(Dix
heures trois minutes)
Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté
le quorum, je déclare la séance de la
Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
téléphones cellulaires.
La
commission est réunie afin de poursuivre ses consultations particulières sur le
projet de règles abrogeant la disposition qui prohibe la vente, le
service et la consommation de boissons alcooliques à l'intérieur des aires de
jeux.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Non, M. le Président, aucun remplacement.
Auditions (suite)
Le Président (M.
Bergman) : Alors, collègues, ce matin nous entendons le ministre des
Finances et de l'Économie, et cet après-midi nous entendrons le ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Alors,
M. le ministre, vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, suivi
d'un échange de 90 minutes avec les
membres de la commission. Il y aura 40 minutes pour le groupe formant le
gouvernement, 40 minutes pour le groupe formant l'opposition
officielle et 10 minutes pour le deuxième groupe d'opposition.
Alors, M. le
ministre, bienvenue à notre commission. Et vous avez 10 minutes pour votre
présentation.
M.
Nicolas Marceau
M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, écoutez, tout d'abord, j'aimerais
vous saluer, évidemment, saluer la
secrétaire de la commission, les collègues du gouvernement, les collègues de l'opposition
aussi. Je suis accompagné de gens du ministère des Finances, de gens de
Loto-Québec et puis de personnel de mon cabinet.
Alors, M. le
Président, nous devons garder le cap sur les cibles que nous nous sommes
fixées, notamment l'atteinte de l'équilibre
budgétaire en 2013‑2014 et les années suivantes. Au dernier budget, nous
avons réalisé que, pour atteindre cet
objectif, des redressements supplémentaires étaient nécessaires, puisque nous
avons hérité d'une impasse budgétaire importante pour les années 2013‑2014
et 2014‑2015. Si aucun geste n'était posé, nous aurions observé un manque à
gagner de 1,4 milliard de dollars pour 2013-2014 et de 2,8 milliards
de dollars pour 2014‑2015.
Tout l'appareil
gouvernemental est mis à contribution, et les ministères, bien entendu, mais
également les organismes et les sociétés d'État. Nous demandons également des
efforts aux sociétés d'État, notamment à Loto-Québec,
car Loto-Québec, M. le Président, verse 100 % de son bénéfice net au
gouvernement en dividendes. En 2011‑2012, ce sont 1,3 milliard de dollars qui ont été versés au profit de la
collectivité, dont 1,2 milliard de dollars en dividendes. Or, le
dividende versé par Loto-Québec diminue depuis le niveau de 1,5 milliard
de dollars observé en 2005‑2006.
Depuis sa création,
le défi de Loto-Québec consiste à réaliser ses objectifs commerciaux tout en
réduisant au minimum les effets néfastes du jeu sur la santé publique. Le
pouvoir d'attraction de Loto-Québec doit cependant lui permettre de susciter l'intérêt
des Québécois en général et plus particulièrement de la clientèle attirée par l'offre
de jeu des juridictions limitrophes et de
sites illégaux non sécuritaires. Or, l'analyse des données présentée dans les
enquêtes sur les habitudes de jeu de 2002 et de 2009 montre un déplacement des
dépenses de la population adulte des jeux de hasard
et d'argent offerts par Loto-Québec vers le jeu illégal. En 2009, le poids
relatif des dépenses de jeu à Loto-Québec était de 68 %,
comparativement à 83 % en 2002. En parallèle, les Québécois ont augmenté
de 17 % à 32 % leur part dans le
jeu illégal ou non étatisé. La tendance que l'on détecte de ces estimations est
non équivoque : la part relative des jeux qui ne sont pas offerts
par Loto-Québec ne cesse d'augmenter.
J'ajoute quelques
mots à ce que vous a dit ma collègue de Sainte-Rose la semaine dernière
concernant les efforts déployés chaque année par Loto-Québec pour canaliser les
joueurs vers le jeu légal et reconquérir la clientèle perdue au bénéfice d'autres juridictions et de sites illégaux. Je réfère
ici aux investissements importants réalisés dans les casinos d'État afin de les rendre comparables à
ceux d'autres juridictions. À ceux de 306 millions de dollars réalisés
au Casino de Montréal, décision prise, rappelons-le, par l'ancien gouvernement.
À ceux de 50 millions de dollars pour revitaliser
les installations du Casino du Lac-Leamy, décision prise, rappelons-le,
également par l'ancien gouvernement. Je
réfère aussi aux efforts pour la construction du casino du Mont-Tremblant. C'est
également l'ancien gouvernement qui, voulant améliorer la compétitivité
du casino, avait pris cette décision. Ce casino accueille maintenant plus de 500 000 visiteurs annuellement, dont environ
10 % proviennent de l'extérieur du Québec. De plus, l'an passé, les
libéraux ont apporté une modification législative — que nous avons d'ailleurs
appuyée — afin
de permettre à Loto-Québec d'obtenir la certification de ses équipements de jeu
dans les mêmes délais que ses concurrents.
Les milieux économiques ne sont pas les seuls à
comprendre la demande qui nous est faite par Loto-Québec. J'aimerais lire, si
vous le voulez bien, un extrait de l'éditorial de Jean-Robert Sansfaçon publié
en fin de semaine dernière — et j'ouvre les guillemets : «Dans tous les casinos du monde, l'alcool
fait partie du divertissement que sont les jeux de hasard. Partout… sauf dans le seul endroit où le personnel est
formé pour intervenir au besoin : les casinos publics de
Loto-Québec. Quel paternalisme absurde!» Et je ferme la citation.
Laissez-moi aussi vous citer un passage de la
lettre d'appui de tous les membres du conseil d'administration de Loto-Québec, nommés par le précédent
gouvernement, que je trouve éloquent — j'ouvre les guillemets : «Partout dans le monde, la consommation d'alcool dans un casino
fait partie des exigences de la clientèle. En effet, cette cohabitation
de l'alcool et du jeu est pratiquée partout sauf au Québec.
«Est-ce que
cela veut dire que nous serions les seuls à être conscients des problèmes
reliés au jeu excessif ou encore que nous serions les seuls à ne pas
être en mesure de gérer une telle situation? Bien sûr que non!»
Tout comme
moi, tous ces acteurs veulent que les investissements publics réalisés dans les
casinos du Québec profitent aux Québécois. Par conséquent, il sera ainsi
permis, à l'instar de toutes les autres juridictions en Amérique du Nord, de vendre, de servir et de consommer de l'alcool
dans les aires de jeux des casinos du Québec, tout en maintenant les
mesures existantes pour prendre en charge les situations problématiques.
Au Canada, tous les casinos sont des casinos d'État…
pardon, tous les casinos, sauf des casinos d'État… Excusez-moi, cette phrase
est mal rédigée. Ce que je veux dire, c'est qu'au Canada, donc, tous les
casinos autorisent l'alcool dans les aires
de jeux des casinos, sauf au Québec. Cela n'empêche pas ces provinces de
présenter des taux de joueurs pathologiques comparables à ceux du
Québec.
• (10 h 10) •
Permettez-moi d'ailleurs de déposer un
tableau — en
fait, je le déposerai à la fin de mon allocution, si vous le permettez — de déposer un tableau montrant le taux de joueurs
pathologiques dans chacune des provinces canadiennes. Les données de ce
tableau proviennent du Canadian Gambling Digest 2011‑2012.
Les gens, souvent, parlent de Loto-Québec comme
d'un monopole. Ceci est un autre mythe. Par exemple, les casinos sont loin d'être seuls dans leur domaine,
la concurrence territoriale est de plus en plus importante et agressive.
La concurrence a explosé. En 1993, il y avait 14 casinos dans notre marché
de concurrence; on compte maintenant près de
80 maisons de jeu à à peine quelques heures de voiture de Montréal. Les
compétiteurs ont investi des milliards de dollars dans ces maisons de jeu. À ce sujet, puisqu'une
image vaut mille mots, je vous déposerai également une carte montrant l'état
de la concurrence en 1993 et une autre montrant cet état de concurrence en
2013.
Dans l'élaboration
de la nouvelle stratégie de la Société des casinos du Québec, la société s'est
mise à l'écoute des besoins de sa
clientèle, et, parmi les exigences de cette dernière, il est demandé
régulièrement de pouvoir consommer de l'alcool
dans les aires de jeux. Présentement, les clients peuvent prendre un verre dans
les bars et restaurants des casinos mais pas à une table de jeu. À cet
égard, il faut savoir que les casinos du Québec sont les seuls casinos en
Amérique du Nord à prohiber la consommation d'alcool dans les aires de jeux.
Sur le continent, plusieurs casinos offrent même gratuitement et à volonté l'alcool
dans les aires de jeux. Je vous présenterai également un tableau vous montrant
cela dans quelques minutes.
Alors, étant
donné les constats quant à la santé publique, le contexte de concurrence des
casinos, les retombées économiques et
les mesures de protection mises en place par Loto-Québec, le gouvernement juge
raisonnable de lever l'interdiction
de vendre, de servir et de consommer de l'alcool dans les aires de jeux des
casinos. Je tiens à vous assurer que Loto-Québec
continuera d'appliquer rigoureusement ses principes de commercialisation
responsable. Tout le personnel en contact avec la clientèle reçoit déjà
la formation requise pour assurer que la consommation d'alcool se fasse en
toute modération dans les établissements.
Cette pratique ne changera pas, et il n'est pas question qu'il y ait d'écart
là-dessus. J'ai d'ailleurs convenu avec mes collègues de la Santé et des
Services sociaux et de la Sécurité publique qu'un groupe de travail sera formé afin de surveiller la mise en
oeuvre de cette mesure. La levée de l'interdiction permettra à Loto-Québec
de compléter la mise en valeur de ses investissements dans les casinos d'État
afin de les rendre comparables à ceux des autres juridictions.
Je conclus
mon exposé en appelant l'opposition à faire confiance. Il faut faire confiance
à Loto-Québec lorsque son conseil d'administration nous informe que des
efforts sont requis pour rendre nos casinos plus concurrentiels. Il faut faire confiance à la direction de Loto-Québec
quand on assure que les moyens seront en place pour encadrer
adéquatement les joueurs. Il faut nous faire
confiance, nous sommes un gouvernement responsable. Nous nous assurerons d'un
suivi rigoureux des mesures qui seront mises en place dans les casinos et des
problématiques rencontrées. Et enfin, M. le Président,
il faut faire confiance aux Québécois, qui, pour la très grande majorité,
sauront, nous en sommes convaincus, s'amuser de façon responsable dans
nos casinos. Quand ils décident d'aller jouer dans les casinos d'État plutôt qu'ailleurs,
les Québécois dépensent ici, et c'est à tout le Québec que cela profite.
Alors, voilà, M. le Président. Je suis prêt à
déposer les documents que j'ai mentionnés dans…
Documents déposés
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre, est-ce que vous avez des documents à déposer?
Alors, maintenant, pour le 40 minutes pour
le gouvernement, pour le bloc formant le gouvernement, alors, Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. le ministre, ça me fait plaisir de vous saluer. Je salue
aussi mes collègues membres de cette commission. Bonjour à tous.
Écoutez,
M. le ministre, j'aimerais vous parler au niveau de la concurrence, j'aimerais
ça que vous preniez le temps de nous donner un peu plus de détails sur l'impact
de cette transformation de la concurrence pour les casinos du Québec. Si on part du
fait qu'au début des années 90, quand on a créé la Société des casinos, la
concurrence, en fait, les casinos
étaient en état pratiquement de monopole au Québec, maintenant ce n'est plus le
cas, et j'aimerais ça que vous nous parliez, nous dressiez un peu le
portrait de cette concurrence, où elle se trouve, qui elle est, de quel nombre…
il y a combien de casinos dans l'environnement du Québec et en fait que vous
nous parliez un peu de l'impact, l'impact sur le nombre de joueurs au Québec et
sur le déplacement de cette clientèle.
Alors,
on a parlé beaucoup, la semaine passée, que, dû à cette concurrence… Cette
concurrence peut être les États limitrophes, peut être les autres
provinces, peut être aussi les casinos illégaux. Donc, l'impact de cet
accroissement de la concurrence fait en sorte qu'on voit des joueurs qui en
temps normal pourraient se retrouver dans les casinos d'État, au Québec, et
devraient, même, se retrouver dans les casinos d'État, mais qui s'en vont jouer
ailleurs. Alors, pourriez-vous nous expliquer un peu, là, l'impact de cette
concurrence?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau :
Oui, merci, M. le Président. Tout d'abord, lorsque, dans mon exposé, j'ai
rappelé le fait que le dividende de Loto-Québec a diminué ces dernières années,
il a diminué de façon importante, et cela s'explique effectivement non pas par
le fait que les Québécois jouent moins… En tout cas, il n'y a aucun indice, il
n'y a aucun indicateur laissant croire que
les Québécois aujourd'hui jouent moins qu'ils ne le faisaient il y a trois ans,
cinq ans, 10 ans, il n'y a rien qui laisse croire ça. Cependant, ce
qu'on a comme indications, c'est que les Québécois jouent ailleurs.
Mais,
avant de vous donner quelques chiffres sur le fait qu'ils jouent ailleurs, j'ai
déposé des cartes qui montrent, par
exemple, qu'en 1993 il y avait 14 casinos, alors qu'aujourd'hui on en a
81… ou 14 maisons de jeu, si vous voulez. Cette carte est assez parlante, là. Une image vaut mille
mots, on dit souvent. Alors, à proximité de Montréal, à proximité du
Québec, il y a énormément d'endroits où les Québécois peuvent aller jouer. J'ai
une autre carte ici qui… je ne sais pas si
vous… Évidemment, c'est peut-être difficile pour ceux qui nous regardent à la
télévision, mais c'est les petits points rouges qui sont à proximité de
Montréal, à proximité du Québec, et on voit très bien qu'il y a un nombre très,
très élevé de ces petits points rouges. Donc, premier élément, là, il y a cela.
Deuxièmement, ce qui
est offert dans les casinos à proximité du Québec, c'est, tel que je l'ai dit,
un certain nombre de services que les Québécois s'attendent… que les gens s'attendent
à trouver dans les casinos. Bon, il y a la question de l'alcool, là, on en a
parlé déjà puis j'imagine qu'on va en parler beaucoup, mais j'aimerais insister
sur le fait que, dans plusieurs casinos à
proximité du Québec, l'alcool est servi gratuitement, à volonté. Il n'est pas
question de cela au Québec, là, il n'est pas question de ça. Dans notre
cas, il n'est pas question d'offrir de l'alcool gratuitement à la clientèle. On
n'en est pas là, loin de là.
Il est également,
dans certains casinos, permis de fumer, puis je voudrais que les gens le
sachent aussi, cela est possible dans
plusieurs endroits. Il n'est pas question de cela au Québec non plus. Et il est
même possible d'obtenir du crédit, dans plusieurs casinos, d'obtenir du
crédit, puis, encore une fois, il n'est pas question de cela ici.
Donc, on parle d'une
concurrence qui est féroce. On investit des milliards de dollars autour de
nous et on permet… donc on donne de l'alcool,
on permet dans certains endroits aux gens de fumer puis on permet, dans
certains cas, de donner du crédit.
Si vous voulez, je
vais vous parler un peu de la croissance des revenus de nos concurrents. Même
si l'Ontario affiche également une diminution de ses revenus, due
essentiellement à l'augmentation de la concurrence des casinos américains limitrophes, permettez-moi de citer
quelques taux de croissance observés au cours de la dernière année chez
nos concurrents : Rhode Island,
croissance de près de 3 %; en Pennsylvanie, près de 5 %; dans l'État
de New York, 43 %; dans le Maine, 67 %.
Au
New Jersey, où se trouve Atlantic City, les casinos ont aussi subi les effets
de la nouvelle concurrence, et leurs revenus
ont chuté de 8 %, mais ce serait une erreur que de se fier à l'évolution
des revenus d'Atlantic City pour conclure que la décroissance des
revenus est un phénomène qui s'observe dans l'ensemble des casinos. En fait,
même en considérant la baisse des revenus d'Atlantic City, on observe une
augmentation globale des revenus des casinos du Nord-Est américain. De 2011‑2012,
ils ont augmenté de près de 500 millions de dollars.
• (10 h 20) •
En
fait — puis
là j'aimerais aborder la question du taux de fréquentation des casinos par les
Québécois — partout
en Amérique du Nord, sauf au Québec, le taux de fréquentation des casinos est
environ de 25 %, en moyenne. Au Québec, le taux de fréquentation est passé
de 21 % à 17 %, 21 % à 17 %, ce qui est un glissement
important.
J'aimerais
juste… Je vais compléter mes chiffres dans quelques instants, mais j'aimerais
juste qu'on s'entende sur une chose de base, là. C'est qu'il y a un
consensus, je pense, au Québec qui a fait en sorte qu'il y a plusieurs dizaines
d'années on a mis en place Loto-Québec, puis
le consensus puis l'idée, je pense, qui rejoint, je crois, l'ensemble des
parties, c'est qu'on veut que le jeu s'effectue
dans le cadre légal et sécuritaire de Loto-Québec. C'est cette logique qui a
prévalu lorsque des casinos ont été mis en place, au début des années 90,
par le gouvernement de M. Bourassa, à l'époque. C'est également cette logique qui prévalait lorsqu'a été mis en place le
réseau d'appareils loto vidéo, également par un gouvernement libéral. C'est cette même logique qui prévalait lorsque des
investissements considérables ont été consentis pour rénover les casinos
ces dernières années, puis je sais que certains d'entre vous étaient députés…
ou même ministres, dans le cas du député de Jean-Talon qui était ministre de la
Santé.
Donc, M. le
Président, cet effritement, là, quand on voit que la fréquentation des casinos
est passée de 21 % à 17 %, cela
devrait faire sonner une cloche, là. Ça nous indique que ce consensus, cet
objectif qu'on s'est donné, comme société,
de faire en sorte que le jeu ne se passe pas à l'extérieur de nos casinos, qu'on
veut qu'au contraire le jeu se passe à l'intérieur du cadre sécuritaire
et légal de Loto-Québec, cette idée est en train de perdre du terrain, on est
en train de rater notre coup.
Alors,
je vous disais : Au Québec, 21 % à 17 %. Je voudrais que vous
sachiez qu'en moyenne, au Canada, c'est 25 %. Les chiffres que j'ai
vus, là, je ne les retrouve pas, mais, il me semble, c'est 27 % en
Colombie-Britannique puis 23 % en Ontario. Donc, il s'est passé quelque
chose au Québec. Je ne dis pas qu'il ne se passe rien ailleurs, mais partout les casinos et les sociétés d'État font
des efforts pour retenir leur clientèle à l'intérieur d'un cadre plus
sécuritaire.
Je pense que je vais arrêter là pour l'instant,
Mme la députée.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le ministre.
Vous parlez beaucoup d'éléments économiques dans vos réponses, et justement l'opposition a parlé beaucoup la semaine
dernière, en fait, qu'avec cette proposition-là de modification et de
pouvoir autoriser l'alcool dans les aires de jeux le gouvernement a fait un
choix économique au détriment de la santé de
la population. Et vous avez parlé tantôt… Et je vous souligne aussi que même le
Dr Arruda, qui est directeur national de la santé publique, a admis que la vision qu'il est venu nous présenter
était partielle puisqu'elle se limitait effectivement à la santé
publique, puisque c'est à ce titre qu'il est venu témoigner devant nous.
Vous avez
parlé tantôt, dans votre présentation, M. le ministre, de cette notion de
commercialisation responsable, c'est-à-dire de peser le pour et le
contre et de faire en sorte qu'un gouvernement puisse prendre des décisions en mettant dans la balance l'ensemble des dimensions,
l'ensemble des arguments, y compris aussi l'argument d'utiliser les revenus de la mesure proposée pour le bien commun,
avant de prendre une décision d'aller de l'avant avec ce que vous proposez. J'aimerais ça que vous nous parliez un
peu plus de cette notion de commercialisation responsable de la nouvelle
mesure et aussi en lien avec l'utilisation qui sera faite des revenus
additionnels que le gouvernement va recevoir et qui seront générés par la vente
d'alcool sur les aires de jeux.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau : Oui, merci, oui, une
très bonne question. En fait, il faut comprendre au départ que les revenus que Loto-Québec perçoit, les revenus que
Loto-Québec récolte servent à financer l'ensemble des services que nous
offrons à la population. On parle d'un dividende de 1,2 milliard, et il y
a donc une grande partie qui sert à financer les services que nous offrons à la
population. On parle de revenus de l'ordre de 1,2 milliard de dollars.
Par ailleurs,
il y a une partie des revenus qui servent à financer des programmes d'aide aux
personnes qui sont prises avec des problèmes de jeu. Il y a une
contribution annuelle de 22 millions de dollars en provenance de
Loto-Québec pour financer ces services-là. Également, Loto-Québec a mis en
place à l'intérieur même, au sein même de sa direction une vice-présidence au
jeu responsable de façon à ce que chacune des décisions prises par Loto-Québec
soit prise à l'aune de cette importante responsabilité qui est donnée à
Loto-Québec.
Je voudrais ajouter un certain nombre d'éléments.
Le premier, c'est parce qu'on parle de commercialisation responsable, et moi, j'aimerais
que les gens réfléchissent aussi au fait que le meilleur endroit pour combattre
le jeu irresponsable, c'est au sein des
installations de Loto-Québec, et que, lorsqu'on laisse les Québécois jouer à
l'extérieur de Loto-Québec, il y a également des problèmes de santé publique
qui surviennent, là. Ce n'est pas comme s'il n'y avait pas de nouveau… de
problèmes qui survenaient lorsque les gens vont jouer à l'extérieur. Or, le
meilleur endroit pour détecter les gens qui ont des problèmes, c'est dans le
cadre des installations de Loto-Québec.
Alors, quand on parle de santé publique, moi, je
veux bien qu'on s'inquiète des problèmes qui pourraient découler de mesures que nous avons prises puis des mesures qui ont été
prises également par l'ancien gouvernement… Je vous rappelle, là, les
investissements importants, l'ouverture de nouveaux casinos, le jeu en ligne,
la mise en place d'appareils de loto vidéo.
Tout ça, ça vient de l'ancien gouvernement libéral, bon, mais moi, je ne les
blâme pas, je pense que la logique
qui prévalait lorsque ces décisions ont été prises était la bonne. La logique,
c'était : Il y a des problèmes qui découlent du jeu pathologique,
on ne peut pas en faire abstraction. Il faut combattre ça. Il faut mettre en
place des mesures, il faut se donner des moyens pour détecter les gens qui ont
des problèmes. Puis, s'il y a un endroit où on peut détecter ces problèmes-là, c'est clairement chez Loto-Québec, alors
que nos concurrents ne sont pas assujettis à des mesures… à des contrôles aussi stricts, alors que nos concurrents ne
mettent pas en place des mesures aussi importantes pour combattre ces
problèmes-là.
Je vous
rappelle simplement rapidement que, chez Loto-Québec, il y a des dispositifs
qui ont été mis en place. Je vous en
dis deux, puis la liste est assez longue, puis je pourrais revenir, si vous le
voulez, mais, par exemple, il y a une formation qui est offerte à tous
les employés de Loto-Québec, et cette formation a pour objet de détecter des
joueurs qui seraient intoxiqués. Cela existe, et Loto-Québec se fait un devoir
de s'assurer que chacun de ses employés a les yeux
grands ouverts, pour s'assurer justement que des personnes intoxiquées ne
peuvent pas jouer dans les installations de Loto-Québec. Il y a également un programme d'autoexclusion qui fait en
sorte que les gens qui ont des problèmes peuvent s'inscrire, si vous
voulez, s'autoexclure, et ce programme est, je pense, efficace et il a donné
des résultats. Il y a beaucoup de personnes
qui se sont inscrites à ces programmes-là. Je pourrais vous trouver le chiffre,
mais on parle de… Si mon souvenir est bon, c'est près de… plus de
1 000 personnes qui se sont inscrites au programme d'autoexclusion de
Loto-Québec.
Donc, les problèmes
de santé publique, on ne peut pas faire abstraction de cela, cela existe. L'objectif,
par ailleurs, des mesures que nous prenons,
ce n'est pas d'augmenter l'offre de jeu, c'est, au contraire, de ramener vers
un cadre sécuritaire et responsable les joueurs qui sont présentement dans un
contexte de jeu qui n'est pas, lui, responsable puis qui est moins sécuritaire. Alors, quand on pense santé publique, il
faut penser à ça, là, il faut penser au fait qu'il va se développer des
problèmes de jeu plus importants si les Québécois jouent ailleurs que chez
Loto-Québec. Alors, ça, c'est
le raisonnement que nous faisons. Et je suis complètement convaincu, Mme la
députée, que c'était le raisonnement qui avait cours lorsque l'ancien
gouvernement a pris les décisions que ce soit d'ouvrir des casinos, que ce soit
de mettre en place des appareils de loto
vidéo, que ce soit de faciliter l'accréditation des nouveaux jeux. Que ce soit
l'expansion, puis l'agrandissement, puis la rénovation des casinos, c'est ce
raisonnement-là qui prévalait, puis je pense que c'était le bon. Voilà.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Bonjour, M. le Président. Merci. Mes collègues du gouvernement, de
l'opposition, M. le ministre, bonjour.
Alors,
M. le ministre, pourriez-vous nous parler des impacts touristiques que les
casinos ont sur l'offre touristique que
le Québec peut offrir? On sait actuellement aussi, avec le dossier, là, de la
vulnérabilité des casinos, qu'ils sont en perte de vitesse, on a observé aussi… il y a des données qui nous disent
qu'entre autres le Casino du Lac-Leamy serait peut-être un petit peu dans une position un peu
difficile, compte tenu qu'il y a une concurrence directe, là, du côté d'Ottawa,
où est-ce que présentement il y a juste des appareils de loterie vidéo, mais qu'on
s'apprête à offrir une offre de jeu plus vaste
qui pourrait menacer beaucoup l'offre qu'on offre au Lac-Leamy. Alors, au
niveau touristique, je pense que, pour le Québec, les casinos sont quand même… ont un effet attractif. Alors, j'aimerais
ça vous entendre parler sur ce sujet-là, parce que justement le casino d'Ottawa,
qui est à proximité de celui du Lac-Leamy, offre l'alcool aux aires de jeux.
Donc, à ce moment-là, la concurrence est vive dans ce secteur-là. Alors, j'aimerais
ça que vous puissiez nous faire un petit résumé de l'aspect touristique qui est
en lien avec les casinos.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau :
Combien il me reste de temps, M. le Président, pour ce bloc-ci?
