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Version finale

40th Legislature, 1st Session
(October 30, 2012 au March 5, 2014)

Wednesday, April 24, 2013 - Vol. 43 N° 16

Special consultations and public hearings on Bill 30, An Act to amend the Civil Code and other legislative provisions with respect to research


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. Réjean Hébert

M. Yves Bolduc

Mme Hélène Daneault

Auditions

M. Philippe Voyer

Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU)

Autres intervenants

M. Lawrence S. Bergman, président

Mme Suzanne Proulx, vice-présidente

M. Sylvain Roy

Mme Rita de Santis

Mme Stéphanie Vallée

M. Roland Richer

Mme Diane Gadoury-Hamelin

*          M. Pierre Blain, RPCU

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures cinquante-cinq minutes)

Le Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives en matière de recherche.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Non, M. le Président, aucun remplacement.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Alors, ce matin, collègues, nous recevons M. Philippe Voyer, de la Faculté des sciences infirmières de l'Université Laval.

Remarques préliminaires

Avant de commencer les auditions, nous allons procéder à l'étape des remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez d'un maximum de six minutes pour vos remarques préliminaires. Alors, M. le ministre.

M. Réjean Hébert

M. Hébert : M. le Président, merci. Je voudrais d'abord saluer mes collègues de l'opposition, le député de Jean-Talon, la députée de Gatineau, de Bourassa-Sauvé et Mme la députée de Groulx, et de même que mes collègues de la partie ministérielle, la députée de Sainte-Rose, la députée de Masson, le député d'Argenteuil et le député de Bonaventure, et vous mentionner que je suis accompagné de Cyril Malouet, qui est attaché politique à mon cabinet, et de Luc Castonguay, sous-ministre au ministère. Nous avons également Mme Nathalie Desrosiers, Mme Claudine Fecteau, et Christine Lavoie, et Manon St-Pierre, qui sont derrière moi pour compléter les informations, éventuellement, que la commission pourrait avoir besoin.

Je suis très heureux d'intervenir, donc, pour débuter les travaux de la commission parlementaire autour du projet de loi n° 30. Vous savez, le Code civil a été réformé en 1998 et a modifié l'univers de la recherche par des dispositions qui prévoient le consentement du curateur ou du tuteur pour des majeurs inaptes ou pour des mineurs. Il faut dire qu'en 1998 le milieu de la recherche était beaucoup moins structuré qu'actuellement. Nous avons actuellement, au Québec, des centres de recherche bien constitués et surtout des comités d'éthique qui sont maintenant déployés dans tous les établissements de santé et de services sociaux et qui veillent, donc, à l'approbation des projets de recherche et également à la conduite des projets de recherche.

Le cadre législatif de 1998 mettait beaucoup de restrictions, notamment au niveau de la recherche pour les personnes âgées, et, comme ancien chercheur, je peux vous dire que cela a nui considérablement à la poursuite d'activités de recherche chez les personnes âgées, parce que, comme vous le savez, beaucoup de personnes âgées qui nécessitent des soins et services sont inaptes, et le Code civil actuel prévoit qu'il faut l'autorisation, le consentement d'un curateur ou d'un tuteur pour que ces personnes-là puissent participer à une recherche. Or, la plupart des personnes inaptes n'ont pas besoin d'un curateur ou d'un tuteur, puisque la loi pour le consentement aux soins prévoit qu'un proche peut faire le consentement, mais ce n'est pas vrai pour la recherche.

Donc, tous les travaux de recherche qui incluent, par exemple, des malades d'Alzheimer ne peuvent pas être réalisés au Québec à cause de cette disposition du Code civil. Il en est de même pour les mineurs de 14 à 18 ans, pour lesquels on ne peut pas consentir à une recherche, bien que ces mineurs puissent consentir à des soins. Donc, il y a là une incohérence que le projet de loi veut dissiper dans le but de permettre que des travaux de recherche puissent être réalisés avec ces populations si la recherche a un risque minimal. Parce que, bien sûr, lorsque la recherche a un risque important, il faut absolument avoir le consentement d'une autorité dûment constituée, et ça, le projet de loi ne le remet pas en question. La notion du risque minimal, on y reviendra tout à l'heure, est bien définie par, notamment, l'arrêté des trois conseils subventionnaires canadiens, qui définit les niveaux de risque, et c'est ces niveaux de risque qui sont utilisés par les différents comités d'éthique.

Le projet de loi vise aussi à moderniser un peu le Code civil, parce qu'on parlait d'«expérimentation» dans le Code civil, alors que le mot «recherche» est surtout utilisé maintenant pour désigner les activités de recherche, et il y a donc une correction là-dessus. Et certaines dispositions également pour le consentement, lorsque la personne ne peut pas écrire, ne peut pas consentir, sont incluses dans le projet de loi.

• (12 heures) •

Alors, ces modifications permettront d'enlever un certain nombre d'obstacles à des activités de recherche actuellement réalisées au Québec, et j'espère que nous pourrons procéder rapidement pour que la communauté scientifique puisse répondre à des questions qui sont extrêmement importantes concernant notamment certaines personnes inaptes qui ne peuvent pas actuellement participer à des projets de recherche. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. le ministre. Alors, j'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de Jean-Talon à faire ses remarques préliminaires pour un temps maximal de six minutes.

M. Yves Bolduc

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'abord, vous saluer, vous et votre équipe, également les gens au niveau du gouvernement, mes collègues de travail et également les collègues... ma collègue de la deuxième opposition.

J'ai pris connaissance du projet de loi, qui est un projet de loi très court. Moi, je m'attendrais à ce que, quand on parlait de la recherche, peut-être qu'on aurait eu... on pourrait avoir un projet sur d'autres éléments, mais vraiment seulement à quelques niveaux, mais des éléments extrêmement sensibles, de trois façons.

D'abord, on touche au Code civil, qui est une loi fondamentale pour notre société. Deuxièmement, on parle de la recherche et l'éthique de la recherche. Et, troisièmement, ça touche les gens qui sont les plus démunis, incapables de donner leur consentement.

Je comprends la question du risque minimal, mais on tombe vraiment dans un secteur où c'est très, très, très sensible. Donc, pour le moment, on a pris connaissance du projet de loi. On va avoir l'occasion d'écouter, en commission parlementaire, différents experts. Je comprends que, pour faire avancer les soins pour ces gens-là, ça prend de la recherche, mais ça ne doit pas se faire non plus à n'importe quel prix. Je vois beaucoup de questions par rapport, justement, aux plus démunis, entre autres les mineurs, 14 à 18 ans. Il y a des parents, généralement... On ne parle pas de soins, on parle de recherche. Donc, ce n'est pas le même niveau de discussion, et, là-dessus, j'émets actuellement une certaine réserve.

Pour ce qui s'agit de la question du traitement des plaintes, nous allons avoir l'occasion d'en discuter, mais je dois vous avouer qu'actuellement, avant de donner notre accord pour ce projet de recherche... ce projet de loi, bien, il va falloir avoir des bonnes auditions, une bonne discussion. Mais, comme d'habitude, nous sommes très ouverts à avoir une collaboration. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. le député. J'invite maintenant la députée de Groulx à faire ses remarques préliminaires pour une période maximale de trois minutes. Mme la députée.

Mme Hélène Daneault

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Alors, d'abord, je dois saluer les membres du gouvernement, les membres de l'opposition officielle et, encore une fois, vous assurer de notre entière collaboration pour cette commission. Il s'agit quand même d'un projet de loi qui est assez simple, qui vise à modifier, effectivement, principalement, les dispositions du Code civil portant sur le consentement en matière de recherche et de manière à répondre à des demandes soutenues et répétées du milieu de la recherche depuis plusieurs années.

Alors, effectivement, nous sommes en faveur d'aider le milieu de recherche qui, on le sait, au Québec, est déjà bien encadré au niveau de l'éthique, alors ce qui est rassurant aussi pour les élus mais pour la population. Alors, évidemment, nous allons collaborer à l'ensemble des auditions et favoriser, tant qu'on le peut, la façon de procéder pour les gens... les chercheurs du Québec, de façon à permettre de cibler, effectivement, certaines parties de la population qui, malheureusement, ont dû être écartées de projets de recherche depuis plusieurs années. Alors, on aimerait pouvoir poursuivre en ce sens-là. Alors, merci, M. le Président.

Auditions

Le Président (M. Bergman) : Merci, Mme la députée. Nous allons commencer maintenant les auditions. M. Voyer, je vous inviterais à vous présenter et faire votre exposé. Vous disposez de 10 minutes. Et, en ce qui concerne le temps alloué aux groupes parlementaires, le groupe formant le gouvernement aurait 24 minutes; l'opposition officielle, 21 minutes; et le deuxième groupe d'opposition, cinq minutes. Alors, M. Voyer.

M. Philippe Voyer

M. Voyer (Philippe) : Alors, merci, M. le Président. Mesdames messieurs membres de la commission, ça me fait plaisir d'être ici et venir partager mon point de vue qui est ancré, par contre, avec plusieurs collaborateurs. Il y a des gens qui auraient aimé être ici avec moi aujourd'hui, que ce soit M. Yves Joanette, qui est de l'Institut du vieillissement, de la recherche en santé du Canada; que ce soit Howard Bergman, également qui aurait aimé se joindre à moi, mais qui n'était pas disponible aujourd'hui; Pierre Durand, directeur scientifique du Centre d'excellence sur le vieillissement. Alors, il y a plusieurs chercheurs qui auraient aimé être ici, des acteurs clés, mais, compte tenu de leur agenda, ils n'ont pas pu se joindre à moi.

Je suis professeur à la Faculté des sciences infirmières de l'Université Laval. Je suis chercheur au Centre d'excellence sur le vieillissement de Québec. Je suis également chercheur au sein du Réseau québécois de recherche sur le vieillissement, et ce que je vais vous présenter ce matin, ce n'est pas l'avis d'un expert législatif de l'article 21, mais c'est vraiment l'expérience que moi, j'ai eue à vouloir faire de la recherche auprès des aînés atteints de la maladie d'Alzheimer ou d'une démence connexe. Et cette expérience-là, que j'ai partagée avec d'autres chercheurs du domaine également, donc c'est un peu le point de vue de tous ces chercheurs-là.

Et j'aimerais ajouter quelque chose qui est quand même important. J'ai remis tantôt à la commission le rapport qu'on a fait sur la question du consentement chez les personnes avec la maladie d'Alzheimer, et, lorsqu'on a fait ce rapport-là, c'est un rapport qui a été déposé non seulement par le Réseau québécois de recherche sur le vieillissement, mais les signataires sont, entre autres, la société Alzheimer de la région de Québec, la table de concertation des aînés de la Vieille Capitale et également anciennement le Conseil des aînés. Donc, on avait également l'appui des personnes qui défendent ou qui font la promotion des droits des personnes âgées.

Donc, pourquoi je me suis intéressé à la question du consentement à la recherche sur les personnes atteintes de maladie d'Alzheimer ou une démence connexe? Je vous dirais qu'il y a les raisons officielles puis il y a les raisons personnelles. Les raisons officielles, c'est, évidemment, je suis un chercheur qui a fait mon doctorat, qui me spécialise dans les soins aux personnes âgées qui ont des troubles cognitifs, et on sait que cette population-là, en termes de prévalence... Vous n'êtes pas sans savoir qu'avec le vieillissement de la population il va y avoir de plus en plus de cas de personnes qui ont la maladie d'Alzheimer ou des démences connexes. Or, il est extrêmement important de pouvoir étudier ces personnes-là non seulement pour prévenir la maladie, mais la traiter correctement et leur donner des soins de fin de vie aussi qui répondent à leurs besoins. Donc, ça, c'est une des raisons principales, je vous dirais, toujours en s'assurant, en faisant cette recherche-là auprès de cette population-là, qu'ils retirent les bénéfices, mais qu'on protège évidemment leur intégrité.

Les vraies raisons aussi, que je vous dirais personnelles, c'est mon expérience à moi, quand j'ai commencé ma carrière de chercheur en 2001. Ce que je me suis rendu compte très rapidement, c'est qu'on avait des très grandes difficultés à faire de la recherche auprès des personnes qui ont une maladie d'Alzheimer ou autre. Alors, je l'ai vécu moi-même, où est-ce qu'il y avait des avis très partagés entre chacun des comités d'éthique, et certains comités d'éthique qui, systématiquement, demandaient le représentant légal pour faire une recherche auprès de ces clientèles-là. Alors, comme vous le savez, les représentants légaux, c'est environ 3 % des personnes qui ont un tel représentant, ce qui fait en sorte que, dans les travaux de Dre Gina Bravo, elle a très bien démontré que ça amenait des biais systématiques dans les résultats de recherches qui seraient faites au Québec auprès de cette population-là. Donc, ça nous fait faire une recherche de moins bonne qualité. Ça, c'est un grave problème.

L'autre élément qui me décourageait davantage en 2001, c'est mes collègues chercheurs seniors qui me suggéraient : Écoute, Philippe, moi, je te suggère de faire ta carrière de chercheur auprès des aînés qui n'ont pas de déficit cognitif, parce que tu vas avoir des bâtons dans les roues toute ta carrière. Tu ne seras pas capable de faire une belle carrière là-dedans, parce que le Code civil — comme on l'a entendu tantôt — a été changé en 1998, ça fait que n'aie pas grand espoir que ça change de sitôt.

Alors, évidemment, je venais de faire mes sept dernières années à me préparer comme chercheur auprès de cette population-là, ça m'entraînait une grande frustration. Et, finalement, mon point de vue, c'est que, fondamentalement, il y a un problème avec l'article 21, du fait qu'on empêche vraiment une clientèle spécifique de bénéficier des résultats de la recherche. On pense la protéger, mais il y a une certaine limite à la protection, ce qui fait en sorte qu'on n'est plus capables de créer des données de la recherche scientifique qui nous permet de nous éclairer sur la manière de faire auprès de cette clientèle-là. Je pourrais vous citer un nombre considérable de projets de recherche qui sont faits en Australie, aux États-Unis et dans certaines autres provinces canadiennes, qui ne peuvent pas être faits ici et qui, finalement, nous empêchent de vraiment faire de la recherche de haut niveau à ce niveau-là.

L'article 21, comme le ministre de la Santé l'a évoqué, il y a un problème avec le... Il y avait des problèmes à deux endroits pour nous. Il y avait la notion d'expérimentation. On voyait que la notion d'expérimentation amenait beaucoup de problèmes au niveau des comités d'éthique, où est-ce que, pour certains comités d'éthique, aussitôt qu'on parle d'expérimentation, on parle de recherche. On exige, à ce moment-là, à l'alinéa trois, le fameux représentant légal, alors que, si on regarde l'alinéa un, on parlait vraiment d'une expérimentation qui comporte un risque sérieux pour sa santé.

Alors, ici encore, il y avait... Qu'est-ce qui est un risque sérieux? Les avis sont extrêmement partagés, et mon expérience d'en avoir débattu à certaines tables sur le sujet, pour certaines personnes : dès le moment qu'une personne inapte participe à la recherche, bien, il y a un risque pour son anonymat, il y a un risque à la confidentialité de ses données, ça peut amener un risque au niveau de sa santé psychologique. Alors, tous les projets étaient impossibles d'être réalisés auprès de cette clientèle-là.

Alors, ça, c'étaient des éléments qui nous ont amenés vraiment à dire : Bien, il faut essayer d'expliquer aux gens c'est quoi, la problématique que les chercheurs vivent, mais, évidemment, lorsqu'un chercheur veut illustrer sa problématique, ça donne un peu l'idée : bien, il veut s'avantager au détriment de la clientèle qu'il veut étudier, alors ça causait un petit problème. C'est pour ça que, dans notre rapport, on s'est vraiment alliés avec les gens qui font la promotion des droits des aînés.

• (12 h 10) •

Et, lorsqu'on parle aussi de recherche scientifique, dans l'imaginaire des gens, on ne sait pas toujours qu'est-ce que ça veut dire. Alors, nous, on s'est fait un devoir d'illustrer ça peut être quoi, des projets de recherche qui ont été empêchés d'être réalisés au Québec. Alors, je vous évoque un projet de recherche dans lequel moi, j'ai été impliqué, qui vise à évaluer une intervention pour diminuer le niveau d'agitation verbale chez des clientèles avec la maladie d'Alzheimer. Alors, nous, ce qu'on voulait faire, c'est faire une intervention où est-ce qu'on va travailler au niveau de la stimulation cognitive, de l'interaction avec la personne et éliminer toutes les sources d'inconfort. Alors, ici, on parle de trois interventions qui vont finalement amener du bien-être à la clientèle, parce qu'on pense que l'agitation verbale, c'est une manifestation d'un besoin de compromis chez cette clientèle-là. Le statu quo actuellement, c'est l'utilisation d'antipsychotiques ou de benzodiazépine qui entraîne son lot de conséquences.

Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que le comité d'éthique a exigé que ce soit... qu'on ait le représentant légal. On est passés d'un devis expérimental avec groupe contrôle à un devis à cas multiples. Alors, je ne veux pas rentrer dans les détails, mais ce n'est pas du tout la même valeur sur le plan scientifique. Donc, quand je vous parle de qualité de la recherche, ça, c'est un exemple.

Puis, le deuxième élément, on a eu besoin du représentant légal, ce qui a fait en sorte qu'on a dû multiplier les sources de recrutement pour finir avec 25 sujets pour faire l'étude. Alors, après trois à quatre années, vous comprenez que c'est beaucoup d'efforts pour des résultats qui ne sont pas vraiment à la hauteur de ce qu'on souhaiterait comme chercheurs québécois.

Un autre exemple encore un peu plus, je vous dirais, loufoque pour moi, c'est l'évaluation de l'efficacité d'un programme d'éducation en loisir adapté comme mesure de soutien à l'implication des aidants auprès des personnes atteintes de la maladie de type Alzheimer. Ce qu'on note, c'est les gens qui accompagnent une personne qui a la maladie d'Alzheimer, les proches aidants, plus la démence avance, plus donc les pertes cognitives deviennent importantes, plus ça devient difficile pour eux d'entrer en communication, évidemment. Ils ne savent plus quoi faire, et ce qu'ils vont faire, c'est qu'ils vont espacer leurs visites. Ils vont rendre de moins en moins visite à leur proche, et leur proche va souffrir d'isolement.

Alors, dans le projet qui était là, on disait : Bien, on va soutenir les proches aidants à développer des modes de communication et des loisirs adaptés au stade de la maladie de la personne pour aider les proches aidants dans leur relation puis évidemment favoriser le bien-être chez la clientèle. Le comité d'éthique a accepté que le projet se réalise uniquement chez les gens au stade léger et non au stade modéré et sévère. Alors, vous comprendrez que ce n'est pas les gens au stade léger qu'on a de la difficulté, c'est les gens au stade modéré ou sévère. Alors, ça, c'est des exemples, au Québec, de recherches subventionnées qu'on n'est pas en mesure de faire et qui sont au détriment de la clientèle qui a des déficits cognitifs.

Moi, comme chercheur, vous vous souvenez, je vous ai dit que, moi, comme nouveau chercheur, en 2001, mes chercheurs seniors me disaient : Philippe, oriente ta recherche dans un autre domaine que cette clientèle avec démence là. Moi, comme professeur à la Faculté des sciences infirmières, je dirige des étudiants gradués qui font... à la maîtrise et au doctorat. Bien, au courant des dernières années, je ne dirige plus aucun étudiant vers cette clientèle-là. Pour quelle raison? Les premiers étudiants, par exemple Isabelle Tardif, une étudiante que j'ai encadrée sur l'évaluation de la qualité des soins buccodentaires chez la clientèle avec démence dans les centres d'hébergement, bien, en fait, encore là, c'était juste de l'observation, on voulait évaluer la qualité dans les standards des soins buccodentaires. Eh bien, on a encore exigé le représentant légal. Ça, ça a fait en sorte qu'on a prolongé...

Le Président (M. Bergman) : ...s'il vous plaît.

M. Voyer (Philippe) : Comment?

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît.

M. Voyer (Philippe) : Oui. On a prolongé d'un an sa maîtrise. J'ai des étudiants comme ça. Ça fait que maintenant, quand on parle de ne plus avoir de relève en raison de la situation actuelle, c'est un exemple.

Alors, pour terminer, moi, ce que je peux vous dire, c'est que la proposition qui est faite présentement satisfait beaucoup de problématiques que vivent les chercheurs. Premièrement, le mot «expérimentation» ne fait plus partie de ça, et, au niveau du représentant légal, on a aussi assoupli les exigences à ce niveau-là. Donc, on peut faire de la recherche, comme je vous ai évoqué là. Dans ce nouveau cadre législatif là, elle pourrait se faire et encore plus. Et ça, évidemment, ce serait très encourageant pour la recherche scientifique auprès de cette population-là.

Le Président (M. Bergman) : Merci, M. Voyer. Alors, maintenant, pour la période d'échange avec les membres de la commission, en commençant avec le groupe parlementaire formant le gouvernement, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Hébert : Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais ça, M. Voyer… Merci d'abord pour votre témoignage. J'aimerais ça que vous nous évoquiez le parcours que vous avez fait, au cours des 10 dernières années, au sujet de cette contrainte. Quelles sont les actions que vous avez menées pour en venir à l'aboutissement qu'on connaît aujourd'hui, d'avoir un projet de loi devant nous?

M. Voyer (Philippe) : Très bien. Bien, le premier élément que j'ai fait, j'ai regardé quelles étaient les données sur la question. On regardait, sur le plan international, qu'est-ce qui se faisait au niveau du consentement. Évidemment, je me suis inspiré beaucoup des travaux de Gina Bravo, qui est à l'Université de Sherbrooke, qui s'est intéressée à la question, qui a démontré, sur le plan scientifique d'abord, les arguments soulevés, comme j'ai soulevé tantôt, qui amènent un biais, qui amènent des résultats de recherche sur lesquels on est obligés d'étudier un groupe très restreint, 3 % des gens qui ont un représentant légal, ce qui fait que ce n'est pas représentatif à une notion très importante en recherche, c'est la généralisation des résultats. Mais là on étudie un groupe très particulier, ce qui fait qu'il n'est pas représentant des autres aînés québécois. Alors, face à cet argument... face à ces résultats-là, Gina Bravo, elle a fait un colloque il y a plusieurs années... qu'elle a réuni les différents acteurs sur le sujet et que… finalement, pour démontrer, pour amener une discussion. Alors, je trouvais qu'elle avait vraiment fait un très, très beau travail sur le plan scientifique pour illustrer clairement le problème avec l'article 21, qu'est-ce que ça entraîne sur la qualité de la recherche.

Donc, mon constat était que c'était un peu un cul-de-sac de poursuivre sur la démonstration scientifique avec d'autres recherches sur la question, surtout que les gens qui avaient des modèles comme nous au niveau du consentement, tels que la France, ont changé leur positionnement qui est beaucoup comme celui qui est proposé aujourd'hui dans ce projet de loi là, 30. Ça reflète beaucoup ce que la France a utilisé comme stratégie aussi pour contourner le même problème qu'ils vivaient à l'époque. Donc, j'ai bien constaté que c'est un petit peu plus sur la sphère politique que devaient se jouer les autres éléments. Et là, nous, notre stratégie, ça a été vraiment de dire : On va aller voir les groupes des aînés, on va leur présenter c'est quoi, la problématique qu'on vit. Est-ce qu'ils peuvent nous appuyer dans cette démarche-là? On a donc rédigé un rapport et, à la suite de ce rapport-là, bien, en fait, on a toujours essayé de garder vivantes les conclusions de ce rapport-là. On a fait des conférences de presse et compagnie, parce que c'était la seule voie qu'on avait pour maintenir un peu vivante cette préoccupation-là puis essayer de faire pousser les choses.

Et donc aussitôt qu'on a vu qu'il y avait des développements ici, à l'Assemblée nationale, avec le projet de loi, nous, on était très, très, très encouragés, parce que, je vous le dis, à chacune des réunions du regroupement de l'évaluation des interventions en soins de longue durée du Réseau québécois de recherche sur le vieillissement, il y a toujours un item à l'ordre du jour, c'est : L'article 21, où on en est? Alors, évidemment, ils étaient très heureux de savoir que j'allais être ici, entre autres, aujourd'hui pour pouvoir représenter ces chercheurs-là, pour leur dire leur point de vue de la situation.

Donc, je vous dirais que ça nous a amené dans une sphère, moi, personnellement, pour laquelle je ne suis pas du tout habilité et confortable, c'est-à-dire la sphère politique, parler avec les gens un peu, présenter les enjeux à ce niveau-là. J'aimerais beaucoup mieux faire de la recherche dans mon centre de recherche. Je suis même professionnel de recherche en ce moment.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup. Dans une lettre publiée dans La Presse du 10 avril, que vous signez en compagnie de d'autres chercheurs, vous mentionnez également qu'en 2009, lors du dépôt du rapport Bergman — que M. le Président connaît bien — portant sur la maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées, il y avait une recommandation qui vise le projet de loi qui est à l'étude actuellement. Pouvez-vous nous parler de cette recommandation?

M. Voyer (Philippe) : Oui, absolument. J'avais la chance d'être un membre de ce comité d'experts sur le plan de l'action pour la maladie d'Alzheimer. Alors, nous, lors des différentes réunions, on avait des sous-comités qui s'intéressaient à différentes choses pour faire les recommandations principales. Et, en ce qui a trait à la recommandation pour la recherche, il est clair que tous les membres présents... et, encore là, je tiens à le souligner, il y avait des membres de la fédération des sociétés Alzheimer qui étaient présents, la maison Carpe Diem, de Trois-Rivières, etc., donc des représentants, vraiment, des soins aux aînés, mais, évidemment, des chercheurs qui ont réitéré l'importance d'agir concernant l'article 21 pour qu'on puisse faire ce type de… de la recherche auprès directement de la clientèle pour essayer d'améliorer les soins.

Parce que, présentement, la difficulté qu'on soulevait, c'est qu'on fait beaucoup de recherche indirectement. On va aller faire de la recherche, des audits, on va aller dans les dossiers pour voir la qualité des prescriptions, mais on ne connaît pas le profil du patient au moment de la prescription, par exemple. On va faire de la recherche sur les soignants, mais on n'est pas capables d'aller voir la personne qui est malade, réellement. Donc, on va dire... on va essayer de favoriser un usage optimal de certains médicaments par les infirmières, les médicaments, au besoin. Donc, on va former les infirmières pour favoriser les pratiques, on va évaluer leurs connaissances avant, après, mais on n'est pas capables d'aller voir quel effet ça a sur la clientèle. C'est ça, notre problématique. Donc, on reste toujours avec un peu de la recherche de surface.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Le projet de loi prévoit les dispositions en cas de risque minimal. Pourriez-vous nous donner des exemples? Et qu'est-ce que constitue un risque minimal?

Le Président (M. Bergman) : M. Viger...

M. Hébert : Voyer.

• (12 h 20) •

M. Voyer (Philippe) : Oui, absolument. Un risque minimal, je vous dirais que c'est la majorité des recherches qu'on fait. Toutes les recherches, par exemple en neuropsychologie, en sciences cognitives, où on fait passer des tests cognitifs, donc, c'est des questionnaires. Beaucoup de recherches, c'est de l'observation directe qu'on va aller faire auprès de la personne.

Recherche aussi simple, là, O.K., qui a été démontrée récemment aux États-Unis par Cohen Mansfield, qui n'est pas le dernier chercheur venu, qui a évalué le massage des mains avec la lavande, O.K., pour voir les impacts sur les signes anxieux d'une clientèle avec démence et son niveau d'agitation. Alors, les résultats ont été très positifs, O.K., mais ça, ce type de recherche là, il est certain qu'on aurait besoin d'un représentant légal au Québec. Alors, ça décourage toute personne de faire... même, c'est ça, une recherche minimale.

En fait, nos interventions, ça pourrait être, par exemple, d'évaluer, de vouloir prévenir le délirium chez la clientèle avec une démence en centre d'hébergement. Alors, nous, ce qu'on va faire, c'est qu'on préparerait, O.K... Je vais donner un exemple de la recherche que j'ai faite, qu'on n'a pas pu amener jusqu'au bout. On veut prévenir le délirium chez une clientèle avec une démence. Donc, on forme les infirmières à reconnaître les aînés à risque de délirium, et, chez les gens à risque, ils vont évaluer certains facteurs de risque. Est-ce qu'il est déshydraté, par exemple, le patient? Est-ce qu'il consomme des antipsychotiques? Est-ce qu'il a un problème visuel? Et, quand on voit que ces facteurs de risque là sont présents, on sait que ces gens-là, il y a un risque très élevé, 60 %, de développer un délirium dans les six prochains mois.

Alors, il faut intervenir sur ces trois facteurs de risque là. On forme les infirmières, le personnel soignant pour intervenir, mais on n'est pas capables d'aller évaluer est-ce que le patient n'est plus déshydraté. La finalité, c'est d'aller le voir, notre plan d'intervention, est-ce que le patient est moins déshydraté? Si on avait un groupe contrôle... Est-ce que, si on compare les deux groupes, les gens ont moins développé de délirium? Est-ce qu'ils ont perdu moins de leur autonomie? Est-ce qu'ils n'ont pas eu une accélération de leur déficit cognitif, etc. Mais là on n'est pas capables d'aller voir la finalité de nos recherches. On travaille toujours à côté, là, on travaille toujours en parallèle. Ça, c'est des exemples, là, que...

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Est-ce qu'on parle, par exemple, de recherches pour voir l'efficacité de médicaments ou d'interventions chirurgicales? Est-ce que c'est de ça qu'on parle quand on parle de risque minimal?

M. Voyer (Philippe) : Non, non.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Oui. Certainement pas. Je veux quand même réitérer que je ne suis pas un expert de la définition du risque minimal, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'au sein du Réseau québécois de recherche sur le vieillissement, dans les différents axes de recherche, nos projets de recherche ne sont jamais chirurgicaux, ne sont jamais sur la médication. En fait, tous ces chercheurs-là — on est au-dessus de 150 chercheurs québécois — ça va toujours être des recherches davantage de stimulation cognitive, de mobilisation. Par exemple, un projet de recherche fort intéressant qui a été fait sur la réadaptation chez des personnes qui ont fait un AVC : donc, quels sont les types d'intervention qui vont favoriser un rétablissement plus rapidement, quelle est la meilleure dose, etc.

Bon, bien, évidemment, ces types de projets là vont avoir été faits chez des gens, par contre, qui n'ont pas de déficit cognitif. Mais il faut savoir que, chez les gens qui font un AVC, certains restent avec des déficits cognitifs, mais, eux, il faut les exclure. Alors, il faut comprendre, on exclut toujours ce groupe-là des autres projets de recherche qui visent, dans le fond, toujours à favoriser le bien-être, retrouver l'autonomie ou maintenir la santé le plus longtemps possible.

Donc, un projet de recherche qui serait extraordinaire à faire : sur, par exemple, la gestion des maladies chroniques, les personnes qui ont une maladie obstructive pulmonaire chronique, faire un suivi à domicile, donc un projet de recherche avec une infirmière pivot puis les soins usuels, voir les impacts, par exemple, sur la symptomatologie, sur l'autonomie, la consultation des services de santé, mais vraiment aller voir après ça le patient, sa santé mentale là-dedans, donc l'étudier, lui. Mais, si on y met des déficits cognitifs, on n'est pas capables. On va pouvoir le faire s'il n'y a pas de déficit cognitif. Ça fait que c'est pour ça que je vous dis qu'il y a un effet, l'article 21. On dit : On va le protéger, on va le protéger. Mais, en fait, on ne le protège pas, on l'exclut, on l'exclut, on l'exclut. C'est ça qu'on fait tout le temps.

Le Président (M. Bergman) : M. le ministre.

M. Hébert : Je vais passer la parole à mes collègues, s'il y a des questions complémentaires.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Voyer. Ça me fait plaisir de vous accueillir aujourd'hui. J'ai bien entendu, dans votre présentation, là, les préoccupations que vous avez, notamment à titre de chercheur, avec l'article 21 du Code civil, alors qui, actuellement, pose des contraintes, qui vous empêche même d'aller de l'avant dans des recherches qui pourraient faire oeuvre utile, disons, et notamment auprès de populations âgées, inaptes, donc les personnes adultes mais inaptes.

À l'heure actuelle, si je comprends bien l'état du Code civil, ça fait en sorte que, pour pouvoir aller de l'avant et qu'une personne majeure inapte puisse participer activement à une recherche, elle doit avoir un représentant légal, donc soit un tuteur, un mandataire ou même le curateur, et, à défaut de ce représentant légal, vous ne pouvez pas aller de l'avant avec les personnes qui ne sont pas représentées. Donc, le projet de loi propose une modification qui ferait en sorte qu'on pourrait demander aux personnes qui sont habilitées à prodiguer des soins à ces personnes-là de pouvoir donner le consentement.

