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Version finale

29th Legislature, 3rd Session
(March 7, 1972 au March 14, 1973)

Tuesday, September 26, 1972 - Vol. 12 N° 95

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 250 - Code des professions et autres projets de loi connexes


Journal des débats

 

Commission spéciale des corporations professionnelles

Projet de loi no 250

Code des professions

et autres projets de loi connexes

Séance du mardi 26 septembre 1972

(Dix heures douze minutes)

M. PILOTE (président de la commission spéciale sur les corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs! Avant que ne débute la séance, je cède la parole au ministre des Affaires sociales.

Séance le 12 octobre prochain

M. CASTONGUAY: M. le Président, nous aurons encore une autre séance qui a été convoquée pour le 12 octobre 1972. D'autre part, un certain nombre d'organismes — ce sont, dans bien des cas, des individus qui ont présenté des mémoires sur des sujets que nous avons discutés — n'avaient pas été convoqués. Nous avons pris une journée pour discuter des problèmes de l'optométrie et nous avions retenu six mémoires, ceux qui paraissaient les plus substantiels, les plus importants. Nous avions donc convoqué six personnes. Alors, dans ce cas précis, deux ou trois groupes n'avaient pas été invités. La même chose pour certains autres mémoires.

Tout comme pour la loi 65, lorsque nous l'avons étudiée, ce que je suggérerais, si les membres de la commission étaient d'accord, c'est que nous demandions au secrétaire des commissions parlementaires de convoquer chacun de ces organismes ou de ces personnes, de leur demander s'ils ou elles désirent toujours se faire entendre. Lors de notre rencontre du 12 octobre, nous pourrions avoir un rapport sur le nombre de personnes ou d'organismes qui désirent toujours se faire entendre et, là, nous pourrions fixer une ou deux séances pour terminer notre travail.

Si vous étiez d'accord sur cette procédure, c'est la même que nous avions utilisée au moment de la loi 65. Nous n'avions pas reçu de critique, à ma connaissance; cela avait donné satisfaction à tout le monde et cela nous avait permis de faire notre travail dans des délais raisonnables. On doit tenir compte du nombre très élevé de journées que nous avons consacrées à l'étude de ces mémoires. Nous avons, je pense bien, pris tout le temps désiré pour étudier chaque mémoire qui a été soumis devant la commission.

La suggestion que je fais n'a pas pour objet d'éviter que des aspects des mémoires ne soient discutés. Il me semble que ce serait un compromis raisonnable pour nous permettre de finir notre travail dans des délais utiles, de telle sorte que des modifications aux projets de loi puis- sent être apportées et que, tôt à la reprise de nos travaux à l'Assemblée nationale, nous puissions aborder l'étude de ces projets de loi.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, je remercie le ministre à qui je voudrais poser surtout une question. Sans doute que, parmi les corporations qui désirent se faire entendre, il n'a pas oublié le Barreau.

M. CASTONGUAY: Je devrais apporter une précision. Le commentaire que j'ai fait a trait uniquement au projet de loi dont je suis le parrain et non aux autres.

M. PAUL: Enchaînant dans ces projets de loi dont vous n'êtes pas le parrain et qui autrefois étaient parrainés par l'illustre confrère, avocat spécialiste devant la cour des Commissaires, l'honorable juge Roy Fournier, est-ce que le ministre pourrait se faire le porte-parole des membres de la commission pour que le premier ministre nous informe du nom du futur parrain de ces projets de loi? Le ministre est attaché surtout, à bon titre, aux lois qui ont un caractère médical et paramédical. D'autres projets de loi nécessiteront également un autre parrain. Le ministre nous avait mentionné il y a environ trois semaines que le premier ministre devait incessamment nous informer du nom du nouveau parrain de ces projets de loi. Alors, je suis sûr que le ministre voudra bien faire les représentations qui s'imposent auprès de l'honorable premier ministre.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la procédure que le ministre a mentionnée est acceptée?

M. CLOUTIER (Montmagny): D'accord.

M. LE PRESIDENT: J'inviterais M. Gilles Poulin, président de l'Association des oto-rhino-laryngologistes de la province de Québec, à présenter son mémoire et à identifier les personnes qui l'accompagnent.

Association des oto-rhino-laryngologistes

M. POULIN: M. le Président, messieurs, l'Association des oto-rhino-laryngologistes de la province de Québec est représentée par le Dr Yvon Morissette de Saint-François d'Assise, le Dr Paul Savary de l'Hôtel-Dieu de Québec, Me Roger David et moi-même, de l'Hôpital Laval.

Dans notre mémoire nous avons voulu recommander certaines modifications du projet de loi des orthophonistes et audiologistes en vue de préciser le champ d'activité de ces professionnels en fonction de leur compétence propre. Nous sommes conscients que le projet de loi répète les définitions actuelles de l'acte professionnel de l'orthophoniste et audiolo-

giste. Nous soumettons que ces définitions sont scientifiquement erronnées et ne correspondent aucunement aux faits. Ni l'orthophoniste ni l'audiologiste n'accomplissent tous les actes que la loi actuelle leur permet de poser. Ils en seraient d'ailleurs incapables. Il y aurait lieu en toutes circonstances de corriger ces définitions. Cela est d'autant plus nécessaire aujourd'hui qu'il y a floraison des cabinets d'orthophonie et d'audiologie qui fonctionnent en dehors de l'équipe médicale hospitalière.

Nous noterons certains de ces dangers que cette situation présente dans le contexte d'une législation aussi imprécise.

L'orthophoniste et l'audiologiste en milieu hospitalier oeuvrent au sein de l'équipe médicale. Cette équipe médicale a pour rôle le diagnostic et le traitement des maladies de la voix, de la parole, du langage et de l'audition. Tout le problème réside dans l'identification du rôle respectif de l'orthophoniste, de l'audiologiste et du médecin dans le traitement de ces maladies.

Rappelons certaines réalités: Toute maladie cause un problème fondamental, c'est-à-dire celui de son diagnostic. Seul un médecin a la compétence requise pour faire le diagnostic différentiel d'une maladie de la voix, de la parole, du langage et de l'audition peuvent être multiples et seule la médecine dans l'état actuel des choses peut les explorer.

Nous donnerons quelques exemples. Premièrement, la voix: une dysphonie, ou si vous voulez, un trouble de la voix, peut être occasionnée par un cancer des cordes vocales; deuxièmement, la parole: un problème de la parole, par exemple, une dysarthrie peut être causée par un trouble vasculaire, soit une trombose ou une hémorragie cérébrale; troisièmement, le langage: une dyslexie ou une disorthographie peut être d'origine psychiatrique; quatrièmement, l'audition: une surdité neuro-sensorielle peut masquer une tumeur du nerf accoustique, soit donc un autre cancer.

A ce motif de la diversité des diagnostics possibles, les maladies de la voix, de la parole et du langage, nous croyons que l'orthophoniste ne doit intervenir qu'au terme d'un diagnostic médical déterminant qu'il s'agit bien d'un trouble relevant de son champ d'activités. Pour les mêmes raisons, nous tenons que l'audiologiste doit limiter son intervention à l'évaluation audiométrique qui s'inscrit dans l'élaboration d'un diagnostic médical, lequel est complexe et comporte notamment des éléments neurologiques, psychiatriques, pédiatriques et cardio-vasculaires.

En bref, en revendiquant l'exclusivité du diagnostic des maladies de la voix, de la parole, du langage et de l'audition, nous ne recherchons qu'une chose: assurer avec les meilleurs moyens scientifiques disponibles, l'identification de leurs causes, lesquelles peuvent être orthophoniques, audiologiques ou, comme c'est généralement le cas, d'ordre strictement médical. Nous sommes sensibles au désir du ministère des Affaires sociales de ne pas hiérarchiser les professions. Nous devons par ailleurs poser des problèmes tels qu'ils sont et proposer des formules qui traduisent les compétences respectives des différents membres de l'équipe diagnostique et thérapeutique.

Nous nous devons de faire l'observation suivante: il y a un danger très grave à laisser le diagnostic et le traitement des troubles de la voix dans le champ d'activité de l'orthophoniste. Ceci même, si quelques orthophonistes ont eu un enseignement sur les troubles fonctionnels de la voix. La raison est que ces maladies, contrairement aux troubles du langage, de la parole et de l'audition, peuvent mettre en péril la santé du malade.

Rappelons que le diagnostic différentiel d'un trouble de la voix peut résulter d'une déficience orthophonique mais, également être le symptôme d'une maladie, telle qu'une paralysie laryngée, la présence d'un polype, d'un module et même d'un cancer. En ce qui concerne ces maladies, nul ne conteste que seul un médecin peut en faire le diagnostic et que ce diagnostic doit être fait dans les meilleurs délais possible puisque tout retard, y compris le délai occasionné par un essai de rééducation orthophonique peut irrémédiablement compromettre les chances du traitement médical.

Ceci est particulièrement vrai dans le cas du cancer laryngé, maladie que l'orthophoniste, en aucune manière, ne peut constater, n'y différencier d'une déficience orthophonique.

Nous venons de parler des définitions de l'acte professionnel de l'orthophoniste et de l'audiologiste sous l'angle du diagnostic des maladies de la voix, de la parole, du langage et de l'audition. Nos propos valent également en ce qui concerne leur traitement. Le projet de loi confie à l'orthophoniste et à l'audiologiste, sans faire les distinctions nécessaires, tout traitement des maladies de la voix, de la parole, du langage et de l'audition. Il est établi que le seul traitement que peut effectuer l'orthophoniste et l'audiologiste est celui de la rééducation.

Nous croyons que le projet de loi doit contenir cette précision et spécifier que l'orthophoniste et l'audiologiste ont charge du traitement des troubles de la voix, de la parole, du langage et de l'audition par des moyens de suppléance et la rééducation.

A cet égard, nous notons que l'article 11 du projet de loi, qui stipule que l'orthophoniste ou l'audiologiste ne peuvent appliquer un traitement médical que sur ordonnance d'un médecin, est, à notre avis, une disposition de style. Qu'il s'agisse d'une intervention chirurgicale ou de tout autre traitement médical, seul un médecin en a la compétence requise. Dans le cadre de la loi actuelle, où nous retrouvons le texte de cet article 11, nous ne connaissons aucun cas pratique où un orthophoniste ou audiologiste n'ait appliqué, ni demandé l'ordonnance requise par la loi pour accomplir un

traitement médical. Cette disposition, sans doute inscrite pour rassurer les médecins, ne protège personne.

Un mot sur le projet de loi des acousticiens en prothèses auditives. En ce qui concerne ce projet de loi, nous devons nous opposer au principe de l'ordonnance d'un appareil par un orthophoniste et par un audiologiste. Nous nous basons sur le fait essentiel que seul un examen médical approfondi de l'appareil auditif permet de conclure qu'il s'agit là d'un traitement approprié. En certains cas de surdité, le traitement, loin d'être un moyen de suppléance, sera un traitement médical ou chirurgical. Il ne faudrait tout de même pas sanctionner par la loi un système qui crée de faux infirmes.

En conclusion, nous recommandons que le projet de loi des orthophonistes et des audiolo-gistes soit modifié pour prévoir que: 1)Constitue l'exercice de l'orthophonie tout acte qui a pour objet l'étude, l'examen, l'évaluation des troubles de la parole, du langage parlé ou écrit ainsi que l'utilisation des moyens de suppléance correspondants et la rééducation sur diagnostic médical. 2)Constitue l'exercice de l'audiologie tout acte qui a pour objet l'évaluation audiométrique de l'audition et la rééducation. 3)Nous recommandons que l'article 11 de ce projet de loi soit aboli. 4)Enfin, nous recommandons que le projet de loi des acousticiens en prothèses auditives soit modifié pour prévoir que l'ordonnance d'une prothèse auditive requiert un diagnostic médical. Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT: La parole est à l'honorable ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier l'association pour ces mémoires qui sont brefs et à point. J'aurais deux questions à adresser au président, le Dr Poulin, ou aux membres de la délégation.

Dans la loi actuelle des orthophonistes et des audiologistes, en fait, l'article 11 dit qu'un orthophoniste ou un audiologiste ne doit appliquer un traitement médical que sur prescription d'un médecin. Il n'existe aucune définition de l'orthophonie ou de l'audiologie, dans la loi actuelle. C'est la raison pour laquelle, d'une part, nous avons voulu formuler une définition. Nous avons aussi repris l'article 11 pour faire le pont avec la loi actuelle et nous assurer que si, dans le domaine de l'orthophonie et de l'audiologie, il y a des actes qui sont de la nature d'actes médicaux, ils doivent être effectués sur ordonnance d'un médecin.

Vous nous dites que la définition proposée à l'article 7 est trop large, qu'il faudrait prévoir l'ordonnance médicale. Vous nous dites aussi qu'il faudrait éliminer l'article 11. Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails sur la nature des actes que posent les orthophonistes et les audiologistes dans les établissements, d'une part? Aussi, quelle est selon vous, la nature des actes qu'ils posent hors des établissements, c'est-à-dire dans leurs cabinets, pour ceux qui ont des cabinets? C'est la première des questions que j'ai.

La seconde question touche les acousticiens en prothèses auditives. Vous nous dites, si j'ai bien compris, que, dans le cas de prothèses auditives, il devrait y avoir ordonnance d'un médecin avant qu'il y ait vente ou fourniture de prothèse. Vous avez expliqué la raison pour laquelle vous le faites. Maintenant, nous rencontrons exactement le même problème, en fait, dans le domaine de l'optométrie, entre l'optométriste et l'ophtalmologiste. Un grand nombre d'actes posés par l'optométriste peuvent l'être sans qu'il n'y ait aucun danger, je crois, s'il s'agit uniquement d'un défaut de la vision ou de l'acuité visuelle, un défaut mécanique et non pathologique.

Le débat, en fait, entre les optométristes et les ophtalmologistes semble se situer sur les dangers que l'optométriste ne dépiste pas ou n'identifie pas les cas où il pourrait y avoir pathologie. La suggestion suivante a déjà été formulée: établir certaines normes à partir desquelles, lorsque l'optométriste rencontre dans son travail un cas qui, selon les normes, indique qu'il est possible qu'il y ait une pathologie quelconque, il fasse référence à l'ophtalmologiste.

L'accusation en prothèses auditives, dans le moment, fait son travail sans prescription médicale et, si j'ai bien compris votre raisonnement, le danger est susceptible de se produire pour un certain nombre de cas. J'aimerais que vous analysiez cet aspect de la question et cette possibilité, si on fait un parallèle avec les optométristes et les ophtalmologistes.

M.POULIN: Merci, M. le Ministre. Je demanderais au Dr Savary de répondre à votre première question.

M. SAVARY: Au sujet de la première question, je répète l'article 11 pour que les choses soient bien nettes. L'article 11 dit ceci: "Un orthophoniste ou audiologiste ne doit appliquer un traitement médical que sur ordonnance d'un médecin." Mais avant le traitement il faut quand même faire un diagnostic, et c'est là qu'est l'importance de notre intervention. Le diagnostic doit être d'ordre médical. Et si le diagnostic n'est pas d'ordre médical, on risque de faire des traitements sur de fausses routes.

Qu'est-ce qu'un traitement médical d'abord? Je pense que c'est un traitement à base d'une médication. Une médication, ce sont des pilules, si vous voulez, des gouttes, une médication quelconque. L'orthophoniste n'est pas qualifié pour donner une médication. Cette définition peut clocher. Mais le traitement par rééducation ne peut être fait par le médecin. Il doit lui donner son importance et il doit prescrire le traitement par rééducation qui doit être fait par l'orthophoniste. Là-dessus, d'accord.

Sur le plan du traitement médical, il est important d'insister sur la partie diagnostic d'abord. Vous parliez tout à l'heure de la différence entre un orthophoniste pratiquant dans un établissement hospitalier...

M. CASTONGUAY: J'ai demandé quelle était la nature des actes qu'il pose dans les établissements, comment ça se fait, quels contrôles sont exercés.

Comment est-ce que ça se déroule en pratique et en cabinet privé?

M. SAVARY: D'accord. Dans les établissements, il n'y a pas tellement de problèmes actuellement puisque, comme on l'a dit tout à l'heure, il s'agit d'une équipe, et l'orthophoniste et l'audiologiste, tantôt dans les troubles de la parole et du langage et tantôt dans les troubles de l'audition, font partie de l'équipe de diagnostic et de l'équipe thérapeutique sur le plan de la rééducation. Alors, si un individu se présente pour un problème de surdité, il consulte d'abord l'oto-rhino-laryngologiste ou le médecin qui demandent l'aide de l'audiologiste pour avoir une charte de sa surdité et, si nécessaire, le contrôle du neurologue, du médecin cardio-vasculaire, etc.

Donc il fait partie de l'équipe. Le danger, pour l'audiologiste en cabinet privé, c'est qu'il n'y a pas d'équipe. Le contrôle est donc excessivement difficile puisqu'il ne fait son diagnostic que sur l'examen audiométrique, sans examen clinique ni examen du tympan, ni examen de l'oreille, ni examen radiologiste, ni examen du médecin consultant. C'est là qu'est le danger du cabinet privé. Cela pour l'audiologiste.

Pour l'orthophoniste, c'est la même chose. Pour l'orthophoniste il va y avoir un examen avec enregistrement de la voix, de la parole, etc., d'accord, mais l'individu peut avoir une maladie psychiatrique qui fait qu'il y a un trouble de langage. Il peut avoir une maladie par malformation des cordes vocales, malformation du voile du palais, malformation des cavités buccales que l'orthophoniste n'est pas qualifié pour examiner. Encore là, ne faisant pas partie de l'équipe de diagnostic au sein d'une équipe hospitalière, il est dangereux de lui laisser le contrôle du diagnostic et le contrôle du traitement en cabinet privé.

M. POULIN: D'ailleurs, pour continuer un peu dans le même article, l'article 11, à toutes fins pratiques, ne s'applique pas. Un orthophoniste au audiologiste n'a pas à donner un traitement médical. C'est un traitement de rééducation, ce n'est pas un traitement médical et ça ne demande pas d'ordonnance à ce moment-là.

M. CASTONGUAY: Alors nos prédécesseurs législateurs se sont trompés, selon vous?

M. POULIN: D'ailleurs, si vous avez remarqué, je l'ai mentionné dans un des premiers paragraphes. Pour répondre à votre deuxième question, M. le ministre, vous nous demandiez s'il était possible, dans le cas des acousticiens en prothèses auditives, de faire certaines normes suivant lesquelles nos confrères pourraient appliquer une prothèse sans qu'il y ait eu une ordonnance médicale. Cela veut dire que s'il n'y a pas eu d'ordonnance médicale, il n'y a pas eu de diagnostic médical encore là.

Si on avait une certaine catégorie de cas pour lesquels on sait très bien qu'il ne peut y avoir aucune pathologie en arrière, on sera peut-être d'accord pour essayer de formuler des normes, mais je crois que c'est impossible parce que même une personne âgée qui a besoin d'un appareil disons du type presbyacousie où il n'y a pas de phénomène réellement pathologique, ça peut tout de même masquer un phénomène pathologique.

Alors les normes sont très difficiles à établir et ça ne peut pas être tranché.

M. CASTONGUAY: Vous êtes assuré de ça?

M. POULIN: Sûrement, parce que ça demande toujours un diagnostic.

M. CASTONGUAY: On voit beaucoup de personnes qui portent des prothèses auditives depuis un certain nombre d'années.

Elles les ont eues sous ordonnance médicale et elles souffrent de surdité sans qu'il y ait eu, à partir du moment où l'ouïe a commencé à perdre de son acuité, développement d'une pathologie identifiée.

M. POULIN: Je suis d'accord, M. le ministre, que de nombreuses personnes portent des appareils qui leurs sont bénéfiques. Peut-être qu'auparavant elles n'ont pas eu d'examen ou de diagnostic médical précis et qu'elles les portent avec succès. Par ailleurs, beaucoup en ont aussi porté sans que cela leur soit utile. Si nous faisions la province, nous trouverions, à toutes les deux maisons, des prothèses auditives qui ont été mises dans le tiroir au bout de deux semaines; je pense qu'il y en aurait beaucoup. Par ailleurs, beaucoup de ces gens ont porté une prothèse auditive et ils auraient pu bénéficier d'un traitement chirurgical, surtout que la chirurgie, de ce côté, a nettement évolué et progressé depuis la dernière décade.

M. CASTONGUAY: Je m'excuse, une dernière question. Quelle est la nature de l'examen que fait, selon vous, l'acousticien en prothèse auditive? Est-ce qu'il ne fait qu'utiliser un appareil après l'autre pour voir si la personne entend mieux ou s'il fait un examen un peu plus approfondi pour voir s'il y a autre chose qu'une baisse graduelle de cette faculté ou de ce sens?

M. POULIN: En somme, l'acousticien en prothèse auditive ne fait qu'un examen au point de vue acoustique pour voir si un appareil va bénéficier à un individu. Mais il ne peut, dans l'état actuel des choses, faire un examen clinique de l'appareil auditif. C'est sur cela que nous insistons.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Argenteuil.

M. SAINDON: M. le Président, je voudrais donner mon opinion sans élaborer sur le bill 267, ni m'étendre sur l'exposé du Dr Poulin. Si je voulais m'étendre sur le sujet, il faudrait prendre le plancher pour toute la journée probablement. Disons que l'exposé du Dr Poulin est absolument fondé, qu'il est juste en regard de la santé publique, santé que nous recherchons d'ailleurs tous. Alors, les orthophonistes et les audiologistes doivent de toute nécessité faire partie et travailler au sein de l'équipe médicale. A ce sujet, je voudrais attirer l'attention du ministre. Je voudrais attirer l'attention de la commission, des techniciens du ministère pour qu'ils apportent les corrections nécessaires qui s'imposent au bill 267.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dubuc.

M. BOIVIN: Dr Poulin, vous nous dites qu'il y a deux sortes d'orthophonistes et d'audiologistes. Il y en a qui travaillent avec l'équipe médicale et il y en a qui travaillent à leur propre compte.

Est-ce que vous pourriez nous parler de la préparation que ces gens ont, des deux côtés? Ceux qui travaillent avec l'équipe médicale ont-ils le même diplôme, la même préparation que ceux qui se sont émancipés, si vous voulez, du diagnostic?

M. POULIN : Ils ont la même préparation.

M. BOIVIN: Quelle est leur préparation, quelles années d'études, qui donne les cours à ces orthophonistes et à ces audiologistes?

M.POULIN: M. Morissette va répondre à cette question.

M. MORISSETTE: Je crois que c'est l'Institut de réhabilitation de Montréal qui donne le cours et je crois que la durée du cours est de trois ans.

M. BOIVIN: De trois ans? Est-ce qu'il y a des oto-rhino-laryngologistes qui enseignent à cette école?

M. MORISSETTE: Je ne pourrais pas répondre à cette question.

M. BOIVIN: On le leur demandera, s'ils reviennent à la commission. Voulez-vous me dire la préparation qu'a un oto-rhino-laryngologiste ? Quelles sont les exigences pour devenir oto-rhino-laryngologiste? Pouvez-vous nous dire les années d'études nécessaires?

M. POULIN: Actuellement, il leur faut cinq années d'études au point de vue strictement médical, une année d'internat chirurgical, plus trois autres années de spécialisation strictement en oto-rhino-laryngologie; par la suite, ils doivent passer leur certificat de la province de Québec.

M. BOIVIN: Vous ne pouvez pas nous éclairer davantage sur les études que font les orthophonistes et les audiologistes?

M. POULIN: Non, nous regrettons. Peut-être que les orthophonistes et les audiologistes pourront vous préciser cela.

M. BOIVIN: Trouvez-vous que ceux qui travaillent dans l'équipe médicale sont assez bien préparés pour collaborer à l'acte médical?

M. POULIN : Ceux qui sont dans les équipes médicales hospitalières actuellement, en général, sont très bien préparés.

M. BOIVIN: Ils ont passé par l'école?

M. POULIN : Oui et il faudrait faire encore une différence; je l'ai notée dans le mémoire que vous avez en main. On parle souvent dans le texte de loi d'orthophoniste et audiologiste; il faudrait peut-être préciser orthophoniste et/ou audiologiste, parce que tout orthophoniste n'est pas nécessairenment audiologiste et vice versa.

M. BOIVIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, juste de petites questions, que je me pose depuis un certain temps. La réalité nous prouve que, si une personne entend mal, elle est souvent portée à déformer des mots ou à mal rapporter ce qu'elle entend. J'aimerais me faire préciser ce matin quelle relation existe entre, par exemple, les groupes qui préparent ou qui fabriquent des prothèses pour entendre et des prothèses pour parler. J'illustrerai tantôt par un exemple.

M.POULIN:DrSavary.

M. SAVARY: Par rapport aux prothèses pour parler, à ma connaissance, il n'existe que quelques prothèses palliatives pour la rééducation de ceux qui n'ont pas de larynx. Ceux qui ont eu un cancer de larynx opéré peuvent avoir une rééducation qu'on appelle l'érygmopho-

nie, c'est-à-dire qu'ils parlent avec une voix oesophagienne ou avec une prothèse qui est fournie par la compagnie Bell Téléphone actuellement.

M. GUAY: Ah! bon.

M. SAVARY: C'est une prothèse pour parler. Au cours de la rééducation, il y a d'autres appareils comme les oscilloscopes, etc., qui font partie de l'apanage de l'orthophoniste. Mais les prothèses pour entendre n'ont aucune relation avec les prothèses pour parler.

Je veux ici apporter le cas que j'ai eu cette semaine d'une personne qui avait eu deux prothèses auditives payées par la sécurité sociale. J'ai pu faire entendre le patient sans prothèse. J'ai alors écrit au ministère des Affaires sociales pour essayer de faire rembourser les prothèses, au coût de $850. Donc, ce patient avait eu, payées par le gouvernement, deux prothèses au montant de $850 pour une surdité qui était opérable. C'est un exemple qui illustre parfois le manque de diagnostic dans l'ajustement de prothèse.

M. GUAY: Je suis également au courant que certaines difficultés de la parole peuvent être corrigées, dans certains cas, par d'autres genres de prothèses. Et j'ai l'exemple d'une personne qui, à cause d'infirmité, a des orifices entre le palais et les voies nasales. Cette correction a été apportée par une prothèse dentaire spéciale. Qui fait le diagnostic et qui ajuste cette prothèse dans ces cas?

M. POULIN: Dans ces cas, c'est l'orthodontiste. Et il existe à Québec comme à Montréal des comités de ce qu'on appelle de fente palatine au sein d'une équipe hospitalière qui, avec un oto-rhino-laryngologistes, un plasticien et un orthophoniste vont, ensemble, en équipe, voir au meilleur traitement du patient. Et en l'occurence, dans l'exemple que vous donnez, c'est l'orthodontiste qui ajuste la prothèse au palais.

