(Dix heures cinq minutes)
Le Président (M. Pagé): Alors, bonjour à tous. À l'ordre. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes, évidemment, dans la salle de bien vouloir éteindre leur sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie aujourd'hui afin de procéder à l'interpellation du député de Mercier au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant: La politique du médicament au Québec.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Kotto (Bourget) est remplacé par Mme Maltais (Taschereau).
Le Président (M. Pagé): D'accord. Je vous remercie. Je vous rappelle brièvement le déroulement d'une interpellation soulevée par un député indépendant. Le député de Mercier interviendra le premier et sera suivi du ministre de la Santé et des Services sociaux; chacun bénéficiera alors d'un temps de parole de 10 minutes. Par la suite, les temps de parole de cinq minutes par intervention seront successivement octroyés à des députés de l'opposition et des députés du groupe parlementaire formant le gouvernement. À chaque fois, le ministre pourra intervenir après une intervention d'un député de l'opposition.
Concrètement, le député de Mercier et le groupe parlementaire formant l'opposition officielle se partageront en alternance les interventions d'opposition, en débutant par le député interpellateur, en l'occurrence le député de Mercier.
Pour terminer, 20 minutes avant la fin de la séance, j'accorderai un dernier temps de parole de 10 minutes au ministre et un droit de réplique de même durée au député de Mercier. Enfin, je vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement unanime, dépasser midi.
Alors, voilà. M. le député de Mercier, vous avez la parole pour 10 minutes.
Exposé du sujet
M. Amir Khadir
M. Khadir: Merci, M. le Président. Merci, monsieur... mon cher collègue, le ministre de la Santé. Je le remercie, ainsi que ses collègues, pour avoir accepté de bien se prêter à notre interpellation.
Je voudrais souligner la présence dans les tribunes de Mme Élisabeth Gibeau. Mme Gibeau est de l'Union des consommateurs. Je mentionne sa présence parce que l'Union des consommateurs est à l'initiative d'une proposition qui est maintenant... qui a reçu l'appui de plus de 170 organisations québécoises, des organisations communautaires nationales, régionales, des syndicats, des organisations indépendantes de toute nature, y compris les médecins québécois pour la défense du régime public d'assurance santé.
Ces 170 organisations ne font qu'en fait constater les contradictions et les problèmes liés à la politique des médicaments, du médicament au Québec, les problèmes liés à l'accessibilité aux médicaments, l'iniquité face à la maladie, qui se manifeste également dans un accès inégal aux médicaments prescrits au Québec, et également les coûts exorbitants, la croissance irréfrénée et démesurée du coût des médicaments par rapport à tous les autres segments, toutes les autres enveloppes budgétaires dans le domaine de la santé. En fait, de 6 % qu'ils étaient il y a encore 25 ans, les médicaments, maintenant, représentent 18 % du coût total des dépenses publiques en santé. La situation au Québec n'est pas une situation unique, mais c'est une situation particulièrement, disons, problématique, même en comparaison avec d'autres pays qui connaissent des problèmes de croissance de coûts en médicaments.
Pour introduire mon propos, je n'ai trouvé rien de mieux qu'en fait... qu'un extrait d'un rapport accablant produit tout dernièrement par une commission mandatée par le président Sarkozy. Parce que les mêmes phénomènes qu'on observe ici, et j'espère que le ministre de la Santé du Québec a les mêmes préoccupations que le président de la France devant les difficultés à entrer dans... avec l'industrie pharmaceutique, qui est en bas de toute attente vraiment sur le plan responsabilité en réponse aux énormes avantages qu'on leur a consentis au cours des 20 dernières années.
**(10 h 10)** Conscient de ce problème-là, le président Sarkozy a mandaté un député et un professeur de l'Institut Necker. Ce rapport est maintenant le... est appelé à... le rapport Debré, du nom du député de l'UMP, de la majorité présidentielle au Parlement, et l'extrait est le suivant: «L'industrie -- en parlant de l'industrie pharmaceutique -- a mangé son pain blanc. L'essentiel de ce qui pouvait être découvert par le hasard, la physiologie et le screening est arrivé à son terme. Le filon est épuisé. Alors sont venues les années de demi-succès et d'échecs thérapeutiques, contrastant paradoxalement avec d'immenses succès financiers -- d'immenses succès financiers -- fondés largement sur le lobbying politique, très évident à Washington...» J'ouvre une parenthèse: très évident aussi au Québec. Je vous invite... j'invite le ministre, je ne sais pas s'il l'a vu, de voir le film du frère d'un de ses collègues qui est actuellement en Chambre. M. Paul Arcand, il y a quelques années, a produit le film un Québec sur ordonnance. Je l'invite instamment à voir ce film. C'est un film documentaire qui montre les méandres de la politique du médicament, comment ça a été bâti, et le poids du lobbying politique à l'Assemblée nationale qui a conduit à l'adoption de cette politique de médicament. Et, très malheureusement, le tableau a été assombri en plus par le fait que celui qui pilotait l'adoption de cette politique du médicament, un ancien collègue de mon collègue, du ministre de la Santé, c'est-à-dire Russell Williams, qui occupait le siège du député de Nelligan, quelques semaines à peine après avoir donné sa démission, alors qu'il était responsable de la politique du médicament, il a été embauché par Rx & D, le lobby des pharmaceutiques privées, des pharmaceutiques de recherche et développement.
Alors, quand le rapport Debré parle: «...fondés largement sur le lobbying politique, très évident à Washington», le même diagnostic prévaut pour le Québec. Alors: «...d'immenses succès financiers [de l'industrie pharmaceutique] fondés largement sur le lobbying politique, très évident à Washington, sur le marketing et parfois sinon le mensonge, du moins l'exagération, souvent de bonne foi -- les firmes sont elles-mêmes très cloisonnées, avec des départements qui ne parlent pas la même langue, scientifique ici, commerciale là, financière ailleurs. Dès lors, chaque département, pour se faire apprécier, tend à maximiser ses résultats, à écarter ce qui devrait conduire à la prudence», trompant ainsi les uns et les autres.
Alors, «...désireux de succès qui affermissent leur carrière, poussant parfois véritablement au crime les décideurs finaux -- poussant parfois véritablement au crime les décideurs finaux -- par des informations embellies à toutes les étapes de ces processus étendus sur 10-15 ans et où il est de plus en plus difficile et coûteux de faire marche arrière, et cela en jouant de la demande infinie des populations pour de nouvelles thérapeutiques, qu'elles croyaient toujours possibles puisqu'elles avaient [déjà] existé jusque-là.» Si j'en parle à M. le ministre, c'est qu'au cours de la dernière année et demie qu'on s'est côtoyés ici j'ai à plusieurs reprises posé des questions, et M. le ministre, sous la même impression que la population en général, en raison du lobbying très efficace des pharmaceutiques, m'a offert des réponses qui sont des réponses fondées malheureusement sur le lobbying et le marketing qui a fini par nous convaincre tous que l'industrie pharmaceutique oeuvre pour nous, qu'il y a des retombées importantes dues aux immenses privilèges qu'on leur a accordés au cours de ces 10, 15 dernières années, qui n'ont pas commencé avec son gouvernement, qui ont commencé avec le gouvernement précédent, parce que les mêmes mécanismes étaient en jeu, les mêmes mécanismes de lobbying, de marketing agressif.
Or, tout le monde aujourd'hui est conscient du fait qu'il y a un problème. Il y a un problème parce que l'augmentation des dépenses en médicaments est responsable d'une partie importante de l'augmentation des dépenses totales en santé. Mais le problème, en plus, est aggravé par le fait que cette augmentation des coûts est accompagnée par le fait que, malgré que tous les Québécois bénéficient d'un régime d'assurance médicaments, en raison de la politique d'assurance introduite en 1997, quatre Québécois sur 10 par les assurances publiques, six Québécois sur 10 par les assurances privées, dans le cadre de leur travail, environ 5 % des Québécois admettent ne pas avoir respecté au moins une prescription. Là, on parle de gens malades, là, une prescription du médecin, dans les 12 derniers mois, en raison des coûts financiers.
Les quotes-parts, les franchises, malgré la soi-disant gratuité, ont diminué de 9 % la consommation des médicaments essentiels chez les aînés. Là, je vous cite à chaque fois des études: «Les personnes les plus touchées par le manque de couverture adéquate pour obtenir des médicaments sont les chômeurs, les travailleurs à temps partiel, les travailleurs autonomes, les travailleurs non syndiqués, les travailleurs de petites entreprises.» En fait, la gratuité des médicaments, si on était capable de l'assurer, ce qui n'est pas le cas actuellement, pourrait améliorer la qualité des traitements et, en fait, s'assurer qu'étant donné la diversité des régimes actuels au Québec, de s'assurer que notre régime d'assurance médicaments, qui est inégal et qui n'assure pas une véritable gratuité, puisse être amélioré afin que tous les contribuables québécois soient... aient accès égal aux médicaments, non pas en fonction de leur travail, non pas en fonction de leur niveau de revenus, mais uniquement en fonction de leurs besoins fondamentaux, leurs besoins médicaux, ce qui est plus conforme à l'esprit du régime d'assurance médicaments... d'assurance maladie, au régime d'assurance santé universel.
Donc, au cours de la présente interpellation, je vais démontrer à M. le ministre que c'est plus bénéfique pour la population et c'est également plus bénéfique pour les contribuables, parce que ça va permettre à notre gouvernement de faire d'importantes économies.
Le Président (M. Pagé): Merci, M. le député de Mercier. La parole est maintenant pour 10 minutes au ministre.
Réponse du ministre
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer mon collègue le député de Lévis puis également le député de Mercier, avec qui j'ai l'occasion régulièrement de discuter de toute la question du médicament au Québec. Et puis on partage tous les deux la même profession, médecin, donc on sait certainement tous les deux l'utilité des médicaments. Entre autres, mon collègue est un microbiologiste infectiologue, donc c'est un spécialiste des maladies infectieuses, puis il sait comment les antibiotiques ont apporté à la médecine. Avant ça, on avait des gens qui décédaient tout simplement d'une infection, puis aujourd'hui on les traite de façon banale avec des antibiotiques.
C'est sûr qu'avec le temps également il est arrivé des infections qui étaient encore plus virulentes. Il y a eu de la résistance, et c'est toujours un combat, au niveau de la médecine, de développer des nouvelles molécules pour offrir des meilleurs traitements. Puis, dans un premier temps, je prendrais quelques minutes, là, peut-être dire toute l'utilité, côté médical, du côté de la santé, de l'utilisation des médications de façon appropriée. Et je vais souvent utiliser le terme «approprié», parce qu'il y a eu beaucoup de tendances à un moment donné de dire: Est-ce qu'on prend trop de médicaments? On n'en prend pas assez? Il faut en arriver à une utilisation judicieuse et, pour la bonne raison, pour la bonne pathologie, utiliser le bon médicament.
Et là je vais vous parler de pertinence. En pertinence, si quelqu'un prend un médicament puis ça ne donne pas d'utilité, c'est non pertinent. Hein? Si vous donnez un antibiotique à une maladie virale, vous n'aurez pas d'effet; vous avez des coûts puis vous avez des chances d'effets secondaires. Puis, par contre, si vous avez une infection qui est très virulente ou encore vous avez une maladie particulière qui nécessiterait un médicament et que vous ne le prenez pas, bien là ça amène un autre problème, ça peut amener des complications plus tard. Puis, l'exemple classique, c'est la personne qui fait de l'hypercholestérolémie sévère, qui va être susceptible d'avoir une maladie cardiaque. Ça fait que, pour le moment, vous n'avez pas de symptômes, vous n'aurez probablement jamais de symptômes, mais à un moment donné vos artères vont bloquer, vous allez faire un infarctus, vous pouvez décéder; là, vous allez devoir prendre plusieurs médicaments. Donc, l'importance de bien utiliser les médicaments mais surtout l'importance qu'on ait une bonne accessibilité aux médicaments. Et là je vais vous amener avant 1997, où on avait 17 % de la population québécoise qui ne pouvait pas se payer de médicaments parce qu'elle n'avait pas les moyens.
C'est le principe aux États-Unis, où est-ce que vous n'avez pas... vous n'êtes pas couvert par le régime public, vous n'avez pas d'assurance privée, mais, à ce moment-là, quand vous tombez malade et qu'on vous prescrit des médicaments pour le diabète qui peuvent vous coûter entre 1 000 $ et 1 500 $ par mois, vous n'avez pas les moyens, vous les prenez pas, et à ce moment-là vous avez des complications plus jeune, et là vous coûtez cher au système de santé. Et ça peut aller jusque... à la fin, vous allez devoir aller sur l'aide sociale, et c'est le gouvernement qui va vous prendre en charge. Donc, dans une société qui est juste, d'avoir une bonne accessibilité aux médicaments, c'est d'abord un... pour moi, quelque chose d'important pour la personne et également pour la société, où on est capable de garder nos gens le plus longtemps en santé.
**(10 h 20)** Et, sans dire que c'est un effet direct de toute l'accessibilité du médicament, l'avancée de la médecine en général fait qu'on a une plus longue espérance de vie. Et on a vu, la semaine dernière, hein, que, depuis les cinq dernières années, au Québec, l'espérance de vie est augmentée de deux ans pour les hommes et augmentée d'une année pour les femmes. Donc, c'est vraiment des gains spectaculaires... avoir un meilleur traitement des maladies cardiaques, meilleur traitement au niveau du cancer, mais aussi de la prévention. Les gens ont des meilleures habitudes de vie, on fait de la prévention. Puis je vais vous donner un exemple: le fait d'avoir des bonnes routes, bien on a moins d'accidents d'auto.
Donc, la médication, c'est un de nos outils dans notre arsenal thérapeutique pour faire parfois de la prévention, pour éviter des maladies, mais aussi traiter des maladies qui sont déjà présentes, et ça sert également pour traiter des gens qui ont des symptômes, hein? Si vous êtes quelqu'un avec de la douleur de façon aiguë, puis là on va parler d'une pierre sur les reins, bien vous êtes content qu'il existe un produit qui va vous soulager, le temps qu'on puisse réussir à faire passer votre pierre sur les reins.
Ça fait qu'avant 1997 on avait un problème d'accessibilité pour environ 17 % de la population qui ne pouvait pas avoir d'assurance. Mais également il y a des gens qui prenaient des médicaments, qui avaient des assurances, que c'était très, très dispendieux, soit par le fait qu'on leur chargeait en plus ou encore par une mauvaise couverture. Ça fait qu'en 1997 il y a eu une position qui a été prise par le gouvernement où on a mis en place l'assurance médicament. D'ailleurs, ce qui est remarquable, en 2011, le Québec est la seule province au Canada à avoir un régime d'assurance médicaments universel. Un régime d'assurance médicaments dont une partie est couverte par le public, pour 40 % des gens, et 60 % est couvert par le privé. Il y a une obligation à un citoyen d'être couvert, de se prendre une assurance. Et, s'il ne peut pas être couvert par une assurance privée, il y a un mécanisme qu'on peut couvrir selon certains frais au niveau du public, selon sa capacité à payer.
J'insiste là-dessus, parce que, voilà à peu près deux semaines, il y a eu une étude de l'ICIS, qui est reconnu, là, c'est l'Institut canadien de l'information en santé, il y a eu une étude de l'ICIS qui a démontré que l'endroit où est-ce qu'il se dépense le plus en médicaments au Canada par habitant, c'est le Québec. Mais c'est intéressant, parce qu'avant ça on nous donnait le chiffre, puis les gens avaient l'impression c'est parce qu'on prenait trop de médicaments. Et ce qui a été dit dans l'étude, et très, très, très bien dit: Les Québécois paient plus cher pour leur médication par habitant parce qu'ils ont une meilleur accessibilité. Tout simplement parce que les citoyens du Québec, lorsqu'ils sont malades, lorsqu'ils ont un diabète, une hypercholestérolémie, ou n'importe quelle maladie, même si c'est très dispendieux en termes de médication, ils sont capables de se les payer, avec un frais qui est raisonnable pour pouvoir se les procurer.
