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Version finale

29th Legislature, 3rd Session
(March 7, 1972 au March 14, 1973)

Thursday, June 15, 1972 - Vol. 12 N° 56

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 250 - Code des professions et autres projets de loi connexes


Journal des débats

 

Commission spéciale des corporations professionnelles

Projet de loi no 250 — Code des professions et autres projets de loi connexes

Séance du mardi 13 juin 1972

(Dix heures treize minutes)

M. BLANK (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

Nous commençons la onzième séance de la commission spéciale des corporations professionnelles. Vous excuserez le retard. Nonobstant la présence des libéraux et des uniquistes, nous attendions les représentants du Parti québécois et les créditistes. Ils ne sont pas arrivés mais nous commencerons quand même la séance. La Corporation des chimistes professionnels du Québec est-elle prête? Est-ce que le président est arrivé? Est-ce que la Corporation des agronomes de la province de Québec est ici?

UNE VOIX: Présent.

M. LE PRESIDENT: L'Association canadienne des manufacturiers de moulées? La Société des traducteurs du Québec? La Corporation des maîtres en centrale thermique de la province de Québec est présente?

M. LAFRENIERE: M. le Président, notre présence immédiate semble manifester certaines présomptions.

M. LE PRESIDENT: Nous allons commencer avec la Corporation des chimistes professionnels du Québec. C'est la coutume ici.

M. LAFRENIERE: Je n'ai pas vu d'autre corporation au début...

M. LE PRESIDENT: Elles sont toutes ici.

M. LAFRENIERE: Je comprends, M. le Président, que vous commenciez par la Corporation des chimistes. La Corporation des maîtres en centrale thermique viendra à quel tour?

M. LE PRESIDENT: La dernière. M. LAFRENIERE: La dernière?

M. LE PRESIDENT: Oui. C'est la liste qui a été préparée par le secrétaire des commissions et nous suivons toujours la liste.

M. LAFRENIERE: Les premiers seront les derniers, je voudrais tout simplement faire une remarque cependant, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Nous finirons même ce matin, nous serons ici jusqu'à midi et demi. Je pense qu'on va pouvoir entendre toutes les corporations qui sont devant nous ce matin.

M. LAFRENIERE: Je voulais tout simplement vous faire remarquer que la salle, à ma connaissance, est remplie presque exclusivement des mécaniciens maîtres en centrale thermique.

M. LE PRESIDENT: Les règles de procédure ont la préséance sur les personnes.

La Corporation des chimistes professionnels du Québec, s'il vous plaît! M. Bonnier est le président.

M. BONNIER: Bonjour, M. le Président!

M. LE PRESIDENT: Vous pouvez procéder avec votre résumé.

Corporation des chimistes professionnels du Québec

M. BONNIER: Je vous remercie, M. le Président, MM. les députés de la commission parlementaire, tout d'abord, permettez-moi de me présenter: Florian Bonnier, président de la Corporation des chimistes professionnels du Québec. Je suis accompagné des membres de l'exécutif de la corporation et par notre délégué au Conseil interprofessionnel du Québec.

Je vous les présente mais je ne sais si je dois procéder à la présentation en commençant par la personne à mon extrême gauche ou par celle placée à mon extrême droite. De toute façon, il ne faudrait pas voir là une signification politique.

Donc, à ma droite, M. Adam Wygnanski, vice-président de la corporation; à la droite de M. Wygnanski, M. Denis Boutin, délégué de la corporation au Conseil interprofessionnel. A ma gauche, M. Pierre Bataille, dernier président sortant de charge; à la gauche de M. Bataille, M. Gérard Pelletier et à la gauche de M. Pelletier, M. Roger Ashley, membres de l'exécutif.

J'aimerais aussi vous souligner que notre délégation est elle-même accompagnée de membres du conseil que je reconnais dans la salle.

Historique de la corporation. La Corporation des chimistes professionnels du Québec groupe présentement quelque 625 membres à travers la province. Incorporée en 1926, l'Association des chimistes professionnels du Québec obtint de la Législature, en juillet 1963, la présente loi des chimistes, reconnaissant légalement le statut de professionnel à ses membres. En 1950, le nombre des membres actifs de la corporation était de 40. En 1972, le nombre est de 625.

Avant de procéder à la présentation proprement dite de notre mémoire sur le projet de loi 263 affectant notre corporation, qu'il me soit permis, M. le Président, de dire quelques mots au sujet du projet de loi 250. Nous n'avons pas présenté de mémoire sur ledit projet parce que nous avons participé à la préparation du mémoi-

re du Conseil interprofessionnel du Québec dont nous sommes un des membres fondateurs. Nous tenons à vous déclarer que nous faisons nôtres toutes les suggestions et commentaires inscrits dans le mémoire du Conseil interprofessionnel du Québec.

Toutefois, nous aimerions revenir sur un point particulier, c'est-à-dire, l'article 171 du projet de loi 250 qui traite des permis de radiologie.

Nous voulons simplement vous souligner qu'il est d'usage courant pour le chimiste en métallurgie, en biochimie et en recherche de faire usage de rayons X et de substances radioactives.

En effet, des chimistes utilisent tous les jours les rayons X pour étudier les métaux et déceler plus particulièrement les failles qui pourraient se trouver dans des axes et des plaques métallurgiques de toutes sortes. Ils les utilisent aussi pour étudier les composés chimiques et déterminer l'orientation des chaînes moléculaires et faire l'étude des cristaux. Les substances radioactives, aussi appelées les radio-isotopes, sont utilisées par les chimistes dans certaines analyses biochimiques. On se sert de l'élément radioactif comme élément traceur. On ne saurait donc exclure les chimistes de cet article, à moins de vouloir réduire leur champ d'action. Il ne pourrait être question d'obtenir un permis spécial pour effectuer ces travaux dans des sphères d'activités que déjà nous reconnaît la loi. Il n'est pas question pour nous d'utiliser les radiations obtenues à partir de rayons X ou de substances radioactives pour traiter qui que ce soit. Pour nous, ce sont des moyens qui nous permettent d'accomplir notre travail. La formation très poussée aux niveaux théorique et pratique que reçoit le chimiste fait de lui une personne hautement compétente et qui ne saurait être à la remorque de quelqu'autre professionnel sur le plan des radiations.

Projet de loi 263. Notre mémoire, comme vous l'aurez constaté, est très succinct et de lecture facile. Nos demandes portent essentiellement sur deux points précis. Premièrement nous vous demandons d'élargir le champ de pratique du chimiste pour y inclure l'enseignement de sa discipline. Deuxièmement, nous vous demandons d'abroger le paragraphe 2 de l'article 14 du projet de loi 263, de façon à intégrer danss la corporation toutes les personnes qui pratiquent la chimie professionnelle.

Sur le premier point, nous disons qu'il est primordial de former des scientifiques qui assureront au Québec une place de choix dans la révolution technique de l'ère postindustrielle. On se doit donc d'assurer aux jeunes une qualité minimale de l'enseignement de la chimie. Cet enseignement spécialisé devrait donc être dispensé sous la direction ou la surveillance d'un chimiste professionnel, lui-même enseignant.

Nous croyons que la corporation est l'organisme tout désigné pour assurer la compétence professionnelle de celui qui le dispensera étant donné que toutes les demandes d'admission à la corporation sont référées à un bureau d'examinateur. Ce bureau évalue d'une façon désintéressée tous les candidats porteurs d'un diplôme universitaire en chimie et aussi les diplômes étrangers, ce qui pourrait constituer un premier filtrage.

De plus, il y va de la protection du public étudiant. L'enseignement théorique de la chimie se complète par l'enseignement pratique, c'est-à-dire par des séances de travaux pratiques où les élèves sont appelés à manipuler des substances dangereuses et à faire des expériences. On ne peut concevoir que de tels travaux pratiques puissent être organisés et surveillés par des personnes n'ayant qu'une connaissance théorique de la chimie. Puisque notre raison d'être est de protéger le public, nous croyons qu'un tel enseignement ne peut se faire que sous la surveillance d'un praticien de la chimie, c'est-à-dire un chimiste membre de l'ordre professionnel.

Enfin, une dernière raison qui milite en faveur de la reconnaissance du principe que l'enseignement de la chimie constitue la pratique est d'ordre professionnel. De nos jours, beaucoup de jeunes diplômés en chimie se dirigent vers l'enseignement de la chimie. Or, une des exigences de notre corporation veut qu'un jeune diplômé soit admis dans l'ordre après un entraînement de deux ans, sous la direction d'un membre de l'ordre. Dans les circonstances actuelles, il serait difficile, à certains niveaux de l'enseignement, pour ce jeune diplômé de trouver une personne qualifiée, aux termes de la corporation, pour répondre de l'évolution et du progrès du jeune chimiste à l'entrafnement. Dans certains cas, il lui serait impossible de remplir l'exigence de notre loi qui lui permettrait l'accès normal à la pratique de la profession.

Sur le deuxième point, nous vous demandons d'abroger le paragraphe 2 de l'article 14 du projet de loi 263, onzième modification du projet de loi 263, de façon à intégrer dans la corporation tous ceux qui pratiquent la chimie professionnelle. Nous croyons que les obligations qui découleront de la mise en vigueur du projet de loi 250 doivent être partagées par tous les chimistes, qu'ils soient chefs de laboratoire ou simples exécutants. Il s'agit d'une question d'équité. On ne saurait limiter à un petit nombre de chimistes le soin de porter tout le fardeau de la responsabilité découlant du bill 250. De plus, on ne saurait nier que le travail d'un groupe important de chimistes peut affecter le bien-être et la sécurité publique. Nous, ce qui nous intéresse avant tout, c'est de protéger le public, quel qu'il soit et nous croyons que c'est uniquement en surveillant l'acte professionnel de tous ceux qui pratiquent la chimie professionnelle que l'on peut y arriver.

En terminant, je remercie les membres de la commission de leur bienveillante attention et

nous sommes à votre disposition pour les questions.

M. LE PRESIDENT: Le Solliciteur général.

M. FOURNIER: M. Bonnier, par le bill 250, nous tentons d'organiser un système en vertu duquel à l'article 169, il y a une participation à l'enseignement, c'est-à-dire que les corporations professionnelles vont rencontrer des universités et décider des programmes d'étude et des diplômes donnant ouverture au diplôme de chimiste, dans votre cas. En vertu de ce que vous nous présentez dans l'article 1, vous voulez étendre jusqu'à l'enseignement et, en vertu de l'article 15, vous allez plus loin encore, vous ajoutez un paragraphe mentionnant ceci: "Cependant, cet enseignement se fera sous la direction ou la surveillance d'un membre de la Corporation professionnelle des chimistes".

Si je regarde votre présentation, ceci veut dire que vous voulez vous réserver presque exclusivement, du moins en direction, l'enseignement pour devenir membre de votre corporation.

M. BONNIER: M. le ministre, ce n'est pas tout à fait notre intention. Nous réalisons que, par l'article 169 du bill 250, il y a dialogue entre les membres de l'enseignement et les corporations pour établir les programmes. Notre but n'est pas d'intervenir d'une façon directe dans les programmes pour établir tout le contenu de ce programme. Notre but est avant tout de surveiller l'acte professionnel même dans le milieu de l'enseignement. C'est surtout au niveau des laboratoires que cela nous inquiète le plus. Il peut sembler y avoir une contradiction entre l'article où nous demandons d'étendre la juridiction de notre corporation à l'enseignement et l'article 15; mais, en fait, ce que nous voulons, c'est faire reconnaître le principe que l'enseignement de la chimie constitue un acte professionnel. Nous voulons surveiller cet acte professionnel et, dans certains milieux d'enseignement, la question ne se pose pas véritablement. Il s'agit en fait de sanctionner une question de fait.

Au niveau universitaire, les professeurs sont éminemment qualifiés pour répondre aux exigences de la corporation. La plupart des directeurs des départements de chimie dans nos universités du Québec sont membres de la corporation. Au niveau des CEGEP, dans les grands CEGEP, il n'y a pas de problème non plus. Dans les CEGEP de moindre importance, il peut y avoir certains problèmes. Notre but est avant tout de surveiller l'acte professionnel. C'est au niveau de l'application de la chimie et non pas tellement au niveau de l'enseignement théorique, parce qu'au niveau de l'enseignement théorique, on réalise fort bien que l'article 169 du bill 250 va nous donner la possibilité de donner notre avis, du moins sur les programmes. Mais lorsque nous passons au laboratoire, on ne peut pas concevoir que ce laboratoire-là où on manipule des substances dangereuses, où on fait des expériences qui sont dangereuses, puisse être surveillé par des personnes qui n'ont pas une connaissance pratique de la chimie. A ce niveau-là, dans les universités, il n'y a pas de problème, ça existe déjà. Mais au niveau des CEGEP, il y a certaines lacunes à combler et, au niveau secondaire, il y a beaucoup de lacunes à combler. Comment voulez-vous, lorsque les jeunes élèves se réunissent dans un laboratoire, au niveau de l'enseignement secondaire et qu'ils sont initiés aux substances chimiques pour la première fois, ces gens-là ne peuvent vraiment pas faire les expériences qui sont décrites dans les programmes sous la surveillance d'appariteurs. Il faut absolument que la personne qui organise ces séances de travaux pratiques ait une connaissance de la chimie, autrement il y va de la sécurité de nos élèves. Nous avons tous été témoins, dans le passé, de certains accidents malheureux qui auraient pu être évités, si simplement les personnes qui organisaient ces laboratoires avaient eu une connaissance pratique de la chimie.

M. FOURNIER: Votre rôle comme corporation professionnelle n'est-il pas plutôt de voir à ce que l'exercice de la profession de chimiste, dans votre cas, se fasse suivant certaines normes pour la protection du public? Relativement à l'enseignement, est-ce que ce n'est pas la responsabilité, quant à l'enseignement lui-même, des CEGEP, des écoles secondaires et des universités? Ce que nous tentons d'établir, c'est un système par lequel vous allez accepter, dans votre corporation, certaines personnes détenant les diplômes qui satisfassent à vos exigences. On ne demande pas aux corporations professionnelles d'aller surveiller la chimie à travers la province.

Le but de la loi est d'établir des corporations professionnelles qui aient des membres qualifiés qui s'appellent des chimistes professionnels. A ce moment-là, la population peut avoir confiance à ces chimistes professionnels.

Ce n'est pas une loi générale de protection du public comme on fait des lois pour la sécurité des établissements, la sécurité des machines, etc. C'est une loi de corporation professionnelle. L'article 169 mentionne ceci: "La corporation s'entend avec l'université, relativement au diplôme". Et si le diplôme du CEGEP ne fait pas votre affaire, vous ne les accepterez pas dans vos rangs.

L'article 169 mentionne ceci: "Le lieutenant-gouverneur en conseil, après consultation de l'office et de la corporation intéressée peut, par règlement, déterminer les diplômes délivrés par les établissements d'enseignement." Votre rôle est de garantir au public les services de ceux qui sont membres de votre corporation.

M. BONNIER: M. le ministre, je crois que notre loi actuelle va un peu plus loin que ça.

Elle nous permet de contrôler la pratique de la chimie. Vous n'avez qu'à consulter notre bill 265 où il est bien dit que, dans certains milieux, il y a obligation pour les chefs de laboratoire de faire partie de notre corporation. En somme, lorsqu'il s'agit de protéger le public; pour nous, le public étudiant, est un public à protéger aussi bien que le grand public en général.

D'abord, une des premières fonctions de notre corporation, et je suis d'accord avec vous, c'est de s'assurer que les personnes qui pratiquent la chimie professionnelle ont la préparation adéquate. Deuxièmement, nous avons la responsabilité, suivant notre loi actuelle, de contrôler cet acte professionnel. En somme, ce que nous vous demandons, c'est tout simplement d'étendre notre contrôle à la surveillance de l'acte professionnel au niveau de la pratique de la chimie, surtout au niveau de l'organisation des laboratoires et de la surveillance des séances de laboratoire dans les maisons d'institution.

M. FOURNIER: Si je compare avec la Corporation professionnelle du Barreau, vous avez constaté que, dans les universités, les professeurs ne sont pas tous membres du Barreau.

M. BONNIER: C'est un fait.

M. FOURNIER: C'est une corporation à côté de l'université mais il faut que les deux se rencontrent de façon qu'il n'y ait pas une multiplicité d'examens.

Seconde question relative à la disposition du deuxième paragraphe de l'article 14. A ce moment-là, vous voulez que, dans chacune des entreprises, toutes les analyses chimiques se fassent par des chimistes membres de votre corporation puisque l'article mentionnait ceci: "Nonobstant le paragraphe 1, lorsque plus d'un employé d'un même établissement industriel exécute un travail qui est l'exercice de la chimie professionnelle, seul le chimiste chef de ces employés a l'obligation d'être membre de la corporation". Vous voudriez donc que tous ceux qui travaillent dans une industrie soient des chimistes membres de votre corporation et qu'il ne puisse pas y avoir d'employés qui soient des assistants de ceux qui sont membres de votre corporation.

M. BONNIER: Tout d'abord, sur votre première question, M. le ministre, il est exact que, pour être professeur à l'université, en droit, il n'est pas nécessaire d'être membre du Barreau. C'est exact aussi que, pour certaines autres professions, ce n'est pas nécessaire. Par contre, ces gens-là, les diplômés de ces facultés, sont obligés de passer des examens d'admission au Barreau, entre autres des examens d'admission à la Chambre des notaires.

Chez nous, nous n'avons pas d'examen d'admission. Nous reconnaissons d'abord que les diplômes décernés par nos maisons universitaires sont adéquats et nous admettons les diplômés spécialisés en chimie directement sans examen d'admission. Le fait que nous aurons une voix au chapitre par le biais de l'article 169 du bill 250 renforce notre conviction qu'il ne sera pas nécessaire à l'avenir d'établir desexamens d'admission puisque nous aurons pu exprimer nos voeux aux commissions qui sont chargées d'établir les programmes.