M. GUAY: Qui fabrique cette prothèse? Parce qu'il faut quand même dire que c'est une prothèse qui a deux fonctions d'abord comme prothèse dentaire, puis, en même temps, une fonction de prothèse...

M. POULIN: D'abord, il est important de faire le diagnostic pour voir si c'est réellement une fente palatine, si elle est opérable et si elle est susceptible d'avoir une prothèse ou non. Par la suite, après le diagnostic, on a pris une décision que l'orthodontiste peut s'en occuper et, les diriger toujours en équipe, à l'orthophoniste qui aide à sa rééducation. Est-ce que cela répond à votre question?

M. GUAY: Cela répond partiellement. D'un autre côté, cette prothèse dentaire porte égale- ment une luette artificielle. C'est ce qui améliore le son. Disons que ce ne sont pas des cas fréquents mais, dans votre mémoire, on demande une précision du champ d'exercice. Une autre question concerne les lunettes porteuses d'appareil auditif. Encore là, il y a deux groupes de professionnels qui devront probablement participer, car ce sont des appareils qui ont double fonction: porter, dans le montant, un appareil auditif, et améliorer la vue en même temps.

M.POULIN: Ce sont deux aspects différents. D'abord l'ajustement de la lunette.

M. GUAY: C'est dans le même appareil.

M. POULIN: Nous ne voulons pas y toucher.

M. GUAY: C'est dans la même prothèse.

M.POULIN: Le montant est tout à fait séparé. Vous pouvez avoir un ajustement de lunette et ajouter un montant séparé. Ce sont deux choses complètement différentes, deux problèmes différents.

M. GUAY: Vous ne voyez pas de problème dans ce genre...

M.POULIN: Elles n'ont aucune relation l'une avec l'autre.

M. GUAY: D'accord.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: Je vais poser une question qui va peut-être sembler méchante mais c'est pour éclairer ma lanterne. Entre les optométris-tes et les ophtalmologistes, tout comme entre les orthophonistes et les oto-rhinos, je me demande — on sait qu'il y a un problème de santé qui doit primer en tout et partout — s'il n'y a pas également une espèce de problème économique. L'ophtalmologiste lui-même a-t-il le droit de vendre des lunettes? Est-ce que l'oto-rhino a le droit lui-même de vendre des appareils?

M. MORISSETTE: Non, absolument pas.

M. PEARSON: Alors, il n'y a pas de point de vue économique, des craintes...

M. MORISSETTE: Absolument pas. Nous ne cherchons pas à essayer de vendre des appareils. Au contraire.

M. PEARSON: Dans ce sens, cela signifie que votre problème n'est pas tout à fait comparable à celui des optométristes et des ophtalmologistes.

M. POULIN: D'ailleurs, je ne crois pas que les ophtalmologistes non plus, cherchent à faire de la vente de lunettes.

M. PEARSON: Ce ne sont pas les ophtalmologistes dans ce cas...

M.POULIN: C'est entre les opticiens d'ordonnance et les optométristes.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: Vous connaissez le souci que j'ai quant à l'absence continuelle des députés du Parti québécois aux séances de cette commission parlementaire.

Je voudrais poser quelques questions à caractère constitutionnel sans, du même coup, qu'il soit dit que je partage la philosophie politique du Parti québécois.

Est-ce que le Dr Poulin pourrait me dire si le diplôme d'oto-rhino-laryngologiste est reconnu par le fédéral?

M. POULIN: Le certificat de la province de Québec n'est pas reconnu du côté fédéral. Mais la majorité de nos oto-rhino-laryngologistes de la province de Québec ont leur LMCC, de pratique médicale d'abord et avant de faire leurs études spécialisées en oto-rhino-laryngolo-gie. Par la suite, ils passent le certificat de la province de Québec qui est nécessaire pour pratiquer dans la province. En plus, je le répète, la majorité ont ce qu'ils appellent le certificat du Collège royal reconnu à travers le Canada avec équivalence aux Etats-Unis.

M. PAUL: Le certificat du Collège royal, c'est le "Fellow", n'est-ce pas?

M.POULIN: II y en a deux. Il y a le "Fellow" et il y a le certificat du Collège royal. Ce sont deux choses, quoique, éventuellement, elles vont n'en devenir qu'une.

M. PAUL: Est-ce qu'il y a des "Fellow" en oto-rhino-laryngologie?

M. POULIN: Oui, monsieur.

M. PAUL: II y a également, des diplômés du Collège royal.

M.POULIN: Exactement.

M. PAUL: Est-ce qu'il est nécessaire de faire des études plus poussées pour obtenir une reconnaissance ou un certificat de compétence du Collège royal ou pour obtenir un certificat de "Fellow" en oto-rhino-laryngologie?

M. POULIN: Les études sont exactement les mêmes. Il s'agit d'un examen de plus, c'est tout.

M. PAUL: Un examen de plus sans études plus poussées...

M. POULIN: Sans études plus poussées et sans année supplémentaire.

M. PAUL: Est-ce que vous pourriez me dire, docteur, s'il y a d'autres écoles d'orthophonistes et d'audiologistes ailleurs que dans le Québec?

M. POULIN: Je l'imagine, mais je ne peux pas vous le dire.

M. PAUL: Vous ne pouvez pas répondre. Merci.

M. LE PRESIDENT: La parole est à l'honorable député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'ai écouté avec grande attention, tantôt, les questions que vous a posées le ministre. Je pense que cela tournait véritablement autour du véritable problème celui d'un champ d'exercice entre votre profession et celle des orthophonistes et des audiologistes. Il a fait une comparaison avec les optométristes et les ophtalmologistes. Je pense que c'est assez juste. Quand ils sont venus devant la commission parlementaire, nous avons posé des questions sur les actes posés par ces différents professionnels. Sauf erreur, je pense qu'on a dit devant la commission que les pathologies de l'oeil tendaient à diminuer, je pense, avec les années. Il y a moins de cas pathologiques aujourd'hui qu'il y en avait autrefois. Je ne voudrais pas faire erreur, mais je pense que ce fait est ressorti des réponses que nous avons eues devant la commission.

Est-ce que ce serait le même cas chez vous? Est-ce que les pathologies qui ont trait à l'exercice de votre profession tendent à diminuer ou est-ce que c'est le contraire? Il est vrai qu'on peut dire dans votre cas que vous avez comme clients ceux qui parlent trop. Ils peuvent aboutir chez vous. Et ceux qui entendent mal peuvent aussi aboutir chez vous. Je pensais que le ministre des Affaires sociales allait vous référer le ministre fédéral, son homologue, M. Munro, parmi ceux qui entendent mal! ... ou qui ne comprennent pas bien!

M. POULIN: A cette question, je pourrais répondre que certaines catégories ou certaines pathologies de l'oreille vont diminuer éventuellement à cause du progrès chirurgical, à cause de la prévention qui se fait et à cause de la médecine d'aujourd'hui, pourrais-je dire.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je vous pose des questions de profane; un médecin les poserait peut-être différemment. Vous dites que les pathologies de l'oreille vont diminuer. Moi,

je pense que la pollution par le bruit et l'atmosphère dans laquelle on vit, le bruit des usines et tout ça, cela a toujours un effet de plus en plus direct sur la faculté d'entendre.

M. POULIN: Certaines pathologies de l'oreille connues, actuellement, tendent à diminuer pour diverses raisons. Il y a peut-être d'autres pathologies qui augmenteront pour d'autres raisons.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que ce serait la même chose pour la gorge?

M. SA VARY: Je pourrais ajouter autre chose au point de vue de la pathologie de l'oreille. Plus les possibilités de diagnostic sont grandes, plus nous trouvons de la pathologie, disons-le, surspécialisée, qui ne pouvait pas être trouvable il y a quelques années.

Par exemple, certaines tumeurs du nerf acoustique sont de diagnostic récent. C'est à ce niveau qu'on a attiré l'attention de la commission, simplement un dépistage de surdité amplifié. Des examens radiologiques spéciaux et des examens oto-rhino-laryngologiques spéciaux peuvent dépister une tumeur du nerf acoustique. Ces gens mouraient, il y a quelques années, d'une tumeur au cerveau qui était immense, puisque non diagnostiquée.

Certaines pathologies comme l'oto-sclérose, cette surdité opérable par stapédectomie, diminuent parce que des gens qui ont souffert de cette maladie pendant tant d'années sont maintenant opérés. Il y a quand même un pourcentage, je pense, de 20 pour 100,000 qui existe encore, en oto-sclérose, qui est le pourcentage normal, mais disons que la banque est à peu près écoulée. Par contre, les possibilités diagnostiques sont telles que des pathologies plus complexes sont maintenant trouvées.

M. CLOUTIER (Montmagny): Tantôt, on vous a demandé comment se déroule la pratique en établissements et comment elle est en dehors. Il semble bien que dans les établissements il n'y ait pas de problème puisque vous pratiquez en équipe. La référence n'a donc pas besoin de se faire. Le patient est tout de suite dirigé à l'équipe. A ce moment-là, des difficultés peuvent être éliminées.

En ce qui concerne la pratique en dehors des établissements, évidemment c'est en cabinet privé. Le patient peut se rendre soit chez le spécialiste de votre spécialité ou il peut aussi se rendre chez l'acousticien ou l'orthophoniste. Est-ce que beaucoup de cas où, semble-t-il, il peut y avoir pathologie, vous sont confiés? Est-ce que cela se produit souvent?

M.POULIN: Si je comprends bien la question, vous me demandez si les cas se présentent assez souvent où un patient nous vient de l'orthophoniste ou audiologiste, de son cabinet privé.

M. CLOUTIER (Montmagny): De son cabinet privé, oui.

M. POULIN: En général, si les gens ont un problème de surdité ou de voix, ils vont plutôt — surtout présentement, alors que la majorité fait partie des équipes hospitalières — voir le médecin. Ensuite, s'il y a lieu, ils nous sont référés. Je ne crois pas qu'ils en envoient.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce une habitude bien enracinée dans la population, parce que la population sait que vous êtes des spécialistes de ces disciplines, ou si c'est à cause de certaines lois, telles que l'assurance-maladie? Celle-ci permet de ne pas défrayer le coût des honoraires si on fait affaires directement avec vous tandis que, je pense, c'est le contraire avec les professionnels des autres spécialités.

M. POULIN: II est difficile de répondre à ces questions parce qu'il n'y a pas eu d'enquêtes de faites sur ce sujet.

M. CLOUTIER (Montmagny): L'optométriste est couvert par le régime d'assurance-maladie. Le pharmacien, avec l'assurance-médicaments, est aussi couvert. Alors c'est pour cela qu'il est difficile d'avoir un point de comparaison. Je vous demande une appréciation à l'oeil.

M. POULIN: C'est peut-être une raison valable.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est une appréciation à l'oeil, même si l'oeil n'est pas votre spécialité.

Pour ma part, c'est tout, M. le Président. Je pense que le véritable problème est là. Nous l'avons discuté, aussi, pour d'autres professionnels. Il est dans le champ d'exercice des professions.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Wolfe.

M. LAVOIE (Wolfe): M. le Président, j'aimerais poser une petite question bien simple. Pourriez-vous me dire si la surdité est héréditaire ou si elle ne l'est pas?

M. POULIN: Certains cas sont héréditaires, d'autres ne le sont pas du tout.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

M. GUAY: J'aurais une autre question. C'est peut-être un peu plus technique mais j'aimerais avoir de la lumière. Est-ce que tous les humains ont la même qualité d'absorption des bruits, sans déranger pour autant leur système?

Et parallèlement à ça, est-ce qu'on a fait des études, à savoir si, dans les usines, certains

bruits ou des bruits à certaines fréquences peuvent endommager l'appareil auditif de l'humain plus souvent que d'autres sons?

M. POULIN: C'est certain que tout l'appareil auditif chez l'humain n'a pas la même réponse au bruit industriel dont vous venez de faire mention. Justement, dernièrement, avec le Dr Goldbloom, à une séance spéciale sur le bruit industriel, question d'environnement et de pollution par le bruit, nous avons eu une discussion à ce sujet. Il est certain que l'humain ne répond pas de la même façon, et chez certaines personnes qui travaillent dans un endroit où il y a un bruit assez fort, il y a définitivement une détérioration de l'ouie et de l'appareil auditif.

M. GUAY: Est-ce qu'il existe des appareils de protection contre ces bruits qui sont néfastes à l'humain?

M. POULIN : II en existe et il se fait énormément de recherche de ce côté. Il existe des appareils qui peuvent protéger, dans les usines, l'appareil auditif. Et je pourrais peut-être mentionner, sur ce sujet, une équipe d'oto-rhino-laryngologistes et audiologistes qui a fait une étude dernièrement sur les Esquimaux ou relativement à une pathologie de type chronique, une question d'affection, parce qu'on savait que chez les Esquimaux il y avait beaucoup d'écoulement des oreilles, de gros problèmes auditifs. La surprise qu'ils ont eue c'est qu'il s'agissait de surdité neuro-sensorielle causée par le bruit non pas industriel mais de l'environnement, soit les motoneiges et les fusils.

M. GUAY: Une dernière question. Est-ce qu'il y aurait lieu d'établir des normes pour les appareils, qui sont de plus en plus répandus, orthophoniques, stéréophoniques, où on peut entendre de la musique avec des écouteurs personnels? Les jeunes semblent s'adonner à ce genre de divertissement. Est-ce que ça a déjà été pensé par votre groupe?

M. POULIN: Oui, et actuellement dans notre association, nous avons un comité qui étudie le problème. Il prépare un mémoire et nous allons faire des recommandations au gouvernement à ce sujet.

M. GUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Argenteuil.

M. SAINDON: Seulement une remarque. Je crois que les actes posés en cabinet privé par les orthophonistes et les audiologistes comportent des dangers assez grands, si ces actes ne sont pas posés sur prescription médicale. S'il y a une pathologie quelconque, les gestes posés par les orthophonistes et les audiologistes très souvent ne tiennent pas compte du tout de la pathologie responsable.

Je voudrais faire remarquer qu'en médecine comme dans les autres professions, les moyens à prendre, les traitements appliqués, ne sont jamais trop bons et il faut toujours viser à obtenir le meilleur résultat possible, appliquer le meilleur traitement. Et le meilleur traitement n'est jamais trop bon.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de L'Assomption.

M. PERREAULT: A la suite de la question du député de Dorchester, j'aimerais vous poser une question. Est-ce que vous avez constaté depuis quelques années, chez les jeunes un endommagement de l'ouie causé par la musique pop, la musique psychédélique qu'on entend partout à un nombre très élevé de décibels?

M. POULIN: Chez les gens surtout qui font partie d'orchestres. C'est un peu ce qui nous a réveillés et pourquoi certains médecins ont porté le problème au niveau de l'association. Et c'est pourquoi nous l'avons formée. En réalité, il ne s'agit pas de bruit industriel, mais nous croyons que ça fait partie de l'environnement. Et comme je disais à monsieur, nous préparons un mémoire à cet effet.

M. PERREAULT: Est-ce que c'est surtout la fréquence des sons qui est affectée?

M.POULIN: La fréquence avec l'intensité.

M. CASTONGUAY: La dislocation des anches!

M. POULIN: Cela regarde les othopédistes. M. GUAY : Une industrie de bruit.

M. LE PRESIDENT: Je remercie le Dr Poulin de la façon dont il a présenté son mémoire. Soyez assuré que les membres de la commission vont prendre bonne note de vos recommandations.

J'inviterais à présent Me Mario Létourneau, procureur de la Société d'orthophonie et d'au-diologie de la province de Québec, à venir présenter son mémoire.

La parole est à Me Létourneau, s'il veut bien identifier les personnes qui l'accompagnent.

Société d'orthophonie et d'audiologie

M. LETOURNEAU: M. le Président, même si j'ai préparé le mémoire, c'est évidemment en étroite collaboration avec mes clients. Vous aurez sans doute remarqué que le mémoire en lui-même est d'ailleurs assez concis et, pour fins de meilleure compréhension, plutôt que de le lire ou de le faire lire, nous avons pensé faire donner des explications par la présidente à partir du mémoire et discuter sur le mémoire en question. C'est la présidente de la société, Mlle Louise Getty qui fera ses remarques au sujet du

mémoire écrit que j'ai préparé. Je laisserai également à Mlle Getty le soin de présenter les autres membres de la délégation. Moi-même, je suis Mario Létourneau. Mlle Getty.

MLLE GETTY: J'aimerais présenter les membres de notre délégation. A l'extrême gauche, Mme Lewis, qui est responsable des services de l'orthophonie et de l'audiologie à la commission des écoles catholiques de Montréal, Mlle Claudette Pelletier, qui est responsable de la clinique d'audiologie à l'hôpital Sainte-Justine de Montréal, M. Luc Legault, qui est responsable de la clinique d'orthophonie et d'audiologie à l'hôpital de Saint-Vallier-de-Chicoutimi et, à l'extrême droite, Mme Louise Coderre, qui est responsable de la clinique d'orthophonie à l'Institut de réadaptation de Montréal et aussi responsable de la section d'orthophonie et d'audiologie à l'Université de Montréal, et moi-même, Louise Getty.

Nous voulons d'abord remercier le législateur d'avoir bien compris l'objet de l'orthophonie et de l'audiologie en rédigeant le bill 267. Les amendements que nous avons proposés ne sont motivés que par notre désir de voir la population souffrant de troubles de la communication verbale servie adéquatement par des spécialistes ayant toutes les compétences requises. Nous commenterons les articles qui ont fait l'objet de propositions d'amendements dans notre mémoire, mais nous commenterons également certains articles qui n'ont pas fait l'objet de propositions d'amendements. Allons au plus simple. Le paragraphe c) de l'article 1 se lit actuellement comme suit,; "orthophoniste" ou "audiologiste"; tout membre de la corporation."

Nous avons demandé de rédiger le paragraphe aussi: "orthophoniste" et/ou "audiologiste", comme l'ont mentionné d'ailleurs tout à l'heure les médecins ORL. Le motif pour lequel cet amendement est suggéré est qu'il existe des membres qui sont en même temps orthophonistes et audiologistes. Ces gens font évidemment partie de la société actuelle et doivent également avoir le droit de faire partie de la corporation à être créée, et ce à titre d'ortho-phonistes-audiologistes et non pas seulement de l'un ou de l'autre. On évitera ainsi peut-être que des gens qui ne sont qu'orthophonistes ou audiologistes prétendent qu'on ne puisse être les deux à la fois.

Cette précision est de plus dictée par la formation actuelle des orthophonistes-audiolo-gistes à l'Université de Montréal. Cette dualité était nécessaire pour répondre aux besoins de la population francophone à l'échelle de la province.

Il était avant tout nécessaire de former des omnipraticiens étant donné la pénurie des centres d'orthophonie et d'audiologie à travers la province.

L'expansion que connaît depuis quelques années la profession conduira dans un avenir rapproché à une révision de ce programme de formation.

L'article 7 se lit comme suit: "Constitue l'exercice de l'orthophonie tout acte qui a pour objet l'étude, l'examen, l'évaluation et le traitement des troubles de la voix, de la parole et du langage parlé ou écrit, ainsi que l'utilisation des moyens de suppléance correspondants et la rééducation. Constitue l'exercice de l'audiologie tout acte qui a pour objet l'étude, l'examen, l'évaluation et le traitement des troubles de l'audition, ainsi que l'utilisation des moyens de suppléance auditive et la rééducation." Il y a un fait à mentionner ici, simplement un mot, à savoir que, dans le texte anglais, on a traduit évaluation par "appreciation". Or, nous soumettons que le terme évaluation réfère à une analyse basée sur des critères objectifs et scientifiques. Ce terme se traduit en anglais par "evaluation" et non par "appreciation". Ce dernier terme, en effet, comme en français d'ailleurs, réfère, selon nous, à une analyse ou à une évaluation plus subjective ou basée sur des critères qui n'ont pas la rigueur nécessaire à l'établissement d'un diagnostic. Nous voulons attirer ici l'attention des membres de la commission parlementaire sur le fait que le dit article 7 reconnaît aux orthophonistes et audiologistes la responsabilité des actes qui y sont mentionnés, soit l'étude, l'examen, l'évaluation, ainsi de suite. Cette responsabilité accordée est justifiée par les connaissances acquises au cours de la formation des orthophonistes et audiologistes, connaissances en science fondamentale, soit anatomie, physiologie, psychologie, linguistique, d'une part, et connaissances professionnelles, d'autre part.

Pour répondre immédiatement à une question, le cours d'orthophonie et d'audiologie donné à l'Université de Montréal décerne une maîtrise qui représente quatre années d'études. Nous avons les programmes d'études que vous pourrez consulter par la suite.

Cette responsabilité se manifeste aussi dans l'exercice quotidien où les clients présentant des problèmes de communication sont référés à l'orthophoniste-audiologiste qui lui-même détermine la nature des examens, pose un diagnostic et assure le "follow-up", soit en exigeant, des examens complémentaires, soit en décidant non seulement des mesures correctives, mais du temps optimum pour les appliquer. Plusieurs exemples de requêtes provenant de référants mals informés de la nature des troubles de la communication pourraient convaincre les membres ici présents de la nécessité de conserver à l'orthophoniste-audiologiste l'entière responsabilité ci-haut mentionnée. Cela risquerait d'allonger grandement le temps de présentation.

En ce qui a trait à notre rôle dans l'examen de la rééducation des troubles du langage écrit, nous croyons qu'il découle directement du fait de notre spécialité, étant donné l'unité, pour ne pas dire la subordination, du code écrit au code oral. La pathologie du langage consécutive à des

lésions cérébrales chez l'adulte démontre, en effet, que les troubles du langage oral sont nécessairement accompagnés de troubles du langage écrit. Chez les enfants, il est bien connu qu'il existe des rapports entre la dyslexie et les retards de parole et de langage. On retrouve, non pas chez tous, mais quand même chez la plupart des vrais dyslexiques, pour accéder au langage écrit, les mêmes difficultés qu'éprouve l'enfant retardé à la parole, à savoir des difficultés dans la perception auditive et dans l'organisation du langage qui rendent malaisée l'association des formes sonores que sont les sons de la langue que l'enfant perçoit mal ou des formes visuelles que sont les signes graphiques. Nous reconnaissons, cependant, que la notion de travail d'équipe s'applique au domaine de la dyslexie et que notre rôle n'en est qu'un parmi d'autres que peuvent jouer des spécialistes également compétents dans la matière.

Considérant cette définition de l'objet de l'orthophonie-audiologie, il nous paraît opportun de souligner ici les deux secteurs cliniques principaux dans lesquels oeuvrent les orthopho-nistes-audiologistes, soit le secteur hospitalier et le secteur scolaire. Nous désirons insister sur le fait que notre corporation, après étude sérieuse de la question et à la lumière de l'expérience vécue par les orthophonistes travaillant déjà dans le milieu scolaire, reconnaît la nécessité d'une véritable intégration des services de l'orthophonie en milieu scolaire.

A l'article 9, on dit: Est titulaire d'un diplôme reconnu valide à cette fin par le lieutenant-gouverneur en conseil ou jugé équivalent par le bureau. La corporation désire commenter brièvement cette question du diplôme donnant accès à l'exercice de la profession. Le bill 138 rend obligatoire le grade de maîtrise pour l'exercice de l'orthophonie et de l'audiolo-gie dans la province de Québec. Au moment où cette loi fut élaborée, une telle exigence se fondait sur les tendances courantes aux Etats-Unis et les programmes de formation de l'Université de Montréal et de l'université McGill, qui. toutes deux, offraient une formation minimale au niveau de la maîtrise.

Or, la corporation reconnaît que depuis ce temps d'importantes modifications ont été apportées au programme d'études préuniversitaires au Québec et, par la suite, au programme d'études universitaires. Par conséquent, reconnaissant les possibilités offertes par la formation au niveau du premier cycle universitaire, reconnaissant qu'il y a place aussi en orthophonie et audiologie pour une diversification des rôles, étant donné que toutes les tâches ne représentent pas le même degré de complexité, notre corporation s'est attachée depuis plus d'un an à étudier la possibilité d'octroyer le droit de pratique aux détenteurs d'un grade du premier cycle et, pour ce faire, travaille présentement à une analyse de tâches et des compétences requises pour ces différentes tâches.

Article 11: "Un orthophoniste ou audiolo- giste ne doit appliquer un traitement médical que sur ordonnance d'un médecin". Cet article n'a pas fait l'objet de commentaires dans notre mémoire mais, depuis, nous avons pris connaissance de certaines erreurs d'interprétation que nous croyons bon de relever à ce moment-ci. Non seulement nous acceptons que nous ne sommes pas habilités à appliquer un traitement médical sans ordonnance d'un médecin mais nous reconnaissons que notre formation ne nous permet tout simplement pas d'appliquer un traitement médical.

En effet, nous croyons qu'il ne faut pas confondre traitement médical et traitement orthophonique et audiologique; il n'y a rien de médical dans notre intervention, qu'elle se situe au niveau des méthodes d'examen ou des méthodes de rééducation. Nous pourrons, s'il y a lieu, en donner des preuves lors de la période des questions. C'est pourquoi certaines recommandations du rapport du Collège des médecins et chirurgiens sur les professions connexes de la santé nous paraissent fort inappropriées. Ainsi, le collège écrit, et nous citons: "Tout comme il est d'ailleurs proposé dans le bill 267, Loi des orthophonistes et des audiologistes, on devrait ajouter au projet de loi sur la physiothérapie un article indiquant clairement que l'exercice de la physiothérapie ne doit se pratiquer que sur ordonnance médicale."

Nous disons que le collège a mal interprété l'article 11 de notre loi, ce dernier ne stipule en aucune façon que l'exercice de l'orthophonie et de l'audiologie ne doit se pratiquer que sur ordonnance médicale. Ainsi que nous l'avons mentionné précédemment dans nos commentaires sur l'article 7 et comme le démontre l'exercice actuel de la profession, l'orthophoniste et l'audiologiste sont responsables de l'évaluation et de la rééducation des troubles de la communication verbale; ils peuvent recevoir des demandes de consultation qui leur viennent de professionnels autres que les médecins, soit l'orthodontiste, le psychologue, l'enseignant, le travailleur social, mais à titre de consultant.

L'article 14 se lit actuellement comme suit: "Sous réserve de l'article 8, nul ne peut poser l'un des actes décrits à l'article 7, s'il n'est pas orthophoniste ou audiologiste. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux actes posés: a) par les étudiants en orthophonie et audiologie qui effectuent un stage d'entraînement professionnel conformément à la présente loi et aux règlements du bureau; b) par les infirmiers, infirmières ou techniciens faisant subir des tests audiométriques de dépistage sous la surveillance immédiate d'un médecin ou d'un orthophoniste au audiologiste; c) par les vendeurs de prothèses auditives faisant des tests audiométriques nécessaires à la vente d'appareils auditifs".

