(Onze heures vingt-neuf minutes)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.
La commission
est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions
publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie
intitulé L'autonomie pour tous.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Daneault (Groulx) est remplacée par Mme Roy (Arthabaska).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Bergman) : Alors, nous recevons maintenant
l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec. Alors, bienvenue. Pour les fins
d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Et je
vous répète que vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Alors,
le micro est à vous pour identification et pour votre présentation de
10 minutes.
Association des
établissements de réadaptation
en déficience physique du Québec (AERDPQ)
M. Malo (Luc M.) : Merci, M. le
Président. Alors, M. le Président, M. le ministre, distingués membres de la
commission, mesdames et messieurs, l'Association des établissements de
réadaptation en déficience physique vous remercie de l'invitation à présenter
son mémoire au regard du livre blanc sur la création d'une assurance autonomie.
• (11 h 30) •
Mon nom est Luc Malo, je préside le conseil d'administration
de l'Institut Raymond-Dewar — c'est pour les personnes sourdes, à
Montréal — ainsi
que celui de l'association. Permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent et qui siègent également au conseil
d'administration de l'association : M. Régis Harvey, directeur
général du Centre de réadaptation en
déficience physique Le Parcours du CSSS de Jonquière, et Mme Anne Lauzon,
directrice générale de l'association. Nous
avons en deuxième rangée Mme Sylvie Valade, qui est la directrice… conseillère
aux affaires cliniques et professionnelles, qui peut-être va pouvoir nous
souffler quelques réponses, au besoin.
L'association
regroupe 21 établissements du réseau de la santé et services sociaux, répartis en 105 points de service sur l'ensemble du territoire
québécois. Les centres de réadaptation en déficience physique, communément
appelés CRDP, offrent des services spécialisés
et surspécialisés d'adaptation, de réadaptation et d'intégration sociale aux
personnes ayant une déficience physique. Quelque
6 800 professionnels y
travaillent en équipes multidisciplinaires afin d'aider les personnes handicapées à retrouver leur autonomie
et une qualité de vie optimale. Quelque 77 000 personnes de tous
âges ayant une incapacité significative et persistante attribuable à une
déficience auditive, du langage, motrice ou visuelle y reçoivent des services
annuellement.
D'entrée de jeu, l'association accueille
positivement le contenu du livre blanc. Le virage annoncé dans ce document
s'appuie sur la volonté de tous de demeurer dans leur communauté et d'y
maintenir une vie active tout en recevant des services adaptés à leurs besoins
là où ils ont fait le choix de vivre.
Le présent
mémoire expose les préoccupations et recommandations de l'association afin de
contribuer à la réflexion à laquelle
nous sommes conviés ainsi que de s'assurer de la prise en compte des réalités
propres aux personnes présentant une
déficience physique. Conséquemment, l'association a identifié cinq enjeux, pour
lesquels 15 recommandations sont formulées. Il s'agit de la portée
de la couverture de l'assurance, de la continuité des services, de l'outil d'évaluation,
du financement et de l'implantation. Aux fins de la présente allocution, seulement
quelques recommandations sont reprises, alors que le mémoire dans son entièreté
est disponible sur le site Web de l'association.
Consciente que le livre blanc propose tout d'abord
des mesures pour répondre aux besoins grandissants liés au vieillissement rapide de la population québécoise,
l'association ne peut que saluer la volonté du gouvernement d'y inclure l'ensemble
des personnes nécessitant des besoins de soutien à long terme,
incluant les adultes ayant une déficience physique. L'association appuie
également la proposition d'inclure dans l'assurance autonomie l'ensemble des
services de soutien à domicile, et ce, peu importe le lieu de résidence de la
personne.
Par ailleurs,
l'association est en accord avec la décision de ne pas inclure les services
spécialisés de réadaptation. Les services spécialisés de réadaptation
offerts par les CRDP s'inscrivent au sein de continuums de services, ils
peuvent être concomitants ou séquentiels aux services offerts par les CSSS.
Pour les adultes et aînés ayant une déficience
physique, les services spécialisés de réadaptation peuvent faire la différence
et leur permettre de conserver une autonomie suffisante pour rester à
domicile et ainsi contribuer à retarder, voire éviter un hébergement en
institution. Si ces interventions sont offertes en temps
opportun à la personne le requérant, elles peuvent permettre de réduire ses besoins de soutien à domicile. En effet, visant la
réduction et la compensation des incapacités, les services spécialisés
de réadaptation ont un impact direct sur la nature et la quantité du besoin en
services de soutien à domicile, engendrant ainsi des économies importantes sur
les montants d'allocation accordés par une éventuelle assurance autonomie.
Toutefois,
l'accès aux services, pour les CRDP, est actuellement loin d'être optimal,
plusieurs milliers de personnes de
tous âges sont en attente d'un premier service. Au 31 mars, on en
recensait 6 840, dont 4 249 adultes et aînés. Il est donc fort possible que l'accès limité aux services
spécialisés de réadaptation produise une forme de goulot d'étranglement,
causant des bris de continuité et une perte
d'efficience de l'assurance autonomie en raison d'allocations indûment
élevées, faute d'avoir bénéficié des services des CRDP en temps opportun.
En ce sens, l'association recommande que
des solutions réalistes favorisant l'accessibilité aux services spécialisés de réadaptation
en CRDP soient identifiées et appliquées afin d'assurer une continuité de
services optimale pour les personnes ayant une déficience physique, et ce, dans
un souci d'efficacité réseau d'optimisation des retombées de l'implantation de
l'assurance autonomie.
Par ailleurs, l'association souscrit à la
décision du ministre de proposer l'utilisation d'un outil unique et standardisé pour déterminer les besoins de soutien
à domicile. Plusieurs avantages en découlent, notamment
en ce qui a trait à l'équité
entre les citoyens demeurant dans différentes régions.
Toutefois, certaines préoccupations demeurent
quant à l'utilisation de l'Outil d'évaluation multiclientèle, du Système
de mesure à l'autonomie fonctionnelle et des profils ISO-SMAF, notamment
en ce qui a trait à leur sensibilité aux besoins des personnes ayant une
déficience physique. En effet, l'OEMC et le SMAF, dans leur forme actuelle,
sont construits pour mesurer les incapacités
fonctionnelles et répondent peu, voire pas à la dimension de la participation sociale des personnes
évaluées, importante pour tout citoyen désirant être actif dans sa communauté.
Ainsi, l'association s'inscrit en partenaire et
recommande qu'une démarche formelle de validation de la sensibilité de
ces outils à évaluer autant les besoins de soutien à domicile et de maintien à
l'autonomie que les besoins reliés à l'accomplissement
des rôles sociaux soit réalisée. L'association recommande aussi que des travaux
soient réalisés afin de s'assurer que
l'allocation consentie permette de répondre aux besoins de soutien à
l'autonomie et à la participation sociale des personnes, incluant celles
ayant une déficience physique.
Le livre blanc propose d'inclure dans l'assurance
autonomie les aides techniques et les aménagements de domicile. L'attribution d'aides techniques de même que les démarches
entourant l'adaptation du domicile s'inscrivent effectivement dans un
processus de maintien de la personne dans son milieu de vie. Cependant, il
existe différents programmes d'aides techniques
visant à compenser les incapacités d'une personne, dont les aides techniques
réglementées par la Régie de l'assurance maladie du Québec.
Présentement,
les CRDP du Québec sont mandatés pour offrir des services d'aide technique
reliés à la mobilité, à la posture, à
la locomotion, à l'audition et à la vision. Le fonctionnement actuel n'apparaît
d'aucune façon interférer avec le maintien à domicile des personnes
requérant ces services. Au contraire, la concentration de l'attribution des ces
aides contribue à rendre disponibles des
aides de qualité à des coûts avantageux pour le réseau public et selon des
modalités performantes. Ainsi, l'association
recommande que ne soient pas couvertes par l'assurance autonomie les aides
techniques de suppléance à l'audition,
reliées à la mobilité, à la posture et à la locomotion et les aides visuelles
qui sont actuellement régies et
réglementées par la RAMQ et pour lesquelles les CRDP ont été conventionnés pour
en faire l'évaluation et la contribution…
et l'attribution. Par contre, l'association est d'avis que le programme d'aide
matérielle et petits équipements d'aide
à la vie quotidienne et domestique et le programme d'adaptation domiciliaire
gagneraient à être intégrés dans le processus
d'assurance autonomie, puisqu'actuellement les délais souvent très longs pour
obtenir ces services deviennent un frein au soutien à l'autonomie des
personnes.
Le Québec
aura du mal à faire face à la demande accrue que le vieillissement de sa
population exercera au cours des prochaines années sur ses dépenses de
santé, notamment de soins et de services de longue durée. Le livre blanc propose la création d'une assurance autonomie et
la constitution d'une caisse autonomie pour en assurer le
fonctionnement.
Le financement
de l'assurance autonomie s'effectue, selon le livre blanc, en deux temps. Pour
les quatre premières années, le cadre financier actuel est utilisé. Or,
l'organisation courante des services fait en sorte que certains budgets ne sont pas toujours distingués selon les
programmes-services comme ils devraient l'être. Par exemple, dans
plusieurs régions, les lits des unités fonctionnelles de réadaptation intensive
pour les personnes ayant une déficience motrice ne se retrouvent pas toujours
en CRDP, et leurs dépenses ne sont pas nécessairement imparties au programme de
la déficience physique.
Aussi, les
550 millions du programme-service en déficience physique inclus dans
l'ensemble des dépenses actuelles en longue durée, selon le livre blanc,
correspondent, pour l'association, aux dépenses des services de première ligne et à celles de deuxième ligne. Conséquemment, le
financement rapatrié dans la caisse d'assurance autonomie devra provenir
exclusivement des budgets des programmes-services concernés, octroyés aux CSSS
ou CHSLD, en excluant ceux utilisés pour les URFI en déficience physique, qu'elles
soient ou non gérées par un CRDP.
Pour le
financement à long terme et afin de s'assurer d'avoir les moyens de nos
ambitions, l'association soutient que
des travaux doivent être dès maintenant enclenchés pour identifier des mesures
de financement, de façon à pérenniser la caisse d'assurance autonomie et
s'assurer d'une plus grande équité intergénérationnelle.
L'implantation de l'assurance autonomie
représente, pour le réseau de la santé et services sociaux, un défi de taille, il importe de bien préparer chacune des
étapes de ce grand virage. Étant donné les défis opérationnels
importants pour garantir une implantation
réussie de l'assurance autonomie, l'association recommande qu'une étape de
planification soit réalisée préalablement à
l'implantation de l'assurance autonomie afin de poser les jalons nécessaires à
sa réussite, qu'il s'agisse de budgétisation, de mécanique budgétaire
des allocations, de la sensibilité des outils d'évaluation et de leur adéquation avec les
montants d'allocation, d'ententes de collaboration ou de service entre les
différents partenaires, incluant les
CRDP. Aussi, étant donné les responsabilités confiées aux CSSS en matière de
surveillance de la qualité des services rendus, l'association recommande que des mesures concrètes soient
prévues pour soutenir les CSSS afin qu'ils puissent assumer cette responsabilité et aussi pouvoir
prendre en compte les besoins particuliers des personnes ayant une
déficience physique.
Par ailleurs, l'association croit que l'implantation
progressive d'une telle mesure...
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît. En conclusion, s'il vous plaît.
M. Malo (Luc M.) : Il me reste une
demi-page.
Le Président (M. Bergman) :
Ça va.
• (11 h 40) •
M. Malo
(Luc M.) : Par ailleurs,
l'association croit que l'implantation progressive d'une telle mesure selon
le critère d'âge et le type de clientèle,
tel que proposé dans le livre blanc, est susceptible d'introduire une notion
d'iniquité entre les citoyens québécois
pendant la période de transition et ouvre la porte à de nombreuses
interprétations selon les régions et les intervenants. L'association recommande
donc que l'implantation progressive ne se fasse pas selon une approche par âge
ni par programmes mais plutôt par types de service ou volets de service
distincts.
En terminant,
l'association croit fermement que les adultes et aînés présentant une
déficience physique ont tout à gagner
à la mise en place d'une assurance autonomie. Elle réitère sa conviction que la
création d'une assurance autonomie et
la constitution d'une caisse d'autonomie sont pertinentes et appropriées au
contexte québécois. Les recommandations qui vous sont présentées mettent en lumière les particularités des personnes
présentant une déficience physique, autant par rapport à leurs besoins et attentes qu'à l'intensité et à la qualité des
services requises pour leur assurer le soutien dont elles ont besoin pour développer ou conserver leur
autonomie et accomplir leurs rôles sociaux. Nous demeurons disponibles
pour répondre à vos questions.
Le
Président (M. Bergman) : Merci, M. Malo, pour votre
présentation. Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Merci
beaucoup, M. Malo, Anne Lauzon et M. Harvey. Je suis très heureux de
vous accueillir. Lorsque je suis arrivé en
poste et qu'on a commencé à discuter assurance autonomie, j'ai eu l'agréable
surprise d'entendre les associations
d'établissements, les organisations également que nous entendrons un peu plus
tard, de personnes avec des déficiences physiques ou intellectuelles,
répondre présent. Nous voulons faire partie de l'assurance autonomie. Et ça, ça va permettre au Québec d'éviter des problèmes
que vivent plusieurs pays qui ont deux systèmes séparés, un pour les
personnes avec des handicaps plus jeunes et un autre avec les personnes âgées,
la France étant un de ces exemples où l'équité
entre les deux systèmes est difficile à maintenir et, deuxièmement, surtout les
transitions entre un système et l'autre sont extrêmement difficiles. Alors, je pense que c'est une excellente
nouvelle de voir l'ouverture de vos établissements à la mise en place d'une
assurance autonomie pour tous les âges.
Je note votre
désir d'inclure la participation sociale dans le plan de services. Évidemment,
dans le plan de services, je pense que ça va de soi, il faut améliorer l'Outil
d'évaluation multiclientèle dans cet aspect-là, et je note votre offre de
collaboration à cet égard.
J'irais sur l'admissibilité, où vous nous
suggérez de baisser l'âge d'admissibilité à 16 ans plutôt que, par exemple, à 21 ans, après le parcours
scolaire, après le départ du foyer familial. J'aimerais ça vous entendre sur
cet âge charnière où on passerait à l'assurance autonomie.
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo. Mme Lauzon.
Mme Lauzon
(Anne) : Oui. Merci, M. le
ministre. En fait, c'est que, d'ores et déjà, entre les centres de
réadaptation qui ont une mission pour les enfants et ceux qui ont une mission
pour les adultes… ou quand c'est le même
centre de réadaptation, quand les jeunes ont 16 ans on se pose déjà la
question, à savoir : Est-ce qu'ils ont plus un profil de besoins de
jeune adulte ou plus des profils de besoins des enfants? Et, selon le cas, par
exemple à Montréal, l'enfant peut être
transféré de Marie Enfant au Centre de réadaptation Lucie-Bruneau, s'il a un
profil davantage… qui correspond aux habitudes de vie, disons, d'un
jeune adulte, par rapport à, s'il a plus un profil enfant, il peut rester à
Marie Enfant. Donc, de 16 à 18 ans, on fait déjà cette analyse-là. Et on n'y
va vraiment pas en fonction de l'âge mais en fonction du profil de besoins et
de la nature des services que la personne aurait besoin.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Donc, si
je comprends bien, votre suggestion serait de ne pas mettre un âge d'admissibilité
mais plutôt d'y aller sur la nature des besoins.
Mme Lauzon (Anne) : Oui, à partir de
16…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lauzon.
Mme
Lauzon (Anne) : Pardon. À
partir de 16 ans, pas avant 16 ans, évidemment, là, mais à partir du
moment où la question peut se poser, effectivement.
M.
Hébert :
Donc, dépendamment du profil des besoins de l'adolescent ou du jeune adulte, on
pourrait même envisager un passage à l'assurance autonomie à 21 ans
pour des jeunes adultes qui continuent à aller à l'université et qui continuent
à être sous la responsabilité parentale.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne) : Oui. Bien, en
fait, le profil des besoins pour la transition, pour nous, nous apparaît un
meilleur critère que l'âge.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre
M.
Hébert :
C'est bien noté. Au niveau de la couverture des aides techniques et des
aménagements domiciliaires, vous nous proposez, là, une façon de
partager le monde entre la Régie de l'assurance maladie et le programme… l'assurance autonomie. Vous nous suggérez de mettre
les aides matérielles et les petits équipements à la vie quotidienne de même que les aménagements domiciliaires sous
l'assurance autonomie, alors que les autres aides techniques resteraient
des programmes séparés de la Régie de l'assurance maladie du Québec.
Outre les ententes de service que vous avez, est-ce
qu'il y a d'autres justifications à un tel partage de ces aides techniques?
Le Président (M. Bergman) :
M. Harvey.
M. Harvey
(Régis) : Il est clair, pour
nous, que les aides techniques qui sont sous la responsabilité des CRDP
sont des… un service spécialisé qui permet à la personne qui en a besoin de
recouvrer son plein potentiel, et c'est par la suite qu'on pourra regarder pour
voir sa capacité de demeurer à domicile et qu'est-ce qu'il a besoin pour
demeurer à domicile. Donc, pour toute la
partie d'accompagnement que le client a besoin de l'ensemble
des professionnels, qu'il faut
lui fournir pour lui permettre de bien
intégrer sa nouvelle modalité de déplacement ou autres, on pense que ce
service-là est clairement un service spécialisé qui devrait demeurer sous
la responsabilité des CRDP, pour
lequel le système fonctionne à merveille, fonctionne très bien. Et donc,
à partir de ce moment-là, il est clair que les CSSS conservent dans leur panoplie des aides relativement peu complexes et
qui aident, celles-là, vraiment pour le soutien à domicile, mais la
première partie qui est sous les CRDP, pour nous, est un service spécialisé qui
devrait demeurer comme tel.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
O.K. Donc, votre raisonnement, c'est au niveau vraiment des services de
réadaptation spécialisés. Lorsque ça entre dans un service de
réadaptation spécialisé, comme les autres interventions thérapeutiques, ils ne sont pas sous le coup de l'assurance autonomie,
mais ils sont sous le coup des CSSS ou des centres de réadaptation. C'est
ce que… C'est votre raisonnement?
M. Harvey (Régis) : Oui.
Une voix : …complément.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne) : Oui, merci. J'ajouterais
effectivement qu'étant donné que les aides techniques font partie du processus
de réadaptation elles peuvent faire une différence sur l'allocation qui serait
donnée, parce que la personne serait plus autonome, ses incapacités ayant été
compensées. Ça, c'est un élément fondamental.
Mais l'autre
élément, c'est qu'avec la RAMQ on n'a pas de frein à l'utilisation. Donc, il
n'y a personne qui est privé, par
exemple, de son fauteuil roulant parce qu'on n'a plus d'argent, parce qu'on est
au mois de novembre, ou parce que le service n'est pas disponible. Et c'est
déjà un financement à l'activité un peu, dans le fond, basé sur l'assurance autonomie, ce qui fait que l'assurance n'aurait
pas une valeur ajoutée dans ces programmes-là, ce qui n'est pas le cas
pour les petites aides ou pour l'adaptation de domicile.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Je
comprends très bien. Merci.
Au niveau… À
la recommandation 9, vous soutenez la création d'une caisse d'assurance
autonomie pour protéger les montants
d'argent et que ça ne serve pas à autre chose. Par contre, vous nous
dites : Dans le contour financier, il faut faire bien attention.
On est en
train de réaliser des travaux sur le contour financier. J'aimerais que vous
nous disiez, là, vos motivations à soutenir la création d'une caisse
spécifique à l'assurance autonomie.
Le
Président (M. Bergman) : M. Malo.
M. Malo (Luc
M.) : Alors, voici. Quand on regarde la courbe d'âge au Québec, quand
on regarde également l'accroissement des dépenses en santé au Québec, on a l'impression
qu'on s'en va sur un mur et qu'il va y avoir des problèmes sérieux pour donner des services à ceux qui le requièrent.
C'est pourquoi on souscrit, au fond, à une caisse d'autonomie, qui va
permettre d'éviter ce mur pour ces personnes qui requièrent des services.
L'assurance
autonomie propose une nouvelle façon de faire, qu'il y ait un caractère
universel, une plus grande accessibilité. On pense que ça va réduire les
iniquités importantes qui existent aujourd'hui entre les régions et les personnes. On introduit un financement à
l'activité axé sur l'usager, ses besoins et les services qui lui seront rendus
et non pas sur des modalités de financement
historiques. Il y a d'autres raisons, mais, quand ce ne seraient que ces
trois-là, on pense que c'est une bonne chose.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Merci beaucoup. Au niveau de la contribution de l'usager, vous êtes d'accord
avec le fait qu'on ait une contribution
équivalente au prix du marché pour le gîte et le couvert en CHSLD. Je vous
entends bien, mais c'est un changement
important de la situation actuelle, parce que, comme vous le savez, la
contribution de l'usager, actuellement, ne couvre pas vraiment le gîte et le couvert, même n'en couvre même pas la
moitié. Alors, c'est une proposition, je dirais, audacieuse que vous nous faites là. Je veux bien que les usagers qui
n'en ont pas les moyens en soient exemptés, mais vous comprenez que c'est
une proposition qui pourrait susciter des débats.
Le Président (M.
Bergman) : M. Malo.
• (11 h 50) •
M. Malo (Luc M.) : Nous sommes tout à fait d'accord avec vous que c'est litigieux. Par
contre, si on veut que la caisse
d'autonomie fonctionne, il faut qu'il y ait une source de financement, parce
qu'on n'y arrivera pas. Et tout va être dans la manière et les choix qui
vont être faits par rapport à ça.
On n'est pas des experts en financement, nous, et
il va falloir laisser à des experts le soin de déterminer… J'ai
contribué activement à implanter l'assurance médicaments avec M. Rochon,
alors que j'étais son sous-ministre, et on se
posait le même dilemme, la même question.
Et je pense qu'on avait pris, à l'époque, une bonne décision,
qui s'avère en tout cas tenir dans le temps. Alors, je me dis : On
fait la même chose, on fait le même pari au
niveau du financement de la caisse
d'assurance. Il va falloir regarder les modalités, et c'est pourquoi,
d'ailleurs, on recommande qu'il y ait des études qui soient entreprises.
Et on voudrait y être associés le plus possible, M. le ministre, pour qu'on
trouve la bonne piste.
On est sensibles
également au fait que, pour les organisations bénévoles de personnes
handicapées, c'est un sujet extrêmement
litigieux, parce que déjà on sait que les personnes handicapées, à tous égards,
sont parmi les plus pauvres de la
société. Et donc, leur contribution à eux, il faut respecter un petit peu leurs
propres revenus et il faut regarder ça d'une façon très particulière et
très attentive. Il ne faut pas se tirer tous azimuts, n'importe comment
là-dedans. Mais on pense qu'en bout de
ligne… Si on veut avoir une caisse qui fonctionne et qui dure, bien là on pense
qu'il faut qu'il y ait des contributions qui se fassent.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Je comprends votre préoccupation de dire : Il faut être équitable envers
les gens qui choisissent de rester à domicile et qu'on ne subventionne pas les
gens qui vont en établissement d'hébergement et qui, eux, sont subventionnés
par l'État. Je comprends votre préoccupation, mais il faudra voir dans la
manière comment on peut arriver à répondre à l'équité tout en ayant des
transitions qui sont acceptables.
M. Malo (Luc
M.) : …équité intergénérationnelle aussi.
M.
Hébert : O.K. Vous nous proposez une autre proposition
audacieuse, que les montants consentis au crédit d'impôt pour maintien à
domicile soient intégrés à la caisse d'assurance autonomie. Vous savez qu'une
certaine partie des gens qui font appel à ce
crédit d'impôt n'ont pas vraiment une perte d'autonomie et donc que ces gens-là
ne seraient pas admissibles à l'assurance
autonomie. Alors, comment vous conciliez cette proposition-là avec cette
réalité-là où il y a des gens qui
actuellement bénéficient d'un crédit d'impôt sans avoir une perte d'autonomie
fonctionnelle comme on la définit habituellement?
Le Président (M.
Bergman) : M. Malo.
M. Malo (Luc
M.) : Mme Lauzon.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lauzon.
Mme Lauzon
(Anne) : Oui. En fait, c'est que plusieurs, par contre, ont une perte
d'autonomie et ont accès à ce crédit d'impôt là. Alors donc, peut-être que c'est
une mesure transitoire, mais, de notre point de vue, enlever ces sous-là sans savoir l'allocation va donner quoi,
c'était plus périlleux. Peut-être qu'il faut revoir le crédit d'impôt pour
que, les personnes qui n'ont pas réellement de perte d'autonomie, ce soit
harmonisé avec les profils et les allocations.
Mais a priori ça ne nous semblait pas
quelque chose de très réaliste, de penser qu'on peut tout enlever ça tout
d'un coup et passer carrément à une
allocation distincte. C'est dans ce sens-là que, pour toutes les modalités
d'allocation, on pense qu'il faut,
premièrement, tabler sur les acquis, sur ce qui existe déjà, et progressivement
s'assurer qu'il y a équité et qu'il y a transition harmonieuse.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Donc, si on avait, dans un premier temps, à… Si on
donnait le choix à la personne de dire : On est sous le régime d'assurance
autonomie ou le crédit d'impôt, vous seriez confortables avec cette option-là
qu'on donne aux citoyens québécois?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne) : C'est une question complexe si c'est un ou l'autre. Dans notre esprit,
ce n'était pas un ou l'autre, c'était que le montant de crédit d'impôt
est comme… est considéré dans l'allocation.
M.
Hébert :
O.K., ça marche.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Dernière question, en ce qui me concerne. Pour
l'implantation, vous recommandez de ne pas utiliser les différentes clientèles comme il était proposé
dans le livre blanc mais plutôt d'y aller par types ou volets de service
distincts. J'aimerais que vous justifiiez un peu votre position là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lauzon.
Mme Lauzon
(Anne) : Oui. Dans le fond, dans le livre blanc, c'était proposé que
les personnes qui ont une déficience physique
soient dans un temps deux. De notre point de vue, ça, ce n'est pas réaliste à
la fois pour les personnes qui
doivent évaluer les personnes et puis les desservir en matière de soutien à
domicile, parce que souvent, dans les CSSS, c'est les mêmes équipes qui
font ce travail-là, alors recevoir deux clients, regarder : Attends un
peu, toi, c'est tel processus ou tel autre, d'une part.
Et,
d'autre part, présentement on a environ 30 000 personnes âgées qui sont
déjà desservies par les CRDP. Ça ne veut pas dire que 100 % de ces
personnes-là auront besoin de services de soutien à domicile, mais probablement
que plusieurs d'entre eux le sont. Donc,
quand est-ce qu'on devient âgé, handicapé, handicapé âgé? À un moment donné,
ça devient une frontière — dont
vous parliez au départ — qui
est très difficile à cerner. Et nos systèmes d'information clientèle ne permettent pas non plus de bien
distinguer ces deux clientèles-là, quand est-ce qu'on est plus un ou l'autre.
Alors,
c'est pour ça que nous, on trouvait que c'est plus... il faut,
oui, une implantation progressive, mais que… Par exemple, tout le nouveau cadre
de rétribution pour les RTF et RI qu'on vient de se doter, avec une évaluation standardisée et un financement associé, bien, ça, on devrait le laisser pour plus tard
puis donc plus y aller par des volets de service qui sont découpables en morceaux, pour les mettre
progressivement en application, plutôt que par diagnostic ou groupe d'âge.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard
(Îles-de-la-Madeleine) : Oui, merci, M. le Président. J'aimerais
revenir avec vous... d'abord vous féliciter
pour le mémoire que vous avez déposé, qui contient beaucoup d'éléments et
beaucoup de recommandations, c'est vraiment instructif de lire tout ça.
Merci infiniment. Merci de votre présence.
J'aimerais revenir
sur l'outil d'évaluation dont vous avez parlé tantôt, l'Outil d'évaluation
multiclientèle qui ne répond pas nécessairement à la clientèle déficience
physique. Et vous avez parlé aussi de participation sociale. J'aimerais vous
entendre un peu plus longuement sur l'outil d'évaluation, mais aussi nous
expliquer un peu plus ce que vous voulez dire par «participation sociale».
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lauzon.
Mme Lauzon
(Anne) : Oui. En fait, l'Outil d'évaluation multiclientèle est utilisé
pour évaluer les besoins en termes
d'autonomie fonctionnelle, mais par contre un jeune adulte, par exemple, qui
doit être évalué par cet outil-là, bien il y a des choses que la
personne peut faire seule ou avec aide.
Présentement, l'outil…
Je ne veux pas rentrer dans trop de technicalités, mais présentement — je
vais vous donner un exemple très, très
concret — si
quelqu'un a besoin d'aide pour se déplacer, alors l'outil peut dire oui ou
non vous avez besoin d'aide, mais de l'aide
humaine est considérée. Mais, par exemple, si l'aide qui est nécessaire pour se
déplacer, c'est un fauteuil roulant, donc
une aide technique, ça ne peut pas être considéré dans l'évaluation. En fait,
ce ne sera pas capté suffisamment
bien, ce qui fait que la personne pourrait avoir droit... ça pourrait donner
une allocation qui n'est pas correspondante
à ses besoins réels une fois que les incapacités sont compensées. Alors, c'est
ce genre de chose là qu'on trouve qu'il faudrait raffiner peut-être ou
bien mesurer l'impact.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Oui, merci. Et c'est ce que
vous entendez par «participation sociale», c'est de se déplacer...
Mme Lauzon (Anne) : Bien, c'est un
exemple de...
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) :
C'est un exemple pour...
Mme Lauzon
(Anne) : Se déplacer, ce
n'est pas un exemple de participation sociale, là. La participation
sociale, c'est plutôt que, la personne, oui, on veut bien que… pour une
personne qui a une déficience physique, être soutenue à domicile et pouvoir
choisir son lieu de résidence, mais il faut aussi pouvoir sortir du domicile
et, par exemple, aller travailler ou aller à la banque et tout, et donc il faut
que, dans l'ensemble du plan d'intervention, on puisse considérer l'ensemble de
ces besoins-là, pas seulement d'être à domicile mais de pouvoir être actif dans
la société.
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
M. Malo
(Luc M.) : Au fond, c'est
qu'au-delà des soins et services on a besoin, comme personnes
handicapées… Parce que moi, je suis en
fauteuil roulant. Ça ne paraissait peut-être pas, mais… Au-delà des soins et
services — puis
on peut avoir les meilleurs soins de santé puis les meilleurs services à
domicile — ce
qu'on a besoin, comme personnes handicapées,
c'est d'avoir... reprendre confiance en soi, se sentir utiles socialement et
donc pouvoir participer à la vie de la communauté. Et, malheureusement,
trop souvent on n'a pas ce moyen-là.
Et il y a
aussi le regard des autres à notre égard. Parce qu'on devient en fauteuil
roulant, c'est comme si on perdait tous
nos moyens. Loin de là. On développe des nouvelles capacités, etc. En tout cas,
ça, je pourrais témoigner longuement. Et
c'est ça qu'on... Par «participation sociale», ce qu'on entend, c'est vraiment
que les gens puissent reprendre confiance en eux, retrouver un rythme de
vie qui va les satisfaire, qui va faire qu'ils vont être heureux quand même,
malgré le handicap et avec leur handicap.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin au bloc du
gouvernement. Pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Mme Lauzon,
M. Malo, M. Harvey. Des gens que je connais d'ailleurs très bien parce que je les ai
rencontrés à plusieurs reprises, dont M. Harvey — il n'aura pas honte de ça — on
a travaillé ensemble comme directeurs à l'hôpital d'Alma.
J'aimerais vous poser quelques questions, puis
on va aller sur un sujet... Ça va être une question aussi de financement.
