Journal des débats (Hansard) of the Select Committee on the Impacts of Screens and Social Media on Young People’s Health and Development
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Friday, January 31, 2025
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Vol. 47 N° 9
Special consultations and public hearings on the Impacts of Screens and Social Media on Young People’s Health and Development
Aller directement au contenu du Journal des débats
Intervenants par tranches d'heure
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Dionne, Amélie
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Leduc, Alexandre
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Tremblay, Suzanne
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Bogemans, Audrey
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Cadet, Madwa-Nika
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Cadet, Madwa-Nika
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Dionne, Amélie
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Sainte-Croix, Stéphane
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Leduc, Alexandre
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Gagnon, Yannick
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Gagnon, Yannick
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Dionne, Amélie
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Tremblay, Suzanne
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Cadet, Madwa-Nika
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Gendron, Marie-Belle
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Leduc, Alexandre
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Leduc, Alexandre
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Dionne, Amélie
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Cadet, Madwa-Nika
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Bogemans, Audrey
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Bogemans, Audrey
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Dionne, Amélie
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Cadet, Madwa-Nika
9 h (version révisée)
(Neuf heures trente-trois minutes)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
bon vendredi, tout le monde. Bienvenu à cette séance. Ayant constaté le quorum,
je déclare la Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux
sociaux sur la santé et le développement des jeunes ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue et je vous demande,
à toute personne qui a un cellulaire, de vouloir éteindre la sonnerie. Merci
beaucoup.
Alors, la commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur les
impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé des jeunes.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Non, Mme la
Présidente.
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
cet avant-midi, nous entendrons le Conseil en éducation des Premières Nations,
le docteur Patrick Giroux, professeur en technologie éducative et chercheur
associé, et HabiloMédias.
Donc, je souhaite la bienvenue à nos
premiers témoins, donc, M. Bruno Rock, coordonnateur des projets
éducatifs, et M. David Vigneault, conseiller technologique... en
technologies de l'information et de la communication. Alors, bienvenue à cette
commission. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous faire part
de votre <exposé...
>
9 h 30 (version révisée)
<19273
La
Présidente (Mme Dionne) :
...je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour nous faire part de votre >exposé, et ensuite on procédera à une
période d'échange avec l'ensemble des membres de la commission. Donc, la parole
est à vous.
Conseil en éducation des Premières Nations (CEPN)
M. Rock (Bruno) : «Kuei
kassinu etashiek.» (S'exprime en innu).
Bonjour, Mme la Présidente. Mmes, MM. les
députés. Mon nom, Bruno Rock. Je suis coordonnateur aux projets éducatifs au
Conseil en éducation des Premières Nations et je viens de la communauté innue
de Pessamit. Je suis accompagné de David Vigneault, qui est conseiller
pédagogique en technologies de l'information et de l'information, et on va
partager notre temps à deux. Au nom du Conseil en éducation des Premières
Nations, nous vous remercions de cette invitation.
Le CEPN. C'est quoi, le CEPN? On célèbre
nos 40 ans en 2025. C'est une association mandatée par 22 communautés
des Premières Nations sur les vastes territoires connus, présentement, comme
Québec. Notre objectif est d'appuyer la prise en charge et le contrôle de l'éducation
par et pour les Premières Nations, à savoir une éducation qui intègre les
savoirs traditionnels et les pratiques éducatives adaptées pour améliorer la
réussite scolaire et renforcer le lien culturel des élèves avec leurs
communautés.
Le CEPN n'est pas un centre de services
scolaires, notre mission est plus large que ça. Nous sommes un porte-étendard
des intérêts des communautés pour que les Premières Nations exercent localement
leur gouvernance en éducation.
Considérant notre mission, notre
présentation et nos propositions porteront de façon spécifique sur le volet
éducatif de l'enjeu présenté à cette commission, à savoir les mesures d'encadrement
des écrans, notamment à l'école et sur le Web, y compris l'accès aux outils
numériques d'apprentissage.
Afin de remplir efficacement nos mandats,
nous soutenons les organismes éducatifs des Premières Nations qui, à leur tour,
offrent des services directs aux élèves, représentant près de 6 000 jeunes.
Nous offrons, entre autres, des services en éducation spécialisée, en
conseillance pédagogique, en langues et cultures, en administration scolaire,
en gouvernance des données et en technologies éducatives.
Comme vous le savez déjà, l'accès aux
services et aux outils technologiques est essentiel. Grâce à une approche d'économies
d'échelle, le CEPN dessert une vingtaine de communautés avec la fibre optique,
non seulement dans les écoles, mais également dans les autres services publics
des communautés, permettant ainsi de surmonter les barrières géographiques et l'isolement
éducatif.
Exemple concret : l'an dernier, la première
nation attikamek de Manawan a inauguré sa nouvelle école primaire, l'école
primaire Awacak. Le CEPN a joué un rôle de premier plan en déployant au total
38 kilomètres de câble réseau, 81 antennes wifi et 600 connecteurs
réseau, ce qui facilite la création d'une communauté d'apprentissage
professionnelle.
Entre autres, les enseignants de nos
communautés déploient une culture de collaboration et de partage des capacités
permettant ainsi le développement des programmes et des stratégies d'enseignement
conçus par et pour les Premières Nations. Cet accès leur permet de se doter des
ressources pédagogiques culturellement et linguistiquement appropriées. Ce sont
les ingrédients d'une stratégie d'apprentissage gagnante plaçant l'élève au
cœur de la démarche avec son identité, sa langue, sa culture.
Un autre exemple concret : en
septembre 2024, le CEPN a dévoilé le portail éducatif Les Voix du territoire,
qui compte désormais près de 8 000 utilisateurs uniques. Il offre des
ressources fiables sur les réalités et les perspectives des Premières Nations
et des Inuits au Québec, pour tous les enseignants, qu'ils soient autochtones
ou allochtones.
Ces ressources numériques, en plus d'être
moins coûteuses, sont conçues pour permettre aux jeunes des Premières Nations
de développer un grand sentiment d'appartenance. Par exemple, le portail
propose des interactions avec des gardiens du savoir, des informations sur les
nations, les territoires, les cultures, les traditions ainsi que des récits et
légendes. C'est pourquoi maximiser les atouts des écrans et offrir un
encadrement adapté à leur utilisation est primordial. D'ailleurs, lors de la
crise sanitaire, nous avons conçu des guides sur l'apprentissage en ligne en
milieu <Premières...
M. Rock (Bruno) :
...
crise sanitaire, nous avons conçu des guides sur l'apprentissage en ligne en
milieu >Premières Nations ainsi que sur l'utilisation des médias sociaux
en milieu scolaire.
Ainsi, comme en témoignent les initiatives
présentées, les écrans sont des outils d'aide à l'apprentissage et non des
moyens d'apprentissage. Toutefois, en parallèle, il est de notre responsabilité
collective de veiller à ce que leur intégration se fasse en cohérence avec la
préservation du patrimoine culturel et linguistique des Premières Nations.
Je passe maintenant le bâton de la parole
à mon collègue, David. «Tshinashkumitinau.» Merci beaucoup.
M. Vigneault (David) : «Kwei
keskina. Nin Tapit Pigno.» Bonjour, je suis David Vigneault. Je suis conseiller
aux technologies de l'information et des communications au CEPN. Je possède une
vaste expérience en enseignement, tant dans le réseau scolaire québécois que
dans le milieu scolaire des Premières Nations au Québec.
Bien qu'il existe des similarités entre
ces milieux, comme l'isolement géographique ou les contraintes socioéconomiques,
les objectifs, les environnements, les méthodes d'enseignement et les rôles des
équipes-écoles sont différents. En milieu autochtone, les outils
technologiques, dont les écrans, aident à dépasser les barrières de
communication et les exigences d'écriture qui sont à l'encontre de la tradition
orale.
À titre d'exemple, le CEPN a collaboré à
la création d'un balado, dans la communauté anishnabe de Lac-Simon, pour les
élèves dont le français n'est pas la langue maternelle. Cet outil leur a permis
de communiquer leur compréhension autrement via les nouvelles technologies. La
réponse des élèves au projet fut phénoménale et les résultats furent encore
meilleurs qu'envisagé.
• (9 h 40) •
D'ailleurs, ce n'est pas qu'en milieu
isolé que les écrans s'utilisent de façon positive. L'école Wahta', de Wendake,
a créé une classe-musée qui inclut des projets sur divers sujets et permet aux
élèves de participer à des projets de réalité augmentée.
Un autre exemple concret qui illustre
notre capacité à maximiser les impacts positifs des écrans, l'école Awacak de
Manawan nous a contactés en mars 2024 pour former leurs enseignants,
majoritairement du premier cycle du primaire, pour encadrer l'utilisation et la
gestion des iPad en classe afin que les élèves n'aient accès qu'aux sites Web
et qu'aux applications que les enseignants auront ciblés pour eux.
Nous reconnaissons que, sans encadrement,
l'utilisation des écrans et ressources numériques, même à des fins
pédagogiques, peut entraîner certains effets négatifs sur le développement de
l'enfant. Toutefois, ces outils en milieu premières nations, et sans s'y
restreindre, rendent l'éducation plus accessible, aident à briser l'isolement,
créent des communautés d'apprentissage, valorisent des ressources basées sur
l'identité, la langue et la culture et, si le tout est bien utilisé, incitent
l'élève à la persévérance scolaire dans un environnement culturellement
sécurisant.
Enfin, nous croyons également que ces
technologies aident à surmonter des désavantages historiques et structurels et
à fournir des moyens pour le renouveau socioéconomique par et pour les
Premières Nations. D'ailleurs, dans son dernier rapport sur la réussite
éducative des élèves autochtones, le Vérificateur général rappelle le rôle
crucial de l'éducation dans la lutte contre la pauvreté, l'enrichissement sur
le plan social, culturel et économique. Un accès limité à l'éducation nuit à
l'employabilité et aux occasions de participer à la vie de la société. L'accès
aux technologies numériques en milieu autochtone réduit l'impact de ces défis.
Finalement, le CEPN estime que cette étude
devrait intégrer l'approche holistique, les définitions, les valeurs et les
réalités des Premières Nations dans la formulation de toute conclusion
concernant l'utilisation des écrans pour des fins éducatives. Les appels à
l'action 11 et 21 du rapport de la commission Viens recommandent au
gouvernement de tenir compte des besoins et des stratégies identifiés par les
Premières Nations et Inuits en matière d'éducation. Notre vision aidera
grandement les membres de la commission dans leurs réflexions et dans leurs
discussions à venir.
«Ekote mikwetc.» Ce sera tout, merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
infiniment. J'aurais envie de vous remercier en innu, mais je ne voudrais
surtout pas massacrer votre belle langue. Alors, nous allons procéder à une
période d'échange. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, la parole est à vous.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous deux. Très content de vous voir ce matin. Merci pour
votre contribution, elle est fort appréciée. Je vais vous amener sur des
aspects très pointus de nos réflexions actuelles.
Vous avez peut-être vu, évidemment, les
médias et toutes les discussions qu'on a par rapport, par exemple, à l'interdiction
du cellulaire à l'école. Vous savez que c'est interdit dans les classes depuis
mars dernier. Dans nos tournées, nos consultations, peu de gens, voire personne
n'a remis ça en question. Mais là la discussion qu'on doit avoir puis qu'on
doit trancher éventuellement, les élus, c'est : Est-ce qu'on interdit au
complet à l'école? Et, si oui, qui devrait prendre la décision? Est-ce que ça
doit être les conseils d'établissement, et donc école par école, le centre de
services scolaire? Est-ce que ça doit être une directive du ministère au grand
complet? Ça fait que ça, c'est ma première question pour vous.
Puis en parallèle il y a toute la question
de la majorité numérique. Est-ce qu'on doit mettre une majorité numérique?
Puis, si oui, à quel âge? 14, 16, 18 ans? Et, dans les réalités <autochtones...
M. Leduc :
...
majorité numérique? Puis, si oui, à quel âge? 14, 16, 18 ans? Et, dans les
réalités >autochtones que vous représentez aujourd'hui, comment tout ça
pourrait atterrir? Avec des défis ou pas? Voilà.
M. Rock (Bruno) : Je vais
laisser mon collègue répondre à la deuxième question sur la majorité numérique.
Mais concernant le cellulaire à l'école, étant donné que notre structure de
gouvernance n'est pas du tout la même, comparativement à la province, nous,
c'est vraiment... on part... c'est les écoles, et les communautés, et les
conseils, le gouvernement des communautés qui décident vraiment de qu'est-ce
qui est bon pour leurs jeunes. Nous, le CEPN, on est vraiment là pour
conseiller, c'est un conseil, donc on est vraiment plus à titre aviseur. Par
contre, c'est certain que nous, tu sais, on ne s'est pas positionnés
directement sur cette question-là, comme je vous dis, c'est vraiment aux
écoles. Par contre, on a posé la question aux communautés, quand cette règle-là
est sortie, a été appliquée, en début d'année scolaire, puis je vous dirais
qu'il y a des écoles qui sont allées de l'avant avec l'interdiction formelle,
alors que d'autres, non. Ça fait qu'on n'est pas allés plus loin de ce côté-là.
M. Leduc : Mais est-ce que je
déduis que, si on devait aller vers une interdiction, une interdiction mur à
mur de la part du ministère, vous, vous seriez plus ou moins intéressés par ça,
vu que... Là, mes connaissances sont limitées, mais j'assume que vous devez
appliquer une partie du programme du ministère puis peut-être... Je ne sais pas
trop comment ça marche dans le concret, là, mais bref, est-ce qu'il y a...
est-ce qu'une directive du ministère, ce serait quelque chose qui vous
heurterait un peu dans votre situation?
M. Rock (Bruno) : Pas
vraiment, étant donné, encore une fois, comment on est... on gère... comment
les écoles sont gérées, c'est-à-dire. On n'est pas soumis obligatoirement, on
n'est pas soumis de suivre toutes les règles du ministère de l'Éducation. Donc,
c'est vraiment les écoles qui décident de leurs positions.
M. Vigneault (David) : Mais,
pour la deuxième partie de la question, je voudrais juste valider, quand vous
parlez de majorité numérique, qu'est-ce que vous voulez dire précisément?
M. Leduc : C'est de mettre
une loi, un peu comme pour acheter de l'alcool, par exemple, il faut avoir
18 ans, pour avoir un compte de médias sociaux, il faut avoir 14, 16,
18 ans.
M. Vigneault (David) : Je
pense que, si je ne me trompe pas, présentement, la plupart recommandent
13 ans. Mais, en même temps, moi, mon rôle dans l'organisation, c'est de
m'assurer qu'à l'intérieur des écoles ce soit utilisé de façon adéquate. Donc,
ça, c'est un peu en dehors de mes juridictions, de qu'est-ce que je fais.
Maintenant, s'il y a une loi qui s'applique, c'est sûr que je vais en tenir
compte de façon à proposer des outils qui correspondent à ce que les élèves
peuvent et doivent utiliser. Mais, de là à être capable de recommander l'âge,
ce ne serait pas... ce n'est pas vraiment de mon expertise.
M. Leduc : En même temps,
vous êtes un pédagogue, si je comprends bien, vous avez de l'expérience. De
votre avis un peu spontané, peut-être, à partir de quel âge vous considérez
qu'un adolescent a assez de discernement pour pouvoir naviguer de manière libre
sur un média social?
M. Vigneault (David) : Encore
là, c'est une question que... qui va au-delà du cadre de mes fonctions. Comme
je dis, moi, je suis là pour m'assurer que les outils pédagogiques sont
utilisés et adéquats. Puis les outils pédagogiques qu'on propose en classe, de
primaire à secondaire, sont... correspondent aux capacités et à la maturité des
élèves. Si on dit, par exemple : Faire une recherche par eux-mêmes sur
Internet, c'est sûr qu'on ne proposera pas ça, nécessairement, aux premières...
aux élèves de première année, deuxième année. Mais, plus qu'on va arriver vers
la fin du secondaire, plus les élèves vont être indépendants. Si on parle des
médias sociaux, ça n'a pas vraiment rapport avec le contexte scolaire, mis à
part le fait qu'une école peut avoir une page sur les médias sociaux pour
parler de ce qu'ils font. Mais l'élève en tant que tel versus les médias
sociaux, c'est extrascolaire.
M. Leduc : Merci beaucoup.
M. Rock (Bruno) : Mais pour
compléter dans cette voie-là, c'est certain que, dans la façon qu'on fonctionne,
aussi, au CEPN et dans les communautés, si jamais on a à se prononcer sur,
justement, la majorité numérique, ce n'est pas nous, au CEPN, qui allons
prendre la décision, comme je le répète. Ce qu'on va faire, c'est qu'on va
rassembler des experts des écoles, on va faire un comité, puis c'est vraiment
le comité qui va se positionner, se positionner mais plus à titre aviseur,
encore une fois, là, pour possiblement produire quelque chose, un document
quelconque qu'on va distribuer aux communautés, aux écoles puis qu'à ce
moment-là c'est elles qui vont décider si elles vont l'appliquer ou pas.
M. Leduc : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Je passe maintenant la parole à Mme la députée de Hull.
Mme Tremblay : ...peut-être
différent d'une école à l'autre, bon, bien, ça semble être... tu sais,
l'utilisation, là, des écrans, des technologies semble être au cœur, là, de
l'enseignement, des méthodes pédagogiques que vous utilisez, pour les raisons
que vous avez énumérées. Ils sont équipés comment? Est-ce que chaque élève a
son iPad, un <ordinateur...
Mme Tremblay :
...
équipés comment? Est-ce que chaque élève a son iPad, un >ordinateur?
Comment ça fonctionne dans vos écoles?
