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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Thursday, February 9, 2006 - Vol. 38 N° 13

Consultation générale sur l'avant-projet de loi sur la Loi électorale


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Table des matières

Journal des débats

(Treize heures cinquante et une minutes)

Le Président (M. Ouimet): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission spéciale sur la Loi électorale ouverte. Et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de votre présence parmi nous. Je me présente, François Ouimet. Je suis président de la Commission spéciale sur la Loi électorale et député de Marquette à l'Assemblée nationale du Québec. Pour cette visite dans votre région, je suis accompagné des députés suivants, à qui je demanderais de se lever à tour de rôle pour que vous puissiez être bien identifiés, en commençant par M. le vice-président de la commission et député de Richelieu, M. Sylvain Simard; M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques et député de Chapleau, M. Benoît Pelletier, qui fait son entrée à l'instant; M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière de réforme des institutions démocratiques et député de Masson, M. Luc Thériault; M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, Marc Picard, représentant l'Action démocratique du Québec; M. André Gabias, député de Trois-Rivières; Mme Fatima Houda-Pepin, députée de La Pinière; Mme Dominique Vien, députée de Bellechasse, en remplacement de Mme Sarah Perreault; et de l'opposition officielle, Mme Lorraine Richard, députée de Duplessis; et j'ai le plaisir aussi de souligner la présence, aujourd'hui, de M. Norbert Morin, député de Montmagny-L'Islet.

C'est la première fois qu'une commission parlementaire intègre à ses travaux un comité citoyen. Mes collègues députés et moi sommes très fiers de pouvoir compter sur la présence de ces membres, sur leurs perspectives originales et sur leurs expériences respectives qui enrichissent de belle façon nos travaux. Je vous les présente donc: Mme Carole Hadd, de Shawinigan; Mme Martine Lafontaine, de Baie-Comeau; Mme Yohanna Loucheur, de Gatineau; Mme Mélanie Proulx, de Sainte-Julie; M. Mustapha Acharid, de Laval; M. Guillaume Boivin, de Québec; M. Charles Gaboury, de Montréal; et M. Michel Morisset, de Baie-des-Sables, en Gaspésie.

La Commission spéciale sur la Loi électorale a été créée par l'Assemblée nationale du Québec en juin 2005, pour consulter la population sur la réforme de notre système électoral, sur la base d'un avant-projet de loi déposé par le gouvernement. Mes collègues et moi avons donc pour mandat d'étudier les questions relatives au choix d'un mode de scrutin, à la tenue des élections et à la représentation équitable des régions et des citoyennes à l'Assemblée nationale. Jusqu'au 9 mars, notre commission tiendra une des plus importantes consultations jamais mises sur pied par une commission parlementaire de l'Assemblée nationale. En effet, nous avons entrepris, le 24 janvier dernier, une tournée au cours de laquelle nous visiterons 15 autres villes du Québec.

Pendant la séance, le public admis doit se tenir assis et en silence. Des formulaires seront disponibles à l'entrée pour nous faire part de vos commentaires ou de vos demandes d'information. N'hésitez pas à les remplir et à les remettre au personnel identifié par le secrétariat.

Alors, merci d'éteindre votre téléphone cellulaire.

Le mandat de la commission, aujourd'hui, est donc de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi électorale.

M. le secrétaire, avons-nous des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Perreault (Chauveau) est remplacée par Mme Vien (Bellechasse).

Auditions (suite)

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, débutons nos auditions. Je vois que les représentantes de la Fédération des mouvements Personne d'abord du Québec ont déjà pris place. Alors, Mme Louise Bourgeois, vous êtes la présidente, c'est bien cela?

Mme Bourgeois (Louise): Oui.

Le Président (M. Ouimet): Alors, bienvenue aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. Auriez-vous la gentillesse de nous présenter les personnes qui vous accompagnent?

Fédération des mouvements
Personne d'abord du Québec (FMPDAQ)

Mme Bourgeois (Louise): O.K. Bonjour, mesdames et messieurs la commission. Mon nom est Louise Bourgeois, je suis la présidente de la Fédération des mouvements Personne d'abord du Québec et, à ce titre, je voudrais d'abord vous remercier de nous entendre aujourd'hui et de nous permettre de vous exprimer notre point de vue. Je vous présente ma collègue, Mme Yvette Miuse, présidente du Mouvement Personne d'abord de Québec. Nous sommes accompagnées de Mme Marie-Noëlle Groulx et Mme Hélène Bernier, personnes-ressources.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, on est flexibles un petit peu sur le temps. Vous disposez d'environ une dizaine de minutes pour nous livrer votre présentation, et après quoi on aura à peu près cinq minutes d'échange avec vous.

Mme Bourgeois (Louise): O.K. J'aimerais commencer par vous dire en quelques mots ce qu'est notre organisme. La Fédération des mouvements Personne d'abord du Québec est un organisme à but non lucratif qui a comme mission première la défense collective des droits et l'amélioration des conditions de vie des personnes ayant été étiquetées vivant avec une déficience intellectuelle.

Au Québec, on estime à 228 000 personnes présentant une déficience intellectuelle, et de ce nombre 168 300 ont l'âge de voter. Depuis les années 1980, dans les Mouvements Personne d'abord, nous avons comme philosophie le par et pour, c'est-à-dire que ce sont nous, les personnes qui vivent avec la situation qui prennent la parole. Notre fédération est un organisme provincial. La fédération représente 14 Mouvements Personne d'abord à travers le Québec, et nous sommes membres de la COPHAN.

Pour nous, l'avant-projet de loi donne l'occasion au gouvernement de prévoir pour tous les citoyens, incluant les électeurs avec des besoins particuliers, les conditions qui vont faciliter l'exercice de leur droit de vote. Aujourd'hui, nous vous proposons des moyens simples et qui, pour nous, feront toute la différence. Cette présente commission est une opportunité pour le gouvernement de réaffirmer, par le biais de ses lois, de ses politiques, son engagement à prôner des valeurs démocratiques.

Le Président (M. Ouimet): Vous prenez le relais, c'est ça?

n (14 heures) n

Mme Miuse (Yvette): Oui. Bonjour, tout le monde. Présentation des recommandations du mémoire. Au cours des dernières années, des présentations faites à l'Office des personnes handicapées du Québec, des organismes de promotion, des organismes en alphabétisation et bien d'autres ont été réalisées auprès du Directeur général des élections afin de lui faire part de différentes propositions visant à améliorer l'accessibilité au processus électoral. Notre démarche s'insère dans cette perspective. La problématique que nous voulons vous apporter cet après-midi est une difficulté vécue par les personnes que nous représentons et par bon nombre de citoyens. Nous vous présentons leurs problèmes mais surtout une solution à laquelle nous croyons fortement.

Comme pour les autres citoyens, la participation aux élections, en tant qu'électeurs, passe par l'information. Voici quelques commentaires de nos membres qui nous donnent leurs opinions et nous disent les difficultés qu'ils ont:

«Je suis allé voter au référendum des fusions. C'est important d'aller voter.

«Les élections, c'est important. Nous aussi, on a notre dignité humaine puis on a le droit, comme tout le monde, de voter.

«On travaille pour avoir la justice. On est des citoyens comme les autres, à part entière.

«Pourquoi on ne pourrait pas voter comme sur des machines, dans les magasins, où, quand on est perdus, on peut toucher l'écran?

«Voter, c'est important. On met souvent tout le monde dans la même poche. Moi, je n'ai pas d'Internet et je ne suis pas d'accord pour les Internet.

«Moi, je préfère voter par bulletin, en personne, c'est mieux pour moi. C'est comme une signature, c'est moi qui est là et c'est une signification importante.

«Moi, je ne crois pas aux machines. J'aime mieux un vote, c'est moi qu'il faut qui fasse le x. Au moins, je suis certain que j'étais là, j'ai touché le papier puis je suis sûr.

«Moi, je sais lire, mais je ne retiens pas les noms, il y en a trop. S'il y avait les photos des candidats, au moins on serait sûrs pour qui qu'on vote.» Ce serait le fun, ça.

Depuis plus de 20 ans, à l'intérieur de nos mouvements, nous vivons les valeurs de solidarité, d'égalité, de justice, d'entraide et de démocratie au quotidien. Nous croyons qu'à ce titre il convient au milieu d'adapter l'information véhiculée. Parmi les personnes que nous représentons ou celles qui militent dans notre fédération, plusieurs connaissent des difficultés d'écriture et de lecture. Dans l'avant-projet de loi, nous devrions retrouver les principes d'accès universel et l'obligation de prendre des mesures concrètes, par exemple documents adaptés. Merci. C'est à toi.

Mme Bourgeois (Louise): Voici nos propositions. La Fédération des mouvements Personne d'abord du Québec vous propose de les adopter suivantes... les adoptions.

Aspects généraux de l'avant-projet de loi:

1. Que soit précisé dans l'avant-projet de loi, à l'ensemble des articles visés qui font la référence à l'information, une obligation d'information et l'utilisation de médias adaptés;

2. Que le vocabulaire de l'avant-projet de loi soit utilisé pour les personnes vivant avec des limitations fonctionnelles, soit personnes avec soit des limitations fonctionnelles, personnes ayant une déficience intellectuelle, visuelle, auditive, de la parole, etc.

Concernant les façons de voter, la solution proposée:

3. Que le modèle du bulletin de vote soit avec photographies des candidats, avec l'inscription des noms en gros caractères et des logos des partis soit adopté en annexe de la loi;

4. Que le vote aux bureaux de scrutin soit maintenu afin de laisser un libre choix aux citoyens, quelles que soient les avancées technologiques de mécanismes de votation mises en place.

5. Que la commission spéciale sur l'avant-projet de Loi électorale consulte l'ensemble des citoyens précisément sur l'adoption du bulletin de vote avec photographies des candidats, avec l'inscription des noms en gros caractères et des logos des partis.

Avec son rapport Améliorer l'accès au vote et favoriser son exercice ? Une proposition du Directeur général des élections du Québec, celui-ci exprime le point de vue suivant: «Il importe, notamment, que des essais portant sur le bulletin de vote avec des photos soient réalisés au cours des élections partielles à venir.»

Nous sommes confiants de voir l'adoption de ce mécanisme de votation avec photographies des candidats, d'autant plus qu'il existe déjà dans le monde. Pour vous comme pour nous, ce sont des mesures simples qui font toute la différence. Merci de nous avoir écoutées et de tenir compte de nos demandes dans vos travaux futurs. Et non seulement pour nous, mais une bonne partie de la population. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci à vous, Mme Bourgeois et Mme Miuse, pour nous avoir livré ce point de vue avec éloquence, et avec conviction, et sur quelque chose que nous n'avions pas encore entendu jusqu'à date, là, toute la question de la photo à côté du nom sur un bulletin de vote. Merci infiniment. Je vais ouvrir la période de discussion avec vous. J'avais M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques.

M. Pelletier: Merci beaucoup d'être ici. Merci de votre présentation aujourd'hui. Merci de l'intérêt que vous manifestez pour les travaux de la commission. Si je comprends bien votre position, vous voulez avoir une photo du candidat ou de la candidate sur le bulletin de vote ainsi que le logo du parti politique.

Mme Miuse (Yvette): Exact. Parce qu'on n'est pas capables de lire la chose, parce que c'est écrit trop petit, et puis on est obligés de demander à du monde. À mon âge, demander à d'autres, là, ce n'est pas bien, bien le fun. On veut être responsables puis avoir notre dignité humaine.

M. Pelletier: Merci. Alors, nous allons l'examiner attentivement. Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le ministre. M. le député de Masson.

M. Thériault: Alors, Mme Bourgeois, Mme Miuse, Mme Bernier, Mme Groulx, bienvenue. Merci de votre contribution. Effectivement, c'est une contribution qui dénote une omission dans cette consultation. Moi, j'accueille favorablement vos recommandations, notamment en ce qui a trait à faire en sorte que tout le monde ait une égalité des chances lors d'un scrutin. Comme vous le dites si bien, ce n'est pas parce qu'on a certaines limitations fonctionnelles ou une déficience qu'il faut que ça devienne un handicap. Et c'est à la société à faire en sorte que cela ne devienne pas handicapant, et, en ce sens-là, j'accueille favorablement, en tout cas en ce qui a trait au bulletin de vote, votre proposition. Encore faut-il... Je remarquais sur le carton que vous aviez mis des grands carrés pour le x. Je vous ferai remarquer que peut-être, si c'était un petit peu plus petit, ce serait préférable parce qu'il y a toujours des gens qui mettent des inscriptions, et puis ça fait des bulletins de vote rejetés. Mais, pour ce qui est de la photo, est-ce que vous pensez que ça devrait nécessairement être une photo couleur ou noir et blanc?

n(14 h 10)n

Mme Miuse (Yvette): Comme vous voulez, mais, d'après moi, les ministres qui votent, ils aiment mieux en couleurs...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Miuse (Yvette): ...de toute façon, parce que c'est plus beau. Puis, moi, j'ai été voir la chose des droits et libertés des personnes, et puis ils avaient peur que les photos n'étaient pas assez belles. Bon. Mais, moi, j'ai dit: Comment ça se fait, dans les rues, elles sont belles puis, sur le chose, elles ne seraient pas belles? J'ai dit: À quelque part, il y a quelque chose qui ne marche pas. Ça fait que, là, cette chose-là, ça ne marche plus, là. On aimerait vraiment. Puis ce n'est pas juste pour nous autres, c'est pour les personnes âgées, les personnes qui ne savent pas lire, les personnes immigrantes, c'est tout ce beau monde là. Puis, à part de ça, ce serait enrichissant pour celui qu'on vote parce qu'il y aurait plus de monde qui voterait, il risque des chances qu'il rentre.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, vous avez une logique implacable. M. Morisset.

M. Morisset (Michel): Alors, félicitations, mesdames. Il y a beaucoup de personnes ? loin de là ma pensée, je m'en désiste totalement ? qui croient que des personnes sur la curatelle publique, ou des prisonniers, ou encore des personnes avec des handicaps certains, ce serait mieux qu'ils n'aient pas le droit de vote. Et croyez-vous, dans un deuxième temps, qu'au contraire on devrait justement faire des campagnes d'information pour soutenir et encourager plus justement le segment de la société comme les personnes handicapées, les prisonniers et les autres, les laissés-pour-compte?

Mme Miuse (Yvette): Mais ils ont tous le droit de voter. D'après moi, si les prisonniers, ils votent, ils votent dans les prisons. Puis ils auraient leurs locaux parce qu'eux autres ils sont renfermés, là, puis ils pourraient avoir... Comment je pourrais dire ça? Veux-tu continuer? J'ai une perte de mémoire.

M. Morisset (Michel): Des facilités, là.

Mme Miuse (Yvette): Plus de facilités, puis ils pourraient voter quand même. Puis, comme les personnes âgées, ils pourraient aller voter parce qu'ils verraient la photo. Parce que, là, ce n'est pas tout le monde qui savent lire puis écrire. Puis ils ont le droit... selon les normes, ils ont le droit de voter, tout le monde. Mais, si vous faites ça, mais on court des chances que tout le monde soit content puis qu'ils aient la dignité humaine au moins dans leur coeur puis dans leur corps.

M. Morisset (Michel): Merci, madame.

Le Président (M. Ouimet): Bien, ça répond aux questions. Je vous remercie infiniment, au nom de tous les membres de la commission, d'avoir participé et d'avoir contribué si positivement à nos travaux. Merci à vous. J'invite maintenant les représentantes d'Option citoyenne de Chaudière-Appalaches à bien vouloir s'approcher et à prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): Alors, Mme Dominique Bernier et Mme Nancie Cameron, c'est bien ça? Bienvenue aux travaux de cette commission. Vous avez environ une dizaine de minutes pour nous livrer votre point de vue, et puis par la suite on aura une courte période d'échange avec vous.

Option citoyenne de Chaudière-Appalaches

Mme Bernier (Dominique): Très bien. Alors, bonjour à tout le monde. On est bien contentes d'être entendues aujourd'hui, à la commission. Ça nous fait plaisir de partager notre point de vue sur cette question très importante.

Je pense que, dans un premier temps, en tout cas à Option citoyenne, ce qu'on s'est demandé, c'est la question fondamentale: Qu'est-ce qu'une élection? Une élection, d'après moi, d'après nous, c'est une consultation de la population. Ce qu'on cherche à savoir par une élection, c'est quelle est la volonté de la population, quelles sont ses priorités quant à son avenir, quant aux décisions importantes qui doivent être prises pour la population. Alors, on pense qu'une élection, ça doit refléter le plus fidèlement possible la volonté de la population. Donc, ça doit refléter ce qui est inscrit sur le bulletin de vote de la façon la plus claire et la plus précise possible. C'est un peu ce qu'on vient vous présenter aujourd'hui.

Nous, on considère qu'actuellement le système électoral du Québec cause des distorsions. Il n'est pas parfait, il est même désuet. Il faut penser que c'est un système qui a été créé à la fin du XVIIIe siècle, alors que la démocratie en Occident en était à ses premiers balbutiements, là. C'était le tout début, c'était tout de suite après la monarchie finalement, alors c'était une première étape. Le scrutin qu'on a aujourd'hui, qu'on dit majoritaire ou uninominal à un tour, finalement c'était un bel essai pour respecter la volonté du peuple, mais il est loin d'être parfait, et on pense qu'il est temps de l'améliorer. On pense comme vous finalement qu'il est temps de le bonifier.

Un peu partout en Occident, au milieu du XIXe siècle, il y a des gens qui ont adopté une dimension proportionnelle, qui l'ont bonifié finalement en ajoutant une dimension proportionnelle pour le rendre plus compatible avec la volonté de la population parce que le scrutin majoritaire cause plusieurs effets pervers, dont: premièrement, il déforme la volonté populaire qui est exprimée par le vote; il crée des majorités artificiellement gonflées ? on va revenir un petit peu là-dessus tout à l'heure en donnant des exemples; en plus, il accorde une prime au parti vainqueur aux dépens des partis d'opposition et des tiers partis; il favorise le bipartisme, la domination de deux partis qui ont un ou deux mandats puis qui alternent comme ça depuis nombre d'années; et enfin il accorde une importance démesurée aux facteurs territoriaux, en ce sens qu'on vote pour quelqu'un dans sa région, mais il n'y a aucune dimension finalement qui reflète le vote dans son entièreté.

En fait, 75 % des démocraties, à l'heure actuelle, ont adopté une dimension proportionnelle, et nous pensons que c'est essentiel pour le Québec aussi parce que le Québec a beaucoup évolué depuis que le scrutin qu'on a actuellement a été implanté. Le Québec maintenant est pluriel, en ce sens qu'il y a beaucoup de personnes issues de l'immigration, il y a des personnes de tous âges, de tous horizons, et ça transforme la donne politique, ça fait que... Les gens aussi sont plus instruits, les gens voient les différentes options qui s'offrent à eux mais souvent vont choisir de voter d'une façon stratégique parce que le parti pour lequel ils voudraient opter a peu ou pas de chances d'élire des députés. Donc, c'est pour des objectifs démocratiques finalement que nous souhaitons qu'il y ait une dimension proportionnelle.

En ce moment, bon, nous souhaitons transformer le scrutin uninominal à un tour en un mode de scrutin mixte avec compensation et nous pensons que c'est un des projets les plus souhaitables pour notre démocratie. Nous saluons donc, disons, la décision du gouvernement actuel qui a proposé cette commission et qui souhaite réfléchir sur la question. C'était d'ailleurs une de ses promesses électorales.

Cependant, cette réforme, telle que proposée actuellement, c'est un peu une réforme qu'on qualifierait de cosmétique, en ce sens qu'elle ne traduira pas fidèlement le vote populaire. Nous pensons qu'une véritable proportionnelle mixte devrait répondre à certains objectifs, entre autres traduire le plus fidèlement possible, comme je l'ai dit, les votes exprimés en sièges parlementaires. Cela implique éventuellement d'éliminer les distorsions qui sont causées par le scrutin majoritaire pour respecter le plus fidèlement possible la volonté populaire et traiter aussi avec équité tous les partis en lice.

n(14 h 20)n

Il faudrait, dans un deuxième temps, faire en sorte que le vote de chaque électeur compte et ait le même poids. À l'heure actuelle, si l'on décide de voter pour le Parti québécois, l'ADQ, l'UFP ou le Parti vert dans une circonscription libérale, on perd notre vote. Il y a des centaines de milliers de votes au Québec qui sont perdus actuellement à cause de cette question-là. De la même façon, si on décide de voter Parti québécois dans un comté péquiste depuis toujours et puis qu'on fait partie des votes qui sont supplémentaires ? disons, mettons, que le parti a besoin de 20 000 votes pour se faire élire, 20 000 plus un, mettons, le Parti libéral a 20 000 votes, le PQ va avoir 20 000 plus un ? tous les votes pour le PQ en surplus sont perdus. Et c'est comme ça, vice versa, pour les deux partis principaux... les trois partis qui font élire des candidats à l'heure actuelle. Alors, c'est ça que ça veut dire pour nous, que chaque vote compte, c'est que tous les votes comptent pour une voix, finalement.

Un autre objectif important, c'est d'atteindre l'égalité entre les femmes et les hommes dans la représentation politique. Les femmes représentent 50 % de la population, nous trouvons que c'est vraiment important qu'il y ait 50 % de femmes à l'Assemblée nationale du Québec. Il faut aussi refléter le pluralisme politique, que les partis de toutes tendances puissent être représentés. Il faut aussi que la diversité québécoise soit respectée. Pour ce faire, il faudrait qu'il y ait suffisamment de personnes représentant les différentes communautés culturelles. Ça, c'est très important. Et continuer à respecter l'importance des régions parce que la réalité québécoise, c'est qu'il y a des gens de toutes les régions, c'est un grand territoire et puis il y a des spécificités régionales qu'il faut respecter.

Et dernier critère important, il faut maintenir un lien entre les députés et leurs électeurs. Alors, il faut qu'il y ait des députés proches des gens aussi.

Alors, le scrutin mixte avec compensation, il consiste à favoriser une répartition du nombre de sièges parlementaires selon des proportions données entre les députés élus au scrutin majoritaire dans les circonscriptions, tel que c'est fait actuellement, et il faudrait corriger les distorsions causées par le scrutin majoritaire en ayant une liste aussi fournie par les candidats.

Donc, le scrutin mixte avec compensation comporte la tenue de deux votes, et c'est primordial: un premier vote au scrutin majoritaire pour élire les députés de chacune des circonscriptions et un deuxième vote qui sert de compensation et qui permettra d'élire des députés de compensation finalement à partir d'une liste. Nous suggérons que cette liste présente une alternance hommes-femmes.

Donc, si un parti recueille 30 % des voix et qu'il fait élire 21 députés dans les circonscriptions, nous proposons qu'il y ait neuf sièges pour ce parti pour compenser, pour qu'on arrive à 30, qui soient pris sur une liste finalement proposée par le parti.

Pourquoi ça prend deux votes? Deux votes, c'est très important. Premièrement, les gens vont voter pour un député, pour une personne qui vient de leur région, une personne reconnue, impliquée dans son milieu. Et ils peuvent décider aussi de voter pour un parti différent de la personne qu'ils viennent de choisir, donc ils peuvent favoriser des nouvelles idées avec lesquelles ils sont d'accord. Et, pour cette raison puis pour assurer vraiment que la dimension proportionnelle soit respectée, c'est important qu'il y ait deux votes.

Alors, la proposition actuelle, c'est un seul vote au scrutin majoritaire. Alors, on ne considère pas que c'est un scrutin proportionnel, avec une composante proportionnelle, puisque c'est un scrutin majoritaire avec une pirouette mathématique, là, pour s'assurer qu'il y ait une minime compensation, mais ça ne représente pas du tout le modèle allemand puis les modèles européens qui ont pourtant fait leurs preuves. C'est une nouveauté que le gouvernement nous propose, nous suggérons de la bonifier.

Le Président (M. Ouimet): Il vous reste à peine quelques secondes.

Mme Bernier (Dominique): Alors, c'est ça. Nous saluons quand même les propositions en matière d'équité, de représentation équitable des femmes et des minorités ethnoculturelles. Nous trouvons que c'était très bien pensé et nous appuyons ces propositions dans l'ensemble.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci à vous pour nous avoir livré ce point de vue. Je vais commencer avec M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, M. le Président. Merci beaucoup de votre contribution, mesdames. Tous les experts qui sont venus nous voir et la plupart des gens ont convenu qu'il n'y a pas de mode de scrutin parfait; ils se composent des avantages et des inconvénients. La population devra arbitrer les avantages et les inconvénients et voir ce qu'elle veut assumer. Dans ce que vous proposez, quels seraient les désavantages?

Mme Bernier (Dominique): Les désavantages nous paraissent minimes. En fait, de ce que je connais, moi, on a suivi une formation sur les différents modes de scrutin, puis, de ceux qui nous ont été présentés ? on n'est pas des politicologues, là; mais de ceux qui nous ont été présentés ? c'est celui qui nous semblait vraiment le plus pertinent. Le désavantage, ça pourrait être: si les partis ne disent pas à l'avance quelles vont être leurs coalitions avec d'autres partis, il peut y avoir un déficit démocratique. Alors, je pense qu'il faudrait que les partis annoncent à l'avance: Moi, si je forme le gouvernement, je vais m'associer à tel autre parti pour pouvoir gouverner. Ça, ça pourrait compenser.

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée de La Pinière. Et, je vous rappelle, de courtes interventions, parce que j'ai plusieurs personnes inscrites.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Bernier et Mme Cameron, merci pour votre présentation. Votre groupe, Option citoyenne, vient de fusionner récemment avec l'Union des forces populaires pour créer un nouveau parti, Québécois solidaire, dont l'un des fondements, c'est l'égalité entre les hommes et les femmes: 50 % d'hommes, 50 % de femmes. L'avant-projet de loi propose des mesures incitatives financières pour les partis qui présentent le plus de candidats féminins, mais par contre vous êtes toujours un tiers parti. Est-ce que vous êtes d'accord d'abord avec les mesures incitatives financières appliquées au nombre de candidats et non pas au nombre de femmes élues? Parce que, dans votre cas, vous aurez fort probablement des chances de faire élire certaines femmes mais pas assez par rapport au nombre de candidats parce qu'au départ vous avez 50 %.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Bien. Alors, allons-y avec la réponse.

Mme Bernier (Dominique): Quand on a écrit ce mémoire-là, nous ne nous étions pas prononcés sur cette question-là, alors que l'Union des forces progressistes, elle, l'avait déjà fait. Depuis, nous avons convenu qu'il serait préférable de bonifier les partis qui font élire des candidates, donc se baser plutôt sur les candidates élues que sur les candidates présentées pour permettre que les partis présentent des candidates dans des régions qui sont susceptibles de les faire élire.

Le Président (M. Ouimet): Merci. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Merci, mesdames, pour votre présentation. J'aurais une question. Dans votre mémoire, vous parlez que les dispositions relatives au financement des partis soient resserrées. Est-ce que vous pourriez élaborer sur... Est-ce que vous avez fait la réflexion sur le resserrement nécessaire, selon vous?

Mme Bernier (Dominique): Resserrées, je ne pourrais pas vous dire exactement... Soient resserrées, en fait on pense que le financement des partis... On n'a pas élaboré sur cette question-là en tant que telle, mais c'est clair qu'à la lumière de la commission Gomery on pense qu'il faudrait vraiment qu'il y ait une réflexion en profondeur qui soit faite sur le financement des partis, et la population devrait peut-être être impliquée dans le processus pour qu'elle puisse déterminer de quelle façon ça devrait être un peu resserré et que la population puisse avoir un droit de regard là-dessus aussi.