Premièrement,
le virage, on est tous d'accord avec. On veut garder les gens à domicile, on
veut qu'ils demeurent le plus près possible d'où ils habitaient
auparavant.
Est-ce que vous avez l'impression que ce virage
avait déjà été pris dans le réseau de la santé au cours des dernières années?
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
• (12 heures) •
M. Malo
(Luc M.) : Le virage vers des services à domicile, oui, il a
été pris avant, puis ça date d'ailleurs de la création
des CLSC dans les années 70, mais le financement n'a jamais
suivi à la hauteur des attentes et des besoins, pour toutes sortes de
raisons. Et là je ne rentrerai pas dans le caractère politico-administratif qui
est la cause de ça, mais il reste que ça n'a pas suivi.
Essayer de
juste augmenter le budget pour les services à domicile, on n'est pas certains
qu'on y arriverait de toute façon. Je
pense qu'on s'en va sur un mur. La croissance du nombre de personnes âgées, la
croissance… pas une grande croissance mais proportionnelle à la
population du nombre de personnes handicapées, même si on a un bon bilan routier, là, depuis quelques années, c'est loin
d'être certain qu'on va y arriver. Et c'est pourquoi on pense qu'avoir…
L'idée d'une caisse d'autonomie qui serait financée, qui idéalement, également,
serait capitalisée, on pense que c'est un élément de solution important.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Bien, je vous remercie. Vous avez répondu à mes deux premières questions, même
si j'en avais juste posé une. La deuxième question — puis j'y reviens — dans
le fond, le problème, c'est qu'il y a un
rattrapage à faire au niveau du financement, et l'assurance autonomie, si on
part avec le principe… Comme vous avez
parlé pour les aides auditives ou aides visuelles, à partir du moment qu'il va
y avoir un besoin, il y a nécessairement quelqu'un qui va le payer. C'est comme ça qu'on voit ça, c'est-à-dire
qu'il y a un manque d'argent, les gens disent : On n'est pas
capables de répondre aux besoins. Si on part sur le principe de l'assurance
autonomie, dès qu'on va avoir eu
l'évaluation du voisin… du besoin, ce ne sera plus une question de ressources
mais une question de dire : Il y a quelqu'un qui va payer pour
répondre à ça. C'est comme ça que vous voyez l'assurance autonomie?
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
M.
Malo (Luc M.) : Oui, c'est comme ça qu'on le voit. Mais toutes les
modalités sont à attacher, ce n'est pas attaché.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je veux juste faire un
commentaire, là, que je vais faire souvent : On est tous d'accord avec le maintien à domicile puis l'organisation
des services comme c'est décrit dans le principe de l'assurance
autonomie. Ça, je peux vous le dire. Puis,
je pense, ça a été commencé depuis quelques années. Là, on est plus dans la
question du financement, la contribution de la personne.
Puis
je vais vous donner un exemple. Le ministre, il dit : Vous savez, dans les
CHSLD actuellement, ça couvre à peine
le logement plus la nourriture. Quelqu'un qui s'en va en CHSLD peut faire une
contribution jusqu'à 21 000 $, je pense que le ministre a participé à un rapport du Vérificateur général
qui disait qu'on devrait augmenter cette contribution. Si demain matin on fait le choix, on demande le
choix aux gens : Vous savez, on va mettre en place l'assurance autonomie,
mais votre contribution ne sera pas de
21 000 $ mais va être de 30 000 $, vos soins à domicile qui
actuellement sont gratuits, bien, sur
le principe d'équité, on va devoir vous demander également une contribution qui
est l'équivalent de si on vous gardait dans un CHSLD, qui pourrait être
également, pour des gens, de 15 000 $, ça fait que ça, c'est des…
Puis, en passant, l'assurance autonomie, on
peut avoir le principe, ça peut être bon, mais il faut avoir d'autres éléments.
Puis avant, en personnes
responsables, de dire qu'on est 100 % pour ça, on peut-u savoir qu'est-ce
qui vient après? Si, vos membres, ça ne coûtait rien, puis qu'à partir
qu'on installe l'assurance autonomie, maintenant, ça va leur coûter un
équivalent peut-être de 15 000 $ par année…
Parce que le
principe, dans les CHSLD, je ne sais pas si vous le savez, mais, si vous avez
plus que 4 000 $ ou 5 000 $,
là, ils vont aller chercher votre argent jusqu'à ce que vous n'en ayez plus.
Puis moi, j'ai vu ça, les gens préfèrent donner leur… Quand ils n'ont pas des gros montants, là, ils donnent leur
argent à leurs enfants pour être sûrs de ne plus en avoir, pour être
capables de ne pas avoir à payer.
Ça fait que c'est
pour ça que je veux le mettre bien clair, là : On est tous d'accord sur le
principe de base de l'assurance autonomie,
c'est de garder les gens le plus possible à domicile, faire le virage, une
réorganisation et surtout répondre à
tous les besoins des gens. La vraie question n'est pas celle-là, puis ça va
être celle-là que je vais vous poser. À partir du moment qu'on sait qu'il
manque d'argent puis qu'il y a un rattrapage à faire… Parce qu'il y a une
notion importante : on ne frapperait un mur tant que ça si on avait l'argent
nécessaire aujourd'hui puis on y allait avec la croissance des besoins. C'est
qu'il faut augmenter l'enveloppe.
Avez-vous estimé,
pour répondre aux besoins, selon les principes d'évaluation qui sont émis dans
l'assurance autonomie, combien il faut
rajouter pour ne répondre seulement qu'à votre clientèle, quel montant que ça
pourrait coûter?
Le Président (M.
Bergman) : M. Malo.
M. Malo (Luc M.) : Honnêtement, on n'a pas fait l'étude. On n'a pas d'expertise en
finances publiques, on n'a pas d'expertise économétrique et actuarielle
pour être capables d'établir cette… de répondre à votre question.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Malo (Luc
M.) : On est un organisme de services de réadaptation.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Puis on est chanceux, on est
avec trois gestionnaires du réseau : M. Malo qui a été
sous-ministre, qui a participé à l'assurance médicaments; M. Harvey que je sais
qu'il a été directeur des finances, directeur des ressources humaines, est
directeur général actuellement; Mme Lauzon qui gère une grande association. Est-ce que vous trouvez que ce serait responsable,
avant de savoir si on embarque dans ce projet-là ou pas, au moins d'avoir les vrais chiffres,
combien ça va coûter, de savoir également combien chaque personne va devoir
contribuer?
Puis également on
parle du principe du SMAF, mais ça peut être un autre principe, selon les
besoins de vos clientèles. Un SMAF à 13, ça veut dire combien? Puis l'autre question
qui vient après : Si le besoin est de 100 %, est-ce qu'on va tenir
compte des ressources pour dire : On va compenser juste à 60 %, ou on
assure à la population qu'ils vont avoir 100 %?
Est-ce
que vous trouvez que ce serait responsable de poser les questions et d'avoir
les chiffres avant même le dépôt du
projet de loi que de passer une loi qu'après ça on se rend compte, quelques
années après, qu'on n'avait jamais eu le moyen, ou encore les gens vont être déçus parce qu'ils vont payer plus
cher, ou encore pire que ça c'est que tout le monde, au lieu d'avoir
80 % ou 100 %, va tomber à 60 %?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lauzon.
Mme Lauzon (Anne) : Bien, c'est une très bonne question. Ce qu'on sait, c'est que, de toute
façon, à cause du vieillissement de
la population, ça va coûter plus cher que maintenant. Ce qu'on sait, c'est que,
peu importe l'équation et la modalité,
présentement c'est autour de 15 % que l'État paie. Puis, avec l'assurance
autonomie, ce qu'on comprend, c'est que l'objectif, ce serait de se
rendre à pas loin de 40 %, mais il restera toujours une partie que, comme
citoyen, il va falloir que chacun assume.
L'adéquation exacte du montant qui va permettre
de faire quoi exactement, c'est une préoccupation qu'on a, mais la perception qu'on a, c'est qu'étant donné
qu'il y aurait une évaluation plus standardisée puis ce serait universel
il y aurait moins d'iniquité, et que, si, comme société
québécoise, on peut se payer, pour dire quelque chose, 25 % au lieu de
15 %, bien ce sera mieux que 15 %. Mais a priori on ne s'attend pas à
ce que, de toute façon, ce soit 100 %.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On est vraiment dans
le coeur de la discussion, hein, qu'on va devoir faire durant les trois
prochaines semaines. Je suis d'accord, il faut corriger l'iniquité. Il faut
garder nos gens à domicile, il faut
développer des services puis il faut essayer de s'organiser pour que partout au
Québec on ait les mêmes avantages ou encore les mêmes accès.
Une fois
qu'on a dit ça, il faut qu'on calcule avant. Vous savez, on a eu des
expériences dans le passé où les gens nous arrivaient avec des belles
idées, un beau projet, mais, quand on arrivait après puis on calculait, c'étaient
des milliards de plus. Si je vous disais que, l'assurance autonomie, mettre ça
en place, c'est 2 milliards de plus pour les Québécois, maintenant il faut savoir qui va le payer. On sait qu'il y a
une limitation au niveau des taxes, à moins de faire une taxe très
spéciale… ou encore on va demander une plus grande contribution aux gens.
Et, votre
clientèle à vous autres, si on met en place l'assurance autonomie sur les mêmes
principes que ce qui est dans le
livre, êtes-vous d'accord qu'il y a des gens qui ont déjà des revenus qui vont
devoir vendre leur maison? Parce qu'à partir du moment qu'ils ont des
revenus ils sont obligés de contribuer à une hauteur très élevée. On parle,
pour une personne en CHSLD, là… Un couple
très ordinaire qui a juste sa pension mais qui a assez de pension pour être
capable de payer, si l'un est obligé de s'en
aller en CHSLD, est obligé de payer 21 000 $, ça, ça… Moi, j'ai des
patients qui m'en ont beaucoup parlé, de ces cas-là, où le monsieur ou
la madame me disait : Je vais être obligé de quitter mon logement parce qu'on
va me réclamer 21 000 $ quand mon conjoint va aller en CHSLD.
Je pense que ces questions-là, là… Parce que,
moi, là, ce que j'ai vu dans l'assurance autonomie, là, c'est des principes
philosophiques qu'on est tous d'accord. Puis, en termes de gestion, en passant,
c'est la continuité des soins, l'intégration
des soins. On se sert des CSSS, on se sert des gestionnaires de cas. On a tout
ça dans le réseau de la santé, si vous
êtes d'accord avec moi. Mais vous m'avez dit le vrai problème : Il n'y en
a pas assez, d'argent, dans le réseau de la santé. Et les associations vont venir ici en disant : Ça, ça va me
donner plus d'argent, mais la question qu'on va devoir se poser si c'est comme toujours les anciens
principes, là : Si on vous met plus 1 milliard là, où vous allez
aller chercher votre milliard dans votre réseau de la santé et des
services sociaux? Parce qu'il y a une autre contrainte qui est le Conseil du
trésor. Maintenant, c'est la question à laquelle on devoir tous répondre
ensemble et être responsables. Et mon rôle de
l'opposition, c'est de poser ces questions-là, et ce n'est pas vrai qu'on va
embarquer dans un projet comme ça… Puis là tout le monde est d'accord
avec le principe du maintien à domicile, mais je veux savoir qui va contribuer
à quelle hauteur — on va défendre l'usager — puis également qui va payer la facture. Et
qu'on n'arrive pas avec des raisonnements, de dire : Bien, il y a quelqu'un à quelque part… on va charger
1 % plus cher, là, parce que 1 % plus cher, au Québec, je vous
ferais remarquer que tu es riche à partir de 40 000 $. C'est ça, la
richesse au Québec, selon les cotes de l'impôt.
Qu'est-ce que vous en pensez, en tant que
gestionnaires et personnes responsables de notre société?
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
M. Malo (Luc M.) : Effectivement, je
pense qu'il faut que toute la dimension du financement soit regardée de près, mais on n'échappe pas le fait que, si on
ne fait rien et on reste avec le système actuel, ça ne s'améliorera pas,
puis on va également avoir, je dirais, un mur par rapport au financement. La
croissance actuelle, elle est comme ça, et l'accroissement du nombre de
personnes âgées, incluant les personnes handicapées, elle est aussi comme ça,
très, très forte, très… une forte croissance.
Je pense qu'effectivement il faut que la question du financement soit regardée
de très près, soit analysée, et il faut recourir à des experts pour le faire.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
• (12 h 10) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Écoutez, on peut faire dire n'importe quoi aux chiffres, mais je vais juste
vous donner une hypothèse,
là. Moi, j'ai pris le tableau qu'il y avait dans le livre blanc, et on part
avec un budget de 32,5 milliards en date d'aujourd'hui puis on nous parle de 2027‑2028. Je l'ai fait croître juste de 3 %, même pas du 4 % ou
5 %, là, puis on arrive, à la
fin, à un budget de 42 milliards. La croissance des besoins, là, à 160 millions comme dans le livre blanc, là, c'est 3/10 de 1 % du coût du
réseau de la santé. Ça fait qu'un chiffre de 160 millions a l'air très
gros, là, mais, quand vous regardez les besoins en croissance de
160 millions, ça ne représente que 3/10 de 1 % du réseau de la santé.
Ça fait que
moi, je me pose des questions aussi. C'est sûr que j'y crois, il y a un
vieillissement, il y a plus de gens au
Québec, mais le vieillissement, là, dans… les études démontrent que ça ne
représente pas plus de 1 % de coûts en termes de besoins. Donc, il faut se poser la question si
on ne peut pas le régler, le chercher par la performance ou s'il ne faut
pas trouver d'autres façons d'aller financer ça. Puis on va en discuter à un
moment donné. Est-ce qu'on y va par une assurance
autonomie avec taxe capitalisation? Le ministre a dit clairement : Il n'y
a aucune place si on réussit à capitaliser. On ne peut pas prendre de l'argent
en plus aujourd'hui pour dire qu'on va l'avoir plus tard, donc il faut que ce
soit à partir soit d'une taxe actuelle ou
d'un montant d'impôt, où on verra de quoi ça a l'air, ou ça pourrait être aussi
par une augmentation de performance.
C'est comme ça que je pense qu'il faut… on peut voir le problème. Mais, chose
qui est certaine, avant d'avoir un
projet de loi, moi, je vais m'attendre à ce qu'on soit responsables et qu'on
ait tous les chiffres, dont
l'évaluation de tout ce que vous auriez à donner à vos usagers, à quelle
hauteur que ça coûte, et là on verra c'est quoi, le vrai coût d'une
assurance autonomie.
Et
je suis d'accord avec vous, M. Malo, on ne fermera pas les yeux non plus.
Il faut être responsables. Puis, dans le
livre blanc, il y a des belles solutions, parce que tout le continuum de
services, de regrouper ça ensemble, on est tous d'accord avec ça, là.
Ça, je vous le dis, on est tous d'accord. Mais la question qu'il faut se
poser : Si on est d'accord avec ça,
est-ce que ça veut dire qu'on achète automatiquement la façon dont on veut le
financer et à quelle hauteur qu'on va
le financer? Puis moi, je vous demanderais de penser à vos usagers, là, puis
allez leur dire demain matin que ceux que ça ne leur coûte quasiment rien, là, ou très peu de contribution, ils
vont monter à 21 000 $. Vous leur demanderez, voir s'ils
veulent rester dans l'assurance autonomie après ça.
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
M. Malo
(Luc M.) : Je pense que
poser la question comme ça, c'est y répondre. Alors, il va falloir se donner
la peine de regarder ça.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …ça va être la question… Juste pour vous dire pourquoi
est-ce que je vous pose la question, c'est qu'il n'y a aucun chiffre, malgré le fait que je suis certain qu'ils sont
disponibles. Il y a possiblement
des chiffres qu'on ne veut pas nous donner
et qu'on ne nous donnera pas, mais ce n'est pas vrai qu'on va passer un projet
de loi avant que… Puis moi, je vais vous
défendre, je vais défendre les usagers, mais je veux savoir, l'usager, là,
cette personne-là, aujourd'hui ça veut dire quoi, demain ça veut dire
quoi. Il y a un principe d'équité, mais on n'appauvrira pas une partie des gens
qui sont déjà bien sur le principe qu'il faut rendre tout le monde pauvre, là.
Ça, c'est une question.
En passant, la plupart des principes dans l'assurance
autonomie, puis vous m'avez entendu comme ministre à plusieurs reprises, on les a tous défendus. On veut garder nos gens dans
leur communauté. C'est ça qui nous coûte le moins cher et c'est ça qu'on veut. Mais il y a des
maisons, également, qu'on veut mettre en place pour les clientèles comme
les vôtres. Parce que l'autre question qu'on va se poser… Ce qui était au
début, c'était : On va vous donner un montant d'argent, vous allez vous organiser avec, ça fait que, si vous voulez
aller chercher votre service dans une maison communautaire ou dans une résidence privée, vous allez avoir le droit de
le faire. Mais là il y a eu du lobbying probablement, là, ça a l'air qu'il va y avoir juste des services du côté
du public. Est-ce que c'est une ligne qu'on va tenir? Est-ce qu'on va vous donner des montants plutôt
que vous mettre en CHSLD et vous mettre dans des résidences qui sont adaptées comme j'ai vu dans les Laurentides? Moi,
je pense que c'est ça qu'il faut qu'on cherche, parce que ça, ça va nous
le permettre. Êtes-vous d'accord qu'on doit
regarder ça avant de savoir qu'est-ce qu'on va adopter dans ce projet de
loi là?
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
M. Malo (Luc M.) : Je suis d'accord
qu'il faut le regarder, mais nous, on n'a pas compris que c'étaient nécessairement des services publics. Ça peut être
des entreprises d'économie sociale qui offrent les services à domicile à
un coût raisonnable.
Évidemment, il faudra faire attention. Si, le
lendemain qu'ils sont créés, ils «boostent» les prix, puis il arrive une
syndicalisation, puis ça coûte plus cher que dans le public, on n'est pas plus
avancés. Il y a des précautions à prendre par rapport à ça.
Mais on pense
que le principe de l'affaire est correct. Ce qu'il faut, c'est trouver les
modalités correctement. Et on vous
l'a dit, financièrement on n'est pas des experts là-dedans. On va regarder ça
attentivement, par exemple, on veut participer aux travaux, mais de là à
être capables de faire les études actuarielles puis reliées au budget, au
ministère des Finances… Ça, je ne suis pas capable de le faire.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Mais, pour…
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Il me reste-tu encore beaucoup de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bergman) :
Vous avez un autre cinq minutes.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Ah! C'est parfait, ça. Mais êtes-vous
d'accord, êtes-vous d'accord qu'avant de dire qu'on est à 100 % avec un projet comme ça… qu'il serait
irresponsable de ne pas prendre connaissance des chiffres et de ne pas
savoir c'est quoi, l'impact pour votre clientèle?
Le Président (M. Bergman) :
M. Malo.
M. Malo
(Luc M.) : En principe, oui,
je pense qu'on devrait avoir les chiffres avant, mais ça ne nous
appartient pas de les fournir.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui,
je suis d'accord, mais comme association, je pense,
c'est important que vous ayez tous, tous les éléments puis que vous
sachiez pour chacune des personnes...
Puis,
juste vous donner un exemple, on parlait du privé versus public, moi, j'avais
compris au début que, si vous étiez en
résidence privée, que vous aviez certains handicaps ou que vous aviez une perte
d'autonomie, on pourrait avoir accès peut-être
à des services à l'intérieur de la résidence privée, qui pourraient être
fournis, quitte à ce que ce soit un paiement
en argent pour compenser, plutôt que d'avoir du service d'employés de l'État, mais
ce que j'ai vu, là, le projet actuel,
c'est que probablement que c'est dans une résidence privée avec plusieurs
services. Si vous êtes en perte d'autonomie, ça va devoir être des gens
soit de l'économie sociale ou encore de l'État, c'est-à-dire du CLSC, qui vont
aller donner vos services.
Une voix :
…
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bon, si ce n'est pas ça, M. le ministre va
devoir nous l'expliquer comme il faut, parce que…
Des voix :
…
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît!
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Quand on a rencontré les
syndicats hier, quand on a rencontré les syndicats hier, il semblerait
que ça serait tout soit du public ou encore de l'entreprise sociale. C'est d'ailleurs
ce qu'on a dans ce projet là, c'est-à-dire
qu'il se dit des choses à un moment donné, il s'est dit des choses dans le
passé, mais aujourd'hui on veut le savoir
exactement. Parce que les résidences privées vont venir. On veut savoir
exactement qu'est-ce qui va se dire. Parce que je suppose que, pour votre groupe à vous autres, ça va être
important qu'il y ait cette marge de manoeuvre là, que les gens puisent
gérer une sorte d'allocation pour mieux s'organiser. C'est-u comme ça que vous
voyez ça?
Le Président (M.
Bergman) : M. Malo.
M. Malo (Luc M.) : C'est clair qu'on va suivre les travaux de très près, tout ce qui va se
passer ici. Et également, bien, on
est en lien, généralement, assez courant avec le ministère, et on suit
l'évolution des travaux qui se font au ministère à tous égards, et on n'échappera
pas à cette dimension-là non plus.
Mais,
comme je disais tantôt, moi, je ne voudrais pas être à la merci nécessairement
d'une résidence privée, pas plus. Je
sais qu'il va y avoir une explosion des coûts, puis on n'est pas sûrs de la
qualité du tout, alors je préfère choisir puis aller dans une entreprise
d'économie sociale. Mais là je suis certain de quels services je vais acheter,
et c'est ça, le principe de l'affaire.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, M. le Président. Puis je
suis tout à fait d'accord avec vous, moi, je pense que la qualité doit
être là. Le mode peut être différent, et puis vous allez avoir des gens qui
vont venir vous dire, dans tous ces
secteurs-là, qu'ils sont très satisfaits. Moi, je pense, un des principes qu'il
y a là-dedans puis que je trouvais beau, dans le projet, c'est qu'on offrait le choix aux gens, puis on offrait le choix
pour qu'ils soient bien installés chez eux et respecter leurs volontés.
Et c'est ce qu'on veut. Puis, comme vous avez vu, dans la plupart des principes
du projet de loi, là, moi, je suis tout à fait d'accord puis je trouve qu'il
faut aller de l'avant de ce côté-là, sauf qu'on a des fils à attacher.
L'autre
chose : il faudrait être sûr qu'on ait le même discours pour tout le
monde; quand quelqu'un du privé vient s'asseoir
ici, qu'on lui dise la même affaire qu'aux syndicats, qu'on lui dise la même
affaire qu'aux entreprises d'économie sociale. C'est un principe de
base.
Et l'autre élément,
puis je suis conscient de ça : ce qui s'est dit voilà un an, voilà six
mois puis ce qu'il y a dans le projet ici
est différent, comme c'est possible que le projet de loi soit un petit peu
différent à moduler. Puis ça, on va l'accepter,
mais… Puis je finirais là-dessus, M. le Président. On veut travailler ensemble,
en passant, on veut collaborer, on veut
avoir le meilleur système. Les principes sont bons, la vision, je pense, est
adéquate, sauf qu'il y a des fils à attacher. Mais il faut être transparent
et donner toute l'information. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, M. Malo, M. Lauzon,
M. Harvey, merci pour votre
présentation. Merci d'être ici avec nous aujourd'hui et partager avec
nous votre expertise.
Et je demande aux
gens d'Ex aequo de prendre leur place à la table.
Et je suspends pour quelques
instants seulement.
(Suspension de la séance à
12 h 19)
(Reprise à 12 h 21)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue aux gens d'Ex aequo.
Merci d'être avec nous aujourd'hui. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Pour les fins
d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir nous donner vos noms, vos
titres, et vous avez le prochain 10 minutes pour faire votre présentation.
Et bienvenue encore.
Ex
aequo
M. Mercier
(Yves)
: Bonjour. Je
me présente : Yves Mercier, président d'Ex aequo. Je remercie la commission
de bien vouloir nous… qu'on puisse présenter notre mémoire aujourd'hui. Je suis
accompagné de Mme Dominique Marsan,
vice-présidente d'Ex aequo; M. Pierre-Yves Lévesque, directeur
général d'Ex aequo; et Mme Brigitte Nadon, qui va répéter pour
M. Lévesque.
Étant donné
que nous devons répéter pour M. Lévesque, nous devons vous demander une accommodation pour ce qui est du
temps de notre présentation.
Le Président (M. Bergman) : …certainement.
M. Mercier (Yves)
: O.K. On
va vous présenter un résumé du mémoire qui est inclus dans la pochette qu'on
vous a remise.
Mme Marsan
(Dominique) : La
présentation d'Ex aequo. Ex aequo est un organisme montréalais se consacrant à la promotion
et à la défense des droits des personnes ayant une déficience motrice depuis
1980. La promotion et la défense des droits se réalisent par des
activités qui peuvent avoir différentes formes : information, formation,
sensibilisation, représentations,
collaboration, mobilisation, moyens de pression et revendications. En
partenariat avec les autres organismes communautaires du milieu, évidemment,
et en concertation avec les instances publiques et décisionnelles,
Ex aequo intervient dans des dossiers tels que la vie municipale,
habitation, les transports, la santé et les services sociaux et le soutien à
domicile.
Là, Pierre-Yves pour le contexte.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Une personne
qui est sans limitation fonctionnelle peut, sans contrainte physique, participer aux activités de son choix. Pour vivre
son inclusion dans la société, une personne
handicapée a besoin de services de
soutien à domicile qui s'adaptent à elle et à ses besoins. Si elle n'a pas de
tels services, elle est contrainte à rester chez elle.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Malgré la
décision ministérielle de 1988, les personnes handicapées se
retrouvent à devoir débourser pour de
tels services, et l'assurance
autonomie, telle que proposée dans le livre blanc, accentue cette
situation et ne permet pas de résoudre les problèmes actuels touchant les
services à domicile.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Je n'ai pas
compris qu'est-ce que tu as dit.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : Moi non
plus.
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Oui. Bien, dans
le fond, comme il dit, on n'endosse pas le livre blanc tel qu'il est présenté. On demande la création d'un comité
national qui aurait le mandat de revoir l'ensemble des services à
domicile et d'effectuer une véritable consultation.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Oui, parce que
les consultations sur le livre blanc ont été faites pendant l'été, alors
que plusieurs personnes étaient en vacances
et que plusieurs organismes doivent fermer les portes pour manque de
financement.
M. Mercier
(Yves)
: Le mémoire a été rédigé à partir d'un rapport de
recherche-action déposé en 2010 pour la région de Montréal. Vous trouverez donc des témoignages ainsi que des
résultats concernant la situation montréalaise.
L'uniformité
des services des CSSS et des CLSC. La disparité des services entre les
différents CSSS et même entre les
CLSC d'un même CSSS est bien présente. S'ensuivent des attentes interminables,
la diminution d'heures de service et une discontinuité dans ces
derniers. Ne pas pouvoir choisir contribue au sentiment de ne pas être libre.
Les budgets empêchent d'offrir à une
personne les services qu'elle requiert, il y a une diminution constante des
heures de service et de soutien à domicile. L'enveloppe budgétaire
réservée au soutien à domicile pour les personnes ayant des limitations fonctionnelles a été dispersée dans d'autres
enveloppes de soutien à domicile. Il y a un décalage entre les services
offerts et ceux qui sont nécessaires afin de fournir les conditions de base
pour la participation sociale des personnes ayant des limitations
fonctionnelles.
L'évaluation
des besoins des personnes. L'évaluation des besoins se fait sous un angle
médical qui néglige l'inclusion et la
participation sociale des personnes ayant des limitations fonctionnelles. Le personnel
n'est pas formé pour considérer l'inclusion sociale. L'évaluation de la
qualité des services à domicile est insuffisante.
Lors des rencontres
avec le ministre, celui-ci nous a spécifié de façon catégorique qu'il n'est pas
question de changer la grille d'évaluation,
le SMAF. Par contre, il est ouvert à ajouter des éléments à la grille actuelle
en lien avec les habitudes de vie des personnes. Le ministre Hébert
est-il prêt à réaffirmer la même orientation?
La formation du
personnel des secteurs privé et parapublic. La formation du personnel qui
travaille dans les entreprises d'économie sociale en aide domestique, EESAD, et
les entreprises privées laisse à désirer.
Chèque
emploi-services, CES. Le chèque emploi-services est apprécié par les
personnes. Les conditions de travail qu'il
permet ne sont pas suffisantes pour assurer un recrutement efficace, la formule
chèque emploi-services n'est pas accessible
pour l'ensemble des personnes. Dans sa formule actuelle, le CES entraîne des
frais supplémentaires pour les personnes qui en bénéficient.
Dans le livre blanc,
on peut lire que le chèque emploi-services sera offert exceptionnellement. Lors
de nos rencontres avec le ministre Hébert,
il nous a informés que, pour les personnes ayant une déficience physique, le
CES ne sera pas remis en question. Lors de cette commission, le ministre
de la Santé et des Services sociaux peut-il le réaffirmer officiellement?
Aussi, prendra-t-il les moyens pour résoudre les problèmes reliés au CES?
• (12 h 30) •
Mme
Marsan (Dominique) : L'assurance autonomie doit assurer que
l'agence de la… O.K. C'est les positions d'Ex aequo, pardon. L'assurance autonomie doit assurer que l'Agence
de santé et des services sociaux de Montréal et que les centres de santé
et services sociaux de Montréal respectent le principe de la compensation
financière pour pallier aux limitations des personnes en situation de handicap
et leurs proches en fournissant gratuitement les services de soutien à domicile
qui leur sont nécessaires.
Deuxième
position : Qu'elle assure que les agences et les CSSS respectent les
paramètres du POSILTPH et conservent l'étanchéité de cette enveloppe, c'est-à-dire
qu'elle fasse en sorte que cet argent soit strictement réservé aux personnes
ayant des limitations fonctionnelles et leurs proches.
L'assurance
autonomie doit aussi garantir que l'agence veillera à ce que des données
précises seront colligées par les CSSS afin de distinguer les services
de soutien à domicile dispensés aux personnes handicapées et leurs familles,
les soins de santé ainsi que les services dispensés aux personnes âgées et le
programme de soutien aux familles.
L'assurance
autonomie doit assurer que les CSSS cessent le saupoudrage de services de
soutien à domicile, qui se fait sans aucun égard pour les besoins
exprimés par les personnes et leur inclusion sociale.
L'assurance
autonomie doit obliger l'agence de Montréal et les CSSS à travailler avec les
membres des différentes communautés montréalaises, dont Ex aequo, pour
créer un nouvel outil d'évaluation des besoins et permettre l'inclusion
sociale. Pour ce faire, il faut fonder ce nouvel outil d'évaluation sur la
grille d'analyse du processus de production
du handicap, le PPH, afin de respecter le principe de l'inclusion sociale des
personnes ayant des limitations fonctionnelles.
L'assurance autonomie
doit garantir qu'un représentant choisi par le milieu associatif siège au
comité provincial du MELS — attends, je vais tourner ma page — qui élabore le programme de formation des
auxiliaires en santé et services sociaux.
L'assurance
autonomie doit aussi s'assurer que les CSSS forment adéquatement les
auxiliaires ou préposés, tous modes de prestation des services
confondus, tant du point humain que technique; en particulier qu'ils s'assurent
que les menaces proférées envers les usagers, quelle qu'en soit la forme,
cessent très rapidement.
L'assurance autonomie
doit amener les agences régionales à veiller à la qualité des formations, tant
du point humain que technique
Elle doit aussi
garantir que les agences et les CSSS permettent aux travailleurs,
travailleuses, tous modes de prestation
confondus, alors, d'accéder à de la formation continue, et ce, dans des
conditions favorables. Parmi celles-ci, ces personnes doivent être
payées lorsqu'elles suivent leur formation.
L'assurance autonomie
doit assurer que les CSSS forment adéquatement les employés de gré à gré et qu'ils
les paient lorsqu'ils reçoivent ces formations.
