(Onze heures vingt-six minutes)
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il
vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de
la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 29, Loi modifiant la Loi sur Héma-Québec et
sur le Comité d'hémovigilance.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M.
Roy (Bonaventure) est remplacé par Mme Bouillé (Iberville).
Le Président (M. Bergman) : Merci. Bienvenue à la commission, Mme
la députée d'Iberville. Alors, ce matin, nous
entendrons Dre Sylvie Bouvet, présidente de l'Association des obstétriciens et gynécologues
du Québec. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Vous avez 10 minutes pour
faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la
commission.
Auditions
Association
des obstétriciens et
gynécologues du Québec (AOGQ)
Mme Bouvet (Sylvie) : Merci. Merci de me donner l'opportunité
de représenter l'Association des obstétriciens
et gynécologues du Québec dans le cadre de cette consultation. Je serai brève.
Je m'appelle Sylvie Bouvet et je suis obstétricienne-gynécologue
à Trois-Rivières. Je suis une obstétricienne de terrain des plus ordinaires. Je
siège au comité exécutif de mon association pour laquelle j'agis à titre
de secrétaire. Au nom de mon président, le Dr Robert Sabbah, présentement en
déplacement à l'extérieur, c'est avec plaisir que je vais vous exposer notre
position.
L'AOGQ se réjouit de la tenue de ces
auditions visant à apporter des modifications au projet de loi n° 29. C'est un projet sans saveur
politique, ça n'a que le goût du lait. L'implantation des banques de lait
maternel est un sujet qui nous tient
particulièrement à cœur. Le lait maternel est l'aliment le plus approprié pour
le nouveau-né. Quotidiennement, les obstétriciens-gynécologues sont
confrontés à des situations cliniques pour lesquelles des femmes donnent
naissance à des enfants nécessitant des
soins particuliers. Parmi ceux-là, la possibilité d'alimenter le nouveau-né
avec du lait maternel fait partie des
traitements optimaux. Il n'est pas toujours possible pour les femmes de
subvenir à ce besoin. Les raisons sont
multiples, allant du simple fait de la piètre production, plutôt rare chez une
femme en bonne santé, à des conditions de santé maternelle rendant
impossible l'allaitement, par exemple, médicaments, maladies, éloignement ou
mortalité. Je suis particulièrement touchée par l'éloignement. N'étant qu'à
Trois-Rivières, un transfert d'un bébé prématuré pose automatiquement une
problématique pour l'allaitement. Des banques de lait peuvent faire la
différence.
L'AOGQ
se soucie aussi de la sécurité entourant ce produit biologique. Tout comme les
normes entourant la gestion des autres produits dérivés du sang, l'AOGQ s'attend
à ce qu'il en soit de même pour le lait maternel. Nous accordons aussi toute notre confiance aux différentes instances
cliniques, scientifiques et administratives pour établir des modalités de fonctionnement à la fois sécuritaires
pour le public et surtout applicables pour le bon fonctionnement des
banques de lait maternel. Actuellement, les données probantes ont toujours été
rassurantes quant à la transmission de maladies infectieuses par le lait
maternel issu de banques. Outre cet aspect de la santé de l'enfant, nous
pensons que les avantages coût-bénéfice des banques de lait dépassent largement
les attentes.
L'AOGQ désire aussi saluer le dévouement et
la générosité de toutes les femmes du Québec et d'ailleurs qui sont prêtes à donner
pour aider. Le Québec est actuellement un peu à la traîne dans ce secteur, et
je pense qu'il est grand temps de rattraper le temps perdu. Je vous
remercie de votre attention.
Le
Président (M. Bergman) : Merci, Dre
Bouvet. Alors, pour le bloc du gouvernement, pour un temps de 24 minutes, M. le
ministre.
M. Hébert : Merci beaucoup, Dre Bouvet. J'aurais
le goût de vous dire d'entrée de jeu qu'il n'y a pas de professionnels ordinaires dans le réseau, il n'y a que des
gens extraordinaires, qui sont dévoués et qui mettent leurs compétences au
service de la population. Alors, merci d'être là, de représenter votre
association.
J'aimerais
peut-être, pour le bénéfice de nos collègues et des gens qui nous écoutent, que
vous nous situiez pourquoi il y a des femmes qui ne peuvent pas allaiter,
notamment dans le cas de bébés prématurés. À qui s'adresse donc cette banque de
lait maternel?
•
(11 h 30) •
Mme Bouvet (Sylvie) : Bien, le territoire du Québec est stratifié en niveau de
soins en ce qui a trait à la prématurité. Les centres tertiaires vont prendre
tout bébé prématuré de 24 semaines et plus; les centres secondaires, généralement du 32 semaines et plus; puis les
centres primaires, du 34 ou 36, tout dépendant s'ils ont un pédiatre sur
place.
L'allaitement... le lait maternel,
particulièrement pour les prématurés, est vraiment l'aliment de choix. Quand on est à Trois-Rivières, à Rivière-du-Loup ou Sept-Îles et
qu'on a un enfant prématuré, il n'est pas toujours possible de transférer la
mère avant, quoi que ce soit toujours le choix idéal. Il peut se trouver des
situations où la condition maternelle ou l'urgence
obstétricale fait que l'enfant naît en éloignement, est transféré par la suite,
ou que la mère n'est pas en condition
de suivre, d'où pause de l'allaitement, ou que la mère a une condition
maternelle instable qui fait qu'elle ne peut pas non plus prioriser tout
de suite l'allaitement pour son enfant. Les banques de lait maternel existent à
travers le monde justement parce que des situations comme ça sont assez
fréquentes pour nécessiter que, justement, on ait une banque de lait pour
subvenir aux besoins de l'enfant.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Merci. Qu'est-ce que vous pensez de
la stratégie québécoise de confier à Héma-Québec la gestion de cette banque de lait maternel? On sait que les
autres banques à travers le monde sont des banques indépendantes des banques de sang et des banques de produits
biologiques. Qu'est-ce que vous pensez de la stratégie qui a été élaborée
au Québec pour confier à Héma-Québec cette responsabilité-là?
Le
Président (M. Bergman) : Dre Bouvet.
Mme Bouvet (Sylvie) : Je n'ai pas la prétention d'avoir les
connaissances adéquates pour tout élaborer ça,
mais il reste quand même que c'est un
produit biologique, puis la compétence d'Héma-Québec dans l'analyse de la
sécurité des produits biologiques est
démontrée. Si le Québec fait le choix de passer via Héma-Québec pour un produit
biologique différent de ce à quoi il est habitué, ça ne m'apparaît pas très
difficile d'aller chercher les compétences en continuité avec un produit
différent.
J'aurais tendance aussi à dire que le fait de
regrouper sous une même enseigne plus de choses quand c'est possible, ça diminue le
nombre d'intervenants ou le nombre d'organismes qui doivent donner des
compétences comparables quand il s'agit d'évaluer les risques infectieux
sur un produit biologique. Moi, j'avoue que je suis en confiance, en tant que
personne et en tant que médecin, de penser qu'Héma-Québec pourrait assumer les
compétences là-dedans.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Vous avez évoqué, dans votre
exposé, les données probantes pour la transmission de maladies infectieuses via le lait maternel. J'aimerais ça
que vous élaboriez un petit peu sur ce risque de transmission de
maladies infectieuses et comment on peut gérer ce risque-là.
Le
Président (M. Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) : Bien, le risque de
transmission vient d'une mère porteuse d'infections, souvent les infections
transmissibles par le sang. On parle d'hépatite, de VIH, tout ce qui se
transmet comme un don de sang. C'est pour ça
qu'il y a des compétences nécessaires là-dedans. Donc, c'est d'évaluer avant
que le lait maternel soit donné à l'enfant,
à savoir que la source est exempte d'infections qui peuvent être
transmissibles, via son sang, dans le lait maternel. Donc, c'est pour ça
que toute la procédure de pasteurisation, de congélation et de testage chez la
mère est importante, parce qu'on veut avoir le plus possible de sécurité sur le
produit.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Certaines personnes ont...
Mme
Bouvet (Sylvie) : Juste…
M.
Hébert : Oui.
Mme Bouvet (Sylvie) : Juste un complément. Une des
contre-indications à l'allaitement, à moins d'être dans un pays endémique pour
le VIH, pour dire quelque chose, c'est généralement de ne pas allaiter, chez
une femme porteuse du VIH ou une
femme porteuse de l'hépatite B, à titre d'exemple. Par contre, si on était en
Afrique et que toutes les femmes ont le
VIH et que, si l'enfant n'est pas nourri, il va mourir, on s'entend qu'en pays
endémique le lait maternel sera quand même donné. Mais ce n'est pas la
situation qu'on a au Québec, ici. Donc, c'est important, tu sais, d'avoir tous
les paramètres de sécurité de la donneuse pour que le lait maternel soit
sécuritaire pour l'enfant receveur et pour les parents dont l'enfant recevra
aussi.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Je fais du pouce sur ce que
vous venez de dire. Est-ce qu'on pourrait imaginer une extension de l'indication d'utiliser le lait maternel d'une
banque comme celle qu'on va mettre sur pied au Québec pour, justement,
être capables d'offrir du lait maternel à ces enfants qui ont des mères
porteuses de VIH ou d'hépatite?
Mme Bouvet
(Sylvie) : Je pense que c'est des cas
d'espèce. Ça, on appelle ça un cas particulier. Le but, actuellement, c'est principalement de prioriser les prématurés, parce
que c'est eux qui en bénéficient vraiment le plus, parce que c'est vraiment le plus adapté pour tous
les sous-produits, dans le lait maternel, qui sont bénéfiques. À date,
le projet n'est pas pour donner du lait à
des bébés nés à terme de mères avec des conditions d'exception. Alors, un cas
d'espèce est un cas d'espèce. Je ne pense pas qu'il y aura de grandes lignes
directrices là-dessus.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert : Ma dernière question, ensuite je laisserai mes collègues.
Il y a des groupes qui ont dit : Vous ne réussirez pas à trouver 260
femmes qui vont vouloir donner leur lait. Est-ce que vous pensez qu'on va
pouvoir être en mesure de recruter ces
femmes-là pour alimenter, si vous me passez l'expression, alimenter la banque
de lait maternel?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Je pense que c'est... On sous-estime les femmes. Je n'ai pas de doute. Je n'ai
pas de doute. Les femmes qui allaitent, les
femmes qui ont allaité, les femmes... Les femmes sont généreuses, et puis quand
on privilégie... Bien, en sang de cordon, c'est
un don qu'elles font, puis elles le font parce qu'il y a une idéologie derrière
ça qui est bonne. Le lait maternel, je
pense, c'est la même chose. Il y a l'idéologie derrière, d'aider quelqu'un dans
une situation que les femmes vivent, parce que c'est le même recrutement
de population que le sang de cordon, donc les femmes qui viennent d'enfanter.
Je pense qu'il ne faut pas nous sous-estimer. Là, je parle personnellement.
M. Hébert : D'accord avec vous.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, Dre Bouvet. Ça me
fait plaisir d'échanger avec vous aujourd'hui. Moi, j'aimerais ça que vous...
parce que vous avez parlé, là, des bienfaits du lait maternel sur les grands
prématurés, et j'aimerais ça que vous nous expliquiez de façon très concrète,
quand on parle de ces bienfaits-là, quels sont-ils, et, a contrario, s'il n'y
avait pas possibilité d'offrir à des grands prématurés du lait maternel, à quel
type de difficultés ils s'exposeraient?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme Bouvet
(Sylvie) : Les composantes normales
du lait maternel, là, ça comprend du liquide, des corps gras, des anticorps pour lesquels toutes ces substances-là ont des
bienfaits : les liquides pour l'hydratation, les corps gras qui sont les substrats nécessaires au développement
des cellules graisseuses, des cellules qui vont nourrir le cerveau;
ensuite de ça, tous les anticorps qui sont là, qui sont des éléments importants
pour diminuer les risques d'allergies et les risques d'infection sur le nouveau-né. Ce sont des choses qu'on n'a pas en équivalence
aussi parfaite parce que chaque mammifère va produire un lait qui est adapté à sa race. Donc, le lait maternel, il
est adapté à la race humaine, et puis cette proportion-là, ce type d'anticorps
là, ce type de substrat graisseux là qu'on retrouve dans le lait maternel, on
ne le retrouve pas en équivalence dans d'autres produits lactés actuellement
sur le marché.
Le
bénéfice, je pense, le plus important aussi est en lien beaucoup, beaucoup avec
l'immunité de l'enfant, parce que, pour obtenir une immunité adéquate, ça prend aussi
des anticorps puis ça prend aussi une bonne capacité à se défendre
contre les infections. Puis ça, ça a été prouvé de façon certaine, là, qu'il y
a une amélioration. Tout le volet allergique des
enfants aussi, ça a été prouvé. La protéine qui est dedans, c'est une protéine
du mammifère humain, ce n'est pas la protéine de la vache. Alors, tout
ce qu'on a actuellement comme préparation lactée de substitution tend à vouloir
se rapprocher le plus possible du lait maternel. Pourquoi? Parce qu'il n'y a
aucun doute que c'est ce qu'il y a de mieux. Mais il n'y arrive pas.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme Proulx : Et pouvez-vous juste nous expliquer la situation actuelle?
Est-ce qu'actuellement, avant la mise en
oeuvre de ce nouveau projet d'une banque de lait, les grands prématurés ont
quand même accès à du lait maternel? Et comment ça s'organise
actuellement?
• (11 h 40) •
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Je vais répondre en deux volets. Le nouveau projet, c'est une ressuscitation,
hein, parce que, des banques de lait, ça
existait avant. Ça existait avant, pour les bienfaits que ça avait.
Actuellement, le projet qui est remis sur la table est d'autant
plus sécuritaire, parce qu'on va contrôler le produit à la source, c'est-à-dire
qu'on aura du lait de qualité parce que la source sera testée comme étant
exempte de maladies dépistables. Ça, c'est la première chose. Il y a
actuellement sûrement des femmes, pour lesquelles il n'y a aucun doute quant au lait maternel et ses vertus,
qui vont aller vers des donneuses ou payer des femmes pour donner leur
lait sans que la source soit contrôlée, sans que l'on sache que c'est quelque
chose de sécuritaire.
En général, quand on se fait payer pour
quelque chose, on devient un petit peu moins... En tout cas, les banques de sang ont
connu, en quelque part, à un moment donné dans leur vie, des gens qui se
faisaient payer pour donner leur sang, puis
ce n'était pas toujours garant de qualité, hein? Je pense que c'est de mettre
un peu la population en danger de ne pas s'intéresser à organiser des banques de lait sécuritaires, parce qu'on
va avoir un marché noir de banques de lait, de lait, sans connaître la
sécurité de la source.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Bonjour. Merci d'être là,
Dre Bouvet. Hier, on avait une présentation d'Héma-Québec qui nous informait que possiblement les premières
donneuses devraient être possiblement les dames qui ont été déjà donneuses de sang de cordon. Donc, ce sont des
femmes qui ont déjà été testées, donc de là la rapidité à rendre le
service et aussi la réduction des coûts, parce qu'on ne répète pas les tests à
refaire.
Alors,
vous, est-ce que vous avez, comme médecin, comme spécialiste du domaine… vous
ne voyez pas d'objection à ce que ce soient
les mêmes femmes? Il n'y a pas de contre-indication, ça va pour la sécurité, à
ce niveau-là?
Le
Président (M. Bergman) :
Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) : C'est de l'efficience.
C'est vraiment de l'efficience, d'autant plus qu'elles viennent d'accoucher,
elles sont en montée laiteuse et elles sont en production de lait. Donc, on n'a
pas, comme une nourrice, à générer du lait,
là. Donc, on a à la fois l'aspect de tous les examens nécessaires qui sont
faits sur le sang de cordon, qui représente
la mère, puis on a, après ça, la mère qui est en mode allaitement. Donc, en
soi, c'est comme gagnant-gagnant de chaque côté.
À mon avis, la problématique est… Toute la
sensibilité qu'une femme qui vient de donner naissance a à reconnaître les vertus de l'allaitement quand elle y croit
pour venir en aide à quelqu'un d'autre, je ne pense pas qu'on a un grand combat
à faire pour expliquer...
Une
voix : Pour les convaincre.
Mme
Bouvet (Sylvie) : Pour les
convaincre.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Masson.
Mme Gadoury-Hamelin : Alors, dans le fond, ce que vous nous
dites aussi avec les propos que vous venez de donner à ma collègue, c'est que, de mettre cette
banque de lait maternel là en place, ça va aussi sécuriser la population
puis s'assurer qu'on va éviter de la transmission de lait qui pourrait être
moins testé et moins rigoureux pour les femmes parce que, dans le fond, ça se passe un petit peu illégalement. C'est ce
qu'on peut envisager, là, ce qu'on peut présumer.
Mme
Bouvet (Sylvie) : Bien, de fait, il
me semble que la réputation d'Héma-Québec, en tout cas, en tant que médecin, je la trouve bonne. J'imagine que, dans
la population, ils sont d'accord avec moi. En ce sens-là, le fait que ce
soit Héma-Québec qui chapeaute aussi, pour
moi, c'est de dire : On a pris les moyens pour être sécuritaires pour la
population en offrant un service qui n'existait pas puis pour lequel on a un
bienfait pour le nouveau-né.
Puis il y a des coûts rattachés à ça, pas
juste le testage, là. On ne le répète pas, mais, pour le nouveau-né, ça peut faire la
différence dans une durée d'hospitalisation, dans une possibilité de maladie
chronique plus tard. Ça aussi, c'est des sous, là. Moi, je pense que...
Mme
Gadoury-Hamelin : C'est gagnant.
Mme
Bouvet (Sylvie) : C'est gagnant.
Mme
Gadoury-Hamelin : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée d'Iberville.
Mme Bouillé : Oui, merci, M. le Président.
Bienvenue, Dre Bouvet. Je veux avoir votre opinion comme obstétricienne-gynécologue. Les grands prématurés sont en
incubateur, et, d'un autre côté, j'entends, depuis quelques années, le bienfait des soins kangourous où on
privilégie le contact peau à peau. J'aimerais avoir votre opinion par
rapport à... Bon, ce que j'ai déjà entendu,
c'est que, que ce soit le contact avec le père ou la mère, mais que l'enfant...
que la mère produira probablement
plus de lait si elle a un contact très rapide avec son enfant, peau à peau,
mais aussi qu'elle va le mettre au sein plus tôt et que le bébé va téter
plus rapidement.
Par rapport à votre expérience, là, vous privilégiez quoi?
Parce que ça a un impact sur la quantité de lait qui est nécessaire aussi, selon les soins ou l'approche du
médecin, là.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Oui. Merci de la question. La question est très large, parce qu'il a été
démontré que, dès la naissance, on peut mettre l'enfant directement en contact avec la
mère, le lien d'attachement est meilleur, et on pense que, quand le lien
d'attachement est meilleur, le soin apporté à l'enfant sera meilleur.
Dans
une situation comme les grands prématurés, il n'est pas possible de le faire
parce que ces enfants-là, ils ont toutes leurs fonctions qui nécessitent un support
dès l'immédiat, ils ne peuvent être débranchés pour être mis en contact avec la mère, en peau à peau. Donc, on ne peut pas
immédiatement le faire, on est obligés de faire des contournements pour
faire survivre l'enfant.
La
méthode kangourou, oui, je ne me souviens plus trop dans quel pays d'Amérique
du Sud ça a commencé, là, pour des besoins
simplement en lien avec de l'argent qu'ils n'avaient pas suffisamment pour
donner des soins aux prématurés, mais c'est
vrai qu'il y a des avantages pour le contact, le soin de l'enfant, le lien,
mais aussi la thermorégulation, régler
la température de l'enfant, régler aussi tout ce qui est les systèmes
respiratoires, donc largement démontré, là, ce qui n'est pas ma sphère de
compétence en tant qu'obstétricienne — je ne suis pas pédiatre, là — mais j'en sais assez
pour savoir que ça, il y a zéro doute là-dessus non plus.
La
production de lait maternel, c'est vrai qu'elle est influencée aussi,
évidemment, par le contact, mais le mécanisme principal de départ pour la production de lait
maternel, c'est un mécanisme qui est très, très hormonal. À la naissance
de l'enfant, l'expulsion du placenta, les
hormones vont virer de bord, et puis c'est une hormone qui s'appelle la
prolactine qui va générer, au tout début, la production de lait et la
montée laiteuse. Après, et c'est très rapide, en dedans de quatre à six
semaines, ce n'est plus un facteur hormonal. Ce n'est que la stimulation
répétée qui va entretenir la prochaine quantité de lait à donner. Donc, c'est
un petit peu pour ça aussi qu'en sevrage tu sautes un boire, donc tu ne fais pas la stimulation, donc tu vas automatiquement
produire une quantité moindre la prochaine fois.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée d'Iberville.
Mme Bouillé : Non, ça va. Je pense que... Merci.
Mme Bouvet (Sylvie) : J'espère avoir répondu…
Le
Président (M. Bergman) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté du
gouvernement? Alors, l'opposition officielle, pour un bloc de 21 minutes, M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'abord, merci d'être ici, Dre Bouvet, puis on
sait que votre association est très impliquée
au niveau de ces soins. Je trouve ça très intéressant que vous puissiez venir
témoigner de l'importance de mettre la banque de lait en place. Juste en
passant, il n'y aura aucune partisanerie politique pour la question de la banque de lait, probablement pas
pour le reste du projet de loi non plus, mais, comme législateurs...
parce que, vous savez, comme médecins, on
est habitués à dire : Comment ça se fait qu'ils ne fonctionnent pas comme
ça? Comme législateur, l'opposition a également l'obligation de poser
des questions, de tout voir les aspects pour qu'à la fin on ait le meilleur
projet de loi pour avoir la meilleure organisation de services par la suite.
Et puis je peux vous
dire que, pour l'intention de la banque de lait, les évidences scientifiques,
les données probantes nous disent que le
Québec va être vraiment innovateur en mettant ça en place, et ce qu'on veut, c'est
le mettre de la bonne façon. Ça, je
vais vous rassurer également, on croit beaucoup dans Héma-Québec. Ça fait qu'Héma-Québec
est vraiment une organisation, là, hors pair, je pense, qui a démontré son
expertise.
Par
contre, dans le projet de loi, il y a d'autres éléments, puis ce n'est pas
seulement que la banque de lait, mais il y a également d'autres éléments qui modifient la
loi, dont, entre autres, au niveau du conseil d'administration. Ça, c'est
quelque chose qu'il faut qu'on regarde plus
au niveau organisationnel, puis également, moi, je vais accorder de l'importance
à protéger Héma-Québec, pas contre la méchanceté du gouvernement, mais pour s'assurer
qu'on ait la meilleure organisation de services au Québec.
Et
puis on espère que ce projet de loi également, là, va pouvoir être mis en place
le plus rapidement possible, mais, avant de l'adopter,
on a beaucoup de questions à poser, puis, également, il y a des choses,
peut-être, qui vont devoir être améliorées au niveau du projet de loi. Mais,
pour en avoir fait plusieurs dans le passé, il n'y a pas de projet de loi dans
lequel il n'y a pas de petites modifications, sauf quelques projets de loi très
techniques.
Ma question, c'est…
Vous avez certainement consulté des membres de votre association puis vous
savez que parfois, dans une association, il
y a des gens qui sont un peu plus rébarbatifs que d'autres à utiliser les
meilleures pratiques de soin. Quelles
sont les données provenant de vos membres? La majorité doivent être d'accord,
mais est-ce qu'il y a eu des
objections de certains membres, de penser est-ce qu'on devra offrir ça d'emblée aux gens qui en ont vraiment besoin?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
• (11 h 50) •
Mme
Bouvet (Sylvie) :
De fait, on n'a pas fait un sondage «at large» parmi les membres simplement
fautede
temps, puis, en même temps, je pense aussi que l'argument principal pourquoi on
n'a pas pensé à sonder tout le monde, c'est qu'il y avait un consensus, au tour de
table, évident, là, en ce sens-là. On n'a pas imaginé qu'on aurait une
opposition de la part de nos membres de façon à modifier notre position. C'est
la première chose.
La
deuxième chose, c'est que, sûrement, les gens qui font partie de l'association,
c'est des gens qui représentent toutes croyances dans la population, d'une
certaine façon. Puis je pense aussi qu'il y a des gens qui sont plus
favorables à l'allaitement, il y a des gens
qui sont moins favorables. La majorité sont plus favorables à l'allaitement,
mais il arrive parfois où des
collègues n'ont pas allaité. C'est leur choix personnel. Je ne pense pas qu'on
peut s'ingérer là-dedans non plus.
Et puis il y a aussi l'aspect d'un produit biologique. Il
y a des gens qui ont une certaine répugnance... Je suis certaine que, dans mon
association, tout comme dans n'importe quelle association et dans la population
en général, il y en a qui pourraient avoir répugnance à donner du lait
maternel d'une autre mère, mais je pense que c'est des cas d'exception.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Pour faire face à ce risque… parce que c'est sûr qu'en mettant ça en
place, on voudrait que, quel que soit l'endroit
où vous demeurez au Québec, on puisse avoir accès aux services. C'est un peu
comme les banques de sang. Je veux dire, que vous soyez en Gaspésie ou dans le
Grand Nord, bien, on va avoir une certaine disponibilité, puis chaque citoyen a
le droit aux mêmes services.
Est-ce que vous pensez qu'il y a un travail qui doit être
fait, au niveau de votre association, dans toutes les régions du Québec, advenant le cas que vous appreniez qu'il
y a un endroit que, vraiment, les gens ont l'air opposé, que votre association
pourrait collaborer peut-être à travailler avec les gens sur place pour
promouvoir, pour ceux qui veulent. Puis je
vais beaucoup dans la même orientation que vous, si quelqu'un ne veut pas, on n'a
pas à l'obliger, mais, du côté professionnel, on a quand même une
obligation d'offrir les meilleurs soins, puis je pense que les études ont
démontré que le lait maternel est le meilleur soin pour le bébé. Qu'est-ce que
vous en pensez?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Bien, il y a tout actuellement la définition des Hôpitaux ami des bébés, qui
ont des critères, hein, très, très, très bien établis, avec un pourcentage, je pense, c'est
95 % des femmes doivent offrir l'allaitement pour être, là, nouveau
Hôpital ami des bébés. Donc, ça, c'est des choses qui sont connues, c'est des
choses que nos membres connaissent aussi, mais ce n'est pas tous les hôpitaux,
actuellement, qui sont ami des bébés, même si pour personne il n'y a de grands
doutes quant à ce qui serait le mieux, être ami des bébés chez tous.