Le Président (M. Ouimet): Merci. M. Acharid.

M. Acharid (Mustapha): Merci, M. le Président. Merci, mesdames. Dans votre mémoire, vous avez parlé que le nombre de districts proposé dans l'avant-projet de loi est trop grand. Est-ce que vous avez eu des réflexions sur un nombre de districts qui permettrait une meilleure proportionnalité?

Mme Bernier (Dominique): En fait, nous, on suggère vraiment que la proportionnalité vienne d'une liste nationale et qu'il y ait un pourcentage... bien, que ce soit 50-50, qu'il y ait un 50 % des candidats qui soient élus dans les circonscriptions et 50 % qui proviennent des listes ou en tout cas, par compensation, qu'on arrive à peu près à l'équivalent. Donc, les districts, ce n'est pas une formule qu'on retenait, là, qui nous satisfaisait vraiment.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, Mme Bernier et Mme Cameron, c'est tout le temps que nous avions avec vous, mais ça a été fort profitable. Alors, merci infiniment de votre participation aux travaux de cette commission.

n(14 h 30)n

J'invite maintenant M. Jean Rhéaume à bien vouloir s'approcher et à prendre place. Bienvenue, M. Rhéaume, aux travaux de cette commission spéciale.

M. Jean Rhéaume

M. Rhéaume (Jean): M. le Président, je voudrais remercier ces dames et ces hommes qui sont au service des gens. En tant que députés, en tant qu'adjoints aux députés, en tant que fonctionnaires, peu importe, je pense que, lorsque nous travaillons, nous travaillons au service des gens. Nous voulons faire avancer des idées, mais c'est le but ultime de notre démocratie. «Réfléchir», c'est le troisième mot sur le questionnaire. Je crois que bien réfléchir, ça nous amène à des meilleures politiques, à des meilleures idées. Et cette commission est une belle initiative; je félicite les initiateurs et je crois que ça nous permet de bonifier tous ensemble notre démocratie.

Quant au mode de scrutin, on parle de simplicité ou de plus de choix à l'électeur. Je pense que l'électeur doit être au coeur de notre réforme parce que nous sommes là pour nos électeurs. Peu importe le parti politique, quand la lutte est terminée, lutte d'idées, nous sommes tous au service de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

Et je crois qu'il va falloir revenir... On parle de réforme, mais j'aimerais bien le mot «renaissance». L'Assemblée nationale du Québec, je l'ai vue même personnellement dans les années où je fréquentais l'Université Laval, lorsque pendant cinq ans j'ai assisté aux débats. Les années de Johnson et de Lesage, pendant cinq ans j'ai assisté à ces débats et j'ai toujours été intéressé par la chose publique. Je crois que le mot «renaissance» doit revenir. On parle beaucoup de réforme, réforme en éducation. Je viens de l'éducation, j'y ai passé 32 ans. Donc, renaissance de ces principes de base.

Quant aux circonscriptions, on parle de diversité. Je pense que le problème majeur, c'est de faire l'unité dans la diversité, dans le respect des autres. Chaque parti politique amène cette diversité, et le citoyen ensuite fait un choix, et il opte pour le parti ou le programme qu'il a le plus confiance. Je pense que se faire élire, c'est une question de confiance entre l'électeur et celui ou celle qui se présente.

À la question 4, ici, on disait la façon la plus appropriée pour adopter un nouveau mode de scrutin. Il faut tenir compte vraiment, il faut tenir compte, je dis bien, des électeurs et non pas dès que nous sommes élus... Je pense que le bien de l'électeur doit passer avant le bien du parti. Nous sommes à l'Assemblée nationale, nous devons tous travailler ensemble pour l'intérêt de notre collectivité.

Quant au mode de scrutin, je favorise, oui, j'aimerais qu'il y ait ce qu'on appelle la proportionnelle. Et je vais vous en donner, des chiffres. Vous avez demandé des chiffres, M. Morisset? Je vais vous en donner. Après réflexion, vous proposiez 60-40? Je propose 70 % et 30 %, 19 régions. Je pense que ce serait un beau compromis. Nous aurions 89 députés élus dans les circonscriptions, et 38 viendraient des territoires d'après les résultats, le pourcentage de votes. Ça, c'est ma position.

On parle de seuil minimum de votes pour permettre aux partis de participer à l'attribution des sièges, le seuil implicite, et on nous pose la question: Croyez-vous qu'un seuil implicite devrait être imposé pour qu'un parti puisse obtenir des sièges de compensation? Et là on nous demande de choisir entre un seuil provincial relativement bas et un seuil régional. Moi, je dois vous dire que ce doit être un seuil moyen. Moi, j'ai appris une chose dans ma vie et je l'ai enseignée toute ma vie: je n'aime pas être dans le corridor de gauche puis je n'aime pas être dans le corridor de droite; je suis un homme de centre et je serai toujours de centre. Et dans mon intervention, aujourd'hui, je me vois comme quelqu'un du centre.

Le choix des électeurs, voter distinctement pour le candidat dans la circonscription et pour la liste? Oui, deux votes, deux votes. Et ensuite je vais vous dire pourquoi deux votes. Après que le député a été élu dans sa circonscription, on va choisir, à partir de la liste, d'autres députés. J'arrive aux partielles. Aux partielles, on se demande: Doit-on aller piger dans la liste? Je dis non. Puis je vais vous dire pourquoi je dis non: parce que, dans les années qui ont suivi l'élection du gouvernement X, il s'est fait des changements, il y a eu des choses qui ont changé. Et je pense que, si je me représente dans une partielle, le tableau n'est plus le même. Donc, je ne favorise pas qu'on aille chercher quelqu'un sur la liste dans une circonscription. Tu te présentes pour un parti politique, tu emmènes tes idées, les citoyens jugent, et, si ta plateforme politique correspond aux besoins des citoyens et citoyennes, ils te font confiance, tu seras élu.

Et, oui, représentativité des femmes, des minorités, des autochtones, mais je dois vous dire une chose, messieurs, mesdames des partis politiques: à ces trois questions, faut-il prévoir des moyens? À chaque parti politique appartient de valoriser nos vétérans, nos aînés, nos jeunes, nos autochtones. C'est ça. Vous savez, dans le sport comme en politique, parce que c'est un sport, l'arène politique, une équipe de hockey va gagner si elle a des vétérans, des recrues, des moyens, une diversité, et je pense que le parti politique qui va répondre à la population va être le reflet de tout ce monde. Donc, ce n'est pas une commission, ce n'est pas... c'est vraiment à chacun des partis politiques de s'assurer qu'il y ait suffisamment de femmes. Moi, c'est ma vision.

Et je termine en disant ceci: Le jour de l'élection, jour fixe, le lundi. Puis je vais vous dire pourquoi: le dimanche, c'est une belle journée pour réfléchir à ce qu'on va faire le lundi.

Donc, je laisse donc aux membres de la commission le pouvoir discrétionnaire, là, de la commission, la représentation électorale. Je pense que ces gens ont assez de jugement pour... Lorsqu'on évolue, lorsqu'on avance, il se fait des changements, c'est normal qu'on doit adopter. Et je termine sur ceci, nous sommes chanceux d'avoir une belle démocratie chez nous puis de pouvoir s'exprimer. Je vous remercie. Je suis prêt à répondre aux questions.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci à vous, M. Rhéaume, pour ce propos. Vous adressez des félicitations à l'Assemblée nationale, permettez-moi de les retourner aux représentants de trois formations politiques qui sont autour de la table qui est devant vous, aujourd'hui. C'est grâce à ces gens si aujourd'hui nous avons cette commission parlementaire qui vous entend. Alors, je ne sais pas qui veut ouvrir... M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Merci, M. Rhéaume, de votre présentation. Je vais aller droit au but, j'ai compris que vous souhaitez une compensation avec un nombre d'élus provenant de la compensation moins élevé. On a entendu des gens qui souhaitent une compensation à partir d'une liste nationale, donc des candidats choisis par les partis. Je comprends que ce n'est pas ce que vous préférez. Est-ce que vous avez considéré la possibilité que les candidats de liste, au lieu de les voir venir d'une liste provenant des partis, qu'ils soient... ou du moins que la compensation se fasse à partir d'un candidat qui a eu le meilleur résultat au scrutin mais qui n'a pas gagné, du parti qui a droit à un siège de compensation? Autrement dit, dans une région donnée, le meilleur score d'un candidat non élu serait celui qui serait le député de compensation de façon à assurer que ce soit un représentant d'abord qui a fait une campagne électorale, qui est près des citoyens et qui possiblement connaît beaucoup mieux la région qu'un candidat de liste provenant d'un parti qui viendrait d'une autre région.

M. Rhéaume (Jean): M. Gabias, une élection partielle, c'est une nouvelle lutte électorale sur des nouvelles idées, des nouveaux faits, il y a du temps de passé. Donc, c'est à chacun des candidats des différents partis de se faire valoir parce que, dans le temps, la partielle... et combien d'années, supposons, hypothétiquement...

M. Gabias: Je ne vous parle pas d'une partielle, là, je vous parle de façon générale, au scrutin général.

M. Rhéaume (Jean): Au scrutin général, bien c'est que la liste qui est là... Chacun des partis a soumis une liste. C'est bien évident qu'on doit, à partir de cette liste-là, prendre quelqu'un pour représenter le territoire. Ça, je suis d'accord avec ça, mais il ne faut pas mélanger les partielles puis une élection générale.

M. Gabias: Je ne vous parlais pas du tout de partielle. Si vous me permettez, M. le Président, je veux juste reformuler ma question, là. La compensation, elle peut se faire à partir d'une liste donnée par les partis, elle pourrait se faire à partir des candidats défaits dans la région, mais le député de compensation pourrait être celui qui a été défait d'un parti qui a obtenu le meilleur score.

M. Rhéaume (Jean): Bien, c'est bien évident, c'est...

M. Gabias: Est-ce que vous préférez cette option-là plutôt qu'un candidat...

M. Rhéaume (Jean): Bien oui, c'est certain, s'il a le pourcentage du vote. Supposons que le pourcentage du vote a favorisé, bon, le parti X, bien il faut que ce soit un candidat du parti X qui soit élu.

M. Gabias: Merci.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Trois-Rivières. M. Boivin.

n(14 h 40)n

M. Boivin (Guillaume): Bonjour, monsieur. Vous proposez que la proportion entre les élus de circonscription et les élus de liste soit de 70-30, mais je n'ai pas bien saisi dans vos propos: Est-ce que ce 30 % là, est-ce qu'il serait réparti selon des districts, tel que proposé dans l'avant-projet de loi, ou bien 30 % de compensation nationale? Donc, autrement dit, la question est: Compensation nationale ou régionale dans vos propos?

M. Rhéaume (Jean): À l'item 4: Selon vous, à quel niveau devraient être répartis les sièges compensatoires, une compensation régionale avec des grandes régions, de quatre à neuf régions, de 10 régions à 19 ou de 20 à 27? Vous le suggérez. Moi, je vous dis qu'on doit prendre 19 régions.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. Boivin. Mme Loucheur.

Mme Loucheur (Yohanna): Oui. Je voudrais poursuivre là-dessus, pourquoi 19? L'avant-projet de loi propose à peu près 26. Il y a beaucoup de gens qui nous ont dit 17 parce qu'on a 17 régions administratives. Vous, vous dites 19. C'est un nouveau nombre, on ne l'avait pas encore entendu. Pourquoi? Il repose sur quoi?

M. Rhéaume (Jean): Bien, dans le questionnaire, j'avais à choisir entre quatre à neuf, 10 à 19. Donc, moi, ce que je veux, c'est moyen. On ne se chicanera pas pour deux, là, s'il y a 17 régions, peut-être que ça pourrait être ça aussi. Mais les gens qui en veulent plus, ils vont dire: Ce n'est pas assez. En tout cas, disons qu'entre 17 et 19 il n'y a pas un grand écart. Je pense que je suis encore dans le centre, dans le corridor du centre.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, c'est le message que vous nous avez livré. Je vous remercie infiniment de votre témoignage devant cette commission. Merci à vous.

M. Rhéaume (Jean): Merci et bonne fin de journée. Et bon début de session à ceux qui vont la débuter, et on va être là à l'occasion.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. Rhéaume.

Est-ce que M. Jerry Beaudoin est présent? Oui? Alors, voulez-vous prendre place?

Bonjour et bienvenue aux travaux de la commission. Donc, allez-y avec votre témoignage.

M. Jerry Beaudoin

M. Beaudoin (Jerry): Donc, j'aimerais débuter tout d'abord en remerciant la commission de faire un saut à Lévis, dans notre belle région de Chaudière-Appalaches. C'est bien qu'on puisse avoir notre mot à dire sur ce qui se passe. Je pense que ce serait une initiative à répéter dans un avenir prochain. C'est justement un bon moyen de rapprocher les gens du pouvoir, et les désabusés, de les faire changer un petit peu d'idée.

Donc, moi, j'ai regardé, je vous dirais, l'avant-projet de loi sur l'angle de la démocratie. La démocratie, c'est censé être la participation citoyenne, le pouvoir au peuple. On voit, au cours des dernières années, que le taux de vote a baissé, on peut dire, dramatiquement. C'est certain qu'au niveau fédéral c'est pire qu'au niveau provincial, mais il y a tout de même des questions à se poser quand le taux de vote est à peine au-dessus de 70 %. Je pense qu'il y a des gens qui ne se reconnaissent peut-être plus.

Moi, je dirais que, par rapport à l'avant-projet de loi, j'en ai sorti des points positifs et des points qui me rejoignaient un peu moins par rapport à l'impact sur les régions, parce que, moi, je viens d'abord pour défendre notre région, qui en est une rurale, et urbaine plutôt sur le littoral pour les comtés de Lévis et Chutes-de-la-Chaudière. Donc, je trouve que le poids des régions devrait être maintenu, sinon amélioré.

Alors, je vous dirais que les points positifs, c'est des points surtout techniques. On pense au vote spécial par la poste ou au vote chez le directeur du scrutin qui sont des aspects qui sont déjà présents au niveau fédéral puis qui facilitent grandement la participation citoyenne pour les gens qui partent en voyage ou qui ne peuvent être disponibles au vote par anticipation ou la journée du vote ordinaire.

Il y a aussi la proposition d'avoir un vote par anticipation plus long, un peu comparable au niveau fédéral sûrement... C'est sûrement ce qui avait été pensé. Je pense qu'à cet égard-là aussi c'est une bonne chose, parce que, si on pense qu'on a un vote par anticipation les vendredis, samedis et lundis, si on veut respecter le jour du Seigneur, donc je pense que ça rejoint plus de gens parce que parfois il y a des gens qui peuvent travailler les lundis ou qui ne sont pas disponibles, etc. Donc, ça aussi, ça favorise la participation du peuple à notre exercice démocratique.

Autre aspect que je trouve positif de l'avant-projet de loi, c'est les élections à date fixe. Ça, ça évite que les partis politiques puissent manipuler la date des élections pour donner, comme on voit parfois, des bonbons électoraux, comme on appelle. De cette manière-ci, en ayant une élection à date fixe, il y a possibilité de le faire encore, sauf que, s'il y a une passe qui va mal dans les sondages pour un parti, bien c'est dommage, mais l'élection a lieu quand même, donc le peuple peut s'exprimer quand même.

Je vous dirais que les points où j'ai accroché un petit peu, c'est vraiment au niveau de ce qui était proposé par rapport au vote et à la représentation. Les comtés fédéraux, on le voit en région, sont des comtés énormes. Je peux vous dire qu'à côté, ici, on a Montmagny-L'Islet, qui est avec Rivière-du-Loup et Témiscouata, je crois. Je peux vous dire que le pauvre député qui a ce comté-là, il en marche une claque. Donc, je peux vous dire qu'à cet égard-là ça n'aide pas beaucoup la population parce que le député, veux veux pas, il est moins présent, le député élu par la population, qui leur est redevable. Donc, à cet égard-là, je trouve qu'en restreignant le nombre de comtés, par exemple, à 77, comme on disait dans l'avant-projet de loi, bien ça favorise les centres urbains, qui sont plus nombreux, et ça nuit aux régions. On peut penser, par exemple, qu'une région comme la Gaspésie? Îles-de-la-Madeleine, qui a présentement quatre comtés, n'en aurait qu'un avec un député. Donc, c'est un impact non négligeable.

Il y a aussi quelque chose que j'ai trouvé un peu complexe, c'est la structure des districts. Ça, il y a d'autres gens qui l'ont apporté précédemment, c'est... Moi, je disais à la blague que je trouvais que ça ressemblait à la chanson de Zachary Richard, L'arbre est dans ses feuilles, ça commençait à être un peu ? il y a trois comtés dans un district, deux non-élus dans le district; ça commençait à être un peu ? compliqué à saisir là-dessus pour la population, et puis je trouve que l'utilité est peut-être à questionner.

Donc, il y a aussi le fait qu'on aurait deux classes de députés. On aurait le député élu, qui est redevable à son comté, un peu comme vous êtes tous ici. Ce député-là, s'il ne fait pas l'affaire ou s'il fait l'affaire, la population de son comté pourra le réélire ou le battre aux élections. Le député qui est sur la liste, le non-élu, s'il ne fait pas l'affaire de la population, c'est sûr que son chef peut l'enlever. Mais, si le chef l'aime bien, on peut être pris avec pendant 20 ans de temps. Ça, vous avez sûrement tous vos images de personnes que vous ne voudriez pas voir pendant 20 ans de temps.

Donc, moi, je peux vous dire qu'à cet égard-là la population se retrouverait moins parce qu'ils verraient qu'il y a un aspect qu'ils ne peuvent pas contrôler. Le non-élu est davantage redevable à son parti qu'à la population. Puis, en ces heures où on voit que les partis sont de moins en moins populaires, de dire que le non-élu est exclusivement redevable à son parti, je ne sais pas si ça peut accrocher des gens davantage à notre système. C'est parce que ça doit être le but du projet de loi.

Je vous dirais aussi, je vous poserais une question: Si on fonctionne par liste, comme ça, avec les partis et que, dans mon comté, on a un député X qui est élu, mais que le deuxième, celui qui arrive deuxième, est un candidat indépendant, le candidat indépendant, il ne se retrouve pas dans les listes des partis. Donc, ça voudrait dire que ceux qui votent pour le candidat indépendant perdent leur vote et que ceux qui votent pour les partis plus marginaux ne perdent pas leur vote parce que les partis marginaux auront des listes de gens qu'ils pourront proposer au prorata de leurs votes.

Ensuite de ça, je vous dirais que j'ai bien analysé la situation puis j'en suis venu à deux propositions plausibles. D'abord, il y aurait la proposition de mettre sur pied une chambre des régions. En gardant les 125 députés, ça pourrait être une chose possible et ça aiderait, ça favoriserait les différentes régions sans leur faire perdre des élus dont ils ont besoin. Ça, c'est quelque chose de bien, mais ça prendrait en même temps une décentralisation des pouvoirs. Parce qu'il y en a plusieurs qui ont peur quand on leur parle de ça, parce qu'ils s'attendent à un deuxième sénat, et les sénats ne sont pas très populaires dans nos régions, je peux vous le dire.

J'ai regardé le mémoire de la FQM, c'est aussi une solution qui pourrait être envisageable, d'avoir 17 personnes qui fonctionneraient par liste, 17 élus. Et puis les autres...

Le Président (M. Ouimet): Moi, je vous demanderais de conclure maintenant.

n(14 h 50)n

M. Beaudoin (Jerry): Donc, je terminais justement. Alors, c'étaient les quelques mots que j'avais à vous dire là-dessus, et je vous rappelle de ne jamais oublier le point de vue régional en prenant vos décisions. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci à vous, M. Beaudoin. Juste une petite question d'intendance à la fois pour vous et pour les personnes qui sont dans la salle, le micro capte bien la voix. Donc, il ne faut pas trop s'approcher parce qu'à chaque fois que vous prononcez des mots qui commencent avec la lettre p il y a comme un son, là, qui résonne dans nos oreilles. Alors, juste pour vous et pour tous les autres. Merci. Bien. Alors, je vais commencer avec M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, M. le Président. M. Beaudoin, bienvenue. Merci de votre contribution. Une question que vous n'avez pas abordée, que je pose assez souvent en cette commission, pour trancher, pour trancher ce débat: Est-ce que vous seriez favorable à ce qu'il y ait un plébiscite ou un référendum ? bien, plus un plébiscite ? lors de la prochaine élection, par exemple, c'est-à-dire qu'on pose à la population la question, une question supplémentaire? Est-ce que seriez favorable à ça?

M. Beaudoin (Jerry): Bien, dans l'idée d'une démocratie saine, je crois que ce serait quelque chose qui pourrait être avantageux parce que la population en entier pourrait avoir son mot à dire à cet égard-là. Sur le nouveau projet de Loi électorale, je pense qu'un plébiscite serait souhaitable dans le cas actuel, oui.

M. Thériault: Vous avez indiqué, d'entrée de jeu, que le vote par correspondance, vous trouviez ça de l'ordre d'une amélioration si j'ai bien compris. Je voudrais juste soumettre à votre attention le fait que, dans l'avant-projet de loi, c'est 27 jours avant le jour J, donc avant même que l'on connaisse le nom des candidats, qu'ils soient sanctionnés par le directeur de scrutin. Vous ne trouvez pas qu'il y a là un peu une banalisation de ce que c'est qu'une campagne électorale et le fait en quelque part qu'il doit y avoir un débat démocratique qui conduit à une décision éclairée d'un électeur ou d'une électrice?

M. Beaudoin (Jerry): Je vous dirais que vous avancez un bon point, sauf qu'en analysant la chose au point de vue de faire participer le plus de gens possible, on l'a vu au niveau fédéral, cette année, il y a eu une recrudescence du vote spécial au bureau du directeur du scrutin. Moi, je pense que... c'est certain qu'il n'y a rien de parfait, mais je pense que ça apporte une nouvelle donne qui facilite la participation. Parce que ce doit être ça, le point le plus important, la participation citoyenne à cet égard-là.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Je vais aller du côté de M. le ministre. Merci.

M. Pelletier: Oui. Merci, M. Beaudoin, d'être ici, aujourd'hui. Merci de votre présentation. Actuellement, nous avons prévu, dans l'avant-projet de loi, qu'il y ait 77 députés de circonscription, 50 députés de liste, ce qui nous donne à peu près un ratio de 60-40. Tout à l'heure, vous nous avez exprimé le souhait que l'on garde les circonscriptions quand même relativement petites ou pas trop grandes, parce que vous avez dit que des grandes circonscriptions, c'était difficile évidemment à couvrir. Qu'est-ce que vous diriez d'un ratio 66-33 plutôt que 60-40? 66 % évidemment, 33 %.

M. Beaudoin (Jerry): Bien, moi, je vous dirais que la différence, elle n'est pas énormément grosse. Si je me réfère encore à l'exemple de la Gaspésie, qui tombe de quatre comtés à un comté, même si on monte à 66, ça va faire un comté et demi. Ce n'est pas... Je trouve qu'il y a quelque chose, là, qu'il faut favoriser la représentation régionale. C'est pour ça que je disais plus tard un peu d'élaborer une chambre des régions qui pourrait intégrer la proportionnelle mais garder nos 125 élus de comté pour avoir un travail sur le terrain puis un ? comment je dirais? ? travail qui se fasse bien, que les députés soient à proximité de leurs électeurs. Je crois que c'est important.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le ministre. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Merci, M. Beaudoin. Tantôt, vous disiez que c'est important que nous soyons en Chaudière-Appalaches; j'en profite pour remercier mes collègues, là. C'est parce que, moi, je suis député de Chaudière-Appalaches, de la région Chaudière-Appalaches, et ceux-ci ont adhéré facilement à l'idée de traverser le fleuve pour venir consulter la population.

Moi, ma question est sur le vote par la poste. Lundi, nous étions à Sherbrooke, puis il y a quelqu'un qui nous a fait un plaidoyer sur le fait que le vote par la poste n'était pas sécuritaire parce qu'il pouvait être manipulé par différentes personnes. Est-ce que vous avez une expérience? Est-ce que vous avez réfléchi là-dessus? Parce qu'il semble qu'il y a un échange d'enveloppes, là, puis, moi, en tout cas, ça m'a allumé une lumière. Je veux dire, le vote par la poste, est-ce que c'est vraiment sécuritaire?

M. Beaudoin (Jerry): Bien, je vous dirais là-dessus, monsieur, avec cette réforme-là, c'est pour démocratiser les choses. C'est certain que, si un parti au pouvoir nomme ses directeurs de scrutin partisans, comme il s'est fait au niveau fédéral, bien, là, c'est certain qu'il y a un problème, là, qu'il y a possibilité de manipulation de votes parce que, écoutez, il y a certains directeurs de scrutin parfois qui ont... C'est une récompense, d'être nommé directeur du scrutin de la part d'un parti qui occupe le gouvernement. À cet égard-là, je suis d'accord qu'il peut y avoir certaines anicroches. Par contre, si le directeur du scrutin est impartial comme il devrait l'être, je crois que c'est... Quelqu'un qui est capable de bien faire son boulot, il ne devrait pas y avoir de problème, là, à cet égard-là. Mais c'est toujours les petites failles du système, comme on dit.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Il me reste un peu de temps. M. Boivin, moins...

M. Boivin (Guillaume): D'accord. Rapidement, j'aimerais vous entendre sur la possibilité que, lors d'une consultation sur la modification du mode de scrutin... si vous êtes favorable à un choix dichotomique ou, pour donner un plus grand choix, un plus grand éventail de choix à la population, qu'il y ait plusieurs modèles présentés? Première question.

Et deuxième rapidement: Seriez-vous favorable ou réfractaire à l'augmentation du nombre d'élus en Chambre si ça nous permettait d'arriver à un meilleur modèle démocratique?

M. Beaudoin (Jerry): Moi, je vais commencer par la dernière partie de la question. Je ne suis pas réfractaire à ça, je crois que, tant que la population est bien représentée, personnellement je n'y vois pas de problème. Je crois que... D'ailleurs, je proposais de garder les 125 députés puis d'avoir une chambre des régions. Donc, à cet égard-là, c'est certain qu'on aurait une augmentation du nombre d'élus mais qui ? comment je dirais? ? faciliterait la gestion de l'État.

Pour le plébiscite, comme vous me parliez...

Le Président (M. Ouimet): Très rapidement, il ne nous reste plus de temps.

M. Beaudoin (Jerry): ... ? ce ne sera pas long ? donc, moi, je pense qu'on pourrait proposer deux choix aux gens, et puis on s'en tiendrait à ça, puis ils feraient leur choix.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci à vous, M. Beaudoin, d'avoir participé aux travaux de la commission. Merci infiniment. J'invite maintenant M. André Beaulieu à bien vouloir s'approcher et à prendre place.

Bonjour, M. Beaulieu. Bienvenue aux travaux de notre commission. Donc, allez-y avec la présentation de votre point de vue.

M. Beaulieu (André): ...

Le Président (M. Ouimet): Vous pouvez en prendre d'autres, il y en a d'autres qui sont fermées.

M. André Beaulieu

M. Beaulieu (André): Il y a des drôles de virus en circulation ce matin.

Le Président (M. Ouimet): Alors, voilà.

M. Beaulieu (André): Bonjour, mesdames. Bonjour, messieurs. Je vous remercie de me donner l'occasion de vous faire part de mes observations quant à cet avant-projet de Loi électorale. Pour diverses raisons, je suis contre cette proposition telle que présentée.