L'assurance autonomie
doit garantir que les agences régionales haussent le salaire des employés de
gré à gré à 15 $ de l'heure, payant les frais de déplacement aussi.
L'assurance
autonomie doit permettre de faire les démarches nécessaires pour résoudre les
problématiques liées au chèque emploi-services.
Elle
doit aussi assurer le financement des banques de préposés actuelles et en
développer d'autres dans les régions, si le besoin se fait sentir.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, merci pour votre présentation, Mme Nadon, M. Lévesque,
M. Mercier et Mme Marsan. Merci pour votre présentation. Maintenant,
pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert :
Merci beaucoup. Alors, ça me fait plaisir de vous revoir, on a eu l'occasion de
se rencontrer à quelques reprises sur ce sujet. Et je vous remercie du
mémoire. Vous avez dû mentionner «assurance autonomie» au moins
25 fois dans votre présentation. Je comprends donc que c'est un sujet qui
vous touche au premier chef.
Vous
avez soulevé, là, beaucoup, dans votre mémoire, le problème
de la protection des budgets, qui,
lorsqu'ils sont consacrés soit aux personnes
handicapées… Et même la Protectrice du citoyen l'avait mentionné dans ses
rapports. Même s'ils sont étiquetés «maintien à domicile», ils sont utilisés
autrement par les CSSS.
Que
pensez-vous donc de la création d'une caisse d'assurance autonomie pour
préserver, sécuriser ces budgets et faire en sorte qu'ils sont utilisés
pour les fins auxquelles on les a désignés?
Le Président (M. Bergman) :
M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Ce qui est
important, pour Ex aequo, c'est que le gouvernement comprenne que les personnes
handicapées ne devraient pas avoir à payer pour pallier à leurs déficiences.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : En passant,
M. le ministre, c'est le Parti québécois qui a fait voter ça, en 1988.
M.
Hébert : Oui, et
nous le réaffirmons d'ailleurs dans le livre blanc. Et, contrairement à ce que
le député de l'opposition essaie de faire
croire, il n'est pas question de faire payer les gens, il est question d'avoir
une allocation qui permette d'avoir
une équité à travers l'ensemble des personnes. Donc, l'allocation va être
modulée en fonction du revenu, pour
les gens qui ont un revenu important. Et actuellement il n'y a pas cette
modulation-là. Vous savez que, les services, vous les avez, bien sûr, gratuitement, mais ils ne répondent pas à
l'ensemble des besoins. On estime, chez les personnes âgées, que les
services fournis par l'État sont de 15 % par rapport aux besoins. Le
reste, le 85 %, là, c'est les gens qui l'assument
soit en espèces ou en nature, et ça, c'est peu importe le revenu des gens. Les
plus riches, qui ont les moyens de se
payer des services, sont capables de se les payer, et les plus pauvres, bien
ils sont obligés d'avoir un proche aidant qui le fait gratuitement ou
encore ils se privent de services. C'est ça qu'on veut changer, on veut mettre
une équité. Il n'est pas question de faire débourser aux gens des sommes, il
est question d'ajuster l'allocation d'assurance autonomie en fonction du revenu des gens pour les gens qui sont
capables de se le payer, ce qui ne touche à peu près pas les personnes
handicapées que vous représentez, qui n'ont pas des revenus suffisants pour qu'on
puisse considérer ces revenus-là dans le montant d'allocation.
Alors, c'est
ça qu'il faut remettre en perspective. Ce qu'on veut faire, c'est avoir… Plutôt
que de se cacher la tête dans le sable
comme on le fait actuellement et dire que c'est équitable… Ce n'est pas
équitable actuellement, on donne 15 % des services qui sont
nécessaires à tout le monde. Les gens qui ont les moyens de s'en payer plus s'en
paient plus, puis les gens qui n'ont pas les
moyens, bien ils font avec. Et je pense que ça, c'est inéquitable comme
société. On devrait donner plus de
services aux gens qui n'ont pas les moyens de se payer des services et être
capables de laisser les gens qui ont
les moyens s'acheter des services complémentaires. Alors, c'est ça que veut
régler l'assurance autonomie.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Nous, on pense
que, peu importe le revenu, les personnes handicapées ne devraient pas
avoir à débourser pour pallier à leurs déficiences.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Ce n'est pas
équitable actuellement. Les personnes qui ont une déficience n'ont pas la CSST…
M. Lévesque (Pierre-Yves) : Des
EESAD, des EESAD.
Mme Nadon (Brigitte) : Les personnes
des EESAD, les travailleuses…
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Marsan (Dominique) : La
personne handicapée qui vient au monde…
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
• (12 h 40) •
Mme
Marsan (Dominique)
: O.K., c'est ça. Il dit : Les
personnes handicapées de naissance, elles n'ont pas les mêmes revenus puis les mêmes possibilités de…
c'est parce que le programme est universel, tandis que tu as les personnes handicapées qui ont acquéri leur
déficience, comme ceux-là qui ont… suite à un accident, puis tu as les autres
qui ont acquéri leur déficience suite à une
CSST, accident du travail, ou accident d'automobile. Les barèmes, les palettes
de fournitures, par exemple, on va donner 12,95 $, un chèque emploi-services,
puis une personne sur la SAAQ, elle, elle va peut-être pouvoir donner beaucoup plus, qui va donner,
mettons, 15 $, 18 $ de l'heure. Alors, la personne, elle ne
peut pas retenir son personnel, elle a un fort roulement de personnel.
Est-ce que c'est ça
que tu voulais dire?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : M. le Président, je voudrais réaffirmer ici ce qu'on a écrit noir sur blanc dans le
livre blanc, page 24, qu'il
n'est pas question de remettre en question la gratuité des services qui sont
donnés par l'État. Je ne peux pas être plus clair que ça, là, il n'est pas question. Alors, je vous rassure là-dessus,
il n'est pas question de retirer la gratuité des services. C'est écrit, je le redis, ça fait plusieurs fois que
je vous le dis, ce n'est pas remis en question. Il n'est pas question de
faire ça avec l'assurance autonomie.
Deuxièmement,
vous insistez beaucoup — et
vous l'avez dit à chaque fois qu'on s'est rencontrés — sur
le chèque emploi-services. Je vous l'ai dit et je le répète : Le
chèque emploi-services, il va demeurer une option.
Ma
préoccupation, c'est : Comment on s'assure, avec le chèque
emploi-services, un, qu'on a des employés qui donnent des services de
bonne qualité et bien formés? Et, deux, comment on s'assure que le poids de la gestion des employés ne repose pas uniquement sur
les personnes handicapées? Pour les personnes âgées, ils ne veulent pas avoir ce poids-là de la gestion, de gérer le
personnel, ils ne veulent pas. Alors, pour les personnes… Certaines
personnes handicapées le souhaitent,
d'autres ne le souhaitent pas, et c'est là où il faut donner une option aux
gens de pouvoir requérir au chèque emploi-services mais aussi à des
entreprises d'économie sociale qui vont donner des services par contrat. Et je
pense que c'est important.
Mais
comment vous voyez ça? Comment on peut assurer la qualité et, deuxièmement, la
formation du personnel qui sont engagés avec le chèque emploi-services?
J'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lévesque.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Les CSSS, ils ont déjà des formations qui sont prêtes.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Bien, c'est ça, Ex aequo gère une banque de référence de
préposés en soutien à domicile, puis on a des ententes avec certains CLSC — ou certains
CSSS? — pour
que les préposés puissent avoir une formation continue.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Mais le problème, c'est qu'actuellement les
préposés qui suivent une formation ne sont pas payés pour le faire, donc
ce n'est pas très motivant pour elles d'aller s'asseoir une journée pour se
faire former.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Ce n'est pas tout le monde qui fait affaire avec la
banque de préposés.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Oui. Ce serait intéressant si les personnes qui
font affaire avec le CES mais pas avec notre banque de préposés puissent
aussi envoyer leurs préposés en formation.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Donc, vous êtes d'accord avec ce qu'on propose au
niveau du livre blanc, c'est-à-dire de confier aux CSSS formellement par la loi la responsabilité de
s'assurer de la formation et de l'accréditation surtout des prestataires
de services, incluant ceux et celles que vous engagez via le chèque
emploi-services.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves) :
…
Mme Nadon
(Brigitte) : Oui. Et qu'ils soient payés pour suivre de la formation.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous
soulignez, dans votre mémoire, la disparité des services et le non-respect du
choix des personnes. Je suis très heureux de
cette position-là, parce que l'assurance autonomie veut justement assurer une
équité dans les
services et redonner à la personne des choix qu'elle n'a pas. C'est-à-dire
qu'actuellement les choix reposent dans les mains des CSSS, le plus souvent, et non pas de la personne
elle-même, et on veut redonner à la personne ce choix qui est absolument important pour nous, qui sont
importants pour les personnes que vous défendez notamment. Alors, c'est
une disposition de l'assurance autonomie, là, qui va sans doute répondre à
plusieurs de vos revendications au cours des dernières années.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Actuellement,
les CSSS ne donnent pas tous les mêmes services.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Oui, bien c'est
ça, les personnes n'osent pas déménager parce que, comme d'un CSSS à l'autre
les services qui sont offerts ne sont pas les mêmes, ils ont peur de perdre
leurs services en changeant de territoire.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Oui.
L'article 101 de la loi sur la santé et les services sociaux, troisième
alinéa, prévoit clairement une uniformité dans les services, une
continuité dans les services.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous mentionnez, dans votre mémoire, l'évaluation. Je suis un peu étonné de
voir que vous dites que l'évaluation est surtout médicale parce que le
médecin intervient très peu dans cette évaluation-là, qui est souvent faite, le
plus souvent, par un travailleur social, un intervenant psychosocial. J'adhère
tout à fait à votre proposition de mieux former les intervenants psychosociaux
à la réalité des personnes handicapées. J'en suis, je l'appuie.
Quant à la
grille d'évaluation, je vous redis ici ce que je vous ai dit : La grille
d'évaluation de base, dans l'outil multiclientèle,
qui nous permet d'avoir un outil de gestion, on ne la remettra pas en question.
Par contre, d'ajouter à cet outil d'évaluation d'autres outils pour
mieux camper les besoins des personnes en termes d'habitudes de vie et de
participation sociale, je suis tout à fait ouvert à cette modification de l'Outil
d'évaluation multiclientèle.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : C'est une bonne
nouvelle.
M.
Hébert : …je vous l'avais
dit, mais… Puis je pense que vous ne me croyiez pas.
Une voix : On voulait que ce soit
enregistré.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : C'est important pour nous que vous le répétiez à
la commission parlementaire parce que c'est plus officiel.
M.
Hébert : Je vais
laisser mes collègues poser certaines questions.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci,
M. le Président. Alors, bonjour,
messieurs. Bonjour, mesdames. Je voulais vous parler… Dans votre mémoire, à la page 5 et 6, vous
mentionnez spécifiquement votre préoccupation par
rapport au financement, là, des soins à domicile et vous mentionnez une
enveloppe dédiée, vous faites référence à une enveloppe dédiée qui a
fini par être dispersée dans plusieurs
enveloppes. J'aimerais ça entendre votre préoccupation et peut-être
que vous nous fassiez le lien avec justement
la proposition d'assurance autonomie, dans laquelle on retrouve justement
une caisse réservée pour assurer que les fonds réservés ne soient pas, justement,
utilisés à gauche et à droite, c'est quoi, votre préoccupation par rapport à
ça, et ce que vous pensez de cet aspect de l'assurance autonomie.
• (12 h 50) •
Le Président (M. Bergman) :
M. Lévesque.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : Dans les années 80, on était pas mal plus
jeunes — moi
la première.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon
(Brigitte) : On a revendiqué une enveloppe protégée pour les
personnes handicapées parce qu'on savait que les personnes âgées étaient
plus nombreuses. Ils ont besoin d'autant de services que nous.
M. Lévesque (Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : M. Lévesque
trouve que c'est une bonne nouvelle, est content d'apprendre que l'assurance
autonomie prévoit de maintenir l'enveloppe protégée pour les personnes
handicapées. C'est important, étant donné qu'on est moins nombreux. C'est pour
ça qu'on avait demandé ça dans les années 80.
Est-ce que ça répond à...
Mme Proulx : Ça répond à…
Le Président (M. Bergman) :
Ceci met fin au bloc du gouvernement.
Mme Proulx : Ça répond en
partie. J'en aurais eu d'autres, mais… J'irai vous voir. Merci
Le
Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc de
l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue ici, à la
commission. Puis vous avez absolument raison,
c'est enregistré. Puis c'est dactylographié, ça fait que vous avez droit au
texte. Puis, comme de fait, c'est l'endroit qu'on doit apprendre et qu'on
doit discuter.
Moi, ce que
j'ai compris dans le projet, par un souci d'équité, c'est que la contribution
va être en fonction des revenus.
Donc, même si vous avez un handicap ou une déficience, si, exemple — prenons un exemple qui doit exister
au Québec — quelqu'un naît et qui a une déficience
importante ou un handicap, et que ses parents ont de l'argent, puis,
quand il est adulte, il a un héritage, s'il
y a des montants d'argent assez substantiels, cette personne-là va être appelée
à contribuer comme l'autre qui a un
revenu par rapport à... C'est ce que je comprends. Je ne sais pas si le
ministre peut confirmer ça.
M.
Hébert : ...le
revenu, M. le député de Jean-Talon, vous le savez très bien.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
O.K. On donnait…
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre,
s'il vous plaît! Il y a une seule personne qui a le micro, c'est le
député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : On parlait d'héritage, mais on parlait
peut-être de... On peut avoir d'autres types de revenus, on peut avoir d'autres types de revenus, parce que, si tu as un
bon montant, tu vas avoir des intérêts, tu peux avoir des entreprises, tu peux avoir un revenu
quelconque. Si je comprends, dans le revenu en tant que tel, ça serait
calculé. Donc, la personne, à la limite, pourrait être appelée à faire une
contribution non pas à cause du fait qu'elle a une déficience, mais dû au fait
qu'elle a un revenu.
M.
Hébert :
M. le Président, une question de privilège, là. Il redit toujours la même
chose. Il n'est pas question d'une contribution. Il est question de
calculer le revenu dans l'assurance, l'allocation d'assurance autonomie, mais
il n'est pas question d'un déboursé.
Le Président (M. Bergman) :
Monsieur…
M.
Hébert : Il va
arrêter de dire des choses comme ça, c'est mal... c'est...
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
M. le Président, M. le Président...
M.
Hébert : …c'est
induire cette commission en erreur, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre, M. le ministre, c'est
moi qui ai la parole. M. le ministre, c'est moi qui ai la parole
maintenant.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
M. le Président, on va…
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. On va régler le problème...
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon, un moment, s'il vous plaît. M. le ministre, ce
n'est pas une question de règlement. Et je
vous demanderais et je demande à tous les députés autour de la table, incluant
M. le ministre, que la parole est donnée
seulement par le président. Alors, la parole, maintenant, est au député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Je comprends que,
quand le ministre est serré un peu puis qu'on va chercher des vraies affaires,
il a un petit peu de difficultés, là, mais on va en discuter. Quand on parle de
la question d'allocation...
M.
Hébert :
…pas juste moi, là, ou... Vous pouvez intervenir?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, vous n'avez pas la parole.
M.
Hébert :
Non, mais pouvez-vous intervenir sur ce qu'a dit le député de Jean-Talon, M. le
Président?
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon a la parole. M. le député
de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On va regarder le
principe d'allocation, ça dépend comment
vous le regardez. Si vous avez quelqu'un qu'on établit vos besoins, mettons, en
termes monétaires, à 15 000 $, 20 000 $, qui en passant, lorsqu'on a une déficience, ce n'est
pas nécessairement des si gros montants que ça, ce que le ministre, il dit : La personne, elle ne
contribuera pas, elle ne donnera pas d'argent. Mais, quand on va faire son
calcul, s'il y a besoin de
20 000 $ et qu'il y a assez d'argent, ce qu'on va lui faire, c'est
qu'on va lui donner pour 5 000 $, puis, l'autre 15 000 $, il contribuera. C'est comme ça
qu'il faut voir ça, c'est qu'on baisse son allocation en fonction de son
revenu.
M.
Hébert :
M. le Président, est-ce que je peux avoir le privilège d'être bien cité? Ce n'est
pas ce que j'ai dit, M. le Président.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre, vous n'avez pas la parole, et ce n'est pas à moi pour juger la
pertinence des questions qui sont demandées par les membres de la commission...
M.
Hébert :
...mes paroles, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon, vous avez la parole.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. M. le
ministre aura l'occasion
de clarifier les choses, mais la façon
dont... Parce que ce n'est pas toujours clair, hein? Dans les
documents, si vous avez vu, il y a beaucoup de flou, là. Entre autres, on ne sait pas à la fin ça va être quoi, la
contribution du montant selon votre situation à vous autres, selon votre propre situation. Et là il y a peut-être
des gens qui vont faire un saut, parce
qu'il ne faut pas oublier, il y avait une recommandation de monter le maximum, mettons, en CHSLD de
21 000 $ on ne sait pas à quel montant. Ça fait qu'il faudrait
le savoir avant d'adopter une loi qui concernerait l'assurance autonomie.
Est-ce que la personne va payer 21 000 $, ou on va le remonter à
22 000 $, ou on peut monter à 30 000 $? Ça, là, c'est
important pour chaque usager.
Juste
pour continuer mon explication, de la façon dont le ministre en parle, c'est
que, si on estime vos besoins, mettons, en termes de services à un coût
monétaire de 20 000 $, si vous avez des revenus suffisants, c'est que
ça se peut que l'État vous fournisse, un exemple, 5 000 $ et que
vous, vous allez contribuer pour 15 000 $. C'est quoi, la différence entre ce que je viens d'expliquer
versus : Je vous donne 20 000 $ et je reviens vous rechercher par en arrière 15 000 $?
À la fin, la personne va recevoir 5 000 $ de l'État.
Et ce qu'on comprend
dans l'assurance autonomie, puis ça vous concerne parce que… Si vous n'avez pas
de revenu, moi, je suis d'accord avec le
ministre, les gens n'auront pas à contribuer, puis on devrait répondre aux
besoins. Mais, si vous avez des revenus,
quelle que soit votre situation, y compris la vôtre, ce que ça veut dire, c'est
que, si vous êtes quelqu'un qui avez
beaucoup de revenus, à ce moment-là vous êtes appelé à contribuer
indirectement, parce que l'État va vous donner un moins gros montant, et
vous, vous allez devoir contribuer pour compléter vos besoins. Ça, il faut le
comprendre comme ça. Puis, si ce n'est pas ça, j'aimerais ça qu'on me l'explique
comme il faut.
Puis,
juste pour terminer, ce qui est intéressant, c'est que, si vous êtes quelqu'un
qui avez 60 000 $ de revenus, 70 000 $ de revenus par des pensions ou de différentes façons,
ça se peut que, si vous aviez besoin de soins à domicile… Bien, à ce moment-là, c'est possible que vous,
vous soyez obligé de contribuer totalement, tout simplement parce que le
montant ne sera pas suffisant. Je ne sais
pas qu'est-ce que vous en pensez, mais c'est comme ça que moi, je l'ai
compris.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lévesque.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : ...
Mme Nadon
(Brigitte) : Trois points. Ex aequo, la position, c'est : Peu
importe le revenu, on ne devrait pas avoir à débourser pour pallier à la
déficience, parce qu'il n'y a personne qui a demandé pour être handicapé.Ce
que Pierre-Yves a compris, c'est que le montant que la personne va devoir
débourser va... Non?
M. Lévesque (Pierre-Yves) : ...
Mme
Nadon (Brigitte) : Que l'assurance autonomie va payer en totalité pour
compenser la déficience.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : ...
Mme Nadon (Brigitte) : Ce n'est pas notre rôle de savoir où est-ce qu'on
va prendre l'argent, mais notre rôle, c'est de s'assurer que les
services vont être bien reçus.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : ...
Mme Nadon
(Brigitte) : Le ministre a mentionné tantôt que les services vont être
gratuits et que c'est l'assurance autonomie qui va débourser. À moins qu'il n'ait
pas compris comme il faut.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
• (13 heures) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, bien je pense que le ministre va devoir le dire. Si quelqu'un
est handicapé mais qu'il a un revenu,
ce que je comprends, c'est qu'il va être comme dans l'assurance autonomie, c'est-à-dire qu'ils n'appellent pas ça une contribution, mais son allocation
va être baissée en fonction de son revenu. Si ce n'est pas ça, je voudrais qu'on me le dise, là, pour que ce soit bien clair,
mais, s'il y a du revenu, nécessairement ça va être comme les autres
dans le système. Donc, si je comprends bien, l'assurance autonomie ne fera pas votre affaire. Parce que,
s'il y a du revenu puis que vous avez besoin d'un
certain niveau de service, il ne dit pas que vous allez contribuer; il va
baisser le montant que vous allez recevoir, et vous allez compenser de votre
propre poche le montant pour atteindre le niveau que vous devriez avoir. Si ce
n'est pas ça, je veux qu'on me le dise.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lévesque.
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
Mme Nadon (Brigitte) : Oui. M. Lévesque veut répéter la position
d'Ex aequo. La position d'Ex aequo, c'est que, peu importe le
revenu, c'est au gouvernement du Québec de débourser pour pallier à la
déficience.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, puis je comprends votre position. Je vous dis juste que ce n'est
pas ça que vous avez là-dedans. Là-dedans, vous allez devoir… Si quelqu'un
a un revenu…
M. Lévesque
(Pierre-Yves) : …
M. Mercier (Yves)
:
C'est pour ça qu'on a dit qu'on n'était pas d'accord avec le livre blanc.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député…
M. Lévesque (Pierre-Yves) :
…
Mme Nadon
(Brigitte) : Tantôt, M. le ministre a dit que ce serait gratuit.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Pour ce
qu'il s'agit de l'inéquité des services entre les différents CSSS puis entre les différents CLSC à l'intérieur
du même CSSS lorsqu'il y en a plusieurs, c'est une réalité qui remonte à
l'histoire, puis ça, je pense, je suis d'accord avec vous, c'est quelque chose
qui doit être corrigé.
En
passant, la majorité des points que vous nommez, je pense qu'on est d'accord.
La formation, je pense, c'est important que ce soit standardisé, la
qualité. Il faut respecter également vos choix, je pense, c'est quelque chose
qui est très important.
Mais je pense qu'un
des éléments importants… Puis ça, comme de fait, le principe de revoir la façon
dont le système est organisé, est-ce que c'est par une assurance autonomie ou
par d'autres principes? La question aussi des budgets
protégés, ça, c'est important également. Ça, on y croit aussi, sauf… Est-ce
qu'on a besoin de passer un projet de loi pour protéger des budgets? Je pense que c'est une discussion qu'on
pourrait avoir, parce qu'avoir un projet de loi, ça crée toute une autre
bureaucratie, il faut voir si ça vaut la peine. Ça, j'adopte ça également puis
je peux vous dire qu'on est tout à fait d'accord.
Et, pour terminer, je
tiens à vous remercier d'être venus nous expliquer, parce que le plus
important… Il y a beaucoup de gens qui vont
venir nous parler, mais les gens qui sont dans le système et qui ont à profiter
ou à utiliser des services, je pense,
c'est eux autres qu'il faut entendre pour se faire une meilleure idée par
rapport à ce projet. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bergman) :
Alors, Mme Nadon, M. Lévesque, M. Mercier, Mme Marsan,
merci d'être ici avec nous aujourd'hui et partager votre expertise avec nous.
M.
Lévesque (Pierre-Yves) : …
Une voix :
Merci beaucoup. Puis j'aimerais…
Le
Président (M. Bergman) : Et, collègues, compte tenu de l'heure,
je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures aujourd'hui.
Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
13 h 3)
(Reprise à 15 heures)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Collègues, la commission
reprend ses travaux.
Nous
allons poursuivre sans plus tarder les consultations
particulières et les auditions publiques sur le livre blanc sur la
création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.
Alors,
on reçoit maintenant la Fédération professionnelle des préposé-e-s aux
bénéficiaires du Québec. Bienvenue. Alors,
pour fins d'enregistrement, s'il vous plaît, donnez-nous vos noms, vos titres.
Et le prochain 10 minutes appartient à vous.
Fédération professionnelle des préposé-e-s
aux bénéficiaires du Québec (FPBQ)
M. Lemelin
(Michel) : Merci, M. le Président. Michel Lemelin, président-directeur
général de la Fédération professionnelle des préposé-e-s aux bénéficiaires du
Québec.
M. Gagnon
(Daniel) : Daniel Gagnon, gérontologue-conseil.
Le
Président (M. Bergman) : Merci. Alors, vous avez le prochain
10 minutes pour faire votre présentation, suivi d'un échange avec
les membres de la commission.
M. Lemelin
(Michel) : Merci, M. le Président. Mesdames messieurs, c'est avec
plaisir que la Fédération professionnelle
des préposé-e-s aux bénéficiaires du Québec, FPBQ, participe à la Commission de
la santé et des services sociaux
concernant le document L'autonomie pour tous — Livre blanc sur la création d'une assurance
autonomie en vous transmettant ses commentaires, réflexions et
propositions.
Tout
d'abord, la FPBQ tient à saluer l'initiative du ministère de la Santé et des
Services sociaux de proposer la création
d'une assurance autonomie et éventuellement d'une caisse autonomie qui, comme
mentionné dans le document, est réclamée
par plusieurs groupes impliqués dans le secteur des services destinés aux
adultes présentant une perte d'autonomie importante et persistante.
Le
vieillissement de la population. Le livre blanc souligne très bien les
projections démographiques démontrant l'augmentation
marquée du nombre de personnes aînées au cours des 20 prochaines années.
Cependant, comme la mise en place d'une assurance autonomie aura des
répercussions sur une période beaucoup plus longue que 20 ans, il nous aurait paru pertinent d'utiliser le maximum des
informations fournies par l'Institut de la statistique du Québec, soit
sur plus de 40 ans, puisque la situation ira en s'accentuant tout au long
de cette période, créant une pression de plus en plus importante sur les
systèmes de services sociaux et de santé et, par conséquent, sur les finances
publiques.
Par ailleurs, en
mettant l'accent sur la population âgée de 65 ans ou plus, il nous
apparaît que l'on minimise l'impact réel de
la croissance des besoins dus au vieillissement, puisque la cohorte des
personnes de 65 à 75 ans, et même jusqu'à 80 ans, ne constitue
pas un groupe représentatif de forte consommation de services sociaux et de
santé, bien que non négligeable, cette consommation étant beaucoup plus
significative chez les plus de 80 ans.
Les
données concernant les services de longue durée nous apparaissent refléter la
réalité. Cependant, bien que les données
provenant d'autres pays puissent apporter un certain éclairage, nous avons
appris à les utiliser avec parcimonie puisqu'elles
couvrent souvent les services différents des nôtres et qu'il faut également
tenir compte de l'ensemble des aspects socioéconomiques de ces pays.
Ainsi, le niveau de taxation, le nombre, la proportion des clientèles visées,
la quantité des services étatiques offerts
par chacun sont autant de facteurs qui peuvent influencer l'attribution
financière dans un ou l'autre des postes
budgétaires. Il faut également prendre en considération l'équilibre financier
précaire de plusieurs pays, ce qui pourrait venir influencer la
distribution dans l'un ou l'autre secteur d'activité au cours des prochaines
années. D'ailleurs, plusieurs pays ont commencé à recentrer leurs dépenses et
continueront à le faire, compte tenu de la situation économique internationale
instable.
La contribution des
personnes. Voilà, à notre avis, un des aspects importants dont les nouvelles
orientations devront tenir compte en priorité, car deux aspects structuraux de
notre société s'y confrontent, soit la responsabilité individuelle et le rôle
de l'État. Ce dernier aspect a d'ailleurs souvent primé dans nos politiques
sociales-démocrates, déresponsabilisant
petit à petit le citoyen de ses rôles fondamentaux. Dans la situation
économique que nous vivons et que nous
aurons à vivre au cours des prochaines années, il faut s'attendre que le
citoyen soit appelé à contribuer de plus en plus, que ce soit par ses
actions ou ses avoirs.
Parallèlement, la
disponibilité des services de soutien à domicile et d'hébergement fournis par l'État
n'a cessé de décroître depuis le début des années 1990. Avec le vieillissement
tant individuel que collectif que connaît et connaîtra le
Québec au cours des prochaines décennies, nul doute que la situation ira en se
détériorant. Si on met en parallèle l'augmentation potentielle de personnes
âgées et très âgées nécessitant des services sociaux et de santé, les services de
soutien à domicile qui ne répondent que très partiellement à la demande
actuelle, rendant difficile, voire impossible le maintien à domicile pour plusieurs personnes âgées fragilisées,
et les conditions restreignant l'admission en CHSLD, nul doute
que les personnes âgées en perte d'autonomie devront se tourner de plus en plus vers les résidences pour personnes âgées, d'où la nécessité de
mettre en place des mesures efficientes afin de faire face à une demande
croissante de services pour personnes âgées présentant des incapacités de
plus en plus importantes.
Le document semble
présenter l'assurance autonomie comme un programme universel, disponible pour
tout citoyen qui remplit les conditions nécessaires, peu importent ses revenus. La FPBQ pense que,
dans la situation économique
actuelle, l'accès universel ne semble plus être un modèle qui devrait être
utilisé dans les nouveaux programmes gouvernementaux, et même dans certains
autres programmes actuellement en vigueur. Afin d'assurer la pérennité du programme, la FPBQ pense qu'il serait préférable
d'établir un mécanisme de récupération fiscale pour les plus fortunés
semblable à celui utilisé par le gouvernement fédéral dans le programme de
pension de sécurité de la vieillesse.
Par
ailleurs, le message véhiculé par le ministre semble tenir compte de ces
préoccupations, mais le livre blanc ne le laisse pas apparaître avec autant de clarté. Il serait donc important
d'établir clairement les paramètres qui seront utilisés dans le document
final. De plus, la FPBQ se questionne sur les montants qui seront versés aux
bénéficiaires et si, tel que compris à la lecture du livre blanc, ils seront
établis en fonction des profils ISO-SMAF.
Nous
tenons à saluer la volonté ministérielle de proposer un budget protégé en
matière de soins et de services de longue durée. Ici encore, c'est une
action demandée par plusieurs groupes depuis plusieurs années.
Par
ailleurs, la volonté de développer l'assurance autonomie à partir de trois
mouvements concomitants, tel que décrit
en page 20, démontre une grande force de détermination de la part du
gouvernement puisqu'on peut s'attendre à une résistance de la part de la
population en général, qui a toujours priorisé les soins aigus, et
principalement pour les jeunes populations et aussi de la part des médecins,
qui ont tendance à considérer la clientèle en perte d'autonomie importante
comme secondaire car irrécupérable.
Allocation
de soutien à l'autonomie. À la lecture de la section 4, qui concerne
l'allocation de soutien à l'autonomie, nous
comprenons que la grande partie des services à la personne ainsi qu'aux
activités à la vie domestique à domicile serait confiée principalement
aux entreprises d'économie sociale en aide domestique. Bien que nous soyons au
courant que déjà plusieurs CLSC utilisent
ces ressources pour offrir des soins directs à la personne, délaissant un
service qu'ils rendaient via les
auxiliaires familiales, nous pensons que jamais, le ministère de la Santé, dans
l'entente de 1996 conclue avec les entreprises
d'économie sociale, que les AVQ ne leur avaient été confiées, au contraire nous comprenions qu'elles
avaient été exclues d'emblée, ce qui fait
qu'à notre connaissance, actuellement, les aides directes à la personne ne sont pas
encadrées par une loi ou un règlement du ministère de la Santé.
De plus, nous
considérons que ceux qui offrent ces services via les entreprises d'économie
sociale n'ont majoritairement aucune formation
pour accomplir ces tâches, contrairement aux auxiliaires familiales qui
détenaient un diplôme d'études professionnelles.
