(Dix heures trois minutes)
La
Présidente (Mme Proulx)
:
À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de la santé et des
services sociaux ouverte. Je demande
à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de procéder aux consultations
particulières et auditions publiques
sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie
pour tous.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Daneault (Groulx) est remplacée par Mme Roy (Arthabaska).
Auditions (suite)
La
Présidente (Mme Proulx) : Merci. Alors, ce matin, nous entendrons l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec et
le Protecteur du citoyen.
Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les
fins d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.
Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ)
M. Leblond
(Claude) : Mme la Présidente, merci beaucoup. M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux, bonjour.
Mesdames et messieurs, membres de la commission, il nous fait plaisir d'être parmi vous. Alors, je
suis Claude Leblond, président de
l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et
familiaux du Québec. Je suis
accompagné de Mme Lyse Gautier, travailleuse
sociale, qui est chargée de projet, à l'ordre. Mme Gautier possède une feuille de route impressionnante, là, et de
nombreuses années d'expérience au sein de notre profession. Elle fut la première travailleuse sociale à travailler pour le
Curateur public du Québec et, pendant une vingtaine d'années, elle y a joué
un rôle conseil afin que soient implantés
les aspects concernant la protection de la personne. Alors, vous serez
certainement en mesure d'apprécier, là, ses compétences et les
éclairages qu'elle pourra nous apporter, là, dans cette présentation.
Alors, notre
ordre professionnel regroupe maintenant près de 12 000 membres, et environ
4 500 de ceux-ci interviennent
auprès des personnes âgées et possèdent d'excellentes connaissances des
problématiques liées au vieillissement et
au maintien à domicile. D'autres membres interviennent auprès des personnes en
perte d'autonomie à la suite de traumatismes ou de maladies dégénératives. Les travailleurs sociaux ont une longue
expérience en matière d'accompagnement dans les choix de milieu de vie. D'ailleurs, l'expertise de nos membres en
matière de protection des majeurs a été reconnue par l'État avec l'adoption du projet de loi n° 21 modifiant le Code
des professions en matière de santé mentale et de relations humaines en confiant aux travailleurs sociaux
l'exercice exclusif de l'évaluation psychosociale d'une personne dans le
cadre des régimes de protection du majeur ou
du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant. Nous avons, au fil des années, produit plusieurs documents en
lien avec la problématique du maintien à domicile. Nous avons d'ailleurs
apporté avec nous plusieurs de ces
documents, que nous remettrons avec plaisir, là, au secrétariat de la
commission. Et, parmi ces ouvrages,
nous avons en main, là, le plus récent numéro
de notre revue scientifique et professionnelle, la revue Intervention, dans lequel on retrouve un article coécrit, là, par le présent ministre de la Santé et des Services sociaux, le Dr
Réjean Hébert, article qui s'intitule Caractéristiques des personnes âgées et des travailleurs
sociaux associées au temps
fourni au soutien à domicile.
Dans son
livre blanc, le ministre de la Santé
et des Services sociaux affirme que, et je
cite, l'assurance autonomie vise à
favoriser la prestation de soins et de services nécessaires au maintien à
domicile partout au Québec et veut donner à la personne en perte
d'autonomie la liberté de choix quant à son lieu de résidence en lui assurant
que les soins et les services dont elle aura
besoin seront disponibles à tarif raisonnable, en qualité et en quantité. Je
ferme la parenthèse. Nous sommes tout à fait d'accord avec cette orientation et cette
affirmation et nous nous rangeons parmi ceux qui applaudissent l'annonce de ce virage majeur. En même temps, si le maintien à domicile représente le souhait d'une majorité de
personnes en perte d'autonomie, un
certain nombre, par choix ou pour diverses autres raisons, préféreront toujours
l'encadrement offert dans un milieu de vie substitut. Or, le
choix de ces personnes doit aussi être respecté, ce qui signifie que nous
aurons toujours besoin d'un nombre de places suffisant en CHSLD
ainsi que dans les autres types de ressources d'hébergement, que ce soit
en RF ou RI.
Cela dit, malgré notre adhésion au régime
proposé, nous entretenons un certain nombre d'inquiétudes sur des éléments qui
nous semblent fondamentaux et que nous avons identifiés dans le mémoire.
D'abord,
nous déplorons la quasi-absence de considérations pour les préoccupations
sociales, comme c'est malheureusement trop souvent le cas dans ce genre d'exercice.
Pourtant, et c'est connu, les déterminants sociaux ont une influence directe sur le maintien ou la
restauration de la santé. Négliger le social — je le
dis souvent et je l'ai dit à quelques reprises
à cette commission — négliger
le social, c'est ajouter une pression encore plus forte sur le curatif. Alors,
il importe non seulement d'agir sur
des conditions physiques, physiologiques et psychologiques, mais également sur
les déterminants sociaux,
c'est-à-dire les conditions de vie, le revenu, le statut social, les conditions
de travail, le réseau social, la famille et le soutien communautaire. Dans le livre blanc, les aspects sociaux
sont pourtant relégués au rang de sous-éléments d'un des trois grands
types de services de longue durée associés à l'assurance autonomie.
Nous
sommes également inquiets par rapport à la formation du personnel dispensateur
de soins et de services. Le personnel
devra être formé convenablement et avoir accès à la formation continue. Sur ce
point, il faut être particulièrement vigilant
en ce qui a trait à la place que jouera l'entreprise privée dans la
dispensation des services et sur sa capacité d'embaucher du personnel dont les qualifications sont
suffisantes. Il est également essentiel de terminer et de consolider
l'intégration des services dans tous
les CSSS. À ce sujet, des défis sont toujours présents, après presque 10 ans de
transformation, pour mieux répondre
aux besoins grandissants d'une population vieillissante : la réorganisation des soins de première ligne, l'intégration
des soins de première et de deuxième ligne ainsi que la coordination des
entités existantes, hôpitaux, ressources
d'hébergement et services communautaires, et le développement des réseaux
locaux de services de santé et de services sociaux dans les communautés.
• (10 h 10) •
Par
ailleurs, ce serait une erreur de procéder trop vite avec la nouvelle façon de
faire sans garder en réserve les ressources
budgétaires nécessaires au maintien du système actuel, le temps de tout mettre
en place. En effet, il faut éviter de
faire vivre aux personnes concernées une rupture ou une diminution de services qui aurait pour conséquence de les placer
dans des situations de plus grande vulnérabilité.
Les
proches aidants jouent un rôle majeur auprès des personnes en perte
d'autonomie. Trop souvent, nous avons tendance à les prendre pour
acquis. Nous recommandons donc que soit accordé aux proches aidants un statut
formel d'usagers nécessitant soins et
services pour poursuivre leur oeuvre. Sur le plan technique,
nous sommes d'accord avec l'utilisation du système de mesure de l'autonomie fonctionnelle, appelé le
SMAF. Cependant, nous demandons à ce que l'outil d'évaluation
SMAF social soit utilisé en complémentarité puisqu'il permet de capter des
besoins sociaux de la personne. Pour les travailleurs sociaux, l'évaluation du fonctionnement social qui consiste en une analyse contextuelle
de la situation sociale de la
personne dans une perspective d'interaction dynamique entre elle et son environnement constitue un préalable incontournable pour déterminer la
pertinence d'entreprendre une intervention sociale.
Le
livre blanc accorde, avec raison, une grande importance au rôle d'intervenant
pivot ou gestionnaire de cas. Depuis longtemps,
les travailleurs sociaux ont développé une expertise en matière de gestion de cas. Toutefois, à
l'heure actuelle, l'accent est placé sur la dispensation de
services, au détriment des autres fonctions du gestionnaire de cas. Nous
souhaitons donc que les compétences des travailleurs sociaux soient reconnues afin qu'ils puissent assumer ce rôle dans l'entièreté et dans toute son intégralité. Mme
Gautier, d'ailleurs, pourra certainement vous en dire plus long sur le sujet. Comme
plusieurs, nous nous inquiétons de la tarification en fonction du revenu,
pouvant faire en sorte que les moins nantis
doivent se priver de services, même si les tarifs sont raisonnables. Nous
partageons également les inquiétudes de certains qui craignent de voir des emplois bien rémunérés dans le
secteur public disparaître au profit d'emplois sous-payés dans le réseau
privé, portant ainsi, principalement, préjudice aux femmes.
Par
ailleurs, nous nous réjouissons de la déclaration faite le 4 novembre dernier
par la première ministre, selon laquelle
le financement du régime d'assurance autonomie sera assumé par les taxes et les
impôts actuels de l'ensemble des contribuables et donc par une
contribution particulière des usagers.
En
conclusion, nous endossons la volonté du ministre de la Santé et des Services
sociaux d'effectuer un virage vers
les soins et les services de maintien à domicile pour les personnes en perte
d'autonomie, reconnaissant ainsi le droit fondamental de la personne à
faire le choix qui correspond aujourd'hui à son meilleur intérêt. Nous avons
d'ailleurs beaucoup de retard à ce niveau.
Cela dit, nous resterons vigilants. Trop souvent dans le passé, plusieurs
bonnes idées se sont transformées en
cauchemars sur le terrain parce que le financement n'est pas venu à la hauteur
de ce qui était estimé. Le défi
auquel s'attaque l'État est majeur et nécessitera une volonté politique solide
et durable ainsi qu'un suivi constant.
En
ce sens, et parce que nous avons le souci de contribuer à la mise en oeuvre et
à la pérennité du programme d'assurance
autonomie, nous avons rédigé quelques recommandations que nous soumettons ici
et quelques recommandations autour
desquelles nous nous ferons un plaisir d'échanger avec vous au cours de la
période d'échange que nous sommes prêts maintenant à aborder. Je vous
remercie de votre attention.
La
Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup pour votre
présentation. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec
le groupe formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Hébert : Merci beaucoup, M. Leblond, Mme Gautier, merci de
ce mémoire qui est extrêmement important, d'autant plus que les membres de votre ordre professionnel sont au coeur
de ce changement important, puisque le gestionnaire de cas ou
l'intervenant pivot représente la porte d'entrée dans ce régime d'assurance
autonomie.
Et j'aimerais, dans
mes premières questions, aller un petit peu plus loin avec vous sur le rôle, la
formation, l'importance du gestionnaire de
cas. Vous nous parlez, là, que le travailleur social est bien placé pour
assumer cette fonction, mais vous
êtes conscients qu'il y a d'autres professionnels de la santé qui assument
également la fonction. Je ne comprends pas
dans votre intervention que vous voulez avoir une exclusivité de pratique au
niveau de la gestion de cas, mais que vous
voulez que des travailleurs sociaux, de par leur formation, puissent faire
partie de ces types de professionnels.
C'est ce que je comprends.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Vous avez tout à fait bien compris, M. le ministre. Effectivement, on ne pense pas que ça soit uniquement
les travailleurs qui devraient faire la gestion de cas, là, au Québec, pas du
tout.
Ce qu'on affirme par contre, et ayant développé
un guide de pratique pour la gestion de cas des travailleurs sociaux — c'est
des travailleurs sociaux — il y a quelques années, là… on souhaiterait que non seulement, là, ils
puissent le faire, mais que, quand
ils le font à titre de gestionnaires de cas, qu'ils puissent assumer
l'intégralité de la fonction qui est prévue et non seulement la gestion
des services, là, des services que la personne a besoin, là. Alors, il y a
d'autres éléments qui sont compris dans la
fonction de gestion de cas et qui devraient être mis en place également.
Et là Mme Gautier pourrait élaborer davantage là-dessus, si vous le
souhaitez, à ce moment-ci, là.
M.
Hébert : …pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent, que vous, peut-être, fassiez un résumé de
c'est quoi, les fonctions d'un gestionnaire de cas.
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Gautier.
Mme
Gautier (Lyse) : Dans le
fond, les fonctions de gestionnaire de cas, c'est une fonction qui comprend
plusieurs activités, qui est
d'évaluer la situation de la personne concernée et de ses besoins,
incluant les facteurs de risque; planifier les services appropriés aux besoins de la personne; développer le plan
de services individualisés; négocier les services et l'accès aux ressources; coordonner les services
mis en place; effectuer le suivi clinique; défendre les droits de la personne
concernée; réévaluer la situation.
Actuellement, comme le dit M. Leblond, très souvent les
gestionnaires de cas font une partie
des activités qui sont prévues, très souvent c'est le lien entre les
ressources… c'est-à-dire, entre les besoins et les ressources. Malheureusement, d'autres
fonctions très importantes dans la gestion de cas sont laissées pour compte, notamment
toute la réévaluation de la situation, à savoir, si la situation évolue, bien il faut
réajuster les services. Ici, on parle de la situation tant de la
personne concernée que des proches qui offrent des services.
Alors, ce
qu'on souhaite, dans le fond, c'est que la fonction, le rôle de gestionnaire
de cas soit assumé dans son entièreté.
Mais, comme vous l'avez dit, M. le
ministre, c'est qu'on ne revendique
pas l'exclusivité de cette activité, mais on voudrait par contre qu'elle soit plus complète que ce qu'elle est aujourd'hui, surtout que, le livre blanc, dans
le fond, ce qu'on voit, pour dispenser des services à
domicile, il se peut que, dans plusieurs situations, plusieurs interlocuteurs
soient impliqués dans la situation.
Alors, à ce moment-là, ça va nécessiter une coordination encore plus
importante pour faire en sorte, dans le fond, que les personnes ne travaillent pas, et de un, en silo et que les
services sont bien coordonnés et bénéfiques à la personne.
La Présidente (Mme Proulx) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Quelle est
la charge de cas d'un gestionnaire de cas typique, de façon idéale ou
habituelle?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Gautier.
Mme Gautier
(Lyse) : Écoutez,
M. le ministre, vous me posez une très grande question, parce que,
les gestionnaires de cas, actuellement, bien, il y a trois modèles, c'est-à-dire que, bon, il y a
les gestionnaires de cas qui font juste la gestion de cas, il
y a les modèles mixtes, c'est-à-dire que les gens qui ont des charges de travail en sus… Alors, il n'y a
pas nécessairement, à ma connaissance, des… On ne s'est pas arrêtés sur
des nombres de dossiers parce qu'il
faut considérer plusieurs indicateurs. Alors, je ne m'avancerai pas pour
donner une réponse exacte à cette question.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
• (10 h 20) •
M.
Hébert :
Au niveau de la réévaluation, est-ce que vous pensez qu'il serait important
d'établir une certaine réévaluation
statutaire des personnes en perte d'autonomie ou des personnes qui reçoivent
des services d'un gestionnaire de
cas, au-delà d'une évaluation qui est nécessaire, étant donné l'évolution de la
personne, mais qu'il y ait au moins une évaluation statutaire qui soit
déterminée?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Gautier.
Mme Gautier
(Lyse) : Idéalement, je crois
qu'il doit avoir effectivement une réévaluation
à des moments statutaires, ce qui ne
veut pas dire que la situation ne doit pas être réévaluée, au besoin. Quand il
y a des événements dans la situation de la personne, je pense que ça
doit absolument être réévalué aussi à ce moment-là.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : J'ajouterais,
dans le fond, les réévaluations, on les fait au moment où il y a des
changements puis quand il y a un besoin.
On met
également en place des réévaluations statutaires probablement pour s'assurer
effectivement qu'on n'oublie pas,
quand on a une trop grande charge de cas ou une trop grande charge de
coordination de services pour une trop grande quantité de personnes… qu'effectivement on n'a pas
oublié des gens. Alors, le statutaire vient répondre à un besoin différent,
me semble-t-il, que ce qui normalement devrait être fait par tout professionnel
en termes de responsabilités par
rapport à sa clientèle. Alors, quand
on met en place des moments statutaires ou des contrôles, ils
sont nécessaires, là. C'est un indicateur d'autres choses
qui se passent, là.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : Est-ce que
la règle du pouce actuelle dans le réseau, là, où la charge de cas d'un
gestionnaire de cas plein temps est autour de 40 personnes, est-ce que
ça vous apparaît une norme raisonnable?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond (Claude) : On s'est penchés, hein, sur la question, là, de la charge de cas du travailleur social et on n'a pas voulu,
que ce soit en gestion de cas ou dans d'autres services, établir de nombre, puisqu'on devrait établir un nombre de
dossiers pris en charge selon ce qui est visé par l'intervention et le temps
requis pour le faire.
Alors,
est-ce qu'effectivement une quarantaine de clients en gestion de cas pour un
travailleur social, c'est correct ou pas?
Ça dépend probablement de la nécessité… ou des besoins de chacun de ceux-ci et
de la possibilité d'atteindre les objectifs
visés par le plan d'intervention, en ayant le temps requis pour pouvoir poser
lesdites interventions pour que ça donne
des résultats, là. Alors, ce n'est pas… un nombre, ça demeure statique, et
c'est en prenant pour acquis que les objectifs seraient atteints dans ce
cadre donné là avec ce nombre de personnes en charge de cas là. Alors, vous
comprenez ma difficulté, là, M. le ministre,
là, de répondre à votre question précisément, là. À partir du moment où on
établit des objectifs, on devrait
pouvoir mettre en action les modalités d'intervention nécessaires pour
atteindre les objectifs. Ces modalités-là prennent un temps x et elles
ne peuvent pas s'additionner à l'infini.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous mentionnez d'entrée de jeu, là, que cette
réforme qui est l'assurance autonomie est nécessaire. Certaines personnes, notamment nos amis en face,
pensent que de mettre un peu plus d'argent dans le système, ça va régler
les problèmes et qu'on n'a pas besoin de
réformer la façon dont on gère et finance les services de soutien à
l'autonomie. Quelle est votre opinion là-dessus?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond (Claude) : Nous, nous pensons que c'est nécessaire de le faire parce que,
malheureusement, je vous dirais, là,
avec… Et là je retourne un peu dans le temps, là, mais j'étais venu également à
la commission, là, au moment de la
création des centres de santé et de services sociaux et du regroupement des
établissements et j'avais salué cette initiative du ministre de la Santé
et des Services sociaux du temps dans la volonté quant aux objectifs qui
étaient visés. J'avais également, à ce
moment-là, dit que nous regarderions les choses aller, là, compte tenu des
enjeux liés au risque, effectivement,
qu'il y ait un transfert de budgets ou en tout cas une augmentation des budgets
liés à tout ce qui touchait la santé
physique et les urgences, et ce, au
détriment des services sociaux, et on m'avait assuré que ça ne serait pas le
cas.
Par contre,
dans les faits, c'est ce qu'on a pu voir au fil des années. L'intérêt particulier, je dirais, du projet, non
seulement du fait qu'on projette vers l'avenir, c'est qu'effectivement il fera
en sorte que les argents prévus pour les services
pour les personnes en perte d'autonomie seront là pour cela et qu'ils resteront
là pour cela. Alors, est-ce que c'est par
dépit de voir des... Non, ce n'est pas par dépit, il y a un choix d'orientation
qui est important, mais il y a aussi l'autre élément qui entre en ligne de compte, c'est qu'effectivement cet
argent-là sera dans une caisse qui servira à ce pour quoi il aura été créé
plutôt que d'être utilisé à d'autres fins qui n'avaient pas été prévues, là,
par le législateur.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : Je souscris tout à fait à votre suggestion
d'intégrer un outil de participation sociale comme le SMAF social dans l'Outil d'évaluation multiclientèle et
également de pouvoir mieux évaluer les besoins des proches aidants. Il y a
quand même un élément que vous soulignez dans votre mémoire, vous dites :
Le proche aidant devrait être considéré comme un partenaire mais aussi comme un
usager. Et j'aimerais ça que vous précisiez votre pensée là-dessus.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond (Claude) : Je vais donner une partie de réponse et je vais demander à
Mme Gautier d'y aller avec également,
là... Il y a des éléments qui sont en... Bien, il y a des besoins, là,
carrément, qui sont liés à la situation d'être aidant, et indépendamment, là, du fait, là, que le client soit également
l'aidé, là. Alors, il y a une situation qui est vécue dans cette dimension-là. L'autre avantage qu'il y
aurait, c'est qu'effectivement, compte tenu de… le mot ne me vient pas, là,
en tout cas, du fait, là, que les
interventions par client doivent être codifiées, là, alors des statistiques et
de l'imputabilité, là, et de la...
Bon, le mot ne me vient pas ce matin, alors je m'excuse. Alors, il y a un
avantage certain à ce qu'on puisse codifier
les interventions qui sont faites auprès des aidants et qu'elles soient prises
en compte ensuite dans les réalisations et des professionnels et des
établissements pour fins de rapports, là, au ministère et aux agences sur
comment sont utilisés les sous.
Quant aux dimensions cliniques, je vais laisser
Mme Gautier y répondre.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Gautier.
Mme
Gautier (Lyse) : On croit, dans le fond, que les aidants doivent être
reconnus à titre de partenaires et à titre d'usagers.
Pourquoi à
titre d'usagers? C'est que devenir aidant, ce n'est pas très souvent par choix.
Ça déstabilise, dans le fond, la
famille, ça déstabilise tous les rôles sociaux que devait jouer l'aidant.
Alors, il a aussi des besoins. Ce que tentait de dire M. Leblond, c'est que les études démontrent que les
travailleurs sociaux n'accordent pas beaucoup de temps aux aidants, c'est-à-dire qu'on ne comptabilise pas beaucoup de
temps de la part des travailleurs sociaux vis-à-vis les aidants parce que les aidants ne sont pas considérés comme étant
des usagers. L'usager, c'est la personne en besoin de services. Ce qu'on
dit, c'est que l'aidant a aussi des besoins
psychosociaux qu'il faut répondre pour que la personne aidante puisse jouer son
rôle de manière la plus adéquate possible et
le plus longtemps possible. Si l'aidant n'est pas supporté, que ses difficultés
ne sont pas reconnues et qu'on ne l'aide pas
au niveau psychosocial, ce qu'on pense, c'est que, le rôle qu'elle va jouer,
elle ne pourra pas le jouer aussi longtemps qu'elle pourrait si elle recevait
des services.
Je ne le sais pas, si ça répond à votre question,
M. le ministre.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Mais ce que je comprends, c'est que vous voudriez qu'au moins, dans le contexte
de l'évaluation, on évalue les
besoins du proche aidant ou de la proche aidante et que, dans le contexte de
l'intervention, il y a un certain nombre de services qui soient couverts
par l'assurance autonomie. C'est ce que je comprends.
Mme Gautier (Lyse) : Tout à fait.
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Gautier.
• (10 h 30) •
Mme
Gautier (Lyse) : Et, au niveau des services généraux, que les aidants
qui manifestent des problématiques particulières à jouer leur rôle,
bien, ils soient reconnus, dans le fond, comme un usager à part entière et non
pas juste comme étant un acteur auprès de la personne en besoin de services.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous précisez, dans votre mémoire, deux partenaires du réseau : les
organismes communautaires, d'une
part, et les entreprises d'économie sociale. Au niveau des organismes
communautaires, vous nous incitez à rehausser leur financement, la mission globale, ce que nous avons fait il y a deux
semaines par l'injection de 40 millions, et plus spécifiquement aux personnes âgées. Vous savez que
du 110 millions de cette année… 10 millions qui étaient consacrés
spécifiquement aux organismes communautaires. Alors, je pense que ce que vous
souhaitez est entendu.
Au niveau des
entreprises d'économie sociale, vous nous suggérez, là, de vraiment s'assurer
de la qualité de la formation et de
la qualité des services des entreprises d'économie sociale. J'aimerais que vous
élaboriez davantage là-dessus.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Quel que soit le
dispensateur de services, l'État devra s'assurer effectivement qu'on a à
la fois, là, des personnes qualifiées pour
faire ce qui est fait et qu'on s'assure que, dans le processus, on vérifie la
qualité des services et la
satisfaction des usagers, là, alors, quel que soit le dispensateur. Le
ministère le fait déjà via les agences, là, par rapport aux services
rendus par les établissements. Il devra le faire également… qu'il y ait des
mécanismes de contrôle pour les services qui
sont rendus par les entreprises d'économie sociale, mais également, là, pour
l'entreprise privée si on veut
s'assurer effectivement de la qualité des services pour les personnes. Ou sinon
on garde au sein de l'État, là, l'ensemble des services et des
mécanismes de contrôle.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Certains ont remis en question ici la qualité des services des entreprises
d'économie sociale. Est-ce que vos
membres ont cette perception que les services des entreprises d'économie
sociale n'ont pas la qualité souhaitée?
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Je ne suis pas en
mesure de vous répondre à cette question. Ce n'est pas l'écho que j'en
ai, là, de façon générale.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Je retiens votre préoccupation de compléter la mise en place des réseaux
intégrés de services pour être en
mesure de mettre en place l'assurance autonomie. On a d'ailleurs investi
8 millions cette année pour réaliser cet effort pour que les gestionnaires de cas soient en place au moment de la
mise en place de l'assurance autonomie. Et je retiens
également votre préoccupation quant à la transition, là, pour qu'il n'y ait pas
de rupture de services, mais que ce soit
en continuité de services. Est-ce qu'il y a des éléments sur lesquels vous
souhaitez insister dans cette précaution que vous nous invitez à avoir
dans la période de transition?
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : …davantage sur la
question de principe, là. C'est qu'effectivement on ne peut pas mettre… il y a une nécessité d'une phase de transition,
là, entre deux façons de répondre aux besoins de la population, et il faut,
pour un temps donné, savoir que ça coûtera probablement plus cher, compte tenu
que nous serons dans cette étape de transition,
et que ça soit juste clair pour tout le monde que… aller vers autre chose. Et
on doit quand même maintenir la route
ouverte, là. Alors, si on doit faire un chemin de contournement, bien il faut
bâtir ce chemin-là et tout en continuant sur l'autre chemin.
Donc, il y a
une période donnée où on a à assumer des coûts supplémentaires et qui sont
normaux, compte tenu de la volonté de
la transition. Mais je ne sais pas. Est-ce qu'il y avait autres choses
particulières par rapport à ça, Lyse?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Gautier.
Mme
Gautier (Lyse) : Je crois que ça répond probablement à nos
préoccupations. Ce qui est clair, dans le fond, il faut être très prudent avant d'abandonner ce qu'on a actuellement
pour autre chose, que l'autre soit déjà en place avant d'abandonner un
service.
Là, je ne m'avancerai pas plus loin que ça, mais
c'était, dans le fond, ce qu'on voulait transmettre.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre, il vous reste à peu près une minute.
M.
Hébert :
Bien, une question assez simple : Est-ce que la formation actuelle des
travailleurs sociaux les prépare bien à leur rôle de gestionnaire de
cas?
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond (Claude) : J'ose le
souhaiter.
M.
Hébert :
Est-ce que vous êtes… Vous avez des contacts avec les universités? Je voudrais
que vous complétiez un peu la réponse que vous me donnez, là.
M. Leblond
(Claude) : Il y a neuf milieux
universitaires qui forment en travail social au Québec, là. Le contenu, quant à la formation, ça, en gestion de cas n'est
pas un contenu obligatoire, là. Donc, on pourrait ne pas retrouver, là, dans
toutes les... de façon uniforme, là, à
travers les neuf milieux universitaires. Il y aura certainement intérêt à ce
qu'on rappelle à nos milieux de
formation — et nous
allons le faire, mais effectivement les établissements et le ministère peuvent
le faire également — qu'il y aurait intérêt à ce que les professionnels
de la santé et des services sociaux, dont les travailleurs sociaux,
soient mieux formés quant à leurs interventions dans un contexte où ils sont
gestionnaires de cas.
La
Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, M. Leblond. Le
temps pour ce premier bloc étant écoulé, nous allons maintenant
poursuivre les échanges avec l'opposition officielle. M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, merci, Mme la Présidente. Bonjour,
M. Leblond, qu'on a vu très régulièrement en commission
parlementaire, d'ailleurs qui fait un travail extraordinaire, Mme Gautier.
D'abord,
c'est un plaisir de vous avoir ici, puis d'abord vous féliciter également pour
le travail que vos membres font. J'ai
l'occasion régulièrement de les rencontrer, de travailler avec des gens sur le
terrain puis, je peux vous dire, le travail
qu'ils font est inestimable. C'est des gens dévoués. Ils prennent en
considération les biens de la personne, de la famille et également ils veulent que les gens soient bien pris en
charge. En tout cas, moi personnellement, mon expérience avec les travailleurs sociaux n'est que positive,
aucun négatif. Puis je vous le dis de bon coeur parce que vous êtes une profession sous-estimée dans le réseau de la
santé, et également vous travaillez avec beaucoup de respect avec les gens.
Juste pour faire un commentaire sur le commentaire que le ministre a fait, là,
on n'a jamais dit que ça prenait juste de l'argent
de plus dans le système. Ça, c'est le ministre qui le dit, qu'on dit ça, mais
ce n'est pas ça du tout. On pense que ça prend une transformation vers les soins à domicile, que ça prend une
meilleure organisation de services. Mais, contrairement à ce que le ministre a laissé croire aux gens en
début, il y a des gens qui vont devoir aller en CHSLD et il y a des gens
qui ont besoin de ressources intermédiaires.
On croit beaucoup plus dans le continuum de services en voulant maintenir nos
gens le plus longtemps possible à domicile,
autonomes, travailler avec les proches aidants, mais, à un moment donné, il
faut être réaliste, ils vont avoir besoin de
plus de ressources en ressources intermédiaires ou encore en CHSLD. Et ça, tous les proches aidants qui ont vécu des
situations similaires savent qu'il peut arriver à un moment donné que la
personne se détériore ou ne puisse plus continue à demeurer à domicile.
Là, il faut avoir le support.
Donc, ce
n'est pas juste une question de mettre plus d'argent. Ça en prend plus, mais,
je pense, encore beaucoup plus, ça
prend également une réorganisation des services. Et également on croit dans
l'apport de toutes les professions dans
un travail interdisciplinaire qui, pour nous, est majeur. On croit dans
l'évaluation, dans la qualité, et, les principes du livre
blanc, ça fait longtemps qu'on les a endossés. Également, on ne croit pas,
comme le ministre, qu'il n'y a jamais rien qui a été fait. Il y a
beaucoup de choses qui ont été faites dans le passé, mais il en reste beaucoup
à faire, comme il y en aura toujours
beaucoup à faire. Même si on mettait en place une assurance autonomie, il va y
avoir encore du travail à faire, tout simplement parce que c'est un
grand réseau avec beaucoup de personnes qu'on doit s'occuper.
Vos
inquiétudes, également, je les partage. Vous parlez, dans votre mémoire, de désinstitutionnalisation,
qui… on est parti d'une bonne idée,
et tout le monde va vous dire que ça a été très difficile à mettre en place,
entre autres, le manque de
ressources. On associe de plus en plus, actuellement, l'assurance autonomie au
virage ambulatoire. C'est un virage
qui était nécessaire à faire, mais, quand ils sont arrivés pour le faire, il
faut se souvenir qu'à l'époque c'était encore dans une période où on visait le déficit zéro, et on n'a pas mis les
ressources. Moi, je l'ai vécu dans mon établissement, là, l'établissement se retrouvait avec 1 million
de déficit. On a congédié des infirmières, il y a eu des infirmières qui ont
été mises à la retraite, et ça nous a
pris 10 ans pour rebâtir le réseau, ce qui n'a pas été fait dans les autres
provinces, puis eux autres sont
arrivés avec des aussi bons résultats en termes de virage ambulatoire sans
faire ce virage, que j'appellerais catastrophique, à l'époque.
L'assurance
autonomie, pour moi, c'est à peu près destiné à faire comme le virage ambulatoire.
Puis ça, je le dis de façon consciente. Ce que je vois, actuellement,
qu'il est en train de faire… C'est que le ministre avait promis aux Québécois que l'assurance autonomie permettrait à
chacun de décider, avec l'allocation qui lui était faite, où il allait recevoir
ses services. Ce qu'on avait compris à ce
moment-là… que, si vous deviez aller en CHSLD, ça coûtait 90 000 $,
bien, théoriquement, la personne
aurait pu avoir 90 000 $ pour demeurer à domicile. Mais, en cours de
commission parlementaire, le ministre
est souvent revenu là-dessus, que ce n'était plus tout à fait comme ça.
Également, le choix des organisations, au début, quand on a rencontré le
syndicat, il nous a dit que c'était juste le public. Quand sont arrivées les
entreprises sociales, bien on a rajouté les
entreprises sociales. Puis, quand on a rencontré les résidences privées …Puis
là c'est son dernier mot qu'il a dit,
donc on espère que ça va être ça, c'est qu'il va y avoir également un choix
pour les résidences privées de choisir leur propre personnel, en autant
que la qualité soit présente, pour donner les services.
Donc, comme
vous avez vu, on est très méfiants par rapport à ce projet parce que ce qu'on
nous avait promis au début… puis on arrive vers la fin des commissions parlementaires,
c'est un projet complètement différent.
J'insiste sur
la question de la qualité. Et puis, à ma connaissance, également, votre profession… je
pense que les travailleurs
sociaux, ce sont tous des gens qui détiennent un bac à l'université.
• (10 h 40) •
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Sur cette question-là,
oui. Oui, oui, tout à fait, un travailleur social doit nécessairement avoir un
diplôme universitaire de premier cycle ou de deuxième cycle en travail
social.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
O.K. Et puis…
La Présidente (Mme Proulx) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Puis vos membres, ils sont présents dans tout le
réseau de la santé, tant dans les hôpitaux, les CHSLD et également au
niveau des CLSC.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M.
Leblond (Claude) : Oui, tout à fait. Alors, on est, je dirais, là, à la fois comme les médecins et les
infirmières — on
est une profession généraliste, là, de
base, là, au niveau des services sociaux — donc, présents auprès de toute la population, de toute catégorie d'âge présentant toute catégorie
de difficultés, dans tous les milieux, tous les types d'établissements, quelles que soient leurs missions, et également
dans les organismes communautaires et
en pratique autonome également, là.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci. Dans votre mémoire, à la page 19…
Parce qu'on comprend que, les principes, on veut tous les mettre en place, là, de garder les gens à domicile, la
qualité, les équipes interdisciplinaires, utiliser tous les professionnels selon leurs compétences. Par
contre, quand vous arrivez, à la page 19, vous dites : «La mise en
oeuvre et la pérennité d'un programme
aussi ambitieux que l'assurance autonomie nécessiteront des sommes — et j'insiste sur le mot — colossales.»
Avez-vous
quantifié, même grosso modo, là, approximativement qu'est-ce que c'était,
«colossales»? Est-ce que c'est 100 millions de dollars,
1 milliard de dollars ou 3 milliards de dollars?
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Je ne pense pas
que nous ayons quantifié, M. le député, je ne crois pas. Mais ce n'est pas
notre spécialité, là, donc on ne se mêlera
pas de ces quantifications-là. Peut-être qu'on aurait pu choisir un autre
vocabulaire, un autre adjectif, là, ou simplement ne pas préciser
l'adjectif, là. Ça aurait peut-être été plus sage, probablement, là.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Non, je pense que votre intuition était bonne. Vous
n'êtes pas obligés de mettre un
chiffre, là, mais je pense que le mot «colossales», là, c'est le bon mot, c'est
le bon mot. Puis on va juste faire un petit calcul pour vous dire, là…
Juste en passant, ce n'est pas qu'on ne croit pas qu'il faut mettre… pas mettre rien en place, mais, lorsqu'on fait quelque
chose, il faut avoir les moyens de le faire, et jusqu'ici on n'a pas eu de
cadre financier, sauf que le ministre nous dit juste : Le cadre financier,
c'est juste pour de la prédiction des dépenses futures, puis on va corriger ça.
Mais un cadre financier, là, c'est savoir combien ça va coûter, combien chacune
des personnes, avec un niveau SMAF
déterminé, va recevoir soit en argent, en services, si on veut savoir combien
la personne va contribuer, et puis à
la fin il faut savoir aussi, comme contribuables, les citoyens du Québec,
combien ça va nous coûter en impôt.
Ça, en passant, c'est nous autres qui l'a arraché à la première ministre à la
période des questions. Il n'était pas capable
de nous dire d'où viendrait l'argent. On parlait souvent d'une caisse
d'économie qu'on allait financer à partir d'une taxe spéciale, mais la première ministre, en période de questions, je
dirais, a craché le morceau puis elle a dit : En fin de compte, ça
va être pris dans les impôts. Mais ça, il faut que les Québécois le savent, ça…
le sachent.
L'autre
question que… Dans la même page, là, on n'en parle pas beaucoup, de ça, mais on
présuppose qu'il va y avoir un
système de gestion et d'information extrêmement efficace. Au niveau des
services sociaux, il existe, je pense, un
certain système, mais, à ma connaissance, il n'y a aucun système qui existe à
la Régie de l'assurance maladie du Québec pour mesurer les niveaux d'autonomie, tant au niveau social que
physique, des patients. À votre connaissance, au niveau de la RAMQ, il
n'y a pas rien qui existe à ce moment-ci?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond (Claude) : Pas à notre connaissance, effectivement. Bien, le défi de la
communication et de la gestion de
l'information dans notre réseau n'est pas simple à réaliser, là, et ce n'est
pas la première année, là, qu'on est face à ce défi-là, ça a été les
années antérieures également. Souhaitons que les outils seront en place.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, juste pour vous donner,
là, la crédibilité du projet, le 1er avril 2014, il va être mis en
place.
Vous
avez au moins 230 000 personnes qui reçoivent des soins à domicile,
vous avez 40 000 personnes qui sont dans des CHSLD et vous
avez probablement, là, 12 000 ou 13 000 personnes qui sont dans
des RI. Arrondissons, là : il y a
275 000 personnes qui vont avoir besoin d'une évaluation SMAF, je
vais avoir 275 000 personnes qui vont avoir besoin d'un
gestionnaire de cas. Oublions les CHSLD, les RI, là, il y a
230 000 personnes qui vont avoir besoin de gestionnaires de cas, et ces gens-là vont devoir être codifiés à la
RAMQ, au moins pour les soins à domicile, pour savoir c'est quoi, l'allocation qu'on devra leur faire.
Seulement que développer un système comme ça, là, puis je l'ai déjà dit pour le Dossier santé Québec, ce n'est pas
connecter deux fils ensemble, il faut développer le programme, il faut
développer également comment va
rentrer l'information, il faut former le personnel, il faut avoir des
ordinateurs pour le gérer. Écoutez, je
vais dire un chiffre, là, je ne sais pas si le ministre a fait
l'évaluation — s'il a
fait l'évaluation, je lui demanderais de corriger mon chiffre, là — ça va être 150 et 300 millions de
dollars dans le système d'information à mettre en place. Ça fait qu'il nous donnera les chiffres. Si ce n'est
pas ça, on verra. Puis, je veux vous dire, il faut que ça fonctionne, le
système, là, sinon ça ne fonctionne pas, mais il faut avoir mis ça en
place pour le 1er avril.
Juste
au niveau des gestionnaires de cas, mettons qu'on ne s'entend pas sur le
chiffre un sur 40, parce qu'il y a quand
même des cas qui sont plus sévères que d'autres, d'autres plus légers, mais,
mettons, approximativement, là, qu'il y a 40 personnes qui sont prises en charge pour un gestionnaire de cas,
vous avez 200 000 personnes — puis je vais diminuer un peu le chiffre, c'est plus facile à
calculer — vous
avez 200 000 personnes qui ont besoin d'un gestionnaire de cas, dont
un gestionnaire de cas par 40 personnes. Rapidement, là, savez-vous
combien ça prend de gestionnaires de cas?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Bien, je ne l'ai pas compté dans ma tête.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je vais vous donner la réponse.
M. Leblond
(Claude) : Je me disais que vous alliez me le dire, là.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Ça prend 5 000 gestionnaires de
cas, O.K.?
M. Leblond
(Claude) : Oui, mais je n'ai pas osé.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Un travailleur social ou une infirmière, salaire moyen… Parce que
ça, en passant, c'est des infirmières
cliniciennes. Donc, généralement, ça va être des bachelières qui vont être des
gestionnaires de cas. Le salaire moyen, ça peut être combien pour un travailleur
social qui a un bac…
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …avec un peu d'expérience, parce que
ça va vous prendre des gens qui ont de l'expérience?
M. Leblond (Claude) : …moyen doit être aux alentours de… oui, aux alentours de 60 000 $, j'imagine, moyen, là,
médian, là.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bon. Écoutez, je me suis trompé…
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …je me suis trompé dans mon chiffre, j'avais pris 40 000 $. J'avais pris 40 000 $
multipliés par
5 000 gestionnaires de cas, mais je vais prendre votre chiffre, je
l'aime plus. 60 000 $ multipliés par 5 000 gestionnaires
de cas, ça coûte combien dans le réseau de la santé?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
M. Leblond
(Claude) : Allez-y, M. le député.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Autour de 300 millions?
M. Leblond
(Claude) : Probablement.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Ça fait qu'il va falloir qu'on les ait, ces chiffres-là, parce que
je suis d'accord qu'au début,
le 1er avril, je ne m'attends pas qu'il
y ait 5 000 gestionnaires de cas, mais, à la fin, il va falloir les
avoir, ces gestionnaires de cas là,
selon le programme d'assurance autonomie. Donc, vous voyez qu'on commence à
avoir des factures qui sont salées.
Ça,
en passant, on n'a pas traité un patient encore, on n'a pas pris en charge un
seul patient dans le réseau de la santé,
là. Il n'y a aucun sou de ce que je viens de vous dire là qui va être donné…
directement des soins aux patients. Quand je dis au ministre : Ça prend plus d'argent, mais que ça prend plus
que ça, là, ça prend aussi une logique d'organisation qui va faire que… comment se fait-il qu'on va
mettre autant d'argent avant même qu'on ait traité un patient, et sans compter
que, pour les quatre prochaines années, il
va y avoir 100 millions de dollars de plus de mis dans l'assurance
autonomie? Moi, je fais mon calcul,
là, il n'y a pas grand argent qui va dans les… Juste mettre la structure en
place, la bureaucratie qui va être
mise en place, là, il a déjà épuisé l'argent des trois ou quatre prochaines
années. Ça, c'est du raisonnement qu'on
va devoir faire. C'est ça, l'objectif aussi de faire une commission
parlementaire. Il faut qu'on les pose, ces questions-là, puis il faudrait que le ministre nous donne les
réponses. Ce n'est pas juste de dire que ça va coûter plus cher plus tard.
Comment vous allez résoudre ça? Il faut
améliorer la performance du réseau de la santé. Je le disais tantôt, plus on va
garder les gens longtemps à domicile, meilleur
ça va être organisé, et plus on va avoir des gens qui vont s'occuper des
gens directement à domicile. Ce qu'on a
besoin, on a besoin de personnes, de préposés qui vont s'occuper du patient. On
a besoin également de gens qui vont
donner des services. Est-ce qu'à ce moment-là il faut, pour avoir ces gens-là,
avant, avoir tout un grand système
d'information, 5 000 gestionnaires de cas, l'évaluation qui va être faite?
Ça, c'est des questions que des gens
doivent poser. C'est notre rôle d'opposition. Puis, je pense, les médias et
même vos organismes, avant de donner
un appui inconditionnel à un virage ambulatoire manqué ou encore à une désinstitutionnalisation
manquée, il faut avoir ces réponses-là.
Si
jamais le cadre financier ne correspond pas à ce qui est attendu, c'est-à-dire
l'argent n'est pas au rendez-vous, que
la transformation va prendre des années et qu'on met beaucoup d'argent ailleurs
que dans les soins cliniques, êtes-vous prêts à revoir votre position
pour appuyer l'assurance autonomie en, je tiens à le dire, en mentionnant que,
oui, c'est important les principes de l'assurance autonomie, du virage vers les
soins à domicile?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond.
• (10 h 50) •
M. Leblond (Claude) : Probablement qu'on le serait, tout comme il faudrait revoir aussi ce
que je vous contais tantôt, là, par
rapport à l'appui que nous avions donné à la création des CSSS au Québec. Si on
le refaisait aujourd'hui, je
nuancerais beaucoup plus parce qu'au-delà de la volonté et des objectifs qui
étaient visés par le projet de loi il s'est
passé autre chose. Est-ce que
ça a dépassé les garde-fous qu'on avait nommés? Alors, aujourd'hui, on donne un appui à ce projet en disant : Bien, par contre,
il y a des choses sur lesquelles il faudra faire attention.
Notre
mandat d'éclairer le législateur par
rapport à des choix qui peuvent être faits en lien avec l'exercice de nos
professions et l'intérêt du public, là, par
rapport aux services sociaux à recevoir, bien, nous amène à dire : C'est
un projet qui est intéressant de par
ses objectifs. Il permettra d'atteindre des éléments dans la mesure où
effectivement on fait aussi attention
à ça, ça, ça, et ça et où effectivement on prévoit qu'il y aura une phase
transitoire. Il y aura également nécessité d'avoir… Si
on veut vraiment permettre aux gens de faire des choix, il faudra que
l'ensemble des ressources soient présentes.
Et dans des secteurs donnés et dans des régions, particulièrement les régions
rurales, il sera sans doute difficile d'avoir
la variété des ressources, mais il faudra les avoir, sinon on ne sera pas face
à un réel choix. Alors, il y a tous ces éléments-là.
Alors, notre
éclairage est en lien avec une proposition donnée, à un moment donné, avec des
limites, là, qu'il peut y avoir, là, quant à
l'atteinte de ces objectifs-là si effectivement l'ensemble des éléments ne sont
pas mis en place, là.
La
Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui. Dans un autre sujet, c'est
la tarification pour l'usager. Comment vous voyez ça en termes d'applicabilité, là, le fait de charger à
l'usager une contribution? La contribution va être en fonction du revenu.
Et ce qu'on voit également, c'est que de garder
quelqu'un en soins à domicile, c'est entre 20 000 $ et
30 000 $. De ce qu'on comprend du projet, c'est : lorsque
vous allez avoir un certain revenu, à ce moment-là, vous ne serez soit pas
accessible à avoir l'allocation ou l'allocation va être diminuée.