M. Vigneault (David) : Bien,
en fait, c'est ça, ça dépend, il n'y a pas de plan uniforme proposé. Comme
chaque école est maître de ses décisions et de ses dépenses, c'est l'école qui
va selon ce qu'ils identifient comme besoins. Tu sais, ça peut aller de :
il y a beaucoup d'équipements... Je peux vous donner l'exemple, par exemple, de
l'école Amik-Wiche, à Lac-Simon. En fait, les deux écoles, à Lac-Simon, ont un
personnel, une direction qui sont vraiment très axés vers les technologies, qui
croient beaucoup à ça. Ça fait que, eux, leur parc informatique est vraiment
très garni, et ça va des lunettes Meta Quest, aux iPads, les imprimantes 3D.
Eux, ils ont vraiment embarqué là-dedans puis ils s'en servent au maximum.
Comme, vous voyez, ils m'ont écrit, juste
avant qu'on rentre, comme, à 9 h 28, pour me dire qu'ils avaient
développé un projet avec des lunettes de réalité virtuelle pour être capables
de se promener dans certains endroits de la nature, virtuellement, dans les
moments donnés où ça ne sera pas possible. Parce qu'il y a beaucoup de...
comment je dirais, il y a beaucoup d'immatériel, dans la façon culturelle
autochtone d'enseigner, puis ces outils-là technologiques permettent, d'une
certaine façon, de capturer cet immatériel-là, capturer les moments qu'on peut
un peu revivre. Et ceux qui... les écoles qui croient vraiment à cette façon de
faire vont s'équiper en fonction.
En même temps, ils vont venir me demander
des recommandations, qu'est-ce qu'ils pensent... qu'est-ce qu'on recommande
qu'ils achètent, etc. Ce n'est pas toutes les écoles qui sont équipées autant
que Lac-Simon, par exemple, mais toutes les écoles sont bien équipées. Puis
pour avoir enseigné, oui, dans le réseau provincial, mais j'ai enseigné aussi à
l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve, les écoles autochtones sont beaucoup
mieux équipées, technologiquement, que ce que j'ai vu ailleurs. Ce n'est même
pas la même ligue.
• (9 h 50) •
M. Rock (Bruno) : Puis en
termes d'équipement, évidemment, toutes les écoles sont équipées de Smart
Boards. La plupart, évidemment, aussi ont des iPads. Puis on a fait sortir ces
chiffres-là, récemment, puis je vous dirais que ce n'est pas toutes les écoles
que c'est du un pour un, mais, beaucoup d'écoles, c'est toujours un pour un.
Puis, parmi les 6 000 élèves, comme on le disait, il y en a quand
même 2 800, là, qui ont un iPad à leur disposition.
Puis c'est certain que, tu sais, pour
revenir un peu au mandat du CEPN, on est là vraiment pour les accompagner. Le
CEPN a été vraiment précurseur et a été rapide dans l'instauration puis le
déploiement des outils numériques, dès les années 90, je dirais, avec... Il
fallait pallier, vraiment, à l'éloignement puis à l'isolement géographique. Les
22 communautés membres sont isolées les unes des autres, donc tout ça
facilite notre rapprochement.
Mme Tremblay : Il y a des
effets, là, vous le savez, là, de l'utilisation, là, des écrans prolongés chez
les jeunes, puis ça inclut autant l'école que la maison. Plusieurs intervenants
nous ont dit à quel point c'était important, la prévention, tu sais, au niveau
de la famille, parce que, bon, il y a beaucoup... il s'en passe beaucoup à la
maison, donc ils utilisent les médias sociaux dans l'école aussi. Est-ce que
vous avez ce rôle-là? Est-ce que vous envoyez de l'information de vos
préventions, justement, pour, tu sais, les parents, par exemple, que le nombre
d'heures... la cyberintimidation? Est-ce que vous avez ce rôle-là d'informer
vos écoles, de travailler en prévention?
M. Rock (Bruno) : On a un
côté prévention puis on a un département ou, en tout cas, des personnes qui
travaillent pour la participation parentale et communautaire, qui outillent les
communautés et les écoles dans leur accompagnement. Puis là je ne pourrais pas
vous dire si, oui ou non, on a fait des... Parce qu'on on sort des pamphlets
mensuels ou, en tout cas, au moins six, sept fois par année, dans lequel on
donne l'information aux parents. Est-ce que ça, ça en fait partie? Je ne
pourrais pas dire, là, mais définitivement que c'est un rôle qu'on pourrait
avoir.
M. Vigneault (David) : Puis
je pourrais même rajouter aussi : le CEPN, dans sa nature, répond aux
demandes des communautés. Donc, si une communauté dit : Bien, nous, on
voit un problème chez les jeunes, il y a vraiment trop d'utilisation des écrans
dans les familles, hors école, là, on prend le rôle d'aller chercher des informations,
d'informer les communautés et les parents, on peut... La façon que notre mandat
est fait, on est plus réactifs, on n'a pas le mandat d'imposer des choses, on
ne peut pas imposer des choses aux écoles. Ça fait qu'on répond juste aux
demandes.
Mme Tremblay : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Merci
beaucoup. Donc, dans la même ligne d'idées, vous pourriez être ouverts à un
guide de bonnes pratiques, avec un volet pour les familles puis un volet
scolaire, qui pourrait être revu par un comité aviseur, là, qui regroupe les
22 écoles? Pour vous, ça serait quelque chose qui pourrait vous aider puis
qui serait un bon outil?
M. Rock (Bruno) : C'est
certain que oui. Puis la particularité, je vous dirais, de tout ce genre de
guides et de politiques qui sont produits par le ou les gouvernements, là, <souvent...
M. Rock (Bruno) :
...
guides et de politiques qui sont produits par le ou les gouvernements, là, >souvent,
on va prendre ces politiques-là et ces guides-là et on va essayer d'en trouver
de diverses sources et d'ajouter notre côté premières nations. Parce que
souvent, malheureusement, les Premières Nations, tu sais, ils vont être
consultés, oui, mais souvent pour plus tard ou trop tard. Ça fait que, souvent,
on veut ajouter nos réalités pour que ça touche nos réalités dans les
communautés.
M. Vigneault (David) : Puis
j'ajouterais aussi que, juste un peu avant la semaine dernière, je pense, on a
eu une rencontre avec les différentes directions des différentes écoles qui
font partie du CEPN, puis c'est une question qui nous a été demandée, aussi,
est-ce qu'on allait les aider à encadrer l'utilisation des écrans en classe,
est-ce qu'on allait... pas fournir une idée, mais comme aider les écoles, dans
le fond, à développer leur politique d'usage d'écran. Donc, ça a été demandé,
donc on va le faire.
Mme Bogemans : Superintéressant.
Autre chose. Dans le cumul des heures, parce que vous faites clairement une
démarcation entre le matériel éducatif fourni par l'école avec, bon, des
applications, des logiciels, des accès qui sont très contrôlés, et les outils
personnels, comment s'assurer que le temps maximum par âges, finalement, soit
cohérent, quand on met la consommation personnelle à la maison des enfants?
Est-ce que vous avez pensé à un système de communication école-enfant ou est-ce
que vous nous suggérez quelque chose en ce sens-là?
M. Vigneault (David) : C'est
une excellente question, je dirais, parce que, comment... Comment, vraiment,
gérer qu'est-ce qui se passe à la maison, tu sais? On peut fournir toutes les
recommandations qu'on veut, même si les parents sont stricts. Moi, j'ai des
neveux qui ont comme 10, 12 ans, puis ils sont bien capables d'aller sur
leur tablette, passé «bed time». Ça fait que ça reste sur papier, mais, tu
sais, comme, au final, on fait le mieux qu'on peut.
Mais, dans l'optique qu'on a, on est d'avis
qu'il ne faudrait pas limiter l'utilisation des écrans dans le cadre scolaire,
quand c'est utilisé à des fins pédagogiques pertinentes. C'est sûr que, si on
parle de, je ne sais pas, moi... il y a du temps à tuer en classe, puis on
envoie tout le monde jouer sur un iPad, ce n'est pas la même chose. Mais, en
tant qu'utilisation d'outils technologiques pédagogiques, aide à
l'apprentissage, et que c'est pertinent, bien, tu sais, comment est-ce que je
dirais ça, si on regarde le portrait global, ces outils-là, dans nos
communautés, on voit... on peut constater que ça aide, ça contre le décrochage
scolaire. Puis, oui, je peux reconnaître qu'il y a des... il y a des effets sur
le développement, mais il y a encore plus d'effets quand tu décroches en
troisième année que quand tu passes quatre heures sur une tablette par jour.
Ça fait que, tu sais, «in the end», au
final, c'est ça, ça devient difficile de dire : Oh! les familles, vous ne
devriez pas faire plus que 2 h 30, parce qu'à l'école on va s'en
servir 3 h 15, tu sais? Ça commence à être... c'est du cas par cas,
beaucoup. Puis je te dirais, je dirais que, plus la famille est impliquée dans
l'éducation de l'élève, de son enfant, plus les familles sont mises au courant
des recommandations, des faits, bien, plus les personnes qui ont ça à cœur vont
l'appliquer. Pour ceux que ça n'intéresse pas, on ne peut rien faire.
Mme Bogemans : Donc, vous
êtes quand même contre le temps d'écran bonbon, surprise, récompense à l'école
puis les films qui sont là pour passer du temps, là, qui ne seraient pas
étudiés, par exemple, dans un cadre culturel ou avec une plus-value, là, à
l'enseignement, là?
M. Vigneault (David) : Bien,
il faudrait que ce soit exceptionnel. Tu sais, je vous ne dirais pas, en tant
que... Ça fait 15 ans que je suis enseignant. Je ne vous dirais pas que je
ne l'ai jamais fait, là, je l'ai fait quand même, probablement, plus souvent
que je devrais, mais c'est une exception. Ça ne peut pas être la solution de
base, là.
Mme Bogemans : Parfait.
Parfait. Est-ce que j'ai le temps pour une dernière question? O.K. Parfait. Je
sais que ça sort un petit peu du contexte scolaire, là, mais les jeux vidéo et
les garçons, on en entend beaucoup parler. Vous avez eu la question,
précédemment, pour les médias sociaux, l'âge limite, mais est-ce que vous
pensez qu'une limite d'âge pour certains jeux vidéo ça ferait du sens aussi?
M. Vigneault (David) : En
tant que... en tant que gamer moi-même, bien, tu sais, ça dépend de la nature
du jeu. Moi, je ne vois pas de problème à ce que mes neveux, par exemple,
jouent à des jeux où c'est un simulateur de travail de ferme, là, tu sais? Je
ne pense pas que, qu'ils soient influencés à aller planter des patates, ça va
être nécessairement négatif. En même temps, ça va avec ce qu'on appelle, je
pense, l'ESRB, là, la suggestion d'âge pour les jeux vidéo, ça, et c'est mon
avis personnel à ce niveau-là, je pense que c'est... il n'y a pas assez de
choses qui est fait pour que ça soit renforcé. Très facile d'acheter un jeu
17 ans et plus dans un magasin, «whatever», mais, au-delà de ça... Et je
pense aussi que les jeux vidéo sont très <utiles...
M. Vigneault (David) :
...
mais, au-delà de ça... Et je pense aussi que les jeux vidéo sont très >utiles,
même en contexte pédagogique. Ça fait que ce n'est pas le jeu vidéo en tant que
tel, le problème, du moins de mon point de vue et du point de vue du travail
que j'ai, ce n'est pas le jeu vidéo qui est le problème, la mécanique du jeu
vidéo qui est le problème, c'est la façon qu'il est utilisé, le contenu qui est
dedans.
Mme Bogemans : ...c'est de
gérer le bon matériel pour la bonne catégorie d'âge?
M. Vigneault (David) : C'est
ça.
Mme Bogemans : O.K.
M. Vigneault (David) : Puis,
ça reste la même chose comme pour les films, on ne peut pas empêcher une
famille qui veut que son enfant de 17 ans écoute un film d'horreur, chez
eux, on ne peut pas décider pour eux autres, forcément.
Mme Bogemans : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Rock, bonjour, M. Vigneault, merci pour votre
présentation. Première question, juste une question de précision sur ce que le
député d'Hochelaga-Maisonneuve vous demandait : Donc, je comprends que,
s'il y avait une directive du ministère encadrant l'usage du cellulaire à
l'école au grand complet, donc, les 22 communautés des Premières Nations
que vous représentez ne seraient pas assujetties à une telle directive? C'est
bien ça?
Une voix : ...
Mme Cadet : O.K., parfait.
Donc, ça répond, donc, à cette question-là. Ensuite, sur la lignée, donc, de la
collègue d'Iberville, donc, moi aussi, donc, j'ai bien noté qu'il y avait, donc,
une démarcation très claire, donc, qui était faite au niveau de l'utilisation
des outils technologiques à des fins pédagogiques et celles utilisées à des
fins ludiques. Manifestement, donc, si on parle, bon, de l'emploi, de l'usage
du cellulaire à l'école, c'est parce que les intervenants précédents qui sont
venus nous voir dénotaient une problématique ou un enjeu de l'usage des outils
personnels comme le cellulaire à des fins ludiques, dans les heures de
récréation, dans les heures, donc, de pause, donc, entre les classes et un lien
moins fort entre les élèves, les élèves étaient moins incités à bouger, à faire
d'autres types d'activités. Dans les... au niveau, donc, des institutions que
vous, vous représentez, est-ce que c'est une problématique qui a été transmise
au Conseil en éducation des Premières Nations?
• (10 heures) •
M. Rock (Bruno) : Ce n'est
pas une question qui a été vraiment soulevée. On rencontre les directions
mensuellement et virtuellement, d'ailleurs, puis ce n'est pas une question qui
a vraiment été soulevée, là. Par contre, tu sais, je le répète, le CEPN peut
être là... Tu sais, si on y va de façon plus... d'un point de vue
sensibilisation, c'est certain que, nous, ça pourra éventuellement être un
rôle, surtout que, tu sais, on constate, évidemment, que le numérique prend de
plus en plus de place, le côté numérique personnel versus académique.
Évidemment que, si on peut aider les communautés là-dedans, on le fera.
M. Vigneault (David) : Je
rajouterais aussi... J'ai enseigné, là, sur une communauté attikamek puis je
dirais que oui, c'est une problématique, mais ça reste au niveau local de
l'école. On vivait ça à l'intérieur de l'école. Comme n'importe quelle autre
école à laquelle j'ai enseigné, ça restait au niveau local, tu sais, la direction
n'emportait pas forcément ça au CEPN pour dire : On a un problème, il
faudrait faire une politique globale. C'est du cas par cas, c'est école par
école.
Puis tu sais, moi, là, dans mon rôle, puis,
même, ça rejoint ma vision personnelle, si vous me demandez mon avis, une
tablette, c'est un gros cellulaire. Ça fait que, tu sais, la problématique est
qu'il n'y a pas une éducation de faite auprès des élèves sur le fait que ce
sont des outils, ce n'est pas juste du divertissement. Moi-même, je ne serais pas
contre l'utilisation des cellulaires en tant qu'outils dans une classe, parce
que ça peut faire la même chose qu'une tablette, mais encore faut-il que les
élèves soient sensibilisés au fait que c'est un outil, que ça sert dans tel
contexte et que, chez eux, ils peuvent bien s'en servir pour divertissement,
s'ils veulent, mais présentement, quand ils sont à l'école, c'est un outil,
puis tout usage qui n'est pas en tant qu'outil devrait être interdit, quant à
moi, oui.
Mme Cadet : Puis, M.
Vigneault, sans que ce soit une problématique qui a été rapportée au CEPN,
vous, comme enseignant... Puis vous dites, donc, ça... Tu sais, vous le voyez
comme dans... en fait, comme dans toutes les écoles, tu sais, vous le voyez,
là, qu'il y a cet usage de la part des élèves du... soit du cellulaire ou de
n'importe quel autre outil. Effectivement, je donnais le cellulaire parce que
c'est celui qu'on mentionne ici, qui est le plus présent, là, auquel les jeunes
ont le plus accès. Mais cet encadrement-là, tu sais... Vous voyez une
nécessité, donc, d'un encadrement au niveau de l'aspect ludique, là, à l'école,
du cellulaire ou de tout autre outil, là?
M. Vigneault (David) : Oui.
Bien, tu sais, les adolescents, dans les écoles des Premières Nations, sont
avant tout des adolescents comme les autres, ils font la même chose que tous
les autres adolescents partout au Québec et, je dirais, quasiment au monde, ça
fait que, oui, ils ont envie de communiquer avec leur ami en dessous du bureau
avec leur cellulaire. Et ça, ça reste une question de gestion de classe et de
discipline. Pour avoir dû gérer ça... Et je me considère comme quelqu'un qui
était très alerte à ça. Si je voyais un élève qui souriait en regardant comme
en dessous de son bureau, c'est louche un peu, là. Mais, tu sais, rendu là,
c'est ça, c'est une question de culture d'école, de gestion, de discipline.
Si on monte la question au CEPN, oui,
c'est sûr qu'on va dire : Bien, on vous incite à faire que vos règlements
d'école soient logiques et structurés, en cette fonction-là, d'encourager et de
récompenser les bons comportements, plutôt que punir les mauvais, mais encore
là, c'est ça, c'est une <question...
>
10 h (version révisée)
< M. Vigneault (David) :
...les
bons comportements plutôt que les mauvais, mais, encore là, c'est ça, c'est une
>question de gestion de classe, de discipline, puis, ça, toutes les
écoles ont déjà tous les outils en main pour être capables d'appliquer ça.
Mme Cadet : Vous avez
illustré, donc, les différents outils technologiques utilisés à des fins
pédagogiques, mais surtout, donc, sur le plan culturel, qui sont utilisés à
très grande échelle parmi les écoles que vous représentez. À partir de quel âge
ou de quel niveau scolaire ces outils-là sont utilisés?
