(Onze heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Bergman) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions
publiques sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant le Code civil
et d'autres dispositions législatives en matière de recherche.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, aucun remplacement.
Auditions (suite)
Le Président (M. Bergman) : Merci.
Ce matin, nous recevons le CHU de Sainte-Justine et la Commission d'accès à l'information.
Alors, M.
Sinnett, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation,
suivie d'un échange avec les membres
de la commission. Alors, s'il vous plaît, identifiez ceux qui sont avec vous.
Et vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Centre hospitalier
universitaire
Sainte-Justine (CHU Sainte-Justine)
M. Sinnett(Daniel) : Merci
beaucoup. M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs, dans un premier
temps, on aimerait vous remercier du temps que vous nous donnez, surtout qu'on
a travaillé un peu fort pour qu'on se
rencontre aujourd'hui. Et je représentante le CHU Sainte-Justine à titre de
directeur exécutif de la recherche et de chercheur en oncologie pédiatrique, et je suis accompagné aujourd'hui de
Me Geneviève Cardinal et Me Nathalie Lecoq, qui travaillent aussi à
Sainte-Justine.
Avant d'aller
dans le vif du sujet, je voudrais vous présenter aussi, brièvement, le CHU
Sainte-Justine et son centre de recherche pour avoir un peu une
compréhension d'où on vient avec nos opinions. Le CHU Sainte-Justine, comme vous le savez probablement, est le seul
établissement de santé québécois qui est dédié exclusivement aux enfants,
aux adolescents et aux mères. Nous avons ce qu'on considère un mandat
provincial, plus de 60 % de nos patients viennent
de l'extérieur de Montréal. Donc, le rayonnement est aussi provincial. C'est le
plus grand centre mère-enfant du Canada avec 3 500 naissances,
19 000 patients hospitalisés et 200 000 visiteurs clinique externe
annuellement.
Le centre de recherche, c'est 1 200
personnes, 225 chercheurs, 400 étudiants gradués qui viennent de plus
de 40 pays. Et on travaille sur différentes thématiques de recherche, allant de
la recherche clinique aux essais cliniques multicentriques à l'échelle
nationale, internationale, la recherche de laboratoire, ce qu'on appelle
fondamental, et la recherche psychosociale.
Donc, ça vous donne une idée aussi que notre comité, aussi, d'éthique a une
capacité à juger ces différents types de recherche là et les différents
risques associés aux projets de recherche.
Et maintenant je vais aller un peu plus dans le
vif du sujet, donc concernant le fait qu'on accueille très favorablement les
modifications qui sont proposées par le projet de loi… le n° 3…
n° 30. On considère que les assouplissements
qui sont apportés au Code civil en matière de recherche permettront la
réalisation de projets de recherche qui étaient jusqu'à maintenant
difficiles, voire même impossibles. On pourrait revenir, à la période de
questions, à ce niveau-là.
• (11 h 40) •
Nous
considérons que les modifications qui sont proposées vont permettre d'avancer les
connaissances sur la santé des
enfants, la médecine des adolescents aussi, sans compromettre leur sécurité. Le
changement proposé concernant l'âge pour consentir à des recherches ne
comportant qu'un risque minimal est très souhaitable, comme le démontrent les nombreux exemples qu'on a soumis dans le mémoire
que vous avez reçu. Cependant, on recommande quelques précisions et
changements qui visent à répondre aux besoins de la population pédiatrique
québécoise, et c'est ce que je vais passer dans les prochaines minutes.
Donc, dans un
premier temps, nous applaudissons la modification proposée qui permettrait aux
enfants de 14 ans et plus de consentir seuls aux projets de
recherche comportant un risque minimal selon l'avis du comité d'éthique de la recherche. L'amendement proposé reconnaît l'autonomie
du mineur de 14 ans et plus, consacrée dans le Code civil et dans la Loi
sur les services de santé et services sociaux.
Notre observation. Présentement, les adolescents
sont souvent écartés de projets de recherche en raison des difficultés posées par l'obligation d'obtenir le
consentement du titulaire de l'autorité parentale. D'autre part, les
chercheurs, les cliniciens qui sont
impliqués auprès des adolescents revendiquent, depuis de nombreuses années, des
changements à la règle de consentement à la recherche.
Et, dans le mémoire qui a été déposé, vous trouvez aussi un document avec
plusieurs signatures dans ce sens-là.
Je voudrais juste apporter un exemple pour vous
illustrer un peu, sur le terrain, ce que ça représente comme complications. C'est un exemple qui porte sur un
projet de recherche qui, lui, portait sur le soutien social et
développement socioattentif des nourrissons
de mères adolescentes. Dans le Code civil présentement, le consentement à
l'expérimentation est donné pour le mineur par le titulaire de l'autorité
parentale ou le tuteur. Dans le cas de parents mineurs, on est confrontés à un paradoxe. Une mère mineure a la
capacité de décider du bien-fondé de la participation de son enfant à un
projet de recherche mais pas la capacité de
décider de sa propre participation au même projet de recherche. Un consentementdoit alors être demandé par la mère mineure
à l'autorité parentale. Donc, vous voyez déjà aussi le paradoxe. À cela
peut s'ajouter un deuxième enjeu. Dans
certains cas, surtout dans le domaine, bon, de ce type de recherche là, bien,
ça va être très difficile et même impossible d'obtenir le consentement
des parents des jeunes mères.
On peut aller plus loin aussi. On a une panoplie
de projets qu'on peut mentionner : projets de recherche sur les infections transmises sexuellement, l'évaluation,
dans les écoles, de programmes de prévention d'abus de drogue ou d'alcool, sur l'avortement des mineures de
14 ans et plus et sur l'abus sexuel intrafamilial. Comme vous voyez, ça
amène un frein, si vous voulez, à ce type de recherches là.
Alors, en résumé, pour cette portion-là, nous
accueillons favorablement la modification proposée, qui est attendue depuis longtemps. Nous aimerions
recommander cependant de supprimer les termes «et que les circonstances
le justifient» à la fin de l'alinéa trois de l'article 21. Nous considérons ces
termes comme étant vagues et susceptibles d'engendrer
un manque d'uniformité d'interprétation par les différents comités d'éthique à
la recherche. De plus, nous considérons que ces termes deviennent
superflus dans la mesure où le critère essentiel est celui du risque minimal.
Le deuxième point porte sur la modification des
règles du consentement pour l'utilisation d'une partie du corps prélevée dans le cadre des soins pour être
utilisée aux fins de recherche. Nous considérons que les changements proposés à l'article 3 du projet de loi
n° 30 ne correspondent pas aux besoins de la population pédiatrique
québécoise. Le texte actuel de l'article 22 du Code civil pose constamment
problème au CHU Sainte-Justine pour l'utilisation, en recherche, de matériel
conservé dans les laboratoires ou, en pathologie, matériel d'archives.
Le changement proposé, c'est-à-dire l'ajout, à
la fin de l'article, des termes suivants : «ou, si la personne concernée est décédée, de la personne qui pouvait
ou aurait pu consentir aux soins requis par son état de santé», pour
nous, ne solutionne en rien le problème actuel que nous vivons. Les médecins et
les chercheurs sont très mal à l'aise de recontacter
les parents d'un enfant qui était décédé simplement pour utiliser un spécimen
de recherche. La sollicitation de consentement devient donc un frein à
ce type de recherche utilisant le matériel déjà prélevé dans le cadre de soins.
Nous considérons même que c'est non éthique,
parce que, finalement, on n'est pas capables de faire ce type de
recherche là. Vous allez retrouver plusieurs
exemples, dans le document, de projets de ce type-là. On va pouvoir y revenir
aussi dans la période de questions, si vous le désirez.
Donc, en
résumé, pour ça, on croit qu'il est essentiel d'assouplir la règle établie à l'article 22
du Code civil lorsque la recherche ne comporte pas de risque ou un
risque minimal pour les participants.
On aimerait
ajouter aussi qu'il serait peut-être le temps d'aligner les règles québécoises
aux règles canadiennes et internationales, notamment la Déclaration d'Helsinki
et l'Énoncé de politique des trois conseils, ainsi qu'à d'autres normes québécoises, par exemple l'énoncé des
principes du RMGA, du Réseau de médecine génétique appliquée, sur l'utilisation
secondaire des données du matériel biologique.
Ainsi, nous proposons le libellé suivant… «Une
partie du corps, qu'il s'agisse d'organes, de tissus ou d'autres substances, prélevée sur une personne dans le cadre de soins
qui lui sont prodigués, peut être utilisée aux fins de recherche, avec le consentement de la personne concernée ou
[...] celle habilitée à consentir pour elle ou, si la personne concernée
est décédée, de la personne qui pouvait ou
aurait pu consentir aux soins requis par son état de santé.» Ça, c'est ce qui
était déjà présent. Ce qu'on propose : «Lorsque de l'avis du comité d'éthique
de la recherche, la recherche ne comporte qu'un
risque minimal, et qu'il est impossible ou pratiquement impossible de
solliciter le consentement, une partie du corps peut être utilisée à des
fins de recherche sans le consentement.»
Le troisième point porte sur la modification
apportée par l'article 4 du projet de loi n° 30, prévoyant la
possibilité que le consentement puisse être donné autrement que par écrit. Nous
souhaitons ce changement-là comme évidemment souhaitable. Par contre, l'utilisation
de l'expression «si, de l'avis d'un comité d'éthique de la recherche, les
circonstances le justifient», on considère que c'est sujet à beaucoup d'interprétation.
Donc, pour s'assurer que le consentement
verbal ou documenté demeure une règle d'exception qui ne devrait pas être
applicable aux essais cliniques mais
qui pourrait, dans certains cas, faciliter des études à risque minimal, nous
recommandons plutôt le libellé suivant pour
l'alinéa deux de l'article 24 du Code civil : «Toutefois, le
consentement à une recherche peut être donné autrement que par écrit si,
de l'avis du comité d'éthique de la recherche, la recherche ne comporte qu'un
risque minimal, et qu'il est impossible ou pratiquement impossible de
solliciter le consentement écrit.»
Le
point 4. Le remplacement du terme «expérimentation» par le terme
«recherche» proposé par les articles 1, 2, 4 et 5 du projet de loi
n° 30 est souhaitable. Par contre, l'utilisation du mot «recherche» au
lieu d'«expérimentation» ne règle pas toutes
les problématiques liées à l'usage du terme «expérimentation» puisque le mot
«recherche» pourrait être interprété de façon aussi restrictive que le
mot «expérimentation». Il serait souhaitable de préciser l'intention du législateur dans le préambule de la loi ou dans le
Code civil lui-même. Nous proposons le libellé suivant pour répondre à
la problématique soulevée : «La recherche inclut la recherche impliquant
une personne physique, une partie du corps ou des données concernant les
personnes physiques.»
Cinquième
point : possibilité pour une personne qui participe à une recherche de se
prévaloir de la procédure d'examen des
plaintes d'un établissement de santé et de services sociaux. La modification à
la loi proposée par l'article 6 du projet de loi n° 30 est souhaitable. Dans
la même foulée, nous recommandons un amendement additionnel à la Loi sur
les services de santé et services sociaux au
sujet de la confidentialité des dossiers de recherche. Nous considérons
qu'il est essentiel que le régime strict de confidentialité et d'accès accordé
au dossier médical d'un usager puisse être accordé également au dossier de recherche d'un participant. Nous recommandons
donc le libellé suivant pour un article qui pourrait être ajouté après l'article 27.3 de la Loi
sur les services de santé et services sociaux : «Les dispositions des
articles 17 à 28 s'appliquent, compte
tenu des adaptations nécessaires, à tout dossier de recherche maintenu par un
établissement.»
Le
dernier point qu'on voudrait amener dans la présentation, c'est la notion de
risque sérieux — c'est à
l'article 21 du Code civil du
Québec — qui est
une notion que nous considérons qui est à conserver. Il fut discuté,
précédemment à cette commission, de l'opportunité
de retirer toute référence à la notion de risque sérieux que l'on retrouve à
l'article 21, alinéa un. La notion de risque sérieux est essentielle. Les
comités d'éthique ont besoin de critères sur lesquels fonder leurs décisions. Cette notion sert aussi à
protéger les enfants et les adolescents. Il serait faux de croire que les
essais cliniques de chimiothérapie ne
peuvent pas se dérouler sur les enfants. Il est important de comprendre que le
critère de risque sérieux, tel qu'énoncé dans le Code civil, s'interprète
en fonction de l'état de santé de l'enfant. Un risque chez un enfant atteint d'une maladie grave pour laquelle les
soins requièrent une chimiothérapie ou encore un enfant atteint d'une
maladie incurable pour laquelle il n'existe plus de traitement standard ne
constitue pas nécessairement un risque sérieux, alors que ce serait vraisemblablement le cas pour un enfant en bonne
santé. Donc, la notion de risque sérieux est donc une notion importante
à préserver.
Donc, je termine en
vous remerciant de votre attention. Nous répondrons à vos questions.
Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation, M. Sinnett.
Maintenant, pour le bloc du gouvernement, M. le ministre.
M. Hébert :
Merci beaucoup. M. Sinnett, mesdames. Je voudrais débuter par la dernière
intervention que vous avez faite au
niveau du risque sérieux. Certaines personnes, devant cette commission, ont
prétendu que des essais cliniques, par
exemple de chimiothérapie, n'étaient pas possibles à faire au Québec, étant
donné cette disposition-là, et la modification qui est dans le projet de
loi, c'est justement d'ajouter «dans les circonstances» pour qu'on puisse
interpréter le risque sérieux à la lumière
des circonstances, ce qui n'est pas tout à fait le cas actuellement. Et je
voudrais comprendre comment vous interprétez la notion de risque sérieux
telle qu'elle est libellée actuellement dans l'article 21.
Le Président (M.
Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.
• (11 h 50) •
Mme Cardinal (Geneviève) : En fait, comme le disait mon collègue, un risque
sérieux est vraiment fonction de l'enfant
qu'on a devant nous, donc du contexte dans lequel se déroule une étude. Un
risque sérieux... C'est clair qu'une chimiothérapie,
si on en parle comme ça, chimiothérapie, pour moi qui n'ai pas besoin de
chimiothérapie, comporte un risque
sérieux. Par contre, une chimiothérapie, avec tous les effets secondaires qu'elle
comporte, qu'elle soit expérimentale n'est pas... ne comportera pas un
risque sérieux pour un enfant qui, de toute façon, aurait besoin de
chimiothérapie ou pour un enfant pour qui on a essayé toutes les
chimiothérapies standards qu'on a et pour qui on n'a plus rien d'autre à lui
offrir.
Donc,
je pense que c'est un critère qu'on peut interpréter en fonction des contextes,
qui est un critère qui permet quand
même de protéger les enfants puis qui est une balise qu'on utilise à
Sainte-Justine depuis de nombreuses années, qui fonctionne très bien.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Donc, si je comprends bien, vous interprétez l'article 21 actuellement
dans le sens qu'on veut le modifier, c'est-à-dire vous interprétez «un
risque sérieux dans les circonstances».
Le Président (M.
Bergman) : Me Cardinal.
Mme Cardinal
(Geneviève) : Oui, oui.
M. Hébert : O.K. Moi, j'aimerais que vous reveniez sur des exemples de travaux, là, chez
les 14-18 ans, qui sont impossibles à réaliser dans le contexte actuel
de l'article 21.
Le Président (M.
Bergman) : M. Sinnett.
M. Sinnett (Daniel) : Donc, les... Bien, on va prendre quelques exemples. Nous avons, par
exemple… Je vais prendre un exemple
en oncologie parce que c'est mon domaine, mais on pourrait aller dans d'autres
domaines, si vous le voulez. Je dirais, la première constatation d'un
hôpital comme Sainte-Justine, c'est qu'au départ on travaille avec un ensemble de maladies plus ou moins rares. La
notion de maladie fréquente n'existe presque pas. Dans le milieu adulte,
ça peut être différent.
Pour nous, en
oncologie, par exemple, dans tout le Québec, nous avons 120 enfants
atteints d'un cancer pédiatrique, O.K.? Une
leucémie de l'enfant comme celle-là, que je travaille, c'est 40 cas au Québec.
Pour mettre dans une perspective donnée, en oncologie pédiatrique, donc
ces 120 cas là, les personnes qui en décèdent, c'est la principale cause de
mortalité par maladie au Québec. Donc, ça vous donne une idée un peu des
chiffres.
Donc,
si on part de ce qui est le plus fréquent, on parle de 120 au Québec, à partir
de ce moment-là, tout est très rare. Donc,
dans un contexte de maladie rare, si on veut commencer à développer des
biomarqueurs, par exemple, pour
déterminer, dans telle mesure... pour détecter la maladie ou le diagnostic ou
pour suivre une maladie, pour développer de nouvelles cibles thérapeutiques pour améliorer les soins, parce que
plus la maladie est rare, moins il y a d'intérêt aussi en recherche de
ce côté-là, on doit trouver un mécanisme qui nous permette de faciliter ces
recherches-là.
Le
problème d'une maladie rare, encore une fois, si je reviens là, si on a besoin — c'est
un des exemples qui est donné dans le
mémoire — si
on a besoin d'une dizaine de cas qui nous permettent d'avoir des données
probantes qui nous permettent d'aller à l'étape plus loin, de faire un
essai clinique, par exemple, à plus grande échelle, et que nous avons deux cas par année, et donc ça prend cinq ans pour
avoir 10 cas, et qu'on n'a pas accès à ces cas-là en arrière qui sont
dans les congélateurs parce que les personnes sont décédées, que c'est
difficile...
M. Hébert :
…
M. Sinnett
(Daniel) : Pardonnez-moi?
M. Hébert :
Mais ce n'est pas sur cet élément-là que je voulais avoir votre avis.
M. Sinnett (Daniel) :
O.K. Ce n'est pas... C'est la première partie?
M. Hébert :
C'est le consentement des mineurs de 14 à 18 ans.
M. Sinnett (Daniel) : O.K. Excusez-moi. O.K. Donc, avec le... O.K. Ça va. Donc, au niveau de
cet... Les exemples qu'on a donnés, c'est... on a donné l'exemple, par
exemple, des filles-mères, c'est l'exemple que vous parlez? O.K., l'exemple des filles-mères. Donc là, vous êtes
dans une circonstance où, bon, on parle de recherche, souvent, qui est
plus psychosociale ou déterminant de santé. Vous êtes dans un environnement
particulier, donc vous êtes aussi dans un environnement
familial particulier, et les... et donc le fait de vouloir faire une recherche,
par exemple, sur les habitudes concernant
la consommation de drogues ou d'alcool, ou d'avortement, ou de comportements
sexuels x, y, z, ou même d'inceste
aussi… De ce côté-là, on s'entend bien que c'est difficile de demander à cette
jeune fille là l'autorité parentale pour faire un projet de recherche
qui peut les concerner ou qu'ils ne veulent pas qu'ils soient considérés. Et
donc ça rend très difficile ce type de recherche là au niveau surtout des
adolescentes. C'est ce qu'on veut dire comme frein.
Donc,
comme… à l'étape... À l'autre niveau, d'aller demander au parent l'autorisation
de faire ce type de recherche là, là ça ne serait probablement pas à
cause du contexte familial ou du contexte de la question qui est posée, donc la
recherche ne se fera pas, si vous voulez, les... tout simplement.
Et
on a d'autres exemples qu'on discutait ensemble, il y a tout, aussi... les
personnes qui peuvent être des sujets de ces projets de recherche là qui
sont en institution, par exemple, ne sont pas nécessairement chez les parents,
encore là pour d'autres raisons familiales, où on n'ira pas, normalement,
demander l'autorisation de l'autorité parentale. Donc, il y a plusieurs types
de recherche, dans un type plus psychosocial, qui sont très difficiles à
réaliser à cause du cadre, présentement, de la loi.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Êtes-vous au courant s'il y a des études multicentriques pancanadiennes ou
encore nord-américaines dans lesquelles Sainte-Justine n'a pas pu
participer à cause de cette disposition du Code civil?
M. Sinnett (Daniel) : Oui, beaucoup. Mais c'est une recherche... La notion d'étude
multicentrique, soit canadienne ou internationale, évidemment, là, je
reviens encore avec mon exemple de maladie rare, c'est un incontournable, et les... et, pour d'autres pathologies un peu plus fréquentes,
ça devient un incontournable parce qu'on est toujours confrontés avec, toujours, l'échantillonnage, le nombre de
patients qu'on recrute pour s'assurer que le résultat qui est généré a
une valeur pour aller à l'étape plus loin, si vous voulez. Et le reste du
Canada n'a pas les mêmes contraintes. Donc, c'est sûr qu'à l'intérieur du Canada le reste du Canada le sait, et souvent on
n'est même plus invités à participer à différents consortiums canadiens, on est exclus, de sorte
que, je dirais, les résultats de la recherche qui est générée, qui
pourraient être très bien pour nos propres patients ici, au niveau du Québec,
on ne peut même pas utiliser les retombées, on n'a pas fait partie de l'étude
de ce côté-là. Et donc c'est sûr que, nous, ça fait un frein, mais en même
temps, pour nos patients tels quels, notre
clientèle, si vous voulez, on ne peut pas bénéficier d'études dont le
leadership viendrait d'ailleurs. Et
donc c'est fait à deux niveaux, donc, localement, je dirais, l'incapacité de
faire le projet de recherche, aussi, à travers les consortiums, l'incapacité
de participer à ces consortiums-là, canadiens ou internationaux, ça, c'est sûr.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Au niveau du consentement écrit, j'aimerais que vous m'expliquiez, là, les
préoccupations que vous avez, pour préciser davantage le libellé du
projet de loi par rapport au consentement écrit.
Le Président (M.
Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.
Mme Cardinal (Geneviève) : Oui, absolument. En fait, ce qui nous préoccupait
particulièrement, c'est que l'article
a été modulé en disant qu'on pouvait aller chercher un consentement d'une forme
différente si les circonstances le justifient.
«Si les circonstances le justifient», c'est très large, c'est un terme vague.
On craint que ça porte à interprétation d'un centre à l'autre et on disait : Dans le fond, les critères,
quels sont-ils? Ce serait probablement de dire : Un consentement n'a
pas besoin nécessairement d'être écrit quand on est dans des domaines où il y a
un risque minimal, donc c'est des critères
que vous reprenez à d'autres endroits dans le projet de loi et qu'on n'est pas
capables ou pratiquement incapables d'aller chercher un consentement.
Une voix :
Écrit.
Mme Cardinal
(Geneviève) : Écrit, oui, absolument. Écrit, pardon. Oui.
M. Hébert :
Comment ça pourrait être interprété, d'après vous, «si les circonstances le
justifient»?
Mme Cardinal (Geneviève) : Bien, nous, on avait une crainte. On veut juste
être certains, entre autres, qu'on ne se
servira pas de cet article-là lorsque c'est difficile d'aller chercher un
consentement écrit pour faire des essais cliniques sans un consentement
écrit, par exemple.
M. Hébert :
Mais vous savez que les règles fédérales obligent un consentement écrit dans ce
cas précis de toute façon.
Mme Cardinal
(Geneviève) : Absolument. Mais on préférerait être en harmonie avec
les autres textes à ce niveau-là.
M. Hébert :
Ah! O.K.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
De toute façon, lorsqu'il y a un essai clinique… doit obtenir un consentement
écrit, alors...
Mme Cardinal
(Geneviève) : Absolument.
M. Hébert :
...nonobstant ce qui est là, là.
Mme Cardinal (Geneviève) : Absolument. Et par ailleurs on est favorables à l'assouplissement
qui est proposé, parce que, je veux
dire, il ne faut pas se le cacher, il y a des recherches qui sont difficiles...
qui ne sont pas impossibles mais qui sont très difficiles à faire sur le
terrain avec un consentement écrit.
M. Hébert :
O.K. Comme?
Mme Cardinal (Geneviève) : Comme par exemple, une recherche dans le domaine
psychosocial où on étudie la relation d'amis chez des adolescents, quel
est l'impact de la relation d'amis chez des adolescents. Bien, dans ce cas-là, les chercheurs partent de leur groupe de
participants adolescents, doivent rejoindre les amis des adolescents à qui
on va demander de répondre à des questions
par téléphone. Donc, ce qu'on me dit, c'est que j'appelle les amis, on leur
explique la recherche. Les amis, souvent, vont dire : Bien, pas de
problème, je vais répondre à tes questions. Posez-moi vos questions immédiatement, ça me fait plaisir, tout
en sachant quel est l'objet de la recherche et ce qu'on attend d'eux.
Par contre, on est obligés de leur
répondre : Bien, écoutez, pas tout de suite, on ne peut pas vous poser les
questions. On doit avant tout vous
envoyer un formulaire de consentement par la poste. Vous devez le lire. Si vous
avez des questions, vous nous rappelez, bien sûr. Vous devez le signer
et nous le renvoyer par la poste, et, à ce moment-là, on perd beaucoup,
beaucoup de participants.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Bien, dans l'exemple que vous citez, avec votre modification, votre libellé, on
ne pourrait pas invoquer que c'est presque impossible à obtenir, le
consentement. Donc, je trouve qu'on serait pris, encore une fois, avec la même
contrainte...
Le Président (M.
Bergman) : Me Cardinal.
M. Hébert :
...alors que «si les circonstances le justifient» le permettait.
Le Président (M.
Bergman) : Me Cardinal.
Mme
Cardinal (Geneviève) : Bien,
je pense que, quand on parle de recruter 500 adolescents de cette
façon-là, de demander un consentement écrit, c'est pratiquement impossible.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : O.K. Je voudrais
juste compléter en disant que ce que vous soulevez au niveau de l'utilisation
du matériel biologique déjà collecté, c'est
tout un chapitre qui va faire l'objet d'un projet de loi en soi et qu'on va
proposer à l'Assemblée nationale au cours
des prochains mois. Mais vous comprenez que c'est tout un autre pan du
consentement qu'on voulait séparer de l'actuel
projet de loi, qui était plus fixé sur le consentement des mineurs et des
personnes inaptes. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) :
Alors, ceci met fin au bloc du gouvernement. Le bloc de l'opposition
officielle, M. le député de Jean-Talon.