Le Président (M.
Bergman) : Vous avez 24 minutes.
• (10 h 30) •
M. Marceau :
Oh, mon Dieu! O.K., c'est tranquille. O.K. Juste pour revenir un peu sur la
question de…
Le Président (M.
Bergman) : …pour les collègues, pour demander des questions.
M. Marceau :
O.K. Merci, M. le Président. Je vais ouvrir mon café, dans ce cas-là, je vais
pouvoir prendre ça mollo.
Je
voudrais… Vous avez évoqué la question de la concurrence puis la question du l'impact
touristique. Alors, je vais juste
compléter un élément de concurrence, parce que c'est important. Vous avez
mentionné Ottawa. Uniquement… Parce que je reviens sur l'aspect
concurrence, puis après ça je vais sur, donc, le tourisme. Mais uniquement dans
les deux casinos se trouvant dans un rayon
de 100 milles de Montréal, 160 kilomètres pour ceux d'entre vous qui
n'ont pas été… qui n'ont pas grandi avec le système métrique, donc…
pardon, qui ont grandi avec le système métrique, donc 100 milles,
160 kilomètres, les études effectuées en 2012 montrent que, sur un chiffre
total de 240 millions de ces deux casinos — alors, les deux
casinos auxquels je fais référence, c'est celui de Rideau Carleton, le racino
de Rideau Carleton, puis le casino d'Akwesasne — donc
dans ces deux casinos s'est dépensé, en 2012, 240 millions. Bien, M.
le Président, sur ces 240 millions, il y en a 52 qui proviennent de
Québécois, 42 millions qui proviennent… 42 millions qui ont été
dépensés à Rideau Carleton, et 10, à Akwesasne. Alors, écoutez, c'est 20 %
des dépenses dans ces deux casinos-là qui sont issues des poches des Québécois.
Alors, c'est de ça qu'on parle, là, O.K.? Bon.
Alors,
quant à l'impact touristique, maintenant, je veux revenir là-dessus. Je
dois vous dire que, pour les régions qui accueillent ces casinos,
évidemment, les casinos d'État représentent des joyaux, hein, ce sont des
joyaux pour… des joyaux touristiques. Et je
me dois d'insister ici, car, comme la vice-présidente de cette commission l'a
déjà mentionné, l'activité économique
générée par les casinos de Loto-Québec contribue au mieux‑être des Québécois.
Comme je vous disais, selon les
données colligées par Loto-Québec, en 2011‑2012 les casinos du Québec ont
généré 41 millions de dollars, 41 millions de dollars de retombées touristiques provenant de l'extérieur du Québec, 41 millions provenant de l'extérieur du Québec.
Et, à titre d'exemple, les clientèles provenant de l'extérieur du Québec
représentent un pourcentage important des visiteurs au Lac-Leamy,
représentent 16 % des visiteurs à Mont-Tremblant, 6 % des visiteurs
au Casino de Montréal et puis 4,5 % des
visiteurs au casino de Charlevoix, et la venue de ces touristes, évidemment,
représente autant d'injection d'argent neuf à l'économie du Québec.
Également,
l'attrait des casinos permet d'inciter les touristes à prolonger leurs séjours
au Québec. Alors, pensons, par exemple, au montant additionnel qu'un
touriste, qu'un couple de touristes dépense lorsqu'il choisit par plaisir, après avoir visité le casino, de prolonger son
séjour d'une journée. Ça pourrait être dans n'importe quelle région,
mais je vous donne par exemple la région de Charlevoix.
Alors, M. le
Président, plusieurs associations et regroupements de gens d'affaires m'ont
écrit afin de signifier leur appui au projet
de modification réglementaire et de sensibiliser les parlementaires à l'importance
d'y donner suite. Les arguments qu'ils invoquent sont simples et ils
sont vrais : ils veulent que les casinos continuent de contribuer au
développement touristique et économique de la région. Et évidemment, dans
toutes ces régions, on a constaté le fait que les casinos attirent moins qu'auparavant.
Alors, dans chacune de ces régions, les gens veulent que la clientèle se maintienne. Ils veulent que les Québécois
continuent à jouer dans le cadre sécuritaire et responsable des casinos
d'État du Québec, dans les régions du Québec, et non pas à l'extérieur, dans
des contextes qui sont moins sécuritaires.
Alors,
je vais vous donner simplement une petite et courte liste de gens qui nous ont
écrit pour nous dire qu'ils appuyaient
cette idée, là, cette modification réglementaire que nous proposons. Alors, M.
le Président, il y a la Chambre de commerce de Charlevoix, Tourisme
Charlevoix, Tourisme Mont-Tremblant, L'Office des congrès et du tourisme du Grand Montréal, Tourisme Outaouais, la Chambre de
commerce de Gatineau, le professeur émérite de la Chaire de tourisme
Transat de l'UQAM, M. Michel Archambault, et la ville de Gatineau, dont le
maire mentionne que «permettre la consommation d'alcool dans l'espace jeux
assurera un meilleur positionnement du Casino du Lac-Leamy face à ses concurrents directs que sont les casinos
ontariens, qui ont cette possibilité, d'autant que le gouvernement ontarien
envisage l'implantation d'un autre casino à
Ottawa. Les touristes souhaitent retrouver dans les casinos du Québec le même
service que dans le reste du Canada et du
monde.» Et, M. le Président, j'ajouterais à ces appuis que s'ajoute celui de la
Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
Alors, M. le
Président, ces gens qui nous ont écrit sont des gens intelligents,
raisonnables, préoccupés, évidemment, du
développement régional, du développement de leur région. Ils sont conscients
des difficultés qui ont été rencontrées par les casinos ces dernières
années. Ils sont conscients comme moi, j'en suis conscient puis comme, j'espère,
tous les parlementaires en sont conscients.
Ils sont
également conscients que la solution qui consiste à ne rien faire, hein, à ne
rien faire, à dire : On laisse les choses telles qu'elles sont puis on continue à constater l'effritement
de la clientèle vers des contextes non sécuritaires, bien ce n'est pas
une solution qui a du bon sens. Ça contrevient au consensus qui s'est établi au
Québec depuis 50 ans, qui veut que les gens jouent à l'intérieur des
casinos de Loto-Québec. Et donc ils nous demandent de réagir, et c'est ce que
nous faisons.
Par ailleurs, je suis persuadé, je suis persuadé
que ces mêmes personnes, mêmes personnes ont écrit ou auraient écrit à l'ancien gouvernement s'il avait hésité à aller de l'avant
avec les mesures qui ont été mises en place, qui étaient des bonnes
mesures. Je suis persuadé que ces mêmes personnes auraient écrit à l'ancien
gouvernement, parce que ça va de… c'est la
logique même que de s'assurer qu'on ne laisse pas les gens jouer dans un
contexte irresponsable, dans un contexte non sécuritaire. La chose à
faire, la chose intelligente, c'est de ramener les gens dans le giron de
Loto-Québec, puis de prendre les revenus, puis, le cas échéant, de s'assurer
évidemment — puis
on le fait — que
de façon sécuritaire on vérifie, on surveille puis on met tout en place pour s'assurer
de détecter les gens qui ont des problèmes de jeu. Voilà.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci, M.
le ministre. Dans aussi un autre ordre d'idées… C'est-à-dire que, durant
la fin de semaine, on retourne dans nos
circonscriptions. Donc, on a l'occasion de jaser et de se mettre en contact
avec les citoyens, et tout ça. Et
justement, dans ma circonscription, on me faisait part en fin de semaine, lors
d'une conférence de presse, à quel
point Loto-Québec était présent au niveau de la population, parce que justement
on organise présentement… vendredi le Relais pour la vie dans la région
de Terrebonne, et que Loto-Québec allait contribuer pour amasser, pour le cancer, une somme assez importante. Donc, les
gens sont conscients très bien, là, du retour que Loto-Québec fait
auprès de la population avec les revenus qui
sont accumulés dans les casinos, alors… Et j'ai eu l'occasion aussi de jaser
avec un groupe de personnes qui me disaient à quel point on est, au Québec, un
peu retardataires dans permettre l'alcool aux aires
de jeux puis qu'on est perdants beaucoup au détriment des autres provinces, et
des casinos illicites, et des endroits, là, où les gens désertent et
vont jouer.
Aussi, ça m'a
permis, en fin de semaine, de regarder un peu comment ça se passait dans les
casinos quand il était question qu'il
y ait de l'alcool aux aires de jeux, et c'est très évident qu'on m'a confirmé
qu'il n'y aurait pas de tolérance d'intoxication aux tables de jeu. Je
pense qu'il y a une éthique quand on joue, parce que je me suis renseignée
aussi là-dessus. Même pour les autres
joueurs à une table, il est inacceptable que des joueurs soient assis à une
table de façon intoxiquée, qui permet… qui dérange le jeu, parce que les
gens, quand même, qui jouent ont l'habitude de jouer, ont quand même une
rigueur dans leur jeu, puis c'est quelque chose qui est intoléré aux tables.
Donc, j'ose
croire, avec la nouvelle avenue de la tolérance de… bien, pas la vente mais…
oui, la vente, c'est ça, d'alcool aux aires de jeux, que cette
dimension-là va être respectée. Parce qu'on sait que Loto-Québec, l'an dernier,
sur 5 millions de présence dans ses
casinos, il y a eu 306 cas d'intoxication identifiés. Et les gens sont
appelés à passer un test, et le test est obligatoire, là, la personne
qui est identifiée comme étant intoxiquée n'a pas l'opportunité de se désister de ce test-là. Donc, il est très
important… Et, à ce moment-là, il y a toute une procédure que Loto-Québec
fait, soit de reconduire les personnes par
le biais d'un taxi, si elles ne sont pas en mesure… S'ils préfèrent prendre le
métro, les gens sont retournés au métro, ou sinon, dans les cas
extrêmes, la police est appelée.
D'ailleurs, je pense que la semaine dernière M.
le député de… je ne sais pas…
Une voix : …
Mme
Gadoury-Hamelin :
…Bourgeoys, Marguerite-Bourgeoys, c'est ça, est venu poser ces questions-là précisément, et il a eu les réponses auxquelles il
s'attendait. Dans ce sens-là, j'ose croire que… Si on va aller avec l'alcool
aux aires de jeux, j'imagine que Loto-Québec va poursuivre dans ce sens-là.
Et ce qui
nous dit aussi que, dans les autres casinos au Canada… On est en train de se
faire dire qu'au Québec, finalement,
on serait peut-être moins responsables que dans les autres provinces du Canada,
parce qu'on a quand même un taux qui est très acceptable, là, de
tolérance au niveau du jeu pathologique, et que, quand on regarde les chiffres
dans les autres provinces du Canada également, les taux sont semblables. Donc,
ça veut dire que nous, au Québec, on a quand même réussi à contraindre le jeu
pathologique, il n'y a pas d'excès. Et, quand les autres provinces offrent de
l'alcool aux aires de jeux, ça n'a pas eu d'incidence directe, là, énorme sur
la différence du jeu pathologique.
Est-ce que
vous êtes en mesure de nous confirmer, M. le ministre, qu'on va continuer dans
ce sens-là si l'alcool dans les aires de jeux se retrouve au sein des
casinos de Loto-Québec?
• (10 h 40) •
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre, il vous reste 12 minutes.
M. Marceau : O.K. Je vais devoir
aller plus rapidement maintenant. Merci, M. le Président. Alors, oui,
effectivement, écoutez, cet engagement du gouvernement, cet engagement de
Loto-Québec à maintenir les efforts pour
détecter les problèmes d'intoxication, cet engagement, il est ferme.
Évidemment, le corollaire de cette mesure, là, c'est que, si on décide d'aller de l'avant avec une
mesure comme celle-là, la contrepartie responsable, c'est de s'assurer
qu'on va être vigoureux, on va être
déterminés dans l'application des règles qui permettent la détection des
clients qui sont intoxiqués.
Je voudrais
quand même revenir sur un élément que vous avez mentionné, qui est celui qu'au
Québec on est des gros joueurs, ou qu'au Québec on joue plus qu'ailleurs,
ou qu'au Québec on a plus de problèmes. La réalité est tout autre. La réalité,
elle est tout autre.
Il y a un
mythe, là, qui veut que les Québécois soient de gros joueurs. Or, si on
regarde… Écoutez, il y a plein d'indicateurs
possibles de cela, ce n'est pas simple, là, mais un des indicateurs, c'est la
quantité d'argent qu'on dépense dans une année, et là-dessus, au Québec,
on a une dépense moyenne de 583 $ par année en jeu, alors que la moyenne
canadienne, elle est de 770 $. Donc, on dépense moins que les gens des
autres provinces, au Québec.
Un autre mythe, c'est qu'au Québec on a plus de
problèmes, c'est-à-dire qu'il y a plus de personnes qui développent des problèmes de jeu pathologique, et en fait la réalité, c'est
qu'on a le plus faible taux du Canada, on a le plus faible taux du Canada. Et le taux, en fait, là, c'est
7/10 de 1 % de joueurs qui, donc, développent ces problèmes de jeu.
Évidemment, dans un monde idéal, ce serait
0 %, là, j'en suis entièrement, j'en suis entièrement, mais ce n'est pas vrai qu'en laissant les gens jouer hors
du giron de Loto-Québec… que les choses vont s'améliorer, au contraire,
au contraire. Lorsque les gens jouent à l'extérieur
du cadre responsable de Loto-Québec, les problèmes sont plus à même de
se développer, les problèmes ne sont pas détectés, et on encourage, dans les
autres casinos, la consommation d'alcool par
de l'alcool gratuit, on encourage le fait que les gens restent dans les casinos
par l'offre de crédit, ce que nous ne faisons pas. Nous, on n'est pas du tout dans ce monde-là. Nous, au contraire, on
détecte les gens qui ont des problèmes. Quand on voit quelqu'un qui
semble intoxiqué, on l'avertit, puis on le prend à part, puis on lui dit que ce
n'est pas une bonne idée de continuer à jouer.
Donc, on fait
des choses que d'autres ne font pas. Alors, non seulement on dépense moins, non
seulement on a moins de problèmes, mais en plus de ça on a des
programmes vigoureux pour s'assurer que les problèmes ne se développent pas.
Là-dessus, j'aimerais
vous donner quelques chiffres sur les mesures qu'on a, les mesures d'accès, si
vous voulez, au casino pour les clients qui sont intoxiqués. Alors, l'accès
aux casinos est interdit, c'est aussi simple que ça, c'est interdit aux clients qui démontrent à leur arrivée
qu'ils sont sous l'influence des boissons alcoolisées. Et c'est comme
ça, puis ça ne va pas changer. De plus, les personnes qui éprouvent des
problèmes de consommation à l'intérieur, une fois
qu'ils sont entrés, sans pour autant éprouver des difficultés de jeu, sont
aussi exclus pour une période pouvant même aller jusqu'à quelques années, dépendant des faits qui entourent la
situation. Donc, ça peut dépendre des comportements, des antécédents.
Alors, si on
prend, par exemple, le Casino de Montréal comme exemple, le casino a accueilli
près de 5 millions de visiteurs au cours de la dernière année. De
ce nombre, il y a eu 306 incidents, vous l'avez mentionné, là, qui ont été
reliés à des personnes intoxiquées, et ça,
ça représente 0,005 % des visiteurs. Pour 55 incidents, 55, l'accès
aux visiteurs a été refusé à l'entrée du casino, et, pour les autres,
ils ont été traités à l'intérieur du casino.
C'est donc
dire, là, que, soyons bien clairs, et à l'entrée et à l'intérieur
il y a des gens qui sont là pour détecter. Alors, ce n'est pas comme si quelqu'un pouvait rentrer, puis après ça
pouvait se mettre à prendre un coup, puis qu'il ne se passe rien, là. Il
y a du monde à l'entrée puis il y a du monde à l'intérieur qui surveille.
Alors, ce n'est pas… Puis, je vous le répète, tous les employés ont reçu une
formation.
Alors, pour
vous permettre de bien comprendre le type d'intervention fait par nos employés,
je vais vous donner deux exemples.
Premier exemple : un client intoxiqué joue
à une table de jeu. L'agent de sécurité est appelé et rencontre le client. Par ses agissements, on lui demande de
passer l'alcootest afin de vérifier s'il peut poursuivre le jeu. Le client
échoue le jeu, se voit interdire le droit de jouer et doit quitter l'établissement.
Le client quitte en autobus.
Ce n'est pas
compliqué. C'est comme ça que ça marche puis c'est comme ça que ça va marcher,
O.K., il n'est pas question de déroger à cette pratique.
Deuxième
situation : un client intoxiqué refuse de quitter en taxi, service de
raccompagnement ou par autobus. On fait alors appel aux corps policiers.
Alors, carrément, là, on fait appel aux corps policiers.
Alors, je
vous fais grâce des 250 autres interventions qui ont eu lieu, mais je veux
vous rassurer et je veux vous assurer,
je vais rassurer les Québécois, là, il n'est pas question de laisser des gens
intoxiqués jouer, ce n'est pas quelque chose que nous envisageons, d'aucune
manière. Ce qu'on veut, je le répète, je le réitère, c'est s'assurer que les
Québécois jouent précisément là où on fait attention.
À l'inverse, à l'inverse, Mme la députée, ce qui
se passe dans les autres casinos, ce qui se passe chez la concurrence… Je ne vais pas porter de… je vais me
limiter dans les propos que je vais exprimer là-dessus, mais je peux
vous dire que rien ne me laisse croire que des mesures comme celles que nous
avons mises en place sont en vigueur ailleurs. Alors, les gens qui ont des problèmes de
jeu puis qui s'en vont jouer dans des endroits où ils peuvent… où on
leur offre de l'alcool gratuitement, bien on comprendra la suite des choses
lorsqu'il n'y a pas les mesures extrêmement responsables que Loto-Québec met en
place.
Le Président (M. Bergman) : Merci.
M. le député d'Argenteuil.
M. Richer : Merci, M. le Président.
Chers collègues, M. le ministre, madame et messieurs du ministère et de Loto-Québec. M. le Président, à mon avis… J'en ai
parlé la semaine dernière, j'ai une grande inquiétude sur… C'est un
risque majeur, de ne pas encadrer les joueurs potentiellement pathologiques. M.
le ministre, vous en avez parlé abondamment,
nos casinos sont les endroits les plus sécuritaires pour le jeu, et, sous
prétexte de ne pas mettre certains joueurs à risque en situation de
devenir des joueurs pathologiques, on ferme les yeux, on se met la tête dans le
sable, on les laisse dans la nature sans
aucun encadrement, aucune protection. Donc, j'y vois, juste sur le plan
économique, un double effet pervers,
c'est que les revenus de Loto-Québec vont continuer à diminuer, et ces
joueurs-là, qui vont développer des pathologies en plus grand nombre,
bien, vont revenir pour des suivis dans nos maisons spécialisées et vont coûter
beaucoup de sous au gouvernement du Québec. Donc, on ne règle pas le problème
de santé, on les laisse aller, mais il faudra s'occuper de leurs problèmes de
santé après. Donc, on diminue les revenus et on augmente les dépenses.
• (10 h 50) •
M. Marceau : Vous avez entièrement raison,
vous avez entièrement raison, on s'achète des problèmes en ne faisant rien. On
s'achète des problèmes parce qu'effectivement le jeu pathologique peut fleurir
dans un contexte non sécuritaire, alors qu'il
est contrôlé dans un contexte sécuritaire. Puis par ailleurs, les revenus, ce n'est
pas nous qui les récoltons. Alors, ce
que vous avez présenté, selon moi, ça correspond précisément à ce qui se passe.
Le statu quo n'est pas quelque chose de raisonnable.
Par ailleurs,
je vous rappelle que, nous, il n'y a pas de cigarette, il n'y a pas d'alcool
gratuit, il n'y a pas de crédit. C'est quand même des éléments
importants.
Au niveau de…
Si on faisait une hiérarchie des niveaux de sécurité des différentes
organisations qui offrent du jeu, j'aimerais vous rappeler que
Loto-Québec a obtenu le plus haut niveau de sécurité qui puisse être obtenu de
la World Lottery Association. Alors, la certification que Loto-Québec a
obtenue, c'est une certification de niveau 4. C'est la plus élevée qu'on puisse obtenir. Alors, nécessairement, lorsqu'on
permet aux gens d'aller jouer ailleurs, c'est nécessairement dans un
contexte qui est moins sécuritaire.
Et
effectivement ce que vous dites, encore une fois, je pense que ça résume très
bien la situation. On s'achète des problèmes, parce qu'effectivement les
problèmes de jeu pathologique sont plus à même d'éclore et de fleurir ailleurs que chez nous, puis on n'a pas les revenus. Alors,
il vaut mieux s'assurer de ramener les gens chez nous, s'assurer de les
ramener, et tel que, d'ailleurs… Je le réitère, puis je le répète, puis je
pense que je vais le redire à plusieurs reprises, là : C'est la façon qu'on
a convenu de faire au Québec depuis des dizaines d'années.
Il y avait
deux enjeux, en fait, hein? J'aimerais bien… J'aimerais être clair. Il y avait
toute la question, évidemment, de la
santé publique qui faisait en sorte qu'on voulait que les gens jouent chez
Loto-Québec. Il y avait aussi, évidemment, la question du jeu illégal,
la question, là, du crime organisé qui, lorsqu'on laisse… Lorsqu'on laissait le
jeu hors du cadre de l'État, bien évidemment
c'est le crime organisé qui prenait le contrôle. Et donc, de manière à empêcher
que le crime organisé prenne le contrôle du jeu, on a voulu s'assurer
que ça se fasse dans un cadre intelligent qui est celui de Loto-Québec.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M.
Marceau : D'ailleurs, la
logique qui a prévalu, là, si je peux conclure là-dessus, c'est la logique
aussi qui a prévalu lorsque l'ancien
gouvernement a mis de l'avant le jeu en ligne. On sait que le jeu en ligne, c'est
quelque chose de très populaire
aujourd'hui, et, lorsque l'ancien gouvernement est allé de l'avant avec le jeu
en ligne, ce n'était pas parce que l'ancien
gouvernement voulait que plus de Québécois jouent. Enfin, j'ose croire. En tout
cas, le député de Jean-Talon est là, je suis persuadé qu'il va me dire
que ce n'était pas parce qu'ils voulaient que plus de Québécois jouent. Je
pense que l'objectif, raisonnable et intelligent,
c'était que les gens cessent de jouer sur des sites qui étaient illégaux puis
qu'ils viennent plutôt jouer sur les sites de Loto-Québec. Je pense que
c'était ça, la logique, parce qu'on sait que certains de ces sites illégaux là servent à alimenter des fins qui ne
sont pas tout à fait honorables, on va dire ça comme ça, alors que,
nous, les fins sont honorables. Ça sert, entre autres, au financement des
services publics.
Le
Président (M. Bergman) : M.
le député d'Argenteuil, il vous reste une minute pour la question et la
réponse.
M. Richer : Ah, une petite question
rapide, M. le Président.
Je comprends
qu'on est la seule province qui ne permet pas la vente d'alcool dans les aires
de jeux. Donc, est-ce qu'on devrait conclure que les gouvernements des
autres provinces canadiennes sont irresponsables?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre, il reste seulement une minute pour la réponse.
M. Marceau : Non, évidemment pas,
là, les autres gouvernements ne sont pas irresponsables. Je pense que cette pratique, qui a cours partout en Amérique du
Nord puis partout à travers le monde, est une pratique que la plupart
des gens essaient d'encadrer. Je vous le répète :
Nous, on a le niveau de certification le plus élevé. Je pense qu'on peut
dire qu'on a le niveau
de responsabilité le plus élevé. Cela étant, d'autres aussi font des efforts,
puis je pense que la lutte au jeu pathologique, c'est une inquiétude
pour l'ensemble des gens qui sont responsables de gérer le jeu. Cela étant,
nous sommes exemplaires, et je pense qu'on peut nous faire confiance.
Le
Président (M. Bergman) :
Merci. Alors, pour le groupe formant l'opposition officielle, 40 minutes,
M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M.
le Président. Bonjour, M. le ministre. Bienvenue, les collègues du
gouvernement, les collègues de mon équipe et les collègues de l'autre
opposition.
M. le
Président, j'étais un petit peu étonné, parce que le ministre, il dit quelque
chose au début puis il dit le contraire à la fin. Ça fait qu'on va demander, voir la clarification. Au début,
vous avez dit qu'on n'était pas meilleurs que les autres au niveau du
nombre de joueurs pathologiques ou du taux de pourcentage de joueurs
pathologiques et, à la fin, vous avez fait un plaidoyer pour dire que nous
étions les meilleurs. C'est quoi, votre position? Est-ce que nous sommes les
meilleurs ou nous ne sommes pas les meilleurs?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau : Là, je ne me suis pas
rendu compte si je me suis contredit. C'est une bonne question.
Alors, effectivement, on a des taux… J'ai dit
deux choses, là. J'ai dit que, premièrement, les dépenses par Québécois sont
plus faibles qu'ailleurs, la fréquentation de nos casinos est plus faible qu'ailleurs,
puis que le nombre de… la proportion de joueurs pathologiques est plus faible
qu'ailleurs. Ça, c'est la première des choses que j'ai dites.
Deuxièmement,
il y a quelque chose qui se passe depuis quelques années qui laisse croire,
selon moi, en tout cas, que, si on
laisse les choses aller, ça ne demeurera pas ainsi, et ce quelque chose qui se
passe, cette inquiétude qui m'habite puis
cette inquiétude qui habite le gouvernement puis qui devait vous habiter aussi,
vous aussi, lorsque vous étiez au Conseil des ministres puis que vous
avez autorisé des dépenses de 350 millions de dollars pour rénover les
casinos, lorsque vous étiez au Conseil des
ministres… Non, vous n'étiez peut-être pas là pour le jeu en ligne… Non, vous
étiez là pour le jeu en ligne, si mon
souvenir est bon. Vous aviez certainement cette inquiétude de voir le jeu se
déplacer vers des contextes non sécuritaires.
Alors, tout ce que je dis, c'est : Nous avons des chiffres qui sont bons.