Actuellement,
le projet passe via Héma-Québec et via la banque de sang de cordon pour lequel
il y a, au Québec, actuellement, huit hôpitaux qui sont ciblés pour faire le recueil du
sang de cordon afin de probablement limiter le nombre de personnes qui
font les prélèvements, les manipulations, ces choses-là. Ce sont des hôpitaux,
un hôpital qui est ici, à Québec, puis les
autres dans la région de Montréal, qui représentent la génétique du Québec
aussi avec ça. Actuellement, Trois-Rivières, pour donner un exemple, il
n'y en a pas de prélèvement de sang de cordon parce qu'on n'est pas un milieu ciblé. Alors, les femmes de Trois-Rivières
ne sont potentiellement pas des donneuses simplement parce qu'on n'a
pas, à date, un projet qui prévoit nécessairement de prendre des femmes qui ne
sont pas des banques de cordon.
Je
suis certaine qu'à court terme il y aura une demande de la part des femmes, à
travers le Québec, qui ne sont pas ciblées dans les banques de cordon, d'offrir leur
lait. Et puis là ça sera à nous, à vous de décider comment... que
ferez-vous de cette demande, parce que les
ligues qui font la promotion, La Leche et d'autres, c'est des grandes
croyances, c'est des grandes femmes qui sont généreuses, et puis, du
lait maternel, vous allez en avoir.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
Une voix : ...
Mme Bouvet
(Sylvie) : Oui, mais vous allez en
avoir.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le
Président, et j'abonde dans votre sens, dans le sens que, pour avoir fréquenté ces
groupes, ce sont des gens qui font une excellente promotion du meilleur soin à
l'enfant et puis c'est des gens qui vont y
mettre beaucoup d'énergie. Puis je pense qu'on peut voir que, dans un avenir
prochain, il va y avoir ce type de
demande, mais le fait d'être capable de créer la banque aujourd'hui, ça va nous
permettre une décision, je dirais, à la limite, politique ou clinique d'offrir
le service. On va avoir l'infrastructure pour le faire. Et ce qu'on veut, puis
je le rappelle, c'est d'avoir la meilleure
infrastructure, d'abord la plus sécuritaire, avec la meilleure qualité et,
comme troisième critère, dans l'efficacité et l'efficience. Puis je
pense qu'avec Héma-Québec on va être capable d'atteindre ça.
J'avais
quelques questions, mais elles ont été posées par le parti au pouvoir, parce qu'il
pose des questions avant nous autres, mais je
voudrais juste vous remercier puis surtout féliciter... vous êtes représentante
d'une organisation d'excellente qualité des
soins en obstétrique et en gynéco que nous avons au Québec, puis je pense que
nos professionnels de tous niveaux
peuvent le faire, mais je vais laisser la parole, c'est sûr, à mes collègues,
là. Allez-y, mes chers collègues.
Le Président (M.
Bergman) : Alors, Mme la députée de
Gatineau.
Mme
Vallée : Merci
beaucoup. Merci d'être présente et de venir partager avec nous les
représentations de vos membres. Je me
demandais, au-delà, bon, de l'enthousiasme que vous manifestez envers le projet
de loi, envers la mise
en place de cette banque de lait là, est-ce que vous auriez des mises en garde
à nous adresser et à identifier, de sorte qu'on puisse faire le meilleur travail parlementaire lors de l'étude
article par article? Est-ce qu'il y a des éléments, à votre avis, qui pourraient constituer des pièges dans la
mise en oeuvre d'une banque de lait comme ça sur le territoire du
Québec?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Bien, moi, je vois deux points. Le premier point, c'est la vigilance puis pour
ce qui est de la sécurité. En 2013, on ne peut pas passer à côté de ça, puis c'est pour
ça qu'on a des organismes comme Héma-Québec qui sont implantés. Donc,
ça, c'est le premier point au niveau des soins de la population, de la sécurité.
Le
deuxième point, ça concerne les demandes qui vont venir des femmes qui ne sont
pas prévues dans la première vague de don de lait maternel, là. Je pense qu'il
va y avoir une position à avoir en ce qui a trait à : Que ferons-nous des
femmes qui veulent donner du lait maternel puis qui ne sont pas prévues, là,
dans la première vague d'implantation, là?
Est-ce qu'on peut penser qu'on est comme rejetée de ne
pas pouvoir donner son lait? Donc, je pense qu'il va y avoir un questionnement face à ça, des réponses à donner,
en tout cas, aux gens, la première étant la sécurité, la deuxième étant :
Bien, O.K., une fois ça fait, peut-on implanter quelque chose de sécuritaire
pour cette deuxième vague là?
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Gatineau.
Mme
Vallée : Est-ce
qu'on devrait déterminer, dans le cadre de la loi ou dans le cadre d'un
règlement, là, qui serait habilité à donner du lait ou qui ne serait pas
habilité à donner du lait de façon très claire, de sorte que, dans un
premier temps, on permette d'éviter une série de tests ou une série de
démarches coûteuses, sachant probablement déjà que la personne ne pourrait pas se qualifier pour donner du lait qui irait à la
banque de lait? Est-ce que c'est quelque chose, à votre avis, qui devrait être fait? Est-ce qu'on devrait
préciser les critères pour les mères donneuses? En même temps, est-ce qu'on
devrait préciser de façon très claire dans
la loi, parce que ça ne l'est pas, que cette banque de lait là est destinée,
d'abord et avant tout, aux grands prématurés et ne devrait pas être considérée
comme une banque, une banque de lait destinée à l'ensemble de la population?
Parce
que je comprends que vous avez soulevé quelque chose auquel je n'avais pas
pensé, quand vous avez parlé de la mère séropositive qui veut allaiter, mais ce n'est
pas nécessairement ce qui est prévu initialement dans la mise en place
du projet de loi. Le projet de loi, si je comprends bien, on cherche vraiment à
apporter les meilleurs soins possible aux grands prématurés.
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
La première chose, c'est que le projet, actuellement, il est fait pour que les
femmes qui soient
des donneuses potentielles soient les mêmes femmes qui ont fait le don du sang
de cordon. Donc, automatiquement, il
y a un dépistage qui est fait pour ce qui est d'assurer la sécurité. Ce sont les
mêmes. Ce qu'on n'a pas à date, c'est d'autres femmes qui n'ont pas fait le don du sang de cordon. Mais, actuellement,
les femmes qui font le don du sang de cordon, ce sont ces mêmes femmes
là qui seront les donneuses potentielles de lait maternel.
Ensuite, c'est sur une
base volontaire que les femmes vont donner leur lait maternel de cette
banque-là, de ce groupe de femmes là déjà
testées. Donc, il n'y a pas de coût supplémentaire parce que ce sont les mêmes
qui seront les donneuses potentielles sur une base volontaire. Ensuite…
Il y avait un autre volet à votre question?
• (12 heures) •
Mme Vallée : Oui. C'était...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Gatineau.
Mme Vallée : En fait, je vous posais la question : Est-ce qu'on devrait
préciser clairement que le projet de loi est destiné aux grands prématurés?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme Bouvet
(Sylvie) : Bien, je pense que,
premièrement, il y a des décisions cliniques, il y a des médecins là-dedans qui sont impliqués — les
pédiatres, les néonatologistes — et puis je pense qu'il doit y
avoir des... Ces gens-là devraient être impliqués dans la décision parce qu'a
priori c'est connu que c'est d'abord et avant tout les bébés prématurés
qui en ont besoin. Donc, la démarche clinique du médecin va aller dans ce
sens-là.
Ce
qu'il faudrait plus se questionner, c'est : Qu'est-ce qu'on ferait des
excédents, si excédents il y a? Puis là, bien,
peuvent rentrer des cas d'exception. Mais d'abord les 32 semaines et moins,
ensuite des extensions à 32, 34 semaines et des situations cliniques laissées
au jugement des cliniciens.
Mme Vallée : Je vous pose ces questions-là parce qu'évidemment, nous,
ici, on a une idée en tête, on veut bien
faire, mais, comme l'avait souligné mon collègue hier, une fois que le projet
de loi est là, on doit vivre avec et on doit travailler avec ce qu'il dit et ce qu'il ne dit pas. Donc, pour éviter
des situations malencontreuses, je pense que c'est notre devoir d'essayer
de trouver la meilleure formulation qui correspondra de façon très claire à l'esprit
qui est derrière la mise
en place du projet de loi. Alors, c'est pour ça. Parce que vous me dites :
Bon, il peut y avoir des exceptions. Mais est-ce qu'on va prendre des réserves? Est-ce qu'il va y avoir des
réserves? Parce que l'objectif, c'est les grands prématurés. Donc, si on
épuise les réserves pour les donner à d'autres enfants...
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Je pense que la priorité doit... Je pense qu'il y a un cadre de priorité qui
doit rester, toujours, hein, puis c'est les 32 semaines et moins. En autant qu'on ait une
quantité suffisante, on peut l'extensionner à du 33, 34; ça reste des prématurés. S'il y avait des surplus
exponentiels, mais je ne pense pas que... Mais je pense que ça doit être
dans un cadre clinique. Bon. Ça, c'est la première chose.
Ce
qui m'interpelle, par contre, c'est l'inverse : Qu'advient-il de l'enfant
qui a une indication formelle d'avoir du lait maternel dont les parents refusent? Je pense
que ça va être un cas de figure qui va arriver, un peu comme du sang,
oui, puis là je ne sais pas si ça doit être encadré, ça.
Mme Vallée : Je vais laisser la parole à ma collègue qui...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président.
Merci, Dre Bouvet. D'après la Loi sur Héma-Québec, le ministre indemnise
toute victime d'un préjudice corporel causé par la défectuosité d'un produit
qui est distribué.
Dans
le projet de loi, on dit que n'est pas «un préjudice corporel les réactions
suivantes» et on parle de réactions qui sont
associées aux constituants normaux du lait maternel. Alors, c'est des
exceptions à l'indemnisation. Il y a l'intolérance
au lactose, il y a les entérocolites nécrosantes et les réactions allergiques.
Est-ce que vous avez une opinion là-dessus, sur les exceptions à l'indemnisation?
Est-ce qu'on devrait ajouter une autre exception? Est-ce que ces exceptions
sont acceptables et valables?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Ça relève beaucoup, beaucoup de la néonatologie et de la pédiatrie. Il reste
quand même qu'il
y a des choses. On ne peut pas prévoir une intolérance au lactose sans l'avoir
essayé, et ça existe... Il y a du lactose dans tous les laits maternels,
ça existerait... Donc, en soi, ça, à mon avis, là, c'est tout à fait pertinent.
L'autre, qui est assez
facile aussi, c'est le troisième, vous avez dit, là, les...
Mme de
Santis : Les réactions allergiques.
Mme Bouvet
(Sylvie) : Ça aussi, si on ne l'essaie
pas, on ne le sait pas. Et ça peut arriver avec n'importe qui. L'entérocolite nécrosante, tous les bébés
prématurés sont beaucoup plus à risque d'entérocolite nécrosante, et on saitque le lait maternel diminue le risque d'entérocolite
nécrosante. Alors, de faire une entérocolite nécrosante puis de conclureque c'est à cause du lait maternel de la
banque de lait, ça ne tient pas la route, là. Ça fait qu'en soi, c'est une
complication que l'enfant devait avoir — devait avoir, c'est ça — et non pas nécessairement... Mais c'est parce que c'est
quelque chose qui est probablement une maladie
grave et assez fréquente pour laquelle la nomination de cette complication-là,
qui n'est pas nécessairement en lien avec le lait maternel donné, mais
simplement que de la condition de l'enfant…
Est-ce
qu'il y en a d'autres? Je ne le sais pas. Les pédiatres pourraient répondre et
les néonatalogistes, plus. Mais la logique d'une
intolérance au lactose, d'une réaction allergique, d'une entérocolite
nécrosante, ce sont des exemples qui m'apparaissent tout à fait adéquats.
Mme de
Santis : Est-ce que vous croyez que c'est
nécessaire d'indiquer aux parents de l'enfant qu'il y a un risque qu'un enfant soit intolérant au lactose,
etc., avant qu'on accepte de donner le lait à cet enfant? Est-ce que le
parent ne devrait pas être informé?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme Bouvet
(Sylvie) : C'est un peu comme les
consentements éclairés pour les transfusions sanguines. En situation d'extrême
urgence, je ne pense pas que c'est un consentement éclairé qu'on va obtenir.
Par contre, je pense que l'allaitement maternel d'une banque, c'est quelque
chose qui est plutôt électif puis je pense que la discussion du clinicien avec
les parents devrait inclure ça.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme de
Santis : À quel moment est-ce que l'enfant
dans un incubateur a vraiment accès au lait maternel? J'imagine, c'est après qu'il n'est plus dans son incubateur, parce qu'à
ce moment-là il est nourri «intravenous». Je veux le comprendre parce
que je ne le comprends pas.
Mme Bouvet
(Sylvie) : Le lait maternel...
Le
Président (M. Bergman) :
Dre Bouvet.
Mme Bouvet
(Sylvie) : Excusez. Le lait, il n'y a
pas juste la tétée, c'est-à-dire que parfois, les prématurés, le fait d'allaiter ou le fait de téter, c'est un
exercice comme aller faire un marathon, donc un enfant prématuré n'a pas
cette énergie-là. Alors, souvent les
prématurés, quand on commence l'alimentation utilisant le tube digestif — et non pas la voie du soluté intraveineux — ils ont un petit tube de gavage pour leur éviter de faire
le marathon de l'alimentation par la tétée ou par la succion même sur une tétine. La
succion sur une tétine est plus facile que sur un mamelon, mais encore
plus facile, le gavage. Alors, ces
enfants-là, souvent, ils ont un petit tube qui se rend directement dans leur
estomac puis ils ont comme un pousse-seringue où ils vont avoir une
quantité de lait maternel ou de lait autre, de préparation lactée,
actuellement, qui leur est donnée par cette méthode-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme
de Santis : Une
autre question qui pourrait peut-être apparaître tout à fait normale à d'autres
personnes, mais que je pose quand même. Il y a
peut-être des femmes qui vont se poser la question suivante : J'ai un
enfant à allaiter, est-ce que j'aurai assez de lait pour allaiter mon propre
enfant si je vais aussi contribuer du lait à Héma-Québec?
Le Président (M.
Bergman) : Merci. Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Je suis originaire de la campagne. Mes grands-parents étaient agriculteurs. J'ai
fait les foins et tiré les vaches. Il y a des
vaches laitières qui sont meilleures que d'autres. Il y a des femmes laitières
qui sont meilleures que d'autres.
Des voix :
Ha, ha, ha!
Mme de
Santis : O.K.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Alors, c'est ça. Les quotas de lait, c'est variable selon chaque femme. Alors,
il y a des femmes qui peuvent allaiter des
jumeaux très facilement, alors qu'il y en a d'autres qui auront de la
difficulté avec un seul enfant. Mais, c'est
la vie. Il y a des femmes qui ont beaucoup de lait puis il y a des femmes qui
en ont moins, puis les femmes qui ont beaucoup de lait peuvent
facilement en donner. C'est le...
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps
pour ce bloc s'est écoulé.
Mme la députée de
Groulx pour une période de cinq minutes.
• (12 h 10) •
Mme Daneault : Merci, M. le Président. Merci, bienvenue, Dre Bouvet,
c'est très intéressant.
Alors,
si on comprend votre intervention, vous êtes favorable, évidemment, à l'élaboration
d'une banque de lait maternel. Devant moi, j'ai une étude australienne, j'ai une étude
australienne — probablement on peut faire unrapprochement avec le
Québec — où la majorité des professionnels de
la santé, 81 %, sont d'accord que le lait
maternel pasteurisé provenant des donneuses réduit la fréquence des
entérocolites nécrosantes. De plus, 78 % admettent que le lait est supérieur aux préparations commerciales.
Pourtant, 47,8 % des médecins jugent que l'implantation d'une
banque de lait n'est pas justifiée. Alors,
est-ce qu'on pourrait se retrouver dans la même situation au Québec? Est-ce qu'il
y aurait lieu, aujourd'hui, de vérifier auprès des médecins s'ils sont d'accord
ou non et surtout d'en faire la promotion, d'avoir des outils de promotion, de
formation médicale continue ou est-ce qu'il y a lieu, même, de sonder,
actuellement, la population médicale à ce sujet-là?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Bouvet.
Mme Bouvet
(Sylvie) : Je pense qu'il y en a qui
ont manqué un bout dans leurs cours de médecine.
Mme
Daneault : Oui,
mais ça, c'est en Australie, là, mais on peut supposer que c'est la même chose
au Québec.
Mme
Bouvet (Sylvie) :
Ça pourrait être la même chose au Québec. Je ne le sais pas, je ne le souhaite
pas. Mais il reste que des gens qui ont de l'expertise
dans le domaine, je ne pense pas qu'ils aient des grands doutes là-dessus, là.
Les vertus du lait maternel, tout ça, le moindrement qu'on fait juste...
Mme Daneault : On est d'accord.
Mme Bouvet (Sylvie) : ...juste faire un petit grattage comme ça, c'est prouvé,
là. D'avoir un sentiment populationnel, médical, honnêtement, je pense que ce n'est
pas nécessaire, parce que... Ce n'est pas nécessaire.
Mme
Daneault : Mais,
selon vous, il n'y aurait pas lieu d'avoir un peu de formation médicale
continue sur ce qui s'en vient, la banque de lait maternel? Est-ce que vous pensez que les
médecins, actuellement, sont informés de ce qui s'en vient ou pas
suffisamment?
Le Président (M. Bergman) : Dre Bouvet.
Mme
Bouvet (Sylvie) : Bien, de fait, il y
a un faible pourcentage des médecins qui sont confrontés à discuter d'une banque de lait maternel, là. Les pédiatres,
les néonatalogistes, des omnipraticiens qui font de l'obstétrique — puis c'est comme
1 %, 2 % des obstétriciens qui sont des médecins de famille — les sages-femmes et nous. C'est tout.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la députée.
Mme Bouvet (Sylvie) : Sur le nombre de médecins qui sont
impliqués là-dedans, c'est très, très peu par
rapport à la population des 16 000 médecins au Québec.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Groulx.
Mme
Daneault : Alors, on peut penser qu'au
Québec, ça va être bien reçu du corps médical, puis on n'a pas besoin d'aller
plus loin.
Mme
Bouvet (Sylvie) : Bien, je n'ai aucun
doute...
Mme
Daneault : Je suis d'accord avec
vous.
Mme Bouvet (Sylvie) : ...que les médecins qui travaillent
dans le domaine seront réfractaires à ça. Aucun
doute.
Mme Daneault : Excellent. Dans votre allocution de
départ, vous avez souligné, bon, évidemment, que vous étiez favorable, mais
il y a un certain moment où vous avez dit : On espère que ça va être
facilement applicable. Est-ce que vous avez des réticences ou des... J'aimerais
vous entendre par rapport à ça.
Le
Président (M. Bergman) :
Dre Bouvet.
Mme Bouvet (Sylvie) : Bien, il y a toute une logistique de
sécurité et de vigilance, hein, qui doit être
implantée, qui est un incontournable. Mais
en même temps, sur le terrain, quand tu en as besoin, il faut que ce soit
accessible puis il faut qu'on ait le produit. Donc, c'est en ce sens-là
que je disais : Aucun compromis sur la sécurité, mais en même temps il faut avoir le bon algorithme pour arriver à une
application sur le terrain, pour dire : On en a besoin, d'accord, on en a.
C'est ça que je voulais dire. Il ne faut passer des journées à remplir des
formulaires. C'est en ce sens-là.
Mme
Daneault : O.K. D'accord. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Puis il vous
reste une minute, Mme la députée de Groulx.
Mme Daneault : Il reste une minute? Bon, d'accord,
je continue. Mais je vais poursuivre un petit peu sur le fait que ça soit
facilement applicable. L'expérience… entre autres, il y a d'autres banques où
ils ont du surplus de lait, entre autres, à Calgary, c'est arrivé.
Alors, est-ce que vous nous suggériez d'étendre, bon, au-delà de 32 semaines,
de se rendre jusqu'à 34 semaines dans le
libellé de la loi, où on peut ouvrir, on ne se retrouvera pas avec des surplus
de lait puis que la loi nous impose le fait que ça soit uniquement
réservé aux 32 semaines et moins? Est-ce qu'on pourrait libeller ça
différemment, selon vous, de l'étendre jusqu'à 34 semaines si on a un surplus?
Le
Président (M. Bergman) :
Dre Bouvet.
Mme Bouvet (Sylvie) : Bien, moi, honnêtement, je pense qu'il faut faire attention
à trop restreindre les indications, parce qu'un prématuré, c'est 37 semaines et
moins... 36,6, exactement, et moins. Il y a des bébés prématurés à 35
semaines qui sont extrêmement malades, puis qui ne rentrent pas dans le 32,
puis qui ne rentrent pas dans le 34. Alors, à mon avis, la première cohorte d'importance, c'est les prématurés en bas de
32 semaines, parce que, si on regarde tous les trucs de coliques nécrosantes, là, cette gang-là, ils en
ont encore plus. Si on regarde après ça, du 32, 34, avec les surplus,
bien, c'est la deuxième gang qui en a encore plus que du 35. Mais après ça il y
aura toujours des situations… l'enfant sera prématuré,
dans une condition de naissance quasiment équivalente à un 32 semaines, pour
dire quelque chose, et qui aura besoin
de ça. Alors, ça devient de la démarche clinique puis ça devient une indication
clinique, ça devient médical comme indication, puis je pense qu'une loi
qui serait trop rigide ne servirait pas bien. Je veux dire, en médecine puis
dans bien des domaines, c'est un petit peu gris. C'est souvent gris. C'est tout
le temps gris, finalement.
Mme
Daneault : Merci.
Le Président (M. Bergman) : Malheureusement, le temps s'est
écoulé. Dre Bouvet, merci pour votre
présentation, merci d'être ici avec nous aujourd'hui.
Et
je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures aujourd'hui.
(Suspension de la séance à
12 h 15)
(Reprise
à 15 h 4)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous
plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 29, Loi modifiant la Loi sur Héma-Québec et sur le
Comité d'hémovigilance.
Alors,
cet après-midi, nous allons entendre le Mouvement Allaitement du Québec,
Préma-Québec, ainsi que le Dr Keith
Barrington, responsable de la clinique du CHU Sainte-Justine.
Alors, bienvenue. Vous
êtes notre premier groupe cet après-midi. Vous avez 10 minutes pour faire
votre présentation, suivie d'un échange avec
les membres de la commission. Alors, je vais vous donner le micro. S'il vous
plaît, faites l'identification de vous et
tous les membres de votre groupe, et vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation.
Mouvement Allaitement du Québec
Mme Petitjean
(Raphaëlle) : Merci, M. le Président. Je
suis Raphaëlle Petitjean. Je suis présidente du Mouvement Allaitement du
Québec.
Mme
Tousignant (Diane) : Bonjour, M. le Président. Je suis Diane Tousignant, consultante en
lactation pour le CHU de Québec.
Mme Couillard
(Kathleen) : Bonjour. Je suis
Kathleen Couillard, microbiologiste et coordonnatrice à la Ligue La Leche.
Mme
Piuze (Geneviève) : Bonjour. Je suis Dre Geneviève Piuze. Je suis néonatalogiste, chef
du service du CHU de Québec.
Une voix : Bienvenue.
Mme Petitjean
(Raphaëlle) : Merci. Je voudrais
commencer par remercier la Commission de la santé et des services sociaux de nous avoir invitées aujourd'hui.
Cela va nous permettre de donner le point de vue des femmes et des
intervenantes en périnatalité au niveau du projet de la banque de lait au
Québec.
Le
Mouvement Allaitement du Québec, c'est un organisme communautaire autonome. On
regroupe des individus qui sont des professionnels de la santé, des intervenants
communautaires, des bénévoles, des parents, donc c'est vraiment un ensemble de points de vue très, très différents.
Notre mission est de rendre les environnements favorables à l'allaitement.
Par exemple, on peut constater certains
manques de cohérence dans le discours face à l'allaitement. On a fait
beaucoup la promotion de l'allaitement ces
dernières années et, entre autres, ça a été axé sur les bienfaits du lait
maternel. Et, quand une mère donne
naissance à un bébé prématuré où elle sait combien c'est encore plus important
pour ce bébé-là d'avoir du lait maternel,
qu'elle est incapable de lui fournir de son lait, elle se fait répondre qu'il n'y
a aucun moyen pour elle d'avoir du lait maternel pour son enfant parce
qu'il n'y a pas de banque de lait maternel au Québec. Donc, ça, c'est un
exemple, vraiment, de manque de cohérence au niveau de la société. C'est
vraiment là-dessus que le Mouvement Allaitement du Québec veut travailler.
Ce qu'il faut
comprendre, c'est que les mères subissent énormément de pression pour allaiter,
ressentent de la pression, en tout cas, et
ce, même avant leur première grossesse. Donc, une femme, quand elle va
commencer à penser à avoir des
enfants, elle va déjà se poser la question est-ce qu'elle va pouvoir allaiter,
que c'est important ou comment ça va être
reçu par ses proches, etc. Dans ces circonstances-là, l'abandon de l'allaitement
peut être vraiment considéré comme un échec.
C'est-à-dire que la mère qui voulait vraiment allaiter son enfant vit ça, ça
peut être même... Certaines personnes vont parler de choc post-traumatique d'abandon de l'allaitement par rapport à
une dépression post-partum, à plein de choses comme ça. Si en plus l'allaitement était lié au lien d'attachement, c'est-à-dire
que la mère pensait que l'allaitement, c'était important pour créer un
lien d'attachement avec cet enfant, elle va avoir de la culpabilité de ne pas
avoir réussi. On va entendre des mots comme : Mon corps m'a abandonné, mon
corps m'a lâché, je n'ai pas été capable.
Pour
toutes ces raisons, on pense d'abord que l'information doit être donnée en
période prénatale au niveau des donneuses,
mais le recrutement de donneuses doit se faire absolument en postnatal pour ne
pas mettre de pression supplémentaire sur les
femmes. C'est-à-dire qu'elles ont déjà de la pression pour allaiter leur
enfant, il ne faut pas qu'elle ressente de la pression à donner du lait
pour les autres enfants.
L'autre
chose aussi, c'est qu'on souhaite que... C'est sûr que les bébés prioritaires
pour recevoir du lait maternel de donneuses sont les grands prématurés. On espère
aussi que, dans une deuxième phase, ce service-là sera accessible à tous les bébés nés à terme et hospitalisés et, en
bout de ligne, sera aussi également accessible à tous les nourrissons de
moins de six mois qui ne peuvent pas être
nourris exclusivement du lait de leur mère. Ça peut paraître très gros au
niveau de la demande, mais ce qu'on espère, c'est que, parallèlement à
ce développement-là, les taux d'allaitement vont considérablement augmenter au Québec, donc il y aura beaucoup moins de
difficultés d'allaitement; les environnements seront tellement plus
favorables à l'allaitement qu'il y aura beaucoup plus de femmes qui vont
allaiter de manière exclusive jusqu'à six mois, et donc on aura plus de
donneuses et moins de gens qui ont besoin de lait maternel, à ce moment-là.