• (12 heures) •
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci,
M. le Président. Juste pour la dernière phrase du ministre, moi, je suis d'accord, on ne devrait pas l'inclure dans ce
projet de loi là. Il y a quelques personnes qui nous en ont parlé, c'est
une autre discussion.
Et puis, là,
la question que je voulais vous poser par rapport à ça : Si vous voulez
avoir accès aux tissus après le décès ou lorsque quelqu'un ne peut plus
consentir, moi, je... en tout cas, je vais avoir du questionnement par rapport à ça, parce que ça veut dire que, là, on ferait
des choses avec les tissus de la personne alors que la personne ne le
savait pas. Pourquoi vous ne l'incluriez pas
dans votre protocole de recherche que ça pourrait être disponible par la suite?
Parce que moi, je me souviens des
années 90, j'étais au comité de la recherche à Chicoutimi, il y avait eu
une cause, entre autres, à l'hôpital de Chicoutimi, contre un chercheur,
et puis c'était qui qui aurait le droit au matériel biologique. Puis l'autre élément,
c'est : les gens ne savent pas, à ce moment-là, quand ils embarquent dans
le projet de recherche, qu'est-ce qui va être fait avec leurs tissus après.
Le Président (M. Bergman) :
M. Sinnett.
M. Sinnett
(Daniel) : Non, c'est une
excellente question. Les... donc… Puis il y a différents éléments de
réponse dans la question. C'est évident, si aujourd'hui on démarre un projet de
recherche sur le cancer qui a un cas à tous les deux ans, les patients vont être sollicités dans la façon standard de le
faire, avec un formulaire de consentement, puis que le projet va avoir son accord, puis avec toutes les
sous-questions qu'on va demander, l'usage du matériel à différentes
fins, le partage selon les règles de l'art.
Ici, ce qu'on
parle, c'est qu'on arrive en 2013, et là, soudainement, on a une question
intéressante, il y a eu un nouveau développement, parce que la recherche
se fait à différents endroits, on aurait besoin maintenant de 10, par exemple, patients de tel type. Et là la question
se pose : Est-ce qu'on attend cinq ans pour les recruter ou on retourne,
ceux qu'on a eus, en arrière pour valider,
finalement, le biomarqueur ou pour confirmer que c'est une vraie belle cible,
qu'on peut faire quelque chose avant? Elle est là, la question. Parce qu'on est
d'accord avec vous, dans l'idéal, on le recrute tout de suite. Ça, on est tous
d'accord avec ça.
Et donc, dans
ce... Et on le sait que c'est quelque chose où on doit faire attention, être
vigilants dans cette source de matériel d'archive. Et c'est là qu'on met
à profit notre comité d'éthique. À vrai dire, c'est au comité d'éthique qu'on
considère... finalement, va être la personne qui va juger si la requête qui est
faite pour l'utilisation — en tout cas, dans un cas où on aurait le
droit — du
matériel, avec la requête qu'on voulait faire, si c'est éthiquement
acceptable dans le contexte tel qu'on l'a proposé. Donc, à ce moment-là, le
comité d'éthique agit un peu comme le représentant, si vous voulez, du patient
et de sa famille.
On juge ça
plus adéquat que de retourner auprès… Parce que, bon, vous le savez
probablement, il y a certaines maladies qui sont plates, le cancer
pédiatrique, c'en est un, et de retourner auprès de la famille quelques années
plus tard pour leur faire revivre encore une fois ça, il n'y a personne qui est
prêt à faire ça.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Je
voudrais... Ça ne fera pas partie du présent projet de loi, mais il y a une
réflexion très en profondeur à faire là-dessus,
qui est beaucoup plus qu'un dialogue à faire aujourd'hui. Je comprends que le
ministre va revenir là-dessus. Puis j'avais
compris également que, vu que c'était un projet de loi qui est très restreint,
on voulait régler des choses peut-être un peu plus urgentes, puis moi,
je savais qu'il y avait un projet de loi qui avait été travaillé au ministère, donc on va revenir par la suite. Puis,
ce qu'on veut faire là-dedans, puis je tiens à le dire, on ne veut pas
mettre de partisanerie là-dedans, on veut
vraiment s'organiser pour faire le mieux et pour la recherche mais surtout, à
la fin, pour les patients. Ça fait que, ça, je pense qu'on a eu la
réponse du ministre puis je suis très satisfait de ça.
Je
reviendrais sur un élément, qui est celui des circonstances à justifier, risque
minime, risque sérieux. Vous m'avez un
peu donné raison la semaine passée, quand vous dites : À Sainte-Justine,
notre interprétation est celle-là, et on n'a pas besoin de changer ça. On a rencontré d'autres comités, d'autres
représentants, et leur interprétation était complètement différente. Moi, ce que ça me dit, là, c'est que
ce n'est pas nécessairement Sainte-Justine qui a raison, pas
nécessairement tort, mais ça veut dire qu'on
a besoin de clarification. Et tantôt vous disiez : Bien, dans ce qu'on...
on devrait se contenter de ça, parce que notre interprétation est
celle-là. Moi, comme législateur, ça ne me satisfait pas. Parce que, si vous,
vous l'interprétez comme ça, puis il y en a qui sont venus, la semaine passée,
nous dire, puis ça a été repris par le ministre textuellement, en disant : Vous ne pouvez pas faire de projet pour
le cancer à cause de ça, c'est parce qu'il y a quelqu'un à quelque part qui a interprété différemment. Puis
je ne veux pas porter de jugement sur les différents niveaux des
avocats, mais il y a
eu des interprétations, par des gens très compétents, différentes. Ça fait que
je ne sais pas si ça vous convainc que ça vaut la peine de clarifier ça.
Le Président (M.
Bergman) : M. Sinnett. Me Cardinal.
Mme Cardinal (Geneviève) : Ce que je craindrais le plus, c'est qu'on enlève
toute notion de risque dans le Code civil. Ça, ça m'inquiéterait
énormément. La notion de risque sérieux, je pense, permet... est une balise qui
permet de protéger les enfants. Je pense qu'il
faut le voir sous cet angle-là. C'est une population vulnérable, il faut faire
attention aux mots qu'on va utiliser. Est-ce
qu'on peut parler d'une proportionnalité de risques, ou mieux le définir?
Peut-être, mais je pense qu'il faut absolument conserver une notion de
risque dans le Code civil.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. De conserver la notion de risque, je suis d'accord
avec vous. Mais tantôt votre interprétation
était que, même lorsque ça pouvait représenter un danger, lorsque la maladie
était encore plus grave que le risque,
on pouvait aller de l'avant. Mais ça n'a pas été l'interprétation de d'autres
groupes. Puis là on parle pour les enfants, mais c'est la même règle qui s'applique pour les personnes inaptes et
les adultes. Donc, c'est pour ça que je pense qu'il faut vraiment
prendre le temps de rédiger à nouveau cet article-là, pour que la réalité soit
conforme avec les mots qu'on veut mettre. Je
pense que c'est... Ça, ça va être un élément sur lequel, moi, je vais insister.
Et puis vous venez de me donner la réponse. Il faut qu'on parle de
risque, mais on peut peut-être plus parler de proportionnalité de risques. Comment nos légistes vont le rédiger, on va avoir l'occasion
de le travailler. Mais on veut vraiment garder cette notion-là de risque
mais que tout le monde comprenne la même chose.
Le Président (M.
Bergman) : M. Sinnett.
M. Sinnett (Daniel) : Oui. Bon, je pense qu'on est d'accord sur certains points. La notion de
risque pondérable en fonction d'une situation, je pense que c'est
quelque chose qu'on... c'est là qu'on voudrait s'aligner.
Je
voudrais juste revenir sur les questions de chimiothérapie et de cancer
pédiatrique; bon, c'est mon domaine, là. Ce qu'il faut comprendre, c'est que vous avez devant vous un individu,
vous lui offrez un traitement qu'on va qualifier de standard. Donc, à ce moment-là, ce n'est pas un
projet de recherche, c'est un standard. Et ce qu'on lui propose comme alternative, c'est de participer à une étude... à
un projet de recherche multicentrique. Et on le sait parce qu'il y a des
données probantes qui démontrent que ce
projet-là multicentrique, bon, avec différents changements dans le protocole,
augmente ses chances de survie de 15 % à 20 %, O.K.? Et donc c'est la
raison pour laquelle à peu près 80 % des enfants à Sainte-Justine sont sur protocole. Parce que le protocole
qui est proposé augmente l'espérance de vie de 15 % à 20 %. Et
donc ça, c'est considéré, par le comité d'éthique,
dans un risque. C'est la même chose pour une maladie, par exemple, qu'il
n'existe pas de cure. Arrive une
possibilité. L'enfant va décéder, probablement. Arrive un protocole, par
exemple, particulierqu'on pourrait
essayer. Donc, on va l'essayer. Donc, la notion de risque est variable, alors
que, l'individu qui n'est pas malade, on ne va pas le soumettre à de la
chimiothérapie.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Juste pour vous dire...
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : ...c'est ce qu'on veut que vous faites... que
vous allez faire... que vous fassiez, sauf qu'il faut qu'on l'écrive
comme il faut, de façon à vous permettre de le faire mais que tous les centres
aient la même interprétation pour que… c'est vrai pour vous, c'est vrai pour
les adultes.
Rapidement,
parce qu'il vous reste peu de temps... il nous reste peu de temps, une petite
question, probablement que c'est Me
Lecoq qui va pouvoir répondre, l'article de la question de la confidentialité,
vous dites : Ça va aller comme un peu
dans le traitement des plaintes; c'est l'article 218, que vous connaissez
très bien. L'article 218, à ma connaissance, même le patient n'a
pas accès à son dossier dans le cas d'une plainte.
Mme Lecoq
(Nathalie) : Dans le cas d'une plainte...
Le Président (M.
Bergman) : Me Lecoq.
Mme Lecoq
(Nathalie) : Pardon. Dans le cas d'une plainte...
M. Bolduc
(Jean-Talon) : ...le patient.
Mme Lecoq (Nathalie) : ...le plaignant va avoir accès à son dossier de
plainte parce que c'est les mêmes règles qui s'appliquent dans la Loi
sur les services de santé et services sociaux. Donc, tout le régime, de l'article 17
à 28, s'applique pour le dossier de plainte également. Et le législateur l'avait
prévu expressément. On voit, avec la réforme proposée pour la Loi sur les
services de santé et services sociaux...
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Me
Lecoq, c'est juste pour savoir, quand je... juste pour spécifier, quand ça va
être une plainte qui va être étudiée par le
médecin examinateur, parce que, si vous suivez le même régime, ça va aller...
la plainte qui concerne un professionnel va aller au médecin
examinateur. Et cette plainte-là va être protégée par l'article 218.
Le Président (M. Bergman) : Me
Lecoq.
Mme Lecoq
(Nathalie) : Oui. Si ça
monte au comité de discipline… Quand la plainte est référée par le
médecin examinateur à un comité de
discipline au conseil des médecins, donc, aussi les pharmaciens, les dossiers
du CMDP, oui, sont protégés, mais le
dossier de plainte demeure accessible au patient, donc au plaignant. Ça, ça
reste. Je pense que c'est important.
Parce qu'on a ouvert la porte depuis l'arrêt Gomez contre Michaud de la Cour d'appel
qui disait que c'était important de traiter tous les participants à une
recherche comme des usagers, notamment quand ça se passe dans un établissement
de santé. On voit que l'ajout de le codifier dans la Loi sur les services de
santé et services sociaux est important. Je pense qu'il faut profiter de l'occasion
pour s'assurer qu'on gère la question justement de conférer les mêmes droits aux participants de recherche, à la
confidentialité de leurs dossiers de recherche aussi, comme on fait pour
leurs dossiers patients.
Si je pouvais juste revenir sur un petit
point...
Le Président (M. Bergman) : ...
• (12 h 10) •
Mme Lecoq
(Nathalie) : ...quand on
discutait du risque sérieux. Est-ce que c'est possible? Juste de... Parce
que, dans le fond, si je comprends bien,
dans le projet de loi, on ajoute le terme, je vais juste lire le premier
alinéa : «Un mineur ou un majeur
inapte ne peut participer à une recherche qui comporte, dans les circonstances,
un risque sérieux pour sa santé…» À ce niveau-là, nous, on accueille
favorablement ça. Les termes «dans les circonstances», c'était plutôt au troisième alinéa du projet de loi qu'on trouvait
que ça portait à confusion quand un comité d'éthique de la recherche
doit se prononcer sur ça. Donc, je voulais juste qu'on clarifie.
Pour nous, ça répond à la préoccupation
justement, peut-être, de l'application et l'interprétation qui n'est pas uniforme par rapport à la notion de risque
sérieux. Donc, en ajoutant «dans les circonstances», ça permettrait
justement aux gens d'avoir cette marge de manoeuvre.
Le Président (M. Bergman) : Merci.
Maintenant, pour le bloc du deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de
Groulx.
Mme
Daneault : Merci, M. le
Président. Merci. Merci de votre présence. Je reviens effectivement sur la
notion de risque sérieux, là, qui semble faire l'unanimité à chaque fois qu'il
y a un groupe qui se présente devant nous. Mais aujourd'hui votre position est complètement... bien, est différente des
groupes précédents. Et ce que j'entends de vous, c'est effectivement qu'on
veut préserver la notion de risque, de le revoir retrouvé.
Par contre,
actuellement, dans le Code civil, l'article 20 nous dit : Un risque
qui «ne soit pas hors de proportion avec le bienfait qu'on peut
raisonnablement en [retirer]».
Mme Lecoq (Nathalie) : ...majeur
apte.
Mme
Daneault : Oui. Mais est-ce
que... À l'article 21, si on remplaçait «risque sérieux» par ce même
libellé, est-ce que, selon vous, ça
correspondrait, dans le sens de conserver la notion de risque, mais est-ce que
ça répondrait aussi à vos ententes de le libeller de cette façon-là
plutôt que le libeller uniquement comme un risque sérieux?
Le Président (M. Bergman) : M.
Sinnett. Me Cardinal.
Mme
Cardinal (Geneviève) : Je
pense... Écoutez, je le réfléchis au moment où vous posez la question. «…que le
risque couru ne soit pas hors de proportion avec le bienfait qu'on peut
raisonnablement en espérer.» J'imagine que, lors de la rédaction de l'article 21, on a voulu être plus protecteur en
parlant de risque sérieux. Est-ce que le critère qu'on utilise chez l'adulte
pourrait protéger adéquatement l'enfant? Je veux dire, on assurait quand même
une bonne protection.
Un autre
exemple de comment on utilise le risque sérieux à l'hôpital, si ça peut vous
aider, par exemple, lorsqu'on a un projet de recherche où on ne nous
demande de faire une endoscopie ou une ponction de moelle osseuse qu'aux fins de la recherche, on va faire valoir la notion
de risque sérieux pour dire que ce n'est pas possible. On ne fera pas
subir une ponction de moelle osseuse ou une
endoscopie à un enfant qui n'en a pas besoin dans le cadre de ses soins, donc
pour les seules fins de la recherche.
Mais, écoutez, je pense que ça peut être
intéressant comme notion, là. Il faudrait y réfléchir.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme Daneault : Merci, en fait.
Le Président (M. Bergman) : Alors,
M. Sinnett, Me Cardinal, Me Lecoq, merci pour votre présentation et l'échange
avec les députés.
Collègues,
je suspends seulement pour quelques instants pour laisser les gens de la
Commission d'accès à l'information pour prendre place à la table. Je suspends
pour quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à
12 h 13)
(Reprise à 12 h 15)
Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît. Alors, je souhaite la
bienvenue à la Commission d'accès à l'information. Me Desmeules, Me
Giroux-Blanchet, Mme Bétie, bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation, suivie d'un échange avec
les membres de la commission. Alors, s'il vous plaît, faites l'identification
de chacun de vos membres. Et vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation.
Commission d'accès à l'information (CAI)
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Merci. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM.
les députés, permettez-moi, dans un premier temps, effectivement, de
vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui, soit, à ma droite,
Me Sophie Giroux-Blanchet, de la Direction des affaires juridiques de la
commission, ainsi qu'à ma gauche Mme
Christiane Bétie, directrice de l'analyse et de l'évaluation à la commission.
Le président de la Commission d'accès à l'information, Me Jean Chartier, s'excuse auprès des parlementaires de
ne pouvoir être présent aujourd'hui en raison d'un ennui de santé. C'est donc à titre de secrétaire
général et directeur des affaires juridiques que je vous transmettrai la
position de la commission en lien avec le projet de loi n° 30.
J'aimerais
remercier les membres de la Commission de la santé et aux services sociaux d'offrir
à la commission l'opportunité de participer à ces consultations
particulières et auditions publiques et de présenter ses commentaires et
réflexions concernant ce projet de loi. Tout comme elle en a fait mention dans
son rapport quinquennal de 2002, la commission
croit qu'il est toujours d'actualité de discuter des enjeux liés à la recherche
et à la protection des renseignements personnels.
La
commission est d'avis que la recherche doit se faire dans le respect de
plusieurs valeurs fondamentales de notre société, dont la protection des
renseignements personnels et le droit à la vie privée, prévus à la Charte des
droits et libertés de la personne. À cet
effet, la commission croit que l'amélioration de la santé et du bien-être par
la recherche doit se faire dans un
contexte de transparence, de respect de la volonté des personnes et d'imputabilité.
De plus, la commission considère que plus un renseignement personnel
collecté est susceptible de révéler des informations sensibles sur une
personne, plus grandes doivent être les garanties de confidentialité.
Après analyse du
projet de loi, la Commission d'accès à l'information nous demande de faire part
aux parlementaires de quelques observations au regard de son mandat de
surveillance et de promotion de la protection des renseignements personnels, et
ce, afin d'assurer une juste utilisation des renseignements personnels dans le
cadre de la recherche.
Le
projet de loi n° 30 prévoit un assouplissement des règles applicables au
consentement du mineur de 14 ans et plus et du majeur inapte dans le cadre de recherche présentant un risque
minimal pour les individus concernés lorsque les circonstances le justifient. Ces modifications découleraient de
problèmes auxquels seraient confrontés les chercheurs et qui nuiraient à la recherche lorsqu'il s'agit d'impliquer
ces deux clientèles vulnérables. De plus, le projet de loi accorde un
rôle accru au comité d'éthique de la recherche dans l'évaluation des conditions
permettant le consentement des mineurs de 14 ans et plus et des majeurs
inaptes.
Le libellé actuel des
articles visés par les modifications du projet de loi a été adopté tenant
compte de la vulnérabilité des mineurs et des majeurs inaptes. Des moyens
supplémentaires de contrôle et de protection ont en conséquence été mis en place par le législateur. La commission appelle à
la prudence dans les assouplissements proposés par le projet de loi, considérant la difficulté d'évaluer les conséquences
des changements proposés sur la protection des renseignements personnels
des personnes concernées.
La
protection de l'intégrité et de l'inviolabilité de la personne est établie par
le Code civil, et une atteinte à cette intégrité doit être faite
uniquement avec le consentement libre et éclairé de la personne ou de son
représentant. Dans le cas des mineurs de
14 ans et plus et des majeurs inaptes, le projet de loi propose de
permettre aux mineurs et à la personne habilitée à consentir aux soins
du majeur inapte de consentir, si les circonstances le justifient, à la
participation de recherche. Une telle participation peut impliquer la collecte,
la conservation, l'utilisation et peut-être même la communication de
renseignements personnels. La commission insiste afin que les intervenants s'assurent
que le consentement qui sera donné par ces
personnes soit sans équivoque. Selon la commission, recourir au consentement
du mineur, à titre d'exemple, ne devrait
être utilisé qu'exceptionnellement et après qu'ait été envisagée la
possibilité, dans tous les cas, de recourir au consentement de l'autorité
parentale ou du tuteur du mineur.
En
outre, la complexité des travaux de recherche exige, selon la commission, des
efforts accrus de vulgarisation auprès
des personnes visées afin que le consentement obtenu soit éclairé. La
commission rappelle que même les majeurs aptes ne possèdent pas toujours
les connaissances nécessaires à l'évaluation des informations et des
conséquences possibles d'une collecte de renseignements personnels dans le
cadre d'une recherche dont les enjeux font appel à des connaissances particulières de domaines spécialisés. Ainsi, la personne
doit recevoir les explications pertinentes pour lui permettre de
comprendre et de connaître la nature, le but et la durée de la recherche.
Un consentement
valable doit être manifeste, libre, éclairé, donné à des fins spécifiques et ne
valoir que pour la durée nécessaire à la
réalisation des fins spécifiées. Par ailleurs, la commission rappelle que l'utilisation
secondaire des renseignements personnels collectés à la
suite de l'expression d'un consentement dans le cadre d'une recherche doit
également faire l'objet d'un consentement.
• (12 h 20) •
La
commission s'interroge également sur la mise en oeuvre de l'obtention d'un
consentement autrement que par écrit,
sur le fait que les modalités d'obtention du consentement soient déterminées
par le comité d'éthique de la recherche. La commission se questionne sur
l'approche qui sera retenue par les différents comités d'éthique pour
déterminer les modalités permettant de constituer une preuve de ce
consentement.
Un
autre point à préciser, selon la commission, concerne la validité du
consentement de la collecte d'organes, de tissus ou d'autres substances prélevés sur une personne dans le cadre de
soins qui lui sont prodigués et utilisés aux fins de recherche après le décès de cette personne. À ce
sujet, la commission suggère que tout soit mis en place afin d'obtenir,
dans tous les cas qui s'y prêtent, le consentement de la personne de son vivant
afin de limiter autant que possible les situations au cours desquelles il sera
nécessaire de demander le consentement de la personne qui pouvait ou aurait pu
consentir aux soins en lieu et place de la personne décédée. En effet, il est
nécessaire, de l'avis de la commission, de prendre tous les moyens disponibles
afin de consigner et de respecter les volontés du défunt.
Le
rôle élargi des comités d'éthique à la recherche amène la commission à s'interroger
sur l'encadrement législatif et
réglementaire applicable à ces comités d'éthique. La commission suggère qu'un
cadre plus précis soit adopté afin de prévoir quelles devraient être
leurs responsabilités actuelles et futures en lien avec les rôles et mandats
des différents intervenants impliqués dans
une recherche. Pour la commission, il semble requis d'établir des règles
claires qui devront être mises en place afin d'encadrer les travaux et
les suivis réalisés par les comités d'éthique en matière de protection des
renseignements personnels.
La commission est
préoccupée à la suite de certains propos tenus dans le cadre des consultations
publiques relativement à ce projet de loi,
notamment quant aux différences d'approche entre les comités d'éthique. Plus
particulièrement, la commission se
questionne sur la prise en compte par les comités d'éthique, lors de l'évaluation
des projets de recherche qui leur sont soumis, de la protection des
renseignements personnels. En effet, la commission se questionne quant à l'expertise des comités d'éthique à prendre en
considération les obligations prévues aux lois en matière de protection
des renseignements personnels et sur la formation dispensée à ce sujet aux
membres de ces comités.
Puisque
les comités d'éthique, selon ce que prévoit le projet de loi, auront à
déterminer dans quels cas le consentement auprès des mineurs de
14 ans et plus ou des personnes pouvant consentir aux soins pour les
majeurs inaptes sera opportun, la commission
s'interroge sur l'approche qui sera retenue, dans les faits, par les comités
d'éthique. Puisque ces comités d'éthique à
la recherche sont institués ou désignés par le ministre de la Santé et des
Services sociaux, la commission estime que le ministre doit veiller à
sensibiliser et à former les membres de ces comités. En outre, la commission
propose également la mise en place d'une reddition de comptes du suivi et de l'application
des règles en matière de protection des renseignements personnels par les
comités d'éthique.
Par le passé, le
Conseil de la santé et du bien-être avait recommandé au gouvernement d'allouer
un budget de recherche et d'éducation à la commission afin qu'elle puisse
assurer auprès de la population et des intervenants du milieu de la santé et de la recherche la promotion des droits visant la
protection des renseignements personnels, la bonne compréhension des responsabilités qui s'y
rattachent ainsi que leur application dans le contexte de la recherche.
Cette possibilité est une autre alternative.
Mais ce qui importe, c'est qu'un contrôle soit assuré, et que les comités
d'éthique soient imputables à leur interprétation des règles assurant la
protection des renseignements personnels, et que des mesures soient prévues
afin d'assurer une transparence du processus menant à une recherche.
En guise de
conclusion, la commission est d'avis qu'il est important de maintenir un
équilibre entre les buts poursuivis par la
recherche et la protection des renseignements personnels, plus particulièrement
quant aux renseignements de santé des
personnes vulnérables. Elle espère également que ce projet de loi sera l'occasion
de poursuivre la réflexion sur l'encadrement législatif global portant
sur la recherche et les comités d'éthique. Enfin, la commission espère que tout
sera mis en oeuvre pour obtenir le consentement
éclairé des personnes concernées dans le but de protéger les renseignements
personnels de celles-ci.
Je vous remercie de
votre attention.
Le Président (M. Bergman) : Merci pour votre présentation, Maintenant, pour le
bloc du gouvernement, M. le ministre.
M. Hébert :
Merci beaucoup, monsieur, mesdames, pour cette intervention. Je voudrais
comprendre pourquoi vous semblez, dans votre mémoire, voir dans les
modifications proposées des changements au principe du consentement libre et éclairé. Parce que vous insistez beaucoup sur un
consentement sans équivoque. Qu'est-ce qu'il y a, dans ce projet de loi, qui change le principe du
consentement libre et éclairé? Je ne comprends pas vos préoccupations.
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, ça découle en bonne partie du fait qu'il ne
semble pas y avoir de cadre précis permettant aux comités d'éthique d'aborder
les considérations de protection des renseignements personnels dans l'évaluation
des situations qui permettent de passer outre, par exemple, au consentement de
l'autorité parentale. Donc, il faut toujours, selon la commission, s'assurer
que le consentement qui sera exprimé sera fait en connaissance de cause dans
toutes les situations.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Où
est-ce que le projet de loi modifie le principe du consentement libre et
éclairé? ...demandé à quelqu'un d'autre, mais le principe du consentement libre
et éclairé, il reste entier.
