(Neuf heures trente-quatre minutes)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance
de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes
présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
téléphones... de votre téléphone cellulaire.
La commission est réunie afin de procéder aux consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 44, Loi
visant à renforcer la lutte contre le tabagisme.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Iracà (Papineau) est
remplacé par Mme Boulet (Laviolette) et M. Paradis (Lévis) est
remplacé par M. Surprenant (Groulx).
Auditions (suite)
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Ce matin, nous entendrons d'abord l'Association québécoise des dépanneurs en alimentation du Québec, par la
suite les directeurs régionaux de santé publique du Québec et finalement
les Breuvages Blue Spike.
Alors, je
souhaite immédiatement la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise des dépanneurs en alimentation du Québec.
Bienvenue à votre Assemblée nationale. Vous disposez d'une période de
10 minutes de présentation et par la
suite vous aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. Je vous
prierais, d'entrée de jeu, de bien vous nommer, chacun d'entre vous, et
de préciser les fonctions que vous occupez. Et, sans plus tarder, bien, la
parole est à vous.
Association québécoise des dépanneurs en alimentation
(AQDA)
M. Laporte (Pascal) : Oui. Je me
présente, Pascal Laporte, je suis détaillant. J'opère 15 dépanneurs dans les régions de Lanaudière, l'est de Montréal et la
Mauricie, et je suis aussi président du conseil d'administration de
l'association des dépanneurs du Québec.
M. Gadbois(Michel) : Si vous
m'entendez, moi, je suis Michel Gadbois. Je suis le président de
l'association des dépanneurs.
M. Leroux(Guy) : Guy Leroux,
je suis directeur des affaires publiques et je m'occupe de la recherche pour le
mémoire.
M. Guénard(Richard) :
Richard Guénard. Je suis détaillant à Roberval, le Dépanneur Chez Ricky. Depuis
sept mois, moi, je fais «pas de carte, pas d'achat» pour tout ce qui est achat
de tabac, loterie et bière.
M. Venne(Jean-Simon) :
Jean-Simon Venne. Je suis président de la firme de recherche Niric. On effectue
des études de mégots à travers le Canada, le
seul territoire qu'on n'a pas fait, c'est le Yukon dans
les six dernières années. Je tiens à préciser qu'on vient tout juste
d'être mandatés par le gouvernement de la Nouvelle-Écosse pour effectuer une
étude cet automne.
M. Laporte
(Pascal) : Donc, chers députés, bonjour. En tant que détaillant opérant
15 dépanneurs et président du conseil
d'administration de l'Association québécoise des dépanneurs en alimentation, je
vous remercie de nous donner l'opportunité
de présenter notre mémoire et d'échanger avec vous dans le cadre de la
consultation du projet de loi n° 44.
Tout d'abord,
j'aimerais prendre quelques minutes pour nous présenter et nous situer. Créée
en 2007, l'AQDA s'est rapidement
imposée comme la plus importante association de dépanneurs du Québec. Nous
avons deux missions pertinentes : premièrement, améliorer
l'environnement d'affaires des dépanneurs — et, croyez-moi, nous en avons
grandement besoin — deuxièmement,
renforcer les pratiques socialement responsables de l'industrie telles que la prévention de la vente de tabac ou d'alcool et de
loterie aux mineurs. Ce sera un élément clé de nos propos aujourd'hui.
L'AQDA
regroupe des bannières de toutes tailles ainsi que des propriétaires
indépendants de diverses origines et dans
chacune des régions du Québec, de Paspébiac à Senneterre. La moitié des
dépanneurs au Québec sont membres chez nous, mais évidemment nous nous
assurons de représenter l'ensemble de notre industrie, membres ou non. L'AQDA intervient auprès des gouvernements et sur la
place publique sur les enjeux d'affaires et réglementaires qui
préoccupent ses membres et touchent nos
catégories de produits, comme l'alcool, l'essence, la loterie, le tabac, les
breuvages et boissons, les aliments,
et bien d'autres. Nous sommes aussi affiliés à l'Association canadienne des
dépanneurs en alimentation, soit la plus grande association canadienne de dépanneurs.
Cela nous permet d'avoir une voix forte sur des enjeux comme les frais
de cartes de crédit, qui sont de juridiction fédérale.
Bien
que nous soyons de petits commerces, les 6 400 dépanneurs du Québec
forment une grande industrie. On parle
de 55 000 emplois, 700 millions en salaires et surtout
3,5 milliards de dollars par année en contribution de taxes au
trésor québécois. Vos conviendrez que ces statistiques sont plutôt
impressionnantes. Il faut savoir en effet que les dépanneurs sont de grands percepteurs de taxes, car la plupart des
produits vendus chez nous sont beaucoup plus taxés que la moyenne, allant de 25 %, environ, pour
l'alcool, 35 % pour l'essence, 75 % pour le tabac et évidemment
100 % pour la loterie.
De plus, la cote
d'amour des Québécois envers les dépanneurs est la plus forte au pays. On vit
une relation de proximité avec l'ensemble du
Québec. Avec en moyenne 400 visites par jour par dépanneur, le Québec tout
entier nous visite deux fois par
semaine. C'est donc dire l'immense impact de notre réseau et, bien entendu, la
grande responsabilité que nous avons lorsqu'il s'agit, par exemple, de
prévenir la vente de produits pour adultes auprès des mineurs. Les dépanneurs sont une source d'enrichissement et de
vitalité pour le Québec, chaque ville et village du Québec compte au moins un dépanneur, et ceux qui n'en ont pas font
tout pour en avoir un, allant même jusqu'à créer des coopératives et les
subventionner, dans certains cas.
Les
dépanneurs créent de l'emploi partout, ce sont des répartiteurs uniques de
richesse collective. Ils fournissent un gagne-pain et une autonomie
financière à des milliers de pères et mères de famille. Plusieurs nouveaux
arrivants ne demandent qu'à se tailler une
place au soleil parmi nous, et nous sommes très fiers de dire qu'ils ont
dépassé le seuil des 40 % de nos effectifs, avec en tête la
dynamique communauté chinoise.
Enfin,
dernier élément clé, le dépanneur respecte les lois et règlements, perçoit et
remet les taxes au gouvernement et s'engage au coeur de sa communauté.
Je suis persuadé que vous appréciez, vous aussi, les dépanneurs. Vous en comptez une cinquantaine en moyenne par comté,
vous les fréquentez sans doute souvent, et je suis certain que vous ne
souhaitez rien d'autre que la réussite et la vitalité de notre industrie, et je
vous en remercie.
Alors,
nous sommes ici, bien entendu, pour parler d'enjeux de santé. J'invite donc
notre président, Michel Gadbois, à présenter les grandes lignes de notre
mémoire.
• (9 h 40) •
M. Gadbois (Michel) : Merci. Je vais tout d'abord remercier la ministre d'être présente,
parce qu'en plus j'ai le plaisir que
c'est ma députée, le bureau de comté est à peu près à 10 minutes de chez
nous. Et je vais malheureusement lire
moi aussi, parce qu'on a huit recommandations. Je ne les présenterai pas toutes
maintenant. Vous les verrez en page 10, où vous les avez déjà en
résumé. Je veux m'attarder surtout sur ce qu'on considère les plus importantes,
c'est-à-dire les trois, quatre premières.
Alors, notre mémoire
est intitulé Pas de carte, pas d'achat. C'est aussi simple que ça — Pour
une offre encore plus légale et responsable. Pour vous résumer de manière simple le contenu
de ce mémoire étoffé de 50 pages, je vais me servir de notre sommaire
exécutif, en pages 10 et 11, comme guide et survoler avec vous les faits
saillants. Il y a quatre volets, dans le projet de loi, qui nous préoccupent et pour lesquels nous demandons des modifications. Je vais les prendre un par un et les traiter au complet avant
de passer au suivant.
Alors,
le premier volet est celui qui concerne la prévention de vente aux mineurs. D'abord,
nous ne serons pas les seuls à vous
dire que les amendes proposées pour la vente aux mineurs sont d'une ampleur
radicale et dévastatrice. En effet, le projet
de loi n° 44 propose des hausses
d'amendes maximales de 6 200 %
pour une première offense et de 4 200 % pour une deuxième
offense. Je vais vous dire bien honnêtement qu'à un tel niveau ça ne fait plus
grand différence pour nous, car l'effet sera
le même, celui de faire fermer un dépanneur. Aucun dépanneur n'a les moyens de
payer un tel montant, et le simple fait de récupérer celui-ci dans ses
opérations pourrait prendre des décennies, compte tenu de la marge de profit
minuscule du commerce d'accommodation.
Au-delà du montant
comme tel, il appert, somme toute, que le gouvernement a fait le choix
d'accroître la répression des détaillants de
tabac dans le but d'améliorer leur conformité à ne pas vendre aux mineurs.
Cette politique de tolérance zéro, si on veut, est non seulement
manifeste par les amendes dont je viens de vous parler, mais aussi par la hausse vertigineuse des inspections du ministère
du MSSS en 2014, ces fameuses tournées dans lesquelles des mineurs payés
par le ministère viennent chez nous tenter d'acheter du tabac et nous prendre à
défaut. Ces inspections sont passées de 2 400, environ, à plus de 5 000 en 2014,
un nombre record pour les annales du MSSS. Bien que nous adhérons entièrement à la volonté du gouvernement
d'améliorer le taux de conformité des détaillants, idéalement l'élever à
100 % et pour toujours, nous ne croyons
pas que la voie de la répression accrue est la solution. Nous pensons que
cette voie a donné ce qu'elle avait à donner
et qu'il nous faut regarder en avant, vers une nouvelle étape qui s'appelle le
cartage obligatoire.
En
effet, nous prenons la moyenne
canadienne de conformité des détaillants à ne pas vendre aux mineurs, je
dis bien canadienne, soit toutes les
provinces réunies, et celle-ci atteint un maximum de 85 % en 2007 et, depuis huit ans, n'a jamais dépassé ce seuil. Il faut voir la réalité
en face, le cartage subjectif selon l'apparence d'âge, tel qu'on le
pratique depuis 25 ans, semble avoir
atteint ses limites, et c'est probablement dû au fait qu'il comporte une grande
part d'humain, et, tant qu'il y aura
de l'humain, il y aura de l'erreur. En ce sens, pour nous, la répression accrue
ne donnera rien. Cela peut certes sembler facile pour les gens de l'extérieur de
dire : Oui, vous n'avez qu'à carter et faites votre job. Et c'est
vrai, c'est notre job, mais, dans les faits, c'est un défi de tous les jours.
Si j'ose faire le
constat pragmatique aujourd'hui, c'est bien entendu parce que nous avons une
meilleure solution à proposer, qui vient
régler le problème une fois pour
toutes, qui vient garantir une
conformité parfaite de 100 %, en plus
qui vient alléger le fardeau des dépanneurs, et c'est le cartage obligatoire,
d'où le titre de notre mémoire Pas de carte, pas d'achat. C'est aussi simple que ça. Ce n'est pas d'hier qu'on se penche sur cette
solution et qu'on valide sa faisabilité, qu'on mesure nos appuis, et
aujourd'hui je vous annonce que nous sommes fin prêts pour aller de l'avant.
Que vous le mettiez ou non dans la loi, nous, on y va.
Je m'explique. Nous avons
ici avec nous M. Richard Guénard, propriétaire du Dépanneur Chez Ricky de la
bannière Sagamie à Roberval, évidemment en plein coeur du comté du premier
ministre. M. Guénard est un pionnier et un
modèle pour les dépanneurs, et voici pourquoi. L'an dernier, il a échoué une
inspection mystère, il s'est retrouvé en cour, suite à quoi il a été acquitté pour preuve de diligence
raisonnable. Jusqu'à date tout va bien. Sauf que M. Guénard a été
bouleversé par cette expérience-là, comme vous pouvez vous imaginer, comme tous
les 5 000 dépanneurs qui ont eu
ça. Alors, c'est quand même 5 000 dépanneurs sur 6 400, c'est
une situation qu'on ne peut pas continuer. D'avoir à subir un stress
pareil a été trop pour lui, et, s'il avait été condamné, il aurait dû cesser la
vente de tabac pendant un mois. Il aurait
été littéralement... il aurait perdu son gagne-pain. Alors, Richard a pris les
choses en main et il a instauré le cartage
obligatoire dans son magasin, seul, sans attendre, et, depuis six mois... Cela
fait six mois qu'il carte tous les clients, peu importe l'apparence, que ce soit pour acheter du tabac, de l'alcool,
de la loterie, et ça fonctionne. Un peu d'ajustement, certes, au début, mais depuis tout le monde est
habitué, et personne ne s'en formalise. Richard Guénard a affronté les
peurs, les craintes, les préjugés. Aujourd'hui,
c'est un homme parfaitement heureux... il a l'air heureux, qui a la paix
d'esprit et la pleine satisfaction de
remplir ses obligations sociales, et je peux vous le dire en connaissance de
cause, et le respect non seulement de ses clients, mais aussi de ses
compétiteurs.
Donc, la
demande n° 1 de notre mémoire est que le gouvernement intègre l'obligation
de carter tous les clients de tabac dans sa loi, de sorte que le cartage
obligatoire soit mis en place partout rapidement et en même temps.
Le
Président (M. Tanguay) : Je veux juste vous indiquer : Votre
10 minutes est maintenant rendu 11 minutes. Il n'y a pas de problème, la ministre vous cède de
son temps, mais c'est du temps d'échange que vous n'aurez pas. Alors, vous avez deux, trois autres points à étayer. Si
vous pouvez le faire dans la prochaine minute et demie, vous allez ainsi
avoir du temps pour discuter avec la
ministre. Donc, à partir de... depuis deux minutes, vous êtes sur son
temps. Alors, je vous en prie.
M. Gadbois
(Michel) : D'accord.
Essentiellement, donc, ce qu'on vous annonce aujourd'hui, c'est que, dans
les semaines à venir, nous allons lancer notre campagne, à travers le Québec,
du cartage obligatoire volontaire par nos détaillants.
On voudrait essentiellement que le gouvernement nous appuie soit dans notre
campagne ou soit en l'insérant dans les propositions du projet de loi.
Le second
volet, rapidement, c'est celui de la prohibition du menthol. C'est pour ça que
nous avons ici M. Jean-Simon Venne.
Pour nous, les études sont sommaires. On demande, comme vous allez voir dans
nos recommandations, que le
gouvernement fasse plus d'études, qu'il reporte à plus tard avant de
l'appliquer. Nos chiffres, nous, ont été très clairs. M. Venne pourra répondre là-dessus. Et, pour ceux qui ont pensé
qu'on manipulait les chiffres, je peux vous dire que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse participe au même type... et
on souhaiterait que le gouvernement du Québec participe aussi au même type d'enquête pour voir sur le terrain la
réalité que nous voyons dans nos magasins et la réalité qu'on voit sur
le terrain en collectant les mégots de cigarettes.
La dernière
chose que j'aimerais dire, c'est parler de ce que j'appelle l'éléphant dans la
pièce, pour prendre une expression
américaine, c'est-à-dire la contrebande. Il y a des solutions pour la
contrebande. Il y a des solutions qu'on a proposées à la ministre dans notre mémoire. Il y a des solutions en
Alberta, il y a des solutions en Colombie-Britannique, où ça n'existe pas, où on s'est entendus. Nous, on a
parlé souvent avec les chefs, et on pense qu'ils ont aussi intérêt que
nous la santé de leurs jeunes, et il faut
mettre fin à cette pratique-là sur les réserves. On veut qu'on aille plus loin.
La dernière commission parlementaire qu'on avait demandée et qu'on a eue
sur la contrebande, le gouvernement s'est engagé à le faire. Il ne s'est rien produit encore. Ça va nous faire plaisir d'en
discuter avec vous pourquoi est-ce qu'on appelle ça l'éléphant dans la
pièce. Merci.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Alors, je dois soustraire quatre minutes du 23 à la ministre. Il
reste 19 minutes pour échanger. Merci. Mme la ministre.
Mme
Charlebois :
Merci, M. le Président. Alors, M. Laporte, M. Gadbois, M. Leroux, M. Venne et...
je ne me souviens plus de votre nom...
M. Guénard
(Richard) : Guénard.
• (9 h 50) •
Mme
Charlebois : ...Guénard,
merci d'être là et de venir nous partager vos préoccupations en regard du
projet de loi. Et sachez que vos recommandations vont être prises en compte,
non seulement vos recommandations, l'ensemble des recommandations de tous ceux
qui font des présentations, mais aussi, je me permets de le rappeler aux auditeurs, ceux qui nous ont fait parvenir des
mémoires puis qui ne peuvent pas venir en commission parlementaire, les
mémoires vont être aussi pris en considération dans leur ensemble.
Dans le contexte
où on est, vous savez qu'il y a quand même une évolution des mentalités dans la société
en ce qui regarde la prévalence au
tabac. Si on arrivait avec le projet
de loi tel qu'il est... si on était
arrivés il y a 15 ans, je ne suis pas certaine qu'on
aurait eu le même consensus social, mais, où on est aujourd'hui, il y a
plusieurs points dans le projet de loi qui m'amènent à penser qu'il y a une
évolution dans la population quant à la mentalité sur le tabac.
Et je voudrais, d'entrée de jeu, vous aborder sur
la cigarette électronique. Vous nous parlez de la cigarette électronique et vous nous faites mention, dans
votre mémoire, que vous voulez qu'ils soient assujettis aux mêmes
règles, en tous points, les boutiques
spécialisées, là, les boutiques de «vape shop», là, que les dépanneurs.
Pourquoi vous demandez ça? J'aimerais ça vous entendre davantage
là-dessus.
M. Gadbois (Michel) : Bien, pour le garder au plus simple, ce qu'on
réalise, c'est que, dépendant de comment le gouvernement va considérer
le produit, si le produit comme les appareils peuvent être présentés et que ce
n'est pas considéré comme des produits de
tabac, à ce moment-là, on présume que ça va s'appliquer partout et dans les
dépanneurs. Ce qu'on veut savoir aussi,
c'est quelle réglementation vous allez faire sur les fioles de nicotine, parce
que ça, vraiment, entre guillemets, c'est illégal. Simplement placer...
Les restrictions que vous allez mettre en place, on veut qu'elles s'appliquent
à tout le monde et on va les appliquer.
Si
vous voulez une plus grande ouverture pour des raisons dites thérapeutiques,
jusqu'à nouvel ordre, je ne suis pas un spécialiste, on veut que ça
s'applique à tout le monde aussi et non faire comme en ce moment. Parce qu'on a
approché le gouvernement fédéral là-dessus,
évidemment ils sont en élection, mais on est très heureux de vous voir
vous pencher sur ce problème-là, parce que les détaillants sentent une
concurrence déloyale. Parce que nous, on a été très sévères dans nos directives
avec nos membres. On a dit : Ce n'est pas parce qu'il y a un vide
juridique en ce moment là-dedans qu'il faut
que vous le preniez comme quelque chose qui n'est pas sous la Loi du tabac.
Vous allez vous comporter comme si c'étaient des cigarettes, point à la
ligne. C'est ça, notre proposition à nos membres.
Maintenant,
on ira des deux bords. Ce qu'on veut, c'est tout simplement, comme on dit en
bon français, «a level playing field» ou d'avoir tout simplement la même
situation que la concurrence sur le marché, point à la ligne.
Mme
Charlebois :
Vous savez qu'en ce qui concerne les fioles le contenu, le produit, c'est
légiféré par Food and Drug, Santé Canada, ce
n'est pas au Québec qu'on va légiférer ça. Nous, on légifère sur l'affichage,
sur où on peut utiliser la cigarette électronique,
l'encadrement, bref, de comment ça... les points de vente, etc. Est-ce que vous
êtes à l'aise avec le fait qu'on
interdise l'affichage à l'extérieur? Parce que ça nous a été recommandé hier
par, justement... hier ou avant-hier,
par les représentants des boutiques de vapotage, que, de l'extérieur, ça ne les
dérange pas qu'ils ne puissent pas
afficher en autant qu'ils peuvent dire leur nom, boutique... «vape shop», je ne
sais pas quoi, là, mais qu'à l'intérieur ils puissent démontrer les produits, puisque ce sont les seuls produits
qu'ils vont vendre. Mais, de l'extérieur... et sûrement pas en présence de
mineurs, par exemple. Ça, je dois vous dire ça. Il y a la même interdiction
quant à l'usage chez les mineurs.
Est-ce que vous
seriez à l'aise, vous, de savoir qu'une boutique de cigarettes électroniques...
Parce que leur prétention, c'est qu'il faut
démontrer aux gens c'est quoi, le produit, puis comment l'utiliser. Il y en a
qui sont même allés jusqu'à nous
demander de les laisser vapoter en dedans pour démontrer l'usage. J'aimerais ça
vous entendre là-dessus.
M. Gadbois
(Michel) : Oui. Le terme «vapoter», ça doit être parce que ce n'est
plus ma génération, j'ai de la difficulté avec cette expression-là, mais,
essentiellement, tout ce que je vous dis, c'est que, si c'est permis pour ces groupes-là, ça doit être permis pour nous. On se
fie vraiment à la décision du gouvernement sur l'interprétation qu'ils vont faire de ce produit-là, surtout s'il n'y a
pas de nicotine. Est-ce qu'il tombe dans la même catégorie que les
cigarettes? Donc, ma réponse va être la même
que j'ai faite tout à l'heure : Si vous ouvrez le marché puis que c'est
clair quelles sont les tolérances du
gouvernement, à ce moment-là elles s'appliquent à tout le monde. Si vous avez des
restrictions à exprimer, on va les appliquer avec la même rigueur qu'on
doit appliquer les autres restrictions qu'il y a dans la Loi sur le tabac.
Mme
Charlebois : Dites-moi, est-ce que les produits qui sont
vendus dans les dépanneurs sont les mêmes que les produits qui sont vendus dans ces boutiques-là?
Bref, les cigarettes, est-ce que c'est du genre comme ça, électroniques,
ou comme cette petite boîte? Vous connaissez
sûrement ces produits-là, parce que c'est ça qui est... Moi, en tout cas,
c'est ce que j'ai vu dans les dépanneurs,
mais je n'ai pas vu les mêmes produits qui sont vendus dans les... Ça, vous le
conviendrez avec moi, là, que c'est un
méchant incitatif pour les jeunes, quoi que, là, ça va être défendu, mais, même
pour quelqu'un qui a arrêté de fumer,
comme moi, c'est joli. Vous conviendrez avec moi qu'il y a un petit cachet, là.
Ça fait un peu...
Alors, dites-moi,
dans les boutiques spécialisées, ce n'est pas ça qu'ils vendent...
M. Gadbois
(Michel) : ...vous va bien, mais...
Mme
Charlebois :
Hein?
M. Gadbois
(Michel) : J'oserais dire que ça vous va bien, oui, effectivement.
Mme
Charlebois : Non,
merci. J'ai eu tellement de difficulté à arrêter de fumer qu'il n'y a pas
de danger que je me mette à vapoter.
Mais, dites-moi, est-ce que vous vendez les mêmes produits que les boutiques de
vapotage ou ce sont seulement ces produits-là que vous vendez?
M. Gadbois (Michel) : Je vais demander à M. Guénard de répondre. Moi, je peux vous répondre,
mais lui, il opère, alors il va vous dire c'est quoi, les...
M. Guénard (Richard) : On vend les deux formats, c'est-à-dire qu'on a les fioles aussi, puis on a le... comme tu vois, là,
comme tu nous as montré, le petit... les deux...
Mme
Charlebois :
...la grosse cigarette, là...
M. Guénard
(Richard) : la grosse cigarette, puis tu...
Mme
Charlebois : ...à
un prix pas mal plus élevé que ceux-là, là.
M. Guénard
(Richard) : C'est ça.
Mme
Charlebois : Est-ce que c'est indiscret de vous demander
combien vous vendez ceux-là puis les autres que vous parlez, qui sont
plus dispendieuses, mais, tu sais, pas à un prix exact, là, mais un ordre de
grandeur?
M. Guénard
(Richard) : Ceux-là qui sont
déjà en... qu'on remplit, c'est 45 $ pour l'achat de la cigarette
plus le liquide, les autres sont alentour
d'une dizaine de dollars, si je ne me trompe pas, là. Bien, c'est parce que
c'est à usage unique. Un coup que c'est fini, c'est poubelle. Ça
fait que...
Mme
Charlebois : Est-ce qu'il y a des gens qui vous demandent ou
est-ce que vous, de votre plein gré, vous faites la formation aux
clients pour s'assurer que ça va les maintenir en arrêt tabagique? Parce que,
souvent, les gens, ce qu'ils nous disent en tout cas... Je vous dirais que
95 % du temps, quand ils achètent ça, c'est pour arrêter de fumer.
M. Guénard
(Richard) : Je ne suis pas
sûr que ça fonctionne pour arrêter de fumer. Ceux-là qui prennent avec
nicotine, en tout cas, moi, je vais dire que les chances qu'ils arrêtent, c'est
très, très mince.
Mme
Charlebois : Le Dr Ostiguy, c'est le contraire qu'il nous
disait. Est-ce que ça a un lien avec la formation, vous pensez, comme
comment l'utiliser, etc.?
M. Guénard
(Richard) : Si tu prends de
la nicotine, que tu la prennes en cigarette ou que tu la prennes en
fiole, tu vas prendre la même nicotine pareil. Tu sais, à des degrés de
nicotine de six, 12 et 18... Moi, ce qu'on vend beaucoup au dépanneur, c'est du
18. Ça fait que, rendu à 18 milligrammes, qu'ils appellent, ou je ne sais
pas trop, mais...
Mme
Charlebois : Ce
que le Dr Ostiguy nous disait, c'est que la cigarette a une combustion qui a
plusieurs produits chimiques qui ne sont pas
dans la cigarette électronique. Vous avez raison que la nicotine est encore là,
et ça crée une dépendance, mais ce
n'est pas le même type de, comment vous dire... La combustion, il y a plus de
produits chimiques qui sont à
l'intérieur. Est-ce que, vous, votre personnel est formé pour vendre les
cigarettes électroniques ou s'ils vendent ça comme un autre paquet de
cigarettes?
M. Guénard
(Richard) : On n'est pas
formés pour le vendre, là, comme tel. On n'a pas d'information plus
précise que ça non plus. On est un peu devant le néant là-dessus, là, je vais
dire.
Mme
Charlebois : Mais ce que je retiens, c'est que — votre
recommandation — ce
soit la même application, la même réglementation, les mêmes lois pour
une boutique spécialisée que les détaillants.
M. Gadbois
(Michel) : Oui, autant au
domaine de l'ouverture qu'au domaine des restrictions. Ce qu'on doit
voir aussi, ce qu'on attend du gouvernement, c'est comment est-ce qu'il perçoit
le produit, O.K.? Parce que le débat est encore là, alors...
Mme
Charlebois : La seule différence, en tout cas, je pense, qui existe ou qui peut nous amener à penser qu'il y a
une petite différence, c'est que, dans les dépanneurs, les enfants peuvent
rentrer en même temps que vous vendez ces
produits-là, alors que, dans une boutique spécialisée, ça va être interdit aux
mineurs. Ça fait que c'est peut-être là où j'ai
une réflexion, en me disant : Les gens qui vont rentrer dans une boutique
spécialisée savent très bien le produit qu'ils vont aller acquérir, puis ça va être des majeurs, des gens qui ont 18
ans et plus. Alors, empêcher la boutique de vapotage de démontrer ses
produits, je ne sais pas.
M. Gadbois
(Michel) : ...psychologue,
je peux vous dire que ce n'est pas parce que c'est présent que... Je
pense que les jeunes vont peut-être
regarder d'autres choses avant de regarder ces produits-là. Parce qu'ils
peuvent toujours aller les
voir. Puis il n'y a rien qui empêche des parents de rentrer avec des jeunes
dans les «vape shop», là.
Mme
Charlebois : Ça va
être interdit.
M. Gadbois
(Michel) : Oui, bien je leur
souhaite d'être inspectés aussi souvent que nous autres, puis peut-être que vous allez réussir. Mais, nous, ce qu'on dit au départ, l'important,
c'est : pas d'accès. Je ne peux pas vous garantir que, parce que... Si vous dites, d'ailleurs, que ces
produits-là doivent être cachés, bien, on va le prendre puis on va dire :
On va les cacher comme on a fait avec les cigarettes.
Mme
Charlebois : Bien, c'est ce qui est dans le projet de loi, ce qui est proposé, c'est la même
réglementation que...
M. Gadbois
(Michel) : C'est ça que je
vous dis, on est pour les restrictions, mais les mêmes pour tout le
monde.
• (10 heures) •
Mme
Charlebois :
O.K. Maintenant, vous avez parlé beaucoup du menthol dans votre mémoire. Vous
nous dites que vous pensez que les études de
l'Institut de la statistique québécoise ne sont pas complètes. Qu'est-ce qui
vous amène à penser ça? Parce que les études qu'on a sont... Puis elles sont
diverses, hein, il y en a plusieurs, à travers le monde, qui nous disent... Même, il y a une
recommandation de l'Organisation mondiale de la santé qui nous demande
d'interdire toutes les saveurs. Qu'est-ce que qui vous amène à penser que
l'étude de la statistique n'est pas bonne?
M. Gadbois (Michel) : Bien, avant de passer la parole à M. Venne, qui, lui, a fait les
études, on se base beaucoup sur la
pratique. Pour nous, la réalité, c'est beaucoup plus que des sondages auprès d'adolescents
sur leur perception de la réalité. Je
pourrais même vous dire que ça pourrait passer dans notre réalité. Je pense que
la dernière chose qui passe dans la tête d'un ado quand il commence à
fumer, c'est : Maudit, j'ai envie de fumer de la menthe, O.K.?
Ce
qui dépasse l'entendement pour nous, c'est que la réalité est tout à fait le
contraire, O.K.? Comment ça se fait que... Si 30 % pourraient fumer
du menthol, comment ça se fait que, dans notre clientèle, les jeunes de 18 à
25 ans, O.K., ne fument même pas pour
1 % du menthol? La réalité du marché. À ce moment-là, vous allez me
dire : Bien, le menthol doit
être tout à la contrebande si effectivement 30 % des gens... Et ils ont
une belle sélection de contrebande. Vous allez m'en entendre parler souvent, mais ils ont des choix énormes. Et,
vous le savez, c'est près de chez nous, là, on les voit passer
régulièrement.
Et
je vais quand même passer la parole à M. Venne, qui est quand même un
spécialiste là-dedans, mais nous, on vous parle d'expérience de nos
ventes sur le terrain. C'est ça, la réalité qu'on connaît.
M.
Venne (Jean-Simon) : Bien, peut-être juste vous donner un aperçu de
comment on fonctionne pour faire une étude, c'est très terre à terre,
vous allez voir. On n'a pas poussé la science très loin, là, pour faire nos
études. C'est essentiellement des statistiques.
Alors,
on fait du repérage sur les sites qui sont identifiés avant. Donc, c'est des
visites d'observation à savoir où les
gens qui utilisent cet édifice-là vont fumer quand ils sont en pause, ou à
l'heure du lunch, ou à l'heure de la récréation quand on parle d'une école, et on fait l'identification de ces
endroits-là. Il y a toujours des endroits qui sont privilégiés. Évidemment, dans les écoles, il n'y a pas
d'endroit officiel, il n'y a pas de cendrier d'installé. Il y a par contre
toujours un endroit bien identifié, très
souvent sur le bord de la cour ou le long de la clôture. Et, lorsqu'évidemment
tout le monde est parti, soit le soir
ou la fin de semaine, on va ramasser tout simplement l'ensemble des mégots qui
se situent à cet endroit-là, et là on fait une analyse, au laboratoire,
d'identifier les mégots : Ah! voici, ça, c'est tel, ça, c'est tel.
On
ramasse beaucoup plus de mégots qu'on en a besoin parce qu'il y en a une grande
quantité qui est discartée parce qu'on ne peut pas les identifier. Ils
sont tout simplement trop brûlés ou consommés. Mais tout ce qui est identifiable est identifié, bien trié, puis après
ça on fait tout simplement le comptage de qu'est-ce qu'on a ramassé par
marques, contrebande ou légales, type de cigarettes. Puis c'est comme ça qu'on
identifie qu'est-ce qu'on a trouvé qui avait du menthol dans l'échantillon.
Alors,
c'est le même processus qui se répète à chaque site et après ça, bien, c'est
une question de savoir est-ce qu'on a un échantillon statistiquement
viable et quelle est la marge d'erreur, et là ça dépend évidemment de la
grosseur de l'échantillon. Donc, la corrélation est faite vraiment de cette
façon-là. Mais je vous dirais qu'on n'était pas surpris des chiffres qu'on a
vus au Québec, parce qu'on voit exactement la même chose que ça soit en
Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick ou en
Ontario. C'est très, très, très similaire quand on compare une école secondaire
avec un «high school» ou avec un
collège, et il y a une corrélation qui se tient, qui est quand même assez
solide, là. Donc, nous, c'est ce qu'on fait, c'est ce qu'on analyse puis
c'est ce sur quoi je peux commenter, là.
Mme
Charlebois :
Les mégots de cigarettes que vous ramassez, vous dites que vous les ramassez
sur le terrain d'une école secondaire?
M.
Venne (Jean-Simon) : Oui, c'est-à-dire qu'on identifie l'endroit où
les jeunes vont fumer durant leurs pauses ou leurs lunchs. Très souvent, c'est juste de l'autre côté de la
clôture, donc sur le bord du trottoir, parce qu'ils ne peuvent pas être sur le territoire de l'école, donc ils jouent
le jeu. Et c'est vraiment une activité qu'ils font en groupe, c'est rare
qu'on a des fumeurs solitaires. Donc, il y a toujours un endroit qui devient le
lieu où on va fumer, et on discute, et après ça, bien, on jette évidemment le mégot par terre, parce qu'il n'y a pas de
cendrier et de... C'est interdit, donc... Tandis qu'un lieu public ou un
édifice privé, bien, il va y avoir un cendrier d'installé, un lieu pour les
fumeurs, et là, évidemment, c'est très, très facile à identifier.
Mme
Charlebois :
Je peux juste vous dire que... là je ne suis plus à l'adolescence, mais quand
même, quand j'ai commencé à fumer, c'était tellement raide, la nicotine, la
fumée de cigarette, que j'ai moi-même... Je me suis souvenu de ça avec les
consultations, parce que je ne m'en rappelais pas, honnêtement, et je me suis
souvenu que c'est avec le menthol que
j'avais commencé à fumer. J'ai le goût de vous dire que ceux qui vont fumer,
comme vous dites, sur le bord de la
clôture... puis, encore là, ce n'est pas des études scientifiques que je vous
donne, là, puis je ne veux pas non plus argumenter sur les études, parce
que ce n'est pas le but de l'exercice, mais ceux qui vont là, c'est vraiment ceux qui sont habitués de fumer, donc ils ont
passé le stade du début. Mais le
début du tabagisme, à ce qu'on en a compris, se fait souvent avec le
menthol, justement à cause de l'irritation.
Maintenant,
qu'est-ce que vous pensez de l'Organisation mondiale de la santé? Pourquoi ils nous recommandent d'interdire toutes les saveurs,
dont la menthe? Ils ont aussi des études, puis ce n'est pas les études de l'Institut
de la statistique du Québec, et on nous recommande d'interdire les saveurs.
Et on a tendance à se coller, parce
que vous savez qu'on a signé l'entente-cadre, on a adhéré à ça au
Québec. Qu'est-ce que vous pensez que... Pourquoi ils nous recommandent
d'interdire les saveurs, dont le menthol?
M. Venne (Jean-Simon) : Bien, je vous dirais que je ne peux pas commenter
leurs études, je ne les ai pas vues. Je n'ai pas vu comment ils procèdent. Je ne veux pas du tout... On tente de
rester vraiment sur les faits ici. Moi, ce que je vous
dirais, c'est que nous, ce qu'on ramasse, puis on ramasse vraiment tout, là,
quand on vide un site, on le vide, là, il ne reste rien, on n'en voit pas, là.
Alors, c'est tout simplement ça.
Mme
Charlebois :
Maintenant... Oui?
M. Gadbois (Michel) : Juste rajouter, Mme la ministre, juste un point que je pense
qui est important. Je pense
que, de la façon dont on le résume, c'est
qu'on a voulu vérifier notre réalité de marché à nous, dans nos commerces, et
ça s'est confirmé, O.K., quand on a ramassé les mégots.
L'autre
réalité qu'il faut comprendre, puis on l'a fait pour les saveurs, c'est que... Puis même j'ai été en
Europe, parce qu'ils sont pris avec le même problème de contrebande
puis ils nous ont demandé... On est le seul endroit au monde qui ont deux réserves indiennes aussi près de
centres urbains comme les nôtres, qui ont 10 manufactures qui
marchent, depuis 2002, à plein régime, O.K.?
Alors, eux autres, c'est le problème qu'ils ont, d'Afrique du Nord, de rentrer
avec des prix très bas sur les
cigarettes légales. C'est comme ça que le marché de contrebande arrive en
Europe. Il n'y a pas de frontière, alors ça se fait.
Nous,
cette réalité-là, tout ce qu'on vous dit, c'est qu'en bout de ligne ça ne sert
à rien, parce que vous allez les envoyer les acheter illégalement
ou, quand ils se réunissent ensemble, bien, le petit pusher de la gang va
passer son menthol à qui il veut mais au
dixième du prix. Alors, c'est ça qu'on dit, c'est : Les petits cigares à
saveur ont été interdits par le
fédéral il y a quatre ans. Si vous remarquez, dans les saisies
de la GRC, je pense qu'il y
a eu une augmentation de 6 000 % à peu près
des saisies de petits cigares de saveur. Les gens qui fument, si, comme vous le
dites, ils tiennent à fumer du menthol, ils n'arrêteront pas, ils vont
aller le chercher. Puis, en plus, malheureusement, la loi va les encourager à
l'acheter 80 % moins cher, parce qu'il n'y a pas de taxe, et là ils vont
entrer dans le réseau.
Et,
la manière dont ça fonctionne, il y a une partie qui est le crime organisé,
vous le savez, l'autre partie, c'est M.
et Mme Tout-le-monde qui vont en chercher comme... Si vous vous rappelez des
jeunes qui fumaient du pot... je suis sûr que vous ne vous rappelez pas de ça, mais, dans les écoles secondaires,
O.K., bien, il achetait son stock à lui puis, pour se payer son stock, il le revendait aux autres. Mais
c'est la même chose pour la cigarette, c'est la même chose qui se
produit pour les petits cigares, c'est la
même chose qui va se produire pour le menthol. Alors, oui, c'est vrai, vous
pouvez régler le problème, mais vous allez le mettre sous le tapis. La
réalité, c'est qu'elle va continuer, puis vous n'aurez rien réglé.
Mme
Charlebois : M. Gadbois, je veux juste vous rassurer en ce
qui concerne la contrebande. Je ne vous dis pas que c'est tout réglé, mais, de 2008 à 2014, on est passé de 30 % à
14 %. Il y a eu une réduction. Est-ce qu'il y a encore du travail à faire? Oui, j'en conviens avec vous.
Vous connaissez très bien mon comté, ça fait qu'on n'ira pas plus loin
que ça.
Je veux juste dire
quelque chose, M. le Président...
Le Président (M.
Tanguay) : Rapidement, quelques secondes.
Mme
Charlebois : Quand quelqu'un va fumer quelque chose à
saveur, ça sent la fraise, ça sent le... Moi, je pense qu'il va
démontrer qu'il est dans l'illégalité. Là, on n'aura plus besoin d'aller voir
le mégot, ça va sentir.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, maintenant, je cède la
parole à notre collègue de l'opposition officielle, député de Rosemont,
pour un bloc de 14 minutes.
M.
Lisée : Merci. M. Laporte, M. Gadbois, M. Leroux, M. Venne, M.
Guénard, bienvenue. Plusieurs des recommandations
que vous faites, certaines d'entre elles sur le cartage, me semblent
intéressantes, et je vais y revenir, mais d'abord j'aimerais en savoir un peu plus sur votre organisation. M.
Gadbois, vous êtes président depuis combien d'années?
M. Gadbois
(Michel) : 2007, depuis la création.
M. Lisée :
2007, depuis la création. Quel est le budget annuel de votre organisation?
• (10 h 10) •
M. Gadbois
(Michel) : Je ne vous le donnerai pas parce que je ne pense pas que
c'est pertinent. Puis ce n'est pas pour être embêtant, O.K.? Il varie sur nos
capacités de ramasser de l'argent. La façon dont nous, on fonctionne, c'est : chaque année, on a un sommet annuel
où les détaillants — vous
allez le voir dans notre mémoire — on décide des priorités. Et, sur ces priorités-là, des détaillants nous donnent un
mandat de soit faire des campagnes, faire des représentations, etc. Des
fois, le contexte réglementaire nous permet de le faire, puis on peut
intervenir. Des fois, il faut faire de la recherche.
Et
nous, en plus des détaillants qui nous paient pour leur membership, on a aussi
nos manufacturiers qui nous paient pour
le membership. Je me fais souvent poser la question, avant que vous me la
posiez : Est-ce que les manufacturiers de tabac contribuent? Oui,
ils contribuent, mais c'est nous qui demandons les montants d'argent selon les
campagnes qu'on veut faire et nos besoins.
Ça ne marche pas toujours. Des fois, ça marche. Et on le fait pour d'autres
campagnes, que ce soit le dossier des frais
de cartes de crédit ou tout autre dossier comme le prix minimum de la bière,
comme le dossier sur le prix du lait, la régie, comme on a fait
d'ailleurs avec le ministre Girard pour toute la déréglementation.
D'ailleurs,
je vous invite à lire notre livre vert, vous allez voir qu'il y a
28 recommandations. Le tabac est important, mais c'est loin d'être notre seule préoccupation. Alors, si vous
regardez les 28 recommandations, vous allez voir qu'on est même de concert avec le
gouvernement pour mettre en place toute une révision de la réglementation qui
touche notre secteur au niveau administratif.
M. Lisée :
M. Gadbois, je ne disconviens pas que vous intervenez sur plusieurs sujets en
plus du tabac, mais, sur vos campagnes sur le tabac, je serais très intéressé
de savoir quelle est la proportion de votre budget qui vient des compagnies de
tabac.
M. Gadbois (Michel) : Je ne peux pas vous le dire parce
que ça dépend si je fais une campagne
ou si je ne fais pas une campagne.
M. Lisée :
En ce moment, la campagne que vous menez en ce moment, est-ce que c'est 10 %?
M. Gadbois
(Michel) : Je ne peux pas...
M. Lisée :
Est-ce que c'est 90 %?
M. Gadbois
(Michel) : Pas du tout. Je ne peux pas vous dire par coeur, mais ce
n'est pas la majorité de nos ressources. La majorité de nos ressources vient de
nos détaillants, O.K.?
M. Lisée :
Ce n'est pas la majorité de vos ressources. Mais est-ce que c'est entre le
tiers et la moitié?
M.
Laporte (Pascal) : Si je
peux me permettre, en fait, on fait appel à tous nos fournisseurs. Les
fournisseurs de tabac sont des fournisseurs
parmi tant d'autres. On a les fournisseurs de bière, on a des fournisseurs de
lait, de chips, etc. Donc, on demande
à tous nos fournisseurs de vouloir contribuer, puis le tabac en fait partie,
oui. Dans quelle proportion? Je n'ai pas le chiffre avec moi, mais probablement
dans la même proportion que nos ventes, là.
M. Lisée :
Probablement la même proportion que vos membres?
M. Laporte
(Pascal) : Probable. Que nos ventes.
M.
Lisée : Écoutez, ça va un petit peu à la question de votre crédibilité, parce que vous existez depuis
2007, vous gérez vos budgets, vous
êtes là depuis des années et vous nous dites que vous ne savez pas, vous ne
pouvez pas nous dire quelle est la
proportion de votre budget qui vient des compagnies de tabac. Je veux dire,
moi, j'ai été le directeur
général du CERIUM, j'avais un budget de
1 million, je pouvais vous dire au dollar près la proportion qui venait de
l'Université de Montréal, la proportion qui venait d'Hydro-Québec, qui était notre partenaire, la proportion qui venait de chacun de
nos partenaires et chacune de nos chaires. Alors, je suis un peu surpris que
vous disiez que vous ne savez pas quelle est la
proportion de votre financement qui vient des cigarettiers, d'autant que, sur
la question du menthol, sur la question de la contrebande, sur la question des saveurs, les positions que vous
défendez sont identiques à celles des compagnies de tabac.
M. Gadbois
(Michel) : Quelle surprise, hein?
M. Lisée :
Quelle surprise.
M. Gadbois
(Michel) : Parce que c'est nos fournisseurs, comme n'importe quel de
nos fournisseurs, s'ils ont intérêt qu'on vende un produit et que ce produit-là
fait partie de nos tablettes, on le vend. Donc, ils ont des intérêts communs,
avec plaisir, comme, essentiellement, j'ai des intérêts communs avec la SAQ,
avec Loto-Québec, qui sont membres chez nous aussi.
M. Lisée :
Bien, des intérêts communs, je sais que...
M. Gadbois
(Michel) : Si l'essence de l'intérêt de la commission, c'est de
connaître nos finances, je vous dis :
Je ne suis pas venu ici préparé pour faire ça. Si c'est ça, votre intérêt
particulier à vous, on s'en reparlera après, parce que je ne suis pas
venu préparé pour présenter mes chiffres.
Je
trouve ça malheureux que c'est votre première question et votre première préoccupation quand les détaillants, aujourd'hui, annoncent que... non pas à
l'instar du gouvernement, mais que nous, on va régler le problème, je pense, qui est le plus préoccupant pour la société québécoise,
et je pense que, pour cette commission, c'est d'assurer 100 % de conformité. C'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui. Vous pouvez
continuer à me poser la question, je n'y répondrai pas.
M.
Lisée : Très bien. Bien, écoutez, moi, je vous dis simplement
qu'en tant que parlementaires nous recevons des gens... On va recevoir Imperial Tobacco. Ils sont financés à
100 % par Imperial Tobacco. On va savoir exactement pourquoi ils
nous disent ce qu'ils nous disent. On a eu hier l'association des
propriétaires, ils nous ont dit ce qu'ils disaient.
On va avoir l'association des compagnies de vapotage. Donc, on sait à qui on
parle et on sait de quoi on parle, et ces gens-là ont une crédibilité
totale.
Vous, le fait que vous nous disiez aujourd'hui
que vous ne savez pas quelle est la proportion de votre budget, que vous gérez depuis la création de
l'association, qui vient des cigarettiers, je m'excuse de vous dire que ça met
en cause la
crédibilité de ce que vous avez à nous dire, d'une part. Je vais continuer à
échanger avec vous, hein? Ça ne met pas en cause la totalité de la crédibilité, mais je pense que c'est un
problème. Je sais que la question vous avait été posée au Sénat canadien. Vous avez répondu : Je n'ai pas les
chiffres, je reviendrai une autre fois. Bien là, c'est une autre fois, vous
ne les avez toujours pas. C'est louche. Je vous le dis, là, votre position,
elle est louche. Bon.
Alors, maintenant qu'on a dit ça, je vais donc
me concentrer avec vous... pas sur les questions qui concernent le menthol, ou la contrebande, ou ce sur quoi vous
dites la même chose que les cigarettiers. Je sais ce qu'ils disent, les cigarettiers. On discutera peut-être
avec eux. Je vais me concentrer sur ce qui vous concerne, c'est-à-dire les dépanneurs. Les
dépanneurs, c'est important, il y a une histoire d'amour entre les Québécois
puis les dépanneurs. Vous faites partie de notre vie, on ne veut pas que vous fermiez. On sait que c'est compliqué — moi,
mon père était détaillant aussi — les
marges sont petites. Il n'y a pas de problème.
Alors, sur le
cartage, ça, j'avoue que c'est un genre de grand mystère, parce que
vous nous dites : Bon, bien là, on est choqués, on est décidés, pas
de carte, pas de tabac. Bien, pourquoi vous ne vous êtes pas choqués il y a
10 ans? Pourquoi vous faites ça maintenant? Moi, j'avais
l'impression, avant d'être sur cette commission, que c'était comme ça : pas de carte,
pas de tabac. Pourquoi vous ne l'avez pas fait depuis 10 ans?
M. Gadbois (Michel) : Bien, si vous
avez écouté ce que j'ai dit tout à l'heure, je n'aurais pas besoin de vous
répondre encore une autre fois, mais je vais le préciser. D'abord, je vous ai
donné l'historique de la conformité à travers
le Canada. Ça s'est toujours fait sur une base
discrétionnaire, c'est-à-dire sur une base de perception, comme ça se fait partout ailleurs dans le monde,
incidemment, d'une part. On s'est rendu compte qu'on atteignait un sommet qui
ne pouvait pas bouger. Parce que,
comme je dis, l'erreur est humaine, et il
y a toujours un moment où, soit la
perception du jeune, même s'il est
entraîné, même s'il a suivi nos programmes de formation, etc., O.K., on
ne dépasse pas ce seuil-là. Et, en
plus, depuis les deux dernières années, les inspections, qui sont souvent — et
c'est expliqué par des juges — presque
des guets-apens pour essayer de prendre les détaillants, c'est tellement
répandu que, justement, comme je vous le mentionnais, à nos sommets, les
détaillants ont dit : Il faut faire quelque chose. Et le cartage
obligatoire...
M. Lisée : Qu'est-ce qui vous
empêchait de le faire avant? C'est ça, ma question.
M. Gadbois
(Michel) : Bien, tout
d'abord, quand quelqu'un fait le cartage et l'autre ne le fait pas... Le
principe, au départ, c'est la concurrence
sur le marché. Et ce qu'on vend, vous le saurez, c'est du temps. Le dépanneur,
ce qu'il vend en premier, c'est du temps, un service rapide, on rentre,
on sort. Alors, évidemment, si vous avez un dépanneur...
Puis je
pourrai demander à mes collègues d'en parler, surtout dans le cas de
M. Guénard qui a eu le courage de le faire même si la compétition ne le faisait pas, O.K.? Ce qu'on a réussi
à faire, si on veut, c'est de dire aux détaillants : Il va falloir
que vous soyez solidaires là-dedans puis que vous oubliiez la concurrence. Il y
en aura toujours un qui va essayer, quelque
part, de se donner un avantage de temps en ne demandant pas, en plus, le temps
que ça demande, de passer la carte, etc. Alors, oui, c'est ça qui
freinait. C'est la concurrence qui freinait. Maintenant...
M. Lisée :
O.K. Je comprends. Donc, je comprends que des détaillants... Parce qu'on a les
statistiques, ils disent que 25 % des jeunes affirment... des
mineurs affirment s'approvisionner directement auprès des dépanneurs et que la moitié d'entre eux affirment ne pas avoir été cartés.
Alors donc, il y a un réel problème. Vous dites vous-mêmes : Le
taux de conformité est de 80 %, 85 %. Ça veut dire qu'il y en a
15 % où il n'y a pas de taux de conformité.
Puis, si vous
nous dites : Écoutez, donnez-nous le signal que pas de carte, pas de
tabac, pas de loto, pas d'alcool, on va
vous le donner. Ça, je n'ai aucun problème avec ça, puis on va en discuter avec
la ministre à l'article par article. Puis déjà, dans le projet de loi, on dit : On vous donne l'autorisation
d'utiliser des cartes émises par le gouvernement. Ça, si c'est ça, la solution, il n'y a aucun problème avec moi, vous
allez le faire. De la même façon, je l'ai dit à vos collègues tout à
l'heure... hier, des détaillants, la
première offense à 125 000 $, je trouve ça excessif. Loto-Québec
dit : Première offense, deuxième offense,
troisième offense. C'est un système qui me semble beaucoup plus adapté. Et
aussi le fait de pouvoir remettre une infraction
sur-le-champ plutôt que d'attendre... Ça, ce sont tous des trucs sur lesquels,
avec la ministre, on va discuter. On va essayer de trouver un système
qui soit aidant et qui soit efficace, parce que c'est ce à quoi on veut en
venir.
Sur la
question de la contrebande, bon, vous parlez beaucoup de ça, cependant, comme
la ministre l'a indiqué, le pourcentage
de contrebande a baissé ces dernières années et il a baissé en même temps qu'il
y avait un certain nombre d'obstacles
supplémentaires qui vous ont été imposés, que ce soit une augmentation du prix
du tabac, un certain nombre d'éléments. Et, en fait, le nombre de
dépanneurs a augmenté sur la période. Alors, comment pouvez-vous dire que
chaque intervention législative réglementaire supplémentaire donne
immédiatement du gaz aux contrebandiers, alors qu'il y a plus de dépanneurs
qu'avant, malgré l'augmentation du fardeau réglementaire?
• (10 h 20) •
M. Laporte
(Pascal) : Juste avant de
passer à la contrebande, si vous voulez, j'ai écouté religieusement ce
que vous avez dit sur le monde du dépanneur puis, comme vous savez, moi, je
suis un propriétaire de dépanneurs, donc j'opère
des dépanneurs depuis plus de 20 ans. Quand on parle qu'on a un taux de
conformité de 85 % sur le
cartage, je peux vous assurer qu'on a
les mêmes préoccupations que vous. Pour nous, c'est important. On ne veut pas
vendre du tabac à des mineurs, puis j'espère que vous nous croyez. Tu
sais, on n'est pas des gens qui... On a des enfants nous aussi puis etc. On a
les mêmes convictions que vous, c'est certain.
Nos employés, on fait... les membres de nos
équipes, on fait tout ce qui est en notre pouvoir pour s'assurer que c'est fait à chaque transaction. On fait
beaucoup de formations, on fait des suivis, on fait des rappels, mais on
dirait que c'est difficile de franchir le
cap du... d'aller plus loin que le 85 %. Parce que c'est une question
humaine. Essayez d'imaginer
une préposée qui peut avoir 17 ans, qui travaille derrière le comptoir
avec... qui pourrait être intimidée par certains jeunes, qui a été intimidée une fois parce qu'elle ne voulait
pas lui vendre du tabac puis, bon, finalement, par après, elle en
échappe un, elle en échappe deux. C'est des choses qui peuvent arriver.
Donc, si vous
voulez qu'on soit conforme à 100 %, moi, je peux vous dire qu'avec la loi
actuelle c'est impossible. C'est impossible. Ça fait que c'est pour ça
que nous...
M. Lisée : O.K. Non, mais ça,
là-dessus, on est en...
M. Laporte (Pascal) : C'est pour ça
que nous, on propose le cartage obligatoire, peu importe l'âge du client.
M. Lisée : Je comprends.
M. Laporte
(Pascal) : Donc, ça deviendrait une première mondiale. Si on veut
vraiment donner... J'entendais hier à
la commission, ici, j'entendais des gens dire : On voudrait que le Québec
soit à l'avant-garde, hein, en matière de tabagisme chez les jeunes. La
solution, c'est ça, plus que le menthol.
M. Lisée :
Là-dessus, là, vous m'aviez, à cartage, O.K.? Donc, je suis très ouvert à cette
suggestion. Mais ce que je vous dis
sur la contrebande, c'est que, depuis 2008, il y a eu trois hausses de taxes,
l'interdiction des étalages dans les points de vente, l'arrivée des
nouvelles mises en garde plus grandes, le prix plancher pour les achats autres
que les cigarettes, et il y a eu une baisse
de la contrebande. Pourquoi est-ce que maintenant, avec une nouvelle
réglementation, tout à coup, il y aurait inversion de la tendance?
M. Gadbois
(Michel) : Je peux vous
répondre sur bien des façons. Je vais essayer un petit historique, parce
que je suis dans ce dossier-là depuis très
longtemps. À toutes les fois que j'essaie d'en sortir, il me ramène toujours
dedans, pour prendre les mêmes expressions que vous.
Alors, la première chose à comprendre, c'est que
la contrebande a repris sa force à partir de 2002, O.K., tout simplement parce que les taxes ont augmenté, on ne
pourra pas le nier, ont augmenté de 100 % dans cette période-là.
L'État a perdu de l'argent, nous avons perdu
de l'argent, et, grâce aux interventions du gouvernement, suite à la commission
parlementaire que nous avions demandée, avec toutes les pressions qu'on a mises
dessus, O.K., effectivement, ça a baissé. Maintenant...
Le Président (M. Tanguay) : En
conclusion, s'il vous plaît. En concluant, s'il vous plaît.
M. Gadbois
(Michel) : ...la réalité sur
les réserves n'a pas changé, et M. Venne peut vous donner les rapports
en Nouvelle-Écosse ou ailleurs, on est
devenu le meilleur exportateur au Canada, O.K., à partir de Kahnawake et
Kanesatake, pour l'Ontario et les Maritimes, qui, eux, ont doublé leurs taux de
contrebande.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Nous allons maintenant poursuivre l'échange, et vous aurez peut-être
l'occasion de compléter votre réponse dans le contexte du bloc de notre collègue
de Saint-Hyacinthe pour neuf minutes.
Mme Soucy : Bonjour. Merci d'être
ici ce matin. Moi, j'aimerais ça vous entendre plus particulièrement sur les
défis au quotidien que vous avez sur le cartage, en fait de savoir si les gens
sont majeurs ou pas. C'est quoi, votre défi au quotidien?
M. Gadbois (Michel) : Je vais
laisser la parole aux deux détaillants. Vous allez voir, c'est les mêmes défis.
M. Guénard
(Richard) : Le défi au
quotidien, c'est compliqué, O.K.? Parce que, s'il arrive rien qu'une
personne à la fois, ça va bien. C'est le
groupe, si on a un 10, 12 clients puis que... On dit toujours à nos
employés : Allez plus vite, allez plus vite, allez plus vite pour
ne pas que le monde attende, parce que, quand ça attend, ça gueule ou ça...
C'est pour ça
que moi, quand j'ai été acquitté au mois de janvier, j'ai mis tout de suite le
cartage obligatoire pour tout le monde. Comme ça, pas de secret, ça a
pris un mois, puis tout était rentré dans l'ordre.
Mme
Soucy : Bien, félicitations, c'est tout en votre honneur. Parce que,
bon, hier, on a eu cette discussion-là, et puis, bon, il y a un commerçant qui me disait : Bien, on ne peut
pas le faire, c'est très difficile, les gens sont réticents à nous
montrer leurs cartes. Rien ne vous oblige à le faire. Mais pourquoi tout le
monde ne le fait pas? Vous, vous le faites. Pourquoi tout le monde ne le fait
pas? Volontairement, là, évidemment.
M. Laporte
(Pascal) : Oui. Si je peux me permettre,
le fait de carter tout le monde, peu importe l'âge, à notre connaissance,
ça n'existe pas nulle part au monde. Donc, moi, en tant que détaillant, si moi,
je décide demain matin de dire : Si vous voulez avoir de l'alcool, du tabac ou de la loterie, vous devez nous présenter
votre carte, je passe pour un hurluberlu, là, je passe pour quelqu'un vraiment,
là, qui est sur une autre planète.
Par contre,
M. Guérard a réussi, lui, à le faire, et c'est tout en son honneur. Je suis vraiment
fier de lui. Même si c'est un compétiteur, loin, mais un compétiteur, je
suis fier de lui quand même. Par contre, si c'est dans la loi et que tout le monde le fait, moi, je suis convaincu qu'au bout de quelques
mois ça va tout simplement devenir une habitude, hein? On va se présenter dans un établissement pour acheter notre caisse de bière puis, par habitude, on va sortir
notre pièce d'identité, parce que tout le monde le fait.
Ça fait que c'est
pour ça que c'est difficile de pouvoir l'implanter par nous-mêmes, parce que ça
devient, en quelque sorte, un désavantage concurrentiel.
M. Gadbois (Michel) : Ce qu'on vous a dit ici, par
contre, c'est qu'on n'attendra pas le
résultat des travaux de la commission, on va commencer à le faire. Au sommet, l'année
dernière, ça a été sanctionné. Ça faisait deux ans qu'on en parlait. À la dernière commission parlementaire, à l'époque où... je pense que c'était M. Bolduc
qui la présidait, on avait déposé cette recommandation-là. Alors, ce
n'est pas d'hier que c'est venu.
Mais, pour faire
allusion à ce que M. Lisée a soulevé tout à l'heure, ça a pris quand même un
électrochoc auprès des détaillants pour
réaliser qu'ils ne pouvaient pas vivre dans cet environnement-là, d'une part,
et, d'autre part, que c'était techniquement rendu là et
qu'on devait le faire également pour la loterie et l'alcool, et on va le faire.