Maintenant, moi, j'ai une question. Vous, comme chercheur, comment vous allez identifier les personnes qui seraient aptes à prodiguer des soins? Donc, on demanderait à ces personnes-là le consentement pour la participation à la recherche. Comment vous allez les identifier?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Oui. En fait, au niveau des règles éthiques, c'est assez clair, on ne peut jamais aller contacter directement la population qu'on veut étudier, il y a toujours un intermédiaire. Donc, les règles d'éthique fondamentales incontournables, c'est d'abord que, si nous, on veut étudier une personne qui a la maladie d'Alzheimer, par exemple, dans un centre d'hébergement, bien, à ce moment-là, c'est un membre du personnel qui va parler à la famille, qui va lui dire : Est-ce que vous accepteriez de rencontrer un membre de l'équipe de recherche pour en savoir plus sur leur projet de recherche? Donc, ils peuvent dire : Non, je ne veux pas les voir. Ils peuvent dire : Oui, je suis prêt à les entendre. Là, le professeur de recherche obtient les coordonnées pour pouvoir entrer en contact avec ce membre-là, pour pouvoir lui expliquer les tenants et aboutissants de la recherche, pour favoriser, donc, un consentement libre et éclairé. Et là, si les membres... si la personne accepte de participer, bien là, elle peut être incluse.

Ceci étant dit, auprès de nos équipes de professeurs de recherche, on s'intéresse toujours à l'assentiment de la clientèle, c'est-à-dire que la famille dit oui, mais, si, nous, à chaque fois qu'on rentre dans la chambre, la personne crie pour... si elle ne veut pas nous voir, bien, on ne persiste pas dans la conduite de ce projet de recherche là.

Comment on identifie les gens en tant que tels, par exemple, si on voudrait faire une étude chez des personnes qui ont une démence, qui ont 65 ans et plus, sans antécédent de trouble psychiatrique, par exemple? ...souvent des critères d'inclusion, exclusion qu'on va établir. Donc, nous, on s'entend avec l'établissement pour qu'on ait une personne désignée qui va identifier qui rencontre nos critères d'inclusion. Et, parmi ce bassin-là, bien, si c'est aléatoire, on tire au hasard une personne, puis là c'est cette personne-là qui est contactée par un membre du personnel, qui lui dit la même routine que je vous ai dit tantôt. Donc, il y a la notion de critères d'inclusion, exclusion puis, après ça, la notion toujours d'avoir un intermédiaire, ce qui est fondamental.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. J'entends bien, mais ma question était plus : Comment vous allez identifier les personnes dans l'entourage de la personne inapte qui pourraient consentir aux soins, avec la nouvelle... ce que vous souhaitez, là, comme modification dans la loi?

M. Voyer (Philippe) : Bien, en fait…

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Oui, excusez. En fait, on prend… Nous, ce qu'on proposait dans notre rapport, c'est de prendre la même définition que la personne qui est apte à consentir aux soins, qui est d'usage dans tous les milieux cliniques. Ça fait aussi la proposition qui est faite actuellement dans le projet de loi. Alors, nous, ça nous convient parfaitement. Donc, c'est la personne qui a le lien le plus significatif, puis on suit la même règle que pour la personne appelée à consentir aux soins.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.

Mme Proulx : Oui. Et vous, M. Voyer, vous avez été, depuis 2006, un des premiers, là, à sensibiliser le ministère sur les difficultés, comme chercheur, que vous rencontriez avec l'application de l'article 21 et vous avez même, comme le mentionnait le ministre, publié une lettre dans La Presse à cet effet-là. Mais j'aimerais ça... Vous êtes ici, devant nous. J'aimerais ça que vous nous parliez de la mobilisation des chercheurs, dans votre domaine, sur cette question-là. Est-ce que... Quel est l'état? Quel est le point de vue? Comment les gens perçoivent et se sentent interpellés par ce projet de loi?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

• (12 h 30) •

M. Voyer (Philippe) : Je vous dirais que les chercheurs sont... Le découragement que je vous soulignais, que j'avais, est très présent, très, très, très présent, au niveau des chercheurs, pour faire de la recherche auprès de cette population-là. C'est ce qui explique qu'on fait beaucoup de recherche chez les gens avec des déficits cognitifs légers, stade léger. On va peu avec les gens aux stades modéré et sévère.

Je vous dirais que, le rapport qu'on a rédigé, on a eu un appui de tous mes collègues chercheurs, mais je ne peux pas dire que les gens avaient un espoir très grand. Je pense qu'ils étaient un peu désillusionnés sur notre capacité, par ce rapport-là avec les groupes d'aînés, à pouvoir changer cet article de loi là. Je vous dirais qu'il y avait... les gens... Je pense que là, là, avec aujourd'hui, je pense qu'ils vont commencer à y croire, là, réellement, parce qu'il y a eu une démobilisation, clairement, de recherche au sein... Moi, j'ai dirigé, pendant huit ans de temps, le regroupement Évaluation des interventions en soins de longue durée. Ça, c'est des gens, dans le fond, qu'on fait de la recherche, qu'on se concentre pour faire de la recherche pour améliorer la qualité des soins chez des personnes qui sont en centre d'hébergement, dont 70 % à 80 % ont des déficits cognitifs. Bien, je peux vous dire que, pendant ces huit années-là, il y a eu rarement plus que 10 chercheurs qui ont été présents à ces réunions-là. On gardait la flamme, mais c'est très difficile, parce que, les gens, il faut toujours qu'ils fassent de la recherche sur des à-côtés — puis ce n'est pas ce qui les intéresse réellement — pour garder espoir, tu sais. Ça fait que, pendant ce temps-là, c'est comme si tout le monde fait ses recherches d'à-côtés, chez la clientèle pas de démence, etc., en gardant espoir qu'on puisse changer la donne.

Donc, moi, durant les années suivant que le rapport a été déposé, j'ai parlé avec les gens des communications de l'Université Laval pour leur dire : Écoutez, qu'est-ce que je peux faire après? Qu'est-ce qui est possible? Alors, ils me disaient : Écoutez, appelez au ministère où est-ce qu'il est rendu, votre rapport. Appelez, appelez. Alors, depuis ce temps-là, à tous les trois mois, j'appelle des gens du ministère puis je leur demande : C'est où qu'on est rendus? C'est où qu'on est rendus? Quelle étape? Puis je prends en note. J'alimente ça chez les chercheurs. Et je peux vous dire qu'eux, bien, il y a eu des périodes d'encouragement, découragement, encouragement, découragement, parce que, des fois, ça variait selon les nouvelles. À un moment donné, on me disait : Ah! Il va peut-être y avoir un avant-projet de loi, ça va peut-être être déposé. Ah! Là, j'arrivais avec cette nouvelle-là. Trois à quatre mois plus tard : Non, il n'a pas été déposé.

Donc, vraiment, les gens, ils ont des espoirs, des espoirs, mais il est certain qu'en 2001, si j'avais eu 55 ans, là, je n'aurais pas entamé cette démarche-là, là. Il y avait une notion, quand même… Je veux changer la donne, là, je ne peux pas croire que je ne serai pas capable d'étudier cette population-là, là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Voyer. Bien, pour faire suite à ma collègue, quel est le retard du Québec en ce qui a trait à la recherche dans le domaine de la maladie d'Alzheimer ou toute autre maladie connexe?

M. Voyer (Philippe) : Bien, en fait, ce qui s'est passé, c'est que… Évidemment, c'est ma lecture personnelle, là, que je vais vous transmettre, mais ça a fait en sorte que... Les chercheurs québécois sont quand même très novateurs et créatifs. Alors, qu'est-ce qu'ils ont fait? C'est que, oui, on a peut-être délaissé la clientèle avec démence sévère dans les milieux d'hébergement, mais, si on regarde la recherche fondamentale, par exemple — quand j'entends «recherche fondamentale», c'est les modèles animaux — si on regarde les gens dans ce qu'ils appellent le déficit cognitif léger, le «mild cognitive impairment», il y a plein de choses où est-ce que, comme les chercheurs se sont tous orientés sur autre chose que ça, bien, ça a fait une masse critique peut-être plus importante.

Alors, je vous dirais que la lecture qu'on a, c'est... Le retard, c'est vraiment dans les cas particuliers de démence modérée et sévère, pour faire de la recherche vraiment sur la qualité des soins, pas les aspects chirurgicaux, pas les aspects des médicaments, mais vraiment sur comment prendre soin d'une personne qui a de la comorbidité, qui a la maladie d'Alzheimer, qui a des troubles de mobilité puis qui est dans un centre d'hébergement, qu'est-ce qu'on peut faire pour elle, pour améliorer sa qualité de vie, améliorer ses soins, éviter qu'elle chute dans ce contexte-là. C'est très simple, on va faire des études pour voir c'est comment qu'on peut prévenir les chutes chez les personnes qui n'ont pas de déficit cognitif. Mais, quand on arrive en centre d'hébergement, ça ne fonctionne pas.

Ça fait qu'il arrive des situations assez particulières qu'on a notées, c'est, par exemple, pour prévenir, un autre exemple bien connu, les plaies de pression. Bon, bien, les plaies de pression, il existe des échelles, l'échelle de Braden, qui détermine qui est à risque de faire une plaie de pression, qui va bien fonctionner chez des personnes sans déficit cognitif avec une certaine mobilité, des personnes âgées. Sauf que, là, Agrément Canada, l'Ordre des infirmières, ils vont demander, par exemple : Bien, il faut compléter une échelle de Braden pour toutes les clientèles. Bien, ce qu'il faut savoir, c'est que cette échelle-là, elle n'a pas été validée chez une clientèle avec démence modérée à sévère. Alors, il y a aussi énormément d'énergie qui est mise auprès d'une population — dans le fond, les soignants vont faire ça — mais sur laquelle on n'a aucune idée de la valeur ajoutée. Et, si on se fie aux résultats plutôt américains et au niveau de l'Angleterre, qui l'ont testée dans ces populations-là, leurs conclusions, c'est : «A waste of time», c'est une perte de temps de compléter ces échelles-là auprès de cette population-là. Mais nous, on ne peut pas l'étudier. On ne peut pas dire : Au Québec, voici, donc, on vous recommande d'éviter de faire cette telle pratique là. Alors, si on cumule les 10 minutes par toutes les infirmières des centres d'hébergement auprès des 45 000 résidents, bien, vous comprenez que ça, c'est juste un exemple de temps perdu, parce qu'on n'est pas en mesure d'illustrer les avantages, les inconvénients d'utiliser telle intervention auprès de cette population-là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Bonaventure, il vous reste une minute.

M. Roy : Vous dites qu'il y a un déplacement ou il y a eu un déplacement, je dirais, de la masse critique des chercheurs — mais vous avez élaboré certaines choses — mais vers où exactement? Vous avez dit la recherche fondamentale, mais pouvez-vous juste m'orienter là-dessus?

M. Voyer (Philippe) : Oui.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Par exemple, la neuropsychologie, avec les travaux de Dre Sylvie Belleville et compagnie, du Réseau québécois de recherche sur le vieillissement, fait figure de proue au niveau mondial. Je veux dire, ils font des travaux extraordinaires. Si on regarde les travaux qui ont été faits, tous au niveau des aidants naturels, avec Dre Francine Ducharme, avec la chaire de recherche sur les... donc, comment aider les gens qui ont une maladie d'Alzheimer, on fait encore... On est la première chaire du Canada qu'il y a eu sur les aidants naturels. Donc, c'est dans ce sens-là.

Je ne dis pas que ces chercheurs-là ont nécessairement bifurqué tout à coup, mais, si tu as un choix de carrière à faire puis que tu es une étudiante à la maîtrise ou au doctorat, bien, ceux qui rayonnent vont attirer, hein, on s'entend là-dessus. Donc, on est des pôles attractifs.

Le Président (M. Bergman) : En conclusion, s'il vous plaît. En conclusion.

M. Voyer (Philippe) : Alors, c'est ça, c'est plus qu'on devient des pôles attractifs et on vient qu'on regroupe des chercheurs comme ça.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon, pour le bloc de l'opposition officielle. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, M. le Président. J'ai une question. Tout ça, c'est quelque chose que je ne connais pas tellement bien, donc excusez-moi si j'ai mal compris. Quand je lis l'article 21 du Code civil, ça dit qu'un mineur ou un majeur inapte ne peut pas être soumis à une expérimentation qui comporte un risque sérieux pour sa santé. Donc, c'est ça, la règle. Tout à l'heure, vous m'avez parlé... j'ai entendu qu'il y avait la recherche qui était simplement la lavande, mais ça, ce n'est pas un risque sérieux, donc pourquoi vous étiez empêché de faire ça en vertu de l'article 21?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Écoutez, je pourrais vous offrir un nombre incalculable de situations similaires, et ce qu'on note, c'est qu'il y a des positions de comités d'éthique que peut-être ces gens-là vont pouvoir venir présenter, ici, mais… Par exemple, aux Comités d'éthique de la recherche de l'Université Laval, aux CERUL, comité d'éthique en santé, bon, bien, si vous parlez aux chercheurs du Centre d'excellence sur le vieillissement de Québec, bien, vous allez voir qu'il n'y a aucun des chercheurs là qui va favoriser chez ses étudiantes d'aller faire de la recherche sur les personnes avec démence, parce qu'aux CERUL, tu ne te poses pas la question, on va exiger le représentant légal dès le moment que tu t'intéresses à une personne qui a une démence. Pas qu'il y a un risque sérieux ou pas sérieux d'expérimentation, non. Une personne a une démence, on exige un représentant légal.

Je pourrais continuer la liste comme ça, mais je ne veux pas tomber dans des débats avec ces gens-là. C'est la réalité, comme je vous dis, que nous, on a vécue.

Mme de Santis : Alors, ce que je comprends, c'est… nonobstant ce que j'ai lu, la pratique est que, si c'est une personne inapte ou un mineur, les comités d'éthique prennent une position qui est très, très conservatrice, très restrictive.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Exactement. Ce que je vous dirais, c'est qu'il y a de l'inégalité entre les comités d'éthique au niveau de leur prise de position à ce niveau-là. Puis au sein d'un même comité d'éthique, avec des projets dont le niveau de risque est minimal… vont aussi avoir des prises de position divergentes d'une fois à l'autre. Alors, c'est vraiment une loterie, c'est une loterie. Les chercheurs se croisent les doigts, puis là ils se disent : Ça va-tu passer, pas passer? Donc, il y a beaucoup de variabilité, puis c'est pour ça que nous, dans notre proposition, on donnait des indices très clairs pour leur dire : Écoutez, si c'est un questionnaire, n'exigez pas le représentant légal.

Dans nos discussions initiales avec des gens très initiés à la question, ils nous disaient : Mais on ne comprend pas... des gens de votre… des gens du propre ministère nous disaient : Bien, on ne comprend pas pourquoi ils ont pris cette décision-là, parce qu'il n'y a pas un risque sérieux. Donc, il y a vraiment un grave problème dans l'interprétation, la compréhension puis la manière que les gens prennent leurs décisions, mais c'est tout le temps au détriment de la recherche qui est conduite. Puis je vous dirais que moi, je sais où soumettre un projet de recherche puis où ne pas soumettre un projet de recherche. Il y a des établissements qui n'auront jamais de recherche auprès de leurs clientèles parce qu'on sait que leur comité d'éthique est un frein majeur, il n'y a pas de projet qui va passer là.

Mme de Santis : Merci pour votre explication. Je vois que c'est vraiment un problème dans l'interprétation de cette clause ou de cette disposition par les différents comités d'éthique.

J'aimerais revenir à quelque chose que vous aviez dit tout à l'heure, c'est que vous donnez les exemples des États-Unis et l'Australie, où des belles choses se font, qui ne se font pas ici. Pouvez-vous nous donner des exemples?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

• (12 h 40) •

M. Voyer (Philippe) : Oui, avec plaisir. Un exemple d'un projet qui a été fait sur des clientèles avec des troubles du comportement, par exemple : un des graves problèmes qu'on a, c'est lors des soins d'hygiène, lorsqu'un préposé aux bénéficiaires va donner des soins d'hygiène à une personne qui a une démence. C'est très invasif, ça va dans l'intimité. Ces gens-là, ils ont beaucoup de problèmes articulaires, de douleurs viscérales. Ils ont un état de santé qui est compromis. Des fois, ils ont des maladies respiratoires, qu'on ne peut pas les coucher, etc. Donc, dans ces différents projets de recherche là, ils ont tout développé des stratégies pour mieux donner les soins. Mais, pour arriver à faire ça, ils ont filmé pendant un an de temps des soins d'hygiène pour analyser les facteurs déclenchants, et tout, donc pour vraiment, là, développer une nouvelle façon de faire.

