(Seize heures une minute)
Le Président (M. Bergman) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.
La commission
est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie
pour tous.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Daneault (Groulx) est remplacée par Mme Roy (Arthabaska).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Bergman) : Merci. Alors, on reçoit maintenant Le Comité d'action des personnes vivant
des situations de handicap. Alors, bienvenue à l'Assemblée nationale, bienvenue
à la commission. S'il vous plaît, pour les fins d'enregistrement, on a besoin
de vos noms, vos titres. Et vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation.
Le Comité d'action des
personnes vivant
des situations de handicap (CAPVISH)
Mme
St-Pierre (Hélène) : Hélène
St-Pierre, coordonnatrice du CAPVISH,
Comité d'action des personnes
vivant des situations de handicap.
M. Labrecque (Robert) : Robert
Labrecque, auteur et administrateur au CAPVISH.
Mme Blaney (Manon) : Manon Blaney,
membre du conseil d'administration du CAPVISH.
Mme Fontaine (Josée) : Josée
Fontaine, directrice de Handi Apte, de Sherbrooke.
Le Président (M. Bergman) :
Bienvenue. Alors, vous pouvez commencer votre présentation.
Mme
Fontaine (Josée) : Donc,
nous tenons à vous remercier de nous avoir permis de venir vous rencontrer
pour vous faire part de nos préoccupations.
Donc, les
deux organismes communautaires, on est cosignataires de ce mémoire et on a
travaillé cet avis de manière conjointe afin de refléter au mieux la
volonté des personnes utilisant les services de soutien à domicile — est-ce
que ça va, vous me comprenez bien? Merci. En
effet, nos deux associations regroupent et représentent sur une base
locale des personnes ayant une ou plusieurs limitations entraînant des
situations de handicap à différents plans : activités à la vie quotidienne, soins personnels, accessibilité,
déplacements, transport. Le CAPVISH aborde ces enjeux sous l'angle de la défense collective des droits des personnes
ayant des limitations motrices. Pour sa part, Handi Apte poursuit la
mission de travailler au maintien à domicile
des personnes handicapées pouvant présenter une ou plusieurs de ces
déficiences, que ce soit motrice, du langage
ou de la parole, auditive ou visuelle. Nos deux organisations partagent
également la réalité du soutien au recrutement, de la sélection des
travailleuses et travailleurs à domicile ainsi que l'accompagnement des
personnes utilisant la mesure d'allocation directe du chèque emploi-services.
Notre avis s'appuie sur l'expertise des
personnes ayant des limitations fonctionnelles, raison d'être de nos organisations depuis plus de 30 ans. Également, notre réflexion s'inspire de l'expérience
terrain que nous avons développée par
la gestion de nos banques de référence. Nos membres sont d'abord et avant tout des experts en matière d'analyse et d'évaluation des besoins dans les
services et soins à domicile. À travers leur connaissance du réseau, ces
personnes témoignent des changements apportés au fil des années et de la
qualité de l'offre de services.
Nous sommes
convaincus que l'exercice proposé constitue un effort nécessaire pour répondre
adéquatement aux défis posés à la société québécoise par l'augmentation
de la demande en services de soins de longue durée engendrée par le vieillissement de la population. Il nous
apparaît également essentiel pour répondre aux besoins des personnes
ayant des limitations et de leurs proches
qui au quotidien se débattent et négocient pour l'obtention de services
adéquats et de qualité répondant à leurs besoins.
Nous reconnaissons difficilement dans le livre
blanc les orientations prises par l'État québécois dès la fin des années 70 à l'endroit des personnes
handicapées et de leurs familles. S'appuyant
sur le principe de la vie autonome pour les personnes ayant des limitations fonctionnelles, notre mouvement a vu
s'enraciner la notion du libre choix, notamment dans la mise en place de
programmes. Également, le principe de compensation de coûts reliés aux
limitations sans égard aux revenus ni à la contribution
des proches demeure un principe sur lequel doivent se fonder les services de soutien à domicile. Ces deux fondements nous
semblant menacés, il reste, selon nous, bien des éléments à préciser
pour faire des intentions exprimées par le
livre blanc autant que des rapports le précédant des instruments de l'indépendance
à domicile.
Je cède la parole à...
M. Labrecque (Robert) : La quête de
l'indépendance à domicile. Bien que le livre blanc sous-entend la
quasi-disparition de la mesure allocation directe chèque emploi-services, qu'on
peut appeler aussi CES, et que j'ai vu lors
d'autres audiences dernièrement que les syndicats aimeraient peut-être
que cette mesure-là cesse, on a eu par le ministre de la Santé… qui a clarifié la prise de cette mesure, qu'elle est appelée à rester,
puis, nous, ça fait vraiment notre bonheur. Cette précision dans le modèle d'organisation des services répond à nos aspirations, telles
qu'identifiées dans la politique À part... égale de 1984 — que
vous avez sûrement lue, près de votre lit, là, à vos chevets. On veut vous
faire remarquer que les avantages de
l'autogestion sont autant pour la personne qui reçoit les services, qui les
administre avec le chèque emploi-services, et autant pour l'État, compte
tenu des coûts. Si vous voulez, on peut y revenir plus tard.
Même si la
quête de l'indépendance à domicile ne date pas d'hier, les personnes ayant des
limitations fonctionnelles doivent aussi composer avec un environnement
physique, des programmes inadéquats, mais également elles doivent transiger au quotidien avec les préjugés et les
stéréotypes sociaux. Avec les années, les personnes ayant des
limitations fonctionnelles en ont tiré des engagements… des enseignements,
pardon, communicables et transmissibles à celles et ceux qui demain négocieront avec les différents réseaux soutenant la vie
à domicile. Dans le contexte du livre blanc de l'assurance autonomie,
les personnes aînées nécessitant des services de soins à domicile devraient s'inspirer
de la vision et des expériences des personnes comme nous ayant des limitations
fonctionnelles. Parce qu'elles souhaitent, elles aussi, préserver leur
autonomie, elles devront, on l'affirme... affirmer, pardon, que l'allocation
directe chèque emploi-servicesest une des composantes fortes du système
de soutien à domicile.
La quête de
l'indépendance en dehors du domicile. Nous ne pouvons aborder la question des
soins à domicile sans parler des
infrastructures de nos villes et villages, qui malencontreusement sont loin de
répondre aux besoins des personnes à
mobilité réduite. Vous savez, vous voyez toutes sortes de contraintes.
Que ce soient les autobus municipaux,
interurbains, que ce soit l'aménagement des bâtisses, les restaurants, il y a
plein de choses qui devraient être améliorées, quitte peut-être même, là, à donner
des amendes à ceux qui ne le font pas. Parce que, dans les politiques
qui sont là pour nous permettre
d'accéder à une vie tout à fait normale, il
y a plein de barrières
architecturales présentement, puis, pour nous, là, c'est très important de se pencher là-dessus.
Comment vivre à domicile s'il y a un tas de problèmes, là, qui nous
pourrissent la vie, en fait?
Que les personnes étudient, qu'elles militent,
exercent un travail bénévole ou lucratif, les personnes ayant des limitations
fonctionnelles le font en se dépassant au quotidien pour se laver, aller aux
toilettes, se nourrir, sortir avec des amis. J'entendais Mme Blais, hier,
dire qu'elle voulait avoir des gens qui sont compétents pour...
Ah! Excusez. Il nous reste seulement deux
minutes? Excusez-moi. Bon, c'est…
Le Président (M. Bergman) :
Ça va. Prenez votre temps.
• (16 h 10) •
M.
Labrecque (Robert) : C'est ça,
Mme Blais disait qu'elle voulait avoir quelqu'un de compétent pour lui donner des services d'hygiène. Je pense
que, présentement, avec la notion du chèque emploi-services et la formation
qui va être donnée aux gens… je pense qu'il n'y a pas de crainte à avoir.
Qu'elle se fie à notre expérience.
Mme Blaney
(Manon) : Notre
espoir : le libre choix. Depuis des années, les personnes handicapées revendiquent leur libre choix. Toute personne vivant des situations de handicap doit
pouvoir choisir la mesure qui lui convient, et ce, en fonction de ses besoins et de ses aspirations. Il
s'avère donc indispensable que la future organisation de services s'appuie
sur ce principe.
De plus, une personne vivant avec des
limitations fonctionnelles doit être en mesure de se voir offrir la possibilité
de modifier sporadiquement cette mesure. Se faire imposer une mesure n'est pas
une pratique exemplaire dans le contexte du
livre blanc. Que ce soit en cas de perte d'autonomie temporaire ou de perte
d'autonomie permanente, le libre choix doit rester un des indicateurs
sur lesquels juger de la qualité du service.
Puisque nous aspirons à l'autonomie de gestion,
à la liberté de choisir, à la sauvegarde de notre dignité et à l'estime de soi, nous allons poursuivre notre
lutte à exiger que soient minimisées les situations de handicap. Nous
ne sommes pas de celles et ceux qui allons nous contenter d'être considérés
comme des exceptions de l'assurance autonomie.
Le libre choix doit passer par une offre de mesures variées et de qualité, dont
celui du chèque emploi-services.
Selon nous,
les entreprises d'économie sociale en aide domestique, premiers dispensateurs
de services à domicile destinés aux personnes âgées, ne doivent pas
faire partie d'un passage obligé. Il en est de même pour les principes d'autogestion
accompagnant les services de banque de référence. Une offre diversifiée et
variée de mesures et de dispensateurs de services sera une confirmation de
qualité de service.
Une première
appréhension : la qualité… la question de gratuité du service. Tout ou
presque tout dans la vie des personnes ayant des limitations
fonctionnelles constitue une difficulté. Quelques-unes arrivent à signifier sur
le… à s'intégrer sur le marché du travail et ont un revenu. Certaines ont
travaillé avant de devenir handicapées et ont une petite rente d'invalidité ou encore bénéficient d'une assurance
invalidité à long terme. D'autres ont aussi réussi à s'intégrer au marché du travail, mais, ayant
dû s'en retirer prématurément, peuvent aussi compter sur un certain revenu.
Nous sommes en mesure de
constater jusqu'à quel point la perte du principe de gratuité des services aura
un effet désastreux sur nos vies. C'est dans
cette perspective de combattre l'exclusion sociale et d'accorder une chance
à celles et ceux qui font face à des difficultés
significatives et persistantes que
les programmes ont été mis en place. Puisque la majorité des personnes
handicapées n'ont pas d'épargne en arrivant à la retraite, quelle sera la
conséquence de cette mesure sur le peu de personnes qui auront réussi à
économiser?
M.
Labrecque (Robert) : Une
deuxième appréhension : l'importance accordée à la mesure allocation directe chèque emploi-services. Comme je vous disais tout à l'heure, cette mesure est essentielle,
mais il y a aussi les services de banque
de référence qui se greffent à cette offre, et ça, je pense que c'est une
avancée. Même si vous ne la connaissez peut-être pas, c'est une avancée en matière de services à domicile parce que
ça permet de trouver des gens, de les référer à des personnes
handicapées pour avoir des services. Puis cette mesure ne coûte vraiment pas
cher. Si vous regardez, là, les coûts de ces
personnes-là pour les banques de référence, je crois qu'on peut se dire, là,
que ça coûte environ 330 $ par personne présentement pour assurer
un suivi de dossier, de référer des gens pour les services à domicile.
Nous désirons aussi attirer votre attention sur
le fait que la commission Clair, en 2001… la piètre qualité des services à domicile. 12 ans plus tard — excusez,
je me suis perdu — que
pouvons-nous affirmer en termes
d'amélioration de la qualité des soins et des services à domicile?
Certes, le projet de création d'une assurance
autonomie a un défi de taille. Notre gouvernement saura-t-il le relever en bonifiant la mesure CES, puisque le
ministre Hébert nous affirmé le 7 octobre dernier, lors d'une
rencontre, que cette mesure allait demeurer?
Ce que souhaitent affirmer les banques de référence, c'est qu'elles sont loin
d'être parfaites, puisque le CES est truffé d'imperfections.
Finalement, il est difficile de passer sous
silence notre inquiétude relativement au calcul d'heures allouées sur le plan de services de la personne handicapée,
puisque la tendance témoigne d'évaluations à la baisse. En effet, dans
certaines régions, on croit qu'il est plus facile de rentrer en CHSLD que de
passer toutes les mesures de sécurité dans un aéroport. Ça se veut une blague,
mais je vous dirais, là, qu'il y a des gens, là, qu'on connaît personnellement
que, pour 10 heures de services de plus
par semaine, ils se voient offrir la porte du CHSLD, là, grande ouverte. Puis
pourtant, 10 heures de plus, là, quand quelqu'un a peut-être
15 heures, ce serait simple, là, de le garder à domicile.
On vous
entendait… Je vous entendais parler hier parce que j'ai suivi la commission
assez attentivement. Je pense que vous devriez nous faire confiance, que
les gens qui vivent à domicile présentement sont des modèles qui peuvent aider
les personnes âgées à combattre leurs craintes dans leur milieu actuel plutôt
que de se ramasser en CHSLD ou en mesures compensatoires, là. Je sais qu'il y a
une gamme de services, là, mais je pense que c'est important. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, merci pour votre présentation.
Et maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Merci
beaucoup, M. Labrecque et mesdames, de ce mémoire. Vous soulignez l'importance
du libre choix, et c'est vraiment la valeur
fondamentale du projet qui est devant nous, comment est-ce qu'on peut
donner le libre choix, un libre choix que
vous avez déjà, que vous avez acquis, les personnes handicapées, de chaude
lutte et que n'ont pas les personnes âgées. Alors là, vous avez une
source d'inspiration pour faire en sorte que les personnes âgées puissent avoir
ce libre choix.
Comme je vous
l'ai dit, le programme de chèque emploi-services est une des options, et elle
est là pour rester, notamment pour
les personnes handicapées. Il y a certaines réserves pour les personnes âgées,
parce que les personnes âgées préfèrent souvent que ce soit géré par un
prestataire, par des entreprises d'économie sociale, puis j'y reviendrai tout à
l'heure, mais, pour les personnes handicapées, il est clair que le chèque
emploi-services est là pour rester.
Et, pour le
bénéfice de ceux qui nous écoutent, moi, j'aimerais ça vous entendre, M.
Labrecque, sur comment ça marche, le
chèque emploi-services, comment vous faites pour recruter les gens qui
travaillent à soutenir votre autonomie, pour qu'on puisse comprendre,
là, la mécanique du chèque emploi-services.