Cependant, il y a un glissement de la clientèle vers un contexte non
sécuritaire. On sait que nous sommes responsables puis qu'on a un contexte de
jeu sécuritaire chez Loto-Québec, vaut mieux
ramener les gens vers là de manière à maintenir ces chiffres qui sont très
bons.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, merci,
M. le Président. Le ministre a fait mention qu'il faisait confiance,
mais toutes les personnes qu'il a nommées,
ce sont toutes des personnes qui ont des intérêts à ce qu'il y ait plus d'argent
dans les casinos, indépendamment de savoir
si la clientèle vulnérable va avoir des problèmes ou pas. Ici, en commission,
M.le ministre, nous avons eu des
groupes d'experts au niveau des services sociaux, au niveau également des
problématiques de jeu, des gens qui
proviennent du domaine universitaire, des gens qui proviennent du terrain, et
ils sont unanimes à dire que Québec
avait les meilleures pratiques jusqu'à maintenant, mais que l'arrivée d'une
pratique telle que la consommation d'alcool dans les aires de jeux va
faire un glissement, justement, vers plus de risques pour cette clientèle-là,
et on va probablement perdre notre statut de meilleures pratiques.
Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a
consulté les différents groupes qui sont en relation avec les problématiques du
jeu?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau : Oui. J'aimerais savoir
si le député de Jean-Talon… quelle était la logique, lui, qui prévalait lorsqu'il
a…
Des voix : …
M. Marceau : Non, mais c'est à cause
qu'on me demande quelle logique prévaut, là.
Le Président (M. Bergman) :
Excusez-moi, M. le ministre. Mme la députée de Gatineau.
Mme
Vallée : On est en
consultations. Je pense que le député de Jean-Talon pose des questions. C'est
au ministre de répondre, et non au ministre de poser des questions au
député de Jean-Talon.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau :
Oui. Sur les questions de santé publique, je veux juste répéter que les
problèmes de santé publique se manifestent, que les gens jouent chez
Loto-Québec ou que les gens jouent à l'extérieur de chez Loto-Québec, et c'est de se mettre la tête dans le
sable que de croire qu'on va faire mieux en laissant les gens jouer à l'extérieur
du contexte sécuritaire de Loto-Québec. C'est
ce que je vous ai dit à plusieurs reprises. Et, pour ce qui est des
questions, évidemment,
moi, j'ai consulté mes collègues du Conseil des ministres, et on a
collectivement réfléchi à cette question-là, puis on est arrivés à la conclusion que la chose sage à faire, c'était
de faire en sorte que les Québécois reviennent vers le giron de
Loto-Québec.
D'ailleurs,
je ne vous pose pas la question, mais je vous soumets bien humblement que je
suis convaincu que c'était la logique qui prévalait lorsque vous avez
autorisé des investissements de 350 millions de dollars pour vous assurer de rénover et de rendre plus attrayants les
casinos de Loto-Québec, que c'était la logique qui prévalait également
lorsque vous avez décidé de permettre le jeu
en ligne, lorsque les gouvernements antérieurs ont permis l'ouverture de
nouveaux casinos, lorsque les appareils loto
vidéo ont été mis en place. C'était la logique qui prévalait, j'en suis
certain. Et moi, encore une fois, je ne vous
pose pas la question. J'en suis entièrement convaincu, j'en suis entièrement
convaincu. Et puis la logique, c'était :
On ne veut pas augmenter le nombre de joueurs, on veut que les joueurs
québécois jouent chez Loto-Québec. C'est deux choses distinctes.
Et,
encore une fois, lorsque les gens jouent, lorsque les gens jouent, on voudrait
que le taux de jeu pathologique qui se
développe soit nul, on voudrait cela. Cela étant, les gens jouent, et la façon
de minimiser le taux de jeu pathologique, c'est de s'assurer qu'ils jouent au bon endroit. Et c'est la raison, j'en
suis convaincu, pour laquelle, lorsque vous étiez ministre de la Santé,
vous avez autorisé ces investissements de 350 millions de dollars.
Le Président (M.
Bergman) : …s'adresser à la présidence, et certainement le ministre
aussi, à la présidence.
M. Marceau :
Aucun problème.
Le Président (M.
Bergman) : Et on peut continuer, M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président. C'est une logique qui est
complètement différente. Mais, M. le Président, j'aimerais demander au
ministre : Est-ce qu'il a lu l'avis de la Santé publique?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau : J'ai lu des résumés de ces avis-là. Je n'ai pas lu les textes de tout
cela, là, mais on m'a informé des inquiétudes de la Santé publique. Et
évidemment, comme toute personne intelligente, puis, j'estime, je fais de mon
mieux là-dessus…
M. Bolduc
(Jean-Talon) : …possible que le ministre s'en tienne…
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon, on va laisser le ministre
répondre à la première question.
• (11 heures) •
M. Marceau :
C'est ça. Regardez, M. le Président, je pense que l'idée des études de la Santé
publique, là… Puis là je vais
résumer, M. le Président, évidemment, puis je ne prétends pas faire honneur
complètement à l'ensemble des informations qui sont contenues dans ces
travaux-là. Puis j'ai le plus grand respect aussi pour la science puis pour la
connaissance, je vous l'affirme avec conviction. Cela étant, il y a deux
phénomènes qui sont à l'oeuvre. Lorsque le nombre de joueurs augmente — et
ça, c'est la théorie du député de Jean-Talon puis c'est la théorie de l'opposition — lorsque le nombre de joueurs augmente, ça se
traduit par plus de joueurs qui ont des problèmes. Ça, c'est une façon
de voir les choses. La deuxième façon de voir les choses, c'est de se
dire : En rendant plus attrayantes les installations de Loto-Québec, on va
ramener des gens qui jouaient dans un contexte non sécuritaire vers un contexte
sécuritaire. Alors, moi, je pense que cette
logique-là est plus adéquate, elle est plus pertinente. Et donc, pour ce qui
est de l'éclosion d'un problème de santé publique, je pense qu'il y a plus de
danger à rester dans un contexte de statu quo, c'est-à-dire à continuer à constater l'effritement de la clientèle de
Loto-Québec, que d'agir et de faire en sorte que les gens viennent vers
Loto-Québec.
Puis encore une fois
je le réitère. Lorsque les anciens gouvernements libéraux ont pris des mesures
de façon à rendre plus attrayantes les
installations de Loto-Québec, je suis certain qu'il y avait des études qui
disaient : S'il y a plus de joueurs, ça va créer plus de problèmes,
mais il y avait aussi cette logique qui est celle à laquelle j'adhère, qui est
qu'il faut déplacer les gens puis les ramener vers Loto-Québec. Je suis
persuadé que cela était le cas, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre a pris
conscience que les experts sont venus témoigner ici, devant la commission, et
ont affirmé que c'était une des pires décisions à prendre que de laisser
consommer de l'alcool pendant que les gens jouent? Et est-ce que le ministre
est au courant que, cette clientèle-là, en jouant
plus — et
on ne parle pas de personnes intoxiquées — seulement le fait de prendre des consommations et
de jouer en même temps augmentait les
risques du jeu non seulement pour les joueurs pathologiques, mais pour tous les
joueurs qui se présentent puis qui jouent dans les aires de jeux?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Bolduc
(Jean-Talon) :
Est-ce que le ministre a pris conscience de ces témoignages?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Marceau : M. le Président,
je pense que, dans un contexte où Loto-Québec prend les moyens pour
détecter les joueurs qui pourraient être
intoxiqués, ces problèmes-là sont minimisés, alors que je pense que, si on
réfléchit dans l'absolu, sans tenir compte des efforts qui sont faits
par Loto-Québec, on n'arrive pas aux conclusions qui sont les conclusions
justes.
Par ailleurs, je reviens à ce que la Santé
publique pouvait penser. Moi, j'ai connaissance qu'il y avait des avis de la Santé publique qui allaient à l'encontre de
la mise en place du jeu en ligne chez Loto-Québec. Or, le député de
Jean-Talon, M. le Président, était à l'époque au Conseil des ministres,
ministre de la Santé, lorsque le jeu en ligne a été mis en place chez Loto-Québec. Il y avait des avis de la Santé publique,
mais la logique qui prévalait, qui est la logique qui est la bonne logique, était celle qu'encore une
fois il valait mieux agir que de s'enfermer dans un statu quo dans
lequel on permet au jeu pathologique d'éclore dans un contexte non sécuritaire.
Je suis convaincu que c'était… D'ailleurs, j'aimerais
bien qu'il nous en parle, le député de Jean-Talon, mais… Je sais que je ne peux
pas lui poser de question, mais j'aimerais juste le ramener à la logique
qui certainement était celle qui prévalait lorsque ces décisions ont été
prises, M. le Président.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : M. le
Président, je rappelle qu'il y a une grande différence entre des gens qui
jouent puis qui consomment en même temps… Et
également nos experts — et je pense que le ministre a dit qu'il respectait
l'avis des experts — ont
dit que les gens qui vont être formés vont être capables de détecter les
intoxications importantes, mais la personne qui est tranquille, qui est calme
et qui consomme de l'alcool va consommer plus au niveau du jeu, va dépenser
plus et va dépenser plus longtemps. Les gens sont venus nous confirmer ça ici,
M. le ministre.
J'aimerais ça
savoir : Est-ce que vous êtes conscient du risque que vous apportez pour
les joueurs pathologiques mais également pour toute la population, qui
va jouer plus, va s'endetter plus, pour aller chercher à la fin un montant
supplémentaire qui va nous coûter aussi un montant important au niveau des
services sociaux? Est-ce que vous êtes conscient de ça?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau : M. le Président, je vais juste revenir à la
question du jeu en ligne, là, parce qu'évidemment — vous vous en doutez bien, M. le Président — lorsque
les gens jouent à la maison, ils jouent dans le contexte qu'ils veulent bien. Puis s'ils veulent prendre un verre, puis s'ils
veulent… S'ils veulent prendre un verre, en tout cas, entre autres
choses, là, ils peuvent le faire, hein, lorsque les gens jouent en ligne à la
maison.
Alors, encore une fois, je ne sais pas comment
le député de Jean-Talon a réagi aux avis de la Santé publique à l'époque, lorsqu'on lui disait : Oui, mais,
si vous permettez aux gens de jouer en ligne, ils vont être capables de
prendre un verre en même temps qu'ils font
du jeu en ligne. Je ne sais pas comment le député de Jean-Talon a réfléchi à
l'époque puis qu'est-ce qu'il a fait des avis de la Santé publique. Je ne sais
pas s'il était conscient de ces avis de la Santé publique. J'imagine que oui, j'imagine
que oui, mais il s'est certainement dit à l'époque, comme je me le dis aujourd'hui,
qu'entre un statu quo dans lequel les gens jouent à l'extérieur du contexte
plus sécuritaire de Loto-Québec…
Parce que, sur le jeu en ligne, je veux juste
être au clair : Loto-Québec a mis en place des dispositifs dans le software,
là, si vous voulez, dans la façon dont le jeu se déroule pour détecter les gens
qui développent de mauvaises habitudes de jeu en ligne, ce qui fait que, si
quelqu'un, justement, joue de façon qui semble inappropriée puis a des patterns de jeu qui correspondent à du jeu pathologique,
bien, dans ce cas-là, le site déclenche, et puis il y a des choses qui
se passent.
Alors, je ne sais pas si à l'époque le collègue
de Jean-Talon était conscient de ces avis de la Santé publique, mais je pense
que c'est important…
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre…
M. Marceau : Alors, le parallèle…
Mme Vallée : Question de règlement.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre, il y a une question de règlement.
Mme Vallée : Là, on est sur la
question, on est sur une question très précise et on gruge du temps précieux. Est-ce qu'on peut revenir sur le service des
boissons alcoolisées dans aires de jeux, s'il vous plaît? On a des
questions, M. le Président, nous.
Le Président
(M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau, ça fait partie de tout le dossier, alors je
permettrai au ministre pour répondre. M. le ministre.
M. Marceau : Excusez-moi, M. le
Président, mais je n'ai pas compris votre décision.
Le Président (M.
Bergman) : Continuez votre réponse, ça fait partie du dossier.
M.
Marceau : O.K., parfait,
merci. Écoutez, oui, j'essaie de faire des… je pense que c'est important qu'on
fasse des parallèles, qu'on comprenne le contexte dans lequel les décisions sont
prises, qu'on regarde le résultat des décisions
passées et puis qu'on s'informe du passé pour prendre des décisions plus
judicieuses aujourd'hui. Je pense que ce sont des choses tout à fait
normales.
Je pense aussi qu'il y a une continuité dans l'État.
L'État québécois, évidemment, aujourd'hui, c'est nous qui sommes… c'est le gouvernement du Parti québécois, mais il y a eu une
époque où c'était le gouvernement du Parti libéral, avant ça c'était le Parti québécois, et ainsi de
suite. Et des décisions ont été prises à travers le temps, puis la
continuité de l'État, c'est quelque chose à laquelle je crois. Il y a des
décisions qui ont été prises, et aujourd'hui je suis devant un état de situation, je suis devant un état de fait
et je dois agir en conséquence de ce que j'ai devant moi. Et ce que j'ai
devant moi, ça résulte, entre autres, des
décisions qui ont été prises par l'ancien gouvernement puis par le gouvernement
précédent.
Alors, il y a
une décision qui a été prise au Québec, M. le Président, qui a été prise au
début des années 90 d'ouvrir des casinos. Elle a été prise, cette
décision, parce qu'on voulait que justement les Québécois jouent chez nous puis
que les… Puis, comme le disait le député d'Argenteuil,
on ne veut pas avoir les dépenses qui découlent du jeu pathologique puis pas les revenus. On veut avoir évidemment les
revenus pour s'assurer de financer nos services, financer la lutte au
jeu pathologique. Puis on veut que les gens… On veut avoir des dépenses
moindres, on veut avoir des dépenses moindres
qui sont liées au jeu pathologique en s'assurant que les gens jouent au bon
endroit. Et c'était cette logique-là qui a prévalu.
Et, encore une fois, je reviens sur le jeu en
ligne, M. le Président…
Le
Président (M. Bergman) : Je
vous demanderais que les réponses soient courtes, car les questions sont
courtes.
M. Marceau : O.K. Bien, je pense que
vous avez compris le sens de ma réponse, là, donc je vais m'arrêter là-dessus.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le
Président. Est-ce que le ministre a discuté avec le ministre de la Santé
et des Services sociaux des impacts et des risques que représente cette
décision de consommation d'alcool dans les aires de jeux?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Marceau : M. le Président,
le gouvernement parle d'une seule voix. Alors, évidemment, je suis un
membre du gouvernement, cette décision a été prise par le gouvernement, et il
va de soi que nous avons pris les décisions à la suite de discussions entre
nous.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le
Président. Ce que je comprends puis ce que le ministre vient d'affirmer,
c'est que le ministre de la Santé et des Services sociaux était d'accord avec
la décision du ministre des Finances.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
M. Marceau : …
Le Président (M. Bergman) : Ce n'était
pas une question, mais on vous donne…
M. Marceau : Ah! O.K., c'est
correct. Je réagirai à la prochaine question, il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
• (11 h 10) •
Mme
Vallée : Merci, M. le
Président. Alors, je voudrais, M. le ministre, peut-être mettre des trucs en
perspective, parce que vous avancez beaucoup
d'éléments à l'effet que la clientèle particulièrement dans la région de l'Outaouais,
la clientèle outaouaise, se sauve vers
Ottawa, vers le racino d'Ottawa Carleton, et vous basez entre autres votre
décision sur cette fuite-là de la clientèle, mais je voudrais tout simplement
reprendre des chiffres, des données très objectives qui proviennent tant des
rapports trimestriels du racino Ottawa Carleton et des rapports produits
par Loto-Québec.
Si on regarde l'évolution du chiffre d'affaires du
racino d'Ottawa Carleton et du Casino du Lac-Leamy, le racino, en 2008‑2009, avait un chiffre d'affaires de
141,9 millions; en 2011‑2012, 139,6 millions; en 2011‑2012,
129,7 millions. Eux aussi perdent de la clientèle. Le Casino de Lac-Leamy
est passé d'un chiffre d'affaires, en 2008‑2009, de 267 millions à, 2011‑2012, 257,4 millions; 2011‑2012,
239 millions. Alors, les revenus annuels de ces deux… du Casino du
Lac-Leamy ont diminué de 27,9 millions, à peu près 10,4 %, et pendant
cette période-là, du côté d'Ottawa, les revenus ont chuté de
12,2 millions, 8,6 %. Alors, la population de l'Outaouais, tant du
côté ontarien que du côté québécois, a diminué ses
dépenses dans les casinos. D'accord? Et, si on regarde la population, parce qu'il
faut aussi voir, regarder dans ces
chiffres-là aussi, la population, la portion québécoise de la population en
Outaouais représente 25 % de la population, la partie ontarienne
représente 75 % de la population, donc, pour tout ça. Alors, si on regarde
ces données-là, ce n'est pas tout à fait
exact, vos affirmations ne sont pas exactes. Vos affirmations sont… Vous
basez votre décision sur des éléments qui ne sont pas précis.
Et, si on
regarde les revenus des casinos et les dépenses clients, là, les revenus du
Casino du Lac-Leamy et du casino de Rideau Carleton, c'est
397 millions en tout et partout, 75 % du côté ontarien, 25 % du
côté québécois. Peu importe si on regarde
les gens qui traversent la rivière. D'un côté comme de l'autre, la concurrence,
l'analyse de tout ça, c'est qu'on
favorise le Casino du Lac-Leamy. On ne favorise pas Ottawa, on favorise la
concurrence du Lac-Leamy. Alors, prétendre
qu'en autorisant l'alcool dans les aires de jeux vous allez récupérer cette
clientèle-là, permettez-moi d'en douter.
Puis ça m'amène à la question : Est-ce que
vous avez, M. le ministre, une étude qui démontre que c'est cette mesure-là de
permettre le service et la vente de boissons alcoolisées dans les aires de jeux
qui va aller récupérer la clientèle? Est-ce
qu'il n'y aurait pas d'autres mesures qui pourraient être mises en place par
Loto-Québec pour attirer la clientèle?
Parce qu'on a réussi quand même… Nonobstant nos mesures de sécurité, on a
réussi, au Québec, à attirer des joueurs à l'intérieur de nos casinos
parce qu'on avait une offre particulière. Est-ce qu'il n'y a pas d'autre façon
de faire? Et quelles sont les études sur lesquelles vous vous êtes basé, M. le
ministre, pour décider que c'était la chose à faire plutôt que toute autre
mesure?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Marceau : Oui. Alors, vous
avez affirmé que les chiffres que j'ai présentés n'étaient pas tout à fait
exacts. Je me permets de vous dire que les
chiffres que j'ai présentés sont exacts. Cependant, évidemment, nous pouvons,
vous et moi, les interpréter de manière différente, ce qui est une chose
distincte. Alors, je pense que nous les interprétons de façon différente, tout
simplement.
Je vais commencer par vous rappeler que le taux
de fréquentation de nos casinos est passé de 21 % à 17 %, premier phénomène, là. Alors, on peut le nier.
Vous pouvez le nier, si vous le voulez. Moi, ce sont des chiffres qui me
sont fournis par Loto-Québec, et j'ai toute raison de croire que ces
chiffres-là sont exacts. Donc, le taux de fréquentation de nos casinos a diminué de 21 % à 17 %. Pendant ce temps-là,
en Ontario, c'est 23 %. Et, au Canada, le Québec est la seule juridiction qui a vu son taux de
fréquentation diminuer. Au Canada, c'est la seule juridiction qui a vu son
taux…
En Ontario,
un phénomène qui semble s'être produit, c'est que se sont multipliés le nombre
de casinos, ce qui fait que la part de marché de chacun d'entre eux a
peut-être évolué, là. Parce qu'on en a ouvert plusieurs. J'ai une liste ici où
il y en a énormément, là, il y en a 25 en Ontario.
Maintenant,
je ne suis pas capable de vous dire ce qui s'est produit particulièrement dans
le cas du racino que vous mentionniez,
là, je ne suis pas capable de vous dire pourquoi dans ce cas-ci il y a eu une
baisse de revenus, mais ce que je sais,
c'est qu'il y a une… bien, enfin, une explosion… il y a beaucoup, beaucoup de
casinos et racinos en Ontario. Encore une fois, on parle de 25.
Par ailleurs,
je vous disais qu'il y a des juridictions limitrophes qui ont aussi gagné. Dans
l'État de New York, on parle de 43 % de gain. Alors, il y a des
gens qui quittent.
Et une autre
chose que je voulais vous dire, que je n'ai pas pu évoquer dans le passé — puis
je vais arrêter là-dessus parce que je veux vous donner des réponses
courtes, là : il y a deux à trois autobus, deux à trois autobus qui
quittent Montréal à tous les jours pour aller à Atlantic City. Première chose
que je veux que vous sachiez. Deuxième chose : il y a un vol direct Air Canada Montréal-Las Vegas aussi à tous les
jours. Alors, écoutez, il y a des gens qui jouent à quelque part, là,
alors la… Mais évidemment, dans ce cas-ci, ce que je veux juste que vous
sachiez, c'est qu'il y a de la concurrence très, très forte. Partout, partout,
partout ces gens-là offrent de l'alcool dans les casinos.
Cela étant, je reviens sur le casino que vous me
mentionniez. Ce que je sais, moi, c'est que la clientèle chez Loto-Québec est
en baisse, est passée de 21 % à 17 % de taux de fréquentation, et c'est
un phénomène qu'on n'a pas observé ailleurs au Canada.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Je réitère ma
question : Est-ce que vous avez des études, M. le ministre, sur lesquelles
vous vous basez pour choisir cette alternative-là plutôt qu'une autre
alternative afin d'attirer la clientèle?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau : Excusez-moi, j'étais…
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau, si vous pouvez répéter votre question.
M. Marceau : Je m'excuse, j'étais…
on me montrait des chiffres intéressants. Allez-y.
Mme
Vallée : En fait, je vous
répète ma question, M. le ministre, tout simplement : Sur quelles études
vous vous basez pour aller de l'avant avec la vente de boissons dans les
aires de jeux plutôt que de mettre en place une autre offre de services pour
attirer la clientèle?
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau :
Là, c'est une bonne question. Effectivement, l'ancien gouvernement, celui de M.
Charest et auquel le député de Jean-Talon
appartenait, avait mis de l'avant ces investissements fort importants de
350 millions de dollars, là. D'ailleurs,
on parle de 305 millions à Montréal, 50 millions au Lac-Leamy,
quelques millions à Charlevoix, ouverture
d'un restaurant aussi au Mont-Tremblant. Donc, ça participait d'une stratégie
plus large, plus globale qui avait, encore une fois, le même objectif
que celui que je poursuis aujourd'hui, c'est-à-dire de ramener les Québécois
vers les casinos québécois.
Maintenant,
une fois que cette étape a été franchie, la direction de Loto-Québec nous a… on
a eu des discussions avec la direction, puis ce sont les gens,
évidemment, qui sont les mieux informés sur l'état de la situation. C'est eux qui nous ont… On a regardé un certain nombre de
mesures. Ils nous ont dit : Nous autres, on estime que ça, ça… que
cette mesure qui consiste à vendre de l'alcool, ça peut se faire de façon
intelligente, ça peut se faire de façon sécuritaire. Et puis on est vraiment, là-dessus, les seuls en Amérique du Nord, ça n'a
pas d'allure, c'est sûr que ça rend moins attrayant notre produit. Donc, ils ont insisté sur le fait
qu'ils étaient capables, eux, de nous offrir… d'offrir de l'alcool de
façon responsable, de façon sécuritaire. Ça
a été la première préoccupation qu'on a eue dès le départ, et Loto-Québec nous
a assuré que cela était possible, qu'ils avaient l'expérience, les moyens, la
capacité de faire en sorte que ça ne pose pas de problème. Alors, à partir du
moment où nous avons été rassurés, on a accepté d'aller de l'avant.
Cela
étant, je pense que, s'il y a d'autres mesures dans le futur, évidemment, nous
les évaluerons. Pour l'instant… Moi, évidemment, je ne suis pas quelqu'un
qui est tous les jours dans Loto-Québec, là, je ne suis pas toujours… Moi, on m'informe. Je consulte les gens à la
direction, qui connaissent très bien comment ça fonctionne. Mais,
écoutez, je vous rappelle que beaucoup de
mesures ont été annoncées ces dernières années et qui vont dans le même sens.
Je me rappelle de la modification
réglementaire qui avait été adoptée l'année dernière ou il y a deux ans, visant
à permettre une certification plus rapide des nouveaux jeux. Ça aussi,
je n'ai pas l'impression que c'était sorti de la tête du député d'Outremont ou bien du député de Jean-Talon, à l'époque. Ça
lui a été suggéré par la direction de Loto-Québec, j'imagine, qui
disait : Faisons les choses intelligemment.
Alors, je m'arrête,
parce que je vois que vous êtes… vous voulez me poser d'autres questions.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée : Je comprends qu'il n'y a pas d'étude. Alors, je vais céder la parole à
ma collègue, qui, elle aussi, a des questions.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
• (11 h 20) •
Mme de Santis : Merci, M. le Président. Je dis aussi bonjour à tous mes collègues, et
au ministre, et à toutes les personnes qui l'accompagnent.
D'après le document
que le ministre même a déposé, Service d'alcool dans les casinos nord-américains, je vois que l'alcool est gratuit au New Jersey, mais je vois aussi
dans un autre document que le ministre a déposé, Revenus des casinos américains concurrents des casinos du
Québec… il y a eu, entre 2011 et 2012, un écartde moins
8 % dans les revenus des casinos
au New Jersey. Je vois mal là qu'on prouve qu'avoir de l'alcool va
nécessairement augmenter les revenus.
J'aimerais faire
référence maintenant au rapport annuel 2012 de Loto-Québec. D'après le rapport
même de Loto-Québec, on dit que «le secteur des casinos — je
lis à la page 13 — a
affiché des produits de 871 millions de dollars,
soit une hausse — pas une
diminution de revenus — de 1,7 % en comparaison du dernier exercice — 2011.
Les quatre établissements ont accru leurs
ventes. En effet, le Casino de Montréal, qui est en plein processus de
modernisation, a vu son chiffre d'affaires
augmenter de 1,3 %.» Et ça, c'est pendant la période de rénovation. Donc,
il y a peut-être des raisons que les gens ne veulent pas nécessairement
aller là maintenant, parce que c'est en rénovation.
Le Casino de
Lac-Leamy, le Casino de Charlevoix, le Casino du Mont-Tremblant ont également
connu des augmentations. On fait référence que le Casino de Montréal est en
plein processus de modernisation.
