(Onze
heures trente-quatre minutes)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.
La
commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le livre blanc
sur la création d'une assurance autonomie intitulé Autonomie pour tous.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. Mme Daneault (Groulx) est remplacée par Mme Roy (Arthabaska).
Auditions (suite)
Le Président (M.
Bergman) : Merci. Alors, collègues, on reçoit maintenant les
Médecins québécois pour le régime public.
Alors, bienvenue. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien
vouloir vous présenter et je vous rappelle que vous disposez de 10
minutes pour votre exposé. Alors, le micro, c'est à vous.
Médecins québécois pour le régime public (MQRP)
M. Vadeboncoeur (Alain) : Merci. Merci
beaucoup à la commission
de nous recevoir. Merci, M. le
ministre. Je m'appelle Alain Vadeboncoeur,
je suis président des Médecins québécois pour le régime public. Je suis urgentologue
aussi dans ma vie de tous les jours.
Mme Kayal (Dounia) : …Dounia Kayal. Je suis médecin en CLSC et je travaille aussi en
gériatrie à l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal.
M. Vadeboncoeur (Alain) : Donc, on a fait une démarche, à Médecins québécois pour le régime public, là, vu l'importance
de ce sujet-là. Il y a eu des médecins qui ont été rassemblés, dont plusieurs
sont en soins à domicile et même en soins
palliatifs à domicile, et le mandat
qu'on s'est donné, comme la plupart des mandats qu'on se donne, c'est d'analyser un peu le livre blanc sous l'angle d'un
service public, là, comme on le fait avec la plupart de nos dossiers, et
on a essayé de poser la question : Est-ce que c'est en continuité ou
est-ce qu'il y a des éléments de rupture? Puis on va essayer de vous éclairer
ou de réfléchir avec vous là-dessus.
Bien,
d'abord, on s'est réjouis, à MQRP, de l'intérêt du ministre et du gouvernement
pour développer les soins à domicile. Je pense que tout le monde s'entend
avec le diagnostic et que c'est un besoin important. On a besoin d'une augmentation des services à domicile. C'est clair
que ce n'est pas ici qu'on en fait le plus, là, dans le monde, en tout
cas. Et donc on salue d'abord cette
augmentation prévisible du financement et de la prestation des soins à
domicile. Un peu le principe qu'on s'est
donné dans notre analyse, qu'on va… on va partager certains éléments avec vous.
Est-ce que les choix concernant le
financement et les choix de prestation… est-ce que ça favorise la continuité, l'intégration,
la qualité des soins? Bien, comme ça a été souligné, entre autres, par
vous, Dr Hébert, donc, à la page 19, «les efforts déjà engagés pour pousser
plus loin l'intégration des services doivent être poursuivis».
Donc,
c'est évidemment primordial, l'intégration des soins, surtout, comme vous le
savez mieux que moi, dans les soins aux personnes âgées et aux personnes
en perte d'autonomie.
Je vais commencer par
la partie financement. Et donc il y a quelques questions qu'on a soulevées ici.
Il y a la question du contrôle des coûts. C'est
clair que la planification vise, entre autres, à diminuer les coûts. Donc, on
parle de 3,3 milliards en 2050, on peut saluer ça, là, mais en même
temps on sait que le contrôle des coûts, ça peut porter préjudice aux patients, à l'accès aux services. Donc, il faut être
prudent. Surtout… bon, on parle d'économies, quand même, par rapport aux
CHSLD, donc un développement probablement moins rapide, et ça, ça nous inquiète
un petit peu, parce que c'est clair que l'hébergement,
dans bien des cas, peut être essentiel. Donc, on a quand même une question
à ce point de vue là. Et c'est clair que, s'il y a un dégagement de ressources
des CHSLD, bien il faut que ça se fasse en complémentarité
avec une augmentation des ressources en soins à domicile. Il ne faudrait
peut-être pas revivre ce qui avait été un peu le cas du virage
ambulatoire, donc des idées mises en place et des changements à l'hôpital mais
moins de ressources, si on veut, à l'extérieur
de l'hôpital, donc certaines difficultés. C'est clair qu'un aspect qui nous
embête un petit peu, c'est d'où vient
le financement. Le MQRP… le financement public redistributif, basé sur la taxe
et les impôts, vous le savez, c'est, à notre avis, la meilleure façon de
financer un système de façon équitable. Là, en partie, on va faire reposer ça sur les individus. Il y a même un
lien avec la notion d'utilisateur-payeur parce qu'il y a un lien
finalement entre la quantité de services
consommés et les coûts. Enfin, c'est ce qu'on semble lire dans le service. Et
ça, à notre avis, ça contrevient un
peu au principe qu'on devrait défendre par rapport au système de santé, qui est
vraiment un financement redistributif donc qui passe par le
gouvernement.
Une
autre question qu'on s'est posée — on n'a pas de réponse définitive — c'est la notion d'une enveloppe ou, enfin, d'une caisse. On comprend le souci du
ministre de protéger les budgets. On sait que ces budgets-là peuvent
glisser dans un... entre autres, d'une instance à l'autre.
Donc,
protéger le budget. On n'est pas sûrs à 100 % qu'une caisse a vraiment cet
effet-là à 100 %. On n'a qu'à penser, supposons, à la caisse de l'assurance
chômage, supposons, au fédéral, où il y a eu des ponctions. Donc, ça dépend beaucoup des gouvernements, ça peut varier.
Donc, on a certaines craintes par rapport à ça. Et peut-être deux autres
petites craintes. C'est clair que c'est un changement par rapport au mode de
financement actuel du système de santé. Et,
d'autre part, cette caisse-là va couvrir une partie des soins à domicile mais
pas, par exemple, les soins médicaux, les soins périhospitaliers, les soins palliatifs. Et donc on a peur un petit
peu que ça crée, à cause de deux modes de financement différents, une
dichotomie et des difficultés très concrètes pour les gens qui pourraient
travailler, par exemple une ergo qui fait le
suivi postopératoire mais qui après ça va s'engager plus dans l'évaluation à
long terme des soins à domicile. Donc, on a des craintes par rapport à
ça sans prendre de position définitive par rapport à une caisse séparée ou non.
Donc, par
rapport au financement simplement, on identifie quand même deux zones de
rupture : une, c'est par rapport
au mode de financement, surtout par rapport à la contribution des usagers
directement, et, d'autre part, que la caisse ait pour effet de séparer un peu le mode de financement. Et donc on s'éloignerait
comme ça de l'intégration des soins.
Maintenant, je vais laisser Dre Dounia parler de
la prestation.
• (11 h 40) •
Mme Kayal
(Dounia) : …en deuxième
partie de la présentation, je vais vous parler de la prestation. Il y a un
coût à la prestation qui est…
Donc, le type de prestation qui est suggéré par
le livre blanc ou l'assurance autonomie peut amener vers des dérives possibles.
Donc, dans un premier temps, comme Dr Vadeboncoeur l'a dit, on va vers une
privatisation de la prestation des soins. La citation dans le livre blanc qui
dit : «Cette participation tient compte de la fréquence et de l'intensité des services fournis et du revenu de
la personne ou du ménage dans lequel elle vit.» Donc, la perspective
pour le patient de payer davantage, ça
pourrait l'amener à négliger une partie de ses soins pour lui-même et puis le
mener à, par exemple, un hébergement précoce.
Dans un deuxième temps, en fait on pense que le
but, ça devrait être de corriger les lacunes actuelles et de réaffirmer la
gratuité des soins à la personne, quel que soit le lieu de résidence du
patient, donc en résidence privée comme à domicile.
Dans un deuxième
temps, on pense que le projet d'assurance autonomie peut mener à une baisse de
la qualité des soins. En effet, les
patients à domicile, ce sont des cas complexes qui vivent dans des environnements très différents et hétérogènes,
sans les facilités du milieu institutionnel. Ce sont aussi des patients dont
les AVQ sont prises en charge par les
ASSS, donc, les AFS. Ce sont en fait des employés. C'est surtout des femmes qui sont des préposées
aux bénéficiaires et qui ont reçu une formation d'au moins un an pour
pouvoir prendre soin des personnes âgées. Elles reçoivent une formation qui est sous l'autorité du ministère de
l'Éducation, donc c'est une formation très standardisée, contrairement aux employés des EESAD dont je vais parler plus
tard. Elles ont une formation pour accomplir des tâches très complexes,
particulièrement, par exemple, chez des patients qui ont des problèmes de
mobilité, des patients très frêles, des patients
aussi qui ont des troubles cognitifs et aussi elles sont amenées, par exemple,
à prodiguer des médicaments à des patients
en soins de fin de vie. Elles sont généralement en lien avec l'équipe
multidisciplinaire des CLSC, et c'est ce qui fait en sorte qu'elles promeuvent la continuité des soins aussi. Elles
ont une rémunération décente et une protection sociale aussi en cas de blessure. Les employés des EESAD,
ce sont aussi, pour la plupart, des femmes. J'aimerais ici rappeler
aussi l'importance de tout le milieu communautaire et des entreprises d'économie
sociale qui ont leur place dans notre société, particulièrement pour donner les
AVD ou pour permettre aux patients d'avoir des activités de la vie domestique
comblées. Cependant, ces employés n'ont pas... ou les EESAD n'ont pas la
permanence des institutions publiques et ni
les obligations rattachées aux institutions publiques. Ces employées, elles ne
disposent pas de la formation requise pour assister les patients dans
leurs AVQ et elles sont souvent sous-payées, malgré les exigences des tâches
que j'ai décrites plus tôt.
On peut
considérer qu'il y a une perte de la continuité des soins si on va vers le
projet d'assurance autonomie, pour deux
raisons : parce que les employés des EESAD qui sont dans des emplois
précaires… en fait, il y a un énorme roulement de ces employés, et ça peut briser la continuité des soins à domicile.
Ces dames non plus ne sont pas en lien avec l'équipe traitante des CLSC, et ça peut aussi constituer un
autre bris dans la continuité des soins des patients, avec les
insatisfactions qui vont avec. On peut se demander ce qui se passera si jamais
le patient se détériore. Est-ce que, par exemple, on va devoir revenir à une
équipe traitante différente qui a plus de compétences, comme par exemple les
équipes des soins à domicile, ce qui va aussi entraîner un bris de la
continuité des soins?
Donc, le projet d'assurance autonomie, ça
constitue aussi un risque pour le patient et sa famille parce que, comme c'est
clairement dit dans le livre blanc, l'allocation financière pour l'achat de
services, c'est une option pour rétribuer les fournisseurs de services. Puis on
pense que cette approche est nuisible pour deux choses : premièrement, sur
le plan éthique, on pense que le fait que le patient rétribue directement ou
indirectement son prestataire de soins, c'est
problématique parce que ça n'entraîne pas la formation ou l'établissement d'une
relation désintéressée entre le patient et son soignant. Ça établit plutôt un rapport marchand que les régimes
publics ont essayé d'enrayer il y a à peu près une quarantaine d'années.
Sur le plan pratique, c'est très difficile pour des patients qui sont malades
et à domicile d'être confrontés à des
lourdeurs administratives, alors même que l'assurance autonomie devrait
permettre d'alléger les processus. On peut prendre l'exemple non seulement
du patient en déclin cognitif, mais aussi à tous ces patients fragiles qui étaient initialement dans les CHSLD, qui vont être
à domicile et qui seront des cas plus lourds évidemment, avec une
gestion plus difficile de leurs soins pour eux-mêmes.
On
pense donc que la rémunération et la prestation des services à la personne
doivent être assumées directement par le CLSC et non par les entreprises
d'économie sociale.
Donc, en tant
que médecins, on a aussi certaines inquiétudes face au fait que même les soins
professionnels de base sont incomplets ou insuffisants en ce moment pour
combler la plupart des soins à domicile, et il y a un manque cruel de travailleurs sociaux, de physiothérapeutes, d'ergothérapeutes
aussi et de médecins à domicile, évidemment. On pense que ça rend le virage vers les soins à domicile, donc,
décrit dans le projet d'assurance autonomie très difficile pour l'instant,
et même inquiétant si jamais on ne comble
pas ces besoins-là. Donc, pour ce qui est de la prestation, on pense que le
fait que l'usager devra contribuer aux soins, surtout aux AVQ, la volonté de
confier la prestation de soins complexes à des AFS et aussi le fait que la rémunération du prestataire se fait
directement ou indirectement par le patient, ça constitue une rupture
avec les soins qu'on connaît déjà aujourd'hui dans notre système.
Le Président (M. Bergman) :
…présentation.
M. Vadeboncoeur (Alain) : …conclure
sur le...
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
M.
Vadeboncoeur (Alain) : Oui. Donc,
juste pour conclure, donc, c'est clair que les objectifs sous-jacents
sont louables, et on identifie quand même,
nous, certaines ruptures en lien avec le financement ou avec la prestation
publics.
On a une dizaine de recommandations, je vais
juste vous les résumer très rapidement, donc.
Bien, d'abord,
la première, c'est que les soins… donc ce qui est des soins à domicile, que ça continue d'être couvert par le régime public. Et en fait on s'oppose au financement privé de ce qui touche les AVQ, puis ça, c'est quel que soit le revenu du patient, comme
le reste de notre système de santé. Comme Dounia l'a mentionné, c'est assez
clair que les soins à la personne devraient,
à notre avis, être réservés aux auxiliaires, en fait ce qu'ils appellent les
ASSS maintenant, au sein des équipes de CLSC, comme c'est le cas
actuellement. Un autre point important, c'est qu'il risque d'y avoir une expansion importante des soins à domicile,
puis c'est probablement souhaitable, mais c'est clair que les ressources
devront être en place pour recevoir et pour
être capables de faire une prestation de soins suffisante pour ne pas se
retrouver dans une situation où on sortirait les patients et on se
retrouverait, dans le fond, sans trop de support.
Donc, ce qu'on
invite en fait le ministre de la Santé à faire, c'est de regarder le projet
sous l'angle d'un service public de
soins qui s'inscrirait davantage dans la continuité des pratiques en place, que
ce soit au niveau du financement ou de la prestation, de manière à…
Le Président (M. Bergman) :
…s'il vous plaît.
M. Vadeboncoeur (Alain) : Oui. Donc,
j'ai terminé, là-dessus.
Le Président (M. Bergman) : Alors, merci pour votre
présentation, Dr Vadeboncoeur. Pour le bloc du gouvernement, M. le
ministre.
M.
Hébert :
Merci, chers collègues, de ce mémoire et de votre préoccupation pour un système
de soins public au Québec.
Vous évoquez,
d'entrée de jeu, dans votre mémoire, la Loi canadienne sur la santé. Et je
pense que c'est la source du problème
que nous vivons actuellement. La Loi canadienne de la santé couvre, dans ses
principes, tous les soins qui sont médicalement nécessaires, et là est
tout le problème. C'est très clair que ça couvre l'hospitalisation, les
services médicaux. Mais, les soins à domicile, est-ce médicalement nécessaire?
Et c'est là toute la difficulté de ce contexte.
Alors, c'est
pour cette raison qu'on doit ajouter un régime d'assurance supplémentaire, avec
le vieillissement de la population, qui couvre la perte d'autonomie, qui
couvre les services associés à l'autonomie, pour s'assurer qu'on respecte ici
les principes d'universalité et de solidarité que vous soutenez. Parce que la
situation actuelle fait en sorte que,
contrairement à ce que vous dites, les soins à domicile, ce n'est pas gratuit.
Les soins à domicile financés par l'État couvrent 15 % des besoins. Une analyse de la Sun Life, il y a
quelques années, montrait que les gens doivent débourser entre 2 000 $ et 5 000 $ par
mois pour payer leurs soins, de leurs… Il y a 85 % des soins qui sont soit
assumés en nature par des proches
aidants ou en espèces, parce que les gens paient de leurs poches. Et, en
résidence privée pour aînés, c'est pire parce que c'est entièrement payé
par la personne, sur des critères qui sont laissés à la discrétion des
propriétaires de résidences, avec des évaluations qui sont extrêmement
sommaires.
Alors, vous
voyez qu'il y a toute une partie du financement qui échappe à la couverture
publique et toute une partie de la gestion également qui échappe au
public. Et le projet d'assurance autonomie veut redonner un financement public
et veut redonner une gestion publique des services aux personnes en perte d'autonomie.
Alors, c'est
tout à fait dans ce sens-là et dans cette lignée-là que le projet d'assurance
autonomie s'inscrit et donc respecte les principes que vous mettez de l'avant.
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
M.
Vadeboncoeur (Alain) : En
fait, on salue le… je pense qu'on a parlé des chiffres, dans une entrevue, de
monter de 15 à 40 %, je pense, de la couverture. Donc, c'est clair qu'on
peut saluer ça.
C'est clair aussi qu'il y a une
expansion des soins à domicile. En fait, je pense qu'à partir du moment où on
vise une expansion on a le choix du modèle.
Nous, ce qu'on déplore, c'est de s'orienter d'emblée vers un modèle
utilisateur-payeur où il y a une contribution plutôt que d'un modèle où
on pourrait avoir une couverture plus large. Je comprends qu'il y a des impacts
financiers dans ces choix-là, il y a d'autres types d'impacts, mais a priori ça
reste un choix. Et donc il pourrait… Nous,
ce qu'on propose, c'est que le modèle pourrait suivre davantage ce que font,
par exemple, les ASSS qui dépendent des CLSC, qui traitent des AVQ, où
ces services-là sont offerts par le CLSC. On comprend que c'est loin d'être
suffisant actuellement et que ça nécessite une expansion.
Je
pense que toute la question, c'est : De quelle façon on fait l'expansion
et selon quel modèle? Et on pense qu'il y a certains éléments des propositions du livre blanc qui s'éloignent du
modèle qui, selon nous, est le plus souhaitable. Donc, c'est dans ce
sens-là qu'on intervient.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
• (11 h 50) •
M.
Hébert : Oui. Mais, même si on allait à 40 — c'est ce qu'on va faire — il restera 60 % qui va devoir
être assumé par la personne. Et mon
problème, c'est un problème d'équité : Est-ce que 60 % pour quelqu'un,
là, qui est au salaire minimum ou quelqu'un qui est à l'aide sociale,
là, c'est beaucoup? Ce n'est aucun soin, en fait.
Est-ce
que la modulation de l'allocation pourrait faire en sorte que les personnes les
plus pauvres de notre société peuvent
obtenir plus de services et non pas que ce soit en fonction du portefeuille ou
de la carte de crédit de la personne? Alors,
elle est là, la modulation de l'allocation de soutien à l'autonomie en fonction
du revenu. Elle est pour faire en sorte qu'on puisse donner plus de
services à des personnes qui n'ont pas les moyens de se les payer et qu'on
puisse laisser des gens qui ont les moyens de se les payer être capables d'assumer
une partie de la facture.
Et
là on respecte un principe d'équité qui est extrêmement important, à mon point
de vue, et qui devrait rejoindre vos préoccupations.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Kayal.
Mme Kayal
(Dounia) : …j'aimerais souligner aussi que, les AVQ, donc les soins à
la personne, même si légalement ce n'est pas
considéré comme des soins médicalement requis, on peut penser que c'est des
soins névralgiques de base et qu'à ce
titre ils devraient être payés par l'assurance publique, comme par exemple on
va voir le médecin, puis la carte de la RAMQ couvre la consultation, ou
comme une ergo, une physio couvrent aussi... En fait, les consultations sont
couvertes.
Donc,
c'est à ce même titre là qu'on pense que, comme c'est extrêmement névralgique,
si on parle de se nourrir, on parle
de se déplacer, on parle des soins à l'incontinence, c'est un argument
important aussi pour que ce soit couvert pour qu'il y ait une équité
dans la population.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
...sur la santé ne prévoit pas ça, et certaines provinces ne les couvrent pas
du tout ou très peu… l'Alberta entre autres, qui laisse tout ça au
communautaire.
Alors,
ce n'est pas couvert par ce volet de l'assurance santé et c'est le problème.
Vous le dites vous-même, c'est un problème
de couverture qui fait que les gens reçoivent 15 % des services seulement.
Et c'est un problème réel qu'on veut régler
avec l'assurance autonomie, qui ajoute ici un droit, un droit de recevoir des
services, et qu'ils soient financés par l'État, et surtout que ces
services-là soient gérés par l'État.
Et c'est ça, le
problème fondamental auquel on veut s'attaquer avec l'assurance autonomie.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur.
M. Vadeboncoeur (Alain) : Bien, c'est sûr que, par certains aspects, ça
rejoint nos préoccupations, mais ça revient en définitive à la question
du choix du mode de financement.
C'est une question de
moyens. Nous, on prône un financement public qui peut être modulé de
différentes façons. Je pense qu'il y a d'autres
groupes... On n'a pas fait une analyse économique, là, du modèle, on s'est
plutôt penchés sur les aspects qui
touchaient les soins, mais il y a d'autres groupes qui ont soulevé le fait qu'évidemment
les sommes en jeu devraient
probablement être plus élevées pour bien couvrir… La seule question qui est en
compte ici, dans le mode de financement,
c'est : Comment cet argent-là transite? Nous, on pense que c'est par un
financement via les impôts, via le gouvernement, que c'est le meilleur
modèle, que c'est plus équitable et que c'est plus en lien surtout avec l'ensemble
du mode de financement.
C'est notre position.
Je veux dire, je comprends qu'on peut avoir des divergences là-dessus, sur ces
points-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : …là-dessus. Et, tout à l'heure en Chambre, j'ai d'ailleurs
très bien précisé que c'était l'impôt qui allait payer la caisse d'assurance
autonomie, qui allait financer l'assurance autonomie. Je suis tout à fait d'accord
avec vous là-dessus.
Je voudrais revenir
sur les prestataires. Vous n'êtes pas sans savoir que les entreprises d'économie
sociale… actuellement, plus de la moitié font de l'aide à la personne, des AVQ,
que les résidences privées donnent des soins d'aide à la personne qui a déjà, là, d'autres
prestataires que les prestataires du réseau public. On a entendu des
groupes syndicaux — puis
ça, on peut comprendre, là, qu'ils puissent avoir cette position-là — dire
qu'il faudrait que ça soit seulement des
employés du secteur public. Mais il ne faut pas nier qu'il existe actuellement
des entreprises d'économie sociale qui font ce travail. Et, l'assurance
autonomie, ce qu'elle vise, c'est de retrouver la gestion publique de ça, c'est-à-dire de s'assurer, par accréditation des
prestataires, qu'on puisse répondre à un certain nombre de standards de
qualité, incluant des standards de formation du personnel.
Et
là on retrouve vraiment une gestion publique, en dépit de certaines prestations
privées qui existent déjà. Et, qu'elle soit associative ou qu'elle soit
privée lucrative, elle existe déjà et elle est très importante dans les
services de soutien à l'autonomie.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur? Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : Oui, je peux répondre à ça. En fait, c'est intéressant parce que votre
choix, ça a été de plutôt laisser l'opportunité aux entreprises d'économie
sociale puis aux… en fait, aux entreprises privées de fleurir au lieu d'essayer de fortifier le système public,
qu'on a déjà, avec la formation de plus d'AFS, parce qu'on sait que leur
formation est standardisée, parce qu'on sait
que les soins en CLSC sont de meilleure qualité probablement que les
soins qu'on trouve dans les entreprises d'économie sociale.
Alors,
pourquoi avoir choisi plutôt ce trajet que le trajet de solidifier les soins en
CLSC? En fait, c'est ce qu'on veut savoir.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Lorsque vous assumez, là, que les soins sont de
meilleure qualité, vous dites «probablement». Alors, il n'y a pas de données là-dessus, là, alors, d'abord,
que les soins sont de mauvaise qualité dans les entreprises d'économie
sociale. Et moi, je suis convaincu que les soins sont de bonne qualité. Et mon
parti pris, c'est d'améliorer encore davantage
la qualité des services qui sont donnés par les entreprises d'économie sociale
et au moins d'en retrouver une gestion
publique qui nous échappe actuellement, là, complètement. Et l'assurance
autonomie va permettre de retrouver une gestion publique.
La solution prônée
par certains groupes syndicaux, c'est de nationaliser tous ces services de
soutien à l'autonomie. Ce n'est pas la position qu'on a là. On veut plutôt
mieux les encadrer et s'assurer de la qualité.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : Oui. Donc, je suis d'accord avec vous, peut-être que les entreprises
d'économie sociale font un bon
travail et puis sûrement, en partie, qu'elles le font.
Mais
qu'est-ce que vous faites du fait que ce sont des emplois extrêmement
précaires, qu'on pense surtout que ce sont
des ghettos d'emplois féminisés — on le dit souvent — et que la perte de la continuité est source
d'insatisfaction pour le patient? Et donc,
même si la qualité est bonne, le roulement est tellement important que
finalement, bien, il y a un bris dans la continuité… et qu'on sait que
les patients sont plus satisfaits avec les CLSC.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Je n'ai pas de données qui montrent que la
satisfaction est plus importante avec les services de CLSC. J'aimerais
qu'on puisse avoir une certaine rigueur.
Deuxièmement, je
pense que justement un meilleur financement des soins à domicile va permettre
aux entreprises d'économie sociale d'améliorer
leurs conditions de travail et de faire en sorte de mieux former leur
personnel, et c'est justement de ce côté-là qu'on va être à même de pouvoir
mettre à contribution plusieurs prestataires pour faire en sorte que l'effort qui est demandé puisse être partagé dans notre
société et qu'on puisse y arriver. Écoutez, il y a un défi considérable, là, qui nous attend. Alors, pour
moi, ce qui est important, c'est d'avoir les prestataires variés, et je
reviendrai tout à l'heure aux chèques
emploi-services parce que pour les personnes handicapées c'est extrêmement
important, mais il faut avoir des modèles variés de prestation de soins.
L'essentiel,
pour moi, c'est de garder le financement public et c'est de garder la gestion
publique, donc, de s'assurer de la qualité de tous les prestataires de
services.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur.
M. Vadeboncoeur (Alain) : C'est sûr que le… Bien, d'abord, on salue tout
rehaussement de formation de gens qui sont dans ces métiers-là, qui ne
sont pas des métiers faciles, là, on s'entend là-dessus.
C'est clair que par
contre il y a quand même un choix qui peut être fait, soit de renforcer les
structures déjà existantes via, par exemple, les CLSC. Et, quand vous
dites : Bon, on assure la gestion, c'est sûr qu'on assure le financement, ça m'apparaît quand même un peu
difficile de dissocier la gestion de la prestation. On peut avoir un
certain encadrement parce qu'on finance, mais c'est clair que ce n'est
probablement pas… parce qu'il y a quand même une variabilité qui est sûrement
plus importante dans ces groupes-là, autant au niveau de la formation que de ce
qu'ils font. Donc, c'est clair que c'est
probablement plus difficile d'assurer un vrai encadrement, une vraie gestion de
la prestation si on est un peu plus loin des organismes.
On comprend par contre le rôle
essentiel de ces organismes-là. C'est plus dans l'articulation, où on met
l'accent dans le développement, peut-être qu'on commente, nous, là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : De là l'importance, et vous le soulignez très bien,
de l'intégration des services, intégration qui ne veut pas dire un seul
prestataire, hein?
Une intégration des
services, un réseau intégré, c'est l'ensemble des acteurs dans le réseau, c'est-à-dire
les organismes communautaires, les
entreprises d'économie sociale, même les organismes à but lucratif, les
résidences privées. C'est ça, la
réelle intégration. Ce n'est pas juste un seul prestataire. Il n'a pas besoin d'intégration
quand c'est un seul prestataire. Lorsqu'on
parle d'intégration des services et de réelle intégration, il faut avoir un
ensemble de partenaires qui s'intègrent
et coordonnent ces activités. Et actuellement, dans les réseaux intégrés, il y
a les entreprises d'économie sociale,
il y a les organismes communautaires, ils sont là. Et ce n'est pas un frein à l'intégration
que de dire : On va mieux les
encadrer au niveau de la formation puis au niveau de la qualité de leurs
services. Au contraire, ça s'inscrit dans un mouvement d'intégration. Alors là, je vous rejoins sur la nécessité d'intégrer
les services aux personnes âgées. D'ailleurs, bon, ça a été une partie
de ma carrière.
Mais
c'est extrêmement important de sortir du seul prestataire public quand on fait
de l'intégration. C'est justement pour étendre ça à d'autres
partenaires.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur? Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : J'aimerais savoir comment vous envisagez de hiérarchiser… en fait, de mettre,
sous la tutelle de l'État, les
entreprises d'économie sociale, parce qu'elles sont complètement indépendantes
pour l'instant? Et pourquoi ne pas penser que c'est plus facile de
redonner toute son importance aux CLSC? Sur le plan administratif, c'est extrêmement difficile d'arrimer les
entreprises d'économie sociale, les entreprises privées à l'État parce
qu'elles sont très hétérogènes, alors que la structure du CLSC est là et qu'on
peut lui donner toute sa force en la finançant mieux.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
• (12 heures) •
M.
Hébert :
Ce qu'il faut faire, c'est, lorsqu'on établit une entente entre l'État et des
prestataires, avoir une entente financière
bien sûr mais aussi, en retour, exiger des normes de formation, des normes de
qualité. Et, si la qualité n'est pas là, il n'y a pas de financement.
Vous
avez là un outil extrêmement puissant pour vous assurer que la qualité est au
rendez-vous… le financement, et c'est
extrêmement important de pouvoir négocier ces ententes-là, qu'il y ait des
critères et des normes nationales qui sont appliquées de façon locale. Parce que, comme vous l'avez dit, il y a
beaucoup d'hétérogénéité. Alors, il faut que chacun des CSSS puisse, compte tenu de son réseau local, négocier ses différentes
ententes avec les prestataires. Mais c'est comme ça qu'on va le faire.
Le Président (M.
Bergman) : ...
M.
Hébert : Vous avez des réserves sur l'allocation directe,
sur le «cash for care». J'ai les mêmes réserves que vous.
Par contre,
vous savez, le chèque emploi-services est utilisé beaucoup
dans le milieu des personnes handicapées, et avec beaucoup de succès. Les groupes de personnes handicapées
sont venus nous dire : Nous voulons conserver le chèque
emploi-services parce que nous avons une meilleure autonomie dans les
prestataires qui viennent dans nos domiciles. Et
il s'est développé, pour le chèque emploi-services, des banques de ressources
qui sont en quelque sorte des
mandataires qui s'assurent de la qualité des
personnes qui reçoivent le chèque emploi-services, qui s'assurent de leur
formation et qui font un certain
nombre de tâches administratives pour les personnes handicapées. Alors, dans ce
contexte-là, je pense qu'on a là un
encadrement intéressant, on a là une autonomie intéressante qui est donnée aux
personnes, un modèle qui pourrait convenir
à certaines personnes âgées, celles surtout sans trouble cognitif, et je pense
qu'on doit se garder cette avenue, cette possibilité.
Et
j'ai assuré, moi, les groupes de personnes handicapées que le chèque
emploi-services était là pour rester. Mais il faut s'assurer, encore une
fois avec des organismes mandataires, que les personnes ont une bonne formation
et que la qualité est au rendez-vous.
Alors, je ne sais pas
si vous étiez conscients de cette modalité-là, qui est extrêmement intéressante
pour les personnes handicapées.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Kayal.
Mme Kayal
(Dounia) : Non. Ça peut être intéressant, mais, encore une fois, on
introduit encore un autre intermédiaire que…
Je suppose… je ne suis pas au courant, là, mais les personnes handicapées vont
devoir payer des sortes de gestionnaires de cas qu'ils paient eux-mêmes,
en plus de payer en partie leurs services?
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
…emploi-services est financé par l'État, mais c'est la personne handicapée
elle-même qui assume cette gestion-là, et donc ça fait partie de l'autonomisation
des personnes. Et l'autonomie dans les décisions est extrêmement importante
aussi.
Alors,
ce que prône l'assurance autonomie, c'est de redonner l'autonomie ou le pouvoir
aux personnes de pouvoir choisir par
qui ils veulent recevoir ces soins-là. Et c'est ça que prône... Donc, l'autonomie
est une des valeurs importantes. Alors,
je vous invite à élargir votre cadre d'analyse. Vous parlez d'universalité, de
solidarité, d'individualité. L'autonomie des personnes, c'est aussi une valeur importante pour les personnes
handicapées et pour beaucoup de personnes âgées.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : Oui. C'est intéressant que l'autonomie, ça passe par le choix du
prestataire de services, parce que c'est
vrai qu'on a un petit peu dénoncé ça dans l'individualisation du choix du
prestataire. Pour nous, l'autonomie,
c'est surtout avoir accès à des soins de qualité, c'est surtout avoir accès à
des soins qui permettent de vivre à domicile de façon autonome, et ça ne
passe pas forcément par le choix du prestataire. Dès qu'il y a un prestataire qu'on sait qu'il est de qualité, qu'on sait qu'il
vient d'une institution publique dont on ne peut pas défaire la
réputation, à ce moment-là l'autonomie est aussi garantie.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
…vous réalisez, là, que les personnes sont entièrement à la merci du CSSS, là,
pour recevoir des services. Et on sait très
bien, dans une étude qu'on a faite en Montérégie, que le taux de réponse aux
besoins en soutien à domicile varie de 6 % à 33 %, selon les
CLSC... de réponse aux besoins. Il y a des CLSC qui donnent un petit peu de services à tout le monde puis il y a des CLSC qui
donnent beaucoup de services à peu de personnes. Alors, il faut sortir
de ce système pour pouvoir redonner le pouvoir aux personnes et dire : Peu
importe où vous restez au Québec, vous avez
le même droit à recevoir des services financés par l'État et vous n'êtes pas à
la merci des décisions d'un établissement de santé… fussent-ils publics.
Et je pense que c'est ça que veut faire l'assurance autonomie, là. Il faut
réaliser ça.
Il
y a une autre valeur. Et c'est ça que je voudrais que vous reteniez peut-être,
qu'une valeur supplémentaire, c'est l'autonomie des personnes. Et je
pense qu'elle est importante dans le domaine des soins aux... à l'autonomie,
des soins et services à l'autonomie.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Kayal? Dr Vadeboncoeur.
M. Vadeboncoeur (Alain) : Honnêtement, je connais personnellement moins la
dynamique, là, des personnes handicapées.
On
parle peut-être un peu d'«empowerment» ici, de choix. Il peut y avoir... en
fait, il y a quand même un message qu'on peut voir là, c'est que, si
vous parlez des CLSC où il y a beaucoup de variabilité — et
pourtant ce sont des organisations, là,
constituées en lien avec les CSSS — on peut penser que cette variabilité-là
pourrait effectivement affecter les
organismes communautaires peut-être de façon encore plus grande. Je ne vois pas
comment ça pourrait être moins grand, de toute façon.
Et
donc, bon, je comprends qu'il y a le choix, mais est-ce que la dynamique est la
même? Puis là je me pose la question
parce que je ne suis pas spécialiste de
la question. Mais, pour une personne âgée, donc, en perte
d'autonomie, donc, en déclin, souvent avec
des troubles cognitifs, est-ce que c'est aussi important que pour une personne handicapée plus jeune, si on veut, qui a peut-être 30, 40 ans à faire devant elle et pour qui l'enjeu
de l'autonomie n'est peut-être
pas sur les mêmes paramètres?
Ceci
dit, c'est plus une question que je pose, là. Je ne suis pas un spécialiste de
ces questions-là, dans ce sens-là. Mais je me pose la question. Une dame de 90 ans à
la maison, ce n'est probablement pas la même dynamique non plus, là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, pour un commentaire final, il reste
moins d'une minute.
M.
Hébert :
Les personnes âgées n'ont pas toutes des troubles cognitifs.
Alors,
il y a certaines personnes âgées qui vont préférer ce mode-là. Alors, il faut l'encadrer.
Et c'est ce que se propose de faire l'assurance autonomie.
Un
dernier point : les CHSLD seront toujours nécessaires. Ce qu'on souhaite faire, c'est de les maintenir
mais de faire en sorte que ça ne soit pas la seule réponse à une personne âgée qui est en perte d'autonomie. Je
vous rassure tout de suite, on
investit d'abord, hein… on investit d'abord dans le soutien à domicile, qui
aura des impacts sur la progression ou le
développement de lits de CHSLD. Donc, les impacts seront ensuite. Et donc le
spectre du virage ambulatoire que vous évoquez ne s'applique pas ici. Et
même, écoutez, une chance qu'on a eu le virage ambulatoire, vous en
conviendrez, parce qu'on serait dans le
trouble, là, dans le système de santé québécois. Ça a été nécessaire pour
permettre qu'un certain nombre de soins
qui étaient auparavant faits à l'hôpital avec des durées de séjour très longues
ne soient plus à l'hôpital. Vous conviendrez que ça a été quand même une
réforme importante pour le système de santé.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Dr Vadeboncoeur, Dre Kayal, merci d'être ici.