Nous soumettons que le paragraphe b) dudit article devrait dorénavant se lire comme suit: "par les infirmiers, infirmières ou techniciens faisant subir des tests audiométriques de dépis-

tage sous la surveillance d'un orthophoniste ou audiologiste".

Nous suggérons donc de faire disparaître le mot "immédiate". En effet, ceci est absolument impossible au point de vue pratique quant on sait que ces tests audiométriques de dépistage se font non seulement dans un milieu hospitalier où des orthophonistes ou des audiologistes sont disponibles, mais également dans les usines et dans les écoles. Ces tests sont d'ailleurs de nature beaucoup plus élémentaire et sont actuellement faits par des infirmiers, infirmières ou techniciens.

Si on devait exiger que ces gens ne fassent subir leurs tests que sous la surveillance immédiate d'un orthophoniste ou d'un audiologiste, on manquerait de cesdits spécialistes pour faire tout le travail.

Soulignons que, de toute façon, les résultats obtenus par les tests audiométriques de dépistage en question doivent, par la suite, être soumis à un audiologiste ou orthophoniste. Ces derniers font l'analyse des résultats en question et s'ils décèlent un problème chez une personne, ils referont la plupart du temps le test eux-mêmes et, par la suite, décideront du traitement approprié après consultations avec un spécialiste.

Nous suggérons également de faire disparaître dudit paragraphe les mots "d'un médecin ou". Le mot médecin traduit ici en anglais par "physican" traduit n'importe quel médecin, y compris ceux qui sont spécialisés en toute autre matière et également les omnipraticiens. Or, nous soumettons qu'il n'est pas nécessaire qu'un médecin surveille les tests dont il s'agit et que seuls quelques spécialistes en oto-rhino-laryngologie, de toute façon, ont l'expérience nécessaire qu'il faut pour surveiller et analyser adéquatement ces tests et leurs résultats et qu'il s'agit là uniquement d'un travail d'orthophoniste, d'audiologiste.

Les connaissances de ces derniers en acoustique, c'est-à-dire les propriétés physiques des sons, parole incluse, les modes de transmission de ces sons et réactions normales ou anormales de l'oreille et du mécanisme auditif en général, l'identification de ces réactions aux différentes pathologies, les connaissances des appareils générateurs de sons à l'aide desquels on évalue cette fonction auditive, en font les véritables et seuls spécialistes des troubles de l'audition.

Nous suggérons enfin également de faire disparaître complètement le paragraphe c): "Soit par les vendeurs de prothèses auditives faisant les tests audiométriques nécessaires de la vente d'appareils auditifs". En effet, ce paragraphe nous semble contradictoire du moins allant beaucoup plus loin que l'article 7 du bill 270 ou Loi des acousticiens en prothèses auditives qui se lit comme suit: "Constitue l'exercice de la profession d'acousticien en prothèses auditives tout acte qui a pour objet d'exécuter une ordonnance d'un médecin, d'un orthophoniste audiologiste en vendant, four- nissant, posant, ajustant ou remplaçant les prothèses auditives". Il pourrait devenir dangereux et sujet à controverse que l'on tente d'extensionner la signification ou le champ d'application des tests audiométriques nécessaires.

Nous soumettons que toute forme de tests doit être appliquée et soumise à la surveillance ou à l'analyse d'un orthophoniste audiologiste. En présence d'une hypoacousie, ou perte d'audition, l'audiologiste a la possibilité de recourir, pour aider le patient, à l'appareillage prothé-tique et par une série d'examens, de déterminer la prothèse auditive qui donne, dans les circonstances, le meilleur rendement pour un patient. Son rôle ne se limite pas à une simple recommandation, mais au contraire à jouer auprès du patient un rôle de soutien en lui donnant des conseils quant au port de la prothèse, quant à son entretien, à lui donner des leçons de lecture labiale et à utiliser au maximum son audition résiduelle.

L'audiologie chez les enfants démontre de façon encore plus probante l'importance du rôle de l'audiologiste dans la sélection des prothèses. Cet aspect de la pédoaudiologie nécessite une connaissance de la psychologie de l'enfant, de la relation entre le développement du langage, de la parole et de l'audition, des réactions normales propres à l'enfant. La sélection de prothèse fait partie de tout l'ensemble des démarches qui visent à l'établissement d'un diagnostic différentiel chez l'enfant présentant des troubles de la fonction auditive.

Il faut bien dire ici que l'absence de réponse à un son ne signifie pas nécessairement qu'il y a surdité. Très souvent, Paudiologiste doit faire précéder la sélection de la prothèse individuelle d'un entraînement auditif au cours duquel il évalue les réactions de l'enfant, ce qui l'aide ensuite à fixer son choix.

De plus, l'orthophoniste ou audiologiste étant responsable du développement du langage chez l'enfant sourd, il peut procéder, tout au cours du programme d'éducation auditive, à la réévaluation du rendement de la prothèse. Messieurs, merci.

M. LE PRESIDENT (Harvey-Chauveau): Merci, Mme Getty. Le ministre a sûrement un commentaire et des questions.

M. CASTONGUAY: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier les membres de la société pour ce mémoire. En fait, ma première question, je crois, est une question absolument essentielle. Vous nous dites que l'examen ou l'appréciation que vous faites, en tant qu'orthophoniste ou audiologiste, n'est pas de nature médicale. Il en est de même quant au traitement. Comme c'est là, en fait, que se trouve la clef du problème, pourriez-vous nous dire pourquoi vous pouvez l'affirmer aussi catégoriquement, et le faire de façon aussi concrète que possible pour que nous puissions comprendre

sans que vos allégations nous entraînent dans un débat avec le groupe qui vous a précédée? Ce n'est pas l'objet de ces commissions de provoquer un débat entre groupes. Son objet est plutôt d'informer les membres de la commission. Il n'en demeure pas moins, comme vous pouvez le constater, que nous avons entendu des affirmations quant aux dangers que serait susceptible de présenter l'exercice de l'orthophonie ou de l'audiologie de façon isolée ou sans prescription ou contrôle médical. Cette question est absolument fondamentale, je crois.

MME GETTY: Je pense que Mme Coderre pourrait peut-être commenter cette question plus précisément.

MME CODERRE: Eh bien, disons d'abord qu'en ce qui a trait aux méthodes d'évaluation que nous utilisons en orthophonie, je dirais qu'elles sont avant tout d'ordre psycho-linguistique. Est-ce que vous m'entendez?

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il serait possible de vous approcher du microphone, s'il vous plaît?

MME CODERRE: D'accord. Je disais que nos méthodes d'évaluation en orthophonie sont, avant tout, d'ordre psycho-linguistique. Nous faisons, évidemment, un examen des structures, du mécanisme oral périphérique qui est intéressé dans l'acte de la parole, c'est-à-dire que nous faisons un examen du fonctionnement des lèvres, de la langue, du voile du palais, enfin de tout le mécanisme qui concourt à l'acte de la parole. Cet examen est fait pour autant qu'il a des connotations avec l'aspect parole.

Maintenant, le deuxième niveau de notre évaluation est justement l'évaluation qu'on dit phonétique, c'est-à-dire qu'on évalue la production des différents sons de la langue parlée, la qualité de ces sons. C'est là qu'on en arrive à décrire toute une symptomatologie qui peut être significative sur le plan diagnostic. Le reste de l'examen orthophonique porte plus directement sur ce qu'on appelle le comportement verbal proprement dit. L'orthophoniste évalue donc, par exemple dans le cas d'un enfant, l'étendue de son vocabulaire compris et parlé, évalue aussi la qualité des structures de phrases qu'il comprend et qu'il utilise et évalue enfin toute l'organisation de son langage. Voilà pour les méthodes d'évaluation en orthophonie.

M. CASTONGUAY: Me permettriez-vous une question? Si je comprends bien, toute cette évaluation a pour effet de mesurer, d'identifier des défauts que je pourrais appeler mécaniques.

MME CODERRE: Pas nécessairement des défauts mécaniques, monsieur, parce qu'il y a beaucoup...

M. CASTONGUAY: Ou des défauts linguis- tiques. Mais où tirez-vous la ligne, par exemple, entre un cas où il y aurait un problème de déficience mentale ou un problème où vous avez un enfant qu'on dit caractériel ou encore un enfant souffrant de troubles mentaux, psychiatriques?

MME CODERRE: A ce moment-là, on fait en même temps une évaluation du comportement non seulement verbal, mais non verbal de l'enfant. Je voudrais bien ajouter que cette évaluation du comportement verbal, nous la partageons avec d'autres spécialistes, entre autres, par exemple, les psychologues, de sorte que le diagnostic de déficience mentale...

M. CASTONGUAY: Excusez, vous me dites avec le psychologue. Avec le psychiatre, aussi, avec le médecin?

MME CODERRE : Avec le psychiatre, aussi. Oui, aussi.

M. CASTONGUAY: En cabinet privé aussi?

MME CODERRE: En cabinet privé, si vous me permettez, je demanderais plutôt...

M. CASTONGUAY: Ou en milieu scolaire?

MME CODERRE: En milieu scolaire, la responsabilité est certainement partagée avec le psychologue ou encore l'éducateur.

Maintenant, pour revenir à votre première question —est-ce que l'évaluation qu'on fait nous permet simplement de dépister les défauts mécaniques? — je dirais non, parce qu'il y a beaucoup de troubles du langage qui ne sont absolument pas en rapport avec un défaut mécanique se situant au niveau de l'appareil oral périphérique. Il y a des troubles qui sont purement fonctionnels, qui ne sont absolument pas associés à un facteur constitutionnel proprement dit, c'est-à-dire organique.

M. BOIVIN: Pourrais-je compléter par quelques questions? Est-ce que vous pouvez, par exemple, dépister un cancer? Est-ce que vous avez des radiologistes? Est-ce que vous avez les possibilités de l'examen de troubles nerveux par radiographies?

MME CODERRE: Je vais demander à mon collègue, M. Legault, de répondre à cette question s'il vous plaît.

M. LEGAULT: Je répondrai au député de Dubuc que dans les cas de troubles vocaux, de troubles de voix, d'enrouement, etc., à ma connaissance, il n'y a aucun orthophoniste, au Québec, qui accepte de s'occuper de cas semblables sans d'abord avoir demandé un examen par un oto-rhino-laryngologiste.

M. BOIVIN: Alors pourriez-vous me dire la différence qu'il y a entre le dépistage et le diagnostic?

M. LEGAULT: Nous ne faisons jamais de dépistage au niveau des troubles vocaux, tel que vous l'avez entendu tantôt. Le dépistage qui se fait actuellement par les orthophonistes ou audiologistes du Québec se fait à l'extérieur des hôpitaux. Il s'en fait un peu partout. Il s'en fait surtout au niveau des écoles et des commissions scolaires. Il s'en fait non seulement par les orthophonistes et audiologistes mais il s'en fait aussi par toutes les infirmières qui relèvent des unités sanitaires du gouvernement du Québec, qui font un dépistage et qui nous envoient les cas pour examens ultérieurs ou pour confirmer ou infirmer ce qu'elles ont trouvé. Souvent, il y a lieu de référence en oto-rhino-laryngologie, ce qui est fait, à ce moment-là.

M. BOIVIN : Pouvez-vous réellement faire un diagnostic, indépendamment de toute profession, de prendre un cas et de le vider totalement? Ce que je veux faire ressortir, c'est que l'acte médical comporte l'examen —je comprends que vous collaborez à l'examen, que vous collaborez au diagnostic et que vous collaborez aussi au traitement — mais peut-on dire que vous prenez un malade et que vous faites parfaitement le diagnostic, en dehors du secours de toute autre profession?

M. LEGAULT: Exactement. Cela se produit très souvent dans le cas des enfants, par exemple qui nous sont adressés ou dont les parents demandent eux-mêmes un rendez-vous pour un problème d'articulation. Pensez, si vous avez de jeunes enfants, à l'enfant qui dira, par exemple, un "ça" au lieu d'un "chat", ce qui est un pur petit problème d'articulation, à l'enfant qui conserve un comportement plutôt bébé et qui arrivera, à l'âge de cinq ans, en ne prononçant pas, par exemple, seulement le r ou des choses semblables. Il y a une foule de cas semblables.

Il y a beaucoup de cas, chez les enfants — je dirais même que c'est peut-être le tiers des cas qu'on voit,— où le problème de la parole est simplement lié à la place de l'enfant dans la famille. Je vous donne un exemple précis et concret. Le cadet d'une famille, très souvent, est tout simplement gâté et n'a pas besoin de prononcer correctement tel mot pour avoir ce qu'il veut. Par exemple, s'il veut avoir un biscuit, il dira "kiki", on le lui donnera et on n'exigera rien de plus de lui. Si vous voulez, c'est simplement un cas de surprotection, qui est vraiment très simple et que nous rencontrons quotidiennement dans les cliniques.

Dans un cas semblable, le traitement, qui est loin d'être médical, peut simplement consister à expliquer aux parents de quelle façon le comportement de la famille fait que l'enfant ne développe pas une parole tout à fait normale pour son âge. C'est aussi simple que cela dans beaucoup de cas.

M. BOIVIN: Quel est le rôle, à votre point de vue, que doit jouer l'oto-rhino-laryngologiste, soit pour compléter votre travail ou pour vous aider dans votre profession?

M. LEGAULT: Je pense que nous avons des rôles complémentaires. Nous sommes loin de nier la place de l'oto-rhino-laryngologiste. C'est absolument évident. Prenez tous les cas d'écoulement d'oreille, d'otite, de mastoidite, enfin tous ces genres de pathologies, il est absolument clair que cela relève de l'oto-rhino-laryngologiste.

A mon avis, ça n'a jamais effleuré l'idée d'un orthophoniste de s'avancer dans une domaine semblable, loin de là.

Ce qui concerne la pathologie comme telle de l'oreille: infection de l'oreille, etc, ça relève de l'o.r.l. J'en profite pour relever de petites choses qui ont été dites tantôt, au moment où les o.r.l. ont présenté leur mémoire. On parlait du grand danger qu'il passe entre les mains d'un audiologistes, par exemple, un cas de tumeur du huitième nerf ou du nerf acoustisque. Je peux vous dire que, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, en dix ans, il y en a eu un seul cas. Je pense que c'est vraiment exagérer ce danger.

M. CASTONGUAY: Vous ne connaissez peut-être pas les autres.

M. LEGAULT: Vous connaissez sûrement l'hôpital de Chicoutimi que vous considéreriez comme surspécialisé. Cet hôpital regroupe des spécialistes qui n'existent pas ailleurs dans la région. La plupart des cas majeurs passent par l'hôpital de Chicoutimi. C'est possible, quand même, qu'il y ait eu d'autres cas, je l'admets.

M. BOIVIN: Alors, avant d'appliquer vos théories, vos traitements, vous acceptez qu'il y a certaines éliminations à faire et qu'un examen médical est très important pour placer le problème exactement où il est.

M. LEGAULT: Cela peut se faire dans les deux sens. De la même façon qu'il peut y avoir des références qui sont faites de l'o.r.l. vers l'audiologiste ou l'orthophoniste, il peut fort bien arriver que l'audiologiste fasse aussi des références dans le sens contraire. C'est évident.

Je peux vous donner un exemple précis. Le fait qu'à Chicoutimi, en particulier — je parle de moi, parce que je connais bien mon secteur — on puisse travailler en excellente collaboration avec les o.r.l. et qu'on ait les coudées franches, ça nous permet de devancer jusqu'à un certain point le bill 65. On constitue parfois de petites équipes d'orthophonistes de l'hôpital de Chicoutimi et on va jusque sur la Côte-Nord.

De cette façon, il est arrivé l'an dernier que, sur 90 cas que nous avons examinés, nous avons découvert 12 cas de demi-surdité. Et qu'est-ce que nous avons fait? Nous les avons référés immédiatement à des o.r.l. Mais, si nous n'étions pas allés, ce ne sont pas des o.r.l. qui

vont aller faire du dépistage. C'étaient, très souvent, des enfants d'intelligence tout à fait normale, sinon, supérieure, qui moisissaient à redoubler et à redoubler des classes uniquement pour un problème d'audition. C'est pour ça que je pense qu'une certaine mainmise de l'o.r.l. sur l'audiologie ou l'orthophonie va empêcher le travail de dépistage dans les écoles, et va empêcher une foule d'enfants, en particulier, de progresser normalement.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Argenteuil et le ministre ont des questions supplémentaires sur le même sujet. Le député d'Argenteuil.

M. SAINDON: Je voudrais, un peu dans le sens du député de Dubuc, poser une question au représentant de l'association des audiologis-tes et des orthophonistes. En pratique privée, lorsqu'il s'agit de troubles mécaniques qui peuvent être congénitaux ou acquis, au niveau de l'oreille moyenne ou interne, êtes-vous en mesure de faire un diagnostic précis et, à partir de là, d'instaurer un traitement adéquat? Avant de vendre un appareil auditif, n'y aurait-il pas lieu qu'un diagnostic soit posé par un oto-rhino-laryngologiste, s'accompagnant du traitement approprié?

MME GETTY: J'aimerais faire seulement une précision ici avant de laisser la question à M. Legault. D'abord, on doit dire que, dans la province de Québec, il y a très peu d'orthopho-nistes-audiologistes qui font de la pratique privée. On peut les compter sur une main dans toute la province.

M. SAINDON: On ne peut quand même pas les ignorer.

MME GETTY: Non, on ne peut pas les ignorer. Je pense que M. Legault peut vous donner plus de précisions sur le rôle en pratique privée.

M. LEGAULT: Disons qu'à ma connaissance ceux qui font de la pratique privée le font surtout en orthophonie. Il y a une chose qui est sûre et certaine: quelqu'un qui va consulter un orthophoniste ou un audiologiste dans un cabinet privé, s'il a un trouble majeur physique, a sûrement été vu d'abord par un médecin.

Je vous donne un exemple ici: une mère vient consulter avec son enfant qui a une fissure palatine, c'est-à-dire un bec de lièvre. C'est bien évident que son bec de lièvre aura été réparé avant que les gens aient consulté.

M. SAINDON: J'ai parlé d'oreille moyenne et d'oreille interne.

M. LEGAULT: En audiologie, il y a quand même deux choses qu'il faut distinguer. Ce qui est audition, c'est-à-dire la physiologie de l'oreille, puis ce qui est l'oreille elle-même.

L'audiologiste s'attache au fonctionnement de l'audition. Cela lui permet de déceler certaines pathologies et de faire les références qui s'imposent. C'est absolument évident, je ne vois pas du tout ce qu'un audiologiste pourrait faire avec un cas de surdité de transmission, sinon que de le soumettre à qui de droit pour voir si éventuellement il n'y a pas lieu d'une intervention médicale ou chirurgicale.

M. SAINDON: Est-ce que vous êtes d'accord pour que l'audiologiste soit obligatoirement obligé d'envoyer un patient à un oto-rhino-laryngologiste pour un diagnostic précis et le traitement qui s'ensuit?

M. LEGAULT: Ecoutez, si quelqu'un fait du dépistage d'audition et trouve le tout normal, je ne vois pas l'intérêt d'envoyer le patient de façon obligatoire à l'o.r.l. Par contre, la conscience professionnelle est là, le code d'éthique est là. Lorsque ça s'impose, les références doivent être faites.

M. SAINDON: Je comprends mais il reste quand même que dans n'importe quelle profession, incluant la nôtre, souvent la conscience est un petit peu élastique. Il faut essayer de prévenir quand même des abus qui peuvent se produire.

M. LEGAULT: II peut sûrement se produire des erreurs de deux côtés. Je peux vous dire qu'après avoir fait certaines recherches on a constaté qu'au moment où les o.r.l. se mêlent de parler d'audition — domaine que nous pensons nous concerner particulièrement — on retrouve jusqu'à 40 p.c. d'erreurs dans les diagnostics médicaux. Au moment par exemple où l'o.r.l. va affirmer qu'il y a une surdité de perception, donc du nerf auditif, on va trouver souvent des surdités de transmission ou vice versa.

Les erreurs ça peut jouer chez tout le monde; il y a un pourcentage d'erreur normal. Cela ne joue pas seulement d'un côté.

M. CASTONGUAY: Je vous remercie. Les questions posées aussi bien par le député d'Argenteuil que par le député de Dubuc complètent celles que j'aurais voulu poser.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester avait une question. D'accord, alors allez-y de votre question.

M. GUAY: Ce serait sur un autre sujet. De toute façon je vais poser mes questions puis vous pourrez profiter de l'occasion pour répondre quand même. J'ai entendu parler à Montréal de la clinique de Lucie de Vienne, qui, à l'aide d'appareils hautement spécialisés, fait un travail de réhabilitation. J'aimerais savoir, étant donné que je ne connais partiellement ce travail, à quel endroit se situent dans les services que vous offrez à la population les services de cette

clinique de Lucie de Vienne? Remarquez bien que je ne vous oblige pas à répondre, c'est un cas particulier, mais ça pourrait me situer comme législateur.

MME GETTY: Mme Coderre peut répondre ou bien je vais essayer de répondre.

MME CODERRE: Mme Lucie de Vienne Blanc s'appuie sur le thèse du Dr Tchomatis, médecin français, thèse qui a été entièrement réfutée par le Dr Fournier. Les méthodes préconisées par le Dr Tchomatis sont actuellement considérées en France comme tout à fait inadéquates. La méthode utilisée par Mme Lucie de Vienne Blanc est appliquée inconsidérément à tous les types de problème. D s'agit de la même méthode appliquée à tous les types de problèmes. Ici je prends tout simplement l'exemple de la dyslexie, parce que c'est surtout dans ce secteur qu'elle oeuvre. Tous ceux qui connaissent un peu la dyslexie savent très bien qu'il n'y a pas qu'une dyslexie, mais des variétés de dyslexie, des variétés de problèmes pour lesquels il faut une thérapeutique différenciée, ce qui n'est pas du tout le cas dans la méthode qu'applique Mme Lucie de Vienne Blanc.

M. GUAY: Est-ce qu'il y a quand même un certain résultat obtenu chez les patients qu'elle traite?

MME CODERRE: Personnellement, je n'ai pas fait l'étude des résultats. Je pense qu'il y a peut-être des gens dans la clinique qui pourraient apporter des exemples.

M. LEGAULT: J'ai vu quand même certains cas où il y avait eu des résultats. C'est évident que lorsqu'il y a un échange thérapeute-patient, il peut y avoir une occasion de faciliter un échange sur des problèmes personnels. Une personne peut donner confiance à une autre personne et faire en sorte que cela donne un certain résultat. Mais on ne peut pas dire cela pour l'ensemble des cas. Sûrement pas.

M. CASTONGUAY: Une question sur le même sujet. Est-ce que cette personne est membre de votre société?

MME GETTY: Non, Mme Lucie de Vienne Blanc n'est pas membre de notre société.

M. CASTONGUAY: Est-ce qu'elle fait de l'audiologie ou de l'orthophonie? Même si cela...

MME GETTY: Elle ne s'appelle pas orthophoniste ni audiologiste. Elle pratique comme rééducatrice. Elle met un nom à côté... Comme notre ancien bill ne nous le permettait pas, nous n'avions pas le droit exclusif au titre; il aurait fallu, s'il y avait eu des plaintes, qu'elles viennent du public.

M. CASTONGUAY: Sans avoir un droit exclusif au titre, seuls les membres de la société peuvent pratiquer l'audiologie et l'orthophonie.

MME GETTY: Nous avons essayé, mais elle ne pratique pas comme orthophoniste.

M. CASTONGUAY: Non, mais si c'est cela qu'elle fait dans les faits.

MME GETTY: Elle joue sur les mots à ce moment-là.

M. CASTONGUAY: Oui, mais si la population est mise en danger, est-ce que ce n'est pas le plus important? Est-ce que votre corporation n'a pas un rôle à jouer? Il ne s'agit pas là d'un débat verbal, mais il s'agit de protéger la population.

MME GETTY: Nous avons, l'année dernière, alors qu'elle a fait énormément de publicité dans les journaux, essayé de faire le pendant avec un autre article dans le journal pour mettre la population en garde mais pratiquement...

M. CASTONGUAY: Est-ce que vous avez un comité d'évaluation des plaintes?

MME GETTY:Oui, nous avons un comité de discipline qui...

M. CASTONGUAY: Cela touche aux membres de votre commission mais pour...

MME GETTY: Le comité de discipline, c'est pour les membres de notre profession.

M. CASTONGUAY: Oui, mais pour les gens qui exercent illégalement, est-ce que vous avez un mécanisme pour en analyser les cas?

MME GETTY: Présentement, non. M. CASTONGUAY: C'est important. MME GETTY: Mais avec le nouveau bill...

M. GUAY: Une autre question, tout le monde est au courant qu'on soumet des candidats qui désirent obtenir un permis de conduire à des tests de dépistage de troubles visuels. Est-ce qu'il ne serait pas nécessaire de soumettre ces mêmes candidats à des tests orthophoniques ou audiologiques? Pour l'obtention d'un permis de conduire, est-ce que ce serait nécessaire de soumettre ces candidats à des tests semblables aux tests de dépistage de troubles visuels? J'ai l'impression qu'un bon nombre de conducteurs peuvent avoir des troubles de l'ouïe et cela peut occasionner dans certains cas des problèmes. On peut se référer aussi au domaine industriel, par exemple, où deux personnes travaillent ensemble mais si une personne entend mal, elle est beaucoup plus sujette à des dangers.

M. LEGAULT: Disons que depuis quelques années, le ministère des Transport accepte de donner des permis de conduire à des personnes qui présentent des surdités même très profondes. Certaines compagnies d'assurances assument les risques. Cela s'est fait à la suite de recherches aux Etats-Unis qui ont prouvé que les personnes sourdes, en grande majorité, accordent tellement une grande attention visuelle à ce qui se passe sur la route que, dans le fond, elles n'ont pas plus d'accidents que les personnes qui entendent normalement. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. GUAY: Oui. Vous avez parlé tantôt de personnes qui n'articulent pas suffisamment. J'ai déjà été accusé en Chambre par un ministre de ne pas articuler suffisamment. Maintenant, je tiens à souligner que plusieurs autres personnes avaient compris, sauf le ministre en question. Mais j'aimerais savoir si les troubles qui dépendent uniquement de la mauvaise articulation sont plus fréquents que les troubles de surdité?

M. LEGAULT: C'est difficile à dire.

M. GUAY: Du tout... C'est une question générale mais à partir d'un exemple et je prends celui-là. Il s'est présenté tout près, ici, à l'Assemblée nationale.

M. LEGAULT: C'est évident que les problèmes d'articulation sont beaucoup plus fréquents que les problèmes de surdité. Il y a beaucoup de facteurs qui jouent là-dedans, dont le premier est probablement le facteur imitation du milieu familial.