M. Vigneault (David) : Ils
sont utilisés à tous les niveaux. Ce n'est pas les mêmes outils qui sont
utilisés. Ce n'est pas... Ils ne sont pas utilisés de la même façon non plus.
Ça fait que ça va, oui, en fonction de la maturité de l'élève ou en fonction de
ses capacités. Je vous dirais qu'en contexte autochtone il n'existe pas
beaucoup de matériel qui a été créé pour les communautés. Tu sais, chaque
communauté parle sa propre langue. Il n'y a pas de maisons d'édition qui font,
comme, des livres, forcément, en anichinabé ou bien en micmac. Ça n'existe pas.
Donc, les outils pédagogiques comme ces
outils technologiques offrent la possibilité, par exemple, dans une classe de
maternelle micmaque, bien, de leur offrir une comptine en micmac qu'ils peuvent
apprendre sur des sujets pertinents pour un enfant de cinq ans. C'est utilisé
dans ce contexte-là et c'est là le bonus qu'on voit, surtout, dans le contexte
des Premières Nations, c'est que ça offre la flexibilité ou la possibilité d'apporter
le contenu culturellement pertinent, alors qu'autrement, sans ça, ce serait
difficile. Mais, c'est ça, à chaque âge, on adapte en fonction des
recommandations, oui, et des capacités de l'élève.
Mme Cadet : Merci. Est-ce que
j'ai le temps...
La Présidente (Mme Dionne) : Allez-y.
Mme Cadet : Oui, peut-être,
en fait, comme dernière question de mon côté, qu'est-ce que vous souhaiteriez
que nous, comme législateurs... Tu sais, vous voyez, donc, on rencontre
plusieurs intervenants. On a un rapport à remettre cet automne. Nous, on aura à...
on devra utiliser les leviers qui sont à notre disposition soit pour légiférer
ou émettre différentes directives à la population. Donc, qu'est-ce que vous
souhaiteriez que l'on retienne de votre présentation et que l'on mette en œuvre
à travers les outils dont nous disposons?
M. Rock (Bruno) : De retenir
le côté positif des technologies et des écrans en classe et dans leur
utilisation. Si on se met dans un contexte Premières Nations et dans un
contexte où la langue est quand même un enjeu très important, le niveau de
langue, et d'acquisition de la langue, et de maîtrise de la langue n'est pas le
même dans les 22 communautés, puis c'est... les outils technologiques
représentent vraiment... sont vraiment importants.
Un exemple ici que j'ai, entre autres, au
niveau de la nation Wolastoqiyik, anciennement malécite, ils ont développé un
outil, là, un outil trilingue, français-anglais-wolastoqey, pour le développement
de la langue et de la culture. Du côté des Anichinabés, également, ils ont fait
des outils d'exploration et de comparaison des langues. Au niveau Attikamek, il
y a un dictionnaire qui est bilingue, français-atikamekw. Du côté Mohawk,
également, ou Kanien'kehà:ka, il y a un répertoire de leçons et de ressources
pour l'apprentissage.
Donc, définitivement que, pour nous, c'est
un levier pour aller chercher... pour aller faire ressortir l'importance de la
langue puis améliorer la maîtrise de la langue non seulement pour les enfants
et les élèves, mais aussi pour les adultes, les enseignants, pour qu'ils soient
vraiment au fait des réalités vraiment vécues dans les communautés. Donc, c'est
vraiment ce qu'on voudrait que vous reteniez.
Également, on parle beaucoup du territoire.
On parle beaucoup du territoire, des aînés également. Une façon facile d'aller
interroger, d'aller recueillir des données et des témoignages de nos aînés, tu
prends un iPad, tu le filmes, et, comme ça, évidemment que c'est quelque chose
qui va rester, et tu l'utilises en classe comme outil pédagogique. C'est
vraiment super. Ça se fait.
Puis d'ailleurs je fais une parenthèse
sur... Vous avez tous et toutes reçu une carte avec un code QR, puis j'ai vu
quelques personnes scanner ce code-là. C'est un outil qui a été développé par
le CEPN, puis je vous dirais que c'est le... Les clients premiers, c'était
vraiment les enseignants des écoles provinciales parce que ça a été, entre
autres, financé par le provincial, mais c'était... c'est vraiment aussi
universel. Qu'est-ce qu'on a dans ce site-là? C'est vraiment des informations
sur les nations, les 11 nations au Québec, toutes les communautés au
Québec. Si un enseignant du Québec veut en savoir plus, on va sur le site, et
il va avoir toutes les informations, mais évidemment que, pour les enseignants
autochtones aussi, étant donné que c'est quand même 11 particularités, 11 langues,
11 cultures, c'est facile d'aller s'informer sur ce site-là. Donc, on vous
encourage d'aller voir ça. C'est vraiment un superoutil.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. Vigneault (David) : Et
peut-être aussi de mon côté, si... parce qu'en n'étant pas soumis aux
réglementations provinciales le CEPN peut aller vraiment là où les écoles
veulent aller. Ça fait qu'on peut <développer...
M. Vigneault (David) :
...provinciales
le CEPN peut aller vraiment là où les écoles veulent aller. Ça fait qu'on peut >développer
des choses en marge de ça. On peut expérimenter puis voir... Et, vraiment, dans
le cadre de mon travail, ce que je pense qui devrait être retenu et qui
s'applique, peu importe la culture, peu importe l'endroit, c'est que les outils
technologiques, l'important, c'est l'encadrement et l'utilisation, et ça passe
par la formation aux enseignants à les utiliser, parce que, bien, je vais
passer un message en même temps, il y a une pénurie d'enseignants présentement.
C'est sûr que, si mon garagiste devient enseignant de secondaire V demain,
ça se peut qu'il prenne des iPad parce qu'il ne sait pas quoi faire. Ça fait
que, tu sais, ça passe par la formation. Ça passe... donner des formations
supplémentaires. Quand on a des outils, il faut être sûr que le personnel sache
comment s'en servir parce que, sinon, ça ne donne rien. Ça fait que plus les
enseignants vont être aptes et formés à utiliser ces outils-là, plus ils vont
être en mesure de les utiliser de la bonne façon.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. le député de Gaspé.
M. Sainte-Croix : Merci, Mme
la Présidente. Bonjour, messieurs. Merci de vous prêter à l'exercice. C'est
très apprécié.
Vous nous avez tracé un portrait, somme
toute, très positif, favorable à l'usage du numérique en termes... dans vos
contextes pédagogiques et éducatifs. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il n'y a
pas vraiment un consensus scientifique sur la plus-value, disons ça comme ça,
mais je comprends, dans votre exposé, que, suivant le contexte dans lequel vous
vivez, en termes de territoire, en termes aussi d'un point de vue culturel,
donc l'accès à votre culture, il y a là, manifestement, quand on vous écoute,
une plus-value indéniable au niveau de se réapproprier la culture à travers les
contextes pédagogiques.
• (10 h 10) •
Est-ce que vous voyez... Puis je comprends
aussi que c'est assez, quand même, généralisé dans votre contexte scolaire. En
tout cas, vous en faites une pratique qui me semble être très présente. Est-ce
que vous voyez, a contrario, là, parce que c'est beaucoup ce qu'on se fait dire
aussi de par plusieurs spécialistes, l'effet plus négatif à travers l'évolution
de nos jeunes, à travers l'isolement, à travers la difficulté de socialiser, à
travers une utilisation, comment vous dire, je ne dirai pas exagérée, mais très
présente à travers, bon, les pauses, les récréations, les périodes de lunch.
Bref, les jeunes sont très portés sur leurs appareils, et il y a une question,
là, d'entrer en communication avec l'autre qui disparaît tranquillement, pas
vite. Est-ce que vous vivez ça dans vos communautés aussi? Comment vous
réagissez à ça? Puis quelles seraient vos recommandations là-dessus dans les
contextes qui sont les vôtres, là, j'insiste, là, tu sais, en fonction de vos
réalités?
M. Vigneault (David) : Bien,
moi, je vais vous dire, je travaille au CEPN, mais je ne suis pas un
autochtone. Je viens des Îles-de-la-Madeleine. La majorité de ma carrière était
dans des écoles soit provinciales au Québec ou provinciales ailleurs. Puis les
propos que je tiens là, à moins que si je dis spécifiquement qu'il y a un
contexte culturel, ça s'applique partout où est-ce que j'ai travaillé.
Donc, oui, ce qui se passe dans les écoles,
où les élèves vont souvent être, aux pauses, tournés vers leurs appareils, ça
se passe partout, puis c'est une problématique humaine plus que culturelle. À
ce moment-là, comme je disais tantôt, c'est une question aussi d'éducation à
qu'est-ce que ces outils-là... puis, je vais le dire bien franchement, ce n'est
pas une éducation qui devrait être limitée aux élèves. Je vois des gens de mon
âge et plus vieux qui font une bien pire utilisation des outils technologiques
que les élèves que je vois. Tu sais, j'ai moins de misère avec quelqu'un qui
joue à... qui regarde Cocomelon que quelqu'un qui perd 3000 $ à Candy Crush,
par exemple.
Ça fait que, tu sais, je pense, c'est un
problème sociétal, rendu là, de société, et il y a une éducation générale à
faire là-dessus. Les jeunes sont influencés par leur environnement. Je pense
que, si les adultes utilisaient mieux ces outils-là, ça se refléterait sur les
jeunes aussi. Puis le rôle de l'école là-dedans, dans notre contexte et dans le
contexte de l'école, ça revient à un contexte de discipline aussi, d'utiliser
ça adéquatement. On pourrait débattre de n'importe quel autre outil qui existe,
puis je peux vous trouver des listes infinies de manières négatives d'utiliser
un marteau ou un livre, puis je peux bien vous dire aussi qu'un livre incite à
la sédentarité parce que tu ne cours pas quand tu lis, mais, tu sais, ça
revient... C'est des exemples imagés, mais ça revient au fait que tout est...
plus on fait la promotion de l'utilisage pédagogique sensée dans un contexte
logique... Puis, tu sais, quand je parle de contexte culturel, même quand
j'enseignais aux Îles-de-la-Madeleine, on se servait de ça pour adapter les
exemples qu'on avait puis qui ne correspondaient pas à nos réalités, à ce que
mes jeunes dans ma <classe...
M. Vigneault (David) :
...puis
qui ne correspondaient pas à nos réalités, à ce que mes jeunes dans ma >classe,
là, vivaient, et je faisais la même chose en contexte autochtone. J'adaptais
les exemples dans les livres qui correspondaient zéro à la réalité. Je me
servais des outils pour que ça rejoigne la réalité. Ça fait que, grosso modo,
c'est juste par l'utilisation adéquate qu'on...
M. Rock (Bruno) : C'est
ça, pour répondre encore plus à la question, oui, c'est un problème dans nos
écoles. Puis d'ailleurs je reviens avec le côté de la sensibilisation... est
important, et de l'éducation. Puis, tu sais, on est tellement au fait de cette
problématique-là, de cet enjeu-là que le CEPN, voyant ça, il y a quelques
années, une quinzaine d'années, on a développé, et monté, et mis de l'avant les
jeux interscolaires des Premières Nations. Donc, chaque mois de mai, à
l'Université Laval, il y a les jeux interscolaires. Donc, on rassemble toutes
les écoles qui peuvent aller pratiquer des épreuves sportives, athlétisme, etc.
Donc, ça, c'est vraiment le côté sensibilisation qu'on pourrait amener.
M. Sainte-Croix : Je
comprends que le pont entre l'école et la communauté, au même titre que le pont
entre une école d'un centre de services scolaire et d'un village, c'est aussi,
chez vous, des réalités qu'on va devoir tenir en compte pour la
sensibilisation, l'éducation à des bonnes pratiques, dans le fond, c'est ce
qu'on cherche.
M. Rock (Bruno) : Tout à
fait. Puis, tu sais, c'est sûr que le côté, là... On parle de parents beaucoup,
mais le côté communauté de nos communautés, sans dire qu'il est plus fort, bien,
c'est quelque chose de particulier, de très, très présent, là, dans nos
communautés, oui.
M. Sainte-Croix : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci. M. le député, oui, il reste 20 secondes si vous voulez poser votre
question.
M. Leduc : ...le terme «autochtonisation
de l'apprentissage». Pouvez-vous nous expliquer ce que ça veut dire?
M. Rock (Bruno) : L'autochtonisation,
c'est comment amener l'école formelle et en rang d'oignons dehors ou en
territoire. Ça, c'en est un exemple. Ce n'est pas que ça, mais c'est vraiment
de rendre les apprentissages signifiants, qui se rapprochent de la culture des
jeunes.
M. Leduc : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) :
Alors, M. Rock, M. Vigneault, merci infiniment pour votre
contribution à ces travaux.
Pour ma part, je suspends quelques
instants pour accueillir nos prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 16)
(Reprise à 10 h 20)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Donc, je souhaite la bienvenue aux
Drs Giroux, Pouliot et Dion. Alors, bienvenue. Alors, Mme Marie-Ève... M. Patrick
Giroux, pardon, qui est chercheur associé, Mme Marie-Eve Pouliot,
professeure titulaire en travail social, et Mme Jacinthe Dion, professeure
titulaire et psychologue, donc, bienvenue à cette commission. Je vous rappelle
que vous avez 10 minutes pour nous présenter vos commentaires, et, par la
suite, on procédera à une période d'échange avec l'ensemble des membres de la
commission. Alors, la parole est à vous.
M. Patrick Giroux et Mmes Eve Pouliot et Jacinthe
Dion
M. Giroux (Patrick) : Bonjour.
Essentiellement, le mémoire qu'on vous a déposé avait deux grandes parties. En
première partie, on voulait vous... on voulait insister sur le fait qu'il y a
déjà beaucoup de choses à l'école qui se font et que c'est complexe à intégrer,
le numérique, que ça prend de la formation, et qu'on ne peut pas s'improviser
ou improviser des changements comme ça à l'école. Il faut que ce soit réfléchi.
On voulait mettre l'accent aussi sur le
fait qu'avec l'expérience acquise depuis des années, entre autres, durant la
période de COVID, nos enseignants sont devenus très bons techniquement, mais
aussi de plus en plus critiques. Puis ce qu'on voit se dégager dans nos
recherches, entre autres, c'est que ce n'est plus à l'école, le problème des
écrans. La dernière recherche que j'ai faite, c'était dans une école tablette
où les gens ont une tablette, chacun leur tablette, puis, durant la journée,
là, les usages pédagogiques de la tablette, ça représente en moyenne 38 minutes,
alors qu'à la maison les usages pédagogiques, c'est 60 minutes, puis on ne
parle même pas des usages qui sont plutôt de l'ordre du divertissement, qui
sont beaucoup, beaucoup, beaucoup au-dessus de ça.
Donc, la première conclusion qu'on voulait
partager avec vous c'est que le temps-écran à l'école, il est de plus en plus
sous contrôle. Il y a beaucoup de personnes qui y travaillent. Les enseignants
sont appuyés, sont déjà encadrés par plusieurs documents. Selon nous, ce qu'on
vous propose, c'est de vous concentrer sur les parents. Les parents ont besoin
de beaucoup, beaucoup d'aide. Ils ont besoin d'assistance, ils ont besoin de
formation et ils ont besoin d'information. Donc, la deuxième partie de notre
propos, ça va être là-dessus. Mais, juste avant, si jamais vous voulez aider
l'école, je pense qu'il y a deux choses que vous pourriez faire, ou
recommander, ou suggérer, comme on l'a écrit. D'abord, c'est de rendre
obligatoire l'évaluation de la compétence numérique. Actuellement, même s'il y
a un peu de compétence numérique puis il y a un peu d'éléments liés à la santé
numérique et aux écrans dans le programme de CCQ, en gros, pour l'école, pour
les enseignants, le numérique, c'est une compétence transversale.
Puis là, on va se le dire, quand c'est la
responsabilité de tous, il n'y a personne qui s'en occupe. Ce qui se passe,
c'est qu'on reçoit des jeunes à l'université... Par exemple, en première année,
là, nous, on reçoit des jeunes à l'université. Il y en a qui réussissent à
faire tout leur cheminement scolaire sans développer pratiquement aucune
compétence par rapport au numérique, sauf que la réalité, c'est qu'à
l'université les profs, ils ont des attentes. Le milieu du travail, quand il
arrive, le milieu du travail a des attentes.
Ça fait que, là, on se retrouve avec une
très, très grosse hétérogénéité, puis elle est, entre autres, due à ça, c'est
qu'il y a beaucoup de monde responsable, mais il n'y a personne qui est obligé
d'évaluer. Ce qu'on suggère, c'est qu'il y ait au moins quelques moments clés,
dans le cheminement au primaire ou au secondaire, où la compétence serait
évaluée pour peut-être responsabiliser encore plus les acteurs scolaires, leur
forcer un petit peu la main. Évidemment, ça veut dire que ça va prendre du
temps. Ça va peut-être être dur pour les enseignants, mais je pense qu'on est
encore capables de le faire.
La deuxième chose, c'est que, si on veut
que les enseignants aient plus de facilité encore à intégrer le numérique, je
vous suggère fortement et je vous recommande l'élaboration puis la diffusion
d'une <progression...
M. Giroux (Patrick) :
...diffusion
d'une >progression des apprentissages officiels. L'idée, c'est que, pour
tous les programmes, pour toutes les disciplines, les enseignants, ils ont un
document qui décrit : En première année, en deuxième année, en troisième
année, voici les apprentissages qu'on doit faire. C'est tout simple, mais c'est
superimportant pour les enseignants parce que ça leur permet de se structurer
puis de s'organiser à l'intérieur d'une école, à l'intérieur d'une équipe
d'enseignants, à l'intérieur d'un CSS. Ça leur permet de s'organiser puis de se
structurer plus facilement pour être certains qu'à la sortie du secondaire les
jeunes ont atteint un niveau x. Actuellement, ça, on ne l'a pas. Ça fait que,
dans certaines écoles, le niveau de compétence technique puis le niveau de
compétence numérique général est très, très élevé, alors que, dans d'autres, il
est un petit peu plus bas.