Et ça, c'est un gros avantage. À un tel point que, lorsque j'ai été nommé ministre, en 2008, ici, à Québec, en septembre, on avait la réunion des ministres de la Santé du Canada, et le principal sujet qui a occupé la majorité de notre temps, c'était comment on fait pour offrir à notre population une couverture au niveau des médicaments. Et chacun des ministres se tournait vers moi puis dit: Au Québec, vous êtes chanceux, vous l'avez, et on aimerait ça avoir le même type de régime que vous autres, mais les gens trouvaient que c'était peut-être dispendieux à ce temps-ci pour le faire. Mais, pour avoir eu des réunions avec eux autres dans les deux dernières années, je peux vous dire qu'ils regardent actuellement comment ils peuvent faire pour avoir une meilleure couverture au niveau de leur assurance médicaments.
Donc, le Québec est la première province et la seule province actuellement à être capable d'offrir à toute sa population les traitements à base de médicaments à un coût raisonnable. Et, quand on dit «à un coût raisonnable», c'est sûr qu'entre autres au niveau des assurances privées puis également au niveau des assurances publiques il y a un frais, qui généralement, dans le public, peut représenter entre 30 $ et 40 $ par mois, pour pouvoir se procurer des médicaments. Et encore, c'est selon votre capacité à payer, parce qu'il y a plusieurs, plusieurs personnes qui ont été exclues. Et, avec la politique du médicament, on en a exclu une bonne partie également qui n'avaient pas les moyens.
Il reste que, pour un frais minime, les gens, ceux qui sont très malades, peuvent prendre pour 1 000 $, 1 500 $, 2 000 $ par mois de médicaments. L'avantage d'avoir rendu cette médication-là disponible aux gens... Et on assume que les gens vont la prendre, c'est un autre dilemme, c'est-à-dire, il faut que les gens soient... aient l'intérêt de les prendre et aient une «compliance» face à leur médication, leur avantage que, moi, je perçois dans notre société, c'est que, si on traite bien le diabète, si on traite bien l'hypertension artérielle, si on traite bien l'hypercholestérolémie, c'est une économie pour notre système de santé, parce que, plutôt que de payer au moment où ils sont très malades, on paie au niveau de la prévention.
En plus, bien ça nous fait une société qui est en meilleure santé, et naturellement ça fait également des gens qui peuvent contribuer à la société. Parce que, si on s'occupe bien de leur santé, eux autres mêmes s'occupent bien de leur propre santé, bien ils ont des chances qu'ils vont contribuer plus longtemps sur le marché du travail. Hein? Le vieillissement va être retardé parce qu'il y a certaines maladies qui vont être prévenues.
Et là on parle de maladies, là, pas rares, on parle de l'hypertension artérielle, on parle de l'hypercholestérolémie, on parle de toute la question des maladies cardiaques. Puis, aujourd'hui, d'ailleurs, les gens qui ont eu des maladies cardiaques, il ne faut pas oublier, quand on recule il y a 20 ans, ces gens-là devaient avoir des pontages aortocoronariens, souvent ils compliquaient, ils rebloquaient, il fallait les réopérer ou, encore pire, ils décédaient jeunes puis ils laissaient souvent des familles dans le deuil. De nos jours, les même personnes, elles rentrent à l'hôpital, on leur fait une coronarographie et on leur offre des médicaments, qui sont très dispendieux, il faut le reconnaître, mais qui empêchent d'avoir ce rebloquage d'artères.
Et le dilemme qu'on a toujours au Québec, c'est qu'il y a un coût à prendre des médicaments, mais, moi, je le ramène de l'autre sens, il y a une économie également à prendre des médicaments. Et c'est certain, puis ça va être une partie des discussions qu'on va avoir aujourd'hui... c'est: Jusqu'à quel montant on est prêts à payer pour s'offrir des meilleures technologies? Mais il y a une autre question qu'on doit se poser: Jusqu'à quel point on fait du partenariat avec les entreprises pour qu'elles développent des nouvelles molécules, que c'est sûr qu'on paie cher quand elles viennent sur le marché mais qui à long terme vont donner des gains? Et l'autre principe qu'il y a en arrière de ça, c'est, si vous n'avez pas de nouvelles molécules sur le marché, vous n'aurez pas non plus de produits génériques, qui nous coûtent beaucoup moins cher, plus tard.
Et je sais qu'avec le député de Mercier on va avoir cette discussion: C'est quoi, le compromis qu'on fait et l'équilibre qu'on fait entre une accessibilité aux médicaments, avoir également des entreprises qui puissent nous offrir des nouveaux produits et qui, on l'espère, ont un certain profit qui devrait être raisonnable? Ça va être le point de nos discussions aujourd'hui, M. le Président. Et, comme de fait, il me reste seulement quatre secondes, je vais regarder l'horloge le temps qu'elles passent. Merci beaucoup.
Argumentation
Le Président (M. Pagé): Alors, merci, M. le ministre. Nous allons maintenant entamer la période d'échange. Alors, la parole est au député de Mercier pour un maximum de cinq minutes.
M. Khadir: Alors, je tiens à rassurer M. le ministre, ce qu'on vous offre aujourd'hui, ce que je vais m'employer à vous démontrer, c'est qu'il n'y a aucun compromis à faire pour la qualité des soins, pour offrir des médicaments bénéfiques et nécessaires à la population, qui permettent non seulement de réduire les coûts plus tard en prévenant des complications, mais vraiment améliorer la qualité de vie des patients.
L'autre assurance que je veux lui donner, c'est que l'exercice consistant, un, à utiliser le pouvoir d'achat incroyable que donne un régime d'assurance médicaments universel en coalisant les risques, en mettant tous les risques ensemble, c'est un principe actuarial élémentaire, c'est-à-dire qu'au lieu de prendre la situation actuelle, qui offre le meilleur des deux mondes aux assureurs privés, d'accord... Pourquoi? Parce que le régime d'assurance médicaments actuel au Québec fait en sorte que quatre Québécois sur 10 qui sont soit âgés, soit trop malades, soit enfants, soit ne sont pas en âge de travailler, donc ne sont pas couverts par un régime privé, sont pris en charge par le régime public. Ceux-là, il est démontré, c'est des consommateurs plus importants de médicaments parce qu'ils se trouvent dans des groupes d'âge plus à risque. L'autre groupe d'âge, les six autres Québécois sur 10, qui sont en âge de travailler, qui sont à l'emploi, qui sont dans leur quarantaine, dans leur trentaine, qui ne représentent pas un risque élevé, la loi les oblige à prendre une assurance privée.
Donc, les assurances privées ont un public, une clientèle captive, mais à très faible risque. Donc, pour eux, c'est de faibles risques qu'il assurent, avec un haut taux de rendement, de profit pour eux.
Ce qu'on offre au gouvernement avec un régime d'assurance médicaments universel, c'est quoi? C'est mettre les faibles risques avec les plus grands risques ensemble, donc mettre tous les Québécois dans un même régime, assuré par le public, qui permet donc d'atténuer les coûts pour les quatre sur 10 qu'il assure actuellement, parce qu'il met dans un plus grand pool -- c'est un principe actuariel, on se comprend? -- et de s'assurer de cette manière donc que les frais sont mieux répartis sur tout le monde.
Ça permettrait par exemple, en captant seulement une fraction de ce qu'actuellement les assurés au privé paient au privé, hein -- et je pourrais vous dire pourquoi c'est très difficile, je vais vous donner un exemple tout à l'heure, pourquoi c'est très coûteux pour les plus faibles salariés ou les salariés autonomes -- donc, en captant juste une fraction de ce montant-là, en le mettant dans le régime public, le gouvernement vient de se donner un formidable levier de négociation pour mieux négocier le prix de ses médicaments, parce que, là, il va acheter en gros.
Évidemment, c'est là qu'intervient l'autre, disons, l'autre aspect de cette dynamique: il faut qu'il y ait une volonté réelle par le gouvernement de négocier. Il ne faut pas que ça soit un bar ouvert comme ça a été au cours des 15 dernières années. Il faut que le gouvernement du Québec, par exemple, emprunte un peu les mêmes lignes qui guident le gouvernement ontarien, qui a négocié avec force le prix de ses médicaments avec les producteurs de produits brevetés depuis 2006, avec des produits génériques, ce qui a fait que le Québec a fini par bouger un peu au cours de la dernière année, grâce à nos interventions, grâce à mes interpellations en Chambre lors de la période des questions, et je vous en suis reconnaissant. On a finalement vu un peu le Québec être à la remorque de l'Ontario.
**(10 h 30)** Mais, ce que je vous propose, c'est que le Québec ne soit plus à la remorque de personne, que vous ne vous compariez plus aux autres provinces du Canada. Parce que les autres provinces du Canada et le Canada font piètre figure quand on les compare aux autres pays avancés, les pays comme la Nouvelle-Zélande, comme les Pays-Bas, comme les pays européens. En fait, le régime d'assurance médicaments universel est un élément d'un plus grand ensemble. L'autre versant, c'est qu'il faut que le gouvernement du Québec utilise, avec un régime d'assurance médicaments universel, le fait qu'il couvre 8 millions de Québécois, pour négocier de bons prix à la fois avec les producteurs de produits brevetés...
Et, je vous rappelle, M. le ministre, vous ne pouvez pas continuer à répéter que l'industrie nous offre de... Non, l'industrie, ça fait 10 ans à peu près qu'elle ne produit rien d'essentiel, rien de fabuleux. Ils font juste produire certains médicaments pour occuper certaines niches très lucratives. Ils copient d'autres modèles, en quelque sorte.
Donc, il faut maintenant négocier en mettant de la pression sur les industries, comme l'Ontario l'a fait, comme la Nouvelle-Zélande l'a fait, pour avoir le meilleur prix pour les contribuables québécois. Et, si vous faites ça, c'est au bas mot 1 milliard de dollars d'économies. Sinon, si on a... on va jusqu'à la Nouvelle-Zélande... ce qu'a fait la Nouvelle-Zélande: 2 milliards d'économies immédiatement pour la caisse du Québec. Ça, c'est au bas mot.
Le Président (M. Pagé): La parole au ministre de la Santé et Services sociaux, en réplique, pour cinq minutes.
M. Bolduc: Oui. Merci, M. le Président. Puis je peux vous assurer que je suis l'horloge à la seconde près puis je vais faire un effort pour terminer à l'intérieur du cinq secondes.
Bon, dans un premier temps, je voudrais juste apporter une correction. Le Québec n'est pas à la remorque des autres provinces. Le Québec est loin en avance des autres provinces. Un, par l'assurance médicaments qu'ils ont mise en place en 1997; donc, selon mes calculs, on est au moins 14 ans en avance sur les autres provinces; deuxièmement, par la politique du médicament, qui a été mise en place en 2005, qui favorise justement l'utilisation judicieuse du médicament, avec une politique d'encadrement qui nous permet d'aller chercher les meilleurs prix. Et, encore là, quand j'ai rencontré des ministre de la Santé de toutes les provinces, il y a quelques mois, à Terre-Neuve, on a parlé encore de la question du médicament, et le Québec était vu comme étant innovateur, parce que le Québec avait les meilleurs prix au Canada, de toutes les provinces. Puis tout le monde le disait: Le Québec s'est doté d'une façon d'aller chercher les meilleurs prix.
Quant à l'utilisation des génériques versus les innovateurs, on a fait un compromis pour justement travailler avec tous nos partenaires pour aller chercher les meilleurs prix. Et d'ailleurs, l'année dernière, on a revu la façon de travailler avec les compagnies génériques, et actuellement on va chercher, pour cette année, une économie d'environ 160 millions de dollars, qui va s'actualiser au cours des prochaines années entre les 300 et 400 millions de dollars, tout simplement parce qu'il y a moins de produits innovateurs à chaque année, de plus en plus de produits génériques. Et, à ce moment-là, on peut faire des économies substantielles.
Et j'aimerais maintenant en arriver, là... puis je ne suis pas un actuaire puis je ne suis pas un comptable, mais je pense qu'il faut expliquer comment fonctionne notre régime d'assurance privé et d'assurance public. Le régime d'assurance public, pour la majorité des patients, c'est des gens qui sont sans emploi, mais surtout la grande partie, ce sont les gens de 65 ans et plus, à qui on fournit la gratuité des médicaments ou encore un prix très raisonnable, là, en termes de couverture.
Si, demain matin, on arrivait puis on disait: On fait un régime complet où on met tout le monde dans le même bateau, bien là il faut comprendre que ceux qui sont dans les assurances privées, ils paient souvent des primes plus petites en relation avec leurs risques, mais ces gens-là, ces gens-là, par contre, paient des impôts qui par la suite nous aident à financer notre reste du régime public. Parce il y a maintenant un certain équilibre qui se fait à ce niveau-là.
Et, quand on parle également d'économie d'échelle, bien, à la quantité déjà que le gouvernement du Québec achète et peut négocier ses prix, je peux vous dire que, quand on négocie pour possiblement 60 % de la consommation des médicaments qui se fait au Québec... Parce que, là, il faut comprendre quelque chose encore: on a peut-être 40 % des gens qui sont dans le régime public, mais c'est 40 % des gens qui consomment beaucoup de médicaments, parce que, plus on vieillit, plus on consomme des médicaments, dont toute la catégorie des 65 ans et plus. Donc, pour 40 % des gens, c'est 60 % des consommateurs... ou de la consommation des médicaments qui se fait au Québec. Ça fait que déjà on a une économie extrêmement marquée. Et, en plus de ça, les prix des compagnies privées sont en fonction des prix du public. C'est encore là une particularité du Québec, ce qui fait qu'on veut assurer à toute la population du Québec le meilleur prix pour les traitements qu'ils doivent recevoir.
Donc, même si, demain matin, on disait: On change le régime, bien ce n'est pas vrai que les gens vont... si on augmente leurs primes, à quelque part, pour financer l'autre système, bien j'assume qu'à ce moment on va devoir baisser leurs impôts. Et, à la fin, c'est toujours les mêmes contribuables qui paient. Donc, ça dépend de la façon dont on veut le travailler.
Également, lorsqu'on a gardé ça dans le privé, c'est que ça amène également une compétition entre eux autres. Et un des avantages qu'on voyait, c'est qu'on pouvait voir c'est quoi, l'augmentation des prix du public versus le privé. Parce qu'il y a quand même un... je vous dirais, une perception que les gens ont, c'est que, dans le public, on administre moins bien que dans le privé, alors que c'est faux. Je pense qu'on peut tous les deux très, très bien administrer et aller chercher le meilleur prix.
Au niveau de la négociation, nos gens négocient des prix de façon ferme. En plus, dans la politique du médicament, on a une clause que, pour les régimes publics, tout ce qui est inscrit, on va chercher les meilleurs prix. Et je sais qu'on va probablement jaser tantôt des ententes confidentielles qu'il peut y avoir pour certains produits en Ontario, mais par contre, au Québec, je vous dirais que la majorité de ce qu'on fait est correct, et on s'entend quand même relativement bien, et on va chercher le meilleur prix pour les plus.. Et, si, ailleurs, les prix baissent, exemple, s'il y a une place qui décide qu'ils inscrivent le médicament, puis qu'il est beaucoup moins cher, à ce moment-là, on va se charger et on va avoir la responsabilité d'aller chercher le meilleur prix.
Tout ça pour dire, M. le Président, que notre régime actuellement est équilibré. Et je reviendrai tantôt sur l'augmentation des coûts pour le Québec au niveau de la consommation des médicaments.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, M. le ministre, de rentrer dans le temps. La parole est maintenant au député de Lévis. Par ailleurs, juste avant de vous prêter la parole, je vous indique qu'on a commencé à 10 h 5. Si on veut protéger le droit des parlementaires, il faudrait que l'on termine à 12 h 5, et j'ai besoin du consentement unanime afin de s'assurer qu'on puisse compléter jusqu'à 12 h 5. C'est... J'ai le consentement unanime? Je vous remercie, tout le monde.