Alors, ça, c'est un exemple d'un projet qui… après ça, on peut implanter, puis évaluer cette stratégie-là. Alors, ça, ce projet-là a permis de démontrer, de diminuer de 60 % les comportements d'agressivité lors des soins d'hygiène. Alors, c'est un superbeau projet, mais, comme vous comprenez, tantôt, pour nous, juste observer les soins buccodentaires, on a exigé le représentant légal. Alors, vous imaginez? Je ne peux m'imaginer m'en aller plus loin que ça pour faire un projet sur les soins d'hygiène en tant que tels, là, parce que, là, c'est encore plus invasif, si on veut.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Dernière question. Mais l'exemple que vous me donnez, ce n'est pas une recherche qui comporte un risque sérieux.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Exactement.

Mme de Santis : O.K., parfait.

M. Voyer (Philippe) : En fait, nous, on ne veut pas... On n'est pas dans le monde de faire des recherches... sérieux.

Mme de Santis : Je pose cette question, parce que je regarde encore le premier paragraphe de l'article 21, je me dis : Mais pourquoi on vous empêche de le faire?

M. Voyer (Philippe) : Si je peux me permettre, il y a l'interprétation, comme on a souligné tantôt, puis il y a les autres enjeux aussi, qui ont été bien discutés dans le rapport. C'est que : Est-ce qu'être représentant légal, ça offre une protection supérieure qu'être la personne apte à consentir aux soins? Donc, il y a aussi un obstacle là qu'il n'est aucunement démontré sur le plan légal que d'être le représentant légal, ça offre une meilleure protection qu'être la personne apte à consentir aux soins. Donc, il y a aussi cet enjeu-là, là. Même s'il y a une interprétation, je pense qu'il y a des problèmes fondamentaux dans l'article 21 comme il est là présentement.

Mme de Santis : Merci beaucoup.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Puis je comprends très, très bien l'enjeu. Puis, premier élément, vous êtes conscient, par contre, qu'il faut se charger de protéger ces gens-là, parce que c'est quand même les gens les plus vulnérables et puis souvent les plus démunis?

M. Voyer (Philippe) : Oui. Vous voulez que je réponde à ça?

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui.

M. Voyer (Philippe) : Absolument. En fait, ça vient peut-être faire le lien avec ce que je viens de dire. Je vais reprendre l'exemple d'un chercheur du CHUM qu'on a cité dans le rapport. Lui, s'il veut, par exemple, favoriser par de la stimulation cognitive le rétablissement cognitif d'une personne suivant un AVC, bien, des fois, avec ses patients, il n'est pas capable, parce que ça prend le représentant légal, puis la dame qui est à côté du monsieur, elle n'est pas représentante légale. Cependant, s'il dit : Peut-être qu'on pourrait faire telle chirurgie pour l'aider, votre conjoint, bien, elle peut consentir. Alors, on a une situation qui est un peu particulière, où est-ce qu'on a une intervention qui est nettement moins invasive et sans risque pour laquelle la personne proche ne peut pas consentir, mais elle peut consentir pour une chirurgie, par exemple.

Donc, c'est pour ça que je vous dis qu'il y a des problèmes fondamentaux au sein de cet article de loi là, où est-ce qu'une même personne peut autoriser des choses dont la gravité est possible et elle ne peut pas accepter pour des éléments qui ont un bénéfice probable. Donc, ça, c'est une autre problématique.

Mais vous avez raison en termes de vulnérabilité. Et là je réitérerais ce qui a été dit en début, sur le plan du fait qu'on a des comités d'éthique, hein, à la recherche, et, jusqu'à maintenant, ils ont démontré qu'ils étaient beaucoup plus en protection de cette population-là que l'inverse.

Il faut savoir aussi qu'on ne rentre pas dans un centre d'hébergement ou dans ce type de milieu là pour faire de la recherche comme on veut. Le personnel qui est en place a des charges de travail très importantes. Alors, évidemment, pour qu'on puisse faire une recherche dans un milieu clinique, il faut l'appui du DSP, il faut l'appui de la direction des soins infirmiers, la direction générale, il faut passer à leur comité d'éthique, il faut que le chef d'unité où est-ce qu'on veut faire notre projet accepte, il faut les consentements, quand même, des proches, parce qu'on demande le consentement. Donc, évidemment, le nombre de filets de sûreté est assez significatif, là, donc... Et il faut quand même comprendre qu'un chercheur qui veut faire une recherche, bien, il faut qu'il passe lui-même à son comité d'éthique, il faut qu'il fasse un projet de recherche puis qu'il soit entériné, s'il veut être financé, par exemple, par la fondation de son hôpital ou encore par un organisme de recherche.

Donc, réellement, de la recherche bric-à-brac avec des risques auprès de cette population-là, je n'en connais pas au Québec, là.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Moi, je suis d'accord avec vous, mais, nous, en tant que législateurs, il faut vraiment qu'on regarde chacun des aspects, puis, pour avoir siégé sur des comités de recherche il y a plusieurs années, quand la loi a été refaite, c'est parce qu'il y avait des gros problèmes, puis il a fallu… D'ailleurs, moi, je pensais qu'on allait peut-être au moins revoir d'autres éléments de la loi, parce qu'il y en a qui veulent ouvrir un peu plus. Mais je me souviens des comités d'éthique, entre autres, d'un établissement à l'autre, c'était variable. Tout dépendant qui siégeait comme chercheur, comme avocat puis comme éthicien, c'était variable.

Et là je comprends qu'on reçoit la position des chercheurs, mais je connais beaucoup d'éthiciens en recherche qui veulent protéger les droits, des fois, parfois, je le reconnais, à outrance. Donc, il faut avoir cet équilibre-là. Et c'est certain qu'aujourd'hui on demande à un chercheur qui fait, je pense... Je suis convaincu que vous faites un travail tout à fait adéquat, mais il faut penser qu'il y a plusieurs centres qui font de la recherche, et, même au niveau de la recherche, on va se le dire, ce n'est pas tout le monde qui a le même niveau de... ce n'est pas tout le monde ou toutes les personnes qui ont le même niveau d'éthique, hein? Il faut se le dire. Mais je pense qu'au Québec, vous avez raison, on a corrigé beaucoup, beaucoup de lacunes par rapport à la recherche.

Par rapport au type de recherche que vous faites, si je comprends bien, pour qu'on puisse offrir des meilleurs soins à ces gens-là, ça nous prend de la recherche. Et le fait qu'on ne puisse pas faire de la recherche de façon convenable ou de façon plus facile, à la fin ça brime l'ensemble de cette population.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Exactement. Ça, c'est... Dans les exemples que je citais tantôt, la décision qui est prise, si le chercheur veut faire de la recherche auprès de cette population-là puis que le comité d'éthique exige le représentant légal, on va exclure cette portion de cette population-là ou encore... l'autre situation où est-ce que les chercheurs vont tout simplement orienter leurs activités de recherche sur une population autre que celle-là.

Et, juste sur 10 ans, on voit déjà le nombre de recherches qui va être fait dans cette population-là, qui est en déclin, parce que, comme je vous dis, la problématique qu'on a, ce n'est pas, actuellement, un problème de protection de l'intégrité de cette population-là, c'est que, de moins en moins, ils peuvent bénéficier des résultats de la recherche. Ça, si on regarde les indicateurs cliniques, par exemple, qu'on peut aller chercher dans les données, on va noter, par exemple, que, si on regarde une étude qui vient d'être publiée aux États-Unis, 12 % de la clientèle avec démence... Dans les «nursing homes», leurs centres d'hébergement à eux, c'est 12 % qui consomment des antipsychotiques. Chez la clientèle dans les centres d'hébergement québécois, on est à 50 % à 60 %. Ça, ça veut dire que non seulement on ne fait pas de recherche, mais on n'implante pas les nouvelles pratiques. Donc, face à une personne qui a de l'agitation verbale, ou physique, ou autre, bien, c'est le médicament qui va apparaître dans la situation, et ces médicaments-là, la dernière méta-analyse de Schneider, c'est une personne sur 100 qui décède de l'utilisation de ce médicament-là, des conséquences directes.

Donc, le statu quo, quand on le voit, il est nettement plus inacceptable que ce vers quoi on pourrait s'en aller pour favoriser des activités de recherche auprès de cette population-là. Puis il faut comprendre, ce ne sera pas la marée, non plus, de chercheurs qui vont aller faire de la recherche là. Vous n'êtes pas sans savoir que, comme la gériatrie, comme la psychogériatrie, la santé mentale, c'est des champs de spécialisation qui sont très peu attractifs. Donc, c'est difficile d'attirer des gens, en début de carrière, à dire : Je vais venir faire de la recherche auprès de cette population-là. Ce n'est pas de l'oncologie, ce n'est pas de la cardiologie, ce n'est pas de l'enfance-famille. Moi, je le sais… À chaque année, on fait des présentations à la faculté, nos 45 nouveaux étudiants à la maîtrise, on va faire du recrutement : Y a-t-il des gens qui sont intéressés à la gériatrie? Je peux diriger vos travaux, je peux vous donner une bourse. Plusieurs années consécutives, personne ne lève la main. Donc, quand j'en ai une, personne, j'essaie de ne pas lui mettre des bâtons dans les roues supplémentaires.

Donc, je veux juste dire que la masse critique de chercheurs, aussi, qui va s'intéresser, qui va aller dans cette direction-là, elle est quand même aussi très limitée, malheureusement.

Le Président (M. Bergman) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Veux-tu poser ta question?

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci. Vous avez... Dans le projet de loi qui est sous étude actuellement, on modifie l'article 21 à bien des égards, mais un des éléments qui est majeur, c'est qu'on remplace, dans l'article 21 actuel, le mot «expérimentation» par le mot «recherche». Est-ce qu'à votre avis ce changement-là... Qu'est-ce que ce changement-là, en soi, va venir apporter? Et est-ce que vous ne croyez pas que ce changement-là, en soi, serait suffisant pour vous permettre d'accéder davantage aux clientèles que vous ciblez dans vos recherches?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Pouvez-vous répéter la question? Parce que j'ai pensé à autre chose qu'à votre réponse. Je m'excuse.

• (12 h 50) •

Mme Vallée : O.K. Dans l'article 21, actuellement, ce qu'on modifie, c'est un certain nombre de choses, mais on modifie... Entre autres, on remplace le mot «expérimentation», qui est au Code civil — parce qu'actuellement, lorsque vous allez devant un comité d'éthique, c'est une notion d'«expérimentation» — on le remplace, dans le projet de loi, par le mot «recherche». En soi, est-ce que ça ne pourrait pas être suffisant? Ou qu'est-ce que ça peut apporter?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Bien, en fait, le fameux mot «expérimentation», je vous dirais que les gens, on n'a jamais su vraiment c'était quoi. Ça fait que ça, ça causait un problème puis ça contribuait, finalement, à un peu la confusion qu'il peut y avoir puis des positions divergentes, parce que les gens disaient : Non, non, ce n'est pas une expérimentation, il n'y a pas de groupe contrôle. Là, ils disaient : Non, non, non, dès que tu étudies des gens, c'est de l'expérimentation. Alors, même... Dr Bolduc avait raison, en ce qu'il parlait de la variabilité entre les éthiciens, et les avocats, et tout. Bien, évidemment, ce mot-là a contribué, entre autres...

Donc, au moins, là, de la recherche, c'est de la recherche, là, qu'elle soit qualitative, que ça soit... Parce qu'il y avait des gens... disaient : Ah! Mais la recherche qualitative, ce n'est pas de l'expérimentation, puis là les gens essayaient de jouer là-dessus. Finalement, c'est parce qu'on était embourbés dans un vocable qui ne fonctionnait pas, qui ne collait pas à la recherche scientifique que nous, on parle… on fait de la recherche. Puis, dès ce moment-là, tout le monde, on sait qu'on fait de la recherche, on est inclus dans ce fameux article de loi là.

Maintenant, on introduit le «risque minimal», on donne une liberté au comité d'éthique, davantage, de prendre cette décision-là. On leur dit : Vous pouvez prendre la décision de... Même si elle était implicite la dernière fois... Vousavez raison, elle est implicite : on pouvait quand même demander à la personne qui est apte à consentir aux soins, quand ce n'était pas un risque sérieux… Mais cette décision-là n'était pas prise. Les gens, ils ne voulaient pas être pris à prendre une telle décision, puis aller devoir la défendre, puis être le seul comité d'éthique qui aurait pris telle décision, parce qu'il y a un effet d'harmonisation, les autres, ils ne feront pas telle décision, puis... On a des comités d'éthique qui sont dans des centres universitaires, qui sont plus leadership, qui avaient pris telle position. Ça fait qu'eux, ils disaient : Bien, moi, je me colle à tel modèle ou tel modèle. Donc, évidemment, ça faisait en sorte qu'on était pris un peu dans le statu quo. C'est pour ça que je vous disais que moi, je sais dans quel projet... auprès de quel comité d'éthique à la recherche qu'on a plus de chances d'avoir la possibilité de demander le consentement à une personne qui est apte à consentir aux soins. Mais ça nous amenait des...

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Combien de temps en tout?

Le Président (M. Bergman) : Cinq minutes.

Mme Vallée : Est-ce qu'il ne serait pas plus opportun, à ce moment-là, d'encadrer les directives accordées aux comités de recherche sans venir modifier toute la question de la protection des personnes les plus vulnérables? Parce que, comme vous le disait ma collègue tout à l'heure, c'est vraiment dans un contexte très particulier que l'article 21 va s'appliquer, puis l'article 24 aussi. Et, à ce moment-là, vous, ce que vous nous exprimez aujourd'hui, c'est qu'il n'y a pas d'homogénéité, il n'y a pas de ligne directive, il ne semble pas y avoir de jurisprudence au sein des comités d'éthique, donc c'est variable. Donc, vous, lorsque vous avez un projet, vous êtes un peu soumis aux aléas du comité d'éthique devant qui vous devez aller présenter.

Donc, plutôt que de modifier substantiellement la question du consentement, est-ce qu'il ne... en incluant le mot «recherche» — ça, je comprends que, pour vous, c'est un changement important qui va vous donner de l'air — est-ce qu'il ne serait pas plus opportun pour le gouvernement d'encadrer les comités d'éthique de donner des directives plus claires? Est-ce que ça ne permettrait pas, d'une façon plus simple, d'arriver aux mêmes résultats?

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Donc, nous, en fait, quand qu'on a fait notre fameux rapport, puis on s'est penchés sur la question, puis on a fait les différentes validations dans ces étapes, on a décidé de se limiter à dire : Écoutez, il y a un problème réel, on va vous l'illustrer, ce n'est pas théorique, c'est réel. Il y a des exemples de chercheurs qui réorientent leur carrière vers autre chose parce qu'ils ne veulent pas faire leurs 10 dernières années auprès de cette population. Ça leur... Donc, on a des chercheurs chevronnés qui ont pu changer d'orientation, de population.

Donc, nous, à la suite de ça, on a dit : On espère qu'au ministère on va faire quelque chose. Est-ce que ce sera de la formation des comités d'éthique, un guide sur comment interpréter les articles... l'article 21, donc clarifier des points, un règlement, changer la loi? Nous, on était plus... on n'est pas les experts de ce domaine-là, mais, s'il vous plaît, faites quelque chose parce que la situation actuelle n'est pas acceptable.

Par contre, là, il semble que le gouvernement a opté pour un projet de loi qui… Nous, en tout cas, on sent vraiment que ça va atténuer beaucoup de problématiques. Alors, on est très satisfaits dans ce sens-là, parce qu'on vient corriger le fameux «représentant légal» puis la fameuse «expérimentation». Je ne vous dirai pas que le fameux «minimal»... On va peut-être avoir des surprises en cours de route, comment qu'il y en a qui vont le définir, mais c'est déjà beaucoup mieux que la situation actuelle. Alors, c'est pour ça que nous, on voit ça de façon très positive.