Je ne crois pas qu'on ait démontré que le système électoral actuel n'a pas bien servi le Québec dans l'ensemble fédératif. Depuis 1867, les gouvernements du Québec ont toujours étés majoritaires. Récemment, à deux occasions, l'Union nationale, en 1966, et le Parti québécois, en 1998, ont formé des gouvernements sans obtenir la majorité des suffrages. Je ne crois pas que ces accidents de parcours justifient une réforme complète du mode de scrutin. Les États-Unis n'ont pas changé leur Constitution, bien que George W. Bush, il y a deux élections, a obtenu moins de votes qu'Al Gore. Il y a beaucoup de gens qui ont critiqué, mais ils n'ont pas changé la Constitution, ils n'ont pas amendé la Constitution.

La réforme devant nous ne permettrait pas, dans sa forme actuelle, une plus grande représentation des tiers ou des petits partis. Au contraire, elle risque de transformer le système des partis actuels en un système bipartisan ou tripartisan avec en tête un parti plus que dominant, un parti institutionnellement au pouvoir grâce à une prime acquise... grâce à une prime ? excusez, oui; grâce à une prime ? grâce à une clientèle anglophone de l'Ouest-de-l'Île, où j'ai demeuré 20 ans, acquise au Parti libéral. En passant, jamais dans mes 20 ans où je demeurais dans le West Island, on n'a suggéré que le système était injuste. Jamais on n'a parlé, dans le West Island, de changer le système électoral, donc ils sont très satisfaits du système électoral.

n(15 heures)n

En plus, ce vote est concentré dans un petit nombre de circonscriptions, ce qui peut donner certaines aberrations. Et pensez que ce n'est pas juste, qu'il y a beaucoup de votes, mais ça ne leur donne pas autant de députés, et je pense que c'est un peu ça qu'on veut corriger dans cet avant-projet de loi. Mais je ne crois pas qu'on change un mode de scrutin pour un pays entier, pour une province entière, pour corriger un phénomène très local qui s'explique historiquement. En fait, le risque est de voir le Parti québécois écarté du pouvoir de façon quasi permanente. Il y a des gens qui ont fait des simulations, et ça pourrait arriver, c'est un risque.

Troisièmement, le Québec n'a pas accepté la Constitution imposée de 1982 et est à la recherche d'une plus grande ouverture vers sa spécificité, sa nature distincte. Le Québec a besoin de plus de pouvoirs et il ne doit pas se lancer dans l'ère des gouvernements affaiblis ou minoritaires. Le risque d'un système proportionnel, c'est d'avoir des gouvernements minoritaires. On le voit partout dans le monde. Pourquoi s'engager dans une telle réforme alors que le gouvernement canadien n'envisage pas de réformer sa Loi électorale et les gouvernements provinciaux non plus, à courte échéance en tout cas? Je crois que certains diront que le Québec doit être à l'avant-garde, mais, dans ce cas-ci, je crois qu'on serait mieux d'être à l'arrière-garde. Il serait plus sage, plus prudent, dans le contexte politique actuel, de ne pas toucher à un système qui nous a bien servis. Se lancer dans une telle réforme alors que la question nationale n'est pas réglée serait inopportun et pourrait engendrer une déstabilisation sociale que personne ne souhaite.

Je trouve inquiétant et suspect que l'avant-projet de loi reste silencieux quant à la façon qu'une éventuelle loi serait adoptée. Peut-on imaginer un scénario, je dirais un cauchemar, où, en fin de session, on suspendrait le règlement pour clore les débats et qu'on voterait une telle loi à la simple majorité? La légitimité de cette loi serait grandement affaiblie, je dirais à tout jamais, d'autant plus qu'il n'y a pas si longtemps le gouvernement en place décidait qu'il fallait des référendums, au nom de la démocratie, afin de permettre à L'Ancienne-Lorette, Beaconsfield, Pointe-Claire, et j'en passe, de se défusionner. Veut-on me faire croire que la réforme de l'envergure que nous avons devant nous ne requiert pas un référendum ou, à tout le moins, un plébiscite? Ne pas faire de référendum ne ferait que renforcer le cynisme, le désintéressement des électeurs que ce même avant-projet de loi veut combattre. À cet effet, il est grandement temps que les proposeurs de cette réforme affirment sans ambiguïté, haut et clair, leur position face au processus par lequel ce projet de loi deviendra loi. Ceci aurait l'avantage d'éclaircir le débat, l'élèverait à la hauteur qu'il devrait être, le sortirait de la partisanerie et le placerait au coeur du débat de société qu'un Québec moderne, lucide et démocrate mérite.

Quant au cynisme des électeurs, mon opinion est qu'il trouve sa source beaucoup plus dans la façon que la politique est perçue que dans le mode de scrutin en vigueur. Je m'explique. Par exemple, les fins de session à toute vapeur où les lois souvent les plus importantes sont adoptées après suspension du règlement, sans débat ou débat écourté, alimentent ce cynisme beaucoup plus que le mode de scrutin; les députés qui changent de parti, disons que ça se passe plus au fédéral, là, mais un ministre qui est libéral et qui devient conservateur la semaine suivante n'aide pas beaucoup à la population de perdre ce cynisme; ou les promesses qu'on ne peut tenir mais qu'on fait quand même parce qu'on veut être élu, ça alimente le cynisme, ça.

En conclusion, le présent avant-projet de loi diminuera le pouvoir de la majorité francophone alors que le Québec n'est ni souverain, ni reconnu comme société distincte et qu'il n'a pas signé la Constitution de 1982. Le présent avant-projet de loi serait acceptable, bien qu'amendé et largement amendé, si le Canada et les provinces avaient préalablement réformé leur propre Loi électorale ou si le Québec était un pays souverain.

Le Québec fait face présentement à des défis beaucoup plus urgents. Exemples: le déséquilibre fiscal, la mondialisation, le maintien de ses services de santé et d'éducation, la régionalisation. Il devrait mettre tous ses efforts dans ce sens.

Notre démocratie fonctionne malgré tout assez bien sans être parfaite. Nous avons fait deux référendums nationaux qui somme toute se sont très bien déroulés, à part des interventions douteuses venues de l'extérieur, des référendums à l'échelle municipale qui ont montré la nature et la maturité des citoyens du Québec.

Si on regarde les deux référendums portant sur la question nationale, le taux de participation en termes de suffrage a été exceptionnel. Bizarre qu'ici on ne parle pas de cynisme, de désintéressement de la population. Y aurait-il une leçon à tirer, une analyse à faire? Les prophètes de malheur qui dissèquent l'état de notre participation démocratique ont peut-être une réponse.

Finalement, le mode de scrutin est plus large qu'un simple exercice mathématique pour professeurs émérites d'université. Il s'inscrit dans notre histoire, dans notre culture. Il n'est pas inerte, il est vivant. Il est au coeur même de notre démocratie. Il est l'expression même de la démocratie. S'engager dans une telle réforme doit se faire avec minutie, prudence, humilité et sans arrière-pensée ou calcul politique.

J'ose espérer que ma contribution fera avancer la discussion, car j'estime qu'outre les deux référendums sur la question nationale cet avant-projet de loi est d'une importance capitale, car il façonnera le paysage politique du Québec pour des années à venir. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Beaulieu, de nous avoir livré votre point de vue avec autant de conviction. Alors, merci. Je vais débuter avec Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M. Beaulieu. Vous apportez une réflexion bien campée d'un homme convaincu. Je cherche à être convaincue comme vous.

Je voudrais vous demander de nous expliquer: Pourquoi faut-il conditionner la réforme du mode de scrutin à la question de la souveraineté du Québec, considérant que le Québec est une... Bien qu'on soit une société jeune, on a un Parlement qui est plus que bicentenaire. Donc, notre démocratie a été à l'épreuve. Et pourquoi est-ce qu'il faut attendre la souveraineté éventuellement avant de toucher à l'amélioration de l'exercice du droit de vote et du mode de scrutin?

M. Beaulieu (André): La souveraineté ou une réforme de la Constitution canadienne où le Québec au moins serait membre de la fédération canadienne, parce que légalement on est membre, mais on n'a pas signé quand même la Constitution de 1982.

La raison pour laquelle... Disons, je vais donner un cas pratique. Disons que, demain, on vit dans le nouveau système puis on a un gouvernement minoritaire ? qui est ma crainte ? ou de coalition. Il y a une conférence fédérale-provinciale qui veut discuter du déséquilibre fiscal. Mais le gouvernement qui est au pouvoir à Québec est minoritaire, et le parti qui a la balance du pouvoir n'est pas d'accord avec la position du Québec. Quelle position le gouvernement du Québec pourrait prendre à une conférence fédérale-provinciale s'il n'y a pas de position ferme parce qu'il y a un gouvernement minoritaire?

Puis, j'ai regardé rapidement, là. Je ne suis pas un spécialiste, mais ça m'intéresse. La plupart des pays... Ce n'est pas un hasard que la plupart des pays qui ont une proportionnelle sont des pays souverains. Nous, nous sommes souverains dans certains secteurs, mais nous ne sommes pas complètement souverains. Il y a un équilibre entre le fédéral et le provincial, et je ne voudrais pas voir le Québec affaibli dans ce contexte-là. Et puis, une proportionnelle, on ne sait pas les résultats que ça peut donner. Et je pense que le... Moi, à l'époque des fêtes, j'ai demandé à des gens, et les gens... Moi, je suis certain, s'il y avait un référendum demain matin, 80 % des gens diraient qu'ils sont satisfaits du système actuel.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, Mme la députée de La Pinière. M. le député de Richelieu.

n(15 h 10)n

M. Simard: Oui. Bonjour. Je vous écoutais avec beaucoup d'intérêt, et il est certain que votre commentaire à la fin a des résonances en moi. Je n'ai jamais vu, par exemple, de citoyen venir à mon bureau de comté pour remettre en question le mode de scrutin actuel. Mais il y a par contre des gens qui, depuis au moins une trentaine d'années, s'interrogent, pour toutes sortes de raisons, avec des motifs très dissemblables, d'ailleurs. Ceux qui sont en faveur d'une proportionnelle plus ou moins intégrale, avec des listes nationales, ont une vision de la réforme. D'autres, qui sont plus près de la proposition du gouvernement sur une proportionnelle mixte compensatoire, ont une tout autre vision.

Mais je vous demanderais... Je vous ai écouté tout à l'heure et je vous demanderais peut-être d'élaborer sur la notion suivante qui était sous-jacente à votre intervention: pour être au pouvoir, un parti doit passer deux tests: avoir une majorité de votes évidemment, mais également être présent sur l'ensemble du territoire. Parce qu'on peut très bien imaginer qu'une région, par exemple, théoriquement, Montréal, pourrait être majoritaire, amener une majorité de votes, mais une absence quasi totale sur le reste du territoire. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Beaulieu (André): C'est un risque où il y a plusieurs comtés très populeux, des circonscriptions très populeuses, et, si on change le système puis on valorise ces circonscriptions-là en ajoutant d'autres comtés, d'autres députés, il est possible que Montréal, avec la ceinture sud de Montréal, serait au pouvoir éternellement et que les régions, même si elles votaient pour un autre parti, ne pourraient pas accéder au pouvoir.

Il y a deux phénomènes: il y a une concentration, dans les circonscriptions, de beaucoup de votes à Montréal, et, dans le reste du Québec, le vote est très, très éparpillé. Et c'est ça, la démocratie, il faut essayer que les régions soient représentées, que tout le monde soit représenté. Je ne suis pas contre une proportionnelle à tout prix, mais je ne crois pas qu'à l'heure actuelle, présentement, c'est nécessaire. Les risques sont trop élevés de changer le système de mode de scrutin présentement.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Richelieu. M. Morisset maintenant.

M. Morisset (Michel): Oui. Bonjour. Vous avez mentionné tout à l'heure, et ça a attiré mon attention, que, si le projet de loi était adopté, il y aurait plus de risques de tensions sociales. J'aimerais que vous précisiez qu'est-ce que vous entendez par là.

M. Beaulieu (André): Ce que j'entends par là, c'est que, si présentement ce projet-là est accepté premièrement et qu'il n'y a pas de plébiscite ou encore qu'il n'y ait pas de référendum, bien les gens... puis qu'on s'aperçoit que cette nouvelle forme de répartition des votes favorise un parti, bien, là, je veux dire, je ne dis pas qu'il va y avoir des émeutes, là, mais il y a des gens qui ne seront pas contents. Ce seront peut-être les régions, ce sera peut-être... Mais on ne vit pas dans un système politique 200 ans puis on change ça. Ce n'est pas un exercice mathématique.

J'ai écouté les débats, moi, j'ai écouté M. Massicotte puis j'ai écouté d'autres personnes qui sont venues. Il y a une chose qui m'a frappé: c'est comme si le mode de scrutin s'était désincarné, c'était comme juste... on sépare des votes, tout ça. C'est des gens. C'est des gens, c'est des régions. Il y a une culture, ça traîne... Il y a une histoire politique au Québec, il y a des régions qui votent d'une certaine façon, puis tout ça. On ne chambarde pas ça de cette façon-là sans consulter le peuple. Ça, c'est évident.

Le Président (M. Ouimet): Alors, votre propos est très clair. Merci infiniment, M. Beaulieu, d'avoir participé aux travaux de notre commission. Je vous en remercie.

J'invite maintenant Mme Michèle Brousseau, si elle est parmi nous, oui, alors à bien vouloir vous approcher et à prendre place à la table des témoins. Alors, bonjour à vous et bienvenue parmi nous, au sein de cette commission spéciale. Donc, à vous la parole pour nous livrer votre point de vue.

Mme Michèle Brousseau

Mme Brousseau (Michèle): Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à tous les membres de la commission. Il me fait un plaisir et un devoir de vous présenter mon opinion sur la nouvelle réforme du mode de scrutin électoral. Je crois qu'un jour, après avoir consulté la population et obtenu consensus, l'évolution et l'intérêt des citoyens à la chose politique, nous pourrions modifier le mode de scrutin actuel.

Le Québec a plusieurs particularités qui en font une province distincte: sa grandeur géographique, ses traditions et son peuple. Le mode de scrutin que nous avons depuis 200 ans ne peut être changé du jour au lendemain sans en informer la population au préalable et encore moins sans lui demander son opinion sur la question, soit par plébiscite ou référendum. Ceci est primordial. Avant d'adopter un nouveau mode de scrutin, le simple citoyen devra donner son opinion sur la question. C'est un droit fondamental que l'Assemblée nationale ne peut changer sans l'assentiment de la majorité. Le citoyen se sentira un citoyen de deuxième classe parce qu'il n'a pas été demandé, son avis n'a pas été demandé au préalable. Et la participation au vote diminuera sans aucun doute. Je crois que ce n'est pas ce que l'Assemblée nationale voudrait.

Entre parenthèses, les madames qui ont donné leur mémoire tantôt, ça me rejoint un peu parce que j'ai travaillé aux élections fédérales, au bureau du Directeur général, j'ai fait toutes les résidences de personnes âgées autonomes, semi-autonomes et non autonomes, et les gens sont complètement désabusés et désintéressés parce qu'il n'y a pas de... ? comment je dirais? ? ils ne se sentent pas près des députés et de la participation en général des gens.

En pays démocratiques, dont nous sommes issus, il y a des règles à suivre, et un gouvernement élu par la majorité de la population ne peut laisser tomber cette population qui l'a élu quand bon lui semble pour changer la Loi électorale si elle ne fait pas son affaire. Je suis choquée un peu de constater que l'Assemblée nationale ait pu seulement penser à faire un tel virement de l'exercice du droit de vote sans l'accord des citoyens.

J'ai lu sur la question du mode de scrutin par représentation proportionnelle et j'ai échangé avec plusieurs personnes qui demeurent dans les pays qui ont cette forme de mode de scrutin, et la majorité des gens m'ont affirmé que ce mode de scrutin n'a pas augmenté le pourcentage de votants, bien au contraire, il n'y a pas eu d'augmentation de femmes non plus ni d'ethnies, et à la fin cela prend du temps avant d'avoir le résultat final lors d'une élection. Alors, je ne vois pas en quoi cela pourrait nous aider. Même la proportionnelle mixte ne sera pas le genre de scrutin qu'il faudrait adopter ici; il faudrait la modifier, la bonifier. La Belgique, l'Allemagne et la Nouvelle-Zélande ont ce genre de mode, et ça n'a pas été une solution à leurs problèmes, ils n'en sont pas satisfaits. Adopter ce mode de scrutin au Québec serait une grosse erreur, car le député n'aura aucun contact avec ses électeurs à cause de la trop grande distance à parcourir et du coût de dépenses qui va augmenter en conséquence de cette distance aussi. Imaginez-vous un comté à partir de Québec à Blanc-Sablon, où il n'y a même pas de route, comment se passera-t-il pour un citoyen de voir son député? Cela n'a aucun sens. Nous sommes dans une fédération, cette option pourrait être envisageable peut-être après que le Canada ou les autres provinces l'aient envisagée.

Je suis tout à fait contre ce projet de loi tel qu'il est présentement, et je trouve que cette façon de faire est tout à fait anticonstitutionnelle et que la population a le droit de dire quelle sorte de mode de scrutin elle préfère. Par conséquent, un plébiscite ou un référendum devra avoir lieu avant de changer quoi que ce soit dans la Loi électorale, et ne pas procéder à un changement de ladite loi unilatéralement. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, Mme Brousseau, pour ce point de vue. Nous allons ouvrir la période d'échange avec vous. Mme la députée de La Pinière s'est inscrite.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Brousseau, vos propos m'interpellent beaucoup parce que je crois qu'il y a une sorte d'incompréhension. Quand je vous entends parler, vous donnez l'impression que l'exercice qu'on fait devant vous, il est déjà terminé, que l'Assemblée nationale a déjà tiré ses conclusions, que les décisions sont prises. Je me permets de vous rappeler que la consultation qu'on fait, c'est justement pour écouter les citoyens comme vous et c'est pour ça qu'on se déplace en région pour avoir le pouls de la population, que le processus est normal, c'est un processus parlementaire normal à un avant-projet de loi soumis pour consultation, et le ministre ne s'est pas positionné définitivement parce qu'il écoute les groupes. Nous aussi, comme parlementaires, nous avons un exercice à faire de ce côté-là, et ce n'est qu'à la fin de toutes ces consultations et de ces tournées régionales qu'on va s'asseoir comme commission et on va discuter des consensus qui pourraient se dégager de ce que nous avons entendu. Donc, je veux vous rassurer, l'Assemblée nationale n'a pas outrepassé la volonté de la population; au contraire, elle la respecte, et c'est pour ça qu'on est devant vous et que vous êtes là pour formuler vos commentaires.

n(15 h 20)n

Mme Brousseau (Michèle): Merci des précisions, mais ça, je le savais un petit peu, là. Mais c'est que je crois... Les gens avec qui j'en ai parlé, parce que ce n'est pas tout le monde qui sont au courant, ce n'est pas... Allez voir les personnes, là, les personnes âgées, là, puis allez leur parler de ça, voir s'ils sont au courant. Non, ils ne sont pas au courant. Moi, je suis au courant parce que j'ai pitonné sur Internet puis je me renseigne sur ce qui se passe, et tout ça. Mais, non, la majorité des gens ne sont même pas au courant que ça se passe, qu'il y a un avant-projet de loi qui est passé. Alors, avant que le gouvernement nous passe ça en sourdine... C'est bien vrai qu'il y a la commission, mais après la commission? On a l'habitude de se faire jouer des tours aussi et puis de se faire passer des règlements puis des lois sans qu'on le sache. C'est déjà arrivé. Alors, c'est pourquoi je dis: Ce sujet-là est trop important. Les gens ont trop de choses à dire. Nous autres, on... Moi, je viens le dire, là, parce que je veux bien le dire. Mais les gens qui ne sont pas au courant qu'il y a un avant-projet de loi, eux autres, ils ne pourront pas venir vous le dire. Alors, je crois qu'un référendum, c'est la chose la plus plausible qu'il peut y avoir pour que les gens soient au courant puis qu'ils votent pour la question.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, Mme la députée. M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, Mme Brousseau, de votre contribution. Si je vous comprends bien, vous nous dites: Il va falloir que cette commission puisse atteindre l'ensemble de la population. La meilleure façon de le faire, c'est de l'interpeller en lui disant: Vous allez devoir trancher le débat. C'est déjà une façon de faire, mais cela doit être précédé par une phase d'information, que ce soit pour sanctionner un changement ou pour dire qu'on ne veut pas de changement.

Je vous entends bien aussi quand vous nous dites: Dans la manière de faire de la politique, il y a... Parce que, quand vous nous dites: On est habitués de se faire passer des lois... Bon. Dans la manière de faire de la politique, il y a aussi quelque chose qu'il faut entendre, nous, comme parlementaires, et qui alimente peut-être aussi le cynisme ou le fait que les gens sont désabusés. C'est-à-dire que la mécanique, c'est une chose, mais la réforme des travaux parlementaires qui est entreprise doit aussi donner ses fruits, peu importe la mécanique que l'on adoptera. Donc, faire de la politique autrement.

Et, par rapport à la participation, vous avez raison, si la seule raison pour laquelle on est inquiets pour changer la mécanique, c'est le taux de participation, au Québec, depuis 1931, on a grosso modo, là, au pif, là, à peu près 75 % de participation. Ce qui est assez intéressant. Et, quand on voit ce qu'un changement de mécanique peut faire, c'est 3 % à 4 % dans les autres pays. Et on a déjà eu des 84 %, 82 %, 81 %. Alors, là-dessus, je vous entends bien aussi. Qu'est-ce qu'on devrait faire de mieux à l'Assemblée nationale?

Mme Brousseau (Michèle): Ah! bien, là, je ne suis pas ici pour faire la réforme de l'Assemblée nationale. Mais, quand il y a au moins... Quand vous passez un avant-projet de loi, mais l'information ne se rend pas, l'information au public, là, sur des sujets comme ça... Allez demander à la population s'ils sont intéressés à ce qu'on change le mode de scrutin. C'est simple, allez le demander, mais ne faites pas ça en sourdine, un avant-projet de loi. Puis là, s'il y a quelqu'un qui parle trop, là, on fait une commission parlementaire, là, puis, tu sais, on va essayer. Non, ce n'est pas comme ça. Sur ces sujets-là, il faut le décrire, le crier, le parler, discuter, que tout le monde puisse savoir de quoi il s'agit.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Masson. Mme Proulx.

Mme Proulx (Mélanie): J'aimerais que vous m'expliquiez... Je comprends vos positions par rapport à un référendum, tout ça, ça peut être légitime. Ce que j'aimerais que vous m'expliquiez, c'est que, dans l'éventualité où il y aurait consensus de la population par référendum ou plébiscite... Mais je vous ai entendu dire tout à l'heure que le Québec ne devait pas... Dans le fond, ce que vous vouliez dire, c'est que le Québec ne devait pas prendre l'initiative d'une réforme du mode de scrutin si le Canada ou les autres provinces n'avaient déjà pas enclenché un processus de réflexion ou n'avaient pas fait de modification. Alors, à partir du moment où la population du Québec s'est entendue pour dire: On veut changer notre mode de scrutin, à ce moment-là, pourquoi... qu'est-ce qui vous fait peur du fait qu'on prenne l'initiative, là, de réformer notre mode de scrutin?

Mme Brousseau (Michèle): Je ne suis pas contre. Je ne suis pas contre des nouveaux procédés ou des nouveaux processus. Je ne suis pas contre l'évolution. Moi, ce qui me fait peur, là, c'est... Les personnes comme les personnes handicapées, les personnes âgées, les personnes non autonomes, les personnes qui ont de la difficulté, je l'ai vue, là, je l'ai vécue avec eux autres, la difficulté d'aller voter. Ces personnes-là, allez donc leur demander ou allez donc les faire voter par proportionnelle mixte, là, avec une liste de députés. Qu'est-ce que vous pensez qu'ils vont faire? Moi, c'est là-dessus... Je les vois, ces personnes-là, je les entends, je les côtoie souvent, puis, moi, je ne trouve pas que c'est une bonne idée. On peut changer le mode de scrutin qu'on a aujourd'hui, c'est sûr. L'évolution, là... Nous autres aussi, on évolue, au Québec, même plus qu'ailleurs. Sauf que présentement ça prend du temps avant d'informer le public, ça prend du temps avant que les gens se rentrent ça dans la tête. Alors, à ce moment-là, tu sais, ce n'est pas en vitesse qu'il faut le faire.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Notre temps, malheureusement, il est écoulé, mais je vous remercie infiniment pour votre contribution à nos travaux. Merci, Mme Brousseau.

J'invite M. André Carrier à bien vouloir se présenter. Bonjour, M. Carrier, bienvenue aux travaux de cette commission spéciale. Alors, je vous cède la parole.

M. André Carrier

M. Carrier (André): Disons qu'afin de faciliter, mon opinion, je l'ai mise par écrit et, désolé, il va falloir que je vous le lise parce que je dois vous avouer que vous avez un décorum qui me dérange un peu. Je ne m'attendais pas à autant de monde puis de cette façon-là...

Alors, bonjour. J'apprécie le débat ouvert, non partisan sur le mode de scrutin, qui m'est offert aujourd'hui. D'informer la population afin qu'elle choisisse le modèle à privilégier demeure l'un des fondements de notre démocratie.

Nous sommes à la recherche de personnes susceptibles de diriger en respectant la volonté de l'électeur en tant que citoyen à part entière. Il faut que le citoyen s'identifie à son choix. On recherche une personne intéressée et intéressante. Il nous faut la connaître et l'entendre, il nous faut éviter des nominations à la Michael Fortier, malgré le fait qu'ils peuvent le faire. Je pense que le citoyen peut ressentir de la frustration face à ce type d'agissements.

Un problème d'absentéisme surgit lorsque l'on parle du pourcentage de votes exprimés. Il faut redonner confiance à la population, au système politique qui nous régit. L'intégrité du vote est essentielle pour maintenir le lien de confiance avec le système de scrutin actuel. La carte d'électeur est une solution à envisager afin d'en assurer l'intégrité.

Je souhaite la mise en place d'un système permettant aux jeunes et aux étudiants d'exercer leur droit de vote. Il ne faut pas oublier de l'informer sur cet aspect de droit d'un citoyen. Il faut éviter de l'exclure du processus électoral dès son jeune âge d'éligibilité. C'est d'avoir le sentiment qu'il s'impliquera davantage dans notre société.

La réforme proposée ne parle pas de dispositions relatives aux dépenses et aux contributions électorales, des pouvoirs d'enquête du DGE pour lui permettre l'application et le respect de la loi, et des modalités de vote hors Québec qui seraient à améliorer.

La démocratie ou plutôt le pouvoir démocratique de décider est ma philosophie de base employée à élire les personnes susceptibles de diriger nos destinées. Il faut entendre, dans nos médias, à travers le monde, tous les rapports de conflits et de guerres basés sur des idéaux de liberté. Nos générations qui nous précèdent vécurent ces luttes dévastatrices à l'acquisition de cette dite liberté. Le fait que vous soyez sortis des murs du parlement permet à la population de s'exprimer, de débattre et de participer au pouvoir légitime des destinées de notre vie politique.

Les principes fondamentaux suivants se doivent d'être respectés pour en arriver à un exercice démocratique des plus complets: la proximité entre la population et les institutions démocratiques, la réalité politique québécoise, le maintien de la stabilité de l'État, la clarté de la responsabilité gouvernementale, la défense des intérêts du Québec, la qualité du lien élu-électeur.

Je pense que la nature des décisions à prendre doit faire l'objet d'un véritable débat de société. Il faut donc laisser à la population québécoise le soin de choisir ce qu'elle voudrait. À part payer nos taxes et nos impôts, nous n'avons pas beaucoup d'occasion de nous exprimer sur nos destinées.