Mme Tousignant (Diane) : Alors, mon intervention se situe
davantage au niveau du vécu des mères. Alors,
en étant consultante en allaitement, ça fait déjà quatre ans que j'accompagne
les mères de grands prématurés dans tout le processus
de la lactation. Autant ça peut être facile pour certaines mères, autant, pour
d'autres, c'est très difficile. Il y a, à la base, une volonté chez toutes les mères de vouloir donner ce qu'il
y a de mieux à leur bébé, mais parfois la situation fait en sorte que ce n'est pas possible pour toutes les
mères. Donc, que ce soit l'état de santé de la mère qui nuit au
démarrage de l'allaitement, que ce soit l'état
de santé du bébé qui génère beaucoup de stress chez les parents, qui a un
impact aussi sur l'allaitement, donc
certaines mères vont expérimenter beaucoup de difficultés. Et tout ce
contexte-là, bien, souvent, le fait de ne pas pouvoir donner ce qu'il y
a de mieux à son bébé, bien, ça ajoute un stress supplémentaire. Ça fait que je
pense qu'à ce moment-là... C'est sûr que, si
l'alternative des banques de lait était là, ça enlèverait une certaine pression
chez les mères, tout en les motivant
aussi, bien sûr, à poursuivre tous leurs efforts qu'elles mettent dans le
processus de la lactation. L'environnement dans lequel elles évoluent
aussi cause une difficulté très importante parce que le bébé est dans une unité de soins intensifs, elles sont dépossédées
de leur bébé, elles n'ont pas accès nécessairement autant qu'elles
voudraient.
Donc,
tout ça pour en arriver à dire que, ces mères-là, c'est possible de fournir du
lait à leur bébé. Ce n'est pas possible pour toutes les mères d'avoir des
quantités suffisantes. C'est des mères aussi qui nécessitent beaucoup d'aide,
beaucoup de soutien et beaucoup d'accompagnement
pendant tout le processus de la lactation, qui parfois peut durer quand
même plusieurs mois.
Ça fait que je pense
que les banques de lait, c'est quelque chose qui est très important, justement,
pour être cohérents — un peu comme Raphaëlle disait — avec le message qu'on envoie aux mères, avec l'importance
qu'on donne au lait maternel pour le bébé
prématuré.
• (15 h 10) •
Mme Petitjean
(Raphaëlle) : Est-ce que tu pourrais
juste expliquer c'est quoi, une consultante en lactation diplômée de l'IBCLC?
Mme
Tousignant (Diane) : Ah oui! Parfait. Alors, la consultante en lactation, dans le fond, c'est
uneprofessionnelle
de la santé qui a répondu aux exigences de l'IBLCE, qui est International Board
of Lactation Consultant Examiners.
Donc, on doit être un professionnel de la santé, on doit avoir
1 000 heures de contact clientèle en allaitement, on doit avoir un minimum de 90 heures de
formation en allaitement pour avoir le droit de se présenter à l'examen
international, qui a lieu une fois par année partout dans le monde en même
temps.
Et,
lorsqu'on réussit cet examen-là, bien, on a le diplôme ou la certification d'IBCLC,
dans le fond. Donc, c'est des spécialistes de l'allaitement qui sont formés pour
accompagner de la période prénatale jusqu'à l'allaitement du bambin dans
les situations au quotidien comme dans les situations plus complexes.
Mme
Piuze (Geneviève) : Oui, bonjour. Moi, je vais vous présenter un peu le point de vue
médical. C'est sûr que, comme médecin
néonatalogiste, je travaille quotidiennement avec toutes sortes de petits bébés
vulnérables, que ce soient des enfants nés à terme qui ont des malformations,
des problèmes intestinaux ou des nouveau-nés prématurés, qui sont
malheureusement trop nombreux dans nos hôpitaux, mais c'est une réalité.
Alors,
je sais que, du point de vue du médecin, on travaille toujours à l'amélioration
de nos soins, à donner les meilleurs soins à nos petits bébés. Puis une des
interventions qui sont les plus efficaces en néonatalogie pour améliorer
le devenir, améliorer la santé de nos petits
bébés, eh bien, c'est de leur procurer du lait maternel. Donc, le lait
maternel, c'est une des choses sur
lesquelles on travaille le plus avec, justement, nos consultantes en
allaitement, avec la promotion de l'allaitement, en expliquant tous les
bienfaits aux parents, et particulièrement quand il s'agit d'enfants prématurés
ou d'enfants avec des intestins vulnérables.
Donc,
les avantages, je vais vous les énumérer sommairement, mais, entre autres, on
le sait que les petits bébés prématurés ont beaucoup de difficulté à digérer,
hein, ils ont un intestin immature qui n'est pas fait pour prendre du lait.
Par contre, si on leur mettait une
intraveineuse, bien, il y aurait des conséquences à ça. On ne peut pas laisser
l'intraveineuse plus longtemps qu'il n'est nécessaire. Donc, on veut qu'ils
puissent digérer, puis la substance la mieux adaptée à leurs besoins, c'est le
lait maternel, qui va aider l'intestin à maturer, à se développer. Le lait est
plus facile à digérer.
Puis
on sait qu'une des maladies très graves que les petits prématurés ont, c'est l'entérocolite
nécrosante. Ça, c'est une inflammation de l'intestin qui peut amener à des complications très
graves, dont des opérations puis même le décès, malheureusement, dans
presque un quart des cas. Donc, on sait que le lait maternel protège les petits
bébés, donc diminue les risques qu'ils
développent une entérocolite nécrosante, quelque chose qui est très important.
C'est une maladie grave qui engendre aussi beaucoup de coûts de santé et
d'utilisation de ressources.
Ensuite, on sait que
le lait maternel a des facteurs immunologiques aussi, donc protège contre les
infections, diminue les risques d'infections
graves chez nos petits bébés vulnérables, diminue la colonisation avec des
pathogènes méchants, donc les pathogènes les plus graves, et puis ça va aussi
réduire les hospitalisations.
Donc, il y a aussi des
effets à long terme, particulièrement sur le développement cognitif. Donc, il y
a une supériorité claire du lait maternel
par rapport aux formules, qui est la seule alternative que nous avons
actuellement quand les mamans sont
dans l'impossibilité de donner leur lait. Alors, pour nous, c'est quelque chose
d'inestimable de pouvoir avoir un
substitut pour les mamans qui ne sont pas capables de donner, pendant une
période, leur lait, ou pas complètement... le lait maternel. Donc, les
banques de lait, pour nous, c'est très important.
Mme Couillard
(Kathleen) : Alors, bonjour. Moi, je
vais apporter plus le point de vue des...
Le Président (M.
Bergman) : ...30 secondes.
Mme Couillard (Kathleen) : ...bien, le point de vue des
organismes communautaires. Nous, on a beaucoup
de mères qui veulent donner du lait qui nous
contactent souvent. Alors, des donneuses, il y en a, alors il ne faudrait pas
aller juste vers les mères qui donnent du
sang de cordon, mais aussi aller vers les autres mères qui seraient très
intéressées et rendre aussi le don de lait facile. Donc, les collectes à
domicile, c'est vraiment très bien.
Et
finalement c'est quelque chose de complexe, c'est quelque chose qui a un gros
côté humain, alors on aimerait que les
organismes communautaires aussi puissent être consultés dans l'élaboration de
cette banque-là pour vraiment répondre aux besoins des mères. Alors, voilà.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, merci pour votre présentation. On vous remercie beaucoup. Et maintenant c'est le bloc du gouvernement, et M. le
ministre.
M.
Hébert : Bien, d'abord,
merci beaucoup. Merci d'être là aujourd'hui, merci d'avoir été là pour soutenir
ce projet jusqu'à
ce qu'on puisse le présenter à l'Assemblée nationale. Vous avez été parmi les
promoteurs de ce projet-là, puis je vous en remercie. Vous avez joué un
rôle extrêmement important.
J'aimerais
revenir un petit peu sur les effets. Vous avez parlé d'entérocolite nécrosante,
Dre Piuze, j'aimerais que vous nous en disiez un petit peu plus pour le
bénéfice des gens qui ne sont pas médecins et qui nous écoutent
actuellement. Qu'est-ce qu'on veut prévenir
au juste et quelles sont, dans le détail, les conséquences, là, que vivent les
bébés prématurés et que le lait maternel pourrait contribuer à diminuer
ou même à éliminer?
Le Président (M.
Bergman) : Dre Piuze.
Mme
Piuze (Geneviève) : O.K. Merci. Alors, l'entérocolite nécrosante, comme je l'ai dit, c'est
une maladie qui est surtout chez les nouveau-nés prématurés. En fait, c'est rare chez
les nouveau-nés qui sont à terme. Donc, plus l'enfant est prématuré,
plus il est à risque de développer ce problème-là.
Il
n'y a pas une cause unique à l'entérocolite nécrosante, c'est multifactoriel. C'est
causé par le fait qu'on est petit, qu'on est
vulnérable, qu'on attrape facilement des infections, que l'intestin est
immature, plus perméable, a plus de difficulté
à tolérer les substances hyperosmolaires. Donc, il y a un ensemble de facteurs
qui vont faire que l'intestin va s'irriter
puis après ça s'infecter. Puis, une fois que l'intestin est malade comme ça,
bien, il peut aller jusqu'à se nécroser, c'est-à-dire qu'il y a des
bouts d'intestin qui peuvent mourir, donc ne plus fonctionner.
Donc, quand notre
intestin devient malade comme ça, le petit bébé vient vraiment pas bien. Il
peut devenir ballonné, vomir, peut devenir
tout pâle, bradycarde, puis il peut même mourir d'un choc quand ça arrive.
Parfois, ça se présente même de façon
très fulminante, avec une perforation de l'intestin. Donc, le petit bébé est
obligé d'aller de toute urgence au bloc opératoire, et puis des fois on
est obligés d'enlever un bout d'intestin. En fait, souvent, quand ils finissent
par aller au bloc opératoire, on enlève un bout d'intestin, on est obligés de
mettre un sac. Ces petits bébés là peuvent
avoir un sac. Comme le dernier que j'ai eu, il y a deux semaines, qui a
perforé, on a été obligés même de mettre quatre stomies, donc quatre petits bouts d'intestin qui sortaient, sur
son ventre. Puis c'est un prématuré de 24 semaines, donc c'est très
grave.
Puis,
en plus, bien, dans le moment où ça survient, c'est souvent quand ils ont
quelques semaines de vie, donc un moment où on
a l'impression que, bon, l'instabilité de la première semaine est passée, il y
a un peu de lumière au bout du tunnel pour
les parents, puis là — woups! — cette complication-là. Puis c'est une complication très
grave aussi dans le sens où, quand l'enfant fait un choc, le sang circule mal, donc il peut
avoir moins d'apport de sang à son cerveau. Ça peut même occasionner des trous dans le cerveau, donc
des séquelles neurologiques graves aussi quand ça se produit puis que c'est une forme fulminante. Donc, c'est une maladie
dont on a très peur, nous, les néonatalogistes parce qu'on le sait que,
quand ça survient, ça compromet vraiment le devenir de l'enfant, ça augmente
son risque de mourir, mais son risque d'avoir des séquelles s'il survit aussi.
Donc, dans le discours qu'on fait aux parents,
quand on les rencontre… Idéalement, les parents, quand l'accouchement ne
survient pas de façon trop brusque en se présentant à l'hôpital, bien, on les
rencontre avant la naissance quand ils sont à risque de donner naissance prématurément,
puis on leur parle de toutes sortes de choses que peut impliquer la prématurité, mais entre autres on leur demande si
c'était prévu d'allaiter. Puis, si ce n'était pas le cas, bien, on leur
explique tous les bienfaits qu'il y aurait à extraire leur lait puis à donner
le lait de maman, sans les obliger à le faire, mais c'est important qu'ils
soient au courant de tous les bénéfices. Alors, le lait de la mère, on ne sait
pas exactement par quel mécanisme ça
fonctionne, mais il y a plusieurs études très bien faites, randomisées,
contrôlées qui montrent, quand on exclut les autres facteurs
confondants, que les enfants qui n'ont reçu que du lait maternel sont moins à
risque d'avoir une entérocolite nécrosante, puis ça semble proportionnel à la
quantité de lait maternel qu'ils ont reçu en proportion de la formule.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert : Merci beaucoup. Mme Couillard, j'aimerais vous
entendre sur les risques que pourrait avoir l'administration
de lait maternel provenant d'une autre mère, donc d'une banque de lait
maternel. Quels sont les risques en termes de transmission des
infections et comment est-ce qu'on peut juguler ces risques-là ou les diminuer?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Couillard.
• (15 h 20) •
Mme Couillard
(Kathleen) :
Bien, dans le cadre d'une banque de lait, comme celle qu'Héma-Québec propose, en fait, les
risques sont assez faibles puisque, premièrement, les donneuses doivent passer
des tests pour montrer qu'elles ne sont pas porteuses de certains virus
qui sont transmissibles par le lait maternel, pour s'assurer aussi qu'il n'y a
pas certaines substances qui peuvent être
données aux nouveau-nés — par exemple,
on va exclure les mères qui sont fumeuses, les
mères qui consomment de l'alcool — et par la suite,
donc, pour avoir une sécurité supplémentaire, ce lait-là est pasteurisé. Donc, de cette façon-là, on élimine
les pathogènes possibles. Et bien sûr Héma-Québec a l'expertise qu'il
faut pour s'assurer que les procédures de toute la manipulation de lait se fait
dans un contexte qui est sécuritaire et où il n'y aura pas introduction de
pathogènes supplémentaires juste par le traitement du lait lui-même.
Alors, dans le cadre d'une banque de lait
comme ça, on a vraiment une option sécuritaire pour les mères, contrairement à ce qui se fait, malheureusement, parfois
dans les échanges informels de lait entre des mères qui se connaissent et qui, des fois… on peut avoir
justement une mère qui pourrait être infectée par quelque chose sans le
savoir, et là il n'y a pas de traitement, il n'y a pas de tests qui sont faits.
Alors, une banque de lait telle que proposée par Héma-Québec, c'est vraiment l'option
la plus sécuritaire pour le bébé par la suite.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M.
Hébert : Et, quand on pasteurise,
est-ce que ça diminue les propriétés bienfaisantes du lait maternel?
Mme Couillard (Kathleen) : Bien, on sait que certaines
propriétés du lait vont effectivement être perdues puisque le traitement à
la chaleur va détruire certaines molécules, mais une grande majorité des
propriétés sont conservées. Et c'est sûr
que le lait de la mère non pasteurisé est toujours la meilleure option, mais,
si on est dans un cas où la mère nepeut
pas fournir de lait ou ne peut pas en fournir assez, même en perdant quelques
propriétés, le lait maternel de donneuses pasteurisé est encore
nettement supérieur aux préparations commerciales pour nourrissons qui existent
actuellement.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : J'aimerais entendre
Mme Tousignant, qui a accompagné plusieurs femmes. Quelle est l'acceptabilité pour
une femme, une mère d'utiliser du lait d'une autre personne pour nourrir son
bébé? Est-ce que vous entrevoyez des problèmes au niveau de l'acceptabilité
d'une telle proposition?
Le
Président (M. Bergman) :
Mme Tousignant.
Mme Tousignant (Diane) : Je ne peux pas répondre pour toutes
les mères, mais je vous dirais que je pense
que beaucoup de mères seraient soulagées,
dans un sens, parce qu'elles sauraient que leur bébé reçoit ce qu'il y a de
mieux. Puis ça pourrait un peu compenser pour la partie qu'elle, elle n'est pas
capable de fournir, et ça viendrait probablement la motiver davantage à poursuivre tout l'effort qu'elle met pour travailler
sur sa production. Parce que les mères mettent énormément d'efforts pour parfois des quantités qui sont vraiment, en
tout cas, très, très minimes. Elles vont poursuivre des semaines et des
semaines pour offrir peut-être ne serait-ce que 25 % de l'apport total du
bébé en lait maternel.
Alors, je pense que cette mère-là aurait
peut-être un soulagement, je pourrais dire, une diminution de la pression, en tout cas,
en sachant que, malgré tous les efforts qu'elle fait, bien, son bébé reçoit
quand même du lait humain. Puis, en leur expliquant ce que Mme Couillard vient de dire, que c'est du lait
qui est pasteurisé, que c'est des mères qui ont subi des tests, qu'il y
a un contrôle sur la qualité du produit, bien, je pense que ça le rend
sécuritaire.
Le
Président (M. Bergman) : M. le
ministre.
M. Hébert : Et ma dernière question avant de passer la parole à mes collègues, c'est…
La loi prévoit un processus d'indemnisation qui exclut un certain nombre de
conditions où Héma-Québec ne serait pas tenue responsable, par exemple, l'entérocolite nécrosante, l'intolérance au
lactose et les allergies. Est-ce que, pour vous, ça semble approprié d'exclure
ces conditions-là dans le processus d'indemnisation?
Et est-ce qu'on devrait ajouter d'autres conditions à cette exclusion?
Le
Président (M. Bergman) : Madame...
Mme Piuze (Geneviève) : Je peux parler du point de vue
médical. C'est certain qu'il y a des enfants allaités par le lait de leur
mère qui font des entérocolites nécrosantes. Donc, on ne peut pas imputer la
faute au lait de donneuse si un enfant développe une entérocolite
nécrosante. Donc, je pense que c'est tout à fait approprié qu'il y ait une
décharge, ça ne se trouve pas à être un effet secondaire. En fait, c'est un
facteur de protection, mais ça ne met pas le risque à zéro, clairement.
Même chose pour les allergies, il y a des
enfants qui développent des formes d'allergie au lait de leur mère à cause de ce que la
maman consomme, particulièrement les protéines bovines, qui est la plus
fréquente. Les allergies ne sont quand même pas quelque chose de
fréquent en néonatalogie. Généralement, le système immunitaire est trop
immature pour faire ne serait-ce qu'une
réaction allergique. Mais parfois il y a des problèmes d'intolérance digestive
qu'on attribue au contenu du lait,
même du lait frais de la mère. Donc, je pense qu'encore là on ne peut pas le
voir comme un effet secondaire au même titre qu'une réaction
transfusionnelle, par exemple, là.
M.
Hébert : Est-ce
qu'il y a d'autres conditions qu'on devrait ajouter à cette liste de trois? En
voyez-vous d'autres?
Mme Piuze
(Geneviève) : C'est
une bonne question. Vous me prenez sur le vif, là. Puis c'est quoi, la troisième? Ils parlaient...
M. Hébert : Bien, c'est les allergies,
intolérance au lactose et puis entérocolite qui ne seraient pas attribuables à une négligence d'Héma-Québec, là.
Mme Piuze (Geneviève) : Bien, il y a aussi... Je veux dire,
un des arguments pour utiliser du lait maternel,
c'est que ça diminue les septicémies. Mais les septicémies — c'est les infections, là, généralisées ou dans le
sang, là, chez n'importe qui — mais les septicémies
néonatales, c'est sûr que les enfants vont en faire quand même. Rares sont les prématurés qui ne font pas au moins une septicémie
pendant leur hospitalisation, même s'ils ont du lait de leur mère. Donc,
ça diminue l'incidence, diminue la sévérité, ça les protège et c'est un facteur
de protection, mais, malheureusement, ça ne les réduira pas à zéro.
Mme Petitjean (Raphaëlle) : Je voudrais juste ajouter qu'au niveau
des préparations commerciales pournourrissons il y a régulièrement des rappels, qu'il
peut y avoir aussi des problèmes, que ça soit au niveau de la
préparation, de l'entreposage ou de la fabrication,
donc ce n'est pas un lait qui est sûr à 100 % non plus. Et puis, juste
pour ajouter par rapport au fait qu'une mère accepterait que le lait d'une
autre mère soit donné à son enfant, souvent les gens oublient que les préparations commerciales pour
nourrissons, c'est fait à partir de lait de vache, donc d'une autre espèce
mammifère que l'humain. Donc, ça relativise un petit peu ce genre de questions.
M.
Hébert : C'est vrai.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le Président. Alors,
bonjour, mesdames, Mme Petitjean. C'est très intéressant de vous entendre. Je
trouve qu'on a une diversité de points de vue… c'est-à-dire une
complémentarité, plutôt, de points de vue, là, autant des groupes
communautaires que du point de vue médical. Alors, c'est très, très
enrichissant de vous entendre.
Moi,
Mme Petitjean, je voudrais revenir au mémoire que vous avez déposé et dans
la partie qui traite de vos recommandations.
Et, dans les recommandations, vous recommandez effectivement de confier à
Héma-Québec l'implantation d'une banque de lait maternel au Québec, et,
plus spécifiquement, vous recommandez qu'Héma-Québec développe et maintienne un partenariat avec un ou des organismes
communautaires en périnatalité afin de valider les communications qui seront faites auprès des donneuses
potentielles et des familles receveuses. J'aimerais que vous m'expliquiez un
peu, quand vous parlez des organismes communautaires en périnatalité, de quel
type d'organismes il s'agit. Et, quand vous mentionnez que vous recommandez que
ces organismes puissent intervenir pour valider les communications, de quel
type de communications vous parlez? Est-ce que vous parlez de sensibilisation,
d'information et... Pouvez-vous nous expliquer un peu?
Le
Président (M. Bergman) :
Mme Petitjean.
Mme
Petitjean (Raphaëlle) : Parfait. Je
vais répondre à la première question, sur les différents organismes communautaires. Les organismes communautaires en
périnatalité, il y en a quatre qui sont au niveau provincial : il y
a le Regroupement Naissance-Renaissance, qui
s'occupe d'humanisation des naissances et qui a un volet allaitement; il y
a la Fédération québécoise Nourri-Source,
qui est un regroupement d'organismes en allaitement; il y a la Ligue La
Leche, qui est un organisme de soutien et d'entraide
en allaitement également; et il y a le Mouvement Allaitement du Québec,
qui a peut-être un mandat très spécifique en
allaitement, mais qui englobe plus les professionnels de la santé, donc ce
n'est pas uniquement des bénévoles qui sont là. À Héma-Québec de voir avec
lequel de ces quatre partenaires — j'ai pu en oublier — ils souhaiteraient travailler.
Au niveau de s'assurer que les discours sont
conformes aux attentes, il y a eu beaucoup, beaucoup de réactions dans les
médias sociaux, entre autres, de mères, de femmes qui sont frustrées, qui n'ont
pas réussi à allaiter ou qui n'ont pas choisi d'allaiter et qui se font ostraciser parce qu'elles n'allaitent pas. Je
prends un exemple d'une jeune femme qui est atteinte du VIH. Sa famille
n'est pas au courant. Elle a 30 ans, elle a fait des études, elle est
vraiment dans le lieu où 95 %, 98 % des
femmes comme elle allaitent; elle, elle n'allaite pas. Elle ne va pas dire d'un
seul coup : Bien, moi, je n'allaite pas parce que j'ai le VIH.
Donc, elle va dire : Bien, moi, je n'ai pas envie d'allaiter.
Donc, il y a beaucoup de bonnes raisons de ne
pas allaiter. Ça peut être des abus sexuels qui ont été subis aussi précédemment qui font qu'on a un rapport au corps
complètement faussé. Il y a des tas de bonnes raisons de ne pas allaiter et il y a beaucoup, beaucoup de femmes
qui... Il y a très peu de femmes, en fait, qui choisissent de ne pas
allaiter. Il n'y a qu'à voir le taux d'allaitement à la sortie de l'hôpital, le
taux d'allaitement trois mois puis six mois après. Les femmes abandonnent l'allaitement pour toutes sortes de raisons :
par manque de soutien, entre autres; par, des fois, certaines pratiques hospitalières qui ont interféré par
rapport à la mise en place de la lactation; ça peut être aussi des femmes
qui n'osent pas sortir et allaiter en public
leur enfant, donc qui se sentent enfermées chez elles avec leur enfant et donc
qui arrêtent l'allaitement pour pouvoir
reprendre une vie sociale normale. C'est tous ces facteurs-là sur lesquels il
faut jouer.
•
(15 h 30) •
Donc,
afin de faire attention de ne pas mettre de pression supplémentaire sur les
femmes, que non seulement il faut qu'elles allaitent leurs enfants, mais en
plus il faut qu'elles donnent leur lait. Il faut vraiment faire attention d'offrir
ça comme une possibilité et de ne pas les pousser à les faire, en fait.
Le Président (M. Bergman) : Mme la députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui. En même temps que vous dites ça,
j'imagine que c'est important aussi de mieux informer à quel point ça peut
être précieux, un don de lait, pour un bébé prématuré qui n'est pas celui de la
femme donneuse. Donc, quand vous
dites... Et je comprends tout à fait, là, de ne pas mettre une pression
supplémentaire pour inciter les femmes à allaiter. En même temps, c'est
certainement important aussi de mieux les informer sur, en fait, pratiquement
le don de vie qu'elles peuvent faire à travers un don de lait.
Le
Président (M. Bergman) : Mme
Petitjean.
Mme
Petitjean (Raphaëlle) : ...donner son
lait, donner la santé. Il faut comprendre que c'est des femmes qui allaitent, donc qui sont convaincues des bienfaits
de l'allaitement. On n'a pas besoin de les convaincre pour ça. Au niveau
de la Ligue La Leche, par exemple, et il y a
nos ressources, c'est vrai aussi, on reçoit des appels de mères qui
disent : J'ai trop de lait, je
le jette, ça coule tout seul. Est-ce que je peux le donner à une mère? On le
sait entre mères, puis vraiment, le
don de lait, c'est une entraide, c'est un soutien entre femmes. C'est vraiment
ça, là, c'est un partage de richesse. Il y en a qui en ont plus que d'autres,
il y en a qui en ont moins.
De convaincre les gens, ce n'est pas difficile.
C'est de leur donner l'information que, si elles souhaitent donner leur lait, elles peuvent se tourner vers tel ou tel
organisme, qu'elles contactent telle personne, que ça se passera de telle façon. Mais, dans la mesure où, même pour un
deuxième ou un troisième enfant, on n'a aucune idée de savoir comment la
lactation va se passer, une femme, de toute façon, ne peut pas décider de
donner son lait en prénatal. Tant que la montée
de lait n'est pas là, elle ne sait pas combien elle va en produire, si elle
aura elle-même des difficultés et comment ça va se passer.
Par contre, donner de l'information...
Puis il peut y avoir des femmes aussi qui choisissent de continuer de fumer pendant l'allaitement ou de boire de l'alcool de
temps à autre, et ces femmes-là pourraient vouloir donner leur lait. Mais il faut qu'elles sachent en prénatal, bien,
si vous voulez donner votre lait, là, c'est zéro médicament, zéro alcool,
zéro cigarette. C'est des choix ensuite qu'elles ont à faire. Ce n'est pas
mettre de la pression, c'est vraiment d'informer c'est quoi les conséquences
dans un cas comme dans l'autre, que ça existe, que ça peut être fait.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Oui, et j'ai une dernière question. Peut-être
que Mme Tousignant va être mieux placée pour
me répondre. En fait, toujours dans les recommandations du Mouvement
Allaitement Québec, on recommande aussi que les mères de prématurés soient
accompagnées de façon adéquate par une consultante en lactation certifiée
IBCLC. Alors, est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que c'est qu'une
consultante en lactation certifiée?
Le
Président (M. Bergman) : Mme
Tousignant.