Le Président (M. Bergman) :
M. Labrecque.
• (16 h 20) •
M. Labrecque (Robert) : Bon, le
chèque emploi-services nous permet d'engager nous-mêmes des gens. Les banques
de référence peuvent nous aider dans ce sens, en nous donnant des noms, mais
engager quelqu'un, là, c'est prendre son numéro d'assurance sociale, l'inscrire
sur une liste de paie qui est gérée par Desjardins. Je ne sais pas comment ça coûte, ce service de paie là, mais, si
on regarde la mesure du chèque emploi-services, ça coûte environ…
présentement, là, aux alentours de 16 $ de l'heure pour avoir quelqu'un
avec tous les avantages sociaux. Le salaire est
de 13,05 $ brut. Et quelqu'un vient à la maison, on fait nos horaires
nous-mêmes, ce qui m'a permis de vous rencontrer, M. le ministre, l'autre
jour, parce que, pour aller à Sherbrooke pour vous rencontrer, il a fallu que
je me lève aux alentours de 4 h 45
parce que c'est long de me préparer, m'installer dans mon fauteuil, là, me
laver les fesses puis faire ma manucure, me friser, puis tout ça. Puis c'est
important de pouvoir garder ça, parce que, les entreprises d'économie sociale, peut-être que l'avantage, c'est d'avoir
des horaires qui sont toujours tout faits, mais de varier cet horaire-là
est assez dur. Moi, pour avoir essayé deux... bien, trois entreprises
d'économie sociale, dont une seulement pour des
ménages mais les autres que j'ai eu des soins personnels, bien on se retrouve toujours
avec la même chose : il y a beaucoup de gens,
dans ces entreprises-là, qui voyagent en autobus. Autant pour le
chèque emploi-services aussi, mais comme moi, j'ai quand même pas mal d'employés…
C'est tous des étudiants, pratiquement. Il y a beaucoup de personnes, là, qui sont en soins infirmiers ou en inhalothérapie.
Comme je vous disais l'autre jour, j'en ai même une, là, qui est en
santé animale, puis le
vieux bouc que je suis, là, il aime bien ça. Mais ensuite on fait les paies. Ça prend
quand même beaucoup de temps,
mais on sauve de l'argent à l'État de cette façon-là.
Je ne sais pas si vous avez d'autres questions
ou si vous voulez que j'éclaircisse autre chose.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Vous dites
dans votre mémoire qu'il y a quand même des imperfections. J'aimerais ça que
vous puissiez nous signaler quelles sont les
imperfections ou les pistes d'amélioration du chèque emploi-services. Tant qu'à faire
une réforme, aussi bien s'attaquer à ce mode d'allocation.
M. Labrecque (Robert) : Je vous
dirais...
Le Président (M. Bergman) :
M. Labrecque.
M. Labrecque (Robert) : Excusez-moi.
Je vous dirais que ce serait très simple d'informatiser la cueillette des heures, là, puis de l'envoyer directement par système informatique, pour les personnes qui l'ont; de
garder quand même le volet social — parce
que c'est comme ça que la feuille de
paie s'appelle — de
la garder, mais elle devrait être simplifiée. Quant à moi, elle pourrait
avoir seulement le nombre d'heures faites par l'employé Untel pendant une
période de paie. Là, il y a plein, plein de cases pour les congés de maternité,
congés sociaux, tout ça, des cases qu'on ne se sert à peu près jamais. Puis ça
prendrait peut-être une formation pour que les gens puissent devenir
autogestionnaires.
J'ai pensé à quelque chose. Vous disiez hier
puis avant-hier, dans la commission, que les personnes âgées avaient environ 15 % de leurs besoins qui étaient assujettis, présentement, là, par
les CLSC, tout ça. Je pense que même les personnes handicapées, souvent,
qui ont des handicaps un petit peu moindres n'ont peut-être pas accès au chèque
emploi-services ou n'osent peut-être pas le
prendre. Il faudrait essayer de faire des publicités en ce sens. Puis, même
les personnes âgées, certaines qui ont
présentement des aidants naturels ou qui sont encore, on va dire, là, assez
fières, là, de remplir une feuille de
paie avec un employé devraient venir vers les banques de référence pour essayer
d'avoir, là, des gens qui viennent à la maison.
Je ne sais pas si je me suis égaré, là, mais...
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Labrecque (Robert) : Puis
mes consoeurs pourraient peut-être, là, rajouter des choses pour améliorer le
chèque emploi-services, là.
M.
Hébert :
J'aimerais peut-être qu'on nous parle des banques de référence, justement,
parce que vous faites... pour le
chèque emploi-services. Puis je connais très bien celle qui est à Sherbrooke,
mais j'ai eu l'occasion de rencontrer les trois banques de référence au
cours des dernières semaines.
Alors,
j'aimerais que vous nous expliquiez le fonctionnement, d'abord, des banques de
référence. Et quelles sont peut-être
les lacunes que vous voyez dans l'utilisation du chèque emploi-services et le
recrutement et la rétention du personnel?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Fontaine.
Mme Fontaine (Josée) : Oui, merci. À
Sherbrooke, on a une banque de référence qui est composée d'environ 65 personnes qui vont donner des
services à domicile. On parle d'AVD et AVQ, donc ça peut être autant
lever, coucher, bain, hygiène que lavage,
ménage, préparation de repas. On fait de la mobilisation passive aussi, il y a
des actes délégués que nos
travailleurs font, qui ont été formés par les physiothérapeutes du CSSS ou par
les infirmières du CSSS
Donc, nous, on fait la vérification d'antécédents
judiciaires, on s'assure qu'ils ont une formation. On fait aussi, donc, une... Par exemple, Robert pourrait
nous appeler : Bon, bien, Josée, moi, le mardi soir, j'aimerais ça me
faire coucher à 10 heures. Ça fait qu'on a une banque de... on a une base
de données, donc on regarde dans notre base de données : O.K., on a deux personnes qui seraient disponibles le
mardi soir. Donc, on va lui donner le nom, donc Robert va les rencontrer
puis il va choisir.
Donc, ce
qu'on fait aussi après, c'est qu'on s'assure d'une qualité du service. C'est
qu'on appelle et la personne handicapée qui a utilisé le service et le
travailleur ou la travailleuse, voir comment a été le service. Ce n'est pas
rare que, la première fois, nous, on va
rencontrer la personne handicapée ainsi que le travailleur à domicile pour
aider à faire les présentations, parce que, des personnes handicapées,
il y a certaines personnes qui ont de la difficulté un petit peu à faire part de besoins, intérêts, il y en a
d'autres qui sont totalement... ça fait qu'on s'ajuste vraiment à la capacité
de la personne handicapée. Donc, on essaie de faire le lien, la
transition, on fait le suivi par après.
Ça arrive des
fois qu'il y a des problèmes. Il y en a beaucoup qui ont la capacité de gérer
le volet social, la feuille de temps,
mais il y en a plusieurs que, pour eux, c'est complexe, donc on les accompagne
beaucoup quand il y a à compléter ça ou quand il y a des erreurs.
Ça fait que des fois
on... Moi, ce que je porte, et c'est partagé aussi par les personnes qui m'accompagnent,
c'est que, le volet social, les banques
de... je pense que, pour nous, à Sherbrooke, en tout cas, ça pourrait peut-être
régler un problème. Il y a des personnes handicapées qui ont la capacité de
compléter le volet social, qui sont à l'aise avec ça, mais il y en a d'autres que non, puis il y a des problèmes
qui se glissent à ça, les heures qui ont été inscrites à un autre employé, quand ils ont plus qu'un employé en même temps, ou…
Ça fait qu'il y a des erreurs qui se produisent suite à ça. Ça fait que, pour ces personnes-là que, pour eux, c'est une
lourdeur, je pense que les banques de référence pourraient peut-être
être en mesure d'accompagner ou de faire ce volet de gestion, administration
là, parce que de toute façon on a déjà les heures dans notre base de données.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Il y a,
dans l'assurance autonomie, une grande préoccupation par rapport à la qualité des services, donc la qualité de la formation et de
la prestation des services, avec un mécanisme d'accréditation des prestataires.
Au niveau
du chèque emploi-services, comment on peut s'assurer de la qualité de la
formation et de la qualité de la prestation qui est donnée par des
employés qui sont gérés par les personnes elles-mêmes?
Le Président (M.
Bergman) : Mme St-Pierre.
Mme St-Pierre (Hélène) : M. le
ministre, nous, c'était une
préoccupation, dans la région de la Capitale-Nationale, parce
qu'effectivement les commentaires qu'on recevait étaient par rapport à la
qualité des services. Alors, on s'est interrogés, on s'est penchés sur la
question. Ce qu'on en est venu à conclure, c'est qu'il fallait absolument que
ces travailleuses et travailleurs là… — je prononce le terme «travailleuses» d'abord
et avant tout parce qu'à 85 % c'est des femmes — donc
il fallait les doter d'une formation. Et je parle ici de savoir-faire mais
aussi de savoir-être.
Bien
évidemment, la réalité de ces personnes-là, c'est souvent des gens qui sont
éloignés du marché du travail. On observe aussi, du côté de Québec, des
personnes qui sont à la retraite, des 50 ans et plus qui désirent
continuer à être actifs sur le marché du travail, qui ont quelques heures.
Robert
parlait tout à l'heure d'étudiants, d'étudiantes. Alors, pour cette portion-là,
bon, c'était différent, le problème ne se posait pas.
Alors,
ce qu'on a fait, nous, on a rencontré des gens d'un CLE à Québec, on a regardé
la possibilité d'une formation qui pourrait être montée sur mesure. Et,
quand je vous dis «sur mesure», c'est tout simplement pour la bonne raison que
le travail à domicile n'est pas du tout la même réalité qu'en institution. La
personne, le travailleur — la
travailleuse — il est laissé à lui-même, il est seul, donc
il n'y a pas de supervision, il n'y a pas de collègue de travail. Alors,
à ce niveau-là, il y a une façon de procéder, il y a une façon d'être. Alors,
on s'est penchés avec un centre de formation professionnelle… Donc, on est en
projet pilote présentement dans la région de Québec. En tout, c'est une année à
former ces gens-là, en tenant compte, par contre, de leur éloignement du marché
du travail, en tenant compte que ces personnes-là
n'ont pas nécessairement la disponibilité de s'asseoir à temps plein sur les
bancs d'école. Donc, c'est une formation qui représente 132 heures.
Il y a un lien qui se fait aussi avec le ministère de l'Éducation. Ça leur
permet du moins d'avoir des connaissances de base et d'être en mesure d'être
efficaces et de pouvoir agir efficacement, là, avec les personnes.
Cela dit, le problème
auquel on fait face : les banques de référence, on n'est pas l'employeur.
Donc, bien évidemment, à ce niveau-là, il
n'y a pas possibilité d'envoyer former nos travailleurs. C'est sûr qu'il va
falloir trouver une solution, puis on en a parlé justement avec
Dr Hébert il y a quelques semaines : Comment faire en sorte, en n'étant
pas l'employeur, que les travailleurs et
travailleuses puissent recevoir… puissent avoir accès à la formation?
Présentement, je sais que le ministère de l'Emploi
et de la Solidarité sociale devait approcher l'agence, au niveau de Québec,
pour voir quelles pourraient être les possibilités de financer cette
formation-là.
Mais,
pour répondre à votre question, on est tout à fait d'accord avec vous puis on
en a parlé aussi. La question de la formation, elle est absolument
nécessaire.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Il y a des banques de référence à Montréal, Québec et Sherbrooke. Qu'est-ce qu'on
fait ailleurs? Parce que vous exercez un
rôle extrêmement important d'identifier les personnes, de les former, de
s'assurer de la qualité, d'être là en
appui pour remplir des formulaires ou les exigences des personnes handicapées.
Je suis préoccupé par les gens de Saguenay, de Rouyn-Noranda qui n'ont
pas accès à ce genre de service et qui doivent transiger directement un à un
avec des personnes dont ils n'ont pas idée de la compétence, de la formation,
etc.
Alors, comment vous
voyez ça pour les régions en dehors de vos trois zones de juridiction?
Mme Fontaine
(Josée) : Je peux répondre?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Fontaine.
• (16 h 30) •
Mme Fontaine (Josée) : Oui.
Nous autres, on croit que ce serait… on a cette préoccupation-là beaucoup aussi. Donc, on estime que ce serait
important qu'il y ait une création de banques de référence dans chacune des
régions au Québec, parce que c'est vrai qu'une personne qui est dans la Beauce,
par exemple, puis n'a pas accès à cette banque de référence là, bien, soit va afficher au dépanneur, va demander à son
voisin, il y a cette réalité-là aussi, mais je crois qu'il y a une structure à mettre en place qui est déjà, je
pense… Il y a des manques, mais il y a quand même
une bonne base pareil que ce serait important d'implanter.
Puis d'ailleurs
on disait qu'on était prêts, nous autres, les banques de référence, à être un
peu un accompagnateur… ou un projet pilote pour que ça puisse se développer ailleurs en région, pour que les
personnes handicapées au Lac-Saint-Jean, par exemple, puissent vraiment avoir le choix
entre une EESAD, une entreprise d'économie sociale, et le chèque emploi-services. Parce
que, sans ça… Il faut vraiment
que toutes les personnes puissent avoir un choix complet.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Et, quand on regarde des modèles à l'étranger, par exemple le modèle français, où des organismes peuvent être prestataires ou mandataires… Et c'est un peu le rôle que
vous faites. Donc, ils sont mandatés par la personne pour organiser le
soutien à domicile.
Et donc vous
verriez, là, d'un bon oeil qu'on puisse prévoir ces deux modalités pour
s'assurer d'abord qu'il y
ait des banques de référence partout et
qu'ils aient la responsabilité de s'assurer de la qualité des services, de la
qualité de la formation et du soutien aux personnes handicapées?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Fontaine.
Mme Fontaine (Josée) : Oui. Moi, je
suis tout à fait… je verrais ça d'un bon oeil pour permettre à… Oui.
M.
Hébert : O.K.
M. Labrecque…
Le Président (M. Bergman) :
M. Labrecque.
M.
Hébert : …du point
de vue de la personne handicapée, ça vous agrée aussi?
M. Labrecque (Robert) : Bien, du point
de vue de la personne handicapée, oui, justement, ça peut être intéressant. Vous savez, il y a déjà des associations dans plusieurs coins, là, du Québec, des associations de
personnes handicapées qui seraient peut-être intéressées à
travailler là-dessus, parce
que, vous savez, le savoir-être
passe, je pense, souvent avant
la formation académique, là, qui peut être lourd.
Si je prends, là… sans vouloir dénigrer ce que
le CLSC fait, mais ce qui arrive, c'est que souvent, quand ils viennent à mon
domicile, moi, c'est pour une urgence parce que je n'ai pas pu trouver quelqu'un,
il y a quelqu'un qui a brisé sa voiture,
puis souvent ça, c'est à cause du salaire, puis ils ont de la misère à venir à
la maison. Mais, si j'ai quelqu'un du CLSC qui vient pour une urgence,
bien il ne viendra pas plier mes serviettes, là, dans ma salle de bains, il va venir juste pour me donner un service de
base, soit me lever ou me coucher. Il va me laver à la débarbouillette,
il va faire ça le plus vite possible. Puis
il prend 15 minutes sur le temps qui va être enlevé de mon allocation
directe chèque emploi-services pour son transport en plus, ça fait que j'en
ai encore moins pour mon argent, malgré tout.
Puis une fois
ça m'est arrivé que je n'avais personne parce que j'avais des employés, là, qui
étaient indisposés de venir. Et puis j'appelle au CSLC, le CLSC dit qu'on
va m'envoyer quelqu'un — excusez-moi,
je suis assez nerveux, mais je ne devrais
pas, pourtant — et
là le préposé m'appelle puis il me dit qu'il va être à temps double ou quelque chose comme ça pour le soir, il va
venir chez moi, tout ça. Mais je regarde ça, là, puis je rappelle un des
préposés, je dis : Ça va coûter peut-être
200 $ pour venir me coucher ce
soir. Je dis : Ça te tente-tu de venir pareil, là, on va faire le
plus tôt qu'on peut, le plus vite qu'on peut? Ça fait que, donc, il est venu,
une façon de sauver de l'argent qui est énorme, là. 200 $ pour un service, là, juste pour coucher quelqu'un, parce que
c'est quelqu'un qui a plus que 40 heures de faites au CLSC, je trouve ça aberrant, là. Je n'accepte pas,
moi, là, que les gens paient des taxes pour ça puis que ce soit mur à
mur comme ça, là, j'ai de la misère avec ça.