Le mode de scrutin majoritaire au Québec est la parole même de la démocratie. Elle permet de foutre à la porte un gouvernement qui n'a pas respecté nos attentes. Ce principe de l'alternance de partis au pouvoir est à la base même de notre démocratie.

En résumé, les citoyens doivent faire partie prenante de la démarche et de la décision finale. Le fait de voir des citoyens ne pas utiliser leur droit de vote est une atteinte directe à la démocratie. Elle peut se traduire par un climat de non-confiance au régime politique en place. Je vous remercie de m'avoir entendu.

n(15 h 30)n

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Carrier, de nous avoir livré votre point de vue, nous l'apprécions beaucoup. Je vais ouvrir maintenant la période d'échange avec vous en cédant la parole à Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Carrier, pour l'effort que vous avez fait de venir partager avec nous votre réflexion. Vous nous interpellez sur le vote des jeunes, et vous dites qu'il faudrait faire en sorte que les jeunes aillent voter, et vous dites aussi: Ne pas voter, c'est quasiment une atteinte directe à la démocratie. Moi, je vous entends beaucoup parce qu'un des problèmes que nous avons au niveau des déficits démocratiques, c'est le taux de participation et plus le taux est à la baisse, plus la démocratie est un peu fragile. Puisque vous ciblez les jeunes et qu'on sait que, les jeunes, c'est une catégorie qui ne vote pas au même niveau qu'elle devrait le faire, est-ce que vous seriez d'avis qu'il faudrait imposer le droit de vote, que le droit de vote soit obligatoire?

M. Carrier (André): Ce n'est pas une notion que je connaissais, mais je peux vous dire une chose, c'est que, moi, mes proches, je les incite, j'insiste auprès de ces gens-là, en fin de compte, à aller voter élection après élection. C'est un débat perpétuel. Mes collègues de travail qui sont plus jeunes que moi, c'est la même chose. Je suis à leur dire: Écoute, il y a des gens qui sont morts pour ça. Alors, c'est à toi, en fin de compte, d'avoir ce pouvoir-là et de l'exercer. C'est une idée qui pourrait être mûrie, ce que vous proposez. Il faudrait le soumettre, en fin de compte, à l'ensemble des gens qui auraient à prendre la décision, c'est-à-dire nous.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. Carrier.

Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée. Si je n'ai pas d'autres demandes d'intervention... Je vous remercie. Il faut croire que votre propos, il était extrêmement clair et apprécié des membres de la commission. Merci à vous, M. Carrier.

J'invite maintenant Mme Denise Laprise à bien vouloir s'approcher. Bonjour, Mme Laprise, et bienvenue aux travaux de cette commission parlementaire. Donc, la parole est à vous.

Mme Denise Laprise

Mme Laprise (Denise): Bonjour, M. le Président. Bonjour, les élus, bonjour, membres du comité citoyen. Ça me fait plaisir d'être ici, aujourd'hui. Je suis fière aussi de l'initiative que vous avez prise de nous rencontrer ici, en région. Je veux vous dire aussi que mon analyse, je l'ai faite sur la base des valeurs et non sur une analyse calculée basée sur des stratégies politiques. Je crois que la réforme du mode de scrutin doit nous amener à donner le goût aux citoyens de la politique. Ce qu'on vit présentement, c'est plutôt le contraire.

Je dois vous dire aussi que je considère que l'avant-projet de loi sur la réforme du mode de scrutin actuel ne constitue pas vraiment une réelle avancée pour la démocratie et que la proposition gouvernementale doit être substantiellement améliorée. Je suis d'avis que cet exercice devrait atteindre cinq grands résultats, c'est-à-dire refléter la volonté populaire le plus possible, c'est-à-dire que le citoyen se reconnaisse et se sente légitimement représenté, on doit aussi viser l'égalité entre les hommes et les femmes dans la représentation politique, respecter l'importance des régions, refléter le pluralisme politique et incarner la diversité québécoise. Donc, comme je vous disais tantôt, il faut vraiment donner le goût de la politique au monde.

Les éléments positifs de cet avant-projet de loi, c'est que le gouvernement met sur la table une proposition qui est concrète et qu'il soumet au débat. Le fait que la consultation soit très large, c'est-à-dire une commission itinérante, ça permet aussi que le débat ne se limite pas seulement qu'aux experts. Et là-dessus je vous félicite.

Les limites de l'avant-projet de loi sont les suivantes: c'est qu'un seul vote de l'électeur le coince dans ses choix. Le modèle mixte compensatoire proposé, par un seul vote au scrutin majoritaire, ne corrige pas suffisamment les distorsions du scrutin majoritaire uninominal par rapport au pluralisme politique existant dans la société québécoise, car 77 députés continuent d'être élus comme avant au scrutin majoritaire et les 50 autres sont élus selon un calcul de votes au niveau des districts, ce qui ne laisse aucune place aux petits partis. Encore trop de votes ne compteront pas au plan national. Un deuxième vote au scrutin proportionnel de liste permettrait la proportionnalité de manière plus juste.

L'expression des identités régionales se fait aussi au détriment de la diversité des courants politiques à l'échelle nationale, car on trouve une double représentation des territoires par les circonscriptions et par les districts.

Finalement, rien ne garantit l'égalité entre les hommes et les femmes dans la représentation politique ni une meilleure représentation de la diversité ethnoculturelle.

Donc, les propositions concrètes que je recommande à la commission sont les suivantes ? et vous en trouverez 10.

Il faudrait instaurer deux votes distincts: un pour choisir les candidats et candidates, dans les circonscriptions, et un autre pour les partis, c'est-à-dire une candidature de liste, pour permettre aux électeurs d'exprimer les nuances de leurs opinions. Ensuite, l'attribution d'au moins 40 % des sièges de l'Assemblée nationale à la proportionnelle, selon les résultats calculés au niveau national et non par district.

Troisièmement, adopter un modèle mixte vraiment compensatoire pour favoriser le pluralisme politique à l'échelle nationale et non pas au niveau des districts. Ceci permettrait des listes de partis longues et égalitaires entre hommes et femmes et une représentation des régions et de la diversité culturelle. Nous pourrions atteindre notre objectif d'égalité et de démocratie plus rapidement.

Quatrièmement, recourir à des listes nationales présentées par chaque parti politique, avec l'obligation des partis de présenter des listes avec une alternance entre les hommes et les femmes, en commençant par une femme, et une représentation de toutes les régions dans la première moitié de la liste, et des représentants des diversités ethnoculturelles également, d'autant plus que seule la première personne, sur la liste de district, a une chance d'être élue. Il faut aussi garantir que le haut des listes ne soit pas monopolisé par les élus de Montréal et de Québec. La préparation des listes devrait être encadrée.

Cinquièmement, obliger les partis politiques à se doter d'un plan national prévoyant des mesures concrètes pour atteindre l'égalité, en bonifiant leur financement public en fonction du nombre de femmes élues et non pas du nombre de candidates. Exemple: la bonification à l'allocation annuelle d'un parti pourrait être de plus de 5 % à compter de 35 % de femmes élues, plus de 10 % entre 40 % et 45 % et plus de 15 % si 45 % d'élues et plus. Donc, il s'agit de récompenser les partis pour les résultats obtenus.

Cinquièmement, bonifier le remboursement des dépenses électorales acquittées par les candidates et les élues, à compter de 35 % de candidatures.

Sixièmement, maintenir et élargir le soutien aux candidatures et à l'éducation politique des femmes par le maintien du programme À égalité pour décider, jusqu'à l'atteinte de l'égalité.

Septièmement, que les partis mettent en place des mesures concernant le recrutement et la sélection des candidatures, la constitution de listes de femmes par région, le soutien dans le processus d'investiture, comme candidates, et dans la campagne électorale; organiser un système de mentorat entre les députés en place et les candidates; limiter sévèrement les dépenses autorisées pour l'investiture et soutenir matériellement les candidates à l'investiture en vue de rendre compatibles candidature à une élection et responsabilités familiales.

Huitièmement, créer un observatoire de l'égalité auprès de la Direction générale des élections, qui aurait le mandat de proposer des mesures de redressement à l'Assemblée nationale.

Neuvièmement, tenir une vaste campagne d'information et d'éducation populaire pour que la population connaisse les enjeux démocratiques et le fonctionnement du nouveau mode de scrutin proposé.

Et, dixièmement, la population devrait être aussi appelée à se prononcer sur le nouveau mode de scrutin suite à une commission parlementaire itinérante, soit lors de la prochaine campagne électorale.

Je veux vous dire aussi qu'en Chaudière-Appalaches les femmes sont moins nombreuses dans les instances de pouvoir depuis certaines transformations, exemple, de la régie régionale de la santé en agence locale de développement, du CRCD en CRE. Il y a eu aussi certaines transformations dans certains CLD, ce qui fait que les femmes sont beaucoup moins nombreuses sur ces instances.

n(15 h 40)n

Au niveau aussi des MRC, il y a très peu de femmes qui sont élues maires ? dans L'Islet, il y a seulement trois femmes; dans Montmagny, il y en a une seule ? et les conseillères ne sont pas très nombreuses non plus ? dans Montmagny, c'est 33 %... c'est-à-dire, dans L'Islet, c'est 33 %, et, dans Montmagny, 23 %. Aux niveaux provincial et fédéral, il n'y a jamais eu de femme élue députée non plus dans Montmagny-L'Islet. Donc, je crois vraiment qu'il faut que le gouvernement prenne des mesures pour faire en sorte que les femmes aient leur place en politique. On voit que, dans les pays où les femmes ont pu accéder à la politique, c'est parce que les gouvernements ont pris des mesures en conséquence.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci à vous, Mme Laprise, pour ce témoignage. Je vais commencer en cédant la parole à M. Morisset.

M. Morisset (Michel): Alors, bonjour, Mme Laprise, félicitations. Mme Laprise, il y a une question en deux volets. J'aimerais savoir: Est-ce que vous pensez que ce serait une bonne chose qu'on cesse les campagnes de sondages durant les campagnes électorales et d'autre part qu'on compile les votes annulés, qui seraient divulgués à la fin d'un scrutin?

Mme Laprise (Denise): Bon. Qu'on compile les votes annulés, je pense que ça pourrait être une bonne idée, mais je crois que ça se fait déjà. Non, ça ne se fait pas?

M. Morisset (Michel): Ils ne sont pas vraiment divulgués, le nombre de... Non.

Mme Laprise (Denise): Ils ne sont pas divulgués, mais ils sont comptabilisés quand même. Oui, je crois qu'on pourrait les divulguer. Et qu'on cesse les sondages, je dirais, au moins deux semaines avant la fin de la campagne électorale, oui, parce que j'ai le sentiment présentement que ce sont les médias qui décident pour la population. Je dirais même qu'il y a une grande partie de la population qui est grandement influencée par la tendance. Et, en Chaudière-Appalaches particulièrement, peut-être même dans la région de Québec, quand on fait du pointage pendant la campagne électorale, ce qu'on se rend compte, c'est qu'il y a des gens qui vont voter pour gagner. Donc, ils votent en fonction de la tendance, ce qui est déplorable, parce que l'exercice d'une campagne électorale, c'est d'amener la population à réfléchir à son vote, à réfléchir à qui on fait vraiment confiance pour défendre les idées des partis, les programmes de parti, et on ne sent pas présentement que les programmes de parti prennent la place pendant la campagne.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. Morisset. M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Laprise, merci beaucoup pour votre contribution au débat. J'ai accroché au début de votre présentation. Je sais bien que nos échanges, là... la formule ne permet pas un échange à long terme, là, mais néanmoins vous avez dit: Moi, je préfère les valeurs plutôt que la stratégie politique. Mais ne croyez-vous pas que, quelle que soit la mécanique, un nouveau mode de scrutin mixte compensatoire avec compensation nationale introduit aussi de la stratégie politique? Qu'on pense au fait qu'on a des gouvernements de coalition nécessaires si on ne veut pas assumer un gouvernement minoritaire. Est-ce que ce n'est pas de la stratégie politique justement ? à un moment donné, vous parliez des plateformes électorales ? bien, qu'elles n'existent plus après coup et qu'on dise: Toi, veux-tu devenir ministre des Finances, toi, veux-tu... et qu'on écarte en quelque part le citoyen de sa détermination de la gouvernance? Ici, il y a de l'alternance, c'est un avantage.

L'autre avantage de ce que vous proposez, c'est le pluralisme. Mais dire qu'il n'y a pas de stratégie politique là... Il me semble qu'il y en a partout, dans tous les systèmes, et que la population va devoir assumer ou trancher ce qu'elle préfère, pluralisme ou alternance. Parce qu'une coalition, après coup, après une élection, alors que tu as 33 jours pour défendre ta plateforme, et là, tout à coup, ça n'existe pas, tu tasses les citoyens, et c'est des apparatchiks de parti qui négocient le reste, vous ne trouvez pas qu'il y a de la stratégie là aussi?

Mme Laprise (Denise): C'est sûr qu'il y a une forme de stratégie. Par contre, la stratégie m'apparaît plus démocratique à partir du moment où on permet à des tiers partis de prendre leur place, à partir du moment aussi où on fait des coalitions. Moi, je suis souverainiste et je pense que la souveraineté du Québec, on va la réaliser à partir du moment où il va vraiment y avoir une coalition entre les partis. Il faut établir dans quelle société on veut vivre et...

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Masson. Je sais que vous souhaiteriez intervenir davantage, mais je dois faire circuler le droit de parole. Je vais du côté de Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Très rapidement, deux petites questions. Mme Laprise, j'ai été très touchée par votre analyse à partir des valeurs. Vous avez dit qu'il faudrait réformer le mode de scrutin pour donner le goût aux gens de s'impliquer davantage en politique. Les études qui ont été faites dans les pays où on a implanté la proportionnelle n'indiquent pas qu'il y ait une relation de cause à effet entre l'introduction de la proportionnelle et la hausse du taux de participation des citoyens à l'exercice du droit de vote. Alors ça, c'est ma question première: Est-ce que vous pensez qu'au Québec on pourrait faire exception? Et la...

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée, je propose qu'elle réponde à cette première question, parce que j'ai d'autres intervenants après coup.

Mme Houda-Pepin: Allez-y. Très bien.

Le Président (M. Ouimet): Mme Laprise.

Mme Laprise (Denise): Je dirais que oui. Pouvez-vous répéter la fin de votre question?

Mme Houda-Pepin: Bon. Il n'y a pas de lien... ce n'est pas parce qu'on introduit la proportionnelle que nécessairement le taux de participation au droit de vote va augmenter. Alors, quand on dit qu'on veut donner le goût aux gens de faire de la politique, on a un problème.

Mme Laprise (Denise): Oui. Par contre, à partir du moment où on a la proportionnelle et on a une liste de candidats qui sont choisis par les partis, je dirais que les partis ont le devoir de mettre des candidatures qui vont vraiment refléter le programme du parti en question. Et ces personnes devraient être des leaders dans leur milieu pour faire avancer tous les groupes de citoyens concernés par les questions à débattre, donc tant les jeunes...

Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée. Je vais aller maintenant du côté de Mme Loucheur. Il reste une minute et quelques secondes.

Mme Loucheur (Yohanna): Bonjour. Pour terminer de faire le tour des questions qui sont soulevées dans l'avant-projet de loi ? de l'autre côté, bonjour ? je voulais savoir si vous êtes en faveur de la double candidature donc au niveau des circonscriptions et sur la liste présentée par les partis. J'imagine que vous êtes familière avec ce que ça implique.

Mme Laprise (Denise): La double candidature, liste et partis, vous dites?

Mme Loucheur (Yohanna): C'est-à-dire que quelqu'un se présente à la fois dans une circonscription et soit aussi sur la liste du parti.

Mme Laprise (Denise): Oui, absolument.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, Mme la députée de La Pinière, il reste une demi-minute.

Mme Houda-Pepin: Une demi-minute? Très rapidement, je voulais... Vous plaidez pour les candidats de liste nationaux, hein, sur une liste nationale, et on a entendu les gens, dans les régions, qui tiennent beaucoup à avoir un candidat dans le district régional. Pour vous, cela voudrait dire, si on vous suit, qu'un élu sur une liste, qu'il soit issu des Îles-de-la-Madeleine, représenterait Chaudière-Appalaches, il ne connaîtrait pas sa réalité. Qu'est-ce que ça vous dit, ça?

Mme Laprise (Denise): Ça ne veut pas dire que ce serait le cas, c'est ce que vous pensez que ça pourrait être...

Mme Houda-Pepin: C'est une probabilité parce que...

Mme Laprise (Denise): ...c'est une probabilité. Mais, si cette personne des Îles-de-la-Madeleine reflète...

Mme Houda-Pepin: Ce n'est pas la réalité de Chaudière-Appalaches, mais parce qu'elle est sur une liste nationale et que le tiers parti gagne, donc c'est cette personne qui va gagner.

Le Président (M. Ouimet): Écoutez, ce serait une question pour réflexion éventuelle, parce que je dois mettre un terme à l'échange, malheureusement. Je vous laisse réfléchir, mais je vous remercie de votre contribution à nos travaux. Merci, Mme Laprise.

J'invite donc maintenant M. Michel Fortier à bien vouloir s'approcher. Et je signale aux membres de la commission qu'après avoir entendu le témoignage de M. Fortier nous allons suspendre les travaux pour environ 10 à 15 minutes.

Alors, bienvenue à vous, M. Fortier. À vous la parole.

M. Michel Fortier

M. Fortier (Michel): Merci bien. Bonjour, tout le monde. Ça me fait plaisir d'être avec vous autres pour vous présenter le document que j'ai préparé. D'entrée de jeu, je voudrais vous dire que j'ai travaillé beaucoup. J'ai analysé, j'ai écouté, j'ai parlé à beaucoup de monde, j'ai écouté le poste 11 qui présente les témoignages, qui a présenté un certain nombre de témoignages de d'autres personnes avant, et j'ai lu évidemment le document attentivement.

Je voudrais d'abord vous demander si vous avez reçu mon nouveau document. C'est parce que celui que j'ai envoyé originalement, il y a quatre, cinq jours, je l'avais fait saisir par une autre personne de telle sorte que je n'avais pas eu le temps de le relire, et je l'ai fait corriger, là.

Le Président (M. Ouimet): Allez-y directement avec votre propos, puis on verra par la suite, là, parce que tout ce que vous dites est retranscrit de toute façon. Puis, s'il y a un nouveau document, on va l'accepter volontiers.

n(15 h 50)n

M. Fortier (Michel): O.K. Alors, d'entrée de jeu, moi, je crois qu'il pourrait être intéressant éventuellement que le mode de scrutin soit modifié. J'ai analysé, comme je vous disais tantôt, ce document-là qui présente la proportionnelle... c'est-à-dire un système à scrutin direct, c'est-à-dire à vote direct, là, comme on le connaît présentement, avec une proportionnelle, une certaine forme de proportionnelle. Je trouvais que... Dans ce document-là, dans cette analyse-là ou dans la présentation qui est faite, le fait d'avoir 75 députés élus, plus deux qui couvrent l'Ungava et les Îles-de-la-Madeleine, je trouve que ce n'est pas suffisant. Ça fait des territoires calqués sur le modèle fédéral, la carte électorale fédérale. Je trouve que ça fait des comtés qui sont beaucoup trop grands, de telle sorte que le député, là, et vice versa, la population... il ne se sent pas proche, dans le cas du député, de sa population; dans le cas de la population, du député. Ça fait que je ne crois pas, moi, que cette forme, ce qui est proposé là-dedans va faire que le pourcentage de votes, d'élection en élection, va s'améliorer. Bien au contraire, je pense que ça aurait tendance même à le faire diminuer, le fait que les gens ne connaissent pas leur député puis ils ne savent pas ce qu'il fait là, dans le fond.

Moi, je propose une proportionnelle aussi, c'est-à-dire un mode de scrutin direct, là, c'est-à-dire qu'on vote pour un député sur un territoire donné. Je proposerais 100 députés, moi, élus. Donc, les comtés seraient un peu plus grands que les comtés actuels, mais ils seraient plus petits que les territoires fédéraux, là, les comtés fédéraux. Donc, 100 députés élus et 25 députés à la proportionnelle modifiée, pas une proportionnelle directe. Et, comme je disais tantôt, les délimitations de comtés calquées sur la carte électorale fédérale étant trop grandes, bien les gens se sentiraient de moins en moins concernés. Je propose, dans ces 100 comtés là, étant donné qu'il y a à peu près 5 500 000 voteurs au Québec ou 5,6 millions, que la moyenne soit de 55 000 électeurs ? autrement dit, le nombre de voteurs divisé par 100; s'il y a 5,6 millions, ça ferait 56 000 ? avec une digression, là, en plus ou en moins, de 15 000 électeurs, c'est-à-dire de 40 000 jusqu'à 70 000.

Vous allez me dire: Ça crée une distorsion pour ce qui est des comtés de ville plus populeux, puis je pense à l'île de Montréal, où il y a beaucoup plus de monde, évidemment. Par contre, cette distorsion-là, disons, qui nous fait dire à prime abord qu'un vote en ville n'est pas l'équivalent du vote en campagne, est largement compensée par la disproportion, je dirais, là, causée par des territoires beaucoup plus grands, exemple, pour les régions.

Moi, je viens du comté de Lotbinière. Si je prends la carte, ce qu'on avait comme carte fédérale, là, on part de l'autre bout, Saint-Ferdinand d'Halifax, là, Saint-Pierre-les-Becquets, puis on s'en vient jusqu'à Saint-Jean-Chrysostome. C'est impossible physiquement, pour un député, de représenter tout ce monde-là. Puis, en plus de ça, dans ce comté-là fédéral, ce territoire-là, il y a une disparité, il y a beaucoup de disparités, je dirais, sociales, économiques, puis d'intérêts et de toutes sortes. Ça fait que je suis absolument contre ça.

C'est pour ça que j'arrive à proposer 100 comtés, 100 comtés des députés qui seraient élus. J'aime mieux personnellement... Si je me présentais, j'aimerais mieux être un député élu qu'un député choisi dans une liste. Je trouve que c'est plus représentatif puis je trouve que ça a une plus grande valeur à mon avis qu'un député qui est tiré d'une liste, là, qui ne sait pas trop pourquoi dans le fond qu'il est là, ou je ne sais pas trop. En tout cas, s'il le sait, c'est mal compris des gens.

Pour ce qui est des 25 députés qui seraient choisis à la proportionnelle à partir d'une liste qui serait fournie par les partis, j'ai développé une formule ? c'est ma déformation professionnelle qui m'a fait travailler sur cette formule-là ? qui à mon avis est bien simple mais qui tient compte... beaucoup plus simple que ce qui est présenté dans le document et qui tient compte à la fois du pourcentage de votes obtenus par un parti et du pourcentage de comtés obtenus par un parti donné. Ça fait que, si vous regardez cette formule-là qui est SDL ? là, j'ai mis des symboles évidemment ? SDL est égal à 25 fois VO plus VO moins SO, au lieu de VG, si vous avez l'ancienne version. C'est que... Je vais tout de suite aller à l'exemple de la dernière page. Le SDL, qui est le nombre de sièges de liste ? sièges de liste, SDL ? c'est 25, le nombre total de députés de liste, multiplié, exemple... 45 % du vote, 0,45, c'est la fraction qui représente le pourcentage du vote, donc ça donnerait 25 multiplié par 0,45, ce qui donne 11,25. Évidemment, il n'y a pas de quart de député, donc on laisse tomber en bas de 1/2, et en haut de 1/2 on l'additionne, de façon générale. Plus une parenthèse qui, à un moment donné, va devenir négative, parce que, si la personne qui a... si le parti qui a eu 45 % du vote a obtenu 60 % des sièges ? ce qui est plausible, au Québec, hein, 60 %, 62 % des sièges ? à ce moment-là, c'est plus la fraction du vote obtenu, qui est 0,45, moins 0,60, qui est la fraction du nombre de sièges obtenus à l'élection, ce qui donne la deuxième parenthèse, moins 3,75. Plus moins, pour ceux qui ont fait de l'algèbre, ça donne moins. Donc, le parti qui aurait obtenu 45 % des votes et 60 % des sièges, on lui additionnerait huit comtés ou huit députés de liste.

Le parti B, qui aurait obtenu, exemple, 38 % des votes et 35 % des sièges, ce qui est encore plausible selon les calculs ? puis ça peut varier, mais ça, ce n'est pas problématique, on rentre dans la formule, et il n'y a pas de problème ? à ce moment-là, ce parti B là, hein, obtiendrait 10 sièges de liste en plus de ses sièges d'élus. Le parti C, exemple, qui a eu 12 % ? je prenais un exemple, ça pourrait être 15 % ? qui a obtenu 12 % du vote ? c'est-à-dire qui est exprimé par la fraction 0,12, 12 %, 0,12 ? et 4 % des sièges, ce qui est plausible aussi, on y ajouterait cinq comtés de liste à ces comtés qu'il aurait obtenus au vote. Et le parti D, qui aurait obtenu 5 % du vote et aucun siège, ce qui est bel et bien plausible, il se ramasserait avec deux députés de liste, de telle sorte que, moi, je considère que tous les partis qui ont obtenu 1 % du vote et plus devraient être représentés.

Et je reviens à mes députés de liste. C'est une liste nationale, disons, pour chaque parti, une liste nationale, puis évidemment pour un territoire donné, pour une région donnée, bien cette liste-là devrait être représentative de toutes les régions données du Québec pour qu'on puisse aller chercher un député de liste et le greffer à la région qu'il va représenter, pour qu'il soit bien impliqué, bien implanté dans son milieu. Moi, je me dis: Pourquoi 25? Ça pourrait être 20, ça pourrait être 23, ça pourrait être... bon, ça pourrait être pas plus que 25 à mon avis par rapport aux 50. C'est que je trouve, moi, personnellement, que ça n'a pas d'allure... Oui, monsieur?

Le Président (M. Ouimet): Il vous reste moins d'une minute pour conclure.

M. Fortier (Michel): O.K. Je vais aller très vite. Je trouve que ça n'a pas d'allure personnellement qu'il y ait un si gros pourcentage de députés choisis par rapport aux députés élus. Et je reviens encore sur le territoire qui est beaucoup trop grand avec 75 comtés. Et, en terminant, je dirais que je suis d'accord avec ce que j'ai présenté évidemment, mais ça devrait être entériné...

Le Président (M. Ouimet): Je l'espère bien, hein?

M. Fortier (Michel): Je savais que ça vous ferait rire, mais évidemment, même si je suis d'accord avec ce que j'ai écrit, il faudrait que la population soit consultée, en bout de course, pour déterminer le mode de scrutin qui serait le plus approprié pour elle.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, votre point de vue, il est extrêmement clair, je vous en remercie infiniment. Je vais ouvrir la période d'échange avec Mme Loucheur.

Mme Loucheur (Yohanna): Oui. Bonjour. Je voudrais juste clarifier un point sur la méthode de répartition des 25 sièges que vous proposez, parce que, dans votre mémoire, vous parlez d'une répartition régionale à partir d'une liste nationale, et c'est un point extrêmement important parce que le mode de répartition affecte les chances des petits partis finalement d'avoir un siège à l'Assemblée ou pas. Et donc vous nous dites: En passant avec 25 sièges, le seuil effectif pour entrer à l'Assemblée, c'est 4 %. Même si vous dites: Un parti avec 1 % devrait avoir une chance, en fait il n'y en aura pas, c'est que ça devient 4 % avec 25 sièges.