Donc, à votre question : Qu'est-ce qui aurait été la meilleure option?, je laisse ça à la discrétion du ministère qui a pris cette décision-là. Mais nous... Pour nous, c'était important qu'il y ait des avancées.

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Gatineau, il vous reste une minute.

Mme Vallée : Je vous posais la question parce que les comités demeurent quand même dans le Code civil. Donc, la problématique que vous avez soulevée n'est pas réglée pour autant, parce que les comités d'éthique vont quand même avoirà se pencher sur la question, et, en l'absence de directives plus claires, peut-être que vous risquez de vous retrouver devant des situations similaires.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer, pour une courte réponse.

M. Voyer (Philippe) : Oui. Bien, je pense qu'avec la notion de «recherche», «d'expérimentation», qu'on enlève le «représentant légal», ça va régler énormément de problèmes, énormément. Je vous dis, les gens s'intéressent à la question. C'est rendu un sujet de recherche. Il y a des publications scientifiques sur la situation du Québec. Je suis à l'ACFAS lundi, dans deux semaines, je présente sur l'article 21... Tu sais, pour vous dire, c'est rendu un sujet de recherche, la situation de l'article 21 au Québec. Donc, je pense que ça va vraiment être éclairant de régler certaines de ces dimensions-là.

Le Président (M. Bergman) : Alors, ceci met fin à ce bloc. M. le ministre, vous avez 2 min 30 s à ce bloc du gouvernement.

M. Hébert : Juste une précision pour ma collègue de Bourassa-Sauvé : le projet de loi actuel ne vise pas à modifier le premier paragraphe de l'article 21.

Mme de Santis : Mais je comprends ça. Mais mon problème, c'est que, si on dit, au premier paragraphe, qu'un mineur ou un majeur inapte ne peut pas participer à une recherche qui porte un risque sérieux pour sa santé, O.K... C'est la même chose qui existe aujourd'hui, O.K.

M. Hébert : C'est ça.

Mme de Santis : Si la recherche ne comporte pas un risque sérieux, le mineur pourrait faire partie de la recherche.

M. Hébert : Mais c'est le troisième paragraphe, où le consentement doit être donné par le curateur, le tuteur.

Mme de Santis : Non, mais, ça...

M. Hébert : Oui, oui... Non, non, mais les deux... les deux. Est-ce que je peux compléter?

Mme de Santis : Oui.

M. Hébert : Le projet de loi ne modifie pas que les personnes inaptes ne peuvent pas participer à une recherche qui a un risque sérieux. Ça, on s'entend là-dessus. Qu'il y ait un tuteur, un curateur qui donnerait un consentement, ce n'est pas possible. Alors, l'article 21 enlève d'une expérimentation avec un risque sérieux tout majeur inapte ou tout mineur.

Maintenant, quand le risque est modéré ou minimal, là il faut, par l'article 21, qu'il y ait un consentement par un curateur ou un tuteur, et c'est ça qu'on veut modifier. Mais, pour le risque sérieux, ça, c'est exclu, et, dans le nouveau projet de loi, on ne modifie pas ça. Un risque… Un majeur inapte ou un mineur ne peut pas participer à une étude qui a un risque sérieux. Qu'il ait un curateur, un tuteur qui donnerait un consentement… et c'est exclu.

Mme de Santis : Je comprends ce que vous dites. Ce qui mène à confusion, O.K., c'est que vous faites cette déclaration dans le premier alinéa, et après vous parlez d'une recherche, simplement, O.K.? Par exemple, au troisième alinéa, vous dites : «Le consentement à une recherche est donné», alors ça porte à confusion. Quelqu'un qui n'est pas dans le domaine, qui lit ça, ça peut dire que... le consentement à n'importe quelle recherche.

Le Président (M. Bergman) : Alors...

M. Hébert : On le verra... À l'article par article, on pourra faire une modification en ajoutant «une recherche qui n'est pas sérieuse», correct.

Mme de Santis : O.K., et c'est pour ça que...

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, collègues...

Mme de Santis : O.K., et c'est pour ça que...

M. Hébert : Non, non, mais le premier paragraphe, on ne le bouge pas. C'est juste ça que je voulais dire, O.K.?

Mme de Santis : O.K., O.K., parfait.

Le Président (M. Bergman) : Collègues, malheureusement, attendre pour...

Mme de Santis : Alors, je comprends ce que voulait dire... Sauf qu'il y a de la jurisprudence...

Le Président (M. Bergman) : Collègues, malheureusement...

Mme de Santis : Très, très vite...

Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, on attendra pour l'article par article. Ça laisse seulement les cinq minutes allouées au deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Groulx, pour une période de cinq minutes. Et certainement on va avoir des bons débats, article par article. Mme la députée de Groulx.

• (13 heures) •

Mme Daneault : Merci, M. le Président. Alors, merci de votre présence aujourd'hui. Je suis effectivement très sensible au fait qu'il y a une population de plus en plus grandissante vieillissante, atteinte de déficits cognitifs. Et je suis aussi très sensible au fait qu'on n'arrive pas à faire de la recherche pour ceux qui sont atteints de déficits cognitifs modérés et sévères.

Et je peux vous parler... Actuellement, dans mon comté, il y a un centre qui utilise une méthode américaine qui évite... un petit peu comme Carpe Diem, qui n'utilise aucun moyen de contention, qui n'utilise aucun médicament PRN lors d'agitation. Ils vont plutôt isoler le patient, le bénéficiaire. Ils vont l'isoler avec une musique spéciale avec... Il retourne dans ses souvenirs d'enfance, et, quelques minutes plus tard, l'agitation a disparu sans médication.

Ils traitent l'errance, alors que, dans plusieurs centres au Québec, l'errance, c'est traité... eux, les gens qui font de l'errance, on les laisse errer tout simplement. Et, quand ils ont fini, ils sont assis, peu importe l'heure, on les invite à aller se coucher. Si la réponse est non, on les laisse errer. Et ce genre de traitement là, malheureusement, n'est pas possible dans tous les cas, c'est-à-dire au Québec, c'est un système privé, malheureusement. Et moi, je voudrais voir l'ensemble des Québécois pouvoir bénéficier de ce type de traitement là plutôt que contention et médicaments, comme on le connaît dans certains cas. Et ça m'interpelle énormément qu'on ne puisse pas actuellement étudier cette population-là.

Par contre, je voudrais m'assurer qu'avec le nouveau projet de loi, en changeant simplement le terme «expérimentation» par «recherche», vous soyez vraiment capable d'obtenir ce genre de recherche là et qu'on n'aurapas, encore une fois, des comités d'éthique qui pourraient être plus sévères qu'on le demande, là, «plus fort, casse pas». Alors, je voudrais juste m'assurer que, vraiment, avec ce qu'on propose aujourd'hui, ça vous convient.

Le Président (M. Bergman) : M. Voyer.

M. Voyer (Philippe) : Je vous dirais que, quand on a écrit notre lettre d'opinion, on l'a fait échanger entre les différentes personnes concernées puis on envoyait également le libellé du projet de loi. Donc, les gens qui font de la recherche, comme moi, là, ne voyaient pas vraiment de la difficulté avec les changements et, en fait, ils les voyaient d'un bon oeil. Le seul point qui a été soulevé, c'était justement le fameux «risque minimal». Ça va être quoi, un risque minimal? Est-ce qu'un risque minimal, c'est une personne qui... son anonymat pourrait être brisé par le fait que la base de données soit corrompue d'une manière ou d'une autre, qui est un risque possible dans n'importe quelle recherche, vous comprenez?

Mais le fameux «minimal», dans le fond, jusqu'où que les gens vont pouvoir l'étirer en tant que tel? Je ne le sais pas. Mais, s'il y a un risque minimal, au bout de la ligne, ma compréhension, c'est que la personne représentante va pouvoir décider qu'elle consent ou pas. Ça fait qu'il y a une décision finale. Parce qu'avant c'était : automatiquement, ça prend le représentant légal. Ça fait que, dès ce moment-là, on ne se rendait même pas aux proches, là, tu sais, on se rendait... Le projet de recherche était abandonné. Là, au moins, on pense que les personnes qui vont être les conjointes, conjoints, enfants de la personne malade, bien, eux, face à la situation, si on leur propose, par exemple, un lait chaud avec un massage du dos au coucher pour voir si ça a un effet sur son errance nocturne — je vous dis ça comme ça — bien, eux, ils vont être en mesure d'évaluer le risque minimal selon eux. Puis je pense que, là-dessus, ils vont avoir une approche qui va être probablement différente que l'appréciation que peuvent faire des membres de comités d'éthique, là.

Parce que les membres de comités d'éthique, là-dessus, pour avoir parlé avec, justement, quelques avocats qui siègent là-dessus, ils avaient une certaine... ils se partageaient leurs opinions puis, entre eux, ils sont assez critiques aussi, puis ils disaient : Bien, il y en a qui sont vraiment sur la loi puis ils ne voient pas la vue d'ensemble, tandis qu'il y en a d'autres, bien, on essaie de faire la part des choses. Mais, si on regarde où est-ce qu'étaient les problématiques par le passé, c'était vraiment avec le fameux... Dès qu'on disait «une expérimentation», c'était un risque sérieux pour la santé, ça prenait un représentant légal.

Tu sais, dans des échanges que j'ai eus, comme, mettons, aux colloques de l'ACFAS, on en a eu d'autres par le passé, j'ai parlé avec des présidences de comités d'éthique, puis qui me disaient : Non, non, automatiquement, majeur inapte, c'est représentant légal, peu importe la recherche; puis des leaders dans le domaine. Donc, à ce moment-là, moi, je ne peux pas argumenter, ça finit là. Tu es au comité d'éthique, et ton projet, ça vient de s'éteindre, là.

Le Président (M. Bergman) : Merci. Alors, malheureusement...

Mme Daneault : Ce qu'on comprend, c'est que le terme «risque minimal» est un risque minimal dans la nouvelle loi.

M. Voyer (Philippe) : Ah!Comparativement à la situation actuelle, oui.

Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Voyer, merci d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour votre présentation, on l'apprécie beaucoup.

Et, collègues, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures aujourd'hui. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 5)

(Reprise à 15 h 7)

La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux. Alors, avant de débuter, j'aimerais obtenir le consentement des membres pour allonger de quelques minutes notre période d'échange, donc on pourrait terminer vers 4 h 7 ou 4 h 8. Consentement? Consentement.

D'accord, merci. Alors, cet après-midi, nous recevons M. Pierre Blain, directeur général du regroupement provincial du comité des usagers.Bienvenue. Donc, nous aurons une période allouée pour la présentation, une période de 10 minutes pour M. Blain, qui sera suivie d'une période d'échange de 50 minutes.

Nous allons maintenant débuter les auditions. Monsieur...

Une voix :

La Présidente (Mme Proulx) : Pardon?

Une voix : M. Blain.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Blain, oui. Alors, M. le ministre, nous allons commencer avec un bloc de 24 minutes pour les représentants du gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Proulx) : Oui, excusez-moi. On va commencer par entendre M. Blain avant les remarques du ministre. Alors, M. Blain, excusez-moi, la parole est à vous.

Regroupement provincial des
comités des usagers (RPCU)

M. Blain (Pierre) : Merci beaucoup. Merci beaucoup de m'avoir invité, messieurs mesdames.

Un mot seulement rapidement sur le RPCU.Le Regroupement provincial des comités des usagers du réseau de la santé et des services sociaux défend les droits des usagers et représente les 600 comités des usagers et des résidents des établissements de santé et de services sociaux du Québec.Ils sont présents dans toutes les installations. Nous représentons un vaste nombre et, entre autres, nous avons... nous représentons également les centres jeunesse, la fédération des centres en réadaptation en déficience intellectuelle et TED, les déficiences physiques, les centres en dépendance, les centres en vocation psychiatrique, le secteur anglophone et surtout, celui avec lequel on est le plus fiers, les communautés autochtones également. Nous portons aussi une attention particulière aux personnes aînées, considérant qu'il s'agit d'une clientèle du réseau de la santé et des services sociaux parmi les plus vulnérables.

Le RPCU est, en principe, favorable au projet de loi n° 30, qui modifie le Code civil et d'autres dispositions législatives en matière de recherche, et croit que les modifications apportées permettront de mieux répondre aux besoins actuels des usagers et les protégeront mieux. Il est d'accord pour modifier les termes et aussi pour introduire un processus de plainte dans le domaine de la recherche. D'ailleurs, nous avions été consultés par le groupe de travail, dans un premier temps, pour faire ce... pour avoir notre opinion.

• (15 h 10) •

Dans le cas des personnes aptes, la modification apportée par le projet de loi n° 30 ne change, en fait, rien. En effet, le libellé proposé est un changement simple et tout à fait acceptable. Dans le cas de personnes mineures ou inaptes, des précisions indiquent qui peut donner le consentement. Il en est de même dans le cas où la personne est décédée; le consentement serait donné par la personne qui aurait pu consentir aux soins.

Ces modifications sont, en principe, pertinentes.Cependant, elles ne couvrent pas tout, car les notions de consentement, tant par la personne apte que par le représentant d'une personne mineure ou inapte, peuvent causer problème.Il existe encore des zones d'ombre. Je vais vous donner un exemple... Les personnes en santé mentale en sont un exemple — d'ailleurs, c'était l'objet de notre discussion avec le comité. C'est une clientèle vulnérable. En effet, la plupart d'entre elles ne sont pas en curatelle, mais peuvent-elles consentir à une recherche en toute connaissance de cause et à quel moment? On m'a apporté un autre exemple la semaine dernière : il en est de même également pour les personnes avec une déficience intellectuelle. Un parent, semble-t-il, actuellement, me disait qu'il ne peut pas donner de consentement pour des projets de recherche parce que la personne n'est pas vraiment en curatelle, elle représente... Mais enfin c'est peut-être une zone d'ombre à ce niveau-là.

Le projet, cependant, introduit un changement important, celui d'un consentement non écrit. Son obtention est laissée à la discrétion d'un comité d'étude de la recherche.Celui-ci établira les modalités d'obtention du consentement qui permettront de constituer une preuve. C'est là que le bât blesse, à notre point de vue.Nous croyons que des précisions plus grandes devraient être apportées. Et, comme c'est le ministre qui institue ces comités, qui en fixe les conditions et qui en publie la liste dans la Gazette officielle, nous croyons que des précisions devraient être apportées aux conditions requises pour le consentement écrit et non écrit par les comités d'éthique de la recherche.

Mais en réalité ce que ce projet de loi met en lumière, c'est la notion de «consentement libre et éclairé». Cette notion est présente tant dans le Code civil que dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux. C'est, de notre point de vue, ce qui est le plus important pour les usagers, et pourtant le projet de loi ne revient pas sur ces notions en recherche et, pire, continue à déléguer aux comités d'éthique et de la recherche cette notion. La notion de«consentement libre et éclairé» fait habituellement référence aux soins de santé prodigués par un médecin.Cependant, il est maintenant accepté que cette notion inclut aussi d'autres professionnels de la santé. Les services sociaux et leurs professionnels y sont également inclus. Un consentement libre signifie «sans contrainte ni menace».Il s'agit de donner une autorisation en toute connaissance de cause pour autant, bien sûr, que l'usager soit en mesure de l'exercer. Advenant l'inaptitude à consentir, le consentement aux soins demeure nécessaire. Il est obtenu d'une autre personne autorisée par la loi ou par mandat.

Un consentement éclairé, de son côté, signifie que l'usager a reçu toute l'information pertinente sur ce qui lui est proposé, de manière à connaître, dans la mesure du possible, les différentes options qui s'offrent à lui, ainsi que les risques, les conséquences associés à chacune de ces options. C'est une décision prise en toute connaissance de cause. Cela signifie, par exemple, que, lorsqu'un médecin propose des soins ou des traitements, il a l'obligation d'informer l'usager sur la nature ou le but du traitement ou de l'intervention proposée, les risques et effets secondaires possibles, les conséquences d'un refus. À notre point de vue, le projet de loi n° 30 étend donc à la recherche le consentement aux soins. La même obligation devrait également s'appliquer au domaine de la recherche.

À notre avis, il n'y a aucune conséquence pour ce qui est des recherches qui se feraient sur des données statistiques ou sur des échantillons prélevés.En effet, ces recherches sont courantes et n'ont aucune conséquence directe sur la santé ou l'intégrité de l'usager. Il en est peut-être différemment d'autres formes de recherche.