C'est quoi, votre
perception, par rapport à la limitation de l'assurance autonomie, par rapport à
ça?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Gautier.
Mme
Gautier (Lyse) : Disons que ça, c'est un sujet assez délicat parce que
la contribution en fonction du revenu risque de faire en sorte que
certains vont se priver de services à cause justement qu'ils doivent
contribuer. Puis ces personnes-là, bien ça
va être les personnes les moins bien nanties ou les personnes de la classe
moyenne… vont faire en sorte, dans le
fond, qu'ils ne recevront pas les services que leur état de santé demande.
Alors, disons qu'il y a un enjeu assez important.
Bon, on sait très bien qu'il y a des gens qui sont maintenus à domicile qui ont
des problèmes, au niveau cognitif, assez
importants. Alors, ce sera les proches qui prendront cette décision-là. On peut
penser que certains proches privilégieront
de ne pas recevoir les services, parce qu'ils doivent les payer, et que la
personne, au bout du compte, bien sera dans un état de vulnérabilité un
peu plus grande.
Alors,
disons que c'est un enjeu assez important sur lequel il faudra se pencher
sérieusement. Ça m'amène aussi à peut-être
faire le lien avec les argents qui sont déjà donnés, les crédits d'impôt qui
sont déjà octroyés aux personnes. Est-ce qu'on va abandonner ces services-là aussi, c'est-à-dire, ces
allocations-là aussi? Parce que ça risque de faire le même effet que si la personne doit contribuer pour le
service. Alors, disons que c'est peut-être… En tout cas, il y a des enjeux très
importants pour faire en sorte qu'on ne
place pas les personnes en besoin de services dans une situation de
vulnérabilité plus grande qu'ils ne le sont déjà.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Parce que, si on comprend le
raisonnement de l'assurance autonomie, si vous avez un besoin de 20 000 $ de services,
advenant le cas que vous avez un certain niveau de revenus, hein, puis on sait
qu'au Québec on commence à être riche
à 40 000 $, 50 000 $, ça voudrait dire qu'au lieu de faire
une allocation de 20 000 $ soit
en services ou en argent, à ce moment-là, elle pourrait diminuer. On pourrait
vous donner seulement que 5 000 $. Ça veut dire, l'autre
15 000 $ viendrait de la poche de la personne.
C'est comme ça que
vous comprenez également l'assurance autonomie, le projet qui a été mis en
place?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Gautier.
Mme
Gautier (Lyse) : On peut le comprendre de cette manière-là, mais
disons qu'il ne faudrait pas le comprendre de cette manière-là.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Il ne faudrait pas que ce soit ça?
Mme Gautier
(Lyse) : Il ne faudrait pas que ce soit ça.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : O.K.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, peut-être une dernière
question avant de passer la parole à ma collègue. On a parlé tantôt… juste en gestionnaires de cas, c'est
5 000 personnes de plus, 300 millions de dollars, à
60 000 $. Aviez-vous les ressources
au niveau des travailleurs sociaux pour être capables de fournir, peut-être sur
les 5 000 gestionnaires de cas, 1 500 ou
2 000 personnes?
M. Leblond (Claude) : C'est comme si on faisait actuellement… Il me semble, en tout cas, dans
ce que j'entends, c'est comme si on
faisait abstraction du fait qu'il y en a déjà, des travailleurs sociaux
gestionnaires de cas. Il y en a déjà, des
évaluations systématiques des besoins des personnes en perte d'autonomie, là.
On ne part pas de zéro, là, pour arriver à ce niveau de besoins là, là. Donc, il y a déjà des choses en place,
là. Est-ce qu'il y a 1 500 ou 2 000 travailleurs sociaux
qui sont déjà gestionnaires de cas? Peut-être.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M. Leblond (Claude) : Il y en a 4 500, là, qui interviennent, là,
auprès des personnes âgées en perte d'autonomie, là. Alors, parmi ces 4 500 là, il y en a. Et,
dans la plupart des établissements, on a vu que c'était déjà mis en place, là,
ce type d'organisation de services,
là. Donc, je ne serais pas étonné qu'il y ait déjà, effectivement, là,
1 500, 2 000 travailleurs sociaux gestionnaires de cas au
Québec, là.
La
Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : C'est un calcul qu'on doit
faire, puis je suis content que vous mentionniez que ça se fait déjà. On y croit beaucoup, dans les
gestionnaires de cas. Quand on va généraliser l'assurance autonomie à la
hauteur que le ministre parle, je ne
suis pas sûr qu'on va avoir l'argent, puis, à ce moment-là, ça va… Je ne suis
pas sûr qu'on va avoir des ressources, mais ça fait partie de nos
discussions.
Je vais passer la
parole à ma collègue.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Leblond,
Mme Gautier, merci beaucoup pour votre présentation.
Vous
avez piqué ma curiosité parce qu'à votre recommandation cinq vous portez une
attention particulière aux régions
dévitalisées. Je dois vous dire que je suis heureuse qu'enfin on aborde la
question parce que je doute beaucoup de la capacité de mettre en place
l'autonomie pour tous en avril prochain ou au printemps prochain de façon
équitable sur le territoire. J'habite
et je représente une partie… je représente plusieurs municipalités
dévitalisées. Je sais que ces municipalités-là
et les gens qui y habitent font face à des défis d'accessibilité aux services,
d'accessibilité, aussi, en fait de
transport pour se rendre à leurs rendez-vous. On a des citoyens qui sont
isolés. Et je me demandais si vous avez répertorié ou vous aviez fait
état des besoins de base.
Qu'est-ce
qui pourrait constituer, là, pour les régions, les communautés rurales du
Québec des services de base sur
lesquels on devrait absolument pouvoir compter pour les fins de la mise en
place de l'assurance autonomie? Donc, qu'est-ce qui est essentiel dans
une communauté afin qu'on puisse réellement parler d'une autonomie pour tous?
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Leblond, il vous reste environ une minute.
M. Leblond
(Claude) : Non, mais ça serait superintéressant de le faire. Donc,
non, ça n'a pas été fait encore.
Notre
réflexion est en lien avec des réflexions qu'on a faites, là, depuis les
dernières années. Et je rappellerais, là,
la commission, là, sur les conditions de vie des personnes âgées, là, où on
avait également référé à la question de la dévitalisation de certaines communautés. Mais on a demandé effectivement
à ce qu'il y ait des paniers de services nécessaires et minimaux partout au Québec, là. Il faudrait peut-être
revoir si on avait été plus loin que ça à ce moment-là. Mais, à cette
occasion-ci, on n'a pas fait, là, cet inventaire-là, mais ça serait très
intéressant de le faire pour s'assurer effectivement
que ça puisse être mis en place. Et ça nécessite également la collaboration des
autres secteurs de… C'est toute la
notion d'intersectorialité, là, en lien avec le transport, avec les
municipalités, l'éducation, etc., là, les loisirs aussi.
La Présidente (Mme
Proulx) : Merci beaucoup, M. Leblond.
Alors,
le temps étant maintenant écoulé, je vais suspendre les travaux quelques
instants et j'invite le prochain groupe à prendre place.
(Suspension de la séance à 11
heures)
(Reprise à 11 h 2)
La
Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux. Je souhaite la
bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de
bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La
parole est à vous.
Protecteur du citoyen
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Mme la Présidente, merci. Je suis accompagnée, à ma droite, du
vice-protecteur, M. Claude Dussault,
et, à ma gauche, du conseiller expert en santé, M. Michel Clavet, et je suis
Raymonde Saint-Germain, Protectrice du citoyen.
Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, je vous remercie de votre
invitation à commenter le livre blanc sur la création d'une assurance
autonomie. Nous convenons tous que le vieillissement de la population québécoise
et la hausse conséquente de besoins de soins et de services viennent mettre une
pression insoutenable sur le système en place. L'investissement dans les
soins à domicile est une voie judicieuse afin de porter assistance aux
personnes en perte d'autonomie, à
leurs proches aidants, en plus de contribuer à mieux utiliser les ressources
publiques d'hébergement, comme les CHSLD et les ressources intermédiaires,
et d'éviter des hospitalisations.
Le Protecteur du citoyen est pleinement conscient des défis budgétaires
et organisationnels liés à cette réforme. Le livre blanc suggère de nouvelles façons de
faire quelquefois en rupture avec une certaine conception de la prestation
publique de soins et de services de longue
durée. Le recours accru à des contrats avec des ressources privées ou communautaires reconnues afin de dispenser les
services à domicile, l'ouverture faite à une tarification de services que
couvre aujourd'hui le régime public,
la proposition de constituer une caisse dédiée à l'assurance autonomie sont
autant d'orientations qui viennent modifier le profil du système
public de soins de santé et de services sociaux. Le Protecteur du citoyen considère qu'il
s'agit là de choix politiques importants. Je ne m'oppose pas en soi à ces orientations,
j'ai cependant des préoccupations quant à leurs probables
conséquences, que je souhaite partager avec vous aujourd'hui. Nous avons appuyé notre réflexion sur certains
principes reconnus. Ces principes sont l'universalité de la couverture publique,
l'équité d'accès aux services, l'accessibilité réelle et la qualité de ces
services, la solidarité dans le financement, la transparence du régime et
l'imputabilité de ses acteurs.
J'ai jugé utile, dans
certains encadrés de notre mémoire, de vous présenter des cas vécus, afin
d'illustrer de la façon la plus concrète
possible l'impact humain des décisions organisationnelles et budgétaires qui sont prises. Ces exemples me ramènent au constat que je vous partageais en
septembre dernier, à l'occasion de la présentation de mon rapport annuel.
Dans plusieurs secteurs, dont celui des
services à domicile, l'écart se creuse entre l'offre de services annoncée sur
papier et celle qui est réellement
disponible sur le terrain. Je pense, par
exemple, à la pratique qui établit
des plafonds d'heures de service, peu
importent les besoins évalués de la personne. De telles pratiques génèrent beaucoup
d'insatisfactions chez les citoyens, et celles-ci sont généralement
fondées. La présente réforme doit être l'occasion d'inverser la tendance.
Ma
première préoccupation à
l'égard de la réforme proposée
concerne la qualité des services qui seront dispensés. Déjà, le réseau public peine à assurer le contrôle adéquat de la qualité de ses propres services.
Dans le contexte où l'on compte faire
davantage appel, dans une large mesure, à des ressources privées et
communautaires pour offrir des services de soutien à domicile, une attention particulière doit être portée au
contrôle de la qualité. Je vise des processus rigoureux sans être trop lourds bureaucratiquement pour
assurer l'accréditation ou la certification efficaces des différents types de
ressources qui seront appelés à dispenser
ces services à domicile. Le ministère de la Santé et des Services sociaux doit
mener à terme son projet de politique d'assurance qualité sur les soins et les
services. C'est un préalable à la mise en oeuvre
adéquate du futur régime d'assurance autonomie. Pour la protection et le
respect des droits de tous les usagers, le régime d'examen des plaintes du réseau doit de plus être étendu à
tous les services donnés à domicile, quel que soit leur dispensateur.
Ces divers moyens sont autant de conditions de respect d'un principe
fondamental : peu importe le mode de
dispensation des services qu'il choisit de déployer, l'État doit demeurer
imputable et responsable de leur mise en oeuvre et de leur qualité.
Je
vous fais part d'une autre préoccupation. Selon notre analyse, le livre blanc
est conçu d'abord et avant tout pour répondre
aux besoins des personnes âgées en perte d'autonomie. Or, on souhaite en
élargir l'application à d'autres groupes, dont les personnes handicapées plus jeunes. Il faut s'assurer de bien considérer
les besoins de ces dernières notamment en matière d'insertion sociale et
professionnelle. Dans notre mémoire, nous attirons votre attention sur certains
effets non souhaitables de l'utilisation de l'outil d'évaluation des besoins,
l'Outil d'évaluation multiclientèle. Il ne tient pas explicitement compte de cette notion fondamentale d'insertion sociale et
professionnelle des personnes handicapées. La compensation des limitations fonctionnelles de ces personnes soulève des
enjeux cliniques, éthiques mais aussi légaux. Le respect de leur droit à l'égalité doit être au coeur de toute
réflexion à ce sujet. Un dernier mot plus général sur l'évaluation des
besoins. Même si l'utilisation d'un outil standardisé est pertinente, celui-ci
ne doit jamais être appliqué de façon automatique sans que le jugement
professionnel et clinique des intervenants soit pris en compte.
Je
souhaite maintenant faire quelques observations sur l'implantation de la
réforme projetée. Celle-ci doit se faire de façon ordonnée et en toute équité, et pour cela une période de
transition suffisante est nécessaire. J'ai des inquiétudes à ce sujet. L'échéancier projeté m'apparaît peu
réaliste compte tenu du déséquilibre que l'on constate déjà entre l'offre et la
demande de services à domicile dans toutes
les régions du Québec. Avant que les CSSS commencent à se retirer de la dispensation directe de certains services, il faut
s'assurer que les partenaires privés et communautaires sont qualifiés pour
prendre la relève et qu'ils sont prêts à le
faire. Est-ce vraiment possible que tout cela soit concrètement fait d'ici
avril 2014? Un désengagement hâtif des CSSS risquerait d'engendrer des
bris dans la continuité des services à domicile. Je suis d'autant plus sensible à cette situation que nous avons
constaté dans plusieurs
de nos enquêtes que certains CSSS ont déjà
commencé à modifier leurs offres de services
dans le sens présenté dans le livre blanc. Cela m'apparaît prématuré. Un
rappel doit être fait dans tout le réseau. Avant l'adoption d'une loi et la
diffusion de la nouvelle politique-cadre qui l'accompagnera,
c'est toujours la politique de soutien à domicile de 2003 qui continue de
s'appliquer. Les citoyens sont en droit de connaître les normes en
vigueur et de les voir appliquées en toute équité.
Je
terminerai mes observations sur la délicate et complexe question
du financement du régime. J'insiste sur l'importance de connaître le cadre financier qui doit être soumis à la discussion
publique. Les modalités de financement de la caisse autonomie doivent respecter
les principes d'équité intergénérationnelle et de justice distributive.
Confier
la gestion de la caisse autonomie à un organisme public crédible sous la forme
d'un fonds en fiducie, en plus
d'assurer la transparence de sa gestion, devrait favoriser la confiance de
la population autour d'un élément fondamental : la conviction que l'argent ainsi amassé ne servira pas à
d'autres fins que celle de dispenser des services de soutien à domicile de
qualité à toutes les personnes qui les requièrent.
Reste
alors la question de la tarification. L'appui du Protecteur du citoyen au
régime d'assurance autonomie qui sera
proposé reposera sur un principe incontournable : l'incapacité financière
des usagers à contribuer ne doit jamais être un obstacle à l'obtention des services. Pour respecter ce principe, il
faudra tenir compte non seulement de la tarification, mais aussi, en particulier pour les faibles
salariés, de l'effort fiscal supplémentaire qui sera exigé d'eux pour
constituer la caisse autonomie.
L'addition de ce fardeau fiscal à une éventuelle tarification risque de peser
très lourd pour ces personnes,
notamment. Les paramètres de la tarification doivent donc être explicites,
détaillés et justes pour les citoyens de toutes les régions du Québec.
En ce sens, j'estime que le tarif horaire des entreprises d'économie sociale en
aide à domicile devrait être le même partout
au Québec et que les augmentations de tarifs devraient être encadrées par des
normes et compensées par un ajustement de l'exonération pour les
personnes moins nanties financièrement.
Vous l'aurez
constaté, c'est avec ouverture mais également avec prudence, en raison des
grands défis qui se présentent, que j'envisage les prochaines étapes de cette
importante réforme, et je vous assure de la collaboration du Protecteur du
citoyen pour la suite de vos travaux. Je vous remercie.
• (11 h 10) •
La
Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup pour votre
présentation. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec
le groupe formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Hébert :
Merci beaucoup, Mme Saint-Germain, M. Dussault, M. Clavet, merci de votre
ouverture et de votre présence, c'est ce que nous apprécions de votre
rôle.
Je voudrais,
d'entrée de jeu, aborder avec vous ce qui a été votre premier point,
c'est-à-dire la qualité. Comme vous
le savez, actuellement, la gestion publique des services de soutien à
l'autonomie échappe dans plusieurs secteurs, notamment les entreprises
d'économie sociale, les résidences privées. L'assurance autonomie souhaite
retrouver une gestion publique, c'est-à-dire
de s'assurer de critères, de standards de qualité et même de mettre en place
des processus d'accréditation de tous les prestataires, qu'ils soient
publics, communautaires ou privés.
En ce sens, est-ce que cette orientation de
l'assurance autonomie vous agrée?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Dans la mesure où ces processus
seront connus, accessibles, efficaces et vraiment indépendants aussi et
qu'ils seront, dans les faits, dotés des ressources nécessaires, je pense que
c'est une orientation et une volonté qui
sont très pertinentes, d'autant plus pertinentes qu'il faut bien reconnaître le
risque, entre autres, pour les
services à domicile, de la vulnérabilité accrue de personnes qui souvent seront
seules ou de personnes qui ont un
aidant naturel lui-même très âgé et qu'il faudra manifestement bien soutenir.
Et souvent ces personnes peuvent craindre
des représailles, vont ignorer leurs droits, ne seront pas accompagnées, d'où
l'importance accrue du contrôle de la qualité en amont et d'une capacité
de surveillance de l'exercice de ces services.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, ce contrôle de qualité devrait prévoir les normes précises sur la
formation des personnels et professionnels, peu importe quel est le type
de prestataire dans le réseau?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain.
Mme Saint-Germain (Raymonde) :
Oui, Mme la Présidente, des standards de qualité effectivement pour la
formation du personnel, l'accréditation des organismes, l'encadrement aussi de
la tarification et un encadrement de tarification
qui devrait aussi concerner les résidences privées pour aînés où il y a quand
même des risques, dans le présent contexte,
qu'il y ait des doubles facturations ou des doubles tarifications. Donc, tout
ça est à regarder, autant sur le plan de la qualité des services
eux-mêmes que de l'équité financière et du contrôle de cette qualité.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Je vais continuer dans l'équité financière. Vous savez qu'actuellement les
services publics couvrent à peu près 15 % des besoins des personnes
en soutien à domicile, et, comme vous l'avez souligné dans vos rapports d'activité, ce 15 % là est variable de façon
importante : juste dans un territoire qu'est la Montérégie, ça va de
6 %, dans certains territoires, jusqu'à 33 %.
Alors, il y a
une variabilité dans la couverture publique des services de soins à domicile.
Évidemment, le reste, c'est assumé par la personne soit en nature — puis
il y a des gens qui ont fait des blagues, là, dans les commissions antérieures — mais par le proche aidant ou en espèces par
l'achat de services, puis on estime donc qu'entre 2 000 $ et 5 000 $ sont déboursés par les personnes
souvent en soins à domicile. Alors, il y a une iniquité dans la couverture
publique. Nous voulons ramener, par
l'assurance autonomie, une équité, donc, avec une allocation de soutien à
l'autonomie qui est basée sur les
besoins de la personne et nous voulons être capables de moduler cette
allocation en fonction de la capacité de
payer, c'est-à-dire que des gens qui ont plus de capacité de payer on module
l'allocation, et, les gens qui n'ont pas la capacité de payer, on
augmente l'allocation pour qu'ils puissent recevoir des services davantage.
Alors, cette
modulation-là, cette façon de moduler, plutôt que de tarifer, parce que vous
utilisez le mot «tarification», là,
cette façon de moduler l'allocation en fonction de la capacité de payer, est-ce
que c'est une avenue qui semble intéressante?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain.
Mme Saint-Germain (Raymonde) :
Alors, c'est ici que la prudence va s'exprimer, Mme la Présidente.
Sur le principe, je pense que les principes sont
clairs, il faut l'équité intergénérationnelle, il faut la justice distributive, il faut que jamais l'incapacité de payer
ne soit un obstacle à l'accès aux services. Présentement, dans l'état du livre blanc, c'est difficile de voir quelle
sera la hauteur réelle des contributions qui seront exigées et, qu'on les
appelle tarifs ou autrement, c'est
très difficile d'estimer, selon leur capacité de payer, quels seront les coûts
pour les contribuables. C'est pour ça
que moi, j'appuie ce principe d'une solidarité dans le financement, le principe
qu'il y ait, selon la capacité de
payer et l'utilisation des services, une gradation. Mais c'est difficile
d'aller au-delà présentement et c'est pourquoi nous avons fait des
recommandations qui portent précisément sur l'importance, avant la mise en
oeuvre, que le ministère poursuive ses
travaux, reprécise les modalités, les conditions et la hauteur du financement,
pour que ce soit plus clair, et refasse des consultations sur cette
dimension-là en particulier.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Il y aura sans doute des consultations sur le projet de loi, alors nous serons
en mesure de revenir dans une prochaine étape.
Vous
nous parlez des entreprises d'économie sociale, et il y a un élément de votre
mémoire sur lequel je veux vous
entendre parce qu'on entendra les groupes cet après-midi nous dire un peu
l'inverse. Vous remettez en question le monopole, si je peux dire, des entreprises d'économie sociale dans
certaines régions. Vous voulez qu'on ouvre les services à une multiplicité de prestataires, notamment dans
l'économie sociale. J'aimerais ça que vous précisiez votre pensée là-dessus.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : En fait, Mme la Présidente, notre
pensée est que le recours soit à des entreprises
privées ou à des organismes d'économie sociale… en soi, nous n'avons pas
d'objection. Par contre, ce que nous
trouvons très important, c'est qu'il y ait, d'une part, formation de ces
personnes, préparation de guides de bonnes pratiques — je le
disais tout à l'heure — évidemment, contrôle a priori, surveillance pendant les services
et un régime donc de contrôle et de
surveillance de la qualité. Mais également ce qui nous apparaît très important,
c'est que ces entreprises-là, dans un contexte de transition, ne soient
pas, du jour au lendemain, appelées à entrer en exercice sans qu'il y ait eu
vraiment un processus d'accréditation ou de certification qui soit sérieux et
au moment où les CSSS se délesteraient de ces responsabilités-là.
Donc, la
préoccupation, pour nous, elle est davantage de s'assurer que les organismes
qui seront retenus, les personnes qui seront
choisies — dans
certains cas, ce seront des aidants naturels ou des proches des personnes
âgées — que
ces personnes-là soient qualifiées, soient
en mesure d'assumer les services pour lesquels ils recevront une rémunération
et que tout ça ne se fasse pas dans le
désordre. Mais, sur le principe des entreprises d'économie sociale, nous
n'avons pas en soi d'objection, mais
ce n'est pas en soi non plus, sans vérification autre et sans préparation, une
garantie de qualité. Alors, c'est le sens de notre réflexion.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
• (11 h 20) •
M.
Hébert : Je voudrais tout de suite préciser un point, là. Il
n'est pas du tout question, dans l'assurance autonomie, d'un transfert d'activités des CSSS vers les
entreprises d'économie sociale, là. On ne parle pas de ça du tout. On parle
d'un ajout de prestataires, parce qu'il y a
des besoins à combler, et une invitation aux entreprises d'économie sociale de
faire partie des prestataires, mais il n'y a
pas de transfert des auxiliaires familiales ou des auxiliaires sociales et de
santé vers des entreprises d'économie sociale.
Je
vous rassure là-dessus, là, il n'est pas du tout question d'opérer un transfert
de la sorte. Mais il y a, dans le projet d'assurance autonomie, l'accréditation d'entreprises d'économie sociale
qui pourront être disponibles pour donner des services à des personnes.
Alors, je vous rassure là-dessus.
Mais
ma question était sur une partie de votre mémoire
où vous dites : L'usager actuellement doit obligatoirement faire appel à l'entreprise d'économie sociale oeuvrant sur son territoire, ce qui entraîne une certaine captivité de la
clientèle et contrevient à la liberté
de choix du prestataire. J'aimerais ça vous entendre là-dessus et sur les
moyens de pouvoir concilier la désignation d'entreprises d'économie
sociale sur un territoire et le libre choix du prestataire.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, le principe est le suivant, c'est que ce sont quand même
des soins et des services de… plutôt,
des services de proximité, et la réserve que j'émets, c'est qu'il ne faudrait
pas que seules des entreprises d'économie
sociale accréditées deviennent
obligatoirement les personnes qui donneraient les services à domicile.
En d'autres termes, le libre choix d'une personne qui pourrait être qualifiée, qui
pourrait être un proche aidant, doit demeurer pour la personne qui
reçoit les services à domicile. Et, dans ce sens-là, et je comprends que c'est
aussi l'esprit du livre blanc, dans ce sens-là, les personnes qui recevraient,
par exemple, un chèque emploi-services pourraient choisir de le verser à un aidant naturel ou à un proche
de leur choix et qui serait qualifié. Je ne sais si ma compréhension est
bonne, mais c'est la compréhension que nous avons dans ce contexte.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : Encore là, certains groupes nous ont recommandé de
conserver le chèque emploi-services. Comment on peut concilier
l'atteinte de la qualité et des normes de formation de ce personnel avec
l'utilisation du chèque emploi-services, à votre avis?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : Encore là, c'est dans le rôle, d'une part, de
surveillance qui devra être joué — contrôle de la qualité, a priori, oui, mais
rôle de surveillance — et, dans ces situations-là, et ce seront des situations réelles, ce sont souvent des aidants naturels ou
des personnes qui déjà offrent, à la satisfaction, des services, par exemple,
d'aide à la vie domestique. Alors, on est
dans un autre ordre de priorité. Et, si la personne qui est la première
concernée est satisfaite des services
et est en mesure de dire : Moi, je continue de le faire et qu'au niveau
d'un contrôle de la qualité il n'y a
pas de difficulté, je pense que ça devrait être accepté. Et c'est à cela que je
référais, entre autres, lorsque je disais, Mme la Présidente, qu'il faut éviter
d'avoir une approche, et des outils, et des exigences qui seraient trop
bureaucratiques, surtout
dans un contexte où il y aura quand même — je pense qu'il faut le reconnaître — une transition qui sera importante à gérer et où il n'y aura pas nécessairement toutes
les ressources requises pour répondre immédiatement à l'ensemble des besoins.
Alors,
c'est cette forme de souplesse avec, oui, des mesures qui peuvent être prises
pour avoir des assurances, en tout
cas, de qualité et de protection ou de sécurité des personnes, mais, à mon
avis, tout ne pourra pas se jouer, là, de manière formelle dès le début, et c'est pourquoi l'importance… Et puis
je suis heureuse d'entendre le ministre souligner qu'il n'y aura pas de désengagement des CSSS dès
le début. Je vous dis que ma compréhension était qu'il y avait une possibilité d'un tel désengagement. Alors donc, ça
viendra contribuer à permettre cette période de transition. On a utilisé
une expression, qui s'appelle «modèle
collaboratif», pour cette période de transition. Ce que ça signifie, au fond,
c'est que les ressources qui agissent
déjà devraient demeurer et travailler en collaboration et progressivement, au
fond, moduler l'offre de services en
fonction de la capacité des nouvelles ressources de prendre le relais. Je pense
que ce sera vraiment important. On ne
pourra pas cesser un service du jour au lendemain sans avoir cette garantie,
là, de collaboration et de transition progressive.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous nous suggérez aussi de prévoir un mécanisme de
recours pour l'évaluation des besoins qui ne serait pas satisfaisante
aux yeux des usagers. Quel est le type de recours que vous nous suggérez de
prévoir?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Là-dessus, on a utilisé le mot
«contestation» qui apparaît dans la littérature scientifique, mais j'aime bien un mot qui, quant à moi, est plus
positif, qui s'appelle le mot «révision», voire qu'un usager ne serait
pas satisfait de son évaluation.
Il
existe déjà des réseaux, là, de services intégrés pour les personnes âgées. Il
y a dans les CLSC déjà des groupes de
cliniciens qui pourraient peut-être être appelés déjà au moment où l'évaluation
est faite, avant que le plan de services, ou plan d'intervention, s'entame,
pourraient déjà recevoir ces demandes de révision là et, au besoin, faire des
ajustements. On a vu que ça se
faisait ailleurs, et ça permettrait d'agir
a priori plutôt qu'a posteriori. Et les ressources sont déjà quand même, dans ce cas-là, disponibles. C'est sûr qu'il y aurait
une charge de travail accrue, mais on ne parle pas de former des personnes, de créer une bureaucratie, d'ajouter de
nouvelles structures. Alors, ça nous semblait une approche qui est intéressante.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous nous soumettez une suggestion au niveau du régime d'examen des plaintes. Vous
nous dites : Il faudrait que le
régime d'examen des plaintes s'applique aussi aux autres prestataires, qu'ils
soient privés associatifs, privés lucratifs
ou communautaires. Actuellement, le commissaire régional aux plaintes n'a pas
juridiction sur ces prestataires-là?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : Le commissaire régional aux plaintes et le
Protecteur du citoyen, en deuxième niveau, n'ont pas compétence présentement
sur les ressources privées qui ne sont pas certifiées, n'ont pas compétence non plus sur des organismes sans but
lucratif, sauf dans certaines situations particulières où il y a une entente
formelle avec une instance du réseau de la
santé et des services sociaux. Alors, il faudrait que ce soit formalisé,
notamment parce que ce serait, d'une part, une source d'autodiscipline
pour ces organismes-là — il
y a une certaine crainte de la surveillance,
qui parfois a un effet positif d'autodiscipline — et aussi parce que c'est une garantie accrue
de pouvoir détecter des situations de services inadéquats, de protection
insuffisante et d'agir adéquatement.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Dans la mesure où l'assurance autonomie va accréditer des prestataires, est-ce
qu'automatiquement… ce n'est pas le
vocabulaire juridique, je m'en excuse, je ne suis pas un juriste, mais,
automatiquement, est-ce que le commissaire aux plaintes deviendrait
autorisé de pouvoir examiner une plainte concernant ce prestataire?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Mme la Présidente, j'évite toujours
les risques d'interprétation juridique différente. Je pense que l'esprit
ou l'intention du ministre, que j'interprète, est d'inclure effectivement ces
nouvelles organisations ou ces nouveaux
dispensateurs de services au régime de plaintes. Je m'en réjouis, mais je pense
que ce serait prudent de l'indiquer spécifiquement dans la loi par une
disposition qui viendrait le préciser.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le ministre.
M.
Hébert : On a des collègues du contentieux du ministère qui,
je suis sûr, prennent bonne note de votre suggestion.
Vous
suggérez également, bien sûr, de considérer l'insertion sociale et
professionnelle pour les personnes handicapées, mais vous nous suggérez aussi d'inclure pour l'assurance autonomie les
moins de 18 ans émancipés. On a eu une suggestion du même ordre qui a été faite par différents
organismes. J'aimerais que vous nous expliquiez votre point de vue là-dessus.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, on sait que les personnes
émancipées, au fond, ce sont des personnes qui bénéficient de l'autorité… qui ne sont plus sous une autorité
parentale et qui normalement ont des droits plus importants. Donc, on reconnaît leur autonomie plus grande que
les personnes qui sont mineures. Et, dans un certain nombre de situations, on parle, par exemple, de personnes
qui ont des troubles envahissants du développement, qui vivent de manière
autonome et qui pourraient avoir besoin de
ces services-là. On parle aussi évidemment de personnes qui ont des enfants,
qui ont la responsabilité de ces enfants et
qui, dans certaines situations, pour elles-mêmes, pourraient avoir besoin…
compte tenu de leur état d'autonomie
ou de problématiques qui font qu'elles sont en perte d'autonomie, pourraient
aussi nécessiter ces services-là.
Donc, c'est
dans cette perspective de dire : Il y aurait lieu de faire des exceptions
à la règle générale des adultes pour
les personnes qui sont émancipées. Ce ne sera probablement pas — je n'ai pas de chiffre à vous donner — un nombre important de personnes, mais, quand on sait que les programmes sont
normés, mieux vaut prévenir ce genre de situation pour faciliter
l'accès.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous nous recommandez, là… vous appuyez, en fait, l'utilisation d'une caisse
séparée pour éviter les dérives que
vous avez dénoncées à plusieurs reprises dans vos rapports. Qu'est-ce que vous
pensez de confier, plutôt que de
mettre en place une nouvelle bureaucratie, de confier la gestion de cette
caisse séparée à la Régie de l'assurance maladie du Québec?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain.
• (11 h 30) •
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Sur ce plan, effectivement, moi, la
création d'organismes, je pense que c'est une façon de faire qui n'est pas nécessaire présentement et qui entraîne toujours ces coûts. La Régie de l'assurance maladie a une
bonne expérience de la gestion en santé. Certains avaient proposé la Régie des
rentes. Mais je pense que ce sont, dans les deux cas, des organismes compétents, qualifiés qui ont une expertise
actuarielle aussi qui est importante et qui leur permettrait d'agir.
Évidemment,
ce n'est pas tout de voir qui sera l'organisme responsable. Le principe de
cette fiducie-là, c'est aussi, comme
vous le disiez, effectivement un principe qui va permettre de s'assurer que
cette somme est dédiée aux fins des services
à domicile et de l'assurance autonomie, en général, que ce soit fait de manière
très transparente, que la reddition de
comptes soit explicite et que les principes de solidarité sociale soient
vraiment respectés, respectés aussi au niveau du financement et bien
explicités, qu'on en rende bien compte dans les rapports.
Alors, sur ce
principe, donc moi, je pense que c'est une bonne idée : Régie de
l'assurance maladie ou Régie des rentes, éventuellement.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Il reste
combien de temps?
La Présidente (Mme Proulx) :
Il vous reste trois minutes.
M.
Hébert :
Merci. Dans le financement de l'assurance autonomie, vous êtes sans doute le
premier groupe… et, pour avoir vu les
mémoires qui s'en viennent, probablement le seul qui nous recommandez de
capitaliser cette caisse pour le futur. J'aimerais comprendre les
arguments à la base de votre suggestion.
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, dans un premier temps, on
vous recommande une capitalisation partielle.
Évidemment,
on est au niveau du principe. C'est sûr que, si on peut, dans un contexte de
capitalisation, prévenir l'augmentation
des coûts pour les générations futures et déjà engranger, ce serait
manifestement idéal. Par contre, nous avons
aussi recommandé que tout le montage financier au fonds soit précisé et qu'on
puisse avoir accès à des chiffres, à des données. Donc, c'est quant au
principe.
Et, si vous permettez, Mme la Présidente, je demanderais
au vice-protecteur, M. Dussault, de compléter cette réponse, lui qui a analysé,
là, particulièrement certaines dimensions.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Dussault.
M.
Dussault (Claude) : Merci.
Écoutez, essentiellement, ça a été repris dans Ménard, là, un des enjeux
majeurs, c'est toute la question de l'équité intergénérationnelle.
Le danger, en mettant un système classique de...
où on serre de l'argent... actuellement, c'est que, vu que la population
va augmenter, il va y avoir de moins en moins de gens pour payer. Donc,
l'équité, là, excusez-moi l'expression, l'équilibrage, le «balancing act » qu'on dit qu'on doit faire,
c'est, dans les argents qu'on perçoit aujourd'hui, quelle est la part qui sert à payer les besoins des retraités actuels
versus quel est l'argent qu'on met de côté pour les futurs. Si on veut respecter l'équité intergénérationnelle, il
faut absolument qu'il y ait une partie des sommes qui sont perçues aujourd'hui
qui soit réservée pour la clientèle du
futur. Sinon, les sommes vont être complètement absorbées, et il ne restera
plus d'argent pour ces gens-là quand ces gens-là vont arriver à la
retraite.
Évidemment,
c'est un équilibrage qui est très délicat, mais il n'y a pas d'autre moyen que
d'assurer... Il faut au moins en
catalyser une partie justement pour prévoir les besoins du futur, sinon
l'équité intergénérationnelle ne sera pas au rendez-vous.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Je voudrais terminer avec le plan de services individualisés. Vous nous
dites : Il faudrait qu'il soit invariable
selon les régions. Je veux être bien sûr que je vous comprends, là, parce que,
pour moi, un plan de services, ce
n'est pas désincarné, là. Un plan de services, ça tient compte de la réalité
régionale. Un plan de services dans une région dévitalisée, c'est différent d'un plan de services au centre-ville de
Montréal. Ce que je comprends, c'est : le besoin devrait être le même, mais la façon d'y répondre peut
varier selon la région, parce qu'on ne peut pas dire que le plan de services
est invariable, là. Je ne comprends pas, là, votre point de vue là-dessus.
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain, pour une très courte réponse d'environ 30 secondes.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, je vous réfère plutôt à la
recommandation 4. Ce que nous disons, c'est
que le plan de services individualisés doit être associé à la personne et
puisse la suivre dans son parcours de soins et de services, peu
importent la région ou le lieu de dispensation des services. Parce qu'on a
vu... moi, j'appelle ça de l'iniquité
interrégionale, et on a vu ça dans beaucoup de situations. Et c'est même, sur
le plan, je dirais, de l'investissement, une perte que d'avoir eu un plan de services individualisés qui
fonctionne, qui est amorcé, qui ne peut pas se poursuivre dans une autre
région lors d'un déménagement.
Alors, c'est
plus dans ce sens-là que nous sommes intervenus. Le vice-protecteur pourrait
compléter brièvement.
La Présidente (Mme Proulx) :
Oui, M. Dussault aura l'occasion de compléter à travers d'autres questions.
Mme Saint-Germain (Raymonde) :
D'accord.
La
Présidente (Mme Proulx) : Le temps est écoulé maintenant. Je
vous remercie. Nous allons poursuivre les échanges avec Mme la députée
de Gatineau pour l'opposition officielle.
Mme Vallée : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci de votre présentation. Bienvenue en commission. Vos
mémoires sont toujours fort intéressants et surtout fort pertinents.
J'aimerais,
avant d'aller… Je voulais aborder une autre question, mais le ministre
a abordé la question des plans de services et des services de l'équité
interrégionale dans l'offre de services.
Moi, je suis un petit peu en désaccord avec ce que le ministre disait. C'est-à-dire, je me dis, si on vise vraiment une
autonomie pour tous, je crois qu'on devrait s'assurer qu'au Québec
il y ait, un peu partout à travers le territoire, des services de base qui devraient, à tout le moins, assurer une véritable autonomie pour tous, et on devrait s'assurer
avant de mettre en place une
assurance autonomie que ces services-là peuvent être dispensés un peu partout,
parce qu'un citoyen ne devrait pas être mis à l'écart ou avoir moins
de choix de par sa situation géographique. Je trouve ça un petit peu triste
de voir ou qu'on pense qu'il pourra y avoir
une autonomie pour tous au centre-ville de Montréal, mais, si vous restez aux
Îles-de-la-Madeleine, ce n'est pas tout à
fait pareil ou, si vous restez… Ma collègue sourit. Mais c'est parce que je
pense aussi aux gens qui sont dans le
Nord-du-Québec, qui habitent le Nord-du-Québec, qui habitent Fermont, qui
habitent les communautés
dévitalisées. On ne devrait pas être pénalisé du fait qu'on choisit d'habiter
le territoire, d'occuper le territoire.
Et je me
demandais si vous aviez porté votre réflexion un peu dans ce sens-là ou si vos
travaux, dans le passé, vous ont
amenés à réfléchir à la question de l'accessibilité réelle des services. Et est-ce
qu'on est prêts, en avril 2014, au même
titre que ce que vous avez fait lors de votre présentation sur le projet de loi
n° 52… Vous avez porté votre réflexion sur l'accessibilité aux soins palliatifs? Bon, bien est-ce qu'au Québec
on a une réelle accessibilité aux soins à domicile pour tous, pas seulement pour les personnes âgées,
mais aussi pour les personnes handicapées, pour les personnes aussi ayant une déficience intellectuelle? Est-ce qu'on
est réellement capables de donner un véritable choix à tous les citoyens
du Québec, peu importe où ils résident?
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, Mme la Présidente, la députée
fait référence, entre autres, à un des principes
qui, pour nous, est fondamental dans l'assurance autonomie, c'est celui de
l'équité d'accès pour tous à tous les services et l'accessibilité
réelle.
Ce sont en
fait deux principes qui sont concomitants. Il faut que ce soit le cas dans
toutes les régions. Ce n'est pas le
cas présentement et c'est pourquoi j'insiste sur l'importance d'un plan de
transition. Et, en même temps, est-ce qu'on est capables de donner tous les services à tous? Présentement, non,
c'est certain. On l'a documenté dans notre rapport sur les services de soutien à domicile de 2012. Il
y a un écart important entre ce qui est prévu et ce qui, dans la réalité,
est vraiment
disponible pour les personnes. Et, quand on regarde évidemment la courbe
démographique, le livre blanc présente
très clairement l'évolution des besoins qui va être croissante, et l'évolution
des ressources n'est pas conséquente. Donc,
c'est certain qu'il y a là une problématique et que la date d'avril 2014… Bon.
Personnellement, je crois que, si on veut
bien faire les choses, bien préparer la transition — je n'ai pas vu l'état des travaux au
ministère, donc je vais aussi être
réservée dans cette réponse — il reste beaucoup de choses à faire pour que
ce soit en oeuvre et que ça s'amorce de manière sécuritaire pour les
personnes. Donc, avril 2014 est une date extrêmement ambitieuse.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
Est-ce qu'il y a, à votre connaissance, un état de situation? Outre votre
rapport sur les soins à domicile, est-ce
qu'il existe d'autres évaluations, d'autres états de situation, un état des
lieux qui nous permettraient d'avoir une
meilleure… de voir ou d'identifier clairement là où sont les lacunes pour être
capables de donner un coup de roue aux
régions particulièrement ciblées? Est-ce qu'on les a identifiées, ces
régions-là? Est-ce qu'on a identifié les secteurs d'activité où on
devrait porter une attention particulière?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
• (11 h 40) •
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Notre rapport de 2012 portait sur
cinq régions spécifiques, mais nous avions fait des vérifications qui nous démontrent que, dans toutes les régions,
l'écart était quand même important entre le besoin et la capacité de répondre aux besoins. Il y avait
des problèmes à Montréal à cause du volume. En Gaspésie, c'est pour
d'autres raisons. Donc, il y avait quand même des problèmes partout.
Ce
que nous venons de constater récemment, c'est que déjà des CSSS, en particulier
dans les régions de Montréal, Sherbrooke
et Gaspésie, ont commencé à préparer le terrain pour travailler au niveau de la
nouvelle approche du livre blanc. Ça
peut être vu comme étant positif en disant : On commence à préparer la
transition. En même temps, il faudra voir
le nombre de ressources qui seront consenties. Ça peut aussi être vu comme
inquiétant, dans la mesure où ça veut dire
que déjà, la politique de 2003, on commence à ne plus la respecter pour aller
dans le sens éventuellement d'un livre blanc mais d'une loi qui n'est
pas encore adoptée. Alors, dans ce sens-là, c'est quelque chose qui est
préoccupant. Le ministère a possiblement des
données évidemment que je ne connais pas. Et il y a eu aussi, bien sûr, le
rapport du Vérificateur général en
2013, qui a fait l'objet d'une commission parlementaire d'ailleurs récemment,
qui présente aussi beaucoup de
constats, et de caractéristiques, et de recommandations qui sont de nature à
améliorer, je dirais, la préparation des cibles, la planification des
services et leur optimisation.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Mais on est
loin d'avoir identifié tout ça puis on est quand même déjà
rendus en novembre 2013. On pourrait échanger longuement. J'avais
d'autres petites questions avant de passer la parole à mon collègue.
Vous
indiquez au point 81 de votre rapport que l'analyse du livre blanc amène
le Protecteur du citoyen à conclure qu'il est, d'abord et avant
tout, conçu pour les personnes âgées
en perte d'autonomie. Pourtant, on nous dit que l'autonomie pour tous s'appliquera également
aux personnes handicapées, aux personnes atteintes de déficience
intellectuelle. J'aimerais vous entendre davantage sur ce constat que
vous avez dressé.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, oui — merci, Mme la Présidente — notre constat est à l'effet que plusieurs
personnes handicapées qui, du fait de leur handicap, ont des besoins, ont une
perte d'autonomie sont des personnes d'abord plus jeunes qui ne sont pas des personnes
âgées au sens du livre blanc et des personnes qui ont des besoins, des capacités d'insertion sociale et
d'insertion à l'emploi. Donc, ça vient modifier la nature de leurs besoins,
d'une part. Ça vient modifier souvent
le profil des services qui sont requis. Dans certains cas, on peut parler de
services requis le soir, requis la fin de semaine, selon la nature des emplois. Pour certains, ce sont des services qui
vont être liés à l'accompagnement, aux études.
Donc,
il y a toutes sortes de situations particulières qui font que, oui, ce sont des
personnes en perte d'autonomie en
raison de leur handicap, mais dont le profil et les besoins varient beaucoup
par rapport aux personnes
âgées. Et l'Outil d'évaluation multiclientèle n'est pas suffisamment explicite sur toute cette prise en considération
des besoins d'insertion sociale et
professionnelle qui sont plus fréquents chez les personnes handicapées. Évidemment, il y a aussi, dans leur cas, toute la notion du principe fondamental de la
reconnaissance de la compensation pour leur handicap. Vous savez que c'est
une... Depuis 1998, il y avait eu une
décision importante du Conseil des ministres, le livre blanc d'ailleurs y
réfère, et ça aussi, c'est une dimension qui devra, au moment de la
préparation de la contribution financière, être prise en compte.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Pour ce qui est justement de la contribution
financière, vous mentionnez que vous avez des craintes à l'effet que certains usagers mettent de côté le
recours à des services d'aide domestique ou différents services en raison
de l'inaccessibilité, pour eux, l'inaccessibilité financière.
Et je me
demandais : Est-ce qu'on a identifié un revenu à partir duquel on ne
pourrait tout simplement... on ne devrait
pas nécessairement demander une contribution? Est-ce que c'est vraiment...