Une voix: ...
Le Président (M. Pagé): Parfait. Alors, la parole est au député de Lévis.
M. Lehouillier: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Donc, je voudrais saluer mes collègues, mon collègue ministre et nos collègues députés qui sont ici présents. Donc, moi, M. le Président, je me suis quand même documenté un peu au niveau de la politique sur le médicament, et je voudrais réitérer les chiffres que le ministre a donnés tout à l'heure, qui sont quand même des chiffres importants. Et c'est bon aussi que nos associations de consommateurs voient un peu l'évolution que le Québec a connue au cours des dernières années. Je pense que le ministre a donné un chiffre qui est extrêmement important: il y avait 17 % de la population québécoise, juste avant la Loi sur l'assurance médicaments, qui avait accès à aucune assurance pour couvrir le coût des médicaments. Ça, je pense que c'est une avancée assez extraordinaire, et on sait qu'actuellement il y a près de 3,2 millions de personnes qui sont couvertes par le régime public et il y a 4,4, environ, personnes qui sont couvertes par le secteur privé.
Alors, c'est sûr, M. le Président, que, moi, si, comme citoyen, j'avais le choix... Moi, personnellement, je suis couvert évidemment par une assurance de type privé, de type de groupe, et je trouve ça extraordinaire qu'on puisse procéder ainsi, M. le Président, avec ce mixte-là, parce qu'il est clair que l'objectif de la politique sur le médicament au niveau gouvernemental, c'est d'abord et avant tout de donner cet accès universel là et vraiment de favoriser les gens qui en ont le plus besoin. Et, moi, M. le Président, si j'avais le choix entre un régime type SAQ, Hydro-Québec, ou quoi que ce soit, comme on a vu dans les journaux, alors, moi, j'opterais pour continuer avec les assurances de groupe -- qui fonctionnent très bien d'ailleurs dans les milieux de travail, en passant, les gens sont très bien assurés, règle générale, très bien couverts -- et j'opterais par contre pour le maintien d'un certain nombre de médicaments, d'un certain nombre de molécules qui sont essentielles.
Je reviendrai tout à l'heure, peut-être dans une autre intervention, sur un exemple qu'on a vécu cette semaine, lorsque le ministre est venu annoncer à l'Hôtel-Dieu de Lévis la remise du rapport du groupe de travail pour l'évaluation des médicaments anticancéreux. Alors, moi, ma préoccupation, M. le Président, est vraiment à cet effet-là. D'autant plus qu'on sait que la politique commence à porter fruit, parce que, même si on a une croissance dans le coût total des médicaments, reste quand même que la tendance est à la baisse actuellement au niveau de la croissance, et on pourrait même assister à une croissance négative à certaines... dans les années qui viennent.
**(10 h 40)** Alors donc, je pense, M. le Président, qu'avant d'alarmer la population puis de dire qu'on s'en va directement dans l'abîme, alors il faut faire bien attention, il faut être extrêmement prudent. D'autant plus que cette politique-là, elle a fait l'objet vraiment d'une vision concertée en matière de médicaments, hein? Il ne faut pas oublier que, cette politique-là, il n'y a pas juste les entreprises pharmaceutiques, parce que des fois on laisse entendre qu'il y a juste les entreprises pharmaceutiques qui ont participé aux consultations, mais il y a eu au moins 80 groupes qui se sont fait entendre dans le cadre de cette politique-là, et je pense que c'est une politique qui a porté ses fruits. Alors donc... et elle a... elle est intéressante, notamment au niveau de l'accès aux médicaments, parce que l'objectif, c'est de garantir un accès raisonnable et équitable. Ça, je pense que cet objectif-là, à mon point de vue, quand on regarde ce qui se passe au Québec, il est atteint. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des améliorations à apporter, mais c'est un objectif qui est atteint, mais qu'il faut poursuivre les efforts.
Ensuite, le ministre en a parlé tout à l'heure, tout l'encadrement de l'inscription d'un médicament à la liste de médicaments, ça, je pense qu'on a fait vraiment... Et d'ailleurs, lorsque le ministre est venu, cette semaine, pour déposer le rapport du groupe de travail, on a vu les spécialistes qui ont admis que cet encadrement-là avait porté ses fruits, et qu'ils l'ont tous dit publiquement, tous ceux qui travaillent dans le domaine l'ont d'ailleurs dit publiquement.
Donc, moi, je trouve ça intéressant, d'autant plus qu'on a aussi toute la nouvelle section de médicaments d'exception -- il me reste une minute seulement? Ah, mon Dieu! ça passe vite -- donc, qui a été suivie. Et je sais que par ailleurs le traitement des maladies métaboliques héréditaires rares, ça, je sais que c'est une préoccupation du ministre, parce qu'il a l'occasion d'en parler souvent. Et, pour moi, M. le Président, juste pour conclure parce qu'il ne me reste juste une minute, malheureusement, alors, qu'est-ce qu'elle a fait, cette politique du médicament là? Elle a amélioré l'accessibilité aux médicaments, elle a amené l'établissement d'un prix juste et raisonnable pour les médicaments. Elle permet l'usage optimal des médicaments, avec une grande diversité pour les patients, et le maintien d'une industrie biopharmaceutique dynamique au Québec.
Alors, M. le Président, je pense qu'au-delà des épouvantails il y a une réalité, puis ça fonctionne bien.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, M. le député de Lévis. La parole est maintenant à la députée de Taschereau pour l'opposition officielle, pour cinq minutes.
Mme Maltais: Bonjour, M. le Président. Je salue le ministre, les collègues de l'Assemblée nationale ainsi que les fonctionnaires et attachés politiques qui les accompagnent. Ça me fait plaisir aujourd'hui de parler de la politique du médicament du Québec. Et j'étais bien heureuse d'entendre le ministre saluer le geste que le gouvernement a posé en 1997. Il a juste oublié de rappeler que c'était le Parti québécois -- c'est notre collègue Jean Rochon, qui est un homme courageux -- et que nous avons su faire preuve de courage. Nous avons affronté à ce moment-là, et il le fallait, l'industrie pharmaceutique ainsi que l'industrie des assurances, qui n'était pas d'accord. Alors, je suis heureuse de voir que mes collègues aujourd'hui saluent le courage du Parti québécois. Nous saurons en avoir quand c'est le temps, mais, cette fois-là, c'est un grand geste qu'on a posé pour le bien-être des patients du Québec.
Maintenant, parlons de la politique du médicament, qui a été adoptée... qui a été rendue publique en 2007, c'est Philippe Couillard, son prédécesseur, qui l'a fait. Elle avait quatre grands axes, 29 orientations ministérielles. Ces axes étaient l'accessibilité aux médicaments, l'établissement d'un prix juste et raisonnable, un usage optimal du médicament et le maintien d'une industrie biopharmaceutique dynamique au Québec. Le problème qu'on a, c'est que, parmi les 29 orientations, plusieurs devraient déjà être en oeuvre, mais les seules, à peu près, qui ont été mises en oeuvre, l'impression qu'on a, c'est que ce sont celles qui sont davantage favorables à l'industrie pharmaceutique, et celles qui pourraient avoir un impact positif sur les patients, elles sont remises aux calendes grecques.
Voici des exemples de celles qui ont été mises en oeuvre pour l'industrie pharmaceutique: dégel des prix des médicaments, assouplissement dans le processus administratif lié à la confection de la liste des médicaments et maintien de la règle des 15 ans. On n'a aucun problème à ce qu'elles aient été mises en oeuvre, le problème, c'est que, pendant ce temps-là, les patients, eux, attendent. Je vais en choisir trois comme exemple. L'orientation n° 5: Rappeler aux établissements leur responsabilité de rendre accessibles aux patients des médicaments non inscrits aux listes lorsque ceux-ci leur sont prescrits dans le cadre des activités d'un établissement. C'est des situations, là... il existe des situations. La liste interne a été utilisée pour restreindre l'accès aux médicaments, généralement à des produits coûteux, et maintenir l'équilibre budgétaire de l'établissement. C'est ça, les situations qui ont été rapportées. On fait... On fait payer... Ça n'a pas de bon sens, là, que, quand aucun autre médicament comparable ne peut être utilisé, que c'est un produit médicalement indispensable, c'est incroyable qu'on en refuse l'accès aux patients.
Or, cette orientation qui a été adoptée par le gouvernement aurait dû être réalisée en 2007, mais, dans les documents de l'étude des crédits, on nous apprend que c'est reporté à une date ultérieure. Les patients attendront.
L'orientation n° 6: Définir les circonstances. Un citoyen traité sur une base ambulatoire pourrait se faire administrer dans un établissement un médicament acquis en milieu communautaire, acquis dans une pharmacie. Écoutez, il y a plusieurs traitements nécessitant des médicaments qui sont désormais donnés sans recourir à l'hospitalisation. On peut acheter les médicaments en pharmacie, de Lucentis. Si le gouvernement avait donné suite à la mesure que je viens d'énoncer, on aurait évité tout le drame lié à la dégénérescence maculaire humide liée à l'âge.
Cette orientation, si importante pour les patients, aurait dû être réalisée en décembre 2008. Mot à mot dans l'étude des crédits: «Le gouvernement reporte à une date ultérieure sa mise en oeuvre.» Encore une fois, les patients attendront.
Orientation 20: Offrir un service Info-Médicaments disponible en tout temps, en plus d'Info-Santé. «Chaque citoyen...» Je vais... la déclaration du gouvernement: «Chaque citoyen aura accès à des renseignements et des conseils sur les médicaments par l'intermédiaire du service Info-Médicaments, un service de deuxième ligne accessible en tout temps par l'intermédiaire du service Info-Santé.» En juin 2004, M. le Président, un groupe de travail a été formé avec le mandat de réviser le rôle et l'organisation d'Info-Santé, et ça devait servir à adapter les services aux nouvelles réalités organisationnelles. Ça devait permettre d'offrir un accès continu à l'expertise des pharmaciens, vers qui les infirmières du service Info-Santé auraient pu se tourner.
Or, cette orientation aurait dû se réaliser en juin 2008, M. le Président. Qu'est-ce qui est écrit dans l'étude des crédits de cette année? Sa réalisation a été reportée en décembre 2009, et maintenant le gouvernement retarde sa réalisation à une date ultérieure. Je vous le dis, quand il s'agit de l'industrie pharmaceutique, c'est correct, il y a des choses qui ont été mises en oeuvre, mais, quand il s'agit des patients, on retarde. Je veux savoir pourquoi ces mesures ne sont pas toujours en oeuvre. Quand il compte mettre en place des mesures, qui sont déjà annoncées pour être mises en oeuvre il y a trois ans?
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. M. le ministre, pour cinq minutes en réplique.
M. Bolduc: Oui. Bien, merci, M. le Président. Bien, je remercie la députée de Taschereau de rappeler que ça avait pris un geste courageux en 1997 pour mettre en place l'assurance médicaments. Moi, j'étais médecin à l'époque, et, comme de fait, comme toute nouvelle réforme qui souvent... et c'est salué quand la personne est partie, mais, plusieurs années après, il faut reconnaître que ça a été un travail remarquable. D'ailleurs, le Québec, puis je tiens à le rappeler, est la seule province qui est dotée d'une assurance médicaments, et la plus grande problématique en santé des autres provinces, c'est qu'il y a une grande partie de leurs populations qui n'a pas accès aux médicaments, ou, même quand ils ont une assurance, c'est limité en termes d'accessibilité. Et ça, je pense qu'au Canada c'est quelque chose qui va être créé.
Et je vous dirais, pour faire du pouce un peu sur ce que la députée discutait, puis on était... on était du même bord lorsqu'on a fait cette discussion, la question de la procréation assistée, qui actuellement est un modèle au Canada -- puis, justement, cet après-midi, je vais faire une allocution au premier congrès d'andrologie international, qui se tient ici, à Québec -- où on a démontré qu'on a passé de 30 % des grossesses multiples à 3,8 %... Et les échos que nous avons des autres provinces actuellement, c'est que les autres provinces sont en train de regarder pour se doter d'un régime similaire, dont, entre autres, par rapport aux médicaments, on paie les médicaments, on paie les nouvelles techniques, et, à la fin, on avait dit que, si on était autour de 10 % de grossesses multiples, c'était un système qui s'autofinançait. À 3,8 %, on va probablement faire des économies significatives dans nos soins néonataux, en ayant des enfants moins malades, et ça va nous permettre de payer une partie du régime pour la procréation assistée.
Et ce que nous entendons parler de certaines autres provinces, c'est qu'actuellement ils regardent le régime du Québec, et ils nous ont demandé des documents pour justement possiblement calquer quelque chose de similaire, si jamais ils réussissent à le passer au niveau politique. Ça, c'est un bel exemple également que, lorsque vous investissez dans des nouvelles technologies, parfois plus dispendieuses, que, si ça vous permet de diminuer des complications à certaines catégories de clientèles, à ce moment-là ce sont des économies qu'on peut faire de façon significative.
Pour ce qui s'agit de la question de l'assurance médicaments, comme de fait, il y a eu, je pense, des ententes qui ont été faites. À ce moment-là, on a mis un régime en place, un régime équilibré entre ce que les compagnies pharmaceutiques pouvaient offrir et puis également ce que le gouvernement prônait.
Il y a eu aussi des travaux qui ont été faits au niveau de l'utilisation judicieuse du médicament, dont, entre autres, si vous regardez actuellement, il y a eu des... pas des protocoles, je vous dirais, des recommandations, des lignes de conduite qui ont été publiées par le gouvernement sur l'utilisation des antibiotiques dans certaines pathologies.
**(10 h 50)** Également, au niveau du Conseil du médicament, il y a eu comme des acceptations de certaines molécules, mais pour des patients avec qui ça va pouvoir vraiment être utile. Puis il y a également toute la question des médicaments d'exception, c'est-à-dire que, pour une catégorie de médicaments, il y a des indications très particulières, donc ça prend une autorisation spéciale qu'on peut utiliser.
Et il s'est rajouté également ce qu'on appelle les patients d'exception. Un patient d'exception, c'est quelqu'un qui a une maladie très, très, très particulière, qui a besoin d'un produit ou d'un ensemble de produits. Et ce patient-là, lorsqu'il est catégorisé, ça lui donne le droit à cette médication-là.
Puis je saisis également l'occasion de dire que, pour ce qui s'agit de l'information au patient, on ne se défile pas, c'est-à-dire qu'il faut donner de l'information au patient, mais actuellement il reste qu'au niveau des pharmacies la majorité des pharmacies offrent actuellement des conseils au niveau des patients, et on encourage fortement les pharmaciens à continuer à donner des conseils pour l'utilisation judicieuse.
Puis, encore là, je rappelle, l'utilisation judicieuse, ça se fait dans les deux sens, c'est-à-dire qu'il ne faut pas prendre des médicaments qui ne sont pas utiles au patient. Par contre, un médicament qui peut donner une utilité au patient devrait être utilisé par lui. Et puis ça, je pense qu'on a un gros travail à faire, parce qu'on parle souvent de surconsommation, mais il faut parler également de consommation pertinente pour prévenir certaines maladies.
Donc, encore là, je salue notre régime avec l'assurance médicaments. Et je pense que la députée de Taschereau pourrait témoigner qu'on a réussi à trouver un équilibre, au Québec, entre un régime d'assurance public et un régime d'assurance privé. Et un des éléments intéressants, c'est que les deux sont quand même mis en compétition, et on essaie de voir c'est quoi, la croissance des coûts dans chacun des systèmes. Et je peux vous dire qu'actuellement, là, selon notre perception, ça s'équivaut à peu près.
Et puis, là-dessus, je vais revenir dans quelques minutes, mais juste pour introduire ma prochaine intervention, c'est qu'actuellement le coût des médicaments est en baisse au Québec, du jamais vu dans l'histoire de la santé au Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, M. le ministre. La parole est maintenant au député de Lévis...