Je
crois… Si je réfère à la question de ma collègue, est-ce que vous ne croyez pas
que, s'il y aura une augmentation de revenus, ça va venir du fait qu'on
est en train de moderniser les casinos de Montréal et de Lac-Leamy? Et je me demande quelle portion des 40 ou 50 millions de
dollars additionnels par année va vraiment être attribuable au fait qu'il
y aura de l'alcool qui sera vendu dans les aires de jeux.
En
plus, dans le même rapport annuel, page 25, on dit qu'alors que l'industrie
des casinos à travers les États-Unis est à la baisse au Québec on a fait
beaucoup mieux.
Mais il y a une autre
chose. Quand on regarde, un des problèmes que Loto-Québec a eus, ça a à voir
avec son investissement en Europe. Le
dividende du Québec en 2012 a été de 1 196 000 000 $, ce
qui représente une réduction de 50,4 millions de dollars par
rapport à 2011. Mais vous savez pourquoi? Ça s'explique parce que le prêt qui
avait été fait en Europe a été dévalué par 59 millions de dollars, plus
que la diminution dans le dividende.
Alors,
quand on parle de chiffres, j'aimerais bien qu'on nous démontre les bons
chiffres. Si Loto-Québec est à la recherche de montants additionnels, de
revenus additionnels, pourquoi Loto-Québec ne revoit pas son investissement en Europe? Pourquoi Loto-Québec — ou
le gouvernement du Québec — ne
voit pas à éliminer les jeux illégaux auxquels nos joueurs au Québec ont présentement accès? Parce que, si on regarde
le glissement des joueurs au casino ou dans les jeux au Québec, ce n'est
pas envers Las Vegas ou New Jersey, c'est plutôt les jeux illégaux
qui se trouvent «online», et il y a des juridictions où on est en train de
faire des démarches pour diminuer l'accès à ces jeux illégaux.
Alors,
d'abord, pouvez-vous m'expliquer qu'est-ce que vous entendez faire avec les
investissements en Europe? Quelle portion des 40 ou 50 millions de dollars
en revenus supplémentaires va être vraiment attribuable à la vente d'alcool
dans les aires de jeux? Et qu'est-ce que vous entendez faire avec les sites
illégaux?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau :
O.K. Bon, bien disons qu'on… Ça me fait plaisir de m'éloigner du sujet, je
constate qu'on s'éloigne.
Sur les
investissements en Europe…
Des voix :
…
M. Marceau :
Bien là, regardez, là, je vais répondre au meilleur de mes capacités…
Le Président (M.
Bergman) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît,
collègues!
M. Marceau :
Je vais parler à vous, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : …vous adresser à la présidence.
M. Marceau :
Oui, c'est ça. Alors, tout d'abord, sur la question des investissements en
Europe, ce sont des décisions de l'ancien
gouvernement, j'aimerais le rappeler, qui n'ont pas été particulièrement heureuses,
qui ont mené à des pertes chez
Loto-Québec, et il n'y a pas de nouveaux investissements de notre gouvernement
en Europe. Alors, on vit avec un passif qui dépend de décisions qui ont
été prises par l'ancien gouvernement.
Évidemment, là, on
est après le fait, je peux constater que ça n'a pas été judicieux. Maintenant,
je ne vais pas blâmer, là. Je fais juste
constater que l'ancien gouvernement avait tenté… a permis à Loto-Québec de se
lancer dans cette aventure, et on a
perdu de l'argent là-dedans. Alors, écoutez, je ne suis pas dans le monde du
blâme, là, je fais simplement dire : C'est ça, la situation. Puis,
cela étant, nous, on n'a pas l'intention d'aller de l'avant avec ça.
La deuxième question
qui a été posée, c'était… Ah oui, sur les sites illégaux. Oui, c'est ça. Sur
les sites illégaux — c'est
une excellente question, puis ça me fait plaisir d'y répondre — vous
savez que le jeu en ligne a été mis en place
par l'ancien gouvernement, à l'époque où le député de Jean-Talon était ministre
de la Santé et à l'époque où le député d'Outremont était le ministre des
Finances, et cette décision, encore une fois, jusqu'à preuve du contraire, elle
s'inscrivait dans la logique que j'ai énoncée tout au long des travaux de cette
commission, c'est-à-dire d'offrir un produit légal, sécuritaire chez
Loto-Québec plutôt que de laisser les gens jouer à l'extérieur. Je pense que c'était
la chose à faire.
Cela
étant, lorsque cette décision a été prise par l'ancien gouvernement, de façon,
moi, je pense, raisonnable aussi, l'ancien
gouvernement avait décidé de mettre en place un comité de suivi sur le jeu en
ligne, lequel avait pour mandat de voir
si ce jeu en ligne menait à des problèmes de jeu pathologique, si ce jeu en
ligne était correctement encadré, bref, un mandat assez large de suivi
du jeu en ligne. Ce comité va faire rapport au gouvernement d'ici la fin de l'année,
d'ici la fin de l'année 2013, et, évidemment, moi, j'ai hâte de voir le contenu
de ce rapport-là.
Cela
étant, entre le moment où le jeu en ligne a été annoncé par l'ancien
gouvernement et aujourd'hui, il semblerait que le jeu illégal en ligne se soit développé de façon beaucoup plus
importante que ce jeu en ligne chez Loto-Québec. Donc, il y a un problème qui existe, moi, je ne le nie
pas. Et, les différentes mesures qui seront suggérées par le comité de
suivi sur le jeu en ligne, je m'engage
évidemment à les regarder de façon très, très attentive, et puis le
gouvernement y donnera suite s'il est possible d'y donner suite.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, il vous reste cinq
minutes.
• (11 h 30) •
Mme de Santis : Merci, M. le Président. Je veux revenir là-dessus. Au départ, la
légalisation des jeux de hasard obéissait
à des motifs de sécurité et de santé publique. Aujourd'hui, je reconnais que c'est
devenu une façon de taxer nos citoyens. Il y a certains qui vont dire
que c'est une taxation régressive.
Donc,
on est là pour voir comment on peut obtenir plus de revenus de nos citoyens.
Alors, si nos citoyens sont en train
d'utiliser des sites illégaux, et vous voulez leur offrir un site qui est mieux
ficelé, plus sécuritaire, je necomprends
pas que, pour obtenir plus de revenus, on ne fait pas plutôt un essai pour
réduire les sites illégaux ou l'accès aux sites illégaux, au lieu de venir nous dire qu'offrir l'alcool dans les
aires de jeux, ça va attirer plus de joueurs ou que ça va faire jouer plus les joueurs qui sont déjà au
casino. Je ne comprends pas la logique parce que, dans un cas, on pourrait
essayer d'éliminer quelque chose qui est
illégal; dans l'autre cas, on essaie de mettre en place ce que la Santé
publique et la majorité des gens qui sont
venus devant nous sont venus nous dire n'est pas une bonne chose, parce que ce
n'est pas une bonne chose pour ceux qui ont une pathologie vis-à-vis le
jeu ou même ceux qui ne l'ont pas mais qui vont être dans un état pour dépenser
plus d'argent, qui peut-être ne vont pas perdre leur maison et hypothéquer leur
avenir mais qui vont quand même avoir des séquelles.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau : Oui, merci, M. le Président. Deux choses. La
première : il y a une distinction entre taxe et offre d'un produit comme c'est le cas dans le monde du jeu.
Une taxation, c'est un pouvoir coercitif qu'exerce un gouvernement puis qui lui permet de récolter des montants pour
chacune, par exemple, des ventes de biens ou sur le revenu. Dans le cas
de la loterie, évidemment, les gens sont libres de le consommer ou pas, ce
bien-là, là. Et il y a une époque où on aurait pu dire que le gouvernement du Québec, à travers Loto-Québec, exerçait un
pouvoir de monopole, mais ce n'est même plus le cas, ce n'est vraiment
pas le cas. Donc, quand même, une petite distinction, je pense, que je vous invite
à…
C'est
clair que la vente de produits de loterie, ça rapporte des revenus au
gouvernement, mais l'alternative, c'était quoi? C'était de laisser ces
revenus-là dans les mains du crime organisé. Puis l'alternative, c'était de
laisser ce jeu se faire dans un contexte non sécuritaire.
Alors,
moi, je ne sais pas si vous remettez en cause cette façon de fonctionner, cette
institution qu'on a mise en place au
Québec, mais moi, j'y adhère totalement et complètement. Je pense que le jeu
doit se faire dans un cadre étatisé, avec,
donc, une approbation gouvernementale. Je pense que ça doit se faire de façon,
évidemment, sécuritaire. Et donc, là-dessus, il n'y a aucun doute.
Par
ailleurs, deuxième élément, vous avez demandé… en fait, vous avez mis en
opposition, je dirais, cette idée de permettre de vendre de l'alcool
dans les casinos et le combat que nous pourrions faire pour combattre le jeu en
ligne illégal. Moi, je vous dis qu'il n'y a
pas d'opposition entre ces deux choses-là. Dans le cas de l'alcool, nous
croyons qu'il y a moyen de faire les choses correctement,
intelligemment, de manière sécuritaire, puis, quant au jeu en ligne, c'est une
problématique qui nous inquiète.
Encore
une fois, on a des experts, on a un comité. Je pourrai vous faire la liste des
membres de ce comité, si vous le
voulez, je les ai ici, j'en ai deux listes. Il y a Mme Louise Nadeau qui est la
présidente du comité, professeure titulaire au Département de
psychologie de l'Université de Montréal. Il y a Mme Sylvia Kairouz, qui est professeure
adjointe au Département de sociologie et d'anthropologie
à l'Université Concordia. J'y vais rapidement : Magali Dufour,
professeure en toxicomanie à l'Université de Sherbrooke; Richard Guay,
directeur général, de la Direction générale des affaires policières au
ministère de la Sécurité publique; et puis Jean-Marc Ménard, coordonnateur des
services professionnels au centre de réadaptation Domrémy.
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.
M. Marceau : Alors, M. le Président, simplement, on a un comité. Moi, j'ai
entièrement confiance dans ces gens, qui
ont commencé à travailler là-dessus depuis 2010. Encore une fois, ils doivent
rendre… faire rapport d'ici la fin de l'année. Le gouvernement va porter
une attention très, très attentive aux conclusions de ce rapport.
Le Président (M.
Bergman) : Merci, M. le ministre. Alors, maintenant, pour le groupe
formant la deuxième opposition, pour un bloc de 10 minutes, Mme la députée
de Groulx.
Mme Daneault :
Merci, M. le Président. Bonjour à tous. Bonjour, M. le ministre.
Je
voudrais vous poser une première question qui est toute simple : Est-ce
que vous savez pourquoi depuis 30 ans on a interdit l'alcool dans
les aires de jeux aux casinos du Québec?
M. Marceau :
Depuis 30 ans?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau : C'est que les casinos existent depuis le début des années 90,
alors, si je ne me trompe pas, ça fait moins de 30 ans, là. Ça
fait…
Mme
Daneault : Depuis le début de leur existence.
Le Président (M.
Bergman) : …vous adresser à la présidence, s'il vous plaît, M. le
ministre et Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault : Excusez.
M. Marceau :
C'est instinctif, je pense, hein, de vouloir échanger, là. Donc… Mais je m'excuse
et je me plie volontiers à votre directive.
Alors,
effectivement, les casinos datent du début des années 90. Et je crois que
la raison pour laquelle on a commencé
comme on a commencé puis qu'on a évolué comme on a évolué, c'est simplement qu'au
fur et à mesure que le temps a
passé on a constaté une intensification de la concurrence. Essentiellement, c'est
ce qui s'est produit. Au début, le
gouvernement du Québec, Loto-Québec avaient ce qu'on pourrait essentiellement
appeler un monopole territorial…
Le Président (M. Bergman) : …des réponses courtes aussi pour donner la chance
à la députée pour demander des questions.
M. Marceau :
O.K. Je veux bien aller court, là, M. le Président, mais en même temps, si vous
voulez que je donne des éléments de réponse…
Puis souvent il y en a plus qu'un. J'estime que je ne fais pas exprès pour
prendre mon temps, là, j'estime que j'essaie d'aller à la réponse, là.
La réponse, c'est
qu'à l'époque, en 1993, on avait un monopole territorial, et donc, entre
guillemets, la clientèle québécoise était captive. Mais, au fur et à
mesure que le temps a passé, d'autres casinos, d'autres racinos, d'autres
maisons de jeu se sont installés autour, et graduellement les Québécois se sont
mis à aller jouer ailleurs, dans des contextes moins sécuritaires.
Alors, je conclus en disant simplement : Il
y a eu des gestes qui ont été posés par différents gouvernements au fil des années, depuis 20 ans, et, à la
fin de ces 20 ans là, on constate encore une fois que la concurrence est
très intense.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : Je reviens encore
sur la notion d'alcool aux aires de jeux, parce qu'on sait qu'effectivement,
dans les casinos du Québec, l'alcool est permis mais pas au niveau des aires de
jeux.
Est-ce que vous avez déjà entendu parler de la
notion de temps d'arrêt?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Marceau : C'est ça, il y a…
Merci. Oui, j'en ai déjà entendu parler. Vous référez au fait qu'il peut être
salutaire pour les gens d'arrêter de jouer pendant quelques minutes ou pendant
un certain laps de temps? Oui?
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : Alors, je vais
juste vous lire ce que les groupes qui sont venus ici nous ont dit :
«Effectivement, l'alcool est disponible au casino. Cependant, autoriser
l'alcool dans les aires de jeux élimine le temps d'arrêt qu'une personne se donnait en se déplaçant entre la
machine ou la table de jeu et le restaurant ou le bar pour aller chercher
sa consommation. Ce temps permet un pas de recul, favorisant ainsi une période
de réflexion face au choix de continuer ou de cesser de jouer.
«Cliniquement,
le temps d'arrêt de jeu peut permettre aux personnes vulnérables de sortir de l'euphorie
du jeu et de prendre conscience de leur comportement[...]. Quelquefois,
ce laps de temps permet à une personne de cesser de jouer et de continuer à passer une belle soirée, ce qui devrait, selon
nous, être l'objectif de tous. Jouer pour s'amuser, afin que le jeu
reste un jeu.»
Est-ce l'objectif du gouvernement, actuellement,
en voulant abolir ce temps d'arrêt qui était salutaire pour la majorité de la
clientèle vulnérable mais aussi pour les gens qui consomment? Et on le sait, on
l'a entendu à quelques reprises, 0,05 % d'alcool dans le sang va diminuer
l'attention du joueur, va lui permettre de gager plus longtemps et d'augmenter
le risque. Alors, est-ce que le gouvernement a oublié ses valeurs morales en
adoptant une telle mesure?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Marceau : Non, M. le Président,
le gouvernement n'a pas oublié.
Tout d'abord,
je réitère et je répète que Loto-Québec forme ses employés pour détecter les
gens qui ont desproblèmes d'intoxication.
Je réitère qu'il y a des gens à l'entrée puis il y a des gens à l'intérieur du
casino qui sont à même d'évaluer le comportement des personnes, qui ont
reçu des formations précisément pour ça.
Je réitère aussi que ces problèmes qui sont
décrits par la collègue députée sont des problèmes qui surviennent également ailleurs que dans les casinos de
Loto-Québec. Or, dans cet ailleurs, ces problèmes-là ne sont pas détectés
de façon aussi efficace que chez Loto-Québec.
Alors, les
problèmes qui sont mentionnés sont des problèmes qui surviennent dans le statu
quo, si on ne fait rien. Alors, moi,
je préfère, encore une fois, faire en sorte que les Québécois viennent jouer
dans les casinos de Loto-Québec, dans
un contexte où on a mis en place, où on met en place les moyens pour s'assurer…
Et là-dessus, là, je m'y engage fermement, Loto-Québec s'y engage
fermement. On met en place les moyens pour s'assurer de détecter les gens qui
ont des problèmes d'intoxication.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : Merci, M. le
Président. M. le ministre, est-ce qu'on ne devrait pas s'inspirer du meilleur
au lieu de s'inspirer du pire? Je
vous rappellerai qu'en Scandinavie le gouvernement, qui est un gouvernement
social-démocrate comme le vôtre…
Sincèrement, j'ai l'impression de jouer dans un mauvais film depuis le début de
cette commission-là. Je ne comprends
pas qu'un gouvernement social-démocrate comme le vôtre s'inspire des pires pratiques.
Je vous rappellerai qu'en Scandinavie, actuellement, le gouvernement a
légiféré non seulement pour des saines pratiques, mais pour limiter les revenus
à 1 milliard annuellement des… les revenus du jeu, et ce, pour la protection de
son public, pour la protection et la santé de ses citoyens.
Pourquoi
aujourd'hui le gouvernement du Québec n'est pas capable de s'inspirer des
meilleures mesures plutôt que des pires?
• (11 h 40) •
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Marceau : M. le Président, la
pire pratique, c'est de se mettre la tête dans le sable. La pire pratique, c'est
de se fermer les yeux, et de laisser faire,
et de laisser les problèmes survenir alors qu'on peut les combattre. La pire
pratique, c'est de laisser les choses aller.
Alors, ça, c'est une opinion qui m'habite profondément. Je suis complètement
convaincu que le statu quo, que de ne rien
faire, c'est aller au détriment de la santé des Québécois, que c'est aller au
détriment aussi de nos finances publiques. Donc, moi, je pense que d'agir,
c'est la chose responsable à faire. De ne rien faire, là, c'est laisser les
problèmes se continuer dans des contextes non sécuritaires. C'est ça que ça
veut dire, ne rien faire.
Ce que la députée appelle les meilleures
pratiques puis les mauvaises pratiques, je suis désolé, mais je suis en désaccord avec elle. Moi, je pense que la
meilleure pratique, c'est de faire en sorte que les gens qui jouent le jouent à
un endroit où on est en mesure de les
surveiller, en mesure de détecter les problèmes. Ça, c'est ce qu'on appelle la
meilleure pratique, M. le Président.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : M. le Président,
on nous sert comme argument depuis le début que la baisse d'achalandage
du casino est attribuable au fait que les
gens sont passés des jeux légaux aux illégaux, au jeu illégal. Pourtant, les
directeurs régionaux de santé publique qui
sont passés ici ont affirmé qu'il n'existe aucune donnée, d'après les
directeurs généraux de santé publique, qui permettrait de démontrer que
les pratiques de jeu illégal soient en hausse au Québec.
Alors, est-ce que vous avez des études à l'inverse
de celles que les directeurs régionaux de santé publique sont venus nous
présenter?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Marceau : Oui. Bien, à la
page A.104 du budget, je faisais… on rappelait une étude… En fait, ce sont
des chiffres qui proviennent de deux études,
excusez-moi. Donc, est-ce que j'ai… Je veux juste vous les mentionner
correctement, là, M. le Président.
(Consultation)
M. Marceau : Excusez-moi, là, je
veux juste donner la bonne information à la députée. Alors, première étude, publiée en… En fait, c'est deux études. C'est
une comparaison de deux études qui permet de voir l'évolution du jeu
illégal, O.K.? Ça prend deux points dans le temps pour être capable d'établir
qu'il y a une évolution.
Alors, étude
de 2004 dont le titre est Comportements de jeu et jeu pathologique selon le
type de jeu au Québec en 2002.
Les auteurs : Serge
Chevalier, Denis Hamel, Robert Ladouceur, Christian Jacques, Denis Allard et
Serge Sévigny, qui sont à l'Institut national de santé publique et à l'Université
Laval. Première étude.
Seconde
étude, publiée en 2010 : Portrait du jeu au Québec : Prévalence,
incidence et trajectoires sur quatre ans, par Mmes Kairouz et
Nadeau, précisément les dames qui président notre comité sur le suivi du jeu en
ligne. Alors, étude publiée en 2009. Ces dames sont à l'Université Concordia et
à l'Université de Montréal.
Et c'est en comparant ces deux… Chacune des
études, en tant que tel, ne peut pas se permettre de tracer une évolution entre
2004 et 2010, mais, à l'aide de ces informations, on peut arriver à ces
conclusions.
Le
Président (M. Bergman) :
Alors, malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le ministre, merci pour
votre présentation. Merci d'être avec nous ici aujourd'hui.
Collègues, je suspends les travaux jusqu'après
les affaires courantes aujourd'hui. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 44)
(Reprise à 15 h 41)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre,
s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission
reprend ses travaux.
Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de
poursuivre les consultations particulières sur le projet de règles abrogeant la disposition qui prohibe la
vente, le service et la consommation de boissons alcooliques à l'intérieur
des aires de jeux.
Document déposé
Je mentionne aux membres de la commission que j'ai
reçu une lettre d'ATR associées du Québec en date du 3 juin 2013, adressée
à M. Nicolas Marceau, ministre des Finances et de l'Économie. Et je dépose
cette lettre.
Collègues, cet
après-midi, nous entendrons le ministre de la Santé et des Services sociaux. Le
ministre a 10 minutes pour faire sa
présentation, suivi d'un échange avec les membres de la commission :
40 minutes pour le groupe formant le gouvernement, 40 minutes
pour le groupe formant l'opposition officielle et 10 minutes pour le
groupe formant la deuxième opposition. Aussi, je vous
demanderais, les collègues, d'adresser toutes les paroles — et le
ministre — à
la présidence.
Alors, M. le
ministre, bienvenue à notre commission. Et vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation.
M. Réjean Hébert
M. Hébert :
Merci beaucoup, M. le Président. Chers collègues, il me fait plaisir d'intervenir
ici, à cette commission, afin de mieux expliquer mon rôle de ministre de la
Santé et des Services sociaux dans l'optique de la modification du règlement
prohibant l'alcool dans les aires de jeux des casinos.
Mais,
pour comprendre cette décision sur l'alcool, il faut aussi bien comprendre d'abord
le rôle de Loto-Québec. On parle souvent de Loto-Québec comme une source
de revenus, mais, pour moi, comme ministre de la Santé et des Services sociaux,
Loto-Québec, c'est une mesure de santé publique, et il faut se le rappeler, M.
le Président.
À
une époque, on a vécu la prohibition au Québec pour être capable d'interdire la
prise d'alcool, une mesure qui s'est
avérée vaine et tout à fait inefficace. À une autre, on a essayé de fermer les
yeux sur les jeux de hasard et les jeux d'argent, une autre mesure qui a donné lieu à de l'activité criminelle,
et le Québec a décidé… plutôt que de prohiber, il a décidé d'encadrer. Il a décidé d'encadrer cette
offre de jeu par Loto-Québec afin d'avoir une offre de jeu qui soit
sécuritaire et qui soit également responsable.
Plusieurs
études, M. le Président, démontrent l'impact de la prise en charge par l'État
du contrôle de l'offre de jeu sur tant la prévalence du jeu pathologique
que sur les autres problèmes sociaux qui sont engendrés par les activités de jeu. D'abord, M. le Président, les études
démontrent que, lorsque le jeu est encadré par un contrôle
gouvernemental comme Loto-Québec, il y a d'abord
l'avantage de réduire au minimum les activités criminelles susceptibles d'être
générées par ce secteur d'activité.
Ensuite, ce contrôle par l'État permet de mettre en place toute une série de
mesures préventives qui sont beaucoup
mieux intégrées de même que des programmes de traitement qui sont accessibles à
l'ensemble de la population.
Permettez-moi de
rappeler que Loto-Québec et le ministère des Finances rendent disponibles
depuis 2005 annuellement 22 millions pour la mise en oeuvre du Plan d'action
gouvernemental en jeu pathologique. Si on fait un peu l'historique de Loto-Québec, c'est en 1971, M. le Président, que les
premiers grands sondages sur les habitudes et la perception du jeu chez les Québécois ont été rendus publics. Par la
suite, M. le Président, notamment en 1993, il y a eu l'adoption par la Société des casinos du Québec d'une
politique de lutte au jeu excessif avec des mesures novatrices, des mesures
qui ont été reconnues au plan international. Il y a eu à cette époque la mise
en oeuvre de la ligne d'aide et de référence pour les problèmes de jeu de même
que le versement de près de 800 000 $ à des organismes de prévention et
d'aide aux joueurs et à leurs proches. C'est donc à compter de cette date, M.
le Président, qu'on a vraiment eu une approche préventive dans le jeu. Et, en
1999, on voyait se mettre en place des bornes interactives dans les casinos pour permettre aux joueurs d'analyser leur
comportement. En 2000, il y a eu la loi sur l'interdiction de vente de
loterie aux mineurs, à la demande de
Loto-Québec. En 2001, mise en place d'un service de première ligne d'urgence
pour les joueurs en crise au Casino
de Montréal. En 2002, création d'un code de déontologie publicitaire pour
Loto-Québec et en même temps réduction du nombre d'appareils de loterie
vidéo de 15 300 à 14 300. Il y a également eu, en 2002, début de la formation des employés de Loto-Québec sur les
problèmes de jeu excessif. Alors, ce bref historique montre le dossier
de Loto-Québec en termes de santé publique, M. le Président, pour permettre de
mieux encadrer le jeu.
Plusieurs actions ont
été mises en oeuvre par Loto-Québec. Je vais en mentionner quelques-unes.
D'abord,
le programme d'autoexclusion, M. le Président, ce programme qui fut une
première en Amérique du Nord et qui permet à des joueurs de s'autoexclure
des casinos pour une période déterminée, c'est un programme confidentiel, un
programme gratuit, mais l'inscription au programme est irrévocable pour la
période choisie. L'an dernier, il y a eu
plus de 1 500 de ces contrats d'autoexclusion qui ont été signés, et il y
avait, l'an dernier, 5 200 contrats en vigueur. Alors, c'est des mesures d'autocontrôle qui permettent aux
joueurs pathologiques de pouvoir avoir un contrôle externe, de façon à leur éviter une rechute, M. le
Président. Alors, c'est un programme qui inclut la reconnaissance, dans
les casinos, des plaques d'immatriculation,
les agents sont formés pour reconnaître, via les caméras de surveillance, le
visage des personnes autoexclues, et il y a
eu plus 6 000 repérages l'an dernier, pour démontrer que ce programme
fonctionne.
Deuxième
mesure : des comités de vigilance qui ont été mis en place depuis 2011
dans les casinos du Québec. Ces comités-là
ont le pouvoir unilatéral, M. le Président, de refuser, pour une période
indéterminée, l'accès à un client qui est manifestement aux prises avec
un problème de jeu.
Troisième
mesure : des mesures qui ont été mises en place pour limiter l'accès aux
clients intoxiqués, M. le Président. Donc,
les personnes qui sont sous l'influence de boissons alcoolisées sans pour
autant éprouver des difficultés de jeu sont aussi exclues des casinos
pour des périodes qui peuvent varier entre 24 heures à quelques années, M.
le Président. Il y a déjà un encadrement qui est fait pour prévenir des
intoxications alcooliques dans les casinos.