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Ce n'est pas tant dans les modifications qui sont apportées au projet de
loi, c'est un constat par rapport à la pratique qui a présentement cours à l'effet
qu'il y a des interprétations qui semblent diverger d'un endroit à l'autre.
M. Hébert : Vous basez cette
analyse-là sur quoi?
Le Président (M. Bergman) : ...
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Bien, notamment... Bien, évidemment, je peux vous mettre dans un certain
contexte. La commission n'a pas, comme
intervenants directs, les comités d'éthique à la recherche. Toutefois, dans
le cadre de ses mandats, la commission
reçoit des demandes d'autorisation de la part du chercheur pour recevoir
communicationde renseignements
personnels dans le cadre de recherche sans le consentement de la personne
concernée. Dans le cadre de l'évaluation de ses dossiers, il arrive à la
commission de prendre connaissance d'interprétations qui sont portées par les comités d'éthique à la recherche sur
différents éléments qui ont trait au consentement, notamment. C'est ce
qui permet de constater, par la commission,
que, des fois, il y a certaines interprétations qui semblent s'écarter des
principes qui sont établis. Puis par
ailleurs, bien, évidemment, vous avez entendu, au cours de la présente
commission parlementaire, certaines
interventions à l'effet qu'il y a effectivement des interprétations qui
semblent diverger d'un comité d'éthique à l'autre.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Est-ce que je
comprends, là, que vous êtes en train de me dire que les comités d'éthique ne
prennent pas compte de la protection des renseignements personnels lors de leur
évaluation?
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Je ne dis pas que, dans l'absolu, il n'y a aucune prise en considération,
mais je vous dis qu'il semble y avoir des interprétations qui divergent sur
certains éléments qui ont trait au consentement dans l'évaluation qui est faite
par les comités d'éthique.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Vous semblez aussi
évoquer que l'utilisation secondaire de données doit faire l'objet d'un
consentement, ce qui m'apparaît être une évidence. Et vous semblez donc mettre
en doute que ça, ça fasse l'objet d'un consentement.
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Bien, en fait, c'est une règle qui, selon nous, doit être rappelée, parce que
c'est un élément qui est important. Que ce
soit pour une collecte de renseignements personnels directement au dossier ou
que ce soit par le biais de prélèvements de tissus ou d'organes, effectivement
l'obtention d'un consentement manifeste sur chacun
des éléments de l'utilisation de renseignements personnels sur la commission
est un élément important qu'il est bon de rappeler.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Alors, si je
comprends bien, vous souhaitez qu'on réfléchisse, peut-être dans un autre
contexte ou dans un autre projet de loi, sur la définition ou revenir
sur le principe du consentement libre et éclairé et du consentement et de la protection des renseignements personnels. C'est-u
ça que je comprends? C'est parce que je ne vois pas le lien avec le
projet de loi qui est là actuellement. Alors, s'il y en a un, éclairez-moi,
mais, s'il n'y en a pas, je vais comprendre
que c'est une invitation à réfléchir de nouveau sur ces principes du
consentement libre et éclairé et sur le consentement de l'utilisation
des données personnelles.
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Ce
que le projet de loi introduit, c'est des modifications qui permettent d'obtenir
un consentement auprès de mineurs de 14 ans et plus — donc,
qui est une clientèle, selon nous, qui est vulnérable — à l'effet d'obtenir des renseignements, de
collecter des renseignements personnels les concernant. Et on introduit... en fait, on élargit le rôle des
comités d'éthique à la recherche dans l'appréciation des situations qui
devraient donner lieu ou non à ces possibilités. Bien,
selon nous, il est nécessaire de préciser le rôle des comités d'éthique à la recherche dans leur appréciation des critères ou
des considérants afférents à la protection des renseignements
personnels. Puis, de la même façon, pour les
majeurs inaptes, on introduit... on élargit les possibilités d'obtenir le
consentement non plus simplement
auprès du représentant, mais également auprès d'une personne qui peut consentir
aux soins pour le majeur inapte dans les circonstances. Et, là encore,
on donne un rôle au comité d'éthique à la recherche, mais sans préciser davantage les balises qui devraient guider les
activités du comité d'éthique à la recherche. Donc, dans ce sens, nous
croyons qu'il serait opportun de préciser les règles... les activités du comité
d'éthique.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Alors, quelles sont vos
propositions? C'est quoi, les précisions que vous voulez mettre?
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
• (12 h 30) •
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
C'est que, dans les travaux des comités d'éthique, il devrait y avoir une
prise en considération... Ça devrait être prévu explicitement que les comités d'éthique
doivent prendre en considération les règles
entourant la collecte de renseignements personnels dans le respect de la vie
privée des gens concernés, et, plus on augmente
dans la sensibilité des renseignements personnels, plus particulièrement auprès
de clientèles vulnérables, ça devient d'autant plus important.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : C'est tout pour moi. Est-ce
que mes collègues…
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. Bonjour. Bonjour, mesdames et monsieur.
Simplement peut-être nous expliquer un peu mieux votre préoccupation par rapport au traitement des plaintes. Alors, si j'ai
bien compris ce que vous proposez, c'est qu'on clarifie, en fait, qui va
traiter les plaintes dans le cadre d'un projet de recherche dans un
établissement. À l'heure actuelle, c'est le
comité de plaintes qui reçoit les plaintes des usagers et, s'il y avait des
plaintes spécifiques par rapport à la protection des renseignements
individuels dans le cadre d'un projet de recherche mené par un établissement,
ce que vous dites, là, c'est qu'il pourrait y avoir confusion entre les deux,
votre commission et le comité des usagers, pour la réception et l'analyse des
plaintes?
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : En
fait...
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Oui, merci. En fait, ce n'est pas tant avec le comité des usagers, c'est en
lien avec le Protecteur des usagers, qui a compétence, aux termes du processus
de traitement des plaintes, pour réviser le traitement
qui est fait, dans un établissement, à une plainte. En fait, aux termes du
processus justement, une plainte est cheminée
au responsable des plaintes dans un établissement et, si l'usager n'est pas
satisfait du traitement qui est donné à cette plainte, il peut en
référer au Protecteur des usagers, soit le Protecteur du citoyen, là, selon la
législation. Et ce que l'article 6 du projet
de loi vient introduire, c'est que, lorsque nous sommes dans le cadre d'une
recherche, ça aussi, ça fait partie des attributions qui sont dévolues,
en termes de processus, au Protecteur des usagers.
Ce qu'on
constate, c'est qu'évidemment, un des éléments importants qui pourraient surgir
dans le cadre d'une plainte, c'est des éléments qui portent sur le
consentement à la communication de renseignements personnels, et, dans ce contexte, la Commission d'accès à l'information,
selon elle, a une expertise particulière qui lui permettrait de traiter ce genre de plainte. Évidemment, en vertu de l'article 173
de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels, soit la loi qui institue la
Commission d'accès à l'information, le Protecteur
du citoyen doit acheminer à la Commission d'accès les plaintes qui relèvent
davantage de la compétence de la commission.
Toutefois, selon la commission, là, à la lecture de l'amendement qui est
apporté à l'article 34 de la Loi sur les services de santé et services sociaux, on semble... en fait, je ne suis
pas certain que, dans la pratique, on va interpréter comme de quoi que
ces plaintes-là doivent nécessairement être référées à la Commission d'accès à
l'information, mais qu'on n'est pas en train
de créer en quelque sorte une double compétence, une double juridiction entre
la Commission d'accès à l'information et le Protecteur du citoyen.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Oui. Et ce que vous
dites, en fait, c'est que l'expertise, l'expertise la plus probante pour
analyser et traiter ces plaintes, c'est la
Commission d'accès à l'information qui l'a et qu'on devrait clarifier toute la
procédure dans le projet de loi pour s'assurer que les plaintes
finissent par aboutir au bon endroit.
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Oui, merci. Évidemment, la compétence
particulière de la commission porte sur
la protection des renseignements personnels. Parce qu'on convient que, dans le
cadre d'une recherche, il peut y avoir bien d'autres éléments qui font l'objet
d'une plainte que des éléments afférents à la protection de renseignements personnels. Puis, ça, évidemment, on convient que
ça ne relève pas de la compétence de la commission. Mais, pour ce qui a trait à son champ… à son domaine d'expertise,
peut-être qu'il y aurait lieu de préciser un peu le champ de compétence
de chacune de ces deux institutions désignées par l'Assemblée nationale.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx :
Merci. Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson. Vous avez trois minutes.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci. Alors, bonjour. Merci d'être là. Depuis
plusieurs jours, on entend… on a entendu
différents groupes nous dire comment c'était facilitant pour eux d'avoir un
consentement pas nécessairement écrit pour différentes recherches à
caractère plutôt psychosocial sur les déterminants de la santé, ce genre de
situation là. Vous, pouvez-vous nous
préciser vos préoccupations à l'égard de la possibilité de consentir autrement
que par écrit? Vous semblez avoir des
préoccupations à ce niveau-là. Pouvez-vous nous dire quelles sont vos... nous
expliquer vos préoccupations?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Merci. Évidemment, un des éléments qui
interpellent la commission là-dessus, c'est évidemment la notion de
preuve du consentement, à l'effet d'avoir un élément qui nous permet de
comprendre la portée du consentement, qu'est-ce que ça vise exactement, le
consentement qui est formulé. Il y a plusieurs
éléments, là, qui peuvent entourer les travaux de recherche, notamment pourquoi
les renseignements personnels sont
communiqués? Est-ce qu'il y aura une utilisation secondaire? Est-ce qu'une
communication sera faite à un tiers? C'est tous des éléments qui sont
importants, qui méritent d'être précisés. Donc, évidemment, un écrit est un
outil facilitant pour déterminer qu'est-ce qui fait l'objet du consentement.
Et
puis un autre élément qui est important, c'est aussi à prendre en
considération, bien, c'est un éventuel droit de retrait d'une personne. En ayant une preuve écrite du consentement, ça
facilite, pour le citoyen ou l'usager, l'exercice du choix de se
maintenir ou non dans le cadre de travaux de recherche.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Masson, il vous reste une minute.
Mme
Gadoury-Hamelin : Ça va pour moi. Les collègues?
Le Président (M.
Bergman) : Alors, le temps pour l'opposition officielle, M. le député
de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, merci d'être ici.
Puis j'ai eu l'occasion d'assister souvent à des présentations de la
commission, peut-être pour l'Assemblée, là, peut-être nous expliquer c'est
quoi, votre rôle. Puis vous n'allez pas
nécessairement dans le détail, mais vous avez quand même un rôle de
surveillance générale qui fait que,
dès qu'il se fait une loi, vous faites une mise en garde avec beaucoup de
prudence par rapport à la loi, puisqu'il s'agit de la protection des
renseignements confidentiels. Peut-être en expliquant bien votre rôle, des fois
on va peut-être plus comprendre, là, qu'à
toute loi vous n'allez pas juste traiter de la loi mais également des
possibilités entourant la loi, pour s'assurer
de la protection. Je pense que ça permettrait de bien clarifier, parce que vous
avez quand même un rôle important de protection.
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, merci beaucoup. En fait, c'est une occasion
intéressante que vous nous présentez là. En fait, la Commission d'accès
à l'information est un organisme public dont les membres, au nombre de sept, sont nommés par l'Assemblée nationale. La
Commission d'accès à l'information a deux volets d'activité
particuliers, soit l'accès à l'information
et la protection des renseignements personnels. Et, pour exercer ces fonctions,
elle dispose d'un volet juridictionnel qui est en quelque sorte son rôle
de tribunal administratif mais également des fonctions de surveillance. Plus spécifiquement aujourd'hui, c'est
le volet renseignements personnels et protection des renseignements...
en fait, protection des renseignements personnels mais dans le cadre de ses
activités de surveillance que finalement je m'adresse à vous.
La
protection des renseignements personnels dans le cadre des activités de
surveillance peut être abordée par la commission notamment dans le cadre
de traitement de plainte. Lorsqu'un citoyen considère que, par exemple, ses
renseignements personnels n'ont pas été traités adéquatement ou conformément à
la loi, il peut porter plainte à la commission, qui peut examiner la plainte et
a un pouvoir d'ordonnance, éventuellement. Également, la commission peut — j'y
ai fait référence tout à l'heure — accorder à un chercheur l'autorisation de
recevoir des renseignements personnels sans le consentement de la personne,
toujours à des fins de recherche.
Mais
également la commission a un rôle de promotion de la protection des
renseignements personnels lorsque, selon
elle, il y a des considérants, notamment dans un projet de loi, qui méritent d'être
portés à l'attention du législateur. Donc, c'est un peu, en quelque sorte, en vertu de
cette possibilité que lui offre la loi que la commission intervient
auprès des différentes commissions
parlementaires pour faire valoir des préoccupations qu'elle peut avoir, ou tout
simplement des rappels ou des mises en garde
au législateur, en lien avec des enjeux de protection des renseignements
personnels.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : M. le Président, je vais passer la parole à ma
collègue.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Bonjour. J'ai appris, à travers ce qu'on
nous a présenté devant la commission, que très peu de personnes inaptes ont un
tuteur, ou un curateur, ou un mandataire, probablement moins de 30 %. Et
je ne connaissais pas ça et je me posais la question : Mais, mon Dieu,
comment ces gens effectuent des retraits bancaires, etc.?
Est-ce que vous avez
une opinion sur cela, sur le fait qu'on a très peu de personnes inaptes qui ont
un tuteur, curateur ou mandataire, et qu'on permet des gens qui sont des
proches ou qui les connaissent bien de prendre des décisions dans leur cas…
pour eux?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules
(Jean-Sébastien) : Bien, en fait, ce qu'un survol de la législation
permet de constater... Bien, premièrement, vous aurez constaté, à l'avis écrit
de la commission et à ma présentation, que la commission n'a pas formulé d'objection
par rapport à cette question parce que la commission convient de l'importance d'effectuer
les recherches, notamment auprès des majeurs inaptes. Les préoccupations de la
commission sont davantage au niveau de l'expression du consentement. Je vais
vous donner...
Mme de
Santis : C'est pour ça que je vous pose la question.
M. Desmeules
(Jean-Sébastien) : Bien oui.
• (12 h 40) •
Mme de
Santis : Qu'est-ce que vous pensez du fait qu'il y a très peu de gens
qui ont un tuteur, curateur ou mandataire qui... personne inapte?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Dans ce contexte, introduire la possibilité que
le consentement soit formulé par une autre personne, à savoir la
personne qui peut consentir aux soins, semble être une introduction législative
qui va permettre de régler une situation. Toutefois, la commission fait le
constat suivant : c'est que, lorsqu'on est dans le cadre d'un régime de protection qui est couvert par les
articles 258, je crois, suivants du Code civil, il y a une
disposition, qui est à l'article 260, qui prévoit que le représentant du
majeur inapte doit… je n'ai pas le libellé exact, mais doit démontrer un certain intérêt pour cette personne,
doit accompagner cette personne, doit assurer une présence auprès de cette
personne. Évidemment, on constate que la personne qui peut consentir aux soins
n'a pas une telle obligation législative. Peut-être que, dans les faits, c'est
ce qui se déroule régulièrement, mais peut-être qu'il y a la…
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : La loi permet en plus à un proche parent, O.K., ou une personne qui
démontre par le majeur un intérêt particulier pour prendre une décision
quant aux soins d'une personne inapte, O.K? Est-ce que vous croyez que ça devrait être les mêmes personnes qui devraient
décider si une personne inapte fasse partie d'un programme de recherche?
Parce que qui décide c'est qui, une personne qui démontre pour le majeur un
intérêt particulier?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules
(Jean-Sébastien) : L'important pour la commission, c'est que la
personne qui va formuler un consentement va
le faire dans l'intérêt du majeur inapte et que cette personne va le faire
également dans une préoccupation de protection des renseignements
personnels de cette personne. Que ce soit le représentant légal qui a ces
obligations légales prévues au Code civil ou
que ce soit la personne qui peut consentir aux soins, l'important, c'est que
soit pris en considération l'intérêt
de la personne qui va manifester le consentement pour le majeur inapte mais,
notamment, dans une optique de
protection des renseignements personnels tout au long d'une éventuelle
recherche, pas seulement au moment d'accepter d'adhérer à une recherche,
mais également dans son déroulement dans le temps.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : D'après l'article 17
du Code civil, le mineur de 14 ans et plus peut consentir seul aux soins
non requis par l'état de santé, O.K.? Maintenant, la modification qu'on a à l'article 21,
«le mineur de 14 ans et plus peut [...] consentir seul», on ne parle plus d'un mineur qui peut consentir
uniquement aux soins non requis par l'état de santé. Est-ce que vous
avez une opinion là-dessus?
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
En fait, selon la commission, là, c'est deux choses qui peuvent être liées
mais qui sont quand même distinctes.
Consentir à des soins, c'est une chose, mais consentir à participer à une
recherche, ça peut être connexe, mais
ce n'est pas la même chose. Et exprimer un consentement pour recevoir des
soins, c'est une chose, mais exprimer
un consentement pour participer à une recherche, c'est que ses propres
renseignements personnels soient utilisés dans le temps pour effectuer une recherche, mais c'est autre chose. Et,
dans ce sens, nous exprimons le souhait que les personnes… les mineurs
de 14 ans et plus qui seront appelés à formuler un consentement puissent
le faire en toute connaissance de cause pour l'ensemble des modalités, mais y
compris la distinction entre les deux.
Mme de Santis : Mais, si un…
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Si c'est un parent
qui doit donner son accord aux soins à un enfant de 14 ans et plus, parce
que ça touche l'état de sa santé, ce même parent maintenant n'est plus... on ne
lui demande pas si l'enfant va participer dans une recherche, vous trouvez ça
acceptable? Est-ce que vous croyez que les parents vont accepter cela?
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Bien, évidemment, c'est du cas par cas. Puis il y a plusieurs éléments à
prendre en considération, notamment la
complexité de la question et quelle utilisation sera faite des renseignements
personnels. La compréhension même d'un projet de recherche, dans certaines
circonstances, est complexe. Et peut-être que, dans certaines situations, il est préférable que le titulaire de l'autorité
parentale puisse accompagner le mineur de 14 ans et plus dans l'expression
d'un consentement.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : Je n'ai plus de
question. Merci.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme
Vallée : Oui. Alors,
bonjour. Je reviens un peu sur la question du consentement donné pour le mineur
de moins de moins de 14 ans... pour le
mineur de 14 ans et plus. Vous mentionnez dans votre mémoire que ce
consentement-là doit vraiment être donné
sans équivoque. Vous avez parlé de l'importance de vulgariser l'information.
Puis effectivement une recherche sur
l'utilisation des données obtenues en recherche puis l'utilisation des données…
ou l'utilisation de ce qui va être
obtenu suite à un soin accordé à un jeune, ce n'est pas tout à fait la même
chose. J'aimerais ça que vous puissiez aller un petit peu plus loin.
Quand vous
parlez de la vulgarisation et de l'importance, que ce soit pour le mineur, ou
même pour le majeur inapte, ou pour
les représentants, de comprendre la portée du consentement qui va être donné et
de comprendre les effets de la
recherche, j'aimerais bien savoir ce à quoi vous pensez lorsque vous nous...
nous vous... pardon, lorsque vous nous apportez la question des efforts
de vulgarisation qui devront être faits. Qu'est-ce que vous avez en tête
lorsque vous parlez de ces efforts-là?
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Oui,
merci. Selon la commission, un consentement éclairé doit porter nécessairement
sur la nature de la recherche, sur la durée de la recherche, sur les objectifs
qui sont suivis, sur les méthodes qui sont employées,
également sur les risques et conséquences. Évidemment, au niveau... Là, nous,
on s'en tient à la protection des
renseignements personnels dans nos préoccupations. Puis évidemment il faut se
rappeler également que plus les renseignements sont sensibles, plus les
explications devront prendre en considération, évidemment, la nature des
renseignements qui sont communiqués dans le cadre de la recherche.
Mme Vallée : Ça devrait…
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme Vallée : Ça devrait prendre quelle forme? Parce que, bon, vous dressez la liste
de ce qui doit être soumis à l'attention de la personne qui devra
consentir, mais, pour vous, est-ce que ça devrait prendre une forme
particulière? Est-ce qu'on devrait faire
référence à un formulaire ou... Comment... Quel est le degré de vulgarisation?
Parce qu'il y a la forme, mais il y a
aussi le degré de vulgarisation qui va dépendre. Parce que, pour certaines
personnes, une explication sera très claire et, pour d'autres, elle ne le sera
pas; ça va dépendre du degré de scolarisation puis plein d'éléments
externes. Donc, lorsqu'on pousse votre recommandation, il faut aller un petit
peu plus loin. Ça prendrait quelle forme, tout ça?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Bien, évidemment, il n'y a pas de formule
consacrée. C'est du cas par cas. Puis justement,
là, les explications qui sont fournies à une personne doivent être... doivent
prendre en considération le degré de compréhension de la personne qui
est appelée à formuler un consentement. Parce qu'il faut toujours s'assurer, si
on veut avoir une adhésion volontaire, que
la personne a bel et bien compris ce à quoi on lui demande de consentir.
Mais il n'y a pas de formule consacrée, c'est du cas par cas, il faut
accompagner la personne convenablement, là.
Mme Vallée : Je comprends, mais c'est parce que, si ultimement ce consentement-là
est donné puis mène à une problématique x ou y et qu'on se retrouve
devant une plainte qui est formulée, il faut quand même être en mesure d'apprécier
la nature du consentement libre et volontaire. D'où ma question. Pour être en
mesure d'apprécier si l'information a été vulgarisée adéquatement, et tout ça,
ça devrait possiblement prendre une forme quelconque. Avez-vous une opinion
là-dessus?
Le Président (M.
Bergman) : Vous avez le temps pour une très, très courte réponse.
M. Desmeules
(Jean-Sébastien) : Bien, c'est du cas par cas. Puis les organismes de
surveillance comme la Commission d'accès à l'information
peuvent porter une appréciation sur un consentement qui a été formulé puisque
c'est un consentement à la communication de renseignements personnels. Et il
faut s'assurer que le consentement qui a été exprimé est éclairé et que la
personne a bien compris ce à quoi elle adhérait.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci. Et merci de votre présence. Si je
comprends bien vos interventions depuis le début, est-ce que… Dans le
fond, ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est que, dans le projet de loi
actuel, il y a des éléments qui ne sont pas suffisamment clairs quant à la
protection des renseignements personnels.
Le Président (M.
Bergman) : M. Desmeules…
Mme
Daneault : Et est-ce qu'il y a des éléments que vous voudriez voir…
retrouver dans le projet de loi?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
• (12 h 50) •
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : Évidemment, les modifications qui sont introduites
sont des mesures d'exception. Donc, la commission souhaite rappeler tout
de même que la règle de base, c'est d'aller chercher le consentement du représentant légal pour ce qui est du majeur inapte,
mais également d'aller chercher le consentement du parent ou du
titulaire de l'autorité parentale dans les cas... Bon, évidemment, il y a des
nuances qui sont introduites par le projet de loi, mais, règle générale, le
consentement doit être formulé par ces personnes, et ensuite on embarque dans
des mesures d'exception, donc, qui doivent se présenter de façon
exceptionnelle, strictement.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de…
M. Desmeules
(Jean-Sébastien) : C'est parce que...
Le Président (M.
Bergman) : …Groulx.
Mme Daneault : Et ce que je comprends, c'est que le libellé actuel, pour vous, est
acceptable… ou vous voudriez voir des modifications? C'est ça, ma
question.
M. Desmeules (Jean-Sébastien) : C'est sûr que le libellé actuel accorde une
grande marge de manoeuvre au comité d'éthique à la recherche, et on
reste avec un questionnement sur, dans les faits, comment seront appliqués
les... la subjectivité qui est introduite
par le projet de loi, par les comités d'éthique, dans quel cadre ce sera fait
en lien avec la protection des renseignements personnels des personnes
concernées.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme Daneault : Donc, ce que je comprends, c'est que vous
voudriez voir certaines précisions dans le projet de loi?
Le Président (M.
Bergman) : Me Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Ce serait intéressant de voir quelles sont les balises, quels sont les
éléments que doivent prendre en considération les comités d'éthique à la recherche
dans l'appréciation des éléments qui sont introduits, lorsqu'eux portent un regard sur une
situation particulière, quelle place est faite à la protection des
renseignements personnels. La commission rappelle l'importance de prendre en
considération ces éléments.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme Daneault : Donc, ce que vous
souhaitez, c'est qu'on précise le rôle du comité d'éthique quant à la
protection des renseignements personnels. Est-ce que j'ai compris ou...
Le Président (M. Bergman) : Me
Desmeules.
M.
Desmeules (Jean-Sébastien) :
Oui, oui, absolument. Que ce soit dans le cadre de cette loi-ci ou d'une autre
loi.
Mme Daneault : Ça me prend du temps
mais ça va. Merci.
Le
Président (M. Bergman) :
Alors, Me Desmeules, Me Giroux-Blanchet, Mme Bétie, merci pour votre
présentation.
Et, compte tenu de l'heure, la commission
suspend ses travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 15 h 14)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la santé et
des services sociaux ouverte. Et, cet après-midi, nous avons Me Anne-Marie
Savard, professeure à la Faculté de droit, Université
de Sherbrooke, et M. Gaétan Cousineau, président de la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse.
Mme Savard,
bienvenue. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, suivie d'un
échange avec les membres de la commission. Alors, le prochain
10 minutes, c'est à vous.
Mme Anne-Marie Savard
Mme Savard
(Anne-Marie) : M. le
Président, je vous remercie beaucoup. Je voudrais tout d'abord remercier
les membres de la commission pour m'avoir invitée à participer à ces travaux
portant sur le projet de loi n° 30. Vous me tiendrez peut-être par le temps, parce que je n'ai pas de montre, mais
vous m'indiquerez si jamais je dépassais. Alors, je vous remercie,
bonjour à tous et à toutes.