D'autre part, dans certaines professions, l'enseignement est reconnu comme étant une pratique de la chimie professionnelle. Dans la Loi des agronomes professionnels, dans la définition de la pratique de l'agronomie, vous avez une définition qui englobe l'enseignement comme étant de la pratique de l'agronomie. En somme, il y a déjà des précédents qui ont été créés.

Au sujet de votre deuxième question, le fait d'abroger l'article 14, paragraphe b) ne veut pas dire que tous ceux qui vont pratiquer la chimie seront tenus d'appartenir à la corporation, parce qu'à l'article 1 de notre loi actuelle nous avons déjà certaines exclusions. On ne considère pas que des analyses de routine et que le contrôle de procédés industriels constituent de la chimie. Vous avez ça dans la définition 1 b) de notre loi actuelle. Donc, il y a certaines exclusions.

Ce que l'on veut, c'est qu'il y ait une distinction à faire entre la chimie tout court et la chimie professionnelle. Lorsqu'il s'agit d'exécuter des travaux de chimie suivant des méthodes connues et sur une base purement de routine, nous ne considérons pas que c'est de la chimie professionnelle. La chimie professionnelle commence là où l'on fait de l'interprétation de résultats, là où l'on fait du développement, là où l'on fait de la mise au point, autrement dit, là où il y a un certain secteur où l'on doit exercer un jugement, où l'on doit innover. C'est là de la chimie professionnelle.

Le fait d'abroger le paragraphe b) de l'article 14 n'entrafnerait que ceci: Tous les chimistes qui exercent la chimie professionnelle sont obligés d'être membres de leur corporation parce que le bill 250 nous apportera des frais additionnels.

On ne pourra pas s'administrer avec le budget que nous avons et nous considérons qu'il s'agit d'une question d'équité. Pourquoi faire porter sur environ 600 à 700 membres tout le fardeau de ces coûts additionnels alors que tous les chimistes font la même chose? Ce que cela veut dire, en comme, c'est que dans l'entreprise aujourd'hui, surtout dans la grande entreprise, vous avez des morcellements. Vous n'avez plus maintenant un laboratoire central. Vous avez plusieurs petits laboratoires et chaque laboratoire a son chef. Dans le cas actuel, seul le directeur scientifique d'une entreprise est tenu d'être membre de la corporation. Or, souvent c'est un administrateur qui est coupé des réalités quotidiennes. Comment pouvons-nous concevoir que cette personne puisse contrôler la qualité de l'acte professionnel de tout son personnel, pas plus qu'un chef médecin,

d'ailleurs, dans un hôpital, ne peut contrôler tous les actes posés par ses aides-médecins. On exige que les médecins, que les avocats pratiquants soient tous membres de leur ordre. En somme, on ne fait que demander ce qui existe déjà.

M. FOURNIER: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Est-ce que les biochimistes font partie de votre association?

M. BONNIER : Oui. Et je suis très heureux de votre question parce qu'en somme cela renforcira le point que je viens de vous soulever. Si on devait s'en tenir uniquement aux termes de la loi, seul le chimiste principal, dans un hôpital, serait tenu de faire partie de la corporation. Or, l'association des biochimistes d'hôpitaux exige comme une des conditions d'admission que l'individu soit d'abord membre de sa corporation professionnelle, reconnaissant par là que tous les actes posés à l'intérieur d'un laboratoire de biochimie, au niveau de la chimie professionnelle, sont primordiaux. Et le chef chimiste reconnaît que, pour lui, il n'est pas question d'aller vérifier tous les jours si les actes posés par tous ses subalternes sont de qualité professionnelle, cette chose étant déjà établie par l'ordre.

M. BOIVIN : Alors, vous voulez dire que le biochimiste qui est à l'hôpital doit d'abord être médecin?

M. BONNIER: Non. En fait, la fonction du médecin et du biochimiste est totalement différente. Le médecin n'est pas un biochimiste. Le médecin peut devenir un biochimiste s'il prend des cours spécialisés en biochimie mais le biochimiste a reçu une formation tout à fait spéciale au point de vue théorique et au point de vue pratique, pour effectuer un travail tout à fait spécial, celui de l'analyse des humeurs humaines et de s'assurer que les méthodes de contrôle sont adéquates de façon que le médecin puisse poser un diagnostic à partir des données qui lui sont fournies par le biochimiste dans l'hôpital.

M. BOIVIN : La biochimie est une spécialité de votre corporation?

M. BONNIER: A l'article 1 b), nous avons la définition de la biochimie, de la clinico-chimie et c'est une spécialité de notre corporation.

M. BOIVIN : Concernant la radiologie, quelle école fréquentent vos étudiants?

M. BONNIER : Ici, il faudrait s'entendre sur la définition de la radiologie. S'il s'agit de faire des radios sur des êtres humains, ce n'est pas notre rôle. Là où l'on se sert d'appareils de rayons X, on se sert d'éléments radioactifs pour des déterminations en laboratoire. Cet entraînement a été fourni dès l'université. Ce n'est pas tellement mystérieux que de se servir d'un appareil qui génère des rayons X et de prendre des radios de cela.

Ensuite, nous apprenons,de même que le radiologiste, de même que le technicien dans un hôpital, va prendre des radiologies sur un être humain, lesquelles radios sont passées au médecin pour interprétation, nous sommes capables de prendre des radios des métaux et comparer à ces radios des standards pour déterminer si les métaux en question présentent une uniformité de structure. Alors, ce sont des choses auxquelles on nous entraîne dès l'université,

M. BOIVIN: Maintenant cette question m'amène à une autre. C'est une opinion personnelle que je vous demande, parce que je crois qu'il y a des dangers dans la manipulation des rayons X, quoique vous venez de dire que c'est une chose qui est assez facile. Est-ce que vous croyez que, dans la province de Québec actuellement, nous avons des lois adéquates pour le contrôle et la réglementation pour permettre à tout le monde, par exemple, d'exercer ce métier de radiologiste? Pour mieux «l'expliquer, c'est que, dans le commerce, on fait usage de radiologie. Dans l'industrie, vous venez de le dire, il me semble qu'il y a des dangers pour le public de ne pas avoir les lois adéquates et les inspections nécessaires pour la manipulation de ces rayons X. Je sais, par exemple, dans le domaine médical, qu'à un moment donné un dentiste s'installe dans le bas d'une résidence, dans un immeuble d'habitation, est-ce qu'on peut dire que le public en général est protégé si tout le monde peut en faire l'usage?

M. BONNIER: Lorsque vous dites tout...

M. BOIVIN: Est-ce qu'on ne devrait pas avoir une loi spéciale dans la province pour régir l'emploi des rayons X?

M. BONNIER: Lorsque vous dites que tout le monde peut se servir des rayons X, je pense que tout de même il y a certaines limitations présentement. Tout le monde ne peut pas s'en servir justement. Vous avez tout d'abord des techniciens qui se servent de rayons X et vous avez des professionnels. Parmi les professionnels, il y a des médecins, des chirurgiens dentistes, des médecins vétérinaires et égale- ment des chimistes. Or, ce que nous demandons, en somme, nous, c'est ceci: l'article 171 est un article très bienvenu, ça pourrait faire l'objet d'une loi tout à fait spéciale, nous n'avons pas étudié la question. Mais l'article tel qu'il est, nous croyons qu'il est beaucoup trop restrictif. Nous croyons que cet article, tel qu'il est, a besoin de précisions, c'est-à-dire que la radiologie faite sur des êtres humains ou sur des

animaux relève d'autres professions, excepté si cette radiologie est faite en laboratoire, sur des animaux de laboratoire, pour permettre au biochimiste de poursuivre ses recherches, mais ça entre dans le cadre de nos responsabilités. Alors, on ne voit pas comment il faudrait pour nous obtenir un permis pour utiliser un moyen de travail que nous avons déjà. Or, nous ne sommes pas n'importe qui. Les chimistes sont des gens qui ont reçu une formation hautement spécialisée, hautement théorique et pratique. En somme, nous ne voulons pas être à la remorque de n'importe quel autre professionnel pour aller demander des substances radioactives pour faire nos travaux. Est-ce que j'ai répondu à votre question?

M. BOIVIN: J'ai bien confiance à tous ces professionnels qui sont sûrement capables de manipuler les rayons X, mais je crois que dans la province nous n'avons pas la législation et c'est que vous réclamez actuellement certaines choses.

Peut-être que le bill 250 est trop restrictif, mais ne croyez-vous pas que par une loi spéciale où vous allez admettre des diplômés comme la chirurgie dentaire en admet, comme la médecine vétérinaire en admet, comme les médecins et tous ces spécialistes vont en admettre et qu'ils aient leur petit laboratoire où ils feront des rayons X un peu partout? Actuellement, il y a eu certaines restrictions, mais on ne peut pas dire que la manipulation des rayons X dans des magasins à rayons sert la protection du public. Des restrictions ont été faites, je ne veux pas limiter ceux qui sont compétents mais il y a danger, manque de protection dans le champ d'action où ces rayons X sont manipulés, je le dis et je l'affirme pour le besoin de la cause, et on devrait voter une loi spéciale pour la protection du grand public.

Je suis d'accord qu'un professionnel établisse un laboratoire, il n'est pas nécessaire que ce soit votre association, mais tous les médecins, la médecine biochimique, les chimistes, les industriels. S'il faut étendre la mesure aux commerces, je ne veux pas qu'il y ait de restriction, mais que l'on soit pas dans une situation inférieure dans la province. Je n'admets pas qu'on ne puisse pas utiliser tout ce que la science nous donne, mais je dis et je l'affirme, pour l'avoir contasté lors de mon passage au ministère de la Santé, actuellement, il n'y a pas de protection adéquate pour le grand public. On fait des rayons X sans avoir des chambres plombées un peu partout dans la province.

M. LE PRESIDENT: Je pense qu'on s'est éloigné un peu du sujet. L'idée est très bonne mais on y a déjà répondu.

M. BOIVIN: Je pose la question pour avoir une opinion.

M. LE PRESIDENT: On a déjà répondu à ces questions et donné une opinion personnelle. Je pense que votre idée est très bonne mais elle devrait être mentionnée ailleurs.

M. BOIVIN: Je vais poser la question partout, à ceux qui font des rayons X.

M. LE PRESIDENT: D'accord, on a eu la réponse, votre idée sur la question des rayons X est très bonne, mais je pense que ce n'est pas dans le contexte de ce bill.

M. BOIVIN: On se plaint qu'il y a restriction, alors, j'affirme qu'on devrait avoir une loi spéciale pour donner un permis à tous ceux qui doivent en avoir.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, le mémoire présenté par les chimistes ne s'attarde qu'à quelques points particuliers. Je dois peut-être en conclure qu'ils sont satisfaits dans l'ensemble de la loi proposée. Tantôt, M. le Président, vous avez présenté ceux qui vous accompagnent en disant qu'il y a parmi eux un représentant au Conseil interprofessionnel.

M. BONNIER: C'est exact.

M. CLOUTIER (Montmagny): Es ont travaillé probablement à la préparation du mémoire conjoint. En ce qui concerne les points que vous n'avez pas touchés, cela voudrait-il dire que vous êtes d'accord sur les positions prises ici devant la commission parlementaire par le Conseil interprofessionnel dont le porte-parole était M. Sheppard?

M. BONNIER : Nous avons, dans notre représentation, dit tantôt que nous étions solidaires des recommandations et suggestions du mémoire du Conseil interprofessionnel. Il est exact que nous avons participé à tous les stades de l'élaboration de ce mémoire. Nous avons fait nos représentations sur les articles particuliers qui nous intéressaient à l'intérieur de nos séances de préparation du mémoire et nous avons trouvé satisfaction dans la rédaction du mémoire final.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous êtes d'avis que le Conseil interprofessionnel soit institutionnalisé par le bill 250?

M. BONNIER: Qu'il soit reconnu, oui. Quant à être institutionnalisé, nous existons déjà depuis un certain temps.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, mais pas dans le cadre de la loi et, à ce moment-ci, cet organisme reçoit une reconnaissance officielle et avec des pouvoirs plus élaborés que ceux qu'il avait auparavant. D'autres organismes ont

mentionné qu'ils devaient rester en dehors des cadres de la loi et que l'adhésion au Conseil interprofessionnel soit volontaire. Il y a plusieurs organismes qui ont mentionné cela aussi.

M. BONNIER: Nous préférons que l'adhésion soit sur la base volontaire.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quant à la définition, vous avez mentionné tantôt avec raison que certaines corporations professionnelles, dans les lois spécifiques qui vont les régir, avaient dans leur définition un aspect qui touche l'enseignement. Vous avez parlé, entre autres, de la Loi des agronomes, bill 258, et je pense qu'on les reçoit tantôt, après vous. Dans la définition, à l'article 24, on dit: Constitue l'exercice de la profession d'agronome tout acte posé moyennant rémunération, qui a pour objet d'enseigner, de vulgariser. Alors, vous avez mentionné au ministre tantôt, au député de Gatineau, cet aspect de l'enseignement contenu dans la définition. D'autre part aussi, dans la question des règlements il est prévu à l'article 69 — le ministre l'a mentionné tantôt — que les corporations professionnelles vont tout de même être consultées à certains stades et, pour certains aspects, avant que le permis ou qu'un certificat de spécialiste ne soit délivré. Si j'ai bien compris tantôt, vous n'êtes pas satisfaits du rôle et des responsabilités que pourront assumer les corporations professionnelles en ce qui concerne la formation. Est-ce exact?

M. BONNIER: Non, M. Cloutier. Je crois que ce qui est important pour nous — d'abord, on reconnaît que cet article 169 du bill 250 est un pas dans la bonne direction— c'est qu'il s'établit un dialogue entre les corporations professionnelles et les maisons d'enseignement et que ce dialogue ne peut que bénéficier aux futurs diplômés. Nous sommes très heureux de cette chose. Seulement ce qui nous inquiète, on peut avoir les meilleurs programmes du monde, si certains aspects des programmes constituent un entraînement pratique vers la spécialité ou vers la formation ultime d'un étudiant, nous calculons à ce moment-là, si ce n'est pas sous la surveillance d'un praticien, qu'il y a une lacune à combler.

Il ne faut pas oublier que la chimie, comme d'ailleurs bien d'autres sciences, est une science avant tout expérimentale. Nous avons d'abord une formation théorique hautement poussée et, ensuite, nous avons une formation pratique. Le chimiste apprend dès l'université à se servir des divers appareils et des diverses substances-, il fait des expériences, il acquiert un doigté, etc., au niveau de la pratique. Comment voulez-vous que cette pratique soit sûre, uniquement parce que des programmes ont bien été élaborés, si cet aspect spécial n'est pas sous le contrôle d'une personne qui connaît la pratique elle-même? Un professeur peut avoir une formation hautement théorique; s'il n'a pas une formation pratique, il n'est pas apte à surveiller des travaux pratiques. Seulement, j'insiste ici, ce n'est pas le cas de nos professeurs dans les universités et dans la plupart de nos CEGEP à Montréal. La plupart de nos directeurs des départements de chimie sont des membres de la corporation. Donc, ils sont déjà aptes à voir à ce que la sécurité des laboratoires où se font des travaux pratiques soit assurée.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, c'est surtout l'enseignement dans sa dimension pratique, c'est là le sens de vos représentations devant la commission.

M. BONNIER: C'est là que se situe le niveau de nos préoccupations.

M. CLOUTIER (Montmagny): D'accord, merci.

M. LE PRESIDENT: M. Bonnier, je pense que ce sont là toutes les questions qu'on veut vous poser et je veux remercier votre délégation et la corporation pour le résumé du mémoire et pour être venues ici aujourd'hui.

M. BONNIER: Je vous remercie beaucoup, messieurs les législateurs.

M. LE PRESIDENT: La Corporation des agronomes.

Me Denys Aubé.

Corporation des agronomes de la province de Québec

M. AUBE : M. le Président, si vous me permettez, Denys Aubé, avocat. Je représente la Corporation des agronomes pour les fins de ce mémoire, ici à la commission parlementaire. Je vais d'abord vous dire que je suis accompagné à ma gauche de M. Bertrand Forest, qui est l'actuel président de la corporation et, à ma droite, de M. Paul Morin, qui est le président tout nouvellement sortant et, à l'extrême gauche, de M. Théodore Mongeon, qui est secrétaire général de la corporation.

Notre mémoire a été déposé, il y a déjà quelques mois. Nous avons également soumis un document, il y a quelques mois aussi, à l'effet que nous donnions notre appui au mémoire du Conseil interprofessionnel. Ce matin, si on ne l'a pas fait, nous avons apporté quelques amendements aux articles 24, 25 et 29 qu'on vous a distribués.

Alors, sans plus tarder, parce qu'il y a beaucoup de délégations ici ce matin, je demanderais à M. Bertrand Forest, le président, de vous exposer le mémoire de la Corporation des agronomes de la province.

M. FOREST: M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire spéciale des corporations professionnelles de l'Assemblée nationale.

Les membres de la Corporation des agronomes de la province de Québec ont étudié le projet de loi 258, communément appelé, intitulé "Loi des agronomes" et ont fait connaître leur point de vue au secrétariat général par l'intermédiaire de leur président de section qui est membre du conseil administratif de la corporation. Les onze corporations régionales sont les cellules de notre corporation générale et le mémoire que nous vous soumettons respectueusement représente donc les vues des membres de la Corporation des agronomes du Québec. Le secrétariat de notre corporation dispose, depuis 1937, d'un secrétaire général permanent, d'un personnel de secrétariat, et a apporté à l'étude du projet de loi 258 une attention particulière qui tient compte des procédés administratifs qui nous sont propres et de l'expérience acquise, au cours des 35 dernières années.