Donc, si on veut aider l'école encore, je
pense, c'est les deux choses qu'on pourrait faire, mais j'attire encore votre
attention sur la première conclusion que j'ai partagée. Je pense que ce n'est
pas à l'école que vous devriez mettre le plus de vos énergies. Les parents sont
très, très, très importants, puis actuellement on ne les supporte pas beaucoup.
Mme Pouliot (Eve) : Pour
poursuivre sur cette idée-là, on pense effectivement que la solution, elle ne
se retrouve pas tant à l'école, que les solutions sont déjà en place, en fait,
en milieu scolaire, mais que, dans le milieu extrascolaire, il y a des choses à
faire, puis que les parents ont vraiment un rôle central à jouer au niveau de
l'usage des écrans chez les jeunes. On a fait une revue systématique des écrits
scientifiques, là, récemment, notamment sur les facteurs familiaux qui sont
liés aux inégalités numériques, puis il y a quatre grands facteurs, en fait,
là, qui se dégagent de cette revue systématique là.
Le premier, bien, c'est l'accès à des bons
outils numériques dans le milieu familial. Donc, ça, c'est fondamental. Puis on
sait, les études nous le démontrent, là, qu'il y a vraiment des écarts encore
aujourd'hui, notamment entre les milieux urbains, les milieux ruraux, les
milieux qui sont favorisés et les milieux qui le sont moins. Donc, on sait
qu'il y a des choses à mettre de l'avant pour solutionner ces écarts-là, les diminuer.
Ensuite, il y a toute la question du
niveau de littéracie ou de compétence numérique chez les parents qui est à
travailler parce qu'on sait que, si les parents n'ont pas de connaissance, de
compétence au niveau des technologies numériques, bien, ils peuvent
difficilement accompagner leurs enfants là-dedans. Donc, c'est un autre élément
ou un autre défi, en fait, là, qu'on doit relever pour mieux outiller les
parents puis faire en sorte qu'ils soient plus connaissants, plus compétents,
dans le fond, dans leur usage du numérique pour accompagner mieux leurs jeunes
à cet égard-là.
Il y a aussi toute la question des
attitudes des parents envers le numérique, et ça, vraiment, dans le contexte
pandémique, ça s'est accentué, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup d'ambivalence
qui est vécue chez les parents. Les parents, d'une part, bien, reconnaissent
que les outils numériques, c'est incontournable de nos jours, les jeunes en ont
besoin, en ont besoin pour apprendre, en ont besoin pour socialiser, mais,
d'autre part, ils s'inquiètent aussi beaucoup sur l'impact que les écrans
peuvent avoir dans la vie de leurs jeunes au niveau de la santé physique, de la
santé mentale. On en parle beaucoup, et ça génère beaucoup de culpabilité chez
les parents, beaucoup de stress aussi, et ça fait en sorte, ce stress-là,
souvent, bien, qu'on va aussi laisser nos enfants utiliser les tablettes, les
outils numériques, parce qu'on est stressés, on a des choses à faire, puis on
va les laisser, des fois, sans beaucoup de supervision, là, utiliser ces
outils-là. Donc, il y a vraiment quelque chose à faire au niveau des attitudes
des parents envers le numérique pour les sensibiliser, pour mieux les
accompagner, les outiller à cet égard-là pour qu'ils soient aussi plus
conscients de certains risques puis aussi réduire certains stress qui peuvent
être associés, là, au numérique.
Finalement, il y a toute la disponibilité
des parents pour accompagner leurs jeunes. Donc, on sait que, dans le contexte
de la pandémie, c'est quelque chose qui a été un enjeu important pour les
travailleurs dans les services essentiels, mais aussi pour les parents en
télétravail, puis ça se poursuit encore aujourd'hui. Donc, les parents qui sont
peu disponibles pour accompagner leurs enfants, bien, ça fait en sorte que les
enfants se retrouvent un peu seuls avec ces outils-là, et là ça peut amener des
usages qui sont plus dangereux ou nocifs, là, pour les jeunes.
Donc, tous ces facteurs-là qui viennent,
en fait, creuser, là, les inégalités dans le milieu familial, bien, ils sont à
considérer dans les solutions qu'on met en place puis dans les outils qu'on
développe aussi pour que les parents accompagnent mieux leurs enfants. Et ces
défis-là, en fait, ils vont aussi influencer les pratiques parentales, parce
que, les enfants, ils apprennent en regardant aussi comment leurs parents
agissent.
Donc, il y a vraiment le phénomène, en ce
moment, beaucoup, dont on entend parler, de technoférence. C'est-à-dire que les
parents sont préoccupés avec leurs cellulaires, avec leurs outils numériques,
sont moins présents pour les enfants, puis ça engendre des difficultés au
niveau familial, au niveau de la qualité des relations, entre autres. Et on
sait que les parents, bien, sont très importants dans la médiation par rapport
au numérique, donc, médiation qui peut être active, donc, accompagner l'enfant
dans l'appropriation des outils numériques, ou restrictive, donc, mettre des
règles. Donc, on sait que les parents, peu importe le type de médiation qu'ils
vont <utiliser...
Mme Pouliot (Eve) :
...donc
on sait que les parents, peu importe le type de médiation qu'ils vont >utiliser,
bien, c'est mieux d'en utiliser que d'être vraiment dans le laxisme et ne pas
en faire. Donc, on doit outiller les parents aussi à cet égard-là pour qu'ils
puissent mieux accompagner leurs enfants.
Et là, bien, je vais laisser la parole à
ma collègue pour des pistes plus concrètes.
Mme Dion (Jacinthe) : Oui.
Donc, bien, il y aurait cinq recommandations qu'on suggère, nous. En fait,
d'abord, avant d'outiller les parents, ça serait important de vraiment
s'assurer de diminuer les inégalités relatives aux écrans. Ce n'est pas toutes
les familles qui ont des sous, de l'argent pour pouvoir avoir des équipements
informatiques adéquats. Puis on sait qu'Internet haute vitesse n'est pas encore
disponible partout dans le Québec, là. Nous, on le sait, on habite en région, au
Saguenay—Lac-Saint-Jean, puis y a des coins, comme Sainte-Rose-du-Nord, où il n'y
a même pas Internet dans certains endroits. Donc, d'abord, avant de s'attaquer
à aider les familles, il faut s'arranger pour diminuer les inégalités pour
l'accès au numérique.
Donc, une fois que ça, c'est réglé, là,
bien, on souhaite que ce soit réglé, bien là on va aider les parents à
développer leurs compétences parce que, malheureusement, ça change vite, donc,
tout ce qui concerne maintenant l'intelligence artificielle, comment on peut
former adéquatement nos parents. Donc, on sait que les écoles sont proches des
parents, les bibliothèques, les centres communautaires. Donc, peut-être qu'on
pourrait outiller ces endroits-là que les parents fréquentent pour pouvoir les
aider à développer des habiletés numériques, puis des campagnes publicitaires,
des campagnes de sensibilisation à grande échelle, au Québec, pour sensibiliser
ces parents-là, mais ce n'est pas seulement de les sensibiliser à développer
plus de compétences numériques, mais il faut aussi les aider à pouvoir encadrer
leurs enfants.
• (10 h 30) •
On le sait, je le sais, j'ai des ados à la
maison, ce n'est pas facile. Puis c'est facile de jeter l'éponge parce qu'à un
moment donné, les enfants, ils veulent toujours être devant leur écran. Donc,
de mettre un nombre d'heures par jour, mais pas juste en termes d'heures, puis
de limiter le nombre d'écrans, mais aussi le contenu de ce qui est vu... Je
fais des recherches auprès des adolescents, puis, juste pour vous donner un
exemple, on sait que, dès 11 ans, même avant, là, mais, en moyenne, à
partir de 11 ans, les jeunes ont déjà vu de la pornographie sur Internet à
11 ans, donc, puis il y en a qui vont regarder à chaque semaine de la
pornographie sur Internet. Toute la question de la cyberintimidation, des leurres
qui peuvent se passer sur Internet, c'est grave. Donc, il faut s'assurer
d'outiller les parents à pouvoir s'occuper de leurs enfants pour s'assurer
qu'ils ne vont pas voir ces contenus-là qui devraient être réservés aux adultes
et...
La Présidente (Mme Dionne) : Votre
temps est malheureusement écoulé.
Mme Dion (Jacinthe) : O.K., parfait.
La Présidente (Mme Dionne) : Mais,
rapidement, est-ce qu'il y a consentement pour que vous fassiez rapidement la
nomenclature de vos recommandations, puis on pourra passer à la période
d'échange?
Des voix : ...
Mme Dion (Jacinthe) : Parfait,
il me reste peut-être 30 secondes, merci. En fait... Puis, ensuite de ça,
ça serait de sensibiliser... bon, j'indiquais ce que leurs enfants regardent,
mais de s'intéresser aux enjeux. Toutes les données qui sont enregistrées dans
des sites Internet, des applications, toutes les publicités qui ont... qui sont
là pendant que nos enfants jouent à des jeux, ça aussi, c'est quelque chose que,
si on pouvait encadrer ça également...
Puis, dernièrement, comme dernière
recommandation, bien, les parents, qui sont au cœur de ça, bien, je pense qu'il
faudrait les consulter pour identifier c'est quoi, leurs besoins, quelles
solutions ils ont besoin puis de quelle façon on doit implanter ces
solutions-là pour qu'ils les utilisent, parce qu'on a bien beau dire que ce
n'est pas plus que tant d'heures par jour, mais, si on n'a rien à leur offrir
en échange ou des outils pour les aider, bien, ils vont être encore mal pris
par la suite. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Donc, je vais donner le privilège à M. le député de Jonquière pour entamer
cette discussion.
M. Gagnon : Ah bien! Merci,
Mme la Présidente. J'en profite pour saluer tout le monde qui a traversé la
réserve faunique des Laurentides pour arriver ce matin, Dr Giroux, tout le
monde, un plaisir d'avoir du monde de chez nous — c'était mon petit
cinq secondes chauvin — l'Université du Québec à Chicoutimi.
Bon, je m'y ramène, je m'y ramène, deux
phrases fortes, là. Il y a beaucoup d'information dans le mémoire, mais... puis
on l'a entendu depuis 48 heures, là, cinq heures... Vous dites, dans le
rapport... dans le mémoire, pardon, cinq heures et plus par jour, en dehors du
contexte scolaire, amènent vraiment des réductions des compétences sociales.
Encore une fois, dans votre rapport, on voit que vous ramenez l'impact à la
maison.
Vous dites également... M. Giroux le
mentionnait, vous nous recommandez de mettre des énergies ailleurs que dans les
écoles du Québec, davantage de mettre nos énergies sur la formation puis le
soutien de nos familles. Encore une fois, vous mentionnez haut et fort que
l'impact est à la maison. Vous mentionnez aussi que nos enseignants au Québec
ont une formation initiale d'enseignants, puis il y a beaucoup d'outils
techniques qui viennent avec nos enseignants.
Moi, ma question est un peu crue, mais je
la pose, en formation des enseignants. Quand un enseignant, au Québec, termine
son bac, comme à l'Université du Québec à Chicoutimi, il a quoi, comme
formation et compétence, pour enseigner à nos jeunes avec les outils
pédagogiques que vous mentionnez, M. Giroux? Est-ce que c'est l'ensemble
de nos professeurs qui sortent avec un bagage ou on doit davantage... Si vous
dites : L'énergie doit être mise sur les... à la <maison...
>
10 h 30 (version révisée)
<19317
M. Gagnon :
...l'énergie doit être mise sur les... à la >maison, parce
que, dans le milieu scolaire, on pense qu'on gère bien cet outil-là. Mais c'est
quoi, la formation qu'ont nos enseignants?
M. Giroux (Patrick) : Il
faut savoir d'abord que... Là, on va parler des enseignants qui sortent avec un
bac de quatre ans, O.K.? C'est impossible de faire ce dont je vais parler avec
moins de ça, là, moins que ça. Il faut savoir que la formation des enseignants
est régie, elle est encadrée. Il y a un référentiel de compétences. Tous nos
enseignants doivent développer un certain nombre de compétences. Le
référentiel, là, a été mis à jour il y a quelques années seulement, puis la
compétence numérique, c'est une de ces compétences-là.
Donc, jusqu'à il y a tout récemment, il y
avait des gens qui s'occupaient... un organisme qui s'occupait de vérifier ce
qui se passait dans les bacs, et tous les baccalauréats en enseignement étaient
obligés de travailler au développement de la compétence numérique. Ça pouvait prendre
plusieurs formes. Je vais parler de ce qui se fait chez nous, mais ça ressemble
à ce qui se fait dans d'autres universités, là. Je ne peux pas parler pour les
autres universités. Chez nous, par exemple, les étudiants, ils ont trois cours
durant leur cheminement, ils ont trois cours de techno, où ils entendent
parler... Bien, actuellement, je donne un cours sur les IA, sur les algorithmes
et les réseaux sociaux. Donc, on parle des IA, on parle des réseaux sociaux, on
parle du temps-écran, nécessairement, on parle de comment ça peut les aider à
leur formation continue. Mais avant, ils ont eu des cours sur les outils qui
permettaient d'aider à l'enseignement et l'apprentissage du français, des
maths, des sciences.
Ça, c'est une chose. Les cours de techno,
c'est une chose, mais on a adopté une approche programme qui fait qu'on est
globalement, tous les enseignants, responsables de toutes les compétences. Ça,
ça veut dire que mes collègues, par exemple, en évaluation des apprentissages,
la semaine prochaine, les étudiants, ils vont travailler, puis, la semaine
prochaine, pendant quelques semaines, ils vont travailler sur comment l'intelligence
artificielle, aujourd'hui, peut aider à préparer du matériel d'évaluation, puis
dans quelle mesure il faut mettre un cadre, puis dans quelle mesure on peut s'y
fier, etc.
La même chose est vraie par rapport à la
gestion de classe. La question des écrans, bon, il y a eu un décret
ministériel, mais avant c'était déjà un défi. Bien, en gestion de classe, on
parlait déjà de comment les écrans... Quand ils vont en stage, ils vont en
stage quatre fois durant leur formation. Bien, la compétence prend un... La
compétence numérique, elle est évaluée à tous les stages. Donc, autant dans les
cours de didactique, que dans les cours de gestion de classe, que dans les
cours d'évaluation, ils entendent parler de comment on peut utiliser le
numérique pour enseigner le français, comment on peut utiliser le numérique
pour enseigner les multiplications en mathématiques, comment... Puis ils en
parlent en gestion de classe, puis ils en parlent en évaluation, puis ils en
parlent en stage. On leur en parle, puis on leur donne des rétroactions, puis
ils ont des cours sur le numérique. Donc, nous, on a adopté une approche
programme. On est tous responsables de cette compétence-là. Ça fait qu'ils en
entendent parler. Il n'y a pas... Ce n'est pas une session puis, après ça, c'est
fini, là. Ils en entendent parler toutes les sessions, de la première à la
dernière session, pendant quatre ans.
Puis, à ma connaissance, c'est une recette
un peu similaire dans tous les bacs. Dans les autres universités, encore une
fois, je ne veux pas parler pour eux, je sais que j'ai des collègues où il n'y
a pas de cours de techno, mais, par contre, ils ont adopté une approche
programme puis il y a de la techno dans tous les cours ou dans... À toutes les
sessions, il y a quelque chose. J'ai vu des collègues qui avaient des cours d'intégration
des connaissances. Donc, il y avait un cours qui était réservé, à chaque session,
à intégrer, rassembler toutes les connaissances de la session dans la pratique
enseignante, puis ça inclut le numérique. Donc... Mais les enseignants qui sont
formés pendant quatre ans, normalement, sortent.
Puis l'autre chose qui est très, très
importante par rapport au numérique, puis je l'ai mentionné dans le mémoire, c'est
que, tous nos enseignants qui sortent de notre bac, on met beaucoup, beaucoup d'emphase
sur les approches réflexives puis les approches critiques. On leur apprend...
Quand ils sortent, on le sait, qu'ils ne sont pas parfaits, puis on leur dit :
Vous allez apprendre toute votre carrière. Puis on les aide à développer les
outils pour continuer à apprendre.
Par exemple, le cours que je donne cette
session-ci, c'est le dernier cours en numérique. Bien, on va entre autres voir
comment les réseaux sociaux peuvent servir à se construire un EAP, un
environnement d'apprentissage personnalisé, pour qu'ils puissent apprendre que
c'est autre chose que TikTok. Il y a moyen d'utiliser les réseaux sociaux pour
se créer un réseau professionnel où ils vont pouvoir avoir de l'aide, ils vont
pouvoir émettre des commentaires, poser des questions, recevoir des idées,
etc., pouvoir continuer à réfléchir puis à s'améliorer, entre autres, par
rapport au numérique.
Ça fait que cette approche critique là,
cette approche réflexive là qu'on déploie tout au long du bac puis qu'on
encourage nos étudiants à adopter puis à acquérir durant tout leur bac, durant
tous leurs stages — ils ont toujours des rapports critiques, des
rapports réflexifs à faire — bien ça, ça contribue, entre autres, à
leur préparation. Puis c'est pour ça qu'on a confiance que nos étudiants...
Ajoutez à ça le réseau des Récit qui continue de les soutenir, ajoutez à ça
tous les programmes, ajoutez à ça toutes les formations continues qui sont
offertes, puis je pense que notre... nos enseignants, on a déjà une bonne base.