J'aimerais que ça soit accéléré, O.K.,
mais je pense qu'on peut donner l'exemple là-dessus.
Puis je vous assure que notre association va mener ce dossier-là.
Mme Soucy :
Donc, vous, ça passe par le cartage obligatoire. C'est ce que vous demandez au gouvernement,
d'obliger de faire des campagnes de
publicité puis d'avertir tout le
monde que pas de cartage, bien, pas
de vente, en fait.
M. Laporte
(Pascal) : C'est certain que c'est difficile d'avoir un taux de conformité
de plus de 85 %. Ça veut dire que, tôt
ou tard, on risque, dans un de nos établissements, de se faire prendre, entre
guillemets, par... Et, malgré tous
les efforts qu'on fait, là, pour ne pas que ça arrive, ça risque d'arriver, et
les conséquences sont beaucoup trop élevées, on ne peut pas se permettre ces conséquences-là. C'est pour ça que le
cartage obligatoire vient régler ça, puis on devient conformes à
100 %, puis on enlève tout ce risque-là.
M. Gadbois
(Michel) : Ce qui est un peu contradictoire, c'est que... Puis M.
Laporte pourra le confirmer, parce que j'ai été en cour avec lui — il
est rendu à trois maintenant, sur 15 magasins — quand on s'acharne sur
un détaillant, on ne le lâche pas, là, O.K.?
C'est sûr, O.K., qu'ils vont attraper un détaillant s'ils décident de le faire.
Je peux vous donner les trucs pour le
faire. Mais, c'est drôle, quand on arrive devant un juge, le juge, les trois
quarts du temps, si on monte notre dossier puis on montre que nos gens
ont été formés puis que les gens sont de bonne foi, nous dit que «vous avez
fait preuve de diligence», et très souvent, O.K., la cause est renvoyée.
D'abord, je pense que maintenant on est
rendus à un point où même les avocats, quand on les rencontre, les avocats de
la couronne, nous regardent, puis ils voient le dossier, comment il est
préparé, puis ils disent : Ça ne vaut pas le temps, on renvoie la cause.
Je pense que, là, on
s'est assez «sizés», en bon français. On va passer aux actes, on va régler ce
problème-là une fois pour toutes. Puis je
pense que non seulement vous... On souhaite votre collaboration, mais
regardez-nous puis, dans les prochaines semaines, vous allez voir, ça va
se répandre.
Mme
Soucy : On sait qu'il y a des problèmes, on est conscients qu'il y a
des problèmes de contrebande dans les réserves. Selon vous, selon...
Une voix :
...
Mme
Soucy : Oui, évidemment. Selon votre connaissance, est-ce qu'il y en a
actuellement, de la contrebande pour les cigarettes au menthol?
M. Gadbois (Michel) : Oui. Si vous avez reçu... et vous l'avez reçu, on avait notre campagne
où on présentait... D'ailleurs, on avait gentiment commencé dans le
comté de la ministre avec une détaillante qu'elle connaît bien. Ce qu'on disait, c'est qu'on arrivait quand même avec
un clin d'oeil, avec une boîte-cadeau avec un ruban vert — et vous l'avez tous reçue, comme députés — et on vous disait : Ne faites pas un
cadeau aux contrebandiers, O.K.? Alors, là-dedans, on a fait les études
et les analyses dont vous parlez. On a répertorié... combien, Guy, de...
• (10 h 30) •
M. Leroux (Guy) : On a répertorié une dizaine de produits de contrebande au menthol, des
marques comme des marques amérindiennes, des marques qui sont exportées
illégalement des États-Unis et des marques canadiennes. On en a répertorié une dizaine, mais on sait qu'il en
existe, au Canada, jusqu'à 20 à 25. Donc, faire un produit de cigarette
au menthol, au niveau de la contrebande de tabac, ce n'est absolument
pas un problème, là, techniquement, ils le font déjà puis ils ont les
capacités, demain matin, de répondre à la demande.
M. Gadbois
(Michel) : Ça me ferait plaisir de vous amener, ainsi que M. Lisée
puis Mme la ministre, faire une visite des cabanes à tabac pour vous le
montrer. On l'a fait dans le passé avec des caméras cachées, qu'on a mis sur YouTube.
On a nous-mêmes fait des inspections avec des jeunes qui demandaient des
caisses de tabac, il n'y a jamais eu de contrôle. Les produits sont affichés, il
y a du marketing qui se fait.
Dans notre mémoire,
ce qu'on vous dit, c'est qu'on est dans une situation où on banalise malgré
tout le 15 %, avec ce que ça
représente. C'est vrai que ce n'est pas aussi haut que ça l'a déjà été, mais
c'est comme... on est assis sur un
volcan, ça peut repartir n'importe quand. Encouragez-le pas avec quelque chose
qui va tout simplement rester dans le marché. Ça, c'est notre première
recommandation.
La deuxième, c'est qu'il y a des
solutions. Moi, j'ai parlé à des chefs de bande à Ottawa, on a eu des
rencontres, ils attendent des solutions. Parce qu'eux autres, ils n'aiment pas
être perçus comme ça puis ils n'aiment pas que leurs jeunes soient impliqués
dans ce genre de commerce là. Et, par exemple, je cite, à un certain moment
donné dans le mémoire et ailleurs, que l'Alberta, la Colombie-Britannique sont
arrivées avec des solutions très simples. Ce qu'ils ont dit, c'est : Payez la taxe, on va faire le calcul du nombre
d'habitants proportionnels qui doivent sauver la taxe, comme c'est le
cas, par exemple, sur les réserves dans le bout de Roberval, et on va vous
rembourser la taxe. Et, en vous remboursant
la taxe... C'est ce qu'ils veulent, c'est séparer le montant. Ce montant-là a
été investi dans des programmes d'études
pour les jeunes. Ça, c'est positif. Ça se fait en Alberta, ça se fait en
Colombie-Britannique, zéro contrebande.
Mme Soucy :
Alors, ça va être le temps d'interpeller les chefs des partis politiques au
fédéral, ils sont en campagne électorale.
Dans votre... Vous
avez fait une étude sur les mégots de cigarettes trouvés dans les cours
d'école. Moi, je ne connais pas votre
méthodologie de recherche. Est-ce que c'est possible de déterminer si les
mégots de cigarettes étaient vraiment ceux des employés et ceux des
élèves? Il doit y avoir des proportions à ça. Est-ce que c'est...
Le Président (M.
Tanguay) : En quelques secondes.
M. Gadbois (Michel) : ...c'est probablement la même proportion que professeurs et étudiants,
mais je laisse... Il a expliqué la méthodologie, mais, si tu veux...
Le Président (M.
Tanguay) : En quelques secondes, il reste 10 secondes.
M.
Venne (Jean-Simon) : Oui. Bien, très rapidement. Lorsqu'on fait la
visite d'observation, je vous dirais que ce qu'on voit, c'est les jeunes. Les professeurs vont très, très rarement
fumer avec les jeunes sur le bord de la clôture. Je pense qu'on a vu ça
une seule fois au Canada. C'est vraiment des jeunes ensemble lors des pauses.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci. Alors, nous vous remercions,
représentants de l'Association québécoise des dépanneurs en alimentation du Québec.
J'invite
maintenant les directeurs régionaux de santé publique du Québec à
prendre place, et nous suspendons quelques instants.
(Suspension de la séance à 10
h 33)
(Reprise à 10 h 37)
Le Président (M.
Tanguay) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous accueillons maintenant les
représentantes, représentants des directeurs régionaux de santé publique du Québec.
Bienvenue à votre Assemblée nationale. Vous disposez
d'une période de 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, vous aurez l'occasion d'échanger et de discuter avec les parlementaires.
Bien prendre soin, pour les fins d'enregistrement, entre autres, de vous identifier,
votre nom et vos fonctions, et la parole est à vous.
Directrices et directeurs
régionaux de santé publique du Québec
M. Massé (Richard) : D'accord. Merci
beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, bonjour. Richard
Massé, je suis directeur de la santé publique de Montréal.
M.
Desbiens (François) : François
Desbiens, directeur de la santé publique de la Capitale-Nationale et aussi,
par intérim, de la Côte-Nord.
Mme Goupil-Sormany
(Isabelle) : Et Isabelle Goupil-Sormany, directrice, santé publique,
Mauricie—Centre-du-Québec.
M. Massé (Richard) : Comme vous l'avez vu dans le mémoire qui vous a été déposé, ce
mémoire-là parle au nom de l'ensemble
des 18 directeurs régionaux de santé publique du Québec,
donc on trouve l'ensemble du territoire. Vous savez que les mandats qui
sont confiés aux directeurs de santé publique comprennent la protection de la
santé de la population, et notamment des gens qui sont plus vulnérables, mais
ça inclut aussi les politiques publiques pour réduire les risques à la
santé et évidemment la politique sur le tabac, étant une chose fort importante.
Je dois dire que le
mémoire qui vous est présenté fait suite aussi à la présentation qui a été
faite il y a presque deux ans maintenant en commission sur la santé sur l'étude
du rapport de la mise en oeuvre de la Loi sur le tabac et qu'on a continué de
travailler avec un grand nombre d'intervenants à travers le Québec pour être
capables de vous présenter ce mémoire-là et les recommandations afférentes,
notamment avec les prisons, avec des départements de psychiatrie et de santé
mentale, de réadaptation, les hôpitaux et CSSS de l'ensemble de la région de
Montréal et du Québec. Donc, c'est quand même le fruit d'un travail très large
qui a été fait.
• (10 h 40) •
Cette
diapo-là vous montre l'importance de l'impact du tabagisme. Je n'irai pas dans
le détail parce que, dans le mémoire, vous l'avez. Je ne pense pas que
c'est nécessaire de rentrer dans ce détail-là. Ceci dit, je veux quand même
souligner quelques faits. Il y a encore 1,4 million de personnes qui
fument la cigarette au Québec. C'est un impact considérable : 10 ans d'espérance de vie de moins chez les fumeurs. L'impact sur les
inégalités sociales de santé, où c'est un des grands déterminants.
L'écart entre les régions du Québec, ce n'est pas homogène, on a des régions
qui sont jusqu'à près de 30 %, d'autres
qui sont autour de 15 %. Les jeunes en difficulté, 66 % des jeunes, centres jeunesse, qui fument. Santé mentale, deux à trois fois plus de
prévalence de tabagisme chez les... Donc, il y a vraiment
des populations qui sont plus
vulnérables, et on pense que c'est vraiment important à la fois de changer les
normes, ce qui a été fait
beaucoup dans les 25 dernières années
au Québec, mais aussi de protéger le plus possible des lieux contre l'impact du
tabagisme.
Il faudrait
d'abord souligner, puis je pense que c'est important, que la loi qui nous est
présentée, c'est une loi qui est robuste, c'est une loi qui est
audacieuse, c'est une loi qui nous permet de toucher des points qui ont évolué.
Les cigarettiers sont très inventifs, ils
ont des stratégies de marketing qui sont dérangeantes et ils développent des
produits pour contourner les lois. Donc, c'est vraiment important de mettre à
jour cette législation-là.
Le fait
d'introduire la cigarette électronique à l'intérieur de la Loi sur le tabac
nous apparaît un élément central, important,
incontournable. Et déjà plusieurs personnes ont adressé cette question-là ici,
en commission parlementaire, mais on
pense que ça, c'est vraiment une chose importante, le phénomène qui est en
croissance, on en voit partout, ce n'est pas réglementé. Je n'irai pas plus loin, parce que probablement qu'on en
discutera tantôt, mais, clairement, c'est important.
L'interdiction de... L'aromatisation, incluant
le menthol, comme phénomène d'introduction au tabac, c'est vraiment un facteur
d'initiation à l'utilisation du tabagisme chez les jeunes. Je pense que ça,
c'est bien démontré. Non seulement l'Organisation mondiale de la santé, mais
les gens qui travaillent dans le domaine du tabac en... du tabagisme en général vous diront que c'est
vraiment un phénomène d'initiation. Ce n'est pas pour rien qu'on se
retrouve avec 30 % des jeunes qui ont
utilisé des produits du menthol et qu'on se retrouve chez les jeunes qui fument
régulièrement, quotidiennement, jusqu'à un
sur deux par rapport à 5 %, un sur 20, chez la population adulte,
nonobstant les études qui sont faites avec des méthodologies qui peuvent
être questionnées. Je pense que ça, c'est des données qui sont relativement fiables, qui peuvent évoluer dans le temps, mais
ça démontre l'importance d'un facteur d'initiation autour du menthol.
Soulignés aussi
dans le projet de loi, la protection au niveau des terrasses, des bars, des
restaurants, les véhicules en présence d'enfants et puis les terrains
des CPE, garderies comme étant des éléments centraux. Il y en a plusieurs autres, je ne veux pas tous les mettre, mais je
veux juste dire qu'on supporte, on souligne ces choses-là puis on pense
que c'est des améliorations qui sont importantes.
Ceci dit, on va se concentrer sur les
propositions d'amendement et de recommandation pour maintenir la robustesse, pour
éviter qu'il y ait des éléments qui diminuent la robustesse au niveau du projet
de loi.
Le premier,
c'est en lien avec des recommandations qui ont été faites avec le réseau de
Montréal sans tabac. Donc, c'est
80 partenaires qui sont associés pour regarder ces choses-là, et une des
choses les plus importantes que les gens nous mentionnent et que nous,
on tient, c'est que l'initiation est au coeur du combat qu'on... dans la lutte
sur le tabagisme. Donc, tout ce qui peut
être fait par le réseau de santé, par la santé publique, mais par tout le
réseau de santé pour lutter contre l'initiation, c'est un facteur
fondamental. Et ce qu'on voit, c'est un effort très important de la part de
l'industrie pour augmenter l'initiation, pour favoriser leur clientèle future.
Premier
amendement puis le premier enjeu. Il y a des personnes dans le réseau de
santé — et c'est
vraiment une des recommandations
centrales qu'on propose — qui sont exposées à fumer du tabac dans un réseau qui a fait ses
preuves au cours des dernières années pour
être capable de réduire le tabagisme. On l'a fait... Et donc, la première
recommandation, c'est l'interdiction des
chambres pour les fumeurs. On sait que, dans les endroits où est-ce qu'il y a
de l'hébergement, on peut avoir
jusqu'à 40 % des chambres qui peuvent être réservées pour les fumeurs.
Bien nous en prenne, ce n'est pas ça, la
situation sur le terrain. Il y a beaucoup moins de chambres que ça. Il y en a
encore, et on pense qu'on est capables d'aller à zéro chambre fumeurs,
et c'est ce qu'on vous recommande.
Déjà, on l'a fait au niveau des centres
jeunesse, déjà on l'a fait à l'institut Pinel. Vous allez avoir les gens du
CIUSSS du nord de Montréal qui vont venir vous présenter leurs recommandations,
et eux vont vous dire que non seulement ils le font, mais ils veulent aller
plus loin encore que ce qui est dans la législation. On est en train de le faire avec l'institut Douglas en santé mentale, on
est en train de le faire avec le centre de réadaptation avec Sainte-Justine,
l'institut de santé mentale. Donc, toutes
ces organisations-là ont développé des politiques sur la lutte au tabagisme,
des politiques sans tabac dans leurs
établissements. Ils ont été capables de le faire progressivement, avec l'aide
et le mentorat, mais avec l'aide des réseaux de santé et de la santé
publique. Donc, on est capables vraiment d'aller plus loin.
On est capables d'aller plus loin sur les
terrains aussi. À l'agence de la santé, ou l'ex-agence de la santé de Montréal, on avait une politique sur les terrains,
politique qui a été accompagnée par plusieurs établissements. En fait, l'ensemble des établissements de Montréal
voulaient utiliser cette politique-là à titre de démonstration, et ça a un
impact important. Et c'est ce qui est fait aussi au Centre jeunesse de
Montréal, centre jeunesse que vous avez déjà rencontré.
Les prisons du Québec sont maintenant totalement
sans fumée. S'il y en a qui nous disent qu'il y a des populations qui sont difficiles à intervenir... C'est difficile
d'intervenir en milieu carcéral, vous le savez très bien. Pourtant, ils ont réussi, parce que non seulement il y avait
des risques pour les personnes qui
étaient là, il y avait des feux, il y avait des difficultés à contrôler les comportements des
gens...
Donc, on a les mêmes problèmes,
dans certains cas, au niveau des institutions de santé mentale ou au niveau des
jeunes. Les gens dans les établissements nous demandent d'intervenir auprès
d'eux pour faire des établissements sans
fumée, et, plutôt que de le faire seulement à la pièce, ce qu'on
a commencé à faire, puis la démonstration est évidente... On pense qu'on
est prêts à aller à une étape supérieure puis de recommander que ce ne soit non
seulement plus de chambre, mais aussi plus
de fumoir, sauf pour les CHSLD. On pense que ça doit s'accompagner d'une politique d'abandon ou de politiques d'établissement sans fumée pour tous les établissements. Avec la réorganisation du réseau
de santé, on avait déjà, avant, des progrès
importants. Il y a eu les fusions et
des changements au niveau des organisations. On pense qu'avec ces changements-là on a
un risque de recul par rapport aux politiques sans tabac que les établissements
s'étaient déjà données volontairement. Et là je pense qu'on peut aller plus
loin et aussi offrir des services d'abandon pour
le tabac à ces personnes-là qui sont dans ce qu'on appelle un «teachable
moment», un moment où est-ce que les gens peuvent être sensibles pour
arrêter de fumer, être réceptifs à cette situation-là.
Établissements
d'éducation supérieure — et
on salue ce qui est dans la loi déjà pour protéger les jeunes, que ce soit CPE, que ce soit garderies, que ce soit écoles primaires, secondaires — on
pense qu'on doit aller plus loin au
niveau des cégeps, des collèges et des universités. Il y
a 15 % des gens qui s'initient
après l'âge de 18 ans. Déjà, au cégep, on a des gens qui ont 16 ans, 17 ans, donc on a des gens plus
jeunes qui sont au cégep, on est encore en phase d'initiation, et je pense qu'il y a
une cohérence par rapport au réseau de l'éducation qui devrait être
exemplaire pour pouvoir protéger les jeunes complètement.
Abris pour fumeurs.
On pense que les abris pour fumeurs, ça devrait être une chose du passé.
Honnêtement, il y a des risques associés aux
gens qui utilisent ces abris-là. Il y en avait un au ministère de la Santé au
temps où j'étais au ministère, ici,
et je peux vous dire que c'était sérieusement emboucané. En fait, les études
nous montrent à quel point il y a des
produits toxiques qui s'accumulent dans ces abris-là. Vous savez qu'il y en a
qui se sont écrasés en tuant des gens qui étaient dans les abris, parce
que c'est chaud dans l'abri, puis il y a de la neige en hiver, donc ça provoque
des problèmes. Donc, on pense que cette
chose-là, elle n'est plus nécessaire. Puis, dans un contexte de dénormalisation
où est-ce qu'on veut créer des espaces sans
fumée, le fait de permettre de créer des abris, on va à l'inverse. Si on se met
à avoir des abris à neuf mètres d'une terrasse qu'on a interdit de
fumer, on recule, d'après moi, là. Donc là, on pense qu'on ne devrait pas aller
dans ce sens-là.
Salon
de cigares et pipes à eau. Bon, vous direz : Il n'y a pas beaucoup...
25 salons qui ont eu, pour les pipes à eau puis les cigares, un
permis, historiquement, puis qui ont pu avoir cette clause grand-père là. Le
phénomène est plus important que ça. En fait, les gens ont reconnu qu'au niveau
des salons de thé, puis je pense que les gens... vous en avez discuté ici, en commission parlementaire, il
y en a beaucoup plus d'illégaux. On a de la misère à les repérer, on a
de la misère à savoir ce qui se passe, et là
on se retrouve vraiment avec deux poids, deux mesures dans un système qui est
difficile.
On a une perception
de risque diminué pour les gens qui utilisent les pipes à eau. Vous avez eu cette
discussion-là. Ce n'est pas exact, c'est une
mauvaise perception. On pense que ça, c'est vraiment un risque qui existe
et on pense qu'on est capables d'arrêter
cette chose-là, et non seulement d'éviter qu'il y ait des salons de thé qui l'offrent aux jeunes de tout âge, d'ailleurs, mais aussi de revenir puis dire :
Bien, cette clause grand-père là ne devrait peut-être pas être
maintenue, puis on devrait arrêter.
Il y a un signal à
donner par rapport à un phénomène qui est en émergence, c'est un phénomène qui
est en croissance, on a parlé des
cigarillos, des petits cigares qui sont en croissance et puis qui maintenant
sont aussi importants que la cigarette, la chicha, et c'est aussi un
phénomène qui est en croissance.
Emballage neutre. Il
y en a d'autres qui vont vous en parler de façon importante. On pense qu'à
l'instar de ce que l'Organisation mondiale
de la santé dit la standardisation des mises en garde est une chose importante.
On a vu les efforts de l'industrie
pour avoir des paquets qui sont attractifs, stratégies de marketing, tout ce
qui va autour du «branding» est très, très important. Plus on va
diminuer ces tendances de «branding» spécifique au tabac, plus on va diminuer
la pression pour initier le tabagisme. Donc, ça fait partie de cette chose-là,
je pense que c'est important qu'on puisse se diriger vers des emballages
neutres. On a même des emballages pour lesquels...
Le
Président (M. Tanguay) : M. Massé, vous avez dépassé de
1 min 40 s. Peut-être, dans le prochain 30 secondes,
si vous pouvez conclure... Parce que c'est
du temps de moins que vous avez d'échanger avec les parlementaires, qui
ont lu votre présentation. Mais donc, si vous pouvez peut-être conclure d'ici
les 30 prochaines secondes... et après ça l'échange débutera.
• (10 h 50) •
M. Massé
(Richard) : Parfait. Montant. Montant qui a été fixé par
réglementation en 2008, on pense qu'on est mûrs pour augmenter à 20 $. On
veut éviter de continuer de vendre des articles à la pièce. On ne veut pas que
cette chose-là arrive. Pour l'instant, c'est une base volontaire, mais on
pense... cette mesure-là est importante.
Système de
surveillance. En Ontario, ils demandent d'avoir des permis. Nous, on dit :
Bien, ce n'est peut-être pas nécessaire, un
permis. Ça pourrait faire partie de la solution, mais ce qui est certain, c'est
que la densité des points de vente est un élément important. On n'a pas
de système pour mesurer la densité des points de vente et le relier à
l'initiation puis au taux de tabagisme, notamment chez les jeunes. Donc, on
pense qu'il faudrait qu'on ait un système de surveillance.
Deux choses qui ne
sont pas des amendements — je
ne vais pas étirer plus longtemps, M. le Président : le prix de la
cigarette. C'est la moins chère au Canada. On est à peu près 20 %, presque
25 % moins cher que les autres provinces.
Vous avez vu dans le rapport le lien entre l'augmentation des prix et la
diminution du tabagisme. Avec les coûts qui pourraient être sauvés en
coûts directs pour le système de santé, en coûts indirects pour les personnes,
donc, on pense qu'il y a de l'espace, en faisant attention toujours à la
contrebande, mais les efforts québécois au niveau de la contrebande ont été
très significatifs.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup, M. Massé. Maintenant, je dois... Vous avez
déjà excédé le 10 minutes de trois minutes. Je dois maintenant céder la
parole pour les échanges, qui seront fructueux et qui vous permettront évidemment de transmettre votre
présentation. Je cède la parole à la ministre, qui disposait de 22,
maintenant qui dispose de 19. La parole est à vous.
Mme
Charlebois : Merci, M. le Président. Mais je ne suis pas
inquiète, on va rattraper... On va pouvoir échanger, mais vous allez
aussi échanger avec mes collègues parlementaires, puis ça va nous permettre de
bien mettre la table.
D'entrée de
jeu, merci beaucoup d'être là. Je tiens à... M. Massé, Mme Goupil-Sormany et M.
Desbiens, merci de venir nous
renseigner davantage sur les dommages que cause le tabagisme. Et j'aimerais ça,
en quelques secondes — je sais que je vais vous demander un tour de force — que
vous expliquiez aux gens qui nous écoutent, là, c'est quoi, votre devoir, votre mission. Parce que moi, je
suis la ministre responsable de la Santé publique, mais vous êtes
directement en action, vous, vous voyez
directement les choses sur le terrain. C'est quoi, votre rôle dans la
population, la santé... Parce que les
gens ont de la difficulté à départager la santé curative de la santé publique.
Si vous pouviez expliquer ça rapidement, ça serait déjà mettre la table
sur votre rôle.
M. Massé
(Richard) : Bien, je vais
utiliser l'exemple du tabac. Le ministère de la Santé a déjà un rôle au
niveau de l'inspection, puis de la
réglementation, puis du suivi de cette chose-là. Donc, nous, on le fait moins.
Par contre, il y a de l'information qui nous est transmise du ministère
de la Santé s'il y a des choses qui sont anormales.
Les choses
qu'on fait le plus, c'est d'accompagner les gens qui travaillent auprès des
fumeurs, par exemple centres d'abandon
sur le tabac, des choses qui sont financées, on supporte, on fait de la
formation, on donne des outils. On travaille avec, directement, les gens sur le terrain qui donnent ces services-là.
Des lignes téléphoniques pour l'abandon sur le tabac qu'on supporte, la même chose. Les campagnes de
promotion qu'on fait, l'appui aux établissements. Les établissements
nous demandent régulièrement d'aller les voir, de voir comment est-ce qu'on
installe une politique de lutte contre le tabac
chez eux, comment est-ce qu'on peut former les employés, quel genre d'outils on
peut employer pour le faire, c'est quoi,
les étapes, c'est quoi, la progression qu'on peut faire pour installer une
politique de lutte au tabagisme, et puis suivre la situation. On a vu qu'au niveau de la cigarette
électronique... Je n'ai pas eu le temps d'en parler, j'en profite un tout petit
peu...
Mme
Charlebois : ...une
question là-dessus.
M. Massé (Richard) : On a vu que ça
a évolué beaucoup. On en a profité pour aller voir, pour faire une enquête, pour voir la situation, qu'est-ce qui se
passe, parce que ça change très rapidement, voir qui l'utilise, comment est-ce qu'ils l'utilisent. J'ai vu de mes yeux des
gens dans les laboratoires faire des mélanges de produits pour nous
dire : Bien là, maintenant, vous avez 16 % de nicotine dans le
nouveau produit qui n'est pas supposé être disponible, mais que tout le monde peut avoir. On le voit, on est
capables de voir qu'est-ce qui se passe, de voir qui qui rentre dans ces
boutiques-là, puis de dire : Ça nous
pose vraiment des problèmes. Donc, suivre la situation, faire des enquêtes,
supporter les gens, travailler avec les groupes communautaires, travailler avec
les établissements de soins.
Mme
Charlebois : Dans
le fond, travailler et veiller à la santé de l'ensemble de la population.
M. Massé (Richard) : Exact.
Mme
Charlebois : Merci
beaucoup. Parce qu'on a vraiment besoin de... Tu sais, au-delà du curatif, il
faut travailler en mode préventif, puis c'est souvent ça qui va faire en sorte
que, dans le curatif, ça va coûter un petit peu moins cher mais qu'on va
prévenir des drames humains aussi.
Ma première
question va aller directement sur les établissements de santé et services sociaux.
Quand vous dites : Plus de fumoir, plus de chambre, plus...
Qu'est-ce qu'on va faire avec la marijuana thérapeutique?
M. Massé
(Richard) : Marijuana
thérapeutique, c'est des choses qui sont, je dirais, relativement marginales
pour l'instant. Je pense qu'il y a des
médicaments relativement efficaces, dans les établissements de soins, que les
gens utilisent. Est-ce qu'il y a des
exceptions qui pourraient être faites? Je ne le sais pas. Honnêtement, on ne
s'est pas penchés sur la marijuana thérapeutique. C'est un phénomène qui
est vraiment marginal, je dois dire, ce n'est pas quelque chose qui est très
fréquent, puis pas dans les milieux hospitaliers.
Par
cohérence, ça serait assez difficile de commencer à laisser des choses errer à
droite puis à gauche. Honnêtement, les
gens dans les établissements, ce qu'ils nous demandent, c'est d'avoir une
politique uniforme d'établissements sans fumée. C'est vraiment ça que
les gens qui sont dans les établissements nous demandent.
Mme
Charlebois : Oui,
je sais, puis je sais qu'il y a des établissements qui y travaillent déjà, puis
il y en a déjà qui sont sans fumée. Mais je vous reviens notamment en CHSLD où,
en tout cas, tout ce qui concerne le côté thérapeutique,
je vous entends, vous dites : C'est vraiment marginal. Vous avez
raison, parce que c'était illégal avant. Est-ce que,
s'il y a une demande... Puis vous savez que c'est devenu légal, là, le
fédéral a légalisé la marijuana thérapeutique, il faut quand même
le prévoir dans notre projet de loi. Vous êtes d'accord?
M. Massé
(Richard) : Oui, mais je
laisse les établissements de courte durée pour aller dans les établissements
de longue durée, puis peut-être
qu'il y a des choses, là, qui pourraient être plus dans les établissements de longue durée, parce qu'on parle de soulager des problèmes à long terme, là,
des problèmes chroniques, puis ce que nous, on propose, c'est garder des fumoirs mais pas des chambres pour
fumeurs dans les CHSLD. Puis ce que les gens nous disent, c'est :
Les gens qui sont hospitalisés, alités, ils sont assez malades que, d'abord, la
plupart d'entre eux ne fument pas, donc, de plus en plus, il y a de moins en moins de fumeurs, que fumer au lit,
c'est un problème très sérieux, puis ils ne peuvent pas toujours
accompagner les malades, donc c'est un risque pour le feu. Et il y a eu des
incendies qui ont été déclarés comme ça non seulement
dans les lits, mais dans les fumoirs. Et donc on propose une mesure intérimaire
pour les gens qui sont ambulatoires. Et ce que vous proposez, c'est plus pour
des gens qui sont ambulatoires que des gens pour lesquels le niveau de maladie
est suffisant pour ne pas qu'ils puissent sortir de leurs lits, puis on ne
pense pas qu'on puisse rentrer des lits dans des fumoirs.
Donc, on propose une mesure intermédiaire pour
les CHSLD, pour les gens qui ont des problèmes vraiment long terme, chroniques... qui sont de garder des fumoirs dans ces
centres-là. Au CHUS du nord de Montréal, ils vont vous dire qu'eux autres pensent qu'il ne devrait plus y avoir de fumoirs, et
c'est leur recommandation pour leurs établissements et pour
l'ensemble des établissements.
Mme
Charlebois : Vous
avez raison, probablement que l'usage de la marijuana est dans les soins de
longue durée plus que dans la courte durée.
Je vais vous
amener tout de suite sur les abris pour fumeurs. Puisqu'on a parlé des
fumoirs dans les établissements, mais
là on va aller dans les abris pour fumeurs. Vous savez qu'on a reçu les représentants de restauration, les représentants des bars, les tenanciers de
bar, et tout ça, puis ce soir on va recevoir l'Union des tenanciers de bars, et
ils sont tous d'avis que nous devrions permettre les terrasses et/ou ils nous
ont suggéré aussi d'avoir des fumoirs sur la terrasse.
Parlez-moi de la fumée secondaire, des effets.
Et est-ce que vous considérez que, si on fait un abri ou si on met la moitié de la terrasse fumeurs puis l'autre
moitié non-fumeurs qu'on pose un bon geste? Comment vous voyez ça, vous,
puis comme... C'est quoi, la réflexion qui a été entreprise par la santé
publique là-dessus?
M. Massé (Richard) : Bon. D'abord,
les décès par fumée secondaire, c'est un phénomène qui est important, ce n'est
pas un phénomène qui est marginal. On en a à peu près 1 000 qui arrivent à
chaque année. Donc, ce n'est pas une chose qui est banale pour le Québec, là.
Donc, il y en a très régulièrement des gens qui sont atteints de ça. Il y a des
centaines, des milliers de produits toxiques, des produits cancérogènes, il y
en a des centaines. Donc, ils se retrouvent concentrés dans ces abris-là, qui
sont plutôt un endroit pour s'exposer de façon active.
Du point de vue dénormalisation...
Mme
Charlebois : Ça doit être comme dans une auto. Quand on
dit : Dans la voiture, c'est 27 fois plus concentré, dans
l'abri, ça doit être sensiblement la même chose?
M. Massé
(Richard) : Bien, je n'ai
pas de mesure exacte, mais je peux vous dire que, dans l'abri du ministère
de la Santé, quand il y en avait un, c'était
extrêmement toxique, parce que j'ai déjà eu à y aller pour parler à des gens et
puis je peux vous dire que ce n'était pas
nécessairement bien. Donc, je suis bien content qu'il n'est plus là. Je pense
qu'il y a une concentration de toxiques qui est très significative dans
ces abris-là.
Il y a un
enjeu de dénormalisation. On veut passer un message comme quoi, de plus en
plus, on veut des endroits qui sont
non-fumeurs puis que c'est la norme. C'est que les gens peuvent fumer, ceux qui
veulent, mais dans des endroits qui sont plus privés. Là, tout d'un
coup, on remet cette question d'abris là.
La question
des terrasses avec la séparation des terrasses, ça me fait penser quand on a
commencé à parler de mettre des zones non-fumeurs dans les restaurants,
puis qu'on s'est rendu compte que ça ne marchait pas du tout, puis que ce n'était pas ventilé comme il faut, puis que les
portes s'ouvraient continuellement, puis que les gens laissaient les
portes ouvertes, puis que, si le vent change
de bord, bien là, la fumée s'en va de l'autre côté. Dans le fond, là, on
revient un peu à ça, à essayer de trouver des compromis pour quelque
chose qui ne fonctionne pas.
Ailleurs au
Canada, les gens, une bonne partie des provinces ont décidé de le faire. Ils
l'ont implanté. À Montréal, on est la
seule grande ville canadienne pour laquelle il n'y a pas d'interdiction de
fumer sur les terrasses des restaurants et des bars. Donc, les autres
l'ont fait.
Puis tout le
monde nous disait : Ça ne marchera pas, ça n'a pas de bon sens. Puis là
ils essayaient de trouver des compromis, ils essayaient de trouver des
affaires, là, de broche à foin — je m'excuse de le dire comme ça, là — des affaires qui sont comme raccommodées pour
dire : Bien là, ça ne marchera pas, mais on va essayer de raccommoder
ça à droite puis à gauche. En vérité, nos
collègues, quand ils l'ont fait, ça a marché puis il y a eu peu d'impact sur la
clientèle, puis, dans certains cas, un impact positif, parce qu'il y a plus de
personnes qui y sont allées.
Donc,
essentiellement, je pense qu'on doit être relativement homogènes, on doit être
relativement consistants dans les
mesures qu'on propose, puis, pour moi, on est en train de comme essayer de
trouver des compromis qui ne sont pas bons, qui ne sont pas bien.
• (11 heures) •
Mme
Charlebois :
D'autant plus que, si tout le monde est dans la même situation, tu sais, il n'y
a pas de comparatif. On nous a dit : Ça
va être terrible, on va devoir envoyer les gens fumer sur le trottoir. On
n'aura pas de personne pour
surveiller nos terrasses. Et moi, j'ai demandé aux propriétaires, j'ai
dit : O.K., mais est-ce que ça prend absolument quelqu'un? Est-ce
qu'on n'est pas rendus là au Québec? Puis les Québécois et les Québécoises sont
suffisamment respectueux des règlements et
des lois, je pense, puis je veux vous entendre là-dessus. Est-ce que vous
pensez que les gens vont affronter cette directive-là puis qu'ils
n'iront pas fumer sur le trottoir ou qu'ils ne vont pas se distancer de l'établissement? Moi, je ne sens pas qu'il y aura
une confrontation, en tout cas pas avec les gens avec qui j'ai parlé
tout l'été. J'ai fait exprès pour m'exposer, pour aller sur les terrasses, puis
je n'ai pas senti ça, même de la part de fumeurs.
M. Massé
(Richard) : Mais non
seulement je ne pense pas qu'il va y avoir de confrontation, mais je pense
que, du côté des propriétaires aussi, la
norme va changer, puis ils vont faire comme ailleurs. Je veux dire, nos
collègues de Toronto, avec lesquels on est en
contact régulièrement, il y a eu les mêmes questions, les mêmes appréhensions,
et ça s'est bien fait, et du côté des clients et du côté des propriétaires. Nos
collègues de Vancouver, avec lesquels on est en contact régulier, la même
chose. Mais c'est comme je dis, les autres grandes villes canadiennes, on le
voit, on le sait.
Ça fait que, non, je suis d'accord avec vous, je
ne partage pas tellement d'appréhensions. Est-ce qu'il y a des individus qui
vont critiquer? Oui, il y a des individus qui vont critiquer, mais cette
chose-là... C'est comme quand on a introduit
la loi, en 1998. Quand on a introduit la loi, en 1998, les gens nous disaient
qu'on était en train de faire mer et monde. Et puis on a vu l'évolution
des moeurs, puis les gens disaient : Bien non, on est mieux protégés, on
est plus confortables puis on va y aller plus,
même, parce que, maintenant, on se sent plus respectés. La majorité des gens ne
fument pas, on veut s'assurer de garder une norme pour protéger les gens qui ne
fument pas.
Mme
Charlebois : Pour
l'ensemble de la population, c'est ça, oui?
M. Desbiens
(François) : Juste un complément d'information. Puis on sait
qu'en diminuant le nombre d'endroits où les gens peuvent fumer ça les
incite à moins fumer et à cesser. Et c'est ça qu'on souhaite. Parce qu'avec
l'ampleur du nombre de fumeurs — puis on ne veut pas qu'il y ait de
recrutement — puis
l'impact sur les coûts de santé, que la société paie au complet, donc, il faut progressivement, année après
année, rendre moins d'endroits où les gens peuvent fumer, et ils vont
cesser de fumer. Puis ça, ça va être bon pour la santé puis pour les budgets de
l'État.
Mme
Charlebois :
Et je vais aller même plus loin que ça, c'est non seulement ça, mais c'est pour
ceux qui sont justement en arrêt de
tabagisme. Pour l'avoir vécu et connaître de mes amis qui ont arrêté de fumer,
quand il n'y en a pas autour de toi,
c'est beaucoup plus facile d'arrêter de fumer que quand ça fume à deux pieds de
toi, là. Et, honnêtement, quand on mange, ce n'est pas tellement
agréable à sentir. Ça, c'est une chose.
Mais moi, je
reviens toujours à ce qu'il peut y avoir des enfants, à ce qu'il peut... les
conséquences de la fumée secondaire.
Je suis toujours là. On nous a dit que, sur une terrasse, il n'y en avait pas
tant que ça, des conséquences sur la fumée secondaire. Qu'est-ce que
vous en pensez, vous?
M. Massé
(Richard) : Bien, écoutez,
c'est sûr que, sur une terrasse ouverte à l'extérieur, qui est bien
ventilée, il va y avoir moins de concentré
de produits, mais il va y en avoir quand même parce que, les produits qui sont
cancérogènes, il y en a beaucoup, puis ils vont s'y retrouver. Puis, quand
moi — je
m'excuse de prendre un exemple personnel — je me retrouve sur une terrasse, puis j'y vais, puis qu'il y a des gens qui
fument derrière moi, j'essaie de trouver la table la plus loin ou de
trouver un autre endroit pour ne pas être exposé.
Donc, je veux
dire, il y a un phénomène d'incommodement. Il y a des produits toxiques qui
sont là. Et donc c'est sûr qu'il y en
a. Il y en a moins, mais là, tout d'un coup, vous avez des terrasses qui ont
des paravents sur les côtés pour éviter
que... s'il pleut, puis là vous concentrez les produits. Vous avez l'effet du
vent. Si vous avez quelqu'un qui est au centre, il va emboucaner les autres qui sont alentour. Comment est-ce
que vous faites pour commencer à gérer toutes ces situations-là? Quand
je disais tantôt : Tricoter pour essayer de trouver des solutions qui ne
fonctionnent pas, c'est un peu ça, là.
Mme
Charlebois :
Je vous entends, merci de votre explication. Je vais vous amener sur les
cigarettes électroniques. Vous vous doutiez bien qu'on était pour en
parler. Il y a un principe, en santé publique, que, quand on n'a pas les études à long terme, les études concluantes sur
certains produits... Puis vous savez très bien que les compagnies de
tabac sont avant-gardistes, hein? Elles ne vont pas se laisser faire, elles
vont essayer de ne pas perdre trop de terrain. On sait déjà qu'elles ont déjà fait l'acquisition de certaines compagnies
de vapotage. Est-ce que vous êtes non seulement à l'aise avec la façon dont on a l'a intégrée, on a
assimilé la cigarette électronique aux produits du tabac, mais est-ce que
vous avez des recommandations? Parce qu'on nous a dit : Dans les
établissements de vapotage, vous pourriez ne pas permettre l'affichage à l'extérieur, mais, à l'intérieur,
vous pourriez nous laisser exposer nos produits, laisser expliquer
comment faire l'usage de ces cigarettes électroniques là.
Et je veux aussi que vous me parliez des
éléments de toxicité. J'ai de la difficulté à le dire tout le temps, je
m'enfarge dans le x, là, mais je veux que vous me parliez des dangers.
Parce qu'il y en a quand même, hein? Il y a de la dépendance, puis on peut commencer à fumer avec ça. Je veux vous
entendre là-dessus dans l'entièreté. Parce que vous savez qu'on a gardé une porte ouverte aussi pour
les saveurs. C'est le seul élément avec qui on a laissé les saveurs,
mais on s'est gardé une porte ouverte par règlement pour dire : Si on
s'aperçoit que les jeunes se mettent à fumer avec ça... qu'on peut arriver et
intervenir par règlement. Alors, parlez-moi de l'ensemble du dossier.
M. Massé
(Richard) : O.K. D'abord,
c'est un phénomène en émergence, vous le savez bien, phénomène pour lequel on a des jeunes, des adultes... La plupart
des gens qui utilisent la cigarette électronique, c'est des gens qui
fument, donc il y a un lien très direct
entre le fait de fumer. Puis les gens disent que ça pourrait être un outil pour
aider à arrêter de fumer. En fait, il y a certaines études qui montrent
une certaine efficacité, probablement comparable à celle d'un timbre à nicotine
ou de d'autres produits qu'on utilise, mais, ceci dit, il manque d'études pour
connaître vraiment l'efficacité, et c'est
une des choses qu'on recommande, qu'on continue de faire cette étude-là. Donc,
je pense qu'au niveau de l'efficacité
pour arrêter de fumer on doit reconnaître qu'il pourrait... c'est un potentiel
qui est là mais qu'on manque d'information avant d'aller trop loin, puis
là on doit être très prudents sur ça.
Quant aux produits qui sont inhalés, la plupart
des gens... Et là c'est un peu difficile, parce que ce sont des produits qui
sont non réglementés. En théorie, on n'a pas de produit avec de la nicotine. En
pratique, on peut avoir de la nicotine dans tous les endroits qui vendent des cigarettes
électroniques que j'ai visités à Montréal, donc c'est comme facilement et largement accessible, à des
concentrations variables. On sait que les appareils ne sont pas réglementés,
ils ne fonctionnent pas les uns comme les
autres. Donc, on ne sait pas exactement les doses qui sont faites. On ne sait
même pas les concentrations des produits qui sont dedans. Des fois, ils sont
déjà tout faits dans une bouteille qui vient de l'extérieur, généralement de Chine, je m'excuse, et puis de d'autres
endroits, ils sont faits dans les laboratoires. J'en ai vu faire des mélanges devant moi. Honnêtement, je
revenais à 50 ans en arrière, là — je peux me projeter, j'avais 10 ans.
Mais je dois dire qu'on... c'est un peu traumatisant.
Donc, oui,
c'est dérangeant, parce qu'on ne sait pas ce qu'il y a dedans puis on ne sait
pas les concentrations qui sont inhalées par les personnes. Oui, il y a
des produits qui contiennent, par exemple, le formaldéhyde, qui peuvent être cancérogènes, à des niveaux qui sont
certainement plus bas que ce qu'on a au niveau de l'utilisation des produits
du tabac. Donc, ça, c'est sûr qu'il y a une
concentration plus faible de ces produits-là. De dire que ces produits-là ne
peuvent pas avoir des effets sur la santé,
je pense que c'est trop tôt pour dire ça. Puis, quand on contient des
cancérogènes, je pense qu'on peut toujours dire qu'il peut y avoir des
effets négatifs, même si les concentrations sont plus faibles.
Parlons un peu de la nicotine. La nicotine,
c'est un produit qui, bon, pour les enfants, peut être très toxique. Donc, s'il n'y a pas de réglementation pour
protéger les bouteilles, les gens peuvent s'intoxiquer. Mis à part ça, c'est
un produit qui n'a pas tant d'effet sur la
santé à des microdoses, mais c'est un produit qui peut induire des dépendances
s'il est absorbé rapidement. Avec un inhalateur, il est absorbé rapidement,
augmente la dépendance. La dépendance à la nicotine,
ce n'est pas pour rien que les compagnies de tabac achètent des compagnies,
parce que c'est le même marché, c'est les mêmes personnes.
Est-ce que c'est un produit qui a un effet
passerelle? Plusieurs personnes regardent ces études-là pour dire : Est-ce qu'il y a un effet passerelle de
l'initiation aux cigarettes électroniques vers d'autres produits du tabac? Il
est trop tôt pour être capable de
dire ce genre de chose là. Je sais que, cette semaine, il y a eu une étude,
dans le JAMA, qui laissait sous-entendre qu'il pourrait y avoir un lien.
Ce n'est pas un lien de causalité, c'est un lien plus situationnel. Je pense qu'il est trop tôt pour dire que... ni oui ni non
dans cette chose-là. Il faut être prudent pour ne pas affirmer des choses
quand on n'a pas l'information. Mais ce qui est sûr, et ça, j'en suis
convaincu, c'est qu'il y a un effet de dénormalisation, un effet d'acceptation. En laissant utiliser la
cigarette électronique avec les mêmes types de marketing que la cigarette
avait, puis là vous avez eu des
démonstrations de cette chose-là, avec les mêmes images, avec les mêmes
stratégies de marketing, comme je me
répète, ces choses-là nous emmènent dans un terrain qui est très, très près de
ce qu'on a vécu à l'initiation de la cigarette.
Donc,
prudence. Pour nous, c'est vraiment prudence face à un produit pour lequel...
beaucoup d'intérêt, des risques et puis des données sur l'efficacité
pour la cessation qui sont encore à démontrer. On ne pense pas qu'on doit
bannir pour les adultes. Puis j'entends
bien, puis je les connais, le Dr Ostiguy, le Dr Juneau qui sont venus présenter
puis qui disent : Bien, nous,
nos patients, on a des succès, des taux de succès. Oui, tant mieux, puis je
suis bien content de ça, des patients
qui ont des problèmes chroniques très sérieux, des patients qui ont essayé
d'autres méthodes avant pour arrêter, des fois des méthodes combinées pour arrêter, et puis qui n'ont pas eu de
succès avec ces méthodes-là. Donc, on est dans une clientèle très, très
particulière. Il y a un accompagnement qui est fait. Donc, soyons aussi
vigilants de ça.
Un dernier
volet, je m'excuse d'être si long, sur la cigarette électronique, mais, si vous
décidiez de faire quelque chose
pour rendre les endroits où est-ce
qu'on vend ces cigarettes-là... je pense
que ça doit être protégé. Donc, ça doit s'accompagner d'une évaluation des effets sur la santé puis d'une normalisation
des produits. Ça doit être des endroits où est-ce qu'il n'y aura pas de
jeunes en bas de 18 ans qui vont y aller, donc protégés. Ça, c'est vraiment
important, vous l'avez mentionné tantôt, ça, c'est vraiment important,
sans ça, on recule, là. Là, on ne s'en va pas par en avant, on s'en va par en
arrière.
• (11 h 10) •
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup, M. Massé. Je dois
maintenant céder la parole à notre collègue de Rosemont pour un bloc de
13 minutes.
M. Lisée :
Merci. Merci, M. Massé, Dre Goupil-Sormany, Dr Desbiens, je suis
très heureux que vous soyez là. D'ailleurs,
nous avons insisté pour votre présence lorsqu'on a fait la liste des invités et
on est contents que la ministre ait accepté que vous soyez présents.
Je vais
continuer sur la cigarette électronique. Alors, vous nous dites :
Évidemment, la difficulté, c'est la composition des fioles, l'absence de
contrôle. On a eu ici l'association des vapoteurs qui nous dit : Bien,
nous, on travaille avec le gouvernement
fédéral pour avoir une norme ISO, on veut être réglementés, on veut savoir
exactement ce qu'il y a dedans. Ça peut être
long, c'est une norme volontaire. On sait que la France a légiféré récemment
sur la normalisation du contenu et du contenant. On avait un
constitutionnaliste, ici cette semaine, qui nous a dit que le Québec a toute
latitude législative pour légiférer s'il le décide, y compris sur la cigarette
électronique, le contenu.
Évidemment,
jusqu'à maintenant, on s'est toujours fiés sur Santé Canada, qui a des
laboratoires, et tout ça. Mais, si on
décidait, nous, de légiférer, de dire : Bon, on regarde la norme
française, on se... on est satisfaits avec celle-là, on a décidé que,
sur le territoire du Québec, ça va être notre réglementation, est-ce que vous
pensez que ça serait une bonne idée?
M. Massé (Richard) : O.K., vous comprenez que je ne vais pas parler de la constitutionnalité
ou de la légalité de l'un ou de
l'autre, ce n'est pas mon domaine à moi, mais est-ce que ça doit être fait? Ça
doit être fait, c'est nécessaire. Ces produits-là,
actuellement, on ne sait pas ce qu'il y a dedans les fioles. Puis encore je
vous ai dit : Ça, ce sont les fioles qui sont faites, mais il y en a d'autres que les gens constituent. On ne
sait pas non plus les appareils, qu'est-ce qu'ils donnent. Il y a plusieurs centaines de marques d'appareils
qui semblent ne pas donner les mêmes doses, et puis il y a des
variations dans les produits
que les gens prennent. Donc, oui, cette réglementation-là, avec des normes, est
une chose nécessaire, et je pense qu'on doit avoir ça avant d'élargir
puis d'aller plus loin, tout à fait.
M.
Lisée : Vous êtes, donc, le directeur de la santé publique de
Montréal, vous avez travaillé au ministère de la Santé. Si on décidait de le faire, je ne vous demande pas votre avis
constitutionnel, mais, si on décidait de le faire, est-ce qu'on a la capacité de le faire?
C'est-à-dire : Est-ce qu'on a les ressources, au ministère de la Santé, ou
est-ce qu'on peut les trouver pour à la fois décider d'une norme et
faire des vérifications pour l'application de la norme?
M. Massé (Richard) : Bien là, je vais être obligé de prendre des exemples autres. Par
exemple, en santé environnementale,
on en fait, des normes. Donc, on sait, au Québec, comment faire des normes.
Dans plein de domaines, on fait des
normes. Donc, est-ce qu'on serait capables de faire des normes? La
réponse : oui. Dans le domaine du tabac, on n'a pas été amenés à le faire, puisque c'était le gouvernement fédéral
qui avait ce mandat-là. Maintenant, si on décidait de le faire, on
serait capables de se donner la capacité.
Ceci
dit, mon souhait, ça serait que ça soit une norme qui soit relativement
robuste. Le danger des normes, c'est de faire des choses qui vont être ping-pong, là : un peu ici, un peu
là, un peu là. Donc, il faut qu'il y ait un certain consensus autour de cette chose-là, et ça, c'est un défi en
soi, compte tenu de la nouveauté du produit et du fait que ce produit-là
évolue continuellement. Par exemple, les
compagnies maintenant, elles ne parlent plus seulement de mettre de la
nicotine, mais même mettre des produits, des dérivés des produits du tabac
là-dedans. Donc, il faut que cette chose-là suive, entre guillemets,
l'évolution d'un marché qui est très rapide.
M.
Lisée : Justement, ça nous donnerait la capacité de dire que,
pour nous, la cigarette électronique ne peut pas avoir de produits de tabac à l'intérieur sur le territoire québécois.
Là, nous aurions la capacité de dire ça. Évidemment, la norme, elle est
réglementaire, donc on peut la modifier sans modifier la loi, selon l'évolution
à la fois de la science et des produits.
M. Massé (Richard) : ...quand qu'on ne sait pas ce qu'il y a dedans. Et là c'est un
problème, c'est qu'on ne sait pas ce qu'il y a dedans.
M.
Lisée : Sur la question des terrasses... Bon, je suis content
que vous nous ayez dit que vous avez des contacts avec vos collègues de la Santé publique de
l'Ontario et de Colombie-Britannique, où l'interdiction a été faite, totale,
donc il n'y a pas de section fumeurs sur les terrasses, il n'y a pas d'abri.
Mais où vont les fumeurs? Parce qu'il y a quand même 20 % des Québécois qui sont fumeurs. On a de bonnes raisons de
penser qu'ils sont surreprésentés dans les bars et les brasseries, les
terrasses. On sait qu'ils veulent fumer, parce qu'ils sortent puis ils sortent
même à moins 20° — ça,
c'est du monde qui veulent fumer! Il y a des
mégots... Là, on a un débat sur les neuf mètres autour de la propriété de
la terrasse : est-ce qu'il y a neuf
mètres, il n'y a pas neuf mètres, on tombe sur le trottoir. Sur la Grande
Allée, ici, il n'y a pas neuf mètres.
Dès qu'on sort de la terrasse, on est sur la voie publique. À Montréal, sur le
boulevard Mont-Royal, sur la rue Crescent, ça va être le cas.
Donc, comment vous
voyez ça, là? Où vont-ils fumer?
M. Massé (Richard) : La réponse, elle peut être simple puis elle peut être compliquée. La
réponse simple, c'est : Bien,
qu'est-ce qu'ils font en hiver ces gens-là? Essentiellement, ces gens-là
continuent de fumer dans les lieux privés puis, quand ils vont avec les
amis, ou seuls, ou en groupe, bien, ils s'abstiennent de fumer dans les
restaurants. Donc, réponse pour une majorité
de l'année, presque huit mois sur 12, ils le font déjà et ils le font
relativement bien, ils vont continuer de faire la même chose.
M.
Lisée : Mais là, donc, c'est l'été, il y a la terrasse, on sort
de la terrasse, on est sur le trottoir. Ils ont le droit de fumer sur le
trottoir, mais la fumée est portée par le vent vers la terrasse, il y a quand
même un problème.
M. Massé
(Richard) : Oui, mais il y a une limite, là. Je veux quand même...
Est-ce qu'on va commencer à interdire de
fumer sur la rue, sur les trottoirs pour dire : Vous devez fumer dans vos
domiciles seulement? Donc, il y a comme
une limite là. Je pense qu'on invente progressivement une norme sociale
différente. On y va au fur et à mesure qu'on
voit qu'on est capables de le faire, hein? C'est comme ça qu'on l'a fait depuis
plus que 12 ans maintenant, 17 ans.
Donc,
à ce moment-là, ça, c'est, je pense, une étape importante qui soit franchie.
Déjà, de faire cette chose-là, ça serait
une chose qui serait un pas en avant significatif. On était des leaders
mondiaux en tabac, je pense que ça, c'est... il faut qu'on avance pour
ça.
M.
Lisée : On est tous d'accord, je pense, autour de cette table,
pour dire qu'on veut avancer, on veut savoir où on va. Et puis, donc,
j'ai trouvé légitime ce que nous ont dit les propriétaires de brasserie, de
taverne, etc., de dire : Bon, bien, comment ça va... On avait dit non dans
les restaurants parce qu'il y avait la possibilité d'aller sur la terrasse. Maintenant, on dit non sur les terrasses. Le
projet de loi, tel que rédigé, nous dit que nous devons policer les neuf
mètres à l'extérieur et nous sommes responsables s'il y a quelqu'un qui fume
dans neuf mètres à l'extérieur. C'est beaucoup, surtout l'hiver. Est-ce que cette règle des neuf mètres... est-ce
qu'elle existe en Ontario et à Vancouver, par exemple?
M. Massé
(Richard) : Là, je ne pourrais pas vous dire exactement combien est-ce
qu'elle est, puis peut-être que je ne suis pas la meilleure personne pour vous
répondre à cette chose-là. On pourrait vous donner l'information, mais je ne l'ai pas
exactement. Je sais qu'il y a des périmètres de protection, mais qu'est-ce
qu'ils sont, comment est-ce qu'ils
sont appliqués, je ne le sais pas. Mais j'ai confiance qu'on est capables de
faire cette protection-là puis que, les gens, une fois qu'on va leur dire, la grande, grande majorité des gens, on
n'aura pas besoin de les policer. Et ça, c'est une chose importante. On
n'a pas toujours besoin d'un garde-fou pour rentrer dedans. On a besoin d'avoir
une limite en disant aux gens : Ça, on
voudrait socialement protéger les gens pour ne pas qu'ils y aillent. Et,
généralement, ça, c'est assez pour qu'ils n'y aillent pas, pour la
grande majorité des gens.
M. Lisée :
Parce que, là, de plus en plus, on a des terrasses. Donc, il y a le restaurant
qui est sur la rue, le trottoir et la
terrasse qui occupe une ou deux places de stationnement, O.K.? Et donc, entre
les deux, il y a la rue. Si on dit :
Bon, vous ne pouvez pas fumer dans le restaurant, vous ne pouvez pas fumer sur
la terrasse qui est dans le stationnement,
bien, ce qu'il reste, c'est le trottoir entre les deux. Et donc on va avoir des
situations où les gens vont être sur le
trottoir en train de fumer entre le restaurant, qui, parfois, est ouvert, et la
terrasse qui est ouverte. Vous ne craignez pas ça?
M. Massé
(Richard) : Bien, écoutez, d'abord, les passants, ça, je veux dire,
les gens qui passent, ça ne nous préoccupe
pas. Puis j'imagine que quelqu'un qui... Puis, à Montréal, on voit cette
situation-là que vous décrivez, là, avec les terrasses, là. Bien, j'imagine que quelqu'un qui est sur la terrasse
puis qu'il y a le restaurant à côté, il ne va pas aller se mettre entre
les deux pour fumer, c'est... Non seulement ce n'est pas ça qui est prévu, mais
ce n'est pas, je dirais, l'esprit social
qu'on souhaite que les gens aient. Et je pense qu'ils vont le respecter.
Quelqu'un qui n'a pas le droit de fumer sur une terrasse, puis qui s'en va fumer à deux pieds à côté, puis que
moi, je suis là, probablement que la plupart des gens vont dire : Écoutez, là, ça n'a pas de bon
sens, vous ne pouvez pas faire cette chose-là. Au début, il va y avoir des
gens qui vont probablement essayer, puis la
norme va évoluer. Puis j'ai confiance que les Québécois vont respecter cette
norme-là.
M. Lisée :
Sur la question des chambres, là, je vous trouve un peu raide, je vous trouve
un peu raide. Je veux dire, on a une
population vieillissante qui a fumé. Elle n'aurait pas dû fumer, c'est mauvais
pour la santé, O.K.? Mais là il a
72 ans, il a fumé, il est dans une chambre dans un CHSLD, puis là vous
dites : Bien là, à partir de maintenant, tu n'as plus le droit de
fumer dans ta chambre. Il n'y a pas...
• (11 h 20) •
M. Massé (Richard) : Merci de soulever cette question-là. On se retrouve avec des gens qui
ont 72 ans, qui sont alités, qui ont des maladies chroniques puis
qui sont assez malades pour rester au lit. On parle des gens qui sont en CHSLD,
là, des gens qui vont rester au lit. Des gens qui vont rester au lit, on
s'attend qu'ils vont avoir peut-être des problèmes
cognitifs, peut-être recevoir des médicaments qui peuvent avoir un
impact sur leurs capacités. Vous voulez qu'il y ait quelqu'un qui soit à
côté quand ils vont fumer? Il y a déjà des feux, dans les lits, qui sont
arrivés. Vous voulez qu'on supporte cette chose-là?
La vérité, c'est que les gens qui sont alités dans les CHSLD sont de plus en plus malades. Ça fait que, ceux-là, honnêtement, ça ne fonctionne
pas, c'est un risque. C'est un risque pour eux, c'est un risque pour les
gens qui travaillent alentour d'eux. Et puis c'est un phénomène qui est en
déclin. On pense qu'on doit les aider.