Je ferai un
commentaire général et quelques commentaires spécifiques concernant le projet
de loi n° 30, qui est un projet
de loi, à mon point de vue, qui est somme toute assez simple, qui vise surtout
à clarifier quelques ambiguïtés et à répondre à des demandes répétées de
la part de plusieurs acteurs qui sont intéressés par la recherche au Québec, et
ces commentaires-là persistent depuis
plusieurs années. Bref, je ne pense pas, à l'instar de, j'imagine, mes
collègues qui sont intervenus avant
moi, qu'il y a ici lieu de s'élever en bloc contre ce projet de loi de… contre
ce projet de loi là, pardon.
Mais le reproche général que je me permettrais
de formuler, peut-être, c'est qu'il s'agit, comme trop souvent, finalement, de simples modifications à la carte d'une
simple partie du Code civil, en l'occurrence, ici, les articles 11
à 25, dans lesquels les articles pertinents
du projet de loi s'insèrent, sont modifiés. Donc, ce projet de loi là n'a pas
l'ambition de revoir de manière approfondie
cette section-là qui comporte des incohérences, à mon point de vue, assez
importantes ou, carrément, n'a pas l'ambition de prévoir un encadrement
juridique spécifique portant sur l'encadrement éthique de la recherche au Québec, comme l'avait recommandé, en
2007, le rapport du Comité interministériel sur l'encadrement éthique de
la recherche et la protection des sujets de recherche.
Je rappelle
qu'évidemment la question du consentement en matière de recherche est
fondamentale, mais il y a aussi d'autres
questions qui pourraient être prévues dans un encadrement plus général, par
exemple les questions en matière de
vie privée, confidentialité, la question des conflits d'intérêts qui est de
plus en plus importante, notamment entre les chercheurs et l'industrie
pharmaceutique, et également toute la question de la procédure d'évaluation des
projets de recherche. Bref, il y a là
éventuellement matière à un encadrement normatif plus rigoureux, mais je
constate que ce n'est pas ici le cas avec le projet de
loi n° 30.
Somme toute,
il y aurait lieu certainement d'améliorer, si on s'en tient aux articles du
Code civil, au moins de rendre
cohérentes les dispositions entre elles et de faire en sorte que… Parce
qu'en ce moment ce qu'on voit, c'est qu'il y a une panoplie d'interventions
aussi diversifiées les unes que les autres qui se retrouvent dans le cadre de
la section Soins, donc les articles 11
à 25. Et ce je proposerai, si je peux me permettre, c'est peut-être de prévoir
au moins deux sous-sections dans la section «Des soins», une section qui
serait intitulée... ou, enfin, qui aborderait les soins ou les interventions dans l'intérêt de la personne
elle-même et qui couvrirait donc, bien sûr, les soins requis et non requis,
la question aussi de la thérapie expérimentale que l'on traite dans le cadre de
l'article 21. La thérapie expérimentale, on l'appelle la recherche visant une seule personne, mais il faut
comprendre que c'est une recherche, donc, qui est faite dans l'intérêt
de la personne avec une part minime accordée à l'avancement des connaissances.
Donc, c'est quand même à classer, à mon
avis, dans la première partie ou sous-partie qui pourrait s'appeler Soins ou
interventions dans l'intérêt de la personne elle-même. Également, les
soins innovateurs entreraient dans cette sous-section.
La deuxième sous-section
pourrait s'intituler Soins ou interventions dans l'intérêt d'autrui, et là j'y
entrerais toute la question du don d'organes,
donc l'aliénation entre vifs, et aussi les dispositions en matière de recherche
purement scientifique, donc faite strictement dans le but de l'avancement des
connaissances.
Donc, ça, c'était
mon commentaire général, c'est-à-dire peut-être au moins, si on ne veut pas
encadrer de manière plus approfondie la recherche au Québec sur le plan
éthique, au moins d'apporter un peu plus de cohérence dans la section Soins.
Mes
commentaires spécifiques, j'en ai cinq ou six, et j'imagine, encore là, qu'ils
ne seront peut-être pas... qu'ils ne seront peut-être pas si originaux
que ça, mais quand même je trouvais important de vous les mentionner.
• (15 h 20) •
D'abord, le remplacement du terme
«expérimentation» par «recherche». Bien sûr, il s'agit d'une excellente modification, à mon point de vue, parce qu'il
existait une incertitude à savoir si des projets de recherche faisant
entrer des personnes majeures inaptes, mais qui ne portaient pas atteinte à
leur intégrité et qui ne constituaient pas, à toutes fins pratiques, des expérimentations au sens pur du
terme… la question se posait de savoir si ces expérimentations-là
étaient soumises à l'encadrement de l'article 21.
Il y avait deux écoles de pensée dans la littérature, une école qui
disait : Non, ce n'est pas de l'expérimentation, et donc ces
projets de lois ne devraient pas être soumis à 21, mais l'école de pensée dominante qui était de dire finalement qu'on devait
assujettir tous les projets de recherche à 21, ce qui faisait en sorte, bien sûr, que plusieurs projets très peu invasifs,
notamment avec des personnes âgées démentes, ne pouvaient voir le jour, donc, parce que 21 exigeait le consentement du
représentant légal et qu'une infime partie de la population est dotée de
représentant légal. Donc, ici, ce qu'on fait, c'est qu'on élargit le concept,
on remplace donc «expérimentation» par «recherche»,
«recherche» étant plus large et exclusif qu'«expérimentation», mais, d'un autre
côté, on assouplit les règles en matière de consentement lié aux mineurs
et aux personnes majeures inaptes lorsqu'il est question de risque minimal.
Donc, ça, c'est mon premier commentaire spécifique.
Deuxième commentaire, concernant les mineurs de
14 ans et plus. Également, je pense qu'a priori c'est une excellente modification également, parce qu'il
semble que le but de cet assouplissement-là, c'est de faire en sorte que
la recherche, notamment sociale, par exemple tout ce qui est étude
observationnelle, ou encore des entrevues ou des questionnaires, puisse intéresser et inclure des mineurs qui sont, par
exemple, en mauvais termes avec leurs parents ou encore carrément en fugue et pour qui il serait absolument impossible d'obtenir
le consentement du titulaire de l'autorité parentale ou encore que ça
alourdirait inutilement, là, le processus de recherche. Donc, je pense que c'est
très bien.
Les balises,
qui sont risque minimal, évaluation des circonstances par le comité d'éthique
et interdiction, et ça, c'est
fondamental, s'il y a un risque sérieux, semblent adéquates. J'avais quelques
réserves quant à l'expression «risque minimal»,
mais on pourra peut-être y revenir dans le cadre des discussions. J'aurais
préféré «risque minime» à «risque minimal»
pour la connotation qui réfère... en fait pour ce qui réfère à l'énoncé de
politique des trois conseils. Il y a quand même une certaine polémique à l'égard du contexte. Est-ce qu'on parle d'un
risque minimal objectif ou encore est-ce qu'on parle d'un risque minimal subjectif, en fonction de l'état général de la
personne? Bref, on pourra en reparler, mais, en général, pas de problème
avec cette modification-là.
Concernant
les majeurs inaptes, on a supprimé, donc, l'obligation du consentement par le
représentant légal, très bien également, donc; évidemment ce ne sont que
pour les projets de recherche à risque minimal. On demande le consentement de
la personne habilitée à consentir pour autrui, donc on réfère à l'article 15
ici. C'est encore une fois une excellente
modification, qui va faciliter notamment les projets de recherche qui étaient
peu invasifs, surtout dans le cas des personnes âgées avec démence.
Donc, ça, c'est très bien. Voilà. Donc, ça, ça va.
J'essaie d'avancer
parce que je vois que, finalement, ça va très vite. Donc, l'idée, ici, c'était
en ce qui a trait à la recherche avec
les majeurs inaptes, c'est bien sûr de s'assurer de l'équilibre entre, d'une
part, la protection des personnes les plus
vulnérables, mais aussi de s'assurer qu'on ne les exclut pas d'emblée de la
recherche sur la santé. Donc, je pense qu'ici cet équilibre-là est bien
atteint.
Deux
commentaires, si je peux me permettre en terminant, qui s'appliquent à la
recherche tant des mineurs que des
majeurs inaptes. D'abord, concernant la possibilité qu'ils puissent refuser de
participer à un tel projet. Le projet de loi n'apporte aucune modification à cet égard-là. En effet, on ne
permet aux mineurs ou aux majeurs inaptes de refuser de participer à un
projet de recherche que s'il en comprend la nature et les conséquences. Il y a
plusieurs critiques qui ont été faites au cours des dernières années, dans la
littérature, à cet égard-là. Je me range du côté de ces critiques-là. C'est-à-dire que, d'une part, il est curieux de
parler d'inaptitude et, dans la même phrase, d'une personne qui comprend
la nature et les conséquences d'une
expérimentation alors même qu'on sait que des personnes majeures aptes ont
souvent du mal à comprendre ces projets de recherche là. Donc, déjà, il y a un
paradoxe.
Mais, plus
important encore, je pense qu'on semble, avec cette disposition-là, vouloir
protéger la vulnérabilité mais surtout l'autonomie résiduelle, je
dirais, des personnes majeures inaptes, mais, de ce fait-là, on se trouve à ne
pas la permettre pour les personnes qui sont
encore plus vulnérables, c'est-à-dire qu'ils ne sont même pas en état de
manifester leur désaccord. Donc, à mon point
de vue, je pense qu'on devrait s'en tenir à un refus pur et simple, à un
respect du refus pur et simple d'une
personne mineure ou encore d'une personne majeure inapte à participer à un
projet de recherche. On pourra également
y revenir, mais il me semble qu'on serait, de toute façon, cohérents avec l'article 16
du Code civil du Québec, qui permet à
un majeur inapte de refuser catégoriquement des soins requis par son état de
santé. Donc, a fortiori, si on permet
à une personne majeure inapte de refuser des soins requis par son état de
santé, devrait-on lui permettre de refuser de la même manière des soins
qui ne sont pas requis et qui sont même dans une visée altruiste?
Deuxième
remarque, et je terminerai là-dessus, concernant les mineurs et les majeurs
inaptes… bien, celle-là, on pourra peut-être aussi y revenir, parce que
je pense que je n'aurai pas le temps, mais j'avais une réserve également avec
le risque sérieux et la thérapie expérimentale. Je me réserve ce commentaire-là
peut-être pour l'insérer dans le cadre des discussions, parce que je voulais au moins aborder la question
des soins innovateurs, c'est-à-dire qu'encore une fois il y a aussi des critiques sérieuses qui ont
été adressées au cours des dernières années concernant le fait que les
soins innovateurs, dans le cadre de l'article 21, se retrouvent exclus de
tout contrôle, c'est-à-dire ne sont pas assujettis, ces soins-là, ni à l'article 21 ni à aucune autre forme de contrôle,
alors même que ces soins-là s'éloignent tout de même de la pratique et des standards médicaux. Donc, je
trouve curieux qu'il n'y ait pas du tout, là, de processus de contrôle à
l'égard de ces soins innovateurs.
Donc,
écoutez, voilà. Sinon, je n'avais aucun problème avec la modification à 22,
concernant le prélèvement, là, d'organes, de tissus, sauf que je me
disais... je me demandais pourquoi on ne l'aurait pas inséré plutôt...
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon.
Mon Dieu, c'est... D'accord. On y reviendra peut-être. Merci.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Savard, merci pour votre présentation.
Mme Savard (Anne-Marie) : Je vous
remercie.
Le Président (M. Bergman) : ...pour
le gouvernement pour 24 minutes. M. le ministre.
M.
Hébert : Merci beaucoup,
maître, de vos commentaires. J'aimerais ça avoir un petit peu plus de
discussions à propos de l'expression «risque
minimal», qui est l'expression des trois conseils, justement, qu'on a retenue.
Vous semblez dire que ce serait mieux
de retenir «risque minime». Est-ce qu'on ne se trouve pas à être en
porte-à-faux avec, justement, les trois conseils, qui utilisent plutôt
«minimal» comme risque?
Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, en
fait, c'est que dans...
Le Président (M. Bergman) : Me Savard.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui. Merci
pour votre question, M. le ministre. En fait, ce qui se passe, c'est qu'avec
l'énoncé de politique des trois conseils, mais aussi le cadre établi par le
FRSQ, on parle effectivement... c'est une notion
qui revient beaucoup, là, que celle du risque minimal. Mais il y a quand même
une certaine incertitude à savoir si, dans
le cadre de cette expression-là, on fait appel à l'interprétation en fonction
de l'état de la personne. Est-ce que c'est un risque minimal objectif,
donc très peu de risque, par exemple une piqûre, ou quoi que ce soit, ou est-ce
que c'est un risque minimal eu égard à l'état de santé, qui peut être très
grave, de certains patients?
Par exemple,
des adolescents de 15 ou 16 ans qui... ou un adolescent de 15 ou
16 ans qui est dans un état... bon, qui a un cancer à un stade très avancé, évidemment il subit des
traitements, des interventions très invasifs, il y a des effets secondaires très importants. Et peut-être
voudrait-on le soumettre à un projet de recherche, éventuellement même
une thérapie expérimentale qui va comporter, bien sûr, des risques qui ne
seront pas minimaux, bien sûr, eu égard à la personne
en bonne santé, bon, qui se livrerait à n'importe quelle recherche, mais, dans
son état à lui, eu égard à ses chances de survie, etc., à son stade
avancé de la maladie, pourrait considérer un risque minimal.
Donc, c'est
simplement qu'il y a, dans la littérature, par rapport à ce terme-là, une
certaine incertitude à savoir, comme
je vous dis, si c'est un risque minimal objectif ou encore subjectif. Je
comprends que... et c'est là-dessus, je pense, qu'on le récupère dans l'article 21 : on ne peut pas faire de
recherche avec des mineurs ou des majeurs inaptes s'il y a un risque sérieux. Donc, on voudrait... à toutes fins
pratiques, l'exemple que j'ai donné serait exclu par le biais de 21.
Mais je ne sais pas si c'est l'intention du
législateur que de le faire ou pas, mais j'avais plutôt l'impression que c'était...
l'objectif ultime était surtout d'ouvrir à
une recherche plus sociale, dont les risques sont pratiquement nuls. Donc, c'est
pourquoi je me serais peut-être, moi, éloignée, au contraire, de cette
expression-là.
Et un
risque... Puis d'ailleurs, même, peut-être, pour le français, je ne sais pas,
mais c'est... mais j'aurais préféré me distinguer pour ne pas justement
encore créer plus de mauvaises interprétations. Un risque minime, pour moi, c'est
clair que c'est un risque qui est très
faible. Un risque minimal, déjà on entre peut-être... mais c'est... Écoutez,
peut-être que c'est mon
interprétation, là, mais on entre déjà, peut-être, dans quelque chose de plus
flexible, plus large et plus porté à interprétation, à mon point de vue.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Si je comprends bien,
vous, vous auriez souhaité qu'on utilise le mot «risque minime».
Mme Savard (Anne-Marie) : C'est une
suggestion, mais...
M. Hébert : Et vous trouvez que c'est
moins... ça porte moins à interprétation.
Mme Savard (Anne-Marie) : Oui.
M. Hébert : Je ne comprends pas,
parce que, pour moi, c'est synonyme, là, «minimal» ou «minime».
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui, mais c'est ça, mais c'est... tout est dans la
distinction, justement, de se distinguer avec la politique des trois conseils
et les autres...
M. Hébert : Ah non! on ne veut pas
se distinguer, on veut se coller à la politique des trois conseils.
Mme Savard
(Anne-Marie) : C'est ça,
mais, comme je vous dis, vient avec... Si vous voulez vous coller, c'est
peut-être... mais vient avec, justement, l'utilisation
de cette expression-là une interprétation, et cette interprétation-là n'est
peut-être pas ce que vous voulez, c'est-à-dire...
M. Hébert : Elle est exactement ce
qu'on veut.
• (15 h 30) •
Mme Savard
(Anne-Marie) : O.K. Donc,
vous, lorsque vous parlez de risque minimal ici, c'est exactement ce que
je vous dis, le jeune de 15 ou 16 ans qui est dans un état, bon, de cancer
avancé...
M. Hébert : Il ne correspond pas à
ça.
Mme Savard (Anne-Marie) : Il ne
correspond pas? C'est-à-dire?
M. Hébert : À un risque minimal,
selon la définition des trois conseils.
Mme Savard (Anne-Marie) : Il y a...
Ce n'est pas si…
M. Hébert : Alors, il faudrait avoir
l'autorisation des parents pour le…
Mme Savard (Anne-Marie) : C'est ça.
Ce n'est pas…
M. Hébert : … soumettre à un...
Mme Savard (Anne-Marie) : Ce n'est
pas si clair que ça. En tout cas, moi, selon ce que j'en comprends des
interprétations de la littérature, le risque minimal…
M. Hébert : Mais vous avez vu la…
Mme Savard (Anne-Marie) : …peut
être...
M. Hébert : Vous avez vu la
définition du risque minimal des trois conseils?
Mme Savard (Anne-Marie) : Oui…
M. Hébert : Alors?
Mme Savard
(Anne-Marie) : …mais il y a aussi d'autres... Bien, écoutez, moi,
simplement, là, je vous fais la suggestion,
c'est à vous de voir. Moi, c'est juste que... Moi, je trouve que, justement, ce
n'est pas si clair. Moi, ce qui… Ce
qui sauve, je dirais, c'est le fait qu'il ne peut pas y avoir de recherche s'il
y a un risque sérieux, tout simplement. Mais, s'il n'y avait pas eu ça,
j'aurais eu peur. Mais c'est tout. Moi, c'est simplement une appréciation.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Allons-y sur le risque
sérieux, maintenant. Certains ont défilé à votre place pour nous suggérer d'enlever cette notion de risque sérieux justement
pour que des majeurs inaptes et des mineurs puissent être soumis à des
expérimentations qui, dans les circonstances, et même compte tenu de leur durée
de vie, de la gravité de leur maladie, pourraient être des expérimentations
avec un risque sérieux. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Savard (Anne-Marie) : Je pense
qu'ici, comme je l'ai dit tout à l'heure brièvement, il faut distinguer deux types de recherche : la recherche faite
sur un seul individu, qu'on appelle aussi thérapie expérimentale, qui vise
avant tout le bienfait… un bienfait du moins
à la personne majeure inapte, et, selon justement mes collègues Robert Kouri
et Mme Nootens, donc qui vise avant tout le
bienfait de cette personne-là, avec une place plus restreinte de l'avancement
des connaissances, et d'autre part la
recherche purement scientifique, qui n'a comme place plus importante que
l'avancement des connaissances, avec, bien
sûr, des bienfaits espérés pour les personnes qui ont les mêmes
caractéristiques d'âge, etc.
Donc, je pense que,
dans le premier cas, effectivement, la notion de risque sérieux pourrait être
supprimée pour permettre justement ce dont vous parlez. C'est pourquoi je vous
disais tout à l'heure qu'en reclassant peut-être des... en insérant des sous-sections, on insérerait ce qu'on appelle la
thérapie expérimentale sous «les soins dans l'intérêt de la personne
elle-même», mais on laisserait donc la recherche purement scientifique dans
«les soins dans l'intérêt d'autrui», et là
je pense que la notion de risque sérieux a toute sa place d'être, parce que
justement, ici, on n'est pas dans des soins ou dans des interventions qui visent l'amélioration
de la santé de la personne, mais aucunement. D'ailleurs, on ne peut pas... il n'y a pas un protocole de
recherche, il n'y a pas un formulaire de consentement qui ne peut assurer que
la personne va finalement voir son état
amélioré. Donc là, je pense que la notion de risque sérieux devrait être
préservée. Mais, encore une fois, dans le
cadre de la recherche, ce qu'on appelle, dans l'article 21, recherche ne
visant qu'une seule personne, je pense qu'effectivement la notion de
risque sérieux pourrait être supprimée.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Là où j'ai un petit peu de mal à suivre, c'est que, lorsqu'un traitement a des
bénéfices, ce n'est plus, pour moi, de la recherche. La recherche
présuppose un grand principe qui est le principe d'incertitude. C'est-à-dire, si on soumet un sujet à une recherche, c'est parce
qu'il y a un principe d'incertitude. On ne sait pas. Et d'ailleurs la
façon de mener ces recherches-là, c'est par des essais cliniques randomisés où
on tire au hasard la personne qui va recevoir le traitement…
Mme Savard
(Anne-Marie) : Pas toujours, mais… Oui.
M. Hébert :
…expérimental et celui qui va recevoir le traitement habituel, parce qu'il y a
le principe d'incertitude. Si ce
principe-là n'existe pas, ce n'est plus de la recherche, c'est un traitement
innovateur. C'est un soin innovateur, mais ce n'est pas de la recherche.
La recherche est basée sur le principe d'incertitude : c'est parce qu'on
ne sait pas que c'est éthique de soumettre
des sujets à une recherche. Alors, à partir du moment où on a des bénéfices et
qu'ils sont démontrés, pour moi ce n'est plus... c'est un soin
innovateur, mais ce n'est plus de la recherche, là.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Disons qu'effectivement la marge de manoeuvre entre...
ou la marge, dans la définition, entre
thérapie expérimentale et soins innovateurs, elle est très mince. Mais vous
êtes d'accord avec moi que l'article 21 distingue deux types de
recherche…
M. Hébert :
Oui.
Mme
Savard (Anne-Marie) : …une recherche visant une seule personne, et c'est
bien écrit à l'article 21, ici : «si elle ne vise que lui». «Il ne peut, en outre, participer à une recherche
qu'à la condition que celle-ci laisse espérer, si elle ne vise que lui, un bienfait pour sa santé ou, si
elle vise un groupe, des résultats…» Alors là, on voit qu'il y a quand
même une distinction. Ce n'est pas moi qui l'ai inventé, c'est l'article 21.
Donc,
il y a effectivement... il y a une gradation. Puis je pense que là-dessus je
suis tout à fait les enseignements de mes prédécesseurs et mentors,
Robert Kouri et Mme Nootens : il y a un continuum dans les soins et la
recherche. On a effectivement les soins
cliniques et on va jusqu'à des soins innovateurs, c'est-à-dire qu'il y a un
soin clinique, ensuite il y a la thérapie expérimentale, il y a la
recherche, éventuellement. Donc, ce n'est pas noir ou blanc.
L'exemple
que vous donnez à la recherche clinique, avec un placebo, randomisé, etc., ça,
c'est de la recherche clinique pure et dure. Et ça, c'est clair qu'on va
toujours se situer dans la recherche visant un groupe, là, avec des résultats, tout ça. Mais je pense qu'on doit
distinguer — et, de
toute façon, la distinction, elle est faite à l'article 21 — ce
type de recherche là qui... Il y a une part d'avancement des connaissances,
mais pourquoi on ne l'élargit pas à un plus
grand groupe, c'est qu'on n'a pas encore toutes les connaissances requises.
Mais il y a une part intuitive qui nous fait penser que, oui, on devrait essayer avec une personne en
particulier, avec un devis expérimental. Parce que, dans le cadre des
soins innovateurs, il n'y a même pas de devis expérimental. On est souvent en
phase III, et donc, l'efficacité, tout est démontré, sauf qu'on veut
tester éventuellement une nouvelle indication.
M. Hébert :
C'est phase IV.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui, bien, après la phase III, le... Non, la
phase IV, c'est la mise en marché, habituellement.
M. Hébert :
Oui, mais c'est des études de phase IV qui ...
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui, c'est ça.
M. Hébert :
... testent de nouveaux… de nouvelles applications.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Pas tous les soins innovateurs sont des phases IV,
mais...
M. Hébert :
Désolé, mais je ne suis pas d'accord avec vous.
Mme Savard (Anne-Marie) : …on est souvent, après la phase III, dans
les soins novateurs. Tout simplement, les médicaments «off-label» sont vraiment exactement ce type-là. Donc,
effectivement, ici, on est carrément dans autre chose, mais la marge, effectivement, elle est ténue, mais
elle existe. Et donc, pour moi, je fais une distinction entre recherche
visant un groupe, recherche visant une seule personne, qui, donc, nécessite un
bienfait. Donc, elle est faite dans l'intérêt. En plus, il y a l'avancement des
connaissances et soins innovateurs.
M.
Hébert : …vraiment pas la même notion de la recherche que vous, parce
que, pour moi, s'il y a un bénéfice seulement pour une personne, ce n'est pas
de la recherche. Le but de la science, c'est la généralisation.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Mais alors...
M. Hébert :
C'est ça, le but. Le but intrinsèque de la recherche scientifique, c'est de
généraliser.
Mme Savard
(Anne-Marie) : O.K. Mais, M. le...
M. Hébert :
Et, si le pouvoir de généralisation n'est pas là, ce n'est pas une recherche.
Mme Savard (Anne-Marie) : Mais, M. le ministre, si vous me permettez,
comment vous voyez… Je veux dire, comment vous expliquez qu'on distingue
dans l'alinéa deux, l'article 21?
M. Hébert :
Ah! Ça, c'est du juridique, madame. Ce n'est pas de la recherche, pour moi, là.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Ah! Bien, non… Non, mais sauf que vous n'avez pas
proposé de le modifier.
M. Hébert :
Non, non, non. C'est ça.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Donc, c'est qu'il doit y avoir une distinction!
M. Hébert :
Bien… Non, non. Mais j'ai proposé parce que ce n'était pas l'objet du projet de
loi, madame. Dans le projet de loi,
ce n'est pas de modifier complètement le Code civil, c'est de pouvoir ouvrir
les dispositions du Code civil pour inclure des mineurs, des mineurs et
des majeurs inaptes. C'est juste ça. C'est tout ça, mais juste ça.
Mme Savard
(Anne-Marie) : O.K. Donc, vous... Écoutez, c'est vous qui voyez.
M. Hébert :
Si on avait à revoir le Code civil sur tous les aspects de soins et de
recherche, je pense qu'on en aurait pour un projet de loi assez
substantiel, là, mais ce n'est pas...