M. Lehouillier: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): ...pour cinq minutes.
M. Lehouillier: Alors, moi aussi, à mon tour, je voudrais quand même, M. le Président, parce que je sais que la députée est intervenue à cet égard-là, au niveau du régime général d'assurance médicaments, qui a été instauré le 1er janvier 1997, et effectivement, moi, je pense qu'on a réussi à aller chercher un équilibre... un équilibre qui m'apparaît tout à fait bien dans notre société, puis je pense qu'il y a un consensus autour de cet équilibre-là. Il y a 3,2 millions d'assurés, comme je le disais tout à l'heure, puis il y a une multitude de régimes privés, qui fonctionnent très bien, d'ailleurs, en passant. Et, moi, je pense qu'on a un bel équilibre et je pense que l'objectif du gouvernement, c'est plutôt de s'assurer, et ça, c'est bon que les consommateurs le sachent, M. le Président, donc l'objectif, c'est de s'assurer qu'on a davantage de variétés de médicaments disponibles et qu'on est capables de répondre aux besoins spécifiques de la population.
Et je la... je l'ai... je le répète, tantôt: les quatre grands axes de la politique, c'est l'accessibilité, l'établissement d'un prix juste, l'usage optimal des médicaments... et, on le voit, la croissance, là, des coûts, là, elle diminue actuellement. Il faut le répéter, ça, M. le Président, parce que des fois on véhicule des choses qui ne sont pas conformes à ce qui est dit. Aussi, l'octroi de la gratuité des médicaments, à l'ajout, au niveau des mesures, à trois autres clientèles vulnérables: les personnes âgées qui reçoivent la prestation maximale du supplément de revenu garanti ou qui reçoivent au moins 94 % du montant maximal, les prestataires d'assurance-emploi sans contrainte sévère... Donc, c'est 313 460 personnes qui ont été ajoutées depuis 2005, là. C'est quand même énorme. Et. si on ajoute les personnes qui en bénéficiaient déjà, ça veut dire qu'actuellement, M. le Président, au Québec, il y a un assuré sur trois du régime public qui bénéficie d'une gratuité complète des médicaments.
Alors, aussi, moi, je pense que... parce qu'on parle souvent de façon négative, mais la mise en place du nouvel encadrement du prix des médicaments, ce qu'on appelle l'indexation des prix annuelle des médicaments, il faut dire qu'en même temps est attaché à ça l'engagement du fabricant à l'égard du meilleur prix au Canada. Ça, c'est extrêmement important et ça a permis, par exemple, au Québec, ce meilleur prix au Canada, de bénéficier de baisses de prix au niveau des médicaments génériques qui sont survenues en Ontario en 2010. Et ça, M. le Président, c'est extrêmement important de le signaler. Donc, au niveau du générique, on est passés de 50 % à 25 %, 190 millions d'économie. Alors, quand on essaie de dire: Bien, le Québec se fait tout le temps fourrer, bien, je m'excuse, là, là on a la preuve qu'on applique ce principe-là du meilleur prix au Canada. Alors donc, moi, je pense, M. le Président, qu'au contraire on s'enligne vers quelque chose qui est quand même intéressant.
Il me reste peu de temps, mais je voudrais quand même revenir aussi sur ce que j'ai vu dans l'article de ce matin dans les journaux, de ce qu'on a pu voir. C'est qu'on... évidemment, on se compare souvent avec la Nouvelle-Zélande, et là on parle du prix de référence pour contenir les dépenses des médicaments. Alors, la Nouvelle-Zélande a appliqué ce principe-là, puis là on parle d'économies qui peuvent être dégagées. C'est vrai que -- et là je m'adresse encore aux consommateurs -- ça a le mérite de faire diminuer les coûts d'un régime d'assurance. Mais cette modalité de remboursement -- puis c'est là qu'on a des choix à faire comme société -- peut aussi venir limiter l'ensemble des thérapies disponibles à un patient qui n'aurait pas les moyens de payer la différence pour obtenir un autre traitement que celui qui sert de référence. Ça, M. le Président, c'est extrêmement important.
De plus, les médecins -- puis on l'a vu à l'Hôtel-Dieu de Lévis, j'aurai l'occasion d'y revenir, au niveau des médicaments anticancéreux -- les médecins voient dans l'application d'un prix de référence une limitation, voire une ingérence dans leur pratique, puisqu'ils ont peu d'options de prescription. Alors, il est important que l'implantation d'une modalité de remboursement qui est basée sur le prix de référence... de voir que ça pourrait aussi avoir des impacts négatifs, notamment au niveau du consommateur, M. le Président, notamment au niveau de l'usager premier. Et, pour moi, c'est ça qui m'apparaît extrêmement important. Nous, on optimise la qualité puis on ouvre la machine, et, quant à nous, je pense que c'est ça qui est quand même important: continuer à offrir le plus de médicaments possible. Et on a raison, on en offre plus qu'en Ontario, on en offre plus qu'ailleurs, des médicaments. Mais c'est ça aussi que nos citoyens souhaitent qu'on fasse. Et on a eu l'exemple de Lévis cette semaine, j'aurais l'occasion d'y revenir lors d'une prochaine intervention.
Donc, on n'applique pas la méthode la plus basse, mais, nous, on est dans la règle de 15 ans, et cette règle de 15 ans là, en passant, elle est à peu près similaire à ce qu'on voit dans les pays de l'OCDE. On ne fait pas bande à part, le Québec, là, on est dans la game, au niveau international. Alors, je pense, M. le Président, que c'est important de signaler ces éléments-là quand on parle de médicaments, et surtout quand on parle d'une politique de médicaments qui, bien sûr, il y a des améliorations à y apporter, mais c'est quand même quelque chose d'important, puis je pense que les Québécois en sont très satisfaits, en passant.
Le Président (M. Pagé): Merci beaucoup, M. le député de Lévis. La parole est maintenant au député de Mercier pour cinq minutes.
M. Khadir: Pour répondre à la préoccupation du député de Lévis, M. le député de Lévis, acceptez l'idée que notre intention, ce n'est pas d'augmenter le coût des médicaments pour les contribuables mais de le réduire. Deuxièmement, notre intention, ce n'est pas de diminuer l'accès aux médicaments, mais les augmenter, de les augmenter sur tous les plans, à la fois pour les médicaments de base mais également pour les médicaments plus coûteux, par exemple les médicaments anticancéreux ou, comme dans l'exemple qui a été donné par ma collègue de Taschereau, le Lucentis. Actuellement, si on a une difficulté à les rembourser, c'est parce que justement c'est des médicaments très coûteux. Si on arrive donc par un régime d'assurance médicaments universel, associé, assorti d'une négociation réelle pour obtenir de meilleurs coûts pour le public, donc moins coûteux pour les contribuables, on réussirait donc à répondre à votre préoccupation, avec les économies dégagées, s'assurer qu'on augmente l'accès à des produits auxquels on n'a pas accès, même au Québec actuellement.
Alors, voici ce qui en est. Le professeur Marc-André Gagnon, professeur adjoint à l'école publique d'administration de l'Université Carleton mais aussi chercheur pour le Pharmaceutical Policy Research Collaboration, qui est associé à Harvard et à McGill, a produit un document qui dit qu'un régime public d'assurance médicaments au Québec, avec continuité des mêmes politiques, c'est-à-dire en continuant d'offrir les mêmes bonbons inutiles, les mêmes avantages fiscaux ruineux pour les contribuables, mais juste en ayant un régime d'assurance médicaments universel, alors que les dépenses actuelles en médicaments prescrits au Québec, au total, public et privé, est de 6,8 milliards, on réussirait à dégager une économie totale nette de 720 millions. Alors, imaginez, M. le député de Lévis, combien vous pourriez dégager de marge de manoeuvre justement pour améliorer l'accessibilité aux médicaments, qui vous préoccupe.
Maintenant, si on fait ça assorti d'une véritable négociation, en cessant de plier les genoux devant l'industrie pharmaceutique, en cessant de répondre au marketing agressif, au lobbying agressif des pharmaceutiques, en tenant compte qu'en Europe... Vous avez dit, vous: On ne fait pas banque à part, oui! Et actuellement, en Europe, on remet en question les avantages qu'on a consentis aux pharmaceutiques parce qu'on s'est rendu compte que ces avantages, ces brevets protégés pendant 15 ans, malheureusement, au lieu d'augmenter la recherche et l'innovation, on a aperçu... Je vous ai lu le rapport Debré, il faut que vous le lisiez; c'est un rapport tout récent qui fait le bilan non pas de l'industrie juste en France, mais partout à travers le monde, et qui démontre... malheureusement cette politique-là, qui a été animée de bonnes intentions, a donné de très mauvais résultats.
**(11 heures)** Alors, si on fait ça au Québec, c'est-à-dire en remettant à niveau notre politique industrielle, par exemple en cessant juste, hein, l'impact, là, notre... le coût pour les contribuables québécois de la protection de 15 ans qui est offerte exclusivement au Québec, par rapport au Canada, aux médicaments brevetés, c'est 102 millions de dollars. Puis une série d'autres mesures feraient en sorte qu'au lieu de 720 millions on ferait 1,2 milliard d'économie dans les médicaments. 1,2 milliard d'économie par année, M. le ministre. Hein? Vous pourriez en faire des usages appropriés pour les médicaments anticancéreux, pour le Lucentis et les semblables, pour toutes sortes de traitements qu'on ne peut pas se permettre actuellement et que les Québécois mériteraient d'obtenir. On pourrait améliorer aussi notre équipement, notre parc d'équipements diagnostiques. On pourrait améliorer l'organisation de nos soins en accordant de meilleurs salaires à nos infirmières, qui actuellement supportent l'essentiel du service dans le domaine de la santé.
Cependant, M. le ministre a dit: Non, on a déjà les meilleurs prix. Je dirais même dans le cas que, si on ne fait rien, rien d'autre, ni assurance médicaments universelle, ni mettre fin à ce qu'on donne comme avantages à l'industrie pharmaceutique actuellement, si on ne fait rien de ça, là, mais on fait uniquement ce qu'un administrateur intermédiaire fait et ce que la RAMQ ne fait pas, par exemple les 11... un consortium de 11 hôpitaux du sud de Lanaudière et des Basses-Laurentides, on pourrait avoir des médicaments 30 % moins cher que ce que paie la RAMQ aujourd'hui sans regarder. Dans mon hôpital et les 10 autres que je vous ai dits, dans ce consortium, nos pharmaciens, les responsables des pharmacies réussissent à négocier, parce qu'il font des achats groupés, à un taux qui accote à 70 % en moyenne ce que la RAMQ rembourse aux pharmaceutiques. Pourquoi? Pourquoi vous ne faites pas la même chose? Juste pour le 4 millions actuellement que le gouvernement, la RAMQ couvre, ça voudrait dire 1 milliard d'économie, M. le ministre. 1 milliard...
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie.
M. Khadir: ...ajoutez-le à tout ce que j'ai dit.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, M. le député de Mercier. Et je comprends votre enthousiasme, je ne vous ai pas coupé la parole, mais je vous rappelle, vous êtes maintenant un député expérimenté, que l'interpellation... même en interpellation, si vous voulez vous adresser à un collègue, vous le faites par l'intermédiaire de la présidence et non directement. Je vous remercie. M. le ministre, pour cinq minutes.
M. Bolduc: Oui. Merci, M. le Président. Vu qu'on parle des coûts des médicaments, je pense que c'est important de faire aussi l'histoire des coûts de la santé depuis plusieurs années. Quand on regarde, il y a 10 ou 15 ans, les coûts des médicaments augmentaient d'environ 15 % à 20 % par année. D'ailleurs, c'était un problème à l'époque, parce que les gens disaient: Un jour, il va falloir que ça arrête, et ça, pour plusieurs raisons.
La première, une des premières, c'est toujours qu'il y a plus de gens au Québec, et également la population vieillit, mais une des raisons, c'est qu'il apparaissait beaucoup de nouvelles molécules très, très efficaces qu'on utilisait, et ça, ça faisait qu'il y avait une augmentation des coûts. Et ça, c'était un effet que nous avions à l'époque.
Depuis quelques années, pour plusieurs raisons, un, il y a eu beaucoup de recherches qui ont été faites. C'est beaucoup plus difficile de mettre en marché un nouveau produit, et, comme de fait, les grandes pathologies à grand volume, qui sont souvent des créneaux rentables pour les compagnies, sont déjà occupées par des bons produits, ce qui fait que, quand un nouveau produit vient sur le marché, il faut qu'il prouve une efficacité supérieure, et naturellement, compte tenu qu'il y en a des très bons, bien la barre est beaucoup plus haute, et c'est plus difficile de les mettre en place.
Il y a eu également le fait que l'utilisation très sécuritaire des produits, avec des nouvelles façons de faire de la recherche, fait que, le moindrement qu'un produit représente un risque, exemple, un patient qui développerait une mortalité augmentée, ou il y aurait de la mortalité augmentée par rapport à une molécule, il ne peut pas venir sur le marché. Ce qui, un petit peu plus tard, va me permettre de vous parler de ce qu'on appelle la médecine personnalisée, qui est un créneau qu'au Québec on veut développer au niveau de la recherche. Ce qui fait que, avec les années, il y a eu de moins en moins de produits. L'arrivée des génériques également puis le fait qu'il y a des molécules qui étaient très bonnes il y a 15 ans, qui maintenant sont devenues des génériques et qu'on continue d'utiliser mais à moindre coût... fait qu'il y a eu une diminution au niveau du prix des médicaments. Et un des effets, également, de cette arrivée moins grande de nouvelles molécules, c'est tout simplement, c'est que ça nous a permis de diminuer les coûts. Parce qu'avant ça, un exemple, il y avait environ 10 à 15 nouvelles molécules sur le marché, maintenant c'est peut-être quatre à cinq, et, compte tenu qu'on a déjà beaucoup de produits qui se sont générisés, ça a amené quand même des conséquences assez intéressantes pour le coût des médicaments.
Donc, on est partis, il y a 10 ou 15 ans, à des coûts qui augmentaient de 10 % à 15 % par année. Voilà trois ans, en 2009, l'augmentation des coûts au Québec et au Canada a été de 6 % pour l'ensemble des médicaments; l'année dernière, nous avons eu une augmentation de 2 %, et les prédictions cette année, tant pour le Canada que pour le Québec, c'est une diminution de la facture des coûts des médicaments entre 2 % et 5 %. Donc, on est partis d'une grande problématique qui était une augmentation très marquée des coûts à un meilleur contrôle des coûts.
Également, lorsqu'on achète nos médicaments, on les achète en grandes quantités, on va chercher une économie de volume. On veut également laisser un peu la diversité parce qu'on veut une compétitivité entre les différentes molécules, parce qu'une même molécule... ou un même problème peut être traité de façon aussi efficace par deux ou trois médicaments qui sont différents. C'est des classes de médicament, et il y a quelques compagnies qui en ont une dans chaque classe, et à ce moment-là on essaie de choisir soit la plus efficace, mais, à efficacité similaire, bien on prend la moins chère. Et cet effet de compétitivité là fait également qu'avec le temps les prix ont tendance à diminuer.
Parce que, là, il faut voir, là, c'est une stratégie aussi que nous avons au Québec, on veut offrir les meilleurs produits, qui au début sont plus dispendieux, plus efficaces mais plus dispendieux... Et, en passant, s'ils ne sont pas plus efficaces, ils ne peuvent pas rentrer sur le marché. Il faut qu'ils prouvent une efficacité supérieure aux autres produits déjà en place, sinon ils ne peuvent pas rentrer sur le marché. Donc, à ce moment-là, ce qu'on veut, c'est que ces produits-là, avec le temps, on puisse les offrir à tous nos patients parce qu'ils peuvent en profiter. Et on sait qu'après un certain temps le brevet tombe, le produit devient générique, et à ce moment-là on va chercher des économies significatives.