On apprend à parler, le plus souvent, avec sa mère; on est en contact avec son père, ses frères et soeurs. Si, par exemple, dans une famille, les gens ont l'habitude de parler très fort, les enfants vont trouver tout naturel de parler très fort. Ce sont des facteurs semblables qui peuvent jouer. Il y a aussi une question de tempérament. Il y a des gens qui parlent très rapidement en fonction d'un tempérament plutôt fougeux ou nerveux et il y a des gens qui parlent beaucoup plus calmement, beaucoup plus lentement, en fonction de leur personnalité. Ce sont tous des facteurs qui jouent et qu'il faut analyser au moment où on voit les cas.

M. GUAY: Etant donné que les troubles d'articulation sont plus fréquents, est-ce que c'est plus facile à corriger qu'un trouble auditif?

M. LEGAULT: Cela dépend du problème d'articulation; il y a des problèmes qui sont très sérieux. Je pense, entre autres, au retard de langage et de parole que l'on rencontre chez les enfants qui viennent de milieux défavorisés. Ce sont des enfants qui viennent de milieux où ils ont eu vraiment, pour ne pas dire une absence, du moins un grand manque de stimulation. Je peux donner des exemples concrets: des enfants élevés en institutions, comme on en voyait autrefois et qui sont maintenant disparues, remplacées par de petits centres d'accueil. Lorsqu'une vingtaine d'enfants sont pris pour être élevés par une seule personne qui s'occupe d'eux, on a déjà vu, à cause de ça, des enfants sortir de l'orphelinat, à l'âge de trois ans, quatre ans et cinq ans, et avoir pour tout vocabulaire quelques mots, comme "merci, ma soeur", "pipi" enfin, vous voyez un peu l'histoire. Certains de ces enfants n'avaient jamais vu de leur vie, par exemple, un réfrigérateur, un poêle, une allumette allumée ou des choses semblables. Comment voulez-vous qu'ils sachent ce que c'est une cigarette, lorsqu'une bonne soeur ne fume pas? A ce moment-là, il y a un manque de vocabulaire flagrant, mais ce n'est pas facile de prendre un enfant de cet âge, quatre ou cinq ans, et de lui donner ce qu'il aurait dû avoir à un moment précis et qu'il n'a pas eu. On ne peut jamais l'acquérir aussi bien après. Ce sont des problèmes sérieux.

M. GUAY: C'est un manque de connaissances chez l'enfant. Est-ce que, par contre, plusieurs enfants vous sont référés par des parents pour ceci? On dit, par exemple, des enfants qui ont une difficulté de langage quand ils sont très jeunes qu'ils ont le "filet". C'est cette petite membrane sous la langue. Je parle en connaissance de cause, car c'est le cas de mon deuxième. Les médecins prennent plaisir à nous dire: Votre enfant a le "filet".

M. LEGAULT: Ecoutez, le "filet", ça ne joue pas, parce que, s'il existe, il est coupé au moment de la naissance par le pédiatre et souvent à la pouponnière. C'est extrêmement rare que le "filet" puisse jouer un rôle dans ces choses-là.

M. GUAY: Ce n'est pas un trouble en quantité majeure que vous rencontrer chez vous. Merci.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de L'Assomption.

M. PERREAULT: En certains milieux, on a prétendu que certains troubles de dyslexie sont dus à des troubles de vision. Est-ce que vous avez la formation nécessaire pour identifier ces troubles de dyslexie dus à la vision et pour les référer à ce moment-là?

MME CODERRE: Le diagnostic de la dyslexie, de toute façon, nous parait être une affaire d'équipe. Nous avons un rôle à jouer dans le diagnostic, mais nous disons que ce n'est pas notre seul rôle.

Quant à la responsabilité des troubles de la vision dans la dyslexie, il a été démontré — je pourrais vous citer un rapport publié récemment, en 1971 — que les troubles de la vision ont une part très minime dans la genèse de la dyslexie. Par contre, je pourrais ajouter que,

dans un fort pourcentage de dyslexies, il y a un rapport étroit entre la dyslexie elle-même et des retards de parole et de langage. Les difficultés pour l'acquisition du langage oral, telles que la difficulté de discrimination entre les sons de la langue, la difficulté d'organisation dans le langage, se retrouvent au même titre dans l'apprentissage du langage écrit, le langage écrit étant — on l'admet — tout simplement un code soumis au langage oral. Il y a donc unité entre les deux codes.

M. PERREAULT: Ma deuxième question est celle-ci. Je suis un profane, mais nous avons entendu, ici à la commission, quelqu'un faire un parallèle entre ophtalmologie, optométrie et les opticiens d'ordonnance. Je fais un parallèle avec l'oto-rhino, l'orthophoniste, l'audiologiste et l'acousticien. On a prétendu que la prescription à l'opticien d'ordonnance pour des verres correcteurs devrait venir de l'optométriste.

Est-ce la même chose dans votre cas? Est-ce que les acousticiens devraient procéder seulement sur ordonnance des orthophonistes et des audiologistes?

M. LEGAULT: Je pense que la sélection de prothèses auditives, d'appareils auditifs doit être faite par les audiologistes. Quant une prothèse doit être choisie, c'est parce que, ordinairement, il a été prouvé qu'on ne pouvait rien pour améliorer l'audition du point de vue médical ou chirurgical. On tombe alors dans les problèmes qui relèvent uniquement de l'audio-logie, le problème de la discrimination. Vous savez qu'il y a des personnes qui ont des petites surdités et qui ont beaucoup de difficulté à comprendre, et l'inverse se produit également. Il y a des personnes qui ont de bonnes surdités et qui ont assez de facilité à comprendre. Il y a tout un jeu de discrimination qui joue. C'est à partir de ce jeu, de ce qui existe au point de vue discrimination qu'on pourra établir quel genre de prothèse convient au patient, s'il doit d'abord en porter une. Vous savez qu'il y a beaucoup de gens qui ne peuvent pas porter, avec profit, une prothèse auditive, et lorsqu'on dit que des gens vont directement chez le vendeur, achètent une prothèse et la placent dans le tiroir au bout de 24 heures, cela se produit encore quotidiennement.

M. PERREAULT: Est-ce que l'acousticien devrait se limiter à une prescription et ne pas agir lui-même?

M. LEGAULT: Je pense que l'acousticien en prothèse auditive devrait, de toute évidence, vendre sa prothèse après avoir obtenu une prescription qui justifie l'achat par le patient d'un appareil auditif, n'ayant droit à aucune participation dans la vente d'appareils auditifs, directe ou indirecte. Nous sommes parfaitement libres de dire au patient: Vous en avez besoin d'une, vous pourriez en profiter, ou encore;

N'en achetez-en pas, vous allez gaspiller X dollars.

M. PERREAULT: D'accord. Si cela pouvait se faire, pour le bien-être du patient, est-ce qu'il ne serait pas approprié que le patient ait d'abord un certificat, qu'il n'y ait pas de pathologie irrémédiable dans les cas de l'ouie, de la vision avant de s'adresser aux optométris-tes, aux orthophonistes et audiologistes?

M. LEGAULT : Cela ne serait pas tout à fait juste, parce qu'il y a des gens qui, éventuellement, pourraient être opérés et refusent de l'être et préfèrent porter un appareil auditif. Nous rencontrons des gens...

M. PERREAULT: Oui mais au moins ils le sauraient à ce moment-là.

M. LEGAULT: Ils le savent déjà. Le plus souvent, ce sont des gens chez qui le diagnostic a été fait il y a déjà plusieurs années, pour un cas d'otosclérose, en particulier — ce sont des cas que nous voyons fréquemment — à qui le médecin a dit qu'ils pouvaient être opérés mais qui, de peur de l'opération ou pour d'autres raisons, refusent l'opération et préfèrent porter un appareil auditif. Ce sont des cas que nous voyons.

M. PERREAULT: Je mentionne des cas où il n'y a pas eu de diagnostic de fait encore.

M. LEGAULT : Si le diagnostic audiologique, qui n'est pas un diagnostic médical, met en évidence une pathologie quelconque qui est susceptible d'être traitée médicalement ou chirurgicalement, la conscience professionnelle impose de l'envoyer à un ORL. Il n'y a pas d'intérêt pour l'audiologiste de garder le patient. Il n'y a aucun intérêt financier à ce moment-là.

M. PERREAULT: Nous pouvons donc conclure que votre formation vous permet de déceler des cas pathologiques.

M. LEGAULT: C'est évident. Si nous pouvons, par nos examens, et cela n'est pas contesté, mettre en évidence qu'une personne est sourde, la surdité est une pathologie en soi.

M. PERREAULT: II y a donc une certaine relation avec la médecine.

M. LEGAULT: C'est évident. Il n'y a personne qui niera cela. Bien sûr.

M. CASTONGUAY: Est-ce que la perception des sons peut varier selon les sujets traités? Je m'explique. Il y a beaucoup de femmes qui croient que la perception de leur mari baisse quand il leur parle de budget familial.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dubuc.

M. BOIVIN: Combien êtes-vous dans l'association?

MME GETTY: Nous sommes 133.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il y en a beaucoup qui ne font pas partie de l'association et qui ont le diplôme de l'école?

MME GETTY: Non. Selon notre ancien bill, toute personne qui obtenait une maîtrise de l'Université de Montréal ou de l'université McGill pouvait s'inscrire et devenait automatiquement membre de la Société d'orthophonie. Pour les gens qui venaient de l'extérieur, nous avions un comité d'admission qui étudiait les équivalences de ces gens, comme cela se fait dans diverses professions.

M. BOIVIN: Combien y en a-t-il qui travaillent avec l'équipe dans le milieu hospitalier? Et combien y en a-t-il qui travaillent en cabinet privé?

MME GETTY: En cabinet privé, je pense que cela ne représente même pas 1 p.c. Ce n'est pas seulement le milieu hospitalier. Il y a le milieu hospitalier et le milieu scolaire aussi. Parce que le milieu scolaire quand même...

M. BOIVIN: Dans le milieu scolaire, n'est-ce pas encore en équipe avec l'oto-rhino-laryngologiste?

MME GETTY: Non. Dans le milieu scolaire, non.

M. BOIVIN : Ils travaillent simplement sur le dépistage. Ils ne font pas de diagnostic précis.

MME GETTY: Non. Ils font un diagnostic...

M. LEGAULT: Ils font des diagnostics orthophoniques et audiologiques, bien sûr.

M. BOIVIN: Pourriez-vous me dire combien d'années d'études ce cours exige et nous parler de l'école?

MME GETTY: Oui.

M. BOIVIN: Je voudrais savoir combien on exige d'années d'étude, qu'est-ce que les études comportent et si les oto-rhino-laryngologistes collaborent à cette école.

MME GETTY: Je pense que Mme Coderre, qui est responsable de la section d'orthophonie et d'audiologie à l'Université de Montréal, serait mieux placée que moi pour répondre plus précisément à votre question.

MME CODERRE: Si vous le permettez, je vais d'abord préciser qu'au Canada il y a six centres de formation en orthophonie et audiologie. Il y en a un en Colombie-Britannique où la formation minimale est offerte au niveau de la maîtrise. Il y en a un en Alberta qui offre un programme de baccalauréat de quatre ans. Il y en a deux en Ontario, dont un offre un programme d'étude au niveau postgradué et l'autre au niveau du premier cycle. Enfin, au Québec, il y a l'université McGill qui offre un programme de maîtrise et de doctorat en orthophonie ou audiologie et l'Université de Montréal qui offre un programme de baccalauréat et un programme de maîtrise.

J'aimerais tout de suite préciser que, contrairement à ce qui a été dit précédemment, ce n'est pas l'Institut de réhabilitation qui est responsable de la formation. L'Institut de réhabilitation est un hôpital qui dispense des soins. C'est donc l'école de réadaptation de la faculté de médecine de l'Université de Montréal qui est responsable de ce programme de formation.

Je pourrais vous dire très brièvement en quoi consiste cette formation. La première année du baccalauréat est constituée exclusivement de disciplines qui sont fondamentales à l'orthophonie et à l'audiologie. Il y a donc des cours en anatomie et physiologie qui sont dispensés par les responsables de ces départements à la faculté de médecine. Il y a des cours de psychologie qui sont très nombreux. Il y a également des cours de linguistique et de phonétique qui sont donnés par le département de linguistique. Il y a des cours de psychiatrie qui sont donnés par les responsables de cet enseignement à la faculté de médecine. Il y a également des cours de physique acoustique. Cela constitue l'objet de la formation de la première année.

En deuxième année, on a encore des disciplines fondamentales en phonétique, linguistique et psychologie et on aborde plus spécifiquement les aspects pathologiques des troubles de la communication verbale.

A votre question: Est-ce qu'il y a des oto-rhino-laryngologistes qui participent à l'enseignement? Je réponds: Oui. Il y a un cours qui traite de la pathologie de la phonation et de l'audition. Il est donné par un professeur attitré de la faculté de médecine. Il y a également un cours en neurologie, un cours en pédiatrie et un cours en odontologie qui est donné par la faculté de chirurgie dentaire. Ensuite, évidemment, il y a des cours professionnels d'audiologie et d'orthophonie qui sont accompagnés de stages. Ces stages sont faits en deuxième année, en milieu scolaire et en milieu hospitalier, sous supervision immédiate d'orthophonistes et d'au-diologistes dûment qualifiés.

La troisième année est presque entièrement constituée de cours professionnels qui traitent de la pathologie de l'audition et du langage chez l'adulte et chez l'enfant. Elle est constituée également de stages.

Quant à l'année de maîtrise, eh bien, elle comporte des cours plus avancés dans les matières qui ont déjà été vues au niveau du

baccalauréat et des stages avancés ainsi que la rédaction d'une thèse qui comporte une expérimentation originale.

M. BOIVIN : Depuis combien de temps exigez-vous trois ans ou quatre ans pour votre cours? Quelle est la scolarité de base que vous exigez pour entrer dans cette profession?

MME CODERRE: A votre première question, je réponds que le programme d'études universitaires a été réformé à la suite des réformes qui ont été faites au niveau de l'enseignement préuniversitaire, soit au niveau des CEGEP. C'est donc depuis 1968 qu'existe ce nouveau programme que je viens de vous décrire est en existence.

Quant aux prérequis qui sont exigés, ce sont les deux années de CEGEP avec le profil de ce qu'on appelle les sciences de la santé, donc des cours en biologie, mathématiques, physique et chimie. Enfin, le même profil qui est exigé pour entrer en médecine.

M. BOIVIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: Je connais bien votre école et vos équipes.

Etant donné le haut niveau des études que vous faites et que je connais, encore une fois; étant donné l'amélioration constante de l'enseignement qui vous est offert, quelles sont les fonctions anciennement ou actuellement exercées par les oto-rhino-laryngologistes que vous vous sentez maintenant en mesure d'accomplir seuls?

M. LEGAULT: Je peux répondre à cette question. Je pense que c'est tout le champ de l'examen de l'audition, qui n'est pas, en fait, l'oreille elle-même. La distinction, on la fait comme ceci, c'est que l'oto-rhino-laryngologiste s'attache à la pathologie de l'oreille comme organe et nous, à la physiologie de l'audition.

M. LAURIN: Dans le champ de la pathologie, est-ce qu'il y a des fonctions ou des diagnostics que vous vous sentez capables de poser seuls?

M. LEGAULT: Le diagnostic audiologique, bien sûr. Notre diagnostic, nous sommes capables de le poser seuls. D'ailleurs, nous nous expliquons assez mal pourquoi le gouvernement du Québec, par l'entremise de la Régie de l'assurance-maladie, a les moyens de payer deux fois le même examen. Je ne sais pas si vous le savez, mais les examens audiologiques faits par des audiologistes diplômés, avec la formation universitaire que nous avons, sont réinterprétés après et on les fait payer comme tels par la Régie de l'assurance-maladie. Les oto-rhino- laryngologistes ont beaucoup parlé, tantôt, d'équipes thérapeutiques. Je me demande où est, disons, la bonne collaboration qu'on veut avoir, lorsqu'un membre de l'équipe fait payer des examens faits par d'autres. C'est assez curieux.

M. LAURIN: Dans le champ de la pathologie, est-ce qu'il y a, maintenant, des actes que vous vous sentez capables de poser parmi ceux que les oto-rhino-laryngologistes posent actuellement?

M. LEGAULT: II y a la question, en fait, de référence pour prothèses auditives. Je pense que c'est le champ principal. Pour le reste, le travail que nous faisons — je pense à la rééducation auditive en particulier, chez les enfants souffrant de surdité, à l'ajustement de prothèses auditives, ce qui constitue ce qu'on pourrait appeler un traitement audiologique — nous l'avons et nous l'avons à part entière. Il n'y a pas un oto-rhino-laryngologiste qui fait de la rééducation auditive, au Québec, actuellement. Ce n'est fait que par des audiologistes.

Je pense que la différence qui existe entre l'oto-rhino-laryngologiste et l'audiologiste, ce n'est pas tellement dans le champ de travail. A mon avis, c'est uniquement une question de contrôle d'une profession par rapport à une autre.

M. LAURIN: Les oto-rhino-laryngologistes disent que, dans l'établissement d'un diagnostic, il faut tenir compte de facteurs que seule la connaissance de la médecine en entier permet d'apprécier, par exemple, des inflammations, des pathologies tumorales. Est-ce que vous vous sentez, même dans ce domaine, avec les études que vous faites, capables de détecter la présence possible de ces facteurs? Si vous le faites, quelle est votre attitude, à ce moment-là?

M. LEGAULT: Nos examens permettent de détecter une foule de choses, mais ce n'est pas nous qui nous occupons de traiter la pathologie médicale comme telle, d'aucune façon. Comme je le disais, si nous décelons une surdité par un examen de l'audition et que, d'après l'examen — c'est très possible de le faire — on peut voir qu'il y a des possibilités de traitements médicaux ou chirurgicaux, nous faisons la référence qui s'impose.

M. LAURIN: Vos études vous permettent, selon vous, de poser ces diagnostics sans surveillance.

M. LEGAULT: Absolument.

M. LAURIN: Sans contrôle, disons.

M. LEGAULT: Sans contrôle, écoutez, les orthophonistes et audiologistes travaillent seuls. Lorsqu'ils voient les patients, ils les voient seuls.

Si on parle de contrôle, il faudrait le faire un peu pour tout le monde.

Je peux vous citer un cas tout récent, qui date d'une semaine, où on m'envoie un cas avec diagnostic médical: dysphonie ventriculaire. La patiente entre dans mon bureau. Après quelques minutes — vous connaissez les relations thérapeute-patient puisque vous êtes psychiatre — la patiente a pu extérioriser son problème, qui était d'ordre familial et sa voix est redevenue tout à fait normale au bout de quinze minutes d'entrevue. Ce n'est pas un miracle. C'est simplement la formation que nous avons qui nous permet de savoir que les patients peuvent avoir certains problèmes psychologiques, familiaux, sociaux. Notre formation nous permet de faire les références qui s'imposent. Il est évident que, dans ce cas, la personne a été référée, de son plein gré à un travailleur social pour une entrevue éventuelle. D'accord?

M. LAUREN: Est-ce que vous établiriez une équivalence à peu près du même ordre entre l'audiologiste et l'oto-rhino-laryngologiste et, d'autre part, entre le physiothérapeute et le psychiatre?

Est-ce que c'est à peu près analogue?

MME CODERRE: Le physiothérapeute travaille sur prescription médicale. L'orthophoniste ce n'est pas son cas. Il travaille simplement après demande de consultation ou de requête. On pourrait vous citer de nombreux exemples où le médecin dirige un patient en orthophonie et nous demande: Faites l'évaluation et déterminez s'il y a lieu ou non d'entreprendre la rééducation. Et il nous arrive fréquemment dans la pratique de même corriger le diagnostic qui a été fait par le médecin.

Depuis le début, on ne parle que d'oto-rhino-laryngologiste et au fond il y a beaucoup d'autres spécialistes en médecine avec lesquels nous collaborons, entre autres le neurologue. Il arrive très souvent qu'à la suite de discussions l'orthophoniste fasse changer le diagnostic. Je pourrais vous donner comme exemple — je m'excuse d'utiliser un peu le jargon du métier — le cas d'un adulte victime d'un accident cérébro-vasculaire. Ce malade arrive en orthophonie avec le diagnostic de dysarthrie, ce qui veut dire un trouble d'articulation qui est dû à un mauvais fonctionnement neuromusculaire de l'appareil phonatoire-articulatoire. Et, après l'examen, l'orthophoniste constate que ce n'est pas du tout une dysarthrie, mais une aphasie, c'est-à-dire un trouble au niveau du langage, un trouble de l'utilisation de vocabulaire, de la phrase. Par conséquent, vous pouvez déduire que la thérapeutique n'est pas du tout la même dans ces deux cas. Et ça se produit, ces choses, dans la réalité.

M. LAURIN: Quelle place occupe, dans votre discipline, aussi bien au niveau des études qu'au niveau de la pratique, l'étude de l'audiologie en tant que science et la promotion de la bonne audition ou la prévention des troubles audiologiques?

MME CODERRE: Au niveau de l'étude de l'audition, je l'ai mentionné précédemment en décrivant les cours qui font partie du programme d'études à l'Université de Montréal, qu'on retrouve aussi à l'université McGill. Il y a de nombreux cours, entre autres en physique acoustique, pour l'étude des sons. Ensuite, il y a des cours en instrumentation psycho-acoustique également. Et il y a tous les cours d'audiologie qui préparent le candidat à l'étude de l'audition à tous les niveaux, soit au niveau de l'oreille moyenne, de l'oreille interne et même centrale.

Quant aux aspects qui touchent davantage la pratique, je pourrais demander à un collègue en audiologie de répondre.

MLLE PELLETIER: Pourriez-vous répéter la dernière partie de la question concernant la pratique?

M. LAURIN: J'ai eu une réponse au point de vue des études, malgré que vous n'avez pas touché la recherche, qui m'intéresse aussi beaucoup. Au niveau de la pratique, jusqu'à quel point, dans votre pratique, vous préoccupez-vous de la promotion d'une bonne audition ou de la prévention des troubles audiologiques?

MLLE PELLETIER: Au point de vue de la prévention, plusieurs collègues s'occupent de dépistage ou sont à la tête de dépistages, soit scolaires, soit industriels. Moi, personnellement je n'ai plus à m'occuper de ce problème. Par contre, lorsque ces collègues évaluent les cas dépistés, ceux-ci sont alors dirigés dans les hôpitaux pour examen par un audiologiste et ensuite un examen auditif précis.

Je crois que la même chose se produit du côté industriel.

M. LEGAULT: Je peux ajouter qu'au point de vue de la prévention, il y a quand même des audiologistes qui rencontrent des groupes de professeurs dans les commissions scolaires afin de leur expliquer les principaux symptômes par lesquels on peut reconnaître dans une classe qu'un enfant pourrait possiblement souffrir de surdité. Il existe à Sherbrooke, depuis déjà deux ans au moins, un cours sur la prévention de la surdité d'origine industrielle, due aux bruits industriels. A ces cours, assistent des agents de sécurité de toutes les industries de pulpe et de papier — qui sont des industries quand même très bruyantes — et de l'industrie de la motonei-ge. Ainsi, les agents de sécurité peuvent se renseigner sur la nature du bruit industriel, ce qu'il peut causer comme problème auditif et de quelle façon prévenir ce trouble.

Et à cette occasion — c'est le rôle de l'audiologiste encore une fois — on leur expose

les différents moyens de protection de l'ouvrier contre le bruit, on leur explique aussi ce qui existe, même s'il existe peu de choses, au point de vue de ce qui est admis par la législation actuelle, qui est en voie d'être changée, au sujet des niveaux de bruits acceptables en milieu industriel. Vous voyez quand même que c'est un aspect préventif qui est très important.

On parle beaucoup de pollution par le bruit actuellement et je pense que le travail qui se fait à Sherbrooke de ce côté est un travail très valable. Il y a des gens qui viennent de tous les coins du Québec, tous les ans, pour se renseigner à ce sujet.

M. LAURIN: Est-ce que vos praticiens et vos professeurs effectuent de la recherche? Pour-riez-vous m'en parler un peu. Jusqu'à quel point et avec quels fonds?

MME CODERRE: Vous comprenez qu'avec le petit nombre de candidats dans la profession, la première responsabilité pour nos gens était de répondre d'abord au service. Il y a un début de recherche qui se fait au niveau de l'université. La recherche vise surtout au développement d'instruments de mesures qui soient adaptées à notre milieu. Maintenant, également en clinique, de la recherche se fait, mais c'est quand même encore à l'état embryonnaire. Les budgets accordés sont très mimimes.

D'ailleurs, je pourrais peut-être ajouter également que les budgets accordés aux centres de formation des orthophonistes et audiologistes ne sont pas encore ce qu'ils devraient être pour permettre une expansion véritable de ces disciplines.

M. LEGAULT: En fait, il existe un fonds pour la recherche actuellement, ce qui nous permet de faire beaucoup de recherches. En ce qui concerne le service que je dirige à Chicoutimi, tous nos dossiers, depuis 1961, sont placés sur ordinateur. Actuellement, il y en a tout près de 11,000. Cela va nous permettre quand même d'effectuer certaines recherches cliniques à partir de renseignements qu'on ne pourrait jamais obtenir d'une autre façon.

Mais on se contente actuellement de faire de petites recherches cliniques lorsque nous considérons qu'on peut se dégager un peu du travail quotidien et vous savez qu'étant très peu nombreux nous avons beaucoup de travail. Pour vous donner une idée, si on s'en tient aux normes américaines, par exemple, pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il faudrait 27 orthophonistes audiologistes. Bien, nous sommes actuellement cinq. Alors, vous pouvez bien imaginer qu'ayant à coeur le bien de la population, nous nous contentons le plus souvent de répondre aux besoins les plus pressants et déjà ça occupe passablement notre temps.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Argenteuil.

M. SAINDON: M. le Président, une question seulement au représentant des orthophonistes. Il peut y avoir des cas d'altération de la phonie due à des troubles digestifs. Croyez-vous être qualifié pour faire le diagnostic et de là à appliquer le traitement qui s'impose?

M. LEGAULT: Voulez-vous répéter votre question, j'ai mal saisi.

M. SAINDON: II peut y avoir des troubles de langage parlé qui sont dus à des troubles digestifs. Croyez-vous être qualifié pour faire le diagnostic et de là appliquer ou recommander le traitement qui s'impose?

M. LEGAULT: En ce qui me concerne, je n'ai jamais vu de ces cas-là. Je vous l'avoue bien franchement. Depuis dix ans...

M. SAINDON: J'avoue que cela ne court pas les chemins mais cela arrive.

M. LEGAULT: Je ne peux pas répondre à votre question, peut-être qu'il y en a d'autres qui peuvent le faire.

MME GETTY: Si à un moment donné il y avait une pathologie que nous ne pouvons pas identifier, comme on l'a dit tout à l'heure, tous les cas, surtout de dysphonie, par conscience professionnelle, je suis certaine qu'il n'y a pas une orthophoniste qui va voir un trouble de la voix avant qu'il soit au préalable vu par un oto-rhino. Alors, ce sera à lui, à ce moment-là à décider s'il veut avoir un examen du mécanisme digestif.