Ceci explique la baisse drastique d'inscription au diplôme d'études
professionnelles Assistance à la personne à domicile depuis quelques années, si
bien que le ministère de l'Éducation a entrepris des démarches afin de
fusionner les cours d'assistance à la personne à domicile, auxiliaire
familiale, et d'assistance à la personne en
établissement de santé, préposé aux bénéficiaires, afin d'avoir une formation
plus adéquate et augmenter la possibilité
de former plus des personnes aptes à offrir des services adéquats à domicile. Le ministère
de la Santé et des Services sociaux aura donc à se positionner dans ce dossier afin
de s'assurer d'un encadrement légal approprié et d'offrir des services à
domicile de qualité par des intervenants formés adéquatement avant de mettre en
place son assurance autonomie, en collaboration avec le ministère de
l'Éducation. À noter que ce besoin
d'exigence de formation ne s'applique pas
seulement aux personnes appelées à donner des services à
domicile, mais à toute personne oeuvrant auprès de personnes âgées
fragilisées, tant à domicile, en résidence qu'en CHSLD.
En
conclusion, la FPBQ est d'avis que le livre blanc sur la création d'une
assurance autonomie est une avenue très souhaitable. Elle est cependant d'avis que certains éléments tels
l'identification claire des clientèles, les responsabilités de chacun des acteurs, le contrôle de la qualité des
services, le financement détaillé du programme, tant de la part des
usagers, du gouvernement que des transferts de programme, la gestion de la
caisse… autonomie, plutôt, et la formation du personnel,
peu importe le lieu de dispensation des services, devront être revus afin
d'offrir un projet clair qui ira chercher l'assentiment de tous les
groupes et les personnes concernées. Merci beaucoup.
• (15 h 10) •
Le Président (M.
Bergman) : Merci pour votre présentation, M. Lemelin.
Alors, maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert :
Merci beaucoup, M. Lemelin, M. Gagnon. Merci de ce mémoire.
J'aimerais
d'abord avoir votre opinion sur le niveau d'investissement qui a été consenti
dans les soins à domicile au cours des dernières années. Est-ce que vous
jugez que ce niveau-là a été suffisant pour répondre aux besoins?
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : La réponse est non, pour la seule et unique question que, les CLSC,
quand ils ont fusionné avec les CSSS,
malheureusement, quand il y a eu des coupures de budget à ce niveau-là, la
plupart du temps les CLSC se faisaient amputer au niveau de leur budget,
donc ce qui a fait une diminution drastique au niveau des services.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Et donc la perspective de créer une caisse sécurisée, séparée est une
perspective que vous trouvez intéressante.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : Oui,
effectivement.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous parlez, dans votre mémoire, de récupération fiscale, là, si j'ai bien
compris. J'aimerais ça que vous nous
expliquiez ce que vous entendez par là. Par rapport à une modulation de
l'allocation qui serait établie suivant le revenu, vous parlez plutôt d'aller récupérer par la fiscalité une partie
de l'allocation qui est donnée, alors j'aimerais ça vous entendre
là-dessus. Je comprends votre préoccupation d'équité, mais, le moyen que vous
proposez, j'aimerais le comprendre un peu mieux.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : M. Gagnon.
Le Président (M. Bergman) :
M. Gagnon.
M. Gagnon
(Daniel) : C'est sûr que
c'est une proposition comme une autre de récupérer des argents des
personnes qui ont le plus les moyens de se
payer des services. Que ce soit par une récupération fiscale comme l'a fait le
fédéral pour la pension de vieillesse ou une autre méthode, peu importe,
c'est qu'il faut tenir compte de la capacité de payer des individus si on veut offrir des services au plus
de gens possible. Mais, nous autres, c'était une méthode, disons, qui
est connue, celle-là, c'est pour ça que c'est celle-là qu'on proposait, mais on
est bien conscients que ce n'est pas la seule qui peut exister, il peut y avoir
d'autres méthodes aussi ou même plus efficaces. Mais c'est ce qui nous est
venu.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
J'aimerais aborder avec vous la question de la formation du personnel qui est
appelé à donner des soins. Vous
questionnez, là, la formation du personnel des entreprises d'économie sociale.
J'aimerais ça avoir votre opinion sur
qu'est-ce que vous entendez comme étant une formation appropriée pour les gens
qui donnent des soins et services à l'autonomie des personnes.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin.
M. Lemelin
(Michel) : Écoutez, M. le
ministre, ce qui est important là-dedans, c'est de donner des soins et
services de qualité. Présentement, dans les
entreprises d'économie sociale, malheureusement, le volet des AVQ, qu'on
appelle, les soins au quotidien ne sont pas pris en charge par toutes les
entreprises d'économie sociale.
Deuxième chose : la plupart du personnel
qui est engagé, oui, il y a une multitude de gens qui sont préposés aux bénéficiaires, mais la plupart n'ont aucune
formation. Donc, ils ne peuvent pas comprendre la nécessité de donner un
bain, de donner à manger ou de faire les toilettes, qui est extrêmement
important.
Troisième
chose : je crois qu'à quelque part on a déjà, dans le réseau de la santé,
des auxiliaires familiales qui ont
une très bonne formation — c'est une formation de 975 heures — qui devraient pallier sur ce côté-là,
pour donner des soins à domicile. Parce que,
vous savez, on n'a pas affaire à n'importe quelle clientèle. C'est une
multitude de clientèles, dont des cas de psychiatrie, et etc. Donc, une
personne mal outillée, quand viendra le temps de pouvoir faire des avancements
au niveau des soins, va être, comme on pourrait dire, mal prise.
Le Président (M. Bergman) :
M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Oui. Tant et
aussi longtemps que les entreprises d'aide domestique à la personne se résumaient aux AVD, aux activités de la vie
domestique, bon, une connaissance plus ou moins grande des services à
rendre puis des techniques à utiliser était
peut-être, disons, moins pertinente. Mais, depuis qu'il y a un transfert, de
plus en plus, des services d'aide à la personne, d'aide directe à la
personne, que ce soit l'aide au bain, ou l'aide à l'habillement, ou peu importe, même à l'orientation, et avec
l'alourdissement des clientèles qui retrouvent à domicile, qui ont des
complexités de conditions de santé et
d'autonomie grandissantes, c'est fondamental que ces gens-là aient une
formation, autant pour savoir bien faire mais savoir aussi… savoir tout
simplement les problématiques dont font face ces clientèles-là et le
savoir-être avec eux autres. Donc, c'est pour ça qu'une formation pertinente,
là, est tout à fait requise.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Parlez-nous un peu de la formation des préposés. Vous nous avez parlé de celle
des auxiliaires familiales. Parlez-nous de
la formation des préposés, que ce soit dans le réseau public ou dans le réseau
privé. Vous savez que le nouveau règlement sur la certification des résidences privées
impose un certain minimum standard pour la formation des préposés. J'aimerais
vous entendre là-dessus et l'arrimage avec les auxiliaires familiales aussi.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : Écoutez,
présentement, la formation des préposés aux bénéficiaires reconnue par le ministère de l'Éducation du Québec, c'est une
formation de 750 heures. Il y a eu un rehaussement depuis quelques
années, et là, présentement, ce que j'ai constaté, c'est que le ministère de l'Éducation
du Québec est présentement dans un chantier afin de développer un nouveau
préposé qui va être adapté aux besoins de ce que la population s'attend pour les soins. Et, sur l'assistance à la personne en
établissement de santé, c'est une formation extrêmement pointue avec une
multitude de compétences, on pourrait dire une douzaine de compétences, ce qui
fait en sorte que la personne est vraiment bien outillée pour être capable de
travailler auprès d'une personne vulnérable.
Comme je vous
disais tantôt, c'est sûr qu'avec le nouveau chantier on veut tenter de
fusionner deux formations, ce qui
veut dire celle des préposés aux bénéficiaires et les auxiliaires familiales.
Le pourquoi, c'est qu'au cours des dernières années, les cinq dernières années, on s'est aperçu graduellement que les
auxiliaires familiales, au niveau de la formation, étaient délaissées au profit des préposés aux
bénéficiaires. Et, quand on regarde ça un peu plus pointu, de plus en
plus de préposés s'en vont en soins à domicile, et pourtant la formation
requise, ça serait auxiliaire familiale.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Certains pays — la
France, pour ne pas la nommer — ont créé ce qu'ils appellent des auxiliaires
de vie sociale, qui est un peu un amalgame entre le préposé et l'auxiliaire
familiale, le but étant de diminuer le nombre d'intervenants
à domicile pour qu'il y ait le moins de personnes possible qui entrent dans le
domicile. Qu'est-ce que vous pensez de cette orientation-là?
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin.
• (15 h 20) •
M. Lemelin
(Michel) : Je ne connais pas bien, bien cette profession-là
en France, je connais plus mon domaine ici, au Québec. Oui, j'en ai entendu parler. Mon questionnement :
Est-ce que ça va être un nombre d'heures moindre? C'est là
la question.
M.
Hébert : Pour vous,
le nombre d'heures actuel de 750 heures pour les préposés est un plancher.
C'est ce que j'ai compris?
M. Lemelin (Michel) : Oui.
Le Président (M. Bergman) :
M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Oui. Il faut
comprendre qu'avec l'alourdissement des clientèles à domicile il y a une très
forte partie des clientèles actuellement à domicile qui, il y a 15,
20 ans, étaient en CHSLD, hein, il faut être bien clair là-dessus. Donc, il faut… Puis ça va
augmenter dans le futur. Surtout avec l'assurance autonomie, on va se
retrouver avec beaucoup plus de personnes en perte d'autonomie sévère à
domicile, et une formation adéquate tant à domicile qu'en établissement d'hébergement,
que ce soit public ou privé, est absolument nécessaire.
Quel sera le
niveau? Disons que les barèmes utilisés actuellement par le ministère de l'Éducation nous apparaissent très corrects. Quels
seront les besoins dans cinq ou 10 ans? On ne le sait pas, mais on fait
confiance au ministère de l'Éducation pour suivre l'évolution des besoins et
offrir à ses étudiants une formation de plus en plus adéquate pour pouvoir
justement permettre aux aînés fragilisés de pouvoir vivre dans le milieu qu'ils
choisiront. C'est aussi notre voeu, mais, en ne leur donnant pas non seulement la formation, mais aussi l'encadrement suffisant, il risque d'y avoir encore plus de rotation de personnel qu'on n'en connaît actuellement, tant à domicile qu'en établissement d'hébergement. Ça fait que, si on veut arrêter le mouvement de rotation et rassurer
autant l'utilisateur que celui qui donne les services, il faut qu'une
formation de base et une formation continue
adéquates soient données à ces intervenants-là, parce qu'on a beau… Il ne faut
pas oublier que c'est probablement la clientèle la plus fragile au
niveau de la santé et des services sociaux dont on parle aujourd'hui.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Je voudrais parler maintenant de la qualité et du
contrôle de la qualité. Le livre blanc, l'assurance autonomie prévoit confier aux CSSS la responsabilité de s'assurer de la qualité des services des différents
prestataires. Vous évoquez dans votre mémoire le spectre du conflit d'intérêts.
Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, sur ce que vous entendez par le
conflit d'intérêts. Et qui devrait s'assurer de la qualité, si ce n'est pas les
CSSS?
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin. M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Oui, merci, M. le Président. Écoutez, quand on est celui qui évalue la personne, qui
décide des services qu'on lui donne, qui
évalue la qualité de ces services-là, on risque de pencher plus d'un côté ou de
l'autre parce qu'on est à la fois celui qui donne, qui décide
des services et qui les évalue. Ce qu'on dit, c'est que, l'évaluation — puis
c'est la même chose quand on parle de
certification ou des visites d'appréciation des CHSLD, c'est confié à des
groupes extérieurs aux CSSS — on pense qu'il pourrait y avoir peut-être un
organisme existant déjà, qui s'occupe de contrôle de la qualité, qui pourrait
prendre en charge ces contrôles-là. Mais mettre… donner au CSSS ce mandat-là,
il peut se faire reprocher de vouloir
protéger son personnel, ou ses décisions, ou ses orientations, ou… À notre
avis, à notre humble avis, c'est un risque de conflit d'intérêts. On a
bien dit : Risque de conflit d'intérêts.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Mais je ne comprends pas, là. Si le CSSS va évaluer la qualité, met des
exigences au niveau de l'accréditation d'une entreprise d'économie sociale,
comment il peut être en conflit d'intérêts? Je ne comprends pas.
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Parce que c'est son propre personnel, parce que c'est lui qui décide
des… Bien, admettons que quelqu'un du personnel du CSSS décide que la
personne a besoin de tel, tel, tel service mais qu'elle en a besoin de plus, O.K., puis qu'on lui donne les services
qui ont été déterminés. Quand elle va faire son évaluation, elle va
dire : Oui, il reçoit les services qu'on a déterminés, c'est correct.
Mais, si ce n'est pas suffisant parce que… pour x raisons, soit qu'il n'y a pas assez de personnel pour donner les
services, soit parce que les services ont été mal identifiés ou
identifiés selon les capacités de payer du CSSS, bien on risque d'avoir des
résultats qui sont discutables.
Mais c'est une
crainte qu'on a. Je ne dis pas… On ne dit pas que c'est exactement… mais c'est
une crainte.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
C'est parce qu'on ne s'entend pas sur l'accréditation, là. L'accréditation,
c'est de dire : Bien, le personnel de
telle entreprise d'économie sociale a le bon niveau de formation, les processus
sont adéquats, etc., là. C'est
plus de cet ordre-là. Et le CSSS, étant l'agent
qui va contracter les services avec l'entreprise d'économie sociale, est
en bonne position pour être en mesure de juger si l'offre de services répond à
des standards.
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M.
Hébert : Vous parlez, vous, plutôt d'aller contrôler la
qualité, par après, par des inspections, là. On ne parle pas de la même
affaire, là.
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : C'est peut-être, M. le ministre, qu'on n'a pas saisi adéquatement
l'orientation que vous proposiez. On
se dit… À la lecture du document, tel qu'on le lit, tel qu'on le comprend,
c'est ce qui nous est apparu. Peut-être
qu'on est dans le champ, ça se peut, mais ce qu'on veut, c'est d'éviter,
justement, qu'on reproche aux CSSS ou qu'on reproche à ceux qui
contrôlent et qui donnent les services de ne pas donner les bons services puis
que ce soit par des questions plus financières que des questions professionnelles.
C'est juste ça.
Mais c'est une
crainte. Ça ne veut pas dire qu'on a raison, mais, à la lecture du document, c'est
ce qui nous est apparu.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Je comprends mieux votre point. Merci.
Vous
avez dans votre mémoire aussi certaines réserves par rapport à l'objectif ou
l'intention de confier certaines responsabilités administratives à la
Régie de l'assurance maladie du Québec. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Actuellement, la Régie de l'assurance maladie du Québec gère le programme d'exonération
financière pour l'aide domestique, alors
j'aimerais vous entendre sur les réserves que vous exprimez par rapport à une
implication de la RAMQ.
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) :
C'est dans le même ordre. Quand l'agent payeur est aussi l'agent vérificateur,
il y a toujours des... bien, en tout cas, on pense qu'il y a toujours des
risques qu'il y ait des priorités qui soient modifiées selon, justement, les revenus qu'on… les budgets qu'on leur donne. C'est
juste une question, je dirais, d'éviter les risques.
On parlait tantôt des
CSSS. Il ne faut pas oublier que, depuis la création des CSSS, plusieurs ont
reproché certaines priorisations de services
au détriment de certains autres. Le maintien à domicile et l'hébergement en
sont. Quand on a, dans une même organisation, à gérer les budgets et les
services des salles d'urgence, des salles d'opération, des hôpitaux, de l'hébergement et du soutien à
domicile, des clientèles jeunes et des clientèles plus âgées, fragilisées, il
est facile de glisser d'un bord ou de l'autre, mais généralement ça glisse
toujours négativement du côté des services aux aînés.
C'est
pour ça qu'on veut que le nouveau plan parte... le nouveau programme,
l'assurance autonomie, parte sur une bonne
base, pour éviter ces glissements-là. Tu sais, oui, on comprend très bien qu'il
y a un budget protégé, mais on est toujours craintifs, hein? Chat
échaudé craint l'eau froide.
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Je vais laisser à mes collègues le soin de poser certaines questions.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Merci, M. le Président. Je
voudrais revenir justement à la qualité, là. Si on dit : Le CSSS est le gestionnaire, donc il ne pourrait pas
nécessairement vérifier la qualité ou s'assurer que les soins sont de
qualité, mais qui, à ce moment-là, verriez-vous pour gérer et pouvoir avoir une
opinion sur la qualité?
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Si on avait pu vous suggérer, peut-être qu'on vous en aurait suggéré,
mais on sait très bien que dans
d'autres... Que ce soit par la certification des résidences, que ce soit par
l'agrément des établissements, que ce soit par les... j'oserais
quasiment dire les visites qui sont faites dans les CHSLD, il y a un tiers
parti. Ce n'est jamais l'organisation même
qui fait l'évaluation, il y a un tiers parti. J'aurais aimé vous donner le nom
du groupe qui aurait été le plus en
mesure de le faire, mais malheureusement je ne peux pas le faire. Est-ce que
c'est un groupe existant? Peut-être. Un groupe qui a déjà un mandat d'évaluation de la qualité? Peut-être. Est-ce
que c'est un autre groupe? Est-ce que c'est le CSSS? Peut-être aussi,
là. Mais c'est toujours la volonté de ne pas mettre personne en conflit et
avoir à défendre des questions de soins et services de qualité par rapport à
des budgets disponibles.
• (15 h 30) •
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Parce
que c'est sûr que le CSSS va avoir
tout avantage à s'assurer que les services
sont de qualité. Les organismes, par exemple, en économie
sociale seraient accrédités, et les
personnes peuvent porter plainte si elles considèrent qu'elles ne
reçoivent pas des bons soins. Ça fait que je pense qu'il y a beaucoup de
mécanismes déjà autour des CSSS, qui sont les gestionnaires et responsables des
services qui seraient offerts, à ce moment-là, parce
qu'on parle des soins à domicile. Ça fait
que les personnes à domicile pourraient, je pense, se plaindre.
Oui? Vous avez une
réaction?
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Vous savez, il y a déjà beaucoup de mécanismes de vérification qui existent,
puis il y a quand même
beaucoup d'irrégularités qui sont identifiées actuellement. Puis il y en a déjà beaucoup, de mécanismes qui existent. Il n'y a rien qui
empêche… Il n'y a jamais
eu rien qui empêche un CSSS de contrôler la qualité des services qui sont offerts sur son territoire, jamais.
Pour n'importe quelle plainte, même sans plainte, on peut vérifier la qualité.
Sauf que pourquoi que ça n'a pas été fait dans le passé, dans plusieurs
cas? On se le demande. Ça fait que c'est juste une crainte.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin :
Alors, je vais aller rapidement, parce
que je pense qu'il ne reste pas beaucoup
de temps. Alors, bonjour, messieurs. Considérez-vous pertinent, vous, de
voir la création d'un ordre ou d'une association professionnelle apte à
encadrer la formation, les conditions de pratique et la couverture de risques
des intervenants prestataires de l'offre de services de l'assurance autonomie?
Est-ce que vous considérez important…
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : C'est très pertinent, puis même, je dirais, c'est nécessaire. Parce
qu'actuellement, de ce qu'on
comprend, dans le réseau de la santé, de ce qui se passe actuellement, on sait
que les médias s'emparent souvent des préposés aux bénéficiaires, de ce
qui se fait actuellement, des services qui sont mal offerts, ou mal donnés, ou
mal organisés, et là-dessus les journalistes sont clairs, ils disent :
Comment ça, il n'y a pas d'organisation qui surveille cette profession-là?
Pourtant, l'Ordre des infirmiers auxiliaires, ils ont le leur, on sait c'est
qui. Les infirmières ont l'Ordre des infirmières, et tout ça. Mais les
préposés, personne. Il n'existe rien. Donc, je crois que ça serait nécessaire.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste
1 min 30 s pour question et réponse.
Mme
Gadoury-Hamelin :
Ah, bien il m'en reste plus que je pensais. Alors, dans une question plus
générale : Le projet d'assurance
autonomie qu'on propose est une façon responsable de prioriser les soins à
domicile et d'opérer le virage concret
afin de répondre aux défis, comme vous l'avez bien dit dans votre mémoire,
défis du vieillissement de la population. Avant toute chose, j'aimerais
savoir si, selon vous, les soins à domicile représentent la voie à prendre pour
répondre aux défis démographiques québécois. Et pourquoi?
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin, il vous reste une minute pour cette
réponse.
M. Lemelin (Michel) : Tout à
fait. On sait qu'à partir de 2023 la
ligne intergénérationnelle entre personnes
âgées et jeunes va prendre une tournure qu'on connaît. Ça fait des années que
nous, on dit que l'approche soins à domicile doit
être préparée avec soin et qu'on doit aller de l'avant vers ça. Sinon, je vais
vous dire, dans des cas particuliers, bien souvent la tendance des gens, quand les gens ont un petit peu de perte d'autonomie, c'est tout
de suite le placement en établissement, que ce soit en résidence ou en CHSLD direct. J'ai des gens qui ont été
un peu délaissés, et malheureusement on leur a dit : Écoutez, il
faut le placer. Et pourtant, avec des soins à domicile, cet homme-là aurait pu
faire cinq ans, peut-être 10 ans.
Le
Président (M. Bergman) : Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bienvenue à notre commission. Je trouve ça très
intéressant de vous entendre, surtout que
vous, vous travaillez vraiment directement avec la clientèle. Je ne pense pas, à la limite,
qu'il y ait des professionnels plus près, parce que vous passez beaucoup de
temps… Récemment, je parlais avec des gens qui disaient : Souvent, les
médecins vont aller faire leurs visites, on va rencontrer les personnes, mais
ceux qui passent beaucoup de temps à s'occuper des personnes pour leurs activités
quotidiennes, c'est les préposés.
Je
veux vous féliciter parce que, dans le document, vous décrivez très bien
la question de la structure d'âge. Et on parle toujours des 65 ans
et plus, mais ce qu'on se rend compte, c'est qu'il y a une progression au
niveau des 65 ans, mais elle est encore
plus grande entre 75 et 85 ans et elle est encore plus grande dépassé
85 ans. Et ça, on oublie ça. Non seulement il y a plus de personnes, mais il y a
plus de personnes plus âgées — et
ça, votre document en fait mention — ce qui fait que ça augmente également
les besoins.
L'autre élément que
je suis d'accord avec vous : je pense que, la proposition du ministre, il
faut la regarder. Il y a beaucoup
d'éléments, mais on a beaucoup d'éléments à éclaircir, on ne sait pas encore où
on s'en va dans certains secteurs. Toute la question du financement, la
contribution, je pense que tout le monde doit s'entendre que c'est encore flou.
Également,
puis ça, je tiens à le dire, là, les… On pose toujours la question :
Est-ce qu'on doit faire le virage à domicile?
Tout le monde croit dans le virage à domicile. Et je pense que ça fait déjà un
certain temps que ça a été amorcé, mais il faut le continuer, puis il y
a un travail à faire pour poursuivre.
On parlait tantôt des
CHSLD. Avez-vous noté que, dans nos CHSLD, les gens sont beaucoup plus lourds
qu'auparavant et que, des gens qui viennent habiter en CHSLD puis qui y passent
plusieurs années, on en a très peu?
M. Lemelin
(Michel) : Effectivement…
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin
(Michel) : Oui, merci. Effectivement, M. Bolduc, c'est sûr que, dans
ma carrière, si je recule voilà 15 ans,
ce que j'ai remarqué, bon, une personne qui rentrait en CHSLD rentrait sur ses deux
jambes bien souvent, avec une
certaine perte d'autonomie. Aujourd'hui, la réalité n'est plus la même. Les
gens, vraiment, sont en très lourde perte d'autonomie, on rentre en
chaise roulante ou en civière.
Et aussi une affaire
qu'on a commencé à remarquer, au cours des années, c'est qu'on commence à voir
des cas psychiatrisés de plus en plus dans
nos établissements, et ça, c'est quelque chose qu'on ne voyait pas. Oui, bon,
les personnes atteintes de maladie d'Alzheimer, c'était un créneau, et tout ça,
qu'on voyait, mais avec des problèmes psychologiques
et psychiatriques il y en a de plus en plus, et même qu'on commence à voir de
plus en plus de démence. Et ça, là-dessus, les préposés sont très mal
outillés. On sait que, la catégorie psychiatrique, bon, si on a de 18 à
65 ans, pour les jeunes, c'est déjà catégorisé, mais, dès qu'ils
atteignent 65 ans, on se ramasse dans une situation qu'ils sont
catégorisés comme aînés, et pourtant tout le long de leur vie ils étaient avec
de la maladie, bien souvent, mentale. Donc, ils se retrouvent en situation de
CHSLD.
Mais
effectivement j'ai déjà vu des cas qui ont atteint 25, 30 ans d'existence
dans les soins de longue durée, et aujourd'hui, si on atteint cinq ans,
c'est pas mal un plafond, au niveau d'une vie dans les soins de longue durée.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, je vous remercie pour
votre commentaire parce que ça, ça témoigne du virage qui avait été fait
auparavant, où on a créé comme des ressources intermédiaires et également on a
fait le virage des soins à domicile.
Pourquoi
les gens sont plus lourds dans les CHSLD? C'est tout simplement… C'est qu'il y
avait une catégorie de patients qui
avant ça n'étaient pas gardés à domicile, et il n'y avait pas d'autre
ressource; qu'on devait nécessairement mettre
en CHSLD. Et, jusqu'à tout récemment — c'est en train de se corriger — Montréal avait 40 % de leurs
patients qui étaient dans des lits de CHSLD qui auraient pu être ailleurs.
Mais cette
transformation-là a commencé depuis plusieurs années, et ce qu'on constate
aujourd'hui au Québec — en tout cas, moi, je l'ai regardé, les deux,
trois dernières années — généralement les gens rentrent dans les CHSLD, et leur espérance de vie est relativement
courte. La preuve : 35 % à 40 % des gens, lorsque c'est vraiment
des cas de CHSLD, décèdent dans l'année qui
suit, donc, ou décèdent… il y en a 35 % à 40 % qui décèdent à chaque
année dans nos CHSLD. Ce qui fait que la transformation du virage à
domicile a été faite et elle doit être augmentée.
Deuxième
phénomène : avec l'arrivée des résidences privées, qu'on soit pour ou
contre, moi, j'ai des gens, là, que je suis
actuellement qui avant ça auraient peut-être été en CHSLD, mais parce qu'il y a
un certain support ils sont capables de demeurer plus longtemps à
domicile. Et ça, c'est la transformation qui a été faite.
Je
ne sais pas si c'est ça que vous avez constaté également sur le terrain de la part
des gens que vous représentez.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : Effectivement, ce qu'on est en train de constater, c'est qu'en soins de
longue durée, vu qu'il y a eu une
multitude de coupures dans les lits, bien on se ramasse qu'il y a moins de
places en soins de longue durée, donc
ça accapare du côté des ressources intermédiaires. Et présentement il y a un
nouveau phénomène qu'on ne voyait pas, d'à
peine quelques années : les résidences pour personnes âgées commencent à
avoir des cas de soins de longue durée dans leurs murs, ce qui veut dire des achats de lits sur des étages complets,
et tout ça. Et ils sont obligés de les prendre parce que malheureusement
les ressources intermédiaires sont au maximum, et les soins de longue durée
sont tout aussi au maximum au niveau des lits. Donc, oui, le phénomène, on le
constate.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée… M. Gagnon.
• (15 h 40) •
M. Gagnon
(Daniel) : Juste un mot, M. Bolduc, pour dire qu'effectivement vous
avez utilisé un terme… Les résidences
privées avec services pour aînés sont des résidences, c'est du maintien à
domicile. Il faut le répéter souvent parce que les gens ont tendance à
mélanger les résidences et les CHSLD, alors que, les résidences, en résidence
la personne est chez elle. Au niveau technique, au niveau de la loi,
elle est chez elle.
Donc, ça devra être
couvert aussi par le programme. C'est sûr qu'ils devront être couverts par le
programme autonomie, l'assurance autonomie, parce que c'est la résidence de l'aîné
à ce moment-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Merci beaucoup, M. le Président. M. Lemelin, M. Gagnon, je suis très
contente de vous revoir.
M. Lemelin,
j'ai beaucoup d'admiration pour les préposés aux bénéficiaires,
que je croise très souvent quand je visite
des CHSLD. J'ai beaucoup de questions à vous poser, mais tout d'abord on est d'accord avec ça, qu'on puisse vivre à domicile le plus
longtemps possible.
Je pense
qu'il va aussi falloir, dans d'autres programmes, prendre en considération
l'aménagement de la résidence, si la
personne n'habite pas dans une résidence privée pour aînées, parce que
parfois on habite dans un deuxième étage, puis on n'est plus capable de vivre dans sa maison, et on ne veut pas
déménager. Ça fait que ça prend parfois de petits aménagements, et là ça permettrait à la personne
de recevoir des soins à la vie quotidienne, des soins de santé avec du
personnel plus formé. Et je crois que ça permettrait de faire en sorte qu'il y
ait moins de personnes qui se retrouvent plus rapidement dans les CHSLD. Est-ce
que vous êtes d'accord avec ça?
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : Je suis tout à fait d'accord avec ça. Pour vous dire, chez nous, nos
membres, il y en a qui
travaillent en soins à domicile actuellement et ils se retrouvent avec des cas
de sclérose en plaques, des gens que ça fait
plus de 20 à 25 ans qu'ils n'ont pas eu de bain. Pourquoi? Parce que
l'endroit où ils habitent, malheureusement, c'est des logements, ce n'est pas des maisons, des logements qui datent des
années 50, 60, 70, qui étaient adaptés à ce moment-là pour le besoin
mais qui aujourd'hui sont vétustes, et malheureusement les
aménagements sont limités. Ils ne peuvent pas enlever des murs, ils ne peuvent pas adapter les toilettes. Ils ne
peuvent même pas adapter certains, comme on pourrait dire, départements
du logement. Donc, à ce moment-là, ces gens-là, quand ils ont une très grande
perte d'autonomie, ils sont confinés
carrément au lit et n'ont qu'une toilette partielle, et la plupart de leurs
activités sont dans leur chambre, sauf pour
des sorties médicales. Donc, oui, l'assurance autonomie, ça serait une bonne
chose, mais l'aménagement du côté… tout ce qui est structurel serait
nécessaire aussi pour accompagner ces gens-là.
Et
un autre facteur qu'on reconnaît aussi, c'est que bien souvent il y a
des gens qui sont sur la liste d'attente pour obtenir des modifications à leur logement, et ça peut prendre
deux ans, trois ans, quatre ans avant de pouvoir obtenir ces
modifications-là. Et ils se retrouvent malheureusement cadrés vers les soins de
longue durée, parce que les CLSC, il faut
l'avouer, les CLSC, selon les heures-soins, disent : Écoutez,
on n'a pas assez d'heures-soins à lui offrir, donc il faut le prendre et le placer en CHSLD immédiatement, sans
donner, bien souvent, le choix au résident, on ne l'écoute pas à ce moment-là. On leur dit
simplement : Soins de longue durée parce que le personnel est au maximum
des heures-soins.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : J'aimerais maintenant vous entendre sur
la caisse autonomie parce que j'ai des préoccupations avec ça. Je ne
suis pas contre, pas du tout. Moi, je suis ouverte sur toutes les possibilités
qui s'ouvrent. On est ici en commission parlementaire pour entendre une
pluralité d'idées et essayer de se faire une idée propre.