Mme Savard (Anne-Marie) : Oui. Sauf que, là, l'article 21, on ne parle
pas de refaire tout l'article, mais là il y a quand même... ici, il
semble y avoir un problème avec l'intention du législateur à l'origine et celle
que vous en faites aujourd'hui. Parce que,
là, moi, l'article 21, c'est vraiment de la recherche. Puis il y a deux
types de recherche : il y a un type qui se fait avec une personne, et c'est un type de recherche. C'est
différent d'effectivement celle où on veut généraliser, mais il n'en
demeure pas moins que c'est deux types de recherche.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Oui. Je voudrais avoir un exemple du premier type; je ne suis pas sûr que ça se
fait encore. À l'époque où il y avait les traitements chirurgicaux
expérimentaux; on n'avait pas encadré la recherche en chirurgie. Ça se
faisait, là, mais je ne suis plus sûr qu'un comité d'éthique de la recherche
accepterait un traitement qui n'a pas de pouvoir de généralisation et
qui n'est fait que sur une seule personne. Ça, je ne suis pas certain que...
Mme Savard
(Anne-Marie) : Il faudrait voir, sauf que l'article…
M. Hébert : En
2013, là…
Mme Savard
(Anne-Marie) : C'est ça, l'article 21 ne date pas non plus de…
M. Hébert : Je
suis d'accord.
Mme Savard
(Anne-Marie) : …de si longtemps.
M. Hébert :
Oui, je suis d'accord avec vous.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Je voudrais également... Vous parliez des deux sous-sections. Là, ce que vous
proposez en fait, c'est un remodelage complet du Code civil, de toutes
ces dispositions-là.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Savard.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Écoutez, pour moi, ce n'est pas un remodelage complet,
c'est une question de forme et de cohérence.
Il y a, dans le Code civil, effectivement des sections. Ici, on a la section
«Soins», puis il arrive très souvent, très
régulièrement, dans plusieurs sections du Code civil, qu'il y a des
sous-sections, dans un but d'une meilleure
compréhension. Et donc je pense que, là, on n'arrête pas de jouer là-dedans…
dans ces articles-là, on en ajoute, on
en... et, à un moment donné, on ne sait plus trop où on s'en va avec tout ça.
Donc, simplement de… oui, de clarifier, de mettre deux sous-sections, en disant : Bien, voici, ça, ce
sont les interventions faites dans l'intérêt de la personne elle-même ou encore faites dans l'intérêt d'autrui, tout
simplement. Mais, pour moi, ce n'est pas un gros remodelage du Code civil,
là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
J'aimerais ça aussi avoir votre avis sur le consentement écrit. Vous n'avez pas...
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui. Je n'en ai pas parlé.
M. Hébert :
...parlé.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Tout à fait.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
• (15 h 40) •
Mme
Savard (Anne-Marie) : Merci de poser la question. Donc, non, parce que
je n'ai pas de problème majeur... Je vous avoue qu'au début, oui, je me
suis dit : Qu'est-ce que c'est? Pourquoi? Bon. Mais, à toutes fins
pratiques, lorsqu'effectivement on ajoute
cette... — voyons! — cette
formalité-là, ça peut tout simplement alourdir lorsqu'on est dans le cadre de recherche, par exemple, d'entrevues,
de questionnaires, ou etc. Je pense qu'en autant qu'on puisse... Et je pense que c'est aussi le point de l'article, là,
on dit qu'on va devoir, autrement dit, là, conserver une preuve que la
personne a consenti. Donc, pour moi, ça ne
me posait pas de problème. Attendez un petit peu, je cherche. Je ne trouve pas,
mais, en tout cas, vous voyez ce que je veux dire, de toute façon.
M. Hébert :
Oui.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Ma dernière question, c'est le refus. Alors, vous faites référence, là, au
premier paragraphe de l'article 21, qui
dit que le «mineur ou [le] majeur inapte ne peut participer à une recherche
[...] à laquelle il s'oppose alors qu'il
en comprend la nature et les conséquences». Quelle serait votre proposition de
modification, parce que je ne suis pas sûr d'avoir bien compris votre...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : O.K. Alors, ça serait tout simple, alors :
«à laquelle il s'oppose», point. Ça serait ma proposition, parce que, comme je vous l'ai dit
tout à l'heure, à mon avis, déjà il y a une contradiction… ou en tout cas il y
a une certaine incohérence avec l'article 16, comme je l'ai mentionné tout
à l'heure, puisqu'avec l'article 16 on est en matière de soins
requis et on permet aux majeurs inaptes une autonomie, donc, résiduelle, en
matière de soins requis, donc de refuser catégoriquement des soins qui lui sont
requis, là.
Donc,
ici, je m'explique mal comment, dans un cadre de recherche qui sont des soins
qui ne sont absolument pas requis par
la personne, on oblige à qualifier le consentement, c'est-à-dire qu'on doit
démontrer... la personne doit démontrer qu'elle comprend la nature et les conséquences. Ça, ça veut dire que, si
la personne est tellement inapte qu'elle ne peut même pas comprendre la
nature et les conséquences, son refus ne sera pas pris en compte, et on va
pouvoir procéder quand même. Donc, je vois là
un problème, c'est-à-dire le fait de mettre de côté une certaine partie de la
population qui est, à mon avis, encore plus vulnérable, donc les
personnes majeures très inaptes. Donc, je m'explique mal comment un article... on peut leur permettre de refuser
catégoriquement des soins requis mais pas, de la même manière, dans le
cadre de soins non requis que sont des soins en matière de recherche ou des
interventions.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
O.K. Est-ce que vous mettriez le même adverbe, c'est-à-dire «catégoriquement»,
ou vous laisseriez «s'oppose»?
Mme Savard (Anne-Marie) : J'ai aussi des réserves sur l'article 16
avec le refus catégorique; ça aussi. Donc, pour moi, un simple refus devrait requérir l'intervention du tribunal, en
vertu de l'article 16, là, je parle de l'article 16. Mais je
ne qualifierais pas le refus, très sincèrement, et surtout dans le cadre de l'article 21.
Ce
qui veut dire qu'effectivement la personne... le mineur, même s'il ne comprend
pas nécessairement toute la nature
puis les conséquences de l'intervention… Lui, il ne veut pas de piqûre, par
exemple, parce qu'il en a une sainte horreur, je vois mal comment... et
qu'il le manifeste, il crie, ou quoi que ce soit, je vois mal comment on pourrait,
en tout cas selon le libellé de 21, l'astreindre à un projet de recherche. Je
pense que, peu importe l'état d'avancement ou d'inaptitude de la personne et la
façon dont elle le manifeste, on devrait respecter ce refus-là.
Le Président (M. Bergman) :
M. le ministre.
M.
Hébert : Alors, si je vous
comprends bien, donc, un mineur, on parle d'un enfant, là, qui a... ou les
parents ont consenti à un projet de recherche, dès qu'il s'oppose, on devrait s'abstenir.
Le Président (M. Bergman) :
Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : En
principe, oui. En principe…
M. Hébert : Mais vous comprenez qu'il
y a… beaucoup de recherches en pédiatrie ne pourraient pas être réalisées, là.
Mme Savard (Anne-Marie) : Oui. Ou
alors, peut-être, soit mettre un âge, mais... Moi, c'est sûr que cette réserve-là s'adresse surtout aux personnes
majeures inaptes, je vais vous dire, plutôt qu'aux mineurs. Est-ce qu'il y
aurait lieu de faire la distinction entre les deux? Peut-être, aussi.
M. Hébert : Je pense que l'intention
du législateur, c'était justement de prévoir ces cas-là, là. L'enfant de trois, quatre ans qu'on ne peut pas approcher pour
examiner une oreille, ça voudrait dire que, si on fait une étude sur les
problèmes d'oreille chez les enfants, qu'on
a la permission, dès que l'enfant ne veut pas qu'on lui mette un otoscope
dans l'oreille, on n'est pas capable de faire le projet de recherche.
Mme Savard (Anne-Marie) : Je
réitère…
Le Président (M. Bergman) :
Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Je réitère
que, pour moi, cette partie-là concerne plus la question de la vulnérabilité des personnes majeures et inaptes, et
il y aurait lieu, éventuellement, de faire la distinction entre les
deux.
Mais, encore
là, je pense que, même dans le cas des mineurs, on parle ici
de recherche et non pas de soins requis. Alors, pour moi, je ne vois pas nécessairement la pertinence de se
montrer aussi insistant face à une personne qui, même mineure ou majeure
inapte, semble ne pas vouloir se prêter à l'expérimentation ou à la recherche.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Mais je reviens,
là : Vous comprenez qu'un enfant, il ne comprend pas tous les éléments,
là…
Mme Savard (Anne-Marie) : Je
comprends très bien.
M.
Hébert : Et beaucoup de
recherches qui ont des interventions, somme toute, mineures ne
pourraient pas être réalisées si on retient la notion de l'opposition pure et
simple.
Mme Savard
(Anne-Marie) : C'est comme
ça que vous le voyez, c'est parfait. Moi, je fais simplement vous dire
ma position là-dessus.
M. Hébert : O.K., ça marche. Merci.
Le Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Ça va. Alors, je vais
laisser mes collègues...
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le Président.
Bonjour, Me Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Bonjour.
Mme
Proulx : Vous avez mentionné
tantôt qu'à votre avis les modifications législatives proposées
atteignent l'équilibre nécessaire entre la
protection des participants aux projets de recherche et, disons, la volonté de
pouvoir offrir un environnement un
peu moins contraignant pour favoriser des activités de recherche ici, au
Québec. J'aimerais ça que vous m'expliquiez
qu'est-ce qui vous permet de croire qu'on a atteint l'équilibre, c'est-à-dire
qu'avec ces modifications-là on n'ouvre pas beaucoup trop large du côté
des contraintes… pour éliminer des contraintes à la recherche et qu'on continue
quand même d'offrir le niveau de protection requis et nécessaire pour soit les
mineurs ou les personnes majeures inaptes.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Savard.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Merci. Merci. Je pense qu'effectivement, dans le cas,
si on prend, là… Les deux points principaux,
ici, c'est le consentement des mineurs de 14 ans et plus et les majeurs
inaptes. Dans le cas des mineurs de 14 ans et plus, je pense tout
simplement que les balises sont suffisamment serrées pour bien préserver, justement,
cet équilibre-là entre le besoin et la nécessité de protection de la
vulnérabilité, mais aussi ne pas exclure la catégorie
de personnes, donc des mineurs, ici, en l'occurrence, de 14 ans et plus.
Donc, je pense qu'avec le consentement du mineur de 14 ans et plus,
un risque minimal et l'évaluation du comité d'éthique selon les circonstances,
je pense qu'ici on a un équilibre.
Dans le cas
des majeurs inaptes, c'est la même chose. Avant ça, on demandait, donc, le
consentement du représentant légal. Comme je disais tout à l'heure, on
sait très bien qu'il y a une infime partie de la population qui est dotée d'un représentant légal. Donc, on excluait d'emblée
une grande partie de la population et alors qu'il n'y avait rien qui démontrait finalement que le représentant légal,
qu'il soit tuteur, mandataire ou curateur, disons, représentait mieux la
personne protégée qu'un proche, par exemple,
énuméré à l'article 15. Donc, en lui conservant cette garantie de
protection via le consentement d'un proche,
en plus il y a, donc, le risque minimal et l'absence de risque sérieux, je
pense qu'on a ici tous des éléments,
là, qui sont suffisamment importants pour garantir cette protection-là. Mais en
même temps on permet, donc, l'inclusion...
je mentionnais tout à l'heure, là, des personnes âgées qui sont démentes, donc,
qu'on excluait d'emblée, et c'est
dommage puisqu'on est dans un contexte, comme on le sait, de vieillissement de
la population, de la prévalence de la démence. Donc, je pense qu'ici,
là, c'est des modifications qui sont très louables.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose, il vous reste deux minutes.
Mme Proulx : C'est bien. Merci, M.
le Président. Je n'ai plus de question.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Bonaventure.
M. Roy : Merci, M. le Président.
Bonjour, Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Bonjour.
M. Roy : Vous avez dit tout à l'heure
qu'il existait des risques minimaux subjectifs et des risques minimaux objectifs. Est-ce que ça veut dire que les risques
minimaux subjectifs sont plus ou moins valides ou, en tout cas... l'aspect
minimal est moins certain que ceux... En tout cas, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui, c'est
ça. Bien, écoutez, j'essaie de vous dire un peu ce que je comprends de
la littérature la plus récente là-dessus, c'est-à-dire
que, concernant l'expression «risque minimal» qui est utilisée notamment
dans l'énoncé de politique des trois
conseils, dans également… et là je cherche le nom, mais... l'encadrement
du FRSQ, les règles de 2008 si je ne
me trompe pas, il y a, disons, une sensibilité au fait qu'on pourrait
effectivement... cette expression-là référerait à un risque qui pourrait
être subjectif, c'est-à-dire évalué en fonction de l'état de la personne et de la gravité de sa maladie, par exemple, donc
un risque qui, pour cette personne-là, pourrait être minimal pourrait
être extrêmement élevé pour une personne qui serait en bonne santé. Donc, c'est
simplement ça.
Mais je ne
suis pas en train de dire que c'est l'interprétation, mais je dis qu'en
intégrant… en insérant le terme «risque minimal» à 21, on se...
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion.
Mme Savard
(Anne-Marie) : ...peut-être
qu'on se porte à... on se porte évidemment à l'interprétation,
justement, qui n'est pas claire dans la littérature. Voilà.
Le
Président (M. Bergman) :
Maintenant, pour le groupe formant l'opposition officielle, pour une période
de 21 minutes, M. le député de Jean-Talon.
• (15 h 50) •
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M.
le Président. Très intéressant, votre présentation, mais surtout votre
discussion, parce que ce qu'on voit, là, c'est que, malgré le fait que les gens
sont dans la recherche… Je pense que ça fait...
troisième journée qu'on écoute, les gens ne disent pas la même chose.
Première journée, «risque minimal», c'était : on ne faisait pas de
projet de recherche puis pas de chimiothérapie, puis on ne faisait pas de ci…
Puis c'était facile, on... Ce n'était pas
plus compliqué que ça. Puis, plus ça avance, plus on se rend compte que l'interprétation
du «risque minimal», là, elle va
directement en fonction du chercheur, puis de l'endroit que vous faites votre
recherche, puis du comité d'éthique.
Puis je ne suis pas... On était tous autour de la table, je pense que vous avez
tous eu cette même perception. Puis, même
dans votre discussion avec le ministre, vous ne vous entendiez pas, malgré le
fait qu'il a fait de la recherche. En passant,
c'est intéressant parce que ça veut juste dire que c'est important qu'on mette
les bons mots pour les bonnes affaires.
Le risque minimal, au niveau de l'énoncé des
trois conseils, c'est défini dans les trois conseils. Nous autres, on va
travailler avec le Code civil. La question : Si on ne s'entend pas c'est
quoi, la définition du risque minimal... Puis
j'aime beaucoup l'expression des juristes, là, l'intention du législateur,
là : 10 ans après, là, il n'y a plus grand monde qui s'en souvient,
puis ça prend quelqu'un qui veut aller faire la recherche pour savoir
exactement c'était quoi, l'intention. Est-ce
qu'il y a moyen de mettre quelque chose de clair pour que tout le monde
comprenne la même affaire?
L'énoncé des trois conseils, je pense,
c'est un document que tous les chercheurs puis tous les comités d'éthique
se fient. L'interprétation peut être
différente. Moi, la question que je me pose, puis je vais vous la poser, c'est
défini dans l'énoncé des trois conseils : Est-ce qu'on devrait
utiliser le même terme qu'eux autres sans en mettre la définition dans la loi?
Mme Savard
(Anne-Marie) : Je ne pense pas.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon. Pardon, excusez-moi, M. le Président. Merci
pour votre question. Écoutez, je...
Il y a, vous savez comme moi, une gradation dans l'édifice normatif, et, à mon
point de vue, le Code civil — et,
je pense, au point de vue de tous les
juristes — est
pas mal au-dessus que… des énoncés de politique comme l'énoncé de politique des trois conseils, qui relève de l'autorégulation,
c'est-à-dire que ça provient tout simplement des organismes
subventionnaires qui se sont concertés pour faire cet énoncé-là. On est loin d'un
débat démocratique dans l'énoncé de politique des trois conseils.
Ici,
on est dans ce cadre-là, et je ne vois pas en quoi on serait liés par des
définitions qui ont été introduites dans des énoncés qui n'ont pas de valeur juridique dure. On parle de droit
dur. Ce n'est pas du droit dur, ce n'est pas du droit contraignant. Alors, moi, ça... Je veux dire, je
ne vois pas du tout l'intérêt. Je le comprends dans un souci d'uniformité,
mais alors moi, je pense qu'on devrait être
plus... on devrait consacrer nos efforts à plus d'uniformité et de cohérence au
sein même du Code civil plutôt que de
vouloir se coller à des énoncés politiques, tel l'énoncé politique des trois
conseils. Ce n'est pas la bible, l'énoncé politique des trois conseils.
La bible, ça devrait être le Code civil.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
Bon. Écoutez…
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : …je savais que j'aurais une belle discussion avec
vous, là. Je trouve ça très intéressant. Là, ce qu'on fait, c'est qu'on prend un terme de l'énoncé des trois
conseils, on le met dans le Code civil sans définition…
Mme Savard
(Anne-Marie) : Voilà!
M. Bolduc
(Jean-Talon) : …et puis, après ça, on nous dit : Bien, référez à
l'énoncé des trois conseils, qui n'a aucune valeur juridique. Moi, il me semble
qu'on fait les choses à l'envers.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Je le pense aussi. Si vous me permettez...
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Bon!
Mme Savard
(Anne-Marie) : Excusez-moi, je...
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Non, c'est… Non, continuez votre pensée, vous me
donniez raison, j'aime ça.
Des voix :
...
Mme Savard
(Anne-Marie) : Je me doute bien, mais ce n'est pas pour ça
nécessairement que je le dis...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
Mme Savard
(Anne-Marie) : ...tout simplement parce que, oui, j'ai effectivement
un problème avec ça. Par ailleurs, je ne
pense pas que le Code civil est un instrument juridique qui se prête à de trop
nombreuses définitions. Je ne suis pas de celles qui pensent qu'on doit
définir tous les termes que le Code civil place dans son... Mais, ceci dit, il faut s'assurer d'introduire des termes qui prêtent
le moins possible à interprétation si on ne veut pas se retrouver dans
un système où on va laisser cours à trop d'interprétation.
C'est
pourquoi je pense qu'il faudrait… il y aurait lieu de s'éloigner, mais c'est
vraiment une idée que je lance, c'est simplement
de s'éloigner, au contraire, de tout ce qui réfère à «risque minimal» et qui a
déjà un passé interprétatif incertain et
d'en faire... plutôt de s'en distinguer. Je pense qu'on sait que notre Code
civil du Québec est un instrument identitaire important, on a tout le
lieu, ici, d'introduire des termes qui sont propres à la pensée civiliste, et
je pense que, de ce point de vue là, «risque minime», pour moi, serait plus
évocateur et plus clair.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, on peut discuter à savoir si c'est «risque
minime» ou autre chose. Moi, j'aimais bien la question de la
proportionnalité, la...
Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, oui.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Puis je suis content que vous me donniez votre
opinion, parce que, là, on est partis avec
des petites modifications que, dans le fond, ça veut dire beaucoup de choses.
On ne touche pas à certains articles peut-être qui auraient eu besoin d'être
remodelés en même temps puis on veut répondre à une petite particularité très spécifique du Code civil pour plein de
raisons : parce que ça n'a pas été revu, les chercheurs ne sont pas
satisfaits puis on veut se permettre
de faire plus de recherche. Puis, par contre, les chercheurs viennent nous voir
puis ils disent : Ça ne nous a
pas empêchés de faire de la recherche, ça ne nous a pas empêchés d'avoir des
soins innovateurs. Par contre, il faudrait avoir cette modification-là
qui nous empêche de faire beaucoup de choses.
La
question qu'il faut se poser, c'est... Là, on a pris l'énoncé des trois
conseils avec un terme. La question qu'il faut se poser : Est-ce qu'on
ne devrait pas rédiger, par nos propres mots, notre propre pensée, parce que je
pense qu'en 2013, avec toutes les
discussions qu'on a eues, c'est beaucoup plus clair, que d'essayer de prendre
un terme que personne n'est pas capable de dire la même chose sur ce terme-là
et qui est... En tout cas, depuis les trois jours qu'on a faits, il n'y en a pas un qui nous a donné la même définition du
risque minimal. Moi, c'est ce que j'ai vu autour de la table. Et même le
ministre, au début, la première journée, nous en a donné une définition qui
aujourd'hui est une définition différente. Ça fait que moi, je pense que ça va
être...
Une voix :
...
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Oui, parce qu'on disait au début qu'on ne
faisait pas de traitement dechimiothérapie
puis, à la fin, on arrivait avec un peu de traitement de chimiothérapie, on
fait des études. Je pense qu'il y a une clarification à faire à ce
niveau-là. Parce que… Pourquoi j'accorde de l'importance à cet élément-là? C'est
que, si ça n'a pas été ouvert depuis 15 ou
20 ans, cet article-là, ça va prendre un autre 20 ans avant qu'il
soit rouvert. Ça fait que ce n'est
pas vrai qu'on va le faire en quelques minutes. Je pense qu'il faut prendre le
temps de faire une bonne réflexion. Puis, je l'ai dit, il n'y a pas de
partisanerie là-dedans, on veut juste faire la bonne chose. Sauf que ce que je
vois, c'est qu'au niveau des termes on ne s'entend pas.
On
sait par contre ce qu'on veut. Ce qu'on veut, c'est de permettre à des gens de
pouvoir participer à des projets de recherche
qui vont soit les aider, eux autres, ou qui vont aider des gens qui sont dans
une situation similaire. On ne veut pas leur nuire puis on veut aussi
faciliter pour que le Québec puisse se distinguer au niveau d'une recherche de
qualité. Moi, je pense que c'est les trois
éléments que l'on veut, mais la rédaction actuelle, selon moi, ne nous amène
pas là. Je ne sais pas ce que vous en pensez, là.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Bien, écoutez…
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Merci. Je pense que j'ai relevé quand même... Par
ailleurs, il y a de très, très bonnes modifications, mais effectivement
je suis d'accord avec vous qu'il y a des termes qui sont employés et qui
portent à confusion ou enfin à interprétation,
dont celui de «risque minimal». Et moi, je ne sais pas, je n'étais pas là dans
le cadre des autres interventions, mais, si on est là à en parler, vous
imaginez ce que ça va être dans les comités d'éthique. Je siège sur quelques comités d'éthique de la
recherche, et effectivement on peut passer des bonnes journées à discuter
de l'interprétation. Et, tant qu'à faire l'exercice
ici, devant... avec les députés, avec le législateur, aussi bien le faire pour
que ce soit le plus clair possible et qu'on, justement, facilite le travail des
membres des comités d'éthique de la recherche. Il me semble en tout cas que ça
devrait être la moindre des choses.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Bien, puis… Voyez-vous,
moi, ce que je vois, c'est qu'il faut qu'on soit quand même conformes à
ce qui se fait au Canada.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Par contre, la priorité, c'est notre Code civil.
C'est ce que vous venez de nous dire. Théoriquement,
c'est là qu'on devrait avoir les éléments pertinents. Puis ma pensée va aussi
loin de dire que, si, le reste du Canada,
on voit que ce n'est pas là qu'ils sont rendus, ça n'empêche pas que, comme
société distincte, on soit capables de mettre nos propres éléments dans
notre Code civil. Puis, qui sait, peut-être que, dans 10 ans, les autres
seront rendus au même niveau que nous autres.
Mais il y a une
réflexion à faire là-dessus. Je suis convaincu que là-dessus il y a une
réflexion à faire…
Une voix :
…
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Ça fait que je tiens à vous remercier, parce
que je trouvais que la discussion... Puis vous avez démontré, devant tous nos auditeurs, la difficulté d'un
dossier comme celui-là : même s'il n'y a pas plusieurs articles, tous veulent avoir des modifications.
Par contre, il va falloir qu'on s'entende à la fin pour que les mots dans
la loi correspondent réellement à notre réalité qu'on veut avoir. Merci…
Le Président (M. Bergman) : Mme
Savard.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le Président.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Je vous
remercie beaucoup pour vos commentaires. En effet, vous parlez, ici, à une civiliste pure. Alors, c'est vrai que j'ai
tendance à effectivement accorder beaucoup d'importance à cette
identification qu'on a ici, au Québec, à notre Code civil. Il s'agit d'un
instrument identitaire très important, l'occasion aussi de se distinguer par notre Code civil, et je ne vois pas
en quoi, encore une fois, on aurait à être liés par des énoncés de
politique d'organismes subventionnaires fédéraux. Et par ailleurs je... Voilà.
Donc, je m'en tiendrai à ça. Je vous remercie.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le
Président. Merci pour votre présentation, c'est fort intéressant, et vous
présentez bien vos points. Félicitations.
Vous faites partie de comités de recherche...
Vous faites partie de comités d'éthique de recherche.
• (16 heures) •
Mme Savard (Anne-Marie) : Oui, oui.
Mme de Santis : Pour les gens qui ne
savent pas comment ça fonctionne, est-ce que vous pouvez nous dire comment ces
comités-là se rencontrent, combien de fois ils se rencontrent par année ou par
mois et comment ils font leurs décisions?
Mme Savard (Anne-Marie) : Écoutez...
Mme de Santis : Ou ils prennent
leurs décisions, pardon.
Mme Savard (Anne-Marie) : Je ne sais
pas s'il faut que j'attende.
Le Président (M. Bergman) : Mme
Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Merci.