M. SAINDON: Vous ne croyez pas qu'il a le danger ou appelez cela la possibilité que différents traitements soient essayés au détriment du patient et à des coûts assez élevés?

MME GETTY: Non, ce n'est pas une peur qui peut se produire parce que comme tous les patients sont au préalable vus par un médecin ORL, si, lui, a vu qu'il pouvait y avoir un trouble digestif et qu'il y avait contre-indication à la thérapie, on ne le verra tout simplement pas.

M. LEGAULT: D'ailleurs le problème financier ne se pose pas puisque tous les orthophonistes ou presque travaillent dans les hôpitaux.

M. SAINDON: J'en reviens à la question des orthophonistes qui travaillent en cabinet privé. C'est sûr que lorsque vous travaillez en clinique avec une équipe médicale, le problème ne se pose pas.

M. LEGAULT: Que ce soit dans son bureau, à l'hôpital, seul avec son patient, je pense que la conscience professionnelle est exactement la même que lorsqu'on est seul en cabinet privé.

M. SAINDON: Vous êtes sûr de cela?

M. LEGAULT: II faut le présumer parce que, autrement, donnons à chaque orthophoniste son ORL dans son bureau pour être bien sûr qu'il n'y aura pas d'erreur.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Maskinongé.

M. PAUL: Je crois que le Dr Boivin et les autres ont parfaitement couvert le sujet.

M. LE PRESIDENT: Alors, je remercie les représentants, Mlle Getty ainsi que M. Legault, M. Létourneau et ceux qui les accompagnent pour la façon dont ils ont présenté leur mémoire. Soyez assurés que les membres de la commission vont prendre bonne note de vos recommandations, Je vous remercie.

Est-ce que les représentants des trois groupes suivants sont ici, à savoir M. Jérôme Nadon, M. Smiley et M. Gérard Parent?

UNE VOIX: Les représentants en podiatrie sont ici, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le Conseil de la certification, est-ce que les représentants sont ici?

M. CASTONGUAY: L'Association des prothésistes et orthésistes du Québec? Alors, M. le Président, il nous reste trois groupes à entendre, il est 12 h 20, est-ce que nous pourrions suggérer, si les membres sont d'avis, que nous ajournions et que nous reprenions à 3 h 30?

M. LE PRESIDENT: Les membres de la commission sont d'accord.

M. CASTONGUAY: Après la période des questions.

M. LE PRESIDENT: Alors, la séance ajourne à 3 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 22)

Reprise de la séance à 15 h 35

M. PILOTE (président de la commission spéciale sur les corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

J'inviterais M. Jérôme Nadon, président de l'Association des prothésistes et orthésistes du Québec Inc, à venir présenter son mémoire et à identifier ceux qui l'accompagnent.

Association des prothésistes et orthésistes du Québec

M. NADON: M. le ministre, MM. les députés de la commission parlementaire, permettez-moi, d'abord, de me présenter: Jérôme Nadon, président de l'Association des prothésistes et orthésistes du Québec. Je suis accompagné des membres de notre exécutif: M. Gustave Lebel, vice-président; M. Lucien Debrabander, secrétaire-trésorier; MM. Robert Adam et Georges Racine, directeurs; M. Camille Corriveau, président fondateur de notre association et directeur de l'Ecole de prothèse et orthèse du Québec Inc.; notre conseiller juridique, Me Cormier, ainsi que M. Jerry Houtart, vice-président de l'Association canadienne des prothésistes et orthésistes.

L'association des prothésistes et orthésistes du Québec désire, en premier lieu, remercier le président et les membres de la commission parlementaire spéciale des corporations professionnelles d'avoir bien voulu accepter de lui accorder cette audience. Notre association groupe présentement quelque 33 membres actifs, quinze membres associés et trois membres correspondants. Les membres actifs sont tous en règle avec leur association.

Notre association a obtenu ses lettres patentes le 16 octobre 1967 en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies, libro 1392, folio 2. Tous nos membres actifs possèdent soit un diplôme de l'Ecole de prothèse et orthèse du Québec Inc., ou la certification canadienne. C'est donc dire que nos membres sont spécialistes dans leur domaine respectif soit l'orthèse et la prothèse.

Je me permets aussi d'ajouter qu'autant dans l'exercice de nos fonctions que dans nos recommandations contenues dans notre mémoire, nous sommes privilégiés d'avoir l'appui du Collège des médecins de la province de Québec. De plus, l'Association des prothésistes et orthésistes du Québec est le seul organisme qui représente ses membres à l'échelon national représentant une des quatre régions de l'Association canadienne des prothésistes et orthésistes.

L'association des prothésistes et orthésistes s'est trouvée surprise de ne pas être incluse dans le code des professions, quand on songe qu'il est extrêmement important d'assurer la protection du public et surtout des handicapés contre certaines personnes qui n'ont pas les connaissances nécessaires pour répondre adéquatement

à leurs besoins. L'art de fabriquer et d'ajuster les appareils orthopédiques et les membres artificiels requièrent de nombreuses connaissances tant médicales et psychologiques que techniques. D'ailleurs, je me permets d'ajouter que les prothésistes et orthésistes font partie intégrante de l'équipe médicale de réadaptation.

Nous sommes conscients que le Québec se doit de posséder un cadre administratif pour exercer un regard sur les professions. C'est donc dire que dans l'ensemble, nous sommes d'accord sur le code des professions, le bill 250, mais avec les recommandations que nous avons faites dans notre mémoire.

M. le Président, comme notre profession, en tant qu'association est une des toutes dernières nées des corporations paramédicales et, par le fait même, presque inconnue du grand public, sauf de ceux qui ont besoin de nos services professionnels, je crois que la période des questions sera plus bénéfique qu'une longue présentation.

Mais avant de terminer, permettez-moi de souligner l'urgence des recommandations faites au dernier paragraphe de notre mémoire, à savoir que l'Association des prothésistes et orthésistes du Québec recommande la préparation et la présentation d'une loi des prothésistes et orthésistes ayant pour principal objet de constituer la corporation professionnelle des prothésistes et orthésistes du Québec.

Elle recommande en outre d'établir des règles concernant l'expérience, l'exercice de la profession de prothésiste et d'orthésiste au Québec en tenant compte des dispositions du projet du code des professions. Messieurs, je vous remercie beaucoup.

M. LE PRESIDENT: La parole est au ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: M. le Président, la question qui s'est posée lorsque nous avons préparé cette loi est la même qui s'est posée vis-à-vis d'autres organismes où il s'agit de fabrication, même s'il y a ajustement, soit de savoir si, vraiment, il est sage de réserver à un seul groupe la préparation de prothèses, compte tenu des changements, de l'évolution dans les modes de fabrication. On a eu les opticiens d'ordonnance, les optométristes. Je pense qu'il est ressorti très clairement qu'il y a un certain nombre d'années l'opticien d'ordonnance ou l'optométriste pouvait, dans la préparation des lentilles, faire la plus grande partie, sinon la totalité du travail. Aujourd'hui, de nouveaux procédés de fabrication se sont ajoutés.

De la même manière, nous avons vu, dans le domaine des prothèses dentaires, l'évolution à tel point qu'aujourd'hui on nous a fait état d'une situation très différente, certainement, de celle qui existait au moment où la Loi des techniciens dentaires a été passée. On nous a fait état du volume élevé de commandes qui passent à l'extérieur du Québec, par exemple, uniquement par le fait que des laboratoires de fabrication, à caractère industriel, pratiquement, n'existaient pas ici puisque nous n'avons que des individus qui peuvent d'après la loi fabriquer des prothèses.

Alors, sans nier la valeur du travail fait par les orthésistes et les prothésistes, l'importance des prothèses, des orthèses pour ceux qui doivent les utiliser, nous nous demandons vraiment quel est le but recherché, de quelle façon la population y gagnerait, au point de vue de sa protection, par la formation d'une corporation professionnelle dans ce secteur, ou encore de quelle façon elle est exposée présentement par des choses qui échappent au contrôle de fabrication, par exemple. C'est la première question que j'ai à formuler, M. le Président.

M. NADON: Pour répondre à la première partie de votre question, le prothésiste et orthésiste, de par ses qualifications, est plus en mesure de jouer un rôle important dans la fabrication des prothèses et des orthèses. Ses connaissances de base, premièrement, lui confèrent cette responsabilité. Si des gens consultent les prothésistes et orthésistes pour un appareil ou un membre artificiel, déjà, au départ, ils ont la certitude que celui qui les fabrique est qualifié pour le faire. Pour le patient, c'est plus rassurant. Combien d'exemples avons-nous de gens qui sont allés, à l'aveuglette, consulter de prétendus prothésistes et orthésistes, qui ont été mal servis et qui, avec le temps, nous sont revenus! C'est dans ce but que nous voulons avoir une protection.

Le prothésiste et orthésiste, en travaillant sur ordonnance médicale, contrôle un peu plus le produit qu'il finit. On peut être assuré que ce qui est fait par le prothésiste et orthésiste remplit le plus adéquatement possible les normes prescrites pour ce patient qui, auparavant, a été vu par un des spécialistes de la santé.

M. CASTONGUAY: Pouvez-vous nous donner des chiffres ou des indications quant au nombre de prothèses et orthèses qui sont fabriquées dans des établissements comme l'Institut de réhabilitation, à Montréal, et quant au nombre de prothèses et orthèses qui pourraient être fabriquées à l'extérieur de telles institutions, dans des conditions qui, disons, ne protégeraient pas le public?

M. NADON: Pour répondre à votre question, je vais céder le micro à M. Camille Corriveau, qui est directeur du laboratoire de prothèse et orthèse de l'Institut de réhabilitation de Montréal.

M. CORRIVEAU: Pour répondre à votre première question, M. le ministre, disons qu'à l'Institut de réhabilitation de Montréal, l'an dernier, nous avons fabriqué 800 appareils de toutes sortes.

Ceci inclut des bras, des jambes, des attelles de toutes sortes, corsets orthopédiques, corsets Milwaukee pour déviations de la colonne vertébrale. Il y a beaucoup d'appareils, chacun portant un nom particulier selon la fonction désirée.

Pour la deuxième partie, je me demande si...

M. CASTONGUAY: Je m'excuse, mais, en plus de l'Institut de réhabilitation, pourriez-vous nous donner une indication des autres endroits où il s'en fabrique pour que nous ayons une meilleure image générale?

M. CORRIVEAU: Je n'ai pas les chiffres qui correspondent à chacun de ces endroits. Je pense que je connais par coeur les endroits où on fabrique ici au Québec des appareils artificiels. En partant par la partie la plus au nord, il y a à Chicoutimi l'hôpital Saint-Vallier. A Québec, il y a la Commission des accidents du travail, il y a aussi la Clinique de réadaptation sur le boulevard Saint-Cyrille, il y a maintenant le Centre Cardinal-Léger; il y a aussi un ou deux endroits privés où on exerce dans ce domaine. Il y a le Centre hospitalier de Sherbrooke. A Montréal, vous avez le Centre de réhabilitation — je m'excuse de le nommer le premier, il m'est quand même assez familier — il y a l'hôpital du Sacré-Coeur avec lequel nous avons un programme conjoint et nous fabriquons des appareils pour les cas de fractures et les cas d'amputations postopératoires; l'hôpital Sainte-Justine; l'hôpital Queen Mary et trois ou quatre autre endroits privés.

Je ne sais pas si ça répond à une partie de votre question, M. le ministre. Je ne suis pas au courant malheureusement du nombre d'appareils fabriqués dans chacun de ces endroits. Je pense que l'institut est l'un des gros.

M. BOIVIN: Est-ce que vous avez des contrats avec toutes les institutions que vous venez de nommer?

M. CORRIVEAU: Non. C'est peut-être un petit peu par déformation professionnelle — je suis directeur de l'école — mais tous les gens qui travaillent dans ces endroits ou la plupart, sont des produits de l'Ecole de prothèse et orthèse du Québec. C'est peut-être pour ça que nous les connaissons tellement bien aujourd'hui. D'ailleurs, nous avons toujours des contacts. Je pense qu'à l'occasion c'est utile de travailler ensemble et non pas séparément pour améliorer l'appareillage orthopédique chez les patients. C'est un peu pour ça que je les connais si intimement.

M. CASTONGUAY: Est-ce que votre école a des liens avec le ministère de l'Education au plan des programmes?

M. CORRIVEAU: C'est une très bonne question, M. Castonguay. Vous savez que jusqu'à ce jour notre école dépendait du ministère des Affaires sociales. Cette année nous avons eu une lettre disant que c'était la dernière année que le ministère des Affaires sociales subventionnait l'école.

Ce qui est assez logique, je pense bien. Je sais une chose — vous êtes au courant sûrement aussi— que depuis deux ans, nous avons des contacts avec le CEGEP d'Ahuntsic ou de Laval, dans la partie nord de Montréal et il est question que l'école soit absorbée en tout ou en partie, par le ministère de l'Education.

Dernièrement, je recevais une lettre — pour répondre plus parfaitement à votre question — malheureusement le nom du signataire m'échappe, je crois que c'est M. Bibeau, du ministère de l'Education, qui nous disait qu'à toutes fins pratiques, il ne voyait pas les raisons qui nous empêchent maintenant d'avoir le permis du ministère de l'Education.

Alors c'est complètement dans l'air mais c'est tout près. D'ailleurs, je peux vous dire, si vous permettez que j'ajoute ce commentaire, que déjà l'école est reconnue par le ministère de l'Education d'une façon implicite par les échanges franco-québécois. Vous savez que nous avons des étudiants qui viennent de France chez nous, depuis cinq ans maintenant. Il en est venu déjà quinze jusqu'ici. Il y a un autre groupe de cinq qui vient l'an prochain. Tout cela par le ministère de l'Education.

M. CASTONGUAY: Merci.

M. BOIVIN: Alors vous avez une école à Montréal et vous donnez un certain service. Vous êtes affiliés à certains hôpitaux, certains centres, pour donner le service. Sur quels services peuvent compter les régions éloignées de la part des prothésistes et des orthésistes? Est-ce qu'il n'y a que votre école? Une question a été posée tout à l'heure mais elle n'était pas aussi précise que celle que je vais vous poser. Combien de prothésistes sont passés par votre école, qui donnent du service dans le reste de la province?

M. CORRIVEAU: Seulement dans la province ou à l'extérieur du pays aussi?

M. BOIVIN: Dans la province.

M. CORRIVEAU: Dans toute la province, je dirais jusqu'à maintenant — malheureusement je n'ai pas les chiffres exacts — 35 ou 40 sûrement, et même plus, j'approcherais même de 50, qui sont passés par l'école.

M. BOIVIN: Qui sont passés par l'école?

M. CORRIVEAU: Oui, qui sont maintenant dans la province. Voici, il faut s'entendre. Voyez-vous, l'école dispense deux genre de cours. Il y a le cours régulier qui s'applique aux finissants des anciennes écoles techniques où le

type s'inscrit à l'école et poursuit un cours de deux ou trois ans selon la spécialité. Ensuite, lorsqu'il a terminé, celui-ci se rend travailler, par exemple, à Chicoutimi, Québec, Sherbrooke, Montréal, etc., dans les hôpitaux de la province et même dans l'entreprise privée. Il y a un second cours qui est offert aussi où il faut prendre garde, c'est de là que j'ai des chiffres qui semblent contradictoires de 40 à 50. Des gens, par exemple, après une certaine phase dans l'entreprise gouvernementale ou privée manifestent le désir de revenir à l'école.

Cela se produit couramment. Ils reviennent pour une période d'un mois, deux mois ou trois mois afin d'apprendre les toutes nouvelles techniques mises à la disposition des prothésistes. Cela peut approcher, à ce moment, le chiffre de cinquante.

M. BOIVIN: II n'y a pas de lien entre toutes ces écoles particulières qui peuvent s'ouvrir?

M. CORRIVEAU: Vous avez seulement une école, l'école de Montréal. Les endroits où nos prothésistes se rendent ensuite travailler sont tout simplement des endroits où il y a une clinique qui prend soin des patients, des handicapés, des amputés. Ces gens ont terminé. Faisons un parallèle avec l'Université de Montréal; quelqu'un termine sa médecine, ensuite, il travaille assez souvent dans un hôpital. A ce moment, le lien n'est pas coupé, mais il n'est plus le répondant de l'école.

M. BOIVIN: Est-ce que vous avez un contrat particulier avec la Commission des accidents du travail? Est-ce que la Commission des accidents du travail a affaire uniquement à un atelier ou s'il y a différents ateliers qui servent les accidentés qui relèvent de la commission? Par exemple, il pourrait y en avoir à Montréal, à Chicoutimi, à Québec.

M. CORRIVEAU: Je pourrais peut-être répondre à votre question, mais, si vous le permettez, on peut la transférer à M. Houtart qui est en charge de la Commission des accidents du travail, à la section des prothèses. Il pourrait répondre plus adéquatement que moi à la question.

M. HOUTART: M. le Président, la politique de la commission veut que, dans son centre de réadaptation, elle reçoive tous les patients handicapés à la suite d'un accident de travail. Les patients qui sont en traitement durant leur séjour post-traumatique et qui suivent des traitements de réadaptation, ont, par la même occasion, les services de prothèse ou d'orthèse requis dans les circonstances. Comme la Commission des accidents du travail est responsable au point de vue de l'appareillage des accidentés pour le reste de leurs jours, cette institution a organisé des services, un service central qui est à Québec et un service régional qui est à Mont- réal, pour pouvoir répondre aux besoins des accidentés.

Tout notre système est organisé afin de pouvoir répondre à la demande des accidentés de façon très, très rapide, indépendamment de l'endroit où ils se trouvent dans la province.

M. BOIVIN: II y a sûrement de la recherche faite de votre côté, mais par qui est-elle payée? Est-ce que la Commission des accidents du travail accorde des subventions? Est-ce que le ministère des Affaires sociales subventionne chacun de ces ateliers ou s'il subventionne tout simplement l'Ecole de prothèse?

M. HOUTART: En ce qui concerne la Commission des accidents du travail, nos travaux de recherche sont principalement orientés sur les cas qui nous touchent en particulier, c'est-à-dire le travailleur, l'adulte, les hommes, qui sont la majorité de nos accidentés. Nos recherches se font en fonction de ces cas et en collaboration avec les autres commissions à travers le Canada.

En ce qui concerne les institutions au service du public, il y en a qui sont spécialisées soit chez les enfants, soit chez les adultes, ou encore dans des traumatismes particuliers. Nous avons toujours des moyens d'échange, des rencontres, pour mettre les résultats de nos recherches en commun.

M. BOIVIN: S'il y a un travail qui se fait — je vais expliciter — par un exemple, dans une certaine région pour un membre artificiel, une main artificielle, est-ce qu'il y a un échange entre les écoles pour voir si, réellement, on a trouvé quelque chose qui pourrait améliorer ce membre ou si c'est tout simplement à l'école que ces recherches sont considérées?

M. HOUTART: Je cède la parole à M. Corriveau, qui est le recherchiste par excellence.

M. CORRIVEAU: Je veux faire une distinction: Nous avons eu le privilège — je dois le dire — et le plaisir d'avoir pu installer il y a quinze ans déjà l'Ecole de prothèse et orthèse du Québec dans les locaux de l'Institut de réhabilitation de Montréal. Pourquoi? Nous avons compris que l'entrafnement d'un prothésiste devait se faire à l'intérieur des cadres d'un hôpital pour plusieurs raisons, à cause de la facilité d'avoir des patients, etc. Je fais ce parallèle pour bien situer la chose. L'école est installée dans les locaux de l'Institut de réhabilitation de Montréal, je pense que c'est une grande chose. Mais, à toutes fins pratiques, comme cadre, c'est complètement séparé, il y a l'Ecole de prothèse et orthèse du Québec et il y a aussi l'Institut de réhabilitation de Montréal.

Si vous me permettez de répondre un peu à la question que vous posiez tout à l'heure au point de vue des recherches, les subventions, les sommes mises à la disposition de la section des recherches à l'Institut de réhabilitation l'ont été

peu pour l'école. Je pourrais l'expliquer un peu plus tout à l'heure. La plupart de ces sommes ont été mises à la disposition de l'institut pour faire de la recherche, au département de recherche. C'est d'ailleurs ce qui nous a permis de fabriquer des prothèses mues à l'électricité. Je pense que vous avez peut-être entendu parler des prothèses à contrôle électrique; après les Russes, c'est nous qui les avons utilisées en premier. Je pense que c'est une grande première dans le monde, c'a été mis à la disposition des Québécois. Il y a aussi les prothèses à contrôle hydraulique qui ont été fabriquées chez nous; il y en a deux actuellement dans le monde. Tout ceci, grâce à des subventions réellement minimes; ce sont des subventions qui nous parvenaient à l'origine grâce aux ententes fédérales-provinciales.

M. BOIVIN: II y a une chose qui me préoccupe, c'est le service que vous pouvez donner en dehors de Montréal et de Québec. Il y a des ateliers qui se développent dans ces régions éloignées. Quel est le secours et l'aide que vous pouvez leur apporter?

M. CORRIVEAU: Vous parlez au point de vue du personnel, leur apporter du personnel, par exemple? Pour fabriquer ces appareils?

M. BOIVIN: Pour les aider, pour ne pas que le malade ait à se transporter. Est-ce qu'il est nécessaire qu'il se développe des ateliers dans le reste de la province, par exemple dans la région de la Gaspésie, Chicoutimi, Lac-Saint-Jean, peut-être sur la Côte-Nord?

M. CORRIVEAU: Cela dépend tout de même un peu de la population. Je sais qu'un règlement assez vague existe selon lequel un hôpital de 100 lits doit avoir un physiatre à sa disposition, etc. Lorsqu'il y a physiatre et aussi chirurgien orthopédiste, on doit penser, peut-être un peu aussi à cause de l'éloignement de certains endroits, qu'il devrait y avoir un ou deux prothésistes ou encore un prothésiste-orthésiste. C'est difficile pour nous aujourd'hui de dire au gouvernement: Ouvrez les hôpitaux ou permettez l'établissement de sections de prothèses dans d'autres milieux. Je sais pertinemment que certains patients voyagent sur de grandes distances pour venir chez nous à Montréal, probablement à Québec ou à Sherbrooke, et que cela pourrait être organisé différemment, je pense. C'est un point de vue assez personnel que je vous donne.

M. BOIVIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

M. GUAY: Comme vous avez inclus, avec votre mémoire, le prospectus 71-72, cela répond à beaucoup de questions que je m'étais posées avant de vous voir à la commission. Cependant, j'aimerais que vous me donniez grossièrement la différence qui existe entre le prothésiste et l'orthésiste. En pratique, probablement y a-t-il des différences plus marquées mais en principe, cela semble être pas mal la même chose.

M. NADON: La raison pour laquelle nous avons inséré le prospectus est justement pour qu'on puisse voir les définitions qui sont à la première page. Pour le commun des mortels, cela peut porter à confusion, être presque synonyme. Par les définitions que vous avez tous — je ne sais pas si je devrais les reprendre — il y a une grande différence entre la prothèse et l'orthèse. Je lis la définition: "La prothèse est l'art qui a pour objet la création d'appareils destinés à remplacer en tout ou en partie un organe ou un membre amputé ou déformé congénitalement et à lui restituer sa fonction et/ou son aspect original" tandis que: "L'orthèse est l'art qui a pour objet la création d'appareils destinés à restituer la fonction, à compenser pour la limitation ou même à accroître le rendement physiologique d'un organe ou d'un membre qui a perdu sa fonction ou ne s'est jamais pleinement développé ou est atteint d'anomalie congénitale." La prothèse est pour un membre amputé tandis que l'orthèse est pour, comme on vient de le décrire, aider un membre à accroître sa fonction primordiale.

M. GUAY: Dans mon esprit, cela reste encore confus. Il me semblerait que l'un ne va pas sans l'autre.

M. NADON: Un amputé a besoin d'une prothèse. La prothèse remplace un membre inexistant tandis que l'orthèse est un support qui aide un membre qui est existant. Pour donner un exemple, la paralysie.

M. GUAY: La grande différence...

M. NADON: Un membre paralysé a tous ses muscles mais ils sont atteints à divers degrés. C'est là que nous voyons l'utilité de l'orthèse.

M. GUAY: D'accord. Vous mentionnez que les cours sont d'une durée variable. Nous ne voyons pas cela, normalement, dans d'autres domaines. Si la durée des cours peut être variable, est-ce que vous avez la possibilité d'évaluer périodiquement les progrès de l'étudiant prothésiste ou orthésiste?

M. NADON: Si vous n'avez pas d'objection, je vais laisser au directeur de l'école, qui est le plus qualifié, le soin de répondre à cette question.

M. CORRIVEAU: Ce sont des cours avec certificat. Maintenant, le cours à certificat est de durée variable. Pourquoi? Si vous voulez,

nous allons faire une petite récapitulation. Vous avez le cours régulier qui se donne à l'école et qui n'est pas variable. Il est de deux ans. Vous vous enregistrez au mois de juillet et vous terminez le 30 juin de l'année suivante.

C'est la première année scolaire. Là, il y a trois semaines de vacances. Ensuite il y a encore onze mois et une semaine pour la seconde année. C'est pour quelqu'un qui veut devenir un prothésiste, pour remplacer un membre absent, c'est deux ans, la même chose, pour celui qui se destine à travailler seulement sur les cas de fractures; lorsque vous avez votre bras, mais avec une paralysie quelconque et qu'il faut poser un appareil, c'est l'orthèse. Alors, pour l'un ou l'autre, le cours est de deux ans.

Maintenant, celui qui s'en va dans un milieu où la population est assez restreinte, où le personnel n'est peut-être pas en nombre suffisant, a tout avantage à posséder les deux disciplines, c'est-à-dire prothèse et orthèse. Lui, il s'enregistre à un cours de trois ans. Alors, pour ces trois cours, prothèse et orthèse, c'est deux ans; mais orthèse-prothèse, c'est trois ans. Pourquoi trois ans? Dans le cas des deux disciplines, on enseigne les mêmes sciences de base, c'est-à-dire anatomie, physiologie, etc. C'est la même chose pour les deux. Alors, ces cours sont invariables. C'est le cours régulier. C'est le cours qui forme réellement, dans notre esprit, à l'école, un prothésiste ou un orthésiste ou les deux à la fois.