J'aime mieux, là, une petite mesure simple qui fait qu'on économise nos impôts,
tout ça.
Ça fait que,
dans les régions, d'après moi, ils sont capables de s'organiser aussi à avoir
quelque chose, là, qui est très raisonnable puis qui va faire l'affaire
de tout le monde.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Si je peux
me permettre un commentaire, ce que vous avez mis en place avec le chèque
emploi-services et les banques de référence est un beau modèle, et je pense qu'on
doit s'en inspirer pour permettre, dans la gamme
des choix possibles… permettre que ça puisse être disponible même pour les
personnes âgées. Parce que vous me rassurez
sur un certain nombre de réserves que j'ai par rapport à l'allocation directe
pour les personnes âgées. Si on passe par
des organismes prestataires comme des banques de référence, on a là une
garantie qu'il n'y aura pas d'exploitation indue, que les gens vont
avoir une sécurité et vont avoir une qualité de service. Alors, je trouve que c'est
intéressant. C'est extrêmement intéressant, ce que vous avez développé et ce
que vous avez amené.
Deuxième
élément. Avant de terminer mon intervention, je veux vous rassurer. D'ailleurs,
à la page 24, là, on précise qu'en 1998 le principe de la
compensation des conséquences financières des limitations fonctionnelles était déjà inscrit, et je vous rassure là-dessus, on va
respecter les acquis, les acquis du chèque emploi-services et ces
acquis-là également. Et je vous ai déjà rassurés, mais je vous rassure encore.
Vous disiez
tout à l'heure que le livre… À part… égale doit être sûrement un livre de
chevet. Non, c'est plutôt le vôtre
qui est mon livre de chevet de ce temps-ci, que vous m'avez remis la dernière
fois qu'on s'est vus et que je trouve intéressant, parce que vous
partagez votre expérience de handicap, et c'est extrêmement instructif, je
dirais.
Je vais passer la parole à mes collègues pour
compléter le bloc du gouvernement.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste trois minutes.
Mme
Proulx : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, mesdames et
M. Labrecque.
Écoutez, moi, je vais
commencer par un commentaire. Effectivement, je trouve ça extrêmement
intéressant de vous entendre, j'ai appris
beaucoup de choses aujourd'hui en vous écoutant. J'ai encore quelques questions
et j'essaie toujours de transposer
l'expérience que vous avez, que vous avez développée notamment avec le chèque
emploi-services et vos banques de référence, et pour essayer de voir qu'est-ce
qu'il serait possible de mettre en place pour les personnes âgées, qui n'ont peut-être pas la même réalité que
vous. Et il a été beaucoup question, avec les intervenants précédents qu'on a eus, au niveau de préoccupations sur soit
la qualité de la prestation de services par les entreprises d'économie
sociale mais aussi beaucoup du taux de roulement.
Vous avez mentionné
tantôt que les gens que vous embauchez, qui sont référés par les banques de
référence, sont beaucoup des étudiants, de
ce que j'ai compris, des étudiants en sciences infirmières ou en
inhalothérapie, et que la moyenne salariale est à peu près 13 $ l'heure,
de ce que vous leur offrez comme conditions salariales. Est-ce que, dans votre expérience, il y a un haut taux de
roulement ou si vous développez des liens assez solides pour faire en
sorte que vous pouvez investir, là, avec une personne à plus long terme? C'est
quoi, la réalité?
Le Président (M.
Bergman) : M. Labrecque.
M. Labrecque
(Robert) : Bon, oui, il y a quand même un taux de roulement qui est
assez important. Je ne sais pas pour les
banques uniquement. Moi, j'ai un petit peu les deux, là, j'ai un petit peu la
banque de référence et des gens que j'engage de gré à gré, puis j'ai des
gens qui sont à la banque de référence qui me réfèrent des amis en soins infirmiers. Donc, j'ai beaucoup de gens, là,
puis... mais c'est sûr que quelqu'un va venir chez moi pendant deux ans,
est aux études, vient pendant deux ans, ensuite il ne reviendra peut-être pas.
Mais il peut me référer d'autres personnes aussi.
Puis
je vous dirais, là, que j'aime peut-être mieux avoir des gens qui vont faire
deux ans. Je ne pense pas que dans n'importe
quel autre système, là, il y ait des gens qui fassent des quatre, cinq, six ans
avec toujours les mêmes clients, tout ça. Il y a beaucoup de roulement
aussi, je pense qu'il doit y en avoir dans les EESAD aussi, parce que moi, j'ai
eu quelqu'un, il y a environ deux ans, que sa voiture a brisé, mais, à cause
des salaires qui sont donnés…
Encore là, l'avantage
du chèque emploi-services, si on dit par rapport au... pas au roulement, parce
que le roulement, il reste à peu près
pareil, d'après moi, pour à peu près tout, c'est que, dans les EESAD, il y a
une partie qui va pour l'administration. Moi, je la fais moi-même, mon
administration, puis, sinon, les banques de référence seraient prêtes à la prendre à des coûts minimes. Comme je
vous le disais tantôt, d'après moi, là... Parce que c'est dur d'avoir
des chiffres. Il y a un problème, là. Je
pense que même vous, autour de la table, vous n'avez pas tous les chiffres.
Puis, d'après moi, là, quelqu'un qui
vient d'une banque de référence comme moi, j'ai l'impression que je coûte 300
quelques dollars pour avoir accès à la banque de référence mais par
année, pas par mois, là. Ce n'est pas beaucoup, c'est minime. Puis…
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.
M. Labrecque
(Robert) : Oui. Puis c'est ça, c'est qu'à 40 $ environ le CLSC, à
25 $, 30 $ les EESAD puis à
17 $, 18 $ gros maximum présentement avec le chèque emploi-services
je pense qu'on s'en tire bien. Puis, le roulement, bien on fait avec, là.
Le
Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc du gouvernement.
Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la députée de
Gatineau.
Mme
Vallée : Merci, M. le Président. Alors, M. Labrecque,
mesdames, merci de venir partager avec nous, de venir nous éduquer sur
la réalité, sur votre réalité au quotidien.
M. Labrecque, suite à
la question de notre collègue, vous avez abordé une question qui me chicotait,
c'était justement la distinction entre les
différents modèles qu'on propose, le coût réel. Donc, vous nous le disiez, le
coût d'une heure de services au CLSC, c'est 40 $?
M. Labrecque
(Robert) : Ça doit être en 35 $ et 40 $ présentement.
• (16 h 40) •
Mme
Vallée : Entre 35 $ et 40 $. Les EESAD, c'est à peu
près 20 $, qui doit inclure un bout d'administration…
M. Labrecque
(Robert) : Non, c'est 25 $ au moins.
Mme Vallée :
25 $?
M. Labrecque
(Robert) : Entre 24 $, je pense, et 30 $.
Mme Vallée :
Et le chèque emploi-services, le brut, c'est 17 $, 18 $, et le taux
horaire qui est versé, c'est...
M. Labrecque (Robert) : Oui, c'est 13,05 $, comme dit ma collègue.
Et ce n'est même pas 17 $ présentement, là, c'est aux alentours de
15 $ à 16 $.
Mme Vallée :
J'ai entendu, puis là j'aimerais... J'ai entendu des histoires, des histoires
qu'on peut peut-être qualifier d'histoires
d'horreur, avec les chèques d'emploi-services, à savoir que certaines personnes
se faisaient parfois arnaquer, se faisaient parfois demander plus d'heures que réellement
offertes en services, certaines... qu'on monnayait le transport, qu'on
monnayait parfois la qualité des soins ou du temps qui était réellement accordé
à domicile.
Est-ce
que des situations comme ça, ce sont des cas isolés… ou malheureusement, dans
vos associations, on vous sensibilise à ce type de problématique?
Le Président (M.
Bergman) : M. Labrecque.
M. Labrecque
(Robert) : Je saurais difficilement vous répondre parce que je connais
juste la région de Québec là-dessus.
Peut-être même, là, qu'Hélène, à côté, pourrait vous dire. Mais moi, je pense
que des cas, là, d'horreur, là, il y en a partout. Quelqu'un qui se fait
ébouillanter dans un CHSLD, là, c'est sûr que...
À
domicile, ce que vous avez comme personnes handicapées, c'est des gens qui ont
leurs capacités, là, cognitives, ils
les ont encore. Qu'ils négocient avec les gens pour donner... Moi, ça m'arrive
de donner un café, là, ou une rôtie le matin à ma préposée, puis je
pense que ça, là, c'est du savoir-vivre, du savoir-être, autant des deux côtés.
Je ne me suis jamais senti, là, poussé par les gens qui viennent à mon
domicile. Sinon, j'ai le pouvoir, en plus, de les mettre dehors. Ça m'est arrivé à quatre reprises de
mettre des gens dehors sur, comment je dirais ça, là, moi, depuis... Parce
que le chèque emploi-services, ça fait 18 ans, mais avant ça, là, il y
avait une mesure qui était payée 6 $ en dessous de la table, jusqu'en 1995. Puis, si ça ne fait pas, là,
les personnes peuvent mettre dehors aussi, là, il n'y a pas... il n'y a
rien qui nous empêche.
Parce
que, même les EESAD, j'ai eu quelqu'un qui m'a blessé, il y a longtemps de ça,
à un moment donné. Puis, quand j'ai fait une lettre de plainte à l'EESAD,
je n'ai pas eu de réponse avant de me plaindre au CLSC. Puis, quand je me suis plaint au CLSC, ils m'ont envoyé la
petite lettre patente, là, qui vient trois semaines après, environ. Puis là
la personne, la responsable de l'EESAD est
venue chez moi, m'a dit : M. Labrecque, on fait ça pour votre bien.
Pendant 45 minutes, là, elle m'a dit, dans le fond, que c'est moi qui
étais coupable, que j'avais mal fait mes affaires, que je n'avais pas dit, puis tout ça. Puis j'ai conté
exactement la vérité, que la personne m'avait déplacée puis je lui avais
demandé de ne pas me déplacer de cette
façon-là. Puis finalement, une semaine après, l'EESAD en question n'avait plus
personne à m'envoyer. Ça fait que des cas d'horreur, là, on va en voir partout,
partout, partout.
S'il y en a qui
peuvent compléter…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Fontaine.
Mme Fontaine (Josée) : Oui. On a un journal, puis, quand on fait nos
suivis après des prestations de services, bien on s'assure que tout va
bien de part et d'autre. Puis il y a des personnes handicapées qui ne sont pas à l'aise de dire, telle chose, qu'ils n'aiment pas
ça, par exemple elle ferme la porte d'armoire trop fort, puis ça la
fatigue, ou elle ne prend pas le bon produit nettoyant pour épousseter, je ne
sais pas. Ça fait qu'on accompagne les personnes dans ça. Ça fait qu'on sollicite, voir : Est-ce que ça a bien été?
Est-ce que vous vous sentez à l'aise? Puis, quand ça ne va pas bien, pas
pour mauvais service mais pour incompatibilité de caractère, par exemple… Puis
on s'assure aussi, dans notre journal, par
exemple… Puis, quand une personne devient membre chez nous, à notre
organisme — d'ailleurs,
on a 260 personnes handicapées qui sont membres chez nous — on
leur donne ces consignes-là que, pour nous, ce n'est pas accepté.
Par
exemple, ce qu'on propose, on n'oblige pas… C'est que le chèque emploi-services
à 13 $ de l'heure, ce n'est pas
beaucoup comme taux horaire. Il n'y a pas de frais de déplacement à payer, ça
fait que, des fois, ce qu'on demande à la personne handicapée, on a
établi un barème donc que, quand c'est pour un déplacement, aller faire l'épicerie,
aller à la banque, accompagner la personne
handicapée à la banque, par exemple, bien on demande à la personne
handicapée… on suggère qu'elle lui paie 5 $ pour compenser pour l'utilisation
de l'automobile. Mais ça, c'est une suggestion.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Donc, je comprends que les banques, vous faites plus
que de la référence, mais vous avez aussi un suivi des gens que vous référez à vos membres qui est constant. Et donc, d'une certaine façon, il y a un certain
contrôle de la qualité qui se fait, là, par la mise en place de ce service-là.
Mme Fontaine
(Josée) : Oui.
Mme Vallée :
Je comprends aussi que peut-être, dans les aménagements au chèque
emploi-services, il y a toute la question
des déplacements et des frais de transport qui serait peut-être à être
considérée pour attirer davantage des gens intéressés par le travail. Et
puis je pense… Là, je réfléchis, là, tout en discutant avec vous. C'est parce
que, la situation des frais de déplacement,
on le voit aussi même avec le CLSC, même avec les infirmières qui vont se
déplacer. Dans les centres urbains, c'est le transport en commun, mais, dans
nos régions rurales, la personne qui prend son véhicule — on sait
que l'essence est relativement chère — qui va se déplacer sur 30, 40 minutes,
qui peut faire facilement un 100 kilomètres aller-retour… Et ça,
là, pour nous, faire un 100 kilomètres aller-retour, en région, il n'y a
rien là, ça fait partie de notre quotidien,
sauf que c'est des coûts. C'est que, pour aller gagner peut-être un 13 $,
20 $, tu vas dépenser la moitié en essence. Donc, peut-être que, le
chèque d'emploi-services, je comprends que ça devient des fois un enjeu, et
donc trouver une façon de compenser pour le déplacement…
Mme St-Pierre (Hélène) : C'est de la
reconnaissance.
Mme
Vallée : …et d'assurer que les heures soient réellement des
heures offertes au service de la personne handicapée qui en a besoin.
Et
puis là je comprends très bien votre intervention sur le savoir-être,
M. Labrecque, là. Le café, la toast qu'on partage, ça, ça fait
partie des relations qu'on développe avec les gens avec qui on travaille. Ce n'était
pas le sens de ma première question, mais je comprends. Il faut faire en sorte
que les heures de services offertes à domicile chez la personne handicapée
soient des heures de services directes et qu'on ne vienne pas, avec ces heures
de services là, compenser le temps de déplacement ou compenser le coût de la
passe d'autobus ou peu importe, là.
Je vais céder la
parole à mon collègue.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci beaucoup. Bienvenue. Puis
votre témoignage est vraiment, comme dit le ministre, très instructif.
Comment
on détermine le nombre d'heures ou le montant qui vous est alloué? Est-ce que
dans votre cas à vous… On va prendre votre cas personnel. Est-ce que c'est
suffisant ou on aurait besoin de plus d'heures?
Le Président (M.
Bergman) : M Labrecque.
M. Labrecque (Robert) : Je vous dirais, dans mon cas personnel, j'ai un
nombre d'heures suffisant présentement. Je sais très bien que les évaluations sont faites par les CLSC. Ils ont
une grille qui a été modifiée à un moment donné, qu'il y a eu des ajouts de faits. Il y a toujours des ajustements, je
pense, à faire. Pour ma part, je suis capable d'exprimer mes besoins correctement, donc je n'ai pas de problème
de manque d'heures. Puis le 27 juillet 2011, là, on a eu une lettre
du CLSC qui disait, là, d'essayer de prendre
le chèque emploi-services en premier et ensuite de ça passer par les
agences, puis qu'on pouvait peut-être avoir une surfacturation à un moment
donné.