Comme
je le disais tout à l'heure, il y a des bornes interactives qui ont été mises
en place également pour que les joueurs puissent autoanalyser leurs
comportements de jeu.
Il y a également une
chaîne d'entraide qui a été mise en place pour aider les joueurs pathologiques
en situation de crise, et c'est des chaînes
d'entraide qui sont gérées en collaboration avec les agences de la santé et des
services sociaux de Montréal, de l'Outaouais, de la Capitale-Nationale, ainsi
que quatre organismes communautaires : La Maison Jean Lapointe, le centre
de crise 24/7, Ressource Génésis et le CSSS des Sommets.
De
plus, M. le Président, tous les employés qui oeuvrent dans les établissements
de jeu sont renseignés sur les signes
et les manifestations de ce type de détresse, pour inviter ces personnes-là et…
inviter surtout les employés à les rapporter à un agent de sécurité,
lorsqu'il y a manifestation de tels signes de détresse. Les employés sont
habilités à intervenir auprès des clients
jusqu'à ce que le relais soit assuré par les intervenants des centres désignés,
des organismes communautaires désignés.
Autre mesure : les centres du
hasard, un espace dédié à l'information et la prévention du jeu excessif appelé
centre du hasard dans les établissements de jeu. Des animateurs sont présents
sur place pour offrir aux joueurs l'occasion de se questionner sur leurs
attitudes à l'égard du jeu. Ces centres permettent notamment aux joueurs de
mieux faire la distinction entre jeu d'habilité et jeu de hasard. Depuis leur
ouverture, plus de 160 000 personnes ont fréquenté les centres du hasard.
Il
y a également un site Web qui a été mis en place, lejeudoitresterunjeu.com,
lancé en mars 2013, et qui est lieu d'information,
de sensibilisation de la population québécoise. Et il y a également des
campagnes de sensibilisation sur les caractéristiques des appareils
électroniques de jeu via les médias imprimés ou encore les médias
électroniques.
• (15 h 50) •
D'autres mesures, M.
le Président, sont disponibles chez Loto-Québec, alors que, dans d'autres
casinos à l'extérieur, dans les casinos illégaux, ces mesures-là ne sont pas
présentes. Il n'y a aucun crédit, M. le Président, sous quelque forme que ce soit qui est accordé aux clients de Loto-Québec. Il
y a une interdiction d'accès pour les moins de 18 ans, il faut une
preuve d'âge avec photo pour être admissible dans les casinos du Québec. Il y a
des messages de modération et de
sensibilisation qui sont affichés sur les machines à sous, M. le Président, et
de l'information également sur les
règles du jeu, incluant les probabilités de gain, qui sont disponibles.
Finalement, les employés de Loto-Québec sont formés pour reconnaître et
intervenir face aux gens éprouvant un problème de jeu.
Loto-Québec
a reçu en 2012, pour toutes ces mesures, M. le Président, et pour une deuxième
fois consécutive, le plus haut niveau de certification international en
matière de jeu responsable de la World Lottery Association, soit le niveau 4. Pour atteindre ce niveau de
certification, c'est une norme ISO, et il faut atteindre un certain nombre de
critères sur l'information, la protection
des joueurs, la collaboration avec les parties prenantes, la recherche, la
publicité, la promotion du jeu responsable et le contrôle des activités
du jeu.
Tout
ça pour dire, M. le Président, que Loto-Québec est une mesure de santé publique
pour encadrer le jeu, de sorte qu'on puisse détecter et prévenir le jeu
pathologique, qu'on puisse également détecter l'intoxication alcoolique, qu'on
puisse prévenir l'utilisation abusive de crédit, M. le Président, ou encore qu'on
puisse prévenir l'admission des casinos par des mineurs.
Loto-Québec est un
partenaire aussi du Plan d'action gouvernemental sur le jeu pathologique et
contribue à l'amélioration des connaissances
en matière de jeu et des problématiques associées au jeu. Les mesures qui sont
mises à l'avant en matière de prévention, de détection, de traitement, de
réinsertion sociale, de recherche, d'évaluation et de concertation avec les
différentes partenaires sont des mesures qui ont pour effet de limiter le taux
de prévalence de joueurs pathologiques au Québec, qui est un des meilleurs en
Amérique du Nord, M. le Président.
Le Président (M. Bergman) :
En conclusion, s'il vous plaît.
M. Hébert :
Alors, moins de 1 % de la population souffre de jeu pathologique. C'est le
meilleur taux, l'Ontario suit avec
0,8 %. Alors, c'est 0,7 % pour le Québec, et c'est le résultat de l'encadrement
du jeu par Loto-Québec, M. le Président.
Je
reviendrai tout à l'heure pour parler des risques, actuellement, qui sont
encourus par le fait que les joueurs ne jouent plus dans les casinos de
Loto-Québec mais bien ailleurs.
Le Président (M. Bergman) : Merci, M. le ministre, pour votre présentation.
Maintenant, le groupe parlementaire formant le gouvernement, pour un
bloc de 40 minutes. Mme la députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Merci, M. le Président. Alors, dans le cadre de la présente commission,
nous avons eu plusieurs données qui
nous ont été présentées portant sur le fait que le nombre de joueurs demeure
présent au Québec, demeure stable. Même qu'il y a une certaine
recrudescence.
Par contre, au cours
des dernières années, une augmentation du nombre de casinos illégaux sur le
territoire québécois est également une
réalité. Également, ces casinos, dans la plupart des cas, offrent de l'alcool
dans les aires de jeux, et même, dans certaines situations, cet
alcool-là est gratuit. Et souvent aussi, généralement, on observe que ces
casinos-là sont liés au crime organisé.
Alors,
M. le Président, j'aimerais savoir si le ministre est inquiet des impacts de
ces casinos sur la population et s'il trouve important de ramener les
joueurs dans le contexte contrôlé et beaucoup plus sécuritaire des casinos de Loto-Québec, qui ont, entre autres, la mission de
canaliser les joueurs vers une aire de jeu responsable. Alors, M. le Président…
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Merci beaucoup pour cette question. Et là est le coeur du problème, M. le
Président. J'ai essayé d'expliquer à quel point Loto-Québec permettait de
pouvoir contenir la prévalence de jeu pathologique et de pouvoir intervenir
pour aider les joueurs pathologiques. Or, on observe, M. le Président, au cours
des dernières années, une diminution de l'achalandage
des casinos de Loto-Québec. Pourquoi, M. le Président? Et c'est le ministre des
Finances qui nous le dit : Parce que le marché s'est diversifié. En 1993,
il y avait 14 casinos autour du Québec. Dans un rayon de quelques centaines de kilomètres, il y en a 80
maintenant, et ça, c'est sans compter ceux qu'on ne peut pas répertorier
et qui sont surtout illégaux. Alors, on a des casinos maintenant qui sont en
Ontario, qui sont en Nouvelle-Angleterre, au Nouveau-Brunswick
et qui sont sur le territoire québécois, et, dans plusieurs de ces casinos,
comme vous le soulignez avec beaucoup de justesse, Mme la députée, l'alcool
est même gratuit, dans ces casinos.
Alors, ce qui me préoccupe, moi, c'est qu'il y a
une baisse de l'utilisation du casino comme encadrement sécuritaire du jeu,
mais on sait tous qu'il y a une augmentation du jeu chez les Québécois et
Québécoises. Il y a une offre
de services qui est diversifiée, qui est beaucoup plus grande, qui est beaucoup
plus importante. Juste pour vous donner un exemple, selon le ministre des Finances, en 2012, les Québécois — les
Québécois — ont
dépensé 42 millions au casino de Rideau Carleton et
10 millions au casino d'Akwesasne. Et là je ne vous parle pas de 80
autres, dans lesquels les Québécois ont aussi joué, M. le Président.
Le problème,
c'est qu'il y a un risque extrêmement important, un risque qui mine actuellement
l'utilisation d'un outil de santé publique extrêmement important qu'est
le casino pour canaliser l'offre de jeu, pour organiser et pour prévenir le jeu pathologique. Et ce risque-là, M.
le Président, est un risque considérable, et c'est pour être en mesure
de contrer ce risque, d'éviter cette
hémorragie, cette hémorragie en termes de santé publique, là, qu'il faut être
en mesure de bonifier les casinos pour rapatrier ces Québécois qui
actuellement vont jouer dans des casinos illégaux ou dans des casinos outre-frontières qui n'ont pas les mêmes
règles que nous nous sommes imposées, M. le Président. Et il y a donc un mal, un mal important qui est à nos portes, M.
le Président, lorsqu'on regarde la baisse de fréquentation de nos
casinos, et qui risque de mettre en péril
tout ce que le Québec a mis en place pour être en mesure d'assurer un meilleur
contrôle sur l'offre de jeu, M. le Président.
Alors, je
pense qu'il faut réagir. Il faut réagir pour faire en sorte d'offrir aux
Québécois et aux Québécoises non seulement un milieu sécuritaire, mais
un milieu intéressant, M. le Président, un milieu où il est agréable d'aller se
divertir dans les casinos du Québec. Et la
mesure que nous avons devant nous permet, M. le Président, d'apporter
une solution à un mal qui est en train de miner toute l'action de santé
publique que le Québec a faite en termes de jeu pathologique au cours des
dernières années.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci, M.
le Président. L'opposition nous a parlé beaucoup, durant cette
commission, que le gouvernement fait un choix économique au détriment de la
santé de la population. Dernièrement, on a eu l'occasion…
Dans les derniers jours précédant la fin de semaine, nous avons eu l'occasion d'entendre
le Dr Horacio Arruda, qui a admis que la vision… il a admis ici que la
vision qu'il présente, naturellement, est préoccupante, mais elle est partielle parce qu'elle se limite à la santé
publique, et qu'il appartient au gouvernement de mettre dans la balance
tous les autres arguments, y compris celui d'utiliser les revenus de cette
mesure à l'amélioration du bien commun, avant de prendre sa décision.
M. le ministre, pourriez-vous nous donner votre
opinion sur cette position-là? Est-ce que vous avez… Voulez-vous nous
entretenir un peu sur ceci?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
• (16 heures) •
M.
Hébert : Mon rôle, M. le
Président, comme médecin et comme ministre de la Santé et des Services
sociaux, c'est d'informer mes collègues et le gouvernement des impacts des
décisions qui concernent l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec. C'est
un rôle que je prends très au sérieux, M. le Président.
Et il y a
effectivement certaines études — et je pense que les experts de santé
publique qui ont défilé devant vous vous en ont relaté certaines — certaines
études qui mettent en relation la consommation d'alcool et le jeu, le jeu pathologique et surtout le jeu, parce que ces
études sont des études de corrélation surtout. Alors, il n'y a aucune
étude qui a établi un lien causal, donc un
lien causal entre la présence d'alcool et le jeu pathologique, mais ce sont des
études de corrélation. En fait, il y
a un très grand nombre d'études qui ont été réalisées beaucoup sur des facteurs
de personnalité, des facteurs
associatifs, des facteurs de risque associés à la personnalité; peu, on doit le
dire, sur la consommation d'alcool. Mais, parmi les facteurs qui sont
les plus souvent reliés au jeu pathologique, on souligne, bien, d'abord le sexe
masculin — les hommes sont plus enclins à être des
joueurs pathologiques — l'impulsivité comme trait de caractère, la faible estime de soi, l'initiation précoce au jeu,
les gains significatifs au début, lorsque les gens commencent à jouer,
la présence de joueurs excessifs ou
problématiques dans l'entourage immédiat, familial ou dans l'entourage au
niveau des amis, et les lacunes au niveau des habiletés sociales et des
habiletés de la résolution de problème. Bien sûr, l'un des facteurs de risque est au niveau de la
consommation simultanée d'alcool, mais il faut réaliser que les études ne sont
pas concluantes dans ce domaine, de sorte
que, lorsqu'on pose la question : Quel est le risque attribuable à l'alcool
pour le jeu pathologique?, en d'autres
termes combien de cas de plus de joueurs pathologiques l'introduction d'alcool
dans les aires de jeux générera, il n'y
a pas de réponse scientifique à cette question. On n'est pas capables de
répondre avec certitude qu'il y aura des joueurs supplémentaires qui
seront créés ou associés à la présence d'alcool dans les aires de jeux.
Et Louise
Nadeau, qui est une des meilleures chercheures que nous avons sur cet aspect,
le disait, faisait preuve de cette
nuance en disant dans une entrevue qu'elle donnait à Radio-Canada, et je la
cite : «Les joueurs pathologiques et les joueurs à risque sont tous
de grands consommateurs d'alcool — les deux sont associés, il n'y a pas de
doute. Mais on n'a pas attendu l'alcool au
casino pour que ça soit la situation et on n'a pas attendu non plus que les
joueurs pathologiques ou à risque aillent dans les bars et jouent avec
les appareils de loto vidéo. D'où mon incapacité — et c'est elle qui parle — [de dire] si, oui, il va y avoir
augmentation [du jeu avec l'arrivée de l'alcool dans les aires de jeux], parce
que déjà c'est là. Est-ce que ça va être
plus, est-ce que ça va être moins? Je ne peux que vous dire que [ces] deux
facteurs [sont] associés.» On a là un cas patent où il y a une
association entre deux facteurs, mais où il n'y a pas de lien causal qui est
établi, de sorte qu'en termes de santé publique — et les collègues
experts en santé publique vous l'ont sûrement précisé — on ne
peut pas attribuer à cette mesure un nombre supplémentaire de cas de joueurs
pathologiques.
Bien sûr, il y a un
risque, un risque que j'ai partagé avec mes collègues autour de la table
gouvernementale. Il y a un risque, mais le mal qui est présent et qui est à nos
portes, qui mine actuellement Loto-Québec est un mal beaucoup
plus important, et lui, il risque de faire en sorte que nous perdions ce filet
de sécurité que nous avons établi avec
Loto-Québec pour être en mesure de détecter et d'intervenir auprès des joueurs
pathologiques. Et c'est ce mal-là qu'on
doit renverser. La mesure, bien sûr, elle a un risque, mais, vous savez, M. le
Président, je suis médecin, alors je sais que tout traitement a un risque. Et l'évaluation que nous faisons,
lorsque nous prescrivons un médicament, c'est toujours de voir : Est-ce que les risques associés au
traitement sont supérieurs aux risques associés à la maladie que nous voulons
traiter? Alors, il y a des médicaments qu'on
utilise qui ont des effets secondaires. Nous savons que l'aspirine peut
provoquer des hémorragies digestives, parfois mortelles, même, mais nous
prescrivons l'aspirine parce que le mal que nous voulons traiter mérite que nous utilisions ce
traitement-là. Dans certains cas, même, on va amputer un patient parce qu'il y
a un mal tellement important qu'on doit utiliser des méthodes qui sont
drastiques. On n'en est pas là avec l'alcool dans les aires de jeux, mais il y a quand même, M. le Président, là un mal pour
lequel il faut avoir un remède, et ce remède, c'est de rendre plus attractif le casino, de façon à
rapatrier les personnes, les citoyens dans des endroits sécuritaires. Nous
avons une responsabilité de moindre mal dans
ce débat, M. le Président, et c'est ce moindre mal qui a été le choix du
gouvernement, M. le Président.
Alors,
bien sûr, pour répondre à votre question, il y a des travaux qui ont été
réalisés. Très peu, d'ailleurs, dans le domaine de l'alcool et du jeu
pathologique, mais il y en a quelques-uns. Et ceux qui existent, même, sont
parfois discordants, parce que, bien sûr,
les joueurs pathologiques sont aussi des dépendants à d'autres substances,
notamment au niveau de l'alcool. Alors, c'est un élément qui a été considéré
dans la prise de décision.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci, M. le Président. On a eu aussi des données
sur les autres casinos dans les autres
provinces canadiennes, on nous a aussi sensibilisés au fait, là, de l'alliance
entre l'alcool permis dans les aires de jeux avec le jeu pathologique, qu'il pourrait y avoir une incidence sur l'augmentation
des joueurs pathologiques, et on constate dans les données… J'aimerais ça vous entendre là-dessus, M. le ministre,
parce qu'on constate dans les données qu'au Québec on a un chiffre de
0,7 % qui sont des joueurs pathologiques, au Québec, et que, dans les
autres provinces canadiennes, l'alcool est
permis dans les aires de jeux, et on observe, dans des provinces canadiennes,
des taux de joueurs pathologiques sensiblement les mêmes, du moins chez
nos voisins ontariens, qui se situent à 0,8 %. Donc, on peut observer que, même dans ces casinos-là où l'alcool
est permis dans les aires de jeux, ils ont réussi quand même à maintenir
un taux de joueurs pathologiques probable
quand même acceptable… bien, c'est sûr qu'on souhaiterait tous qu'on n'ait
aucun joueur pathologique, il est évident, mais que, même dans ces
situations-là, on arrive quand même à contrôler cette situation-là.
Alors, M. le
ministre, j'aimerais ça vous entendre, entendre votre opinion sur ce fait-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Je pense que l'exemple de l'Ontario est un exemple intéressant, puisqu'ils ont
des taux de joueurs pathologiques similaires à ceux du Québec, à peine
plus élevés, et ils ont fait le choix de permettre l'alcool dans les aires de jeux. Donc, on n'a pas là d'évidence, en
tout cas, par cette expérience naturelle, que de permettre l'alcool dans
les aires de jeux augmente la proportion de
joueurs pathologiques. Alors, il y a là une réassurance par rapport à l'introduction
de cette nouvelle mesure.
Je
dirais que ma préoccupation est beaucoup plus grande par rapport au jeu en
ligne, où, là, on n'a vraiment pas de contrôle. Et on a introduit il y a
quelques années, sous le gouvernement précédent, d'ailleurs, le jeu en ligne,
alors que, là, il y avait des évidences que
l'introduction du jeu en ligne entraînerait… et les experts de santé publique évoquaient 100 000 joueurs pathologiques de
plus au Québec. Et, malgré ces évidences-là, le gouvernement est allé de l'avant, et alors que l'introduction de l'alcool
dans les aires de jeux n'est pas documentée avec une telle précision, où
on peut calculer un risque attribuable.
Il
y a un risque qu'on peut difficilement quantifier, et on doit soupeser ce
risque-là à la lumière du risque de voir les Québécois et Québécoises
jouer ailleurs qu'à Loto-Québec. Et ça, pour moi, c'est un risque, en termes de
santé publique, qui est beaucoup plus important.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Alors, M. le ministre, la question que j'aurais le
goût de vous poser à ce stade-ci : Pouvez-vous
nous dire si vous avez confiance dans les mesures de jeu responsable qui sont
en place dans les casinos du Québec
pour gérer l'introduction de la prise d'alcool dans les aires de jeux? Vous
nous en avez parlé brièvement tantôt.
Là, on s'en va dans un… Si on va de l'avant avec cette mesure-là, on franchit
un pas supplémentaire. Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire si
vous avez un niveau de confiance pour cet aspect-là?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
• (16 h 10) •
M. Hébert :
D'abord, je pense que j'ai évoqué tout à l'heure la feuille de route de
Loto-Québec en termes de mesures mises en
place pour détecter et intervenir auprès des joueurs pathologiques. Je vous
rappelle que Loto-Québec est une des
organisations de jeux de hasard et d'argent qui est reconnue comme la plus
sécuritaire et celle qui applique le mieux
les critères internationaux qui guident les meilleures pratiques dans le
domaine de la prévention et de l'intervention auprès du jeu
pathologique.
Il
est aussi clair que l'introduction d'alcool dans les casinos — et
ça, Loto-Québec nous l'a confirmé — va
être accompagnée d'une formation, qui est déjà en place, d'ailleurs, qui s'appelle
le programme d'Action Service pour un service
responsable des boissons alcoolisées, que tous les employés au service de bar
de Loto-Québec doivent suivre et qui
a été élaboré par l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, en
collaboration Éduc'alcool. Alors, il y a déjà une formation, là, qui est en place pour que les
employés de Loto-Québec qui sont chargés du service de boissons
alcoolisées puissent détecter et intervenir
lorsqu'il y a un niveau d'ivresse qui est atteint par les joueurs, de façon à
ce qu'on puisse prévenir des
problèmes reliés au jeu. Loto-Québec a une fiche, je pense, remarquable dans
les actions qui ont été prises, va continuer à prendre ces actions-là.
On nous
assure également que l'alcool ne sera pas gratuit, qu'il sera à un prix
compétitif, donc au prix régulier, pour qu'on ne puisse pas encourager
la prise d'alcool.
Et j'y reviens. Ce qui est important, c'est que
nous puissions être en mesure d'offrir aux joueurs qui veulent pratiquer ce loisir… Parce qu'il faut se rappeler,
là. Pour 98 % de la population, c'est un loisir, et ce n'est un problème
que pour 0,7 % de la population et un autre 2 % qui est à risque
modéré. Mais, pour la grande majorité des citoyens
et citoyennes et pour la majorité des touristes qui viennent dans nos casinos,
c'est un loisir, c'est un passe-temps, c'est une activité qui est
ajoutée à notre offre de tourisme, par exemple, pour les gens qui nous
visitent, et je pense qu'il faut le considérer comme ça. Bien sûr, il ne faut
pas nier les problèmes qui y sont associés, mais il faut aussi reconnaître que
ces problèmes ne touchent qu'une petite partie de la population, moins de
1 %, en fait.
Alors,
Loto-Québec a donc, dans le passé, eu un comportement responsable concernant le
jeu. Et la stratégie de Loto-Québec
en rénovant les casinos, au cours des dernières années, en rendant plus
attrayante l'offre de jeu pour être capable d'attirer, de réattirer, de
faire en sorte que les gens qui ont délaissé les casinos de Loto-Québec y
reviennent parce qu'ils y trouveront une
offre de jeu intéressante, la présence d'alcool fait partie de cette offre de
jeu là, et nous pensons que cette
stratégie-là va permettre de rapatrier à Loto-Québec des gens qui actuellement
vont jouer à l'extérieur, sans aucun contrôle,
sans aucun filet de sécurité, sans aucune procédure d'aide, sans aucune
procédure de détection des personnes qui sont de toute évidence intoxiquées, sans aucune détection des personnes
qui de toute évidence présentent un comportement pathologique par rapport
au jeu, sans aucune mesure d'intervention. Et c'est le but de ce règlement, de
pouvoir être en mesure de consolider l'offre de jeu de Loto-Québec.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Je vais
terminer en laissant… Je vais laisser la parole à mon collègue. Mais,
finalement, un peu ce que le ministre des
Finances nous a dit un peu plus tôt, c'est que, finalement, accepter le statu
quo, c'est se mettre la tête dans le sable puis accepter que cette
situation-là perdure, puis que les gens aillent jouer à l'extérieur de nos
casinos, au Québec, puis qu'ils soient devant une situation de plus grande
vulnérabilité. C'est ce que vous nous dites, si je comprends bien.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M.
Richer : Merci, M. le
Président. Alors, chers collègues, M. le ministre, Mme Rioux, heureux de vous
revoir.
Certains députés de l'opposition officielle ont
laissé entendre, M. le ministre, que le fait d'aller à l'encontre de l'avis de la Santé publique était incompatible
avec le rôle du ministre de la Santé, donc qu'il manquait à son devoir.
Pourtant, nous avons démontré que le précédent gouvernement a plusieurs fois
passé outre aux recommandations et les avis de la Santé publique, surtout en ce
qui concerne l'implantation des jeux en ligne.
Alors, M. le
ministre, est-ce que vous contestez l'idée que les avis de la Santé publique
sont les seuls guides du ministre de
la Santé? Et sur quelle base, au ministère de la Santé, le ministre de la Santé
peut-il différer d'opinion avec les directions de la santé publique, et
quelles sont les limites déontologiques qui doivent être respectées?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Alors, je pense que
c'est utile de rappeler les responsabilités du ministre de la Santé et des
Services sociaux décrites aux articles 53 et
54 de la Loi de la santé publique. Et vous me permettrez, M. le Président, de
rappeler le libellé de ces deux articles.
L'article 53
stipule que «pour prévenir [...] les problèmes sociaux ayant un impact sur la
santé et influencer de façon positive
les facteurs déterminants de la santé de la population, le ministre [et] les
directeurs de santé publique[...], chacun au niveau d'intervention qui
le concerne, peuvent notamment :
«5° promouvoir la santé et l'adoption de
politiques sociales et publiques aptes à favoriser une amélioration de l'état
de santé et de bien-être de la population auprès des divers intervenants dont
les décisions ou actions sont susceptibles d'avoir un impact sur la santé de la
population en général ou de certains groupes;
«6° soutenir les actions qui favorisent, au sein
d'une communauté, la création d'un milieu de vie favorable à la santé et au bien-être».
L'article 54 prévoit que le ministre est
«le conseiller du gouvernement sur toute question de santé publique. [...]À ce titre, il doit être consulté lors de l'élaboration
des mesures prévues par les lois et [les] règlements qui pourraient
avoir un impact significatif sur la santé de la population.»
Alors, dans
le cadre de ce projet de règlement qui nous occupe aujourd'hui, j'ai eu l'occasion
de faire connaître la position de la Santé publique à mes collègues au
Conseil des ministres, mais, comme le disait très bien Dr Arruda, ces éléments ne sont pas
les seuls éléments à prendre en compte par un gouvernement, il y a l'ensemble
de la problématique et de la
situation. Et je pense que tout à l'heure je vous ai exposé quels étaient les
arguments plus larges, plus globaux qui faisaient en sorte que cette
décision, bien qu'associée à un risque dont le gouvernement a été dûment averti
par votre humble serviteur… que ce risque-là
était moins grand que le risque pour lequel nous souhaitons apporter des
correctifs.
Deuxièmement, au niveau déontologique, M. le
Président, au niveau déontologique, il est clair que le Collège des médecins, auquel j'appartiens, me prescrit que
je dois en toute chose être capable de faire état des données de la
science, et je pense que devant vous aujourd'hui et devant mes collègues je l'ai
fait. Je l'ai fait en respectant mon code de déontologie
et en donnant à mes collègues — et
comme je l'ai fait devant vous — un
résumé des données scientifiques qui sont à la base ou qui ont été
prises en compte dans la décision qui nous occupe.
Mais je dois
aussi avouer que, mon prédécesseur, dans le dossier de l'amiante par exemple,
alors, j'aimerais qu'il nous explique tout à l'heure quelle a été sa
conduite déontologique pour permettre à un gouvernement de pouvoir…
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre, je vous demande de rester sur le sujet devant nous.