Est-ce qu'on parle vraiment d'autonomie pour tous à partir du moment où on évalue la
contribution en fonction du revenu puis en fonction aussi de la fréquence
des services ou de l'intensité des services
requis? Parce que, dans le livre blanc, on fait référence, à la page 24,
de l'intensité des services fournis
au niveau de l'allocation au soutien à l'autonomie. Et moi, je me questionnais en me disant : Est-ce que c'est équitable d'avoir, à l'intérieur d'une politique, ce type de
référence là? Est-ce qu'on va demander davantage de contribution à quelqu'un qui a besoin d'une plus grande intensité de
services, alors que c'est son état physique, son état personnel qui fait
en sorte que ces services-là sont requis?
Est-ce que c'est
équitable d'avoir cette philosophie-là?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Encore une fois, Mme la Présidente,
le principe de l'équité, il est à la fois intergénérationnel, il est aussi en justice distributive. Et c'est une
question qui se pose. Notamment, notre préoccupation… on n'a pas de… Je ne peux pas répondre à votre
question en disant : À partir de tel seuil, on pense que ça serait
inéquitable de demander une
contribution additionnelle, etc. Par contre, la préoccupation était beaucoup
celle des faibles salariés, ça peut
être des personnes seules, ça peut être des familles, par opposition à, par
exemple, des personnes qui sont aussi des
personnes vulnérables, qui émargent aux programmes, qui reçoivent de l'aide des
programmes de solidarité sociale mais
qui souvent, en contrepartie de cette aide, auront plusieurs services pour
lesquels ils n'ont pas à payer. Et là on arrive à cette tranche du
faible salarié qui, lui, est très peu exonéré.
Alors,
pour l'instant, il n'y a pas un montant à donner, mais ce principe
effectivement de l'équité doit s'appliquer aussi, je dirais, en fonction du besoin et ne pas faire en sorte que la
personne soit pénalisée par le niveau ou la complexité de son état de santé ou de sa perte d'autonomie.
Ça, c'est vraiment important. Et autant pour cette question que pour certaines,
que vous aviez abordées tout à l'heure,
reliées au financement nous faisons, nous formulons les recommandations 12, 13
et 14, au fond, au ministère pour
réaliser des travaux requis pour avoir justement une proposition de financement
qui soit plus complète et qui
permette de voir, de constater, avec plus de transparence, le respect de tous
ces principes d'équité dans le financement, de solidarité dans le
partage et de justice, au fond, distributive.
Mme Vallée :
Merci.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Dans
votre mémoire qui est très intéressant — puis je vois que vous avez fouillé
les questions de façon assez sérieuse — vous parlez du droit d'appel.
Là,
ce qu'on comprend, c'est qu'il va y avoir une personne qui va avoir des
besoins, il y aurait un intervenant pivot ou un gestionnaire de cas qui va évaluer les besoins, un groupe nous a
fait mention que ça serait important également que cette personne-là soit accompagnée pour un peu
défendre ses intérêts, et il va y avoir l'établissement d'un SMAF auquel
va correspondre un montant, en nature ou en
espèces, sur des services qui vont être donnés. Et ce que vous nous dites…
Parce qu'on voit dans notre réseau que ça
peut arriver que, l'évaluation, il y a quand même une partie subjective. Si la
personne est insatisfaite, à ce moment-là, il devrait y avoir un droit d'appel
au palier régional. Est-ce que c'est bien l'interprétation de votre mémoire?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : C'est une interprétation, oui, qui
se rapproche de notre mémoire, mais je ne suis pas du tout sous un angle juridique. Et l'important, c'est que… On
dit toujours : Le jugement clinique ne doit pas être mis de côté,
et il ne doit pas y avoir d'automatisme dans les conclusions de l'utilisation
de l'outil d'évaluation. L'accompagnement
des personnes, souvent c'est important par un proche parce que ça permet de
connaître des éléments qui sont
importants et déterminants dans l'évaluation de leurs besoins : l'état de
pauvreté de la personne, la nature de son environnement, le fait qu'elle ait un… qu'elle soit en isolement social
ou non. Il y a toutes sortes de dimensions qui ont un caractère plus humain, et ça, c'est vraiment
important que ce soit aussi pris en compte parce que ça peut déterminer
la nature et le niveau des services.
Par ailleurs, quand
on parle d'un appel, c'est plus… On a utilisé le mot «contestation» qu'on
retrouve dans la littérature scientifique,
mais c'est plus... et je dirais «en amont», avant que le plan soit finalisé… si
la personne le reçoit et dit :
Ça ne répond pas, j'aimerais qu'on révise telle chose parce que je suis seule
ou que je n'ai pas tel type d'accès, je
dois aller voir un médecin, j'ai besoin d'outils pour l'aide à la vue, etc.,
que ce plan-là puisse être déjà révisé par des personnes qui sont soit
déjà des cliniciens dans les CLSC ou soit les membres du réseau…
Une voix :
RSIPA.
• (11 h 50) •
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : …RSIPA, là, oui. Le RSIPA, c'est le
Réseau de services intégrés pour les personnes âgées.
J'espère
que tout le monde a compris que c'est un réseau qui existe déjà, qui dans
certains cas, évidemment, n'est pas
implanté partout à 100 %, mais c'est un réseau qui fournit… Pour
l'instant, c'est ça, c'est 62 % — merci, M. Clavet — 62 %, le niveau d'implantation de ce réseau-là, mais ils sont vraiment présents partout, ils ont une bonne connaissance du terrain, et je pense qu'on gagnerait à faire appel à leur
expertise, encore une fois, une approche qui permet de ne pas créer de nouvelles structures, d'aller chercher l'expertise
critique... clinique, pardon, et l'expertise de service social qui est disponible.
La
Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Puis, si
je comprends, vous proposez ce mécanisme par un souci d'équité, c'est-à-dire que, si la personne a l'impression
qu'elle n'a… soit que son intervenant pivot a sous-évalué ou a mal
évalué, à ce moment-là, cette personne-là voudra avoir au moins une instance à
laquelle elle pourrait demander... comme vous dites, on peut utiliser le mot «contestation» ou «révision»… mais
dans lequel il y aura quand même un droit d'appel.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Oui, effectivement, et ça permettrait, dans ce contexte-là, d'agir
plus vite, de prendre en
considération des besoins spéciaux.
Et moi, je pense que tout ne doit pas se régler, au niveau des plaintes, dans un contexte de
différends. Je pense qu'il y
a des façons de faire qui peuvent
être facilitantes surtout pour des
personnes âgées, surtout pour des
personnes en perte d'autonomie. Or, je pense que c'est une forme d'action peu
coûteuse et, à mon avis, réaliste et utile.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui. Bien, peu coûteuse… Ça, vous savez, on n'a pas d'expérience avec
ce projet de l'assurance autonomie.
Mais peu coûteuse? Je suis moins certain, parce que l'expérience que
nous avons habituellement, c'est que les gens veulent quand même
aller chercher les services auxquels ils ont droit, et souvent leur perception,
c'est qu'ils devraient en avoir plus.
Donc, s'il y a un droit d'appel, on peut s'attendre qu'il va
être très utilisé. On le voit également
dans les formules comme au niveau de la CSST, de l'aide sociale. C'est légitime, ça, on veut… Quand on met un système en
place, il faut monter un bon système. Mais il faut
s'attendre qu'il va y avoir un droit d'appel. Et, même si
on est d'accord avec le principe, il reste que c'est de la bureaucratisation, parce que, quand on met de
l'argent là, on ne le met pas dans
les soins.
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Bien, pour nous, Mme la
Présidente, il ne s'agit pas d'ajouter des ressources, il
s'agit de bien et mieux utiliser des ressources qui existent déjà et de
travailler au palier régional le plus rapidement possible. Et je pense qu'une demande de révision pour des
services pour des personnes en perte d'autonomie, quand on utilise un outil standardisé… je pense que ce n'est pas
quelque chose qui soit abusif, et ça ne doit pas être… Je partage l'avis du
député de Jean-Talon, ça ne doit pas être
quelque chose de bureaucratique et lourd, mais c'est comme un autre regard
clinique avant l'implantation ou la finalisation du plan d'intervention.
Et les ressources, elles sont là. C'est de l'optimisation.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : On partage certaines visions, mais, celle-là, je la… Connaissant le système,
là… on a vu, au niveau du traitement des plaintes, ça a pris un
gestionnaire de plaintes, ça prend une secrétaire, puis c'est correct parce qu'il faut mettre ça en place. Mais à la fin
ça ne se fera pas à coût nul, ça va prendre des gens pour le gérer, mais ça,
on verra ça en temps et lieu.
Vous
avez parlé du cadre financier, puis je pense que vous avez fait mention, avec
justesse, qu'il manque beaucoup d'éléments
dans le cadre financier. Vous, actuellement, avec ce que vous nous avez dit,
qu'est-ce que ça prendrait pour dire
qu'on a un cadre financier qui nous permet justement de faire une bonne
évaluation de ce qui doit être mis en place? Et le ministre, lui, nous dit que le cadre financier, c'est toujours ces
trois mêmes courbes, ça coûte plus cher, là, sauf qu'à la fin moi, le cadre financier, j'aimerais ça savoir
combien on va… combien est-ce qui va être octroyé pour chaque SMAF en termes de coût, également c'est quoi, la
contribution de l'usager, c'est quoi, le coût total du système, y compris le
système d'information. La RAMQ, ils vont devoir certainement engager des
fonctionnaires pour gérer un système comme celui-là.
Et, à la fin, je ne sais pas, mais, dans un cadre financier, il y a le côté
dépenses, mais on devrait également avoir le côté revenus. C'est quoi, la contribution du contribuable? Parce qu'on
sait maintenant que ce ne sera pas une taxe dédiée, mais ça va être pris à même les impôts. Donc, on
s'attend à ce qu'il va y avoir soit une augmentation d'impôt... Il va falloir
nous dire d'où vient l'argent, parce que dans le projet il y a beaucoup de
pensée magique.
Vous,
est-ce que vous trouvez qu'on a ces éléments-là dans ce projet qui nous est
déposé par le ministre? Et c'est quoi que ça prend de plus pour dire
qu'on a un cadre financier qui soit crédible?
La Présidente (Mme
Proulx) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, Mme la Présidente, il est certain qu'au niveau du livre blanc toutes les
données financières ne sont pas là. Il y a des études actuarielles qui sont
importantes et qui sont requises, d'où nos recommandations sur le fait qu'il faut compléter le plan de financement.
Donc, nous ne pourrons pas répondre ce matin par des chiffres. Mais je vais passer, avec votre permission, la parole
au vice-protecteur sur… pour répondre à la question qui porte notamment
sur les critères ou ce qu'on devrait retrouver en termes de ventilation des
coûts.
La Présidente (Mme
Proulx) : M. Dussault.
M.
Dussault (Claude) : Je veux
juste rappeler, dans notre rapport qu'on a fait sur les soins à domicile, justement c'est une des recommandations qu'on avait
faites, de bien identifier les besoins pour savoir… Ça, c'est la première chose
en gestion, c'est de dire : J'ai tant
de ressources… de bien identifier c'est quoi, l'ampleur des besoins, donc de
bien définir c'est quoi, le panier de
services qu'on va offrir à nos personnes âgées, de bien le définir, puis de
reconnaître... à un moment donné, de
dire : Bien, ce qu'on voudrait, idéalement c'est ça, ce qu'on est capables
d'offrir en ce moment et de voir l'écart. Et là il va forcément…
C'est
correct, dans le livre blanc, on pose la question, mais il y a
une adéquation entre évidemment les services qu'on va donner et les montants que les citoyens vont devoir assumer.
Et ça, c'est un peu le discours du Protecteur du citoyen, c'est un choix politique
de dire : C'est quoi, l'ampleur? Mais il faut qu'il y ait une adéquation entre «voici ce qu'on
a vraiment» et «voici le coût qui doit être assumé par les citoyens».
Le problème qu'on observe en ce
moment, là, puis on est en préassurance autonomie, c'est qu'on
annonce beaucoup dans nos services, mais les services, en réalité,
ne sont pas disponibles parce qu'on n'a pas les ressources suffisantes. Quel que soit le choix politique
qui sera fait, ce qui est important, c'est d'avoir une bonne adéquation
entre «voici ce qu'on offre»… et qu'on a mis les ressources qui correspondent. Et ça, c'est un choix politique de dire : Le niveau, il n'est pas
défini dans le livre blanc. Nous, le commentaire qu'on fait, c'est qu'il va être important qu'on fasse justement un bon
arrimage encore une fois entre «voici ce qu'on offre» et «voici les
ressources correspondantes qui sont nécessaires pour financer ce qu'on veut
offrir».
La Présidente (Mme Proulx) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Est-ce qu'on pourrait rajouter également
c'est quoi, la contribution de l'usager, parce que, dans un plan de financement... Puis est-ce qu'on pourrait rajouter
également c'est quoi, le montant d'impôt octroyé là-dessus? Est-ce que
vous êtes d'accord qu'on devrait rajouter ça?
M. Dussault (Claude) : Absolument.
Écoutez…
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Dussault.
M. Dussault (Claude) : Pardon.
La Présidente (Mme Proulx) :
M. Dussault.
M.
Dussault (Claude) : Oui, absolument.
Et je pense qu'il faut le définir. La transparence, c'est ça, c'est qu'il faut définir.
Il y a
une partie qui sont les sommes qui sont déjà dans le… les fonds qui
viennent du fonds consolidé. Il y a une partie
qui est là, il y a une partie qui va venir de la contribution d'assurance autonomie, qu'on comprend qu'il va y avoir une progressivité selon la justice distributive là-dessus,
et l'autre partie qui serait une contribution de l'usager. Tous ces paramètres-là évidemment devront être
débattus, devront être faits de façon transparente, de manière qu'on voie que
ces trois sources de financement là cumulées ensemble permettent de
répondre aux services qu'on veut s'offrir.
La Présidente (Mme Proulx) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Un, je veux vous remercier de votre réponse parce que c'est, depuis le début
des auditions, c'est ce que je dis que ça
nous prend. Et puis le ministre me ramène toujours ces trois courbes qui
font juste dire combien ça va
coûter de plus dans le futur puis que son projet qui, d'après moi, essaie de
promettre une illusion… qu'avec son projet tout va se régler.
Ce que vous
nous avez donné là, c'est ce que ça prend dans un cadre financier. Puis vous
avez commencé par un mot intéressant : une «bonne» gestion. Dans ce projet-là, il nous manque un élément, un
élément de bonne gestion. Le gros bon
sens nous demande qu'on définisse c'est quoi, la hauteur des besoins. C'est le
nombre de personnes qui va en avoir. Et après ça il faut regarder :
Est-ce qu'on a les ressources pour offrir ces services et répondre à ces
besoins, et également, si vous êtes d'accord avec moi — il faut avoir une adéquation, il y a un
signe de dollar, à la fin, qui vient — combien ça va coûter? Mais, pour
protéger le citoyen, l'usager doit savoir combien ça va
lui coûter. Dans le projet qui nous
est déposé, moi, si je comprends bien, là, on peut arriver à la fin avec un citoyen
qui gagne un assez bon salaire — vous
savez, au Québec, un bon salaire, c'est 40 000 $, 50 000 $, je tiens à
le répéter — qui va
avoir contribué, par ses impôts, à
l'assurance autonomie, mais, lorsqu'il va être malade, parce qu'il a des
revenus de son fonds de pension suffisants,
pourrait ne pas avoir le droit à l'assurance autonomie parce que, son
allocation, comme le dit le ministre, je ne lui enlève pas de l'argent,
mais je ne lui en donne pas pour répondre à ses besoins.
Est-ce que
c'est une hypothèse qu'il y a des citoyens, au Québec, qui vont contribuer dans
leurs impôts… pourraient à la fin,
parce qu'ils ont des revenus suffisants, ne pas pouvoir profiter de l'assurance
autonomie? Puis c'est une question assez directe.
La Présidente (Mme Proulx) :
Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Sous ce plan, il y a quand même eu
des simulations qui ont été faites par le comité Ménard, qui étaient très intéressantes et qui donnaient justement
les balises à respecter, et encore une fois nous, on recommande au ministère de préciser cette
information-là. C'est essentiel d'avoir le plan actuariel qui sous-tend à la
fois la hauteur des sommes qui seront
demandées, en conséquence les services qui seront requis et l'écart qui
demeurera entre les besoins et la
capacité d'offrir les services. Je pense que ce sont des critères très
importants. Et, oui, il faut toujours le dire, si on parle du fonds
consolidé ou du trésor public, bien c'est toujours un citoyen, un contribuable,
individu ou entreprise, et il y a l'usager,
le citoyen devenu usager, qui s'ajoute à ça, et la transparence va être très
importante pour faire comprendre et faire, en conséquence, accepter ou
non ce programme.
La
Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, Mme Saint-Germain. Le
temps étant maintenant écoulé, je vous remercie de votre présentation.
Compte
tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'après les
affaires courantes, vers 15 heures. Et
je demande aux collègues de bien vouloir apporter leurs effets personnels et ne
pas les laisser dans la salle, s'il vous plaît. Merci.
(Suspension de la séance à 12
heures)
(Reprise à 15 h 30)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses
travaux. Nous allons poursuivre, sans
plus tarder, les consultations
particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie
intitulé L'autonomie pour tous.
Alors,
on reçoit maintenant, collègues, le Regroupement des aidants naturels
du Québec. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission.
Pour les fins d'enregistrement, est-ce que
vous pouvez donner vos noms, vos titres? Et le prochain 10 minutes, c'est à
vous.
Regroupement des aidants
naturels du Québec (RANQ)
M. Hernandez (Carlos M.) : Bon après-midi. Mon nom, c'est Carlos Miguel Hernandez, M. le Président, du Regroupement des aidants naturels du Québec. Je suis
accompagné de...
M. D'Astous-Tardif
(Mario) : Bonjour. Mario Tardif, coordonnateur du Regroupement des
aidants.
Mme Boucher (Nadine) : Bonjour. Nadine Boucher, agente de développement au Regroupement des aidants naturels du Québec.
M. Hernandez (Carlos M.) : Alors, voilà. D'abord, je vous remercie beaucoup,
M. le ministre, pour nous avoir invités à présenter un
mémoire, au nom du Regroupement des aidants naturels du Québec et aussi au nom
de tous les aidants naturels du Québec. Je vous remercie beaucoup de nous avoir
invités.
Et,
vous savez, les aidants naturels, c'est une aide sociale qui a toujours
existé et existera toujours, mais ce qui est nouveau, c'est que,
depuis trois ans, on s'est regroupés. Aujourd'hui, il y a un mouvement, le
Regroupement des aidants naturels, qui est
dans 17 régions sociosanitaires du Québec et puis il
y a plus de 80 groupes qui sont déjà
regroupés, et ça, seulement
en 13 ans de travail, avec les moyens du bord, comme on dit, des petits moyens,
mais des grosses bottines pour
marcher et aller chercher d'autres groupes. Alors, les aidants naturels que
nous, on représente, ce sont les aidants naturels qui sont auprès des aînés mais aussi qui sont auprès des
personnes handicapées, aussi des personnes avec une déficience intellectuelle, et aussi avec des
personnes qui ont des… santé mentale. Tous ces hommes et ces femmes-là, aujourd'hui, ils sont regroupés dans le Regroupement des aidants naturels du Québec,
comme je vous ai dit, en 17 régions. C'est
ça que nous, aujourd'hui, on aimerait bien : vous présenter leurs
voix. Nous avons fait, durant l'année, une visite de toutes ces régions-là et, dans ces régions,
nous avons vu qu'il y a des besoins, et ce sont ces besoins-là qu'on va
vous présenter aujourd'hui dans le mémoire.
Le
but du mémoire est clair, nous aimerions améliorer les services de maintien à
domicile — ça,
c'est clair — et, en
même temps qu'on améliore le service de maintien à domicile, améliorer la vie de
ces hommes et ces femmes-là qui sont à domicile, qui sont aujourd'hui là, à l'intérieur de leurs
maisons, en train de prendre soin de nos malades. C'est eux que nous, on représente et c'est à eux qu'aujourd'hui
nous aimerions bien… vous présenter ce mémoire. Pour ça, j'invite Nadine
pour continuer.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Boucher.
Mme Boucher (Nadine) : Alors, bonjour à toutes et à tous. Merci, M. le
Président. Donc, comme notre mémoire, que
nous vous avons transmis, comporte 26 recommandations, on ne va pas prendre le
peu de temps qu'on a aujourd'hui pour vous entretenir de ces 26
recommandations, mais on aimerait attirer votre attention sur trois points
privilégiés, trois points sur lesquels on aimerait orienter la discussion
aujourd'hui.
Alors, le
premier, c'est que, dans le projet d'assurance autonomie, il y ait une réelle
connaissance et reconnaissance des
personnes aidantes, et cette réelle connaissance et reconnaissance des personnes
aidantes, elle s'exprime de deux manières : premièrement, de reconnaître les personnes aidantes comme des
partenaires du réseau de la santé, les experts qui connaissent la réalité de leurs
proches aidants et, deuxièmement, de reconnaître les personnes aidantes
également comme des personnes qui ont
des besoins, des demandeurs de services. Alors, lors d'une plateforme de
revendications communes qui a été réalisée dans 15 régions du Québec par le Regroupement des aidants naturels du
Québec auprès de plus de 260 personnes aidantes et intervenantes dans le milieu, il y a un point récurrent qui a fait
l'unanimité, et cette idée-là, c'est qu'il y a une déshumanisation des soins au niveau des soins, des
services qui sont offerts aux personnes aidantes, et cette déshumanisation
des soins, elle s'exprime notamment par le
fait qu'on ne les reconnaît pas, on ne reconnaît pas le fait que ce sont des
personnes aidantes qui ont des besoins et qui sont des partenaires du
réseau de la santé.
Alors, on dit qu'il
n'y a pas de reconnaissance officielle dans la plateforme du statut d'aidant de
la part du gouvernement, et l'expertise du
proche aidant n'est pas prise en compte ou n'est pas reconnue dans le réseau de
la santé, même si, parmi les gens qui
sont en contact avec la personne aidée, le proche aidant est la personne qui
connaît bien les besoins de la
personne aidée de laquelle elle s'occupe. Première chose. Et, deuxièmement, de
reconnaître les personnes aidantes
comme des demandeurs de services. Parce que souvent la réalité d'une personne
aidante, elle est associée souvent à
différentes problématiques. On parle d'isolement, d'épuisement,
d'appauvrissement, plusieurs problèmes de santé. Et c'est fragilisant, être une personne aidante,
c'est fragilisant, accompagner quelqu'un qu'on aime vers la mort, c'est
fragilisant d'accompagner un proche
dont on sait qu'il ne pourra jamais vraiment s'épanouir pleinement dans la vie.
Et, à la lumière du mémoire qu'on
vous a transmis, il y a une recommandation qui est d'inclure les personnes
aidantes dans la liste des personnes
qui peuvent se qualifier à l'assurance autonomie parce qu'elles ont besoin de
services. Elles ont des besoins qui doivent être connus et reconnus. Aussi,
on demande à ce que soit offerte systématiquement aux proches aidants l'évaluation
de leurs besoins, évidemment, et, enfin, que le ministère de la Santé et des
Services sociaux se dote d'un outil d'évaluation des besoins des proches
aidants plus adéquat que l'Outil d'évaluation multiclientèle en s'inspirant ou
en généralisant l'utilisation, par exemple,
d'un outil qui s'appelle Aide-proches. Alors, ça, c'est le premier point sur
lequel on aimerait attirer votre attention : la reconnaissance
réelle des personnes aidantes comme des partenaires et à la fois comme des
demandeurs de services.
Ensuite,
le deuxième point sur lequel on aimerait attirer votre attention, c'est celui
de la question de la qualité et de
l'accessibilité des services. Lors toujours de cette même plateforme de
revendications qui a été réalisée dans 15 régions du Québec, qui a mobilisé 260, et plus, personnes
aidantes, la question de la déshumanisation des soins, elle a été évoquée
aussi à la lumière du manque de savoir-faire
et du manque de savoir-être. Les personnes aidantes ont l'impression désormais
que c'est la bureaucratie qui prime au
détriment de l'aspect humain et que les méthodes de gestion qui sont calquées
sur les entreprises ne font plus en
sorte qu'on considère l'humain comme un être humain mais qu'on veut davantage
répondre à des objectifs d'optimisation qui sont demandés par les
agences.
Alors,
en règle générale, les personnes aidantes, elles ont l'impression qu'elles
doivent se battre pour obtenir des services, et même certaines proches
aidantes, certains proches aidants ont l'impression qu'ils doivent quémander
des services. Et ce n'est pas normal d'avoir l'impression qu'on quémande des
services quand on assume plus de 80 % du maintien
à domicile au Québec. Quand on est la structure portante du maintien à
domicile, ce n'est pas normal d'avoir l'impression
de quémander des services. Alors, à la lumière de ça, il y a aussi ce qui a été
présenté par la Protectrice du citoyen
dans son rapport 2012-2013 qui mettait en lumière l'idée que les personnes
aidantes, bien elles se sentent un peu comme
des ressources complémentaires à rabais qu'on peut utiliser, qui sont bien
commodes, sur lesquelles on peut se fier, mais dont on n'a pas à
considérer les aspirations, les besoins et les opinions.
Alors, à la lumière
de ces idées, il y a la recommandation n° 1 du mémoire, qui demande à ce
que les proches aidants et leurs
associations soient consultés dans le cadre d'une évaluation en profondeur et
obligatoire de l'organisation, du
choix des priorités terrain et des pratiques du MSSS et des CSSS en maintien à
domicile… soit réalisée, aussi une autre qui demande que la qualité des
services soit au centre de la politique d'assurance autonomie, que, pour ce
faire, le MSSS se dote de mesures
adéquates et contraignantes pour garantir cette qualité, ainsi que des
mécanismes de contrôle de cette qualité,
et que les groupes d'usagers, incluant les organisations de proches aidants,
soient associés au développement de ces
mesures et mécanismes. On demande aussi à ce que les travailleurs qui assument
les services de maintien à domicile aient
une formation adéquate, continue qui aborde, en plus des compétences
techniques, la réalité des aidants et qu'ils bénéficient d'un encadrement et de conditions de travail qui leur
permettent de livrer cette qualité de travail, et, enfin, que le soutien
aux activités de la vie quotidienne ne soit pas tarifé et qu'il soit assumé par
le réseau public.
Et,
enfin, le troisième point sur lequel on aimerait attirer votre attention, c'est
l'idée de faire en sorte que le projet
d'assurance autonomie ne s'inscrive non pas seulement sur un projet orienté
vers la santé, mais un projet encore plus vaste,
un projet de construction et d'évolution sociale. Et, à la lumière de ça, le
RANQ demande à ce que différents acteurs soient interpellés pour leurs contributions, par exemple, d'autres ministères, des entreprises privées, des organisations syndicales et, évidemment, les organismes
communautaires de proches aidants, qui ont un savoir et une expertise qui se
doit d'être reconnue.
Alors, je laisse maintenant
la parole à Carlos Hernandez qui fera la conclusion de notre présentation.
• (15 h 40) •
M. Hernandez
(Carlos M.) : Alors, voici. Voilà, si vous voulez entendre quelle est
notre demande… notre mémoire, il y a
trois éléments, lesquels on aimerait bien souligner et qu'on croit… c'est qu'il faut
mettre une politique générale…
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé pour la présentation…
Des voix :
…
Le Président (M. Bergman) : Certainement.
De consentement? Consentement. Alors, procédez, monsieur.
M.
Hernandez (Carlos M.) : …merci beaucoup, une politique générale pour tous les aidants naturels, un support à notre mission, ça fait 13 ans qu'on marche
avec ça, puis un support… à notre mission. Et, le troisième élément qu'on
vient de dire, que chaque fois qu'on fait un
pas, ou un projet, ou une politique pour les aidants pour le maintien à
domicile, les aidants naturels, il faut
qu'ils soient là. On est la base du maintien à domicile : 80 % du travail, c'est nous qu'on le fait. Puis on est prêts à continuer mais avec un
grand support, et c'est ça qu'on demande à travers notre mémoire. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation.
Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Merci
beaucoup, M. Hernandez. Mme Boucher, M. D'Astous.
Si on avait,
dans ce livre blanc, mis de façon proportionnelle la place des proches aidants
dans le livre blanc par rapport à
toute la place que vous occupez dans le soutien à domicile, vous auriez occupé
la grande majorité de ce livre blanc.
Et, comme vous le soulignez très bien, on ne mentionne pas assez, et j'en
conviens, la place des proches aidants dans
ce livre blanc, mais soyez assurés que, dans le projet que nous menons
actuellement, les proches aidants sont au coeur en fait de ce projet d'assurance autonomie, le but étant vraiment de
fournir les services dont les aidés dont vous vous occupez ont besoin, de façon à pouvoir vous permettre
d'assumer un rôle de proches aidants et non pas d'être une ressource, comme
vous le soulignez. Alors, d'entrée de jeu,
ce que vous affirmez ou ce que vous souhaitez, je le partage, je le partage
tout à fait, soyez-en assurés. Ce
rôle de ressource qui trop souvent vous est attribué doit faire place à un rôle
de partenaire, comme vous le
souhaitez. Et le fait que vous soyez ici et qu'on a déjà eu des conversations
illustre bien le rôle important, le rôle central des proches aidants pour l'élaboration d'un projet de société
comme celui sur lequel nous travaillons cet après-midi.
Vous nous demandez une reconnaissance des
aidants — et
là je veux être bien sûr que je comprends votre demande — une reconnaissance
comme partenaires. Qu'est-ce que ça implique pour vous d'être reconnus comme
des partenaires du réseau de la santé et des services sociaux dans le
soutien à domicile?
M. Hernandez (Carlos M.) : Il y a
deux éléments et il faut faire une distinction. L'aidant naturel, il fait des fonctions à l'intérieur de sa maison, ce qu'on
appelle les AVQ. Ça, ces fonctions-là, les aidants naturels sont bénéficiaires,
ils ont besoin d'un support de l'État. Mais
on peut être partenaires, et là les partenaires, c'est là où est le rôle social
que nous jouons. Dans les groupes,
dans tous ces groupes-là que nous avons dans les 17 régions, il y a des groupes
qui ont une mission, et ces
missions-là peuvent être… parce que c'est un rôle social qu'ils jouent. On peut
être partenaires pour pouvoir bien
développer et arriver à faire des services à domicile adéquats. Parce que, dans
la plateforme que nous, on a, c'est
ça qu'on a vu : il y a des services, mais souvent… n'est pas tellement
adéquat à la réalité de l'aidant naturel. Donc, les aidants naturels peuvent être bénéficiaires mais en même temps
partenaires, et c'est là qu'il faudra faire un dialogue et puis bien se
comprendre.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Est-ce que ça implique, là, la participation du proche aidant à l'élaboration du plan de
services pour l'aidé?
M. Hernandez (Carlos M.) : Exactement.
M.
Hébert : O.K.
M.
Hernandez (Carlos M.) : Et
voilà. Et c'est là où le rôle social rentre… dans lequel nous, on peut
participer, avec les professionnels
et les institutions, à définir un peu quels sont les services parce que,
les besoins, c'est les aidants naturels qui peuvent les exprimer très clairement.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Vous nous suggérez, là, d'évaluer de façon
beaucoup plus précise et adéquate les besoins des proches
aidants dans l'Outil d'évaluation multiclientèle. Vous nous suggérez un outil : Aide-proches. Est-ce
que c'est une possibilité ou
un parmi tant d'autres, l'outil que vous trouvez le plus approprié? J'aimerais
que vous nous parliez de cet outil-là.
Le Président (M. Bergman) :
M. D'Astous-Tardif.
M.
D'Astous-Tardif (Mario) :
Dans le cadre de cet outil-là, c'est un outil. Ceci dit, c'est un outil qui
s'inscrit dans des travaux comparatifs avec ce qui a été fait dans d'autres
pays, des travaux qui ont déjà été menés, d'ailleurs, au ministère.
C'est un document qui, malheureusement, n'a pas été retenu, à l'époque, parce que la question
des proches aidants n'était pas assez
significative. Nous, ce qu'on croit, ce qui est important… et c'est un outil,
dont la recherche… Et il y a des équipes de chercheurs qui ont fait du travail sérieux, donc on peut s'inspirer.
On ne voulait pas forcer, canner quelque
chose pour le ministère,
on croit que le ministère est capable de faire ses choix, mais on pensait qu'il y avait
une piste là, des gens qui travaillent
depuis de nombreuses années et on trouvait très important qu'il y ait un outil
distinct pour qualifier les besoins des
proches aidants parce qu'on pourrait facilement se retrouver dans une situation
où il y a un proche qui a besoin de soutien,
mais que la personne aidée, elle ne veut pas de soutien de l'État. Donc, le
fait de la rallier automatiquement crée… et j'ai vu ça, moi, des
dynamiques où l'aidé ne veut pas de soin, de support de l'État, et le proche
aidant donc se trouve incapable de se qualifier pour quoi que ce soit au CSSS.
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Est-ce que c'est un outil qui est utilisé par
certains de vos membres ou qui a été utilisé dans certains des
regroupements?
Le Président (M.
Bergman) : M. Hernandez.
M. Hernandez (Carlos M.) : Je vais vous dire une chose, je suis retraité
actuellement, mais j'ai passé 25 ans au maintien à domicile comme
travailleur social. Et puis, comme travailleur social, j'ai participé à
l'élaboration de cet instrument-là et puis
j'ai trouvé ça… j'attendais quand cet instrument-là allait venir parce que,
chaque fois que je rentrais dans les maisons, il n'y avait pas seulement
un malade, il y avait quelqu'un à côté qui avait besoin.
Je
me souviens très bien du temps de la CTMSP qui est passée au SMAF… et puis
qu'aujourd'hui on est là, mais on
propose un troisième pour les aidants naturels. Je crois que c'est un
instrument que ça vaut la peine. En 1980… non, en 1976, quand j'ai commencé, j'avais un instrument de deux pages. On a
passé à la CTMSP, au SMAF. Aujourd'hui, on vous propose un autre instrument, mais celui-ci est spécifiquement
pour les aidants naturels, et je crois que ça va être complémentaire, et
ça va être de qualité pour eux.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous soulignez avec justesse l'importance de la
qualité des services et vous nous dites qu'il faut mettre des mécanismes de contrôle. Quel genre de mécanismes
de contrôle souhaitez-vous pour qu'on puisse assurer la qualité des
services?
Le Président (M.
Bergman) : M. Hernandez.
M. Hernandez (Carlos M.) : Le contrôle… moi, je m'intéresse plutôt au terme
d'«inspection», quelqu'un qui va voir,
réaliser si le service est adéquat pour la personne. Nous… et moi personnellement,
je crois que déjà notre système d'évaluation,
et notre système d'intervention, est assez bien pour ne pas ajouter un autre
contrôle, si on utilise votre terme. Ça veut dire, je ne crois pas que
ça serait pertinent de créer une nouvelle coordination, un nouveau… — comment
tu appelles ça? — un
autre membre qui va contrôler les services et le travail des intervenants
sociaux dans le terrain.
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous-Tardif.
• (15 h 50) •
M. D'Astous-Tardif (Mario) : Notre intervention à ce niveau-là se situe qu'on
va déployer une nouvelle assurance, des
nouvelles façons de travailler, et on croit que les organisations de proches
aidants, les organisations d'usagers doivent être partie prenante pour développer
les critères, les paramètres. C'est dans
ce sens-là qu'on voulait intervenir, c'est ça,
et dans le sens aussi de l'amélioration des mesures qui sont actuellement sur place. Mais vraiment c'est au niveau
d'être partie prenante des paramètres
et du développement, là, de ça serait quoi, les objectifs,
comment on identifie les choses, évidemment. C'est ça.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Dans
l'intention du livre blanc de mettre en place des mécanismes d'accréditation des prestataires, les
critères d'accréditation, vous voudriez être associés à l'élaboration de ces critères-là, du cadre de référence, en tout cas.
M. D'Astous-Tardif
(Mario) : Oui, exactement.
M.
Hébert :
O.K. Alors, je comprends bien.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous
soulignez avec beaucoup de justesse que vous êtes responsables de 80 % des services. Seulement 15 % à 20 % des soins sont assumés par
le financement public actuellement, par l'État, donc, vous êtes responsables du
reste. Soit que vous le faites via
votre travail de proches aidants ou que vous engagez, avec vos propres fonds,
des personnes pour le faire. L'assurance autonomie vise à augmenter ce
financement public et à le faire de façon à ce que les moins fortunés puissent avoir une aide financière plus
importante. Donc, quand vous dites : On s'oppose à la tarification, en
fait il y en a une actuellement,
85 % des services sont tarifés. C'est vous autres qui en êtes
responsables, là, vous le faites en nature
ou en espèces. Nous souhaitons, par l'assurance autonomie, pouvoir augmenter de
façon substantielle cette part de
financement de l'État et de la moduler suivant le revenu, de façon à ce que les
gens qui ont moins de revenus aient plus accès à une allocation. Cette
façon de pouvoir assurer l'équité, est-ce qu'elle vous agrée?
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous-Tardif.
M.
D'Astous-Tardif (Mario) : Ce
que je vous dirais : Quand les AVD ont été tarifées, on y était, et
actuellement... Et moi, dans mon intervention terrain avec le monde,
j'ai vu à de nombreuses reprises que juste le fait que soient tarifés les AVD, les gens retardent d'y
avoir recours. On ne peut pas se retrouver dans une situation similaire pour
les AVQ. Que ce soit la liste
d'attente ou la tarification, pour moi, ça amène la même difficulté. Ça prend
un financement adéquat. C'est un défi, on
en est bien conscients puis on sait que l'argent ne pousse pas dans les arbres,
mais il reste qu'il y a une obligation de résultat, et même une forme
raisonnable de tarification va entraîner… en tout cas, entraîne déjà, au niveau
de l'aide domestique, un retardement d'avoir
recours aux services et, dans certains cas, un refus d'aller les chercher. Donc, dans le cas des AVQ, ça nous
apparaîtrait contre-productif.
Le Président (M.
Bergman) : M. Hernandez.
M.
Hébert : Actuellement, même pour les AVD, dans le PEFSAD, ce qui est demandé même aux gens
qui ont le maximum du supplément de
revenu garanti — les gens
en dessous du seuil de la pauvreté — est un montant important qui peut
limiter l'accès à ces services d'aide domestique. Vous êtes d'accord avec ça?
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous-Tardif, commentaires?
M. D'Astous-Tardif (Mario) : Ah, je veux juste dire que je suis d'accord
avec le ministre, qu'actuellement, oui,
c'est un obstacle.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Je
voudrais passer la... une dernière question avant de passer la parole à mes
collègues. Vous souhaitez que même
les moins de 18 ans soient admissibles à l'assurance autonomie. J'aimerais ça
que vous puissiez m'expliquer pourquoi et quel est votre rationnel là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Boucher.
Mme Boucher (Nadine) : Oui. Merci. C'est très simple. C'est que, pour le
Regroupement des aidants naturels du Québec,
les personnes aidantes sont non
seulement les proches d'un parent en
perte d'autonomie ou encore les proches d'une personne atteinte d'un problème de santé mentale, mais aussi les
parents d'un enfant atteint d'un handicap lourd. Et, à la lumière de ça, bien c'est logique dans la logique du
Regroupement des aidants naturels du Québec que les personnes de moins de 18 ans et leurs proches soient également
éligibles au projet d'assurance autonomie. Puis c'est aussi simple que
ça, pour nous.
M.
Hébert : Avez-vous
l'impression que les besoins... que l'évaluation est similaire pour des gens en bas de 18 ans
que des gens en haut de 18 ans? En d'autres termes, il me semble que le
contexte est extrêmement différent chez une personne de moins de 18 ans que
chez une personne de plus de 18 ans.
Mme Boucher
(Nadine) : Oui.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Boucher.
Mme Boucher (Nadine) : C'est sûr. C'est sûr que les contextes sont
différents, mais il y aura une manière humaine de répondre à ces différents contextes de vie,
différents contextes de différentes personnes qui ont à vivre avec certaines
difficultés et d'encourager le maintien à domicile à la lumière de ça. Donc, pour
nous, c'est logique que les personnes aidantes,
les parents d'un enfant atteint d'un handicap lourd doivent aussi être
considérés éligibles, et aussi leurs enfants, également, dans le cadre du projet d'assurance autonomie. Et, bien,
ça sera de s'ajuster à tout ça et de développer aussi également des
infrastructures qui seront en mesure de répondre à ces différents contextes.
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous-Tardif.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : Du point de vue des proches aidants — puis on s'entend que, là, c'est notre point
de vue — dans nos groupes, la mère qui s'occupe d'un
enfant autiste ou la personne qui accompagne une personne Alzheimer vit une détresse similaire, et, quand
ils échangent et ils partagent, ils se comprennent, ils partagent une réalité qui est la même. Donc, effectivement, dans notre logique, pour ce qui est des
besoins des proches aidants, on ne voit pas pourquoi ça devrait être
traité différemment.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre. Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, madame. Un
petit peu en lien avec ce que vous venez de mentionner tantôt par rapport au frein que peut représenter la
tarification, même pour l'aide à la vie domestique, dans une de vos recommandations vous recommandez que le
programme d'exonération financière pour ces services-là soit fortement
bonifié. J'aimerais ça que vous nous donniez un peu plus de détails.
Est-ce que vous avez
évalué un certain niveau de bonification? Qu'est-ce qui vous semblerait
acceptable?
M.
D'Astous-Tardif (Mario) :
Moi, je vous dirais, regardez, dans l'absolu, ce serait le retour de la
gratuité, mais il faut se positionner
dans le réel, et ce qui est très clair, en ce qui me concerne, c'est que les
seuils actuels sont un obstacle. Il
faudrait travailler avec les personnes aidantes pour voir… ou avec les
personnes demandeuses, les personnes aidées pour voir quels seraient les seuils réévalués. On ne s'est pas arrêtés
pour faire une analyse économique de la chose, mais ce qu'on… Puis, comme je vous dis, dans le monde idéal
qui n'existe pas, on aimerait la gratuité. C'est dans ce contexte-là
qu'on l'inscrit.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste deux minutes.
Mme Proulx : Oui. En fait, ce
que je comprends, c'est que la situation actuelle représente un frein.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : Oui.
Mme Proulx :
O.K., parfait. Et j'ai bien entendu votre message à l'effet que vous souhaitez,
vous aussi, comme d'autres groupes
nous ont dit d'ailleurs, que les proches aidants devraient être considérés
comme des usagers aussi du… notamment dans le cadre de l'assurance
autonomie.
J'aimerais ça
vous parler, dans le temps qui reste, à propos des plaintes. Donc, en
considérant les personnes… les
proches aidants, les aidants naturels comme des usagers, ils auraient aussi
accès à un service de traitement des plaintes. J'aimerais ça que vous nous donniez le portrait actuel. Actuellement,
est-ce que vous, comme regroupement des proches aidants, vous savez ou vous avez un portrait de toute cette question de
gestion de plaintes? Est-ce qu'il y a beaucoup de plaintes? Et est-ce que les proches aidants sont
reconnus comme… Est-ce qu'ils ont le droit de faire des plaintes pour eux,
comme proches aidants? Et qu'est-ce que vous souhaiteriez dans le futur?
Le Président (M. Bergman) :
M. D'Astous-Tardif, il vous reste une minute dans ce bloc.
M.
D'Astous-Tardif (Mario) :
O.K. Je vais essayer d'y aller vite. Je vous dirais, je vais y aller sur des
cas d'expérience de terrain. Je ne
connais pas d'analyse générale. Ce que je sais, c'est que techniquement, même
quand la plainte vient de l'aidé,
c'est un service pour l'aidé, plus souvent qu'autrement c'est l'aidant qui va
le faire, et qui va mener les démarches, et qui va parfois se faire dire qu'il n'a pas sa place et qui va parfois
se faire écouter, selon qui est l'interlocuteur qui est devant lui. Et,
comme il n'y a pas de reconnaissance formelle, ça dépend des pratiques et du
bon vouloir.
Le
Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc du gouvernement.
Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de
Gatineau.
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, bonjour. Merci beaucoup pour votre présentation,
surtout pour un mémoire qui est
substantiel. J'aimerais vous entendre parce que vous avez soulevé quelque
chose, d'entrée de jeu, qui, à mon
avis, est extrêmement intéressant. Vous avez fait le tour des régions, vous
avez rencontré énormément de regroupements sur le terrain. Une question qui me préoccupe grandement, c'est
l'accessibilité des services sur l'ensemble du territoire, parce qu'on parle de l'autonomie pour tous.
L'autonomie pour tous, ça ne devrait pas, à mon avis… le fait d'habiter dans
une région rurale, pardon, ne devrait pas
être un frein au choix que fera un individu de demeurer à la maison et d'avoir
accès à des services à la maison.
Donc,
j'aimerais ça un petit peu vous entendre sur le portrait que vous ont dressé
vos membres un peu partout. Quels
sont les besoins? Quels sont les enjeux auxquels font face vos membres un peu partout? Puis est-ce que
vous avez pu évaluer ce qu'il
manquait, quelles étaient les régions qui avaient besoin peut-être
qu'on leur porte une attention particulière dans le cadre de cette
grande réforme?
• (16 heures) •
Le Président (M. Bergman) : M. D'Astous.
M. Hernandez.
M.
Hernandez (Carlos M.) : Oui.
La question est très bonne. Nous avons fait, disons, une
tournée, et dans la tournée il y a quelque
chose qui est ressorti tout de suite : les aidants naturels, qu'est-ce
qu'ils ont besoin, c'est du répit.