Ça
fait que, pour les heures, moi, je n'ai pas de problème. Si les gens se
plaignent ou argumentent, il n'y a pas de problème d'avoir les heures. Présentement, je vous dirais que, si les
gens du CLSC ont l'ordre de faire les évaluations, là, de façon correcte
et de ne pas couper… Je ne sais pas d'où ça vient, ça, d'essayer de couper les
heures, mais, si c'est fait correctement, là, je ne pense pas qu'il y en ait
vraiment, de problème, si les gens sont capables d'exprimer leurs besoins ou que les intervenants sont capables de
les cibler vraiment aussi, les besoins. Pour ma part, moi, ça me
satisfait, là, très bien présentement.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je pense que vouliez rajouter un commentaire.
Mme Fontaine
(Josée) : Oui. Je dirais que…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Fontaine.
Mme Fontaine (Josée) : Oui. Je dirais que ce que M. Labrecque dit,
il y a ça à Sherbrooke aussi, ces situations-là, mais il y a aussi beaucoup de personnes qui ont des heures en attente.
Les heures sont reconnues, mais, faute de budget, ils sont en attente. Quand c'est pour de l'aide à la
personne, lever, coucher, ça, c'est sûr qu'il n'y a pas vraiment d'attente
à ce niveau-là, mais de l'aide aux courses,
par exemple, il y a une heure d'allouée par personne pour de l'aide aux
courses. Ça fait qu'aller à l'épicerie, au centre d'achats, revenir, les
lumières, défaire l'épicerie, mettre ça dans les armoires, c'est comme… Si tu as des files d'attente aux caisses, à
la caisse, c'est vite passé. Ça fait que je dirais qu'en tout cas nous,
à Sherbrooke, il y a beaucoup d'heures en attente à ce niveau-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Une question. On a su tantôt le
nombre de personnes pour votre organisation, 260 à Sherbrooke. À Québec,
c'est combien de personnes?
• (16 h 50) •
Mme St-Pierre (Hélène) : À Québec, on est 270 à peu près. À nous deux, là, c'est ce qu'on se disait cet
après-midi, là, c'est sûr que les gens qui choisissent la mesure du chèque
emploi-services sont une proportion peut-être
minime, mais ces personnes-là, c'est un choix qu'ils font d'avoir le libre
choix puis de pouvoir gérer eux-mêmes leur horaire et gérer par le fait même la
personne qui...
Je pense à Manon, par
exemple. Manon est membre chez nous et puis elle reçoit... elle a décidé,
Manon, de retourner sur le marché du travail. Donc, le fait de retourner sur le marché du travail, elle avait
besoin d'heures au dîner, donc il fallait trouver une préposée pour
Manon qui allait aller la rejoindre à son lieu de travail.
Alors,
oui, on considère… Puis on le marque aussi dans le mémoire, puis je tiens quand même
à le souligner. Oui, ça rejoint une petite partie des personnes
handicapées, mais ces personnes-là ont le désir, puis ça fait partie, ça fait partie de leur raison d'être, de dire : Bien,
moi, j'ai le libre choix. Je peux gérer mon horaire, je peux faire ce que je
veux de ma vie. Je sors quand je veux et puis... Ça, c'est important.
Puis ce que Robert mentionnait tout à l'heure,
se lever à 5 heures du matin pour aller rencontrer le ministre Hébert à
Sherbrooke, alors, oui, effectivement, on est... Je vous dirais que la
problématique qu'on a souvent, c'est aussi le jumelage, parce que, 30 minutes pour
des bas de maintien, trouver quelqu'un et le faire rentrer pour
30 minutes alors qu'il a à se déplacer
deux fois plutôt qu'une, ce n'est pas toujours évident. Le défi qu'on a, nous,
à Québec, puis probablement que c'est
comme ça pour toi aussi à Sherbrooke : souvent, c'est tellement des plans
de services atypiques, je dirais,
avec des horaires atypiques qu'on ne finit pas par trouver le 30 minutes à
combler. Alors, on a des dossiers en attente effectivement. Et, ces
dossiers-là, malheureusement, il faut se trouver des solutions, il faut trouver
des moyens efficaces pour pouvoir suffire à la demande.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Fontaine.
Mme
Fontaine (Josée) : Dans des
situations comme elle vient de dire, on va essayer de trouver un
travailleur qui ne demeure pas loin
géographiquement de la personne handicapée physique. On essaie de compenser
pour qu'il y ait le moins de
déplacements possible, pour essayer de... Mais c'est sûr qu'en bas d'une heure,
quand on a des demandes de services ponctuelles comme ça, pour matin et
soir, c'est un vrai défi pour nos organisations.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Un, ce qui est important, je crois, c'est la
satisfaction de l'utilisateur. Puis,
deuxièmement, moi, je suis en accord quand même qu'il faut avoir un mécanisme
externe d'évaluation de la qualité,
pour être certain que, dans certaines situations, on n'apprenne pas trois ans,
quatre ans après qu'il y avait eu de l'abus.
Puis ça, c'est pour le bien de tout le monde, donc, je pense, c'est important.
Puis l'évaluation de la qualité se fait autant au niveau du service
direct que de la méthode pour l'octroyer, puis je pense que, ça, on est en
accord avec ce système-là.
Je ne suis
pas certain qu'on a besoin de l'assurance autonomie, dans un contexte comme ça,
pour le mettre en place, parce que ce que je peux voir — puis,
la réponse, j'aimerais l'avoir de la part des utilisateurs — vous
êtes satisfaits actuellement de la façon que ça fonctionne parce que ça
respecte votre libre choix où vous demeurez et ça respecte également le libre choix de la façon dont vous
voulez avoir les services. Dans vos cas à vous, vous avez l'air à être
satisfaits.
Mme Blaney (Manon) : Pour ma part...
Le Président (M. Bergman) :
Mme St-Pierre.
Mme Blaney
(Manon) : Mme Blaney.
Pour ma part, oui, ça me satisfait beaucoup et ça me permet d'avoir une meilleure
autonomie autant pour faire mon bénévolat, aller travailler. Sans le chèque
emploi-services, je pense que je resterais chez moi toute la journée.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
M. Labrecque.
M. Labrecque (Robert) : Si je peux
me permettre, si on regarde quelqu'un comme nous, là, qui serait en CHSLD — puis
il y en a présentement qui seraient prêts, je pense, à sortir du CHSLD — on
regarde, ça coûte 90 000 $ en
CHSLD présentement pour garder quelqu'un comme nous, là, en moyenne. Si vous
prenez ça puis vous le convertissez à environ 17 $ de l'heure, on a
fait l'exercice, nous autres, ça donne environ 110 heures par semaine. Vous ne me direz pas que si... Regardez, on a vu
des cas dernièrement, là. Quelqu'un, pour trois heures de plus… ou une autre personne, pour 45 minutes, est obligée
d'aller en CHSLD. Vous pourriez faire un décret, M. le ministre, demain
matin que tout le monde peut avoir un 70 heures de services par semaine
sans avoir aucun problème de... Je pense que, là, on viendrait régler le
problème. Puis même les personnes âgées aimeraient peut-être ça, puis ce serait
une ouverture.
Parce que nous autres, on ne vient pas ici pour seulement
nos fesses à nous autres, on vient pour celles de toutes les Québécoises
et les Québécois, parce que, pour nous autres, là, l'indépendance de notre vie,
c'est primordial. De mettre quelqu'un en
CHSLD qui pourrait être chez lui avec les bonnes ressources puis que ça
coûterait moins cher, pour nous autres, c'est aberrant. Pour nous
autres, là, ça nous fait sortir de nos gonds, à un moment donné.
Oui, les
services offerts présentement nous satisfont. Ceux qui… Si ça ne satisfait pas
la personne, il faut que vous mettiez les mesures en place pour aller
les voir, ces gens-là, je ne sais pas, par sondage ou peu importe, mais que les
intervenants refassent les évaluations puis,
plutôt que de se faire diriger vers le CHSLD, qu'ils se fassent offrir
vraiment ce qu'ils ont de besoin, de débloquer juste les parcelles de dollar que
ça prend présentement plutôt que de faire, on va dire, 12 admissions par
jour en CHSLD, d'arrêter de les faire, les admissions, là, puis de garder les
gens à domicile.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui. Puis je dois vous avouer qu'on a des
gens qui sont en CHSLD qu'on pourrait possiblement ramener dans la
communauté, mais il faut y aller d'abord selon la volonté de la personne. Même
si ce serait possible, il y a des gens qui
peuvent faire le choix de rester en CHSLD. Mais à ceux qu'on peut l'offrir,
oui, je suis d'accord avec vous, on devrait faire cette transformation.
Également, vous avez
entendu parler des maisons Michel Matte… Martin-Matte qui ont été développées? Moi, j'en ai visité, et c'est des gens qu'on leur
permet de vivre ensemble, des groupes de sept à huit. Et il y en a qui
veulent ça. Si quelqu'un veut demeurer seul
à la maison, c'est son choix… ou en appartement. Par contre, si on peut leur
offrir également ce
modèle-là… Il y a des modèles également de plus grande adaptation au niveau du
domicile. Pour moi, ce qui est important, c'est de respecter d'abord la
volonté de la personne puis essayer de lui offrir le service et le nombre d'heures
requis.
C'est
certain que, quand vous arrivez en termes de coûts, dans votre cas à vous, vous
dites : Moi, ça me prend tant
d'heures, ça me coûte moins cher qu'en CHSLD, même pour un coût supplémentaire
en CHSLD, moi, je pense que ça vaut la peine. Où est-ce que les calculs
ont été faits puis il faut être réaliste : lorsqu'il faut maintenir quelqu'un
à domicile, puis ça coûte trois fois le prix
d'un CHSLD, puis ça prend quasiment une ou deux personnes 24 heures sur
24, là il y a comme… au niveau raisonnable, là, des fois il faut y repenser.
La question :
Actuellement, est-ce que vous payez une contribution pour les services que vous
recevez…
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît, M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : O.K. Ça fait que ma question,
c'est : Est-ce que vous payez une contribution? Parce que ce qui est prévu dans l'assurance autonomie, en
tout cas comme on le voit actuellement : si vous avez un revenu, on
va tenir compte de votre revenu par rapport à l'allocation qu'on va vous donner.
Qu'est-ce que vous pensez de ça?
M. Labrecque
(Robert) : Bon, comme c'est inscrit…
Le Président (M.
Bergman) : M. Labrecque.
M. Labrecque
(Robert) : Excusez-moi. Comme c'est inscrit dans notre mémoire, mais
on n'a pas eu le temps de glisser là-dessus
tout à l'heure, nous autres, on demande la gratuité pour les personnes
handicapées, compte tenu que, si vous
voulez un véhicule adapté, ça coûte… Seulement le véhicule, là, c'est des
véhicules au-dessus de 20 000 $, des véhicules neufs, comparé
à des voitures qui peuvent se vendre 14 000 $. Il y a plein de coûts
comme ça, le coût pour les déplacements
souvent, avoir quelqu'un pour nous aider, tout ça, il y a plein de coûts qui
sont reliés aux handicaps, présentement, que les gens ne devraient pas
avoir à subir. Parce que vous lirez dans le mémoire, là, on fait l'exemple de
trois personnes. Puis, si tu veux compléter, Hélène, par rapport à ça.
Mme St-Pierre
(Hélène) : En fait…
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps pour ce bloc s'est écoulé,
et je dois passer au deuxième groupe d'opposition. Mme la députée d'Arthabaska,
pour un bloc de 4 min 30 s.
Mme Roy
(Arthabaska) : Bonjour. Merci d'être venus nous voir, de nous
faire part de votre vécu. Comme députés, on a aussi un vécu, c'est-à-dire que
moi, j'ai rencontré dernièrement — ça m'a surprise, ça fait 10 ans que
je suis députée — deux familles qui avaient des personnes
handicapées adultes avec eux, encore avec les parents, qui avaient toutes les deux déménagé de territoire d'agence,
et l'évaluation par les CSLC était très différente, ce qui m'a surprise.
Je me demande si j'ai eu deux cas d'espèce ou si c'est fréquent que ça arrive.
Mme St-Pierre (Hélène) : …du côté de la Capitale-Nationale,
en tout cas, ça, je peux vous le confirmer, on est sur le terrain. Donc,
il semble y avoir une disparité qui est propre à chacune des agences…
Une voix :
Des CSSS.
Mme St-Pierre
(Hélène) : …oui, à chacun des CSSS, puis effectivement ce qui fait en
sorte que les gens ne comprennent pas.
Puis
on entendait aussi par le fait même… Je sais que Pierre-Yves, là, avait des
commentaires à cet effet-là, mais on entend beaucoup de choses par
rapport aux heures.
Mme Roy
(Arthabaska) : Aux heures allouées?
• (17 heures) •
Mme St-Pierre (Hélène) : Aux
heures allouées puis aux heures qui sont coupées. Bon, Robert, tu as quand même une expérience, je pense, positive, là, par rapport à ça, mais, nous, au niveau du service BRAD du CAPVISH,
effectivement il y a des gens que ça fait un an, là, qu'ils se font couper les
heures au niveau des AVQ… En fait, c'est plus les AVD que les AVQ, parce que,
les AVQ, ils ne coupent pas. Mais il y a une problématique là.
Mme
Roy (Arthabaska) : Mais vous expliquez ça comment? Avez-vous
vu… La disparité entre les régions, là, c'est sur quels facteurs que ça varie comme ça? Savez-vous, dans… Vous
n'avez pas des cas de figure qui reviennent tout le temps, c'est inégal?
Le Président (M.
Bergman) : Mme St-Pierre.
Mme St-Pierre
(Hélène) : C'est assez inégal.
Mme Roy (Arthabaska) : Puis
ça peut être à quelle fréquence à peu près?
Mme St-Pierre (Hélène) : Ça dépend. Nous, on est un organisme de défense
de droits, alors, notre téléphone, souvent les gens prennent le
téléphone pour dénoncer. On ne fait pas de défense individuelle, on fait de la
défense collective de droits, mais, je vous dirais, c'est tant au niveau du
logement, tant au niveau des services à domicile, du transport. Je vous dirais,
là, au niveau des dossiers concernant les personnes ayant des incapacités
physiques, c'est tellement… vous seriez
tellement surpris du nombre d'appels qu'on reçoit, des… Souvent, c'est
vraiment… la personne, elle n'a plus de recours, là, elle est…
Mme Fontaine (Josée) : Je pense qu'il y a différents CSSS qui se donnent
des barèmes un petit peu différents, par exemple il y a tant d'heures d'allouées
pour tel… Puis, quand une personne va coter, je ne sais pas, moi, profil ISO-SMAF 9, bon, bien, dans telle situation, je ne
sais pas, moi, du ménage, ça peut être deux heures par deux semaines;
dans un autre CSSS, ça peut être deux heures et demie, par exemple. Ça fait que
ça, ça peut venir aussi évaluer… Dans le maximum
qu'ils allouent, par exemple, une personne qui a un profil tant, pour de l'aide
à la personne, bien ça va être tant d'heures de services, puis je crois
que dans d'autres régions ailleurs au Québec c'est un autre total d'heures qui
est alloué en fonction du même…
Mme
Roy (Arthabaska) : Un autre cas de figure que j'ai rencontré,
c'est lorsque les personnes sont handicapées puis passent 65 ans. Là, ils deviennent des aînés, et puis, la
façon dont on les dessert, on les diminue la plupart du temps.