Le cours d'une durée variable auquel vous référez, c'est sûrement celui qui est offert, par exemple, aux spécialistes, à ceux qui sont déjà dans la profession, mais qui n'ont peut-être pas eu l'avantage de venir à l'école et auxquels on souhaite que leurs patrons leur permettent de venir à l'école pour un, deux ou trois mois, selon ce qu'ils viennent y chercher. Dans notre domaine, il faut savoir quantité de choses. Il faut connaître l'anatomie — je le répète encore — la biologie, la physiologie, un peu de psychologie, la physiothérapie, l'ergothérapie. Toutes ces sciences, il faut les connaître de façon à être capable de rendre un service adéquat au patient. Le type qui dit: J'aimerais savoir exactement quel est le lien entre la prothèse et la physiothérapie, on peut lui dire: Venez de novembre à janvier. C'est dans cette période que ce cours est donné. Alors, ce cours est d'une durée de deux mois. On n'a pas voulu, dans le prospectus, dire que le cours de physiothérapie est de deux mois, trois mois ou de six mois. C'est d'une durée variable, selon le sujet qu'il prend. Cela s'adresse à ceux qui sont dans la spécialité déjà.

M. GUAY: Maintenant, quel est le pourcentage de vos membres qui possèdent la compétence nécessaire pour exercer les deux professions? Est-ce plus de 50 p.c?

M. CORRIVEAU: Présentement, je dirais que oui. Je n'ai pas le chiffre exact, mais je pense que oui. Peut-être que le secrétaire aurait ce chiffre.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: Outre les quinze stagiaires français que vous avez formés pour une durée variable, est-ce que vous avez accepté déjà d'autres étudiants venant de l'étranger et qui sont repartis, par la suite, dans leur pays?

M. CORRIVEAU: Oui, on a même un palmarès, je pense, assez enviable. On en est un peu fier parce que, pour une fois, il y a quelque chose qui va bien au Québec et cela vient de chez nous. Nous avons eu des étudiants qui sont venus de Turquie, des Indes, du Vietnam, du Laos, du Venezuela, du Honduras, des Etats-Unis, sûrement une plus grande quantité du Canada, c'est-à-dire des différentes provinces, et aussi une bonne proportion du Québec. On en a eu de France. Je peux en oublier. Présentement, je peux vous faire une brève récapitulation. Il y a une jeune fille d'Israël, parce que ce domaine est ouvert aux femmes aussi. Il y en a une autre du Vietnam présentement. Il y en a une autre de France. En plus, j'ai quatre étudiants français; donc, cinq avec la jeune Française. On a deux Américains présentement. Je pense qu'en tout il y a peut-être une centaine d'étrangers, depuis quinze ans, qui sont venus chez nous. Je pense qu'on a eu des étudiants de 20 ou 22 pays du monde.

M. LAURIN: C'est dû à la bonne réputation conjointe de votre école et du Dr Gingras?

M. CORRIVEAU: Sûrement.

M. LAURIN: Maintenant, est-ce qu'on peut dire que vos relations avec les physiatres ou les spécialistes en médecine sont parfaites ou si elles laissent à désirer encore sur quelques points?

M. NADON: En faisant partie, comme je le disais tantôt, de l'équipe médicale, je pense que cela résume assez bien la sitaution. Les relations sont extrêmement bonnes avec les physiatres, comme avec toutes les autres disciplines de la médecine. Il n'y a pas de problème qui semble se poser.

M. LAURIN: Ce serait donc la seule discipline où il n'y a pas de zone grise!

M. NADON: Je n'ose pas trop m'aventurer sur ce terrain.

M. LAURIN: Aucune contestation réciproque!

M. NADON: Non.

M. LAURIN: Vous avez parlé tout à l'heure, dans votre témoignage, de la présence de faux prothésistes, qui peuvent poser de mauvais appareils, qui fonctionnent mal. Pourriez-vous établir, ne serait-ce qu'approximativement le nombre de faux orthésistes ou prothésistes, ou de prothésistes ou orthésistes insuffisamment informés?

M. NADON: Vu qu'il n'y a pas de contrôle gouvernemental à cet égard, il existe des gens, à tort ou à raison, qui se donnent la vocation d'installer des prothèses et des orthèses. Il y a des classes de gens qui me viennent à l'idée. Je pense à certaines pharmacies, où l'on fait un genre de spécialisation dans les appareils orthopédiques par des gens qu'on y a soi-même initiés. Ces gens n'ont aucune préparation, au point de vue de l'appareillage ou autrement. Comme je le disais, il arrive souvent, à cause d'un mauvais ajustement de ces appareils, que le patient revienne voir les gens qui sont, disons-le, professionnels dans leur métier.

M. LAURIN: Ce sont des pharmaco-prothésistes.

M. NADON: Je ne sais si on peut leur donner ce nom mais...

M. LAURIN: Y a-t-il déjà eu des poursuites judiciaires d'intentées par ces patients contre ces faux spécialistes?

M. NADON: Pas à ma connaissance. Voyez-vous, n'étant pas reconnus nous-mêmes, je ne vois pas quel avantage la personne aurait à intenter une poursuite. Je ne sais pas, même, si cela lui rapporterait quelque chose, parce que la profession elle-même n'est même pas reconnue.

M. LAURIN: Vous n'avez aucun moyen de contrôle ou de surveillance...

M. NADON: Nous n'avons aucun moyen de contrôle ni de surveillance.

M. LAURIN: ... sur ces praticiens inorthodoxes?

M. NADON: Aucun.

M. LAURIN: Est-ce que, par ailleurs, vous exercez un certain contrôle, une certaine surveillance sur les activités de vos membres, une fois qu'ils sont responsables dans quelque centre hospitalier que ce soit, de l'application des techniques que vous leur avez enseignées?

M. NADON: Oui, régulièrement, nous nous rencontrons, soit au niveau de l'association ou d'un congrès, pour discuter des techniques que nous avons pu implanter dans notre milieu, dans notre service. S'il y a quelque chose qui ressort de tout cela et qui peut être valable pour les autres gens de la profession, dans la provin- ce, nous ne nous gênons pas pour communiquer la bonne nouvelle.

D'ailleurs, à notre dernière assemblée annuelle, une résolution a été adoptée à cet égard, soit d'étendre nos connaissances acquises dans une certaine sphère de la prothèse ou de l'orthèse aux autres membres qui n'ont pas eu la chance d'y participer. Il y a une participation complète de tous les prothésistes et orthésistes de la province.

M. LAURIN: Incitez-vous vos membres à prendre régulièrement des cours de recyclage et est-ce que vous leur favorisez la tâche en instituant de tels cours?

M. NADON: Oui. Comme on l'a mentionné tantôt, l'école de prothèses et orthèses facilite notre tâche dans ce domaine. Les gens sont souvent appelés à participer à des séminaires ou à des congrès sur le domaine de la prothèse et de l'orthèse.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Wolfe.

M. LAVOIE (Wolfe): J'aimerais savoir qui est président de votre association.

M. NADON: Je suis le président.

M. LAVOIE (Wolfe): Vous-même. Quel est votre nom?

M. NADON: Jérôme Nadon.

M. LAVOIE (Wolfe): Sur certains documents, on voyait M. Andres. Que fait-il là-dedans?

M. NADON: Monsieur qui?

M. LAVOIE (Wolfe): M. Andres. Est-ce l'autre groupe?

UNE VOIX: Des podiatres.

M. LAVOIE (Wolfe): Des podiatres. Bon, d'accord.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. LAVOIE (Wolfe): Excusez-moi. Est-ce que vous recevez une assistance technique d'autres formations, de compagnies quelconques? Y en a-t-il qui fournissent une assistance technique?

M. NADON: A ma connaissance, non. Nous avons nos propres budgets, selon l'endroit où nous pratiquons. La plupart du temps, à part les entreprises privées, c'est dans le milieu hospitalier. Donc, chaque directeur de service a son budget à l'intérieur du budget de l'hôpital.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: Pourriez-vous me donner la différence qui existe entre l'Association des prothésistes et orthésistes du Québec Inc., et le Conseil de la certification des prothésistes et orthésistes du Québec? Dans quels champs d'action ces deux groupements oeuvrent-ils?

M. NADON: L'Association des prothésistes et orthésistes, comme je le disais, a ses lettres patentes depuis le 16 octobre 1967 et groupe les prothésistes et orthésistes de la province de Québec. Quant au Conseil de la certification des prothésistes...

M. PAUL: ... et orthésistes du Québec.

M. NADON: ... je ne suis pas familier avec cet autre groupement; je ne pourrais pas élaborer sur l'autre groupe.

M. PAUL: Est-il à votre connaissance que des membres de votre association fassent partie du conseil de la certification?

M. NADON: A ma connaissance, non. Il y en a peut-être, remarquez bien.

M. PAUL: Savez-vous si les membres du Conseil de la certification des prothésistes et orthésistes du Québec ont passé par l'école de l'association?

M. NADON: Non, je ne suis pas au courant. M. PAUL: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.

M. GUAY: J'aurais une autre question; cela me fascine un peu de la poser. Les deux définitions comportent les mêmes mots "conçoit, fabrique et ajuste". Cela semble assez important. Serait-il possible pour vous de fabriquer une prothèse ou une orthèse sans l'ajuster vous-mêmes à un patient?

M. NADON: Non, je ne vois pas la possibilité de fabriquer un tel appareil sans l'ajuster. C'est impensable.

M. GUAY: Vous mentionnez en bas: "Ces définitions excluent les prothèses et orthèses dentaires". La question a été posée à d'autres groupes. Dans le cas de prothèses dentaires, disons qu'il n'y aucune relation, sauf qu'eux nous ont dit également que c'était impossible de fabriquer une prothèse sans voir le patient et sans en faire l'ajustement eux-même. C'est pour ça que je vous posais la question.

M. NADON: Oui, parce que tout notre appareillage se fait à base de mesures sur le patient. C'est là qu'il y a nécessité d'avoir une relation intime en prothésistes et orthésistes et patients. C'est la base de tout appareillage, des bonnes mesures. Il faut absolument que le patient se soumette — si on peut employer l'expression — à des prises de mesures et de plâtres pour fabriquer un appareillage quelconque.

M. GUAY: En fait, l'orthésiste comme le prothésiste exécute l'ordonnance médicale.

M. NADON: Oui.

M. GUAY: Avec l'autonomie, cependant, de fabriquer et d'ajuster la prothèse et l'orthèse.

M. NADON: Nécessairement, du moment que le prothésiste ou l'orthésiste a son ordonnance médicale, il a le champ libre pour fabriquer et ajuster l'appareillage qui lui est prescrit. Cependant, parce qu'après tout on traite des humains, en cours de route, il peut y avoir des problèmes, des anomalies qui se présentent. Il y a alors une référence au médecin traitant. Mais le prothésiste ou orthé-siste fabrique lui-même, sans l'aide du médecin ou de quelque autre personne, son appareillage et l'ajuste.

M. GUAY: Est-ce que le médecin a la chance d'examiner le patient porteur de prothèse ou d'orthèse après l'installation?

M. NADON: Oui, c'est la pratique, d'ailleurs, qu'un spécialiste qui prescrit un appareil vérifie le produit qu'il a commandé, l'appareillage qu'il a demandé.

M. CUAY: Est-ce que les membres de votre association ont quand même la possibilité de choisir les produits qui entrent dans la fabrication?

M. NADON: Oui, c'est là que les connaissances du prothésiste-orthésiste entrent en ligne de compte. Prenez le cas d'un amputé, par exemple. Le médecin nous le dirige, c'est nous qui allons décider, d'après le diagnostic qui a été posé, telle ou telle sorte d'appareillage, tout dépendant de la taille du patient et sa position, de la raison pour laquelle il a été amputé, des problèmes qui l'ont amené à sa maladie.

Cela rentre dans le cours du prothésiste et de l'orthésiste.

M. GUAY: Une dernière question. Est-ce que les spécialistes parmi vos membres — je dis spécialistes parce que ça semble très rare — fabriquent des yeux artificiels?

M. NADON: Au Québec, je ne connais pas d'endroit où on fabrique des yeux artificiels; il y en a qui peuvent me reprendre.

M. GUAY: II semble actuellement y avoir un spécialiste, à New York. Les gens qui ont besoin de ses services doivent se rendre à New York. Alors, je me demandais s'il n'y aurait pas moyen de s'organiser à Québec, à Montréal ou à Toronto.

M. NADON: Cela serait peut-être intéressant, mais si on pouvait s'organiser en tant que prothésiste ou orthésiste, pour les membres supérieurs et inférieurs, ce serait déjà un bon départ. Il y a déjà un certain besoin à satisfaire dans ce domaine-là. Après ça, je pense qu'on pourrait peut-être penser aux prothèses pour les yeux. C'est assez difficile, parce que ce n'est pas tout à fait le même domaine que la prothèse ou orthèse telle qu'on la conçoit présentement. Cela pourrait peut-être venir s'il y avait des spécialistes, mais au Québec il n'y a personne qui fabrique une telle prothèse.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce qu'il y a des compagnies nationales ou internationales qui fabriquent des prothèses ou des parties de prothèses selon vos données?

M. NADON: Disons qu'il y a des parties de base qui sont faites par des compagnies qui sont spécialistes dans le domaine, il y a des matériaux de base. C'est là que le prothésiste ou l'orthésiste entre en ligne de compte, car il faut un choix judicieux du matériel à employer.

Comme dans n'importe quelle autre spécialité plusieurs compagnies vantent leurs produits mais c'est à nous de faire un choix judicieux pour le bien du patient.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce qu'il y a des compagnies qui font la prothèse complète selon votre ordonnance, selon des données que vous avez trouvées?

M. NADON: Nous, nous n'en faisons pas. Sur ordonnance, je douterais fort qu'elles fassent le moule au complet. C'est strictement réservé parce qu'une bonne prise de plâtre ou des bonnes mesures, comme je le disais tantôt, c'est la base d'un bon appareillage. Je ne vois pas pourquoi le prothésiste-orthésiste donnerait une commande à une compagnie extérieure pour fabriquer un membre quand lui-même possède les qualifications pour le faire.

M. SAINT-GERMAIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL : Je m'interroge quant aux réponses que pourrait me donner éventuellement le directeur de l'école au sujet des questions que j'ai posées tout à l'heure à M. le président. Je crois que le directeur de l'école est M. Corri-veau. Alors pourriez-vous me dire s'il y a des membres du Conseil de la certification des prothésistes et orthésistes du Québec qui ont passé par votre école?

M. CORRIVEAU: Je ne suis pas en mesure de vous répondre, pour une foule de raisons. C'est très récent cette chose; elle est apparue comme ça tout à coup.

Je ne sais pas qui sont les cosignataires de cette demande, de cette nouvelle proposition; ne connaissant pas les membres, si vous me les nommiez de A à Z, je pourrais dire: Oui, oui.

M. PAUL: Le président semble être M. Gérald Boucher et nous avons de la correspondance qui a été remise aux membres de la commission et qui remonte au mois de mars 1970.

M. CORRIVEAU: Je crois que M. Gérald Boucher est un avocat d'Ottawa.

M. PAUL: On parle aussi, dans la correspondance, d'un dénommé Gérard Parent.

M. CORRIVEAU: Oui, je le connais. Il est venu à l'école durant une courte période mais je ne peux vous dire si c'est deux semaines ou un mois.

M. PAUL: II n'a pas terminé le cours chez vous?

M. CORRIVEAU: Non, c'était une courte période. Cela entrerait dans les cas de cours de durée variable, comme un député le mentionnait tout à l'heure.

M. PAUL: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'aurais quelques questions à poser. Vous avez parlé tantôt de la juridiction du ministère des Affaires sociales, et que vous allez passer sous la juridiction du ministère de l'Education. Est-ce que ce changement va provoquer des modifications importantes quant aux bourses, quant à l'endroit où sont dispensés les cours ou si cela va continuer comme...

M. CORRIVEAU: II est sûrement probable que certains changements vont intervenir. De quelle nature seront-ils? Malheureusement, je ne suis pas encore dans le secret des dieux à ce niveau pour savoir exactement quels seront les changements requis par le ministère de l'Education. Moi, personnellement, je crois fortement qu'il y aurait grand bénéfice pour la profession à ce que le ministère de l'Education s'en occupe activement. Mais du côté pratique, qu'on permette aux étudiants de toujours se rendre aux

endroits où on a assez bien réussi à ce jour pour leur faire faire une espèce d'internat. Ils pourront travailler sur des patients et non pas exclusivement en institution comme maintenant.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que cette modification pourrait être semblable à celle qui s'est produite pour les infirmières, à savoir qu'à partir du milieu hospitalier, on les a amenées au CEGEP pour une formation académique? Ensuite, au terme des études, on les a retournées au milieu hospitalier pour faire un stage pratique.

M. CORRIVEAU: Je verrais la question ou la réponse de cette façon — encore une fois, je ne voudrais pas exprimer le point de vue d'un groupe de personnes, c'est mon opinion à moi — je pense qu'on ne peut pas être assez bien informé du niveau de compétence requis pour travailler sur un malade si on n'a pas l'occasion de travailler sur des malades, de les rencontrer au jour le jour, dans l'exercice de notre fonction. Les médecins qui vont en résidence apprennent quand même à l'Université de Montréal, McGill, etc., les bases de leur future profession parce qu'ils rencontrent des malades. C'est une toute autre chose. On le dit souvent que la théorie et la pratique sont deux aspects différents. Les deux se complètent, sont nécessaires.

Je pense que la solution serait que les étudiants puissent continuer à travailler avec les patients.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je crois que vous avez raison. Surtout dans votre profession, l'aspect pratique paraît très important, et je pense que vous avez raison de vouloir maintenu-un juste équilibre.

J'aurais une autre question. De façon générale, l'accès aux prothèses et aux orthèses est facile, financièrement, ou y a-t-il des complications?

M. CORRIVEAU: C'est relativement facile, tout dépend du point où on se place. Disons qu'il est facile si on a les prérequis pour suivre, par exemple, le programme de l'école. Au point de vue de la rémunération...

M. CLOUTIER (Montmagny): Non, pour les patients. Est-ce que l'accès aux prothèses et aux orthèses est facile, au point de vue financier?

M. CORRIVEAU: A ce moment-ci, je vais changer mon chapeau...

M. CLOUTIER (Montmagny): Sinon, quels sont les problèmes.

M. CORRIVEAU: Je vais changer mon chapeau et retourner à l'Institut de réhabilitation pour cette question, l'école n'est pas concernée.

Il est assez difficile, l'accès aux prothèses, de cette façon. Je sais aussi que le ministère des Affaires sociales paie pour tous les soins hospitaliers, sauf les prothèses. Assez souvent, le patient se présente pour obtenir une prothèse, sachant que l'hospitalisation ou les soins hospitaliers par les médecins sont gratuits.

Entendons-nous, il ne paie pas et lorsqu'il arrive ensuite au service de prothèses, il se voit dans l'obligation de payer pour sa prothèse. A ce moment-là, il dit: Je n'ai pas les moyens de payer, je croyais que c'était payé par l'assurance-maladie. Ce sont des choses qu'il faut dire.

Dans le cas où un patient peut, ou a un revenu suffisant, tout cela est considéré par le gouvernement. Nous faisons une enquête qui établit le bilan de l'individu en question, s'il a une automobile, une maison, s'il a des dettes, etc. Ces renseignements sont envoyés à Québec et c'est de là que nous savons si Québec peut payer une certaine partie.

M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministère des Affaires sociales intervient surtout pour les assistés sociaux, je pense qu'il n'y a pas de problème.

M. CORRIVEAU: Pour les assistés sociaux, c'est différent.

M. CLOUTIER (Montmagny): II y a accessibilité. Pour ceux qui ne bénéficient pas de la Loi de l'aide sociale, il semble qu'il y a un problème. Vous avez aussi l'apport des clubs sociaux, je pense, qui aide à couvrir...

M. CORRIVEAU: Oui, mais de moins en moins.

M. CLOUTIER (Montmagny): ... de moins en moins?

M. CORRIVEAU: Parce qu'ils n'ont plus de fonds et ils disent que leurs fonds nécessairement sont utilisés pour d'autres choses.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous avez connaissance — c'est peut-être une question un peu délicate — qu'il y a des abus de la part de ceux qui fabriquent des prothèses, ceux sur qui vous n'avez pas de contrôle surtout, dans d'autres milieux ou d'autres disciplines? Est-ce qu'il y a des abus qui devraient être corrigés et réprimés?

M. CORRIVEAU: Je pourrais vous répondre de cette façon-ci, M. le député: c'est exactement la raison qui a poussé un groupe d'individus à se présenter devant vous aujourd'hui afin que ceci soit réglementé pour prévenir ces abus. On n'est pas sans savoir qu'il y a différents prix qui sont exigés à différents endroits pour le même service. Je pense qu'il y a justement quelque chose à corriger en ce sens.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Nadon et M. Corriveau, ainsi que ceux qui les accompagnent, de leur mémoire. Soyez assurés que nous allons prendre vos remarques en considération.

J'inviterais à présent le Conseil de la certification des prothésistes et des orthésistes du Québec, représenté par M. Gérard Parent, le président, à venir présenter son mémoire.

Conseil de la certification des prothésistes et orthésistes du Québec

M. PARENT (Gérard): M. le ministre, M. le Président, MM. les membres de la commission, en passant je voudrais féliciter les membres de l'Association provinciale des prothésistes et orthésistes pour leur mémoire qui m'a un peu surpris à quelques occasions.

Vous avez en main notre mémoire de convention. Il serait donc inutile aujourd'hui de faire de longs plaidoyers sur le sujet qui nous intéresse. N'étant pas nombreux dans cette profession, nous voudrions avoir un conseil de certification bien à nous. Alors, pour aller rapidement, une fois qu'on a défini les droits acquis et les objectifs, nous croyons qu'un certain nombre de questions se posent sur les modes d'évaluation.

Encore là, il faut cerner les questions et ne pas préjuger d'une forme d'évaluation quelconque. Je pense que si l'on veut évaluer si un sujet a développé son esprit scientifique, son jugement, le compte tenu de ses connaissances, s'il a acquis telle forme d'apprentissage, on peut le faire selon des modes d'évaluation qui sont bien différentes les unes des autres et qu'il y aurait intérêt à préciser.

Cela dit, dans ces cadres-là, une fois qu'on a établi les droits acquis et les objectifs et les modes d'évaluation qui correspondent à une réalité, celles que l'on peut palper à ce moment-ci en se projetant le plus dans l'avenir, il faut autant apprendre à s'évaluer qu'apprendre à se faire évaluer par les autres. Nous pensons que c'est ici, lorsqu'on parle de certification, que notre conseil joue son rôle en tant que mandataire du gouvernement et au nom d'une législation en collaboration avec l'Association provinciale des prothésistes et orthésistes.

Elle viendrait attester que, dans un programme donné, les objectifs ont été atteints et que les modes d'évaluation étaient bons. A ce moment-là, l'acte administratif qu'elle pose est de décerner un certificat qui atteste que... Est-ce que cela veut dire que nous attachons au certificat une importance illimitée quant à la carrière de quelqu'un? Non. Un certificat, c'est simplement un jugement à une étape de l'année. Nous pourrions dire que c'est une mesure des connaissances, des expériences, des aptitudes de quelqu'un qui fait qu'on le juge suffisamment compétent pour assumer telle responsabilité.

La compétence est tout autre chose. Elle se développe au fur et à mesure qu'on évolue dans la vie. Il y a des gens qui, avec un diplôme, peuvent, après 20 ou 30 ans, être devenus incompétents, alors que d'autres peuvent être devenus plus compétents. C'est tout le problème aujourd'hui. Il est certain que c'est à différentes corporations et à la société elle-même de se donner les moyens pour permettre à quelqu'un d'être compétent ou d'avoir le minimum de compétence qu'il lui faut pour exercer sa profession.

Notre conseil est présentement appuyé dans ses demandes par 40 signataires prothésistes-orthésistes dont la plupart ont passé par l'Ecole de prothèse de Montréal, qui apparemment l'ignore.

Nous vous remercions de votre bonne attention et nous vous prions de bien vouloir accepter nos sincères remerciements.

J'ai ici les signatures des prothésistes-orthé-sistes qui sont allés à cette école; il y en a même qui sont dans la salle ici. Aujourd'hui, ils viennent nous dire qu'ils ne sont pas au courant de cela. A plusieurs occasions, nous avons eu des assemblées. Nous en avons eu une à Montréal. J'étais président provisoire parce qu'il fallait quelqu'un pour représenter les prothé-sistes-orthésistes insatisfaits. A l'assemblée de Montréal, les prothésistes-orthésistes de l'association canadienne étaient présents. Il y avait l'Association provinciale et, unanimement, ils m'ont donné le mandat de continuer à faire les démarches. C'est pour cela que nous travaillons depuis 1970 à cette cause.

M. PAUL: Vous dites qu'il y a des membres qui sont ici cet après-midi et qui font partie de votre association.

M. PARENT: Oui. Et ils ont signé: Conseil de la certification des prothésistes-orthésistes. J'ai les signatures ici. Ils nous ont demandé de poursuivre notre action. Ce qui se produit, c'est qu'à un certain moment un homme qui est président — je ne veux pas commencer une guerre — d'un collège, qui est président d'une association, qui est directeur de l'école, en vient à brimer tous les autres autour de lui. Les autres ont peur de se lever. Cela en prenait un. J'ai accepté la tâche. C'est ce qui s'est produit.

Cela fait quatorze ans que je travaille à l'atelier de prothèse de l'hôpital de Chicoutimi. Je suis reconnu par mes patrons et ils n'ont jamais eu un reproche à me faire. J'ai passé environ deux mois et demi à l'Ecole de prothèse. Je félicite, d'ailleurs, cette école parce qu'elle joue très bien son rôle et que nous en avons besoin. De là à reconnaître seulement les types qui sont allés à cette école!

En effet, ce n'est pas l'Ecole de prothèse qui a mis les prothèses au monde. Cela fait à peu près quinze ans que cette école existe et les prothèses existent depuis 1914. Je veux bien continuer à travailler. C'est pour cela que nous nous sommes réunis et que nous avons demandé d'avoir un conseil de certification qui respecterait les droits acquis et, par la suite, pourrait

former avec ces mêmes membres un conseil de certification permanent, en collaboration avec le gouvernement, et reconnaître un vrai prothé-siste-orthésiste. C'est tout.

M. LE PRESIDENT: La parole est au ministre.

M. CASTONGUAY: Je voudrais vous remercier pour cette présentation que vous nous avez faite. J'aurais une ou deux questions à vous poser. Quels sont les torts ou préjudices que vous subissez ou que vous êtes susceptibles de subir présentement du fait que vous n'êtes pas membres de l'association?