Est-ce que,
pour vous, la caisse autonomie, c'est les 4,3 milliards de dollars
pour les personnes de 18 ans et plus qui ont besoin de soins à domicile, plus le 100 millions par année sur
cinq ans, qui constituent la caisse autonomie jusqu'en 2017 ou si une
caisse autonomie, c'est aussi une contribution supplémentaire qui s'ajoute à
cette caisse qui serait gérée par la Régie de l'assurance… la RAMQ?
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin
(Michel) : Là-dessus, on
s'entend que, bon, de ce qui est offert actuellement, c'est de courte
durée. Nous, ce qu'on espère, c'est que ce
soit de très longue durée, parce que, comme je vous disais tantôt, à partir de
2023 les besoins vont être
retentissants, ça, c'est assuré, et en montant les années à venir, jusqu'en
2040, 2050. Donc, à ce moment-là, il va falloir adapter cette caisse
autonomie là. Et je crois, à mon avis, qu'il faudrait la renflouer d'année en
année, mais là-dessus je tiens à vous dire que nous ne sommes pas des experts
au point de vue de comptabilité, et tout ça, là.
Le Président (M. Bergman) :
M. Gagnon.
M. Gagnon
(Daniel) : Au moins,
l'avantage de la caisse d'autonomie, c'est d'avoir des argents qui sont
identifiés clairement pour certaines
clientèles et certains besoins. Ça, c'est déjà un pas énorme. C'est une chose
qui est demandée depuis au moins
20 ans, d'avoir ce que l'on appelait, nous autres, dans le temps, des
budgets protégés ou des enveloppes protégées.
Est-ce que
c'est suffisant? Est-ce que c'est la manière? Ça, comme Michel disait, on n'est
pas des comptables, on n'est pas des
spécialistes, mais au moins le fait d'avoir identifié des budgets spécifiques
pour les clientèles pendant un temps x puis pour certains services,
c'est fondamental, puis ça, c'est un pas énorme.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Vous avez émis… je ne
sais pas si c'est le terme, «inquiétude», là, mais certaines réserves par
rapport à la gestion, que cette caisse serait confiée à la RAMQ.
Est-ce que
vos inquiétudes viennent du fait que, pour la gestion de cette caisse, on
serait obligés d'embaucher des fonctionnaires supplémentaires? Parce
que, pour faire la gestion de l'argent, quand même, là, ça prend des personnes
pour le faire. Est-ce que vous aviez une inquiétude aussi à cet égard?
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin. M. Gagnon.
M. Gagnon
(Daniel) : Je ne sais pas si
on a une inquiétude. Je ne peux pas vous dire qu'on avait une inquiétude
par rapport à l'augmentation du nombre de fonctionnaires pour gérer cette
caisse-là, déjà qu'on trouve que la RAMQ a déjà pas mal un grand nombre de
fonctionnaires. Et on trouve aussi qu'il y a un grand nombre de budgets à gérer.
La réponse
n'est pas puis elle ne sera pas simple, puis je ne vous la donnerai sûrement
pas, parce que je ne la sais pas,
sauf que, quand on a vécu ce qu'on a vécu, entre autres, avec l'assurance
médicaments et les hausses faramineuses des budgets qui ont dû être
ajoutées au fil des ans — on
pourrait quasiment dire une certaine perte de contrôle — c'est
sûr qu'on peut être inquiets. Est-ce que
c'est la structure la meilleure pour gérer ça? Je ne pourrais pas vous le dire,
mais il va falloir songer réellement à trouver une solution adéquate.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Est-ce qu'il y a
actuellement assez de personnel, des préposés aux bénéficiaires, des
auxiliaires? Est-ce qu'il y a assez de
personnel pour être en mesure, quand on va réellement décider, là, qu'on prend
cet immense virage immédiatement pour
offrir des services et des soins de qualité à toute cette population… Bien que
le ministre ait mentionné qu'on commencerait par les personnes âgées la
première année, une année subséquente ce seraient les personnes en déficience
physique et, la troisième année, les personnes en déficience intellectuelle,
mais quand même en trois ans ça va rapidement pour l'implantation de ce
système, de ce virage, de ce service avec les évaluations, etc., là. Est-ce que
vous êtes assez nombreux?
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : Vas-y.
Le Président (M. Bergman) :
M. Gagnon.
• (15 h 50) •
M. Gagnon
(Daniel) : Ce n'est pas
toujours une question de nombre de personnel, c'est souvent une question
de gestion et d'organisation. Souvent, un
établissement va nous dire : On manque de personnel. On regarde son
budget; il a effectivement moins de personnel qu'un autre, mais par
contre il a un budget semblable ou supérieur. C'est dans cette distribution de
personnel qu'il peut y avoir des lacunes.
Ça va être la
même chose au niveau des services. Si les personnels qui sont embauchés pour
donner ces services-là ont une bonne formation et que la gestion est
adéquate, je crois qu'on peut effectivement faire face aux besoins de l'assurance autonomie. Ça va demander certains
réaménagements, certaines… Aussi, les mandats vont devoir être clairs,
on le disait, les mandats vont devoir être
clairs. Et je pense que, oui, on peut y arriver, puis surtout que, si on a une
formation adéquate de base donnée par le ministère de l'Éducation, je pense que
ça peut attirer beaucoup d'étudiants.
Il ne faut
pas oublier qu'on a énormément de décrocheurs, au Québec, et on a énormément de
besoins en services d'aide aux aînés.
Donc, ça adonne bien. Je pense
que, si on leur donne… Je vous le dis, les préposés qui font un cours, il
y a une grande
proportion des préposés qui étaient des décrocheurs, qui sont aujourd'hui… qui ont un cours de 750 heures de préposé aux bénéficiaires, qui sont utiles à la société,
qui sont fiers de travailler et puis qui remplissent très bien
la tâche qu'on leur a demandée.
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Gatineau, il vous reste trois minutes.
Mme Vallée : Alors, bonjour,
messieurs. Bienvenue devant cette commission.
J'ai une
petite question toute simple. Ma collègue parlait du personnel,
de la suffisance ou de la quantité adéquate de personnel sur le terrain
pour répondre aux besoins de la mise en place d'une assurance autonomie. Moi,
je me questionne sur non seulement la disponibilité du personnel sur le
terrain, mais sur l'ensemble du territoire. Je regarde l'assurance autonomie et je la vois dans le contexte des milieux ruraux
et des services offerts, par exemple, par vos membres en milieu rural.
Je sais que, chez moi, j'ai des auxiliaires, j'ai des préposés qui actuellement
travaillent auprès… vont offrir des services
à domicile et qui disent : Ça nous prend des pneus d'hiver plus chers sur
nos voitures, le kilométrage qui nous
est versé n'est pas suffisant. On n'a pas le temps… Les temps de déplacement
sont tellement importants d'un milieu à l'autre — j'ai
une circonscription de 15 500 kilomètres carrés — c'est
tellement grand qu'on se rend… on donne à peine
les services et on doit retourner, parce qu'on a un certain nombre de personnes
à rejoindre puis à aller voir dans notre journée.
Comment voyez-vous ce défi-là? Comment
voyez-vous notre capacité de relever ce défi-là, d'assurer à vos membres les ressources adéquates pour répondre aux
besoins? Et est-ce que vous croyez qu'ils seront en mesure, justement,
de répondre à ces besoins-là? Les services à domicile à Montréal, avec le métro
puis tout ça, c'est bien beau, mais en région ce n'est vraiment pas la même
chose.
Le Président (M. Bergman) :
M. Lemelin, dans une minute.
M. Lemelin
(Michel) : Effectivement, je viens d'un village dans le coin de L'Islet, et la réalité que vous
racontez est effective, c'est effectivement la réalité. Il y a beaucoup de
kilométrages à faire, et tout ça.
Mais ce qu'on constate, par contre, c'est que la
plupart des employés qui travaillent comme en entreprise d'économie sociale… Parce que c'est surtout les
entreprises d'économie sociale et les CLSC qui donnent des services en région. Et ces gens-là, malheureusement, se
retrouvent dans une précarité au niveau de l'emploi. Il y a des postes à
temps plein, eux ne s'en plaignent pas, mais
la plupart des gens sont mis à temps partiel, donc de là le roulement de
personnel, que les gens ne restent pas, décident de quitter le milieu pour
aller à un autre milieu.
Autre chose
aussi qu'on est en train de constater, puis le plus bel exemple, c'est le
centre de formation professionnelle de Montmagny :
beaucoup de jeunes gens qui viennent des villages aux alentours viennent
étudier comme préposés aux bénéficiaires, pas auxiliaires familiales mais
préposés aux bénéficiaires. Et les jeunes nous disent : On aimerait bien
rester dans notre région, on aimerait bien ça donner des soins et services aux
gens de notre région, mais malheureusement
il n'y a pas assez d'ouvrage, donc on doit quitter notre région pour s'en aller
en ville, les plus grandes villes, ce qui veut dire Montréal, Québec,
Lévis, Trois-Rivières, et etc.
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
M. Lemelin (Michel) : Donc, c'est
comme ça que les jeunes quittent, parce qu'ils disent : On n'a pas assez d'heures,
et bien souvent il n'y a pas d'ouvrage dans notre coin.
Le Président (M. Bergman) :
Ceci met fin au bloc de l'opposition officielle. Maintenant, pour le deuxième
groupe d'opposition, Mme la députée d'Arthabaska.
Mme Roy (Arthabaska) : Oui.
Venant aussi d'une circonscription rurale qui n'était pas loin de la vôtre,
anciennement Lotbinière, maintenant Arthabaska, je l'ai souvent dit, mais je n'avais
pas pensé à cet aspect-là, que, dans les milieux
ruraux, on gère des distances et non des populations. Donc, c'est vrai pour les pompiers, c'est vrai
pour les policiers, pour les ambulances, mais je n'avais pas pensé aux
préposés, au soutien à domicile, finalement.
Il me semble qu'il y aurait peut-être lieu d'y avoir un genre d'ajustement, compte tenu des distances qu'il y a
à faire. Puis c'est du temps qui n'est pas
auprès des personnes. Je pense qu'il y aurait peut-être… dans la solution ou
en tout cas l'application, y avoir peut-être
une variable pour la grandeur du territoire couvert, parce que ça ne doit pas
exister dans les ratios de personnes à l'heure actuelle, j'imagine, les
ratios de personnes... de bénéficiaires versus préposés.
Le Président (M. Bergman) :
M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) : Dans les deux
dernières questions, il y a des questions d'organisation puis il y a des
questions de conditions de travail. La question des conditions de travail, je
vais la laisser, parce que ça, c'est surtout les
syndicats qui s'occupent de ça, puis c'est avec les syndicats... Les syndicats
vont devoir participer aussi à ce plan-là, à cette assurance autonomie.
Mais,
pour ce qui est de l'organisation du travail, ça, ça relève de chacune des
régions, et effectivement on va devoir tenir
compte des particularités. Mais, pour ma part, j'ai déjà fait deux ans de
services à domicile, et puis il y a toujours moyen d'organiser les services, s'il y a une bonne coordination des
services. Autant dans l'organisation, si l'organisation est mauvaise, il peut y
avoir une perte de temps épouvantable, mais, si l'organisation est bonne, si la
gestion est bonne, on va avoir beaucoup plus de services qui vont se
donner, et en même temps ça va coûter beaucoup moins cher.
Donc,
oui, il y a une question de la distance, oui, il y a une question de
disponibilité de personnel, mais il y a une très grande question de
gestion et d'organisation du travail qui relève de chacun des territoires.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée d'Arthabaska.
Mme Roy (Arthabaska) :
Ça revient peut-être à dire ce que plusieurs groupes nous ont dit, qu'il y
avait une disparité dans l'application du
maintien à domicile ou de… de région en région. Vous ne nous l'avez pas dit,
mais là vous venez presque de nous le dire.
Le Président (M.
Bergman) : M. Lemelin.
M. Lemelin (Michel) : Effectivement, il y a une disparité. Je vous dirais que, quand on
discute avec des directions générales
de CLSC, on n'entend pas les mêmes échos d'une région à une autre, hein? Et,
comme M. Gagnon le spécifiait, il
y a bien de l'organisation qui est mal adaptée. À titre d'exemple… je ne
nommerai pas le CLSC en question, mais, au lieu des préposés, on envoie
des infirmières en quantité. Et on les coordonne mal, ce qui veut dire… elles
peuvent faire des 50, 60 kilomètres
pour atteindre une personne dans son territoire et avoir une perte de temps
totale. Comme la dame disait tantôt, à force de faire du millage,
d'arriver à la maison, le nombre d'heures-soins qu'il reste à donner est minime, donc à ce moment-là c'est extrêmement
rapide, et on quitte. On est déjà arrivé, puis on donne le soin, et on est
reparti.
Donc, à ce niveau-là,
oui, dans chaque région… et tout dépendant le territoire. Si on parle du
territoire du Lac-Saint-Jean, de l'Abitibi,
c'est des territoires immenses. Donc, les gens voyagent beaucoup, et bien
souvent les soins… Ils voyagent plus en voiture qu'ils donnent des
soins, en réalité, là. C'est la réalité.
Le Président (M.
Bergman) : M. Gagnon.
M. Gagnon (Daniel) :
Par ailleurs, on a des territoires de CLSC comparables en distance et en
composition, puis il y a des disparités pareil entre les deux. Ça, c'est une
question de priorités du territoire, du CLSC ou du CSS maintenant. Il y a des CLSC et des CSS qui mettent les priorités sur une
clientèle, un type de clientèle. Et, bien, c'est sûr qu'avec un budget qui est fermé il y a des choix à
faire, et souvent, je le disais tantôt, souvent, bien, il y a certains
services pour les aînés qui sont délaissés pour en donner plus pour d'autres
types de clientèle, parce que le budget n'est pas élastique. Ça fait que, ça,
il y a aussi une question de priorisation dans le territoire, soit par le CSS
ou le CLSC.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. M. Lemelin, M. Gagnon, merci pour votre présentation.
Merci de partager votre expertise avec nous.
Et
je demande aux gens de la Chaire Desjardins en soins infirmiers à la personne
âgée et à la famille de prendre place à la table.
Et je suspends pour
quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à
16 heures)
(Reprise à 16 h 1)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à la Chaire Desjardins en soins
infirmiers à la personne âgée et à la famille, on vous souhaite la bienvenue.
Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Pour les fins de
donner l'identification, s'il vous plaît, donnez-nous vos noms, vos titres. Et
le prochain 10 minutes, c'est à vous pour faire votre présentation.
Chaire Desjardins en soins infirmiers
à la personne âgée et à la famille
Mme Ducharme (Francine) : Oui, merci. Alors, merci à la commission d'avoir
accepté de nous entendre cet après-midi. Mon nom est Francine Ducharme.
Je suis la titulaire d'une chaire de recherche, la Chaire Desjardins en soins
infirmiers à la personne âgée. Je suis accompagnée de Diane Saulnier, qui est
la coordinatrice de la chaire.
Nous avons proposé un mémoire, écrit un mémoire
dont vous avez reçu copie, je crois, et qui est intitulé Soutenir les
proches aidants de personnes en perte d'autonomie... des avenues à considérer.
Et je devrais mentionner que c'est les
personnes âgées en perte d'autonomie, parce que c'est plus notre domaine de recherche que toutes les personnes
en perte d'autonomie. En fait, il y a cinq
membres de la chaire Desjardins qui ont participé à la rédaction de ce
mémoire, et nous avons évidemment un mémoire
qui est très ciblé, compte tenu de nos projets de recherche. On ne s'improvise
pas compétents dans tous les domaines. Nous,
c'est le domaine des proches aidants des personnes âgées, ça fait 13 ans
que je suis la titulaire de cette chaire, donc le mémoire est basé un peu sur
nos travaux de recherche qui ont été effectués au cours des dernières années.
Nous avons proposé six recommandations, dans ce
mémoire, qui sont très ciblées, comme je le disais tout à l'heure, et qui portent sur la problématique des
proches aidants des personnes âgées. Comme notre expertise n'est pas du tout le financement et… on n'a pas beaucoup élaboré dans le
domaine du financement de cette fameuse assurance autonomie ou caisse d'autonomie.
Dans un
premier temps, nous aimerions souligner que nous saluons l'initiative du
gouvernement et du ministre Hébert
présentée dans le livre blanc, soit celle de la création d'une assurance
autonomie. Alors, nous sommes favorables à cette création. Dans le contexte actuel, il me semble que c'est une
solution très intéressante. Le mémoire documente très bien le contexte actuel de l'accès aux soins et
aux services pour les personnes en perte d'autonomie, du vieillissement
de la population, des limites financières de l'État. Alors, pour l'avenir, il s'agit
d'une solution qui nous apparaît très intéressante, d'autant plus qu'il y aura
des enveloppes protégées pour la clientèle en perte d'autonomie.
Ce qui nous a
plu particulièrement, dans le mémoire, c'est les principes qui sont à la base
et sont sous-jacents à la création de
cette assurance. Le libre choix du milieu de vie, de la prestation de services
et des prestataires de services nous a particulièrement plu; l'accessibilité,
le partenariat, l'individualisation, des principes qui sont, à notre avis,
gagnants et garants de la qualité de vie pour les personnes en perte d'autonomie.
Quand on
parle d'individualisation, on parle, bien sûr, des personnes, mais on parle
aussi de leur environnement. On parle
du domicile, et bien sûr que le domicile est le premier choix, mais aussi on
parle de l'environnement humain et — vous me voyez peut-être
venir, mais… — des
proches aidants, qui sont l'environnement humain immédiat des personnes en
perte d'autonomie.
Dans le livre
blanc, on reconnaît très bien l'importance des proches aidants pour le maintien
à domicile et le soutien qui leur est
essentiel, on le dit noir sur blanc, mais la place qui leur est accordée nous
apparaît un peu timide. On sait que la couverture des services actuelle
couvre 15 %, à peu près, des besoins et que 85 % des soins et
services sont offerts par les membres des
familles. Alors, l'assurance autonomie veut combler en partie cette lacune dans
l'accessibilité des services — et c'est très bien — en offrant des services complémentaires. Nous croyons qu'il s'agit d'une opportunité,
la création d'une assurance autonomie, pour
aller un peu de l'avant, aller vers des services qui sont novateurs, vers la
création de nouveaux services assurables
pour les proches aidants en tant que clients du système de santé. Il nous
apparaît que c'est une réelle
opportunité pour aller plus loin que l'offre de services de répit, qui bien sûr
est le premier besoin des proches aidants, c'est le répit, et on le
mentionne dans le livre blanc, mais il y a plus que le répit, et il y a
probablement des formules innovantes qu'on pourrait aussi ajouter à la
couverture de services et qui pourraient être essentielles pour les proches
aidants et pour aussi retarder l'hébergement des personnes âgées en perte d'autonomie.
On reconnaît,
dans le livre blanc, la vulnérabilité des proches aidants, leurs problèmes de
santé, leurs problèmes de santé
physique et psychologique, et les conséquences de l'aide qu'offrent les
familles aux personnes âgées. Et évidemment prendre soin des proches
aidants nous semble une solution aussi pour retarder l'hébergement. Alors, la
création de l'assurance autonomie pourrait
être une opportunité pour assurer des services aux proches aidants. Et c'est
l'objet de notre première recommandation et de plusieurs de nos
recommandations qui sont dans ce mémoire.
Actuellement, les services sont offerts en
faible quantité, donc trop peu trop tard, et souvent ils ne sont pas ajustés
aux besoins des proches aidants. Et, dans ce contexte-là, nous voyons très
bien, dans le livre blanc, que les besoins des personnes en perte d'autonomie
seront très bien évalués par un gestionnaire de cas du CSSS, qui pourra compléter un plan de suivi et qui… par la suite,
la personne en perte d'autonomie pourra décider des services qu'elle
pourra se procurer. Nous adoptons à peu près
la même logique pour le proche aidant et croyons qu'on devrait parler plutôt de la dyade aidant-aidé, dans ce
livre blanc, et procéder aussi à l'évaluation des besoins des proches aidants
avec un outil, quel qu'il soit, qui conduira
inévitablement à élaborer un plan de soutien pour le proche aidant en tant que
personne clé du système de santé et lui prodiguer des soins et services
qui sont adaptés à ses propres besoins.
Bien sûr,
offrir de l'aide aux activités de la vie quotidienne, aux activités de la vie
domestique et du répit, c'est excellent,
mais je pense qu'on pourrait aller plus loin, dans le cadre de
cette assurance autonomie, et offrir des choses particulières pour les proches aidants, donc qui sont spécifiques à
leurs propres besoins, qui ne sont pas nécessairement les besoins de la
personne en perte d'autonomie au moment où on se parle. Je pense aux services
psychoéducatifs, il y a plusieurs recherches qui ont démontré des effets
très intéressants sur la qualité de vie, sur la détresse psychologique
des proches aidants, qui pourraient être
offerts dans les CSSS par les intervenants — évidemment, ça prend des intervenants professionnels
pour ça. Alors, je vois une belle opportunité ici, dans ce livre blanc, pour
aller au-delà.
Nous avons
aussi une recommandation, qui est la deuxième… Et peut-être
que c'est parce qu'on a mal
compris le livre blanc, mais, la question du
domicile, il est certain que les personnes âgées veulent mourir à domicile et
rester le plus longtemps possible,
mais vient un moment où peut-être que le domicile n'est plus l'endroit le plus
adéquat. Il va toujours rester des CHSLD et des ressources alternatives.
Et on le voit un petit peu moins apparaître dans le livre blanc, et je pense qu'il y a des familles qui vont, à un moment
donné, inévitablement être obligées d'aller vers l'hébergement, et il
faudra aussi les soutenir à ce moment-là. Et le domicile n'est peut-être pas la
solution pour tout le monde, il y aura encore… Même si on comprend le besoin du
maintien à domicile, il y aura d'autres ressources qu'il faudra aussi développer, et soutenir et les proches aidants et
les personnes en perte d'autonomie dans ces autres milieux, et assurer
la qualité, ce qui est bien important.
Donc, ce que
nous proposons, c'est une évaluation systématique des besoins des proches
aidants, un plan pour subvenir à leurs propres besoins, et nous allons
même à la création d'un dossier pour les proches aidants. Si on veut
reconnaître un statut officiel aux proches aidants, il faut qu'il soit reconnu
dans les CSSS aussi. Nous, on travaille beaucoup
avec les CSSS, et souvent ce que les intervenants nous disent, c'est que leur
temps accordé aux services aux proches aidants n'est pas comptabilisé
officiellement et d'avoir un dossier pour le proche aidant dans le système de santé serait vraiment un plus au Québec. Il y a
des pays où ça existe. Je pense qu'on pourrait aller de l'avant, et ça
offrirait une reconnaissance et aux proches
aidants et aux intervenants professionnels, qui font souvent des interventions
qui ne sont pas comptabilisées dans le système de santé.
C'est un peu nos points les plus
importants. Évidemment, on propose certains programmes, il y en a là-dedans,
il y en a d'autres, mais des programmes qui ont été évalués par le biais de la
recherche — parfait,
deux minutes, merci — et une condition pour implanter ces
programmes, évidemment, ce serait la formation. Et j'imagine que je
touche des recommandations d'autres groupes. À l'heure actuelle, c'est un peu
pathétique, la formation de nos intervenants. Que
ce soit le domicile, le CHSLD, je pense que, pour assurer des services de
qualité, il faut former les gens non seulement aux pertes d'autonomie,
mais aussi à l'approche auprès des familles. Et je pense que, là, il y a tout
un préalable à… Il faut mettre de l'énergie à la formation avant d'en arriver
vraiment à des services de grande qualité.
Enfin,
les coûts, on n'en a pas beaucoup parlé, mais on apprécie le fait que dans le
livre blanc on n'attribue pas les coûts uniquement au vieillissement de
la population mais à d'autres facteurs dans le système de santé. Notamment les médicaments, la technologie, les tests diagnostiques,
il y a beaucoup, beaucoup d'éléments dans le système de santé qui
occasionnent des coûts faramineux. Il faut regarder la perspective de l'assurance
autonomie dans une perspective peut-être plus large de coûts qui sont imputés
au système de santé.
Et enfin je termine
en disant que ça prendra une transition, bien sûr, à ce changement important au
sein du système de santé, le temps de recruter du personnel, de le former. Et d'ajouter
les proches aidants — je
reviens à ça — à notre assurance autonomie nous apparaît
vraiment garant d'avenir, parce qu'on va tous être un jour ou l'autre
des proches aidants ou des personnes qui
seront aidées, et je pense qu'il faut être proactifs dans ce domaine. Je vous
remercie.
• (16 h 10) •
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme, merci pour votre présentation. Maintenant,
pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : Mme Ducharme, Mme Saulnier. Je vais
faire un effort pour essayer de vous tutoyer, Mme Ducharme… de vous vouvoyer, parce qu'on a été collègues sur des équipes de recherche sur les proches
aidants, justement. Alors, je suis
très heureux que vous soyez là. Je suis particulièrement heureux que des
chercheurs prennent la peine de participer au débat social et je vous salue, parce que c'est important d'avoir ce
point de vue là lorsqu'on est appelé à mettre en place, à mettre en branle des politiques sociales. Alors,
bravo d'avoir pris le temps, dans votre horaire super chargé, de venir
nous rencontrer et surtout de produire un mémoire d'excellente qualité.
Je vais me cibler sur
les proches aidants, parce que c'est votre domaine d'expertise, puis je veux
être sûr d'aller chercher…
Mme Ducharme
(Francine) : On peut parler d'autre chose, mais on connaît moins…
M.
Hébert : Non, mais je vais le cibler là-dessus. Certains
groupes de proches aidants nous proposent qu'on puisse reconnaître le
statut et rémunérer même les proches aidants. J'aimerais ça vous entendre
là-dessus, sur… Et certains pays l'ont fait,
ont donné des allocations en espèces qui permettent de rémunérer les proches
aidants. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme.
Mme Ducharme
(Francine) : Je ne suis pas tellement d'accord avec la rémunération
des proches aidants. Je sais qu'il y a des
pays qui le font. Pour moi, ce n'est pas une question de rémunération, c'est
une question d'avoir un statut reconnu
dans la société et de pouvoir avoir des services pour soi-même, si je décide
d'être proche aidant. Mais la question de la rémunération, non, pour
moi, ce n'est pas une question qui m'apparaît importante, pas du tout, non.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous dites dans votre mémoire qu'il faudrait que
les proches aidants soient admissibles à l'assurance autonomie. J'aimerais ça que vous précisiez votre
pensée. Admissible en soi, même si la personne dont ils s'occupent n'est
pas admissible?
Mme Ducharme
(Francine) : Non.
M.
Hébert :
O.K. J'aimerais ça que vous précisiez.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme.
Mme Ducharme
(Francine) : Probablement qu'on n'est pas suffisamment clairs, peut-être.
Non, à partir du moment où il y a
une personne en perte d'autonomie qui est admissible comme client… En fait, les
critères d'admissibilité à
l'assurance autonomie, nous, on se dit que, bon, la personne en perte
d'autonomie est admissible. Pourquoi son aidant ne serait pas aussi admissible, et ce serait la dyade aidant-aidé qui
serait admissible à l'assurance autonomie pour avoir des services pour la personne âgée et pour avoir des
services pour le proche aidant qui sont aussi… que le proche aidant peut
aller chercher son prestataire de services
de la même façon, en fait, c'est la même logique que pour la personne en perte d'autonomie, mais pour le proche aidant? Donc, vraiment,
on regarde plus le système ou la dyade aidant-aidé que juste la
personne en perte d'autonomie.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Dans l'évaluation des besoins du proche aidant, bon, vous nous suggérez, là, d'ajouter
des outils, en fait, carrément,
pour évaluer les besoins des proches aidants. Est-ce que vous avez des suggestions
d'outils qui pourraient être intégrés à l'Outil d'évaluation
multiclientèle pour aller capter la réalité, les besoins des proches aidants?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme
Ducharme (Francine) : Oui,
on en propose dans le mémoire. Évidemment, c'est à partir de nos travaux, il y en a
d'autres probablement, là, mais je pense qu'il faut… Autant on a un outil
multiclientèle pour évaluer les besoins de
la personne en perte d'autonomie, pourquoi on n'aurait pas un outil
complémentaire, justement, pour évaluer les besoins de soutien des
proches aidants?
On en a
travaillé un avec une équipe de la Suède et de l'Angleterre qui s'appelle
l'ESPA, c'est l'Entente sur le soutien aux proches aidants. C'est un
outil intéressant mais qui n'est pas du tout du même acabit que l'OEMC, qui est un outil de partenariat qui va bien avec la
philosophie, beaucoup, du livre blanc, mais qui est un élément de
discussion où on identifie avec le proche
aidant ses propres priorités, qu'est-ce qu'il a besoin. Parfois, ce n'est pas
un bain trois fois par semaine qu'il a besoin. Parfois, c'est juste d'avoir
du counseling, ou une intervention psychoéducative, ou plus de répit la fin de semaine. Donc, l'outil permet de
discuter avec le proche aidant de ses propres besoins et d'élaborer un
plan de soutien, que le gestionnaire de cas du CSSS peut très bien faire avec
le proche aidant, et d'établir les services et les soins. C'en est un, il y en
a peut-être d'autres.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Vous parlez, dans votre mémoire,
de considérer le proche aidant comme un partenaire. Et j'en suis. Actuellement,
ils sont plus perçus comme des ressources, en fait, que comme un partenaire.
J'aimerais ça que vous nous disiez c'est quoi,
la conséquence. C'est quoi que ça veut dire? C'est quoi que ça implique, de
considérer le proche aidant comme un partenaire?
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : Oui. Bien,
merci pour votre question. C'est une très bonne question.
Évidemment,
on a considéré le proche aidant comme une ressource, c'est-à-dire une personne
qui nous permet de maintenir à tout
prix la personne âgée à domicile, sans considérer trop ses besoins.
Aujourd'hui, on parle d'un partenaire au sens où il y a plus une
relation égalitaire entre le prestataire de services, l'intervenant et le
proche aidant pour discuter ensemble,
évidemment, des besoins, des priorités et l'établissement des soins et
services. Présentement, c'est souvent l'intervenant professionnel — puis
on travaille avec des intervenants dans les CSSS — qui décide du plan d'intervention, c'est comme ça qu'on va faire ça,
puis le besoin, c'est celui-là, compte tenu de nos ressources. Dans une
optique de partenariat, il y a une décision commune.
Et parfois le proche aidant nous dit
clairement — on
l'a testé, on l'a implanté — que
les besoins qui ont été identifiés ne sont
pas les leurs. Alors, ce n'est pas ceux-là qu'ils auraient identifiés s'ils
avaient été consultés, si on avait établi
le plan d'action ensemble. C'est ça, le partenariat. Et on travaille ensemble
pour la continuité, le suivi de ce plan-là. Ça, c'est un élément du
partenariat, des décisions communes, et pas une hiérarchie professionnel-proche
aidant ou professionnel-personne en perte d'autonomie mais vraiment une action
commune.
Je ne sais pas si je réponds à votre question.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Mais je veux aller plus loin avec vous là-dessus. Lorsqu'il y a élaboration du
plan de services individualisés entre le gestionnaire de cas et l'aidé,
il faudrait avoir une triade, en fait, dans cette démarche pour impliquer aussi le proche aidant, si je vous ai
bien comprise. Est-ce qu'il faudrait formaliser ça, c'est-à-dire avoir une
espèce de contrat, de contrat social entre le gestionnaire de cas, le proche
aidant et l'aidé pour officialiser cette démarche-là?
Mme
Ducharme (Francine) :
Absolument. Je pense que la triade, oui, personne âgée en perte d'autonomie,
proche aidant et professionnel travaille ensemble. Évidemment, dans les cas de
troubles cognitifs, là, c'est le proche aidant qui est représentant, donc c'est
la dyade, mais, dans le cas où la personne âgée a toutes ses capacités
cognitives, je pense que c'est la triade. Il
faut l'officialiser, puis, plus encore, je pense qu'il faut former nos
intervenants à penser comme ça, parce
que présentement ce n'est pas le paradigme dominant. Le paradigme dominant,
c'est le professionnel qui décide des services selon ce qu'il y a à son
CSSS.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Saulnier.