Depuis plusieurs années, les agronomes désiraient des amendements à la loi qui les régissait, car cette dernière devenait de moins en moins adéquate, puisqu'elle avait été sanctionnée le 29 mai 1942. Depuis lors, la loi des agronomes a connu peu de changements. Par ailleurs, on sait que l'agriculture a évolué durant cette période. Le champ d'action de l'agronome s'est considérablement agrandi. De nouvelles sciences sont apparues dans les programmes universitaires d'enseignement agronomique. Le rôle de l'agronome a une dimension mondiale, puisqu'il voit à nourrir le genre humain. Un célèbre auteur américain écrivait récemment "Can we learn to feed the world in time? " La famine mondiale est arrêtée temporairement par ce que l'on appelle communément la révolution verte en agriculture. Ici même au Québec, les problèmes sont nombreux. On ne produit pas tout ce qu'on pourrait produire sous nos propres conditions pour suffire à nos propres besoins alimentaires.

Les deux facultés d'agriculture situées au Québec, celle de l'université Laval, celle de l'université McGill, Collège Macdonald, dispensent un enseignement universitaire supérieur de haut calibre; leurs diplômés occupent les postes les plus variés au Québec, au Canada, à l'étranger et leur influence est considérable. Les membres de la Corporation des agronomes expriment leur reconnaissance au législateur qui a jugé bon de refondre la loi de leur corporation. Dans son ensemble, le projet de loi nous plaît et les considérations qui suivent n'ont pour but que de l'améliorer et de parvenir à une plus grande efficacité.

Premièrement, dans la version anglaise du projet de loi 258, on traduit "agronome" par "agronomist". C'est une traduction impropre. Le mot "agronomist" est restreint et qualifie celui qui s'occupe de grandes cultures, culture des céréales, des plantes fourragères en grand champ. Alors que le mot "agrologist" est celui qui applique les sciences à l'agriculture, sans restriction, et dans tous les domaines de l'agri- culture, soit l'élevage, l'alimentation. D'ailleurs, l'Institut agricole du Canada qui est l'homologue de la Corporation des agronomes ici au Québec, traduit ce terme par "agrologist" au lieu de "agronomist". Nous demandons donc que le mot "agrologist" soit substitué à celui de "agronomist" à 47 endroits différents de la version anglaise du projet de loi 258.

Choix des membres du bureau nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, l'article 5. Nous considérons que le rôle des membres du bureau nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil en est un d'observation avec pouvoir de délibération et de votation. A ce point de vue, nous croyons fermement que ce rôle peut être efficacement tenu par un seul membre nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil.

Nous sollicitons de plus que ce délégué soit choisi parmi une liste de noms provenant de divers milieux et suggérés par notre corporation.

M. le Président, lors du dernier congrès de la corporation, tenu au début de juin à Trois-Rivières, les agronomes se sont opposés à la désignation, par le gouvernement, d'administrateurs de la Corporation professionnelle des agronomes du Québec.

Délégués au bureau. Article 7. Depuis la fondation de notre corporation en 1942, les présidents de section ont toujours été délégués au bureau provincial d'administration, appelé chez nous le conseil administratif. On constate, par le tableau suivant, la variation entre les effectifs des sections de la corporation.

Le président de section, au niveau local, est l'autorité démocratiquement élue. C'est la personne la mieux informée de ce qui se passe au sein de sa section. Le président de section constitue le lien essentiel entre la corporation générale et les membres de sa section, servant d'agent d'information dans les deux directions.

Si le président de section ne peut pas être le délégué au bureau provincial, nous croyons qu'il se créera une double autorité au sein de la section et nous ne pouvons concevoir que le délégué puisse être une autre personne que le président de section élu au suffrage universel par les membres de sa section.

Nous demandons qu'une disposition précise au projet de loi 258 soit inscrite pous s'assurer que le président de section est le délégué au bureau, avec pouvoir de se nommer un remplaçant en cas d'incapacité.

Cotisations. Depuis huit ans, le secrétariat général de notre corporation recueille les cotisations de tous les agronomes et remet à chacune des sections une ristourne de 10 p.c, avec un minimum de $300, de l'argent perçu des membres de la section concernée. Cette procédure a beaucoup amélioré le rythme de perception des cotisations et toutes nos onze sections sont unanimes à vouloir que ce système continue, afin que la corporation générale dispose de revenus nécessaires à sa régie.

Il est également bon de souligner que si

chacune de nos sections est indépendante, aucune d'entre elles ne dispose d'un personnel permanent. Nous demandons donc, que le projet de loi 258, à l'article 10 c), soit modifié et confirme ce qui existe en fait depuis huit ans. Et afin d'éviter que les membres d'une section puissent être obligés d'acquitter une cotisation supplémentaire, nous sollicitons l'abrogation de l'article 18 du projet de loi 258.

Modifications aux territoires des sections. Quatre de nos corporations régionales ont exprimé le désir de modifier leur appellation ou la répartition des districts électoraux qui les concernent. Le district électoral de Témiscouata ferait partie de la Corporation des agronomes de Rivière-du-Loup-Gaspé et serait retranché de la Corporation des agronomes de la région de La Pocatière. Les deux corporations régionales concernées ont donné leur approbation à cette décision.

La Corporation des agronomes de la région Abitibi-Témiscamingue a exprimé le désir d'être désignée sous l'appellation la Corporation des agronomes du Nord-Ouest québécois. Cet amendement à nos règlements a été approuvé lors de l'assemblée générale de la' corporation au début de juin dernier.

Enfin, la Corporation des agronomes de la région Lac-Saint-Jean-Saguenay désire également modifier son appellation en Corporation des agronomes de la région Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Exercice et résidence. Depuis 1937, le lieu de résidence a toujours été le critère d'appartenance à une section. Nous croyons que, pour minimiser le transfert de membres entre les sections, le critère de résidence soit ajouté à celui de l'exercice de la profession. Et si l'un des deux critères, exercice et résidence, doit disparaître, nous préférons que subsiste celui de la résidence.

Fonction agronomique. Article 24. L'agriculture a évolué et évolue rapidement. La ferme agricole est devenue une entreprise commerciale. Des étudiants en agronomie, au niveau universitaire, étudient maintenant de nouvelles sciences que les plus vieux agronomes n'avaient pas perçues. Les méthodes d'approche des agronomes auprès des cultivateurs sont différentes de celles qui avaient cours il y a moins de dix ans. L'agriculture n'est plus uniquement une affaire de production mais aussi, et surtout, une affaire de transformation.

Le rôle de l'agronome dans une agriculture moderne est perçu et apprécié dans de nombreuses sphères comme essentiel puisque de son action professionnelle dépend l'alimentation des humains. L'agronome est le seul professionnel de l'agriculture, le seul capable d'appliquer les sciences à l'agriculture. Il lui faut donc disposer d'une autorité légale qui lui permette d'oeuvrer et d'empêcher les charlatans de mal conseiller la classe agricole.

Le terme agronomie dépasse de beaucoup le cadre étroit et restreint qu'on lui attribue normalement, soit la connaissance supérieure de l'agriculture. Un éminent agronome français précisait en termes très courts, brefs, une définition de l'agronomie: "C'est la connaissance des faits agronomiques et des moyens de les apprécier".

Depuis plusieurs années, les agronomes aspirent à une définition légale plus à jour de leur travail professionnel. Cette nouvelle définition de leur profession, les agronomes la souhaitent ardemment, non pas pour revendiquer des droits qu'ils ne peuvent avoir, non pas non plus pour éliminer et dominer des gens qui gagnent leur vie en agriculture, non pas pour restreindre le champ d'action d'autres professionnels mais pour caractériser leur action, pour en déterminer la portée, pour leur permettre d'appliquer à l'agriculture les sciences qu'ils ont étudiées.

Deux solutions se présentent à ce désir de modifier la définition légale de l'exercice de la profession d'agronome, une définition détaillée des diverses fonctions agronomiques ou une définition plus large qui ne nécessitera pas d'être modifiée à la suite de l'évolution de la profession. Nous avons consulté tous les agronomes et 80 p.c. d'entre eux ont opté pour une définition plus large de leurs fonctions. Nous avons remis ce matin la définition des fonctions agronomiques qui ont été choisies et approuvées par les membres de la corporation.

Modification de l'article 24. Article 25: Droits et privilèges. Rares sont les professions qui peuvent réclamer l'exclusivité absolue d'un champ d'exercice de leur profession. Il est fréquent de voir plusieurs professionnels de professions différentes travailler à la réalisation d'un projet. Cette complémentarité des professions a son origine à l'université où le mouvement de décloisonnement des facultés est maintenant chose irréversible.

Nous sommes d'avis que la rédaction de l'article 25, tel qu'il apparaît au projet de loi 258, est préjudiciable aux intérêts professionnels des agronomes parce qu'elle accorde la priorité de l'exercie des fonctions à tout professionnel dont la loi qui le gouverne contient une ou plusieurs fonctions incluses dans la définition de la fonction agronomique. Et la portée de cet article est considérable puisqu'elle englobe toute fonction qu'une corporation pourrait éventuellement ajouter aux siennes ou croire être siennes.

Nous acceptons l'article 25 dans sa rédaction actuelle à condition que pareille disposition apparaisse aux lois constitutives des médecins vétérinaires, des ingénieurs, des arpenteurs, des ingénieurs forestiers et des chimistes professionnels.

Comité des examinateurs. Article 26. La Corporation des agronomes se réjouit du fait que le législateur ait maintenu au comité des examinateurs qui jugera de la qualité des candidats à l'exercice de la profession. Notre corporation, soyez-en assurés, s'acquittera de

cette tâche et profitera de l'expérience qu'elle a acquise depuis 1942 et qui a permis à plus de 1,768 candidats de devenir membres.

Dans les pouvoirs que le projet de loi 258 accorde au comité des examinateurs, il y a celui de faire subir un examen écrit et un examen oral.

La Corporation des agronomes veut que ce pouvoir demeure mais apprécierait que l'imposition d'un examen écrit soit laissée à la discrétion des membres du comité des examinateurs. L'examen écrit, par exemple, des diplômés de nos deux facultés d'agriculture du Québec pourrait être celui imposé par ces dernières.

Nous sollicitons un amendement à l'article 26 du projet de loi 258 dans ce sens.

Dispositions transitoires. Article 31, article 36. Comme nos onze sections ont par la loi qui nous gouverne présentement des pouvoirs et des devoirs, nous croyons que les dispositions transitoires dont il est fait mention à l'article 31 spécifient qu'elles s'appliquent également aux sections.

Il en est ainsi des règlements qui demeurent en vigueur et dont l'article 36 doit faire mention pour les règlements des sections.

Corporation régionale. Le projet de loi 258 utilise abondamment le mot section pour désigner la corporation régionale. Nous préférons de beaucoup que les mots corporation régionale remplacent le mot section dans tout le texte du projet de loi 258.

Texte français et texte anglais. Les agronomes ont signalé que le texte français du projet de loi 258 pouvait être amélioré sans pour autant en affaiblir l'interprétation. Croyant que cette tâche revenait au législateur, nous n'avons pas cru bon d'aller plus avant dans ce projet.

Afin d'expliciter le mémoire, il nous fera plaisir de répondre à vos questions et je vous remercie de votre bienveillante attention, M. le Président et messieurs les membres de la commission parlementaire.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gatineau.

M. FOURNIER: Relativement au premier point que vous avez souligné à l'effet que le mot anglais "agrologist" serait plus conforme à la loi, est-ce que vous avez examiné la définition française du mot agrologiste ou agrologie? Parce qu'il semble que, dans le texte, si l'on prend le mot agrologie en français, ce terme a moins d'étendue que l'agronomie. Et avez-vous comparé? Peut-être est-ce plus restreint en anglais? Peut-être est-ce le contraire?

M. FOREST: C'est que "agronomy" en anglais est très restrictif.

M. FOURNIER: II est plus restrictif qu'en français?

M. FOREST: C'est plus restrictif "my" que "mie". C'est pour cela qu'en accolant agronomist à agronomy, on restreint. Il y a aux Etats-Unis ce qu'on appelle Agronomy Department dans une université qui ne constituera que l'étude des plantes de grandes cultures, les plantes fourragères, les céréales, à l'exclusion des plantes horticoles, des animaux et de tout. Et parfois on y inclut le sol dans d'autres universités et c'est différent. Alors, nous trouvons que le mot "agronomy" anglais est très très restrictif. C'est pour cela qu'on voudrait l'étendre.

M. FOURNIER: En français, c'est le contraire?

M. FOREST: Oui.

M. FOURNIER: L'agrologie est restreinte à la grande culture, comme vous le mentionnez et ne s'étend pas aux animaux.

M. FOREST: Et comme je l'ai mentionné, les Anglais eux-mêmes utilisent le terme "agrologist".

M. FOURNIER: Vous nous avez soumis une définition de champ d'exercice de la profession, de même qu'une définition de l'agriculture. Et, dans la définition de cette dernière, vous lui donnez une étendue qui couvre la production, l'entreposage, la transformation et la distribution. Je devance peut-être les mémoires qui seront entendus. De quelle façon considérez-vous les personnes qui manufacturent et vendent les produits? Est-ce que ces gens, lorsqu'ils se présentent, soit à la coopérative ou chez le gros cultivateur et lui suggèrent des produits, lui vantant leurs produits, la façon dont ils sont composés et leurs effets, comment considérez-vous ce champ d'exercice relativement au champ d'exercice que vous nous demandez dans votre définition? Il s'agit de la distribution; les vendeurs de moulées, quand ils se présentent...

M. FOREST: La minute où ils donnent un conseil au public — si on veut protéger le public adéquatement — ils doivent être en mesure de répondre à certaines normes professionnelles ou autres, parce qu'ils donneront immédiatement un conseil au producteur ou au cultivateur. A ce moment-là, ils devront posséder la compétence nécessaire pour protéger...

M. FOURNIER: Ils devront être membres de votre corporation. Comment considérez-vous la personne qui vend les produits pharmaceutiques, qui se rend chez les pharmaciens, les médecins et vante les nouveaux produits? Parce que dans votre article...

M. FOREST: Si c'est pour les produits pharmaceutiques pour les animaux...

M. FOURNIER: Non.

M. FOREST: ... je présume que les médecins vétérinaires eux-mêmes verront à ce point.

M. FOURNIER: C'est seulement par analogie que je fais la remarque. Cela prendra des agronomes aux entreprises commerciales pour aller voir les coopératives et pouvoir vanter leurs produits.

M. FOREST: S'ils donnent des conseils et des avis concernant la culture, il faudra qu'ils aient la compétence, qu'ils soient reconnus. Comment voulez-vous autrement protéger le public et vous assurer que l'acte professionnel qu'ils ont posé répond bien au code des professions que vous voulez établir?

M. FOURNIER: Sans être un acte professionnel, établir les valeurs nutritives des produits, cela fait partie de votre champ d'activités? Jusqu'à maintenant, quelles ont été vos relations avec ces gens?

M. FOREST: M. l'ex-président qui a été membre du conseil administratif pendant six ans pourrait peut-être vous parler des relations qu'il a entretenues. Si vous n'avez pas d'objection.

M. FOURNIER: J'aimerais cela.

M. FOREST: M. Morin a été associé...

M. MORIN: La plupart du temps vous avez dans chaque territoire, même dans chaque comté, un bureau du ministère de l'Agriculture auquel peuvent faire référence tous les cultivateurs qui sont indécis sur l'utilisation d'un produit qu'ils se sont procuré chez un revendeur ou même un manufacturier. A ce moment-là, il y a toujours un contrôle qui est exercé par un ou plusieurs agronomes sur l'utilisation du produit.

M. FOURNIER: Relativement à la production elle-même, je vois que vous le mentionnez dans votre définition, la production et la transformation, est-ce que ça veut dire aussi qu'il y aura un agronome dans les établissements qui produisent ou...

M. FOREST: Je pourrais répondre à votre question en disant que nous avons, par exemple, ici au ministère de l'Agriculture du Québec, des conseils, c'est ainsi qu'on les appelle: le Conseil des recherches agricoles du Québec, le Conseil des productions végétales, le Conseil des productions animales où sont regroupés les agronomes et les spécialistes du gouvernement du Québec, de celui du Canada qui a des établissements au Québec, des universités et de l'entreprise privée. Tous et chacun mettent en commun leurs renseignements, participent à certains travaux de développement expérimental ou même de recherche appliquée, étudient les résultats et, chaque année, on publie des recommandations précises. Souventefois, les produits auxquels vous avez fait allusion ont été essayés, ont été soumis même par certaines de ces compagnies; s'il s'agit de pesticides, ces produits ont été soumis aux essais qui ont été coordonnés par les comités et les conseils dont je vous ai parlé tout à l'heure.

M. FOURNIER: Revenant au mémoire plus précisément, vous mentionnez que le représentant nommé au bureau devrait provenir d'une liste soumise par votre corporation. Est-ce que vous seriez satisfait si la liste était faite par le Conseil interprofessionnel?

M. FOREST: Certainement que...

M. FOURNIER: Si elle est soumise par chacune des corporations, cela devient pas mal restrictif si on veut une représentation du public.

M. FOREST: Nous avons un délégué au Conseil interprofessionnel.

M. FOURNIER: Si la liste provenait du Conseil interprofessionnel...

M. FOREST: Elle serait épurée à une deuxième étape.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny-

M. CLOUTIER (Montmagny): M. Forest, concernant les régions qui sont contenues dans l'annexe, vous demandez certaines modifications. Le gouvernement a fixé par arrêté en conseil dix régions économiques dont il se sert pour l'administration du territoire. Je pense que le ministère de l'Agriculture a douze régions, si ma mémoire est bonne. Vous avez onze régions. En pratique, comment tout cela peut-il se conlier?