Est-ce que c'est parfait? Non, mais on a déjà une bonne base. Puis c'est dans
ce contexte-là qu'on vous dit : Je pense que, là, c'est le temps de s'occuper
des <familles...
M. Giroux (Patrick) : ...ce
contexte-là qu'on vous dit : Je pense que, là, c'est le temps de s'occuper
des >familles.
M. Gagnon : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée de Hull.
Mme Tremblay : Alors,
bonjour. Moi, j'ai été enseignante pendant de nombreuses, nombreuses années.
Et, bon, ça, vous avez totalement raison que, quand ça fait partie des
compétences transversales, bien, souvent, là, c'est un petit peu plus loin dans
les priorités d'évaluation. Écoute, les choses à faire sont nombreuses dans une
classe, et puis c'est très chargé aussi, les contenus éducatifs, de sorte que
la compétence transversale, bien... Ça ne veut pas dire qu'on n'intègre pas les
technologies, au contraire, mais c'est vrai que l'évaluation en tant que telle,
elle est loin de la première priorité, évidemment.
Vous, vous avez parlé d'une progression,
là, des apprentissages, là. Le cadre de référence, il existe, là, tout est bien
établi, mais évidemment, vous, ce que vous souhaitez, c'est dire : Bien, à
la fin, par exemple, du premier cycle du primaire, voici les compétences qui
devraient être plus... qui devraient être touchées, un peu comme il se fait en
sciences puis en mathématiques. On a tous des progressions d'apprentissage.
J'imagine que c'est vers ça que vous voudriez tendre puis de faire en sorte
que, vraiment, il y ait des évaluations à chacun des cycles jusqu'à la fin du
secondaire, finalement?
M. Giroux (Patrick) : Exactement.
En fait, il faut savoir... tu sais, je vous le propose et je vous le
recommande, il faut savoir qu'il y a quelques années, dans un rapport qu'on a
donné au ministère sur les laboratoires créatifs, on s'intéressait aux
laboratoires créatifs à ce moment-là, déjà, on avait rapporté que les
enseignants le réclamaient. Il faut savoir qu'il y a plusieurs écoles
primaires, secondaires qui se sont déjà dotées de tels cadres non officiels
parce que les enseignants n'étaient pas capables de s'organiser. C'est difficile,
par exemple... Vous étiez au primaire ou secondaire?
• (10 h 40) •
Mme Tremblay : ...écoles
secondaires.
M. Giroux (Patrick) : O.K.
Imaginez-vous que vous êtes en secondaire III, vous voulez monter un
programme avec, je ne sais pas, moi, de la réalité virtuelle, et puis vous ne
savez pas qu'est-ce qu'ils ont vu, dans les... en secondaire I et II. Vous
n'avez aucune idée s'ils ont les outils pour être capables de mobiliser la
réalité virtuelle pour atteindre vos intentions pédagogiques, pour atteindre
vos objectifs disciplinaires. Ça complexifie l'intégration du numérique
énormément. Puis ce qu'on voit actuellement dans le milieu, c'est les
enseignants d'une équipe-école qui se rassemblent puis qui disent : O.K.,
en première année, là, moi, je vais faire ça, ça, ça. En deuxième année, ils
disent : Moi, je vais construire sur ce que tu as fait puis je vais
ajouter ça. En troisième, il dit : Moi, je vais utiliser tout ce que vous
avez fait, mais je vais plutôt aller de ce côté-là puis je vais introduire, mettons,
la robotique pédagogique. Ça fait que, là, en quatrième année, là, il regarde
ce que ses collègues, ils ont dit : O.K., bien, moi, je pourrais utiliser
ça, ça puis ça, mais il y a telle partie, là, moi, la robotique pédagogique, je
vais aller plus loin, moi, ce qui m'intéresse en sciences, on va faire de la
programmation, ça fait que je vais développer cet aspect-là, programmation par
objets... avec des objets, par exemple.
Ça fait les enseignants, à partir du
moment où ils ont cette progression-là, ils sont plus facilement capables de
réfléchir à comment je peux mobiliser le numérique pour ma discipline. Parce
que, le numérique, on n'arrête pas de dire à nos enseignants : Essayez de
l'utiliser pour faire d'autres choses, c'est une compétence transversale, puis
idéalement, il ne devrait pas trop vous gober de temps, mais il devrait
faciliter les apprentissages tout en apprenant le numérique. Mais là, si tu
n'as pas de programme, si tu es toujours obligé de recommencer à zéro, bien, ce
n'est pas le cas, c'est très lourd pour les enseignants. Et je comprends tout à
fait que, des fois, les enseignants, ils jettent l'éponge puis qu'ils disent :
Regarde, je vais me concentrer sur mes mathématiques, ou sur mon français, ou
sur mon univers social, sinon, ce serait trop compliqué. Donc, c'est cette
structure-là que je pense qu'il faut amener.
Mme Tremblay : Il y a des
intervenants qui sont venus, là, avant vous puis qui ont dit que, quand on fait
le choix d'utiliser un logiciel, d'utiliser les outils, là, ils sont venus nous
dire qu'eux, il faut absolument que ça ait une plus-value, notamment plus au
primaire, même, je vous dirais, là, que, si, dans le cas contraire, l'outil
utilisé, par exemple Netmath, là, puis il y a différents logiciels, si ça n'a
pas de plus-value, là, que ça n'apporte pas quelque chose que l'élève serait
capable de faire autrement, bien, pour eux, ce n'est pas utile de l'utiliser.
Même qu'il y en a qui sont allés encore plus loin puis qui disaient :
Avant la cinquième année du primaire, là, on ne devrait même pas, nécessairement,
l'utiliser, puis garder plus la manipulation, l'enseignement traditionnel.
Donc, vous, vous en pensez quoi?
M. Giroux (Patrick) : Je suis
100 % d'accord pour dire que, l'enseignant, c'est une décision
professionnelle qu'il doit prendre. À tout moment, il doit aligner, choisir les
outils avec ses intentions... les aligner avec ses intentions pédagogiques,
avec le groupe qu'il y a devant lui, avec le contenu.
Puis, des fois, la plus-value, là,
c'est... pas besoin... ça peut être très, très gros, comme ça peut être tout
petit, tout petit. Puis, des fois, là, tu sais, ça peut être gagner du temps,
ça peut... On sait, la recherche montre que les jeunes, ils vont souvent plus
loin à partir du moment... puis ils en font souvent plus, question de
motivation, mais aussi question d'accès à l'information, etc. La plus-value,
elle peut prendre plein, plein de formes. Je ne parle pas de contraindre les
enseignants puis de les obliger à le faire. Je parle de faire en sorte que
par... je ne sais pas, moi, à la fin du deuxième cycle au primaire, à la fin du
premier cycle au <secondaire...
M. Giroux (Patrick) :
...
je ne sais pas, moi, à la fin du deuxième cycle au primaire, à la fin du
premier cycle au >secondaire, puis à la fin du deuxième cycle au
secondaire, on a des moments, des jalons où on pourrait s'assurer que, sur les
trois dernières années, le jeune, il a progressé au moins de trois pas. Puis,
oui, il faut que ça apporte une plus-value, mais, en même temps, en soi, là,
quand on y réfléchit, en 2025, levez la main, ceux qui n'ont pas utilisé le
numérique aujourd'hui puis ceux qui seraient capables de se passer de leurs
compétences numériques. Puis levez la main ceux ici, que, en tant que parents,
ils pensent être capables d'amener leurs enfants à acquérir toutes les
compétences que ça prend en 2025 pour faire un usage sain puis productif du
numérique. Il n'y a aucune main levée. Je ne la lèverais même pas moi-même.
C'est difficile. Ça prend du temps. Il faut que ça soit structuré, organisé.
Puis, nos enseignants, c'est des professionnels là-dedans.
Mme Tremblay : Développer la
compétence numérique des parents pour qu'ils soient mieux outillés, c'est quoi,
les solutions? Pas qu'ils ne sont pas toujours faciles à aller chercher. Tu
sais, ils ont... Eux autres aussi, ils sont occupés. Bon, là on voit que,
depuis la pandémie, il y a eu une amélioration, évidemment, mais on fait
comment? Avez-vous réfléchi à ça? Je trouve que la nécessité, elle est là, je
suis tout à fait d'accord, mais on fait comment?
Mme Pouliot (Eve) : Bien,
moi, je pense que la première étape qu'il faut faire, c'est aller voir les
parents puis leur demander c'est quoi, leurs besoins. Puis il faut co-créer
avec ces parents-là. Donc, il ne faut pas présumer que les besoins, c'est ça,
ou ça, ou ça. Il faut travailler avec eux.
Puis, bon, comme équipe, on a déposé un
projet qui, malheureusement, là, faute de financement suffisant, n'a pas été
financé, mais c'était dans cette optique-là qu'on souhaitait faire un projet
pour vraiment, avec des parents, mieux comprendre les besoins en présence puis
co-construire des outils avec eux. Donc, je pense que les solutions, elles
doivent venir des parents eux-mêmes, là.
Mme Dion (Jacinthe) : Je pense
que, si on commence dès maintenant à mieux former nos enfants qui sont les
parents de demain... tu sais, il y a ça aussi. Ça fait que peut-être que, là,
on est dans un gap où, là, c'est peut-être difficile parce que la technologie
est arrivée puis on était déjà parents, mais, tu sais, ça prend du temps. Ça
fait que je pense qu'il ne faut pas miser ça : en dedans d'un an, on va
former tous les parents au Québec. Donc, c'est vraiment quelque chose de longue
haleine. Mais, en même temps qu'on va promouvoir puis qu'on va former ces
parents-là, il faut aussi penser à l'à-côté. Parce que je pense, entre autres,
à des travaux qu'on fait en communautés autochtones puis quand on parlait aux parents,
parce qu'on est allés voir leurs parents, puis ils nous disaient : Moi,
j'aime mieux que mon enfant soit dans le sous-sol, en train de jouer sur
PlayStation, qu'il soit dans la rue en train de prendre la drogue parce qu'il
n'y a pas d'autre chose à faire dans ma communauté. Ça fait qu'il faut comme
balancer quelles activités on met, quel parascolaire, quel truc gratuit,
peut-être, quelles installations de jeux, de skatepark, des trucs comme ça,
pour qu'il y a une balance entre les écrans à la maison puis l'extérieur, où ça
peut être intéressant pour les jeunes d'y aller. Donc, il y a tout ça auquel il
faut penser. Mais c'est sûr que, les parents, c'est les premiers répondants
puis c'est eux qu'il faut aller consulter pour savoir comment on peut aller
vous chercher, à venir chercher des outils pour développer vos compétences.
Mme Tremblay : Une dernière petite
question... Ah! vous avez un complément? Allez-y.
M. Giroux (Patrick) : Bien,
j'ai une... Il existe des stratégies d'intervention qui sont pensées pour être
spécifiquement proches du milieu. Je pense, par exemple, aux «living labs», qui
sont des stratégies qui permettent d'impliquer le milieu puis de l'aider à
développer ses propres solutions à ses problèmes, de l'accompagner. Donc, il y
aurait moyen, par exemple, de développer des programmes où on encourage les
maisons de jeunes, les patros, je vais plaisir à Yannick, on encourage les
comités de parents à déployer des programmes comme ça qui vont permettre aux
gens qui sont autour d'eux, qui sont des gens du milieu, de s'impliquer.
Il existe aussi... On pourrait aussi
favoriser beaucoup, beaucoup ça, la formation des parents, en favorisant
certains types de recherche, puis là je ne serai peut-être pas populaire auprès
de certaines personnes au ministère de l'Éducation, mais la recherche action,
la recherche participative. Une des premières retombées de ce type de recherche
là, quand... L'école où j'ai... avec qui j'ai travaillé pendant cinq ans, dont
je vous ai rapporté les résultats, bien, pendant cinq ans, on a discuté,
réfléchi avec les enseignants. Quand on a décidé de faire l'enquête sur le
temps-écran, là, ce n'était pas une décision des chercheurs, c'était une
décision qui venait du comité de parents puis des enseignants, ils voulaient
ces informations-là pour prendre des décisions.
Quand on fait ça, puis qu'on leur présente
les résultats, puis là, après ça, on s'assit, puis que ces gens-là, ils disent :
O.K., mais comment on fait?, puis là ils se mettent à trouver puis à chercher
des solutions, bien, on les aide aussi à développer des outils puis à
apprendre, mais surtout on les aide à prendre le contrôle sur leurs problèmes.
Je pense que, ça, c'est des pistes de solution qu'il faudrait regarder. Toutes
les solutions, que ce soit en recherche ou en intervention qui vont permettre
aux gens de prendre en contrôle leurs problèmes, ça va aider.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Giroux, Mme Dion, Mme Pouliot. Bon, j'ai
dénoté, donc, certainement, donc, que vous nous disiez qu'il fallait, donc,
vraiment, donc, mettre l'accent sur ce qui se faisait à l'extérieur de l'école.
Peut-être pour bien saisir votre <propos...
Mme Cadet :
...donc,
vraiment, donc, mettre l'accent sur ce qui se faisait à l'extérieur de l'école.
Peut-être pour bien saisir votre >propos ici... ce qui fait... ce que
vous avez entendu, donc on a beaucoup parlé de la question, donc, du... de
l'usage, donc, du cellulaire ou, donc, des écrans, donc, à des fins ludiques à
l'école, donc à l'extérieur, donc de l'usage du numérique à des fins
pédagogiques, là, mais simplement, donc, des élèves, donc, dans les périodes de
pause, et tout. Est-ce que vous, vous avez une opinion sur l'encadrement de
l'usage du cellulaire à l'école?
M. Giroux (Patrick) : Écoutez,
avant même le décret du ministère, les écoles avaient le pouvoir de mettre en
place des règlements. S'ils n'étaient pas rendus à gérer ce problème-là — peut-être
que je ne serai pas populaire — mais c'est parce que c'était un
problème mineur comparé à plein d'autres problèmes qu'ils ont dans les écoles,
plein d'autres difficultés avec lesquelles ils doivent dealer à chaque jour.
C'est un problème de gestion de classe, en
vérité, la gestion du cellulaire. Prenez votre cellulaire, mettez-le dans votre
sac. Avertir le jeune, une fois, deux fois, puis mettre en place ton programme
pour la discipline, puis, tu sais, mettre en place tes limites, je pense que
les enseignants pourraient faire ça si seulement ils avaient le temps, les
énergies, puis si seulement c'était en haut... Ils vont le faire au moment où
ça va être en haut de leur liste de problèmes.
Il faut être honnête, là. Il y a bien
d'autres... Tu sais, quand il n'y a pas de chauffage dans ta salle de classe,
le cellulaire dans les mains de tes étudiants, là, ça passe peut-être en
deuxième, troisième ou 25e priorité, là. Pour moi, ce n'est pas un si gros
problème que ça.
Moi, ce que j'ai vu dans les salles de
classe, là, c'est que les enseignants sont très critiques. Quand les
enseignants disent : Là, c'est le temps, là, on va faire ça, là, ils sont
très bons à modéliser puis à encadrer des usages productifs et sains du
cellulaire, ou des tablettes, ou des ordinateurs portables.
Maintenant, est-ce que nos enseignants ont
le temps de gérer ce qui se passe entre les cours, gérer ce qui se passe sur
l'heure du dîner? Sûrement pas. Puis je ne pense pas que ce soit très, très
important.
• (10 h 50) •
Mme Cadet : Dans la même
veine, vous nous avez sûrement entendu beaucoup parler de majorité numérique.
Là, vous êtes beaucoup dans la sensibilisation et dans le fait d'offrir des
outils et des formations aux parents pour mieux encadrer l'usage de... des
écrans, là, à la maison. Est-ce que ça signifie que vous, vous dites :
Bien, ça... en fait, que vous êtes en défaveur de l'imposition d'une majorité
numérique, plutôt d'y aller vers la voie de la sensibilisation?
M. Giroux (Patrick) : Je
pense que mes collègues vont avoir quelque chose à dire par rapport à l'âge des
jeunes et des technologies. Je suis en défaveur de tout ce qui va être
contraignant. Je pense qu'il faut éduquer nos enfants. Il faut les encadrer. Il
ne faut pas jeter la serviette, il faut leur montrer comment faire. Ça va être
dur parce que les parents ne savent pas toujours comment faire. Moi le premier,
là. Je suis rentré ici puis j'ai oublié de mettre mon téléphone à off, là. Il a
sonné... il a sonné, tantôt. Ça fait que, tu sais, on a des réflexes à
développer, on a des stratégies. Si c'est contraignant, je pense que... Il
suffit que ce soit interdit pour que ce soit le fun, là. Ça fait qu'on ne
s'aidera pas, là, tu sais.
Je serais en faveur de... Je serais en
faveur, peut-être, qu'il y ait des limites. Mais interdire complètement le
numérique ou dire qu'avant un certain âge ce n'est pas possible... De toute
façon, comment vous allez faire pour mettre ça en force? Mais il y a des choses
en lien avec... il y a des choses qu'il faut savoir, par exemple, en lien avec
l'âge puis les réseaux sociaux, par exemple, le développement et...
Mme Pouliot (Eve) : Mais
complètement, complètement d'accord. Moi, je pense que ça passe par la
sensibilisation. Puis, tu sais, les efforts, les ressources devraient être
mises à contribution pour mieux sensibiliser les parents, les familles, la
société de façon générale au fait que, bon, c'est ne peut-être pas un bon usage
que de laisser un enfant devant un écran sans qu'il n'y ait de limite au niveau
des contenus, et tout ça, plutôt que d'aller vers une majorité numérique.