J'ai lu votre
mémoire avec grand intérêt et je tiens à vous féliciter. Il est très bien fait.
Je ne partage pas nécessairement l'entité de votre mémoire au niveau des
recommandations, mais je peux vous dire que vous avez vu les écueils et vers quoi on s'en allait. Contrairement au
ministre, votre analogie avec le virage ambulatoire, elle est parfaite. Le
virage ambulatoire : excellente idée.
Dans le projet, ici, on a des très, très bonnes idées qui, en passant… Je pense
que vous pouvez témoigner que ce virage-là était déjà commencé depuis
plusieurs années. On a réorganisé les soins pour favoriser le maintien à domicile. On a quand même développé des
ressources intermédiaires. On sait qu'il n'y en avait pas assez à Montréal, qui était une problématique, mais qu'au
cours des années il s'en développe de plus en plus. Et également on veut utiliser les CHSLD pour les patients qui ont
vraiment besoin de soins de CHSLD. Et je rappelle qu'on a passé de ratios de 3,4, 3,5 lits par 100 personnes de 65
ans et plus, et on est rendu à des ratios qui peuvent varier entre 2,8 et 3.
Et, les meilleurs endroits, c'est autour de 2,5.
Mais ma
première question au Dr Kayal… C'est certain que vous, vous faites du maintien
à domicile. Vous devez être
consciente qu'il y a des patients qu'à un moment donné on ne peut pas maintenir
à domicile, même si on voulait puis même
si on mettait des ressources, tout simplement parce que leur condition ne le
permet pas. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ça, là. Le
ministre l'a confirmé tantôt, mais j'aimerais ça l'entendre de votre bouche.
Le Président (M. Bergman) :
Dre Kayal.
Mme Kayal
(Dounia) : En fait, je ne
fais pas de maintien à domicile, mais je travaille en CHSLD. Donc, je
peux vous dire que, oui, les patients qui
sont là, pour la plupart, ils ont leur place là. Je sais que, bon, le ministre,
je pense… Le ministre Hébert, vous avez dit que c'était 35 % des
gens qui n'avaient peut-être pas leur place. Pourquoi pas?
Une voix : …
Mme Kayal (Dounia) : Pardon?
Une voix : …
Mme Kayal
(Dounia) : Le Vérificateur
général. Pardon. Pourquoi pas? Si plus de gens peuvent rester à
domicile, je ne suis absolument pas contre ça.
Ce qu'on dit, à MQRP, c'est qu'il faut que la
fermeture des lits soit complémentaire avec l'augmentation du financement puis des soins à domicile, que ça se
fasse de façon coordonnée. Et donc, oui, pour les soins à domicile, oui,
pour peut-être déplacer certains patients, qui sont en CHSLD, à domicile, mais
pas pour la fermeture massive de lits sans qu'il y ait une complémentarité dans
les actions.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
• (12 h 10) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, juste pour clarifier la
question du 35 % à 40 %, là, c'est… À Montréal, on sait qu'il y a 40 % des patients qui
avaient un profil qui aurait pu être autre que CHSLD, mais la majorité de ces
patients n'étaient pas nécessairement à domicile. Ils étaient en ressources
intermédiaires. Et la problématique de Montréal, c'est qu'on avait… Puis ça, je l'ai évalué, je l'ai vu, comme ministre.
Puis j'ai visité les endroits, entre autres l'Institut universitaire. C'est tout simplement parce qu'il n'y
avait pas d'autre ressource. Également, ça n'amène pas une fermeture de lits de CHSLD. Les besoins vont être croissants à
cause de l'augmentation de la population de 65 ans et plus. Ce qu'on
peut faire, c'est, en faisant le virage vers
les maintiens à domicile, garder le nombre de lits et progressivement, plutôt
que d'ouvrir des lits à cause de la
croissance de la population, garder le même nombre de lits et de peut-être
aller vers un ratio de 2,5. Ça, je pense que même le ministre comprend
cette logique-là. Parce que, du jour au lendemain, on ne récupérera pas
350 millions de dollars dans le réseau de la santé.
D'ailleurs, le financement, puis vous en faites
mention, il n'y a aucun plan financier. Et, juste pour vous dire, le
100 millions de dollars, même si on continue dans le même système qu'on a
actuellement, réussirait à peine à combler…
En faisant le virage de maintien à domicile, on va être capable de donner plus
de services, mais c'est loin d'être attaché au niveau du financement,
parce qu'avec toutes les promesses qu'il y a dans le livre blanc ça va prendre
encore plus d'argent.
L'autre élément que nous n'avons pas, puis vous
avez touché ce point, c'est la question de la contribution de l'usager. Actuellement, honnêtement, c'est
directement dans la poche de l'usager. Parce qu'on va évaluer votre
besoin. Si votre besoin est à un certain niveau… Un exemple, là, je ne donne
jamais les mêmes chiffres parce que ça peut varier d'une fois à l'autre, là, si votre besoin est de 10 000 $, si
vous êtes quelqu'un qui n'avez pas de revenu, pas d'actif, de ce qu'on
comprend actuellement, c'est comme en CHSLD, ça va être gratuit. Mais, si vous
avez des revenus — puis
vous savez qu'au Québec la richesse est
considérée... vous êtes riches à partir d'un revenu de 40 000 $ — bien, à partir de ce moment-là, vous allez contribuer selon votre
revenu. Donc, vous allez être probablement dans les gens qui vont payer
les impôts, parce qu'on sait maintenant que
ça va être pris directement dans les impôts et transféré peut-être dans une
caisse autonomie. Et après, lorsque vous allez arriver pour retirer les
services, ce qui est très clair dans ce plan-là, c'est que les gens vont devoir
payer.
Ce qu'on ne
sait pas puis ce qu'on demande — je ne sais pas si vous trouvez ça
logique — c'est qu'avant
qu'on aille plus de l'avant avec un projet
de loi… qu'on nous dise, pour commencer, quand tu as a un besoin avec un
certain profil, ça vaut
combien. Puis, deuxièmement, cette personne-là, selon le revenu, elle va
contribuer de combien? Pourquoi? Pour un principe éthique que vous n'avez
pas mentionné — mais
vous avez parlé de l'éthique tantôt : avant de prendre une décision, on
peut-u avoir l'information? Il faut faire un consentement qu'on appelle
éclairé. Ça existe également, dans un système
de santé, d'avoir un consentement éclairé lorsqu'on prend des décisions de
gestion administrative ou d'organisation des soins.
Je ne sais pas, Dr Vadeboncoeur, qui est
familier avec ces concepts-là, si vous êtes d'accord avec ça?
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
M.
Vadeboncoeur (Alain) : On n'a
pas fait appel à des économistes, là, mais on essayé d'analyser un petit
peu, et effectivement il nous semble qu'il y ait un flou, là, sur qu'est-ce qui
va se passer concrètement pour la personne. Et
ça doit nécessairement être défini. On peut parler du principe
utilisateur-payeur. Nous, on est contre le principe, mais on peut aussi
craindre l'application de ça. Et c'est clair que cette application-là pourrait,
dépendant de comment elle est dessinée,
restreindre l'accès ou non, mais probablement restreindre l'accès si c'est plus
ou moins bien. Ça fait que c'est clairement des choses qui devront être
précisées pour juste savoir comment ça va fonctionner.
Sur le fond,
nous, on est contre le principe, mais c'est clair qu'il faut aussi savoir le
comment, surtout si on s'en va vers ce type de financement là.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : ...M. le Président. Surtout, vous savez, l'AQESSS
est venue ici, a dit : On donne notre accord au projet. Et tout le
monde donne son accord à ce projet-là, dans le sens du maintien à domicile, on
est tous d'accord avec ça. Par contre, ce qu'ils
disent : Vous savez, il faudrait peut-être savoir combien ça va coûter,
parce que, tout dépendant de combien
vous allez charger directement aux patients, tout dépendant de ce que vous
allez nous dire qu'on a comme
montant, nous autres, il va falloir qu'on fasse un choix dans l'offre de
services. Parce que, si vous avez seulement que 100 millions de
dollars avec ce que le ministre propose, c'est soit qu'il va charger cher soit
qu'il va beaucoup augmenter les impôts avec
une taxe autonomie où les établissements, comme ils ont souvent fait dans le
passé, ils ne seront pas capables de remplir 100 % des besoins.
D'ailleurs,
le ministre l'a dit, les gens… Au début, on s'était tous fait dire : Bien,
vous allez avoir tout ce que vous voulez
pour rester à domicile, puis on va mettre l'argent qu'il faut. Mais plus ça va,
puis plus on se rend compte que c'est un projet qui est très limité,
sans beaucoup plus de ressources, avec une grande transformation du réseau. Et,
l'autre élément, puis vous touchez ça très bien dans votre mémoire, on est en
train de briser l'intégration et la continuité des services. Une caisse
différente prise dans un autre contexte. Et là vous allez voir ce qu'ils
vont... Les établissements, il va falloir qu'ils
s'organisent pour dire… Puis, vous l'avez bien écrit, ils vont peut-être faire
des charges ailleurs que là-dedans.
Un exemple, en postopératoire, peut-être qu'on pourrait mettre ça dans les
services de l'autonomie plutôt que de mettre ça dans des soins aigus. Je
pense que vous avez touché ces points-là.
Pour le
moment, il faut donner quand même le bénéfice du doute au projet, mais il y a
de la clarification à apporter. Puis ça, on l'a toujours dit, si c'est
un bon projet, on va collaborer. Les grands principes, que ce soit n'importe
quel gouvernement, ça va être fait. C'est
fait, d'ailleurs, dans les autres provinces, dans les autres pays, mais la
manière dont c'est fait… et également
on veut savoir ça va coûter combien, au total. Parce qu'il va y avoir une taxe
qui par la suite va devoir être mise
soit par un impôt progressif ou une taxe spéciale. Il va y avoir un montant à
quelque part qui va être pris pour être capable de financer ça. Puis vous, vous voulez avoir également la
question, vous voulez avoir l'information, puis je pense que tous les
groupes doivent demander l'information pour savoir : Avant de partir en
projet de loi, ça veut dire quoi pour moi, comme citoyen?
Les gens qui
avaient des handicaps, vous savez, ils sont tous venus nous dire : On ne
serait pas supposés de payer, on ne payait pas avant, puis là on va être
obligés de payer parce que c'est une question d'équité.
En passant, l'équité,
là, c'est : tout le monde paie plus, dans le projet là. Pour ce qui s'agit
des soins, on est d'accord sur les principes. J'aimerais ça avoir vos
commentaires.
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
M. Vadeboncoeur (Alain) : En fait,
la question est fondamentale, parce que, bon, c'est clair que, s'il y a une
contribution, il faut savoir à quoi elle va être appliquée, à quel type de
soins.
On comprend
que les soins en dehors de l'hôpital, ce n'est pas nécessairement dans la Loi
canadienne sur la santé, là, c'est :
hôpital et médecins. Mais, si c'est des soins qui s'apparentent à des soins médicalement requis,
donc essentiels pour la personne, c'est clair, pour nous, que ça doit
être financé par l'État, là, parce que sinon, là, vraiment, on va avoir un
problème.
Donc, où va
se faire cette coupure-là? Ça va dépendre probablement du niveau de financement. Mais c'est clair
qu'il va y avoir une coupure, et il faut savoir où va être cette coupure-là. C'est
clair que, si on commence à parler d'AVQ,
que les gens vont devoir débourser, bien ça change vraiment
la dynamique par rapport à la dynamique actuelle où les auxiliaires
trois S sont fournis par le CLSC, et c'est couvert, généralement. Donc, je veux
dire, je pense que ces questions-là vont être fondamentales, parce qu'où va se
faire la coupure et de quel type de coupure vont dépendre vraiment les changements de dynamique? Et ça
pourrait être... Effectivement, c'est dramatique pour les patients que
ça change comme ça.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
...question — puis,
peut-être, j'aimerais avoir juste un oui ou non : Êtes-vous d'accord qu'avant
d'appuyer totalement un projet comme celui-là il faut au moins avoir toute l'information?
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
M.
Vadeboncoeur (Alain) : C'est
ce qu'on a écrit, je veux dire, c'est clair : non seulement avoir l'information, mais avoir ce qu'il faut pour que ça
fonctionne aussi sur le terrain.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Merci
beaucoup, M. le Président. Dre Kayal, Dr Vaillancourt, merci d'être… Vadeboncoeur… merci d'être
présents aujourd'hui.
Je partage
votre inquiétude en lien avec la diminution des ressources en CHSLD, et du
vieillissement accéléré, et de la fragilité évidemment de certaines
personnes qui veulent évidemment rester à la maison, mais un jour on ne peut
plus rester à la maison.
Il y a
une question qui n'a pas été abordée. C'est que je constate... Je discutais
avec un médecin qui fait des soins à domicile.
C'est qu'il existe très peu de médecins actuellement au Québec
faisant des soins à domicile et qu'on encourage peu le développement de médecins à domicile. On encourage davantage le
développement de médecins dans les hôpitaux. Et, si on veut prendre un virage de cette nature,
si on veut soutenir des personnes plus fragilisées, il va falloir que l'État,
le ministère de la Santé et que le ministre encouragent les
médecins à faire de la pratique à domicile. Sinon, c'est impossible. Moi, je considère que ce sont des voeux pieux, parce que
les médecins vont devoir repartir, comme à une certaine époque, avec
leur valise pour aller soigner les gens à domicile. Je voudrais savoir ce que
vous en pensez.
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
Mme Kayal (Dounia) : Je peux
répondre.
Le Président (M. Bergman) :
Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : Oui. Alors, c'est
vrai qu'il n'y a pas beaucoup de médecins à domicile. C'est vrai qu'il n'y a pas beaucoup non plus de relève par
rapport aux médecins qui vont à domicile, et je pense que... Je ne sais
pas si vous connaissez la Dre Geneviève
Dechêne. En fait, elle fait partie de notre comité, et c'est elle qui milite beaucoup pour que les médecins choisissent de
plus en plus cette pratique-là qui
est très gratifiante, qui est extrêmement utile. Bien, je peux vous dire que, dans la formation des médecins au niveau de la
résidence, il y a eu des changements et qu'il y a de plus en plus de résidents en
médecine familiale qui vont faire des stages en CHSLD et aussi qui ont des
patients à domicile, qu'ils suivent.
Et donc je
pense qu'il y a quand
même une volonté dans les programmes universitaires d'aller vers ça, même si c'est absolument vrai que c'est une
très petite minorité des médecins de famille qui vont faire ça.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Bien, je pense que ça devrait faire partie de l'ensemble
de l'assurance autonomie qu'il y ait cette volonté
de faire en sorte qu'il y ait de
plus en plus de médecins pour se
déplacer à domicile si on veut vraiment
prendre ce virage. On ne peut pas dire aux
gens : Vous allez pouvoir vous procurer les soins, on vous donne l'argent
nécessaire, mais, si les... On peut
avoir la prestation, mais, si on n'est pas capable d'obtenir les services, bien
ce sera très difficile de le faire.
Et j'aimerais
laisser un peu de place à ma collègue mais seulement vous dire que je
suis, comme vous, inquiète du fait de
faire une caisse autonomie à part, sortir 4,3 milliards de dollars du ministère de la Santé pour mettre ça à la Régie de l'assurance maladie du Québec pour faire en sorte qu'il y ait
plus de fonctionnaires pour administrer ces 4,3 milliards de dollars
là, plus le 100 millions annuellement. Je trouve que ce n'est pas forcément nécessaire
et qu'on pourrait très bien
protéger les enveloppes.
Vous-même
avez dit que ce n'est pas par une caisse que les sommes d'argent
seront protégées, et je veux vous entendre un peu plus.
Le Président (M. Bergman) :
Dr Vadeboncoeur.
• (12 h 20) •
M. Vadeboncoeur (Alain) : Bien, en
fait, il y a plusieurs exemples de caisse — puis je pense toujours à l'assurance chômage, là — où le gouvernement peut décider autrement.
Et donc ce n'est pas une garantie d'étanchéité, puis je pense que tout
le monde peut s'entendre là-dessus. Il y a un aspect protection, bon, peut-être
un peu plus que si le budget est complètement fondu. Peut-être, peut-être pas.
Mais, nous, ce qu'on craint, c'est que ça crée
aussi certaines ruptures et que ça puisse poser des problèmes très concrets d'avoir
deux sources de financement pour des soins pour la même personne, peut-être
même par les mêmes professionnels. Et là, bien là, oui, on a certaines
inquiétudes par rapport à ça parce que c'est deux sources de financement différentes. Et donc quelle dynamique ça va
engendrer? Comment ça va s'harmoniser, tout ça? C'est des questions
importantes, là.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau, il vous
reste trois minutes.
Mme
Vallée : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Vadeboncoeur. Bonjour, merci beaucoup de votre présentation. L'universalité, pour moi, au-delà de la question
des coûts qui seraient défrayés par les citoyens, c'est une question aussi d'accessibilité
partout sur le territoire. Et je me demandais si vous aviez aussi regardé cet
aspect-là. Parce que l'autonomie pour tous, c'est beau, mais dans quelle mesure
l'assurance autonomie pourrait être mise en oeuvre dans le Grand Nord? Dans quelle mesure l'assurance autonomie
pourrait être mise en oeuvre de façon universelle en Gaspésie, en Abitibi,
dans les régions rurales de l'Outaouais?
Moi, c'est la
question que je me pose. Et je me demande, de votre connaissance du terrain,
est-ce qu'on est rendus là. Est-ce qu'on est capables de dire : D'ici un
an, on pourra s'attendre à ce que tous les citoyens, que ce soient les aînés, que ce soient les handicapés qui
ont besoin de services, y auront accès? Est-ce que c'est réaliste ou
est-ce que c'est utopique? Ma collègue, tout à l'heure, parlait de la formation
des médecins. En avoir davantage qui vont à domicile,
c'est une chose, mais, en Outaouais seulement, on a tellement d'enjeux en
santé, avec l'accès à un médecin de famille…
moi, je ne le sais pas, mais les citoyens de chez moi, là, à Grand-Remous, à
Denholm, est-ce qu'ils vont vraiment avoir accès à des services s'ils
choisissent de rester à domicile?
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur.
M. Vadeboncoeur
(Alain) : Je ne peux pas dire que j'ai une familiarité avec les enjeux
régionaux de ces questions-là, mais j'ai l'impression qu'à peu près
tout le monde s'entend que ça ne peut pas se faire du jour au
lendemain.
Ça
ne peut être que quelque chose de
progressif, ne serait-ce qu'à cause des ressources professionnelles. Et
on aura beau, bon, aller chercher d'autres
types d'intervenants, les gens des EESAD, tout ça, c'est clair que, simplement
du point de vue médical, du point de
vue infirmier, tout ça, il y a des manques qui vont ne pouvoir que se combler
graduellement. Donc, nous, ce qu'on demande,
c'est qu'il y ait une prudence, certainement, pour ne pas revivre justement ce
qui a été mentionné par rapport au
virage ambulatoire, qui était une réforme probablement nécessaire mais qui a eu
des impacts parce que justement il n'y a pas eu la contrepartie externe,
et donc ça reposait davantage sur les familles.
Donc,
c'est cette dynamique-là qu'on veut éviter. C'est plus par intuition, mais je
dirais que ça ne peut être qu'une dynamique
progressive où il y a vraiment beaucoup d'évaluation, qui n'a pas d'impact
néfaste, là, dans cette expansion-là, qu'on
est capables de faire la job, autrement dit, pour les patients, parce que sinon
ça peut être un cul-de-sac aussi, là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau, il vous reste une minute
pour… Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : En fait, j'aimerais dire que, dans toutes les régions, il y a
probablement des entreprises d'économie
sociale en nombre très inégal, probablement que, dans le Grand Nord, il n'y en
a presque pas, mais, dans toutes les
régions, il y a des CLSC. Ça, c'est le message qu'on peut donner, c'est qu'en
développant les CLSC probablement qu'il y a des soins à domicile qui
vont se développer aussi dans toutes les régions.
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme la
députée d'Arthabaska, du deuxième groupe d'opposition, pour une période de
4 min 30 s.
Mme
Roy (Arthabaska) : Bien, ce que vous venez de dire, «dans
toutes les régions, des CLSC», c'est en rapport avec votre point à la
page 6, l'individualisation. Si je reprends la phrase, c'est : «Il place
le patient, une fois évalué et son
allocation définie, devant des fournisseurs de soins hétérogènes au sein d'un
marché où il pourra magasiner parmi les prestataires habilités à fournir
les services.»
Vous
avez peur que ce soit inégal, si je comprends bien votre crainte, là, exprimée,
mais la plupart des intervenants qui sont venus nous dire ici qu'il y
avait des disparités entre chaque agence, entre chaque CLSC et entre chaque… et souvent dans un même territoire, deux CLSC,
dans un même territoire, voisins… Il y avait des différences dans les
allocations de services, dans les évaluations puis dans les clientèles. Donc,
les CLSC sont tous constitués en vertu de la
même loi, ils utilisent tous le même mode d'évaluation, puis ça fait des
différences, de toute façon. Moi, je me demande si on ne pourrait pas faire plus confiance à la personne qui choisit les
soins pour aller choisir le prestataire de services qui lui convient plutôt que de… rendre tout ça
homogène — je vais
prendre un mot plus facile — rendre tout ça homogène et que ça ne
fonctionne pas, là, de faire du mur-à-mur.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur.
M. Vadeboncoeur (Alain) : Je pense qu'il n'y a pas de réponse «noir ou
blanc», à cette question-là, totale, là.
Ce
qui est clair, c'est que, si, dans des organismes publics, il y a déjà beaucoup
de disparités, je présume qu'il peut y en avoir encore plus en des organismes
qui sont encore plus disparates, là.
Ceci dit, l'autre
question que je me pose, c'est : Est-ce qu'une personne fragile, en perte
d'autonomie, est en mesure justement de… je
ne sais pas comment dire ça, magasiner, ou de choisir, ou d'essayer des trucs
comme ça? Ma perception des personnes
âgées rendues là, c'est que, bon, la continuité est tellement importante, je ne
pense pas qu'elles sont en position
non plus, elles n'ont pas de rapport de force par rapport à des gens ou des
organisations. Le service devient extrêmement important, d'autant plus
vers ces personnes-là. Ceci dit, ce n'est sûrement pas noir ou blanc, là. On
comprend que, si on a un choix de personnes qui peuvent nous aider, on va en
trouver des fois des meilleures, des fois des moins bonnes.
Est-ce
que c'est le meilleur choix de construire le système comme ça? C'est là-dessus
qu'on a des réserves importantes. C'est dans ce sens-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée d'Arthabaska.
Mme
Roy (Arthabaska) : C'est comme vous dites, on voit le verre à
moitié plein ou à moitié vide. Bien, moi, je pense aussi que le fait de pouvoir choisir le service que l'on veut, ça
crée, on va dire, compétition, mais plutôt peut-être prime à une… Si on peut choisir, il y a une prime
à rendre un service efficace parce que sinon le prestataire de services
ne donnera plus de services. Puis, si la
personne qui n'est pas en perte cognitive, là, on s'entend, est capable d'avoir l'autonomie de dire : J'aime mieux
une femme, un homme, une personne de mon village, une personne que je ne
connais pas, pour des soins intimes, admettons, il me semble, ça fait aussi
partie de son autonomie que de pouvoir choisir qui lui donne ces services.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Vadeboncoeur? Dre Kayal.
Mme Kayal (Dounia) : Oui. Je comprends ce que vous voulez dire. Mais ça n'empêche pas que,
dans les CLSC, il puisse y avoir une flexibilité dans les services
aussi. Si, par exemple, il y a une personne qui n'est pas appropriée, qui ne s'entend pas bien avec le patient, on peut
toujours changer. Ce n'est pas non plus une règle d'or, là, que, s'il y a
une personne qui vient chez le patient… que
ça doit être la même personne qui reste. Donc là, on a aussi le choix à
travers le système public.
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement…
Mme
Roy (Arthabaska) : De mon expérience de députée, pour avoir
rencontré plusieurs personnes qui viennent nous voir, les systèmes de
santé sont tellement gros que c'est difficile, je peux vous dire, d'avoir cette
souplesse-là. Mon expérience de députée date d'une dizaine d'années, puis on a
travaillé avec… j'ai travaillé avec quatre CLSC différents sur les territoires de mes deux comtés, et puis l'expérience
m'amène à penser que c'est très lourd, c'est très lourd de discuter avec eux autres. C'est peut-être même
plus facile de discuter avec des prestataires ou des groupes communautaires.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Kayal, pour une très courte réponse.
Mme Kayal (Dounia) : Oui. Non. Mais en fait je comprends ce que vous voulez dire. Les
entreprises d'économie sociale, je ne pense pas qu'elles ont la
possibilité non plus de permettre une continuité de soins qui fasse en sorte
que le patient soit satisfait si jamais ça
change tout le temps. Donc, je ne sais pas comment on peut dire que la personne
est complètement autonome, satisfaite alors
qu'il y a plusieurs personnes qui viennent chez vous, alors qu'avec le CLSC
ça serait une seule personne, ça serait vraiment très direct, et elle aurait le
choix aussi de négocier avec cette personne-là si jamais il y a quelque chose
qui ne va pas, comme on le voit aussi dans les CLSC où il y a des situations où
ça ne marche pas bien.
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé.
Dr
Vadeboncoeur, Dre Kayal, merci pour votre présentation, merci d'être ici avec
nous aujourd'hui et partager votre
expertise.
Et
je demande aux gens de la confédération des organisations des personnes
handicapées du Québec pour prendre place à la table et je suspends pour
quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à
12 h 29)
(Reprise à 12 h 32)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on souhaite la bienvenue à la
confédération des organisations de personnes handicapées du Québec.
Bienvenue. Pour fins d'enregistrement, on a besoin de vos noms, de vos titres.
Et vous avez 10 minutes pour faire une présentation. Alors, le micro, c'est à
vous.
Confédération des organismes de personnes
handicapées du Québec (COPHAN)
M. Lavigne
(Richard) : Merci, M. le Président, merci de nous recevoir encore une fois.
Bien là, moi, je me présente, je suis
Richard Lavigne, je suis le directeur de la COPHAN, la Confédération des
organismes des personnes handicapées du Québec.
Mme Vézina
(Véronique) : Bonjour. Véronique Vézina, présidente de la COPHAN.
M. Lavigne (Richard) : La dernière fois qu'on s'est vus, messieurs dames de la commission,
on a parlé de mourir dans la dignité.
Aujourd'hui, on va parler de vivre dans la dignité, parce qu'il
semblerait que le livre blanc nous propose un
certain nombre de choses pour… nous, on considère que c'est des choses qui
devraient être améliorées de façon à permettre, à assurer l'autonomie et la
dignité des personnes.
Bon,
comme vous savez, la COPHAN, c'est un organisme provincial qui regroupe 55
regroupements de personnes et d'associations
de personnes qui ont l'ensemble des limitations fonctionnelles. La mission de
la COPHAN, c'est de rendre le Québec
inclusif. La COPHAN ne peut pas faire ça toute seule. Mais notre mission, c'est
d'essayer de contribuer à ce que le Québec
soit inclusif afin d'assurer une pleine participation sociale des personnes qui
ont des limitations fonctionnelles et de
leurs proches. Ce qu'on va vous dire durant les 10 prochaines minutes, je crois
que vous l'avez déjà entendu ou que vous le réentendrez encore en certains éléments, la preuve qu'il y a des
consensus quand même qui existent dans nos milieux. Je parle notamment du milieu des personnes qui sont en
situation de handicap et, à certains égards, avec d'autres
communautés, notamment nos aînés.
La
COPHAN et le milieu des personnes qui ont des limitations fonctionnelles, on
travaille depuis plus de 30 ans, et c'est
assez intéressant de voir ce qui s'est passé notamment en 1984, lorsqu'on a
travaillé sur une politique gouvernementale qui s'appelle À part… égale. Je vais vous en lire un petit bout, de ce
qui était dans cette politique-là. On parle d'il y a 30 ans. L'objectif
principal, c'était «d'assurer, dans les faits, des politiques nationales jusqu'au
quotidien de chacun et de chacune, [des] conditions véritables de l'exercice
des droits de la personne pour les personnes [ayant des limitations fonctionnelles], sans discrimination». La section
sur le soutien à domicile, on y précise que — et vous allez voir qu'on est encore à date, hein — «l'accès aux services de [soutien] à domicile pour
toutes les personnes qui les requièrent dépend d'un choix
politique — ça,
c'est toujours le cas. Ce secteur doit être perçu comme un des domaines
prioritaires de développement. […]Il ne suffit pas de permettre à une personne
de demeurer dans son domicile; il faut aussi lui permettre de participer
aux activités de sa communauté en adaptant les moyens de cette participation.»
Tout comme vous, on
lit toutes sortes de rapports, hein, que ce soient le Protecteur du citoyen, le
Vérificateur général, le Commissaire à la santé, et d'autres… santé et
au bien-être, et on remarque, d'année en année… et il n'y a pas juste la COPHAN qui se répète,
ceux-là aussi. Ils se répètent, ces gens-là, en questionnant un certain nombre
de problématiques notamment sur les services de soutien à domicile. Et, lorsque
nous, à la COPHAN, on parle avec nos membres,
on se rend compte que ces rapports-là souvent sont en deçà de la réalité, c'est-à-dire
que, sur le terrain, pour toutes sortes de raisons, ça ne va pas si bien
que ça, même que ça va même très mal. On parle de services de soutien à
domicile. C'est quand même quelque chose de très fondamental pour les
personnes.
Alors, nous, à la
COPHAN, on a préparé un certain nombre d'orientations et de recommandations, et
notre présidente va vous les lire
rapidement. Et je profite de l'occasion pour vous remercier de nous accommoder,
compte tenu que des fois on lit moins
vite que les autres, donc peut-être de nous accommoder quelques minutes pour
pouvoir permettre à notre présidente de terminer la présentation.
Le Président (M.
Bergman) : Certainement. Certainement.
M. Lavigne
(Richard) : Merci, M. le Président.
Mme Vézina (Véronique) : Merci. Bien, tout d'abord, avant de vous présenter les recommandations, simplement vous mentionner
que, la façon dont on a procédé pour arriver à ces recommandations-là, on est partis de neuf principes qu'on avait adoptés en 2012, lorsqu'on a fait des travaux sur la
compensation des coûts liés aux limitations fonctionnelles. Ces neuf principes-là ont guidé notre réflexion
sur la réforme qui est proposée pour les services de soutien à domicile. On ne vous citera pas
les neuf principes. Peut-être, le principal qui a été utilisé dans notre
réflexion, c'était de réduire de façon significative les conséquences
physiques, financières et sociales liées aux déficiences, aux incapacités et
aux situations de handicap.
La première
recommandation et, je dirais, la principale de nos sept recommandations est de
prendre le temps d'impliquer l'ensemble des
acteurs québécois dans la réforme des services de soutien à domicile par la
création d'un groupe de travail
national, incluant notamment les représentants du milieu d'action communautaire
autonome des personnes ayant des
limitations fonctionnelles et leurs familles. Donc, les sous-recommandations
sont de suspendre les travaux actuels avant d'aller de l'avant et d'adopter
un projet de loi, de constituer une instance, on l'a dit, pour laquelle on
suggère les quatre mandats suivants :
de construire une analyse commune de la situation; de proposer des actions à
court terme pour améliorer les services de soutien à domicile; de
réfléchir à la gamme de services en soutien à domicile; de proposer, d'ici juin
2015, un ensemble de recommandations concernant notamment le mode d'organisation
des services, la couverture des services, les mesures transitoires, la
formation du personnel et les modalités de suivi.
Notre
deuxième recommandation est d'assurer l'accès et la gratuité des services de
soutien à domicile à toutes les personnes
ayant des limitations fonctionnelles, sans égard à la nature ou à la cause de
la déficience ou de l'incapacité, à l'âge,
au revenu ou au lieu de résidence. Comme sous-recommandation, on dit aussi qu'il
faut que cette gratuité et cet accès de
services là se fassent et que la personne puisse choisir le mode de prestation
qu'elle veut. Ça veut aussi dire d'inclure les jeunes de 18 ans et moins dans les personnes admissibles aux services et
de valoriser et reconnaître la contribution des proches en leur
accordant une compensation financière.
Notre troisième
recommandation : bonifier l'Outil d'évaluation multiclientèle afin qu'il
supporte la mise en oeuvre de volets complémentaires aux services existants ou
la création de nouveaux services au sein du réseau de la santé et des services sociaux et des autres
réseaux. Les sous-recommandations sont donc de développer un outil d'évaluation
complémentaire à l'OEMC, au SMAF, tenant compte de l'ensemble des besoins de la
personne; d'assurer une utilisation uniformisée des outils et la réévaluation
des besoins, lorsque nécessaire; d'assurer une formation initiale et continue
des intervenants sur l'ensemble de ces outils puis d'appliquer l'obligation d'impliquer
les personnes et leurs proches dans l'élaboration de leurs plans de services.
Notre
quatrième recommandation : s'assurer que l'organisation des services de
soutien à domicile mette les personnes au
centre des préoccupations en permettant un choix libre et éclairé et en
assurant l'équité, la qualité, l'efficacité et la simplicité.
• (12 h 40) •
On recommande donc
que les services supportant le soutien à domicile soient développés en s'assurant
d'améliorer de manière significative les
conditions salariales de l'ensemble du personnel offrant des services de
soutien à domicile, par exemple, en adoptant un décret inspiré de celui du Décret sur
le personnel d'entretien des édifices publics; de réunir une instance
nationale sur le chèque emploi-services; de développer les différents modes de
prestation de services au sein de chaque réseau local de services dans le
respect des réalités régionales; de concerter les différents prestataires de services afin que les différents
modes de prestation de services s'adaptent aux besoins des personnes, et
non l'inverse; de former le personnel de
chaque mode de prestation de services en incluant les personnes ayant des
limitations fonctionnelles et leurs groupes communautaires dans l'élaboration,
la dispensation et l'évaluation des formations; puis de créer des instances
régionales pour la qualité des services de soutien à domicile.
Notre
cinquième recommandation : s'assurer que celles et ceux qui sont payés pour
gérer le système assument la responsabilité en cas de mauvaise gestion.
On recommande de faire en sorte que la procédure d'examen des plaintes soit un mécanisme clair, simple et efficace qui facilite les recours puis de
suspendre l'application d'une décision, lorsqu'une plainte est déposée,
avant que le processus ne soit terminé.
La sixième
recommandation : préserver l'autonomie des organismes d'action
communautaire autonome et assurer leur
financement à la mission globale, donc de respecter l'autonomie des organismes,
de financer les organismes d'action communautaire à la mission globale,
et non par entente de service, en incluant la couverture des besoins liés aux
limitations fonctionnelles.
La
dernière recommandation, c'est d'assurer le financement des services de soutien
à domicile par le biais des impôts, des taxes des particuliers et des
entreprises et des revenus des sociétés d'État.
Pour terminer — ça
résume un petit peu ce qu'on disait dans nos recommandations — au
fil des années, la COPHAN a indiqué aux
différents gouvernements la nécessité de services de soutien à domicile axés
sur la participation sociale des personnes ayant des limitations
fonctionnelles. La création d'une assurance autonomie représente une politique À part entière... À part... égale,
excusez, qui a été adoptée en 1984. Pour y arriver, le Québec doit prendre le
temps de parvenir à un consensus fort pour
une réforme d'aussi grande envergure. Tous les efforts financiers et
organisationnels ne suffiront pas à atteindre les objectifs voulus sans la
concertation à laquelle la COPHAN invite le gouvernement et les autres acteurs
concernés.
En
ce sens, la COPHAN est disponible pour l'identification des enjeux à aborder et
des pistes de solution à mettre en oeuvre autant à court terme pour
éteindre les feux qu'à moyen terme pour un système assurant l'autonomie de
toutes et de tous. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation, Mme
Vézina, M. Lavigne. Alors, maintenant, pour le bloc du gouvernement, M.
le ministre.
M.
Hébert : Merci beaucoup, Mme Vézina, M. Lavigne, de votre
présentation. Ce n'est pas la première fois qu'on se rencontre, ce n'est
sûrement pas la dernière sur ce projet-là.
Et je vais peut-être
commencer par la fin en vous réitérant que le financement sera à partir de l'impôt,
comme vous le souhaitez. Je l'ai réaffirmé
ce matin à l'Assemblée nationale et donc je peux vous rassurer là-dessus.