M. FOREST: Nous nous sommes surtout basés sur les districts électoraux.

M. CLOUTIER (Montmagny): Mais les districts électoraux, nous sommes à les étudier à nouveau dans cette même salle.

M. FOREST: C'est précisément pourquoi il y a deux corporations qui ont suggéré une modification.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ah bon! C'est en tenant compte de ces représentations que vous avez été amenés...

M. FOREST: Oui, il faut toujours qu'il y ait entente entre deux corporations régionales. La

modification au règlement doit être soumise avant l'assemblée générale annuelle de la corporation et l'amendement soumis au vote sous forme de résolution. Elle est même soumise au conseil général après que les deux corporations respectives se soient entendues pour les modifications à leur propre territoire. L'amendement au règlement doit être approuvé par l'assemblée générale de la corporation lors du congrès annuel.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, il faudra peut-être que le législateur tienne compte de cet élément de réforme électorale pour introduire un peu de souplesse dans cette législation là où les lois contiennent des annexes. Evidemment, il faudra toutes les revoir, à un moment donné, et il est même possible aussi que le ministère de l'Industrie et du Commerce revoie les régions, ce qui n'a pas été fait depuis 1965. C'est une remarque que je voulais faire devant la commission.

La deuxième question que je voulais vous poser, à même vos effectifs totaux de la corporation qui est de 1,248 membres, je pense...

M. FOREST: Le secrétaire général me disait hier qu'il y a 1,269 membres.

M. CLOUTIER (Montmagny): Il y a 1,269 membres.

M. FOREST: Il y a trois autres membres recrutés hier. Le total varie: 1,269.

M. CLOUTIER (Montmagny): Cela renforce votre position d'autant devant la commission parlementaire. Je voudrais aussi savoir quelle est la proportion des fonctionnaires, au niveau fédéral ou provincial. Vous avez une bonne proportion de vos membres qui sont fonctionnaires.

M. MONGEON: Est-ce que je peux répondre?

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui.

M. MONGEON: Dans l'établissement du pourcentage, si on part de 1,250, il faut enlever immédiatement 125 retraités, enlever une cinquantaine de finissants, parce que l'échantillonnage est fait une fois l'année du diplôme terminée. Cela nous ramène à 1,000 aux niveaux provincial, fédéral et municipal. J'établirais à environ 450 membres le nombre de ceux qui travaillent pour ces organismes fédéraux, provinciaux et municipaux.

M. CLOUTIER (Montmagny): Les autres sont...

M. MONGEON: ... dans l'industrie agricole et paragricole. Il y en a aussi dans l'enseignement un certain nombre.

M. CLOUTIER (Montmagny): L'évolution que l'on constate dans l'industrie de façon générale et dans l'industrie agricole, en agriculture en particulier, est-elle ce qui vous a amenés à modifier sensiblement la définition de l'agriculture pour les fins de la présente loi?

Je remarque en effet que, dans votre proposition de définition, à l'article 24, on va assez loin dans le champ couvert par la définition. Vous dites bien que, pour les fins du paragraphe précédent et sans en restreindre la portée générale, l'agriculture comprend telle chose, telle chose et telle chose. Mais vous allez dans l'exploitation des boisés de ferme, dans l'embellissement du paysage par les plantes et vous allez dans l'écologie agricole. D'autres groupes ou professionnels sent venus devant la commission parlementaire, en particulier des urbanistes, puisqu'il a été question d'urbanisme par rapport aux agriculteurs, par rapport aux écologistes. Je voudrais donc vous demander si vous prévoyez, en pratique, des difficultés quant au champ d'exercice de votre profession.

M. FOREST: Je n'en prévois pas.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous en prévoyez pour d'autres professions?

M. FOREST: Pour autant que ce n'est pas restrictif. Voyons ce qu'il y avait dans l'autre article, tel que mentionné: sous réserve des droits et privilèges expressément accordés. Le terme est peut-être un peu fort, s'il était sous réserve des droits et privilèges accordés à d'autres professions, ce n'est pas exclusif. Il y a des champs où c'est assez connexe, un peu comme en agriculture, de la recherche à la pratique, c'est continu. Parce que l'agriculteur expérimente chaque jour dans sa ferme les rendements de ses cultures, de ses animaux. Il fait des essais. C'est la même chose. Il y a des domaines qui y sont contigus, le domaine de la foresterie, où la classification des sols est faite par les forestiers. Les ingénieurs forestiers de même que les agronomes vont faire de la classification des sols. Il n'y a pas là de problème parce que ce sont même dans certains cas les normes de classification qui sont établies selon un système reconnu et le système est appliqué par l'un et par l'autre dans leur domaine respectif. J'ai cité une comparaison, même si je mentionnais dans la loi la classification des sols, il est bien entendu que les forestiers font de la classification et peuvent en faire.

M. CLOUTIER (Montmagny): Advenant la formation et la reconnaissance officielle, avec l'évolution telle qu'on la connaît, d'une profession qui s'appellera l'écologie, avec les développements qu'une profession comme ça est appelée à connaître dans l'avenir, est-ce que vous prévoyez que les écologistes agricoles qui seraient des agronomes pourraient se diriger davantage vers cette autre profession qui, sous

le nom générique d'écologistes, pourraient comprendre des membres de différentes spécialités telles que des agronomes, des urbanistes de différentes formations? Ce serait une spécialité de l'agriculture. A ce moment-là, on pousse un peu plus loin, la spécialisation mais, je vois que, dans le développement de votre profession, vous ne ferez pas autrement que de suivre le développement de votre profession.

Vous ne ferez pas autrement que suivre le développement des autres professions. Il va y avoir non seulement une formation générale, mais aussi une spécialisation, tenant compte de l'évolution et des problèmes nouveaux qui se posent. Prenons le problème de l'environnement, le problème ne se posait pas il y a 25 ans et il se pose aujourd'hui.

M. FOREST: Vous avez bien raison. Lors du congrès, c'est la remarque que j'ai faite aux membres de la corporation, il va falloir s'ouvrir au milieu, on ne peut pas vivre en vase clos, il va falloir ouvrir sur le milieu, il va falloir s'ouvrir aux problèmes de l'environnement. On est directement concerné, soit — le mot à la mode actuellement est pollution — par la pollution, pollution par l'agriculture et également pollution de l'agriculture par les développements industriels ou urbains. Si l'on mettait dans la balance le tort réciproque causé par l'un ou l'autre, on serait peut-être surpris de voir qui cause le plus de dommage au milieu environnant.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je suis content de vos remarques. J'ai posé ma question dans le contexte suivant. On a reproché longtemps, j'ai eu connaissance de ces reproches qu'on a adressés à votre profession, vous l'avez souligné tantôt, vous avez dit: Cela fait longtemps qu'on attend une refonte de notre loi pour pouvoir moderniser et assumer véritablement les responsabilités qui sont les nôtres. Alors, vous en étiez bien conscients. Dans certains milieux et dans le milieu agricole, on vous a adressé des reproches assez sévères sur l'évolution de votre profession et sur la possibilité pour votre profession d'assumer davantage des responsabilités. Il ne faut pas se faire d'illusions, la profession que vous exercez sera de plus en plus importante, étant donné ces avertissements que l'on entend souvent à savoir, en l'an 2000, ce qui va se passer pour l'alimentation. Encore ce matin, nous avions l'occasion d'entendre â la radio un économiste de l'alimentation ou de l'agriculture qui posait le problème. Alors, c'est pour cela qu'il est important que votre profession soit bien à l'heure de 1972 et qu'elle assume ses responsabilités, qu'elle ait des outils. J'attire l'attention du législateur sur le fait que l'agronimie, et avec les spécialités possibles dont on vient de parler, assume véritablement toutes les responsabilités qui seront les siennes.

C'est dans ce contexte-là que je vous posais la question et je vois que les agronomes sont conscients de l'évolution de leur profession et de la spécialisation qu'il va falloir qu'ils regardent eux aussi.

M. AUBE: Nous sommes heureux de ces remarques parce qu'évidemment le gros problème qui s'est posé est que, d'un côté, les agronomes voulaient élargir le plus possible le champ de définition de leur profession plutôt qu'en faire une définition détaillée. D'un autre côté, on ne pouvait pas faire cela sans jouer dans des territoires qui risquaient d'être communs. Par l'article 25, cette inquiétude au départ que vous souligniez, je pense, est prévue; c'est-à-dire que, si à un moment donné le législateur croit que les agronomes ne doivent pas bénéficier d'un pouvoir exclusif dans le domaine, par exemple, de la mise en marché ou de l'écologie, comme vous le disiez tout à l'heure, on pourra accorder expressément à d'autres professionnels ce droit d'après l'article 25. Mais nous, nous ajoutons un paragraphe à l'article 25 pour dire: Si le législateur décide d'ouvrir un champ qu'on demande ici à d'autres, cela ne voudra pas dire que cela nous l'enlève, ce sera une juridiction concurrente. Je pense qu'à ce moment-là la définition est large chez nous mais elle n'empêche pas les autres de jouer si le législateur en décide ainsi.

M. LE PRESIDENT: Merci. Le député de Dorchester.

M. GUAY: J'aurais également quelques questions. J'ai remarqué au cours de l'évolution de l'agriculture, comme vous le dites si bien, que le rôle de l'agronome a légèrement changé et s'est transformé. Il y a eu une transformation qui s'est faite naturellement, mais la plus grande transformation qui semble se concrétiser de nos jours, c'est qu'il semble que l'agronome est de plus en plus un bonhomme qui remplit des formules ou qui indique à l'agriculteur de quelle façon remplir telle ou telle formule. Je pense aux travaux mécanisés actuellement : les gens ne se plaignent pas que l'agronome ne fait pas son travail, loin de là, il y a même des salles d'attente qui sont remplies par les agriculteurs qui ont à se faire aider soit pour des indications, soit pour remplir des formules ou pour autre chose.

Est-ce que cette profession d'agronome deviendra en fait une classe d'intellectuels qui devront normalement, si on suit l'évolution, se pencher sur ce problème ou avoir en quelque sorte des personnes qui vont les aider?

M. FOREST: M. Morin.

M. MORIN: L'inconvénient que vous soulignez a été vécu plusieurs années. Je pense qu'il est pratiquement corrigé aujourd'hui, parce que, dans chaque bureau d'agronome, ou cha-

que bureau d'information agricole, dans les comtés, il y a un homme chargé de toute la question des subsides et des formules à remplir. On l'appelle l'inspecteur agricole. C'est un type qui a l'habileté nécessaire pour remplir tout ce formulaire et qui dégage l'agronome de toute cette cuisine, du travail de paperasse.

M. GUAY: Est-ce qu'il y a différentes classifications dans la profession d'agronome, soit, par exemple, des spécialités qui sont nées de l'évolution?

M. FOREST: Au sein même de la corporation?

M. GUAY: Au sein même de la corporation.

M. FOREST: J'ai parlé tout à l'heure de la classification des sols. Ce serait un spécialiste en sol, un pédologue. S'il est à la défense des cultures, ça pourrait être un phytopathologiste; cela pourrait être un entomologiste pour la lutte contre les insectes; ça pourrait être un malherbologiste pour le contrôle des mauvaises herbes, et ainsi de suite. Il y a même des économistes agricoles et il y a différentes spécialités dans nos facultés d'agriculture.

M. GUAY: Selon la corporation, y a-t-il suffisamment d'agronomes pour répondre aux besoins de la société, aux besoins généraux? Est-ce qu'il y a des agronomes chômeurs, qui n'ont pas de travail?

M. MONGEON: Très peu.

M. GUAY: Vous dites très peu, est-ce que ça signifierait quand même qu'il y en a?

M. MONGEON: II y en a.

M. FOREST: C'est possible qu'il y en ait, mais de plus en plus, disons qu'on suffit aux besoins du marché. On a dit tout à l'heure qu'on voulait ouvrir la corporation au monde extérieur. J'ai dit qu'il y avait des membres de la corporation qui sont actuellement à l'étranger, qui sont en mission au Maroc, en Algérie, en Tunisie et on m'en demande deux pour le Niger. Je n'en ai pas. On demande constamment des spécialistes francophones pour ces pays africains. Je pense bien que, même chez nous, ici, on peut à peine suffire au marché et les demandes de l'extérieur, des pays francophones, sont considérables.

M. GUAY: J'ai remarqué dans la répartition de vos effectifs par région — et je suis très heureux de le constater — que la plus forte concentration de vos membres n'est pas cette fois dans la région de Montréal mais dans la région de Québec.

UNE VOIX: II n'y a pas seulement des fermes...

M. FOREST: Je voudrais souligner toutefois que cette évolution est récente. L'an passé, je crois que c'était à peu près 50-50. Je suis heureux moi-même que le centre agricole se déplace, pas nécessairement le centre agricole, mais le centre de la corporation. Vous connaissez la région de Montréal, il y a là de belles terres qui ne sont pas exploitées, M. le Président, et qui devraient l'être.

M. GUAY: D'accord. Maintenant, ceci m'amène à vous poser une autre question. Est-ce que vous avez de la difficulté à faire en sorte que vos membres soient répartis de la façon la plus adéquate possible? Est-ce que vos membres refusent parfois de changer d'endroit pour s'établir dans des régions où ça nécessiterait leurs services?

M. FOREST: Vous voulez parler surtout des régions excentriques comme l'Abitibi, le Lac-Saint-Jean ou la Gaspésie?

M. GUAY: Si on exclut, bien sûr, ceux qui travaillent exclusivement pour le gouvernement?

M. MONGEON: Si on exclut ceux qui sont au gouvernement, je dirais que le problème ne se pose pas comme ça. Les besoins de services agronomiques, dans les régions éloignées, c'est surtout au niveau du gouvernement provincial qu'ils existent. On ne retrouve pas le problème dans le sens que vous le signalez.

M. GUAY: Maintenant, dernière question, les nouveaux membres de votre corporation sont-ils surtout des étudiants qui proviennent de milieux agricoles ou des gens qui partent de la ville et qui n'ont aucune connaissance de base au départ?

M. FOREST: Durant leur cours agronomique, s'ils n'ont aucune connaissance agricole, s'ils n'ont pas été élevés dans une ferme, ils sont obligés de faire un stage dans une ferme au cours de leurs études universitaires.

Les étudiants, actuellement, peuvent nous venir de la ville. Maintenant, étant donné les possibilités d'emploi, le champ d'action comme on l'a dit tout à l'heure, soit à l'enseignement, soit à la recherche, l'étudiant pourra travailler et utiliser sa compétence dans un laboratoire ou dans une institution d'enseignement s'il n'a pas les dispositions pour aller dans un bureau de conseiller agricole dans une région.

M. GUAY: Et ce stage d'apprentissage dure combien de temps?

M.,FOREST: Durant les vacances, l'étudiant est obligé de faire un stage dans une ferme et préparer un projet sur l'exploitation où il a travaillé durant ses vacances.

M. GUAY: Cela lui permet de se familiariser

davantage avec les données réelles de l'agriculture.

M. FOREST: S'il ne l'est pas.

M. GUAY: Est-ce que vous auriez, comme agronome, des recommandations précises à faire, peut-être pas comme professionnel, au gouvernement en tant que responsable, comme vous l'avez mentionné, de la dimension mondiale, pour nourrir le genre humain? Est-ce que vous auriez des recommandations précises à faire au gouvernement dans ce sens-là afin d'améliorer, non seulement les possibilités de production, mais la conservation de certains milieux agricoles qui tendent à disparaître actuellement?

M. FOREST: C'est une question qui est vaste, M. le Président. La corporation n'a pas encore fait de résolutions précises sur le sujet. On m'a déjà posé la question. Il y a là un sujet de toute une étude.

M. GUAY: Si un député vous la demandait en vous laissant tout le temps voulu, est-ce que vous seriez en mesure de faire cette étude?

M. FOREST: La corporation même? M. GUAY: Oui.

M. FOREST: Nous ne ménageons pas nos conseils lorsqu'on juge bon de nous demander notre avis sur des questions. Cela nous fera plaisir de répondre aux questions qu'on voudra bien nous poser, avec autant de spontanéité qu'on l'a fait ce matin pour répondre à vos questions, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Forest et Me Aubé.

M. FOREST: Au nom de mes compagnons, je désire vous remercier de l'attention que vous avez accordée à la présentation de notre mémoire, M. le Président, et MM. les membres de la commission parlementaire.

M. LE PRESIDENT: Merci. L'Association canadienne des manufacturiers de moulées.

Association canadienne des manufacturiers de moulées

M. AUBREY: J'aimerais vous présenter les deux personnes qui sont avec moi; le président, M. Nicolas Florakas et M. Don Greene. Nous avons présenté à la commission un mémoire dont vous avez reçu une copie je crois. Maintenant, j'aimerais céder la parole à notre président, M. Florakas.

M. FLORAKAS: Merci, René. Présentement, les employés des manufacturiers de moulées sont exclus de l'acte agronomique. Nous voulons simplement maintenir le statu quo. C'est la raison pour laquelle nous avons déjà soumis le mémoire et, aujourd'hui, nous avons une proposition à faire dont, je pense, vous avez déjà reçu une copie. Nous proposons que l'article 29 e) du bill 258 soit amendé pour y inclure: "Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux actes posés — et là, on ajoute e) — par une personne à l'emploi de ou agissant pour une compagnie qui fabrique ou vend des produits agricoles, incluant les moulées pour le bétail commercial, volaille et les moulées spéciales, les produits sanitaires pour le bétail et la volaille, dont les responsabilités durant la période de l'emploi exigent l'exercice de la profession et pour laquelle il est rémunéré par son employeur".

M. LE PRESIDENT: M. le Solliciteur général.

M. FOURNIER: Pourriez-vous, M. Florakas, nous dire quelle est la représentativité de votre association? Est-ce que tous les producteurs canadiens font partie de votre association?