Ça, c'est ressorti tout de suite dans toutes les régions. Donc, le répit, c'était une des bases. Et ce
répit-là est demandé aux centres de services sociaux d'abord et aux organismes
communautaires, mais c'est le répit
qui est la base parce que les aidants
naturels, comme vous le savez, ils sont pris à l'intérieur de la maison
avec des besoins propres à eux et ils prennent soin de quelqu'un qui, à
un moment donné… la maladie les dépasse.
Deuxième
élément, c'est toute la question, comme vous dites, de l'accessibilité. Alors, comment faire souvent, un aidant naturel, pour arriver à avoir un service à la maison? Au tout
début, je me souviens des CLSC, on avait développé ces services à la maison à partir des CLSC, mais, au fur et à mesure que se sont développées les institutions, ces services-là ont été concentrés ailleurs. Donc, pour avoir accès à ces services-là, les
aidants naturels, il faut toujours composer avec la personne qui est à côté, qu'il faut leur donner quelqu'un
qui va venir à prendre soin pour qu'elle se déplace à ce service-là.
Troisième
élément, c'est quand les services viennent à domicile et la qualité des
services. Les problèmes que nous avons,
c'est la continuité des services, et je m'explique. Ça veut dire qu'aujourd'hui, pour venir laver mon père, ma mère, il y a une intervenante qui
vient. La semaine prochaine, c'est une autre intervenante. La semaine
prochaine, c'est une autre intervenante.
Donc, il y a une rotation dans la personne qui vient à donner
un service, qui crée un problème intérieur pour les aidants naturels, parce
que les aidants naturels disent : Je ne peux pas, il faut que je reste
encore à la maison pour pouvoir
expliquer à la personne qui vient où sont les serviettes, où sont les… Alors,
ça, c'est des éléments de pointe que les aidants naturels, ils nous disent concrètement pour les services. Alors,
oui, accessibilité, et là, avec difficultés, services avec
qualité mais avec une rotation qui crée des problèmes à l'aidant naturel.
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : J'aimerais juste rajouter aussi que les
organismes de soutien aux personnes aidantes ont développé un peu partout au Québec, en partenariat avec
les CSSS, souvent avec les EESAD, des fois non, ça dépend des dynamiques régionales, toutes sortes de formules et d'alternatives qui méritent à être mises à contribution, tant et aussi longtemps que ça se fasse dans l'autonomie des
partenaires.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
Quel est l'état du répit? Je vous pose la question, puisqu'il y a quelques
semaines on a eu une commission
parlementaire, en fait à la CAP, où,
pour la clientèle comportant des problèmes de déficience intellectuelle et des troubles envahissants du développement, la question du répit était un enjeu pour les familles. Ce
n'était pas facile, ce n'était pas… il y avait
beaucoup d'attente, de listes d'attente, de gestion de
listes d'attente, et je me demandais si, lors de votre consultation des régions, on vous avait sensibilisés à des problématiques similaires. Et quel est l'état… parce que du répit une fois par année, ce n'est pas du
répit, ou du répit instable, ce n'est pas non plus du répit. Alors, je ne sais
pas si vous avez pu dresser un petit peu un état de la situation sur le territoire.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Boucher.
Mme Boucher (Nadine) : En fait, je vous dirais que, lorsqu'on
peut considérer que les personnes aidantes sont des personnes invisibles, lorsqu'on considère que ce sont des partenaires mais qui
sont invisibles, qu'on ne les reconnaît pas comme étant des personnes aidantes qui ont besoin de services, qui
s'épuisent, qui s'isolent, qui s'appauvrissent à apporter un soutien à un proche avec des limitations qu'ils aiment,
quand on considère que les personnes aidantes sont invisibles, ils ne sont pas du tout considérés. Eh bien,
c'est normal qu'il y ait des personnes aidantes qui développent des
problèmes de santé énormes. C'est même
troublant de savoir qu'il y a des personnes aidantes qui décèdent avant le
proche aidé.
Alors,
pour ces raisons-là, on essaie de faire comprendre que le répit est essentiel
et vital pour les personnes aidantes. Ce
n'est pas pour rien que les deux dernières éditions de la Semaine nationale des
proches aidants — d'ailleurs, elle a lieu la semaine
dernière — aient comme principale thématique le répit, parce que
les personnes aidantes meurent, s'appauvrissent, s'isolent, s'épuisent — dans certains cas, oui, elles décèdent même
avant le proche aidé — pour subvenir aux besoins d'un
proche avec des limitations. Et ça, ce n'est pas normal. Il y a
une problématique à ce
niveau-là qui se doit d'être résolue
avec le temps, parce que c'est inacceptable.
Donc,
en réitérant les demandes comme quoi c'est primordial qu'il y ait du répit pour les personnes
aidantes, on l'a fait dans les deux
dernières années de la Semaine nationale des proches aidants… bien, c'est parce
qu'il y a un besoin réel de répit, et il faut faire quelque chose de
concret et de significatif par rapport à ça.
Le Président (M.
Bergman) : M. Hernandez.
M. Hernandez (Carlos M.) : Oui. Et, ce répit-là, on aimerait bien qu'il soit
bien compris. Nous sommes là face à un
drame humain, et ça, j'aimerais bien qu'il soit bien compris. Les aidants
naturels… ce qui met aujourd'hui dans l'échelle du Québec, c'est que nous avons des hommes et des femmes qui ont
vraiment besoin d'un support. Et le répit, c'est les clameurs d'une société qui vit une série de…
disons, de sacrifices, de stress, de manque de liberté et c'est pour cela qu'on
cherche un peu quelqu'un qui peut nous aider
à sortir ces hommes et ces femmes là de leur maison. C'est ça qui est le
sens du répit. Le répit, c'est une clameur
qu'aujourd'hui… millions de Québécois et Québécoises sont dans la maison et
puis qui ont besoin d'un petit peu de
liberté, un petit peu de qualité de vie. C'est pour cela que le répit, c'est
tout le temps la même chose qu'on entend des aidants naturels et c'est ça
qu'aujourd'hui on veut vous présenter et on vous présente… comme une
clameur des aidants naturels du Québec.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée : Comment vous voyez l'entrée en vigueur de l'assurance
autonomie? Parce que de la façon dont s'est présenté, ce sera par étapes. Et
moi personnellement, je trouve qu'on crée différentes classes de citoyens parce
que l'assurance autonomie serait
disponible, d'abord, pour les aînés, par la suite, pour les personnes ayant des
handicaps, les déficiences
intellectuelles et troubles envahissants du développement. Bref, on y va par
année. Ça peut créer des risques, ça peut créer des préoccupations au
sein des clientèles visées.
Comment
vous la voyez, vous, cette entrée par segments? Est-ce que vous êtes en accord
avec ça? Est-ce que vous croyez qu'on
ne devrait pas faire de distinction quant à ceux et celles qui auront accès à
l'assurance autonomie? Est-ce qu'elle devrait être disponible pour tous
en même temps?
M. Hernandez
(Carlos M.) : Alors…
Le Président (M. Bergman) :
M. Hernandez.
M. Hernandez (Carlos M.) : Pardon. Oui. Je vous ai dit que j'ai travaillé
durant 25 ans dans le réseau et j'ai vu des grandes réformes du réseau : la désinstitutionnalisation du
réseau, après les services à domicile du réseau. Aujourd'hui, c'est une troisième que je crois que… le ministère
et les services sociaux veulent faire une nouvelle réforme. Et, dans les
deux autres, les aidants naturels étaient
absents. Dans celle-ci, voilà, aujourd'hui nous sommes ici, nous sommes
présents et nous, on le dit au
Dr Hébert et au ministère des Services sociaux et Santé, que, si vraiment
on veut réaliser une troisième
réforme qui aboutisse — parce que, les autres, on a eu de la misère à ce qu'elles
aboutissent — s'ils
veulent aboutir à bon port, on vous
dit : On ne peut pas passer à côté des aidants naturels. On est là. Il y a
quelque chose qu'on ne veut pas,
c'est que… comme les deux premières qu'ils ont faites, ceux qui ont, disons,
assumé le travail ou le glissement des
autres deux, c'étaient les aidants naturels, mais aujourd'hui nous sommes regroupés
puis on veut être présents dans cette nouvelle réforme.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste quatre
minutes.
• (16 h 10) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Je
reçois très bien votre message, là, pour ce qui s'agit du répit. Moi, en tout cas, j'ai eu l'occasion de travailler
avec des familles qui avaient besoin de soins, puis il y avait toujours des
aidants naturels.
Vous
savez, il y a deux histoires, hein : il y en a une qu'on voit venir, qu'on
s'implique progressivement, il y a l'autre
également qui arrive, une maladie soudaine, et là toute la famille est obligée
de s'impliquer. Je peux vous dire, ça
change la vie de tout le monde autour, et non seulement des aidants naturels,
mais de la famille également des aidants naturels. Et souvent les gens sont désespérés parce que c'est du
24 heures sur 24. Ils veulent garder les gens à la maison et souvent ils n'ont pas les ressources nécessaires
pour pouvoir les aider. Ça, je pense, en tout cas, que c'est un message que moi, je reçois très bien. Et ça, ça doit se
développer indépendamment de l'assurance
autonomie parce que c'est un grand besoin qu'on a dans notre communauté.
Je
vous amènerais sur un autre sujet. Vous avez parlé de la tarification, qui est vraiment
limitante. Dans le projet d'assurance
autonomie, autant les AVD, les AVQ, il y aurait une tarification qui irait en fonction du revenu de la personne. Ce qu'on comprend également, c'est que, si vous
avez gagné un certain montant, à ce
moment-là, votre évaluation
va faire que vous avez besoin d'un
certain nombre de services, mais, à cause de vos revenus, vous ne les aurez
pas. Et là les gens, théoriquement, parce qu'ils ont des revenus, devraient se payer les services. Si je comprends
votre message, il y a des gens qui, tout simplement, même s'ils
ont les revenus disponibles, probablement n'iront pas chercher les services et
utiliseront encore plus les aidants naturels. Est-ce que c'est ça que vous
voulez nous faire comme message?
Le Président (M.
Bergman) : Messieurs.
Des voix :
Oui.
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : Je vous dirais que ça fait partie des craintes.
C'est ce qu'on a vu se développer avec
la tarification des AVD. Donc, on
n'a aucune raison de croire qu'on ne verra pas ça se développer avec le développement des AVQ.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste
1 min 30 s.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, oui. Bon. Trouvez-vous que c'est important de savoir qui d'entre vous va avoir à payer des montants et à quel niveau vous allez
payer des montants? Parce que, dans le projet, on n'a aucun cadre financier
qui nous dit : Est-ce que c'est à
partir de 30 000 $, 40 000 $? Vous connaissez l'histoire
des gens en CHSLD, hein? À partir du
moment que tu as le moindrement un revenu, moindrement un peu d'actifs,
2 000 $, 3 000 $, la tarification va jusqu'à 21 000 $. Et vous en connaissez,
des couples qui ont dû vendre leur maison, vendre leur condominium ou encore
vendre des actifs parce que, selon les
règles, ils payaient 21 000 $? Et ce n'est pas la responsabilité de
l'autre conjoint de savoir comment ça va fonctionner, il doit tout
simplement acquitter la facture. Vous connaissez ces histoires-là?
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous-Tardif.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : Oui. Juste rapidement. Oui, on a vu des
histoires de même. Là, ce qu'on comprend, on est devant un livre blanc, il y
aura un projet de loi, et c'est clair que — l'expression que j'aime bien — le
diable est dans les détails. Donc, on
espère qu'il y aura consultation sur le projet de loi et là on pourra
intervenir. Pour l'instant, au niveau
du livre blanc, on est plus au niveau des positions de principe.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : M. Hernandez.
M.
Hernandez (Carlos M.) : Oui.
Et aussi j'aimerais bien faire voir que déjà les aidants naturels, ils
mettent sur la table
4,1 milliards de dollars pour le maintien à domicile et j'aimerais qu'on
porte l'attention à d'autres secteurs dans la santé, comme la corporation des médecins, qui peuvent apporter quelque chose à la santé au niveau, disons, économique. Et,
vous savez, actuellement nous avons la corporation des médecins
spécialistes, qui sont en train de donner un bon coup de main, et avec une fondation ils sont en train
de nous donner un coup de main, et chapeau! Mais aussi il faudrait que
cette corporation des médecins se développe un petit peu plus et qu'ils
viennent à nous donner un coup de main.
Les
pharmacies, les pharmaciens, toute la question des pharmacies qu'il y a dans nos CHSLD,
etc., ils devront aussi être conscients que le maintien à domicile est
formé à 80 % par les aidants naturels.
Le Président (M. Bergman) :
Ceci...
M. Hernandez (Carlos M.) : Toute la
technologie, actuellement, et ça veut dire toute la question...
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
M. Hernandez (Carlos M.) : Hein?
Le
Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc de l'opposition
officielle. Maintenant, Mme la députée de Gouin pour un bloc de quatre
minutes.
Mme David : De quatre
minutes?
Le Président (M. Bergman) :
Oui.
Mme David :
D'accord. O.K. Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, bonjour, madame. On
dit souvent que les proches aidants
sont en fait des proches aidantes, dans beaucoup de cas. Avez-vous une idée de
la proportion de femmes?
M.
D'Astous-Tardif (Mario) :
Ah, regardez, on parle de... ça dépend comment qu'on décide de calculer les
chiffres, mais, je vous dirais, entre 75 % et 80 %.
Mme David : Donc, c'est
énorme.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : C'est
énorme.
Mme David : On s'entend au
moins là-dessus.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : On est
plus que s'entendre là-dessus.
Mme David : D'accord.
Mme
Boucher (Nadine) : Et on
évalue qu'il y a une personne sur sept qui est une personne aidante au Québec.
Ça, ce sont les 45 ans et plus aussi
dont on tient compte. On ne tient pas compte des 45 ans et moins. Donc, il
y en a encore plus. Et en effet ce
sont davantage des femmes entre 45 ans et 64 ans souvent qui assument
cette tâche. Donc, il y a une prédominance de femmes proches aidantes
ici.
Mme David : D'accord.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Gouin.
Mme David :
Merci, M. le Président. Donc, ça m'amène à vous poser un petit peu la question
suivante : Où est-ce que vous
tracez la ligne entre ce qu'une société est en droit de s'attendre, disons, des
gens qui aiment leur père, leur mère, leurs
frères, leurs soeurs ou leurs enfants… et donc tout ce que ces personnes-là vont être prêtes à faire, mais le
moment où, là, il faut que ça cesse
et c'est à l'État de prendre le
relai? Puis ça peut être aussi à des organismes communautaires, bien sûr.
Mais où
est-ce que vous tracez la ligne? Et, si je vous pose la question, c'est parce
qu'il me semble, depuis autour de 20
ans, qu'on prend pour acquis et qu'on trouve parfaitement naturel de faire
reposer gravement, lourdement, sur les épaules des femmes finalement ce
qui s'appelle des soins quotidiens à des proches.
Le Président (M. Bergman) :
M. Hernandez.
M.
Hernandez (Carlos M.) : Très
bonne, très bonne question. Moi, j'anime quatre groupes : deux groupes de
personnes avec la maladie d'Alzheimer, des
aidants naturels, et deux groupes qui sont des aidants naturels en général.
Et, chaque fois, la ligne est très
intéressante parce que la ligne, c'est l'aidant naturel qui, à un moment donné…
il la trouve dans le groupe parce que
le groupe le supporte. Mais il y a à un moment donné qu'on le dit :
Écoute, il faut que tu prennes soin
de toi, et c'est à ce moment-là, quand l'aidant naturel, dans le groupe — c'est pour cela qu'elle est très importante,
notre mission — dans le groupe, prend
conscience qu'eux aussi, ils ont un droit à vivre une qualité de vie, c'est à
ce moment-là que la ligne s'impose, à part
de qu'il y a un événement qui arrive tout le temps. Mais c'est très important
que les aidants naturels arrivent à tracer, eux, la ligne, pas
l'institution ni les professionnels.
Voilà
pourquoi c'est très important d'avoir des groupes de support, qui est notre
mission. Et c'est là où nous, on dit : Voici pourquoi on ne peut
être partenaires à ce moment-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. D'Astous-Tardif, il reste une minute à ce bloc.
M. D'Astous-Tardif (Mario) : O.K. Je vais essayer de faire rapidement. Une
autre ligne qui est posée, c'est par l'absence de services.
Veux veux pas,
souvent les gens se retrouvent contraints à aller plus loin que qu'est-ce
qu'ils veulent, parce qu'il n'y en a pas,
d'alternative. Il n'y a pas d'alternative au travail parce qu'il n'y a pas de
mesure de conciliation travail-famille
qui a de l'allure. Il n'y a pas d'alternative dans le réseau de la santé. Les
alternatives dans le communautaire sont
généralement excellentes mais pour ce qu'elles offrent. Elles ne sont pas là
pour se substituer aux obligations de l'État. Donc, la ligne… Et il y a une pression des intervenants pour leur dire…
et de la famille pour dire : Il faut bien s'en occuper. Donc, quand les services ne sont pas là, les gens,
ils dépassent leurs limites, avec les conséquences que ça apporte. Puis,
on s'entend, c'est une responsabilité qui
est partagée et qui demande une politique interministérielle qui couvre
l'ensemble de la réalité des proches aidants.
Il
y a des aménagements à faire dans le soutien à domicile. On est contents que
l'enjeu soit posé. Mais il y en a dans
le travail, il y a les autres acteurs sociaux, qui doivent être interpellés,
patronaux, syndicaux, il y a un grand travail de réforme sociale à
faire, et ça, ça demande minimalement une politique interministérielle.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. M. Hernandez, Mme Boucher, M. D'Astous-Tardif, merci pour votre présentation, merci d'être ici avec
nous aujourd'hui et partager avec nous votre expertise.
Je demande les gens
du regroupement des entreprises d'économie sociale en aide à domicile du Québec
pour prendre leur place à la table et je suspends pour quelques instants
seulement.
(Suspension de la séance à
16 h 18)
(Reprise à 16 h 20)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la
bienvenue au regroupement des entreprises d'économie sociale en aide à domicile du Québec. Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation, suivie d'un
échange avec les membres de la commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin
de vos noms, vos titres, et le prochain 10 minutes, c'est à vous.
Regroupement des entreprises d'économie
sociale en aide à domicile du Québec
Mme Gasse (Marie-Claude) : Bonjour, mon nom est Marie-Claude Gasse, je suis
présidente de la coalition des EESAD.
Je suis aussi la directrice générale de Coup de main à domicile, qui est
l'EESAD située à Rimouski. Il y a
trois réseaux actuellement d'EESAD au Québec,
et on travaille très bien ensemble depuis maintenant cinq ans. Donc, je suis accompagnée par Benoit Caron, qui est le directeur général de La Fédération des coopératives de services à domicile et
de santé du Québec, et par M. André Richard, qui est porte-parole de L'Aile
rurale et aussi le directeur général de Multi-Services, qui est l'EESAD située
à Grande-Vallée, en Gaspésie.
On
a beaucoup, évidemment, entendu parler des EESAD dans les dernières
semaines, donc on apprécie grandement pouvoir
venir vous donner notre vision de la situation. C'est sûr qu'avec le défi que représentent le vieillissement de la population et l'augmentation des besoins qui l'accompagnent, nous croyons nécessaire
d'effectuer à nouveau un virage santé.
Même si nous avons certaines préoccupations quant à la mise en oeuvre de l'assurance
autonomie, elle nous paraît être un
bon moyen d'effectuer ce virage. Les EESAD font déjà partie de la solution et
sont prêtes à accroître leur apport dans
le cadre de l'assurance autonomie. Il
y a 102 EESAD au Québec,
qui sont accréditées par le ministère
de la Santé, dans 17 régions
administratives, plus de 6 millions d'heures de services par année auprès
de 87 000 usagers, 6 800 emplois occupés à 95 % par des femmes, et les EESAD sont toutes des
entreprises collectives exploitées à des buts non lucratifs.
Étant
donné qu'on est des gens qui sommes très connectés sur le terrain, au lieu de
vous lire notre mémoire, que vous
avez tous reçu et que vous avez tous lu, j'en suis convaincue, on a décidé de
vous parler de ce qui se passe réellement sur le terrain, et pour ça je vais laisser mes collègues vous présenter
les enjeux de notre secteur d'activité, les solutions potentielles que
nous vous proposons et aussi les conditions nécessaires à leur mise en oeuvre.
M. Richard
(André) : Donc, bonjour…
Le Président (M.
Bergman) : Alors, M. Richard.
M. Richard (André) : Vous dire d'entrée de jeu que c'est sûr que
l'ensemble des EESAD offre des AVD un peu partout sur le territoire du Québec et que plus de la moitié des EESAD
offre aussi des AVQ, présence, surveillance, répit et ont des partenariats avec des résidences
privées ou d'autres alternatives d'hébergement. Pour nous, pour répondre au
défi du vieillissement, c'est clair qu'il
doit y avoir une complémentarité entre les AVQ et les AVD, ce qui va permettre
possiblement moins d'intervenants et qui va nous permettre aussi d'intensifier
et de rentabiliser les actions en soutien à domicile.
Le
premier enjeu pour les EESAD, c'est sans aucun doute la qualité des services.
On sait que, du côté des AVD, on est
déjà reconnus, mais on sait qu'avec une formation adéquate et adaptée pour nos
préposés — plusieurs
entreprises offrent déjà le PDSB, RCR, et ainsi de suite — cette
qualité-là va être reconnue aussi du côté des AVQ, avec un bon encadrement. Deuxième enjeu, parce qu'on m'avait
dit de faire très vite, prévention et dépistage précoce. Donc, c'est sûr
que nos préposés sont les yeux et les
oreilles du système, ils font partie du quotidien sous plusieurs aspects, là,
de la vie de tous les jours. Ce sont
nos préposés qui peuvent dépister et prévenir. Donc, nous, on est pour le
maintien du PEFSAD pour les clients
n'ayant pas accès à une allocation au soutien à l'autonomie. Troisième enjeu,
sûrement, consolider les EESAD
existantes par un financement adéquat. Juste accrocher, en passant, la loi no
27. Quelle belle opportunité de mettre en
application cette loi-là, tout de suite en partant, avec les EESAD! Et la
quatrième, c'est sûr, participer à la création de richesse collective. C'est sûr que les EESAD favorisent
le maintien prolongé à domicile par l'intensification des services, on
contribue à la vitalité des communautés, et une étude qui avait été réalisée
dernièrement dit que les activités des EESAD
ont produit un avantage social net de 333 millions de dollars en 2011‑2012
et que globalement chaque dollar investi par le gouvernement au Québec dans le PEFSAD… la valeur totale des avantages quantifiables générés par les
EESAD pour l'économie du Québec s'élève à 5,27 $.
Des
solutions : optimiser les services en limitant le nombre d'intervenants;
favoriser le développement d'alternatives d'hébergement, ou les partenariats avec les résidences privées, ou OSBL
d'habitation; mieux encadrer la détection des abus et de la maltraitance; offrir plus de répit personnalisé pour les
proches aidants; et le dernier, bien entendu, je vais quand même le dire comme ça, le fameux chèque
emploi-services où il y aurait possibilité de développer des partenariats
EESAD et chèque emploi-services tout en
respectant le choix de l'usager et en s'assurant d'une offre de services
comparable. Et là on pense qu'il y aurait, là aussi, via le chèque
emploi-services et EESAD, dans ce partenariat-là, une meilleure prestation de
services.
Le Président (M.
Bergman) : M. Caron.
M. Caron (J. Benoit) : Alors, en résumé, je vous dirais que cet
après-midi, en me préparant, il y a une phrase qui me revenait : Pour réussir ce qu'on n'a jamais réussi, il faut
faire ce qu'on n'a jamais fait. Alors, c'est sûr qu'on est à un moment
où il faut changer de paradigmes.
Les
EESAD ont déjà été un changement de paradigmes il y a 17 ans, et on est
enthousiastes à l'idée de répondre positivement à l'invitation qui nous
est faite dans le cadre du livre blanc. On parlait d'optimisation tantôt.
Alors, la reconnaissance des EESAD dans le
projet d'assurance autonomie est, pour nous, un moyen d'optimisation, et
justement de changer les paradigmes,
et d'être peut-être plus efficaces pour faire face à la demande qui va être
présente demain, après-demain et considérablement, là, au cours des
prochaines années.
Le
financement, on en a beaucoup parlé. On a écouté les auditions à la commission.
Le financement est un point qui
revient constamment. On le sait, pour bien réussir ce projet-là, cet ambitieux
projet là, il faut que, bien entendu, les EESAD aient le financement nécessaire pour la formation pour avoir la
capacité d'intervention sur l'ensemble du territoire et de la même façon partout. Il y a également le
financement et la capacité de payer des usagers. Alors, ça, c'est un élément
qui est très important. Une condition de mise en oeuvre, c'est un plan de
développement très bien orchestré entre le ministère
de la Santé et le réseau ou les regroupements des EESAD. On ne croit pas que ça
sera possible de réaliser cet ambitieux
projet là sans avoir un projet de plan de développement bien orchestré. La
formation, on n'y reviendra jamais assez,
on a constaté que c'était une préoccupation généralisée et, c'est normal, on
adhère à cette obligation de formation là. Cependant, là aussi, il y aura besoin de ressources, et c'est une
condition qu'on croit essentielle, là, à la mise en oeuvre, là, du
projet d'assurance autonomie.
On
a parlé d'accréditation. Je l'ai déjà mentionné. Alors, on est favorables à une
accréditation, on l'a mentionné. Et
102 EESAD du Québec sont déjà accréditées dans le cadre du PEFSAD. Alors,
elles sont volontaires aussi pour faire une autre étape dans une accréditation qui concernera cette fois-là les
activités de la vie quotidienne. Les ententes avec les CSSS sont essentielles. Et c'est fondamental que
ce soit une condition peut-être même d'accréditation pour que les EESAD puissent développer leurs paniers de services
aussi bien au niveau des AVD et des AVQ. On le sait, la majorité ont déjà
des ententes avec les CSSS, mais on devra
intensifier ces ententes-là, les élargir à l'offre de services qui sera celle
de demain.
Le maintien de l'aide
financière, ça aussi, c'est un point important, le maintien de l'aide financière
pour les clientèles qui ne seront pas dans
l'ISO-SMAF, alors le maintien des clientèles qui seront âgées, en légère perte
d'autonomie mais qui ne seront pas
dans l'ISO-SMAF. On a besoin d'être financés également pour eux. On a parlé
tantôt de prévention. Alors, on pense que le travail que les EESAD font,
que les intervenants, que les préposés d'aide à domicile font à ce niveau-là est primordial et constitue une
merveilleuse façon de prévention chez les personnes âgées en perte d'autonomie.
Ensuite,
un détail : on parle d'entreprises d'économie sociale en aide domestique,
mais nous, depuis longtemps, on s'appelle entreprises d'économie sociale
en aide à domicile.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, merci pour votre présentation.
Pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : M. Richard, Mme Gasse, M. Caron, bienvenue à cette
commission, merci pour votre mémoire. «Pour réussir ce qu'on n'a jamais réussi, il faut faire ce qu'on n'a jamais
fait.» Alors, je la retiens, celle-là, parce que, pour moi, c'est une phrase qui résume bien tout le projet
d'assurance autonomie, toute la transformation qui est nécessaire pour être
capables d'aller plus loin et de faire les
choses autrement. Alors, merci de cette phrase. Je ne sais pas si elle a une
propriété, mais…
Une voix : Ce n'est pas la mienne.
• (16 h 30) •
M.
Hébert : O.K. Je
voudrais que vous nous expliquiez un peu mieux comment fonctionnent les
entreprises d'économie sociale à l'aide à
domicile. Et quelle est la contribution, par exemple, minimale pour une
personne qui aurait le supplément de
revenu garanti complet, là, donc les personnes les plus pauvres de notre
société, qui font appel à vos services
pour l'aide domestique dans le cadre du PEFSAD? Qu'est-ce que ça représente
pour les personnes qui reçoivent vos services?
Le Président (M. Bergman) :
M. Caron.
M. Caron
(J. Benoit) : On a déjà
parlé que l'aide… le tarif horaire au Québec, là... Puis je demanderais à ma
collègue, Mme Gasse, peut-être
d'intervenir, qui est sur le terrain. Au Québec, là, le taux horaire moyen pour
une heure de services, c'est 20 $. La personne que vous décrivez, le
profil que vous avez décrit va obtenir jusqu'à 13 $ d'aide financière, aide fixe et aide variable, dans le
cadre du PEFSAD. Elle devra donc assumer sept dollars pour chacune des heures. Comme je l'ai déjà mentionné, quand on a
besoin de deux heures, ça fait 14 $. Quand on a besoin de 25 heures, ça
fait une somme inaccessible, impossible à
avoir pour une personne en perte d'autonomie qui a le profil que vous avez
décrit.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gasse.
Mme Gasse
(Marie-Claude) : Bien, je
vous dirais que c'est un peu différent dépendamment des réalités régionales.
Il y a des CSSS qui sont beaucoup plus
impliqués que d'autres, il y en a qui vont payer la cotisation du client, il y
en a d'autres qui ne sont pas
capables de le faire. Pour les entreprises, les tarifs peuvent être différents
aussi. Si je vous donne l'exemple
souvent qu'on donne, c'est l'entreprise qui est située à Tête-à-la-Baleine,
elle, pour aller desservir ses clients ou
même pour aller les faire signer dans le cadre du PEFSAD, il faut qu'elle
prenne l'avion pour se déplacer d'un village à l'autre, donc c'est sûr
qu'à ce moment-là les coûts d'opération sont très différents.
M.
Hébert :
Donc, il y a une iniquité, à travers le Québec, sur le montant qui est assumé
par les personnes, ce qui peut être
un obstacle à l'accessibilité à des services d'aide domestique ou encore même
d'aide... d'activités de la vie quotidienne, là. C'est ce que vous nous
dites.
Mme Gasse
(Marie-Claude) :
Effectivement, et c'est ce qu'on dit maintenant depuis cinq ans. Ce qu'on
remarque, c'est que les entreprises
ont eu des choix difficiles à faire où, pour accoter ne serait-ce que le
salaire minimum, qui augmentait toujours, et que c'était une très bonne chose,
il a fallu qu'on hausse les tarifications, et les subventions
gouvernementales n'ont pas toujours suivi. Donc, on a dû faire le choix
déchirant, des fois, d'abandonner certaines clientèles
qui avaient besoin d'intensité de services ou qui n'avaient plus les moyens de
se payer des services pour pouvoir continuer d'exister et desservir les
autres.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, d'avoir des règles claires au niveau de l'allocation de soutien à
l'autonomie, de la modulation de cette allocation en fonction de la
capacité de payer de l'usager, c'est un pas qui est important à franchir?
Le Président (M. Bergman) :
M. Caron.
M. Caron
(J. Benoit) : Je dirais
qu'il y a la capacité de payer de l'usager, mais, comme on vient de le décrire,
il y a également la réalité régionale.
Mme Gasse donnait l'exemple de Tête-à-la-Baleine. Et, si on regarde la
différence entre le centre-ville de
Québec et Tête-à-la-Baleine, le coût pour l'entreprise, le coût pour l'usager
ne sera pas le même. Alors, il y a
une modulation à faire, oui, dans la capacité financière de l'usager, mais il y
a une modulation à faire aussi dans le coût que devra charger
l'entreprise.
M. Richard
(André) : Et c'est très
important, on croit, de respecter justement ces particularités régionales là,
parce qu'on sait que c'est très différent
aussi d'organiser des services, que ce soit en milieu urbain ou en milieu
rural, où la clientèle est sur un très grand territoire et très
dispersée.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, des grilles tarifaires uniformes à la grandeur du Québec, ce n'est pas
une solution que vous souhaitez?
M. Caron (J. Benoit) : Ce n'est pas les mêmes coûts. Tu sais, le coût
n'est pas le même d'une région à l'autre, et c'est valable pour... Le coût de main-d'oeuvre n'est pas le même, le
coût des déplacements, le coût de l'exploitation n'est pas le même. Donc, d'une région à l'autre, on... Je verrais mal
comment on pourrait avoir un tarif uniforme au Québec.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Certaines personnes devant cette commission ont parlé des entreprises
d'économie sociale avec beaucoup de réserve
sur la qualité des services et la formation des intervenants. J'aimerais que
vous nous... puis que vous puissiez réagir à ces différents commentaires
qui ont été faits à l'endroit des entreprises que vous représentez.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gasse.
Mme Gasse (Marie-Claude) : Je vous dirais que ce qui nous surprend le plus,
c'est de voir que la majorité des intervenants
ont dit qu'au niveau des AVD on faisait des miracles et on donnait des services
d'une très grande qualité. Donc,
notre réaction est de dire : Comment on fait, quand on dessert le même
type de clientèle, pour passer d'un très haut standard de qualité
à : On n'est plus bon du tout? Donc, ça, pour nous, il y a vraiment une
marge.
Quand
on parle de formation, il est faux de dire qu'il n'y a aucune formation qui est
donnée par les EESAD. La majorité des EESAD donnent des très gros
programmes de formation, et je vous dirais que, quand on parle de sonner l'alarme, on forme nos gens dans ce sens-là aussi.
Ce n'est pas n'importe quelle formation. Ça prend une formation adaptée,
terrain, technique et non pas de retourner
nos gens sur les bancs de l'école pendant six mois, pendant un an. Il faut
vraiment les former sur la réalité du
terrain. Donc, qu'est-ce qui fait partie du vieillissement normal? Qu'est-ce
qui fait partie d'une maladie
normale? Quand est-ce qu'on doit sonner l'alarme parce qu'on détecte quelque
chose d'anormal? À qui on doit le faire
et comment on doit le faire? Donc, ça, c'est des formations de base qui
existaient déjà. Le fameux PDSB, principes de déplacement sécuritaire qui sont pratiquement distribués à l'ensemble
du personnel, même ceux qui ne font pas d'AVQ, parce qu'on a un principe de sécurité… Si j'ai une personne aînée ou une
personne qui a un certain handicap, qu'on va aider et qui est prise… je ne sais pas, je dis n'importe quoi, là, mais
qui est prise sur la toilette, par exemple, il faut être capable de la sortir de cette situation-là pour la
rendre confortable. Donc, on doit le faire en sécurité pour la clientèle mais
aussi en sécurité pour notre personnel.
Donc,
pour nous, la formation a toujours été d'une importance capitale. Par contre,
dépendamment des ressources financières
et des subventions que certaines entreprises peuvent aller chercher, bien, des
fois, il y a une limite à la formation qu'on peut offrir.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous avez, au cours des dernières années, établi un
certain mécanisme d'autoaccréditation pour vos EESAD de façon à avoir des standards de qualité. Vous vous l'êtes donné
à l'interne. J'aimerais ça que vous, en quelques minutes, là, puissiez
résumer la démarche que vous avez élaborée.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gasse.
Mme Gasse (Marie-Claude) : Bien, en fait, ce qui est important, pour nous,
c'est la qualité de base. Donc, outre tout
ce qui se passe autour, ce qu'on veut, c'est remettre le client au coeur des
préoccupations. Les entreprises d'économie sociale ont été mises au monde pour ça, pour répondre à un besoin dans
le milieu. Donc, comment on fait pour bien répondre au besoin et pour le faire, comme je le disais
tout à l'heure, sécuritairement pour le client et pour l'employé? Donc, on
s'est nourris de tout ce qui existait
autour. Et on doit aussi dire que nos conseils d'administration sont souvent
formés par beaucoup d'usagers, et la
qualité des services est toujours au coeur de nos préoccupations. Et je sens
que mon collègue Benoit a envie d'intervenir.
Le Président (M.
Bergman) : M. Caron.
M. Caron (J. Benoit) : J'ai eu le plaisir de vous rencontrer la semaine
dernière puis de vous dire que, comme Marie-Claude
le précise, les entreprises collectives, ce sont les usagers souvent qui sont
autour de la table. Alors, ça l'a un effet
d'accréditation au niveau de l'offre de services qui est assez importante. On
l'a précisé, on a un nombre d'heures important
qui a une croissance importante annuellement au niveau des AVQ. Alors, c'est en
réponse aussi à la demande de nos usagers.
Quand
on parle d'accréditation, tout le processus, vous le savez, on ne devient pas
une EESAD parce qu'on le veut bien. On ne croit pas qu'on doive non plus
devenir une EESAD qui offre des AVQ sans préalablement avoir des partenariats, par exemple, avec le centre de santé
et de services sociaux. Et ça doit s'inscrire dans une démarche qui est
portée par l'ensemble des intervenants dans un milieu.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Certains mentionnent que les conditions de travail
dans les EESAD ne sont pas optimales. Comment est-ce que l'assurance autonomie pourra vous permettre de modifier cet
état de situation et d'améliorer vos conditions de travail et de
formation?
Le
Président (M. Bergman) : Mme Gasse.
Mme Gasse (Marie-Claude) :
Très bonne question. C'est moi qui y réponds ou...
Une voix :
Commence.
Le Président (M.
Bergman) : M. Richard? M. Caron?
Mme Gasse (Marie-Claude) : Évidemment, les balises de l'assurance autonomie
ne sont pas toujours claires. On connaît
les grandes prémisses. Comment ça va s'opérer sur le terrain? C'est encore un
peu nébuleux pour nous. C'est sûr que
ça fait cinq ans qu'on se bat pour dire qu'on ne paie pas adéquatement notre
personnel, du moins pas à la hauteur des
responsabilités qu'on leur demande. Malgré tout, je pense que, sans vouloir
être prétentieux, on a réussi à faire des miracles dans certains endroits, et on réussit à donner un service quand
même d'une très grande qualité. Donc, on espère que le financement va être au rendez-vous pour être capables de
consolider les emplois, parce que tout passe par là : pour être capables de donner un service de qualité à la
clientèle, on doit avoir du personnel qui est formé adéquatement et qui, je
dirais, doit être heureux dans son travail.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Quel est l'état des EESAD en termes de recrutement, de rétention du personnel,
actuellement?
Le Président (M.
Bergman) : M. Caron.
• (16 h 40) •
M. Caron (J. Benoit) : Beaucoup d'EESAD qui ont actualisé ou augmenté
leur offre au niveau du salaire ont répondu...
J'ai vu des EESAD, moi, qui n'ont plus de listes d'attente justement parce
qu'ils ont haussé leurs... l'offre au niveau salarial, pardon, ce qui a
eu par contre un effet au niveau de la tarification. Heureusement, ça a
coïncidé, puis plusieurs s'en souviendront,
avec l'augmentation de l'aide variable aux personnes. Alors, à mesure que
l'aide variable du PEFSAD a augmenté,
il y a eu une augmentation de la tarification qui a permis un ajustement des
salaires des préposés.
Alors, où on en est?
On a fait un virage, il y a quelques années, pour être honnêtes, pour
poursuivre l'offre de services. On avait le
choix, à un moment donné, de poursuivre l'offre de services ou de ne plus
avoir les ressources. D'un côté, on a la capacité de payer des usagers; de
l'autre côté, on a le besoin d'avoir des ressources
et de les payer le plus convenablement
possible. Alors, il y a quelques années, on a fait le choix d'augmenter la tarification de façon à avoir les ressources pour répondre à la
demande. La demande a eu une croissance quand même importante.
Il y a
encore énormément de travail à faire. Est-ce que
la situation est correcte actuellement? Non. Est-ce que
les préposés d'aide à domicile
doivent gagner plus demain? Oui, sans aucune hésitation. Et, je vous l'ai dit,
c'est une condition dans le
financement du projet d'assurance autonomie. Si on ne dispose pas des ressources
financières nécessaires pour offrir des conditions de travail
convenables, ce sera un échec.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Et, si
les conditions nécessaires sont là, la capacité de développer votre main-d'oeuvre va être au rendez-vous. C'est ce que je comprends.
M. Richard
(André) : Effectivement.
Le Président (M.
Bergman) : M. Richard.
M. Richard (André) : Oui, effectivement, si on a les ressources financières, le
recrutement va être plus facile, toujours en respectant nos critères. On sait aussi que
c'est peut-être un peu plus facile en milieu rural qu'en milieu
urbain parce que, même du côté des salaires, on est plus compétitifs que ce qu'il y a
sur le marché. Chez nous, il y a des employés qui sont là depuis 1998.
Donc, du côté de la rétention du personnel, ce n'est quand même pas si mal.
Mais, oui, si le financement est là et qu'on
peut offrir des conditions, oui, ça va être plus facile de faire le
recrutement, et, oui, on va pouvoir répondre à la demande.
Le Président (M.
Bergman) : M. Caron.
M. Caron (J. Benoit) : Dans des conditions très difficiles, M. Hébert,
on a réussi à faire des miracles. On sait qu'il y a… C'était avant hier, en 1997, là, ça n'existait pas ce
réseau-là. Le développement de ce réseau-là a permis la création de 6 800 emplois,
6 800 préposés, dans des conditions, on en convient tous, qui ne sont
pas idéales. Alors, on a réussi ça, et ces entreprises collectives là
ont réussi cela. Alors, imaginez-vous, si on nous en donne la capacité, les
ressources, ce qu'on sera capable de faire.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, il vous reste trois minutes.
M.
Hébert : Vous nous
mettez en garde contre l'accréditation d'autres EESAD sur un même territoire.
On a eu d'autres témoignages ici où
on nous mettait en garde contre les monopoles et on nous incitait à pouvoir
donner un choix plus intéressant de prestataire aux personnes. J'aimerais que vous défendiez votre
position et vous nous l'expliquiez, s'il
vous plaît.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gasse.
Mme Gasse
(Marie-Claude) : On a
tendance à croire que, pour être gagnant, on n'a pas avantage à multiplier
les structures. Les structures sont déjà là,
sont déjà en place, et, j'oserais dire... Excusez le terme
que je vais utiliser, je suis
connue pour manquer de nuance. Moi, quand on me dit : On injecte de l'argent et que
l'argent s'en va en structure et ne
se rend pas sur le terrain, ça me donne des boutons. Donc, le peu d'argent qui
est disponible au niveau de l'État, les besoins sont tellement
grands, pourquoi on multiplierait les structures quand on répond déjà à la
demande? Et, pour faire la corrélation,
quand les CSSS ne sont pas capables de répondre à la demande, la solution, ce
n'est pas de créer un autre CSSS à
côté, c'est de s'organiser pour optimiser les services pour être capables de
donner le plus de services possible avec les ressources disponibles.
Donc, c'est ce qu'on propose de faire.
Le Président (M. Bergman) :
M. Caron.
M. Caron
(J. Benoit) : Je vous
rappelle que ce sont des entreprises collectives, on n'est pas des entreprises
privées. L'objectif, ce n'est pas de générer des excédents et de
faire des bénéfices, c'est de répondre à des besoins. Alors, avec ce profil-là, considérant les 102 sites et
les 17 ans d'expertise qu'on a développé à faire des miracles, on pense
qu'on peut faire une bonne job.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre, il vous reste 1 min 30 s.
M.
Hébert : Dernière petite question brûlante. Vous piquez
ma curiosité en mentionnant que vous souhaitez avoir un rôle dans le chèque emploi-services. J'aimerais
ça que vous précisiez quel rôle et, deuxièmement, les partenariats avec les résidences privées. Alors, ces deux éléments
ont piqué ma curiosité, j'aimerais ça que vous alliez un petit peu plus loin.
Le Président (M. Bergman) :
M. Richard, dans une minute.
M. Richard
(André) : Du côté du
chèque emploi-services, bien c'est des partenariats qui existent déjà sur
certains territoires où, par exemple, une personne handicapée qui a
accès au chèque emploi-services a approché l'EESAD, et l'EESAD a enclenché le processus de recrutement avec la personne pour
voir la personne choisie par la personne
handicapée : Est-ce que c'est elle que vous voulez? Oui, elle correspond
à nos critères d'entreprise, elle a passé le processus, elle est devenue une employée de l'entreprise, ce qui fait que la personne n'est pas isolée seule chez elle à
contrôler quelqu'un. Il y a un contrôle de la qualité, et tout ça. Et nous,
on pense que ça, ça pourrait être extensionné et avoir des partenariats
directs comme ça avec les prestataires du chèque emploi-services et les
entreprises d'économie sociale qui pourraient devenir l'employeur tout en
respectant le choix de l'usager. Ça, c'était le premier. Résidences?
Mme Gasse
(Marie-Claude) : Bien, il y
a beaucoup de partenariats actuellement au Québec qui se développent, où les propriétaires de résidences privées sont
parfois limités dans la gestion d'entreprises qu'ils peuvent faire. Donc, les
EESAD ont fait des partenariats où ils vont
dispenser l'ensemble des ressources humaines, donc les AVD et les AVQ. Ça
a encore un avantage quand on parle de formation, d'encadrement de la qualité.
Et, pour le ministère, on pense que l'avantage, la plus-value est que, là, on
fait rentrer des yeux nouveaux. Donc, quand on parle de contrôle d'abus et de maltraitance, il y a différents intervenants qui
passent sur place et qui peuvent sonner l'alarme si jamais il y a des choses
anormales qui se passent.
Le Président (M. Bergman) :
Malheureusement, le temps est écoulé. Pour le bloc de l'opposition officielle,
Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, bonjour, un plaisir de vous retrouver, pour
certains d'entre vous.
Là, je me
sens un petit peu mal de vous poser la question, là, et de faire le
commentaire, mais je ne peux pas m'en empêcher.