M. Lisée :
Oui. Justement, il est en déclin.
M. Massé
(Richard) : On pense qu'on doit les aider, on pense qu'on doit les
aider, ces gens-là. Mais, par contre, les gens — puis là c'est là qu'on fait un
compromis — les gens
qui sont encore ambulatoires, les gens qui ne sont pas alités... Fumer au lit, personne ne va vous...
Vous n'allez pas recommander que les gens fument au lit, non? Mais les gens qui sont capables de se déplacer, ces gens-là
vont pouvoir aller au fumoir. C'est le compromis qu'on propose. Puis
aider les gens à arrêter de fumer... Dans la politique, on dit : On peut
aider les gens à arrêter de fumer, ça fonctionne.
M.
Lisée : Oui. Mais là
ce que vous dites, c'est que... Oui, évidemment, je suis d'accord
avec vous, si vous êtes alité, si
vous êtes malade, vous ne devriez pas fumer. Mais on a une population
de vieux snoreaux, hein, et c'est tout ce qu'il leur reste, c'est la cigarette,
tu sais? Il y a vraiment... Mais il y a aussi...
Une voix :
...
M.
Lisée : ...oui, et il y a
aussi... Là, on fait deux poids, deux mesures. Moi, évidemment,
comme dans toutes les familles, j'ai
des oncles et des tantes âgés. Certains sont chez eux et fument, certains sont
en résidence, en CHSLD, et fument,
mais ils sont mobiles. Et là on dirait : Bien, si vous êtes à la maison,
vous avez le droit de fumer chez vous; si vous êtes en CHSLD et que vous
êtes mobile, vous êtes sain d'esprit, vous n'avez pas de droit de fumer chez
vous. Il n'y a pas un problème d'équité?
M. Massé (Richard) : Oui. Ils ont le droit d'aller fumer dans un fumoir. Parce qu'ils
sont chez eux, mais en même temps
c'est un environnement pour lequel il y a des travailleurs, c'est un environnement pour lequel les chambres pour fumeurs sont mises un peu partout, ils ne peuvent
pas les regrouper, ça fait qu'elles sont mises un peu partout, les gens
ne ferment pas les portes, et donc il y a les salles alentour qui sont
exposées. Donc, vous n'êtes pas capable de créer un environnement qui protège
les autres patients et protège les travailleurs.
M. Lisée :
La distinction, c'est que c'est un lieu public ou semi-public par rapport aux
lieux privés.
M. Massé
(Richard) : Semi-public. Mais c'est pour ça qu'on dit qu'il doit y
avoir pour les gens qui sont mobiles... — vous avez introduit cette variable-là qui
est importante — pour ces
gens-là, qu'ils puissent avoir accès à un fumoir. Les gens qui sont
alités, qui sont assez malades...
M. Lisée : Très
bien, vous avez répondu à ma
question. J'ai juste une minute. J'en ai une autre. Sur les
25 salons de cigares ou de pipes à eau,
O.K... Donc, on sait qu'il y a un
marché pour ça, notre population d'origine moyen-orientale en particulier, mais là on a la capacité d'avoir, dans les
25 lieux de cigares et de pipes à eau, narguilés... Ils sont d'accord
pour mettre des avertissements : Fumer
une heure ici, c'est comme fumer 150 cigarettes, etc., Si on leur dit de
mettre ça, ils vont tout mettre ça.
Mais il y en a beaucoup plus qui sont illégaux, qu'on veut fermer. Est-ce que
ce ne serait pas préférable de dire :
Écoutez, il vous en reste 25. On ferme les illégaux. Si vous voulez vraiment fumer ça, parce que vous avez fait ça toute votre vie quand vous habitiez au Maroc, ça existe, il y en a 10, puis il
y a des avertissements sur les murs disant que vous êtes en train de vous suicider. Ce ne serait pas
préférable, ça, que d'abolir les 10 qui restent et d'envoyer les gens
vers les sites illégaux, qui sont nombreux?
M. Massé
(Richard) : Non. On ne veut
pas envoyer les gens vers les sites illégaux, on veut donner une norme comme quoi on pense que ce n'est pas quelque chose
qui est un lieu de tabagisme public. On veut empêcher qu'il y ait du
tabagisme dans les lieux publics. Là, tout d'un coup, on fait une exception
avec 25 qui ont une clause grand-père en sachant qu'il y a tous les autres. Ça
fait que, oui, on veut contrôler le phénomène émergent, là, des salons de thé
pour lesquels on a de la chicha qui est
disponible, mais je pense qu'il ne faut pas dire que ces gens-là ont un
privilège éternel, ces 25 là, ce qui
n'empêche pas que les gens qui veulent fumer la pipe à eau chez eux peuvent le faire,
là. Je veux dire, on n'empêche pas l'utilisation de la pipe à eau. Mais,
en public, comme lieu public, ça n'a plus sa place.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Merci. Je cède maintenant la
parole à notre collègue de Saint-Hyacinthe pour un bloc de neuf minutes.
Mme
Soucy : Merci, M. le Président. Bonjour. Seriez-vous d'accord pour dire qu'il est
primordial que le personnel des
boutiques qui vendent des cigarettes électroniques ait une formation? Est-ce que
vous pensez que c'est nécessaire qu'il ait une formation? Est-ce que
vous pensez aussi qu'il devrait y avoir des lieux établis pour cette vente de
cigarettes électroniques là, puisqu'on
est d'accord pour dire que c'est un outil de sevrage? Alors,
avec toutes les... ce que vous avez
mentionné tantôt, les doses, qu'il faut qu'elles soient bien établies, qu'est-ce que vous pensez de ça? Pensez-vous qu'il est nécessaire qu'on détermine, qu'on accrédite, par exemple, les boutiques puis qu'on s'assure que le personnel est bien formé?
M. Massé
(Richard) : Bien, d'abord,
je vais être obligé de reprendre un
petit peu la prémisse. Vous m'avez
dit que c'est reconnu que ce sont des outils de sevrage. Je pense qu'il est peut-être
un peu tôt...
Mme Soucy : Non. Si on part de la
prémisse...
M. Massé (Richard) : Ah! si on part
de cette prémisse-là. O.K.
Mme Soucy : ...que c'est un outil de
sevrage puis qu'on veut s'en servir comme outil de sevrage.
M. Massé
(Richard) : Bon. O.K.
Parfait. Bien, c'est une grosse prémisse déjà, parce qu'il nous manque beaucoup d'informations pour être certains de cette chose-là, là. C'est
sûr qu'on pense que la cigarette électronique, c'est quelque chose
qui doit être encadré, c'est quelque
chose pour lequel les gens devraient
connaître leurs produits. Est-ce
qu'on devrait faire une formation spécifique? Je ne suis pas sûr que c'est le réseau de santé qui doit faire une formation spécifique pour aider les gens à vendre des cigarettes électroniques. Je ne me vois pas tellement
dans ce commerce-là, là, personnellement. Mais c'est sûr que le souhait,
c'est que les gens connaissent leurs produits.
Dans les boutiques où je suis allé, dans les
boutiques électroniques, généralement les gens connaissaient les produits, je dois dire, dans les boutiques
spécialisées — spécialisées — puis,
dans les endroits qui sont non spécialisés, puis là je ne ferai pas la distinction entre les dépanneurs et les autres, généralement beaucoup moins ou pas. Donc, les gens vendent ces
produits avec moins de connaissances. Il peut y en avoir, des gens, qui vont
les connaître, mais je peux vous dire que l'expérience qu'on a, c'est que les
gens ont beaucoup moins de connaissances. Et puis, dans le fond, ils doivent...
comme si ce n'était rien du tout ou n'importe quoi.
Mme
Soucy : Bien, seriez-vous d'accord
pour dire que les dépanneurs, ce n'est peut-être pas l'endroit, ce n'est pas l'endroit idéal pour vendre des cigarettes
électroniques, qu'on pourrait peut-être, je ne
sais pas... dans les pharmacies,
par exemple, puis se concentrer à deux, trois points de vente, pour s'assurer justement
que le personnel ait le temps de l'expliquer?
M. Massé (Richard) : O.K. Je ne le
verrais certainement pas dans les pharmacies. C'est un débat auquel j'ai déjà
participé il y a bien longtemps, puis j'espère que c'est un débat qui est réglé,
que les pharmacies ne vont pas rentrer dans le business du tabac.
Pour ce qui est des dépanneurs, écoutez, je pense que les dépanneurs, en autant qu'on n'a pas la
vente aux mineurs... Parce que,
là, ça, c'est ce phénomène-là qui nous inquiète. Tant qu'on n'a pas la vente
aux mineurs, ça... Ça nous dérange.
Personnellement, la
cigarette électronique, actuellement, les gens fumeurs qui veulent la fumer
pourraient, puis il y aura
peut-être — peut-être, je suis bien prudent — un
bénéfice que les gens puissent l'utiliser, mais quand ils ont essayé d'autres méthodes puis quand ils ont un certain soutien, un certain support,
parce qu'on sait que c'est beaucoup plus efficace. Autrement que ça, honnêtement, là, la place de ça est
vraiment... à être prudent, à prendre avec des pincettes.
Tout ce qui
est le volet marketing, commandites, et puis l'accès dans les lieux publics,
puis l'accès aux jeunes, ça nous pose
beaucoup de questions actuellement, parce que c'est très ouvert. Ça fait que,
pour ce qui est des dépanneurs, il faudrait
qu'on soit certains qu'il y a un respect intégral, je dirais, de ces
conditions-là qu'on retrouve dans la Loi sur le tabac.
Mme
Soucy : Vous parlez de recherches, bon, qu'il y a encore de la
recherche à faire. La recherche nécessaire pour clarifier, là, les résultats probants sur les effets du produit, combien
de temps ça peut prendre puis combien d'argent que le gouvernement
devrait investir? Combien de temps, environ, ça peut prendre pour...
M. Massé
(Richard) : La difficulté
avec la recherche, c'est que ce n'est jamais un jour pour toujours, puis
que les gens inventent des produits, puis on voit qu'il y en a plusieurs qui
vont rentrer. Ça fait que ça, c'est une chose.
Ceci dit, on
a besoin que les gens se mettent ensemble, ce n'est pas une recherche qui va
être faite dans un petit endroit. Pour avoir des données
épidémiologiques de qualité, il va falloir regrouper l'information d'études qui
sont faites non seulement au Québec, mais
qui sont faites au Canada, en Amérique du Nord, en Europe, ailleurs. Donc, ça
prend un consortium. Comme on fait des
études scientifiques calibrées, randomisées et de qualité, c'est ça qu'on a
besoin. Ça fait que les partir de zéro, ça prend du temps, puis c'est
pour ça qu'il faut se mettre en équipe.
Donc, la proposition, c'est évidemment de faire
de la recherche, mais cette recherche-là doit se faire dans des réseaux de
recherche, dans des équipes de recherche, et c'est ça qu'on propose. Il n'y
aura pas une réponse demain matin. Par
contre, les normes, on peut utiliser ce qu'on a maintenant, mais s'assurer de
faire évoluer les connaissances qu'on a puis les normes en fonction des
connaissances.
Mme
Soucy : O.K. Je vais revenir dans les CHSLD. C'est quoi, à peu près,
le pourcentage de fumeurs dans les CHSLD actuellement?
M. Massé
(Richard) : Ah! ce n'est pas
beaucoup. Les gens qu'on a contactés, j'ai parlé à mon équipe pour
avoir... Je n'ai pas un chiffre précis à vous donner, mais, les gens, ce qu'ils
nous ont dit, c'est qu'il y a de moins en moins de fumeurs. Dans les nouvelles personnes qui rentrent dans les CHSLD, la
plupart sont assez malades. Les gens sont de plus en plus des gens qui ont plusieurs maladies, qui sont
donc très lourds au point de vue des soins. Donc, la plupart des gens, même si c'étaient des fumeurs, le cas que M. Lisée
mentionnait tantôt, ne fument plus au moment où est-ce qu'ils sont en CHSLD, parce qu'ils sont trop malades puis ils sont
alités. Donc, c'est de moins en moins. C'est, je dirais, une très petite
minorité des gens qui, même, fumaient avant qui, maintenant, vont fumer en
CHSLD.
• (11 h 30) •
Mme Goupil-Sormany (Isabelle) :
C'est ça. Moi, j'aimerais bien citer l'exemple qu'on a eu dans le CSSS Bécancour—Nicolet-Yamaska. On n'a plus qu'une seule fumeuse
pour tous les sites d'hébergement. Ils ont adopté
une politique sans fumée. Chaque nouveau résident est accompagné, soutenu. On l'aide
à cesser de fumer. Puis on a réussi, il n'en reste qu'une. On pourrait
la nommer, là, je suis sûre que les gens le savent, c'est qui.
Donc, tu sais, on est capables de le faire, on
est capables de soutenir les changements, puis il faut... Même les personnes
âgées peuvent cesser de fumer, puis il ne faut jamais l'oublier.
Mme
Soucy : Plusieurs
nous disent que la vapeur des cigarettes électroniques, ce n'est pas un enjeu
pour la santé. Partagez-vous cet avis?
M. Massé (Richard) : Non. Je ne
partage pas cet avis, parce que, d'abord, il faut regarder... On ne sait pas exactement
les composants qu'il y a dedans. On sait qu'il y a des composants
cancérogènes. On sait qu'il y en a
moins que dans la cigarette, mettons,
régulière. Ceci dit, on voit maintenant l'introduction de nouveaux produits ou
est-ce qu'il va y avoir des dérivés
de produits du tabac qui vont être dedans. Donc, faisons très attention de quoi
on parle. Puis de dire qu'il n'y en a pas, ça ne serait pas exact. De
dire qu'il y en a moins, c'est probablement exact avec ce qu'on connaît comme
produits actuellement.
Mme
Soucy : D'où l'importance que ce soit homologué par Santé Canada pour
vérifier le contenu des produits. Vous
mentionnez qu'il y a eu quand même des effets positifs sur l'interdiction de
fumer sur les terrasses dans d'autres provinces.
Avez-vous des données à nous présenter sur les effets positifs de
l'interdiction de... sur la clientèle, en fait?
M. Massé (Richard) : C'est difficile
de voir une mesure séparément. Ce qu'on voit, ce sont des mesures de façon plus
générale, puis on voit que l'exposition à la fumée indirecte est quelque chose
qui est plus élevé au Québec qu'ailleurs. Et là je vais être obligé, pour avoir
les données, à vous parler des véhicules moteurs. On sait qu'on a à peu près 30 % des jeunes, des jeunes en bas
de 16 ans, qui sont exposés à la fumée indirecte au Québec, alors que
c'est beaucoup... à peu près la moitié en
Ontario, deux fois moins en Ontario puis au Canada. Donc, on voit que les
endroits où est-ce que les gens ont
réglementé pour limiter l'exposition à la fumée indirecte a un impact sur
l'exposition des gens. Sur les
pourcentages, je ne suis pas capable de vous répondre avec un... l'exact...
parce qu'il y a beaucoup de mesures qui sont difficiles à...
Mme Soucy :
Tantôt, vous avez parlé de l'effet positif sur l'achalandage.
M. Massé (Richard) : Ah!
l'achalandage.
Mme Soucy : Oui, sur l'achalandage.
M. Massé
(Richard) : Excusez-moi, là,
je pensais sur l'exposition. Mais, non, sur l'achalandage, en fait, il y
a plusieurs personnes qui nous ont mentionné, puis ça a été rapporté dans les
autres villes, qu'il y a des gens qui n'y allaient
pas, qui se restreignaient d'y aller, et qui maintenant y vont parce que ce
sont des lieux qui sont mieux protégés.
Mme Soucy : Avez-vous des données
sur ça? Non?
M. Massé (Richard) : ...on pourrait
demander aux collègues de nous en fournir, si vous voulez.
Mme
Soucy : J'aimerais ça que vous nous dites comment ça se fait qu'il y a
plus de jeunes qui fument au Québec que
dans le reste du Canada. Est-ce que c'est parce qu'il n'y a pas assez de
prévention? L'éducation manque à ce niveau-là?
M. Massé
(Richard) : Bien, il y a un
enjeu historique, là. Historiquement, on avait des taux de tabagisme qui
étaient aussi extrêmement élevés au Québec,
au-delà de 50 % dans la population. Donc, c'était vraiment très, très
élevé. On a baissé quand même régulièrement, mais les autres ont baissé aussi
puis ils sont plus bas que nous. Il y a un enjeu de scolarisation, il y a un
enjeu de pauvreté. On sait qu'il y a un lien entre la scolarisation et la
pauvreté puis les taux de tabagisme, ça fait que probablement des enjeux
culturels puis des enjeux reliés à la richesse collective, notamment à
l'éducation.
Il y a un
phénomène de masse, il y a un phénomène de groupe. L'initiation au tabac, c'est
un enjeu de pairs, mais c'est un
enjeu familial. On sait que les gens dans lesquels... il y a des familles, les
parents fument, bien, à ce moment-là, les enfants vont plus fumer. Ça
fait qu'au fur et à mesure qu'on va changer la norme sociale des parents, des
écoles, des milieux, tous les milieux, on va pouvoir le baisser. Puis moi, j'ai
bon espoir qu'on va pouvoir se rendre comme aux États-Unis, à Los Angeles ou
San Francisco, où est-ce qu'ils ont en bas de 12 %, ou...
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup.
M. Massé (Richard) : ...à Vancouver,
où est-ce que ce sont les mêmes taux.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Alors, nous vous remercions, les représentants des directeurs
régionaux de santé publique du Québec.
J'invite maintenant Breuvages Blue Spike à
prendre place, et je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 34)
(Reprise à 11 h 39)
Le Président (M. Tanguay) : Alors, à
l'ordre, s'il vous plaît! Nous poursuivons nos travaux. Nous recevons maintenant le représentant de Breuvages Blue
Spike. Bienvenue à votre Assemblée nationale. Vous disposez de
10 minutes de présentation. Par la
suite, vous aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. Peut-être bien
préciser, d'entrée de jeu, votre nom, vos fonctions, et la parole est à
vous.
Les
Breuvages Blue Spike
M.
Gagnon-Oosterwaal(Nicolas) : M. le Président, Mmes et MM.
membres de la commission, je suis Nicolas Gagnon-Oosterwaal, président et cofondateur de Blue Spike, une
entreprise familiale fondée en 2003,
basée à Montréal.
Nous employons près d'une quarantaine de
personnes et créons 60 autres emplois partout en province. Nous sommes présents et actifs dans deux industries,
dont les boissons alcoolisées. Nous fabriquons et vendons des cocktails
prêts à boire, nommément «coolers», des spiritueux et des bières de
microbrasseries. Ces produits sont vendus dans six provinces canadiennes, dans
une dizaine d'États aux États-Unis, et tous fièrement produits au Québec.
• (11 h 40) •
Nous
commercialisons aussi des cigarettes électroniques sous notre propre marque
nommée EVO. Ces produits sont
disponibles sous forme jetable ainsi que sous forme rechargeable. Nous vendons
ces produits dans les dépanneurs et stations-services
du Québec, dont les grandes bannières corporatives comme
Couche-Tard, Esso, Ultramar, Boni-Soir, et autres. J'aimerais préciser que nous ne vendons pas nos produits dans ce
qu'on appelle les «vape shops» et que nous ne vendons aucun produit du tabac traditionnel. Nous ne sommes d'aucune
façon reliés ou associés aux grands cigarettiers.
En ce qui concerne la raison de notre présence
ici aujourd'hui, soit le projet de loi n° 44, j'aimerais d'entrée de jeu saluer l'ouverture de la ministre ainsi que
des autres membres de la commission envers les différents points de vue des participants qui luttent contre le tabagisme,
incluant le nôtre. Nous souscrivons aux objectifs de la ministre de
protéger les jeunes et
les non-fumeurs et d'inciter les consommateurs de produits du tabac à cesser de
fumer. Nous partageons aussi la
volonté gouvernementale de renforcer cette lutte en imposant des règles claires
et contraignantes. D'ailleurs, nous avons été une des premières compagnies de l'industrie, il y a maintenant déjà
plus d'un an, à contacter le gouvernement et ainsi militer pour une
réglementation claire, juste et efficace pour la cigarette électronique au
Québec. Nous joignons donc notre voix à
toutes les autres qui ont exprimé leur satisfaction face au contenu du projet
de loi, qui est généralement juste, équilibré et équitable.
Par contre, j'aimerais aborder avec vous
aujourd'hui trois points qui, selon moi, nécessitent des précisions et amendements afin d'accroître l'efficacité du
projet de loi, soit l'encadrement de la publicité de la cigarette
électronique qui se fait à l'extérieur des
points de vente, l'encadrement du marchandisage et de la visibilité des
produits sur les lieux de vente et, troisièmement, le contrôle de la
chaîne de commercialisation des produits.
En ce qui
concerne le premier point, nous sommes d'avis que la publicité commerciale ou
de style de vie pourrait générer un
certain abus, comme l'ont démontré certains experts au cours des derniers
jours. Cet abus potentiel pourrait faire mauvaise presse au produit,
créer de la désinformation face à celui-ci et mettre en deuxième plan son
objectif principal, soit la lutte au
tabagisme. Nous partageons donc la position du gouvernement par rapport à
l'interdiction de faire de la
publicité commerciale ou de style de vie pour les produits de cigarette
électronique. Par contre, il existe une différence fondamentale entre la
publicité commerciale et la publicité informative.
En ce qui a
trait à la cigarette électronique, tous s'entendent pour dire que le produit
est beaucoup moins nocif que la
cigarette traditionnelle et que le produit peut être un excellent outil pour
arrêter de fumer. Ces points ont déjà été mentionnés plusieurs fois par plusieurs experts très crédibles ici même,
donc je ne m'y attarderai pas personnellement, étant sous l'impression
que ces points sont déjà partagés par les membres de la commission.
Mais nous sommes d'avis que les citoyens ne
possèdent pas encore toute l'information requise pour leur permettre de faire un choix de consommation
éclairé, et ceci va encore une fois dans le même sens des propos de
certains experts qui m'ont précédé ici même, à la commission, qui mentionnaient
un certain phénomène de désinformation par
rapport à la cigarette électronique, et c'est cette désinformation qui
malheureusement crée des inquiétudes injustifiées quant à la consommation des produits et en sa
capacité de lutter contre le tabagisme. Nous sommes donc d'opinion
qu'une publicité informative approuvée par le gouvernement du Québec et fondée
sur un argumentaire rationnel quant aux caractéristiques et aux qualités du
produit pourrait répondre aux besoins des consommateurs qui veulent arrêter de fumer. Mieux informés et mieux préparés, les
chances de succès de leur sevrage seraient accrues, contribuant du coup
à réduire efficacement le taux de tabagisme au Québec.
Depuis le 31 mai 2008, la loi actuelle
interdit aussi l'étalage des produits du tabac à la vue du public dans les points de vente. Ceci est dû au fait que tous
connaissent les aspects nocifs de la consommation des produits du tabac
et que le gouvernement tente de limiter sa
consommation afin de protéger la santé publique. En pratique, le projet de loi
n° 44, tel qu'écrit actuellement, vise
à limiter considérablement la possibilité d'acquérir une cigarette électronique
en la traitant exactement comme un
produit du tabac au niveau de la publicité et du marchandisage, et ce, malgré
que tous les experts s'entendent pour dire que la cigarette électronique
est un produit beaucoup moins nocif pour la santé.
En ce sens, nous croyons que le gouvernement
devrait différencier les deux produits et permettre l'affichage des produits de cigarette électronique sur les
lieux de vente. Le produit le moins nocif devrait avoir un
positionnement préférentiel, comme le
mentionnaient certains experts ici même, et ce, dans tous les points de vente
où le tabac traditionnel est vendu. Les dépanneurs sont, selon nous, en
effet, les endroits les plus appropriés pour rappeler l'existence et la disponibilité de la cigarette électronique et
inciter, par le fait même, les consommateurs à choisir un produit moins
nocif.
Les produits du tabac sont disponibles dans plus
de 8 000 points de vente au Québec. Nous ne sommes pas d'avis que de limiter la distribution du produit
moins nocif à seulement 150 ou
200 points de vente aidera le gouvernement à lutter efficacement contre le tabagisme. Le contraire devrait plutôt
s'appliquer. Le gouvernement devrait encourager le plus possible l'accessibilité du produit le moins
nocif, soit la cigarette électronique, et de limiter au maximum l'accès
et la visibilité des produits du tabac.
Je sais qu'une des craintes de la ministre et
des membres de la commission soit que la cigarette électronique devienne une
passerelle vers le tabac traditionnel. Plusieurs experts mentionnent le
contraire, et plusieurs études le démontrent
aussi, comme une étude de l'OMS qui révélait que seulement 1 % des consommateurs réguliers de
cigarette électronique n'avaient jamais fumé de tabac traditionnel avant leur
premier essai de cigarette électronique.
Je partage les soucis de la ministre à ne pas
créer de passerelle vers le tabac, surtout pour les jeunes. Dès le lancement de
nos produits et avant toute mention de loi limitant la vente des produits aux
mineurs, notre compagnie encourageait déjà
nos détaillants à agir de façon responsable et éthique et de seulement vendre
nos produits à des gens d'âge majeur.
Comme
plusieurs études démontrent que la cigarette électronique n'est pas une
passerelle vers le tabac et que la cigarette
électronique peut être un excellent outil à la lutte contre le tabagisme, nous
croyons sincèrement que le législateur devrait
permettre un positionnement préférentiel de ce produit sur les lieux de vente.
C'est dans ce sens que nous proposons donc
de permettre à tous les détaillants, incluant les dépanneurs, de continuer à
pouvoir étaler les produits de cigarette électronique à l'intérieur des
lieux de vente, et ce, pour une période transitoire minimale de deux ans.
Nous jugeons qu'en allouant une période minimale
de deux ans pendant laquelle la visibilité des produits en lieux de vente serait permise, combinée avec la
possibilité de faire de la publicité informative par rapport aux
produits permettrait à l'industrie d'éduquer la majorité des fumeurs actuels
sur les bienfaits de la cigarette électronique, ses modes d'utilisation et les
endroits où les consommateurs pourraient s'en procurer. Le délai exact pourrait
être défini par réglementation pour
permettre au gouvernement d'agir plus tôt ou plus tard, dépendamment des
réalités du marché du moment.
En
bref, en donnant un certain avantage compétitif à la cigarette électronique, le
gouvernement encouragerait et maximiserait
la transition du tabac vers la cigarette électronique et ainsi accélérerait
l'atteinte de ses objectifs. Limiter l'accès,
la visibilité et permettre de la désinformation de se propager par rapport à la
cigarette électronique ralentiraient l'atteinte des objectifs du
gouvernement, selon nous.
Le troisième et dernier point dont j'aimerais
discuter avec vous est le contrôle de la chaîne de commercialisation. Une des rares raisons qui inquiète les experts sur
les bienfaits de la cigarette électronique est le fait que leur contenu
n'est pas toujours clair et garanti. Sans
loi et réglementation, il est prévisible que certains s'inquiètent sur l'absence
des normes par rapport aux
ingrédients, à leur provenance et aux normes de fabrication des produits. Pour
cette raison, nous préconisons un
contrôle plus rigoureux de l'industrie de la part du gouvernement. Nous sommes
en faveur de l'obligation de détenir des permis à toutes les étapes de la chaîne de commercialisation, en
incluant les fabricants, les importateurs et les distributeurs. Dans le
même ordre d'idées, l'imposition de normes standardisées à l'industrie pour
chacune des étapes permettrait d'uniformiser les composantes du produit et donc
aiderait le gouvernement à mieux encadrer et à protéger la santé publique, d'où
notre proposition d'ajouter une telle disposition à l'article 20 de la Loi
sur le tabac.
En conclusion, je
réitère que le projet de loi n° 44 est d'une importance significative dans
la lutte contre le tabagisme et que les
dispositions qui y sont proposées sont généralement pertinentes, équilibrées et
équitables. Mais nous avons la forte conviction qu'en incluant les trois
propositions mentionnées aujourd'hui, soit l'encadrement d'une publicité
informative approuvée par le gouvernement, un positionnement préférentiel pour
les produits de cigarette électronique sur
les lieux de vente pour une période minimale de deux ans et un contrôle plus
rigoureux de la chaîne de commercialisation,
la ministre ainsi que le gouvernement atteindront plus rapidement leurs
objectifs dans la lutte contre le tabagisme,
pour la protection de la jeunesse et pour l'amélioration de la santé publique.
Je vous remercie de votre attention... et maintenant prêt à répondre à
vos questions.
Le
Président (M. Plante) : Merci beaucoup, M. Gagnon. Donc, on est rendus
à la période d'échange pour un temps de 20 minutes avec la partie
ministérielle, donc je cède la parole à Mme la ministre.
Mme
Charlebois :
Merci, M. Gagnon, de votre présence. Vous allez nous apporter une autre
lumière, qui va certainement nous permettre
d'avoir un autre point de vue mais aussi de prendre de bonnes décisions quant à
la bonification du projet de loi. Et merci de vous être rendu disponible
pour venir nous faire part de vos observations.
Vous
avez dit beaucoup de choses. J'ai compris qu'en partie vous n'êtes pas tout à
fait satisfait qu'on inclue la cigarette électronique dans le projet de
loi... qu'elle soit assimilée aux produits du tabac pour certains éléments.
• (11 h 50) •
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : C'est ça, pour certains points
spécifiques.
Mme
Charlebois : C'est
ça. Et j'ai le goût de vous dire qu'à l'article 24 il
y a toute la spécificité de ce qui
est interdit en publicité pour les produits
du tabac, mais il y a un... c'est ça, de la loi actuelle, puis ça va se
prolonger dans la prochaine loi,
mais, à la fin de l'article 24, il dit toutefois... il est dit,
là : «Toutefois, la publicité qui vise à communiquer aux
consommateurs des renseignements factuels sur un produit du tabac — ce
dont la cigarette électronique va être assujettie — y compris sur le prix ou les
caractéristiques intrinsèques du produit du tabac et sur les marques de
produits du tabac est permise dans la mesure où il ne s'agit pas d'une
publicité ou d'une forme de publicité faisant l'objet d'une interdiction», les interdictions précédentes.
Voilà. Ça vous permettrait d'informer les gens, d'une part... bien, ça
permet déjà, et on n'est pas en
contradiction avec la loi fédérale à ce niveau-là. Ça fait que le fait
d'inclure la cigarette électronique ne vous
permettra pas de faire de la publicité, comme il est stipulé à l'article, mais
à tout le moins d'informer les gens, puis c'est ce que j'ai compris que
vous souhaitiez faire. Est-ce que je me trompe?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Exact. Moi, je pense que, comme le Dr
Ostiguy et le Dr Juneau mentionnaient plus
tôt à la commission, il y a un problème de désinformation. Mais, moi, ce que
j'aimerais, c'est aller encore plus loin, que le gouvernement s'implique et réglemente l'information qui est diffusée
par rapport aux produits de cigarette électronique aux consommateurs qui désirent arrêter de fumer.
Il y a une mauvaise presse des produits qui est faite actuellement, ce
qui cause des inquiétudes injustifiées et
qui fait en sorte que certains consommateurs pensent que la cigarette
électronique est aussi nocive que la
cigarette traditionnelle, ce qui n'est pas le cas. Alors, nous, on aimerait
avoir le droit de faire cette publicité-là, informative, sur les lieux
de vente aussi pour vraiment aider la transition du fumeur au vapoteur et aussi
que le gouvernement s'implique dans la
diffusion d'information concrète, crédible par rapport à l'efficacité de la
cigarette électronique et du fait qu'elle soit beaucoup moins nocive que la
cigarette traditionnelle.
Mme
Charlebois :
Comme je vous dis, la publicité informative, dans la loi actuelle... puis ce
qui n'est pas modifié va être permis, mais
la publicité informative... Vous semblez d'accord avec moi là-dessus. Où j'ai
un malaise... et puis je pense que vous pourrez très bien la faire, les
entreprises qui font la vente de produits de vapotage, mais là où j'ai un malaise... et vous avez certainement
entendu comme moi plusieurs intervenants dire que nous n'avons pas
d'études à long terme qui nous permettent de croire qu'il n'y a aucun danger.
Ça fait que le gouvernement, certainement, tant que nous n'aurons pas des études concluantes, ne pourra pas faire la
promotion d'un produit où il y a quand même un élément de nocivité et où
on peut générer des dépendances. Alors, moi, je pense qu'au niveau informatif
ce sera votre travail, mais je ne pense pas
que ce soit le devoir du gouvernement de commencer à faire la promotion de la
cigarette électronique. Qu'est-ce que vous en pensez?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Oui, je comprends votre point de vue.
Effectivement, il y a peu d'études à long
terme, parce que le phénomène est plutôt récent. Je crois que toutes les études
par rapport à la cigarette électronique qui vont sortir dans les prochaines années vont sans aucun doute être
plus positives que n'importe quelle étude qui a jamais été faite sur le tabac. On ne peut pas avoir un
produit plus nocif que le tabac. Je pense qu'il y a des chiffres qui
mentionnent que ça tue un consommateur sur
deux, là, au long terme. Alors, c'est sûr que ça ne sera jamais pire. Est-ce
que c'est sans nocivité aucune?
Probablement pas, mais c'est certain que c'est moins nocif. Mais je comprends
si le gouvernement doit attendre des recommandations, des études à plus
long terme. Mais moi, j'aimerais que le gouvernement encadre ça très, très
bien.
Comme je mentionnais au début de ma
présentation, une de nos divisions, dans notre compagnie, vend des breuvages alcoolisés. Avant de soumettre... avant
de faire de la publicité pour les breuvages alcoolisés, on doit
soumettre au gouvernement la publicité, à la
RACJ. Il y a des frais associés à ça. La RACJ regarde la publicité, la lit,
regarde si elle respecte tous les
lois et règlements, qui sont bien clairs, bien définis pour tous les détenteurs
d'enjeux de l'industrie. Si c'est approuvé,
on peut faire la publication de la publicité. Si ce n'est pas approuvé, parce
que ça ne respecte pas la réglementation, on ne peut pas aller de
l'avant. Et ces réglementations-là s'appliquent pour les grands brasseurs du Québec
et les plus petites compagnies comme la nôtre.
Mme
Charlebois : Bien,
c'est la même chose avec la publicité sur le tabac, là. Il faut qu'elle soit
soumise au ministère. C'est déjà dans la loi
qu'il faut soumettre afin de faire vérifier exactement si ça correspond en tous
points, au même titre que la RACJ.
J'aurais aimé
ça vous entendre davantage sur ce qui concerne la nocivité. Vous savez que j'ai
entendu... bien, pas juste moi, mais
mes collègues aussi, nous avons entendu, en commission parlementaire et à plus
d'une reprise, que les compagnies de
tabac commençaient à s'investir, à acheter des détaillants ou, en tout cas, des
fabricants, ou s'investissent, bref,
dans le marché de la cigarette électronique. On a même entendu que non seulement
il y en a qui ne mettent pas juste de la nicotine, mais on commence à
mettre des produits du tabac directement dans la cigarette électronique. Alors,
vous comprenez qu'il y a comme une forme
d'inquiétude pour nous, devant tant d'audace, de faire en sorte que nous
puissions carrément en faire une promotion.
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Je
suis d'accord avec vous. Je suis aussi inquiet que vous par rapport au contenu
et la provenance de certains ingrédients dans certains produits. Je pense que
je vous en avais déjà fait part, moi, je
suis pour une standardisation des ingrédients, des quantités, des provenances,
de la déclaration sur l'étiquette de qu'est-ce
qu'il y a dans le produit. Même, il y a quelques années, la Société canadienne
de cancer avait fait une étude sur huit produits de cigarette
électronique, avait fait des tests sur les ingrédients qui étaient à
l'intérieur de la cigarette électronique,
avait comparé avec ce qu'il y avait sur la liste d'ingrédients, si liste
d'ingrédients il y avait de déclarée, et nos produits étaient une des
seules deux cigarettes électroniques qui ont respecté les exigences de la
Société canadienne du cancer.
Moi, je
demande que tous les détenteurs d'enjeux dans l'industrie suivent les mêmes
réglementations, qu'il y ait des réglementations claires pour s'assurer
que le gouvernement offre des produits de qualité aux Québécois, et que les Québécois puissent savoir c'est quoi qu'il y a
dans les produits, et qu'ils soient assurés que ça soit bon pour leur...
moins nocif pour la santé que les produits du tabac réguliers.
Mme
Charlebois :
Vous savez comme moi que les ingrédients, c'est contrôlé par Food and Drug en
ce moment, et c'est là que vous devez...
puis c'est le bon moment, là, il y a des campagnes électorales. Alors,
interpellez les gens pour voir quelle
est leur intention à ce niveau-là, au niveau de la cigarette électronique, pour
savoir le contenu, comment ils entendent... est-ce qu'ils entendent
légiférer là-dessus, est-ce qu'ils... Bon.
Pour ce qui
est de la mise en garde, j'ai retenu votre recommandation. On va regarder aussi
celle sur les produits du tabac,
mais, tant qu'à faire, sur les produits, peut-être qu'on pourra examiner
qu'est-ce qu'on peut faire au niveau de la mise en garde pour la standardiser
sur les produits qu'on vend pour les cigarettes électroniques.
Pour ce qui est de l'ensemble de l'oeuvre, vous
dites : On a beaucoup... Vous êtes satisfait de l'ensemble du projet de loi. Il y a l'étalage que vous nous
parlez. Vous parlez de l'affichage, tout ça, mais, au niveau de l'étalage,
vous nous dites : Laissez l'étalage
dans les produits où il y a des produits du tabac. Moi, ce qui m'inquiète, je
vous le dis franchement, c'est qu'il
ne se vend pas le même produit dans... ou il y en a, des dépanneurs ou des
marchés d'alimentation, qui vendent la
cigarette électronique plus complexe ou, en tout cas, plus performante, mais la
plupart vendent des petites cigarettes électroniques pour les jeunes,
qui incitent au tabac. Alors, moi, l'étalage, ça m'interpelle un peu, dans le
sens où, dans les boutiques ou
détaillants... Puis il y a des jeunes qui vont dans ces boutiques-là, qui vont
voir ça. Il y a comme une renormalisation.
C'est pour ça qu'on pensait, dans le projet de loi, l'inclure, l'interdiction
de l'étalage des produits de la cigarette
électronique, autant chez les détaillants de tabac que chez les autres, parce
qu'on se disait, notamment chez les détaillants
de tabac : Bien, on renormalise de mettre des petits paquets de cigarettes.
Parce que c'est très, très, très subtil, hein, il y en a qui se
ressemblent tellement, là, c'est à s'y méprendre.
Par contre,
on a eu des détaillants de vapotage qui nous ont dit : Bien, laissez-nous
au moins afficher nos produits. Ils
sont même allés jusqu'à nous dire : Laissez-nous au moins instruire les
gens puis laissez-nous la possibilité de les faire vapoter pour leur
montrer comment utiliser. Alors, qu'est-ce que vous pensez de tout ça?
• (12 heures) •
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Premièrement, même le Dr Juneau, hier, mentionnait qu'aucune étude ne prouve que la cigarette électronique est une
passerelle vers le tabac. Oui, il y a des produits qui sont très
similaires, en termes
de look et design, à des cigarettes régulières. Ça pourrait être une des
standardisations et une des normes appliquées par le gouvernement
provincial ou fédéral par rapport aux dimensions, aux couleurs et aux autres
caractéristiques des produits de cigarette électronique.
Notre
compagnie, comme d'autres, offre des produits jetables. Donc, les plus petits
produits, à environ 10 $, c'est des produits jetables. Il y a des
produits aussi rechargeables, qui sont les cigarettes un peu plus complexes. Il
y a de la demande pour les deux types de produit.
La cigarette
rechargeable, qu'on vend aussi, mais il faut la dévisser, il faut remplir du
liquide, il faut brancher ça dans son
ordinateur, dans le port USB, pour s'assurer que la batterie recharge
efficacement, et tout ça. À chaque 30 jours, il faut rechanger la bobine chauffante. Ce n'est pas
fait pour tout le monde. C'est un produit qui est un peu plus compliqué.
Et la transaction moyenne dans une «vape
shop» est entre 75 $ et 100 $, le kit complet de la cigarette un peu
plus compliquée, avec une bouteille de liquide.
La cigarette
jetable, qui coûte seulement 10 $, est beaucoup plus accessible pour la
majorité des consommateurs, en termes
de coût, qui désirent arrêter... essayer d'arrêter de fumer. Et je pense que le
meilleur test pour voir si on peut devenir un vapoteur est de prendre
une cigarette jetable à 10 $, l'essayer pendant deux, trois jours chez
eux, dans des circonstances réelles, et voir si on veut devenir un vapoteur.
Au niveau d'essayer les saveurs en magasin, je
pense que ce n'est pas absolument nécessaire. La majorité d'entre nous achètent leurs aliments à l'épicerie
sans y avoir goûté auparavant. Je pense que le seul objectif des
magasins de vapotage pour essayer les produits en magasin serait de faire une
différenciation entre la saveur de fraise et la saveur de bleuet ou de saveur x, y, z. Je ne pense pas que c'est
nécessaire, mais je pense que se donner une chance de rendre la
cigarette électronique plus visible que la cigarette de tabac est un pas dans
la bonne direction. Il faut donner le goût aux fumeurs de transitionner vers la
cigarette électronique.
Si je peux me
permettre un exemple très imagé, tout le monde sait qu'il y a des Big Mac au
McDonald. La seule chance qu'on a de vendre de la salade au McDonald,
c'est de le mettre sur une affiche, de le mettre en spécial puis de dire qu'il y a moins que 50 % des calories du
Big Mac. Si on met la salade... on la met en dessous du comptoir, on ne
forme pas les employés et on n'en parle
jamais, on ne se donne pas de chance de vendre la salade au McDonald. C'est sûr
que ce serait mieux que chaque Québécois ait
une diététiste qui fait son menu quatre fois par semaine, et tout, mais je
pense qu'à chaque fois que quelqu'un
commande une salade à la place d'un Big Mac au McDonald on prend un pas dans la
bonne direction. Et mentionner aux gens que, dans 8 000 points de vente de
tabac, il y a des cigarettes électroniques qui sont moins nocives que le
produit régulier qui est disponible partout, dont tout le monde connaît
l'existence, est un pas dans la bonne direction.
Les seules
gens qui vont être contents si on cache les cigarettes électroniques dans les
dépanneurs vont être les grands
cigarettiers. Des études des détaillants en alimentation du Québec prétendent
que 33 % de la baisse des ventes de cigarettes traditionnelles
provient de la croissance des ventes de cigarettes électroniques. Alors, ils ne
nous aiment pas. Ils savent qu'à chaque fois
qu'il y a quelqu'un qui consomme un bâton de cigarette électronique c'est deux
paquets de cigarettes de moins. Eux vont
vouloir qu'on le cache, sans aucun doute, parce qu'ils savent que tout le monde
sait qu'il y a leurs grandes marques
dans les dépanneurs, et ce n'est pas tout le monde qui sait que le produit est
accessible... les produits de cigarette électronique sont accessibles
dans les dépanneurs. Moi, je pense que, pour que le gouvernement atteigne ses
objectifs, il faut mettre de l'avant, donner un avantage concurrentiel aux
produits moins nocifs, je n'en ai absolument aucun doute.
Mme
Charlebois : Je ne
partage pas votre opinion, parce que je pense que le marché est tellement en
grande croissance que les gens savent qu'ils peuvent se le procurer au
dépanneur. Mais, bon, on a chacun notre point de vue là-dessus, puis je
respecte votre opinion, là, il n'y a pas de problème.
J'aimerais ça
vous entendre parler sur l'affichage. Puis je veux aussi vous dire que,
concernant... Avant d'aller à l'affichage, là, j'ai ici, devant les
yeux, un article qui a été publié, qui nous dit... Puis j'en ai parlé hier,
puis je le sais que vous allez me dire,
probablement, que l'étude n'est pas concluante, puis c'est un peu ce que je
disais en début : On n'a pas des
études long terme. Mais il y a déjà une étude américaine qui nous dit qu'il y a
2 530 collégiens à Los Angeles qui ont commencé à fumer parce qu'ils avaient commencé à vapoter. Alors,
je ne veux pas me baser seulement sur cette étude, honnêtement, parce qu'il manque de documentation, mais il n'en
demeure pas moins qu'il faut quand même y penser.
Et je veux vous amener aussi à réfléchir sur la
renormalisation du geste de fumer mais aussi de voir des produits. Parce qu'il
n'en demeure pas moins que, si vous le voyez sur le comptoir, ça vous amène à
penser que vous pouvez vous mettre quelque
chose à la bouche. Donc, le premier réflexe qu'on a tous quand on se met
quelque chose entre les doigts, c'est
fumer. Moi, je ne pense pas à vapoter, là, je pense à fumer. Une fois qu'on a
dit ça, on peut avoir des points de vue partagés, puis, en tout cas...
Mais il faut avoir un réflexe de prudence. C'est ce que je veux vous dire.
Parlez-moi de l'affichage, si vous voulez bien,
parce que ça m'interpelle...
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Est-ce que je peux répondre à ce commentaire?
Mme
Charlebois : Bien
sûr, bien sûr.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Parfait. Alors, sur l'étude du JAMA qui
est sortie hier, même la CBC a répondu dans la même journée en disant que, oui,
il y a un aspect de corrélation entre le fait de fumer la cigarette
électronique et le fait de fumer la cigarette traditionnelle. Mais même les
gens de santé publique qui me précédaient expliquaient
que ce n'est pas parce qu'il y a un lien de corrélation qu'il y a un effet de
causalité. Ce n'est pas nécessairement à cause que les gens ont fumé de la cigarette
électronique qu'ils fument du tabac traditionnel. C'est peut-être le
niveau d'éducation de leurs parents, leurs
habitudes de vie qui causent qu'ils vont essayer la cigarette électronique,
essayer le tabac et faire d'autres essais dans leur vie quotidienne.
Mme
Charlebois :
On dit la même chose mais dans le sens où on dit qu'il n'y a pas d'étude de
long terme qui nous prouve autre chose. Mais
je ne veux pas qu'on s'étende trop là-dessus, parce qu'on dit la même chose
pour des raisons différentes, mais, bon.
Parlez-moi
de l'affichage. Vous me dites : Au niveau de l'affichage, les boutiques de
«vape shop», nous autres, on aimerait mieux qu'il n'y ait pas
d'affichage. Expliquez-nous votre point de vue, là.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Non, moi, je pense qu'il faut qu'il y
ait de l'affichage sur les produits les moins nocifs partout où est-ce
qu'on peut...
Mme
Charlebois :
...l'affichage extérieur?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Les boutiques spécialisées devraient
être sous les mêmes réglementations que les dépanneurs et stations-services. Si l'affichage est permis dans les
boutiques spécialisées, ça doit être permis dans les dépanneurs. Si l'affichage est permis dans les
dépanneurs, ça doit être permis dans les boutiques spécialisées. Moi,
mon point là-dessus, c'est que le produit moins nocif devrait être plus visible
que le produit le plus nocif. On se donne une chance de faire la transition du
fumeur au vapoteur.
Et je sais qu'il y a
certaines personnes qui mentionnaient que ce serait peut-être seulement dans
les «vape shops» qu'on devrait avoir le
droit de faire de l'étalage. Moi, je pense que le lieu de conversion le plus
propice à transférer un fumeur à non-fumeur est au dépanneur et sur le
lieu de vente du produit le plus nocif. La personne qui rentre dans la «vape shop» et qui est prête à dépenser
75 $ ou 100 $ a déjà probablement réfléchi sur ses besoins d'arrêter
de fumer et a fait l'effort d'aller au centre d'achats, d'aller au coin
de la rue pour acheter un dispositif rechargeable.
Mais
il y a des gens... Puis, si je peux me permettre l'exemple du menthol, on parle
beaucoup du menthol depuis le début
de la commission, qu'il y a des chances que le menthol soit banni au Québec.
Or, exemple, le 1er janvier 2016, le menthol est banni au Québec, et le monsieur rentre au dépanneur le
matin pour acheter son paquet de menthol, le caissier lui répond :
Non, il n'y a plus de menthol, c'est banni, le projet de loi n° 44 a été
passé, et tout ça. D'après moi, il y a trois
scénarios possibles. Il se dit : Ah! bien, peut-être, je peux aller sur la
réserve puis acheter du menthol là-bas, peu importe...
Une voix :
...
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : ... — c'est ça — peut-être : Ah! bien, je vais acheter
un paquet de cigarettes traditionnelles,
parce qu'il n'y a plus de menthol, mais je veux vraiment fumer. Et le troisième
scénario, c'est : Ah! bien, je
vais passer à la cigarette électronique. Ça, du menthol, c'est permis. S'il y a
une affiche dans le magasin qui dit : Le menthol est disponible ici, c'est moins nocif, ça coûte juste 10 $.
Vous êtes rentré dans le point de vente avec un budget de 10 $ pour acheter un paquet de cigarettes au
menthol, il y a cette alternative moins nocive en lieu de vente dont on
fait l'affichage en magasin, on augmente nos chances que cette personne-là
achète un produit de menthol directement sur le lieu de vente.
Si
on l'oblige à aller à un autre point de vente, à une boutique spécialisée,
faire 15 autres kilomètres pour dépenser 75 $ pour s'acheter une fiole au menthol, il y a des chances aussi
qu'il transitionne vers la cigarette électronique. Mais, d'après moi, on augmente nos chances et on va
baisser le taux de tabagisme si on donne l'option au consommateur de
cigarettes traditionnelles, sur le lieu de vente du produit nocif, de
transférer à la cigarette électronique. C'est là que le lieu de conversion est
maximisé, selon moi.
Mme
Charlebois :
Ce que j'ai mal compris dans votre mémoire... J'ai cru comprendre que c'était
écrit : On n'aimerait pas voir
l'affichage comme, exemple, Boutique de vapotage Charlebois, ou Vape shop
Charlebois, ou... C'est ça que je n'arrive pas à saisir. Dans votre
mémoire, là, ce que j'ai compris, c'est que vous ne souhaitez pas d'affichage extérieur. Advenant, là, que la loi était adoptée
telle quelle, vous savez qu'il n'y a pas d'affichage permis, si on disait
aux boutiques de vapotage : O.K., comme les dépanneurs, pas d'affichage,
pas de produit exposé, est-ce que... En fait, ce que je veux vous dire : Pas d'affichage, mais est-ce qu'on peut
laisser aux boutiques de vapotage la possibilité d'afficher et d'exposer
leurs produits, si la loi était adoptée comme elle l'est en ce moment, avec cet
amendement-là?
Le Président (M.
Tanguay) : En quelques secondes.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Moi, je crois que, si les boutiques de
vapotage ont le droit de faire l'étalage des produits à l'intérieur de leur boutique, les dépanneurs devraient
aussi avoir le droit. Tout le monde devrait jouer avec les mêmes
règlements et mêmes lois.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au collègue de
Rosemont pour un bloc de 12 minutes.
• (12 h 10) •
M. Lisée :
Merci beaucoup pour votre présence, M.Gagnon-Oosterwaal. Bravo pour le
lancement de votre entreprise, la création d'emplois et votre participation à
la lutte contre le tabagisme. Voilà, vous êtes un entrepreneur du
XXIe siècle.
J'ai des
questions d'abord sur... Comme vous le dites, votre produit est une transition
beaucoup moins nocive que les
produits du tabac. On a eu plusieurs témoignages en ce sens-là. Des
cardiologues nous ont fait la promotion, comme vous, de l'avantage comparatif qu'il faut donner à votre produit
puisqu'il permet de réduire la nocivité de façon spectaculaire. Et moi,
je suis assez sensible à vos arguments. Et d'ailleurs j'ai des enfants en bas
âge, donc je suis un consommateur de
McDonald et je mange de la salade. Puis vous avez raison que j'ai su qu'il y
avait des salades maintenant plus grosses récemment parce qu'ils
l'avaient affiché. Bon.
Alors, écoutez...
Donc, on est d'accord là-dessus. Je pense que c'est une bonne discussion à
avoir dans l'article par article sur
quel est le niveau d'avantages comparatifs qu'on peut donner :
informatifs, informatifs, bien sûr; style de vie, il n'en est pas question. On ne veut pas avoir le...
On a eu le «Marlboro Man», on ne veut pas avoir le «Blue Spike» ou le
«EVO Lady». Vous êtes d'accord avec ça.
Tester deux choses avec vous. Vous nous dites,
en entrepreneur responsable : Écoutez, ça prend des normes, il faut
pouvoir savoir quels sont les ingrédients dans le liquide rechargeable. Pour
l'instant, on est un peu dans le Far West, on attend des normes fédérales. On a
eu des gens ici qui nous parlent de la constitution d'une norme ISO qui
pourrait arriver dans un moment, on ne sait pas lequel, mais on a eu un
constitutionnaliste qui nous a dit : Écoutez, si le québécois veut légiférer là-dessus, il en a la capacité. On peut très
bien légiférer là-dessus. Et, avant vous, j'ai parlé à docteur... M. Massé, le directeur de la Santé
publique de Montréal, pour lui dire : Bien, si on décidait de légiférer,
est-ce que la Santé publique aurait la
capacité d'établir la norme et de la vérifier? La réponse, c'est oui. Bon.
Est-ce que vous, comme manufacturier
et vendeur d'un produit, vous seriez opposé à ce que le Québec ait sa propre
norme et l'applique sur votre produit?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Absolument pas, je suis en faveur que le gouvernement du Québec réglemente l'industrie,
détermine les ingrédients, leur contenu, leur provenance. C'est absolument nécessaire
pour protéger la santé publique. Présentement, vous utilisez le terme «Far West». Je suis d'accord
avec vous. Il y a plusieurs
entreprises qui possèdent un, deux magasins qui font les liquides eux-mêmes. M. Massé
mentionnait qu'il en avait visité quelques-uns,
que ça l'avait ramené 50 ans en arrière, que ça lui faisait peur. Je suis
du même avis. Il faut réglementer ça, il faut encadrer ça le plus
rapidement possible. Je pense que demander des normes ISO au gouvernement
fédéral est un bon concept. Si ça prend
quatre ans, c'est inacceptable que, pour les quatre prochaines années, il n'y
ait aucune norme, aucune réglementation par rapport à ces produits-là.
Il faut que le gouvernement agisse rapidement, responsablement. Si le fédéral
ne le fera pas, moi, j'encourage fortement le gouvernement du Québec à le
faire.
M. Lisée : Très bien. Bon,
comme vous le savez... Vous êtes dans une entreprise, vous avez votre produit,
il y a d'autres entreprises qui ont des
produits, vous savez que les cigarettiers veulent entrer sur ce marché-là
aussi. Il y a une idée que j'ai
évoquée plus tôt cette semaine, c'est d'interdire aux producteurs de tabac de
produire, de manufacturer ou de mettre en marché des cigarettes
électroniques. Qu'est-ce que vous pensez de cette idée?
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Ça,
c'est plus une décision économique. Je pense que la première étape doit être de réglementer et d'encadrer les
ingrédients, la publicité, le marchandage, et tout ça. Moi personnellement,
je n'ai aucune association avec les grands cigarettiers, je suis en compétition
avec eux. Alors, techniquement, plus ils ont de bâtons dans les roues, mieux je me tiens. Alors, je pourrais être
favorable à ça. Je pense que la première étape, par contre, c'est l'encadrement, la
responsabilisation, parce que les grands cigarettiers pourront peut-être
trouver des trucs de s'infiltrer dans cette industrie-là malgré la
législation qui leur empêcherait, en utilisant des divisions dans d'autres pays ou... je ne le sais pas. Je pense que tout le
monde sait qu'ils peuvent être créatifs. Mais moi, je répète, je n'ai
aucune association avec eux. Je suis en compétition. Je ne pense pas qu'ils
apprécient la compétition particulièrement.
M. Lisée :
D'accord. Donc, vous nous dites, vous avez des produits, la cigarette jetable
et la cigarette rechargeable, électronique dans les deux cas, mais vous
ne commercialisez pas dans les «vape shops». Pourquoi pas? Ce serait un endroit
de plus pour vendre vos produits.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Oui, les «vape shops», eux, ils contrôlent la manufacture puis la
fabrication des produits, c'est ça, leur
modèle d'affaires. Les détaillants d'alimentation, les dépanneurs, eux,
achètent des produits, les revendent.
Il y a beaucoup plus de dépanneurs au Québec
que de «vape shops». C'est plus simple de... bien, pour nous, basé sur notre expérience, c'est plus simple de vendre
dans les dépanneurs. On pense que le produit devient plus accessible, et
c'est la seule façon de vendre des produits
jetables. Selon nous, le modèle rechargeable est compatible avec les
«vape shops» à cause qu'il faut retourner aux «vape shops» acheter d'autre
liquide à chaque fois. Alors, c'est un différent modèle d'affaires que la «vape
shop» qui vend...
M. Lisée : Vous en avez des
rechargeables aussi.
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Exact. Nous, on vend ça, mais ça représente un certain pourcentage de nos ventes, ce n'est pas majeur. Et nous, on a,
disons, exemple, quatre différentes saveurs, une «vape shop» va en avoir
50, là. C'est une différente réalité.
M. Lisée :
...acceptaient de vendre vos produits, est-ce que vous voudriez qu'ils les
vendent?
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Je
n'aurais pas de problème à vendre mes produits aux «vape shops».
M. Lisée : Maintenant, sur
l'affichage, ce que vous dites, vous proposez d'interdire complètement pour les
«vape shops» l'affichage incluant toute
mention de marque et de nom d'entreprise à l'extérieur des commerces.
Alors, comment on va savoir qu'on peut acheter des cigarettes électroniques?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : C'est ça. Je pense qu'il faut juste bien
juger qu'il n'y ait pas d'abus par rapport à ça, que le nom ne soit peut-être pas évocateur ou fasse d'allégation
thérapeutique. Je pense que les gens aussi pourront être créatifs de ce
côté-là, sur les noms des boutiques. Il faut juste agir de prudence par rapport
à ça.
M. Lisée : Mais, si c'est
écrit «vape shop» ou «magasin de cigarettes électroniques», est-ce que ça vous
va?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Oui, oui, si c'est quelque chose comme
ça. Mais, si le magasin s'appelle Sauvez-vous la vie avec la cigarette
électronique, peut-être que c'est un peu abusif.
M. Lisée : O.K. Si c'est leur
marque de commerce?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Exact. Mais les gens vont déclarer que
c'est leur marque de commerce, et le gouvernement
fédéral va dire que c'est une allégation thérapeutique qui n'est pas légale,
qui n'est pas permise. Nous, on est
une compagnie responsable, on travaille avec des détaillants responsables, on
ne fait aucune allégation thérapeutique par rapport au produit. Si on laisse une porte ouverte aux grands
cigarettiers ou aux autres compagnies indépendantes de le faire, on peut
rentrer potentiellement dans un terrain glissant. Alors, je demanderais au
gouvernement d'agir avec prudence par rapport à ça.
M. Lisée :
L'Association pulmonaire nous proposait d'apposer sur les cigarettes
électroniques deux avertissements, un
disant : Ce produit contient de la nicotine, la nicotine crée une
dépendance, est mauvaise pour la santé, et l'autre disant : Ce
produit contient de la nicotine mais est nettement moins nocif qu'une cigarette
traditionnelle. Ça, est-ce que ça vous irait?
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Oui. Moi, je pense que ça rentre dans le cadre de publicité informative, de transmission d'information, de gestion de la
désinformation que j'encourage le gouvernement à imposer aux fabricants
et aux distributeurs de cigarettes
électroniques. Moi, je pense que de transmettre de l'information sur la
cigarette électronique va aider le
gouvernement à lutter contre le tabagisme. Et même probablement que le
gouvernement devrait demander aux grands
cigarettiers de parler de cigarette électronique puis de marquer sur le
paquet : Avez-vous considéré transférer vos achats dans la cigarette électronique? C'est un produit moins nocif.
Oui, ça contient de la nicotine, puis on peut utiliser la même ligne que Dr Juneau proposait par rapport à
ça, mais c'est là qu'on va convertir un fumeur à un vapoteur et c'est là
que le gouvernement va faire des gains dans sa lutte contre le tabagisme.