M. PARENT (Gérard): Lorsque l'école a été créée à Montréal, je travaillais déjà. Je suis un blessé de guerre. Ce sont les vétérans qui m'ont orienté dans les prothèses-orthèses. Je suis arrivé à l'hôpital de Chicoutimi. J'ai commencé à travailler. A ce moment-là, c'était M. Dion qui est ici qui venait prendre les mesures pour faire les prothèses et je collaborais avec lui. Je travaillais à l'atelier et nous commencions à mettre en marche cet atelier. A ce moment-là, ils ont envoyé M. Tremblay, qui travaillait avec moi, suivre un cours d'orthèse. L'école a été créée. J'étais d'accord. Je suis allé à l'école. J'ai rencontré les gens. Je suis devenu assez intime avec eux. Nous avons commencé à parler de former une association. J'en suis devenu membre. J'ai dépensé de l'argent. Je n'ai jamais manqué une réunion. Cela s'est formé. Tout allait bien, mais, lorsqu'elle a eu sa charte, je me suis aperçu que je n'étais plus un membre. J'étais un associé. Il y en a plusieurs comme moi. A ce moment-là, nous avons dit: II y a quelque chose qui ne fonctionne pas.

M. CASTONGUAY: Dans les hôpitaux, où il se fabrique des prothèses, est-ce que les orthé-sistes et les prothésistes qui ne sont pas membres de l'association peuvent s'engager, recevoir les mêmes salaires ou s'il y a des différences?

M. PARENT (Gérard): C'est arrivé dans mon cas et à d'autres aussi. A un certain moment, à l'Hôtel-Dieu, j'étais reconnu comme prothé-siste-orthésiste. M. Tremblay a sorti la certification canadienne.

Ils m'ont fait venir. Ils m'ont dit: Tu étais pour avoir une augmentation de salaire mais puisque tu n'as pas la certification canadienne, on ne peut pas te la donner. Cela a marché pendant un an ou deux. A un moment donné, j'ai fait écrire le directeur de l'Hôtel-Dieu à Ottawa. Là, ils nous ont dit que le conseil de certification n'était pas mandaté, puisqu'il n'avait pas de charte à ce moment-là, pour faire passer des examens et de donner les certificats. Là, à l'Hôtel-Dieu, ils ont reconnu ça et ils m'ont dit: On t'a causé un préjudice, on va t'accorder un an de rétroactivité et on va réajuster ton salaire. Ils ont réajusté mon salaire. Apparemment, le conseil de certification, selon la troisième partie de la Loi sur les compagnies, a eu une charte d'Ottawa. Mais nous, nous voulons avoir ça de Québec.

M. PAUL: Est-ce qu'on vous la refuse? M. PARENT (Gérard): A Québec? M. PAUL: Oui.

M. PARENT (Gérard): Là, on fait la demande et on va attendre.

M. CASTONGUAY: Le transfert, dont on a parlé, au ministère de l'Education, comme responsabilité et avec les mécanismes que l'on connaît pour la certification ou l'accréditation des écoles de formation, on en a eu de nombreux autres exemples, comme celui des gardes-malades auxiliaires qui ne sont pas formées en corporation et qui suivent des cours dans des écoles secondaires. Lorsqu'elles arrivent dans un hôpital, étant donné qu'elles viennent d'une institution reliée au ministère de l'Education, leurs certificats attestent que leur niveau de formation est compris dans les conventions collectives. C'est le niveau de rémunération et c'est fixé par négociation.

Alors, de la même façon, avec le changement qui s'amorce, il me paraît logique de relier les institutions de formation au ministère de l'Education et aux institutions dans le secteur de l'Education, ce qui n'enlève pas la pertinence de la question du député de Montmagny quant à la nécessité d'une formation pratique. Mais est-ce que ce n'est pas susceptible de régler, dans une très large mesure, sinon complètement, le problème que vous soulevez étant donné que le diplôme, qui sera donné par cette école, sera reconnu par le ministère de l'Education qui fera foi de la compétence d'une personne? Tout autre organisme canadien, en fait, à mon sens, n'a rien à faire là-dedans. Même s'il leur a donné une charte, la certification ou l'émission de permis, sur le plan de l'exercice d'une profession, se fait au Québec par les collèges ou les corporations professionnelles. Et pour les groupements, qui ne sont pas formés en corporations professionnelles, ce sont les diplômes des établissements d'éducation.

M. PARENT (Gérard): Tout ce que nous voulons — ce qui se fera, on ne le sait pas — c'est que ceux qui sont déjà dedans, qui ont X années d'expérience, soient reconnus au moins.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions? Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Parmi les 40 membres que vous avez dans votre association, est-ce que ce sont des gens qui sont passés par l'école?

M. PARENT (Gérard): Oui, il y en a plusieurs.

M. BOIVIN: Beaucoup. Dans quelle proportion?

M. PARENT (Gérard): Au moins une dizaine.

M. BOIVIN: Qui sont passés par votre école et qui sont dans votre association. Ils ne sont pas dans l'autre association.

M. PARENT (Gérard): Le conseil de certification est en faveur d'avoir la certification au Québec. Ils ont signé les formules.

M. PAUL: Ils sont dans les deux associations?

M. PARENT (Gérard): Ils sont dans les deux et dans les trois associations. Il y en a trois, on ne sait pas où se brancher.

M. BOIVIN: Est-ce que vous avez demandé une charte, actuellement, au gouvernement provincial?

M. PARENT (Gérard): Notre charte, avait été demandée avant 1970. Mais les élections sont arrivées et on s'est fait couper ça juste à la bonne place!

M. BOIVIN: Cela n'a pas eu de suite depuis 1970!

M. PARENT (Gérard): Cela a eu des suites mais ce sont ces suites qui nous ont amenés à la commission.

M. BOIVIN: Quand avez-vous demandé la charte, officiellement?

M. PARENT (Gérard): On a commencé en 1969. La première demande a été faite en 1969 ou 1968.

M. BOIVIN: En 1970, est-ce que quelque chose a bougé?

M. PARENT (Gérard): Cela a bougé! Vous avez dû avoir pas mal de rapports d'après tous les papiers qu'on vous a envoyés.

Il y a le ministère des Affaires sociales, je pense, qui est au courant. Nous avons Commencé avec lui. C'est lui qui nous a transférés au conseil, ici. Plusieurs médecins étaient à notre comité. Nous avions deux physiatres, deux orthopédistes.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, pourriez-vous nous dire quelle est la scolarité que possèdent la plupart des membres de votre conseil?

M. PARENT (Gérard): La douzième année.

M. PAUL: Une douzième année. Sans études spécialisées?

M. PARENT (Gérard): II y en a plusieurs qui ont soit de la mécanique, soit du dessin industriel, des choses comme ça.

M. PAUL: Si je comprends bien, vous ne pouvez pas être membres de l'association parce que vous n'auriez pas suivi des cours à l'école.

M. PARENT (Gérard): Nous avons été refusés, oui.

M. PAUL: Vous avez été refusés.

M. PARENT (Gérard): J'ai fait des stages. J'ai trois certificats.

M. PAUL: Est-ce qu'on vous a donné les raisons pour lesquelles vous et d'autres de vos confrères auraient été refusés par l'association?

M. PARENT (Gérard): Ils nous ont dit que nous ne remplissions pas les normes.

M. PAUL: Que vous ne remplissiez pas les normes actuelles. Et votre demande est à l'effet qu'on reconnaisse votre expérience pratique pour être intégrés dans l'association.

M. PARENT (Gérard): C'est cela.

M. PAUL: Ou être reconnus comme des prothésistes et orthésistes professionnels. Est-ce bien cela?

M. PARENT (Gérard): Oui. Mais n'oubliez pas que c'est tout le champ de la troisième partie de la loi. Ils peuvent refuser ce qu'ils veulent. Si cela avait été un bill ou quelque chose de pareil, il aurait fallu qu'ils respectent les droits acquis. Un type qui a 14, 15 et 20 ans d'expérience dans un hôpital, qui est reconnu par l'hôpital, s'il n'était pas capable, je m'imagine qu'il ne serait plus là.

M. PAUL: II semble que certains physiatres appuient vos démarches et vous reconnaissent une expérience qui vous qualifierait pour obtenir le titre d'orthopédiste. Y a-t-il plusieurs physiatres qui vous appuient? Il semblerait, dans la documentation, que vous nous avez donnée, que seuls des physiatres ou des spécialistes de la région de Chicoutimi vous appuient. Y en a-t-il d'autres qui ont reçu une lettre de recommandation?

M. PARENT (Gérard): Nous étions éloignés et il ne fallait pas trop occasionner de dépenses non plus. Nous avons formé un conseil provisoire. En parlant avec les autres, ils ont demandé: Essaie donc de former cela dans ton bout. Tu as deux physiatres sur place, tu as des orthopédistes. C'est ce qui s'est produit. Deux physiatres

qui étaient au conseil, le Dr Aimé Guimont et le Dr Jacques Saint-Cyr, et deux orthopédistes, le Dr Laperrière et le Dr Henri Carrier, nous appuyaient dans nos démarches. Cela fait treize ans que je travaille en collaboration avec eux. Ils sont satisfaits. C'est pour cela qu'ils nous appuyaient.

M. PAUL: Bien, merci.

M. LAVOIE (Wolfe): Sur quoi vous basez-vous pour décerner un certificat de compétence à un prothésiste?

M. PARENT (Gérard): Nous ne nous basons sur rien puisque nous ne donnons pas de certificat.

M. LAVOIE (Wolfe): Ceux qui en ont, sur quoi se basent-ils? Je m'imagine que faire une prothèse c'est plutôt une création. A chaque fois, c'est peut-être différent.

M. PARENT (Gérard): II y a le Conseil de certification canadien qui se base sur des examens. On nous fait passer des examens. Moi-même, j'ai été à Saskatoon, l'an passé — cela m'a coûté $800 — pour me faire dire que j'avais manqué un peu mon coup, qu'il faudrait que j'aille en Ontario pour me reprendre.

M. LAVOIE (Wolfe): N'est-ce pas que le type qui fait une prothèse est obligé d'être habile en mécanique, habile dans le bois ou dans le plastique, ou habile dans l'aluminium ou dans différents métaux?

M. PARENT (Gérard): Je pense que ce qui fait un prothésiste, c'est bon l'école mais c'est la dextérité du type lui-même.

M. LAVOIE (Wolfe): C'est ce que je m'imaginais. C'est pour cela que je vous posais la question. C'est la créativité de la personne elle-même.

M. PAUL: Est-il à votre connaissance que les élèves qui fréquentent l'école doivent subir des cours d'entraînement ou de cléricature dans des cliniques reconnues avant d'obtenir leur diplôme?

M. PARENT (Gérard): Je n'ai jamais entendu parler de cela.

M. PAUL: Vous n'en avez jamais entendu parler. Alors le diplômé de l'école n'a qu'une connaissance théorique. C'est par la pratique...

M. PARENT (Gérard): Par la pratique.

M. PAUL: ... — vous le faites vous autres — qu'il devient un excellent orthésiste ou prothésiste.

M. PARENT (Gérard): C'est ça.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: Si le projet de loi conservait vos droits acquis et décidait d'une façon ou d'une autre de vous accorder le titre de membre à part entière de l'Association des prothésistes et orthésistes du Québec, verriez-vous la nécessité de conserver votre conseil de certification?

M. LE PRESIDENT: Un instant. Une intervention du ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: Pour qu'il n'y ait pas de confusion dans la discussion, il n'y a pas de projet de loi présentement pour ce groupe.

M. LAURIN: Mais je pose la question en enlevant le projet de loi. Si le gouvernement d'une façon ou d'une autre...

M. CASTONGUAY: C'est pour qu'il n'y ait pas de malentendu, ce n'est pas...

M. LAURIN: ... maintenait vos droits acquis, favorisait et obtenait votre incorporation dans cette association des prothésistes, verriez-vous la nécessité de conserver ce conseil de certification?

M. PARENT (Gérard): Non, je ne le verrais pas. Il n'y aurait pas de nécessité.

M. LAURIN: C'est simplement un moyen que vous prenez de garder vos droits acquis qui sont une chose...

M. PARENT (Gérard): Un moyen de protection. Je connais des types qui étaient prothésistes ou orthésistes depuis 25 ans et qui ont été refusés.

M. LAURIN: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres commentaires de la part des membres de la commission?

Nous vous remercions beaucoup messieurs pour la présentation de votre mémoire. J'invite, à la suite de ces derniers, les praticiens en podiatrie de la province de Québec.

Je vous inviterais à vous identifier, s'il vous plaît, au nom de votre organisme.

Les praticiens en podiatrie

M. PAQUET: Mon nom est Jean-Marie Paquet, avocat, et avec Me Smiley, j'agis comme conseiller. Nous représentons les praticiens en podiatrie de la province de Québec. J'aimerais vous présenter les membres du conseil de cette association. Je les inviterais à se lever au fur et à mesure. M. Robert Villeneuve, président des praticiens en podiatrie, qui est attaché à l'hôpital Sainte-Justine; M. Roger Bouchard, vice-président; Mme Wendelin Gardner, vice-présidente,

qui travaille à l'hôpital Royal Victoria à Montréal; M. Michel Tétrault, secrétaire et Mme Aline Aubut, trésorière. Les directeurs sont les suivants: M. Robert Colina, M. Jean-Guy Lambert, M. Maurice Bénard qui travaille en collaboration avec l'hôpital Sainte-Jeanne-d'Arc de Montréal et Mme Suzanne Hébert. Tous sont directeurs des praticiens en podiatrie de la province de Québec.

J'inviterais Me Smiley à vous faire des remarques d'ordre général sur le mémoire que nous avons présenté. Après quoi, avec la permission de la commission, je reviendrai sur des points particuliers. M. Smiley.

M. LE PRESIDENT: Une minute! Avant de commencer, j'aimerais vous rappeler que vous avez environ une vingtaine de minutes pour exposer vos points de vue sur votre mémoire.

M. PAQUET: C'est bien compris, M. le Président.

M. SMILEY: M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, je vous suis très reconnaissant de nous donner l'occasion de faire des représentations verbales. Je comprends que les praticiens ont été invités pour la séance du 28 août dernier, mais malheureusement l'avis fut envoyé au président des praticiens au lieu d'aller à leur avocat et, par conséquent, M. Andres étant en vacances, nous n'avons pas pu faire nos représentations alors.

C'est pour ça que je remercie la commission de nous fournir une autre occasion de le faire. Nous avons l'avantage d'avoir avec nous le Dr Leboeuf qui représente le Collège des médecins et chirurgiens. Nous avons l'appui dans notre attitude du collège. M. Leboeuf sera invité, je l'espère, à faire quelques remarques. Sans délai, je dois corriger quelques impressions qui furent laissées lors de notre absence le 28 août. On avait indiqué que les praticiens avaient une formation qui demandait, dans un cas, 45 heures de préparation, dans un autre cas, 75 heures de préparation; je crois que ceci est dû à un manque de mémoire plutôt qu'à autre chose.

En effet, la plupart des membres des deux associations de podiatres, soit les praticiens et la Société des podiatres de la province qui furent entendus le 28 août, furent formés par le Centre de formation en pédicure Inc. Alors, le centre est la seule école pour former les podiatres dans la province de Québec et, d'après ce qu'on me dit, même au Canada. Mon savant ami expliquera le curriculum du centre de formation, mais je peux dire qu'en général on enseigne la biologie, l'anatomie du corps entier, mais en donnant l'importance à l'anatomie, naturellement, du pied, des mesures antiseptiques à prendre, comment choisir des chaussures, les mesures préventives et la pathologie pour reconnaître les conditions qui demandent des soins médicaux ou chirurgicaux.

Dans le programme 2 du centre de formation, il est indiqué qu'entre autres il faut avoir des connaissances pour reconnaître certaines affections et maladies qui ont une influence directe sur la santé du pied — là, on réfère immédiatement à un médecin ou bien à un chirurgien orthopédiste — entre autres, les crampes dans les jambes et les pieds, le diabète, l'hémophilie, les varices et autres troubles circulatoires des membres inférieurs, les affections de la peau, l'infection microbienne, le rhumatisme, l'arthrite, la goutte.

Alors, avec ces études auxquelles s'ajoutent l'expérience directe et les cliniques qu'ils tiennent pour développer la dextérité, l'habilité, nous avons, dans la province de Québec, environ 200 podiatres qui rendent service à une population de 6 millions.

Ces services ont donné tant de satisfaction, paraît-il, qu'on n'a jamais reçu une plainte. S'il y avait des cas qui demandaient les services d'un médecin, ils étaient envoyés au médecin. On n'a pas osé empiéter. C'est pour ça que je suis bien d'accord sur la définition de la podiatrie qui se trouve dans le projet de loi no 271. Notre effort était pour rendre bien clair le fait que le podiatre ne devait pas empiéter dans ce domaine.

En pratique, les podiatres s'occupent, 80 p.c. du temps, à soulager les douleurs dont on souffre, comme les cors, les callosités, les ongles incarnés, les verrues. Pour les autres 20 p.c, on considère des mesures préventives et correctives.

Ma première solution est que la formation qui est donnée aux 200 podiatres comporte au moins 160 heures, et même plus, de théorie et plusieurs heures de pratique, expériences de soulagement et autres. Je crois que ces 200 podiatres sont absolument nécessaires. Je propose que dans la future corporation les 200 podiatres qui ont exercé cet art pendant au moins 3 ans à 5 ans comme principal moyen de gagner leur vie devront être admis sans examen. Cela me fait penser à ce que les comptables agréés ont fait. Quand il fut proposé d'avoir un seul corps pour régir cette profession, ils ont admis des gens qui pratiquaient la comptabilité et qui avaient atteint un certain stage. Ils leur ont conféré le qualificatif de comptable agréé. C'est la première solution.

Deuxième solution. Il y a trois organisations. Les praticiens sont les plus nombreux; la deuxième compte 57 ou 58 membres; la troisième en compte 10 ou 20. On devrait donc choisir les membres du bureau au prorata.

Merci. On m'indique qu'on a consommé une dizaine de minutes.

M. PAQUET: M. le Président, sur le texte du résumé du mémoire qui a été préparé par Me Smiley, j'aimerais vous faire certaines remarques. Vous vous souviendrez sans doute, à la suite des dernières auditions, qu'il y a effectivement trois groupes de podiatres au Québec: il y

a l'Association de podiatrie de la province de Québec, qui groupe une vingtaine de membres et qui est celle mentionnée à l'article 17 du projet de loi 271; il y a deux atures associations, les Praticiens en podiatrie du Québec qui, comptait, le 31 décembre 1971, 138 membres; et la Société de podiatrie qui comptait une cinquantaine ou une soixantaine de membres. Les deux derniers groupes, la Société de podiatrie et les Praticiens en podiatrie — que nous représentons ici cet après-midi — possèdent la même formation de base, et les deux groupes poursuivent des programmes d'entraînement durant le cours de la pratique de la profession et de perfectionnement.

Me Smiley vous soulignait tantôt que nous suggérons une représentation, à la future corporation, au prorata du nombre de membres actuellement et, deuxièmement, que nous demandons la protection des droits acquis de ceux qui pratiquent la podiatrie et qui déjà rendent service à la population depuis un bon nombre d'années. Je vous indique par exemple que la clinique Wolfe, à Montréal, clinique de podiatrie, existe depuis 1942.

Je vous inviterais à passer directement au texte des amendements proposés, dont je n'ai pas l'intention de discuter avec vous la rédaction détaillée, mais j'aimerais cependant souligner certains points qui me semblent importants, D'abord, la définition, à l'article 6, qui s'intitule: Texte proposé. Elle est, à notre avis, plus restrictive que la définition proposée dans le texte du...

M. LE PRESIDENT (Carpentier): Est-ce que vous pourriez nous mentionner à quelle page vous nous référez?

M. PAQUET: Je suis à la page 7, M. le Président, du résumé, couverture verte. Il nous semble que la définition que nous proposons colle plus à la réalité de ce qu'est la formation et le champ d'activité du podiatre, de façon à exclure toutes les interventions dhirurgicales et toute anesthésie en profondeur; nous nous considérons, podiatres, non pas comme des concurrents du médecin mais comme des collaborateurs du médecin avec qui nous travaillons en étroite collaboration.

A l'article 7, je pense qu'il est important de souligner, encore une fois, la différence, en ce qui nous concerne, entre l'orthèse podologique et la prothèse. La prothèse est un appareil mécanique de remplacement d'un membre, alors que l'orthèse est un instrument de rééquilibre, de rééducation ou un palliatif pour un membre amoindri mais toujours présent. Autant nous admettons que les podiatres ne doivent pas être des commerçants de souliers orthopédiques de série, autant nous croyons que la confection d'une orthèse personnelle avec prise de mesures, ce qu'on peut appeler, entre autres, le soulier moulé qui est un exemple, devrait être du domaine du podiatre.

Finalement, à l'article 17, nous vous avons proposé un texte qui aurait le mérite de reconnaître que seraient élus aux postes de membres du bureau de la nouvelle corporation des membres en proportion du nombre de membres des groupes existants et, deuxièmement, que seraient éligibles à la corporation et les personnes détentrices de diplômes et les personnes qui pratiquent la podiatrie au Québec à l'heure actuelle. Il s'agit ni plus ni moins, sans s'étendre davantage, de la clause grand'père qui est standard et qui, évidemment, protège les droits acquis de personnes qui rendent des services à la population depuis de nombreuses années et qui le font, à mon avis, avec toute la compétence requise pour le champ d'activité qui est le leur et qui n'est pas du tout le champ de la médecine.

H s'agit de services spécifiques dans des cas spécifiques pour lesquels la formation qui est donnée nous semble suffisante non pas dans le sens qu'elle ne peut pas être améliorée — nous travaillons à l'améliorer — mais dans le sens qu'elle assure le minimum de protection auquel la population est en droit de s'attendre.

J'aimerais vous réinviter à regarder la page 7, au sujet de la radiologie. Les praticiens en podiatrie sont parfaitement d'accord pour ne pas avoir le droit ou le privilège de faire des radiographies ou de pratiquer la radiologie. Il s'agit d'un domaine dans lequel ils ne sont pas spécifiquement formés. Mais cependant, les podiatres croient qu'ils devraient avoir le droit de référer un patient ou un cas au radiologiste compétent de façon que l'examen radiologique puisse être fait et que le podiatre puisse recevoir du professionnel compétent le rapport de lecture et d'interprétation qui permettra au podiatre d'appliquer le traitement podiatrique approprié dans le cas où c'est un traitement podiatrique qui est la conséquence logique de ce qui a été trouvé à l'examen radiologique.

Il nous semble que la procédure actuelle veut ceci: Prenez le cas bien pratique d'un assisté social qui se présente au bureau du podiatre et le podiatre, après examen, dit: Vous avez besoin d'une radiographie ou d'un examen radiologique. A ce moment-là, ce qui se passe, c'est que le podiatre est obligé de référer le patient au médecin de médecine générale qui le réfère à un radiologiste et qui le réfère de nouveau, par la suite, au podiatre. Alors, ce sont des honoraires qui sont payés, inutilement à notre avis, au moins pour l'intermédiaire.

Je ne veux pas prolonger davantage le temps de cette séance de la commission. Je termine ici l'exposé pour répondre aux questions.

M. LE PRESIDENT (Carpentier): Suite aux représentations des membres des praticiens en podiatrie de la province de Québec, j'invite le ministre des Affaires sociales à prendre la parole.

M. CASTONGUAY: J'aimerais remercier les praticiens en podiatrie pour ce mémoire. Est-ce que votre groupement possède une charte présentement?

M. PAQUET: Notre groupement est enregistré auprès du pronotaire de la cour Supérieure dans le district de Montréal mais ne possède pas d'incorporation, ne constitue pas une corporation. Même si cela serait souhaitable, à l'heure actuelle, ce n'est pas le temps de le faire avec la loi proposée qui s'en vient.

M. CASTONGUAY: Très bien.

Vous dites que le Centre de formation de pédicure est un institut constitué en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies et qu'il fonctionne avec un permis du gouvernement.

M. PAQUET: Oui.

M. CASTONGUAY: Est-ce que les cours qui y sont donnés ont fait l'objet d'études, de discussions avec le ministère de l'Education? De quelle nature est ce permis, en fait?

M. SMILEY: Je suis au courant. Nous avons assisté à une assemblée du ministère de l'Education. Nous avons décidé qu'aucune personne ne peut se présenter pour le cours donné par le centre de formation à moins que le candidat ne possède une éducation secondaire complète, c'est-à-dire jusqu'à la douzième année. Nous avons obtenu un permis.

M. PAQUET: Voici la référence juridique, M. le Président; il s'agit du permis no 470, émis en vertu de la Loi de l'enseignement privé, chapitre 67 des lois de 1968. Il s'intitule: Enseignement professionnel, recyclage, pédicure.

M. CASTONGUAY: Outre l'exigence de la douzième année, est-ce que les cours qui y sont donnés, leur durée, leur composition, le choix des sujets, etc. ont fait l'objet de discussions avec le ministère de l'Education?

M. SMILEY: Oui. On a soumis le cours complet, qui comprend l'anatomie, l'ostéalgie, la biologie, la physiologie générale, les ongles, la verrue plantaire, le massage, la mobilité, la gymnastique, notions de pathologie élémentaires, dictionnaire pathologique, terminologie, troubles de la circulation dans les jambes et les pieds, affections des glandes sudoripores, le pied normal et sa structure, les déformations, malformations du pied, la chaussure, comment acheter les chaussures, les chaussures orthopédiques, les semelles orthopédiques, l'histoire de la pédicurie et déontologie. Je crois que ceci est contenu dans le mémoire qui fut soumis avant le résumé que j'avais préparé.

M.CASTONGUAY: Vous avez fait état de trois groupes qui existent au Québec.

M. SMILEY: Oui.

M. CASTONGUAY: Vous avez dit que deux de ces groupes comptent tant et tant de membres. Ils ont à peu près le même niveau de formation.

M. SMILEY: Oui.

M. CASTONGUAY: Le troisième groupe compte moins de membres, une vingtaine.

M. SMILEY: Oui.

M. CASTONGUAY: Si j'ai bien compris, leurs études sont d'une durée de quatre ans. Ils vont aux Etats-Unis et c'est là que la plupart ont pris leur formation. A votre avis, est-ce qu'ils s'agit là d'une formation superflue? En fait, il y a une distinction. Si vous pouvez, en 160 heures, acquérir la compétence nécessaire, qu'est-ce qu'ils font pendant les quatre ans?

M. SMILEY: M. le Président, il n'y a que deux ou trois membres qui ont une formation américaine de podiatrie. Les autres sont des autodidactes. Cette formation, je ne le crois pas, n'est pas supérieure à la formation européenne, soit le cours de pédicurie en France ou la "Chiropody" en Angleterre. En effet, M. Gran et M. Andrès ont la même formation de pédicurie, je crois, en France, et ils sont très habiles. Ils rendent des services énormes et ils soulagent les douleurs qui nous affligent.

Je crois que le bureau de la corporation pourra, pendant les cinq premières années, établir un cours adaptable à la population de la province de Québec. Pour le moment, je crois que la population a grandement besoin des services de ceux qui furent formés par le centre ou les écoles européennes et américaines ou celles des autres provinces, s'il y en a. Ceux-là devront remplir le vide qui existera, s'il ne leur est pas permis de pratiquer leur profession.