Est-ce que vous avez
aussi… Je ne sais pas si c'est propre au cas que j'ai rencontré ou si vous avez
rencontré aussi des cas semblables.
Mme Fontaine (Josée) : Bien, nous autres, en Estrie, par exemple, le
CSSS de Sherbrooke, il y a différents… de la façon que c'est, les… pas
les départements, mais en tout cas vous comprenez ce que je veux dire, les… ça
fait que, nous — les programmes, merci — c'est 18 à 65 ans, à Sherbrooke c'est
comme ça, et à Magog c'est zéro à 100 ans. Ça fait que ça dépend
vraiment de comment est-ce qu'ils ont organisé leurs offres de services.
Mme
Roy (Arthabaska) : Donc, les disparités sont multiples entre
les clientèles d'une même agence, puis entre les agences, puis à tous
les niveaux, au niveau de l'accès au logement, de l'aménagement du logement,
des transports collectifs puis des soins, le panier de services. C'est ce que
je comprends?
Mme Fontaine (Josée) : Nous, c'est plus… Moi, mon organisation, c'est
plus relié au maintien à domicile. Nous, on n'a pas le volet, à Sherbrooke… Il y a un autre organisme
communautaire qui s'occupe du transport adapté, il y a un autre
organisme communautaire qui s'occupe d'accessibilité. Alors, nous, c'est… moi,
je peux plus parler au niveau du maintien à domicile.
Mais,
l'accès au transport adapté, j'en entends des fois, des personnes qui viennent
de l'extérieur, je ne sais pas, moi,
d'une autre région en Estrie, puis qui viennent déménager à Sherbrooke, mais ce
n'est pas la même situation non plus. Ça, j'entends ça, mais je ne peux
pas dire que je suis au fait de tout ça, là.
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé.
Mme St-Pierre, Mme Fontaine, M. Labrecque, Mme Blaney,
merci pour votre présentation. Merci d'être ici avec nous et de partager votre
expertise.
Et je demande au Commissaire
à la santé et au bien-être de prendre sa place à la table.
Et je suspends pour
quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 4)
(Reprise à 17 h 18)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues,
je dois vous demander consentement pour dépasser 18 heures pour à
peu près 20 minutes ce soir. Consentement? Consentement.
Alors, M. le
commissaire, on vous souhaite la bienvenue. Pour fins d'enregistrement, est-ce
que vous pouvez donner vos noms et vos titres? Et le prochain 10 minutes,
c'est à vous pour faire votre présentation.
Commissaire à la santé et au bien‑être
M. Salois
(Robert) : Bonjour. Mon nom est Robert Salois, je suis le Commissaire
à la santé et au bien-être. Et je suis accompagné aujourd'hui par…
Mme Robitaille
(Anne) : Anne Robitaille, directrice générale.
Mme Cleret de Langavant (Ghislaine)
:
Ghislaine de Langavant, commissaire adjointe à l'éthique et à l'appréciation.
Le Président (M.
Bergman) : …bienvenue.
M. Salois
(Robert) : Est-ce qu'on peut commencer? Oui? Bonjour, M. le
Président. M. le ministre, distingués membres de la commission, bonjour.
Je vous remercie sincèrement pour cette invitation. Et on a fait les
présentations d'usage,
donc je vais passer tout de suite dans le coeur de ma présentation. Au cours
des prochaines minutes, je présenterai mon organisme, son mandat et
quelques-unes de nos réalisations qui alimentent ma réflexion. J'attirerai
ensuite votre attention sur des éléments stratégiques dont la prise en compte
avantagerait très certainement la mise en oeuvre de l'assurance autonomie.
Le
Commissaire à la santé et au bien-être est un organisme qui a pour mission
d'apporter un éclairage pertinent au débat
public et à la prise de décision gouvernementale dans le but de contribuer à
l'amélioration de l'état de santé et du bien-être des Québécoises et des Québécois. Il apprécie donc les
résultats atteints par le système de santé et de services sociaux et
fait des recommandations au ministre pour améliorer la performance. Notre
approche de travail est unique et novatrice.
Par la prise en compte du point de vue citoyen et des enjeux éthiques dans
l'appréciation de la performance, le commissaire vise à démocratiser les
débats en matière de santé et de services sociaux.
• (17 h 20) •
Nous avons lu avec intérêt le livre blanc sur la
création d'une assurance autonomie. Nous sommes en accord avec les constats qui
sont mis en évidence. Le Québec va connaître un vieillissement accéléré de sa population.
Cette augmentation créera une pression supplémentaire sur le système, qui,
malgré les efforts des dernières années, n'a pas encore complété son virage à
partir des soins curatifs et ponctuels vers une prise en charge globale, plus
adaptée aux maladies chroniques. Le projet
d'assurance autonomie comporte plusieurs éléments qui permettraient de faire
face aux impacts de l'augmentation du nombre de personnes âgées parmi
les usagers du système de santé. Si elles sont mises en oeuvre efficacement, les
solutions proposées pourraient aussi bien être propices à la résolution des
problèmes plus globaux du système de santé et bénéfiques pour tous.
Toutefois, après la lecture du livre blanc, je
me questionne sur certains aspects de la mise en oeuvre de ce projet.
Disposons-nous, dans le contexte actuel, des ressources qui permettraient d'aller
de l'avant? Les composantes concrètes de la
mise en oeuvre de ce projet ont-elles été assez étudiées? La complémentarité du
projet avec tous les aspects du système de santé et de services sociaux
a-t-elle été suffisamment analysée? Ces aspects méritent une attention
particulière. Cette réforme est trop importante pour qu'on se permette qu'elle
n'ait pas de succès.
Au cours des
dernières années, l'organisme que je dirige a abordé plusieurs thématiques qui
ont de nombreux points communs avec
l'objet de cette commission parlementaire. Je pense à la première ligne de
soins, aux maladies chroniques et à
la santé mentale, par exemple. Notre rapport d'appréciation en 2014 portera sur
le vieillissement de la population. Nos études font l'objet de constats
relatifs à la performance du système.
Dans le mémoire que nous avons soumis, nous
avons identifié des objets de préoccupation en nous appuyant sur ces constats. Sans reprendre tout le contenu
de ce mémoire, je souhaite maintenant attirer votre attention sur six
éléments qui me paraissent déterminants pour le succès de ce projet.
Premièrement,
il est essentiel d'adopter une approche interdisciplinaire et de favoriser une
pratique en réseau. Considérant la
croissance du nombre de personnes âgées et, par le fait même, l'augmentation
des maladies chroniques et des
incapacités, le succès du projet proposé ne pourra être atteint que dans un
contexte de travail composé de différents professionnels ayant des rôles
spécifiques et complémentaires et de pratique en réseau, c'est-à-dire des
équipes constituées non seulement de médecins en première ligne et d'infirmières,
mais aussi d'autres professionnels. Il faut élargir
les horizons au-delà des limites du système de santé et de services sociaux
afin d'intégrer toutes les disciplines qui peuvent contribuer au
bien-être, au mieux-être des bénéficiaires de l'assurance autonomie.
La pratique médicale de groupe en première ligne
et l'accroissement de l'interdisciplinarité constituent des recommandations que nous avions déjà formulées.
Des annonces récentes concernant les groupes de médecins de famille vont
en ce sens. Il faut continuer d'avancer dans ce domaine.
Le mode
actuel de rémunération des médecins constitue, d'après moi, un obstacle
important au déploiement de la pratique interdisciplinaire. Celui-ci
devrait de toute évidence être révisé afin de permettre de réaliser l'ensemble
des tâches essentielles.
La disponibilité de la main-d'oeuvre doit aussi
être examinée attentivement, on ne pourra répondre à la croissance de la demande sans avoir des stratégies efficaces pour
accroître l'effectif de certains corps professionnels. Les efforts pour augmenter le recrutement dans le
secteur de la gérontologie et de la gériatrie doivent se poursuivre,
puisque ces secteurs peinent à attirer des intervenants en nombre suffisant.
Deuxièmement,
il faut réaffirmer le rôle central des centres de santé et de services sociaux
et s'assurer de leur capacité à livrer la marchandise partout sur le
territoire québécois. Depuis la création des CSSS, la coordination des différents niveaux de soins a certes connu une
amélioration. Toutefois, la fusion des établissements a engendré
certaines lacunes, et le degré d'implantation des réseaux locaux de services
varie beaucoup d'une région à l'autre. C'est ce que nous constations dans le
cadre de nos travaux d'appréciation sur les maladies chroniques en 2010. Selon
des données plus récentes, c'est encore le
cas. Cette disparité doit à tout prix être enrayée. Outre la prestation des
services, l'organisation de ceux-ci
sur le territoire s'avère un élément majeur.
Troisièmement,
il faut favoriser l'autonomie des personnes dans la prise en charge de
leurs soins et il faut aussi soutenir les proches aidants et veiller à leur
santé, tant physique que psychologique.
De plus en
plus, les patients veulent participer à la prise de décision relative à leurs
soins. Cela nécessite une grande adaptation de l'information afin que
les renseignements et les outils nécessaires à cette prise en charge
correspondent aux besoins particuliers de chaque patient et de chaque proche
aidant. Entre autres mesures, l'accès des patients à leur dossier médical
électronique favoriserait leur autonomie et le développement des pratiques d'autosoins.
Vous êtes sans doute aussi sensibles que moi au
fait que l'augmentation des services offerts à domicile puisse
engendrer un accroissement de la charge de travail pour les proches aidants
alors que la pression qu'ils subissent s'avère déjà trop grande. Or, il
faudrait absolument que le système déploie les ressources nécessaires à leur
soutien. Il y aurait lieu de bien camper le rôle des organismes
communautaires dans l'offre de services et d'en reconnaître l'importance, tant dans le renforcement et le
développement des pratiques d'autosoins que dans le soutien qu'ils
procurent aux proches aidants.
J'ajouterai que, bien
que notre forum de consultation se soit manifesté en faveur du principe d'autosoins,
les membres ont aussi exprimé une préoccupation importante, soit que le
développement des pratiques d'autosoins ne doit pas conduire à la
déresponsabilisation du réseau ou à une réduction des services de l'État.
Quatrièmement,
la mise en place de l'assurance autonomie ne doit pas accroître la
vulnérabilité des personnes en perte d'autonomie. L'adaptation implique
la nécessité, pour les intervenants, de s'ajuster aux besoins particuliers et au contexte de vie propre à chacun afin d'assurer
une réponse efficace, d'éviter de susciter la méfiance des patients à l'égard
des professionnels ou d'accroître la détresse d'une personne.
Il est clair que les
services à domicile représentent l'essence même de l'assurance autonomie.
Néanmoins, il faudrait tout de même garantir
l'accessibilité et la disponibilité d'autres types de services, tels
l'hébergement alternatif, l'hôpital et les services de répit, afin de
combler tous les besoins. La liberté de choisir les soins à domicile ne peut se
faire au détriment de la diversité des autres ressources disponibles.
Aussi,
tous ces milieux de vie qui accueillent des personnes en perte d'autonomie
doivent faire l'objet d'évaluations de la qualité soutenues pour éviter
que des situations regrettables et des graves lacunes telles celles déplorées
par le Vérificateur général n'entravent la qualité des soins et des services
offerts. Il faut pouvoir rassurer les personnes déjà vulnérables et non les
insécuriser davantage.
Cinquièmement, le
vieil adage qui dit : Il vaut mieux prévenir que guérir, c'est toujours
d'actualité. Dans un contexte de vieillissement de la population, la promotion
de la santé et la prévention des maladies chroniques doivent représenter des
préoccupations prioritaires. Il faut aider la population à prévenir ces
maladies et leurs complications ou de soutenir les personnes atteintes à mieux
vivre avec leur condition. En 2010, dans notre rapport sur les maladies chroniques, nous proposions l'élaboration d'une
politique provinciale de prévention dans le cadre d'une recommandation
visant l'adoption de politiques et la création de milieux de vie favorables à
la santé, c'est pourquoi j'estime que le projet de politique nationale de
prévention qui devrait être rendu public sous peu est un pas dans la bonne
direction.
Malgré
les bienfaits d'une telle approche, sa mise en oeuvre peut se heurter à
plusieurs difficultés, dont le fait que les résultats ne sont visibles qu'à long terme. Cela ne doit pas
décourager d'investir et d'intervenir en promotion et en prévention.
Dans tous nos rapports d'appréciation, la promotion et la prévention ont
toujours été des préoccupations de premier
plan, entre autres pour les membres de notre forum de consultation, qui voient
là une voie incontournable pour améliorer la performance du système
ainsi que la santé et le bien-être de la population. À cet égard, j'ai tenu à
saluer, dans notre mémoire, certaines actions très porteuses, dont le programme
Québec ami des enfants… des aînés et la démarche Municipalité amie des aînés.
Sixièmement,
il est impératif de donner des outils pour mesurer la performance de
l'assurance autonomie. Dans l'accomplissement
de mon mandat comme Commissaire à la santé et au bien-être, je me heurte
régulièrement à un manque de données et d'indicateurs pour mesurer la
performance du système de santé et de services sociaux. Ainsi, si nous disposons assez aisément de données pour connaître
les volets ou encore des indicateurs de reddition de comptes, peu d'indicateurs
traitent des résultats comme tels et encore moins de la réponse aux besoins de
la population. Dans ce contexte, il
m'apparaît essentiel que les impacts d'un virage d'une telle ampleur que celui
visé par le projet d'assurance autonomie puissent être mesurables et
mesurés. Avec la mise en place de l'assurance autonomie, il faudrait dès le départ se donner les moyens d'assurer un
monitorage continu, en temps réel, afin de pouvoir suivre les résultats sur
la santé et le bien-être de la population et apporter sans délai les
ajustements nécessaires.
En conclusion, M. le
Président, il faut adopter une approche interdisciplinaire et une pratique en
réseau pour améliorer la coordination des soins et services donnés aux
personnes en perte d'autonomie. Il faut s'assurer de la capacité des centres de
santé et de services sociaux à assumer pleinement leur responsabilité
populationnelle et leur rôle de
coordination. Il faut soutenir les patients dans les approches d'autosoins
ainsi que leurs proches par des mécanismes de soutien à l'entraide afin d'éviter un accroissement indu de leur
charge de travail. Il faut porter une attention particulière aux personnes en perte d'autonomie qui sont
vulnérables afin de ne pas augmenter leur détresse. Il faut agir de manière concertée en promotion et en prévention pour
réduire la pression exercée sur le système par l'augmentation du nombre de personnes en perte d'autonomie.
Et finalement il faut développer des indicateurs de suivi pour mieux mesurer en
continu les impacts des actions et réajuster le tir, le cas échéant.
Je vous remercie de
votre attention. Et il me fera plaisir de répondre à vos questions.
• (17 h 30) •
Le
Président (M. Bergman) : M. le commissaire, merci pour votre présentation. Pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Merci beaucoup, M. le commissaire, mesdames. Merci
de ce mémoire fort intéressant. Je retiens une phrase que vous avez
dite : C'est une réforme trop importante pour ne pas en assurer le succès.