Oui, alors, merci pour votre question. Alors, la plupart des comités d'éthique sur lesquels j'ai siégé depuis plusieurs
années, en général c'est tout simplement une rencontre d'au moins une demi-journée, donc, par mois. Et vous savez
certainement, là, la composition... vous connaissez peut-être la
composition, on a des éthiciens, des
juristes, évidemment, des médecins, des chercheurs de différentes disciplines,
des disciplines qui sont habituellement liées à la nature de la
recherche qui se fait dans l'établissement, bien sûr. Et donc, en général, la
façon dont ça fonctionne, c'est qu'on étudie
le protocole et le formulaire de consentement, et on se penche sur, justement,
les éléments qui ne seraient pas conformes
aux dispositions du Code civil mais aussi, effectivement, aux autres
dispositions qui figurent dans différents
énoncés, soit québécois ou encore canadiens, qui régissent l'éthique de la
recherche au Québec.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Quand je regarde le
troisième alinéa de l'article 21 tel qu'on propose de modifier, on dit
que «le mineur de 14 ans et plus peut néanmoins consentir seul si, de l'avis
du comité d'éthique de la recherche, la recherche ne comporte qu'un risque minimal et que les circonstances le
justifient». Maintenant, quand je lis ce texte, est-ce que, d'après vous, le comité d'éthique de la recherche
doit déterminer si chaque mineur peut consentir seul ou est-ce que c'est
le groupe de mineurs?
Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, on
va y aller selon...
Le Président (M. Bergman) : Mme
Savard.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Pardon. On va
y aller selon le projet de recherche tel qu'il est monté — j'allais
dire entre guillemets, si vous me passez l'expression — par le ou les chercheurs. C'est-à-dire qu'on
va évaluer, selon le projet de recherche qu'on a devant nous, s'il s'agit
ici d'un risque minimal pour une personne âgée de 14 ans et plus ou pas,
mais pas pour chacun, évidemment, en particulier selon sa condition, mais
plutôt la condition dans laquelle sont ces mineurs-là.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Et donc, si... J'essaie
de comprendre le risque pour chaque personne. Si, dans ce groupe qui est
constitué de mineurs de 14 ans et plus, un risque peut être un risque
minimal pour certains mais être un risque plus important pour les autres,
comment cette détermination est faite?
Mme Savard (Anne-Marie) : Bien, c'est
là que je vous dis...
Le Président (M. Bergman) : Mme
Savard.
Mme
Savard (Anne-Marie) : ...qu'on
va avoir beaucoup de travail et de pain sur la planche en tant que
comité d'éthique et… en tant que comité d'éthique pour évaluer si ce projet de
loi là, tel qu'il est conçu, et parfois il est conçu pas nécessairement par
les… en tout cas, c'est une autre question, mais, tel qu'il est conçu, comporte
un risque minimal ou pas. Mais on n'ira pas voir selon chaque personne, bien
sûr.
Nous, on évalue le protocole comme tel, le
formulaire de consentement. Donc, on va nous dire quelle est la population
visée, par exemple 15... des mineurs de 15, 16 ans dans telle école
secondaire, on veut observer leur comportement.
Là, je vous parle de recherche sociale, et c'est sûr que c'est ça qu'on vise;
je le sais. On veut observer leur comportement
dans la cour, ou, peu importe, dans les vestiaires, ou quoi que ce soit, les
études observationnelles ou encore des
entrevues, des questions. On va arriver à des consensus, certainement, en
disant : C'est un risque minimal. Et je pense que c'est l'objectif,
ici, ultime qui est visé, c'est la recherche sociale qui comporte des risques,
en oubliant le terme «minimal», qui sont
très faibles pour permettre justement que, comme je le disais tout à l'heure,
des jeunes qui sont en fugue ou en
conflit familial et avec lesquels on ne pourrait jamais faire de la recherche,
puisque leurs parents ne... ils ne sont pas là, ou, tout simplement, ils n'ont pas de contact, ou quoi que ce
soit, on ne pourrait jamais faire de la recherche avec eux parce que justement il n'y a pas de titulaire de l'autorité
parentale, ou il est parti, ou quoi que ce soit. Donc, c'est ça qu'on vise.
Je suis très
consciente de la portée très peu dangereuse, j'allais dire, de l'article 21,
mais, pour moi, il faudrait qu'on clarifie et qu'on mette des termes qui
sont clairs et ne portent pas à interprétation, ou le moins possible.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Dans votre réponse,
vous avez décrit le type de recherche que vous présumez que cette
clause... à laquelle cette clause réfère.
Mais est-ce que cette clause, quand on lit les mots dans cette clause, réfère
exactement à ce que vous venez de dire? Parce qu'on parle de recherche
risque minimal mais pas du type nécessairement que vous venez de mentionner.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Je suis
entièrement d'accord avec vous. Je suis entièrement d'accord avec vous, mais, bon, je vais dire, peut-être, pour une petite
expérience de lecture de projet de loi, et de la façon dont se modifie
ce genre d'article litigieux, entre
guillemets : On sait très bien que c'est un projet de loi qui vise à
répondre à des critiques répétées
depuis plusieurs années, et, ces critiques-là, on est capables de les lire,
elles existent, elles sont dans la littérature. Et c'est justement pour
inclure le genre de recherche dont je viens de parler, je pense, qu'on
introduit cet article-là. Par contre, on ne
le fait peut-être pas de la bonne manière, c'est-à-dire avec les bons termes,
puisqu'on est encore là à en parler. Alors, je suis d'accord avec vous
qu'à la lecture du libellé ce n'est pas écrit que c'est le genre de recherche
auquel je réfère. Mais je pense que ça vise à répondre effectivement aux
critiques dont j'ai parlé.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Si on revient
maintenant à l'article 4, qui fait référence à l'article 24 du code,
et on ajoute le consentement autrement que par écrit, alors est-ce que
vous êtes d'accord qu'un mineur de moins de 14 ans devrait aussi pouvoir donner son consentement autrement
que par écrit? Et disons que c'est par téléphone, on l'appelle, est-ce
que vous voyez ça comme étant un consentement éclairé du mineur de 14 ou
15 ans?
Mme Savard
(Anne-Marie) : Écoutez, de
toute façon, on s'entend que, selon les dispositions qui sont dans le
projet de loi, les mineurs de 14 ans et... de moins de 14 ans, j'allais
dire, ne pourraient jamais, de toute façon... Bon, ça, on s'entend.
Alors, ici,
on parle éventuellement, oui, de mineurs de 14 ans et plus avec ce fameux
risque minimal. Dans ce contexte-là
et selon des circonstances... si les circonstances le justifient, je pense qu'en
effet un consentement écrit n'est pas
nécessairement... Je ne suis pas une… j'allais dire une rigoriste, là, du
consentement écrit, parce qu'on a tellement de consentements écrits qui ne veulent rien dire de toute façon. Ce qui m'importe
avant tout, parce que, souvent, ce qu'on voit... en tout cas,
quelquefois, je devrais dire, ce qu'on peut voir, c'est effectivement des
consentements très, très bien écrits, mais
la personne a plus ou moins lu le formulaire de consentement, etc. Donc, pour
moi, ça ne veut pas dire grand-chose.
Un consentement, qu'il soit verbal ou écrit, tant qu'on peut le documenter et
qu'on peut en arriver à en faire la preuve, je pense qu'effectivement…
peut très bien se justifier ici, dans des circonstances très précises.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Une différence, c'est
que, quand c'est un consentement écrit, on voit ce que la personne a
reçu comme demande et ensuite a signé. Peut-être, la personne n'a pas
complètement compris ce que la personne a signé, mais on sait quoi a été
présenté à la personne. Quand c'est un consentement qui n'est pas écrit, qu'il
n'est pas écrit, comment on va contrôler les
mots qui sont utilisés ou comment on va savoir exactement quel est le contenu
du message qui a été transmis à la personne dont on veut le
consentement?
• (16 h 10) •
Mme Savard (Anne-Marie) : C'est effectivement un problème. Je pense qu'ici
on vise souvent... Et, encore une fois,
c'est de l'interprétation. Mais est-ce que ça pourrait être mieux formulé?
Probablement. Mais je pense qu'on vise finalement des projets à risque,
encore une fois, très, très minime, des entrevues, des questionnaires, et qui
font en sorte que, si la personne accepte,
on voit qu'elle accepte de remplir, on prend ça pour acquis, qu'elle a accepté
de le faire. Ici,
on parle juste de remplir, bon, une entrevue... comme je vous dis, là, de
répondre à quelques questions qui ne sont pas nécessairement très
importantes.
Donc, je pense que le
fait de remplir pourrait être un gage qu'on a consenti, donc, de démontrer une
forme de preuve. Mais, de toute façon, on va
en revenir finalement au chercheur. Ça va être au chercheur de se
prémunir, finalement, lorsqu'il ne voudra
pas utiliser le consentement écrit, de trouver un autre mode de preuve qui
pourra donc démontrer que la personne a effectivement consenti.
Mais,
écoutez, moi, je suis... mais je ne suis pas, là... Je sais qu'il y a des
juristes qui sont très, très... ça prend un consentement écrit. Je suis moins dans cette ligne-là, je vous dirais,
parce que, pour moi, j'ai trop vu de consentements écrits qui ne
voulaient de toute façon rien dire. Alors, là-dessus, je ne suis pas très, très
formelle.
Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps de ce bloc, c'est fini.
Mme la députée de Groulx, pour un bloc de cinq minutes.
Mme
Daneault : Merci, M. le Président. Merci, Mme Savard. Dans votre
allocution de départ, vous avez mentionné qu'il n'y a pas de référence, dans le
projet de loi actuel, aux soins innovateurs. Alors, on sait que c'est un exercice qu'on ne fait pas très souvent, de
modifier... d'avoir des projets de loi. Selon vous, est-ce qu'on devrait
l'inclure dans le projet de loi actuel et de quelle façon?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Merci beaucoup pour votre question. Écoutez, je
ne suis peut-être pas là pour vous donner toutes les pistes de solution.
Par contre, comme je vous l'ai dit, effectivement, au départ, j'ai été surprise
et déçue de voir qu'on excluait encore les
soins innovateurs et qu'on ne les soumettait pas à aucun autre contrôle.
Donc, c'est ça, mon point.
Et
le fait de dire, à l'article 21, dernier alinéa : «Ne constituent pas
des recherches les soins qui, selon le comité d'éthique de la recherche, sont des soins innovateurs requis par l'état
de santé de la personne qui y est...» «Selon le comité d'éthique de la recherche». Le problème, c'est qu'à
partir du moment où les soins ou les interventions sont interprétés par les médecins comme étant des soins innovateurs,
ils ne montent pas au comité d'éthique de la recherche. Autrement dit, c'est le médecin qui va interpréter que c'est un
soin innovateur ou, en tout cas, que ce n'est pas de la recherche et
donc que ça ne requiert pas… J'ai vu une fois en peut-être sept ans un
questionnement, dans les comités d'éthique, sur les soins innovateurs, et j'ai siégé sur plusieurs. Donc, ça veut... Je suis
persuadée que ce n'est pas parce qu'il ne se fait pas de soins innovateurs ici, dans les établissements
de santé ou les instituts de recherche. Il s'en fait, mais ça ne monte
pas au comité d'éthique.
Alors, je pense qu'au
minimum il devrait y avoir un encadrement, peut-être par un comité qui ne
serait pas le comité de la recherche, un comité
qui serait plus médical, ou une opinion médicale éclairée, pour faire en sorte
que ces soins-là, qui ne sont pas,
donc, des soins standards, qui ne sont pas reconnus par la pratique médicale
courante, soient soumis à une forme de contrôle. Donc, je dis simplement
que je déplore le fait qu'effectivement ils ne soient pas contrôlés du tout.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme Daneault : Donc, ce que je comprends, c'est qu'on pourrait inclure, à l'article 21,
que les soins innovateurs soient soumis aux mêmes règles ou...
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui, ça peut être une solution, effectivement, ça
pourrait être une solution. Ou encore un autre comité, mais là c'est sûr que,
là, on a... En tout cas, vous auriez d'autre travail, certainement, à faire
puisque... Mais, à tout le moins, oui, il faudrait qu'il y ait quand même un
certain suivi, parce qu'encore une fois ce ne
sont pas des soins qui relèvent de la pratique courante et standard de la
médecine. Donc, je ne vois pas pourquoi, là, ces soins-là pourraient
être faits selon le bon vouloir et le bon jugement des médecins ou des
chercheurs.
Le Président (M.
Bergman) : Il vous reste deux minutes.
Mme Daneault : J'ai du lousse. Je voudrais revenir aussi sur le fait qu'à l'article 21,
le premier paragraphe, tout à l'heure
vous avez semblé dire : On devrait tout simplement retirer... bon, on
devrait arrêter à «il s'oppose». Personnellement, j'ai relu le paragraphe à quelques reprises, et,
bon, quand on parle : «Un mineur ou un majeur inapte ne peut
participer à une recherche qui comporte, dans les circonstances, un risque
sérieux pour sa santé ou à laquelle il s'oppose alors qu'il en comprend la
nature et les conséquences», moi, j'ai un peu de difficultés avec ça. Quand on
dit que c'est un majeur inapte, comment peut-il comprendre la nature et les
conséquences ou comment peut-on s'assurer qu'il en comprenne la nature et les
conséquences?
Mme Savard
(Anne-Marie) : Bien...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Savard.
Mme Savard (Anne-Marie) : Pardon.
Mme Daneault :
…j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Savard
(Anne-Marie) : Oui, c'est
ça. Bien, c'est ce que j'ai souligné, de toute façon, comme vous le
disiez, dans mon allocution, là. Je voyais
un petit peu le paradoxe en disant : Bien, on parle justement de personne
majeure inapte, là, ici, et on ne parle pas de comprendre simplement ou
de pouvoir... Ce n'est pas quelque chose de simple, là, de comprendre la nature
et les conséquences d'un projet de recherche. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure,
pour une personne majeure apte, il faut déjà
se lever de bonne heure, comme on dit; donc, pour une personne majeure inapte,
c'est relativement difficile. Si bien que, pour moi, ce morceau de phrase, si
vous me permettez l'expression, est inutile et en plus, comme je l'ai dit tout
à l'heure, fait en sorte d'écarter toute une partie de la population la plus
vulnérable, c'est-à-dire celle qui ne
comprendra jamais ni la nature ni les conséquences d'un projet de recherche, et
donc pour qui... qui ne pourra jamais non plus s'opposer à un projet de
recherche. J'ai mentionné tout à l'heure que je parlais ou je mentionnais
surtout les personnes majeures inaptes, peut-être un peu moins les mineures.
Le Président (M. Bergman) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme Savard (Anne-Marie) : C'est
tout.
Le
Président (M. Bergman) :
Alors, Mme Savard, merci pour votre présentation. Merci pour l'échange
avec notre commission.
Et je demande
les gens de la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse de prendre place à la table. Je suspends pour quelques instants
seulement.
(Suspension de la séance à 16 h 16)
(Reprise à 16 h 17)
Le Président (M. Bergman) : Alors,
collègues, je demande votre consentement pour dépasser 17 heures, cet après-midi, avec nos délibérations. Est-ce que j'ai
votre consentement? Consentement? Consentement? On va terminer à
17 h 16.
Alors, M. Cousineau, bienvenue. Vous avez
10 minutes pour votre présentation. S'il vous plaît, présentez les membres de votre délégation. Vous avez le prochain
10 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec
les membres de la commission.
Commission des droits
de la personne
et des droits de la jeunesse (CDPDJ)
M.
Cousineau (Gaétan) : Merci
beaucoup. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les
députés, alors je suis accompagné aujourd'hui de Me Daniel Carpentier,
directeur adjoint de la recherche, et Me Claire Bernard, conseillère juridique.
Nous vous
remercions de l'invitation qui a été faite à la commission de présenter ses
observations sur le projet de loi n° 30.
Nous déplorons cependant le très court délai alloué pour commenter le projet de
loi, car, bien que ce texte législatif soit court, il concerne une
réalité complexe, notamment sur le plan normatif.
La commission, conformément à son mandat, a
examiné le projet de loi afin d'en vérifier la conformité aux principes et aux droits contenus dans la charte et
de faire les recommandations qu'elle estime appropriées. La
participation à des projets de recherche met en cause des droits fondamentaux
de la personne, particulièrement la recherche avec des populations considérées
vulnérables.
Le droit de
jouir du meilleur état de santé possible est un droit de la personne reconnu
dans plusieurs instruments internationaux, dont la Convention relative
aux droits de l'enfant et la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Dans une observation générale émise
en 2000, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a
précisé que l'obligation de mettre en oeuvre
le droit à la santé requiert, entre autres, que les États parties fassent la
promotion de la recherche médicale.
Toutefois, tant le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
que la Convention relative aux droits
des personnes handicapées interdisent de soumettre une personne à une
expérience médicale ou scientifique sans
son libre consentement, car une telle situation est jugée contraire au droit de
ne pas être soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Rappelons que, conformément à l'article 3 de la Convention relative aux droits
de l'enfant, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération
primordiale dans toutes les décisions qui les concernent, notamment celles qui
sont faites... des organes législatifs.
• (16 h 20) •
Le Comité des
droits de l'enfant vient d'affirmer, tout récemment dans une observation
générale sur le droit de l'enfant à la santé, qu'en matière de recherche
médicale l'intérêt supérieur de l'enfant doit prévaloir sur l'intérêt de la société ou de l'avancement de la science. Quoique
le droit à la santé et le droit «ne doit pas être soumis à des
traitements cruels, inhumains ou dégradants»
ne soient pas enchâssés dans la charte québécoise des droits et libertés de la
personne, plusieurs droits garantis par la charte sont pertinents, en
particulier le droit à l'intégrité, le droit à la sauvegarde de sa dignité et
le droit au respect de sa vie privée.
Il est également nécessaire de prendre
en considération les droits spécifiques que la charte confère à des
catégories de personnes qui sont
principalement visées par le projet de loi. En effet, tout enfant a droit à la
protection, à la sécurité et à l'attention que ses parents ou les
personnes qui en tiennent lieu peuvent lui donner. Ce principe, d'ailleurs, a
été repris intégralement à l'article 32
du Code civil. Par ailleurs, toute personne âgée et toute personne handicapée a
le droit d'être protégée contre toute
forme d'exploitation et le droit à la protection et la sécurité que peuvent
leur apporter leur famille ou les
personnes qui en tiennent lieu. Ça englobe, outre l'exploitation financière,
toute autre forme d'exploitation, dont l'exploitation physique,
psychologique, morale et sociale.
Le
Québec est une des premières juridictions au monde à avoir légalisé la
recherche médicale avec des enfants. En
1971, le Code civil reconnaissait la légalité de l'expérimentation impliquant
des mineurs à condition qu'ils soient doués de discernement, que l'expérimentation n'entraîne pas de risque sérieux
pour la santé du sujet et qu'il y ait consentement du titulaire de l'autorité parentale et autorisation
du tribunal. Cependant, face au constat que l'interdiction absolue de
toute expérimentation impliquant les enfants non doués de discernement et les
majeurs inaptes les prive de l'avancement de la recherche, le législateur a
autorisé l'expérimentation avec ces catégories de population en 1991.
Toutefois, afin d'assurer le respect des droits des personnes dont l'état de
vulnérabilité les rend plus susceptibles d'être exploitées, le Code civil assujettit la recherche avec ces
personnes à des conditions plus rigoureuses que celles protégeant les
majeurs aptes. Certaines de ces conditions ont été modifiées en 1998, car
jugées encore trop restrictives par les milieux de recherche. On a, entre autres, totalement éliminé l'autorisation
judiciaire. La commission rappelle qu'elle avait participé aux travaux
parlementaires à l'époque.
Le
présent projet de loi vise de nouveau à réviser les dispositions législatives
pertinentes en tentant d'établir un équilibre entre le respect des
droits et la protection des sujets de recherche qui sont vulnérables en raison
de leur âge ou de leur handicap, d'une part, et la poursuite des projets de
recherche impliquant ces mêmes sujets, d'autre part.
La première
modification propose de remplacer le terme «expérimentation» par le terme
«recherche». Ce changement ne clarifie pas la portée des actes que l'on vise à
réglementer ou à exclure puisque les dispositions du Code civil contiennent peu d'indications qui permettraient d'établir une
définition. La commission recommandait déjà en 1998 que la notion des soins innovateurs soit clarifiée. Suivant l'article 21
du Code civil, la responsabilité de déterminer si des soins constituent des recherches ou des soins
innovateurs requis par l'état de santé de la personne qui y est soumise revient au comité d'éthique de la recherche. Cette
délégation à chaque comité d'éthique peut entraîner des répercussions significatives, les conditions juridiques
entourant les soins innovateurs requis par l'état de santé étant moins
contraignantes que celles qui encadrent la
recherche. La commission estimait donc que cette clarification était
nécessaire, entre autres, afin de
contribuer à s'assurer qu'une interprétation trop large de la notion de soins
innovateurs ne vienne pas réduire à néant
l'objectif visé par les modalités entourant l'expérimentation avec des mineurs
et des majeurs inaptes. La commission réitère
que le concept de soins innovateurs devrait être mieux défini afin d'assurer
une protection uniforme aux personnes vulnérables qui reçoivent des
soins qui sont, de par leur nature, expérimentaux.
Dans
le même sens, la commission considère que la notion de recherche devrait être
définie ou délimitée.Rappelons que
les dispositions régissant la recherche se situent dans la section du Code
civil qui traite des soins et que cette section se situe dans le
chapitre qui traite de l'intégrité de la personne. Bien que la notion des soins
soit définie assez largement par l'article 11,
puisqu'il peut s'agir d'examens, de prélèvements, de traitements ou de toute
autre intervention, il faut néanmoins se demander si toutes les
recherches envisagées correspondent à des soins. Une réflexion s'impose sur le
cadre législatif qui devrait s'appliquer.
Cela
dit, la première exigence qui conditionne la recherche est celle du
consentement. C'est principalement sur cette question que le projet de loi propose des modifications. Compte tenu du
court délai, la commission n'est pas en mesure de présenter une position
sur chacune de celles-ci. Nous formulerons toutefois quatre commentaires et une
règle fondamentale, soit que le principe du consentement libre et éclairé est
au coeur du droit à l'intégrité de la personne.
En premier lieu, le
projet de loi propose de permettre à un mineur de 14 ans et plus de
consentir seul à une recherche si, de l'avis
du comité d'éthique de la recherche compétent, celle-ci ne comporte qu'un
risque minimal pour le mineur et que
les circonstances le justifient. Rappelons que la charte ainsi que le Code
civil et la Loi sur la protection de la jeunesse consacrent le principe
de la responsabilité des parents à l'égard de leur enfant mineur, quel que soit
son âge. Cependant, plusieurs dispositions
du code et de la Loi sur la protection de la jeunesse permettent à l'enfant âgé
de 14 ans et plus d'exercer
directement certains droits. Cette approche reconnaît le principe de la
capacité évolutive de l'enfant, notamment en matière des soins de santé.
Cependant, un tel changement exige que les mesures soient en place pour garantir que l'enfant qui participe à la recherche
donne un consentement qui soit effectivement à la fois libre et éclairé.
D'autre part, si cette modification était retenue, la commission considère que
le Code civil devrait être plus précis sur le type de circonstances qui
pourraient justifier le recours à ce régime de consentement exorbitant du
régime général.
En
second lieu, le projet de loi élargirait la situation où une personne aurait le
pouvoir de consentir pour un majeur inapte
en l'absence de représentant légal. Serait aussi autorisé le conjoint... sera
ainsi autorisé le conjoint, ou, à défaut de conjoint ou d'empêchement de
celui-ci, un proche parent, ou une personne qui démontre pour le majeur un
intérêt particulier. Il faut se rappeler que
toute personne inapte n'est pas nécessairement représentée en vertu d'un mandat
de protection ou d'un régime légal de
protection. L'assouplissement de la règle relative aux personnes qui pourraient
donner un consentement substitué ne doit pas se faire au détriment du droit à l'intégrité
et des autres droits fondamentaux de la personne
inapte. En particulier, les conditions doivent être en place pour que les
personnes soient en mesure d'agir dans le seul intérêt de la personne inapte. Elles devront, entre autres,
disposer des informations suffisantes pour tenir compte des volontés que cette dernière a pu manifester, en
particulier si elle a exprimé son consentement à participer à une
éventuelle recherche ou refusé.
D'autre part,
il est opportun de se demander comment se régleront les situations où plusieurs
proches du majeur inapte divergeraient d'opinion, en particulier lorsque
la recherche ne viserait pas le bienfait pour le majeur inapte.
Le
troisième commentaire concerne l'introduction du concept de risque minimal.
Étant donné que le premier alinéa de l'article 21
interdit la participation à la recherche des mineurs et majeurs inaptes lorsqu'elle
comporte un risque sérieux pour la
santé, on comprend qu'on introduirait ici un risque qui se situerait au‑dessus
du seuil de l'absence de risque mais
en deçà du risque permis par l'article 21. La commission recommande que ce
nouveau critère fasse l'objet d'une définition dans le Code civil afin
que les comités d'éthique de la recherche puissent l'appliquer sur la base d'une
compréhension commune.
Finalement,
le projet de loi propose de permettre que le consentement à une recherche
puisse être donné autrement que par
écrit si, de l'avis d'un comité d'éthique de la recherche, les circonstances le
justifient. Si on peut admettre que, dans certaines situations, l'exception
pourrait être justifiée, notamment pour permettre de respecter les droits de la
personne concernée, il n'en demeure pas moins que le Code civil devrait être
plus précis.
Par
ailleurs, la commission accueille favorablement la proposition de conférer à
toute personne qui participe à une recherche
de même qu'à ses héritiers ou représentants légaux le droit de formuler une
plainte concernant cette recherche auprès
du commissaire local aux plaintes et à la qualité de services. Elle note
toutefois que ces personnes ne disposeraient pas d'un recours auprès du
Protecteur du citoyen. La commission se demande ce qui justifie ce choix.