Mme Cadet : Puis juste pour
bien saisir vos recommandations en termes de sensibilisation aux parents,
est-ce que c'est beaucoup plus sur qu'est-ce qui se passe, donc, sur les
écrans? Donc, comment ça fonctionne? Donc, quelque chose, donc, de plutôt
didactique, ou plutôt, donc, sur les méfaits des écrans, sur les impacts sur le
sommeil, la santé mentale, la santé oculaire, le développement langagier?
Est-ce que c'est...
Mme Pouliot (Eve) : Je pense
que ça prend tout ça. Ça prend tout ça. Il faut comprendre...
M. Giroux (Patrick) : ...
Mme Pouliot (Eve) : Oui, il
faut comprendre comment ça fonctionne. Il faut comprendre aussi qu'il y a des
effets positifs, là, tu sais, il ne faut pas le nier. Ça, il y a des effets
positifs aussi, des écrans. Il y a des usages qui sont sains puis qui sont
positifs également, là, pour les jeunes. Mais, tout ça, je pense qu'il faut
sensibiliser.
Mme Dion (Jacinthe) : C'est
des lois à faire. Moi, je pense plus que c'est en lien avec les compagnies qui
développent les jeux, qui ramassent nos données, qui font des algorithmes qui
font que, quand nos jeunes sont devant une PlayStation, ils ont juste envie de
continuer parce que ce qu'ils voient les amène à continuer, ou quand ils sont
sur un téléphone, puis là il y a un autre... ils jouent à un jeu, il y une
publicité qui arrive, ils ont juste envie de cliquer là-dessus, tu sais, pour
une «OP» qui met des contenus d'ados. En tout cas, moi c'est plus ça qui
m'inquiète, beaucoup plus en termes de lois que d'aller avec la majorité par
rapport à l'âge. Désolée, mais je me suis comme emballée.
Des voix : ...
Mme Dion (Jacinthe) : C'est
ça.
Mme Cadet : C'est un sujet
qui est passionnant. Ce que vous disiez plus tôt, dans votre <présentation...
Mme Cadet :
...un
sujet qui est passionnant. Ce que vous disiez plus tôt, dans votre >présentation,
bien, qu'il faut aider les parents, dans vos recommandations, aider les parents
à développer, donc, ces compétences-là à travers l'école, les centres
communautaires, les bibliothèques, à l'école, donc, dans votre mémoire, donc,
vous l'avez abordé. Donc, vous avez parlé, donc, de l'expertise des enseignants
au bout, donc, d'une formation de quatre ans. Mais justement : Est-ce que...
à travers, donc, les écoles, donc, qui disposent déjà, donc, des outils
nécessaires pour pouvoir aider, donc, ces parents... aider, donc, les parents à
développer, donc, ces compétences-là et à comprendre la portion méfait aussi
surtout? Oui, M. Giroux.
M. Giroux (Patrick) : Je
veux... Je ne veux pas parler pour les écoles, il va falloir leur demander,
mais j'ai l'impression que la cour est pleine. S'occuper des jeunes toute la
journée, planifier, corriger, etc., là, c'est déjà pas mal d'ouvrage pour nos
enseignants. Bien sûr, les bâtisses, les... probablement qu'il y a moyen de les
utiliser, de les exploiter parce qu'il y a déjà des laboratoires informatiques,
il y a des laboratoires créatifs où il y a des ordinateurs, où il y a des
robots, etc. Il y a des ressources, une partie. Mais le personnel enseignant,
je ne pense pas. Pelleter ça dans leur cour, là... Tu sais, déjà, ils s'occupent
des jeunes. S'il faut qu'ils s'occupent des parents en plus...
Mme Dion (Jacinthe) : Mais je
pense que ça pourrait passer par le communautaire. Moi, je pense à l'école
secondaire de mes enfants, l'organisme communautaire vient à l'école, puis, tu
sais, deux fois par année, ils font une soirée pour les parents, tu sais, pour
parler du numérique. Donc, je pense que de financer les organismes
communautaires qui sont près des familles, qui connaissent les besoins des
parents, je pense que ça peut être une bonne façon, là, d'aller chercher des
parents par le biais des organismes, parce qu'effectivement les enseignants,
ils en ont plein leurs bras, actuellement, avec toutes sortes de problèmes.
Mme Cadet : Peut-être une
dernière question rapidement. Merci, Mme la Présidente. Justement, est-ce que
vous, vous voyez, donc, d'autres juridictions desquelles nous, nous pourrions
nous inspirer comme législateurs, où il y a eu des campagnes de sensibilisation
à cet effet qui, pour vous, sont une réussite ou en voie d'être une réussite?
M. Giroux (Patrick) : On
peut-tu prendre les exemples ici, au Québec?
Mme Cadet : Oui, allez-y.
M. Giroux (Patrick) : Quand j'étais
jeune, ParticipAction, pendant des années, on a eu des publicités, il y a eu
des programmes. Ils sont venus dans les écoles pour faire bouger les jeunes.
Regardez ce que Pierre Lavoie a fait. Il a réussi à impliquer les familles.
Regardez, encore une fois, quand j'étais à l'école, les bacs bleus, la
récupération, les publicités, la sensibilisation. On a déjà réussi, dans le
passé, à déployer des mesures globales où on utilisait des interventions
ciblées dans les écoles, auprès des familles, mais aussi des concours, des
publicités, etc. On est capables de le faire. On n'est même pas obligés de
regarder ailleurs, là. On est capables de le faire. On l'a déjà fait. Pourquoi
on... Il faut juste s'assire puis vouloir le faire, je pense.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Mme la députée de Châteauguay.
Mme Gendron : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci d'être avec nous aujourd'hui. En fait, je pense qu'au
niveau des parents vous faites écho à plusieurs groupes qu'on a rencontrés. On
s'entend que vous avez proposé plusieurs suggestions afin de toucher les
parents, de toucher le milieu familial. Et je comprends bien que vos actions
devraient être plus au niveau de la famille et des parents que plutôt dans les
milieux scolaires.
Par contre, docteur, vous avez mentionné
qu'il faudrait évaluer les compétences numériques de nos jeunes. J'aimerais
savoir si vous avez des suggestions ou comment ça pourrait se traduire, ça,
compte tenu la réalité que ce n'est pas pour tout le monde aujourd'hui, ce n'est
pas tous nos jeunes qui ont accès, justement, à la technologie à la maison. Avez-vous
des pistes d'idée de comment, ça, ça pourrait se traduire sur le terrain, une
telle évaluation des compétences technologiques chez les enfants?
M. Giroux (Patrick) : Il faut
savoir que, dans la mission de l'école, dans la première partie des programmes
de formation, là c'est très, très clair que l'école, ça doit servir, entre
autres, à égaliser les chances. Quand je pense à l'évaluation des compétences
numériques, je ne parle pas... je pense à l'évaluation de compétences
numériques qui auraient pu être développées en milieu scolaire. Je parle de
celles qui sont... qui permettent d'être productif, celles qui vont... les
compétences qui vont leur permettre d'aller un petit peu plus loin en math, un
petit peu plus loin en français, un petit peu plus loin en sciences ou en
univers social.
Donc, comment, moi, je vois ça? On
évaluerait les compétences qui ont été développées en classe. On structurerait
un programme pour qu'il y ait un niveau minimal de compétences puis on
répartirait le programme sur 11 ans, par exemple. On peut même... Écoutez,
quant à moi, vous pouvez inclure le collégial puis inclure l'université, là. On
va mettre la main à la pâte aussi. On le fait déjà, de toute façon, pour que
nos étudiants, quand ils sortent, quand ils finissent l'école, peu importe le
chemin qu'ils ont pris, ils aient... on sache qu'ils ont un minimum. Puis, ces
compétences-là, on est capables de les développer à l'école. C'est un petit
surplus de tâches, c'est un petit surplus de planification, mais il y a déjà
plein de ressources, comme je l'ai décrit dans le mémoire. On a un réseau de
conseillers pédagogiques, on a des documents légaux, puis il y a d'autres
choses qui s'en viennent. Il y a du travail qui se fait pour ajouter, par
exemple, l'IA à la compétence numérique.
Je pense que juste en travaillant ce qu'on
peut ou la petite partie qu'on peut voir à l'école... pour s'assurer que tout
le monde, au moins, à la fin de secondaire, a les compétences minimales <numériques...
M. Giroux (Patrick) :
...au moins, à la fin de secondaire, a les compétences minimales >numériques
pour être productif, pour être un citoyen responsable, pouvoir participer au
débat qu'on a actuellement. Il y a plein de gens qui ne comprennent pas le
débat, ils ne comprennent pas l'impact, ils n'ont pas été renseignés. Donc,
dans ma tête, ce serait juste ça, là. L'école jouerait le rôle de niveleur,
d'égalisateur des chances.
Mme Gendron : La technologie
numérique, étant ce qu'elle est, évolue à la vitesse de la lumière, là, on
s'entend. Comment faire pour que tous les acteurs, que ce soit les enseignants,
que ce soit les parents, puissent suivre ça? Parce qu'on s'entend que même
nous, là — vous avez posé des questions tantôt — on n'est
pas nécessairement à jour de tout ce qui se fait. Donc, de quelle façon on peut
toucher, justement, tous ces acteurs-là qui doivent justement enseigner ou
montrer à nos jeunes, et même à nous, comment on fait ça?
M. Giroux (Patrick) : La
première chose, il faudrait peut-être accepter que c'est vraiment important,
que c'est rendu aussi important que d'apprendre à lire puis écrire en 2025.
Tant qu'on va... Tant qu'on n'y croira pas, ça ne sera pas important. À partir
du moment où on va y croire, bien, ça va être de la formation continue. On va
développer peut-être une certaine... Tu sais, si on dit aux parents que c'est
important, puis si les parents, ils en viennent qu'à le croire puis à le
réaliser par les observations qu'ils font, bien, ils vont peut-être être un
petit peu plus curieux puis poser des questions. Puis là ils vont peut-être
répondre à l'école quand ils organisent une soirée sur le numérique.
Je pense que ce n'est pas une intervention
qui va régler ce problème-là, là, mais, un, la première chose que je vois, là,
c'est que tant qu'on ne sera pas convaincus que c'est important pour vrai, tant
que... «walk the talk», tant que nos actions n'iront pas dans ce sens-là, ça ne
se réglera pas. Mais, après ça, je suis désolé, mais il n'y a pas de solution
miracle, ça va très, très vite, puis il va falloir courir en arrière puis
essayer de suivre. Il va falloir se former, puis être curieux, puis...
• (11 heures) •
Mme Gendron : Très
intéressant. Merci. Je n'ai pas d'autre question.
La Présidente (Mme Dionne) : M.
le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. J'ai beaucoup aimé votre montée de passion il y a quelques instants.
Ça m'a allumé, moi aussi. C'est pour ça que j'ai levé la main. Parce que moi,
je pousse beaucoup cette réflexion-là, puis pas juste sur le jeu vidéo. Tu
sais, on est en train de réfléchir sur, potentiellement, des interventions à
faire. Et la Belgique a interdit les fameux «loot boxes», là, les jeux de
hasard qui sont normalement interdits aux enfants, mais qui sont permis sur les
jeux vidéo. Mais j'aimerais ça aussi vous entretenir sur la question des
réseaux sociaux. Quand ça a commencé, Facebook, il y avait une fin à Facebook,
hein? On déroulait, on déroulait, puis, à un moment donné, c'était tout ce que
vos amis avaient publié aujourd'hui. Il y avait une fin. Après 45 minutes,
une heure, là, vous aviez fait le tour de Facebook aujourd'hui.
Aujourd'hui, on a inventé, donc, des fonctionnalités
pour vous garder accrochés le plus longtemps possible pour vous vendre la
publicité, essentiellement. Ça fait que c'est le déroulement infini, le
démarrage automatique de vidéo, les boutons «J'aime», etc. Est-ce que ça ne
serait pas envisageable de venir faire... j'utilise le terme un peu classique, mais
la police de ce genre de situation là? Est-ce qu'on pourrait commencer à dire :
Bien, c'est fini, ça, le déroulement automatique, c'est fini, le démarrage
automatique de vidéos, les boutons «J'aime»?
Chaque fois que j'en parle à du monde,
puis là on s'adresse aussi aux adultes... vous parlez des parents, puis, moi,
je plaide coupable aussi, des fois, le téléphone m'attire, puis il faut que je
me force à le laisser pour me concentrer sur ma fille puis les activités que je
fais avec elle. Mais est-ce que toutes ces choses-là, qu'on pourrait venir
limiter — parce qu'on s'imagine qu'il y en a peut-être d'autres qui
vont être inventés dans le futur, encore pire — ne viendraient pas
aussi ressouder cette relation-là, parent-enfant, et aider les parents aussi,
comme adultes, de manière générale?
Mme Dion (Jacinthe) : C'est
une bonne question. J'aurais comme tendance à dire oui, mais, en même temps, je
trouve ça important de développer l'esprit critique. Mais, en même temps, je
sais que, tu sais, la façon que le cerveau... comment il est fait, tout ça,
puis les algorithmes, puis... tu sais, ces gens-là, ils étudient ce que les
cerveaux aiment, tu sais. Ça fait qu'ils vont développer cette technologie-là
justement pour qu'on reste plus accros. Parce que ces compagnies-là, on le
sait, plus qu'on reste accros longtemps, plus on voit de publicités. Puis plus
on voit de publicités, plus qu'ils font de l'argent. Plus qu'ils font de
l'argent, plus que... Tu sais, c'est une roue sans fin, là. C'est comme Google
qui vous a déposé un mémoire, là, qui disait qu'ils prennent des mesures. Je
m'excuse, mais, non, ils ne prennent pas des mesures, là, tu sais. Mais, je
veux dire, ils en prennent, mais c'est mineur comparé à tout le reste. Ça fait
que...
M. Giroux (Patrick) : Ils
prennent autant de mesures... Ces compagnies-là prennent autant de mesures pour
empêcher certains contenus qu'ils prennent de mesures pour vous garder captifs
devant l'écran. Si on veut régir, peut-être qu'on peut aller dans ce sens-là.
Oui, c'est clair que ça a un impact, là. Les interfaces aujourd'hui sont faites
pour vous garder devant l'écran. Plus vous êtes là longtemps, plus vous... plus
ils en apprennent sur vous, plus ils peuvent utiliser ça pour cibler, cibler la
publicité, pour cibler la prochaine vidéo qu'ils vous envoient pour vous garder
encore plus longtemps captif.
Une des choses, une des compétences que
les gens... puis une des connaissances que les gens doivent acquérir, c'est :
C'est quoi, un algorithme? Comment ça fonctionne? Ces sites-là sont programmés
pour vous garder. Ils ne sont pas programmés pour vous envoyer les infos sur
vos amis, là, ils sont programmés pour vous garder devant l'écran. C'est une de
leurs premières fonctions. Donc, je pense que c'est une voie de... Je ne suis
pas <spécialiste...
>
11 h (version révisée)
< M. Giroux (Patrick) :
...de
leurs premières fonctions. Donc, je pense que c'est une voie de... je ne suis
pas >spécialiste des logiciels, etc., mais, clairement, c'est sûrement
une voie à explorer. Ça sort beaucoup de l'éducation.
Mme Dion (Jacinthe) : Mais
même les contrôles parentaux qu'ils mettent sur les téléphones, là, moi, je le
sais, j'ai des enfants puis... je suis avec Apple puis je me disais :
Pourquoi ça dépasse? Mettons, je mets deux heures, je ne sais pas, puis là c'est
plus que deux heures, je me demande pourquoi. Finalement, j'ai réalisé, tu
sais, dans le fond, mon fils, quand le deux heures est terminé, c'est écrit
«encore une minute», ça fait que, là, il clique «encore une minute», il clique
«encore une minute». Puis moi, je me suis informée, là, est-ce qu'on peut
enlever ça. Bien non, c'est comme ça dans le téléphone. Ça fait que, là, je me
dis : O.K., tu sais, l'application Apple met ça en place pour aider les
parents, mais, au final, tu sais... Puis là, bien, encore une minute, ça fait
que, là, il y a encore comme une dépendance de... tu sais. En tout cas, mais c'est
ça, c'était juste pour vous donner un exemple de... dernièrement, je me suis
rendu compte de ça, mais, en tout cas, j'ai hâte de t'en reparler, Patrick,
justement, mais c'est ça. Ça fait que je ne sais pas, comment on peut faire, tu
sais, moi, je ne suis pas en politique, là, mais c'est sûr que moi, il y a
quelque chose qui me dérange, de ces grandes compagnies-là, tu sais, qui font
de l'argent puis qui ramassent des données sur le dos de nos enfants, tu sais,
il y a quelque chose de préoccupant par rapport à ça.
Mme Pouliot (Eve) : Puis il y
a de l'éducation à faire chez les parents puis chez les jeunes eux-mêmes parce
qu'ils ne savent pas. Puis, à partir du moment où tu es sensibilisé à ça, tu
fais plus attention aussi, là. Donc, au-delà du contrôle, je pense qu'il y a
des mesures de sensibilisation aussi, là.
M. Leduc : Dans les...
La Présidente (Mme Dionne) : Malheureusement,
le...
M. Leduc : C'est déjà fini?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
bien, 30 secondes, allez-y.
M. Leduc : 30 secondes.
Dans les... Juste vous dire, dans les classes qu'on visitait, on demandait aux
jeunes : Est-ce que vous trouvez que vos parents donnent un bon exemple? Puis
il n'y avait pas beaucoup de mains levées.
Mme Pouliot (Eve) : Je ne
suis pas étonnée.
M. Giroux (Patrick) : Je ne
suis pas surpris non plus.
Mme Dion (Jacinthe) : On fait
une étude, actuellement, là-dessus, puis les jeunes, ils répondent que leurs
parents sont trop sur leurs téléphones, là, c'est...