M. Lisée :
Donc, vous proposez que l'avantage comparatif, dans les dépanneurs, les points
de vente, de la cigarette électronique,
ce soit que, pendant deux ans, dites-vous, ou une période similaire, vous
puissiez afficher cette information-là de la moins grande nocivité et de
la présence de nicotine quand même. Je trouve ça intéressant.
Plusieurs
personnes sont venues nous dire qu'il y avait une perception assez répandue que
la cigarette électronique était aussi
nocive que la cigarette traditionnelle, et on a eu l'exemple par un détaillant,
tout à l'heure, du Saguenay, qui nous l'a
dit. Il a dit : Bien, c'est la même chose, il y a de la nicotine, O.K.?
Alors, je ne doute pas de sa bonne foi, mais c'est sûr aussi que sa
marge de profit est plus forte. Ou l'est-elle? Je vous pose la question :
Est-ce que la marge de profit du dépanneur est plus forte sur la cigarette
traditionnelle que sur la cigarette électronique?
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Le
volume de tabac traditionnel représente la très grande majorité de l'industrie, là, plus de 95 %, plus de
97 %. Alors, c'est sûr que les détaillants font plus d'argent en vendant
du tabac au volume. Maintenant, sur
les marges de produits spécifiques, je ne connais pas les détails des ententes
des grands cigarettiers avec les différents détaillants.
Je reconnais
qu'il y a une désinformation, puis on l'a vue ce matin encore, par rapport à
ça, alors je pense que...
• (12 h 20) •
M. Lisée :
Mais ce que je veux savoir, c'est si la désinformation peut être intéressée, si on est dans un système où
le dépanneur a intérêt à vendre la cigarette traditionnelle plutôt que la
cigarette électronique. Parce qu'au-delà du volume...
Le volume, c'est une chose, mais, s'il change complètement son volume vers la
cigarette électronique avec le même rendement économique, pour lui,
c'est kifkif.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
La vraie solution à ça et, comme dans toutes les entreprises
commerciales capitalistes, la seule solution à long terme est de vendre un
produit que le consommateur veut. Alors, même si les grands cigarettiers donnent plus de marges aux détaillants pour des
cigarettes traditionnelles mais que le client veut un produit moins
nocif sur la santé, dans le dépanneur, c'est ça qu'il va vendre. C'est ça, la
vraie seule solution à long terme. Mais généralement,
économiquement, on est capables de donner des marges plus élevées pour les
cigarettes électroniques que les compagnies
de tabac le font pour les produits de tabac traditionnels, et ça, c'est la
réalité dans la majorité des détaillants, mais je ne connais pas toutes
les ententes.
M. Lisée : Donc, vous êtes capables. Donc, vous dites qu'en
fait la marge peut être supérieure à l'unité, pour la cigarette
électronique, que la cigarette traditionnelle.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Absolument. Une cigarette traditionnelle... une cigarette
électronique comme ça se détaille 35 $, 40 $ dans un dépanneur. Le dépanneur
va payer entre 22 $ et 26 $, ça va faire 14 $ à 18 $ de
profit. Un paquet de cigarettes peut coûter entre 7 $ et 10 $, vous
pouvez vous imaginer qu'il fait 1 $ ou 2 $ de profit. Il préfère
grandement vendre ça et faire 12 $ de profit sur la transaction.
M. Lisée :
Bon. Ça, c'est une information qui devrait être largement répandue pour inciter,
donc, les dépanneurs à faire plus d'argent en proposant la cigarette
électronique à tous les acheteurs de cigarettes traditionnelles.
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Nos
équipes font ça à tous les jours.
M. Lisée :
O.K. J'ai entre les mains les modalités du programme de fidélisation de
Rothmans, Benson & Hedges pour les dépanneurs du Québec — j'aurais voulu en parler aux dépanneurs tout
à l'heure. Et évidemment plus ils ont de stock, plus ils vendent de cigarettes — là, ils passent d'argent, or ou platine,
comme les programmes de fidélisation, et ils peuvent gagner des voyages, avion, chambres d'hôtel, location d'une
voiture, forfaits ou autres éléments d'un voyage. Est-ce que vous êtes
au courant de ça? Est-ce que vous savez si ça a un impact sur les dépanneurs?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Oui, je suis au courant, oui, ça a un
impact. S'il n'y avait pas d'impact, ils ne le feraient pas. Alors, les grands cigarettiers compétitionnent pour
avoir l'espace tablette et l'inventaire dans les dépanneurs, et tentent d'inciter tous les détaillants à garder
le plus grand nombre de produits de leur portfolio, et trouvent des
façons créatives de faire ceci tout en respectant la loi.
M. Lisée : Très bien. Je vous
remercie beaucoup.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole
à notre collègue de Saint-Hyacinthe pour une période de huit minutes.
Mme
Soucy : Merci. Merci d'être ici. Actuellement, la publicité, vous
dites, bon : Ce serait une bonne chose qu'elle soit encadrée. On a fait référence, au courant de
la... depuis le début de la commission, des publicités qui étaient
associées directement avec «fumez, vous allez devenir plus mince» ou le style
de vie. Vous, actuellement — vous
avez déjà sûrement fait de la publicité — vos produits, est-ce qu'ils
font de la promotion du style de vie ou de la promotion de, justement, là,
associer l'acte de fumer avec la minceur?
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Non, absolument pas, on ne fait pas ça. Je pense que, techniquement, de mentionner... de faire un lien entre la cigarette
électronique et la minceur serait une allégation thérapeutique. Ceci
n'est pas permis, selon le gouvernement fédéral. Je me répète, mais nous, on
vend à des détaillants crédibles, qui ne prendront pas de risque pour une compagnie comme la nôtre de mettre en péril même
leur permis de tabac ou leur réputation. Quand on a commencé à vendre les produits à nos détaillants, on leur
disait : Il n'y a pas de loi, il n'y a pas de réglementation, mais
vous devriez être responsables, et être critiques, et vendre seulement à des
gens d'âge majeur. C'était leur choix de respecter
notre demande ou pas, mais nous, on a agi de façon responsable et éthique.
Alors, on ne s'embarque pas là-dedans, on ne le fait pas.
Le professeur de l'université de l'Ontario, de
Guelph, qui était ici hier a montré des publicités de différentes compagnies. Il n'avait aucune publicité qui
provenait de notre compagnie à cause qu'on n'en fait pas, malgré que j'ai
vu qu'il avait des produits de notre marque
avec lui. Alors, il connaît l'existence de notre compagnie, il n'a juste pas
trouvé de publicité, parce qu'on n'en fait pas. C'est ça.
Mme Soucy : Faites-vous... Vous n'en
faites pas non plus sur les réseaux sociaux, de ce genre de publicité?
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Pas
nécessairement sur les réseaux sociaux. Sur les réseaux sociaux, les gens peuvent
se prendre en photo, et tout ça. Là, on ne peut pas contrôler tous les messages
qui se passent dans les réseaux sociaux.
Mais, nous, notre focus se fait sur les lieux de vente, parce que c'est là
qu'on fait la conversion du fumeur au vapoteur. Alors, nous, la majorité
de nos investissements en marketing, en publicité sont sur les lieux de vente.
Mme
Soucy : O.K.
Vous avez mentionné que, bon, il serait préférable de montrer — puis
j'ai bien aimé votre exemple, c'était très imagé, avec la salade du McDo — alors,
qu'il serait préférable de rendre justement la cigarette électronique visible pour, bon, en faire une
certaine promotion, en fait montrer au moins qu'elle existe dans le dépanneur.
Vous dites également
qu'il y aurait une période de transition de deux ans. Si j'ai bien compris, la
période de transition de deux ans, c'est
pour qu'elle soit accessible dans les dépanneurs. C'est quoi, la période de
transition de deux ans que vous parlez?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Oui, c'est ça, ce serait pour permettre aux détaillants et aux fabricants
de faire la promotion des produits
marchandisés et étaler les produits à
l'intérieur du dépanneur ainsi que
faire de la publicité informative sur les lieux de vente.
Mme Soucy : Pour deux ans, c'est ça?
Pour un...
M. Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Je
prétends qu'en deux ans on peut éduquer les consommateurs, leur mentionner où les produits peuvent être vendus. Ce
n'est pas toute la population qui sait que les cigarettes électroniques jetables et/ou rechargeables sont vendues dans les
dépanneurs. Il faut transmettre cette information-là au public. Puis
ça pourrait être plus longtemps.
Comme je le mentionnais, je pense que le gouvernement devrait se permettre une certaine latitude
par rapport à ça, d'utiliser peut-être une réglementation pour étudier le
marché, à ce moment-là, et décider quelle date exacte le moratoire pourrait
terminer.
Mme
Soucy : Vous avez parlé de
cigarettes électroniques jetables. Pour vous, c'est nécessaire de... pour
justement que ça soit accessible, vu qu'on
sait que souvent le tabagisme est lié au milieu socioéconomique plus
défavorisé, donc ça augmente... Pour vous, ça augmente les chances
d'aider les gens à sortir du tabagisme, si j'ai bien compris.
La part du
marché du jetable que vous vendez dans les dépanneurs versus ceux qui sont un peu plus complexes, ça représente quoi,
environ?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Bonne question. Les deux freins à l'utilisation des cigarettes
jetables... des cigarettes rechargeables, pardon, sont le fait que c'est
compliqué et le fait que c'est coûteux.
Mme Soucy : Mais votre part du
marché?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
C'est ça. Nous, on vend les deux. C'est présentement environ 50-50.
Alors, une transaction sur deux est faite
pour des cigarettes jetables, une transaction sur deux, sur des cigarettes
rechargeables. On n'a pas d'étude précise qui mentionne que les gens qui
achètent des cigarettes jetables passent ensuite aux cigarettes rechargeables, mais économiquement c'est beaucoup plus avantageux de consommer des
cigarettes rechargeables, bien entendu.
Ça, la preuve économique est facile à faire. Sauf qu'à 75 $ ou 100 $
ce n'est pas tout le monde qui peut faire l'essai. J'entends des histoires, à chaque semaine, de gens qui vont au
dépanneur, qui disent : Je m'en vais chez ma tante, j'ai entendu dire qu'elle voulait arrêter de fumer
le 1er janvier, c'était sa résolution, ça n'a pas fonctionné. En allant
arrêter mettre de l'essence, je vais acheter
une cigarette à 10 $, je vais lui donner en cadeau, on va lui donner une
autre chance...
Mme Soucy : C'est plus accessible.
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Ce n'est pas tout le monde qui aime
assez leurs tantes pour acheter 75 $ de cigarettes électroniques.
8 $ à 10 $...
Mme
Soucy : Vous ne vendez pas
dans les... Vous avez mentionné que vous ne vendez pas dans les «vaposhops».
Bien, pour vous, c'est quand même possible de percer ce marché-là?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) : Oui, potentiellement. Nous, ça fait
nombre d'années qu'on travaille avec les détaillants. On pense que c'est
un bon point de vente pour exposer le produit, pour le vendre, pour le
commercialiser. Alors, on a décidé, quand on
a lancé le produit, d'utiliser ce réseau de distribution là. Nous, on pense que
c'est le meilleur. C'est un choix
d'affaires. Et, comme je dis, le modèle d'affaires des «vape shops» n'est pas
compatible avec la vente de produits jetables nécessairement. Ils
n'auraient pas avantage à vendre des produits jetables, alors je ne sais pas
s'ils nous encourageraient dans ce sens-là.
Mme
Soucy : O.K. C'est quoi, la différence? Parce que, dans votre mémoire,
vous dites : La cigarette électronique et puis le cigarillo
électronique. C'est quoi, ce cigarillo?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
C'est juste un différent modèle. Les saveurs sont différentes. Le format
est un peu différent. Ça reste que c'est le même principe.
Mme
Soucy : O.K.,
parfait. Donc, dernière question : Avez-vous approché le fédéral jusqu'à maintenant pour justement leur partager,
là, vos craintes et puis faire un peu de pression justement pour qu'ils
légifèrent la cigarette électronique?
M.
Gagnon-Oosterwaal (Nicolas) :
Oui, on a approché le fédéral. Plusieurs groupes ont approché le gouvernement fédéral. La ministre
avait demandé à un comité sur la santé de mettre du temps sur ça. Ils ont
déposé leur rapport il y a maintenant
trois ou quatre mois. Je m'attendais à ce que la ministre Ambrose en fasse
commentaire dans les dernières semaines avec les élections fédérales. Le
processus a sans doute été ralenti.
• (12 h 30) •
Mme Soucy : Vous avez... Je veux dire, vous ne faisiez pas partie de ce groupe-là
avec les recommandations, non?
M. Gagnon-Oosterwaal
(Nicolas) : Non. Nous, on a émis nos recommandations par écrit au gouvernement
fédéral. Ils ont invité les différents détenteurs d'enjeux à émettre leurs
opinions et leurs recommandations. Nous, on a fait ça, d'autres aussi l'ont fait. Puis, ils ont procédé à quelque chose qui ressemble, j'imagine, à une commission parlementaire, ils
ont émis un rapport. Maintenant, il reste à agir sur le rapport, qui était généralement favorable à la cigarette électronique, avec un encadrement
clair, juste et qui protégerait la population canadienne.
Mme Soucy : Merci.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Nous vous remercions pour votre temps et votre disponibilité aujourd'hui.
Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les
travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 31)
(Reprise à 14 h 7)
La
Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demande donc à
toutes les personnes qui sont dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Nous allons
poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 44, Loi
visant à renforcer la lutte contre le tabagisme.
Nous entendons cet après-midi l'Institut
national de santé publique du Québec, l'Institut Philippe-Pinel, le Réseau du
sport étudiant du Québec, la Coalition Priorité Cancer et l'Union des
tenanciers de bars du Québec.
Donc, je
souhaite bien sûr la bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir
vous identifier, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous
rappelle que vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre
présentation, qui sera suivie d'une période d'échange d'environ
50 minutes. Donc, sur ce, la parole est à vous.
Institut national de santé publique du Québec (INSPQ)
Mme Damestoy
(Nicole) : Merci, Mme la Présidente. Mme la
ministre déléguée à la Réadaptation,
à la Protection de la jeunesse et à
la Santé publique et membres de la commission, il me fait plaisir de vous présenter notre
analyse du projet de loi n° 44.
Aujourd'hui, je suis accompagnée de Mmes Michèle
Tremblay et Annie Montreuil, qui sont les auteures du mémoire qui vous a été
déposé et qui seront d'une grande contribution pour répondre à vos questions.
D'emblée, je
souhaite souligner que l'institut accueille très favorablement ce projet de loi qui contribuera sans contredit à l'amélioration de la santé de
la population québécoise. Rappelons quelques données juste pour se... en
introduction : 10 000 Québécois meurent chaque année de maladies
dues au tabac. Aujourd'hui, ça veut dire que 27 personnes
en décéderont. En plus des fumeurs qui décèdent rapidement des maladies dues au
tabac, plusieurs fumeurs et ex-fumeurs souffrent longtemps avant de
mourir. Les produits du tabac sont encore sur le marché malgré les 70 composés chimiques cancérigènes reconnus
et la dépendance qu'ils créent. Encore aujourd'hui, 1,4 million de
Québécois font l'usage du tabac régulièrement.
• (14 h 10) •
Examinons, dans un premier temps, les mesures du
projet de loi appuyées par l'Institut national de santé publique. Lors de notre
analyse du projet de loi n° 44, cinq mesures nous apparaissent
incontournables. La première concerne
l'encadrement de la cigarette électronique. L'institut considère que la
proposition d'élargir le champ d'application de la loi à la cigarette électronique est justifiée. En effet, la
cigarette électronique avec nicotine est un produit qui n'est pas approuvé par Santé Canada mais pourtant accessible
au Québec dans plusieurs boutiques et par intermédiaire d'Internet.
Elle est
probablement moins dommageable pour la santé que la cigarette pour les fumeurs
et est beaucoup utilisée par les fumeurs pour diminuer leur consommation
de tabac ou même cesser de fumer. Cependant, elle attire aussi la curiosité des jeunes, qu'ils soient fumeurs ou non
fumeurs. À l'heure actuelle, nous ne disposons pas de suffisamment
d'études sur ses effets sur la santé à long terme, sur son efficacité réelle
pour cesser de fumer ni sur son impact sur l'usage
des produits du tabac par les jeunes. L'encadrement de la cigarette
électronique au Québec, par la loi, est bien fondé et prudent, car cela ferait en sorte d'en
interdire la vente aux mineurs, d'interdire la publicité, la promotion et
l'étalage, d'interdire l'usage de la cigarette électronique dans les endroits
où il est interdit de fumer, tout en permettant aux fumeurs adultes qui
désirent utiliser ce produit pour les aider à cesser de fumer de toujours y
avoir accès.
Finalement,
il serait aussi important de s'assurer que des normes de fabrication soient
instaurées pour garantir tant la sécurité que la qualité des dispositifs
et de ses différents composants.
Deuxièmement, l'interdiction des arômes.
L'institut appuie fortement la mesure proposée visant à interdire la vente des produits du tabac aromatisés, incluant
le menthol. Certains additifs permettent de minimiser les désagréments
des premières expériences, celles dont on se
rappelle, qui, souvent, sont à l'origine de l'initiation de l'habitude
tabagique. Le menthol, par exemple, possède des propriétés refroidissantes,
anesthésiques, analgésiques qui modèrent l'irritation due à la fumée du tabac.
En 2012-2013, c'est près de 60 % des jeunes Québécois de sixième année du
primaire et du secondaire qui avaient fait
l'usage du tabac au cours du dernier mois qui avaient utilisé un produit du
tabac aromatisé.
Le
menthol n'est pas visé par la loi canadienne, et plusieurs produits y
échappent. C'est pourquoi, à l'instar de
cinq autres provinces canadiennes, nous appuyons cet article du projet de loi
qui interdit tout ajout d'additif aromatisant, incluant le menthol.
Passons aux nouvelles
interdictions de fumer qui sont proposées. L'interdiction de fumer dans les
véhicules automobiles en présence de mineurs
de moins de 16 ans. L'institut considère que cette mesure est amplement
justifiée. La fumée dégagée par deux
cigarettes, lorsque les fenêtres sont fermées, peut générer une exposition à
des particules fines qui dépasse les
normes dictées par l'OMS. Les particules fines pénètrent profondément dans les
poumons, et la fumée inclut une
multitude de composés qui sont dommageables pour la santé. Ainsi, les enfants
peuvent être exposés à des niveaux élevés de particules néfastes pour
leur santé, même si le temps passé à l'intérieur du véhicule est relativement court.
On sait par ailleurs que le quart des fumeurs québécois fument régulièrement,
ou à l'occasion, dans leurs voitures en présence
d'enfants. De plus, une mesure législative interdisant de fumer dans les
voitures en présence d'enfants est efficace, et plus de huit fumeurs et
ex-fumeurs québécois sur 10 appuient déjà une telle mesure.
L'interdiction de
fumer sur les terrasses. Le projet de loi n° 44 propose d'interdire
complètement de fumer sur les terrasses et
les autres aires extérieures exploitées dans le cadre d'une activité
commerciale. L'institut est tout à fait en accord avec une telle mesure. Certaines études démontrent une
augmentation de la concentration des composantes néfastes pour la santé
dans l'air et le sang des non-fumeurs qui sont exposés à la fumée de tabac sur
les terrasses. Lorsqu'on sait que les
travailleurs des restaurants et des bars qui servent des clients fumeurs sur
une terrasse pendant plusieurs heures et de façon répétée... ces résultats sont préoccupants. Enfin, sept Québécois
sur 10 approuvent une interdiction de fumer sur les terrasses, une
mesure en vigueur dans cinq provinces et un territoire canadien déjà.
L'interdiction de
fumer à neuf mètres de toute porte communiquant avec plusieurs lieux visés par
la loi. Au Québec, il est interdit de fumer à l'extérieur dans un rayon de neuf
mètres des portes de plusieurs lieux, dont les établissements de santé et d'enseignement. Le projet de loi n° 44
propose d'étendre une telle interdiction à tous les lieux de travail et
tous les lieux qui accueillent le public. L'institut appuie cette mesure. La
concentration de particules fines à l'extérieur de l'entrée d'édifices, en
présence de fumeurs, peut dépasser de deux fois le niveau de base, ce qui peut
être problématique, en particulier pour les personnes souffrant de problèmes
respiratoires.
Enfin, dans les
endroits où il est déjà interdit de fumer à neuf mètres des portes, les fumeurs
se rassemblent parfois près des fenêtres qui
s'ouvrent et près des entrées d'air. La fumée peut donc pénétrer à l'intérieur
de l'édifice. Cette situation paradoxale a d'ailleurs été documentée
dans le rapport de mise en oeuvre de la Loi sur le tabac 2005-2010. C'est
pourquoi cette interdiction devrait s'appliquer aussi aux fenêtres qui
s'ouvrent et aux entrées d'air.
Parlons
maintenant des trois mesures que l'institut souhaite voir intégrées dans le
projet de loi. D'abord, une mesure qui
concerne les lieux servant à la garde d'enfants. La loi actuelle interdit de
fumer à l'intérieur des lieux servant à la garde d'enfants aux heures où
les enfants sont présents. Or, les enfants peuvent être tout de même exposés à
des polluants de la fumée du tabac si des
personnes fument en dehors des heures d'ouverture. En effet, dans les lieux
intérieurs, une partie des polluants
de la fumée du tabac demeure dans la pièce longtemps après que la dernière
cigarette ait été éteinte. Ces polluants s'accumulent sur les surfaces
et sont très difficiles à déloger. Certains sont remis en circulation dans
l'air beaucoup plus tard, et d'autres
peuvent même se transformer en de nouvelles particules cancérigènes, avec des
réactions chimiques avec les molécules
d'oxygène. Les enfants sont particulièrement vulnérables lorsqu'ils rampent,
qu'ils jouent par terre, qu'ils
portent des objets à la bouche et ils peuvent, donc, respirer ou ingérer ces
particules. C'est pourquoi l'institut estime qu'il devrait être interdit
de fumer en tout temps dans ces lieux afin de protéger la santé des
tout-petits.
Dans
les établissements du réseau de la santé et des services sociaux. Les
établissements du réseau de la santé et des services sociaux peuvent
aménager, en ce moment, des fumoirs pour les personnes qui sont hébergées, et
certains peuvent également réserver jusqu'à
40 % des chambres pour les fumeurs. Or, selon le rapport de mise en oeuvre
de la Loi sur le tabac, certains fumoirs ne répondent pas aux exigences
prévues dans cette loi, et les chambres réservées aux fumeurs ne sont pas regroupées. Il faut remédier à cette situation, même
dans les lieux où l'interdiction complète de fumer peut sembler plus difficile à respecter, comme les
centres qui hébergent des personnes atteintes de problèmes de santé
mentale, les centres de traitement des dépendances et les centres jeunesse.
Il
existe de plus en plus d'études et d'expériences terrain, notamment au Québec,
démontrant qu'il est possible d'offrir
des lieux totalement sans fumée pour ces clientèles. En cohérence avec leur
mission d'offrir des environnements sains,
l'institut suggère d'interdire les fumoirs et les chambres où il est permis de
fumer dans les établissements du réseau de la santé, à l'exception des
CHSLD, où seuls les fumoirs pourraient être permis.
J'aimerais
terminer avec une mesure qui limiterait encore davantage la promotion du
tabac : c'est la mesure qui concerne l'emballage neutre. Avec la
diminution des possibilités de commandite, de publicité, de promotion des produits du tabac, le paquet de cigarettes est
devenu un outil promotionnel par excellence, et ce, malgré l'obligation
des mises en garde devant atteindre 75 %
de la surface du paquet. En 2006, le Québec a adopté un décret le liant à la
convention-cadre de lutte contre le tabac de l'OMS, signée par le Canada. On y
prône de limiter ou d'interdire l'utilisation de logos, de couleurs, d'images
de marque ou de textes promotionnels sur les emballages.
L'Australie
a mis en place, depuis décembre 2012, l'emballage neutre, et certaines
études réalisées dans ce pays nous
apprennent notamment que les fumeurs perçoivent depuis ce moment leurs paquets
comme étant moins attrayants et les cigarettes comme étant de qualité
moindre. Les gens remarqueraient davantage les messages de mise en garde, et
l'emballage neutre inciterait plusieurs fumeurs à cesser de fumer.
Pour
ces différentes raisons, l'institut réitère sa suggestion, déjà émise en 2013,
à l'effet d'obliger les compagnies de
tabac à présenter leurs produits dans des emballages de format neutre et
prédéterminé, de manière à ce que les produits et les emballages ne
puissent se distinguer que par les noms de leurs marques.
Pour
conclure, Mme la Présidente, Mme la ministre, le projet de loi est excellent,
et nos ajouts visent à protéger encore davantage les jeunes et les
non-fumeurs. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme
Hivon) : Merci. Vous avez respecté le temps de manière
extraordinaire. Donc, sur ce, nous allons débuter la période d'échange avec la
partie gouvernementale pour une période de 22 minutes. Donc, Mme la
ministre, la parole est à vous.
Mme
Charlebois : Merci,
Mme la Présidente. Alors, Mme Damestoy, Mme Laguë — est-ce qu'elle est là? Oui? Ah! elle est derrière — Mme Tremblay, Mme Montreuil, merci
d'être là et d'être venues partager vos connaissances avec nous. Ça va certainement enrichir la bonification
du projet de loi, parce que, vous savez, quand on consulte, ce n'est pas
pour une partie de plaisir, c'est vraiment
une consultation. Comme je l'ai dit aux gens depuis le début, on entend tous
les groupes qui se présentent, ça va aider à bonifier le projet de loi. Mais
aussi on va lire tous les mémoires. Ce n'est pas tout le monde qui a eu la chance ou le privilège de venir
le présenter devant nous, mais on va tous les lire et on va certainement
travailler à bonifier le projet de loi. Hein, on est en consultation, et c'est
pour ça. Alors, merci d'être venues.
J'ai le goût
de tout de suite vous demander, quand vous dites : «...interdiction de
fumer sur les terrains de jeux pour enfants
de même que sur les terrains et aménagements sportifs publics permettrait de
protéger», etc., quand vous parlez de lieux
publics, qu'est-ce que vous entendez par «lieux publics»? Ça concerne les
parcs, les installations? Jusqu'où vous entrevoyez ce qu'est une
propriété, un terrain public? Le terme «public», finalement.
Mme Damestoy (Nicole) : Oui. Bien,
disons, on va commencer par le principe, le principe étant de suggérer l'ajout de l'interdiction de fumer sur les
terrains de jeux, d'abord et avant tout, et autres lieux fréquentés par les
jeunes, puisque l'idée en arrière de ça, c'est vraiment la visibilité de
l'usage du tabac dans les lieux fréquentés par les jeunes. Puisqu'on sait très bien que ce qu'on appelle la
norme sociale... Donc, plus l'usage de la cigarette est visible, plus il
est conçu comme étant courant et normal, et c'est un facteur qui est associé à
l'initiation au tabagisme chez les jeunes.
Et cette mesure qui interdirait l'utilisation du
tabac dans les terrains de jeux serait cohérente avec celle qui prévaut déjà
sur les terrains des établissements d'enseignement, par exemple, hein? On ne
peut pas dire qu'on a été très à fond dans
le détail, je dirais, de la nature des endroits qui pourraient être touchés,
mais l'esprit en arrière de cette suggestion était celui-ci. Alors,
est-ce que mes collègues auraient peut-être quelque chose à rajouter?
• (14 h 20) •
Mme Montreuil (Annie) : Bien, c'est
une mesure aussi qui est cohérente avec plusieurs autres interventions qui visent à diminuer la visibilité et l'accès au tabac, mais notamment
la visibilité, comme, bon, l'interdiction d'étalage dans les points de vente, l'interdiction de fumer
sur les terrains des écoles, l'interdiction de vendre aux mineurs. Donc,
il y a plusieurs mesures, déjà, qui sont en place et qui visent à diminuer
l'accès et la visibilité des produits du tabac pour les jeunes.
Mme
Charlebois : Et ça
a été un sujet de discussion au cours de l'été. On a vu souvent des reportages
où on... j'ai entendu... Puis j'ai été à
même de constater moi-même : derrière chez moi, il y a une cour d'école, et,
derrière la cour d'école, qu'est-ce qu'il y a? Bien, il y a un parc. Et,
quand j'ai entendu le reportage à la télé, j'ai dit : C'est vrai,
il y a beaucoup de jeunes qui vont au parc, même en dehors des heures de
classe; on fait quoi?
Alors, ça a été... C'est une recommandation que
vous nous faites, finalement, de tenir compte du terrain des établissements mais en tout temps, finalement, pas
juste pendant les heures de classe, là. Dès qu'il y a une utilisation
par les jeunes d'un espace public, il faut considérer de voir à faire en sorte
qu'il n'y ait pas de tabagisme qui... en tout cas, qu'il n'y ait pas personne
qui fume. C'est ça?
Mme Damestoy (Nicole) : Exactement.
Oui.
Mme
Montreuil (Annie) : On
considérait que c'était vraiment important dans les endroits où... que les
jeunes et les enfants... les adolescents et
les enfants fréquentent, comme les terrains de jeu. Et on pensait aux
aménagements sportifs publics, et ça
peut inclure les piscines. Dans ces endroits-là, alors, il y a plusieurs... Il
y a certaines provinces qui ont déjà mis en application des
interdictions de fumer dans ces... dans les terrains de jeu, sur les
aménagements sportifs, et il y a plusieurs villes au Québec aussi qui sont déjà
allées de l'avant.
Mme
Charlebois :
O.K., les aménagements sportifs, les piscines. J'ai pris note. Dites-moi, quand
vous parlez des services de garde...
J'ai pris connaissance de votre mémoire, puis je vous entendais tantôt, et là
je me disais... Donc, à la conclusion,
c'est : Quand on veut devenir service de garde en milieu familial... Parce
que c'est clair que, pour les installations,
ça ne pose pas un problème ni dans les CPE ni dans les garderies privées. Mais,
dans le milieu familial, ça veut dire
que c'est terminé : une responsable en service de garde en milieu familial
et sa famille ne pourront plus fumer, jamais. C'est ce que vous souhaitez, du moins. Parce que, si on ne peut pas
fumer sur les lieux, bien, c'est clair qu'il faut que toute la famille ne fume pas. Puis j'irais plus loin que
ça : même les visiteurs ne pourront plus fumer à l'intérieur du service
de garde. C'est ce que vous souhaitez?
Mme Montreuil (Annie) : Cette
mesure-là, effectivement, c'est davantage les garderies en milieu familial que ça toucherait. Ils ne pourront plus fumer à
l'intérieur de leurs maisons s'ils veulent être un service de garde.
Parce qu'on sait que les résidus de fumée se
déposent, s'accumulent, s'incrustent dans les surfaces, incluant les tapis, les
meubles, mais aussi sur des surfaces qu'on
considère qu'elles sont plus dures, comme les murs, la peinture, c'est très
difficile à déloger. Puis, ces
substances-là, certaines sont remises en suspension dans l'air et certaines se
transforment en nouvelles substances cancérigènes, différentes de celles
qui sont présentes dans la fumée. On ne sait pas quels sont les effets à long
terme. En fait, on
sait que c'est des substances cancérigènes, on ne sait pas quelle quantité de
polluants entraîne quel type de maladie.
Mais, pour les enfants, les jeunes enfants qui portent des objets à leurs
bouches, eux, on est capables de mesurer ces polluants-là, chez les
enfants, parce qu'ils les absorbent par la bouche et parce qu'ils les
respirent.
Alors, il y a
déjà plein de mesures qui visent à protéger les enfants qui sont en service de
garde en milieu familial. Ce serait
une mesure additionnelle. Et c'est très facile à vérifier. Les résidus de fumée
peuvent... Dans les études qu'ils l'ont
fait, c'est simplement en prenant un échantillon, avec un type de coton, de
poussière. Donc, c'est quelque chose qui n'est pas compliqué à vérifier.
Mme
Charlebois :
Mais on n'a pas d'idée quelles maladies ça peut engendrer? Vous n'avez pas
d'exemple du tout, du tout, du tout?
Mme Montreuil (Annie) : Ce sont des
substances cancérigènes qui sont présentes dans le tabac, donc on se doute que
c'est le même genre de maladies que le tabagisme entraîne. On ne sait pas
quelle quantité, quelle quantité d'exposants les enfants doivent être exposés
pour développer plus tard ou pour augmenter leur risque de développer certaines maladies qui sont liées à l'exposition
au tabac. Ce sont des études qui sont assez récentes, qui datent de
quelques années, on n'est pas rendus là encore.
Mme Damestoy (Nicole) : Mais, dans
le domaine...
Mme
Charlebois : C'est
inquiétant, hein?
Mme Damestoy (Nicole) : Pardon.
Mme
Charlebois :
Excusez-moi. Allez-y.
Mme
Damestoy (Nicole) : J'allais dire : Dans le domaine, il n'y a pas
de seuil minimal. Dans le fond, on devrait viser une exposition nulle.
Mme
Charlebois :
Oui. Puis c'est inquiétant quand vous le dites, porter à la bouche des
particules qui étaient sur le tapis, juste y penser, ça nous fait peur
un peu.
Je vais vous amener maintenant sur
l'interdiction de fumer dans les établissements de santé. Vous avez sûrement
entendu notre dernier groupe qui est venu juste avant l'heure du dîner, les
directeurs de santé publique qui sont venus
nous présenter un mémoire, puis on nous a parlé justement, tout comme vous,
d'interdire le tabagisme dans les établissements de santé partout au
Québec, les centres jeunesse aussi, et aussi les centres de soins de longue
durée. Et je leur ai posé la question suivante, que je vais vous reposer :
On fait quoi de la marijuana thérapeutique?
Mme
Damestoy (Nicole) : Bien, on
ne s'est pas spécifiquement penchées sur la question — vous
avez vu que le mémoire est muet à ce sujet — puisqu'on a vraiment pris, je dirais, une
lunette d'analyse qui portait sur les conséquences à la santé publique, donc on regarde les impacts sur
la population en général. Par contre, donc, l'utilisation de la
marijuana, on rentre vraiment plus dans une dynamique thérapeutique. Donc, il
n'y a pas de positionnement officiel, je dirais, de l'institut, on n'a pas
étudié la question spécifiquement.
Par contre,
c'est sûr que, d'un point de vue clinique, il y a plusieurs... différentes
manières de prescrire la marijuana, il
n'y a pas uniquement la marijuana qui est fumée. Mais, à ce moment-là, on
rentre dans une relation médecin-patient, finalement, qui n'est pas du
ressort de la santé publique.
Mme
Charlebois : Parce
qu'on a eu d'autres échanges pendant l'heure du dîner, vous vous doutez bien,
hors commission — ça n'arrête jamais, là — et qu'est-ce que vous diriez si on statuait
sur des mesures d'exception? Parce que ce
qu'on me disait avant le dîner, c'est que c'est des cas d'exception en ce
moment. Admettons qu'il y en a plus, puis ce serait de toute façon dans du traitement à long terme,
probablement plus dans les CHSLD que dans les hôpitaux, que ça, ça va
être utilisé... Alors, si on faisait du traitement d'exception en abolissant le
40 % mais en gardant une possibilité pour ces personnes-là qui ne
pourraient peut-être pas se rendre dans un fumoir, au CHSLD, qu'est-ce que vous
en pensez?
Mme
Damestoy (Nicole) : Bien, c'est un peu difficile pour moi de vous donner
une réponse songée, puisqu'on n'a pas vraiment étudié la question.
Mme
Charlebois :
O.K. Vous n'êtes pas plus favorables aux fumoirs dans les établissements de
santé, que j'ai pris connaissance?
Mme Damestoy (Nicole) : C'est ça.
Mme
Charlebois : Pourquoi?
Mme
Damestoy (Nicole) : Bien, en
fait, la question des fumoirs dans les établissements de santé, c'est parce que... Bien, en ce moment, les fumoirs sont permis ainsi
qu'un certain nombre de chambres fumeurs dans certains types d'établissements, à condition qu'elles soient regroupées. Or, l'analyse de la mise en oeuvre de la Loi sur le tabac démontre qu'il y a des fumoirs qui ne
respectent pas les règles du jeu puis que les chambres ne sont pas toujours
regroupées, ce qui n'est pas toujours
facile à faire non plus, hein, il faut se rendre à l'évidence. Et donc ça
expose les patients qui sont non fumeurs de même que le personnel
soignant à une exposition involontaire à la fumée de tabac, le fait qu'on ne
soit pas capable de respecter les normes ou
d'appliquer le regroupement des chambres tel qu'il était prévu initialement.
Donc, c'est un peu une impossibilité d'appliquer les mesures qui étaient initialement prévues qui nous amène
vers cette réflexion.
Mme
Charlebois :
Pour le 40 %?
Mme Damestoy
(Nicole) : Oui.
Mme
Charlebois :
Pas pour le fumoir?
Mme Damestoy
(Nicole) : Fumoir aussi, oui.
Mme
Charlebois :
Ah oui?
Mme Damestoy
(Nicole) : Peut-être, Mme Montreuil peut compléter, puisque...
Mme Montreuil (Annie) :
Bien, selon le rapport de mise en oeuvre de la Loi sur le tabac 2005-2010, il
était rapporté que plusieurs
des fumoirs ne respectaient pas les conditions qui étaient énoncées dans le projet de loi, donc d'avoir des... de
fonctionner avec pression négative, une ventilation indépendante, d'avoir des
portes qui s'ouvrent et qui se ferment automatiquement. Donc, toutes ces conditions-là font en sorte
d'empêcher que la fumée sorte, et se propage ailleurs, puis expose d'autres
personnes que les gens qui sont à
l'intérieur du fumoir. Donc, il
semblerait, selon le rapport de mise
en oeuvre de la loi, qu'il y avait plusieurs problèmes au Québec, là, concernant ces
fumoirs-là. Donc, c'est pour cette raison-là et aussi parce que c'est cohérent avec la mission des établissements de santé d'empêcher qu'il y
ait des fumoirs et des
chambres fumeurs.
Dans certains établissements,
ça peut sembler plus difficile à implanter. Mais, comme on l'a documenté dans le mémoire, on a des exemples de... on a des données, en fait, sur les clientèles,
comme celles qui souffrent de problèmes de santé mentale, les gens qui sont aux prises avec des problèmes de
dépendance à d'autres substances. Ces
personnes-là, bien qu'elles fument en
plus grande proportion que la population en général, elles veulent autant que les autres arrêter de
fumer. Et souvent les professionnels ou les
intervenants sont réticents à... ce sont surtout les professionnels et les
intervenants qui ont des réticences à intervenir auprès de ces personnes-là
pour le renoncement au tabac.
Mais finalement on a
des expériences québécoises qui démontrent que les gens sont intéressés à se débarrasser de leur dépendance. Et même les gens
aux prises avec des problèmes de santé mentale veulent arrêter de fumer.
Et, lorsqu'on les accompagne et qu'ils ont un soutien, c'est quelque chose qu'il est possible de faire. Alors, puisqu'on a de plus en plus
d'évidence qui démontre que c'est faisable, donc on est allées de l'avant avec
cette recommandation-là.
Mme
Charlebois : Il y a
déjà des établissements à Montréal, si je ne m'abuse, qui ont fait de leur établissement
un établissement sans fumée.
Mme Montreuil (Annie) : Après nous, vous allez entendre l'Institut
Philippe-Pinel, vous pourrez leur demander plus de détails là-dessus.
• (14 h 30) •
Mme
Charlebois : Oui, c'est
ça. C'est certain qu'on va leur
demander comment ils ont accompagné les gens, et tout.
Je
vais aussi vous amener sur les terrasses, parce que c'est un... et puis
le neuf mètres. C'est deux sujets, là, qui font parler beaucoup par les temps
qui courent. Commençons par les terrasses. On nous dit que... certaines
personnes nous disent que nous
exagérons et qu'il faudrait permettre la moitié ou, encore là, un fumoir.
J'entends votre position que, non, on ne
va pas si loin que ça, qu'il faut absolument demander aux restaurateurs et aux
propriétaires de bar d'interdire la fumée de cigarette sur les terrasses. Est-ce que vous croyez que c'est mission impossible
ou si vous croyez que ça va être facilement fait? Est-ce que vous croyez
que la société est rendue là?
Mme
Damestoy (Nicole) : Je ne pense pas que ça soit mission impossible, au
contraire. Puis la fumée... Bien, comme
on explique dans le mémoire, la fumée de tabac sur la terrasse... je fais
référence au fait qu'on devrait réserver 50 % de la... on pourrait
réserver 50 % de la terrasse à des fumeurs. La présence des particules
fines associées à une cigarette consommée sur une terrasse fait monter les
composantes et l'exposition des gens qui sont autour. Ça, c'est un fait. C'est très variable, l'exposition qu'on
peut avoir sur une terrasse, ça dépend du nombre de fumeurs, de comment
ils sont assis sur la terrasse, comment le
vent tourne, etc. Et donc l'exposition sur la terrasse, pour les clients, soit,
mais ce qui nous concerne particulièrement, c'est l'exposition pour les
travailleurs qui ont à venir servir les clients de manière répétée pendant de
longues heures, et eux ont une exposition répétée à la fumée secondaire. C'est
mission possible, puisque ça ne serait pas
la première province, au Québec, qui appliquerait une telle mesure. Je ne sais
pas si mes collègues aimeraient compléter.
Mme Montreuil (Annie) : Bien, on
pourrait ajouter qu'on a des données qui démontrent que 70 % des Québécois sont d'accord pour interdire de fumer
sur une terrasse, alors on n'a pas vraiment de raison de croire que ça
ne se passerait pas
bien. Quand il a été interdit de fumer à l'intérieur des restaurants et des
bars, contrairement à ce qu'on appréhendait, ça s'est bien passé et ça a
bien été respecté, puis aujourd'hui tout le monde en profite.
Mme
Charlebois :
Est-ce que vous croyez que ça va prendre une surveillance supplémentaire ou si
les Québécois, Québécoises sont
rendus là? On n'a pas besoin d'une police pour se faire dire : Non, tu ne
peux pas fumer? Si on met de l'affichage,
si on dit aux gens : Maintenant, la loi, c'est que tu ne peux plus fumer
sur une terrasse... Pensez-vous que ça prend absolument quelqu'un pour
aller vous dire : Non, allez fumer en dehors de la terrasse?
Mme
Montreuil (Annie) : Bien, je
pense que, pour ces mesures-là, on peut sûrement s'inspirer de ce qui a
été fait dans les autres provinces. Donc, ils peuvent nous indiquer s'il y a
des mesures peu coûteuses, faciles à implanter, qui facilitent le respect de la loi. Par exemple, dans d'autres... je pense
à d'autres contextes, là, mais, dans les immeubles résidentiels, le fait de mettre des affiches qui
indiquent : Ici, c'est interdit de fumer, bien, ça donne plus de
légitimité aux non-fumeurs de dire : Bien, regardez, vous ne pouvez
pas fumer ici parce qu'il y a une... comparativement à quand il n'y a pas d'affichage
comme ça. Donc, ça, c'est une mesure qui est relativement peu coûteuse puis qui
peut faciliter l'implantation, incluant la participation des autres personnes,
là, pour faire respecter la loi.
Mme
Damestoy (Nicole) : Sept Québécois sur 10 se disent déjà en faveur.
Puis il faut faire appel, je dirais, à la bonne volonté des fumeurs. La
plupart des gens, quand c'est interdit, respectent les interdictions, hein?
Mme
Charlebois : Oui.
Puis je pense qu'honnêtement, pour avoir jasé avec des fumeurs, c'est des gens respectueux, quand même, pour la plupart. Puis il
y a plusieurs provinces qui l'ont mis en application — pour renforcer vos propos — et on pourra toujours, comme vous le dites,
s'inspirer de la pratique, comment ils ont pu faire ça. Puis j'ai même le goût de vous dire qu'il y a actuellement,
déjà, des propriétaires de restaurant qui le font, des bannières, mais
aussi des propriétaires indépendants, et je me demande comment ils ont réussi à
le faire.
Il y a le
neuf mètres aussi qui nous interpelle. Encore là, les commerçants... Vous
savez, quand on fait des projets de loi
comme ça puis qu'on veut protéger la santé des gens, on ne se lève pas le matin
en se demandant qu'est-ce qu'on peut faire
pour embêter les gens. Ce n'est pas ça, le but de l'exercice, c'est de protéger
la santé de l'ensemble de la population. Et là, quand on a mis la norme de neuf mètres, c'était justement neuf
mètres de la porte, évidemment, jusqu'à concurrence de la fin de la propriété de l'établissement. Parce
qu'il y en a qui pensaient qu'on envoyait les gens fumer au milieu de la
rue, mais ce n'est pas le cas, là, on ne veut pas faire tuer personne en
voiture.
Mais, ce que j'allais vous dire, ce neuf
mètres-là semble problématique justement pour ces propriétaires d'entreprise là qui disent qu'ils, encore là, vont
devoir avoir à mettre du personnel à l'extérieur pour superviser ce type de réglementation là. Qu'est-ce que vous
en pensez? Est-ce que c'est dans le même esprit que pour les terrasses, vous croyez? Est-ce
que vous pensez qu'on peut aller
aussi loin que ça, non seulement pour la santé
publique... Parce qu'on a des statistiques et des enquêtes qui nous
disent que, oui, il faut s'éloigner de l'établissement pour justement la
qualité de l'air, et tout. Mais, au-delà de
tout ça, est-ce que vous pensez qu'on
peut aller aussi loin que ça non
seulement pour la santé publique... Parce qu'on a des statistiques et des enquêtes qui nous disent que, oui, il faut s'éloigner de
l'établissement pour, justement,
la qualité de l'air, et tout, mais, au-delà de tout ça, est-ce que
vous pensez qu'on peut... on va trop loin ou qu'on peut aller jusque-là avec le neuf mètres, pour demander aux gens
d'aller fumer plus loin? Pourquoi on demande ça, là? Moi, j'ai la
réponse, mais je veux vous entendre.
Mme
Damestoy (Nicole) : Bien, encore une fois, le neuf mètres est, je dirais, un principe qui démontre à quel
point l'utilisation du tabac, et l'exposition à la fumée de tabac, est nocive
pour la santé des non-fumeurs. Donc, c'est un principe
qui s'appliquait jusqu'à présent à certains lieux qui, dorénavant,
si le projet de loi... serait dans tous les lieux publics et tous les lieux de travail. Donc, c'est vraiment
un geste significatif par rapport à ce qu'on comprend de cette exposition
involontaire. Est-ce que c'est nécessaire d'aller mettre des gens pour
surveiller? Bien, je pense qu'il y a une notion de logique et d'intelligence des
fumeurs. Comme on disait tantôt, les gens sont respectueux la plupart du
temps sans nécessairement avoir quelqu'un
qui les surveille. Mais je veux passer la parole à ma collègue
Mme Tremblay, qui...
Mme
Tremblay (Michèle) : Oui,
oui. Je veux juste renchérir sur ce que Mme Damestoy vient de dire. C'est
que, dans le fond, on a aussi une évolution de la norme sociale,
dans le sens que, quand le projet de
loi a été adopté
en 2005 et on a interdit de fumer à neuf mètres des établissements, de
certains établissements, c'étaient les établissements de santé, entre autres. Mais, quand vous allez l'hôpital, il y a un neuf mètres, et les gens font très bien
l'association que ce n'est pas très sain d'avoir à
passer à travers un nuage de fumée, définitivement.
Donc, je pense
que la norme, au niveau de notre société, elle est rendue là puis je
considère aussi que les fumeurs sont assez respectueux, sont très
conscients, dans le fond, que c'est dommageable pour la santé des non-fumeurs.
Ils souhaitent vraiment arrêter de fumer, ils ne sont juste pas rendus... ils
n'ont pas réussi encore, mais ils vont réussir à arrêter de fumer éventuellement. Puis je
pense qu'il faut aussi se rappeler
qu'on a 80 % de non-fumeurs au
Québec, et donc des gens qui ne sont...
ils sont chanceux, ils ne sont pas dépendants du tabac, mais qui ne devraient
pas avoir à subir cette exposition-là quand on arrive près des édifices
publics.
Mme
Charlebois :
80 % de non-fumeurs, c'est quand même considérable.
Mme Tremblay (Michèle) : Il faut ne
pas l'oublier, quand même.
Mme
Charlebois : Bien, voilà.
Mme Tremblay
(Michèle) : On l'oublie souvent.
Mme
Charlebois :
Exact, exact. Et, quand on passe à travers une haie d'honneur de nicotine, pour
ceux qui ont arrêté de fumer, comme
certaines personnes que je connais, dont moi, bien, c'est un rappel direct,
direct, puis c'est une renormalisation du geste de fumer. Alors, si on
éloigne, je pense que c'est un plus.
Je
vais vous faire parler de la cigarette électronique, évidemment.
Vous vous doutez bien qu'on ne peut pas passer outre ce sujet-là. Et je vais... Ça va même m'amener à parler de l'Institut national de santé publique, dans le sens
où votre mission... vous allez
chercher vos données où, votre mission, c'est exactement quoi. Puis, quand on
parle de cigarette électronique en ce moment, on passe notre temps à
dire qu'il n'y a pas d'étude. Puis vous savez comme moi qu'il y a un principe en santé publique qui dit que, quand
on n'a pas d'étude concluante à long terme, on ne peut... il y a un
principe de précaution. Alors, c'est pour ça qu'on a encadré la cigarette électronique
comme elle l'est en ce moment. On l'a amalgamée
avec les produits du tabac. Il y a les mêmes usages, les mêmes interdictions,
les mêmes points de vente, les mêmes conséquences et, dans la vente, où
on peut l'utiliser, à qui on peut vendre, et etc.
J'aimerais
ça vous entendre sur... Un, on a laissé le choix des saveurs, mais on s'est
gardé une porte ouverte qui, par règlement, nous permettrait, si on
s'aperçoit qu'il y a une petite dérive, que les jeunes se mettraient à fumer ça
ou que même... que la prévalence au tabac
augmenterait pour l'ensemble de la population, parce que ce serait une
passerelle, bien, que nous puissions réglementer pour, justement, interdire les
saveurs plus tard. Ça, c'est le premier élément.
Le deuxième élément,
je veux que vous me parliez des études concluantes — en fait, c'est votre
travail, je pense — c'est
de ça que je voudrais vous entendre, parce que les gens ont l'air sceptiques
quand on dit ça.
La Présidente (Mme
Hivon) : Il reste un 40 secondes pour répondre. Mais
peut-être que le sujet va revenir.
• (14 h 40) •
Mme
Damestoy (Nicole) : Oh! je vais aller sur la mission de l'Institut
national de santé publique. Donc, nous sommes
le centre d'expertise et de référence en santé publique au Québec, et notre
mission est de documenter avec la littérature
scientifique pour aider les décideurs à prendre leurs décisions qui ont des
impacts sur la santé publique, donc qu'est-ce
qu'on connaît, qu'est-ce que la science nous dit qu'il faut faire ou qui
fonctionne, qu'est-ce que la science nous dit qui ne fonctionne pas et
qu'est-ce qu'on ne connaît pas.
Et,
dans le domaine de la cigarette électronique, il y a beaucoup d'incertitudes
encore aujourd'hui. Il y a certaines études qui émergent, notamment par
rapport à l'efficacité de la cigarette électronique pour aider les fumeurs à
cesser, mais il y a seulement deux études
qui ont été faites de manière rigoureuse qui commencent à examiner cette
question, donc c'est très insuffisant avant
de conclure définitivement. Et il y a certains éléments d'étude qui nous
laissent présumer qu'il pourrait y avoir un lien, chez les jeunes en
particulier, entre l'utilisation de la cigarette électronique et une utilisation
éventuelle de la cigarette traditionnelle,
ou, disons, un intérêt. Mais on n'a pas encore suffisamment de données pour
être en mesure d'affirmer qu'il y a vraiment un lien de cause à effet. Mais il
y a quand même des doutes, des incertitudes qui nous font croire que ce que vous avez mis de l'avant, qui est une
approche très prudente, surtout par
rapport à l'attrait que la
cigarette électronique a envers les jeunes, c'est une mesure qui nous semble
très prometteuse, parce que...
La
Présidente (Mme Hivon) : Je vous remercie, je vous remercie. On doit cesser ici, mais peut-être
que ça va revenir. Donc, je cède maintenant la parole, pour une période
de 13 minutes, à l'opposition officielle.
M.
Lisée : Merci, Mme la Présidente. Dre Damestoy, Dre Laguë,
Dre Tremblay, Mme Montreuil, merci d'être là. Effectivement, vous avez fait un travail de recension
scientifique important. Je vais vous parler de plusieurs sujets mais
d'abord d'un élément qui est absent du projet de loi, qui est l'emballage
neutre ou standardisé. Il y a un débat... bien, il y a un débat... je ne pense
pas qu'il y ait un débat scientifique, mais les cigarettiers affirment qu'il y
a un débat, c'est leur façon d'essayer de semer le doute, sur
l'efficacité de la mesure. Vous citez un certain nombre d'études subséquentes à la décision de l'Australie d'imposer l'emballage
standardisé. J'aimerais ça que vous nous en fassiez un résumé. Quelle
est la connaissance scientifique, en ce moment, de l'impact de l'emballage
neutre sur la consommation, la volonté de quitter le tabagisme?
Mme
Damestoy (Nicole) : Alors,
je passerais la parole immédiatement à ma collègue qui a examiné cette question en
particulier.
Mme Tremblay
(Michèle) : Bien, écoutez, l'expérience de l'Australie, elle est
jeune. Ce qu'on avait comme études auparavant,
c'étaient plutôt des études où on allait valider avec des adultes fumeurs ou
avec des jeunes. On leur montrait des paquets, que ce soit un paquet
neutre ou un paquet de marque, et on leur demandait toutes sortes de questions par
rapport à l'attrait que ça pourrait avoir, par rapport à leur perception de la
nocivité des cigarettes qui se trouveraient dans un paquet neutre versus un
paquet qui est de marque. Et c'était déjà assez intéressant de voir que, dans le fond, les paquets brun foncé, pas très intéressants, avec des grandes mises
en garde, les gens percevaient que c'était un produit de qualité
moindre. Ce que l'Australie a fait en...
M.
Lisée : Ils ont
l'impression, en voyant un paquet qui est neutre, qui est standardisé, qui
n'est pas attrayant...
Mme Tremblay (Michèle) : Voilà.
Voilà, absolument.
M.
Lisée : ...ils en tirent la conclusion que ça ne doit pas être
de bonne qualité.
Mme
Tremblay (Michèle) : Voilà.
Vous m'avez bien comprise. Depuis décembre 2012, avec l'Australie
qui a décidé d'aller de l'avant avec
l'emballage neutre, ils ont commencé à faire des études, ils ont fait ce même
genre d'études, à savoir auprès de
fumeurs qui avaient vu... depuis que l'emballage neutre était en place, quelle
était leur perception du paquet, et
ils ont retrouvé à peu près la même chose, c'est-à-dire que le paquet
n'était pas vraiment attrayant. Puis je ne sais pas si vous
avez vu les paquets, c'est brun olive, c'est vraiment la couleur la plus
inintéressante qu'il n'y a pas. Et donc ils ont aussi...
Il
faut dire qu'en Australie, par la même occasion, ils ont décidé d'augmenter la
grandeur des mises en garde sur le
paquet. Donc, ce que ça a fait, c'est que, dans le fond, les mises en
garde ont été beaucoup plus remarquées sur ce type de paquet là que lorsqu'on avait un paquet bleu
pâle, avec toutes sortes de beaux dessins graphiques où là on distrayait
les gens de ça.
Donc,
à la fois chez les adultes, ils ont remarqué ça, donc diminution de la
perception de l'attrait, c'est déjà une première chose, diminution de la perception de la qualité des
cigarettes. Ils avaient l'impression que le style de vie qu'on veut
faire porter avec la marque de cigarettes, ça ne leur appartenait plus puis ce
n'était pas eux...
M.
Lisée : C'est moins
sexy, là, pour... On pogne moins avec ce paquet-là qu'avec des paquets
attrayants. Voilà.
Mme Tremblay
(Michèle) : Absolument. Et ce qu'ils ont aussi remarqué, c'est que, dans
le fond, la mise en garde étant tellement
prédominante sur l'emballage neutre, le fumeur, lorsqu'il fume 20 fois par
jour, son paquet, il le sort, il le
regarde et il tombe toujours sur la mise en garde et l'image qui est très
forte, et donc ça le porte à réfléchir — il sait très bien que
ce n'est pas bon pour la santé, mais il a besoin de fumer — et donc ça le portait à réfléchir plus à
l'idée d'arrêter de fumer. Et ils ont même observé que les fumeurs
avaient plus l'intention... et qu'ils cachaient leurs paquets pour ne pas voir la mise en garde, et même qu'ils
cessaient en plus grande proportion de fumer. Ce sont des premières études
et...
M. Lisée :
Ils cessaient en plus grande proportion de fumer...
Mme Tremblay
(Michèle) : Oui, ils faisaient...
M. Lisée :
...à cause des mises en garde et de la nouvelle présentation non attractive du
paquet.
Mme
Tremblay (Michèle) : Voilà. Bien, je vous dirais qu'ils faisaient plus
une tentative d'abandon du tabac. Puis on
le sait que, quand on fait une tentative d'abandon du tabac, on n'a pas
95 % de taux de succès, c'est très difficile. Mais ça, ce sont des
données qui sont extrêmement intéressantes, parce que, là, on n'est plus dans
l'essai, la perception, on commence à être
dans l'intention et le comportement dans un monde réel. Et donc cette
expérience-là, elle est extrêmement intéressante.
M. Lisée :
D'accord. Donc, il y a toutes les raisons qui militent en faveur du fait que le
Québec devrait faire comme l'Australie pour avoir des résultats comparables.
Mme Tremblay
(Michèle) : Absolument. Parce que, dans le fond, ce n'est pas
qu'auprès des adultes que ça incite à
arrêter de fumer, ça a aussi un impact au niveau des jeunes, qui sont
extrêmement intéressés, ils ont été ciblés depuis tellement d'années par
les sortes de paquets de cigarettes. Puis je pense que les gens de d'autres
organismes vous en parleront, mais les
paquets... c'est incroyable la quantité de sortes de paquets, des paquets sous
forme de briquets, des paquets qui
ressemblent à des boîtiers cosmétiques. Et donc, toutes les stratégies pour rendre
le paquet très attrayant, très cool, c'est les jeunes que ça vise en
grande partie.
M.
Lisée : Il y a un chiffre ici, dans votre mémoire :
«Finalement, l'introduction de l'emballage neutre en Australie [a]
engendré une hausse [...] de 78 % des appels à la ligne d'aide à l'arrêt
tabagique.» C'est considérable.
Mme Tremblay
(Michèle) : Voilà. C'est considérable et ça s'est poursuivi sur une
longue période de temps.
M.
Lisée : Sur un autre sujet, bon, les terrasses. On va avoir
M. Sergakis, tout à l'heure, qui va venir nous dire que,
finalement, ce n'est pas très grave qu'il y ait de la fumée sur les terrasses,
et qu'on devrait avoir des sections fumeurs et
non-fumeurs séparées d'un mètre et demi, et que, si on ne fait pas ça, il va
nous poursuivre. Bon, alors, on est... on tremble dans nos bottes, là,
on a hâte d'en discuter avec lui tout à l'heure.
Mais ce que j'ai
trouvé plus intéressant, c'est les détaillants, des gens des bars et des
restaurants qui ont des terrasses, qui nous disent : Bon, bien, écoutez,
on avait interdit à l'intérieur du restaurant parce qu'il y avait la
possibilité d'aller sur la terrasse. Là, maintenant, on va interdire sur la
terrasse, et là, évidemment, le fumeur... Parce qu'on dit : Oui, il y a
80 % de fumeurs, oui, il y a 20 %...
Mme Tremblay
(Michèle) : Pas de fumeurs...
M. Lisée :
...de non-fumeurs. Il y a 80 % de non-fumeurs, très bien. Oui, mais ça
veut dire qu'il y a 20 % de fumeurs,
puis on dit : 1 million... vous avez dit : 1 million de
Québécois qui fument. Ça fait quand même beaucoup de monde. Puis je suis sûr que la majorité d'entre
eux savent que c'est mauvais pour la santé, aimeraient arrêter de fumer.