M. Fortier (Michel): C'est moins pire que le 15 %. Vous êtes d'accord avec ça? Et j'ai pris mon exemple à 5 %.

Mme Loucheur (Yohanna): Sauf que... Mais ce que je voudrais comprendre par contre, c'est: Comment on attribue... Puisqu'on prend les votes au niveau national, comment après ça on va attribuer au niveau régional les sièges? Comment on va décider que telle région, ça va être le parti X qui va l'avoir et que telle autre région, ça va être le parti Z, puisqu'on aura pris les votes au niveau national?

n(16 heures)n

M. Fortier (Michel): Les députés, mettons... C'est-à-dire que c'est les partis qui choisissent les députés de liste, d'accord? Et ces députés de liste là, ils sont représentatifs de toutes les régions du Québec, comme je l'ai dit tout à l'heure. Ça fait que... Exemple, un petit parti qui aurait eu deux députés puis qui choisit, mettons, Jos Bleau, qui vient de l'Abitibi, bien, dans sa liste, il faudrait qu'il l'envoie en Abitibi. Un autre qui viendrait de la région de Montréal, le parti décide tout le temps, le parti décide, supposons, qu'il choisisse M. Y et que ce M. Y là vient de la région de Montréal, on le greffe à la région de Montréal.

Mme Loucheur (Yohanna): Donc, une région pourrait se retrouver avec deux députés de liste de deux partis différents, et d'autres régions n'en auraient aucun.

M. Fortier (Michel): Oui. Oui. Oui, exact, exact.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, Mme Loucheur. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Dubé, vous insistez beaucoup...

M. Fortier (Michel): Mon nom est Fortier.

Mme Houda-Pepin: ... ? pardon, excusez-moi, M. Fortier; vous insistez beaucoup ? sur le sentiment d'appartenance du député et du lien avec les électeurs. Comment voyez-vous le rôle du député de liste en le collant à la région? Parce que vous insistez aussi sur l'appartenance à la région. Alors, un député qui serait choisi sur une liste nationale, pour représenter une région, déjà, avec les difficultés qu'on peut envisager, quel serait son rôle par rapport au député de circonscription?

M. Fortier (Michel): Votre question est très bonne, madame, et je... Avec...

Mme Houda-Pepin: Je le pense aussi, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fortier (Michel): Puisque vous l'avez posée.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fortier (Michel): Ce que vous dites là, c'est sûr, mais ce qui est proposé là-dedans, on a le même problème, on a le même problème, c'est sûr. Moi, personnellement, je considère, comme j'ai dit tout à l'heure, que le député qui est élu, à mon avis il est beaucoup plus représentatif ou il a beaucoup plus de valeur, à mon avis, là, que le député qui sort d'une liste, là, O.K.? Ça, à prime abord, moi, il n'y a pas personne qui va me faire démordre de ça.

Il y a un danger effectivement que le député de liste, que ce député-là ait plus de temps, à l'intérieur d'une région donnée, pour faire du patronage ou rencontrer un paquet de monde, puis qu'il essaie de débarquer l'autre. Parce que ce qui semble, c'est que, dans les pays où il y a des députés de liste comme ça, le député de liste, là, il se considère quasiment comme un pas bon, excusez l'expression, il veut avoir la tête de l'autre. Il fait tout, dans une région donnée, pour débarquer l'autre.

C'est sûr et certain, je répète que votre question est bonne, puis je n'ai pas de réponse, là, je n'ai pas de réponse, là, bien, bien absolue, là, là-dessus. Mais ça va être la difficulté; que ce soit avec ma proposition ou avec celle-là qui est là-dedans, on a la même difficulté.

Le Président (M. Ouimet): J'espère que la question de la députée de La Pinière ne vous amènera pas maintenant à être en désaccord avec votre proposition.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fortier (Michel): Avec?

Le Président (M. Ouimet): Avec votre proposition.

M. Fortier (Michel): Absolument pas, absolument pas.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Écoutez, merci infiniment. On voit que vous avez travaillé extrêmement fort, vous avez partagé le fruit de votre analyse, de votre réflexion avec les membres de la commission, nous vous en remercions très sincèrement. Merci.

Tel que convenu, donc, les membres de la commission, nous allons prendre une pause santé d'environ une dizaine de minutes. Alors, je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 16 h 3)

 

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Ouimet): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux. Et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir reprendre leur place pour que nous puissions poursuivre nos travaux. Je demande également aux membres de la commission de bien vouloir reprendre leur place aussi.

Je demande maintenant à M. Antoine Dubé à bien vouloir prendre place à la table des témoins. Alors, M. Dubé, bienvenue à ces travaux de la Commission spéciale sur la Loi électorale de l'Assemblée nationale du Québec. Vous qui avez été député, depuis un certain nombre d'années, vous avez été un témoin très important...

M. Dubé (Antoine): Au fédéral.

Le Président (M. Ouimet): ...du processus ? oui, je sais, au fédéral; très important du processus ? démocratique. Alors, nous sommes honorés de votre présence. Bienvenue à vous, et je vous cède la parole pour que vous puissiez nous exposer votre point de vue.

M. Antoine Dubé

M. Dubé (Antoine): Merci beaucoup. Alors, bonjour, tout le monde. Je reconnais des gens ici, députés et aussi d'autres personnes, d'autres dans une ancienne vie. Je pense à M. Simard, qui a été président du Mouvement national des Québécois. Aujourd'hui, je vais vous parler entre autres du Mouvement national des Québécois. Alors, bonjour, tout le monde.

J'ai fait deux applications. J'en ai fait une comme président de la Société nationale des Québécois et des Québécoises de Chaudière-Appalaches et aussi à titre individuel. Mais la façon que j'ai reçu l'avis de convocation, je ne sais pas à quel titre. Alors, c'est à mon nom.

Mais la première partie de mon mémoire, la première page, c'est des revendications du Mouvement national des Québécois, que vous allez entendre, à un moment donné, j'imagine, à Montréal. Et l'autre partie, la deuxième page, ça va être une réflexion plus personnelle qui n'engage que moi.

Alors, le titre de mon mémoire, c'est: Les régions... devraient... J'ai oublié de souligner la présence de notre trésorier, Jean-Guy Pépin.

Les régions, selon moi...

Le Président (M. Ouimet): Bienvenue.

M. Dubé (Antoine): ...devraient être ? selon les jeunes de la Société nationale ? mieux représentées à l'Assemblée nationale du Québec. Moi, je voudrais vous rappeler donc les principales revendications du Mouvement national des Québécois dont notre organisme de Chaudière-Appalaches fait partie, comme il y en a une, Société nationale ou une Société Saint-Jean-Baptiste, dans chacune des régions du Québec; or, cinq principes que le MNQ voudrait voir respecter dans la réforme du mode de scrutin.

D'abord, le maintien du lien des élus avec un territoire. C'est l'histoire qui veut ça. Il y a toute une pratique, et les gens et les députés, c'est le maintien du lien des élus avec un territoire, c'était comme la priorité.

Une relative stabilité gouvernementale. Je suis allé en Israël entre autres, pour remarquer que 1 % donnait un député. Mais ils sont sur une liste, puis c'est 100 députés; ils sont toujours en train d'être en gouvernement minoritaire. Alors, je ne pense pas qu'on souhaite ça. Je vous donne ça comme exemple.

L'assurance aussi d'une représentation régionale; c'est là-dessus qu'on va appuyer tout à l'heure. La présence bien sûr de tiers partis viables au Parlement. C'est un peu un des buts, je pense, souhaités, mais je ne suis pas sûr que, dans la mécanique du projet de loi ou de l'avant-projet de loi, qu'on le permet vraiment. Mais la présence de tiers partis, je pense que beaucoup de gens souhaitent ça.

La progression dans l'application des réformes démocratiques. Alors, en ce qui concerne la réforme du régime politique que le MNQ considère, des réformes importantes ne devraient être entreprises qu'en temps opportun et qu'avec l'approbation de l'ensemble des citoyens et des citoyennes.

Alors, je pense que vous avez entendu des objections, tout à l'heure, de certaines personnes, que j'ai entendues aussi. On ne veut pas que ça se fasse n'importe comment, on veut qu'il y ait un large consensus.

Il serait important de considérer la pertinence d'une république québécoise. Je signale ça, parce qu'une république, là, ça pourrait se faire dans l'État... le Québec pourrait être une république au sein de la Confédération. Ce n'est pas un point de vue souverainiste indépendantiste, ça pourrait se faire, il n'y a rien qui interdit ça, mais on dit juste qu'à un moment donné on devrait considérer ça.

Les régions devraient être représentées de manière plus concertée et plus dynamique. L'Assemblée nationale devrait primer sur les autres institutions. Je trouve ça personnellement très important.

L'adoption d'un mode de scrutin qui assure mieux sa représentativité. Quant à la Loi électorale, le MNQ propose l'intégration d'un cours d'éducation à la citoyenneté, au secondaire, et au renforcement du programme d'histoire pour mieux soutenir le droit de vote. Moi, je le constate tout le temps. Je ne dis pas qu'il y a deux sortes de citoyens, mais un citoyen qui possède des cours d'histoire est mieux équipé pour voter, à mon avis.

La présentation obligatoire d'une carte d'identité avec photo pour exercer son droit de vote; l'encadrement du droit d'initiative populaire, de façon à lui permettre de compléter nos institutions et non de les contrer. On voit qu'en Suisse ou à certains États américains ils arrivent avec des référendums qui ne demandent pas beaucoup de signatures, et finalement c'est pour faire bloquer des projets de loi, reconsidérer des choses qui sont... Or, nous... moi, je pense qu'il faut que ce soit bien encadré, il faut que ça aille dans le sens d'un progrès.

La création d'un conseil de citoyens et de citoyennes devant rendre compte de l'état de la démocratie et en proposant des correctifs; une intervention plus poussée de l'État afin de protéger le droit à une information juste et nécessaire au plein exercice de la citoyenneté.

Là, je suis rendu dans la partie plus personnelle, alors j'y vais.

Quant aux particularités de la région de Chaudière-Appalaches, puis en me basant sur la situation actuelle, moi, je dis qu'il est anormal qu'avec les trois partis qui sont en présence actuellement, par exemple dans cette région de Chaudière-Appalaches, là où on est aujourd'hui, qu'il n'y ait pas un seul député du Parti québécois sur le territoire.

Je dirais la même chose s'il n'y avait pas aucun député libéral sur le territoire, puis je dirais la même chose s'il n'y avait aucun député de l'ADQ sur le territoire, étant donné qu'ils ont manifestement eu beaucoup de votes. Je ne m'embarque pas comme dans des calculs, des méthodes de calcul; d'autres personnes se sont chargées... Mais je pense qu'au moins un minimum... moi, je me dis qu'un parti qui a 15 % des voix dans une région devrait être représenté.

n(16 h 30)n

L'Outaouais, qui n'a été, pendant des années, pas représenté par un des partis même qui était au pouvoir ne m'apparaît pas normal; comme Montréal, au fédéral, qui n'a pas de député, pour la grande région de Montréal, dans le Parti conservateur à Ottawa, ce n'est pas normal. Pour moi, la proportionnalité devrait être une mesure de compensation; ça ne devrait pas être une mesure de représentation.

Je m'oppose à ce que, pour arriver à une proportionnalité régionale... ? je sais que le projet de loi, il n'en parle pas, mais on a le droit de le promouvoir, ce que je veux faire aujourd'hui ? soit regroupée avec celle de la Capitale-Nationale, en raison de nos différences et du rattrapage encore à compléter ? M. Picard va être d'accord avec moi; encore à compléter ? par le gouvernement du Québec, au niveau de certains services publics. On est la plus récente région créée, et on a un énorme rattrapage à faire. Les gens, la population de la région n'a pas le sentiment d'avoir tous les argents qu'elle devrait avoir si ça avait été une région créée il y a plus longtemps.

Ensuite, je préconise que la désignation de la carte électorale ou la confection de la carte électorale se rapproche, se rapproche le plus possible des territoires des MRC reconnus actuellement au Québec. Là, je sais que ça a changé parce qu'il y a eu des fusions des villes, puis je n'ai pas fait une recherche tout dernièrement, mais il fut un temps où c'était autour de 100 MRC. Et ça, j'appuie là-dessus, parce que, que ce soit, peu importe, le gouvernement libéral, Parti québécois ou autre, il y a eu des changements de structure, puis la population, à un moment donné, là, c'est qu'en plus la carte électorale change, celle du Québec, celle du fédéral, après ça on se demande, les gens, pourquoi ils ne vont pas voter quand ils se disent: Bien, c'est qui, mon député? Il y en a dans certains cas, ça change. Au fédéral, c'est une manière, ce n'est pas le même territoire, une telle municipalité... On a l'art, au Québec, de changer pour changer parfois, et je trouve que les citoyens ne se retrouvent pas, ils manquent de stabilité. En France, à titre d'exemple, ils ont des territoires qui sont en général assez fixes. Et ce que je dis, à cet égard-là: Ce serait peut-être une proportionnalité au niveau national qui pourrait corriger certaines distorsions qui pourraient arriver quant à l'évolution démographique du Québec.

Je conclus, puis je pense que vous alliez m'inviter à le faire, en disant: Le principe premier que j'ai établi, qu'on a parlé tantôt, c'est qu'on devrait associer l'ensemble de la population à ça, attendre qu'il y ait le plus large consensus possible. Ce n'est pas facile réunir les opinions de trois partis qui sont actuellement à la Chambre, mais... et, en plus des tiers partis, j'imagine, ce n'est pas une chose facile. Puis je ne vous envie pas dans votre responsabilité de vouloir clarifier ça, c'est une chose difficile. Mais il vaut mieux prendre son temps puis prendre plus de temps pour en arriver à une telle chose, à une telle réforme, que de le faire parce qu'il y a une mode qui dit qu'il faut le faire, et puis qu'on improvise, et puis qu'on risque des conséquences graves.

Comme ancien député fédéral, je veux juste souligner quelque chose que je n'ai pas écrit, mais que j'ai entendu, je suis entièrement d'accord: c'est que j'étais député de Lévis, moi, pendant 10 ans, ce qui regroupe à peu près l'ensemble de la ville, ici. Mais, à un moment donné, avec la carte électorale, ils ont divisé la ville de Lévis en deux, une partie avec Bellechasse puis une autre partie avec Lotbinière, ce qui fait que les deux députés en question ou les deux... peu importe qui qui est élu doit composer avec deux réalités différentes. La formule de 75 comtés me semble insuffisante, c'est pour ça que les territoires des MRC, autour de 100, je le dis hors-texte, là, m'apparaît importante. Le MNQ proposait jusqu'à 150, ce n'est pas obligé d'aller là dans mon sens avec la proportionnelle. La base pourrait être le nombre de députés actuel.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci à vous, M. Dubé, pour ce témoignage. Je me permets une courte question, je le fais très rarement, mais je profite de votre occasion.

Ayant été député de Lévis pendant une dizaine d'années, l'avant-projet de loi propose de calquer les territoires des députés de circonscription basés sur les territoires des circonscriptions fédérales. Vous venez de l'évoquer hors-texte, je sais qu'il y a des nuances entre bien sûr les champs de compétence au fédéral par rapport au provincial, mais est-ce que ce serait une bonne chose que de calquer les futurs comtés provinciaux... provincial, c'est-à-dire, sur celui du fédéral?

M. Dubé (Antoine): En raison de mes orientations politiques antérieures, j'allais dire... c'est ça, c'est que c'est rarement bon, à mon point de vue, que de copier sur le fédéral; ça ne vous surprendrait pas. Mais, plus sérieusement que ça, ma considération est plus de l'ordre... suite à... ça date de 1977, 1978, je crois, les MRC, et tout ça, ce sont les régions... ce sont les élus de l'époque, tous partis confondus, qui se sont... en fait il y a un exercice, puis ils se sont reconnus un territoire commun. Pourquoi on ne respecterait pas ça? Il me semble que c'est une base qui a été faite, ça peut être révisé à l'occasion, je suis d'accord, mais ça tenait compte de toutes sortes de considérations. L'Amiante, là, n'a rien à voir avec le comté de Montmagny-L'Islet, et puis vice versa. Alors, ces MRC là, il y en avait 11; là, avec la ville de Lévis, c'est ramené à 10 parce qu'on a mis les deux MRC à l'intérieur de la ville de Lévis, mais ça correspond actuellement aux comtés ? à peu près, là; aux comtés ? qui sont sur la carte électorale du Québec actuelle.

Le Président (M. Ouimet): Bien, je comprends. Merci infiniment. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui, M. le Président. Vous m'avez aimablement soufflé ma question et vous avez bien fait, c'est excellent, je vais simplement peut-être ramener à votre conclusion. Vous parliez d'une centaine donc de circonscriptions assez près des MRC qui sont des entités d'appartenance, des milieux d'appartenance, qui, au niveau municipal, ont une signification.

Je pense qu'on tient là un point important: simplifier les choses. On sait qu'au Québec, au niveau de la santé, il y a des aires de santé, des régions qui n'ont pas de rapport avec les autres. Au niveau scolaire, hein, les commissions scolaires ont une réalité, bon, qui se rapproche davantage maintenant des MRC mais qui s'en éloigne très souvent. On a le niveau fédéral qui a les dimensions qu'on connaît. Il y a les comtés provinciaux. Je pense que vous n'avez pas tort de vous interroger sur la nécessité peut-être de nous retrouver sur des mêmes territoires de façon à rendre les choses plus rapprochées des citoyens. Mais votre système se rapproche d'ailleurs de la dernière proposition du citoyen qui est venu, tout à l'heure, nous parler d'une centaine...

Une voix: ...

M. Simard: ... ? M. Fortier; qui parlait d'une centaine ? de circonscriptions et de 25 sièges de compensation. Comment vous le verriez, ce fonctionnement de 25 sièges de compensation? Ça fonctionnerait comment?

M. Dubé (Antoine): Là-dessus, j'ai écouté, j'ai été attentif aux propos. J'ai lu... Ce n'est pas parce qu'on a été député 10 ans qu'on possède la science, là, ni la sagesse; d'ailleurs, on dirait qu'on ne l'attrape jamais même quand on vieillit.

Non, ça, tout ça, c'est une mécanique, mais j'aime bien l'idée que j'ai entendue, par exemple, que dans le fond ça devient la gestion des partis. Si un parti veut avoir, par exemple, une représentation féminine, veut s'assurer de, puis en même temps les partis connaissent leurs réalités là où ils sont plus forts ou pas, bien, moi, je pense ? j'ai passé la ligne, puis je m'en excuse auprès de ceux de la Société nationale qui sont des femmes; je pense ? qu'il faut s'assurer de ça. La représentation féminine, je pense qu'il faut absolument chercher à obtenir ça.

D'autre groupes de citoyens, puis je ne veux pas réduire les femmes à un groupe de citoyens, mais les partis, sur des balises, pourraient... À mon avis, ça va être aux partis à gérer ça. Par exemple, si le parti... je vais prendre... le Parti libéral était très fort dans l'Outaouais. Bien, au niveau du choix de ses candidats, il peut s'attendre à un certain résultat. Dans d'autres régions, s'il met, dans une liste régionale, que des femmes puis qu'il est très faible ? je prends le Parti libéral puis ça pourrait être n'importe quoi ? dans le fond ce serait transparent, il voudrait... ce ne serait pas sérieux. Alors, je pense qu'il faut qu'il mette... pour les personnes qui seraient dans des listes, volontairement le parti déciderait de corriger sa représentation. Je trouve que la première responsabilité reviendrait au parti.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. Dubé. Il reste une minute pour Mme la députée de Bellechasse.

Mme Vien: Oui, bien, une petite question rapide, M. Dubé. Bon après-midi. En ce qui concerne le régime politique, vous dites que des réformes importantes ne peuvent être entreprises qu'en temps opportun. Vous avez dit, à la fin de votre exposé, que, si on s'intéresse... vous avez laissé entendre, peut-être ai-je mal compris, qu'il s'agit peut-être d'une mode ou encore d'une improvisation. Moi, je pense que nous ne sommes pas dans l'une ou l'autre de ces logiques-là, à ce moment-ci. Je pense que ça fait longtemps que nous parlons de réformes importantes que nous devons apporter à ce que nous... Oui?

M. Dubé (Antoine): Je vous le concède, ce n'est pas ce que je voulais dire.

Mme Vien: Bon, alors, bravo. Quand vous dites: En temps opportun, c'est quand?

n(16 h 40)n

M. Dubé (Antoine): C'est lorsqu'on sent qu'une grande partie de la population souhaite ça, le veulent vraiment. Je pense que, si vous me demandez l'évaluation si, à ce moment-ci, c'est un temps opportun, je dirais que c'est le début d'un temps opportun, dans le sens que je sens bien qu'il y a des gens qui souhaitent une meilleure proportionnalité, mais je ne sens pas, moi, dans mon milieu, qu'il y a un consensus large, ni chez les partis politiques ni dans la population, sur la formule idéale. Le temps idéal ? là, excusez-moi, ça va être une apparence de politique ? ce serait si le Québec devenait souverain, c'est certain que ce serait un temps opportun parce que là on changerait pour de vrai. Mais, en attendant, il y a lieu quand même de considérer ça, et je pense qu'un avant-projet de loi vous n'êtes pas obligés d'adopter un projet de loi demain matin. Vous êtes au début d'un processus. On va vous regarder aller. Vous faites un travail sérieux, je ne doute pas de ça, puis je suis même impressionné par le nombre de personnes qui est là. Il y a eu M. Béland qui a fait une consultation. Mais le temps opportun, il n'est pas tout à fait là, mais il commence à poindre, O.K.?

Le Président (M. Ouimet): Bien. Pour la réforme pour la souveraineté...

M. Dubé (Antoine): Mais je voudrais juste... oublié un petit mot sur le conseil des citoyens. Le conseil des citoyens, ce n'est pas nécessairement un sénat, mais je pense qu'il faut aussi regarder pour une place aux citoyens. Je vois que vous le faites un peu aujourd'hui.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, M. Dubé, on a débordé de l'enveloppe de temps qui était impartie, mais...

M. Dubé (Antoine): ...dans mes habitudes, je m'en excuse.

Le Président (M. Ouimet): Non, non, non, pas de problème, c'était fort intéressant. Je vous remercie infiniment d'avoir participé à nos travaux.

J'invite maintenant notre ex-collègue à l'Assemblée nationale qui a été députée de Lévis bien sûr et ministre de la Justice, ministre de la Famille et ministre de la Condition féminine, Mme Linda Goupil, à prendre place.

Mme Goupil (Linda): Bonjour.

Le Président (M. Ouimet): Bonjour à vous.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil (Linda): D'abord, permettez-moi de saluer bien sûr tous vos collègues de l'Assemblée nationale qui sont présents aujourd'hui. C'est un grand privilège pour moi de me retrouver devant vous, et c'est en toute humilité que je le fais, comme citoyenne de Lévis, comme mère de famille, comme avocate médiatrice mais aussi qui enseigne actuellement au Barreau. Et je suis assez étonnée qu'il n'y ait pas davantage de jeunes juristes qui ne participent pas bien sûr à cette consultation-là.

Permettez-moi également, M. le Président, de vous féliciter également pour avoir pris l'initiative de joindre à cette commission parlementaire des femmes et des hommes de la société civile. Je ne sais comment vous les avez choisis, mais je trouve que c'est une initiative extraordinaire, parce que, d'abord, dans un premier temps, ça permet à ces gens de voir davantage en quoi consiste le rôle de l'élu qui malheureusement n'est pas suffisamment connu, et c'est avec beaucoup de tristesse que, lorsque j'entends parler de nos collègues, de quelque parti politique qu'ils se retrouvent, que malheureusement nous ayons des propos aussi méprisants, aussi méchants à l'égard des femmes et des hommes qui humblement tentent d'améliorer les choses pour le bien commun, tous partis confondus. Bien sûr, il y a quelques exceptions. Il y a des gens qui posent des gestes qui sont malheureusement non acceptables, mais, quand on regarde l'ensemble du travail qui est effectué par tous les parlementaires, tous partis confondus, nous sommes privilégiés de vivre dans une société où nous avons des gens qui donnent de leur temps, le meilleur d'elles-mêmes et d'eux-mêmes, pour faire avancer le bien commun. Et d'avoir associé des membres de la société civile, d'abord, bien sûr, ils sont à même de constater le travail qui est fait, mais aussi de voir que ce n'est pas facile de prendre des décisions, parce que nous vivons dans une société qui, bien souvent, on a un pourcentage très élevé qui est pour quelque chose puis on a un pourcentage presque aussi élevé qui n'est pas pour ce que nous proposons. Alors, la démarche d'aujourd'hui, je trouve qu'elle est non seulement très démocratique, mais elle est fort agréable.

Ceci étant dit, j'aimerais également féliciter aussi le fait que l'on se préoccupe bien sûr d'un objectif extrêmement important, celui de s'assurer d'une représentation équitable entre les femmes et les hommes. Nous représentons 54 % et plus de la population comme femmes. Alors, bien sûr, le jour où, à notre Assemblée nationale, on y retrouvera autant d'hommes et de femmes sera bien sûr un plaisir extraordinaire, mais je pense que notre société aussi ne s'en retrouvera que mieux servie encore. Sans enlever aux messieurs tout le travail qu'ils peuvent ou qu'elles peuvent faire, il serait intéressant.

Également, de susciter une représentation aussi des communautés ethnoculturelles, c'est extrêmement important. Le Québec se retrouve avec des gens qui ont une façon de dire les choses, de vivre les choses, avec un bagage culturel qui nous permet aussi, comme société, de devenir meilleurs. Alors, également, c'est un objectif à atteindre qui est fort louable.

Également, je trouve aussi que les éléments qui ont été particulièrement soulevés, des actions structurantes en vue de rechercher plus systématiquement des candidates, de les appuyer aussi, tout au long de l'engagement politique, je trouve que ce sont des mesures qui sont extrêmement importantes, et nous devons le faire.

Je pense aussi que les femmes ont besoin plus que jamais d'être sollicitées pour faire de la politique, parce que bien souvent il y a comme un doute qui s'installe que parfois nous ne sommes pas suffisamment compétentes pour le faire, alors que ce n'est pas le cas. Contrairement peut-être, je dirais, quand on regarde toutes les analyses qui ont été faites, on sait très bien que les femmes ont besoin d'être sollicitées davantage et aussi elles ont besoin d'être soutenues parce que malheureusement c'est encore un monde qui n'est pas suffisamment connu par, je dirais, les femmes en général.

Également, ce qui est important, c'est de soutenir que toutes mesures qui pourront avoir comme effet justement de soutenir, que ce soit au niveau de la formation, de l'accueil, de l'accompagnement, du mentorat, toutes les démarches qui sont faites et soutenues pour soutenir bien sûr la présence de candidates féminines, c'est extraordinaire. Et à cet égard chacun et chacune ont un rôle à jouer, les partis politiques en ont, l'État en a, mais également je dirais qu'au niveau de notre système d'éducation bien sûr on aurait aussi encore un coup de barre à donner pour faire mieux connaître cette profession qui est noble et qui a aussi besoin qu'on y soutienne les meilleurs pour pouvoir exercer cette profession.

Un élément important aussi que je trouve, avec lequel je suis en accord, c'est le fait qu'au niveau du financement annuel des partis politiques on puisse soutenir davantage pour permettre la présence également des femmes. Je trouve que ce sont des mesures extrêmement intéressantes. Cependant, encore une fois, toutes mesures qui sont mises de l'avant ne devront jamais avoir comme préambule que les femmes serviraient mieux les hommes que les hommes le font. Je pense que tous les hommes et les femmes qui bien sûr souhaitent être des élus, bien, tout ce qu'ils souhaitent bien sûr, c'est offrir le meilleur d'elle-même et d'eux-mêmes pour améliorer les services des citoyens et des citoyennes.