Je vous écoute, et vous dites : On a besoin de hausser les tarifs, on a
besoin d'aller chercher un financement qui va répondre davantage aux
besoins sur le terrain, qui va faire en sorte que les préposés qui travaillent
au sein des EESAD seront rémunérés d'une
façon plus adéquate, plus représentative de la charge de travail qu'ils auront
ou qu'elles auront à effectuer. On
souhaite également aller chercher des grilles tarifaires qui vont correspondre
aux réalités régionales. Là-dessus,
je vous suis, là, on s'entend, le transport d'une région à l'autre, ce n'est
pas les mêmes coûts pour les gens. Et
là je pense aux contribuables, là, du Québec, parce qu'à date, honnêtement,
plus on écoute les demandes des différents groupes, plus on écoute les différentes interventions, je me dis :
On arrête où dans ce projet d'assurance autonomie là? Ça va coûter combien? Parce qu'actuellement, avec
les barèmes actuels, on a eu un aperçu la semaine dernière, on s'en
irait autour du 4 milliards. Et ça, c'est sans compter toutes les demandes
qui sont formulées à la commission depuis quelques
semaines. Et je vous écoute puis je me dis : Où est l'intérêt pour la
société que les services soient offerts par les EESAD plutôt que par notre service, par les CSSS si, au bout du
compte, le coût sera le même? Et je vous dis ça, là... j'étais mal à l'aise de
vous poser la question, mais c'est plus fort que moi parce que je suis
persuadée qu'il y a des gens qui se posent la même question.
Actuellement,
les EESAD font un travail, puis, oui, vous avez contribué à la création
d'emplois, oui, vous êtes présents sur le terrain, vous êtes dans toutes
les régions du Québec, vous faites un travail extraordinaire, puis c'est un
travail... le rapport qualité-prix est somme toute fort intéressant. Mais là je
vous écoute, et vos représentations sont à l'effet :
Bien, oui, on veut être partenaires dans l'assurance autonomie, mais il faudra
plus, plus d'interventions, il faudra payer
ci, il faut payer ça. Et là je me dis : Bien, le contribuable, là, il
gagne quoi? Alors, je vous demande de me convaincre et de m'expliquer,
s'il vous plaît.
Le Président (M.
Bergman) : M. Caron.
M. Caron (J. Benoit) : En introduction à la réponse, parce que mes
collègues vont poursuivre, je vous dirais : Pourquoi pas?,
premièrement.
Deuxièmement,
on sait très bien qu'on le fait déjà. On fait des AVD depuis 17 ans, on
fait des AVQ progressivement, il y a
une croissance importante. Comment? Est-ce qu'on va économiser? Le soutien à
domicile, moi, c'est ce qui m'anime autour
du projet d'assurance autonomie. C'est un virage soutien à domicile. On le sait
tous, de quelque endroit qu'on se place, on sait qu'on doit investir dans
le soutien à domicile. Mme Lamarre, de l'AQESSS, vous disait que ça coûtait 90 000 $, une personne qui est hébergée.
On sait très bien, puis plusieurs vous l'ont dit aussi, qu'une personne en
soutien à domicile… quand on aura
dépensé 30 000 $ ou 40 000 $, on aura investi beaucoup, on
aura été très présent dans le soutien à
domicile. Alors, on vient juste de faire une économie de 50 000 $ par
année par personne. C'est un calcul simple, c'est sûr.
Alors,
nous, on croit que le virage soutien à domicile va nous permettre d'économiser
comme État. On ne prétend pas qu'on
doive avoir... parce qu'on l'a déjà fait, puis on réussit assez bien, avec une
bonne différence entre le coût du public et le coût de l'économie
sociale. D'ailleurs, je pense que l'État veut investir dans l'économie sociale.
L'État a adopté une loi, qui est la loi n° 27.
Alors, on pense qu'on est capable de réduire les coûts de l'État puis
d'augmenter la capacité des gens de vivre chez eux, heureux et bien.
• (16 h 50) •
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gasse.
Mme Gasse (Marie-Claude) : J'ai envie de vous répondre que, si vous êtes mal
à l'aise de nous poser la question, on est très à l'aise, nous, d'y
répondre.
Actuellement, ça
coûte plus cher pour une personne de faire le choix de rester à domicile que de
s'en aller en hébergement, et ça, pour nous,
ça n'a pas de bon sens. Donc, Benoit vient de nommer les coûts dans le réseau.
Donc, c'est sûr qu'à domicile le coût
est beaucoup plus faible. J'ai entendu aussi certains autres passages devant
vous, et on parlait beaucoup
d'optimisation de services, et ça, j'ai envie de dire : On a un travail
incroyable encore à faire à ce niveau-là. Je vous donne un exemple très, très simple : il y a des endroits où,
si on ne se rend pas sur place, les gens ne mangeront pas, donc on est sur place, par exemple, sept matins
par semaine. Est-ce que c'est normal en 2013 que, si l'EESAD est présente
sept matins par semaine, on doive prendre
quelqu'un du CLSC, un auxiliaire, pour se déplacer, pour venir faire de la pose
de bas support quand on est déjà sur place? Donc, il y a différents petits
actes qu'on pourrait faire, qui vont beaucoup optimiser
les services et qui vont faire économiser de l'argent aux contribuables. Donc,
on pense qu'on n'est pas la solution au système de santé, mais on est une
partie de la solution. On doit travailler en complémentarité de services. On a
beaucoup, actuellement, d'ententes de
services entre les CSSS et les EESAD. Ces ententes-là et les manières de
fonctionner entre les deux doivent être arrimées.
Je
vous donne un autre exemple. Ils font des comités, par exemple, d'intervention
avant de sortir quelqu'un de l'hôpital
où on va regarder : Est-ce qu'on peut le retourner à domicile ou est-ce
qu'on l'envoie en hébergement? Ils font tout ça tout seuls, en vase clos, et après ça ils nous appellent : Bon,
service B, demain matin, ça me prend 40 heures-semaine dans tel milieu pour être capable de sortir la
personne. Nous, on dit : Pourquoi ne pas nous avoir impliqués à la base au
lieu que, là, on vous explique qu'est-ce qui ne fonctionne pas et que vous ayez
à recommencer ce que j'appelle de la réunionite? Dans ce temps-là, on
recommence quelque chose qui a déjà été fait.
Donc, on doit
vraiment arrimer les choses, s'assurer que la roue tourne encore mieux et
vraiment y aller en complémentarité de services.
M. Richard
(André) : Juste rajouter aussi…
Le Président (M.
Bergman) : M. Richard.
M. Richard (André) : Juste rajouter aussi, revenir sur la complémentarité de services, parce
qu'on pense que c'est là que le
système peut y gagner, et de beaucoup. Si on dit : J'ai quelqu'un qui est
là, par exemple, comme Marie-Claude disait,
pour aller, par exemple, préparer le déjeuner et servir le déjeuner et que la
personne a besoin d'aide pour des bas support
ou, tout simplement, pour un changement de protection, bien ce geste-là AVQ
pourra être facturé par la durée du temps pris pour le faire et non pas
juste pour… Si quelqu'un va seulement pour poser ce geste-là, le coût va être beaucoup plus élevé, car la durée va être plus
longue, incluant le déplacement. Si on est déjà là pour les AVD et qu'on
doit poser certains gestes d'AVQ, on pense
qu'il y a lieu d'optimiser et d'avoir une meilleure utilisation des ressources
autant humaines que financières, même si, Marie-Claude, tu n'aimes pas
«ressources humaines». Excusez-moi.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
Alors, vous dites : Avec une meilleure optimisation des ressources, on va
être en mesure d'économiser puis,
même si on a une augmentation du tarif qui est versé aux EESAD, il y a quelque
chose à gagner pour l'ensemble des contribuables du Québec.
Est-ce
qu'on est prêts, en avril 2014, à se lancer dans cette aventure-là ou
est-ce qu'on a besoin de recadrer des choses, parce qu'on est rendus en
novembre, puis ça va vite?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gasse.
Mme Gasse (Marie-Claude) : J'ai envie de vous dire : Ça dépend. C'est
parce que les EESAD n'ont pas toutes la
même grandeur ou la même grosseur et les mêmes possibilités financières. Donc,
il y a des entreprises qui sont rendues déjà très loin dans ça, et elles sont rendues même plus loin qu'au
1er avril 2014, il y en a d'autres qu'on va devoir accompagner pour leur permettre de développer. Il
y a un frein important quand c'est une petite entreprise qui n'a pas
beaucoup de moyens financiers, l'argent pour faire le développement n'est pas
là non plus. Donc, de là où on parlait tout
à l'heure… ça prend du financement pour faire la formation, pour une remise à
niveau de la formation pour ceux qui n'offrent
pas déjà le service. Donc, pour nous, le fait que l'implantation de l'assurance
autonomie va se faire de manière graduelle
est vraiment une bonne nouvelle. On va devoir intensifier ce qui se fait déjà,
donc il y a certains endroits où on
va pouvoir aller plus vite et aider au développement. Mais, on vous rassure,
l'ensemble des entreprises est d'accord pour faire ce virage-là.
M. Caron (J.
Benoit) : On dispose déjà de…
Le Président (M.
Bergman) : M. Caron.
M. Caron (J. Benoit) : Si vous me permettez? Je
regardais les résultats d'une enquête qu'on a faite sur le développement des AVQ, et c'est entre 1 500
et 1 900 préposés d'aide à domicile qui ont déjà la formation ou une
partie de la formation.
Depuis
la sortie du livre blanc, nous, on est en opération. Alors, on a des rencontres
provinciales, on anime, on accompagne et on soutient les entreprises. On
n'a pas la prétention de pouvoir tout faire. Ce que je veux dire par là, bien entendu — on a parlé de financement tantôt — les entreprises ont besoin d'être soutenues
financièrement parce que c'est
soudainement, là, de développer un nouveau service, c'est de procéder aussi à
des processus de recrutement importants, c'est de l'adaptation aussi de la machine administrative. On a une bonne
machine, elle est efficace. Cependant, il y a des adaptations à faire. Donc, c'est sûr qu'on dit,
nous, dans le mémoire que le financement doit être là très rapidement. On
ne peut pas se réveiller le
1er avril 2014 puis dire : C'est ce matin qu'on commence. Il
faut que ça soit planifié. Dans mon intervention
du départ, on a parlé d'un plan de développement stratégique de tout ça. Alors,
on est en attente. Quand je dis : On
est en attente, ce n'est pas vrai, parce qu'on travaille déjà avec le ministère
de la Santé et des Services sociaux déjà depuis plusieurs semaines, sinon
des mois. Bien entendu, il reste encore beaucoup de travail à faire.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau, il vous reste sept
minutes.
Mme
Vallée : Dernière question : Aviez-vous un portrait de la
situation à travers le Québec, c'est-à-dire est-ce qu'il y a des régions qui ont besoin qu'un effort
additionnel soit accordé? Est-ce qu'on est prêt? Parce que vous disiez qu'il y avait des différences entre certaines
entreprises. Donc, on n'est pas partout au même niveau. À quel endroit ou
dans quel secteur on devra accorder une
attention particulière? Puis est-ce que les EESAD sont présentes vraiment dans
toutes les régions? Je pense au
Nord-du-Québec, je pense à la Côte-Nord. Est-ce qu'on a des entreprises et des
employés en quantité suffisante pour pouvoir répondre aux besoins des
régions?
Le Président (M.
Bergman) : Monsieur... Mme Gasse?
Mme Gasse (Marie-Claude) : On a un portrait actuellement qu'on est en train
de finaliser, qui n'est pas toujours facile
à faire parce qu'on prend une photo un jour mais on est en constante évolution,
et on a des gens qui sont en formation. Outre les capacités financières, je vous dirais qu'un des freins qu'on
rencontre actuellement, c'est là où il y a des arrimages difficiles entre les CSSS et les EESAD. Et, même
si on n'ose pas nommer... il y a certains syndicats qui sont plus compliqués
au niveau terrain, donc il y a certains CSSS
qui n'osent pas transférer certains EESAD. Et je ne devrais pas utiliser le mot
«transférer», parce que, quand on parle avec
le ministère de la Santé — on travaille déjà avec le ministère de la Santé dans un objectif rapproché — on ne parle pas de transférer des AVQ chez
nous mais plutôt de regarder, avec le vieillissement de la population,
avec les besoins qui sont en grandissant, qui devrait s'occuper de quelle
clientèle.
Donc,
les auxiliaires dans les CSSS sont encore très importants, mais, étant donné
que la formation est plus appuyée, bien, probablement qu'ils devraient
se concentrer sur des clientèles qui sont un peu plus complexes, qui ont des
soins critiques, des problématiques
complexes ou des soins en fin de vie et que les EESAD pourraient, à ce
moment-là, donner un coup de main au
niveau des clientèles qu'on dit plus simples. Donc, s'il y a juste un problème
physique, je ne sais pas, si c'est une personne âgée qui a de la difficulté à
rentrer dans le bain ou qui n'est pas capable mais qui a une santé mentale
et qui a toute sa tête, bien c'est beaucoup
plus facile de prendre la relève dans des cas comme ça. Donc, actuellement,
on est en train de développer, avec le ministère de la Santé, comment peut se
faire cette implantation progressive là.
Le Président (M. Bergman) :
M. Caron.
M. Caron (J. Benoit) : On travaille déjà, on l'a dit tantôt, avec
plusieurs centres de santé et de services sociaux. La plupart des EESAD,
la grande majorité des EESAD ont déjà des ententes avec les centres de santé et
de services sociaux. Donc, il y a déjà une
habitude de consommation. Je vous ai dit aussi qu'il y avait une croissance
constante, là, au niveau des
activités de la vie quotidienne et les services d'activité de la vie
quotidienne qui sont offerts par les EESAD. Je vous ai parlé aussi d'un réseau de 102 sites, actuellement avec
une machine administrative qui est efficace, avec des gestionnaires, des spécialistes en ressources
humaines qui sont là. On a des entreprises, vous savez, qui ont
300 travailleurs. Alors, c'est
sûr qu'il y a une machine administrative. Quand tu as 300 travailleurs
dans les... on sait que ce n'est pas une usine avec tout le monde dans la shop en bas, hein, donc ça demande une
organisation du travail qui est assez exceptionnelle puis assez lourde aussi. Imaginez, si vous vouliez
faire la même chose sans ces 102 sites là et ces 102 organisations là...
Le
projet d'assurance autonomie, pour ce qui concerne les AVD, les AVQ et le
soutien à domicile... Notre titre de
mémoire, c'est : Un pilier du soutien à domicile, les EESAD.
Imaginez comment réussir cela sans
les EESAD. Alors, oui, on est prêts.
• (17 heures) •
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : Il vous reste 3 min 30 s.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Un, merci d'être ici, puis on apprécie beaucoup, beaucoup votre travail.
Je
voudrais juste faire un petit correctif, là, parce que, dans ce dossier-là,
il faut mettre de la rigueur. Puis il se dit beaucoup de choses, là, puis, à un moment donné, quand vous vérifiez sur le terrain ou vérifiez les chiffres, ce n'est
pas la réalité. Quand on parle de maintenir quelqu'un
à domicile, ça coûte 20 000 $,
puis on dit : On va prendre quelqu'un en CHSLD, puis on va le mettre à domicile, puis on passe de
90 000 $ à 20 000 $, là, juste pour vous dire, ce n'est pas
vrai, ça, là. 20 000 $ à domicile,
là, c'est des gens avec des profils probablement autour de
deux heures-soins, mais, quand vous
arrivez avec des profils de quatre puis cinq heures-soins, l'expérience a
été essayée, ces gens-là, ça prend du monde 24 heures sur 24 pour s'en occuper. Donc, ça ne coûte plus
90 000 $. D'ailleurs, un des critères, à un moment donné, quand
on veut garder quelqu'un à domicile, puis il
est rendu qu'il nous coûte 150 000 $, la société va dire : Bien,
écoutez, je pense qu'on est peut-être
mieux de l'avoir en CHSLD. Donc, c'est juste pour apporter un correctif, parce
que les gens nous écoutent puis ils
partent avec l'idée : Regardez, qu'on prenne le patient puis qu'on le
mette à domicile au coût de 20 000 $. Ce n'est pas vrai, ça.
Deuxièmement,
les profils sont tellement élevés pour certaines personnes, lorsqu'on parle de
troubles cognitifs, on ne pourrait pas les garder à domicile. Ce n'est
pas réel, là, ce n'est pas possible. L'autre affaire, ça nous prendrait tellement de monde pour les garder à domicile dans
chacun leur appartement qu'on ne peut pas le faire. Il y a du travail à
faire, parce qu'il y a des gens, oui, qui peuvent retourner à domicile, qui
n'auraient peut-être pas dû être admis en CHSLD,
qui… Juste pour vous dire, c'était vrai peut-être voilà cinq, six ans,
c'est moins vrai aujourd'hui parce que tous les CSSS ont augmenté leurs critères d'admissibilité. Puis généralement,
actuellement, les profils, c'est souvent des profils CHSLD puis, s'il n'y en a pas, de profil CHSLD,
s'il rentre parce qu'il n'a pas le profil CHSLD, c'est parce qu'il n'y avait
pas la ressource dans la communauté, pas
nécessairement en soins à domicile mais beaucoup en ressources intermédiaires.
Juste une clarification, parce que, je me
rends compte, il faut mettre beaucoup, beaucoup de rigueur dans ce dossier-là.
Puis, l'autre principe que je veux faire
attention, c'est beau dans l'innovation, puis j'y crois beaucoup, qu'il faut
essayer des nouvelles choses, là,
mais, je rappellerais, puis le ministre va peut-être la retenir aussi,
celle-là, c'est que neuf fois du
temps, lorsqu'on fait des grandes transformations, c'est des échecs soit dans
l'entreprise privée ou l'entreprise publique. Il vérifiera ses données.
Il y a beaucoup, beaucoup d'échecs.
Donc,
c'est pour ça qu'il faut soumettre un projet comme ça à un grand débat. Il faut
retourner chacune des roches, il faut
en discuter. Il y a des points qui sont positifs dans le projet, mais il y a
des points qu'il va falloir qu'on clarifie. Si on ne part pas avec cette idée-là, c'est un peu comme
le soupir que fait le ministre en disant «ce n'est pas vrai, là», ce n'est
pas vrai, là. À un moment donné, il faut
être réaliste. Puis on fera remarquer qu'il y en a eu, des grands échecs, dans
le passé, que les gens après ça se
sont demandé : Comment ça se fait qu'on a été là? Parce que des questions
n'avaient pas été posées.
Ma
question que je veux vous adresser. Les résidences privées veulent avoir une
possibilité d'avoir leurs propres ressources,
ne pas utiliser les EESAD, ne pas utiliser le système public. Êtes-vous
d'accord avec ça, qu'on puisse partager sur le principe du libre choix, qu'eux autres pourraient avoir leurs
propres ressources formées qui respectent la qualité et qu'elles
pourraient, à ce moment-là, donner leurs propres services sans utiliser les
EESAD?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gasse, il vous reste seulement une minute pour
la réponse.
Mme Gasse (Marie-Claude) : J'ai envie de vous dire que, pour nous, le
domicile, ce n'est pas seulement une maison
isolée dans le fond d'un rang, il y a aussi des alternatives à l'hébergement
qui se sont développées, entre autres, en
collaboration avec les offices municipaux d'habitation ou même dans des
résidences privées. Vous êtes d'ailleurs venus voir un monsieur qu'on a sorti du CHSLD et que, pour nous, c'est un
gain. Je vous rassure, les EESAD, au Québec, selon nous, ce n'est pas un
échec du tout, c'est une réussite.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Les EESAD sont une réussite, ça, on ne conteste pas ça, là.
Mme
Gasse (Marie-Claude) : Mais
il y a certains changements importants qui peuvent être des réussites. Donc,
certaines alternatives à l'hébergement
pourraient être développées et coûteraient beaucoup moins cher que de
l'hébergement normal. On ne vient pas
vous dire qu'on peut sortir plein de monde du CHSLD demain matin. Ce n'est pas
vrai, ce n'est pas ce qu'on dit. Ce
qu'on dit, c'est qu'on doit retarder par contre leur entrée en hébergement. Et
souvent les résidences privées ont une
limite à ce niveau-là. Donc, est-ce qu'on est d'accord à ce qu'ils soient
eux-mêmes leurs propres fournisseurs?
Ils vont atteindre la même limite. La différence, c'est que, quand on veut les
garder dans les résidences privées plus
longtemps, les CSSS viennent cogner chez nous puis ils nous disent : Tu
pourrais-tu aller donner des services là parce qu'on doit les maintenir
là…
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Gasse (Marie-Claude) : …on ne
peut pas les envoyer ailleurs, ils ne cotent pas?
Le
Président (M. Bergman) : Alors, malheureusement, le temps s'est
écoulé. Mme Gasse, M. Caron, M. Richard, merci pour votre présentation,
merci d'être ici avec nous aujourd'hui. Et je demande au Regroupement des
offices d'habitation du Québec de prendre leur place à la table.
Je suspends pour quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à 17 h 4)
(Reprise à 17 h 6)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, je souhaite la bienvenue au Regroupement des offices d'habitation du Québec. Bienvenue à
l'Assemblée nationale. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation,
suivie d'un échange avec les membres de la
commission. Pour les fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms, vos
titres. Et les prochaines 10 minutes, c'est à vous.
Regroupement des
offices d'habitation
du Québec (ROHQ)
M.
Chauvette (François) :
Merci. Dans un premier temps, je vais vous présenter une synthèse ou en tout
cas un certain nombre d'éléments qu'on va retrouver à l'intérieur du
mémoire qu'on vous a déposé.
D'abord, je
vais commencer par une présentation de notre regroupement, le Regroupement des
offices d'habitation du Québec. Le
Regroupement des offices d'habitation du Québec, le ROHQ, constitue un vaste
réseau qui s'étend sur tout le territoire du Québec. Son effectif est
composé de 537 offices municipaux d'habitation, les OH, un office régional d'habitation et 10 corporations privées sans but
lucratif reconnues à titre de membres auxiliaires. Les membres du ROHQ interviennent dans la gestion d'un peu plus de
90 000 unités de logement, dont 63 000 logements à loyer modique, les
HLM, et près de 10 000 logements
communautaires. Les offices sont également impliqués dans la conclusion de plus
de 8 000 ententes avec des
locateurs privés dans le cadre du Programme de supplément au loyer. Dans le
cadre de sa mission, notre
regroupement offre des services de soutien organisationnel, de formation et de
représentation aux 3 800 administrateurs bénévoles, dont les
conseillers municipaux, les délégués des municipalités, des représentants des
locataires et des représentants de groupes
socioéconomiques qui siègent au sein des conseils d'administration des offices.
Nous offrons également des activités
de réseautage, de formation et de perfectionnement aux 2 400 employés à
temps plein et à temps partiel
intervenant dans l'allocation de services d'habitation sociale auprès de plus
de 100 000 résidents à travers le Québec.
Le
vieillissement des populations, les opérations de désinstitutionnalisation
ainsi que les politiques du réseau de la santé en matière d'intervention
ont contribué à ce que les logements sociaux au Québec abritent de plus en plus
de personnes âgées en perte d'autonomie, de clientèles aux prises avec des
troubles mentaux ou encore de la déficience physique
ou intellectuelle. Selon les données recueillies par le ROHQ en 2013, la
majorité des logements du parc HLM — 55 % — sont
spécifiquement destinés aux personnes aînées. C'est dans ce contexte que
l'office d'habitation devient un
pivot d'un ensemble de partenariats motivés par la nécessité d'assurer
l'amélioration des conditions de vie des résidents dans la reconnaissance et le respect des compétences
spécifiques à chacun des partenaires. C'est ainsi qu'un réseau de 260 intervenants oeuvrant en soutien
sociocommunautaire est actuellement déployé au sein de notre regroupement
pour agir auprès de résidents en HLM. Un peu
plus de la moitié de ces ressources sont spécifiquement rattachées à des
offices d'habitation. Les autres proviennent
des CSSS — 23 % — ou des organismes communautaires associés au
réseau local de services. Cette toile
d'intervenants témoigne des nombreuses ententes de collaboration impliquant les
intervenants d'habitation sociale
publique et le réseau de la santé et des services sociaux dans des actions de
soutien aux résidents en HLM.
Les offices
d'habitation sont les seuls acteurs locaux en habitation sociale qui disposent
d'un ensemble de moyens pour répondre
aux besoins en logement des populations plus fragilisées. Ils administrent un
parc de logements publics sous l'égide du programme HLM. Ils disposent
d'un ensemble d'unités de supplément au loyer leur permettant de conclure des ententes de location avec des
propriétaires privés. Ils peuvent développer de nouveaux projets de logement
pour des clientèles ciblées dans le cadre
des programmes administrés par la SHQ. Plusieurs réalisations témoignent de
quelque 200 ententes de collaboration avec le réseau de la santé et des
services sociaux ayant cours au sein de notre regroupement.
Dans le mémoire que nous avons déposé, on cite divers exemples d'entente de
collaboration entre des OH, des CSSS et d'autres
partenaires, permettant de maintenir à domicile des personnes âgées en perte
d'autonomie, des personnes aux prises avec des déficiences physiques ou des
troubles de santé mentale.
• (17 h 10) •
D'emblée,
nous pouvons affirmer que notre réseau appuie le projet de déployer davantage de ressources aux soins de santé et aux services à domicile pour les
personnes en perte d'autonomie. Nous estimons également que le financement et la gestion publique d'un tel programme constituent le mode de gouvernance le plus
approprié pour assurer l'accessibilité
équitable à ces services à l'ensemble des citoyens
québécois. Il nous apparaît aussi fondamental que le déploiement des ressources associées à cette prestation de services soit
coordonné au niveau local sur la base d'ententes de collaboration avec des ressources du milieu spécifiquement définies au niveau
des responsabilités et des compétences et inscrites dans la pérennité, le long terme. Enfin, il est important
que les intervenants qui seront impliqués dans le virage proposé à l'égard
de l'organisation de ces services soient
accompagnés par des référentiels permettant de mesurer les impacts, résultats,
retombées de leurs actions pour les bénéficiaires des services et leurs
collectivités.
Nous pensons sincèrement que les cinq conditions
suivantes sont essentielles à la réussite de la démarche proposée : premièrement, augmentation des budgets et ressources du réseau de la santé et des services sociaux
consacrés aux soins de santé et aux
services à domicile; deuxièmement, le financement et la gestion publique de l'assurance autonomie; troisièmement, coordination locale de
la prestation de services; quatrièmement, prestation de services sur la base d'ententes de collaboration spécifiques à
long terme avec des partenaires du milieu; puis, cinquièmement, référentiel de
mesure des impacts et des retombées.
Au-delà de
ces cinq conditions, nous souhaiterions partager quelques-unes de nos préoccupations quant à la mise en oeuvre
de ce projet. Il est essentiel que la réorganisation des services de soutien
pour le maintien à domicile du réseau de
la santé n'ait pas pour conséquence de fragiliser les ententes de collaboration existantes entre le réseau de la santé et des services
sociaux et le réseau de l'habitation sociale. Au sein du réseau des OH, plus de
200 ententes de collaboration favorisent
le maintien en logement de personnes vulnérables — personnes aînées, personnes avec des
handicaps physiques ou personnes aux
prises avec des problèmes de santé mentale — sont actives. On constate une situation très
inégale entre les régions et entre
les territoires de CSSS à ce chapitre. Les succès que l'on observe sont très
souvent davantage liés à la présence d'individus convaincus ou
convaincants que d'orientations ou de liens formels permettant de renforcer et
de préserver des projets d'habitation fondés
sur les besoins des clientèles spécifiques. Malgré les engagements du cadre de
référence sur le soutien communautaire en
logement social, il appert que des financements spécifiquement dédiés à des
objectifs de maintien et de développement
des capacités des résidents en logements sociaux ont été détournés à d'autres
fins sous les pressions de la croissance des besoins régionaux et locaux de
santé et services sociaux.
Il
conviendrait d'associer le soutien communautaire en logement social en
complémentarité des plans de services qui
seront déployés. Le soutien communautaire se distingue des services d'aide à la
personne en supportant des actions s'adressant
à l'ensemble des locataires et davantage destinées à la vie en logement collectif.
Cependant, des interventions de référencement et d'accompagnement vers
des ressources spécialisées, de vigilance quant à la santé, sécurité et
maltraitance, de mobilisation et de sollicitation et de soutien à la vie
quotidienne en font aussi partie. Considérant les conditions socioéconomiques des résidents en HLM, il appert que la
complémentarité des porteurs d'actions collectives et individuelles auprès de ces personnes devrait
être envisagée. Le mécanisme d'accréditation des prestataires de services
devrait tenir compte des particularités des
clientèles et des projets en logement social. Plusieurs organismes ont déjà mis
en place, dans le cadre d'ententes tripartites avec des EESAD et des CSSS, un
niveau de services qui est associé au fondement
même du projet d'habitation sociale. Nous l'avons mentionné précédemment, ce
qui caractérise l'habitation sociale,
c'est justement ce volet de soutien aux locataires. Il faudrait que ces
caractéristiques particulières soient prises en compte dans le
déploiement du panier de services visé par l'assurance autonomie.
Concernant
les aînés en perte d'autonomie, nous ne pouvons passer sous silence l'impact de
la certification des résidents sur le
coût du loyer des locataires habitant les logements sociaux, notamment les
projets développés dans le cadre du
volet 2 du programme AccèsLogis. Les normes associées à la prestation de
services de surveillance notamment auront pour effet d'entraîner une augmentation des charges moyennes de
75 $ à 90 $ par mois pour les locataires des ensembles
immobiliers de plus de 50 logements et d'au moins le triple pour les plus
petits ensembles. Considérant les capacités économiques
limitées des résidents de ces immeubles, une telle avenue conduit les
intervenants locaux à l'abandon plutôt qu'à
l'optimisation de leurs services de soutien. Des mesures compensatoires
relatives à cette problématique devraient être envisagées.
Sur un plan
opérationnel, il sera important de formaliser les liens entre les gestionnaires
de cas, les intervenants sociocommunautaires
des OH et les prestataires de services afin d'assurer une plus grande
efficacité et une plus grande cohésion
dans l'établissement et la mise en oeuvre des plans de services. Il faudra
favoriser la mise en place de mécanismes de concertation territoriale
entre les différents organismes impliqués — les CSSS, EESAD, OH, OBNL et coops
en habitation — afin
d'optimiser les ressources et de mieux répondre au continuum de services en
habitation sociale. Sur la base des
expériences de notre réseau, il ne faut toutefois pas sous-estimer les efforts
requis, au quotidien, dans le travail intersectoriel.
Celui-ci requiert un niveau d'engagement qui doit être absolument orienté vers
des cibles de résultat plaçant les clients au centre des actions et non, comme
on l'observe malheureusement trop souvent, par une instrumentation de la
reddition de comptes desservant des motifs
propres à chacune des parties prenantes. Les partenaires devraient ainsi être associés
à la mesure de la performance et des retombées des plans d'action pour le
maintien à domicile.
En conclusion, les offices d'habitation font
partie de la solution. Il importe que les besoins particuliers des locataires et des offices d'habitation soient
reconnus dans leurs particularités. Il faut aussi que nos partenaires du réseau
de la santé comprennent mieux les limites
mais également les opportunités de notre mission en habitation
sociale. Dans la mise en oeuvre de l'assurance autonomie, nous souhaitons que la Commission de la santé et des services sociaux recommande de reconnaître l'importance de considérer les partenaires entre le logement social et le réseau de
la santé comme incontournables;
formaliser les ententes de collaboration existantes et futures; pérenniser ces ententes;
assurer une évaluation
constante des besoins et des ressources associées à la prestation de services
ou aux ententes de collaboration;
proposer une réponse territorialisée
concertée et une mutualisation des ressources; puis, finalement, évaluer, en concertation avec les partenaires, les retombées
sociales et économiques des interventions de maintien à domicile.
Le Président (M. Bergman) : Merci, M. Chauvette, pour votre présentation. Collègues,
avant de commencer les échanges, y a-t-il
consentement afin de permettre à la députée de
Groulx de participer à cette séance? Est-ce
qu'il y a consentement?
Des voix :
…
Le Président (M.
Bergman) : Consentement?
M.
Hébert :
…est membre de cette commission.
Le
Président (M. Bergman) : Non, mais on a fait le remplacement ce matin. Alors, pour être corrects, on doit
avoir votre consentement, M. le ministre.
M.
Hébert : Ah, O.K.
Nous sommes très heureux de revoir la députée
de Groulx. Nous débordons
d'allégresse.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Avec plaisir, puis on s'ennuyait d'elle.
Des voix :
Ha, ha, ha!
Le Président (M.
Bergman) : Alors, collègues, pour le bloc du gouvernement, M.
le ministre.
M.
Hébert : Merci beaucoup, M. Chauvette, M. Robitaille, de votre mémoire. Comme vous le savez,
l'assurance autonomie vise à redonner aux personnes âgées une première
liberté fondamentale qui est celle de choisir là où elles veulent vivre, et, pour 100 000 de ces personnes âgées, elles ont choisi
de vivre dans vos établissements, dans vos habitations. Il fut une
époque que j'ai connue, où la perte d'autonomie était un critère d'exclusion,
sinon un critère d'expulsion des habitations, des HLM. J'aimerais ça que vous
nous disiez l'évolution des HLM et la population que vous hébergez actuellement
et qui peut être en perte d'autonomie.
Le Président (M.
Bergman) : M. Chauvette.
M. Chauvette
(François) : On a, depuis quelques années, comme on l'a mentionné dans
le texte, là, avec le vieillissement des
populations, puis tous les changements, puis l'évolution dans les politiques du
réseau de la santé, de plus en plus de clientèles qui ont une perte
d'autonomie qui s'alourdit, dans nos logements.
Il
y a comme deux niveaux de personnes qu'on rencontre. Bon, on a des gens qui ont
une perte d'autonomie, qui se compare… qui vivent à domicile dans les logements
des offices d'habitation, qui se compare à ce qu'on voit dans tous les autres types de logement, là, en lien avec le
maintien à domicile traditionnel. Bon. Donc, on a des intervenants qui viennent des centres de santé, des EESAD, des
organismes communautaires, qui permettent de pallier les incapacités de ces
personnes-là puis de les maintenir à
domicile le plus longtemps possible. Ce qui est en train de se développer, je
dirais, depuis principalement, là, le début des années 2000, c'est des
clientèles qui ont des pertes d'autonomie importantes, des clientèles que, traditionnellement, on retrouvait hébergées dans des
résidences privées, dans des RIRTF ou même en hébergement. On a des projets. Bon, il y a eu, dans un premier temps, ce
qu'on appelait, à l'époque, les projets novateurs qui ont permis de développer des actions, des
logements avec des ressources, avec des heures-services assez poussées, qui
permettaient à ces gens-là d'être maintenus
dans leurs résidences. On a également des projets, dans le cadre de différents
programmes comme AccèsLogis, qui permettent
de développer des résidences avec une supervision qui devient de plus en plus lourde. On a même des offices qui sont
impliqués dans des résidences qui s'apparentent beaucoup à des résidences
intermédiaires, quand ce n'est pas carrément
des résidences intermédiaires qui sont gérées par des offices d'habitation.
Donc,
les offices sont, depuis quelques années, de plus en plus impliqués avec des
clientèles qui sont hypothéquées lourdement.
Puis là on parle de personnes âgées, mais on pourrait parler aussi de personnes
avec des déficiences physiques. Je
pense à un projet, au Saguenay, où on a des personnes… déficiences physiques
très lourdes qui, dans d'autres endroits, habituellement sont envoyées dans des CHSLD mais qu'on maintient dans
des résidences, dans le cadre d'un programme AccèsLogis, avec une collaboration de la coop de services à domicile et
du centre de santé… des gens qui sont très hypothéqués mais qui ont une
qualité de vie intéressante à l'intérieur de logements.
Donc,
c'est une place, c'est un créneau qu'on développe de plus en plus dans les offices,
tant pour les personnes âgées en
perte d'autonomie que les clientèles avec des déficiences physiques
intellectuelles et troubles de santé mentale, avec des partenaires. Parce qu'évidemment les offices, on n'est pas des
prestataires de services comme tels, hein, la majorité du temps, là,
donc on s'associe à des partenaires, en particulier dans le réseau de la santé,
pour que les services soient dispensés, en
plus des partenaires autres, comme les EESAD, en particulier. Ils sont très
actifs, là, dans plusieurs endroits.
Le Président (M.
Bergman) : M. Robitaille.
• (17 h 20) •
M.
Robitaille (Denis) : Juste
un complément d'information. Puis, si vous permettez, avec tout le respect, M. le ministre, je vais vous reprendre.
Les résidents
HLM ne choisissent pas de résider en HLM, c'est un parcours de vie qui les
amène là. Et c'est ce qui nous amène
à travailler dans le sens du maintien
à domicile, notamment,
puisqu'il y a une masse critique : 55 % du parc de logements
est destiné à des personnes âgées, de plus en plus âgées. Au moment où ce
parc-là, dans son âge d'or, pour les personnes âgées a été créé, entre
1980 et 1993, avant le retrait du gouvernement fédéral du financement, c'étaient des personnes âgées autonomes, et,
effectivement, vous avez très raison, l'âge d'entrée dans un HLM était de
55 à 65 ans. La moyenne d'âge en HLM
aujourd'hui, une personne âgée, c'est autour de 78 ans. On est dans les barèmes
qui nous préoccupent au niveau du maintien
en autonomie. Et c'est justement parce que ces gens-là ne font pas le choix
d'aller en HLM. C'est des conditions, des
parcours de vie qui les amènent là, avec des conditions, d'abord, économiques
très préférentielles puis après au niveau de
l'accompagnement, qui sont préférentielles… et qui a une masse critique, qui
a amené les offices à s'inscrire dans une
stratégie immobilière sociale, finalement. Alors, ce qui fait qu'à… Mais par
contre il y a des barrières
architecturales qui nous contraignent en termes de sécurité, d'évacuation, de
capacité, de maintien, il y a notre
mission qui nous interpelle. On fournit du logement, pas des lits — c'est très important, c'est du logement chez
nous — mais les gens sont conscients qu'ils ont une
capacité d'offrir un continuum résidentiel, et c'est là-dessus que les offices
se sont, je pense, démarqués avec différents programmes.
Mais aussi,
dans des initiatives de rénovation du parc HLM à Lévis, ça a fait en sorte que,
bon, dans leur parc, ils ont fait des
opérations tiroirs et ont concentré l'édifice qui était le plus adapté pour
favoriser le maintien à domicile à faire
des transformations de bâtiments pour y accueillir puis y sécuriser des gens.
Mais, pour faire ça, ça ne prenait pas juste
l'accord de la Société d'habitation du Québec, ça prenait une entente, un appui
des réseaux de la santé, des organismes communautaires. À Drummondville, à côté du HML classique, ils ont
construit un AccèsLogis, un passage entre les deux, puis il y a une
EESAD qui vient donner de l'aide à la vie domestique, des soins en AVQ pour le maintien
à domicile. À Victoriaville, bien ça a été
un projet plus achevé, vraiment en continuum avec le réseau de la santé dans le
cadre d'un projet novateur. Et ce
sont des acteurs clés, mais sur lesquels il y a déjà des ententes qui vont dans
le sens du maintien à domicile.
M.
Hébert :
Donc — je suis
très heureux que vous me repreniez — c'est la continuité de la vie de la
personne, et je suis extrêmement
heureux de voir qu'on peut accompagner la personne, en dépit d'une perte
d'autonomie, dans vos maisons. Et on
évoque souvent le modèle danois, hein, où 73 % des budgets vont au soutien
à domicile, où il y a très peu de
CHSLD tels qu'on les connaît aujourd'hui et où cette formule d'habitation même
municipale permet d'accueillir des gens
même en lourde perte d'autonomie, même avec des problèmes cognitifs. Le fait
que ce soient des résidences collectives fait en sorte qu'on est
capables d'accompagner à domicile ces gens-là sans nécessairement séparer des
couples, par exemple, permettre que des couples puissent continuer à vivre dans
ces habitations, même si l'un des deux n'a pas de perte d'autonomie. Et je pense que c'est des modèles extrêmement
intéressants que l'allocation de soutien à l'autonomie, telle qu'incluse dans l'assurance autonomie, va permettre
de voir émerger et même se développer davantage, parce que, là, on donne
les moyens aux gens d'avoir des formules novatrices, comme celles que vous avez
évoquées tout à l'heure.
J'aimerais
que vous me parliez un peu plus des intervenants sociocommunautaires qui sont
dans vos habitations. Alors, quel est leur rôle? Qu'est-ce qu'ils font,
exactement? Quel est leur mode d'intervention auprès des résidents?
Le Président (M. Bergman) :
M. Chauvette.
M.
Chauvette (François) : Ça
fait référence à un cadre de
référence, justement, qui a été convenu entre le ministère de la Santé, les offices d'habitation, la SHQ, qui
permet de déployer des intervenants à l'intérieur des offices d'habitation,
qui ont pour but de soutenir la vie communautaire qui existe, là, dans ces
bâtiments-là.
Quand on
parle de vie communautaire, bon, c'est au sens large, il y a différentes
facettes dans ça. On fait affaire à une
clientèle qui est vulnérable, c'est des gens qui sont défavorisés
économiquement, mais, de plus en plus, on a affaire également à des gens qui sont défavorisés à toutes
sortes de niveaux, là, que ça soit en termes de perte d'autonomie liée au
vieillissement, que ce soient des gens qui ont des problématiques sociales, des
problématiques de santé mentale, des familles
en difficulté, donc des gens qui, de plus en plus, sont dans le besoin. Avec
les intervenants sociocommunautaires, on
fait du travail de proximité, un peu comme du travail de rue, mais à
l'intérieur des offices d'habitation, avec différents modèles, différents types de fonctionnement. C'est
des gens qui vont permettre à des personnes qui ont des difficultés
particulières de réapprendre à vivre en communauté, de vivre en société; des
personnes, des intervenants qui vont développer
des activités qui vont stimuler les comités de résidents, qui vont les amener à
travailler sur des projets, comme développer
des petits jardins communautaires, toutes sortes de petites activités qui vont
favoriser la vie en communauté; des
personnes qui vont aussi permettre de dépister des individus qui présentent des
problèmes particuliers et de les référer aux ressources appropriées; des intervenants qui vont… bon, dépendant
des endroits, dépendant des intervenants qu'on a, il y a des gens qui ont un volet clinique qui va
les amener même à intervenir cliniquement avec des personnes qui ont des
problématiques.
Donc, c'est
un ensemble de personnes qui sont, comme je disais tantôt, dans un contexte de
travail de proximité, qui permettent
d'améliorer la qualité de vie des personnes qui vivent en logement social par
différents moyens de travail de
proximité qui peut être mis à leur disposition par le biais d'ententes. Parce
que ça, c'est très, très, très important. Ça se fait beaucoup par le biais d'ententes entre le réseau de la santé et les
offices d'habitation. D'ailleurs, une partie importante des intervenants qui font
ce travail-là provient du réseau de la santé. Ils sont engagés et payés par le
réseau de la santé qui travaille en collaboration avec les offices d'habitation.
M.
Hébert : Merci.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Nous avons
entendu, tout à l'heure, des représentants des entreprises d'économie sociale
nous faire part de leur ouverture à établir
des partenariats avec des résidences privées. Est-ce qu'il est envisageable
pour vous d'avoir — et
en avez-vous déjà? — des
partenariats avec des entreprises d'économie sociale?
M. Chauvette (François) : Oui.
M. Robitaille (Denis) : Oui, mais
pas avec des EESAD.
Le Président (M. Bergman) :
M. Chauvette.
M.
Chauvette (François) : Oui.
On a à plusieurs endroits... Quand tantôt je mentionnais des projets qui
touchent des personnes en perte
d'autonomie à différents niveaux… souvent les entreprises d'économie sociale
sont impliquées directement avec la
clientèle. Il y a des ententes formelles — dans bien des cas, c'est informel — où ces organisations-là sont
directement impliquées avec la clientèle. On en voit beaucoup, là. Je dirais
qu'une partie…
Une voix : ...
M. Chauvette (François) : Pardon?
M.
Robitaille (Denis) : Oui,
j'allais glisser dans l'oreille de mon président que la presque totalité des
ententes de service sont avec des
coopératives de services à domicile, des EESAD, donc ce réseau communautaire là
qui est… puis qui, par nature, de
toute façon, est complémentaire à l'intervention que les offices comme… à la
fois comme intervenant mandataire de
logement social public mais aussi OBNL de logement social, parce qu'ils ont
aussi ce statut-là, dans tous les projets qui ont été développés en
AccèsLogis, sont là.
Peut-être juste revenir sur le soutien
communautaire. L'élément marquant du soutien communautaire, on le déterminait dans notre mémoire, c'est
l'intervention à stabiliser la vie collective, parce que, je reviens là-dessus,
les gens en HLM, ils ne choisissent
pas d'y vivre. Tous les autres citoyens choisissent. Même les gens qui
bénéficient de programmes de
supplément au loyer, ils ont un certain choix en termes de logement, mais ce n'est
pas le cas des gens qui sont en HLM.
Alors donc,
il faut apporter un soutien à cette vie collective là qui est obligée, et c'est
là que se prend l'essence du soutien
communautaire. C'est moins une aide à la personne pour la maintenir en
logement, c'est un soutien à la personne pour la vie collective, puisqu'elle a à… je ne dis pas «à la subir», ce
n'est pas le cas, mais c'est un élément qui est assez marquant dans l'intervention au programme de
logements publics, qui n'est pas particulier au Québec. D'ailleurs, hein, en
France, en Belgique, partout, l'un va avec
l'autre, c'est la poignée de porte et la poignée de main, hein? On n'arrête pas
de le dire, là, nous, mais ça va ensemble en logement social.
• (17 h 30) •
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre? Mme la députée de Sainte-Rose. Il vous reste
3 min 30 s.
Mme Proulx :
Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Bien, en lien avec ce que vous
venez de dire, est-ce que le modèle
des coopératives d'habitation qui sont aussi du logement collectif, qui peuvent
avoir un impact quand même intéressant
sur la vie des personnes qui décident, cette fois-ci par choix, d'aller vivre
dans une coopérative… Est-ce que vous pensez que le logement social
pourrait s'inspirer du modèle des coopératives d'habitation?