La nature de la recherche est souvent complexe, et, aux fins de ce mémoire, nous nous sommes référés aux trois champs de recherche qui se retrouvent au Centre de recherche du CHUM. Le centre du CHUM identifie trois champs : la recherche fondamentale, la recherche clinique, la recherche en santé des populations. Le regroupement croit que le projet de loi touche directement tous ces secteurs, mais plus particulièrement la recherche clinique.

Et voici la définition, aussi, qui est donnée de la recherche clinique : «La recherche clinique est "une recherche effectuée chez l'homme, dont la finalité est l'amélioration de la santé humaine, dans le respect fondamental de la personnalité et de l'intégrité de chaque individu". Elle constitue un trait d'union important entre la recherche fondamentale et les soins de santé.Elle est une plateforme incontournable pour la mise au point de nouvelles stratégies diagnostiques, thérapeutiques et préventives. Elle se penche sur l'être humain, par opposition à la recherche fondamentale, qui, elle, est effectuée sur des échantillons cellulaires ou sur des animaux. Le but de la recherche clinique est d'améliorer la connaissance d'une maladie, d'une méthode d'investigation ou d'un traitement. Il existe plusieurs variantes de la recherche clinique qui sont effectuées soit avec des patients, soit avec des sujets sains : les essais cliniques de traitements, d'appareils médicaux, d'interventions chirurgicales ou de nouveaux médicaments, la recherche en épidémiologie, la recherche en génétique, la recherche par le biais des dossiers, de banques de données ou de tissus, etc.»

Le RPCU croit que cette notion devrait être mieux définie. Le projet de loi donne cette responsabilité aux comitésd'éthique, et il nous semble que ce n'est pas suffisant. À l'article 4, d'ailleurs, du projet de loi : «Toutefois, le consentement à une recherche peut être donné autrement que par écrit si, de l'avis d'un comité d'éthique de la recherche, les circonstances le justifient.» Est-ce que ça veut dire que l'usager est parti en Russie et il n'est pas là pour le donner? Je ne le sais pas.

Le comité d'éthique et de recherche… Et d'ailleurs je veux parler un tout petit peu des comités d'éthique etde recherche. Ils sont institués par le ministre de la Santé et des Services sociaux, comme nous l'avons vu plus haut. Ils ont pour mandat d'évaluer tout projet de recherche qui implique des sujets humains et qui pourrait comporter l'une des caractéristiques suivantes : ils ont pour responsabilité de s'assurer que le projet a été évalué et approuvé du point de vue administratif et du point de vue de sa pertinence scientifique; de procéder à l'évaluation éthique de tout nouveau projet qui a été accepté au niveau de la convenance institutionnelle ou au niveau scientifique; d'assurer le suivi du déroulement du projet en exigeant que toute l'information pertinente lui soit fournie à cet effet.

Ces comités, qui sont constitués de représentants de l'établissement, de spécialistes en éthique ainsi que de représentants de professionnels reconnus dans leur domaine… À ces personnes s'ajoutent — à mon grand étonnement — desreprésentants de la collectivité.D'où vient le mot «représentants de la collectivité»? Donc, c'est un comité d'éthique qui est choisi. Comment sont-ils choisis? Je ne le sais pas.

Dans la Loi sur la santé, cependant, il est toujours question d'«usagers», pas de «représentants de la collectivité». Il serait peut-être important que le même terme soit utilisé dans la composition des comités d'éthique. Il faudrait donc que des usagers y siègent. D'ailleurs, nous croyons que les comités des usagers de l'établissement devraient être consultés sur les représentants siégeant au comité d'éthique de l'établissement. Souvent, ces personnes n'ont aucune connaissance de l'établissement ou de la notion des droits des usagers quand ils viennent de l'extérieur et qu'ils ne peuvent pas...

D'ailleurs, il y a eu un rapport d'enquête qui a été commandé en 1999 par le ministère de la Santé sur les comités d'éthique. Il est ressorti...

La Présidente (Mme Proulx) : ...

M. Blain (Pierre) : Pardon?

La Présidente (Mme Proulx) : ...conclusion, il vous reste moins d'une minute.

M. Blain (Pierre) : D'accord.

La Présidente (Mme Proulx) : Conclusion.

M. Blain (Pierre) : Donc, en conclusion, je pense qu'il y a également d'autres droits des usagers qui sont également inclus... qui devraient être inclus dans ce projet de loi. On parle du droit à l'information, le droit de consentir aux traitements, le droit de participer à des décisions, le droit à la confidentialité, le droit de recevoir des services, aussi, en langue anglaise. On pense que cela devrait faire partie aussi des protocoles de recherche.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, M. Blain, pour cette présentation. Alors, nous allons maintenant effectivement débuter la partie échange. Alors, nous débutons avec les représentants du gouvernement. M. le ministre, pour un bloc de 24 minutes.

M. Hébert : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M. Blain, de ces remarques extrêmement intéressantes. Il y a un certain nombre de choses que je ne suis pas sûr de bien comprendre dans votre exposé, surtout lorsque vous abordez toute la question du consentement libre et éclairé, qui est déjà inclus, qui est déjà en vigueur dans les protocoles de recherche.

Je vais vous donner mon exemple personnel : la même étude qui a été faite à trois moments différents, en1987, en 1997 et en 2007, le formulaire de consentement, qui était une étude de questionnaire, en 1987, était sur un paragraphe; en 1997, il était sur une page; et, en 2007, il prenait quatre pages. Donc, en termes de consentement libre et éclairé surtout, l'éclairage est de plus en plus important, et les exigences qu'on pose en termes d'éclairage sont de plus en plus imposantes. Alors, ce projet de loi là ne remet du tout en question l'obligation du consentement libre et éclairé, puis j'ai du mal à comprendre le point que vous voulez soulever par cette question-là.

• (15 h 20) •

M. Blain (Pierre) : C'est tout simplement... Le point que je veux soulever, c'est le fait qu'on étend à la recherche. Bien sûr, il existe déjà dans les protocoles, et effectivement j'ai vu plusieurs protocoles, j'ai vu aussi des questionnaires. Moi, ce que je me demande cependant : Est-ce que c'est vraiment clair pour l'usager, ce qu'on dit?

Moi, je vais vous donner mon avis dans certains cas où on m'a demandé mon avis éclairé. Pour un projet de recherche — et ce n'était pas le médecin, qui le faisait, c'était l'infirmière — j'étais, normalement, en jaquette avec la main en arrière pour cacher mon postérieur, et on me disait : Signe ici. On me disait, bien sûr : Voulez-vous participer à une recherche? Je peux comprendre quand c'est une recherche simple sur des données statistiques, c'est-à-dire : Est-ce que vous voulez qu'on étudie une portion de la population? C'est plutôt quand on arrive dans d'autres genres de protocoles, je pense que c'est là qu'il serait important qu'on puisse bien informer l'usager, peut-être même résumer correctement. Je ne peux pas vous dire... Récemment je n'en ai pas vu, mais effectivement... Mais, non, je ne veux pas remettre en question... sauf qu'il était là. Vous avez raison, mais je pense qu'il faudrait que ce soit peut-être un peu plus standardisé à l'ensemble de tous les comités de recherche.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K. Mais ce je comprends, c'est que le formulaire de consentement — puis c'est ça que j'essayais de dire — il est de plus en plus long. Et ce que vous me dites, c'est qu'il est tellement long qu'il est moins éclairant. Il est éblouissant, je veux dire...

M. Blain (Pierre) : Bien, je n'ose pas faire la même démonstration que j'avais faite avec le bail pour les résidences de personnes âgées, qui faisait 18 pieds, mais vous venez de me donner une idée.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Je reviendrais à la composition des comités d'éthique, où vous voudriez que le comité des usagers puisse... ou encore qu'on désigne les usagers comme étant le collège électoral sur les comités d'éthique. Il faut réaliser, M. Blain, que, dans certains centres de recherche — puis je vais prendre celui que je connais bien, le Centre de recherche sur le vieillissement, à Sherbrooke — la très, très grande majorité des participants, des sujets des études qui sont réalisées là ne sont pas des usagers, donc sont des personnes qui sont dans la collectivité et qui ne sont pas vraiment des usagers. Alors, la notion de collectivité fait en sorte d'élargir le bassin des personnes qui peuvent siéger au comité d'éthique. Alors, je ne voudrais pas qu'on laisse sous-entendre que les centres de recherche des établissements n'utilisent que des usagers comme sujets de recherche, loin de là. Alors, c'est pour ça que l'appellation dans la désignation des membres des comités éthiques de la recherche est plus large qu'«usagers».

M. Blain (Pierre) : Je vous comprends, effectivement, sauf que j'ai été étonné de voir... Parce que, dans le fond, ça se retrouve dans les comités d'éthique et de recherche. C'est là où ce terme-là se retrouve; il ne se retrouve pas dans la loi. Donc, c'est plus… Peut-être devrions-nous avoir une espèce de mécanisme à l'intérieur, ne serait-ce que de faire rapport quand il y a un comité de recherche qui s'établit. Peut-être que le comité des usagers pourra en être au moins informé. Donc, c'est peut-être un échange d'information. Ce n'est peut-être pas nécessaire, comme vous le dites vous-même, que ce soit un usager comme tel, et ce n'est pas ça que je veux dire. Je ne veux pas dire que ça devrait être un membre du comité des usagers qui devrait y aller, y siéger. Cependant, je pense qu'il devrait y avoir un échange d'information qui pourrait se faire, au moins à l'intérieur des établissements où il y a, justement, certaines instances formelles qui peuvent exister.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Et le fait que les sujets ne sont pas toujours des usagers est à l'origine de l'un des articles de la loi, où on veut que le processus de plainte puisse s'appliquer non seulement à des sujets de recherche qui sont des usagers, mais aussi à ceux qui ne sont pas des usagers. Alors, c'est justement pour ça qu'on a rajouté cette disposition à la loi, pour que le processus de plainte puisse s'appliquer à l'ensemble des sujets de recherche.

M. Blain (Pierre) : Mais ce que j'ai cru comprendre pour ce processus de plainte là, c'était justement quelque chose qui est un peu à l'extérieur de ce que… normalement devrait traiter. Justement, on y rajoute, je pense, au processus de plainte, les recherches qui pourraient se faire ailleurs. Donc, au moins désigner un endroit où on pourrait, justement, suivre cette problématique.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : J'aimerais que vous me parliez un peu plus de ce qui n'est pas dans le projet de loi et que vous avez soulevé en ce qui concerne des sujets éventuels à des recherches qui ont des problèmes de santé mentale. Qu'est-ce que vous souhaitez, là? Quelle orientation voulez-vous qu'on prenne dans cette question-là?

M. Blain (Pierre) : Je ne voudrais pas, justement... Parce que ce sont des domaines extrêmement importants, la santé mentale et également l'autre que je vous ai donné, la déficience intellectuelle. Ce que les parents m'ont dit, la semaine dernière, quand j'ai rencontré tout l'ensemble des comités des usagers en déficience intellectuelle, était de... Ils m'ont dit : Moi, comme parent, normalement, je ne peux pas donner de consentement à une recherche pour mon enfant,parce que ou il n'est pas en curatelle ou il n'est pas vraiment... Donc, c'est pour ça, c'est des notions qui sont floues. Je pense que vous devriez vous y pencher avec vos spécialistes, possiblement, mais, pour moi, c'était là où je voyais qu'il pouvait peut-être y avoir quelque chose d'un peu plus précis.

Je vais vous donner l'exemple de ma nièce qui, à un moment donné, a fait une très grande dépression, et qui,justement, était dans la région de Sherbrooke, et qui, dans le fond, n'aurait pas pu consentir à des soins de santé, etc. Et c'est là peut-être que… Je ne sais pas comment qu'on pourrait étendre cette notion-là.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Bien, je veux bien comprendre l'optique, là. Vous voudriez qu'on puisse permettre à ces patients-là de participer à des projets de recherche, donc de faciliter la participation.

M. Blain (Pierre) : Absolument. Éviter qu'il ne puisse pas y participer pour qu'on puisse, justement, avoir la... partout. Donc, si c'est juste un détail légal, si c'est juste parce que le consentement n'est pas là, je ne sais pas, comment peut-on l'étendre? C'est dans ce sens-là. Moi, je pense que c'est extrêmement important, d'autant plus dans des domaines semblables. Donc, il ne faudrait pas que des formalités nous empêchent de pouvoir le faire. Peut-être que c'est prévu dans le projet de loi, peut-être que c'est une objection inutile, mais, pour nous, on pense que ça devrait être inclus.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : O.K. Bien, en fait, le projet de loi vise plus d'inclure des gens qui, actuellement, ont des obstacles à participer à des projets de recherche. Les personnes dont vous faites mention n'ont pas vraiment ces obstacles-là, alors c'est... Elles ne sont pas visées par le projet de loi, en fait. C'est surtout lorsqu'il y a des obstacles ou lorsqu'il y a une aptitude de constatée ou encore de faite entre 14 et 18 ans que ces obstacles-là sont levés par le projet de loi et permettent, lorsque le risque est minimal, qu'on puisse les intégrer à des projets de recherche en utilisant les personnes qui sont habilitées à donner le consentement aux soins.

L'autre élément, j'aimerais ça que vous nous éclairiez... On pourrait penser, là, qu'on ouvre, à des personnes inaptes, un champ de recherche. Vous qui êtes préoccupé par la protection des usagers et des sujets, des citoyens, est-ce que vous pensez qu'on ouvre trop ou est-ce que les balises qu'on a mises dans le projet de loi vous apparaissent suffisantes pour protéger les sujets de recherche et leur permettre de participer à des recherches?

M. Blain (Pierre) : Pour moi, il y a une chose fondamentale : la recherche est nécessaire. Par conséquent, il ne faut pas y mettre de contraintes. Bien sûr, quand on parle de recherche, on parle de recherche simple, là. Je ne parle pas, justement, de tester des médicaments sur des personnes inaptes. On n'est pas dans le régime nazi, là. Et, pour moi, justement, c'est ça qui est important.

Ayons le plus possible la possibilité de le faire. Par conséquent, si une personne n'est pas en curatelle... Supposons une personne, là, qui est en début d'alzheimer : le consentement aux soins, je pense que, dans certains cas, ça s'applique. Le Code civil s'applique, justement, pour le consentement aux soins dans beaucoup de cas, et je pense qu'on devrait s'assurer que la même chose puisse s'appliquer aussi pour les soins de santé.

Non, au contraire, on ne pense pas qu'il faut y mettre... qu'il faille y mettre des contraintes. Au contraire, je pense qu'il faut ouvrir pour donner le plus de possibilités de faire avancer la science.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Merci. Je vais laisser à mes collègues le soin de poser d'autres questions, si vous en avez.

La Présidente (Mme Proulx) : Oui, M. le député d'Argenteuil.

M. Richer : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Blain. Vous avez parlé, en début de présentation, d'aptitude et d'inaptitude. Est-ce qu'il y a des situations, par exemple, où des personnes qui présentent des problèmes de santé mentale… qui pourraient être aptes quand même?

M. Blain (Pierre) : C'est tout le processus du consentement aux soins, effectivement. J'ai mis, justement... Il y a un des membres de notre conseil d'administration, qui siège sur un comité d'éthique dans un établissement de santé, récemment, qui me rapportait plus tôt que le comité d'éthique se posait la question : Est-ce qu'on doit intervenir dans le cas de santé mentale? Une personne est suicidaire, est-ce qu'on doit décider pour elle qu'elle ne se suicide pas? Bon. Grande question, puis avec raison.

Alors, c'est où? Est-ce que c'est la décision de prendre sa décision qui est là ou bien c'est l'état de santé qui fait qu'on n'est pas capable de prendre la décision? Et c'est là que c'est extrêmement difficile à juger et à jauger.Qu'est-ce qu'on fait pour intervenir? Et le cas du suicide est un exemple précis. Donc, on intervient ou on n'intervient pas? Moi, je pense qu'il faut toujours être prudent. Il vaut toujours mieux s'assurer que la personne reçoit des soins, dans certains cas, même à cause de son état de santé qui pourrait faire en sorte qu'elle ne pourrait pas nécessairement juger elle-même. Mais, vous voyez, c'est là où ça peut être problématique et un peu difficile à juger.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député d'Argenteuil.

• (15 h 30) •

M. Richer : Merci, Mme la Présidente. Vous avez également parlé de consentement non écrit. J'aimerais savoir si, à votre point de vue, vous jugez qu'un participant serait moins bien protégé avec un consentement non écrit.