Je suis également en accord avec les mesures des allocations annuelles qui puissent être accordées aux partis politiques pour mieux soutenir également les candidatures féminines, mais encore une fois il serait important d'avoir des façons de faire qui soient transparentes, pour qu'on soit capables de voir que l'utilisation des sommes qui auront été utilisées pour favoriser les candidatures féminines... qu'on puisse savoir exactement quelle aura été l'utilisation de ces sommes-là. Parce que bien souvent, les citoyens sont en accord qu'il y ait des deniers publics qui soient utilisés pour atteindre des objectifs, mais encore faut-il que nous soyons capables de rendre des comptes, qu'on soit capables de façon simple de voir où vont les sous.

De façon plus spécifique, ce qui aussi serait intéressant, dans la reddition de comptes de l'utilisation des deniers publics, c'est, plus elles seront rendues publiques, bien, à ce moment-là, ça aura des effets d'entraînement aussi pour les autres partis politiques si ça a donné de bons résultats. Et aussi, bien, ça a des effets d'entraînement sur les autres partis politiques.

Quant aux modalités du scrutin proportionnel mixte, évidemment je ne suis pas une experte dans le domaine. En toute humilité, ce que j'ai fait, j'ai fait comme la plupart des citoyens et citoyennes qui sont venus prendre la parole, c'est bien sûr de prendre connaissance du document, qui était très bien fait, pour voir un petit peu ce qui était proposé.

Alors, évidemment, ici, dans notre société, le scrutin majoritaire est pratiqué depuis 1792. Selon les informations que nous avions... serait remplacé par le scrutin mixte: un scrutin majoritaire, plus une partie du scrutin proportionnel qui nous donnerait bien sûr ce scrutin proportionnel mixte.

Quels sont les objectifs que l'on recherche lorsque l'on propose une telle modification? Quand on fait la lecture, autant des documents que des ministres qui ont pris la parole dans ce sens-là, autant ceux du parti politique précédent ainsi que le présent gouvernement, on cherchait d'abord de s'assurer qu'on favorisait bien sûr l'exercice de la démocratie. On voulait s'assurer qu'elle soit la plus représentative possible, et on veut s'assurer aussi qu'elle soit aussi la plus représentative possible, sur l'ensemble du territoire et aussi sur, je dirais, les courants que l'on retrouve de plus en plus.

n(16 h 50)n

Alors, évidemment, l'objectif est fort louable, et il y a beaucoup de personnes qui effectivement se sont penchées sur la question: plusieurs spécialistes, plusieurs personnes qui ont une connaissance plus fine de ce que signifie ce mode de scrutin, mais il faut en convenir aussi que la population, dans leur quotidien, ne sait à peu près pas en quoi consistent ces modes de scrutin.

Ce que, je pense, la population recherche, c'est de s'assurer bien sûr que les personnes qu'elles choisissent pour les représenter, qu'elles aient le plus possible accès à ces gens-là, que ces gens-là prennent la parole en leur nom et qu'ils soient en mesure aussi de faire valoir ce qu'ils espèrent voir comme changements au niveau de leur... Il reste une minute? Bon.

Alors, évidemment, pour moi, ça m'inquiète un peu d'abord de voir qu'il pourrait y avoir deux sortes de députés. Ayant eu le privilège d'être députée moi-même pendant une courte période, quatre ans et demi, je peux vous dire que, particulièrement dans notre secteur, ici, que ce soient les gens de Lévis ou de la région de Chaudière-Appalaches, il y a un sentiment, un lien qui s'instaure avec la personne qui les représente. Alors, malgré ce lien, malgré tout le travail qui a pu être effectué, quand la démocratie s'exprime, bien évidemment on choisit une autre personne. Cependant, les gens, lorsqu'ils mettent leur x à un endroit, ils ont cette possibilité de choisir la personne en qui ils veulent mettre leur confiance.

Alors, à partir du moment où on fait deux listes, une liste où on retrouverait des candidats ou candidates qui seraient choisis par le parti, nous ne connaissons pas les éléments avec lesquels ils feraient leurs choix; ça m'inquiète.

L'autre élément aussi qui m'inquiète beaucoup, c'est le fait que, quand on regarde ce qui s'est fait ailleurs, souvent les deux listes, les gens qui déposent leur candidature dans une circonscription et qui sont sur une liste sont souvent les mêmes personnes. Alors, là aussi, comment on choisirait? Ça, pour moi, ça crée deux situations, au niveau de l'élu, et, moi, je suis très mal à l'aise avec cela.

L'autre élément aussi, c'est le fait que je pense que plus globalement il y a des difficultés importantes pour les citoyens, que je résumerais rapidement. D'abord, on...

Le Président (M. Ouimet): Très rapidement parce que vous faites preuve...

Mme Goupil (Linda): C'est ça.

Le Président (M. Ouimet): ...je fais preuve d'une grande largesse pour vous, madame.

Mme Goupil (Linda): Je vous remercie. Il y a une dévalorisation importante, au niveau du politique, il y a la montée de l'analphabétisme civique, pour moi, qui est très préoccupante, et il y a aussi le fait qu'il faudrait sortir le débat aussi du cadre restreint du Québec, parce que, quand on regarde tout ce qui se passe au niveau international, les États ont besoin d'être forts et solides justement pour présenter le bien commun. Donc, toute la stabilité de la gouvernance, elle est importante.

Finalement, je dirais, en terminant: Les solutions qui sont sur la table, je n'ai pas la prétention de dire si elles sont bonnes ou mauvaises; elles ont le mérite d'être analysées. Mais attention, avant de proposer des solutions de changement d'un système qui nous a bien servis, il faut qu'on soit capable de mesurer les impacts et les retombées de cela. Et, dans ce contexte-là, je ne suis pas pour le statu quo, je suis pour que nous puissions être inventifs, créatifs, et trouver des façons de répondre le mieux possible à l'exercice de la démocratie, mais ne pas mettre en péril non plus un système qui nous a bien servis pendant autant d'années, malgré certaines lacunes. Au cours de 225 ans, selon l'histoire, on nous dit que c'est à peu près trois fois où on a eu vraiment des distorsions entre l'exercice du droit de vote des gens et les résultats.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci infiniment pour cette présentation, Mme Goupil. Je vais ouvrir dès maintenant avec Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, chère ancienne collègue, c'est un plaisir de vous revoir. Et vous n'avez rien perdu de votre verve et de votre vigilance.

Je voudrais vous amener directement sur la question de l'équité. L'avant-projet de loi propose des mesures financières incitatives pour amener les partis à avoir plus de femmes en politique.

Comme vous avez déjà été députée et ministre, je voudrais vous demander: Qu'est-ce que ça change, d'avoir des femmes en politique? Ça, c'est la première question. Allez-y rapidement parce que j'en ai une autre.

Mme Goupil (Linda): Bien, alors, rapidement, comme nous représentons plus de 54 % maintenant de la population, bien, le fait d'y retrouver des femmes, c'est le reflet de notre société. Bien sûr, d'être représentatifs... Je vous dirais, d'abord comme femme, on s'identifie bien sûr à des femmes et à des hommes, et je vous dirais aussi le fait qu'il est évident, pour moi, que l'approche dite féminine, pour moi ? et puis je fais attention quand je le dis ? c'est...

Mme Houda-Pepin: Ça fait une différence.

Mme Goupil (Linda): ...ça fait une différence, tout à fait, parce que nous avons une façon d'aborder les choses qui est différente. Nous sommes différents, hommes et femmes, donc manifestement il est important que nous retrouvions des femmes en proportion des hommes.

Le Président (M. Ouimet): Madame... Je...

Mme Houda-Pepin: ...

Le Président (M. Ouimet): Non, écoutez, on a débordé l'enveloppe, là. Il me reste trois intervenants à qui je veux donner la chance de poser des questions: M. le député de Masson, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, M. Morisset. Très rapidement.

M. Thériault: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue et merci beaucoup de votre contribution, Mme Goupil.

Ces mesures incitatives... Parce qu'en tout cas, s'il y a des consensus ou... qui ne seront pas trop difficiles à faire à l'issue de cette commission, c'est, entre autres choses, le principe de l'égalité de la représentativité hommes-femmes, et plusieurs sont venus nous dire que le mode de scrutin pourrait favoriser cela.

Mais, au-delà de la mécanique, seriez-vous favorable à ce que, ces mesures incitatives, on puisse les mettre en vigueur, quelle que soit la mécanique, et le plus tôt possible?

Mme Goupil (Linda): Tout à fait. Je pense qu'il y a plusieurs éléments qui pourraient être mis en application, sans mettre en application tous les éléments d'une proportionnelle mixte comme on le voit. Il y a des mesures incitatives qui peuvent être faites d'abord par les partis politiques. Quand on a la volonté de vouloir vraiment s'assurer qu'il y ait des femmes, alors on sollicite, on en trouve. Et lorsqu'elles se présentent, et lorsque les gens sont en accord avec les éléments qu'elles proposent, bien évidemment on les choisit. Puis, quand elles sont choisies, habituellement, quand on regarde dans nos Parlements, on leur confie aussi des responsabilités importantes.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Mme Goupil, merci de votre contribution. Vous avez parlé tantôt d'incitatifs financiers pour augmenter la représentation des femmes. Beaucoup de personnes nous ont parlé d'avec une obligation de résultat pour que ce soit selon le nombre de femmes élues. Vous, vous avez parlé de candidates. Est-ce que vous faites une différence entre les deux? Parce que qu'est-ce qu'on s'est fait dire souvent: Un parti politique, il y a certains comtés sûrs, donc là ils seraient plus portés à peut-être mettre des hommes là, et ainsi contourner, aller chercher les sous mais tout en n'ayant pas d'obligation de résultat.

Mme Goupil (Linda): D'abord, c'est important, l'obligation de résultat, parce que, vous savez, les hommes et les femmes contribuent par leurs impôts à faire en sorte que l'on puisse, comme société, s'offrir des services mais aussi soutenir nos institutions. Alors, des mesures incitatives, quelles qu'elles soient, il est important qu'on puisse avoir des mécanismes de reddition de comptes et qu'on soit capables de mesurer si les mesures incitatives que nous avons mises de l'avant donnent les résultats et sont utilisées aussi pour justement s'assurer d'une plus grande représentation des femmes.

Quand vous me demandez si je fais une distinction entre les candidates élues et les candidates et les... oui, je fais une différence parce que je pense très sincèrement que, lorsque, par exemple, on sollicite des investitures des candidates et des candidats, bien on le sait que l'investiture est souvent le premier endroit où finalement on va déterminer qui va être la personne que nous allons choisir. Et souvent il y a des éléments, pour des femmes entre autres qui se retrouvent dans des situations financières plus difficiles, qui ne sont pas en mesure d'avoir les congés nécessaires pour pouvoir faire une campagne électorale, n'ont pas les congés nécessaires non plus pour, par exemple, soutenir financièrement la famille, et vous savez qu'il y a une famille sur deux qui est en rupture, et on a 85 % des chefs de famille qui sont des mamans seules, alors cette réalité fait que c'est plus difficile de soutenir bien sûr des femmes en politique.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Je vais permettre une dernière très courte question de la part de M. Morisset.

M. Morisset (Michel): Bonjour, Mme Goupil, et merci d'être parmi nous. Mme Goupil, si j'ai bien compris, pour vraiment que la perception du citoyen soit bonne face aux élus, c'est que, quel que soit le député qui se présente, qu'il soit tout d'abord élu par la population, c'est bien ça?

Mme Goupil (Linda): Tout à fait.

M. Morisset (Michel): Merci.

Mme Goupil (Linda): C'est un principe et un droit fondamental pour moi. Si vous me permettez, quand on regarde ce qui se passe un petit peu à l'extérieur, je prends par exemple le Timor-Oriental, où on a plus de 100 000 personnes qui ont donné leur vie pour exercer justement librement un choix, nous, au Québec, on a cette liberté, et malheureusement on a un très grand nombre de personnes qui n'exercent plus leur droit de vote. Et, moi, je pense que le mécanisme technique, en soi, n'est pas l'élément le plus important pour inciter les gens.

Je vous parlais de la dévalorisation de la politique, il nous faudrait absolument trouver des façons de faire pour que les gens connaissent davantage le rôle de l'élu, et une solution...

Le Président (M. Ouimet): Bien...

Mme Goupil (Linda): ...rapidement: on devrait utiliser Télé-Québec pour permettre aux parlementaires de tous partis politiques confondus de pouvoir prendre la parole, s'adresser à la population pour leur faire part, par exemple, de ce qu'ils font comme travail et qu'ils puissent avoir non pas des clips de deux minutes pour présenter les enjeux de société...

Le Président (M. Ouimet): Bien.

Mme Goupil (Linda): ...mais leur permettre justement de faire valoir leurs points de vue. Alors, il y a...

Le Président (M. Ouimet): Mme Goupil...

Mme Goupil (Linda): Je vous ferai parvenir un petit mémoire écrit pour les petites solutions, pour rehausser ces éléments-là.

Le Président (M. Ouimet): Vous seriez très gentille, on apprécierais grandement.

Mme Goupil (Linda): Oui.

n(17 heures)n

Le Président (M. Ouimet): Au nom de tous les membres de la commission, merci infiniment d'avoir participé aux travaux et d'avoir contribué aux travaux de cette commission.

Mme Goupil (Linda): Merci!

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, au plaisir de se retrouver.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, à ce moment-ci, j'inviterais M. Serge Dépatie à bien vouloir s'avancer et à prendre place.

Bienvenue, M. Dépatie, aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. À vous la parole.

M. Serge Dépatie

M. Dépatie (Serge): Merci. Je vous remercie. Je salue tout le monde dans un premier temps. Alors, ce qu'on voit devant nous, de venir donner notre opinion, c'est fondamental. Mon objectif, c'est ça.

Alors, je suis un enseignant universitaire en sciences de l'administration, «Management Strategy», dans trois universités, puis j'ai une petite firme de consultants. Voilà ce que je suis, grosso modo, un simple citoyen aussi.

Alors, dans un premier temps, je vais essayer d'être bref et de rentrer à l'intérieur du minutage, je comprends très bien vos objectifs. Alors, moi, j'ai de la difficulté au niveau des premiers éléments qui sont dans les documents diffusés. Exemple, on fait référence au cynisme et au désintéressement des gens. Alors, moi, j'ai de la difficulté à faire le lien entre le scrutin et ça. Selon moi, le lien se fait beaucoup plus au niveau des comportements de certains politiciens, de l'éthique, de la cohérence entre les promesses, les engagements, les actions et les résultats; grosso modo, tout ce qui touche l'intégralité réelle dont les journaux sont pleins. Bien sûr qu'il y a de l'abus: il y a de l'abus médiatique, mais il y a quand même un fond, hein, qui est présent, le citoyen se pose des questions.

Moi, je voudrais insister sur la valeur réelle et la valeur symbolique d'un vote versus une utilisation différée dans une espèce de processus, là, utiliser des votes qui pourraient changer possiblement le choix du citoyen. Je pense que le citoyen, il tient à l'intégralité de son vote, il veut que son vote, ça serve exactement ce à... il met un x, mais il veut que ça serve à ça, pas à autre chose parce qu'on a décidé qu'un processus faisait qu'on ferait autre chose avec.

Alors, le mode de scrutin, moi, j'ai l'impression que ce qu'on est en train de faire... Je ne souhaite pas que ce soit, là... Je suis ici pour ça: je ne voudrais pas que ça complique les choses versus les simplifier. Alors, la proportionnelle versus la majorité, le nombre de comtés versus le pourcentage des votes; la représentativité des comtés moins populeux me semble aussi importante. Je pense bien que ce serait peut-être facile que les grandes villes puissent simplement décider de tout, et que les régions ou les autres groupes ne puissent pas avoir droit au chapitre, alors le jeu de la concentration des votes.

Je me pose des questions aussi sur la carte électorale. Je me dis: Peut-être qu'une partition ou une réorganisation différente de la carte électorale permettrait d'avoir des comtés plus équilibrés, puis ça viendrait réduire l'éventualité d'un écart significatif entre le nombre de comtés et le pourcentage du vote. Donc, d'après moi, il y a quelque chose à réconcilier, il y a quelque chose à réconcilier, là. Le système actuel a été bénéfique pour le Québec, et, moi aussi, je pense qu'on doit évoluer, s'améliorer. Donc, je ne dis pas que je ne veux rien changer, mais, moi, je pense qu'on devrait continuer puis on devrait améliorer ce que l'on a. Je ne crois pas que ce soit nécessaire de passer à autre chose.

Moi, je serais plus pour le maintien du scrutin majoritaire avec des améliorations, avec de la créativité. Il nous a relativement bien servis à venir jusqu'à ce jour. De plus, bien, pour moi, je pense que ça vient, tel que je le lis, en tout cas, tel que je l'interprète, je pense que ça vient toucher fondamentalement la démocratie ou les règles de la démocratie, ça remet une partie de cette... de cette démocratie-là, pardon, entre les liens des partis politiques. Peu importe le parti politique pour lequel on est, je ne suis pas intéressé, moi, à donner droit au chapitre aux partis politiques dans le jeu démocratique. Je pense que les règles qui sont là nous permettent de sauvegarder bien des choses.

Ne pas changer pour moins, au plan de la démocratie, au plan des valeurs puis au plan de la symbolique qui entourent actuellement le vote puis la perception du vote du citoyen. Vous avez évoqué avec... ça a été évoqué plusieurs fois, là, l'histoire de la formation des citoyens, je pense qu'il ne faut pas que les choses deviennent plus compliquées.

Alors, si ce changement devait être retenu, il devrait aussi être accepté par tous, à mon avis, lors d'un référendum, car, moi, je pense que ça touche tous les citoyens. Malgré tout le respect que je peux avoir pour l'Assemblée nationale et le gouvernement, à ce moment-ci, en considérant différents aspects, sur le plan politique et sur le plan historique, je ne pense pas que l'Assemblée nationale ait le droit de modifier ça. Je pense qu'elle peut peut-être le proposer, mais je pense que c'est à la population et aux citoyens de dire: On est d'accord ou on n'est pas d'accord. On reste avec ce qu'on avait, ou bien votre nouveau projet nous enthousiasme majoritairement dans un référendum, et puis on l'accepte, on change les choses, on est majoritairement d'accord. Alors, moi, je pense que ça devrait passer par un référendum.

Et puis, moi, je m'inquiète aussi sur... Ça me semble néfaste que de vouloir installer quelque chose, entre les citoyens et le gouvernement, qui permettrait de jouer un peu avec la démocratie. Je vous répète que, moi, je pense que ça viendrait encore démobiliser et puis alléger la signification réelle du vote d'un citoyen. Et, moi, je pense qu'au lieu de favoriser la participation et l'engagement des gens, les gens vont encore reculer en se disant: Bien, c'est tellement compliqué, il y a tellement de possibilités de manoeuvres, on est aussi bien de ne pas voter pour ça, ça ne change rien, ça ne changera rien. Moi, j'ai l'impression qu'il y a beaucoup de gens... c'est ce qu'ils disent.

La perfection étant hors de notre portée, moi, je préfère un gouvernement fort, redevable et congédiable. Je pense ça a déjà été dit et écrit, là, alors, même s'il existe une toute petite possibilité de situation d'exception. Alors, on connaît, on connaît certains slogans. Moi, j'aimerais vous dire que, face à ce qui nous est proposé dans le moment, en tout cas, ce que j'en lis, là: Moi, je ne suis pas prêt!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dépatie (Serge): Alors, je m'oppose à ce projet de changement tel qu'amené. Je suis plus en faveur de modifications, d'améliorations de ce que l'on a. Je vous remercie beaucoup de votre écoute.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Julien, pour nous avoir livré vos réflexions et fait ces recommandations.

M. Dépatie (Serge): M. Julien, c'est le suivant, je pense.

Des voix: M. Dépatie.

Le Président (M. Ouimet): Ah! M. Dépatie, je suis vraiment désolé de...

M. Dépatie (Serge): Ce n'est pas grave, ce n'est pas grave. Je ne me formaliserai pas de ça, moi, là, là.

Le Président (M. Ouimet): Désolé. Alors, vous avez tout à fait raison, M. Dépatie. Je vais ouvrir la période d'échange avec M. le député de Trois-Rivières, par la suite M. le député de Masson et M. Boivin.

M. Gabias: Merci, M. Dépatie. Alors, je comprends que vous, ce n'est pas: Prêt, pas prêt, j'y vais.

M. Dépatie (Serge): Pardon?

M. Gabias: Je comprends que vous, votre idée, ce n'est pas: Prêt, pas prêt, j'y vais.

M. Dépatie (Serge): Non.

M. Gabias: Il faut absolument qu'il y ait quelque chose de présentable, qui rejoigne l'ensemble de la population.

M. Dépatie (Serge): Mais je voudrais, je voudrais être capable de tirer, de quelque projet que ce soit, un réel sentiment qu'on a préservé, amélioré la démocratie, et qu'on est dans le plein respect de l'exercice de notre droit de vote, et que mon vote à moi ne sera pas du tout diminué, manipulé ou traficoté, à quelque niveau que ce soi. Je ne veux pas que ça m'arrive, ça, moi.

M. Gabias: D'accord. Mme Goupil, tout à l'heure, y a fait allusion, quant à l'importance de l'élu, du député. Et qu'est-ce qui devrait nous guider dans ce que la commission devra recommander éventuellement? Est-ce que c'est de préserver ce que j'appellerais le contrôle de la population d'une circonscription de l'élection de son député ou si c'est plutôt le contrôle de la population du Québec quant à l'élection d'une formation politique?

M. Dépatie (Serge): Je comprends le sens de votre question. Ma réponse ne va peut-être pas exactement dans le sens de votre question, mais ce que j'ai envie de vous dire, c'est que les quelques égarements antérieurs que nous avons vécus sont corrigeables par d'autres mécaniques et d'autres moyens.

Ça ne veut pas dire qu'il n'y en aurait pas du tout, d'égarements. Mais je pense que globalement notre mode de scrutin actuel nous a très bien servis, nous permettant l'alternance. Et puis aussi je serais mal à l'aise avec... je ne sais pas, j'invente n'importe quoi, moi, là, là... qu'est-ce que je pourrais bien vous dire?

Le parti de ceux qui pensent qu'on devrait prôner la violence, dans telle ou telle région, et qui obtiennent 14 % des votes, et, moi, il faut que je leur donne... il faudrait que je leur donne 14 % des sièges à l'Assemblée nationale parce qu'il y a je ne sais pas quel jeu, là, puis qu'on dit: Bien, écoutez, ils les ont, les votes. La loi est là, donnez-leur leurs sièges. Eux autres, ils sont en faveur de la violence, c'est de même, et puis c'est leur droit, hein, il faut respecter ça. Moi, je ne suis pas sûr que je serais à l'aise avec ça, je ne suis pas certain, là, je ne suis pas du tout certain.

M. Gabias: Merci, monsieur.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Trois-Rivières. M. le député de Masson.

M. Thériault: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. M. Dépatie, merci beaucoup pour votre contribution. Moi, vous avez attiré mon attention sur la question de l'attitude des élus. J'ai comme l'impression que ce que vous nous dites, c'est: Il y a des choses à améliorer. Je voudrais savoir un peu lesquelles, quoiqu'on peut avoir une idée.

Allant dans le sens de l'attitude des élus, est-ce que vous parlez d'une réforme des travaux parlementaires? Comment améliorer avec créativité, avez-vous dit, pas le mode de scrutin actuel, mais la vie politique actuelle ou les institutions démocratiques actuelles?

n(17 h 10)n

M. Dépatie (Serge): Moi, j'ai envie de vous répondre en vous disant qu'on connaît tous les valeurs et les règles de base de cela. Le jeu du pouvoir, on le connaît, il y a bien des gens qui sont entrés au pouvoir, avec plein de bonnes intentions, qui, en cours de mandat, même publiquement, ont avoué que le pouvoir les avait transformés malgré eux, et qu'ils n'en étaient pas si à l'aise que ça.

Moi, ce que je veux vous dire, c'est: Ce sont des règles de gouvernance, des règles de gestion, une plus grande rigueur, et je pense que vous avec les moyens de ça, mais vous avez aussi les pouvoirs au niveau des... je parle surtout aux gens qui sont élus, bien sûr, mais les gens ont les moyens aussi de les contourner, par toutes sortes de manières, l'intelligence humaine étant ce qu'elle est.

Je ne parle pas des scandales ou je ne parle pas des grandes fraudes, mais, même dans les petites manipulations, ça va quand même à l'encontre de ce en quoi croient les gens, leurs valeurs, pardon. Et puis, en terminant aussi, je pense que c'est l'intégrité, la cohérence des gens. Je veux dire, on connaît bien... on a tous fait nos petits cours de base de philosophie. Finalement, il faut être cohérent avec ce qu'on a promis, les engagements qu'on a pris publiquement. On sait très bien que la population... d'une élection à l'autre, on sait que les gens oublient, etc., mais il y a quand même des gens dans notre société qui sont vigilants.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. M. Boivin, cette fois-ci.

M. Boivin (Guillaume): Bonjour, monsieur. Vous avez fait allusion à la question du cynisme envers le régime politique, envers les élus. Pour votre bénéfice et celui de tous, celui des gens dans la salle, vous amenez des arguments qui ont été soulevés dans le cadre des audiences antérieures.

Prenons le cas, par exemple, d'un individu qui a passé sa vie dans un comté château fort d'un parti politique, disons, x, durant toute sa vie d'électeur, durant toute sa vie de citoyen. S'il s'avérait qu'il ne votait pas pour le parti dont c'est le château fort, qu'il se soit déplacé pour aller manifester son vote ou pas, durant toute sa vie d'électeur, son poids politique, son impact politique sur la société dans laquelle il vit est nul. Qu'il se déplace ou qu'il ne se déplace pas, vous en conviendrez, c'est la même chose. Donc, ces gens-là ont une préoccupation à l'égard du système actuel.

De la même manière, et ce, sur tout le territoire, les citoyens qui appuient des groupes minoritaires, bien qu'ils puissent représenter une partie très importante de la population, à du 5 %, 10 %, 15 %, 20 % à la limite, ce serait possible d'avoir 20 %, si le vote n'est pas groupé, dans un secteur géographique, il pourrait très bien n'avoir aucune représentation à l'Assemblée nationale. Alors, à cet égard-là, les gens qui vivent ce genre de situation développent le cynisme, à ce qu'ils nous en disent, et, à ce moment-là, c'est par ce biais-là que ça augmente le cynisme. Est-ce que vous pourriez voir... j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.

Le Président (M. Ouimet): M. Boivin, je vous invite à poser votre question, oui.

M. Boivin (Guillaume): Alors, j'aimerais avoir des commentaires tout simplement sur cet aspect-là. Est-ce que vous...

M. Dépatie (Serge): Bien, en tout cas, j'ai l'impression que vous aviez votre plaidoyer personnel à faire; c'est mon impression, en tout cas. J'interprète votre longue question, là, je pense que vous êtes passé par Paris pour aller à Toronto.

Moi, je ne vois pas les choses comme vous, mais vraiment pas comme vous. Tout le monde connaît la mathématique. Quand on veut changer les choses, il faut utiliser les droits qui nous sont donnés dans cette société, et nous en sommes très heureux. Nous sommes dans un pays exceptionnel, hein, où on a vraiment beaucoup de liberté et de choix. On peut l'exercer, ce choix-là. Moi, je crois dans la valeur d'un vote, et je crois, dans le moment, dans notre mode de scrutin; l'électeur peut vraiment envoyer son message. C'est clair. Il peut refuser un candidat, une candidate, et, s'il exerce son droit, si on l'encourage à prendre ses responsabilités, bien, à ce moment-là, je pense que l'exercice de la démocratie va se faire.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, M. Dépatie, merci infiniment d'avoir participé aux travaux de la commission. Merci de votre contribution. Merci.