Mme Tousignant (Diane) : Merci, M. le Président. Bien, c'est ce
que j'expliquais tout à l'heure, c'est laprofessionnelle de la santé qui a répondu aux
exigences de l'IBLCE, donc International Board of Lactation Consultant
Examiners. Excusez mon accent anglais. Donc, on a à répondre à certains
critères, qui sont 1 000 heures de contact clientèle en allaitement, 90 heures de formation, être un professionnel
de la santé et se présenter à l'examen international qui a lieu une fois par année partout dans le monde en
même temps. Donc, on se prépare en étudiant tout l'allaitement, de la période de préconception jusqu'à l'allaitement du
bambin, tous les aspects qui touchent l'allaitement :
physiopathologie, biologie, le psychosocial,
etc. Et, lorsqu'on réussit l'examen, là on est ce qu'on appelle IBCLC, c'est-à-dire
une spécialiste de l'allaitement
reconnue. Donc, on a les critères. On a eu la formation et on possède les
connaissances et les compétences pour soutenir les mères dans les
situations plus complexes, entre autres l'allaitement d'un bébé prématuré.
Le
Président (M. Bergman) : M. le député
d'Argenteuil.
M. Richer : Merci, M. le Président. Merci beaucoup
de la présentation. C'est très intéressant. Je suisparticulièrement
sensibilisé au problème des grands prématurés parce que, comme orthopédagogue,
j'ai eu à travailler souvent avec des
enfants qui avaient des retards de développement, toutes sortes de difficultés,
et, quand on regardait le dossier, on arrivait au début pour constater
que ça a été un bébé prématuré, donc les problèmes avaient souvent suivi, d'où
mon grand intérêt.
La question que je me posais... Vous avez
parlé des mères qui aimeraient allaiter ou les mères d'un bébé prématuré qui auraient besoin de recevoir, et vous avez
parlé aussi un peu de partage. Ma question, c'est surtout aux futures mères donneuses. Est-ce que, dans les gens que
vous rencontrez, est-ce que les mères sont déjà très sensibilisées, vous
prévoyez que ce sera relativement facile de recruter des mères donneuses, même
si, elles, n'ont pas besoin, ce ne sont pas des mères d'enfants prématurés, tu
sais? Les mères sont déjà sensibilisées à ça?
Le
Président (M. Bergman) : Mme
Couillard.
Mme Couillard (Kathleen) : Oui. Donc, nous, à la Ligue La Leche,
on reçoit vraiment, vraiment souvent des courriels, des appels de mères qui ont trop de
lait puis qui veulent en donner. Et puis là, malheureusement, pour l'instant,
ce qu'on leur dit, c'est que ce n'est pas possible parce qu'il n'y a pas de
banque de lait au Québec.
Donc,
on sait qu'il y a beaucoup de mères qui sont prêtes à donner du lait. Il y a
des études qui ont été faites ailleurs dans
le monde, qui démontrent que, quand on demande aux mères : Est-ce que vous
seriez prêtes à donner votre lait?,
elles disent : Oui, si c'est simple et pas compliqué. Donc, c'est
important d'avoir un bon système, justement, pour aller collecter le
lait et de rendre ça facile pour les mères.
Et
puis ce matin encore je voyais des nouvelles de la banque de lait de Calgary,
qui récoltent vraiment beaucoup de lait, qui
ont un très, très grand succès et qui ont vraiment plus que ce qu'ils s'attendaient.
Alors, oui, il y a vraiment des mères qui sont prêtes à le faire.
Souvent,
les mères qui ont allaité aussi savent qu'est-ce que ça représente, elles
comprennent qu'est-ce que c'est pour une mère qui essaie d'avoir une production de lait
suffisante et qui n'y arrive pas. Alors, il y a une grande solidarité
entre les femmes et cette volonté-là d'aider des mères à avoir du lait pour
leur bébé prématuré.
Alors,
nous, on n'a pas d'inquiétude là-dessus, qu'il va être possible de recruter
suffisamment de donneuses pour les besoins, et surtout qu'au départ on se concentre
surtout sur... la banque va être surtout priorisée pour les bébés
prématurés. Et les bébés prématurés ont un très, très petit estomac, donc c'est
des très petites quantités qu'on parle. Alors, de cette façon-là, ça va être
possible d'aller chercher suffisamment de donneuses.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député d'Argenteuil,
il vous reste 2 min 30 s.
M. Richer : Ça va pour moi. Peut-être que...
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée d'Iberville.
Mme
Bouillé : Merci.
Merci aussi pour votre présentation. C'est un dossier qui nous intéresse particulièrement et qui nous interpelle. On y croit
beaucoup, dans la banque.
J'aimerais
avoir votre opinion. Est-ce que, pour vous, ça semblerait préférable que le
lait qui est donné à un prématuré, à un
grand prématuré, soit de la même donneuse ou si ce serait comme un mélange de
lait, je m'explique, là, que ça soit un lait «poolé», si on veut, de
différentes donneuses?
Mme
Couillard (Kathleen) : Bien, ce qui se fait dans d'autres banques dans le monde, c'est
effectivement qu'on va mélanger le lait de plusieurs mères pour essayer d'avoir quelque chose d'uniforme,
parce qu'on sait que la composition du lait change vraiment beaucoup d'une
mère à l'autre, au fur et à mesure que la lactation progresse et même dans une même journée. Donc, c'est des choses qui se font
dans d'autres banques. Je crois cependant qu'Héma-Québec a privilégié de
ne pas faire ça pour avoir une meilleure traçabilité. Si, par exemple, il
survenait un problème, bien là c'est plus facile d'identifier exactement d'où
provient, disons, la contamination ou des choses comme ça. Alors, je crois qu'Héma-Québec
va privilégier plutôt une autre façon de faire, mais c'est effectivement
quelque chose qui se fait dans d'autres banques dans le monde.
Le Président (M.
Bergman) : Alors, pour le bloc de l'opposition
officielle, M. le député de Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. D'abord, merci d'être ici puis surtout
félicitations pour le travail que vous faites.
Je pense qu'au cours des dernières décennies le Québec a beaucoup avancé au
niveau de l'allaitement maternel. Puis je me
souviens d'avoir assisté à une activité à Montréal, vous aviez une salle pleine
de gens, la Journée de l'allaitement, où les gens faisaient la
promotion. Et ça change quelque chose pour la vie de ces gens-là, autant pour
le lien maternel ou le lien même, je dirais,
à la limite, paternel, parce que c'est une question familiale, je pense que ça
nous permet d'avoir des enfants en meilleure santé.
Je
commencerais peut-être par Mme Tousignant parce que ça a l'air une profession
extrêmement intéressante. Il y a combien de
personnes certifiées au Québec qui font votre travail?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Tousignant.
Mme
Tousignant (Diane) : Merci. Je n'ai pas le nombre exact. Ça se situe tout près de 200, si ma
mémoire est bonne, de consultantes en
lactation, là, certifiées IBCLC.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Puis est-ce qu'on peut
penser que c'est dans toutes les régions ou c'est vraiment dans plus les
centres spécialisés?
Mme
Tousignant (Diane) : Il n'y en a malheureusement pas dans toutes les régions. Il y a une
forte concentration pour la région de
Montréal, Laval et la Rive-Sud. À Québec, on est peut-être, je vous dirais
comme ça, 15 ou 20, puis il y en a un petit
peu dans certaines régions. Mais je pense que c'est une profession qui est en
pleine expansion parce qu'on est de
plus en plus connues et on intervient de plus en plus aussi, là, avec les
équipes multidisciplinaires. Donc, on travaille
beaucoup avec les médecins, avec les pédiatres, on travaille avec les
orthophonistes. Donc, je pense que, comme je le dis, pour recruter des
nouvelles collègues, on est une profession en pleine expansion.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
• (15 h 40) •
M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, puis je vais vous faire part de
mon expérience personnelle. Moi, je suis un
médecin qui faisait de la pouponnière, c'est-à-dire
que, quand vous êtes un médecin de famille, vous allez à la pouponnière,
vous vous occupez des bébés, là, que,
souvent, les gynécologues ont accouchés. Et puis c'est nos infirmières, qui en
faisaient beaucoup, qui faisaient le conseil
au niveau des parents. C'est un art, hein? C'est parce qu'il y a une façon de
travailler ça, et puis je pense qu'elles
faisaient un travail merveilleux. Puis il faut leur rendre hommage parce qu'il
faut de la patience, surtout que, de temps en temps, il y a beaucoup de
gens qui y croient, il y a des gens qui y croient moins puis, dès qu'ils ont une difficulté, ça devient une raison
pour abandonner. Et puis je pense qu'à ce moment-là ce n'est pas
nécessairement bon pour le bébé.
Pour
continuer un peu sur votre profession, y a-tu des programmes de formation qui
se donnent au Québec ou c'est une formation
que vous suivez par vous-mêmes? C'est quoi, l'orientation de la profession?
Le Président (M.
Bergman) : Mme Tousignant.
Mme
Tousignant (Diane) : Pour l'instant, il n'y a pas de cursus scolaire au niveau du ministère
de l'Éducation. Il y a deux écoles, deux
organismes qui donnent une formation. C'est plus dans le domaine du privé.
Donc, on peut s'inscrire et suivre un programme de formation qui nous prépare,
dans le fond, à l'examen ou on peut aussi l'étudier nous autres mêmes.
Comme
moi, j'ai fait partie d'un groupe d'étude chapeauté par d'autres consultantes.
Donc, on a étudié en groupe, on s'est préparées et on a passé l'examen. Et là
je regarde l'éventualité de partir un groupe d'études en septembre aussi
dans mon centre pour former de la relève. Ça fait qu'on peut se préparer
soi-même, en autant qu'au moment où on s'inscrit à l'examen on répond aux
critères que j'ai énumérés un peu plus tôt. Mais il n'y a rien de chapeauté.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Mon autre question, c'est que moi, je vois que, vous, vous êtes
infirmière : Est-ce que c'est un travail
qui est réservé à des infirmières qui vont chercher la formation, ou d'autres
types de profession, ou n'importe quelle personne qui est intéressée pourrait
aller chercher la formation?
Mme
Tousignant (Diane) : Un des critères, c'est d'être un professionnel de la santé. Il faut
avoir une certaine base en biologie, en
physiopathologie ou en biochimie. Donc, c'est ouvert surtout aux professionnels
de la santé, mais pas seulement les
infirmières. Donc, il y a des pharmaciens, pharmaciennes qui sont consultants
en allaitement. Ça peut être un médecin, ça peut être un ergothérapeute,
physiothérapeute, il y a des nutrionnistes.
Auparavant,
voilà quelques années, les bénévoles en allaitement pouvaient aussi devenir
consultantes, à condition d'aller se chercher une formation complémentaire
dans certains domaines, là, de la santé. Mais, maintenant, il faut être
une profession reconnue dans le domaine de la santé.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Maintenant, pour Mme Petitjean, vous avez
parlé tantôt un petit peu de l'inquiétude que vous aviez, hein, par rapport que ça soit un don
volontaire. Puis ce que j'ai compris par la suite dans vos remarques, en
tout cas quand on regarde l'ensemble, là, c'est que vous avez l'air de dire que
ce ne sera pas un problème de faire du recrutement pour des gens qui vont
offrir leur lait.
Moi,
ma question, c'est : Qu'est-ce que ça implique pour la personne qui décide
de donner leur lait? Ça doit être un petit plus que juste la personne qui dit : Je
vais offrir un don de sang, j'y vais une fois, mettons une fois, trois fois par
année, là, versus donner du lait. Il faut que tu donnes possiblement sur une
base régulière si on veut avoir une banque de lait, là, qui est assez fournie.
Le Président (M.
Bergman) : Mme Petitjean.
Mme
Petitjean (Raphaëlle) : Alors, ça va varier beaucoup d'une femme à l'autre. Le don de lait, contrairement au don de
sang, n'est pas intrusif. Bon, on ne rentre rien dans le corps. Puis c'est
quelque chose qui est produit naturellement par le corps, donc ce n'est pas quelque chose... on ne vient pas prendre
quelque chose qu'il faut reconstruire par après. Ça va dépendre beaucoup
de la production qu'a la mère, puis il y a différents cas de figure.
Il
peut y avoir, par exemple, des mères qui perdent leur enfant et qui décident de
continuer à tirer leur lait pour faire don de ce lait-là. Ça peut faire partie de son
deuil, de son processus de deuil. Il y a beaucoup de femmes, surtout dans
les premières semaines, qui ont un écoulement spontané au niveau du sein quand
le bébé tète à l'autre sein. Donc, à ce moment-là,
il n'y a même pas besoin d'action mécanique, il suffit juste de recueillir
proprement le lait pour le conserver. C'est
la façon la plus... De toute façon, ces femmes-là, c'est celles qui jettent
leur lait parce qu'elles ne savent plus quoi en faire, là, sinon ça
tache tous les vêtements, là, puis, tu sais, c'est problématique.
Il y a aussi des bébés
qui ne boivent qu'à un sein. Donc, la mère a juste à téter un autre sein, à ce
moment-là. C'est des quantités... ou on
rajoute une espèce de boire artificiel dans la routine du bébé pour créer une
quantité. C'est sûr que beaucoup de femmes allaitent des jumeaux et les
allaitent de façon exclusive. Donc, une femme qui n'a qu'un seul enfant, la
plupart, si la stimulation est suffisante, va être capable de produire pour
deux enfants. Donc, ce n'est pas vraiment un problème.
La
routine, après, de mettre son lait dans le congélateur proprement, ça, ça
marche bien. Ce qui peut être plus problématique,
surtout pour des jeunes enfants ou quand il ne s'agit pas d'un premier, c'est
de mettre, dans ses activités, le
fait d'aller porter son lait dans un point de chute. Donc, il y a des gens pour
qui ça ne va pas poser de problème, qui habitentplus en région éloignée, qui veulent vraiment donner leur lait, qui vont
faire cet effort-là. Moi, j'ai beaucoupapprécié, dans le plan d'Héma-Québec, cette collecte à domicile du lait
des mères, parce que, ça, je pense que les mères sont prêtes à donnerleur lait si c'est facile et pas compliqué, parce
que ce n'est déjà pas toujours facile d'avoir un jeune enfant à la
maison.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Seulement qu'une question de logistique. Je
comprends que, dans un premier temps, ça va surtout s'adresser aux prématurés, le temps
qu'on mette en place le système. Puis vous avez ouvert sur la possibilité que tout nourrisson qui en aurait besoin, à un
moment donné, pourrait l'avoir. Mais ce que je vois, ça devient possiblement une quantité assez
phénoménale de lait à avoir. Et puis, à ce moment, ça prend toute une
logistique pour, un, avoir les personnes qui
veulent le donner; deuxièmement, c'est la logistique de tout traiter le lait;
puistroisièmement, la
redistribution. Je ne sais pas, vous, comment vous voyez ça, puis je ne vous
dis pas que ça ne se fait pas, mais je vous dis juste que ça devient une
industrie en tant que telle.
Mme
Petitjean (Raphaëlle) : Bien, d'abord, je vois ça avec une amélioration de la cohérence d'allaitement, donc des taux d'allaitement
où la mère arrive à nourrir son enfant à 100 % de son lait bien plus
élevés que ce qu'on a là. Ensuite, il s'agirait
éventuellement de mères qui, effectivement, ne peuvent pas donner leur lait à
leur enfant, pas juste quelqu'un qui décide que c'est plus facile d'aller
acheter du lait que de donner son lait à son enfant. On s'entend bien
là-dessus.
C'est
difficile pour une... Je reprends l'exemple des femmes séropositives, parce que
ça leur est fortementdéconseillé d'allaiter leur enfant, par Santé Canada, avec de très
bonnes raisons. Dans les pays en voie de développement, on a un discours un peu contraire pour d'autres
raisons. Cette femme-là, elle, son bébé, il n'a pas le droit, il n'a pas le
droit au lait maternel, alors qu'on dit à toutes les autres mères de tous les
autres enfants que c'est le meilleur aliment pour leur enfant. Donc, il y a
quelque chose d'injuste là-dedans.
Il faut
rajouter aussi toutes celles qui ont une production de lait insuffisante, soit
parce qu'elles ont eu une chirurgie mammaire
ou que le développement de la glande mammaire ne s'est pas fait correctement à
l'adolescence. C'est un peu un mythe
de dire que toutes les femmes sont capables de produire du lait pour leur
enfant, ce n'est pas vrai. Mais c'est certain
qu'il faut y aller progressivement, puis il faut que la demande soit là, et il
y aura des priorités, la priorité étant les grands prématurés, puis les bébés nés à terme et hospitalisés et, en
dernier lieu, les bébés qui sont nés à terme, en santé et qui n'ont pas de problème de santé. C'est
vraiment en dernier lieu. Mais on parle d'allaitement exclusif jusqu'à six
mois, mais aucun soutien pour les mères qui ne peuvent réellement pas fournir
de lait.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le
Président. Une question que probablement j'ai oublié de demander à Héma-Québec : La durée de vie du lait, à
partir du moment qu'il a été tiré par la mère jusqu'au moment où est-ce
qu'on peut le donner, ça peut être combien de temps? Le savez-vous?
Mme
Tousignant (Diane) : Je peux peut-être répondre. Si on parle d'un lait qu'on va congeler, on
peut facilement penser, dans un congélateur prévu à cet effet, un gros congélateur
tombeau, on peut facilement aller de six mois à un an. Même un lait frais, bien, fraîchement exprimé, à
la température de la pièce, on peut aller... Nous, on est très
sécuritaires avec quatre heures, mais une
mère à la maison peut aller jusqu'à sept, huit heures à la température de la
pièce, quatre jours au réfrigérateur. Ça fait qu'il y a des études qui
ont été faites pour avoir des marges sécuritaires.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Puis c'est une question peut-être plus pour Dre Piuze, mais j'imagine
que, même si on prévoit, pour les grands prématurés, si on avait une mère qui est
porteuse du VIH — il n'y en a quand même pas beaucoup au Québec, à
ma connaissance, là — probablement que vous allez être
capable de dire que, par prescription
médicale, elle pourrait avoir du lait qui provient de la banque, sans
difficulté.
• (15 h 50) •
Mme
Piuze (Geneviève) : Bien, je pense que c'est quelque chose dont on discute entre
néonatalogistes pour établir des priorités, parce qu'il va falloir avoir le
même discours dans les différentes unités néonatales tertiaires pour ne pas
léser certains bébés par rapport à d'autres. Pour l'instant, les priorités
étaient mises sur les grands prématurés puis sur les enfants qui ont des troubles digestifs importants, par exemple les
gastroschisis. C'est des enfants qui naissent avec l'intestin à l'extérieur
de l'abdomen. On est obligés de le rentrer, puis souvent, bien, il ne s'est pas
développé normalement parce qu'il flottait dans le liquide amniotique. Donc,
ils ont des gros problèmes de malabsorption et de digestion, puis, chez eux, le
lait maternel peut aider.
Donc,
on voulait commencer pas trop gros parce qu'il va falloir voir la réalité entre
ce qu'on projette, faire nos projections,
puis ce que va être la quantité de lait qu'on va arriver à récolter. Puis je
pense que ce qui est important, c'est d'établir des priorités. Puis, si
on est capables de combler tous les bébés de moins de 28 semaines pour qu'ils
se rendent jusqu'à 32 semaines... Parce qu'il
faut décider aussi on va en donner pendant combien de temps. Jusqu'à
quelle période est-ce qu'ils sont le plus à risque? Ce n'est pas parce qu'un
bébé est né à 24 semaines qu'on va le fournir jusqu'à 18 mois.
Pour l'instant, on voyait ça pas mal
plus petit, dans le sens qu'on allait commencer avec le lait de la maman. Elle, elle va donner
tout ce qu'elle peut, puis on complète avec le lait de donneuses, puis, si on
en suffisamment, on va aller jusqu'à
32 semaines d'âge corrigé. Si on en a suffisamment, bien, peut-être qu'on va
aller jusqu'à terme. Après ça, si on en a suffisamment, bien, on va élargir aux moins de 32 semaines qu'on va
rendre à terme. Donc, il faut avoir des paliers. On est encore en discussion, là, entre
néonatalogistes puis on va faire des recommandations claires à Héma-Québec pour
ça.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Puis on va écouter vos recommandations. Je
pense, la priorité, c'est au niveau clinique, mais je peux déjà vous prédire, ça va être un gros succès. Selon moi, là,
il y a un besoin qui va augmenter, qui, en passant, on va essayer d'y
répondre tous ensemble, au niveau de la société, parce que c'est bon
pour les enfants puis c'est bon pour les
familles. Mais je vois déjà dans ma tête, parce que, quand M. le ministre a
présenté le projet, on parlait qu'on sauvait quelques vies, mais, quand
vous regardez l'ensemble du projet, ça va être beaucoup plus gros parce qu'on s'en
va vers quelque chose de plus gros. Mais, si c'est ce que ça prend, c'est ce qu'on
devrait faire.
Ma question, ça va être pour Mme Couillard, c'est la
question des organismes communautaires. Je sais que vous jouez un rôle très
important. Il y a plusieurs organismes communautaires qui se sont impliqués à
ce niveau-là. Où vous voyez votre rôle principalement? Dans la
promotion? Est-ce que vous pouvez aider pour la distribution?
Mme
Couillard (Kathleen) : Bien, je pense que, d'une part, on peut aider au recrutement des
donneuses puisqu'il y a beaucoup de mères qui
nous contactent, justement, à ce sujet-là. Comme Mme Petitjean disait, au
niveau aussi d'avoir un message qui est
clair, qui informe bien les mères sans mettre de pression, c'est ça, c'est
important de les informer, mais c'est un sujet tellement sensible, et,
nous, on le voit parce qu'on est là-dedans tous les jours, là. Alors, il faut
vraiment faire attention au message qu'on envoie, c'est vraiment très, très
émotif.
Alors donc, c'est ça,
au point de vue du recrutement, au point de vue d'aider à avoir des messages
qui sont respectueux de toutes les mères,
peu importent les choix qu'elles font. Et puis, nous aussi, on prône beaucoup
l'information, donc informer les mères,
autant qu'est-ce que ça... Des fois, on a des mères de prématurés qui peuvent
nous contacter parce qu'elles veulent
avoir de l'information un peu sur ce que ça représente. Alors, on peut les
aider à ce point de vue là et aussi informer les donneuses sur qu'est-ce
que ça implique de donner son lait, sur l'importance de la conservation, de la manipulation. Et vraiment, dans le fond, on crée
un soutien autant pour les mères de prématurés qui peuvent recevoir le
lait qu'autant du côté des mères qui souhaitent donner, mais qui ne savent
peut-être pas nécessairement comment procéder au départ.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député de
Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Ma dernière question, avant de passer la parole
à ma collègue de Gatineau, c'est... Moi, je viens des régions puis je trouve important
que chaque citoyen puisse recevoir les services quel que soit l'endroit où il demeure au Québec. Comment
vous voyez l'organisation du service pour les gens qui sont en région?
Ma collègue, elle demeure à Maniwaki, qui
est une très, très, très belle place. Elle n'est pas trop loin de Gatineau
quand même, mais j'imagine, là, qu'il
y a des endroits que les gens sont très éloignés. Comment vous voyez l'organisation
du service pour s'assurer que, quel que soit l'endroit qu'on soit au
Québec, si le besoin est là, on puisse y répondre?
Mme Couillard
(Kathleen) : Au point de vue des
organismes communautaires, vous voulez dire?
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Général. Les quatre
peuvent répondre.
Mme
Couillard (Kathleen) : Bien, au point de vue des organismes communautaires, ce qu'il faut
savoir, c'est qu'il y a vraiment beaucoup d'organismes d'entraide en allaitement. Il y
a deux organismes qui sont à la grandeur de la province, qui sont la Fédération québécoise Nourri-Source et la Ligue La
Leche, donc qui ont des groupes satellites dans différentes régions. Mais, lorsqu'on fait l'énumération de tous les
groupes qui existent, on parle d'à peu près 75 groupes, et il y en a
vraiment dans toutes les régions du Québec.
Alors, au niveau du soutien pour les mères, les groupes
sont là, puis, habituellement, les bénévoles, c'est des mères qui ont allaité elles-mêmes, et qui sont très, très
motivées dans ces projets-là, et qui sont toujours là pour, justement, soutenir
les mères, qu'elles soient mères de prématurés ou des mères donneuses. Alors,
je pense que, du point de vue communautaire, on a vraiment ce qu'il faut. La
limite des groupes communautaires, c'est souvent le financement,
malheureusement. Ce n'est définitivement pas la volonté ni la motivation.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Gatineau, il vous reste 4 min 30 s.
Mme
Vallée : Merci,
M. le Président. Alors, bonjour. J'ai quelques questions parce que votre
mémoire est très différent de ce qu'on a entendu. En fait, votre présentation est
différente, nous amène dans une autre façon de penser. Vous avez soulevé, dans votre mémoire, à la page 9,
vous parlez de tout le questionnement : Est-ce que le lait d'une autre
mère, c'est quelque chose qui est socialement acceptable? Et vous faites état
qu'il existe actuellement des sites informels, et j'aimerais avoir un petit peu plus d'information là-dessus. Est-ce que c'est
une pratique vraiment courante? C'est organisé comment? Puis est-ce qu'on
sait s'il est arrivé des incidents suite à l'utilisation de lait dans des sites
informels?
Le Président (M. Bergman) : Mme Couillard.
Mme Couillard (Kathleen) : Bien, nous, dans les organismes
communautaires, on en entend beaucoup parler. Surtout sur les réseaux sociaux, il y a beaucoup
de groupes d'allaitement. Alors, c'est des choses qui se parlent. Il
existe certains sites Internet qui servent d'intermédiaire,
en fait, entre des mères qui veulent donner, des mères qui ont besoin. Donc, c'est quelque chose qu'on voit de plus en
plus souvent. On se fait aussi poser des questions là-dessus, des mères
qui nous demandent si c'est quelque chose qu'elles devraient faire ou pas.
La plupart des organismes, on s'entend pour
ne pas recommander ce genre de pratiques là, parce que ce n'est pas du tout encadré,
alors les risques de transmission de maladies sont présents. Et ce qu'il faut
comprendre, c'est que souvent la donneuse
a les meilleures intentions du monde, mais elle peut être porteuse de certains
virus et ne pas le savoir, malheureusement. Donc, oui, c'est vraiment un
phénomène qui existe et c'est là qu'on voit que les mères n'ont pas nécessairement d'option sécuritaire lorsqu'elles
ne produisent pas assez de lait, puisqu'elles se tournent vers des
échanges comme ceux-là. Et puis, donc, c'est un phénomène qu'on voit de plus en
plus et qu'on entend de plus en plus parler dans les groupes communautaires.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme Vallée : Peut-être que vous pourrez m'aider.
En fait, est-ce que vous faites des campagnes? Est-ce que les organismes communautaires ou Allaitement Québec font
des campagnes pour sensibiliser les femmes aux dangers qui accompagnent l'utilisation
de sites ou de regroupements... pas de groupes d'allaitement, là, mais de
banques d'allaitement informelles?