Moi, mon père, il arrêtait de fumer tous les deux mois. Je veux dire, il le
savait que c'était mauvais pour la santé.
Et
il y a la moitié d'entre eux qui ont dit, dans le sondage Léger, qu'ils étaient
favorables à l'interdiction sur les terrasses,
il y en a la moitié d'entre eux qui ont dit qu'ils étaient défavorables à
l'interdiction. Donc, on a quand même, là, une minorité significative de fumeurs qu'on va affecter dans leur vie
personnelle et parfois à leur corps défendant. Vous avez parlé : J'aimerais arrêter de fumer,
j'ai essayé six fois, je n'y arrive pas; si je vais à la terrasse, ça me prend
ma cigarette au moins à l'heure. Tu sais, c'est physique, là, c'est du
poison, ça. Vous le savez que c'est du poison, hein?
Bon, alors là, on
dit : Écoutez, vous ne pourrez pas fumer sur la terrasse, il n'y aura pas
de section fumeurs, non-fumeurs, et en plus
vous ne pouvez pas fumer à neuf mètres autour. Et vous, vous avez fait... Vous
avez regardé dans les provinces, il y
en a que c'est trois mètres, il y en a que c'est quatre mètres, il y en a que
c'est neuf mètres, il y en a que ce
n'est rien, il n'y a rien de prévu. Sauf que, dans plusieurs cas, on va avoir
une situation où, sur la Grande Allée ou sur la rue Crescent, bien, c'est des terrasses une à côté de l'autre et qui
donnent directement sur la rue, et donc les fumeurs vont se mettre sur le trottoir où ce n'est pas
interdit, et il va y avoir des amas de fumeurs à côté des terrasses.
Comment on résout ce problème-là?
Mme Montreuil
(Annie) : Bien, d'abord, je voudrais répondre à la proposition de
mettre des zones fumeurs et non-fumeurs. Ce
que les études démontrent, c'est d'abord que, l'exposition aux particules
fines, on est capables de la mesurer
même sur une... dans un lieu extérieur comme une terrasse. Les seuils ne
dépassent pas toujours les conditions qui sont... c'est-à-dire les normes des organismes de santé comme l'OMS,
mais il reste quand même qu'on est capables de... on voit, on est capables de déceler chez les gens,
dans l'air... les tests qui sont faits avec des machines, dans l'air
mais aussi dans le sang puis la salive des non-fumeurs exposés, qu'il y a une
augmentation. On est capables de déceler les biomarqueurs
de l'exposition à la fumée de tabac chez eux. C'est hautement variable, selon
le vent, selon le nombre de fumeurs,
la proximité de fumeurs, l'endroit où la terrasse est placée. Est-ce qu'on est
au centre-ville avec des gratte-ciel ou on est dans un club de golf? Donc, ça va faire une énorme différence sur
la quantité. Puis, au niveau des moyennes entre toutes ces différentes conditions là, on est quand même capables de
déceler une augmentation des marqueurs de l'exposition à la fumée, on
est capables de la mesurer.
Alors,
l'idée de faire une zone fumeurs et non-fumeurs sur la terrasse, étant donné
que la fumée voyage comme ça de... Je
veux dire, ça ne fonctionne pas à l'intérieur, ça ne fonctionne pas plus à
l'extérieur. Donc, ce serait une mesure inutile, en fait.
Les
fumeurs, six mois par année, quand c'est l'hiver, ils n'y vont pas, sur la
terrasse. Qu'est-ce qu'ils vont... Ils vont
fumer à l'extérieur. Ces mesures-là ont aussi un impact sur le changement de
comportement des gens.
Rappelez-vous, en 2005, lorsqu'il était
interdit de fumer à l'intérieur des restaurants et des bars, à l'institut on a
fait une étude, on a suivi des...
bien, on ne les a pas suivis, on les a interrogés, on les a interviewés au
téléphone, un groupe de fumeurs, une cohorte de fumeurs et d'anciens
fumeurs récents qu'on a appelés un mois avant l'interdiction et un an et demi
après, et ce qui est ressorti de ce
sondage-là, c'est que, notamment pour les restaurants, la moitié des fumeurs qui
fumaient avant au restaurant, à l'intérieur, la moitié ne fumaient plus
quand ils allaient au restaurant, donc ils ne prenaient même pas la peine de sortir pour aller fumer, ils ne fumaient
plus, puis l'autre moitié continuait à fumer. Dans les bars, c'était
plus élevé, mais les gens sortaient, puis on voyait qu'ils fumaient un moins grand
nombre de cigarettes, mais ils allaient fumer dehors et puis...
• (14 h 50) •
M.
Lisée : D'accord.
Mais, dans l'état actuel du projet de loi, sur Grande
Allée, ou sur Crescent, ou sur Mont-Royal,
où il y a des terrasses une à côté de l'autre, l'endroit où
les fumeurs pourraient fumer, c'est sur la voie publique. C'est
problématique.
Mme Montreuil
(Annie) : C'est problématique, mais ça ne veut pas dire que c'est
impossible à faire. Puis, s'il y a plusieurs autres provinces qui ont réussi,
d'autres grandes villes à travers le Canada ont réussi — Montréal,
Québec, c'est parmi les dernières grandes
villes où ce n'est pas interdit de fumer sur les terrasses — alors il y a sûrement moyen de... Nous, on n'a pas regardé cet
élément-là dans notre mémoire, mais, si on regarde un peu ce qui se fait
autour de nous, il y a sûrement... on peut
sûrement aller puiser dans les expériences des autres provinces pour trouver
des façons de rendre ça faisable et...
M.
Lisée : Très bien. Bien, ça, ça m'intéresse beaucoup, parce
que, tu sais, si on disait que le neuf mètres s'applique à l'espace
public, bien là, la Grande Allée serait complètement une rue non-fumeurs, tout
simplement.
Une voix :
Ce serait une bonne chose.
M. Lisée :
Vous, vous dites que ce serait une bonne chose. Bien, c'est une...
Une voix :
Un trottoir.
M. Lisée :
Oui, un trottoir, mais c'est parce que, justement, si tu as trois fumeurs qui
vont sur le trottoir de la Grande Allée et
qui fument à côté de la terrasse qui est non-fumeurs, bien, c'est comme s'il y
avait une section fumeurs dans la terrasse, parce que l'exposition à la
cigarette est la même.
Mme Tremblay (Michèle) : Mais je
serais portée à vous dire...
M. Lisée :
Pardon?
Mme
Tremblay (Michèle) : Je serais porté à vous dire que les fumeurs, oui,
quand ils fument un paquet par jour, vont avoir des fortes envies de
fumer de façon régulière aux heures, mais il y a des gens qui se promènent en
avion pendant six, sept, huit heures, alors
il y a possibilité de se retrouver dans une situation sans avoir à aller fumer
aux heures. Il y aurait sûrement des
alternatives qu'ils pourraient utiliser si le manque est trop grand. Et je ne
suis pas certaine que les gens vont passer des cinq, six heures sur les
terrasses non plus. Puis souvent, quand on est au resto, on peut passer deux
heures, les gens vont fumer dehors une cigarette puis ils reviennent.
M. Lisée : Oui, mais on sait
que les fumeurs sortent par moins 20° pour aller fumer, alors ils sont
résilients, ils sont résilients.
Mme Tremblay (Michèle) : C'est
clair.
M. Lisée : Sur la question
des espaces sportifs, je suis un peu scandalisé d'apprendre, en vous lisant,
qu'on peut fumer à la pataugeoire en ce
moment, sauf dans Côte-Saint-Luc, qui semble un des endroits au Québec où on
disait : Bien, non, dans les parcs,
dans les pataugeoires, etc., on n'a pas le droit de fumer, y compris à neuf
mètres des pataugeoires. Alors donc,
moi, je suis tout à fait d'accord avec vous. Je fréquente des pataugeoires,
compte tenu de l'âge de mes enfants, mais je n'ai jamais vu personne
fumer. Alors, je pense que ça devrait devenir une règle générale.
En ce moment,
la loi interdit l'utilisation de cigarettes dans les espaces sportifs fermés
mais pas les espaces ouverts comme le
Stade Saputo ou le stade Molson. Est-ce que vous, vous proposez que, même dans
des endroits sportifs ouverts, ce soit interdit?
La Présidente (Mme Hivon) :
Je vous demande une réponse en 15 secondes.
M. Lisée : Oui ou non?
Mme Montreuil (Annie) : Bien, ce
qu'on propose... Oui.
M. Lisée : Oui? Merci.
Mme Montreuil (Annie) : Mais, ce sur
quoi on s'est penchés, on pensait plus aux endroits publics de jeu qui s'adressent aux jeunes et aux adolescents. On
avait vraiment la perspective de diminuer l'exposition sociale des
jeunes et des adolescents, parce qu'on sait
que ça entraîne une augmentation de l'initiation au tabagisme puis que c'est
cohérent avec plein d'autres mesures qui sont déjà en place pour diminuer la
visibilité du tabac pour les jeunes.
La
Présidente (Mme Hivon) : Merci. Merci beaucoup. Alors, je vais
maintenant céder la parole au deuxième groupe d'opposition pour une
période de neuf minutes. M. le député de Groulx.
M. Surprenant : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, mesdames. Alors, j'aime bien le débat au niveau des terrasses, puis on va y revenir tantôt, mais j'ai
une question peut-être un peu plus pragmatique, pour l'instant, plutôt
que sociale, au niveau comportemental,
social. Alors, vous avez mentionné que vous suggéreriez un huit heures
précédant l'ouverture d'une garderie pour
éviter qu'il y ait de la fumée et la toxicité que cela peut avoir, également ce
qui s'imprègne au niveau des objets
pour les enfants, parce qu'ils mettent ça dans leurs bouches, le risque que ça
peut avoir au niveau de la santé, qui, pour l'instant, est inconnu.
Alors, dans
un mémoire qu'on a reçu plus tôt, on n'en avait pas fait état, le mémoire
venait de la Fondation des maladies du coeur. Alors, je vais juste vous
lire un petit paragraphe qui disait que «même après que la fumée se soit estompée, ces substances toxiques — toxiques, j'ai bien dit, puis là il n'y a
pas de doute, il me semble, c'est toxique — peuvent se retrouver sur les surfaces environnantes, un effet appelé fumée
tertiaire». Alors, c'est un concept qu'on ne connaissait pas. On a la
fumée secondaire, mais là on parle de fumée tertiaire.
Alors :
«Une étude [a été] publiée dans la revue Pediatrics [et] nous apprend
que plusieurs personnes ne sont pas conscientes
de ce problème. "Nous savons que certaines composantes de cette fumée
tertiaire sont toxiques. Les résidus de quelque 250 métaux, substances chimiques et autres éléments
toxiques contenus dans la fumée de cigarette s'incrustent dans les meubles, les tentures, les tapis et les
autres surfaces et y demeurent longtemps après que la fumée se soit
dissipée..."»
Alors, ça
peut s'appliquer à une garderie, mais je vais faire l'avocat du diable et je
vais parler de l'automobile. Alors,
quand les gens fument dans l'auto... Là, on parle d'interdire que les gens fument
alors que leurs enfants sont dans l'auto.
Mais, vous savez, les gens fument même quand les enfants ne sont pas là. Il y a
des conséquences à ça. Il y a des tissus dans les autos, alors ça
absorbe la fumée, puis ça reste là. Puis même les gens peuvent avoir fumé, et,
quelques minutes après, tout le monde embarque dans l'auto et on part, donc il
y a de la boucane encore en suspens. Alors, est-ce qu'on ne devrait pas, de ce côté-là aussi, envisager d'interdire de
fumer un certain temps avant que des enfants entrent dans l'auto,
finalement?
Mme
Damestoy (Nicole) : Bon, alors, je vous dirais : Il faut
commencer quelque part et, en ce moment, à l'intérieur des véhicules automobiles... Donc, ça, c'est bien démontré
que la concentration des composés toxiques associés à la fumée secondaire peut
augmenter très rapidement dans une voiture, surtout quand les fenêtres sont
fermées, puis, au Québec, les fenêtres, elles sont fermées souvent. Et
c'est cette exposition de courte durée à des niveaux très intenses qui nous
préoccupe en ce moment, et, en ce moment, il n'y a rien pour protéger les
enfants de cette exposition-là.
Par contre,
vous avez raison, c'est-à-dire que, l'utilisation de la cigarette dans un
milieu fermé comme une voiture, c'est sûr que ça fait des composants qui
se déposent puis c'est sûr qu'il y a une exposition à la fumée tertiaire aussi.
Mais commençons par ce qui est déjà le plus
nocif, le plus flagrant. Et, dans le cas de l'exposition des enfants de
moins de 16 ans à l'intérieur d'un véhicule automobile, le Québec est la
dernière province à se pencher sur cette mesure. Un.
Deux,
l'exposition des enfants à des produits de fumée tertiaire à l'intérieur d'un
véhicule est pas mal moins grande, en
durée, que l'exposition qu'ont des enfants dans une garderie, qui y passent
jour après jour l'entièreté de leurs journées. Ça atteint un niveau
d'exposition plus grand. Les enfants sont dans la garderie toute la journée,
tous les jours et ont des activités qui font
en sorte qu'ils ingèrent les particules. Je ne vous dis pas que... C'est vrai,
éventuellement, dans la voiture, vous
avez raison, mais, en niveau de... Si on a à prioriser les interventions,
l'exposition à la fumée secondaire à l'intérieur du véhicule est
vraiment celle qu'on devrait prioriser, d'autant plus qu'on est la dernière
province à mettre une telle mesure de l'avant.
M. Surprenant : Vous avez dit :
À l'intérieur des véhicules, qu'on devrait prioriser?
Mme Damestoy (Nicole) : C'est-à-dire,
le fait de fumer lorsque les enfants sont à l'intérieur de la voiture.
M.
Surprenant : De fumer, simplement. D'accord, d'accord. Alors, vous
dites que le risque serait moins grand dans
l'auto parce que les enfants y sont moins longtemps. J'en conviens qu'ils sont
généralement moins longtemps dans une auto,
quoique parfois on peut faire des longs voyages en voiture, alors... Dans une
garderie, les espaces, par contre, sont beaucoup plus grands pour que la
cigarette puisse se diluer. Dans une voiture, c'est concentré comme espace.
Alors, j'aimerais que... j'apprécierais si vous pouvez m'indiquer le risque de
toxicité dans un espace restreint, alors que...
Mais je me souviens, en fait, ma jeunesse... On
était six chez moi, et les cinq autres fumaient dans l'auto, évidemment. Moi, je ne fumais pas. Mon père est
mort du cancer. Ma mère, elle fait de l'emphysème puis elle va... il ne
lui en reste pas longtemps. Alors, je
m'attends à ce que moi aussi, un jour, j'écope de ça. Alors, qu'est-ce qu'on
peut faire pour que les jeunes
d'aujourd'hui n'écopent pas de ça? Parce qu'à mon avis il y a une concentration
importante de boucane. Puis les gens, souvent, fument un, deux puis
trois paquets par jour, là, bien souvent, puis je l'ai vécu. Alors, de la boucane, il y en avait dans l'auto puis il y en a
encore dans les autos, encore, des gens qui fument beaucoup, donc des
enfants affectés par ça.
Et on parle... au niveau de la vapoteuse, il y a
une faible toxicité. Si on fait une comparaison, dans une auto, la toxicité,
une fois que les gens ne fument plus, est-ce qu'elle pourrait être équivalente
à une vapoteuse, à la limite? Est-ce que
vapoter serait moins pire que de retrouver un enfant dans une auto alors que
les gens ont fumé beaucoup puis qu'il y a de la toxicité qui demeure là?
Mme Damestoy (Nicole) : Je vais
passer la parole à ma collègue.
• (15 heures) •
Mme Montreuil (Annie) : Je vais
commencer par votre dernière question. Donc, ce qui ressort des études
actuellement, ce qu'on sait sur les effets de la vapeur de cigarette
électronique sur la santé, c'est que c'est beaucoup moins nocif que la fumée de
tabac. Ce n'est quand même pas un produit inoffensif, mais il y a beaucoup
moins de substances toxiques que dans la fumée de tabac. Quels sont les effets
à long terme ou quelle quantité ça prend pour entraîner des... ça, on ne le
sait pas encore, il est trop tôt.
Donc, dans
une voiture, l'exposition des jeunes
à la fumée est très toxique... c'est-à-dire les niveaux peuvent être élevés, puis ils sont confinés parce que
l'espace est petit. Donc, la proximité avec le fumeur fait en sorte que
l'exposition peut... Il y a
des études qui disent... Par exemple, juste pour vous donner un ordre de grandeur, les
normes de l'OMS, c'est :
au-dessus d'une exposition de 25 à 30 microparticules sur une période
de 24 heures, c'est dommageable pour la santé. Alors, dans une voiture, il
y a des études qui montrent qu'on
peut se rendre à 42. Même sur une courte période de temps comme 10 minutes, si on rapporte sur
24 heures, ça donne une moyenne de 42, donc déjà on dépasse beaucoup
les normes. Et les enfants ne peuvent pas, dans une voiture, trouver une autre
alternative, dire à leurs parents : Bon, bien, je vais y aller en métro ou... Ils ne peuvent pas se déplacer par
eux-mêmes. Donc, c'est pour ça qu'on trouve que c'est une... On
recommande d'interdire de fumer dans les voitures en présence d'enfants.
Mais par contre... Puis, dans ce même cubicule
là, on peut penser que l'exposition aux vapeurs de cigarette électronique qui... On sait aussi qu'il y a
de la nicotine qui est transmise dans la vapeur. Donc, oui, la vapeur est
moins nocive que la fumée de tabac, mais, à
long terme, dans une voiture, on ne sait pas quels seraient les effets de
l'exposition des enfants à ces
substances-là. Donc, le fait que l'interdiction de fumer dans la voiture en
présence de jeunes s'applique aussi à la cigarette électronique, ce
serait logique en fonction de ce qu'on sait aujourd'hui et surtout de ce qu'on
ne sait pas aujourd'hui.
Mme Damestoy (Nicole) : Mme Tremblay
voulait compléter.
Mme
Tremblay (Michèle) : Moi, je pense que vous avez une très bonne idée
de sujet de recherche, dans le sens... oui,
dans le sens que je ne suis pas... Il faudrait qu'on retourne voir s'il y a
vraiment des études... Maintenant qu'on interdit de fumer de plus en plus dans les voitures, ça serait intéressant
d'aller mesurer, effectivement, le taux de composantes toxiques qui demeurent
quand on ne fume pas en présence d'enfants, mais qui demeurent dans les tissus
de voitures. Je trouve que c'est...
il me semble que c'est une excellente... Mais je ne crois pas qu'on ait les
données, pour l'instant, pour pouvoir
comparer si ça, c'est plus nocif que, par exemple, à l'intérieur de milieux de
garderie, mais je pense que c'est une excellente idée.
Mais je serais portée à dire, comme Dre Damestoy,
que, dans le fond, déjà d'interdire de fumer en présence d'enfants dans les voitures, c'est une première
étape, puis effectivement peut-être que, dans quelques années, on sera
rendus à une autre étape où, là, on suggérera
très fortement aux gens de ne jamais fumer dans leurs voitures à cause des
composantes qui y demeurent très longtemps et qui seraient respirées par des
gens qui ne fument pas. Donc, moi, je trouve que c'est une très bonne idée de
recherche.
M. Surprenant : Merci.
La Présidente
(Mme Hivon) : Bon. Alors, je vous remercie. Il reste
20 secondes. Est-ce que vous pouvez être très rapide?
M. Surprenant : Non, en fait, je
n'ai pas de question de 20 secondes. Je peux laisser aller.
La
Présidente (Mme Hivon) : Pas de... Désolée, c'est rapide. Donc,
écoutez, je vous remercie beaucoup, à vous trois, pour une présentation
très intéressante.
Et, sur ce, je vais suspendre les travaux
quelques instants et demander au prochain groupe de prendre place, s'il vous
plaît.
(Suspension de la séance à 15 h 3)
(Reprise à 15 h 5)
La Présidente (Mme Hivon) :
Alors, nous reprenons nos travaux, et je tiens à souhaiter la bienvenue aux
représentants, représentante de l'Institut Philippe-Pinel. Donc, je vous
invite, pour les fins d'enregistrement, à bien vouloir, d'entrée de jeu, vous identifier, ainsi que les personnes qui
vous accompagnent. Et je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour faire votre présentation. La parole est à vous.
Institut Philippe-Pinel de Montréal
Mme Fugère
(Renée) : Alors, merci de
nous avoir convoqués. Mme la
Présidente, Mme la ministre, membres de la commission,
je suis Renée Fugère, je suis la présidente-directrice générale de l'Institut
Philippe-Pinel de Montréal. À ma
droite, il y a le recteur, Paul-André
Lafleur, qui est médecin psychiatre et qui, au moment de l'implantation du
projet d'Hôpital sans fumée, était le directeur général, donc il est l'artisan
de ce projet. Et, à ma gauche, il y a M. Jean-Sébastien
Turcotte, qui est le directeur des soins
infirmiers, direction des programmes de l'institut, qui viendra témoigner, si
vous voulez, de l'évolution depuis les 10 dernières années.
Dr Lafleur se concentrera sur l'historique et aussi le processus
d'implantation.
M. Lafleur
(Paul-André) : Peut-être
commencer en vous disant qu'en psychiatrie c'est particulier, c'est-à-dire que la cigarette a toujours été
beaucoup plus tolérée que dans d'autres milieux de la santé. On fait toujours
une distinction, et ça paraît même
dans le projet de loi. Pour dire combien on revient de loin, l'Institut
Philippe-Pinel de Montréal, dans le temps
où j'ai accédé à la direction générale, non seulement les patients pouvaient
fumer et partout, mais encore, nous leur fournissions les cigarettes. Et
les membres du personnel de l'unité aidaient les plus malades à rouler leurs
cigarettes, parce qu'évidemment, pour économiser un peu, c'était du tabac et du
papier. Donc, nous partions de loin.
Mais il a
fallu bouger, il a fallu évoluer, pour différentes raisons. D'abord, je pense
qu'il y a eu de la sensibilisation croissante
non seulement de la population, mais en particulier des gens qui travaillent
dans le domaine de la santé, donc des membres du personnel de l'Institut
Philippe-Pinel de Montréal, de certains patients aussi qui ont été de plus en
plus inquiets des effets que le tabac pouvait avoir sur eux, et de la fumée
secondaire, notamment. Parce qu'il faut savoir que la fumée secondaire, c'est
plus tard qu'on a compris à quel point elle était néfaste. On a fait face à des
problèmes croissants. J'en nommerais
un : le recrutement. On a déjà perdu d'excellentes infirmières qui
venaient faire un tour puis qui disaient : Non, moi, je ne viendrai
pas travailler dans un milieu aussi enfumé, et on pouvait les comprendre.
Et puis
finalement, bien, ce qui nous a donné l'élan, ça a été, évidemment, les
nouvelles dispositions, en 2002 et surtout
en 2003, par rapport à la Loi sur le tabac de l'époque. On se trouvait... En
fait, si on ne modifiait pas nos façons de faire par rapport au tabac,
évidemment, on allait être dans l'illégalité. Pour un institut en psychiatrie
légale, c'était tout à fait déplorable d'être dans l'illégalité. Alors, on a
regardé toutes les possibilités, on a consulté dans les milieux environnants, les autres milieux de la santé, puis
il y a des gens qui disaient : Bien, moi, je ne fais rien, on attend que
les choses changent, au fond, puis on verra en temps et lieu. Il y a eu des
demi-mesures. Par exemple, on reporte le tabac à trois mètres des portes de l'institution, mais, à l'intérieur, on ne
regarde pas trop ce qui s'y passe, donc des demi-mesures. Il y a des espèces de mesures inefficaces. On a
regardé la possibilité d'établir des fumoirs à l'Institut Philippe-Pinel
de Montréal. Pour des raisons architecturales que je vous épargne, ça aurait
été un coût absolument faramineux.
Ensuite, bien, il y a les compromis
douteux. On a pensé, par exemple, à laisser les patients fumer dehors, les
laisser fumer dans leurs chambres. Dans
leurs chambres, ce n'était pas possible. 40 % des chambres, seulement,
devaient être allouées à des fumeurs.
Qu'est-ce qui allait se passer pour... En fait, on avait près de 80 %,
85 % des patients qui fumaient. Qu'est-ce qui allait arriver avec
les autres? Fumer dehors, ça pouvait être en contravention avec certaines
activités thérapeutiques. On aurait eu
constamment de la pression pour permettre aux patients de sortir, et ça
pouvait... Aussi, ça brimerait ceux
qui étaient plus malades, ceux qui ne pouvaient pas sortir pour différentes
raisons. Donc, il fallait qu'on trouve une autre solution, et celle à
laquelle on est parvenus, c'est celle de l'Hôpital sans fumée.
Il y a eu plusieurs
obstacles à l'établissement d'un hôpital sans fumée. Le premier, c'étaient les
mythes qui circulent autour des patients psychiatriques et du tabac. Le
premier, le plus important de ces mythes, c'était : ils vont devenir
dangereux encore plus. Les patients de l'Institut Philippe-Pinel de Montréal,
par définition, sont dangereux. Mais là on
s'est fait dire : Ça va être épouvantable, vous allez avoir des passages à
l'acte, vous allez avoir des bagarres, et tout ça, ça risque d'être
terrible. C'est un mythe.
Et
on a pu un peu atténuer les craintes, quoique pas complètement, parce qu'un
mythe est difficile à déraciner, par
l'expérience qui avait été faite ailleurs, parce qu'on était le deuxième
hôpital au Canada à procéder ainsi. Et l'autre institution en
psychiatrie qui a fait la même chose, évidemment c'est un hôpital de
psychiatrie légale, celui de Penetanguishene
en Ontario, sécurité maximum comme nous. Et ils avaient constaté, comme nous
devions le faire par la suite, que la
violence dans l'institution s'était atténuée avec l'implantation de cette
mesure. Donc, ça déboulonnait ce mythe.
• (15 h 10) •
Il
y avait la question des droits et libertés. Alors, ça, c'est intéressant parce
que justement, Penetanguishene,
qui a initié ça quelques années avant nous, il y a un patient de là-bas qui a
porté plainte contre l'institution hospitalière et il y a eu un jugement dans cette cause, de la Cour supérieure de l'Ontario,
qui était extrêmement intéressant et qui réglait un petit peu cette
question-là. En tout cas, on avait des assises légales. Ils avaient dit que,
non, ce n'était pas un traitement imposé, c'était
une mesure, en fait, pour tout le
monde; non, ça n'allait pas à l'encontre de la Charte des droits et libertés, qui ne consacre pas le droit au tabac et
qui disait aussi que, même si c'était un lieu de résidence du patient,
même si... il y avait d'autres personnes qui évoluaient dans ce milieu et qu'en
conséquence on pouvait prendre des mesures semblables. Alors donc, ça, c'est un
autre obstacle qui, pour nous, tombait.
Les
autres, ils venaient de l'intérieur de l'institution, ils étaient un peu plus
pervers. La pitié : C'est tout ce qu'ils ont. La facilité : Quand il fume, il est tranquille. Une certaine
mesure de contrôle : Tiens-toi tranquille, sinon tu vas aller à ta chambre puis tu ne peux pas fumer. Alors, vous
voyez, donc, il y avait... À l'intérieur des milieux, le tabac souvent
fait l'objet d'un usage, je dirais... bon,
j'ai utilisé le mot «pervers», là, enfin, donc qui n'est pas tout à fait
approprié. Alors donc, ça, c'étaient les obstacles. Il y en avait
d'autres de nature plus scientifique. On sait, par exemple, que le tabac accélère le métabolisme. En conséquence, il allait
falloir réévaluer la posologie des médicaments qu'on administre, et puis
il y avait des aspects comme ça qu'il fallait regarder. Alors, voilà un peu
pour les obstacles qui se présentaient.
La démarche et
l'implantation. Plusieurs des obstacles dont j'ai mentionné, on les a beaucoup
travaillés, et donc ça s'est fait dans la
démarche d'implantation. Alors, première chose, on est allés voir tout ce qui
s'était fait ailleurs, réunir une vaste documentation là-dessus. Après
ça, on a formé un comité d'implantation, et le soin qu'on a apporté à la formation du comité est important. Je vous
donne l'exemple suivant : il fallait que des patients soient présents
sur le comité, il fallait que des fumeurs
soient présents sur le comité. Donc, on ne faisait pas un comité avec des gens,
d'un côté, tous contre le tabac et, de l'autre côté, toutes les
personnes qui fument, incluant les membres du personnel, révoltées par notre projet. En fait, devant le conseil
d'administration qui était très réticent pour certaines des raisons que je
vous ai dites plus haut, ça a été, je dirais, le cri du coeur d'un infirmier
fumeur faisant partie du comité d'implantation et siégeant aussi sur le conseil
d'administration qui a été déterminant pour remporter l'adhésion du comité.
Donc,
ce comité d'implantation, ensuite, devait, en quelque sorte, s'assurer que ça
puisse se faire dans l'institution. L'étape
suivante, ça nous prenait une unité pilote. On a 15 unités de soins dans
l'Institut Philippe-Pinel de Montréal. On en a une qui s'est avancée, unité d'admission, en disant : Nous, on est
prêts à le faire, on en a discuté même avec les patients de l'unité en
ce moment et on est prêts à s'engager là-dedans, et ça, ça a été un élément
déterminant. Les gens du comité d'implantation disaient que c'était la clé du
succès, parce que, quand vous avez des gens qui sont déterminés, qui veulent porter ce projet-là, bien, évidemment, ils
résolvent tous les problèmes qui se présentent et ils les résolvent à
l'avance pour ceux qui, s'engageant moins
volontiers dans le projet, vous arrivent avec ça. Et là on n'avait qu'à les
renvoyer à l'unité pilote pour leur dire : Regardez avec vos
collègues qui ont si bien fait ce que vous pourriez faire pour surmonter les
problèmes qui se présentent.
Alors, ça a été
graduel, on a fait ça sur un an. Le projet a germé en 2003, et le comité... fin
2003; le comité d'implantation, mars 2004; octobre 2004, la première
unité, l'unité pilote. Le directeur général, moi à l'époque, voulait aller vite. Le comité d'implantation m'a
dit : Non, on va se donner un an. Et ils ont eu raison parce que, sur
un an, il y a, je crois, une ou deux unités
à qui, à la fin, il a fallu l'imposer. La majorité de l'hôpital était devenue
sans fumée à ce moment-là. On avait fait une date butoir. Est-ce qu'il
me reste un mot peut-être?
La Présidente (Mme
Hivon) : Il reste une minute.
M. Lafleur
(Paul-André) : Bon. Je vais m'arrêter ici.
La Présidente (Mme
Hivon) : Ah oui? Bon, très bien. Merci.
M. Turcotte
(Jean-Sébastien) : Peut-être me laisser... Donc, où en sommes-nous
10 ans après? Un bilan avait été
demandé au coordonnateur des unités, qui reflète une adhésion à des degrés
divers des patients à la politique de l'Hôpital sans fumée. Ceux-ci doivent s'y
conformer, puisqu'elle est en vigueur et implantée à l'intérieur du
périmètre de l'enceinte hospitalière, incluant les cours intérieures
sécurisées.
Sept
des 15 unités respectent intégralement la politique. Les autres unités où
les patients peuvent avoir des sorties de par le mandat de ces unités-là : réhabilitation, réinsertion
sociale, ont une adhérence imparfaite de par l'accès... par l'absence
d'une motivation intrinsèque absente. Ils profitent donc de leurs sorties pour
fumer, et ceci représente un incitatif pour demander des sorties aussi.
D'autre part, ceci
est susceptible d'amener des divers comportements de magouille, de
sollicitation, voire d'intimidation sur les unités. Ces comportements sont
autant d'invitations, pour les intervenants du personnel, à des fins d'éducation, de motivation et de gestion des conflits, si tel est le cas. Lorsque
des patients fumeurs sont nouvellement admis
en... Il y a une... Voyons! Excusez-moi. Lorsqu'il
y a des patients fumeurs qui sont nouvellement admis, une thérapie de remplacement par timbres est prescrite, et il est rare que des
symptômes de sevrage soient présents. De façon rarissime, on peut avoir des patients qui, de façon
compulsive, lors de leur sortie, vont fumer, exemple, un paquet de cigarettes
en quelques heures, et là on peut voir certains symptômes, mais c'est vraiment
marginal comme effet.
La
Présidente (Mme Hivon) : Je vais vous arrêter ici. Je sais que c'est frustrant, mais je suis
certaine qu'on va revenir sur le
sujet. C'est juste pour laisser le temps à la période d'échange. Donc, je vous remercie beaucoup. Je vais céder la parole à Mme la ministre
pour la partie gouvernementale, un 22 minutes d'échange.
Mme
Charlebois : Est-ce qu'il vous reste beaucoup de temps dans votre présentation ou si vous en
avez pour une ou deux minutes maximum?
M. Turcotte
(Jean-Sébastien) : Pour moi, moins d'une minute.
Mme
Charlebois :
Et vous, madame?
Mme Fugère
(Renée) : Moi, je ne présente pas.
Mme
Charlebois :
Bon, bien, finissez puis...
M. Turcotte
(Jean-Sébastien) : Allez-y.
Mme
Charlebois : Oui.
Non, mais c'est parce qu'on va pouvoir... mais si vous n'avez pas
d'objection, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Hivon) : ...pas d'objection, c'est parfait.
M.
Turcotte (Jean-Sébastien) : Absolument.
Donc, c'est ça, donc, quant aux enjeux pour le personnel à l'intérieur d'un hôpital sans fumée, bien, il y a eu une amélioration de
la gestion du temps en lien avec l'organisation du travail et l'absence de gestion du tabac, une amélioration de la qualité de vie des patients, une absence d'impact sur la médication psychiatrique, absence d'impact dû à la fumée
secondaire, achats des patients plus diversifiés en lien avec les choix
de vie, impact positif sur la santé des
patients, facilitation de l'occupation des chambres doubles, parce qu'on a une grande partie de nos unités où on a des chambres doubles.
Le
côté négatif, bon, comme je l'ai déjà mentionné, il y a la magouille, l'augmentation des fouilles et la gestion du trafic de cigarettes. Si des
patients désirent fumer, ils n'ont pas le privilège de sortir seuls. Le
personnel doit les accompagner, pour certains patients.
Donc, ça complète où est-ce
que nous en sommes.
Mme
Charlebois :
Bien, merci beaucoup. Ça va? Je peux y aller?
La Présidente (Mme
Hivon) : Oui, allez-y.
Mme
Charlebois : O.K.
Alors, merci beaucoup d'être venus nous présenter... Parce que
vous allez vous douter que je suis bien intriguée par le processus. J'ai
entendu docteur... — mon
Dieu! attendez un peu — Lafleur
me parler... vous avez parlé à tout le monde ici de... comme les étapes que vous aviez franchies, mais on va aller
plus loin là-dedans. J'ai bien
entendu que vous dites qu'il y avait à l'époque, en 2005, quand vous avez démarré le processus,
80 % à 85 % des gens
qui fumaient à l'intérieur de l'établissement.
M. Lafleur
(Paul-André) : C'est conforme à ce qu'on relève, par exemple, chez les
patients schizophrènes, qui constituent une large partie de la clientèle à
l'Institut Philippe-Pinel de Montréal, qui ont un taux de tabagisme beaucoup
plus élevé que la population en général et pour qui c'est beaucoup plus
difficile de cesser de fumer.
Mme
Charlebois :
Maintenant, ce n'est plus le cas.
M. Lafleur
(Paul-André) : Non. En fait, il y a une nuance et une précision. La majorité
de nos patients, lorsqu'ils quittent l'Institut Philippe-Pinel de Montréal,
recommencent à fumer, et ça, on l'avait prévu dès le départ, parce que c'est quand même quelque chose qui est
connu. Et un aspect qui avait été intéressant, c'est qu'au fur et à
mesure que les unités devenaient sans fumée,
moi, avec le comité de direction, j'allais manger avec les patients, quelques
semaines plus tard, sur les unités, sur
chacune des unités, et je trouvais ça intéressant de demander leurs impressions.
Il y en avait évidemment certains qui regrettaient, en des termes très
vifs pour certains, que le tabac ait été cessé, mais la plupart disaient que soit ça ne les incommodait pas soit
qu'ils en étaient contents. Ils savaient, de toute façon : la question de
leur payer le tabac, c'était fini, donc
c'était une bonne partie de leurs revenus qui étaient épargnés, le bien-être
social pour la majorité d'entre eux. Et je me souviens d'un patient
particulièrement enthousiaste, qui donnait tous les avantages qu'il tirait de ça, comment il se sentait mieux.
Je lui disais : Quand vous allez sortir, est-ce que vous allez fumer? Il
dit : Le jour où je sors, immédiatement
je recommence à fumer. J'ai dit : Pourquoi? Parce que — il dit — je suis incapable de m'arrêter. Dès
que la proposition, dès que l'offre du tabac est là, je ne pourrai pas m'en
empêcher.
Alors
donc, ce n'était pas tant chez ce patient-là en particulier, c'est anecdotique,
mais ce n'était pas tant le plaisir qu'il allait retrouver que la
dépendance, la souffrance à laquelle il était confiné, de ne pouvoir dire non
au tabac.
Mme
Charlebois : J'ai aussi lu dans votre mémoire qu'il y a...
quand vous déplacez les patients de chez vous vers les centres
hospitaliers autres, que ça déstabilise, je crois, la médicamentation, parce
qu'il n'y a, chez vous, pas de possibilité
de fumer, ailleurs oui. Alors, vous nous recommandez de faire l'interdiction de
la fumée de cigarette partout. Mais ça débalance à ce point-là la
médication des gens?
• (15 h 20) •
M. Lafleur
(Paul-André) : Pour certains médicaments, puis certains délicats — je
pense à la clozapine, par exemple, qui est le meilleur des antipsychotiques mais
qui est aussi celui qu'il faut surveiller le plus près en raison des
effets secondaires importants qu'il peut
avoir s'il est mal contrôlé — ça change, en effet, les concentrations
sériques de façon importante. Alors, c'est une chose avec laquelle on a
dû apprendre à composer, et c'était beaucoup... c'était la crainte majeure, je dirais, des médecins de l'institution.
Alors, on avait la chance d'avoir un excellent service de pharmacie, on
s'est vraiment documentés sur le domaine et on le fait bien.
Et
le problème actuellement n'est pas seulement lorsqu'on envoie les patients dans
d'autres institutions. Nous avons des patients qui rentrent et qui
sortent. Donc, il y a des unités où ils sont plutôt confinés à l'unité, mais il
y en a d'autres où ils vont à l'extérieur.
Ça veut dire : quand ils y vont, ils fument, quand ils reviennent, ils ne
fument plus. Et, le problème de
l'ajustement de la médication, je dirais qu'on est rendus experts à ce
niveau-là et que ce n'est pas si compliqué que c'était appréhendé. Donc,
c'est une chose avec laquelle on peut composer sans trop de difficulté.
Mme
Charlebois :
Par contre, vous nous recommandez quand même de faire l'interdiction de tabac
dans les autres établissements de santé, puisque ça a été possible chez vous.
M. Lafleur
(Paul-André) : Bien, disons que...
Mme
Charlebois :
Pour le personnel, à tout le moins, qui y travaille.
M.
Lafleur (Paul-André) : Oui.
Moi, je formulerais ça de la façon
suivante : Je ne crois pas qu'il y a d'obstacle à ce qu'on l'implante dans tous les milieux de la santé, y compris les milieux
psychiatriques. Quand j'ai quitté l'Institut Philippe-Pinel de Montréal — parce que j'ai été absent de là à peu près
sept ans — je suis
allé au pavillon Albert-Prévost de
l'Hôpital du Sacré-Coeur. C'était à
l'époque le plus gros département de psychiatrie, je dirais, et quasiment du
Québec, parce qu'on avait récupéré Fleury — c'est
toute une histoire — donc
la plus grosse urgence, le plus gros département de psychiatrie, et on a
implanté des mesures différentes — ce n'était pas un hôpital
sécuritaire — mais
on a aussi fait l'interdiction du tabac sur
les lieux, et ça a bien fonctionné. C'était assez agréable de voir, par
exemple, un fumoir peu intéressant
visuellement et à l'odorat transformé en salle d'exercice. Alors, il y a des
choses comme ça qui ont été faites.
Mme
Charlebois :
Vous dites aussi dans le mémoire que vous aviez demandé un bilan, au
coordonnateur des unités, qui reflète une
adhésion, à des degrés divers, des patients à la politique de l'Hôpital sans
fumée. Ceux-ci doivent s'y conformer
puisqu'elle est en vigueur et implantée à l'intérieur du périmètre de
l'enceinte hospitalière, incluant les cours
intérieures sécurisées. Cependant, vous mentionnez que sept des 15 respectent
intégralement la politique. Qu'est-ce qui arrive des huit? En quoi elles
ne respectent pas puis que... Qu'est-ce que vous faites?
M.
Turcotte (Jean-Sébastien) : C'est parce qu'il y a différents mandats.
Il y a des unités, on les appelle les
unités d'admission-réadmission-expertise, où les patients arrivent de la prison
directement, ils viennent chez nous, ils sont confinés pendant le temps
de l'évaluation, 30 à 60 jours maximum, et ils quittent pour la cour, puis
le processus suit son... Donc, eux, ils
n'ont aucune sortie, là, dans la communauté durant leur séjour chez nous, puis
après ça ils transitent à la prison. Donc,
c'est assez simple. Il y a aussi des unités spécifiques où c'est seulement des
femmes avec des sentences fédérales,
donc qui arrivent de la prison. Elles sont chez nous et elles n'ont pas accès à
la communauté. Donc, il n'y a aucun accès à la cigarette.
Sur les unités de
réinsertion, donc là les patients vont, plusieurs fois par semaine, aller à des
activités dans la communauté et donc être en contact avec la cigarette, et ils
peuvent en ramener sur l'unité, tu sais, par la magouille, et donc il peut s'en fumer sur l'unité, puis ça,
c'est très difficile pour ceux qui sont confinés sur l'unité, parce que ce
n'est pas égal. Il y a des patients qui sont quand même confinés sur l'unité.
Mme
Charlebois : Mais
vous travaillez à uniformiser.
M. Turcotte
(Jean-Sébastien) : C'est uniformisé, mais, vous comprenez, ce n'est
pas le non-respect par les employés, ou les gestionnaires, ou la direction,
c'est vraiment par un phénomène de trafic, si vous voulez.
Mme Fugère
(Renée) : Et ce qu'on doit préciser aussi, c'est que ce n'est pas un
fort pourcentage. Alors, c'est isolé, c'est des événements isolés, et ça
permet aux équipes traitantes, finalement, de reprendre les plans de soins, de reprendre l'éducation, de faire des entrevues
motivationnelles pour développer, là, justement, une motivation
intrinsèque à l'arrêt du tabac en les conscientisant davantage sur les risques
pour eux-mêmes et pour autrui.
Mme
Charlebois :
Mais, en tout cas, ce qui me frappe, c'est que c'est drôlement fort, pour jouer
dans la médication d'un patient, là, les conséquences du tabagisme. Je
ne sais pas si les gens réalisent, là, mais, quand on est rendu à dire qu'il y a un impact sur la médication des
gens, on s'aperçoit quand ils fument puis quand ils ne fument pas, c'est
grave, là. Il y a quand même quelque chose d'important. Je n'avais pas pensé à
cette avenue-là, puis ça me frappe.
M. Lafleur
(Paul-André) : Ça modifie le métabolisme, en effet, oui. Donc, la
dégradation des médicaments se fait moins
rapidement à partir du moment où les patients ne fument
plus, ce qui fait que, quand ils retournent à l'extérieur, qu'ils fument plus, la dégradation des médicaments
se fait plus rapidement, et, par prudence, il faut majorer un petit peu leur
posologie.
Mme
Charlebois : Je sais qu'il
y a plusieurs personnes qui n'ont
pas vu cette avenue-là arriver, mais je vais vous poser la question quand
même. Vous souhaitez que tous les établissements... c'est une recommandation
que vous nous faites, que tous les établissements de santé deviennent
sans fumée. Que pensez-vous... Parce qu'il y a la marijuana thérapeutique qui
fait son apparition dans nos milieux, qui est maintenant légale, et ce n'est
pas quelque chose qui est généralisé, c'est des cas d'exception, on va se dire
la vérité. Si vous nous recommandez d'abolir, donc, le tabac, donc il n'y aura plus 40 % des chambres, si on
suit votre recommandation, qui pourraient être avec fumée, est-ce que vous
croyez que nous devrions aménager un fumoir
particulier ou garder un certain pourcentage de chambres? Comment vous
nous suggérez de gérer ça? Parce que ça se
fait en milieu de longue vie, là... en soins de longue durée — excusez-moi, milieu de longue vie, je
déparle.
Mme Fugère
(Renée) : Nous n'avons pas réfléchi à cette question, il est clair,
mais nous avons eu, dans le cadre des
deux dernières années, des patients qui avaient une prescription de marijuana
thérapeutique. Alors donc, ce qu'on a fait à ce moment-là, c'est que les
patients ont été réévalués par un interniste, et on a revalidé, si on veut,
l'indication thérapeutique, et finalement,
médicalement, ces patients-là n'avaient pas à prendre, selon les opinions que
nous avions, de la marijuana thérapeutique. Donc, ça a été cessé, et les
patients s'y sont conformés et ont terminé leur séjour sans aucun incident et sans aucune recrudescence, si vous
voulez, des motifs qui avaient motivé la prescription au départ. Alors,
ça, c'est notre expérience, qui est très
limitée, là, qui est aussi anecdotique. Je pense qu'il y a toujours place à la
précaution et à la prudence. Et il y a des patients, effectivement, pour
lesquels la prescription de marijuana thérapeutique est justifiée, et je pense justement qu'il faut être prudent
lorsqu'on légifère, même si on sait que les lois durent pour longtemps et
qu'il y a place aussi à des exceptions.
Les chambres,
chez nous en tout cas, dans un milieu sécuritaire, c'était impossible, la
balise du 40 %, structurellement
et aussi en lien avec le pourcentage de patients que nous avions à l'époque.
Maintenant, le pourcentage a beaucoup,
beaucoup diminué. Si on regarde, et ce n'est pas une étude scientifique, là,
c'est uniquement sur la foi de notre expérience, lors du projet
d'implantation à la pharmacie, le coût a été de 40 000 $. On
comprend, là, que c'est des données de 2005, là, alors l'inflation et tout, là,
mais maintenant c'est 10 000 $ par année et c'est concentré sur les nouveaux patients qui arrivent via des mandats
d'ordonnance judiciaire, que ce soit dans les admissions, dans les
expertises ou dans les réadmissions, et les autres patients.
Alors donc, on voit qu'il y a une nette
diminution, là, de demandes. Et il arrive aussi, et ça, nous n'avons pas le chiffre, que des fumeurs qui arrivent chez nous,
de par le non-accès, ne demandent pas non plus de thérapie de
remplacement et cessent de fumer pour la période où ils sont à l'établissement.
Mme
Charlebois :
Mais évidemment, ayant arrêté de fumer moi-même, je peux vous dire que je n'ai
pas demandé d'accompagnement puis
j'aurais dû. Je recommande aux gens de demander de l'accompagnement, parce que
c'est non seulement plus facile, mais aussi on fait ça de façon plus
responsable. On s'évite beaucoup de problèmes. C'est une petite recommandation
que je fais aux gens qui veulent arrêter de fumer.
Ceci étant,
je vous le dis, je suis renversée sur les conséquences du tabac sur la
médication. Je suis renversée de tout ça,
mais je veux vous dire que vous étiez des précurseurs en 2005, quand même. On
est en 2015, on commence à parler de restreindre
la fumée dans les établissements. On nous suggère fortement d'éliminer les
40 %... Mais vous étiez vraiment avant-gardistes et dans un milieu
où les gens n'auraient jamais pensé que vous puissiez... Alors, moi, je
constate que c'est possible puis qu'on peut peut-être élargir dans l'ensemble
du réseau.
On nous a aussi recommandé, dans les services de
garde en milieu familial... On nous a parlé de cigarettes électroniques. J'aimerais ça vous entendre sur ces
deux avenues-là. Je sais que c'est hors votre champ de compétence, mais,
du fait que vous êtes dans le monde médical,
je me dis que vous devez avoir des opinions quand même quant à ce qu'on
fait avec les jeunes en centres de la petite
enfance, en milieu familial, parce que, si c'est possible chez vous, ça veut dire
que, si on demande au milieu familial de faire en sorte qu'il n'y ait pas de
fumée dans la maison, c'est possible aussi.
• (15 h 30) •
Mme
Fugère (Renée) : Bien, c'est possible comme c'est possible chez tous
les parents qui ne sont pas dans des milieux
de garde, et qui décident de ne pas fumer parce qu'ils sont conscients des
risques pour eux-mêmes et pour leurs enfants,
et qui, de façon responsable, décident de ne pas fumer en présence de leurs
enfants. Alors, c'est sûrement possible, là, au niveau des milieux de garde aussi, mais je pense que, comme on
peut imaginer, c'est l'application de ça qui risque d'être difficile.
Mme
Charlebois :
Ce qu'on nous dit, c'est que ça va aller avec l'ensemble des autres
réglementations. Il y a une surveillance
accrue, apparemment, dans les... bien, pas apparemment, il y a une surveillance
accrue dans les centres de petite
enfance, mais de toute façon on verra plus tard, dans l'étude article par
article et dans la possibilité d'application.
Cigarette
électronique, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Est-ce que vous avez
réfléchi à cette possibilité? Est-ce que vous avez des patients qui vous
on parlé, dire : Bien, on ne peut plus fumer, on peut-u vapoter?
Mme Fugère
(Renée) : Bien, la question
nous a été posée mais pas nécessairement par les patients, mais par le personnel. Et nous avons, pour des raisons plus
sociales, décidé d'interdire aussi la cigarette électronique à l'intérieur
de l'hôpital, parce que le geste de fumer, ça renormalise la... de fumer.
Et, même si on sait que les conséquences sur le plan médical ne sont absolument pas comparables,
bien qu'on n'a pas toutes les études qu'on souhaiterait avoir, on a
interdit parce que c'est un hôpital sans fumée, et on pourrait dire maintenant
un hôpital aussi sans vapotage.
Mme
Charlebois : Je suis d'accord avec vous que la renormalisation
du geste... C'est pour ça qu'on a encadré la cigarette électronique quant à l'usage, la vente, les lieux de vente,
etc., et on l'interdit aux mineurs, l'achat, et tout ça.
J'aimerais ça qu'on puisse reparler de votre processus
d'implantation, parce que vous l'avez fait rapidement dans votre présentation, puis je pense que c'est important qu'on s'y
attarde comme il faut, parce que, s'il y a des gens qui nous écoutent dans d'autres établissements de
santé, ils vont peut-être être intéressés à pouvoir partager votre
expérience pour pouvoir, eux autres aussi, implanter ça chez eux.
Alors, moi,
j'aimerais ça que vous me repreniez un
petit peu... sans reprendre toute la
présentation, mais me dire ça vous a
pris combien de temps, exactement, à implanter le processus complet, là. Parce que
vous êtes devenus, en 2005... en dedans d'une année ou...
M. Lafleur
(Paul-André) : Oui. En fait,
la première unité, c'est en octobre 2004, et la dernière, là, il y avait
une date butoir, qui est devenue sans fumée,
c'est en octobre 2005. Donc, on s'est donné un horizon d'un tout petit peu plus d'un an. Mais le
comité d'implantation travaillait déjà, lui, depuis plusieurs mois avant qu'il
y ait le projet pilote qui émerge sur la première unité à avoir fait ça.
Le rôle du
comité d'implantation a été important. C'était, je dirais, un facilitateur
d'échanges, quelqu'un qui... faciliter les échanges, donner du soutien, donner
de l'information. Il y a eu des conférences scientifiques d'organisées
pour les membres du personnel. Il y a eu de l'information scientifique diffusée
aux patients. On a écouté tout ce qui causait
problème, ce qu'on pouvait faire. On a donné du soutien aux patients mais aussi
aux membres du personnel. Eux aussi
ont eu accès à des mesures de remplacement pour le tabac gratuitement en cette
période-là, parce que notre idée, c'était : puisqu'ils fumaient
avec les patients... Ils travaillent avec eux, ils fument avec eux, le tabac
est admis, on les prive eux aussi, et donc
on va leur donner accès... on ne les obligera pas à payer pour les mesures, au
fond, qu'on leur impose. C'est un exemple.
On a aussi
donné après, quand ça se faisait, des mesures de reconnaissance et de
gratification. Donc, il y avait des cadeaux
qui étaient donnés aux patients, à certains intervalles, en leur disant que
c'était pour les remercier de s'imposer ce processus-là... en fait, de comprendre qu'on leur impose ce processus-là
et qu'on voulait leur témoigner, donc, notre reconnaissance et reconnaissance de l'effort qu'ils avaient à faire, pas
toujours sur une base volontaire, mais, quoi qu'il en soit, de l'effort
qu'il y avait à faire.
On a investi
à différents égards et, je vous dirais, par boutade, mais ce n'est même pas une
boutade, c'est vrai, on sauvait de l'argent, on sauvait
65 000 $, je pense, par année, de tabac. Donc, on a évidemment
redonné ça, et plus, de différentes
manières. On a, par exemple, repeint les unités après qu'elles aient été...
qu'on ait cessé d'y fumer. Il fallait donner certaines gratifications.
On a augmenté les légumes et les fruits, leur accès sur l'unité. On avait
distribué, à un moment donné, une machine à maïs soufflé par unité, donc, en disant :
C'est un aliment qui n'a pas trop de calories, à moins qu'on l'inonde de beurre, et tout ça. Toutes sortes de mesures
qu'on a mises en place pour faciliter. On donnait des paquets de gomme,
les premières semaines, aux patients des unités lorsqu'ils arrêtaient. Ce
n'étaient pas des gommes avec de la nicotine, ça ne faisait pas partie des
mesures de remplacement, mais on ajoutait ça en plus pour le besoin strictement
oral.
Alors donc,
il y a beaucoup de... Il y avait énormément, comme ça, de soin qui a été apporté et de détails. Ça a été étudié.
Avant l'implantation, évidemment, le comité des bénéficiaires avait été
rencontré, ça avait été discuté avec lui. Il y avait
des patients de certaines unités qui voulaient rencontrer le directeur général et lui dire leur façon de penser. J'étais allé les voir avant la mise en place, et ce qui m'avait à
l'époque étonné, c'est que ceux qui étaient les plus révoltés, les seuls, en fait, qui étaient vraiment... puis qui considéraient les... en fait, ils ne considéraient pas les
arguments, ils étaient révoltés, ils
ne voulaient pas, c'étaient les adolescents. Mais moi, je leur avais rétorqué
qu'eux, de toute façon, ils n'avaient même pas le droit, point.
S'il y avait certains aménagements dans le projet de loi, il n'y en avait pas
pour eux. Et donc je n'avais aucun scrupule
dans leur cas. Pour les autres, oui. Pour ces grands malades, en plus, qui
étaient là pendant... qui seraient là
pendant des années, des décennies pour certains, oui, là, il y avait
certaines questions, des scrupules. On a fait des comités d'éthique là-dessus. Alors, on a
une éthicienne qu'on avait fait venir, entre autres, puis qui avait
animé quelques
réunions qui avaient été très animées, très houleuses, parce qu'il y avait, du côté des membres du personnel, des personnes qui
étaient radicalement contre. Il y avait...
Donc, c'est
pour ça. C'était beaucoup de discussions, d'où le fait qu'on fait un comité
en 2004, après avoir déjà tout pensé, en mars 2004, mais ce n'est
qu'en octobre qu'on commence, donc beaucoup de discussions, beaucoup de préparations, beaucoup d'invités. Le Dr
Gervais était venu, d'ailleurs, nous rencontrer, et tout ça. On avait même
invité à l'une de nos conférences du midi un
Américain spécialiste des questions qui était plutôt contre. Alors donc, on a
dit : On fait ça dans la
transparence, ouverture. Et je crois que c'est vraiment ça, la... Les clés du
succès, ce sont des gens engagés, enthousiastes, qui veulent, c'est vraiment
de le faire dans la transparence, pour les bonnes raisons, et c'est de prendre
tous les moyens pour respecter la clientèle qui le fait.
Mme
Charlebois : Est-ce
que vous diriez aujourd'hui, si vous alliez questionner et vos patients et votre personnel, que, dans ces deux catégories, vous auriez un taux
de satisfaction énorme au fait que ce soit un établissement sans
fumée?
M. Lafleur (Paul-André) : Je vous
laisserais peut-être répondre à ça. Oui?
M. Turcotte (Jean-Sébastien) : Moi,
je suis convaincu que oui. Je me rappelle, il y a 15 ans, là, quand j'ai commencé à l'institut puis que c'était fumeurs,
là, puis, ceux qui avaient des verres de contact, les yeux brûlaient à la
fin du quart de travail, il y avait
des toux qui se développaient chez les membres du personnel, il y avait... Ce
n'était vraiment pas sain, là,
comme... Puis, chez nos membres du personnel, d'emblée, on avait des gens
sportifs chez nous, ça fait partie d'une caractéristique de nos
employés, donc il y avait une demande aussi d'avoir un milieu sain pour venir
travailler. Puis, chez les patients, je vous
dirais qu'il y a une paix sociale, là, qui s'installe. Puis ce n'est pas
problématique. Aussitôt que... Ceux qui viennent pour la première fois,
puis on leur annonce, là, rapidement qu'on est un hôpital sans fumée, des fois ça maugrée un petit peu, mais rapidement,
bien, c'est la normalité puis c'est comme ça. Puis il y a
une absence du produit. Donc, c'est facile.
Mme
Charlebois : Il y a un centre de jeunesse qui est venu
témoigner cette semaine, puis ils nous ont dit : On s'attendait à
avoir plus de fugues, puis ça n'a pas été le cas.
M. Turcotte (Jean-Sébastien) :
Alors, ça n'a aucun effet.
Mme
Charlebois : Ça n'a pas été le cas du tout parce qu'ils se sont... c'est devenu la normalité
autant pour le personnel que pour les jeunes, puis il n'y a pas de
problème, à ce qu'on nous a dit.
M.
Turcotte (Jean-Sébastien) : Parce que ceux qui ont l'opportunité de
fumer avec des sorties de réinsertion, bien, ils peuvent le faire,
puis...
La
Présidente (Mme Hivon) : Merci. Ça met fin, donc, à la période
d'échange avec la partie ministérielle. Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de Rosemont pour une période de 13 minutes.
M. Lisée :
Merci, Mme la Présidente. Mme Fugère, M. Turcotte, Dr Lafleur, merci
d'être avec nous. C'est très inspirant, le récit que vous avez à nous
faire, l'expérience que vous avez menée, l'audace dont vous avez fait preuve, transformation importante. Vous racontiez que vous
fournissiez les cigarettes, hein, on... Le chemin parcouru par vous, mais par toute la société et par l'Occident en
entier est remarquable. On fumait dans les avions, là, dans les
années 70. Une réunion politique sans
fumée, ça n'existait pas, c'était inconcevable. On aurait dit que ça
arriverait, personne ne l'aurait cru, et donc la capacité d'adaptation,
elle est réelle. Elle est réelle, et là c'est le temps pour la société
québécoise de faire un pas de plus dans
cette direction-là. Et ce n'est pas la timidité qui doit nous guider, c'est
l'ambition, et c'est ce que vous nous
dites. C'est ce que vous avez fait à l'institut Pinel, c'est ce que le Centre
jeunesse de Montréal a fait aussi, et, en ce sens-là, vous êtes un peu
nos guides, notre boussole dans ce qu'on doit faire.
Vous nous
dites, dans vos recommandations : «...nous souhaiterions que la loi inclue tous les établissements de santé et d'éducation comme non-fumeurs, et que
l'installation de fumoirs soit interdite à l'intérieur des murs.
Idéalement, les périmètres extérieurs
devraient l'être...» C'est-à-dire qu'on ne permet plus qu'à neuf mètres de la porte
ce soit le cas. On a eu d'autres recommandations en ce sens-là pour dire : Bien, sur tout le terrain de l'hôpital
jusqu'à l'espace public ou à la propriété voisine, ça devrait être interdit pour
qu'il n'y ait plus ce mur de fumée qu'on traverse. Mais vous ajoutez un
bout de phrase, que je vais vous demander d'éclairer : «...les périmètres
extérieurs devraient l'être à l'exclusion des endroits où des enjeux de
sécurité ou de besoins liés à des populations vulnérables et démunies rendent
acceptables certains aménagements.» Qu'est-ce que vous voulez dire?