• (16 h 20) •
Mme Saulnier (Diane) : En fait, c'est qu'actuellement, ce qu'on
observe, les intervenants ou les professionnels font de la prescription de services et non pas une discussion sur le
besoin du proche aidant, alors souvent parce
qu'ils n'ont pas soit d'outils ou ne sont pas formés à cette façon d'intervenir
auprès des aidants. Alors, on observe souvent des prescriptions de services qui ne répondent pas aux besoins. Donc, les
aidants vont mettre fin aux services parce que ça ne répond pas, ce
n'est pas à l'heure que j'ai de besoin, ce n'est pas le bon moment, vous n'en
donnez pas assez, ou effectivement,
moi, ce que j'ai besoin, par exemple, c'est de l'information sur : Est-ce
que je peux avoir des crédits d'impôt? Où
est-ce que je peux trouver un soutien financier? Je dois quitter mon emploi? Et
pourtant on va leur offrir peut-être un petit deux heures de plus cette
semaine pour faire du ménage ou un bain à la maison.
Alors, l'adéquation
entre le service et… l'offre et la demande n'est pas toujours adéquate, parce
qu'elle n'est souvent, à la base, pas bien
évaluée. Et c'est cet outil-là que, bon, nous, on a travaillé dans ce sens-là,
mais il pourrait, bon, y en avoir d'autres. Mais l'important, c'est
effectivement de faire l'évaluation du besoin de la personne en perte d'autonomie
mais également de son proche aidant.
Et
souvent le proche aidant ne mentionnera pas devant la personne qu'il soigne ou
qu'il aide ses propres besoins, parce
que souvent il y a un malaise, hein, souvent, dans les familles. Si j'aide ma
mère très âgée, bien elle peut être mal à l'aise de savoir que moi, j'ai un besoin de soutien émotif,
psychologique, j'ai un besoin un peu plus de répit. Donc, parfois, il y a des situations familiales aussi qui sont
difficiles à vivre, et ces situations-là ne sont pas toujours bien
circonscrites, alors ça donne lieu souvent à des prescriptions de services où
le CLSC envoie des intervenants, mais les personnes mettent fin, comme tel, au service qui leur est offert parce que
ça ne répond pas. Alors, c'est vraiment, à la base, là, un élément important qu'on
recommanderait, là, que ce soit formalisé.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Donc, l'outil dont vous nous parlez est plus un outil, je dirais, d'appui au processus
qu'un outil d'évaluation des besoins. Si je
compare à l'outil de Nancy Guberman, par
exemple — puis là on va avoir une discussion scientifique un peu plus, là, mais… — qui
est une évaluation des besoins avec un aide-mémoire pour s'assurer qu'on
n'a pas oublié aucun besoin des aidants naturels, c'est complémentaire, à mon
avis, ce n'est pas deux outils qui sont...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : C'est deux philosophies, deux philosophies.
L'outil de Nancy, oui, quand on a... J'ai déjà participé à un comité d'un
outil complémentaire à l'outil OEMC, il y a à peu près 10 ans, au ministère.
On recommandait l'outil de Mme Guberman parce que,
là, on l'avait, c'était ça qui existait, et tout ça. Puis tout le monde était d'accord, puis ça ne s'est
pas concrétisé, malheureusement. Ça fait longtemps qu'on parle d'outil complémentaire.
L'ESPA
est vraiment un outil... Il y en a, des besoins qui
sont identifiés, il y a quatre dimensions. On pourrait le définir, là, je pourrais en parler longtemps. Il y a quatre ou cinq dimensions qui
sont évaluées systématiquement, mais c'est évalué pas nécessairement
avec des grilles, avec des nombres d'heures, là, non, ce n'est pas ça, c'est :
Quel est le besoin prioritaire? Puis il y a des dimensions qui ressortent des
études, qu'on doit absolument évaluer, comme par exemple la qualité de vie du
proche aidant. Il y a une dimension, c'est la qualité de vie du proche
aidant. Une dimension, c'est comment m'aider à prendre soin de mon
proche qui est en perte d'autonomie. Donc, il y a quelques dimensions comme ça, et c'est lors d'une discussion où on
voit les failles, les faiblesses ou les limites du proche aidant, on
identifie ensemble, avec l'intervenant, ce qui ressort et on établit un plan de
soutien ensemble face aux dimensions qui ont été identifiées un peu plus difficiles pour le proche aidant. Mais c'est vraiment
le proche aidant qui décide, et ce n'est pas nécessairement un outil,
là, un, deux, trois, quatre, cinq, où on coche. Ça, c'est clair, ce n'est pas
un «checklist».
Le Président (M.
Bergman) : Mme Saulnier.
Mme Saulnier (Diane) : Si vous permettez, je compléterais juste en
disant que, dans cette approche-là, ce qui est fort intéressant, ce qu'on a observé aussi avec les familles,
c'est qu'on donne le pouvoir aux familles de déterminer ce qu'elles
peuvent faire elles-mêmes, ce qu'elles sont capables de trouver comme ressources
dans leur entourage, dans leur réseau, et en
même temps de déterminer avec l'intervenant professionnel ce qu'elles attendent
du service, justement, de l'État, qui pourrait compléter ou combler le
besoin pour lequel elle n'a pas actuellement le service dont elle a besoin.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : Oui. Une petite précision que j'ai oublié de
dire, puis elle est très importante, c'est qu'on pourrait utiliser une
échelle de fardeau, par exemple, hein, bon, mais l'outil dont on parle
présentement, c'est un outil qui devrait
être utilisé dès la première rencontre avec un proche aidant, qu'il soit en
phase avancée de son fardeau ou pas. C'est vraiment un outil proactif
qui permet de prévenir la détresse et prévenir la dépression.
Donc,
c'est sûr que, si on coche avec une échelle de fardeau, les résultats ne seront
pas les mêmes. C'est vraiment un
outil proactif et de processus, oui, c'est vrai, c'est un outil de processus
mais qui donne — on l'a
évalué — des
résultats fort intéressants. On a formé 95 gestionnaires de cas dans un
CSSS à cet outil, et on a des résultats très intéressants.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Des résultats en...
Mme Ducharme
(Francine) : Des résultats en termes, bon, d'utilisation, de
satisfaction. On a des résultats en termes
d'identification des besoins, et ça peut donner un outil, pour le CSSS, pour la
formalisation d'un nouveau service, parce que, si les besoins ressortent
les plus fréquents dans une région, on peut développer ce service-là. Donc, c'est
quand même un outil qui donne des indicateurs intéressants aux CSSS.
Le
problème qu'on a eu, après la formation de ces personnes, c'est que c'est
difficile de maintenir l'engouement des
troupes parce qu'il n'y a rien qui est reconnu, il n'y a pas d'endroit pour
colliger les résultats, il n'y a pas de dossier proches aidants, et les
gens qui le font le font à leur corps défendant, en disant : Bien, moi, j'y
crois, je le fais. Ceux qui n'y croient pas,
de toute façon, ce n'est pas comptabilisé à la régie ou n'importe où. Alors,
c'est ça, le problème. Si on avait un dossier proches aidants, tout ça
pourrait être inscrit, et il y aurait une reconnaissance pour les intervenants
et pour les proches aidants.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert :
Et ce que je trouve intéressant dans ce que vous dites, c'est la convergence
des principes, parce que l'assurance autonomie, c'est de redonner le
pouvoir à l'usager et à son proche aidant de pouvoir choisir le prestataire et
le mode de prestation. Alors, en ce sens-là, on est en convergence assez
étroite, là, oui.
Le Président (M. Bergman) : Madame…
Mme
Ducharme (Francine) :
Exactement. On était très contents des principes qu'il y avait dans le livre
blanc, on trouvait juste que ça n'allait pas assez loin au niveau du proche
aidant. Et, bien, ce qu'on propose est tout à fait... Notre philosophie, dans
nos projets, c'est vraiment une philosophie de recherche-action, de
partenariat, de pouvoir et d'«empowerment», et c'est ça.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Vous
parlez, dans votre mémoire, de services de répit plus flexibles. Alors, j'aimerais
ça, vous entendre là-dessus, sur qu'est-ce qui devrait être mis en place comme
services de répit plus flexibles.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : On sait
que le répit, c'est le premier besoin, on ne peut pas le cacher, mais présentement je dois vous avouer... parce qu'aussi
on fait de la recherche, mais on a des familles, hein, puis on vit les
mêmes expériences, mais le répit deux, trois heures de temps en temps, pas la
fin de semaine, pas le soir et pas la nuit, ça ne donne pas des résultats
extraordinaires. Alors, quand on parle de répit flexible, c'est selon les
besoins des proches aidants, pas selon les
besoins des intervenants, nécessairement. Donc, réserver deux semaines pour
aller acheter sa pinte de lait… Là,
j'exagère, mais il y a vraiment un répit qui est assez encadré et difficile.
Donc, moi, je préconise du répit à la semaine,
le soir, les fins de semaine, la nuit et un répit un peu plus structuré, avec
une forme d'accompagnement. Puis je pense au modèle de Baluchon
Alzheimer, qui fonctionne très bien et qui pourrait être adapté à d'autres
clientèles. Présentement, c'est pour les personnes atteintes de démence ou de
maladies apparentées, mais c'est un modèle qui fonctionne très bien. Moi, je pense qu'on pourrait l'utiliser pour
d'autres problèmes d'autonomie, de perte d'autonomie.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Je vais
laisser mes collègues poser...
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard
(Îles-de-la-Madeleine) : Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais justement vous entendre
définir qu'est-ce que c'est, le modèle du Baluchon Alzheimer qui pourrait être
inscrit pour d'autres...
Le Président (M. Bergman) : Mme
Ducharme.
Mme
Ducharme (Francine) : Le
modèle de Baluchon Alzheimer, c'est que ça combine le répit de longue
durée... Donc, ce n'est pas un répit de deux
à trois heures seulement, ça peut être de quatre jours à deux semaines. C'est
un répit de longue durée pour donner
à l'aidant la chance d'avoir des vacances, du temps de repos un peu plus que
trois, quatre heures à la fois. Mais
pas seulement ça. Ça, c'est une chose. L'autre chose, c'est que les personnes
qui vont à domicile offrir le répit
offrent aussi une forme d'accompagnement au proche aidant en lui remettant, par
exemple, un journal d'accompagnement suite à leur visite pour dire qu'est-ce
qui s'est passé pendant son absence et comment on peut transiger avec les comportements, par exemple, de la personne. Dans
le cas de la maladie d'Alzheimer, il y a souvent des comportements
difficiles avec lesquels la personne qui va garder, entre parenthèses, doit
transiger; elle enseigne au proche aidant des stratégies qui pourraient
peut-être l'aider à mieux transiger avec ces comportements-là. Ça, c'est un
exemple. Il y a un journal de… Il y a un accompagnement qui est fait avec l'aidant
et non seulement un service de gardiennage.
On peut aller
offrir du répit, et parfois le répit aussi, la flexibilité, c'est qu'on
envoie toutes sortes de personnes différentes,
et ce n'est pas nécessairement l'idéal. Un proche aidant veut avoir confiance
en la personne qui vient, donc le même
intervenant, qui est compétent et qui peut aussi nous aider à accompagner notre
personne en perte d'autonomie.
Donc, c'est
plus que juste des petites heures de répit. On en donne, on en donne beaucoup
puis on commence à en donner de plus en plus, mais c'est, à mon avis, nettement insuffisant pour avoir un effet sur la qualité de vie des proches aidants.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.
Mme
Richard
(Îles-de-la-Madeleine) : Oui, merci. Et justement j'aimerais revenir sur les services qui
pourraient être intégrés dans l'assurance
autonomie pour les proches aidants. Vous avez parlé de services
psychoéducatifs, formation, information. Est-ce qu'il y a d'autres types
de services qui pourraient être intégrés, concrètement?
Mme
Ducharme (Francine) : Bien,
je pense qu'on a été assez... on a suivi la même logique que la logique
pour les personnes en perte d'autonomie dans
notre mémoire. On s'est dit : D'abord, une évaluation. Ça, ça devrait être compris dans l'assurance, on évalue nos proches aidants. En
deuxième, on ouvre un dossier comme
il y en a pour la personne en perte d'autonomie.
En troisième, on offre des services, du répit, bien sûr, du répit plus flexible
et plus… avec accompagnement mais
aussi d'autre chose, parce que, les proches aidants, on dit dans les
statistiques qu'il y a 40 % à 72 % des proches aidants qui ont de la détresse psychologique, puis
il y en a presque 40 % qui ont de la vraie dépression, donc ils ont
besoin d'un accompagnement soit de nature counseling ou psychoéducatif. Ça veut
dire du soutien, bien sûr, mais aussi des modalités d'apprentissage pour être
mieux, pour vivre mieux leur vie d'aidant.
Donc, il y a des programmes qui existent,
individuels, de groupe, sur le Web, avec la technologie, il y a des programmes
qu'on a même faits avec le Dr Hébert qui fonctionnent bien, qui ont eu des
résultats sur la détresse et qui ne sont pas
utilisés présentement, faute soit de ressources mais beaucoup
de formation. Et il n'y a pas d'endroit pour colliger ça, donc on le fait si on est intéressé. Nous, on donne beaucoup
de formation parce qu'on a ces programmes-là, Mme Saulnier organise
des formations. Aujourd'hui, il y en a deux jours, de formation sur un
programme. Mais, quand ils vont retourner,
ces gens-là, dans leurs CSSS, est-ce qu'ils vont pouvoir le faire? Alors, on
aimerait ça que ça soit assuré, ces choses-là. Autant qu'il y a des
bains qui sont assurés, là, il pourrait peut-être y avoir des choses qui sont
un peu plus à nature psychosociale offertes aux proches aidants.
Je ne sais pas si je réponds à votre question.
• (16 h 30) •
Le Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Oui. Alors, bonjour, mesdames. Très heureuse de
vous entendre, je trouve que vous avez
une approche intéressante. Pour avoir passé par une situation avec ma
mère, je peux vous dire qu'il faut
organiser tout un réseau autour de nous, puis un réseau qui offre différentes
alternatives, hein, parce que c'est… Puis, quand vous en parlez, vous parlez d'une
approche globale avec l'aidant puis la personne, alors je trouve ça très intéressant.
Alors, c'est
sûr qu'on a un grand défi, hein, qui est à nos portes avec le projet d'assurance autonomie. Puis on souhaite prioriser les soins à domicile, parce
qu'on sait que les gens souhaitent… En tout cas, moi, dans le cas de ma
mère, ça a été : Ne m'envoie pas dans
une institution, s'il te plaît. Alors, je lui avais répondu : Je vais
faire tout ce que je peux jusqu'à la dernière minute. Alors, on a un
défi important dans les années qui s'en viennent et qui est à nos portes maintenant. Alors, c'est sûr que le vieillissement
de la population est important. Et ce que je voudrais savoir de
vous : Ce qu'on propose, est-ce que
c'est une alternative intéressante? Puis le statu quo, actuellement, si on
adoptait ça, puis on faisait juste injecter de l'argent supplémentaire,
puis qu'on ne changerait pas nos méthodes, nos façons de faire, est-ce que vous
pensez que c'est une solution? J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : Bien, on
est d'accord avec cette proposition-là certainement. Je pense que, le statu
quo, on ne peut plus rester là, non. Dans le contexte actuel, c'est impensable.
Avec tout ce qui se produit puis les finances publiques, le vieillissement,
non.
Je pense que
ça, c'est une solution intéressante. Maintenant, on peut la bonifier, on peut
l'améliorer. Moi, je trouve, c'est
excellent. Qui va payer, comment ça va se faire, ça, c'est une autre question,
mais je pense qu'on ne peut pas rester au statu quo. Toute la
coordination des services, l'innovation dans les services, la façon dont les
services fonctionnent actuellement, il y a pas mal de sable dans l'engrenage,
et moi, je pense qu'il faut faire différemment. Et ça, c'est une proposition
qui nous apparaît intéressante.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin :
Merci. Vous nous avez parlé aussi tantôt, d'entrée de jeu, qu'il y aurait
encore, toujours des besoins pour des soins
en CHSLD. Ça, dans la meilleure situation, on voudrait garder les gens le plus
possible à la maison, les gens le
souhaitent, mais il arrive aussi qu'il se produise des situations où c'est
impossible. Alors, comment voyez-vous aussi ces alternatives-là?
Le Président (M. Bergman) :
Il reste du temps pour une très courte réponse.
Mme
Ducharme (Francine) : Courte
réponse, courte réponse. Il y a 80 % de la clientèle en centre d'hébergement
qui est atteinte de troubles cognitifs. Alors, c'est ça qui est difficile
présentement, en tout cas dans mon domaine, les personnes âgées, qui est
difficile pour les familles. 24 heures par jour, sept jours par semaine,
je ne pense pas, même si l'assurance
autonomie fonctionne très bien, qu'on va être capable de couvrir tous ces
services-là avec les régions, puis tout ça. Il va falloir toujours qu'il
y ait un certain pourcentage — et le moins possible, on le
souhaite — qui
vont être en centre
d'hébergement, et là il va falloir offrir aussi des services de qualité, parce
qu'on entend beaucoup parler des centres d'hébergement, il y a du
travail à faire là. Il ne faut pas négliger les ressources intermédiaires, qui
sont moins coûteuses un peu que le centre
d'hébergement, on sait que c'est plus coûteux, mais il y aura toujours des gens
en grande, grande perte d'autonomie,
qui sont très, très lourdes, et que les proches aidants ne pourront plus
continuer. Mais c'est vraiment la… Ça reste un pourcentage minime, puis
on le souhaite…
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Ducharme (Francine) : …mais il
faut le considérer.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Maintenant, pour le bloc de l'opposition officielle, Mme la
députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Merci beaucoup, M. le
Président. Mme Saulnier, Mme Ducharme, heureuse de vous revoir. On
a discuté ensemble à quelques reprises. Vous
le savez, c'est un sujet qui me touche particulièrement, et je considère
que, quel que soit le gouvernement en place,
nous avons une responsabilité — et elle est collective aussi — de mettre en place des services pour
les proches aidants. Je me souviens, j'étais présidente du Conseil de la
famille et de l'enfance en 2003, il y avait
un avis qu'on a sorti, le premier avis, c'était Vieillissement et santé
fragile : un choc pour les familles?, et nous parlions à
l'époque d'aidants naturels et on parlait jusqu'où les services et les soins de
l'aidant vont et là où commencent les soins
et les services du professionnel de la santé. Donc, c'est relativement récent.
Et il manque beaucoup, beaucoup, beaucoup encore, je crois, de services
de répit et de considérer le proche aidant non pas comme étant une personne malade mais comme une personne en santé
qu'on ne veut pas voir devenir malade. Et ça, c'est très différent dans
la perception.
Je tiens à vous remercier pour votre mémoire, c'est
une importante contribution pour l'assurance autonomie, parce que l'assurance autonomie, ce n'est pas que pour les personnes qui
vieillissent, là, ça commence à 18 ans. Quand on parle de proches aidants, on oublie bien souvent qu'il y a des parents
avec de jeunes enfants, même si ça ne touche pas l'assurance autonomie, qui ont des efforts incroyables à faire en tant
que proches aidants pour s'occuper de leur enfant lourdement en
situation de handicap.
Vous avez
parlé de Baluchon Alzheimer, puis j'étais très contente. Quand nous avons, le
ministre et moi, terminé la consultation publique sur les conditions de
vie des aînés, le premier organisme que nous avons financé, c'était Baluchon Alzheimer, parce que Baluchon était
arrivé en consultation en pleurant. Ça coûtait trop cher, ça coûtait
100 $ par jour pour obtenir une
baluchonneuse, quelqu'un qui se déplace à domicile, et ce n'était pas la
majorité des gens qui pouvaient se
payer des services à 100 $ par jour. Et, avec le ministère de la Santé et
des Services sociaux — à l'époque, c'était
Philippe Couillard — on a mis
en place un service de 15 $ par jour. Mais ça coûte quand même… Je ne sais
pas où c'est rendu au ministère de la Santé, mais ça dépasse le… c'est entre un
demi-million et 800 000 $ maintenant pour Baluchon Alzheimer. Ça fait
que c'est quand même des coûts, mais c'est extraordinaire comme service.
Et il y a
aussi Chloé Sainte-Marie qui a eu une idée que j'aime beaucoup, ce sont les
maisons des proches aidants, où dans une petite maison — il y
en a une à Brome-Missisquoi — c'est la dyade, c'est-à-dire la personne
en perte d'autonomie et le proche aidant,
qui visite sa personne là où elle reçoit aussi, dans un groupe d'entraide, de
la formation, elle peut partager avec d'autres proches aidants pour
briser cette détresse.
Donc, est-ce que ça fait partie des voies
alternatives pour soutenir les proches aidants?
Le Président (M. Bergman) :
Madame…
Mme
Blais : Vous avez
parlé d'initiatives, ça prend des initiatives. Vous en avez certainement d'autres,
Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : Oui. On ne
les a pas toutes nommées, mais on pense qu'il faut profiter de la création de l'assurance autonomie pour être
innovant. Je pense que c'est une belle opportunité. C'est un nouveau
projet, un projet de société. Il ne faut pas manquer le bateau puis parler
seulement de la personne en perte d'autonomie, il faut parler du proche aidant.
Il y a beaucoup d'initiatives, on ne les a pas
toutes nommées. Ce sur quoi on s'est penchés, c'est surtout nos résultats de
recherche, parce qu'on est une chaire de recherche. Donc, on n'a pas fait de
recherche sur les maisons dont vous parlez,
sûrement une initiative intéressante. On a tenté de limiter notre mémoire aux
résultats probants qu'on avait obtenus. Et pourquoi on ne les
utiliserait pas, ces résultats-là, au Québec, pour tenter des innovations?
Maintenant,
il y a plus que ce qu'on peut dire là-dedans. Il y a beaucoup d'autres
possibilités pour les proches aidants,
et je pense qu'il faut toutes les considérer. Mais notre mémoire est limité à
nos travaux, bien sûr, vu que c'est les personnes de la chaire qui l'ont
rédigé.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Mme Ducharme, vous avez parlé d'outils d'évaluation du proche aidant, le
ministre en a parlé aussi abondamment. Je sais que ça se fait dans
certains organismes de proches aidants actuellement, entre autres Société Alzheimer de Montréal, où il y a un outil
d'évaluation pour permettre aux proches aidants… Donc, pour vous, il
faudrait que ce soit
généralisé, qu'on fasse en sorte que tous les proches aidants aient un outil
d'évaluation pour justement faire en sorte de garder la personne en
santé le plus longtemps possible.
Mme Ducharme
(Francine) : Absolument. Je pense que…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme Ducharme
(Francine) : Oui, je m'excuse. Je pense qu'il y a des belles
initiatives faites dans plusieurs organismes,
là. Ça, je ne veux pas négliger que ça peut être fait, l'évaluation, il y a des
endroits qui le font. Ce que je dis, c'est
qu'il faudrait systématiser la chose pour que tous les proches aidants aient
droit… Tout comme la personne en perte d'autonomie a droit à une
évaluation, tous les proches aidants d'une personne en perte d'autonomie
devraient avoir droit à son évaluation. Et pourquoi pas avoir le même outil
pour pouvoir comparer nos éléments? Et pourquoi ça ne serait pas un outil de
partenariat?
Alors,
c'est un peu ce qu'on défend, mais je ne dis pas qu'il y a… Il y a certainement
des endroits où ils ont des initiatives
très intéressantes. On ne le sait pas. Ce n'est pas comptabilisé non plus, puis
il n'y a pas de dossier. Alors, c'est au bon vouloir souvent des
intervenants, pour le moment, et moi… Ce qu'on pense, c'est qu'il faudrait le
systématiser davantage.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
• (16 h 40) •
Mme
Blais :
J'étais heureuse de vous entendre dire que vous ne croyez pas qu'une rémunération
aux proches aidants, c'est la voie à
privilégier. Durant la consultation publique sur les conditions de vie des aînés, on
a beaucoup entendu parler de ça, c'est comme s'il y avait deux écoles de pensée : rémunérer
le proche aidant et plutôt soutenir les organismes qui offrent du répit aux proches aidants. J'étais
heureuse de vous entendre parce que nous avons beaucoup de pression parfois et on ne pourrait jamais faire en sorte,
là... C'est beau, le projet de société de l'assurance autonomie, mais, si
demain matin on commence à rémunérer tout le
monde, on n'y arrivera pas, là. Alors, il faut privilégier le financement aux
groupes.
Écoutez, je ne sais
pas où c'est rendu, mais on a mis en place les appuis aux proches aidants avec
un budget de 200 millions de dollars.
Je pense que l'instauration, ça a été peut-être un peu lent, parce qu'il faut
que ça vienne du terrain puis que ça s'organise dans chacune des
régions.
Vous,
en tant que chercheurs et proches des proches aidants, est-ce que vous avez la
chance de voir l'évolution de ces appuis aux proches aidants et du travail
que ça fait sur le terrain? Et est-ce que ça profite aux proches aidants?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : Oui. Bien, c'est une excellente question. Moi,
j'ai beaucoup travaillé avec l'appui pour les proches aidants, je pense
que c'est une belle initiative. C'est vrai que ça prend du temps à s'installer,
mais je pense qu'il faut donner la chance au coureur. Là, ils essaient d'avoir
des appuis régionaux, des appuis dans toutes les régions du Québec.
Évidemment, ce n'est
pas la même chose que ce qu'on propose ici. Ici, là, c'est vraiment pour les
CSSS, les intervenants pivots, les proches
aidants d'une personne en perte d'autonomie. Les appuis sont beaucoup centrés
sur les groupes communautaires,
donner dans chaque région des ressources, mais il n'y a pas de professionnels
beaucoup dans ces groupes communautaires, et, tous nos programmes dont
on parle, c'est des professionnels qui doivent les apprendre, être formés pour
faire ça. Donc, je pense qu'il y a une complémentarité à avoir entre les appuis
et le réseau de la santé.
Moi,
je travaille pour les deux, et puis je ne vois pas beaucoup de liens, et je
pense que ça, c'est la prochaine chose qu'il
faut développer. Les proches... Les appuis vont prendre leur erre d'aller,
j'imagine, et vont se développer, puis le réseau de la santé va aussi avoir une participation au niveau de
l'autonomie des proches aidants, mais je pense qu'il faut que ça soit
lié un peu plus. Et peut-être que c'est le défi qu'on a pour les prochaines
années.
Je
mettais dans le mémoire : Le plan Alzheimer pourrait être une opportunité
pour faire un lien entre le réseau de la santé, les CSSS et les appuis, mais ça, ça reste à développer, puis
c'est un peu normal. Ça s'est développé un peu à côté, en... mais là je
pense qu'il faudrait mettre... Si on parle de système intégré, il faut aussi
que ça, ça soit intégré.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais :
Vous avez dit quelque chose d'important : Ça prend un peu de temps pour
que ça s'installe un peu partout quand ça vient de la base, quand ça
vient des régions et des gens qui y oeuvrent. Mais ça peut être aussi… ça donne
l'occasion aussi, pour les gens, de s'approprier un projet d'un point de vue
régional. Et, éventuellement, probablement
qu'avec les agences de santé dans toutes les régions du Québec ça pourra
devenir beaucoup plus complémentaire, prendre un envol vraiment pour que
ça se réalise avec un plein potentiel.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Ducharme.
Mme Ducharme (Francine) : Vous avez raison. Quand on procède par la base,
ça prend toujours un petit peu plus de temps pour que les gens s'approprient
le concept, la philosophie, etc., puis je pense que c'est pour ça que je dis : Il faut donner une chance, ça ne fait
pas longtemps, les appuis, le temps de s'installer. Et puis, quand on part de
la base, c'est plus long, mais peut-être
qu'après le résultat est mieux. En tout cas, dans des projets de recherche,
quand on part de la base, c'est toujours plus long, mais on finit par
avoir des résultats. Alors, on peut avoir confiance.
Mais,
comme je disais tout à l'heure, moi, je pense que c'est l'intégration de tout
ça. Il y a des choses qui se font ici et là, et il y a des liens à
établir, je pense.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Saulnier.
Mme Saulnier (Diane) : Oui. Bien, en
fait, on observe, là, sur le terrain, quand on donne de la formation aux programmes pour lesquels... les programmes
psychoéducatifs, là, pour les aidants, les intervenants qui viennent dans
ces groupes de formation déjà essaient de
trouver des façons ou des modalités entre les groupes communautaires, parce
que parfois on a des gens des groupes communautaires et parfois des gens du
réseau de la santé, et ils tentent d'identifier, justement, des façons d'intégrer les modalités d'implantation de ces
programmes-là. Alors, qui va faire quoi? Quel rôle on va se donner, quels contacts, quelle démarche?
Donc, il y a ces discussions entre eux lors des formations que l'on
donne, et ce qui facilite beaucoup l'implantation après dans les milieux.
Donc, il
y a des initiatives locales en ce
moment qui se font, mais c'est sûr que ce n'est pas systématique. C'est toujours
basé sur la bonne volonté des gens.
Le Président (M. Bergman) : M.
le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Je voudrais explorer un sujet que vous avez apporté.
Vous avez dit que, même si on fait beaucoup
de soins à domicile très intenses, on va toujours avoir besoin de lits
de CHSLD. J'aimerais ça juste que vous nous expliquiez ça, parce que,
lorsque les gens ont commencé à parler de soutien à domicile, il y a comme eu une idée, à un moment donné, qu'on
n'aurait plus besoin de CHSLD puis on n'aurait plus besoin de ressources
intermédiaires, puis, je pense, c'est important de démystifier ce concept. Et
puis, compte tenu que vous êtes du monde de la recherche et universitaire, bien
je pense que vous êtes en mesure de bien nous l'expliquer.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme
Ducharme (Francine) : Je ne
sais pas si je peux l'expliquer, mais je
pense qu'on aura toujours
un certain pourcentage de la population qui n'aura pas de famille ou que
la famille va être complètement épuisée, on ne pourra pas continuer. Puis je donnais l'exemple de la démence. Quand je
regarde… Moi, je suis à l'institut de gériatrie de Montréal. Bien, il
y a 80 % de la clientèle qui a des troubles cognitifs, et il y en a
90 % qui ont des troubles de comportement avec lesquels les aidants n'étaient plus capables de
transiger. Alors, il ne faut pas non plus… Bravo pour le maintien à
domicile. Moi, je ne veux pas y aller, en
CHSLD. Mais, si je deviens comme ça, peut-être que je ne voudrai pas épuiser
complètement mon proche aidant, et, à un
moment donné, il y a une décision qui est très difficile à prendre mais qui
doit être celle-là. Mais ce n'est pas la majorité de la population,
hein, on parle d'un petit pourcentage. Puis peut-être qu'il y en a trop aujourd'hui,
mais il en restera toujours, pour moi.