Mme Petitjean (Raphaëlle) : On ne les encourage pas, c'est
certain. Si la question nous est posée, on va dire qu'il y a des risques, mais on se sent très mal
à l'aise d'aller contre ces pratiques-là, c'est-à-dire vraiment de faire un message de santé de ne
pas y aller, de manière publique, dans la mesure où on n'a pas d'autre solution
à proposer à ces femmes-là.
Il
faut comprendre aussi que l'échange de lait existe depuis aussi longtemps que l'humanité,
depuis bien plus longtemps que les préparations commerciales pour nourrisson,
parce que la voisine qui gardait l'enfant qui est en âge d'être allaité, qui avait elle-même du lait, puis
la mère tardait un peu pour revenir... Dans d'autres communautés, si une
femme n'avait pas de lait, c'était pris en
charge par les autres femmes qui allaitaient. Donc, c'est quelque chose...
Mais l'allaitement se faisait directement au
sein, à ce moment-là, mais c'est quelque chose qui existe depuis aussi
longtemps que l'humanité et qui est encore pratiqué dans certaines cultures,
milieux culturels au Québec. Mais on ne fait pas...
Mme
Vallée : Je comprends. Je comprends
cette...
Mme Petitjean (Raphaëlle) : On ne fait pas la promotion de ces
services-là, c'est certain. On ne fait pas non
plus de chasse aux sorcières, on répond simplement aux questions quand elles
nous sont posées.
Mme Vallée : Je comprends ce que vous me dites,
mais, en même temps, compte tenu de tout ce que l'on sait des dangers d'allaiter
ou qu'un lait maternel contaminé soit passé à un autre enfant, il me semble qu'il
serait logique d'aviser. On comprend que les mères ont la meilleure
intention du monde, tant les donneuses que les mères qui se tournent vers cette option-là, mais ça comporte des risques,
parce qu'on parlait un peu plus tôt de l'obligation de sécurité, c'est-à-dire
tous les critères qui doivent être pris en
charge. On a même questionné un petit peu plus cet avant-midi, à savoir est-ce
qu'on devrait, à l'intérieur de la
législation, prévoir clairement, comme ça se fait d'ailleurs en Californie, que
certaines personnes porteuses, par
exemple, du VIH, ne peuvent pas et que ce soit de façon statutaire,
mentionner : Malheureusement, ces gens-là
ne peuvent pas être des donneurs. Alors, on pose ce questionnement-là, et, en
même temps, vous me dites : Bien, je comprends, c'est culturel, et
on ne veut pas trop aviser nos gens du danger...
Le
Président (M. Bergman) :
Malheureusement, le temps s'est écoulé pour ce bloc.
Mme
la députée de Groulx, pour un bloc de cinq minutes.
Mme
Daneault : Merci, M. le Président.
Bienvenue, merci de votre présence. J'ai, moi, cinq minutes, hein, c'est-u ça
que j'ai compris, d'accordé?
Une
voix : ...
Mme Daneault : Je vais accélérer. Je regardais, dans
votre mémoire, les recommandations, ce que je
comprends, finalement, la différence entre
les intervenants qui sont venus avant vous et vous, c'était finalement d'élargir,
au-delà des grands prématurés, l'accès aux banques de lait. Est-ce
que...
Une
voix : ...
Mme
Daneault : Oui. Est-ce que je me
trompe ou c'est ce que vous recommandez?
• (16 heures) •
Mme Petitjean (Raphaëlle) : Ça fait partie de... c'est une de nos
recommandations, effectivement, mais, une fois
que la banque de lait sera mise en place, c'est
certain que, compte tenu du lait qui sera disponible, il faut prioriser les
receveurs.
Mme Daneault : O.K. Donc, ce que vous souhaiteriez, c'est de retrouver
dans la loi qu'il y ait une possibilité d'élargir le mandat à pas seulement les
grands prématurés, mais à d'autres clientèles.
Mme
Petitjean (Raphaëlle) : J'ai regardé rapidement la loi et je n'ai pas vu que c'était limité. C'est
dans le projet d'Héma-Québec, mais je n'ai pas
vu que c'était limité dans la loi. La loi, ce qu'elle permet, c'est à
Héma-Québec de manipuler le lait maternel.
Je n'ai pas vu qu'il y avait de limitation par rapport au receveur. Je ne pense
pas que ce soit dans leur mandat de décider qui va recevoir le lait.
Mme
Daneault :
Est-ce qu'on devrait avoir des critères de sélection, en cas... Bon, je sais
que Calgary n'a pas cette expertise-là. Eux
autres, ils en ont trop. Mais, si jamais on devait manquer de lait maternel,
est-ce qu'on devrait avoir des critères de préétablis pour s'assurer que les
grands prématurés soient les premiers bénéficiaires du lait maternel?
Mme
Piuze (Geneviève) : Oui, clairement. Il devrait y avoir une grille de priorisation, puis ça
peut... pour qu'il y ait des ajustements ponctuels selon la quantité de lait disponible.
Donc, les clientèles les plus à risque, les plus vulnérables devraient
être les premières sur la liste. Par exemple, si on dit que ça devrait être les
moins de 32 semaines, bien, s'il manque de
lait, bien, on devrait prioriser les moins de 28 semaines, là, puis... Donc, ça
devrait être clairement établi sur une grille de priorisation, puis,
quand il y en a beaucoup, bien, plus il y en a, plus on peut ouvrir.
Mme Daneault : O.K. Puis il n'y a personne d'entre vous qui avez fait un
genre de grille là ou qu'il y a une grille disponible.
Mme Piuze
(Geneviève) : Bien, on a commencé. On
a un groupe au Québec qui travaille là-dessus, là, une collaboration entre néonatalogistes, là, puis on est en contact avec Héma-Québec
pour ça. Donc, on est consultés. Il y a des gens de partout dans la province qui travaillent dans les unités de
soins intensifs, ou en nutrition, ou en microbiologie, mais il y a un comité qui travaille là-dessus.
Donc, oui, on va faire des recommandations à Héma-Québec dans ce
sens-là.
Mme
Daneault : O.K.
Mais est-ce qu'on devrait avoir au moins un libellé dans la loi qui l'indique,
sans nécessairement avoir les recours
actuellement, là? Parce que ce que je comprends, c'est que ce n'est pas
disponible au moment où on se parle.
Mme Piuze
(Geneviève) : Non, je ne pense pas.
Je pense qu'ils voulaient faire d'abord changer la loi pour qu'Héma-Québec ait le droit de prendre en charge,
puis, après ça, ces détails-là vont être mis... Mais, oui, il devrait y
avoir quelque chose... Je n'ai pas lu, moi, le projet de loi, mais il devrait y
avoir quelque chose qui stipule que le lait va être distribué selon des
priorités préétablies.
Mme Daneault : O.K. Merci. Ça va. Moi, pour moi, c'était correct.
Le Président (M. Bergman) : Alors, merci beaucoup, Mme Petitjean,
Mme Couillard, Dre Piuze, Mme Tousignant.
Merci pour votre présentation, merci d'être ici avec nous cet après-midi.
Et je
suspends pour quelques instants, pour donner la chance pour Mme Mantha de
Préma-Québec de prendre sa place à la table. Je suspends pour quelques
instants.
(Suspension de la séance à
16 h 3)
(Reprise à 16 h 5)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix : …
Le Président (M.
Bergman) : Alors, je suspends pour
quelques instants.
(Suspension de la séance à
16 h 6)
(Reprise à 16 h 8)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous
plaît! Alors, on reçoit Préma-Québec, représentée par Mme Ginette Mantha.
Mme Mantha, vous avez... Bienvenue. Vous avez 10 minutes pour votre
présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, le
micro, c'est à vous.
Préma-Québec
Mme Mantha
(Ginette) : Merci. Merci, merci de m'accueillir,
merci de m'avoir invitée. Je suis très touchée d'être ici. Je n'ai pas ni mémoire, ni recherche, ni statistique à
déposer ici, devant vous. Je suis une directrice générale, je suis la fondatrice de Préma-Québec, mais je suis d'abord
et avant tout la maman de deux enfants prématurés. J'ai aussi eu une fille à terme à la fin. Donc, on trouvait que
ça finissait un peu mieux notre famille de finir avec un bébé à terme,
en santé. Mais vous devez savoir qu'après
avoir eu deux bébés prématurés c'est aussi possible d'avoir un bébé où tout va
bien, un bébé qui vient dans notre chambre à l'hôpital, et pour lequel on a du
lait, et qu'on allaite.
Ce
n'est pas pour ma fille que je suis ici, mais c'est bien pour représenter
toutes les mamans qui aimeraient être avec moi
aujourd'hui pour vous dire à quel point c'est important d'avoir une banque de
lait. C'est important que vous sachiez que
je suis une Abitibienne. Alors, je suis une fille de Rouyn-Noranda. Il y a 22
ans, j'ai eu un premier prématuré à 32 semaines,
qui n'était pas malade, qui n'était pas intubé, pour qui j'ai tiré mon lait.
Et, à 25 ans, je n'étais pas préparée à tirer mon lait, je ne savais
même pas que ça existait, un bébé prématuré pour lequel on aurait à tirer du
lait avec un tire-lait. Ça a été une
expérience difficile, j'ai trouvé ça difficile de tirer mon lait pendant cinq
semaines pour pouvoir mettre un bébé au sein.
• (16 h 10) •
Alors, aujourd'hui,
après les deux journées que vous avez passées, je ne pense pas que je vais être
là pour rajouter une statistique à tout ça.
Je voudrais que vous repartiez ce soir avec au moins une maman dans votre
coeur, une maman qui, aujourd'hui, tire son lait. J'arrive de l'unité
néonatale de Québec, je viens tous les mois rencontrer les mamans et les papas à l'unité. Certaines d'entre
elles aujourd'hui auraient voulu m'accompagner, mais elles tirent leur
lait aux trois heures. Certaines d'entre elles m'ont demandé de vous parler d'elles
précisément. Alors, je vais vous parler surtout
de ces mamans-là, qui existent pour vrai de vrai, des vraies mamans qui tirent
leur lait aux trois heures, qui tirent leur lait au moins huit fois par
jour, donc huit fois par 24 heures — c'est au moins 200 fois par mois, pendant des mois — avant de mettre un bébé au sein, ces mamans qui
voudraient avoir une banque de lait.
Certaines,
je leur ai demandé… Je fais un vox populi depuis quelques semaines, évidemment,
pour savoir est-ce qu'il y en a parmi elles qui ne voudraient pas qu'on donne leur lait.
Aucune ne m'a dit : Moi, je préférerais que mon bébé reçoive du lait maternisé. Toutes les mamans m'ont
dit : Ah non! Au contraire, ça me ferait du bien de savoir qu'une
autre maman tire son lait parce qu'elle aussi, elle tient à mon bébé. Alors, je
pense que c'est important que tout le monde sache que les mamans sont d'accord.
Je ne vous parlerai
pas des mamans à terme et en santé, je ne les connais pas beaucoup, je n'ai que
ma seule expérience. Mais, depuis 10 ans,
Préma-Québec existe. Depuis 10 ans, je, personnellement, rencontre à peu près
400 familles par années, on reçoit
900 appels. L'allaitement est un volet de l'association Préma-Québec. Ce n'est
pas une association d'allaitement. Préma-Québec regroupe tous les gens
qui ont la cause à coeur. C'est un organisme de charité.
Je
vous ai fait remettre un petit dépliant pour que vous puissiez voir, à l'intérieur,
nos services. C'est un organisme qui vient en
aide aux parents. C'est un organisme qui a toutes sortes de services, dont,
évidemment, des services de consultation d'allaitement.
Mais on a aussi des services de deuil, on a aussi des services d'accompagnement.
On a toutes sortes de services, parce
que, quand on a un bébé prématuré, on a besoin de parler avec d'autres parents.
Donc, l'allaitement est quelque chose d'important parce que
rapidement, quand j'ai un très petit bébé qui pèse 500, 600, 700 grammes, tout l'appareil, tout le réseau médical va
insister, va mettre en place des choses pour que jetire mon lait. Aujourd'hui, à l'unité néonatale,
il y a une maman d'un 26 semaines, qui vient de Baie-Comeau, qui n'a pas
une goutte de lait. Ça fait des semaines qu'elle
tire son lait puis aujourd'hui elle m'a dit : Tu sais, Ginette, je
voudraisdonc que quelqu'un me dise d'arrêter
tout ça, mais je ne peux pas. Je ne peux pas parce que mon bébé a besoin de
mon lait.
Les
banques de lait seraient là pour ces mamans-là. Je pense que Dre Piuze a bien
dit qu'il y aurait des priorités. Évidemment que, moi, c'est ces priorités qui m'intéressent,
c'est ces bébés-là que je voudrais qu'on puisse aider, mais je voudrais
surtout aider les mamans pour que les mamans ne se sentent plus autant
coupables de ne pas avoir de lait.
Avoir
du lait, ce n'est pas toujours mécanique. Il y a beaucoup, beaucoup de facteurs
qui vont rentrer en ligne de compte. On pense que, parce que l'allaitement, c'est
naturel, ça se fait facilement. Il y a des centaines de mamans à chaque année qui pleurent et qui parfois ont plus envie
de tirer leur moelle épinière, leur sang que d'avoir du lait parce que
ça ne fonctionne pas. J'aimerais qu'on pense
beaucoup à ces mamans-là puis à ces familles-là, des papas qui sont
terriblement découragés de laver la tubulure
dans laquelle il n'y a pas eu grand lait mais qui n'osent pas le dire à leur
conjointe parce qu'ils essaient de
continuer de les encourager. Je voudrais qu'on pense surtout à ces mamans-là,
parce que je pense que vous avez eu beaucoup, beaucoup d'exemples, et de
mémoires, et de statistiques, et de recherches pour tout le beau côté de l'allaitement
puis de la qualité du lait.
Moi, je
pense que c'est important que les gens sachent que la prématurité, c'est une
épreuve, mais que, bien accompagné, on passe
à travers. Une épreuve, ça ne fait pas mourir, ça fait grandir. Une épreuve,
une fois qu'on est de l'autre côté du
soleil, le soleil est là. Pendant que je suis dedans, pendant que je passe mes
mois à l'unité néonatale à tirer mon
lait, j'ai besoin de parler avec du personnel compétent, j'ai besoin de parler
avec d'autres parents qui sont passés par là, mais j'ai aussi besoin qu'on
mette en place, au-delà de la banque de lait, des choses, des situations plus
physiques, j'oserais vous dire, pour qu'on
puisse héberger les mamans, par exemple, qui tirent leur lait, ce qui n'est pas
le cas dans toutes les unités néonatales au Québec. Les parents vivent
des conditions difficiles. Je vois des parents, l'été, dormir dans leur
voiture, dans le stationnement de grands centres hospitaliers, parce qu'ils n'ont
pas les sous pour payer le Manoir Ronald McDonald pendant des semaines.
Alors, je voudrais qu'on pense aussi à ces gens-là qui,
avec une banque de lait, avec le soutien et l'appui nécessaires, auraient peut-être
aussi la chance d'avoir un petit succès à la fin de l'hospitalisation — l'allaitement
en fait partie — mais repartir avec un bébé qui
est rendu à terme et en pas pire santé. Parce qu'on finit par souhaiter ça
aussi, que notre bébé revienne à la
maison, peut-être pas toujours comme on l'aurait souhaité, mais, la plupart du
temps, oui. Mais, au moins, on repart avec un bébé à la maison.
Comme
vous savez, je vous l'ai dit, je suis une Abitibienne, alors je me suis
retrouvée à 650 kilomètres de ma maison, de ma famille, de mon autre enfant, parce
que c'est mon deuxième enfant qui a eu des complications sévères, c'est
mon deuxième enfant pour lequel on a eu besoin d'assistance et qui a été
transféré à Sainte-Justine. Je voudrais qu'on pense
aussi aux mamans du Saguenay aujourd'hui. Je voudrais qu'on pense aux mamans de
la Gaspésie, qui sont loin de leur domicile, de leur conjoint, de leur
support et qui tirent leur lait puis qui sont terriblement découragées.
Je
voudrais vous inviter aussi à aller sur notre site Web, à aller sur notre page Facebook voir ce que c'est
une maman qui tire son lait, aller voir que,
souvent, la première chose qu'elle va faire en cliquant J'aime, sur Préma-Québec,
c'est aussi aller mettre la photo de son
bébé, même intubé, même gavé. Pour cette maman-là, c'est une grande
différence. Je voudrais que ces mamans-là puissent aussi être fières parce qu'une
autre maman tire son lit pour elle.
Je
voudrais aussi vous parler, bon, évidemment, de tous nos services, de toutes
nos activités, mais je pense que vous avez eu
deux bonnes journées. Je voudrais que vous sachiez qu'il y a maintenant deux
journées qui sont dédiées, au Québec... tout particulièrement, il y a le 5
septembre, qui a été nommé comme étant la Journée québécoise pour les enfants
prématurés. Elle passe encore trop sous silence, à mes yeux, évidemment. Je
voudrais que vous reteniez aussi maintenant
le 17 novembre qui a été nommé Journée mondiale de la prématurité. Si, au
Québec, on pouvait parler un peu plus
de ces journées-là, les mamans qui tirent leur lait, les parents qui se
retrouvent dans les unités néonatales auraient un peu plus de soutien,
parce que beaucoup, beaucoup de gens n'ont aucune idée de ce que c'est la
prématurité.
Je voudrais qu'on pense aussi aux mamans qui vivent un
deuil tout en tirant leur lait. Je ne sais pas si, dans vos deux dernières
journées, on a parlé de ces mamans-là, des mamans de jumeaux, des mamans de
triplés qui se retrouvent, après
quelques semaines, à perdre un de leurs bébés et qui, tout en préparant les
funérailles, vont se retrouver aussi, dans une résidence funéraire, à
tirer leur lait dans les salles de bain. Il faut voir que ça existe pour vrai
au Québec aujourd'hui. Il y a des mamans qui se retrouvent dans cette
situation-là.
Alors,
au-delà de la pression et du stress d'avoir du bon lait puis d'avoir beaucoup
de lait, il y a des situations qu'on ne peut
pas imaginer, qui se passent aujourd'hui. Je voudrais qu'avec les banques de
lait on enlève la culpabilité puis le stress sur les mères.
Le Président (M.
Bergman) : Il vous reste une minute.
Mme
Mantha (Ginette) : Je voudrais surtout que vous repartiez avec, dans votre coeur, une
maman. Je voudrais que vous en trouviez une, dans votre tête, dans votre coeur, que vous en
trouviez une sur un réseau ou sur un site Web. Je voudrais que ces
mamans-là vous accompagnent et vous aident à poursuivre votre réflexion. Je
vous ai laissé un petit document, J'allaite
mon bébé prématuré. L'allaitement est un sujet important pour nous. Ça fait
quelques années qu'on a pu faire ce
document-là. Toute notre documentation, tous nos services sont gratuits pour
les familles. On est évidemment financé par les deux paliers de
gouvernement.
Puisque, dans les
derniers mois, dans les dernières années, on parle beaucoup, énormément de
mourir dans la dignité, je voudrais qu'au
Québec on fasse de la prématurité, de la néonatalogie un fleuron québécois et
je voudrais aussi que les prématurés aient la chance de naître dans la
dignité.
Le Président (M.
Bergman) : Alors, Mme Mantha, merci
pour votre présentation, merci beaucoup. Le bloc du gouvernement, M. le
ministre.
M. Hébert : Merci beaucoup, madame, de ce témoignage humain, empreint
d'émotion. On a entendu toutes sortes de
statistiques, comme vous pouvez l'imaginer, mais vous nous apportez une
dimension humaine et émotive qui est extrêmement riche. Vous savez,
quand on décide de devenir député puis qu'éventuellement on a le privilège d'être
ministre, on y va pour les gens, pour faire
en sorte qu'on puisse aider les gens, et vous nous confortez dans cette
décision-là. Et, vous savez, quand on a des
choix à faire, dans un menu législatif qui est important, et on choisit un
certain nombre de projets, on les
choisit sur la base de critères. Et je trouve ça extrêmement enrichissant, ce
que vous apportez cet après-midi, parce
que vous me dites qu'on a fait un bon choix, puis je pense que, ça, c'est
rafraîchissant, dans une semaine parlementaire, d'entendre ce genre de
témoignage. Si j'ai besoin de mettre un visage à ce projet de loi, c'est vous
que je choisis comme maman, et puis je vous remercie de votre témoignage ici.
• (16 h 20) •
Mme Mantha
(Ginette) : ...Dr Hébert, mais je
veux juste rajouter, choisissez aussi le visage des centaines d'enfants aujourd'hui
au Québec qui se battent, avec leurs parents, et qui deviennent grands. Les
enfants prématurés deviennent grands. Vous pouvez en choisir et vous en croisez
plein. Choisissez-en un autre visage.
M.
Hébert : J'aimerais
ça que vous me disiez ce que c'est que d'être dans l'incapacité de nourrir son
bébé. Vous avez
côtoyé des femmes comme ça. J'aimerais ça que vous partagiez avec nous cette
situation de vie et à quel point ce projet de loi là peut soulager un
peu ces problèmes que vivent les mamans.
Mme
Mantha (Ginette) :
En fait, avoir de la difficulté à avoir du lait, ça va ajouter encore plus à l'odieux
de ne pas avoir mené notre grossesse à terme.
Les parents se sentent tous les deux... Bon, évidemment, papa, maman ont
beaucoup de peine. Les grands-parents ont beaucoup de peine. On a de plus en
plus d'appels pour avoir du support et du soutien des grands-parents, des grands-parents
qui ne connaissaient pas toujours la prématurité. Donc, une maman qui ne réussit pas à avoir son lait, ça va juste ajouter.
En fait, elle n'a pas su être enceinte. Les parents ont de la peine à
peu près pareil, mais la maman se sent
coupable, se sent coupable longtemps. Elle a l'impression d'avoir failli, de ne
pas avoir réussi ce que des centaines
d'autres mères font facilement, être enceinte. Donc, si, en plus, mon corps ne
sait pas faire du lait, ne peut pas faire du lait, bien, vraiment, je
suis une ratée. C'est comme ça que les mères se sentent, bizarrement.
Il y a tout un gros...
Tu sais, c'est très psychologique, puis il y a un gros phénomène qui s'installe
quand on accouche prématurément, des mamans qui accouchent d'un 24 semaines.
Aujourd'hui, je parlais avec une maman, justement,
à l'unité néonatale, puis elle me disait : Mais personne n'a eu le temps
de voir que j'étais enceinte, je n'avais pas de bedaine. Ça fait que ce phénomène-là est étrange pour des mamans qui
vont, en plus, ne pas avoir de lait. Donc, ils vont se sentir ratés,
vraiment. C'est vraiment le sentiment que les parents ont, de «je ne sais pas
rien faire de bon». Évidemment qu'il y a des
mamans qui vont avoir l'impression qu'elles sont responsables de quelque chose,
puis elles se demandent : Qu'est-ce que je pourrais faire de plus?
Je vois des mamans... Bon, je ne sais pas si tout le monde a une bonne image de ce que c'est, un tire-lait, mais un
tire-lait, dans un centre hospitalier, ça ressemble à un petit moteur
puis ça a de la tubulure. Les deux seins sont stimulés à la fois.
La
semaine passée, à Sainte-Justine, j'ai vu un papa qui est arrivé avec un petit
pot pipi, puis il y avait du sang dans le fond, quelques millilitres de sang. Et là je
lui ai dit : Ah! Mais il faudrait parler à la consultante. Ah, mais ça ne
fait pas trop mal, qu'elle m'a dit. La maman pense qu'en mettant son tire-lait
au maximum elle va avoir plus de lait, donc elle a des gerçures. Elle n'a pas d'accompagnement, puis là c'est clair qu'elle
n'en a pas parlé à personne, mais il arrive avec un peu de sang. Si la maman savait que ce n'est pas correct d'avoir mal
quand on tire notre lait — il n'est pas supposé d'y avoirdu sang quand on tire
notre lait — bien, peut-être qu'elle aurait une moins grande pression. Mais
elle, elle doit se dire : Ce n'est pas grave si je souffre, mon bébé souffre
aussi. C'est une phrase qui revient souvent pour les mamans, en
disant : Je n'ai pas su être enceinte, ça fait que c'est correct que je
paie. Bizarre, mais ça arrive.
Ça fait que vive les
banques de lait pour, surtout, nos prématurés.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert : Je vais laisser mes collègues poser d'autres questions,
là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme Proulx : Mon Dieu, oui, je suis... Bonjour, Mme Mantha.
Mme Mantha
(Ginette) : Bonjour, bonjour.
Mme
Proulx : Merci,
M. le Président. Je suis vraiment très, très touchée, et c'est très émouvant de
vous entendre. Vous nous amenez une dimension complètement réelle, parce que, bien
souvent, on entend toutes sortes de points de vue qui sont peut-être
plus cliniques, mais là vous nous parlez du point de vue de la réalité vécue
par ces femmes et ces enfants. Et j'ai noté, là, tirer son lait, pour l'avoir
fait moi-même, je sais ce que ça peut représenter, mais je ne l'ai certainement
pas fait 200 fois par mois. Et ce que vous mentionnez là, c'est une image
extrêmement difficile.
Mme
Mantha (Ginette) :
C'est 200 fois par mois avant de mettre un bébé au sein. Tirer notre lait et
avoir un bébé au sein, c'est autre chose, j'ai déjà une production qui s'est
installée, mais là je me retrouve devant un tire-lait pour un bébé qui n'a rien à voir avec ce que j'avais imaginé,
hein? Je ne m'attendais pas d'avoir un petit bébé de 600 grammes,
intubé, que je ne peux pas prendre.
Une
maman qui tire son lait à Chicoutimi aujourd'hui, pendant 17 jours, qui n'a
jamais vu son bébé, puis elle tire son lait
pour son bébé sans l'avoir respiré. Tous ceux qui ont des enfants savent à quel
point nos enfants sentent bon, hein,
très petits, nourrissons. Alors, cette maman-là était hospitalisée pendant 17
jours à Chicoutimi — et je ne vous parle pas de l'an 1950,
je vous parle de la semaine dernière — elle a dû tirer son lait huit fois par jour pendant 17
jours avant de l'avoir vu respirer. Alors,
tirer notre lait 200 fois quand on n'a jamais mis un bébé au sein, c'est
quelque chose. Et ça, 200 fois, c'est juste un mois. Une maman qui a un 24
semaines, ça va être 400 fois avant de le mettre au sein.
Mme
Proulx : Alors,
écoutez, ce que vous dites, justement, ça m'amène à vous parler de l'importance
du réseau de soutien.
Vous nous avez mentionné justement l'épisode, là, où une maman, pensant bien
faire et voulant donner tout ce qu'elle
peut à son enfant, va jusqu'à tirer du lait avec du sang. Et vous dites :
Si elle avait été accompagnée, probablement qu'on lui aurait dit : Regarde, ce n'est peut-être la bonne
solution. Mais j'aimerais ça que vous nous parliez de l'importance d'un
réseau de soutien pour les mères de bébés prématurés.
