(Onze heures trente-six minutes)
Le Président (M. Morin) : Bonjour,
tout le monde. Comme nous avons quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux
ouverte. Et, comme à l'habitude, vérifiez vos téléphones cellulaires,
car la sonnerie nous dérange en commission.
La commission est réunie ce matin afin de
procéder à des consultations particulières sur le projet de règles abrogeant la
disposition qui prohibe la vente, le service et la consommation de boissons
alcooliques à l'intérieur des aires de jeux.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, aucun remplacement.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Morin) : Donc, ça
va bien, les gens de la commission sont tous là.
Ce matin, nous entendons les représentants de
Loto-Québec, mais, avant de débuter, je sais que nous avons discuté ici, en commission, de procéder à l'étape
des remarques préliminaires. Je suis donc prêt à entendre un
représentant du groupe parlementaire formant le gouvernement, dont Mme la
députée de Sainte-Rose, vice-présidente de cette commission. Mme la députée,
vous disposez d'un maximum de six minutes pour vos remarques
préliminaires.
Mme Suzanne Proulx
Mme
Proulx : Merci beaucoup, M.
le Président. Alors, ça me fait plaisir de saluer mes collègues membres
de la commission et, bien sûr, de souhaiter la bienvenue à nos invités,
M. Bibeau et les personnes qui l'accompagnent.
Alors, j'ai
donc, en effet, quelques remarques préliminaires concernant le mandat de la
commission aujourd'hui. Créée en 1969 afin d'implanter une loterie
publique, on sait que Loto-Québec a diversifié ses activités au fil des ans. Aujourd'hui, en plus des loteries, Loto-Québec
exploite notamment quatre casinos, un réseau d'appareils de loterie
vidéo et un site de jeu en ligne.
La
contribution de Loto-Québec à l'activité économique est considérable. Je vous
rappelle, par exemple, qu'en 2012‑2013, les achats en biens et services
de Loto-Québec auprès d'entreprises en affaires au Québec ont totalisé 347 millions de dollars et que la société
verse aussi, à plus de 6 000 employés, plus de 425 millions en
salaires et avantages sociaux. En
plus de soustraire la population à l'offre de jeu illégale, l'intervention de
Loto-Québec contribue de façon importante au financement de l'ensemble
des services publics offerts aux Québécois.
Loto-Québec
verse 100 % de son bénéfice net au gouvernement en dividendes. La société
participe également au financement de missions spécifiques de l'État dans
les domaines de l'action communautaire autonome, de l'aide aux aînés en perte d'autonomie et du jeu pathologique.
En 2011‑2012, ce sont 1,3 milliard de dollars qui ont été
versés au profit de la collectivité,
dont 1,2 milliard en dividendes. Or, le dividende versé par Loto-Québec
diminue constamment depuis le niveau de 1,5 milliard observé en 2005‑2006.
Depuis sa création, le défi de Loto-Québec
consiste à réaliser ses objectifs commerciaux tout en réduisant au minimum les effets néfastes du jeu sur la santé
publique. La capacité de Loto-Québec d'assumer son rôle dépendessentiellement de l'attraction que suscite son
offre de jeu sur la clientèle. Cette attraction ne devrait cependant pas
être excessive et créer des problèmes de
santé publique. Par conséquent, l'attraction des joueurs vers les jeux de Loto-Québec
s'effectue dans le respect rigoureux d'un ensemble de règles relatives à la
façon d'offrir ses jeux.
Le pouvoir
d'attraction de Loto-Québec doit cependant lui permettre de susciter l'intérêt
des Québécois en général et, plus particulièrement, de la clientèle
attirée par l'offre de jeu des juridictions limitrophes et des sites illégaux
non sécuritaires.
• (11 h 40) •
Or, l'analyse des données présentées dans les
enquêtes sur les habitudes de jeu de 2002 et de 2009 montre un déplacement des
dépenses de la population adulte des jeux de hasard et d'argent offerts par
Loto-Québec vers le jeu illégal. En 2009, le
poids relatif des dépenses de jeu à Loto-Québec était de 68 %
comparativement à près de 83 % en 2002. En parallèle, les Québécois
ont augmenté de 17 % à près de 32 % leur part dans le jeu illégal et
non étatisé. La tendance que l'on détecte de ces estimations est non équivoque.
La part relative des jeux qui ne sont pas offerts par Loto-Québec ne cesse d'augmenter.
À titre
d'exemple, en ce qui concerne le jeu en ligne, il est estimé que les dépenses
de jeu des Québécois totalisent un
minimum de 100 millions de dollars par année, dont 30 millions de
dollars sur Espacejeux. Ça signifie donc qu'il y a plus de
70 millions de dollars qui sont dépensés chaque année sur des sites
illégaux. Chaque année, Loto-Québec déploie des efforts importants de mise en marché
pour canaliser les joueurs vers le jeu légal et reconquérir la clientèle
perdue au bénéfice d'autres juridictions et de sites illégaux.
Ces efforts
se sont notamment traduits par des investissements importants dans les casinos
d'État afin de les rendre comparables
à ceux des autres juridictions. Ainsi, à l'automne 2013, le Casino de Montréal
aura bénéficié d'investissements majeurs totalisant 306 millions de
dollars. Au Casino du Lac-Leamy, la revitalisation des installations amorcée à
l'automne 2012 permettra également d'accroître la qualité du service à la
clientèle; 50 millions de dollars y seront investis. À Mont-Tremblant, le casino achevé en 2009 accueille
maintenant plus de 500 000 visiteurs annuellement, dont environ 10 % proviennent de l'extérieur du
Québec. Il importe de rappeler ici, devant cette commission, que ces
projets avaient été approuvés sous l'ancien gouvernement. Celui-ci comprenait
alors, tout comme nous, l'importance de maintenir
la capacité d'attraction des casinos d'État. Pour les régions qui les
accueillent, les casinos d'État représentent des joyaux dans leur offre touristique. L'activité économique générée
par leur présence participe également au mieux-être des Québécois.
Plusieurs associations et regroupements de gens
d'affaires ont signifié leur appui au projet de modifications réglementaires et
souhaitent sensibiliser les parlementaires à l'importance d'y donner suite. Les
arguments qu'ils invoquent sont simples et vrais. Ils veulent que les casinos
continuent de contribuer au développement touristique et économique de leurs
régions. Au nombre de ceux-ci, on compte notamment la Chambre de commerce de
Charlevoix, Tourisme Charlevoix, Tourisme Mont-Tremblant, L'Office des congrès
et du tourisme du Grand Montréal, Tourisme Outaouais,
la Chambre de commerce de Gatineau, le professeur émérite de la Chaire de
tourisme Transat de l'UQAM, M. Michel
Arseneault, et la ville de Gatineau, dont le maire mentionne d'ailleurs que
permettre la consommation d'alcool dans
l'espace jeux assurera un meilleur positionnement du Casino du Lac-Leamy face à
ses concurrents directs que sont les casinos ontariens, qui ont cette
possibilité, d'autant que le gouvernement ontarien envisage l'implantation d'un
autre casino à Ottawa. Les touristes souhaitent retrouver, dans les casinos du
Québec, le même service que dans le reste du Canada et dans le reste du monde.
Je conclus, M. le Président. Derrière ces
regroupements et associations se trouvent des gens d'affaires qui prennent des risques, paient des salaires,
collectent des taxes et paient des impôts. J'ajoute à ces appuis celui de tous
les membres du conseil d'administration de
Loto-Québec. Notre point de vue est donc qu'il devrait être permis, à l'instar
de toutes les autres juridictions en Amérique du Nord, de vendre, de servir et
de consommer de l'alcool dans les aires de jeux des casinos du Québec.
Merci, M. le
Président, et il me fait plaisir de déposer la lettre d'appui signée par les
membres de la direction et du conseil d'administration de Loto-Québec.
Document déposé
Le
Président (M. Morin) :
Est-ce qu'on accepte le dépôt? Oui? Merci, Mme la députée de Sainte-Rose. Je
suis prêt maintenant à reconnaître la personne responsable de l'opposition
officielle en la personne de M. le député de Jean-Talon. Vous avez
six minutes, mon cher monsieur.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. C'est ce que nous
déplorons, M. le Président, on a un discours seulement économique. Jamais il n'a été parlé des personnes qui
pouvaient être atteintes par des problèmes de jeu et des problèmes d'alcool. La première raison pour
laquelle on va abolir ce règlement qui interdit la boisson... la
consommation de boissons alcooliques à l'intérieur des aires de jeux est tout
simplement une commande de 40 millions de dollars supplémentaires pour
Loto-Québec, et c'est ce que nous déplorons, M. le Président. Ils n'ont pas
pris d'avis au niveau de la santé publique, n'ont pas tenu compte également des
différents groupes qui ont à traiter ces gens. Et tous savent — et
c'est reconnu dans plusieurs études — qu'il
y a un risque important lorsqu'on combine l'alcool avec le jeu : ça
augmente la consommation au niveau du jeu et ça augmente la consommation au
niveau de l'alcool.
Moins de
1 % des gens ont une grande vulnérabilité, mais il y a d'autres groupes
également qui, sans dire que c'est des grands vulnérables, vont
consommer plus d'alcool et à ce moment-là vont jouer plus, donc ça va apporter multiples problèmes. Premier problème, au niveau
de l'individu : on les ancre encore plus dans leur problématique de
jeu et d'alcool. Deuxième problème, au
niveau de la famille : pour chaque personne qui a des problèmes de jeu, il
y a au moins cinq à six personnes qui sont atteintes — on
parle des conjoints, on parle des enfants, on parle des parents — donc
c'est un problème social qui se développe.
Et, oui, nous sommes pour un jeu responsable
mais limité. Le Québec, déjà, est un des endroits au monde où est-ce qu'il y a le moins de consommation au
niveau du jeu en termes de grands problèmes de société tout simplement
parce que nous avions établi une politique responsable de limiter, de voir qui
sont les gens très à risque et d'éviter qu'ils viennent au niveau du casino.
M. le
Président, ce que nous reprochons, c'est que la décision a été seulement
économique. Habituellement, lorsque le gouvernement prend une décision
aussi importante, il sollicite la Santé publique pour avoir un avis pour voir
les impacts et les conséquences. Dans ce cas-ci, peut-être qu'il y a eu des
études, mais il semblerait qu'elles sont non disponibles, et nous ne savons
même pas si les études existent.
Donc, M. le
Président, nous croyons que le ministre de la Santé et des Services sociaux, la
ministre déléguée aux Services
sociaux, n'ont pas joué leur rôle, n'ont pas joué leur rôle d'équilibrer la
position des usagers qui sont les plus vulnérables versus une position
qui est seulement économique.
Aujourd'hui, M. le Président, nous
allons commencer à entendre les différents groupes. Nous avons hâte de
savoir qu'est-ce qui va être dit. Nous allons avoir des gens qui vont être en
faveur de cette décision et des gens qui vont être en opposition avec cette
décision. Nous nous mettons en mode écoute, mais déjà je peux vous dire, M. le
Président : Nous regrettons énormément
que le gouvernement n'ait pas consulté les instances de la santé. Et également
notre rôle, en tant qu'opposition,
est de protéger, dans un premier temps, les plus vulnérables. Oui, pour le côté
économique, mais pas au détriment des personnes qui sont les plus à
risque. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Morin) : M. le député de Jean-Talon, merci. J'invite
maintenant la députée de Groulx… Je veux vous entendre. Vous avez trois
minutes. Oui, c'est ça.
Mme Hélène Daneault
Mme
Daneault : Merci, M. le Président. Alors, je suis heureuse d'être avec
vous aujourd'hui, justement, pour discuter
des décisions qui ont été prises quant à permettre l'alcool dans les aires de
jeux. Évidemment, on connaît bien la
réputation de Loto-Québec, qui est une société d'État, effectivement, qui est
florissante puis qui a... mais dont une grande proportion de ses revenus — il ne
faut pas l'oublier — provient
des Québécois. Alors, on se doit, avant de permettre
une telle politique, de regarder ce qui se fait et, en élus responsables, de
regarder aussi les impacts au niveau de la santé publique. Et ça fait 30 ans que le Québec a résisté à cette
tendance lourde d'offrir de l'alcool aux gens qui sont aux tables de jeu. Parce qu'il y a une raison pour
laquelle on a résisté autant d'années, c'est qu'on connaît très bien l'effet
pervers de l'alcool, même aux gens qui ne
souffrent pas... Ceux qui souffrent déjà d'une dépendance au jeu, on sait
qu'ils sont... c'est propice à en développer une deuxième, dont la
dépendance à l'alcool.
Mais, même chez les
consommateurs irréguliers, l'alcool affecte le comportement en diminuant le
niveau d'activité du cortex cérébral, les processus relatifs à la pensée se
font alors de façon désorganisée. Selon une étude de 1987, par les docteurs... un taux de 0,05 d'alcool dans le sang suffirait
à diminuer le niveau d'attention, à altérer le jugement et à désinhiber. Donc, l'alcool peut agir à deux
niveaux sur le jeu : en désinhibant le consommateur, l'alcool libère
l'individu de ses contraintes sociales et
financières, ce qui lui permet de parier plus qu'il ne serait prudent de le
faire; l'effet de l'alcool sur les facultés cognitives rend plus
probables les paris qui n'optimisent pas les chances de gains du joueur, ainsi,
dans ces paris imprudents, il est plus vraisemblable que le consommateur perde.
Alors, ces études-là
sont connues depuis bien des années. Je pense qu'on ne peut pas permettre l'autorisation
d'alcool dans les aires de jeux sans regarder cet aspect. Nous sommes des élus
et nous devons être responsables de protéger
la population. Et je pense qu'effectivement l'objectif du 40 millions, si
on est à 40 millions près, il y a des façons peut-être plus appropriées de le faire ailleurs
que de permettre l'alcool dans les aires de jeux sans se soucier de la
santé publique et sans se soucier du problème de codépendance qui peut exister
chez les joueurs pathologiques.
Alors,
évidemment, on est ici pour entendre tous les partis, autant ceux qui sont
favorables à cette mesure-là que ceux qui ne le seront pas, mais je
pense qu'on se doit, comme élus responsables, de prendre des décisions qui vont
au-delà d'une situation financière. Merci, M. le Président.
• (11 h 50) •
Le Président (M. Morin) : Mme la députée de Groulx, vous avez entré dans le
temps de trois minutes. Bravo!
Mme
Daneault : Je m'en viens bonne.
Auditions
Le Président (M.
Morin) : Nous allons maintenant débuter les auditions. M. Bibeau,
bonjour, bon matin. Et j'aimerais que vous présentiez les personnes qui vous
accompagnent, et vous avez 10 minutes pour nous exposer votre point de vue
là-dessus.
Loto-Québec
M. Bibeau
(Gérard) : Merci beaucoup, M. le Président, Mmes et MM. les députés.
Je suis accompagné aujourd'hui de M. Jean Royer, qui est le premier
vice-président et chef de l'exploitation à Loto-Québec, Mme Lynne Roiter,
qui est la secrétaire générale et la vice-présidente à la direction juridique,
et Mme Guylaine Rioux, qui est la vice-présidente au jeu responsable chez
Loto-Québec.
Donc,
merci de nous permettre d'être présents aujourd'hui. Nous pourrons vous
expliquer les raisons qui nous ont motivés à demander au gouvernement
une modification réglementaire pour permettre la consommation d'alcool dans les
aires de jeux de nos casinos.
Je vais d'abord vous
dresser un bref historique. En septembre 2010, le précédent gouvernement a
adopté la planification stratégique 2010‑2013
de Loto-Québec. Cette planification s'articule autour de trois grandes
orientations, soit de canaliser l'offre de
jeux de hasard et d'argent dans les circuits contrôlés, encadrer efficacement à
la consommation des jeux de hasard et d'argent et bien sûr accroître l'efficacité
et la performance globale de la société.
Il
est clairement indiqué, dans ce document, que l'objectif de Loto-Québec est de
mettre de l'avant une offre qui est à la fois légale et compétitive. J'insiste
là-dessus : une offre qui est légale et compétitive. En effet, pour
remplir notre mandat, on doit proposer à nos
clients une expérience aussi bonne que celle de la concurrence, voire plus.
C'est un principe qui est vrai pour
nous et pour toute entreprise commerciale, et c'est d'autant plus nécessaire
que la compétition augmente sans cesse.
Notre concurrence a longtemps été
concentrée à Atlantic City, mais il y a maintenant des casinos en Ontario,
dans le Maine, dans le Connecticut, dans l'État de New York. Seulement, dans
l'État de New York, les revenus du jeu ont augmenté de 600 millions la
dernière année, de 2011 à 2012. Vous savez peut-être que les casinos canadiens
sont visités, en moyenne, par 25 % à
28 % de leur population adulte locale; aux États-Unis, c'est 32 %. Au
Québec, le taux est passé de 21 % en 2007 à 17 % dans les
dernières années. Chaque point de pourcentage équivaut à des revenus de
23 millions de dollars. La différence est énorme.
Pourtant,
les Québécois ne jouent pas moins qu'avant, loin de là. En effet, on estime que
les Québécois dépensent 42 millions
de dollars par année au racino de Rideau Carleton, à Ottawa, pour un chiffre
d'affaires de 150 millions, donc 42 millions. Dans le cas du
casino d'Akwesasne, les Québécois y jouent environ pour 10 millions par
année, environ 10 % de leurs revenus. Ces deux établissements sont nos
deux plus proches concurrents, mais on compte aujourd'hui 80 maisons de jeu à quelques heures de route de
Montréal. C'est six fois plus qu'il y a 20 ans. Le fait est qu'aujourd'hui,
en 2013, des Québécois peuvent consommer de l'alcool en jouant au black-jack ou
aux machines à sous, mais chez nos concurrents.
Cette montée de la
concurrence explique en partie la tendance à la baisse de l'achalandage. L'autre
facteur est le cadre réglementaire entourant
l'offre de nos nouveaux produits. Jusqu'à tout récemment, pour offrir un
nouveau jeu de table, Loto-Québec devait aller chercher l'autorisation du
Conseil des ministres. Les autres, eux, pouvaient offrir rapidement et régulièrement des nouveaux jeux.
Dans le même sens, une nouvelle machine à sous devait être certifiée par
le laboratoire d'expertise judiciaire, qui se spécialise plutôt dans les
autopsies et les analyses d'ADN. Cette incapacité à renouveler adéquatement nos produits, jumelée à une concurrence plus
forte que jamais, a donc fait baisser l'achalandage. C'est pour arrêter
ça que le gouvernement précédent, appuyé de l'opposition officielle, a modifié
certaines mesures réglementaires et
législatives. Nous pouvons maintenant suivre le rythme et offrir, nous aussi,
les nouveautés que nos clients voient ailleurs. C'est un pas dans la
bonne direction, et il faut continuer.
Au-delà
du cadre réglementaire, il y a aussi nos établissements. La norme, dans
l'industrie, c'est de rénover nos casinos à tous les sept ans. Le projet
du bassin Peel était une façon de renouveler notre offre; son abandon n'a fait que retarder la rénovation du Casino de Montréal.
C'est ce qui explique que, dans les dernières années, nous avons fait des investissements majeurs pour rendre nos
casinos plus attrayants : à Montréal, c'est 305 millions qui ont été
investis; un chantier de 50 millions
qui est actuellement en cours au Casino du Lac-Leamy; Charlevoix et
Mont-Tremblant ont aussi eu droit à des améliorations. La fin des
travaux approche à Montréal. Nous avons dit au gouvernement qu'avec les
rénovations bientôt complétées et les nouvelles mesures, ça nous permettrait de
remettre 40 millions de dollars de plus en dividendes cette année et
70 millions l'an prochain.
Pour atteindre nos
objectifs financiers et augmenter le nombre de visiteurs, nous comptons sur
trois points : une meilleure expérience
pour les clients, ça inclut l'alcool, mais nous voulons surtout
offrir un produit qui se distingue notamment par l'utilisation du
multimédia, une meilleure expérience, donc, de la publicité aussi pour inciter
les gens à visiter leurs casinos et une bonne gestion des dépenses.
L'alcool, c'est une
mesure parmi les autres. Nous vendons de l'alcool dans nos bars et nos
restaurants depuis 20 ans. Ce n'est
rien de nouveau, nous avons une longue expérience en la matière. Partout en
Amérique — sauf
dans les aires de jeux des casinos de
Loto-Québec — le
jeu et l'alcool cohabitent. Serions-nous les seuls à voir un problème?
Il semble que oui. Serions-nous les seuls à être incapables de gérer la
cohabitation? La réponse est non.
Et
je dirais même que Loto-Québec est particulièrement bien placée pour s'assurer
que le jeu reste un jeu en offrant à
ses clients un environnement qui est sécuritaire. En effet, nous avons
plusieurs mesures en place pour éviter les abus : tous nos employés
sur le plancher sont formés pour repérer les personnes qui sont à risque et
agir en conséquence, nos employés qui
servent de l'alcool suivent la formation Action Service de l'ITHQ et
d'Éduc'alcool. Attention! Il ne faut pas confondre consommation d'alcool
et abus d'alcool. De la même façon, le jeu n'est pas synonyme de jeu excessif.
Ces nuances sont importantes. Pour une personne qui n'est pas familière avec l'univers
des casinos, ne pas pouvoir prendre d'alcool
dans les aires de jeux peut être vu positivement, mais cette interdiction ne
répond pas aux exigences de nos
clients. Ils sont nombreux : 15 000 par jour à Montréal seulement.
Nos clients s'attendent à ce qu'on leur offre un environnement de jeu
concurrentiel, et aujourd'hui ça inclut de pouvoir prendre un verre en s'amusant.
Les modifications
demandées sont nécessaires et conformes au mandat exposé dans notre plan
stratégique 2010‑2013, soit mettre de l'avant une offre à la fois
légale et compétitive. Loto-Québec gère l'offre de jeu dans l'ordre et
la mesure. Nous appliquons nos principes de commercialisation responsable.
Notre engagement est indéniable.
Parlons
de certaines mesures dans nos casinos : nous ne faisons aucun crédit,
l'entrée est strictement interdite aux moins
de 18 ans, chacun de nos casinos compte un espace dédié à la prévention du
jeu excessif, les clients qui le souhaitent peuvent s'autoexclure de nos
casinos, tous les employés suivent un atelier sur le jeu pathologique et la
procédure à suivre en cas de détresse, des comités de vigilance sont aussi en
place. Plus récemment, nous avons créé une vice-présidence dédiée au jeu responsable. Elle s'assure que nous ayons les
meilleures pratiques du domaine dans toutes nos sphères d'activité. La gestion responsable de nos produits et activités
nous a permis d'avoir la plus haute distinction en jeu responsable décernée
par la World Lottery Association. Nos mesures ont été étudiées par un panel
indépendant d'experts internationaux.
M. le Président, pour
conclure, notre requête s'appuie sur ces constats : au Canada, ce sont les
Québécois qui dépensent le moins en jeux de hasard et d'argent; pour les
dépenses en casinos, les Québécois arrivent septièmes sur neuf; les études
scientifiques de 1996, 2002 et 2009 montrent que le taux de joueurs
problématiques est stable au Québec et parmi les plus bas au pays.
• (12 heures) •
La
concurrence de nos casinos se multiplie. Loto-Québec doit réagir pour que son
offre reste compétitive. Les Québécois
ont délaissé nos casinos pour aller jouer en Ontario et aux États-Unis. Nos
casinos ont des mesures éprouvées pour éviter les dérapages. Notre personnel est
qualifié et adéquatement formé. Nous vendons de l'alcool depuis 20 ans.
Loto-Québec a toujours géré l'ensemble de ses activités de façon responsable.
Le gouvernement a déjà fait un pas en modernisant le cadre réglementaire de nos
casinos. Pour notre part, dans nos casinos, on est en train de renouveler les infrastructures et l'offre de jeu, et
maintenant nous devons ajuster cette offre à la réalité nord-américaine, tout
ça, M. le Président, dans le but
d'offrir un environnement qui est concurrentiel, nous permettant d'attirer une
nouvelle clientèle. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Morin) :
Merci, M. Bibeau. Vous aussi, vous avez respecté le temps, donc bravo.
Maintenant, nous débutons les échanges. Je vous rappelle que le gouvernement a
22 minutes; l'opposition, 22; et la deuxième opposition, vous avez un beau
six minutes, chère madame. Donc, j'invite maintenant Mme la députée de Masson à
débuter cet échange.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci, M.
le Président. Bonjour, M. Bibeau, bonjour à toutes les personnes qui
vous accompagnent. Heureuse que vous soyez
ici ce matin pour nous expliquer en détail ce que… les enjeux et les
impacts que pourraient comporter, là, les changements que vous proposez.
Dans un
premier temps, on voit aussi, dans la documentation que vous nous avez fournie
et dans laquelle a été déposée votre
demande tout à l'heure, on voit qu'il y avait quand même un glissement, au
niveau des revenus des casinos, qui
était amorcé depuis un certain temps. Vous nous dites dans votre lettre que
c'était dans le but d'endiguer ce glissement-là que le gouvernement précédent
avait appuyé... de l'opposition officielle avait modifié certaines
mesures de réglementation et de législation
dans ce sens-là. Vous nous dites que c'était un premier pas dans la bonne
direction, mais que là on est rendus à une autre étape du processus
parce que le glissement s'accentue.
Alors,
pouvez-vous nous dire quelles étaient, à ce moment-là, les mesures
réglementaires et législatives qui avaient été mises en place, là, par
le précédent gouvernement pour vous aider, justement, à éviter, là, ce
glissement-là?
M. Bibeau (Gérard) : O.K. Comme j'ai
parlé un petit peu, là, dans ma présentation, un des règlements qui a été changé, c'est toute l'approbation de nos
différents jeux. Tu sais, notre clientèle qui vient chez nous, dans nos
casinos, ils aiment ça. Les gens s'amusent,
les gens connaissent les jeux, les gens connaissent la compétition. Donc, les
gens suivent le marché, donc sont intéressés à avoir les jeux. Puis,
quand ils ne les ont pas, bien, ils nous filent entre les mains, puis la
compétition est quand même plus proche qu'on pense. Donc, ils filent ailleurs.
Donc, une des
choses qui a été discutée avec le gouvernement à cette époque-là, c'est de
changer la réglementation pour nous
permettre de s'ajuster rapidement à la compétition. Notre réglementation nous
obligeait à se faire approuver par le centre de... Comment qu'on l'appelle
déjà?
Une voix : ...
M. Bibeau
(Gérard) : Le centre... le
laboratoire d'expertise, que je parlais, là, tout à l'heure. Là, il y avait un
certain délai à ce moment-là. Là, les gens... ça a été changé, puis l'approbation
est beaucoup plus rapide.
Ensuite de
ça, un autre exemple, je vous dirais, c'est toute la question, là, de... toute
la question, là, du jeu en ligne peut-être, toute la question du jeu en
ligne, où les gens jouaient énormément. Au niveau du jeu en ligne, il existait 2 000 sites illégaux. Notre clientèle avait
accès à tous ces sites-là, des centaines de millions nous filaient entre
les mains. La réglementation a été changée pour nous autoriser, pour
autoriser Loto-Québec aussi à offrir un jeu en ligne.
Donc, on a notre site, et les Québécois peuvent
jouer sur les sites de Loto-Québec. C'est peut-être quelques exemples.
Mme
Gadoury-Hamelin : O.K.
Merci. Il y avait aussi... Là, vous nous proposez... vous proposez au
gouvernement une augmentation du bénéfice, là, des casinos du Québec de
40 millions pour l'année financière 2013‑2014 et de 70 millions pour
l'année suivante.
Comme groupe
parlementaire, nous, le Parti québécois, c'est sûr qu'on a toujours défendu le
principe que les jeux de hasard et d'argent au Québec doivent demeurer
et doivent être exploités de façon responsable. Je pense qu'on l'a démontré.
Puis ça signifie aussi que toutes les mesures doivent être prises afin d'assurer
que les risques associés au jeu soient minimisés autant que possible.
On sait aussi que Loto-Québec a reçu, en 2012,
pour une deuxième fois consécutive, le plus haut niveau de certification
internationale en matière de jeu responsable de la World Lottery Association,
qui est le niveau 4, qui semble être quand
même un niveau très, très intéressant. Donc, pour atteindre ce niveau de
certification, qui est une forme un
peu ISO, nous comprenons que Loto-Québec a démontré qu'elle intégrait ses
activités quotidiennes aux sept principes du jeu responsable. En augmentant les bénéfices nets de la Société des
casinos du Québec, j'aimerais savoir si vous remettez en cause toute
cette dimension-là au sein des casinos du Québec.
Le Président (M. Morin) : M. Bibeau.
M. Bibeau (Gérard) : Merci beaucoup.
Donc, à la question bien précise, c'est sûr que non. C'est sûr que non. Je vais
m'expliquer là-dessus. On ne remettra jamais ces principes-là, tout ce qui a
été acquis… On va continuer toujours d'être
très actifs dans ce domaine-là. Je vais vous expliquer ce qu'on fait puis
qu'est-ce qu'on va continuer à faire. Je pense que c'est très important
que ça soit connu.
D'abord,
je vous parlerais peut-être de l'alcool, O.K.? Il y a une association, au
Canada, qui s'appelle la Canadian Responsible Gambling Council. Bon. C'est
canadien. C'est bien sûr que c'est dans notre milieu. On a eu des discussions récemment avec ces gens-là, avec
le Dr Jon Kelly, qui est le directeur. Concernant l'alcool sur les aires
de jeu, de façon précise, il nous dit par
écrit que l'alcool dans les aires de jeu versus pas d'alcool dans les aires de
jeu, ce n'est pas ça, la question. La
vraie question qu'il faut se poser, c'est la gestion responsable de l'alcool. À
titre d'exemple, il nous dit : Est-ce que les employés ont reçu des
instructions claires sur comment intervenir auprès de nos clients qui
démontrent des signes d'intoxication? Est-ce que les clients intoxiqués peuvent
jouer? Est-ce que l'alcool est servi gratuitement?
Est-ce que les employés qui servent l'alcool ont reçu une formation appropriée,
etc.? Le genre de questions qu'il
faut se poser. Nous, c'est là-dedans qu'on se situe au niveau de la prévention,
puis on est très fiers, comme je vous dis, de qu'est-ce qu'on fait.
Je
vous donne des exemples plus précis concernant l'alcool, pour vous expliquer
comment ça fonctionne dans nos casinos.
D'abord, quelqu'un qui arrive chez nous, qui semble être intoxiqué par
l'alcool, première chose, il ne rentre pas, il est interdit tout de suite en rentrant, il n'a pas la chance de
rentrer dans notre casino. C'est sûr, là, qu'il faut le voir, il faut le détecter, là, mais il ne rentre pas dans
notre casino. Un coup à l'intérieur de notre casino, il y a toute une
panoplie de mesures pour détecter les gens qui peuvent avoir une problématique
d'alcool, puis on intervient. Juste au Casino de Montréal, il y a 5 millions de visiteurs par année, au Casino de
Montréal. On a relevé, l'an passé, 306 incidents qui étaient reliés à
des personnes intoxiquées. Pour 55 de ces incidents, l'accès du visiteur a été
refusé dès l'entrée au casino. Les autres, ça s'est passé à l'intérieur.
Pour
mieux vous permettre de comprendre notre intervention, je vais vous donner des
exemples très précis. Je vais vous en donner deux. Par exemple, un
client intoxiqué joue à une table. Il est détecté par nos employés. Un agent de
sécurité est appelé sur les lieux. Il
rencontre le client. On lui demande de passer un alcotest. Le client accepte de
passer l'alcotest. Finalement, le client
échoue à l'alcotest. Il est invité à sortir du casino. Bien sûr, sa sortie est
aussi importante pour nous autres. Le client quitte en autobus. Jamais
on ne l'aurait laissé partir avec son auto.