M. FLORAKAS: Je vais demander à notre secrétaire-trésorier, M. Aubrey, de répondre à cette question.

M. AUBREY : Dans la province, nous avons actuellement 92 membres associés à notre association qui, eux, fournissent les manufacturiers de moulées qui, en retour, fournissent les cultivateurs dans la province.

M. FOURNIER: Ce sont des gens qui circulent, qui vont aux coopératives, qui vont chez les gros cultivateurs et expliquent les produits qu'ils ont à vendre?

M. AUBREY: C'est ça. Autrement dit, les représentants que nous avons vont suivre le programme recommandé par leur compagnie et vont recommander aux cultivateurs le programme, ainsi que de suivre les recommandations pour l'hygiène, la ventilation ou quoi que ce soit.

M. FOURNIER: Actuellement, quelles sont vos relations avec la Corporation des agronomes? Est-ce que l'on a tenté, de quelque façon, de restreindre vos activités de vente de vos produits?

M. AUBREY: Dans le passé, M. le ministre, non.

M. FOURNIER: Il n'y en avait pas; il n'y a pas eu de restriction, bien que la loi prévoyait que c'était du domaine de l'agronomie ce que vous faisiez, jusqu'à un certain point.

M. AUBREY: C'est ça. Il y a une autre chose

que j'aimerais ajouter, M. le ministre. La majorité des vendeurs, aujourd'hui, que les compagnies essaient d'avoir vont au collège de Saint-Hyacinthe; ce sont des diplômés en technologie. Ce sont ceux-là que nous employons aujourd'hui pour la pratique.

M. FOURNIER: Ce sont des technologistes et non pas des agronomes.

M. AUBREY: C'est ça. Si la loi est mise en vigueur, il n'y aura plus d'emploi pour ces jeunes.

M. LE PRESIDENT: On vous remercie infiniment, messieurs.

M. AUBREY: Au nom du groupe, j'aimerais remercier la commission de nous avoir entendus.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Société des traducteurs du Québec est ici? Messieurs, vous pouvez procéder.

La Société des traducteurs du Québec

M. COTY: M. le Président, MM. les membres de la commission, je suis Jean-Paul Coty, président de la Société des traducteurs du Québec. Je vous remercie d'avoir bien voulu nous accueillir aujourd'hui pour nous permettre d'exposer notre cas.

A ma droite, M. Robert Dubuc, terminolo-gue en chef de la banque de terminologie de l'Université de Montréal; M. Georges Neray, vice-président de la société; M. Beaugrand-Champagne, membre du conseil d'administration. A ma gauche, M. Paul Horguelin, professeur à l'Ecole de traduction de l'Université de Montréal.

M. Lucien Forgues, directeur adjoint du service de traduction de la Sun Life. M. William Côté, président de la section de Québec de la Société des traducteurs du Québec. Si vous voulez bien, M. le Président, je confierais à M. Robert Dubuc le soin de présenter notre mémoire.

M.DUBUC: M. le Président, messieurs les membres de la commission, la Société des traducteurs du Québec a été constituée par lettres patentes le 27 mai 1943. Devant l'évolution de la situation qui était surtout caractérisée par, d'une part, l'accroissement du volume des traductions et, d'autre part, par une sensibilité accrue du public à l'égard de la qualité de la langue, nous avons senti la nécessité d'appuyer l'organisation de notre profession sur des bases plus solides. C'est pourquoi, en 1967, il y avait trois organisations professionnelles concurrentes. Nous sommes parvenus à faire l'unité de ces sociétés et nous pouvons dire qu'aujourd'hui la Société des traducteurs du Québec regroupe la grande majorité des traducteurs professionnels en exercice.

Notre société comptait, au 30 avril 1972, 766 membres dont 354 membres agréés et 412 membres adhérents. Les membres adhérents doivent, dans un délai de cinq ans, se qualifier au moyen d'un examen d'agrément.

Notre société entretient également des relations étroites par l'entremise du Conseil canadien des traducteurs et interprètes avec l'Association des traducteurs et interprètes de l'Ontario et la Corporation des traducteurs et interprètes du Nouveau-Brunswick. Nous sommes également affiliés à la Fédération internationale des traducteurs.

Notre société, en outre, contribue très activement, à la publication de la revue META, qui a maintenant, dans le domaine de la traduction, une audience internationale.

On peut se demander ce qu'est la traduction, même si c'est réputé être l'un des plus anciens métiers du monde. Il est certain que la traduction a toujours été un facteur de civilisation et de progrès. Depuis la deuxième guerre mondiale, les besoins de traducteurs ont connu une expansion sans précédent. Au Québec en particulier, la traduction joue évidemment un rôle de premier plan en raison de la coexistence de deux communautés linguistiques, bien sûr, mais aussi à cause de notre situation géographique et économique. Si nous voulons traiter avec nos voisins, force nous est de faire de la traduction.

Alors, la traduction est essentiellement à notre point de vue une activité professionnelle qui a pour objet de transposer d'une langue en une autre la teneur d'un message, sa tonalité et son esprit. Le mot à mot que l'on rencontre parfois ne saurait à aucun titre être considéré comme un travail de traduction.

Or, quels sont les critères d'exercice de la profession? Aujourd'hui, on exige de plus en plus que le traducteur se soit préparé par des études professionnelles à l'exercice de sa profession. Il ne suffit plus d'être bilingue pour être traducteur.

L'Université de Montréal, d'une part, offre un cours de trois ans, qui conduit à un baccalauréat en traduction et, depuis l'an dernier, elle offre en outre une maîtrise. De même, l'université Laval offre une licence qui correspond sensiblement au baccalauréat spécialisé offert par l'Université de Montréal.

A cause des difficultés intrinsèques de l'exercice de la profession de traducteur, il est de plus en plus reconnu que le traducteur doit avoir sur le plan linguistique, d'abord, une formation universitaire parce que la connaissance qu'il doit avoir de ses langues de travail doit déborder largement celle qu'on attribue ou qu'on reconnaît généralement à de simples bilingues.

Donc, sur le plan linguistigue, il faut une formation universitaire; de même sur le plan technique parce que l'évolution de la société fait que la plupart des traducteurs en exercice à l'heure actuelle sont des traducteurs techniques. Alors, sur le plan technique, ils ont besoin aussi d'une connaissance de base suffisamment forte

pour leur permettre d'aborder tous les domaines de la technique contemporaine.

Un autre point qu'on devrait également signaler, ce sont les apports ethniques par l'immigration que le Québec reçoit.

Ces gens-là, arrivent souvent au Québec et n'ont pas la possession des langues officielles. Ils ont besoin de pouvoir compter sur des traducteurs compétents pour assurer les services qui leur sont essentiels. Dans les relations du traducteur avec le public, l'expérience prouve que très souvent les clients n'ont pas la compétence linguistique ou la compétence technique nécessaire pour juger de la qualité du travail. Ce n'est un secret pour personne que notre économie a des caractéristiques particulières au Québec, ce qui a pour conséquence que 80 p.c. environ des traductions qui sont faites au Québec se font de l'anglais au français. Ces clients de nos traducteurs sont souvent des unilingues qui sont incapables de juger de la qualité du travail qui leur est présenté. Or, cette caractéristique ouvre la porte à ce qu'on peut appeler des chevaliers d'industrie de sorte qu'il arrive souvent que des clients soient obligés de payer des sommes presque astronomiques pour des traductions faites par des amateurs. Ils ne sont pas en mesure de juger de la qualité.

Sur le plan technique et scientifique, il y a un problème aussi qui se pose, c'est celui de la terminologie. Un concours de circonstances: tout à l'heure nous avons vu la difficulté terminologique que présentait la traduction du mot agronome qui pouvait sembler simple au premier abord, mais on s'aperçoit qu'agronome et "agronomist" ne correspondent pas. Alors, dans tous les aspects de la technique, des problèmes semblables se posent avec des conséquences qui peuvent être considérables. En particulier, l'imprécision terminologique présente un double risque, c'est d'abord l'incompréhension du message avec tous les dangers que ça peut comporter quand il s'agit, par exemple, de traduire des posologies en pharmacie ou des modes opératoires dans l'industrie et l'implantation d'une terminologie erronée qu'il faut ensuite redresser à grands frais par des campagnes de refrancisation.

Enfin, sur un autre plan, je pense qu'il est important de le dire, c'est la garantie des droits de la minorité anglophone. Si le français continue à faire les progrès qu'on espère bien qu'il va faire en tant que langue de travail, il est certain qu'il faudra qu'un plus grand nombre de traductions se fasse vers la langue anglaise et il faudra aussi, pour respecter les droits de ces gens-là, que la traduction soit de qualité. Ce qui caractérise la situation du Québec à l'égard de la traduction en particulier, c'est que, de plus en plus, à cause de la présence des techniques massives de diffusion, la traduction devient omniprésente, c'est un facteur d'influence constant sur tous et chacun des citoyens du Québec. On donne dans le mémoire le cas de la publicité qui est traduite dans une proportion de 80 p.c. à 90 p.c; à la télévision, en moyenne 40 p.c. des émissions sont doublées; les agences de presse s'alimentent aux sources anglo-saxonnes pour la plupart, donc quand elles rédigent leurs textes, elles s'inspirent d'un texte anglais ou d'un texte traduit d'un texte anglais. La même chose pour les textes qui émanent du gouvernement fédéral, ils sont traduits à presque 100 p.c. Même dans les textes émanant du gouvernement provincial, l'influence de l'anglais se fait sentir justement à cause de cette omniprésence.

Le cas des manuels scolaires aussi méritent notre attention. Au niveau de ce qu'on appelait autrefois les écoles normales et qui sont devenues les facultés de pédagogie, 5 p.c. des manuels sont traduits, mais par contre près de 40 p.c. des manuels utilisés par les maîtres ne sont pas traduits, mais sont en langue anglaise. La même chose au niveau des CEGEP, les proportions sont considérables. Tout ça pose un problème très considérable sur le plan linguistique parce que les maîtres ou les étudiants sont souvent en possession de textes qui n'ont pas la qualité requise ou encore qui sont rédigés dans une langue qui n'est pas la nôtre.

Alors, si notre situation nous contraint ainsi à traduire, elle nous oblige également, sous peine d'une aliénation profonde ou d'une dégradation culturelle inquiétante, à bien traduire. Il ne fait pas de doute que les mauvaises traductions ont été et sont encore le cheval de Troie de l'anglicisation du français au Québec. Cela se traduit sur le plan du vocabulaire par la création d'une sorte de vocabulaire parallèle. On donne dans le mémoire l'exemple du vocabulaire des assurances sur la vie, publié par l'Office de la langue française du gouvernement du Québec, sur les 223 expressions considérées comme fondamentales en matière d'assurance sur la vie, il y a 85 expressions qui sont fautives et qu'il faut redresser.

Cela représente â peu près 40 p.c. du vocabulaire en usage, vocabulaire fondamental, élémentaire et je pense que la situation vaut à peu près pour toutes les techniques et toutes les sphères d'activités. Il faut penser aussi à la désarticulation de la pensée qui se produit par les mauvaises traductions. Il faut lire des mauvaises traductions pour savoir ce que ça peut représenter comme désarticulation de la pensée.

Je pense que, compte tenu de tous ces facteurs, on peut dire que, si la traduction qui se fait au Québec n'atteint pas bientôt un palier de qualité satisfaisant, il n'est pas sûr que le patrimoine linguistique de la majorité des Québécois ne se détériore pas au point de devenir un sous-produit qui ne pourrait être qu'un facteur de détérioration ou d'infériorisation pour notre peuple.

Cela pose le problème d'une traduction de qualité. On ne peut pas parler de traduction de qualité sans traducteurs de qualité. Tant qu'on ne disposera pas d'un moyen permettant de reconnaître officiellement et légalement la com-

pétence du traducteur, on laissera oeuvrer, je pense, les chevaliers d'industrie, on incitera les bilingues à se consacrer traducteurs sans préparation et sans compétence et on ouvrira la porte à tous les abus qu'on a déjà décrits. Je pense qu'il faut cesser de faire des campagnes de français pour redresser les mauvaises expressions que les mauvaises traductions mettent en circulation. Ce n'est pas la bonne façon de procéder. Je pense qu'il vaut mieux travailler à la source et à la base.

Quoi qu'on dise, les mauvaises traductions qui circulent ne sont pas l'oeuvre des traducteurs mais ce sont l'oeuvre de personnes qui s'improvisent traducteurs sans avoir la préparation nécessaire.

Il importe, au tout premier chef, si on veut mettre un terme au règne de l'amateurisme en traduction, que la profession de traducteur bénéficie d'une reconnaissance officielle qui lui a fait défaut jusqu'ici. Il faut que le public, client ou consommateur, sache qu'il y a moyen d'avoir des traductions de qualité mais qu'elles ne peuvent être le fruit de l'improvisation. Sans un minimum de pouvoirs légaux, sans une reconnaissance officielle de l'Etat, la Société des traducteurs du Québec restera toujours impuissante à défendre les intérêts du public devant les dépravations de traducteurs improvisés et des amateurs peu consciencieux.

Je pense qu'une donnée apparaît comme incontestable, c'est qu'il se fait et se fera toujours beaucoup de traduction au Québec. C'est de la qualité de cette traduction que dépendra en grande partie la qualité du français parlé et écrit au Québec. Or, comment aussurer la compétence des traducteurs si on ne dispose d'aucun instrument efficace pour la faire reconnaître? Notre objectif n'est certes pas de monopoliser la traduction ni d'en fermer l'accès à quiconque. Ce que nous voulons, c'est un moyen de fournir au public une garantie raisonnable de la valeur d'un titre, celui de traducteur agréé. Déjà la Société des traducteurs du Québec s'efforce de donner cette garantie en soumettant ses membres à un examen d'agrément, mais seule la protection légale du titre pourra donner une efficacité réelle à ses efforts.

Je pense aussi que l'exercice de la profession de traducteur comporte une dimension éthique importante. Les erreurs de traduction dans les modes d'emploi, dans les processus opératoires et dans les notices d'entretien impliquent des conséquences désastreuses, non seulement sur le plan financier — parce que c'est souvent sur le plan financier que cela peut en avoir — mais aussi pour la santé et le bien-être des usagers. Une posologie mal traduite est une menace directe à la santé de même qu'une mauvaise notice d'entretien compromet la durée de vie de l'appareil et très souvent la sécurité des opérateurs.

Notre système législatif et notre système judiciaire exigent également la présence de traducteurs compétents si on ne veut pas léser les droits fondamentaux de nos deux communautés linguistiques. Enfin, les traducteurs sont appelés à traduire souvent des textes de nature confidentielle. Or, il ne fait pas de doute que la présence du secret professionnel dans l'exercice de la profession revêt une importance considérable quand il s'agit en particulier des traducteurs de l'Etat et des traducteurs qui sont appelés à traduire des textes confidentiels, des rapports de gestion confidentiels, des dossiers personnels ainsi que des dossiers qui comportent des secrets de fabrication.

Il semble donc que les connaissances requises des traducteurs, la difficulté de porter un jugement sur ses activités professionnelles, le caractère souvent personnel des rapports avec ses clients, la gravité du préjudice et des dommages que ceux-ci peuvent subir en l'absence de tout contrôle et le caractère souvent confidentiel des renseignements auxquels il a accès justifient aux termes de l'article 21 du projet de loi 250, l'attribution d'un titre réservé.

Toutes ces raisons se doublent d'un nouvel impératif, par suite de la politique du gouvernement d'implanter le français comme langue de travail. Je pense qu'il ne sert à rien d'implanter le français comme langue de travail si on n'est pas capable de garantir que ce soit un français de qualité. Or, la réalisation de cet objectif risque d'être compromise si la société québécoise ne peut compter sur un corps professionnel de traducteurs dont la compétence est dûment attestée par l'attribution d'un titre réservé. M. le Président, je vous remercie; mes collègues et moi-même serons heureux de répondre à toutes les questions que vous jugerez à propos de nous poser.

M. FOURNIER: J'ai devant moi le projet de loi, le bill 114 que vous avez présenté et dans lequel vous énumérez les buts de la société que vous vouliez voir dotée d'une charte particulière. Tout le long il s'agit de la société des traducteurs et non pas de la corporation professionnelle, de sorte que l'on s'imagine que c'est une société du genre d'un syndicat plutôt. Si on lit les buts, on y retrouve aussi un peu la même chose avec l'exception du paragraphe d) où l'on parle d'un code d'éthique. Parce qu'au paragraphe a), vous mentionnez que la société a pour but de grouper les titulaires de diplômes; au paragraphe b), d'étudier et de promouvoir les intérêts économiques, sociaux et professionnels de ses membres; au paragraphe c), d'éditer des revues, etc., et ce n'est qu'au paragraphe d) que l'on retrouve la question d'un code d'éthique. Il ressort de cette analyse qu'il s'agit plutôt d'une société ou d'un syndicat destiné à protéger les membres et non pas le public. Est-ce que cela a été modifié depuis?

M. DUBUC: Je pense, quand on avait soumis le projet de loi 114, que le projet de loi 250, il n'en avait pas été question; le projet de loi 114

remonte déjà à ce qu'on peut appeler l'ancien régime. Alors, ce projet de loi 114 était sensiblement structuré selon le schème fondamental des projets de loi régissant les corporations professionnelles à cette époque. Si vous remarquez, ce paragraphe d'introduction que vous nous avez donné, on peut le retrouver dans celui de la corporation des psychologues et d'autres organismes semblables. Il y avait un schème fondamental qu'on suivait normalement. Maintenant, notre objectif en venant devant vous ce matin — je pense que mes collègues seront d'accord avec vous — ce n'est pas de nous constituer en un syndicat professionnel ou en un syndicat tout court, mais c'est de donner ou de donner au public un moyen de pouvoir discerner le bon grain de l'ivraie.