Mme
Mantha (Ginette) :
Je vous parlerai de moi, qui est une vieille mère. Même si j'ai l'air d'avoir
32 ans, là, j'en
ai 47. Et j'ai eu un bébé, donc, il y a 20 ans, pour lequel j'ai tiré mon lait. À l'époque, il n'y avait pas de consultante en allaitement. Il y avait des groupes d'entraide,
ce qui est extraordinaire, mais, quand on avait besoin d'une aide un peu plus
spécialisée, il n'y avait pas rien. Il n'y avait rien. Donc, on tirait notre
lait un peu à peu près, en parlant avec une marraine d'allaitement.
Donc,
moi, je suis tellement contente. J'ai vu Mme Tousignant qui est consultante en
allaitement. Mme Tousignant,je lui parle chaque fois que je viens à l'unité. C'est
à elle que je serais allée dire : Cette maman-là, il y a quelque chose qui
ne marche pas. C'est à
elle que je serais allée le dire, parce que maintenant il y a une consultante
dans les unités, ce qui n'est pas comme
ça dans toutes les unités néonatales au Québec. Ne serait-ce que de penser à
ça, dans toutes les unités néonatales tertiaires,
il n'y a pas des consultantes partout, et, quand il y en a, elles ne sont pas
libérées pour être au chevet d'un bébé prématuré. Elles ont elles-mêmes
des patients, donc elles sont moins libres, disons.
Alors, bien sûr que, moi, je voudrais qu'il y ait des
consultantes parce que l'allaitement, ça se transmet d'une mère à l'autre. Puis,
dans des cas un peu plus pointus, on a besoin de quelqu'un qui comprend, qui
connaît un peu mieux toute cette problématique-là.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Oui.
Et, dites-moi, votre organisme, l'organisme que vous avez mis en place,
Préma-Québec, est-ce que vous avez été associé à toute la réflexion qui a mené, là, à ce
projet de loi de la mise en place d'une banque de lait au Québec? Parce que vous représentez les parents des
enfants prématurés, des grands prématurés et des autres. Est-ce que vous
avez été associé? Est-ce que vous travaillez en collaboration avec les
organisations, avec Héma-Québec, avec...
Mme
Mantha (Ginette) :
De loin, j'oserais vous dire, dans le sens où, pour nous, l'allaitement, c'est
un volet. Donc, à partir du moment où on nous demande notre opinion, on la donne,
évidemment, on était associés. On en a beaucoup parlé, Dre Piuze et moi,
mais plus dans l'informel que dans le formel, effectivement.
Mme Proulx : O.K. Merci.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député d'Argenteuil.
M.
Richer : Merci,
M. le Président. Mme Mantha, je n'ai pas de question, mais j'ai été
impressionné par votre présentation. Et, comme le disaient mes collègues précédemment, vous
avez apporté une dimension tellement humaine à notre beau projet de loi, et je dirais que vous avez mis un «s»
majuscule au sens de notre travail de parlementaire. Alors,
félicitations. Merci et félicitations pour votre travail, et je voudrais juste
vous dire merci d'être ce que vous êtes.
Mme
Mantha (Ginette) :
Merci, c'est gentil. Merci, mais je suis contente d'être là pour être la voix
des parents. Je suis contente, depuis 10 ans, je fais le plus beau travail qui
soit : j'accompagne des gens à passer à travers une épreuve. Et je
peux vous dire, parce que je suis policière de formation, je peux vous dire que
le choix n'est pas difficile à faire entre les
deux carrières. Je suis très heureuse de faire la vie que je fais. J'ai
longtemps pensé que, pour avoir eu un bébé aussi malade, avec des complications sévères, pour notre deuxième garçon, j'ai
longtemps pensé que, quand on vit une épreuve comme ça, j'ai pensé que j'avais
été punie. Je sais aujourd'hui que j'ai été choisie, c'est sûr. Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Merci. Pour le bloc de l'opposition
officielle, Mme la députée de Gatineau.
• (16 h 30) •
Mme Vallée : Merci, M. le Président. Mon collègue ne veut tellement pas
prendre trop... il veut tellement me donner
du temps qu'il me laisse commencer. Alors, bonjour, Mme Mantha. C'est un
plaisir de faire votre connaissance et surtout
de vous entendre sur ce projet de loi là, parce que je pense que, sans répéter
ce que les collègues nous ont dit, vous apportez une fraîcheur, je
dirais, malgré l'importance du message dont vous êtes la porteuse, vous
apportez une fraîcheur, alors je vous remercie.
Moi,
j'aurais une question, par contre, parce qu'il est question, dans le projet de
loi… évidemment, il n'y a pas que la banque d'allaitement, il y a d'autres trucs.
Alors, évidemment, nous, notre travail, comme le disait si bien mon
collègue, c'est de retourner chaque pierre,
parce que, si ce n'était que de l'allaitement maternel, ce serait une chose,
mais il y a d'autreséléments aussi
qui sont un petit peu plus complexes et qui vont demander probablement un peu
plus de temps et plus de réflexion.
Mais, pour ce qui est du lait maternel, on a jasé beaucoup de l'acceptabilité
pour une maman de donner à son nouveau-né
le lait d'une autre maman. Vous, vous êtes près, je pense… De tous les
intervenants, vous faites partie de ceux qui sont le plus près de ces
mamans-là. Comment l'interprétez-vous? Pensez-vous qu'il y aura une
problématique, au sein de la clientèle que vous desservez, à recevoir ce
lait-là? Pensez-vous que ça pourrait poser une problématique?
Mme
Mantha (Ginette) :
J'ai posé la question tantôt pendant le café-causerie aux mamans et j'ai dit
aussi que, moi, personnellement, comme mère, je ne suis pas sûre que j'aurais d'emblée
accepté il y a 20 ans, je ne le sais pas. Je me pose la question.
Je ne suis pas sûre que ça aurait été simple pour moi. Personnellement, j'ai l'impression
que ça aurait ajouté à «même ça, je ne suis pas capable». Mais est-ce que c'est
moi, toute seule dans son petit coin, qui aurait pensé ça? Peut-être qu'au
moment où ça serait arrivé, j'aurais été contente.
Les mamans qui étaient là, au café-causerie,
m'ont toutes dit qu'elles seraient contentes, même celle qui me disait qu'elle aimerait
arrêter de tirer son lait parce qu'elle est tannée, parce qu'elle aimerait ça,
s'en aller un peu à Baie-Comeau faire
un petit tour, puis que, là, elle se sent partagée, puis, bon, tout ça. Les
mamans à qui j'ai posé la question, aucune ne m'a dit qu'elle n'aimerait pas ça. Tout le monde a
dit : Ah bien, écoute, c'est sûr que, si c'est Héma-Québec… Parce que
c'est quelque chose de reconnu évidemment,
puis on se pose moins de questions sur les produits sanguins ou sur les
transfusions. Les mamans, beaucoup de mamans en reçoivent elles-mêmes. Beaucoup
de bébés prématurés reçoivent aussi des
produits sanguins. Donc, ce lien-là se fait aussi dans la tête des gens. Je
suis sûre que parce que, là, c'est nouveau un peu ici, je suis sûre que, là, on se pose la question, mais, dans
cinq ans, les parents que je rencontrerai ne se poseront peut-être pas cette
question-là, vont se dire : Bien, écoute, c'est bien pire, je reçois du
sang. La maman dont je vous ai parlé,
de Chicoutimi, a reçu quatre transfusions. Puis elle me l'a dit, elle
dit : Voyons! Donner du lait, ça ne me dérangerait pas. Moi-même, j'ai,
dans mon corps, quatre dons de quatre personnes, avec mon sang. Elle me
dit : De savoir que c'est Héma-Québec, je suis correcte.
Mme
Vallée : Donc, ça sécurise énormément
votre clientèle.
Mme
Mantha (Ginette) : Oui.
Mme
Vallée : Est-ce que, lors de
vos échanges, certaines ont soulevé des préoccupations, c'est-à-dire :
Moi, il y a un aspect particulier qui me préoccupe, ou des questions qu'elles
avaient quand vous les abordiez avec la mise en place de cette banque de lait
là?
Mme Mantha (Ginette) : Tout le monde parle de : ça va
se faire à l'hôpital, la collecte va se faire comme il faut, ça va être bien
testé. Puis là, bien, on fait toujours la comparaison avec le sang, évidemment.
Et là on se dit que ce n'est pas tout
le monde, puis tout ça. Non, les gens sont presque... Je trouve que les mamans
sont plus prêtes que je ne le pensais. Je pensais qu'il y aurait un peu
plus d'hésitation, non? La plupart disent : Ah oui, c'est sûr, si ça se
fait bien encadré. Non, tout le monde est
content, même. Et moi, je pensais que les mamans pour qui c'était difficile
auraient l'impression d'ajouter, puis, non, disent au contraire :
Ça va me rendre tellement mieux que de penser que mon bébé reçoit du lait en canne — ça, c'est un mot qui revient dans la tête des mamans — ou du lait en poudre. On sait, là, que, si j'aime mon enfant, je l'allaite, tu sais. Il y a comme cette
phrase bizarre là dans la tête des gens, puis, quand ce n'est pas la réalité,
évidemment... Donc, les mamans se disent : Ça serait déjà mieux si mon
enfant recevait du lait d'une autre mère qui
l'a tiré pour mon enfant que de lui donner du lait en poudre ou du lait en
canne. Ça, c'est une phrase qui revient.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme Vallée : Donc, sachant que tout ça est encadré
par un organisme comme Héma-Québec, sachant qu'il y a déjà en place des mécanismes de contrôle pour le
prélèvement du sang, donc, dans la mesure où ces mesures de contrôle là sont
mises en place, votre clientèle est tout à fait à l'aise avec…
Mme
Mantha (Ginette) : Oui.
Mme
Vallée : Parfait. Je vous remercie.
Mme
Mantha (Ginette) : Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Merci. M. le
député de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Ah oui! Ce n'est pas parce que j'ai
laissé la parole en premier que je ne veux pas
parler.
D'abord,
je veux vous féliciter parce que je pense que, comme plusieurs l'ont dit, vous
êtes le côté... Tous les intervenants sont
importants, mais vous apportez vraiment la touche de la personne qui a été
touchée par ça. Puis vous avez également eu un ou deux enfants... deux
enfants, si je comprends bien, qui ont été des prématurés.
Juste une question. Je regardais vos
pamphlets, qui sont très bien faits, mais — c'est peut-être noté, mais je n'ai pas eu le temps de
le trouver — quand vous parlez de prématurité, avec votre organisation, est-ce
que vous parlez des 34 semaines et moins, ou
des 32 semaines ou moins, ou des 28 semaines?
Mme Mantha (Ginette) : On est un prématuré si on naît à 37
semaines et moins. Préma-Québec n'est pas une association de parents, c'est l'association de
tous ceux et celles qui ont la cause des prématurés à coeur. Je donne
souvent comme exemple, pour que les gens
saisissent bien, LEUCAN. Donc, je peux très bien me faire raser la tête puis
être touchée par le cancer
pédiatrique sans avoir un enfant, personnellement, qui a le cancer. Alors,
Préma-Québec regroupe tous les gens qui ont la cause à coeur. Et la
seule et unique mission de Préma-Québec, on a longtemps réfléchi pour la
trouver, mais c'est celle-ci : améliorer la qualité de vie des enfants
prématurés.
Alors, améliorer la qualité de vie des
enfants prématurés, c'est en avoir des plus grands qui viennent à la Marche pour les prématurés. Tous les prématurés qui
viennent marchent avec leur nombre de semaines. Alors, une maman, un petit couple qui arrive avec un 28 semaines
dans sa poussette, qui est rendu à huit, neuf, 10 mois, et qui voudrait
bien en voir un 28 qui est rendu à
huit ans, ou 10 ans, ou 15 ans. Alors, tous les prématurés sont
invités. Alors, c'est une association qui
vient en aide à tous les prématurés, et, pour être un prématuré, il faut que j'arrive
trop vite, à 37 semaines et moins.
Alors, on ne fait pas la distinction entre
les 32... tout ça, là, on laisse ça aux unités néonatales. Si je suis une maman ou un papa d'un 36 semaines qui ne va pas bien,
parce que ça arrive aussi, donc, un 35 ou un 36 semaines qui va mal, va plus mal qu'un 28 qui va bien, si j'ai
besoin de support, si j'ai besoin de sous, si j'ai besoin d'accompagnement,
de documentation, si je me retrouve dans une situation difficile puis j'ai
besoin d'une consultante en lactation diplômée, c'est Préma-Québec qui paie les frais. Parce qu'il y a des frais, c'est
des services privés, les consultantes, là, à l'extérieur de l'unité
néonatale. Donc, tous les enfants prématurés sont inclus.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Puis, si je comprends
bien...
Le
Président (M. Bergman) : M. le député
de Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Si je comprends bien, de votre titre, vous avez
été la fondatrice de l'association?
Mme Mantha
(Ginette) : Oui.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Doubles félicitations, parce que quelqu'un qui embarque dans une
association… mais de fonder une association, c'est
de créer...
Mme
Mantha (Ginette) :
Bien, en fait, ça relève d'une promesse. Alors, quand, il y a 20 ans, je
me suis retrouvée en neurochirurgie à
Sainte-Justine avec un bébé qui n'allait pas bien — et vous savez tous qu'avoir une hémorragie cérébrale grade 3 avec une hydrocéphalie, ce
n'est jamais un plus dans la vie d'un bébé — on
s'est promis, là, pendant l'hospitalisation,
parce qu'on trouvait ça très, très difficile, mon conjoint et moi, on s'était
promis à l'époque que, si jamais on s'en
sortait puis on repartait avec notre cadeau pas pire — parce
qu'on négocie, hein, c'est sûr — on s'était promis, il y a
20 ans, qu'on ferait une association pour les parents parce qu'on avait
trouvé ça bien difficile. Puis je pensais que c'était parce que j'habitais
loin que je trouvais ça dur. 20 ans plus tard, je vous confirme que, même
si on habite à côté de l'unité, avoir un bébé hospitalisé, c'est avoir un
enfant hospitalisé.
Alors,
si mon enfant de huit ans se fait frapper dans la rue puis qu'il est
hospitalisé trois mois, personne ne va me
dire : Ah! C'est le fun, tu as le temps de te reposer avant qu'il sorte.
Personne ne va me dire ça. Alors, on avait trouvé ça difficile, et c'est une promesse faite et au diable et à Dieu, parce
qu'on savait qu'il y avait quelqu'un, là. Donc, il y a 10 ans, on s'est dit : Ça y est, on se
lance. Et je n'ai pas fait ça toute seule, j'ai fait ça aidée par énormément de
gens, de parents, de professionnels
que j'ai côtoyés à l'unité néonatale, et on s'est dit : Ça y est, on se
lance, puis on va faire quelque chose, puis on va faire quelque chose
partout en province, parce qu'une Abitibienne ça veut que les services soient
partout en province, pas juste dans les grands centres.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : ...travaillé sept ans
à Rouyn-Noranda, et puis je peux vous dire que la qualité des services est très présente — entre autres, il y avait une unité de néonatalogie avec
Dr Vincelette et toute l'équipe — mais il faut développer
des services en région. Maintenant, vous êtes rendue à Montréal, mais il faut
penser toujours :Comment on
fait pour offrir des meilleurs services le plus près possible d'où les gens
demeurent? Mais, lorsque le servicen'est
pas disponible parce que c'est un service qu'il faut concentrer par souci d'offrir
des meilleurs soins, il faut que les Québécois
soient capables de les recevoir n'importe où et dans des grands centres pour
les gens qui sont en région également.
• (16 h 40) •
Mme
Mantha (Ginette) :
Mais c'est deux choses totalement différentes. Aller en centre tertiaire, c'est
une affaire, mais moi, c'est sûr que des
niveaux 2, puis des niveaux 2B, comme on développe partout au Québec, pour
nous, c'est important. Moi, je ne veux pas
qu'on se mette à traiter des prématurés un peu partout, qu'on en fasse deux,
troischacun, là. Ce n'est pas ce que
je veux du tout. Je veux qu'il y ait des désignations ministérielles dans des
centres régionaux. Puis ça, c'est un autre débat, mais je serais
heureuse de venir vous parler à quel point c'est difficile en région.
Et
on a mis sur pied, il y a trois ans, un colloque itinérant, qui se promène
partout — et cette année, là, donc, le 22 mai, on sera
ici à l'Hôtel Québec — un colloque qu'on a mis sur pied pour
le personnel. Parce que le personnel en
région, ce qu'ils veulent, c'est de la
formation, de l'information sur les services à offrir aux prématurés, et il n'y
a rien auQuébec. Il n'y a pas de
journée de la néonatalogie, autant pour le personnel que pour les parents.
Alors, vous avez parlé de Dr Vincelette, qui est resté notre mentor
à l'association, qui a participé activement à la création de Préma-Québec, et
au début je lui disais : Ah, c'est drôle que le personnel nous demande
toujours de faire de la formation en région. Maintenant,
on fait le tour. On fait vraiment le tour. Et notre colloque qui vient le
22 mai sera notre septième colloque qui fait la tournée. Donc, on a
fait Rimouski, Rouyn-Noranda, Chicoutimi, Sherbrooke, Gatineau. Et on se
promène.
Mon
souhait, c'est qu'on parle des prématurés partout au Québec et qu'on sache
aussi que la prématurité, c'est une chose, mais que le bonheur des familles est grand.
Je ne voudrais pas qu'on ne parle que de ceux qui vont moins bien. Je
veux aussi qu'on parle des grands enfants qui vont bien et qui portent le
bonheur dans leur famille. Les parents vivent du bonheur une fois que l'épreuve
est passée. Il ne faut pas juste penser à ce qui va moins bien. Merci.
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Félicitations et merci
beaucoup.
Mme Mantha
(Ginette) : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme Daneault : Merci, M. le Président. Alors, merci
beaucoup. Je suis aussi très sensible à votre intervention, et d'autant plus, je pense, qu'il y a une
chose qui m'atteint beaucoup, c'est le sentiment de culpabilité que les mères
ont de ne pas mettre à terme un enfant. Et c'est malheureux. C'est malheureux
et encore plus de ne pas être capable de l'allaiter s'il le faut.
Ma question est :
Est-ce que vous avez reçu du support psychologique durant ces moments-là ou
est-ce que des familles... Parce que je sais
que vous, vous traversez le Québec, là, mais vous êtes bonne de le faire, mais
est-ce que vous êtes soutenus? Est-ce
qu'il y a du soutien psychologique pour ces mamans-là dans les hôpitaux, dans
les centres de néonatalogie, pour, justement, minimiser et même éliminer
le sentiment de culpabilité autant que possible?
Mme Mantha (Ginette) : Je vous dirais que, depuis facilement
les 15 dernières années, il y a une grande,
grande différence. Moi, comme mère, là, je trouve qu'il y a une grande
différence dans les unités. Il y a tout un service qui est mis en place. Bon, autant au niveau mondial, de toute façon, on
parle beaucoup de la présence des parents. Les unités qui sont transformées sont transformées pour que ce
soient des plus petites chambres, des plus petits lieux, moins des
grandes salles ouvertes pour les soins néonataux. Donc, il y a maintenant de
plus en plus d'unités qui ont des travailleuses sociales, qui ont des
psychologues, qui ont des gens qui sont sur le terrain, qui sont là,
précisément, rapidement.
Évidemment
qu'entre unités ça ne fonctionne pas de la même façon, là. C'est différent à
chaque unité. Ils ont chacun leurs critères.
Mais je vous dirais qu'en gros les 32, 30 semaines et moins ont d'emblée une
demande de consultation. Il y a des parents
qui la refusent. Les gens ne comprennent pas tout à fait à quoi ça sert, une
travailleuse sociale. Ils ne vont pas
toujours comprendre pourquoi ils en ont besoin. Mais, après quelques semaines,
ils comprennent, puis ils en veulent. C'est
sûr. Puis ce n'est pas parce que Préma-Québec accompagne qu'on n'a pas besoin
de ces services-là. C'est vraiment un service complémentaire.
Puis
ça, je le dis haut et fort, autant dans les unités… Parce que ce n'est pas vrai
que c'est simple de rentrer dans une unité néonatale. Au début, les portes ne se
sont pas ouvertes comme ça. Mais j'ai souvent parlé de ce que les AA
font, hein? Ils se regroupent entre eux pour
parler de leurs problématiques. Puis ils vont aussi chercher de l'aideprofessionnelle. C'est la même chose. Mais, dans
les unités néonatales, de plus en plus, il y a des services d'accompagnement. Mais, malgré ça, les parents veulent
parler entre eux. Malgré le soutien, malgré qu'on voie la travailleuse sociale,
la psychologue, puis tout le personnel, puis tout ça, les parents veulent
parler avec d'autres parents. Et c'est
simple, on voudrait aussi, dans une épreuve, parler avec quelqu'un qui est
passé dans la même épreuve.
Mme Daneault : On se sent mieux compris par quelqu'un qui vit la même
chose.
Mme Mantha
(Ginette) : Oui.
Mme Daneault : Ma question, c'est au niveau, bon, de l'allaitement, la
banque de lait. Est-ce qu'on va créer encore un sentiment de culpabilité aux
mères qui vont se dire : Bon, bien, là, en plus, je prends le lait
maternel de quelqu'un d'autre parce que je
ne suis pas capable de donner mon lait, ou c'est plus un soulagement? Tantôt,
vous avez abordé ce sentiment-là. Ça ne semble pas être le cas.
Mme Mantha
(Ginette) : Non, les mères… non.
Mme Daneault : Puis je pense qu'il ne faut pas que ça soit le cas, mais
pensez-vous que ça pourrait arriver et qu'on devrait peut-être soutenir ces
femmes-là, ces mamans-là?
Mme
Mantha (Ginette) :
Bien, on va soutenir les mamans de toute façon, les mamans qui n'auront pas de lait ou qui ne pourront pas… je pense qu'avec une banque
de lait, on ne va pas ajouter dans ce sens-là. Il y a des mamans qui
choisissent de ne pas allaiter, hein?
Mme Daneault : Ah, ça, oui.
Mme Mantha
(Ginette) : Ce n'est pas tous les
bébés qui reçoivent du lait maternel aujourd'hui, là. Il y a des mamans... Là, on parle d'un bébé comme si c'était
le premier bébé ou le seul bébé. Il y a des mamans qui ont eu deux
autres bébés, qui n'ont pas allaité leurs
plus vieux, puis qui vont arriver à l'unité néonatale et qui vont tirer leur
lait pour celui-là. Puis ça arrive,
des mamans qui tirent leur lait sans avoir le désir de mettre leur bébé au
sein, et elles le disent clairement : Moi, je tire mon lait pour qu'on lui donne, qu'on le gave, mais je ne
veux pas l'allaiter. Donc, c'est correct. Ces mamans-là vont avoir aussi besoin de soutien. Puis moi, je
parle autant avec ces mamans-là qu'avec n'importe quelle maman. Donc,
les mamans, moi aussi, j'avais un peu ce que vous avez dit, je me disais :
Mon Dieu, ça va ajouter. Non, toutes me disent qu'au contraire elles vont se
sentir moins prises, parce que, là, il y a une grande pression sur les mères.
Au moment où on se parle, il y a une très, très grande pression sur les mères.
Moi, j'ai en tête une maman de prématurés, c'était sa sixième grossesse, c'était
la première fois qu'elle avait des bébés vivants, c'étaient des triplets. Elle,
elle pleure, elle est fatiguée.
Mme Daneault : Bien, je comprends.
Mme Mantha
(Ginette) : Ses trois bébés ne vont
pas nécessairement bien tous les trois, hein? Des 25, 26 semaines, ils ne vont pas bien tous les trois, ils ne sont pas
dans le même état. Elle, elle n'avait jamais pensé, enceinte de triplets, qu'elle allaiterait ses bébés, mais
là, là, on met une petite pression pour qu'elle tire son lait. Elle, une
banque de lait, peut-être que ça l'aurait…
pouf! Ça fait que moi, je me dis, pour ces mères-là… Il faut les voir, ces
mères-là. C'est sûr, si je pense à un
gros bébé, ce n'est pas pareil, mais, si je pense à cette maman-là, elle, ça
lui aurait fait plaisir. Là, elle tirait son lait puis elle pleurait
plus qu'elle tirait son lait, je vous dis.
Le Président (M.
Bergman) : Malheureusement, le temps
s'est écoulé.
Mme Daneault : Merci.
Le
Président (M. Bergman) :
Mme Mantha, on vous remercie beaucoup pour cette présentation.
Mme Mantha
(Ginette) : Merci de m'avoir
accueillie. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Vous me donnez beaucoup d'inspiration aussi, aujourd'hui, comme député. On vous remercie beaucoup.
Je
suspends pour quelques instants et je demande au Dr Barrington de prendre
sa place à la table. On va prendre une très,
très courte suspension.
(Suspension de la séance à
16 h 48)
(Reprise à 16 h 49)
Le Président (M.
Bergman) : À l'ordre, s'il vous
plaît! Alors, Dr Keith Barrington, on vous souhaite la bienvenue. Est-ce
que vous êtes prêt? Ça va?
M. Barrington
(Keith) : Oui. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Ça va. Alors, vous avez 10 minutes pour votre présentation, suivie
d'un échange avec les membres de la
commission. Alors, Dr Keith Barrington, le micro, c'est à vous.
M. Keith Barrington
M.
Barrington (Keith) : Merci beaucoup pour m'avoir invité ici cet après-midi. Mon nom est
Keith Barrington, je suis chef de service en néonatalogie à CHU Sainte-Justine. Je suis aussi,
en fait, le président de la Société desnéonatalogistes du Québec, qui soutient fortement cette initiative de
création de banque de lait. Et par contre je suis aussi, en fait, le père d'un enfant né très prématurément
il y a sept ans. Puis j'ai un peu de perspective des deux côtés, mais je
vais parler surtout comme néonatalogiste et chef d'unité cet après-midi.
• (16 h 50) •
J'ai préparé un
document, mais je n'ai pas eu le temps d'imprimer. J'espère que c'est correct
si je lis de mon ordinateur et je vais le déposer tout de suite après. Mais je
dois dire qu'il y a beaucoup de fautes de français. Je suis anglophone d'origine anglaise — je pense que c'est évident — et je parle français depuis seulement huit ans, et d'apprendre une deuxième langue à l'âge de 50 ans, ce
n'est pas toujours très évident.
Les
nouveau-nés prématurés ou à terme, malades, admis dans les unités de soins
intensifs néonataux représentent une clientèle particulièrement vulnérable en termes
de mortalité et de morbidité à court et à long terme. Plusieurs
recherches ont démontré des bénéfices
additionnels à l'utilisation du lait humain comme substrat privilégié pour l'alimentation
de cette clientèle à risque. En effet, le
lait humain utilisé pour nourrir les humains, les enfants prématurés au cours
de leur hospitalisation en néonatalogie, offre des avantages
nutritionnels non retrouvés dans les préparations artificielles.