Votre recommandation six, vous devez être
contents de l'annonce, qu'on a faite hier, de 54 millions de plus pour les
organismes communautaires, pour le
financement de la mission globale. Ça ne s'était jamais vu depuis les 20
dernières années. Et nous avons donc répondu à l'appel des organismes
communautaires pour rehausser le financement à la mission globale.
Évidemment, écoutez,
la première recommandation que vous faites, d'arrêter les travaux en cours, je
ne la reçois pas. Je pense qu'il y a
urgence, il y a urgence surtout dans le secteur personnes âgées. Vous ne le
percevez pas peut-être de façon aussi aiguë, de pouvoir redonner aux
personnes une liberté et une autonomie dans les décisions, qui est absolument
importante et que vous avez gagnée au fil des années au niveau des personnes
handicapées mais qui est complètement
absente pour les personnes âgées. Alors, il y a urgence, et nous allons donc
continuer à faire ces travaux-là. Nous
avons même prévu une implantation progressive de l'assurance autonomie pour que
les personnes avec déficience physique et intellectuelle… il y ait une
implantation en 2015 et en 2016.
Alors, si je
comprends bien, contrairement à d'autres groupes qui sont venus ici et nous ont
dit : Non, nous voudrions que les
personnes handicapées aussi soient... puissent avoir accès à l'assurance
autonomie dès l'implantation, vous,
vous nous dites : Il faut retarder cette implantation-là. Est-ce que je
comprends bien que ce serait votre souhait que les personnes handicapées
ne fassent pas l'objet de la couverture de l'assurance autonomie, dans un
premier temps?
Le Président (M.
Bergman) : M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : Merci, M. le Président.
Écoutez, une petite réaction. Puis notre présidente, qui est quand même
notre spécialiste dans le soutien à domicile… Vous pardonnerez ma généralité
dans ce dossier-là.
Pour
ce qui est de retarder, puis nous, on demande de suspendre les travaux, tout
ça, ce n'était pas pour le plaisir de revendiquer ça qu'on l'a écrit, c'est
qu'on veut bien que les choses soient bien préparées.
Et, pour ce qui est des personnes qui ont des
limitations fonctionnelles, parmi lesquelles il y a de plus en plus de
personnes qui composent nos aînés, nous, on pense qu'il faut bien… tant qu'à
refaire, il faut prendre le temps de bien refaire. Parce que vous nous disiez, M. le
ministre, tantôt que, oui, les personnes handicapées, elles ont obtenu
le libre choix avec le chèque emploi-services, et tout ça. Une fois qu'on a dit
ça, il y a énormément de problèmes. Puis, pour
avoir un… pour choisir, il faut avoir un véritable choix. Je vous dirais que,
dans certains territoires, le choix n'existe pas. C'est entre le chèque emploi-services ou entre… C'est souvent le
chèque emploi-services ou rien. Alors, ça, ce n'est pas un choix pour nous, ça. Alors, nous, on
propose de faire une réflexion pour s'assurer d'une complémentarité, que
les ressources soient bien formées, soient
bien rémunérées. En tout cas, je ne referai pas toutes les recommandations,
mais nous, on pense que c'est tellement important que je crois qu'il y a
urgence, mais il y a urgence de prendre son temps, d'une certaine manière, de bien faire les choses. Je ne
dis pas que les choses vont être mal faites, mais, si on les fait
rapidement, on a plus de chances d'échapper.
Ceci étant dit, vous prenez vos décisions. Les
organismes communautaires, oui, on est contents. Hier, j'ai participé à cette annonce de la solidarité, là,
et, oui, c'est très important que le gouvernement continue, développe
son soutien aux organismes communautaires.
Nous, ce qu'on dit, dans le fond, c'est qu'il faudra faire attention. La
nuance entre le financement à la mission
globale et des fameuses ententes de service, il faudra être très prudent. Je
pense, M. le ministre, on en a déjà parlé. À un moment donné, quelqu'un
qui accepte un contrat, bien, dans le contrat, il y a des obligations, notamment qu'on arrête de se faire dire que, si c'est
un groupe communautaire, ou une entreprise d'économie sociale, ou le
secteur privé qui donne un service… qu'il n'y a pas de mécanisme de plainte
parce que ce n'est pas celui du CSSS. En
tout cas, on se le fait faire, le coup : Ah, mais c'est communautaire, ils
sont autonomes, arrangez-vous. Puis on sait très bien que, même lorsqu'il
y a des mécanismes de plainte officiels dans la loi sur la santé, ce n'est pas
évident.
Le dernier
commentaire sur votre premier commentaire, c'est la gratuité. Rien n'est
gratuit dans ce bas monde. Moi, quand
j'ai ma paie, je me rends compte que rien n'est gratuit à toutes les deux
semaines. C'est correct. Nous, ce qu'on dit, c'est que… Puis ça, M. le ministre, j'aimerais ça à un moment donné qu'on
ait une réponse parce qu'il y a effectivement, dans votre livre blanc,
cette fameuse possibilité de contribution… en tout cas, tarification,
contribution ou je ne sais plus. En tout
cas, ça va coûter quelque chose. Est-ce qu'on va peut-être finir par savoir,
là — j'imagine
qu'un jour vous allez l'annoncer — qu'est-ce qu'on entend par
«les personnes qui ont les moyens»? Parce que, les personnes que nous, on
représente, effectivement il y en a beaucoup qui sont très pauvres, il y en a
beaucoup qui sont très, très pauvres, puis il y a beaucoup qui sont pauvres,
puis il y en a beaucoup que c'est classe moyenne faible. Les personnes
handicapées millionnaires, il n'y en a pas gros. On en voudrait plus, mais il n'y
en a pas.
Alors, quand
qu'on dit «les contributions», est-ce qu'il va y avoir un seuil? Et, ce
seuil-là, on ne le connaît pas. On ne
le connaît pas pour des raisons que je ne connais pas, mais est-ce que vous
seriez… Est-ce que, dans vos réflexions, M. le… Est-ce que le ministre,
dans sa réflexion, M. le Président, a commencé à réfléchir? Quel est ce fameux
seuil? Et ça va être pour quels types de service? Puis, quand on parle… juste
pour terminer, lorsqu'on parle d'étudier, c'est qu'actuellement, pour toutes
sortes de raisons, l'ensemble des besoins de soutien à domicile ne sont pas
prévus parce que l'évaluation est, je
dirais, parfois différente et parfois, je dirais, même assez souvent,
incomplète, notamment sur toute la question de la participation sociale.
Alors, j'avais
une question, M. le Président, pour le ministre. Dans le fond, c'est : Y
a-tu un chiffre quelque part en termes de contribution, à partir de
quoi? Puis comment ça va marcher? Parce que, là, nous, on ne le sait pas. On comprend qu'on n'en veut pas, de contribution,
mais, s'il y en avait une, comment le ministre voit ça? À partir de quel
salaire, de quel revenu annuel de la famille? Puis, dans ces revenus-là, est-ce
qu'on va tenir compte des dépenses qu'on assume pour limitations
fonctionnelles? Tu sais, c'est toutes des questions qui restent en suspens.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
• (12 h 50) •
M.
Hébert :
Comme je vous l'ai déjà dit, M. Lavigne, nous réitérons, et d'ailleurs c'est
écrit noir sur blanc dans le livre blanc, le positionnement du livre À
part… égale, où la gratuité des services publics est assurée. Et je pense
que je vous le réitère.
Mais,
concernant l'urgence, là, moi, j'entends, là, des personnes handicapées, là,
actuellement qui sont obligées de s'en
aller en CHSLD parce qu'on ne peut pas augmenter le nombre d'heures de service.
Et moi, je trouve ça déplorable, là, personnellement. Et l'assurance
autonomie vise à régler ce problème-là. Les gens vont avoir une allocation qui
va leur permettre soit d'aller en CHSLD ou
de rester à domicile, et ça, ça permet aux gens de pouvoir avoir les services
à domicile. Actuellement, là, lorsqu'il y a
un plafonnement de l'offre de services du CSSS, la seule solution, c'est
d'aller en CHSLD. Mais moi, je trouve ça
déplorable. Et je pense qu'il faut renverser ça. Il faut redonner aux gens un
véritable choix, comme vous le dites,
là. Et je vois une certaine urgence aussi pour les personnes handicapées plus
jeunes et je ne comprends pas que vous disiez : Il faut attendre,
il faut réfléchir, il faut mettre en place un groupe de travail.
Il y a
urgence, là, il faut faire de quoi pour ces gens-là qui sont obligés de s'en
aller en CHSLD, là, actuellement.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : M. le Président,
moi, je veux bien croire le ministre. Puis effectivement il y a des situations
inacceptables, là, on en a tous vu, connu, mais en quoi il faut attendre l'assurance
autonomie pour régler la question dont vous parlez, là, le nombre d'heures?
Écoutez, là,
nous, on vous l'a dit, M. le ministre, que, s'il y a une assurance autonomie,
parce que, pour nous, c'est une bonne nouvelle, parce qu'on pense que c'est
le moment de régler des problèmes… Pourquoi on demande de bien réfléchir? Justement, c'est parce qu'on ne veut
pas que les choses s'implantent tant que les gens ne sont pas prêts.
Est-ce que le réseau va tout être prêt, les
groupes vont tous être prêts le 1er avril 2014 à tout faire entrer ça? Je ne
suis pas convaincu. Alors, pour nous, l'objectif,
c'est l'amélioration des services, la mise en place de conditions gagnantes
pour notre indépendance, notre autonomie comme personnes. Et je crois que, si
le ministre nous garantit que tout va être réglé le 1er avril 2014, que tous les intervenants pivots, les grilles d'évaluation
vont être complétées par des évaluations sur la participation sociale,
si tous les types de prestataires vont être réorganisés de manière à avoir des
bons salaires, de bonnes formations, je dis oui tout de suite. Je ne consulte
même pas la COPHAN, mes patrons.
Si tout est
prêt, on dit oui. Mais on n'est pas sûrs, M. le ministre, que ça va être prêt.
On n'est pas sûrs. C'est ça.
M.
Hébert : M.
Lavigne, on va vous rassurer. D'ailleurs, l'association québécoise des
établissements qui est venue devant nous nous dit qu'ils sont prêts et qu'ils
voient l'urgence d'agir de cette façon.
Je vous dis tout de suite que l'Outil d'évaluation multiclientèle intégrera un outil de participation sociale et une évaluation des besoins des proches aidants. Alors, c'est déjà
dans le collimateur. Ils sont en train de compléter l'informatisation actuellement
de ces deux composantes-là supplémentaires. Alors, c'est une autre recommandation
que nous entérinons. Vous savez, il y a
un momentum, hein? Quand il y a un momentum, il faut profiter du
momentum pour être capables de faire les changements dont le Québec a besoin.
Je voudrais
aussi, comme l'a souligné le Comité d'action des personnes vivant des
situations de handicap, hier, vous
dire que le chèque emploi-services est là pour rester. Le chèque
emploi-services, avec des modalités qui assurent la qualité de la
formation et la qualité de l'intervention des personnes qui le reçoivent, est
là pour rester. Et j'ai très bien accueilli
les banques de ressources hier qui ont dit qu'ils étaient prêts à agir, à faire
ce genre de fonction d'assurance qualité, de recrutement et même de
gestion pour certaines personnes qui ont de la difficulté. Je pense que c'est
un modèle intéressant, et on va le retenir comme une des modalités, et je tiens
à vous rassurer là-dessus.
Quand vous
nous parlez d'une recommandation sur… Quand vous nous parlez de l'autonomie des
personnes, l'autonomie décisionnelle, c'est vraiment
en plein dans la lignée de l'assurance autonomie, dans les valeurs de l'assurance
autonomie.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : Bien, oui. Écoutez,
je pense qu'on s'entend tous sur les principes, sur les grands enjeux. Le
problème, c'est : Comment on va vérifier que le fait d'implanter une
assurance autonomie va régler les problèmes?
Nous, c'est ça, la question. Ce n'est pas parce qu'on rebrasse des choses, nécessairement, que tout se
règle comme par enchantement.
Moi, je vous
crois, M. le ministre. À nos niveaux, ici, aujourd'hui, je pense qu'on s'entend
tous. Mais il y a un paquet de monde
en arrière qui doivent s'ajuster : les personnes qui utilisent les
services, les personnes qui les donnent, les organisations qui les
gèrent, et on arrive au mois de novembre, là, bientôt et on n'a pas vu le
projet de loi encore. J'imagine qu'on va
voir ça rapidement, parce que, là, ça a l'air qu'on va travailler au lieu d'aller
voter. C'est merveilleux, O.K.? Mais nous, on vous dit que c'est la meilleure
opportunité qu'on a pour profiter de la chose, pour les régler. Le chèque emploi-services, oui, il est là pour
rester, mais j'espère qu'il ne restera pas comme qu'il est là, hein, dans le
sens où les personnes qui donnent des
services doivent avoir de la formation, des conditions de travail dignes de ce
nom. On ne parle pas d'aller donner
une bière à quelqu'un sur un coin de table, là, hein, on parle de services
souvent assez spécifiques, hein?
Puis les entreprises d'économie sociale ont
développé beaucoup l'aide domestique, mais est-ce qu'on va être capable de s'assurer que ces entreprises-là vont
être capables de rattraper la balle? Vous dites qu'il y en a un certain
nombre qui le font déjà, vous dites, la
moitié ou 40 %. Je ne suis pas
convaincu que c'est aussi important que ça, mais, bon, vous le savez
mieux que moi. Mais, nous, ce qu'on entend, c'est qu'il y a des difficultés
même pour l'aide domestique.
Alors, je
comprends tout ça, là. Mais nous, on espère — admettons que vous décidez de procéder
rapidement — qu'on
va être capables, dans le processus, de travailler pour corriger les choses
quand même, tiens.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
…sur le chèque emploi-services, là. Vous l'avez évoqué, là. Quelles sont les
mesures qui devraient être mises en place pour améliorer le chèque
emploi-services?
Le Président (M. Bergman) :
M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : Je vais laisser
Mme Vézina, là, parce qu'on rentre dans le pointu un peu, puis je compléterai
après.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Vézina.
Mme Vézina (Véronique) : En fait, il y a
plusieurs améliorations qui devraient être faites.
Il y a d'abord la question de la formation de
ces employés-là. Souvent, les formations qui sont offertes sont standardisées. Et actuellement les formations qui
sont offertes à ces gens-là fonctionnent de la façon dont on fonctionne,
exemple, dans un hôpital ou dans un établissement du réseau de la santé pour
donner les services, alors que les installations à domicile sont tout à fait
différentes.
Donc,
je crois qu'il y a une formation qui est nécessaire, mais une formation qui
doit être développée pour s'adapter aux besoins variés des personnes,
qui vivent à domicile, et aux installations qui peuvent être différentes mais
aussi qui tient compte de la volonté des personnes parce
que souvent les formations qu'on donne amènent une certaine rigidité dans la façon dont on donne les services,
et il y a certaines personnes à qui ça peut amener différents problèmes
ou différentes difficultés. Donc, il y a une
formation à développer qui doit être similaire mais avec certaines variantes
pour les personnes qui donnent des soins à
domicile et qui ne sont pas des gens qui sont régis par le réseau de la santé.
Il y a aussi toutes les conditions de travail de ces personnes-là. On
sait qu'actuellement le salaire est très bas, ce qui rend difficile le recrutement. Il y a beaucoup de… je
dirais, d'autres éléments, comme les déplacements, certains accès à des…
la vaccination. Si les personnes veulent aller se former, elles ne sont pas
payées. Il y a différentes difficultés qui sont liées à ça et qu'on devrait
améliorer.
Ensuite,
il y a toute la question, je dirais, de la relation entre l'employé et l'employeur.
Souvent, la personne qui vient donner
le service ne considère pas la personne qui reçoit le service comme son
employeur. Donc, de bien cerner, autant chez les travailleurs que chez
les personnes qui engagent ces personnes-là, la relation employé-employeur.
Le Président (M.
Bergman) : Merci. M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : …la question de la protection en cas de maladie aussi, M. le Président.
Il y a des blessures, hein? Quand on donne de ce genre de services là,
il y a un risque de blessures, il y a un risque d'attraper des… ou de
transmettre des difficultés, là, des maladies ou je ne sais pas trop, là.
Alors,
c'est pour ça que nous, on dit : Oui, mais il faut qu'on travaille
là-dessus. Comment on peut faire ça? On me dit, moi, que, même dans le réseau de la santé, là où c'est plus, entre
parenthèses, parce que je le mets entre parenthèses, payant, fermez la parenthèse, on a de la misère à
recruter puis à garder des préposés pour le maintien à domicile parce
que ce n'est pas évident. Ça fait qu'imaginez-vous
dans le réseau du chèque emploi-services, et je ne vous parle même pas
des organismes communautaires, des entreprises d'économie sociale, là. On
réfère à des choses… Et je crois, M. le ministre, que… ce que je comprends, c'est
que vous êtes ouvert à regarder ça. Est-ce que je comprends bien?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : D'ailleurs, dans l'annonce du pilier de solidarité,
hier, il y a eu une mesure concrète, là, pour faire en sorte que ces travailleurs d'organismes
communautaires ou d'entreprises d'économie sociale ou ces travailleurs
autonomes dans le cadre du chèque
emploi-services puissent avoir accès à des régimes d'assurance invalidité, d'assurance
maladie, des régimes de retraite. Alors, il y a une disposition, là, qui
précisément s'adresse à cet élément-là de votre présentation.
Ma
dernière question, avant de passer la parole à mes collègues. Vous nous
recommandez d'inclure les jeunes de 18
ans et moins aussi dans les personnes admissibles dans le cadre de l'assurance
autonomie. J'aimerais ça vous entendre. Il me semble que c'est une
problématique qui est assez différente, les gens de 18 et moins. J'aimerais ça
vous entendre là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lavigne.
• (13 heures) •
M. Lavigne
(Richard) : Je vais commencer, puis Mme Vézina va sûrement compléter.
Écoutez, nous, ce qu'on
considère, c'est que la personne ne devient pas autonome le jour de ses 18 ans comme tel. L'autonomie, c'est comme la
responsabilisation, ça se prépare. Il vient un moment où, à 16, 17 ans, pour
obtenir des services d'aide à domicile, peut-être que la jeune fille ne veut
pas que ce soit son père qui lui donne son bain ou... Tu sais, il y a des
choses qu'on... Il y a des liens à faire avec l'institution famille, mais en
même temps il y a des distinctions à faire.
Il y a
des responsabilités, je dirais, régulières d'une famille envers les
enfants, les enfants envers les parents. Mais, lorsqu'on arrive dans les
responsabilités liées aux limitations fonctionnelles, il faut être très prudent
pour ne pas créer ou susciter la création de
distorsions dans les relations dites normales entre un père et sa fille ou
entre une mère et son fils ou… en tout cas, faites les croisements, là.
Et nous, on dit qu'il y a des besoins qui pourraient... Il faudrait voir, avec les autres programmes, une
complémentarité et faire bien la distinction du dossier famille versus le
dossier de la personne. On parle d'une assurance autonomie. Et moi, j'ai
dit à la fille de ma conjointe qu'elle ne devient pas raisonnable et autonome
le matin de ses 18 ans, c'est quelque chose qui commence avant. Puis nous,
on pense que de l'exclure de l'assurance autonomie, ça risque de créer des
difficultés, comme il faut s'assurer aussi que l'assurance autonomie a des frontières claires pour tout le monde, notamment pour les programmes des techniques, les... On n'en
a pas parlé, des aménagements de domicile, versus l'adaptation de
domicile.
Il y a plein de
choses qu'on n'a pas fini de discuter, M. le ministre, puis on en a discuté
avec vous un peu. Puis on voit les choses arriver puis on ne sait pas exactement
où ça part, où ça arrête, qui prend le relais. Parce que la personne... Et ça, je pense que nos prédécesseurs
l'ont bien dit : À un moment
donné, on requiert des services dans
une continuité. Un bout de service, c'est l'assurance
autonomie. L'autre, ça ne l'est pas. Je sais bien que pour l'usager, à un moment
donné, ça peut devenir... et pour les
gens qui organisent des services, ça peut être un exercice, on va dire,
stimulant et intéressant de faire la part des choses.
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps du gouvernement s'est
écoulé. Pour l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Bien, c'est dommage que quelqu'un soit parti, parce que le message que je veux
faire... On a rencontré l'AQESSS.
Et puis je veux apporter
un correctif : l'AQESSS n'a pas dit qu'ils étaient si prêts que ça. D'ailleurs,
la principale inquiétude de l'AQESSS, c'était
tout simplement qu'eux autres vont devoir faire le choix dans les services
qui vont être donnés, parce qu'ils voient
très bien — ils ont
dû faire une analyse financière — qu'ils n'auront pas les moyens de
tout donner. Et ils ont dit au ministre que c'est important de clarifier parce
qu'ils ne s'attendaient pas à tout donner. Ça,
ça a été le message qui a été très clair. Et c'est d'ailleurs le
principal message qu'on a reçu de l'AQESSS, où tout le monde est d'accord
avec les grands principes, sauf qu'ils voient bien que la mise en application
va être très difficile.
Merci, M. le
Président. C'était juste un commentaire que je voulais faire. Je vais laisser
la parole à ma collègue.
Le Président (M. Bergman) :
Madame? M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : Bien, est-ce
que...
Une voix: Non.
M. Lavigne
(Richard) : O.K. Je voulais juste
dire que M. Bolduc... M. le député de Jean-Talon, pardon, soulève
des choses qui nous inquiètent énormément.
Et moi, là,
personnellement, j'ai lu des mémoires des uns puis des autres. C'est tellement
drôle, M. le Président, de voir comment les gens, les autres veulent
garder leurs billes dans tout ça, hein : Ah, oui, les autres, c'est
correct, mais, nous, ça va bien. Ah, les
autres, nous autres, tu sais... Je m'excuse de le dire comme ça. Mais j'en ai
lu quelques-uns, et c'était :
Les billes des uns, il faut qu'elles soient protégées; les billes des autres,
on ne le sait pas trop. Mais les billes des personnes... nous, on est ici pour parler des billes des personnes. Et
les billes des personnes, c'est leurs projets et leurs habitudes de vie.
Puis, à un moment donné, on peut-u réviser nos façons de faire?
Ça ne marche
pas. Il y a des plaintes, il y a des insatisfactions, il y a des problèmes. Et,
nous, ce qu'on dit, c'est que l'assurance autonomie en elle-même, si on
ne change pas les autres choses, ça ne changera pas les résultats. C'est juste
ça qu'on dit. On ne veut pas retarder pour retarder, là.
Le Président (M. Bergman) :
Madame...
M. Lavigne
(Richard) : Puis le service de
soutien à domicile, là, ce n'est pas d'hier qu'il y a de défis, hein, c'est
depuis le début. Il ne faut pas penser que les problèmes sont arrivés hier non
plus, là.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
M. Lavigne, Mme Vézina, je suis bien heureuse de vous entendre encore
une fois. Vous faites partie des habitués de nos commissions
parlementaires, et puis votre franc-parler nous fait du bien.
C'est
important d'entendre ce que vous avez à dire puis surtout d'apprendre, de
savoir ce qui se passe sur le terrain parce qu'un projet aussi important
que l'assurance autonomie... Puis, vous l'avez tellement bien dit, lorsque vous
dites : Nous, on se préoccupe de nos billes, des billes des usagers, des
billes des patients, c'est à ça qu'on doit penser. On ne doit pas penser aux
intérêts des associations et d'un et l'autre, on doit penser à l'intérêt du
citoyen. Et puis l'assurance autonomie... On a beaucoup, beaucoup parlé de l'assurance
autonomie pour les aînés, mais les personnes handicapées, les gens que vous
représentez, que votre association représente, font partie du grand livre, puis
c'est important d'entendre ce que vous avez à dire.
Puis, moi,
tout à l'heure, quand le ministre dit : Je vous entends, mais en fait je
ne vous écoute pas, là, moi, j'ai mon idée
puis je m'en vais là, moi, ça m'interpelle puis ça me déçoit, parce
que vous avez soulevé des questions.
On n'a pas répondu à ces questions-là.
On n'y répond pas, à ces questions-là, à savoir le seuil pour la contribution qui sera peut-être demandée. Quel est le seuil? Vous avez mis le
doigt sur la problématique. Les personnes que vous représentez,
certains ont un revenu… puis je ne le sais
pas, vous pourrez peut-être m'indiquer le revenu moyen de vos membres, mais
j'imagine que ce n'est pas très élevé. Mais
je suis persuadée que ces gens-là, dans le quotidien, assument déjà des
frais que quelqu'un qui n'a pas une incapacité puis qui a le même revenu
n'assume pas. Puis on doit en tenir compte aussi, de tout ça.
J'aimerais ça vous entendre sur cette
réalité-là, parce que, si le ministre n'est pas intéressé, je suis persuadée
que ses collègues ici sont intéressés à l'entendre.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lavigne.
M. Lavigne
(Richard) : Merci, M. le Président. Moi, je présume que le ministre
est intéressé, mais qu'il n'a pas le temps de nous écouter aujourd'hui.
Comme dirait
l'autre, moi, je prends pour acquis qu'on essaie tous de bien faire. On ne fait
pas tous les choses de la même façon et on ne les fait pas toutes au même rythme. Et,
nous, c'est pour ça qu'on demande de réfléchir. Vous l'avez dit, Mme
la députée de Gatineau,
le matin, quand on se réveille, on a des dépenses que vous n'avez pas. À un moment donné, on nous donne des évaluations,
au service de soins à domicile, mais l'évaluation est basée non pas sur les besoins
globaux, mais elle est basée sur la volonté ou la capacité, soi-disant, de
payer de l'État. Alors, tu as besoin de 20 heures, mais je suis obligé de t'en
donner 15. Il y a des intervenants. On nous a dit que les professionnels
étaient des professionnels, oui, mais les professionnels
ont des patrons. Puis, dans le Québec, c'est encore les boss qui mènent, en tout cas
de temps en temps. Puis, quand le boss, il dit : Je n'ai plus d'argent
pour payer des heures, bien l'autre, elle va s'arranger
pour donner moins d'heures parce qu'ils veulent, c'est vrai, avoir des rapports
qui sont respectés, écoutez. Puis c'est
humain, on ne veut pas… Ce qu'on condamne, nous, c'est de dire : On répond
aux besoins. Les besoins ne sont même
pas, bien souvent, évalués. Ça fait que les personnes qui ont besoin de plus
paient de leurs poches. Si les personnes qui veulent garder leurs préposés, Mme la députée, M. le Président, Mme
Tout-le-monde ici… M. et Mme Tout-le-monde… il y en a qui sont obligés de payer
plus cher pour ne pas perdre leurs préposés. Ça fait que tu as le choix
entre manger puis avoir un bain.
Puis la
dernière chose que je voulais dire là-dessus, c'est que la COPHAN, nous, on
représente des personnes, qui ont des limitations fonctionnelles, de
tout âge, et les personnes qui ont besoin de soutien à domicile, peu importe leur âge, c'est parce qu'elles ont des
incapacités, madame, messieurs, ce n'est pas pour le fun, O.K.? Et une dernière
phrase : Pour le revenu moyen, je vous dirais que je n'ai pas le chiffre,
mais c'est excessivement moyen, comme vous dites, très, très bas. La majorité des personnes qui ont des limitations
fonctionnelles vivent, sinon proche… en dessous du seuil de pauvreté au
Québec. Il y a des statistiques éloquentes là-dessus. Puis, quand on nous
dit : Oui, mais justement les personnes ne sont tellement pas riches qu'elles
ne paieront pas, ils paient déjà pour des affaires, qu'est-ce qu'il faut faire… qu'elles ne paieront plus si on ne veut pas
revoir les évaluations, si on ne veut pas revoir l'organisation des
services? Puis, pour ceux qui gagnent des petits salaires, parce qu'il y
en a un paquet, c'est quoi, le salaire minimum, pour qu'on commence à être
obligé de payer?
Je la pose encore, la question, on n'a pas de
réponse. Je ne sais pas si quelqu'un a une réponse. Peut-être que quelqu'un du côté gouvernemental a une réponse à
nous donner. Mais, quand on dit : Contribution pour ceux qui ont
les moyens, bien c'est quoi, le moyen? C'est
quoi, le chiffre, aujourd'hui? C'est-u à partir de 13 000 $,
20 000 $ par année? Hein, c'est comme la taxe santé, on ne le
sait pas, on ne sait rien.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Berthier.
M.
Villeneuve : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Lavigne. André
Villeneuve, député de Berthier. Je m'excuse de prendre un peu de temps
sur le temps de l'opposition. Juste vous dire que, si le ministre est sorti, c'est
parce qu'il avait une urgence.
M. Lavigne (Richard) : Il nous l'a dit,
oui.
M. Villeneuve : Mais soyez
assuré…
Le Président (M. Bergman) :
Ce n'est pas, M. le député…
M. Villeneuve : …qu'il va
prendre connaissance des transcriptions, M. Lavigne. Voilà.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Berthier, ce n'est pas un élément de…
Une voix : …
M. Villeneuve : Pardon?
Le Président (M. Bergman) :
Ce n'est pas un élément pour soulever… Mme la députée de Gatineau.
• (13 h 10) •
Mme Vallée :
Je suis désolée pour ça, M. Lavigne. J'aimerais revenir, j'avais des questions.
J'ai des questions sérieuses, si le
gouvernement n'en a pas, la question de l'évaluation des besoins. Vous avez
soulevé quelque chose qui était préoccupant,
c'est-à-dire que bien des personnes qui ont des limitations fonctionnelles ont
accès à un nombre d'heures qui n'est pas toujours représentatif du
nombre d'heures dont elles auraient réellement besoin au quotidien, d'une part.
Vous avez
aussi fait état de quelque chose qui est troublant — j'avais posé la question hier — au fait que, pour pouvoir avoir des services via, par exemple, le
chèque emploi-services, il y a bien des gens qui doivent soit couper sur
le nombre d'heures qui leur est réellement accordé pour compenser, par exemple,
pour le transport, pour compenser pour bien d'autres choses ou, comme vous l'avez
mentionné, donner une contrepartie financière parce que le chèque
emploi-services n'est pas suffisant pour attirer du personnel qualifié puis du
personnel intéressé à offrir des services.
Puis je
voudrais vous entendre là-dessus parce
que, pour moi, c'est important.
Si on est pour mettre en place une assurance autonomie dans moins de six
mois, il faut savoir, il faut connaître la réalité du terrain puis il faut
trouver des façons de régler ces problématiques-là une fois pour toutes.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lavigne.
M. Lavigne
(Richard) : M. le Président, oui. Bien, pour répondre rapidement, c'est que vous savez que… ce que Mme
notre présidente vous a dit tantôt, c'est que c'est toute la relation entre la
personne qui a une limitation et la personne qui lui rend un service. Normalement,
en tout cas dans certaines entreprises, c'est les patrons qui disent : Tu
vas faire ça, tu vas venir à telle heure, tu vas faire ça, ça, ça.
Mais
là il y a une relation d'interdépendance, on parle de soins
à la personne. Alors, le préposé qui peut… On l'a tous entendu, il y a
des préposés qui disent : Si tu veux que je vienne, tu vas payer mon
transport, tu vas payer mon heure de transport. Si tu chiales, je ne viendrai plus. Si tu veux que
je vienne quatre heures, il faut que tu m'en paies cinq. Ils sont assis
tous les deux tout seuls dans la maison. L'autre, il est comme un peu, entre parenthèses,
mal pris, là. Le rapport de force, il n'est
pas fort, fort, là, pour la personne, là. Alors, ça, il faut faire attention.
Je crois qu'il y en a que ça
va très bien aussi.
Pour ce qui est de l'évaluation,
dans l'évaluation, ils… non, ils te demandent si tu as des proches. Si tu as
des proches, là il fera partie de la réponse
à tes services, hein? Ton conjoint, ou tes enfants, ou tes voisins, si tu dis
que tu en as autour de toi, ne crains
pas, ils vont rentrer ça dans les heures de service, ce qu'ils peuvent faire.
Mais, le proche, lui, ça lui tente-tu
de… hein? Mais il est calculé, il est calculé comme étant une ressource
disponible. Puis, les besoins, bien, comme je vous dis, si on a des grilles d'évaluation, on ne dit pas qu'elles ne sont pas bonnes, on
dit qu'elles ne sont pas complètes. Il faut faire attention, parce qu'il
y a quelqu'un qui nous a accusés de dire que leurs grilles n'étaient pas
bonnes. Elles ne sont pas complètes, on va
dire, puis elles ne sont pas administrées de la même façon d'un intervenant à l'autre.
Chacun y va de sa petite estimation personnello-professionnello je ne
sais pas quoi. Ça fait qu'à un moment donné ça repose sur des évaluations incomplètes sur la base de directives, parce qu'il
existe des directives, là. Cette année, on va… cette semaine, on n'a pas
d'heure à donner, ça fait que, quand vous évaluez des gens, bien soyez
conscients que ce qui est important, c'est
que j'ai un bloc d'heures à donner, puis je ne peux pas le dépasser. Alors, à
un moment donné, on ne pourra pas transférer les problèmes dans une
caisse, ou dans une assurance, ou dans je ne sais pas quoi puis penser que tout
va se régler juste parce qu'on le transfère.
On
nous annonce des investissements, bravo, mais rappelons-nous qu'on n'est pas
les chefs de file au Québec en termes d'investissement per capita dans
le maintien à domicile, hein, on est plutôt à l'autre bout de la file, et ça,
ça fait des siècles qu'on en parle.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, il vous reste
six minutes.
Mme
Blais :
Mme Vézina, M. Lavigne, ça me fait plaisir de vous voir.
J'aimerais
tout d'abord faire une mise au point : ce n'est pas une question
ici, je crois, de parti politique, c'est vraiment un projet de société. Et, toute la question
de ce virage de l'assurance autonomie, on va l'implanter pas pour un an,
mais pour les années à venir. Alors, c'est
très important, les questions qu'on pose, puis la réflexion aussi. Puis je
vous remercie de prendre le temps de venir
très souvent. J'aimerais vous mentionner que vous avez tellement
raison quand vous dites que c'est difficile d'obtenir les heures pour
les personnes en situation de handicap pour rester à la maison. Il y avait
cette histoire de jeune fille qui a dû être hébergée en CHSLD parce qu'on a évalué son nombre d'heures pour rester à la maison puis qu'on
n'était pas capable de lui donner. Ça vient d'arriver il y a à peine quelques
mois. Et cette jeune personne dans la trentaine
a dû déménager contre son gré dans un CHSLD. Alors, ça commence, je pense, par être en mesure de combler ces besoins-là qui sont les besoins de faire
en sorte qu'elle puisse rester à la maison si elle le souhaite. En plus, pour les personnes en situation
de handicap, je le mentionne souvent, mais je veux le rementionner, ça
prend aussi l'aménagement, ça prend l'aménagement du logement. Si on n'est pas
capable d'avoir un environnement adéquat pour vivre dans son domicile, on n'est
pas capable d'avoir cette autonomie. Cette autonomie, qu'on appelle ici le mot
«liberté», il faut que l'environnement soit fait en conséquence, et il y a coût
autour de ça aussi.
Puis
je voudrais vous entendre autour de ces deux notions : il faut que les
heures pour les personnes en situation de handicap soient présentes pour
ne pas que vous ayez à aller en CHSLD puis il faut que l'aménagement de votre environnement
soit également fonctionnel.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lavigne.
M. Lavigne (Richard) : M. le Président, bien ce que Mme la députée vient de dire, c'est la
preuve qu'on devrait arrêter de
marcher avec des règles de programmes. En haut de telle heure, là… Je ne sais
pas pourquoi, il y a quelqu'un qui a décidé que, un tel nombre d'heures,
tu t'en vas au CHSLD. C'est quoi, l'affaire? C'est quoi, le problème, là? D'où
ça sort, cette règle-là?
C'est
des règles de personnes qui ont une autre analyse que la nôtre. Nous, on
dit : On a des besoins, on a des droits, on veut être libres et indépendants, autonomes, appelez ça comme vous
voulez. Les règles d'adaptation puis d'aménagement de domicile, c'est la
même chose. Ça prend des années avant d'avoir des services, puis après ça ils
disent : Bien là, il faut le mettre en
CHSLD, il coûte trop cher. Bien oui, mais payer le nombre d'heures, payer les
aménagements à domicile… on est pris avec contraintes de programmes, qui
n'ont rien à voir avec la personne. C'est des formulaires, c'est des règles, c'est des… Puis nous, on dit :
Profitons de cette réflexion pour régler. Je ne dis pas qu'on réglerait tout,
mais on peut-u en régler un bout? Il y en a des milliers, de personnes
handicapées qui ont des limitations fonctionnelles qui n'ont pas d'affaire dans
les CHSLD. Y a-tu quelqu'un qui calcule comment ça coûte, ça, pour rien?