Et je vous prie d'être rassurés là-dessus,
nous allons prendre tous les moyens pour que cette réforme puisse non seulement
voir le jour, mais être couronnée de succès. Et je voudrais rappeler qu'elle
s'inscrit dans un trépied de priorités dont l'un des éléments est l'accès à la première ligne, et vous avez tout
à fait raison de souligner l'importance de l'interdisciplinarité dans le
suivi des maladies chroniques. Le deuxième
est la politique de prévention, qui sera rendue publique bientôt, et le
troisième, évidemment, l'assurance autonomie.
Vous soulevez, dans
votre mémoire, certaines réserves quant à l'augmentation des responsabilités
des CSSS sur la prestation de services. Nous voulons, dans l'assurance
autonomie, leur donner surtout une responsabilité de gestion, donc d'évaluation,
de contrôle de qualité, et partager la prestation de services.
On
a entendu hier des groupes syndicaux qui sont venus nous dire que les CSSS
devraient donner l'ensemble des services, et
je pense que c'est une responsabilité qui encore plus importante. J'aimerais
vous entendre là-dessus, sur les limites de la responsabilité des CSSS
et sur les précautions qu'on devrait prendre.
Le Président (M.
Bergman) : M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : Oui. En fait, à travers nos différents travaux — le
dernier, entre autres, était santé mentale — on a trouvé que les services ou les rôles
qui étaient remplis par les CSSS étaient de qualité inégale. Dans des régions où le réseau local de services, par
exemple, est très bien déployé et où les corridors de services entre la
première ligne, les CSSS et les groupes
communautaires… à cet effet, ça fonctionne bien, mais, dans d'autres régions,
il y a très peu de communication, et
les services ne sont pas en continu, ils ne sont pas en interdisciplinarité. Ce
qui fait que, si on veut que les CSSS remplissent leur rôle, au-delà de
l'évaluation et la mise en place des différents services, il faut s'assurer qu'ils
soient capables de le faire puis qu'on développe le réseau.
Un des éléments qu'on
a trouvés fascinants aussi, à l'intérieur de nos analyses, c'est le rôle aussi
des organismes communautaires en support. On a trouvé ça dans des recherches
qui ont été faites en santé mentale, que les
médecins de famille, qui voient 70 % des problèmes de santé mentale,
50 % n'ont aucun contact avec un professionnel qui travaille dans le domaine de la santé mentale
et près de 90 % ne connaissent pas l'existence, les services qui
peuvent… offerts par les groupes communautaires.
Dans
le domaine de l'assurance autonomie, pour nous, c'est une priorité, que tout le
monde travaille en coordination et en collaboration pour être capable de
soutenir ces personnes, souvent, qui sont vulnérables et qui vont être à la maison. Donc, nous, on croit au
rôle des CSSS, mais notre expérience, c'est que ce n'est pas uniforme à
travers la province.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Et d'ailleurs notre collègue la députée d'Arthabaska le soulignait lors de l'audition
du groupe précédent, il y a des disparités
extrêmement importantes d'une région à l'autre et même à l'intérieur d'une même
région. Écoutez, dans une étude que nous
avons faite il y a quelques années, où nous avons mesuré le pourcentage de
services requis qui était effectivement rendu par les CLSC d'une même région,
la Montérégie pour ne pas la nommer, on a trouvé une disparité extrêmement
grande, allant de certains CLSC qui répondaient à 6 % des besoins et d'autres,
à 33 % des besoins. Alors, vous voyez
que la gestion du CLSC, elle conditionne le fait qu'on donne un peu de services
à tout le monde ou qu'on donne beaucoup de
services à peu de personnes, et il y a là des inéquités qui sont tout à fait
inacceptables dans un système de santé comme
le nôtre. Alors, l'assurance autonomie vise à uniformiser une allocation qui
permettrait à la personne, peu importe la région, de recevoir les services dont
elle a besoin. Et un des objectifs, c'est de régler ces problèmes de disparité
là.
Alors,
j'aimerais que vous puissiez commenter sur les disparités de service et la
façon dont l'assurance autonomie prévoit les aplanir ou en tout cas les
amoindrir.
Le Président (M.
Bergman) : M. le commissaire.
M. Salois (Robert) : Oui. En fait, je pense
qu'une des problématiques dans… c'est une grande problématique de communication. On a l'impression, à l'intérieur, qu'il y a énormément de professionnels de grande qualité qui travaillent dans ces organisations-là, qui sont dévoués, mais
c'est comme si la communication, les échanges entre… ou la coordination n'est pas faite. Et, si je peux illustrer un peu
ce que je veux dire, dans un programme comme l'assurance autonomie où on
va trouver les patients dans leurs maisons ou les citoyens dans leurs maisons
différentes, avec un rôle central du CSSS, c'est comme un «virtual ward» — j'essaie
de trouver le nom français — c'est
comme si, par exemple, on avait un hôpital
avec des ailes, où il y a des patients, puis, au lieu d'être dans un hôpital,
ils sont à la maison, chacun dans leurs maisons, avec un central qui
gère le besoin puis qui les soutient. Ça prend, je pense, une plus grande
coordination des CSSS pour être capable de
les soutenir dans leur environnement que s'ils étaient localement dans un
hôpital. Et, avec l'assurance autonomie, une image que je donne, c'est
que ces personnes, ces couples-là vont être un peu distribués dans la région,
et ça va prendre une grande coordination du CSSS pour les rejoindre.
Je
pense même… Et on parle de détresse dans notre rapport aussi, avoir, un
exemple, un endroit simplement pour appeler,
pour se faire rassurer. Vous êtes certainement familier avec des travaux qui
ont été faits dans les Laurentides, les travaux du Dr Mireault et
de Mme Laframboise où on a pris les plus grands utilisateurs d'une
urgence, on a mis un gestionnaire de cas qui
les suivait et on a réussi à diminuer leur fréquentation à l'urgence de
72 %. La raison principale de ça, c'est que chacune de ces
personnes-là qui avaient une inquiétude ou un besoin se sont trouvé un endroit
pour demander conseil. Et je pense qu'une assurance autonomie, si on était
capables, les CSSS, de mettre un endroit où on va avoir… on est à un coup de fil d'un conseil ou à un coup de fil de
quelqu'un qui va venir nous aider, ça rassurerait certainement ces
personnes-là. Et aussi ça permettrait une meilleure coordination, parce qu'on
connaîtrait réellement les besoins de ces personnes-là et on pourrait mettre en
place des actions rapides pour corriger ou pour augmenter les services,
dépendant des besoins.
Donc, nous, on pense
que cette coordination-là est très importante. Les outils existent, les
personnes existent; il s'agit, à un moment
donné, qu'on puisse bien intégrer et bien organiser les services. D'ailleurs,
c'était un des premiers commentaires sur la première ligne de soins qu'on
a dits. Au-delà de l'argent et des ressources, ce que le système de santé
manque, en première ligne, c'est de l'organisation.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : O.K. Tout
à fait d'accord avec vous.
L'assurance
autonomie prévoit un changement important dans le financement des
établissements, donc de passer à un
financement à l'activité où l'argent suit le patient, en fait, où l'allocation
sert à financer les établissements publics, que ce soient les CHSLD ou
les services du CLSC en soutien à domicile. J'aimerais vous entendre sur ce
nouveau mode de financement à l'activité dans notre réseau public.
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : En fait, on a été
invités à présenter sur le comité qui travaillait justement
sur le financement par activité.
On est d'accord avec cette nouvelle façon de financer où le
patient représente de l'argent, autrement
dit il a une valeur, je dirais,
monétaire, si je peux exprimer cette opinion-là. Et je pense qu'à un moment
donné ça va changer à une dynamique qui va être particulièrement
importante par rapport au fait que ça ne devient pas un patient, mais ça va devenir un client. Dans ce sens-là, et avec le
fait que les services ou la personne… Donc, on va avoir un service
personnalisé plus grand, puisqu'il va
falloir… on va savoir que ces patients-là représentent un montant d'argent pour
les services qu'on va donner, mais ça va aussi être beaucoup plus
efficace si on a de la compétition, dans le sens que, s'il n'y a pas de
compétition, on n'aura pas la même valeur ajoutée du financement par activité.
Mais nous, on
pense que c'est une bonne chose. D'ailleurs, l'angle d'approche qu'on avait
pris dans le mémoire, c'était de vous parler d'une révision du mode de
rémunération, puisqu'on pense que le financement à l'acte, tel qu'il est
actuellement, n'est pas bénéfique à la prise en charge de maladies chroniques.
Donc, le financement par activité est un autre moyen dans lequel, à un moment
donné, on obtiendrait un service à la clientèle, au patient, de façon beaucoup
plus améliorée.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Dit autrement, dans un financement à l'activité, l'usager n'est plus vu comme
une dépense mais est vu comme un revenu par l'établissement, et je pense
que ça change beaucoup l'approche des établissements.
J'aimerais
aussi vous entendre au niveau de l'évaluation de la qualité, vous le soulevez
dans votre mémoire. Alors, quels seraient les mécanismes qu'on devrait
mettre en place pour s'assurer de la qualité des services qui sont rendus?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
• (17 h 40) •
M. Salois
(Robert) : Bien, dans
un premier temps, la mise en place,
pour assurer la qualité, ça prend des règles, ça prend des paramètres
dans lesquels on s'assure que chacun et chacune des personnes qui va donner les
services aux personnes en perte d'autonomie
qui vivent à domicile… qu'on ait des paramètres où on va avoir un standard de
la façon à laquelle on va les approcher.
Il faut
aussi, en termes de qualité, la mesurer. Je pense qu'à un moment donné c'est un
peu de cet esprit qu'on allait. Quand
on parlait de mesures, on ne pensait pas à des mesures simplement en termes
d'efficacité mais aussi de mesurer la
qualité. Il y a certainement des indicateurs qu'on pourrait faire, comme des
indicateurs de perception ou de satisfaction de clientèle, qui nous permettraient de savoir si les personnes sont bien
traitées ou si la qualité est là. D'autres indicateurs qui mesureraient,
par exemple, le nombre de personnes d'un certain âge vivant en perte d'autonomie
qui vont fréquenter l'urgence, ça serait aussi un indicateur de qualité à
savoir s'ils sont bien à domicile ou ils doivent aller à l'extérieur pour
recevoir le service. Il y a plusieurs indicateurs de cette nature-là qui vont
servir à mesurer la performance du modèle d'assurance autonomie mais aussi vont
être des éléments pour mesurer la qualité.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, vous reliez beaucoup la qualité avec la performance. Donc, vous avez une
approche, je dirais, plus macro de la qualité de l'assurance autonomie.
Moi, je pensais plus à la qualité des services
qui sont rendus effectivement. Est-ce que vous avez réfléchi sur des mécanismes
pour s'assurer de la qualité des services?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : Une des
recommandations qu'on a faites sur la qualité des services, on a, une de
nos recommandations, demandé à l'INESSS de développer des indicateurs de
performance au niveau clinique pour la première ligne de soins, d'abord pour
être capable de mesurer la qualité des services qui sont donnés en première ligne mais aussi permettre... Et c'était la
philosophie de demander à l'INESSS de faire ça, c'était de pouvoir… que
chacun des professionnels ou des médecins, entre autres, pourrait s'autoévaluer
dans sa performance.
Je pense que, quand
on arriverait à l'assurance autonomie, ça serait intéressant de demander à
l'INESSS de développer des indicateurs de qualité pour être capable d'aller
mesurer exactement qu'est-ce qu'elle fait, mais, nous, dans notre vision, la
qualité est un des éléments de la performance, et, sans la performance, il n'y
a pas de qualité. D'ailleurs, dans le restant
du Canada, mes équivalents s'appellent des «quality councils». Donc, c'est
finalement un autre mot pour utiliser «la performance», c'est d'utiliser «la qualité». Puis
la qualité clinique, d'après moi, elle se ferait par des indicateurs qui feraient en sorte de définir une
«best practice» pour ceux et celles qui devraient être capables de
donner les services à domicile.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Dans votre mémoire, vous soutenez avec raison que
le statu quo est inacceptable, est insoutenable. Certains prétendent que
juste d'injecter un petit peu plus d'argent dans les soins à domicile, ça va
être suffisant pour être capable de pouvoir transformer le réseau de la santé.
Est-ce que vous êtes d'accord avec ces prétentions?
Le Président (M.
Bergman) : M. le commissaire.
M. Salois (Robert) : Bien, en fait, vous avez vu dans notre rapport qu'on n'a pas parlé de
sous, on n'a pas parlé de financement, parce qu'on pense que d'entrée de
jeu c'est d'abord un problème d'organisation puis d'efficacité. C'est toujours difficile de quantifier les besoins en
termes de personnel ou en termes de docteurs ou quoi que ce soit quand
on n'a pas rendu la façon de livrer les services de façon optimale. Donc, nous,
notre prétention à cet effet, c'est qu'il y a déjà
énormément de personnes compétentes dans le système de santé, il y a déjà de
l'argent qui sont là. Si on arrivait à faire fonctionner tout ça
ensemble en interdisciplinarité puis de façon très fonctionnelle, on pense qu'on
aurait des gains d'efficacité et
certainement des gains financiers à obtenir, de cette nature-là. Et on saurait
probablement, à ce moment-là, quels sont nos réels besoins, tant sur le
point de vue des personnels et tant du point de vue financier.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous soulevez dans votre mémoire la situation des
proches aidants, hein, qu'on devrait plutôt dire au féminin, des proches aidantes, et l'assurance autonomie prévoit de
couvrir des services aux proches aidants, prévoit aussi transformer les proches aidants de ressources tels
qu'ils sont actuellement en des partenaires, plutôt, pour les soins à domicile.
Quelle est votre
opinion par rapport à ce changement important qui est proposé dans le livre
blanc?
Le Président (M.
Bergman) : M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : En fait, il y a... pour nous...
Mme Robitaille
(Anne) : Bien, peut-être que ce qu'on pourrait... le parallèle que l'on
pourrait...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Robitaille.
Mme Robitaille (Anne) : Oui, bonjour. Le parallèle que l'on pourrait
faire, c'est notamment dans le domaine des...
les travaux qu'on a faits en santé mentale, où le rôle des proches aidants est
extrêmement important et le besoin de soutien
de ces personnes-là pour accompagner efficacement leurs proches est extrêmement
important. Donc, la volonté d'en faire un partenaire à part entière, je pense
qu'en soi c'est une excellente idée, qui a été soulevée par plusieurs des usagers que l'on a rencontrés
dans le cadre des consultations en santé mentale, qui nous signifiaient qu'ils
avaient souvent l'impression de devoir se
battre contre le système pour obtenir des services, les services qu'eux
avaient évalués, estimaient qu'ils
étaient nécessaires pour venir en aide à leurs proches, mais aussi
des services pour eux-mêmes. Et, en ce sens-là, toute amélioration qui
serait apportée pour faire en sorte que les proches aidants deviennent un
partenaire de l'offre de services est, en
soi, visée, en faisant attention, bien évidemment…
puis je pense que, M. le ministre, vous êtes sensible à ça, on
sait que les proches aidants, c'est quelque
chose qui est très féminisé, donc
de ne pas… que ça ne serve pas encore
à isoler davantage les proches aidants puis les confiner dans des
rôles où, dans le fond, ça les met en situation de pauvreté ou d'autre problématique sociale qui va
encore augmenter leur vulnérabilité.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Un
dernier point avant de passer la parole à mes collègues. Je voulais juste
souligner l'importance que vous accordez à l'«empowerment», à l'implication
des personnes dans leurs propres décisions. Et c'est vraiment une valeur fondamentale
également de l'assurance autonomie. La première décision à prendre, c'est où on
veut vivre et par qui on veut recevoir les
services, comment on veut les recevoir. Alors, cet «empowerment», je suis tout à fait d'accord avec vous, est excessivement important si on veut
faire en sorte que les patients sont impliqués au coeur des décisions
qui les concernent. Alors, je suis tout à fait d'accord avec vos visées là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Merci, M.
le Président. Bonjour, M. le
commissaire. Bonjour, mesdames. Je
pense qu'au niveau des préoccupations que vous nous avez transmises dans votre mémoire
c'est éclairant beaucoup puis ça nous fait réfléchir, là. Je pense qu'il
y a des points très importants que vous avez apportés.