M. Blain (Pierre) : Je ne comprends qu'est-ce que ça veut dire, «consentement non écrit». Dans ce sens-là, c'est le comité d'éthique qui dirait : Il y a eu un consentement, mais on n'a pas besoin de l'avoir par écrit?

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Je peux peut-être répondre à vos interrogations. On parle de gens qui répondent à des enquêtes par téléphone, par exemple, où la personne répond, et là, actuellement, il faut exiger un consentement écrit, ce qui amène des complications. Il faut envoyer le consentement, il faut que la personne le poste, alors que, quand elle répond au téléphone, bien, si elle ne consent pas, elle a juste à raccrocher, là. Alors, il y a un consentement implicite qui, actuellement, n'est pas permis, et c'est donc le type de situation où un comité d'éthique pourrait juger qu'il y a un consentement implicite qui est suffisant.

Mais, autres sujets, des sujets sensibles, par exemple, où des gens veulent répondre aux questions, mais ils ne veulent pas signer aucun document. Et ça, ça arrive assez régulièrement, où il y a des sujets extrêmement sensibles, là, qui peuvent être abordés dans des enquêtes. Alors, c'est le genre de situation un peu exceptionnelle, je vous le concède, mais qui... actuellement, dans le cadre de la loi, ce n'est pas possible de se libérer de l'obligation d'avoir un consentement écrit obligatoire.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député d'Argenteuil.

M. Richer : Merci, Mme la Présidente. Le comité d'éthique, si j'ai bien compris, est là pour évaluer la pertinence et accepter les projets de recherche, et votre organisation est là pour faire la protection des gens qui seraient susceptibles de participer à cette recherche. J'aimerais comprendre comme le parallèle entre les deux, la responsabilité du comité et la vôtre.

M. Blain (Pierre) : Bien, le comité est là pour la recherche comme telle. Nous, on est là pour défendre les droits au cas où les droits auraient été brimés. Donc, c'est dans ce sens-là que nous... C'est la différence entre les deux. Le comité d'éthique lui-même s'assure que le projet est correctement monté, et correctement évalué, et correctement, aussi, fait. Dans le cas où il y aurait des problèmes au niveau de la défense des droits, à ce moment-là, c'est là où notre organisation et le comité des usagers pourraient faire valoir des points à ce moment-là.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député d'Argenteuil.

M. Richer : Merci. Une petite dernière question. Tantôt, vous parliez aussi de représentativité de votre groupe sur le comité d'éthique. Est-ce que vous jugez que le comité d'éthique, dans sa forme actuelle, a trop de pouvoir sur l'évaluation des projets?

M. Blain (Pierre) : Je ne pense pas. Je pense que les comités d'éthique sont des instances scientifiques mises en place. Cependant, je pense qu'il faut peut-être qu'il y ait plus de liens qui soient créés avec d'autres instances à l'intérieur. C'est souvent plus fermé. C'est correct parce que c'est des sujets particuliers, mais on pense, nous, que les comités des usagers pourraient être au moins informés de ces sujets-là. Peut-être qu'ils le sont par la bande en siégeant au conseil d'administration de l'établissement, peut-être pas, parce que... Je ne partirai pas le débat de qui représente qui sur les conseils d'administration, mais...

Et donc c'est des liens que je pense qui doivent être faits et qui peuvent être amenés justement, qui peuvent aider, et surtout quand on parle des autres droits qu'on pense aussi qui devraient être prévus... bien, enfin, pas qui devraient être prévus… je pense que le comité de recherche, dans le protocole, est assez clair, mais nous, on dit qu'il y a d'autres droits. D'abord, justement, il faut être bien informé. Avant de prendre une décision, il faut être bien informé, puis c'est un droit qui est prévu dans la loi sur la santé.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Blain. Dans la foulée de ce que mon collègue a avancé tout à l'heure, est-ce que vous avez eu souvent à défendre les droits de vos... des personnes que vous...

M. Blain (Pierre) : Tous les jours.

M. Roy : Tous les jours? Pouvez-vous nous donner des exemples?

M. Blain (Pierre) : Bien, si on parle de droits en CHSLD, c'est entendu…

M. Roy : Je parlais par rapport à la recherche.

M. Blain (Pierre) : Ah! Au niveau de la recherche, non. Je ne vous dirai pas que c'est des choses qui sont courantes. Non, pas du tout, pas du tout. C'est des préoccupations que nous avons, mais, comme tel, au niveau de la recherche, non. On a, bien sûr, une préoccupation pour s'assurer que c'est vraiment sécuritaire, que c'est surtout confidentiel, et c'est là, je pense, que... c'est les parties qui sont les plus importantes.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Donc, si je comprends bien, actuellement, il n'y a pas eu de problématiques majeures auxquelles vous avez été confrontés ou des dossiers que vous avez eu à défendre par rapport à un abus de la recherche quelconque.

M. Blain (Pierre) : Non. Vous avez tout à fait raison, présentement, ce n'est pas le cas.

M. Roy : O.K. Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Bonjour, M. Blain. Alors, merci de vos commentaires.

Je me posais une question en lisant les documents, là, qui concernent votre présentation. Concernant le traitement des plaintes, on en a parlé un peu brièvement tout à l'heure, mais est-ce que, vous, les modifications qui sont proposées dans le projet, vous... elles vous satisfont ou...

M. Blain (Pierre) : En autant, bien sûr, que les plaintes sont traitées correctement, je vous... Nous, on pense que, de façon générale, le processus de plainte est correct à l'intérieur des établissements. Et, surtout, il ne faut pas oublier que, pour nous, on ne veut pas parler de plainte. D'habitude, on ne parle pas de plainte. Nous, on parle d'insatisfaction dans notre regroupement et surtout qu'il faut savoir qu'une plainte est là pour améliorer la qualité. Donc, pour moi, ce n'est pas tant la plainte qui est importante que plutôt le résultat qu'on aura par la suite pour pouvoir améliorer tant le degré de satisfaction puis les services.

Cependant, je vous... je ne suis pas sûr que ça s'applique à tout le monde, bien sûr, mais je fais juste vous rappeler ce que la Protectrice du citoyen a dit concernant les commissaires aux plaintes, dans certains cas où elle trouvait que le commissaire aux plaintes n'avait pas suffisamment d'indépendance. Je ne vous dis pas que ça s'applique au niveau de la recherche, mais je fais juste vous rappeler que la Protectrice du citoyen avait soulevé plusieurs fois des questions au niveau de l'indépendance des commissaires aux plaintes.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Alors, si je comprends bien, c'est une zone, là, qui vous préoccuperait un petit peu plus.

M. Blain (Pierre) : Bien, présentement, on n'a pas lieu de croire que, mais, bien sûr, on a eu des situations. Je vais vous donner un exemple où il y a eu des décisions qui ont été données par un commissaire aux plaintes, qui étaient, à notre point de vue, complètement erronées, qui prenaient carrément le parti de l'établissement au détriment de l'usager comme tel. Mais je ne vous dis pas que c'est des choses courantes et je ne pense pas que ça s'applique nécessairement au niveau de la recherche. Comme je vous dis, je n'ai pas eu de... à ma connaissance, encore de choses au niveau de la recherche.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Je vous remercie.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député d'Argenteuil.

M. Richer : Peut-être un tout petit complément à ma dernière question. Est-ce qu'actuellement je comprends qu'il n'y a pas de représentant du RPCU sur les comités d'éthique?

M. Blain (Pierre) : Non. Bien, c'est parce que je pense qu'à notre niveau comme tel il n'y a pas de comité national de la recherche. Je ne suis pas certain, peut-être qu'il y en a un qui chapeaute tous les comités de recherche, mais je ne penserais pas. Et, comme tel, non, on siège sur plusieurs autres instances, mais, à ce niveau-là, non. Et, dans certains cas, il est peut-être possible que des membres des comités des usagers localement aient été invités à y siéger, mais je pense que, de façon générale, au niveau de la recherche, ce n'est pas le cas présentement.

La Présidente (Mme Proulx) : Y a-t-il d'autres questions du côté du gouvernement? Alors, nous allons débuter le bloc avec Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Blain.

Je veux faire référence à votre recommandation numéro un, quand vous dites : «Que le consentement soit mieux défini pour certaines clientèles vulnérables comme les utilisateurs de services de santé mentale.» Est-ce que ce consentement est le même pour les soins de santé que ce l'est pour la recherche? Parce que les critères «inapte», «apte», c'est les mêmes, que ce soit pour le besoin de soins ou que ce soit pour être d'accord avec une recherche.

M. Blain (Pierre) : C'est pour ça que nous soulevons la question. Je n'ai pas vraiment de réponse. C'est vraiment une zone grise, comme je vous le disais tantôt, et c'est pour ça que je ne sais pas si ça doit être mieux défini ou pas. Dans le cas de santé mentale, c'est peut-être difficile de le faire, mais, comme on soulève le cas, c'est à quel moment... Est-ce qu'une personne en santé mentale est toujours apte à prendre une décision? C'est son médecin, normalement, qui devrait le déterminer. Donc, à partir de ce moment-là, la même chose pourrait arriver avec la recherche. Enfin, vous voyez, c'est vraiment une zone grise. Je n'ai pas vraiment de réponse.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Il n'y a pas de définition exacte d'inaptitude, et je présume que c'est une zone grise, et vous soulevez le point que ça devient difficile à appliquer quelquefois.

J'aimerais vous poser la question… Vous, qui représentez le comité d'usagers, vous voyez que, dans l'article 2 du projet de loi, on remplace l'article 21 du code, on dit qu'un enfant de... ou un mineur de 14 ans et plus peut consentir seul si, de l'avis du comité d'éthique de la recherche, la recherche ne comporte qu'un risque minimal. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus? Est-ce que vous avez une opinion quand un enfant de 14 ans soit... donnant son consentement à une recherche?

• (15 h 40) •

M. Blain (Pierre) : Déjà, l'enfant de 14 ans et plus, dans certains cas, peut prendre lui-même certaines décisions. C'est déjà prévu entre autres pour la pilule contraceptive ou d'autres éléments. Alors, pour moi, dans le fond, ce que cet article-là fait, il ne fait qu'étendre, jusqu'à un certain point, ce qui existe déjà dans d'autres domaines du consentement.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Les comités d'éthique et de la recherche se rencontrent peut-être une fois par mois, et, dans cet article tel qu'amendé, le comité aura plus de responsabilités, entre guillemets. Est-ce que vous croyez que ça peut bien fonctionner?

M. Blain (Pierre) : C'est là où nous avons soulevé la question du rapport qui avait été fait déjà en 1999 par le ministère de la Santé, qui avait soulevé le fait que les comités d'éthique ne se réunissaient souvent qu'une fois par mois. Ils avaient des horaires très chargés, des agendas très chargés. Est-ce que, justement, en une heure, on était capables de vraiment tout revoir? Il y avait d'autres points qui avaient été soulevés, et c'est pour ça que nous les soulevions aussi, dans la façon d'évaluer les protocoles, la structure d'organisation des comités de recherche, la fréquence, le soutien administratif même à ces comités.

Alors, ça, c'est un rapport qui existe, du ministère de la Santé, et qui, justement, a soulevé ces points-là. Bon, c'est peut-être corrigé. Depuis, je n'ai pas vu de nouvelles recherches qui ont pu être faites, mais, disons, c'était déjà des drapeaux qui étaient levés au niveau des comités de recherche.

Mme de Santis : Et donc...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Pardon, Mme la Présidente. Quand vous faisiez votre présentation au tout début, vous avez commencé à parler d'un rapport d'un comité créé en 1999. C'est bien de ce comité-là que vous... auquel vous faites référence?

M. Blain (Pierre) : Oui, absolument, celui qui se trouve à la page 11... qui se trouve dans notre rapport, à la page 14.

Mme de Santis : 14, O.K. Mais vous n'avez pas un nom pour ce rapport.

M. Blain (Pierre) : Je ne l'ai pas mis. Je ne l'ai pas avec moi comme tel. Attendez. C'est un rapport d'enquête comme tel sur les comités d'éthique. Je pourrais retrouver le titre exact, je l'ai au complet, là, bien sûr, mais je ne l'ai pas apporté avec moi aujourd'hui.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme de Santis : Pour l'instant, ça va. Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour. Dans votre mémoire, vous mentionnez, à la page 12, que le législateur devrait définir dans quelles circonstances l'absence d'un consentement serait autorisée. J'aimerais vous entendre : Vous, en fonction des groupes que vous représentez, des expériences que vous avez vécues, quelles seraient, à votre avis, les circonstances qui mériteraient de passer outre la règle générale et d'être touchées par cet article-là?

M. Blain (Pierre) : Vous voyez, tantôt, je ne pouvais pas savoir non plus. M. le ministre nous a donné des exemples. Moi, ce que je me dis : Est-ce qu'un sondage téléphonique est une recherche? Bon, Léger Marketing, quand ils nous appellent, c'est un sondage ou c'est une recherche, vraiment? Donc, à partir de ce moment-là, ça se situe dans quel niveau, ça se situe à quelle autre chose? Dans le cas de signer un consentement, là non plus, parce que le consentement n'a rien à voir avec la réponse qu'on fait normalement dans un protocole de recherche. Alors, c'est pour ça, je pense, qu'il faudrait qu'on définisse un peu dans quels cas qu'un consentement non écrit peut être fait.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Mais c'est justement ce que je vous demandais. Vous, là, de par votre expérience du réseau de la santé, qu'est-ce qui, à votre avis, serait des circonstances qui justifieraient de passer outre la règle générale prévue au Code civil?

M. Blain (Pierre) : Personnellement, présentement, je n'en vois pas.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Donc, pour vous, je comprends, pour le comité des... le regroupement des comités des usagers, pour vous, il est clair que le consentement, pour s'astreindre à une recherche, qu'on soit... qu'on ait tous nos moyens ou qu'on ne les ait pas tous, demande... c'est quelque chose d'important, qui engage l'individu, qui engage... qui aura des effets. Et, même si cette recherche-là est faite dans le meilleur intérêt de la personne, je comprends que vous considérez que ça demande un minimum de formalisme.

M. Blain (Pierre) : À moins, bien sûr, naturellement, de déterminer lesquels, c'est-à-dire, si on pense qu'une enquête téléphonique est une recherche, bien, disons-le. La même chose pour d'autre chose, disons-le. Alors, à mon point de vue, c'est ça. Mais, comme telle, pour moi, une enquête téléphonique, pour moi, c'est un sondage. Un sondage, ce n'est pas... Enfin.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Vous avez également... À la page 14, vous mentionnez que, bon, on ajoute une nouvelle responsabilité, par le projet de loi, au comité d'éthique. On leur confère le mandat de déterminer les modalités d'obtention du consentement qui vont permettre de constituer une preuve non écrite.

Est-ce qu'à votre avis cette responsabilité-là devrait être conférée à une autre entité qu'au comité d'éthique? Est-ce que votre conclusion… Est-ce qu'on doit lire de votre conclusion que peut-être il y aurait des entités qui seraient mieux habilités à rendre ces décisions-là?

M. Blain (Pierre) : Pas nécessairement. Cependant, je crois qu'il faut que ça soit mieux défini, mais je ne pense pas que ça soit nécessairement... Un comité d'éthique de recherche a un rôle spécifique à l'intérieur d'un établissement, et je pense qu'il peut l'assumer, mais il faut qu'il ait aussi les moyens de pouvoir les faire.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Et est-ce que vous partagez l'avis… parce que le premier intervenant qu'on a entendu cet avant-midi nous disait qu'il y avait une... il n'y avait pas, disons, d'homogénéité dans les décisions rendues par les différents comités d'éthique. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez constaté de façon aussi claire au sein des comités des usagers?