M. FOURNIER: Est-ce que la réputation elle-même, créée par votre société et la qualité des membres que vous avez, ce n'est pas déjà suffisant pour obtenir, exiger que certains emplois soient pour les membres de la société des traducteurs? Est-ce que cela vous prend, en plus...

M. DUBUC: Si on vivait dans une société de purs esprits, je pense que oui, monsieur. Mais la nature humaine étant ce qu'elle est, elle a parfois besoin d'être contrainte.

M. FOURNIER: Quelles sont les exigences pour être traducteur? Est-ce que nécessairement cela prend un diplôme universitaire ou si c'est plutôt un stage de cinq ans tel que mentionné?

M. DUBUC: Comme notre société sur le plan professionnel est relativement jeune, il y a beaucoup de traducteurs, dont ceux de ma génération en particulier, même s'ils avaient voulu obtenir un diplôme universitaire de traducteur, ce n'était pas possible. Nous sommes tous des autodidactes. Mais aujourd'hui, maintenant que les structures sont en place dans les universités pour former des traducteurs, de plus en plus cela devient le critère d'admission. Maintenant, comme on ne veut pas justement priver de reconnaissance professionnelle les traducteurs qui se sont formés eux-mêmes, parce qu'il n'y avait pas possibilité de faire autrement, c'est pour cela qu'on a prévu certaines dispositions moyennant, toujours, sanction de la compétence par un examen pour reconnaf-tre également les gens qui ont acquis la compétence nécessaire, mais par eux-mêmes.

M. FOURNIER: A l'intérieur de votre société, est-ce que vous avez un code d'éthique quelconque, est-ce que vous avez certaines réglementations qui s'appliquent à vos membres?

M. DUBUC: Oui, il y en a un qui est en chantier, présentement. Nous avons toujours été régis par un règlement général, mais justement en vue de l'évolution récente, nous avons un projet de code d'éthique qui est présentement rédigé.

Je pense que M. Forgues peut-être pourrait ajouter quelque chose en ce qui concerne le code d'éthique.

M . BEAUGRAND-CHAMPAGNE: Le projet a été préparé de façon générale, en attendant de connaître un peu mieux les intentions du gouvernement, parce qu'il ne sert à rien de préparer un code d'éthique et qu'on nous dise: Ecoute mon vieux, t'as pas le droit de ci, t'as pas le droit de ça, cela ne fait pas l'affaire. Alors, il faut tout de même savoir — excusez l'expression — sur quel pied danser. Le projet, c'est une ébauche où on a mis peut-être plus de clauses qu'il ne fallait, de façon à laisser libre cours à la discussion, il y a toujours moyen de le modifier. Il sera préparé selon les exigences.

M. FOURNIER: Voulez-vous dire que si votre demande n'était pas accueillie par la

Législature vous ignoreriez jusqu'à un certain point la question d'un code d'éthique?

M. BEAUGRAND-CHAMPAGNE: Pas du tout. Mais il faudrait tout de même savoir quelles sont les exigences du gouvernement à ce sujet-là. C'est normal d'ailleurs. Parce qu'en définitive, les médecins savent à quoi s'en tenir, alors ils peuvent préparer un code d'éthique, mais pas nous; officiellement, je suis traducteur mais je n'existe pas officiellement.

M. FOURNIER: Est-ce qu'il n'y a pas...

M. COTY: Pour revenir à ce sujet, M. le ministre, je pense que le problème, c'est que, selon les structures officielles d'une société, qu'elle soit corporation professionnelle ou non, son code d'éthique varie, non pas dans le contenu mais dans son application, parce que les moyens de sanction sont différents. C'est plutôt une question de procédure et de forme que de contenu, parce que le contenu d'un code d'éthique ne relève pas des structures d'un organisme. C'est dans ce sens-là que l'association croit plus prudent de savoir quelle va être sa forme définitive, qu'elle demeure telle qu'elle est, ou qu'elle soit reconnue comme corporation. C'est à peu près la distinction qu'il faut faire.

M. FOURNIER: M. Sheppard, ayant travaillé au rapport Castonguay-Nepveu, de même qu'ayant présenté le mémoire du Conseil interprofessionnel et ayant analysé le bill 250, est-ce que vous considérez que la société qui présente son mémoire et que vous représentez aussi entre totalement dans les critères édictés par l'article 21?

M. SHEPPARD: Vous me demandez de por-

ter un jugement de valeur. Je suis payé pour le faire.

M. FOURNIER: J'aimerais savoir...

M. SHEPPARD: J'ai eu l'occasion d'étudier le champ d'action des activités de ma cliente. Mais, à part ce que j'ai fait pour le Conseil interprofessionnel et pour la commission Castonguay-Nepveu, les représentations qui vous sont faites ce matin rejoignent une de mes préoccupations personnelles, d'abord à titre de directeur de la recherche juridique à la commission Laurendeau-Dunton et j'occupe les mêmes fonctions auprès de la commission Gendron maintenant.

Je vois tout d'abord dans cette association un organisme qui est structuré dans l'esprit d'une corporation professionnelle, c'est-à-dire qu'il veut non seulement assurer la compétence mais il ne cherche pas un monopole, il cherche principalement à protéger le public. Vous pouvez voir par le nombre de membres, par le fait que les associations se sont fusionnées, qu'il y a un esprit progressif et dynamique.

Deuxièmement, vous avez pu voir par le mémoire — et je peux dire qu'à titre d'avocat j'ai moi-même eu ce problème — que nous sommes conscients des problèmes déontologiques que pose la traduction. Parce que, de plus en plus, vous avez des documents, que ce soient des documents médicaux, que ce soient des documents juridiques, des documents commerciaux ou industriels, qu'on traduit. Le secret professionnel est aussi fort, aussi bien protégé que le plus faible maillon dans la chaîne. Si un traducteur peut le trahir, si le secrétaire peut le trahir, si un paramédical peut le trahir, il ne vaut rien. Or, il est très important, et ça va devenir de plus en plus important, que cet aspect déontologique soit considéré. Il y a ensuite une question de conscience professionnelle qui se pose sur le plan déontologique, c'est que, la plupart du temps, le client n'est pas en mesure de vérifier lui-même la qualité de la traduction, parce que, si c'est un anglophone qui ne connaît pas le français, qui commande une traduction en français, il est à la merci d'une qualité très piètre. Donc, il y a une importance du point de vue du client que le professionnel concerné soit moralement obligé à donner des services de qualité.

Mais, et c'est là que je veux revenir à des considérations intellectuelles et politiques de droit linguistique, il y a cet aspect de la protection des droits linguistiques dont nous commençons à nous occuper tellement.

Et là, je vois plusieurs aspects que j'aimerais soumettre à votre attention.

Premièrement, je pense que ce n'est un secret pour personne qu'on s'oriente de plus en plus vers une situation où la majorité francophone travaille en français, pense en français et communique avec d'autres groupes et d'autres juridictions en français. Mais, en contrepartie, elle reçoit aussi beaucoup de communications qui sont peut-être en anglais.

Il y a donc un intérêt à avoir une traduction compétente des communications reçues en anglais. Il y a également, je pense, un consensus général qu'une minorité anglophone importante a certains droits qu'on va continuer à respecter, qu'elle aura droit de recevoir des communications dans sa langue.

De part et d'autre, même si on travaille soi-même dans sa langue, même si on administre soi-même dans la langue, il y a tout de même l'obligation de communiquer avec l'autre groupe dans la langue de ce groupe. Oublions un instant l'aspect du droit juridique mais pensons simplement à l'aspect de courtoisie ou de respect pour l'autre.

Je pense que la traduction au Québec va être appelée, pendant très longtemps, à un rôle de plus en plus important et j'aimerais insister, par exemple, sur l'aspect de la langue de travail. Pendant très longtemps, on va être obligé de traduire parce que les manuels, les instructions, toutes sortes de documents qui font partie des communications entre l'industrie et le commerce, ses salariés et ses employés, émanent en anglais parce que ce sont les mêmes que ceux utilisés à l'extérieur ou parce que ce sont les seuls disponibles.

Or, tout ceci se résume à dire qu'il ne suffit pas d'adopter une loi qui dit que l'ouvrier peut travailler en français; il s'agit aussi de savoir quelle va être la qualité du français. On peut très bien légiférer et finir avec le franglais ou avec du mauvais français, ce qui est presque aussi mauvais que du bon anglais.

Je vous signale par exemple que, depuis quelque temps, on a une série de lois qui stipulent que le client, le consommateur, a le droit d'avoir un contrat en français. Il y a un projet de loi qui a été déposé il y a quelques jours; il y en a déjà deux ou trois autres, par exemple la Loi de la protection du consommateur, où on dit que le contrat est en français, quoiqu'on puisse exiger une version anglaise.

Les avocats qui sont présents ici, moi-même je peux vous le confirmer, avons un problème constant, c'est de nous assurer que les deux versions sont identiques et surtout qu'elles soient dans une langue qui respecte l'intégrité culturelle du groupe. Or, vous voyez déjà d'ici ce qui peut se passer. C'est très joli de dire que les contrats doivent être en français; il faut aller plus loin et s'assurer que ce sera du français au moins convenable. Et pour vous montrer que même les codificateurs peuvent se tromper, vous trouverez dans le code civil du Québec, qui est tout de même un document d'inspiration française, un article où on a traduit l'expression "newspaper" par "papier journal".

Du point de vue des droits linguistiques, c'est essentiel que la compétence de traduction soit assurée et j'appuierais fortement, à titre personnel, à part mon titre d'avocat, cette demande de l'association.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, le mémoire qui nous est présenté est extrêmement important et encore plus importantes, je pense, sont les remarques de M. Dubuc et de Me Sheppard. En vous écoutant tantôt, je me demandais si on avait requis, au niveau des négociations fédérales-provinciales, des traducteurs. Si on n'en avait pas requis, ça pourrait peut-être expliquer qu'on parle difficilement le même langage et que les accords sont difficiles.

A tout événement, pour revenir au sérieux, M. le Président, je pense que vous avez raison de dire que, de plus en plus, les services de vos professionnels seront nécessaires dans le contexte que vous avez indiqué tantôt.

Ma première question serait celle-ci: Est-ce que l'importance de votre profession est reconnue par les fonctions publiques, la fonction publique au fédéral et la fonction publique du Québec et, par les critères de base, pour les examens, et pour la rémunération qui est accordée dans la fonction publique?

M. DUBUC: Pour commencer par le fédéral, je pense qu'à ce niveau il y a une longue tradition et il y a des examens de sélection. Le niveau de rémunération se compare, je pense, aux autres professions où on exige une préparation analogue.

En ce qui concerne la fonction publique québécoise, les structures sont peut-être un peu moins fermes mais il y a eu aussi beaucoup de progrès depuis quatre ou cinq ans. Il y a des traducteurs compétents qui travaillent au sein de la fonction publique québécoise, qui sont reconnus comme travailleurs professionnels et qui touchent une échelle de rémunération qui se compare, je pense, aux autres professions.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce qu'il y en a plusieurs dans la fonction publique québécoise?

M. DUBUC: Dans la fonction publique québécoise, à ma connaissance — mais il faudrait vérifier pour avoir quelque chose d'exact — ils sont une vingtaine.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce qu'ils sont davantage concentrés soit au ministère de la Justice ou à l'Office de la langue française? M. Beaugrand-Champagne, vous êtes à l'Office de la langue française?

M. BEAUGRAND-CHAMPAGNE: Non, moi je suis simple traducteur libre, je travaille à mon compte.

M. DUBUC: A l'Office de la langue française, vous avez certains traducteurs mais qui travaillent surtout dans des fonctions apparentées à la traduction, de la recherche terminologique, par exemple, des choses comme ça. Il n'y a pas un bureau de traduction constitué à l'Office de la langue française proprement dit. Il y avait dans ce qu'on appelait autrefois le Secrétariat de la province un bureau de traduction et les autres traducteurs, je pense, sont disséminés un peu à travers les ministères.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous pourriez davantage fournir d'effectifs au gouvernement du Québec, à la fonction publique québécoise?

M. DUBUC: Certainement, voyez-vous, l'Université de Montréal met sur le marché du travail, chaque année, une centaine de traducteurs. La fonction publique fédérale en absorbe peut-être 20 p.c. à 30 p.c. alors il reste un bon nombre qui sont disponibles; de même, l'université Laval en prépare, je pense, une soixantaine par année. Donc, je pense qu'on pourrait certainement être en mesure de répondre à la demande dans ce secteur.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que tous ceux-là dont vous venez de parler assistent aux cours du jour et ont une formation universitaire?

M. DUBUC: C'est ça, oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que les interprètes font partie de votre groupe?

M. DUBUC : Les interprètes ne font pas partie de notre groupe. Il y a à peu près au Québec, en exercice à l'heure actuelle, vingt à vingt-cinq interprètes. La plupart sont affiliés à l'Association internationale des interprètes. Ils n'ont pas senti le besoin de se joindre à nous pour l'instant mais les portes ne sont pas fermées.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que des traducteurs, des membres de votre groupe, débouchent sur l'autre fonction d'interprète?

M. DUBUC: Il y a une fonction qui commence à prendre de la vogue et c'est celle de la terminologie. Je fais présentement de la terminologie à l'Université de Montréal. C'est une des principales spécialités. Il y a évidemment aussi la spécialisation à l'intérieur de la traduction. De plus en plus, les traducteurs doivent prendre une spécialité technique. Ils peuvent se spécialiser en chimie, en pharmacologie ou dans des secteurs comme ceux-là.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous pensez que les 412 membres adhérents passeront, dans une proportion importante, l'examen d'agrément d'ici cinq ans?

M. DUBUC: Nous le souhaitons. Nous avons organisé des cours de perfectionnement à leur intention de façon qu'ils puissent se qualifier. Maintenant, il est probable qu'il y aura quand

même un certain nombre qui ne pourront pas réussir, mais nous espérons bien qu'en leur fournissant les outils nécessaires pour leur perfectionnement, ils pourront éventuellement finir par se qualifier pour devenir traducteurs agréés.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que l'université donne la possibilité à des fonctionnaires ou à ceux qui ne sont pas fonctionnaires, qui ont un degré universitaire, qui seraient intéressés à étudier la traduction pour devenir spécialistes de la traduction, de suivre des cours du soir? Est-ce qu'ils peuvent accéder à ce niveau de formation?

M. DUBUC: Je demanderais à M. Horguelin, qui est professeur à l'école de traduction de l'Université de Montréal, de répondre à cette question.

M. HORGUELIN: Actuellement, quatre universités au Québec dispensent des cours du soir. L'Université de Montréal, l'université Laval, l'université McGill et, à partir de septembre prochain, l'Université de Sherbrooke. Et très récemment, le ministère de l'Education a donné l'autorisation aux CEGEP de commencer également à donner des cours de traduction. Ces cours devraient commencer cette année. C'est très récent.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je suis bien sensible...

M. DUBUC: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose? Aussi au niveau de la maîtrise à l'Université de Montréal, il est possible pour quelqu'un qui possède déjà un baccalauréat spécialisé dans une matière quelconque de prendre une maîtrise en traduction moyennant deux années d'étude à temps plein s'il peut le consacrer. Cela veut dire que cela le dispense quand même de deux années supplémentaires d'étude.

M. CLOUTIER (Montmagny): Pour couvrir tous les champs d'action que vous avez mentionnés dans votre mémoire... Prenons un exemple, les manuels scolaires dont la traduction n'est pas, généralement, à la disposition des étudiants. Vous avez la publicité télévisée ou publiée dans les journaux, qui en fait, est bien souvent une traduction assez pauvre. Pour tous les secteurs que vous avez mentionnés qui sont extrêmement importants, notamment la fonction publique, est-ce que vous pensez que le recrutement actuel et les étudiants qui terminent leurs études chez vous seront capables de répondre d'une façon générale à la demande à assez court terme?

M. DUBUC: Je pense que le problème a plusieurs aspects. Il y a une loi en économie qui dit que "la mauvaise monnaie chasse la bonne" et peut-être que la bonne attire la bonne aussi. Je pense que, si on a une structure professionnelle affermie, si l'exercice de la profession, de ce fait, se trouve assaini, on aura de moins en moins de difficultés à attirer des candidats compétents. Présentement d'ailleurs, depuis quatre ou cinq ans, où on travaille de façon plus systématique à structurer la profession, la demande devient de plus en plus forte. Lors des examens d'entrée à l'Université de Montréal, il y a eu 500 candidats qui se sont présentés à l'Ecole de traduction. Présentement, il n'est pas possible d'en retenir plus de 100.

Mais si les conditions du marché se modifiaient il n'y a pas de doute qu'on... le problème ne m'apparaït pas un problème d'approvisionnement, en d'autres termes.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci. M. LE PRESIDENT: Merci au groupe.

M. BURNS: Quant à moi, M. le Président, je suis convaincu que les traducteurs ou la corporation qui les représenterait correspond assez favorablement aux critères de l'article 21 bien que le Solliciteur général a semblé en douter tantôt.

M. FOURNIER: J'ai demandé des explications à Me Sheppard.

M. BURNS: D'accord! Particulièrement le quatrième, la gravité du préjudice et des dommages qui pourraient être subis par les gens recourant à leurs services; je pense même, comme l'ont fait ressortir M. Dubuc et Me Sheppard, que c'est peut-être la collectivité elle-même qui va en souffrir si des critères professionnels ne sont pas imposés. Mais, pour moi, ce n'est pas encore tout à fait clair. Vous avez peut-être répondu à cette question au cours de la discussion, mais si je décidais, aujourd'hui, de devenir traducteur et être agréé ou accrédité auprès de votre société, qu'est-ce que je devrais faire?