Le Président (M. Bergman) :
M. Chauvette.
M. Chauvette (François) :
Absolument. On a plusieurs coopératives d'habitation qui sont impliquées à ce niveau-là également. Puis, comme on l'a mentionné
tantôt, on trouve très important, à plus forte raison, que ce soit que les coopératives d'habitation puis les organismes…
les OBNL qui font du logement social. On milite beaucoup en faveur d'une concertation entre nos trois réseaux. On
fait tous du logement social avec des façons différentes, des besoins
différents, mais on a beaucoup de
points communs qui se recoupent puis on vit dans des mêmes territoires. Donc,
on a intérêt à mettre en commun nos
expertises, à se coordonner, à s'organiser plutôt que de travailler en
compétition les uns avec les autres.
Donc,
effectivement, les coops d'habitation, ça fait aussi partie de solutions mais
avec un modèle qui est centré sur le
modèle coopératif. On s'entend qu'il y a des limites par rapport à ce modèle-là
en lien avec des personnes souvent en
perte d'autonomie. Il y a des mixtes qui peuvent être faits, il y a peut-être
des ententes qui peuvent se faire entre les coops, puis les offices
d'habitation, puis le réseau de la santé, mais, là aussi, il y a de la place,
là, pour faire des projets intéressants.
Le Président (M. Bergman) :
M. Robitaille.
M.
Robitaille (Denis) : Bien,
ce serait juste un complément, d'une part. La participation citoyenne à la
gestion des offices d'habitation, elle
est là, il y a 3 500 administrateurs bénévoles qui sont au conseil
d'administration des 543 offices. La
presque totalité des représentants des locataires, ce sont des personnes âgées,
notamment, qui sont très, très impliquées, très actives dans leur
milieu. Il ne faut pas tomber dans l'inverse de la problématique.
Donc, il y a
une participation citoyenne à la gestion des offices qui est importante, d'une
part. Puis, d'autre part, je dirais
qu'au Québec on a cette chance-là, il y a un succès québécois, là, historique
en matière de logement social, et ce succès-là,
il fait en sorte qu'il n'y a personne qui a un pôle. La vérité n'est pas dans
le logement social public, la vérité n'est
pas dans les OBNL d'habitation, la vérité n'est pas dans les coopératives
d'habitation puis la vérité n'est pas dans le programme d'aide de
soutien à la personne en logement privé, mais la vérité est dans le fait qu'on
a tout ça dans notre jeu de cartes. Historiquement, on a maintenu tous ces
leviers-là, qui sont importants en fonction des types, des caractéristiques des clientèles, des
besoins des milieux, des particularités d'engagement, et c'est ça qui est
gagnant. Il faut prôner une certaine
concertation entre les acteurs, coordination. On parlait d'optimisation tout à
l'heure. C'est vrai aussi à ce
niveau-là. Et ça, nous, on est absolument ouverts, le réseau. D'ailleurs, il y
a des réalités concrètes à ce niveau-là. Il y a une entente spécifique en Chaudière-Appalaches, par exemple, sur le
soutien communautaire à laquelle sont impliqués tous nos réseaux de partenaires, et les trois réseaux — coops, OBNL, offices — travaillent au sein de cette entente-là en
complémentarité. Donc, oui, il y a des réalités, et je pense que c'est
là-dessus qu'il faut capitaliser, sur ces acteurs-là.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le
député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. J'ai beaucoup aimé
votre explication sur la diversité qu'on doit avoir au niveau de l'offre de services en logement. Moi, ce que je
constate, c'est… On rencontre des gens. Souvent, ils habitent dans des endroits où ils n'ont plus le moyen de se payer
des appartements qui sont décents, ils n'ont pas les revenus nécessaires, ils ont souvent l'isolement
également. Et ils font une demande d'un logement à loyer modique et,
quand ils sont acceptés, ils améliorent beaucoup leur qualité de vie, et ça, je
peux vous dire que, pour nous, là, c'est quelque chose de très, très, très
important qu'on veut maintenir, c'est certain.
Puis, comme
vous dites, puis j'accède à ça, quand quelqu'un a les revenus suffisants pour
se payer un bon logement, il ne fera
pas affaire avec vous. Ça va être les plus démunis, ces gens-là qui… Au fond,
si ce n'était pas de l'offre de services en HLM avec les loyers modiques, ces gens-là seraient dans des
appartements probablement désuets, vétustes puis dans lesquels ce n'est
pas agréable de demeurer. C'est ça, votre clientèle?
Le Président (M. Bergman) :
M. Chauvette.
M.
Chauvette (François) : Oui,
c'est notre clientèle. C'est une clientèle de personnes démunies, des personnes
qui, comme disait M. Robitaille tantôt, ont
un parcours de vie qui ne les amène pas nécessairement à choisir, là, à choisir
les logements sociaux mais qui les amène
vers là parce que c'est une alternative
qui leur permet d'avoir une qualité
de vie, de ne pas être coincées au niveau financier mais, de plus en
plus aussi, pour des gens qui sont démunis d'une façon importante, là. Puis là,
si on revient à la question des gens qui sont en perte d'autonomie, de plus en
plus, ces gens-là retrouvent dans le logement social un milieu de vie qui est plus adapté à leur situation
que dans un contexte de logement, là, dans le domaine privé. Donc, on
constitue une réponse qui est adaptée, là, aux besoins de la communauté.
Le Président (M. Bergman) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'accord. D'ailleurs,
moi, j'y crois beaucoup, je crois dans la
diversité. Ça nous prend des résidences privées qui peuvent être très
dispendieuses, moyennement dispendieuses, à prix modique. Ça prend également des installations comme les vôtres pour
permettre à ces gens-là d'avoir une qualité de vie. Un des principes que moi, j'ai, puis on en parle
souvent, c'est… une chose des plus importantes pour quelqu'un, c'est son logement. On pense, pour nos enfants, nos parents
ou pour nous-mêmes, d'être bien logés, c'est déjà une condition
essentielle.
Si vous
évaluiez les gens qui auraient le potentiel d'aller dans votre organisation,
versus l'offre de services que vous offrez, la différence entre le
besoin puis l'offre que vous faites, ça serait d'à peu près combien de
logements?
M.
Robitaille (Denis) : Ah,
écoutez, de façon très simple, M. Bolduc, je vous dirais, il y a 38 000
personnes sur les listes d'attente de
HLM au Québec actuellement, mais, sur ces 38 000 là, c'est majoritairement
des personnes âgées, notamment en
région, hein? On comprend que c'est là que sont les besoins. Quand on regarde
les… qu'il se construit à peu près,
en moyenne, 3 000 unités de nouveaux logements via le programme
AccèsLogis, la grande faveur est sur des volets de programmes qui
accueillent des personnes âgées en légère perte d'autonomie, en perte
d'autonomie ou des clientèles plus ciblées,
notamment, en santé mentale. Donc, tous les groupes, hein, réclament à hauts
cris des engagements à long terme sur la construction de nouveaux logements.
Des engagements de 3 000, 3 500 unités par année, là, on serait
capables de livrer ça sans trop de
problèmes, tous les réseaux confondus, là. Je me permets de parler pour tous
les réseaux, sans aucun problème, à ce niveau-là.
Puis, en HLM,
bien on a une réalité d'environ 35 000 logements spécifiquement dédiés aux
personnes âgées. Il y a aussi un
certain potentiel en région. Vous savez qu'il y a des limitations qu'on a en
vertu des ententes fédérales-provinciales sur la transformation des parcs de logements. Je donne des exemples
concrets. Par exemple, à Matane, en Gaspésie, où les parcs
sont construits historiquement dans le cadre du Bureau d'aménagement de l'Est
du Québec, destinés à des familles, aujourd'hui
les besoins, c'est pour des personnes seules âgées de plus de 50… 60 ans,
souvent des personnes seules qui présentent
des problèmes de limitations physiques ou d'autonomie aussi, et là il y aurait
des possibilités de transformer aussi
ces parcs-là puis de les faire évoluer, ce qu'on n'a pas actuellement comme
possibilité dans le cadre des ententes qu'on a avec le fédéral. Mais,
oui, il y a de la marge de manoeuvre à ce niveau-là, effectivement.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président.
Actuellement, avant même l'apparition de l'assurance autonomie, si je comprends bien, quelqu'un peut
vieillir dans vos logements parce qu'il va y avoir soit des soins à domicile
venant du CSSS, il va y avoir également les
entreprises d'économie sociale qui vont aller donner des services. Ce que
vous nous dites aujourd'hui : C'est déjà comme ça.
M. Robitaille
(Denis) : Bien, il y a déjà plusieurs ententes, on les a citées dans
notre mémoire avec plusieurs exemples, des
ententes avec des CSSS notamment ou des organismes communautaires, favorisant
le maintien à domicile des personnes
âgées, ou de création de projets qui favorisent le maintien à domicile des
personnes vieillissant en HLM, oui.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Et
puis, si je comprends bien ce que vous dites, si on avait plus de ressources dans les soins à domicile, on serait
peut-être capables de faire plus, indépendamment du modèle, parce qu'il existe déjà les entreprises d'économie sociale.
Les CSSS sont en place. Il y a probablement déjà une évaluation des besoins
de vos clientèles. Il y a probablement une
clientèle qui auparavant, avant qu'on développe les soins à domicile, devait
aller soit en ressources intermédiaires ou
en CHSLD, qui actuellement est capable de demeurer dans vos logements, ce
qui fait qu'il y a un alourdissement au niveau de vos gens qui demeurent dans
vos logements.
Le Président (M.
Bergman) : M. Chauvette.
• (17 h 40) •
M. Chauvette (François) : Puis il y a encore de la place pour du
développement. Il y a deux choses. Bon, d'une part, dans les conditions qu'on a mentionnées dans notre mémoire, oui,
l'augmentation du financement pour soutenir le maintien à domicile… il est important, mais, je vous dirais, juste en
faisant un travail de meilleure complémentarité, de meilleur partenariat dans différentes régions,
parce que c'est très inégal au Québec… Il y a des régions où on a des projets
numéro un, il y a une très belle collaboration, mais il y a des secteurs où
est-ce qu'il y a beaucoup de difficultés. Puis il n'y en a pas juste une,
région, là, il y en a plusieurs.
Nous
autres, on voit des gens partout au Québec, là,
on circule un peu partout, on jase avec notre monde, puis on nous
mentionne régulièrement l'existence de problèmes entre les CSSS et les offices,
entre autres des CSSS qui considèrent que, parce qu'une personne réside dans un office, elle
a besoin de maintien à domicile mais est prise à charge par un office.
Mais l'office, ce n'est pas un organisme de maintien à domicile, là, on n'a pas
de service. Donc, si ces partenariats-là
étaient en meilleure cohésion au Québec, déjà on aurait un développement, un
développement naturel à partir de ce
qu'on fait déjà, il y aurait déjà de la place, là, d'une façon intéressante.
Puis, oui, les offices, on est capables de soutenir des clientèles qui sont passablement en perte d'autonomie
avancée. On a une infrastructure en termes de logements, on a une capacité, on
a une boîte à outils en termes de programmes existants avec la SHQ, entre
autres, puis on a la capacité d'établir
des partenariats avec le réseau de la santé, les EESAD et d'autres partenaires
dans la communauté, donc on est équipés pour développer.
Donc, si on prend le
projet d'assurance autonomie tel qu'il est présenté actuellement, on peut
devenir une alternative intéressante pour
continuer à développer le maintien à domicile puis permettre même… Moi, je dirais,
pour avoir vécu l'expérience dans ma
région, chez moi, on est, je suis convaincu, capables de réduire passablement
le nombre de personnes qui sont hébergées dans des milieux comme des
ressources privées, des ressources intermédiaires, des CHSLD en les gardant dans leurs logements en logement social mais avec
des services appropriés de la part des partenaires comme le réseau de la
santé.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Mais,
si je comprends bien votre message, c'est si on met plus de ressources mais également si on les coordonne
mieux. Mais est-ce qu'on a besoin de créer une nouvelle structure avec la RAMQ
qui rentre dans le dossier ou localement… Généralement, moi, ce que j'ai vu, il
y a plusieurs endroits qui vont bien,
au Québec. Juste pour vous dire, de créer une structure avec des paiements
différents, ça ne changera pas la volonté d'un directeur général de
s'entendre avec ses EESAD puis ça ne changera pas non plus la volonté
nécessairement de donner plus de services,
même si le financement est là. Il faut juste avoir un financement qui vient
directement cibler les endroits qu'on veut traiter plus de gens, non?
Le Président (M.
Bergman) : M. Chauvette.
M.
Chauvette (François) : Oui,
théoriquement, ce que vous dites, je suis en accord avec ça. Par contre, à la
lumière de l'expérience qu'on vit, malgré la bonne volonté de tout le
monde puis le niveau de conscience des besoins d'une population vieillissante, des fois ça prend un
incitatif, ça prend quelque chose, des moyens qui permettent de fouetter un
peu la machine. Tu sais, je regardais
comment le système… la documentation, là, tout ce qui a été publié au niveau du
projet. Puis, bon, moi, je viens du réseau
de la santé, j'ai travaillé dans le secteur pendant longtemps puis je voyais
beaucoup tout le système en réseau
intégré, là, qu'on tente depuis quelques années d'installer, là, pour les
personnes âgées, puis il y a beaucoup
d'éléments là-dedans, là, qu'on retrouve, là, tu sais, il y a beaucoup
d'éléments qui ne sont pas nécessairement nouveaux mais qui permettent de donner un coup de fouet. Puis c'est un
petit peu ça, le projet d'assurance autonomie, c'est un mécanisme qui permet probablement de donner une… c'est un
catalyseur, c'est quelque chose qui devrait permettre d'actualiser des
choses, qui existent déjà sur le terrain, à partir de moyens supplémentaires.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Un, je suis content que vous me
dites qu'il y a déjà beaucoup de choses qui étaient sur le terrain. Il y
a probablement de l'amélioration à apporter.
La
question dans le projet… vous avez vu un peu le dossier du financement, là, les
gens viennent ici puis ont des commandes.
Puis ma collègue disait tantôt : Les gens ont beaucoup de demandes et ils
s'attendent à ce qu'on réponde à toutes
leurs demandes. Et de plus en plus on est en train de se rendre compte que le
moyen qui va être mis en place, soit que ça va… une meilleure, une plus grande
contribution de l'usager, soit qu'il va y avoir un impôt supplémentaire qui
va arriver ou encore on va devoir dire aux
gens : Vous savez, ce qu'on vous avait dit, avec le 100 millions de
dollars qu'on met cette année, probablement
qu'il n'y en aura pas beaucoup qui va aller directement dans les services,
parce que, monter juste la structure
au niveau de l'informatique, avoir tous les intervenants pivots, on a estimé ce
matin pour ma collègue de Groulx que
c'était pas loin de 300 millions de dollars d'intervenants pivots que ça
prenait. Il y en a peut-être déjà en place,
mais c'est 300 millions de dollars. Elle, elle est dans le domaine de la
santé. Elle sait qu'un intervenant pivot, ça ne donne pas de soin
directement aux patients.
Moi,
la question qu'on va devoir se poser : Si on est pour mettre
100 millions de dollars, est-ce qu'on est mieux de les mettre directement dans des soins comme le
vôtre en demandant aux gens de mieux s'entendre puis de coordonner — ce que
je suis tout à fait d'accord, en partant du principe que des services intégrés
sont déjà en place, toute la structure est là, les acquis, le ministre l'a dit, sont déjà là — ou encore on se crée une structure où,
pendant les trois, quatre prochaines années, le 100 millions de
dollars qu'on va mettre à chaque année, on va le mettre dans une structure administrative?
C'est
du questionnement qu'on doit faire. Le ministre va devoir répondre en déposant
un projet chiffré, pas avec des
courbes qui montent mais bien avec des chiffres, contributions d'usagers et de
combien. Ça va coûter combien au total, puis ça veut dire quoi également pour des entreprises comme la vôtre? Et
vous avez vu que chacun vient avec une demande d'en avoir plus, mais, à un moment donné, pour la société il y a aussi
le contribuable, comme disait ma collègue, qui... Il faut peut-être lui poser la question, au
contribuable citoyen : Ça va lui coûter combien de plus dans ses impôts?
Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez.
Le Président (M.
Bergman) : M. Chauvette.
M. Chauvette (François) : Écoutez, il y a un travail de réingénierie à
faire indépendamment des projets qui sont sur la table, ça, c'est clair, mais il y a aussi une réalité avec
laquelle on vit : il y a un vieillissement de la population qui est très important, qui va demander le déploiement
de moyens supplémentaires. Il y a sûrement du financement qu'il faut
qu'il soit donné dans les différents niveaux de services.
En
logement social, c'est clair que, si on veut augmenter l'apport du logement
social pour participer au maintien à domicile,
ça va demander des logements supplémentaires, ça va demander des ressources
supplémentaires pour desservir ces
gens-là. L'intervenant pivot, moi, ce que je conçois de ça, pour l'avoir vécu
également à d'autres niveaux, entre autres en santé mentale où on a travaillé beaucoup, dans le domaine où j'étais
auparavant, à développer ce secteur-là, l'intervenant pivot devient un intervenant, même s'il n'est pas
nécessairement, cliniquement, impliqué dans le quotidien, un intervenant
majeur parce qu'il joue un rôle de
coordination puis il travaille avec des partenaires, avec des organismes qui
eux autres donnent des services. Ça
fait qu'on apprend, quand on fonctionne comme du monde avec ça, que c'est
rentable d'avoir des intervenants pivots, des gestionnaires de cas.
Appelons-les comme on veut, là, mais il y a une question de gestion là-dedans,
une question de coordination, une question de partenariats puis évidemment,
éventuellement, une question d'investissement. On ne s'en sortira pas, là, il y
a des choix sociaux à faire.
Mais,
nous, le logement social, ce qu'on vous offre, c'est une réponse à partir de ce
qu'on a. Ce dans quoi on est bons,
c'est du logement, de la gestion de logements, mettre des logements à la
disposition des services qui sont requis par les personnes en perte
d'autonomie puis de vous permettre de participer avec une infrastructure qui
est adaptée à ces besoins-là. C'est ce qu'on
vous offre. Puis, comme on vous dit, on fait partie de la solution. Bien, c'est
à ce niveau-là que nous, on est prêts à jouer le jeu.
Le Président (M.
Bergman) : M. Robitaille.
M. Robitaille (Denis) : Bien, juste un petit complément d'information. Ce
qui est aussi important, je pense, à dire, peu importe la solution qui
sera retenue, peu importe la stratégie ou la réingénierie qui sera retenue,
nous, on peut témoigner d'une trentaine d'années d'histoire de partenariat
visée à ce que les clientèles soient maintenues dans leurs logements. C'est ça, la réalité puis la mission
des offices d'habitation depuis leur création. Et ça demande énormément...
Il ne faut pas sous-estimer toute l'énergie
que ça demande en termes de concertation, en termes de travail de partenariat.
Et c'est un défi qui est très important et
qu'il ne faut pas sous-estimer. Au-delà du fait que nécessairement il va
falloir ajouter
des ressources, nécessairement il y a un appel à tous ces éléments-là, mais
c'est un élément qui est très important. L'optimisation, ce n'est pas... dans sa pratique qu'elle est difficile,
et ça, on peut témoigner d'une centaine de réussites… de 200 projets de réussite là-dessus, mais il y a
énormément d'efforts qui reposent sur des individus. Et là il ne faut pas
sous-estimer tous les efforts que ça demande. C'est un peu le message qu'on
donnait dans...
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault :
Cinq minutes, c'est ça?
Le Président (M.
Bergman) : Pour un bloc de cinq minutes.
• (17 h 50) •
Mme
Daneault :
Merci. Merci, M. le Président. Merci de votre présence ici.
Je
comprends votre message et je peux vous parler d'une expérience qu'on a vécue à
Rosemère — peut-être
que vous le savez — où on avait un OMH et on a ajouté AccèsLogis
parce qu'on avait de l'espace sur le terrain. Puis j'étais mairesse à ce moment-là. Et, à ma grande surprise,
effectivement les gens qui ont eu accès à AccèsLogis, qui étaient en perte d'autonomie, ont progressé, dans les mois
qui ont suivi leur intégration à AccèsLogis, d'une façon assez exceptionnelle,
de un, parce que l'isolement était brisé, deux, parce qu'il y avait des
activités sur place, déjà en place.
Avec l'autre côté de
l'OMH, là, il y avait un tunnel qui rejoignait les deux, donc les activités
sont devenues mitoyennes, alors les gens ont
commencé à participer. Et ce qu'on qualifiait de perte d'autonomie au départ… finalement,
à la longue, après quelques mois, on s'est
rendu compte que, juste le fait d'être dans un milieu qui était stimulant pour
eux, on a obtenu des résultats assez
impressionnants. Donc, je pense qu'effectivement c'est une belle formule, et c'est une formule, je pense, à multiplier, effectivement. Le constat, effectivement, c'est que ça ne se retrouve pas dans tous
les milieux au Québec, malheureusement, et je pense qu'il y a vraiment à faire
la promotion de ces AccèsLogis-là.
Ma
question et ma… À ma grande surprise, lorsqu'on a mis en place l'AccèsLogis, il
ne semblait pas y avoir, d'emblée,
une coordination avec le CSLC, les soins à domicile, et chacun était laissé
pour compte avec son propre médecin. Certains étaient sur la liste
d'attente de soins à domicile ou ils étaient ailleurs, ils sont restés au même
endroit. Et, sincèrement, là, je pense qu'il
y a vraiment beaucoup de travail à faire, parce qu'essentiellement, si je comprends votre
message — mais, moi, c'est ce que j'ai vécu — c'est qu'on devrait s'assurer, dès qu'on a
un AccèsLogis sur un territoire, d'être
desservi par le CLSC, autant les soins à domicile qu'au niveau médical, qu'au
niveau des infirmières, au niveau aussi
de l'ergothérapie, parce qu'on s'est rendu compte… et là c'étaient des
bénévoles qui venaient faire faire de l'activité physique à ces gens-là,
et on a eu une récupération assez impressionnante, aussi, physiquement.
Alors,
ce que je comprends, mais je pense que ce que vous nous demandez aussi, c'est,
cette coordination, qu'elle se fasse d'emblée dès qu'il y a un
AccèsLogis au niveau d'un territoire.
Le Président (M.
Bergman) : M. Chauvette.
M.
Chauvette (François) : Ce
que vous amenez là, c'est majeur, c'est majeur puis c'est la condition pour
qu'on puisse…
À
la lumière du projet, là, l'assurance autonomie, si on veut que les offices,
dans ce cadre-là, soient mis à contribution
d'une façon rentable, il faut davantage, je dirais, formaliser le partenariat
entre le réseau de la santé et les offices.
Il y a tellement d'écarts entre les régions au Québec. Puis, comme on disait
dans le mémoire, on l'a dit tantôt, c'est lié beaucoup plus aux
individus qu'à la gestion de clientèle, qu'au système, là, d'ententes, là.
C'est des conditions gagnantes. Puis je
pense que là-dessus le réseau de la santé… il y a un bout du ministère, il y a
un travail important à faire, les
agences ont un travail important à faire. Il faut s'assurer qu'on ait quelque
chose de formel puis qu'il y ait une reddition de comptes en lien avec ces ententes-là, qu'on s'assure que ce n'est pas
lié aux individus, qu'il y ait une pérennité dans les ententes. On voit des offices qui développent un
projet en lien avec le CSSS, par exemple, en santé mentale où est-ce que le
CSSS s'engage à donner des services d'intervenants qui vont intensifier leur
travail auprès d'une clientèle qui est dans un projet AccèsLogis, puis, à un moment donné, il y a des coupures de
budget ou le cadre responsable s'en va, puis les services s'en vont avec. On est pogné avec la clientèle. Ils ont des
services pareil, mais c'est des services minimaux, puis, à un moment donné, mais tranquillement pas vite, les
gens, ils s'en vont de là, ils s'en vont en ressources intermédiaires,
en RTF ou à l'hôpital puis, bon, parce que l'entente n'a pas été maintenue.
Donc,
c'est un élément important. Donc, l'exemple que vous soulignez, bien, on le
vit, là, un peu partout, comme on peut observer le succès d'ententes qui
marchent bien, qui marchent depuis longtemps, où on voit des résultats. Évidemment, c'est plate — parce que ça aussi, c'est un élément qu'on
vous a mentionné — on n'a
pas d'indicateurs qui permettent de mesurer ça actuellement. Si on pouvait être
capables d'évaluer la progression des clientèles lorsqu'ils sont intégrés dans des projets comme ça, on verrait en
quels points c'est rentable à tous les niveaux : ça permet de décharger
le réseau de la santé, ça évite d'envoyer
des gens à l'urgence, ça évite de les placer en milieu d'hébergement, ça donne
à ces gens-là une qualité de vie. Donc,
on est gagnants, tout le monde, là-dedans, autant au niveau santé sociale
qu'économique.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. M. Chauvette, M. Robitaille, merci pour votre présentation,
merci d'être avec nous ici aujourd'hui et partager votre expertise.
Collègues, compte
tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à
19 h 30 ce soir, et nos travaux ce soir sont dans le salon rouge.
Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 17 h 55)
(Reprise à 19 h 30)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, la commission reprend ses travaux. Nous allons
poursuivre, sans plus tarder, les consultations particulières et auditions
publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé
L'autonomie pour tous.
Alors, collègues,
on reçoit maintenant la Commission
de la santé et des services sociaux des premières nations du Québec et du Labrador. Alors, bienvenue à
l'Assemblée nationale, bienvenue à la commission. Pour fins d'enregistrement,
on a besoin de vos noms, vos titres, et vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation. Le micro, c'est à vous.
Commission de la santé
et des services
sociaux des premières nations du
Québec et du Labrador (CSSSPNQL)
M. Picard
(Ghislain) : D'accord. Merci
beaucoup. Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, mesdames et messieurs, membres de la commission, d'abord,
nos remerciements pour nous recevoir ce soir. On va être trois à faire la présentation. On va se partager les
10 minutes qui nous sont allouées. À ma droite, M. Malik Kistabish,
qui est président de la Commission de
la santé et des services sociaux des premières nations du Québec et du
Labrador, et, à ma gauche, Marjolaine
Sioui, qui est directrice générale de la Commission de la santé et des services
sociaux du Québec et du Labrador. Et moi-même, Ghislain Picard, qui est
chef pour l'Assemblée des premières nations du Québec et Labrador, donc, je représente moi-même le secrétariat politique, si
on veut, alors que la commission se penche beaucoup plus de façon étroite
sur la situation qui prévaut en matière de
santé et des services sociaux pour les communautés de premières nations que
nous représentons. Et donc, encore une fois, mes remerciements. (S'exprime dans
sa langue).
Donc, mes
salutations dans la langue qui m'est propre, qui est la langue innue. Et ça me
permet peut-être d'aborder la
question qui nous intéresse ce soir en insistant sur les principes qui ont été
mis de l'avant par un gouvernement sous le Parti québécois, et je vous ramène en 1983 alors que ce
gouvernement-là, sous M. René Lévesque, à l'époque avait mis de l'avant un certain nombre de principes, une
quinzaine de principes pour être plus précis, et qui reconnaissaient, au-delà des questions linguistiques,
reconnaissaient également à nos communautés le droit de pouvoir créer leurs
propres institutions, le droit à leur développement social, également,
développement économique, et j'en passe. Et j'en parle parce que c'est important dans ce contexte-ci de la discussion que nous
voulons avoir avec vous ce soir. Et ça me ramène aussi, peut-être, à un
contexte beaucoup plus large qui est celui de la déclaration de l'ONU sur les
droits des peuples autochtones, qui a été
endossée par le gouvernement canadien en novembre 2010 et qui a été auparavant
reconnue par Mme Marois et son
parti un peu plus tôt cette année-là, et ça a été le deuxième parti à avoir
reconnu cette déclaration-là après Québec solidaire. Et j'en parle parce que la
déclaration de l'ONU fait un parallèle avec les droits reconnus par le gouvernement de M. Lévesque en 1983 et de
façon assez claire et je pense qu'on peut constater que, presque 30 ans
plus tard, il y a eu de toute
évidence une évolution marquée sur la question de cette reconnaissance sur les
droits des peuples que nous représentons.
Notamment,
l'article 3 de la déclaration de l'ONU reconnaît de façon très claire notre
droit à l'autodétermination. Et, en dépit de l'évolution qu'on constate
depuis plusieurs années maintenant sur le plan domestique mais sur le plan international également, on est obligés aussi de
constater qu'il y a encore beaucoup de rattrapage à faire pour notamment
donner l'opportunité à vos institutions de
faire une reconnaissance un peu plus appropriée dans votre façon de faire les
choses et qui nous permettrait de
dire : Bon, c'est un gouvernement qui est à l'heure de l'évolution du
droit international et qui respecte
bien ses obligations de consultation au niveau des communautés que nous représentons.
Et ça touche la question qui nous
intéresse ce soir de façon très évidente, parce qu'à notre sens ce qu'on
constate depuis déjà plusieurs, plusieurs
années de… je dirais même, depuis plusieurs gouvernements, c'est qu'il y a un
réflexe, souvent, d'oubli par rapport à la particularité des communautés
que nous représentons.
Et je vais
m'arrêter ici parce que je sais que notre temps est très limité. Et je voulais
juste peut-être faire ce point-là et insister
sur une dernière, peut-être, particularité, c'est que le gouvernement du Québec
a souvent l'occasion de référer à sa relation
avec les Premières Nations et souvent dans le contexte peut-être plus
particulier des communautés dites conventionnées,
et particulièrement les Cris, les Naskapis et les Inuits, alors que nous, bien,
on représente peut-être beaucoup plus
les intérêts et la spécificité des autres communautés qui sont encore en
étroite relation avec le gouvernement fédéral.
Et je passe la parole à M. Kistabish.
M.
Kistabish (Malik) : Bien, merci
beaucoup de nous recevoir ici. Moi, qu'est-ce que je veux mettre en lumière
aussi, c'est la divergence entre les
programmes qui sont offerts au sein des communautés versus dans le réseau
québécois de la santé et des services
sociaux, deux programmes qui sont financés par le fédéral. Pour les communautés
non conventionnées, ce sont les soins à domicile et l'aide à la vie
autonome.
Un des
obstacles qu'on… bien, deux des obstacles qu'on a là-dedans, c'est des
programmes qui sont très restrictifs puis
peu de marge de manoeuvre pour rendre les services, surtout compte tenu de
l'état de santé des Premières Nations. Une
autre des différences, c'est que, dans les communautés autochtones, on a des
centres de santé qui sont dits de prévention et d'autres qui sont curatifs. Ceci aussi peut causer des obstacles
aussi à la délivrance de services à nos membres et à nos usagers qu'on dessert dans nos communautés. Un
autre obstacle qu'on peut avoir aussi, c'est la difficulté d'assurer un continuum de services avec l'accès aux services
afin de diminuer les risques de mettre en danger la santé de nos patients.
Quand je parle de continuum de services, c'est faire le lien entre le réseau et
puis nous, les Premières Nations.
• (19 h 40) •
Mme
Sioui (Marjolaine) : Donc,
quand vous allez voir dans le mémoire qui a été rédigé, c'est que, suite aux
enjeux qu'on a pu énumérer, on rencontre aussi diverses problématiques
au sein des communautés.
Bien sûr, on
ne pourrait pas passer sans justement souligner l'éloignement, donc,
l'éloignement et la répartition de
toutes les communautés sur le territoire du Québec. Et ça, ça amène une
diversité bien sûr au niveau des communautés qui sont très différentes
les unes des autres. Bien sûr, quand on regarde aussi au niveau de l'accès
limité aux soins spécialisés, donc, bien sûr,
quand on regarde au niveau de l'éloignement, bien c'est plus difficile pour
certaines communautés justement
d'accéder à ces soins spécialisés là au sein de leur communauté et d'avoir à se
déplacer des grandes distances pour pouvoir accéder à ces services.
Lorsqu'on
regarde aussi au niveau des communautés, ce qui nous est beaucoup rapporté et
ce que les communautés constatent,
c'est une très grande méconnaissance, souvent, de la culture ou du milieu, même
une méconnaissance aussi au niveau de l'offre de services qui est
offerte dans les communautés, et ce qui peut créer certaines problématiques justement avec les intervenants du réseau, et
d'essayer de, justement, assurer un certain continuum à ce niveau-là, et de
pouvoir justement bâtir sur cette
relation-là pour offrir des services qui vont… Parce que, dans la majorité des
communautés, on peut retrouver des
centres de santé, mais on retrouve aussi des postes de soins infirmiers, donc,
encore une fois, une diversité qui
peut offrir des services 24/7, comparativement à des services sur les heures
régulières de bureau. Une fois qu'on
arrive dans le réseau, bien on tombe plus au niveau des services de deuxième et
troisième ligne, et là encore une fois,
bien, il y a une méconnaissance, dans le sens de pourvoir, même de la part des
communautés, des services qui pourraient être accessibles au niveau
aussi des Premières Nations.
On parle
aussi d'accompagnement, d'interprétation pour les personnes qui parlent aussi... Comme vous le savez, il y a une
grande majorité de communautés qui, pour elles… la deuxième langue est
l'anglais, à part de leur langue maternelle.
Et la même chose aussi pour les Premières
Nations qui sont... plus pour nos
aînés, où la langue, c'est... la langue qui est la plus utilisée, c'est leur langue maternelle. Donc, lorsqu'on
arrive justement dans le réseau, on entend même des gens du réseau qui peuvent arriver et dire que
c'est dur pour eux autres de donner des services puis de communiquer avec la
personne, souvent par manque au niveau de l'accompagnement ou bien aussi de la
compréhension parce qu'on parle deux langues
différentes. Et c'est sûr et certain que, pour les communautés
qui sont plus anglophones, la limite au
niveau des ressources qui sont
spécialisées : c'est de plus en plus dur, ce qu'on constate, à accéder à des
services aussi où on peut se faire servir au niveau de la langue
anglaise.
On a aussi
les gens qui nous parlent beaucoup de se sentir un peu comme exclus socialement, la
coupure aussi au niveau
des familles lorsqu'on doit se rendre en milieu urbain pour recevoir des
services et où on est limité au
niveau... Parce que, comme vous le savez, au niveau
des communautés des Premières
Nations, on a quand même
tout le sens aux niveaux
social, familial, qui est assez développé, et ça devient une déchirure, une
coupure des fois qui peut être assez difficile pour les personnes âgées lorsqu'elles
quittent leurs communautés.
On dispose,
dans les communautés, d'environ sept centres d'hébergement pour les
personnes aînées. C'est très peu.
Chaque communauté n'a pas accès à ce centre, à ces types d'établissement là. Et ça devient aussi très difficile pour elles de pouvoir justement s'éloigner, des fois
jusqu'à une heure, deux heures et trois heures de route, de la famille. Et
souvent on constate un affaiblissement,
souvent très prononcé, des personnes lorsqu'elles sont éloignées de leur milieu et qu'elles ne peuvent pas retourner dans la communauté
pour pouvoir recevoir les soins dont elles devraient avoir justement accès.
On regarde aussi au niveau de tout ce qui est de l'accompagnement, mais
aussi de personnes qui nous soulèvent aussi
des problématiques. Je sais que le réseau présentement fait des efforts à ce niveau-là, mais, lorsque les personnes des fois vont se sentir exclues socialement… ou
avec des fois des personnes qui peuvent même leur dire, encore aujourd'hui, qu'elles peuvent avoir de la
difficulté à obtenir justement des services dans la langue… ou même des gens qui
sont dans le réseau et qui pourraient
dire : On n'a pas pu avoir l'accès ou avoir une personne qui était pour
nous accompagner dans la langue qu'on avait de besoin.
Lorsqu'on
regarde au niveau des impacts qu'on pourrait prévoir avec l'assurance
autonomie présentement, on parle
d'un investissement au provincial, qui est destiné à couvrir justement
l'accroissement estimé au niveau du soutien à domicile et on se questionne présentement beaucoup sur comment ça pourrait se traduire au niveau
de l'accès pour les personnes des Premières Nations au niveau du service. On soulève aussi l'inquiétude au niveau
de ce qui est prévu ou de ce qu'on
estime pouvoir utiliser au niveau de financer les institutions quand on sait très bien
que, si on donne... au niveau du financement avec la RAMQ et vers les centres ou les institutions des CSSS, si on avait des gens au sein des communautés
qui avaient accès à recevoir les services,
de quelle façon ça pourrait se traduire pour recevoir au niveau
des services qui pourraient être ajoutés aux heures qui se donnent déjà
en soins au niveau des communautés. Présentement, lorsqu'on regarde les problématiques qu'on a déjà
eues, c'est que les communautés sentent aussi qu'elles pourraient mettre en jeu
certaines gouvernances ou autonomies au niveau de fournir leurs soins ou leurs
services. On sait que, dans plusieurs communautés,
il y a quand même une population aussi qui peut être allochtone et qui réside
au sein des communautés pour toutes sortes de raisons. Et on se questionne
aussi, dans les communautés, à savoir comment ça va se passer lorsqu'on va devoir donner des soins avec le
programme qui est offert au niveau de l'assurance autonomie et de s'assurer
que les communautés disposent des moyens
nécessaires pour pouvoir desservir la clientèle qui résidera sur leur
territoire.
On peut aussi
citer certains exemples au niveau des meilleures pratiques. Présentement, on
sait que l'assurance autonomie amène quand même une option que, je
crois, les communautés ont déjà mentionnée...
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Sioui
(Marjolaine) : ...ont déjà
mentionnée au niveau d'un mémoire sur les aînés et qui était le désir de
résider le plus longtemps possible dans leurs communautés et d'avoir les
services qui soutiennent avec ça. Et donc on a quand même
regardé plusieurs mesures spécifiques qui pourraient aussi développer des plans
d'action et aussi regarder au niveau
de certains projets de loi où on a fait un effort, justement,
de consultation au
niveau des Premières Nations pour s'assurer de
minimiser les impacts le plus possible.
Le Président (M. Bergman) :
Alors, merci pour votre présentation. Et maintenant, pour le premier bloc du
gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert :
Merci beaucoup, M. Picard, Mme Sioui, M. Kistabish.
Lorsque vous affirmez d'entrée de jeu que le livre blanc ne traite pas de la question des Premières Nations, vous
avez parfaitement raison. Et je suis très heureux de vous accueillir ce soir pour qu'on puisse
discuter avec vous des enjeux que soulève cette nouvelle mesure de solidarité
sociale qu'on est à implanter au Québec, qui est l'assurance autonomie, quels
sont les enjeux et comment ça, ça peut s'adapter ou peut-être s'appliquer, nous
verrons, aux communautés que vous représentez.
Je situe tout
de suite… et je pense que vous l'avez fait d'entrée de jeu, M. Picard, on
s'intéresse ici ce soir, là, aux non
conventionnées, sur réserve surtout. Et j'aimerais mieux comprendre, pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent aussi,
mieux comprendre l'organisation des services sociaux surtout et des services de
santé sur les territoires de réserves, parce que vous nous avez parlé de
deux programmes fédéraux, les programmes de soins à domicile et d'aide à la vie
autonome. Et j'aimerais donc que vous puissiez nous décrire, là, chacun de ces
programmes-là.
Le Président (M. Bergman) :
M. Picard.
M.
Hébert : Ou M.
Kistabish.
M. Picard
(Ghislain) : Oui. Bien,
merci beaucoup. Je laisserais peut-être le soin à Mme Sioui d'y aller avec
les détails sur les deux programmes. C'est que le domaine de la santé et
des services sociaux est un de ces domaines où il y a très clairement, là, un chevauchement, d'un côté, de la
responsabilité fédérale en matière de santé principalement mais aussi des services sociaux et, évidemment, un
secteur où, pour des raisons qui sont évidentes à nos yeux, on doit faire affaire avec des institutions du
gouvernement du Québec, qui sont sous la responsabilité du gouvernement du
Québec.
Ceci étant
dit, il y a quand même des programmes qui sont, je veux dire, entièrement sous
la responsabilité du gouvernement
canadien. Et, parce qu'on a manqué de temps tantôt, je vais revenir tantôt sur
les recommandations que nous avons à
vous présenter et qui ont déjà fait l'objet d'une lettre qui vous a été
adressée, M. le ministre. Et on reviendra un peu plus tard là-dessus.
Mais pour l'instant, puis pour répondre à votre question, je laisserais
peut-être le soin à Mme Sioui d'élaborer davantage.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Sioui.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Merci. Bien,
si on regarde au niveau des communautés, l'offre de services peut diverger
d'une communauté à l'autre.
C'est sûr qu'on
s'entend au niveau des financements qui sont reçus au niveau des communautés
non conventionnées où le fédéral va
donner des enveloppes qui vont être négociées avec chacune des communautés pour
différents programmes. Donc, ce sont,
dans la majorité, des programmes qui sont plus au niveau de promotion de la
santé et de prévention, pour la majorité,
et aussi au niveau de santé publique. Donc, la façon que ça fonctionne — et peut-être que Malik pourra continuer
tout à l'heure pour vous exposer un petit
peu plus comment ça se passe dans une communauté donnée — mais présentement ce que la communauté va négocier, c'est, par le
biais d'accords de contributions... vont regarder un ensemble de services
où autrefois ils étaient beaucoup plus fixes. Maintenant, il y a une certaine
souplesse qui est donnée à ce niveau-là.
Mais,
peut-être pour vous l'illustrer un petit peu plus, c'est que les soins qui sont
donnés à travers ces deux programmes-là vont, d'une partie, donner les soins à domicile, donc pouvoir permettre à
la communauté de pouvoir développer son offre de services. Mais, si on prenait deux communautés identiques, au niveau
de la population, de 2 500 personnes…
Et, pour une communauté qui se trouve
avec beaucoup de problématiques au niveau d'un taux de diabète
peut-être de 30 %,
35 %, comparativement à une autre communauté qui aurait
2 500 habitants, la même chose, avec un taux de diabète de 5 %,
on a la même enveloppe populationnelle, donc
on doit offrir nos services de la même façon, en donnant certaines priorités.
Donc, la communauté qui est aux prises avec
plus au niveau de problématiques de santé ou quoi que ce soit bien sûr va
avoir des choix à faire au niveau de sa
priorité, au niveau de l'offre de son service, tandis qu'une autre communauté,
bien, va pouvoir peut-être axer plus au niveau de la prévention ou de la
promotion au niveau des saines habitudes de vie.
Donc, c'est
une réalité dans laquelle les communautés naviguent sur une base quotidienne.
Les programmes aussi au niveau… Quand on parle au niveau de l'aide à la vie
autonome, une communauté peut aussi, lorsqu'elle va donner un soutien au niveau de services… va souvent aussi
offrir des… par sous-contrats, donc sous-contractants… qu'elle va offrir
pour une personne qui va aller donner… — puis,
Malik, tu pourras peut-être renchérir — au niveau de donner un montant pour la personne qui va aller donner ces soins-là
et ces services-là. Donc, elle engage cette personne-là pour offrir ses
services.
D'un autre
côté, au niveau des soins à domicile, bien, c'est sûr aussi, quand on regarde
présentement, avant on ne disposait
pas de l'outil ISMAF pour pouvoir
faire l'évaluation, on avait l'outil multiclientèle qu'on utilisait,
et maintenant, depuis près de deux ans, ISMAF, dans
certains... on l'a commencé avec... on a réussi avec... au niveau des Affaires
autochtones du fédéral, de pouvoir obtenir un financement pour pouvoir justement
former nos intervenants dans les communautés,
et ils ont été capables d'arriver seulement avec un financement pour les communautés qui avaient des centres
d'hébergement.
Donc,
c'est sûr qu'avec la politique au
niveau que vous voulez… bien, pas la politique,
mais avec le projet que vous voulez
mettre en place il est évident qu'il y aura quelque chose à avoir justement
pour que ce soit l'ensemble des communautés
qui puissent faire une évaluation au
niveau de leurs communautés et des personnes qui auront besoin de soins éventuellement.
• (19 h 50) •
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Est-ce que vous pouvez compléter? Parce que j'ai compris que, pour le soutien à
l'autonomie des personnes à domicile,
il y avait un programme de soins à domicile puis un programme d'aide à la vie
autonome. Alors, j'aimerais connaître un peu mieux ces deux programmes-là.
M. Kistabish (Malik) : Je vais
renchérir là-dessus.
Le Président (M. Bergman) :
M. Kistabish.
M.
Kistabish (Malik) :
Concernant les soins à domicile, c'est des services de santé. À la base, c'est
un service de soins infirmiers qu'on
donne à domicile. Dans une communauté, ça se passe que, exemple… Je vais donner
un exemple un peu plus concret :
un patient, un membre de la communauté, reçoit un congé postopératoire, il
retourne à la maison, et puis
l'infirmière en soins à domicile va aller chez le patient, va faire des soins,
des changements de pansements tout au long de la durée de la guérison du
patient. Pour les soins à domicile, en gros, c'est ça que l'infirmière fait.
À part ça, le
financement qu'on reçoit, ce n'est pas vraiment… On ne peut pas aller plus loin
que ça. Puis aussi c'est très
restreint, on ne peut pas… Quand je dis «restreint», c'est : on n'a pas
beaucoup d'espace de manoeuvre. Il faut suivre vraiment les règles du
programme qui sont dictées.
M.
Hébert : Et qui
engage cette infirmière-là?
M. Kistabish (Malik) : C'est le
centre de santé.
M.
Hébert : Le centre
de santé.
M. Kistabish (Malik) : Oui, c'est le
centre de santé de la communauté.
M.
Hébert : O.K.
M. Kistabish (Malik) : Et puis, pour
ce qui est de l'aide à la vie autonome, c'est un peu plus du maintien à domicile. Du côté du volet des services sociaux,
nous, on aide les gens à rester chez eux. Exemple, là, une femme qui aurait
un congé de… un billet du médecin qui dirait
qu'elle aurait une grossesse à risque, bien il faudrait qu'elle reste couchée.