• (15 h 40) •
Mme Fugère
(Renée) : C'est le bémol que j'ai mis, dans le sens où, bon, les
établissements de santé sont situés dans
divers endroits. Pinel est près des raffineries, et on a une population
vulnérable et captive avec de très longues durées de séjour. Beaucoup de patients ne sortent pas de
l'institut ou sortent peu de l'institut, et, dans l'hypothèse où il y
aurait une interdiction complète de fumer
sur un grand périmètre... Parce que c'est un peu comme un grand terrain de
baseball chez nous, là. Alors donc,
effectivement, c'est très large. Alors, il y a beaucoup d'air qui y circule, de
sorte que, même si quelques patients,
parfois, ou quelques membres du personnel fument à l'extérieur, ça ne cause pas
de grands problèmes. Il n'y a pas de haie d'honneur chez nous non plus.
Et on a le boulevard Henri-Bourassa qui est... où les patients et le personnel devraient aller
fumer. Nous avons rencontré la mairesse d'arrondissement il y a quelques mois
parce que, sur Henri-Bourassa, il y a
une limite de vitesse qui n'est pas respectée. Et donc nous sommes inquiets
que, dans l'hypothèse ou plusieurs ou quelques-uns de nos... soit notre
personnel ou de nos patients aillent fumer sur le trottoir... On trouve, premièrement, que ce n'est pas très adéquat, là,
d'aller fumer près d'un boulevard, et il y a ces enjeux de sécurité
aussi.
Alors donc, ça ne veut pas dire que ça
arriverait. Parce que, comme j'ai dit, moi, j'ai un bureau en surplomb, alors donc je vois, là... parce que je suis
souvent dans mon bureau à y travailler, et il y a très peu de personnes qui
fument sur le périmètre, et il n'y a pas ce
nuage de fumée comme dans beaucoup d'hôpitaux du centre-ville, là, quand on
entre par la porte, alors là il y a une
forte concentration de fumée. Mais, chez nous, il n'y a pas ça. Alors, c'est
pour ça que je dis : Il pourrait
y avoir certains aménagements, dépendamment de préoccupations significatives.
Autrement dit, je pense qu'il doit y avoir une certaine souplesse pour
ne pas créer de nouveaux problèmes s'il n'y en a pas à un endroit.
M. Lisée :
Mais donc ce que vous dites, c'est que, lorsque sortir du périmètre pose un
problème de sécurité, par exemple sur
le trottoir d'Henri-Bourassa, où le risque d'accident est réel, ou trop près
d'une raffinerie, où on veut éviter des
explosions, donc on pourrait aménager un espace fumeurs dans la zone de... dans
le périmètre de l'établissement public. C'est ce que vous dites. O.K.
Une autre
question. On sait que, dans les milieux de prison, la cigarette est souvent une
monnaie d'échange. Les non-fumeurs ont des cigarettes pour s'échanger,
acheter, etc. Est-ce que ça a déjà été le cas à Pinel?
Mme Fugère
(Renée) : Bien, ça a déjà été le cas de façon ponctuelle, si vous
voulez, pour certains patients. Alors donc,
à ce moment-là, souvent, les autres patients... Surtout depuis que l'hôpital
est sans fumée, ce genre de cas d'espèce arrive pour ceux qui quittent, qui vont en sortie de réinsertion et qui
reviennent après à l'hôpital. Et, même s'il y a des fouilles chez nous... Parce que, quand on sort,
quand on rentre, on doit de nouveau passer au détecteur, si vous voulez.
Et ils ont une case où ils doivent laisser
leurs effets personnels, là, avec leurs paquets de cigarettes et leurs
briquets, et tout, mais, vous savez,
les gens sont ratoureux, hein, alors donc ça passe. Et là, habituellement, les
autres patients vont s'en plaindre au personnel, et c'est une occasion,
justement, de revisiter les différents enjeux avec l'individu en question. Et
donc... Mais c'est...
M. Lisée : Mais ça n'a pas
été remplacé par une autre devise de remplacement que la cigarette?
Mme Fugère
(Renée) : Non, non. Habituellement, bon, il y a tout le travail, si on
veut, avec l'équipe thérapeutique, qui se fait avec le patient, et les
patients sont aussi avisés qu'il y a des règles, quand même, lorsque les patients sortent, à savoir... Il y a des objectifs à ces sorties, et, lorsque
le patient revient, il doit rencontrer son intervenant pour vérifier si les objectifs
de la sortie ont été rencontrés. Et, s'il
y a eu des incartades, justement,
en lien avec d'autres besoins qui n'étaient pas nécessairement
thérapeutiques, alors là, à ce moment-là, c'est revisité. Et aussi les
patients, habituellement, sont avisés que, dans l'hypothèse où les objectifs
des sorties ne sont pas rencontrés, alors, il pourrait y avoir des mesures qui
sont prises.
Alors donc,
ils sont toujours informés qu'ils ont une liberté et, s'ils
n'utilisent pas la liberté à bon escient, qu'il pourrait y avoir des
conséquences, et donc ils sont traités de façon responsable.
M. Lisée : Très bien. Je vous
félicite et je vous remercie.
La
Présidente (Mme Hivon) : Alors, nous allons maintenant passer la parole au deuxième groupe d'opposition.
Pour débuter les échanges, Mme la députée de Saint-Hyacinthe.
Mme
Soucy : Merci. Merci d'être
ici. Si l'institut Pinel a réussi malgré sa clientèle qui est particulière,
diriez-vous qu'avec un minimum de volonté, si on l'impose à tous les
établissements de santé, ils sont capables de réussir?
M. Lafleur
(Paul-André) : Moi, j'en suis convaincu. Parce que je vous dirais que,
quand j'ai quitté l'institut, donc, pour sept ans, puis que j'ai été au
pavillon Albert Prévost de l'Hôpital du Sacré-Coeur, gros département de psychiatrie, cette question-là était importante,
et je ne croyais pas qu'elle aurait pu se résoudre aussi facilement
qu'elle l'a été. Mais, encore là, il y avait
des gens très enthousiastes par rapport à ça. On avait reçu un bon soutien
aussi de l'hôpital, il y a des pneumologues qui avaient une expertise
par rapport à ça qui avaient bien creusé le sujet. Donc, ça s'est fait de façon
relativement harmonieuse.
C'est bien différent, bien sûr, parce qu'on peut
sortir de Prévost, pour la plupart des patients, sauf les soins intensifs, sauf l'urgence, pour aller fumer à
l'extérieur. Mais, à l'intérieur des locaux, ça a été implanté, je dirais,
plus facilement que je l'aurais cru. Donc, je crois que c'est possible à grande
échelle.
Mme Soucy : Vous mentionniez qu'il a
fallu avoir un cri du coeur de l'infirmier fumeur. Quels ont été ses arguments
pour être si mobilisateur, pour arriver à mobiliser et convaincre ses collègues
du projet?
M.
Lafleur (Paul-André) : Bien,
lui, entre autres, a fait part de sa propre expérience. Oui, il
fumait puis il l'avait toujours assumé, il a fait comme un peu une
sortie du placard, mais c'était une dépendance, c'était quelque chose qu'il regrettait, qu'il avait voulu arrêter, et
que les membres du conseil
d'administration qui avaient ces
scrupules, dont il était à peu près le seul à fumer, ne devaient pas,
dans leur statut de non-fumeurs, au fond, priver les patients de cette opportunité et de cette
chance de rendre le milieu plus sain et de leur donner l'occasion de cesser de
fumer. Je dirais que ça tournait autour de ça. Je pense que c'était
aussi l'engagement qu'il avait là-dedans, en tant que fumeur, qui était
convaincant.
Mme Soucy :
Merci.
La Présidente (Mme
Hivon) : Est-ce qu'il y a d'autres questions?
Mme Soucy :
Excusez-moi, juste...
La Présidente (Mme
Hivon) : Oui, continuez.
Mme Soucy :
Est-ce que vous aviez eu une subvention pour le projet ou c'est quelque chose
que vous avez autofinancé puis...
M. Lafleur
(Paul-André) : Non, c'est quelque chose qu'on a autofinancé.
Mme Soucy :
Il y a un coût relié à... Il y a un coût, quand même, relié à ça.
M. Lafleur
(Paul-André) : Oui.
Mme Soucy :
Est-ce que vous avez un ordre de grandeur?
M.
Lafleur (Paul-André) :
C'était à peu près 50 000 $,
si je me souviens bien, que ça avait coûté à l'institution, tout compté. Parce qu'évidemment, comme je vous
disais, on était dans la situation extrêmement particulière où on a fait
des économies sur le tabac. Mais, au total, c'est à peu près ce que ça nous
avait coûté.
Mme Soucy :
C'est quoi, la nature des dépenses, par exemple? Parce que, dans le fond,
c'est...
M.
Lafleur (Paul-André) : Bien, je dirais que les produits de
remplacement étaient certainement des dépenses, alors donc les fameux
timbres de nicotine, et tout ça, et les différents produits. C'est un aspect.
Mme
Fugère (Renée) : Il y a eu les gâteries, si vous voulez, ou de
meilleures habitudes de vie, à savoir les fruits, les légumes, aussi les réaménagements d'unités
des... On a renouvelé aussi tout le matériel récréatif sur les unités, et
puis, c'est ça, les patients voient des films.
Alors donc, différentes choses. Ce sont des petites choses. Le gros de la
dépense, c'était vraiment la pharmacopée, là.
Mme
Soucy : Mais, si, au Québec, on estime que la baisse de 1 % du
taux de tabagisme génère quand même des économies directes de
40 millions puis indirectes de 70, alors c'est payant, le
50 000 $ que vous avez investi.
M. Lafleur
(Paul-André) : On ne l'a jamais regretté.
Mme Soucy :
Merci.
La Présidente (Mme
Hivon) : M. le député de Groulx, c'est à vous.
• (15 h 50) •
M.
Surprenant : Merci, Mme la Présidente. Merci. Alors, dans le projet de
loi, on rajoute des conditions, des contextes où les gens ne pourront
pas fumer. Et puis, au contraire, ce que je comprends, c'est que c'est beaucoup
les conditions qu'on va mettre, d'accompagnement, entre autres, pour favoriser
la réduction, finalement, de l'usage de la cigarette
qui donnent des résultats. Alors, on a entendu plus tôt, dans les mémoires qui ont été déposés, les
gens considéraient qu'il y a beaucoup des conditions, actuellement, qui sont en
place... des règles, des lois qui sont en place qui sont difficiles à appliquer, en fait, qu'il n'y a peut-être pas
assez de gens qui sont là pour s'assurer de l'application et du contrôle de
ça. Et d'en rajouter, bien, ça va prendre encore plus de gens, puis peut-être
qu'on n'aura pas possibilité de tout contrôler.
Et je reviens aussi,
également, au niveau de mon point au niveau des voitures, tantôt, puis des
garderies. La clientèle qui fume, il a été
dit que c'est beaucoup la clientèle, disons, à faibles revenus, la clientèle en
difficulté qui fume. Alors, je crois
que, les garderies, en fait, on veut s'y adresser, mais la clientèle... Ce
n'est pas la clientèle qui fume qui a, bien souvent, accès à ces garderies-là, par le profil qu'on a déjà déclaré au
niveau de la clientèle qui fume. Donc,
si on veut vraiment aider la clientèle qui fume à réduire de fumer,
vous ne pensez pas qu'au lieu de modifier un paquet de lois on ne
devrait pas prioriser l'accompagnement puis d'investir de ce côté-là, par
votre...
Mme Fugère
(Renée) : Bien, c'est une question...
M.
Surprenant : ...souci que vous avez eu, là?
Mme
Fugère (Renée) : C'est une
grande question que vous posez. C'est une question sociale, c'est une question
politique. Même si vous pensez à un investissement dans des solutions de
remplacement, je pense que ça demande minimalement,
de la part des gens qui fument et qui ont une dépendance à la fumée, une
motivation. Donc, même si vous offrez
beaucoup de mesures de remplacement, si la motivation n'est pas là, alors donc,
à ce moment-là, vous avez beau offrir beaucoup de soutien, les gens
n'adhéreront pas.
Chez nous, on
a fait un sondage, parce qu'on est aussi un hôpital promoteur de santé, donc on
a fait un sondage, l'an dernier, où
on posait différentes questions sur des saines habitudes de vie. Donc, il y
avait des questions sur le tabac, il y avait des questions sur
l'activité physique, sur la sédentarité, sur les loisirs et sur l'alimentation.
Et l'ensemble... c'est ça, c'était pour le
personnel. Et l'ensemble du personnel... Nous, on a uniquement 10 % de
notre personnel qui fume de façon régulière. De ces 10 % là, il y
en a uniquement 23 % qui aimeraient arrêter de fumer avec du soutien, mais
ils ont répondu que c'était inutile, pour nous, de proposer puisqu'ils
n'avaient pas la motivation.
Alors donc,
je pense qu'à ce moment-là c'est là qu'il faut aller — ce qu'on parle — dans la prévention primaire. Et ça n'est pas parce qu'ils sont déjà fumeurs, mais
c'est l'éducation, finalement. Et c'est ce qui a été fait souvent, qu'on
a vu dans les médias, la sensibilisation, et
aussi de sensibiliser les gens pas uniquement sur leur santé à eux, mais sur
l'impact de la fumée secondaire ou de la fumée tertiaire chez les autres.
M. Lafleur
(Paul-André) : Je pense
aussi que les... On n'en est pas au même point. Moi, j'ai l'impression que,
recommencer, si on ne l'avait pas fait jusqu'à maintenant et qu'on le faisait aujourd'hui
à l'institut Pinel, ça se ferait encore
beaucoup plus facilement qu'à l'époque. On voit, en discutant avec les
professionnels travaillant à l'institut Pinel... Je pense aux médecins. Moi, j'avais des médecins qui
étaient venus se plaindre de ça à moi avant. Ils disaient : Tu
travaillais sur les unités il y a quelques années, puis là tu es rendu que tu
implantes un projet comme ça, ça ne tient pas debout. Aujourd'hui, même les médecins de l'époque qui sont encore là, qui
avaient cette attitude-là, ce ne serait plus le cas. On est plus avancé,
comme société, je pense que c'est plus facile.
Et, oui, des
mesures de soutien, mais, Dre Fugère est tout à fait juste, ça prend une
motivation. Et là vous avez, maintenant
au Québec, plusieurs organismes très motivés à faire avancer cette cause. Vous
avez plusieurs projets pilotes déjà
implantés. Vous avez les unités jeunesse... les centres jeunesse qui sont
venus. Vous avez des hôpitaux qui le font de plus en plus. Il y a un effet d'entraînement. Et moi, je ne crois pas que
ce soit le levier financier qui soit déterminant en ce moment, je pense
qu'une détermination du législateur est importante.
M. Surprenant : Merci.
La
Présidente (Mme Hivon) : Ça va? Alors, je vous remercie
beaucoup pour votre présentation et je suspends les travaux de la
commission le temps que le prochain groupe, le Réseau du sport étudiant du
Québec, puisse prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 54)
(Reprise à 16 h 6)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre nos travaux. Nous accueillons maintenant les représentants du Réseau du sport étudiant du Québec, et donc bienvenue à
votre Assemblée nationale. Vous disposez d'une période de temps de
10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite vous
aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. À titre d'introduction, je vous demanderais de bien vouloir vous
nommer, préciser vos fonctions, et la parole est à vous. Merci.
Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ)
M. Roel
(Gustave) : Merci beaucoup. Tout d'abord, merci de nous
recevoir dans ce marathon que vous avez, de consultations, on en
convient. Et donc on va essayer de profiter au maximum du 10 minutes.
Mon nom est
Gustave Roel, donc, président-directeur général du Réseau du sport étudiant. Je
suis accompagné présentement de Stéphane Boudreau, qui est le directeur
des communications et marketing et également responsable du programme De Facto.
Et j'ai vraiment l'honneur aujourd'hui d'être
accompagné par le Dr David Hammond, professeur associé à la chaire sur la santé
à l'Université de Waterloo, de là le besoin possible d'avoir un peu de
traduction. Et, si vous me permettez, je
vais être quand même assez concis, mais je tiens quand même à vous présenter Dr
Hammond. Donc, on parle de conseiller
à l'Organisation mondiale de la santé, expert en intervention sur la recherche
du tabac, également témoin expert en
lien avec l'usage du tabac, a reçu des nombreuses récompenses à travers son
travail, notamment avec l'Association médicale canadienne et la société
de statistique royale du Canada.
Dans le cadre
du Réseau du sport étudiant, en lien avec la mission que nous avons, on a à
travailler sur la pratique sportive des jeunes, puis, quand qu'on parle
des jeunes, pour nous, on parle de la maternelle jusqu'à l'université. Ça
représente au-delà de 187 000 étudiants-athlètes au niveau de la
province au complet. Dans ce cadre-là, on travaille également au niveau de la santé. C'est la raison pour laquelle nous sommes
ici aujourd'hui et qu'on est intéressés par le projet de loi de... la
loi n° 44.
Donc,
en raison de ces éléments-là, depuis 2004, on a travaillé à développer un
nouveau programme, qui s'appelle De
Facto, donc c'est le programme sur lequel on a déposé le mémoire comme tel
aujourd'hui. Ce programme, dans le fond, c'est un programme de dénormalisation du produit du tabac. Et
l'orientation sur laquelle on le prend dans ce type de travail là, c'est de travailler beaucoup sur la... de ne
pas être moralisateur auprès des jeunes, mais plutôt d'utiliser leurs
capacités et leur intelligence à faire, donc, la lumière sur qu'est-ce que le
tabac et l'industrie du tabac comme telle.
Avant que je cède la parole à Dr Hammond,
qui va pouvoir vous parler sur deux points essentiellement, soit l'harmonisation et les mises en garde de santé
standardisées, moi, je tiens à affirmer, au nom des
187 000 étudiants-athlètes que
nous avons dans notre réseau ainsi que l'ensemble de la population scolaire,
que le projet de loi qui est sur la table est essentiellement important
pour cette population-là, et je vous dirais qu'il est important également,
l'amendement qui... certains amendements qui
sont proposés, notamment celui qui nous, nous touche plus directement, celui
d'élargir l'interdiction à tout ce qui est... tout endroit où un jeune peut se
retrouver, que ça soit dans un parc, que ça soit dans un terrain de jeux. Dans le fond, c'est de leur permettre d'avoir un
milieu sécuritaire et sain pour pouvoir explorer et se réaliser dans ce
domaine-là. Je cède la parole à Dr Hammond.
• (16 h 10) •
M. Hammond
(David) : Je vous remercie
de l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui. Je voudrais
commencer par vous présenter mes excuses pour la qualité de mon français.
Je suis un
scientifique en santé publique et mène une étude approfondie des recherches
scientifiques portant sur les
questions discutées ici aujourd'hui, y compris le tabagisme des jeunes,
l'aromatisation et le design des produits du tabac. Mon témoignage d'aujourd'hui est également basé sur mon
expérience de conseiller pour des pays de par le monde quant à la réglementation du tabac. J'ai, par
exemple, servi comme témoin expert au nom de pays comme l'Australie, le
Royaume-Uni et le Canada dans le cadre de poursuites impliquant des compagnies
de tabac.
On m'a demandé de traiter de deux questions
aujourd'hui. Tout d'abord, je tiens à témoigner au sujet de l'impact de l'interdiction des arômes de tabac qui
est contenue dans le projet de loi n° 44. Comme vous le savez bien,
il existe des restrictions fédérales sur les
produits du tabac au Canada. Toutefois, ces restrictions ont d'importantes
exemptions, notamment pour le
menthol, qui est la saveur la plus répandue pour les cigarettes. L'exemption
actuelle pour le menthol dans les
règlements fédéraux est comme une interdiction de soda qui exempte Coke et
Pepsi : elle n'est ni logique ni efficace.
Le projet de
loi n° 44 va fournir une protection supérieure pour les enfants et les
jeunes du Québec. La preuve démontre
sans équivoque que les produits avec des saveurs, comme le menthol, ont un plus
grand attrait chez les jeunes. J'ai examiné
des milliers de documents de l'industrie du tabac, et ces documents commerciaux
établissent clairement que les saveurs
sont un moyen efficace de commercialiser et de promouvoir le tabagisme pour les
jeunes. Ces documents sont également compatibles avec les données de
prévalence.
Au Canada et
au Québec, les fumeurs de cigarettes chez les jeunes sont environ six fois plus
susceptibles d'utiliser le menthol
que les fumeurs de cigarettes adultes. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles
le menthol est un puissant produit d'initiation.
En plus de leur goût, les produits au menthol sont perçus par beaucoup comme
des produits moins nocifs, en partie parce qu'ils anesthésient la gorge
et masquent l'expérience hostile de l'inhalation de la fumée.
L'interdiction
des saveurs ici proposée ramènerait le Québec en phase avec les recommandations
internationales de la Convention-cadre de
l'Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac. J'ai moi-même
siégé au comité responsable de
l'élaboration des lignes directrices, basées sur des données probantes, pour
les articles 9 et 10, qui couvrent les tests et la réglementation des produits du tabac dans les
180 pays qui ont ratifié la convention-cadre. Les articles 9
et 10 des lignes directrices recommandent que les saveurs qui augmentent
l'attrait ou l'appétence du tabagisme, comme le menthol, soient limitées ou interdites.
Québec rejoindrait alors d'autres provinces canadiennes, l'Union européenne et un nombre croissant d'autres juridictions dans
la mise en oeuvre des restrictions complètes de saveurs dans les
produits du tabac. Je ne doute pas que ces
restrictions permettraient de réduire l'adoption du tabagisme chez les jeunes
Québécois.
On m'a aussi
demandé de parler des emballages de tabac. Je suis conscient que les groupes de
santé dans le Réseau du sport
étudiant du Québec ont réclamé l'emballage neutre, comme en Australie. Je sais
aussi que la ministre déléguée à la Santé publique, Mme Lucie
Charlebois, a déclaré, le 5 mai dernier, qu'elle considérait instaurer un
règlement, suite à l'adoption du projet de loi n° 44, pour standardiser
les mises en garde de santé sur les paquets.
Les paquets
de tabac sont de toutes formes et toutes tailles. Dans des pays tels que le
Canada, les paquets sont la forme la plus importante de marketing qu'il
reste à l'industrie, et les entreprises continuent d'innover au niveau de la forme physique des paquets. Cela pose un sérieux
défi pour les mises en garde de santé. J'ai pris plusieurs exemples de formes d'emballage, en face de moi, qui illustrent
comment la forme et la taille des paquets de tabac modifient et
détériorent les mises en garde de santé. En
particulier, les emballages de cigarettes minces et ultraminces réduisent le
texte de mise en garde, et ce, à une taille pratiquement illisible.
J'ai conseillé des pays du monde entier sur le
design des mises en garde de santé et je peux attester que la grande variété dans des formes d'emballage est un
problème considérable pour maximiser l'efficacité des mises en garde de santé. Voici un exemple de Player's. Si on
fignole un peu, on peut complètement enlever la «part» extérieure du
paquet où se trouve la mise en garde et simplement la jeter.
Les consommateurs sont généralement
d'accord : nous avons mené des recherches sur cette question et nous avons constaté que les jeunes en particulier
perçoivent les mises en garde sur les paquets minces comme moins
efficaces. Le problème devient encore plus
grave pour les paquets à bords arrondis ou à formes inhabituelles, qui sont souvent utilisés pour les petits cigares et
d'autres produits du tabac.
La qualité de mise en garde de santé ne devrait
pas dépendre de la marque ou du type de cigarettes que fume un consommateur.
Par conséquent, des pays tels que l'Australie et le Royaume-Uni ont adopté des règlements
visant à standardiser la forme et la taille
des paquets. Cela peut être fait de plusieurs façons : par la mise en place d'une
dimension minimale
pour les surfaces des mises en garde; en exigeant que leurs surfaces soient
planes et à arêtes carrées, pour éviter des bords arrondis ou cachés; et
un mode standard d'ouverture des paquets de sorte que les volets et les autres
types d'ouverture ne viennent occulter les mises en garde.
J'ai ici plusieurs
exemples de paquets standardisés d'Australie. Dans le cadre des règlements
existant là-bas, il existe une dimension minimale pour les principaux
côtés de paquets. Les formats minimaux d'emballage, comme en Australie et à l'Union européenne, ont la
conséquence bénéfique supplémentaire d'éliminer les cigarettes
ultraminces, qui sont un moyen de marketing
très efficace pour cibler les jeunes filles et qui sont faussement perçues
comme moins nocives que les cigarettes régulières.
Ma
compréhension est que le Québec a, dans sa loi actuelle, l'autorité réglementaire
requise pour encadrer les emballages et les mises en garde de santé et
pourrait donc standardiser celles-ci. Cette mesure a l'appui de plusieurs
groupes de santé publique. Cela permettrait au Québec d'atteindre les objectifs
gouvernementaux en renforçant les connaissances du public pour la santé et en
réduisant l'initiation au tabagisme chez les jeunes.
Je vous
remercie de l'opportunité de parler avec vous aujourd'hui. Je serai heureux
de répondre à toute question que vous
pourriez avoir et, je regrette, mais mon français n'est pas assez bon pour bien
parler sans texte à lire, donc, si cela ne pose pas de problème, je
répondrai aux questions en anglais. Merci.
Le
Président (M. Tanguay) :
Thank you very much. Nous allons maintenant débuter la période d'échange, et, pour une
période de 20 min 30 s, je cède la parole à Mme la ministre.
Mme
Charlebois : Alors, M. Roel, M. Boudreau et M. Hammond, merci
d'être là. Merci de nous faire part de vos préoccupations et de vos
points de vue sur le projet de loi sur le tabac. Ça va certainement permettre
d'enrichir nos connaissances mais aussi
d'apporter... de bonifier le projet
de loi de façon impeccable. Et,
d'entrée de jeu, je veux vous
féliciter de vous soucier des jeunes par le sport, mais aussi par l'intérêt
de ce qu'ils consomment. Vraiment, c'est tout
à votre honneur. Puis je pense que c'est étroitement lié, l'alimentation,
le sport et le tabagisme, là... l'interdiction de tabagisme. Honnêtement,
c'est extrêmement lié, alors j'imagine que vous devez être heureux de voir que
nous allons réglementer la cigarette
électronique. Je ne vous ai pas entendus en parler, mais j'imagine que vous
êtes heureux de voir que nous allons l'interdire aux mineurs. D'entrée
de jeu, je vais vous questionner là-dessus.
M. Roel
(Gustave) : Dans le fond, on
est très heureux dans la mesure, effectivement, qu'on va venir baliser et faire en sorte
que nos jeunes ne commencent pas à fumer. Le fait qu'on a demandé à
Dr Hammond d'être avec nous, c'est justement parce
qu'on a besoin d'un expert pour être capables de voir quels sont les impacts
possibles. Ce n'est pas notre expertise.
Notre expertise, vous l'avez bien mentionné, et je vous en remercie de l'avoir
fait ressortir, c'est effectivement la santé
de nos jeunes à travers l'activité physique. Et c'est pour ça que le programme
De Facto a travaillé depuis, maintenant, 2004 à faire en sorte que les jeunes comprennent par eux-mêmes quels
sont les impacts. Donc, on ressort les effets, les faits comme tels, et c'est à eux à prendre une décision,
donc les responsabiliser à dire : Est-ce que j'y vais ou je n'y vais
pas? Par contre, concernant les effets, je ne sais pas si le Dr Hammond veut
parler au niveau de cet élément-là.
• (16 h 20) •
M.
Hammond (David) :
Well, I'll just add to that to say that, you know, Québec is... will be
standing along with many
other provinces in terms of the increasing regulations around e-cigarettes,
particularly cheaper brands used among youth.
And I think, as you've heard in your hearings, this is a very complicated
issue. There are arguments on both sides. But I think there is very strong consensus and agreement that
e-cigarette should not be used by youth, and measures such as prohibiting sales to youth and a minimum age
have very strong consensus, not just among public health advocates here, in Canada,
but, I think, around the world.
Mme
Charlebois : Est-ce
que vous considérez que ça pourrait
avoir un effet passerelle, c'est-à-dire que les jeunes pourraient commencer à
fumer avec la cigarette électronique pour transférer éventuellement vers le
tabagisme?
M. Hammond (David) : Well, you know, I think there's again
agreement that we don't want young people using nicotine and ingesting nicotine. There's all sorts
of reasons, in
terms of the deleterious
effects of nicotine in the developing
brain, and certainly, you know, there's a
possibility that the use of any nicotine products can... you know, might lead
to smoking later on. So, again, I think
there's very strong consensus. I haven't even heard proponents of e-cigarette
suggest that these are something that youth should be using.
So I think the proposition, as
I understand it in the bill, to have a minimum age restriction, I think, is a
very sensible public health measure and one
that will ensure that it will help to minimize the use of nicotine products
among youth in general.
Mme
Charlebois :
Donc, vous devez être d'accord avec le fait qu'on va interdire et l'affichage
et le... voyons! l'exposition des
paquets de cigarettes électroniques dans un dépanneur. Vous devez être en
accord avec ça, parce qu'on va les
réglementer au même titre que les paquets de cigarettes vont devoir être
cachés. Vous êtes à l'aise avec tout ça?
M. Roel
(Gustave) : Je vous dirais que les jeunes sont à l'aise avec ça. Si
vous regardez, à la page 6 du mémoire qu'on vous a déposé, le sondage qui a été fait auprès des jeunes, c'est
des éléments qu'ils soulèvent. Encore une fois, notre objectif avec De
Facto, c'est de faire en sorte qu'ils prennent conscience et qu'ils fassent des
choix. Et, dans cette consultation-là, dans
ce sondage-là, ils ont dénoté notamment le fait que... au niveau des emballages
neutres, ils ont dénoté également, au niveau des
faits... d'interdire des nouveaux produits. Donc, c'est le message qu'ils nous
passent, donc ils vont dans le sens que vous abordez présentement.
Donc, toute
solution possible pour faire en sorte que nos jeunes ne commencent pas à
fumer... Je pense que les statistiques
le prouvent, et vous avez plusieurs personnes, j'imagine, qui sont venues vous
faire cette démonstration-là, vous en
avez à l'intérieur de notre document... Bien, l'objectif, c'est de faire en
sorte que nos jeunes ne débutent pas dans ce processus-là. C'est
vraiment ça.
La raison
pour laquelle je disais tantôt de pouvoir étendre cette interdiction-là dans
les lieux publics comme des terrains de jeux, par exemple, c'est
exactement l'objectif sur lequel nous, on essaie de travailler.
Mme
Charlebois :
Les gens qui ont participé au sondage, ce n'est pas seulement des sportifs, là,
c'est des gens de tout acabit, hein?
M. Roel (Gustave) : Exactement.
Exactement, et c'est pour ça que je disais tantôt qu'on représente, oui, 187 000 étudiants-athlètes, mais,
lorsqu'on s'adresse avec De Facto, pour nous, c'est l'ensemble de la population
scolaire à laquelle on s'adresse, pas uniquement ces jeunes-là.
Mme
Charlebois : Je
pense que docteur avait quelque chose à ajouter?
M. Hammond (David) : No. I would just... You know, we know
that the point of sale is a very effective way of
marketing. It's not just for tobacco and cigarettes, it's for all products.
That's why Québec and other provinces have banned display and marketing of
cigarettes at the point of sale. We know that the point of sale has very broad
reach among youth. If you walk in to buy
milk or a candy, you're exposed to it. And I think that any restriction that
helps to reduce marketing of any nicotine product to youth is a good
thing. And any marketing of e-cigarettes needs to be carefully controlled, and that if there is any marketing for
e-cigarettes, it should be towards the purpose of discouraging smokers,
by promoting people to quit smoking rather than potential gateway to increase
smoking.
I
would just add to that that, as much as e-cigarette is a very difficult issue,
I think it's important that we keep our focus on the products that people are using now...
and, we know, are killing them, like menthol cigarettes. So you may know that in Québec about half of youth smokers,
in Québec, have used a menthol product in the last months. That's half of all your regular youth smokers. And we also
know, as I'm sure you've heard, that one out of every two or one out of
every three of those kids will die from smoking if they continue in their
habit.
So,
as much as e-cigarettes are a very important issue, I think it's very important
that public health measures focus on the products that are out there right now, and
they're being used very widely among youth, and that would include
menthol products, and ensuring that they continue to get the best health
information that they can on their packaging.
Mme
Charlebois : Ce
que je constate ici, c'est écrit : «Près du tiers des [étudiants] du
secondaire III à V qui fument la
cigarette, 31 %, choisissent la
version [...] menthol», c'est ce que vous venez de dire, je pense, en anglais.
Mais, drôle de hasard, on avait des
détaillants des dépanneurs hier, on avait aussi d'autres représentants, on nous
disait que c'était une part infime de
leur marché, le menthol, et que les jeunes — leur constat, eux autres, sur le
terrain — n'achètent
pas de menthol. Les statistiques que vous
avez proviennent de l'enquête et proviennent définitivement de jeunes
Québécois, là?
Une voix : Oui. Tout à fait.
Mme
Charlebois :
O.K. Est-ce que, Dr Hammond, vous pourriez me dire pourquoi l'Ontario ont
mis un délai pour l'adoption... pour
l'interdiction du menthol? Avez-vous une idée? Parce que, nous, ce n'est pas ce
qu'on projette, là, on dit : Toutes les saveurs. Vous le savez, vous
avez lu notre projet de loi. Mais pourquoi l'Ontario ont fait
différent?
M.
Hammond (David) :
Well, I am always careful about understanding or saying that I understand
politics, but, as
you may know, a number of provinces... most provinces of Canada have either
proposed a bill or implemented a ban on
menthol. And there are differences in how quickly they brought in that ban.
Other provinces like Nova Scotia and New Brunswick have acted much more quickly. So I can't speak to why they
decided to have a longer lead time. Some people might suggest it's because of lobbying, to give retailers and
manufacturers some advanced time. And, as you know well, that's typically... you know, you need to provide
the industry with some time to adjust. But I think the examples in the
other provinces certainly demonstrate that it's possible to have a relatively
short implementation deadline. I mean, that has happened, and there have been
no problems in terms of implementing those bans, to my knowledge.
Mme
Charlebois :
Non, je comprends. Je veux vous ramener sur les cigarettes électroniques, parce
que vous me dites :
Concentrons-nous sur le produit comme tel du tabac, qui tue davantage que la
cigarette électronique, j'en conviens avec
vous, mais, moi, l'effet passerelle me fait peur. Et vous avez dû remarquer
que, dans notre législation, c'est le seul produit sur lequel on a conservé les saveurs. Par contre, on s'est gardé
une possibilité de règlement pour pouvoir l'interdire si on s'aperçoit que les jeunes, ou d'autres
populations, tendent vers ça puis que ça va augmenter la prévalence au
tabac.
Je comprends
aussi que les compagnies de tabac, créatives comme elles le sont, ont commencé
à s'investir dans la cigarette
électronique et à y introduire le produit du tabac, pas seulement la nicotine,
qui crée la dépendance, mais là ils commencent à introduire le produit du tabac.
Alors, est-ce que vous ne considérez pas qu'on doit être très vigilants,
partout au Québec, concernant ces cigarettes électroniques là, même si on sait
que plusieurs s'en servent pour arrêter de fumer?
M. Hammond (David) : The short answer is yes. I think you
do need to be very careful about these products, and, you
know, you are one of many jurisdictions that are struggling with this issue,
and, you know, why it is such a struggle?
It's because you have some people saying these things increase smoking, you
have some things... saying that will
decrease smoking, and they are both correct. It depends upon who uses them and
for what purpose. So, obviously, they
could promote smoking among youth. They can help to sustain smoking among
smokers. If I can't smoke at work or I can't smoke in parks, I might
quit smoking. If I use an e-cigarette to get me through those times, maybe I
continue smoking. At the same time, we know that many Canadian adults are
trying these things to get off cigarettes.
So that is what makes this difficult:
both sides are correct. And the answer is how there are regulated, and that is precisely, I think, what you are dealing with, and that is
why, as I have said, I think regulations that discourage youth of e-cigarettes,
among young people, are the first and critically most important step, and that
is, I think, what I see in your Bill 44.
There
are another set of issues that are even more complicated, such as, well, «Wat
flavors should remain, what flavors should
not remain?» I think there's consensus that you don't need bubble gum and
peanut butter flavors in e-cigarettes
for smokers to want to use them to quit. I think there is a... It's not a
simple issue, and so I don't pretend to give you advice on what specific flavors should be addressed. My
understanding of your bill is that it gives the province the authority to decide at a later point, and my
personal opinion is that that would be a reasonable basis for future
decisions.
• (16 h 30) •
Mme
Charlebois :
D'accord. Merci, vous répondez très bien à ma question, en tout cas.
Je vais vous parler
maintenant de l'emballage neutre. J'ai vu vos recommandations. Vous m'avez
parlé de l'étiquette de mise en garde.
Qu'est-ce que vous pensez si l'étiquette de mise en garde est réglementée, avec
des dimensions, etc.? Est-ce que ça peut compenser pour l'emballage
neutre? Première question.
Deuxième
question : Vous qui êtes de l'Ontario — je vous reviens encore avec l'Ontario, vous
allez dire «elle est fatigante» — comment se fait-il que l'Ontario n'a pas
réglementé sur l'emballage neutre dans le nouveau projet de loi? Puis
Dieu sait qu'ils sont rigoureux dans leur projet de loi.
M.
Hammond (David) :
Well, I grew up in Alberta, so I won't take responsibility for everything from Ontario.
Well,
you know, the history of tobacco control is that measures that were once new
and radical become commonplace. When the first jurisdiction tried to ban
smoking in the workplace, it was never going to work, it was never going to happen, and now we find it
difficult to imagine the opposite. And standardizing the warnings on
packages is, I believe, going to follow the
same course. You know, we have packs called superslims, with pink flowers on
them, called Vogue, and I think that
people will look back in 20 years and say, «I can't believe we ever had
that, I can't believe we had these nice superslim packages.»
So why have another province done it?
Well, Australia has done it, and, in the last year, about half a dozen other countries have step up and said that they were going to do
it. And provinces have always been at the forefront of new measures for tobacco
control in Canada. It's rarely the federal Government that steps up and says,
«We're going to do it first.»
So I think that this will happen. I
think it's a question of who wants to take leadership. And I think that this is an opportunity of having good
regulation, good protection for kids or better protection for kids. And so I
think it's a case of which province
or jurisdiction in Canada wants to take leadership. You may or may not know
that something like this was very
close to happen 15 years ago in Canada and then there was all sorts of
court cases for different reasons with the companies.
So I can't tell you why other
provinces have done it. I think that it likely will be a province that steps
forward and takes
leadership on this issue, and I think, as I said, it's a question between good
treatment or better treatment. So
I suppose we'll see.
Mme
Charlebois :
Mais, quand je vous parle de réglementer l'étiquette, ce que je vous dis, c'est
que les dimensions vont être réglementées.
Là, les petits paquets ne seraient plus permis avec une réglementation. Mais,
vous, ce que vous souhaitez, c'est qu'on y aille pour la totale, de faire en
sorte que tout le paquet devienne neutre. C'est ça? C'est ça,
votre recommandation?
M. Hammond (David) : Well, I mean, it's not so much what I
want. I think the most important step is to insure we have agreement around the world that this is a
uniquely lethal product and it requires unique health warnings. And I
have helped many countries to design their
health warnings. And there is something I'm not suppose to say in public, but I
can certainly tell you that in Canada, you
know, the Government said to me, «Jeez, it is very difficult for us to
design a health warning when we don't
know if the picture is going to be on the side of the text or on top of the
text.» And if you could see, they cropped the pictures differently, and
this text is so small. So it's very hard to design a warning.
So I think one of the first measures
in tobacco control has always been to present health information in the most direct standard way, and I think that standardizing the shape
and size of packages is the most important thing. Other countries have gone further in terms of prohibiting brand imagery. I
mean, that is what you see here. I mean, that's not what I'm speaking
about today, but it's the same principle of standardizing the package, and I
think starting with a standard shape and size for health warnings is a very
good starting place.
Mme
Charlebois : Ce qui m'a impressionnée, c'est qu'en Australie
il y a des études, je crois, qui le démontrent, le taux de tabagisme... la prévalence au tabac s'est grandement réduite
suite à l'emballage neutre. Est-ce que je me trompe?
M. Hammond
(David) : Yes. And I'm actually serving as an expert
witness on behalf of the Australian Government,
and the U.K. Government, and the Irish Government, all of whom have been sued
by the tobacco companies. So I can't
disclose anything private, but certainly they have had, in Australia, their
largest decrease in prevalence ever recorded in history, and that is
starting from an already low level. So that certainly helped.
And
I know... There's actually...
I mean, it's funny because it's the two topics I'm speaking of today, but there are two dominant international trends in tobacco products.
One is the increased flavoring and use of menthol and these things where you
crush the filter and it releases menthol, and the second one is slim and
superslim packaging. And it's not me saying
that. You can read the trade magazines for the industry, and it says these
are the two dominant trends. It's not
an accident that those two trends are preferentially targeting young people.
And so I think that's one of the reasons why the Australian regulations have been so effective, because they are
really changing and altering the two dominant ways that companies are
trying to promote smoking to youth.
So, I'm sorry, that was a long
answer to your question. The short answer is, «Yes, smoking has gone down to
historic levels.»
Mme
Charlebois : Mais
je vous ai entendu dire, dans votre réponse longue, que les pays qui ont
normalisé les paquets ou, en tout cas, qui ont des paquets standard sont
poursuivis en ce moment par les compagnies de tabac?
M. Hammond
(David) : That is
correct.
Mme
Charlebois :
Alors, j'avise la population que les compagnies de tabac sont persistantes.
Alors, je vais
vous amener sur, maintenant, les terrains de jeux. Vous avez vu qu'on a eu beaucoup
de recommandations à l'effet que...
ce n'est pas dans le projet de loi en ce moment, mais qu'on devrait interdire le
tabac sur les lieux publics des terrains de jeux des enfants. On a même
eu un groupe qui nous a demandé que, dans tous les établissements scolaires, que ce soit primaire, secondaire, cégep et universitaire, soit interdit le tabac. Je veux vous entendre là-dessus, étant donné que notre
réflexion ne s'était pas rendue là. Est-ce que vous croyez que c'est aller loin
que d'interdire dans tous les
établissements scolaires et particulièrement les aires de jeux, les parcs ou... J'aimerais
vous entendre sur jusqu'où on devrait aller. Seulement les terrains de
jeux ou bien les plages, tout ce qui est public?
M. Hammond (David) : Well, to be honest with you, I'm not
an expert in that area, and so, you know, I would defer to others that you've spoken to. I want to
be careful about not providing you with my opinion in areas that I don't
feel fully qualified to do so, you know. So
I'll simply say that, you know, those sorts of regulations had been
implemented in other places. I think they've been quite popular, and actually
they have surprisingly little resistance from smokers themselves who, I think,
recognize people's wishes and perhaps rights to experience smoke-free
environments. But perhaps I'll hand it back to you.
M.
Roel (Gustave) :
Merci. Je ne suis pas un expert non
plus dans ce domaine-là. Par contre, j'ai un vécu assez long au
niveau du domaine de l'éducation. Je proviens d'une commission
scolaire, donc c'est tout récent, le
nouveau poste que j'occupe aujourd'hui, et j'ai eu à gérer des conseils
d'étudiants pendant plusieurs années, et les éléments que les étudiants amènent souvent, dans les trois
priorités dans une commission
scolaire, c'est souvent le fait
d'avoir un accès à l'école sans
fumée. Pourtant, il y a une loi qui fait une ligne bleue en quelque part, où les gens doivent fumer plus loin que la ligne bleue. Le problème, c'est que l'écran de
fumée n'est plus à la porte. Elle est au bout du corridor, si vous voulez, ou de l'allée.
Donc, dans ce
sens-là, je vous répondrai oui. C'est ça que les jeunes veulent, c'est ça que
les étudiants-athlètes... Ce qu'ils
veulent, c'est d'avoir un endroit où ils ne sont pas confrontés nécessairement à ça, donc, d'une part, parce
qu'ils veulent protéger leur santé, mais, du deuxième côté... C'est de faire en
sorte qu'ils ne débutent pas déjà à fumer, déjà là. Et, vous le savez aussi, les effets de la fumée secondaire et ces
éléments-là. Moi, je vous dirais : Le plus loin possible, encore
mieux pour la clientèle que nous représentons. La réponse est oui.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole
à notre collègue de Rosemont pour une période de 13 minutes.
• (16 h 40) •
M. Lisée :
Merci, M. le Président. M.
Roel, M. Boudreau, Dr. Hammond, welcome to the National
Assembly. I want to commend you on the
quality of your French. Parce
que vous avez lu, mais j'ai entendu des anglophones lire moins bien que
vous. I would put you between Stephen Harper and Jean
Chrétien.
Bon, d'abord, je tiens à vous féliciter pour votre
travail. Le sondage dont vous parlez, que vous avez fait auprès des jeunes en général, est très parlant, est très
parlant. Vous dites : «...près de neuf jeunes sur 10 considèrent que
l'industrie du tabac profite de leur
sentiment d'invincibilité et de leur naïveté pour les attirer et les rendre
dépendants aux produits du tabac.» Et
ça, on a montré, aux États-Unis entre autres, que les campagnes antitabac les
plus efficaces auprès des jeunes étaient
celles qui parlaient de la volonté des compagnies de les manipuler, hein, et
c'est parce que, bon, les jeunes aiment être autonomes. Quand on leur dit :
Vous vous faites manipuler, ils réagissent négativement. Si on leur dit :
C'est mauvais pour votre santé, ils
disent : Non, je suis en pleine santé. Bon. Alors donc, c'est bien de voir
la conscience des jeunes de la volonté manipulatrice des compagnies de
tabac.
Ensuite, vous
dites : «60 % des jeunes
fumeurs ou anciens fumeurs âgés de 18 à 24 ans identifient les
produits du tabac aromatisés comme ayant fait partie de leurs premières
expériences avec le tabac.» Alors, effectivement, c'est ce que l'industrie du tabac essaie de nier, mais
votre sondage est probant, 60 %, c'est considérable. C'est chez les
jeunes Québécois que la popularité des
produits du tabac aromatisés est la plus élevée au Canada. 59 % des élèves
fumeurs de la troisième à la
cinquième année du secondaire, au Québec, consomment des produits du tabac
aromatisés, ce qui est 9 % de
plus, neuf points de pourcentage de plus que la moyenne canadienne. C'est un
des rares cas où je voudrais bien que le Québec atteigne la moyenne
canadienne, sinon réussisse à montrer la voie.
Je vais vous parler du tabac à chiquer, parce
que vous êtes avec des jeunes sportifs, et, bon, il faut faire des distinctions, il y a le tabac à chiquer et à
cracher, ensuite il y a le tabac que l'on met sur la gencive sans le mâcher et
dont la nocivité est moins grande. Tout est nocif, mais, si on fait une
gradation, cette nocivité-là est moins grande. Et on a l'impression que c'était d'un autre âge, le tabac à chiquer, mais vous
nous dites que, presque toujours aromatisé, ce produit est très
populaire chez les jeunes sportifs. Pourquoi? Dans quelle mesure?
M. Roel (Gustave) : Nouvelle
tendance.
M. Lisée : Nouvelle tendance?
M. Roel (Gustave) : Il faut
comprendre que les jeunes sont aussi influencés par des modèles qu'ils voient,
et c'est ça qu'on voit présentement de plus en plus. Donc, ça nous préoccupe.
On n'a pas de... Dans notre cas à nous, et je
vais laisser le Dr Hammond donner plus d'information, dans notre cas à nous, on
n'a pas plus d'information très précise sur combien, mais ce qu'on voit, c'est qu'il y a une augmentation, et
ça, on le ressent, et ça, on l'entend. Dans ce sens-là, nous, ça nous préoccupe. Donc, c'est pour ça qu'on
dit : Écoutez, vous êtes dans un travail important, ça serait peut-être
déjà important de commencer à le considérer, parce qu'il y a quelque chose là à
l'heure actuelle et il risque d'avoir un dérapage là aussi.
Dr Hammond, je ne sais pas si vous avez quelque
chose à ajouter.
M. Hammond (David) : Well, I think, again, it speaks to the
importance of social norms, people that kids look up to, and I think it speaks to action from both
ends. I know for a fact that there are groups trying to work with the
Major League Baseball Association, for example, to ban the use of smokeless
tobacco at all levels. And I think the other direction
is the one that Québec is undertaking, which is to get it out of sports areas,
to get it out of playgrounds and to break that association.
These
are associations that have been built up for many decades very carefully
through industry marketing. I have read tens of thousands of these documents, and
they're very clear in saying why kids smoke. You know what? Kids don't smoke just for the nicotine, because you have to
try the product before nicotine has an effect on you. And so that
initial trial is all about the image of
smoking and the value that it provides, and one of those values is : I'm a
tough guy, I'm a real serious
baseball player, so I have smokeless tobacco. So this is built up over many
decades, and I think, you know, getting tobacco use outside of the sports areas and sporting events is an
important component of trying to break that association.
M. Lisée : M. Roel, M.
Boudreau, est-ce que c'est permis sur les terrains de sport au Québec de chiquer
pour les jeunes?
M. Boudreau (Stéphane) : Oui.
M. Lisée : C'est permis en ce
moment?
M.
Boudreau (Stéphane) : Oui, c'est permis. Même la cigarette
électronique... sont sur les terrains. C'est banalisé en ce moment, c'est vu comme une tendance. Quand
on va dans un championnat, ou une pratique, ou même une partie d'une
saison régulière, on le voit. C'est régulier tant au football, au baseball que
le hockey.
M. Lisée :
Alors, quelle serait la réaction si on décidait de bannir à la fois la
cigarette électronique, la cigarette traditionnelle, le tabac à chiquer
ou à sucer, du jour au lendemain, pour les jeunes? Comment vous géreriez ça?
M. Roel
(Gustave) : Moi, je prendrais
un bout de réponse de Dr Hammond tantôt : C'est un changement,
dans le fond, pour nous, de normes sociales. Et, dans le programme
De Facto, c'est quelque chose qu'on a mis de l'avant dès le départ,
depuis 2004. Et les jeunes, dans le fond, réagissent fortement et positivement
à ça, parce qu'effectivement ce qu'on leur démontre, c'est qu'ils sont
manipulés présentement, et c'est ça qu'on arrive à leur donner avec les faits. Est-ce qu'il peut y avoir une réaction? Peut-être,
mais je vous dirais que la majorité de nos étudiants-athlètes,
présentement, ils seraient favorables à quelque chose comme ça, c'est... et
vous le voyez dans les résultats que vous avez énumérés tantôt. L'information
qu'ils nous donnent, c'est : On veut le sortir de cet élément-là et changer
les normes sociales.
M. Lisée :
Est-ce qu'il y a des athlètes québécois
connus qui sont des mauvais modèles en
ce moment? Est-ce que vous les connaissez? Vous pouvez
nous donner leurs noms, on va les convoquer.
M. Boudreau (Stéphane) : Moi, je ne
m'avance pas.
M. Roel (Gustave) : Je ne pense pas
que je l'ai marqué dans le mémoire.
M.
Boudreau (Stéphane) : On doit les côtoyer. On doit les côtoyer. Là, je
ne m'avance pas.
M. Lisée :
On se parlera tout à l'heure. On se parlera tout à l'heure parce qu'on pourrait
faire une campagne, trois anciens chiqueurs,
olympiques ou autrement, qui disent : Moi, j'arrête de chiquer. Bon, tu
sais, on peut travailler là-dessus. O.K.
Et évidemment, là, en
ce moment, la loi va enlever, comme,
bien, le rappelle la ministre, les saveurs dans le tabac à chiquer, dont, vous dites, ils sont essentiellement aromatisés. Est-ce que ça aura un impact important sur la baisse de
la consommation, chez les jeunes, du tabac à chiquer?
M.
Hammond (David) :
Yes, we certainly expect that to be the case. I could have brought many more products, and you've probably
seen these, but, you know, if you haven't, come on up afterwards. So this is a
blunt trap, but it's the same idea. I
mean, they smell like candy. This is called Grapes Gone Wild. I mean, they are
presented with candy flavors for a reason : it makes them more
interesting to initiate and it really masks the taste and the feel of having
tobacco in your mouth. So, yes, I mean, that's... the flavors are in there
because they are an incentive to try, and taking them out reduces that
incentive to try in the first place.
M. Lisée : Il y a deux recommandations que vous faites qui ne sont pas dans le projet de loi tel que rédigé mais que nous,
au Parti québécois, on appuie. Le premier, c'est l'interdiction des
familles de marques et des cigarettes minces et ultraminces. Là, vous dites : Ceux-là, il faudrait que ça
n'existe plus, les cigarettes minces et ultraminces. Pourquoi?
M. Hammond (David) : Well, as I said, I mean, one of the
positive benefits of requiring a minimum pack size for the warnings is that these disappear. They
used to have these in Australia, they are no longer allowed. You know,
the benefit of that is not just that people
get superior health information, so young girls that are smoking these are
getting the same health information as men that might smoke these, but
these are...
You know, it's interesting, but the
desire to be slim, to lose weight is one of the most common reasons for young people to try smoking.
And, you know, 70, 80 years ago, very few women smoked. It used to be illegal
in places like New York City for
women to smoke, and the American Tobacco Company, in the 1930s, came out with
the first advertising campaign and it was, «Reach for a Lucky instead of
a sweet.» In other words, smoke a cigarette instead of eating a candy. And that campaign has persisted through
Virginia Slims to Vogue, and it really hits on one of the most important
reasons why young girls smoke.
And so it has the benefit, again, of
trying to cut the chord with that very effective reinforcement. You don't have to come out and say,
«Smoking makes you skinny» when you name it, the... a name of a fashion brand
and write the word «superslim» on the
pack, as is the case. And, if you look at these cigarettes, they're beautiful
and they're very small. This one's cut in half, but you can see that
it's the entire marketing package, with the product design, with what's written
on there, that together reinforces that belief.
M. Lisée : Dr Hammond, vous êtes une des sommités
internationales en la matière. Donc, vous l'avez dit, vous avez été témoin expert pour le gouvernement australien, le gouvernement du Royaume-Uni et de l'Irlande. Ce matin,
dans Le Devoir, vous dites : «Je m'attends à ce que le
gouvernement [québécois] adopte une loi qui soit forte[...]. [Le] Québec
a démontré, au fil des années, un leadership
important en matière de lutte au tabagisme [...] et s'est engagé à protéger
les jeunes. Les mesures déjà prévues dans le projet de loi vont certainement
aider, mais, en ajoutant une mesure sur la standardisation
de l'emballage des paquets de cigarettes, ça va aider encore plus. C'est comme
aller chez le docteur et se faire
demander : Est-ce que vous voulez le bon traitement», le projet de loi
actuel, ou est-ce que vous voulez un traitement encore meilleur, celui avec les paquets standardisés? Eh bien, moi, je
vous dis que, pour le Parti québécois, c'est sûr qu'on veut le traitement encore meilleur, et on va
travailler là-dessus.
Évidemment, ce qui
pourrait un peu refroidir les ardeurs de membres du Conseil des ministres,
c'est que les compagnies de tabac
poursuivent. Et poursuivre, ça coûte cher pour se défendre. Parfois, on gagne.
On gagne 15 milliards de dollars, récemment. On est en appel, mais quand même.
Alors, pourriez-vous... Je sais que l'Australie a été poursuivie deux
fois au moins mais a gagné...
Une voix :
...
• (16 h 50) •
M.
Lisée : Trois fois.
Alors, pouvez-vous résumer rapidement quelle est l'ampleur de l'effort des
compagnies de tabac pour essayer d'empêcher l'Australie de faire ce qu'elle a
fait avec les paquets standardisés?
M.
Hammond (David) :
So you're correct in that there were three separate legal challenges. The first
one has been heard,
and the Australian Government won. The second one is the World Trade
Organization challenge, which has been heard but not
decided. And the third one, the case has not been heard. I can tell you
that...
M.
Lisée : Est-ce que
j'ai compris qu'ils sont intervenus dans une entente Singapour et l'Australie
pour introduire, dans l'entente
Singapour-Australie, une disposition qu'ils pouvaient ensuite invoquer en disant que
l'Australie était en contravention de cette convention?
M.
Hammond (David) :
Yes. Without providing my personal opinion, what happened is Philip Morris opened a company in another
country for which there was no trade after the Australian Government had announced
regulations, so they
could then say that those trade interests were damaged. Legal scholars don't
believe that those cases have much merit, but they are disincentive, there is no question. I mean, the tobacco
companies have sued the Canadian Government many times. You may or may
not know that they've just announced that they're suing him again.
M.
Lisée : Oui.
M. Hammond (David) : So, you know, these things are as much to scare governments from acting as they are to have merit...
M. Lisée :
Mais parfois ça fonctionne. Ça fonctionne parce que... Est-ce que j'ai raison
de dire que le Togo a voulu adopter une législation antitabac, les compagnies... je
pense que c'est Philip Morris, leur a
dit : Bien, non seulement
on va vous poursuivre, on a poursuivi l'Australie, et le Togo a considéré qu'il
n'avait simplement pas les moyens d'embaucher des avocats et donc n'a pas adopté
la loi antitabac qu'ils envisageaient?
M.
Hammond (David) :
Well, it's... Yes. I mean, that's a fact, you know, in their history, they've sued for smoke-free restrictions, they've sued for all sort of
things. I think what's most important is that the case in Australia and in
the U.K. has preceded. And it's usually the first country that gets hit, and
Australia has taking that on. So, you know, the threat of legal action from the tobacco industry always exists
and it's...
M. Lisée : Je sais que mon temps est terminé,
mais je vais quand même... ask you this question : If we proceed, and we're sued, and I convince the
Minister, would you be an expert witness for Québec?
M.
Hammond (David) : Well, I'd be happy to. You
can see my hairs are going grey from the other cases, so I'm not sure I have
much else to lose, but...
M. Lisée :
Merci. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à notre collègue de Saint-Hyacinthe
pour un bloc de neuf minutes.
Mme
Soucy : Merci, M. le Président. Plusieurs spécialistes sont venus ici également
puis nous ont parlé du modèle australien.
Mais vous avez aussi cité le modèle du Royaume-Uni, qui avait été aussi... qui
avait aussi adopté des mesures pour le paquet standardisé. Pouvez-vous nous présenter un peu le... nous
parler de ça, parce qu'il est moins cité? En fait, on le cite beaucoup
moins que celui de l'Australie. Est-ce que c'est parce qu'il a eu un moins haut
taux de succès ou...
M.
Hammond (David) :
No, it's just the timing of it. So Australia was the first country to actually
pass a bill and is today the only country to actually
implement it. So that happened about two, three years ago. So a number of other
countries have proposed their passed bills,
it's just that they have not yet been implemented. Now, having said that,
in terms of standardizing the size of the
package, that's in the European Union Tobacco Products Directive. So that will
happen throughout Europe. Countries like the
U.K. and Ireland have gone further to standardizing the appearance by
eliminating branding and brand imagery. So I think it's just a function of the
timeline in that Australia was the first to have fully implemented, and we now
have a true example of what it looks like in practice.
Mme Soucy :
Quels sont les autres pays qui envisagent d'aller de l'avant avec la mesure de
standardisation des paquets?
M.
Hammond (David) :
There's a long growing list, so... I mentioned U.K., Ireland, France, Norway,
India, Brazil. Canada came close in the 1990s. There was recently... I think it was last
month, there was a meeting of Health ministers from... I forgot to say New Zealand. So there's a...
I think it was like when Canada first put
pictured health warnings on packages. In 2000, Canada was the first, there was nobody. That's now
being implemented in, I think, more than 70 or 80 countries around the world. So what you see is an adoption curve
where it goes like this, and I think plain packaging... you know, there must be a dozen countries that
have said, «OK, we intend to do this», and they are
in different stages of actually drafting bills, passing
bills and then, ultimately, implementation.