M. DUBUC: Tout d'abord, cela dépend un peu de votre dossier. On examinerait votre dossier. On exigerait de vous que vous soyez inscrit à un cours universitaire, qu'il s'agisse de cours du soir ou de cours du jour et que vous vous justifiiez aussi quant à l'exercice de la profession. Si vous êtes déjà diplômé, l'exercice d'un an, si vous n'êtes pas diplômé, je pense que c'est trois ans. Après cela, vous devez quand même réussir l'examen d'agrément.

M. BURNS: Merci.

M. COTY: Il faudrait qu'il y ait également un examen d'admission, un examen d'entrée...

M. BURNS: A la corporation, à la société. M. COTY: ... à la société. Il y a donc deux

examens, un à l'entrée et un autre, si je peux m'exprimer ainsi, à la sortie.

M. BEAUGRAND-CHAMPAGNE: Excusez-moi! Au sujet des manuels scolaires, j'aimerais faire une petite remarque. Je viens de terminer une traduction d'un manuel sur le dessin industriel avec un professeur de dessin bien connu. Le monsieur en question est de bonne foi, c'est un chic type qui connaît bien son français. Dans divers domaines il me dit: Je n'ai aucun document en langue française sur le sujet. Moi, j'en achète, je les lis, je les étudie, je vois de quelle façon on utilise telle expression, tel mot. Il arrive toujours et me dit: Ce n'est pas ce mot qu'on utilise. Finalement il ressort que cela fait 25 ans qu'on utilise ce mot et on ne peut pas le changer.

Ce qui se produit, c'est que des entreprises d'ingénierie, par exemple, j'ai eu l'occasion de le voir, vont communiquer avec des entreprises de langue française dans des pays francophones et elles reçoivent un télégramme: Pourriez-vous nous envoyer un texte anglais parce qu'avec ces mauvaises traductions... On utilise les termes ou les expressions à mauvais escient. Alors le type lit un cahier des charges et, d'après lui, cela se rapporte à quelque chose qui va au sommet du mur et il lit mais ne comprend pas pour la bonne raison qu'on a fait une traduction et que le mot se rapporte à une autre partie du mur. Cela devient complètement incompréhensible.

L'Hydro-Québec a adopté le français international au point de vue technique et scientifique justement pour pouvoir communiquer avec tous les spécialistes des pays francophones. Les jeunes ingénieurs cherchent à faire un stage de quelques années à l'Hydro-Québec pour apprendre le français. Si le français était de si bonne qualité dans les écoles, ils ne seraient pas obligés de le faire.

M. LE PRESIDENT: Merci encore.

M. COTY: Je remercie M. le président ainsi que les membres de la commission d'avoir bien voulu nous écouter.

M. LE PRESIDENT: Me Lafrenière, et la Corporation des maîtres en centrale thermique de la province de Québec.

Corporation des maîtres en centrale thermique

M. LAFRENIERE: M. le Président, MM. les membres de la commission, c'est avec plaisir que je souligne ici la présence du président de la Corporation des maîtres en centrale thermique, M. Lavoie de même que les deux vice-présidents, MM. Laberge et Leboeuf, le secrétaire et le trésorier M. Karavasilis et M. Lebel, l'ex-président M. Venne, le conseiller technique, M. Bréard, de même que le surintendant de Place Ville-Marie des mécaniciens de machines fixes.

Je désire vous remercier d'avoir voulu commencer l'audition de notre cas même si l'heure parait tardive avant le dîner et j'essaierai, pour suivre les recommandations de la société qui vient de vous exposer son problème, de traduire le plus clairement possible et dans le meilleur français possible, le problème de la Corporation des maîtres en centrale thermique. Je dois vous dire qu'il s'agit d'un organisme qui a été incorporé en 1958, donc depuis environ quatorze ans. Depuis la date de son incorporation, environ 5,000 membres se sont inscrits à cette corporation. Aujourd'hui, il y a à peu près 1,500 membres réguliers ayant payé leur cotisation. Les mécaniciens de machines fixes, au nom desquels nous parlons ce matin, sont dans la province de Québec au nombre d'environ 15,979, suivant les statistiques fournies par le ministère du Travail. Sur ce nombre, certains sont classés dans les premières classes de mécaniciens de machines fixes. Et je dois vous dire immédiatement que, dans ce métier ou profession, il y a environ cinq classes. La situation des mécaniciens de machines fixes au point de vue de la protection et de la promotion de leurs intérêts est assez précaire. Cependant, je sais que la philosophie du code des professions est basée sur la protection du public. C'est la raison particulière pour laquelle nous venons devant vous ce matin.

Evidemment, ces gens travaillent, pour la plupart, dans des édifices publics et un grand nombre d'entre eux sont des fonctionnaires des gouvernements fédéral, provincial ou municipal; d'autres travaillent dans l'industrie en général, dans des manufactures, usines de papeterie, scieries, grands magasins à rayons, centres d'achat, dans des édifices publics comme des maisons de rapport, collèges, couvents et hôpitaux.

C'est donc dire, messieurs, que les travailleurs de cette catégorie correspondent, à coup sûr, à la philosophie générale du code des professions qui est destiné à la protection du public. Je n'ai pas besoin de donner des exemples particuliers de catastrophes qui pourraient survenir si des travailleurs mécaniciens de machines fixes étaient préposés dans des endroits, sans qu'ils aient les qualifications nécessaires, la compétence nécessaire et le sens des responsabilités nécessaire pour bien remplir leurs fonctions.

Jusqu'à maintenant, les mécaniciens de machines fixes ont été régis par le chapitre 157 qui s'intitule: " Loi et règlements concernant les mécaniciens de machines fixes". Le chapitre 157, de par la volonté du bill 49, qui concerne la Loi sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre, devra éventuellement disparaî-tre; c'est du moins ce que dit l'article 96 du bill 49. Le chapitre ou la loi régissant les mécaniciens de machines fixes disparaissant, ceux-ci seront simplement noyés dans le groupe de travailleurs de toute catégorie et de tous métiers. Le fait est qu'actuellement les mécani-

ciens de machines fixes n'ont pas le privilège ni le droit de former ce qu'on appelle un groupe distinct, en vertu de l'article 20, paragraphe 3, du code du travail. Ce sont des travailleurs isolés pourrait-on dire. Pour donner un exemple plus concret, je pourrais dire que pour un employeur qui retient les services de 200 employés, il peut y avoir quatre, cinq ou six mécaniciens de machines fixes. Ces gens sont noyés dans des unités de négociation qui peuvent comprendre des coiffeurs, des barbiers, des cuisiniers, des journaliers, des ouvriers, des menuisiers. En conséquence, nous prétendons qu'ils sont mal placés pour négocier directement avec l'employeur, en tenant compte des conditions particulières de travail qui devraient être leur lot.

Comme je l'ai dit au début, si cette loi, si le chapitre 157, disparaît... Le ministre du Travail s'est occupé d'eux jusqu'à maintenant et je ne voudrais pas critiquer de façon trop acerbe les employés du gouvernement, mais je ne saurais dire que les mécaniciens de machines fixes reçoivent, de la part du gouvernement, toute l'attention que commande l'importance de leurs fonctions et que commandent aussi les qualifications qu'ils doivent avoir pour exercer leurs fonctions.

De plus, comme je l'ai dit tantôt, il est impossible à ce groupe de travailleurs de s'unir pour discuter de leurs contrats de travail, pour discuter de leurs conditions de travail, parce que la loi ne permet pas que trois ou quatre employés d'un employeur de Montréal par exemple, se joignent à quatre ou cinq employés d'un autre employeur de Montréal ou de n'importe quelle autre ville dans la province pour former ce qu'on appellerait une union ou un syndicat.

C'est donc dire qu'en 1972, alors que les droits des travailleurs sont scrupuleusement respectés, nous sommes ici pour attirer votre attention sur 15,000 ou 16,000 personnes qui sont mal servies au point de vue de la protection de leurs droits et de leurs privilèges. Evidemment, ceci est un point, M. le Président, mais je comprends que ce n'est pas le principal point et le code des professions recherche la protection du public.

Mais la protection du public ne doit pas nécessairement exclure aussi l'intérêt des travailleurs eux-mêmes. Alors, je soumets que les mécaniciens de machines fixes devraient être considérés pour former une corporation professionnelle. Je veux dire par ceci que la corporation que je représente aujourd'hui et qui est composée d'environ 2,000 membres est la seule corporation aussi importante dans la province de Québec, et le gouvernement ou l'Etat pourrait, croyons-nous, considérer sérieusement la possibilité de lui déléguer des pouvoirs. La corporation est composée d'un conseil général d'administration pour la province de Québec évidemment.

Cette même corporation est répartie dans la province en six chapitres. C'est donc dire que cette corporation est bien structurée, elle est déjà bien organisée. Il s'agit donc d'un corps intermédiaire dont le gouvernement pourrait se servir parce qu'à l'intérieur de cette corporation, il y a évidemment bon nombre de mécaniciens de machines fixes qui ont déjà acquis dans le métier ou la profession un bon nombre d'années d'expérience et qui pourraient servir adéquatement pour aider l'Etat à protéger le public en scrutant les qualifications, la compétence et le sens des responsabilités des mécaniciens de machines fixes.

Au point de vue des qualifications qui sont exigées de la part des membres de la corporation ou des mécaniciens de machines fixes, les règles ne sont pas à ce point de vue, je dois l'avouer, strictement établies. Je veux dire que, pour qu'un individu accède à la fonction de mécanicien de machines fixes, il n'y a pas strictement de prérequis au point de vue de l'instruction. Cependant, il y a — comme je l'ai dit tout à l'heure — différentes classes de mécaniciens de machines fixes, il y en a quatre qui sont d'importance.

La quatrième classe exige d'un individu qu'il ait une expérience de douze mois sur un système de plus de 100 chevaux-vapeur-bouilloire; la troisième classe exige douze mois supplémentaire sur un système de plus de 300 chevaux-vapeur-bouilloire; la deuxième classe exige en supplément 18 mois sur un système de plus de 600 chevaux-vapeur-bouilloire et enfin, la première classe exige un supplément de 24 mois, dont douze mois en charge d'un corps ou d'une relève d'une installation de plus de 1000 chevaux-vapeur-bouilloire.

C'est donc dire que, en fin de compte, celui qui est parvenu à la première classe et à la deuxième classe de mécanicien de machines fixes possède l'équivalent de douze, treize et quatorze ans de scolarité. Les autres, ceux de quatrième classe et de cinquième classe, ont évidemment une scolarité beaucoup moindre.

Cependant, messieurs, le point sur lequel je veux surtout attirer votre attention aujourd'hui, l'action des législateurs, c'est que nous avons affaire à un groupe extrêmement important de travailleurs. Comme je l'ai dit au début, ils sont environ 16,000. Si leurs qualifications ne sont pas scrutées, pesées et analysées, si leur sens de responsabilité n'est pas mesuré, il pourrait en résulter des catastrophes déplorables.

Ainsi, par exemple, je voudrais mentionner la ville de Montréal et je ne pourrais pas évidemment faire la nomenclature de toutes les institutions importantes dans lesquelles ces gens travaillent. Pour ne prendre qu'un secteur de la ville de Montréal, je pourrais nommer Place Bonaventure, Place Victoria, le palais de justice, l'Hydro-Québec, la bâtisse de la Canadian Industries Limited, la Place Ville-Marie, la Banque de Commerce, le Château Champlain, ce sont

tous des endroits où les services de mécaniciens de machines fixes sont absolument nécessaires. Ici à Québec, pour vous donner quelques autres exemples où les services de mécaniciens de machines fixes de première classe sont retenus, je pourrais nommer l'Anglo Canadian Pulp & Paper Ltd, l'hôpital de l'Enfant-Jésus, Saint-Malo Heating, Saint-Michel-Archange et je dois dire, évidemment, que ce n'est pas un patient de cet hôpital qui est en charge de la centrale thermique ou des bouilloires ou de la mécanique dont nous parlons ce matin.

Cela vous indique tout de même l'importance qu'on doit attacher aux classifications requises pour ces travailleurs. Je reviens sur cette idée déjà exprimée que le ministère du Travail, malgré toute sa bonne foi, malgré la compétence — j'en conviens — des fonctionnaires qui doivent voir à l'application de la loi, est à notre avis incapable de couvrir tout le champ ou tout le secteur qui intéresse la corporation au nom de laquelle nous parlons.

Nous voulons insister sur cette idée que le chapitre 157 disparaissant, loi qui régit les mécaniciens de machines fixes, le chapitre 156, lois et règlements concernant les appareils sous pression, ce chapitre-là aussi disparaissant, vu aussi l'impossibilité pour les travailleurs de cette classe de se grouper en syndicat et en union à travers toute la province de Québec, eh bien, nous aurons laissé pour compte en 1972 un groupe fort important de travailleurs qui ne pourront pas se prévaloir du droit sacré de l'union pour exprimer aux autorités compétentes, soit au gouvernement, soit à leurs employeurs, les représentations nécessaires pour protéger leurs droits et ils seront dans l'impossibilité aussi de voir à la protection du public. Comme je l'ai dit aussi, il s'agit d'une corporation qui est la seule aussi bien structurée pour offrir au gouvernement une collaboration étroite, une collaboration efficace.

Il y a quelques autres corporations dans la province de Québec qui groupent un certain nombre de mécaniciens de machines fixes, mais ce nombre est très restreint et peut se limiter à 40, 50 ou 60, alors que la corporation qui est ici devant vous groupe un nombre de 1,500 membres actifs et possède au-delà de 5,000 inscriptions de membres depuis son existence.

En conséquence, messieurs, je vous demande au nom de la corporation de donner, de déléguer des pouvoirs à la corporation qui est ici devant vous, afin qu'elle puisse régir et règlementer la pratique et l'exercice de cette profession des mécaniciens de machines fixes, être en même temps aussi l'interlocuteur valable entre l'autorité, soit le gouvernement, et les milliers de membres répartis dans la province de Québec, et de cette façon assurer la protection du public et la promotion de la compétence et de l'intérêt de ses membres.

Je pense, messieurs, que j'ai parlé un peu abondamment du problème général sans me reporter au mémoire qui est devant vous et que vous pourrez lire à loisir. Mais il ne sert à rien, à mon avis, de répéter ici les écrits que vous avez déjà et je vous laisse le soin de poser les questions qu'il vous semblera bon de poser pour savoir si la corporation satisfait aux critères exigés par la loi pour devenir une corporation professionnelle.

Je n'insisterai pas sur chacun des critères. En ce qui concerne les connaissances requises que l'on voit au premier paragraphe de l'article 21, je pense qu'il y aurait moyen de légiférer là-dessus ou de réglementer. Quant aux dommages à la propriété et à la personne, ai-je besoin d'insister puisque, si on avait ici dans la bâtisse un mécanicien en machines fixes incompétent, on pourrait sauter rapidement et sans en avoir même le douloureux souvenir.

En conséquence, messieurs, je laisse ce problème à votre sens des responsabilités et à votre compétence et vous pourrez poser des questions.

M. FOURNIER: Me Lafrenière, le code des professions tel qu'édicté par le bill 250, ne contient pas simplement une reconnaissance, mais il contient aussi une série d'obligations que doivent assumer les corporations professionnelles. En particulier, elles doivent avoir un comité de discipline, comité d'inspection professionnelle, code de déontologie, des procédures d'arbitrage de comptes, toute une série d'obligations et je me demande si réellement votre groupement désire être sujet à toutes ces obligations-là.

Quand je regarde le mémoire que vous avez présenté et les conclusions que j'y retrouve, ce sont des conclusions s'adressant au ministère du Travail et une reconnaissance vis-à-vis du ministère du Travail. Il semble que le problème de votre groupe, c'est de ne compter que 2,000 sur 15,000 personnes qui exercent la même discipline. Est-ce que la solution ne réside pas dans un autre système comme par exemple les électriciens où tous ceux qui sont électriciens, en plus du certificat du ministère du Travail, doivent appartenir à l'association? Est-ce que ce n'est pas là plutôt votre solution qu'imposer à un groupement comme le vôtre toute une série d'obligations qui semblent ne pas être trop appropriées à votre domaine?

M. LAFRENIERE: Je comprends le souci bien fondé de l'honorable Solliciteur général à ce point de vue-là et je puis dire qu'actuellement la corporation au nom de laquelle je parle n'a peut-être pas d'une façon déterminée tous les comités auxquels vous vous référez, soit — quoiqu'il en existe des embryons — le comité de discipline, le comité d'inspection, de surveillance, le code de déontologie.

Vous comprendrez, M. le Solliciteur général, que cette corporation-là, qui a été incorporée en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies et qui n'est en somme qu'une corporation socio-économique pour la protec-

tion de ses membres, n'a pas eu jusqu'à maintenant les pouvoirs nécessaires pour bâtir toute la structure qu'exige vraiment une corporation professionnelle. C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, avec 5,000 inscriptions qui sont venues dans la corporation, des membres ont négligé de renouveler leur cotisation, des membres se sont désintéressés parce que l'autorité n'a pas laissé à cette corporation les pouvoirs nécessaires pour vraiment bâtir du solide et avoir les moyens en somme de fonctionner et d'atteindre ses fins.

Nous prétendons cependant, les membres de votre commission en jugeront, que la corporation est tout de même un organisme actuellement valable et un corps intermédiaire précieux qui pourrait aider à l'établissement et à l'application de la réglementation concernant les mécaniciens de machines fixes. Vous vous êtes référé aussi au ministère du Travail, sans critiquer le ministère du Travail, nous prétendons que des fonctionnaires qui n'ont pas, peut-être le nombre d'années d'expérience que pourraient avoir la plupart des membres de la corporation, ne sont certainement pas aussi avertis des nécessités du métier que le sont les membres eux-mêmes de la corporation. C'est un peu comme si on laissait mener par des bureaucrates ou des fonctionnaires, quelles que soient leur compétence et leur intelligence, une association comme le Collège des médecins ou comme le Barreau, l'association des avocats. Il est bien entendu, l'honorable Solliciteur général le sait pour avoir pratiqué pendant plusieurs années le droit, que celui qui n'a pas été dans la pratique elle-même oublie une foule de facteurs humains que l'on rencontre dans la pratique et qui pourtant sont d'une aide précieuse lorsqu'il s'agit de réglementer la profession. Alors, c'est un peu, toute proportion gardée, le même principe que l'on peut appliquer à l'organisme que nous appelons la Corporation des maîtres en centrales thermiques.