M.
Hébert : Mais c'est un sujet
extrêmement important, la déontologie, M. le Président. C'est la question,
alors… Et je voudrais… je donne un exemple
de décisions d'un gouvernement précédent qui n'ont pas fait l'objet
suffisamment de questionnement sur, un, la déontologie de la décision et, deux,
sur les avis de la Santé publique dans un problème, l'amiante par exemple, qui, lui, est associé à une mortalité bien
démontrée et pour lequel on a décidé d'aller de l'avant…
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : M. le
Président, le… D'ailleurs, c'est intéressant, parce que le ministre,
aujourd'hui, utilise les mêmes arguments pour dire que lui, il répond aux…
Le Président (M. Bergman) : Est-ce
que c'est une question de règlement?
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, c'est
une question de règlement, M. le Président. Le ministre devrait s'en
tenir au sujet. Mais je voulais juste faire
la remarque que lui aussi ne tient pas compte actuellement des avis de santé
publique.
Le
Président (M. Bergman) :
Alors, M. le ministre, je demanderais que vous restiez sur le sujet en question
qui est devant cette commission. M. le ministre.
M. Hébert : Bien, je suis content de
voir que mon collègue le député de Jean-Talon dit qu'il n'a pas suivi les recommandations de la Santé publique. Alors, c'est
déjà quelque chose. On n'avait jamais eu cet aveu de la part du député
de Jean-Talon, qu'il n'avait pas suivi…
M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le
Président, M. le Président…
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Le ministre,
là, il va au-delà de l'interprétation. Ce que je lui ai dit, c'est de s'en
tenir seulement au sujet d'aujourd'hui. Pour
ce qu'il s'agit des avis de santé publique, on va avoir l'occasion d'en parler
tantôt.
Le Président (M. Bergman) : Merci,
M. le député de Jean-Talon. M. le ministre, je vous demande de rester sur le
sujet. Et je rappelle, collègues, qu'on est ici pour étudier… avoir des
consultations particulières sur le projet de règles
abrogeant la disposition qui prohibe la vente, le service et la consommation
des boissons alcooliques à l'intérieur des aires de jeux, alors je vous
demande de rester sur le sujet. M. le ministre.
• (16 h 20) •
M. Hébert : On va rester sur le
sujet. Je vais vous parler de jeu en ligne qui a été adopté par le précédent
gouvernement, où les avis de santé publique montraient qu'il y aurait
100 000 nouveaux joueurs en ligne. Alors là, il y avait des chiffres à l'appui de la part de la Santé publique pour dire
que cette décision-là allait augmenter le nombre de joueurs pathologiques, ce que nous n'avons pas
dans les recommandations de la Santé publique, et, en dépit de cet avis
extrêmement clair, le gouvernement a décidé d'aller de l'avant avec une offre
de jeu en ligne. Alors, juste pour vous montrer, M. le Président, qu'on n'a pas
de leçons à recevoir des gens de l'opposition.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M. Richer : M. le Président, il nous
reste combien…
Le Président (M. Bergman) : Il vous
reste 13 minutes.
M. Richer : Merveilleux! Alors, M.
le Président, M. le ministre, la semaine dernière, dans sa présentation, le Dr Arruda,
qui a bien spécifié qu'il parlait dans son créneau qui était la santé, nous a
rappelé que, dans notre prise de décision,
nous devrions tenir compte de l'ensemble de la problématique, donc les aspects
touristiques, économiques, etc. Et, dans sa
présentation, comme responsable de la santé, il s'est opposé en disant qu'il y
avait effectivement des risques de servir de
la boisson dans les aires de jeux. Il n'a pas parlé, par contre — et
j'aurais aimé qu'il le fasse — des
risques concernant les gens qui consommaient
de la boisson ou qui jouaient dans un milieu non protégé, un milieu géré
par le crime organisé, donc un milieu plutôt néfaste.
Alors, j'ai
posé une question puis je la ramène, parce que ce matin je l'ai
posée au ministre des Finances en parlant surtout des coûts, mais ce que
je ramenais, c'est qu'actuellement… Et c'est ma grande inquiétude depuis le
début de cette commission, M. le ministre, c'est
que, sous prétexte de ne pas placer des joueurs potentiellement à risque dans
un milieu même protégé, là, on se met la
tête dans le sable puis on les laisse en pleine nature, sans aucune protection,
sans suivi, sans connaître aucunement les risques, le nombre de personnes qui
boiraient, alors que, dans un casino géré par Loto-Québec, on peut les dépister
et les reconduire.
Alors, il y
avait dans ça deux risques, une baisse de revenus pour Loto-Québec et une
augmentation des coûts en santé,
parce que ces joueurs-là vont développer plus de pathologies, en plus grand
nombre. On ne pourra pas les identifier, les dépister, donc on va les prendre en état plutôt lamentable. Alors,
ce matin, j'ai posé la question en termes de coûts, et là, au M. le
ministre de la Santé, en termes de responsabilité sociale face à ces
joueurs-là. Est-ce que… En tout cas, à mon
avis, il y a un risque très grand de les retrouver dans un état plutôt
lamentable. J'aimerais entendre mon ministre de la Santé à ce niveau-là.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Merci beaucoup, mon
député. Évidemment, le Québec a mis en place, comme je l'expliquais, des
mesures pour encadrer le jeu, le jeu de hasard, les jeux d'argent, des mesures
qui ont démontré des bénéfices certains en
termes de prévalence de jeu pathologique, et on a même une tendance à la baisse
de 1996 à 2009. On était à 1 % de prévalence du jeu pathologique en
1996, à 0,8 % en 2002, à 0,7 % en 2009. Vous allez me dire : Ce
n'est pas une grosse diminution, mais il y a quand même une tendance qui est
dans la bonne direction.
Ma crainte, c'est
que cette tendance à la baisse se renverse parce que les casinos du Québec sont
de moins en moins fréquentés par les citoyens québécois, et c'est cette
crainte-là qui est à la source des interventions de Loto-Québec et du gouvernement. On en fait beaucoup une question
d'argent, mais c'est aussi une question de préoccupation par rapport à
la croissance d'un problème qui est extrêmement sérieux.
Le jeu pathologique, M. le Président, c'est une
des dépendances qui engendrent le plus de conséquences aux niveaux social, économique, financier, au niveau
médical. C'est une des raisons de certains suicides chez les personnes
qui en sont victimes. C'est une raison
importante de séparation, de divorce, de bris de famille. Le jeu pathologique,
c'est aussi, comme vous le soulignez,
M. le député, une cause de consommation de services de santé importante pour
être en mesure d'aider ces gens-là ou être en mesure de traiter certains
effets connexes à la consommation de jeu pathologique. On a évoqué tout à l'heure la consommation abusive d'alcool,
la consommation abusive de d'autres substances qui est souvent associée
avec le jeu pathologique.
Alors, ce bon résultat du Québec au niveau de la
prévalence du jeu pathologique est en péril — et je n'ai pas peur d'utiliser ce mot — est en péril actuellement parce que les gens
vont jouer ailleurs. Les gens vont jouer dans des casinos illégaux, des casinos où il y a des
activités criminelles, et c'est bien démontré. Les gens vont jouer à l'extérieur
du Québec dans des milieux, bien sûr, légaux mais des milieux qui n'offrent pas
le filet de sécurité, qui n'offrent pas l'intervention des organismes
communautaires, qui n'offrent pas la détection des joueurs pathologiques et
qui, en plus, ont des pratiques commerciales qui ne correspondent pas à nos
valeurs, M. le Président.
Les pratiques
commerciales, par exemple, des casinos américains sont à l'effet d'offrir la
boisson gratuitement, donc la
consommation de boissons alcooliques gratuites autour des tables de jeu. Alors,
ça, M. le Président, je pense que ça, c'est un geste qui fait en sorte
que certains Québécois qui vont jouer à Las Vegas, qui vont jouer en
Pennsylvanie, qui vont jouer au Nevada sont susceptibles d'avoir, M. le
Président, des comportements qui peuvent mener à du jeu pathologique, et ça, on va devoir, nous, récupérer les pots cassés, M.
le Président, lorsque ces gens-là reviennent au Québec. Il faudra donc leur offrir des services, M. le
Président, parce qu'ils auront consommé à l'extérieur du Québec ce que
nous aurions pu leur offrir dans un environnement sécuritaire, à l'intérieur
des frontières du Québec.
Alors, c'est évidemment l'objectif du règlement
que nous avons devant nous, M. le Président, de rapatrier les joueurs
pathologiques, de rapatrier l'ensemble des joueurs, et notamment les joueurs
pathologiques, à l'intérieur du giron de Loto-Québec, de façon à ce qu'ils
puissent avoir accès rapidement aux services dont ils ont besoin, et à une intervention la plus rapide possible, et à des
balises qui sont mises en place, hein? Quand on pense aux balises qui
ont été mises en place par Loto-Québec pour
l'inscription des joueurs pathologiques volontaire ou l'identification des
joueurs pathologiques par des comités de vigilance, alors c'est des mesures qui
nous permettent de mettre des balises à l'offre
de jeu et de pouvoir faire en sorte d'aider les personnes qui ont une tendance
à des facteurs de risque, et je les évoquais tout à l'heure, là, la
faible estime de soi, l'impulsivité, le fait d'être un homme, donc une série de
facteurs de risque qui rendent les gens plus
susceptibles de développer du jeu pathologique; alors, que ces gens-là soient
aidés. Alors, c'est ça, l'objectif que nous visons.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil, il vous reste cinq minutes.
• (16 h 30) •
M. Richer :
Merci, M. le Président. Un des groupes qui est venu nous déposer un mémoire la
semaine dernière prétendait, selon
leur analyse, leurs données, que la vente d'alcool dans les aires de jeux ne
garantissait pas uneaugmentation de
clientèle parce que… les représentants de Loto-Québec avaient prétendu, entre
autres, qu'il y avait d'autres moyens, bon, d'attirer la clientèle, mais c'en
était un, des moyens. Donc, selon ce groupe-là, ce n'était pas une
garantie, ce à quoi a répondu ma collègue de
Sainte-Rose en présentant des chiffres qui montrent que, dans l'ensemble des
provinces canadiennes, nous sommes les seuls à ne pas vendre… permettre la
consommation d'alcool dans les aires de jeux. Donc,
dans l'ensemble des autres provinces canadiennes, il y avait six des neuf
provinces concernées qui avaient connu une augmentation de revenus, sauf
l'Ontario et… J'oublie l'autre. Par contre, parallèlement, le pourcentage de
joueurs pathologiques connu dépassait à peine celui du Québec, là. Dans les
chiffres que j'ai notés, nous sommes à 0,07 %, l'Ontario est à un point plus haut, et le plus haut étant la
Colombie-Britannique, à deux points de plus. Donc, selon ces statistiques, on peut prévoir que la mesure
amènerait des revenus supplémentaires — ce
que souhaite Loto-Québec — ne mettrait pas en danger les joueurs qui
fréquenteraient, compte tenu que chez nous, bon, le personnel est formé et qu'on
fait un suivi.
Alors, selon vous,
est-ce que ces chiffres-là sont rassurants pour le projet?
M. Hébert :
Écoutez…
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, il vous reste 2 min 30 s
pour la réponse.
M. Hébert : O.K. Vous avez tout à fait raison de
souligner que tous, hein, non seulement la plupart, mais tous les
casinos dans les autres provinces canadiennes et dans le Nord-Est américain
offrent la possibilité de consommer des boissons alcooliques dans les aires de
jeux. Tous. Et j'en ai la liste ici. Que ce soient ceux de l'Ontario, ceux du
New Jersey, de la Pennsylvanie, l'ensemble des casinos permet cette offre
de jeu là.
On
n'a pas de statistique très précise sur la prévalence du jeu pathologique aux
États-Unis, mais ce qu'on sait, c'est
que, dans les autres provinces canadiennes où cette offre de jeu là est
disponible, il n'y a pas une prévalence qui est très significativement
différente. Elle n'est pas significativement différente, en fait, de celle du
Québec en termes de joueurs pathologiques. Alors, cette expérience-là nous
permet d'être relativement rassurés.
Quoi qu'il en soit,
ma préoccupation comme scientifique, c'est qu'on puisse mieux documenter les
relations réciproques entre l'alcool et le jeu pathologique, parce qu'actuellement,
selon les données scientifiques, on a encore beaucoup
de flou autour de cette relation-là. Alors, il y aurait lieu, à mon avis, de
pouvoir avoir des réponses plus précises lorsqu'en termes de santé
publique on souhaite faire une modification de l'offre de jeu et de pouvoir
intervenir avec des données probantes — ce
que nous n'avons pas, il faut bien le reconnaître — pour l'influence de l'alcool dans les aires
de jeux, sur le taux de prévalence et l'incidence
de nouveaux cas de joueurs pathologiques. Alors, ça, je pense qu'il y a
là un défi. Et je pense que le Québec, qui
finance déjà des chaires de recherche, des activités de recherche au niveau du
jeu, devrait mettre en place un certain nombre d'études pour documenter ce
phénomène, de façon à ce qu'on puisse, dans l'avenir, prendre des décisions
mieux éclairées concernant l'influence de l'alcool dans les aires de jeux sur le
taux de joueurs pathologiques.
Pour ce qui concerne
l'alcool dans les aires de jeux comme facteur attractif, là, moi, je ne suis
pas un expert en marketing. Loto-Québec a des experts en marketing qui leur
disent qu'une offre d'alcool dans les aires de jeux permettrait d'attirer des…
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.
M. Hébert :
…plus de joueurs dans les casinos de Loto-Québec, et moi, je dois prendre ces
données-là et reconnaître l'expertise de ces gens en marketing.
Le Président (M. Bergman) : Merci, M. le ministre. Maintenant, pour le groupe
parlementaire formant l'opposition officielle, pour une période de
40 minutes, M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre, d'être ici présent après-midi. C'est
dommage que vous preniez l'expertise en marketing mais que vous ne preniez pas
l'expertise…
Le Président (M.
Bergman) : Je demanderais aux députés d'adresser leurs paroles à la
présidence.
M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, je trouve dommage que le
ministre, il prend l'expertise en marketing de Loto-Québec comme étant
ses nouvelles valeurs, alors que nous avons écouté des experts en services
sociaux qui ont démontré le risque important
de la consommation d'alcool dans les aires de jeux. Et je pense que le
ministre… Peut-être juste… Pas regarder juste le marketing, peut-être
regarder les services sociaux.
Ma
première question… Puis, M. le ministre, habituellement, la règle, lorsque nous
avons des auditions, c'est qu'à des réponses courtes on essaie d'avoir
des… à des questions courtes on essaie d'avoir des réponses courtes, pour
pouvoir, justement, approfondir le sujet.
Je
pense, M. le ministre, que vous… M. le Président, le ministre a reconnu que l'offre
de jeu ici, au Québec, est très sécuritaire,
et puis également on a réussi à développer une offre de jeu qui répond aux
besoins de la population, et tous étaient
d'accord pour essayer le plus possible que les gens viennent consommer,
viennent jouer dans les casinos du Québec.
Est-ce que le
ministre peut nous confirmer qu'il est d'accord qu'au cours des dernières
années le Québec est devenu un des endroits où est-ce qu'il y a les meilleures
pratiques pour le jeu dans les casinos?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Oui, M. le Président, je peux le confirmer. Je
peux aussi confirmer, par contre, que la fréquentation des casinos au Québec, au cours des dernières
années, a diminué de façon importante. Alors, avoir des meilleures
pratiques, M. le Président, et ne plus avoir
de client… Je pense qu'on aura des très bonnes pratiques ou des meilleures
pratiques, mais on ne pourra pas les mettre
en application, parce que les joueurs ne seront plus au rendez-vous et vont
aller jouer… et vont actuellement
jouer de plus en plus dans des casinos illégaux, vont de plus en plus jouer en
traversant la frontière. Et c'est ce phénomène que nous devons
renverser, M. le Président.
Dans les meilleures
pratiques, il faut bien reconnaître… Et je pense que le député de Jean-Talon
accorde une importance beaucoup trop considérable aux preuves scientifiques qui
lient l'alcool et le jeu pathologique. Elles ne sont pas si évidentes que ça, et je pense que même les experts de santé
publique vous le diront, M. le Président. Il n'y a pas d'étude randomisée contrôlée qui permette de
pouvoir affirmer que d'introduire l'alcool sur les aires de jeux a une incidence sur le jeu pathologique. Alors, il faut
être très prudent dans les études qui mettent en relation deux
phénomènes, parce que le sens de la causalité peut aller d'un côté comme de l'autre,
M. le Président.
Alors,
il y a une relation entre le jeu pathologique et la consommation d'alcool. Les
joueurs pathologiques sont aussi des
personnes qui, de par leur profil psychologique, ont une prédisposition à
plusieurs autres types de dépendance, notamment à l'alcool, M. le
Président. Mais de dire que l'introduction de l'alcool sur les aires de jeux va
entraîner des cas supplémentaires de joueurs
pathologiques, je pense qu'il y a là un sophisme scientifique, M. le Président,
et on ne doit pas aller jusque-là. Il faut dire : Il y a un risque.
Et je n'ai pas jamais nié le risque. Je ne l'ai pas nié lors de la discussion
avec mes collègues, ce risque. Il est là, et je ne le nie pas, le risque, mais
c'est un risque qui actuellement n'est pas soutenu par une très grande
littérature scientifique et un risque qu'on ne peut pas quantifier en termes
de…
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît. En conclusion.
M. Hébert :
…de nombre de cas supplémentaires attribuables, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, je suis un peu déçu du ministre,
parce que la semaine passée la Santé publique est venue, puis ils ont
dit qu'on ne pouvait pas avoir ce type d'étude qui pouvait être fait, tout
simplement parce qu'au niveau éthique ça ne pourrait pas répondre aux critères.
Et ça, tous les gens ici l'ont entendu, autour.
Et
d'ailleurs tantôt, la question de causalité, quand on faisait juste une cause
en disant que, dans les casinos des autres provinces, aux États-Unis,
ils étaient meilleurs pour recruter la clientèle, puis qu'on ne faisait
seulement que le facteur… un seul facteur, c'était
qu'on pouvait consommer de l'alcool dans les aires de jeux, bien je pense qu'on
fait de l'extension de pensée. Puis, encore là, ça, c'est juste une
opinion. Ça n'a rien à voir de scientifique, même si on a essayé de nous le
démontrer comme étant pratiquement de la science.
Mais,
M. le Président, la question que je poserais au ministre… On peut dire qu'il y
a d'autres facteurs qui font qu'on va attirer les clientèles. La
question du tabagisme, actuellement, le Québec, si je comprends le raisonnement
du ministre, il ne sera pas tout à fait
compétitif encore, parce que souvent, les gens qui jouent et les gens qui
prennent de l'alcool, il y a aussi un plus grand risque, hein, sans qu'on
fasse de grandes études, il y a un plus grand risque d'être des fumeurs. Compte tenu du fait qu'on ne sera pas
compétitifs au niveau du tabagisme parce qu'ils peuvent fumer dans les casinos illégaux, ils peuvent fumer aux États-Unis — puis
je ne le sais pas s'ils peuvent fumer en Ontario — est-ce que le ministre irait jusqu'à dire que, pour devenir compétitifs, on pourrait
peut-être, par exception, autoriser le tabagisme dans nos salles de jeu,
dans nos aires de jeux, compte tenu que c'est un élément de non-compétitivité
avec les autres casinos?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert : D'abord, permettez-moi de réfuter, M. le Président, l'argument voulant qu'il n'est
pas possible de mener une étude sur la relation entre l'alcool et le jeu
pathologique. C'est tout à fait possible dans un cadre éthique, M. le Président. On a mené ces études-là au niveau
de la relation entre la cigarette, par exemple, et le cancer. On n'a pas
eu besoin de faire une étude randomisée où
on donnait à fumer à des gens pour montrer qu'il y avait un taux de cancer
plus élevé, il y a des moyens scientifiques
qui peuvent être mis en oeuvre pour établir une relation causale sans
nécessairement être obligé d'introduire un
risque chez les populations. Le retrait du risque, par exemple, peut être un
protocole tout à fait acceptable pour montrer le même effet. Et ça, au
niveau scientifique, M. le Président, il y a plusieurs stratégies de recherche
qui permettent de pouvoir mieux établir une relation causale ou en tout cas de
mieux établir qu'il y a une association beaucoup plus forte que celle devant
laquelle nous sommes présentement avec les données scientifiques, M. le
Président.
Concernant
le tabac, je pense que c'est une diversion, parce que ce n'est pas l'objet de
la commission. Moi, je pense que c'est hors d'ordre, M. le Président. On
ne parle pas du tabac dans les aires de jeux, on parle de l'alcool dans les
aires de jeux.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
• (16 h 40) •
M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, c'est très, très au coeur de nos
discussions. On parle : Qu'est-ce qui pourrait nous amener à être
plus compétitifs?
Là,
le ministre nous amène un élément qui est intéressant. Il nous dit : Oui,
on pourrait laisser boire les joueurs sous le principe qu'on joue et on
boit en même temps, parce que ça va nous attirer des gens dans nos casinos,
mais, lorsqu'on arrive
sur les autres éléments compétitifs, ce n'est pas une question qui est à l'ordre
du jour. M. le Président, là, je pense que le ministre erre à ce
niveau-là.
Dans
les autres casinos, M. le ministre… M. le Président, je demande au
ministre : Dans les autres casinos, on a également de loin un
meilleur accès au crédit, les gens peuvent s'endetter. Les casinos, ça ne les
dérange pas. À un moment donné, eux autres, ce qui est important, c'est de
faire de l'argent.
Si
on veut être compétitifs avec les casinos illégaux, compétitifs avec les
casinos américains, est-ce que le ministre, dans nos pratiques, pourrait
accepter qu'on puisse avoir un meilleur crédit, pour permettre aux gens,
justement, de s'endetter plus, dans un but de les attirer dans nos casinos et
de les empêcher d'aller jouer dans les autres casinos?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
M. le Président, nous avons fait un choix, au Québec. C'est que, dans tous les
établissements publics, M. le
Président, il n'y a pas de consommation de cigarette. Ça, c'est vrai dans les bars,
pas de consommation de cigarette. C'est
vrai dans les restaurants puis c'est vrai dans tous les établissements publics,
y compris les casinos. Et là la question n'est pas là. La question n'est pas là, ce n'est pas une question qui
est à l'ordre du jour. Et, dans les casinos en Ontario, il n'y a pas de tabac, il n'y a pas de tabagisme non
plus, et ils ont un pouvoir d'attraction. Je vous rappelle que
40 millions de dollars ont été dépensés
par des Québécois dans l'un des casinos de l'Ontario l'an dernier. Alors,
là n'est pas la question, au niveau du tabac, M. le Président. Alors, il
n'a jamais été dans notre intention de pouvoir introduire dans quelque établissement public que ce soit, que ce soient
les casinos, les bars, les restaurants… de réintroduire la cigarette. Je
pense que ça, ça serait irresponsable.
Deuxièmement,
l'accès au crédit, absolument pas dans notre intention de donner un accès au
crédit. D'ailleurs, il n'y a pas d'accès
au crédit non plus en Ontario et dans les autres provinces canadiennes. Alors,
il n'est pas dans notre intention d'introduire
l'accès au crédit, ce n'est pas ça qui nous occupe, M. le Président, c'est l'introduction
d'alcool. Et, pour la majorité, la très grande majorité des gens qui
vont jouer dans les casinos, une consommation d'alcool, M. le Président, ne
cause aucune difficulté. Et je pense que ça, c'est la mesure qui est devant
nous et c'est celle qui devrait faire l'objet de nos débats.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
Merci, M. le Président. Bien, je pense qu'on est au coeur du débat, parce que l'argument que vous apportez : Pour la
sécurité des gens, il faut qu'on se donne des avantages concurrentiels, dont,
entre autres, un avantage qui représente un
risque pour le joueur compulsif et un risque pour la population en général.
Parce qu'encore là nos experts, si vous voulez bien les entendre puis réécouter
ce qu'ils ont dit, nous ont dit que, même chez
la personne normale qui n'est pas un joueur compulsif, le fait de consommer
seulement de petites quantités augmente le jeu, augmente la durée du jeu puis augmente la dépense. Bien, je
pense, M. le Président, que c'est quand même des arguments qui sont
importants.
Troisième
argument, M. le ministre… J'aimerais, M. le Président, savoir : Pour être
compétitifs avec l'Ontario, compétitifs
avec les casinos américains, est-ce que le ministre est d'accord qu'on devrait
offrir de l'alcool gratuitement? Parce
que je ne vois pas pourquoi quelqu'un viendrait jouer au Québec plutôt que d'aller
jouer dans un casino illégal aux États-Unis
si peut-être il peut consommer son alcool dans les aires de jeux, mais ailleurs
c'est gratuit, il y a un accès au crédit,
puis il peut fumer. En quoi le Québec va devenir compétitif avec nos casinos?
Est-ce que ça veut dire que c'est un signe de mort pour nos casinos? M.
le Président, c'est ma question au ministre.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
M. le Président, il n'est pas question, dans le règlement qui nous occupe, d'ouvrir
les casinos à toutes sortes de
pratiques qu'on voit notamment aux États-Unis ou dans les casinos illégaux, la
question n'est pas du tout là. Nous
ne voulons pas, nous ne voulons pas, M. le Président, ouvrir le crédit et comme
ça se fait d'ailleurs en Ontario. Nous ne voulons pas ouvrir la
consommation de tabac comme ça se fait en… Ce n'est pas là, la question, M. le
Président.
La
question est : Est-ce qu'on doit permettre l'utilisation de l'alcool sur
le parquet du casino? Parce que je vous rappelle, M. le Président, que dans les casinos, actuellement, les gens
peuvent consommer de l'alcool, mais ce n'est pas une consommation dans
les aires de jeux, alors ils doivent se déplacer au bar pour aller prendre
leurs consommations. La question, elle est
strictement limitée à la consommation d'alcool dans les aires de jeux, M. le
Président, et c'est là que le règlement cible cette offre
supplémentaire.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
M. le Président, je ne sais pas si le ministre a écouté nos auditions, mais on
parlait qu'un moment important pour empêcher
les gens, justement, d'avoir des problèmes avec le jeu, puis on parle du
joueur compulsif, mais on parle également du
joueur habituel, qui va aller jouer à l'occasion, c'est que, le fait de se
déconnecter de la machine — et
le terme, c'est vraiment se déconnecter de la machine — pour
aller chercher une consommation lui permet
de réaliser que, là, il était à risque. Et justement, lorsqu'on consomme en
même temps que l'on joue, on ne peut pas
avoir ce moment de repos pour diminuer le risque. Plusieurs personnes sont
venues nous l'expliquer, des scientifiques, des chercheurs sont venus
nous l'expliquer, et c'est ce qui explique que la pratique de ne pas consommer
d'alcool dans les aires de jeux est considérée comme une des meilleures
pratiques au monde.