Un
autre, un client intoxiqué refuse de quitter en taxi, ou service de
raccompagnement, ou encore en autobus. On a carrément appelé la police, qui est venue sur les lieux, qui a réglé
la situation. Je vais vous faire grâce, là, des 250 autres interventions
qui ont eu lieu, juste vous dire qu'on prend vraiment les moyens pour
identifier les clients qui sont en état
d'ébriété, puis s'assurer qu'ils quittent l'établissement en toute sécurité.
Puis, quand on a des problèmes qui sont un petit peu plus graves, on a aussi une ligne de... un service de première
ligne avec La Maison Jean Lapointe. S'il y a des problèmes qui se
pointent, sérieux, il y a des gens qui sont en disponibilité 24 heures sur 24,
sept jours par semaine, à qui on va faire appel.
• (12 h 10) •
D'autres exemples de
notre programme au niveau du jeu responsable. On a été les premiers en Amérique
à avoir un programme d'auto-exclusion. Ça,
c'est des joueurs qui ont des problèmes, qui, après être conscientisés, se
retirent complètement. Ça peut être de trois
mois jusqu'à cinq ans, l'auto-exclusion. Tu ne peux pas révoquer ça. On a eu,
juste l'an dernier, 1 500 contrats
d'auto-exclusion qui ont été signés. Actuellement, on en a 5 200 qui sont
en vigueur. Il faut tout l'appliquer.
C'est quand même quelque chose à appliquer, des contrats d'auto-exclusion. On a
la reconnaissance, là, des plaques
d'immatriculation, nos agents aussi sont formés pour détecter les gens, là, via
la surveillance par caméra. On a eu plus de 6 000 repérages juste l'an
passé, des gens qui étaient auto-exclus qui essayaient de se présenter au
casino, qu'on a bloqués là-dessus.
On
a des comités de vigilance. C'est important, un comité de vigilance… Parce que
je parle des gens auto-exclus, mais le comité de vigilance, c'est un
peu... C'est un peu récent, nous autres, chez nous, c'est depuis 2011 que c'est
en application. C'est des gens de l'interne,
de nos casinos, qui sont dans un comité où ils peuvent voir quelqu'un qui
a une problématique de jeu, d'alcool ou de quoi que ce soit, qui a une
problématique, et on se donne le pouvoir d'exclure complètement le joueur de notre casino. Tu sais, on dit : C'est
notre casino, on est chez nous, à notre casino, on laisse jouer les gens avec qui on veut jouer, et tu ne
peux pas jouer si on ne veut pas te laisser jouer. Donc, on surveille les
gens qui ont une problématique, puis ils
peuvent être retirés du casino. C'est sûr qu'on fait ça correctement. C'est sûr
qu'on est en lien avec différents organismes qui nous aident à prendre ces
personnes en charge puis tout ça, puis ces gens-là essaient de faire comprendre au joueur de s'auto-exclure puis de suivre
des programmes pour s'en sortir. Mais, même si le joueur refuse, nous, on a le pouvoir de dire : Tu es exclu de
nos casinos, et on le fait. C'est quand même une mesure qui est quand
même importante.
On
a aussi ce qu'on appelle les chaînes d'entraide. Ça, c'est tout notre service
qu'on a, de première ligne, de gestion de crise. On fait ça avec les
agences de santé et services sociaux de Montréal, de l'Outaouais,
Capitale-Nationale, de Québec, les organismes communautaires, dont La Maison
Jean Lapointe, le Centre de crise 24/7, gestion Génésis, CSSS des Sommets. Tous les employés qui sont sur
les aires de jeu sont formés là-dedans pour appliquer cette fameuse chaîne d'entraide. On a des ateliers de
sensibilisation sur le jeu problématique. Tous nos employés... Même moi, j'ai
suivi ce cours-là, un cours de trois heures. Ensuite de ça, on a des ateliers d'intervention
de crise, pour certaines personnes dans nos casinos, par exemple, les
infirmières, les agents de sécurité qui doivent agir. Bon, différentes
choses : des bornes interactives, les
centres de hasard qu'on a dans nos casinos. On a un site Web sur les
problématiques de jeu. Vous avez vu,
ce printemps, on a fait une campagne nationale de publicité concernant la
prévention, pour expliquer aux gens que c'est toujours le hasard qui
décide, tu ne peux pas contrôler la machine, c'est du hasard, donc les
sensibiliser. On n'a aucun crédit. Les 18 ans et moins sont interdits.
Franchement,
on fait un gros travail au niveau de la gestion responsable. Je vous dirais que
ça nous démarque. On est une société
d'État, on prend ça extrêmement au sérieux. Donc, peut-être ça pourrait faire
le tour, puis on est très fiers de faire ces choses-là, puis on est
toujours prêts à s'améliorer. On regarde toujours les situations, et on s'améliore
toujours, puis on va continuer dans ce sens-là.
Mme
Gadoury-Hamelin : Donc, vous
dites que vous avez des ententes avec des organismes. Vous dites aussi que l'alcool est présent au casino, c'est juste
qu'il n'est pas dans l'aire de jeu. Ça serait la différence. Donc, si vous
parlez de gestion responsable envers la
clientèle, vous allez impliquer cette nouvelle dimension là de l'alcool,
j'imagine, dans vos procédures. Vous avez sûrement songé à ça jusqu'à
maintenant.
M. Bibeau (Gérard) : Exactement.
Comme vous le dites, l'alcool est présent dans nos casinos depuis le tout début. Depuis 20 ans, on a de l'alcool dans nos
casinos, les gens peuvent boire dans nos restaurants, les gens peuvent
boire dans nos bars. Ce n'est pas gratuit,
tu paies, les prix sont compétitifs, puis nos bars, là, il y en a plusieurs, bars,
là. On ne les a pas isolés, on ne les
a pas cachés. Les bars sont là, là. On peut avoir un bar, puis tu fais 10 pieds
puis tu es rendu dans l'aire de jeu,
là. C'est ça, la réalité, là, dans un casino : tu fais 10 pieds puis tu es
rendu dans ton aire de jeu. Là, la personne va pouvoir être dans son aire de jeu puis commander une consommation et
la prendre tout simplement, là, en jouant, ce qu'il ne pouvait pas faire
avant. C'est ça, la différence.
Là, nous autres, ça change, bien sûr, l'organisation,
là, interne. On va avoir beaucoup plus de gens qui vont être sur le terrain,
qui vont travailler au niveau de l'alcool. Avant ça, nos serveurs, bien, ils
fournissaient le café, ils fournissaient les
jus, ils fournissaient de la liqueur, tout ça. Là, ils vont fournir de
l'alcool. Il va y avoir encore tout ça, mais ça va être juste à côté, on
va avoir un petit système, là, pour ces choses-là. Mais nos gens vont être plus
près de l'action, si on veut, nos serveurs.
Tous ces
gens-là, c'est nos yeux, c'est nos oreilles. Ils vont servir les choses, ils
vont détecter puis ils vont appliquer les
moyens que je vous dis. Parce que tout l'enjeu est là, il faut les détecter,
là. On n'est pas parfaits, mais il faut les détecter, il faut voir puis
agir surtout. Tu sais, je vous ai montré, ce n'est pas juste de la prévention
qu'on fait, on a aussi les moyens de
l'appliquer, notre prévention. Ça, c'est important. Ça, c'est important. Faire
juste des beaux programmes de prévention puis ne pas les appliquer… Là,
ça va nous... on l'applique puis on va avoir encore plus de moyens pour l'appliquer
puis surveiller les gens qui ont des problèmes d'intoxication.
Mme Gadoury-Hamelin : Merci.
Le Président (M. Morin) : Mme la
députée de Sainte-Rose, vous voulez intervenir? Allez-y.
Mme Proulx : Merci, M. le Président.
M. Bibeau, vous nous avez indiqué, dans votre présentation, que le précédent gouvernement a autorisé formellement, en
fait, votre planification stratégique dans laquelle il était clairement indiqué que l'objectif de Loto-Québec est de
mettre de l'avant une offre à la fois légale et compétitive. Je comprends
aussi que ce principe-là s'est matérialisé
par une série d'autorisations du précédent gouvernement qui vous a permis
d'être plus compétitifs. Je constate
que c'est d'ailleurs dans ce cadre-là que le précédent gouvernement vous a
autorisés à opérer un site de jeu en ligne, et ce, malgré l'opposition
des 18 directions de santé publique.
Étant donné
que cette activité de jeu en ligne se fait à domicile, sans aucun contrôle, y
compris sur la consommation d'alcool,
j'aimerais ça que vous nous indiquiez quel a été le processus d'approbation
suivi sous l'ancien gouvernement, de façon à pouvoir offrir des jeux sur
Internet.
Le Président (M. Morin) : M. Bibeau.
M. Bibeau (Gérard) : Merci. Écoutez,
à notre connaissance, je vous dirais que c'est exactement le même processus qui
a été suivi dans les deux cas, autant pour le jeu Internet que pour l'alcool
dans les aires de jeu, puis je vous dirais
aussi que c'est exactement le même raisonnement, le même mode décisionnel que
les deux gouvernements ont appliqué, et je m'explique… je m'explique
là-dessus.
Les deux
gouvernements ont pris des décisions pour canaliser — nous autres, on appelle ça de même dans
notre jargon — le
jeu. Il faut que les gens qui décident de jouer, les Québécois qui veulent
jouer, jouent au Québec, le plus possible en tout cas. Avec le jeu Internet, la
problématique, c'était quoi? Des sites, il y en a partout, il y en a
2 000, accessibles dans les maisons. Tout le monde ont accès à ça. Nous,
on n'avait pas de site Internet, on n'était pas là. Notre job, c'est d'abord de le canaliser. Canaliser, ça veut dire au
moins l'offrir, avoir la possibilité. Donc, le gouvernement nous a
autorisés à offrir un site Internet qui était... pour qu'on soit légal puis qu'on
soit aussi compétitif. C'est le même raisonnement pour l'alcool.
Comme je vous disais tout à l'heure, notre
problématique, c'est que notre clientèle diminue dans nos casinos. Sauf que les Québécois ne diminuent pas, eux, de
jouer. Ils vont jouer ailleurs. J'ai donné des exemples tout à l'heure, plus précis, concernant deux casinos, hein? Il y
en a d'autres, on pourrait parler de Las Vegas aussi, on pourrait parler
de bien des choses. Les Québécois continuent à jouer. Ils délaissent nos
casinos, et une des raisons pourquoi qu'ils les délaissent, l'alcool est un
facteur. Mais c'en est un. Ça nous est demandé régulièrement.
Donc, c'est
pour ça qu'on a demandé au gouvernement de modifier la réglementation, pour
nous permettre de vendre de l'alcool dans les aires de jeu. Donc, c'est
une demande. Effectivement, on n'a pas... à notre connaissance, les directeurs
de santé publique n'ont pas été consultés au niveau d'Internet. C'est venu par
après dans le processus réglementaire, avec
la prépublication puis toutes ces choses-là, comme actuellement où le règlement
a été prépublié, les gens font les
commentaires. Ça semble être le processus, là, habituel, donc c'est la même
chose. À ce moment-là, le ministre des Finances de l'époque, quand les
directeurs de santé publique ont réagi...
Une voix : …
M. Bibeau
(Gérard) : Comment?
Le Président (M. Morin) : Est-ce que
vous avez terminé, M. Bibeau?
M. Bibeau (Gérard) : Non, non, non.
Le Président (M. Morin) : O.K.
Allez.
• (12 h 20) •
M. Bibeau
(Gérard) : Une petite
gorgée. Le ministre des Finances a tout simplement dit que les directeurs
de santé publique faisaient leur travail,
puis soulevaient les inquiétudes, puis tout ça, puis il a rappelé le
pourcentage, là, de joueurs qui ont
des problématiques, des choses du genre, là. Puis il y a plusieurs personnes, à
ce moment-là, qui s'étaient opposées, comme ça se passe aujourd'hui.
Je vous dirais qu'à notre connaissance c'est la
même histoire qui se répète, là, de A à Z. C'est ce qu'on peut comprendre.
Le Président (M. Morin) : Oui, Mme
la députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Oui. J'aurais... En
fait, suite à ce que vous dites, en termes d'encadrement et de contrôle, est-ce
que vous diriez que vous pouvez offrir un
meilleur encadrement et contrôle auprès des joueurs dans les casinos
comparativement aux joueurs en ligne? Quelles sont... Est-ce qu'il y a des
mesures de contrôle pour... par rapport à l'avènement du jeu pathologique avec
des joueurs en ligne? Et comment on peut les encadrer comparativement aux
personnes qui sont sur place, dans les casinos?
Le Président (M. Morin) : M. Bibeau,
vous avez deux minutes.
M. Bibeau
(Gérard) : Deux minutes,
O.K. Donc, rapidement, juste la question... On est présents dans nos
casinos. Notre joueur est là; nous, on est là, on voit, on fait agir, on a
plein de moyens de prévention, on peut sortir les gens, on peut les exclure,
tout ce que je vous ai expliqué tout à l'heure. Une question physique d'abord.
Internet, ce
n'est pas physique. On a plein de moyens de prévention qu'on a pris, là, sur
notre site Internet. On est, encore une fois, ce qu'il y a de mieux.
Quand on se compare mondialement, c'est ce qu'il y a de mieux sur notre site Internet, mais on n'est pas présents quand même,
là. On n'est pas présents, on fait ce qu'on peut là-dedans. C'est sûr
que ce n'est pas aussi efficace, par exemple, que dans nos casinos.
Le Président (M. Morin) : Mme la
députée de Sainte-Rose, vous avez une autre question?
Mme
Proulx : Oui. En conclusion,
je sais qu'il ne nous reste pas grand temps, mais j'aimerais ça que vous
nous parliez, d'après vous... que vous voyez
votre clientèle tous les jours dans les casinos, et je vais vous dire la
perception que moi, j'ai de la clientèle qui
va dans les casinos. C'est des gens qui vont là par loisir. Est-ce que c'est
massivement des gens qui ont une
problématique de jeu, qui ont un problème d'alcool qui vont dans les casinos ou
si ce n'est pas des autobus de retraités qui veulent avoir un loisir
intéressant, des gens qui vont là avec des amis pour passer une soirée
agréable? C'est quoi votre perception de la clientèle que vous avez dans les
casinos?
Le Président (M. Morin) :
40 secondes, M. Bibeau.
M. Bibeau
(Gérard) : C'est sûr que la
majorité des gens qui viennent chez nous, là, n'ont pas de problématique
de jeu, là. Je pense, les statistiques, on les connaît, là, c'est moins de
1 % qui ont des problématiques de jeu. Donc, on a au moins 99 % qui n'ont pas de problématique. C'est des gens qui
viennent là pour s'amuser, pour se désennuyer. Ils aiment le jeu, ils aiment jouer aux cartes, viennent
jouer aux machines à sous, ils aiment les spectacles, avoir du plaisir.
C'est ça qu'on voit dans nos casinos puis dans les casinos du monde entier.
Le Président (M. Morin) : M. Bibeau,
merci beaucoup. Le temps étant écoulé, on vous remercie pour votre
présentation. Merci d'être là, Mme Roiter, Dr Rioux et M. Royer... oups. Ah,
oui! Excusez, là, j'étais trop d'avance, je voulais m'en aller, moi, là.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Morin) : Allez-y,
M. le député de Jean-Talon. Je m'excuse.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M.
le Président. Puis il faut toujours entendre l'autre côté de la médaille.
Le Président (M. Morin) : Ah, oui!
Je suis d'accord avec vous.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Ce serait
bien important. Bonjour, M. Bibeau et les gens qui accompagnent, M.
Royer, qu'on a déjà eu l'occasion de travailler quelques dossiers ensemble. D'ailleurs,
premièrement, là, je veux féliciter Loto-Québec, qui est une organisation de très
haute qualité, qui a toujours pris ses responsabilités. Et, si, au Québec,
on a un aussi bas taux de gens qui sont des joueurs, je dirais, qui exagèrent
au niveau du jeu, c'est définitivement parce qu'il y a eu des politiques qui
ont été mises en place puis qu'il y a une surveillance.
Sauf quelques exceptions, presque tous
reconnaissent que le jeu fait partie de notre société et que d'avoir du jeu
responsable, c'est acceptable. Également, tous reconnaissent que le
gouvernement, en s'impliquant, souvent va réussir à faire un meilleur contrôle
et diminuer les abus.
Puis notre
propos n'est pas là, puis je suis content que vous ayez tout expliqué toutes
les mesures qui ont été mises en place, que nous avons soutenues et que
nous voulons continuer à soutenir, dont, entre autres, la rénovation des casinos pour améliorer l'expérience des gens. On
veut également être concurrentiels. Ça, je pense que c'est un élément.
Donc, il y a
beaucoup d'arguments auxquels on adhère. L'argument où on a plus de difficulté,
une fois qu'on a fait tout ça, c'est
la problématique consommation alcool avec le jeu à proximité, c'est-à-dire que
les gens sont dans l'espace de jeu,
consomment puis... Deux niveaux de problématique. Le premier, les joueurs
excessifs, qui, eux autres, avec la consommation
d'alcool, n'additionnent pas le risque mais le multiplient. Donc, ça peut
amener des plus grands problèmes pour
cette clientèle. Également, les joueurs habituels, qui ne sont pas
nécessairement des joueurs excessifs, qui, avec la consommation d'alcool,
va faire qu'ils vont jouer plus, vont consommer plus, et puis ça peut amener
des problèmes.
Dans ce
dossier-là, ce qui est un peu le reproche qui est fait, c'est d'abord à cause
de ces deux facteurs de risque médicaux, hein, qui est l'abus, la
dépendance au niveau du jeu et également la consommation d'alcool. Il n'y a pas
eu d'avis de demandé à la Santé publique, et c'est ce qu'on déplore. On aurait
dû avoir un avis de la Santé publique.
De même, le gouvernement et Loto-Québec étant
responsables, une attitude responsable, est-ce que c'est une mesure qu'on aurait pu se passer et mettre en
place toutes les autres mesures, sauf celle-là, faire différent des autres,
même si les autres décident de le faire, et accepter que, oui, il va y avoir
moins de profits, mais, par contre, on va avoir une attitude responsable? Moi,
je pense qu'au niveau moral ça aurait été plus acceptable.
Donc, ma
question, après ce préambule : Avez-vous eu vent qu'il y a eu des avis au
niveau de la Santé publique, même si vous avez donné la réponse? Et
pourquoi, selon vous, ces avis n'ont pas été demandés?
Le Président (M. Morin) : M. Bibeau.
M. Bibeau
(Gérard) : Écoutez, comme je
l'ai expliqué tout à l'heure à une question sur comment ça se passait
auparavant, ça semble être la façon de faire habituelle. En tout cas, j'ai
donné l'exemple du jeu Internet, c'est comme ça
que ça s'était passé. Loto-Québec avait eu une discussion avec le gouvernement,
il y avait un processus qui s'était mis en marche, décision au Conseil des ministres, prépublication de règlements,
puis, à ce moment-là, Santé publique intervient, là, dans les
discussions puis tout ça. Écoutez, je ne peux pas vous dire... c'est de même
que ça se passait par le passé puis c'est de même que ça s'est fait encore.
Mais, comme
je vous disais, tu sais, concernant l'alcool dans les aires de jeu, non
seulement, ailleurs, c'est de même
que ça se passe... ça se passe vraiment partout comme ça. On est vraiment,
vraiment les seuls à être de même. Mais, vous avez vu nos chiffres, comme je vous disais, on a passé de 21 %
à 17 % en l'espace de cinq ans. Donc, on dégringole. Ça, c'est une chose, ça, dégringoler. Si les gens
arrêtaient de jouer, c'est une chose, mais les gens n'arrêtent pas de
jouer, les gens vont ailleurs, ils vont à Akwesasne, ils vont à Rideau Hall...
pas Rideau Hall, excusez, au casino, là, d'Ottawa.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Morin) : Vous êtes
pardonné. Le président... tantôt, là.
Des voix : ...
M. Bibeau
(Gérard) : Exactement. Donc,
les gens vont à l'extérieur, ils vont aux États-Unis, ils vont à
Atlantic City, ils vont dans l'État de New York, ils continuent à aller à Las
Vegas. On me disait, Atlantic City, je crois, c'est deux autobus par jour, deux autobus par jour qui partent de Montréal
pour aller à Atlantic City. Les Québécois continuent de jouer et ils ne
jouent pas chez nous.
Puis dans mon
exposé, tout à l'heure, il y a une chose que je pense que j'essayais de donner,
en tout cas, qui est d'une croyance
profonde qu'on a à Loto-Québec, on pense qu'on peut faire la différence dans
nos casinos, parce qu'on est
présents, parce qu'on peut intervenir auprès des gens qui ont des problèmes.
Quand ils sont à Atlantic City, quand ils sont à Akwesasne, regardez, c'est
les mêmes Québécois qui sont là-bas, qui sont exposés à de l'alcool, qui sont
exposés à différentes choses, que souvent
l'alcool, il est gratuit. Je pense que de l'alcool gratuit, c'est quelque
chose, ça. Nous autres, on n'est pas
là-dedans, pas du tout. Puis les Québécois qui sont là-bas, bien… je pense
qu'on est meilleurs qu'à Akwesasne, je
peux vous dire ça, en termes de moyens de prévention, là, O.K.? On est
meilleurs, on est très bons, on est très sérieux.
C'est une
société d'État, Loto-Québec. La dernière chose qu'on veut, là, c'est que, nous
autres, quelqu'un parte du casino, là, puis qu'il y ait une
problématique, hein, qu'il parte, par exemple, en état d'ébriété, qu'il ait des
accidents ou tout ça. On n'est pas dans
cette game-là, mais je vous dis qu'on peut intervenir quand les gens sont chez
nous. Quand les gens sont ailleurs,
on ne peut pas intervenir. Les gens reviennent le soir, les mêmes personnes
reviennent, ça demeure des Québécois,
ils reviennent ici, et là ceux qui ont dégagé des problématiques, bien, regardez,
ils sont dans notre système. Puis c'est
le ministère de la Santé puis c'est toutes nos organisations qui doivent
supporter le coût des problèmes qui peuvent se dégager, qu'on n'a aucun
contrôle. C'est ça, nous, qui nous anime, c'est ça qui nous anime vraiment, c'est
ça qui fait la différence. Donc, il faut qu'ils jouent chez nous le plus
possible.
Puis l'alcool, là-dedans, bien,
écoutez, c'est une demande. On se le fait dire. J'étais à l'émission de M.
Arcand à Montréal, tu sais, puis je suis le
président de Loto-Québec, la pire affaire qu'il nous dit, c'est : Vos
casinos sont plates. C'est ça qu'ils
nous disent : Vos casinos sont plates. Bien, on a travaillé bien fort pour
qu'ils soient moins plates, ça va arriver
cette année. Puis la question de l'alcool juste sur les aires de jeu — comme
je vous ai dit, tu peux prendre un verre d'alcool à 10 pieds de ta machine à sous, là, tu vas pouvoir la prendre
en jouant à ta machine à sous — c'est
ça qui fait... C'est ça qu'on demande, puis on ne croit pas que les gens
vont avoir des problèmes de jeu supplémentaires.
• (12 h 30) •
Le Président (M.
Morin) : Oui, Mme la députée de...
Mme Vallée :
Merci. Gatineau.
Le Président (M.
Morin) : Gatineau.
Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, M. Bibeau, je vous écoutais… je vous
écoute faire la comparaison avec
Akwesasne, je ne suis pas certaine qu'on doive nécessairement s'inspirer des
mauvaises pratiques qui sont connues ailleurs.
Je pense que, justement, c'est une société d'État, et on devrait, nous, mettre
en oeuvre les meilleures pratiques.
Vous
avez mentionné que vous travaillez, entre autres, avec le Canadian Responsible
Gambling association ou... problem, que vous avez mis en place un
certain nombre de mesures dans un contexte bien précis où le jeu n'est pas permis... la consommation de boisson n'est pas
permise dans les aires de jeu. Maintenant, dans le contexte où vous vous
apprêtez à changer de façon substantielle la
donne dans les casinos du Québec, qu'est-ce que vous avez mis en place? Qu'est-ce qui sera mis en place et quelles seront
les sommes qui seront accordées ou attitrées à cette particularité-là?
Parce qu'on le sait qu'il va y en avoir, des
impacts. On n'aura pas... On a des groupes qui nous ont déjà déposé des
mémoires, mais on sait qu'à partir du moment
où on joue, on a notre verre de boisson, les gens qui ont déjà une
problématique risquent d'augmenter cette... Cette problématique-là
risque d'augmenter. Donc, évidemment, on se questionne parce qu'on a peu de réponses. Qu'est-ce qui a été mis en place?
Comment vous allez gérer ça? De quelle façon vous allez travailler avec,
entre autres, et on l'espère, le ministère de la Santé et des Services sociaux?
Le Président (M.
Morin) : M. Bibeau.
M. Bibeau (Gérard) : Oui, il y a des études, là, concernant l'association, là, entre la
consommation excessive d'alcool puis les problèmes de jeu. C'est sûr
qu'il y en a. On les connaît, on en est tout à fait conscient, ça nous
préoccupe, et c'est pour ça qu'on fait tout ce qu'on fait dans nos casinos
depuis plusieurs années, puis on continue de s'améliorer là-dessus.
Tout à l'heure, j'ai
fait la nomenclature des principales mesures de prévention qu'on a dans nos
casinos. J'ai essayé aussi de vous démontrer
qu'on a la capacité de les appliquer. Ça, c'est important. Ça serait... Tu
sais, faire des règles puis ne pas les appliquer, c'est facile. Non
seulement on fait des règles, on peut les appliquer, on les applique.
Plus
particulièrement, quand vous nous demandez : Maintenant qu'on va mettre de
l'alcool dans les aires de jeu, quelle
différence ça fait pour nous?, nous autres, ça demeure que c'est de l'alcool,
puis je vous dis qu'on a énormément d'expérience
au niveau de la gestion de l'alcool. J'expliquais, nous autres, quelqu'un qui
arrive chez nous, qui débarque du
taxi, qui arrive… qui semble avoir une problématique d'alcool, fini, il n'entre
même pas. Et ça, on le fait, là, on le fait. Un coup qu'il est entré dans notre casino, il peut aller au restaurant,
il peut prendre du vin, il peut en prendre beaucoup, il peut aller au bar, il peut en prendre beaucoup. Il
y a une problématique d'alcool? On est habitués de gérer avec ça. Là, la
différence, c'est qu'il va pouvoir la
prendre à son aire de jeu. C'est ça, la différence. Pour nous autres, ça
demeure quand même la même problématique, c'est la problématique d'alcool.
Il faut détecter les gens qui ont une problématique, il faut avoir des yeux
partout, les détecter puis agir.
Tout
à l'heure, j'expliquais que là, maintenant, ça va être nos serveurs qui vont
donner de l'alcool, donc ils vont être encore plus près du joueur. Il n'ira
pas prendre d'alcool dans un bar, à un endroit, puis il va se ramasser dans l'aire
de jeu. Ça va être le serveur qui va être là, il va être près de la personne,
il va le voir agir, il va se faire commander régulièrement.
Donc, il va le voir. Il va le voir, il va le détecter. Ça, c'est bien
important. Puis, à partir du moment où est-ce qu'il est détecté, là, on
a toute une chaîne, nous, qui se met en marche pour s'assurer que la personne
qui a une problématique, qui a une intoxication, qu'on puisse agir, de l'arrêter
de jouer, même de le sortir de notre casino. Ça, on le fait, c'est de même qu'on est organisés. On va avoir plus d'yeux,
plus de détection pour s'assurer que ces gens-là n'aient pas de problème
d'alcool en jouant. Puis ça, c'est important pour nous autres.
Le Président (M.
Morin) : Est-ce que vous y retournez, Mme la députée de Gatineau?
Mme Vallée : Vous dites : Plus d'yeux, plus de détection. Donc, est-ce qu'il y
a des embauches additionnelles?
M. Bibeau
(Gérard) : Non. C'est nos gens qui... On a toute une réorganisation,
là, qui se fait actuellement, parce
que, comme je vous disais, là, il y a des gens, nous autres, qui servent du
café, de la liqueur, des jus, etc. Il y a toute
une organisation qui doit se mettre en place justement pour offrir le service
de boisson aux tables. Donc, tout va se faire, là, avec le même
personnel. Il va y avoir des mouvements, mais ça va être le même nombre de personnel là-dessus.
Le Président (M. Morin) : Ça va? On a un nouvel arrivant autour de la
table, et c'est le député de Marguerite-Bourgeoys, qui vous demande la
permission de poser une question. Est-ce que j'ai votre consentement? M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Poëti :
Merci, M. le Président. Je suis désolé, je travaille sur une autre commission
également. J'ai une préoccupation de
sécurité publique, je suis porte-parole en matière de sécurité publique. Vous
avez abordé la question de l'alcool
et de la sécurité. Vous savez qu'au Québec les deux premières causes de décès
au volant sont la vitesse et l'alcool. C'est reconnu depuis toujours.
Donc, je sais que vous le savez, mais je tiens à vous le souligner parce que le
lien entre sécurité publique et l'alcool est non seulement intimement relié,
mais c'est les premières causes de décès.
Vous avez dit :
On va agir. Alors, vous avez dit : On ne laisse pas quelqu'un entrer qui
aurait une apparence d'alcool. À titre d'exemple, l'année passée, vous en avez
refusé combien?
M. Bibeau
(Gérard) : 55 au Casino de Montréal seulement.
M. Poëti :
55 au Casino de Montréal. C'est la même chose dans les autres casinos, parce
qu'on comprend que ça va s'appliquer partout. Combien vous avez d'espaces
de stationnement possibles au casino?
M. Bibeau
(Gérard) : 2 200.
M. Poëti :
Si un individu ou une personne qui a consommé, qui aurait échappé aux serveurs,
et qui a trop consommé, et qui s'en va vers
sa voiture pour quitter le casino — 2 200, on peut comprendre que c'est une
possibilité — de
quelle façon vous pouvez intervenir pour
l'empêcher... Vous avez dit : On va intervenir. Est-ce que ça va aller
jusqu'à l'empêcher d'embarquer dans son véhicule et de quitter?
M. Bibeau (Gérard) : Oui. Écoutez, on a une panoplie de moyens. Comme vous savez, au casino,
quand vous entrez là, vous êtes vus à
peu près en tout temps. On a des caméras partout. Bon. Donc, on suit nos gens.
Si on détecte quelqu'un comme ça, qui semble avoir une problématique, on
peut le détecter... nos agents de sécurité sont là, on surveille, on va
intervenir auprès de la personne.
Écoutez,
on m'a même conté des exemples où, si vous... tu sais, vous... les gens qui
connaissent la sécurité, des fois...
Des fois, les gens ne veulent pas toujours collaborer. On va loin, on va loin
là-dedans. On m'a même conté, une fois,
justement, quelqu'un ne voulait pas nous donner ses clés, et puis il a fini par
embarquer dans son auto, puis, regardez, là, les agents de sécurité ont
pris d'autres autos de sécurité puis ils lui ont carrément barré la route en
auto pour l'empêcher de sortir.