Bien, pour subvenir à ses besoins, à la
maison, faire le ménage, faire les activités quotidiennes, bien il y a
une personne qui est déléguée, qui
est engagée pour aller justement donner des services à la femme. Et c'est ça qu'on
délivre comme services chez nous, puis aussi…
M.
Hébert : …personne. Si une personne âgée dans votre communauté, qui a besoin d'être lavée, par
exemple, qui a besoin qu'on puisse
l'aider au ménage ou à préparer les repas, c'est le Programme d'aide à la vie
autonome qui va être mis en cause, c'est ça?
M. Kistabish (Malik) : Oui.
M.
Hébert : Et qui est
le prestataire de services dans ce cas-là? Qui va donner ce service-là et par
qui sont-ils encadrés, engagés?
Mme Sioui (Marjolaine) : C'est qu'on
n'aura pas…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Sioui.
Mme Sioui (Marjolaine) : …de soins
palliatifs au sein des communautés.
M.
Hébert : Non, pas palliatifs, mais des services comme ceux
que… aide au bain, aide au ménage. Quelles sont les personnes qui vont
faire ça pour la personne âgée en perte d'autonomie?
Mme Sioui
(Marjolaine) : C'est soit au niveau
des aidants naturels ou au niveau de… Si la communauté peut
essayer… Avec l'enveloppe qu'elles ont, elles peuvent des fois décider de
pouvoir le faire, mais ce n'est pas dans les règles
ou dans la politique de pouvoir mettre ce type de services là. Donc,
elles le font au niveau des services de base, au niveau
de l'infirmière, de pouvoir donner ce type de services là, mais c'est assez
limitatif au niveau de services qu'on peut offrir avec ça.
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, c'est la famille qui a la responsabilité, en fait, de donner les
services, si j'ai bien compris.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Bien, dans des…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Sioui.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Pas toujours, mais, dans des cas, ils vont se mobiliser
pour pouvoir le faire, et il va y avoir certaines failles.
M.
Hébert : …engager
une personne pour faire ça, avec un financement qui vient du fédéral, est-ce que
c'est…
Mme Sioui
(Marjolaine) : …ménage. Si une personne justement a besoin de tant…
Ils peuvent allouer tant d'heures pour
pouvoir donner une aide au niveau d'aider la personne à faire le ménage parce qu'elle est moins apte à pouvoir le faire. Donc, des genres de services
de ce type-là.
M.
Hébert :
Et c'est sous la responsabilité du conseil de bande?
Mme Sioui
(Marjolaine) : Toujours.
M.
Hébert :
O.K. Donc, c'est le conseil de bande qui gère cette enveloppe fédérale, si j'ai
bien compris.
Mme Sioui (Marjolaine) : Oui. Mais peut-être que c'est important
de dire que, lorsque le fédéral avait amené une initiative au niveau de politique
de transfert… Donc, cette politique-là, en 1986, a été mise sur pied pour permettre
aux communautés de prendre en charge certains programmes
et services. Donc, ce que ça a fait, c'est qu'au cours des années 80 le Québec a été, au niveau
des communautés autochtones, quand même un pionnier dans le
sens de pouvoir prendre en charge ces
services-là. Donc, on négociait des enveloppes de transfert du fédéral vers les
communautés. Et, à
partir de ce moment-là, les communautés sont devenues responsables d'embaucher justement
le personnel, le personnel infirmier,
autres ressources, pour pouvoir donner des services dans les communautés
suite aux programmes. On avait des programmes, aussi, communautaires. Donc, ça peut varier aussi de ce
qui est au niveau d'autres programmes, le diabète, au niveau soins à domicile, au niveau aussi des
programmes d'aide à l'enfance, dans certains cas. Donc, il y a une gamme
de programmes comme ça qui, à l'aide des ententes de transfert, peuvent être
pris en charge par les communautés.
Présentement,
au Québec, on a seulement, si je ne me trompe pas, trois communautés qui ne
sont pas totalement transférées. Donc, c'est Santé Canada qui continue
d'offrir des services, donc, qui embauche le personnel qui va aller travailler dans les communautés. Pour le reste des
communautés, c'est le conseil de bande. Les employés sont sous le conseil
de bande.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, c'est sous juridiction fédérale tant et aussi longtemps que c'est sur la
réserve. Dès que la personne âgée demeure à
l'extérieur de la réserve, elle devient sous la responsabilité du gouvernement
du Québec et de son réseau de la santé et des services sociaux.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Sioui.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Oui. Toutefois, les politiques aussi au niveau fédéral
présentement…
Je vais vous donner
un exemple d'une personne qui doit se rendre en milieu… supposons, au
centre-ville de Québec pour recevoir des
soins au niveau des personnes dialysées, O.K.? Donc, la personne, elle a un
besoin au niveau de la dialyse. Ce
type de dialyse là ne se donne pas au niveau… supposons, à Sept-Îles, doit se
donner ici, à Québec. Et, quand elle
arrive à Québec, bien elle doit séjourner, des fois parce que le médecin peut
dire qu'elle est… son état va ne pas lui
permettre de retourner à la maison, va devoir accéder au niveau des services et
va devoir peut-être, des fois, séjourner un an, deux ans, jusqu'à ce que le médecin puisse dire : Bien,
écoutez, ça va être permanent, ou sinon elle pourra retourner, à un
certain moment donné, dans sa communauté.
Les
politiques, au niveau fédéral présentement, pour tout ce qui est au niveau de
séjourner, après trois mois, on va considérer qu'une personne n'est plus
admissible au niveau des soins de santé non assurés pour pouvoir l'héberger à l'extérieur de la communauté à une période autre…
au plus de trois mois. D'un autre côté, la personne qui va garder, si on
voit une personne qui est obligée de quitter
son emploi ou quoi que ce soit et qui deviendrait, au niveau de la sécurité du
revenu… va être, au niveau de la politique
avec les Affaires autochtones, va être considérée, même si elle demeure hors de
la communauté, pour recevoir des soins de
santé, va être toujours en lien avec la communauté et va continuer d'être payée
sous le régime fédéral au niveau de la sécurité du revenu.
Donc,
il y a beaucoup d'incohérences au niveau des politiques présentement, qui
amènent des problématiques pour les
personnes qui doivent séjourner à l'extérieur des communautés. Donc, ce n'est
pas cohérent, dans plusieurs cas.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Lorsque l'assurance autonomie pour les personnes âgées va être mise en place,
jusqu'à quel point ça s'applique à la
situation des réserves étant donné que c'est une responsabilité fédérale? En
d'autres termes, ce que je vous demande, c'est… Vous avez vu le livre
blanc. Comment vous voyez l'application de cette mesure-là pour les communautés
dont vous avez la responsabilité?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Sioui.
• (20 heures) •
Mme Sioui (Marjolaine) : Bien, peut-être qu'on arrive un peu avec une
solution qu'on vous propose de regarder. C'est que présentement, à cause de différentes incohérences dans les
politiques, ou quoi que ce soit, puis des juridictions aussi, parce
qu'on arrive souvent dans des conflits juridictionnels en termes de qu'est-ce
qui s'applique ou ce qui ne s'applique pas…
et ce qu'on propose, c'est justement de pouvoir faire une analyse des impacts
un petit peu plus approfondie pour
voir justement comment ça pourrait s'appliquer ou non au niveau des communautés
mais aussi de voir de quelle façon le continuum de services doit
s'effectuer.
Donc,
si on prend le cas... Au niveau de s'appliquer au niveau des communautés, si on
avait une personne… Je vais vous
donner quelques exemples. Si on avait une personne des Premières Nations qui
doit aller séjourner dans un milieu urbain pour une période donnée à
cause de son état de santé et si, à ce moment-là, elle devenait résidente du
Québec, contribuait à la… justement à… si elle avait, à un moment donné, une
contribution à donner au niveau de l'assurance autonomie, retournait dans sa
communauté et avait besoin de continuer avec le nombre d'heures qu'elle
aimerait recevoir en tant que services, donc
de quelle façon on va assurer un continuum pour pouvoir dire : Bien,
maintenant... Si la personne a contribué pendant un an, deux ans,
qu'elle retourne dans sa communauté, à quel moment qu'on peut continuer de considérer de dire que la personne
doit encore recevoir des soins soit par le réseau québécois ou soit par la
communauté.
Si on a une personne
qui séjourne dans une communauté qui est allochtone... On a souvent des
couples, bon, supposons, une personne qui
est mariée avec un Québécois. Elle demeure dans la communauté avec la personne.
Donc, à ce moment-là, la personne,
elle peut contribuer, comme tout Québécois. Ils sont situés dans… localisés
dans la communauté, donc est-ce que… À ce moment-là, qu'est-ce qui se
passe? Est-ce que c'est le réseau qui vient donner un service en communauté pour cette personne-là qui est
québécoise ou bien est-ce que c'est la communauté qui prend en charge? Quels
arrangements qu'on fait avec le réseau québécois pour coordonner ces types de
services là?
Donc,
il y a beaucoup de questions comme ça qu'on s'est posées, qu'on aimerait mettre
devant pour voir quelles réponses qu'on peut donner à ça et analyser un
petit peu plus en profondeur.
Le Président (M.
Bergman) : M. Picard.
M. Picard (Ghislain) : Ce que j'aimerais peut-être ajouter ici, c'est
que, sur une base presque quotidienne, on est constamment sur le front par rapport à, d'un côté, notre interprétation
de l'obligation fédérale en ce qui concerne les soins de santé et, de
toute évidence, de leur côté — je parle du gouvernement fédéral — avec une limite qu'eux-mêmes fixent. Et c'est toujours, de toute évidence, à court des
besoins que nous exprimons au nom des communautés et des membres qui les
constituent.
Et
donc le cas des dialysés est un bon exemple à cet effet-là. Et, pour nous, bien
c'est clair qu'on ne veut pas, je veux
dire, on ne veut pas un service de second ordre ou de troisième ordre par
rapport à ce qui existe autour de nous. Donc, on essaie, dans la mesure où c'est possible, d'harmoniser, je veux dire,
la responsabilité du gouvernement fédéral à l'endroit des communautés
que nous représentons avec ce que le Québec dispense comme services. Donc,
c'est une question d'harmonisation davantage
dont il est question ici, et ça pourrait très certainement s'appliquer au livre
blanc, d'ailleurs, et à ce qu'il propose.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, il vous reste deux minutes.
M.
Hébert : Oh! J'essaie de décoder ce que vous me dites, M.
Picard. Vous dites : Si, pour les Québécois il y a un régime
d'assurance autonomie qui est beaucoup plus intéressant que ce qu'on reçoit du
fédéral, on voudrait être capables d'avoir l'équivalent sur nos réserves.
C'est-u ça que je décode?
Le Président (M.
Bergman) : M. Picard.
M. Picard (Ghislain) : Non. Bien, tout ce que je dis, c'est que nous, on
ne cessera pas, je veux dire, de mettre le gouvernement fédéral sur le stand, si on veut, là — pardonnez-moi l'expression — par rapport à son obligation. Mais en même temps ce qu'il faut savoir aussi, c'est
que c'est un combat de tout instant, là. Ça, c'est notre situation à nous.
Et ce que nous disons, ce que nous disons
ici, c'est que, je veux dire, il existe déjà des précédents où le Québec, je
veux dire, est capable de signer sur
un bout de papier pour permettre que certaines institutions, par exemple, qui
sont, je ne sais pas, caractérisées
comme étant provinciales puissent servir dans certaines communautés. Sous votre
gouvernement, je veux dire, on a
permis la construction d'un hôpital à Kahnawake, ça fait déjà... sous l'ère de
M. René Lévesque. Et est-ce qu'on
pourrait, par exemple, envisager qu'un service, par exemple, de soins de longue
durée puisse, je veux dire, quelque part représenter, je veux dire, un
autre exemple possible d'une communauté qui pourrait, par exemple, se doter
d'un service comme celui-là, alors que le gouvernement fédéral ne le prévoit
pas?
M.
Hébert : Il ne
faudrait pas que…
Le
Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc du gouvernement. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Je vais passer la parole à ma collègue de Gatineau.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Merci, M. le Président. Alors, bonjour. Bonsoir. Bienvenue parmi la commission. J'ai quelques questions.
Je me
demandais, dans les communautés que vous représentez à l'Assemblée des Premières Nations, est-ce
qu'il existe des ressources d'hébergement destinées aux aînés ou destinées aux personnes en perte d'autonomie ou est-ce que
les membres de vos communautés vont surtout rechercher ces services-là à
l'extérieur des communautés?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Sioui.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Il y a
sept communautés qui détiennent présentement des maisons d'hébergement des
personnes aînées, et, pour les autres, elles doivent aller rechercher ces
services-là à l'extérieur des communautés.
Bien sûr,
comme je l'ai mentionné tout à
l'heure, une des grandes
problématiques qu'on voit présentement pour les
communautés qui n'ont pas de centre
d'hébergement, ce sont plus pour les
personnes justement comme les communautés anglophones, où elles se sentent plus… pour aller dans des centres où
qu'ils parlent la langue anglaise. Donc, quand on parle, supposons, des communautés micmaques de la Gaspésie,
elles doivent, bon, pour accéder aux services, aux soins… souvent, bon, elles vont se limiter au territoire.
Mais ça devient des problématiques où justement ils peuvent se sentir très
isolés. Et il y avait aussi… tout à l'heure, on ne l'a pas mentionné, mais peut-être...
puis ça viendrait répondre un petit peu à la question qui a été posée tout à l'heure. Au niveau des
soins à domicile, on estime, avec le financement qu'on reçoit, un soin, qu'il peut être donné jusqu'à un maximum de 2,5 heures, O.K.,
par personne, par jour. Et ce que ça amène, bien c'est sûr que, quand on fait l'évaluation, donc après, bien
la personne, elle est retournée vers le réseau, quand elle a besoin de
plus de soins, étant donné la limite qu'on a dans la communauté à pouvoir
donner un type de services.
Donc, c'est sûr et certain qu'à plus long terme,
quand on regarde si la personne veut recevoir ces types de services là, va se tourner de plus en plus à se retrouver dans le réseau… Et, si on veut retourner la personne
plus vers son milieu naturel pour
retourner... bien la personne qui a besoin de ces services-là, si elle voit
que, dans la communauté, on n'a pas
ce type de services là et qu'on est limité à ne pas pouvoir donner plus que ça…
bien il pourrait aussi y avoir une dynamique
qui s'installe, que la personne qui a déjà eu son service lorsqu'elle s'est rendue hors
de la communauté, elle a peut-être une réticence aussi à retourner compte tenu qu'elle ne pourra peut-être pas recevoir le même type de services.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Gatineau.
Mme Vallée : Vous soulevez
une problématique qui est réelle. Est-ce qu'il existe des ententes entre
certaines communautés et les CSSS?
Je vous pose
la question parce
que moi, je suis dans le coin de
Maniwaki. Donc, évidemment, la communauté de Kitigan Zibi est contiguë avec la communauté de Maniwaki. Et je sais
qu'entre autres, au niveau de la dialyse, il y a des échanges, il y a
un travail, qui se fait, de collaboration, de proximité. Mais est-ce qu'il existe, dans
certains secteurs, des ententes entre
les services de santé des communautés et les CSSS pour justement permettre aux
membres des communautés d'avoir
accès, à l'intérieur, dans leurs résidences, dans leurs chez-soi, à des
services spécialisés qui, par
exemple, ne sont pas disponibles à l'intérieur du service de
santé? Je ne sais pas, je pense peut-être à un physiothérapeute ou à des services spécialisés. Parce qu'en région on sait que nos services spécialisés ne sont pas aussi
disponibles ou accessibles qu'on peut les avoir dans les centres
urbains.
Donc, est-ce
qu'il existe ces ententes-là de facto qui permettent aux membres des
communautés de demeurer dans leurs résidences mais d'avoir accès à des
services spécialisés à domicile?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Sioui.
Mme Sioui (Marjolaine) : Bien,
peut-être, Malik, tu pourrais partager un exemple de chez vous?
Le Président (M. Bergman) :
Monsieur...
• (20 h 10) •
Mme Sioui
(Marjolaine) : Mais il y a
différentes communautés, il y a quelques communautés qui ont quand même
amorcé des ententes de service ou de soutien.
Tu sais, une
communauté peut avoir justement conclu une entente que, lorsqu'elle va donner
son service… Parce que, comme je vous ai expliqué tout à l'heure, il y a
les postes de soins infirmiers qui sont 24/7, mais il y a aussi les communautés qui offrent seulement sur les heures
normales, là, qu'on connaît, de 8 à 4, si on veut. Et, à ce moment-là, c'est qu'on peut avoir conclu une entente avec un
CSSS pour justement prendre la relève. Donc, on va diriger notre population
sur les heures en dehors des heures normales
de bureau au niveau du CSSS, et le CSSS est avisé, Donc, il va pouvoir justement
offrir les services, et les gens vont pouvoir se rendre justement dans le
réseau.
D'un autre côté, il
peut y avoir, dans certaines communautés... Comme je le disais tout à l'heure, il y a certaines communautés où il peut y avoir
une population plus grande au niveau des personnes allochtones qui résident
dans la communauté.
Donc, je donnais l'exemple tout à
l'heure d'un couple, la personne... c'est déjà
arrivé, et les communautés nous l'ont mentionné… où il peut arriver que, dans une même
maisonnée, il va y avoir l'infirmière du réseau du CSSS qui va être là pour traiter monsieur et
l'infirmière qui est payée par le conseil de bande qui va être là pour traiter
la dame. Donc, ça arrive. On se demande maintenant à savoir comment on
pourrait peut-être trouver des moyens d'arrimer ce service-là justement pour ne
pas dupliquer les ressources, être plus efficaces et d'arriver à trouver des
solutions qui pourraient justement faire un échange au niveau des services et
de répondre mieux au niveau de ce que la clientèle a besoin, qui vit sur notre
territoire. Tu voulais-tu ajouter...
Le Président (M.
Bergman) : M. Kistabish?
M. Kistabish (Malik) : Un peu pour répondre à votre question
concernant les ententes qu'on a, dans ma communauté d'où que je viens, on a deux ententes avec des
médecins visiteurs qui viennent au centre de santé, qui viennent faire des
cliniques au centre de santé dans ma
communauté. L'entente a été faite aussi pour désengorger les cliniques en ville
pour permettre aussi à nos membres
d'avoir accès à des médecins qui n'ont pas nécessairement de véhicule
pour se déplacer à l'extérieur de la
communauté. Ça fait qu'on a conclu cette entente-là. On a des médecins qui
viennent dans la communauté.
Aussi,
on a une entente aussi avec le CSSS Les Eskers, à côté de
chez nous. On a donné un temps-plein pour une nutritionniste. On a convenu d'une entente avec le CSSS pour embaucher
une nutritionniste. Le CSSS avait besoin de deux jours, et nous, dans la communauté, on avait besoin de trois jours
par semaine… d'une nutritionniste, et nous avons convenu ensemble
d'offrir un temps-plein, et puis on a conclu une entente avec le CSSS pour
faire l'affichage d'un temps-plein. Puis la
prochaine entente qu'on veut essayer de faire, c'est de mettre un interprète
pour les soins de santé au CSSS, qui
est à côté de chez nous, pour permettre aux gens de recevoir
des services en ma langue, là, en leur langue.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
Outre la question de la langue, qui, je comprends, est un enjeu majeur pour les
membres des communautés, que ce soit la
langue des communautés ou la langue anglaise, quels sont les principaux
obstacles au maintien à
domicile des membres des communautés autochtones du Québec?
Le Président (M.
Bergman) : M. Kistabish.
M. Kistabish (Malik) : Le principal obstacle que je dirais, pour ma
part, c'est que c'est le... bien, autre que le niveau de la langue, c'est le déracinement. Ils veulent demeurer chez
eux aussi, à l'intérieur de leur communauté. On a grandi avec la valeur
de la famille, et se faire déraciner comme ça, ça rappelle d'autres souvenirs
aussi de leur vécu, qu'est-ce qu'ils ont
vécu par rapport à… je vais mentionner le pensionnat indien. Ils
sont partis, ils ont... déracinés de leur
communauté, puis là, encore une fois, il faut qu'ils sortent de chez eux? Je me mets
un peu à leur place. Ça ne devrait pas
être trop, trop évident de partir
encore une autre fois puis de se faire déraciner encore de leur communauté. Et
ils veulent...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Bien, en fait, ma question, c'était : Qu'est-ce
qui est le principal obstacle, justement? Qu'est-ce qui empêche les membres des communautés de rester
à domicile? Est-ce que c'est les ressources, les soins spécialisés, la
proximité des soins spécialisés? Est-ce qu'il y a d'autres enjeux? Qu'est-ce
qui serait... S'il y avait une chose sur laquelle
on devait principalement s'attarder pour assurer que ce soit vraiment une
autonomie pour tous et que les mesures mises en place puissent plus
facilement desservir l'ensemble de la population, ce serait quoi?
Le Président (M.
Bergman) : M. Kistabish.
M. Kistabish (Malik) : Je vous dirais que ça serait les ressources.
Principalement, c'est les ressources qui sont le
plus gros obstacle chez nous à délivrer, à rendre des services à notre population,
que je parle de juste des ressources spécialisées,
mettons, en réadaptation, si je peux dire ça comme ça. C'est le manque de ressources
aussi. Puis, avec des programmes
aussi restreints, des fois on est encadrés dans des cadres de référence qu'on
doit juste faire ça. Si on dépasse certains cadres, bien on ne peut pas
donner le service, il faut qu'on se tourne vers le réseau, puis...
Mme Vallée :
Les boîtes sont strictes puis...
M. Kistabish
(Malik) : Oui.
Mme
Vallée : O.K. Les
programmes sont peu adaptés à la réalité ou sont peu malléables, on pourrait
dire. Est-ce que c'est ça?
M. Kistabish (Malik) : C'est ça. Ils sont très peu malléables, on ne
peut pas vraiment dépasser du cadre, puis...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée : Je vais laisser
la parole à mon collègue, qui, je sais, avait des...
Le
Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Je reviendrais avec vos recommandations, parce que, je pense, la première
recommandation, je vais la lire : «Que le MSSS s'engage à participer au
groupe de travail conjoint qui sera mis
sur pied par la [commission] dans le but d'analyser les impacts du projet
d'assurance autonomie sur les premières nations du Québec et de formuler des recommandations quant à
l'énonciation des paramètres du projet
de loi et de toute politique
qui en découlera.»
Si
je comprends bien, vous aimeriez avoir une collaboration avec le ministère
pour voir comment une politique
comme l'assurance autonomie pourrait s'implanter chez vous… ou, en tout cas,
les collaborations qui pourraient être possibles pour offrir des meilleurs
soins?
Le Président (M.
Bergman) : M. Kistabish.
M. Picard
(Ghislain) : Vas-y.
M. Kistabish (Malik) : Pour ma part, là, oui, c'est ça, effectivement, c'est ça qu'on
voudrait avoir, une collaboration afin d'analyser les impacts qu'on aurait, qu'un
tel projet pourrait avoir comme impact sur nos communautés puis aussi
comment qu'on pourrait harmoniser et avoir accès aux services pour nos communautés.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, écoutez, moi, je trouve que c'est une
belle... en tout cas, c'est un appel à la collaboration.
Puis, avant de savoir qu'est-ce qu'on va faire, il faut peut-être en faire
l'étude, faire une étude des besoins puis
tout en respectant les différentes juridictions. Puis je comprends que c'est
une situation assez complexe où chacun a des apports à faire. Moi, je pense que, comme gouvernement, on devrait
saisir l'opportunité, surtout que, comme vous disiez, quand on met des
politiques comme ça en place, théoriquement on devrait vous consulter.
Vous
offrez encore plus, vous offrez une possibilité de collaboration par un comité.
C'est-u un comité que vous verriez avec des résultats à court ou à moyen
terme, sur l'espace de quelques mois ou en termes d'années?
Le Président (M.
Bergman) : M. Picard.
M. Picard (Ghislain) : Je vais laisser le soin à Mme Sioui de compléter.
Mais, pour nous, c'est très clair qu'il y a une possibilité d'arriver à des résultats rapidement, parce que je pense
qu'on est capables de bien cerner la situation qui nous intéresse ici. Et, à mon sens, il y a des
exemples aussi de résultats, lorsqu'il y a collaboration, et notamment au
chapitre, par exemple, de l'adoption
coutumière — et je
pense que c'était sous le gouvernement précédent — où il y a eu le dépôt d'un projet de loi n° 81 pour reconnaître
l'adoption coutumière dans nos communautés. Et également, il y a quelques
années, il y avait une modification,
je pense que c'était une loi qui venait confirmer le statut de sage-femme, et
je me souviens qu'à l'époque il y avait des considérations précises pour
cette profession-là à l'intérieur des communautés que nous représentons.
Donc,
il y a des exemples de bonne collaboration qui existent. Encore faut-il avoir
le forum approprié pour en discuter.
C'est pour ça que nous avions proposé, d'ailleurs, acheminé une lettre au
ministre à cet effet-là pour la création d'un groupe de travail conjoint pour vraiment faire l'examen de tout ce
qui peut constituer de paramètres, là, par rapport à la spécificité des
communautés que nous représentons.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon, il vous reste
3 min 30 s.
• (20 h 20) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Surtout
que moi, je pense qu'il y a beaucoup de travail à faire avec les communautés. Il y a un phénomène
d'isolement. Il y a également des phénomènes où il y a des communautés qui ont peu de personnes. Donc, quand on veut
développer des ressources, on n'a pas toujours le nombre minimal. Puis je
pense qu'il y a également une grande, grande volonté.
Puis,
quand on parle de maintien à domicile, c'est que vous avez probablement des
gens qui pourraient rester dans la
communauté, parce qu'il n'y a rien de pire, quant à moi, que les sortir de la communauté,
qu'on peut essayer de les garder le plus possible jusqu'à la fin de leur
vie, mais ça va peut-être demander de développer des ressources très
particulières que vos communautés pourraient probablement gérer et qui
pourraient se faire en collaboration avec le gouvernement du Québec et le
ministère de la Santé.
Le Président (M.
Bergman) : M. Picard.
M. Picard (Ghislain) : Oui. Bien, sur cette question-là, c'est clair que
ce qui est poursuivi comme objectif par l'ensemble des communautés que nous représentons, c'est... Et
d'ailleurs, au début, je référais à la déclaration de l'ONU sur les droits des peuples autochtones. Et, je veux
dire, cette déclaration-là, comme les principes du Québec en 1983,
reconnaissait notre capacité et la possibilité aussi de pouvoir
développer nos propres institutions. Donc, oui, de toute évidence, et qu'on
puisse avoir nos propres institutions qui assurent leur propre gouvernance.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon, il vous reste deux minutes.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui. Bien, écoutez, moi, je
conclurais en vous disant que j'apprécie énormément, puis notre parti apprécie énormément la proposition que
vous faites parce que c'est une proposition de collaboration. Pour avoir
rencontré le chef Picard dans le H1N1, là,
on avait vu qu'à ce moment-là on avait établi qu'il y avait des collaborations,
puis vos communautés avaient été dans les
communautés avec lesquelles on avait eu vraiment des bons résultats. Et moi,
je pense que c'est le type d'approche qu'il
faut avoir. Je suis à peu près certain que le ministère et le ministre doivent
être contents de voir qu'on puisse
avoir des collaborations communes. On sait que la situation, quand on arrive
pour négocier ou discuter, c'est
toujours complexe parce qu'il y a toujours le niveau fédéral, mais il reste que
les citoyens du Québec qui reçoivent
des soins… Puis je pense que vos communautés ont droit aux mêmes soins, adaptés
aux conditions, comme je vous le
disais, à cause souvent de l'isolement, petites communautés. C'est comment on
peut faire pour donner les services. En tout cas, vous pouvez être
assurés que vous pouvez compter sur notre collaboration.
Le
Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc du deuxième
groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault :
Merci, M. le Président. Merci de votre présence. Je voudrais vous référer...
Dans votre mémoire, vous mentionniez
que vous bénéficiez de deux programmes de Santé Canada, le premier étant le
Programme de soins à domicile en
milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits, le deuxième étant le
Programme d'aide à la vie autonome.
J'aimerais
comprendre comment ça fonctionne. Est-ce que c'est des enveloppes budgétaires
annuelles que vous recevez en fonction
des besoins ou c'est la même enveloppe qui bénéficie d'une augmentation
annuelle? Comment ça fonctionne puis quel est le montant de l'enveloppe
que vous recevez?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Sioui.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Bien, ça
dépend des communautés. Le même montant n'est pas alloué à chacune des
communautés de la même façon.
Ce sont des
ententes maintenant que les communautés peuvent conclure jusqu'à sur une
période de cinq ans. C'est négocié
sur une base populationnelle, comme je l'expliquais un petit peu plus tôt.
Donc, dépendamment de ce qu'on reçoit du
montant, on doit bâtir notre offre de services à ce niveau-là. C'est sûr, c'est
assez complexe, là, quand même au niveau des lignes directrices et de tout ce qui vient avec. Donc, encore une
fois, bien, comme je le disais, c'est… supposons, pour les soins à domicile, on va donner des soins pour
une période x pour les personnes, soit de 2,5 heures. Par la suite, on doit
après ça référer au niveau du réseau parce
qu'on ne peut pas nécessairement donner tous les services qu'on a de besoin
au niveau des personnes, dépendamment de la
gravité de l'état de la personne. Aussi, lorsque la communauté conclut son
entente, c'est sur une base d'une entente, dépendamment, avec le fédéral. Donc,
une entente est signée avec Affaires autochtones
au niveau de l'aide à la vie autonome, et l'autre entente est signée avec Santé
Canada au niveau du Programme de
soins à domicile. Donc, ce sont deux ententes distinctes. Il y a un travail qui
est en train de se faire au niveau fédéral pour essayer de ramener les ententes, avoir les ententes unifiées, mais
ça ne sera pas disponible avant 2015-2016 pour les communautés. Et là
ils sont comme en pilotes présentement.
Donc, une
communauté, dépendamment, va... L'enveloppe va être différenciée, là, d'une
communauté à une autre. Donc il n'y a pas de formule pour tout le monde,
la même chose, ce sont des ententes qui sont basées vraiment sur la population
qu'on dessert au niveau de la communauté.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Groulx, il vous reste deux minutes.
Mme
Daneault : Merci. Mais le montant global, ça peut
représenter combien dans le programme soutien à domicile?
Mme Sioui (Marjolaine) : Peut-être
que, Malik, tu peux parler de ton…
M.
Kistabish (Malik) : Dans le
montant pour le soutien à domicile, c'est un peu ambigu, parce que pour nous,
les Algonquins de chez nous, c'est un… comme
que Marjolaine disait, c'est une entente qui était des services sociaux.
Nous, les
services sociaux, on n'a pas d'entente.
On n'a pas pris en charge les services
sociaux à l'intérieur de la communauté. Ça
fait que le ministère
des Affaires indiennes envoie ça au Centre jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue chez nous, et c'est le centre jeunesse qui… Nous,
on facture le centre jeunesse. Ça
fait que ça peut... Le montant, je ne
l'ai jamais su, en tant que tel.
Mais, pour ce qui est des soins à
domicile, j'ai une enveloppe de 104 000 $ par année pour desservir mes
soins de santé à l'intérieur de ma communauté. Puis ça n'augmente pas
nécessairement annuellement. Alors, on a des
petites indexations, là, de 2 % à 3 % par année, là, et c'est tout.
Et cette augmentation-là de 3 %, souvent elle nous est dictée par Santé Canada. Ils nous disent que c'est soit
pour les frais de formation ou pour l'augmentation salariale de nos employés, et ça ne peut
strictement servir à rien d'autre et, non, même pas pour la délivrance de
services.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. M. Picard, Mme Sioui, M. Kistabish, merci pour votre
présentation, merci d'être ici avec nous et partager votre expertise.
Je demande
aux gens du Regroupement interprofessionnel des intervenants retraités des services
de santé pour prendre leur place à la table et je suspends pour quelques
instants seulement.
(Suspension de la séance à 20 h 26)
(Reprise à 20 h 29)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors,
collègues, on reçoit le Regroupement interprofessionnel
des intervenants retraités des services de santé. Bienvenue à la commission
parlementaire. Pour les fins de
l'enregistrement, on vous demande de nous donner vos noms, vos titres, et vous
avez 10 minutes pour faire votre présentation. Alors, le micro est
à vous.
Regroupement interprofessionnel
des intervenants
retraités des services de santé (RIIRS)
Mme
Lamontagne (Andrée) : O.K.
Je me présente : Andrée Lamontagne, je suis la présidente. À ma gauche,
c'est Claire Tougas, la première
vice-présidente. À l'extrême gauche, Élaine Trottier, la deuxième
vice-présidente et, à ma droite, Nicole Lefebvre, qui est la secrétaire
du RIIRS.
Donc, M. le
Président, Mmes, MM. les députés, le Regroupement interprofessionnel des
intervenants retraités des services de santé était à l'origine un
regroupement d'infirmières retraitées. Il a été créé en 1992 par la volonté
d'infirmières sur le point de prendre leur retraite ou déjà retraitées et est
supporté par le Fédération des infirmières et infirmiers
du Québec. Ces pionnières souhaitaient rassembler leurs consoeurs afin de
recréer un sentiment d'appartenance, et d'éviter l'isolement, et de
donner une voix collective à ses retraités.
• (20 h 30) •
Depuis, le
RIIRS n'a cessé de croître et, en 2006, il s'est agrandi et enrichi en
intégrant les infirmières et infirmiers auxiliaires, les inhalothérapeutes, les perfusionnistes et les
techniciens et techniciennes en
circulation extracorporelle et les puéricultrices.
Notre regroupement compte actuellement près de 10 000 membres répartis dans 10 régions du Québec. Nous sommes
une organisation d'action collective visant à favoriser une meilleure défense
des droits et intérêts des membres, à
fournir le soutien nécessaire à l'amélioration de leur qualité de vie et
participant aux grands débats publics relatifs aux intérêts des aînés.
Donc, le
livre blanc sur la création d'une assurance autonomie traite de sujets que nos
membres connaissent bien en raison de
leurs activités dans le cadre de leur vie professionnelle et de leur réalité
personnelle à titre d'aînés. Nous avons donc tenu une consultation
auprès de nos membres au courant de l'été afin de connaître leurs avis sur
l'ensemble des propositions et recueillir leurs suggestions quant au projet
d'assurance autonomie. Le mémoire est le résultat de cette démarche. Les présidentes de chaque région ont
procédé à une consultation parmi leurs membres selon le temps et les
moyens disponibles, là, parce qu'on était en période d'été. Les membres de sept
régions ont répondu avec beaucoup d'intérêt et manifesté de nombreuses
inquiétudes. L'essence du contenu du livre blanc est très bien reçue, puisque
les aînés souhaitent vraiment choisir leur
domicile pour y vieillir en toute sécurité et obtenir les services qui leur permettront
d'atteindre cet objectif. Les commentaires
furent très nombreux sur les préoccupations et les questionnements suscités
quant à la mise en application du programme
ainsi que le financement pour mettre en place cette assurance. Notre groupe est composé à 90 % de femmes dont le revenu
est, en général, faible et donc très vulnérable aux coûts pouvant être engendrés
par la mise en application de l'assurance autonomie.
Donc, la démarche nécessaire pour cette
assurance. Nous réitérons que nous appuyons le projet d'assurance autonomie, mais nous tenons à souligner qu'une
attention particulière devrait être portée quant aux réalités différentes
qui sont vécues par les aînés dans les
différentes régions du Québec. Nous constatons parmi nos membres qu'il existe
des disparités régionales importantes quant
aux besoins, aux ressources et aux services. À titre de professionnels de la
santé, nous avons été à même de faire le
constat de ces différences qui existent et nous considérons qu'elles doivent
être tenues en compte. Donc, comme
première recommandation, nous recommandons que l'aspect des disparités
régionales quant aux besoins, aux
ressources et services soit tenu en compte quant à l'élaboration du programme
d'assurance autonomie.
Nous avons
aussi pris connaissance de l'échéancier proposé par le livre blanc quant à
l'adoption et l'implantation du programme d'assurance autonomie. De
prime abord, nous nous interrogeons quant à la possibilité de respecter cet échéancier, qui nous semble peu réaliste, en considérant
qu'il est essentiel que les besoins et les ressources soient évalués et répertoriés en tenant compte des réalités et
des disparités régionales, toujours tel que mentionné. La mise en place de
l'ensemble des mécanismes nécessaires et
surtout l'adhésion tant des aînés que de l'ensemble des intervenants qui seront
impliqués sont tout aussi indispensables.
Nous sommes d'avis que ces étapes sont essentielles au succès du programme
et doivent s'inscrire dans un échéancier
réaliste. Nous recommandons que l'échéancier quant à l'implantation du
programme d'assurance autonomie soit révisé afin de s'assurer qu'il sera
réaliste et réalisable.
Pour les
personnes admissibles, tout en étant en accord avec l'identification des
groupes ciblés, l'intervention du RIIRS
vise uniquement le groupe des aînés en raison de la mission du regroupement,
qui vise la défense de l'intérêt de ses
membres. Pour les services assurés, nous sommes en accord avec les services
identifiés qui doivent être visés par le programme. Par ailleurs, notre
expérience professionnelle passée ainsi que notre constat de la situation
présente nous amènent à nous interroger quant à la disponibilité et la
formation de l'ensemble des ressources qui seront appelées à assurer les services identifiés. Ces éléments
constituent, selon nous, la pierre d'assise du projet d'assurance autonomie
et la clé de sa réussite. Nous recommandons que la disponibilité et la
formation de l'ensemble des ressources soient évaluées, toujours en tenant
compte des particularités de chaque région du Québec.
Pour le
cheminement des personnes admissibles, nous sommes en accord avec les grandes
lignes élaborées dans le livre blanc, concernant le processus de
cheminement des personnes admissibles. Notre expérience professionnelle collective
nous autorise à souligner l'importance primordiale qui doit être accordée à
l'autorité et à l'imputabilité du gestionnaire
de cas : l'autorité quant à la détermination et l'identification des
services à donner ainsi que les ressources qui seront appelées à les dispenser — cette autorité devra, selon nous, être
exercée en consultation avec une équipe de professionnels de titres
d'emploi pertinents autres que celui du gestionnaire de cas. Cette autorité
devra aussi pouvoir être exercée
envers l'ensemble des ressources dispensatrices de services, que celles-ci
relèvent directement ou non du réseau de santé; l'imputabilité quant à la mise en oeuvre du plan de
services déterminés ainsi que l'ensemble des moyens afin de le respecter.
Nous
constatons par ailleurs qu'il existe une ambiguïté quant au moment de
l'intervention du gestionnaire de cas. Ce
dernier est-il impliqué avant et pendant l'évaluation ou uniquement
après celle-ci? Ça nous apparaissait un peu nébuleux. Donc, nous recommandons que l'autorité et l'imputabilité du gestionnaire de cas soient maintenues et même
renforcées. De plus, le moment de l'intervention du gestionnaire de cas
devrait être précisé.
L'allocation
de soutien à l'autonomie. Nous tenons à souligner que la priorité de nos
membres est à la disponibilité
et l'accès aux ressources
et aux services. Sans nier que l'allocation financière pour l'achat de services
puisse répondre aux attentes de
certains aînés, nous considérons que la priorité doit être donnée à la disponibilité et à l'accès aux services et
non à l'allocation financière. Donc, nous recommandons que l'allocation de
soutien à l'autonomie priorise l'attribution d'heures de services devant
l'allocation financière pour l'achat des services.
La
responsabilité du CSSS. Nous sommes aussi en accord que la responsabilité et l'imputabilité du CSSS sont nécessaires et essentielles
pour assurer le bon fonctionnement du projet d'assurance autonomie. Nous soulignons
qu'il est primordial qu'il y ait une concertation de tous les organismes
qui sont à même de donner les services requis dans chacune des régions et qui
se retrouveront donc sous la responsabilité et l'autorité du CSSS.
Au niveau
du financement, la préoccupation du RIIRS et de ses membres, c'est que l'assurance
autonomie n'ait pas pour effet de
hausser la contribution des usagers ou de diminuer les crédits d'impôt disponibles pour les aînés et leurs proches. Le défaut de respecter ces paramètres amènerait indubitablement
comme résultat un appauvrissement des aînés, ce qui n'est certes pas le but visé ou une des
conséquences souhaitées par le projet d'assurance autonomie. Donc, nous recommandons que l'assurance autonomie n'ait pas
pour effet direct ou indirect de hausser les contributions des aînés
ou de diminuer leurs crédits d'impôt ou ceux de leurs proches.
En
conclusion, nous remercions les membres
de la commission de nous avoir permis
de présenter l'opinion de nos membres pour qui ce projet sera
déterminant afin de leur permettre de vieillir dans le domicile de leur choix.
Nous sommes disponibles pour les questions en lien avec la consultation
effectuée auprès de nos membres.
Le
Président (M. Bergman) : Merci, Mme Lamontagne, pour votre présentation. Et maintenant,
pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Merci,
mesdames, pour votre présentation. J'irais, d'emblée, sur votre premier point
qui porte sur les disparités régionales.
En fait, c'est un
élément qui a été soulevé par notamment le Protecteur du citoyen dans deux de
ses rapports, l'iniquité par rapport à l'accès aux services de soutien à domicile selon le territoire,
et l'assurance autonomie est justement
la réponse que nous proposons à ceci parce que, si l'accès aux services varie
d'une région à l'autre, l'allocation, elle, le soutien à l'autonomie, suite à l'évaluation, devrait être uniforme, peu importe la région du Québec,
et c'est la réponse que nous
souhaitons apporter à cette disparité-là. En fait, l'État actuellement, en moyenne, fournit 15 %
des services de soutien à
l'autonomie, et ça peut aller d'un faible 6 %, dans certains territoires,
à plus de 33 % dans d'autres, dépendamment de certaines politiques de gestion des CSSS. Alors, ce que nous voulons, nous, c'est qu'on
puisse avoir une équité interrégionale
dans l'accès à des services de soutien à l'autonomie, alors on se rejoint tout à fait dans cette voie. Par contre, j'ai
l'impression qu'on ne comprend pas la même chose avec l'allocation. Pour moi,
ce n'est pas une allocation en espèces, une allocation, c'est une allocation d'heures de services. Et, je vous
rassure là-dessus, il n'est pas question d'avoir un chèque qu'on signe à la personne, quoique, pour les
personnes handicapées, ce qu'on nous dit, c'est que le chèque emploi-services
est une modalité qu'ils apprécient et qu'ils veulent continuer à recevoir.
Alors,
pour nous, c'est vraiment une allocation en heures de services. Qu'elle soit
donnée par des établissements publics ou des entreprises d'économie
sociale, des résidences privées ou des organismes communautaires, c'est une
allocation en heures de services.
• (20 h 40) •
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Andrée) : Oui. O.K. Je suis d'accord avec vous, mais c'est qu'on avait bien lu dans
votre présentation du livre blanc qu'il pouvait aussi y avoir des
allocations au niveau monétaire.
Maintenant, pour ce qui est des régions, la disparité des régions, moi, le manque,
là, c'est au niveau de la ressource. C'est qu'actuellement, en région, et on l'a observé, là, même
dernièrement, c'est que le besoin est analysé, on dit :
Oui, voilà, madame a besoin des
EESAD, si on veut, d'une personne des EESAD, et on prend le téléphone, et il n'y a
pas de ressources. Madame nous
dit : Elles sont tout utilisées, cette semaine on ne peut pas, ça va
aller dans deux semaines. Et les services
sont vraiment rompus, et on les reprend la semaine d'ensuite. On y va quand les
ressources sont là. Et c'est ça
qu'on trouve difficile au niveau des régions, c'est que la ressource n'y est pas ou y est peu, et aussi ce ne sont jamais les mêmes, de toute évidence, aussi, qui viennent. Et
c'est la difficulté qui se vit actuellement en région. C'est pour ça qu'on
demandait… Parce que, même s'il y avait
allocation, au niveau des services, d'heures, il faut la ressource, et
actuellement elle n'est pas là. Il
n'y a pas de stabilité de ces ressources-là et il n'y a pas de permanence de
ces ressources-là. C'est ça qui est le plus difficile.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : On n'a pas eu tout à fait la même opinion de la
part des entreprises d'économie sociale qui nous ont assuré que, dans
les 102 entreprises d'économie sociale partout sur le territoire, il y avait la
capacité de répondre aux besoins. Alors, on a une divergence là-dessus, sur
l'appréciation de la disponibilité des ressources.
Je voudrais
vous entendre sur le gestionnaire de cas. Vous demandez : Est-ce qu'il
intervient avant, pendant ou après? Toutes les réponses sont bonnes,
c'est-à-dire : le gestionnaire de cas doit être là avant l'évaluation,
pendant l'évaluation et après l'évaluation.
Ce n'est pas juste quelqu'un qui vient faire une évaluation et s'en va, le
gestionnaire de cas, c'est la
personne qui procède à l'évaluation, élabore avec la personne le plan de
services individualisés, obtient les services
et s'assure du suivi de la personne et de sa réévaluation. C'est l'ensemble de
ces fonctions-là que le gestionnaire de cas accomplit pour les personnes
en perte d'autonomie.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : C'est
ce que nous souhaitions, parce qu'il
n'y a rien de mieux que la continuité
pour être capables de connaître le dossier et
le suivi de la personne comme telle. C'est ce qu'on souhaitait, que le gestionnaire
de cas soit avant et après pour le suivi, et même l'évaluation, effectivement.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Bien,
c'est lui qui est responsable de l'évaluation, hein?