Là, le Québec, qui était
un leader, va devenir un cancre. Pour prendre un mot que vous utilisez souvent,
dans plusieurs circonstances non
appropriées, on va devenir un cancre, parce qu'on va être dans ceux qui vont
permettre de consommer de l'alcool
dans les aires de jeux. Et, si le Québec a un aussi bon taux actuellement,
est-ce qu'on pourrait penser que ce fait-là, ce soit un élément
important qui nous permette d'offrir des bons résultats, une sécurité pour nos
gens? Et ce n'est pas parce qu'ailleurs ils font une mauvaise pratique que nous
sommes obligés de l'adopter au Québec.
M. le Président, ma question au ministre, c'est :
Si c'est considéré comme une meilleure pratique, pourquoi est-ce que le ministre n'utilise pas le principe
de précaution et ne retire pas cette décision, en reparle avec ses
collègues pour leur expliquer que et
scientifiquement il y a un risque, et également le Québec pourrait être, encore
là, un des promoteurs d'une meilleure santé, et accepter le principe du
jeu responsable, et interdire encore la consommation d'alcool dans les aires de
jeux?
M. le
ministre… Je ne sais pas si le ministre pourrait repenser puis peut-être voir
si cet argumentaire-là pourrait être bon. Sinon, je pense qu'il va y
avoir un glissement au Québec. Après la consommation, pourquoi pas la gratuité?
Après la gratuité, pourquoi pas
compétitionner sur le principe des autres habitudes de vie telles que le
tabagisme? Et, si ça ne fait pas parce qu'on n'a pas encore assez de
monde dans nos casinos, pourquoi on ne va pas offrir un meilleur accès au
crédit pour permettre aux gens de plus s'endetter? Je pense que c'est la suite
logique si on achète, M. le Président, l'argument du ministre et de son
gouvernement qu'il faut être compétitifs pour ramener nos gens dans nos
casinos.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Bon. Alors, on a
une approche catastrophique, là, ici. Alors, je remets les choses dans leur
contexte.
Là, l'Ontario,
qui est aussi, M. le Président, une province qui est reconnue comme ayant les
meilleures pratiques, a introduit l'alcool
dans ses aires de jeux et conserve des taux de prévalence de joueurs
pathologiques de 0,8 % qui sont très comparables à ceux du
Québec. Donc, je rassure tout de suite le député de Jean-Talon, il n'y aura pas
de catastrophe dans la prévalence du jeu pathologique.
D'ailleurs,
les experts… Et je vous mets au défi de me trouver un expert qui peut me dire
combien de cas de plus de joueurs
pathologiques cette mesure-là va entraîner. Il n'y a pas de donnée là-dessus.
Louise Nadeau, je recite Louise Nadeau dans
une entrevue à Radio-Canada, M. le Président, qui dit : «D'où mon
incapacité [de dire] si oui [ou non] il va y avoir augmentation…» Elle
ne sait même pas si ça ne baissera pas, en plus. Alors…
Des voix : …
M.
Hébert : C'est ce qu'elle
dit : «Est-ce que ça va être plus, est-ce que ça va être moins?» Est-ce
que ça va être plus? Je la cite, M.
le Président : «Est-ce que ça va être plus, est-ce que ça va être moins?»
C'est ce qu'elle dit, et elle pose la question, M. le Président.
Deuxièmement,
lorsqu'on a introduit le jeu en ligne, M. le Président, au Québec, le jeu en
ligne, les gens jouent chez eux, à la maison…
Une voix : …
Le Président (M. Bergman) : …M. le
ministre. M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le
Président, je veux bien que le ministre…
Le Président (M. Bergman) : Question
de règlement?
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Oui, une
question de règlement. Je veux bien que le ministre fasse de la politique,
là, mais je pense qu'il devrait garder à un
haut niveau la discussion, surtout qu'on essaie de discuter scientifiquement,
là.
Le Président (M. Bergman) :
Ce n'est pas une question de règlement.
M. Hébert : Vous n'aimez pas que je
cite Mme Louise Nadeau, un des experts les plus reconnus au Québec?
Le Président (M. Bergman) : S'il
vous plaît! M. le ministre, M. le ministre, je vous demanderais d'adresser à la
présidence, s'il vous plaît.
• (16 h 50) •
M.
Hébert : O.K. Alors, M. le
Président, Louise Nadeau, une experte reconnue, je la cite… J'ai le droit de la
citer, M. le Président? Je pense que c'est un haut niveau scientifique, de
citer notre expert québécois au niveau du jeu pathologique. Elle le dit :
«D'où mon incapacité [de dire] si oui il va y avoir augmentation [du jeu avec l'arrivée
de l'alcool dans les aires de jeux], parce
que déjà c'est là. Est-ce que ça va être plus, est-ce que ça va être moins? Je
ne peux que vous dire que ce sont
deux facteurs associés.» C'est elle qui l'a dit, M. le Président, ce n'est pas
moi, là. C'est elle qui cite ça. On ne peut pas le savoir. Et ce
pourquoi on ne peut pas le savoir, c'est qu'il n'y a pas de donnée, M. le
Président.
Et l'autre chose, et je l'ai bien expliqué dans
mon exposé tout à l'heure : Ne pas mettre d'alcool sur les aires de jeux,
c'est un facteur de diminution de la compétitivité de nos casinos, et, si les
gens vont ailleurs, là on risque d'avoir une augmentation des joueurs
pathologiques. Et vous voyez tout de suite pourquoi Louise Nadeau nous dit que ça pourrait être plus
également, parce qu'il y a un risque, si nous ne faisons pas la mesure, que les
gens aillent jouer ailleurs et que nous ayons plus de jeu pathologique.
Au niveau du
jeu en ligne, M. le Président, les gens, ils jouent chez eux. Ils ont accès à l'alcool,
le tabac et à tout ça, là. C'est
beaucoup plus sérieux, c'est beaucoup plus sérieux comme risque. Et la Santé
publique avait alors estimé à 100 000 le nombre de joueurs
pathologiques supplémentaires par l'introduction du jeu en ligne chez
Loto-Québec, et le gouvernement précédent,
auquel participait le député de Jean-Talon comme ministre de la Santé et des
Services sociaux, avait autorisé cette extension du rôle de Loto-Québec,
M. le Président. Il y avait un risque qui était beaucoup plus sérieux, à ce moment-là, et qui a été assumé par
le précédent gouvernement. Ces gens-là qui jouent en ligne, M. le
Président, sur Internet, ils ont accès à l'alcool
très facilement, à un prix très compétitif par rapport à ce qu'on peut trouver
dans les bars, M. le Président, parce
que, lorsqu'on l'achète à la Société des alcools ou à l'épicerie, on a un coût
qui est beaucoup moindre que ce qu'on
retrouve dans les bars, et là il n'y a pas de contrôle. Et pourtant le
gouvernement précédent avait accepté cette extension du rôle de
Loto-Québec. Là, il y avait un risque beaucoup plus important que ce qu'on est
en train de traiter actuellement.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, M. le
Président. C'est intéressant parce qu'on parle des mêmes experts. Alcool dans les casinos. C'est tiré du Devoir, 3 mai 2013. Le
gouvernement péquiste contredit par les experts, la même Mme Louise Nadeau, qui est professeure à l'Université
de Montréal, et Sylvia Kairouz, qui est de l'Université Concordia :
«…les chercheuses affirment que leur étude ne conclut pas à une hausse des
dépenses faites dans les sites de jeu illégaux.
"Il faut faire attention pour ne pas faire dire aux chiffres ce qu'ils ne
disent pas."» Ça fait que, M. le Président, quand on parle des gens qui ont des expertises, il y a beaucoup de
choses qui ont été dites par le gouvernement qui sont maintenant
réfutées autant par nos chercheuses que par les experts.
M. le
Président, moi, j'aimerais poser une question au ministre par rapport à ce risque
qui est toujours présent : Est-ce
que le ministre est d'accord que, lorsqu'on regarde le principe de précaution,
le gouvernement devrait être plus prudent,
surtout que les experts en santé publique sont revenus et nous ont dit que
définitivement ils ne recommandaient pas au gouvernement de prendre
cette mesure? Est-ce que le ministre en a parlé avec le Conseil des ministres?
Et, si le ministre veut être transparent,
est-ce qu'il peut nous déposer l'étude que la Santé publique a faite? C'est
sous une forme d'avis. Et puis est-ce
que ce serait possible de l'avoir pour que nous puissions en prendre
connaissance? Je me dis que, si nous n'avons rien à cacher, déjà la
transparence pourrait nous aider à cheminer.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Bien, d'abord, M.
le Président, j'aimerais ça rappeler que… Où était le député de Jean-Talon,
au niveau du principe de précaution, lorsqu'il a laissé son gouvernement
investir dans l'amiante, M. le Président…
Une voix : …
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre… Est-ce que c'est une question de règlement?
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Là, M.
le Président, là, c'est le ministre qui se fait poser les questions. Qu'il réponde,
et qu'il réponde de façon adéquate à la question précise, et qu'il cesse de
faire des attaques qui sont non pertinentes, parce que, quand il attaque comme
ça, c'est parce qu'il n'est pas capable de se défendre, M. le Président, c'est très, très clair. Il n'est pas capable de
répondre à cette question. La question, c'est : Oui ou non, va-t-il
déposer l'avis…
Le Président (M. Bergman) : S'il
vous plaît, adresser à la présidence.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : M. le
Président, c'est : Oui ou non, est-ce que le ministre va déposer l'avis
dont il a pris connaissance et qu'il dit avoir discuté avec les autres
ministres et avec la première ministre? S'il est transparent, s'il veut la vérité — puis il n'arrête pas de parler du côté
scientifique — qu'il
dépose au moins l'avis pour que le Québec, les médias et l'opposition
aient l'information que lui a eue. Mais la réponse, M. le Président, c'est oui
ou c'est non, il n'y a pas de peut-être là-dedans.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : M. le Président, le
député de Jean-Talon sait très bien que les documents qui sont déposés au
Conseil des ministres sont protégés pendant 25 ans et que, même si je
voulais le déposer, M. le Président, je n'en aurais pas le pouvoir ni la
liberté.
Par
contre, M. le Président, le Dr Horacio Arruda, qui est le directeur de la santé
publique, est venu témoigner devant
vous et vous a fourni tous les renseignements nécessaires. Vous avez eu l'avis
des départements de santé publique du Québec, M. le Président, qui ont
bien résumé la situation. Je ne conteste pas du tout ces avis-là, M. le
Président, c'est des avis dont j'ai fait
part à mes collègues du Conseil des ministres. Mais, comme le disait très bien
Dr Arruda, l'avis de la Santé publique est un élément dans la prise de
décision, que nous avons considéré à sa pleine valeur, M. le Président, mais ce n'est pas le seul avis qu'un gouvernement
doit considérer lorsqu'il y a une décision à prendre. Et j'ai expliqué très, très bien devant
cette commission quels étaient les enjeux de laisser une offre de jeu de
Loto-Québec devenir moins compétitive, avec tout ce que ça représente
comme perte de ce filet de sécurité, perte de ce contrôle dont le Québec peut s'enorgueillir, M. le Président. Alors, c'est
les enjeux qui ont été considérés par le gouvernement et qui ont permis
au gouvernement d'aller de l'avant avec ce projet de règlement, M. le
Président.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : M. le Président, encore là, j'aimerais avoir un
oui ou un non : Est-ce que le ministre peut confirmer qu'il endosse la décision du ministre des Finances d'aller
récolter 50 millions de dollars soit en augmentation au niveau du
jeu soit en augmentation au niveau de la consommation d'alcool et qu'il est d'accord
que c'est un prix à payer pour mettre cette mesure en place?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
M. le Président, je suis un petit peu irrité par le fait que le député de
Jean-Talon veut que je réponde de la façon qu'il veut que je réponde. Je
répondrai bien comme je voudrai, M. le Président. Il y a des réponses qui ne se
répondent pas par oui ou par non et qu'il faut expliquer. Alors, je vais
répondre comme je veux, là, je pense que c'est mon privilège devant cette
commission.
Deuxièmement,
M. le Président, la décision du ministre des Finances est une décision que je
ne commenterai pas. Il y a des décisions du gouvernement, M. le
Président, auxquelles moi, je suis solidaire, M. le Président. Lorsqu'au gouvernement on a à prendre des décisions, on
considère toutes les options et on discute de toutes les options, on fait
valoir tous les points de vue, M. le Président, et finalement le gouvernement
prend la décision dans le meilleur intérêt des Québécois et Québécoises. Et c'est ce que nous avons fait dans ce
dossier comme dans plusieurs autres, M. le Président.
Et, s'il veut m'entraîner
sur des décisions gouvernementales douteuses, M. le Président, on pourrait
passer plusieurs minutes à discuter des décisions gouvernementales du dernier
gouvernement libéral qui sont pour le moins douteuses,
qu'on pense à Gentilly, M. le Président, où il y a eu une décision qui était
contraire à l'avis d'Hydro-Québec, qui était contraire à la santé
publique, M. le Président.
Le Président (M. Bergman) : M. le ministre, je vous demande de rester sur le
sujet, s'il vous plaît. M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. M. le Président, avant de passer la parole à
mes collègues, je voudrais juste lire ce que Vincent Marissal a écrit
dans La Presse du 4 mai 2013, l'article est intitulé Un
gouvernement de gratteux : «Le principe de solidarité ministérielle
est nécessaire à la cohésion d'un gouvernement, même s'il oblige parfois
certains élus — c'est le prix à payer — à avaler des couleuvres par esprit d'équipe.
Rarement, toutefois, un ministre piétinera ses principes comme Réjean
Hébert vient de le faire.» Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, on entendait le ministre, tout à l'heure,
dresser la liste de l'encadrement qui est offert dans les casinos du Québec aux
joueurs pathologiques, un encadrement qui est mis en place en fonction du fait qu'il n'y a pas d'alcool de servi dans les
aires de jeux. Il y a ce temps d'arrêt, ce temps de réflexion qui permet
aux gens de se détacher de la table de jeu, d'aller prendre un verre, d'aller
prendre de l'air à l'extérieur, pour les fumeurs.
Dans
le contexte où on n'a pas d'avis qui nous a été déposé, d'avis en vertu de l'article 54
de la loi sur la santé et les services sociaux, vous comprendrez qu'on
est un petit peu inquiets de cette question-là. Et moi, j'aimerais
savoir : Est-ce qu'il y aura des sommes
additionnelles qui seront investies à l'intérieur du budget du ministère de la
Santé et des Services sociaux pour
pallier aux effets nocifs qu'entraînera la mesure que le gouvernement s'apprête
à mettre de l'avant? Parce que, là, c'est
bien beau de dire qu'on a un certain nombre de mesures qui existent, ces
mesures-là sont présentes, parfait, mais, compte tenu que le ministre a
dû avaler des couleuvres et qu'il va aller de l'avant avec la mesure
gouvernementale malgré les préoccupations qui sont soulevées par l'opposition,
qu'est-ce qu'on va faire pour venir en aide
à la clientèle vulnérable, qu'est-ce qu'on va faire de plus? Et combien seront
investis pour soutenir ces gens-là?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
• (17 heures) •
M. Hébert :
Alors, M. le Président, lors de la discussion du gouvernement, il a été
convenu, M. le Président, de mettre en place un groupe de travail sur le
suivi des mesures de Loto-Québec pour réellement assurer un monitorage de l'effet de ces mesures, l'effet positif et d'éventuels
effets négatifs, pour faire en sorte que la mise en oeuvre des mesures
de Loto-Québec puisse être suivie, un groupe de travail formé par le ministère
de la Santé et des Services sociaux, où on
assumera le leadership, mais aussi le ministère des Finances et de l'Économie
et celui de la Sécurité publique, pour examiner notamment : Est-ce
que les formations qui sont proposées pour le personnel dans le but de mieux
intervenir en cas de dérive au niveau de la
consommation d'alcool sont effectivement en place et produisent les effets
escomptés? Est-ce que le nombre de personnes qui ont suivi ces formations ont
constitué la très grande majorité du personnel? Quel est le nombre d'interventions
qui a été effectué par le personnel dans les aires de jeux suite à cette
modification réglementaire, le nombre de plaintes? Et également est-ce que ces
mesures ont un impact sur le taux de prévalence?
D'ailleurs,
il y a un comité de suivi qui avait été mis en place lors de l'introduction des
loteries en ligne, qui mesure
périodiquement — et d'ailleurs
la prochaine mesure est attendue pour les prochains mois — le taux de prévalence du jeu
pathologique de façon à documenter l'impact de l'introduction de cette mesure,
les loteries en ligne, sur le jeu pathologique,
et nous allons poursuivre ce monitorage régulier de la prévalence du jeu
pathologique de façon à pouvoir documenter s'il y a une augmentation du
jeu pathologique ou non. Alors, il y a dans ce groupe de travail, je pense, une stratégie de façon à bien documenter l'impact
des mesures, l'impact également sur la consommation du casino par les Québécois : Est-ce qu'on est capables de
renverser la tendance qu'on observe actuellement d'une défection des
clientèles des casinos du Québec?
Cela dit, M. le
Président, les mesures — et
je pense que je les ai énumérées tout à l'heure — qui sont mises en place par Loto-Québec pour détecter et pour
intervenir avec les groupes communautaires auprès des gens qui ont des problèmes de jeu pathologique se poursuivent, M.
le Président. Et il bien évident que, s'il s'avérait, parce qu'on n'a
pas une offre compétitive ou parce qu'éventuellement
il puisse y avoir un impact négatif des mesures introduites, qu'il y ait
une augmentation du jeu pathologique,
évidemment, ces mesures-là vont être renforcées, M. le Président, et on va
fournir le service aux gens qui en ont besoin.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée : J'ai tellement l'impression qu'on travaille à l'envers. On va faire un
groupe de travail, on va évaluer la question, on va documenter la
question une fois que la mesure est mise en place.
On
le sait, les effets que ça va avoir. C'est documenté. Je comprends que le
ministre n'a pas voulu tenir compte de
l'avis de la Direction de la santé publique, mais c'est documenté. Il y en a,
des études qui démontrent l'augmentation, par exemple, des mises
excessives lorsqu'on est sous l'influence de la boisson. On a documenté qu'il y
a 28 % des joueurs problématiques qui ont des problèmes concomitants d'alcool.
C'est clair. C'est là.
Je
comprends, M. le Président, que le ministre ne souhaite pas en tenir compte,
mais ce que je ne comprends pas, c'est que, dans tout ça, on n'a pas
renforcé les mesures pour venir en aide à ces gens-là qui vont être placés dans
une situation de vulnérabilité encore plus
grande. On parle d'un comité de travail. Ce n'est pas de l'aide directe, ça,
aux joueurs. Ce n'est pas de l'aide
directe aux consommateurs. Ce n'est pas de l'aide directe aux citoyens du
Québec. Des comités de travail, du
parle, parle, jase, jase, ce n'est pas ça qui va soutenir les gens qui ont des
problèmes de jeu, et leurs familles, et les drames, les drames qui sont vécus. C'est comme si on faisait
abstraction de ça tout simplement parce que, bien, tout le monde le
fait, on va le faire.
Et
puis c'est extrêmement préoccupant, M. le Président, et d'autant plus… Puis à
moins que le ministre, lui, soit au courant. Ce matin, on n'a pas été à
même de nous dire que… ou de documenter le choix fait par le gouvernement du
Québec d'autoriser la vente de boissons alcoolisées dans les aires de jeux. Il
y aurait d'autres façons, probablement, d'augmenter le facteur d'attraction des
casinos du Québec, mais on a choisi celle-là.
Le
ministre a fait une allocution assez particulière ou pour le moins
particulière. Lorsqu'il disait : Parfois, il faut des remèdes
extrêmes pour briser des cycles, je vous dirais qu'à titre de porte-parole de l'opposition
pour les services sociaux j'ai beaucoup de difficultés à accepter ce
discours-là de la part d'un ministre qui est censé protéger les plus
vulnérables. C'est son rôle et c'est le rôle de sa collègue ministre déléguée.
Ceci étant dit, je
vais passer la parole à ma collègue.
M. Hébert :
Je peux répondre à la question, M. le Président?
Le Président (M.
Bergman) : Oui, vous avez… M. le ministre.
M. Hébert :
Alors, moi, je voudrais rappeler à la députée de Gatineau que sa région est au
coeur du problème auquel on s'intéresse
aujourd'hui. La province de l'Ontario va développer, au cours des prochaines
années, un casino dans la région d'Ottawa, M. le Président. Alors, si
les gens de l'Outaouais traversent de l'autre côté parce que l'offre de jeu est plus intéressante, le Casino du Lac-Leamy, M.
le Président, va continuer à avoir une défection de sa clientèle, et là
on va avoir un problème important, M. le Président. On va avoir des gens qui
vont aller jouer de l'autre côté et on va être obligés de réparer les pots cassés au Québec et d'offrir les services au
Québec, M. le Président. Alors, c'est pour ça sans doute que tant la Chambre de commerce de Gatineau
que le maire de Gatineau, que Tourisme Outaouais, M. le Président, sont en faveur du règlement qui nous occupe
actuellement, parce qu'eux, ils voient que de garder les gens de l'Outaouais,
de garder en Outaouais les gens de l'Outaouais
et d'attirer en Outaouais des touristes qui vont venir profiter de l'offre
de jeu, c'est une façon, M. le Président, d'avoir
un jeu responsable, une offre de jeu responsable à la population de l'Outaouais.
Et je pense que c'est extrêmement important notamment pour la région de l'Outaouais,
qui est juste à la frontière, M. le Président,
et qui est très susceptible de voir cette évacuation des citoyens de l'Outaouais
vers des casinos de l'Ontario.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau, il vous reste sept minutes.
Mme Vallée : Juste une petite parenthèse. Ce matin, peut-être que la ministre n'a
pas eu la chance d'écouter les échanges avec son collègue des Finances,
mais on a 25 % de la population… Dans le fond, M. le ministre, ce qu'on a
démontré, c'est que, la population, 65 % des revenus des casinos vont du
côté québécois, en Outaouais. Et on a fait la démonstration en fonction des
chiffres présentés dans les rapports trimestriels tant du racino que du casino.
Et peut-être le ministre ne le sait pas, c'était
dans LeDroit, mais le casino ne s'implantera pas au centre-ville d'Ottawa,
le maire d'Ottawa l'a refusé. C'était dans le quotidien LeDroit ce
matin, ceci étant dit. Petite précision.
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Mais ça ne veut pas dire, parce qu'il n'y en a pas un dans la ville d'Ottawa,
qu'il n'y en aura pas un dans la
région d'Ottawa, M. le Président. Et je pense que c'est écrit dans le ciel que
l'offre de casino dans la région d'Ottawa va se bonifier au cours des
prochaines années et qu'il faut garder au Québec notre avantage concurrentiel.
Le Président (M. Bergman) :
Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : Il vous reste six minutes.
• (17 h 10) •
Mme de Santis : J'aimerais saluer le ministre. Je trouve qu'il a beaucoup de courage de
venir soutenir et défendre sa position.
J'aimerais revenir
sur deux ou trois choses qui ont déjà été dites. D'abord, la députée de
Sainte-Rose nous a remis un tableau qui démontre les revenus par province et
secteur, où on semble dire qu'au Québec les revenus pour 2011‑2012 provenant des casinos ont diminué. Cela
est complètement contre ce qu'on retrouve dans le rapport annuel de
Loto-Québec, qui démontre clairement qu'il y a eu une augmentation de revenus
dans chacun des casinos au Québec. Alors, l'augmentation, la hausse a été de
1,7 %. Ça, c'est une chose.
Deuxième chose :
j'aimerais aussi faire référence à un autre tableau que nous avons reçu ce
matin concernant les taux de joueurs pathologiques. Au Québec, on dit que
c'est 0,7 %. Vous savez que, si on va à 0,8 % comme nos amis de l'Ontario, au Québec, ça voudrait dire qu'il
y aurait au moins 5 000 personnes de plus qui seraient touchées. Ce
n'est pas négligeable. Quand on regarde ça
simplement, 0,7 %, 0,8 %, ça ne veut pas dire beaucoup, mais, quand
ça touche la vie des gens, ça veut dire beaucoup.
J'aimerais
aussi maintenant tourner à une autre chose. Le ministre nous dit que c'est son
devoir d'informer les citoyens et ses collègues, mais son devoir va
au-delà de simplement informer. Si je regarde la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, à l'article 3,
on dit clairement : «Le ministre doit plus particulièrement — entre
autres, parce qu'il y a toute une liste :
«b) prendre les
mesures requises pour assurer la protection de la santé publique.»
Sur
son site Internet, on voit que la mission de son ministère, c'est de maintenir,
d'améliorer et de restaurer la santé et le bien-être des Québécois et
Québécoises.
Alors, ayant dit tout
cela et ayant entendu du ministre que c'est très important que les recherches
soient scientifiques, etc., moi, j'aimerais savoir : Quelle recherche
scientifique existe-t-il pour démontrer qu'il y a eu une augmentation de
Québécois à l'extérieur pour jouer les jeux de hasard? Est-ce qu'il y a des
études scientifiques?
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
O.K. M. le Président, il y a beaucoup de questions dans l'exposé de madame.
Alors, je vais commencer par les revenus de Loto-Québec. Je pense qu'il aurait
été intéressant de questionner mon collègue des Finances là-dessus, il aurait pu vous apporter les éclairages, là, ce n'est
pas mon domaine de spécialité. Moi, ce que je peux vous dire, c'est que tant Loto-Québec que mon collègue des Finances
ont constaté que l'offre de jeu de Loto-Québec avait diminué au cours
des dernières années, et je pense qu'ils ont des chiffres à fournir là-dessus,
tout comme, pour répondre à la dernière question, on sait très bien que
40 millions ont été dépensés par des Québécois au casino de Carleton — comme il s'appelle? — Rideau
Carleton, et 10 millions au casino d'Akwesasne. Ça, c'est de l'argent qui
ne va pas au Casino du Lac-Leamy ou au
Casino de Montréal. Alors, il y a des évidences qu'il y a consommation de jeux
de hasard et d'argent ailleurs, à l'extérieur
du Québec, et ces évidences-là vous ont été fournies par mon collègue des
Finances.