Nous
autres, on ne veut tellement pas que ça arrive, ces choses-là. D'ailleurs, il
n'y a pas beaucoup de choses... En
tout cas, à ma connaissance, on n'en a pas échappé beaucoup, des gens qui
partent du casino en état d'ébriété puis que... Ce n'est pas arrivé
souvent, en tout cas, puis on ne le souhaite pas. On n'est pas parfaits, là, on
n'est pas parfaits, mais on va jusqu'à
barrer l'accès en automobile par nos agents de sécurité. Les gens qui ne
veulent pas nous donner leurs clés,
qui ne veulent pas partir en autobus, ne veulent pas partir en taxi, qui ne
veulent pas se faire accompagner, on appelle la police. Et on le fait.
Ce n'est pas des voeux, on le fait, on appelle la police puis on intervient
là-dessus.
M. Poëti :
Donc, vous l'avez fait déjà, appeler la police pour empêcher quelqu'un de
partir du casino?
M. Bibeau
(Gérard) : Oui.
M. Poëti :
Et, dans les directives de vos employés, ils doivent le faire?
M. Bibeau
(Gérard) : Oui.
M. Poëti :
D'accord. Dernière question. On interpelle souvent le privé sur la formation
des serveurs, la formation responsable.
On a voulu déposer un projet de loi cette année — à ce jour, il n'a pas été appelé — qui
obligeait la formation responsable, donc un cours de formation pour
justement gérer une personne qui a les facultés affaiblies. Est-ce que vos
serveurs et les gens qui sont reliés au service d'alcool vont tous avoir cette
formation-là?
M. Bibeau (Gérard) : Exactement, tout le monde va être formé par Educ'alcool. Il y a l'ITHQ,
nous autres, qui donne de ces cours
de formation là, puis il y a différents cours. Ces gens-là vont avoir la meilleure
des formations. Tout le monde va être
formé là-dessus, comme nos serveurs actuellement dans les bars et dans les
restaurants. Même chose pour nos agents de sécurité, même chose pour nos
infirmières. Mais il y a différents degrés de formation, tout dépendant de
comment tu es proche du client.
M. Poëti :
Parfait. Donc, en terminant, je comprends, juste pour vraiment que ça soit
clair pour tout le monde, qu'une
personne qui quitterait avec des apparences de facultés affaiblies, vos gens,
vos agents de sécurité, bien qu'ils ne soient
pas des agents de la paix, vont intervenir physiquement, en ce sens que, si la
personne ne veut pas répondre au fait qu'on l'invite à prendre un taxi
ou quitter, vont intervenir physiquement pour l'empêcher de quitter le casino.
M. Bibeau (Gérard) : Oui.
M.
Poëti : Merci beaucoup d'avoir répondu à ma question.
Le Président (M.
Morin) : Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Maintenant, je
crois que Mme la députée de Bourassa-Sauvé veut intervenir.
Mme de
Santis : Merci beaucoup, monsieur...
• (12 h 40) •
Le Président (M.
Morin) : Vous avez la parole, madame.
Mme de Santis : Merci, M. le Président. Merci. Je veux vous féliciter pour ce que vous
avez mis en place pour que nous ayons
un des plus bas taux de personnes qui sont compulsives au jeu. Mais j'ai
quelques questions. Est-ce qu'avoir l'alcool aux aires de jeu, c'est d'encourager
de nouvelles personnes de venir vous visiter ou c'est pour que les gens qui
sont déjà des joueurs jouent plus?
M. Bibeau (Gérard) : La réponse, c'est : On veut attirer de nouveaux joueurs. Ça, c'est
la réponse. Ce n'est pas que nos
joueurs boivent plus, c'est pour attirer des nouveaux joueurs. Et tout notre
plan au complet pour pouvoir livrer ou pouvoir augmenter notre dividende
de 40 millions, tout ça, c'est basé pour retrouver d'abord une clientèle
qu'on a perdue au cours des cinq dernières
années. C'est ça qui est visé. C'est pour ça qu'on a fait la rénovation de tous
nos casinos, 350 millions qu'on
a investis là-dedans. C'est pour ça qu'on améliore notre expérience de jeu,
parce que les gens viennent s'amuser
chez nous, ils aiment jouer, s'amuser. On va avoir du multimédia. Ça, c'est un
des points qui va nous démarquer, qu'on
pense que les gens vont aimer. Ensuite de ça, l'alcool, bien, veux veux pas, ça
fait partie... l'alcool sur les aires de jeu, c'est une demande, là, de nos clients. On va faire aussi de la
publicité. On veut d'abord ramener notre monde chez nous, donc des
nouveaux clients. Puis l'expérience de jeu, l'alcool, ça fait partie des
demandes. On a vraiment vérifié ces choses-là.
Mme de Santis : Mais vous comprenez aussi que, quand les personnes boivent, ils sont
plus aptes à jouer, les... Ça, c'est
déjà démontré. Donc, ça va aussi encourager des gens qui jouent déjà chez les
casinos au Québec de jouer plus.
Mais
je veux aller à une autre question. Ici, dans ce que j'ai... je viens de
recevoir aujourd'hui, on dit qu'en tenant compte de la fin imminente des travaux du casino de Montréal Loto-Québec
a convenu avec le gouvernement de remettre 40 millions de plus en
dividendes cette année à 70 millions l'an prochain. Quelle partie de ces
40 ou 60 millions de dollars ne serait
pas là s'il n'y avait pas d'alcool dans les aires de jeu? Parce que vous venez
de dépenser un argent fou pour rendre tout ça beaucoup plus sexy pour le
joueur. Alors, à quel pourcentage va vous amener l'alcool dans les aires de
jeu?
M. Bibeau (Gérard) : La manière qu'on fait notre calcul dans les discussions qu'on a eues
pour faire notre budget, comme je
vous ai dit tout à l'heure, nous autres, chaque pourcentage de point de
fréquentation, ça équivaut à 23 millions, O.K., de revenus. Et,
pratiquement, ces niveaux-là, c'est pratiquement du bénéfice. Donc, le
40 millions, c'est un deux points de
pourcentage. On était, en 2007, à 21 %. On était à 21 %. Là, on est
actuellement à 17 %. Ce qu'on veut, avec toute la préparation qu'on a faite depuis plusieurs années, y
compris la réglementation de l'alcool dans les aires de jeu, on souhaite, pour la prochaine année, on y
croit vraiment, de réussir à remonter de 2 %. Ce n'est même pas
revenir au niveau qu'on était en 2007, juste
revenir à 2 %. Et ce qu'on vise encore une fois, c'est de rapatrier nos
clients qu'on a perdus qui continuent à jouer. C'est ce qu'on vise. C'est
un tout. C'est un tout. Ça, là, le 40 millions, c'est de même qu'on l'évalue.
Puis comment qu'on réussit, c'est un tout.
Mme de
Santis : Mais, s'il n'y avait pas l'alcool aux aires de jeu, vous n'allez
pas rencontrer les 40 millions, les 70 millions?
M. Bibeau
(Gérard) : Regardez, je n'ai pas les chiffres là-dessus. C'est
vraiment, là, c'est tout un... c'est un ensemble de choses qui fait qu'on va
réussir à rapatrier notre clientèle qu'on a perdue.
Mme de
Santis : Mais est-ce que les...
Le Président (M.
Morin) : Oui, allez. Vous avez quelques secondes.
Mme de Santis : O.K. Est-ce que les 40 millions, 70 millions incluent le
chiffre d'affaires pour la vente de l'alcool?
M. Bibeau
(Gérard) : Ça inclut tout.
Mme de Santis : Ça inclut la vente d'alcool aussi? Ce n'est pas seulement les personnes
qui vont venir jouer.
M. Bibeau
(Gérard) : Oui, oui.
Mme de
Santis : À quel pourcentage est la vente d'alcool?
M.
Bibeau (Gérard) : Non,
regardez, je n'ai pas le pourcentage. C'est vraiment mon 2 % du taux de
fréquentation avec toute l'expérience de
jeu, tous les nouveaux casinos, l'alcool, la publicité. On veut que nos clients
reviennent. On veut augmenter de 2 % notre taux de fréquentation. C'est
ça qu'est notre objectif. C'est de même qu'on le calcule, c'est de même qu'on a
évalué à 40 millions qu'on travaille pour livrer la marchandise.
Mais, dans le 40 millions aussi, ça inclut
toute la question de la gestion de nos dépenses, là, hein? Il y a eu la loi
n° 100, le gouvernement nous demande d'avoir une gestion des dépenses
extrêmement rigoureuse. Ça aussi, ça fait partie...
Le Président (M. Morin) : ...parce
que votre temps est terminé, là. C'est-à-dire le temps de la députée de l'opposition. Mme la députée de Groulx, vous avez
six minutes. M. Bibeau, compte tenu qu'elle a six minutes, raccourcir
vos réponses, peut-être. Allez, madame.
Mme
Daneault : Merci, M. le
Président. Merci, M. Bibeau, d'être présent. Si je comprends bien votre
intervention, dans le fond, cette mesure-là,
elle a été mise en place pour pallier à la baisse d'achalandage. J'imagine
qu'il y a eu une baisse de revenus
substantielle suite à la baisse d'achalandage où on a eu une hausse de revenus
parce qu'on a permis le casino en ligne. Et est-ce que cette baisse d'achalandage
là ne s'est pas retrouvée dans le casino en ligne?
M. Bibeau (Gérard) : Écoutez, dans
nos casinos, il y a eu une baisse d'achalandage, oui. Ça a donné une baisse de
revenus, bien sûr...
Mme Daneault : ...globale de revenus
ou on parle seulement de...
M. Bibeau (Gérard) : Je parle de
casinos, là. Là, je parle de casinos.
Mme Daneault : Est-ce qu'on inclut
casinos en ligne?
M. Bibeau
(Gérard) : Non, pas encore.
Pas encore. Je vais y arriver. Donc, dans nos casinos, les revenus ont
baissé parce que le taux de fréquentation a
diminué. Je peux vous dire, depuis plusieurs années, une façon qu'on a pallié à
la diminution de notre bénéfice, ça a été
vraiment, là, de faire des réorganisations, de gérer la dépense de façon
importante.
Actuellement, ce qu'on fait dans nos casinos, on
a le budget base zéro qu'on appelle pour...
Mme
Daneault : ...uniquement.
C'est parce que je n'ai pas beaucoup de temps puis je voudrais vraiment
avoir une réponse précise. Est-ce que les revenus ont augmenté ou ont diminué
en ajoutant le casino en ligne?
M. Bibeau (Gérard) : Le casino en
ligne... Le jeu sur Internet, actuellement, on a 30 millions de revenus
supplémentaires pour le jeu en ligne.
Mme Daneault : La baisse d'achalandage
dont vous mentionnez a donné une baisse de revenus de combien?
Le Président (M. Morin) : M. Royer.
M. Royer (Jean) : Pour répondre à
votre question, Dr Daneault... Mme la députée, l'augmentation des revenus
provenant de l'activité en ligne est infiniment inférieure à la diminution des
revenus des casinos terrestres.
Mme Daneault : De combien?
M. Royer (Jean) : Bien, ça se joue, en termes... Parce qu'il faut
comprendre que, dans un casino, chaque client n'est pas égal. Ce n'est pas un client qui donne nécessairement le même
revenu, là. Une partie de nos clients, nous savons… Les clients qui
étaient plutôt des clients, là, porteurs sont maintenant des clients de
casinos, mais des casinos... mais terrestres,
dans l'État de New York, en Ontario. Ça, nous le savons. Tandis que ce qui se
dessine, à l'heure actuelle, sur les jeux en ligne, ce sont d'autres
jeux, et c'est une clientèle qui est différente. Donc, ce n'est pas
nécessairement des vases communicants.
Le Président (M. Morin) : Mme la
députée de Groulx.
• (12 h 50) •
Mme Daneault : Est-ce que ça serait
possible d'obtenir les documents et avec les revenus de Loto-Québec avec le
casino en ligne versus le Casino de Montréal? Juste si c'est possible d'obtenir
ça. O.K. Merci.
Deuxièmement,
est-ce que Loto-Québec n'a pas choisi la voie de la facilité en proposant de
permettre l'alcool dans les aires de
jeu, alors que, depuis 30 ans, on l'a interdit? Il y a une raison pour laquelle
on l'a interdit depuis 30 ans. Et on a mentionné aujourd'hui le fait que
les joueurs pathologiques pouvaient aussi avoir une codépendance de jeu aussi
et de dépendance à l'alcool. Ça, on est conscients de ça.
Mais que
répondez-vous aujourd'hui aux études qui ont bien démontré que seulement
0,05 % d'alcool dans le sang... Alors
là, on ne parle pas de joueurs pathologiques, on parle de votre clientèle, de
la majorité de votre clientèle qui se présente chez vous, et, on le
sait, de plus en plus, la clientèle, ce sont nos aînés qui sont à la retraite,
nos jeunes retraités
qui vont au casino s'amuser. Alors, que répondez-vous à cette clientèle-là,
alors qu'on sait que 0,05 % d'alcool dans le sang prolonge la session de jeu, accentue la prise de risque et
amplifie les pertes financières? Alors, comment, de façon responsable... On sait très bien que cette
clientèle-là, qui est prisonnière, là, qui est dans le casino, à qui on va
offrir de l'alcool et qui, avec 0,05 %, peut causer des effets aussi
néfastes pour la santé en plus des joueurs... de créer une codépendance chez
les joueurs pathologiques. Alors, pourquoi pensez-vous que, depuis 30 ans au
Québec, on a eu des prix, on a eu des
renommées? Parce qu'on est intervenus, entre autres, à ce niveau-là. On s'est
battu. Et, vous le savez comme moi, dans les casinos à l'étranger, où
non seulement on sert de l'alcool, on la donne gratuitement parce qu'il y a un retour sur l'investissement, on le sait
très bien. Ces études-là sont démontrées depuis — je peux vous en sortir, là, j'en ai une et une autre — depuis les années 90. Alors, pourquoi
aujourd'hui Loto-Québec n'est pas capable de poursuivre dans sa mission
de protection du public?
Le Président (M.
Morin) : Vous avez 30 secondes, M. Bibeau.
M. Bibeau (Gérard) : Bien, je vais... Bien, écoutez, je vais vous dire que, d'abord, on
poursuit dans notre mission de la
protection du public. De l'alcool, ça fait 20 ans qu'on en a dans nos casinos,
on en a dans nos bars. Les gens peuvent boire. On est considérés parmi
les meilleurs, c'est un des endroits les mieux contrôlés, c'est un des...
Une voix :...
M. Bibeau
(Gérard) : Oui. Mais, en 1993, on était les seuls casinos, les autres
casinos étaient très loin. Là, il y en a
partout. Nos Québécois ont accès aux autres casinos et ils vont dans les autres
casinos, ils prennent de l'alcool gratuit dans les autres casinos. Puis je pense qu'on est meilleurs pour les
contrôler. Je pense que, moi, ma job, c'est pas mal plus important de faire jouer les Québécois qui veulent
jouer dans nos casinos, dans un milieu contrôlé, où, justement, on prend
des moyens de prévention et on est capables d'intervenir avec nos partenaires
justement de la Santé, du ministère de la Santé, pour trouver des solutions.
Et, s'il y a des problématiques particulières qui se dégagent à l'avenir dans
ce dossier-là, c'est clair qu'on va prendre
d'autres moyens pour améliorer la chose. On n'est pas rendus là pour rien; on
est reconnus, on va continuer. Et c'est
important qu'on la fasse, notre job, qui est de justement canaliser le jeu des
Québécois chez nous, dans nos casinos à nous autres.
Le Président (M. Morin) : Merci, M. Royer, dans cet élan passionné. Donc,
comme, tout à l'heure, je me suis pratiqué, je vous remercie beaucoup,
Dre Rioux, Mme Roiter et M. Royer. Merci de cet échange. Et je remercie les
membres de cette commission pour leurs questions très pertinentes. Donc, bon
retour à la maison.
Je suspends jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à
12 h 53)
(Reprise à 15 h 5)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
La
commission reprend ses travaux.
Je vous rappelle que
nous sommes réunis afin de procéder à des consultations particulières sur le
projet de règles abrogeant la disposition
qui prohibe la vente, le service et la consommation de boissons alcooliques à
l'intérieur des aires de jeux.
Alors,
collègues, cet après-midi, nous entendons les représentants de l'Association
des centres en réadaptation en dépendance
du Québec, l'Association des centres de traitement des dépendances du Québec et
le Centre Dollard-Cormier.
Alors, M. Soucy, Mme
Lecomte, bienvenue à notre commission. Vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Et,
collègues, je vous rappelle que le groupe formant le gouvernement ont
22 minutes pour l'échange avec nos invités; l'opposition officielle,
20 minutes...
Une voix :
22.
Le Président (M.
Bergman) : ...22 minutes, et le deuxième groupe d'opposition,
cinq minutes.
Alors, pour les fins
de transcription, si vous pouvez donner votre nom et votre titre avant de
commencer avec certainement votre autre collègue... Alors, bienvenue.
Association des centres de réadaptation
en dépendance du Québec (ACRDQ)
M. Soucy (Claude) : Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, je suis Claude Soucy, président
du conseil d'administration de l'Association des centres de réadaptation
en dépendance du Québec et président du conseil d'administration du Centre de réadaptation de Québec. Je suis accompagné
de Mme France Lecomte, qui est la directrice des services à la clientèle
au Centre de dépendance de Montréal, Institut universitaire en dépendance.
L'Association des centres de réadaptation en
dépendance du Québec remercie les membres de la commission de lui permettre de
présenter son avis et ses recommandations dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de règles abrogeant la
disposition qui prohibe la vente, le service et la consommation de boissons
alcooliques à l'intérieur des aires de jeux.
Je souhaite
d'abord rappeler que l'Association des centres de réadaptation en dépendance du
Québec regroupe tous les établissements publics ayant une mission de
centre de réadaptation en dépendance. Ce sont les centres de réadaptation en
dépendance qui, au Québec, assument 90 % de l'offre de service faite aux
joueurs pathologiques.
Alors qu'une large proportion de la population
du Québec joue aux jeux de hasard et d'argent, un très petit pourcentage d'entre elles développera, au cours de
sa vie, un problème de jeu pathologique. En 2002, le taux de prévalence du jeu pathologique au Québec était de l'ordre de
0,8 %. Les études plus récentes menées par Louise Nadeau et Sylvia Kairouz indiquent que ce taux se situe aujourd'hui
autour de 0,7 %. Ainsi donc, la très grande majorité des Québécois jouent aux jeux de hasard et d'argent sans
développer de dépendance ou de problèmes particuliers. À cela il faut
ajouter qu'un peu plus de 1 % de la population est considéré à risque de
développer un problème de dépendance au jeu. Bien que cette population de joueurs à risque demeure
actuellement mal connue et que la littérature soit encore peu éclairante sur
leurs motivations, nous savons que certains facteurs engendrent un risque pour
les gens de développer un problème de jeu ou, à l'inverse, les protègent contre
un tel sort.
Le Québec, à
cet égard, se compare de façon très avantageuse par rapport aux autres
provinces canadiennes et par rapport
à d'autres pays. La proportion de joueurs pathologiques semble s'être
stabilisée au cours des dernières années. Les centres de réadaptation en dépendance ont même enregistré une légère
baisse de fréquentation des joueurspathologiques
dans leurs services. Nous attribuons ces résultats au fait que le Québec a su
adopter, au fil du temps, un certain nombre de mesures de protection du
jeu à risque, faisant plutôt la promotion du jeu responsable.
• (15 h 10) •
Dans le cadre du programme expérimental sur le
jeu pathologique du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, les données provenant des sites
expérimentaux indiquent que les usagers des services de traitement se
composent principalement d'hommes dans une proportion des deux tiers, de
personnes âgées entre 35 et 54 ans, de personnes veuves, séparées ou divorcées
et d'individus possédant une scolarité de niveau secondaire ou moindre. Les joueurs pathologiques présentent de hauts niveaux
de comorbidité. La concomitance de problèmes de santé mentale est importante et il existe une forte association
entre une participation problématique au jeu et l'abus ou la dépendance à
des substances telles que l'alcool, la drogue et le tabac. Les résultats de
certaines études suggèrent un effet d'interaction entre les problématiques
liées au jeu et à l'alcool.
Ajoutons que
le ministère de la Santé et des Services sociaux a confié aux centres de
réadaptation en dépendance du Québec
la responsabilité d'offrir des services de traitement aux joueurs
pathologiques. Ainsi, 90 % de l'offre de service faite à ces
personnes est assumée par nos membres.
Une catégorie de joueurs dits à risque,
représentant un peu plus de 1 % de la population, ne reçoit, à l'heure actuelle, aucun service spécifique lié à leurs
problèmes de jeu. Il serait sans doute souhaitable que cette catégorie de
joueurs bénéficie de programmes d'intervention mieux adaptés à leurs
situations.
Le Québec a mis en place, au fil du temps, un
certain nombre de mesures qui agissent comme des facteurs de protection du jeu
à risque ou du jeu problématique. De notre point de vue, ces facteurs de
protection expliquent sans doute en partie les faibles taux de prévalence du
jeu pathologique au Québec.
Mentionnons
parmi ceux-là : la concentration des aires de jeux dans les salons de jeu
ou les casinos et, par le fait même,
la diminution de l'offre de jeu dans les bars où se trouvent les appareils de
loterie vidéo; le fait que ces aires de jeux soient encadrées et réglementées par l'État; et le fait que des
mesures d'auto-exclusion ainsi que des mesures de gestion de crise aient
été mises en place dans ces aires de jeux afin de prévenir les problèmes
associés au jeu pathologique.
Il en est
ainsi des règles qui prohibent la vente, le service et la consommation de
boissons alcooliques à l'intérieur des
aires de jeux. On sait que l'alcool agit comme un désinhibiteur qui,
généralement, augmente la prise de risque chez le joueur compulsif. Plusieurs études ont démontré
que l'association de l'alcool et du jeu pouvait conduire à des pertes de
contrôle. L'obligation pour le joueur de devoir quitter l'aire de jeux pour
consommer des boissons alcooliques agit souvent comme un frein et constitue,
par le fait même, une mesure de protection du jeu à risque.
Ainsi, la décision d'abroger la disposition
prohibant la vente, le service et la consommation de boissons alcooliques à
l'intérieur des aires de jeux peut conduire certains joueurs ayant des
comportements problématiques à augmenter la prise de risque et la perte de
contrôle. Nous sommes particulièrement préoccupés par la tranche de 2 % de la population qui, soit en tant que joueurs à
risque, soit en tant que joueurs pathologiques, est susceptible de
développer des problèmes encore plus importants.
Une fois ces
mises en garde faites et dans la mesure où le gouvernement maintient sa
décision, l'Association des centres de réadaptation en dépendance du
Québec souhaite formuler quatre recommandations.
Considérant qu'il n'existe au Québec aucune
instance chargée d'observer les taux de prévalence du jeu à risque et du jeu pathologique parmi la population,
l'association recommande de confier à l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux le mandat de
mettre en place un observatoire de manière à exercer une meilleure
surveillance des comportements à risque ou des problématiques en lien avec les
jeux de hasard et d'argent.
Plus particulièrement concernant le changement
réglementaire proposé et considérant que près de 2 % de la population
présente déjà une relation problématique avec le jeu, l'association recommande
la création d'un groupe d'experts
indépendants afin d'évaluer et de faire le suivi de ce changement réglementaire
sur une période suffisamment longue, de manière à en évaluer les impacts
sur les habitudes de jeu des Québécois.
Aussi, si les
prétentions du ministre des Finances à l'effet que la levée de la prohibition
de la vente, du service et de la consommation d'alcool dans les aires de
jeux sont susceptibles de générer 40 millions de dollars de revenus supplémentaires à l'État, l'association recommande
qu'une partie de cette somme soit investie dans le développement de nouveaux services ou de
programmes d'intervention pour la population des joueurs à risque, qui
représente un peu plus de 1 % de la population du Québec et pour
laquelle il n'existe, à l'heure actuelle, aucun service spécifique.
Enfin,
considérant que les centres de réadaptation en dépendance du Québec sont déjà
responsables de 90 % de l'offre
de service faite aux joueurs pathologiques au Québec, qu'ils ont, depuis 10
ans, développé une expertise spécifique dans le traitement du jeu pathologique, l'association recommande que le
gouvernement leur confie la responsabilité de développer, dans chacune des régions du Québec, un programme
d'intervention spécifique pour les joueurs dits à risque.
En terminant,
nous espérons que les commentaires de l'association seront utiles aux membres
de la commission et qu'ils
permettront au gouvernement de prendre les meilleures décisions dans un souci
de promotion du jeu responsable et de protection des plus vulnérables de
notre société.
Nous vous remercions de votre attention et
sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
Le Président (M. Bergman) : M.
Soucy, merci pour votre présentation. Maintenant, le groupe formant le
gouvernement, pour une période de 22 minutes. M. le député d'Argenteuil.
M. Richer : Merci, M. le Président.
Bonjour.
Des voix : Bonjour.
M. Richer : Merci d'être là pour
nous éclairer dans la démarche que nous allons faire, qui nous amènera à une
prise de décision.
Alors, si je
comprends, vos organismes accompagnent les joueurs pathologiques qui tentent de
s'en sortir. Donc, ces organismes
apprennent l'histoire de chaque joueur qui se présente et sont à même de mieux
comprendre comment s'est développé ce problème de jeu.
Alors, ma
question, M. le Président, c'est : Selon l'expérience des organismes, ces
derniers peuvent-ils nous dire si l'essentiel des joueurs compulsifs ont
des habitudes de jeu généralement liées aux appareils de loterie vidéo dans les bars ou des habitudes qui seraient liées aux
casinos? Alors, est-ce qu'on peut nous expliquer aussi les étapes qui
mènent généralement à cette problématique de jeu compulsif?
Mme
Lecomte (France) : Alors, je
pense que la majorité... Je pense qu'on l'a dit : Dans la vie de l'association,
la majorité des personnes utilisent le jeu de façon adéquate, mais il y a
1,7 % de la population qui développe une problématique
de jeu. Beaucoup de ces personnes-là ont de la difficulté avec les appareils de
loterie vidéo, mais il y en a une forte proportion aussi qui présente
des difficultés dans le casino. Puis, dans le casino, il y a aussi des
appareils de loterie vidéo. Il y a des aires de jeux, des tables de jeu, mais
il y a aussi des appareils de loterie vidéo.
Comment se
développe une dépendance? Bien, une dépendance, il y a trois facteurs
importants : il y a l'individu, le
contexte et le jeu — et on
appelle ça, dans le réseau de la dépendance, la loi de l'effet — et c'est ces trois facteurs-là qui font qu'une personne développe une dépendance.
Ce n'est pas seulement le jeu, c'est qui elle est comme individu, quels sont ses facteurs de risque et ses facteurs de
protection, elle vit avec qui, et c'est quoi, son contexte de vie pour
qu'une personne développe une dépendance.
Puis c'est un
petit peu sournois, hein? On commence doucement à jouer. On pense qu'on va se
refaire. On continue à jouer, on perd des sous. Mais il y a une
distorsion cognitive : on est convaincus, dans notre tête, que la machine
ou la table de jeu va nous remettre l'argent qu'on a perdu, et c'est vraiment
une distorsion cognitive.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M. Richer : Oui, M. le Président.
Une toute petite question puis une suivante. Vous avez parlé, madame, de
1,7 % de la population.
Mme Lecomte (France) : Oui.
M. Richer : 1,7 % de la
population globale ou 1,7 % des joueurs?
Mme Lecomte (France) : 1,7 % de
la population en général.
M. Richer : En général.
Mme Lecomte (France) : Oui.
M. Richer : D'accord. Alors, on s'entend,
M. le Président, oui?
Le Président (M. Bergman) : Ça va.
M. Richer : Le risque des jeux, il y
a sûrement un lien aussi avec l'évolution du jeu au Québec. Je veux dire,
depuis 1992, la situation a changé considérablement. Je constate, en regardant
certains documents, que, depuis 1992, il y a
eu 16 décisions ou décrets qui sont venus modifier en ajoutant, après le
Casino de Montréal, le Casino de Charlevoix, le Casino du Lac-Leamy, et, sur ces 16 projets de
loi là, il y en a 12 qui sont venus du gouvernement libéral et quatre du
gouvernement du Parti québécois. Et, dans
les 12 du Parti libéral, il y a l'implantation du jeu en ligne, et c'est là-dessus
que j'aimerais vous entendre un petit peu
parce que, dans les trois facteurs de risque que vous avez mentionnés — l'individu,
le contexte, et le jeu — on
les trouve très bien aussi dans les jeux en ligne qui, à mon avis, sont à
risque parce qu'il n'y a aucune surveillance. Comparativement aux casinos, si
on en venait à permettre la vente d'alcool, on est dans un lieu où il y a un
encadrement systématique.
Alors, est-ce
que cette dépendance et ce risque de combinaison alcool et jeu, qui n'est pas
souhaitable, est-ce qu'elle ne risque pas plus de développer de la
dépendance dans les jeux en ligne où l'individu est seul à lui-même et donc
rencontre très bien les trois critères que vous avez mentionnés par rapport à l'encadrement
possible au casino?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
• (15 h 20) •
Mme
Lecomte (France) : Oui. Il y
a deux questions dans votre... que vous m'adressez. La première est en
regard des jeux en ligne. Effectivement,
dans les jeux en ligne, la personne est seule puis elle joue en ligne. Alors,
oui, il y aurait lieu de regarder, puis ça pourrait faire état d'un
autre avis de quels seraient les facteurs de protection qu'on pourrait mettre
pour faire en sorte d'encadrer les jeux en ligne.
L'objectif de
notre présentation aujourd'hui, c'était de regarder la consommation d'alcool
dans les aires de jeux. On sait que
l'alcool, c'est un produit qui est un dépresseur, donc qui désinhibe, qui amène
le joueur à... ça augmente la prise
de risque, l'alcool, et ça fait en sorte d'augmenter la perte de contrôle. Le
produit même, l'alcool, favorise ça. Ce que les joueurs nous disent...
Puis on va le présenter, le point de vue des joueurs, à 5 heures, avec le
Centre Dollard-Cormier… Puis je vais y aller
un petit peu, là. Ce que les joueurs nous disent, c'est : À partir du
moment où ils doivent quitter leur
appareil de loterie vidéo ou la table de jeu, bien, c'est une façon de cesser
le cycle de cette dépendance-là et de pouvoir se reprendre en main et de
regarder qu'est-ce que j'ai perdu, quels sont les objectifs que je me suis
fixés puis est-ce que je ne devrais pas retourner à la maison.
C'est la même chose pour le tabac. Quand on a
enlevé... Quand on a fait l'interdiction de fumer dans les bars, où il y avait
des appareils de loterie vidéo, bien, les clients nous le disaient : Je
quitte la machine, la même chose… Le parallèle avec la table de jeu : Je
quitte la table de jeu, et, quand je suis dehors et que je fume ou quand je
vais me chercher un verre d'alcool — on peut faire le même parallèle — c'est là que je reprends le contrôle de ma
situation et de ma problématique. C'est là que je fais un temps d'arrêt
et que je brise ce cycle-là.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M.
Richer : Une petite
dernière, M. le Président. Je reviens à ma première question dans la différence
entre les loteries vidéo dans les
bars et les habitudes au casino. Est-ce qu'il y a des... Est-ce qu'on connaît
une proportion reliant un à l'autre, et est-ce qu'il y a des études qui
viennent démontrer cette proportion-là?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Bien,
peut-être qu'on va attendre la présentation de Brigitte à 5 heures, puis
que Brigitte va être mieux à même de répondre à cette question-là en regard des
appareils de loterie vidéo et des tables, là, parce qu'elle est vraiment
concentrée sur les joueurs.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Oui. Bonjour.