Mme
Lamontagne (Andrée) :
Responsable. Mais ce qu'on souhaitait, par
exemple, par rapport à ça aussi… et responsable et
imputable, parce qu'on avait besoin des deux aussi, parce qu'il
fallait absolument quelqu'un qui rende des comptes.
On a besoin de quelqu'un qui rende des comptes.
Mais ce qu'on souhaitait, par exemple, c'est qu'il y ait une équipe avec cette gestionnaire de cas, qui
soulagerait sa responsabilité. Dans ce sens-là, on dit : S'il y a
une équipe qui travaille avec elle, à ce moment-là c'est plus facile de prendre la responsabilité, de l'assumer totalement. Parce que ce que j'en ai compris aussi, c'est que non seulement
elle faisait le suivi, mais elle devait évaluer les ressources qui allaient
s'occuper de la personne. Donc, tout ça, vous comprendrez que c'est beaucoup,
hein? On trouve que pour une même personne,
là, c'est beaucoup, d'en faire l'évaluation, de faire le suivi, de voir à ce
que les bonnes ressources soient accordées et de voir aussi à ce que la ressource soit compétente et d'en faire
l'évaluation. Donc, ce qu'on voyait, c'est qu'il y avait une équipe avec
cette personne-là aussi pour lui aider.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Quoique l'évaluation de la compétence des prestataires, ça, ça relève en fait
plus de l'établissement, que ce soit
l'agence ou le centre de santé et de services sociaux, et non pas du
gestionnaire de cas lui-même. Le gestionnaire de cas va s'assurer que les services qui sont supposés être donnés le
sont effectivement, mais l'accréditation des prestataires, ça, ça doit se faire par un processus qui ne
dépend pas du gestionnaire de cas, là, qui est un processus qui fait partie du
contrat que l'établissement passe avec les
prestataires, que ce soit l'entreprise d'économie sociale ou l'organisme communautaire.
Comprenez-vous ce que je veux dire?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : Oui.
Bien, ce qu'on avait… oui, mais ce qu'on avait saisi, c'est qu'il y avait…
la gestionnaire
de cas devait faire l'évaluation des services rendus à la personne, donc, par les
différentes ressources qui étaient là.
M.
Hébert : Dans le sens que les services sont donnés,
mais la compétence du personnel… ce n'est pas elle qui va faire l'évaluation de la compétence du personnel qui donne les
services. Ça fera l'objet d'une accréditation des organismes
prestataires, en fait. Le gestionnaire de cas va s'assurer que les services…
s'il a besoin de 15 heures par semaine, que ces
15 heures par semaine là sont effectivement données, parce
que le gestionnaire de cas suit la
personne et va donc être en mesure de
savoir auprès de la personne et de son proche est-ce que les 15 heures ont
été effectivement données et est-ce que votre estimé de la qualité de ces services-là est
satisfaisant. Comprenez-vous?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Andrée) : Oui.
M.
Hébert : Alors, je résume le processus.
Si je me résume, il y a deux processus d'évaluation de la qualité : un qui est un processus où les prestataires
doivent avoir une accréditation pour s'assurer que leur personnel a la bonne
formation et que les critères de
qualité sont au rendez-vous, et une autre qui est plus individuelle : Est-ce que
la personne dont je m'occupe reçoit des services qui correspondent au
plan de services individualisés? Et ça, c'est le gestionnaire de cas.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne
(Andrée) : Oui. Et de là notre inquiétude, à savoir que c'est
essentiel pour nous que les ressources qui vont donner les services aient la
compétence, par exemple, qu'elles reçoivent une formation nécessaire
et qu'elles aient la compétence de donner ces services-là. Ça, pour
nous, c'est essentiel.
M.
Hébert : Donc, dans les critères d'accréditation des
prestataires, il faudra que la formation soit un élément central, selon
ce que vous me dites.
Mme Lamontagne (Andrée) : Voilà.
M.
Hébert : O.K., peu
importe le prestataire en question.
Mme Lamontagne (Andrée) : Exact.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Je reviens sur le chèque emploi-services parce que,
pour moi, c'est un élément important sur lequel je veux avoir votre
avis. Pour les personnes handicapées, ils utilisent déjà ce chèque par lequel
ils engagent des gens eux-mêmes. Et ils utilisent le chèque emploi-services pour
les rémunérer. Les personnes
handicapées souhaitent continuer
à avoir ce mode de prestation.
Est-ce que pour les personnes âgées on pourrait
le retenir également, selon vous?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : Ce que
nous, on a retenu de ce que les membres nous ont dit, c'est qu'elles souhaitaient avoir les services, donc avoir les
heures-soins. Ce n'est pas exclu qu'il puisse y avoir aussi ce chèque, mais,
dans l'ensemble des personnes aînées, la préoccupation et l'essentiel,
c'est qu'elles reçoivent les services, donc que ce soient des heures-services qui soient attribuées,
pour être sûres qu'elles l'aient. Parce qu'au niveau monétaire on n'est pas
sûrs que ça ne puisse pas faire un petit peu
des abus auprès des aînés, que ce soit une question, à cet effet-là, là, qui
serait dangereuse, à notre avis, parce que, dépendant, là, des gens qui
vont rendre le service...
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, vous dites : On peut l'utiliser mais avec prudence pour éviter qu'il y ait des abus ou que
les heures ne soient pas effectivement au rendez-vous. C'est ce que vous
dites.
Mme Lamontagne (Andrée) : Exactement,
que les heures ne soient pas données tel que prévu.
M.
Hébert : O.K. Je disais tout à l'heure que 15 % des services sont donnés par le public.
Donc, ça veut dire que le reste est donné par les proches aidants ou
encore les gens se le paient eux-mêmes.
On estime que
ça coûte entre 2 000 $ et 5 000 $ par mois pour les
soutiens à domicile pour ces personnes-là. Avec l'assurance autonomie,
c'est clair que ça augmente le 15 % de façon importante. Et ce qu'on
prévoit, c'est moduler l'allocation pour que
ceux qui ont moins de revenus puissent avoir plus de pourcentage de soins, plus
d'allocation. Alors, en fait, on ne
peut pas aller pire que 15 %, là, parce que 15 %, c'est vraiment le
minimum. Et ce qu'on souhaite, c'est que les gens qui ont moins de revenus puissent justement avoir beaucoup plus
que le 15 % en question. Alors, quand vous parlez de votre crainte de tarification, en fait il y a une grosse
tarification actuelle, une tarification de 85 % actuellement, là. Et ce qu'on veut, c'est diminuer cette
tarification-là pour faire en sorte qu'elle soit modulée selon le revenu, elle
ne soit pas pareille pour tout le monde.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
• (20 h 50) •
Mme
Lamontagne (Andrée) : O.K. Ce
que nos aînées connaissent actuellement, là, c'est que, quand elles deviennent
en perte d'autonomie, elles ne restent pas à la maison justement parce qu'elles
n'ont pas les moyens, là, d'y rester. Donc,
ce qui leur reste, c'est le CHSLD, et, le CHSLD, bien, vous savez comme moi
qu'il y a un montant fixe qui fait en sorte que même les plus pauvres
peuvent y aller, il n'y a aucun problème.
Donc, c'est leur façon à eux autres
d'être là. Et ce qu'on leur demande, ce
qu'on souhaite et ce qu'ils souhaitent aussi, c'est de rester à la maison, mais
qu'ils ne se sentent pas plus
dépourvus au niveau monétaire que s'ils se rendaient au CHSLD. En
fait, c'est que le domicile va être supérieur aux CHSLD. Puis bien sûr
que, quand ils y vont, je peux vous assurer, en tout cas dans ce qu'on a reçu
des membres et de leurs proches, que ce
n'est pas un souhait du tout, ce n'est pas ça qu'elles veulent, mais elles
n'ont pas le choix parce qu'elles ont besoin de services, elles n'ont
pas les moyens de se le payer.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
On estime que l'État assume autour de 75 % à 80 % de la couverture de
services en CHSLD alors qu'elle est de seulement 15 % à domicile.
Alors, vous avez tout à fait raison de dire que le fardeau est beaucoup plus important à domicile pour
les personnes que lorsqu'elles sont hébergées, effectivement, surtout pour les
personnes moins bien nanties. Comme
retraités du réseau de la santé et des services sociaux, vous êtes à même de
pouvoir apprécier le rôle des infirmières. On sait qu'au niveau de la
gestion de cas ça se divise à peu près moitié-moitié entre les travailleurs
sociaux et les infirmières.
Quelle
est votre appréciation de cette tâche de gestionnaire de cas et de la formation
des infirmières pour assumer une tâche comme celle-là?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Andrée) : C'est sûr qu'ayant une formation d'infirmière et
ayant oeuvré en tant qu'infirmières nous
pensons que l'infirmière a une capacité d'évaluation plus complète que la
travailleuse sociale, quoiqu'on ne dit pas que la travailleuse sociale
n'a pas sa place, là, loin de là. Mais on pense que l'infirmière, dans sa
formation, est plus capable d'évaluer les
aspects biopsychosociaux de la personne qui font en sorte que l'évaluation est
quand même plus importante, plus
globale, si on veut, et que, si la personne a besoin, en plus, de soins, bien
elle peut le faire, là, tandis que... Ça évite d'aller chercher d'autres
professionnels, parce que les soins sont importants.
Donc,
on dit : Bien, elle, elle peut le faire. D'ailleurs, c'est ce qui se
pratique actuellement. J'ai validé au niveau du CLSC chez nous, et les gestionnaires de cas qui sont en... ils ont des
manques d'infirmières à domicile, et c'est elles-mêmes qui font les soins actuellement. Donc, elles compensent. Si
c'était une travailleuse sociale, elle ne pourrait pas le faire. Donc,
il y a quand même une économie, là, à percevoir, là, sur ce plan-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : D'un autre côté, le travailleur social, lui aussi,
il intervient dans son champ de compétence, même lorsqu'il est gestionnaire de cas, et c'est une compétence un peu
différente. Donc, ce modèle qu'on appelait le modèle hybride, là, c'est-à-dire où le gestionnaire de cas
fait sa tâche de gestionnaire de cas, plus une certaine tâche dans son rôle
professionnel auprès de ses usagers, c'est
valable à la fois pour l'infirmière ou pour le travailleur social. Je ne
voudrais pas faire un débat au niveau professionnel, mais je pense que
c'est les deux professions qui sont bien placées par leur formation généraliste
pour assumer ces rôles-là.
Mme Lamontagne
(Andrée) : On n'est pas réfractaires...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Andrée) : Merci. On n'est pas réfractaires au travailleur
social, c'est juste qu'on vous donnait, là, le point de vue infirmier.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Une dernière question avant de passer la parole à
mes collègues. Au niveau des crédits d'impôt, vous le soulevez dans
votre mémoire, il n'est pas de notre intention de les retirer. Par contre, on
ne veut pas qu'ils fassent double emploi.
Lorsqu'il y a une allocation de soutien à l'autonomie, il ne faut pas qu'il y
ait en plus le crédit d'impôt, là. Alors,
on s'assurera qu'il y a un arrimage entre ces deux modalités et qu'on puisse
utiliser l'un ou l'autre, dépendamment de
la volonté de la personne. Alors, si ça peut vous rassurer, ce n'est pas dans
notre intention d'éliminer le crédit d'impôt pour soutien à domicile.
Mme Lamontagne
(Andrée) : On est en accord.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Merci, M. le Président. Bonsoir, mesdames. Écoutez, ça
me fait plaisir d'échanger avec vous, d'une part, parce que vous êtes toutes d'anciennes professionnelles de la
santé, donc avec une connaissance du réseau, et vous êtes, vous-mêmes, maintenant retraitées. Alors, je
trouve qu'à la fois votre expertise et l'expérience que vous avez de
personnes retraitées vont certainement nous être utiles. J'ai combien de temps,
M. le Président?
Le Président (M.
Bergman) : 5 min 30 s.
Mme
Proulx : Parfait. Je souligne d'entrée de jeu que vous mentionnez que l'essence du contenu du
livre blanc est très bien
reçue, puisqu'effectivement les
aînés, vous l'avez mentionné, souhaitent vraiment choisir leur domicile, et
vieillir en toute sécurité, et avoir l'opportunité
d'obtenir à domicile les services dont ils ont besoin. Et vous mentionnez
aussi que votre groupe est composé à
90 % de femmes dont le revenu est, en général, faible et donc très
vulnérable aussi aux coûts qui pourraient être engendrés par la mise en
application de l'assurance autonomie.
Vous
parlez de votre groupe. Je suppose qu'il y en a beaucoup dans votre groupe qui
sont elles-mêmes des proches aidantes.
Vous n'avez pas parlé beaucoup de proches aidants dans votre mémoire, mais je
suis convaincue que vous avez des choses à nous dire là-dessus. Et
j'aimerais ça vous entendre. Quels sont les besoins que vos membres vous ont
peut-être signifiés au niveau des aidants naturels… aidantes naturelles, je
devrais dire?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : Oui,
je vais passer la parole à ma consoeur, qui a vécu... elle aussi étant aidante
naturelle il n'y a pas longtemps.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Tougas.
Mme Tougas
(Claire) : Oui. Alors,
disons qu'au niveau des aînées infirmières retraitées... Bon, toute notre vie,
dans nos familles, vous le savez, comme
étant… Je vois le Dr Hébert qui fait ça. Comme étant médecin, il a eu les
mêmes questions. Quelqu'un nous appelle, bon, il a tel problème.
Alors, c'est sûr qu'on est aidantes naturelles
naturellement, hein, ça se dit tout seul. La problématique est la même pour tout le monde, qu'on soit infirmière ou
pas, c'est les revenus et aussi c'est le temps, c'est l'épuisement. Et malheureusement, bien, nous, on est à l'âge de la
retraite, donc il y a l'âge aussi qui fait que c'est un petit peu plus
difficile. Au niveau des besoins qui
ont été nommés, c'est les mêmes besoins que pour toute la communauté, pour
toute la population du Québec. On a besoin de plus de ressources, on a
besoin de répit puis on a besoin de sous. C'est la même chose.
Au niveau des
infirmières, on a dit... et les inhalos, etc. : Les revenus, contrairement
à ce que la population pourrait peut-être
penser, à la retraite ne sont pas si élevés que ça. Il faut penser qu'une
grande majorité, c'étaient des femmes. Donc,
elles ont souvent soit arrêté pour élever une famille. C'est la même chose
qu'on a vue, je pense, chez les professeurs. Et, à ce moment-là, les revenus de la retraite étaient un petit peu
amputés, pour ne pas dire «beaucoup». Et c'est surtout vrai pour les infirmières qui ont pris leur
retraite, qui ont été un petit peu poussées dehors, là, en 1997 et depuis.
Alors, ces infirmières-là n'étaient
peut-être pas prêtes financièrement à prendre leur retraite, mais on leur
offrait un montant. Et, étant
épuisées ou quoi que ce soit… avaient certains besoins, elles ont pris leur
retraite mais se ramassent avec des retraites qui ne sont pas toujours
suffisantes pour ne serait-ce qu'avoir accès à des services nous-mêmes.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. Et je fais
appel encore à votre expérience, là, d'anciennes professionnelles de la santé.
Vous
soulignez dans votre mémoire que la mise en place de l'assurance autonomie, par
exemple, et de tous les mécanismes nécessaires qu'on va devoir mettre en
place doive susciter l'adhésion tant des personnes aînées que de l'ensemble des intervenants qui vont être
impliqués. J'aimerais ça vous parler de cet aspect-là, de l'adhésion des intervenants. Selon vous, pourquoi c'est important
de susciter l'adhésion des intervenants et quels sont les moyens, comment
on peut susciter l'adhésion? Parce
qu'effectivement c'est un virage. C'est un changement. Donc, il peut y avoir
parfois une résistance aux changements, naturelle. Mais comment?
Quelles seraient vos recommandations pour
vraiment susciter l'adhésion des intervenants?
Le
Président (M. Bergman) : Mme Lamontagne, il reste une minute à
ce bloc, le temps pour une courte réponse à une question.
• (21 heures) •
Mme Lamontagne (Andrée) : Parfait.
En fait, c'est ce qu'on avait évalué, c'est qu'on avait dit que la pierre angulaire, la réussite de l'assurance autonomie,
ce sera la formation des ressources et l'adhésion des personnes. Parce qu'on l'a vécu par le virage ambulatoire. Il y a
eu adhésion, mais il y a eu un manque de financement par la suite et il y a eu
découragement des acteurs par la suite.
Donc, ce
qu'on nous dit… nos aînés nous disent : Ça va faire comme le virage
ambulatoire, O.K., c'est plein de belles
promesses, c'est plein de belles choses, mais, quand on arrive à la fin, il
manque l'essentiel. Donc, cette crainte-là, elle est là, elle est constante,
et ce qu'on pense qui est important...
Et c'est pour ça qu'on parlait de
l'échéancier, parce qu'on a
dit : Si on fait adhérer les intervenants et les aînés à l'assurance, aux bénéfices de l'assurance autonomie mais que ce qu'on leur dit est réel et vrai, et qu'on
peut leur prouver, et qu'on peut leur dire : Bien, voici, vous avez des
besoins, la ressource est là pour
vous les donner, et voici ce que ça va coûter, les gens vont adhérer et les
gens vont suivre ce plan-là.
Mais, si ça fait comme le reste, comme c'est arrivé
au virage ambulatoire, ils ont de la misère à y croire. Et actuellement il y a une défense à cet effet-là, parce qu'on
dit : Ah, ça va faire comme le virage ambulatoire. Et c'est
là qu'il faut aller chercher, là, les ressources
nécessaires, compétentes pour les rassurer à cet effet-là et
dire : Oui, on est dans la bonne direction, et ça va se faire comme
ça. C'est là-dessus qu'on en est.
Le
Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc du gouvernement. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue à la commission. C'est toujours
un plaisir de rencontrer des gens qui étaient dans notre réseau puis qui
ont collaboré.
On va continuer sur la lancée sur laquelle vous
parliez. Si on vous disait que les ressources ne seront pas au rendez-vous puis on vous prouve mathématiquement qu'elles n'y seront pas… Et vous avez vécu le
virage ambulatoire. Moi, je l'ai vécu en tout cas dans le réseau, où
je l'ai défendu, en passant. J'étais probablement dans les 5 % qui y croyaient. J'ai même fait des entrevues à la radio. Et puis j'étais
médecin puis j'étais directeur des services professionnels, et, au début, c'était beau parce que le plan était bon,
les idées étaient très, très bonnes, mais ça a chaviré complètement lorsque le milliard qui devait être investi dans le virage ambulatoire n'est pas venu à cause du déficit
zéro. Vous vous en souvenez. Notre établissement à Alma, l'hôpital d'Alma, à l'époque a fait 1 million de déficit. J'ai connu des établissements
qui ont fait 5 à 6 millions,
gros plans de redressement, fermetures de lits. En plus de ça, on a eu la mise
à la retraite du personnel que vous
avez vécue. Par la suite, pénurie du personnel, puis on a pris 10 ans avant de
se relever dans le réseau de la santé. On
commence à avoir assez de médecins dans le réseau de la santé en 2013. C'est
tout nouveau, là. Parce que ça, juste pour
vous dire, c'est tout nouveau, parce qu'on a augmenté les effectifs médicaux
puis les demandes dans les facultés de médecine
à partir de 2002-2003. Ça a été ça, le virage ambulatoire. Donc, on a eu une
bonne idée, mais, lorsqu'on est arrivés pour l'appliquer, ça n'a pas
fonctionné et, vous l'avez dit, par manque de financement.
Si je vous disais
qu'on regarde mathématiquement, parce qu'on n'a pas de cadre financier, on ne
peut pas se prononcer, on arrive à la fin,
puis le besoin pour faire tout ce qui est dit dans l'assurance autonomie puis
tout mettre en place, là... mettons,
un petit chiffre, là, ça prendrait 2 milliards de dollars, mais on vous
met juste 100 millions de dollars sur
la table puis on vous dit qu'on va faire la transformation du réseau... Vous
avez connu ça, la transformation du réseau, hein? On va couper à quelque part puis, quand on va l'avoir coupé, on va
l'investir au bon endroit, là. En passant, il ne se fermera pas de lits de… Moi, je ne pense pas qu'on
a besoin de fermer des lits de CHSLD, c'est juste qu'il faut peut-être
ralentir le développement.
Mais,
si on en arrivait à la fin puis on vous disait : Bien, ce que vous avez
calculé, qui était 2 milliards de dollars, ça, c'est à part de toutes les demandes qu'on a eues durant les trois
semaines de commission, là, ce que tout le monde nous disait qu'est-ce que ça leur prenait pour qu'on
réussisse, puis qu'on vous disait qu'on met juste 100 millions de dollars,
qu'est-ce que vous en penseriez?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lamontagne.
Mme Lamontagne (Andrée) : C'est la crainte des gens. En fait, quand on a
fait la consultation, c'était pas mal tous des gens qui étaient dans le
réseau lors du virage ambulatoire, donc c'est l'exemple qu'ils nous ont donné
aussi.
Donc,
la crainte, c'est : Est-ce que les ressources y seront? Parce
qu'actuellement elles n'y sont pas. Donc, comment est-ce qu'on va aller
les chercher, d'une part, et comment est-ce qu'on va pouvoir recevoir cette
aide-là à domicile si actuellement on ne l'a
pas? C'est la question, c'est la préoccupation et c'est la même que nous avons
aussi. Donc, on a l'exemple de ce qui
a été fait antérieurement avec la meilleure volonté du monde. Et, comme vous
avez dit, c'était une bonne idée,
mais c'est la fin qui avait tout gâté avec le manque de financement. Donc,
c'est la crainte que nous avons encore cette
fois-ci. C'est normal, je pense qu'on y va avec du vécu, et notre vécu nous
apprend qu'il y avait un manque à cet effet-là, et c'est la crainte que
nous avons actuellement.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Moi,
habituellement, je suis quelqu'un qui est optimiste. Puis, juste pour vous dire, on a eu des projets de loi
qui ont été déposés par le ministre, puis on les a salués, puis on les a
adoptés ensemble, sauf que mon oeil
de médecin et de gestionnaire regarde ce projet-là, et je me dis : Je
pense qu'on va avoir un gros
problème. Et le danger que nous avons... Parce que, vous savez, quand on a fait
le virage ambulatoire, il faut se le dire,
ça a pris 10 ans avant de se relever de ça, et les coupures qu'il y a eu dans
les établissements de santé, ça a fait mal. Il y a des patients qui en ont
souffert. On a fermé des lits, on a fermé des ressources. À la fin, je pense
que c'est ça qu'il fallait faire, mais la façon dont ça a été fait, ça a
été beaucoup, beaucoup de souffrances dans le réseau, beaucoup de souffrances
pour les patients.
Vous disiez quelque chose, vous
dites : On n'a pas assez de ressources. La solution, également,
c'est peut-être de changer nos façons de faire puis de mettre plus
de ressources. Mais, si on n'est pas capables de mettre plus de ressources
actuellement... De ce que je vois dans le projet d'assurance autonomie, là, c'est
qu'on va créer un gros système informatique. On va nous donner l'estimé,
à un moment donné, qui va être au moins plusieurs dizaines de millions de
dollars, peut-être quelques centaines
de millions de dollars. Puis là il faudra peut-être avoir des estimés.
Juste la question des gestionnaires de
cas, les intervenants pivots, moi, je suis d'accord pour qu'on en mette, mais
on estimait, après-midi, là... Si on prend un estimé d'un intervenant pivot par 40 personnes, on estime à peu près
200 000 personnes. Moi, je pensais que ça a l'air autour peut-être de 40 000, 45 000.
C'est 60 000, sans compter les coûts marginaux, parce que c'est des
bachelières ou des bacheliers. On
arrive déjà avec une facture de 300 millions de dollars juste pour gérer
les intervenants pivots. Juste pour
vous dire, je suis d'accord que l'évaluation, c'est une partie importante, mais
l'intervenant pivot ne donne aucun soin directement au patient.
Là,
on part. Moi, je vais vous avouer, je le regarde d'un oeil de gestionnaire,
puis on veut développer. En passant, on
est tous d'accord avec le principe d'assurance autonomie, garder nos gens à
domicile, offrir plus de services, faire la transformation, utiliser les professionnels à bon escient, mais je
regarde le projet, là, puis je dois vous avouer que c'est un bateau que je ne suis pas sûr qu'il est… Sans
compter que, juste pour vous donner une idée de la crédibilité, on a dit
qu'on va mettre ça en place le 1er avril. On
va finir d'écouter les groupes la semaine prochaine. On va faire le projet de
loi n° 52 pendant deux semaines. On
arrête. Le ministre va pouvoir déposer son projet de loi. Selon moi, à moins
qu'il ne soit déjà écrit avant qu'on
ait fini les auditions, il va déposer ça au mois de février. Il faut faire les
auditions d'encore une quarantaine de
groupes en février. On va être à la mi-mars, là. Puis là il faut faire l'étude
article par article d'un projet de loi qui va être controversé.
Est-ce
que vous pensez qu'on peut mettre ça en place pour le 1er avril 2014? Je veux
juste dire : Soyons réalistes, là. Est-ce que c'est possible de
mettre ça en place pour le 1er avril 2014?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : Bien,
c'était ça, notre inquiétude. On ne le croit pas. On pense que l'échéancier — effectivement, c'est ce qu'on a dit dans
notre mémoire — était
trop court pour réaliser... Et on pense que ce serait peut-être plus intéressant d'aller plus lentement, d'aller
vers les régions, rechercher les ressources, mettre en place le système pour que, quand l'application pourra se
faire sans accroc… Et c'est ça qui va donner la crédibilité aux aînés qui vont dire : O.K., on embarque dans ce
plan-là. Les intervenants aussi, parce qu'on aura pris le temps d'installer
tout le système, mettre le système en
place avant, faire l'inverse de ce qu'on avait fait au virage ambulatoire. Ça,
c'est la position que nous avons.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Puis pensez-vous qu'avant d'embarquer dans un projet comme
ça le minimum, c'est qu'on sache quelle va être la contribution de la personne?
Le ministre,
il nous dit : Les personnes, on ne leur prendra pas de l'argent, on va
leur en donner moins, puis, par la suite,
ils vont devoir se donner les services selon leurs moyens. Mais, si vous êtes
une personne ou un couple qui gagnez, je
ne sais pas, 50 000 $, 55 000 $, on peut donner tout à
celui qui n'a pas de revenus, puis ça, je peux le comprendre. En passant, dans le système, actuellement c'est un
peu comme ça aussi, ceux qui ont moins de revenus, on essaie de leur en
donner plus, sauf qu'à 50 000 $, 55 000 $, ça se pourrait
que tu sois appelé à te payer tes propres services de soins à domicile. Et, où il y a peut-être une injustice
qu'il faut qu'on regarde avec le ministre, la personne qui va avoir contribué,
par ses impôts, pendant toute sa vie, là,
15, 20 ans, quand elle va arriver à la fin, si elle a moindrement des revenus,
un bon fonds de pension, ce qui est
actuellement quand même assez bon dans le réseau de la santé... Parce que vous,
vous étiez dans des années aussi où
est-ce que les gens arrêtaient mais en plus de ça ne cotisaient pas
nécessairement sur plusieurs années.
Ces mêmes personnes là qui vont avoir payé des impôts vont être celles-là qui
vont encore payer pour avoir leurs services à domicile sur le principe
que l'allocation va aller en fonction du revenu. Mais je ne vous dis pas que
c'est correct ou pas correct, je vous dis
juste : Est-ce que ce serait normal qu'on ait les chiffres, avant, de
combien vous allez recevoir, et
quelle va être la contribution que, comme usagers, vous allez devoir faire,
avant de dire qu'on est pour ou contre un principe d'assurance
autonomie?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
• (21 h 10) •
Mme Lamontagne
(Andrée) : Merci. Bien,
c'est sûr que les gens qu'on a consultés avaient cette inquiétude au
niveau du financement. C'est pour ça qu'on ne l'a pas élaboré sur le
financement, et on n'a pas pu non plus faire des recommandations sur le financement. Et les gens souhaitent évidemment
savoir combien ils vont débourser pour l'assurance autonomie, pour les services qu'ils vont recevoir.
Puis je pense que c'est normal que les gens vont accepter un montant
raisonnable pour les services qu'ils recevront, dans leur capacité de payer. Et
c'est ce qu'ils nous ont dit. Pour ceux qui ont pris leur retraite antérieurement, ça fait longtemps, parce qu'on
sait que le RREGOP est en fonction depuis 1973, donc ceux qui ont pris leur retraite bien avant
n'avaient pas cette forme de protection là non plus. Et ce n'est pas rare, là,
les gens entre 70 et 75 ans, qui sont peut-être les personnes, là, qui
vont utiliser le plus… qui ont un fonds de pension à 10 000 $ et
12 000 $, là, dans l'année, là. Ça fait qu'on parle d'un fonds de
retraite qui est très faible.
Et c'est de
ça qu'on parlait tantôt. Et les gens ont dit : Si on doit rembourser,
donner plus, on ne peut pas, on n'est pas
capables, donc on n'utilisera pas ces services-là. Et ils n'auront pas plus.
Donc, c'est d'aller savoir… Évidemment, bien sûr que les gens veulent savoir combien ça va leur coûter, mais ce
qu'ils nous ont dit au départ, c'est qu'«on ne peut pas assumer plus que ce qu'on paie là, en regard
de la pension que nous avons, qui est très faible». Et là je ne vous parle
pas de ceux qui ont pris leur retraite dans
les 10, 15 dernières années, je vous parle de ceux qui sont d'âge de recevoir
plus les soins, qui… en haut de 75 ans.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Vous devez avoir des enfants, aussi, entre 30, 40 ans?
Mme Lamontagne (Andrée) : Oui.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Vous savez comment, de nos jours, les jeunes
travaillent, mais également au niveau de…
ils ont des dépenses, ils ont une famille à faire vivre. Est-ce qu'il serait
normal également pour vos jeunes, ceux qui travaillent, qu'on leur dise
combien ça va coûter, une assurance autonomie?
Et, si on
leur disait… Puis, un exemple, si on leur disait : Bien, vous allez payer
1 000 $ de plus d'impôt, ça va être la cotisation que vous allez payer à partir de votre impôt régulier
pour qu'on soit capables de se payer une assurance autonomie dans 15, 20 ans, alors qu'on sait que
cette classe moyenne là, là, est déjà à la gorge… Les gens, là, juste les
taxes scolaires, là... vous avez vu les
taxes scolaires, c'est… En passant, les taxes scolaires, ce n'est pas nos plus
grosses taxes, c'est les taxes
municipales, les plus grosses taxes. Juste le fait d'avoir augmenté les taxes
scolaires, il y a des gens que ça a
eu de l'implication. Mais moi, je pense que — puis je ne vous parle pas des gens qui sont
riches, là, je vous parle des gens
qui sont dans la classe moyenne, là — ces gens-là, quand on va leur dire, là, qu'«à
partir de maintenant vous allez
payez, quoi, 400 $, 500 $, peut-être jusqu'à 1 000 $ de
plus pour mettre en place un système d'assurance autonomie», est-ce que vous pensez que le contribuable, qui,
en passant, va être l'usager, qui peut être aussi un travailleur… est-ce que
ça ne vaudrait pas la peine qu'on lui
demande avant : Est-ce que tu es prêt à assumer ça, selon les services
qu'on va donner?
C'est
parce que, là, on met une grande priorité sur tout ce qui devrait être mis en
place, mais, à un moment donné, là,
il faut être réaliste, il y a quelqu'un qui va devoir avoir à payer cette
facture-là. Le ministre, il dit qu'on va demander ça aux élections. Bien, peut-être qu'aux
élections, si les gens savent combien ça va coûter, là… combien ils savent que
ça va coûter, peut-être que les… on va
demander d'être raisonnables. Là, on nous offre des gros, gros besoins. Là, on
dit aux gens : Vous allez tout
avoir. Puis, juste pour vous dire, calculez tout ce qui… Puis, en passant, les
gens venaient en disant : Si
vous me donnez ce que j'ai de besoin, je suis d'accord, mais, si je ne donne
pas pour ce que j'ai de besoin, bien on
va en rediscuter. Mais cette facture-là, là, du contribuable, là… Moi, je
défends les patients, mais, à un moment donné, là, il faut voir que, le même patient, là, s'il a moins d'argent dans
ses poches, là, ça va avoir de l'impact sur sa famille.
Ne
pensez-vous pas qu'on devrait le savoir avant? Même qu'on fasse les prochaines
consultations, il faut que le ministre nous dépose ce cadre financier
là.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : Oui.
Bien, je pense que pour tout le monde ça va être important de connaître le
financement avant son application. C'est normal.
Mais moi,
j'aurais peut-être un petit bémol au niveau des 40 ans, parce que ce que je
vois au niveau des jeunes, c'est que,
contrairement à ce qu'on vivait antérieurement, ils n'ont pas la capacité de
devenir aidants naturels, ils n'ont pas
la capacité et le temps. Donc, si pour eux on leur explique… sans que ça coûte
une fortune évidemment, mais qu'on leur
explique que l'assurance autonomie va leur éviter de devenir, en obligation, un
aidant naturel pour les parents, bien peut-être
qu'il y a quelque chose qui va allumer ou ils vont dire : Bien, ça
pourrait peut-être être intéressant à cet égard-là. Mais en même temps il y a des limites, toujours, à
ce financement-là, et il ne faut pas
non plus que ça déborde, là, que ça devienne
un montant épouvantable qui va même les amputer. Parce qu'on sait très bien
qu'à 40 ans aussi tu n'as pas la pensée non plus qu'à 75 ans tu vas en
avoir besoin. Tu sais, ce n'est pas là que ça se passe.
Ça fait que le seul élément qui ferait en sorte
qu'ils accepteraient l'assurance autonomie, qu'ils accepteraient d'y participer, c'est de dire : Bien, ça va
nous éviter de devenir un proche
aidant, un aidant naturel qui va faire en sorte que nous, on va
continuer de travailler, et il y a quelqu'un qui va s'occuper de nos proches.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Vous comprenez que
notre rôle, de l'opposition, c'est de poser des questions et également de faire un débat, et
on veut avoir des réponses à des questions qui sont légitimes.
Et au début,
quand les gens sont arrivés avec l'assurance autonomie, ça a été vendu comme
étant... Vous regardez l'annonce qui
est faite à la télévision, qui a coûté 1 million de dollars, là, tu vois une madame qui dit : On vous
garantit que vous allez rester à
domicile. Mais la réalité, à un moment donné... Moi, je suis médecin, je vois
les patients puis je vois les
familles également. Et, à un moment donné, les gens, ils perdent tellement de
la capacité que, même si vous voulez les garder à domicile, même pour
les aidants naturels, avec tous les services, c'est peu possible.
Juste pour
vous dire, vous parliez tantôt, là : Les gens veulent demeurer à domicile,
puis on va les admettre dans les
CHSLD. Actuellement, je ne connais pas beaucoup d'endroits qui admettent des
patients qui sont légers, parce qu'ils manquent de moyens. Parce qu'une
heure, 1,5, deux heures-soins, ça ne rentre plus dans les CHSLD, hein? C'est du
trois heures, 3,5 heures. La preuve, si vous
regardez, la plupart des gens qui vont rentrer dans les CHSLD sont beaucoup
à la fin de vie puis ils vont souvent mourir
dans l'année ou les deux années qui suivent. Le taux de décès dans les CHSLD,
parce que les gens sont en fin de vie — hein, c'est la réalité — est d'environ entre 35 % et 40 %.
Ça, ça veut dire que, dans un CHSLD,
il y a 35 % des gens qui vont décéder parce qu'ils sont à la fin de vie.
C'est la situation actuelle et c'est la
situation qu'on a déjà depuis quelques années. Mais là on nous dit : Vous
savez, ces gens-là vont rester à la maison. Je ne suis pas sûr qu'on est réaliste quand on fait cette prévision-là.
Puis on nous dit, en plus de ça : Vous savez, cette clientèle-là,
on va les garder à la maison, ça va nous empêcher de développer des lits de
CHSLD.
Moi, je pense que, pour les cinq, six prochaines
années, il y a une marge de manoeuvre. Mais après ça il va falloir ajuster notre nombre de CHSLD qui, d'après
moi... La norme est autour de 2,5 lits par 100 personnes de 65 ans et plus. Descendre en bas de ça, ça va être difficile. Il y
a comme une réalité aussi, il faut être... Moi, en tout cas, je suis un
docteur, là, je suis un clinicien,
puis le ministre aussi l'est, puis je suis certain qu'il réalise que ce n'est
pas vrai qu'on va garder tout le monde
à domicile. Mais, moi, ce que je veux, je veux juste qu'on dise la vérité, puis
je veux juste qu'on dise les vraies
choses, puis je veux qu'on prenne une décision sur ce projet-là, pas sur un
flash, ou une idée, ou une image à la télévision. Je veux qu'on prenne
les décisions selon ce qu'on pense qui est le mieux pour les patients puis à la
fin, il faut y penser aussi, là, la capacité à payer du contribuable. Ça, c'est
mes deux critères.
Et, quand on
fait des idées où on arrive puis on dit : Vous savez, notre projet, vous
allez tous rester à domicile, vous ne
pouvez pas croire ça. Mais les gens le croient parce que ça a été vendu comme
ça. Qu'on se dise les vraies choses. Puis peut-être que le projet, à la
fin, moi, je vais être le premier à dire : C'est un bon projet. Mais
actuellement il y a tellement de doutes. Et
tout le questionnement que vous avez mis, là... On ne s'était pas parlé, c'est
vrai, on ne s'était pas parlé avant.
Tout le questionnement que vous avez mis, là, j'ai le même questionnement. Et
c'est à ça qu'on doit répondre dans le projet.
Et moi, je
pense qu'on est peut-être partis d'une grande idée, mais, quand on va arriver
pour la réaliser sur le terrain, ça
va être difficile. Savez-vous pourquoi? Deux raisons. Premièrement, je pense que
l'argent ne sera pas au rendez-vous. Deuxièmement,
je ne suis pas sûr qu'on va avoir tout le personnel pour réaliser ça. Et
l'illusion de penser qu'il va y avoir moins
de monde en CHSLD parce qu'on va fermer des lits de CHSLD, on n'en ouvrira pas,
puis on va mettre de l'argent dans les soins à domicile,
là, ça, ça s'appelle le virage ambulatoire. On va vous couper vos ressources
puis après ça on va vous investir
dans la communauté. Mais, quand est arrivé le temps d'investir dans la
communauté, l'argent n'était pas là. C'est ça, notre réalité.
Ça fait que,
moi, ce que je demande, c'est d'avoir la vérité, d'avoir les vrais chiffres
puis d'avoir un plan qui est crédible, ce que nous n'avons pas
actuellement.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
• (21 h 20) •
Mme
Lamontagne (Andrée) : Bien,
en fait, c'est un complément. En fait, c'est ce qu'on souhaite avoir comme
réponse. C'est qu'on veut rassurer nos aînés
sur les avantages de l'assurance autonomie. C'est sûr que le plan de base, il
est intéressant, et c'est la volonté des
aînés de vieillir à la maison. C'est sûr que les services qui seront rendus à
la maison pourront, à tout le
moins... Je pense que les aînés ne sont pas dupes non plus de savoir qu'ils
vont tous mourir à la maison. Je pense qu'ils le savent. Et ils ont
aussi des choix, qu'ils font, de maison pour aînés, des maisons privées.
Ils savent
qu'ils ont ce choix-là aussi, mais ça peut reporter, si on fait… le CHSLD. Et
je ne pense pas qu'ils sont... qu'ils
croient, là, vraiment... D'ailleurs, c'est les interrogations qu'ils nous ont données et c'est vraiment
les préoccupations quant
à l'assurance autonomie et sa réussite. S'ils ont des garanties sur un
financement qui pourrait être acceptable, s'ils ont des garanties qu'ils peuvent avoir les services,
c'est sûr qu'ils vont adhérer à l'assurance autonomie. Et c'est ce qu'on
disait tantôt : Si on réussit à
les faire adhérer, les intervenants et les personnes, c'est assuré que
l'assurance autonomie sera quelque chose, là, d'assez intéressant. Mais il
faut faire ça avant.
Le
Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc du
deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault : Merci,
M. le Président. Merci de votre présence, merci aussi de votre franchise.
Alors, ce qu'on comprend de vos recommandations
ce soir, c'est que, «oui, on est en faveur de l'assurance autonomie», oui, dans le fond, vous adhérez à
la philosophie des gens qui veulent le plus possible demeurer à domicile,
tant qu'il se peut. Par contre, à quel coût? Je pense qu'aujourd'hui la question,
elle a été posée à plusieurs reprises. Et maintenant
on devra avoir des réponses avant d'aller plus loin et des réponses qui sont
beaucoup plus claires que ce qu'on a
là. Et, quand vous mentionnez le virage ambulatoire, je peux vous dire
que — je suis
médecin, moi aussi — j'ai été
témoin de ce virage ambulatoire qui
était aussi parti d'une idée qui est plutôt noble, comme celle de l'assurance
autonomie, mais qui a fini avec des
dérapages. C'est, à tout le moins, des fermetures de lits, des fermetures
d'hôpitaux ou on avait la pensée magique
qu'on pouvait, au lendemain du virage ambulatoire, se retrouver à la maison. Et
ce qui est arrivé, c'est que les gens se sont retrouvés à la maison, mais ça a
été les aidants naturels qui sont devenus les infirmières à domicile, qui ont
dû prendre soin de leurs proches. Et
effectivement on a payé le prix longtemps de la mise à la retraite massive des
infirmières, et des infirmières qui
étaient des infirmières d'expérience, hein? Moi, je me souviens, c'étaient les
infirmières-chefs qui ont pris leur
retraite le 1er juillet 1996, tout le monde en même temps, et les médecins
aussi, la même journée. Alors, ça a été plutôt catastrophique, et les
mots me manquent.
Effectivement,
on ne voudrait pas revoir la même situation, ce que je comprends de vos
interventions et de vos craintes, la même chose, et qu'actuellement,
dans le paysage québécois… Et je continue de pratiquer et au quotidien j'entends des proches aidants me dire : Mon
problème, ce n'est pas de m'occuper de mon proche, c'est d'être capable d'avoir du répit, de devoir me battre avec le CLSC
pour avoir des heures-soins, parce qu'ils n'en ont pas; parce que je suis
trop bonne, justement, ils ne veulent pas m'en donner. Alors, ces gens-là sont
à domicile actuellement, ils sont souffrants,
ils sont à bout de souffle. Et, ce qu'ils me disent et ce qu'ils nous disent,
ce qui est plus difficile actuellement, ce n'est pas de s'occuper de leurs proches mais bel et bien de gérer le
système qui est fermé le soir, que les appels sont… ils ne sont pas capables d'avoir d'appel
d'urgence, ils doivent s'en aller à l'urgence. Ils n'ont pas de lien avec le
CLSC, de services, et le CLSC n'a pas suffisamment d'heures-soins à leur
consacrer.
Alors,
effectivement, quand on regarde le plan d'assurance autonomie, il nous manque
le financement. On est d'accord avec
vous, c'est le nerf de la guerre. Et on doit avoir l'honnêteté et la
transparence, envers tous nos aînés, envers tous les Québécois, de dire : Oui, si on veut se payer ce
système-là, on peut, mais à quel prix? Et je pense qu'on doit avoir
l'honnêteté de le dire à tout le monde, à tous et que ce soit clair, qu'on ait
un cadre financier. On ne peut pas partir d'évaluations de 500 millions à
certaines personnes qui sont venues ici nous dire : 4,5 milliards par
année. L'écart est beaucoup trop grand. On
doit savoir où on s'en va. Et on est d'accord à s'en aller et à permettre aux
aînés de rester plus longtemps possible
à domicile mais dans des conditions qui sont acceptables, qui sont humaines. Et
on ne veut pas qu'au lendemain de
l'adoption de cette assurance autonomie là la charge soit transférée aux
proches aidants, comme ça a été le cas dans le virage ambulatoire.
Alors, est-ce
qu'on doit comprendre de vos interventions aujourd'hui qu'on doit avoir, à tout
le moins, un cadre financier avant d'aller plus loin dans ce projet-là?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lamontagne.
Mme
Lamontagne (Andrée) : Oui,
un cadre financier est absolument nécessaire, mais ce qui est aussi nécessaire,
c'est l'assurance des ressources qui seront là, des ressources compétentes,
formées et qui pourront rendre le service à domicile.
Parce que le problème, il est là : c'est que les gens doutent de
la capacité du système à se rendre à domicile pour donner les services. Ils peuvent le faire, mais,
sur une base permanente, c'est là qu'est la difficulté. Et, vous l'avez
dit tantôt,
votre proche aidant, il a besoin de répit et il ne l'a pas parce que
la ressource n'est pas là. Donc, la ressource
pourrait être là. On parle d'une fin de semaine, on parle d'un 14 heures. Et c'est ça qui manque, actuellement. Certaines fois, ils peuvent
l'avoir, mais ce n'est pas une assurance que le service y sera. Donc, le proche
aidant vient vraiment fatigué, vient à bout de ressources parce
qu'il n'a pas la capacité de récupérer. Et c'est ça qu'on constate dans le
milieu et dans le système. Et c'est ça qu'on souhaite.
On dit :
L'assurance autonomie va être intéressante, va être satisfaisante si on peut
assurer que le service sera rendu à domicile. Et c'est là la grande
question et c'est là l'interrogation que nos gens ont et l'incertitude de ne
pas l'avoir.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Mme Lamontagne, Mme Tougas, Mme Trottier, Mme
Guillemette-Lefebvre, merci pour votre présentation, merci d'être ici avec nous
ce soir.
Alors,
collègues, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux jusqu'au
mercredi 13 novembre 2013, après les
affaires courantes, afin de poursuivre les consultations particulières et les
auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance
autonomie intitulé L'autonomie pour tous. Bonne soirée, collègues.
(Fin de la séance à 21 h 27)