En
néonatalogie, le lait humain réduit l'incidence de l'entérocolite nécrosante,
des infections nosocomiales, des bactériémies
et favorise un meilleur neurodéveloppement de l'enfant prématuré et même un
Q.I. supérieur à long terme. Il favorise
aussi l'attachement parent-enfant, améliore la tolérance gastro-intestinale à l'alimentation,
permet la maturation de la muqueuse
intestinale des nouveau-nés prématurés et favorise l'établissement d'une flore
intestinale normale.
De plus, les bénéfices
à long terme semblent être dose-dépendants : plus l'enfant reçoit une
proportion importante de lait humain dans son alimentation et plus la période d'allaitement
est longue, plus il en bénéficie. Si un médicament démontrait de tels
bénéfices, nous nous donnerions beaucoup de mal à nous le procurer. Les coûts
reliés aux infections nosocomiales et aux
complications de l'entérocolite nécrosante sont extensifs pour les unités
néonatales. Or, le lait maternel est gratuit. Le lait de banques de lait, ça va
coûter des sous.
Les
prématurés reçoivent souvent de la formule avant de recevoir du lait maternel,
car celui-ci n'arrive pas assez vite, surtout quand la mère est malade. Nous
savons qu'une seule journée de formule peut modifier la flore intestinale
d'un prématuré pendant plusieurs semaines. La perturbation de la flore
intestinale du prématuré est un des mécanismes mis en cause dans la physiopathologie de l'entérocolite nécrosante. Le
lait maternel contient de la lactoferrine, des probiotiques, des
prébiotiques, surtout des oligosaccharides, des probiotiques comme les
lactoferrines, lactobacillus et bifidobacteria ainsi que des immunoglobulines
et des cellules d'immunité. Toutes ces composantes manquent dans la formule
artificielle.
Les
enfants nés à moins de 32 semaines, surtout, d'âge gestationnel, sont à risque
d'une maladie qui s'appelle l'entérocolite
nécrosante. Cette maladie est un problème des intestins qui deviennent
enflammés et arrêtent de bien fonctionner.
Il est nécessaire, pour traiter des enfants avec cette maladie, de les mettre à
jeun pour au moins une semaine, d'administrer les antibiotiques et d'installer
la nutrition parentérale. Les enfants atteints sont à risque de perforation intestinale et mort. Ils ont une réduction de
leurs fonctions cognitives à long terme aussi. L'incidence de cette maladie
est d'environ 10 % parmi des enfants à
très petit poids, et les formes les plus sévères peuvent avoir une mortalité
jusqu'à 20 %.
Plusieurs études ont
démontré que le lait humain, lait de banques de lait ou maternel, réduit l'incidence
de l'entérocolite. Il semble que le lait maternel non pasteurisé est
probablement le plus efficace, mais le lait humain des donneuses, pasteurisé, a
une efficacité bien prouvée pour réduire l'incidence de l'entérocolite.
L'allaitement
d'un enfant prématuré ou malade hospitalisé en néonatalogie comporte des
difficultés uniques, propres au contexte de
naissance et à l'environnement des soins intensifs néonataux. Ces défis sont l'établissement
et le maintien de la production
lactée durant la période où l'enfant est trop immature ou malade pour être
totalement alimenté ou être mis au
sein. L'établissement d'une culture favorable à l'allaitement en unité de soins
intensifs néonatale est essentiel. Effectuer la transition entre l'alimentation
par gavage et l'alimentation par la bouche au sein est aussi un défi, et le
maintien de l'allaitement après le départ de l'unité néonatale n'est toujours
pas évident non plus.
Les
solutions qu'on veut voir au Québec, c'est, en premier, un soutien aux mères
afin de surmonter ces défis et de donner accès aux bénéfices du lait maternel pour
la population vulnérable en néonatologie. Les grandes unités néonatales
canadiennes et américaines se sont dotées de moyens afin d'augmenter leur taux
d'initiation ainsi que la durée de l'allaitement
maternel. L'embauche des consultantes en lactation certifiées ayant une
expérience spécifique en néonatalogie est actuellement un standard de
pratique dans ces grandes unités.
En
effet, ces professionnels agissent à titre de leaders cliniques, d'éducateurs
et de support aux professionnels ainsi qu'aux
parents d'enfants hospitalisés en néonatologie. L'addition de consultants en
lactation est une stratégie démontrée efficace avec les données probantes à l'appui.
Une revue systématique récente des données probantes a prouvé que — et je vais faire la «quotation»
en anglais — «our economic analysis found that
additional skilled professional support in
hospital — that is lactation
consultants — was more effective and
less costly — due to reduced
neonatal illness — than normal staff
contact».
La
deuxième manière de supporter l'administration de lait humain aux enfants, c'est
évidemment une banque de lait humain. Une banque de lait humain est une
option importante pour aider les enfants prématurés s'ils n'ont pas
accès au lait maternel pour les périodes initiales avant que le lait maternel
ne soit disponible, pour les périodes de difficulté de production de lait par
la mère, si la mère prend des médicaments qui empêchent l'utilisation de son
lait ou si la mère ne peut pas ou ne veut pas allaiter.
Mais
je dois dire que cette option comporte certains risques qui doivent être
adressés. En premier, on a tous pensé à des infections et la nécessité de dépistage d'infections.
Ici, l'expertise bien connue d'Héma-Québec dans le domaine de dépistage d'infections dans le sang sera
importante pour le dépistage des mêmes types d'infections dans le lait :
le VIH, CMV, hépatite et d'autres infections virales ainsi que des
infections bactériennes peuvent être transmises par du lait.
Deuxièmement, les
composantes nutritionnelles. La composition du lait maternel est très variable.
Les concentrations de protéines et de gras
sont particulièrement variables. Une analyse de ces facteurs serait souhaitable
pour chaque lot de lait humain fourni.
Et
troisième défi serait que, dans la situation actuelle de compressions
budgétaires, tous les hôpitaux sont sous pression de couper tous les services non essentiels,
si une source de lait humain devient disponible, il est possible que les
hôpitaux aient à réduire le budget pour des
conseillères en lactation, les achats de tire-lait et les accessoires de tire-lait.
Je crois que la solution pour empêcher cette
circonstance serait qu'Héma-Québec aura le droit de faire payer les
hôpitaux pour le lait de la banque. Avec une
telle approche, les hôpitaux les plus performants en termes de taux et soutien
d'allaitement auraient moins de coûts, et Héma-Québec serait remboursée pour
ces frais.
En sommaire, les
avantages du lait humain pour les prématurés sont indéniables. Dû à certaines
composantes du lait humain, les enfants qui
en reçoivent ont moins de complications et de meilleurs devenirs à long terme.
Malheureusement, beaucoup d'enfants prématurés ne reçoivent pas le lait de leur
mère ou durant une certaine période ou pendant tout leur séjour aux soins
intensifs néonataux. La capacité de leur donner le lait des donneuses est donc potentiellement très importante pour ces enfants.
Avec assez de sauvegarde, une évaluation de la qualité nutritionnelle, des dons et un encadrement par une loi appropriée,
une banque de lait humain serait un atout pour nos enfants prématurés du
Québec. Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Merci, Dr Barrington,
pour la présentation, on vous remercie beaucoup. Pour le bloc du gouvernement,
M. le ministre.
• (17 heures) •
M.
Hébert : Merci
beaucoup, M. le Président. D'abord, merci, Dr Barrington, d'être avec nous
cet après-midi et de partager votre expertise avec nous. Je voudrais saluer votre
persévérance dans ce dossier. Vous avez déjà sensibilisé le ministère en avril 2011 sur l'importance d'avoir
une banque de lait maternel. En mai 2012, vous écriviez à mon
prédécesseur pour signaler qu'aucune action n'avait été entreprise et que vous
étiez toujours en attente de voir démarrer ce projet. Moi, je suis très heureux de l'avoir priorisé et, dès la première
rencontre avec Héma-Québec, de leur avoir donnél'autorisation de travailler sur ce projet de loi et de le déposer en
priorité à cette session de l'Assemblée nationale. Alors, merci d'avoir
poussé pour l'adoption de cette banque de lait maternel qui, comme vous le
disiez, va améliorer la santé des enfants prématurés.
J'aimerais
revenir sur un certain nombre d'éléments. Le premier, vous avez évoqué que le
lait maternel améliorait le neurodéveloppement
et l'attachement. Est-ce que c'est vrai aussi pour du lait de banque ou c'est l'allaitement
lui-même et non pas le lait maternel qui...
M.
Barrington (Keith) : En fait, les premières études qui ont été faites en Angleterre par Alan
Lucas ont été les études randomisées,
contrôlées. On ne peut pas faire ça avec l'allaitement, mais, à cet effet, il a
comparé le lait de formule, le lait artificiel
avec le lait d'une banque, O.K. En fait, c'est cette étude avec les suivis à
long terme qui a démontré une augmentation du Q.I. d'à peu près huit
points parmi les prématurés qui en reçoivent.
M.
Hébert : Et, au
niveau du mécanisme biologique, là, j'ai un petit peu de difficulté. Y a-tu des hypothèses?
M. Barrington (Keith) : On ne le sait pas pour certains, mais
il y a certains facteurs de croissance cérébrale
qui sont dans le lait humain, qui est
spécifiquement humain. Il y a d'autres... En fait, la réduction de
complications comme l'entérocolite, c'est
un facteur aussi, la réduction d'infections, parce que les deux complications
dans le pré et néonatal réduisent la
fonction cognitive à long terme de nos enfants puis juste d'éviter ces complications…
Mais aussi quelque chose de
spécifique parce qu'on sait que, de cette étude, les bébés qui ont reçu une
partie de leur nutrition par le lait maternel, le lait humain et
partout, eux, ils ont eu un bénéfice moindre, puis c'est vraiment une «dose-response»
que le plus qu'on reçoit le mieux c'est la croissance du cerveau, le
développement cérébral.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M. Hébert : Merci. Je voudrais avoir votre opinion sur le processus de
pasteurisation qui va être utilisé chez Héma-Québec.
Jusqu'à quel point ça influence la présence des probiotiques puis des
immunoglobulines, des éléments, là, qui favorisent la santé des jeunes
prématurés?
M. Barrington
(Keith) : Oui. En fait…
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
M.
Barrington (Keith) : Pardon. En fait, il vient d'être publié, juste il y a un mois, une
étude d'Europe où ils ont comparé le lait
maternel non pasteurisé au lait maternel pasteurisé, parce qu'ils ont vu, de
temps en temps, que le lait maternel peut contenir des pathogènes, des
bactéries qui sont néfastes, puis ils voulaient voir si, en pasteurisant le
lait maternel, ça réduisait les infections systémiques. En fait, c'est tout le
contraire, il y avait une augmentation, une petite
augmentation. Puis c'est probable que c'est la première fois, que ça n'a jamais
été fait. Et, en fait, il semble qu'il y a probablement une petite réduction des bénéfices du lait avec la
pasteurisation, mais toujours les premières études, dont j'ai mentionné,
d'Alan Lucas en Angleterre étaient avec un lait de banque pasteurisé, et il
démontre les bénéfices avec ça. Puis ça veut
dire que je pense que le lait non pasteurisé maternel, c'est le meilleur de
tous, mais la pasteurisation des donneuses, qui est évidemment
incontournable… le lait pasteurisé a toujours des bénéfices très importants.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Jusqu'à
quel âge, pour un bébé prématuré, on devrait utiliser du lait d'une banque de
lait maternel?
M. Barrington
(Keith) : Je pense qu'en fait ça va
dépendre sur combien de lait maternel on a de disponible, mais, en fait, le risque le plus important en
termes de... le bénéfice le plus important, c'est la réduction de l'entérocolite,
et, en fait, l'entérocolite, après 34
semaines d'âge gestationnel, le taux d'entérocolite s'abaisse énormément. C'est
rare après 34 semaines, puis, si on peut continuer jusqu'à 34 semaines,
les bébés vont tirer le plus d'avantages.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre.
M.
Hébert : Pour me
donner une idée, un bébé prématuré de 28 semaines qu'on nourrit avec du lait d'une banque, jusqu'à 34 semaines, ça peut représenter quelle
quantité de lait?
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
M. Barrington
(Keith) : Je n'ai pas calculé ça. Je
peux faire les calculs, si vous voulez.
M. Hébert : Non, mais c'est juste pour nous donner une idée, là, un
ordre de grandeur.
M. Barrington
(Keith) : Parce qu'en fait un bébé à
28 semaines, qui pèse un kilo, par exemple, a besoin de 150 millilitres
par jour.
M. Hébert : 150 millilitres par jour.
M.
Barrington (Keith) : Et ça va augmenter avec les semaines, le bébé grandit et, à 34
semaines, le bébé va peser deux kilos, et
ça va être 300 millilitres par jour, à ce moment-là.
M. Hébert : O.K. Bien, ça me donne une bonne idée. Merci. Je vais
passer la parole à mes collègues.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme
Proulx : Merci,
M. le Président. Alors, bonjour, Dr Barrington. Ça me fait plaisir d'échanger
avec vous. Vous avez parlé tantôt, dans votre
présentation, des bienfaits du lait maternel, vous avez parlé aussi des
bienfaits à plus long terme. Et j'aimerais
ça que vous nous donniez un peu plus d'informations et de détails. Quand vous
parlez des bienfaits du lait maternel à plus long terme, est-ce qu'on
peut penser que ça peut avoir une incidence, par exemple, chez des enfants plus vieux, sur leur santé en
général, sur leur développement, sur le fait qu'ils soient plus allergiques
ou moins allergiques? Est-ce que même on
peut aller jusqu'à faire un lien de cause à effet avec cette épidémie d'obésité
qu'on voit souvent, l'obésité infantile? Est-ce qu'il y a un lien avec l'allaitement
maternel? Est-ce qu'il y a des études qui font des liens avec ça?
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
M.
Barrington (Keith) : Oui. Je vais parler des autres bénéfices en premier, on peut parler de
l'obésité plus tard. Mais, en fait, même pour les bébés à terme, on sait que les bébés qui
sont allaités ont moins d'infections gastro-intestinales, ils ont moins d'infections des voies aériennes,
autres. Ils ont moins d'allergies en général. Ça dépend des familles,
mais, en fait, en général, les études
démontrent qu'ils ont moins d'allergies aussi. Et, avec ça, même les bébés à
terme ont un bénéfice en termes de
développement. Les bébés qui ont été allaités ont un Q.I. un peu plus élevé,
même les bébés à terme, que les bébés
qui sont nourris avec formule. Et ça, c'est un peu difficile à voir, parce que
les familles ne sont pas nécessairement les mêmes types de familles non
plus dans les deux différentes approches à la nutrition des nouveau-nés, mais
il semble qu'il y a probablement, même pour les enfants à terme, un bénéfice
développemental et cognitif d'avoir du lait.
En
termes d'effet sur l'obésité, il n'y a vraiment pas beaucoup de données qui
démontrent qu'il y a un grand effet. En fait,
le Dr Kramer, qui est l'ancien chef de l'IRSC pour les enfants, il vient de
publier un article qui suggère qu'il n'y a vraiment pas de différence, selon la
promotion de l'allaitement, en termes d'obésité. Il y a beaucoup d'autres
bénéfices, mais pas nécessairement sur ça.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : M. le député d'Argenteuil.
M.
Richer : Merci,
M. le Président. Bonjour, Dr Barrington. Tantôt, vous aviez expliqué le fait
que parfois un enfant prématuré à la naissance devait être alimenté avec un lait de
préparation, un lait artificiel à cause qu'il y avait un délai, là, entre la naissance et le temps que la
mère pouvait produire un lait naturel, en quantité parfois insuffisante.
Donc, je comprends que la banque de lait viendrait réduire ou annuler cette
carence-là du fait qu'il y avait du lait disponible pour nourrir l'enfant dès
sa naissance.
Ma
question est la suivante. J'ai vu dernièrement un rapport qui montrait que,
durant les 10 dernières années, le nombre d'enfants souffrant de trouble envahissant
de développement était 10 fois plus grand dans les 10 dernières années
et qu'il y avait une quantité, un pourcentage important de ces enfants ayant un
trouble envahissant du développement qui étaient des enfants prématurés. Donc,
le fait qu'un enfant prématuré pourrait être alimenté dès sa naissance avec du
lait maternel, est-ce que ça viendrait, du moins en partie, soulager cette
problématique-là?
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
• (17 h 10) •
M. Barrington
(Keith) : En fait, je ne sais pas si,
en termes scientifiques, je peux vraiment vous donner des réponses à ça. La majorité de l'augmentation de
troubles de développement envahissants comme ça, d'autisme, en fait, c'est surtout dû à un changement de définition. Ce
n'est pas parce qu'il y a beaucoup, vraiment, de différences à part ça.
Mais,
cela étant dit, c'est vrai qu'aussi il y a plus de bébés prématurés qui ont le
même type de problèmes que les bébés nés à
terme. Ce n'est pas une grosse partie du problème, mais c'est plus fréquent.
Et, en fait, il y a aussi des problèmes de définition chez les
prématurés, parce que les prématurés ont souvent un retard de développement de langage, ce qu'ils rattrapent plus tard, mais,
quand on passe les tests pour les troubles envahissants de
développement, les bébés ont des échecs
parce qu'il y a un problème de langage, puis ce n'est pas nécessairement dû au
fait qu'ils sont vraiment autistes ou
ont d'autres problèmes. Et, pour ça aussi, je ne sais pas si, vraiment, les
quelques jours d'exposition au lait de formule vont avoir un effet sur
ça.
Je
pense que le gros problème avec ces premiers jours de vie, c'est que ce qui
arrive actuellement, c'est que souvent on garde les bébés à jeun en attendant le lait
maternel, parce qu'on ne veut pas, pour les trop grands prématurés,
donner du lait artificiel dû au haut risque.
Puis on attend deux, trois, quatre jours et, en fait, dans notre protocole de
notre unité, on peut attendre jusqu'à
quatre jours pour les plus grands prématurés en attendant le lait maternel. Et
ça arrive que, même après quatre jours, la mère est toujours malade,
elle essaie de tirer son lait, mais elle a commencé plus tard parce qu'elle
était plus malade, et c'est beaucoup plus difficile si ça commence plus tard.
Et durant cette période, ce qu'il faut faire, c'est
de mettre un cathéter central et donner une nutrition parentérale. Et on fait
ça, et ça comporte des risques. Il y a des risques d'infection avec ça, il y a des risques de toxicité parce que
les solutions ne sont pas parfaites. Et je pense que, si on peut donner
du lait de la banque durant cette période, ça va aider beaucoup à réduire ces
risques.
L'autre
chose qu'on peut faire, en fait, c'est une approche différente chez ces mères.
On a commencé quelque chose tout juste à
Sainte-Justine où, maintenant, nos conseillères en lactation vont aller voir la
mère avant l'accouchement pour parler de toutes sortes de choses à propos de l'allaitement
et aussi de l'environnement de l'unité, et ça semble vraiment aider. On a juste
commencé de faire ça, mais ça semble avoir des bénéfices aussi. Parce que je ne
veux pas qu'on mette tout sur la banque de lait. C'est vraiment tout le soutien
d'allaitement pour les grands prématurés, c'est très important.
Le Président (M. Bergman) : M. le député.
M.
Richer : Merci. C'est bon.
Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée d'Iberville.
Mme Bouillé : Merci. Merci, Dr Barrington de nous
faire part de votre expérience. Ça alimente notre réflexion aussi. J'ai entendu, dans
votre présentation, vous parliez de la variabilité de la qualité nutritionnelle
du lait maternel, et je me
questionne. Selon votre expérience, parce que, quand un bébé est allaité par sa
mère, c'est toujours la même source, finalement,
à moins qu'il y ait une nourrice à quelque part, là, est-ce que, selon votre
expérience, il est préférable, dans le cas des bébés prématurés, de
quand même les alimenter de la même source de lait maternel ou si vous trouvez préférable que les laits maternels recueillis
soient comme agglomérés et qu'on puisse donc balancer? Peut-être c'est
mon expérience agricole qui déteint, mais c'est ce qu'on fait avec le lait de
vache, c'est-à-dire que c'est l'ensemble des laits recueillis qui permet de
balancer le taux de gras et de protéines, etc. Je voudrais vous entendre sur
ça.
M.
Barrington (Keith) : Oui. En fait,
comme je dis, il y a beaucoup de variabilité, surtout dans le niveau de protéines et le niveau de gras. Le niveau de
carbohydrates et de lactose est plus stable, et les autres micronutriments
sont moins variables aussi. Et, en fait, normalement, dans la nature, avec un
bébé à terme, le bébé qui tète très bien, la mère
produit plus de lait, mais un lait qui est plus dilué. Il y a un ajustement
entre la production et les besoins de l'enfant qui ne se fait pas dans la période néonatale, quand on
nourrit les bébés avec les tubes, puis c'est pour ça qu'en fait, des
fois, quand une mère produit beaucoup de
lait, on a des craintes parce que c'est possible que c'est moins riche. Et, en
fait, on sait même que les premières gouttes de lait ont plus d'eau et
moins de nutriments que les dernières gouttes de lait; le «hindmilk» et le
«foremilk», en anglais. Et puis, ça, c'est différent.
Puis, pour les bébés prématurés, on ne sait
pas qu'est-ce qu'ils reçoivent actuellement. On n'a pas de test individuel de lait puis
on espère que le lait que chaque mère produit, c'est assez pour son enfant. Et,
en fait, pour les grands prématurés, on ajoute toujours des fortifiants,
des fortifiants en poudre, parce que, pour un bébé prématuré, il n'y a pas
assez de protéines, ni de calories, ni de calcium et, surtout, pas de phosphore
dans le lait maternel pour la croissance qu'il faut pour un grand prématuré.
Pour
le lait d'une banque, je pense que, oui, la meilleure chose serait d'avoir
toute une... Je ne sais pas si le «pooling»,
c'est la meilleure façon de faire ça. Je ne suis pas un expert là-dedans. Je
pense que les gens d'Héma-Québec seraient
les meilleurs à répondre exactement comment on fait ça. Mais je pense que le
bébé est probablement mieux de recevoir
le lait de plusieurs donneurs. Comme ça, on va avoir une moyenne. Et, si ça se
fait en vrai «pooling» ou c'est juste, chaque jour, c'est une donneuse
différente; je ne sais pas c'est quoi, la meilleure approche.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Sainte-Rose.
Mme Proulx : Merci, M. le Président. Dr
Barrington, j'aimerais revenir, dans votre présentation, sur un élément qui est de nature plus administrative, là, que
vous avez mentionné. En fait, c'est une proposition que vous avez faite, qu'il
y ait un coût pour le lait et qu'Héma-Québec puisse vendre le lait aux
hôpitaux. J'aimerais ça, pour une meilleure compréhension
de votre proposition et de votre point de vue là-dessus, que vous nous
expliquiez un peu plus pourquoi vous faites cette proposition et comment
ça pourrait s'organiser, tout ça.
M. Barrington (Keith) : Je pense qu'une des choses dont je
suis fier, dans les dernières années, c'est
vraiment les avances dans l'allaitement à Sainte-Justine. Notre groupe, et
surtout Dr Janvier dans notre groupe, a vraiment poussé pour avoir un soutien plus grand de l'hôpital. Et on a finalement... Et
je pense qu'il y a 2,5 équivalents à temps plein de conseillères en lactation juste pour notre unité
néonatale, qui est la plus grande unité du Québec et, en fait, une des
plus actives du Canada. On a 1 300
admissions par année, cette année, et c'est vraiment pour ça que cette
clientèle, on avait vraiment besoin d'un soutien.
Mais, évidemment, ça coûte quelque chose.
Avoir 2,5 équivalents à temps plein, c'est 2,5 postes, c'est beaucoup d'argent dans
une situation où l'hôpital cherche à trouver les choses à couper qui ne vont
pas avoir des impacts négatifs sur les soins. Et les choses qui sont un
peu plus préférées, comme une conseillère en lactation, on ne peut pas dire qu'elle
ventile un bébé ou... Je pense qu'il y a un
risque que, les hôpitaux, ou ils vont couper ou ils ne vont pas... Dans notre
plan pour l'unité, on avait visé, en fait,
cinq conseillères en lactation à temps plein pour toute notre unité. Je pense
que, dans la situation actuelle, ça ne va pas arriver. J'espère que,
dans les prochaines années, on va être capables de continuer à développer. Mais
ma crainte est vraiment que, si les hôpitaux voient que, oh, je peux avoir les
deux banques pour rien, ils ne vont pas donner les sous extra pour les autres
conseillères en lactation.
Je ne sais pas si c'est la meilleure... C'est
juste une idée que j'ai eue. En fait, ça ne va pas coûter au système parce que c'est de l'argent qui va passer d'une poche à l'autre,
mais peut-être ça va encourager les hôpitaux à regarder toutes les possibilités
de soutien d'allaitement, et pas juste de recevoir les gratuits d'une banque.
Mme
Proulx : D'accord, merci.
Le
Président (M. Bergman) : Alors, l'opposition
officielle. M. le député de Jean-Talon.
M. Bolduc
(Jean-Talon) :
Oui, merci, M. le Président. C'est sûr qu'on aime utiliser votre expertise en
tant que néonatalogiste.
On n'a pas beaucoup discuté, là... Il y a quand même une différence entre un
prématuré de 25 semaines versus un prématuré de 35 semaines. Comment
vous voyez la hiérarchisation et l'importance... Puis je sais que le lait humain est important pour toutes les catégories.
Mais c'est quoi, la différence pour le plus grand prématuré versus celui
qui est prématuré peut-être de trois ou quatre semaines?
Le
Président (M. Bergman) : Dr
Barrington.
•
(17 h 20) •
M.
Barrington (Keith) : En termes de
bénéfice médical durant la période néonatale, c'est évident que les avantages sont vraiment pour les bébés les plus
prématurés. Les risques qu'ont les bébés qui sont nés à 25 semaines,
les risques d'entérocolite, d'infection, ce n'est pas des risques qu'on voit…
On ne voit jamais des entérocolites chez les enfants de 35 semaines, puis
on ne peut pas dire que c'est vraiment un gros problème pour eux. Et aussi, les
bébés de 35 semaines peuvent normalement aller au sein tout de suite ou
peut-être y aller pour des périodes de difficulté, mais c'est rare qu'il faut que la mère, il faut qu'elle tire son lait. Et,
pour un bébé à 25 semaines, en général, les mères, il faut qu'elles
tirent le lait pendant souvent 10 semaines, peut-être 12 semaines. C'est
vraiment, vraiment difficile, et c'est vraiment difficile pour n'importe quelle
maman de continuer à tirer son lait pendant une période comme ça. Ce n'est
vraiment pas physiologique, ça ne stimule pas la production de lait de la même
façon d'avoir un bébé au sein.