M. Blain (Pierre) : À mon point de vue, ce que j'ai vu, justement, en faisant quelques recherches, et c'est là un peu ce que j'amenais en disant que le ministre pourrait mieux définir ces choses-là, je pense qu'il pourrait y avoir justement des formulaires plus «type de consentement», qui soient plus... Bien sûr, les modalités, à la fin, vont toujours être différentes, mais je pense qu'il y a des modèles qui devraient être déterminés, plutôt que ce soit laissé, jusqu'à un certain point, à chacun. Je sais qu'il y a des guides d'écriture de ces protocoles qui existent, mais peut-être les formaliser un peu plus, peut-être de voir comment ça peut se faire. L'INESSS pourrait être un exemple là-dedans, pourrait avoir des guides de rédaction des protocoles.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Tantôt, vous parliez des 14 ans puis vous n'aviez pas l'air de faire de distinction entre le consentement pour recevoir des soins versus le consentement pour participer à des recherches, mais moi, je vois une grande nuance. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, mais recevoir des soins, ils vont consentir, mais de la recherche, c'est quand même un peu plus à risque, même si le risque est minime. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Blain (Pierre) : Bien, c'est là justement qu'il s'agit de voir si la personne comprend correctement l'information qu'elle reçoit. Si c'est... Comme je vous disais tantôt, je pense qu'il y a une distinction à faire entre les différents types de recherche. La recherche statistique, c'est facile. La recherche clinique, c'est une autre paire de manches. Et c'est là qu'il s'agit de voir est-ce que la personne, à ce moment-là, peut le faire. Bon, un enfant… une personne de 14 ans, on détermine exactement le consentement aux soins qu'il peut recevoir. Dans certains cas, c'est bien déterminé jusqu'à... Et c'est là qu'il s'agit de faire la même chose avec, dans ce cas-là, la recherche, et c'est juste une information correcte qui peut être faite et avec aussi le degré de risque qui peut être mis, à partir de ce moment-là, dans la recherche.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Bien, la réflexion que je me fais, quand on parle des inaptes, on dit : Bien, la personne qui peut en être responsable, sans nécessairement en être tuteur ou curateur, tutrice, ou curatrice, c'est plus facile d'aller chercher le consentement à ce moment-là. Mais, quand on parle d'enfants de 14 ans, entre 14 et 18 ans, c'est vrai que la loi permet qu'ils reçoivent des soins sans l'autorisation des parents, sauf sous certaines conditions, mais, quand on parle de la recherche, c'est à un autre niveau. Puis, s'il y a un enfant de 14 à 18 ans qui doit passer 24 heures à l'hôpital, les parents doivent être avertis. Je me pose la question par rapport à la recherche, si ce n'est pas plus près de ça que juste avoir des soins en externe ou ambulatoires.

C'est une réflexion, puis j'aimerais partager ça avec vous, parce que, selon moi, dans le projet de loi, c'est un élément qui est fondamental.

• (15 h 50) •

M. Blain (Pierre) : Vous avez raison, et c'est pour ça qu'on a fait le passage entre le consentement aux soins, qui, normalement, est quelque chose de prévu, à ce qui est maintenant recherche. Et, à mon point de vue, ça s'applique à tout le monde, et c'est là, justement, où il s'agirait de voir.

Présentement, je ne peux pas vous donner d'opinion pour voir si la personne de 14 ans devrait consentir. Je pense que c'est une question, justement, de spécialiste, jusqu'à un certain point, mais je ne suis pas certain qu'un parent aimerait savoir qu'on va expérimenter une nouvelle pilule sur son enfant pour telle autre chose.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, mais ce que j'ai compris, c'est qu'il n'y aurait pas, comme ça, de la chirurgie ou des médicaments.

Juste une clarification, parce que je ne sais pas si M. le ministre va avoir l'occasion de la refaire, mais, oui, il y a de la recherche qui se fait par enquête téléphonique et ça fait partie de la recherche, parce que ça peut faire partie des protocoles de recherche. Donc, je pense que c'est important de noter que, oui, ça pourrait être mis à l'intérieur du projet de loi dans ces circonstances-là et, comme de fait, ça devient fastidieux d'envoyer des formulaires, de revenir.

Et puis je tiens à préciser, l'objectif, ce n'est pas qu'il y ait moins de recherche au Québec. Il faut juste y avoir une recherche qui est bien faite, et, quand on peut faciliter la recherche pour développer des nouvelles connaissances, on devrait le faire. Donc, c'est pour ça qu'on va collaborer quand même au niveau du projet de loi, sauf qu'il y a quand même des éléments de prudence à apporter, surtout quand on touche les mineurs. Les mineurs, c'est un peu particulier, puis les inaptes également. Donc, pour moi, c'est un élément important.

Il y a un questionnement également par rapport aux plaintes. Là, les plaintes, ça a l'air banal, on dit : Maintenant, à l'avenir, si vous voulez faire une plainte, vous passez par le responsable de la qualité, le commissaire aux plaintes et… à la qualité et aux plaintes. La recherche, c'est un domaine particulier, c'est un domaine... Si je regarde, au CHUM, c'est un centre de recherche, bien, je vais peut-être m'attendre à ce qu'il y ait une personne responsable des plaintes qui est spécialisée un peu en recherche. Ce n'est pas la même chose que de traiter une plainte par rapport au niveau clinique. Plusieurs plaintes peuvent être dans le même domaine, mais on peut tomber... ou avoir des plaintes qui sont vraiment plus particulières, puis il faut connaître le domaine de la recherche. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, par rapport à ça, parce que, des fois, les gens s'imaginent que la recherche, c'est un petit domaine dans un hôpital, mais, si vous allez au CHUM, au CUSM ou à Sainte-Justine, vous allez voir que la recherche est très présente, et puis c'est un domaine très spécialisé.

M. Blain (Pierre) : Vous avez tout à fait raison, et c'est la raison pour laquelle j'ai pris justement l'exemple du Centre de recherche du CHUM pour montrer l'importance et de prendre aussi un peu de définitions chez eux. Vous avez raison, quand on parle des commissaires aux plaintes, est-ce qu'ils sont toujours habilités pour traiter toutes les plaintes? Bien, c'est... Là aussi, vous avez raison, il faudrait voir s'ils sont habilités pour faire des plaintes au niveau de la recherche. Est-ce que c'est des plaintes qui sont... et ce serait de voir à quel niveau. Je ne pense pas que... Supposons qu'il y a des conséquences physiques, je pense que ce serait le médecin examinateur... Peut-être qu'il faudrait même y rajouter le médecin examinateur, étant donné que ça s'adresse peut-être à des soins aussi, plutôt que le commissaire aux plaintes. Alors, il s'agirait de voir, peut-être qu'il y aurait cette précision-là à y apporter. Mais, effectivement, dans certains cas, ça peut être…

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Ça, c'est un élément qu'on va devoir discuter, parce que, comme de fait, si la plainte, elle touche un médecin, théoriquement, c'est le médecin examinateur qui devrait en faire l'évaluation. Le médecin examinateur, souvent, va être un pair au niveau de l'établissement. Je trouve que la recherche, ça devient tellement important, je ne voudrais pas non plus banaliser ça puis... en disant : Maintenant, ça va être le même phénomène ou le même processus qu'on a dans les autres secteurs de l'établissement. Je ne suis pas certain qu'on ne pourrait pas avoir une structure particulière pour les plaintes, parce que la recherche, c'est un domaine particulier à l'intérieur de l'établissement, et parfois tu as l'impression que ça va se régler facilement. Mais, s'il y a une plainte, théoriquement, dans un dossier de recherche, si ça concerne un médecin, vous avez raison, ça s'en va au médecin examinateur, et là le médecin examinateur pourrait être en conflit.

En tout cas, ça, je vous dirais que c'est une des faiblesses, parce que ça a l'air facile au début, là, on envoie ça à cet endroit-là, mais, dans des gros centres comme le CHUM, comme le CUSM, comme Sainte-Justine, de dire que ça va être traité dans le même processus que les plaintes au niveau clinique, je ne suis pas certain que c'est la bonne solution pour la recherche aussi et pour les chercheurs. Ça fait que ça, ce serait un élément, là, qu'il serait important de clarifier.

Également, vous nous avez mentionné qu'il y a plusieurs droits que vous auriez aimé avoir présents dans le projet de loi. Je ne sais pas si vous voudriez un petit peu commenter là-dessus.

M. Blain (Pierre) : C'est pour ça que, dans le fond, on a étendu à notre mémoire le consentement. C'est pour ça qu'on l'appelle le consentement à la recherche, parce qu'on pense qu'à ce moment-là il y a d'autres éléments qui sont importants. Quand on parle, justement, de signer un protocole pour ça, c'est l'information, c'est l'information qu'on reçoit. Et d'ailleurs, si je me rappelle bien, puis on n'a voulu pas le souligner dans le mémoire comme tel, mais il y a un jugement de la Cour suprême qui est assez clair au niveau du degré d'information qui doit être donné.

L'exemple que je vous ai donné tantôt est banal. Bien sûr, ce n'étaient que des recherches statistiques qu'on faisait sur une pression artérielle, qui m'est arrivée, et je suis là en jaquette, puis c'est l'infirmière qui vient me demander : Voulez-vous participer au protocole de recherche? Et, de toute façon, en général, souvent, ça se fait comme ça. Ce qui est différent… Non, c'est vrai, je veux dire, c'est des recherches banales, là, j'en conviens. Ce ne sont pas des recherches qui sont des investigations sur la personne comme telle, là.

Quand on parle de recherche clinique, ça, pour moi, c'est... bien, enfin, peut-être que je comprends mal aussi, mais, pour moi, c'était de s'assurer que... 500 usagers, on puisse prendre leurs données pour faire des comparaisons. Donc, pour moi, dans le fond, c'est banal jusqu'à un certain point, parce que ce n'est pas sur mon intégrité physique. C'est quand je parle... Où, là, il faut qu'on ait une meilleure explication, c'est quand, vraiment, il pourrait y avoir des conséquences sur la santé ou sur soi. Alors, c'est là où les droits des usagers, les autres droits, comme le droit à l'information, le droit à la confidentialité, etc., sont importants et ils sont déjà prévus dans les protocoles, mais je pense qu'il faut les... pour nous, il est important de les rementionner.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon, pour environ 2 min 30 s.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Ça va être un commentaire. Vous m'avez éveillé, là. La question des plaintes, là, ce n'est pas seulement que le commissaire à la qualité, ça va être toute la question du médecin examinateur. Et, lorsqu'on va tomber dans une grosse structure comme le CHUM... Au CHUS, ça va être... Il faut vraiment penser un peu plus loin. Et le médecin examinateur, est-ce qu'il va être intéressé à traiter des plaintes concernant des chercheurs dans un domaine de la recherche, alors que nos commissaires à la santé puis les médecins examinateurs sont plus au niveau clinique en tant que tel? Ça, ça va être... Puis, surtout, il va falloir avoir le cheminement de la plainte avec tous les processus d'appel. Je pense qu'on va avoir... Je ne dis pas qu'on a un os, il va falloir le regarder ensemble parce que ça va être quelque chose d'important. Oui?

M. Blain (Pierre) : Excusez-moi. Parce que, justement, si ça s'en va au commissaire aux plaintes, l'étape suivante, c'est la Protectrice du citoyen.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui. Elle, elle a accepté de traiter... de ce que j'ai compris dans une communication, sauf que, la question du médecin examinateur, c'est un autre niveau, parce que, théoriquement, en plus de ça, si la plainte est retenue, ça peut aller en comité de discipline et transféré à l'exécutif du CMDP, après ça, possibilité d'un comité de discipline. Il n'y a pas de recours au Collège des médecins, mais, théoriquement, dans ce type de plainte là, le recours ultime pourrait être aller au Collège des médecins.

Donc, c'est un petit peu plus compliqué que juste dire : On va traiter la plainte. Puis, souvent, c'est des plaintes qui peuvent être assez substantielles, ne serait-ce qu'une plainte pour fraude dans des projets de recherche. Ça s'est déjà vu même au Québec. Ça devient un autre niveau de discussion. Donc, ça, je pense, ça va être des situations qu'on va devoir discuter, parce qu'il y a eu de la fraude puis il y a toujours possibilité d'une fraude. À ce moment-là, il y a une plainte qui est faite contre le médecin.

Pour terminer, rapidement, je veux juste vous remercier et surtout vous féliciter pour le travail que vous faites avec le comité des usagers, qui, pour nous, sont très importants dans nos établissements de santé. Et un des fondements de notre système de santé puis notre façon de gouverner le réseau de la santé, c'est d'abord fait pour les usagers et que les usagers puissent être consultés et participer. Je pense que c'est un de nos points forts dans notre réseau de la santé. Merci beaucoup.

M. Blain (Pierre) : Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : Alors, le temps pour... dévolu à l'opposition officielle est maintenant écoulé. La parole est à la députée de Groulx pour un bloc de cinq minutes.

Mme Daneault : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci d'être présents. Comme j'ai juste cinq minutes, je vais aller directement au but. Dans votre mémoire, vous avez mentionné que la notion de... ce que je comprends, c'est que vous êtes favorables à... bon, en gros, au projet de loi.

M. Blain (Pierre) : En principe.

Mme Daneault : Par contre, dans votre mémoire, la notion de consentement libre et éclairé, vous mentionnez que c'est, à votre point de vue, ce qui est le plus important pour les usagers, et pourtant le projet de loi ne revient pas sur ces notions en recherche et, pire, continue à le déléguer au comité d'éthique de la recherche.

J'aimerais savoir ce que vous auriez voulu voir, retrouver à l'intérieur du projet de loi n° 30, les suggestions, ce que vous auriez voulu voir à l'intérieur.

• (16 heures) •

M. Blain (Pierre) : Dans le fond, ce que je n'ai pas vu — bien, peut-être que j'ai mal cherché aussi — c'est ce que le ministre délègue et comment il les établit. Et je pense qu'il y a peut-être des règles qui sont là et je pense que c'est à ce niveau-là qu'il devrait exister des directives quelconques au niveau du consentement pour la recherche.

Bon, est-ce que c'est... Ce que j'ai cru comprendre, c'est chaque comité d'éthique et de... chaque comité de recherche qui établit son propre consentement pour chacun des projets, et c'est là, je pense, qu'il pourrait y avoir une standardisation jusqu'à un certain point, au moins des balises. Peut-être que ça existe, mais c'est dans ce sens-là que nous faisions cette remarque.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Groulx.

Mme Daneault : Donc, ce que je comprends, c'est qu'on voudrait voir retrouvées certaines balises à l'intérieur du projet de loi.

M. Blain (Pierre) : Dans le projet de loi comme tel ou dans le règlement qui en découle, possiblement, quand on parle des comités de recherche et d'éthique.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Groulx.

M. Blain (Pierre) : Éthique de la recherche, pardon.

Mme Daneault : Oui. Je voudrais avoir certaines... parce que je vous ai vu sourciller tout à l'heure, quand on a parlé de consentement non écrit et... Bon. Et on a entendu les précisions du ministre à cet effet-là.

Moi, j'aimerais vous entendre sur le fait qu'effectivement, quand on est au bout d'une ligne téléphonique, est-ce qu'on peut identifier vraiment la personne, est-ce qu'on peut identifier aussi, selon vous, qu'elle a bien reçu... parce qu'on... à moins que ça soit enregistré, mais est-ce qu'elle a bien reçu effectivement, bien, un consentement éclairé quant à ce qu'on peut faire avec ces données-là. Est-ce qu'il y a des précisions que vous voudriez voir ou carrément le consentement non écrit, pour vous, ce n'est pas acceptable de le retrouver dans la loi? J'aimerais vous entendre à cet effet-là.

M. Blain (Pierre) : Merci. Bon, effectivement, ce que vous soulevez comme question est fort pertinent, et c'est pour ça qu'on pense qu'il faut que ce soit défini. C'est quoi, quand on parle de non... un consentement non écrit? Si ça fait référence, justement, comme disaient le ministre et l'ex-ministre, que ça existe déjà, des genres de choses semblables, on pourrait le mettre, on pourrait le dire, on pourrait le savoir.

Mais là, maintenant, vous venez de poser une autre question qui est encore plus importante, effectivement, qui est celle de la confidentialité des données. Bon, un sondage, c'est un sondage, normalement on nous dit qu'il n'y aura pas de retombées. Mais là on parle de confidentialité d'un dossier, ce n'est plus pareil, là. Donc, c'est là où, effectivement, on pense qu'il faut faire attention.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Groulx, pour 1 min 20 s.

Mme Daneault : Alors, est-ce que je comprends que vos recommandations, c'est de maintenir le non-écrit, mais avec certaines balises? C'est ce que je comprends de votre intervention.

M. Blain (Pierre) : Si le non-écrit est nécessaire, bien, il faut y mettre au moins des balises pour qu'on puisse savoir quand il est nécessaire.

Mme Daneault : Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : Alors, merci, M. Blain.

Le temps étant maintenant écoulé et compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à demain, 25 avril, à midi. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 3)

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