Je reprends une phrase que
le ministre a soulevée aussi dans votre mémoire et que j'avais soulevée, que le
statu quo n'est pas une solution acceptable,
il faut déjà penser à modifier ou accentuer l'offre de soins.
Pensez-vous que c'est souhaitable de
mettre en place dès cette année ou 2014 cette assurance autonomie? Ça serait ma
première question.
Puis rapidement peut-être avec une deuxième, je
ne sais pas le temps qu'il nous reste : Est-ce que vous êtes favorables à
augmenter justement le panier de services et l'offre de différents services, c'est-à-dire
du secteur public mais également
des entreprises d'économie
sociale, les chèques emploi-services
dont on entendait parler tantôt, les banques de référence? Est-ce que vous
souhaitez... Pensez-vous que c'est souhaitable, justement, d'aller dans ce
sens-là?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : À la première question,
évidemment, dès qu'on va commencer… le plus rapidement qu'on va commencer, le plus
facile ça va être, parce que le groupe à motiver ou à organiser va être plus
petit, donc on pourra s'ajuster plus rapidement.
Pour ce qui
est d'augmenter le panier de services, nos recommandations à travers
les... depuis notre existence vont aller
dans cette direction-là. D'ailleurs, en santé mentale, nous suggérions au ministre
de rendre la psychothérapie dans le panier de services.
Mais, sur les
maladies chroniques, on s'est reposés beaucoup sur le fait de revoir dans le panier de services
les professionnels qu'on rémunère. Autrement dit, on parle beaucoup, dans le système canadien, de rembourser les médecins, en général c'est dans les hôpitaux et les
médecins, c'est comme ça que notre système est bâti,
mais on posait la question de faire une réflexion à savoir si, dans le cas des
maladies chroniques, qui représentent 60 % des dépenses des systèmes de santé à travers le monde, est-ce qu'on pourrait penser que d'autres
professionnels pourraient maintenant être rémunérés étant donné les besoins qui sont si grands, donc,
autrement dit, l'entonnoir en allant vers le médecin, avec le diagnostic
qui est là, mais de penser, par exemple, aux
problèmes musculosquelettiques avec les physios, les chiros ou d'autres
professionnels.
Dans le
document, on parle aussi d'élargir à une vision beaucoup plus grande que celle
de juste les relations entre le système de santé et l'assurance
autonomie. On dit que, si on voulait voir plus grand puis on avait une vision
plus grande, la mise en place de ce programme-là, ça serait une occasion rêvée
de devenir... faire des partenaires avec les ordres
professionnels ou les professionnels qui sont dans le domaine privé de la santé
pour avoir un service beaucoup plus complet.
Par exemple, on va avoir des besoins pour les personnes qui sont dans
l'assurance autonomie. Bien, sans pour autant,
le système, payer pour les services, bien de faciliter par un mécanisme en
quelque part, à travers le gestionnaire de cas, l'accès ou la possibilité à ces personnes-là, à travers un
gestionnaire de cas, d'avoir accès à un optométriste, d'avoir accès à un dentiste, d'avoir accès à d'autres
professionnels, donc élargir l'offre
de services le plus large possible avec des mécanismes pour permettre à
ces personnes-là qui sont à la maison de pouvoir avoir un service complet en
restant à la maison. Donc, oui, on est favorables à une ouverture plus grande
de ce côté-là.
• (17 h 50) •
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée des Îles-de-la-Madeleine, il vous reste deux minutes.
Mme
Richard
(Îles-de-la-Madeleine) : Deux minutes. Merci beaucoup. Alors, même pour ce
qui est des soins de la vie quotidienne
ou des soins à domicile, là, vous seriez favorables à ce que les entreprises d'économie
sociale, les banques de référence fassent partie de l'offre de services?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
M. Salois (Robert) : À la lumière
des besoins qu'il va y avoir, l'équipe a besoin d'être assez bien fournie, là,
de diverses personnes, soit d'un point de vue médical ou d'un point de vue
strictement d'encadrement. C'est dans cet esprit-là
aussi qu'on suggérait aussi de faire des partenariats avec les organismes
communautaires, parce que, quand le groupe, le nombre de personnes qui
va avoir des besoins va être tellement grand, ça va prendre une grande équipe
pour en prendre soin.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) :
…la coordination demeure quand même par le CSSS ou CLSC?
M. Salois (Robert) : Tout à fait. Ça
prend un coordinateur, de toute évidence. Autrement, ça va être la tour de
Babel.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) :
Oui. Merci.
Le Président (M. Bergman) :
Pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Vous avez dit, M. Salois, que le CSSS
faisait le choix, que c'était soit peu de services à beaucoup de monde
ou beaucoup de services à peu de personnes. Y a-tu une raison qui explique ça?
Est-ce que c'est parce qu'ils ont une enveloppe fermée, et qu'ils doivent faire
avec un certain montant d'argent, et qu'à ce
moment-là ils ne peuvent pas donner beaucoup de services à beaucoup de monde
parce que l'enveloppe est insuffisante?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire. Mme Robitaille.
Mme
Robitaille (Anne) : En fait,
la question de la régionalisation notamment
des budgets est un aspect intéressant, et on a constaté dans différents travaux qu'il y a
effectivement ces disparités-là extrêmement importantes
d'un territoire de CSSS à l'autre et à l'intérieur même, là, des différents établissements. Et ça, en soi,
si c'est adapté aux besoins de la population, c'est correct, parce que c'est ce que veut le
principe de régionalisation, de pouvoir répondre aux besoins les plus précis d'une population. Par contre,
il y a des choix, des choix régionaux parfois qui deviennent problématiques
lorsque l'offre de services n'est pas nécessairement au rendez-vous.
En santé mentale notamment, on a constaté qu'il y
avait une scissure entre les orientations du plan d'action en santé
mentale, notamment
sur l'implication des… et le financement des organismes communautaires dans
chacune des régions du Québec,
qui se devait d'être à 10 %,
c'était l'orientation convenue par le ministère, et, dans les faits, il y
avait une très grande variation dans les
choix régionaux qui étaient faits de financer ou non les organismes
communautaires. Alors, c'est sûr que, si une région fait le choix parce
qu'elle investit davantage dans l'hospitalier, par exemple, ou autres, bien il y a moins d'argent pour offrir des
services directs dans des modalités plus légères parfois. Donc, oui, la
souplesse, mais en même temps les choix
régionaux qui sont faits font en sorte qu'il faut aussi les requestionner
parfois pour s'assurer qu'au fur et à mesure que les besoins d'une
population évoluent, bien, on ne demeure pas encarcanés dans des choix qui ont
été faits, par exemple, de privilégier certaines clientèles au détriment de
d'autres en leur offrant davantage de services,
mais, quand les besoins de la population évoluent, bien il faudrait que, de
façon assez souple, les choix régionaux qui sont faits dans l'allocation des ressources suivent aussi et qu'on
ne soit pas pris avec des structures qu'on a mises en place, qu'on a financées, qu'on peut plus
difficilement bouger pour s'adapter aux besoins de la population à ce
moment-là.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Nous sommes d'accord,
le statu quo n'est pas acceptable. Mais ce qu'on entend par «statu quo»,
c'est l'évolution également des pratiques, comme vous avez dit, c'est-à-dire
des pratiques de groupe, interdisciplinaires. Tout le monde, on est tous d'accord,
puis ça, je tiens à le dire — puis, quand j'étais ministre, je le disais aussi — il faut faire le virage vers le maintien à
domicile, qui a été commencé voilà plusieurs années, mais certaines organisations ont été plus longues à faire leur
transformation que d'autres. Puis il y en a qui ont été très innovateurs. On recevait hier le CSSS Arthabaska-Les Érables de la région de
l'Estrie qui, eux autres, ont commencé il
y a plusieurs années. Mais, à ma connaissance, puis dans vos études, vous avez dû constater que toutes les régions
ont certainement amorcé ce virage mais possiblement à des vitesses différentes.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Robitaille. M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : Oui. En fait,
depuis le début de nos travaux, il y
a déjà quelques années, on peut...
Même qu'à une certaine époque on avait regardé la progression, l'amélioration
du système de santé. Le système de santé québécois, à une période, s'était
amélioré plus que les autres provinces avec lesquelles on comparait. Effectivement,
il y a des améliorations constantes à chaque année, on les note, on les voit.
Il y a des éléments qui peuvent actuellement ralentir cette progression-là, dépendant aussi du niveau d'informatisation
des régions. On a fait cette année… Dans nos travaux en 2013, on a fait des
tableaux où on a mis en relation des régions très informatisées en relation
avec la production ou le volume d'activité ou des fois avec la qualité et on
voit que les régions informatisées, qui sont
équipées avec un système d'information important,
réussissent à se démarquer de d'autres régions qui ne sont pas
informatisées. Mais, ceci étant dit, tout le monde a progressé, tout le monde s'est
amélioré depuis les débuts dans lesquels on fait l'évaluation.
Ce n'est pas tout le monde qui l'ont fait au même rythme puis au même niveau. C'est un peu dans ce
sens-là aussi, pour ajouter à la réponse de madame… c'est à l'effet qu'on
aimerait ça avoir des indicateurs de besoins. On travaille avec l'INSPQ pour avoir des indicateurs de
besoins, parce que ce serait intéressant de savoir, par exemple, deux régions qui arrivent avec le même résultat, avec les
indicateurs qu'on mesure, et puis… savoir qu'une région avait des besoins beaucoup
plus grands, mais elle est arrivée quand
même à un standard de performance
intéressant parce qu'elle a répondu aux besoins qui étaient plus
grands dans sa région.
Donc, je
pense que c'est un élément important, de savoir que certaines des régions ont dû
s'ajuster, dépendamment des régions.
Si vous êtes une région avec beaucoup de jeunes, par exemple, c'est sûr que le développement pour personnes âgées, assurance autonomie, ce n'est certainement
pas développé aussi grand que des régions où le taux de personnes âgées est
très élevé, donc... Mais en fait il y a eu des progressions dans toutes les
régions. Certaines l'ont fait sur une plus grande échelle.
Le Président (M. Bergman) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Oui. D'ailleurs, le ministre vous avait posé la question par rapport à qu'est-ce qui doit être fait. Je pense qu'il n'a pas aimé
nécessairement votre réponse; moi, je l'ai beaucoup aimée, là. C'est d'abord
aller chercher de la performance dans le
réseau par la transformation, dont, entre autres, ce virage vers le maintien à
domicile, travailler en équipe et puis
également aller chercher de la performance dans le réseau avant de dire qu'on
puisse réinjecter de l'argent. Et, vous avez raison, on peut réinjecter
énormément d'argent, mais, si on ne fait pas cette transformation, l'argent ne
sera pas aussi bien utilisé.
Dans
l'assurance autonomie, moi, je vois deux grands tableaux, le premier tableau
qui est la transformation du réseau,
on favorise le maintien à domicile, on utilise déjà des acquis qui sont en
progression, les CSSS, les gestionnaires de cas et puis également l'évaluation des besoins
avec l'ISO-SMAF qui est en place actuellement dans le réseau de la santé, on détermine des besoins puis on alloue un
montant ou encore des services. Ça, je crois que les CSSS le font déjà.
Ce que l'assurance autonomie nous amène, c'est l'autre aspect, c'est le
financement. Et ça, vous en parlez peu dans votre mémoire, sauf que vous mettez
un petit signe d'alerte en disant : Il faut en tenir compte également. Et
puis moi, j'aimerais ça savoir, le financement, comme il est prévu.
Est-ce que
vous pensez qu'on doit absolument savoir avant combien ça va coûter ou encore
on donne le feu vert à de l'assurance
autonomie pour se rendre compte par la suite que soit qu'il va y avoir une
augmentation énorme des coûts, qu'on va devoir faire des choix… Et ça, l'AQESSS
a été très claire hier, ils disent : Si vous arrivez avec énormément de besoins puis vous n'avez pas plus d'argent, on
va devoir faire, nous, des choix à l'interne, et là la théorie du «on va
en donner à moitié à tout le monde», versus
une certaine répartition, c'est ce qui va s'appliquer dans le réseau. Parce
que, le financement, c'est ça, le coeur. On est tous d'accord avec les
principes, et vous l'avez expliqué, c'est ça qui doit être fait. C'est commencé depuis plusieurs années et ça
se continue. Mais combien il va y avoir… Quel montant qui va être demandé à l'usager? Quel est le coût total? Et à
la fin, si, exemple, ça dépasse de 2 milliards, la mise en place de
l'assurance autonomie, est-ce qu'on est prêts à accepter ça comme facture… ou
où on va aller chercher l'argent?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire. Mme Robitaille.
• (18 heures) •
Mme
Robitaille (Anne) : Oui. En
fait, je pense que la démonstration est assez évidente que l'accroissement
du nombre de personnes âgées va de toute
évidence, de toute façon, coûter plus cher au système, donc d'où l'importance
de revoir le mode d'organisation et de
réfléchir à comment collectivement on peut faire face à ce défi-là et composer
avec.
Vous avez
parlé tout à l'heure, Dr Bolduc, de différents éléments, dont la disparité
entre les territoires de CSSS qu'on
constate et que plusieurs constatent dans le panier de services. Nous, on pense
que... Bien, évidemment, on s'est peu prononcés sur les modes de financement comme tels,
mais il y a un leadership à assumer du côté national à définir un panier de services de base, ce à quoi chaque
Québécois, Québécoise devrait être en mesure de s'attendre, s'il
rencontre… s'il survient une perte d'autonomie dans sa vie, et que, dans le
fond, les ressources qui sont déjà dans le système de santé soient révisées avec les partenaires impliqués dans ces
territoires-là pour voir, dans le fond, comment répondre à ça et comment
rencontrer les obligations, je dirais, les attentes de la population à l'égard
d'un panier de services de base. Et ça, je
pense que c'est comme inévitable parce que, que l'on fasse quelque chose ou que
l'on ne fasse rien, ça va coûter plus cher. Est-ce que ce sera
2 milliards? Est-ce que ce sera 1 milliard? C'est difficile de le
dire à ce moment-ci, mais il est clair que toutes les courbes démographiques
vont dans ce sens, avec l'augmentation de la consommation des services de santé
et sociaux aussi.