Alors, j'invite M. Denis Julien cette fois-ci à bien vouloir s'approcher.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): Alors, bienvenue, M. Julien, aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. La parole est à vous.

M. Denis Julien

M. Julien (Denis): Merci. Alors, bonjour, mesdames et messieurs. Moi, je veux témoigner à titre de citoyen de Lotbinière. Je ne suis pas un spécialiste des questions des modes de scrutin, je veux juste vous donner le feeling que j'ai, là, d'emblée, sur cet avant-projet de loi.

Moi, j'ai des inquiétudes sur la réforme envisagée par le gouvernement actuel sous forme d'un avant-projet de loi. Le but étant de rapprocher les citoyens de la chose politique, quelque peu boudée, au cours des dernières années, par un taux de participation de plus en plus faible d'une élection à l'autre. Je crains que ce but louable ne soit pas atteint par cet avant-projet de loi.

Est-ce qu'on a bien sous-pesé les avantages et les désavantages du système actuel, uninominal à un tour, et l'instauration d'une certaine forme de proportionnelle? Le système uninominal à un tour est un des systèmes les plus fiables au monde. Les systèmes proportionnels entraînent souvent une grande instabilité des gouvernements, qu'on pense à l'Allemagne, à l'Italie, où ces pays ont vécu, au cours des dernières années, voire des dernières décennies, de graves crises politiques.

Dans un système comme celui que nous avons présentement, c'est le peuple ou les électeurs qui ont le dernier mot par la possibilité de remercier ou de congédier le gouvernement, comme le mentionnait M. Christian Dufour, dans un article paru dans le journal Le Soleil de la semaine dernière.

Dans les systèmes où la proportionnelle s'applique et qui donne lieu à des gouvernements de coalition, on assiste souvent à des jeux de coulisses qui ne vont pas toujours dans le sens de la transparence et de l'intérêt des électeurs.

Je ne suis pas un partisan à tous crins du statu quo, quoique je considère que le projet qui nous occupe contient des choses qui ne me rejoignent pas comme citoyen et comme électeur. D'abord, je trouve exagéré et excessif qu'il y ait 50 sièges de compensation par rapport à 77 sièges de circonscription. Je trouve aussi excessive la délimitation géographique calquée sur les circonscriptions fédérales, trop étendues sur le plan géographique. Je me questionne aussi sur votre façon de vouloir établir les députés compensatoires par district.

Je vais reprendre les trois points que j'ai énumérés. En ce qui concerne les 77 versus 50, je pense que le rôle du député, c'est d'abord de représenter son comté avec tout ce que cela implique au niveau de l'appartenance, du profil socioéconomique culturel de ses électeurs. Je crains que ces 50 nouveaux députés aient une moins bonne légitimité que les autres et qu'ils soient même considérés comme des représentants de seconde zone. Il est dans notre tradition parlementaire d'élire des députés qui nous ressemblent au niveau du profil dont je parlais tout à l'heure. Je crains qu'on assiste à certaines rivalités dues à ces deux types de députés.

En ce qui a trait à la délimitation des circonscriptions sur celles du fédéral, cela se traduirait par une augmentation de la charge de travail du député, qui aurait encore plus de difficulté à rejoindre ses électeurs en raison d'un territoire trop vaste à couvrir.

Plusieurs compagnies de téléphone... Je vous donne un exemple dans Lotbinière: vous avez plusieurs compagnies de téléphone qui desservent à la fois la même circonscription électorale fédérale. Cela encourt des frais d'interurbain, pour les partis politiques, leurs militants et le député lui-même, ce qui est contraire à l'esprit de l'avant-projet de loi. Et je pense que ça pourrait décourager certains de nos concitoyens de vouloir siéger comme député à l'Assemblée nationale si on complique leur tâche en siégeant sur une circonscription dont la géographie est trop vaste.

Aussi, l'établissement des députés compensatoires par district risque de surreprésenter certaines communautés qui se concentrent dans certaines régions du Québec, comme la communauté anglophone de l'Ouest de Montréal. Cela risque à la fois de surreprésenter certaines clientèles électorales, comme la présence de l'ADQ dans la région de Chaudière-Appalaches.

n(17 h 20)n

Le but n'est pas d'exclure cette représentation, mais que celle-ci soit juste et équitable. Pour cela, je pense qu'il serait préférable qu'on établisse un autre mode de représentation, dont celui qui tiendrait compte du pourcentage reçu par chaque parti sur le plan national. Cette dernière façon de choisir les députés compensatoires évitera les manoeuvres de certains partis qui auraient intérêt à se maintenir ad nauseam au pouvoir ? la tentation est forte ? ou à d'autres de jouir d'une représentation boursouflée lorsqu'ils n'ont jamais réussi à dépasser plus de 18 % des votes exprimés sur le plan national. D'ailleurs, des spécialistes de la question ont fait des projections à partir des résultats de la dernière élection; il y a un risque élevé à ce sujet. Je pense qu'il y a péril en la demeure.

En ce qui concerne la possibilité d'exercer son droit de vote, en tout temps, au cours de la période électorale, je m'y oppose avec énergie. Cela aurait comme conséquence de banaliser les campagnes électorales. Je pense sincèrement que les électeurs ont la responsabilité et le devoir de se renseigner et de s'informer sur les différents programmes proposés.

L'opinion des gens se modèle, se forge, au cours d'une campagne électorale, en prenant entre autres conscience des différents enjeux. Voter, c'est sérieux, c'est plus que de mettre une croix sur un bulletin. Ça doit impliquer une certaine réflexion, et une campagne électorale est un moment privilégié pour faire cette réflexion et cette démarche.

Je voudrais faire un commentaire sur le vote par anticipation. Je considère qu'avec les années on a abusé de cette possibilité de voter avant la journée de l'élection. C'est devenu une véritable manoeuvre, pour les partis politiques, de sortir le vote, et de systématiquement paqueter l'urne avant le temps. Je trouve cela profondément antidémocratique, parce que cela ne tient pas en compte de l'évolution des opinions qui peuvent changer durant cette période qui précède le jour de l'élection même. Je considère que c'est de la manipulation. Je pense qu'on devrait resserrer les critères d'admissibilité au vote par anticipation, tout comme on devrait interdire la tenue des sondages en période électorale, parce que cela constitue une véritable manipulation de l'opinion publique.

Je suis d'accord avec un scrutin à date fixe fixée par la loi. Je pense qu'encore là c'est une question d'équité. Je trouve que le système actuel privilégie le gouvernement en place, qui profite de la situation qui lui est le plus favorable pour déclencher les élections. Avec un scrutin à date fixe, pas de faux-fuyants, pas de magouille, pas d'intrigues. Comme on dit dans mon métier: Le gouvernement va passer à la caisse ? pour ne pas dire au cash ? le peuple va parler.

En terminant, je pense que cet avant-projet risque d'avoir un impact majeur sur nos moeurs électorales, nos façons de faire, notre expertise qui fait l'envie de plusieurs pays au monde, il risque de bousculer nos traditions. Je pense qu'il serait sage, de la part du gouvernement, de consulter les citoyens et citoyennes du Québec par voie de référendum.

Merci de m'avoir permis de donner mon opinion sur l'avant-projet de loi.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Julien, de nous l'avoir donné, ce point de vue sur l'avant-projet de loi; c'est ce que nous sollicitons. Donc, je vais ouvrir la discussion avec M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Merci. M. Julien, je vous demanderais, d'entrée de jeu, si vous n'aviez pas d'objection, de déposer votre document ou du moins de le transmettre à la commission. Je pense que vous avez des réflexions très intéressantes.

Comment concilier votre attachement, je dirais, à la nécessité d'avoir un élu, c'est-à-dire que la population puisse bien choisir son député, et la compensation dont vous parlez et qui serait une compensation dite nationale?

M. Julien (Denis): C'est-à-dire que, moi, je suis d'accord pour que la grande majorité des députés à l'Assemblée nationale soient élus dans des comtés bien délimités géographiquement, et la représentation compensatoire, c'est uniquement une partie très minoritaire qui vise, comme le monsieur, il disait tout à l'heure, à combler des trop grandes disparités, là, au niveau du... Mais je demeure d'opinion que le député doit coller à sa circonscription. Les gens doivent s'identifier au député; il doit y avoir vraiment, là, un sentiment d'appartenance du député. Je pense que c'est très important.

M. Gabias: ...rapidement, est-ce que... Parce qu'il y a des collègues qui vous diront rapidement que 125 comtés, ce n'est pas trop au Québec. Alors, est-ce que vous envisageriez la possibilité qu'il y ait toujours 125 comtés ou à peu près, ce qu'on connaît actuellement, et ajouter à ça 25 députés de compensation?

M. Julien (Denis): Je ne sais pas si je vais vous faire plaisir dans ma réponse, mais, moi, je vous dirais qu'il devrait y avoir beaucoup plus de députés. Parce que je trouve que c'est absolument impensable: la population, le nombre de personnes qu'il peut y avoir dans un comté, et qu'elles soient représentées uniquement par un député, je trouve que la charge du député, elle est excessive. Je ne sais pas si ça répond à votre question. Alors, je pourrais envisager qu'il pourrait y avoir beaucoup plus de députés, parce que le député serait beaucoup plus près de sa population, absolument.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Trois-Rivières. Mme la députée de Duplessis.

Mme Richard: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Julien, je vous félicite pour vos propos. Je vais aller dans le même sens que mon collègue. Qu'est-ce que vous penseriez qu'on maintiendrait les 125 députés avec les 125 circonscriptions actuelles, et que, pour arriver à la compensation, bon, ça pourrait être 25 députés, ou on pourrait y aller au niveau des MRC, au niveau aussi... On a parlé au niveau des régions administratives, est-ce que vous seriez d'accord avec...

M. Julien (Denis): Absolument. Comme monsieur disait tout à l'heure, il y a plusieurs mécanismes qui peuvent être utilisés, mais je pense qu'on doit garder à l'esprit qu'un député doit être élu dans une circonscription bien définie. Alors, je veux dire, toutes les avenues sont pensables, mais, moi, je ne suis pas un spécialiste, là, de ces questions-là, alors j'y ai été un petit peu avec mon coeur, mon feeling, là, puis...

Mme Richard: Vous ne semblez pas être un spécialiste, M. Julien, mais je vous dirais que vos propos sont fort intéressants, parce que, moi, je me suis sentie interpellée. J'ai un immense territoire, et le lien entre le citoyen et le député, c'est extrêmement difficile. Est-ce que vous avez des expériences avec votre député, parce que vous avez axé beaucoup là-dessus, sur le lien entre le citoyen, le député et le territoire?

M. Julien (Denis): Bien, je regarde le comté de Lotbinière, qui est un comté qui est presque un pays en soi, là, si on le compare à certains pays européens. Moi, je dis chapeau à quelqu'un, là, qui va siéger soit à la Chambre des communes ou soit à l'Assemblée nationale, dans un comté comme Lotbinière, parce que c'est quand même immense. Et puis je conviens de la charge de travail puis de tout ce que ça implique, au niveau des déplacements puis au niveau des coûts aussi, au niveau du kilométrage, au niveau de l'essence; c'est incroyable.

Mme Richard: M. Julien, ne pensez-vous pas que, si on va de l'avant avec l'actuel projet de loi, on va le faire justement au détriment des régions et des circonscriptions qu'on connaît actuellement? On essaie tous, les députés, de faire le lien avec notre électorat et d'être présents dans nos circonscriptions.

M. Julien (Denis): Moi, je le pense sincèrement, et je pense que cet avant-projet de loi n'est pas de nature du tout à rapprocher les citoyens de leurs députés.

Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée. Mme Loucheur.

Mme Loucheur (Yohanna): Oui, bonjour. Je vais peut-être faire un peu l'avocat du diable, ou en tout cas j'essaie de comprendre la conception du rôle du député. Moi, personnellement, je n'ai jamais rencontré un seul député, dans toute ma vie, peu importe où j'ai habité. J'avoue que j'ai du mal à comprendre le rôle qu'on lui attribue ou qu'on voudrait lui voir jouer. Mais, de ce que je comprends de vos propos, c'est quelqu'un qui doit faire un éventail de services absolument incroyable. Est-ce qu'on s'attend d'un député à ce qu'il prenne la place de l'Administration, par exemple?

Il y a des gens qui nous ont dit: On est en train de développer vraiment les régions, les services, au niveau des régions, d'ancrer, et que, ça, peut-être ça va changer un peu le rôle que les députés vont être amenés à jouer, qu'il va peut-être y avoir un certain rééquilibrage. Je voudrais avoir vos vues là-dessus. Et, si ce n'est pas vrai, si vraiment le député doit absolument être là, être présent et être capable de servir ses citoyens et connaître son territoire...

Le Président (M. Ouimet): C'est un 45 secondes.

Mme Loucheur (Yohanna): ...est-ce qu'il faudrait envisager, par exemple, d'interdire les candidats qui n'habitent pas dans leur circonscription, depuis, je ne sais pas, moi, au moins 10 ans, 15 ans, et qui la connaissent mal?

M. Julien (Denis): En fait, le rôle du député est double. Il doit siéger à l'Assemblée nationale, mais il doit aussi faire du bureau de comté, puis il doit aussi être au courant des besoins de ses concitoyens, savoir qu'est-ce qui se passe dans son comté. Je vais vous donner un exemple.

Dans Lotbinière, là, actuellement, on a un très gros problème au niveau de l'industrie du meuble. Vous savez qu'actuellement on assiste à l'entrée du meuble chinois sur le marché canadien, ce qu'on appelle le dumping. Alors, je pense que le député de Lotbinière a un rôle à jouer dans la défense des intérêts justement des industries de son coin, et aussi de travailler pour le maintien des emplois dans son comté.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, là-dessus, je vais mettre un terme à l'échange. Merci infiniment, M. Julien, d'avoir participé aux travaux de la commission.

J'invite maintenant M. Claude Martin à bien vouloir s'approcher et à prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): M. Martin, bienvenue aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. Je vous cède immédiatement la parole.

M. Claude Martin

M. Martin (Claude): Je remercie beaucoup les membres de la commission de me donner l'occasion de donner mon point de vue sur un processus qui me semble extrêmement important, puisque la valeur d'un vote... plusieurs l'ont évoqué, il y a des pays, dans le monde, où il y a des gens qui mettent leur vie en péril pour pouvoir exercer un droit de vote, alors qu'ici c'est considéré tellement comme un acquis que des gens se permettent de ne pas exercer leur droit de vote, ce que je trouve absolument invraisemblable.

n(17 h 30)n

Je comprends bien que l'objectif global que la commission poursuit, c'est d'améliorer le processus démocratique en voyant des façons nouvelles de susciter l'intérêt de la population envers le processus électoral. Je ne me pencherai pas tellement sur le projet proposé; c'est plutôt le processus, moi, qui me questionne, c'est plus les raisons que le détail de la mécanique. En fait, je me dis... dans un premier temps, c'est: Quelle est la situation qu'on veut corriger...

Le Président (M. Ouimet): Un instant, M. Martin.

M. Martin (Claude): Oui.

Le Président (M. Ouimet): J'ai de la misère à entendre M. Martin. Je demanderais dans l'assistance, s'il vous plaît, de garder le silence pour qu'on puisse entendre M. Martin.

M. Martin (Claude): Je m'excuse, j'étais peut-être loin du micro un peu aussi, bon.

Le Président (M. Ouimet): Non, non, non. Vous êtes...

M. Martin (Claude): Ça va, oui?

Le Président (M. Ouimet): ...vous êtes à bonne distance.

M. Martin (Claude): O.K. Donc, les questions que je me poserais, moi, c'est, bon, quelles sont les situations ou les aberrations qu'on aimerait corriger, et aussi quelles sont les situations actuelles qui sont favorables et qu'il y aurait lieu de préserver?

Bon, d'une façon générale, évidemment, c'est toujours sur des objectifs qu'on va réussir à tirer des conclusions pour voir est-ce qu'on a atteint ou non les objectifs. Les objectifs que la commission peut avoir et les objectifs que la population y verrait ne sont pas nécessairement du même ordre. À mon sens, évidemment, ce sont les objectifs que la population pourrait y voir qui prennent de l'intérêt. Pour moi, tout changement qu'on veut entreprendre, à quelque niveau que ce soit, pas juste en politique, les changements, selon moi, doivent s'accompagner d'une espérance de gains. Si on n'a pas d'espérance de gains, on change pour le plaisir de changer, mais finalement, c'est sans objet. On met beaucoup d'énergie dans ça, et on obtient un résultat différent, mais où finalement on a déplacé les problèmes; on a réglé certains problèmes puis on en a créé des nouveaux qu'on n'avait pas avant.

Donc, la sous-question, évidemment, c'est de se dire: Les améliorations qu'on envisage, est-ce qu'elles sont impossibles à atteindre dans le contexte actuel, ce qui évidemment nous force à aller vers une situation autre, ou encore on peut partir de la situation actuelle, telle qu'elle est, et envisager des améliorations qui vont faire en sorte que les irritants principaux sont corrigés?

Donc, je me permettrais de regarder un peu quels sont les critères sur lesquels on peut s'appuyer pour voir... bon, pour faire un bilan comparatif, si on veut, du système de votation actuel et de celui qui est proposé pour voir quelles sont les forces et les faiblesses et à quel endroit on pense avoir des gains.

Donc, les critères. Selon moi, un des tout premiers critères qui a toujours fait la force du parlementarisme d'inspiration britannique, c'est la stabilité que permettent des modes de scrutin. Si on y réfléchit, on se rend compte que les périodes de stabilité ici, au Canada, que ce soit au niveau des gouvernements provinciaux ou du gouvernement fédéral, les périodes de stabilité ont toujours été les périodes constructives. On comprendra bien que des gouvernements minoritaires et des gouvernements qui tiennent par la peau des dents ont beaucoup de difficultés: ils mettent beaucoup de leurs énergies à tenter de conserver le pouvoir plutôt qu'à se lancer dans des grands projets.

Si on regarde, par exemple, les grands acquis, au Canada et au Québec, on pense par exemple à l'assurance santé au niveau fédéral, on pense à l'assurance automobile ici, au Québec, on pense, bon, enfin, toutes sortes de grandes... par exemple le zonage du territoire agricole, des choses comme ça, ce sont des grandes réformes dont on profite, et qui ont été possibles parce qu'on avait des gouvernements qui avaient une bonne stabilité. Vous comprenez comme moi qu'on n'aurait jamais pu envisager des modifications en profondeur comme ça si on avait été avec des gouvernements instables, et qui, du jour au lendemain, se demandent s'ils vont être toujours en selle. Donc, il m'apparaît que les possibilités de stabilité, avec la situation qu'on a actuellement, sont grandes.

Il n'est pas certain que... même il est à peu près certain qu'on n'aurait pas un gain de ce côté-là avec un mode de scrutin où il y a de la proportionnalité qui est incluse. Ne comprenez pas tout de suite que je ne suis pas d'accord avec la proportionnalité: je suis d'accord qu'il puisse y en avoir, mais il ne faut pas en attendre non plus des merveilles.

Les possibilités de l'alternance m'apparaissent aussi extrêmement importantes. On a juste à regarder des pays par exemple comme le Mexique, avec le PRI qui était au pouvoir, depuis peut-être 60 ans, le PLD, au Japon, bon, ça fait des gouvernements qui deviennent tellement lourds, parce qu'il n'y a plus l'alternance, qu'au fond, ce qui finit par arriver... Bien, on l'a d'ailleurs vu ici, au Canada, tout le temps où les partis d'opposition, à Ottawa, étaient très divisés. C'est à l'intérieur même du Parti libéral du Canada qu'il y avait une opposition, hein, parce qu'on n'arrivait plus à avoir une opposition suffisamment solide autrement; donc, les possibilités d'alternance m'apparaissent extrêmement importantes.

Ce que ça permet, ça permet à des tendances politiques de nature souvent différente ou opposée d'avoir leur tour au bâton, où ils vont arriver avec leurs réformes, ils vont arriver avec des modifications qu'ils veulent apporter pour... parce que tout le monde vise le bien public, et tout le monde est pour la vertu, mais il y a bien des façons de l'exercer, la vertu. Bon.

Un autre critère. Donc, sur les possibilités d'alternance, encore une fois je ne suis pas certain qu'avec des gouvernements de coalition qui sont faits d'alliances, une fois que les élections sont passées, qu'on ait des éléments d'alternance très forts. Autrement dit, c'est que les partis vont perdre quelques députés, puis ils vont faire une alliance avec un autre qui a grossi un petit peu, puis finalement ça fait des gouvernements un petit peu branlants et dans lesquels il n'y a pas de réelle alternance, puis ça, ça m'apparaît quelque chose de risqué à terme.

La participation populaire au vote. Bon, si on a l'impression que... si c'est l'objectif qu'on vise, d'améliorer la participation au vote, rien nous permet de croire que le fait de faire des modifications telles que celles qui sont proposées va avoir quelque effet que ce soit sur la participation populaire au vote. J'ai l'impression que c'est changer quatre trente-sous pour une piastre. C'est à d'autres niveaux que la participation des élus... c'est-à-dire des électeurs va pouvoir être améliorée.

L'imputabilité et la relation avec les élus. Ça, il y en a plusieurs qui en ont parlé, puis je pense que c'est un aspect important: les gens ont tendance à associer beaucoup... à s'identifier beaucoup à leur député pour faire avancer des dossiers, puis ça m'apparaît normal aussi, puisqu'évidemment on parle à quelqu'un qui est de notre milieu... Oui?

Le Président (M. Ouimet): Il vous reste à peine une minute.

M. Martin (Claude): Oh! Je vais essayer d'aller vite. Bon, la représentation des femmes, les minorités, on en a parlé, bon. Bon, là où il y a les plus grosses aberrations selon moi, actuellement, dans le système qu'on a, c'est la possibilité de supporter des nouveaux partis.

Or, évidemment, là, on a des grosses faiblesses; ça, il faut en être bien conscient. Maintenant, il faut toujours avoir en tête que, dans la société, il y a beaucoup de façons de faire avancer les idées nouvelles. C'est sûr qu'avoir des députés élus en Chambre, ça aide énormément, mais il y a quand même tous les groupes de pression qu'on a, que ce soit au niveau de l'environnement, d'altermondialisme, des politiques sociales, etc., il y a d'autres façons donc de faire avancer les idées...

Le Président (M. Ouimet): Je vais vous inviter à conclure, M. Martin.

M. Martin (Claude): Oui. Bon. Donc, ce que je voudrais dire là-dessus, c'est le dilemme auquel on fait face, c'est: Est-ce qu'on considère plus important d'avoir une représentation qu'on dit démocratique des citoyens à cause d'une proportionnalité parfaite ou presque parfaite, ou si on met en balance la stabilité d'un gouvernement auquel on donne les moyens d'agir?

Ce que j'aimerais proposer, c'est la chose suivante: c'est qu'à partir de la situation actuelle, si on envisageait d'ajouter des mécanismes de correction qui feraient en sorte... je vous donne un exemple, qui permettraient de dire, par exemple, pour des nouveaux partis qui arrivent, s'ils ont atteint par exemple 5 % du vote, on leur donne droit à quelques députés qui ne sont pas nécessairement attachés à une région en particulier, puisque de toute façon imaginez un parti vert par exemple, le Parti vert n'est pas nécessairement attaché à tel ou tel ou tel comté.

Le Président (M. Ouimet): Écoutez, on aura l'occasion, je pense, d'explorer davantage votre exemple, mais le temps imparti est écoulé. Je vous remercie de cette présentation. Je vais ouvrir dès maintenant avec Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M. Martin, votre réflexion est très profonde et très pertinente, et nous interpelle à bien des égards. Très peu de temps, je vais aller donc directement au but.

Vous êtes à ma connaissance la première personne qui ait soulevé un point que je trouve qui mérite réflexion. Vous dites: Les tiers partis, ils n'ont pas nécessairement besoin d'être au pouvoir, ils peuvent exercer une influence, hein? Donc, vous mettez en rapport l'influence politique versus le pouvoir. Ça, c'est une idée qui mérite qu'on puisse réfléchir là-dessus.

Mais en même temps j'aimerais vous questionner sur le fait qu'en 1998 un parti a obtenu la pluralité des votes et il s'est ramassé dans l'opposition parce qu'il n'a pas eu la pluralité des sièges. Est-ce que vous trouvez que c'est équitable, c'est juste? Est-ce que ce modèle peut être reproduit sans qu'on puisse rien faire, puisque vous considérez finalement que le jeu n'en vaut pas la chandelle?

n(17 h 40)n

M. Martin (Claude): Je pense qu'à partir de l'instant où on veut introduire des modifications, je dirais qu'on joue peut-être avec le feu, au sens où, si on pense à des mécaniques compensatoires au niveau de deux grands partis par exemple, ce qui m'apparaît difficile, c'est qu'évidemment on peut dire à un moment donné: On va appliquer telle recette, mais on va se rendre compte plus tard que la même recette, si on voulait l'appliquer, elle créerait des aberrations dans une autre direction.

Parce que vous parlez du cas de 1998, mais on pourrait parler du cas de 1966 aussi. En tout cas, il y en a plusieurs, situations comme ça, qu'on a rencontrées: l'élection de 1970, l'élection de 1973, il y a eu des aberrations. Sauf que, selon moi, je pense qu'il est préférable de mettre l'emphase sur la stabilité d'un parti à qui on donne le pouvoir pour un certain temps, on lui laisse les moyens d'agir. Si finalement il s'en tire avec les honneurs, il a toutes les chances du monde d'être réélu, puis les gens vont apprécier leur passage, que de dire: Ah! bien, il y a eu tant de votes de plus ou de moins. Si le vote est très concentré dans des régions puis qu'il y a des votes pratiquement automatiques pour certains partis, je ne suis pas certain que ça aide la démocratie, moi. Donc...

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, Mme la députée. M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, M. le Président. Alors, M. Martin, merci beaucoup de votre contribution. Évidemment, le temps qui nous est imparti fait en sorte qu'on a de la difficulté à tout faire ressortir.

Vous avez parlé du fait qu'en démocratie il y a effectivement les représentants du peuple au niveau du pouvoir législatif, il y a aussi des groupes de pression qui ont de l'influence. Mais ne croyez-vous pas qu'on pourrait réussir à faire en sorte de s'assurer que cette influence soit de fait, si on augmentait entre autres l'équité des moyens dans un débat, dans le débat politique, au niveau du financement des partis politiques?

On pourrait prendre l'exemple... quoique je n'aime pas beaucoup transposer le fédéral et le système québécois, parce que c'est deux systèmes différents, mais on pourrait penser, entre autres, que le Parti vert a bien performé aux dernières élections, au fédéral, alors que la loi a été changée et leur a permis un financement et une équité des moyens à la ligne de départ, de sorte qu'ils peuvent peut-être retrouver certaines de leurs mesures populaires et reprises dans d'autres partis par d'autres législateurs. Est-ce que vous croyez que ça, ce serait une amélioration intéressante?

M. Martin (Claude): Oui, sans doute. Maintenant, quand je disais tantôt que la possibilité de corriger le système actuel, en disant, par exemple: Si un nouveau parti a récolté... je donnais l'exemple de 5 % du vote, bon, qu'on puisse accorder certains postes en Chambre, qui s'ajouteraient aux 125 qu'on aurait, supposons, mais il faut bien penser que les commissions parlementaires qui vont siéger peuvent recevoir des gens qui vont avoir l'occasion de passer certaines idées. Et aussi rien n'empêcherait quelqu'un qui tenterait, par exemple, d'arriver avec un projet de loi privé de le faire pousser par quelqu'un qui voudra bien le défendre pour lui à l'Assemblée nationale. Ça n'empêche pas...