Mme Lecomte (France) : Bonjour.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci d'être là, de nous apporter votre éclairage
dans le processus que nous avons entrepris ce matin.
Mme Lecomte (France) : Merci.
Mme
Gadoury-Hamelin : Ce matin,
on a eu les gens de Loto-Québec, qui nous ont présenté le portrait aussi
de la situation, du glissement, hein, de la
clientèle qui délaisse les casinos officiels pour aller vers des casinos à
l'extérieur. La concurrence est vive et, à
cet endroit-là, l'alcool est permis aux tables de jeu; donc, de tout, là aussi,
ce qui nous amène, devant aussi cette commission-là, à regarder cette
avenue-là pour les Québécois parce qu'on est bien conscients aussi qu'à Loto-Québec aussi les revenus de Loto-Québec
servent à la population du Québec et, si cette avenue-là, on la laisse
glisser aussi, alors là, à ce moment-là, ces gens-là, on n'a pas de contrôle,
mais ils vont aller consommer ailleurs.
Finalement,
là, ce que j'essaie de dire, c'est que... mon impression, puis vous êtes là
pour nous le dire, les gens qui ont
des dépendances par rapport au jeu ou quels que soient d'autres types de
dépendances, ce n'est pas nous qui vont les empêcher. Ce qu'on souhaiterait faire dans les casinos, c'est d'avoir un
certain contrôle pour pouvoir les aider au moment où ils ont besoin,
parce qu'ils sont à vue puis ils sont encadrés avec des outils, là; c'est un
peu ça. Parce que ce qu'on constate, c'est que les gens vont jouer ailleurs, et
puis tout ça.
Bon, ceci étant dit, vous êtes
habilités à transiger avec les gens qui ont des dépendances. On sait que le
problème du jeu pathologique... on nous a
dit aussi, ce matin, que ce n'était pas l'ensemble des joueurs qui avait une
pathologie par rapport au jeu. Présentement, on identifie ça à 0,7 %, mais
il y a quand même... Donc, ça demande une vigilance constante pour être en
mesure de bien les identifier puis d'être capable de leur apporter une aide.
Dans
ce sens-là, vous, qui êtes les témoins, souvent, de ces situations-là,
pouvez-vous nous dire à quel moment il est
plus efficace d'agir, d'intervenir en amont au niveau de la sensibilisation ou
au niveau… De par votre expérience, là, qu'est-ce qui pourrait faire qu'on pourrait réduire, là, les problèmes
de dépendance chez les gens, là, au niveau du jeu?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte
(France) : Je pense qu'il y a plusieurs facteurs qui peuvent aider la
réduction, mais ce sont des facteurs de protection
qui aident le plus à la réduction des problématiques à risque et des
problématiques pathologiques. Et, les
facteurs de protection, il faut les regarder sur une étude longitudinale, il ne
faut pas mettre un facteur de protection puis penser qu'immédiatement ce
facteur de protection là va donner un résultat. Si on regarde le tabac, c'est
sur plus de 10 ans qu'on obtient des
résultats parce qu'on a mis des facteurs de protection. Alors, c'est pareil
pour le jeu. Je pense qu'il faut
faire la promotion du jeu responsable, il faut avoir des aires de jeux qui sont
sécuritaires. Je ne pense pas qu'on doit offrir l'alcool dans les aires
de jeux, c'est un facteur de risque plus important.
L'autre
élément, c'est que nous avons fait le choix, au Québec, d'avoir des casinos
d'État, et ces casinos d'État là doivent
avoir une préoccupation pour la clientèle qui est vulnérable et qui présente un
problème de jeu pathologique ou de comportement
à risque et qui se retrouve aux tables de jeu ou en arrière des appareils de
loterie vidéo. Et je comprends que
Loto-Québec dit qu'il pense récupérer 40 millions, mais ce
40 millions là, il va venir pas seulement de la consommation d'alcool, il va venir des mises plus importantes
que les joueurs pathologiques vont faire aux tables de jeu et il va
venir sur la durée plus longue où ils vont rester aux tables de jeu puisqu'ils
n'auront pas besoin de sortir de la table de jeu pour avoir un verre d'alcool.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Bien, ce matin, ce qu'on avait entendu, c'était… Je ne veux pas dire
qu'il n'y a pas du tout, là, de ce
que vous dites, mais ce qu'on a entendu plus, c'est que le pourcentage de
joueurs au Québec se maintient, même s'accentue, mais qu'il n'est plus
dans les casinos de Loto-Québec; il est ailleurs, il est dans les 80 autres
endroits autour.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Ce que vous me dites, c'est que les joueurs
pathologiques utilisent les casinos autres que les casinos d'État ou les
appareils de loterie vidéo qui sont autres que les appareils de loterie vidéo
de l'État. Je pense qu'effectivement il y a un pourcentage qui glisse. Je ne
pense pas que c'est seulement l'alcool qui est le seul facteur déterminant pour que ces gens-là se retrouvent; il
y a d'autres facteurs. Puis il faudrait évaluer, chez ces joueurs-là,
quels sont les facteurs qui font qu'ils vont vers ces sites qui ne sont pas les
sites encadrés par l'État. Mais je ne pense pas que c'est seulement l'alcool qui est un facteur, c'est un des facteurs.
Je ne nie pas que ça peut être un facteur, mais ce n'est pas le seul
facteur.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Est-ce que vous avez une idée des autres facteurs
qui pourraient être...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Écoutez, il peut y avoir une multitude de
facteurs, qui peut être la proximité, quelque chose de l'ordre de la proximité, quelque chose du fait que ce n'est pas
un casino d'État et que moi, j'aime mieux aller jouer dans un casino qui
n'est pas d'État, qui est moins encadré, moins soutenant, où il n'y a peut-être
pas d'auto-exclusion, alors, ou moi, je veux
aller dans ce type de casino là. Mais je pense qu'on aurait avantage à faire
une recherche puis à aller voir quels
sont ces facteurs-là qui incitent ces joueurs-là à quitter le casino puis à
aller vers un autre site de jeu.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Vous nous avez dit aussi, dans vos commentaires, que les casinos de
l'État justement avaient des outils
pour bien identifier puis pour bien supporter. Je pense que vous avez des liens
avec. Vous ne pensez pas que ce serait mieux justement que les gens se
retrouvent dans nos casinos à nous, les casinos de l'État, plutôt que de se
retrouver dans des casinos illicites?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Tout à fait.
Je pense qu'on aurait avantage à ramener les joueurs, mais je ne suis pas
certaine que c'est en donnant l'alcool aux aires de jeux qu'on va ramener les
joueurs nécessairement. Je pense qu'on aurait avantage à regarder c'est quoi, les facteurs, puis à aller
interviewer ces gens-là. Je ne suis pas certaine que c'est en donnant
accès à de l'alcool qu'ils vont nécessairement revenir vers les casinos d'État.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Bien, de
toute façon, vous, quand vous dites : Donner l'alcool, on ne donnerait
pas l'alcool, là, elle serait…
Mme Lecomte (France) : Non, je
comprends très bien, là, mais...
Des voix : Ha, ha, ha!
Mme Gadoury-Hamelin : O.K., c'est
bon. Parce que vous savez qu'il y a des endroits où, carrément, elle est
donnée, hein?
Mme Lecomte (France) : Oui, où c'est
gratuit. Non, je le sais...
Mme Gadoury-Hamelin : Ça, ça peut
être un incitatif.
Mme Lecomte (France) : Non, non. Je
me suis mal exprimée, là, je...
• (15 h 30) •
Mme Gadoury-Hamelin : O.K. Non, je
voulais juste être certaine.
Mme Lecomte (France) : ...permettre
aux gens d'acheter de l'alcool et de le consommer directement à la table de
jeu.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour. Je reviens sur ce que vous dites. En fait, vous
dites qu'il n'y a pas d'étude
spécifique, là, qui démontre que le fait de servir, de permettre l'alcool aux
tables de jeu est un facteur qui inciterait les gens à revenir vers les
casinos d'État. Mais, à ce moment-là, est-ce que c'est démontré, finalement,
cette relation problématique entre la consommation d'alcool aux tables de jeu
et le jeu pathologique?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme
Lecomte (France) : Ce qui
est démontré, c'est qu'il y a une relation de cause à effet entre la
consommation d'alcool et le jeu. On sait
que, chez les joueurs pathologiques, il y en a une forte proportion qui ont aussi
des problématiques d'alcool. Donc, il
y a une relation, il y a une interaction entre le fait de jouer et de consommer
de l'alcool qui accentue la problématique
de jeu, parce que la personne, en consommant de l'alcool, elle se met plus à
risque. C'est un facteur de risque
supplémentaire, l'alcool. C'est un dépresseur qui amène les gens à prendre une
plus grande prise de risque. C'est comme
la conduite automobile : quand on consomme de l'alcool, on a une prise de
risque plus importante dans la conduite automobile. Alors, le même
parallèle se fait avec le jeu.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Oui. Et cette
association entre l'alcool et le jeu, dont on parle, là, est-ce que — à ce moment-là, je reviens un petit peu avec ce que ma collègue vous
proposait — ce ne
serait pas plus responsable pour un gouvernement de mettre en place des mesures qui vont favoriser le jeu dans un endroit
où ce sera mieux réglementé? Et, pour éviter que les joueurs, surtout les joueurs pathologiques, qui peuvent développer
une dépendance ou qui peuvent, bon, finalement, avoir une problématique
assez sérieuse, est-ce que ce n'est pas plus responsable de nous assurer de les
canaliser et de faire en sorte qu'ils
viennent jouer le plus possible dans un endroit réglementé, où, je souligne
aussi, 99 % de la clientèle n'est pas... ne sont pas des joueurs
pathologiques?
Donc, il y a
une expérience, disons, de loisir et une expérience comme aller souper dans un
restaurant et prendre une bouteille de vin, où il y a toujours un niveau
de responsabilité de l'individu, et ce n'est pas parce qu'on est dans un restaurant et qu'on consomme de l'alcool qu'on
a un problème d'alcool, au même titre que ce n'est pas parce qu'on est
dans un casino et qu'on prend une consommation à une table de jeu qu'on a un
problème d'alcool ou qu'on est un joueur pathologique. À ce moment-là, mais
compte tenu qu'on sait que ça existe, le jeu pathologique, pour une faible
proportion quand même de la clientèle des casinos, est-ce qu'on ne devrait pas
tout mettre en place pour nous assurer de leur permettre de jouer dans un
encadrement le plus sécuritaire possible?
Le Président (M. Bergman) : M.
Soucy.
M. Soucy
(Claude) : Oui, c'est sûr
que, comme association, on va toujours favoriser que ce jeu-là se fasse...
que les jeux de hasard se fassent dans un environnement qui est le plus
encadré, le plus légal possible. Ça, je pense que, comme association, on a une position assez claire
là-dessus. Par contre, je pense qu'il ne faut pas mettre en opposition
ce fait-là et le facteur bien connu de
l'interaction alcool et jeu, que Mme Lecomte a décrit, là. Puis je pense que,
lorsqu'on fait référence à des études
récentes, entre autres de Mme Nadeau, où on voit qu'il y a 50 % des
joueurs pathologiques qui ont aussi
des problèmes de consommation d'alcool, je me dis : On peut se poser quand
même des questions, là, sur l'orientation de la mesure qui est proposée.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Oui. J'aimerais
revenir sur une proposition que vous faites dans votre mémoire, dans le
document que vous nous avez déposé. Dans vos recommandations, vous souhaitez,
si le gouvernement allait de l'avant avec la réglementation, la modification
réglementaire, de mettre en place un comité de suivi.
J'aimerais ça
que vous m'expliquiez un peu plus votre vision de ça. Qu'est-ce que vous
souhaiteriez que ce comité de suivi
fasse? Est-ce que ce serait d'évaluer véritablement l'impact de cette réglementation,
j'imagine, à différents niveaux, autant
du point de vue de l'individu, du point de vue de la prévalence du jeu
pathologique que du point de vue, peut-être, de l'augmentation de la
clientèle et des revenus de Loto-Québec? Comment vous voyez ça, ce comité de
suivi?
Le Président (M. Bergman) : M.
Soucy.
M. Soucy
(Claude) : Je pense qu'il y
a deux ordres de préoccupations dans nos recommandations, une première qui vise à s'assurer qu'au Québec on ait un
observatoire sous la responsabilité de l'Institut national d'excellence en
santé, par exemple, et que cet
observatoire-là assure une certaine vigie sur le phénomène, sur le problème des
comportements à risque liés au jeu. Je pense
que, comme Mme Lecomte le disait, c'est que la littérature et la recherche sur
ces éléments-là n'est pas autant
développée, par exemple, que dans le secteur de l'alcool ou dans le secteur des
drogues. Donc, je pense que ça assurerait une certaine vigie et
améliorer la connaissance.
Plus spécifiquement, la deuxième recommandation,
ce qu'on dit, c'est que, s'il y a un changement apporté au règlement, ce qu'on souhaiterait, c'est qu'il y
ait un comité d'experts indépendants. Il existe des organismes qui
peuvent faire ce type d'évaluation là, entre
autres on pense à des équipes de l'ENAP ou d'autres organismes, mais qui
pourraient faire une évaluation, une équipe
d'experts indépendants qui pourraient faire une évaluation et le suivi des
impacts sur les joueurs, mais peut-être aussi sur le suivi de l'impact
financier dont on parle, entre autres, là, dans le...
Le Président (M. Bergman) : Il vous
reste une minute.
Mme
Proulx : Une minute? Bien,
juste en une minute, en quelques secondes, est-ce que vous pouvez nous
parler un petit peu de la relation que vous avez
avec Loto-Québec? Est-ce qu'il arrive que Loto-Québec vous réfère des
clients? Comment... Est-ce que vous... Oui, est-ce que vous travaillez avec
Loto-Québec, en fait?
Mme
Lecomte (France) : On n'a
pas d'entente de services avec Loto-Québec, mais, oui, dans le cadre de...
ils vont référer de la clientèle. Ils nous
connaissent comme centre de traitement puis, oui, ils vont, dans les situations
où ils font intervenir l'intervention
de crise… Alors, oui, on a de la clientèle qui nous parvient des aires de jeu
du casino, que ce soient les tables ou les appareils de loterie vidéo.
Mais on n'a pas d'entente spécifique avec Loto-Québec.
Le Président (M. Bergman) : Alors,
ceci met fin au bloc du gouvernement. Pour l'opposition officielle, pour une…
22 minutes, Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée : Merci, M. le Président.
Alors, bonjour. Bienvenue. Merci de participer à ces consultations.
On a entendu
Loto-Québec, les gens de Loto-Québec, un peu plus tôt aujourd'hui, qui nous
expliquaient qu'ils avaient mis en
place une série de mesures, en fait, qui sont mises en place en fonction de ce
qui existe actuellement. On a compris
qu'il n'y a rien qui sera mis en place afin de pallier peut-être aux nouveaux
besoins qui résulteront des changements proposés.
Mais
j'aimerais vous entendre : Est-ce que, selon votre expertise, selon les
gens que vous croisez, la clientèle que vous croisez, est-ce que, si le gouvernement devait aller de l'avant
avec cette modification-là au règlement, des mesures additionnelles
devraient être mises en place à l'intérieur des casinos? Parce que, je
comprends, vous parlez de l'observatoire. Ça, c'est une chose. Mais
concrètement, pour l'aide directe à la clientèle à risque, un observatoire, concrètement, là, au jour le... au quotidien, ça
ne pourra pas les... on ne pourra pas les accompagner, ça ne les aidera
pas, ça ne viendra pas tenter de les sortir d'une situation.
Quelles seraient les mesures qui pourraient être
mises en place, les mesures additionnelles qui devraient, pas pourraient, qui
devraient être mises en place pour venir pallier aux conséquences qui seront
directement en lien avec cette décision-là?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Vous me
demandez, advenant que le règlement passe et qu'on va de l'avant pour permettre la consommation d'alcool dans les aires
de jeu, quels seraient les éléments qui pourraient être mis en place.
Écoutez, je pense qu'il va falloir développer des outils de dépistage
extrêmement importants pour être capable de dépister ces
gens-là qui vont être en consommation d'alcool et dans un cycle important relié
à leur problématique de jeu pathologique,
parce qu'ils ne se retirent pas de leur cycle, ne se retirent pas de leur aire
de jeu pour aller se chercher et se payer une consommation.
Alors,
vraiment, il va falloir qu'il y ait du dépistage très spécifique qui soit
développé pour détecter ces gens-là et leur offrir une alternative, je
dirais. Mais c'est beaucoup des outils de dépistage, là, de surveillance et de
dépistage dans les aires de jeu.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
• (15 h 40) •
Mme Vallée : Loto-Québec, M. Bibeau
nous disait : Nos serveurs ont suivi une formation, une formation de trois heures, alors ils sont capables de détecter
et de dépister toutes les problématiques à l'intérieur du casino.
Croyez-vous que des serveurs, avec tout le
respect que je peux avoir pour les gens qui travaillent dans les casinos…
Est-ce que quelqu'un qui travaille au
bar a les compétences requises pour dépister les problématiques ou les
comportements à risque?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme
Lecomte (France) : Plus on
fait le choix d'augmenter les facteurs de risque, plus ça nécessite une
expertise chez les gens pour dépister. Et c'est vers ça qu'on va, là, on
augmente les facteurs de risque, alors je... Est-ce que les serveurs ont
suffisamment de formation pour dépister? J'en douterais. Je me permettrais d'en
douter.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Quel serait, à
votre avis, le profil des gens qui devraient être formés, qui devraient être
appelés à intervenir dans les casinos?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme
Lecomte (France) : Vous me
demandez un profil pour intervenir dans les casinos, dans des
situations... pour prévenir. Parce que, dans une situation de crise, il y a une
intervention, dans le casino, qui est faite puis il y a des professionnels qui
se déplacent quand il y a une situation de crise. Vous me demandez plus pour
prévenir. Bien, je pense qu'il faut que ce
soient des intervenants cliniques, il faut qu'il y ait plus d'intervenants
cliniques disponibles dans les
casinos pour être capables d'observer ces gens-là. Et des cliniciens, là, je
parle de gens qui ont une formation clinique.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Ce sera ma dernière
question, je sais que mes collègues ont des questions. Donc, le fait d'avoir
un infirmier ou une infirmière par casino
pendant les heures d'ouverture, comme on nous l'expliquait comme étant un
moyen extraordinaire pour prévenir les dérapages, est-ce que c'est suffisant, à
votre avis?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Je ne pense
pas que ce soit suffisant pour prévenir les dérapages, surtout si on augmente
les facteurs de risque.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le
Président. Est-ce que vous savez c'est quoi, le taux des joueurs pathologiques
en Ontario, par exemple, ou dans les Maritimes?
Mme Lecomte (France) : Le taux de
joueurs pathologiques est sensiblement le même en Ontario ou dans d'autres pays
comme la France. On obtient tous des taux de joueurs pathologiques qui se
situent autour du 0,7 %, 0,8 % de
la population générale, et les taux de joueurs à comportement à risque sont
aussi autour du 1 %, 1,2 %. Donc, on peut dire qu'en moyenne
il y a à peu près 2 % de la population qui présente une problématique de
jeu. Et il y a, en Angleterre, où le taux
est un petit peu plus élevé, et… En Angleterre, ils attribuent ce taux plus
élevé aux paris sportifs qui sont...
où cette culture-là adhère bien aux paris sportifs. Alors, il y a un taux un
petit peu plus élevé en Angleterre, mais on est tous autour du même
taux.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Alors, je me pose
la question : Si l'alcool est vendu dans les aires de jeu ailleurs que le
Québec, et le taux des joueurs pathologiques, c'est semblable, comment vous
expliquez cela?
Mme Lecomte
(France) : Bien, je pense qu'il faut dire que les recherches dans le
jeu, ce sont des jeunes recherches. Ce n'est
pas un domaine, le jeu, qui a été... où il y a eu beaucoup de recherches si on
compare avec d'autres dépendances. Alors, on a un
historique de recherche qui est beaucoup plus récente en jeu qu'on l'a dans d'autres
dépendances comme...
Nous,
ce qu'on dit, c'est : Il faut mettre autour du joueur des facteurs de
protection puis il faut faire des études longitudinales pour être capable de voir l'impact de nos mesures de
protection sur le taux de prévalence. Et, au Québec, on est le seul au monde où on a une offre de service
qui est gratuite pour les joueurs pathologiques — ça n'existe pas nulle part dans le monde — et on
a beaucoup de facteurs de protection qu'on met en place par rapport à d'autres
endroits. Mais on ne peut pas, en ce moment,
compte tenu que les recherches sont récentes, vérifier l'impact de nos facteurs
de protection immédiatement. Si on regarde le tabac, c'est sur une période de
10 ans que ça a donné des résultats sur les facteurs, sur le taux de prévalence. Alors, il faut maintenir les
facteurs de protection, faire de la recherche et voir l'impact sur les
taux de prévalence.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : O.K., parce que, quand je lisais votre présentation, je me
demandais c'est quoi, l'aspect scientifique
derrière les déclarations qui sont faites. J'ai commencé un doctorat en
biochimie, ça explique un peu pourquoi je poserais ces questions-là. Par exemple, quand vous dites que
l'obligation pour le joueur de devoir quitter l'aire de jeux pour consommer les boissons alcooliques, que cela
agit souvent comme un frein, est-ce que ça, c'est une déclaration qui est faite parce que ça semble quelque chose qui
est évident ou parce qu'il y a des études scientifiques qui le
démontrent?
Mme Lecomte
(France) : Il y a des études scientifiques. Maintenant, je ne serais
pas à même de vous dire est-ce qu'il y a une
étude scientifique qui a démontré ça, mais les joueurs nous le disent, et il y
a des déclarations des joueurs qui
nous le disent. Ils nous disent que, quand ils doivent aller dehors fumer une
cigarette ou s'ils ont à aller se chercher un verre d'alcool au bar, que
ça brise leur cycle et que ça permet de reprendre contrôle. Et ça, les joueurs
nous le disent.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Comment est-ce que le taux de 0,7 % ou 1 % a été
calculé? Comment vous êtes arrivés à ces chiffres-là?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte
(France) : Bien, c'est calculé à partir de recherches qui ont été
faites par Mme Louise Nadeau et Sylvia
Kairouz, qui ont travaillé sur les taux de prévalence. Alors, elles ont... Je
ne pourrais pas rentrer dans le spécifique
de ces recherches-là, mais c'est deux grandes chercheuses au Québec qui se
penchent... Mme Nadeau, depuis des années, sur les problématiques de
dépendances et Mme Kairouz principalement sur les problématiques de jeu. Et
elles font des études pour être capables de déterminer le taux de prévalence,
comme on le détermine pour l'alcool, comme on le détermine pour d'autres
produits.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Je pose cette question, parce que, quand j'étais sur le Net — tout le monde va sur le Net — ce
n'était pas Wikipédia… puis j'étais
sur le Net, j'ai trouvé d'autres études, j'ai trouvé des études Smart et
Ferris, etc., et, eux, c'était par des appels téléphoniques. Alors, je
me dis : Comment ça peut être valable?
Mme Lecomte
(France) : Les taux de prévalence?
Mme de Santis : Non, non, quand des études sont faites par appels téléphoniques de
2 000 personnes. Alors, je me dis : Est-ce que c'est
scientifique?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte
(France) : Bien, c'est difficile pour moi de répondre à cette
question-là, là, n'étant pas une chercheure.
Je suis une clinicienne de formation. Mais ces études-là, si elles
déterminent... si elles permettent de déterminer des taux de prévalence, c'est qu'elles sont vraiment déterminées par des
critères scientifiques très précis. Et, oui, des fois, au téléphone, ça
peut donner des résultats extrêmement positifs aussi, parce qu'il y a des
critères très précis qui sont en lien avec les résultats de ces appels
téléphoniques là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Une dernière question. Je ne sais pas comment les gens font pour aller
jouer sur le Net, mais je présume que c'est assez facile et qu'ils le
font à partir de leur chez-eux. Et l'alcool, c'est tout à fait... je veux dire,
c'est facilement accessible à l'intérieur d'une maison.
Est-ce
qu'il y a des études qui ont été faites là-dessus dont vous pouvez être au
courant? Et est-ce que vous voyez que
vraiment, si l'alcool est vendu dans une aire de jeux, ça change beaucoup pour
celui qui est un joueur pathologique? Parce
que le joueur pathologique, je présume, va aussi jouer à l'intérieur de son
chez-lui. Il n'y a aucune raison d'aller au casino pour le faire, il va jouer chez lui. Alors,
chez lui, il n'est pas du tout protégé. Et donc, si on impose ça aux
casinos, qu'est-ce qu'on réussit vraiment à faire?
Mme Lecomte
(France) : Bien, je pense...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
• (15 h 50) •
Mme Lecomte (France) : Excusez-moi, je parle trop vite. Je pense qu'on
ne peut pas réglementer la vie privée des gens, hein? Les gens sont dans
leur maison, et, oui, il y a des facteurs de risque importants, mais on ne peut
pas réglementer. On peut faire du dépistage,
on peut faire de la promotion du jeu responsable pour ces gens-là, on peut
leur offrir une offre de service quand ils
vont venir nous voir, on peut faire beaucoup de choses. Mais, dans les aires de
jeu d'un casino d'État, je pense qu'on a une
responsabilité à l'égard des joueurs pathologiques qui sont présents et de
leur grande vulnérabilité. Et on a à se
questionner si on ajoute un facteur de risque ou si on maintient les facteurs
de risque qui sont là, parce qu'il y
en a déjà, puis qu'on encadre bien ça. Je considère que c'est ajouter un
facteur de risque, puis on est devant un produit qui est de l'alcool,
qui est un dépresseur et qui va désinhiber la personne.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
Il nous reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Bergman) : Il vous reste huit minutes.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'abord, merci d'être ici
puis félicitations pour la présentation, parce que c'est très formateur, puis on veut justement entendre les
experts dans ce domaine. C'est quoi, l'impact d'avoir la consommation d'alcool
dans l'aire de jeu? Et, si vous... de la façon dont vous l'expliquez aujourd'hui,
c'est quand même plus que d'avoir à aller au bar, où le bar est à 10 ou 15
mètres. Ça brise un cycle.
Et, vous l'avez expliqué, mais j'aimerais ça que
vous partiez du principe que la personne qui est vulnérable, elle joue, donc représente un risque important, mais le fait
de consommer sur place, elle n'a pas cette pause de repos qui fait
qu'elle va arrêter de jouer et de boire.
J'aimerais ça que vous nous le réexpliquiez comme il le faut, parce que c'est
ça, le coeur. Et, entre autres, quand
on compare avec le jeu en ligne à la maison, c'est une problématique qui est
complètement différente, alors qu'il pourrait jouer en ligne à d'autres
endroits, tandis que là, c'est dans nos casinos que ça se joue, ce phénomène-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Alors, bien évidemment, quelqu'un qui est à la
table de jeu puis qui joue, il est bien installé dans son cycle
de : je fais une mise, il y a un résultat, je refais une mise, puis il y a
un résultat. Il y a quelque chose… Le cycle est bien installé à l'aire de jeu.
Alors,
si on veut briser ce cycle-là, il faut que la personne sorte de la table de jeu
pour être capable de se reprendre et
de récupérer, sur le plan cognitif, des éléments importants pour se refaire une
prise de position, alors que, quand je reste sur la table, je suis
toujours en distorsion cognitive. Je me dis : Ce n'est pas cette fois-ci
que j'ai gagné, ça va être la prochaine
fois. La roulette, elle va rouler pour moi. Il y a une distorsion cognitive que
j'ai. Quand je brise ce cycle-là, quand
je sors de la table, je reprends mon raisonnement et mon jugement pour être
capable de me dire : Bien, aujourd'hui, j'en ai perdu beaucoup par rapport à mes gains. Je m'étais fixé un
montant, je l'ai beaucoup dépassé. Il y a quelqu'un, à la maison, qui m'attend.
Peut-être que c'est le temps que je quitte.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Ce que vous venez d'expliquer, c'est vrai pour
les joueurs compulsifs. Mais est-ce qu'on peut dire que c'est vrai également
pour la personne qui joue habituellement sans compulsion, mais qui, en présence
d'alcool, va avoir ce comportement?
Mme Lecomte (France) : Tout à fait. C'est vrai pour tout le monde. C'est
vrai pour tout le monde, pour les joueurs à risque, pour les joueurs récréatifs puis pour les joueurs
pathologiques. C'est vrai pour tout le monde. L'alcool, quelle que soit
ma difficulté au niveau du jeu, a un effet de désinhibition et m'amène à
prendre des risques plus élevés.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Continuons notre raisonnement. On sait qu'au
Québec on est l'endroit où est-ce qu'il y a le moins de joueurs
compulsifs, peut-être parce que l'offre de jeu est moins libérale. Et puis, à
ce moment-là, si vous étiez dans un endroit, Atlantic City, puis vous faisiez
un diagnostic de population qui a un haut taux de joueurs compulsifs, un haut taux de problèmes… qui ont des
problèmes, des difficultés sociales, familiales parce qu'il y a une
problématique de jeu, iriez-vous jusqu'à leur recommander de mettre en place
une mesure telle que de cesser d'avoir de l'alcool dans les aires de jeu pour
diminuer, sur quelques années, cette problématique?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme
Lecomte (France) : Oui, je
recommanderais ça et je recommanderais qu'on fasse une recherche puis qu'on
vérifie l'impact de ça. Alors, oui, je recommanderais ça.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
Troisièmement partie du raisonnement. Quand on a des comportements qui sont inadéquats, comme gouvernement, comme société, on
veut protéger. Si on suit le raisonnement qu'on permet l'alcool dans les aires de jeu pour que la population
vienne jouer dans nos casinos parce qu'on n'est pas en compétition avec
les autres, seriez-vous prêts à accepter le principe qu'on devrait accepter
également le tabagisme, compte tenu qu'il y a plusieurs casinos que les gens
ont le droit de fumer… et ça garderait les gens localement?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme
Lecomte (France) : Écoutez,
je ne pourrais pas accepter ça, là. C'est comme si vous me dites :
Remettons un facteur de risque qu'on a enlevé. Alors, non. Je pense qu'on est
très avant-gardistes d'enlever ces facteurs de risque là, il ne faudrait pas
les remettre.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Autrement
dit, au Québec, on a la meilleure donnée, les meilleures statistiques
pour la question des joueurs compulsifs parce que probablement qu'on réussit à
faire un certain contrôle. On a mis en place des mesures pour rendre le jeu
intéressant, parce qu'on accepte que, le jeu, ça fait partie de notre société.
Par contre,
on n'est pas allés jusqu'à avoir des facteurs de risque qui augmentent de façon
assez importante la consommation au niveau du jeu et la consommation au
niveau de l'alcool, lorsqu'on les met ensemble, parce que ça devient des personnes vulnérables. Il y a un
cycle, comme vous dites, qu'on n'est pas capables de briser. Donc, le
Québec, quant à ça, a un modèle quand même intéressant et probablement pourrait
être un modèle mondial au niveau de la façon de faire la conciliation entre le
jeu et éviter des pathologies reliées au jeu.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Oui, je suis
tout à fait d'accord avec vous.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Oui. Puis ce
que je comprends, c'est qu'en prenant cette seule mesure de consommation
d'alcool dans les aires de jeu, on revient en arrière comme société responsable
par rapport au jeu.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
Mme
Lecomte (France) : Bien, on
augmente les facteurs de risque. C'est évident qu'on ne va pas de l'avant
dans les facteurs de protection; on augmente les facteurs de risque.