Puis il y a
peut-être les ressources intermédiaires qu'il faut développer davantage, parce
que c'est lourd, le CHSLD. Peut-être
qu'entre les deux… On en a développé, des ressources intermédiaires, mais
est-ce qu'on en a suffisamment? Puis est-ce qu'on a bien évalué leur
portée sur la qualité de vie ou…
Mais, je pense, si on veut être réaliste, là,
écoutez, 24 heures par jour, sept jours par semaine sans arrêt, un soutien à domicile avec des intervenants, même si
on s'achète nos services, c'est impossible. Et on aura des intervenants
qui vont venir de partout, puis peut-être
que les proches aidants ne voudront pas ça, parce que ce n'est pas ça qu'on
veut pour la qualité des soins à
domicile. Donc, il faut juste être réaliste. Moi, je crois beaucoup à ça, puis,
le domicile, bravo, mais il faut juste
penser qu'il va toujours y en avoir un petit pourcentage. Puis il va falloir
aussi mettre des sous dans le réseau pour une belle qualité de soins en
CHSLD.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'ailleurs,
l'histoire, au Québec, ça a été ça. C'est qu'il y avait peu de
ressources intermédiaires — il
n'y en avait même pas — on
avait peu de soutien à domicile, ça fait que, dès qu'on était un peu en perte d'autonomie, on rentrait dans un CHSLD. Ce
qui fait qu'il y a eu une époque où on avait peut-être même quatre lits
de CHSLD par 100 personnes de 65 ans et plus, puis on n'avait pas
beaucoup de personnes de 65 ans et
plus. Et puis progressivement on a développé des soutiens à domicile, ça fait
qu'on a pu descendre le ratio. Puis, quand est arrivé les ressources
intermédiaires, c'est à peu près un tiers qui pouvait être considéré CHSLD qui
pouvait aller dans les ressources intermédiaires.
Là, je pense que le défi, c'est de savoir
comment ajuster nos ressources. Et puis actuellement on est à peu près entre 2,8 et trois lits par
100 personnes de 65 ans et plus. J'ai vu des endroits qui
fonctionnaient très, très bien dans les soutiens à domicile; eux autres,
ils ont réussi à descendre à 2,5 par 100 personnes de 65 ans et plus.
La question qu'il faut se poser : Est-ce qu'on est capables de descendre
en bas de ça?
Et, à partir
du moment qu'on sait qu'on a atteint un plancher, ça veut dire que, pour le
nombre de personnes qu'il y a, dans la population, de 65 ans et
plus, il faut développer les ressources de CHSLD. Ce que l'on sait, puis je
pense que M. le ministre a dû être informé de ça par son équipe, c'est que
probablement que, si on améliore la situation du maintien à domicile,
ressources intermédiaires, si on est capables de passer de 2,8, trois, à 2,5,
ça, ça veut dire que, la croissance de
population de personnes âgées au cours des neuf ou 10 prochaines années,
on va avoir assez de places de CHSLD. Et après peut-être qu'on va être
capables de… être obligés d'en développer.
L'autre
élément, comme on disait avec le groupe précédent, c'est que les gens
vieillissent, mais ils vieillissent plus encore dans la
catégorie 85 et plus. Puis une des notions, puis j'aimerais ça peut-être
que vous me renseigniez là-dessus… Moi, je
parlais avec Dre Marie-Jeanne Kergoat, qui est à l'institut, puis on se
posait la question à un moment donné :
C'est à partir de quand qu'on est une personne qui a plus de perte d'autonomie?
On a tendance à prendre le critère de 65 ans, parce que c'est l'âge
de la retraite au Canada, mais, la réalité, on serait peut-être mieux de faire
nos critères en fonction du 75 ans, en
sachant qu'entre 65 et 75 il y en a, entre 55 et 65 il y en a, mais que la
grande majorité apparaissent après 75 ans.
Là, je me
posais la question. 70? 75? Quelle est votre opinion là-dessus? Parce que ça
devient important parce que peut-être qu'on va devoir revoir nos ratios
non plus en fonction des 65 ans et plus mais peut-être en fonction des
75 ans et plus.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
• (16 h 50) •
Mme Ducharme (Francine) : Oui. Je
pense que vous avez raison pour le 65 ans. On est jeunes à 65 ans,
là. Les pertes d'autonomie sont beaucoup plus grandes… Si on regarde les
statistiques, c'est beaucoup plus tard que 65 ans. Dans les centres d'hébergement,
là, c'est des gens de 85 ans, là, qui sont là, ce n'est même pas 70 puis
75.
Alors, je
pense que, oui, on a allongé la vie. On a plus de maladies chroniques, il faut
avoir un modèle de maladie chronique,
c'est sûr, là, moins le modèle des maladies aiguës, mais je pense que c'est
évident que le critère de 65 ans, à mon avis, ne correspond plus à la réalité, là, d'aujourd'hui. Et les gens en
grande perte d'autonomie, grande perte d'autonomie, c'est 80, 85. 75,
vous avez raison, mais c'est encore jeune.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
Une voix : …
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
il vous reste trois minutes.
Mme
Blais : Oui.
Peut-être seulement souligner qu'il y a quand même, dans les centres d'hébergement,
des personnes de 65 ans et moins qui se sentent parfois très mal à l'aise
avec des personnes beaucoup plus âgées, parce que
la stimulation intellectuelle n'est pas la même, et c'est la raison pour
laquelle nous allons examiner les conditions de vie des adultes hébergés
en CHSLD. Il me semble que c'est très important de commencer à les voir
peut-être autrement et à leur faire une place autrement dans nos centres d'hébergement.
Ce que je
retiens de votre passage aujourd'hui, Mme Saulnier et Mme Ducharme,
c'est que les proches aidants doivent
devenir des partenaires à part entière dans tout ce projet de l'assurance
autonomie. Il n'y a pas de doute, on ne peut pas faire d'assurance
autonomie si les proches aidants ne font pas partie de ce projet, qui est un
projet pas seulement de société, je pense, c'est un projet de vie, c'est un
virage, et ça, je le retiens et je considère que votre participation aujourd'hui,
votre contribution est importante en ce sens.
En terminant,
vous dites à la page 15 : «Il est recommandé que des avenues de solution
au contrôle des coûts en santé soient étudiées afin d'être
complémentaires à la création d'une assurance autonomie.» Vous dites que vous n'avez pas, là, de… financièrement, ce n'est pas
votre domaine, ce n'est pas votre dada, mais vous avez quand même écrit ces deux lignes pour dire que vous savez qu'il y a
des coûts qui sont attachés à ça, que ça ne se fait pas par l'opération
du Saint-Esprit.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Saulnier. Dans une minute, s'il vous plaît.
Mme
Saulnier (Diane) : Oui.
Alors, lorsqu'on a écrit le mémoire, on a fait une petite recherche de
littérature, et partout ce qu'on a vu, parmi plusieurs auteurs, c'est
effectivement que, le coût en santé, les coûts qui augmentent énormément sont beaucoup liés à l'augmentation des
coûts des médicaments. Et, là-dessus, bien peut-être que… il y a
peut-être à revoir la Politique du médicament. Je sais qu'il y a des projets en
cours en ce moment sur ça.
Les coûts d'augmentation des technologies en
santé, l'informatisation des dossiers, toutes les nouvelles machines, c'est
bien beau, là, ça coûte cher; et les coûts qu'on a pu voir aussi d'organisation
des services, parce qu'actuellement, en CHSLD, oui, les autres modèles sont
souvent axés sur l'organisation comme si c'était, autrefois, les soins aigus. C'est un gros plateau souvent
technique, là, pour… mais c'est une clientèle qui demande beaucoup de soins aussi. Mais peut-être que, comme disait Mme
Ducharme, le modèle d'organisation des services basé sur le modèle de soins chroniques, comme le Commissaire à la santé,
des services sociaux avait recommandé dans son rapport, serait peut-être
un modèle qui serait mieux adapté dans
l'organisation des services et qui serait peut-être plus efficace et moins
coûteux.
Donc, quand
on a vu ça, on recommande que vous exploriez toutes ces solutions-là pour
contrôler les coûts en santé et ne pas toujours… pour être en mesure
aussi de financer les services pour les proches aidants.
Le
Président (M. Bergman) : Ceci met fin au bloc de l'opposition
officielle. Maintenant, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la
députée d'Arthabaska.
Mme Roy
(Arthabaska) : Bonjour. Merci pour votre mémoire, pour votre
intervention aussi. Il ne faut pas être député depuis très longtemps pour savoir, pour avoir rencontré des
familles qui viennent nous dire que les soins qu'on leur offre… Peut-être moins à Victoriaville puis
la région d'Arthabaska, là, que c'était dans le cas de Lotbinière, parce
que j'ai fait deux régions, celle rattachée à Chaudière-Appalaches puis une
autre rattachée au Centre-du-Québec. Les CSSS n'étant pas les mêmes, j'ai eu
des expériences différentes de personnes qui se plaignaient que ce qu'il y
avait comme soins ou soutien n'était pas adéquat. Ça, pour moi, ça ne m'apprenait
pas quelque chose.
Ce qui me surprend, par exemple, c'est que,
malgré que ce ne soit pas adapté, on refuse, on les refuse, ces heures-là qui
nous sont dévolues.
Avez-vous fait une recherche, autant au niveau
de nombre d'heures refusées ou de nombre de cas ou de personnes qui… de
familles touchées par ces refus?
Mme Ducharme (Francine) : On n'a pas
fait d'étude…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Ducharme.
Mme
Ducharme (Francine) : Je
m'excuse. On n'a pas fait d'étude sur le nombre de personnes, mais on a
fait des études sur les causes, pourquoi les
gens refusent. On leur a demandé : On vous offre des services, pourquoi
vous ne les prenez pas? Parce que très souvent ils ne les prennent pas. Et
les réponses, dans les études, c'est le manque de flexibilité : C'est moi
qui dois m'adapter à l'intervenant quand il est prêt.
Par exemple…
Je vous donne l'exemple du bain parce
que c'est toujours
celui-là qu'on donne, puis tout le
monde parle des bains, mais on me donne un
bain à telle heure l'après-midi. Ça ne marche pas, le bain en après-midi. Chez nous, on a toujours pris le bain le soir ou le matin, et je
ne veux pas ça, je ne veux pas commencer à être obligée d'être ici l'après-midi. Bon, c'est un exemple. Ou le répit au mauvais moment ou un service
standardisé, toujours le même à tout le monde, quand le besoin — on
parle d'individualisation dans ce livre blanc là — n'est pas… les besoins sont personnalisés. Alors, les proches aidants, si je parle d'eux,
vont refuser parce que ce n'est pas ajusté à leurs besoins. Et on offre,
ce que je dis dans le mémoire, «one size fits all», un service pour tout
le monde puis c'est le même, alors qu'il faut ajuster nos services en fonction
de la trajectoire de nos proches aidants, et le timing de l'offre de services
est très important.
Donc, les
raisons qui motivent beaucoup de proches aidants à les refuser… Ils les
acceptent en dernier recours, quand
ils n'en peuvent plus, là ils vont dire oui. Mais, au début, si on voulait
promouvoir leur santé ou prévenir soit des hospitalisations ou des hébergements, il faudrait leur offrir ce dont
ils ont besoin, d'où un besoin d'évaluer, d'évaluation de leurs besoins.
Mme Roy
(Arthabaska) : Bien,
je suppose que vous avez questionné ces personnes-là pour documenter
ce que vous venez de me dire. Avez-vous regardé la variante... la
variable, plutôt, d'où viennent ces personnes-là? Est-ce qu'il y a des endroits
où on a réussi à avoir des services plus souples ou d'autres où il y a beaucoup
plus de rigidité?
Mme
Ducharme (Francine) : On a
fait des études en milieu rural et en milieu urbain. Évidemment,
en milieu urbain, c'est plus
difficile qu'en milieu rural. À la ville, c'est plus compliqué. Je ne sais pas
comment ça se fait, là, mais, dans les régions plus rurales, il y a
comme une adaptation, un ajustement plus facile.
On a vu des
disparités incroyables par rapport aux CSSS. On en a parlé tout à l'heure, les disparités régionales sont énormes. Il n'y a pas un CSSS qui offre la même chose, puis il n'y a
pas des intervenants qui sont formés de la même façon, puis il
n'y a pas une organisation de la même façon. Donc, c'est sûr que, d'une région à l'autre, ça
varie, et idéalement on devrait quand même
avoir un minimum de qualité partout égal. Mais ça ne veut pas dire de négliger
la coloration de la région, il y a
des particularités régionales qu'il faut respecter, mais un minimum semblable
serait bien. Mais disons que, dans les régions rurales où on est allés,
l'ajustement des services était plus facile à faire.
Le
Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. Mme Ducharme,
Mme Saulnier, merci d'être ici avec nous aujourd'hui et de partager
votre expertise avec nous.
Je demande aux gens de l'Association canadienne
des compagnies d'assurances de personnes de prendre leur place à la table.
Et je suspends pour quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à 16 h 58)
(Reprise à 16 h 59)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, on reçoit l'Association canadienne des
compagnies d'assurances de personnes. On vous souhaite la bienvenue. Pour fins
d'identification, si vous pouvez nous donner vos noms, vos titres. Et vous avez
10 minutes pour faire votre présentation.
Association canadienne
des compagnies
d'assurances de personnes inc. (ACCAP)
M. Millette (Yves) : Merci. D'abord,
je me présente : Yves Millette, vice-président principal aux affaires québécoises de l'Association canadienne des
compagnies d'assurances de personnes. J'ai à ma droite M. Jacques
Bédard, qui est directeur, Ventes assurance individuelle,
chez Manuvie. Et il y a aussi, qui devrait nous joindre, qui nous joint maintenant, M. André Langlois, qui est vice-président, Développement et mise en marché, Assurance et épargne
pour les particuliers, chez Desjardins Sécurité financière.
• (17 heures) •
Alors,
l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes apprécie
grandement l'occasion qui nous
est donnée de vous faire une présentation et tient à vous remercier de l'invitation.
L'ACCAP est une association à adhésion libre qui
représente des sociétés d'assurance de personnes qui détiennent 99 % des
volumes d'affaires au Canada. L'association compte parmi ses membres le regroupement
des assureurs à charte du Québec, qui est un membre à part entière. Notre industrie
commercialise une vaste gamme de produits essentiels à la sécurité financière
de quelque 7,2 millions de Québécois qui participent à notre industrie, en
complémentarité avec les régimes publics.
Les régimes offerts par les compagnies d'assurance vont de l'assurance
vie, assurance santé complémentaire, l'assurance invalidité et les régimes de
retraite.
En juin 2012, l'ACCAP
a publié un rapport sur la politique en matière de soins de longue durée
intitulé Améliorer l'accessibilité, la qualité et la viabilité des soins de longue durée au Canada. Nous en avons mis
un exemplaire en annexe de la lettre
que nous vous avons fait parvenir. Et ce document-là a été élaboré avec
la participation d'organismes du milieu autour de tables rondes tenues
au Québec et dans les différentes régions du Canada.
Une réforme
structurelle facilitant l'acheminement des patients vers la solution la plus
appropriée en matière de soins de longue
durée non seulement améliorera la qualité des soins, mais se traduira par
d'importantes économies d'efficacité. Les soins de santé évoluent. La
réduction du temps d'hospitalisation, et ainsi de suite, font qu'il y a un besoin
de plus en plus grand pour les soins de longue durée. S'il est vrai que la
majorité des intéressés sont âgés, une maladie incapacitante ou un accident
peuvent survenir à tout âge et nécessiter des soins de longue durée.
Il faut trouver la
meilleure façon de prendre soin de la population. L'ACCAP partage l'objectif du
document intitulé L'autonomie pour tous
qui stipule que l'assurance autonomie doit être comprise comme un nouvel élan
pour les soins et les services de
longue durée destinés aux personnes aux prises avec des incapacités
signifiantes et persistantes. Une assurance autonomie telle que proposée
nous apparaît une très bonne approche.
Si vous permettez, je vais ici ouvrir une
parenthèse. On oppose souvent la notion de régime public avec la notion de régime privé. Je pense d'abord
qu'il faut être clair et que les produits offerts par les assureurs vont au
financement et non pas pour les services. Les assureurs n'offrent pas de
services, donc ils ne sont pas en concurrence avec des services qu'ils
offriraient.
Et aussi il faut distinguer que les services
publics et… c'est-à-dire que le financement est fait par les régimes publics et que ce qui n'est pas couvert par un
régime public est assumé par le citoyen. Le citoyen a ensuite le choix de demander à ce que le
financement soit pris en charge par lui-même, à même ses propres épargnes, ou
pris en charge en contribution, par les contributions de son employeur, par
exemple, dans des régimes d'avantages sociaux qui vont couvrir une gamme de situations comme la retraite, comme l'assurance maladie complémentaire, l'assurance invalidité. Ça peut aussi être
directement auprès d'une compagnie d'assurance, soit par des assurances
individuelles soit par une assurance
collective, et, à ce moment-là, on revient avec l'employeur. Ça peut
aussi être par le beau-frère qui a gagné à la Loto-Québec aussi, là, ce
n'est pas… Ça peut être toutes sources de financement confondues et non pas des
régimes privés de financement.
Ce n'est pas
une approche nouvelle. Cette approche-là de régime public versus
complémentarité existe depuis les années 60,
depuis l'existence des nouveaux régimes… depuis l'existence des régimes publics
qui sont venus s'installer dans les
années 60. Ce qui est nouveau, avec le vieillissement de la population,
c'est le rapprochement qu'on est obligés de faire de la retraite avec
les soins de longue durée. Et donc ça demande une approche qui est nouvelle
pour la population. Nos régimes publics et privés, qui avaient été pensés en fonction
d'une population jeune, doivent être adaptés à la nouvelle situation.
L'approche de
l'assurance autonomie proposée nous apparaît une approche dans la bonne
direction. Toutefois, les soins et
les services qui seraient assurés par l'assurance autonomie ne devraient pas
faire oublier que les sommes que déboursent les personnes elles-mêmes
pour des services qui leur sont offerts, comme la contribution des adultes hébergés en CHSLD, les frais à payer en résidence
privée des aînés, les coûts à assumer pour des services d'aide
domestique, la contribution non rémunérée des proches aidants, et ainsi de
suite, doivent aussi être prises en compte.
L'ACCAP pense que, selon les estimations
prudentes, les soins de longue durée dont auront besoin les baby-boomers
devenus vieux au cours des 35 prochaines années coûteront cher aux
Canadiens. En dollars courants, on estime
que l'ensemble des soins, que ce soient les soins qui sont prévus à domicile ou
les soins directs aux personnes, que ce soient d'autres soins qui ne
sont pas pris directement en compte par le régime proposé sur l'assurance
autonomie, devraient coûter 1 200 milliards de dollars,
1,2 billion de dollars, ce qui représente à peu près, en faisant une règle
de trois, là, 7 milliards de dollars par année, ce qui n'est pas à
dédaigner, pour ici, au Québec, s'entend.
Ce chiffre,
si on le met… Ça, ce sont des dépenses. Si on décide de capitaliser les soins
sur une longue période, ça représente approximativement la valeur
marchande de l'actif total des régimes de retraite enregistrés publics et privés au Canada en 2009, régimes publics et
privés étant les régimes publics pour les employés de la fonction
publique et non pas les services publics
genre Régime de rentes du Québec ou pension de vieillesse, c'est uniquement les
économies qui sont mises de côté pour payer les régimes de retraite
enregistrés. Mais ça représente quand même énormément d'argent, si on décide de
capitaliser ces soins-là sur une longue durée.
Nous estimons que les couvertures qui sont
offertes par l'ensemble des programmes d'État actuellement permettront de payer environ la moitié des sommes
requises. Et donc le virage proposé vers les soins à domicile
permettrait aussi d'amener des économies qui sont évaluées à 139 milliards
de dollars. Il resterait tout de même 456 milliards de dollars
à trouver sur 35 ans, ce qui représenterait, pour le Québec, quelque chose
comme 2,7 milliards par année d'aujourd'hui à 2037‑2038, donc une période
plus longue que ce qui est couvert dans votre proposition sur les soins de
longue durée.
Le document L'autonomie
pour tous propose une stratégie de financement en deux temps. Pour les quatre
premières années, l'assurance autonomie adopterait le cadre financier actuel du
gouvernement avec un ajout jusqu'à
500 millions de dollars étalé jusqu'en 2017-2018, et la contribution de
l'usager serait maintenue par la suite dans une perspective d'équité.
L'assurance
autonomie viendrait compléter les régimes d'assurance maladie, hospitalisation
et médicaments. On veut juste
rappeler que, même s'il s'agit là de régimes universels, du moins dans le cas
des deux premiers, ces régimes-là couvrent, dans le cas de l'assurance
maladie, 98 % des dépenses, l'assurance hospitalisation, 92 %, et l'assurance
médicaments, 58 %. Il reste donc une place pour des régimes
complémentaires privés, qui, s'ils sont bien définis, permettraient de couvrir
les soins qui ne sont pas déjà dans l'enveloppe prévue mais également des soins
qui peuvent être connexes ou complémentaires.
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion s'il vous plaît.
M. Millette (Yves) : En conclusion,
les régimes qui seraient proposés par le privé sont des régimes qui ne remboursent pas des dépenses mais qui viennent
ajouter des prestations soit mensuelles soit globales et qui permettent
aux gens d'utiliser ces sommes-là pour compléter leurs besoins financiers qui
peuvent être liés à leur vieillesse.
J'ai avec moi
deux personnes qui sont en mesure de vous parler des produits que l'industrie
serait prête à mettre en place pour compléter les programmes publics. Je
vous remercie.
• (17 h 10) •
Le
Président (M. Bergman) : M. Millette, merci pour votre présentation. Alors, maintenant,
pour le premier bloc du gouvernement, M. le ministre.
M.
Hébert : M. Millette, M. Langlois,
M. Bédard, bienvenue. Merci de contribuer à ce débat public
important.
Je suis d'accord avec un certain nombre de vos
points. C'est l'organisation de coopération économique et de développement, l'OCDE, qui a fait des projections extrêmement intéressantes qui montrent que, pour 2051 — puis
c'est le même genre d'horizon que vous utilisez dans votre document — la
croissance des soins de longues durées passera de 1,2 % du produit
intérieur brut, telle qu'elle est actuellement, à 3,4 % ou à peu près du
produit intérieur brut, à moins que des
pays fassent un virage vers les soins à domicile, auquel cas on pourrait
diminuer de 1 % du produit intérieur brut la facture, et ça, ça veut dire beaucoup d'argent.
1 % du produit intérieur brut, c'est 1,3 milliard en dollars de 2011,
là. Alors, si on met ça en dollars de 2051, ça sera une somme
extrêmement importante.
Et, sans
aller jusqu'à 2051, on a fait, nous, l'exercice pour la période 2027‑2028 et on
l'a dans le livre blanc. Ce qui m'a étonné, moi, quand je suis arrivé en
poste, c'est qu'il n'y avait pas de projection de coûts des soins de longue
durée au ministère, alors que la réalité démographique est incontournable, est
implacable et qu'on peut faire ces projections-là.
Alors, on a fait les projections, et c'est marqué, c'est bien dans le livre
blanc où on a le statu quo qui nous amène, comme nous le prédit l'OCDE,
à une facture de 12,8 milliards en 2027‑2028, alors que la mise en place d'un
régime d'assurance autonomie permet de
diminuer la pente de cette courbe et nous permet de limiter, de contrôler les
coûts, comme vous le dites dans votre mémoire, à un niveau de
1,3 milliard, ce qui représente une économie, une économie de
1,5 milliard. Ce n'est quand même pas rien. Je pense que c'est important
de faire les gestes maintenant pour être en mesure de modifier cette courbe d'augmentation
des coûts.
Bien sûr, le
budget actuel ou le cadre financier, avec les 500 millions, ne permet pas
de financer complètement, et c'est
pour ça qu'il faudra injecter régulièrement des sommes dans... Et on reviendra
tout à l'heure sur votre opinion par rapport à la façon de financer ce
manque à gagner à partir de 2017‑2018.
Je salue,
dans votre mémoire, qu'une de vos recommandations, c'est mettre en place un
système de soins longue durée axé sur
les patients, c'est de redonner aux patients le financement au lieu de le faire
passer par les établissements. Et je pense que c'est le changement
majeur de l'assurance autonomie, c'est de redonner aux patients la
responsabilité, le pouvoir, comme disait un
groupe qui vous a précédés, le pouvoir d'avoir les allocations et les services
dont ils ont besoin. Et je pense que c'est fondamental si on veut opérer
le virage. C'est comme ça qu'on fait le virage, parce que, quand on donne aux gens ce pouvoir-là, ils choisissent de
rester à domicile, et donc c'est comme ça qu'on est capables d'infléchir
la courbe du statu quo et de faire en sorte
qu'on peut vraiment faire un changement. Alors, je salue cette approche que
vous appuyez dans votre mémoire.
J'aimerais
aussi vous entendre sur le changement qui est à imprimer. Certains prétendent
qu'il faut simplement mettre un petit
peu plus d'argent dans les soins à domicile puis on va répondre aux besoins.
Vous semblez nous dire que ce n'est pas suffisant, il faut changer la
façon de financer, puis j'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bergman) :
M. Millette.
M. Millette (Yves) : Oui. Il faut
changer... D'abord, il faut améliorer les services et les financer comme vous disiez,
que l'argent devrait suivre le patient. Nous pensons que c'est quelque chose
qui est très important. En plus de redonner l'argent entre les mains des
patients, ça permettrait éventuellement… Si des sommes complémentaires sont
prévues de d'autres ressources, ça permet plus facilement de compléter le
financement, sans recommencer ou sans commencer à faire des financements qui
seraient éparpillés à gauche et à droite et donc pas nécessairement utiles. Ça permet de concentrer les aides, qu'elles viennent que ce
soit des employeurs, là, ou que ce soit des assureurs privés, donc ça a une
importance très grande.
Les soins à
domicile, ce n'est pas juste de verser de l'argent. Je pense que... Et, dans ce
sens-là, on rejoint beaucoup le livre blanc sur la perte d'autonomie, il
faut vraiment que les soins soient organisés et que l'évaluation des besoins
soit faite par des spécialistes. Et on pense que c'est évidemment le régime
public qui est beaucoup mieux placé que n'importe quel régime privé pour faire
ces choses-là.
Ça ne veut
pas dire que les services doivent être achetés nécessairement auprès de
services publics. On est d'accord que
ça pourrait être des services privés, bien que nous, on ne les fournit pas, là.
Mais on pense qu'il est important que l'évaluation des besoins soit
faite par le service public.
L'autre chose qui est très importante, c'est au
niveau des conditions auxquelles les sommes deviendraient payables, les fameuses six conditions de la capacité
de vous occuper de vos propres besoins. Je pense que c'est important qu'elles soient harmonisées, de façon à ce qu'à
peu près tout le monde puisse s'y fier lorsque des sommes vont être
allouées pour faire des financements. On
essaie de le faire dans le privé, à venir jusqu'à maintenant, de façon à ce que
les produits soient coordonnés entre eux au niveau du secteur privé,
mais ce serait important que ça se fasse aussi avec le public puisque vous allez être le premier payeur, en
quelque sorte, vous allez être le régime universel, du moins pour une
catégorie des soins, les régimes privés
venant nécessairement en complémentarité, en ajoutant ou en incluant des
services qui ne sont pas déjà prévus, en les ajoutant à d'autres
services.
Un des
exemples qu'on donne souvent, c'est l'exemple de l'assurance voyage. Si on
revient aux années 90, quand on
a commencé à faire des choix, on demandait au gouvernement que les choix, à
l'époque, soient faits de façon à ce que ça donne ouverture, si vous retirez certains services du panier de
services, si vous les retirez, qu'ils puissent être organisés ailleurs.
Et c'est ce qui a été fait avec l'assurance voyage, c'est-à-dire que les soins
médicaux à l'extérieur du Canada ont été en
bonne partie désassurés mais de façon telle à ce que le privé puisse l'inclure
dans ce qu'on a appelé l'assurance voyage, qui comprenait toute une
série de services aux voyageurs, la perte de bagages, les retards ou n'importe
quel genre de perte qui peut être subie au
cours d'un voyage, mais qui prenait aussi en compte le paiement des soins
médicaux à l'extérieur et le rapatriement au Canada des personnes. Donc, ça a
permis à l'industrie privée d'organiser une foule de services qui vont avec le
voyageur et qui permettent à ceux qui voyagent d'avoir des services.
Un peu la même chose va probablement se produire
avec l'hébergement. Je vous parlais tantôt de retraite et de soins de longue
durée; je pense que c'est des choses qui vont aller ensemble. Et, si les
produits qui sont offerts, les régimes publics qui sont offerts permettent d'organiser
autour, bien c'est des façons de faire qui vont compléter les régimes publics
qui vont être mis en place.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Votre
mémoire va dans la même ligne qu'un rapport de l'Institut de recherche sur les
politiques publiques de Michel Grignon et Nicole Bernier que vous avez
probablement vu, qui fait une analyse de qui devrait payer les soins à long terme et qui examine le modèle privé-privé, le modèle
mixte comme l'assurance médicaments, un mixte public-privé, ou le
modèle public, et qui en vient à la conclusion que c'est le modèle public qui
est le seul tenable, avec une place
pour les régimes complémentaires privés. Donc, on serait dans le même esprit,
en fait, que l'assurance santé, où il y a un régime public universel
avec des régimes complémentaires des compagnies d'assurance privées.
Alors, vous
êtes dans cette même ligne de pensée là. Je pense que c'est une étude extrêmement intéressante qui montre le bien-fondé
de ce qu'ont fait plusieurs pays. Le Canada,
le Québec est le seul actuellement au Canada à aller de l'avant avec une assurance
autonomie, mais plusieurs pays asiatiques et européens l'ont implanté depuis
très longtemps, et je pense que ça, c'est intéressant.
Mais j'aimerais vous entendre sur c'est quoi,
les assurances complémentaires qu'on peut imaginer dans... Imaginons, là, que,
l'assurance autonomie, on est en 2015, qu'elle est implantée, qu'il y a une
couverture de base pour les services de soutien à l'autonomie. Qu'est-ce que
vous envisagez comme assurances complémentaires?
Le Président (M. Bergman) :
M. Millette.
• (17 h 20) •
M.
Millette (Yves) : Bon, les régimes qui seraient envisagés sont des régimes
qui pourraient être parents avec ce qu'on connaît, comme l'assurance
invalidité, à l'heure actuelle, ou avec l'assurance vie. Et j'aimerais laisser
aux deux personnes qui sont avec moi une
minute chacun, là, pour expliquer en gros leur approche. M. Bédard va
parler d'une approche qui est plutôt orientée vers une fonction d'assurance
invalidité, alors que M. Langlois va nous parler plus de l'assurance vie.
Mais ça va
vous donner une idée. Je vous parlais un peu tantôt de l'assurance voyage. Ça va
vous donner une idée de la complémentarité qui va pouvoir être faite.
Le Président (M. Bergman) :
M. Bédard.
M. Bédard
(Jacques) : Merci. En fait, à la Financière Manuvie, c'est que nous
avons un produit spécifique pour les soins
de longue durée. C'est un produit qui est individuel. La personne peut choisir
le montant qu'elle veut avoir comme couverture pour les soins à domicile
ou les soins en établissement. C'est un contrat individuel, comme je vous disais. Et, si la personne a besoin de soins
en établissement, qu'est-ce
qu'on va faire, à la Financière
Manuvie, c'est qu'on va doubler le montant de la prestation qui a été
choisie dès le départ, à la souscription. Donc, ça veut dire que, si la personne choisit de prendre, pour fins d'exemple, un
montant de 200 000 $, bien on peut verser, exemple, 1 % du
montant, donc qui va donner 2 000 $, si elle a besoin de soins et
4 000 $ — le
montant va être doublé — si
elle va en institution.
Ce
produit-là, il est aussi complémentaire aux gens qui possèdent une police
d'assurance invalidité personnelle, ce
qui veut dire que nous offrons à cet assuré la possibilité de changer sa
couverture d'assurance invalidité en une police de soins longue durée.
Et ça, c'est sans preuve d'assurabilité, ce qui devient un élément important.
La personne est en invalidité mais va
pouvoir continuer à aller chercher une protection pour les… étant donné que je
ne suis plus à l'emploi. Tantôt, on
parlait de 65 ans, mais plus ça va… On va peut-être se rendre plus loin pour la
retraite. Donc, on va pouvoir utiliser cette protection-là pour les
besoins futurs.