On
pourrait-u prendre cet argent-là pour faire du soutien à domicile puis de l'adaptation
de domicile avec? Y a-tu quelqu'un quelque part qui peut y penser?
Puis, Mme la
Présidente, ma présidente veut compléter.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Vézina.
Mme Vézina (Véronique) : Tantôt, quand on a demandé de reporter la réflexion pour, dans le fond,
une entrée en vigueur en 2016… Parce que ce qu'on voulait, c'est que le
comité prenne le temps de statuer sur certains aspects.
Il pourrait y avoir une
entrée en vigueur en 2016. Ça n'empêchait pas qu'il y avait des choses qui
pouvaient être réglées avant. Et, tant qu'à
nous, la question d'envoyer des gens en CHSLD à cause qu'elles ont besoin de
cinq heures de plus que ce que le
programme permet par semaine, c'est quelque chose qui peut être réglé avant. On
calcule encore le nombre d'heures de service à 45 000 $ par
année. Une personne en CHSLD coûte 90 000 $ par année. Pourquoi on ne change pas juste le plafond et on n'alloue pas
un nombre d'heures plus important aux personnes? C'est quelque chose qu'on peut travailler rapidement. On n'a pas
besoin d'attendre l'entrée en vigueur de l'assurance autonomie pour
pouvoir régler ce problème-là. Puis, les gens qui sont en CHSLD, il faut aussi
leur trouver un endroit pour aller demeurer. Ce n'est pas des gens qui vont pouvoir prendre le logement tout de suite à
côté, rentrer là, puis on dit : On vous donne 60 heures de service. Donc, il y a des structures à mettre
en place, il y a des choses qu'on peut régler d'ici là, et on a besoin de
faire une réflexion complète. Les personnes
qui ont une déficience intellectuelle ou un trouble envahissant du
développement, ce n'est pas juste d'avoir
un bain ou d'avoir quelqu'un qui va aller leur préparer à souper qu'ils ont
besoin, ils ont besoin d'accompagnement, ils ont besoin de certains
services de stimulation, qui ne leur est pas donné actuellement.
Est-ce qu'on
peut prendre le temps de réfléchir à tout ça avant d'aller plus loin? On ne dit
pas qu'on n'en veut pas, on dit que la réflexion doit être complétée et
mettre, en attendant, des choses en place pour éviter, entre autres, de mettre
des gens en CHSLD.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
il vous reste une minute seulement pour un commentaire.
Mme
Blais : Oui, mon commentaire
est le suivant : Quand on a eu à mettre en place la politique Vieillir et
vivre ensemble —
Chez soi, dans sa communauté, au Québec, je suis allée visiter un beau projet,
à Québec, qui s'appelle Chez soi, où il y
avait comme trois édifices : un pour les personnes… un pour les familles;
l'autre pour les personnes ayant des déficiences intellectuelles; et d'autres
pour des personnes âgées puis ressources intermédiaires, avec une aire commune.
Et j'ai rencontré une personne en mobilité réduite qui m'a dit : Vous
savez, Mme Blais, si on n'avait pas aménagé
mon appartement, je serais aujourd'hui en CHSLD; et aujourd'hui je suis la
présidente du comité des usagers… du conseil d'administration, là,
plutôt, de la résidence et je suis extrêmement active et autonome.
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
Mme
Blais : Et je me suis
dit : C'est beau, c'est comme ça que ça devrait se passer, et c'est ça, le
vivre-ensemble, le partage-ensemble et, pour moi, la véritable
autonomie.
Et merci beaucoup d'être venus nous rencontrer,
vous enrichissez nos discussions.
Le Président (M. Bergman) :
Alors, ceci met fin au bloc de l'opposition officielle.
• (13 h 20) •
M. Lavigne
(Richard) : …une dernière phrase
à vous dire. On vient souvent à l'Assemblée nationale, on vient, on reconsulte, on… Je vais vous le dire, là, il y a,
par bouts, là, qu'on sent que vous nous entendez, mais c'est très
difficile de contribuer.
Il faut qu'on
accepte de changer les choses. Arrêtez de nous adapter aux machines, adaptez
vos machines à nous autres. Et je dis : Nous autres, tous les
citoyens, là, toutes les Québécoises et les Québécois, on est en droit d'avoir des services à la mesure de nos besoins.
Requestionnons nos réseaux, requestionnons les choses. Et ça, si vous ne le
faites pas, bien on va toujours jaser. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska, pour un bloc
de 4 min 30 s.
Mme Roy (Arthabaska) : J'ai
senti un peu de découragement dans votre dernière remarque.
Mais je dois
vous dire que je dis souvent à mes enfants — au début, ils ne savaient pas la réponse, maintenant
ils le savent : Est-ce que
c'est le rocher ou l'eau qui est le plus fort? La première fois, ils m'ont dit
«le rocher». Mais c'est l'eau, parce qu'à force de frapper toujours au
même endroit elle finit par percer le rocher. Ça fait que vous allez peut-être finir par vous faire entendre, mais c'est à venir
ici que vous allez le percer, le rocher, sinon vous ne ferez pas évoluer
les choses. Puis je vous remercie de venir puis je vous remercie de votre
persévérance. On peut dire de vous que vous n'êtes pas une personne qui parlez
pour ne rien dire.
Et j'ai vu, dans les recommandations, quelque
chose qui m'a un peu étonnée. Vous avez marqué qu'il fallait «assurer l'accès
et la gratuité des services de soutien à domicile sans égard […] à la cause de
la déficience». Est-ce qu'il y a des inégalités en raison d'une déficience ou
une autre? Ça m'a étonnée.
Mme Vézina (Véronique) : Quand on parle
de cause de déficience, souvent c'est… il y a des gens qui ont une déficience de naissance, il y en a qui l'ont
acquise suite à un accident, des suites d'une maladie, peu importe.
Donc, c'est pour ça qu'on dit qu'il peut y avoir une différence, parce qu'une
personne qui a, exemple, une déficience de naissance par rapport à une personne
que c'est suite à un accident de voiture, bien il y a une iniquité, je dirais,
dans les traitements puis les services qui lui sont donnés.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée d'Arthabaska.
Mme
Roy (Arthabaska) : Bon. Ça, vous m'éclairez. Maintenant,
quelque chose que je n'ai jamais vu, là, «s'assurer que celles et ceux qui sont
payés pour gérer le système […] assument la responsabilité en cas de mauvaise
gestion». On a vu des horreurs, depuis des années, dans le système de santé.
Comment vous verriez
ça? Quel mécanisme vous proposez pour la reddition de comptes puis les…
M. Lavigne
(Richard) : M. le Président…
Le Président (M.
Bergman) : M. Lavigne.
M. Lavigne
(Richard) : M. le Président, moi, je sais qu'à la COPHAN je suis directeur
puis, si je fais une mauvaise job, je sais
ce qu'ils vont faire. Savez-vous qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont me…
dehors. Il y a toutes sortes de manières d'avoir des réactions quand quelqu'un ne fait pas la job.
Je ne dis pas qu'il faut les mettre dehors, mais il faut que les gens soient
imputables pas juste pour le fun. Il
y a des mécanismes qui pourraient
être mis en place. Je sais que ce n'est pas dans la culture, hein? La
culture, au Québec, on comprend, ah oui, il faut comprendre : Pauvre
petit, il y a un contexte. On comprend ceux qui donnent les services, mais on
comprend rarement ceux qui n'en reçoivent pas, hein?
Et donc il y a un
mécanisme. Je ne l'ai pas, la réponse, mais, à un moment donné, il faut que les
gens soient imputables pour le vrai. Puis,
pour le rocher puis l'eau, madame, faites-vous-en pas, madame, de l'eau, ça
fait longtemps qu'on en verse. La
roche est dure, mais on va finir par l'avoir, vous avez raison. C'est juste qu'il y a
des journées où je trouve ça plus dur
que d'autres. Puis ce que je fais ce matin, c'est que je… peut-être
que ça ne se fait pas, mais je fais juste vous dire qu'à un moment donné il y a des journées où on pense que… je ne veux pas
parler des sourds, mais des dialogues de
sourds, à un moment donné… Parler avec un sourd, il comprend. Quand on lui
parle en langage des signes, on comprend.
Mme Roy
(Arthabaska) : Ce que vous dites, c'est qu'on vous écoute, mais
on ne vous entend pas.
M. Lavigne
(Richard) : Je ne dis pas ça. Vous entendez, mais des fois il y en a qui
écoutent moins, disons.
Mme Roy
(Arthabaska) : Oui, puis vous faites bien de le dire.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée d'Arthabaska.
Mme
Roy (Arthabaska) :
Mais vous faites bien de le dire, parce
qu'il n'y a rien qui va… Il faut commencer par faire une critique pour
provoquer le changement.
M. Lavigne
(Richard) : …mais je l'ai dit quand même.
Mme Roy
(Arthabaska) : Puis amener des solutions comme vous faites
aussi, ça provoque le changement.
On
est ici pour ça. Si tout allait bien dans le meilleur des mondes, là, on n'aurait
pas à faire une commission, on n'aurait
pas à faire un livre blanc, on s'occuperait d'autre chose. Mais c'est pour ça
qu'on est ici. Puis, si vous nous amenez des recommandations comme celles-là, je pense qu'il y a le mérite d'être
évalué, et je vous remercie de votre prestation.
Le
Président (M. Bergman) : Merci. Alors, M. Lavigne, Mme Vézina, merci pour votre présentation,
merci d'être ici avec nous et partager votre expertise, et certainement
vous êtes écoutés, et on vous entend.
Et,
collègues, compte tenu de l'heure, je
suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
Vous pouvez laisser vos documents dans la salle, la salle sera fermée.
(Suspension de la séance à
13 h 24)
(Reprise à 15 h 1)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Collègues, la commission
reprend ses travaux.
Nous
allons poursuivre, sans plus tarder, les consultations
particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création
d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.
Alors, on souhaite la
bienvenue à la Fédération de la santé et des services sociaux. Bienvenue. Pour
les fins d'enregistrement, pouvez-vous
donner à nous vos noms, vos titres? Et vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation. Alors, le micro, c'est à vous, monsieur.
Fédération de la santé et des services
sociaux de la CSN (FSSS-CSN)
M. Begley
(Jeff) : Merci beaucoup. Donc, moi, je m'appelle Jeff Begley, je suis
président de la Fédération de la santé et des services sociaux à la CSN. À ma
gauche, il y a Philippe Crevier, qui est conseiller syndical, ainsi qu'Hubert
Forcier, qui est aussi conseiller syndical chez nous.
M. le Président, M.
le ministre, messieurs mesdames, membres de la commission, on vous remercie,
dans un premier temps, de nous recevoir.
Notre objectif, c'est de vous faire une lecture à partir du terrain, le monde
qui travaille sur
le terrain. À la Fédération de la santé et des services sociaux, nous
représentons 130 000 membres, la plupart dans le secteur public, mais il y a 20 000… qui
travaillent aussi dans le secteur privé, y compris les soins à domicile, y
compris les centres d'hébergement privés.
Lors
de notre dernier congrès, en 2012, nous avons eu le plaisir d'avoir un invité
de marque pour parler justement de la
question des soins à domicile puis de la condition des personnes âgées. Après
qu'on a fait l'essentiel de notre rapport, j'ai pris, en fin de semaine, la peine de revenir sur… sortir les
enregistrements pour vraiment voir est-ce qu'on est sur une bonne track, est-ce qu'on est sur de bonnes pistes
dans ce que nous vous livrons. Donc, ça me faisait plaisir de constater
avec l'expert en question que… un professeur, qu'il avait effectivement sur l'état
du réseau et ce que nous, nous livrons ici…
On a convenu exactement c'est quoi, l'état actuel du réseau. D'ailleurs, lorsqu'on
avait invité le professeur en question,
on ne savait pas à ce moment-là qu'il allait devenir le prochain ministre de la
Santé et des Services sociaux. Mais n'empêche
que, lorsqu'on est allés plus loin dans l'autre, le monde, la façon qu'ils ont
reçu la présentation… sur l'état, on en
convient, tout le monde, tout le monde l'a reconnu. Sur la question de la
nécessité de finances publiques, notamment dans les soins à domicile, il
y avait quelques intervenants qui sont intervenus après la présentation pour
dire : C'est de la musique à nos
oreilles que finalement il y a quelqu'un qui se préoccupe d'avoir du
financement public. Mais, lors de la période
d'échange et de questions, il y avait une préoccupation qui revenait souvent, c'était
la question de la prestation, que, là, on trouvait que, dans la
présentation du ministre, qui n'était pas ministre à ce moment-là… qu'il
manquait la préoccupation de la prestation publique.
Et je vais vous dire
que l'ensemble des intervenants, puis autant du public que du privé, même s'ils
étaient contents de la direction que semblaient prendre la forme, les idées qui
étaient mises sur la table, les préoccupations quotidiennes revenaient rapidement.
Et, que ça soit dans le privé, que ça soit dans le public, nos membres, ce qu'ils
nous disent, c'est qu'avec toute la bonne volonté du monde nous n'avons pas les
moyens pour livrer les services.
D'ailleurs,
nous constatons que la volonté est là — et on a juste à regarder les statistiques d'assurance
salaire chez nous — que souvent le monde livre des qualités de
services au-delà de ce qu'on leur donne comme moyens, même au détriment
de leur propre santé, et moi, je pense qu'il faut... Puis, je pourrais
comprendre, dans un premier temps, à la limite,
la commission dira : Oui, mais on n'est pas ici pour
regarder les conditions de travail, on est ici pour regarder l'état des services et les besoins de services des personnes âgées. Nous partageons ça à 100
milles à l'heure, c'est la préoccupation
numéro un de nos membres. Mais il me semble que nous ne pouvons pas dissocier
complètement… et dire que ce n'est
pas notre préoccupation, les conditions. Et je parle notamment des moyens pour
offrir les services. On ne peut pas
juste faire abstraction, lorsqu'on travaille avec les personnes âgées qui se
retrouvent en perte d'autonomie… mais on arrive à des situations où le
monde est très fragile. Et il y a un sérieux problème en termes d'application
des services. À l'heure actuelle, lorsqu'on regarde
les travailleuses sociales, les professionnels qui coordonnent l'ensemble des
travaux, ce qu'ils nous disent de façon sans cesse, c'est qu'on est tellement
débordés par la bureaucratie de notre travail, par la justification des choses
qui se font que les préoccupations et l'interaction avec la personne âgée, c'est
très limité. Non seulement ça devient
frustrant, mais ça fait en sorte qu'il y a une démotivation au bout de l'exercice.
Lorsqu'on parle avec les auxiliaires
de santé qui travaillent à faire, à offrir des soins, des services à domicile…
Dans un premier temps, d'ailleurs, il
y a eu un témoignage, qu'on parle dans notre mémoire, une fille qui fait ça
depuis 1992, qui dise : Écoutez, là, moi, quand j'ai embarqué, j'ai fait mon certificat de gérontologie, moi,
j'étais emballée, c'était quelque chose de futur, avec les affaires
démographiques, et ça me tentait, mais ça me tente toujours, mais de plus en
plus on est contraintes. Ah, vous
dites : Là, là, vous allez faire une hygiène dans une heure. Plus que ça,
c'est du blabla, c'est du gaspillage. Dans un premier temps, elle a dit : Tant que vous débarquez dans la maison,
amenez une personne au bain, où, tu sais, ce n'est pas dans les mêmes
conditions que vous et moi qui peut s'organiser, se déplacer facilement… Elle a
dit : On fait le strict nécessaire, on
ne peut pas laisser la personne toute nue quand même dans son bain. Puis, l'essentiel,
mais on le perd, on fait le strict nécessaire pour les statistiques,
pour dire qu'elle a été lavée.
Donc,
avec tout ça… Et là maintenant nous avons aussi du monde qui travaille dans les
EESAD, dans les centres d'hébergement
privés, et c'est exactement le même message : Sans les moyens, on va faire
le nécessaire, on va faire ce qui… le strict minimum, mais ça ne sera
pas plus que ça.
Puis un dernier
élément, c'est la question de coordonner tout ça. Moi, je pense qu'au niveau
des services publics il faut arrêter, d'abord, de couper dans ce qui… les services de soins à domicile. Il faut garder quand même
un minimum pour que, dans des cas où on est
en attente de réponse des EESAD, dans des cas où la personne est dans un
état fragile, puis qu'elle a besoin d'avoir
rapidement une interaction, et que le CLSC, et le professionnel, qui gère
l'ensemble de la situation a toutes les
affaires nécessaires… Mais la meilleure place pour faire ça, c'est à
l'équipe. Parce que, là, il
y a des réunions régulières où on peut
échanger puis dire : Bon, bien tel a besoin de ci, tel a besoin de ça, ça
presse dans tel cas, parce que, si on ne répond pas, la situation va rapidement
détériorer. Puis, imaginez, quand on peut faire une coordination avec
des multiples intervenants qui sont... qui peuvent se... le privé à but
lucratif, le privé sans but lucratif, le public, plusieurs, plusieurs
intervenants…
Moi, je pense qu'il y
a une préoccupation là, qu'il y a du monde qui vont avoir des besoins qui ne
seront pas répondus assez rapidement. Et ça, ça nous préoccupe beaucoup,
préoccupe beaucoup. Pardon. Je comprends, mon temps est pas mal terminé.
• (15 h 10) •
Le Président (M.
Bergman) : Merci pour votre présentation, M. Begley. Alors,
maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert :
Bien, merci beaucoup, messieurs. Plaisir de vous revoir.
Vous admettrez que le
professeur devenu ministre est cohérent avec ce que vous avez dit. Et moi, je
voudrais aborder une chose qu'on a discutée à de nombreuses reprises. Il y a
actuellement, et vous le savez, des prestations de services qui sont faites par les entreprises d'économie
sociale, par les organismes communautaires, par les résidences privées d'hébergement. Ça existe déjà. Et ce que vous
soulevez dans votre mémoire, c'est que ça devrait être seulement du
public qui fait la prestation. Comment vous
conciliez ça avec la présence actuellement d'autres prestataires qui sont
actuellement là, là? Et ils sont présents, ils donnent des services.
Alors, lorsque vous
nous dites : Il faudrait que ce soit juste de la prestation publique, vous
voulez quoi? Qu'on nationalise tous les
services aux personnes âgées? Que ça soit juste le public qui fasse ça? C'est
votre point de vue?
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley (Jeff) : Bien, nous, nous ne prétendons pas que ça doit être juste le public. Je
ne sais pas, il faudra... Moi, il me semble qu'on avait regardé avec
attention. Nous, jamais est-ce qu'on ne demande d'abolir ce qui se fait dans le
privé, jamais, jamais, jamais.
M.
Hébert : …la CSN qui est venue, votre centrale, elle, c'était
le message qu'elle nous donnait, là. Puis j'avais compris que vous aviez
la même opinion.
M. Begley (Jeff) : En tout cas, moi, je pense... d'abord, nous sommes tout à fait d'accord
avec la présentation de la centrale,
en ses coordonnées. Ça, là-dessus, il n'y a aucun problème, mais... Puis, tu
sais, mettre fin à la prestation qui se donne en privé demain matin, bien c'est un désastre. Il faut... Mais
nous pensons par ailleurs que, nonobstant ça, il faut arrêter de couper
dans le public, première étape.
Deuxième
étape, on pense qu'il y a des éléments qui manquent dans le public. Puis on
aura quelques suggestions au niveau
du privé aussi parce qu'il y a la question de la formation, il y a la question
des salaires. Puis, je répète, moi, je ne suis pas ici sur les conditions de travail de notre monde, on s'occupera
ailleurs… Mais il y a un impact direct sur les services, parce que le
taux de roulement chez nous, dans les centres d'hébergement privés, et c'est
semblable dans les CHSLD, c'est aux quatre ans.
Former
du monde puis avoir à reformer tout le monde, qui travaille dans le secteur,
aux quatre ans, moi, il me semble que, là, il y a un questionnement à
faire.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Je suis heureux de vous entendre, là, parce qu'effectivement
il y a une prestation privée à but lucratif ou à but non lucratif qui
existe déjà.
Moi, j'aimerais ça
vous entendre sur comment est-ce qu'on peut s'assurer de la qualité de ce qui
est donné par ces prestataires publics là.
Quels sont les mécanismes qu'on doit mettre en place pour assurer cette
qualité-là? Parce que, comme vous le voyez dans le livre blanc, on veut
essentiellement augmenter de façon importante le financement public, retrouver une gestion publique, parce qu'elle
nous échappe, là. Les résidences privées, ça échappe à la gestion publique actuellement, et on veut
retrouver la gestion publique, mais il faut s'assurer, en bons
gestionnaires, de pouvoir assurer la qualité de ce qui est donné dans les
organismes privés lucratifs ou non lucratifs.
J'aimerais ça vous
entendre sur qu'est-ce qu'il faut mettre en place pour rehausser la qualité et
s'assurer de cette qualité.
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Mais nous, nous sommes toujours à partir d'une position qu'on
appelle le fameux consensus de 1996, où, là, il y avait quand même, avec l'économie sociale, le secteur public… en tout cas, le côté syndical du secteur public, où on avait regardé un
certain nombre d'affaires. Puis
soutenir les organismes d'économie
sociale dans ce qui… la formation, c'est majeur, je répète. Puis il y a
aussi la question salariale qu'il faut en tenir compte puis qu'il va falloir
adresser tôt ou tard.
Je
comprends, ce n'est pas la première chose, mais assez rapidement. Mais la formation, c'est central dans tout ça. D'ailleurs,
je peux vous dire qu'au niveau des centres d'hébergement privés j'ai participé
à la formation d'une mutuelle de formation
pour les personnes qui travaillent en résidence privée. Ça prend beaucoup de
temps pour mettre en place puis
finalement la rendre… et ce n'est pas parce qu'il y a mauvaise volonté. Mais
ça, c'est un point majeur. Mais il faut coordonner ça avec les
intervenants. Puis, moi, il me semble qu'il faut resserrer le lien avec les
intervenants pivots que je parlerais, qui aussi, eux autres… Parce que, lorsque
vous êtes travailleuse sociale dans un CLSC, puis quelqu'un arrive pour les soins à domicile… Mais vous constatez où il y
a des manques. Puis ce n'est pas nécessairement des manques parce que
les personnes ne veulent pas, c'est parce qu'ils n'ont pas les ressources. Mais
moi, je pense qu'il faut que cette personne pivot là à l'ensemble… pour qu'elle
peut faire, avec les personnes qui travaillent sur le terrain, des
recommandations pour améliorer ces situations-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous soulevez des points sur la condition féminine
dans votre mémoire, je suis tout à fait d'accord avec vous.
Actuellement, il y a beaucoup de femmes qui
quittent leur emploi pour devenir des proches aidants, sans aucune forme de
rémunération et de soutien social. On estime que ça coûte à l'économie
québécoise 100 millions par année, le fait que des
femmes quittent le marché du travail pour devenir des proches aidants. Et l'un
des objectifs de l'assurance autonomie, c'est justement de stopper ce phénomène
et de permettre aux personnes en perte d'autonomie de recevoir des services, de
faire en sorte que les femmes puissent continuer à être sur le marché du
travail et même de pouvoir avoir des emplois intéressants pour les femmes qui
ne sont pas sur le marché du travail et qui voudraient y retourner dans les
entreprises d'économie sociale, dans les établissements du réseau.
Alors, l'un
des objectifs de l'assurance autonomie, c'est justement de faire en sorte que
les femmes ne soient pas confinées au rôle de proches aidants et qu'on
puisse les maintenir ou les retourner sur le marché du travail.
M. Begley
(Jeff) : Mais, moi, il me
semble que ça fermerait la boucle. Il y a 20 ans maintenant, on a
commencé avec les services de garde pour que
justement les femmes pouvaient et y travailler, dans les services, mais aussi
confier leurs enfants à un service de garde de qualité. Puis là il reste l'autre
bout qui est justement nos parents. Moi, je l'ai vécu dernièrement, mon ami qui… son père qui était assez avancé dans l'âge,
puis la possibilité d'avoir des services… ça a été un travail à demi-temps juste pour coordonner l'ensemble
pour que les services rentrent dans la maison. Donc, moi, il me semble
que, oui, c'est tout à fait, d'abord et avant tout évidemment, quelque chose
pour justement permettre aux femmes… parce
que, règle générale, ça reste ça quand même : en 2014, c'est les femmes
qui livrent les choses, les services, que ça soit dans notre vie privée
ou sur le plan de services.
Le Président (M. Bergman) :
M. Crevier.
• (15 h 20) •
M. Crevier (Philippe) : Par contre,
un élément qui est un petit peu plus difficile eu égard à la question féminine, c'est le fait qu'actuellement les
activités de la vie quotidienne sont dispensées par 5 200 ASSS qui sont un
groupe qui est majoritairement féminin
aussi. Et ce que le projet d'assurance autonomie propose, c'est de transférer
ces activités-là dans le domaine de l'économie sociale, du moins en
grande partie, parce que je pense qu'on a gardé que sur une base exceptionnelle
ces services-là pourraient être dispensés par les établissements publics.
Puis, pour
nous, là, il y a un problème en termes d'abord de qualité de services, de capacité de contrôler tout
ça. Nous, on pense, comme le disait le président de la fédération, que ça peut
entraîner une bureaucratie à travers un phénomène de contractualisation qui est
déjà en cours beaucoup dans le domaine de l'hébergement. Puis on voit qu'il y a une qualité qui est assurée dans le
contrat, mais est-ce qu'il y a quelqu'un pour s'assurer que la qualité effective
est vraiment au rendez-vous? C'est autre chose. Et nous, on y voit justement
quelque chose qui n'est pas de nature à améliorer de
façon générale la question des emplois, notamment des emplois féminins. Puis un
endroit où il y a de très bons emplois
féminins qui pourraient être développés,
bien c'est justement dans les services publics. Alors là, il y aurait
moyen de faire d'une pierre deux
coups : c'est d'avancer encore plus rapidement sur cette question-là et de
s'assurer qu'en termes de qualité de
services, bien, on ait de meilleurs verrous, ceci n'étant pas un absolu qui
indiquerait que l'économie sociale n'a pas de rôle à jouer.
Bien au contraire, l'économie sociale, pour
nous, a un rôle à jouer, mais, quand il est question de la… quand on est plus près de la question des soins, ce qui
est le cas avec les AVQ, ce qui peut être le cas, certaines fois, avec
les AVD pour des clientèles très particulières dans des contextes très
spécifiques, bien là on pense que ça devrait être du personnel du secteur public qui donne ces services-là puis que c'est
quelque chose qui fait avancer la cause des femmes, du même souffle.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Vous utilisez le mot «transférer», là. Il n'est
pas là, vous vérifierez. M. Lacharité l'a vérifié, et puis ce n'est pas
marqué «transférer», là, tu sais.
On a un
marché qui va augmenter de façon importante, et il y aura des prestataires
publics, mais il y a de la place pour d'autres prestataires. Il
y a 50 % des EESAD actuellement qui donnent des services d'aide à la vie
quotidienne, là, ça existe déjà, là. Et ma
préoccupation à moi, c'est : Comment est-ce qu'on peut assurer la qualité et la formation de
ces personnels-là qui donnent des services?
Quand vous dites : Il faudrait les exclure, ils sont déjà là. Et pourquoi pas? Pourquoi l'économie sociale
ne pourrait pas donner des services de qualité aux activités de la vie
quotidienne?
Vous en avez, des syndiqués, dans les entreprises
d'économie sociale. Donnent-ils de mauvais services?
Le Président (M. Bergman) :
M. Crevier.
M. Crevier (Philippe) : Bien, nous,
ce qu'on dit… Puis on a quand même écouté les dernières consultations. Effectivement, ce qu'on nous dit pour nous rassurer un peu là-dessus,
c'est : On va augmenter la formation, on va essayer d'améliorer les
conditions de travail.
Puis finalement
la question qu'on peut se poser, c'est : Pourquoi ne pas tout simplement les intégrer au secteur public,
ces gens-là qui effectivement, à l'heure
actuelle, dispensent d'excellents
services? Mais il faut bien reconnaître qu'actuellement la seule
raison qui nous incite à les laisser dispenser des activités
qui sont spécifiques aux soins, c'est parce que c'est moins cher. Alors,
si on se dit : On va améliorer la condition de ces gens-là, pourquoi
ne pas les faire dispenser les services via les services publics? Parce
que, si on se dit : On monte la formation, on monte les conditions de
salaire, finalement on est en train de se rapprocher d'un équivalent en termes
de ce qu'on fait dans le secteur public.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Pourquoi ne pas prendre cette voie-là, d'améliorer
la formation, d'améliorer les conditions de travail dans ce secteur-là de façon à ce qu'il puisse y
avoir un choix pour l'individu? C'est une question de choix. Ce n'est pas une question économique, comme vous semblez le
dire, c'est une question de choix. Et il
y a même des personnes handicapées qui, elles, veulent choisir le chèque emploi-services pour avoir cette
autre option-là et il faut s'assurer que l'ensemble de ces services-là soient de qualité équivalente. Et moi, je
pense qu'on doit travailler sur l'amélioration
des conditions de travail, l'amélioration de la qualité des services dans ces autres modes
de prestation là plutôt que de dire : Ils n'existent pas ou :
Fermons-les puis ramenons ça complètement dans le public.
C'est ça, l'angle
avec lequel on approche cette situation-là dans l'assurance autonomie, c'est de
redonner aux gens un choix.
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Peut-être deux petites choses avant de passer la parole à M.
Forcier.
Première
des choses, vous ne me ferez dire jamais que nos membres ne donnent pas une
bonne qualité de service. Ils donnent
la qualité de service à la hauteur des moyens qu'on leur fournit pour l'offrir,
peu importe où ils travaillent. Ça, là...
puis je l'ai vu. Le monde, ils mettent du coeur. Ceci dit, moi, je pense qu'il
faut aussi... La question de libre choix, aucun problème avec ça, aucun. Mais il faut que ça soit un libre choix,
dans le sens à dire que, dans bien des cas, là, le monde, ils prennent
les services auxquels ils peuvent avoir accès, point. Puis, comme les services
publics sont de moins en moins accessibles, bien… et souvent ils s'organisent
avec des amis pour qu'un prenne la relève après les autres, là.
Donc, moi, aucun problème
avec le libre choix. Quand quelqu'un a un voisin qui dit : Je pourrais, tu
sais, avec le chèque emploi-services, s'organiser
ou, avec une EESAD, je sais que, là… Ce n'est pas là, le problème.
Mais, quand vient le moment de soins, la plupart des EESAD ne sont pas équipées pour
les questions des soins. Je comprends qu'il y en a qui offrent un certain niveau,
là. Mais je regarde juste le débat sur les changements au niveau de la loi n° 90
sur les médicaments, puis l'administration, puis tout ça, là, il y a beaucoup de centres d'hébergement privés, là, qui
font des affaires qu'ils ne devraient pas faire, selon la loi, mais qu'il n'y a
personne d'autre pour le faire. Moi, je pense qu'il y a bien des EESAD… c'est exactement
la même chose.
Donc
là, c'est qui qui offre les… C'est qui qui est équipé? À l'heure actuelle, là, c'est le monde qui fait les soins à domicile dans les CLSC.
Eux autres, ils sont équipés pour faire ces services-là. Donc, pourquoi
réinventer la roue? Si ça vous convient…
Le Président (M.
Bergman) : M. Forcier.
M. Forcier (Hubert) : Merci. Bien, pour poursuivre un peu là-dessus puis revenir sur la
question qui était posée, à savoir :
Est-ce que les usagers veulent en fait avoir plus de choix?, bien, sans doute. Mais
ce que je crois qu'ils veulent le plus, c'est avoir des services de la
meilleure qualité qui soit. Puis ça, nous, c'est une préoccupation qu'on a.
Nos
membres ont cette préoccupation de donner les meilleurs services qui soient.
Puis, en plus de ça, bien les études démontrent quand même qu'en termes
de prestation de services la meilleure qualité qui soit, c'est quand elle est
donnée par des services publics. Puis ça, c'est des études qui sont quand même…
qui viennent d'une fois à l'autre revenir sur cette idée-là. Donc, pour nous,
en termes de qualité de services, pourquoi ne pas aller vers meilleur, tout
simplement? C'est la question qu'on se pose.
Puis,
deuxièmement, bien de dire «en termes de coordination des services»… bien, pour
nous, il est clair que c'est beaucoup plus simple d'assurer une bonne
coordination des services puis de s'assurer que les usagers vont recevoir les services auxquels ils vont avoir droit d'avoir
par le biais d'une équipe qui est tout intégrée dans les services
publics. Si on multiplie les prestataires
puis qu'on s'attend à ce que la qualité des services va être maintenue par des
mécanismes de coordination, bien on se pose
la question : À quel moment ça va être fait? On a des exemples, par
exemple, dans l'hébergement, où ça pose problème. Il n'y a encore pas…
la Protectrice du citoyen est venue le rappeler récemment, il n'y a encore pas
d'évaluation qui est faite dans les ressources privées pour les personnes
âgées.
Donc, à quel moment
est-ce qu'on va être en mesure de faire ça si on s'en va vers cette ligne-là
pour les services à domicile?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Là, écoutez, l'assurance autonomie, c'est pour tout
le monde, c'est-à-dire à domicile, en ressources intermédiaires ou en
centre d'hébergement privé ou public.
Quand
on dit : On va mettre en place des mécanismes d'accréditation de la
qualité, là on parle de ça, là. Ce n'est pas juste les EESAD, c'est aussi les centres d'hébergement privés. Alors,
l'assurance autonomie inclut le retour de la gestion publique des
services à l'autonomie. On revient à une gestion publique, là, qui n'est pas là
actuellement. Elle n'est pas là dans les
centres d'hébergement privés, elle n'est pas là dans les résidences privées,
elle n'est pas là dans les entreprises d'économie sociale. Il n'y a pas
de gestion publique, là. Alors, on revient à une gestion publique. Le rôle de l'État, là, c'est de financer puis c'est de
gérer. Est-ce que l'État doit faire toute la prestation? C'est là qu'on ne
s'entend pas. Moi, je pense qu'il y a de la
place pour plusieurs types de prestataires en autant qu'on s'assure de la
qualité, et c'est là qu'on ne s'entend
pas. Quand vous dites : Les études montrent que la qualité est meilleure
dans le public, j'aimerais ça les voir, vos études, parce que le
scientifique que je suis, là, n'a pas vu d'étude comme celles-là. Et au
contraire moi, j'ai des études, comme ma
collègue Gina Bravo au Centre de recherche sur le vieillissement, qui montrent
que la prestation en centre d'hébergement privé, privé conventionné et
public a la même qualité. Et j'aimerais ça voir vos études.
Il
y a aussi des déficiences dans nos centres d'hébergement publics en termes de
qualité. Il faut le reconnaître, là. Et
j'aimerais ça que vous me convainquiez de ça. Que hors du public, point de
qualité, moi, je pense que c'est une équation que je ne suis pas prêt à
faire, en autant… Et on peut améliorer la qualité des deux côtés, mais il faut
s'assurer que la qualité soit au rendez-vous dans les prestataires privés. Et
ça, c'est le rôle de l'État.
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
• (15 h 30) •
M. Begley (Jeff) : Mais, première
des choses, si vous me dites que le libre choix comprend le service d'aller chercher ces soins dans le secteur public, là, tu
sais… je vais être rassuré si vous me dites ça, là, parce que moi, je n'ai
pas compris ça ni du livre blanc ni de… Parce que moi, je… C'est surtout ça, le
problème pour beaucoup de membres. Ils voudraient aller chercher les soins à
domicile dans le secteur public puis ils ne sont pas disponibles.
M.
Hébert : …mieux que
ça.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : L'assurance
autonomie fait en sorte que le financement des établissements publics est lié à
l'allocation d'autonomie des usagers qu'ils reçoivent.
Alors, ça
veut dire que pour l'établissement public l'usager n'est plus vu comme une
dépense, il est vu comme un revenu.
Alors, lorsque l'usager choisit d'aller chercher ses soins dans le public, c'est
un revenu pour l'établissement public. Il
va avoir le revenu qui correspond à l'allocation de l'usager. Même chose en
CHSLD : les CHSLD vont être financés sur la base du profil d'incapacité de leurs usagers et non pas sur une base
historique, comme c'est actuellement.