Donc, la
question qui était posée tout à l'heure, à savoir : Est-ce que ça devrait
être mis en place rapidement?, nous croyons
que oui, parce qu'il y a une période de transition qui est à prévoir. Alors,
aussi bien se pratiquer, en quelque sorte, à mettre en place les bons services de la bonne façon. Donc, on fait
beaucoup de choses, on dépense beaucoup d'argent, mais faisons-nous la bonne chose pour répondre aux
besoins de la population? Donc, se permettre ces réajustements-là au fur
et à mesure que surviendra l'accroissement de la population en perte d'autonomie,
et parce que de toute façon les coûts supplémentaires, ils seront là, de toute
façon.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Puis je suis d'accord pour cette
transformation-là, et on a déjà des estimés des coûts supplémentaires.
La question : On ne sait pas c'est quoi, le projet d'assurance autonomie,
en termes de financement. Et on ne sait pas également, dans la nouvelle
transformation, c'est quoi, la contribution de l'usager.
Juste pour
vous donner un exemple, c'est quoi, le montant qu'on va donner pour un ISO-SMAF
coté, mettons, 8 ou 9? Y a-tu une standardisation? Est-ce que ça va être
la même chose partout? Et là, vous savez, à un moment donné, ça nous prend des données, et vous êtes certainement des gens qui
vont évaluer avant les chiffres, avant de prendre une décision. Si vous donnez l'ISO-SMAF à tout le
monde à un certain montant et vous vous rendez compte qu'en faisant ça ça vous coûte 2 milliards de plus, il faut
peut-être vous poser des questions si ce que vous faites est en train d'être
la bonne chose… ou vous transformez le système de façon différente.
Vous savez,
on a vécu un dossier qui s'appelle l'Hôtel-Dieu de Québec. Je le répète, on
avait un montant. On prend une décision puis on se rend compte, à peu
près trois mois après, que ça coûte presque le double. C'est ça, la réalité.
Moi, je pense
qu'il faut faire l'évaluation des chiffres avant. Et, une fois qu'on aura tous
les chiffres ensemble, moi, je suis d'accord pour qu'on regarde pour
prendre une décision, je ne suis pas… je veux collaborer. En passant, on veut tous la même chose, on veut de l'amélioration
du système. Mais il y a beaucoup de gens qui disent : Quand on a
fait la désinstitutionnalisation puis le
virage ambulatoire… Moi, j'ai vécu le virage ambulatoire, là, une excellente
idée, sauf que, quand est arrivé le
temps de mettre l'argent, il n'était pas disponible. Et, demain matin,
posez-vous la question : Si ça coûte 2 milliards de plus,
est-ce que le gouvernement va faire le choix de mettre la réforme en place sans
mettre l'argent? Et là c'est là que vous avez
basculé. L'échec du virage ambulatoire, et tout le monde le reconnaît, c'est
quand est arrivé le temps… Ils ont
coupé, mais, quand il est arrivé de mettre le temps… l'argent dans les services
en externe, l'argent n'est pas venu parce qu'on visait le déficit zéro.
C'est ça qui est arrivé, le virage ambulatoire, tout le monde connaît cette
histoire-là. Est-ce qu'on doit répéter l'histoire avec une assurance autonomie?
Et, en
passant, les coûts, actuellement, c'est à peu près 100 jusqu'à
150 millions de dollars sur 20 ans qu'il faut rajouter à
chaque année, et, vous l'avez dit tantôt, il y a de la performance à aller
chercher dans le réseau de la santé. Je ne dis pas qu'on va aller chercher 100,
150 millions de dollars de performance, il faut rajouter de l'argent, mais
il y a peut-être en même temps une amélioration de la
performance pour réussir à contrecarrer ce 100, 150 millions. Vos
commentaires?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
M. Salois
(Robert) : Bien, en fait,
c'est une des préoccupations qu'on a. Pour nous, la performance du
système de santé est un message clé, est un
message clé, pour nous, vis-à-vis la… L'investissement d'argent, si on n'est
pas performants, ça ne donnera pas les résultats. C'est un peu pour ça
que le mémoire insiste sur le fait qu'il faut régler des problèmes de coordination, de continuité,
d'interdisciplinarité d'abord, et ensuite l'efficacité du système lui-même va
faire en sorte que les besoins financiers devraient probablement être
moins importants.
Et c'est un
constat qu'on a fait. Première ligne, maladies chroniques, périnatalité, santé
mentale, c'est d'abord un problème
d'organisation, et c'est pour ça qu'on met en garde. Si ça, ce n'est pas au rendez-vous, l'assurance autonomie va être
difficile à mettre en place et va coûter cher. C'est pour ça qu'on dit... C'est
ça, les messages qu'on va laisser, qu'il faut organiser cet aspect-là, parce
que, si ça, c'est organisé, le reste des choses va aller bien quant aux
services et la prise en charge, et aussi les coûts vont certainement être
diminués, si on a une meilleure efficacité.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je veux vous remercier, vous me donnez
100 % raison, parce qu'actuellement, la façon dont on voit l'assurance autonomie, c'est des
grands principes avec aller chercher de l'argent d'une façon et le
redistribuer d'une autre façon, puis redonner le même montant, ils redonnent le
même montant, mais ils disent : Les gens vont faire le choix. Mais, si tu
ne fais pas une amélioration de ton organisation de services localement, à la
fin tu vas juste remettre plus d'argent.
Savez-vous
l'expérience qu'ils ont eue en France par rapport au financement à
l'activité — dans
lequel je crois, d'ailleurs, je pense
que c'est une bonne affaire? C'est qu'ils se sont rendu compte que, quand les
gens ont vu comment ça fonctionnait, tout a monté, tout simplement.
Puis je vais vous donner l'exemple, puis c'est
très humain, là : le gestionnaire de cas, à partir du moment qu'il y a un montant qui va arriver en fonction de
la sévérité des cas, les cas sont tous plus élevés, on est toujours un
peu plus large. Puis la différence entre des
profils 7, puis 8, puis 9, contrairement à ce qu'on pense, quand vous prenez
plusieurs gestionnaires, il y a une petite
marge de manoeuvre. Mais, si ton CSSS, il a plus d'argent si l'évaluation est
plus haute, pas longtemps après, là,
puis c'est humain — en
passant, moi, je suis un gars également de chiffres, là, mais je comprends
très bien que c'est humain — tout
augmente et tout devient plus lourd, il y a des cas parfois qui n'étaient pas
si lourds que ça qui deviennent plus lourds, et, à ce moment-là, il faut donner
plus d'argent.
En France,
ils se sont rendu compte qu'en mettant un financement à l'activité sans
contrôle — puis,
encore là, ce n'est pas évident de mettre des contrôles — tout
a augmenté de 30 % tout d'un coup. D'ailleurs, ça leur a causé un problème. Moi, je suis allé visiter, puis ils
m'ont expliqué comme il faut, ils ont dit : Écoute, ça, c'est un risque.
Ce n'est pas mauvais, mais il faut que ce soit mieux contrôlé.
D'ailleurs, dans le système, il n'y a pas plus d'argent.
Il y a juste 100 millions de plus, qui compense juste le vieillissement de la population. C'est juste qu'on
veut l'allouer de façon différente, mais on n'améliore pas
nécessairement la performance du système.
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
Mme Robitaille (Anne) : Bien, ce à
quoi vous faites référence...
Le Président (M. Bergman) :
Mme Robitaille.
Mme
Robitaille (Anne) : Ce à
quoi vous faites référence, en fait, c'est le monitorage du suivi, parce qu'il
y a moyen, comme ministère, de se donner des indicateurs de suivi pour
pouvoir réajuster et poser les bonnes questions aux bonnes personnes. Il y a toutes sortes de programmes dont les
budgets sont alloués de cette façon-là, sur la base d'une déclaration de
clientèle qui est cotée X ou Y, et qui donnent plus ou moins d'argent. Je pense
qu'il faut s'assurer de pouvoir effectuer les suivis nécessaires et poser les
questions si du jour au lendemain la population entière ou une proportion
importante de personnes âgées d'une région devient tout d'un coup plus lourde,
plus handicapée, moins autonome, etc. Je pense qu'il y a moyen de se doter de
mécanismes de suivi et de contrôle pour s'assurer que ces dérapages-là ne
soient pas monnaie courante et réajuster le tir, le cas échéant.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Vous êtes des évaluateurs de système. Êtes-vous
d'accord qu'avant d'accepter un principe d'assurance autonomie ou même déposer
le projet de loi on doit savoir combien l'usager va payer, combien ça va coûter
au système, quel montant qu'on va donner selon le profil — parce
que c'est la base que ce profil-là — et également ça va nous prendre combien de
gestionnaires de plus pour administrer le système?
Là, les gens
vont vous dire : Oui, mais ils vont administrer ça avec les ressources
actuelles. Je pense qu'il faut aller demander aux gens sur le terrain s'ils
vont être capables de le faire, vous avez tout décrit ce que ça prend de plus. Est-ce qu'on va rajouter de la bureaucratie? Et en plus de
ça il y a une nouvelle couche qui va être faite, où est-ce que ça va être géré
par la Régie de l'assurance maladie du Québec.
Et également tous les patients qui pourraient avoir besoin de
services vont devoir avoir une évaluation, donc le 15 % des gens qui ont des
handicaps ou qui ont des besoins, de 65 ans et plus — c'est
à peu près l'estimé qu'on fait, grosso modo — ont tous besoin d'une
évaluation. Je ne sais pas si on va aller jusqu'à tout évaluer ceux dans les CHSLD. C'est 40 000 personnes. C'est environ
15 000 personnes au niveau des ressources intermédiaires. Et en plus
de ça il faut faire évaluer ça sur une base
régulière, parce que, compte tenu que ton profil peut changer, moi, je m'attendrais
que ça va être sur une base régulière.
Est-ce que
vous pensez qu'on devrait au moins avoir tous ces chiffres-là avant même qu'on
ait un dépôt de projet de loi de l'assurance autonomie, en gestionnaires
responsables?
Le Président (M. Bergman) :
M. le commissaire.
• (18 h 10) •
M. Salois
(Robert) : Une autre façon qu'on peut voir les choses, c'est
qu'avant de quantifier on veut entendre aussi tous les besoins et les
analyses qui sont en place, pour s'assurer qu'on a toute l'information pour
être capables de pouvoir, justement, faire cette quantification-là.
En passant,
la quantification d'un point de vue financier, ce n'est pas quelque chose de facile dans le système
de santé. On le sait, que les données ne
sont pas toujours disponibles.
Oui, on pourrait commencer à faire une analyse au début, mais il y
aurait aussi une autre façon de faire en s'assurant de faire le tour du jardin,
d'essayer de comprendre tout ce que les acteurs ont à proposer et d'arriver à
la fin avec une quantification, à la fin, avant de passer au projet.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Robitaille.
Mme Robitaille
(Anne) : Il y a aussi des
grandes questions, des grandes questions qui doivent être répondues et qui touchent à l'équité notamment. On sait déjà,
par exemple, que le prix des … les usagers qui sont en CHSLD ne paient
pas leurs médicaments, contrairement à ceux qui vivent à domicile, et ces
éléments-là amènent aussi des questions d'équité entre les différentes
personnes qui constituent notre société. Il y a toute la question de la
contribution des personnes où nous pensons qu'il y a des travaux qui doivent
être faits pour apporter des précisions, toujours dans une perspective
d'équité. Comment se fait-il que la contribution des personnes âgées en CHSLD
soit plafonnée, alors que certaines personnes qui ont difficilement accès à des
services d'hébergement, dans le fond, vont au privé ou vivent à domicile et dépensent beaucoup plus que ça? Ces
questions-là ont été soulevées par d'autres, et nous, on commence à entendre ce genre de chose là. Notamment dans le
cadre des travaux qu'on a faits sur les médicaments d'ordonnance, qui sera l'objet d'un prochain rapport, là, du
commissaire, on a entendu beaucoup de choses sur des éléments comme ça
qui touchent à l'inéquité selon d'où proviennent les services.
Donc, nous
pensons qu'effectivement, dans le projet d'autonomie, il reste des questions
qui doivent être répondues, mais ce
n'est pas parce qu'il reste des choses sur lesquelles il faut travailler,
apporter des précisions, faire des réflexions collectives aussi que ce n'est pas pour autant un projet, là, que le
commissaire estime pertinent et utile pour l'amélioration de la santé et
du bien-être de la population.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Gatineau, il vous reste trois minutes.
Mme Vallée : O.K., merci. Vous
avez, dans votre mémoire, abordé une question assez intéressante et assez importante, c'est toute la question de la charge
additionnelle qui pourrait être mise sur les épaules des proches
aidants. Et vous vous questionnez sur la
capacité, pour le système, de soutenir ces proches aidants là, et c'est en
page 12 du mémoire, tout ça dans une question d'éviter, là, d'augmenter
la détresse des proches aidants.
J'aimerais ça
vous entendre davantage parce qu'évidemment c'est un élément fort, c'est-à-dire
que le maintien à domicile va aussi
apporter une charge additionnelle. On parle d'équité, là? Bien, il y a aussi
l'équité pour ceux et celles qui sont
à la maison et qui vont être là au quotidien auprès… et qui sont là au
quotidien auprès des personnes handicapées, dont on a très, très peu
parlé à date, et des personnes… des aînés.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la commissaire adjointe.
Mme Cleret de Langavant (Ghislaine)
:
Oui. Ce n'est pas la première fois que l'on soulève la question de la préoccupation
du soutien des proches aidants. Nous l'avons fait à plusieurs reprises, entre
autres dans l'avis sur les droits… comment
informer des droits et des responsabilités des citoyens eu égard à la santé et
l'utilisation de services. Mais,
comme a dit Mme Robitaille, ce n'est pas parce que nous n'avons pas mis en
oeuvre les choses que l'on recommande depuis des années… Tous les six
défis dont on parle, ça a été recommandé depuis des années pour améliorer la performance. Ce n'est pas parce qu'on n'y est pas
arrivé, qu'on n'a pas répondu à ces préoccupations-là que ça la remet en
question, la pertinence de ce projet d'assurance autonomie. On pourrait voir ça
aussi comme une opportunité de faire ce qu'on devrait faire depuis longtemps.
Et puis le soutien aux proches aidants, c'est
clair que c'est une nécessité morale même, que ce soient des services de répit, que ce soit de l'information,
que ce soit, en fait, l'accompagnement par les organismes
communautaires. Souvent, on ne reconnaît même pas ce droit de l'accompagnement.
Donc, ce sont des choses que l'on devrait faire depuis très longtemps. La
question est à savoir : Pourquoi on ne le fait pas déjà?
Donc, oui, c'est une
préoccupation, mais ce n'est pas parce que c'est une préoccupation qui devient
de plus en plus aiguë par rapport à la nécessité d'aller de l'avant, de
permettre, les personnes, d'être chez eux que cette question-là devrait enrayer
la pertinence d'aller de l'avant.
Le Président (M. Bergman) :
Malheureusement, le temps s'est écoulé…
Mme Vallée : Ce n'est pas du
tout ça que je disais. Vous interprétez mes propos, c'est dommage.
Mme Cleret de Langavant (Ghislaine)
:
...excusez-moi, j'ai mal compris.
Le
Président (M. Bergman) : M. le commissaire, Mme la commissaire adjointe, Mme Robitaille,
merci pour votre présentation. Merci d'être ici avec nous aujourd'hui et
partager votre expertise avec nous.
Collègues,
compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au jeudi 31 octobre
2013, après les affaires courantes, afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une
assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous. Bonne soirée.
(Fin de la séance à 18 h 16)