Concernant le taux de
prévalence, il faut bien réaliser que ces taux-là sont des estimés. Donc, on ne calcule pas le nombre de joueurs
pathologiques, on estime par des études épidémiologiques les joueurs
pathologiques à partir d'échantillons. Et le
0,7 % a un intervalle de confiance autour, alors il peut varier de
0,9 % à 0,5 %. Et donc ça ne veut pas dire, parce que l'Ontario est à 0,8 %, qu'il y a 0,1 % de plus,
là, il faut réaliser que cette différence-là n'est pas nécessairement
statistiquement significative. Et je pense qu'il faut bien réaliser ceci.
En
termes de protection de la santé publique, M. le Président, je pense vous avoir
fait la démonstration que ma préoccupation est, bien sûr, d'être
conscient du risque d'introduire de l'alcool dans les aires de jeux, mais ce
risque-là est moins grand que le mal, qui
est beaucoup plus important, de voir les citoyens et citoyennes du Québec
consommer les jeux de hasard et d'argent à l'extérieur
du cadre légal des casinos de Loto-Québec et de les consommer dans des
casinos illégaux ou encore dans des casinos de l'autre côté de nos frontières.
Et c'est là…
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.
M. Hébert :
Et c'est là, M. le Président, qu'est l'enjeu majeur. On est là, dans un
règlement de moindre mal, et l'attitude en
termes de protection de la santé publique que doit avoir votre humble
serviteur, c'est vraiment d'être dans une situation de moindre mal.
Le
Président (M. Bergman) :
Merci, M. le ministre. Ceci met fin au bloc de l'opposition officielle.
Maintenant, le deuxième groupe d'opposition, pour un temps de 10 minutes. Mme
la députée de Groulx.
Mme Daneault :
Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre, de votre présence.
Ce matin, le ministre des Finances nous a
indiqué clairement que cette mesure-là a été prise dans le cadre de l'atteinte du déficit zéro uniquement, c'est-à-dire
qu'on a demandé à Loto-Québec de participer à l'atteinte de l'objectif du
déficit zéro et d'amener 40 millions supplémentaires dans les coffres de l'État.
Alors, le ministre des Finances l'a lui-même confirmé, nous a même admis ne pas
avoir pris connaissance totalement du rapport de l'Institut national de santé
publique ni de comprendre parfaitement la notion de retrait qui est impliquée
dans la consommation d'alcool dans les aires de jeux.
Alors, ma
question est la suivante, M. le ministre de la Santé : Est-ce que vous
avez expliqué de façon très claire au
caucus des ministres, au Conseil des ministres, l'impact du retrait d'une table
de jeu de la consommation d'alcool? Ici, pour nous, ça a été démontré par les experts à de nombreuses reprises, mais
est-ce que ça a été expliqué clairement au Conseil des ministres, cette
notion de retrait qui peut être salutaire dans le cas des gens vulnérables, qui
sont à risque d'abus d'alcool, abus de jeu?
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : M. le Président,
lors des discussions du gouvernement concernant cette question, nous avons,
ma collègue la ministre déléguée aux
Services sociaux et moi-même, exposé clairement l'état de la littérature et
également les avis de santé publique, je peux assurer cette commission de cette
action que nous avons prise pour expliquer le plus clairement possible, M. le Président, qu'il y avait des avis de santé
publique qui émettaient des réserves par rapport au règlement. Et nous avons expliqué le phénomène
auquel fait référence la députée de Groulx et nous avons également, autour de la table, évoqué d'autres considérations
extrêmement importantes au niveau de la santé publique, M. le Président. Notre préoccupation en
termes de la diminution de la consommation du jeu par Loto-Québec est une
préoccupation qui est importante, M. le
Président, et c'est dans ce contexte-là que le gouvernement a pris sa décision,
mais soyez assurés que nous avons assumé nos responsabilités en
informant du mieux que nous avons pu nos collègues de l'état de la littérature
scientifique et des avis, des réserves exprimées par la Santé publique.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : Alors, ce qu'on comprend,
c'est que le Conseil des ministres a opté pour un 40 millions
malgré la dangerosité du phénomène d'alcool dans les aires de jeux.
Ma deuxième question, elle est claire, elle est
simple : Est-ce que les membres du caucus ont aussi été avisés qu'il existe seulement cinq mesures politiques
efficaces en matière de prévention des problèmes de jeu? Et ça, c'est
une étude de Williams en 2007 qui l'a bien
démontré. Il y a cinq mesures qui ont été relatées efficaces, dont la
restriction du nombre de sites, la
restriction des formes les plus dangereuses de jeu, la restriction sur la
localisation, les interventions en amont et, la cinquième, la
restriction sur la consommation concomitante d'alcool et… dans les aires de
jeux. Est-ce que le caucus a été mis au courant de ces cinq mesures politiques
là préventives?
Là où je veux en venir, M. le ministre, c'est
que, depuis…
Le Président (M. Bergman) :
…adressez à la présidence.
Mme
Daneault : Oui, M. le
Président, excusez-moi. C'est que, depuis qu'on a nos casinos étatisés — et
tout le monde le dit — on
a des résultats qui sont quand même impressionnants. Nous sommes considérés
comme des leaders en protection du
public, et ces cinq mesures-là font partie des interventions politiques
efficaces en matière de prévention. Alors, aujourd'hui, ce qu'on
comprend, c'est que, si on en retire une, c'est un recul pour le Québec en
matière de saines pratiques de prévention.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : M. le Président, l'étude
de Williams faisait partie ou fait partie du débat. M. le Président,
Williams, qui est un chercheur ontarien, a élaboré un certain nombre de bonnes
pratiques, dont celles que soulève la députée de Groulx, M. le Président, mais, en dépit de ça, l'Ontario n'a pas retenu
ce cinquième élément de ce qui était proposé par Williams, en offrant plutôt une offre de jeu dans ses casinos qui soit
la plus compétitive possible et qui permette de pouvoir consommer de l'alcool
dans les aires de jeux, M. le Président. Alors, même dans sa propre province,
M. Williams n'a pas réussi à convaincre
les autorités ontariennes que ça faisait vraiment une différence. Et, comme je
l'ai expliqué à de nombreuses
reprises, l'état de la littérature scientifique, dans ce domaine-là, n'est pas
aussi clair que ça. Il y a beaucoup d'opinions
là-dessus et beaucoup d'études de corrélation qui portent sur, oui, la
consommation d'alcool et le jeu, mais, au niveau de la consommation d'alcool et du jeu pathologique, c'est
beaucoup plus ténu comme preuve scientifique. Et c'est pourquoi l'Ontario
n'a pas retenu cette proposition dans les bonnes pratiques qu'avait soumises le
Dr Williams.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx, il vous reste quatre minutes.
• (17 h 20) •
Mme
Daneault : Merci. Merci, M.
le Président. Alors, depuis l'entretien, on se cache derrière des études ou
on dit qu'il n'y a pas d'études qui sont
valables ou… Et, par contre, j'inviterais le ministre de la Santé à consulter
le livre Tabac, alcool, drogues,
jeux de hasard et d'argent qui a
été publié par l'Institut national de santé publique du Québec, où on retrouve, à la page 222, la concomitance des
conduites addictives et délinquantes à l'adolescence, entre autres, et la concomitance de l'alcool et des jeux. Je ne
vous ferai pas la lecture de toutes les références, mais je pense que ça
serait une bonne idée que vous le fassiez.
Mais, au-delà
des études scientifiques, aujourd'hui, moi, j'aimerais qu'on parle de morale.
Nous sommes aussi des élus, nous
sommes responsables de protéger notre population. On sait très bien que la
population qui fréquente les casinos est
une population en majorité québécoise, 94 % sont des Québécois. La
majorité sont des gens à faibles revenus, dont on sait qu'ils sont vulnérables à penser, à croire qu'en
misant davantage ils pourraient avoir des revenus supplémentaires. Alors, quand on parle aujourd'hui qu'on va aller
rechercher 40 millions dans la poche de cette population vulnérable,
à risque, est-ce qu'on peut se parler
aujourd'hui, au-delà des études scientifiques, de moralité? Est-ce qu'on peut
aujourd'hui aller voir des pays qui ont de
saines pratiques, des pays scandinaves, entre autres, qui ont, eux, décidé
collectivement de cesser d'avoir des revenus supplémentaires des jeux,
par les jeux?
Alors, c'est
une question morale, M. le ministre… M. le Président, puis qui va au-delà des
études, au-delà. Est-ce qu'on va aujourd'hui taxer les gens les plus
vulnérables du Québec qui fréquentent les casinos? Est-ce qu'on va aller chercher 40 millions supplémentaires dans
leurs poches alors qu'on sait que ces gens-là sont des gens à faibles
revenus? Et les statistiques le démontrent, ils ont des revenus inférieurs à
40 000 $ annuellement. Alors, est-ce qu'on s'est posé la question au
Conseil des ministres? Est-ce qu'on s'est posé la question, au-delà de
considérations financières, de la moralité?
Nous sommes des élus, nous sommes responsables de notre population. J'aimerais
aujourd'hui… J'aimerais vous entendre
dire à Loto-Québec : Retournez faire vos devoirs, trouvez d'autres façons
plus créatives qui n'affecteront pas l'état de santé de nos citoyens,
qui vont plutôt avoir des ressources… des pratiques plus, je vous dirais…
Le Président (M. Bergman) : Il vous
reste seulement une demi-minute. Alors, si vous voulez une réponse…
Mme Daneault : …plus rigoureuses.
Vous m'avez enseigné la rigueur, M. le ministre, dans le passé, rigueur
intellectuelle. Aujourd'hui, je dois admettre que je suis déçue de vos interventions.
J'aimerais vous entendre dire que vous allez dire à…
Des voix : …
Le Président (M. Bergman) : S'il
vous plaît! S'il vous plaît!
Mme Daneault : …
Le
Président (M. Bergman) : Mme
la députée de Groulx, Mme la députée de Groulx, le temps s'est écoulé.
Mais je vous donne une minute pour une réponse, M. le ministre.
M.
Hébert : …permettre aux gens
de tous les revenus de pouvoir jouer dans un cadre sécuritaire et dans un
cadre contrôlé. C'est ce que le Québec a
fait au cours des 30 dernières années, M. le Président, et c'est ça, l'enjeu
moral. Et je pense que de permettre l'alcool
dans les casinos continue à permettre à Loto-Québec d'avoir une offre
compétitive et une offre qui permet d'avoir
un milieu contrôlé, bien encadré pour permettre d'aider les personnes qui
développent malheureusement du jeu pathologique, mais qui permet aussi à la
très grande majorité des Québécois de pouvoir avoir un loisir qu'ils aiment et
qu'ils peuvent continuer à pratiquer, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) :
Merci, M. le ministre. Alors, ceci met fin à cette consultation avec M. le
ministre. Je vous remercie pour votre présentation devant nous et l'échange
avec les députés de cette commission.
Collègues, je suspends pour quelques instants
avant d'entreprendre les remarques finales. Je suspends pour quelques moments.
(Suspension de la séance à 17 h 25)
(Reprise à 17 h 29)
Remarques finales
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre,
s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous en sommes
maintenant à l'étape des remarques finales.
J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition à faire ses
remarques finales, pour une durée maximale de trois minutes. Mme la députée de
Groulx.
Mme Hélène Daneault
Mme Daneault : Merci, M. le
Président. Alors, je pense que notre position, elle a été très claire dès le
début et que les travaux de la commission
nous ont permis effectivement de nous conforter dans cette vision-là. Je pense
que ça a été clairement établi par la Santé
publique que la mesure qu'on a au Québec depuis le début de l'arrivée des
casinos, qui ne permettait pas l'alcool aux aires de jeux, était
salutaire dans le cadre de la prévention d'une clientèle vulnérable mais aussi d'une clientèle régulière, parce qu'on a vu au
fil des auditions que même un taux aussi faible que 0,05 % d'alcoolémie dans le sang pouvait aussi porter
atteinte au jugement d'un joueur, qu'il soit un joueur pathologique ou
non, et lui faire regretter ses gestes.
Alors, au
Québec, on a opté pour des casinos d'État pour lutter contre la criminalité, et
je pense que tout le monde est d'accord
là-dessus, que c'était une bonne décision, mais, tout en permettant l'étatisation
des casinos, on a été d'avant-garde
en utilisant des moyens de prévention qui se sont avérés efficaces, entre
autres de ne pas permettre l'alcool dans les aires de jeux. Alors, je
pense qu'aujourd'hui on a… et je l'ai répété à plusieurs reprises, Loto-Québec
a utilisé la voie de la facilité en
répondant à une commande du gouvernement d'obtenir un 40 millions
supplémentaire dans les coffres de l'État. Alors, je pense qu'aujourd'hui,
s'il y a une chose… Et je le demande de tout coeur. Je pense que moralement, éthiquement, scientifiquement on ne peut pas aller
dans ce sens-là, on doit reculer — et
cette fois-ci je pense que, si le gouvernement
recule, on va être les premiers à applaudir et à les soutenir, sérieusement — et
demander à Loto-Québec de retourner à la table de travail. Et, si on a
besoin de revenus supplémentaires, qu'on nous arrive avec des moyens qui sont
beaucoup plus créatifs et moins néfastes pour la santé des Québécois.
On n'a qu'à
penser… Récemment, on a entendu le retour de Martin Fontaine à Elvis Story,
qui va être Elvis Aventure ou… je ne me souviens plus trop, trop,
je ne veux pas faire d'erreur, mais… Et c'est déjà «sold out» à Québec, et il
sera au Casino du Lac-Leamy. Alors, on a des artistes…
• (17 h 30) •
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme
Daneault : Merci. On a des
artistes au Québec qui cherchent des salles, où on pourrait en faire la
promotion et augmenter l'achalandage par la même
façon, des casinos, si c'est ce qu'on recherche. Mais sincèrement je
demande au gouvernement de reculer sur cette décision-là. Et je serai la
première à applaudir et à vous appuyer dans ce sens-là.
Le Président (M. Bergman) : Merci,
Mme la députée de Groulx. Maintenant, j'invite le porte-parole de l'opposition officielle à faire ses remarques
finales, pour une durée maximale de six minutes. M. le député de Jean-Talon.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M.
le Président. D'abord, nous sommes d'emblée d'accord qu'au Québec on ait un jeu responsable et sécuritaire. Nous
avons mis en place des infrastructures où il y a des casinos publics.
Donc, les gens peuvent jouer dans des endroits où est-ce qu'il y a une
protection, il y a des mécanismes de surveillance puis il y a une offre de jeu
qui est très raisonnable.
Lors des auditions, nous avons entendu plusieurs
groupes. Un seul groupe s'est montré en faveur, et c'est Loto-Québec, qui avait
une commande au niveau financier de la part du gouvernement d'augmenter les
revenus entre 40 et 50 millions de
dollars. Donc, leur stratégie est basée pour augmenter les revenus et non pas
pour le bien des joueurs, et certainement pas pour le bien de la
population.
Également, ce
qu'il faut dire à la décharge de Loto-Québec : C'est une des meilleures
organisations au monde parce qu'ils
ont su appliquer les meilleures pratiques, dont une de ces meilleures pratiques
est l'absence de consommation d'alcool dans les aires de jeux. C'est
reconnu, tous les groupes l'ont dit, c'est une des meilleures mesures qui peut
être mise en place.
Tous les
groupes sont venus également nous expliquer le fonctionnement, pourquoi, entre
autres le principe du temps d'arrêt,
également l'augmentation d'alcool et de jeu lorsque c'est pris de façon
concomitante. D'ailleurs, ma surprise, c'est
de voir que le ministre essaie de faire de la discrétion, des déviations en
disant que ce n'est pas si vrai que ça, alors que tous les experts nous
disent que c'est évident que c'est comme ça. De dire qu'il faut avoir une
preuve par une étude scientifique en double
insu avec 50 000 personnes, je pense que la plupart… Et tout le monde l'a
dit également, que c'était quelque
chose qui était difficile à faire ne serait-ce qu'au niveau éthique, malgré les
commentaires du ministre à la fin. D'ailleurs,
si c'était vrai, ce qu'il disait là, bien ils avaient juste à financer un
certain type d'étude, et nous pourrions avoir une réponse peut-être dans
cinq à 10 ans. Mais, en attendant, il y a des gens qui vont payer le prix,
M. le Président.
Des
témoignages intéressants également de la part des usagers, des groupes qui
représentaient les usagers, des intervenants et des chercheurs. Et, je
tiens à le redire, c'est l'unanimité.
De même, nous avons des avis de la direction
régionale de santé publique de Montréal et le directeur national de la santé publique. Tous sont venus nous dire qu'ils
étaient contre la mesure, et l'avis qui a été envoyé au gouvernement
leur disait de ne pas prendre ce règlement et de ne pas prendre cette mesure.
Ça, M. le Président, c'est extrêmement puissant comme argument, parce que nos
experts, malgré le fait que le ministre de la Santé ait dit qu'il y a d'autres considérations, nos experts au niveau social et au
niveau santé recommandent de ne pas mettre en place ce règlement.
M. le
Président, je tiens à réitérer les risques que ça représente. Ce sont des gens
qui sont à risque au niveau du jeu, qui en même temps sont à risque au
niveau de la consommation d'alcool. Les deux ensemble font une potentialité des facteurs de risque. Donc, M. le Président, on
doit s'attendre à ce qu'il va y avoir des gens qui vont en souffrir, il
faut s'attendre à ce qu'il va y avoir des familles également qui vont en
souffrir.
Et également, pour notre société québécoise, je
crois que l'argumentation de la compétitivité… Moi, je suis d'accord avec le
principe de la morale. On n'a pas à piler sur notre morale pour augmenter la
compétitivité. Et déjà, au Québec, c'est un
endroit où est-ce qu'on se vantait d'avoir les meilleures pratiques au monde,
mais actuellement je pense qu'on a
une déviation vers une tendance à dire que c'est la priorité d'abord à l'argent,
d'abord des mesures pour augmenter la compétitivité et après la
population.
M. le Président, moi
également avec mes collègues, nous faisons la recommandation que le
gouvernement revienne en arrière. Et nous allons saluer cette décision. Et c'est
rare qu'on salue un recul, mais, dans ce cas-ci, je pense que ce serait bien avisé de la part du gouvernement d'y repenser,
revenir en arrière et de voir avec Loto-Québec comment on peut faire
pour soit augmenter les revenus ou… Si on a des principes, dans notre société,
on n'a pas à augmenter les revenus en créant
un problème ailleurs. Je pense que, comme gouvernement, on est capable de faire
face à… de prendre ce type de décision.
M. le
Président, pour terminer, une grande, grande déception, c'est… Ma collègue de
Gatineau a posé la question. Le ministre, ne serait-ce que pour avoir
bonne conscience, a seulement dit qu'il y aurait une étude, alors que les gens qui vont subir les conséquences de cette mesure,
eux, ont besoin de services, ont besoin de soins. De ce que nous avons compris, tant du ministre des Finances que du
ministre de la Santé et des Services sociaux, il n'y a aucun montant qui
va être dédié pour aider les gens. Donc, on est encore dans la pensée magique,
faire des études, avoir des résultats dans plusieurs
années, et les gens qui vont payer le prix, eux, n'auront pas aucune, aucune
aide de la part du gouvernement.
Merci, M. le Président. Puis je fais encore un
appel de tout mon coeur, de toute ma raison et, je pense, des connaissances
scientifiques pour dire que c'est une mauvaise mesure et que le gouvernement
devrait reculer et annuler ce règlement. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) :
Merci, M. le député. Je suis maintenant prêt à reconnaître un membre du
gouvernement pour ses remarques finales, d'une durée maximale de six minutes.
Mme la députée de Masson.
Mme Diane
Gadoury-Hamelin
Mme Gadoury-Hamelin : Oui, merci, M.
le Président. Bien, c'est sûr qu'après avoir écouté tous ces gens qui nous ont présenté leur avis, notre position,
nous, c'est sûr qu'outre l'aspect économique puis outre l'aspect
compétitivité ce qu'on vise, comme
gouvernement, c'est de s'assurer que les Québécois qui veulent jouer puissent
le faire dans un milieu sécuritaire.
Déjà, je pense qu'on l'a démontré avec plusieurs chiffres, Loto-Québec a déjà
fait une démonstration de la capacité d'encadrer le jeu par du jeu
responsable. Je pense qu'on nous a énoncé à plusieurs reprises que, dans le cadre du jeu des casinos de Loto-Québec, le tout
se déroule de façon sécuritaire. Et je pense que, notre gouvernement, la
position de notre gouvernement, c'est de ne
pas se mettre la tête dans le sable, ne pas adopter le statu quo pour
justement permettre de rapatrier ces gens-là qui jouent de toute façon dans des
milieux illégaux, dans des milieux illicites où est-ce qu'on a moins de
contrôle, pour, justement, les encadrer.
Je pense,
aussi, Loto-Québec a démontré que, les bénéfices nets au gouvernement, elle
verse 100 % de ses bénéfices nets au gouvernement en dividendes et
que la société participe également au financement de missions spécifiques de l'État dans le domaine de l'action communautaire
autonome, de l'aide aux aînés en perte d'autonomie et du jeupathologique. Je pense que ça, ça a été démontré
et je pense que… Au-delà de l'aspect économique, je pense qu'il est
important de maintenir un juste équilibre dans notre réflexion. Je pense aussi
que, par conséquent, l'attraction des joueurs
vers les jeux de Loto-Québec s'effectue dans le respect rigoureux d'un ensemble
de règles relatives à la façon d'offrir
ces jeux-là, puis ça, je pense qu'il faut en tenir compte aussi, parce que de
toute façon les gens vont jouer ailleurs puis vont jouer dans un milieu
où on n'a pas de contrôle.
• (17 h 40) •
Je pense qu'on a nommé aussi, entre autres, la
vulnérabilité des jeunes qui commencent à jouer. Donc, ça, quand ils jouent ailleurs, on n'a pas de contrôle
là-dessus. Par contre, quand ils jouent chez Loto-Québec, on a un
contrôle de l'âge. On a un contrôle de l'intoxication
quand les gens arrivent dans les casinos, ça fait qu'on est capables de
contrôler. Puis en plus de ça on est
capables de contrôler comment ça se déroule pour eux en cours de jeu, parce qu'on
a des gens pour identifier ça, tandis que, quand ils jouent ailleurs, on
n'a pas cet aspect-là du tout, on n'est pas capables de leur apporter l'aide et
les outils que Loto-Québec a à la disposition des gens qui jouent.
On a parlé
beaucoup, beaucoup des joueurs pathologiques. J'aimerais entre autres vous
citer un article, parce qu'on en a cité beaucoup, puis je pense que c'est
important de citer un article du Devoir qui date du 2 juin 2013 — donc
c'est assez récent — où
est-ce qu'on parle de paternalisme d'État. C'est un article de Jean-Robert
Sansfaçon qui… Il nomme… Je ne vous lirai
pas tout l'article, mais il y a un espace, là, que… il y a un moment qui est
important : «Dans tous les
casinos du monde, l'alcool fait partie du divertissement que sont les jeux de
hasard. Partout… sauf dans le seul endroit où le personnel est formé pour intervenir au besoin : [alors] les
casinos publics de Loto-Québec. Quel paternalisme absurde!
«La dépendance au jeu, à l'alcool, au sexe, à l'argent,
au pouvoir, à Internet et même au travail peut être pathologique et, dans quelques cas limites, conduire aux pires excès, y
compris à la faillite, au vol, au suicide et au meurtre. En détecter les
signes précurseurs vaut toujours mieux que de tenter de réparer les pots cassés
après coup, bien sûr.»
Alors, c'est
un peu ça, la position du gouvernement. Aussi bien avoir les gens chez nous
pour pouvoir les identifier avant d'être rendus à cette étape-là, pour
justement leur apporter l'aide qu'il faut, parce que de toute façon les gens
jouent ailleurs. C'est ce qu'on nous donne comme statistiques.
La tendance
que l'on détecte de ces estimations-là que je viens d'évoquer, c'est non
équivoque. La part relative des jeux qui ne sont pas offerts par
Loto-Québec ne cesse d'augmenter, et ça, c'est une évidence. Alors, aussi bien
avoir les gens chez nous.
Chaque année, Loto-Québec déploie des efforts
importants de mise en marché pour canaliser les joueurs vers le jeu légal et reconquérir la clientèle perdue au
bénéfice d'autres juridictions et de sites illégaux. Alors, ces efforts-là
sont notamment traduits par des investissements importants dans les casinos d'État
afin de les rendre comparables à ceux des autres juridictions. On en a parlé.
Au Casino de Montréal, il y a eu de l'investissement. Au Lac-Leamy, on a fait des investissements. Mais il reste que les gens
disent : Ce n'est pas intéressant de… on va aller jouer ailleurs, parce qu'ailleurs il y a de l'alcool dans les aires de
jeu. Donc, nous perdons ces joueurs-là, et c'est ce qui est négatif
aussi….
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme
Gadoury-Hamelin : Oui.
Alors, depuis plus de 40 ans, aucun gouvernement n'a souhaité revenir à
l'époque d'avant Loto-Québec, au contraire.
Les décisions prises au fil des années, et ce, peu importe le gouvernement en
place, ont toutes contribué à consolider son rôle et ses responsabilités.
Et, en
terminant, je veux rappeler aux gens que nous avons aussi… et le ministre l'a
souligné tout à l'heure, que nous allons avoir un comité qui va pouvoir suivre
l'évolution de cette mise en place là. On ne fait pas ça aveuglément…
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme
Gadoury-Hamelin : …on fait
ça de façon suivie, avec un comité sérieux qui va s'occuper de la vigie.
Et, je le répète, nous voulons que les
Québécois viennent s'amuser dans les casinos du Québec. Quand ils décident
d'aller y jouer, ils dépensent ici, et c'est à tout le Québec que cela profite.
Le Président (M. Bergman) : Merci,
Mme la députée.
Collègues, je
lève maintenant la séance, et la commission suspend ses travaux jusqu'à
19 h 30, ce soir, où elle entreprendra un autre mandat. Merci,
collègues.
(Fin de la séance à 17 h 44)