Le Président (M. Ouimet): Bien.

M. Martin (Claude): ...sauf qu'évidemment c'est beaucoup plus...

Le Président (M. Ouimet): Je dois...

M. Martin (Claude): ...naturel et normal de dire...

Le Président (M. Ouimet): M. Martin, je dois vous interrompre parce qu'on...

M. Martin (Claude): ...bon, bien, on a obtenu tant de pour cent de votes...

Le Président (M. Ouimet): M. Martin.

M. Martin (Claude): ...bon, bien, qu'on donne...

Le Président (M. Ouimet): M. Martin, on...

M. Martin (Claude): ...pour qu'ils le fassent directement.

Le Président (M. Ouimet): ...on a dépassé l'enveloppe, là. Merci infiniment de votre participation. Je partage les propos de Mme la députée de La Pinière sur la profondeur de votre réflexion et de l'avoir partagée avec nous. Merci infiniment.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): J'invite maintenant M. Rémi Bourgoin à bien vouloir prendre place. Je signale aux membres de la commission une petite correction, au niveau du nom qui apparaît sur votre document, là: c'est M. Rémi Bourgoin, et, Bourgoin, c'est g-o-i-n, si j'ai bien compris. Voilà? Merci. Bienvenue à vous, bienvenue aux travaux de cette commission. Et à vous la parole.

M. Rémi Sarrazin-Bourgoin

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Merci. Rémi Bourgoin, comté de Lotbinière. Je vais un peu platement vous lire le mémoire que j'ai déposé à la commission. Alors, mes respects à toute l'assistance ici présente.

Une boutade qui contient, je crois, beaucoup de vérité veut que la démocratie, ce ne soit pas «ferme ta gueule», mais plutôt «cause toujours». Je viens donc causer avec vous et présenter mon opinion, que vous avez dite fondamentale, sur la modification du mode de scrutin telle que proposée par l'avant-projet de loi.

Il est cependant un moment où la voix démocratique cesse d'être une simple causerie, prend tout son poids, et c'est au moment de la tenue d'un scrutin électoral. Ce moment fondamental en démocratie doit être sauvegardé et mis à l'abri de tout changement qui pourrait s'apparenter à une arnaque.

L'actuel mode de scrutin doit-il être changé pour y introduire des éléments de proportionnalité permettant une meilleure expression de la diversité des opinions, une meilleure représentation des femmes, historiquement sous-représentées, ainsi que des minorités visibles ou idéologiques? Qui s'y opposerait dans une société démocratique avancée comme celle du Québec? Les élections devraient-elles être à date fixe, se tenir électroniquement ou le dimanche plutôt que le lundi? Voilà quelques-unes des belles questions soulevées par l'avant-projet et méritant de nobles débats.

Vous me permettrez cependant de ne pas aborder devant vous toutes ces questions, qui, selon moi, emballent et dissimulent la pilule empoisonnée que contient l'avant-projet de loi ici proposé. Je veux donc aller plutôt à ce qui me semble l'essentiel: dénoncer l'utilisation d'un vertueux concept, la proportionnalité, pour en faire un outil de confiscation du pouvoir.

Mais, avant même d'aller plus avant dans ma démonstration sur la nocivité de la proportionnelle mixte compensatoire telle que proposée dans l'avant-projet, je voudrais rappeler qu'il serait tout à fait inacceptable qu'une telle modification à la Loi électorale puisse être adoptée sans le consentement de tous les partis politiques. La règle du consensus, en matière de modifications de la Loi électorale, règle dont le parti ministériel a d'ailleurs exigé et obtenu le respect contre le projet d'établissement d'une carte d'électeur en 1995, ne saurait être écartée. Ainsi, les remarques qui suivront à propos de l'avant-projet ne devront pas être perçues comme pouvant rendre concevable l'inconcevable. Elles n'auront pour but que d'expliquer pourquoi, à mes yeux, tout consentement à cette réforme, telle que présentement libellée, doit être refusée.

Après avoir fait des projections à partir des scrutins passés, des experts nous ont alertés: le compensatoire régional, pudiquement appelé de district, conduirait à la réélection répétitive du parti politique qui propose l'actuel projet de réforme, ce qui donnerait un résultat absolument incompatible avec une saine démocratie. Ce qui est proposé ici, dans l'avant-projet de loi, ce n'est pas de la proportionnalité, c'en est même plutôt l'inverse, en ce que cela aurait plutôt effet de donner, lors des élections, non pas une compensation, mais bien une surcompensation du vote concentré régionalement.

Dans des élections qui seraient tenues à la proportionnelle mixte compensatoire de district, celle proposée par l'avant-projet de loi, les votes non différenciés, quasi unanimes, concentrés dans certains districts, en viendraient à compter presque double, permettant ainsi que soient raflés, dans ces districts, tant les sièges de circonscription que les sièges de compensation. Voilà l'arnaque.

Les auteurs de l'avant-projet ont-ils vu cet effet de leur réforme et est-ce intentionnel? De toute façon, nous sommes devant un projet partisan qui ne saurait avoir l'assentiment des autres partis.

Dans un référendum, qui est une sorte de scrutin à la proportionnelle intégrale, tous les votes, même concentrés régionalement, comptent et obtiennent tout leur poids démocratique. De même, dans une élection pour laquelle serait utilisée une proportionnelle intégrale où tout le territoire du Québec formerait une seule et unique circonscription, ou encore dans une élection où serait utilisée une proportionnelle mixte dans laquelle la portion compensatoire serait répartie sur le plan national, pour reprendre les termes du cahier d'information, ces deux modes pourraient être acceptables, mais pas le mode compensatoire régional ici proposé. Mieux vaudrait, selon moi, encore le statu quo.

Mais pourquoi le Québec, société démocratique moderne, avancée, souvent à l'avant-garde des changements, au Canada sinon en Amérique du Nord, et qui a déjà introduit une réforme admirée en matière de financement des partis politiques, pourquoi ce Québec ne pourrait-il pas adopter n'importe laquelle formule de proportionnalité? Parce que le Québec est là encore une société distincte de toutes les sociétés démocratiques nord-américaines. Parce que le Québec est une société démocratique tout à fait atypique. Pourquoi? Parce que le Québec contient en son sein un important groupe de citoyens, concentré surtout dans quelques districts, qui ne fait pas ses choix électoraux de la façon typique en démocratie, et que la réforme du mode de scrutin proposée permettrait de profiter à fond de ce phénomène d'exceptionnelle concentration régionale du vote.

n(17 h 50)n

Entendez-moi bien là-dessus: les citoyens de ce groupe ont le droit strict et non contesté d'exercer leur droit de vote comme ils l'entendent, selon la compréhension qu'ils se font de leurs intérêts, mais les conséquences de la concentration régionale de leur vote quasi unanime ne doivent pas être corrigées, compensées aux dépens des autres Québécois qui, eux, exercent leur droit de vote de façon différenciée, votant bleu, rouge, vert, jaune, à droite, à gauche, au centre et à l'extrême centre, comme on le voit dans les démocraties typiques.

Pour qualifier le projet de réforme proposé par le gouvernement, j'ai utilisé tantôt l'expression «pilule empoisonnée» et j'ai parlé de l'existence d'un phénomène de concentration du vote qui entrave, selon moi, le fonctionnement démocratique normal. Ces propos ont peut-être paru à certains comme le fruit d'un délire paranoïde et pour d'autres un propos politiquement incorrect, puisqu'il est tabou de dire et même de s'apercevoir qu'une portion de la population vote à répétition d'une façon quasi unanime, population qui, avec le même esprit de corps, s'est pareillement assez récemment dissociée d'une structure municipale unifiée. Cependant, je l'ai dit, ces votants ont le droit strict de s'exprimer ainsi, mais, je le répète, le parti ministériel ne doit pas s'appuyer sur ce phénomène pour concocter un système de scrutin à la proportionnelle qui lui permettrait de confisquer par là le pouvoir parlementaire.

Je me permets d'ailleurs de mettre en garde le parti gouvernemental contre l'adoption du projet conçu par Me Massicotte. Après d'éventuelles confiscations du pouvoir par l'utilisation de la mécanique ici projetée, application moderne du vieux principe «diviser pour régner», le parti ministériel risquerait de pousser la majorité francophone à adopter à son tour, par réaction, le vote ethnocentrique. Si les francophones allaient approcher les proportions de plus de 90 % du vote exprimé pour un même parti, alors, même la proportionnelle ici concoctée ne pourrait sauver l'ordre constitutionnel canadien, l'objectif premier poursuivi par lui.

Le parti ministériel n'a pas intérêt politique à risquer de réveiller le chat qui dort. En somme, à cet avant-projet, je crois fermement qu'il faut dire: Non merci, mon nom est démocrate québécois, la «séparation» en deux solitudes, c'est non. Je vous remercie.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci à vous, M. Bourgoin, pour nous avoir exposé votre point de vue. Je vais ouvrir la période d'échange avec vous. J'ai Mme Loucheur et puis, par la suite, M. le député de Trois-Rivières.

Mme Loucheur (Yohanna): Bonjour. J'ai noté avec intérêt, dans votre présentation, que vous avez dit très, très rapidement que, compensation avec une liste nationale, vous n'auriez pas la même opinion, vous seriez sans doute favorable. Ce qui est intéressant, parce que ce qui est sur la table, ce n'est pas nécessairement l'avant-projet de loi, on peut examiner tous les modèles.

Mais j'avais une question: Au-delà du modèle qui serait proposé, effectivement, quand vous dites qu'il faudrait le consentement de tous les partis pour l'adopter, est-ce que vous comprenez là-dedans des partis qui sont présentement exclus de l'Assemblée nationale à cause précisément du mode de scrutin actuel?

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Question difficile. Possiblement que le référendum serait une solution, là, plus éthique et plus équilibrée. Parce qu'effectivement les partis politiques présentement à l'Assemblée nationale ne contiennent pas, à eux seuls, là, toute la diversité des opinions politiques contenues au Québec.

Le Président (M. Ouimet): Merci. M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Oui. Merci, M. Bourgoin, d'exprimer votre opinion. Je ne l'ai pas fait souvent, mais je dois vous dire que je suis en désaccord sur le qualificatif que vous donnez au préprojet de loi quand vous parlez d'arnaque. Pour une raison très simple, et je comprends très bien votre préoccupation, lorsque vous parlez d'exportation des votes, là, mais vous dites que ce serait le cas dans une proportionnelle à la grandeur d'un district, et vous dites que ce ne serait pas le cas dans une proportionnelle où la compensation serait sur un plan national. Alors, je vois là une très grande contradiction dans ce que vous qualifiez, là, pour prendre votre terme, d'«arnaque».

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Concentration régionale.

M. Gabias: Maintenant, ma question est très simple. Quand vous parlez du consentement de tous les partis politiques pour qu'il y ait une modification, est-ce que vous entendez par là les partis politiques représentés à l'Assemblée nationale ou les partis politique reconnus par la loi?

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Je vois que la question intéresse beaucoup la commission, on me la pose pour la deuxième fois; je vais répondre de la même façon. Il y aurait quelque chose d'assez odieux, là, à restreindre aux seuls trois partis politiques actuellement représentés la décision là-dessus. Puisque c'est très fondamental, la modification de la Loi électorale, je pense que, s'il y a consultation, elle devrait se faire, au niveau de l'ensemble de la population, par voie référendaire.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Trois-Rivières. M. le député de Masson.

M. Thériault: Merci, M. le Président. M. Bourgoin, merci de votre contribution à ce débat. Vous dites que les votes non différenciés, quasi unanimes, concentrés dans certains districts, en viendraient à compter presque double.

J'imagine que l'avant-projet de loi, vous l'avez bien étudié, il n'y a qu'un seul vote, un vote dans chacun des districts. S'il n'y a qu'un seul vote, ça veut effectivement dire que le vote pour la candidate ou le candidat d'un parti se trouve à être celui qui déterminera les éléments de compensation.

Or, si je suis votre raisonnement, dans certains districts où il y a forte concentration atypique en quelque part, là, par rapport à ce qui se passe ailleurs dans des démocraties ? bien vous reconnaissez qu'ils ont droit de le faire ? concentration du vote en 82 à 85, des fois à 78, 80...

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Et plus, et plus, et plus.

M. Thériault: ...pour un seul parti et plus, vous considérez que cela constitue effectivement un manque flagrant à la volonté d'équité du vote?

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Ça crée une distorsion, là; comment réussir à réaliser, là, la quadrature du cercle là-dedans. Tout à l'heure, quelqu'un disait: Le système actuel a ceci de bien, même lorsqu'il arrive, comme en 1998, que bon le Parti libéral se trouve éconduit du pouvoir, ou enfin ne l'obtient pas, parce que, malgré une pluralité de votes, il y a encore alternance possible, et il y a eu effectivement alternance, et puis nous sommes en mesure actuellement de profiter, là, à un haut niveau, de leur perception du pouvoir à Québec.

Le Président (M. Ouimet): En terminant, M. Bourgoin.

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Pardon?

Le Président (M. Ouimet): En terminant, parce qu'il ne reste plus de temps.

M. Sarrazin-Bourgoin (Rémi): Non, ça va. J'ai restreint mon propos, là, à un seul angle qui me paraissait essentiel. Je conçois que, dans le projet, il y a énormément de choses. Je ne suis pas un technicien, là, je ne sais pas comment concilier facilement la compensation. Mais, de la façon dont on l'approche dans l'avant-projet de loi, là, mieux vaudrait tout autre chose et rien du tout même plutôt que cela.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci infiniment d'avoir partagé ce point de vue avec les membres de la commission.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): À ce moment-ci, nous approchons 18 heures, j'ai besoin d'un consentement des membres de la commission pour pouvoir entendre M. Pierre-Paul Sénéchal. Alors, j'ai le consentement? Merci. Mais je me devais de me poser la question.

Alors, bienvenue à vous aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. Donc, à vous la parole, M. Sénéchal.

M. Pierre-Paul Sénéchal

M. Sénéchal (Pierre-Paul): Bonsoir, M. le Président. Bonsoir, mesdames et messieurs. Je vous remercie de votre indulgence. Je suis conscient, moi aussi, qu'il est 6 heures. Je suis le dernier, ce n'est pas facile d'être le dernier, parce que tout le monde a dit à peu près tout ce qu'il fallait dire avant. Il est 6 heures. Tout le monde s'endort un peu, après avoir entendu tant de choses toute la journée, après tant de semaines, surtout qu'il y a beaucoup de choses qui se répètent finalement, mais je vais essayer de... C'est sûr que je ne vous lirai pas le texte que je vous ai présenté, vous l'avez en main, il a sept pages. Je vais essayer de le résumer, passer rapidement puis essayer d'être assez intéressant pour que vous puissiez avoir des questions.

n(18 heures)n

J'ai intitulé mon texte, mon mémoire Attention aux effets non anticipés et mal évalués. C'est que, moi, je suis un administrateur d'État à la retraite, j'ai travaillé beaucoup dans les réformes, et je peux vous dire que, dans toute réforme, il y a ce qu'on appelle les effets pervers. Et les effets pervers, ils sont pervers essentiellement pour une chose, c'est qu'on n'a jamais été capables de les anticiper avant. Donc, l'essentiel du message que je vais faire aujourd'hui, là, c'est: Attention, dans toute réforme, il faut essayer d'anticiper tout ce qu'il y a de pervers. J'aurais pu intituler ça aussi Il faut si peu de chose pour faire tourner une mayonnaise. J'essaie de vous réveiller un peu, il est 6 heures. C'est que, pour faire une mayonnaise, c'est très simple, hein, ça prend de l'huile et des oeufs, puis on tourne. Essayez d'y ajouter une cuillerée de margarine, et vous allez la faire tourner. Le projet qui nous est présenté, tel que j'en ai lu, c'est celui d'insérer une proportionnelle dans un système déjà construit, avec ses traditions, et d'après moi, si vous lisez mon texte, il y a un risque d'insérer une matière, en pensant faire bien, qui va faire, à la fin, peut-être tourner la sauce.

Moi aussi, comme bien d'autres, j'ai été un peu inquiet, je ressens un certain malaise face à la complexité de tout cela, là. Je regarde les termes, là, que je vous rappelle: proportionnelle intégrale, proportionnelle régionale, vote unique transférable, liste bloquée versus liste ouverte, région électorale plurinominale. J'ai eu des cours en sciences politiques et je suis complètement désarçonné face à ce langage-là, je ne suis pas capable. Et j'ai essayé de me mettre dans la peau ? j'en parle dans mon introduction ? du citoyen de Val-d'Espoir. Val-d'Espoir, c'est un petit village de la Gaspésie ? et c'est fusionné à Percé maintenant ? à peu près à 20 km dans les montagnes en arrière de Percé, et c'est à peu près ce qu'il y a de plus pauvre au Québec. Et c'est bien sûr que, dans le document d'information que vous présentez, là, lorsqu'on dit: Les citoyens souffrent d'une désaffectation en raison de la distorsion dans la représentation, bien je vous dis que le citoyen de Val-d'Espoir, là, il ne s'est pas aperçu qu'il y avait une distorsion dans la représentation. Son problème est pas mal ailleurs, là. Donc, essayons d'être clairs, là, la distorsion dans la représentation, plusieurs l'ont dit avant moi, je ne pense pas qu'il y a une psychose nationale autour de ça.

Donc, j'ai essayé de décortiquer un peu un élément, celui de la proportionnelle, et j'ai regardé les postulats qui militent en faveur justement de cette formule proportionnelle. J'ai de la difficulté à y adhérer, personnellement.

Le premier, c'est que le système actuel étoufferait les courants politiques émergents. C'est bien sûr que le système uninominal à un tour, là, mène la vie dure à ces petits partis là. Au Québec, par contre, en politique ça vaut aussi, le marché des idées et des programmes politiques est un marché libre. Les produits de base sont toujours en demande, les produits accessoires le sont souvent moins, mais il est faux de prétendre que notre système uninominal va bloquer. Il met un certain frein. Ça, tous les politicologues vont l'affirmer, il met certaines barrières techniques pour la montée des tiers partis, mais ce ne sont pas des barrières infranchissables. La preuve, il y a des partis qui l'ont franchie. Ceux qui vont faillir à la tâche, c'est ceux qui ont des programmes trop marginaux au niveau des idées ou, à l'inverse, des programmes qui empruntent trop de choses aux deux autres partis dominants. Ces partis-là, à mon point de vue, vont avoir de la difficulté à franchir les barrières. Donc, ça ne veut pas dire nécessairement que les courants d'opinion politiques qui sont émergents dans notre société ne sont pas présents à l'Assemblée nationale, à la Chambre des parlementaires; ils entrent, ils peuvent entrer par l'entremise de d'autres partis.

Notre ministre de l'Environnement, M. Mulcair, s'il était ici, là, s'il habitait le troisième rang de Saint-Raphaël puis qu'il était sur une ferme biologique, il serait probablement pour le Parti vert, mais, à titre de ministre de l'Environnement, il traduit aussi, je pense, les préoccupations des verts. Donc, le courant, il entre quand même à l'Assemblée nationale.

L'autre principe qui est amené en faveur de la proportionnelle, c'est que le scrutin uninominal actuel irait à l'encontre d'un principe sacré de l'égalité des votes. Ça, cette notion d'égalité, je pense que c'est très important qu'on s'y penche, parce qu'à mon point de vue égalité de représentation ne signifie pas nécessairement parité, c'est-à-dire qu'équité dans la représentation ? je ne sais pas si c'est ça que j'ai bien dit ? n'équivaut pas nécessairement à parité numérique. C'est sûr que ? on l'a dit tout à l'heure ? à deux reprises, ce n'est pas beaucoup, depuis 1792 ? peut-être trois ? un parti n'ayant pas eu la pluralité des votes a été au pouvoir. Est-ce que ça veut dire que le système est mauvais? Ça veut peut-être dire que la carte pose des problèmes et que certains comportements électoraux aussi portent en eux des problèmes. Parce qu'en vertu d'un objectif d'égalité stricte sur le plan numérique ça veut dire que l'idée, par exemple, d'avoir un député pour représenter la communauté inuite et complètement accrochée à la partie nord du Québec ne pourrait pas aller plus loin au niveau des idées parce qu'ils ne pourront jamais correspondre à une autre circonscription électorale.

J'apporte aussi l'exemple du poids dans notre démocratie, du poids qui peut être inégal entre certaines tranches d'électeurs. Je donne, dans le texte que je vous présente, l'exemple d'une tranche de 1 000 électeurs du comté de Bellechasse-Chaudière-Etchemin ? c'est dommage que Mme Vien soit partie ? un comté qui regroupe 30 villages, qui a des milliers de kilomètres de route. Et je sais qu'il y a plus de routes à entretenir dans Bellechasse-Etchemin qu'il y en a dans tout l'État du Vermont. Il me semble que, sur le plan territorial, cette tranche de 1 000 personnes là peut ? puis c'est légitime ? avoir plus de poids en termes de représentation que 1 000 électeurs de l'Île-des-Soeurs qui habitent un condo avec trois portes de garage. Moi, je fais cette assertion-là. Peut-être qu'elle est contestable, mais personnellement je suis capable de la soutenir.

Parce qu'un pays, ce n'est pas seulement qu'un ensemble de citoyens; un pays, c'est aussi un territoire. Et à chaque fois, dans les deux cas où un parti qui n'a pas eu la pluralité des votes a pris le pouvoir, certains se sont interrogés sur sa légitimité démocratique. Pas moi. Dans les deux cas, ce parti-là avait la majorité des régions du territoire québécois avec lui. Et, pour moi, c'est un élément qu'il faut absolument que la commission analyse. On ne peut pas dissocier totalement les citoyens électeurs et le territoire parce que ce serait trop facile. Imaginez que Hong Kong, c'est une ville qui a peut-être 20 millions d'habitants. Je pourrais instaurer la proportionnelle dans cette ville-là demain matin, je n'ai pas de problème. Si, demain matin, comme M. Bérard de la Banque Nationale l'a déjà suggéré, on vidait les régions du Québec pour toutes les envoyer à Montréal pour instaurer le système de proportionnelle à Montréal, pas de problème pour moi. Mais, à partir du moment où il y a des régions au Québec, il faut en tenir compte. Vous ne me dites pas que mon 15 minutes est déjà passé?

Le Président (M. Ouimet): Non. Je vous dis que votre 10 minutes est déjà passé, puis là je vais ouvrir la période d'échange de cinq minutes avec vous. Mais votre propos, il est extrêmement clair, je vous en remercie. M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: M. Sénéchal, rassurez-vous, vous ne m'avez ni réveillé ni endormi, j'ai trouvé ça très intéressant, tout comme toutes les personnes qu'on a entendues aujourd'hui. Vous soulignez, je pense, un point important quand vous dites de regarder ce que vous appelez les effets pervers. À vouloir corriger des situations qui sont éclatantes, très souvent, je pense, vous avez raison, on crée des problèmes qui sont latents et qu'on ne voit pas. Qu'est-ce qui devrait guider la commission dans sa recherche de trouver une solution qui vise évidemment les objectifs qu'elle s'est donnés? Est-ce qu'on doit davantage regarder la représentation au niveau de l'élu et du député dans ces régions plutôt que de regarder une représentation de courants ou de partis politiques, tel que c'est prôné par certains?

M. Sénéchal (Pierre-Paul): Moi, la solution que je propose... Parce que c'est sûr que je fais la critique un peu de la formule proportionnelle, j'ajoute quand même des propositions à la fin de mon texte, là, moi, je pense que... C'est sûr que, comme je le disais tout à l'heure, le système uninominal donne la vie dure aux petits partis. Ce que je proposerais ? j'en ai fait trois propositions, ça vaut ce que ça vaut; mais ? moi, je serais en faveur de faire participer aux travaux des commissions parlementaires ainsi qu'aux missions de l'Assemblée nationale ? c'est important, il y a des missions à l'étranger, des missions au Canada, etc. ? tout parti qui a recueilli au moins 5 % d'appui lors de l'élection précédente. Ça, c'est concret. À l'Assemblée nationale, on devrait augmenter aussi le temps d'intervention des tiers partis selon un ratio à déterminer. Puis la question du financement des partis politiques, je trouve que la réforme introduite au fédéral qui récompense le nombre de voix obtenues, je trouve que ça pourrait aider considérablement les nouveaux partis émergents au Québec.

n(18 h 10)n

Mais je fais toujours la différence dans... Là, je parle de petits partis, mais, dans l'approche du mémoire que je vous présente aujourd'hui, je ferais la différence entre parti émergent et courant d'opinion émergent parce que ce n'est pas vrai que, parce qu'un parti ne réussit pas à faire élire son candidat, que les courants d'idées n'entrent pas à l'Assemblée nationale. Pour moi, c'est très important à considérer, ce facteur-là, là.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Trois-Rivières. M. Boivin.

M. Boivin (Guillaume): Alors, un peu sur le même propos que vous venez d'énoncer, du seul fait qu'un courant politique minoritaire ne s'exprime pas par sa propre voix mais par l'entremise d'une faction à l'intérieur d'un parti existant qui, lui, bénéficie d'assises plus larges pour les faire rayonner, mais est-ce qu'on peut déduire de vos propos autre chose que ces courants minoritaires compensés... constitués ou non en partis politiques devront quémander leur acceptation au sein des deux partis historiques et que conséquemment les 200 000 Québécois membres de ces partis et les establishments de ces partis seront les grands intermédiaires détenteurs de la voix démocratique au Québec? Peut-on déduire autre chose de vos propos que ça?

M. Sénéchal (Pierre-Paul): En fait, s'ils ne sont pas représentés à l'Assemblée nationale, c'est... La nature a horreur du vide, hein? Si ce ne sont pas ces personnes-là qui représentent ces courants d'opinion là, il va y avoir des députés, j'en suis certain. Je trouve ça choquant pour un parti politique qui, à cause de son programme, ne réussit pas à faire élire ses deux, trois ou quatre députés qui représentent ce courant-là, mais, avec le soutien que je propose, là, j'ai quelques mesures, peut-être qu'à l'élection suivante ils auront eu une visibilité, puis ça leur donnera un coup de pouce. Mais ce n'est pas antidémocratique que de penser que ces courants-là sont représentés à l'Assemblée. Et la démocratie n'existe pas uniquement pour valoriser les partis, elle existe pour respecter des courants d'opinion dans notre société.

Le Président (M. Ouimet): Bien.

M. Sénéchal (Pierre-Paul): Le parti, ce n'est pas la finalité...

Le Président (M. Ouimet): Alors, là-dessus, M. Sénéchal, je vous remercie infiniment d'avoir participé et d'avoir contribué à nos travaux. Je profite de l'occasion aussi pour remercier, au nom de tous les membres de la commission, toutes les personnes qui ont assisté, toute la journée, aux travaux de cette commission. Sachez qu'il y a une transcription de tout ce qui s'est dit en commission qui est accessible par le biais du canal de l'Assemblée nationale, et je vous invite à continuer de suivre nos travaux.

Je vous indique également que la commission se réunira à Rimouski, à la salle A du Centre des congrès de Rimouski, le mardi 14 février 2006, à 10 heures, afin de poursuivre ses auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard de l'avant-projet de loi sur la Loi électorale.

Et là dessus j'ajourne les travaux. Je vous remercie infiniment.

(Fin de la séance à 18 h 14)


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