M. Bolduc (Jean-Talon) : O.K. Et le
rôle d'un gouvernement, c'est de faire cet équilibre entre le bien de la
population au niveau santé publique versus aller chercher plus de l'argent via
les finances. Et, dans ce cas-ci, c'est qu'on
rend nos gens plus malades dans deux domaines : ils boivent plus et ils
jouent plus, et ça amène plus de problématiques sociales. Êtes-vous d'accord
avec un raisonnement comme celui-là?
Le Président (M. Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte (France) : Bien, oui, je
suis d'accord, là, avec ce raisonnement-là, parce que, comme je l'ai expliqué, on augmente les facteurs de risque et on
augmente les facteurs de risque chez une population qui est déjà vulnérable.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon, il vous reste...
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M.
le Président. La preuve est faite.
Le Président (M. Bergman) : Alors,
Mme la députée de Groulx, pour un bloc de six minutes.
Mme Daneault : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup de votre présence ici. Bon, ce que je comprends de votre intervention : dans le fond, si vous
étiez dans un monde parfait, votre recommandation première serait de ne
pas aller de l'avant avec une telle mesure. Est-ce que je me trompe, oui ou
non?
Mme Lecomte (France) : Non, vous ne
vous trompez pas.
Mme Daneault : J'ai bien perçu. Et, si vous étiez dans un monde idéal aussi, je pense
que vous nous demanderiez d'avoir la création de nouveaux services et même
de programmes d'intervention auprès des joueurs pathologiques.
Mme Lecomte (France) : Qui sont à... joueurs pathologiques, mais
principalement pour les joueurs à risque, parce qu'il n'y a pas d'offre
de service pour les joueurs à risque. Alors, oui.
Mme
Daneault : Donc, ça serait...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme Daneault : Merci, M. le... Excusez-moi. Donc, ça serait votre deuxième
recommandation et c'est bien noté. Le
fait qu'au Québec on se soit battu pendant plus de 30 ans pour éviter la
présence d'alcool dans les aires de jeu nous a probablement valu des résultats meilleurs qu'ailleurs dans le monde. Et
j'ai avec moi une étude qui le démontre. C'est une étude de Williams, qui a été faite en 2007, où on
nous a démontré qu'il y avait des mesures de prévention les plus
efficaces. Je vais vous en faire la lecture
rapidement, je pense, pour le bénéfice de tous : Une des principales étant
la restriction du nombre de sites, la
localisation des sites et, le troisième retenu principal, restriction sur la
consommation concomitante de tabac et d'alcool dans les aires de jeu…
Alors,
je pense qu'on s'est battu au Québec pour justement éviter de tomber dans ce
piège-là qu'à certains endroits qui
ne sont pas des casinos d'État où, finalement, l'ultime objectif était
finalement financier... Le fait que nous avons la sécurité du public comme responsabilité en tant
que casinos d'État nous a probablement tenus à l'écart de cette
mesure-là de permettre, effectivement, l'alcool dans les aires de jeux. Est-ce
que, selon vous, si on allait de l'avant avec une telle mesure, c'est un recul
pour le Québec?
• (16 heures) •
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte
(France) : Bien, c'est un recul pour les personnes qui sont
vulnérables. On les place dans une position de plus grande vulnérabilité.
Mme
Daneault : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx, est-ce que vous voulez déposer
votre rapport que vous avez cité?
Mme Daneault :
L'étude?
Le Président (M.
Bergman) : Oui.
Mme
Daneault : Oui. Je peux vous donner... J'en ai plusieurs, études. Ça
va me faire plaisir.
Le Président (M.
Bergman) : Si vous pouvez déposer à la commission, on va envoyer des
copies à chaque membre de la commission.
Mme Daneault : D'accord, aucun... ça va me faire plaisir. Alors, merci, M. le
Président, merci de confirmer ce qu'on pense. Merci.
Le Président (M. Bergman) : Alors, M. Soucy, Mme Lecomte, merci
pour votre présentation, merci d'être ici avec nous aujourd'hui.
Alors,
je demande les gens de l'Association des centres de traitement des dépendances
du Québec pour prendre leur place à la table et je suspens pour quelques
instants seulement.
(Suspension de la séance à
16 h 1)
(Reprise à 16 h 3)
Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à l'Association des centres de traitement des dépendances du Québec.
M. Marcoux, Mme Beaulieu, vous avez 10 minutes pour votre
présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, si
vous pouvez mentionner votre nom, votre titre pour les fins de cette
commission, et vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Association des centres de traitement
des dépendances du Québec
M. Marcoux (Vincent) : Parfait.
Merci beaucoup, M. le Président, MM. et Mmes les députés. Donc, mon nom est Vincent Marcoux, je suis directeur général
de l'Association des centres de traitement des dépendances du Québec et
je suis accompagné de Mme Martine Beaulieu, directrice clinique du Centre
CASA, un centre spécialisé en jeu.
Je vais commencer rapidement, je vais essayer de
faire le tour du rapport au complet pour qu'on puisse avoir un bon survol. Premièrement,
l'Association des centres de traitement des dépendances du Québec, rapidement,
ça regroupe l'ensemble
des centres certifiés par le ministère de la Santé et Services sociaux,
communautaires ou privés. Les organismes certifiés, c'est des organismes
qui sont court terme, un mois; moyen terme, deux à quatre mois; et des organismes long terme, cinq mois et plus. C'est
tous des centres d'hébergement, donc ils reçoivent de la clientèle
alcoolique, toxicomane, des personnes à jeu
pathologique, sept jours sur sept, 24 heures sur 24. Donc, c'est la
particularité de nos centres certifiés. Présentement, on regroupe 62
centres aujourd'hui.
Donc,
rapidement, notion de choix : rentabilité ou prudence. D'emblée, nous
reconnaissons qu'une grande partie de la population s'adonne aux jeux de
hasard et d'argent de façon raisonnable. Cependant, l'Association des centres
de traitement des dépendances du Québec est
préoccupée par la volonté de rendre accessibles des produits alcoolisés
aux aires de jeux dans les salons de jeu et les casinos. Dans nos centres, nous
constatons que la clientèle présentant des problèmes
de jeu a évolué principalement dans un contexte d'utilisation d'appareils de
loterie vidéo où la consommation d'alcool
est bien présente. Pour les casinos et les salons de jeu, les personnes à
risque représentent une minorité négligeable, mais, pour les centres que
l'association regroupe, chacune de ces personnes vit une situation de
souffrance qui a des conséquences sur toutes
les sphères de leur vie. Bien que le personnel des casinos soit formé pour
intervenir auprès des cas problématiques, nous savons d'expérience que
leurs interventions se limitent souvent à l'exclusion de ces personnes en
difficulté.
Dans ce qui
suit, nous démontrons que l'augmentation de l'accessibilité de la consommation
d'alcool pour les personnes aux prises
avec des problèmes de jeu ne peut qu'amplifier les difficultés auxquelles ces
dernières sontconfrontées. Nous
espérons, à travers ce mémoire, soulever certains questionnements et apporter
des éléments tirés de nos pratiques afin de vous permettre de prendre
une décision plus éclairée.
Donc, rapidement, on va arriver avec l'effet de
l'alcool sur l'individu. Donc, rapidement, pour vous dire que, l'alcool, dès le premier verre, il y a déjà un
concept… il y a déjà un effet déjà sur nos notions intellectuelles. Ce
qu'on peut retirer de ça, c'est que, quand on consomme, il y a un surcroît...
il y a une diminution de notre vigilance et un entraînement à des erreurs de jugement… et joue également un rôle
désinhibiteur, augmente les risques de perte de contrôle de soi. Donc,
ce qui est important, c'est : quand on consomme, déjà, il y a toujours une
diminution de nos facultés, automatiquement.
Rappelons
qu'il est reconnu que la pratique de jeux de hasard et d'argent, tout comme
l'alcool, altère le fonctionnement neurobiologique. S'il y a des
combinaisons d'alcool et de jeu, les effets neurobiologiques en sont d'autant
plus augmentés.
On va parler
encore... Il va y avoir aussi des similitudes avec l'ACRDQ, la présentation,
mais… La concomitance de l'alcool et
de jeu. Donc, quand on met l'alcool et le jeu ensemble, il y a des effets, et
ces effets-là, ça fait augmenter la problématique, les deux ensemble.
On va parler entre autres des risques
suicidaires. Tous les centres de traitement de l'association sont formés à intervenir au plan... sept jours sur sept,
24 heures sur 24, avec des personnes suicidaires. On sait que le risque
suicidaire est problématique dans les casinos. Ça arrive, ça peut arriver que
des personnes qui ont joué ont des idées suicidaires importantes sans que l'alcool ne soit offert dans les aires de jeux
présentement. Mais, si on ajoute l'alcool avec les casinos… Vous savez,
le potentiel de risque de passage à l'acte d'une personne en état d'ébriété est
nettement supérieur. Une statistique qu'un
des centres a faite a évalué que 65 % de sa clientèle alcoolique était
seulement en tentative de suicide lorsqu'ils
avaient consommé. Donc, 65 % de cette clientèle-là était… tentative de
suicide avec... en état de consommation. Excusez-moi, je vais me
reprendre.
Disponibilité
de la gratuité de l'alcool. Là, je souligne un peu… Tantôt, ce matin… Mais j'ai
entendu qu'effectivement, à 6 ou
7 heures, il y a 80 casinos alentour de Montréal, dans les environs,
ce qui peut occasionner des compétitions, des compétitivités. Donc, on s'entend
que l'alcool dans les casinos, dans les aires de jeux, ça fait partie d'une
réponse à ça. Une de nos inquiétudes, c'est
que la gratuité de l'alcool est présente dans plusieurs des casinos. Donc, si
on voit que l'alcool pourrait devenir
une possibilité de gratuité dans les casinos, c'est que ça invite beaucoup de
personnes qui ont déjà une dépendance à l'alcool et à la toxicomanie à
venir au casino. C'est comme un buffet, dire : Venez, l'alcool est
gratuit, et occasionner une tendance vers les problèmes de jeu. Donc, il y a un
danger qui est à souligner là.
Croyances
erronées. Vous savez, je survole. Si vous avez des questions, vous pourrez...
On va pouvoir répondre. Les croyances
erronées, c'est souvent... On va vous dire qu'est-ce qu'on entend
souvent : Plus je joue, plus j'augmente mes chances de gagner. Pourtant, la réalité est tout autre. D'autres
croyances erronées, c'est que la machine va finir par payer ou la
machine est due pour payer. Tu sais, combien de fois qu'on entend une personne
dire : Aïe! Elle, ça fait longtemps
qu'elle joue; je vais attendre qu'elle s'en aille et je vais aller jouer pour
gagner. Mais la réalité, ce n'est pas ça du tout. On sait qu'à chaque tour, la chance de gagner ou la chance de
perdre est la même. Donc, on souligne ici qu'en apportant la
consommation d'alcool dans les aires de jeux, ça ancre l'idée déraisonnable qu'il
faut que je reste à ma place. Donc, la
personne qui joue à la machine qui a l'accès à l'alcool directement à sa place,
elle peut rester à sa machine pour continuer à jouer. Donc, ça ancre les
idées erronées que je dois rester. Puis même le casino le croit, il m'envoie l'alcool directement pour que je puisse continuer
à jouer. Aussi, la population en général, puis il ne faut pas oublier la
population en général… que, quand on joue puis qu'on consomme, notre jugement
est différent, donc on peut avoir des idées erronées aussi, également, et
continuer, et dépenser de plus en plus.
• (16 h 10) •
Les impacts, je vous passe rapidement, on les
sait : les coûts sociaux, coûts professionnels, coûts personnels. On peut évaluer les coûts financiers associés à
ces conséquences, mais pouvons-nous calculer la souffrance et la
détresse vécues par ces personnes, leurs familles, leurs entourages et leurs
milieux de travail? Et j'aimerais ajouter, ainsi, que 124 000 Québécois sont des joueurs problématiques probables et/ou à
risque modéré. C'est le portrait du jeu, la prévalence. C'est un des
rapports qui avaient été faits.
Et
tantôt… On parle toujours de 0,7 %, 1,3 %. Moi, je trouve que c'est...
Si on dit : 42 000, bien, c'est 0,7 %, mais 42 000, c'est un chiffre important. Si on dit :
82 000 personnes ont un risque modéré de jeu, c'est un chiffre
important. Puis ajoutons au décompte
qu'environ 10 personnes sont touchées directement ou indirectement par la
problématique de chacune de ces personnes, et
donc par les conséquences diverses énoncées précédemment. Quoique les études
pancanadiennes révèlent une prévalence du jeu pathologique assez comparable d'une
province à l'autre, le Québec se place parmi les provinces affichant le plus
bas taux de jeu pathologique, c'est soutiré aussi de la recherche. Donc,
souhaitons-nous voir augmenter ce taux en autorisant l'alcool?
Le
temps d'arrêt, on en a parlé beaucoup tantôt. Cliniquement, le temps d'arrêt
est important. Donc, que ce soit de cinq secondes, d'une minute, le fait
de se retirer d'un endroit pour être capable d'avoir la réflexion : Est-ce
que j'ai joué trop? Qu'est-ce qui se passe?
Ou : Non, j'ai du plaisir. Parce que l'idée, dans le fond, d'aller au
casino, c'est d'avoir du plaisir, et
je crois que la population doit demeurer avec cette idée-là. Et le fait de se
retirer peut faire en sorte d'arrêter la personne de jouer et de trop
dépenser. Ça fait que le temps d'arrêt est un point très important aujourd'hui.
Pour que le jeu reste
un jeu, on l'a mentionné tantôt, le rôle de l'État... a un rôle de protection
des personnes vulnérables, prioritairement
sur la rentabilité des établissements de jeu. Et on prend un exemple, ici, que
le gouvernement considérait que la diminution de fréquentation des
casinos pouvait être due aussi aux jeux en ligne puis aux jeux illégaux. Mais nous, on trouve ça intéressant. On
a vu, dans des articles de journaux, qu'on mentionnait l'idée d'interdire
ces sites Internet illégaux. Et moi, je crois que, pour des saines habitudes de
vie, effectivement, ça peut être une belle alternative d'interdire les sites
Internet illégaux. Et ça, on continue à dire que c'est sain. Par contre, quand
il y a une diminution de 25 % à 17 % dans les casinos, est-ce qu'on
peut dire que c'est sain pour la population du Québec?
Une voix :
…
M. Marcoux (Vincent) : Une minute? Conclusion, je vous lis ma
conclusion. Nous croyons que la prudence est de mise. Si l'on considère
que le jeu et l'alcool peuvent ruiner des vies, la mise en place de conditions
favorisant l'accroissement de l'influence
cumulée de l'alcool et du jeu auprès des personnes vulnérables est des plus
préoccupantes.
Nous
pouvions lire, dans un article du Devoir, les propos suivants :
«…briser l'interdiction d'alcool dans les aires de jeux, qui était en vigueur depuis l'ouverture du Casino de Montréal,
il y a 20 ans. Ce bannissement visait à empêcher les joueurs de
perdre le contrôle de leurs dépenses.» En quoi est-ce différent aujourd'hui?
Pourquoi la prudence d'autrefois serait-elle
remplacée par la vigilance des employés? Quel message souhaitons-nous véhiculer
en ce qui a trait à la
responsabilisation des individus? Par ailleurs, comment définit-on une
consommation raisonnable, plus particulièrement lorsque l'on est dans la
situation où l'on risque de tout perdre?
À
la lumière de ce que nous venons de vous partager, permettre l'alcool dans les
aires de jeux comporte des risques sérieux
pour la santé et le bien-être des personnes vulnérables, et même pour la santé
publique. Si l'on souhaite augmenter de façon raisonnable la rentabilité
dans les casinos, permettre la consommation d'alcool dans les aires de jeux n'est
pas une alternative, une option. Merci.
Le Président (M. Bergman) : M. Marcoux, merci pour votre présentation.
Alors, pour le bloc du gouvernement, pour 22 minutes. M. le député
d'Argenteuil.
M. Richer :
Merci, M. le Président. Merci d'être là pour éclairer notre position. Moi,
j'aimerais revenir... Vous avez parlé, tantôt, de temps d'arrêt. On
avait parlé, dans le groupe précédent, de délai. Donc là, on voit la situation
de quelqu'un qui est en train de jouer et qui peut aller se procurer une bière
ou une boisson alcoolique au restaurant ou au bar. Et il y aurait la
possibilité, éventuellement, que cette boisson-là soit disponible sur les aires
de jeux.
Donc,
première hypothèse — bien,
pour moi, c'est une hypothèse parce que je n'ai pas encore entendu de
données précises là-dessus : la personne quitte sa table de jeu — donc
il y a un temps d'arrêt — s'en
va prendre un verre bien tranquillement. Il réfléchit à la situation et ne se sent
pas très bien et décide de rentrer à la maison sagement.
On
pourrait l'inverser. On pourrait en faire une deuxième hypothèse : donc,
je suis allé au casino pour jouer, j'ai du plaisir à jouer, j'ai le goût
de prendre un verre, mais, quand je sors pour prendre mon verre, je suis un peu
stressé parce que quelqu'un pourrait prendre
ma machine ou je ne prendrai pas la machine de la voisine, qui a l'air payante,
donc mon scotch ou ma bière, je vais le
caler, et je vais revenir rapidement, et déjà augmenter l'effet de l'alcool et
du stress.
Donc, moi,
actuellement, je ne suis pas convaincu que ce délai-là, ce temps d'arrêt pour
aller prendre une bière soit si positif parce qu'il y a 50-50 qu'il soit aussi
très négatif. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : Oui, bien, dans votre exemple, vous m'avez donné
exactement l'idée déraisonnable qu'une personne peut avoir en allant... en se
dépêchant, en allant prendre son scotch puis s'en revenir à la machine. Donc,
nous, ce qu'on veut éviter, c'est qu'une bonne partie… on ancre cette idée
déraisonnable que la machine, elle va gagner à tout prix si je reste à l'intérieur,
dessus.
Donc, le pas de recul
est nécessaire pour faire cette réflexion-là… Mais effectivement ce n'est pas
toutes les personnes qui vont avoir cette réflexion-là. Mais de permettre l'alcool
directement à la machine, c'est d'ancrer l'idée de cette personne-là que, oui, tu as raison de rester à la machine parce
qu'elle va payer parce que tu continues à payer. C'est des idées
déraisonnables.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M. Richer : Effectivement, c'est une possibilité, mais il y a
aussi la possibilité qu'il prenne son scotch ou sa bière bien
tranquillement en continuant à jouer, ne se mettant pas ce stress de la caler.
Alors, moi, actuellement, je ne suis pas
convaincu, parce qu'on est dans l'hypothétique, là. Je veux dire, je n'ai pas
plus de chiffres pour confirmer la deuxième hypothèse que j'amène, je n'en
ai pas entendu sur la première, donc j'ai un petit peu de misère avec... Tu
sais, on pourrait inventer deux, trois autres hypothèses puis on n'aurait pas
non plus la certitude.
M. Marcoux
(Vincent) : Bien, en fait... Effectivement, il faut dire qu'il y a
différents comportements de jeu. Ça, il faut
s'entendre qu'il y a différents comportements de jeu. Mais est-ce qu'on veut,
en tant que gouvernement, en tant que société d'État, dire : On
veut que les gens... on veut ancrer leurs croyances erronées pour qu'ils
puissent jouer davantage? Est-ce que c'est
ça qu'on veut? Ou on veut essayer, en tout cas, du moins, de promouvoir de
jouer puis que le jeu reste un jeu? Est-ce que c'est ça qu'on veut
faire? Tu sais, pour moi, c'est ça.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose. Mme la députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Oui. Bonjour, monsieur, bonjour, madame, contente que vous soyez là.
Moi, j'avais... Tantôt, vous avez
parlé des jeux en ligne illégaux. Brièvement, j'aimerais ça que vous clarifiiez
votre pensée là-dessus. Vous avez un
petit peu escamoté, là... Bien, je veux dire, vous n'avez pas élaboré.
Pouvez-vous nous dire, vous, vous seriez pour qu'on élimine ces jeux-là,
illégaux, en ligne?
M. Marcoux
(Vincent) : Bien, en fait...
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux (Vincent) : Excusez-moi. Ces propos-là venaient, entre
autres, qu'il y avait une diminution, hein, dans les casinos, de fréquentation. Et ce qu'on a constaté aussi, dans
les plusieurs articles de journaux qui sont sortis, c'est qu'il y a une majeure partie des diminutions qui
sont dues aux sites illégaux sur Internet. Donc, pour nous, à ce
moment-là, le rôle du gouvernement est beaucoup plus de protéger la population,
donc d'interdire ce genre de sites illégaux là au lieu de permettre la consommation d'alcool dans un casino pour essayer
d'attirer la clientèle à venir davantage. Le rôle, pour moi, plus
protecteur, c'est d'interdire des sites illégaux comme ça.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson.
• (16 h 20) •
Mme Gadoury-Hamelin : O.K. Oui, effectivement, on a dit des chiffres, des statistiques,
depuis qu'on s'est mis le nez dans ce dossier-là, qu'effectivement les
joueurs au Québec demeurent les mêmes. Même, à la limite, il y a une certaine augmentation, sauf qu'ils désertent les
casinos officiels de Loto-Québec pour aller vers des casinos illicites
où l'alcool est disponible et, dans certains cas même, est gratuit.
Ça fait que, nous, ce
qu'on nous a dit ce matin avec Loto-Québec : C'est sûr que, dans le cadre
de l'offre de Loto-Québec, c'est sûr que c'est beaucoup plus réglementé,
beaucoup plus régi, où les gens ont accès à des outils, ont accès à… aussi, dans les... Loto-Québec, dans les casinos, il y a
l'autodétermination, est-ce qu'on est... on peut aller consulter pour savoir si on est un joueur qui
pourrait être... des tendances à devenir à risque ou pathologique. Il y a
quand même des éléments, là, qui permettent ça aux joueurs et accès à
différents outils, il y a aussi la détection. Mais est-ce que vous, vous croyez vraiment, là, que les
joueurs, là, qui jouent... Vous en voyez, j'imagine, des joueurs qui jouent
ailleurs que dans les casinos de
Loto-Québec. Quand ils arrivent chez vous pour des services, est-ce qu'ils sont
plus mal en point? Est-ce qu'ils sont
plus hypothéqués? Est-ce qu'ils ont été détectés plus tardivement parce qu'on
n'a pas pu les détecter, ils n'étaient pas dans les casinos de
Loto-Québec, ils étaient ailleurs?
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux. Mme Beaulieu.
Mme Beaulieu (Martine) : Donc, la... simplement m'assurer de bien
comprendre, là. Le sens de la question, c'est de savoir s'il y a un
profil de clientèle qui serait différent au niveau du jeu selon que ce sont des
joueurs qui vont jouer soit dans les casinos à l'extérieur du Québec ou
plutôt...
Mme
Gadoury-Hamelin : Ou même dans des bars où ils consomment avec des
machines de loto. Est-ce que vous avez une expertise? Est-ce que vous pouvez
nous dire dans quel état vous arrivent les gens?
Mme Beaulieu (Martine) : C'est certain qu'au niveau de nos clientèles,
comme on l'expliquait un petit peu dans le mémoire, principalement,
notre clientèle qui est la majeure, ce sont des gens qui vont vraiment avoir
développé la problématique, principalement
la fréquentation et au jeu dans les appareils de loterie vidéo dans les bars où
est-ce que la consommation d'alcool, elle est présente. Donc, on voit,
effectivement, une concomitance importante, là, dans nos clientèles, de problématiques de jeu et de
consommation d'alcool. Souvent, on va voir ces deux problématiques-là
qui sont présentes chez une même personne.
Très souvent, on va observer que les gens… Puis les gens vont nous
nommer qu'il y a une consommation d'alcool
qui peut se faire avant, pendant et après... avant, ou pendant, ou après la
séance de jeu comme telle. Donc, c'est parmi les préoccupations de nos
clients, souvent, aussi de conserver une consommation d'alcool contrôlée pour
éviter que cette consommation-là puisse les mettre à risque de revenir dans des
dynamiques de jeu problématiques. Ça fait que, souvent, c'est vraiment ce qu'on
a comme profil de clientèle, là, essentiellement.
Si
on regarde au niveau des clientèles par rapport aux sites en ligne, bien, ce n'est
pas vraiment les mêmes clientèles, de toute
façon. Ce qu'on constate, ce n'est pas les mêmes. C'est très émergent, le jeu
en ligne, et ce n'est pas nécessairement vraiment le même profil de
personnes qui vont développer des problématiques ou qui vont entretenir leur
jeu en ligne que ceux qui vont continuer de jouer sur les appareils de loterie
vidéo.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le Président. Alors, bonjour. Écoutez, j'aimerais revenir… Je
vous ai bien écoutés, et vous parlez
beaucoup de l'alcool comme facteur de risque. Vous avez parlé beaucoup de
l'effet désinhibiteur de l'alcool et de ce que ça peut engendrer quand
on est dans un contexte de jeu. Et vous avez même fait des liens avec l'état d'ébriété potentiel et le taux de suicide, et le
suicide pour quelqu'un qui... Mais à ce moment-là, si on... Et je
comprends bien votre position, que vous ne
souhaitez pas qu'on modifie la réglementation pour permettre la consommation
d'alcool dans les aires de jeux. Mais, si je
suis votre raisonnement, en cohérence avec ce que vous dites, est-ce qu'on ne
devrait pas carrément interdire la consommation d'alcool dans les casinos?
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux (Vincent) : Bien, en fait, en réponse à qu'est-ce qu'on vous
disait, c'est que le temps d'arrêt est intéressant.
Le temps d'arrêt entre la personne qui part de la machine et qui s'en va vers
le bar et le restaurant, bien, à ce moment-là, c'est ça qui fait le
pont. On ne peut pas interdire à tous les bars et tous les restaurants d'interdire
l'alcool dans les bars, c'est irréaliste. Par contre, ce qu'on peut comprendre,
vraiment, c'est que, dans les aires de jeux, ça fait seulement ancrer ces
personnes-là à l'intérieur de cette problématique-là.
Puis
je veux quand même souligner… On parle beaucoup de la clientèle vulnérable, mais
c'est les personnes en général. Il faut se rendre compte que l'alcool a
un effet pour tout le monde, hein, une diminution de notre jugement, tranquillement
pas vite, donc ça va apporter l'ensemble de la population… probablement. Ce
n'est pas avec la vente d'alcool qu'on fait
40 millions ou 70 millions, mais ça, c'est avec les personnes qui
vont jouer plus, jouer davantage. On va
plus être impulsifs dans l'idée de jouer, d'avoir du plaisir à jouer puis, avec
la consommation d'alcool, bien, des fois, on oublie où on en est rendus
dans nos dépenses à ce moment-là. Ce qui fait en sorte que c'est ça qui
occasionne la problématique : parce que la personne reste ancrée à la
table et n'a pas le temps de réfléchir pour ressortir de cette situation-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui, mais je reviens encore parce que vous parlez beaucoup de... Je
pense qu'on doit remettre en perspective
toute cette question-là parce qu'il reste que cette problématique-là, dont vous
parlez, du lien entre l'alcool comme facteur de risque dans un
environnement de jeu, c'est quand même... Et toutes les statistiques, autant
les gens qui étaient là avant vous, que
vous, que Loto-Québec ont mentionné, à peu près toujours les mêmes statistiques,
c'est autour de 1 % de la
population, de 1 % à 2 % — même
on peut aller jusqu'à 1 % à 2 % — de personnes qui peuvent avoir un problème. Mais il reste que… j'aimerais ça que…
vous entendre sur, comme gouvernement, ce que vous pensez de ce nécessaire arbitrage qu'on doit faire entre la
protection des personnes les plus vulnérables, mais aussi le
développement et l'implantation de casinos, des les aires de jeux comme lieux
de loisirs, comme attraits touristiques et cette nécessité, comme gouvernement, aussi, qu'on a d'assurer le
développement économique des régions, qu'on a d'assurer des meilleurs revenus pour l'État, notamment les revenus des
casinos, qui sont redistribués dans la collectivité en services aux personnes.
Comment...
À partir de quel... Où est l'équilibre? À partir de quel moment vous jugez
qu'on doit mettre en oeuvre des mesures pour augmenter les revenus dans
les casinos, tout en protégeant les personnes à risque, qui sont 1 % de la
clientèle des casinos?
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux (Vincent) : Bien, 1 %... Moi, j'aime mieux dire
42 000 personnes. Mais, juste vous rappeler... Ce matin, j'ai bien entendu, hein, ils ont des belles
stratégies multimédias, promotion, marketing... Est-ce que le multimédia,
promotion, marketing n'est pas suffisant
pour faire en sorte qu'on doit mettre un... rajouter un facteur de risque
important, qui est de la consommation
d'alcool? Moi, je ne crois pas. En tout cas, ma définition personnelle :
alcool ne veut pas dire plaisir au jeu nécessairement. Je peux avoir
beaucoup de plaisir avec le jeu sans avoir à consommer présentement. Je pense que, quand je vais dans un casino, c'est
pour davantage jouer que de consommer. Donc, d'ajouter un facteur de
risque, je trouve qu'il peut être inutile, quand les casinos... En tout cas,
ils avaient l'air à avoir de belles stratégies multimédias, et tout ça. Donc,
cette stratégie-là est là.
Et
je rappelle que, voilà 20 ans, le ministère avait... le gouvernement avait
banni, dans les casinos, la consommation d'alcool dans les aires de jeux parce qu'il se disait préoccupé que les
joueurs perdent leur contrôle sur leurs dépenses. Donc, je rappelle encore : En quoi c'est
différent aujourd'hui? Parce que l'alcool est le même, donc c'est... C'est des
propos qui avaient été dits, donc pourquoi? L'alcool, il a le même effet que
voilà 20 ans, là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Si on compare la
prévalence de joueurs pathologiques au Québec ou par rapport aux autres
endroits... Tantôt, j'ai entendu que… vous me corrigerez, là, mais que c'est à
peu près toujours la même proportion, autour
de 0,7 %, indépendamment qu'il y ait de... Parce que le Québec est à peu
près le seul endroit où on n'autorise pas la consommation dans l'aire de jeux directement. Et il y a même, en
Angleterre, qui nous a été souligné… où la prévalence est plus élevée… Mais les Anglais eux-mêmes, en
Angleterre, l'attribuent aux jeux... aux mises sportives, là, aux jeux
reliés aux sports.
Donc,
qu'est-ce qui permet de faire le lien aussi direct? Est-ce qu'il y a des études
qui le démontrent, que ce lien-là est prouvé? Parce que, juste le fait
de mettre des éléments un par derrière l'autre et de dire que la preuve est
faite, je vous avoue que, moi, ça ne me
convainc pas, là. Mais est-ce que vous avez des études? Est-ce que vous vous
basez sur quelque chose de scientifiquement démontré pour dire que, si
on offre cette possibilité de consommation d'un verre de bière en s'amusant
entre amis dans un casino...
Parce que
moi, je vous parle toujours de la population, de la clientèle en général, là,
dans les casinos. Je suis bien consciente
qu'il y a 1 % à 2 % de gens qui ont des dépendances... Comme
dans les restaurants : quelqu'un va consommer une bouteille de vin… Et il y a des personnes qui
ont des problèmes d'alcool, qui sont dépendantes à l'alcool, mais c'est sûr qu'on ne peut pas se mettre à interdire, ou ne
pas offrir, et ne pas vouloir améliorer l'expérience client dans tous
les... dans tous nos... que ça soit les restaurants, ou les casinos, ou dans
tous les lieux d'attraits touristiques qu'on peut avoir, les lieux de sortie.