M. Leduc : Exact.
La Présidente (Mme Dionne) : On
a eu les mêmes réponses dans notre tournée. Alors, Dr Giroux, Dre Pouliot,
Dre Dion, merci beaucoup pour votre contribution à ces travaux.
Donc, pour l'instant, je suspends les
travaux pour accueillir nos prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 05)
(Reprise à 11 h 11)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux.
Donc, nous avons le plaisir d'accueillir
les représentants d'HabiloMédias. Alors, bonjour et bienvenue. D'abord, je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour nous faire part de votre
exposé. Peut-être, vous présenter aussi, d'emblée. Et, par la suite, on va
procéder à une période d'échange avec les membres de la commission. Donc, la
parole est à vous.
HabiloMédias
Mme Hill (Kathryn Ann) : Merci.
Bonjour, je m'appelle Kathryn Hill et je suis la directrice générale
d'HabiloMédias. Nous sommes le centre canadien à but non lucratif pour la
littératie aux médias numériques. Je ferai notre discours d'ouverture et mon
collègue Marc Alexandre répondra aux questions.
HabiloMédias effectue de la recherche et
développe des ressources éducatives pour les jeunes au sujet des médias et les
technologies depuis près de 30 ans. Notre travail inclut du soutien aux
enseignants, aux parents et aux jeunes dans le développement de la littératie
aux médias numériques.
Nous nous sommes profondément immergés
dans le sujet de l'impact des écrans et des médias sociaux sur les jeunes. Et
il est clair que nous nous trouvons à un point tournant crucial dans la façon dont
nous abordons le sujet des jeunes et de la technologie. La technologie, en
particulier les médias sociaux, présente à la fois des défis et des
opportunités. Alors que certaines juridictions tentent d'interdire les
appareils et les médias sociaux, notre position est que le moyen le plus
efficace de naviguer ce paysage complexe est de responsabiliser les jeunes
grâce à la littératie aux médias numériques. Plutôt de recourir à des
interdictions générales ou à des restrictions d'âge, nous préconisons une approche
qui met l'accent sur des habitudes médiatiques conscientes et positives, dotant
les jeunes des compétences dont ils ont besoin pour s'épanouir à l'ère
numérique. À l'exception des plus jeunes <enfants...
Mme Hill (Kathryn Ann) :
...À
l'exception des plus jeunes >enfants, notre objectif n'est pas de
réduire le plus possible le temps passé devant un écran, mais de leur apprendre
à contrôler leur utilisation des médias et de les aider à développer des
habitudes médiatiques conscientes et positives. Il est important de reconnaître
que le temps passé devant un écran n'est pas en soi nocif. L'accent doit être
mis sur ce que nous faisons et voyons lorsque nous utilisons des écrans. Il
s'agit d'aller au-delà de la simple mesure de temps passé et d'examiner plutôt
les activités spécifiques et le contenu consommé. Les médias sociaux peuvent
offrir des avantages importants comme le lien social, l'éducation et
l'expression de soi. Aussi, les recherches suggèrent que les jeunes les plus
vulnérables aux risques en ligne peuvent également tirer le plus grand bénéfice
de ces technologies. Certaines activités, comme la publication de contenus et
l'envoi de messages à des amis sont liés à un meilleur bien-être et d'autres
activités sont associées à des niveaux plus élevés de solitude.
Alors, la clé, ici, est une approche
nuancée qui se concentre sur des comportements et des contextes spécifiques,
car les façons dont nous utilisons les médias sociaux et les appareils sont
complexes. Une interdiction générale ou une réduction d'âge ne peut pas tenir
compte de cette complexité. Lorsque l'on considère les inconvénients potentiels
de la technologie, il est tentant de se précipiter vers des mesures
restrictives. Cependant, nous devons être conscients des risques de contre-performance
des interdictions. Les stratégies trop générales peuvent se retourner contre
les jeunes, car elles peuvent les pousser à prendre plus de risques parce
qu'ils ignorent les raisons spécifiques pour lesquelles une activité peut être
nuisible.
Les recherches montrent également que le
retrait de la technologie en guise de punition peut nuire à la confiance et
rendre les jeunes moins susceptibles de demander de l'aide lorsqu'ils en ont
besoin. Il s'ensuit donc que l'interdiction d'appareils ou de médias sociaux
pourrait envoyer le message que les jeunes doivent garder secrètes leurs
activités technologiques. Si les jeunes entendent constamment qu'ils sont
malades et accros à leurs applications de médias sociaux, cela peut devenir une
cause créée qui engendre son effet pour certaines jeunes, qui commencent à y
croire et à se comporter en guise de cette croyance. Malgré les nombreux défis
associés au respect des interdictions d'âge sur les médias sociaux, y compris
les éventuelles préoccupations en matière de confidentialité, nous devons également
garder à l'esprit qu'il n'existe pas d'âge magique auquel les jeunes deviennent
immunisés contre d'éventuels préjudices médiatiques. Fixer une limite d'âge
risquerait de laisser les jeunes se déchaîner sur une plateforme sans
l'encadrement et les conseils nécessaires des adultes.
Nous devons apprendre aux jeunes à
utiliser la technologie de manière responsable avant qu'ils ne s'immergent
complètement. Au lieu de nous concentrer sur des restrictions générales, nous
devons reconnaître le pouvoir de l'éducation aux médias numériques. Notre
objectif devrait être d'apprendre aux jeunes à contrôler leur utilisation des
médias et à développer des habitudes médiatiques conscientes et positives.
Lorsque les jeunes comprennent ces techniques, ils peuvent mieux contrôler leur
expérience en ligne.
Nous devons promouvoir une conception plus
saine et apprendre aux jeunes à remettre en question les normes sociales qui
les poussent à être constamment disponibles. Il est essentiel de s'attaquer aux
pièges de la comparaison que peuvent créer les médias sociaux en enseignant aux
élèves comment organiser leurs flux. Plus important encore, l'éducation aux
médias numériques devrait être une partie obligatoire de l'apprentissage tout
au long de la maternelle et jusqu'à la fin du secondaire et même au cégep afin
de garantir que tous les élèves disposent des outils dont ils ont besoin pour
utiliser la technologie de manière consciente et positive. C'est pourquoi notre
travail est <fondé...
Mme Hill (Kathryn Ann) :
...utiliser
la technologie de manière consciente et positive. C'est pourquoi notre travail
est >fondé sur un cadre théorique qui aborde tous les aspects de
l'éducation aux médias numériques et permet aux jeunes de s'habiliter en tant
que citoyen numérique. Notre approche ne consiste pas à ignorer les dangers
potentiels de la technologie, mais à préparer les jeunes à naviguer dans leur
monde numérique de manière responsable, critique et conscient. En donnant la
priorité à l'éducation aux médias numériques, nous pouvons aider les jeunes à
exploiter les avantages de la technologie, tout en atténuant ses risques, en
les préparant à être des participants actifs et conscients du monde numérique
plutôt que des consommateurs passifs. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup pour ces interventions. Donc, nous allons débuter la période d'échange
avec Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
• (11 h 20) •
Mme Cadet : Merci, Mme Présidente.
Bonjour, Mme Hill. Bonjour, M. Johnson. Et bonjour, M. Ladouceur.
Merci pour la présentation. Donc, bien saisis l'essence de votre propos, donc,
sur l'éducation et la sensibilisation qui doit être faite, non seulement du
côté des parents, mais également du côté des jeunes. Vous avez peut-être
entendu nos intervenants précédents qui nous disaient que, par exemple, donc,
en ce qui a trait, donc, à l'école... Parce que j'ai cru comprendre que vous
parliez donc d'un cursus, donc, d'éducation aux médias numériques à l'école,
que, bon, le cursus est déjà très, très complet, et que les enseignants sont
déjà très débordés et que ça peut être une ressource, donc, plutôt difficile.
Et, au même titre, donc, oui, les parents, manifestement, doivent disposer de
plus de ressources, doivent disposer d'une meilleure, donc, sensibilisation à...
autant, donc, à ce qui peut être fait sur les différents outils numériques, à
des fins pédagogiques, ou autres, ou récréatives mais également aux différents
méfaits.
Je vais donc me tourner sur peut-être un
aspect que j'ai moins entendu de votre part, donc sur les plateformes en tant
que telles. Donc, justement pour donner une espèce de souffle aux parents qui
peuvent être débordés et à l'environnement scolaire... Bien, on le voit et on
l'a entendu, donc il y a plusieurs mécanismes qui retiennent les jeunes sur les
plateformes, et parfois donc bien avant qu'ils disposent des... de la maturité
nécessaire pour bien comprendre, donc, comment utiliser ces plateformes-là.
Donc, vous, comment est-ce que vous pensez que, comme législateurs, on peut
encadrer les différentes plateformes du monde numérique afin de rendre leur
utilisation plus sécuritaire pour les jeunes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Merci.
C'est en fait une excellente question. Parce qu'on a reconnu déjà trois aspects
importants, c'est-à-dire qu'à quelque part il y a une intersection entre la
présence des parents, le modèle des parents, l'éducation et la législation avec
les plateformes numériques. Donc, on... je les inclurais même dans une
intersection par quatre voies. Et puis l'importance évidemment de la
réglementation, elle est aussi reconnue. On le sait que des jeunes réclament, par
exemple, que les plateformes puissent leur donner le droit d'être oubliés. Ils
voudraient que le rapport à la désinformation soit plus facile d'accès,
c'est-à-dire qu'ils nous ont rapporté, dans nos propres groupes de recherche,
qu'ils vont en ligne, évidemment, pour s'amuser, et les plateformes vont leur
offrir cette réalité-là, et on... Bon, on a déjà parlé, j'ai entendu dans le
dernier groupe... on a constaté que c'est un jeu quasiment sans fin, et je le
reconnais, mais ce que je veux dire ici, c'est que les informations aussi qui
paraissent dans ce jeu sans fin peuvent être justes ou non, sans nécessairement
avoir des façons faciles de le repérer. On offre donc des suggestions sur
comment rapporter de la désinformation, comment la rendre plus facile, comment
la rendre quasiment divertissante, dans le... de la même façon que les autres parties.
Ils réclament aussi pouvoir comprendre ce qui se passe quand on leur demande
d'accepter cette terminologie juridique, etc. qui paraît dans les conditions
d'utilisation. Par ces trois moyens-là, déjà, on... on sait que c'est ce que
les jeunes réclament et on veut répondre à leurs besoins lorsqu'on cherche
aussi à offrir des moyens d'agir dans ce monde numérique là.
Mme Cadet : Oui. Bien oui,
mais je vais continuer sur cette même lancée-là, parce que vous avez vous-même
évoqué le droit à l'oubli. C'est effectivement, donc, un... Bien, en fait, une
des intervenantes hier, donc, nous amenait sur cette piste-là. Parce
qu'effectivement, donc, les informations qui sont partagées par... bien, en
fait, par l'ensemble des utilisateurs, mais notamment, donc, par les mineurs
sur les plateformes, donc ne leur appartiennent plus à ce moment-là. Et ça fait
partie des <préoccupations...
Mme Cadet :
...sur
les plateformes, donc ne leur appartiennent plus à ce moment-là. Et ça fait
partie des >préoccupations que les jeunes peuvent avoir au fil du temps.
Donc, vous, qu'est-ce que vous recommandez au législateur en matière de droit à
l'oubli?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Là,
on se tourne énormément vers l'éducation, c'est-à-dire que le droit à l'oubli,
ça appartient quasiment à la formule de la plateforme et une interaction entre
les législateurs et la plateforme. Nous autres, notre spécialisation, ici, se
veut sur le côté de l'éducation, la littératie pour prendre l'expression
pédagogique. Donc, déjà, l'éducation aux médias numériques va montrer aux
jeunes à se servir des plateformes comme s'ils avaient accès au droit à
l'oubli, à contrôler leur flux, à contrôler leur public, à agir de façon à ce
que leurs informations ne soient partagées que selon leur modalité
intentionnelle. L'éducation aux médias numériques, aussi, se fait toute...
telle que proposée tout au long du monde... du parcours éducatif des jeunes,
faisant en sorte qu'on peut modeler dès un plus jeune âge, O.K., qui peut voir
quoi. Ensuite, on peut essayer de comprendre c'est quoi l'implication de mes
données? C'est quoi... pourquoi est-ce que je reçois certaines publicités
tandis que d'autres en reçoivent des versions complètement différentes?
Qu'est-ce qu'un algorithme? Je continue avec des considérations d'âge.
Qu'est-ce qu'un algorithme? Comment est-ce que ça affecte mes interactions
maintenant? Pourquoi est-ce qu'on me recommande certaines personnes comme
nouveaux amis, comme nouvelles connexions? Par la suite, comment est-ce que je
fais pour contrôler ces informations-là? Mon image? L'image de... à laquelle je
compare sur les médias sociaux, qui fait encore partie des raisons pourquoi on
s'y abonne si rapidement. Et, bon, je pourrais en donner plusieurs exemples,
là, ça fait partie carrément de notre spécialité. Mais tout ça pour dire qu'on
sait que quand les jeunes agissent de façon consciente, c'est sûr qu'il va
quand même y avoir d'autres problèmes par... bon, par rapport à toutes les
informations qui peuvent leur parvenir, mais ils ont une base de référence sûre
sur laquelle s'appuyer, ce qui risque de... d'avoir, excusez-moi, un effet
positif sur les comportements face à ces informations-là aussi. Or, l'éducation
mène à une utilisation consciente des médias sociaux. Et, avec tous ces
droits-là, ils peuvent aussi commencer à les réclamer eux-mêmes, être habiletés
à dire : O.K., mais nous autres, on veut ce droit-là, qu'est-ce qu'il faut
pour y parvenir? Et devenir acteurs dans le monde, eux-mêmes.
Mme Cadet : Sur qui peut voir
quoi, parce que vous l'avez évoqué, nous, quand on a fait la tournée des
écoles, quand on demandait, à main levée, aux élèves : Qui, ici, s'est
créé un compte bien avant 13 ans, bien avant 14 ans? Tout le monde
levez la main et tout le monde, donc, disait : Mais moi, je n'ai pas
mis... évidemment, j'ai indiqué que j'étais né en 1995 ou en 1998 et pas en
2005 et en 2008. À ce moment-là, tu sais, on le sait, donc c'est quand même
relativement important que, donc, les comptes, donc, des utilisateurs, donc, d'âge
mineur puissent être confidentiels, que pour des raisons de... pour des motifs
de sécurité. Est-ce que d'abord, en termes de votre sensibilisation que vous
faites, est-ce que c'est un élément sur lequel vous mettez l'accent? Et, encore
une fois, en parallèle, au niveau des plateformes, est-ce que vous pensez que
ça pourrait être une forme d'encadrement utile pour protéger ces jeunes
utilisateurs-là, étant donné, donc, les défis en matière de vérification d'âge,
là, qui viennent avec le fait d'établir un seuil minimal pour atteindre les
différentes plateformes, pour s'inscrire sur les plateformes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : D'abord,
carrément, oui. Ce que je veux dire, ce n'est pas de façon simpliste, mais,
pour les jeunes de 13 à 17 ans, on recommande fortement toutes les
protections qu'il faut pour leurs données. Ils sont mineurs et doivent être
traités ainsi. Ça fait partie de plusieurs formations chez HabiloMédias que de
dire aux jeunes ou aux parents des jeunes qui veulent savoir un peu comment naviguer
ce portrait-là, et même les enseignantes et les enseignants, que quand tu dis
qu'à 13 ans, tu... excusez-moi, à 10 ans, tu en as 13, eh bien, à
partir de l'âge de 15 ans, tu vas être traité comme un adulte d'âge majeur
et les protections soudainement s'évaporent, parce que d'après la plateforme tu
as l'âge qu'ils ont recommandé. C'est pourquoi aussi les restrictions d'âge ont
toujours... comment est-ce je pourrais dire, certaines complexités qu'il faut
adresser, parce qu'il n'y a pas moyen sûr de savoir nécessairement c'est quoi
l'âge d'une personne sans rentrer dans un terrain éthique ou un terrain de
données et de vie privée, bon, je vais dire nuancé, mais même potentiellement
problématique.
La question des plateformes aussi. On
pense par exemple à TikTok qui, par défaut, pour les mineurs, a déjà des
restrictions plus sévères que pour leurs autres utilisateurs. Donc, il existe
des modèles déjà pour pouvoir protéger les âges de 13 à 17 ans.
Encore, nous autres, comme <organisme...
M. Ladouceur (Marc Alexandre) :
...pour pouvoir protéger les âges de 13 à 17 ans.
Encore, nous autres, comme >organisme
d'éducation, on veut mettre l'emphase que oui, il faut être au courant de tout
ça. Ça fait partie de la conscience pour comprendre comment devenir des acteurs
dans le monde du numérique. Et je sais que je le répète, mais cette fois-ci
pour dire que les jeunes qui savent pourquoi on met des règlements en place,
d'après nos recherches, ont démontré plus de chances de suivre ces règles-là
que de juste mettre des règles en place sans valeur associée.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Merci
beaucoup. Tout à l'heure, vous avez bien nommé le fait que retirer les tablettes
ou le cellulaire, là, à toutes les sauces, comme punition ou conséquence,
finalement, ça pouvait vraiment briser un lien de confiance avec les parents
puis que les jeunes déclareraient moins s'il y avait un incident en ligne, par
cette perte de confiance là à un adulte responsable. Quel autre système on
pourrait mettre en place, ou vers quel adulte, tu sais, pour créer un canal
sain? Parce que, quand j'ai fait les écoles dans mon comté, les enfants ne
savaient pas quoi me répondre, franchement. Vers qui se retourner en cas...
Puis j'ai eu toutes sortes de réponses farfelues.