Pour
terminer, la commission souhaite formuler deux commentaires portant
respectivement sur l'encadrement normatif
des comités d'éthique de la recherche et sur la composition de ceux-ci. Les
normes encadrant la composition et les conditions
de fonctionnement des comités d'éthique de la recherche responsables d'approuver
et de surveiller les projets de recherche ne sont établies ni dans le
Code civil ni dans une autre loi. Elles sont plutôt définies par le ministère
et doivent être publiées à la Gazette
officielle. En 1998, la commission avait suggéré que les normes encadrant
la composition et le fonctionnement
des comités d'éthique de la recherche soient prévues par règlement. Compte tenu
des responsabilités exercées par les
comités d'éthique de la recherche pour assurer le respect des droits
fondamentaux des sujets de recherche mineurs
ou inaptes, la commission est toujours d'avis que les conditions de
fonctionnement de ces comités devraient plutôt être édictées par
règlement.
Par
ailleurs, la commission avait recommandé que chaque comité d'éthique comprenne
au moins une personne ayant pour rôle
de défendre les droits et l'intérêt des personnes vulnérables impliquées. Elle
suggérait que ce rôle pourrait être
assumé par une personne ayant une sensibilisation et un intérêt marqué en
matière de droits de la personne malade, des personnes handicapées ou
des malades mentaux, selon le cas. Cette recommandation n'a été que
partiellement suivie.
La
présence d'une personne ayant un intérêt particulier à l'égard du groupe de
personnes qui font l'objet d'une recherche
trouve une illustration dans l'énoncé de politique relative à l'éthique de la
recherche avec des êtres humains adoptée en 2010 par le Conseil de
recherches en sciences humaines du Canada, le Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada et les Instituts
de recherche en santé du Canada. Selon nous, ce principe devrait pouvoir
s'appliquer au sein des comités d'éthique de la recherche lorsque des
catégories spécifiques de personnes sont visées par une recherche. Je vous
remercie de votre attention.
• (16 h 30) •
Le Président (M. Bergman) : Merci, M. Cousineau, pour votre présentation. Et
maintenant le groupe formant le gouvernement pour un bloc de
24 minutes. M. le ministre.
M. Hébert :
Merci beaucoup, M. Cousineau. Bonjour, madame, monsieur. J'aimerais d'abord
que… Lorsque vous dites : «clarifier la notion de soins innovateurs»,
quelle serait votre suggestion, si on avait à clarifier cette notion-là dans le
Code civil?
Le Président (M.
Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau
(Gaétan) : Merci. Nous croyons qu'il y a des pistes de définition
autant dans la convention européenne que dans des déclarations de l'UNESCO, que
peut-être que madame pourrait... Bernard ou
monsieur...
Le Président (M.
Bergman) : Mme Bernard.
MmeBernard(Claire) : Pas spécifiquement sur ce...
M. Cousineau
(Gaétan) : C'est le risque minimal.
Mme Bernard (Claire) : Oui. Excusez-moi. Les définitions, on les voit
sur d'autres questions qui pourraient venir. C'est le législateur qui a
fait la distinction. Donc, à notre avis, c'est à lui d'expliquer quelle est la
catégorie de soins qu'il exclut du champ des soins qui sont des recherches.
Nous, on a fait une présentation en fonction des droits et des moyens pour respecter ces droits, mais on n'est
pas sur le terrain pour qualifier les soins. Mais ce qu'on voit, c'est l'impact
de l'exclusion et du manque de définition,
donc les répercussions sur... le fait qu'il n'y ait pas de définition. Et on a
même entendu que même ce que le Code civil prévoyait, c'était que cet examen
devait être fait par les comités d'éthique. On apprend que même ce stade-là n'est pas respecté. Donc, merci.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Je vais avoir le même genre de question. Lorsque vous dites : Il faudrait
préciser le type de circonstances où un mineur
de 14 ans et plus pourrait consentir, avez-vous des suggestions
quant à la précision de ce type de circonstances?
Le
Président (M. Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Non, on n'en a pas. Vous savez qu'on a eu un
délai très court pour commenter ce projet de loi. Alors, nous, ce qu'on a dit, bien, c'est qu'à la lecture même du
projet et des textes écrits ça nous pose des questions.Donc,
on reste avec des questions, et c'est ça qu'on vous donne comme information.
Peut-être qu'il faudrait les préciser, et, à partir de ces précisions, on pourrait mieux commenter le projet et s'assurer
de la protection. Parce que, comme on dit, c'est le meilleur intérêt de
l'enfant, c'est sa protection qu'il faut, au-dessus de tout, se préoccuper.
Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Vous évoquez, dans votre mémoire, là, l'Énoncé des trois conseils auquel on pourrait se référer. L'Énoncé des
trois conseils définit l'expression «risque minimal», et on entendait tout à l'heure que les comités
d'éthique basent leurs décisions sur
notamment l'Énoncé des trois conseils,
qui, soit dit en passant, est un énoncé qui résulte d'une large
consultation publique et d'un consensus et qui est révisé, là. Je pense qu'entre
les deux énoncés il y a eu 10, ou 12, ou 15 ans. Donc, c'est un processus très bien suivi.
Et «risque minimal», c'est : «…la
recherche où la probabilité et l'ampleur
[de] préjudices éventuels découlant de la participation à la recherche ne sont
pas plus grandes que celles des préjudices inhérents aux aspects de la
vie quotidienne du participant qui sont associés au projet de recherche.»
Est-ce que vous trouvez que cette définition de «risque
minimal»... est-ce que vous êtes confortable
avec cette définition?
Le Président (M.
Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Notre commentaire était que… le fait qu'au Code civil, dans le projet de loi,
il n'y avait pas cette définition du «risque minimal». Là, j'entends
votre définition, donc on n'a pas pu l'étudier, on l'entend maintenant. Nous,
on avait regardé... Je m'excuse, tantôt, la
question, c'est justement dans la convention européenne, et l'UNESCO avait,
eux, fait des tentatives de «risque minimal». Par exemple, celle-là, ici, c'est
la convention européenne, je crois.
Mme Bernard
(Claire) : C'est le protocole.
M. Cousineau
(Gaétan) : C'est le protocole de...
Mme Bernard
(Claire) : C'est le protocole de la convention européenne en matière
de recherche médicale.
M. Cousineau
(Gaétan) : Alors, ici : Recherche comportant un risque minimal
et une contrainte minimale. «Aux [termes] du présent protocole, une recherche
est considérée comme [représentant] un risque minimal si, au regard de la nature et de la portée de l'intervention, on
peut s'attendre à ce qu'elle entraîne, tout au plus, un impact négatif
très faible et temporaire sur la santé de la
personne concernée.» Et on explique même une définition de ce qui est une
contrainte minimale si... Je peux la définir, si vous
voulez.
Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Vous me permettrez de préférer celle des trois conseils,
qui, à mon avis, est plus opérationnelle.
Autre
question, sur le consentement écrit. J'aimerais
aussi vous entendre sur vos réserves par rapport au consentement écrit, s'il y
en a.
Le Président (M.
Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Bon, on s'est dit que,
si, dans... Oui, on dit, dans notre document, que,
parfois, ça peut être
opportun. Mais je pense que, lorsque c'est consentement écrit, toutes les
questions se posent. À quoi on a consenti? Et donc, dans notre texte plus long, là, on vous suggère de penser
peut-être à un témoin qui serait là pour assurer de pouvoir bien
identifier ce à quoi on a consenti de façon verbale s'il n'y a pas d'écrit pour le confirmer.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert : O.K. Mais, par exemple, une recherche qui se ferait par téléphone, parce que
c'est à ça qu'on réfère surtout, là,
les recherches qui se font par téléphone, où le consentement écrit est
difficile, ou encore des recherches de masse où on a 50 000 personnes à observer, par exemple, alors c'est ce
que nous révélaient, là, certains témoins qui sont venus à cette commission,alors
la présence de témoins, comment ça peut s'opérationnaliser?
Le Président (M.
Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Dans le projet de loi, on ne parle pas de ce type
de recherche, on parle de recherche tout court, et on n'identifie pas
que c'est un appel téléphonique ou un autre moyen. Donc, je pense que, dans ces
cas-là, il faudrait trouver un moyen quand même de s'assurer du consentement
libre et éclairé. On a affaire à un mineur ou une personne inapte, donc il faut
prendre les moyens pour assurer la protection de cette personne.
Le
Président (M. Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert :
Je vais laisser mes collègues poser des questions
supplémentaires.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Cousineau, Me Carpentier et Me Bernard. De prime
abord, M. Cousineau, j'aimerais ça que
vous nous disiez si votre organisme est saisi souvent de plaintes ou de
problèmes relatifs à des personnes qui participent à des projets de recherche.
M. Cousineau (Gaétan) : Les plaintes que nous recevons sont basées sur la
discrimination. Alors, ça ne pourrait pas
être inclus, à moins qu'on puisse faire un lien avec une discrimination. Les
autres types de plaintes qu'on peut
recevoir, c'est des plaintes d'exploitation,
personnes âgées, personnes handicapées. Dans ce sens-là, nous, on n'a pas... On
a enquêté dans différents cas où, par
exemple, les gens devaient... les soins reçus,
ou les soins non reçus, ou la qualité des soins
reçus pouvaient être un des facteurs de l'examen de l'enquête, pas
nécessairement une participation à la recherche. Je ne me souviens pas de quoi
particulier à cet effet-là. Moi, je n'en connais pas.
Mme Proulx :
Parfait.
Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. Merci. J'aimerais, M. Cousineau, vous parler de toute la question
relative aux changements législatifs
proposés en lien avec le consentement des personnes inaptes. Alors, dans le
projet, il y a un assouplissement de la règle au niveau des personnes inaptes qui vient donner le droit aux
personnes habilitées à consentir aux soins. On vient donner à ces personnes-là le droit de consentir
pour la personne inapte à une participation à un projet de recherche.
Est-ce que, de votre point de vue, là, de président de la Commission des droits
de la personne, vous jugez que les personnes habilitées
à consentir aux soins sont en mesure de protéger les droits de la personne
inapte au même titre que ce qui était prévu
dans la loi précédemment, c'est-à-dire une personne, un tuteur légal? Est-ce
que vous pensez que cette personne-là, qui est habilitée à consentir aux
soins, va pouvoir protéger adéquatement les droits de la personne inapte?
Le Président (M.
Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Dans notre texte et comme je l'ai dit tantôt,
premièrement, il y a le risque minimal, la définition, on en a parlé tantôt, donc je ne reviendrai pas là-dessus.
Mais ce que le projet propose, c'est qu'il pourrait être représenté par une autre personne s'il n'y a pas de
mandataire ou un représentant désigné. Alors, oui, ça peut être opportun, à ce
moment-là, d'avoir accès à cette personne-là.
Mais je vous
rappellerai, on le cite dans nos notes de présentation, la Cour supérieure, une
décision qui est importante, qui vient
peut-être éclairer de ce côté-là, c'est qu'on dit, dans cette décision du
tribunal, que «…doit se justifier par l'intérêt
d'une personne majeure inapte dans la
mesure où il convient de la protéger de nulle autre personne». Alors, il
faut s'assurer que la personne qui va
consentir ou qui va venir appuyer parce qu'elle a un intérêt pour cette
personne, elle va se préoccuper de la qualité de vie de cette personne
et non pas de l'intérêt que le mandataire ou la personne qui a l'intérêt… elle voit qu'il y a peut-être un
intérêt que sa mère ou son père qui souffre d'alzheimer,
de démence, pourrait être vérifié, puis ça bénéficierait aux
autres personnes. Donc, il ne faut pas déplacer le test au bon endroit.
Et
je peux vous mentionner que, comme ancien notaire qui a pratiqué le droit et
qui a vu plusieurs disputes de famille
et comme aussi on s'occupe de la protection des personnes âgées, des personnes
handicapées, on peut voir que, souvent,
il y a plusieurs personnes autour d'une personne,
et qu'ils ont tous, quand on les écoute et qu'on les entend, le meilleur
intérêt de la personne en tête, et qu'ils recherchent… mais qui sont tous avec des
opinions divergentes, et ce qui fait des bonnes chicanes de famille.
Le Président (M.
Bergman) : Monsieur...
M. Cousineau
(Gaétan) : Alors, ça, c'est l'enjeu dans ces
situations-là.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
• (16 h 40) •
M. Hébert :
Un commentaire là-dessus. Habituellement, c'est une des raisons pour laquelle
les gens vont aller vers un processus de protection légale lorsqu'il n'y
a pas d'entente. Donc, d'habitude, ces gens-là ont déjà un régime de protection
légale, parce qu'il y a justement mésentente
dans la famille. Dans les autres cas, on convient selon les dispositions du
Code civil.
Une
remarque sur l'une de vos notes concernant l'examen des plaintes, et vous
dites : Pourquoi on ne réfère pas au Protecteur du citoyen? Vous
savez que le Protecteur du citoyen est toujours en deuxième instance dans l'examen
des plaintes. Et d'ailleurs la Protectrice du citoyen nous a écrit là-dessus en
disant : «Je constate avec satisfaction que le Protecteur du citoyen aurait ainsi compétence pour recevoir et traiter
ces plaintes en deuxième instance.» Donc, pour la Protectrice du citoyen elle-même, il s'agit de...
elle est impliquée dans le processus de facto,
puisqu'on soumet les sujets à une recherche au même processus que les
patients des établissements. Donc, elle est là. Elle est dans le processus.
Le Président (M.
Bergman) : Me Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Bien,
écoutez, tant mieux si elle perçoit qu'elle a ce rôle. Nous, on croyait ou on
avait perçu... Comme je vous disais, on a peu de temps regardé tout
cela, mais on avait perçu que, parce qu'il n'y avait pas de modification de la loi qui... La Loi sur le
Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux, la commission, là, on s'est dit : Bien,
peut-être qu'à ce moment-là il y aurait peut-être dû avoir une modification à
cette loi. Et, si vous pensez qu'il n'y
en a pas besoin puis que la protectrice se croit saisie, bien, tant mieux.
M.
Hébert : Dans la loi, la
protectrice arrive en deuxième recours lorsque c'est les soins. Et, comme on dit que c'est le même processus
que pour les soins, bien, ipso facto...
M. Cousineau (Gaétan) : Tant mieux.
Parfait, on est d'accord.
M. Hébert : Mes collègues peuvent
peut-être compléter.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. Dans votre
mémoire, vous parlez de... en fait, vous semblez avoir une préoccupation par rapport à la modification proposée de changer le
terme «expérimentation» par le terme «recherche». Vous dites, dans votre
mémoire, que ça correspond mieux à la réalité
québécoise, canadienne et internationale mais
que ça ne clarifie pas pour autant la
portée des actes que l'on vise à réglementer ou de ceux qu'on souhaite exclure.
Alors, j'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu plus la
préoccupation. Est-ce que, pour vous, il s'agit d'un changement plus large qu'uniquement
sémantique, là, le terme «expérimentation»
et le terme «recherche»? Est-ce que vous voyez une différence? Parce que
vous mentionnez que le Code civil contient très peu d'indications qui permettent
d'établir une définition. Est-ce que, pour vous, il y a une différence?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Il doit
y en avoir une. Si on décide de le changer, ça ne doit pas tout à fait dire la
même chose,
ou, si on change quatre 0,25 $ pour 1 $,
je ne le sais pas. Mais ce qu'on vous dit,
finalement, c'est que le terme «recherche»
aux... et les dispositions du Code civil ne contiennent pas d'indication,
justement. Donc, pour mieux définir, je pense qu'il serait important qu'on
tente une définition du terme «recherche» dans le code. C'est notre suggestion.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose... M. le député d'Argenteuil.
M.
Richer : Merci, M. le
Président. Bonjour. Dans votre rapport, vous
mentionnez à la page 4 : «La
responsabilité de déterminer si les soins
constituent des recherches selon la nouvelle terminologie proposée ou des soins
novateurs requis par l'état de santé de la personne qui est soumise
revient au comité d'éthique de la recherche.» Et vous ajoutez : «On
conviendra qu'il s'agit dans les deux cas de soins de nature expérimentale.» J'aimerais
vous entendre sur cette dernière phrase.
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Si vous
me permettez, là, vous avez parlé tantôt de notre document comme étant
un mémoire, un rapport. Je voudrais le
qualifier pour ce qu'il est : ce sont des notes de présentation. On n'a
absolument pas eu le temps de faire
un avis ou un mémoire à l'Assemblée nationale, on regrette, en peu de temps. On
a présenté nos notes de présentation à nos membres vendredi parce qu'il
y avait une date de fixée pour cette rencontre déjà à l'avance, sinon on n'aurait pas pu le faire, et sans leur donner
la chance d'avoir un texte à l'avance. Donc,
nous, ce qu'on a fait, on s'est repris... on a repris la majorité de nos
notes de 1998, lorsqu'on était intervenus la
dernière fois, à cette époque-là.
Alors, ce qu'on
dit, finalement, pour revenir à votre question précise, c'est qu'on dit que, dans les deux cas…On convient que, dans les deux cas, ce sont des soins de nature
expérimentale, que les... mais que cette... puis que, là, cette
détermination-là, elle est déléguée à chaque comité d'éthique.
Alors, nous, on dit qu'à partir de là il
faut éviter des interprétations divergentes
des comités d'éthique,et c'est là qu'il est risqué… et
que, donc, les concepts de recherche, de risque minimal, de soins
innovateurs, tout ça devrait être mieux défini, mieux précis pour assurer une
cohérence, une harmonisation des décisions
des différents comités d'éthique qui se fréquentent ou ne se fréquentent pas et
qui pourraient avoir une définition plus large ou plus restreinte selon
les gens, selon les groupes. Et même on parle de... on vous donne des recommandations quant à la composition des comités… excusez, la... parce que c'est par Gazette
officielle, on vous suggère d'y aller par règlement,donc la commission pourrait commenter, comme
elle le fait sur les différents règlements, et de plus vous suggère la présence
d'une personne additionnelle à ce type de comité pour représenter les groupes
de personnes selon leurs spécificités.Voilà. C'est un
peu les commentaires qu'on fait à ce niveau-là.
M. Richer : Merci.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci.
Bonjour, M. Cousineau. Alors, madame, messieurs, vous nous dites aussi,
dans vos propos, que le consentement non écrit pourrait... Vous avez certaines
réserves par rapport à un consentement non écrit, mais par contre,
documenté, il pourrait peut-être y avoir des possibilités. On a entendu des
groupes de recherche qui nous ont parlé de recherches sociales, plus de
caractère, plus de recherche, de questionnaires, des fois, aussi, faire par téléphone ou... ce genre de questions là qui
pourraient apporter des éléments pour faire avancer la recherche et la
science dans certains domaines sociaux.
Alors, pouvez-vous nous donner une idée de, pour vous, qu'est-ce que ça
pourrait être, des choses suffisamment documentées pour que ce soit
acceptable pour vous? Avez-vous des idées?
M.
Cousineau (Gaétan) : Bien,
par exemple, si vous faites affaire avec un mineur, s'il avait 14 ans et plus, puis on entre dans un cadre de risque minimal, comme un questionnaire,
par exemple, et que, bon, vous ne lui envoyez pas un document auparavant qu'il pourrait signer, bien,
ça peut être par... si les parents sont là, de toute façon, il y a…
comme on dit, le parent a toujours autorité même si l'enfant a plus de 14 ans. Alors, le
parent pourrait peut-être vérifier et consentir, vous auriez un témoin
de ce côté-là.
Mais on ne l'écarte
pas, hein? On ne vous dit pas qu'il faut l'écarter. On
dit même... On constate que ça pourrait être, dans certains cas,
acceptable. Voilà. Par exemple, on peut aller dans des cas, des situations plus
graves, plus importantes, je pense, comme
dans les situations où les parents, les gens qui... par exemple, suite à un
accident où on sait que la personne
aurait mentionné des choses à sa famille, à son conjoint, puis on se retrouve
dans des situations, donc, où il pourrait
y avoir, là, des consentements qui auraient pu être donnés, on peut... Voilà.
Il y aurait peut-être des consentements écrits à aller chercher dans ces
situations-là pour documenter ce pan-là.
Mme
Gadoury-Hamelin : O.K. Par
contre, les gens de la recherche nous ont indiqué que, dans bien des cas,
c'est de la recherche sociale, les parents
ne sont pas présents ou les jeunes, à ce moment-là, sont en brisure sociale
avec leursfamilles, et que c'est là toute la
difficulté d'aller chercher les consentements parentaux, de là l'allégement qu'on
regarde ici, en commission. Est-ce que vous auriez d'autres solutions
acceptables?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Oui, d'accord.
Oui, d'ailleurs, nous, vous savez, on a... C'est
la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse, on a régulièrement affaire à des jeunes
qui sont dans des familles d'accueil, dans des centres de réadapt, qui sont en coupure avec les parents. On se
retrouve souvent dans des situations où c'est un des parents ou les deux
parents qui font des plaintes à la commission puis sont complètement en
désaccord sur des soins à donner aux enfants. On connaît bien toute cette
situation. On la connaît, on la vit de façon, je vous dirais, presque
quotidienne dans ces situations-là, parfois justement pour faire des examens de
capacité d'enfants pour les soins à donner, au
lieu de les servir soit au niveau scolaire ou autrement. Alors, oui, il y a des
défis de ce côté-là.
Mais là vous
parlez de questionnement, mais je pense que j'aimerais aussi que M. Carpentier
vous donne un peu...
Le Président (M. Bergman) : M.
Carpentier.
• (16 h 50) •
M.
Carpentier (Daniel) : C'est
qu'il y a une certaine difficulté à traiter de ce projet de loi puisqu'il y a…
On est dans le Code civil, dans la section
des soins, et notre réflexe et notre expérience, comme Commission
des droits, c'est les droits
fondamentaux, le droit à l'intégrité de la personne. Normalement… Et là on
passe d'expérimentation à recherche, et ce qu'on entend ici, c'est de la recherche sociale qui se fait par
téléphone. Je comprends que ce n'est pas le
mandat qu'a le ministre dans ce
projet de loi là, c'est d'ouvrir à certaines choses, mais on est en train d'ouvrir
sur de la recherche sociale dans un chapitre du Code civil qui traite
des soins. Alors, nous, nos préoccupations quant au consentement, c'est... On dit : Pour faire des sondages au téléphone
sur des habitudes qu'ont des adolescents, est-ce qu'on est dans les
soins requis par l'état de santé,
innovateurs, etc.? C'est la difficulté qu'on a. Je comprends le besoin d'étendre...
d'ouvrir la recherche à certaines choses, mais on est dans une section
du Code civil qui traite des soins. Alors, je
veux quand même... c'est peut-être le...
Et nous ne sommes pas des experts en recherche ni
sociale ni médicale. On a une expertise sur le respect des droits de la
personne, le droit à l'intégrité, le libre consentement des personnes, et c'est
ça qu'on vient amener et dire : Faisons
attention. Et il faut peut-être définir ce dont on parle ici. On comprend que
le Code civil n'est pas un lieu pour... ce n'est pas le type de législation où on définit en détail des choses,
mais on peut au moins établir des balises de qu'est-ce qu'on entend par soin minimal, qu'est-ce qu'on
entend par soin innovateur puis qu'est-ce qu'on entend par recherche.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson, il vous reste trois minutes.
Mme Gadoury-Hamelin : Moi, ça va
pour moi.
Le Président (M. Bergman) : M. le
député de Bonaventure.
M. Roy : Bonjour, madame, bonjour,
messieurs. Pensez-vous que les modifications proposées constituent un équilibre acceptable entre la protection des
participants à la recherche et l'avancement de la science? Bref,
globalement, est-ce que c'est un bon projet
de loi? Est-ce que ça peut permettre un avancement de la science tout en respectant
quand même les droits de la personne?
Le
Président (M. Bergman) : M. Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Jusqu'à date, je n'ai jamais répondu à une
question si c'est un bon projet ou pas. Je laisse le soin aux législateurs d'en convenir. Nous, on
fait des commentaires sur des aspects de projet. En fait, ce qu'on vous
souligne, c'est les questionnements qu'on a à la lecture de notre expertise, qui est celui de la protection des droits fondamentaux des individus avec qui on traite. Et
là vous... le projet vient traiter des deux groupes les plus vulnérables
de ces personnes : les mineurs, d'une
part, et les majeurs inaptes. Alors, vous voyez qu'on devient, nous, comme
protecteurs, à ce moment-là, plus prudents dans nos commentaires face à cela.
Ceci
dit, puis on l'a dit, je pense qu'on a essayé de le dire dans notre document,
que l'on constate, à partir de 1971, si
je me souviens bien de la date où le Code civil s'est fait innovateur au Québec
pour la recherche et comment chaque... les chercheurs ont cherché, puis on voit qu'il y a…
l'important... puis, si j'avais... puis je ne le ferai pas, mais, si j'avais le goût de parler de ma vie personnelle et de mes
enfants, j'ai eu affaire à des situations semblables dans ma vie
personnelle et je connais, moi,
personnellement, des situations de demande de
recherche, etc. Mais, ceci dit, le document, je
pense… il est important que, les gens
qu'on aime, et qu'on veut prendre soin, et qui ont des droits fondamentaux, on
puisse leur donner les meilleurs soins possible.
Puis
le droit, je vous l'ai dit au tout début…Ce que j'ai dit, c'est que le droit important qui
nous retient, qui amène la commission ici, c'est le droit à la santé,
hein? C'est ce droit-là qui est important. Par
contre, il y a d'autres droits, et les
droits sont égaux. Il n'y a pas de hiérarchie, là. Alors, il faut faire
attention dans ce sens-là. Est-ce qu'il y a équilibre? Bien, c'est ça qu'il faut s'assurer. Et, pour s'en
assurer, nous, il manque de clarté dans certains aspects, dans certaines
définitions pour s'en assurer, pour qu'on puisse vous donner une réponse
équilibrée et éclairée, qui vient de notre consentement libre et éclairé.
Le Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin à ce bloc. Pour le groupe
formant l'opposition officielle, pour un bloc de 21 minutes, M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Seulement que faire un
commentaire sur la dernière discussion. On n'a pas le choix d'en faire un bon projet de loi puis d'en faire une
bonne loi, parce que c'est trop fondamental. Et, si les gens ont autant hésité à ouvrir l'article 21, c'est parce qu'il y a beaucoup de
susceptibilité, mais il faut être capables, autour de la table, d'y
répondre.