Sur quoi vous basez, là, votre affirmation, qui est quand même assez...
Le Président (M. Bergman) :
M. Marcoux.
Mme Beaulieu (Martine) : Bien...
Le Président (M. Bergman) :
Mme Beaulieu?
• (16 h 30) •
Mme Beaulieu (Martine) : Oui, merci,
M. le Président. J'aimerais répondre à cette question-là en ramenant d'emblée la base des données scientifiques
probantes qui nous permettent d'affirmer... de déterminer ce qui amène
une dépendance. Donc, au niveau... Comme on
disait tout à l'heure, que ce soit au niveau de la consommation d'alcool,
même à faible dose, pour tout individu, et
c'est la même chose au niveau des jeux de hasard et d'argent, ces deuxconsommations-là — on les appelle comme ça — ont
un effet au niveau neurobiologique, et ce, pour toute personne... Donc, au niveau neurobiologique, le fait de
consommer de l'alcool et le fait de jouer va venir modifier le
fonctionnement au niveau du cerveau en venant notamment interagir ou modifier
ce qu'on appelle le circuit neuronal de la récompense. Et ça, c'est pour toute consommation d'alcool, et pour tout type de
forme de jeu de hasard et d'argent, et pour tout être humain. C'est là-dessus qu'on base les
connaissances, là, au niveau des dépendances. Donc, ça, c'est là-dessus
qu'est construit, là, finalement, toutes nos connaissances là-dessus. Et donc,
nécessairement, on sait que, si on favorise une concomitance de deux situations qui vont amener une personne à avoir un
fonctionnement de son système neuronal, de son cerveau, son système de
neurotransmetteurs modifié, nécessairement, on l'amène en une situation
beaucoup plus à risque, parce qu'on vient combiner, finalement, deux facteurs
de risque.
Donc, nous,
ce qu'on veut surtout mettre en évidence, c'est que : Pourquoi prendre le
risque de venir favoriser cela chez
les gens en augmentant une accessibilité de la consommation d'alcool dans un
contexte de jeu pour des personnes qui
n'auraient peut-être pas nécessairement consommé simultanément les deux, le jeu
et l'alcool? Donc, est-ce qu'on veut vraiment
se rendre à devoir démontrer que, oui, si on le met en place, les risques
augmentent, et donc, nécessairement, les conséquences augmentent?
Pourquoi ne pas plutôt aller dans une idée de prévention? C'est-à-dire, bien,
sachant que c'est deux situations à risque qui se combinent, si on peut faire
le choix de ne pas les amener à se combiner pour prévenir ces conséquences-là,
bien, je pense que c'est plus logique de cette façon-là, dans un sens, là. Puis
je pense que M. Marcoux voudrait compléter aussi, là.
Le Président (M. Bergman) : M.
Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : Oui. Bien, en
fait, c'est clair, on sait... Merci, Martine. Effectivement, c'est clair,
c'est un facteur de risque, O.K.? La consommation d'alcool dans l'aire de jeux,
c'est un facteur de risque supplémentaire. Présentement,
avec les statistiques, ce qu'on dit, c'est qu'au Québec on est quand même un
peu plus bas que les autres provinces.
En tout cas, on est quand même un bon chiffre pour ce qui est des personnes qui
ont des problématiques de jeu. Donc, est-ce qu'on veut, en tant que
gouvernement, augmenter le potentiel avec un facteur de risque supplémentaire? Ça, dans le fond, c'est à vous à prendre cette
décision-là en disant : Bien, vous avez un facteur de risque
supplémentaire qui peut arriver et qui peut
faire en sorte que ça augmente le nombre de personnes, de joueurs pathologiques
ou de personnes à risque modéré d'avoir des problématiques.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Bien, moi, je vous relance, à ce moment-là, la question. Est-ce que
vous ne croyez pas que, comme gouvernement, les meilleures mesures ou la
meilleure stratégie qu'on peut mettre de l'avant, c'est de nous assurer que, justement, s'il y a à y avoir alcool et jeu
ensemble, est-ce qu'on ne devrait pas s'assurer que ça se fasse dans un
endroit le plus sécuritaire, le plus
réglementé possible, où il y aura possibilité de dépister et de faire de la
prévention? Parce que, sinon, ultimement, là, si je vous dis : Du
jour au lendemain, on ferme tous les casinos au Québec, qu'est-ce qui arrive avec les joueurs qui
ont... les joueurs pathologiques? Qu'est-ce qu'ils vont faire? Il n'y a plus de
casino, il n'y a plus de jeu légal au Québec. Qu'est-ce qui va se passer
avec les joueurs pathologiques?
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux (Vincent) : Bien, moi, en fait, là, on parle de l'extrême,
hein, de la fermeture des casinos, et tout ça. Mais, moi, ma question, c'est plus... Je vous retourne la question :
Qu'est-ce qu'une bonne prévention? Qu'est-ce qu'un bon... des bons
facteurs, dans le casino, qui font en sorte que les personnes vont être bien
protégées? Donc, moi, cette réponse-là, je
ne l'ai pas. Je ne l'ai pas puis je ne l'ai pas reçue, ce matin, avec la
présentation de Loto-Québec. Donc, ça, ces
facteurs de... Donc, le facteur de risque de l'alcool qui est supplémentaire,
je ne vois pas comment Loto-Québec fait ses facteurs de protection pour
ces gens-là, là, encore.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste deux minutes.
Mme Proulx : En fait, c'est un ensemble de facteurs, hein? Quand on dit qu'on veut
essayer de canaliser et de ramener
dans le giron de Loto-Québec, dans un endroit beaucoup plus sécuritaire, dans
un endroit où l'alcool n'est pas donné
gratuitement, dans un endroit réglementé, dans un endroit où on peut référer
les clients à des organismes comme les
vôtres qui... pour les personnes qui auraient des besoins… En fait, si, comme
gouvernement, on veut faire ça, bien, il me semble que c'est une mesure responsable, là, de favoriser... Parce que
sinon, si on ne met en place toutes ces mesures-là, bien, on le voit, on le constate ces dernières
années, il y a des casinos illégaux qui surgissent de plus en plus au
Québec, les gens vont vers là où c'est
possible de consommer de l'alcool sans restriction et de jouer en même temps.
Est-ce que ce n'est pas mieux, pour un gouvernement, de s'assurer de
pouvoir encadrer beaucoup mieux le jeu et de le faire dans un environnement légal, sécuritaire, réglementé?
Alors, en fait, c'est le point de vue, là, derrière cette volonté, tout
en... Je vous le répète aussi : On a un arbitrage à faire comme
gouvernement entre favoriser des mesures de développement économique, favoriser... et tout en assurant la
protection du faible pourcentage, quand même, de 1 % à 2 % de la
population, là, qui peut représenter... qui est plus fragile, qui est plus
fragile.
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux, il reste du temps pour une courte réponse.
M. Marcoux
(Vincent) : Oui. En fait, c'est de savoir où que le gouvernement...
jusqu'où il veut aller pour la rentabilité de ses casinos puis jusqu'où il veut
aller pour la prudence de ces personnes. Et ça, bien, il y a des risques, il y a des dangers. Ce qu'on vous dit,
c'est : Où s'arrête la rentabilité puis où s'arrête la prudence? Donc,
c'est là que le gouvernement a à faire sa réflexion.
Le Président (M. Bergman) : Alors, merci. Ce bloc est fini. Alors, le bloc de
l'opposition officielle pour 22 minutes. M. le député... Mme la députée
de Gatineau. M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'abord, merci. Puis je
suis impressionné. Je suis impressionné, M. Marcoux, par la noblesse de votre discours, parce que vous savez
ramener le dossier vraiment à des vraies valeurs. Vous savez que le
gouvernement va adopter une politique sur la prévention, puis on se gargarise
de faire de la prévention, on veut faire de la prévention, nous sommes dans un
dossier de prévention, puis on commet un geste malveillant.
Plus
que ça, on commet un geste malveillant et on se donne bonne conscience en le
justifiant, en disant : On va prendre
des mesures compensatoires. Ça, c'est le principe, là, du fumeur qui fait de
l'asthme puis qui prend des pompes, la cause,
puis qui fume. La chose à faire en premier, c'est d'arrêter de fumer en sachant
que c'est difficile. Mais, en plus de ça, comme gouvernement, on avait
déjà posé le bon geste en n'autorisant pas l'alcool dans les aires de jeu, on
cause le geste malveillant de l'autoriser puis, après ça, on se donne bonne
conscience.
Je
veux vous féliciter, parce que vous avez très bien défendu le dossier. Puis, de
la façon dont vous l'avez dit, ça justifie notre position. Notre
position : à un moment donné, il faut savoir arrêter à quelque part. Et
vous avez bien répondu. Pour être
concurrentiels, il y a des bons gestes à poser : rénovation des
infrastructures, avoir une approche client, l'amabilité du personnel, organiser des spectacles puis une approche
multimédia marketing, c'est des choses acceptables. Est-ce qu'on irait
jusqu'à avoir ce que j'appelle des comportements qui sont répréhensibles? On
devra autoriser le tabagisme parce que les
autres casinos vont autoriser le tabagisme; on devra autoriser l'alcool gratuit
parce que, si nous autres, on vend notre alcool, puis les autres, il est
gratuit, les gens vont transférer de la même façon.
Ici,
au Québec, on a le plus bas taux au niveau des joueurs compulsifs parce que
probablement qu'on a fait les bons choix à un moment donné. Moi, ce qui
me choque, je vais vous le dire, là, c'est le même gouvernement, puis je ne veux pas trop faire de politique avec ce
dossier-là, qui se gargarise de prévention qu'on ne sait pas trop qu'est-ce que
ça va donner à la fin et qui, en même temps,
pose des gestes pour aller chercher encore plus d'argent chez le
contribuable en les rendant malades.
Mme
Beaulieu, vous, je vais vous féliciter parce que vous avez très, très bien
expliqué le mécanisme neurobiologique de la dépendance qui, en passant,
selon mes connaissances — encore
plus de connaissances que moi — sont les mêmes pour la cyberdépendance,
dépendance à l'alcool, dépendance aux drogues. C'est des mécanismes biochimiques,
et, lorsque ces gens-là sont en contact avec la substance ou le comportement
qui crée la dépendance, ils développent, au
niveau du cerveau, des approches vraiment biochimiques qui font que ces gens-là
ont de la misère à arrêter. Et ce qu'il faut voir quand on essaie de
nous faire accroire qu'il n'y a pas de lien entre l'alcool et le jeu... D'ailleurs, Radio-Canada vient de publier un
article disant qu'il y a une association, mais il n'y a pas de cause à
effet.
Quand
vous ne savez pas quoi dire en santé, là, puis que vous ne voulez pas être
capables de prouver vos choses ou
vous voulez défaire un raisonnement, vous dites : Prouve-moi la cause.
Dis-moi, explique-moi… sûr que c'est une cause à effet alors qu'il y a un gros mécanisme d'association. Je veux
vous féliciter parce que vous m'avez impressionné dans votre
présentation, puis vous avez su tenir tête à des raisonnements qui, d'après
moi, n'ont pas de sens.
Ma question,
c'est : Qu'est-ce qui va arriver, si cette loi passe, au niveau des centres
de dépendance? Est-ce que vous vous attendez à avoir une clientèle soit
plus malade ou une augmentation de clientèle?
Le Président (M. Bergman) : M.
Marcoux. Mme Beaulieu?
• (16 h 40) •
Mme
Beaulieu (Martine) : C'est
sûr que, comme tout... Bon, on parle de loi de cause à effet. Je pense que
les gens qui ont passé avant nous, au niveau des centres de réadaptation, l'ont
bien dit : On ne peut pas immédiatement constater
une cause à effet, c'est des études longitudinales, des choses comme ça. Par
contre, nous, ce qu'on sait très bien, qu'on voit sur le terrain,
cliniquement, c'est l'ampleur des impacts qu'une problématique de dépendance a
pour les personnes, impact au niveau
financier, impact au niveau familial, impact au niveau de la santé puis impact
sur les proches aussi. L'impression
que j'aurais, c'est que c'est certain que, si on favorise une concomitance ou
une présence simultanée de consommation
d'alcool et de jeu et qu'on sait que nos personnes vulnérables à une première
dépendance sont plus à risque d'en
développer une deuxième, on peut penser que nos gens vont présenter peut-être
des concomitances à une présence plus grande, donc des conséquences qui
vont prendre peut-être plus d'ampleur.
Puis, je
pense, c'est important de ramener aussi, comme on le disait tout à l'heure,
que, pour nous, nos clientèles, une personne dans la population, bon, on
dit, on parle de pourcentage, mais, pour chacune de ces personnes-là qui est aux prises avec des problématiques de dépendance
au jeu, on parle de 10 personnes de l'entourage, plus ou moins, qui sont touchées directement ou indirectement, donc
qui subissent les coûts de ces habitudes-là en coûts financiers, en
coûts de santé, en détresse, donc conjoints,
conjointes, enfants, parents, beaux-parents, employeurs, collègues de travail.
Bien, on vient de répandre encore là ces conséquences-là à une plus large
ampleur.
Donc, oui, on parle de rentabilité dans un sens,
puis je ramène un peu ce qu'on disait tout à l'heure, tu sais, c'est : Où est-ce qu'on tranche entre la
rentabilité et les coûts? Bien, peut-être qu'on peut, oui, être plus rentables
pour nos casinos, mais peut-être que, dans une autre partie, on peut craindre
que les coûts sociaux vont aussi, en même temps, augmenter. À ce niveau-là, bien, à quel endroit est-ce qu'on est
rentables? Tu sais, je pense qu'il y a un regard très large, très large
à porter. Nous, on voit ça au niveau clinique, mais, de façon globale, on sait
que, quand une personne est touchée, ça se répand nécessairement, là.
M. Marcoux (Vincent) : Pour
compléter...
Le Président (M. Bergman) : M.
Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : Mettons qu'on
continue dans les suppositions, O.K.? Supposons. Supposons que l'alcool
devient gratuit parce qu'on est en compétitivité avec les 80 casinos, donc
supposons. Si on suppose que, dans un avenir
plus lointain, la gratuité arrive dans les casinos, bien, on peut imager une
pancarte au-dessus du casino, dire aux alcooliques :
Bien, venez vous chercher une deuxième problématique. Nous, on dessert
10 000 clients dans les centres certifiés,
qui ont un problème d'alcoolisme, de toxicomanie. Je veux dire, on vous
propose, dans un casino, de l'alcool gratuit, c'est sûr et certain que
moi, si je serais un alcoolique, j'irais prendre l'alcool gratuit pour jouer un
peu.
Donc, à ce
moment-là, quand on sait que les dépendances... les personnes dépendantes ont
une fragilité à avoir une autre dépendance, donc ça les attire
assurément à ce moment-là.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Avant de
passer la parole à ma collègue, je voudrais seulement conclure. On a les meilleurs résultats. Ce qu'on nous a dit
aujourd'hui, c'est qu'on a les meilleurs résultats au niveau des joueurs
compulsifs, avec le taux le plus bas,
probablement parce que notre stratégie est un modèle que les autres devraient
essayer de suivre. Puis ce que je me rends compte par la prise de
position en autorisant l'alcool dans les aires de jeu, c'est qu'on va rejoindre les autres cancres, qui, eux autres, ont
des hauts taux. Ça, c'est ma conclusion aujourd'hui comme médecin et
comme politicien.
Merci, M. le Président. Je vais passer la parole
à mes collègues.
Le Président (M. Bergman) : Mme la députée
de Gatineau.
Mme
Vallée : Merci, M. le
Président. Alors, M. Marcoux, Mme Beaulieu, bienvenue. Merci de votre
présentation, qui, évidemment, est très
complète puis est très claire également. Moi, j'aurais un commentaire parce que
nos collègues de l'autre côté ont
fait des allusions avec la compétitivité des casinos illégaux. Je vous avoue
bien honnêtement que je trouve qu'on
pourrait niveler vers le haut et non vers le bas au Québec. Se comparer à des
sites de jeu illégaux où on peut fumer, où on peut boire, où on peut
finalement... où probablement que l'âge légal n'est même pas respecté, je
trouve que ce n'est pas nécessairement
l'idéal de la part de membres d'un gouvernement. Et faire ce nivellement-là, ce
n'est pas fort, parce qu'on peut voir…
Est-ce qu'on va introduire la cigarette dans les casinos, maintenant, pour se
comparer aux autres casinos ailleurs dans le monde qui permettent de
fumer dans les aires de jeu? Est-ce qu'on va changer ou limiter l'âge d'accès à nos
casinos? Bref, on peut aller très loin avec un raisonnement comme ça. Et puis
je ne crois pas que ce soit... Je crois que le gouvernement a le devoir,
comme vous le dites si bien, d'agir un peu en... d'agir en amont et de protéger
les clientèles vulnérables et non de créer de nouvelles problématiques.
Et vous le
soulevez très bien et très clairement, et puis je tenais à le souligner parce
que c'est ce qu'on dit depuis quelques
semaines, que le gouvernement doit protéger ces clientèles vulnérables là. Et
ce que je comprends, c'est que, peu importent
les mesures qui seront mises en place, qui pourraient être mises en place pour
pallier à la problématique créée, dans
le fond, ce ne serait pas, pour le gouvernement, une façon de rencontrer son
obligation de protection à l'égard des clientèles vulnérables. Est-ce
que c'est bien le message que vous nous adressez cet après-midi?
M. Marcoux (Vincent) : Bien, c'est
sûr qu'on ajoute un facteur…
Le Président (M. Bergman) : M.
Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : On ajoute un
facteur de risque important. Donc, en rajoutant un facteur de risque, ce
que j'en comprends, c'est qu'est-ce que vous venez de dire, effectivement.
Mme
Vallée : Et donc... Parce
que, bon, vous travaillez au quotidien avec ces clientèles-là. Ça fait partie
de votre réalité. Vous les côtoyez.
Les clientèles, est-ce que vous savez si les clientèles qui sont aux prises
avec cette double problématique là
jouent dans les casinos d'État ou vont traverser les frontières pour aller très
loin, ou est-ce que c'est des clientèles, des gens... Quel est le profil
d'un client, le profil socio... Ils viennent de quels groupes de société, de quelles tranches de la société? Est-ce qu'ils ont
des propensions à voyager à l'extérieur ou est-ce que ce sont bien
souvent une clientèle locale?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Beaulieu.
Mme Beaulieu (Martine) : Oui. Bien,
nous, au niveau de Centre CASA, on a un mandat principalement régional, donc c'est certain que nos clientèles,
c'est des gens de la communauté, de la région de Québec, principalement.
On reçoit aussi des gens de la Côte-Nord, de
Charlevoix, principalement. On parlait d'impulsivité, tout à l'heure, au niveau de la consommation d'alcool, et
tout ça. C'est certain qu'au niveau de la dynamique de dépendance quelqu'un qui est dans une dynamique de
dépendance, d'impulsivité va rechercher à aller chercher une satisfaction
rapide, accessible facilement, donc d'aller jouer dans des endroits qui vont
être à proximité de chez lui où est-ce qu'il va pouvoir passer en allant au
travail, en revenant du travail, etc., pour pouvoir aller jouer.
Nos
clientèles, si vous me permettez l'expression, c'est des gens M. et Mme
Tout-le-monde. C'est des gens de la communauté.
C'est des travailleurs, c'est des retraités, c'est des personnes qui,
finalement, présentaient des vulnérabilités. On l'a dit tout à l'heure, la dépendance, c'est multifactoriel, c'est
plusieurs facteurs qui vont faire qu'une personne, au fil du temps, va
développer une problématique. Et on ne sait jamais quelle personne va la
développer, mais c'est des gens de la communauté, finalement, nos profils, là,
de personnes qu'on reçoit.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Donc, il est
possible que les mesures ne vont pas... vont porter atteinte justement à M. et
Mme Tout-le-monde beaucoup plus qu'à la clientèle qui est portée à s'exiler
pour jouer. Donc, c'est vraiment la clientèle... les résidents du Québec, là, et les citoyens des environs des casinos
qui seront plus à risque que les citoyens de passage ou le touriste de
passage.
Mme Beaulieu (Martine) : En tout
cas, c'est...
Le Président (M. Bergman) : Mme
Beaulieu.
Mme Beaulieu (Martine) : Oui. Merci.
Dans ce qu'on constate dans notre pratique actuellement, c'est vraiment ça, là,
notre clientèle, c'est certain, oui.
Mme Vallée : Je vais céder la
parole...
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre présentation. Je vous regarde, vous avez
l'air tellement jeunes, et je me dis : Comment vous pouvez avoir autant de
bon sens? C'est... Bravo!
Mais j'ai
quelques questions. Vous regroupez 62 centres, O.K.? Ces 62 centres certifiés
représentent... Combien de personnes passent à travers ces centres par
année?
M. Marcoux (Vincent) : C'est
10 000, à peu près 10 000 personnes qui passent dans les centres par
année.
Mme de Santis : 10 000
personnes par année. Combien ont un problème d'addiction au jeu?
Le
Président (M. Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux (Vincent) : Je n'ai pas la statistique précise, mais j'ai eu
de l'information de la plupart de mes centres, et eux, ce qu'ils estiment, c'est qu'entre 5 % et 15 % de leur
clientèle ont une double problématique. Ils ont un problème avec le jeu, et il y a un potentiel de 5 %
qui est des personnes qui ont un risque modéré d'avoir un problème de jeu
dans cette clientèle-là.
• (16 h 50) •
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Alors, il y a de 5 % à 15 % qui ont un problème
avec le jeu et un autre, un problème de consommation.
M. Marcoux
(Vincent) : Avec l'alcool, exactement. L'alcool, la toxicomanie, avec
un problème de jeu, oui.
Mme de Santis : Alors, on parle d'environ cinq... Combien? Vous avez dit 10 %,
c'est 1 000, alors c'est environ de 500 à 1 500 personnes.
M. Marcoux
(Vincent) : C'est ça.
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux (Vincent) : Oui, c'est ça. Puis, en même temps, comme on vous
disait tantôt, bon, bien, il y a ce 1 500 là, exemple, qui sont
vraiment à risque parce qu'ils ont développé un problème de jeu, puis là arrive
aussi la problématique, exemple... On y va toujours dans les suppositions,
hein, on y va toujours dans des suppositions qu'avec
la compétitivité qu'un casino peut avoir, à ce moment-là, si, un jour, arrive
la gratuité, bien, fait en sorte que mes 9 000 autres clients qui
passent par année dans les centres certifiés, bien, c'est un appel à ces
personnes-là de dire : Bien, venez
consommer de l'alcool dans nos casinos. Donc, est-ce que le déplacement va
valoir la peine quand je sais que ma
consommation va être gratuite dans le casino à ce moment-là? Ça fait que les
problématiques des alcooliques versus... avec un problème de jeu, bien
là on peut peut-être, avec des recherches, évaluer ça, mais on va probablement
évaluer une augmentation du taux de problématiques à ce moment-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Merci. Dans ce groupe de 500 à 1 500 personnes qui ont un problème
de jeu, est-ce qu'ils jouent dans des sites ou des endroits illégaux ou
est-ce qu'ils jouent chez Loto-Québec?
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : La plupart... On m'a donné l'information que c'était
beaucoup avec la loterie vidéo dans les
bars. La proximité — on
parlait encore, tantôt, d'impulsivité — la proximité du lieu, tous les facteurs qui
font... bien, l'alcool est disponible à ce
moment-là. Puis aussi il faut... Il y a plein de facteurs, hein? On peut
déterminer aussi qu'une personne a un problème d'alcool en premier, qui
était dans les bars tout le temps et, à un moment donné, a vu la loterie vidéo et il y a la proximité, donc a
commencé à jouer à la loterie vidéo. Une double problématique est
arrivée. Ou le contraire, la personne a un problème de jeu en premier. Donc, l'impulsivité
d'aller à la machine, à la loterie vidéo, et après, vu ses pertes, va
consommer, et après ça, bien, la double problématique arrive, là, à ce
moment-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Tout à l'heure, j'ai entendu l'argument de... l'effet d'un temps d'arrêt.
Alors, je me demande si... Je me
souviens quand on allait au casino au tout début. Je vais chaque fois qu'il y a
quelqu'un qui vient comme touriste à Montréal pour leur montrer notre
casino. Au début, c'étaient les 25 sous, après, c'étaient les cartes de crédit,
et, maintenant, les gens ont un type de clé qui est attachée à la machine. Ça,
ça me fait peur.
Est-ce
que l'effet... Quand on parle de... le temps d'arrêt, que ça donne le moment à
réfléchir, est-ce que ce n'est pas la même chose avec cette clé qu'ils
ont attachée dans la machine qu'un verre d'alcool à la machine? Vous dites oui.
Mme Beaulieu
(Martine) : Tout à fait.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Beaulieu.
Mme Beaulieu (Martine) : Dans la dynamique de dépendance, hein, ce qui se
produit, c'est que la personne est dans une recherche de soulagement ou
de gratification immédiate, instantanée. C'est le terme qu'on utilise au niveau
clinique, mais... Donc, les gens, très
impulsivement, vont rechercher très rapidement à soulager ou à voir ce qu'ils
ont comme désir, soit de jouer, soit de
consommer pour avoir l'effet que le jeu ou la consommation va leur donner.
Donc, on vient un peu utiliser, entre guillemets, la vulnérabilité de ces
personnes-là qui ont une dynamique de dépendance en donnant des mécanismes qui
vont dans le sens de leur désir d'avoir très rapidement l'effet.
Donc,
moins la personne a de démarches à faire qui lui... plus elle va avoir
rapidement l'effet qu'elle recherche. Et
on vient alimenter, si on veut, la dynamique de dépendance de cette façon-là ou
utiliser la dynamique de dépendance au profit de la rentabilité.
Le Président (M. Bergman) : M.
Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : Pour résumer,
c'est la notion de facilité. La notion de facilité, donc facilement
accessible, facilement consommable. Donc, c'est ça qu'il faut comprendre
finalement. Plus qu'on donne une notion de facilité aux personnes soit de
dépenser ou de consommer, plus on leur donne l'occasion d'avoir un problème.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Est-ce que vous
avez une idée combien ça coûte à l'État pour aider une des 500 à 1 500
personnes que vous avez dans vos cliniques?
Combien ça coûte par personne qui doit être traitée? Est-ce qu'il y a un
chiffre? Parce que, si je comprends
bien, si on va rendre plus facile l'alcool dans les aires de jeu, ça pourrait
augmenter le nombre de personnes qui
vont avoir des problèmes, et donc il faudra trouver des moyens de les aider.
Combien ça coûte, aider une personne?
Parce qu'eux, ils parlent d'un dividende... je m'excuse. Ils parlent de
dividendes de 40 millions de dollars. Mais recevoir 40 millions de dollars ici, et ça me coûte... Je me
demande si jamais quelqu'un a fait l'analyse de... C'est beau, c'est un dividende que Loto-Québec paie, mais le service
de santé et service... santé et services sociaux, ça coûte combien?
Le Président (M. Bergman) : M.
Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : C'est très
difficile à évaluer, parce qu'on va parler, exemple, seulement du coût,
mettons, du traitement. Mais est-ce qu'on va évaluer le coût que la personne a
pris l'ambulance pour se rendre à l'hôpital, le coût de l'urgence qui a eu lieu, le coût des psychologues que la femme
de la personne a pris et que leurs enfants ont pris à ce moment-là? Tous ces coûts-là sont associés. Que l'employeur a
perdu des sommes importantes d'argent parce que la personne était absente ou a même fraudé l'employeur… Donc, toutes
ces données-là font en sorte que ça devient un coût de société plus intense. Donc, on ne peut pas seulement
dire : Comment ça coûte pour le traitement? Il faut prendre en
compte tout ce que ça peut occasionner comme problématique, là, finalement. C'est
très difficile à évaluer.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé. Il vous reste une minute.
Mme de
Santis : Mais je suis
d'accord. Il y a tout le coût qui est connexe. Mais le coût pour chaque patient
qui est reçu à une clinique, le coût de la clinique, c'est combien?
M. Marcoux
(Vincent) : Dans les centres
de traitement des dépendances, les coûts par jour pour une personne, c'est
entre 100 $ et 150 $ que ça coûte par jour pour ces personnes-là, d'être
en traitement. Donc, on peut évaluer. S'il y
a une augmentation, bien là il va avoir un besoin, donc un agrandissement, un
besoin, pour les centres de traitement, de grandir. Donc, ça va faire en
sorte que ce coût-là va grandir, à ce moment-là.
Le Président (M. Bergman) : Alors,
malheureusement, le temps pour ce bloc s'est écoulé. Mme la députée de Groulx,
pour un bloc de six minutes.
• (17 heures) •
Mme Daneault : Merci, M. le
Président. Merci, M. Marcoux, Mme Beaulieu. C'est très intéressant. Je pense qu'il y a une notion du temps d'arrêt que vous
avez amenée aujourd'hui, après-midi, qui va nous aider un peu à
préciser, parce que, ce matin, on entendait,
entre autres, les gens de Loto-Québec nous dire que, de toute façon, l'alcool
existe dans les casinos. Alors, je
pense que la notion du temps d'arrêt, elle est essentielle, c'est-à-dire que
d'avoir l'alcool à la table de jeu empêche ce temps d'arrêt là pour la
personne. Et là on ne parle pas uniquement de personnes vulnérables, on parle de l'ensemble de la population. Ce temps
d'arrêt là est primordial pour éviter justement de poursuivre souvent
plus longtemps les mises et augmenter les mises, augmenter le risque pour les
citoyens qui sont présents aux tables de jeu de gager plus que ce qu'ils sont
capables de faire. Alors, merci de préciser cette notion de temps d'arrêt.
Si je peux me
permettre, parce que je suis un peu surprise des questions que le gouvernement
vous pose et de mettre en doute qu'il y a certaines études... Il y en a
plusieurs, études qui ont démontré que l'alcool, dans les aires de jeu, effectivement, un taux d'alcool de 0,05 %
dans le sang suffit à diminuer le niveau d'attention, et altérer le jugement,
et à désinhiber. Ce sont des études qui ont été faites aux États-Unis, à l'université
de Memphis, et ça date de 1998. Alors, ce sont de vieilles études.
Et, si je peux aider les gens du gouvernement,
vous pouvez vous procurer ce petit livre-là, qui est le livre Tabac, alcool, drogue, jeux de hasard et d'argent, qui a
été publié par l'Institut national de santé publique du Québec. C'est dans ce livre-là qu'on nous donne les moyens
de prévention qui sont, entre autres, d'éviter l'alcool dans les aires
de jeu. Alors, ça ne vient pas des
États-Unis, ça vient de chez nous. Ces études-là sont connues depuis longtemps.
Ces études-là ont permis justement à ce que le Québec se prémunisse de
facteurs de risque supplémentaires. Alors, ce que je comprends, c'est qu'on est
allés de l'avant avec une mesure, au gouvernement, sans regarder les études du
passé…
Le Président (M. Bergman) :
…de Groulx…
Mme
Daneault : …et sans questionner. Ma question, c'est :
Est-ce que vous avez été consultés, oui ou non, avant qu'on aille de l'avant
avec cette mesure-là?
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux.
M. Marcoux
(Vincent) : Non, on n'a pas été consultés.
Mme
Daneault :
Alors, je pense…
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault : Est-ce qu'il me reste du temps?
Le Président (M.