M. PAQUET: M. le Président, si vous me le permettez, sur la même question de l'honorable ministre, j'aimerais souligner que les praticiens en podiatrie, tout en reconnaissant le rôle très important qui a été joué par le Centre de formation de pédicure de Montréal — c'était la seule école qui existait dans le temps — seraient fort heureux de voir cette matière s'enseigner après le secondaire, au niveau du CEGEP, de façon que ce type d'éducation soit accessible à plus de candidats dans le système public.

Egalement sur la question de l'éducation, j'aimerais bien que M. Villeneuve, le président actuel des praticiens, fasse état de ce qui s'est fait comme recyclage pour la majorité des praticiens en podiatrie.

M. VILLENEUVE: Nous avons, depuis trois ans, étudié et recyclé nos membres en pathologie des pieds, par des cours donnés par des orthopédistes, en biologie par des techniciens en pharmacologie et en dynamique du pied. Est-ce que cela répond bien à votre question, M. le ministre?

M. PAQUET: Sur la même question, également, M. Tétrault, le secrétaire, me souligne — il est de formation américaine— que les "chiropodists" ou "podiatrists" des Etats-Unis, qui ont quatre ans de formation, pratiquent, eux, la chirurgie complète du pied et que, par conséquent leur champ d'activité est beaucoup plus large que ce que les podiatres demandent, au Québec, comme champ d'activité. Le terme est le même, mais la réalité médicale ou professionnelle n'est pas la même aux Etats-Unis qu'ici. Je voudrais quand même souligner ce fait.

M. CASTONGUAY: Vous dites qu'ils pratiquent la chirurgie totale — je ne sais pas quel terme vous avez employé — du pied. Sont-ils membres des collèges de médecins, aux Etats-Unis? Je peux peut-être répondre?

M. VILLENEUVE: Nous croyons que, dans le moment, les quelques praticiens qui sont de formation américaine, ne font pas d'opérations du pied. Ceux que je connais à Montréal, dans le moment, ne le font pas.

M. CASTONGUAY: Votre collègue me disait que ceux qui étaient formés aux Etats-Unis, faisaient de la chirurgie au plein sens du terme.

M. VILLENEUVE: Oui, ils en font.

M. CASTONGUAY: Ma question était: Est-ce qu'ils sont membres des collèges de médecins aux Etats-Unis?

M. VILLENEUVE: Du Collège des podiatres, je crois.

M. SMILEY: Je crois qu'il serait dangereux de permettre à un podiatre d'empiéter sur le champ des chirurgiens. J'ai grandement peur de cela. C'est pour cela que j'aime tellement la définition actuelle du projet de loi, à l'article 6.

M. LAVOIE (Wolfe): Surtout ceux qui suivent leur cours par correspondance, ce serait plus dangereux de les laisser faire de la chirurgie.

M. SMILEY: Le cours par correspondance demande beaucoup de caractère, parce que celui qui fait ses devoirs chez lui, d'après la correspondance, a plus de caractère que celui qui assiste à l'école où il faut écouter. Et ce cours est terminé par une clinique de trois semaines, de dix heures par jour, pour le bénéfice de ceux qui ne peuvent pas payer pour des soins podiatriques.

M. PAQUET: Je ne voudrais pas laisser la question sans réponse. J'aimerais bien que M. Tétrault, qui est de formation américaine, vous dise exactement ce qui se passe aux Etats-Unis dans ce domaine, si la commission est intéressée à le savoir. M. Tétrault.

M. TETRAULT (Michel): Je vous remercie. Tout d'abord, je dois souligner que je ne suis pas de formation américaine, bien que j'aie passé mes concours aux Etats-Unis; je suis de formation anglaise. Mais ce qui se passe aux Etats-Unis, c'est qu'on leur a donné un champ d'action plus vaste et qui ne nous serait pas permis ici dans la province de Québec, parce qu'ils agissent là-bas comme des chirurgiens, ils font même des amputations. Ce ne serait pas permis dans la province de Québec, nous avons déjà nos orthopédistes qui s'occupent de ces choses. Et ça tombe complètement dans le domaine médical, parce qu'on ne peut pas nous accepter.

M. LAVOIE (Wolfe): Avez-vous reçu la formation chez le Dr Scholl?

M. TETRAULT (Michel): Non, monsieur, du Northen Institute Therapeuty, et nous passons nos concours — plus maintenant parce que l'Angleterre a maintenant ses lois aussi — aux Etats-Unis. Non pas du Dr Scholl, je regrette.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dubuc.

M. BOIVIN: M. Smiley a insisté sur le fait que les podiatres étaient formés à l'école de pédicure. Quels sont les professeurs qui enseignent à cette école? Est-ce que ce sont des orthopédistes?

M. SMILEY: Si je comprends bien, c'est M. Paul Andrès lui-même.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il y a quelqu'un de l'école ici?

M. LAMBERT: Je peux répondre. Nous suivons un stage de pédicurie scientifique qui se limite au traitement du pied et à la partie théorique en ce qui concerne l'anatomie et la biologie. Ces cours sont donnés par M. Andrès lui-même.

Il y a un deuxième cours...

M. BOIVIN: Quelle formation a-t-il?

M. LAMBERT: II a la formation européenne. Il détient ses certificats d'Europe, je ne pourrais vous dire...

M. BOIVIN: Est-ce que c'est un orthopédiste?

M. LAMBERT: Non, c'est un pédicure européen, de formation européenne.

M. BOIVIN: Qui enseigne l'anatomie et...

M. LAMBERT: II donne des cours en anatomie, biologie et dirige des stages pratiques sur la façon de traiter les pieds du patient en clinique. Il y a un deuxième cours qui vient se greffer à

celui-là, qu'on dit cours de perfectionnement, qui se consacre essentiellement à la question orthèse, la rééducation du pied, kinésithérapie. Je pense que vous avez une vue d'ensemble assez complète du cours qui se donne.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de L'Assomption.

M. PERREAULT: Au point de vue pratique, en quoi consiste votre cours? On donne des cours théoriques, mais au point de vue pratique?

M. LAMBERT: Au point de vue pratique, l'école est équipée de cabines qui reçoit, dans le jour, le public. Le soir, ces mêmes cabines sont mises à la disposition des personnes qui ne peuvent pas défrayer les soins podiatriques, parce qu'au point de vue pécuniaire elles n'ont pas les moyens. Et l'étudiant travaille directement sur le patient. Il apprend à faire l'exérèse des cors, traiter la verrue plantaire ou l'ongle incarné, etc.

M. PERREAULT: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dubuc.

M. BOIVIN: Combien de temps dure votre cours? Je comprends qu'il y a de 45 à 200 heures. Depuis quand se donne-t-il en 200 heures et...

M. SMILEY: Un cours est d'un minimum de 168 heures et l'autre de 200 heures à part les cliniques pratiques.

M. BOIVIN : Réparties sur combien d'années?

M. LAMBERT: Réparties actuellement sur une période d'une année où l'étudiant suit des cours un soir par semaine, quatre heures par jour, et ensuite, il a deux samedis par mois au complet.

M. SMILEY: Et je dois ajouter qu'il y a des examens trimestriels.

M. BOIVIN: Maintenant, vous disiez tout à l'heure que vous collaborez de façon très étroite avec les médecins. Une association s'est présentée devant la commission qui nous a dit qu'elle était appuyée même par des orthopédistes et qui travaillait sous l'autorité des orthopédistes. Mais de quelle façon pouvez-vous prouver, vous, votre association, que vous travaillez de façon aussi étroite avec les médecins?

M. BOUCHARD: Mlle Gardner va répondre à cette question, s'il vous plaît.

MLLE GARDNER: I work in a hospital and I work directly with the doctors in conjonction with them to take care of the diabetics and the skin problems, and all the patients are referred by the doctors directly to me. I look at their feet, making a charter for what I think is wrong. They consult me and we work for the patient's good together and they leave me in charge of the care of their feet. If I think that during the treatment the patients are not stable and diabetics or are not taking care of themselves properly, we refer the patients backwards and forwards to each other so that they constantly hoped the best of both of our knowledge, because the doctors, although they know a lot about feet they prefer someone who is constantly dealing with this and who sees the problems all the time to deal with these patients.

M. LAVOIE (Wolfe): When you speak about doctors, do you speak about orthopedists or only ordinary doctors?

MLLE GARDNER: They are all specialists in their own field. They are metabolic disorders specialists. I also have orthopedic men, dermatologists, they all come to their special clinics and most of them head of their own departments.

M. LAVOIE (Wolfe): It is not only for skin problems?

MLLE GARDNER: No, it is for all of them. Every patient in the hospital who has something wrong with the circulatory system whether it is metabolic or anything like that may be referred to me in the hospital, but they are all specialists in their own field.

M. LAVOIE (Wolfe): What kind of course did you had yourself, Miss Gardner?

M.LLE GARDNER: I was trained at the London Foot Hospital, London England, for three years.

M. LAVOIE (Wolfe): How many of your people have been trained over there?

MLLE GARDNER: How many are in the society at the moment?

M. LAVOIE (Wolfe): Yes.

MLLE GARDNER: In Canada or in England?

M. LAVOIE (Wolfe): In your organisation right now, how many of your people?

MLLE GARDNER: Twenty five or thirty.

M. LAVOIE (Wolfe): Out of the 138 members, 25 have been trained in England, is that it?

MLLE GARDNER: About that.

M. LE PRESIDENT: This answers the question?

Le député de Bourget.

M. LAURIN: Vous avez parlé...

M. LAVOIE (Wolfe): Une autre petite question. J'apprenais que c'était M. Villeneuve le président, maintenant, depuis quand êtes-vous président?

M. VILLENEUVE: Trois semaines.

M. LAVOIE (Wolfe): Qui était président avant?

M. VILLENEUVE: M. Andrès.

M. LAVOIE (Wolfe): Quelles sont les raisons qui ont motivé ce...

M. VILLENEUVE: Raisons personnelles, il a démissionné, c'est personnel.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il enseigne encore à l'école?

M. VILLENEUVE: Oui, il enseigne.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il a démissionné il y a trois semaines de l'école ou s'il enseigne encore actuellement?

M. VILLENEUVE: II enseigne encore et il continue son école mais il était trop occupé pour occuper la présidence de la Société des praticiens en podiatrie.

M. LAVOIE (Wolfe): Je parlais justement des produits du Dr Scholl; à votre clinique, avez-vous des relations quelconques ou je pourrais dire assistance technique ou morale de cette compagnie qui vend des produits pharmaceutiques ou des produits de prothèses ou des produits quelconques?

M. VILLENEUVE: Nous n'employons pas, dans notre association, des produits du Dr Scholl. Nous employons les méthodes enseignées. On sourit là-bas, je ne sais pas pourquoi.

M. CASTONGUAY: Non, non on se demandait si le député de Wolfe était actionnaire de la compagnie du Dr Scholl.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Je demande à l'assistance et aux représentants de ne pas manifester par des applaudissements ou de quelque façon que ce soit.

L'honorable député de Dubuc.

M. BOIVIN: J'aurais encore une question à poser...

M. LAVOIE (Wolfe): J'aimerais savoir si ces produits sont vendus dans tous les magasins et si ces gens ont des rayons dans un magasin quelconque pour faire vendre plus de chaussures et plus de "pads".

M. VILLENEUVE: Des scaphoides et des métatarsiens.

M. LAVOIE (Wolfe): Oui, des affaires de même.

M. VILLENEUVE: Excusez-moi, mais non. M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Vous avez demandé de pouvoir sortir des ordonnances afin de passer des rayons X. Mais quelle préparation scientifique avez-vous pour interpréter des rayons X?

M. VILLENEUVE: Nous, les praticiens, nous ne regardons pas seulement le sujet debout. Lorsque le sujet entre on ne lui dit pas: Tu as besoin de ça. Nous faisons un examen qui n'est pas médical, mais nous voyons si les genoux, les pieds sont faibles ou si c'est un affaisement des chevilles, interne, externe —je ne vous donnerai pas les autres termes — ou si le pied est plat ou si ce sont les métatarsiens. Si nous voyons que ce n'est pas notre domaine, nous le référons à un orthopédiste avec lesquels je fais bien affaires. Tout à l'heure, vous avez posé une question: "Comment faites-vous? " Dans le moment, pour référer notre patient à un orthopédiste, il faut le retourner à son médecin omnipraticien à qui on envoie la description de ce qu'il a. Celui-ci retourne le patient à l'orthopédiste et l'orthopédiste nous le retourne avec une ordonnance à exécuter.

M. BOIVIN: Quelle préparation avez-vous pour interpréter une radiographie? Combien de cours suivez-vous pour interpréter des radiographies?

M. VILLENEUVE: On ne veut pas interpréter des radiographies. On veut prendre l'ordonnance et, plus tard, interpréter les radiographies quand nous aurons mis à jour nos cours de recyclage dans cette optique.

M. BOIVIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.

M. LAURIN: Vous avez fait état, tout à l'heure, d'une collaboration de votre association avec le Collège des médecins; vous avez même mentionné le nom du Dr Leboeuf. De quel type est cette collaboration? Est-ce que le Collège des médecins a été sollicité par vous en vue de l'examen de votre curriculum? Est-ce que vous avez sollicité son aide en tant que

consultant pour l'amélioration du curriculum? En général, de quel type de collaboration faites-vous état?

M. SMILEY: Je sais que M. Andrès était toujours en communication avec le Dr Roy, registraire du Collège des médecins et chirurgiens. Je sais aussi qu'on lui avait soumis le résumé pour avoir ses commentaires et que le collège a été très satisfait.

M. LAURIN: Satisfait de quoi? De votre programme d'études ou de vos activités?

M. SMILEY: De nos activités.

M. LAURIN: Est-ce qu'il a examiné votre programme d'études?

M. SMILEY: Je ne le sais pas.

M. LAURIN: C'est une question que je pose à l'un ou l'autre.

M. LAMBERT: Pour répondre à la question du programme d'études, nous sommes entrés en communication avec le Collège des médecins et le Dr Roy est tout à fait conscient de la formation de la majorité des podiatres de la province de Québec. Le Dr Roy est conscient aussi que nous devons nous recycler. C'est pourquoi, avec le bon appui du Dr Roy, nous avons structuré des symposiums ou des journées d'études dans lesquelles des orthopédistes — comme l'a mentionné tout à l'heure notre président — des techniciens en pharmacologie, des spécialistes du diabète, des fibrologues nous ont donné un ensemble de cours, mais disons que ce n'est pas complet. Nous travaillons encore à nous recycler. La preuve en est que cette année nous avons encore des symposiums qui sont organisés et nous continuons. Mais nous espérons que le gouvernement saura peut-être clarifier la chose et nous permettra un jour ou l'autre de travailler en collaboration encore plus intense avec le corps médical et, un jour, avec les autorités de tous les hôpitaux de la province de Québec.

M. LAURIN: A la lumière de votre réponse, croiriez-vous nécessaire, une fois le présent projet de loi adopté, d'étoffer davantage la partie théorique de votre programme d'études?

M. LAMBERT: A ce moment-là on pourra étudier, on pourra voir clairement la situation, ce que le gouvernement attend du podiatre québécois. Actuellement, c'est un peu confus. On nous arrive avec des théories américaines, des théories européennes. Disons que ces choses sont bonnes mais, en tant que Québécois, nous espérons qu'une loi va nous éclairer là-dessus pour orienter et compléter notre formation.

M. LAURIN: Une dernière question; est-ce que vous êtes mêlés de près ou de loin à la fabrication de chaussures qu'on pourrait appeler prothèses?

M. VILLENEUVE: Oui, nous le sommes. M. LAURIN: De quelle façon?

M. VILLENEUVE: En prenant les empreintes, des fois dans l'espace, des fois de façon stable selon les conditions du patient. Nous faisons fabriquer les chaussures nécessaires pour le patient.

M. LAURIN: Vous dites que vous faites fabriquer. Est-ce qu'il y a des cas que vous connaissez où vous fabriquez vous-mêmes les chaussures?

M. VILLENEUVE: Nous améliorons les chaussures mais ne les fabriquons pas.

M. LAURIN: Aucun praticien en podiatrie ne fabrique de chaussures?

M. VILLENEUVE: Pas à ma connaissance.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Argenteuil.

M. SAINDON: M. le Président, j'aurais quelques petites questions à poser aux praticiens en podiatrie. Je ne m'adresse à personne en particulier, celui qui voudra bien me répondre sera bienvenu.

Vous avez parlé tout à l'heure d'un acte probablement médical, un petit point infime en ce qui touche la santé de l'être humain. Dans le cas d'exérèse des cors, quel résultat obtenez-vous des gestes que vous posez? Je crois — et mon opinion est partagée par plusieurs autres — que la majorité des gens, lorsqu'il s'agit de cors, se traitent eux-mêmes. J'en ai vu plusieurs et je n'ai jamais constaté de différence entre celui qui se traite lui-même et celui qui est traité par un podiatre. Il y a autre chose. En général — cela m'a été rapporté par plusieurs — lorsqu'un médecin ou un orthopédiste réfère un cas à un podiatre, ne pensez-vous pas qu'il le fait parce qu'il ne veut justement pas, pour des raisons que je n'ai pas besoin de mentionner, s'occuper de ces cas?

D'autre part, ne pensez-vous pas qu'il est difficilement acceptable que des personnes qui s'adonnent à la podiatrie travaillent seules en cabinet privé? Ne pensez-vous pas, par exemple, que, si vous travailliez dans un centre de santé au sein d'une équipe médicale, cela serait beaucoup plus approprié?

M. COLINA: Si vous me le permettez, je répondrai d'abord à la première question. Pour l'exérèse d'un cor, c'est vrai que, dans le marché, il existe des genres d'emplâtres; je ne voudrais pas dire le nom parce que cela ferait

certainement plaisir à un certain monsieur si je nommais la compagnie. Ce sont des produits à base d'acide salycilique et, automatiquement l'acide salycilique a la propriété de ramollir les tissus. Mais cela n'enlève absolument pas le cor et, de plus, cela peut causer certains problèmes très graves. Mais on peut dire — je crois que tous les podiatres seront d'accord avec moi — que le podiatre enlève définitivement le cor.

M. SAINDON: Le cor ne reviendra pas?

M. COLINA: Pardon. Tout est relatif sur terre. Si vous n'évitez pas ce qui a provoqué le cor, cela veut dire, donc, la compression, le frottement, indubitablement cela va revenir.

M. SAINDON: Seulement une question sur le même sujet.

M. COLINA: Oui.

M. SAINDON: Qu'est-ce que vous pensez de la radiothérapie dans le traitement des cors?

M. COLINA: Je vais vous dire en toute sincérité — là, je vais me permettre de prendre l'exemple de Jean Lelièvre, un très grand orthopédiste qui l'a dit — que c'est un assassinat. Indubitablement, on peut retirer un cor par la bombe au cobalt. On peut le retirer par le radium. On peut le retirer par ce qu'on appelle la neige carbonique. On peut faire même une opération chirurgicale et, plusieurs fois, nous avons vu que, pour un simple cor, on a coupé même un doigt du pied. Je pense quand même que c'est une chose bénigne.

Qu'est-ce qu'un cor? C'est la couche cornée qui est kératinisée et fait une pointe. Automatiquement, cela crée une douleur. Le but, la finalité du podiatre, c'est de le retirer.

M. SAINDON : J'aurais une petite remarque à faire là-dessus. Premièrement le cobalt n'est pas utilisé dans l'exérèse des cors. Deuxièmement,... Ecoutez, vous prenez un "tank" pour écraser une fourmi

M. COLINA: Exactement.

M. SAINDON : La comparaison ne tient pas tellement. Remarquez bien que la radiothérapie, dans l'exérèse des cors, vaut n'importe quel traitement.

M. COLINA: Je me réfère justement aux maîtres de la podologie, qui est la podiatrie, disons, en français. Automatiquement, on peut utiliser beaucoup de choses. On peut faire aussi une chirurgie, bien entendu. Mais est-ce que pour casser une noisette, on utilise un marteau-pilon?

M. SAINDON : Avez-vous essayé de faire de la chirurgie sur un cor? Allez-vous être capable de fermer la plaie après?

M. COLINA: Un chirurgien fait des points de suture.

M. SAINDON: II va faire de la plasticie mais il ne fera pas de la chirurgie.

M. COLINA: Nous autres, nous ne faisons pas ça.

M. SAINDON : II ne fermera pas simplement la plaie.

M. COLINA: Nous ne faisons pas ça. Nous retirons le cor, Automatiquement on met un cicatrisant ou un produit X et la plaie se referme.

M. SAINDON: De toute façon, la majorité des gens les enlèvent eux-mêmes. Je me demande pourquoi ils iraient vous voir. C'est encore assez dispendieux. Alors, si les gens sont capables de le faire eux-mêmes, je m'interroge.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Qu'est-ce qu'un chiropodiatre?

M. VILLENEUVE: Un chiropodiatre? M. CLOUTIER (Montmagny): Oui.

M.VILLENEUVE: Nous n'en connaissons point.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce qu'il n'y en a pas dans l'association? Regardez dans votre mémoire.

M. COLINA: Non, c'est chiropodiste.

M. CLOUTIER (Montmagny): Chiropodiste! En tout cas, disons un chiro avec un podiatre. Qu'est-ce qu'un chiropodiste?

M. COLINA: C'est l'appellation du podiatre en Angleterre. Ici, le problème est le suivant. Automatiquement, dans les pays anglophones, tout au moins en Angleterre, le podiatre s'appelle "chiropodist". Podiatre vient du terme américain "podiatrist". Ensuite, vous avez, par exemple, en France le terme pédicure. Automatiquement, on joue sur ces trois mots.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez dans votre mémoire, à la fin, une annexe signée par M. Albert Raymond, de l'Association des podiatres.

Il dit qu'après des réunions, l'Association des podiatres de la province de Québec, une résolution fut prise sur l'admission de nouveaux membres. Premièrement, tous les chiropodistes pratiquant... Et on donne les conditions.

M. COLIN A: Oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors il y a donc admission et on les appelle des chiropodis-tes.

M. COLINA: Oui. Justement, c'est comme dans notre association, il y en a beaucoup de formation anglaise qui s'appellent chiropodis-tes, de formation française, qui s'appellent pédicures et, automatiquement, quelques-uns de formation américaine. On est obligé d'englober ces trois terminaisons.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez des statistiques, ailleurs, qui donnent, à la page 2, 50 autodidactes ou sans formation suffisante, sur un total de 210. Vous nous avez donné des statistiques, au début de votre intervention. Dans les praticiens, vous en avez 138; dans la Société de podiatrie, vous en avez 50 ou 60. Je retiens le chiffre 60. Cela fait donc 198. Et 198 sur 210, c'est presque le total. Alors les 50 qui ont une formation d'autodidacte ou insuffisante se retrouvent donc aussi dans vos deux groupes.

M. COLINA: Bien entendu, oui. Dans les trois groupes, même, on pourrait dire.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dans les trois groupes. J'avais retenu, je ne sais pas si je fais erreur que peut-être dans le groupe, l'association... vous avez mentionné avec quel groupe vous avez plus ou moins de relations. Est-ce que dans ce groupe en entier, ils auraient besoin d'un recyclage ou si vous leur reconnaissez une certaine formation?

M. COLINA: Bien entendu.

M. SMILEY: Je crois que dans le plus petit groupement, l'association, il y en a deux ou trois qui ont une formation américaine. Les autres, je crois, sont des "self-taught".

M. CLOUTIER (Montmagny): Parce que vous avez représenté, aussi, au début de votre mémoire... la loi telle que rédigée... la composition de l'organisme serait contrôlée par le groupe le moins nombreux. C'est pour cela que vous avez demandé une modification à votre mémoire.

M. SMILEY: Oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez également fait une analyse du nombre de podiatres par chiffre de population, dans différents pays.

M. COLINA: Oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous l'avez fait dans votre mémoire. Aux Etats-Unis, vous avez environ 20,000 — soit 18,350 — et en France, c'est là où il y en a le plus, vous avez un podiatre pour 5,000 habitants. Tenant compte de ces statistiques, ce que nous avons dans le Québec, actuellement, vous arrivez à un podiatre pour 32,500. Alors, vous dites qu'il nous faudrait, évidemment, former une centaine de nouveaux podiatres. Croyez-vous que c'est possible, dans un délai relativement court, d'intéresser suffisamment de jeunes à entrer dans cette profession?

M. PAQUET: Je pense que, si nous voulons être réalistes, pour former 100 nouveaux podiatres, il faut envisager un délai de 2 à 3 ans. Il n'est pas question de pouvoir les former en six mois. Si le président me le permettait, j'aimerais me référer à l'annexe dont l'honorable député a parlé tantôt, qui s'intitule "Clinique Raymond". J'aimerais bien qu'il soit clair que ce document émane non pas des praticiens en podiatrie que nous représentons, mais bien de l'association dont il est fait mention dans le bill 271.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est ce que j'ai dit tantôt. C'est M. Raymond, de l'Association des podiatres, qui a signé la lettre.

M. PAQUET: J'avais mal compris, je m'excuse.

M. CLOUTIER (Montmagny): Cela me satisfait.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de l'Assomption.

M. PERREAULT: Une courte question. Le président, M. Villeneuve, a mentionné que vous envisagez une formation au CEGEP pour l'avenir. Est-ce qu'à ce moment cette demande a été faite ou avez-vous des consultations avec le ministère de l'Education à ce sujet?

M. VILLENEUVE: C'est M. Tétrault qui est chargé de l'éducation et du recyclage.

M. TETRAULT (Michel): A ce jour, nous avons contacté, au début, la direction de certains CEGEP et, actuellement, nous sommes en pourparlers pour leur exposer en quelque sorte les besoins scolaires qu'auront nos futurs podiatres. Il faudrait qu'ils commencent une secondaire V et, ensuite, qu'on leur donne ce qui est nécessaire à la poursuite de leurs études. Ceci est déjà en cours, mais non complété.

M. PERREAULT: Cette option n'a pas été agréée encore par le ministère de l'Education?

M. TETRAULT (Michel): Non, mais cela viendra sous peu. Nous sommes en pourparlers avec eux; nous échangeons des lettres et vous savez que ça prend un petit moment.

M. PERREAULT: Merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que ceci termine les questions de la part des membres de la commission? Je remercie, au nom de la commission, les membres de l'Association des oto-rhino-laryngologistes de la province de Québec, la Société d'orthophonie et d'audiologie de la province de Québec, l'Association des prothésis- tes et orthésistes de Québec, les Praticiens en podiatrie de la province de Québec et le Conseil de la certification des prothésistes et orthésistes de Québec pour la présentation de leurs mémoires.

La commission ajourne ses travaux au 12 octobre, à dix heures du matin.

(Fin de la séance à 17 h 56)

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