Merci de... puis
rebonjour dans cette commission. Vous êtes venus, il y a quelques semaines,
discuter...
M. Cousineau
(Gaétan) : ...
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Aux deux semaines, puis réservez...
M. Cousineau
(Gaétan) : ...semaines actuellement et dans des... je vous rappellerai, dans des domaines très vastes
et différents.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Puis réservez votre
mercredi dans deux semaines;on ne sait
pas, là, ça pourrait revenir.
M. Cousineau
(Gaétan) : Oui. Bien, on en a d'autres en préparation.
M. Bolduc (Jean-Talon) :
Écoutez, j'ai un... je pense que vous nous avez apporté un nouvel élément. Un,
votre Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, c'est
quand même un organisme qui est très reconnu. Est-ce que j'ai raison ou pas?
M. Cousineau (Gaétan) : Oui. Je pense que oui, que les gens s'adressent à
nous, parce que, s'il y a brisure, ou
effraction, ou discrimination, exploitation, ils vont venir chez nous. Et ils
sont de plus en plus nombreux à le faire et se tournent vers nous pour des
opinions sur ces sujets-là.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : C'est un organisme public.
M. Cousineau
(Gaétan) : Absolument.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Absolument.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Excusez-moi, j'ai
devancé, M. le Président. Par contre, quand vous avez fait vos devoirs
puis vous avez recherché la notion de risque minimal, vous n'êtes pas allés du
côté des trois conseils, vous êtes allés du
côté d'une autre organisation. Ça fait que je ne sais pas si vous pourriez nous
réciter ce que vous nous avez donné comme définition du risque minimal.
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Je vais vous expliquer pourquoi on se tourne vers
ces instruments-là. Nous, ce qu'on regarde
en premier lieu, c'est la Charte des droits, les droits au Québec et les
conventions internationales, parce que c'est là-dessus qu'on base le
droit. Mais on peut vous lire… Je vais vous
laisser...
M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, c'est ça, c'est justement... Vous m'avez
dit… vous êtes basés
sur les conventions internationales. Où, à quel endroit vous êtes allés chercher votre définition, et est-ce que vous
pourriez la lire?
M. Cousineau
(Gaétan) : Oui. Allez-y, là.
Le Président (M.
Bergman) : Me Bernard.
Mme Bernard (Claire) : Alors, je voudrais juste dire qu'on a quand même
regardé aussi les outils normatifs ici, mais c'était pour répondre : Est-ce qu'on est capables de donner,
dans un outil juridique, une définition? Et on en donne un exemple.
Donc,
l'article 17 du protocole de la convention européenne qui porte
particulièrement sur la recherche biomédicale définit le risque minimal
et la contrainte minimale :
«1.
Aux fins du présent protocole, une recherche est considérée comme présentant un
risque minimal si, au regard de la
nature et de la portée de l'intervention, on peut s'attendre à ce qu'elle
entraîne, tout au plus, un impact négatif très faible et temporaire sur
la santé de la personne concernée.
«2.
Une recherche est considérée comme présentant une contrainte minimale si l'on
peut s'attendre à ce que les désagréments pouvant en résulter soient
tout au plus temporaires et très légers pour la personne concernée. Lors de l'évaluation
individuelle de la contrainte, une personne jouissant d'une confiance
particulière auprès de la personne concernée est, le cas échéant, appelée à
évaluer la contrainte.» Donc, il y a deux éléments dans cette large définition.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci. Puis êtes-vous d'accord? Parce que cette
définition est quand même différente de celle
des trois conseils.
Le Président (M.
Bergman) : Me Cousineau.
M. Cousineau
(Gaétan) : La réponse est oui.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : O.K. Merci, M. le Président. Dans notre Code civil, on
donne la notion de risque minimal. Qu'est-ce
qui ferait que la notion des trois conseils aurait priorité sur la notion que
vous venez de nous lire? C'est parce
qu'il n'y a pas de définition dans le Code civil. Ça fait qu'on sait juste que
c'est «risque minimal».
On nous a dit ici que c'était basé sur les trois conseils, mais moi, je pars du
principe que, le Code civil, c'est juste
marqué «risque minimal», puis on avait
tous des interprétations différentes. Qu'est-ce qui ferait que celle des trois
conseils serait prioritaire sur celle que vous venez de nous lire?
M. Cousineau (Gaétan) : En fait, il n'y a rien qui oblige qui que ce
soit, présentement, à suivre la définition
même des trois conseils. C'est un travail de
concertation, c'est une définition qui existe. On ne l'a pas mise au code, donc
elle n'est pas codifiée, et, à ce moment-là,
on confie la tâche d'évaluer le risque au comité d'éthique. Alors, c'est eux
qui auront le dernier mot avec l'interprétation
qu'ils en donnent, peut-être à partir de la même définition, peut-être avec des
regards différents sur les mêmes... C'est
sûr que la définition qu'on vous a donnée, qui est la convention européenne,
elle est là comme un indicateur dans
le patrimoine international qui gère là-dessus. Mais, si on ne la fait pas nôtre, alors elle reste là.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Vous venez de faire mon point, là. C'est qu'on a
marqué un terme dans lequel c'est... qui est très, très important, sur
lequel on avait la perception que les gens avaient tous la même définition,
puis on en arrive aujourd'hui avec la
conclusion que, tout dépendant... À la limite,
un chercheur européen pourrait dire que le risque minimal… ou des gens qui sont plus de mentalité
européenne pourraient dire que le risque minimal, c'est plus la notion
que vous nous avez donnée versus celle des
trois conseils. Puis je comprends qu'au Canada on assume peut-être que c'est
celle des trois conseils, mais trois conseils,
c'est un organisme... c'est un principe d'organisme subventionnaire qui n'a pas
force de loi, d'où, pour moi, ça devient important de
mieux définir les termes.
La
problématique que nous avons, c'est que nous voulons clarifier quelque chose
pour le bien du patient, mais, si on ne
le clarifie pas bien, on va avoir plus de problèmes dans l'interprétation par
la suite. Et après ça ça prend des directives. Moi, je pense qu'on est
aussi bien de bien faire la loi, aller chercher l'intention du législateur,
et — je
le répète, ça fait plusieurs fois que je le
dis pour nos légistes, là, puis pour des collègues
ici — c'est de... Si on
connaît bien les concepts, on devrait
être capables d'écrire une loi qui va bien
définir ces concepts-là. Puis, pour moi, ça va être quelque chose de majeur, parce que je n'ai pas l'intention qu'on
rouvre l'article 21 pour en arriver, puis
comme ça a été dit :Est-ce que ça répond, oui ou non, aux grosses problématiques? C'est plus que ça. Il
faut bien faire la loi, avec les bons mots
accrochés aux bons termes. Puis, en tout cas, il y a plusieurs éléments, puis
vous êtes une des preuves aujourd'hui que ça va être important de bien définir
c'est quoi, les termes qu'il va y avoir dans
la loi.
Le Président (M.
Bergman) : Me Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Bien là, je ne sais pas s'il y a une question,
mais...
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui.
M. Cousineau (Gaétan) : Oui, il y a
une question?
M. Bolduc (Jean-Talon) : Un
commentaire.
• (17 heures) •
M. Cousineau
(Gaétan) :«Risque minimal», c'est peut-être les bons mots. Je
pense que ce qui manque, c'est la définition pour qu'on... qu'il y ait
clarté, et la même chose pour les soins innovateurs.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme Vallée : Bonjour. Dans votre
mémoire, vous mentionnez l'importance d'encadrer ou de... par voie de règlement ou autrement, les normes... bien, la
composition puis les conditions de fonctionnement des comités d'éthique
qui sont responsables de la recherche. On a
entendu, depuis la semaine dernière, bon nombre de témoignages à l'effet
que les comités d'éthique, entre eux, n'avaient
pas nécessairement d'homogénéité non plus dans la façon dont ils appliquaient
certaines... dont ils interprétaient certaines notions, et donc, à ce
niveau-là, il y avait un besoin de plus... d'avoir une meilleure homogénéité. Mais je comprends que vous voulez... ce que vous
recommandez, c'est d'aller un peu plus loin, c'est de dire... de prendre ce qui est... ce qui a été publié dans la Gazette
officielle le 29 août 1998, qui est, somme toute, assez
sommaire, et de l'encadrer à l'intérieur d'un règlement plus strict.
Est-ce qu'il
y aurait des éléments... Si on prend le texte de la Gazette officielle
de 1998, est-ce qu'il y aurait des éléments
que vous ajouteriez à ce qui est déjà prévu? Parce que je... on le regarde,
puis il est quand même... Bon. Le texte est là, mais c'est quand même sommaire, si on tient compte de vos recommandations
et aussi de ce qui nous a été présenté depuis deux semaines.
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : En
1998, on avait déjà informé, ici, que le conseil... on avait... le conseil d'en
faire un règlement de cette... plutôt
que de... une publication dans la Gazette officielle, de cet ordre. En
fait, le seul commentaire qu'on fait
sur ce qui est là, c'est sur la composition, et on vous suggère de penser à
ajouter... D'ailleurs, on a les... moi, je les ai lus encore récemment. Vous, je sais que vous les avez regardés
encore plus que moi. Il y a possibilité d'ajouter des personnes, et on s'est dit, à ce moment-là :
Peut-être qu'il y aurait intérêt... D'ailleurs, on y voit un grand intérêt à ce
que chaque comité d'éthique comprenne au moins une personne qui aurait pour
rôle de défendre les droits et les intérêts des personnes vulnérables
impliquées. Parce que, là, on a... Prenez le CHUM, par exemple, c'est très
gros, puis là il y aurait une personne qui serait là pour parler un peu des...
pour les usagers, là. Vous pouvez imaginer la quantité de personnes qu'il aurait à représenter, comment qu'il
peut être le porte-parole et vraiment porter ce facteur. Et nous, on va
plus loin, on dit : Bien là, écoutez... Et là on vous donne un indicatif,
là, c'est là qu'on cite les trois conseils, là, dans ce sens-là. Et nous, on
pense que la composition pourrait avoir un intérêt particulier.
On peut
penser, par exemple si on fait une recherche sur les autochtones, que vous
auriez quelqu'un qui, par exemple, pourrait mieux définir la culture des
peuples des Premières Nations et de mieux gérer ces programmes de recherche avec eux, en ayant... capable de vous
transmettre, aux comités d'éthique et à tous, de meilleures
connaissances. Ça peut être d'autres groupes
aussi, ça peut être... Si vous faites affaire avec les jeunes, par exemple,
dans tel milieu, il y a peut-être des
gens qui travaillent plus près. Vous parliez tantôt de questionnaires d'information
auprès de jeunes qui sont dans des
centres jeunesse ou dans des familles d'accueil, qu'on n'a plus de parent ou
qui ont des parents qui sont en conflit et qui ne sont... incapables d'en
prendre soin, comment ces... quelqu'un pourrait être plus près d'eux pour
parler de leurs préoccupations et leur façon de regarder les choses et vous
aider, finalement.
Alors, nous,
on pense que ce type de personne serait intéressant. C'est la recommandation qu'on
fait. C'est la seule. Je ne sais pas s'il y en aurait d'autres. On a
jeté un regard rapide, quand même, là. Il n'y en a pas d'autre?
Le Président (M. Bergman) : Me
Bernard.
Mme
Bernard (Claire) : Non, non.
Effectivement... Puis ce qu'il faut rappeler, c'est qu'en 1998 l'avant-projet
de loi ne parlait pas du tout d'encadrement,
on ne parlait même pas de Gazette officielle. Mais nous, on
disait : Il faut que ce soit
réglementé, et on disait, par exemple : par règlement. Donc, finalement,
on s'est retrouvés avec la précision que le ministre devait déterminer les conditions et les règles de
fonctionnement et que ça devait se trouver dans la Gazette, mais
ça a été émis par simple avis. Vous savez qu'un
règlement, ça a quand même l'avantage aussi de pouvoir... d'être public
et donc de faire l'objet d'une discussion
plus démocratique. Donc, c'est dans ce sens-là, c'est intermédiaire, parce
qu'on ne peut pas mettre toutes les conditions dans la loi, surtout dans le
Code civil, mais que ce soit mieux réglementé dans le cadre des règlements plutôt
que dans un avis.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Gatineau.
Mme Vallée : Et je comprends que
vous souhaitez que le paragraphe où on mentionne... Il est évident que cette composition représente un minimum, et donc
vous souhaitez qu'on spécifie davantage que la composition du comité soit composée d'un membre qui aurait un lien ou
une connaissance particulière avec le cas qui sera présenté au comité.
Donc, ça serait variable selon...
M. Cousineau (Gaétan) : Oui,
absolument, selon les types de recherche, les projets, etc.
Mme
Vallée : Est-ce que ce n'est
pas un petit peu utopique? Je comprends ce que vous souhaitez, mais, dans
le pratico-pratique, est-ce que ce n'est pas un peu difficile d'atteindre ce
que vous souhaitez?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Non, je
ne crois pas, au contraire. Écoutez, la commission fait souvent du travail
en coopération, ou en collaboration, ou en
concertation, parce qu'il y a des... avec des groupes communautaires, des
groupes de toutes sortes. Et on sait qu'il y a, sur le territoire du Québec,
plein de groupes qui représentent et qui travaillent au meilleur intérêt de différents groupes. Et je pense que, là-dedans, il y
a une masse importante de personnes qui pourraient jouer ces rôles-là.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le
Président. D'après l'article 1 de la Charte des droits, tout être humain a
droit à la vie ainsi qu'à la sûreté,
à l'intégrité... en intégrité de sa personne. On retrouve une disposition
semblable à l'article 3 du Code civil
du Québec. J'aimerais regarder le premier alinéa de l'article 21 tel que
modifié et j'aimerais vous poser la question suivante : Est-ce qu'un majeur inapte qui s'oppose à participer à
une recherche, même s'il ne comprend pas la nature et les conséquences
de la recherche... est-ce qu'il devrait être capable de dire non, et donc ne
pas être sujet à la recherche?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M. Cousineau (Gaétan) : Si la
personne inapte est incapable de discernement, elle ne peut pas, en toute connaissance de cause, soit accepter ou refuser
une recherche. Alors, c'est là qu'il faut avoir une personne qui va agir
à sa place, dans son meilleur intérêt, pour
jouer ce rôle pour elle. Écoutez, c'est qu'il y a tout un... Il y a plusieurs
maladies, on le voit. C'est le grand défi
que la commission a quand elle traite de plaintes en exploitation de personnes
âgées ou de personnes handicapées. Ça
peut évoluer. Il y a le niveau de vulnérabilité, mais, jusqu'à l'inaptitude
totale, il y a toute une gamme. Alors,
il y a des cas où on peut, oui, justement aller chercher un consentement de
certaines personnes, dans d'autres cas, pas. Et, à ce moment-là, les
droits fondamentaux, bien, il faut que d'autres personnes viennent protéger ces
personnes. C'est là les systèmes... les régimes de protection.
Mme de
Santis : Mais, si la
personne qui est... même son tuteur est d'accord, mais la personne inapte ne
veut pas, réagit de telle façon que la
personne ne veut pas participer, est-ce que la personne devra être forcée à
participer à la recherche?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : On ne s'est
pas posé cette question. Le projet nous est... C'est une question qu'on
n'a pas traitée. Alors, vous me posez une question sur laquelle... Écoutez...
Mme de Santis : Mais, regardez, je
vous lis...
M. Cousineau (Gaétan) : Oui, un
instant… Oui.
Mme de
Santis : ...l'article 1
de la Charte ou je vous lis l'article 3 du Code civil, ça veut dire quoi?
Ça veut dire quoi que l'être humain a droit à l'intégrité de sa
personne? Vous êtes le commissaire de la Commission des droits de la personne.
M. Cousineau (Gaétan) : Oui, j'ai
répondu à cette question-là en disant que, si la personne est incapable de discernement, qu'elle est incapable de porter un
jugement éclairé... libre et éclairé sur sa situation à cause de son
inaptitude, bien, je pense qu'elle ne peut
pas ni s'opposer ni accepter. Si elle est encore capable, oui, je pense qu'il
faut l'écouter. Et on dit «alors qu'il
en comprend la nature et les conséquences» dans l'article 21 proposé,
alors... Et, à ce moment-là, bien, c'est
ça qu'il faut examiner, si elle est capable de comprendre. Si elle n'est pas
capable, je pense que, pour la protéger, la protéger dans son intégrité, il faut que les autres personnes qui sont
autour d'elle puissent prendre cette décision à sa place.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé.
• (17 h 10) •
Mme de Santis :
J'aimerais maintenant adresser cette question, parce que vous êtes les
représentants de la Commission des droits de
la personne et vous avez une politique aussi vis-à-vis les personnes
handicapées et les personnes aînées.
Et j'essaie de comprendre, parce que je ne comprends pas. Il y a très peu de
personnes inaptes qui ont un représentant légal, qui ont un tuteur, un
curateur ou un mandataire. Ces personnes, comment elles agissent dans leur vie quotidienne, vis-à-vis des décisions
quotidiennes? Par exemple, ils doivent faire un chèque, ils doivent recevoir
de l'argent, comment ces gens fonctionnent,
pour que je puisse comprendre comment le consentement est donné tous les
jours dans leur vie quotidienne et voir s'il
y a un rapport à faire avec le consentement quant à faire partie d'une
recherche ou pas?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Alors
que la personne est encore apte, si elle a préparé un mandat d'inaptitude, à
ce moment-là elle pourrait confier à une ou
deux personnes le soin de poser ces gestes-là. Et, à ce moment-là, ce sont
ces personnes qui vont signer les chèques, faire les comptes en banque, signer
pour les soins, voir à gérer les biens et la personne.
Quand les personnes n'ont pas fait de mandat d'inaptitude, on est dans l'impasse.
À ce moment-là, la famille est aux
prises avec une situation qui n'a pas été prévue. Alors, soit qu'ils organisent
la... qu'ils fassent déclarer leurs parents, leur mère par exemple,
inaptes, et là il y a quelqu'un de désigné. On ne le fait pas toujours, hein, c'est
ce qu'on vous disait tantôt. Alors, à ce
moment-là, les institutions, les banques, les institutions financières vont
peut-être accepter un mandat qui n'est
pas un mandat d'inaptitude, puis ils vont fermer les yeux, puis ils vont
accepter qu'il y ait des échanges du compte
bancaire pour les besoins de la personne, puis ils vont nous signaler, à la
commission, si cette personne abuse du mandat
en sortant des sommes, par exemple, de 5 000 $ à tout coup, alors qu'avant
la personne dépensait 1 700 $ par mois, et là va nous aviser qu'il y a peut-être une
exploitation. Oui, on se retrouve dans des situations où les gens n'ont pas
prévu.
L'autre chose
qu'on peut faire, c'est qu'on peut, lorsqu'on est apte, faire des choix sur
notre avenir. Est-ce que je veux participer à des soins de recherche?
Est-ce que je veux certaines choses en cas de maladie et de soins en fin de vie? On peut déjà prévoir ces choses-là. Et c'est,
des fois, des choses qu'on a informé les gens autour de nous au moins
verbalement; sinon, ce qui est mieux, c'est par écrit quand c'est le cas.
Alors, c'est vrai que ça peut être complexe à ce moment-là.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Bourassa, il vous reste 1 min 30 s.
Mme de
Santis : Je suis nerveuse
et... Ayant entendu votre réponse, sachant qu'il y a très peu de personnes
qui sont des représentants légaux de personnes inaptes, je vois qu'il y a une
très grande lacune là, et ça me rend très nerveuse.
Mais j'ai une dernière question. Encore, portez
votre chapeau de Commission des droits de la personne. Et je demande cette question parce qu'à un moment donné
quelqu'un m'avait demandé de participer à une recherche. Quand une
personne qui participe à une recherche demande pour le résultat de la
recherche, est-ce que vous croyez que la personne devrait avoir droit à ces
résultats-là, le rapport de la recherche?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau, dans une minute, s'il vous plaît.
Mme de
Santis : Et, si ça fait
partie de la demande… de la raison que le consentement a été donné et ce
n'est pas fourni, est-ce que le consentement est valable?
Le Président (M. Bergman) : Me
Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Nous ne
sommes pas spécialistes dans les contrats de recherche. La commission ne
rend pas de tels services, mais je vous
dirais que, si la convention ne l'a pas prévu, l'entente, quand on s'est
engagé, vous risqueriez de ne pas avoir les résultats de la recherche.
Mais ce n'est pas... on n'a pas à étudier ces questions-là. Je ne sais pas si
vous vouliez ajouter quelque chose tantôt, sur la première question, je crois.
Le Président (M. Bergman) : Me
Bernard.
Mme
Bernard (Claire) : Si vous
permettez, pour vous rassurer, il y a quand même un encadrement
juridique dans le Code civil pour les
conjoints qui sont mariés ou en union civile. Il y a un mandat qui est prévu
par la loi. Mais, vous avez raison,
il y a des catégories de personnes qui, sinon, ne sont pas représentées. Mais
le principe, c'est que les régimes sont ouverts, les régimes de
protection sont ouverts s'il y a un besoin de protection. Sinon, si les gens
fonctionnent sans protection avec leurs proches, le curateur public juge que ce
n'est pas nécessaire d'ouvrir les régimes.
Le
Président (M. Bergman) :
Merci. Alors le deuxième groupe d'opposition, un bloc de cinq minutes. Mme
la députée de Groulx.
Mme Daneault : Merci, M. le
Président. Merci de votre présence. J'aimerais revenir sur... dans vos notes,
la recommandation que vous aviez faite, en
1998, d'encadrer... la composition et le fonctionnement des comités d'éthique
de la recherche soient prévus par règlement.
Aujourd'hui... Vous savez, à ce moment-là, le législateur avait retenu une
voie plus souple, soit la publication dans la Gazette officielle.
Aujourd'hui, on est 15 ans plus tard, vous refaites la même recommandation. J'aimerais
connaître... Durant les 15 dernières années, est-ce qu'il y a eu, selon
vous… ou avez-vous eu vent d'expériences
malheureuses quant à l'utilisation du règlement par la... en fait, de ne pas
avoir de règlement mais de plutôt utiliser la Gazette à cet
effet?
Le Président (M. Bergman) :
Me Cousineau.
Mme Daneault : Dans le fond,
pourquoi vous persistez à... dans la même voie et la même recommandation
aujourd'hui?
M.
Cousineau (Gaétan) : Bien,
là-dessus, on peut dire qu'on est logiques. On l'a recommandé en 1998, on
réitère, comme on l'a fait aussi dans d'autres
projets de loi où on considère qu'il faut des réglementations. Parfois, on suit
notre conseil, parfois on ne le suit pas. On l'a fait… par exemple, la
certification des personnes âgées pour certains projets. Et parfois c'est...
Puis, en
fait, la commission, lorsque ça fait partie de son travail de regarder les
projets de loi et les règlements, à ce moment-là
elle aurait l'occasion de fournir un éclairage en fonction de son expertise en
droits fondamentaux sur ces types de projets de règlement, alors que les
règles de d'autres façons, les règles ministérielles ou les politiques
ministérielles, on n'aura pas nécessairement à commenter.
Mme Bernard, je pense, a quelque chose d'autre
à ajouter.
Le Président (M. Bergman) :
Me Bernard.
Mme Bernard
(Claire) : Bien, je réitère.
Ce qu'on explique, c'est que ça permet de recueillir les commentaires. C'est sûr que, dans notre expérience, on ne reçoit
pas les plaintes sur ces types de situations. Mais c'est un principe de
transparence dans l'exercice du respect des droits, entre autres.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme Daneault : Mais, ce que je
comprends, vous n'avez pas eu vent d'expériences malheureuses où… qui feraient en sorte qu'effectivement l'utilisation
du règlement est une nécessité. Dans le fond, d'avoir utilisé la Gazette
toutes ces années-là, les 15 dernières
années, ne vous a pas... Ne sont pas venues à votre oreille des expériences
malheureuses. Ma question, c'est dans ce sens-là.
Le Président (M. Bergman) :
Me Cousineau.
M.
Cousineau (Gaétan) : Non, on
n'a pas eu vent, puis personne ne serait venu chez nous nous le dire non
plus. Ce n'est pas notre travail puis ce n'est
pas la place où ils iraient le faire. Je ne sais pas si les bureaux des ministres
ont eu des commentaires à cet effet-là. Nous, on ne le saurait pas.
Cependant, le
fait que vous... qu'il y ait un projet de loi maintenant nous permet... nous
permettait d'avoir... de regarder,
voir ce qui s'est passé entre 1998 et aujourd'hui sur ça. Comme
Mme Bernard mentionnait tantôt, on a quand même amélioré certains
textes du côté de la composition, le fonctionnement, tout cela. Et là on... ça
nous permet aujourd'hui, puisqu'il n'y pas
de... Il n'y a pas eu de discussion possible sur un règlement puisqu'il n'y a
pas de règlement. Là, au moins, on peut vous faire une suggestion, qui
est celle de la composition, qui nous apparaît intéressante.
Le Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme Daneault : Dans le fond, pour
vous, la nécessité du règlement, c'est plutôt dans la composition des...
M.
Cousineau (Gaétan) : Pas
juste ça, sur l'ensemble, sur l'ensemble du contenu qu'on aurait pu
commenter. C'est un processus démocratique.
Écoutez, vous avez le choix de le faire de cette façon ou de le faire
autrement. Dans un autre projet de
loi, on avait mentionné que, bon, ça peut se faire par une directive et... mais
la directive, elle se change régulièrement. Le processus de règlement, c'est
un peu plus ferme, c'est un processus plus formel. Alors, il y a toute une
série de contraintes, bien sûr, mais aussi d'occasions de commenter aux gens
qui souhaiteraient commenter.
Le
Président (M. Bergman) :
Alors, Me Cousineau, Me Carpentier, Me Bernard, merci pour votre
présentation, merci pour votre présence.
Les collègues, compte tenu de l'heure, la
commission ajourne ses travaux au jeudi 2 mai, à 15 heures. Merci
beaucoup.
(Fin de la séance à 17 h 19)