Bergman) : Il vous reste un autre trois minutes.
Mme Daneault : Bon. Alors, je pense que, pour le bénéfice de
tous... Et je suis étonnée d'entendre le gouvernement,qui s'est toujours targué de : on va prendre
soin de notre monde, aujourd'hui, qu'on en soit réduits à aller de l'avant
avec une mesure financière… d'ordre financier qui va nous rapporter
40 millions sans qu'on ait d'évaluation d'impact.
On
vous a posé la question : Quels seront les impacts au niveau de la
société? Ces gens-là, ces gens-là qui sont vulnérables, qu'on va soumettre à des facteurs de... à un risque
supplémentaire, on n'a pas fait d'étude de coût. On vous a posé la question. Ça semble flou, mais effectivement
il y a un impact qui n'est pas seulement au niveau de l'individu, mais au
niveau de sa famille, au niveau de l'employeur. Alors, on est en train de
prendre une mesure qui va probablement rapporter
40 millions dans les coffres du gouvernement, mais qui va coûter combien?
On n'a pas fait d'étude d'impact.
J'aurais
aimé que des groupes comme le vôtre puissent avoir les moyens de le faire et
d'arriver avec des résultats probants.
Mais une chose est certaine, aujourd'hui, quand on vous entend, c'est que le
facteur de risque, il est présent, c'est que vos recommandations sont bel et bien négatives à cet effet… à cette
mesure-là. Et ce qu'on peut comprendre aussi, c'est qu'on devrait aller vers d'autres mesures plus créatives, moins
nocives pour la santé pour améliorer l'achalandage de nos casinos.
Le Président (M.
Bergman) : M. Marcoux, commentaire?
M. Marcoux
(Vincent) : Non. Tout à fait. Je suis très d'accord avec madame. Tout
à fait.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault : Merci. Je n'ai pas d'autre question.
Le Président (M. Bergman) : Alors, M. Marcoux, Mme Beaulieu, merci pour être
ici avec nous aujourd'hui. Merci pour votre présentation. Et je demande
les gens du Centre Dollard-Cormier de prendre leurs places à la table.
Je vais suspendre nos
travaux pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à
17 h 3)
(Reprise à 17 h 27)
Le Président (M.
Bergman) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît!
Alors, collègues, compte tenu qu'on va compléter
nos travaux à 6 h 30, j'ai besoin de votre consentement pour
dépasser 18 heures. Est-ce que j'ai le consentement?
Une voix :
Consentement.
Le Président (M.
Bergman) : Consentement? Consentement pour dépasser 18 heures?
Des voix :
Oui, oui, oui.
Le Président (M.
Bergman) : Consentement?
Une voix :
Oui.
Le Président (M.
Bergman) : Merci.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : On ne vous fera pas revenir demain matin.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bergman) : Alors, M. Thibault, Mme Vincent, Mme Lecomte,
bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation,
suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, s'il vous plaît, pour les fins de transmission,
transcription, donner votre nom et votre titre ainsi que ceux qui vous
accompagnent, et vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Centre Dollard-Cormier, Institut universitaire
sur les dépendances (CDC-IUD)
M. Thibault (Jean-Marie) : Bien. Moi, je suis Jean-Marie Thibault. Je suis
le président du conseil d'administration du Centre de réadaptation
Dollard-Cormier, Institut universitaire. À ma droite, vous l'avez rencontrée
déjà à une autre présentation, Mme France
Lecomte, qui est notre directrice des services à la clientèle, et, à ma gauche,
quelqu'un qui va pouvoir vous répondre de
façon très concrète, c'est Mme Brigitte Vincent, qui est la coordonnatrice du
programme de Jeu pathologique au Centre Dollard-Cormier.
M.
le Président, Mmes, MM. les membres de la commission, le Centre
Dollard-Cormier, Institut universitaire sur les dépendances, tient à remercier les membres de la Commission de la
santé et des services sociaux de lui donnerl'opportunité de faire valoir son point de vue et celui des joueurs
pathologiques dans le cadre des auditions publiques sur le projet des règles abrogeant la disposition qui
prohibe la vente, le service et la consommation de boissons alcooliques
à l'intérieur des aires de jeux.
Le
CDC-IUD, comme on l'appelle, est un centre de réadaptation public membre de
l'Association des centres de réadaptation
en dépendance du Québec, qui regroupe tous les centres publics à travers la
province, qui dessert au-delà de 50 000 usagers annuellement. Il
offre — notre
établissement, comme les autres — des services gratuits à plus de 7 000 Montréalais par année ayant des
problèmes d'alcool, de drogue, de jeu et de cyberdépendance. À titre d'Institut
universitaire sur les dépendances, il veille
à l'avancement des connaissances dans le domaine des dépendances, tant
sur le plan de la recherche que de l'enseignement et du développement des
pratiques de pointe.
Le centre compte près
de 400 employés, dont environ 300 cliniciens. De plus, 22 chercheurs réguliers
et collaborateurs ainsi que trois groupes de
recherche — le
RISQ, qui est la Recherche et l'intervention sur les substances
psychoactives au Québec, le GRIF-JEU, qui est un groupe de recherche sur l'intervention
et les fondements en jeu, et l'équipe HERMES, sur les Habitudes de vie et
recherches multidisciplinaires — y sont associés de façon étroite.
Pour poursuivre la
présentation et rentrer dans le vif du sujet, je donnerais la parole à Mme
Brigitte Vincent.
• (17 h 30) •
Mme Vincent (Brigitte) : Bonjour. La préoccupation que nous désirons
partager avec vous concerne l'impact de l'introduction de l'alcool dans
les aires de jeux sur les 44 000 Québécois — soit le fameux
0,7 % de la population de 18 ans et
plus — qui
présentent un problème de jeu pathologique ainsi que sur les personnes de leur
entourage. Au-delà des statistiques,
le CDC-IUD tient à témoigner de la réalité des personnes que les intervenants
accompagnent au quotidien dans la difficile démarche de se sortir de l'emprise
du jeu et de retrouver une certaine sérénité.
Le
jeu pathologique est défini dans le DSM-IV comme étant «une conduite de
jeu répétée, persistante et inadaptée qui perturbe la vie personnelle,
familiale ou professionnelle».
Au Centre
Dollard-Cormier, Institut universitaire sur les dépendances, plus de 400
personnes sont traitées annuellement au Programme jeu pathologique. Ces
personnes vivent avec une détresse cliniquement significative qui origine de leurs habitudes de jeu. Nous soutenons
également une cinquantaine de personnes vivant dans l'entourage d'un
joueur qui subissent des répercussions majeures liées au jeu sur leur existence
et celle de leurs proches.
En
effet, le jeu pathologique affecte jusqu'à cinq à 10 personnes par joueur
pathologique. Plusieurs recherches se sont
intéressées aux conjoints des joueurs, car elles figurent en première place
parmi les personnes touchées par le jeu. Certaines d'entre elles
développent des comportements de consommation — ici, on parle tabac, alcool,
drogue et biens divers — alors que plusieurs d'entre elles se
retrouvent mêlées aux problèmes financiers des joueurs en empruntant, en contractant une deuxième hypothèque ou en
augmentant leur crédit personnel pour alléger leurs dettes familiales.
En plus des problèmes conjugaux, certaines
vivent des problèmes au travail, développent des symptômes physiques
ainsi que des problèmes légaux.
Les enfants des
joueurs subissent également plusieurs conséquences négatives. Ils peuvent avoir
l'impression de perdre le parent qui, notamment en raison des absences fréquentes
et prolongées, est absent.
Donc, à notre avis,
aux 44 000 Québécois qui présentent un problème de jeu pathologique, il
faut ajouter le pourcentage représenté par
les membres de l'entourage qui, comme démontré par les recherches ou par notre
pratique clinique, vivent de graves
conséquences au plan biopsychosocial. Cette conception de la réalité sociale du
phénomène augmente grandement l'impact de cette problématique sur la santé
publique.
Pourquoi,
selon nous, existe-t-il un lien causal entre la consommation d'alcool et le jeu
pathologique? Une des interventions de base des cliniciens est d'identifier
avec leurs clients des facteurs de protection et de les mettre en place. Le fait d'être sobres lorsqu'ils
jouent — jeu
contrôlé — ou
d'être dans une situation à risque — exemple, réception de leur paie,
situation de stress, conflit — en est un important.
Le jeu pathologique
est considéré comme un trouble de contrôle des impulsions et l'alcool a un
effet désinhibiteur, ce qui ne peut
qu'accentuer la perte de contrôle. Rappelons que 50 % des joueurs
pathologiques présentent aussi des problèmes liés à l'alcool. Il est
clairement démontré qu'il y a une relation causale entre la consommation
abusive d'alcool et le jeu pathologique.
La perte de contrôle
peut induire une prise de risque plus élevée et conduire le joueur à mettre en
jeu des mises plus élevées, à avoir un jeu
moins prudent, moins réfléchi, et ainsi augmenter ses pertes. Soulignons que le
besoin incontrôlable de retourner jouer pour se refaire fait partie des
critères diagnostiques du jeu pathologique.
De plus, l'alcool, en altérant le
jugement, diminue la capacité du joueur à évaluer ses chances réelles de gains
et altère le souvenir des pertes subies dans le passé, ce qui peut prolonger l'épisode
de jeu et donc, vraisemblablement, augmenter les pertes d'argent.
La
perte de contrôle peut aussi amener le joueur à dépasser les limites qu'il
s'est fixées et jouer des sommes qu'il avait décidé de protéger, comme,
par exemple, le montant nécessaire pour faire l'épicerie ou pour faire l'achat
des médicaments. Suite à ce type d'événement, la honte, la culpabilité
ressenties par le joueur sont alors très présentes.
Éduc'alcool
fait d'ailleurs une mise en garde très claire à cet effet : Les individus qui
apprécient les jeux de hasard et d'argent — et je les cite — devraient
éviter de consommer de l'alcool. Le mélange alcool-jeu accroît les risques de
jouer de façon inappropriée, voire pathologique. C'est un mélange toxique.
De
nombreuses études établissent un lien entre le jeu pathologique, les idéations
suicidaires et les tentatives de suicide,
et un des prédicteurs du passage à l'acte est une grande perte financière. Être
intoxiqué à l'alcool est aussi un grand prédicteur du passage à l'acte
au plan suicide. Si le joueur sort du casino, intoxiqué, honteux et ayant subi
une perte importante, aura-t-il plus de chances de tenter de s'enlever la vie?
Un
argument pour l'alcool aux aires de jeux serait de dire : De toute façon,
il y a déjà des bars au casino et il est donc possible d'y consommer de
l'alcool.
Je
pense que je vais sauter le paragraphe — puisqu'il
reste une minute —au niveau... Je pense qu'on vous a fait la démonstration que, de prendre du recul, la
personne est à nouveau... Parce que le jeu dissocie la personne de la
réalité et même de ses propres impressions physiques. Donc, je ne ferai pas la
démonstration puisque ça a déjà été fait.
Ce
que je peux vous dire, c'est que nos usagers nous disent très clairement que ça
leur permet de se reconnecter avec la
réalité quand ils quittent le jeu ou la machine, et là, par exemple, de prendre
leur cellulaire et de voir qu'il y a à peu
près 10 messages de leur femme, de leur conjointe sur le cellulaire, et là
de se rappeler leurs objectifs de réadaptation et peut-être de quitter.
Il est possible de
penser que le même phénomène, donc, se reproduit lorsque le joueur décide de
quitter la table de jeu que celui pour aller fumer une cigarette.
Le Président (M.
Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Vincent
(Brigitte) : Oui. Alors, je pense que la seule recommandation que l'on
peut faire, pour nous qui soutenons les joueurs, c'est : au nom des
joueurs pathologiques, au nom des intervenants qui travaillent à Dollard-Cormier, nous recommandons de ne pas
introduire d'alcool aux tables de jeu et aux aires de jeux du casino.
Nous espérons avoir fait la démonstration que le fait d'introduire de l'alcool
aux aires de jeux équivaut, pour notre société, à faire le choix d'installer un
facteur de risque qui nuit au rétablissement des personnes vulnérables et peut
accentuer la sévérité de leurs dépendances. Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Merci pour votre présentation. Alors, le bloc pour le
gouvernement, pour 22 minutes. Alors, M. le député d'Argenteuil.
• (17 h 40) •
M. Richer :
Merci, M. le Président. Bonjour, merci d'être là pour éclairer nos
connaissances et nous permettre de prendre des décisions qui seront
bénéfiques pour tous les joueurs du Québec.
Alors,
M. le Président, j'aimerais opposer deux situations pour aller chercher le
point de vue des experts qui sont devant
nous. Donc, on est ici pour... depuis un bout de temps en fait, on discute
beaucoup du risque d'augmenter le nombre de joueurs pathologiques en permettant la consommation d'alcool dans les
aires de jeux. Ça m'apparaît, actuellement, depuis quelques minutes, l'élément
essentiel de notre discussion.
Alors,
les deux situations que j'aimerais opposer sont les suivantes. La première,
bien, j'en ai parlé plus tôt dans la journée en parlant de l'évolution
du monde du jeu au Québec depuis 1992. Alors, je disais, à ce moment-là, que, depuis 1992, il y a eu 16 décisions ou décrets de
pris : 12 par le gouvernement du Parti libéral de l'époque, quatre du
Parti québécois. Et, dans les 12 pris par le gouvernement libéral… Et là il y
aurait eu besoin peut-être, Mme la députée de Groulx, du volume intéressant que
tu nous suggérais tantôt, peut-être que le ministre des Finances de l'époque en
aurait eu besoin, parce que, dans les 12 interventions, il y a eu l'implantation
du jeu en ligne...
Le Président (M.
Bergman) : S'il vous plaît! S'il vous plaît, Collègues, je vous
demanderais d'adresser la présidence dans vos interventions…
M. Richer :
Oui, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : …ou les questions à nos invités.
M. Richer :
Bien, monsieur. Alors, M. le Président, dans cette implantation-là du jeu en
ligne qui a été faite en 2010, malgré
l'opposition de 14 groupes qui sont venus déposer des mémoires qui
disaient l'inverse, qui s'opposaient, cette décision-là a été prise, et
la conséquence, c'est qu'on a quelqu'un qui est assis tout seul dans son salon,
dans sa chambre, qui peut boire à volonté et qui peut même fumer à volonté; il
fait ce qu'il veut sans aucune protection.
À l'opposé,
actuellement, la situation, M. le Président, c'est qu'on nous a démontré ce
matin que les joueurs fréquentent moins les
casinos, mais ne jouent pas moins; ils vont jouer ailleurs. Donc, la suggestion
que je comprends de Loto-Québec, c'est de récupérer ces joueurs-là et
les amener dans un endroit contrôlé, un endroit sécuritaire, un endroit où ils
recevront des services appropriés à leur dépendance, si dépendance pathologique
il y a.
Donc, quand on me dit qu'on craint que le fait d'offrir des
consommations alcooliques à des joueurs potentiellementinfluençables, ou on pourrait appeler… d'autres
termes, donc la solution, c'est de ne pas vendre de boissons
alcooliques. Donc, à mon avis, en ne faisant
pas cette mesure pour amener les gens dans un milieu sécuritaire, on les laisse
à eux-mêmes, on ferme les yeux, on se met la tête dans le sable et on
les laisse aller en pleine nature.
Il y a des
gens qui ont des sous pour aller jouer à Atlantic City ou dans l'Ouest
américain et ceux qui en ont moins peuvent facilement aller à Kanesatake
avec un billet de métro ou d'autobus. Donc, on est dans une situation où on leur permet de boire, de fumer à la maison, sans
contrôle, et là on voudrait ne pas les amener au casino, mais les laisser
en pleine nature à eux-mêmes. Alors, à mon avis, ce n'est pas une décision très
responsable.
Alors, ma
question comme député membre de cette commission, comme député membre du
gouvernement qui veut prendre une
décision responsable : Est-ce que je dois décider de laisser ces gens-là
aller en pleine nature, sans aucun contrôle, travailler à partir de chez
eux devant leur état?
Et moi, je ne me sens pas à l'aise,
actuellement. Donc, j'attends votre éclairage, s'il vous plaît.
Le Président (M. Bergman) :
Monsieur...
Mme Vincent (Brigitte) : Ça va me
faire plaisir…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Vincent.
Mme
Vincent (Brigitte) : Merci.
Alors, ça va me faire plaisir de répondre à votre question. Premièrement,
vous le savez, je parle de joueurs
pathologiques et je parle en fonction des 400 annuellement et de notre
expérience clinique.
Ce que je peux vous dire, j'ai débattu justement
avec mon équipe, qui est composée de six intervenants, de voir est-ce que les personnes qu'on dessert,
est-ce qu'ils fréquentent les casinos illégaux? Alors, face à cette
question-là, très peu de notre clientèle
fréquentent les casinos illégaux. Donc, je veux juste préciser ça en fonction…
Bien sûr, on s'entend, il n'y a pas d'étude, je ne peux pas dire que c'est
une étude formelle, mais, au niveau de notre expérience… et, quand même, on
dessert, comme je vous dis, depuis 2001, 400 joueurs pathologiques par année.
Maintenant, c'est sûr que, lorsque vous parlez
du jeu en ligne, je vous dirais… Parce qu'il ne faut pas avoir l'impression que les joueurs sont qu'un profil. On
a plusieurs profils de joueur, hein? Blaszczynski parle de trois profils
au niveau des joueurs, puis c'est ce qu'on voit aussi dans notre pratique. Il y
a un profil de joueur où, premièrement, c'est
souvent pour dissocier d'un sentiment de dépression, O.K.? Donc, souvent, ces
personnes-là ne vont jamais aller jouer au niveau de l'illégalité. Au contraire, ils vont aller jouer au niveau
d'un casino étatique parce que pour eux, c'est plus rassurant, O.K.? Donc, je vais juste mettre ce
bémol-là. Maintenant, on a aussi une clientèle, je vous dirais, de 10 %
de personnes âgées qui ont un problème de
jeu pathologique, et ces personnes-là, bon, ne font pas le jeu en ligne non
plus.
Alors, je pense que plus on sera prudents dans
tous les types d'endroit où les personnes peuvent développer un jeu pathologique, mieux cela sera. Alors, oui,
cherchons à protéger au niveau du jeu en ligne, mais cherchons aussi à protéger au niveau du casino parce que, selon notre
expertise, ça n'attire pas nécessairement la même clientèle. Alors, je pense que c'est important de regarder et de garder
en tête qu'il y a des personnes qu'on dessert. Vous le savez, le profil
type d'un joueur, c'est que les revenus ne sont pas très importants. Donc, ils
n'iront pas, eux non plus, à l'extérieur. Alors, l'accessibilité, le fait que c'est
légal, oui, ça attire bien sûr les joueurs pathologiques.
Je pourrais vous dire un exemple aussi,
dernièrement, qu'une intervenante m'a donné. Vous savez, nous, on travaille à installer des mesures de protection
chez les joueurs au niveau du rétablissement et de la réadaptation. Et
un joueur qui avait la double problématique,
jeu et alcool, dans son plan de traitement… Le plan de traitement était
d'aller jouer au casino parce que justement il était capable… parce que, dans
son plan de traitement, c'était : O.K., je veux contrôler. Tu joues, mais tu laisses tomber l'alcool pour être plus
vigilant puis être plus connecté sur la réalité. Et le plan d'intervention
de l'intervenant et du joueur, décidé de façon commune, était qu'il aille jouer
au casino parce qu'il était moins sollicité pour l'alcool et ça l'aidait à
accepter de ne pas boire en termes de traitement.
Alors, bien
sûr, vous me parlez du taux de prévalence, mais il faut parler aussi du soutien
déjà au niveau de la réadaptation des personnes qui ont un problème de
jeu pathologique et aussi de la sévérité, hein? Parce que, dans le jeu
pathologique, il y a des niveaux de sévérité, et je suis convaincue et les
intervenants qui travaillent dans mon équipe sont convaincus que la prise d'alcool
aggrave la sévérité des symptômes de jeu.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député d'Argenteuil.
M.
Richer : Merci, M. le
Président. Alors, c'est un élément de réponse intéressant, mais pas tout à fait
satisfaisant sur mes questionnements, M. le Président. Parce que justement ce
que Loto-Québec veut faire, c'est d'offrir à ces gens à risque… parce que je suis d'accord qu'on parle surtout de la
clientèle à risque, veut leur offrir un endroit sécuritaire, contrôlé, avec des personnes… même des serveurs
qui sont là, non pas formés comme intervenants, mais formés pour être
capables de dépister quelqu'un qui est en train de déraper. Il l'a référé à un centre
de traitement, il l'a référé à des personnes qui seront aptes à intervenir, ce
que ces joueurs-là ne trouveront pas dans un casino autre, ne trouveront pas dans un casino illégal. Et, encore une fois,
pas besoin d'aller à Atlantic City, les gens ont accès à ces jeux-là dans
des endroits non contrôlés, très près de leurs milieux, surtout à Montréal.
Alors, ma grande
inquiétude, ma grande inquiétude, c'est que, sous prétexte encore une fois de
ne pas offrir de consommer de la boisson
dans un endroit contrôlé, dans un endroit confortable, on abandonne ces
gens-là, on les laisse… et cette crainte-là de les mettre en situation
difficile fait en sorte qu'on se ferme les yeux et qu'on les plonge dans une situation difficile, M.
le Président. Alors, on fait quoi avec ces gens-là qui vont… De toute façon,
ils vont jouer, ils vont continuer à aller jouer… qui vont continuer à
aller jouer et consommer là où ils ne seront pas dépistés, où il n'y aura pas
de service, on avance à quoi? Elle est où, ma responsabilité comme législateur,
madame?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Vincent.
• (17 h 50) •
Mme Vincent (Brigitte) : Alors, je vais compléter ma réponse en vous
disant qu'il faut voir aussi, étudier les mesures de détection, O.K., et de prévention. Que vous semblez dire que,
si... On ne peut pas être contre, hein? Je ne veux pas… J'aime mieux que
les joueurs jouent au casino… dans les casinos légaux, on s'entend. On ne peut
pas être contre la vertu.
Maintenant,
quand vous me dites : Oui, mais ces personnes-là, au moins, ils jouent de
façon... avec plus de sécurité, qu'il y a plus de mécanismes de
détection. Permettez-moi de vous poser... bien, de vous poser la question, de
dire : Est-ce qu'on a évalué ces mécanismes de protection? Par exemple,
nos joueurs nous disent que l'auto-exclusion, par exemple, fonctionne pour
certains, mais ne fonctionne pas pour d'autres. J'ai un joueur qui actuellement
avait été en auto-exclusion pendant... avait demandé pendant cinq ans, et est
retourné jouer 12 fois depuis, O.K.? Elle était en rechute, hein?
Maintenant, comment on peut dire qu'un serveur va
être capable de détecter quelqu'un qui est en état d'intoxication, donc dont le jugement est altéré au niveau du jeu?
Je suis persuadée que la détection va se faire sur des individus qui ont
des comportements… des conduites sociales qui font qu'ils vont parler fort, qui
vont déranger les autres et qui vont être identifiés
comme étant intoxiqués. Les autres, les joueurs, souvent qu'on dessert, sont
des personnes, souvent aussi, qui ont
un trouble concomitant au niveau de la santé mentale : anxiété,
dépression. Ce n'est pas eux qui... en état d'intoxication, ce n'est pas visible. Ce n'est pas eux qui vont
faire des éclats. Alors, comment on va être capables d'aller les détecter
et comment on va être capables aussi... Et, si on les détecte, comment on va
être capables de les amener à cesser, à aller chercher de l'aide? C'est une
approche motivationnelle.
Vous savez que, même
avec les intervenants, tous les intervenants du Programme du jeu ont une
formation universitaire. Malgré ça, malgré
leur grande compétence, malgré les formations qu'on leur donne, l'encadrement
clinique, on perd des joueurs qui ont décidé
de vouloir aller en traitement, mais qui, après ça, abandonnent. Alors,
imaginez, c'est avec des professionnels, on établit l'alliance
thérapeutique. Alors, imaginez qu'un serveur, pour détecter et amener quelqu'un à consulter, l'adversaire est coriace,
hein? Vous savez que juste de penser... un joueur pathologique, juste de
penser à arrêter le jeu, c'est les mêmes
symptômes que le sevrage et l'alcool : il y a de la transpiration, il y a
de l'anxiété. Alors, écoutez, ce
n'est pas une mince affaire, la dépendance au jeu, hein? C'est vraiment très
important et ça demande, pour intervenir auprès de ces personnes-là
souffrantes, parce qu'il y a plusieurs raisons pourquoi on joue… alors ça demande vraiment, à mon avis, une expertise, un
établissement aussi qui donne la formation continue, qui encadre les
intervenants pour arriver à aider ces personnes-là à se sortir de l'emprise du
jeu puis à retrouver leur liberté de dire non au jeu.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député d'Argenteuil.
M. Richer :
Merci, M. le Président. Tout simplement pour conclure ma portion de questions,
je suis entièrement d'accord avec
vous, madame, quand on pense que des joueurs pathologiques, des gens qui ont
vraiment besoin d'un service pour les sortir de là, ça demande des
spécialistes. Mais, quand ils sont rendus chez le spécialiste, c'est peut-être
parce qu'il y a quelqu'un qui les a référés à un spécialiste.
Alors,
ce qu'on nous montre, ce matin, dans la rencontre avec Loto-Québec, c'est que,
depuis deux ans, ils ont reçu le
niveau 4, le niveau le plus élevé de certification de l'association mondiale
des loteries, basée sur sept principes de jeu responsable. Alors, je crois que ces gens-là sont parfaitement aptes
à détecter. Non pas à intervenir comme spécialistes, ce n'est pas ce qu'on nous a dit, ce n'est pas ce
qu'on nous présente, mais ils sont aptes à détecter, et on peut prendre
des mesures immédiates et, si c'est nécessaire, les référer.
Alors, moi, je me
sens très confortable et rassuré par ces présences-là. Et ma question :
Nommez-moi un seul endroit ailleurs que dans
les casinos gérés par Loto-Québec, un seul endroit dans les casinos à
Kanesatake, aux États-Unis, en Ontario, nommez-m'en un seul, endroit,
qui présente cette assurance-là de contrôle, de suivi chez les joueurs.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Lecomte.
Mme Lecomte
(France) : Alors, deux éléments que je vais reprendre : c'est
comme si, M. le député, vous faites un lien
direct entre la consommation d'alcool et le fait que les gens ont quitté le
casino d'État et vont vers un casino illégal.
Il n'y a pas vraiment de lien direct. Puis, pour être capable de faire un lien
direct, il faudrait être capable d'évaluer ça puis de voir pour quelles raisons ces joueurs-là se retrouvent dans les
casinos illégaux. Ce serait trop simple que ça soit seulement l'alcool;
il doit y avoir d'autres facteurs. Et, quand vous faites un lien direct comme
ça, ça rend ça simple. Loto-Québec nous
dit : C'est simple, ils ont une perte de joueurs, ils attribuent ça au
fait que, dans les casinos illégaux, il y a de l'alcool. Il doit y avoir
d'autres facteurs puis il faudrait évaluer les autres facteurs.
L'autre
élément, c'est... Vous avez raison, M. le député, c'est extrêmement sécuritaire
dans nos casinos, puis il ne faut pas
amener un facteur de risque supplémentaire qu'est l'alcool. Mais vous avez
raison, on est chanceux, au Québec, d'avoir des casinos d'État qui sont
préoccupés par les facteurs de risque. Nous, ce qu'on dit, c'est que, d'amener
de l'alcool, c'est un facteur de risque
supplémentaire. On est devant une consommation d'alcool qui désinhibe les
personnes. Alors, c'est un peu ça, notre...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose, il vous reste
5 min 30 s.
Mme Proulx : Merci, M. le Président.
Alors, bonjour mesdames et monsieur. Je pense que vous avez très, très bien décrit toute la problématique reliée aux
dépendances, que ça soit dépendance du jeu... dépendance au jeu… en fait, le jeu pathologique, dépendance à l'alcool,
dépendance aux drogues. C'est clair que les dépendances amènent d'autres
problématiques dans l'entourage immédiat des personnes, que ce soient des
problèmes conjugaux, des problèmes légaux,
des problèmes financiers. Donc, vous avez très bien décrit, et je pense que ça…
on ne remet pas du tout en question ce fléau que peut représenter dans
la vie de quelqu'un de souffrir d'une dépendance.
Maintenant,
je reprendrais un petit peu le raisonnement que madame vient de faire
concernant ce que disait mon collègue, donc le raisonnement de lien
direct, je pense, qui s'applique aussi à l'inverse, s'il s'applique, où on ne
peut pas faire de lien de cause à effet. Et
j'aimerais vous citer… Parce qu'on en a parlé, il y a quelqu'un qui l'a citée
ce matin, la chercheuse Louise
Nadeau. J'aimerais vous citer un extrait de son étude où elle mentionne :
«Ce qu'on sait d'après les études qui
ont été faites, il y a deux variables : d'une part, les gens jouent plus
longtemps et d'autre part, il y a plus grande probabilité qu'ils
augmentent l'argent dépensé, c'est-à-dire l'argent misé.» Elle poursuit :
«Faut-il pour autant faire un lien direct entre le jeu et la consommation d'alcool?»
Louise Nadeau est plutôt nuancée. Elle dit : «Les joueurs pathologiques et
les joueurs à risque sont tous de grands consommateurs d'alcool. Mais on n'a
pas attendu l'alcool au casino pour que ça
soit la situation et on n'a pas attendu non plus que les joueurs pathologiques
ou à risque aillent dans les bars et
jouent avec les appareils de loto vidéo. D'où mon incapacité — c'est toujours Mme Nadeau qui parle — [de
dire] si oui il va y avoir augmentation [du
jeu avec l'arrivée de l'alcool dans les aires de jeu], parce que déjà, c'est
là.» C'est présent. «Est-ce que ça va être plus, est-ce que ça va être
moins? Je ne peux que vous dire que ce sont deux facteurs associés.» Elle ne se
permet pas, dans le cadre de sa recherche, de faire ce lien de cause à effet.
Alors, moi, M. le Président, j'aimerais poser la
question : Est-ce que vous, vous avez des études vraiment rigoureuses sur les impacts, positives ou
négatives, de cette mesure que nous proposons? Et est-ce qu'on peut garantir,
est-ce que vous avez cette... d'où vous vient cette certitude qu'il va y
avoir nécessairement un impact sur le jeu…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Vincent.
Mme Proulx : …le nombre de
joueurs aussi?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Merci.
Alors, je pense…
Le Président (M. Bergman) :
Pour trois minutes.
• (18 heures) •
Mme Vincent (Brigitte) : Je pense qu'au
niveau d'Éduc'alcool le lien… et je pense qu'Éduc'alcool a une notoriété au
niveau intellectuel assez importante… le fait, le lien, O.K.? C'est sûr que...
Et, nous, au niveau de notre connaissance,
notre sens au niveau clinique et de notre suivi, on peut vous dire qu'on fait
le lien, et les usagers font le lien aussi.
Et, même au niveau de vos mesures qui sont sur votre site, au niveau de la
protection du jeu pathologique, vous le dites vous-même, sur le site de Loto-Québec, de ne pas mélanger alcool
et jeu. Alors, ça, je pense que c'est assez évident.
Est-ce que ça
va augmenter la probabilité? Ça, je ne peux pas vous répondre. Ça, non, c'est
une autre question. Mais est-ce que
ça va augmenter la gravité des personnes? Ça, je peux vous répondre. Puis, oui,
ça va augmenter la gravité, pour toutes les raisons qu'on vous a dites.