Puis toute la notion entre signaler un
incident versus bloquer la personne. Puis il semble y avoir une grande tendance
à bloquer, parce que, si on signale, puis que ce n'est pas pris au sérieux, il
peut y avoir des conséquences pour les jeunes. Ça fait que comment être
capables, nous, législateurs, d'encadrer ça pour qu'un signalement protège un
plus grand nombre de personnes puis que ce soit fait de manière sérieuse?
• (11 h 30) •
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : O.K.
Si vous me permettez, j'entends deux volets à la question.
Mme Bogemans : ...
M. Ladouceur (Marc Alexandre) :
Oui? O.K. Parfait. Au premier volet, la question de comment reconnaître les
adultes de confiance — c'est ce que je... c'est l'expression qu'on
utilise — pour ça, bon, on y va par... je sais qu'on va reprendre,
mais des activités comme le covisionnement, comme les conversations continues,
comme la participation semi-active dans la vie numérique des jeunes. Et ce que
je veux dire... «Semi-actif», bon, on va le rendre un peu plus concret comme
expression, c'est-à-dire que dès un jeune âge on s'intéresse, on pose des
questions, on participe. Comme ils deviennent plus vieux, on leur donne plus d'indépendance,
on leur fait de plus en plus confiance. On peut dire carrément : Écoute,
je veux avoir tes mots de passe pour avoir accès à tes réseaux sociaux, mais je
ne m'en servirai qu'en cas d'urgence. On veut essayer d'enlever, excusez-moi
l'expression, l'élément de l'hélicoptère — et pardon, quand je dis
«on» ici, je parle de parents — et intégrer de plus en plus le
modèle... bien... comme une piscine, hein? Finalement, je ne tiendrai pas mon
adolescent par les épaules pendant qu'elle ou il nage, je leur permettrai de
nager par leurs propres moyens, sachant que j'ai mis en place les éléments de
covisionnement, etc., qui venaient avant ça. Comme ça, s'il y a un problème, au
lieu de tout de suite enlever l'appareil et de briser ce lien de confiance là,
on peut commencer d'avoir des conversations.
Ce qui mène super bien à la prochaine
question par rapport aux signalements et aux blocages, parce que les jeunes
nous ont aussi rapporté dans nos recherches que c'est, des fois, difficile de
bloquer quelqu'un ou de le signaler. Ils ont peur de rompre ces mêmes liens
sociaux là entre eux et leurs pairs que s'ils répondaient ou répondaient de la
mauvaise façon, en tout cas, dans certaines situations. Mais il faut comprendre
aussi la façon que les outils fonctionnent. Par exemple, un blocage signifie
que personne d'autre ne peut voir que ça a été bloqué, nécessairement, qu'on
fait juste arrêter de voir le flux ou les commentaires de telle personne.
Mais je voulais... je voulais juste poser
une question de clarification ici par rapport... Parce qu'on a dit «blocage»,
«rapportage», et qu'est-ce qu'on fait, comme membres législatifs, pour
assurer un meilleur fonctionnement?
Mme Bogemans : ...dans le
fond, si on met des barres d'outils standards, ou on demande aux plateformes,
quelles qu'elles soient, là, que ce soit YouTube, les jeux vidéo de manière
générale, aussitôt qu'il y a une connectivité avec l'autre, les médias sociaux,
des boutons d'aide pour les enfants qui sont très, très clairs comme bouées de
sauvetage. Mais dans tout ce que je viens de nommer, tout le monde a une
version de ce qui est bloqué, ce qui est signalé et une façon de faire la
médiation ou de prendre la décision sur ce qui sera effectivement retiré comme
contenu ou pas. Puis, dans certains cas, dans les jeux vidéo, il y a des
conséquences si tu l'as fait pour rien. Puis ça, ça... en tout cas, c'est un
fort élément dissuasif de signaler pour les jeunes garçons, là, pour les jeux
vidéo, en tout cas.
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : O.K.
Merci. Ça aide énormément, en fait, à répondre, parce que... D'ailleurs, les
outils de signalement, déjà, sont difficiles, et, pour reprendre l'expression
d'un des jeunes, «pas le fun». C'est... ça fait partie du <vocabulaire...
>
11 h 30 (version révisée)
< M. Ladouceur (Marc Alexandre) :
...pour reprendre l'expression d'un des jeunes, «pas le fun».
C'est... ça fait partie du >vocabulaire qu'on a entendu qui crée déjà un
niveau de résistance par rapport à leur utilisation. Donc, si on avait des...
disons, plus standardisés comme vous avez suggéré, ou encore des outils de
signalement faciles à utiliser avec des conditions claires... Parce que l'autre
question, c'est que, quand on regarde la façon de se servir des outils de
signalement, les jeunes disent que ça change de plateforme en plateforme, ça
manque de clarté, on ne comprend pas toujours toutes les conséquences. Donc, la
compréhension, et c'est là que je veux répondre à la question, joue le rôle le
plus important. D'avoir des outils qui sont clairs et qui se comprennent
facilement va permettre aux jeunes de, d'après eux, mieux s'en servir.
Mme Bogemans : Super. Puis je
voulais juste bien comprendre vos propos. Tout à l'heure, vous disiez que
retirer un élément ou juste l'exclure de la vie, ce n'est pas une solution.
Mais, si on va, par exemple, vers une solution qui est : pas de portables
ou d'outils technologiques personnels à l'école, mais avec un matériel qui est
fourni par l'école, contrôlée par l'école et un cours de citoyenneté numérique,
est-ce que, pour vous, ça, ce serait un compromis raisonnable?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Ce
que j'entends, bien, c'est justement un cours comme, disons, en continu. Et ça,
c'est, oui, déjà quelque chose qu'on préconise tout le temps. Je pense que le
vocabulaire joue aussi un rôle important, c'est-à-dire que, si on va parler des
restrictions comme un retrait des outils, ça devient... bien, tu sais, c'est
une marche finale, il n'y a plus d'autre option. Si on parle de mesures qu'on a
mises en place, là, il y a au moins un élément... et je ne parle même pas de
négociations de l'utilisation de l'outil en salle de classe, mais un élément
pour montrer qu'on les enlève avec raison et avec un progrès en tête. C'est
pour ça qu'on en parlait de cette façon-là dans nos commentaires initiaux.
Mme Bogemans : Merci. S'il
reste du temps, j'aurais une dernière question après les autres.
La Présidente (Mme Dionne) : Bien,
vous pouvez poursuivre. Après, Mme Bourassa-Sauvé avait une question
aussi. Donc, je vais vous laisser poser votre question.
Mme Bogemans : Parfait. C'est
au niveau de la littératie. Comme c'est vraiment le centre de ce que vous
faites, je voulais savoir si votre organisme serait à même, selon vous, de
juger le bon matériel pédagogique sain ou exempt de mécanismes qui pourraient
garder les enfants addictifs ou de mécanismes de jeu de loterie ou des choses
comme ça pour être utilisés dans les écoles. Et sur, encore, la littératie, mais
une deuxième question, c'est : Qu'est-ce que vous pensez d'une possibilité
d'obliger la divulgation de qui finance les études sur ce qui est numérique vis-à-vis
des jeunes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Parfait,
je vais commencer. Première question... pardon, deux questions superintéressantes,
et la première, au niveau de la littératie, je la trouve extrêmement importante
et je peux répondre que, carrément, oui, on a les outils. D'ailleurs, tout
notre matériel, tout ce qu'on publie... et il y a un tas de leçons sur une
multiplicité de sujets qui sont reliés à un cadre théorique, et le tout relié
au cursus scolaire existant pour les enseignantes et les enseignants. Et, oui,
au Québec, mais dans toutes les provinces. Donc, non seulement sommes-nous en
mesure, mais on y oeuvre depuis 20 ans, presque 30, et puis... Donc, ça
existe et c'est déjà en place.
En ce qui est des jeux de loterie, par
exemple, et tout ça, on a des matériaux sur la publicité, sur ce qui nous garde
intéressés. On a du matériel qui est spécifiquement sur le sujet des jeux en
ligne et comment y participer, comment savoir ce qui se passe et comment
pouvoir communiquer si jamais il y a un problème. Donc, bon, ça adresse une
certaine partie du sujet, mais c'est encore plus grand, et, encore une fois, le
matériel est là.
Et ça nous amène donc à notre deuxième
question : Comment est-ce qu'on fait pour publier un tel matériel? La
transparence de la recherche, je trouve que c'est superimportant. Je peux
parler pour moi en tant qu'individu autant qu'en tant qu'organisation, parce qu'on
a toujours des mesures en place, peu importe le financement, pour pouvoir
assurer que le matériel soit fiable directement envers le matériel de recherche
ici. Notre équipe de recherche travaille de façon ardue pour assurer que ce que
nous présentons est toujours fiable et reflète les mesures les plus reconnues. «Reconnues»,
c'est quasiment difficile à dire parce qu'on est en plein dans le centre des
données émergentes, mais c'est le mot que je vais utiliser pour... Donc, oui,
cette transparence <doit être évidente....
M. Ladouceur (Marc Alexandre) :
...c'est le mot que je vais utiliser pour... Donc, oui, cette
transparence >doit être évidente.
Mme Bogemans : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Donc, deux questions complémentaires, puisque le temps nous le
permet.
D'abord, dès le départ, Mme Hill, donc, vous
disiez, pour vous, pour HabiloMédias, donc, ce que vos recherches, donc, vous
ont permis de conclure, c'est qu'à votre sens, donc, le temps d'écran était
moins important que ce que les jeunes, donc, faisaient, donc, sur les écrans.
Vous n'êtes pas sans savoir qu'en fait, donc, la grande majorité des
intervenants qui sont venus en commission, donc, nous ont parlé du temps
d'écran en tant que tel comme donnée à mesurer, tant au niveau du temps d'écran
à des fins pédagogiques que du temps d'écran à des fins récréatives. Donc,
peut-être, en entendre un peu plus de votre part sur cet élément-là dans un
premier volet, et, dans un second volet, à savoir si vous faites cette
distinction-là, de votre côté, au niveau du temps récréatif versus pédagogique.
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Je
sais que la question a été dirigée à Kathryn. Est-ce que ça va si je réponds?
O.K., parfait, merci. Parce que, oui, on fait cette distinction-là. On le sait
que du temps d'écran récréatif versus pédagogique, ça existe. On sait qu'il
faut considérer la qualité et le contenu autant que le temps, qu'il faut aussi
considérer... Et c'est là que je vais ajouter un petit peu la modalité autour
du temps d'écran.
• (11 h 40) •
Donc, le temps d'écran, dans le vide, que
ce soit un contenu pédagogique... excusez-moi, «le temps d'écran»... bon,
j'utilise la mauvaise expression, la consommation des médias, qu'ils soient
pédagogiques ou récréatifs, ou un ou l'autre, consommée dans le vide ou sans
interaction avec, disons, un adulte pour un plus jeune ou avec des cadres, des
questions... un retour beaucoup moins important qu'un temps d'écran qui est en
soi social et participatif. Donc, non seulement est-ce qu'il faut distinguer
entre les différentes qualités de ce que nous consommons, mais aussi des
modalités familiales, sociales qui existent autour de ces qualités-là.
On encourage, avec l'association
canadienne de pédiatrie, ce qui est... tout ce qui est créatif, éducationnel,
ce qui est social et même ce qui amènerait à une certaine participation active,
physique de la part des utilisatrices et des utilisateurs. Ces catégories ont
été démontrées comme étant — bon, je voulais éviter de me répéter,
mais je vais le faire quand même — plus efficaces et rendent le temps
d'écran plus... fait promotion, excusez-moi, du temps d'écran comme quelque
chose de plus actif que de passif. Et c'est là que je veux mettre la
distinction finale que la consommation passive, toujours... Oui, pardon, je
vois un doigt. Est-ce que...
Mme Cadet : Finissez, puis je
vais...
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : O.K.
Pardon. Donc, la consommation passive n'a jamais les mêmes retours qu'une
consommation active. Et la passivité, donc l'autolecture, l'écran comme façon
de faire passer le temps, tout ça tombe dans une même catégorie de peu de
retours versus les questions d'activités, l'engagement physique, éducationnel,
etc.
Mme Cadet : Juste pour bien
comprendre... Donc, j'ai bien saisi votre réponse au deuxième volet de ma
première question, mais, pour le premier volet, alors est-ce que, oui ou non,
le temps d'écran est une variable pour vous?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Bon,
pour les enfants de deux ans et moins, avec l'association pédiatrique avec
laquelle on a consulté, c'est sûr qu'on le recommande le moins possible et on
sait que le temps d'écran peut affecter, mais les provisions que j'ai ajoutées
sont celles qui doivent être prises en ligne de compte si on pense au temps
d'écran comme une seule mesure, comme étant de même qualité, que ce soit une
émission à la télévision qu'un jeu éducationnel, etc.
Mme Cadet : ...deuxième
question ici : Est-ce... En fait, selon vous, quelle doit être la
responsabilité des plateformes, je pense à Google, Meta, TikTok, YouTube, par
exemple, dans le rôle d'éducation puis de sensibilisation que vous, vous
promouvez? Parce que vous nous avez beaucoup parlé, donc, de votre mission,
vous, chez HabiloMédias. Donc, ces plateformes-là, donc, quelle doit être leur
responsabilisation, donc, dans ce rôle éducatif là auprès des parents et des
jeunes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Il
y a plusieurs façons que je peux y penser. On a travaillé avec les
organisations Google, YouTube pour créer des ressources éducatives qu'on
pouvait partager justement avec les parents pour les présentations des
ateliers, du matériel pédagogique. Déjà, dans ce modèle-là, on voit une part de
la <responsabilité...
M. Ladouceur (Marc Alexandre) :
...des ateliers, du matériel pédagogique. Déjà, dans ce modèle-là,
on voit une part de la >responsabilité que j'encourage fortement.
L'éducation, ça se fait, bon, dans les salles de classe, on le reconnaît, qui
veut dire qu'elle doit être balisée d'après ce qui se fait dans la province ou
dans la ville ou dans la salle de classe, dépendant du niveau macro,
microscopique qu'on voudrait envisager. Aussi, avec les parents, ils doivent
avoir accès à des ressources claires, ça, je l'ai mentionné au début, pour les
enfants, mais c'est vrai pour les personnes de tout âge, qu'elles soient
responsables pour des enfants ou non.
Quand on parle des conditions
d'utilisation, quand on parle des systèmes de soutien qui existent, ils doivent
être faciles à trouver, ils doivent être clairs. Et, ça aussi, ça nous a été
suggéré, il faut que les conséquences soient claires d'après les actions qui
sont prises à l'intérieur de leurs... excusez-moi, de leurs plateformes. Ils
ont un rôle toujours, toujours important, ils doivent continuer de rendre les
plateformes plus saines et aussi... bon, là, excusez-moi, je... sur le mot en
anglais, «safe»...
Une voix : ...
M. Ladouceur (Marc Alexandre) :
...plus sécuritaire, merci, afin que les gens puissent s'en servir avec autant
de confiance possible.
Mme Cadet : Puis c'est quoi,
la réceptivité de ces plateformes-là, selon vous, à jouer ce rôle-là,
d'éducatif, puis de s'assurer que ces plateformes-là soient, donc, plus saines
et sécuritaires, comme vous venez de le mentionner?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : On
a déjà vu des changements intéressants, qui ont été proposés d'ailleurs suite à
notre recherche, là, avec toutes les propositions, par exemple, que j'avais
mentionnées. On a vu des éléments de protection plus sérieux pour les jeunes de
13 à 17 ans. En même temps, je ne veux pas parler pour la plateforme ou
pour les gens qui régissent ces plateformes-là, parce que, autant qu'on voit du
progrès, on veut être... on veut que le progrès soit continu. Et donc la
réceptivité que nous avons vue, pour protéger les jeunes, elle est
encourageante, et je voudrais qu'elle soit aussi toujours continue.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
qu'il y a d'autres interventions?
Mme Cadet : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Bien
oui, allez-y, Mme la députée.
Mme Cadet : Oui. Bien, c'est
ça. Donc, vous dites, donc, cette... vous avez vu un... vous avez dénoté un
certain progrès. Puis justement, je reviens à votre mission éducative, est-ce
que vous pensez que, dans ce rôle de responsabilisation des plateformes sur
l'éducation qui doit être faite à la population, autant chez les jeunes que
chez leurs parents... Donc, vous dites, donc, la réceptivité, elle est bonne.
Est-ce que vous pensez qu'il devrait y en avoir plus pour justement vous aider
à réaliser votre mission? Donc, plus de progrès? Donc, comme vous avez dit, il
y a des choses qui, selon vous, sont intéressantes. Est-ce qu'il devrait y en
avoir encore plus de la part des plateformes?
M. Ladouceur (Marc Alexandre) : Quand
le ciel est bleu, le ciel est clair, la réponse est toujours oui.
C'est-à-dire... Excusez-moi. Je vous remercie pour la curiosité par rapport à
cette question-là, parce que c'est au cœur de ce qu'on suggère. Oui, oui et
toujours oui, on voudrait toujours voir plus de responsabilisation, on voudrait
toujours voir plus de protection, on voudrait toujours voir plus d'organisation
et de littératie encore, autant chez les plateformes. On serait contents de
continuer de voir des programmes voués à l'éducation aux médias dans les écoles
aussi, on serait contents de voir des programmes continus pour les adultes.
Comme j'ai dit, quand le ciel est bleu, quand le ciel est clair, la réponse est
toujours oui. Mais pour les plateformes en particulier, telle votre question,
absolument.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
qu'il y a d'autres interventions? Alors, Mme Hill, M. Johnson, M. Ladouceur,
merci infiniment pour votre contribution à ces travaux.
Donc, pour ma part, étant donné qu'il n'y
a plus d'intervention, j'ajourne les travaux jusqu'au
lundi 3 février, 14 heures. Donc, bonne fin de semaine, tout le
monde.
(Fin de la séance à 11 h 48)