Alors, on a vraiment… vous avez vraiment là, là… Vous pouvez
être rassurés sur l'option publique qui demeure mais qui n'est pas la seule. Actuellement, les gens sont prisonniers de
l'offre de services du public. Et on sait qu'en soins à domicile, là, on
peut aller… Il y a certains CLSC qui offrent
6 % des besoins; d'autres, 33 % des besoins. Ça varie d'une région à
l'autre. La Protectrice du citoyen l'a souligné d'ailleurs dans son
dernier rapport.
Ce qu'on veut, c'est mettre fin à ces iniquités
régionales là et faire en sorte que, peu importe où on se trouve, on a accès
aux mêmes services. Et c'est un élément fondamental de l'assurance autonomie,
je vous rassure là-dessus.
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Mais, c'est ça,
moi, je pense qu'il faut… Tu sais, je répète, pour nous, il ne s'agit pas
de… Nous ne sommes dans une situation où on va mettre les personnes, que… je
répète, livrent avec beaucoup de coeur les services, les uns contre que les
autres.
Ce n'est pas
là, le problème. Le problème, c'est le manque de services puis beaucoup, beaucoup
de monde qui chercheraient dans le
public et qui vont au CLSC et que la travailleuse sociale dit : Écoutez,
là, ici, là, oubliez ça, donc voici
vos choix. Et là ils ont le libre choix de ce qui reste. Moi, je dis : Il
faut mettre fin à ça, d'abord. Ensuite, pour le reste et sur la formation, on va être partie prenante comme on était
partie prenante dans les centres d'hébergement privés, comme on était partie prenante dans les centres de
la petite enfance, comme on est partie prenante dans le secteur public.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : L'implantation
de l'assurance autonomie s'accompagne, avant même son implantation, d'un investissement majeur dans les soins à domicile,
cette année, 110 millions, et on s'est engagés à 500 millions au
cours d'un mandat normal de gouvernement. Il y a là de l'argent qui arrive, là,
pour les services à domicile.
Est-ce que
vous êtes d'accord avec ça? Vous avez une bouffée d'air frais, j'imagine, vous
ne pouvez pas être contre.
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
M. Begley (Jeff) : Je vais laisser
monsieur…
Le Président (M. Bergman) :
M. Crevier.
M. Begley (Jeff) : Ça, c'est une
question un peu plus difficile.
M. Crevier (Philippe) : Bien,
écoutez, effectivement il y a un apport d'argent neuf dans toute la question
des soins de longue durée.
Un constat qu'on peut faire, puis on l'a mis
dans notre mémoire, c'est que, malgré l'ajout de ces sommes additionnelles là, on sera encore très loin de ce
que les pays qui excellent en matière de couverture de soins de longue
durée font. Et on pense que le fait de
mettre en place l'investissement sur une longue période va compromettre, dans
le fond, notre capacité à rapidement
rencontrer les résultats qui sont recherchés, c'est-à-dire dégager des
économies en baissant le niveau d'institutionnalisation.
Donc, nous, on invitait le gouvernement à procéder à cet investissement-là de
façon plus rapide.
Une autre chose qui nous inquiète en termes de
financement, c'est que le projet ouvre quand même la porte à un accroissement
du financement privé. Parce que, vous le disiez tantôt, l'allocation de soutien
à l'autonomie va être déterminée et modulée en fonction
du revenu et va servir, dans le fond, à financer tant les services à domicile
que les services en hébergement de longue
durée. Donc, ce que ça laisse présager, c'est qu'actuellement on va, en
fonction du revenu, établir, moduler
la couverture de services non seulement en soutien à domicile, mais aussi en
hébergement et en soins de longue durée où actuellement ces services-là
sont couverts. Alors, de ce côté-là, bien on a quand même une crainte à l'effet
qu'il y a une partie de l'accroissement du financement des soins de longue
durée qui provienne du financement privé et puis
que ça percole non seulement dans le domaine des services de soins à domicile,
mais que ça percole aussi dans l'hébergement de longue durée.
Le Président (M. Bergman) :
Malheureusement, le temps s'est écoulé. Pour l'opposition officielle, M. le
député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Bienvenue ici, à la commission.
Un point que
vous n'avez pas beaucoup parlé avec le ministre : la question de la
contribution de l'usager. Vous savez
que la contribution va être en fonction du revenu. On ne sait pas encore à quel
montant ça va être, mais on ne sait pas non plus les montants qui vont
être alloués selon le profil ISO-SMAF.
C'est quoi,
votre position par rapport au fait que l'usager va contribuer à partir de ses
revenus? Puis vous savez qu'au Québec, à partir de 35 000 $,
40 000 $, là, généralement, on est considéré comme assez riche.
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Mais, vous savez, c'est
une préoccupation chez nous. Moi, je vais vous dire que, si on est en
train de regarder des contributions qui s'apparentent à ce qu'on a fait avec
les services de garde, on est prêts à regarder ça.
Mais, si c'est
d'autres types, et notamment vous avez mentionné «selon le revenu», moi, je
vais vous dire, ça nous préoccupe au plus haut point, pour une première
raison majeure : les coûts d'administration, d'administrer ce que le membre doit selon le revenu, c'est des coûts
fantastiques. Et c'est, à ce moment-là, des argents qui ne rentrent pas
dans les services. Alors, moi, je vais vous
dire que, si c'est ce qu'on appelle en anglais «a means test», où on vérifie l'état
de revenu puis votre capacité, selon
des critères, de payer, nous, on pense que c'est un mauvais, mauvais calcul. On
est beaucoup plus quelque chose d'universel.
Puis, si on veut un tarif, comme j'ai dit, qui soit quelque chose comme dans
les services de garde, on est prêts à regarder ça, même si on pense que
ça devrait être universel. L'autre chose, bien sûr c'est que toutes les expériences,
puis évidemment la plus exagérée ou la plus évidente, c'est l'expérience des
États-Unis… D'ailleurs, Philippe me disait
juste avant qu'on commence… il est allé regardé au niveau de quelque compagnie
d'assurance qui salive un peu à la venue de peut-être une place où il
peut aller chercher beaucoup, beaucoup d'argent. Probablement qu'ils vont s'assurer sur le plan personnel pour des
soins à domicile pour ceux qui ne seront pas donnés par le public. Puis
ça, au Québec, il y a une tarte. L'argent,
il sort des mêmes poches, peu importe, là. Tu sais, ça peut aller au
gouvernement, ça peut aller aux
compagnies d'assurance privée, ça peut aller direct pour payer quelqu'un pour
venir chez vous, là, mais ça vient tout de la même place.
Donc, qu'on
trouve le moyen le plus efficace. C'est pour ça que nous, nous pensons que...
mettez, dans des coûts d'administration, comme aux États-Unis, où les
services d'administration, ça avoisine les 20 %... ça n'a pas d'allure.
Le Président (M. Bergman) :
M. Crevier.
M. Crevier
(Philippe) : Bien, l'autre
impact négatif que ça peut engendrer, puis ça a le même effet en quelque
part qu'un ticket modérateur, c'est de dire : Bon, on module l'allocation
en fonction du revenu parce que, il faut bien se le dire, on pense que le revenu est suffisant pour que la personne
finance le reste directement, et ce qui peut... Ce que ça peut entraîner
comme conséquence, c'est que la personne décide tout simplement de ne pas payer
pour ces services-là, bien qu'ils soient
requis. Donc, on va se retrouver avec un système où on mesure l'incapacité avec
un outil qui est fort précis, qui est
assez intéressant. On va établir des besoins, mais on va dire à la
personne : On ne vous finance pas 100 % des besoins parce qu'on
figure que vous allez vous financer la différence à même vos revenus. Puis on
sait très bien qu'il y a des gens qui ne le feront probablement pas.
Alors là, on
s'éloigne de l'objectif qui est de prendre en charge les pertes d'autonomie au
meilleur moment pour essayer d'éviter
que ça dégénère en coût supérieur puis que ça entraîne des hospitalisations ou
des admissions à l'urgence. Donc, ce n'est probablement pas la meilleure
façon de financer la chose.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Vous avez l'air de bien connaître le système.
Si on établit une allocation selon la perte de capacité, mettons, un
exemple, 10 000 $, et si vous avez des revenus et on dit : Selon
vos revenus, votre allocation va être de 3 000 $, ça, ça veut dire
que la personne va devoir contribuer pour 7 000 $ de sa propre poche.
Vous, votre interprétation, est-ce que la personne paie de sa poche ou ne paie
pas de sa poche?
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Bien, écoutez, moi,
je... c'est un peu ça, notre préoccupation, justement. C'est qui qui
couvre la différence? C'est majeur comme question, si différence il y a.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je vais...
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
• (15 h 40) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Le ministre puis moi, on a un différend. Moi,
comme je vous l'explique, je trouve que la personne paie de sa poche, mais le
ministre, il dit qu'il n'y a personne qui sort de l'argent de sa poche. Mais à
la fin la différence va devoir être comblée.
L'autre
élément, si vous allez avec les CHSLD, actuellement quelqu'un qui rentre en CHSLD, qui a un revenu moyen,
qui a un peu d'argent dans son compte de banque, généralement pas plus que
3 000 $, 4 000 $, là, un chiffre approximatif, on va lui demander de contribuer jusqu'à la hauteur de
21 000 $. Le rapport du vérificateur, je pense, auquel le
ministre a participé avant d'être ministre recommandait d'augmenter ça. Je ne
sais pas à quel niveau que ça peut être, mais
je suppose que ça ne sera pas en bas de quelques milliers de dollars. Ça, c'est
une contribution directe de la personne en fonction des revenus. Puis, je vous le dis tout de suite, au Québec,
là, pour l'avoir vu pour plusieurs personnes, là… riche, là, 35 000
$, 40 000 $, là, selon les tables d'impôt, vous êtes quelqu'un d'assez
riche. Et, quand arrive le temps de contribuer, également vous êtes considéré
dans les riches, moi, j'appelle «les riches»… mais les très riches, en haut de
70 000 $, là. Des fois, les gens pensent que c'est 10 millions. Mais
je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ça.
À
partir de 40 000 $, 50 000 $ généralement, dans les CHSLD,
on doit contribuer soi-même jusqu'à la hauteur de 21 000 $. Qu'est-ce
que vous en pensez?
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley? M. Crevier.
M. Crevier (Philippe) : Bien, ce qui est clair, c'est qu'il faut que la
contribution qui est requise des usagers pour l'hébergement ne soit pas
un frein d'aucune sorte pour que la personne se retrouve dans le milieu d'hébergement
qui est approprié. Mais une inquiétude qu'on
a quant à la question qui nous occupe, c'est que cette tarification-là, si on
veut, indirecte… Parce qu'effectivement, si
on module l'allocation de soutien en fonction du revenu, c'est parce qu'on se
dit que le revenu est suffisant pour que la
personne paie la différence. Donc, il y aura un déboursé éventuel. Mais le
problème majeur, c'est que, là, on introduit cette question-là non seulement
pour l'hébergement, mais pour le volet soins.
Donc,
effectivement, il y a, au niveau de la contribution exigée pour l'hébergement…
il n'y a certainement pas beaucoup de
place pour accroître ça. Et la notion que ça percole puis que ça se déplace du
côté des soins, bien là c'est carrément très, très…
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président?
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : C'est juste que vous devancez mes questions,
mais ça va bien, vous comprenez très bien le système.
Vous
savez qu'on parle d'équité. Et, si vous contribuez en CHSLD, si on veut être
équitable, la personne qui va être en
ressources intermédiaires devrait contribuer en fonction de revenus à la même
hauteur probablement, non pas en fonction
du prix que ça coûte, mais en fonction de sa capacité de payer. Donc, on suit
que les ressources intermédiaires devraient
être la même chose. Et, ce qu'on rajoute dans le projet, si vous avez les soins
à domicile, sauf le côté des services professionnels, comme médecins,
infirmières, aussi on va vous demander de contribuer probablement à une
certaine hauteur assez élevée pour vos soins à domicile.
Ça, appelez-vous ça
un ticket modérateur, une taxe, une tarification?
Le Président (M.
Bergman) : M. Crevier.
M. Crevier (Philippe) : Bien, ça a les mêmes effets, ça a les mêmes
effets. Ce qu'il faut quand même reconnaître, c'est qu'on voit
évidemment d'un bon oeil l'augmentation de la couverture de services.
C'est
la façon de le financer qui est problématique. On est en effet, évidemment, en
accord avec le fait que ce soit largement
financé par les fonds publics, parce que je pense que c'est ce qui est prévu,
sauf qu'il y a un... disons, appelons ça un flou sur ce que la personne elle-même va avoir à débourser. Puis c'est
difficile de se prononcer là-dessus tant qu'on ne connaît pas le panier de services publics qui va
être disponible. Donc, on ne sait pas ce que la personne va avoir elle-même
à faire comme contribution. On n'a pas tous les détails du projet, là.
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Bien, c'est ça, moi, je... C'est un peu... on peut faire bien
des hypothèses, mais, nous, le principe, l'orientation de base, c'est de
dire : Assurons-nous que les frais d'administration soient le moins
importants possible, que la qualité de
services soit le plus importante possible puis que l'essentiel du financement
doit venir de là où c'est le plus
efficace, c'est-à-dire le système d'impôts. Puis, s'il y a une contribution qui
dépasse ça, on est prêts à regarder. Mais,
comme j'ai dit, c'est : nous, on regarde l'exemple beaucoup plus, style,
les services de garde que quelque chose... où, là aussi, c'est
universel, peu importent les moyens.
Donc, ça, ça
assure que le montant payé, c'est assez bas que ça reste très, très, très
accessible, même si, à 7 $ par jour, il y a une petite frange. Mais
c'est largement accessible.
Le
Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je vais bien honnête avec vous, là, ils ne
chargeront pas 7 $ par jour pour une personne
en CHSLD, c'est 21 000 $ par année, O.K.? Puis là, dans ce qui est
prévu, c'est l'augmenter, puis tout le reste va suivre en fonction de l'équité.
Ça fait que, juste pour vous dire, on va être loin du système de garde, là,
honnêtement.
L'autre
élément que je veux vous poser comme question : Êtes-vous d'accord que,
tant qu'on ne sait pas c'est quoi, le panier de services, tant qu'on ne
sait pas c'est quoi, la contribution de l'usager, tant qu'on ne sait pas c'est
quoi, le coût total en fonction du panier de services, et tant qu'on ne sait
pas non plus combien on va donner pour chacun des profils ISO-SMAF, et tant qu'on ne sait pas l'argent qu'on va mettre
dans le système, on a beau être d'accord avec tous les grands principes du virage vers le maintien à
domicile, l'utilisation d'un système public, le paiement dans les
impôts… que c'est difficile de se prononcer
si, oui ou non, on doit aller de l'avant avec ce projet tant qu'on ne sait pas
ces éléments-là?
Si vous me dites oui,
ça va m'inquiéter. Qu'est-ce que vous en pensez?
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Depuis tantôt que vous me dites
que, si on ne sait pas ça, si on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va, ne
serait-ce que ce serait le minimum à savoir…
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Je comprends que, là, c'est une question politique, donc c'est
le politique qui va répondre.
Moi,
écoutez, je répète, il y a un certain nombre de bases fondamentales sur
lesquelles nous voulons regarder et nous
voulons nous assurer de l'orientation, mais c'est vrai que souvent… Je vais vous
dire que je vais revenir aux CPE puis
je comprends que l'hébergement, ce ne sera pas 7 $ par jour, je comprends
ça, là. Mais je vais vous dire que ça a été une préoccupation à ce moment-là, avant de vraiment établir le tout, que ça
allait devenir quelque chose de bureaucratique, de gros, que, sans perdre le contrôle… C'est vrai que
le diable est dans les détails, et nous sommes très préoccupés par les
questions que vous posez. Nous n'avons pas toutes les réponses parce qu'ils ne
le sont pas. Mais on pense que deux sur
trois, ce n'est pas pire. Le premier, sur la question du financement public,
pour nous, c'est une orientation fondamentale. Sur la gestion publique,
c'est quelque chose que, si on veut garder un contrôle sur les dépenses
éventuelles, c'est une très bonne affaire.
Mais,
les questions que vous soulevez, moi, aujourd'hui, tout ce que je peux dire, c'est
que ça se peut. Et, si c'est ça, oui, ça m'inquiète.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci.
M. Begley
(Jeff) : Si ce n'est pas ça, espérons que ce ne soit pas ça.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Merci beaucoup, M. le Président. MM. Crevier, Forcier, M. Begley, merci d'être
là.
Vous avez dit, M.
Begley : Pourquoi réinventer la roue? Alors, pourquoi créer une caisse,
pourquoi prendre 4,3 milliards de dollars confiés actuellement au ministère
de la Santé et des Services sociaux,
prendre le 4,3 milliards, le confier à RAMQ qui va devoir effectivement
prendre des fonctionnaires pour gérer ce système-là? Alors, pourquoi réinventer
la roue plutôt que peut-être attacher ce qui fonctionne moins bien, le faire
fonctionner mieux avec à la fois les CSSS, à
la fois avec les CLSC et faire en
sorte que les enveloppes au niveau
financier soient effectivement
attachées, totalement dédiées et s'assurer que les sommes d'argent sont
pour les personnes en situation de handicap, handicapées intellectuelles
et pour les personnes âgées pour le maintien à domicile?
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley (Jeff) : Mais, bien franchement, l'intérêt que je vois à la caisse, c'est qu'il
y aura là de l'argent dédié. Parce que ça fait des années que nous
constatons, tout le monde, que ces problèmes sont là. Puis tout le monde
dit : Oui, il faut régler ça. Moi, l'intérêt,
que je vois, d'une caisse, bien franchement, c'est de se dire que, là, je… Tout
ce que je comprends dans ce qui est proposé, c'est que, là, il y aura
des montants consacrés à la chose. Donc, c'est ça que je trouve intéressant.
Y
a-tu d'autres mécanismes possibles? Sûrement, sûrement. Mais c'est ça qui est l'intérêt
que je vois, en tout cas.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Alors, si les montants
sont réellement protégés, on n'est pas nécessairement obligé d'inventer une
caisse, avec tout ce que ça comprend
comme nouvelles infrastructures, nouveaux mécanismes. Et il y a un coût
attaché à ça aussi, financièrement, là, parce qu'il y a des gens qui
vont devoir faire la gestion de cette caisse-là, là. Parce que vous comprenez
qu'on sort l'argent, là. Alors, peut-être,
rapidement… Je pense que j'ai votre réponse, là, mais je voulais
seulement…
Le
Président (M. Bergman) : M. Begley.
M. Begley (Jeff) : Mais nous, nous n'avions
pas… Justement, on avait travaillé avec la CSN justement pour cette raison-là.
Nous autres, notre préoccupation, c'était vraiment une préoccupation terrain.
On n'avait pas creusé beaucoup. Mais, une fois qu'on a dit qu'il y a de l'argent
dédié là, s'il y a des meilleurs moyens, on n'est pas fermés à ça. La proposition, c'est de dire : Il y a
une caisse dédiée. Nous, ça nous sourit, mais, tu sais… Puis moi, je pense que, si ça avance, bien il va
falloir revenir puis se questionner sur ces préoccupations-là.
Mais, nous, tel quel, sur la question d'établir
une caisse dédiée, ça nous sourit.
• (15 h 50) •
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Merci beaucoup. Vous avez mentionné, M. Begley, qu'il faut
arrêter de couper dans le public. Est-ce que vous voyez beaucoup de ces
coupures actuellement? Moi aussi, je suis préoccupée. Ça se fait depuis plusieurs
années. Mais je pense que, si on veut
donner des services, des soins à domicile, il faut qu'il y ait les ressources humaines autant que financières pour être en
mesure d'offrir les services.
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
M. Begley (Jeff) : Mais c'est intéressant
que vous posez cette question-là.
Cette
semaine… au début de la semaine, il y
avait un article
qui a paru, qui a parlé de l'augmentation
fulgurante du nombre de cadres. Moi, je pense
qu'il y a moyen de regarder les affaires pour que justement
ça soit… Puis moi, je vais vous dire, je pense que c'est le résultat, en
partie en tout cas, de la loi n° 30. Les méga-institutions ont fait en
sorte que le médical, maintenant, dans les conseils d'administration, s'accapare
de beaucoup, beaucoup les budgets. Et pas parce qu'il n'y en a pas besoin. Je comprends les
besoins, mais n'empêche que tout ce qui a été social puis… c'est comme… pris une deuxième place parce que le social, un
conseil d'administration de mégastructures qui sont les CSSS, bien ils n'ont
pas le poids, à tort ou à raison. Mais moi,
je pense qu'à tort… Donc, bref, oui, moi, je… en réponse très directe à
votre question, oui, nous sommes préoccupés
par ça, nous constatons que… Puis ça se fait à… je ne dirai pas
«sournoisement», mais, tu sais, ce qu'on
fait, c'est qu'on s'organise pour ne plus embaucher. Donc, tranquillement, il y
a du monde qui prend leur retraite, mais, oups, il y a moins de
services. Tu sais, il n'y a pas de congédiement du monde, il n'y a pas mise à
pied du monde, règle générale. Mais tranquillement, tu sais, une personne prend
sa retraite, il change d'emploi, puis, woups, tout d'un coup, le service est
réduit.
Et je pense
que c'est pour ça qu'il y a une différence, que le ministre a parlé tantôt,
entre les régions. Il y a des régions où le service était plus jeune,
puis d'autres, où c'était moins jeune, puis ça donne ces résultats-là.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Vous avez mentionné à
quelques reprises qu'il fallait avoir les moyens. Vous avez mentionné
souvent le mot «moyens». C'est quoi, pour vous, les moyens?
Le Président (M. Bergman) :
M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Bien, moi,
justement, je pense qu'il faut le regarder globalement, mais je pense que les
moyens, dans un premier temps, c'est des moyens d'équipe. Donc, tous les
éléments de l'équipe contribuent.
Dans un
deuxième temps, il y a des moyens au niveau d'équipements. Souvent, les
personnes… soins domicile, ils ont
acheté la maison lorsqu'ils étaient jeunes, lorsqu'ils ont installé leur
famille, etc. Là, tout d'un coup, ils ont besoin des équipements que...
il n'y en avait plus, des rentes, des... tu sais...
Une voix : …
M. Begley
(Jeff) : Exactement. Donc,
ça, c'est des moyens. L'autre, évidemment, c'est des moyens... nombre suffisant de personnels et du personnel qui a
accès à des formations nécessaires pour la mise à jour continue. Parce
que c'est vrai, ce que disait notre... Je
parlais tantôt du témoignage qu'on a eu, notre congrès. Tu sais, la fille, elle
commençait au moment de vraiment… où
les personnes âgées devenaient le sujet du jour. Elle était emballée par... tu
sais, elle a pris son cours de
gérontologie. Mais c'est relativement nouveau. Donc, beaucoup de monde qui ont
besoin de formation justement, notamment au niveau des soins de domicile
et notamment avec les changements au niveau de la loi n° 90, qui était la
loi sur les actes réservés... donc : Qu'est-ce que je peux faire, qu'est-ce
que je ne peux pas faire?
Il y a
beaucoup, beaucoup de confusion, y compris dans le secteur public, pour le
monde qui fait des soins à domicile.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Juste un commentaire
avant de passer à ma collègue. Je suis tout à fait d'accord avec vous, ça
prend des programmes d'adaptation, des
programmes de rampes d'escalier, des programmes pour les baignoires, des
programmes de poignées de porte. Si on n'est pas capable de rester à la maison,
bien c'est bien de valeur, on a beau avoir tous les soins, ça ne sera pas
fonctionnel. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Bonjour, messieurs. On parle peu de la situation des
personnes handicapées. On en parle, on a eu quelques groupes, mais il y a une réalité lorsque vous parlez des
services d'aide à la vie quotidienne. Actuellement, on a les personnes handicapées qui reçoivent des
services grâce au chèque emploi-services, qui serait apparemment
maintenu, mais on a également parlé d'une participation financière non
seulement en fonction du revenu des personnes, mais en fonction de la fréquence
puis de l'intensité des services.
J'aimerais
vous entendre sur cette question-là, parce qu'à mon avis on ne peut pas parler
d'universalité lorsqu'on module en
fonction de ces handicaps. On sait que quelqu'un qui est lourdement handicapé
risque d'avoir besoin davantage de temps pour vaquer aux occupations
quotidiennes, pour accompagner dans les activités de la vie quotidienne que
quelqu'un qui a une perte d'autonomie plus légère. J'aimerais vous entendre sur
cette question-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
M. Begley
(Jeff) : Bien, vous savez, moi, avant d'arriver à l'exécutif de la
fédération, je travaillais comme intervenant dans un centre de crise. Puis, si
on ne regarde pas de façon globale, effectivement c'est clair qu'il y a des morceaux qui vont nous échapper là-dedans. Et moi,
je pense que ces préoccupations-là... Parce que, là, on est dans le très
pointu en termes d'application. L'orientation,
si on ne regarde pas global, c'est clair qu'il y a du monde qui vont
glisser en dessous de la chose.
Mais, dans l'application
très concrète, j'aimerais laisser plus M. Crevier adresser plus pointu la
question.
Le Président (M.
Bergman) : M. Crevier.
M. Crevier (Philippe) : …cette question-là, tout simplement, ce qu'il
serait le plus judicieux de faire, c'est de tout simplement dispenser et
d'offrir les services qui sont requis.
D'assujettir
la couverture de services en un critère financier ou à critère d'intensité, ça
nous éloigne de l'objectif, je pense,
qui est visé par l'introduction de cette assurance autonomie là. Si on regarde
les pays dans l'OCDE, la couverture de ce
type de services là est la plus grande, et la plus étendue possible, et la plus
accessible possible. On parvient à mieux contrôler les coûts globaux du système de santé justement parce qu'on
intervient au moment judicieux, non en fonction de critères qui sont périphériques à la question
centrale. Mais on détermine les services en fonction du besoin puis, ce
faisant, bien on fait de la prévention, on intervient au bon moment puis on
empêche un paquet de situations qui à terme génèrent des coûts.
Donc,
que ce soit pour ce type d'usagers là ou pour des personnes âgées en perte d'autonomie,
ce devrait être le critère clinique ou le critère des soins qui sont
requis qui détermine les services qui sont à dispenser, point.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Petite question. Tout à l'heure, un peu plus tôt
aujourd'hui, on avait la COPHAN qui nous disait : Peut-être qu'on
devrait, avant de penser à mettre ce programme d'assurance autonomie en oeuvre
au printemps prochain, le printemps 2014… on
a encore beaucoup de chemin à faire puis on devrait peut-être y aller un petit
peu plus doucement. Plutôt qu'accélérer
le rythme, on devrait prendre le temps de bien faire les choses, de ne pas se
lancer dans ce grand chantier là tête première parce qu'il risque d'y
avoir des ratés importants. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Le Président (M.
Bergman) : M. Begley.
• (16 heures) •
M. Begley (Jeff) : Mais, écoutez, c'est clair que mieux que les choses sont planifiées,
mieux que ça fonctionne. Mais
moi, je vais vous dire la crainte que j'aurai, et je suis toujours sur les
objectifs de base, c'est que, si ça tombe aux calendes grecques, les objectifs qu'on dit
poursuivre là-dedans et que… des objectifs qui sont intéressants, il y a urgence.
Nous,
nous pensons qu'il y a une opportunité d'agir avant que la situation devienne
catastrophique. Puis je ne veux pas
être démagogique, mais je pense que, si on n'adresse pas la chose rapidement,
la situation va devenir catastrophique, avec le nombre de personnes
âgées qui vont nécessiter des soins, que ce soit domicile, CHSLD ou dans les
hôpitaux.
Donc,
si on retarde… puis je ne suis pas dans le pointu bureaucratique de comment l'appliquer,
mais, si on retarde l'orientation qui est voulue là, moi, je suis très
préoccupé qu'on n'arrivera plus jamais à rattraper le retard qu'on a accumulé
depuis un certain temps. Donc, je vais vous dire que... Puis, comme j'ai dit, il
y a des détails qu'on ne connaît pas, mais, sur les questions des orientations,
il y a urgence, à notre avis, urgence.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Begley, M. Crevier, M.
Forcier, merci d'être avec nous ici aujourd'hui, merci pour partager votre expertise avec nous.
Et
je demande les gens de la Conférence des tables régionales et de
concertation des aînés du Québec pour prendre la place à la table et je
suspends pour quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à
16 h 1)
(Reprise
à 16 h 4)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on reçoit maintenant
la Conférence des tables régionales de
concertation des aînés du Québec. Bienvenue. Pour fins d'enregistrement,
donnez-nous vos noms, vos titres et vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation. Encore bienvenue à l'Assemblée nationale.
Conférence des tables régionales de
concertation des aînés du Québec
M. Quintin (Claude) : D'accord. Merci. Alors, mon nom est Claude Quintin, je suis
président de la Conférence des tables. Je suis accompagné de Lorraine
Chartier, qui est notre coordonnatrice.
Les
tables de concertation ont été fondées en 1999 pour être des tables temporaires
pour l'année internationale des aînés, mais elles sont devenues
permanentes, et, au fil des dernières années, on leur a donné un rôle de plus
en plus important. Et, dans les derniers protocoles, entre autres,
dans la politique sur le vieillissement, on en a fait des
interlocuteurs privilégiés en région et des
partenaires aussi avec les CRE et les agences dans les ententes spécifiques sur
les aînés. Donc, les tables régionales ont quand même un rôle à jouer important
dans la concertation au niveau régional puis ce qui regroupe toutes les associations sur une base régionale. Et la
Conférence des tables, on représente les tables à toutes les autres instances, c'est-à-dire tous les groupes
qui oeuvrent dans les groupes d'aînés. Donc, on se rencontre, par exemple, dans un organisme qui s'appelle le G15, qui est un regroupement des
groupes d'aînés, et c'est dans notre rôle également de transmettre au ministre
des avis susceptibles d'améliorer la qualité de vie des aînés.
Alors, c'est dans le
cadre de ce mandat-là qu'on est ici.
Rapidement.
Je pense que, si on fait les études le moindrement sérieuses, on va tous
arriver à la même conclusion, c'est
que l'assurance autonomie est importante, et il faut la faire rapidement et
maintenant. Maintenant, il faut que ce soit quand même un exercice qui va être équitable pour tous et qui va donner
accès à des soins selon les moyens et
selon les besoins, alors. Et c'est là
qu'arrive le problème. C'est qu'il
y a dans ça beaucoup
de problèmes qui sont de nature politique, d'autres
qui sont de nature économique.
Alors,
nous, on est bien d'accord pour réorganiser
le système de santé. Je pense qu'il y a déjà beaucoup de travail qui se fait par en arrière, même si on en entend
moins parler. Mais il y a beaucoup de choses qui sont déjà en route.
Quand on regarde l'AQESSS, par exemple, qui
ont déjà mis sur pied des programmes de formation, on regarde qu'est-ce
qui se fait dans les agences, on regarde les EESAD qui commencent déjà à donner
un certain nombre de services d'AVQ, alors il
y a beaucoup de choses qui se font. Alors, on a quand même des interrogations.
L'interrogation, c'est clair que c'est le financement. Dans notre idée à
nous, on serait mieux d'avoir une caisse à part. Maintenant, la question des
coûts de financement, les coûts de comment la gérer, ça dépend comment
qu'on s'organise au niveau… Il y a déjà du monde qui travaille en gestion dans
tous les établissements. Alors, dépendant d'où vient l'argent et comment il va
être géré, qu'il y ait des gens qui gèrent à un endroit ou à un autre, ce n'est
pas évident que ça va changer beaucoup de choses.
Maintenant,
il y a des décisions politiques à prendre dans ça qui sont des décisions, à
notre avis, importantes. Pour l'instant,
c'est difficile de les prendre parce qu'on n'a pas eu de… on n'a pas de
chiffre. On est des bénévoles. Alors, les économistes retraités, il n'y
en a pas des douzaines. Puis on n'a pas les chiffres pour évaluer tout ce qu'on
aurait pu évaluer. Donc, il y a beaucoup de
questions que vous avez posées tout à l'heure que je n'aurais pas pu vous
donner de réponses parce qu'on ne les
a pas, ces chiffres-là. Par contre, il y a des choses qu'on sait. Par exemple,
on sait qu'actuellement il y a beaucoup de monde qui donne des services.
Des auxiliaires familiales, il y en a autour de 5 000 actuellement qui
sont dans les CSSS. Et est-ce qu'on les garde ou est-ce qu'on les envoie dans
les EESAD? Il y a une question. On sait qu'il
y a une question de salaire qui est importante. Si on enlève ces personnes-là,
on les envoie dans les EESAD, ça veut
dire qu'on a une diminution drastique de salaires. Ce sont surtout des femmes
qui ont besoin de travailler. C'est évident qu'ils ont plus de stabilité quand ils travaillent pour un CSSS que
quand ils travaillent pour une EESAD, où souvent on n'arrive pas à leur donner un nombre suffisant d'heures
pour que ce soit rentable pour quelqu'un qui est monoparental ou qui
veut élever une famille, par exemple.
Donc,
il y a des problèmes à ce niveau-là qu'il va falloir prendre le temps de
regarder, parce que normalement on ne devrait pas remplacer des emplois
stables et décemment rémunérés du secteur public par des emplois qui sont un
peu sous-payés en économie sociale.
L'autre
point. Actuellement, il y a beaucoup de services qui sont donnés dans les CSSS
et qui sont des services gratuits,
alors que les services qui sont donnés par les EESAD ne sont pas toujours
gratuits. Il y a une partie qui est payée par le PEFSAD, mais les gens
ont quand même de l'argent à donner. Alors, il y a une… je dirais, un arrimage
à faire. Il y a une péréquation à faire là-dedans qui n'est pas facile à faire.
Puis pour l'instant on n'a pas les chiffres qu'il faut pour faire ça. J'espère que c'est des développements qui ont été pensés.
C'est un fait que les EESAD, depuis quelques années… en tout cas, à mon avis à moi, là, dans les cinq, six dernières
années que je les regarde aller, ils sont sous-financés. Et là on arrive
avec un problème. On dit que ça va prendre beaucoup plus de monde, et ça va
prendre la même chose aussi au niveau des
CSSS, là. Si vous dites : Des gestionnaires de cas, ça va en prendre plus,
il va y avoir plus d'aînés, ça va prendre plus de monde aussi pour
évaluer les besoins des gens. Alors, forcément, il va y avoir besoin de faire
de l'embauche de personnel ou de la formation de personnel et du contrôle de
qualité, mais il faut le faire aussi dans les EESAD.
Actuellement, là, un des problèmes des EESAD, c'est de garder leur monde. Puis
l'autre problème, c'est d'arriver à
les former puis d'arriver à contrôler la qualité. Alors, il ne faut pas que… Il
faut que ça soit les organismes qui ont les reins un peu solides. Et on ne doit pas permettre qu'il y en ait des
milliers de petites qui partent un peu partout. Il faut quand même une
masse critique pour arriver à faire ça, c'est-à-dire avoir un service de
recrutement, de formation et d'évaluation de la qualité. Alors, je pense que c'est
important qu'il faut travailler là-dessus.
Maintenant, je le sais, qu'il y a des
EESAD qui font déjà beaucoup d'efforts dans ce sens-là. Il y en a d'autres
qui se font de l'autre côté aussi. Alors, il
va vraiment falloir évaluer ça, également la question des proches aidants. Il
ne faut pas oublier que les aidants naturels, actuellement c'est
majoritairement des femmes, puis en plus la plupart sont déjà des personnes
âgées. Donc, il faut que ça rentre dans la balance aussi parce que ces gens-là
aussi ont besoin d'un peu d'air là-dedans.
• (16 h 10) •
Alors, je pense qu'il
se passe beaucoup de choses actuellement, mais on n'est pas nécessairement toujours
au courant. Pour une personne, ouvrir sa
porte à quelqu'un qui vient faire son ménage, c'est une chose. Si
en plus il ouvre la porte à une deuxième personne qui vient lui donner
son bain, c'est une autre chose. Puis, si en plus, avec un taux de roulement comme on a actuellement dans les EESAD, cette personne-là change assez souvent, c'est un autre problème. Alors, ces personnes-là, pour rester à la maison,
elles ont quand même besoin d'un minimum de stabilité, un minimum d'intimité et elles ont besoin de connaître les
personnes qui viennent les rencontrer. Il ne faut pas oublier que ces
personnes-là qui viennent les rencontrer, là, ce n'est pas juste des faiseux de
ménage, là, il faut que ce soient des gens qui voient également qu'est-ce qui se passe. Ça peut être des gens qui sont
capables de dire, par exemple, au CSSS : Cette personne-là a besoin d'aide, là, il y a d'autres genres de
problème. Mais, pour que les gens arrivent à faire ça, il faut les former
pour ça, il faut que ce soit… Si c'est pour être des sentinelles, il faut qu'ils
soient formés pour être des sentinelles.