Mme
Soucy : Vous avez mentionné
que vous avez conseillé plusieurs gouvernements
et puis que, bon, vous ne pouvez pas
dire publiquement certaines choses. Pourquoi? Parce que ces choses-là
pourraient aider d'autres gouvernements à se protéger ou à se défendre
contre les compagnies de tabac.
M.
Hammond (David) :
Yes. And, you know, that is why we... There is a treaty, a public health treaty
with the World Health Organization. 180 countries have
ratified it. And so that has been very helpful in jurisdictions sharing information and evidence, which is especially
important because of the threat of litigation. And so it is... What you
see is countries actually getting together
and working together, different... It could be provincial jurisdictions that
are assisting each other and sharing evidence and resources.
So I think, you know, my
work is a part of that. I'm a researcher, I read industry documents and I try
to inform them to
the best that I can about what the evidence is. My job isn't to say, «Québec or
any other jurisdiction should do these things.»
My job is to say, «If you want to reduce tobacco use, if you work to do this
thing, this is what you can expect.»
Mme Soucy :
Au Québec, on estime que la baisse de 1 %, de 1 point du pourcentage du
taux de tabagisme réduirait... en fait,
aurait des économies directes de 40 millions puis indirectes de
70 millions. En Australie, si on prend le cas de l'Australie qui a
baissé son taux de 3 % avec le paquet neutre, alors c'est payant pour
l'État, même si on a des risques de poursuites.
M.
Hammond (David) :
Yes. I mean, you know, I think countries like Australia have done it, first and foremost, to protect children. It's a wonderful benefit that
actually saves healthcare costs and money. And so you're absolutely right, I think that there are strong economic
incentives for jurisdictions to reduce tobacco use and promotion among
kids.
You know, this is a long game, because
it's so addictive. You know, the health consequences are, on one hand, a long time away, but on the other hand, the key is whether
the kid picks up the product and starts to use it, because we know that many people can never get off that train
once they begin, because of the pharmacological effects of nicotine. So this is a long game with very expensive costs,
financial costs to governments, and, as you say, there are some
substantial financial benefits to that sort of reduction in smoking.
Mme Soucy :
Pouvez-vous nous dire combien l'Australie a dépensé pour se défendre?
M. Hammond (David) : Well, in the
one case that's been decided so far, the answer is nothing, because the industry lost and they paid the Government's
costs. So I don't pretend to know the legal protocols in every
jurisdiction, but my understanding is, typically: if a country is sued and the
industry loses, the industry pays the costs. So, you know, that's certainly the case in Australia, and my
understanding is that's been the case in other legal actions I've been
involved in, where companies have sued countries and lost.
Mme
Soucy : D'après vous, quelles seraient, en fait, les mesures en lien
avec la prévention pour éviter, justement, l'initiative au tabagisme,
qui devraient être... qui devraient faire partie d'un gouvernement responsable,
les mesures de prévention?
• (17 heures)
•
M. Hammond (David) : Well, I think it's mainly the ones
that are in your bill. I think it's reducing incentives
for kids to smoke. Menthol, flavors are an
incentive. Innovation in packaging designs and the shape that reinforce the
reasons why kids might want to smoke are important incentives. And, you know,
at the end of the day, that was the most important criteria for Australia. So I think
it's many of the things in your bill and some of the other things we've talked about today. Sorry.
Mme
Soucy : Bien, j'aurais dû peut-être
préciser ma question, mais, au
niveau scolaire, il devrait peut-être
y avoir de la prévention au niveau
académique dès le bas âge, qui devrait peut-être faire partie du système d'éducation ou
des cours d'éducation physique aussi.
M.
Hammond (David) :
I mean, absolutely. I think the school environment is an important one. And,
you know, it's a...
The lesson in tobacco control is that there's no one measure that is effective,
it's the combination of measures. And so we heard references to
anti-smoking media campaigns, to work that is done in schools, so all of those
things are important. And the one thing that...
I would just caution this : If you asked a tobacco company, «How do you
stop kids smoking?», they say, «Check for ID and tell kids that
they shouldn't smoke.» Now, it's not to say that those aren't important, but
what is important is to adjust the fundamental reasons why they do smoke, and
it has to do with the product and how it's
delivered to kids. So I think it's the combination of measures. And just
telling kids not to smoke isn't enough. You actually have to remove, as
I said, some of the incentives in the product, in the package itself, that
actually increases smoking.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup.
Mme
Soucy : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Tanguay) : Dr. Hammond,
thank you very, very much for your time. Merci beaucoup,
M. Boudreau, M. Roel également. Alors, c'est tout le temps que nous
avions aujourd'hui. Merci pour votre présence.
Je suspends nos
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 2)
(Reprise à 17 h 12)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous accueillons maintenant les représentantes,
représentants de la Coalition Priorité Cancer. Bienvenue à votre Assemblée
nationale. Vous disposez d'une période de 10 minutes
de présentation, et par la suite vous aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires.
Je vous demanderais, d'entrée de jeu, de bien vouloir vous nommer, préciser vos fonctions, et, sans plus
tarder, la parole est à vous.
Coalition Priorité Cancer au Québec
Mme
Rodrigue (Nathalie) : Merci beaucoup, M. le Président. Mme la
ministre, mesdames et messieurs de
la commission, je suis Nathalie Rodrigue, présidente de la Coalition Priorité Cancer
au Québec. Et nous vous remercions de nous permettre de vous présenter notre point de vue dans le cadre de la consultation sur le projet
de loi n° 44, Loi visant à renforcer la lutte contre le tabagisme. Je suis accompagnée du président du Comité patients et survivants de
la coalition, M. Serge Turgeon,
ainsi que de la Dre Claire Jutras, médecin de famille et
médecin-conseil en santé publique et touchée de près par le cancer.
Aujourd'hui, 18 hommes et femmes sont morts dû au tabagisme, demain
18 hommes et femmes mourront dû au tabagisme, après demain
18 hommes et femmes mourront encore à cause du tabagisme, pour un total,
au Québec, de 6 500 hommes et femmes par année. On peut parler d'un
fléau.
La Coalition
Priorité Cancer a été créée en 2001. Elle a pour mission de donner une voix
forte, de soutenir et de défendre les personnes touchées par le cancer,
on parle des patients, des survivants, proches aidants et leurs familles. Notre objectif principal est d'obtenir un
véritable plan de contrôle du cancer et de faire en sorte que les autorités
publiques, au plus haut niveau, se
responsabilisent à l'égard des enjeux de la lutte contre le cancer et de
l'action sur les déterminants de la santé. Par ses membres, la coalition
représente près de 1,5 million de personnes.
Nous sommes
ici parce que le tabagisme est un tueur et que ceux qui fabriquent et vendent
des produits du tabac le savent
parfaitement et qu'ils utilisent tous les artifices possibles pour maquiller et
enjoliver leur réalité. Et cette réalité, elle est très claire :
près du tiers de tous les cancers ont le tabagisme pour origine et pour
85 % des cancers du poumon.
Nous sommes venus vous dire que nous appuyons le
projet de loi n° 44, qui permettra de lutter un peu plus efficacement
contre ce fléau. Également, au nom des centaines de milliers de personnes qui
sont mortes à cause du tabagisme et des
dizaines de milliers d'autres qui en mourront dans les prochaines années, nous
aimerions que vous alliez plus loin dans le durcissement de la
législation contre le tabagisme.
D'entrée de
jeu, nous appuyons fermement les mesures préconisées quant aux zones sans
fumée, soit l'interdiction de fumer à
moins de neuf mètres de toute porte d'un établissement public, sur les
terrasses des bars et restaurants, dans les véhicules en présence d'enfants, ainsi que dans les lieux communs
d'édifices de deux logements et plus. Évidemment, nous souscrivons aussi aux mesures interdisant toutes
les saveurs, incluant le menthol, pour l'ensemble des produits du tabac.
Pareillement,
nous nous réjouissons de l'assujettissement de la cigarette électronique, avec
ou sans nicotine, à la Loi sur le
tabac, ce qui interdira sa vente aux mineurs, la publicité de type style de vie
ainsi que son usage là où fumer est interdit.
Certains prétendent que les cigarettes
électroniques peuvent être une alternative, une méthode pour cesser de fumer. Les avis en ce sens ne font pas consensus
auprès des professionnels de la santé. Toutefois, comme le
démontrent de nouvelles recherches publiées ces jours-ci chez nos voisins du
Sud, il y aurait un grand risque pour que le vapotage électronique soit associé
à l'initiation du tabagisme chez les jeunes.
Par ailleurs, à l'instar de beaucoup d'autres organismes, nous suggérons au
législateur d'apporter des amendements pour
renforcer le message antitabagique et pour préciser la portée des dispositions déjà incluses dans le projet de loi. Nous nous intéressons particulièrement à la protection
contre la fumée secondaire, dont la nocivité est maintenant amplement démontrée.
Dans cette optique, nous proposons les amendements
suivants : en ce qui a trait à la fumée secondaire, que l'interdiction de
fumer et aussi de tous les autres produits du tabac sur les terrains d'écoles
primaires et secondaires soit appliquée en
tout temps, et non seulement aux heures durant lesquelles des mineurs s'y
trouvent, et inclure les terrains des
établissements collégiaux; que le rayon de neuf mètres
d'interdiction de fumer s'applique aussi à partir de toute fenêtre ou
prise d'air et non seulement les portes d'un établissement public; que les
abris pour fumeurs soient situés à plus de
neuf mètres de toute fenêtre ou prise d'air, et non seulement des portes
d'entrée; de ne plus permettre de fumoirs dans les centres jeunesse, les départements ou unités psychiatriques et dans
les centres de réadaptation et de ne plus permettre de chambres fumeurs
dans les installations de santé, bien que nous soyons conscients que de telles
mesures peuvent être difficiles à appliquer,
notamment dans le contexte de soins psychiatriques ou de
soins palliatifs de fin de vie; de préciser les droits des propriétaires
et gestionnaires d'immeuble d'interdire de fumer dans leurs édifices.
En ce qui a
trait à la réglementation sur les emballages, à défaut d'obliger l'emballage
neutre et standardisé des produits du
tabac, nous proposons que la mise en garde sur les paquets soit standardisée
par voie de règlement, incluant la taille minimale de la mise en
garde.
En ce qui a
trait à la promotion des produits du tabac, nous souhaitons vivement que des
mesures soient incluses de manière à
instaurer un pouvoir réglementaire pour mieux encadrer et interdire certaines
activités promotionnelles entre les fabricants
et les détaillants, notamment les paiements en lien avec une promotion ou les programmes
de performance. De même, nous vous
demandons d'interdire dans un point de vente toute affiche comportant des images
de produits du tabac ou des emballages de tabac autres que ceux
autorisés par le ministère.
D'autres mesures sont à considérer. Nous
appuyons également d'autres mesures mises de l'avant par nos partenaires et par différentes organisations, qui devraient être considérées par le gouvernement du Québec
pour rendre encore plus efficace la lutte contre le tabagisme. Deux
d'entre elles nous apparaissent importantes : l'imposition d'un moratoire sur tout nouveau produit du tabac, c'est-à-dire l'interdiction de mettre sur le marché de nouveaux produits, de nouvelles marques ou de nouveaux emballages de
produits du tabac. Il faut comprendre que, par l'introduction de
nouveaux produits, l'industrie déploie de nouvelles stratégies de marketing
auprès des consommateurs, ciblant particulièrement les jeunes. L'interdiction de l'utilisation des
cigarettes minces et ultraminces. Son association avec la mode,
principalement féminine, par certaines
compagnies, est dangereuse. Par le passé, c'est notamment grâce à l'apparition
de ces cigarettes que l'industrie a réalisé une partie de son marketing
auprès des femmes, ce qui a contribué à l'augmentation du taux de tabagisme chez ces dernières. Une interdiction de
toute cigarette dont le diamètre est inférieur à 7,5 millimètres ou
dont la longueur dépasse 70 millimètres serait souhaitée pour décourager
cet engouement de mode et de tendance. Merci.
• (17 h 20) •
M. Dion (Serge) : Alors, moi, je
vais vous entretenir sur d'autres actions pour appuyer la législation contre le
tabagisme.
Alors,
globalement, les mesures contenues dans le projet de loi n° 44
visent principalement deux objectifs : un, rendre les produits du tabac moins attrayants afin de réduire
l'initiation au tabagisme et d'augmenter la cessation tabagique, et, deux, renforcer la protection
des non-fumeurs, tout particulièrement les jeunes, contre la fumée du tabac
secondaire.
Comme nous
l'avons indiqué précédemment, la Coalition Priorité Cancer au Québec
appuie ce projet de loi tout
en proposant, par des amendements,
d'aller plus loin dans la même logique de réduction du tabagisme et de la
protection contre la fumée secondaire. Nous
pensons que le renforcement de la réglementation contre le tabagisme ne sera
pas suffisant pour atteindre les objectifs visés. D'autres mesures
devraient être prises... devraient être mises de l'avant pour appuyer l'action législative et pour développer dans la population,
notamment chez les jeunes, une nouvelle norme
comportementale excluant le tabagisme et privilégiant de saines habitudes de
vie.
Nous sommes
d'avis que le gouvernement du Québec devrait hausser immédiatement et de manière
significative, y compris son indexation, la
taxe sur tous les produits du tabac ainsi que sur les cigarettes électroniques
et tout autre produit connexe.
Contrairement à certaines croyances, les effets pervers des hausses de taxes
sur la contrebande des produits du tabac sont largement exagérés ou
montés en épingle par les fabricants et les vendeurs de ces produits.
Nous croyons
que les temps ont changé et que le moment est venu de prendre le taureau par
les cornes. S'il y a un effet
démontré, c'est bien la relation directe entre le prix du produit et la décision
de l'acheter. Plutôt que d'engloutir les montants de taxes récupérés dans le fonds consolidé de l'État, nous
suggérons au gouvernement d'investir directement dans le financement et la promotion de saines habitudes de vie ainsi
que dans le soutien aux initiatives du milieu, notamment les organismes communautaires visant à prévenir le
tabagisme et à modifier les comportements. Si besoin est, la
surveillance de la contrebande du tabac
pourrait être augmentée, mais parions qu'à terme les résultats seront largement
bénéfiques tant pour la santé des Québécois que pour la santé de nos finances
publiques.
Ceci étant dit, vous nous permettrez de conclure
sur cette observation : La coalition incite fortement le ministère
de la Santé et des Services sociaux à
réinvestir dans la promotion et la prévention dans le domaine de la santé et du
mieux-être. Cela est d'autant plus justifié
qu'il assume annuellement une facture de plus de 1 milliard de dollars en
soins directs de santé dont la cause est le tabagisme.
De plus, nous espérons que le gouvernement du
Québec adoptera le plus rapidement possible une politique nationale de
prévention qui concernera autant les individus que les communautés. Par
exemple, dans le cadre d'une vision
préventive et à long terme du développement social et économique de notre
société, les décisions et les initiatives de l'État devraient tendre à
promouvoir et à appuyer les meilleures habitudes de vie, dont le non-usage du
tabac.
Nous tenons à
remercier les membres de la Commission de la santé et des services sociaux de
nous avoir permis de présenter nos
commentaires sur le projet de loi n° 44 pour le renforcement de la lutte
contre le tabagisme. Nous apprécions cette
opportunité d'appuyer la coalition québécoise contre le tabac ainsi que les
nombreuses autres organisations pour qui la lutte contre le tabagisme au Québec est une priorité. Nous considérons
que l'utilisation du tabac tout comme l'exposition à la fumée secondaire
sont des fléaux publics qu'il faut combattre de toutes nos forces.
En raison des
stratégies de marketing déployées par l'industrie du tabac pour séduire les
consommateurs, autant les adultes que
les jeunes, des centaines de milliers de Québécois sont entraînés et enchaînés
dans la dépendance du tabac et de la nicotine. Nombreux sont ceux et
celles qui y laisseront leur santé et leur vie. Voilà pourquoi nous appuyons le
projet de loi n° 44 et pourquoi nous
formulons d'autres propositions qui permettraient d'appuyer le renforcement de
la lutte contre le tabac, notamment
l'accentuation de la promotion des saines habitudes vie. Nous encourageons
vivement le gouvernement à continuer à assurer une vigilance sur les actions de
l'industrie du tabac et l'assurons de notre soutien à cet égard. Merci.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, maintenant, nous allons débuter une période d'échange
avec les parlementaires, et je cède la parole à Mme la ministre pour
18 min 30 s.
Mme
Charlebois :
Alors, merci beaucoup, M. le Président. Oui?
Une voix : ...
Mme
Charlebois : Ah!
excusez. Allez-y.
Mme Jutras(Claire) : Je suis
médecin, je travaille en prévention, mais la raison pour laquelle je suis ici,
c'est que le travail que vous êtes en train
de faire est fondamental. Le mot «cancer», moi, je l'ai appris à neuf
ans : ma mère a eu un diagnostic de cancer du sein. J'avais un
petit frère de trois ans, j'avais une grande soeur de 14 ans. Je peux vous
dire que ça frappe comme un bulldozer. C'est
dans mon coeur, c'est dans mon cerveau, c'est dans mes tripes, et ça fait
40 ans.
Ce que vous
êtes en train de faire ici est important, et je vous remercie de nous donner l'occasion
de participer à ce processus démocratique. Sachez, quand vous allez retourner
rédiger votre projet de loi, que derrière le mot «menthol», derrière le mot
«terrasse», derrière le mot «fumoir», il
y a des papas, il y a
des mamans, il y a des enfants qui souffrent et qui ont mal.
Vous avez leur vie, ou leur mort, ou leurs souffrances entre vos mains, parce
que le tiers des cancers est lié au tabac.
Mme
Charlebois : Ça va? Alors, bien, merci, Mme Rodrigue,
M. Dion et Dre Jutras, d'être ici et de venir nous partager vos connaissances, votre expérience et
surtout vos préoccupations quant au projet de loi. Et j'ai le goût
de vous dire que j'étais là... je
n'étais pas là en 1998, mais en 2005, alors qu'il y a eu révision de la Loi sur
le tabac. J'étais députée déjà élue
et je participais activement à la commission
parlementaire depuis 2003. Et, quand
le projet de loi a été déposé, ce projet de loi là m'a amenée à quitter cette habitude de
tabagisme. Et je fais partie de celles qui ont perdu un membre de leur
famille — bien
que je ne veux pas aller là-dessus, parce que je ne le fais pas pour ma cause,
je le fais pour l'ensemble de la population,
étant ministre responsable de la Santé publique — mon
père est mort d'un cancer du poumon, alors
je comprends très bien les propos que vous avez tenus. Puis je ne le dis
pas avec émotivité, soit dit en
passant, parce qu'on va me
dire que je suis émotive. Bon.
Une fois que je vous ai tout dit ça, je crois
que la société québécoise a évolué grandement quand on parle de tabagisme. En ce moment, le projet de loi sur lequel on travaille, c'est prévenir la consommation chez les
jeunes, protéger la santé des
non-fumeurs et favoriser la cessation du tabagisme. Tout ce qui est prévu dans
le projet de loi est là pour ça.
Et j'ai le
goût de vous dire qu'on entend plusieurs groupes, ce n'est pas pour rien, c'est
parce qu'on veut s'assurer qu'on va entendre tous les points
de vue possibles et impossibles. Puis
il y a des groupes qu'on n'entendra pas mais qui nous envoient leurs mémoires. Tous les parlementaires
ici, de toutes formations politiques confondues, vont prendre le temps de prendre connaissance de tous les mémoires, puis on va travailler
ensemble pour bonifier le projet de
loi pour s'assurer qu'on aura le meilleur projet de loi possible pour
faire en sorte que notre population soit bien protégée, notamment
les jeunes. Parce qu'en ce moment la prévalence au tabac stagne au
Québec. On sait pourquoi, c'est parce que, chez les jeunes, il n'y a pas une
recrudescence, mais ça ne baisse pas puis c'est là qu'il faut travailler, entre
autres.
J'ai le goût
de vous amener à me parler de cigarettes électroniques. Vous en avez parlé un
petit peu, mais pas tant que ça, et
cigarette électronique, c'est un moyen... on se fait dire... Il y a deux côtés,
hein? On se fait dire par certaines personnes
que... Puis les études ne sont pas concluantes, vous le savez. Il y a
différentes études, mais on est au début. C'est en effervescence, c'est en ébullition, mais c'est en grande croissance, les
boutiques de vapotage, la cigarette électronique aussi, mais je dois
vous dire qu'il n'y a pas d'étude concluante qui nous dit : Oui, c'est
vrai que ça permet à des gens d'arrêter,
puis c'est... non, c'est mieux d'éliminer la cigarette électronique. Alors, ce
qu'on s'est dit, contrairement à tous les autres produits du tabac, que
ce soit le tabac sans fumée, bref, le tabac à chiquer, là, les... Toutes les
saveurs sont éliminées de tous les produits
du tabac, sauf pour la cigarette électronique. On s'est gardé, par contre, une
voie réglementaire possible pour
l'interdire si on s'aperçoit qu'il y a une recrudescence puis que ça devient
une passerelle pour les gens pour commencer à fumer. Qu'est-ce que vous
pensez de ça?
Mme Jutras
(Claire) : Bien, en fait, j'aime votre vision globale, parce
qu'effectivement... Je suis aussi un médecin, donc la lutte au tabac, c'est vraiment important. D'entrée de jeu, je
dirais que ce n'est pas la cigarette électronique qui tue, et vous avez raison, actuellement on n'a pas assez
de recul. Mais je pense que, dans des contextes comme ça, le principe de
précaution vaut, c'est-à-dire on va
essayer... Et votre projet de loi est, à mon point de vue, tout à fait
équilibré en ce sens-là, c'est-à-dire
qu'il n'empêchera pas les gens pour qui ça pourrait être utile de l'utiliser
dans un but de cessation tabagique ou de réduction des méfaits, mais en
même temps il va essayer de protéger les jeunes et les ex-fumeurs.
Parce qu'il
ne faut pas se leurrer, je trouve que la cigarette électronique, ça peut être
un... quand les ex-fumeurs voient ça, avec les volutes de fumée, et tout
ça, ça doit être, pour certains, tellement tentant. Donc, je pense qu'il faut y aller avec modération. Ce n'est pas lui qui tue,
mais je pense que c'est très prudent de l'avoir mis dans votre projet de
loi, s'assurer, donc, que les jeunes y
toucheront le moins possible. Se garder une petite réserve avec l'aspect
réglementaire sur les saveurs, c'est génial. Protéger les ex-fumeurs, donc, et
toute la notion de renormalisation, je pense que ça, c'est particulièrement fondamental. J'ai toujours trouvé
que la cigarette électronique, ça ressemblait à un simulateur de vol, c'est-à-dire que, pour les jeunes, si tu apprends
à fumer dans les meilleures conditions possible, après c'est facile de
passer. Donc, votre projet de loi, moi, je
pense qu'il est tout à fait équilibré puis j'abonde, là, dans le sens d'aller
de l'avant avec ça.
Mme
Charlebois :
On a appris pendant les consultations que, même dans la cigarette électronique,
on commence à introduire du tabac et non pas juste de la nicotine. Je ne
savais pas ça. Est-ce que vous avez déjà entendu parler de ça en tant que
médecin?
• (17 h 30) •
Mme Jutras
(Claire) : Bien, c'est une compagnie... Ce n'est pas encore ici, au
Québec. Ils veulent chauffer le tabac plutôt
que le combustionner, si vous voulez, donc ce n'est pas juste l'aspect
nicotine. À mon point de vue, mais je ne suis pas une experte là-dessus,
je trouve que le tabac, il devrait être le moins possible présent, puisqu'il y
a un paquet de cancérigènes, alors que la
nicotine ne cause pas les maladies, elle cause la dépendance, qui est en fait
une maladie. Mais donc, personnellement, je trouve que c'est un produit
qui ne devrait pas être sorti, et, si vous avez le moratoire sur les nouveaux
produits, on pourrait être protégés, nous.
Mme
Charlebois : Parlons donc des espaces publics comme les écoles
primaires, secondaires. Vous nous suggérez d'élargir ça aussi... les établissements
collégiaux. Il y a même quelqu'un qui m'a dit : Pourquoi pas les universités,
tant qu'à y être? Ce sont des établissements publics financés par des fonds
publics. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Pensez-vous que la société est rendue
là?
M. Dion (Serge) : Concernant les espaces publics, écoutez,
si on revient un petit peu en arrière, que de chemin parcouru! On fumait dans les hôpitaux il n'y a pas si longtemps, etc. Qu'est-ce
qui va nous attendre demain, après la loi? Ça va être quoi, le prochain cheval de bataille? Qu'est-ce qu'il reste
aux fumeurs? Il va rester des espaces publics. Donc, nous, ce qu'on préconise, évidemment, on ne fait
aucune distinction primaire, secondaire, université : allez-y, allez-y,
il n'y a aucun problème.
Cependant,
j'aimerais vous amener ailleurs. Je pensais vous parler d'espaces publics pour
l'après-loi, mais j'ai envie de vous
en parler tout de suite, parce qu'il y a des choses qui se sont faites dans le
monde, qui sont très intéressantes, depuis plusieurs années. Je vais
vous donner quelques exemples.
On
parle de cours d'école, mais est-ce qu'on parle de plages? Est-ce qu'on parle
d'espaces verts? Je peux vous dire
qu'en 1900... qu'en 2011 à New York... Depuis 2011 à New York, si vous en
grillez une sur Times Square, ça va vous
coûter 50 $ d'amende. On est à près de 184 villes... ou plutôt
184 villes comptant au moins une plage non-fumeurs, près de 1 000 parcs ou espaces verts,
appelez ça comme vous voudrez, qui interdisent carrément le tabac. Il y a
même en France qu'il y a eu... ils ont eu
des plages de non-fumeurs, des espaces verts. Même, c'est en Espagne... non.
Écoutez, je veux retrouver... À Tokyo,
Tokyo, on s'entend que ce sont des gens qui fument beaucoup, il y a des rues
sans tabac. Donc, vous me demandez des espaces publics, oui, allons-y,
il n'y a aucun problème. Je n'ai aucun problème avec ça.
On
peut reculer encore un petit peu plus loin, de manière un petit peu plus
ponctuelle. Aux Olympiques d'hiver de 1992
à Albertville, le gouvernement a décrété l'interdiction de fumer sur les sites
de compétition extérieurs. Personne ne s'en
est offusqué. Ça s'est appliqué sans problème. On parle de 1992, ça fait
23 ans. Donc, vous me demandez pour ce qui est espaces publics, je n'ai aucun problème avec ça. Même que votre
projet de loi devrait aller encore un petit peu plus loin ou du moins se
ménager des portes de sortie où est-ce qu'il serait possible de réglementer à
ce niveau-là.
Mme
Charlebois : Les activités promotionnelles entre les
fabricants et détaillants, bref, les ristournes, ce n'est pas illégal en ce moment dans le projet de loi actuel.
Vous m'en reparlez, est-ce que c'est parce que vous entendu des gens qui
ont des, comment vous dire... je n'ai
peut-être pas le bon mot quand je parle de ristournes, mais qui ont des
bonifications?
Mme Rodrigue (Nathalie) : Mais il n'y a pas personne qui va en faire la
publicité, mais on sait que, pour certains produits, si vous vendez plus de barres de chocolat ou de sacs de chips,
vous allez avoir une ristourne ou... mais, si vous avez un meilleur étalage, il y a des choses qui
peuvent arriver. On a entendu dire, pour certaines personnes... quand
ils vont dans un dépanneur et qu'ils partent
avec une caisse de bière, ils se font dire : Un petit paquet de cigarettes
avec ça? Bon, on n'est pas au McDo,
mais jamais personne ne va s'en vanter. Il n'y a pas un commerçant qui va dire
qu'ils font la pratique. Mais, dans les faits, ce sont des choses qui
arrivent.
Et,
concernant les ristournes, mais ça pourrait être sous forme de plus que tu
vends de cigarettes, plus on te donne de cartons de cigarettes gratuits,
comme on avait dans les bars : plus tu vendais de barils... de bière
pression, à chaque 10 barils, tu en
avais un gratuit. Alors, on voudrait s'assurer que ces pratiques-là ne... on va
dire, si elles existent ou si elles pourraient exister, soient... qu'il
y ait une interdiction de ces pratiques-là entre le fabricant et les
commerçants.
Mme
Charlebois :
O.K. Vous voulez qu'on le stipule plus précisément dans la loi!
Mme Rodrigue
(Nathalie) : Oui, je pense que oui.
Mme
Charlebois : Parlez-moi du rayon de neuf mètres, puis on va
parler des terrasses. Parce que le prochain qui va venir va nous dire qu'il faut laisser les détaillants... les tenanciers de bar et de taverne, et etc.,
et les restaurateurs survivre et
qu'on devrait avoir un moyen de transition, c'est-à-dire de... Ce qu'il
suggère, c'est d'avoir la moitié de la terrasse avec fumée puis l'autre
moitié sans fumée, ou d'avoir... Il y a un groupe, hier, qui nous a dit
même : Des abris. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Mme
Jutras (Claire) : Vous vous
êtes déjà baignée dans une piscine? Mais, s'il y a
quelqu'un qui fait pipi dedans, je vous défie de ne pas sortir. Ça fait que moi...
On a déjà vécu les espèces de restaurants avec des aires
où, genre, il y avait un petit
mur, puis, si elle fumait, moi, j'étais à côté. Franchement!
Des
terrasses, là, sans fumée, il y en a partout. L'autre colline parlementaire, là, à Ottawa, là, j'y suis allé encore récemment, tu
peux manger sur les terrasses, c'est bondé, ils n'ont pas fermé puis ils ont
survécu. Pourquoi on ne pourrait pas faire ça, nous autres aussi?
Mme Rodrigue
(Nathalie) : Puis, avec des espaces réservés, si le vent change de
côté, tout le monde change de place? C'est un peu irréaliste.
M. Dion (Serge) : Je pourrais même rajouter quelque
chose. Je demeure en Outaouais et je
travaille à Ottawa. Je parlais de ma
comparution aujourd'hui à mes collègues de travail, et puis il y en a
un qui m'a fait remarquer : Ah! bien, c'est intéressant, parce que moi, j'ai recommencé à aller dans les restaurants
et dans les terrasses quand la ville d'Ottawa ou le gouvernement
ontarien a passé sa législation. Donc, quand on dit que ça va être une
catastrophe annoncée, j'ai beaucoup de misère à les croire. Pour la petite histoire,
j'ignore si mon copain est allé manger une salade avec un verre d'eau,
ça, je ne le sais pas, mais tout ce que je peux vous dire, c'est que ces
gens-là vont regagner une clientèle qui avait déserté.
Mme Jutras (Claire) : En tout
cas, regardez, moi, je n'ai pas l'air
de boire juste de l'eau puis manger de la salade, puis je vais sur les
terrasses à Ottawa, mais pas au Québec.
Mme
Charlebois : Moi,
ce qu'on a entendu aussi... Je vous entends, là, dire : Bon, bien, ça
existe déjà. On le sait qu'il y a des
restaurateurs au Québec qui le font déjà. On nous a dit aussi qu'il y
avait eu une perte de clientèle. Ceux qui sont déjà passés, ils ont
perdu 25 %, je pense, de leurs clients qui n'ont pas été récupérés. Je
leur ai demandé, puis je ne sais pas votre
point de vue là-dessus : Est-ce que c'est attribuable seulement au tabac
ou bien s'il y a d'autres lois qui ont fait
en sorte que votre clientèle a diminué, exemple le 0,08, le taux d'alcoolémie?
Est-ce qu'il y a d'autres facteurs? Vous, votre croyance sur cette perte de clientèle, est-ce qu'elle est
attribuable au tabac, au taux d'alcoolémie ou... Vous parlez avec la
population, comment vous voyez ça? Qu'est-ce que les gens vous disent?
Mme Rodrigue (Nathalie) : Bien, moi, j'ai travaillé dans la restauration et
l'hôtellerie jusqu'en 2001. Donc, quand je suis partie, ça fumait encore dans les bars. Et, de temps en temps,
je retourne au petit bistrot où je travaillais, maintenant c'est devenu non-fumeurs, et la clientèle est
demeurée. Ce qu'on avait vu par contre, c'est que le 0,08 a eu quand
même beaucoup d'influence, parce qu'une
personne qui arrivait là à 7 heures le soir, puis qui repartait à
2 heures du matin, puis qui avait
pris cinq, six bières, là elle en prenait trois. Alors, je pense que la baisse
du chiffre d'affaires est aussi attribuable à cela, mais aussi la hausse des coûts des produits de l'alcool. Il faut
quand même avoir un bon budget si on veut aller passer toute la semaine, à tous les soirs dans un bar,
là, c'est de moins en moins donné. Le verre de draft à 1 $, on ne le voit
plus, c'est la pinte à 8 $, 9 $.
M. Dion (Serge) : Il y a d'autres facteurs aussi qu'on pourrait rajouter à ça. On parle
de terrasses, on parle de quoi, là,
ici, au Québec? On parle de quelques semaines par année et on ne parle pas de
milliers de places par restaurant. Donc, encore là, j'ai beaucoup de
difficultés à gober ça.
D'un
autre côté, d'autres facteurs, évidemment il y a le facteur économique. À la
dernière crise de 2008, il était sorti des statistiques où est-ce qu'il
y avait beaucoup de restaurateurs qui s'étaient plaints d'une baisse
d'achalandage, et, curieusement, il y a eu
un transfert vers le fast-food. Pourquoi? Parce que le fast-food ne coûte rien
comparativement à un repas avec une
bouteille de vin. Donc, les facteurs sont multiples. La cigarette en est un,
mais, encore là, je ne me souviens pas
en quelle année où est-ce qu'on a interdit ça dans les bars et les restaurants,
il y en a combien qui sont venus déchirer leur chemise sur la place
publique? Ça, je l'ignore, mais il ne devait pas y en avoir tant que ça.
• (17 h 40) •
Mme
Charlebois : Merci, c'est éclairant. J'avais déjà quelques
arguments, mais vous m'en avez fourni d'autres, c'est intéressant.
Parlons
donc du neuf mètres, parce que ça, on en entend parler. On nous a dit que le
neuf mètres va faire en sorte, justement,
pour les tenanciers de bar et aussi les restaurateurs, qu'il va falloir
vérifier, mettre un employé dehors pour s'assurer qu'il n'y a pas personne... à cause de la présomption, qu'il
n'y a pas personne à l'intérieur du neuf mètres. Puis évidemment que, si le terrain de la propriété finit à quatre
mètres, hein, on s'entend que c'est le trottoir ensuite, on ne va pas demander aux gens de fumer sur la ligne
blanche, là, ça, c'est... C'est le neuf mètres ou la limite du terrain, là,
hein? Puis il y a quelqu'un qui nous a demandé de le clarifier, puis on va
travailler là-dessus pour clarifier ça dans le projet de loi pour que ça soit bien clair
pour tout le monde qu'on ne demande pas aux gens d'aller fumer en plein centre
du chemin, là. Ce n'est pas ça, le but de
l'exercice. Mais le neuf mètres pose problème, à leur avis, parce qu'il y aurait un coût de main-d'oeuvre associé à ça. Est-ce que vous croyez que,
si on met des affiches, on fait de la pédagogie une fois la loi adoptée,
ce sera nécessaire d'avoir un employé dehors pour dire aux gens : C'est
interdit de fumer, ou, si c'est affiché, si on fait vraiment de la pédagogie, qu'on fait la promotion, de dire : C'est
maintenant interdit... Au même titre qu'on a fait avec le 0,08. Il n'y a
personne qui tient la main de chaque client dans le bar puis dit : Aïe!
Mme Rodrigue (Nathalie) : Si on est capable de donner des contraventions à
des personnes qui sont stationnées au
mauvais endroit, ou etc., il pourrait y avoir le même principe, c'est-à-dire qu'on met les affiches pour dire que, dans cette section-ci, on ne peut pas fumer, ou quoi que ce
soit, et avec une possibilité de sanction. On le fait pour les excès de
vitesse, on le fait pour plein d'autres
choses, alors, qu'à ce moment-là... bien, peut-être que les policiers ne voudront pas avoir quelque chose en plus à faire, mais c'est peut-être de donner l'opportunité ou l'autorisation à des
gardiens de sécurité, dans les hôpitaux, entre autres, de pouvoir
peut-être émettre une contravention. Il y aurait sûrement quelque chose à voir là-dessus, sur laquelle on n'a pas vraiment encore
beaucoup réfléchi. Mais on est conscients que, justement, l'histoire du
neuf mètres peut être très difficile à appliquer. Par contre, si on ne peut pas
en tenir compte parce que le terrain n'est pas
assez grand, mais de toujours faire attention quand même aux prises d'air et
aux fenêtres, là, qui peuvent s'ouvrir, pour éviter que la fumée entre à
l'intérieur.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous nous tournons maintenant vers
notre collègue de Rosemont pour une période de 12 minutes.
M.
Lisée : Merci beaucoup de votre présence. Merci de votre
témoignage. Merci, docteure, pour le témoignage, aussi, nous disant que, derrière les mots «menthol», «terrasse», il y a
le mot «cancer». Il y a le mot «cancer» qui est là. Une personne sur deux va finir par en mourir, une
vingtaine, par jour au Québec, meurent des conséquences du tabac, et
c'est très lourd pour le budget de l'État québécois, 4 milliards de
dollars.
Vous
approuvez les mesures du projet de loi. Vous proposez d'aller plus loin. Je
vous signale que nous sommes d'accord, nous, au Parti québécois, avec
votre recommandation sur l'emballage neutre et sur le moratoire de tout nouveau produit. Ça, ce
sont des amendements que nous avons déjà annoncés, et, avec la ministre, on est
prêts à regarder d'autres amendements qui nous ont été proposés.
Vous allez
plus loin cependant en parlant d'une hausse immédiate et significative de la
taxe sur l'ensemble des produits du
tabac. Alors, évidemment, ça, ce n'est pas envisagé par le gouvernement pour
l'instant. Il y a eu des hausses importantes
ces dernières années. Je sais que le niveau québécois est inférieur à celui de
certaines provinces canadiennes encore.
Il y a toujours la question de la contrebande qui nous est présentée comme
contre-argument. Alors, expliquez-moi pourquoi
cette hausse de taxe, qui aurait un impact sur la vente, on le sait, c'est
direct, hein, l'appel... le signal de prix a un impact sur la consommation. Mais pourquoi vous pensez que ce ne serait
pas... ça ne provoquerait pas une augmentation de la contrebande?
Mme
Rodrigue (Nathalie) : Bien,
parce que, de toute façon, il y a une limite à ce que les contrebandiers
peuvent faire. On sait dans quel secteur du
Québec il y a le plus de contrebande. À un moment donné aussi, on sait que les
personnes qui fument sont souvent dans des
milieux défavorisés, alors tout le monde n'a pas nécessairement les moyens de
pouvoir aller s'acheter des cigarettes dans des lieux réservés. Donc, il y a
quand même une limite à ce qui peut être fait.
Et je pense aussi qu'il y a un moyen pour la
police, et tout ça, d'améliorer ses services de surveillance sur la contrebande. Je pense que les gens connaissent qui
vend, connaissent aussi beaucoup qui achète, et il y a moyen de faire quelque chose là-dessus. Et, en haussant la hausse
des taxes, ça peut permettre d'investir, justement, un peu dans...
beaucoup plus dans la surveillance, mais
surtout aussi dans la prévention. Et d'accorder aux organismes communautaires
et dans le milieu scolaire beaucoup
plus de formation et d'éducation auprès des jeunes, surtout en milieu
défavorisé, pourrait aussi venir contrecarrer le fait que les gens ne
commencent pas à fumer, donc moins d'impact sur la contrebande, mais une
meilleure santé publique en général.
M. Lisée :
Il y a une autre avenue qui a été envisagée ailleurs, c'est de réclamer des
permis, de vendre des permis aux
manufacturiers, aux distributeurs, certains disent aux dépanneurs, moi, je n'y
suis pas favorable, mais, en tout cas, à d'autres acteurs de la chaîne,
et d'utiliser cet argent-là pour faire de la promotion, de la conscientisation.
On sait que le gouvernement est désargenté
en ce moment, et ce serait une source de revenus qu'on pourrait établir, qui
pourrait avoir un impact indirect à
la hausse sur le prix du paquet de cigarettes, mais qui ne serait pas une taxe
directe. Est-ce que vous seriez favorables à ce type de tarification où
il y a des permis?
M. Dion (Serge) : Oui, tout à fait,
parce que nous, à travers notre loupe, la hausse du prix... On veut que cet
argent-là soit réinjecté en prévention, hein? Ça, ça veut dire quoi? Ça veut
dire qu'on va aller travailler, au niveau de l'investissement,
et non de la dépense, le préventif versus le curatif. On sait pertinemment que
le ministère de la Santé — théoriquement, on s'entend — c'est une dépense. Donc, ces argents-là
devraient être réinjectés en amont. Ça, ça veut dire qu'on travaille en
préventif. À ce moment-là, les coûts qui vont en découler à travers le temps et
à travers les années sont extraordinaires.
J'allais
rajouter une chose. Je fais une tournée provinciale pour aller rencontrer des
gens qui sont atteints de cancer. Je
leur demande les bons coups et les mauvais coups du système de santé, pas des
médecins, du système de santé, etc. Et, de temps à autre, je vais leur
poser la question : Si vous étiez ministre de la Santé, qu'est-ce que vous
feriez demain matin? On m'a donné toutes
sortes de réponses. Jusqu'à temps qu'il y en ait un qui me pose la question, à
moi : Et vous, que feriez-vous? Et puis il a fallu que je m'arrête
pour y penser. Et, toujours selon notre loupe, à la coalition, je lui ai
répondu : Je ne veux pas être ministre de la Santé. Je préférerais être
ministre de l'Éducation, et augmenter les heures d'éducation physique, et augmenter les cours en prévention, que ce soit...
peu importe, que ce soit au niveau social ou, peu importe, préventif.
Donc, oui, nous, on serait d'accord avec ça, tout à fait.
Mme Jutras (Claire) : Ça aurait
l'avantage de nous donner l'idée d'où il y en a, notamment voir s'il y a une concentration proche des écoles, et tout ça. Parce
qu'on a deux armes puissantes, hein, pour baisser le tabac, mais, parmi
les plus puissantes, là, c'est la loi puis
les taxes. Ce sont nos deux plus puissantes. Puis, au Québec, vous l'avez dit,
on a les taxes, au Canada, parmi... je
pense que c'est même la province où elles sont plus faibles. Donc, ce n'est pas
une équation, si j'augmente les taxes, que je vais augmenter la
contrebande. Donc, la contrebande, c'est toujours l'argument qui est utilisé pour justement qu'on ne fasse pas quelque
chose qui est très efficace pour baisser la clientèle de fumeurs. Je
pense que c'est ça qu'il faut garder en tête.
M. Lisée :
Vous avez donné l'exemple tout à l'heure de Times Square, que j'ignorais. Donc,
Times Square a été désigné un endroit
sans fumée, et on peut avoir une contravention de 50 $ si on fume à Times
Square. Donc, ça veut dire qu'on pourrait donner aux municipalités la
capacité de désigner des places et des rues non-fumeurs.
M. Dion
(Serge) : Tout à fait, tout à fait. Pourquoi on ne donnerait pas ce
pouvoir-là aux municipalités? Parce que, si on pense que les Américains sont capables de faire appliquer ça à
Times Square, qu'est-ce que vous croyez qu'on serait capables de faire, que ce soit ici, sur la
terrasse Dufferin, par exemple? Ce serait quelque chose qui serait
envisageable, tout à fait.
M. Lisée :
Très bien. Sur la question de l'emballage neutre, alors, comme vous le savez,
on en a discuté juste avant, le fait que les
compagnies de tabac punissent les juridictions qui sont les premières à
s'avancer sur un terrain comme celui-là, ils l'ont fait en Australie,
ils l'ont fait en Irlande, ils l'ont fait au Royaume-Uni, est-ce que vous
pensez que ça devrait modérer nos transports ou augmenter
notre détermination, le fait qu'on soit sous le coup de la possibilité de
poursuites?
• (17 h 50) •
Mme Rodrigue
(Nathalie) : Moi, je crois que ça devrait augmenter notre
détermination. Et il faut arrêter, à un moment donné, de plier face à des
menaces, ou quoi que ce soit. De toute façon, moi, je trouve que cette manière
de procéder là est totalement immorale. Ça ne tient pas la route. On vend un
produit cancérigène qui contient près de 4 000 produits
toxiques. Déjà qu'on continue à le vendre, alors que, quand il y a eu un peu de
bactéries de listériose dans le fromage
au Québec, on a ramassé tout le fromage. À un moment donné, il ne faudrait pas
non plus que les compagnies exagèrent.
Et quitte à ce qu'on essaie peut-être de modifier la perception culturelle des gens face aux compagnies du
tabac, mais il faut qu'à un moment donné ça devienne aussi «out» de fumer que d'aller tuer un lion dans une
réserve. À un moment donné,
là, il va falloir qu'on arrête.
Puis il faut arrêter
d'avoir peur. Puis, s'il y a une majorité de Québécois qui se lèvent puis qui
disent : Nous sommes d'accord avec le
fait d'avoir des paquets de cigarettes neutres... Et je suis certaine que même
des fumeurs vous le diront, parce que,
s'il y a une chose qui est dure de faire, c'est bien d'arrêter de fumer. C'est
une drogue dure qui travaille sur les
mêmes neurotransmetteurs que l'héroïne. Ça fait qu'arrêtons de penser que c'est
juste de la petite boucane qu'on fait puis que, les gens, s'ils fument,
c'est parce que ça leur tente. Les gens sont malades. Dre Jutras nous l'a
expliqué aujourd'hui, ce n'est pas juste une mauvaise habitude, c'est une
maladie. Donc, à un moment donné, il faut arrêter d'avoir peur des tueurs puis
mettre... retrousser nos manches, puis on se battra.
M. Lisée :
Je suis d'accord avec vous. Je vous remercie beaucoup pour votre action et
votre témoignage.
Mme Rodrigue
(Nathalie) : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à notre collègue de Saint-Hyacinthe pour huit minutes.
Mme
Soucy : Merci. Merci d'être
ici. Votre témoignage, Dre Jutras, était très prenant, je dirais, très... un
beau témoignage. Ça nous sensibilise au coût humain derrière ça.
Vous
qui gérez des... en fait, travaillez avec les cancéreux, quels sont les coûts
liés directement au traitement de cancers liés au
tabagisme?
M.
Dion (Serge) : Bien, c'est 1 milliard par année. Je ne peux pas vous donner une ventilation exacte, mais,
au Québec, c'est 1 milliard par année qui s'envole en fumée.
Mme Rodrigue (Nathalie) : Mais ça, ce sont des coûts de traitement, de
soins ou ces choses-là qui sont évalués, mais, encore là, avec certaines réserves. On n'a pas de registre du
cancer pour évaluer exactement combien de personnes ont ce type de cancer,
mais après ça combien chaque épisode de soins a comme coût sociétal.
Mais il
y a aussi ce qu'on n'évalue pas
souvent, c'est le coût pour le proche aidant, c'est le coût pour
l'appauvrissement de la famille, ce
sont des coûts qui sont énormes. Le coût d'un décès avant temps, ça a aussi une
valeur économique. À la coalition, on avait déjà fait faire une étude
économique sur les coûts du cancer. Là, je n'ai plus les chiffres en tête, malheureusement, parce qu'on en voit, des
statistiques, dans une année, mais les coûts sont astronomiques. Et, s'il
faut en prendre une partie, si investir pour
défendre certains principes de ce projet de loi là permet à long terme de
sauver sur les autres coûts, je pense qu'on n'appelle pas ça une
dépense, on appelle ça un investissement.
Mme
Soucy : En parlant d'investissement, tantôt vous parliez, vous disiez
qu'il valait mieux faire de la prévention que faire du curatif. Si on doit prioriser pour faire de la prévention,
est-ce qu'on devrait cibler les milieux socioéconomiques défavorisés
puis se concentrer sur ces milieux-là en premier pour faire de la prévention?
M. Dion
(Serge) : J'imagine que c'est ce qui est ciblé.
Mme
Jutras (Claire) : Mais je
vais vous dire quelque chose... je vais prendre un chiffre, parce que
je trouvais que... Si vous me permettez, je vais faire un parallèle.
En
1973, il y avait... en décès sur la route, décès routiers, on
en avait 2 209. En 2014, si mes chiffres sont bons, on est à 336, ou quelque chose comme ça. Je suis
contente d'avoir les bons chiffres. On conduit toujours avec une auto,
avec un volant, une pédale à gaz puis une
pédale à frein. Comment ça se fait que, malgré qu'on a plus de véhicules en
circulation, plus de titulaires de permis,
on a réussi à baisser le nombre de victimes? Pourtant, on n'a pas changé. Qu'est-ce qu'on a fait? On a mis des appuie-têtes, des ceintures obligatoires, des radars
photo, phares allumés le jour, sièges d'auto pour enfants, coussins gonflables, des véhicules plus
sécuritaires, des campagnes punchées, des pneus d'hiver obligatoires,
des petites bandes qui font grrr quand tu
sors de la route, les cours de conduite obligatoires, des points d'inaptitude
progressifs. Qu'est-ce qu'on a fait? Je
pourrais en nommer plein d'autres. On n'a pas changé le conducteur, ou pas
trop, on a changé ce qu'il y a autour. Puis on ne l'a pas fait juste
pour les jeunes qui étaient peut-être plus à risque d'accident, on l'a fait
pour l'ensemble de la population.
C'est
pour ça que vous avez un pouvoir immense de faire des mesures générales pour
couvrir sur... le changement d'environnement, qu'il soit économique,
social, politique. Et ces changements-là ont une puissance inimaginable,
comparé à moi avec un patient à la fois pour l'aider à cesser de fumer. C'est
là qu'est votre pouvoir énorme.
Mme Soucy :
Vous parlez justement de moyens. On a entendu plusieurs groupes, puis il y en, entre
autres l'association pour les détaillants d'alimentation, qui ne sont pas... en
fait, qui ont fait un saut en voyant les amendes, une grosse différence, là, faire un gros bond, les amendes qui sont
destinées aux propriétaires, aux vendeurs de tabac qui vendent à des mineurs, en fait. Donc, ça, c'est quelque chose qu'eux autres ont demandé de rétablir, parce qu'ils trouvaient ça vraiment exagéré.
Alors, dans
les mesures, vous dites : Bien, ça prend plusieurs mesures, plusieurs
lois. Est-ce que vous pensez que ça passe absolument par le moyen
coercitif pour dissuader les propriétaires de vendre aux mineurs puis de donner
une formation à leurs employés, de s'assurer que c'est... qu'il faut carter?
Mme Jutras
(Claire) : Oh! attendez, là. Carter, ce n'est pas pareil. Je vois que
nos réussites en accidents de la route ont
été liées à des sanctions plus sévères. Je ne sais pas. Peut-être poser la
question, c'est y répondre, notamment par rapport à l'alcool, aux excès
de vitesse.
L'histoire de
carter, là, ça, là, c'est parfait. Pour les compagnies de tabac ou les industriels,
qu'est-ce que ça met? Ça met tout le
poids sur un individu, hein? C'est sa responsabilité. Si tu fumes, c'est ta
faute, si tu en achètes, c'est de ta faute. C'est facile, c'est David contre Goliath, là. C'est le tout... Il faut
responsabiliser le jeune, il faut responsabiliser l'enfant? Ça n'a pas
de...
Mme Soucy : Non, non, moi je parle
du commerçant.
Une voix : On parle aussi du
commerçant, là, les amendes pour les commerçants.
Mme Jutras (Claire) : Alors, pour le
commerçant, mais vous avez parlé de carter. Moi, carter, c'est de faire porter au jeune l'odieux de devoir carter. Non.
Puis plus tu vas lui dire «carter», plus il va vouloir le faire. Dis à un
jeune : Fais-le pas, il va le faire.
Donc, je pense que... C'est sûr que ça ne fait pas l'affaire, mais, moi, quand
j'ai une contravention puis j'ai
excédé de vitesse... ça ne m'est pas arrivé souvent, mais, si ça
m'arrivait, je dirais : Bien, j'ai couru après. J'ai juste à ne pas
le faire.
Mme Soucy : Mais, pour une mesure
pratico-pratique, il faut quand même que le propriétaire s'assure qu'il a
18 ans, puis le moyen de s'assurer qu'il a 18 ans puis qu'il est
majeur, c'est de carter, parce qu'on ne peut pas lui demander de... Vous
comprenez?
Mme Jutras (Claire) : Non, non, ce
que je veux dire... mais c'est la pénalité sur le jeune s'il en achète, là.
C'était ça que...
Mme Soucy : Non, c'est la pénalité...
Moi, je parlais de la pénalité vraiment sur le vendeur. Mais c'est... Êtes-vous
d'accord avec...
Mme Jutras
(Claire) : L'augmentation des sanctions? Bien là, ça fait depuis 1994
qu'ils savent qu'ils n'ont pas le
droit à des mineurs. On est en 2015. Ça fait 11 ans. S'ils ne savent pas encore
comment faire, on va leur montrer. Puis, des fois, la méthode dure,
c'est la meilleure.
Mme Rodrigue (Nathalie) : Quand ça
fait mal dans le portefeuille, habituellement, là, ça...
Mme
Soucy : Je vais vous poser une question. Vous, en tant que médecin,
est-ce qu'à l'heure actuelle vous êtes à l'aise de conseiller à un patient, à un de vos patients qui a un
problème de tabagisme puis qui veut diminuer, d'utiliser la cigarette
électronique?
Mme Jutras
(Claire) : Alors, c'est très intéressant, ce que vous dites, mais, en
cessation tabagique, l'expert de sa vie, c'est le fumeur lui-même. Donc,
je ne recommande pas, je ne décommande pas. Je lui dis : Toi, te
connaissant, qu'est-ce qui serait le meilleur? J'ai des choses efficaces à
proposer, mais, si le patient m'arrive avec la cigarette électronique, bien, on
va regarder ensemble c'est quoi, ses objectifs. Puis on va le travailler
ensemble, avec un bon counseling. Parce que des produits miracles pour cesser
de fumer, ça n'existe pas.
Mme Soucy : C'est la volonté en
premier, évidemment.
Mme Jutras (Claire) : Pas la
volonté. Il y a une dépendance physique, et le fumeur a appris à fumer, il faut
le déprogrammer.
Mme
Soucy : Alors, vous parlez de déprogrammer. Alors, c'est nécessaire
qu'il y ait un sevrage qui se fasse puis que la personne... le patient
soit bien accompagné, qu'il soit accompagné par un professionnel, en fait, de
la santé ou quelqu'un qui s'y connaît pour bien le conseiller, pour que ça
fonctionne.
Mme
Jutras (Claire) : Bien, il y en a qui réussissent à arrêter. Chacun
peut... Quelqu'un peut arrêter «cold turkey», mais, selon les évidences scientifiques, les meilleures façons d'arrêter
de fumer, c'est... on recommande d'avoir une dose de nicotine
pour contrôler la dépendance qui est physique. Mais maintenant ce n'est pas la
seule dépendance, il y a une dépendance qui
est psychologique ou comportementale. Parce que le tabac, c'est... Bien, en
fait, la nicotine, qui cause la dépendance,
elle est associée aux rituels de tous les jours : je prends un verre, un
café, j'ai une cigarette; je rentre dans mon auto, je m'allume une
cigarette; j'appelle quelqu'un, je prends une cigarette. Tu n'arrêtes pas
d'appeler quelqu'un, tu n'arrêtes pas de
prendre ton café puis tu n'arrêtes pas de conduire ton auto. Donc, il faut
déprogrammer. Et l'idée, c'est... Souvent,
les gens s'imaginent que c'est miracle, ils vont se mettre une patch ou ils
vont prendre la cigarette électronique, ça va finir. Donc,
effectivement, les recommandations sont doubles : supplémenter le patient
avec une thérapie de remplacement de nicotine ou une médication pour cesser de
fumer — ça
double le potentiel de réussir — et un bon counseling par un professionnel
de la santé.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin à
l'échange avec les parlementaires. Merci beaucoup aux représentantes, représentants de la Coalition Priorité
Cancer.
Je
suspends momentanément nos travaux.
(Suspension de la séance à 18
heures)
(Reprise à 18 h 5)
Le Président (M.
Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre
nos travaux.
Alors,
nous recevons maintenant les représentants
de l'Union de tenanciers de bars du Québec. Bienvenue à votre Assemblée nationale. Vous disposez d'une période
de 10 minutes de présentation, dans un premier temps, et par la
suite vous aurez l'occasion d'échanger avec
les parlementaires. Je vous demanderais, d'entrée de jeu peut-être, de vous
nommer, de préciser vos fonctions, et par la suite, donc, la parole est à vous.
Merci.
Union des tenanciers de bars
du Québec (UTBQ)
M.
Sergakis (Peter) : Je m'appelle Peter Sergakis, je suis le président
de l'Union des tenanciers de bars du Québec.
M. Sénéchal(Sébastien) :
Bonjour, Sébastien Sénéchal, je suis l'avocat de l'Union des tenanciers de bars
du Québec et aussi administrateur.
M. Arbour(Guy) : Mon nom est Guy Arbour, je suis un modeste
ingénieur spécialiste dans les matériaux délétères.
M. Beaulieu
(Jaques) : Bonjour, mon nom est Jacques Beaulieu, je suis
communicateur scientifique.
M.
Sénéchal (Sébastien) : Alors, la première personne qui va parler,
c'est M. Arbour, en fait, qui va vous présenter succinctement, en
fait, l'étude du risque incrémentiel associé à la fumée de tabac, qui a été
réalisée par lui.
M.
Arbour (Guy) : D'abord, écoutez, c'est une étude qui est vraiment à
titre indicatif, qui n'a pas une prétention d'exhaustivité. On n'est pas
un organisme de recherche, on est un bureau d'ingénieurs qui utilisons des
appareillages qui sont sur le marché, qui sont connus.
M. Sénéchal
(Sébastien) : Juste un instant, M. Arbour, je pense qu'on entend
mal.
M. Arbour
(Guy) : Ah oui?
M. Sénéchal
(Sébastien) : Est-ce qu'il y a moyen...
Une voix :
...
M.
Sénéchal (Sébastien) : Ah! je pensais que ça avait été communiqué à
l'Assemblée nationale. Ça a tout été communiqué, mais on en a des
copies.
Une voix :
...excusez-moi.
• (18 h 10) •
M. Sénéchal
(Sébastien) : Non, non, mais écoutez... Vous n'en avez pas eu, vous
non plus? On en a...
Le Président (M.
Tanguay) : O.K. Alors, veuillez prendre place.
Une voix :
Oui, il y en a d'autres.
Le
Président (M. Tanguay) : Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît, et on
vous écoute. La parole est à vous. Merci.
M. Arbour (Guy) : Bon.
Alors, assez succinctement, on a voulu établir, en termes de risque, si le fait
d'avoir des fumeurs qui sont sur les
terrasses et qui sont à distance raisonnable pouvait constituer un risque
acceptable ou inacceptable en termes
des normes publiques qui existent ici. L'élément qui est utilisé pour
déterminer la nocivité de fumée secondaire, ce sont les particules fines
de 2,5 millimètres... pardon, micromètres et moins par mètre cube. Et, à
Montréal, il y a couramment... La moyenne,
pour l'année passée, c'était à 11 microgrammes par mètre cube environ, et
ça peut varier, dans une journée,
entre cinq et 20 microgrammes, pour une journée normale qui n'est pas trop
polluée. Le fait d'être sur une terrasse
et il y a des fumeurs en nombre relativement... en nombre significatif fait
augmenter, pour une période très brève, d'un niveau qui peut aller de
cinq à 15 microgrammes lui-même. Alors, si on ajoute les deux, surtout
compte tenu que l'exposition sur une
terrasse n'est pas sur 24 heures mais sur quelques heures, on en arrive à
un total qui est à peu près dans les
normes de 25 microgrammes par mètre cube qui sont celles de la ville de
Montréal ou d'autres organismes comme l'Organisation mondiale de la
santé, et ainsi de suite.