Tout ça pour dire, M. le Président, que l'économie du médicament au Québec, c'est une économie qui est équilibrée, c'est une économie également qui nous permet d'aller chercher de nouveaux produits, de meilleurs produits à un prix raisonnable, qu'on accepte de payer pendant un certain temps plus cher, mais, après un certain temps, on est capables de le génériser, et il devient moins dispendieux.
Pour ça, c'est important, M. le Président, parce qu'on parle de molécules à grand volume, mais on peut peut-être essayer de revenir tantôt sur les médicaments qui sont très dispendieux, dont le cancer. Et, le cancer, c'est des traitements qui coûtent très cher, mais c'est également des molécules qui profitent à peu de gens mais que le coût de recherche est très dispendieux. Mais, M. le Président, on va prendre notre temps, on va avoir le temps d'y revenir, là, dans quelques minutes.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, M. le ministre. La parole est maintenant au député de Lévis pour cinq minutes.
M. Lehouillier: Merci beaucoup, M. le Président. Donc, je voudrais parler un peu aussi, M. le Président, d'une évolution qui est fort intéressante au Québec maintenant, qui est, on en a parlé un peu tout à l'heure, qui est la baisse de prix des médicaments génériques. Et on sait que la politique du médicament a prévu à cet égard-là de nouvelles balises pour les médicaments génériques.
On était, souvenons-nous, M. le Président, à 60 % du prix du produit innovateur, après ça 54 %, selon qu'on retrouve un ou plus d'un produit générique à la liste; donc, c'étaient un peu, là, les barèmes qu'il y avait. Et le Québec profitait de ces balises-là, où on était à 70 % ou 63 %, qui ont été en vigueur jusqu'en 2006, M. le Président. Et l'engagement réglementaire du fabricant, il ne faut pas l'oublier, il faut le répéter constamment, prévoit qu'il doit soumettre au régime général d'assurance médicaments le meilleur prix consenti au Canada. Et ça, on ne le dira jamais assez, là. On est... Ils sont... Tout le monde est pris dans cette contrainte-là.
Cet engagement-là, là, ce n'est pas d'aujourd'hui, c'est depuis 1992, imaginez-vous. Puis je ne pense pas qu'à date, là, personne n'ait remis en cause cette approche-là. En novembre 2007, il y a une nouvelle réglementation qui est entrée en vigueur pour les allocations professionnelles, aussi, pour les plafonner à 20 %. Et ça, je pense que c'est quand même une nouveauté qui a été introduite, de la valeur des ventes d'un fabricant de médicaments à un pharmacien propriétaire. Donc, ça, je pense que c'est important de le signaler. Et ça va continuer à baisser parce qu'il y a des... les pourcentages vont augmenter.
Donc, je pense que, pour les médicaments génériques, en termes d'ordonnances, on est rendus maintenant, M. le Président, à pas loin de... peut-être que le ministre me corrigera si mes chiffres ne sont pas exacts, mais on est à 57 % à 60 % pour les médicaments génériques, au niveau des ordonnances, puis 41 % pour les médicaments innovateurs. Ça veut dire qu'à un moment donné plus on avance, plus on se rend compte qu'il y a des économies substantielles à faire. On l'a dit tout à l'heure, avec ce qui est arrivé en Ontario en 2010, où le gouvernement a publié un ensemble de dispositions réglementaires pour les nouvelles balises, et donc on est descendu à 25 % du prix du produit innovateur, c'est-à-dire que ce qu'on appelle, là, les produits équivalents, on est maintenant rendus à 25 %. Alors donc, je pense que c'est quand même important de le signaler.
Et ce qu'il faut signaler également, M. le Président, c'est que, dans ces baisses de prix là au niveau des médicaments génériques, il y a une baisse des prix qui est survenue le 17 décembre 2010. La cible: 37 % du prix du produit innovateur. La deuxième baisse, avec la liste des médicaments cibles: 30 %; troisième baisse, cible: meilleur prix au Canada. Le gouvernement a donc annoncé que ces baisses-là permettent de réaliser des économies finalement de 190 millions. Et, au cours de l'exercice 2013-2014, c'est ce qui va arriver, et donc je pense que c'est quand même quelque chose d'extrêmement positif.
Et, pour accorder tout ça, alors donc le plafond des allocations professionnelles va être ramené également de 20 % à 16 %, M. le ministre. Et ça, quand même, c'est une autre avancée qui fait que progressivement, au niveau des médicaments, on améliore constamment notre performance tout en maintenant -- le ministre a eu l'occasion de le démontrer tout à l'heure -- tout en maintenant une abondance dans la qualité des médicaments qu'on peut offrir.
Alors, pour moi, je pense qu'on a un régime qui est à la fois équilibré, on a un régime qui fait appel à un régime universel qui vient vraiment appuyer sans réserve les consommateurs qui en ont vraiment besoin et qui fait en sorte, à un moment donné, que, même pour les médicaments dont les prix sont assez élevés, on s'assure que tous les Québécois aient accès à ces médicaments-là. Et c'est sûr que c'est un défi à relever, c'est un gros défi à relever, mais je pense qu'on est en train de réussir à le relever, et c'est une très bonne chose pour le Québec. Merci.
**(11 h 10)**Le Président (M. Pagé): Merci beaucoup, M. le député de Lévis. La parole est maintenant à Mme la députée de Taschereau pour cinq minutes. S'il vous plaît.
Mme Maltais: Merci, M. le Président. Je voulais aborder un autre sujet mais je ne pourrai pas, M. le Président. Je ne pourrai pas, parce que, un, il y a une partie des questions que j'ai posées auxquelles je n'ai pas eu de véritable réponse; deuxièmement, le petit bout de réponse que j'ai eu mérite d'être éclairci, parce que je viens de voir... je viens d'entendre ce que je considère comme l'abandon d'un des quatre axes de la politique du médicament, soit l'usage optimal du médicament, la pierre angulaire de cet axe, qui était l'usage optimal du médicament, la pierre angulaire, ce qui faisait que les gens ont adhéré à la politique du médicament et à cette idée d'un usage optimal du médicament, pour éviter d'autres consultations, pour éviter des complications aux patients, c'était Info-Médicaments.
C'était tellement la pierre angulaire qu'il y a eu beaucoup d'articles qui ont été écrits là-dessus. Et voici ce qu'ils disaient. Le Devoir, décembre 2004: «Les Québécois ont besoin d'une ligne Info-médicaments, un pharmacien au bout du fil 24 heures sur 24.» Voilà ce que proposait l'Association des pharmaciens des établissements de santé, qui a réclamé la mise en place d'une ligne téléphonique d'information sur les médicaments. Et la politique du médicament le donnait. Pourquoi? Parce que c'est loin d'être un luxe pour le Québec. Parce que le principe proposé, c'était un service de deuxième ligne qui se greffait à Info-Santé. Et ça permettait justement que ce ne soit pas seulement les compagnies pharmaceutiques qui donnent des informations sur les médicaments, c'était que le public était en droit d'exiger une source d'information totalement objective. Alors, on passait par Info-Santé, puis, si l'infirmière disait: Vous avez probablement un problème de médication, et que c'était la nuit -- la pharmacie n'est pas ouverte souvent la nuit, là, ou, en région, c'est difficile, on n'en a pas tant que ça, des pharmacies 24 heures sur 24 -- elle vous envoyait à Info-Médicaments, et vous aviez une opinion, vous aviez une information.
Puis il y a des projets pilotes qui se sont passés au Québec, et ça a donné une amélioration. Et, entre autres, entre autres, certaines interventions auraient évité des consultations à l'urgence. Je viens de lire La Presse, j'espère que le ministre l'a lue ce matin, deux pages de La Presse, pour expliquer, encore une fois, le problème des urgences, à quel point le ministre n'a rien fait. On est encore, huit ans après une intervention sur... où on nous a promis la fin des... des choses à l'urgence: on est encore à 17 heures, on a augmenté l'attente aux urgences. Mais, ici, une des mesures, elle était là, c'était l'usage optimal du médicament. Je viens d'apprendre que c'est abandonné.
«10 % des hospitalisations sont liées à un problème de médication.» Saviez-vous ça, M. le Président? 10 % des hospitalisations! Ce sont les propos du ministère de la Santé et de Philippe Couillard quand il a présenté sa politique du médicament. Est-ce que ça veut dire qu'on abandonne une mesure qui permettrait d'éviter 10 % des hospitalisations puis les problèmes de congestion aux urgences? C'est ça qu'on est en train de faire! Je n'en reviens pas, M. le Président, de ce que je viens d'entendre. J'étais sûre qu'on me donnerait une date.
Alors. l'autre chose, à laquelle il faut ajouter, quand on... dans cette image d'abandon de la politique du médicament et de l'axe de l'usage optimal du médicament, c'est l'intention thérapeutique. Quand il y avait une prescription, on demandait que l'intention thérapeutique soit notée, ça faisait partie de tout cet ensemble. C'est abandonné, on n'en entend pas parler, ça n'a jamais été actualisé, ça n'a jamais été fait. Ça veut dire, là, que le coeur d'un des grands axes de la politique du médicament, une mesure qui donnait des impacts directs aux personnes, aux patients, pas aux pharmaceutique... C'est correct qu'il y en ait eu sur les pharmaceutiques, mais jamais en abandonnant les mesures qui aidaient les patients. Là, M. le Président, on est en train d'abandonner une partie de la politique du médicament. Et je viens de le réaliser ce matin par les réponses du ministre.
J'ai remarqué, en plus... Là, je parle de celui-là, mais je n'ai eu aucun mot, aucun mot sur les orientations que j'ai nommées aussi juste avant, mais aucun, M. le Président. J'ai parlé de deux autres orientations, les 5 et 6, l'orientation qui était de rappeler aux établissements leur responsabilité de rendre accessibles aux patients des médicaments non inscrits aux listes. Pas un mot. Ça veut dire que c'est abandonné? Dans l'étude des crédits, on nous dit «reporté à une date ultérieure». Je comprends que... Ce qu'on nous dit, là, c'est que l'usage optimal du médicament, c'est reporté aux calandres grecques pour le ministre, et ça n'a pas de sens. Qu'on arrête de faire des annonces et d'abandonner ensuite, dans les années futures, la réalisation de ces annonces. Ce n'est pas des annonces qu'on veut, c'est des gestes, c'est des actes, c'est des décisions puis c'est des mises en oeuvre. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. En réplique, M. le ministre, pour cinq minutes.
M. Bolduc: Bien oui, M. le Président, naturellement, si elle a glissé un mot sur les urgences, ça veut dire que je peux parler un peu des urgences, quelques minutes. Comme de fait, ce matin, on a eu le palmarès, dans La Presse, sur les urgences, qui a démontré que, dans un premier temps, qu'on a eu une augmentation de consultation de nos urgences de 6 % plus de patients de 75 ans et plus. Pourquoi? Tout simplement parce qu'il y a beaucoup plus de personnes âgées de 75 ans, mais on a également beaucoup plus de personnes de 80, 85 ans, 90 ans, tout simplement parce que, l'espérance de vie s'étant beaucoup améliorée, tel que je l'ai mentionné en début d'intervention, bien on a plus de gens qui sont susceptibles d'être malades.
L'autre élément, puis je le décris dans une entrevue que j'ai donnée à La Presse, c'est qu'à chaque année, au Québec, nous avons 80 000 personnes de plus; c'est 80 000 citoyens qu'on doit prendre en charge et pour lesquels il faut développer des services. Et habituellement, à chaque année, les urgences, à cause de cette augmentation de volume d'activité, qui est entre 3 % et 6 % à chaque année, les urgences prennent un peu de retard, et il y avait une augmentation de la durée moyenne de séjour.
Cette année, pour la première fois, nous avons réussi à stabiliser la durée moyenne de séjour et, au cours de la dernière année, nous avons également travaillé avec plusieurs établissements, entre autres les établissements... les 24 à 25 urgences à grand volume, qui ont plus de difficultés, pour développer des ressources localement: des ressources au niveau des personnes âgées, des ressources aussi au niveau des gens qui prennent des... puis qui d'ailleurs qui prennent plusieurs médicaments, ce qu'on appelle les maladies chroniques. Donc, en termes de stabilité, c'est déjà un grand gain, et le fait d'avoir fait infléchir la courbe de la durée moyenne de séjour nous permet d'espérer qu'au cours des prochaines années il va y avoir une grande amélioration.
Et, pour en revenir à la question de l'usage optimal du médicament, ce qu'il y avait dans la politique du médicament en 2007, on ne le renie pas, sauf qu'on va donner... on peut donner le service de façon possiblement différente, mais on regardera en cours de route qu'est-ce qui peut être fait. Il y a une toute nouvelle technique qui existe, puis je tiens à le dire parce que je l'ai vue: la majorité des pharmacies actuellement offrent l'information au patient, le patient peut consulter son propre dossier et aller chercher de l'information sur le médicament; il peut également appeler son pharmacien de famille -- un peu comme le médecin de famille, il y a des pharmaciens de famille -- ou à la pharmacie avec laquelle il fait affaire, de façon à pouvoir avoir de l'information sur les médicaments.
Ce qui a été mis en place également depuis 2007, c'est l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, qui, elle, va faire la promotion de l'utilisation optimale du médicament, mais dans un contexte différent. Avant ça, on avait le Conseil du médicament, qui avait une approche par rapport aux médicaments, quelle était la meilleure façon de l'utiliser. L'INESSS, qui est l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, qui, en passant, est le seul organisme de ce type au Canada, et je vous dirais même en Amérique du Nord... Et, il y a quelques semaines, l'Ontario a annoncé qu'ils se doteraient d'une organisation similaire à l'INESSS, c'est-à-dire la promotion des meilleures pratiques au niveau de la santé.
Ça fait que l'INESSS, elle, va avoir une approche un petit peu différente: en même temps qu'elle va s'occuper du médicament, parce qu'elle a récupéré le Conseil du médicament, donc elle a toute cette mission de s'occuper de la bonne utilisation des médicaments, en même temps va faire des guides de pratique avec les différentes associations, avec les différents ordres professionnels: Collège des médecins, Ordre des pharmaciens, l'Ordre des nutritionnistes du Québec, de façon à faire la promotion et dire c'est quoi, les meilleures lignes de pratique qu'on peut faire pour les différentes pathologies.
Et, quand on parle d'utilisation optimale du médicament, ça fait partie du grand tableau des guides de pratique pour le meilleur traitement, pour la meilleure façon de traiter une pathologie particulière, dans lequel le médicament peut jouer un rôle important. Et, lorsque, encore là, on... juste pour prendre un exemple très pratique, quand on parle du diabète, le médicament joue un rôle, mais il y a également toute la question de l'exercice physique, la perte de poids, l'enseignement que l'on fait au patient sur c'est quoi, les saines habitudes qu'on devrait avoir, le stress, éviter le tabagisme, tout ce qu'on appelle saines habitudes de vie. Donc, plutôt que d'avoir une seule façon, c'est-à-dire utilisation optimale du médicament, il faut plutôt regarder avec la façon de traiter une maladie dans laquelle on va incorporer l'usage optimal du médicament. Donc, la prise en charge par le médecin. Le suivi, également, au niveau du pharmacien pour servir de guide, et, la députée de Taschereau en a parlé, toute la question d'Info-Santé. Donc, s'il y a des questions particulières par rapport aux médicaments, je peux déjà vous dire qu'Info-Santé a des guides de pratique qui peuvent aider, et, en même temps, si nécessaire, ils peuvent référer au bon professionnel de la santé pour justement bien guider le patient.
Donc, c'est ce portrait d'ensemble qu'on a en 2011, qui a évolué au cours des dernières années, sans compter toute la question du Internet, sur laquelle on pourra revenir également. Merci, M. le Président.
**(11 h 20)**Le Président (M. Pagé): Merci, M. le ministre. Je suis bien content que vous ouvriez la porte sur les saines habitudes de vie et l'activité physique. La parole est au député de Lévis pour cinq minutes.