Alors,
je pense qu'il y a beaucoup de volets dans ça qui sont importants, puis il va
falloir prendre le temps de les regarder comme il faut.
Un
autre point dont on ne parle absolument pas, en tout cas je n'en ai pas entendu
parler dans ce qui s'est passé ici puis
que j'ai eu connaissance dans les derniers jours, c'est le refus de services.
On parle avec des aînés, là. J'ai eu ma belle-mère à la maison, moi,
pendant 21 ans, puis, quand elle est partie, elle avait 93 ans. Elle est morte
à 95. Bien, quand elle décidait de ne pas se
laver, il avait beau venir quelqu'un du CSSS pour la laver, il ne la lavait
pas, là. Alors, la personne, à un
moment donné, qui donne des soins, que ce soient des piqûres de B12, que ce
soit n'importe quoi, il passe à la maison, il est pris entre deux choses, là : Mon devoir me dit de le faire;
puis le droit au libre arbitre. Elle a le droit de dire : Non, je n'en veux pas, même si on sait que, si elle ne le
prend pas, elle va arriver dans le système dans deux semaines puis elle
va être très mal-en-point, puis il va falloir recommencer à zéro.
Alors,
il y a des points. On ne discutera pas de ça ici aujourd'hui, là, mais c'est
quand même des points que je veux qu'on prenne le temps de regarder à un
moment donné.
Un
dernier point, c'est le déploiement équitable des services. C'est clair qu'il y
a des régions qui… Ça, c'est à cause
des choix des agences. Les agences ne font pas toutes les mêmes choix face aux
budgets qui sont disponibles et…
Une voix :
…
M. Quintin
(Claude) : Oui?
Le Président (M.
Bergman) : Vous avez une minute.
M. Quintin
(Claude) : D'accord. Alors, les choix des agences font en sorte qu'il
y a des endroits où il y a beaucoup de services
qui sont donnés puis qui ne le sont pas ailleurs ou qui le sont ailleurs, mais
qu'il faut payer pour ou que c'est
des services à moitié donnés ou donnés avec un temps très limité, qui fait qu'on
n'a pas le temps. Pour certaines personnes
qui ont des handicaps, entre autres, on ne peut pas donner un bain
nécessairement dans 60 minutes, là. Il y a des choses à faire. Il faut
prendre le temps d'arriver, il faut prendre le temps de parler aux gens.
Alors,
en gros, c'est ce qu'on voulait vous dire. On ne veut pas minimiser l'importance
des défis à rencontrer, là. On dérange puis on réorganise plusieurs
activités, mais il faut qu'on reconnaisse qu'il y a quand même des choses qui ont changé. Il y a eu des ententes
interprofessionnelles. Il y a des choses qui avancent, là. Ça avance. Ça
n'avance pas vite, mais ça avance. Et il
faut que ça continue. Mais il va falloir donner un tour de roue un peu plus
rapide parce que le nombre de personnes aînées va grossir plus vite que
les services qu'on met dans le système. Voilà.
Le Président (M.
Bergman) : Merci, M. Quintin. Alors, pour le bloc du
gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Bien, merci beaucoup de votre mémoire, merci
beaucoup d'être là, merci beaucoup de collaborer au quotidien avec le
Secrétariat des aînés et le ministère pour être la voix des personnes âgées, et
je pense que vous le faites très bien. Et on est très, très heureux de pouvoir
avoir cette collaboration-là avec vous.
Je vais aborder un
certain nombre de points. D'abord, dans votre présentation, lorsque vous nous
parlez de l'urgence, j'en suis tout à fait.
On a fait des petits pas dans le passé. Il faut faire un grand pas, il faut
faire un grand saut, et c'est ce que
le livre blanc propose. Je vous rassure tout de suite, il n'est pas question de
transférer les auxiliaires familiales dans les entreprises d'économie
sociale. Les auxiliaires familiales vont rester dans les centres de santé et de
services sociaux. Il est plutôt question d'améliorer les conditions de travail
des travailleurs des entreprises d'économie sociale et surtout de s'assurer qu'ils
aient une qualité de leur formation.
Alors, le parti pris
de l'assurance autonomie, c'est de retrouver le financement public et de
retrouver la gestion publique du système de
façon à ce qu'on puisse s'assurer de la qualité des prestataires. Alors, je ne
sais pas si cette mise au point vous rassure, là, sur l'égalité des
services dans les différents prestataires, mais nous, nous voulons qu'il y ait
les mêmes standards de qualité qui s'appliquent.
M.
Quintin (Claude) : Bien,
moi, c'est… on prend juste qu'est-ce qu'on entend, là. Moi, l'information là-dessus,
on ne peut pas dire qu'on en a beaucoup.
On sait des choses parce qu'on parle
avec les gens de l'AQUESSS, on parle avec
les gens des EESAD, on parle avec… on parle un peu partout. Mais, pour dire, le
modèle structuré que vous avez dans votre tête à vous puis que vous
expliquez facilement, on n'a pas tous les volets de ça, nous autres, là, ça fait
qu'il y a des fois où on a des questions, puis : Ah, regarde donc ça.
Alors, il faut…
M.
Hébert : …important
d'avoir cette consultation-là pour être capables d'avoir un échange.
M. Quintin
(Claude) : Bien, parce que,
pour nous, ce qui est important, c'est d'avoir des réponses, parce que
les tables, quand les gens… Comme là, la semaine prochaine, on est cinq jours
en réunion à Québec. On fait venir les gens
des ministères, on fait venir les gens pour nous expliquer les dossiers, qu'est-ce
qu'ils sont, où ils sont rendus, pour qu'on puisse voir plus facilement
qu'est-ce que les gens peuvent faire, qu'est-ce qu'ils peuvent apporter de
positif dans ces démarches-là. Alors, c'est important de le savoir. En tout
cas, j'apprécie ce que vous me dites là, là.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Il y a un
point que vous soulevez au niveau de la gratuité des services.
Il faut réaliser que l'État actuellement finance
seulement 15 % des services dans les soins à domicile. 85 %, ça vient soit des proches aidants ou encore de la
poche des personnes. Nous voulons faire passer ça, avec l'investissement
de 500 millions qu'on s'est engagé, à
40 %. L'objectif, ce n'est pas 100 %. L'objectif, c'est de 40 %,
pour faire en sorte que ce que les
gens paient de leurs poches ou en temps de service de leurs proches aidants
diminue d'autant. C'est ça, l'objectif,
là, l'objectif. Et je voyais… dans votre mémoire, vous disiez : Bien, on
va prendre l'autre 60 %. L'objectif n'est pas de se rendre à 100 %, l'objectif est d'au moins en faire un
bout qui est plus important que le bout qu'on fait actuellement, donc d'aller jusqu'à 40 %. Et, là où il y a
une certaine iniquité actuellement, c'est que, le 60 %, il faut voir
comment on le module. Est-ce que c'est 60 % pour tout le monde?
Est-ce qu'on donne 40 % à tout le monde ou est-ce que, les gens qui ont moins de revenus, qui vivent avec le
supplément de revenu garanti, par exemple, on ne pourrait pas leur
donner, à eux autres, 50 %, 60 %
pour qu'ils aient plus de services? Et c'est cette modulation-là selon le
revenu qui est proposée dans le livre blanc et qui permettrait de
pouvoir avoir une certaine équité.
Dans l'autre
partie, hein, vous savez, la Sun Life estime, là, que ce 85 %, ça
représente entre 2 000 $ et 5 000 $ par mois. C'est
quand même de l'argent, là, que des gens en perte d'autonomie sont obligés, en
nature ou en espèces, de demander à leurs proches aidants ou à des gens du
secteur privé.
Alors, ce qu'on
souhaite faire, c'est d'avoir une certaine équité. Est-ce que c'est des
éléments que vous considérez comme étant intéressants?
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : Il y a plein de
points dans ça. Le premier, c'est que nous, en tout cas, on pense que
les gens ne devraient jamais avoir à choisir entre leurs services, et leurs
pilules, et leur bouffe. Et on voit que dans le cas des médicaments… en tout cas, moi, j'ai connaissance de beaucoup de
monde qui se privent de leurs médicaments pour pouvoir manger. Puis on n'embarquera pas dans la bagarre avec le
fédéral, pourquoi que le fédéral, ils sont niaiseux puis qu'ils ne
donnent pas le supplément de revenu garanti à tout le monde qui le mérite. Mais
c'est une autre histoire. Mais elle est là
pareil. Il reste qu'il y a des aînés vulnérables qui souffrent de ça à tous les
jours et que c'est le gouvernement qui
est supposé les protéger qui les colle à tous les jours. C'est une autre
histoire. Mais ça, je pense que c'est important.
La deuxième affaire, c'est que moi, je trouve
que, les proches aidants, même maintenant, même avec l'aide qu'on essaie de
leur apporter, ça leur coûte énormément cher d'avoir quelqu'un qui a des problèmes
et dont ils sont proches. Puis je peux vous
le dire par expérience puis je peux vous le dire par ce que je vois autour de
moi. Alors, il va falloir aussi aller
plus loin que ça. La protection du travail, par exemple, c'est une chose; les
aider à se retrouver un travail. Il y a beaucoup de façons de faire.
Mais en fait tout ce que je vous dis aujourd'hui, là, c'est une question d'équilibre,
là. Je pense qu'on ne veut pas, personne, aller sur un côté ou aller sur l'autre.
On dit : C'est où, l'équilibre, là-dedans, là? Il faut trouver un
équilibre…
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M. Quintin (Claude) : …un équilibre
qu'on est capables de payer, mais dont les gens ont vraiment besoin.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
• (16 h 20) •
M.
Hébert : Tout à
fait d'accord avec vous. Et c'est pour ça qu'on voudrait moduler l'allocation
pour que les gens les moins bien nantis
puissent recevoir plus que les gens mieux nantis et de façon à ce qu'ils n'aient
pas besoin de faire ces choix que vous soulevez et qui sont des choix
cruels, je dirais.
Concernant les proches aidants, je suis tout à
fait d'accord avec vous, il y a un coût, il y a un coût même à l'économie du
Québec, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de proches aidants qui quittent un
emploi. C'est souvent des femmes qui
quittent un emploi pour devenir proches aidants. Et on estime que c'est
100 millions par année, l'économie du Québec qui est perdue par
cette perte des femmes qui travaillent sur le marché du travail.
Alors, c'est sûr que, si on donne plus
de services, on va permettre aux femmes de rester sur le marché du
travail. Et ces services-là, si on donne plus de services, ils sont faits
souvent par des entreprises d'économie sociale, des établissements du secteur public qui engagent des femmes. Alors, non
seulement on permet aux femmes de rester sur le marché du travail, mais on donne des opportunités aux femmes qui ne le
sont pas de pouvoir réintégrer le marché du travail. Alors, il y a là un
élément important pour les proches aidants.
J'aimerais
vous entendre, M. Quintin, un peu plus sur le refus de services. C'est vrai,
personne ne l'a abordé, on ne l'aborde
pas dans le livre blanc. J'aimerais vous entendre sur quelles sont les
stratégies qu'on doit avoir par rapport aux personnes qui refusent les
services qui seraient nécessaires.
M. Quintin
(Claude) : Moi, je pense, c'est une question…
Le Président (M.
Bergman) : M. Quintin.
M. Quintin (Claude) : …c'est une question… Dans ce cas-là, c'est vraiment une question de
formation. Il y a des infirmières qui l'ont, puis d'autres qui ne l'ont
pas. Puis il y a des travailleurs sociaux qui l'ont, puis d'autres qui ne l'ont pas. Et ça a toujours été comme ça et ça
va continuer d'être comme ça. Moi, je sais que j'ai été appelé à l'hôpital
d'urgence parce que ma belle-mère menaçait les infirmières avec un couteau. Ce
n'était pas compliqué : elle, elle déjeunait
à 9 h 30 le matin; eux autres, ils mettaient le déjeuner là à
6 h 30 puis à 8 h 30 ils venaient le ramasser. Elle
ne voulait pas qu'ils le ramassent. Bien, c'était un couteau à beurre quand
même, là, mais…
Des voix :
…
M. Quintin (Claude) : …bon, tu sais… Alors, elle, elle ne comprenait rien là-dedans : il
faut l'enlever, c'est fini, l'heure est passée.
Bien, il y a une
question de psychologie là-dedans aussi. Il y a des gens qui étaient capables
de régler ça. Ils prenaient la petite assiette, la mettaient de côté avec ses
affaires puis ils mettaient une napkin par-dessus, puis elle était très
contente. Alors, il y a quand même une capacité de réagir à des choses comme
ça.
Quand
c'est à domicile, c'est plus difficile parce que, là, tu es rendu avec une
personne et tu es en intimité avec la personne.
Et il n'y a pas grand-chose à faire, sauf que de prendre le temps de la
persuader puis de placoter avec. Mais ça, pour ça, il ne faut pas que tu sois «timé», que tu rentres pour lui
donner une piqûre, c'est 4 min 30 s ou tu rentres pour lui donner un bain, puis c'est tant de minutes.
Puis, tu sais, c'est très variable, là. Mais je pense qu'il faut prendre le
temps de le regarder parce que c'est un
problème. Il y a des gens qui le demandent, puis, quand on est rendu là pour le
donner, ils n'en veulent plus ou il y a des
gens que… On le sait par le CSS, qu'il faut aller faire ça comme service à
cette personne-là parce que c'est dans son plan de soins. On arrive là,
elle ne veut rien savoir.
Alors, ça reste un
problème, je pense qu'il faut prendre le temps de le regarder. C'est les gens
qui donnent les services qui vivent avec.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous soulevez avec raison le fait que plusieurs personnes différentes viennent
dans le domicile. Il y a un certain nombre
de pays… l'exemple de la France, par exemple, où on a, pour limiter le nombre
de personnes… on a créé des
auxiliaires à la vie sociale, qui combinent en fait les compétences d'un
préposé et d'une auxiliaire familiale, et des gens, donc, qui vont faire de multiples tâches et qui sont formés
pour faire ces multiples tâches là de façon à passer plus de temps,
limiter les déplacements et limiter aussi le nombre de personnes. Qu'est-ce que
vous pensez de…
M. Quintin (Claude) : Mais ça, ce serait la solution idéale. Maintenant, il faut tenir compte
du fait que les gens qui travaillent…
Je pense aux femmes de ménage, par exemple. Ces gens-là, la plupart ont des
enfants aussi. Donc, il y en a un qui a la coqueluche, l'autre ne peut
pas être admis à la garderie, l'autre a ci, l'autre a ça. Donc, il y a toujours
des changements qui se font. L'autre point, c'est qu'on n'est pas capable de
leur donner un nombre minimal d'heures par semaine.
Une famille monoparentale, là, tu lui donnes une semaine 35 heures, la
semaine d'après il n'y en a rien que 20, il faut qu'elle mange pareil,
puis son épicerie lui coûte le même prix.
Alors, il faut s'organiser.
Il faut avoir, au niveau de l'organisation, une masse critique qui fait qu'on
est capable de dealer avec des choses comme ça. Et actuellement c'est ça qu'il
faut mettre en place, c'est avec ça qu'il faut
travailler. Il y en a qui le font. En tout cas, moi, j'ai vu des EESAD
fonctionner avec bonheur dans ça parce qu'il y a des personnes là qui l'ont,
puis ils arrivent à faire toutes sortes de choses. Mais il faut vraiment
innover là-dedans, là. Il faut arrêter de regarder toujours de la même manière
parce que ce n'est pas toujours les solutions gagnantes, là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous soulevez un point extrêmement important qui est le déploiement uniforme,
équitable des services. Il y a des agences
et des CSSS qui font des choix différents. Le but de l'assurance autonomie, c'est
de rendre les choses équitables et ne pas être à la merci des choix des
agences et des CSSS, mais faire en sorte que l'allocation soit attribuée à la personne et que ce soit la
personne, l'usager, la personne âgée, la personne handicapée qui fait les
choix et non pas l'agence ou le centre de santé et de services sociaux.
Alors, je pense que ça, c'est une partie qui
répond à vos attentes, là, par rapport à l'iniquité régionale.
M.
Quintin (Claude) :
…attentes, sauf qu'il reste un problème qu'on n'a pas parlé bien, bien
là-dedans non plus, c'est la question de la mobilité.
Moi, chez nous, en Estrie, tu sais, les villages…
là, il y a des villages où qu'ils se sont organisés eux-mêmes, là, pour
avoir un transport, par exemple, pour l'hôpital ou pour faire des soins ou c'est
des bénévoles qui le font. On se fait taper
sur les doigts par le ministère des Transports parce que c'est illégal, la
compagnie d'assurance nous engueule et...
Alors, il faut quand même organiser quelque chose, mais il faut l'organiser sur
le bras, là. C'est le vécu de tous les jours
que je vous parle, là. Mais il faut être capable de le faire. Mais à long
terme il faudrait peut-être
trouver... Moi, je trouve actuellement que les gens sont très
imaginatifs et très débrouillards, mais il reste qu'à long terme il faudrait
avoir des solutions peut-être à long terme plus sécures et mieux organisées que
celles qu'on a actuellement.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Dans votre mémoire, vous vous inquiétez un petit peu des tableaux comparatifs des courbes, là, une courbe avec le statu quo, qui arrive à 12
milliards en 2027‑2028; une courbe avec l'assurance autonomie à 11,3
milliards. Il y a une économie, entre guillemets, qui est réalisée, de 1,5
milliard.
Vous
dites : Les économies vont venir d'où? C'est de l'argent
de moins à mettre et non pas de l'argent à retirer.
M. Quintin (Claude) : Oui, mais...
M.
Hébert : Vous
comprenez, là, vous comprenez. On se comprend bien?
M. Quintin (Claude) : Je ne m'inquiète
pas qu'on fasse des économies...
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M.
Hébert : Hein?
M. Quintin (Claude) : Je ne m'inquiète
pas qu'on fasse des économies
M.
Hébert : Pardon?
M. Quintin (Claude) : Je ne m'inquiète
pas qu'on fasse des économies, pas du tout.
M.
Hébert : Non, O.K.,
mais...
M. Quintin (Claude) : Ce qui m'inquiète,
c'est de dire : Avec la situation actuelle, avec nos connaissances à nous
actuelles, à quelle place on va économiser là-dedans, là, c'est-à-dire où qu'on
va dépenser moins?
M.
Hébert : Mais on
va, au lieu d'avoir à construire des lits de CHSLD, parce que c'est la seule
réponse actuellement lorsqu'on a atteint des limites du soutien à domicile, des
limites qui sont rapidement atteintes… bien là on va se concentrer sur les
soins à domicile, ce qui va diminuer la pression sur la construction des CHSLD,
et c'est là qu'on fait des économies.
On fait des économies sur la façon dont on donne
les services. On les donne à domicile plutôt qu'on les donne en CHSLD. On estime, là, que ça coûte 90 000 $ par année, une place en CHSLD.
Déjà, à 40 000 $ par année en soins à domicile, on a donné
beaucoup de services, on est dans les soins intensifs à domicile, là. Alors,
vous voyez qu'il y a pour la même perte d'autonomie une amélioration sur le plan financier, mais en
même temps on donne les
services là où la personne souhaite les recevoir, c'est-à-dire chez eux, plutôt
que de l'obliger, souvent de la contraindre, malheureusement, de divorcer d'avec
son conjoint pour aller en CHSLD.
M. Quintin (Claude) : Ça fait partie
de la vie.
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin (Claude) : Ça va. Moi, je
n'ai pas rien à rajouter là-dessus, je suis...
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Je vais
passer la parole à mes collègues parce que, moi, ça fait le tour des questions
que je voulais vous poser.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci,
M. le Président. Bonjour, M. Quintin,
bonjour, Mme Chartier. Ça me fait plaisir de vous voir. Et, M.
Quintin, ça me fait plaisir de vous réentendre, et je constate à chaque fois
que j'ai l'occasion de vous entendre parler que vous êtes toujours
aussi intéressant. Je trouve que vous êtes quelqu'un de très terre à
terre, et vous nous ramenez constamment à l'essence même des choses
importantes.
Premièrement, je veux vous féliciter pour le
travail que vous faites. Et je sais que les tables de concertation régionales pour les aînés et votre conférence,
vous êtes vraiment des personnes engagées dans la cause des personnes âgées. Et, dans le tout début de votre mémoire, il y a quelque chose qui m'a frappée, que vous prenez le temps de nous souligner en
parlant de «lorsqu'une personne âgée ouvre la porte de son logis à une personne
étrangère, ce n'est jamais facile». Mais c'est
aussi un autre aspect dont on a peut-être moins parlé et qui, moi, m'apparaît extrêmement important, c'est la prise de
conscience de cette personne-là qu'elle est dans une étape vers la perte de son
autonomie, et ça, c'est extrêmement important.
Et de toute façon ce que je veux vous dire, c'est : Ce qui
ressort de votre mémoire, c'est l'aspect très humain. Vous, vous avez la
préoccupation de mettre la personne au coeur de tout ce qui doit être fait, et
je trouve que c'est un message que vous nous
livrez aujourd'hui, à nous, au gouvernement, aux oppositions,
en fait à tous les parlementaires.
Et j'aurais une question un peu globale :
Comment on fait, M. Quintin, quand on doit déterminer, décider des lois, quand on est des parlementaires, pour nous assurer de toujours garder cette humanité, cette préoccupation de l'être humain derrière toutes les statistiques, et toutes les
structures, et toutes les ressources suffisantes ou insuffisantes? Comment on
fait pour s'assurer de garder ça, de garder notre humanité?
• (16 h 30) •
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin (Claude) : Juste une
question, juste une : Si c'était ma mère? Puis vous allez avoir la réponse.
Parce que c'est vraiment ça, la question qu'il faut se poser. On peut
prendre des décisions pour les autres, mais, quand ça nous touche, nous personnellement, on a une
meilleure idée de l'humanité des décisions qu'il y a à prendre. C'est
toujours ce que moi, j'ai fait, puis c'est toujours ce qu'on a fait, puis je
pense que c'est une bonne ligne.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. Merci. Merci, M. Quintin. Dans votre mémoire, vous avez aussi une grande
préoccupation de cette période de transition
entre des soins qui sont actuellement donnés dans des milieux très, très
encadrés et des soins qui seront donnés
à domicile et vous parlez de ce réflexe, parfois normal aussi, d'une forme de
résistance au changement.
Pouvez-vous
nous parler un peu plus de votre vision de cette espèce de transition : Comment
on va réussir cette transition? Et quels sont, selon vous, là, les
principaux défis qu'on aura à surmonter?
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin (Claude) : …ça dans le
sens que, quand on parle avec les gens qui travaillent dans les EESAD, c'est des gens dévoués, puis ils sont prêts. Ils
sont dévoués à fond de train puis ils sont prêts à tout faire pour faire
leur travail. Ils sont prêts à le faire et souvent ils manquent de ressources.
Et le plus gros problème qu'ils ont, c'est qu'ils manquent de ressources. Puis
ils sont prêts à embarquer tout de suite. Puis ça a été la même chose avec les
autres organisations, quand on a rencontré l'AQESSS
pour discuter de tous ces problèmes-là. Ils sont intéressés à participer
à n'importe quel groupe de discussion. Ils rencontrent les gens, ils se parlent
beaucoup.
Au niveau des
agences, il y a beaucoup de travail qui se fait. Moi, je suis plus au courant
chez nous parce que je suis au forum de la population pour la santé et
les services sociaux. On l'a gardé chez nous, le forum. Et ça a un rôle intéressant
parce qu'on est au courant de tout ce qui se passe. Puis on est toujours
surpris de voir tout ce qui se fait. Mais ça
ne se sait pas. Le problème au Québec, c'est : de la publicité positive
sur le système de santé, ça n'existe pas, il y a juste des mauvaises nouvelles. Alors, il va falloir se réorganiser
autrement. Ça peut faire partie de la game aussi de décider qu'on est
positif demain matin. Puis c'est la même chose face aux aînés puis c'est la
même chose face au bénévolat. Moi, je leur
dis : Demain matin, tous les bénévoles sont en grève. Ils s'apercevraient
qu'est-ce que ça fait dans une société, un paquet de bénévoles qui sont
en grève. Mais pourquoi est-ce qu'il faudrait faire ça? Les gens ne nous voient
plus, alors que finalement c'est une force économique extrêmement importante qu'on
a actuellement avec le bénévolat qu'on fait. Puis c'est la même chose avec l'implication
des gens aussi, mais ce n'est comme pas vu.
Alors, dans
le système de santé, c'est la même chose. Moi, je n'ai vu que des gens engagés,
dans les EESAD, que des gens qui sont
prêts à faire leur job et à le faire comme il faut. Mais les petites
organisations, bien elles manquent de personnel
pour faire de l'engagement, pour faire de la formation et surtout pour faire du
contrôle de qualité, parce que le contrôle
de qualité est extrêmement important. Ce n'est pas tout d'envoyer quelqu'un à
la maison, il faut que le travail qu'il fait soit humain puis que ce
soit une personne qui est valable pour la personne qui est là, parce que c'est
souvent la seule personne qu'elle rencontre dans sa semaine.
Et ce
serait : tant qu'à envoyer quelqu'un, autant envoyer quelqu'un qui est
capable de faire le travail comme il faut.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx :
0ui. Et, puisque vous parlez, justement, d'assurer la qualité des services,
selon vous, qui serait le mieux
placé? Et comment? Quels sont les meilleurs moyens pour assurer cette qualité
de services? S'il y a une évolution dans la prestation de services, s'il
y a des nouveaux prestataires, comment on va s'assurer de la qualité des soins?
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : Je pense que vous avez une bonne question puis je n'ai pas
de réponse automatique là-dessus.
Mais moi, je
pense qu'on n'a pas le choix. Et il faut que tout le monde se parle, il faut
que ce soit un travail collectif. C'est une responsabilité collective qu'on
a devant nous autres, et il faudrait que ce soit un travail collectif. Si tout
le monde met l'épaule à la roue, on va y arriver.
Maintenant,
il y en a, des gens. Les gens actuellement qui seraient intéressés à faire ce
travail-là, c'est-à-dire de donner en même temps des AVQ puis des AVD,
ces personnes-là, actuellement elles ne vont pas donner leurs noms, là, dans
des EESAD, là, parce qu'elles disent : Ils font juste une partie du
travail, moi, je suis intéressé à travailler sur l'humain, mais eux autres, ils font le ménage, ça ne m'intéresse pas.
Peut-être que, si on commence à regarder autrement pour faire du recrutement, il y a beaucoup de
monde qui serait prêt à embarquer, puis rapidement en plus, là-dedans.
Mais pour ça il faut leur garantir un minimum, un salaire décent puis leur
garantir un travail qui est stable.
Et ça, si on est capable de faire ça, moi, je
pense qu'on vient de monter une grosse marche pour partir.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx :
J'ai une question d'un autre ordre. Hier, on a reçu des représentants de
personnes handicapées, qui nous ont
manifesté leur grande préoccupation de maintenir le chèque emploi-services. Ils
nous ont même mentionné que ça pourrait aussi être intéressant pour des
personnes âgées, éventuellement, qui en auraient les capacités, de gérer les
services à travers le chèque emploi-services. Vous qui êtes porte-parole des
personnes âgées, j'aimerais avoir votre point de vue là-dessus.
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : Ça, vous n'aurez
pas mon point de vue là-dessus parce que je ne me suis pas fait une idée
là-dessus. Je peux vous dire que je sais depuis longtemps que les gens qui sont
handicapés sont… ça en est d'autres qu'on ne voit pas, ça.
Mais, les systèmes qui sont en place actuellement
puis qui fonctionnent, là — pour
l'instant, c'est ça, la transition qu'on
veut faire, là — qu'on
garde ce qui marche, qui marche comme il faut, puis après ça on fera notre
transition tranquillement. Puis est-ce que c'est
possible de se dépêcher lentement, je ne le sais pas, ou d'aller lentement puis
de se presser? Il faut faire quelque
chose entre les deux. Je ne sais pas si on peut innover dans ce sens-là, là,
mais il y a des choses qui sont
urgentes à faire, mais, si on ne prend pas le temps de les faire comme il faut,
on est aussi bien de ne pas les faire.
Ça fait que c'est là qu'on est, là. C'est des
choix, puis ce n'est pas moi qui vais les prendre.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé
pour le bloc du gouvernement. Maintenant, pour le bloc de l'opposition
officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Je saisis votre
dernière phrase, je suis tout à fait d'accord avec vous. Et, quand on
fait une transformation, il faut avoir tous les éléments pour prendre la
décision.
Et vous avez
dit quelque chose d'intéressant tantôt, c'est : Les gens ne réalisent pas
que c'est quand même plus de 200 000 personnes au Québec qui, à
chaque année, reçoivent des services de soutien ou de maintien à domicile. Et souvent on parle… Moi, je suis dans le réseau de
la santé également, puis on parle des cas que ça a été mal. Puis on sait
que, si on veut faire avancer notre cause,
il faut venir critiquer puis sortir des arguments massue. Et, si vous saviez le
nombre de personnes qui sont bien traitées au Québec à tous les niveaux… On
parle dans les urgences, on parle dans les soins aigus, en CHSLD, les visites à domicile, le rôle des infirmières dans
les CLSC, les groupes de médecine de famille. Il y a énormément de gens
qui reçoivent des très, très bons soins. Puis le groupe avant vous avait fait
mention par rapport à quelques… quelques énoncés par rapport aux États-Unis où
c'est un système qui est complètement différent.
Je pense qu'il
faut être fiers, au Québec, du système qu'on a mis en place. Et, tout ce qui
peut être amélioré, on devrait l'améliorer,
dont, entre autres, les principes de garder les gens à domicile. Ça, pour nous,
c'est un principe qui est très, très
important. Et c'est une transformation qui a commencé il y a plusieurs années,
qui doit se continuer. Puis ça, on est tout à fait d'accord.
Un groupe qu'on
ne parle pas souvent, puis je vais l'aborder avec vous : les résidences
privées. Vous savez qu'on a à peu
près 40 000 personnes qui sont dans des CHSLD, 3 % de la population
des 65 ans et plus. Alors, on oublie souvent que les résidences privées,
là, c'est… je pense, c'est 104 000…
Une voix : 7 % à 8 %.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
…7 % à 8 %, mais c'est 104 000 personnes par année, là…
Une voix : …
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
…111 000 qui sont dans des résidences privées.
Moi,
je vais vous donner mon impression personnelle. Une des plus grandes
innovations qu'on a eues au cours des dernières années, c'est qu'on
avait des gens qui vivaient dans leurs maisons, qui voulaient rester dans leurs
maisons, mais à un moment donné ils n'étaient
plus capables, ne serait-ce que les repas, c'est très difficile, d'avoir la
sécurité puis également
d'éviter l'isolement. Et il y a plusieurs personnes qui volontairement — ce n'est pas obligatoire — volontairement ont décidé d'évoluer et d'aller vers des
résidences privées, et ces gens-là, en tout cas, moi, je suis convaincu,
réussissent à rester plus longtemps à domicile parce qu'il y a souvent une
moins grande perte d'autonomie.
Donc, quand on parle
d'une gamme de services, on a le domicile, on a le domicile avec aide, on a la
résidence privée, ressource intermédiaire, et puis également le CHSLD. C'est
quoi, votre position par rapport aux résidences privées?
Le Président (M.
Bergman) : M. Quintin.
M. Quintin (Claude) : Moi, j'ai travaillé plus au niveau des coopératives de solidarité pour
les personnes âgées.
On en a mis en place
chez nous, et ça se tient tout, ces dossiers-là, là. Quand on s'est chicanés
avec Solidarité rurale pour dire : On
aime ça que vous vous battiez pour garder les jeunes dans les villages, gardez
donc les vieux aussi… Et, tu vois, à
La Patrie, Notre-Dame-des-Bois, Chartierville, ils se sont mis ensemble,
ils ont fait une coop. Mais les gens qui vivent dans la coop, ils sont
dans leur collectivité, puis ils sont en très bonne santé actuellement, puis
ils vont vivre probablement plus longtemps que si on les avait envoyés à
Lac-Mégantic, ou à Thetford, ou encore à Sherbrooke. Alors, ça, je suis d'accord avec ça. Au niveau des résidences privées,
il faut quand même être capable de contrôler la qualité de ce qui se fait dans ces résidences-là. Il y en
a que je connais qui sont super. Mais il y a des articles… On était là
quand on a fait le règlement, on s'est battus là-dessus, donc je suis plus au
courant de ça. Mais on disait quelque part qu'il fallait organiser des activités puis il fallait faire… tu sais. Là, il y
a le livre vert. On est allés, la semaine passée, discuter du livre
vert. On a dit : Peut-être que les aînés, là, qui sont en résidence
privée… est-ce que l'exercice qu'ils font, c'est de les asseoir dans le lit, puis
de les rasseoir dans leur fauteuil, puis les emmener à la toilette, puis c'est
tout?
Il
y a une organisation à faire. Puis je pense que c'est vrai que, les gens, qu'ils
soient dans une résidence privée, dans une coopérative ou dans un CHSLD,
si les services sont meilleurs, c'est clair qu'ils vont se sentir plus à l'aise,
puis ils vont vivre plus longtemps mais surtout avec une meilleure qualité de
vie. Moi, c'est cette partie-là que je trouve intéressante.
Puis
c'est pareil pour les soins palliatifs. On voit arriver des gens qui rentrent
parce qu'ils ont dit : Ils vont mourir dans la semaine. Puis ils
remontent puis au point où on les envoie en congé pour deux semaines.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
• (16 h 40) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Vous savez, quand je parle de résidences
privées, le principe des coops, c'est la même
chose dans les villages. Moi, j'ai connu Saint-Gédéon. Ils voulaient garder
leurs personnes aînées dans le village. La municipalité s'est mobilisée, puis ils ont construit un… je pense, un 12
logements. Et ça permet aux personnes de rester où ils ont toujours vécu. Ça, pour moi, à la fin, que
vous soyez dans une résidence privée de ce genre-là, un loyer avec une
coopérative ou une autre formule, quant à moi, ce qui est important, c'est que
les gens vivent bien puisqu'ils ont les services nécessaires. Puis, en passant,
ce n'est pas nécessairement des gens de CHSLD, ils font juste les prendre puis
les coucher… souvent des personnes très autonomes, mais que ça leur prend
quelques services.
La
question, c'est quand on arrive au niveau de l'aide à domicile. Le livre blanc
parle qu'on va offrir le choix aux gens.
Soit au début on devra offrir le choix en disant : Il y a un montant qui
va être comme alloué, puis vous déciderez si vous allez chercher votre service dans le privé ou dans le public. Le
ministre a changé d'idée en cours de route puis il est beaucoup plus
pour dire : Maintenant, ça va être le public qui va donner les services,
sauf l'EESAD qu'on voudrait garder. Puis là
il y a le chèque emploi-services qui arrive également. Mais, à partir du moment
qu'on a ce principe-là, avez-vous une
crainte qu'un jour on pourrait décider de faire de l'impartition puis tout
simplement dire à la personne, comme
c'était prévu au début, selon les dires du ministre : Bien, on va donner
la ressource monétaire, et puis la personne décidera, tout en respectant
la qualité, de faire le choix où aller chercher ses services?
Le Président (M.
Bergman) : M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : Il y a un côté positif puis il y a un côté qui est
dangereux là-dedans aussi.
C'est
que c'est clair que, si ça finit par… Il faut qu'il y ait un contrôle suffisant
pour ne pas que tout ça, ça finisse en travail
au noir ou que ça finisse qu'ils empochent le profit, puis ils ne vont pas
faire le service ou ils s'entendent avec les voisins pour avoir des
papiers ou… Il passe bien des… Il y a bien du grenouillage en arrière de ça. Si
on est capable de contrôler la qualité des
services qui sont donnés avec ça, moi, je n'ai pas d'inconvénient avec ça,
parce que l'important, c'est que les
services soient donnés et que les gens y aient accès, mais encore, selon leurs
moyens. Ça, je trouve que c'est important.
Mais l'autre partie,
sur le contrôle de ces chèques-là, on a vu passer trop de bébelles dernièrement
que je ne peux pas vous donner une idée éclairée là-dessus. Je m'excuse.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Merci, M. le Président. Mme Chartier, M. Quintin, je
suis heureuse de vous retrouver.