L'autre point qui est
très important par rapport au produit que nous avons, c'est que nous n'exigeons
aucune preuve de remboursement ou de
facture. Ça fait que le montant qui a été choisi dès le départ, c'est un
montant que nous allons allouer. Que
ça soit pour payer des soins, pour payer des aidants ou quoi que ce soit, ce
montant-là va être pour la personne.
Les sommes vont être versées, également, à l'assuré et non à une institution,
donc c'est l'individu qui reçoit les sommes que le client a choisies, à
ce moment-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Ma question n'était pas dans le sens de faire la promotion de vos produits, là.
J'aimerais juste que vous nous donniez une idée du type de complément que les
assureurs privés pourraient apporter à un programme d'assurance autonomie.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette (Yves) : Je pense que ce qu'il essayait de faire, c'est exactement de vous dire
quels sont les produits. La première partie, c'est sous forme d'assurance
invalidité.
Je
pense qu'une chose qui est très importante, au niveau des assurances, au
niveau… c'est qu'en vieillissant, avec le vieillissement de la
population, l'assurabilité devient plus dispendieuse. Donc, les premières
générations de produits qu'on a faites, si
vous voulez… Parce que les assureurs privés n'ont pas de subvention, donc ça
doit être payé par les clients sur la base de leur état de santé au
moment où ils adhèrent. Ça, c'est la base de l'assurance privée. Et plus vous
le prenez jeune…
M.
Hébert : D'ailleurs, le rapport de l'IRPP souligne bien ça.
C'est une des difficultés pour lesquelles il n'y a pas de place ou il n'y
a pas un intérêt des assureurs privés dans ce créneau, c'est justement ce que
vous soulevez.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette (Yves) : Ça, on n'est pas d'accord avec cette partie-là de l'opinion que vous
citez, de l'IRPP, parce qu'il y a des façons de faire la différence, d'abord
en souscrivant plus jeune, et donc… Non, non, mais c'est…
Par
exemple, il y a une assurance invalidité. Vous perdez votre emploi, vous avez
de l'assurance invalidité. Si vous
transformez — on vous
donne un droit de transformation — bien la prime qui va continuer à être
payable est la prime qui était payable à l'origine et non pas la prime
au moment où vous souscrivez la transformation de votre produit…
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Millette (Yves) :
…la même chose pour de l'assurance vie. Donc, ça devient très important.
Et l'autre élément,
toujours dépendant… qui est très différent de ce qu'on parle ici, c'est qu'aux
États-Unis il n'y a pas de mise en place de
mutualisation. On l'a fait ici, au Québec, avec la mutualisation en assurance
médicaments.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Millette (Yves) : Donc, il existe des mécanismes qui ont été rodés ces dernières années
et qui peuvent permettre de dire que l'assurance privée peut être
complémentaire à des régimes publics, y compris en assurance invalidité.
Le Président (M.
Bergman) : Excusez. Je m'excuse. M. le ministre.
M.
Hébert : Dans certains pays, les assureurs privés se sont
entendus pour utiliser les mêmes outils d'évaluation que le régime public, donc, pour éviter de doubler
des évaluations ou d'introduire les outils publics dans la gestion de
leurs assurances complémentaires. Est-ce que c'est une voie que vous seriez
prêts à envisager?
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette (Yves) : C'est ce qu'on vous a dit
tantôt. Oui, plus ces régimes vont être coordonnés, mieux ça va être. Et
on pense que c'est le régime public et le gouvernement qui est le mieux en
position pour le faire.
Le Président (M. Bergman) : M.
le ministre.
M.
Hébert : Dans votre mémoire, vous dites à la
cinquième recommandation : S'assurer qu'il y a une capacité des
fournisseurs de soins de longue durée suffisante, et vous recommandez qu'on encourage
la prestation privée de soins de longue durée.
Comment vous voyez
cette prestation-là? Comment on peut la contrôler, contrôler la qualité surtout
de la prestation privée? Et, pour vous, «privée», ça veut dire privé lucratif
et aussi privé non lucratif, j'imagine, les deux secteurs du régime privé.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette
(Yves) : Est-ce que vous voulez parler du contrôle de la prestation d'un
service privé?
M.
Hébert :
Oui.
M. Millette (Yves) : À ce moment-là, les assureurs n'ont pas l'intention de contrôler
la prestation du service privé. Ils ont l'intention de soit… compléter
ce qui va être offert par le régime. Mais, si le régime public offre 100 %
de la prestation, les régimes privés complémentaires vont offrir d'autres
choses qui ne sont pas couvertes par les services publics, comme par exemple des services de ramassement de la neige
l'hiver ou peu importe ce que vous pouvez imaginer, mais ça va compléter
des services qui ne sont pas offerts.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Mais je parlais plus du contrôle de la qualité de ce qui est… de la prestation.
Vous savez, la responsabilité de l'État,
c'est, bien sûr, de financer une partie des services mais aussi de s'assurer de
la qualité et d'un contrôle de gestion de… qui est absolument important.
Alors,
comment vous voyez… Quelle expérience vous avez dans le contrôle de la qualité
des prestataires lorsque vous les financez?
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M.
Hébert :
Vous ne les contrôlez pas?
M. Millette
(Yves) : Non. Quand vous… Si vous parlez des prestataires, des gens
qui reçoivent la prestation, bien ça va…
M.
Hébert :
Non, les prestataires… ceux qui donnent les services. Je m'excuse, le mot
«prestataire» a deux appellations, là.
M. Millette (Yves) : Oui, O.K. Les prestataires, si vous parlez des gens qui rendent les
services, les assureurs ne sont pas équipés pour le faire et n'ont pas l'intention
de le faire. C'est-à-dire qu'ils vont donner des sommes d'argent qui vont être à la disponibilité des gens pour
rembourser des services qui ne sont pas payés par l'État. Donc, ça peut
être des services qui sont déjà en
complément des services qui sont payés à des prestataires, mais ça peut être
aussi, comme on disait tantôt, des sommes qui pourraient être utilisées
pour récompenser des aidants naturels ou quoi que ce soit.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Vous avez vu l'évolution des courbes. Il y a un
écart entre l'assurance autonomie et le cadre financier du gouvernement,
donc un écart à combler.
Il
y a une hypothèse qui est soulevée, dans le livre blanc, de capitaliser cette
caisse-là. Quelle est votre opinion sur cette capitalisation? On sait qu'aucun
pays n'a capitalisé ce genre d'assurance, et c'est toujours des systèmes
«pay-as-you-go», si vous me permettez l'anglicisme. Qu'est-ce que vous en
pensez? Est-ce que c'est possible de le faire dans notre contexte québécois? Et
comment devrions-nous le faire?
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette
(Yves) : C'est vrai que c'est généralement des services
«pay-as-you-go» qui ont été utilisés dans le
domaine de remboursement des soins de santé, mais, à partir du moment où il
s'agit… où on veut essayer de prévoir à l'avance ou de commencer à capitaliser une forme de soins, on pense que
ça peut se faire. On le fait en matière de régimes de retraite, par exemple, donc on peut le faire
aussi dans ce domaine-là. On le fait aussi en matière de mutualisation
en assurance médicaments, on est aussi capables de quantifier à l'avance des
sommes qui sont nécessaires. Ce sont des expériences
nouvelles, et on pense très bien que même… que le gouvernement ou les
gouvernements pourraient mettre en place des systèmes de capitalisation.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert :
Vous suggérez, dans votre mémoire, d'adopter des mesures pour encourager les
Canadiens — dans notre cas ici, ce seraient des
Québécois — à
épargner pour payer les soins de longue durée. Vous recommandez un régime
enregistré d'épargne. J'aimerais ça que vous nous en parliez un peu plus.
• (17 h 30) •
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette
(Yves) : Bon, évidemment, les régimes publics qu'on connaît jusqu'à ce
jour, où les citoyens comptent de plus en
plus sur… comptent sur le fait que l'État va payer une partie des soins, fait
en sorte que les gens ont un peu
perdu une habitude d'épargne. On pense que les gens doivent revenir à
l'épargne, doivent épargner, compter plus sur eux que sur l'État pour payer au moins une partie des soins qui sont
liés à leur vieillissement. Et, à ce moment-là, on pense qu'ils doivent
épargner et qu'un incitatif à l'épargne sont des régimes d'épargne… ou des
régimes d'épargne fiscalisés.
Et,
quand on parle de REEE, c'est le régime
enregistré d'épargne-études où les… En fait, pour amener les gens à payer les études de leurs enfants, on leur permet
une certaine déduction d'impôt et on permet aussi ou on offre aussi une
certaine subvention des gouvernements pour faire en sorte que les gens puissent
avoir des épargnes suffisantes pour faire
étudier leurs enfants. Donc, le même principe pourrait s'appliquer, il pourrait aussi y avoir un principe différent qui serait
une subvention… aider à la subvention de la prime d'assurance soins de longue
durée, qu'elle soit au public ou au privé, là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, il vous reste deux minutes.
M.
Hébert :
Je vais laisser une dernière question à mes collègues, je m'excuse.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, il vous
reste deux minutes… 1 min 30 s.
Mme
Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Oui, merci beaucoup. Alors,
on va aborder… Bonjour, messieurs. On va aborder le document que
vous avez donné, qui est daté de juin 2012 et dont le titre est Améliorer l'accessibilité,
la qualité et la viabilité des soins de
longue durée au Canada. Puis on
en a très, très peu parlé. Par
contre, vous avez des opinions, quand
même, et des recommandations par rapport aux soins de longue durée. Dernier
deux minutes. Peut-être vous pouvez nous faire un résumé de ce que
vous voyez dans ces soins-là comme assureurs.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette, il vous reste une minute pour faire ce…
Mme
Richard
(Îles-de-la-Madeleine) : Une minute pour faire le résumé.
M. Millette (Yves) : Bien, on pense qu'effectivement, si on veut vraiment réaliser des
économies, il faut amener les gens à
rester chez eux, donc offrir des services, autant des services paramédicaux que
des services d'aide domestique, mais on
pense aussi qu'il faut offrir des services de répit aux aidants naturels et un
peu tout ce dont on parle habituellement. À l'heure actuelle, le gros
problème, c'est de diviser la tarte et de faire en sorte qu'il y en ait un peu
pour tout le monde, et c'est là que nous
pensons que les services privés… les assurances privées peuvent avoir un rôle complémentaire
à jouer.
Le Président (M.
Bergman) : Ceci met fin au bloc du gouvernement. Pour le bloc
de l'opposition officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président.
Bienvenue. Puis ça va être intéressant. Je ne suis pas certain, de la façon dont on va parler, que tout le monde va
comprendre, parce qu'on va être beaucoup dans les chiffres. Vous êtes
des gens de chiffres, comme je l'ai dit au début.
Premier
élément : Êtes-vous d'accord qu'il y a déjà un virage qui a été pris au
Québec vers le virage ambulatoire et puis le virage du maintien à
domicile, ne serait-ce que sur le principe? On est passés d'un très haut taux
de lits de CHSLD… On a réussi à le descendre
actuellement, tout dépendant des régions, entre 2,5 % et 3,2 %. Est-ce que vous êtes
d'accord au moins qu'il y a eu ce virage-là qui a été fait?
M. Millette (Yves) : On est d'accord qu'au Québec il y a eu… qu'une avance a été prise au
Québec sur toute la question des soins de longue durée, effectivement.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : O.K. Puis, si vous êtes
d'accord, là, il faut distinguer l'organisation de services avec des
résultats directement avec le patient, dans le sens qu'il y a une partie de la
clientèle qui va être autonome, une partie de
la population qui va avoir besoin de maintien à domicile, une partie de la
population qui va avoir besoin de ressources intermédiaires, puis il y a
une partie de population qui va avoir besoin de CHSLD.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette (Yves) : Exact, oui.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Puis ça, c'est différent du financement. Puis à la fin, dans notre réseau de la
santé, il faut arriver pour dire qui a besoin vraiment d'être en CHSLD,
qui est peut-être autour d'un taux de 2,5 personnes par 100 personnes
de 65 ans et plus, et combien est-ce qu'on va en avoir en ressource
intermédiaire. Et, si on maximise au
maximum, là — j'utilise les deux mots volontairement, là — si on maximise au maximum le maintien à
domicile, on va peut-être avoir
15 %, 17 % des gens qui vont avoir besoin de maintien à domicile de
façon assez intense, et ces gens-là, si on réussit à les maintenir à
domicile avec tous les soins, selon le principe de l'assurance autonomie, ils
iront moins en ressource intermédiaire, ils iront moins en CHSLD.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette
(Yves) : On est d'accord avec ça.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Fiez-vous sur les chiffres, ce n'est pas loin
de ça.
M. Millette (Yves) : Le chiffre qu'on a utilisé, c'est 20 %, mais 17 % étant
correct. La différence que je vois avec ce que vous proposez, c'est que nous, on pense que les gens devraient
avoir le choix du genre de soins, soit aller dans des résidences ou des CHSLD, dépendant, ou d'être à
domicile, mais ils devraient assumer la partie des coûts de leur choix
qui leur arrive.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. On va revenir à votre
situation à vous après. Donc, l'organisation des services, c'est quand même
indépendant du financement, montant global.
M. Millette
(Yves) : Oui, je suis d'accord.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Et ce qu'on veut… Plus il va y en avoir à domicile parce que
ça coûte moins cher, moins il va y en avoir en CHSLD parce que ça coûte
plus cher. Et l'objectif à la fin, c'est de dégager des lits de courte durée — parce
que vous en parlez dans votre document — pour qu'il n'y ait plus de
patients qui attendent dans la courte durée, qui est très dispendieuse, mais
que chaque patient se retrouve à la bonne place. Ça, c'est ce que j'appelle… c'est de l'organisation de services, et
le Québec, depuis plusieurs années, s'en va vers ça, indépendamment de
l'assurance autonomie. L'assurance autonomie
amène des nouveaux principes, mais à la fin on va atteindre ce résultat-là.
Maintenant,
on va prendre le graphique que le ministre nous parle si souvent que ça. Dans son graphique — je les
ai rajoutés moi-même à la main, O.K.? — quand on part en 2013‑2014,
on part actuellement avec un budget de 3 250 000 $. 3 250 000 $,
c'est combien de millions de dollars? Dites-moi-le.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette
(Yves) : Bien, 35 fois 1 000, là, oui.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Il y a combien de millions de dollars dans
1 milliard de dollars?
M. Millette
(Yves) : Bien, il y en a 1 000.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Il y en a 1 000. Si vous en avez 32, ça
fait combien?
M. Millette
(Yves) : 32 000.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : 32 000. J'aime ça que vous
me dites ce chiffre-là. Quand vous prenez la courbe en premier ici, ça,
c'est qu'on ne fait rien, si on ne fait pas l'assurance autonomie ou si on n'améliore
pas les soins à domicile. Si on fait le...
Le graphique en bas, c'est là qu'on devrait être avec l'organisation des
services. Quand je prends le budget
actuel et je l'augmente de 3 %, qui est très conservateur, nos budgets du
réseau de la santé, j'arrive en 2027‑2028 avec un budget de
49 milliards de dollars. Si on fait le même raisonnement,
49 milliards de dollars, c'est combien de millions de dollars? C'est
49 000, vous êtes d'accord avec moi?
M. Millette
(Yves) : Oui, oui.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : L'écart entre annualiser... Parce qu'on peut
prendre un chiffre, là, puis, si vous le mettez pendant 30 ans, c'est
toujours des gros chiffres. Mais le réseau de la santé, ça se gère à chaque
année. Quand vous arrivez à la fin, entre le montant qu'on devrait avoir par l'optimisation
des soins avec ce qui est prévu au cadre budgétaire,
c'est 160 millions de dollars. 160 millions de dollars sur
49 000 millions de dollars, c'est quel pourcentage, ça?
M. Millette
(Yves) : Là, vous commencez à m'en demander.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Bien, j'ai fait le calcul, je vais vous le dire.
M. Millette
(Yves) : Oui, O.K., allez-y.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : C'est 3/10 de 1 %. Ça fait que, si le
ministre reprend ses chiffres, il va se rendre compte qu'avec 3/10 de
1 % du réseau de la santé, annualisé, il n'y en a pas, de problème dans
son financement. C'est ça, le raisonnement qu'il va avoir à la fin. Et je...
Une voix : ...
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Non, parce que... D'ailleurs, c'est pour ça
que, quand vous dites «pay-as-you-go», il n'y a pas besoin de
capitalisation, parce qu'à chaque année c'est 3/10 du budget total du réseau de
la santé.
Juste pour vous dire, dans le réseau de la santé
on rajoute au-dessus de 1 milliard de dollars, et, quand vous regardez en nouvel argent, c'est à peu près 300 millions
à 400 millions de dollars qu'on a. Et c'est dans 20 ans. Là, c'est
dans 14 ans. Ça fait que, quand vous
regardez le raisonnement sur 14 ans, théoriquement, si vous cherchez à
capitaliser puis à mettre une caisse en
place, vous êtes probablement mieux, à ce moment-ci, de penser de mettre
l'argent au fur et à mesure et d'améliorer la performance de votre
réseau de 3/10 de 1 % par différentes méthodes. Ce n'est pas obligé d'être au niveau des personnes aînées. Ça peut
être dans les médicaments, ça peut être au niveau de la rémunération de
certains professionnels, ça peut être... Il y a plusieurs choses, puis on a
14 ans pour le voir venir.
Donc, la
question qu'il faut se poser : Est-ce qu'on a besoin de capitaliser ou on
peut aller tout simplement à chaque année rajouter l'argent? Moi, je
pense qu'on est capables à chaque année de rajouter de l'argent, comme on a
fait d'ailleurs depuis 15 ans à
20 ans. Et le réseau de la santé est toujours sous pression puis il va
l'être encore, c'est une réalité, mais on est capables, à ce moment-là,
de passer à travers.
D'ailleurs,
une des erreurs qu'on fait, c'est qu'on oublie... on prend un chiffre de
160 millions puis on l'applique comme
si c'étaient des gros montants, alors que le réseau de la santé va avoir, à ce
moment-là, 49 milliards de dollars.
M.
Hébert : ...un
chiffre.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre, la parole est au député de Jean-Talon.
M.
Hébert : J'aurais
voulu corriger M. le député de Jean-Talon.
Le Président (M. Bergman) : S'il
vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Jean-Talon, je vous
reconnais.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Oui. Quel chiffre?
M.
Hébert : Bien, je
veux juste corriger que ce n'est pas le chiffre cumulatif. 1,3 milliard, c'est
ce qu'en 2027-2028... c'est l'écart,
1,3 milliard, ce n'est pas un chiffre cumulatif, là. Et, si vous le
rapportez sur votre 42 milliards, vous êtes à 2 %, vous êtes à
2 %.
Le Président (M. Bergman) : À
l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bon, M. le Président, je veux juste répéter.
Il a raison, ce n'est pas un chiffre cumulatif, parce qu'à chaque année
on a réussi à le compenser.
M.
Hébert : ...député
de Jean-Talon…
Le Président (M. Bergman) : À
l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre...
M.
Hébert : Bien oui,
mais...
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je sais que... C'est correct, M. le
Président. Ça fait que je ne sais pas si vous voyez la problématique...
Le Président (M. Bergman) :
Une seule... Une personne a la parole, c'est M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Je ne sais pas si vous voyez, mais, à ce
moment-là, on a besoin de capitaliser ou pas?
Le Président (M. Bergman) :
M. Millette.
M.
Millette (Yves) : L'approche
que nous avons fait en sorte qu'on couvre l'ensemble des soins de longue
durée et pas uniquement les services qui pourraient être rendus. Si vous avez
besoin… Vous allez avoir, à long terme, besoin de d'autres centres de soins de
longue durée, vous allez avoir besoin… Donc, il y a des augmentations de
dépenses qui vont être faites.
• (17 h 40) •
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …troisième partie qu'on va traiter. La troisième partie, si je pars
avec votre principe, c'est que le régime d'assurance autonomie qui va
être mis en place va être un régime qui ne couvrira pas le tout. Puis d'ailleurs,
dans le projet, on ne sait pas jusqu'à quel niveau il va couvrir et on ne sait pas, également,
la contribution de la personne qui va avoir des revenus, jusqu'à
quel montant elle va payer. Puis, l'exemple, je pense que… Puis c'est
l'exemple d'aujourd'hui, là. Si vous êtes en CHSLD, que vous possédez
plus que 4 000 $ ou
5 000 $ et que vous avez le moindrement des revenus, votre cotisation, quand vous êtes en
CHSLD, est d'au plus 21 000 $, donc la personne doit payer le
21 000 $. Si vous êtes un couple
qui résidez dans un condo ou dans une résidence, si un des deux se retrouve en
CHSLD, il y a un montant de 21 000 $ qui est chargé
automatiquement.
Et, si je
comprends, c'est que vous autres, vous pourriez compenser certains services
comme celui-là ou encore d'autres
services qui ne sont pas donnés par l'assurance autonomie. Parce qu'encore là
on parle de besoins à 100 %, mais on ne sait pas à quel niveau ça
va être couvert parce qu'on n'a pas encore fait les calculs actuariels,
probablement. Donc, si on couvre à
60 %, il y a un 40 % qui ne sera pas couvert. Et il y a également,
dans le principe qu'on a là, un montant qui va être donné par l'usager
pour les services qu'il va recevoir, s'il a des revenus suffisants. Donc, le
type de services que vous pourriez offrir, ça se situerait à ce niveau-là, pour
compenser ce que le régime ne paie pas.
Le Président (M. Bergman) :
M. Millette.
M. Millette (Yves) : C'est exact,
là, c'est exact, mais il ne faut pas oublier que les assurances privées ne couvriront pas l'ensemble de la population, vont
couvrir ceux qui souscrivent une assurance. Donc, il va toujours rester
des augmentations de fou pour les personnes qui n'ont pas les moyens de le
payer, le 21 000 $.
Donc, nous,
ce qu'on pense, c'est qu'évidemment ceux qui sont riches, ils ont le moyen de le
payer, ils n'ont même pas besoin
d'assurance privée, les gens de la classe moyenne, ils ont probablement besoin
d'avoir recours à une assurance ou à
l'aide de tiers pour couvrir la contribution, mais on est bien conscients qu'il
y a une large partie de la population qui ne peut pas le faire et donc qui va devoir émarger au régime public, un peu
comme on le voit pour l'assurance médicaments, et donc, à ce moment-là, oui, les coûts vont augmenter. Je ne pense pas
que les coûts vont être juste absorbés par le privé.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Oui. M. le Président, pour répondre au
ministre, quand on parle du cumulatif, bien c'est à chaque année qu'on
combat le 3/10 de 1 %. Donc, ton montant qui est montré ici — d'ailleurs
c'est les chiffres du ministre qu'on a
ici — qui est
115 millions, 126 millions et 133 millions, c'est à chaque année
qu'il faut réussir à aller chercher la performance du réseau, du système
pour réussir à contrecarrer ça. Donc, à la fin… Mais, encore là, c'est toujours un chiffre sur 14 ans. Ça peut
donner un écart, mais c'est à chaque année que le réseau a besoin de faire un
effort.
C'est-u comme
ça que vous… Vous ne l'avez pas vu, le graphique, mais c'est-u comme ça que
vous l'analyseriez?
M.
Millette (Yves) : Oui. Sauf
que, si je comprends bien le document, le livre blanc, le montant dont vous
parlez est un montant qui est limité aux soins qui seraient donnés pour… aux
augmentations pour les soins à domicile, ne comprendrait
pas nécessairement des coûts supplémentaires pour des nouveaux CHSLD, des
nouvelles résidences, etc. Donc,
nous, quand on parle… Je vous ai fait un chiffre annualisé tantôt. Évidemment,
ce n'est pas sur les mêmes périodes et
c'est vraiment juste à titre comparatif, mais nous, on parle de
2,7 milliards. Donc, il manquerait encore des sommes à contribuer à
ce tableau, au tableau qui est là.
Donc, peut-être que vous arrivez… on peut
arriver à la conclusion qu'on n'a pas besoin… qu'on peut utiliser uniquement la méthode «pay-as-you-go» pour
transformer les soins en soins de… les transformer ou favoriser le
maintien à domicile, mais je ne pense pas que ce soit l'ensemble des soins de
longue durée qui soit couvert par ça.
Le Président (M. Bergman) :
M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : Bien, moi, ce que je comprends, où est-ce que
vous auriez une niche probablement, c'est
qu'on va couvrir des services pour une grande partie de la population, il va y
avoir des cotisations qui vont… les gens
vont être obligés de payer parce que l'allocation ne couvrira pas
nécessairement tous les services, tout dépendant de vos revenus, et, pour ces gens-là, ça pourrait
être utile, mais, la personne qui théoriquement n'a pas de revenu et puis
qui n'a pas, également, d'avoir, la majorité des soins ou presque la totalité
des soins vont tout simplement être couverts. C'est à partir du moment que tu
as un certain revenu…
M. Millette (Yves) : …par le public,
effectivement, oui.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) : …ou
que tu as un certain avoir que tu vas être obligé de payer, et là votre
assurance pourrait venir en complément à ce niveau-là.
Pour ce qu'il
s'agit du choix, je pense que c'est ce qu'on veut au Québec,
on veut que les gens restent à domicile le plus longtemps possible,
on veut que ce soit leur choix, mais, s'ils veulent aller en résidence privée,
ils devraient avoir le droit d'aller
dans résidence privée. Et, lorsque quelqu'un est en perte d'autonomie puis
qu'il n'est pas capable de rester à domicile ou en résidence privée,
bien là on a les ressources type ressource intermédiaire… ou à la fin
possiblement qu'il y a un 2,5 % chaque année,
de 100 personnes de 65 ans et plus, qui va être obligé d'aller en CHSLD. Mais
ce qu'il faut voir, c'est notre évolution de notre système de santé.
Auparavant, ces gens-là passaient des années dans les CHSLD, mais au moment où ils entrent en CHSLD actuellement,
habituellement, s'il y en a 35 % à 40 % qui décèdent à chaque année dans nos CHSLD, c'est signe que c'est
des gens qui sont souvent plus vers leur fin de vie. Ça fait que ça, c'est
l'orientation du réseau de la santé qui a été commencée depuis déjà plusieurs
années mais qui se poursuit. Et l'assurance
autonomie, je pense, comme bien des principes, puis je pense qu'on est tous
d'accord avec les grands principes, maintenant
c'est comment on le finance, combien quelqu'un va contribuer et puis également
la pérennité du système sur un 20 à 25 ans où, là, on doit
discuter. Merci, M. le Président. C'est tout.
Le Président (M.
Bergman) : Alors, pour le deuxième groupe d'opposition, Mme la
députée d'Arthabaska.
Mme
Roy (Arthabaska) : Merci. Merci de votre mémoire, de votre
présentation. Moi, je suis porte-parole aux services sociaux et aux
aînés mais aussi famille. Donc, j'ai entrepris des travaux ces derniers temps
et puis, sur les dépenses de consommation
des familles, je me suis rendu compte… Si on regarde la taxe santé, on dit que
quelqu'un qui gagne plus de
40 000 $ est riche, au Québec. Je ne partage pas nécessairement cette
opinion-là. Par contre, j'ai regardé pour
un modèle familial d'à peu près deux adultes, deux enfants, 60 000 $
de revenu familial. En prenant les dépenses reliées aux familles sur la base de Statistique Canada, ce qu'il reste
de marge de manoeuvre pour les familles, là, sans mettre de poste pour placer de l'argent, je veux
dire, faire de l'épargne, c'est 2,70 $ par jour. Ça, c'est s'ils ne fument
pas, s'ils ne prennent pas d'alcool, s'ils ne font pas de folies.
Bon,
la tendance est à l'effet que les ménages s'endettent, à l'heure actuelle, les
familles s'endettent. Pour être capables
de et épargner ou se prendre une assurance supplémentaire, ce n'est pas la
classe moyenne, c'est à peu près… J'aimerais ça, pour voir, là… Votre
solution, là, on va toucher combien de personnes à peu près de la population du
Québec? Parce que je pense que ça va être un petit peu à la marge.
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette
(Yves) : C'est pour ça que je faisais un rapprochement avec les
régimes de retraite tantôt, il y a déjà 50 % des gens qui n'ont pas
suffisamment d'épargne pour se payer des régimes de retraite, et donc on a
besoin d'augmenter les régimes publics, notamment pour les soins de longue
durée. Et on peut le faire, mais il faut aller chercher les blocs à l'intérieur des régimes de retraite ou
l'épargne-retraite. Mais il faut aussi avoir des régimes d'assurance vie
ou des régimes d'assurance invalidité qui vont permettre d'accumuler, avec le
temps, des sommes.
Il
y a beaucoup de ces choses-là qui sont faites sur une base collective avec
votre employeur à l'heure actuelle, et, à l'heure actuelle, ces choses-là sont abandonnées quand vous avez
65 ans. Donc, est-ce qu'il est possible de transformer ces
produits-là pour les continuer? Vous avez déjà contribué, votre employeur a
contribué. Est-ce qu'il est possible de les transformer? C'est là que vous
allez aller en chercher, de l'épargne. Parce qu'évidemment, si vous la prenez,
l'épargne, au niveau de l'individu, il n'y en a pas beaucoup. Mais, si vous
allez au niveau de l'État, l'État n'a pas nécessairement
non plus le moyen d'augmenter indéfiniment les prestations pour les services.
Donc, il y a une obligation de trouver
des nouvelles façons de faire, et on pense qu'à l'intérieur des cadres des
avantages fiscaux qui sont offerts, que ce soit pour la retraite ou les
autres, ou à l'intérieur des programmes existants il y a peut-être moyen de
réorganiser les services. Et la caisse
autonomie en est une, façon de réorganiser les services de façon à maximiser
l'argent qui est dans le système à l'heure actuelle.
Mais
il est évident qu'on ne peut pas inventer de nouvelle façon de faire pour une
personne qui… deux adultes, deux enfants, sinon que, lorsque les enfants
ont quitté le foyer, il y a peut-être une partie d'épargne qui est possible. Donc, nous, on pense que la plupart des produits
qui sont offerts vont être offerts à des personnes de 45 ans et plus.
On veut les offrir avant 65 ans parce
qu'ils deviennent inabordables, mais, à partir de 45 ans, il y a peut-être
un transfert de dépenses pour élever votre famille à pour penser à votre
retraite qui peut être fait.
• (17 h 50) •
Mme Roy
(Arthabaska) : Là où je partage votre raisonnement, c'est que,
si on regarde les dépenses reliées aux ménages, l'item qui a le plus augmenté,
c'est taxes et impôt, dans les dernières années, la plus grosse proportion. Ça fait
que, si on se fait un plus gros régime public, bien là c'est certain qu'il se
mord la queue, là. Ça va… Il
n'y a pas d'autre façon de faire que de s'améliorer en termes d'efficience.
Je pense que peut-être le paiement par épisode de services — pas
de soins, qu'on entend souvent — va peut-être introduire une compétitivité
qui va être un facteur de productivité. Et j'espère que ça va être le cas, qu'il…
Le Président (M.
Bergman) : M. Millette.
M. Millette (Yves) : On est d'accord. Les dépenses de santé dépassent… ont atteint à peu près
50 % du budget des
gouvernements, et c'est certain qu'il y a des limites à ce qui peut être fait
là. Donc, c'est pour ça qu'il faut penser à des
réallocations de services, de dépenses, autant du privé que du public. Et, dans
ce sens-là, on trouve que l'assurance perte d'autonomie est une bonne
approche.
Mme Roy
(Arthabaska) : Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, M. Millette, M. Langlois,
M. Bédard, merci pour être avec nous aujourd'hui. Merci pour votre
présentation et partager vos expertises avec nous.
Compte tenu de l'heure, la
commission ajourne ses travaux jusqu'à mardi le 29 octobre 2013, à
10 heures, afin de poursuivre les
consultations particulières et les auditions publiques sur le livre blanc sur
la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.
Bonne soirée. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 52)