M. Lehouillier: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, tout à l'heure, M. le Président, je pense que le ministre a eu l'occasion de démontrer que le Québec se distingue du reste du Canada, évidemment, par l'existence du régime général d'assurance médicaments.
Je pense que, par les composantes publiques et privées, dont on a démontré qu'il y a une cohabitation qui est superintéressante de ce côté-là, le régime général couvre l'ensemble de la population. Ce qu'il faut ajouter, M. le Président, c'est que les autres provinces peuvent compter sur un régime public et des régimes privés, mais il y a une frange significative de la population qui n'est couverte par aucun régime d'assurance médicaments. Aucun. Donc... et ça, je pense qu'il faut quand même le signaler.
Et actuellement, M. le Président, ce qui se passe, c'est qu'on voit qu'il y a plusieurs provinces qui ont mis en oeuvre un régime de type catastrophe, pourrait-on dire, où l'aide est conditionnelle à l'atteinte d'une franchise qui est très élevée, qui est établie en proportion du revenu annuel. Je pense que, ça aussi, il faut que les consommateurs et les gens le sachent. C'est ce qui se passe actuellement.
Donc, ici, notre régime général d'assurance permet à l'ensemble de la population québécoise de bénéficier d'une aide qui est dès les premiers dollars de dépenses en médicaments. Dès les premiers dollars de dépenses en médicaments. Ça, M. le Président, je pense que c'est important de le signaler, c'est ce qui nous distingue de ce qu'on voit ailleurs. Donc, les caractéristiques, aussi, du régime québécois favorisent l'accessibilité aux médicaments. Donc, c'est sûr que, quand tu favorises cette accessibilité-là quasi universelle aux médicaments, forcément c'est normal que tu aies un niveau de dépenses qui soit un peu plus élevé. Ça, je pense qu'il n'y a personne qui va nier ça. C'est assez simple.
Et c'est sûr que, nous, également... parce qu'il ne faut pas oublier que, dans les objectifs de la politique du médicament, il y a toujours le maintien d'une industrie biopharmaceutique dynamique, là. Ça, c'est important aussi. Qu'on le veuille ou pas, ça fait partie d'un des quatre éléments majeurs. Alors, il est clair que la règle de 15 ans a un impact. Mais, encore là, même si on a un rapport actuellement, tel qu'on le signalait tout à l'heure, tel que le signalait le député de Mercier, qu'il y a un rapport qui est sur la table au niveau international, à certains endroits, on commence à remettre ça en question, bien le Québec s'adaptera en conséquence, s'il y a lieu. Mais je pense que c'est quand même important qu'on ait ces éléments-là et qu'on le voie très bien.
Et l'autre élément qui rentre en ligne de compte, c'est qu'il y a aussi les caractéristiques sociodémographiques qui permettent d'expliquer, M. le Président, une partie de l'écart entre les provinces au chapitre des dépenses. Et il faut regarder que Québec, Terre-Neuve et Labrador et Nouvelle-Écosse -- c'est drôle parce que c'est les trois provinces justement qui sont à peu près au même rang -- bien ils comptent respectivement 14,9 %, 14,8 % et 15,8 % de personnes âgées de 65 ans et plus, alors que la moyenne canadienne est à 13 %. M. le Président, c'est clair que, quand on regarde tous ces facteurs-là, on se rend compte que finalement on est assez comparatifs de ce côté-là.
Il faut souligner aussi qu'il y a certains médicaments coûteux qui sont couverts par le régime, alors que dans d'autres provinces ils sont financés par les établissements de santé eux-mêmes, alors qu'ici on les considère dans notre régime. Ça, ça peut amener des fluctuations qui sont quand même extrêmement importantes. Mais, moi, ce que je veux dire, M. le Président, en conclusion sur cette section-là, je veux dire une chose qui m'apparaît fondamentale, c'est que, oui, effectivement on peut avoir des paramètres au niveau financier qui sont plus élevés au Québec, j'ai expliqué pourquoi tout à l'heure, mais en même temps, M. le Président, il ne faut pas oublier qu'on a fait des choix, puis ces choix-là, c'est de nous assurer de l'universalité vraiment d'accès aux médicaments. Et ça, je pense que c'est quelque chose qui est quand même extrêmement important chez nous, au Québec.
J'ai eu l'occasion de parler de l'expérience de la Nouvelle-Zélande, oui, mais il faut regarder ça puis il faut regarder aussi les inconvénients pour les utilisateurs, parce que, nous, ce qu'on veut, c'est de s'assurer que le patient a le meilleur médicament existant sur la planète, pratiquement, c'est ça qu'on fait au Québec actuellement. J'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): Merci, M. le député de Lévis. La parole est maintenant au député de Mercier pour cinq minutes.
M. Khadir: M. le Président... M. le Président, ce que je propose au gouvernement... Pour faire une analogie, mettons, avec des logiciels informatiques, d'accord? Moi, ce que je propose au gouvernement, c'est un régime d'assurance médicaments public universel qui est une version 3.0. Le gouvernement actuellement... le ministre ainsi que le député de Lévis nous parlent d'une version 2.0, d'accord? Puis, pour mettre en relief les vertus de cette position 2.0, les députés en face, du gouvernement, comparent la situation au Québec avec la situation dans les autres provinces canadiennes, qui ont la version 1.0. Je ne sais pas si le député de Lévis suit mon analogie.
L'idée, c'est que je dis au député de Lévis: Plutôt que de nous comparer à ce qui est moins bon, regardons les intérêts de mettre le Québec à l'avant-garde, d'aller plus loin. Parce que c'est un consensus depuis au moins 1964, depuis au moins 1964. On n'a cessé de répéter qu'il fallait un régime d'assurance médicaments universel, c'était la meilleure chose à faire, commission Hall, ensuite, en 1994-1997, sous les auspices de Jean Chrétien, le Forum national sur la santé, encore assurance médicaments universelle. En 1997, la Loi sur l'assurance médicaments qui a rendu obligatoire... c'était un pis-aller en attendant un régime d'assurance médicaments universel. La loi de 1997 qu'on a actuellement, c'est la version 2.0, ce n'est pas la version plus développée, 3.0, c'est un régime d'assurance médicaments universel.
Au lieu d'avoir quatre sur 10 assurés par le public, les plus âgés, les plus malades, avec des haut risques de consommation de médicaments, que ça soit le public qui couvre ça puis qu'on laisse aux assureurs privés les moins risqués, tous les patients en âge de travailler, les jeunes, qui ne sont pas à grand risque, on dit: Mettons ça ensemble, d'accord? Mettons ça ensemble, comme le demandait la commission Romanow, 2002, commission royale d'enquête. Pendant deux ans, ils ont tout fouillé, tout reviré chaque brique pour voir c'est quoi, le meilleur modèle, puis, eux aussi, une de leurs lignes forces, c'était qu'il fallait un régime d'assurance médicaments public universel. C'était leur meilleur moyen de contenir les coûts puis d'offrir une bonne qualité. Maintenant, je vous rappelle que, si on fait ça, un régime public d'assurance médicaments universel, puis on abroge les politiques industrielles parce que ça n'a pas donné de résultats... Vous dites qu'on a fait des choix pour protéger notre industrie biopharmaceutique. Le constat après 15 ans, c'est qu'il n'y en a pas, d'avantages. Les compagnies pharmaceutiques ont fait d'énormes bénéfices, énormes, mais, depuis les 10 dernières années, je mets au défi le ministre de la Santé, M. le Président, je vous invite à leur poser la question vous-même, depuis les 10 dernières années, qu'est-ce que l'industrie pharmaceutique -- innovateur, entre guillemets -- québécois a produit qui n'était pas une copie déjà existante, qui n'était pas juste quelque chose pour occuper une niche qui rapporte, par exemple, en anti-inflammatoires, en antidiabétiques, en anticholestérants, d'accord?
On a déjà des produits. Tout ce que fait l'industrie pharmaceutique, soit disant pour innover, ils trouvent quelque chose pour le même problème, au lieu de véritablement innover. On n'en a pas. Ça n'a pas donné de résultats et ça coûte trop cher. Si on applique ça, suivant les études du chercheur que je vous ai mentionné, avec le groupe multidisciplinaire Carleton, Harvard, McGill, d'accord, on nous dit que les dépenses actuelles des médicaments prescrits, qui sont de 6,8 milliards, on pourrait les réduire à 4 155 000 000 $. M. le Président, 2,8 milliards d'économie par année pour le coût total, ça, c'est... évidemment, ce n'est pas dans le budget, parce que, là, actuellement, avec le régime public, ce n'est que quatre sur 10 qu'on couvre. Mais donc couvrir toute la population du Québec, mais, sur le coût total payé par tout le monde, on ferait des économies de 2,8 milliards.
Imaginez la marge de manoeuvre que ça donne au ministre pour travailler, pour aller chercher d'autres molécules, pour améliorer l'accessibilité. Pas dire que ce n'est pas bon, l'accessibilité qu'on a, c'est vrai, mais cette accessibilité n'est pas vraiment parfaite. J'invite notre député de Lévis à constater qu'une famille qui a actuellement 20 000 $ par année peut se retrouver à payer un total de primes et de contributions, avec les franchises, là, de 2 500 $ par année, c'est-à-dire 12,5 % du revenu brut total, d'accord?, alors que ceux qui bénéficient d'aide sociale, c'est gratuit. C'est comme une trappe à la pauvreté. Il y a certaines familles, là, où ils sont obligés d'abandonner de travailler pour avoir une assurance médicaments qui les couvre complètement.
Donc, ce que je vous invite, c'est de passer du modèle 2.0, plutôt que de le comparer au modèle 1.0 du reste des provinces canadiennes, d'aller vers le modèle 3.0.
**(11 h 30)**Le Président (M. Pagé): Merci, M. le député de Mercier. La parole est maintenant au ministre de la Santé pour cinq minutes.
M. Bolduc: Écoutez, M. le Président, je suis un petit peu surpris quand le député de Mercier dit que depuis 15 ans on n'a pas eu de nouvelles molécules qui ont donné des avantages mais seulement que des copies, là. Mais, en tout cas, je pense que Herceptin n'existait pas voilà 15 ans. On a des nouvelles molécules pour... On a des nouvelles molécules pour le diabète type 2 également, alors qu'il... mais... Ah! je comprends, c'est que le député... je comprends ce que le député, il disait, c'est que ce n'étaient pas des molécules nécessairement qui étaient découvertes au Québec, parce qu'on a eu quand même des molécules qui ont été découvertes au niveau de l'asthme, pour le Québec, qui ont été utilisées au niveau mondial. Également, il y a plusieurs recherches fondamentales qui se font au Québec, ce qui fait qu'ils participent quand même à des groupes de recherche. Puis on a également de la recherche fondamentale.
Ce qui nous amènerait peut-être pour parler d'un sujet intéressant qui est toute la question de la médecine personnalisée et dans laquelle le Québec va être un innovateur.
La médecine personnalisée, pour avoir rencontré différents groupes de chercheurs de recherche fondamentale qui appartiennent dans une université dont... je vais en noter juste un, Dr Pavel Hamet, qui font de la recherche pour chercher des produits qui actuellement ne peuvent pas être utilisés, parce que, si vous faites des études sur l'ensemble d'une population, on n'est pas certains que ça pourrait donner une efficacité marquée, mais, lorsqu'on va chercher une population très sélective, souvent avec des marqueurs, à ce moment-là, ça nous permet de dire que, pour telle catégorie de gens qui peut représenter 5 % à 10 % seulement des gens qui ont cette maladie, pour eux autres, ça a un effet très marqué.
Également, l'autre phénomène pour la médecine personnalisée, il y a des gens qui ne peuvent pas prendre certains produits parce que ça leur donne des effets secondaires marqués, mais, encore là, en faisant une recherche très personnalisée, si on sait quelles sont les personnes qui vont avoir les effets secondaires, ça nous permet de ne pas leur donner le produit mais de garder ce produit qui est très efficace pour d'autres personnes. Puis je vais vous donner un exemple, un produit que nous n'avons pas encore au Québec, récemment il y a une compagnie qui disait qu'ils avaient une nouvelle molécule pour le cancer du poumon qui était utile seulement qu'à 5 % des gens qui avaient le cancer du poumon. Mais, par des tests biologiques, on était capable de savoir quel était ce 5 %, et à ce moment-là ça pouvait leur être utile.
Tantôt, j'ai glissé le mot sur le Herceptin, le Herceptin également pour le cancer du sein. Certaines personnes qui ont des... certains types de marqueurs au niveau de leur corps, au niveau des tests lorsqu'on fait des biopsies, si ces marqueurs-là sont positifs, on sait que ces gens vont bénéficier de l'Herceptin. Par contre, si les tests sont négatifs, on sait que ces gens-là ne bénéficieront pas de l'Herceptin. Donc, la médecine personnalisée, c'est la médecine qui est appliquée à l'ensemble d'une population, dans laquelle on va chercher les gens qui vont bien réagir à la molécule ou qui n'auront pas les effets secondaires qui sont reliés à la molécule, et qu'on peut cibler, et à ces gens on peut offrir ce produit.
Plusieurs effets positifs. Premier effet positif, c'est qu'on aide ces gens, c'est-à-dire que, quand on donnerait à l'ensemble de la population, il y aurait trop de personnes qui n'auraient pas d'effet bénéfique, ce qui fait que souvent on n'aura pas tendance à accepter cette molécule. Deuxièmement, ça nous permet de faire une recherche très ciblée pour dire: Pour telle personne, lui, on va aller, ou elle, on va aller chercher cet effet-là qui est l'effet recherché au niveau de la molécule. Troisièmement, au niveau des coûts. Parce que, si on utilise des molécules très ciblées que, pour ces gens-là, c'est efficace, à ce moment-là, comme je vous disais, dans un contexte que, certaines maladies, si on fait de la prévention, on va éviter des complications plus tard, bien ça va nous apporter des effets très bénéfiques.
Je vais vous donner d'autres exemples de recherche très ciblée qu'on fait au Québec. On va vous donner un exemple en rhumatologie. Hein, il y a maintenant des molécules biologiques qui sont très dispendieuses, on le reconnaît, c'est des médicaments qui peuvent coûter entre 15 000 $ et 20 000 $ par année, mais, lorsque vous avez de l'arthrite rhumatoïde, vous pouvez être des semaines et des mois à être incapables de travailler, à avoir de la douleur, et souvent ces gens-là... je ne dirais pas «souvent», mais à l'occasion ces gens-là vont venir à avoir d'autres symptômes, comme de la dépression, parce que, le fait d'avoir mal à chaque jour, bien ça les incommode et également ça les empêche d'avoir une vie fonctionnelle et de pouvoir profiter des bonheurs de la vie. Ces molécules empêchent justement l'arthrite rhumatoïde de revenir. Ça les rend fonctionnels, ça fait que c'est des gens qui sont productifs, c'est des gens qui n'ont pas de douleur, c'est des gens qui, au niveau de la fonctionnalité des mains, au niveau de la fonctionnalité des articulations, ils sont capables de continuer leur travail. Ça, c'est tout l'aspect de la recherche, puis c'est ce qu'on veut développer au Québec. Mais, pour développer la médecine personnalisée, il faut qu'on ait des entreprises qui sont intéressées à investir au Québec dans le domaine de la médecine personnalisée.
Et c'est pour ça qu'au Québec on a fait un équilibre entre les produits innovants et les produits génériques. Et notre politique, tout en encourageant l'innovation et la recherche, nous permet d'offrir les meilleurs produits aux Québécois et, comme je l'ai dit plutôt, à l'intérieur de balises budgétaires qui respectent la capacité de payer du gouvernement et des citoyens. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): Merci beaucoup, M. le ministre. La parole est au député de Lévis pour cinq minutes.