Alors donc, la sévérité, l'alcool va exacerber la symptomatologie du jeu pathologique. Donc, oui. Et ça nuit justement un
peu à tout le rétablissement, parce que plus la personne a une sévérité
au niveau de sa pathologie, plus les efforts
pour elle d'arriver à se sortir de la dépendance sont importants. Vous savez
qu'en moyenne, et vous savez qu'au Programme
du jeu pathologique, en moyenne, quand on accompagne quelqu'un au niveau
d'un traitement, c'est, au niveau, là, des objectifs atteints, c'est souvent
une année, une année d'investissement à essayer,
avec les rechutes que ça implique, d'appuyer le joueur pour qu'il se défasse de
ce jeu. Alors, plus le problème est sévère,
bien, c'est sûr que plus les méfaits sur la personne sont importants, les
méfaits sur la personne et sur sa famille.
Mme
Proulx : Bien, rapidement, à
ce moment-là, si je poursuis votre raisonnement, ça m'amène à vous poser
la question aussi, que j'ai posée d'ailleurs à certains de vos
prédécesseurs : Si on est dans l'optique d'éliminer tous les risques et qu'on considère, comme vous le dites,
que l'alcool est un facteur de risque important, est-ce que vous
considérez qu'on devrait prohiber l'alcool dans les casinos?
Le Président (M. Bergman) : Une
courte réponse, s'il vous plaît, madame.
Mme
Vincent (Brigitte) :
Écoutez, là, vous m'amenez à faire une balance, O.K., entre mon désir, et ma
mission, et mon travail de protéger les
joueurs. Si je vous réponds comme coordonnatrice de joueurs pathologiques et
qui sont au fait de leur grande
souffrance, j'aurais tendance à vous dire oui, mais, si je vous réponds en tant
que citoyenne, je vous dirais : Il faut faire dans la balance.
Alors, pourquoi pas? Parce que probablement les
gens qui vont jouer au casino de façon ludique vont apprécier d'avoir un verre. Mais laissons-les au bar, séparons les deux
activités, et je trouve qu'on répond autant au niveau des joueurs pathologiques que de la population en
général. Il y a possibilité de quitter sa table et d'aller prendre un
bar...
Une voix : ...
Mme
Vincent (Brigitte) : ...une
consommation, merci. Alors, voilà. Donc, je vous répondrai ça, qui est
comme un compromis entre la population en général et le joueur pathologique.
Et, même pour la population en général, je serais inquiète...
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme
Vincent (Brigitte) :
...parce que quelqu'un qui a pris un verre, on le sait, son jugement est
altéré. Alors, est-ce que, même pour la population en général, il peut
faire des mises plus importantes qu'il avait pensé au départ?
Le Président (M. Bergman) : Ceci met
fin au bloc du gouvernement. Pour l'opposition officielle, Mme la députée de
Gatineau, pour un temps de 22 minutes.
Mme Vallée : Merci, M. le Président.
Alors, merci beaucoup pour votre présentation, qui est très claire. Et j'aimerais
revenir sur vos propos de conclusion suite à la question de notre collègue de
Sainte-Rose. L'élément de la clientèle
ordinaire, de la clientèle qui n'a pas de trouble de jeu pathologique, et la
conséquence de pouvoir jouer, et avoir son verre de bière ou son
cocktail à la main, il y a aussi un impact pour ces gens-là.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme
Vincent (Brigitte) : Bien
sûr. C'est comme je disais tout à l'heure, bien sûr, là, c'est sûr que mon
propos est au niveau du joueur pathologique,
mais, bien sûr, pour n'importe quel individu, le fait d'avoir pris de l'alcool... C'est
pour ça qu'au niveau de la conduite
automobile on a mis ces règles-là, hein, parce qu'on le sait que ça altère le
jugement, la vigilance, et on peut penser
que même... Il y aura des coûts même pour les personnes qui n'ont pas de
problème de jeu, mais qui pourront
dépenser plus que prévu puis qui, après ça, retourneront dans leurs familles
puis ils diront : Bien, oui, bien, peut-être qu'on devait aller en
week-end à la pêche, mais on n'ira pas parce que, voilà, j'ai joué plus que je
pensais. Puis là il pourrait y avoir aussi des conflits avec l'entourage et
tout ça. Alors, oui, bien sûr.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Je me posais la
question, compte tenu de l'expertise que le Centre Dollard-Cormier possède et
puis de la renommée surtout que vous
avez : Est-ce qu'on vous a consultés? Qu'il s'agisse de Loto-Québec, qu'il
s'agisse du ministère de la Santé, de
la ministre déléguée aux Services sociaux ou même le ministre des Finances,
est-ce qu'on s'est tournés vers vous
afin d'analyser, de peser le pour et le contre avant d'aller de l'avant avec la
mesure qui est sur la table?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Non. On n'a
pas été consultés.
Une voix : D'aucune façon.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Je vais céder la
parole à mon collègue, mais je tiens à vous remercier encore une fois parce
que, votre rapport, il est très, très clair,
et vos propos sont d'une limpidité. On pourrait vous questionner pendant des
heures, mais je pense que votre message est clair et assez direct. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le
Président. D'abord, félicitations pour la présentation. Puis, les
dernières présentations, on entend à peu
près le même message, mais de perspectives différentes : des usagers, des
intervenants.
Et, juste
pour bien vous définir, à ma connaissance, parce que je me souviens d'avoir
remis un prix d'excellence à votre
organisation, au Québec, vous êtes probablement les gens qui possédez la
connaissance scientifique la plus valable avec les recherches...
probablement qu'au niveau mondial vous surveillez la littérature. Juste me le
confirmer, vous êtes probablement les gens qui en savent le plus, au niveau de
la dépendance, au Québec.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Oui, et au niveau du jeu pathologique, parce
qu'étant... On a la chance d'avoir, tu sais, une grande population, donc d'avoir la possibilité d'avoir de la
recherche, d'avoir des chercheurs, etc. Et aussi c'est qu'on a une équipe dédiée, au Centre Dollard-Cormier.
Mon équipe s'occupe que de soutenir les joueurs pathologiques. Alors, on
a vraiment développé une expertise pointue au niveau des joueurs pathologiques.
D'autres centres n'ont pas la masse critique nécessaire, et, bien sûr, il y a
quand même plusieurs similitudes, mais desservent aussi tout type de dépendance. Mais nous, à
Dollard-Cormier, on a vraiment une expertise pointue, parce que mon équipe
d'intervenants dessert que des joueurs pathologiques.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Puis au niveau... Je reviens sur la question. Au niveau
scientifique, vous possédez vraiment les
dernières connaissances, les dernières études. Puis là, du côté gouvernemental,
on essaie de nous faire avaler, là,
qu'il n'y a pas de lien de cause à effet, mais peut-être un lien associatif.
Pour les populations en général, prouver une relation de cause à effet est beaucoup plus complexe, mais, quand on
veut semer le doute, on fait juste dire : Regardez, c'est peut-être
juste associatif, il n'y a peut-être pas de choses comme ça.
Juste une question
comme ça… Vous êtes en commission parlementaire, il faut voir… il faut vous
attendre des fois qu'on va avoir des petites
questions un peu vaudou, là, que ça ne répond pas aux normes scientifiques.
Êtes-vous étonnés de ça?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) :
Pouvez-vous me...
M. Bolduc (Jean-Talon) : ...il y a des questions qui se posent, puis ça
n'a pas de... il n'y a pas de connotation scientifique ou prouvée. Vous avez à répondre à ça. Est-ce que ça vous
étonne qu'on vous pose ce type de question là?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Écoutez, moi, ma motivation, c'est d'éclairer la
commission. Alors, je me dis, on est prêts à répondre à tout type de
question, parce que, pour nous, c'est sûr que notre rôle, au Centre
Dollard-Cormier, bien au-delà de la question
politique, la question est humaine et, au niveau de l'intervention, est de
notre mission de soutenir.
Alors,
pour moi, si je peux éclairer la commission pour protéger les joueurs, qui est
de ma responsabilité, et de soutenir mes intervenants dans leurs plans d'intervention
avec les joueurs, je suis... ça va pour moi.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Puis tantôt on a fait mention qu'on est quand
même fiers qu'au Québec que nos casinos avaient des comportements qui étaient modèles; entre autres, justement,
on ne pouvait pas consommer d'alcool au niveau des aires de jeux. On comprend qu'il y a un mécanisme de surveillance
qui n'est pas parfait, puis je suis très content de qu'est-ce que vous
avez dit tantôt, parce que Loto-Québec nous fait toujours mention, au niveau de
sécurité, qu'ils ont reçu un prix, mais je
ne suis pas certain qu'avec la mesure qu'ils sont en train de mettre en place
qu'ils vont conserver leur norme de quatrième niveau parce qu'on
augmente le risque.
Et
ce n'est pas vrai... Et, vous avez raison, on est habitués de voir des gens en
état d'ébriété qui crient, alors que la majorité des gens qui sont en
état d'ébriété ont juste un comportement qui est augmenté. Donc, une personne
qui est timide va peut-être être plus
timide, et on ne se rendra pas compte de ces types de comportement. Et, quand
ils jouent, de toute façon, ils sont
concentrés sur leurs machines, et ça fait juste qu'ils jouent plus, puis on...
On n'est pas capables de l'expliquer, mais, si on allait chercher la
physiologie, probablement que la cause de l'alcool sur leur système nerveux fait que ces personnes vulnérables sont en train
de dépenser tout leur argent, soit causer des personnes... des problèmes
personnels, ne répondent pas au téléphone de
leur conjointe qui leur dit de revenir à la maison, dépensent tout l'argent,
puis ça met des enfants en difficulté. C'est à peu près ça, l'histoire
naturelle de ces gens-là?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Vincent.
M. Thibault
(Jean-Marie) : Je vais répondre, si vous permettez, M. le Président.
Le Président (M.
Bergman) : M. Thibault.
• (18 h 10) •
M. Thibault (Jean-Marie) :
Vous avez entièrement raison, il y a tous les impacts sociaux entourant ce phénomène-là. C'est toute la population qui est
concernée, là, il faut bien se comprendre. Il y en a que ça va atteindre
moins, mais on sait, nous, avec les joueurs
pathologiques, que ça va les mettre dans une situation encore plus critique,
que les personnes à risque risquent
de devenir de vrais joueurs pathologiques et que la clientèle du monde
ordinaire, qui prend un verre puis qui trouve ça bien drôle de jouer, va
peut-être vouloir répéter l'expérience une fois, deux fois, trois fois.
Première chose qu'on va savoir, ça va nous faire des nouveaux clients.
Si on pouvait s'éviter
ça, déjà avec les moyens qu'on a, donner des services... Puis l'équipe qu'on a
à Dollard-Cormier fait un travail
extraordinaire, et je sais qu'ailleurs au Québec il y a des équipes qui
travaillent très fort aussi là-dessus
pour contrer les effets néfastes du jeu pédagogique. Si vous arrivez avec une
mesure facilitante de cette sorte-là, c'est comme si on décidait du jour
au lendemain que la conduite au volant, ce n'est plus 0,5 ou 0,7, on passe
immédiatement à 0,16 puis on verra les résultats. C'est ça qui est dangereux
avec ce genre de mesure là, là.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Également, puis vous m'avez éveillé à cet
argument, Loto-Québec nous dit : Vous savez, on a une diminution de consommation dans nos établissements, on a
moins de personnes, il faut faire quelque chose. Et, à ce moment-là, pour faire un comportement, on va mettre de l'alcool
dans les aires de jeu. Mais ce que j'ai compris tantôt, c'est que les
clientèles qui jouent dans nos casinos actuellement, ce n'est probablement pas
des clientèles qui vont à l'extérieur, et on
est loin d'être certains que ces joueurs-là qui vont à Atlantic City et
ailleurs, qui y vont possiblement pour
d'autres raisons, vont revenir dans nos casinos. Et, s'il y a une offre plus
grande autour du Québec, il faut penser que, juste le fait de mettre de l'alcool, avec tous les autres moyens,
ne veut pas dire qu'ils vont augmenter le nombre de joueurs, sauf que les joueurs qui sont là vont
être plus à risque. Et le joueur qui est là, c'est notre voisin, la personne
qui va travailler le matin, qui, là, va
avoir une raison de plus, à cause des facteurs de risque augmentés, de jouer
plus et également de consommer plus d'alcool. Ça fait que c'est là qu'on
va avoir un effet extrêmement important.
Et
je suis loin d'être certain que Loto-Québec, par cette seule mesure… Peut-être
que les autres mesures peuvent aider, mais, en ne mettant pas cette
mesure en place, je pense qu'ils ne pénaliseraient pas nécessairement leur
budget. Et je suis loin d'être sûr qu'ils
vont aller chercher leurs 40 millions de dollars prévus, sauf s'ils font
une atteinte directe à la clientèle
qui est locale, qui, de toute façon, n'irait pas à l'extérieur. Qu'est-ce que
vous en pensez, comme raisonnement?
Le Président (M.
Bergman) : M. Thibault. Mme Lecomte.
Mme Lecomte
(France) : Bien, c'est un raisonnement qui se tient parce que je
disais que les gens qui ne fréquentent pas
le casino, qui vont ailleurs, on ne peut pas faire de lien direct. Ce n'est pas
seulement le fait qu'il n'y ait pas
d'alcool qui fait qu'ils quittent le casino. Il y a d'autres facteurs, qui
peuvent être des facteurs comme la proximité d'un jeu, disponible plus
près de leur domicile, qui peuvent être toutes sortes de facteurs. Mais on ne
peut pas faire de lien direct avec le fait de dire : C'est seulement le
fait qu'il n'y ait pas d'alcool.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Puis, si je comprends bien, quand vous êtes venus
aujourd'hui, pour vous, la recommandation, puis vous l'avez faite, c'est
définitivement que le gouvernement pourrait mettre en place les autres mesures
pour avoir un jeu responsable, et la mesure précise de consommation d'alcool
dans les aires de jeu, c'est pratiquement contre-indiqué médicalement.
Mme Vincent (Brigitte) : Je ne peux qu'au niveau... Si je parle au nom des
joueurs pathologiques et au nom des intervenants,
on ne peut que faire... le Centre Dollard-Cormier ne peut que faire cette
recommandation-là, puisque notre mission est d'aider ces personnes-là,
et de les soutenir, et d'éviter que ça se chronicise au niveau des problèmes,
tu sais, des problèmes.
C'est
sûr qu'on ne peut pas être contre le fait de vouloir, si vous voulez, rapatrier
l'argent des sites illégaux. Ça, c'est
sûr que, ça, on est tout à fait d'accord et que c'est très louable, mais on
pense qu'il y a d'autres façons de le faire que d'augmenter le risque.
Par exemple, est-ce que… bien, je ne me connais pas trop en informatique, mais
est-ce qu'on pourrait bloquer les sites illégaux pour les gens qui sont sur
Internet et qui y vont? Parce qu'en plus on le sait que ces sites-là, il y a de la... C'est risqué. Nous, on
n'aime pas que les personnes qu'on dessert aillent sur les sites illégaux
au niveau du jeu en ligne. Est-ce qu'on
pourrait les bloquer? Puis peut-être que, si on les bloque, ça rapporte, tu
sais, ça ramènera un peu l'argent illégal dans les coffres de l'État
pour justement soutenir toutes les mesures sociales.
Mais,
voilà, il faut prendre le temps de réfléchir, parce que l'enjeu est trop
important pour les joueurs pathologiques et pour les centres de traitement. Alors, ce que je vous dirais, c'est
juste : Prenons le temps de réfléchir. L'objectif est bon, est
louable, mais essayons de trouver une façon de le faire qui n'augmente pas les
risques. Ce serait un peu...
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon? M. Thibault.
M. Thibault (Jean-Marie) : Simplement pour compléter, la mesure actuelle, le
délai, l'obligation pour le joueur, qu'il
soit une personne normale ou que ce soit une personne qui a des problèmes de
jeu, de s'arrêter et d'aller au bar s'il veut une consommation, c'est
salutaire. Ça, on ne peut pas faire autrement que de le penser de cette
façon-là parce que ce temps d'arrêt là lui permet... Peut-être qu'il va passer
par dessous, il va aller chercher son verre, va le consommer, va revenir, après ça, jouer, puis ça ne dérangera
rien, mais la chance qu'il y ait une étincelle qui le fasse réfléchir puis
dire : Où je suis rendu aujourd'hui, là?, elle est là. Puis ils l'ont vu
en traitement que, souvent, des joueurs, ils réagissent à ça, puis ça leur
donne la chance de se récupérer. Si vous l'enlevez, comment ils vont se
récupérer?
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Avant de passer la parole, un dernier
commentaire. Je dois vous avouer, je trouve ça très désolant que, lorsqu'ils
mettent ces mesures-là en place, ils consultent les comptables pour savoir
combien ils vont faire plus d'argent, mais ils ne consultent pas les experts,
qui, donc, traitent les clientèles qui vont être atteintes par ça et qu'ils ne consultent pas également les
gens qui ont été atteints par ça. Je trouve ça très désolant puis je
pense que c'est une des raisons pour
lesquelles le gouvernement devrait reprendre sa position puis refaire le
travail comme il le faut, puis le
faire dans l'ordre, faire les consultations puis, après, prendre une décision.
Je vais laisser la parole à ma collègue.
Le Président (M. Bergman) : Mme la députée
de Bourassa-Sauvé.
Mme
de Santis : Merci, M. le
Président. Bravo, pour une excellente présentation, vraiment. J'ai quelques
petites questions. Je comprends que vous avez 400 employés parmi lesquels il y
a 22 chercheurs. Quel type de recherche vous faites quant aux joueurs qui ont
cette pathologie de jouer? C'est quoi, la nature de la recherche que vous
faites avec ces personnes-là?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Bon, bien,
c'est sûr que je pense que nos chercheurs seraient plus à même de vous donner une réponse exhaustive, mais ce que je peux
vous dire, c'est qu'il y a des recherches... Bien, il y a eu la
recherche au niveau du taux de prévalence,
où certains de nos intervenants ont participé. Il y a eu une recherche aussi au
niveau des caractéristiques des joueurs. Maintenant, on pourrait
peut-être vous faire parvenir peut-être, au niveau de la mission universitaire,
un peu la liste des recherches qui ont été effectuées au niveau du jeu. Il y a
eu des recherches aussi plus cliniques, où
des chercheurs sont venus dans mon équipe pour vraiment essayer de dégager le
profil des joueurs puis de nous aider
dans nos hypothèses et dans notre façon d'orienter notre traitement. Alors, il
y a eu aussi de la recherche qui sert aux intervenants pour qu'on offre
un service plus de qualité. Mais je ne sais pas si, France, tu veux ajouter
quelque chose au niveau de la recherche.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Est-ce que vous
pourriez envoyer au président une copie de cette liste? Et, si on identifie de
la recherche, sur cette liste, qui pourrait nous être utile, on pourrait par la
suite revenir et vous demander pour une copie de ces rapports-là.
Le Président (M. Bergman) : On vous
demande de l'envoyer au secrétaire de la commission s'il vous plaît, à la
secrétaire de la commission.
Mme Vincent (Brigitte) : Et un...
Est-ce que je peux me permettre, M. le Président?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Merci.
Aussi, un des documents de référence est un document qui a été fait par l'ACRDQ, qui fait un peu la recension. C'est sûr
que... C'est ça, qui fait un peu la recension des écrits et des
recherches. C'est vraiment un document de
référence très important. Alors, peut-être qu'on pourra aussi vous envoyer la
référence, parce que c'est vraiment la recension des meilleures pratiques et de
toutes les recherches au cours des ans qui ont été faites sur le sujet.
Vous savez que la recherche, puis je pense que
France vous l'a bien dit, vous savez, c'est depuis peu qu'on s'intéresse au jeu pathologique. Donc, il y a des
recherches récentes et, comme vous le verrez, il y a beaucoup de
problèmes de méthodologie dans les
recherches au niveau du jeu, ce qui va... et qui est corrigé, là, actuellement,
avec nos chercheurs. Mais, quand
même, je trouve qu'il y a des éléments qui pourraient éclairer la commission,
qui se retrouvent au niveau, là, du guide des bonnes pratiques et
l'offre de base au niveau du jeu pathologique que l'ACRDQ, avec, bien sûr, la
collaboration des établissements, a produit.
Mme
Lecomte (France) : J'ai une
copie que je pourrai vous laisser immédiatement à la secrétaire puis j'ai
une copie aussi du document d'Éduc'alcool, L'alcool et les mélanges, là.
Alors, je pourrai vous laisser ça. J'ai ça dans ma serviette. Je vous laisserai
ça.
Le Président (M. Bergman) : S'il
vous plaît, à la secrétaire de la commission...
Mme Lecomte (France) : Oui, je vous
déposerai ça.
Le Président (M. Bergman) : ...qui
va le diffuser à tous les membres de la commission. Mme la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Merci.
Le Président (M. Bergman) : Il vous
reste cinq minutes.
Mme de
Santis : Cinq minutes? Oh!
Beaucoup de temps. Bon. O.K. Ici, je vois qu'on parle de 44 000
Québécois. 44 000 Québécois est moins que 0,7 % de la population.
Donc, 44 000 Québécois, c'est un chiffre de... C'est à quelle date? Parce que, quand je vois un chiffre que je
ne sais pas la date que ça correspond, je ne sais pas si c'est il y a 10
ans, cette année, il y a deux ans.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Lecomte.
• (18 h 20) •
Mme
Lecomte (France) : Écoutez,
c'est assez récent. C'est la conseillère aux communications chez nous
qui nous a donné ce chiffre-là. Elle est partie de la population, du nombre de
population au Québec qui a 18 ans et plus, et là elle a fait… 18 ans et plus,
et là elle a fait le 0,7 % du 18 ans et plus, ce qui donnait 44 000.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Est-ce que vous
savez comment ils sont arrivés à ce chiffre?
Mme Lecomte (France) : De la
population en général?
Mme de Santis : Non, de 44 000.
Mme Lecomte (France) : Bien, elle a
calculé 0,7 % de la population du Québec de 18 ans et plus.
Mme de Santis : Mais comment on est
arrivés à 0,7 %, alors?
Mme Lecomte (France) : Ça, c'est le
taux de prévalence.
Mme Vincent (Brigitte) : Le taux de
prévalence. Il y a eu des recherches qui ont été faites, menées par Sylvia Kairouz et Louise Nadeau, et dont les intervenants
du Programme jeu ont participé, ont contribué, O.K.? Alors, c'est sûr que je ne peux pas… C'est vraiment ces
personnes-là qui seraient en mesure de vous dire comment a été faite la
recherche, mais cette recherche-là a été
faite par appel téléphonique sur plusieurs mois. Mais je serais vraiment plus à
l'aise si les chercheurs vous présentaient leur méthodologie.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : J'aimerais
maintenant parler des 400 personnes qui, chaque année, viennent au Centre Dollard-Cormier et que vous traitez. Est-ce que
vous pouvez me dire combien ça vous coûte par personne par jour pour
traiter une personne qui a un problème de jeu?
Mme
Vincent (Brigitte) :
Écoutez, ça va être... Parce que tantôt on a entendu la question. Alors, France
et moi, on savait que ça nous serait posé. Alors, c'est approximatif,
hein, bien entendu, ce n'est rien de scientifique, c'est approximatif, mais,
selon nos calculs rapides de tout à l'heure, c'était...
Mme Lecomte (France) : Entre
12 000 $ et 15 000 $, on pense.
Mme de Santis : Par?
Mme Lecomte (France) : Par année,
par individu.
Mme de Santis : Par individu. Alors,
ce n'est pas par jour, c'est par individu.
Mme Vincent (Brigitte) : Non, non,
non, c'est par individu. Par individu. Au niveau...
Le Président (M. Bergman) : S'il
vous plaît. S'il vous plaît, une personne à la fois, pour les personnes qui
prennent la transcription. Alors, Mme Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Au niveau
traitement, hein, mais c'est sûr qu'en plus du traitement, souvent... et, à Dollard-Cormier, les joueurs peuvent aussi aller à
d'autres types de thérapie, le psychologue, ou le psychiatre, ou etc., hein? Donc, ça peut être un ensemble de services.
Moi, je vous donne qu'au niveau du coût à Dollard-Cormier pour le
traitement, mais c'est sûr que, comme je vous disais tout à l'heure, il y a des
profils de besoins et des motivations différentes
de jouer, et quelquefois, bien sûr, on travaille en réseau avec les
psychiatres, avec, bon, avec d'autres professionnels. Alors, ces
coûts-là, je ne peux pas vous les dire.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé, il vous reste 1 min 30 s.
Mme de
Santis : O.K. Dans un
article dans la Gazette du 21 mai… c'est Brenda Shanahan qui a écrit
l'article, elle fait référence à un chiffre qu'elle a de Loto-Québec, que
Loto-Québec a obtenu d'une étude faite à l'Université Concordia en 2009 : 70 % des adultes québécois avaient joué au
moins une fois… et que la moyenne pendant l'année était plus que
700 $ par personne.
Le Président (M. Bergman) : Une
réponse, s'il vous plaît, dans une minute.
Mme Vincent (Brigitte) : Oui, c'est
exact. C'est des chiffres qu'on connaît.
Mme de Santis :
Et l'alcool dans les aires de jeu peut que faire que ce montant de 700 $
soit plus élevé.
Mme
Vincent (Brigitte) : C'est
notre croyance et notre... C'est ce que nous pensons, avec les données que
nous connaissons au niveau clinique, au
niveau du comportement humain. C'est des hypothèses, bien sûr. Il faudra que ça
soit confirmé par les chercheurs, mais, au niveau de notre compréhension
clinique et humaine, oui, on pourrait le penser.
Le Président (M. Bergman) : Merci.
Ceci met fin à ce bloc. Alors, Mme la députée de Groulx, pour un bloc de six
minutes.
Mme
Daneault : Merci, M. le
Président. Merci d'être présents. Je voulais vous référer à une étude qui est
citée dans le livre de l'Institut national
de santé publique du Québec , à la page 188, où il est mentionné que «la
disponibilité d'alcool dans les lieux de jeu est unanimement réputée nuire au
contrôle» des habitudes de jeu, car il s'agit d'un désinhibiteur reconnu. Alors, ça, c'est tiré d'une étude de
Crockford et el-Guebaly, 1998, et de Baron et Dickerson , 1999. «Les
résultats de recherche démontrent que la
consommation d'alcool prolonge la session de jeu, accentue la prise de risque
et amplifie les pertes financières. Des restrictions d'accès à l'alcool
représentent une mesure préventive d'importance.» Alors, selon l'expertise que
vous avez dans votre centre et les chercheurs, bon, qui sont avec vous, est-ce
que vous avez validé ces hypothèses-là et ces études-là?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme
Vincent (Brigitte) :
Absolument. Je pense que, selon le suivi qu'on fait auprès des joueurs, eux-mêmes
nous disent que l'alcool nuit aux objectifs
qu'ils s'étaient mis et amplifient les symptômes du jeu pathologique. Alors,
nous sommes tout à fait en accord avec ce que vous...
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : Merci. Tout à
l'heure, dans votre allocution, vous avez précisé certaines caractéristiques de
votre clientèle, et, bon, on avait entendu
ce matin qu'on essayait d'aller récupérer des gens qui vont jouer en ligne ou
jouer à l'extérieur. Il semble, selon
ce que vous avez décrit tout à l'heure, que ce ne sont pas les caractéristiques
de votre clientèle.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme
Vincent (Brigitte) : Merci.
Selon les intervenants, ce n'est pas la majorité de notre clientèle qui va
dans les sites illégaux, non, alors qu'une mince partie des joueurs que nous
desservons fréquente le jeu illégal.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme Daneault : Merci. Alors, l'argument
qu'on nous sert depuis le début de la journée, de dire : On veut rapatrier cette clientèle-là dans le casino et
leur offrir de l'alcool aux tables, dans un milieu plus sécuritaire, pour
vous, ça ne tient pas la route. C'est ce que je comprends?
Le Président (M. Bergman) : Mme
Vincent.
Mme Vincent (Brigitte) : Attendez.
Ça ne tient pas la route pour les 400 qu'on suit, O.K.? Je ne peux pas m'exprimer pour tous les joueurs pathologiques
parce qu'il y a une partie des joueurs pathologiques qui ne consultent pas, hein? Alors, il y a 7 % des joueurs
pathologiques qui consultent. Mais on peut penser qu'à Dollard-Cormier
ceux qui consultent, pour passer au-delà de
la... des fois, des difficultés à demander de l'aide et de la stigmatisation
que ça peut amener, c'est des
personnes qui ont un problème important de jeu pathologique. Alors, pour ces
personnes-là, je peux répondre que oui, que c'est... ils ne fréquentent
pas.
Le Président (M. Bergman) : Mme la députée
de Groulx.
Mme
Daneault : Merci. Alors,
dans le fond, la situation actuelle du casino, qui est quand même reconnue
puis qui a été... où on a un endroit
suffisamment sécurisé à l'abri de l'alcool dans les aires de jeu, pour vous,
est beaucoup plus sensée que de permettre l'alcool dans les aires de jeu
dans les casinos?
Mme
Vincent (Brigitte) : Bien
sûr, parce qu'on s'en sert, du casino, même au niveau de nos plans d'intervention
et de réduction des méfaits, hein? Les
personnes qui fréquentent les bars avec les appareils de loterie vidéo, quand
ils sont dans le désir de contrôler
leur jeu, mais pas encore dans l'arrêt, hein, parce que nous sommes en
réduction des méfaits, et on suit le joueur dans son cheminement, on va
prendre souvent le moyen de... Comme ça, on est sûrs que l'alcool ne sera pas
présent lors de son épisode de jeu.
Alors, comme
je vous disais tout à l'heure, il y a un joueur qui a les deux problématiques
et qui veut arrêter de boire mais continuer avec un jeu contrôlé, va au
casino parce que l'alcool est moins accessible qu'avant, dans son jeu, où il
allait dans les bars. Alors, vous voyez que, même pour nous, au niveau de notre
plan d'intervention, des fois, on se sert du casino pour répondre aux besoins de ces
usagers-là qui sont en réduction des méfaits. Donc, le fait qu'ils
aillent au casino sans consommer, leur jeu
est plus contrôlé, et ils ont plus de facilité à respecter un peu l'entente
qu'ils ont prise eux-mêmes avec leur intervenant de jouer tant d'argent
et après ça de quitter, hein, donc de protéger un peu l'argent pour la
nourriture ou les études des enfants.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx, il vous reste une minute.
Mme Daneault : Merci. Alors, ça, c'est
très important, ce que vous venez de dire là, pour moi, dans le sens où actuellement même le casino, dans la forme où
il est, fait partie d'un plan de traitement, alors que, si on ajoute l'alcool,
on ne pourra plus l'utiliser comme plan de traitement pour cette clientèle...
Mme Vincent (Brigitte) : Pour
certains de nos clients, hein...
Mme Daneault : ...pour cette
clientèle-là.
Mme
Vincent (Brigitte) : ...qui
sont en réduction de méfaits puis qu'un des éléments de risque est justement
parce qu'ils consomment de l'alcool. Donc, d'aller au casino, c'est un élément
protecteur.
Le Président (M. Bergman) : Alors,
merci, M. Thibault, Mme Vincent, Mme Lecomte. Merci pour votre présentation,
merci d'être avec nous ici aujourd'hui.
Collègues, je lève maintenant la séance, et la
commission ajourne ses travaux au jeudi 30 mai à 15 heures. Merci. Bonne
soirée.
(Fin de la séance à 18 h 30)