Du
côté français, où maintenant des règles pour l'usage du tabac, beaucoup plus
strictes que les nôtres, sont en place,
on a fait cette distinction entre les terrasses ouvertes, donc les espaces
ouverts, et les espaces clos. Dans cette étude, on décrit c'est quoi, un espace clos. À l'époque où
on fumait à l'intérieur des restaurants, c'étaient des espaces clos, et
on arrivait avec des quantités en termes de
PM2,5 qui étaient très élevées, et évidemment on a conclu, à ce
moment-là, que c'était inacceptable. Du côté français, après avoir
examiné le pour et le contre, ils sont venus à déterminer que, si une terrasse était ouverte, et là il y a une série de
critères qui définissent une terrasse ouverte, donc l'air circule, on en
arrive à des concentrations qui sont
acceptables. Maintenant, si vous êtes un adepte du risque zéro, qui n'existe
pratiquement pas en science, c'est sûr que ça ne vous satisfait pas. Par
contre, si on regarde les normes telles qu'elles sont définies pour la
protection de notre santé, bien, on arrive dans des barèmes qui sont à peu près
comparables.
Mais je vous encourage à lire au détail l'étude,
c'est... Il est certain qu'on aimerait qu'il y ait dans le monde plus d'études
semblables pour qu'on puisse avoir des résultats qui soient plus tranchants.
Mais il est clair que, si les gens, physiquement, sont assez éloignés, parce
que, dès que vous avez quelqu'un qui fume très proche, vous avez les... Et,
sur les appareils, on voyait très bien, vous
aviez des mesures considérables. Mais, dès qu'une certaine distance existe, il
y a une dissipation qui se fait dans
l'espace naturel, à l'air libre, là, qui est assez phénoménale. Voilà,
ce sont les modestes conclusions.
M.
Beaulieu (Jacques) : Bonjour. Moi, tout au long de ma carrière, j'ai
eu l'occasion de signer ou cosigner plus d'une trentaine de livres sur divers sujets de santé. J'ai même eu le
privilège de participer à la rédaction de deux rapports de santé publique sur le tabagisme. Alors, lorsque M.
Sergakis, le président de l'UTBQ, m'a approché, j'ai d'abord été assez
étonné, puis j'ai compris sa démarche. L'étude qu'il a commandée sur la fumée
de cigarette sur les terrasses apporte certainement
un éclairage pertinent sur l'état réel de la situation, comme vous allez le
voir en lisant le rapport. Il y avait eu l'étude Kennedy, en 2013, qui
avait apporté... qui avait porté sur quelques terrasses et qu'on venait donc
d'étendre l'échantillonnage et d'en apprécier les résultats.
C'est
particulièrement à ce niveau que le projet devient intéressant. En somme, au
lieu de s'en tenir à une discussion purement technique où on compare, par
exemple, les niveaux de pollution urbaine à ceux engendrés par la cigarette sur les terrasses des bars, M. Sergakis
a fait un pas en avant et propose des solutions qui ne sont pas dénuées
de bon sens : d'abord, faire une
distinction claire entre les terrasses closes et les terrasses ouvertes, puis
apporter une proposition quant aux
terrasses avec tables et parasols, et finalement terminer en proposant l'idée
de terrasses avec section fumeurs et non-fumeurs avec une zone tampon
d'au moins 1,5 mètre entre les deux.
Ayant
eu l'occasion d'étudier l'histoire de la lutte contre le tabac, particulièrement
au Québec, j'ai été à même de réaliser
non seulement le changement radical de l'opinion publique face au tabagisme,
mais la façon dont ces changements ont
pu se réaliser. D'abord, il faut réaliser que, depuis la première Loi sur le
tabac, en 1908, ces changements se sont opérés par étapes, échelonnés sur de longues périodes de temps. En somme, les
gouvernements ont eu la sagesse de légiférer en aval des changements dans la perception du tabagisme dans l'opinion
publique, et non en amont. Par exemple, on a vu naître des sections fumeurs et non-fumeurs avant la loi interdisant le
tabac à l'intérieur des restaurants. Les mentalités étaient prêtes, donc la loi pouvait être proposée. On
pourrait, ici, énumérer toutes ces étapes et jalons qui ont marqué l'évolution
des mentalités et celle des lois et règlements entourant le tabagisme, mais
cela serait probablement assez long.
Dans la poursuite de
cette évolution, le gouvernement actuel propose une nouvelle loi, et l'UTBQ
appuie inconditionnellement toutes les
mesures proposées par celle-ci, sauf celle où il est question d'abolir tout
tabagisme sur les terrasses. Tant nos
membres qu'une bonne partie de notre clientèle — de leur clientèle, en fait, devrais-je
dire — ne
sont pas prêts pour une mesure si radicale.
L'UTBQ propose, en fait, un continuum dans la lutte au tabagisme en
franchissant une autre étape en ce
qui concerne les terrasses. Plutôt que de tout interdire radicalement,
pourrait-on proposer, dans un premier temps,
un encadrement du tabagisme sur les terrasses? C'est pourquoi nous proposons
une définition de ce que devrait être
une terrasse avec espace ouvert et une terrasse avec espace clos, et une
division des terrasses avec sections fumeurs et non-fumeurs espacées
l'une et l'autre d'au moins 1,5 mètre.
Tous
et chacun d'entre nous rêvons, à juste titre, d'un Québec sans fumée. Si nous
sommes aujourd'hui beaucoup plus près
de ce noble objectif, nous le devons à toutes ces étapes rendues
possibles : d'abord, par l'information et l'éducation au grand public, et ensuite suivi de lois adaptées
à l'époque où elles ont été proposées. Bien sûr, il reste encore bien
des marches à gravir pour atteindre l'objectif zéro en matière de tabagisme,
mais, d'un point de vue de santé publique, mieux vaut probablement les grimper
une à la fois plutôt que de risquer de perdre pied et de mettre en péril des
actifs si bien acquis. Je vous remercie.
M.
Sénéchal (Sébastien) : Alors, l'UTBQ pense, en fait, que le
gouvernement du Québec va un peu trop loin, en fait, en voulant interdire de façon absolue, en fait, la consommation de
tabac sur les terrasses. C'est clair qu'il est facile de plaire à la majorité lorsque la majorité est
non-fumeurs. On parle de huit personnes sur 10. Il y en a quand même deux personnes sur 10 qui
demeurent fumeurs au Québec. Et, dans les établissements licenciés, blague à
part — qui
a passé dans les médias — il y a plus de fumeurs que... en fait, ils
sont plus représentés, en fait, que dans la population en général. On ne s'avancera pas sur un chiffre, mais
on peut vous dire de façon sûre et certaine qu'il y a plus de fumeurs
qui fréquentent les établissements licenciés
que dans la population en général. Il y a eu, en fait, une interdiction du
tabac, et à juste titre, dans les établissements licenciés depuis 2006.
Cette interdiction-là, en fait, on a appris à travailler avec elle. Il y a eu un très gros impact. Peu importe
ce qui est parfois galvaudé, il y a eu un impact, on vous le dit. Ce
n'est pas parce que tous les bars ne sont pas fermés aujourd'hui qu'il n'y en a
pas eu, d'impact, il y en a eu un très gros.
Par
contre, on s'est rabattus, notamment, sur les terrasses, et il y a eu, entre
autres, à Montréal... Depuis 10 ans, il n'y a jamais eu autant de
terrasses dans la rue, sur les toits, parce que c'est un phénomène. En fait,
les gens se sont rabattus sur l'extérieur et
ils se sont dit : Bon, bien, on ne peut plus fumer à l'intérieur des
établissements, il y a une nouvelle façon
de faire, une nouvelle façon de consommer, on va quand même consommer à
l'extérieur. Dans un pays nordique, on peut
le faire cinq à six mois par année. Les tenanciers ont dû s'adapter à ça, notamment
parce qu'il y a des questions de tranquillité publique. Il faut être
capable de gérer ces gens-là sur les terrasses. Que ce soit l'hiver comme
l'été, il faut les gérer, il faut gérer les
gens qui s'amassent maintenant à l'extérieur, en fait, et qui peuvent déranger
leurs voisins. Tout ça, on s'est
habitués à ça. On n'est pas habitués et on ne sera pas capables, en fait, de passer
la prochaine étape qui est proposée par le gouvernement du Québec, c'est-à-dire
d'aller contrôler notre clientèle à neuf mètres de l'établissement.
Ici,
en fait, il y a une intervention qui est demandée et qui est
exagérée, selon ce que nous... en fait, ce que nos experts ont déterminé. On sait que l'Organisation mondiale de la santé... Je le sais,
vous allez nous le dire qu'il y a une tolérance
zéro. C'est le seul polluant, là, où il y a une tolérance zéro. Mais, pour
qu'il y ait une tolérance zéro, il faut qu'il n'y ait aucun fumeur. Puis, pour l'instant, le produit est encore légal,
et il y en a 22 %, de fumeurs, au Québec, donc il faut vivre avec
eux. Et, pour vivre avec eux, il faut être capable de vivre avec eux dans un
certain environnement, et, cet environnement-là, il faut qu'on soit capables de
continuer, en fait, à opérer des établissements licenciés puis à respecter la
minorité.
On
est une province qui respecte beaucoup les minorités. Je comprends que le terme
est excessivement galvaudé. On ne
parlera certainement pas d'accommodement raisonnable en matière de fumée. Par
contre, il faut trouver une façon de vivre
ensemble. Et la façon de vivre ensemble, dans des normes qui sont respectables
et respectées selon des barèmes internationaux,
ce serait de faire un espace qui est fumeurs et un espace non-fumeurs et de
laisser une zone tampon de plus de
1,5 mètre. On pense que c'est une façon d'aller de l'avant, de continuer
dans la logique du gouvernement, qui s'inscrit vers une réduction, même
une abolition des produits du tabac, probablement, mais il faut laisser le
temps au temps. Et c'est un pas en avant.
L'Union
des tenanciers de bars du Québec ne vous demande pas de rester dans
l'immobilisme. On vous suggère et on vous tend la main, on vous dit :
Toutes les terrasses qui sont fermées, interdisez le produit. Les terrasses qui
sont ouvertes, permettez-nous, en fait, d'offrir à la clientèle une
alternative. Et, si la clientèle, avec le temps, nous dit : On n'en veut
plus, de cigarettes, on n'a pas besoin du gouvernement pour nous le dire, on
est dans un libre marché, et on va réagir, et on va offrir ce produit-là.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin à votre
10 minutes, qui était devenu un 12, peut-être un 30 secondes
pour compléter, pour que l'échange puisse débuter avec les parlementaires.
Une voix :
Allez-y, M. Sergakis.
M. Sergakis
(Peter) : Oui. Excusez. Je pense que votre gouvernement, il tient un
discours à deux vitesses. Il faudrait que...
Je vais vous prendre un contexte que... On prend la rue Sainte-Catherine :
présentement, la rue est fermée, certaines
places, les piétons, ils marchent sur le trottoir puis, l'autre temps, ils
marchent dans le milieu de la rue. Notre clientèle, si je comprends le projet de loi n° 44, notre clientèle,
il faut qu'ils aillent fumer... neuf mètres, c'est bien ça? O.K.
Qu'est-ce qui arrive avec les piétons qui marchent sur le trottoir? Puis
qu'est-ce qui arrive avec les... Bien, je vous donne un exemple, là :
l'été, avec les feux d'artifice, il y en a, dans la rue, à peu près
100 000, personnes. Qu'est-ce qui se passe avec les clients... pas les
clients, les piétons puis les gens qui marchent dans le milieu de la rue?
Je m'excuse, peut-être... parce que je pose les
questions... Je devrais parler seulement, c'est ça? Est-ce qu'il y a un...
Le
Président (M. Tanguay) : Non, non. Je vous explique. Vous aviez
10 minutes de présentation, qui est devenu 13. Les trois minutes,
je les prends sur le temps de la ministre, qui aimerait peut-être discuter avec
vous.
M. Sergakis
(Peter) : O.K. Combien de temps qu'il...
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, si vous voulez, je pourrais peut-être
lui céder la parole, et, pour le temps qu'il lui reste,
18 min 30 s, vous pourriez échanger.
Alors,
je cède la parole à Mme la ministre. Si vous voulez... vous avez sûrement des questions.
Merci beaucoup, merci.
Mme
Charlebois :
Alors, M. Sergakis, M. Sénéchal, M. Arbour et M. Beaulieu, merci d'être ici et
de nous faire part de vos préoccupations, de nous parler de comment vous voyez le projet de loi. Et sachez que toutes les préoccupations sont prises en compte, même ceux qui n'auront pas la chance de venir ici
faire leurs représentations. On va
prendre le temps de consulter tous les mémoires et on va travailler
ensemble, tous les parlementaires, à faire en sorte de bonifier ce projet de
loi là.
Je vous ai entendu, dans votre
allocution, nous parler de vos études,
et vous semblez m'avoir dit : Oui, je sais, vous allez me parler de l'OMS. C'est certain que je vais vous parler de l'Organisation mondiale de la santé puis c'est certain que je vais vous parler des études scientifiques indépendantes. Est-ce que
vous réfutez la valeur des études scientifiques indépendantes que nous
avons, qui sont dans des revues scientifiques?
• (18 h 20) •
M.
Sénéchal (Sébastien) : En
fait, si vous avez la chance de lire le rapport, on les reprend, ces... on
vient à la même conclusion que
Kennedy : il y en a une... En fait, il y en a un, impact. Cet
impact-là, en fait, c'est de déterminer pendant combien de temps cet impact-là dure et à quelle distance, en fait, il y a réellement un impact. Parce qu'à l'autre bout
de la salle, même si, en fait, on était sur
une terrasse, et vous fumeriez, Mme la ministre, il n'y en aurait pas,
d'impact, sur ma santé à moi. Alors,
on ne dit pas qu'il n'y a aucun impact lorsque quelqu'un s'allume une cigarette
à l'extérieur, ce qu'on vous dit,
c'est que cet impact-là peut être acceptable, dépendant de la distance à
laquelle vous êtes de celui-ci puis pendant combien de temps vous y êtes
exposé.
On
est d'accord avec toutes les autres études, en fait, qui ont été réalisées à
travers le monde. On trouve simplement étrange que le gouvernement nous
remette sur le nez, en fait, que l'Organisation mondiale de la santé dit que
respirer pendant une seconde de la fumée de cigarette, ça va nous tuer, alors
que vous continuez à vendre le produit. Si c'est dangereux à ce point-là sur une terrasse, c'est dangereux dans la rue.
Si c'est dangereux dans la rue, c'est dangereux aux feux d'artifice. Ce
n'est pas juste dangereux parce que c'est sur une terrasse d'un établissement
licencié. Il faut faire attention lorsqu'on
utilise, en fait, cet argument-là, parce que je pense qu'il se retourne contre
ce gouvernement. On pense actuellement
que, malheureusement, s'il y a tolérance zéro, c'est vous qui avez la clé. Mais
vous ne pouvez pas faire un choix
entre la terrasse et la rue. Si ce n'est pas possible de fumer sur une
terrasse, ce n'est pas possible de fumer dans la rue non plus, ce n'est
pas moins dangereux.
Mme
Charlebois : Est-ce que vous comprenez que le projet de loi
vise... Il a trois objectifs, hein : prévenir la consommation du tabac chez les jeunes, protéger la
santé des non-fumeurs et favoriser la cessation de tabagisme. Pour quelqu'un qui veut arrêter de fumer, voir les
autres fumer autour et sentir la nicotine, la fumée secondaire, est-ce que
vous croyez que c'est bon?
M.
Sénéchal (Sébastien) : En fait, je pense qu'on s'inscrit exactement
dans les trois objectifs du gouvernement. Premièrement, on protège les jeunes, parce que, dans nos établissements,
on ne représente aucun restaurant. Je pense que c'est bien compris, l'Union des tenanciers de bars du Québec, c'est des
personnes de 18 ans et plus, donc des personnes qui normalement sont capables de prendre leurs
décisions. Deuxièmement, on offre un choix, c'est-à-dire d'avoir un environnement sans fumée sur une terrasse où il y
a des sections, alors dans une question de protection. Et,
troisièmement, bien, on est en train de justement rendre ce geste-là, dans la
même logique que le gouvernement, de moins en moins acceptable, c'est-à-dire qu'on est en train de ghettoïser encore les
fumeurs et de leur dire : Regardez, vous autres, vous allez rester ensemble, puis on va vous regarder, nous,
les non-fumeurs, parce que vous êtes en train de vous rendre malades.
C'est exactement la
technique qui a été utilisée, en fait, par les différents gouvernements dans le
monde, c'est-à-dire de rendre ce comportement-là inacceptable. Mais
ce qu'on vous dit, c'est que vous allez un peu trop vite. On vous demande de franchir un pas à la fois
et non de courir, en fait, alors que, partout dans le monde, la tendance n'est
pas là, sauf... Je vous le dis, vous avez
raison, au Canada, en fait, on semble vouloir, en fait, limiter la
consommation de tabac sur les
terrasses et dans l'État de New York. Mais, partout dans le reste du monde, il n'y a
personne qui court. On peut y aller un peu
plus tranquillement, et on ne se fera
pas accuser, comme en 2005, d'être les derniers en matière de lutte contre le
tabagisme.
Mme
Charlebois : Est-ce que
vous êtes au courant qu'au Canada les seules provinces qui ne légifèrent pas
sur les terrasses sont le Manitoba, la Colombie-Britannique et nous?
M.
Sénéchal (Sébastien) : Et
pourtant la Colombie-Britannique est
certainement, en fait, un exemple, disons, en différentes matières,
notamment en environnement. Et, écoutez, il y a une...
Mme
Charlebois : Vous
êtes en train de me dire que, sur l'ensemble du Canada, on devrait imiter la
Colombie-Britannique et rester dans ceux qui n'autorisent pas?
M. Sénéchal
(Sébastien) : Ce qu'on est en train de vous dire...
Une voix :
...
M. Sénéchal
(Sébastien) : Pardon?
Une voix :
Et la France.
M. Sénéchal
(Sébastien) : Oui. Non. Bien, en... Regardez...
Mme
Charlebois :
Non, mais je parle du Canada, là.
M. Sénéchal (Sébastien) : Non. Au Canada,
c'est clair, en fait, qu'il y a une tendance, il y a une tendance que moi, je
pourrais qualifier aussi de bloc de l'Ouest, il y a une tendance... Il y a une
tendance, en fait, qui est de radicaliser les choses. Mais, écoutez, est-ce qu'on veut absolument suivre l'Alberta ou le Nouveau-Brunswick ou
on veut se comparer aux États-Unis,
aux pays d'Europe? Vous pouvez choisir ce que vous voulez, mais ce que je vous
dis, c'est qu'il n'y a pas d'urgence. En fait, on peut légiférer, et y
aller par étapes, et ne pas avoir l'air fou dans notre grande Confédération
canadienne en faisant des... en suivant, par exemple, la France.
Je pense que
le gouvernement doit intervenir pour protéger les mineurs dans les autos, dans
les parcs. Vous avez tout à fait raison de le faire. Protégez-les, les
mineurs. Vous avez raison d'intervenir dans les établissements de santé. Mais
est-ce nécessaire, en fait, de faire une terrasse à l'air libre et la rue? Je
ne sais pas si c'est nécessaire de le faire.
Mme
Charlebois :
Est-ce que vous avez entendu la majorité des représentations qui sont venues
ici, en ce moment, et nous dire que... Je ne
sais pas pourquoi, là, l'ensemble des représentations qu'on a eues nous disent
qu'il n'y a pas de problème, il faut absolument interdire de fumer sur
les terrasses.
J'ai posé la
question parce que j'ai entendu la suggestion de limiter la terrasse à... une
partie de la terrasse. On nous a même
dit... Une autre association de tenanciers de bars, la corporation que vous
connaissez sûrement, nous a dit : Avoir un fumoir, ce serait utile sur la terrasse. Et on pose des questions
notamment à plein de gens, plein d'intervenants, on nous a dit qu'il y avait plus de toxicité dans un abri
pour fumer, que c'était encore plus dangereux pour les personnes qui y
allaient. Et, pour ce qui est de limiter l'espace de la terrasse, on nous a
aussi dit que ce n'était pas souhaitable, qu'il y avait, veux veux pas, un
échange de fumée secondaire.
M. Sénéchal (Sébastien) : Peut-être
demander à M. Arbour de répondre à la deuxième partie, là, mais...
Mme
Charlebois :
Pourquoi, à votre avis, il y a une tendance, au Québec, à tous nous recommander
la même chose?
M.
Sénéchal (Sébastien) : Bien, parce que je pense qu'en général...
l'Union des tenanciers de bars du Québec pense, en général — puis elle aussi, elle est d'accord — qu'on ne devrait pas fumer au Québec. Mais
il y a des fumeurs. Et on vous a dit,
dans notre rapport, et d'entrée de jeu, que, tous les endroits fermés, il faut
les bannir. Certainement qu'il ne faut pas faire un fumoir. Par
contre... En fait, je vais laisser M. Arbour vous parler de toxicité, là, parce
que c'est...
M. Arbour
(Guy) : Oui. Écoutez, il est certain que, dans la population, beaucoup
de gens sont contre le tabagisme, la
cigarette, et j'en suis, O.K.? Alors, c'est évident que huit personnes sur 10,
probablement, en moyenne, vont vous dire qu'ils sont contre ce genre de
mesure.
Toutefois, ce
qu'on essaie de dégager comme conclusion, c'est qu'il y a une distinction
vraiment cruciale — et les Français l'ont faite, et d'autres
gens l'ont faite à travers le monde — à faire entre les espaces
clos et les systèmes ouverts. Un système
ouvert, il y a une dissipation qui se fait. Mettez, par exemple, une
voiture : si vous la mettez en plein milieu d'ici avec le moteur qui tourne, tout le monde est mort au bout
de 20 minutes, O.K.? Mais, si cette voiture est dehors, ça se
dissipe énormément. On est dans le trafic avec des milliers de voitures autour
de nous et on le tolère.
Même chose
pour ces fumées délétères de cigarettes. C'est fondamental. Je veux dire, quand
vous référez à des espaces enfumés, les terrasses enfumées, elles ont
des auvents, c'est fermé sur le côté. On a fait des mesures, on voit très, très bien la différence. Quand une terrasse n'est
pas ouverte, et c'est bon de le préciser, il y a accumulation. Si ce n'est pas le cas, ça se diffuse. Puis la terrasse,
là, l'exemple que vous aviez sur Sainte-Catherine, au-dessus d'un toit
comme ça, là, c'est évident, c'est aux quatre vents, ça se diffuse
immédiatement. Alors, il faut faire attention.
Il y aurait
peut-être une espèce de régie interne à développer pour caractériser les
terrasses et puis arriver peut-être, de
temps en temps, à l'improviste et voir si effectivement on arrive en bas des
normes — je parle
du 25 microgrammes par mètre cube — c'est fort possible. Mais
c'est ça, la distinction, je pense, qu'il est important de faire. On n'est pas
à l'intérieur, là.
Mme
Charlebois :
Je vous entends, mais j'ai le goût de vous dire que ce n'est pas la tendance de
la population, ce n'est pas la demande de l'ensemble de la population.
Mais, une fois...
M. Arbour (Guy) : ...à
l'intolérance.
Mme
Charlebois :
...que je vous ai dit ça, moi, j'ai parcouru cet été... Pendant mes vacances,
j'ai fait le tour puis je me suis promenée justement sur des terrasses
pour entendre les gens. Puis savez-vous quoi? Quand les gens me voient arriver puis... les gens me connaissent
dans mon comté, particulièrement, et, quand ils me voient arriver, ils
savent très bien que... puis tout le monde
m'a parlé du projet de loi, des fumeurs comme les non-fumeurs. Et je vais vous
dire que ça a été des exceptions qui m'ont dit que ce n'était pas une bonne
idée.
M. Beaulieu (Jean) : Mais la plupart
des curés rencontrent surtout des croyants, alors il y a ce phénomène qui joue
aussi.
Mme
Charlebois : Bien,
dans mon comté, je vais vous dire que les gens me connaissent assez pour mon franc-parler, me connaissent assez pour ma
franchise et me connaissent assez pour ma réceptivité à entendre des
points de vue divergents, mais je vous laisse ça à vous.
• (18 h 30) •
Je
veux juste rectifier des faits concernant la baisse de clientèle, parce que,
oui, il y a eu un impact, probablement, avec l'interdiction de tabac. Je
ne veux pas dénier ça, mais je veux juste vous dire que c'est un ensemble de
facteurs. Il y avait le 0,08, il y a tout ce
qui était le coût de la boisson à l'époque. J'ai travaillé dans le milieu, en
passant, ça fait que je connais un petit peu la clientèle de bar. J'ai
travaillé assez longtemps là-dedans pour vous en parler. Et il y a eu, oui,
l'interdiction de cigarettes, le taux d'alcoolémie qui a fait une méchante
différence — et
vous en êtes conscients, certain — et le coût de la boisson, mais j'ai le goût
de vous dire aussi que vous avez récupéré, certainement, des clients qui
ne fumaient pas, qui veulent justement...
Entre autres, moi. Moi, personnellement je suis une cliente qui évitait ces
endroits-là depuis que j'avais arrêté de
fumer et je me permets maintenant d'y aller. Mais j'ai un collègue ici qui
fume, j'aimerais ça l'entendre vous poser une question.
M.
Plante : Oui, parce que tantôt j'ai... Je fais malheureusement partie
du 20 % de la population restant à fumer, donc je fais partie, comme vous avez exprimé, de votre problème à gérer
si on interdit... Non, mais, tu sais... Tantôt, j'étais... mais là c'est mon problème à gérer. Donc, tantôt,
vous avez dit : Si on interdit de fumer sur les terrasses, les fumeurs
vont devenir un problème à gérer ou vont
causer un problème aux tenanciers, parce qu'ils vont devoir, bon, bien, sortir,
s'en aller sur le trottoir, ou tout ça.
Ça m'intrigue beaucoup, ça, parce que... Je vais
vous dire, hier après-midi, on avait une pause de commission parlementaire, et ici, sur la Grande Allée, la
majorité des terrasses sont non-fumeurs, là, et j'étais assis avec une
collègue, et tous les deux, on est très
surpris, il y a quelqu'un qui s'est allumé une cigarette, et la serveuse lui a
dit : Excuse-moi, est-ce que tu
pourrais aller fumer... tu ne peux pas fumer ici. Il s'est levé bien gentiment
et il est allé... Et même moi puis ma collègue...
Je me suis levé, moi, je suis allé fumer une cigarette... bien, j'ai laissé mon
verre sur la table, je suis allé fumer une cigarette tout poliment et
tout gentiment.
Mais j'aimerais savoir pourquoi, pour les
tenanciers de bar, tout d'un coup ou abruptement comme ça, ça deviendrait un
problème, puisqu'en disant, partout au Québec, que c'est interdit, bien, ça
deviendrait comme dans les moeurs, puis on serait habitué de se lever puis de
sortir pour ne pas incommoder personne qui sont autour de nous.
M. Sénéchal (Sébastien) : Bien,
écoutez, si la cigarette était interdite partout... Parce que je prends votre
raisonnement : Ça ne serait pas un problème sur les terrasses non plus,
O.K.? Donc, c'est sûr que, si vous y allez en microcosme,
puis là vous nous dites : Bien, on va décortiquer ça... Prenez
l'exemple : Si c'est interdit sur toutes les terrasses au Québec, bien, est-ce que ça va être plus facile
à gérer? Non, ça va être un problème partout. Ça va être un problème
partout. Parce que, là, vous avez laissé votre verre sur la table, O.K.? Bon,
vous avez laissé votre verre sur la table. Il y
a des phénomènes, peut-être que vous êtes moins habitué, mais ça s'appelle le
GHB, ça, et, quand on laisse notre verre sur la table, bien, il y a des
bonnes chances, en fait, qu'on soit obligés, en fait, de surveiller votre
verre, parce que, quand vous allez
revenir... Peut-être que vous n'êtes pas au goût de certains de vos collègues
sur les terrasses, mais il y a des jeunes filles, en fait, qui sont des
proies, en fait, et c'est un réel problème dans les établissements licenciés.
On ne peut pas sortir notre verre, on ne peut pas l'abandonner, hein, bon, puis
on ne peut pas l'amener dans la rue non plus, puis encore moins à neuf mètres.
Et, quand on est rendu à neuf mètres, en plus,
bien là, il y a toute une question, en fait, de réintégrer, en fait, l'établissement. C'est-à-dire que, quand c'est une
terrasse... Comme par exemple, sur la Grande Allée, ici, bon, bien, les
terrasses, elles sont relativement petites. Elles sont spacieuses, elles sont
belles, mais elles sont relativement petites. Il
y a des terrasses de plusieurs centaines de personnes, en fait, dans les
établissements. Et, oui, ça cause un problème quand on est rendu avec
100 personnes qui se retrouvent dans la rue et qui décident de parler, de
discuter ensemble et de festoyer, parce
qu'après ça il faut demander, en fait, à notre personnel de sécurité de ne plus
être sur notre espace à nous mais d'aller dans la rue puis d'intervenir
là où les policiers doivent intervenir normalement.
Alors, oui, il y en a, des problèmes. Il y en a,
des problèmes, mais le plus gros problème, en fait, le plus gros problème, c'est que, justement... Et ça, c'est
très intéressant, ce que vous dites là, c'est qu'il y en a déjà, des terrasses
non-fumeurs. Cette offre-là existe, elle est régulée par le marché, et on n'a
pas besoin, en fait, d'intervenir pour protéger quelque... Parce qu'il faut avoir une motivation, là, quand on est
l'État, là. Il faut avoir une motivation puis il faut avoir une raison. Vous nous le dites vous-mêmes, en
fait : Ça fonctionne déjà. Mme la ministre dit : Je me suis promenée
dans mon comté, et il y a des gens qui sont tannés. Bien, il y a des
gens, en fait... Et nous, on le voit quotidiennement, quand un fumeur, en fait, dérange des non-fumeurs, bien, il
va avoir la décence, la plupart du temps — la plupart de temps, je vous le dis, parce qu'on n'en voit pas, d'escarmouche sur
les terrasses — de se
tasser et d'aller à l'extérieur. Il y a déjà ce respect-là qui existe au
Québec entre les individus. On n'est pas à l'intérieur d'un aéroport, on n'est
pas dans un avion, on est dehors sur une
terrasse. Il faut se demander si on a absolument besoin de légiférer et
d'interdire manu militari, en fait, à toute personne de consommer dans
des circonstances comme celles-là. J'espère avoir répondu à votre question.
Mme
Charlebois :
En fait — M. le
Président, je vais reprendre la parole — si c'est possible pour certains propriétaires de... tenanciers de bar qui ont des
terrasses, je me demande pourquoi ce n'est pas possible pour l'ensemble,
d'une part. D'autre part, quand vous me
parlez de la France, j'ai le taux de prévalence au tabagisme, qui est tout près
de 30 %, alors que nous, on est à
22 %, et c'est stagnant depuis plusieurs années. Notre objectif, c'est de
baisser de 6 % en cinq ans, et
c'est un objectif très raisonnable, mais il faut poser des gestes pour y
arriver. Si c'est possible pour beaucoup de propriétaires de terrasse,
pourquoi un certain groupe s'y objecte?
M.
Sénéchal (Sébastien) : C'est
possible pour tous les propriétaires
de terrasse, c'est possible à tous
actuellement d'interdire. On est dans une
propriété, disons, publique... privée avec un accès public. Les propriétaires
le font s'ils le veulent bien, ça dépend de ce que la clientèle désire et souhaite.
Ici, sur la Grande Allée, on le souhaite. Ailleurs, on ne le
souhaite pas nécessairement.
Maintenant,
vous avez dit tout à l'heure : La prévalence, elle est... ou, en fait, le
nombre de fumeurs est à peu
près stable, là, puis on essaie de ne pas
intéresser les jeunes. Les jeunes n'ont pas accès à nos établissements. On pense que vous atteignez
ou vous visez, en fait, une mauvaise cible. Vous avez des excellentes idées
dans ce projet de loi n° 44 là, mais, ce que vous recherchez, vous ne
l'atteindrez pas, en fait, et vous ne diminuerez pas le nombre de fumeurs au Québec
en interdisant la consommation de tabac sur
les terrasses. Ce que vous allez faire, par contre, c'est faire mal à
une industrie qui n'a pas besoin d'avoir plus mal qu'elle a déjà.
Mme
Charlebois : Si je
vous écoute, là... Puis j'ai écouté
les gens qui vendent du tabac sans fumée, j'ai écouté d'autres petits
groupes qui me disent : Bien, ça, nous autres, on est juste une petite
partie, le menthol, c'est juste une petite
partie des ventes. Les bars me disent : C'est juste une petite partie.
Tout le monde me dit : C'est des petites parties. Finalement, on
n'a pas besoin de rien faire.
Ce qu'on veut, ce qu'on vise avec le projet de loi,
je vais vous le rappeler, là, c'est protéger la santé des non-fumeurs,
pas juste les jeunes, là, des non-fumeurs. Puis, quand vous dites — c'est
quand même incroyable : Oui, il y a 20 %
des gens qui fument puis il y a 80 % qui ne fument pas, mais les 20 %
ont le droit... C'est vrai, ils ont le droit de fumer, mais ils peuvent
respecter le 80 % et, comme le fait mon collègue, aller fumer à
l'extérieur.
Puis,
pour ce qui me... en ce qui me concerne, pour le GHB, puisque vous en parlez, ça existe déjà. On n'a pas besoin de la loi actuelle pour savoir qu'il y a
des jeunes filles qui sont agressées à cause du GHB en ce moment. Ça fait que ce n'est pas la terrasse qui va être interdite
de fumer qui va faire qu'il n'y en aura plus, là... ou qu'il va y en avoir.
M.
Sénéchal (Sébastien) : Bien,
avec beaucoup de respect, en fait, non, vous allez accentuer le
problème de façon fort
importante, parce que les gens qui vont quitter la terrasse ne pourront pas
apporter leurs verres. Ça, c'est... Ça, je ne discuterai pas longtemps là-dessus.
Le fait de ne pas garder son oeil sur son verre, c'est un problème, ça va être
un problème de GHB, et autres. Par contre...
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup.
M. Sénéchal
(Sébastien) : Pardon?
Le
Président (M. Tanguay) : Je
vais maintenant céder la parole, pour la suite de la discussion,
à notre collègue de Rosemont pour 13 minutes.
M.
Lisée : Oui, merci, M. le Président. Bonjour, bonjour à tous. M. Sergakis, vous
allez nous poursuivre si on adopte le projet de loi tel quel. Sur quelles
bases?
M. Sergakis
(Peter) : L'avocat est là.
M.
Lisée : Bien, je
sais, mais c'est à vous que je pose la question, c'est vous qui avez dit ça.
Sur quelles bases?
M. Sergakis
(Peter) : Bien, sur quelles bases... Je pense que c'est abusif, qu'est-ce
que vous voulez faire sur les terrasses. J'ai entendu Mme la ministre, tout à
l'heure, qui dit : On veut protéger la santé des 80 % non-fumeurs.
Mme la ministre, vous voulez que les 20 %, ils meurent, là. C'est ça que
vous voulez?
M. Lisée :
Non. Ça, vous auriez...
M. Sergakis
(Peter) : Mais non, mais un instant!
M. Lisée :
Vous pourriez nous poursuivre si c'était notre intention.
M. Sergakis
(Peter) : Non, non, parce que... Un instant!
M.
Lisée : Bien, M. Sergakis, je vais vous poser la question,
parce qu'en 2005 vous avez poursuivi aussi. Vous étiez contre la loi de 2005 qui interdisait la fumée... de fumer à
l'intérieur des établissements. Vous avez demandé une injonction. Vous
avez gagné?
M.
Sergakis (Peter) : Un instant, on va vous expliquer. La dernière
minute, le gouvernement... C'était le PQ qui était là ou le libéral qui
était là?
M. Lisée :
2005, malheureusement, c'était le Parti libéral.
• (18 h 40) •
M.
Sergakis (Peter) : Oui, O.K. Je vais vous expliquer qu'est-ce que vous
nous avez méfait à ce moment-là. Vous avez
dépensé, jusqu'avant l'audience, là, à peu près 2 millions. Donc, vous
avez présenté à M. Grey en disant : Si vous perdez, vous payez les 2 millions. Vous avez joué le bras. Puis c'est comme ça que vous faites, les gouvernements, tout le temps, là, vous écrasez le petit. C'est ça que vous
avez été... Non, mais je vais vous expliquer...
M.
Lisée : Mais c'est vrai que le jeu...
Le Président (M. Tanguay) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Je vais prendre la parole, là, comme président.
M. Sergakis, il y a des mots qu'on ne peut pas, malheureusement ou
heureusement...
M. Sergakis
(Peter) : Mais qu'est-ce que j'ai dit, monsieur? Je suis poli.
Le Président (M.
Tanguay) : Je ne le répéterai pas.
M. Sergakis
(Peter) : Non, non, je suis poli. Je n'ai pas dit... Je n'ai pas
insulté personne.
Le Président (M.
Tanguay) : Non, M. Sergakis, la parole est à moi. Merci. Il y a
des mots qu'on ne peut pas utiliser. Vous
êtes un homme intelligent, vous les connaissez très, très bien, alors je vous
demande juste votre collaboration. Faites attention, s'il vous plaît. La
parole est à vous.
M. Sergakis
(Peter) : Merci, monsieur. Merci. Là, vous pouvez régler le problème,
interdit la cigarette...
M. Lisée :
Je comprends votre argument.
M.
Sergakis (Peter) : ...puis arrêter aussi remplir le Trésor avec
l'argent de 20 % des fumeurs. Parce que c'est ça que vous faites,
là. Puis ça...
M. Lisée :
Ce n'est pas tout à fait la question que je vous posais, M. Sergakis.
Alors, moi...
M. Sergakis
(Peter) : Non, mais... Bien oui, mais laissez-moi finir. Oui.
M.
Lisée : Mais, sur la question de vos poursuites en 2005, le
juge a refusé de vous donner une injonction, et vous avez retiré votre
plainte en 2009.
M.
Sergakis (Peter) : On ne pouvait pas plaider. Je vais vous expliquer
puis je vais vous le répéter autant de fois que vous voulez. Quand vous
avez demandé, le juge, à la dernière minute que le coût du gouvernement...
jusqu'à ce moment, c'était 2 millions.
Ils ont demandé, les avocats du gouvernement... Vous avez demandé à la juge, si
on perdait, de payer le 2 millions. Je vous explique : J'étais
seul à payer, j'étais seul à payer tous les frais, là.
Je
répète encore, c'est ça que les gouvernements, ils font. Je vais faire
attention à... les mots, qu'il m'envoie... C'est ça que vous faites tout
le temps dans toutes les causes. Vous creusez le petit, O.K.? Vous gagnez...
M. Lisée :
Bon, on va passer sur le fond.
M. Sergakis
(Peter) : Non, non, mais c'est la réalité.
M. Lisée :
On va...
Une voix :
...
M. Lisée :
Creuser. Il a dit «creuser».
Le Président (M.
Tanguay) : Creuser.
M. Lisée :
Creuser. O.K. On va passer sur le fond. Je veux parler à M. Arbour.
M. Arbour, vous dites, dans votre... Je
l'ai lue attentivement, votre étude. C'était fait sérieusement, je vous en
félicite. Mais vous dites, en conclusion : «Sous toutes réserves et
à moins que d'autres études ne démontrent le contraire», j'affirme ce que
j'affirme. Or, aujourd'hui, l'Institut
national de la recherche scientifique nous a présenté une revue de littérature
scientifique sur l'impact de la fumée
secondaire sur les terrasses : «L'exposition de non-fumeurs à la fumée
[du] tabac sur une terrasse — selon une étude australienne de 2010 — peut également être détectée dans la salive
et [l']urine.» Et ils ont fait un test sur 28 non-fumeurs ayant fréquenté une terrasse de restaurant
pendant trois heures — trois heures, pas 24 heures, trois heures — ils
ont détecté une augmentation significative de la concentration de deux éléments
nocifs dans l'urine et dans la salive. Pour les clients de terrasses et bars,
la durée... Évidemment, la durée de l'exposition, comme vous le dites, est plus
importante, s'il y a plus de fumeurs, c'est plus important.
Et
il y a aussi la fumée tertiaire. Alors, la fumée tertiaire — ça, c'est le mémoire de la Fondation des
maladies du coeur : «Les résidus de quelque
250 métaux, substances chimiques et autres éléments toxiques contenus dans
la fumée de cigarette s'incrustent
dans les meubles, les tentures, [...]les autres surfaces et y demeurent
longtemps après que la fumée se soit
dissipée.» Alors, voilà des études qui disent qu'il y a un impact réel non
seulement sur les particules dans l'air, mais qu'on trouve dans la
salive et dans l'urine.
M. Beaulieu
(Jacques) : ...un impact. Vous dégagez quelque chose qui a un impact
partout. Maintenant, l'appareillage de
mesures dont on dispose permet d'aller chercher des traces, des traces infimes,
et voilà. Est-ce que, ces matériaux-là, ces traces sont toxiques ou pas? Écoutez,
le cyanure... L'arsenic, par exemple, c'est une substance qui est toxique, mais c'est celle qui confère le goût à
l'ail, alors c'est... Je ne veux pas dénigrer ces études, au contraire, bien
au contraire, mais, bon, écoutez...
M. Lisée : D'accord. Alors,
vous dites aussi que...
M. Beaulieu (Jacques) : ...c'est une
question de quantité, tout ça, là.
M. Lisée : Oui, bien, c'est ça. Mais vous dites : À
moins qu'il y ait d'autres études. Je vous cite des études
qui montrent que c'est suffisamment important pour qu'il y ait des traces dans
la salive puis dans l'urine. Et vous n'avez pas testé non plus la fumée
tertiaire, c'est-à-dire l'impact des résidus qui sont sur les tables et qui
restent. Ça, vous ne l'avez pas testé, ça.
M.
Beaulieu (Jacques) : Oui,
oui. Bon, j'essaie de répondre à votre question.
L'élément par lequel on mesure couramment
l'exposition à la fumée de cigarette, c'est nos particules fines de 2,5. Alors, si vous me citez une étude
qui va se baser sur le même genre d'évaluation, qui est le standard, à peu près, dans l'industrie, le mesurage de la cigarette... la mesure
de cigarette, là, évidemment, je vais pouvoir comparer puis affirmer. Mais je
ne réfute aucune étude de quiconque, bien sûr.
M. Lisée : Je ne mets pas en
doute vos résultats, mais vos résultats sont fondés sur les particules dans
l'air.
M. Beaulieu (Jacques) : Bien sûr.
M. Lisée : C'est ça. Et je vous dis : Bien, il y a
d'autres études qui sont fondées sur d'autres éléments, la salive et
l'urine, qui démontrent autre chose.
M.
Beaulieu (Jacques) : C'est
ça. Bien, absolument. Écoutez, là, j'avoue qu'on compare un peu des
pommes avec des raisins, mais néanmoins vous avez raison de le mentionner.
M. Lisée : Bien, on compare l'impact sur les... Oui, oui. O.K. Parce que
vous dites, là : «Sous réserve d'autres études», alors, je vous en donne. Là, vous dites : Écoutez,
l'important, c'est que l'exposition à l'extérieur... Vous
dites : Une terrasse qui serait
couverte, où il y aurait trop de parasols, etc., vous êtes d'accord,
ça, ça devrait être non-fumeurs, mais une terrasse qui est ouverte ou
qui n'a pas trop de parasols, bon... Mais vous admettez que ça dépend aussi de
la direction des vents et que, si les vents
dominants sont du bon côté, ça va. Mais que faites-vous si le vent tourne dans
une journée? Pouvez-vous prévoir ça?
M. Beaulieu (Jacques) : Bien, écoutez,
c'est au gérant d'établissement de gérer son établissement et puis de décider, à
ce moment-là, que c'est... Il y a
sûrement un client qui va se plaindre que ce n'est pas acceptable. À ce moment-là...
M. Lisée : Donc, il pourrait
intervertir.
M.
Beaulieu (Jacques) : C'est
une gestion privée, vous savez. On n'a pas besoin de faire venir la police à
tout bout de champ dans ces...
M. Lisée : O.K. Je comprends.
Donc, on pourra faire une rotation. Vous dites que vous avez fait des mesures à
l'intérieur aussi, et là ça donnait des valeurs très importantes «qui ne font
que démontrer à quel point — là,
je vous cite — était
bien inspirée l'idée de prohiber la cigarette à l'intérieur des bars et
restaurants».
M. Beaulieu (Jacques) : Aucun doute
là-dessus, monsieur.
M. Lisée : Vous savez que
M. Sergakis, lui, il était contre à l'époque.
M.
Beaulieu (Jacques) : Bien, c'est son point de vue. Écoutez, je fais...
on travaille pour une firme indépendante.
M. Lisée : Je comprends. Je
tiens juste à vous le souligner.
M. Sergakis (Peter) : M. Lisée,
à l'époque, j'avais proposé les fumoirs, là.
M. Lisée : Vous avez proposé
des fumoirs.
M. Sergakis (Peter) : Oui, puis
j'avais proposé les établissements non-fumeurs en affichant dehors, ou les établissements fumeurs, là. C'est pour ça que je propose maintenant... Il y en a, des
propriétaires, qui disent : Moi, je veux ma terrasse non-fumeurs. Puis il y en a d'autres
qui disent : Pourquoi que le gouvernement, ils vont nous imposer
tout le temps? C'est tanné qu'ils nous disent : Fais ça, fais ça, et...
M. Lisée :
Je comprends. Je vais vous le dire, je vais vous le dire parce que je suis très
sensible à l'argument que maître a
indiqué : Pourquoi c'est permis... ce serait interdit sur la terrasse,
mais, sur la rue, ce ne serait pas interdit, etc.?
M. Arbour,
dans votre document, vous dites très bien : «La présente étude reste
limitée à une évaluation qualitative de
l'exposition [des] consommateurs[...]. Elle ne peut prétendre investiguer le
risque pour les travailleurs de terrasses où on fume.» Vous ne couvrez pas les travailleurs. Or, les travailleurs
sont sur la terrasse, sont exposés pendant huit heures d'affilée à la
présence de fumée.
M.
Beaulieu (Jacques) : Bien sûr. Écoutez, vous pouvez commander une
étude à la CSST, mais je suis persuadé qu'ils vont pouvoir... l'IRSST va
faire ça. C'est des études pour les... du domaine des travailleurs, ce qui
régit tout le droit des travailleurs.
M. Lisée : Je comprends, mais...
Très bien.
M.
Beaulieu (Jacques) : C'est extrêmement complexe, extrêmement
structuré, et on parle de différents budgets en termes d'études.
M. Lisée :
Oui, mais votre prétention, c'est que le consommateur, selon votre unité de
mesure, n'est pas exposé à suffisamment
d'intoxicants sur une période courte, mais vous ne pouvez... et vous partez de
cette conclusion pour dire : Bien,
donc, on pourrait avoir des terrasses fumeurs—non-fumeurs. Mais, si on prend le point de vue du
travailleur, vous ne pouvez pas arriver à cette même conclusion.
M.
Beaulieu (Jacques) : Oui, c'est ça. Bien, écoutez, vous avez... ça peut
être nuancé par le fait que le travailleur est en présence de fumée lorsqu'il vient faire le service à la table. Il
n'est pas toujours là. En général, il reste à un poste de travail qui
est autour du bar.
M. Lisée : Oui, mais vous ne
le savez pas, vous le présumez. Ce n'est pas ce que vous démontrez.
M.
Beaulieu (Jacques) : C'est pour ça qu'on recommande qu'il y ait une
étude, par exemple du genre que peut faire
l'IRSST, approfondie. Vous savez, c'est complexe. Il faut que vous munissiez
chaque travailleur d'un équipement pendant
tout son quart de travail, que ça soit sur plusieurs établissements, dans des
conditions différentes. Ça demande un budget d'un demi-million pour
faire ça.
M. Lisée :
Je comprends, mais... Donc, la conclusion à laquelle vous en arrivez pour les
consommateurs, pour vous, elle est
valide. Moi, je dis qu'il y a d'autres études qui montrent autre chose. Mais,
pour les travailleurs, vous ne pouvez
pas vous prononcer. Et la différence, maître, entre la rue et la terrasse,
c'est que, sur la terrasse, il y a des travailleurs qui sont obligés d'y aller constamment, là où il y
a des fumeurs. Sur la rue, il n'y a pas de travailleur, aux feux
d'artifice, il n'y pas de travailleur.
M. Beaulieu (Jacques) : Écoutez, si
vous voulez...
M. Lisée :
Et, si on prend le point de vue de la protection des travailleurs, même chose
pour votre suggestion, que je
comprends, qui n'est pas dénuée de sens, de dire : On va faire des
restaurants fumeurs, des restaurants non-fumeurs, mais là-dedans il y a
des travailleurs qui sont exposés à la fumée.
• (18 h 50) •
M. Beaulieu (Jacques) : Oui. Bon, il
n'y a aucun doute là-dessus. Et, pour avoir la réponse à ça, il faut faire des
études.
Ce qui m'a
surpris, en consultant une quantité incroyable d'études — d'ailleurs,
on en cite une centaine dans notre modeste
étude, là — c'est
que, justement, le risque sur la santé des travailleurs, ça a été très peu étudié, pourtant ça vaudrait probablement la
peine de le faire.
Mais, comme
je vous dis, il y a toujours la présomption que, n'étant pas attablé, le travailleur n'est pas baigné continuellement dans le contexte mais l'est
épisodiquement lorsqu'il fait le service. Alors, ça peut être un argument,
mais, pour en avoir le coeur net, ça prend 1 million de dollars puis une
étude approfondie pendant un certain temps.
M.
Sénéchal (Sébastien) : Et,
M. Lisée, avec votre permission, en fait, les travailleurs, ils circulent aussi dans la rue.
Ils ont droit à la même protection, en fait, de la part de leur gouvernement lorsqu'ils marchent dans la rue que lorsqu'ils
travaillent. Donc, je pense, en fait, que...
M. Lisée : Mais ils ne sont
pas tenus d'être huit heures d'affilée sur une terrasse fumeurs.
M.
Sénéchal (Sébastien) : Mais il n'y a
personne qui est tenu d'être huit heures d'affilée. Et, si c'est ça,
votre... Non, il n'y a pas personne qui est tenu... parce que les travailleurs,
en fait, ils oeuvrent à l'intérieur et ils oeuvrent à l'extérieur. Ils se promènent. Ils ne sont pas en contact avec des fumeurs pendant
huit d'heures d'affilée. Et, si c'est ça, uniquement, votre préoccupation... Parce que, si c'est ça, la réalité, là, bien, écoutez,
dites, en fait, aux consommateurs qui
sont sur les terrasses d'aller chercher leurs bières, en fait, par une vitre de
l'établissement, puis le consommateur, il va aller la
chercher puis il va aller la payer. Alors, si c'est uniquement ça, la
considération du gouvernement, il y a des solutions, bien, il y a des solutions
pour ça. Donc, d'interdire le service...
M. Lisée : Non, bien, on
voudrait que les serveurs servent les 80 % de non-fumeurs aussi à la
terrasse.
M.
Sénéchal (Sébastien) : Mais ils peuvent les servir. Ils peuvent les
servir, mais... Alors, les fumeurs, eux, iront se servir, en fait iront les chercher à l'intérieur, leurs bières, si
vous le voulez, M. Lisée. Il n'y en a aucun, problème. Alors, on peut régler cette situation-là. Tout ce que ça
demande, en fait, c'est un peu de collaboration et peut-être
d'imagination pour permettre, en fait, une activité, qu'on soit d'accord ou pas
avec elle, pendant un certain temps encore.
M. Lisée : Je peux juste dire
que moi, je vais continuer à y aller, à vos terrasses.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à la collègue de Saint-Hyacinthe pour neuf minutes.
Mme
Soucy : Merci d'être ici.
Vous dites, puis je vais vous citer : «Beaucoup de Québécois
disent pencher pour ce compromis, à condition que [les terrasses]
"fumeurs" ne [soient] pas [placées] en amont des vents dominants [de]
la terrasse!» Je veux revenir là-dessus,
là, parce que je
pense que je n'ai pas bien saisi vos
propos. Donc, le vent qui souffle habituellement au sud-est, bon, vous allez dire : On va
mettre les fumeurs-là. Mais je ne sais où est-ce que vos commerces sont situés, là, mais, mettons Montréal,
le vent, il tourne de bord quand même quelques fois dans l'été. Il me semble que... Je ne sais
pas, là, mais ça me paraît peu
probable que vous changiez les clients de place parce que le vent change de
place, hein, il me semble.
M.
Beaulieu (Jacques) : En tout cas, bien, les vents dominants sont d'ouest en est, mais je vais laisser peut-être répondre...
Mme Soucy : Bien, c'est un exemple,
là.
M. Sénéchal (Sébastien) : Bien,
c'est sûr que, normalement, là, ça vient de l'ouest vers l'est, hein? Donc, ça change une fois de temps en temps dans l'été.
Si on se rend compte, en fait, que, cette journée-là, il y a
une dépression, une dépression
majeure, alors on demandera, en fait, aux gens, là, d'inverser... Parce que
sûrement qu'il y
aura 50-50 sur les terrasses,
60-40. Écoutez, tout ça est gérable, là, en fait...
Mme Soucy : ...
M. Sénéchal
(Sébastien) : Non, c'est
très facilement gérable. C'est déjà géré, actuellement, dans le plus grand respect.
Alors, ce qu'on pourra faire, en fait, c'est de continuer de travailler avec
notre clientèle. Sincèrement, là, c'est un commerce de proximité. Les
gens se parlent, hein? Ce n'est pas des multinationales, là. Il y a sept ou
huit personnes sur la terrasse d'un côté,
sept ou huit personnes sur l'autre. Alors, à partir de moment où il y a
un vent changeant, bien, il est possible
qu'il se mette à pleuvoir, et on rentrera tous en dedans, on ne fumera pas.
Mais normalement, quand le vent vient de l'ouest vers l'est et qu'il
fait beau, il n'y a pas de problème.
Mme Soucy : Vous ne trouvez pas que
vous vous compliquez la vie pour garder...
Une voix : Des clients? Non.
Mme
Soucy : Bien, les clients...
En 2009, il était supposé également d'avoir une baisse de clientèle, c'est
souvent cet argument-là qui vient.
Mais je vais
vous emmener sur... Vous affirmez que, bon, les clients fumeurs ne sont pas
prêts pour une interdiction de fumer
sur les terrasses. À mon avis, ce n'est pas un argument très valable, parce que,
s'il fallait attendre que tous les groupes
soient prêts à faire un changement, on ne ferait rien au Québec,
hein, parce que c'est rare qu'on a l'approbation, que tout
le monde est d'accord. Est-ce que le droit des non-fumeurs de fréquenter vos
terrasses est...
M. Sergakis (Peter) : Je peux-tu
vous répondre, madame?
Mme Soucy : Vous pouvez y aller,
monsieur.
M. Sergakis
(Peter) : Vous parlez des
droits de non-fumeurs, puis c'est à vous de régler le problème.
Interdire la cigarette, puis arrêter de
collecter les taxes, puis remplir les coffres, là, avec les fumeurs, c'est ça,
le problème, là. Si vous voulez faire quelque chose important, quelque
chose efficace... Parce que,
là, vous faites des demi-mesures, parce
que, les règles, là, de terrasse, les
fonctionnaires, là, ou qui qui a préparé les parties de la loi n° 44,
ils n'ont pas visité les terrasses qui existent. Là, présentement, moi, j'ai une
terrasse de 500 personnes, c'est au quatrième étage, puis le monde, ils
montent en haut à pied. Qu'est-ce que vous voulez que je fais avec la terrasse,
là?
Mme
Soucy : Vous parlez justement
des terrasses. Bien, il y a de nombreux bars qui n'ont pas de terrasse en
raison qu'ils n'ont pas l'endroit, en fait,
l'emplacement pour en installer. On peut dire que l'interdiction de fumer sur
les terrasses va rendre le terrain de jeu économiquement plus uniforme
pour tous les bars, puisque...
M.
Sergakis (Peter) : Madame,
vous n'acceptez jamais qu'il y avait une baisse de 25 % quand on a interdit de fumer à l'intérieur. Le gouvernement, avec
Loto-Québec, il a perdu 200 millions annuels avec l'interdiction. Parce
qu'on s'entend, tout le monde, là, que, oui,
il y a une petite baisse. On a détruit l'industrie au complet, puis là on va
les détruire encore bien plus avec
quelque chose que ça ne fonctionnerait pas, parce que, là, les gens, ils vont
marcher sur le trottoir, puis la terrasse est à côté, puis il va fumer,
puis nous, on ne peut pas intervenir...
Mme Soucy : Bien, le neuf mètres, de
toute façon, c'est quelque chose que... on va en discuter lorsqu'on fera
l'étude détaillée article par article puis on va trouver une solution à ça.
Vous parliez
tantôt de taxes puis de... Vous êtes un contribuable, vous, vous payez des
taxes. Savez-vous combien ça coûte, l'effet du tabagisme, à l'État québécois?
C'est vos taxes également, vous êtes un contribuable.
M. Sergakis (Peter) : Mais je l'ai,
la réponse, madame. Si vous interdisez le produit, là, vous n'avez plus de problème de... que ça vous coûte 2 milliards
par année en santé. C'est comme ça qu'on va régler le problème. Là,
peut-être que vous pouvez sortir que la cigarette est légale, puis tout ça,
mais vous avez les pouvoirs, là, de mettre les lois, de contrôler tout ça.
Mme
Soucy : Bien là, on essaie de contrôler au moins les endroits où
est-ce que les gens peuvent fumer, là. Là, on est là présentement
pour...
M. Sergakis
(Peter) : Mais non, non. Vous voulez... Non. Qu'est-ce que vous
faites, qu'est-ce que vous faites basé sur
votre fait? Vous avez encore 20 % fumeurs. Tranquillement, les 20 %,
c'est ça que vous dites, là, il va mourir, puis vous autres, vous collectez
les centaines de millions par année.
Mme Soucy : On va essayer qu'ils ne
meurent pas...
M. Sergakis (Peter) : Non, mais
c'est comme ça que...
Mme
Soucy : ...puis on va essayer aussi de protéger ceux qui ne fument
pas, parce que, quand même, les fumeurs doivent s'adapter à la forte
majorité de gens qui ne fument pas. Puis, vous l'avez dit, c'est 20 %.
M.
Sergakis (Peter) : Ce n'est pas la majorité. La minorité a des droits.
Les minorités, là, il faut qu'on protège...
Mme Soucy : Mais il y a toujours
moyen de fumer ailleurs, aussi.
M.
Beaulieu (Jacques) : Si vous me permettez, si moi, j'étais
fumeur — je ne le
suis pas, là — si
j'étais fumeur puis je fumais sur une
terrasse, si je prends ma cigarette puis je vais fumer à neuf mètres plus loin,
je vais intoxiquer les gens qui vont passer à côté de moi sur la rue à
neuf mètres plus loin.
Mme
Soucy : Bien, vous allez
sûrement moins l'intoxiquer, celui qui passe — puis ça prend deux secondes — que votre personnel qui travaille
huit heures par jour. On s'entend sur ça, là.
• (19 heures) •
M.
Sergakis (Peter) : Je m'excuse. Je veux dire quelque chose, mais je ne
veux pas insulter personne. Aujourd'hui, j'entends n'importe quoi pour vous défendre, n'importe quoi. Vous avez
tout le temps la réponse pour vous défendre, mais vous ne regardez pas la réalité. Je m'excuse, là.
Non. Vous avez toujours les réponses. Je veux avoir la ... Probablement,
vous pensiez aux votes. 80 %, les non-fumeurs, ils vont voter pour vous
autres, et non les 20 %. Si c'était à l'inverse, mais peut-être que vous prenez une autre décision, là. C'est ça que je
vois ici. C'est ça que je vois. Vous dites n'importe quoi, que... vous avez toujours les réponses pour
vous défendre votre cause sans regarder la réalité, tout le temps.
Qu'est-ce que j'ai entendu ce soir ici, là, c'est ça que vous avez, là. Je
m'excuse, là, puis... C'est ça.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. M. Sergakis, c'était important de vous entendre, puis on était heureux de le faire, de même que d'entendre les
personnes qui vous accompagnaient. Malheureusement, c'est tout le temps
qui nous est accordé. Alors, l'Union des tenanciers de bars du Québec, merci
beaucoup pour votre présentation.
Et je suspends nos travaux jusqu'à demain,
vendredi 21 août, à 8 h 30. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 19 h 1)