M. Lehouillier: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, j'aimerais ça donner un exemple d'évolution au niveau de la politique des médicaments qu'il est important de souligner, parce que j'ai eu l'occasion de participer, donc, le 24 mai, donc cette semaine... le ministre a eu l'occasion d'effectuer une visite et une annonce nationale dans mon comté, donc au CSSS Alphonse-Desjardins, communément appelé chez nous encore l'Hôtel-Dieu de Lévis, bien sûr. Alors donc, je voulais quand même dire que... Et ça, c'est un bel exemple d'évolution dans la politique du médicament, puis j'ai eu l'occasion de le voir avec tous les experts qui étaient présents à cette rencontre, puisqu'on avait à cette rencontre-là, M. le Président, qui ont pris la parole, il y avait bien sûr... Là, je parle, bien sûr, M. le Président, que le ministre... notre ministre a donné suite au rapport du groupe de travail sur le processus d'évaluation des médicaments anticancéreux. Et il y avait à l'occasion le président, M. Léonard Aucoin, qui a pris la parole, il y avait M. Stéphane Ahern, qui était le président du conseil scientifique d'inscription, ainsi que M. Félix Couture, qui est le président du Comité d'évolution des pratiques en oncologie.
Et ce qui est intéressant, c'est qu'on constate que, dans le domaine de l'oncologie... Et c'est là qu'on voit comment cette politique-là, elle est évolutive puis comment on doit s'adapter justement en fonction des quatre grandes orientations. L'accessibilité aux médicaments, hein, c'est une première orientation de la politique. Parce que, dans le domaine de l'oncologie, il y a de plus en plus de médicaments très coûteux qui ont fait leur arrivée sur le marché, puis évidemment c'était porteur d'espoir puis d'amélioration pour la qualité de vie et la santé des gens. Et il y avait les médicaments anticancéreux qui étaient déjà offerts, ils sont souvent utilisés selon des indications thérapeutiques différentes.
Donc, on a vu qu'au cours des derniers mois il y a des attentes sans cesse grandissantes quant à l'accès à tout médicament potentiellement actif. Quand on est pris avec un cancer, on se dit à un moment donné: Y a-tu un médicament quelque part qui peut faire en sorte que je puisse m'améliorer? Et les gens s'informent de plus en plus. Les gens sont à l'affût de ce qui se passe. Ils s'informent. Là, ils voient qu'aux États-Unis ou ailleurs dans le monde il y a un nouveau médicament qui a été mis en marché, etc., et ce que les patients et les oncologues québécois ont fait avec les groupes de pression, bien ils ont alerté les médias. Puis là ils disaient: Bien, on a comme un problème, on n'est pas sûrs que les médicaments auxquels on a accès, c'est correct. Est-ce que nos médecins sont consultés? Eux autres, ils voudraient bien nous prescrire tel médicament, mais on ne peut pas.
Alors, qu'est-ce que le ministre a fait? C'est qu'il a créé un groupe de travail. Et ce groupe de travail là a mis ensemble le Comité d'évolution des pratiques en oncologie, donc finalement on se disait: On va créer un groupe de travail dans lequel tout le monde va travailler ensemble pour faire des recommandations et voir comment on peut améliorer la situation.
**(11 h 40)** Alors, moi, je suis fier que notre ministre soit venu à Lévis lundi pour donner suite aux principales recommandations de ce rapport présidé par M. Léonard Aucoin. Et ce qu'on a vu et ce qui a été dit par les spécialistes, c'est que dorénavant le processus d'évaluation des médicaments anticancéreux s'effectuera avec une participation plus poussée et une approche davantage collaborative des experts en oncologie. Cela va se traduire, comme le ministre l'a dit, par un travail de concertation entre l'Institut d'excellence en santé et en services sociaux, le Comité d'évolution des pratiques en oncologie de la Direction québécoise du cancer, qui est composé de cliniciens spécialisés travaillant auprès des clientèles atteintes de tous les types de cancer.
Ça, M. le Président, la conséquence, c'est qu'on ne sait pas combien de médicaments ou qu'est-ce que ça va donner comme évaluation au niveau des médicaments. Mais, maintenant, les gens qui utilisent ces médicaments-là, qui utilisent une panoplie de médicaments, sont maintenant rassurés sur une chose, c'est que l'opinion du médecin va être prise en considération dans l'évaluation et la valeur thérapeutique du meilleur traitement médicamenteux qui s'offre à eux.
Et, moi, M. le Président, ce que j'ai trouvé extraordinaire, c'est que tous les spécialistes qui étaient présents ont vanté toute la politique de médicament qui est en oeuvre actuellement au Québec, et ils ont souligné l'excellence du Québec dans les choix qu'ils font des meilleurs médicaments pour les patients au monde. Alors, je pense que de ce côté-là on peut se dire qu'il se fait un excellent travail, et on a beaucoup de gens passionnés qui travaillent dans ce milieu-là.
Alors, M. le ministre, merci beaucoup d'être venu à Lévis pour annoncer le... donner suite, rendre public ce rapport, d'abord. Et je sais que vous avez l'intention vraiment de mettre ça de l'avant, puisqu'une fois que la valeur thérapeutique d'un médicament va être démontrée, bien, l'institut va tenir compte d'autres éléments, mais, bien sûr, à partir de ce moment-là, on va savoir que ça a fait consensus dans le milieu, et là le patient va être rassuré. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): Merci, M. le député de Lévis, pour votre dernière intervention. Pour arriver dans le temps, M. le député de Mercier, vous avez, cette fois-ci, quatre minutes.
M. Khadir: Merci. M. le Président, je comprends que, disons, qu'on ne peut pas ici décider en interpellation d'une nouvelle politique d'assurance médicament universelle. Je signale au ministre qu'il y a donc 170 organisations, et en particulier l'Union des consommateurs, qui demandent un régime public d'assurance médicaments universel. Québec solidaire le propose, ça fait partie du consensus canadien et québécois depuis plus de 40 ans.
Donc, je suis tenté de dire, pour discuter plus à fond, parce que, pour prendre en considération notre proposition, le ministre ne peut pas agir seul, il faut qu'il consulte ses experts, ses meilleures, disons, ses meilleures compétences dans le domaine, donc je l'invite, s'il veut bien accepter mon invitation, à une rencontre de travail où on fournirait la documentation de notre part, avec l'appui historique, le consensus, par exemple, qui a été repris pas très... dernièrement par le Canadian Medical Association Journal, donc par l'Association médicale canadienne, qui en éditorial, très récemment, est allée dans le même sens, a dit: La meilleure chose à faire pour tous les législateurs canadiens, c'est un régime public d'assurance médicaments universel. Donc, s'il veut bien accepter mon invitation, une réunion de travail où, en rencontre, on irait dans le détail de tout ça.
Je voudrais rappeler que -- donc, il me reste 2 min 30 s, c'est ça, c'est mon minutage? -- quand vous dites que c'est une politique... quand je vous ai posé la question, tout à l'heure, j'ai posé la question au ministre, qu'il n'y a pas vraiment d'innovation... Depuis les 10 dernières années, l'industrie pharmaceutique, à laquelle on a consenti 100 millions de dollars de l'argent des contribuables en aide directe, d'accord? -- c'est l'équivalent de 100 millions de dollars, je ne calcule pas l'aide indirecte -- donc, 1 milliard sur 10 ans, n'a pas produit de bénéfices pour la science, pour les Québécois, a plutôt engrangé d'énormes profits. Pourquoi? Parce que, comme dit le rapport Debré, que je veux déposer à la fin de notre interpellation, l'industrie pharmaceutique a consacré durant ce temps, au détriment de la recherche, plus de 40 % de son chiffre d'affaires au marketing dans la presse, les médias, la télévision, le Web, Internet... Bon. D'accord? Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que, sur le 1 milliard, il y a à peu près 400 millions qu'on a donnés vraiment juste pour le marketing des compagnies pharmaceutiques. Moi, je ne suis pas contre les brevets. Les brevets devraient peut-être même être prolongés -- parce que ça prend 10 à 15, développer un nouveau produit -- devraient probablement être prolongés pour les véritables produits d'innovation, mais pas pour les «me too».
Je donne un exemple. Le ministre a parlé de mes compétences de microbiologiste. En microbiologie, on a différentes classes d'antibiotiques. Une de ces classes importantes, c'est les quinolones. On avait la ciprofloxacine, à laquelle s'est ajoutée la lévofloxacine, ensuite la trovafloxacine. Mais ensuite il est venu se rajouter 10 autres quinolones qui étaient juste des quasi-copies, ce qu'on appelle le «me too»: aucun bénéfice. Mais ces mêmes molécules ont été protégées par les mêmes brevets. C'est là qu'il y a un ménage à faire pour éviter de faire payer les contribuables pour des activités de marketing inutiles.
C'est pour ça qu'à la fin de l'interpellation je veux vous présenter Pharma-Québec, qui est un moyen pour englober tout ça, pour passer de la version 2.0 à la version 3.0, pour à la fois, avec un régime d'assurance médicaments universel, se donner des outils, d'augmenter encore davantage l'accessibilité aux médicaments, mais aussi de contenir les coûts, les réduire et protéger notre recherche, protéger la véritable recherche et innovation et faire en sorte qu'à chaque fois qu'on nous fait le chantage: Ah! On va s'en aller si vous ne nous donnez pas un autre bonbon, d'assurer que les Québécois, les chercheurs québécois, qui sont parmi les meilleurs au monde dans le domaine pharmaceutique, on puisse leur offrir d'autres débouchés qu'être à la merci des multinationales étrangères.
Conclusions
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, M. le député de Mercier. Donc, maintenant, nous sommes à la partie de la conclusion. Vous avez chacun 10 minutes et vous aurez l'occasion de répondre à l'invitation du député de Mercier. M. le ministre, pour 10 minutes.
M. Yves Bolduc
M. Bolduc: Merci, M. le Président. Bon, M. le Président, j'aimerais peut-être juste faire un genre de résumé de nos discussions d'aujourd'hui. Dans un premier temps, on a... Je pense que tout le monde a reconnu que l'assurance médicaments au Québec était quand même une politique innovatrice. Tout le monde, je pense, même au Canada, reconnaît que c'est quelque chose de bien, et également on est, il faut le dire, la seule province à l'avoir.
J'insiste là-dessus, parce que souvent les gens ont tendance à se comparer avec ailleurs puis à dire: Regardez, ailleurs, ce qu'ils ont. Moi, je peux vous dire que les autres provinces regardent le Québec. Et d'ailleurs une des caractéristiques du Québec qui est vue par les autres provinces, c'est qu'on est la province avec le plus d'innovations au niveau des politiques de la santé, au niveau de l'apport, les façons de faire, puis là on parle d'Info-Santé, de l'assurance médication, la procréation assistée, les PREM, la répartition des effectifs médicaux de façon équitable sur le territoire. Ça, on est enviés par toutes les autres provinces.
Également, on l'a vu récemment, quand on regarde les données de l'Institut canadien de l'information en santé, dans les traitements comme le cancer, en radiothérapie, on est dans les meilleures provinces; les délais en chirurgie, on est dans les meilleures provinces. Donc, il faut reconnaître qu'au Québec on fait une pratique, au niveau de la santé, puis j'inclus la médecine à l'intérieur de ça, comme étant de très, très haut niveau. Donc, déjà, au Québec, on s'est doté d'une politique de d'assurance médicaments.
Deuxièmement, on s'est donné une politique du médicament qui nous permet d'avoir le meilleur prix au niveau des médicaments, au niveau des provinces. Deuxièmement, une politique du médicament qui fait la... qui favorise l'utilisation judicieuse du médicament, c'est-à-dire qu'on veut en avoir pour notre argent. Et également il y a des règles qui se sont données, que ce n'est pas n'importe quels produits qui peuvent venir sur le marché. Et on essaie d'utiliser le produit le plus efficace au meilleur coût. Je pense également que c'est un grand avantage que nous avons, aux médicaments, et c'est assez innovateur.
Le troisième niveau, c'est le coût des médicaments. Et, comme je l'ai dit, au niveau du régime d'assurance médicaments du Québec, régime public et régime privé, on passe de coûts qui étaient, voilà 10 ou 15 ans, dans les 15 % à 20 % d'augmentation, à, il y a... 2009, 6 %; 2010, 2 %. Et, cette année, on s'attend à une diminution des coûts qui va être de l'ordre de 2 % à 5 %. Là-dessus, je ferais un aparté en disant qu'on veut un équilibre entre les médicaments innovateurs qui nous apportent des nouvelles molécules pour traiter des maladies, qui sont innovantes, avec un brevet accordé pendant un certain nombre d'années -- et, au Québec, on est plus selon la norme internationale, d'essayer de protéger pour un certain temps, un peu plus longtemps que les autres provinces, de façon à favoriser la recherche fondamentale ici et également la recherche au niveau des médicaments puis, si possible, également la fabrication des médicaments -- un équilibre entre ces compagnies innovantes et également des compagnies génériques qui, elles, lorsqu'elles arrivent sur le marché, nous permettent d'aller chercher des meilleurs prix. Donc, c'est l'équilibre entre les deux qui nous permet de dire qu'au Québec on est capables de se payer les produits du médicament de façon à bien traiter notre population.
Également, l'autre équilibre que je veux insister, c'est l'équilibre entre tout ce qui se fait au niveau clinique et au niveau recherche. Parce que tantôt on parlait de la recherche, qu'il y a des investissements. C'est que parfois ce n'est pas au Québec qu'est découverte la molécule, mais on sait qu'au niveau de la recherche pharmaceutique il doit se faire de la recherche dans de multiples laboratoires au niveau mondial, et chacun des laboratoires collabore et contribue à une certaine recherche, et c'est difficile de dire aujourd'hui d'où vient la molécule. Et une recherche également qui est une recherche clinique, où, lorsqu'une molécule est mise sur le marché ou pourrait être mise sur le marché, nos chercheurs, entre autres... Et je suis certain que le député de Mercier a déjà participé à ce type de recherche là où... au niveau du CHUM, du CSUM, où ils font des recherches cliniques pour savoir l'efficacité, et, lorsque le produit a démontré une efficacité après plusieurs études cliniques, à ce moment-là il est mis sur le marché. Donc, ce type de recherche, au Québec, on en profite. Et je peux vous nommer de multiples chercheurs qui ont une réputation internationale, mais je pense que le député de Mercier peut reconnaître que c'est une recherche qui est de très, très haute qualité.
**(11 h 50)** Ça me permet peut-être de faire le message: avec l'arrivée du nouveau CHUM, l'arrivée également du CSUM, les investissements qu'on fait à Sainte-Justine, à l'Hôpital général juif, à Maisonneuve-Rosemont, ce sont tous des établissements qui sont dotés de puissants centres de recherche qui sont reconnus mondialement, et, avec les investissements qu'on fait actuellement, ce qu'on nous dit, c'est qu'il va y avoir de plus en plus de recherche au Québec. Et il y a également une pointe dans laquelle on va faire de la recherche, on va en faire dans plusieurs catégories, mais il y a également une pointe, qui est la médecine personnalisée, et, pour avoir parlé personnellement, entre autres, avec le Dr Pavel Hamet, Dr Jean-Claude Tardif, de l'Institut de cardiologie de Montréal, ce sont des points dans lesquels on croit qu'il va être... ça va être très prometteur au niveau de la découverte de nouvelles molécules, entre autres des molécules qui n'avaient pas pu percer le marché, mais, avec les nouvelles études cliniques qui vont pouvoir être faites sur des catégories de clientèles, de certains types de patients, c'est des molécules que probablement qu'on va être capables de mettre sur le marché.
Donc, je pense qu'au Québec on est bien positionnés par tout ce qu'on appelle l'industrie pharmaceutique, d'où notre intention de continuer à avoir un équilibre entre les compagnies génériques, les compagnies... et les compagnies innovantes.