Et nous, je suis vraiment fier qu'actuellement
à Sainte-Justine on a passé à un taux de commencement d'allaitement pour nos
grands prématurés de 93 % avec les conseillères en allaitement. On a très
peu de mères qui ne sont pas capables, qui
ne veulent pas, qui ne vont pas essayer de commencer de donner leur lait, mais,
après quatre à six semaines, ça tombe. C'est vraiment difficile et c'est
vraiment, pour ces cas-là aussi, les mères dont la production de lait est
épuisée, qu'on puisse aussi donner du lait d'une banque.
Le
Président (M. Bergman) : M. le député
de Jean-Talon.
M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, M. le Président. Justement,
aujourd'hui, on a eu une conseillère en
allaitement, puis ça fait un certain temps
que vous pratiquez à Sainte-Justine, seriez-vous capable de nous faire la
différence entre le travail fait
maintenant avec les conseillères en allaitement, qui semble être excellent,
versus qu'est-ce qui se faisait avant? Probablement que c'est sur l'unité,
l'ensemble des infirmières devaient s'en occuper?
M.
Barrington (Keith) : Oui. En fait, c'est
toujours la responsabilité de toutes les infirmières dans l'unité d'encourager,
de soutenir et d'aider les mères. En fait, une des responsabilités des
conseillères en lactation, c'est une formation
continue pour les infirmières au chevet pour aider les mères. C'est la même
chose envers l'enfant aussi, les mères qui accouchent à terme, c'est
leur infirmière qui a la responsabilité de les aider à commencer à allaiter
leur enfant.
La différence est vraiment la spécialisation,
le temps qu'elles ont, les trucs qu'elles ont pour aider les mères qui ont de la
difficulté, la formation qu'elles ont et les connaissances qui sont beaucoup
plus poussées. Elles sont souvent capables d'aider une mère à remonter la production de lait quand ça commence à
tomber, et c'est vraiment ça qui aide beaucoup.
Le
Président (M. Bergman) : M. le député
de Jean-Talon.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Bien, merci, M.
le Président. Ça va être ma dernière question pour vous. On parle beaucoup des
avantages, mais est-ce que vous voyez également des inconvénients à utiliser le
lait maternisé, là? Je n'en vois pas, mais
vous, comme spécialiste, là, voyez-vous qu'il y a des inconvénients pour l'utilisation
de lait maternisé?
M.
Barrington (Keith) : De lait
maternel?
M.
Bolduc (Jean-Talon) : De lait
maternel, oui.
M. Barrington (Keith) : Le seul vrai... Il y a deux choses
qui sont un peu plus compliquées avec le lait
maternel. La première, c'est le fait que c'est possible que les bébés peuvent
attraper les infections virales même de leur propre mère, et, en fait, c'est le cas avec le CMV, le cytomégalovirus. Et ça,
c'est pour les grands prématurés. On ne sait pas exactement quoi faire
avec ça pour le moment, parce qu'en fait il y a souvent réactivation de CMV
durant la période d'allaitement et puis il y a une possibilité de transmission
de CMV par le lait maternel. Et, en fait, il y a des places où qu'ils congèlent
tout le lait pour les grands prémas avant de le donner aux bébés parce qu'il y
a une réduction de la viabilité de CMV avec la congélation de lait.
L'autre chose, c'est, en fait, on le sait, en
général, la croissance d'un bébé qui reçoit le lait maternel est un peu moins que les bébés, les grands prématurés qui reçoivent
du lait artificiel. Et c'est probablement parce qu'on ne sait pas exactement c'est quoi qui est dans le lait maternel.
Il y a cette variabilité, et, de temps en temps, les bébés reçoivent un
peu moins. Mais, en fait, si on regarde ça à
long terme, ça n'a pas d'effet néfaste. La croissance de la tête des
prématurés, c'est la même dans les deux groupes, les bébés qui reçoivent
le lait artificiel ou lait maternel, et les devenirs à long terme et la
croissance à long terme ne sont pas affectés de façon négative. En fait, c'est
plus positif.
M.
Bolduc (Jean-Talon) : Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Gatineau.
Mme Vallée : Merci, M. le Président. Bonjour. Alors, évidemment, comme
on dit avec chaque présentation, l'important,
c'est de bien faire les choses. Et puis c'est un petit peu notre rôle dans le
processus législatif, d'autant plus que le projet de loi va bien au-delà de la question du lait maternel. On a
voulu modifier la Loi sur Héma-Québec, donc on a mis plein de trucs là-dedans, des éléments qui comportent certains
questionnements puis des éléments qui semblent plus d'acceptabilité
sociale plus large, telle la question du lait maternel. Donc peut-être y
aurait-il fallu faire deux lois, mais bon, on a une grande loi avec laquelle on
devra composer.
J'avais des questions, parce que vous avez
allumé la lumière quant à certains risques, certains dangers potentiels de la mise
en place d'une banque de lait, et donc vous avez levé les drapeaux. Est-ce qu'à
votre avis il y aurait lieu d'encadrer, par voie réglementaire ou par
voie législative, les exigences quant à l'éligibilité des mères donneuses?
Est-ce qu'on devrait, de façon très claire,
à l'intérieur d'un texte législatif, prévoir que certaines mères atteintes de
certaines infections ne peuvent tout simplement pas être donneuses, au
même titre qu'on le fait dans l'État de la Californie, par exemple?
Le
Président (M. Bergman) : Dr
Barrington.
M.
Barrington (Keith) : Moi, je pense
que, ça, c'est évident que, si la mère est infectée avec le VIH, elle ne peut pas donner. Mais je pense qu'Héma-Québec a
assez d'expérience avec ces types de questions qu'on peut donner à eux
la responsabilité de sélectionner les mères qui sont les donneuses. Mais il y a
d'autre chose. Par exemple, il y a certains médicaments,
il n'y en a pas beaucoup, mais certains médicaments que, si la mère en prend,
on ne peut pas utiliser son lait, on ne devrait pas utiliser son lait.
Et ça, c'est quelque chose de dépistage qu'il faut pour Héma-Québec avant de
prendre et manipuler le lait d'une mère.
Je
pense qu'au moins on ne devrait pas mettre dans la loi une liste des choses
parce que la liste va changer éventuellement. On va trouver d'autres virus, on
va trouver d'autres médicaments. Je pense qu'on devrait donner la
responsabilité pour ça à Héma-Québec, mais évidemment il faut qu'il y ait un
contrôle de qualité et un examen des résultats à côté à court et à long terme.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme Vallée : Donc, à votre avis, il n'est pas
nécessaire de légiférer. Est-ce qu'il serait nécessaire d'établir des exigences quant aux
composantes nutritionnelles du lait maternel qui sera mis à la disposition des
mères? Est-ce qu'on devrait... parce
que ce que je comprends… et puis, d'ailleurs, je suis tombée sur l'étude de
faisabilité qu'Héma-Québec faisait.
On voit, de façon résumée, pas mal plus succincte que l'explication que vous
avez donnée à notre collègue, l'effet de la pasteurisation sur le lait maternel. Donc, est-ce qu'on doit s'assurer,
sachant qu'il y a des effets et sachant aussi que le lait maternel, les
composantes du lait maternel sont différentes d'une mère à l'autre, avoir une
exigence minimale déjà préétablie? Est-ce que c'est nécessaire, à votre avis?
Le
Président (M. Bergman) : Dr
Barrington.
•
(17 h 30) •
M.
Barrington (Keith) : Je ne sais pas
encore si c'est nécessaire dans la loi d'écrire ça. Je pense que c'est probablement quelque chose que... en fait, je suis
certain que les gens qui sont impliqués dans ce processus ont examiné
ces questions. Et on sait que, dans d'autres banques de lait qui existent déjà
ailleurs en Amérique du Nord, en général, il n'y
a pas beaucoup d'examens du lait pour voir c'est quoi le taux de protéines, par
exemple. Et, en fait, ça n'a pas été très facile à faire, ça, dans le passé. Maintenant, il y a des machines qui
sont produites où on peut passer le lait pour mesurer beaucoup plus
facilement le taux de protéines et de gras dans le lait qu'on donne, mais ça, c'est
quelque chose qui est vraiment en développement.
Mais je ne sais pas, je pense que, peut-être,
dans la loi, on peut dire qu'il faut qu'Héma-Québec trouve une façon pour assurer la
qualité du produit, plutôt, encore, que de mettre les exigences très claires qu'on
veut un huit grammes par cc de
protéines ou quoi que ce soit. Je pense que ça serait trop restrictif et trop
problématique pour la banque si on dit ça, de nourrir... Et je pense qu'il
n'y a pas beaucoup de personnes qui ont l'expertise de dire ça non plus.
Le
Président (M. Bergman) : Mme la
députée de Gatineau.
Mme Vallée : Est-ce qu'à votre avis... Parce que
vous avez aussi soulevé la question budgétaire rattachée à tout ça, c'est-à-dire que les hôpitaux devront,
évidemment, pour s'approvisionner, acheter des réserves de lait. Est-ce qu'il devrait y avoir un prix plancher de défini, donc
un montant de défini, de précisé ou est-ce que ça devrait être laissé,
encore une fois, à la discrétion d'Héma-Québec de déterminer le prix du lait
qui sera vendu aux hôpitaux?
Le
Président (M. Bergman) :
Dr Barrington.
M. Barrington (Keith) : Je pense que, ça encore, devrait
être... Je ne sais pas si ça devrait être dans la loi. Je pense que c'était juste une idée qu'on avait pour essayer
de faire en sorte que les hôpitaux reconnaissent le coût du lait et la valeur de ce lait aussi. Mais je pense qu'il y a
peut-être d'autres façons d'approcher aux mêmes choses. Je pense que,
par exemple, on a des exigences pour les
banques de sang dans les hôpitaux, et il faut qu'ils répondent à certaines
exigences avant qu'Héma-Québec envoie le sang.
Peut-être on peut
aussi dire que, pour les hôpitaux tertiaires en néonatalogie, les hôpitaux
secondaires en néonatalogie, il faut qu'il y ait certains standards de soutien
de l'allaitement maternel avant qu'ils aient le droit de recevoir du lait de la banque. Je pense qu'il y a
certaines autres façons de penser à essayer, de s'assurer que tous les
hôpitaux qui sont impliqués dans le processus donnent assez de soutien aux
mères qui veulent allaiter.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Gatineau.
Mme
Vallée : Et,
dernière question... Ce n'est pas des questions pièges, en passant, c'est
juste, comme je disais, on a l'obligation, comme parlementaires, de poser les
questions, parce que ce n'est pas une fois que le projet de loi est en
place et puis qu'on soulève des problèmes, il est un peu trop tard pour
revenir, alors c'est pour ça.
Croyez-vous
que, au niveau réglementaire, au niveau législatif, on devrait hiérarchiser les
besoins, c'est-à-dire prévoir déjà que le lait
maternel de la banque mise en place doit prioritairement être donné aux grands
prématurés et mettre une hiérarchisation? Parce qu'on constate que certains
groupes voudraient vraiment... souhaiteraient élargir l'utilisation de la
banque de lait maternel, donc que ce ne soit plus nécessairement exclusivement
réservé aux grands prématurés, mais bien à
tous ceux et celles qui auraient besoin, pour différentes raisons, d'avoir
accès à du lait maternel. Donc,
est-ce qu'il serait important, dans le contexte où on n'a peut-être pas autant
de donneuses qu'on... Je ne sais pas, là, on estime qu'on aurait environ
300 donneuses, mais ça peut être moins. Peut-être que, de ces 300 donneuses là,
on en a qui ne seront pas admissibles. Donc,
est-ce qu'il serait important de prioriser très clairement à qui devrait, d'abord
et avant tout, être destiné, ce
lait-là, la clientèle de Préma-Québec, par exemple... oui, c'est ça, de
Préma-Québec, par exemple, ou...
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
M.
Barrington (Keith) : Selon moi, oui, ça serait important, parce que c'est une question et de
disponibilité, mais aussi de coût. Même si c'est un don gratuit, ça coûte beaucoup pour
faire les analyses et le «processing» de lait et en fait d'être assurés qu'il y a un bon suivi en cas de
problème, mais aussi la disponibilité. Si on a un certain nombre de
litres de lait, on ne peut pas
nécessairement donner ça à tous qui en veulent. Et je pense qu'en premier ça
devrait être les grands prématurés parce que c'est chez eux qu'on le
sait qu'il y a des bénéfices énormes en termes d'effets médicaux à court et à
long terme.
Après
ça, il y a d'autres groupes, comme les enfants nouveau-nés avec des problèmes
chirurgicaux, qui ont besoin de nutrition ou
qui ont souvent une période sans bonne nutrition, les enfants avec
gastroschisis et d'autres problèmes chirurgicaux.
Après ça, il y a d'autres groupes. Je pense qu'après ça on peut commencer, si
on a assez de lait et assez de ressources, d'élargir et donner aux bébés
qui sont un peu moins prématurés, et après ça, même, peut-être les bébés à
terme. Mais je pense que ça, c'est une question, pour la société, à long terme.
Mais au départ je pense qu'on devrait restreindre ça aux enfants qui ont le
plus besoin.
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de
Gatineau.
Mme Vallée : Merci beaucoup. Merci beaucoup d'être venu partager avec
nous vos connaissances.
Le Président (M.
Bergman) : M. le ministre, il vous
reste quatre minutes sur votre bloc.
M.
Hébert : O.K.
Juste en complémentaire à Mme la députée de Gatineau, est-ce que ces priorités
devraient être inscrites dans la loi ou on
devrait laisser à Héma-Québec le soin, avec ses comités d'experts, de pouvoir
établir ces priorités-là?
M.
Barrington (Keith) : Je pense que ça, c'est quelque chose qui ne va pas changer beaucoup, ça
peut être inscrit dans la loi, mais au moins
de donner à Héma-Québec le droit d'établir c'est telle priorité.
M.
Hébert :
Dernière question, au niveau de l'indemnisation éventuelle de certaines
personnes qui se sentiraient lésées par le lait maternel qui a été donné, la
loi, le projet de loi qu'on a ici prévoit trois exclusions où on ne peut pas
engager la responsabilité d'Héma-Québec :
l'entérocolite nécrosante, les réactions allergiques et l'intolérance au
lactose. Est-ce que vous êtes d'accord avec ces trois exclusions et
est-ce que vous en voyez d'autres qu'on devrait ajouter?
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
M.
Barrington (Keith) : Oui, je suis d'accord. Je n'en vois pas d'autres, nécessairement, pour
le moment, mais je pense que c'est les cas où
on ne peut pas vraiment impliquer le lait, le lait humain dans la cause, et je
n'ai pas pensé à ça en termes s'il y en a d'autres, mais je pense que ces
trois, c'est probablement suffisant.
M. Hébert : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Merci. Mme la députée de
Groulx.
Mme
Daneault :
Merci, M. le Président. Bonjour, merci d'être avec nous. J'ai devant moi un
article, bon, quidate du 16 avril 2013, qui s'intitule La banque de lait maternel
déborde de dons à Calgary. Alors, ce que l'article dit, c'est que,
depuis seulement un an, la banque de don a été mise sur pied à Calgary et elle
déborde déjà de dons — alors
on espère voir que, l'an prochain, ça sera Québec qui
débordera de dons — ce qui leur a permis, et
je trouve peut-être l'initiative intéressante, mais j'aimerais avoir votre
opinion, ce qu'ils ont fait, parce qu'ils en ont trop, finalement, ils permettent aux parents qui quittent la
néonatalogie de pouvoir continuer, les mamans qui ne peuvent pas allaiter,
bien, de pouvoir continuer à bénéficier du
lait maternel à un coût de 4 $ l'once. Alors, on connaît les bénéfices du
lait maternel, et, comme ils en ont
un surplus d'inventaire, bien, ils permettent aux mamans qui quittent la
néonatalogie, on sait, encore, le bénéfice,
effectivement, du lait maternel, alors ils leur permettent d'acheter,
finalement, le lait maternel pour poursuivre. Alors, j'aimerais vous
entendre à ce sujet-là.
Le Président (M.
Bergman) : Dr Barrington.
M. Barrington
(Keith) : Oui, je pense que, si on a
assez de lait, c'est raisonnable de permettre aux mères de continuer à en
recevoir, mais de les faire payer pour ça à 4 $ par once, ça va faire
beaucoup d'argent pour une petite famille
qui n'a pas beaucoup de ressources, nécessairement. Et en
fait je pense que, pour moi, ça devient
problématique parce que ça va être juste les
familles riches qui vont faire ça et les familles pauvres ne vont pas être
capables de faire ça. Mais d'avoir au moins la capacité d'avoir du lait
gratuit ou à très petit prix après l'hospitalisation, si on en a assez, c'est
raisonnable.
L'autre chose, en
fait, qu'on peut faire — et je ne sais pas si
on aura les ressources — si on a assez de
lait, c'est vraiment de créer un fortifiant
de lait, de lait humain. En fait, il y a une préparation commercialisée aux
États-Unis qui est un fortifiant pour
le lait, qui est préparé de lait humain, mais qui coûte très, très cher. C'est
des centaines de dollars par jour. Et ça, si on peut penser à faire ça
pour l'avenir, ça serait une façon d'utiliser un surplus de lait.
• (17 h 40) •
Le Président (M.
Bergman) : Mme la députée de Groulx.
Mme
Daneault : Si on
prévoyait, dans le fond, le faire au coût d'un lait maternisé — parce
qu'on sait que de toute façon les parents qui quittent la néonatalogie
auront à débourser pour un lait maternisé — si
on arrivait à faire un prix similaire, est-ce que ce serait acceptable, pour
vous, de le faire, en cas de surplus de lait maternisé… de lait
maternel?
M.
Barrington (Keith) : Si c'est un prix similaire, oui. Je pense qu'il y a une portion de nos
familles qui sont sous l'aide sociale, par exemple, et qui ont besoin d'aide financière, et si
ça peut être couvert aussi pour ces familles-là, même façon que le lait
normal et c'est le même prix, je pense que ce serait raisonnable, oui.
Mme Daneault : Merci.
Le Président (M.
Bergman) : Merci. Alors,
Dr Barrington, je vous remercie pour votre présentation et votre présence
ici aujourd'hui.
Et, collègues, je dois
suspendre pour quelques instants avant de retourner pour les remarques finales.
On suspend seulement pour quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 41)
(Reprise à 17 h 42)
Mémoire déposé
Le
Président (M. Bergman) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, collègues, avant de procéder à l'étape
des remarques finales, je dépose, du groupe qui n'a pas été entendu lors des auditions
publiques, le mémoire. Alors, il s'agit du mémoire du Collège des
médecins. Alors, c'est déposé ici aujourd'hui.
Remarques finales
Alors,
collègues, nous en sommes maintenant à l'étape des remarques finales. J'invite
la porte-parole du deuxième groupe d'opposition à faire ses remarques finales,
pour une durée maximale de trois minutes. Mme la députée de Groulx.
Mme Hélène Daneault
Mme
Daneault : Ah! C'est
moi qui commence? Bien, merci. Merci, M. le Président. Alors, je serai brève.
Je pense qu'on
a eu plusieurs intervenants très intéressants au cours des deux dernières
journées, qui ont confirmé, finalement, ce qu'on pensait, dès le début, dans le fond, de l'utilité d'avoir une
banque de lait au Québec, de lait maternel. Je pense que c'est un
incontournable. Maintenant, évidemment, il y a des dispositions, dans la loi,
qui méritent d'être clarifiées. J'aurais peut-être apprécié avoir la présence d'un
juriste. Je ne sais pas si on ne pourrait pas, quand on a des projets de loi à entériner, avoir la présence d'un juriste qu'on pourrait
questionner un petit peu, entre autres : Est-ce qu'on inscrit ounon, dans la loi, les priorités? Je pense que,
pour moi, j'aurais aimé avoir l'opinion d'un juriste et savoir si oui ou
non on doit l'inscrire. Est-ce que c'est
nécessaire ou le fonctionnement d'Héma-Québec à l'interne, c'est suffisant?
Alors, je pense que le
commentaire que je pourrais faire, c'est que j'aimerais que dorénavant, si on
peut, inviter un juriste vers la fin des auditions serait intéressant.
Pour
ce qui est de la position de la Coalition avenir Québec, je pense que
clairement on était positionnés, dès le début, favorables et, après ce qu'on a entendu
aujourd'hui, on le demeure fortement. Et on a hâte de voir, dans le
journal... de dire que la banque de lait maternel déborde à Québec.
Le
Président (M. Bergman) : Merci, Mme la députée. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle, le député de Jean-Talon, à faire ses remarques
finales, pour une durée maximale de six minutes.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc
(Jean-Talon) : Merci, M. le
Président, puis je vais le faire en collaboration avec ma collègue de Gatineau. Bien, Écoutez, je vais d'abord remercier
tous les groupes qui sont venus présenter en commission parlementaire. Pour nous, ça a été important. On a eu plusieurs
points de vue, depuis les... je ne dirai pas les prématurés, mais au
moins les représentants des prématurés jusqu'aux professionnels. Et puis nous
aussi, on voit vraiment que ça va être un gros avantage au Québec d'avoir une
banque de lait maternel, qui a été mise à l'intérieur, par contre, d'une loi
qui modifie aussi les statuts d'Héma-Québec.
Donc,
il y a trois éléments importants pour moi. D'abord, la création d'une banque de
lait maternel. On va être favorables. Il va y avoir des points à discuter,
puis je pense que ça va être intéressant qu'au niveau du ministre on ait
des juristes pour venir nous expliquer, là,
tous les tenants et aboutissants au niveau de la loi. Par contre, on n'a pas
discuté beaucoup des cellules souches et des
tissus humains, qui, aussi, au niveau éthique, représentent un élément
important. Donc, lorsqu'on va faire l'article
par article, il va falloir prendre le temps également de bien approfondir ce
sujet parce que, quand on parle, entre autres, de cellules souches, il y
a des éléments éthiques, des éléments légaux qu'il faut travailler un peu plus.
Le
deuxième aspect qui, pour moi, est important, c'est que ça modifie également la
gouverne d'Héma-Québec. Ça, c'est un enjeu
majeur, et ce n'est pas parce qu'on a un beau dossier comme la banque de lait
maternel qu'on va devoir négliger la
gouverne. Puis également, dans le projet de loi, il y a des outils de contrôle
que le ministre veut se doter, qui... On va en faire la discussion. Je pense qu'au départ ça va être important de
faire une bonne discussion. Puis, avant de passer la parole, bien, merci
M. le Président, puis merci à votre équipe, puis également les gens du son et
de l'image, parce que ça a été une commission très agréable.
Le Président (M.
Bergman) : Merci M. le député de
Jean-Talon. Mme la députée de Gatineau.
Mme Stéphanie Vallée
Mme
Vallée : Merci,
M. le Président. Alors, évidemment, les avantages de la création d'une banque
de lait sont clairs, ils nous ont été
clairement identifiés, et je pense que ça nous a permis, du moins pour ceux
qui, comme moi, connaissaient plus ou moins le sujet, ça nous a permis de nous
instruire. Alors, la commission aura été, à cet effet, très, très positive.
Il
y a par contre beaucoup d'autres aspects qu'on n'a pas abordés lors des
consultations, les questions éthiques, telles
que celles soulevées par mon collègue, toute la question, évidemment, des
cellules souches. On a voulu les mettre à l'intérieur du projet de loi, eh
bien, il faut se questionner, il faut prendre le temps de faire les choses correctement. L'objectif n'est pas de passer
rapidement un projet de loi dans la gorge des Québécois parce qu'il
comporte un élément qui vient chercher une
adhésion au sein de la population, qui est la question des banques de lait. Les
banques de lait, oui. La population
en fait la demande, de remettre sur pied... Puis je dis «remettre sur pied»
parce que, dans les années 30, il y avait des banques de lait. Les
banques de lait ont été abandonnées, mais c'est quelque chose qui existait à
Montréal, qui existait au Québec. Donc, il ne faut pas prendre ça et
dire : Cet élément-là est important, c'est pressant, et faire en sorte que
tout le reste ne soit pas abordé, toutes les autres questions du projet de loi
ne sont pas abordées. Alors, évidemment,
nous, notre travail, ce sera d'aborder ces questions-là, de prendre le temps de
le faire et de prendre le temps de bien légiférer, parce que ce n'est
pas une question du nombre de lois qu'on fait à l'intérieur d'une législation,
c'est de la qualité dont il faut se préoccuper. Merci.
Le
Président (M. Bergman) : Merci, Mme la députée de Gatineau. Alors, j'invite maintenant le
ministre de la Santé et des Services sociaux à
faire ses remarques finales pour une durée maximale de six minutes. M. le
ministre.
M. Réjean Hébert
M.
Hébert : Merci,
M. le Président. Alors, ces consultations particulières ont été riches, je
pense, enenseignements.
On a entendu six groupes, notamment Transplant Québec et Héma-Québec qui nous
ont parlé beaucoup des dispositions entourant le constat de décès, et je
pense que ça, ça a éclairé, je crois, les parlementaires sur cette
disposition-là du projet de loi. Et on a bien sûr entendu surtout des groupes d'experts
au niveau du lait maternel, que ce soient des gynécologues et obstétriciens,
des pédiatres et des groupes communautaires. J'ai été très touché par le
témoignage de Mme Ginette Mantha de Préma-Québec, qui nous a donné un
point de vue extrêmement intéressant sur cet aspect.
Bien
sûr, on aura l'occasion de discuter largement de ça dans l'étude article par
article du projet de loi. Il y a évidemment
d'autres dispositions dans le projet de loi, qui sont incluses pour rénover un
peu la Loi sur Héma-Québec qui en a besoin, là, après plus de
10 ans d'âge.
Le
plus important, évidemment, c'est la mise en place de la banque de lait, mais
je pense qu'il ne faut pas négliger les autres aspects. Et on aura le temps de prendre
chacun des articles pour voir leur bien-fondé et s'assurer qu'ils
répondent vraiment non seulement à des préoccupations actuelles d'Héma-Québec,
mais aussi à l'avenir, au futur, parce que l'utilisation
de produits biologiques est une voie de développement extrêmement importante où
Héma-Québec, et le Québec, peut assumer un leadership extrêmement
important.
• (17 h 50) •
Héma-Québec
a déjà des dispositions en termes de comité d'éthique, en termes de comité de
vigilance, en termes de comité de normes, de standards de qualité. Alors,
tout ça est déjà dans la loi d'Héma-Québec. Elle n'est pas remise en
cause par ce projet de loi là. Mais on
étend, par ce projet de loi, les mandats d'Héma-Québec à d'autres produits
biologiques, et je pense que ces mêmes
critères, ces mêmes hauts standards, ces mêmes processus vont pouvoir s'appliquer
aux nouveaux produits.
Je
remercie les oppositions pour leur participation. Je remercie mes collègues
parlementaires également, et les gens du ministère, et du cabinet qui ont participé
à ceci. Ça s'inscrit, ce projet, dans la vision du gouvernement d'avoir
un Québec pour tous et d'avoir un Québec pour tous, même les prématurés. Alors,
merci beaucoup.
Le Président (M.
Bergman) : Merci, M. le ministre.
Alors,
collègues, je lève maintenant la séance, et la commission ayant accompli son
mandat ajourne ses travaux sine die. Merci,
collègues.
(Fin de la séance à
17 h 51)