On
a beaucoup travaillé ensemble, et ça me rappelle un souvenir. Et d'ailleurs,
lorsqu'on a fait la consultation publique
sur les conditions de vie des aînés avec le ministre, qui était coprésident à l'époque,
je me souviens très bien qu'on avait invité des observateurs. Et les
observateurs étaient les tables de concertation des aînés. C'étaient également
des représentants d'agences de santé et de
services sociaux. Et il y avait un autre groupe d'observateurs là et un
représentant des CRE. Et ces gens-là ne se parlaient pas forcément entre eux
autres, et je dirais même qu'il y avait des
dissensions profondes. Et on a remarqué à la fin de la consultation, pas
immédiatement après mais au fil du temps, que les gens ont commencé à
travailler ensemble. Et, quand on a mis en place les Municipalités amies des
aînés, municipalités amies pour tous les
âges— là, on
en a 704 — bien là
la Santé, les CRE, les tables, tout ce monde-là a commencé à travailler
ensemble.
Alors,
il me semble que, dans le projet qui nous préoccupe, parce que c'est un projet
pour les années à venir, là, tu sais, on ne discute pas de quelque chose
qu'il va se faire puis, dans trois ans, ça va partir, là. Il faut que ça reste,
là, nonobstant les gouvernements qui seront
en place. Bien, cette formule-là de se parler, de dialogue est quelque chose
qui pourrait peut-être nous permettre de
comprendre davantage ce que le ministre comprend très bien, qu'on ne
comprend peut-être pas tout à fait. Mais,
quand il dit, entre autres, là — je viens de voir quelque chose : On va
contourner en quelque sorte les
agences de santé parce que, dans les agences, il y a des différences au niveau
des services qui sont offerts, et on va donner un montant à la personne
qui pourra acheter ces services, donc c'est vraiment un changement, là.
C'est
un changement de paradigme totalement, mais ça va se mettre en place comment?
Et ça va prendre combien de temps? Et, au fond, ça va coûter combien? C'est
des grandes questions, là.
M. Quintin
(Claude) : Je n'ai pas de réponse.
Le Président (M.
Bergman) : M. Quintin.
Mme
Blais :
Vous n'avez pas de réponse.
M. Quintin (Claude) : Non, je n'ai pas de réponse vraiment là-dessus. Moi, je pense que, si
les… Je ne devrais pas dire ça,
surtout si ça passe à la télévision. Les meilleures idées qu'on a trouvées pour
faire avancer des systèmes, c'est quand on était délinquant. On a trouvé
juste… Peut-être qu'on devrait faire ça de même, on n'avait pas… Ce n'était
peut-être pas nécessairement correct, mais en tout cas on les a faites.
Évidemment, on n'est pas allé aussi loin qu'à la commission Charbonneau, mais on a quand même passé à côté d'un certain nombre de choses, ce qui fait que, les
gens, là, il faut prendre le temps de les écouter.
Les
gens qui travaillent là-dedans, ils ont des idées, puis on ne leur demande jamais
leurs idées. Je ne comprends pas. Ça,
c'est un bout que je n'ai jamais compris. Je travaillais dans une mine, puis le
type nous disait : Dis-nous comment sauver de l'argent, on va t'en donner 10 %. Il y a des gens qui ont doublé leurs salaires dans l'année
parce que c'étaient des faiseux, c'étaient
des... tu sais, ils étaient là, puis ils regardent et : Moi, je ne ferais
pas ça de même, bon. Mais ils avaient des idées, on les a écoutés. Et,
dans ces systèmes-là, c'est ce qui arrive... que les EESAD arrivent à faire
autant d'affaires puis à s'organiser, c'est des gens de même qu'il y a là. Ils
disent : Peut-être que, si on faisait ça de même... puis ils s'organisent puis...
Alors,
il y a des penseur puis il y a des faiseux. Puis ça prend des penseur, sauf
que, s'il y a juste des penseur, on va être dans le trouble.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Vous avez en partie répondu à ma question. C'est par le dialogue. Et les
mouvements qui se sont mis en place à la suite de la consultation
publique ont fait en sorte qu'il y a un mouvement de dialogue maintenant entre
différents acteurs sur le terrain, dans la société.
Écoutez,
je ne peux pas m'empêcher... parce que, dans le mémoire, c'est écrit. Le
ministre avait déclaré en 2008 que,
pour combler 40 % des besoins des soins à domicile, ça coûterait, au bas
mot, 500 millions $ par année. Là, on se rend compte, quand on fait de la politique puis qu'on arrive, que ce n'est
pas toujours facile d'être capable d'implanter tout ce qu'on veut au moment... Alors là, c'est
110 millions. Ce sera 500 millions à terme. Est-ce que ce sera
suffisant si on veut rehausser le
financement des EESAD? On le sait, il y a un roulement, dans les EESAD, de
personnel. Pourquoi? Parce que ces
gens-là ne sont pas assez payés. Il a raison, le ministre, il faut les payer
davantage, mais ça va coûter combien, parce que sinon les visages
changent, les personnes partent? Et après ça il faut davantage s'occuper des
proches aidants. Alors, pour moi, je sais qu'il
ne faut pas trop parler d'économie, il faut parler aussi de philosophie, mais,
à un moment donné, il y a quelqu'un
qui va payer la note à quelque part. Et ça, c'est quelque chose de très
important. Et je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous parliez tout à l'heure, là, les coopératives… puis
je pense à tous les projets novateurs, de faire en sorte qu'il y ait des nouvelles formules de
domicile où les gens peuvent vivre à trois, quatre, cinq pour faire en sorte
qu'on brise l'isolement et qu'on puisse recevoir les soins, peut-être dispenser
les soins à plusieurs personnes dans le même endroit, mais que ça ne soit pas
nécessairement une immense résidence.
Alors, il va falloir
qu'on soit très créatif dans ce créneau-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : Le problème qu'on a cet après-midi, c'est qu'on essaie de
jouer à un jeu qu'on ne connaît pas vraiment
les règlements. Mais on peut les changer, les règlements, on peut les faire, on
peut travailler dessus puis on peut
essayer de les améliorer. Et je pense que c'est là-dessus qu'il faut mettre le
point de vue. En tout cas, nous, ce qu'on
veut, c'est : on veut être positifs là-dedans, on veut aider les gens.
Tous ceux qui sont prêts à travailler en avant dans ce projet-là, on va
y aller.
Mais c'est clair que pour l'instant on ne
connaît pas les règles du jeu, là. On n'a pas de chiffre, on ne sait pas vraiment... Peut-être que, quand on va connaître
mieux tout ça, on va avoir une meilleure idée puis on va savoir comment
qu'on peut s'impliquer là-dedans.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Oui, c'est
un peu notre inquiétude, toute la question, là, du financement, le panier de
services, combien ça va coûter. Ce n'est pas
la question des soins à domicile et de faire en sorte que les personnes en
situation de handicap, puis que les
personnes âgées puissent recevoir plus de soins là où elles souhaitent les
recevoir, et qu'il y ait une formation
de qualité. Ça, tout le monde, on s'entend là-dessus, et tout le monde, on veut
avancer dans la même direction.
Qu'est-ce que
vous pensez de la situation des CHSLD? On sait qu'on veut diminuer probablement
le nombre de lits en CHSLD pour faire
en sorte qu'il y ait plus de soins à domicile. Mais, avec le vieillissement de
la population, est-ce qu'on sera capable de diminuer les lits en CHSLD,
avec les personnes qui sont atteintes de maladies cognitives, etc.?
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : …si on ne parle
pas de les diminuer pour l'instant, on peut au moins dire : Les gens
qui sont là devraient être les bonnes personnes.
Et, ceux qui sont là puis qui ne devraient pas
être là parce qu'on peut leur donner des bons soins ailleurs, on devrait être
capable de leur donner des bons soins ailleurs, à d'autres endroits où ça coûte
moins cher, et laisser ces espaces-là
disponibles pour ceux qui en ont vraiment besoin. Il y a un replacement à faire
là-dedans. Ça aussi, ça prend un peu
de temps, là. On ne peut pas attendre que tout le monde soit mort non plus
là-dedans, là, parce qu'il y en a dans ça qui sont là pour de très, très, très nombreuses années parce que la
meilleure place pour leur donner les services dont ils ont besoin, ce n'était pas un CHSLD. Ils se sont retrouvés là avec l'historique, là, qu'on n'essaiera
pas de refaire après-midi.
Mais il y
a un travail à faire à ce niveau-là. Moi, je ne crois pas que ce soit nécessaire qu'on ouvre des
nouvelles places en CHSLD. C'est clair qu'il y a des CHSLD qui sont passés date
puis que, tôt ou tard, il y en a qu'il va
falloir soit fermer ou mettre des sous tellement importants dedans que ça
vaudrait la peine de les jeter à terre, puis repartir. Mais ça reste des
décisions vraiment politiques, là. Moi, je ne peux pas… je n'ai pas de réponse là-dedans.
• (16 h 50) •
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Gatineau, il vous reste trois minutes.
Mme Vallée : Merci.
Bonjour. J'avais un autre alignement pour la question, mais vous venez de dire
quelque chose qui m'a profondément touchée.
Vous dites : On essaie de jouer un jeu,
mais on ne connaît pas les règles du jeu. On va commencer à jouer dans six mois
à peu près, sauf qu'on ne joue pas avec de l'argent de Monopoly puis on ne joue
pas avec des pions, on joue avec du vrai
monde. Et là, dans six mois, on va commencer à jouer puis on ne sait pas encore
à quoi on va jouer, on ne sait pas
encore comment on va jouer puis on ne sait pas combien ça va coûter puis
combien d'argent sera mis à contribution. Ça fait que je vous avoue que
c'est venu me chercher parce que je me dis : Ce n'est pas un jeu, là, c'est
loin d'être un jeu, on va venir toucher la réalité des gens.
J'ai une préoccupation. Évidemment, je vous
avoue que j'ai un penchant, je me préoccupe beaucoup de la question des
personnes handicapées dans toute cette mise en oeuvre là. Mais évidemment vous
représentez des aînés. Est-ce qu'on a, sur l'ensemble
du territoire, suffisamment de ressources humaines et de ressources pour
assurer ce virage-là, pour s'assurer qu'il y aura une universalité puis
une équité pour tous les gens, pour les gens qui seront maintenus à domicile
dans les régions éloignées, pour les gens qui seront dans des communautés
rurales? Moi, c'est une de mes préoccupations
également, parce qu'on sait que, dans les milieux ruraux, l'accessibilité n'est
pas nécessairement la même qu'en
milieu urbain parce que certains milieux ruraux ont des défis quant à la
rétention puis l'attraction de leur personnel, du personnel qualifié, du
personnel formé.
Je ne sais pas si, cet enjeu-là, dans votre
table, vous avez eu des échanges avec vos collègues.
Le Président (M. Bergman) :
M. Quintin.
M. Quintin
(Claude) : Quand je dis qu'on
ne connaît pas les règlements, là, on sait en gros c'est quoi, le règlement,
on sait quand même qu'on peut quand même se permettre de dire qu'on pense que c'est
des bons choix, puis on est prêts à aller
là-dedans, puis on est prêts à faire notre bout là-dedans, puis on est prêts à
travailler dans ça. Ça, on est prêts à le
dire, il n'y a pas de problème avec ça. Maintenant, la question, c'est la
question des limites : Si on arrive à faire une évaluation, y a-tu
assez d'argent avec ça, il n'y en a pas assez? On ne le sait pas parce que
nous, on ne les a pas faits, les chiffres. On ne les a pas puis on ne les a pas
faits.
Maintenant,
c'est clair que les ressources… actuellement, il y a des ressources dans le
milieu qu'on a développées historiquement. Alors, si on tire une ligne,
on ne peut pas la tirer avec tout l'historique qui s'en vient en arrière, là.
Il faut dire :
Actuellement, on ne peut pas arrêter ça dans le temps, là, on s'en va vers
autre chose. Alors, si le vers autre chose
est organisé autrement, peut-être que les ressources qu'il y a là sont
suffisantes pour faire les choses autrement. Mais ça, pour l'instant, on
ne le sait pas. En tout cas, moi, je ne le sais pas.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Pour le deuxième groupe de l'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.
Mme
Roy (Arthabaska) : Merci, M. le Président. Je vous ai entendu
dire : On a réussi les meilleures choses quand on était un peu
délinquant.
Je
comprends exactement ce que vous voulez dire parce qu'à Victoriaville et sa
région, Arthabaska, L'Érable, on réussit
à faire de belles choses dans le maintien à domicile, alors que les enveloppes
n'étaient pas étiquetées. Donc, ça a émergé du milieu comme étant un
objectif, comme étant quelque chose de nécessaire à faire. Et par chance qu'on
l'a fait au moment où les enveloppes n'étaient
pas tout étiquetées puis qu'on n'a pas attendu que l'assurance autonomie
arrive. Je pense que la confiance envers les
gens qui sont sur le terrain est primordiale puis que, dans ce sens, des fois
on oblige des façons de faire ou des
moyens. Moi, je pense qu'on devrait plutôt imposer des résultats quelquefois,
laisser l'intelligence des gens qui s'impliquent
travailler et puis… mais sans pour autant laisser aller le système sans
vérification puis sans surveillance.
Il
y a des endroits où ils ont réussi à avoir un bon maintien à domicile, des bons
soins palliatifs. Puis plusieurs personnes…
puis il y a un taux très, très élevé de personnes qui meurent à domicile, parce
qu'on sait que la plupart des gens veulent mourir à domicile, ne veulent
pas mourir dans un corridor à l'urgence. Donc, est-ce que c'est un peu comme ça
que vous voyez les choses?
M. Quintin
(Claude) : Bien, moi personnellement…
Le Président (M.
Bergman) : M. Quintin.
M. Quintin (Claude) : …je me fie beaucoup à mon intuition. Il y a beaucoup de nouvelles
solutions qui ont été trouvées par intuition, par des gens qui sont dans
le milieu, puis qui travaillent là, puis qui sont capables de regarder ce qui
se passe.
Mais
ensuite la deuxième affaire, c'est
sûr que c'est avoir une confiance dans les structures. Mais, à long terme, ça, ce n'est pas suffisant, il va falloir aller plus loin. Alors, il faut
avoir des ressources puis il faut être capable de bien
encadrer ce qu'on veut faire. Maintenant, ça prend un système qui est souple.
On est en train de déranger beaucoup de monde de
beaucoup de façons. On veut garder ce qui est bon, on ne
veut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. On veut garder ce qui est bon puis on veut améliorer le reste.
Alors, il faut faire attention. Il y
a une discrimination à faire. Moi,
j'appellerais ça une discrimination positive. Il y a des choses qu'il faut
garder, c'est important. Puis il y en a d'autres que, sans les mettre carrément de côté, bien, il faut se poser des questions.
Vous en avez tous, des questions sur des points bien précis. Je veux dire,
il s'agit de les ramasser puis de les regarder. Mais là on essaie de faire une
grosse, grosse recette, là. Puis tout le monde veut dire : Ah,
bien, moi, ma mère, elle mettait ça, puis, moi, ma mère, elle mettait ça. Bien,
si on met ce que toutes les mères
mettaient dans la même recette, là, je ne sais pas si on va arriver au bout
avec une recette qui est mangeable.
Alors, il faut faire
attention à ça. Il faut regarder vraiment, il faut faire des choix. On est
devant les choix, là.
Mme Roy
(Arthabaska) : Je vous remercie. Je comprends. Je pense qu'on a
fait le tour de la question. On comprend vos points de vue.
M. Quintin
(Claude) : …des soins palliatifs.
Mme Roy
(Arthabaska) : Voulez-vous en parler?
M. Quintin (Claude) : Bien, je pense que c'est un point qui est important là-dedans.
On n'en a pas parlé, dans le sens que… je ne le sais pas, il y a des
gens qui… c'est clair qu'ils aimeraient mieux être chez eux. Ils se retrouvent
à l'unité de soins palliatifs parce que la personne qui s'en occupait est
brûlée puis elle n'a pas les capacités de faire les actes médicaux dont elles auraient besoin. Mais il y a
sûrement beaucoup de gens là-dedans aussi qui seraient prêts à rester chez eux
si on leur donnait ces capacités-là. C'est un autre problème dans le casse-tête
qu'on a à régler.
Mme
Roy (Arthabaska) :
Oui. Oui, c'est ce que je vous dis. Il
y a certaines régions au Québec
où on a réussi. Puis c'est grâce à l'intelligence
puis à l'implication du communautaire
avec du CSSS, avec des unités de personnes qui venaient pour les
personnes qui voulaient mourir à domicile. On a tout arrimé ça. Si on a réussi
là, on est capable de le faire ailleurs. C'est
ce que je dis. Et puis il ne faut pas essayer de réinventer le bouton à quatre
trous, là… il ne faut pas essayer de réinventer la roue, plutôt. Il y a
des endroits où ça marche, au Québec, puis je pense qu'il faut étendre ce
modèle-là.
M. Quintin (Claude) : Un dernier point, pour terminer, si vous permettez, c'est qu'on n'a pas
parlé du tout des centres d'action bénévole, les groupes communautaires.
Il y a beaucoup de
groupes communautaires actuellement qui donnent un certain nombre de ces
services-là. Il ne faudrait pas non plus les enlever. Puis il faudrait…
Regarde, en fait, ceux qui sont là puis qui font déjà un bon travail,
il faut s'organiser pour leur donner les moyens pour qu'ils puissent continuer
puis qu'on puisse les garder. Alors, c'est un autre morceau.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. M. Quintin, Mme Chartier, merci pour votre présentation, merci d'être avec nous aujourd'hui et partager votre
expertise.
Et
je demande aux représentants de l'Ordre professionnel des diététistes du
Québec de prendre leur place à la table et je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à
16 h 58)
(Reprise à 17
h 2)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on reçoit maintenant l'Ordre
professionnel des diététistes du Québec.
Alors, s'il vous plaît, donnez-nous vos noms, vos titres. Et le prochain
10 minutes, c'est à vous pour faire votre présentation, suivie d'un
échange avec les membres de la commission.
Ordre professionnel des
diététistes du Québec (OPDQ)
Mme Gagné
(Anne) : Alors, merci, M. le Président. Permettez-moi d'abord de
saluer M. le ministre de la Santé et le ministre
responsable des Aînés, il ne faut pas l'oublier, le Dr
Réjean Hébert. Je voudrais aussi saluer les autres députés de l'Assemblée
nationale et, par la même occasion, vous remercier tous de nous recevoir aujourd'hui
et de vous présenter notre mémoire.
Alors,
mon nom est Anne Gagné, nutritionniste et présidente de l'Ordre professionnel
des diététistes du Québec, et je suis
accompagnée de Joanie Bouchard, nutritionniste également et coordonnatrice
aux affaires professionnelles à l'Ordre professionnel des
diététistes du Québec. Alors, je voudrais également profiter de l'occasion pour
remercier — vous
avez reçu notre mémoire — les
collaborateurs, parce que vous savez que ça prend beaucoup
de temps à préparer. Alors, je remercie
Nancy Presse, Isabelle Piedalue, Isabelle Desjardins, Louise Girard, Michel
Sanscartier, Janick Perreault ainsi que notre directrice générale qui nous accompagne aujourd'hui, Me Annie Chapados. Alors, comme vous le savez, les ordres professionnels
ont une mission qui est la protection du public en s'assurant de la qualité de
l'acte professionnel de ces membres, et nous avons également une autre section dans notre mission, qui est de
valoriser l'importance de la nutrition, de la saine alimentation et des soins nutritionnels pour la promotion, le
maintien et le rétablissement de la santé humaine. À cette fin, l'OPDQ
privilégie des interventions de qualité optimale de la part de ses membres, et
ce, en fonction des divers besoins nutritionnels de la population québécoise.
Alors, concernant le
livre blanc et l'autonomie pour tous, vous savez, ce n'est pas le premier mémoire
que l'OPDQ présente concernant la santé des
aînés, mais nous sommes particulièrement heureuses aujourd'hui de la volonté du ministre de souhaiter l'autonomie pour tous et
particulièrement pour les aînés.
D'ailleurs, nous nous
sommes attardés particulièrement à cette partie de la population dans notre mémoire.
Vous savez, on ne peut parler de l'autonomie
des aînés et de les garder à domicile sans parler de leur alimentation et
de leur état nutritionnel. C'est la raison
de notre présence ici aujourd'hui. Pourquoi? Bien, premièrement, en raison du vieillissement
normal. Et je vais vous faire travailler. Je
vous invite à prendre... Vous avez tous reçu le mémoire. Allez à l'annexe 1
du mémoire, qui concerne les principaux changements physiologiques et physiques
liés au vieillissement normal et les conséquences nutritionnelles associées. En
fait, si vous aviez une page à retenir de notre document... il y en aura deux autres tout à l'heure, mais celle-là
est importante. Alors, j'imagine que vous l'avez tous devant
vous. Alors, elle est divisée en
trois sections. Alors, la première section, ce sont les types de changement; la
deuxième colonne, les changements physiologiques qui sont liés au
vieillissement normal — alors,
on va tous y passer, la jeunesse éternelle, ça n'existe pas; et, la troisième
section, ce sont les conséquences possibles.
Par exemple, si nous allons à la deuxième ligne, on parle des changements dans la
composition corporelle. Alors, pour
le vieillissement normal, ce que ça apporte, c'est une diminution de la masse
musculaire, une diminution de la masse osseuse,
une augmentation de la masse adipeuse, et les conséquences possibles... les
conséquences nutritionnelles associées : une diminution des besoins
énergétiques, réduction de l'autonomie fonctionnelle, augmentation des
risques de chute, augmentation des risques
de fracture associés à la réduction de la masse osseuse. Alors, dans ce
tableau-là, vous retrouvez des
changements qui se font au cours du vieillissement, qui sont normaux : un
changement au niveau de l'odorat, au niveau du goût, au
niveau de la capacité de digestion,
etc. En plus du vieillissement normal, on retrouve d'autres facteurs qui
peuvent altérer les conditions
nutritionnelles et avoir des conséquences, par exemple les conditions
médicales, la chirurgie, mais d'autres
facteurs aussi, comme par exemple la capacité de se déplacer, les difficultés
de se déplacer, les difficultés d'acheter des aliments, les difficultés
de les cuisiner. Il y a aussi le revenu, qui parfois est très faible — vous le mentionnez d'ailleurs dans votre livre
blanc — ce
qui veut dire le budget pour l'achat des aliments, la solitude, la perte
d'un conjoint.
En fait, tous ces
facteurs-là, qui sont endogènes, exogènes, peuvent amener la dénutrition et la
malnutrition.
Et
là, en me préparant, ce matin, pour venir vous rencontrer, j'ai retrouvé un document
chez moi qui a été produit par le ministère de la Santé en 2011, qui s'intitule
Approche adaptée à la personne âgée en milieu hospitalier, qui a été rédigé par plusieurs médecins gériatres, entre
autres quelqu'un que vous connaissez sûrement, Dre Kergoat, qui est
gériatre à l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal. Et vous allez me
permettre de vous lire quelques lignes sur les conséquences de la malnutrition
et la dénutrition. Alors, j'y vais.
«La malnutrition engendrée
par un apport alimentaire insuffisant ou par un accroissement des besoins nutritionnels en raison de la maladie est
fréquente. À l'admission [au centre hospitalier], la prévalence de la malnutrition
est estimée à 35 % environ; au congé — lorsque la personne
retourne — elle
passe à 50 %. La malnutrition et son corollaire,
la perte de poids, sont associés, chez la personne âgée, à une augmentation de
la mortalité, qui peut s'étendre de 9 % à 38 % de un an à deux
ans et demi après la perte initiale. Les personnes âgées frêles, celles qui
accusent un petit poids de base et celles
récemment admises à l'hôpital sont particulièrement à risque. La malnutrition
est aussi associée à un risque accru de
complications — delirium,
infections, désordres métaboliques, mauvaise cicatrisation des plaies, perte de masse musculaire [et aussi] un déclin
dans les activités de la vie courante, à une perte des capacités
physiques [et] à un taux plus élevé d'hébergement
et à une qualité de vie pauvre. [Finalement], il existe de nombreuses études
pour appuyer que l'apport alimentaire, un facteur modifiable, est un des
principaux déterminants de l'état nutritionnel de la personne âgée
hospitalisée.»
Tout ça pour
vous dire finalement que... qui vous explique pourquoi on doit parler de l'alimentation
et de l'état nutritionnel, et, si on veut garder les aînés chez eux, il
faut s'en préoccuper. Alors, malheureusement, malgré que la prévalence est connue… de la dénutrition, les
études démontrent, au Québec, qu'elle est rarement dépistée et
diagnostiquée en milieu ambulatoire. Donc,
la prise en charge est souvent tardive, et les impacts de la dénutrition sont
déjà importants.
• (17 h 10) •
Alors, c'est
ici que j'arrive à nos deux premières
recommandations. Premièrement, il est primordial de dépister, d'évaluer
et de diagnostiquer le risque nutritionnel et la dénutrition chez la clientèle
recevant des soins à domicile. Vous
comprenez pourquoi. Conséquemment, ce que nous proposons en
complément de la grille d'évaluation SMAF, qui est recommandée dans le livre
blanc et qui est un système de mesure de l'autonomie fonctionnelle, nous
recommandons l'utilisation d'un outil supplémentaire, qui est le dépistage
nutritionnel des aînés, le DNA. En fait, cet outil, que je vais vous
parler un peu plus longuement tout à l'heure, a été élaboré et validé au Québec
par l'équipe du Dr Hélène Payette, qui est à
l'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke. Donc, le ministre de la Santé connaît bien cette région et il doit sûrement connaître Dre
Payette. Alors, c'est un outil facile et rapide à utiliser qui est disponible
en français et en anglais, et ce qui est
intéressant, c'est qu'il a été validé pour être utilisé par le personnel des
services à domicile. Donc, ce n'est pas nécessairement un professionnel
qui doit l'utiliser.
Alors là, je
vous fais travailler encore, je vous envoie rapidement à l'annexe 3 du
document, du mémoire qu'on vous a présenté, et le questionnaire DNA, c'est
simplement deux pages, 10 questions. Et ce qui est intéressant, en plus — là,
je ne ferai pas le tour des questions parce qu'on me dit qu'il faut que je sois
plus rapide — à
la suite de ce questionnaire-là, qui peut être complété par des employés qui
font de l'aide à domicile, on obtient un score de trois niveaux : un niveau faible, alors le niveau faible fait référence à
une vigilance quant à l'apparition d'un facteur de risque, ce qui veut
dire qu'il faut faire attention si la personne a un changement de situation ou
une perte de poids; le modéré fait référence
à une surveillance alimentaire constante, alors il faut s'informer régulièrement de l'alimentation, donner des conseils, puis ça, ça peut être fait par les employés qui font l'aide à
domicile; et, le troisième, risque élevé, alors là, ici c'est un service
d'aide à l'alimentation, on doit augmenter les apports alimentaires et aussi
faire référence à un professionnel en nutrition.
Alors, cet
outil-là permettra de dépister des risques nutritionnels et éviter que les
personnes qui sont chez elles puissent le demeurer. Ça peut également
les aider à maintenir leur état de santé.
Je vais
passer la parole à Joanie, qui va nous parler... ou durant les questions, la
période des questions… minutes?
Le Président (M. Bergman) : Malheureusement,
le temps s'est écoulé, à moins que...
Mme Gagné
(Anne) : Déjà? Ça va
trop vite. On aura l'occasion de vous parler du financement, et d'efficacité,
et des outils, d'autres outils qu'on propose.
Le Président (M. Bergman) :
Parfait. Pour le premier bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Bien, merci
beaucoup. Merci d'abord
de nous rappeler l'importance de la nutrition pour le maintien de l'autonomie des personnes âgées. C'est extrêmement important. Et vous suggérez, là, de mieux détecter les personnes
à domicile et même d'intégrer le DNA, le
dépistage nutritionnel des aînés, dans l'Outil d'évaluation multiclientèle.
Ce qui me préoccupe, c'est qu'est-ce qui arrive après, c'est-à-dire, une
fois qu'on a détecté...
D'abord,
avez-vous une idée de l'ampleur du phénomène pour les gens qui sont dans les
soins à domicile? Est-ce que vous connaissez combien… quel est le
pourcentage de gens qui seraient dénutris, selon l'outil de détection de Mme Payette?
Mme Gagné
(Anne) : Bien, en fait, à
votre première question, quand vous demandez qu'est-ce qui arrive lorsqu'ils
sont dépistés, bien, justement, comme je vous expliquais, il y a trois niveaux,
hein? Le premier niveau… les deux niveaux,
en fait, c'est… Le premier niveau, c'est simplement d'encourager à s'alimenter,
puis à ne pas oublier de manger, puis de vérifier aussi s'il n'y a pas
un événement majeur qui arrive dans sa vie qui ferait que son apport
nutritionnel va diminuer.
Le deuxième niveau, c'est de surveiller puis d'encourager
également un peu plus serré. Mais le niveau... le premier, qui est très, très sévère, alors là il faut augmenter l'apport
alimentaire, ce qui veut dire d'utiliser les services qui sont déjà en place, par exemple des popotes
roulantes, l'aide domestique à s'alimenter, à cuisiner et aussi une
référence en nutrition. La référence en
nutrition, bien, écoutez, ça dépend de la problématique de la personne. Comme
vous êtes médecin, vous ne feriez pas la même
prescription à tous vos patients. Alors, c'est pour ça que ce qui est
important… que la personne rencontre une
nutritionniste, qu'elle fasse une évaluation individualisée, et par la suite il y aura
un plan de traitement qui sera déterminé.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Mais, c'est justement, est-ce qu'il y a les ressources dans le réseau actuellement pour offrir à
ces personnes les services d'une nutritionniste?
Mme Gagné (Anne) : O.K. Je vais
laisser la parole à Joanie, qui devait vous présenter... On a préparé des
ratios. Alors, c'est la deuxième... C'était la deuxième partie, elle va...
alors je vais laisser Joanie...
Le Président (M. Bergman) :
Mme Bouchard.
Mme
Bouchard (Joanie) : Merci,
Mme Gagné. M. le ministre, aussi, pour répondre à votre question quant à
la fréquence… actuellement, la prévalence de
dénutrition chez nos aînés qui sont à domicile actuellement — Dre Payette
a publié des chiffres également en ce sens-là — c'est sûr qu'au Québec, en
Amérique du Nord, en Europe, ça va varier selon le profil, donc, de
dénutrition. On va parler de 5 % à 15 % des aînés à domicile. Ceci
dit, si on parle de risques nutritionnels, donc un risque de développer une
dénutrition, on parle jusqu'à 60 % des aînés actuellement à domicile qui
auraient une dénutrition possible.
Actuellement,
ces gens-là ont déjà recours à des services de la nutritionniste au CLSC. Ceci
dit, les délais d'attente sont très
longs. Et la quatrième annexe que vous allez trouver dans notre mémoire fait
référence à des travaux qu'on a réalisés
dans la dernière année, qui portent sur les ratios d'effectifs en nutrition
clinique pour répondre aux besoins de la population qui nécessite des
soins à domicile et qui inclut, donc, les personnes âgées. Donc, à savoir qu'est-ce
qui se passe par la suite et quels sont les
besoins, combien de nutritionnistes on aurait pour répondre à ces besoins-là,
on vous a fourni des statistiques, des chiffres, des données, qu'on est
allés chercher dans la dernière année, à cet effet-là.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Pouvez-vous me guider dans cette annexe? Je vous avoue que j'ai lu le quart de
votre mémoire mais pas l'annexe, là. Alors, quel serait le nombre de
nutritionnistes qu'il faudrait engager pour répondre aux besoins?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Une voix : …
Le Président (M. Bergman) :
Mme Bouchard.
Mme
Bouchard (Joanie) : Merci.
En fait, ce travail-là qu'on a effectué, on a regardé vraiment sur la base
des besoins populationnels, des personnes.
Donc, ce que vous allez trouver dans ce rapport-là, ce n'est pas
nécessairement un chiffre de professionnels
qui seraient à engager mais plutôt un travail qui est à effectuer par les CSSS
pour vraiment les regarder selon les
besoins de la population, comment on pourrait déterminer. Donc, effectivement,
on a émis des recommandations dans la dernière section du document, des
ratios qui... en fonction des facteurs de vulnérabilité qui sont présents dans
la population, qui pourraient donc mettre à risque nutritionnel ces gens-là,
combien de diététistes on devrait avoir besoin pour répondre à ces besoins-là.
Donc, c'est vraiment une étude qui est
individualisée, qui est à regarder par territoire, par population, en fonction
des besoins.
Mme Gagné (Anne) : Je voudrais
ajouter, si vous me permettez, M. le ministre. Nous sommes une petite organisation,
l'Ordre professionnel des diététistes du Québec, alors nous ne sommes pas en
mesure d'élaborer des statistiques ou des... aussi élaborées, en fait. Mais,
par contre, nous sommes prêtes à collaborer avec les autorités pour ce faire.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Oui, mais il y a là un enjeu de planification de main-d'oeuvre, là, vous vous
en doutez bien. Ce que je voudrais
savoir de vous, sans avoir des chiffres précis, c'est est-ce que nous avons les
nutritionnistes formés et disponibles pour
être en mesure de combler ces besoins. Et le corollaire — parce que j'ai l'impression qu'on ne les a
pas : Mais alors qu'est-ce qu'on fait pour les avoir? Pour en avoir
plus, qu'est-ce qu'il faudrait mettre en place?
Mme Gagné
(Anne) : Bien, ça, c'est l'oeuf ou la poule, c'est-à-dire que... On
est nutrionnistes. L'oeuf ou la poule, en
fait c'est de... Vous dites : Combien ça prend de nutritionnistes puis
combien on en a de besoin? Ça fait qu'il faut travailler avec ces
deux-là. Mais actuellement on a différentes statistiques, mais on ne peut pas
vous donner le chiffre aujourd'hui. Vous avez parlé de la planification de la
main-d'oeuvre. Effectivement, c'est un dossier qu'on a amené au ministère de la Santé ça fait quelques
années. Puis qu'il faut augmenter les ressources en nutrition,
effectivement c'est un dossier... Je suis heureuse que vous en parliez, parce
qu'on espère vos rencontrer à ce sujet-là, justement.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : On a annoncé l'embauche de 180 professionnels
dans les GMF. Et vous m'avez entendu à quelques reprises, et à chaque
fois que j'en ai l'occasion je dis : Ça peut être des nutritionnistes
aussi. Donc, est-ce que vous savez s'il y a
actuellement des nutritionnistes qui n'ont pas de travail ou qui se cherchent
de l'emploi? Quelle est la situation de l'emploi? C'est un peu ce que je
voudrais, que vous puissiez nous éclairer.
Est-ce
qu'on est en pénurie de nutrionnistes, à votre avis? Est-ce qu'il y a des
nutritionnistes qui ne se trouvent pas d'emploi?
Mme Gagné
(Anne) : En fait...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
• (17 h 20) •
Mme Gagné
(Anne) : Ah! Oui, excusez-moi, je suis rapide à lui répondre.
Alors,
en fait, le portrait, c'est que, les nutritionnistes, il y en a plusieurs qui
travaillent dans le réseau de la santé, il y en a plusieurs qui
travaillent à temps partiel effectivement qui pourraient peut-être faire des
temps-pleins, il y a des nutritionnistes qui
sont en congé de maternité, il y a des nutritionnistes qui travaillent en
pratique privée parce que, vous savez, dans le réseau de la santé, avoir
un poste à temps plein, ce n'est pas évident et c'est souvent sur appel. Alors,
il y en a quelques-unes qui préfèrent aller en privé.
Mais,
oui, actuellement il y a des ressources pour combler des postes. Mais, pour
faire une projection, quand vous me parlez qu'il y a de l'argent qui est
développé pour avoir des postes dans les GMF, mais vous ne m'avez pas dit
combien de nutritionnistes… Ça fait que moi, je peux bien vous répondre, mais
ça fait que vous aussi…
M.
Hébert :
…que les GMF vont faire.
Mme Gagné
(Anne) : C'est ça.
M.
Hébert : C'est-à-dire qu'on n'a pas à imposer un choix. On a
offert aux GMF de combler ces postes-là par des intervenants psychosociaux, des nutritionnistes, des kinésithérapeutes…
des kinésiologues, pardon, j'ai mon vieux fond français qui remonte… ou des inhalothérapeutes, alors… ou des
pharmaciens. Combien vont choisir… nutritionnistes? Je ne sais pas. Mais
je voulais avoir une opinion de votre part sur : Sommes-nous en pénurie?