Pour ce qu'il s'agit de notre régime d'assurance médicaments, bon, le choix a été fait au Québec d'avoir un régime public et un régime privé. À ce moment-là, ce qui avait été dit, puis je pense que ça se réalise comme ça, c'est qu'on va essayer d'avoir le meilleur des deux mondes. Et, moi, je ne crois pas tellement à la théorie que, demain matin, on déciderait d'avoir un seul régime, et d'emblée ça coûterait beaucoup moins cher. Parce que, il ne faut pas oublier, les gens paient des cotisations, ces gens-là paient des impôts aussi, ça fait que, si on regroupait tout ça, il y aurait un rééquilibrage qui se ferait. Et, à la fin, c'est quand même l'ensemble des citoyens du Québec qui doivent se doter d'un certain régime d'assurance médicaments.
Mais, pour moi, le principal, ce n'est pas de savoir si c'est public, privé, c'est que tous les citoyens du Québec ont un régime d'assurance médicaments qui fait que, quand ils sont malades, ils peuvent se les procurer. Et, oui, dans certains cas, il y a certains frais qui peuvent être chargés aux patients, mais ils sont minimes par rapport à la facture totale. Et, à ma connaissance, lorsque ça coûte très cher, les frais restent quand même très, très minimes, et les gens peuvent continuer à se procurer tous les médicaments.
Ce qui m'amène au dernier item, c'est l'importance du médicament dans notre arsenal, dans nos outils thérapeutiques avec les patients. Je pense, encore là, que... le député de Mercier doit le reconnaître, on a quand même des très, très bon outils au niveau des traitements. Il faut que ce soient des outils utilisés de façon judicieuse, il faut utiliser ce qu'on appelle la pertinence, c'est-à-dire que, lorsque quelqu'un n'a pas besoin d'un produit, il ne devrait pas le prendre, et, lorsqu'il a besoin d'un produit, on devrait lui recommander. Ça reste son choix à lui de le prendre.
Et également, moi, je vois le médicament comme étant un outil pour diminuer les coûts de santé. Comment? C'est, lorsqu'on traite bien nos patients, ils diminuent l'utilisation de ressources beaucoup plus dispendieuses, dont entre autres l'hôpital. Donc, quelqu'un qui est bien suivi, qui prend soin de sa santé, saines habitudes de vie, qui est bien traité pour ses maladies, il a moins de chances d'être hospitalisé. Et également cette personne-là a moins de chances de faire un accident vertébro-cérébral, cette personne a moins de chances également d'être hospitalisée un jour dans un CHSLD. Et, où ça nous coûte cher dans notre société, c'est souvent dans les lits d'hôpitaux et également dans toute l'utilisation des CHSLD, que, si on ne s'occupe pas bien de notre population, ça va nous en prendre plus. Donc, il faut en avoir suffisamment pour pouvoir s'en occuper.
Donc, globalement ma perception, c'est que le médicament peut être même quelque chose d'utile pour diminuer nos coûts de santé, en autant qu'il soit utilisé de façon judicieuse. Deuxièmement, on veut avoir les meilleurs traitements pour chacun de nos patients et pour l'ensemble de la population. Troisièmement, on veut avoir un arsenal thérapeutique assez large pour qu'on soit capable d'avoir une certaine compétition entre les différentes molécules, et, à la fin, je pense que c'est également important, c'est qu'on veut, comme société, en avoir le plus possible pour notre argent.
Là-dessus, moi, je retiens bien, parce qu'à toutes les fois que le député de Mercier me parle de... des idées, qu'est-ce qui se fait dans le monde, je suis comme lui, on s'intéresse à ça. On ne sait pas qu'est-ce que ça va être dans cinq, six ou sept ans. Il va peut-être y avoir des nouveaux modèles économiques comme on en a créé un l'année dernière avec les génériques, où on a baissé de 50 % à 25 % des coûts de remboursement. Il va peut-être y avoir des nouveaux modèles économiques qui sont en train de se mettre en branle, on en entend parler. Puis j'ai participé également à la réunion des ministres de la santé, où il y a certaines provinces, entre autres les petites provinces, qui veulent se faire des groupes d'achat. Il y a peut-être des groupes d'achat au niveau national qui sont en train de se mettre en place. Ce que le Québec a dit, c'est qu'il surveillait la situation. Nous allons voir comment ça va évoluer. On n'a pas rejeté le fait qu'on pourrait participer à ces groupes d'achat. Puis il reste qu'actuellement, de ce que j'ai perçu, c'est que les autres provinces envient notre position par rapport à l'utilisation du médicament. Ils envient notre régime d'assurance médicaments puis ils envient également la façon dont on les utilise.
Et je pense que je peux vous le dire, les gens, au niveau mondial, envient la pratique de la médecine, la pratique de la santé qui se fait au Québec. Donc, pour moi, c'est quand même positif. Et également je veux témoigner au député de Mercier ma grande ouverture à recevoir les recommandations. Et d'ailleurs j'ai... on va demander à M. Denis Lalumière, là, qui travaille chez nous, de pouvoir le rencontrer, discuter. Et je tiens à le dire, s'il a des nouvelles idées, s'il voit des nouveaux articles, on est intéressé, on a un esprit très ouvert. Ce qu'on veut, c'est offrir les meilleurs soins à notre société. Et le mot final, si on fait tout ça pour une petite raison, c'est qu'on veut que le patient reçoive les meilleurs soins. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Pagé): Tout à fait. Merci, M. le ministre. La parole est maintenant, pour 10 minutes, en conclusion, au député de Mercier.
M. Amir Khadir
M. Khadir: M. le Président, je tiens à remercier le ministre d'avoir accepté notre invitation pour une rencontre, pour débattre justement du régime d'assurance médicaments universel. Je comprends, je suis d'accord que le Québec a quelque chose de bien. C'est ce que dit le ministre. Je suis prêt à le reconnaître. Ce que nous voulons, c'est peut-être offrir quelque chose de mieux, d'accord? D'ailleurs, il a lui-même reconnu que la baisse du prix des médicaments génériques, qui est passé de 50 % de son équivalent breveté à 25 %, a occasionné des économies. Hein, j'ai fait le calcul: de 2010 à 2014, suivant le budget, c'est 581 millions.
Mais je crois que le ministre est assez franc habituellement pour reconnaître que c'est dû à une question -- il y a des démarches que j'ai faites en Chambre -- donc une proposition que je lui ai faite de se pencher sur ce qui se passe en Ontario. J'ai attiré son attention de ce que venait d'obtenir l'Ontario pour les médicaments génériques. Mais l'Ontario, en 2010, quand il a fait ça, ne faisait qu'appliquer une politique qu'il avait commencé à appliquer aux médicaments brevetés également quatre ans plus tôt, en 2006, d'accord? Or, les médicaments brevetés constituent 80 % de nos dépenses en médicaments. Ils sont 50 % de la consommation en volume mais 80 % des dépenses. Donc, si on fait une règle de trois, on ferait quatre fois plus d'économies que ce que vous allez en faire. Au lieu des 581 millions, d'accord, vous en ferez aussi quatre fois plus avec les médicaments brevetés, si on réussit à avoir la même grille en disant: Écoutez, il faut nous accorder de meilleurs prix. On a des assurances publiques, par exemple, quatre personnes sur 10 au Québec sont couvertes par le gouvernement, ça fait 3,2 millions de personnes, ça devrait être un levier de négociation, d'accord?
Ensuite, s'il y a des génériques, par exemple, des compagnies génériques qui ne veulent pas aller plus loin... Parce qu'on n'a pas à se contenter de 25 %, on pourrait même aller plus loin. Les génériques, M. le ministre le sait sans doute, le député de Lévis, je crois, il serait heureux d'apprendre qu'en moyenne une pilule générique, pour être produite, là, parce que c'est un peu de farine puis un... un élément, un ingrédient actif, et, comme ça fait longtemps qu'on les a développés, c'est à très faible coût, ça coûte environ 5 sous par pilule. Mais le coût moyen qu'on nous le vend aujourd'hui, le coût moyen au Québec, c'est 25 sous par pilule. Alors, vous imaginez, là, ils font 500 % de profit, 500 %. Même quand on les réduit de moitié, leurs profits, ça fait 250 %. Il y a encore de la marge.
Vous allez me dire: Bien, si on fait ça, ils vont partir. Bien, pour les génériques, qu'ils partent! Ce n'est pas grave. On a les capacités de le produire, on a les compétences scientifiques. Ce qu'on n'a pas, c'est qu'on n'a pas les moyens... On l'avait, par exemple, pour les vaccins, mais on l'a privatisé, à cause de M. Ryan, qui était alors au gouvernement libéral, malheureusement. D'accord? on l'a privatisé, soi-disant pour ne pas faire une concurrence déloyale au privé. Aujourd'hui, on se rend compte que c'est le privé qui fait une concurrence déloyale aux contribuables puis aux deniers publics. Donc, on pourrait avoir un pôle de production pharmaceutique public, qui permettrait de donner encore plus d'emplois à nos chercheurs, pour qu'à chaque fois que des gens, là, des industriels, font du chantage... on n'a pas besoin de plier, on dit: Très bien! Vous ne voulez pas le produire? On va le faire nous-mêmes.
**(12 heures)** À chaque fois qu'il y a un produit vraiment d'innovation, d'accord, accordez-lui même plus de protection, pour des durées plus prolongées, quand c'est vraiment de l'innovation. Mais, quand ce n'est pas de l'innovation, c'est juste des quasi-copies, c'est vraiment des avantages inutiles qu'on donne et qui font en sorte que ça cause des phénomènes paradoxaux qui font que plus on leur donne ça, plus ils vont créer des quasi-copies. Avec comme résultat, par exemple, que le gouvernement américain, l'année passée, M. Obama a annoncé, en décembre, devant l'état déplorable de l'industrie pharmaceutique -- hein, parce que ce n'est pas juste en France, là -- ... M. Obama s'est rendu compte, le président Obama, que depuis de nombreuses années il n'y avait pas vraiment d'innovation. Alors, pour corriger la situation, il a décidé d'investir, à travers le NIH, plusieurs milliards de dollars pour avoir un pôle d'innovation, de recherche et de développement indépendant, public. Aïe! C'est une idée géniale, ça. Donc, on négocie mieux nos prix. À chaque fois qu'on ne peut pas négocier les prix avec des génériques, on les fabrique nous-mêmes. Il n'y a pas de patente, il n'y a pas de brevet, on peut le fabriquer nous-mêmes, on est autorisé puis on a les compétences. Ensuite, comme la recherche et le développement ne fait pas... il faut qu'on pense, comme État: Comme le privé ne fait pas sa job... Bon. Il a commencé à se rectifier, c'est vrai, mais on fait beaucoup de bonnes recherches au Québec.
En fait, plusieurs des meilleurs produits qu'on a produits au Québec au cours des dernières années ont d'abord commencé dans le public, ont commencé d'abord dans les universités avant d'être appropriés par le privé. Pensez au 3TC. Pensez au Singulair, hein? Pensez à M. Yvon Guindon, prix de l'innovation industrielle au Québec, 2006, accordé par votre gouvernement, un chercheur brillant qui a dirigé l'Institut de recherches cliniques de Montréal, lui aussi est d'accord, il faut qu'il y ait une recherche. On est allés le voir avec notre proposition -- je vais venir avec notre proposition de Pharma Québec -- on est allé le voir, il a dit: C'est ça qu'il faut. Il faut un pôle public pour s'assurer qu'on a un moyen aussi comme État, comme nation, d'assurer là où le privé ne peut pas assurer, de faire en sorte que ce qu'on a investi dans nos universités -- c'est de l'argent public -- ça profite au public d'abord, pas à des intérêts qui ont leur raison d'affaires en Suisse ou aux îles Caïmans, d'accord?
Donc, comme Obama, comme le suggère un de nos meilleurs cerveaux en recherche pharmaceutique, Yvon Guindon, un pôle de production public de recherche et développement pour des molécules innovantes publiques. Quand vous mettez tout ça ensemble: mieux négocier nos prix, exactement comme le font les hôpitaux... Je vous ai donné l'exemple de mon hôpital avec 10 autres hôpitaux de Lanaudière et des Laurentides. Eux autres, ils réussissent, juste en négociant pour ces 10 hôpitaux -- c'est beaucoup moins que les 3,2 millions que fait la RAMQ -- à accoter leur prix à 70 % de la RAMQ, d'accord? Donc, mieux négocier, d'abord mieux négocier, de manière responsable, comme le font les responsables des pharmacies de ces 11 hôpitaux que je vous ai mentionnés.
Ensuite, quand les génériques... ou les pharmaceutiques ne donnent pas les effets escomptés, les forcer à le faire en ayant un pôle de production indépendant. Pour les génériques, ça va de soi, pour les autres, bien on innove nous-mêmes. Et comment financer ça? Bien, avec un régime d'assurance médicaments universel qui fait en sorte qu'au lieu juste d'avoir ceux qui sont les plus risqués, qui nous coûtent très cher, on fait juste capter une partie. En moyenne, ceux qui sont assurés par le privé, chez des assureurs privés, là, les travailleurs ou les employés qui sont assurés par le privé, en moyenne, paient 750 $ par année, d'accord? C'est parce qu'ils constituent de très faibles risques. Nous, ça nous coûte en moyenne 1 500 $ par les patients âgés, par les malades chroniques, que le régime public couvre.
Quand tu mets tout ça ensemble, le modèle actuariel que je vous ai présenté, sans toucher à tout le reste, là, permet de faire 750 millions d'économie. Quand tu ajoutes à ça d'autres politiques, c'est-à-dire de mieux utiliser les médicaments, d'utiliser seulement ceux qui offrent le meilleur ratio bénéfice-coût, d'accord, quand tu fais tout ça, ça remonte à 1,2 milliard de dollars. Quand tu mets fin aux politiques industrielles ruineuses, qui ne sont pas utiles, ça va même plus loin. Quand tu mets tout ça ensemble, ça fait 2,8 milliards de dollars d'économie pour l'ensemble, en partie pour l'État, à 50 % à peu près pour l'État puis à 50 % pour les gens qui paient actuellement des assurances privées. Donc, c'est gagnant-gagnant pour ceux qui ont des assurances privées, pour l'État: sur 2,8 milliards, ça veut dire 1,4 milliard d'économie, d'accord, et c'est gagnant aussi pour nos chercheurs, parce que là on a un pôle public de production puis de recherche et de développement pour de l'innovation.
Tout ça, on l'appelle, nous, Pharma-Québec, donc, qui serait soit autonome soit dépendant de la RAMQ, mais dont le rôle serait d'abord l'acquisition, pour tout l'ensemble des besoins du Québec, des médicaments au meilleur prix en ayant à sa disposition la formidable force de négociation que constitue... quand tu paies pour 8 millions de gens. Ensuite -- je termine avec ça -- Pharma-Québec, c'est un pôle public de production de génériques. À chaque fois qu'on n'a pas les meilleurs prix... on négocie d'abord, mais, si on n'a pas les prix qui nous conviennent, bien on le produit nous-mêmes. Ça ne nous coûte rien, il n'y a pas de brevet, puis on a toutes les compétences qu'il faut au Québec. Quatre facultés de pharmacie formidables, d'accord, avec des chercheurs incroyables, qui ont été à l'origine de quelques-unes des meilleures innovations mondiales au cours des 25 dernières années mais souvent dans le cadre universitaire. D'accord? Donc, pôle de production de génériques mais aussi pôle de recherche et d'innovation. Financé avec quoi? Financé avec la réduction qu'on a obtenue en ayant un régime d'assurance médicaments universel qui améliore l'accès aux médicaments pour tout le monde, qui améliore l'accès aussi en permettant d'avoir un peu d'économies pour payer pour les médicaments plus chers, anticancéreux, les meilleurs médicaments de pointe, puis en même temps qui assurent de meilleurs coûts, une réduction du coût pour l'État et pour les contribuables.
Le Président (M. Pagé): Je vous remercie, chacun des collègues, pour la qualité de nos interventions ce matin. Ce fut très intéressant. Donc, je lève la séance et, la commission ayant complété son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci!
(Fin de la séance à 12 h 6)