La question simple, c'est : Sommes-nous en pénurie de nutritionnistes
actuellement au Québec, d'après vous?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Bouchard.
Mme Bouchard (Joanie) : Merci, M. le Président. En fait, M. le ministre,
on avait déjà… il y a eu un document qui a été produit il y a quelques
années déjà, auquel l'OPDQ avait collaboré, qui statuait en fait qu'effectivement
on s'en allait vers une pénurie de diététistes.
Nous, nous sommes d'avis
qu'actuellement nous le sommes déjà. C'est… pour lequel on travaille le
dossier, qu'on souhaite augmenter les
cohortes, on souhaite augmenter qu'il y ait des nutritionnistes. À savoir des
chiffres précis sur le pourcentage de
nutritionnistes qui se cherchent des emplois, ces chiffres-là, on ne les a pas
avec nous aujourd'hui. Ceci dit, je peux vous dire que c'est très rare,
des nutritionnistes qui se cherchent de l'emploi. Des offres d'emploi, il y en a beaucoup qui circulent. Vous avez nommé, entre
autres, des milieux de travail comme les GMF, les centres hospitaliers.
Il y a beaucoup d'autres milieux de travail qui sont accessibles pour les
nutritionnistes en dehors du réseau de la santé
aussi, ce qui fait qu'on observe, dans les dernières années, un dispersement un
peu des professionnels une fois qu'ils sortent de l'école. Et il y a
aussi tout le dossier de pouvoir leur permettre d'accéder à une formation
pratique.
Donc,
actuellement, c'est aussi ce qui nous limite de former plus de professionnels
pour pouvoir répondre aux besoins qu'on ressent dans la population, c'est
le fait que les professionnels en formation n'ont pas accès à des stages
pratiques dans tous ces milieux-là pour être en mesure d'être compétents une
fois sur le marché du travail.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : La formation des nutritionnistes actuellement se
fait dans combien d'établissements? Puis vous en formez combien par
année?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : En fait, dans trois universités : l'Université de Montréal, l'Université
McGill et l'Université Laval. Et il y en a une cohorte d'à peu près 200…
50, 60, 90?
Mme Bouchard (Joanie) : Les
Universités de Montréal et de McGill vont former environ 90 étudiants. À l'Université
Laval, on est un peu en dessous de ça, aux environs de 70. Donc…
Mme Gagné (Anne) :
…environ…
Mme Bouchard (Joanie) : …180… 250.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, il n'y a pas actuellement de formation, en région, des nutritionnistes.
Est-ce que ça ne pourrait pas être
une avenue intéressante de pouvoir utiliser le réseau des universités du
Québec, par exemple, pour essayer de développer des programmes
supplémentaires pour former des nutritionnistes?
Mme Gagné
(Anne) : Bien, en fait,
actuellement, là… D'ailleurs, il y a eu une planification de la main-d'oeuvre,
un document qui a été produit voilà… je pense, c'était en 2010… déjà par le
ministère de la Santé. Et déjà, dans ce document-là,
on disait qu'il fallait augmenter les cohortes dans les universités, les trois
universités que je vous ai nommées.
La problématique d'augmenter les cohortes
actuellement, c'est qu'il y a des difficultés de trouver des stages, entre autres, dans le réseau de la santé. Alors,
ce n'est pas qu'il y a un besoin d'ouvrir d'autres sites de formation,
mais il faudrait déjà augmenter les cohortes dans les universités. C'est un
autre dossier qu'on a amené à votre ministère. Et d'ailleurs on a rencontré le
ministère de l'Éducation supérieure à cet effet, et il y a un comité
provincial, là, qui a été créé avec les
trois universités, avec le ministère de l'Éducation, et il va sûrement y avoir
quelqu'un de chez vous pour parler de cette situation-là. C'est un
dossier qui nous préoccupe depuis plusieurs années. On en parle et on espère qu'il
va y avoir des suites, là.
Mais, comme
je vous dis, c'est l'oeuf et la poule, hein, tout est ensemble, là. Alors, c'est
pour ça que c'est difficile de vous donner un portrait exact. Mais
effectivement il y a des choses qu'il faut étudier puis évaluer.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Un élément qui me préoccupe aussi, et ça préoccupait le Vérificateur général
dans son rapport de 2011, c'est la
dénutrition en centre d'hébergement et de soins de longue durée. Avez-vous un
état de situation là-dessus? Est-ce que vous avez de nouvelles données
par rapport à ce que le Vérificateur général soulevait dans son rapport? Quelles sont les pistes de solution? Est-ce qu'on
devrait faire le même genre de
dépistage? Est-ce qu'il devrait y avoir des normes quant au budget
de l'alimentation? Parce que, dans certains établissements, c'est un problème.
Donc, je voudrais vous entendre là-dessus, sur
les personnes en établissement d'hébergement, aussi.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : Juste avant,
Joanie… Le document, ce que je vous ai présenté tout à l'heure, le DNA,
celui-là, pour dépister la dénutrition, c'est pour les soins à domicile, les
personnes qui sont en perte d'autonomie.
Considérant les CHSLD, bien c'est encore les
mêmes données par rapport à la dénutrition. Puis, oui, il faut la dépister puis il faut… Vous avez fait référence au
rapport du Vérificateur général qui disait justement qu'il fallait
augmenter les ressources en nutrition, avoir
une nutritionniste, que le patient soit vu au moins une fois par mois… je
pense, c'est 30 minutes une fois par mois. Alors, là aussi, il n'y a pas
suffisamment de ressources. La dénutrition, oui, elle est là également. Puis souvent ce qu'on note dans toutes
les études, c'est que les personnes qui arrivent en CHSLD sont déjà dénutries. Elles le sont déjà. Alors, c'est pour
ça que nous, on trouve ça intéressant qu'il y ait un travail qui soit fait
au niveau des personnes qui sont dans leurs
domiciles. Puis d'ailleurs on avait déjà commencé à y travailler. On avait
produit un document, ça fait un an et demi,
deux ans, avec le ministère de la Famille et des Aînés à l'époque, qui s'intitule
Les protéines : des alliées pour vieillir en santé!.
Parce que la problématique de la dénutrition est reliée finalement à une faiblesse au niveau des calories ou au niveau
des protéines. Alors, on a ciblé ces nutriments-là. Et c'est un peu loin
pour le voir, mais on a apporté des copies. On a fait le document, avec des
gros caractères, très simple, des images intéressantes, pertinentes, il y a des
aliments. Alors, vous savez, c'est un outil qui peut avoir un impact positif.
Mais
effectivement il faut agir en amont pour éviter que ces personnes-là arrivent
en dénutrition dans les CHSLD.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Je vais
laisser…
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le
Président. Bonjour, mesdames. Vous parlez beaucoup, là, de dénutrition, de
carences nutritionnelles. Et, dans le contexte actuel où on a un projet d'assurance
autonomie dans lequel on prévoit développer
des plus grands partenariats, notamment avec les entreprises d'économie
sociale, est-ce que vous diriez… et j'ai vu que vous avez développé une grille, là, le DNA, un diagnostic
nutritionnel, mais est-ce que c'est facile pour quelqu'un de dépister
une situation de carence nutritionnelle? Un préposé qui va à la maison et qui n'est
pas nécessairement un diététicien, qui n'est pas nécessairement infirmier ou
infirmière, est-ce que vous pensez qu'il pourrait y avoir une formation spécifique? Et comment? À quoi
spécifiquement ces personnes-là… sur quoi devraient-elles être formées
pour être en mesure de dépister les problèmes, les carences?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : Merci. Tout à l'heure,
je suis peut-être allée rapidement. Mais, justement, cet outil-là a été développé pour qu'il soit présenté par des
employés qui font du service d'aide à domicile, pas nécessairement des professionnels de la santé. Alors, il peut être
utilisé par, par exemple, une personne qui va aider à cuisiner ou un
étudiant qui a été engagé pour un travail d'été.
C'est très facile, c'est 10 questions. Et la compilation des résultats,
c'est selon les scores obtenus. Alors, oui,
c'est facile de dépister. Puis ça peut être fait par n'importe qui, pas
nécessairement un professionnel de la santé.
Mme Proulx : Donc, cette
grille-là pourrait simplement être utilisée et ne requiert pas une formation
spécifique pour son utilisation.
Mme Gagné (Anne) : Non.
Mme Proulx :
O.K. Et j'aimerais ça, puisque vous êtes là, que vous nous donniez un peu plus
de détails sur ce que c'est
concrètement que la dénutrition. Est-ce qu'on parle de personnes qui sautent
des repas? Est-ce qu'on parle de personnes
qui ne mangent pas suffisamment ou des personnes qui n'ont pas suffisamment de
diversité dans les aliments? Qu'est-ce
que c'est, selon vous, le principal problème, quand on parle de dénutrition,
bien sûr chez les personnes âgées qui sont à domicile?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
• (17 h 30) •
Mme Gagné (Anne) : En fait, toutes
vos réponses sont bonnes. Comme je vous disais, au départ, là, le
vieillissement normal fait qu'on a des besoins plus grands, que nos besoins ne
sont pas comblés.
En plus de ça, s'il y a une maladie, si, par
exemple, la personne ne peut pas s'alimenter parce qu'elle n'a pas suffisamment d'argent… là on fait référence aux
apports alimentaires, ce qu'on mange, là. Alors, si la personne, elle n'a
pas d'argent, elle ne peut pas le faire elle-même, si elle ne peut pas aller s'acheter
des aliments, si elle ne peut pas cuisiner…
Parfois, ça peut être un couple dont le conjoint décède. Là, la personne peut peut-être
sauter deux, trois repas. Puis
de sauter deux, trois repas, six, huit
heures sans manger, déjà il
y a une perte de la masse musculaire.
Alors, déjà, la personne âgée, elle
est fragile en raison du vieillissement, et c'est normal, mais, s'il y a des
événements supplémentaires, c'est là que ça peut aggraver son état nutritionnel.
Mme Bouchard, voulez-vous ajouter quelque chose?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Bouchard.
Mme Bouchard (Joanie) : Merci. En
fait, pour compléter Mme Gagné, je vous dirais qu'effectivement on a deux
sources qui vont amener cette problématique-là avec le vieillissement.
Outre les changements normaux que Mme Gagné a
bien expliqués au début de son allocution, donc on a soit une augmentation des
besoins qui vont être présents chez la personne âgée suite à un vieillissement
normal ou une pathologie qui est présente ou
des apports qui vont être insuffisants. Dans le cadre de l'autonomie à domicile
et de handicaps ou d'incapacités, on va parler d'une difficulté soit à
se nourrir, qui est incluse présentement dans l'évaluation du système de mesures fonctionnelles, ou une
difficulté aussi à se préparer un repas ou à aller faire les courses, qui vont
toucher soit la quantité d'aliments qui vont
être ingérés par la personne ou la qualité. Puis c'est deux notions qui sont
importantes, parfois qui vont faire que la
dénutrition ne soit pas dépistée ou le risque nutritionnel ne sera pas dépisté
de façon adéquate
C'est que ce
n'est pas juste la quantité d'aliments qui va être importante, mais aussi la
qualité des aliments qui vont être ingérés, et là il y a plusieurs
facteurs qui viennent entrer en compte à ce moment-là.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. Et, en lien
avec ce que vous venez de dire, toute la question des aidants naturels, les personnes qui font partie de la famille et qui
demeurent à domicile pour prendre soin des personnes âgées… est-ce que, selon vous, les aidants naturels sont bien au fait
des changements de l'évolution des besoins nutritionnels au fur et à
mesure du vieillissement des personnes? Est-ce que c'est quelque chose que vous
avez constaté? Est-ce qu'il y a un besoin là? Comment on les sensibilise, les
aidants naturels?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Mme Gagné
(Anne) : Écoutez, je ne
voudrais pas porter de jugement sur les connaissances, mais, si la
majeure partie de la population… Vous êtes représentatifs de la population,
vous me posez beaucoup de questions là-dessus, donc j'imagine que leur connaissance par rapport à ça n'est pas,
peut-être, suffisante. Mais ce serait peut-être un bon moyen d'améliorer
la nutrition des aînés, de les former, de leur donner de la formation, de l'information,
de les sensibiliser à ça. Oui, ce serait intéressant de le faire.
Mme Bouchard (Joanie) : En fait…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Bouchard.
Mme Bouchard (Joanie) : …sur le
terrain actuellement, ce qu'on observe, c'est que c'est souvent le rôle que la
diététiste-nutritionniste va occuper, entre autres. Quand les aînés sont vus à
domicile par une diététiste-nutritionniste,
comme elle ne sera pas présente à tous les moments, à tous les repas de la
journée de la personne, il y a de l'information
qui va être transmise. Donc, il y a l'enseignement, il y a de la formation qui
est faite à ce moment-là, quand il y a une prise en charge individuelle,
qui permet aussi de cibler les messages et ce qu'on souhaite qui soit vraiment
surveillé pour cette personne-là en particulier.
Donc, c'est
fait lorsque la personne est prise en charge par une diététiste-nutritionniste.
Sinon, lorsque les services ne sont
pas offerts et que c'est d'autres services d'aide à domicile qui sont offerts,
à ce moment-là, bien, effectivement, ce que Mme Gagné a indiqué, c'est
ce qu'on peut constater.
Mme Gagné (Anne) : Si vous permettez
que…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : Si vous
permettez, j'ajouterais le… Justement, le dépliant qu'on a produit, là, qui est
distribué auprès des aînés, bien c'est
souvent leurs familles qui l'utilisent, leurs frères, leurs enfants puis qui
discutent avec eux. Alors, ce sont des outils qui peuvent aider effectivement,
là, pour améliorer leur alimentation.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci. Il y a
madame…
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin :
Oui. Alors, bonjour, mesdames. Merci d'être là.
Comme vous
avez vu, dans la proposition du livre blanc de l'assurance autonomie, il est
beaucoup prévu d'avoir recours aux EESAD, aux organismes communautaires
et aux entreprises d'économie sociale dans le domaine, là, et ce sont des gens qui vont être appelés à être,
faire partie du quotidien des gens qui vont être à domicile. Vous nous
avez parlé de la grille qui permettrait à
des gens d'évaluer la dénutrition chez les gens mais, au-delà de ça, d'apporter
des correctifs. Pensez-vous qu'avec
une… Est-ce que c'est envisageable qu'avec une formation adéquate ces gens-là
puissent pallier aux manques nutritionnels des gens qu'ils vont voir
régulièrement à domicile? Et, souvent, faire les courses, préparer les repas… c'est
souvent ces gens-là qui sont à ces tâches-là. Est-ce que vous pensez que c'est
envisageable?
Mme Gagné (Anne) : Bien, en…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : En fait, oui.
Comme on le disait tout à l'heure, une fois qu'on a obtenu le score sur le
risque nutritionnel, il y a une section où il faut augmenter les apports
alimentaires. Alors, pour augmenter les apports alimentaires, on a parlé de la préparation des repas à domicile,
livraisons de repas, tout ça. Alors, ces organismes-là peuvent faire ce… peuvent jouer ce rôle-là qui est
important, oui. Mais, au niveau de l'intervention nutritionnelle puis de
faire l'évaluation nutritionnelle, là, ça prend une nutritionniste pour le
faire. Mais, à un certain niveau, oui, c'est utile, puis ça se fait déjà d'ailleurs,
effectivement.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Bouchard.
Mme
Bouchard (Joanie) : Oui. En
fait, puis pour compléter ce que Mme Gagné a dit, les personnels qui
sont présents peuvent définitivement
apporter une contribution en ce qui a trait aux quantités d'apports qu'on a
parlé. Mais ça me permet en fait d'introduire aussi que les
diététistes-nutritionnistes vont intervenir pour beaucoup d'autres raisons à domicile,
chez les gens qui sont en perte d'autonomie. Par exemple, chez les aînés, chez
une dame qui va souffrir de diabète, qui
prend soit des hypoglycémiants oraux ou de l'insuline, parfois, cette
raison-là… si l'alimentation n'est pas de qualité ou suffisante, ce problème-là
peut être suffisant pour amener des complications médicales et mener à une
hospitalisation. Donc, à ce moment-là, c'est des aspects qui ne pourront pas nécessairement
être couverts par des aides à domicile, mais le relais se fait.
Une fois que
la diététiste-nutritionniste a évalué et déterminé un plan de traitement, même actuellement sur le terrain, il y a beaucoup
de collaborations qui se font, et ces gens-là sont très utiles à ce moment-là pour pouvoir permettre la surveillance
et donner aussi de l'information aux diététistes-nutritionnistes sur les apports
qui sont consommés par la personne.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé pour le bloc du gouvernement. Pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
Une voix : Non.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Merci, M. le Président. Mme Bouchard, Mme Gagné, je suis heureuse de vous
retrouver.
Écoutez,
5 % à 15 % des personnes âgées qui sont en situation
de dénutrition à domicile… Vous avez parlé de l'outil que nous avons développé, je crois, il y a à peu près
deux ans, le premier outil qui s'adressait vraiment aux personnes
âgées à domicile. J'aimerais savoir, depuis ce temps-là, est-ce que vous
évaluez que cet outil a porté fruit et qu'il a donné des résultats dans la population?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : Alors, nous n'avons pas fait d'évaluation, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a eu une réédition. Je ne sais pas
combien… le nombre de copies qu'on a reçues, mais on a eu beaucoup de commentaires
positifs, que les gens l'utilisaient, que c'était
pertinent, que le format… Effectivement, comme vous avez dit, il y a beaucoup d'informations. Parce qu'on en a parlé tout à l'heure, hein, de donner de l'information. Et souvent c'est des outils qui sont faits pour la population
en général.
Alors,
c'était la première fois qu'on faisait un outil qui était… qu'on visait justement
cette population-là, c'est pourquoi on l'a fait en
conséquence de. Mais, oui, c'est pertinent puis… Mais on n'a pas fait d'évaluation,
là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Vous savez, quand on vit seul à domicile, on a tendance à ne pas s'alimenter.
Mon
père, il ne mangeait pas quand il était seul, il prenait une saucisse crue. Ce
n'est pas une façon de s'alimenter. Mais il n'était pas le seul. Et les
seules fois où il mangeait, c'est quand je lui apportais un repas ou quand la
popote roulante se déplaçait pour aller à
domicile. Et je suis certaine aussi que c'est comme ça pour beaucoup de
personnes en situation de handicap,
parce que l'assurance autonomie couvre évidemment les personnes âgées mais couvre
aussi les personnes à partir de 18 ans en situation de handicap.
Quand on est seul…
même moi, quand je suis seule à Québec, j'ai tendance, à l'appartement, à moins
bien m'alimenter que lorsque je suis en compagnie de quelqu'un d'autre. Et je
pense que ça, ça fait partie du phénomène du
plaisir de bien se nourrir. Et on peut faire des évaluations, mais, si l'évaluation…
et après ça qu'il n'y a pas un suivi, je pense que c'est difficile. Et
il y a des gens qui sont seuls, qui n'ont pas de proche aidant, et c'est là, je
pense, la très grande difficulté.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
• (17 h 40) •
Mme Gagné (Anne) : Oui. En fait, il y a deux choses : oui, il faut dépister, puis on
a un outil qui est intéressant, pertinent, qui est faisable, mais aussi
il y a des recommandations qui sont pertinentes.
Puis tout à l'heure
on en a parlé. Puis ce qui est intéressant aussi, c'est qu'on n'a pas besoin
nécessairement d'ajouter des ressources, on
peut utiliser les ressources qui existent déjà. On a parlé d'économie sociale,
on peut parler des popotes roulantes,
je veux dire, il y a un réseau qui est déjà existant. Puis ce qu'on dit
finalement, c'est que ça soit dépisté puis que par la suite on mobilise ces
gens-là à travailler différemment avec les aînés parce qu'ils sont déjà là,
puis il y en a déjà qui ont des connaissances aussi.
Alors,
je pense qu'il y a quelque chose qui est bien installé, mais c'est d'apporter
cet outil-là qui est pratique puis le
dépister, puis on va avoir des résultats. Ça, c'est certain. Puis il y a des
recommandations qui sont concrètes. Quand on parle de s'assurer que, quand... Lorsque le niveau est faible, de s'assurer,
quand on rencontre la personne âgée, bien, de… est-ce qu'il y a eu une perte de poids, est-ce qu'il y a une personne
qui est décédée, est-ce qu'il y a eu un gros changement dans sa vie?, c'est
ça qui va faire que son état nutritionnel va être modifié. Modéré? Bien là, il
faut l'encourager à s'alimenter, il faut lui donner des conseils.
Ça fait que c'est
déjà quelque chose de concret, de pertinent qui peut être fait par l'entourage.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Il y a un manque… un membre du gouvernement — quand je suis fatiguée, des fois je ne suis
pas capable de trouver mes mots — une députée du gouvernement qui
mentionnait : Comment on fait pour prévenir? Moi, je me souviens, à un moment donné, d'un travailleur
de milieu. Entre autres, dans les HLM, les travailleurs de milieu qui entrent dans les appartements, ouvrent la porte du
réfrigérateur et bien souvent ils se rendent compte qu'il n'y a rien ou presque rien dans le réfrigérateur. Alors, on voit
que ça fait partie aussi de cette équipe-là qui peut entrer dans ce
panier de services, des gens qui se mobilisent et qui sont capables de
dire : Les travailleurs de milieu qu'on avait pour les jeunes, maintenant
il y en a pour les personnes plus âgées, tout de suite aviser le CLSC qu'il y a
une difficulté à ce niveau-là. Mais c'est souvent la solitude qui fait en sorte
que les personnes deviennent en situation de dénutrition, dénutries. Puis,
lorsqu'elles se retrouvent en CHSLD, bien là c'est là que c'est pire.
Puis
c'est vrai que, dans les différents CHSLD, la qualité de l'alimentation n'est
pas la même, c'est très variable.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme
Gagné (Anne) : Bien, pour les CHSLD, nous avons été convoqués pour une
autre commission au mois de novembre, alors on pourra élaborer un peu plus à
cet effet.
Oui,
c'est variable. Il y a eu un rapport du Vérificateur général qui a été produit.
Il y a des recommandations qui sont
faites. On pourrait vous en parler longuement. Mais, considérant qu'aujourd'hui
on parle de soutien, d'autonomie, santé
puis que les personnes restent à domicile, là on aimerait prendre le temps de
plus élaborer sur ce qu'on a à vous dire à ce sujet-là. Mais
effectivement il y a des problèmes là aussi, dans les CHSLD.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : 1263 Mme Blais :Mais
l'assurance autonomie, c'est vraiment pour les personnes, que ce soit le
domicile, la maison, que ce soit pour
une résidence privée, une coopérative d'habitation, une ressource
intermédiaire, jusqu'au CHSLD, là.
C'est
toute cette panoplie de services quand on parle de l'assurance autonomie. Donc,
on vous écoutera une autre fois
concernant les CHSLD, mais ça fait partie aussi de cette couverture-là, puis il
ne faut pas l'oublier parce que c'est comme
une espèce de suite, là. Quand on ne peut plus vivre à domicile… Bien souvent,
les gens, quand il y a un décès dans le
couple, alors, c'est là où on casse maison ou logement puis qu'on va vivre dans
une résidence privée. Puis, quand on n'est plus capable de vivre là puis qu'on a besoin de plus de soins,
ressources intermédiaires jusqu'au CHSLD, puis il n'y a personne qui
veut aller au CHSLD, mais on y arrive parfois.
Mme Gagné
(Anne) : Mais peut-être que…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné
(Anne) : Peut-être que je me suis mal exprimée, Mme la députée.
Je ne dis pas qu'il n'y
a pas de problème en CHSLD, mais par contre ce que je dis, c'est que les
personnes arrivent déjà dénutries en CHSLD
et que, si on veut les maintenir à domicile, on doit faire des choses
concrètes, on doit dépister l'état nutritionnel, et ça va éviter qu'ils
se rendent dans les CHSLD. Ça va éviter aussi qu'ils se ramassent à l'urgence
dans le centre hospitalier.
Alors,
c'est pour ça que je vous dis que nous trouvons… et nous sommes très heureuses
qu'il y ait un projet à cet effet. Mais par contre, si on ne fait pas de
dépistage nutritionnel, on va manquer notre coup.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme Gagné
(Anne) : Bien, quand je dis «on», c'est la société et tout le monde.
1263 Mme
Blais :MmeBlais : Peut-être
au même titre que les proches aidants qui veulent jouer un rôle important au
niveau de l'implantation de l'assurance autonomie, vous, les nutritionnistes,
vous souhaitez aussi jouer un rôle important, parce que, si on veut faire le
maintien à domicile, il faut que toute la question de l'alimentation prenne son
importance puis qu'elle soit considérée pour la santé et l'autonomie de la
personne.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné
(Anne) : Je ne suis pas certaine d'avoir compris votre question.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Bien, les proches aidants veulent jouer un rôle important au niveau de l'assurance
autonomie, ils veulent se sentir considérés, ils veulent pouvoir avoir du répit,
ils veulent être partie prenante de cette assurance autonomie. Les
nutritionnistes aussi, vous voulez jouer un rôle important au niveau de l'implantation
de l'assurance autonomie parce que vous voulez que les personnes qui restent à
la maison le plus longtemps possible soient en santé pour ne pas arriver en situation de dénutrition au CHSLD. Donc, vous
voulez être considérés à l'intérieur de l'assurance autonomie.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : Tout à fait. En fait, c'est ce qu'on dit, en fait. Pas que les
nutritionnistes soient considérés, mais
que leur rôle… qu'on soit impliqués, par exemple, en… lorsqu'il y a un risque
nutritionnel élevé, que la personne soit référée à une nutritionniste. On peut aussi… On n'a pas beaucoup parlé,
tout à l'heure, de la quatrième recommandation. On souhaiterait qu'il y
ait des analyses qui soient faites.
Est-ce
que vous en parlez, Mme Bouchard, par rapport à l'INESSS, cette contribution,
qu'on pourrait apporter, collaboration?
Mme Bouchard
(Joanie) : Bien, en fait, effectivement, l'essence du mémoire qu'on
est venues présenter aujourd'hui, c'était pour sensibiliser.
On souhaitait que l'aspect
nutritionnel soit tenu en compte davantage pour l'évaluation des besoins dans l'assurance autonomie. On est conscients, on a
parlé de ressource au début à cet effet-là, quelles ressources ça va
prendre, mais aussi,
quel impact que ça va avoir d'inclure ces ressources-là, on y est sensibles
également. Mme Gagné nommait aussi qu'on
est une petite organisation, et donc naturellement de faire toutes ces
études-là et cette documentation-là, c'est un gros mandat pour nous. On voyait la pertinence d'impliquer l'INESSS à
ce niveau-là, qui a un mandat d'excellence et de documentation de bonnes pratiques, pour aller documenter les impacts, la
rentabilité, à ce moment-là, des soins nutritionnels qui sont offerts à
domicile, pour s'assurer qu'à ce moment-là on spécifie vraiment ces impacts-là
et qu'on oriente nos recommandations en fonction de ça.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Pour moi, c'est clair
que vous faites partie de l'équipe interdisciplinaire, surtout du côté de… je
dirais, des soins physiques.
On
parle souvent du médecin, de l'infirmière. Mais nutritionnistes puis moi, je
rajouterais également kinésiologues doivent
travailler en collaboration pour avoir un plan de traitement. Si on veut éviter
que les gens aillent en CHSLD… ou demeurent
le plus longtemps possible en santé à domicile dans leurs conditions, bien je
pense que vous êtes un joueur majeur et puis je tiens à dire que vous
devez vous imposer.
Dans
le projet du livre blanc, ce que l'on voit, c'est que les services
professionnels seraient gratuits. C'est-à-dire, ils sont fournis par le
CLSC ou le CSSS et, comme le médecin, l'infirmière, seraient couverts par le
régime. Et vous savez qu'il y en a qui vont
avoir une contribution à faire, mais, de ce que je comprenais dans le livre
blanc, le côté nutrition, infirmière et médecin pour les soins à
domicile serait fourni par le CLSC, donc serait gratuit. Est-ce que c'est la
perception que vous avez?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
Mme Gagné
(Anne) : Que les soins nutritionnels seraient gratuits? C'est ça que
vous me…
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, dans le… S'ils sont
fournis par les services du CLSC, à ce moment-là, il n'y aurait pas de
contribution demandée pour cette partie des services.
Mme Gagné
(Anne) : Bien, écoutez…
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Ça, ça va être des points qu'on va éclaircir,
puis je…
Mme Gagné
(Anne) : Oui. Nous, on ne s'est pas penchés sur le financement, l'organisationnel,
tout ça. Mais actuellement les soins nutritionnels, la nutritionniste, c'est un
service qui est offert gratuitement, là. Alors, c'est fourni par le CLSC.
Alors, je…
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, c'est…
Mme Gagné
(Anne) : C'est peut-être que ça va changer, je ne le sais pas, mais on
ne s'est pas penchés sur cet aspect-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, en tout cas, on va avoir
l'occasion de poser des questions là-dessus aussi, mais ma lecture, c'est
que ces services-là… J'ai parlé beaucoup de la contribution de l'usager, là,
mais je pense qu'il y a des services qui étaient… c'était compris que pour tous
les gens c'était fourni gratuitement.
Par contre, on sait
qu'il y a une pénurie de ressources dans les CLSC, hein? Si vous essayez de
faire une consultation en externe dans un
CLSC, ça peut prendre un an, un an et demi, deux ans avant d'avoir le service.
Donc, il faut qu'il y ait une priorité qui soit accordée possiblement
aux gens aux soins à domicile. Ça, je trouve que ça serait intéressant que vous
fassiez les travaux pour savoir c'est quoi, le nombre de personnes que ça
prendrait pour qu'on soit capable d'offrir les services de façon raisonnable
aux gens qui demeurent à domicile.
On
part du principe qu'on fait l'évaluation, mais, si on a besoin de plus, à ce
moment-là, selon moi, ça demande l'intervention d'une nutritionniste. Qu'est-ce
que vous en pensez?
Mme Gagné
(Anne) : Bien, on a fait…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Gagné.
• (17 h 50) •
Mme Gagné
(Anne) : Oui. On a fait des ratios, comme... Mme Bouchard vous en a
parlé tout à l'heure.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Bouchard.
Mme Bouchard (Joanie) : Oui. En fait, pourquoi on a débuté ces
travaux-là aussi dans la dernière année? C'était, entre autres, pour
mieux documenter ces aspects-là et c'est aussi parce qu'on voyait… sur le
terrain, effectivement, actuellement, les services en CLSLC pour voir une
diététiste-nutritionniste sont gratuits.
Ceci
dit, les effectifs sont faibles, ce qui fait que les gens attendent longtemps.
Ça a d'ailleurs été documenté dans le rapport du Vérificateur
général. On parlait d'attendre jusqu'à 990 jours, dans certains endroits, pour
pouvoir voir la diététiste-nutrionniste. Il y a beaucoup
de références qui sont faites, dans le document qu'on vous a présenté, sur les ratios, où
on en discute, de ces chiffres-là qu'on est allés chercher auprès de nos
membres, à savoir le nombre de références qui sont faites actuellement aussi en
nutrition, par année, les raisons de références, quelles sont les raisons pour
lesquelles on demande que les diététistes-nutritionnistes interviennent. Ce
sont des problèmes qui sont souvent aigus.
On parle
fréquemment de dénutrition, mais on parle aussi de troubles de déglutition, d'alimentation
par sonde. Ce sont des problèmes qui
sont importants pour maintenir l'autonomie des personnes à
domicile. Mais vraiment, en termes d'effectif, qu'est-ce que ça prendrait? Comme on vous avait mentionné dans
le document des ratios, s'il y a une étude qui
est faite par population, on en propose, une amorce de suggestion d'effectif
par territoire.
Le Président (M. Bergman) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Je suis prudent, hein, quand on travaille avec le
nombre de demandes parce que, quand le délai est long, souvent les gens
ne feront pas la demande parce qu'ils savent que ça va prendre trop temps. Donc, il faut peut-être se trouver une autre
façon indirecte d'évaluer le besoin, puis après ça on pourrait regarder
à quel niveau on peut répondre à ce besoin.
Moi, je vois
un beau partenariat dans le réseau de
la santé, là, le partenariat nutrition-kinésiologue. Je ne sais pas si vous avez l'occasion de travailler avec les
kinésiologues dans les milieux, mais j'aimerais ça vous entendre là-dessus,
voir si vous avez des relations avec les gens de l'autre profession.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Mme Gagné
(Anne) : Bien, je ne sais
pas si vous le savez, mais les kinésiologues souhaitent fonder, créer un
ordre professionnel. Alors, on va les
rencontrer prochainement à cet effet, puis je pense que ça va être
pertinent. Eux, ça concerne plus l'activité physique, la condition
physique.
Alors, écoutez,
nous, on veut travailler avec tout professionnel qui peut contribuer à
améliorer la santé de tous les Québécois. On est pour ça, l'interdisciplinarité.
Je veux dire, on n'est pas contre la vertu.
Le Président (M. Bergman) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président.
Mme Gagné (Anne) : Mais je ne sais
pas qu'est-ce que ça sous-entend, votre question, là. Vous avez un petit
sourire, mais...
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Ce
que ça ne sous-entend pas... c'est que je ne veux pas vous marier avec eux
autres. Ça, ça ne sous-entend pas ça.
Ce que ça
sous-entend, c'est que, lorsqu'on regarde la personne dans sa globalité, il y a
deux éléments qui sont essentiels. Moi, je pense qu'il y a trois
éléments essentiels : d'abord, la prise des médicaments de ces gens-là, c'est
bien important d'en avoir le moins
possible, puis qu'ils prennent justement ce qui est nécessaire;
l'autre élément, toute la question nutritionnelle; puis, troisième
élément, c'est qu'il faut les garder avec une certaine activité physique. Et
ça, c'est complémentaire. Et puis tu as le rôle également de l'infirmière, du
médecin. Mais, je vous dirais, si on parle de prévention,
ces trois professionnels-là, qui est le pharmacien, la
nutritionniste-diététiste et le kinésiologue, doivent être capables de
travailler en équipe. Je comprends qu'ils ne sont pas obligés de se réunir
ensemble pour parler de ce que chacun fait,
mais il y a quand
même une interrelation à ce niveau-là. Le kinésiologue, c'est vraiment un professionnel qui, d'après moi, doit s'implanter
de plus en plus dans le réseau de la santé.
On parle de
coûts, mais quelqu'un qui fait une chute avec une fracture de hanche, c'est un
coût important pour la société. Mais
quelqu'un qui est dénutri puis qui attrape des infections, avec une pneumonie,
qui rentre à l'hôpital, c'est un coût important pour la société. Donc,
moi, je pense qu'à un moment donné il faut faire cette prévention-là pour
éviter que des gens utilisent des services encore plus dispendieux, mais
surtout pour essayer de les garder en santé et à la maison le plus longtemps
possible.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Gagné.
Mme Gagné (Anne) : Vous avez
quasiment résumé une grande partie de notre mémoire.
Effectivement,
c'est important, la prévention puis la nutrition. Et, tout à l'heure, vous me
disiez d'imposer notre importance ou notre rôle, mais on parle déjà des
soins de nutrition dans le livre blanc. Nous sommes bien heureuses à cet effet. Puis même nous, on ne parle plus de
services en nutrition, on parle de soins nutritionnels parce que la
nutrition, c'est aussi important que le médicament. Et alors on est partie
prenante de ça, on a un rôle à jouer important et on le fait en
interdisciplinarité.
Chacun a son
rôle à jouer, effectivement. Et c'est comme ça qu'on va réussir à améliorer la
santé des Québécois.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Pour terminer, je veux juste
vous remercier puis vous féliciter de venir présenter... parce que vous
nous apportez des éléments qui sont importants. On parle beaucoup d'assurance
autonomie, mais il faut voir le rôle que nos
professionnels vont jouer à l'intérieur, pas seulement dans l'organisation de l'assurance
autonomie, mais également dans les services qu'ils peuvent offrir. Puis je
tiens à vous féliciter et à vous remercier beaucoup.
Le
Président (M. Bergman) : Mme Gagné, Mme Bouchard, merci d'être
ici avec nous aujourd'hui et partager votre expertise avec nous. On l'apprécie
beaucoup.
Collègues, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux jusqu'au mardi le 5 novembre 2013, à 10 heures, afin de poursuivre les
consultations particulières et les auditions publiques sur le livre blanc sur
la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour
tous. Alors, bonne soirée, collègues.
(Fin de la séance à17 h 56)