M. FOURNIER: Merci.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, Me Lafrenière, c'est la deuxième fois que vous venez devant la commission pour représenter des groupes qui s'apparentent un peu, des groupes extrêmement importants. La première fois, c'étaient les techniciens professionnels et aujourd'hui ce sont les membres de la Corporation des maîtres en centrale thermique. Est-ce que vous faites un joint entre les deux groupements professionnels, si ce n'est pas au plan de la formation, ce qui n'est pas exclu dans l'avenir, toute formation évoluant? Est-ce que vous faites un rapprochement entre les deux corporations?

M. LAFRENIERE: Je pense que la question de l'honorable député de Montmagny est extrêmement pertinente. L'on ne peut pas faire de joint au point de vue corporatif lui-même, parce que les corporations sont des personnes morales, strictement indépendantes et séparées l'une de l'autre, mais en ce qui concerne la formation et la compétence que peuvent avoir ces travailleurs des différentes corporations, à un certain moment il peut y avoir fusion, parce qu'en somme nous sommes dans l'ère technologique, comme on l'a déjà établi. Le rôle ou le travail accompli par les mécaniciens de machines fixes est quelque chose d'essentiellement technique aussi. Ils doivent posséder des techniques mécaniques pour pouvoir exercer leurs fonctions et exécuter leur travail. Leur formation pourrait être prise aussi à la même source, soit dans les CEGEP de la province de Québec, et particulièrement en ce qui concerne les membres des trois premières catégories que j'ai mentionnées tout à l'heure, soit les mécaniciens de machines fixes première classe, deuxième classe et troisième classe. Il est bien convenu et admis que pour les mécaniciens de machines fixes de quatrième classe et de cinquième classe, on exige moins de compétence ou moins de théorie. Leur travail pourrait s'apparenter davantage à un travail qui requiert strictement de l'expérience; c'est un travail manuel qu'on pourrait apprendre en ayant suivi un cours dans les écoles secondaires, sans avoir nécessairement étudié dans les écoles de niveau collégial que l'on dénomme les CEGEP.

M. CLOUTIER (Montmagny): Actuellement, dans le secteur parapublic, au cours des négociations qui se font actuellement avec le gouvernement provincial, les mécaniciens de machines fixes n'ont-ils pas une unité de négociation spéciale?

M. LAFRENIERE: Je crois pouvoir répondre dans la négative, M. le député de Montmagny, à ce point de vue. Parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, jusqu'à maintenant l'esprit de la loi ne permet pas qu'un petit groupe d'employés, du parlement par exemple, s'affilie à un groupe d'employés de 1'Anglo Pulp, de Saint-Michel-Archange ou de l'hôpital de l'Enfant-Jésus pour former- un syndicat qui soit bien à eux et représentatif. De sorte que, lorsqu'un mécanicien de machines fixes veut négocier avec son employeur — je pense que nous devrions recourir à la société des traducteurs qui est passée devant vous tantôt, parce que j'allais employer un anglicisme — il n'a pas ce qu'on appelle un "bargaining power" qui soit très puissant, parce qu'ils sont isolés, ils sont seuls et noyés dans une unité de négociation qui inclut tous les genres de métiers.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je vois que vous voulez apporter une précision...

M. LEBOEUF: J'aurais quelque chose à ajouter à ce que Me Lafrenière disait. Pour une bonne partie des mécaniciens de machines fixes, il n'est pas possible de faire partie des comités

de négociation, comme vous le mentionnez, au sujet des salaires et des conditions de travail, puisque ces gars sont déjà dans la partie patronale de l'industrie des édifices publics ou représentent le patronat.

Pour ce qui est du bill 49, lorsqu'on a demandé de travailler aux comités consultatifs, on nous a répondu, à ceux qui étaient la partie patronale, qu'on devait passer par un représentant de notre patron. Or, je vous cite un cas en particulier, le mien. Lorsqu'on a voulu travailler à un comité consultatif régional, on nous a mentionné que, dans notre usine, c'était un commis qui nous représentait.

Or, ce qui nous intéresse énormément vis-à-vis du bill 250 et ce que nous retenons surtout, c'est le contrôle de l'exercice de la profession. Cela nous intéresse énormément puisque, par le bill 49, vous avez mentionné tantôt : Les électriciens ont un système. Mais je vous ferais remarquer que, dans le bill 49, on n'a pas abrogé totalement la loi des électriciens ni celle des mécaniciens en tuyauterie, alors que pour les mécaniciens de machines fixes, on a tout simplement dit un mot: abrogé. Et nous nous inquiétons énormément, nous, ceux qui font partie du patronat, ceux qui ont une classe supérieure probablement, ceux qui seraient en mesure d'aider le plus et le gouvernement et la société, en vertu de la protection et du public et des gars eux-mêmes qui travaillent dans les installations concernées.

C'est-à-dire que je crois que ce sont les individus qui ont atteint un certain palier qui sont en mesure d'aider à la rédaction de nouvelles formes de contrôle. On espère qu'il y aura une nouvelle forme de contrôle, que ce ne sera pas laissé au loisir de chacun de contrôler les appareils sous pression, parce qu'on sait fort bien que c'est à peu près impensable. Certes, vous avez peut-être à l'idée de petites installations, mais souvenez-vous qu'il y a beaucoup de grosses installations auxquelles on attache énormément d'importance parce qu'on connaît bien le domaine, on connaît bien le danger que cela comporte.

On a déjà eu, puisque la loi a été modifiée à plusieurs reprises, le chapitre 157 qui a donné beaucoup plus de latitude à certains, je pourrais même dire les propriétaires, pour faire des changements concernant la sécurité qui devient très chancelante. On le fait par expérience, on s'opposait en s'appuyant sur une loi qui existait mais, si elle disparaît, comment voulez-vous que je puisse prendre des décisions rapides? A certains moments, vous comprendrez bien qu'il y a des décisions extrêmement rapides, pour éviter une catastrophe, qui sont prises par la personne en charge et qui relèvent de toute une série de données, d'expériences accumulées et de connaissances? A ce moment-là, on évite la catastrophe parce qu'on pose un geste de compétence et qui est réfléchi parce qu'on a déjà l'expérience.

Si on évite de contrôler l'accès à la profes- sion, c'est-à-dire si on nie le droit au gars d'avoir un système qui contrôle, vous mettez la sécurité publique en danger. Vous savez, lorsque je suis à l'intérieur d'une centrale thermique et que je n'ai pas de moyens de contrôler les actions dangereuses qui peuvent se produire, je suis également en danger.

M. CLOUTIER (Montmagny): Revenant au niveau des négociations, il y a une unité de négociation qui s'appelle le local 50.

M. LEBOEUF:Oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ce sont des mécaniciens de machines fixes.

M. LEBOEUF: Ce sont des mécaniciens de machines fixes mais non pas pour la partie patronale. Autrement dit, pas un surintendant, pas un contremaître, vous comprenez ce que je veux dire?

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui.

M. KARAVASILIS: Monsieur, si vous permettez, le local 50 dont vous parlez, je le connais très bien, j'en fais partie tout en faisant partie des cadres de la corporation. Le premier des problèmes majeurs avec l'organisme concerné c'est que c'est un organisme municipal. Les mécaniciens de machines fixes exercent dans toute la province et le local 50 est pour toute la ville de Montréal. Si vous me permettez, disons l'impertinence d'être en désaccord mineur avec notre procureur, je crois que notre ami Leboeuf approchait le problème tout à l'heure, à mon sens: le gros problème n'est pas au niveau de notre employeur. Très peu d'entre nous ici vont faire état du manque de dialogue avec notre employeur.

Notre gros problème est le manque de dialogue avec les autorités gouvernementales. Notre existence légale dépend d'un fil, c'est le chapitre 157 et, au moment où les technocrates en place modifient ou menacent de changer le code 157, on se trouve devant une situation où on ne peut plus parler.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous n'êtes pas pris dans un cercle vicieux? Le ministère du Travail vous considère moins parce que vous avez seulement 1,500 membres actifs sur 15,000? D'autre part, vos membres se désintéressent parce que les autorités gouvernementales ne portent pas suffisamment d'attention à vos recommandations? Vous l'avez dit tantôt. Vous êtes abrogés, en un mot, vous disparaissez de cette législation.

M. KARAVASILIS: Vous savez, 1,500 membres en règle, je crois — je n'essaie pas de me gargariser avec nos mérites — pour un organisme comme le nôtre qui n'a jamais eu aucune espèce de pouvoir et connaissant la façon dont les

mécaniciens ont été maltraités par le ministère du Travail — parce qu'il faut l'admettre — que nous ayons 1,500 gars qui d'année en année envoient $15 ou $20 à la corporation qui n'a rien à offrir, les promesses mises à part, je crois que c'est fameux.

M. LAFRENIERE: Je pense que l'honorable député de Montmagny touche le centre du problème parce que c'est un peu un cercle vicieux, comme vous l'avez mentionné. Et c'est pour cela que la protection du public pourrait être compromise si le législateur ne s'occupe pas de légiférer spécialement pour un groupe semblable de travailleurs. Le législateur décidera-t-il de former une corporation professionnelle avec les mécaniciens de machines fixes? C'est la question qui se pose actuellement. Mais si une autre loi pouvait couvrir tout aussi bien les buts que nous recherchons, les mécaniciens de machines fixes en seraient probablement enchantés aussi.

M. CLOUTIER (Montmagny): En somme, si le législateur d'un côté agréait à votre demande, il faudrait que cela s'apparente aux techniciens professionnels, si je comprends bien, et, d'autre part, si le législateur décidait de couvrir le problème d'une autre façon, il faudrait que vous soyez aussi bien couverts que le sont les autres corporations, comme les maîtres électriciens ou d'autres corporations professionnelles du même genre. Vous êtes assis entre deux chaises. Vous n'êtes couverts, ni par la corporation professionnelle, ni par... Le chapitre 157 disparaissant, évidemment, vous êtes noyés dans tous les autres corps de métiers.

M. LAFRENIERE: C'est cela. Nous sommes noyés dans tous les autres corps de métiers et surtout avec cette caractéristique principale qu'on a affaire à des gens qui ont des responsabilités extrêmement lourdes et qui travaillent dans des endroits publics, dans des édifices publics. Je ne pense pas que l'Etat ou l'autorité civile devrait tolérer une situation d'à peu près comme cela pour un groupe semblable de travailleurs. C'est la raison pour laquelle nous sommes venus devant vous ce matin.

Je pense qu'en ce qui concerne les mécaniciens de machines fixes, malgré qu'il y ait d'autres petites corporations qui soient déjà existantes, c'est la seule qui, semble-t-il, viendra devant vous exposer le problème que nous avons discuté depuis tout à l'heure. A notre point de vue et je ne pense pas qu'on rêve en couleur en disant cela, je pense que nous sommes réalistes, la Corporation des maîtres en centrale thermique est de beaucoup la plus importante de toutes celles qui peuvent exister pour surveiller les intérêts des mécaniciens de machines fixes et pour surveiller leur qualification. Conséquemment, si le comité que vous représentez considérait la Corporation des maf-tres en centrale thermique, c'est avec plaisir que les autres corporations joindraient celle que nous représentons pour vraiment présenter un front commun et une unité de buts ou d'objectifs à rechercher.

M. CLOUTIER (Montmagny): Les mots "front commun" sont acceptables!

M. LAFRENIERE: J'ai pensé qu'ils impressionneraient le président...

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: J'ai seulement une question, Me Lafrenière. Vos réclamations pour les maîtres en centrale thermique ou les mécaniciens de machines fixes, je pense qu'elles sont, sur le plan réclamations, justifiées. Je me demande si, d'autre part, le genre de reconnaissance que vous recherchez n'est pas un type de reconnaissance analogue à celui de la corporation des maîtres électriciens ou la corporation des mécaniciens en tuyauterie ou des choses de ce genre. Regardant les critères, vous nous avez parlé de deux des critères auxquels les mécaniciens de machines fixes répondent, je pense, assez clairement : la question de compétence et la question de gravité du geste posé. Mais, l'article 21 nous parle de l'ensemble des cinq critères, les trois autres étant l'aspect confidentiel des renseignements, le caractère personnel des rapports qui existent entre la personne qui donne des services et la personne qui en reçoit, et également le degré d'autonomie dont jouissent les personnes qui sont membres de ces corporations. A cet égard je me pose la question tout en admettant vos réclamations et c'est là que je reviens à ma question du début: Est-ce qu'il ne s'agit pas plus d'une accréditation, auprès du ministère du Travail, du type de corporation comme les électriciens ou les autres corps de métiers semblables?

M. LAFRENIERE: C'est l'opinion, actuellement, M. le député, de la plupart des membres de la corporation qui sont intéressés vraiment d'une façon active, c'est l'opinion de ces gens pour lesquels le ministère du Travail ne semble pas manifester d'intérêt assez positif.

Vous avez mentionné les critères. Admettons au départ qu'on pourrait prendre deux critères, soit les connaissances requises et la gravité du préjudice causé. Je pense aussi qu'on pourrait pousser plus loin et prendre des critères qui traitent du degré d'autonomie, parce que le mécanicien de machines fixes qui se trouve en charge d'une centrale thermique ou de ces machines a des décisions à prendre, comme l'a signalé le vice-président, qui sont assez rapides. Sa compétence doit entrer en ligne de compte. Il se conduit lui-même de par sa compétence.

Quant à l'aspect confidentiel, évidemment, ce n'est pas comme s'il s'agissait d'un médecin ou d'un avocat, mais il reste que ces gens connaissent certaines choses dans une manufacture, dans un édifice public, qui ne doivent pas

être révélées au premier venu parce qu'il pourrait y avoir quand même des tentatives de sabotage ou quoi que ce soit. Cet homme doit donc présenter un caractère moral qui soit de tout repos.

Si on regarde la question de près et les critères nécessités ou exigés par l'article 21 du code des professions, on s'aperçoit que, généralement parlant, on y répond assez bien. D'un autre côté, il reste une foule de modalités, de technicités à étudier, ce qu'on ne peut faire ici, en commission, pour faire l'ajustement complet de cette corporation dans les cadres d'une corporation professionnelle. Bien entendu, il y aurait peut-être lieu d'émonder un peu et d'avoir des exigences plus précises, plus serrées pour certains membres de la corporation.

Comme la plupart des membres ici l'ont compris, on est assis entre deux chaises vraiment et je ne pense pas que ce genre de travail doive être laissé en plan comme ça et laissé pour compte. Il y a tout de même 15,000 ou 16,000 travailleurs dans la province de Québec qui sont en mesure de protéger ou de compromettre la sécurité du public. Par conséquent, je pense qu'on doit accorder une attention extrêmement particulière à ce groupe de travailleurs et légiférer en conséquence. Quant au mode de législation, cela reste à étudier, mais le but que nous avons recherché ici ce matin est de placer le problème sur la table de façon que le législateur en soit averti.

C'est la première fois, je pense, que pour le groupe des mécaniciens de machines fixes, cela peut se faire et c'est grâce, justement, à votre compréhension et à l'invitation que vous nous avez faite de paraître devant vous, que nous avons pu le faire.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. BURNS: Une dernière seulement; vous ne m'avez pas répondu à l'autre question que je vous posais. Evidemment, elle était peut-être cachée dans tout ce que je vous ai dit. Est-ce que les buts que vous visez ne seraient pas atteints par une loi spéciale pour votre groupe, un loi du type de celle de la corporation des maftres électriciens ou de la corporation — encore une fois je vous donne l'autre exemple — des mécaniciens en tuyauterie? Il y a d'autres corporations du même style. Est-ce que les buts que vous visez ne seraient pas atteints par cela?

M. LAFRENIERE: Les buts, je pense bien, pourraient être atteints, à la condition que, justement, le gouvernement donne à notre corporation des pouvoirs qui ne sont pas tout simplement des pouvoirs d'un club social.

M. BURNS: Si le gouvernement prenait la peine de faire la loi concernant les mécaniciens en centrale thermique, je pense que déjà, en soi, cela serait une reconnaissance, cela vous donne- rait justement ce fameux "bargaining power" auprès du ministère du Travail pour représenter vos gens. Est-ce que je me trompe en disant cela?

M. LAFRENIERE: Je ne crois pas que le groupe actuel veuille tellement avoir une corporation qui s'appelle nécessairement une corporation professionnelle. Il veut avoir une corporation qui lui donne des pouvoirs.

M. BURNS: Et un statut.

M. LAFRENIERE : ... qui peuvent lui permettre de réglementer, de surveiller, d'avoir un comité de discipline, de faire passer des examens à ses membres et d'exiger l'application intégrale des règlements à travers la province de Québec. Ce qui ne peut se faire que d'une façon très incomplète par un seul organisme gouvernemental qui n'a à son emploi que 36 employés de bureau et 21 inspecteurs pour les mécaniciens de machines fixes qui sont au nombre de 15,979. Alors, ce n'est pas équilibré.

M. BURNS : La raison principale pour laquelle je vous posais cette question — et là-dessus, je rejoins le Solliciteur général dans sa question précédente — c'est que je me demande si le fait de vous couvrir par le projet de loi no 250 ne vous imposerait pas des obligations beaucoup trop lourdes pour le genre de corporation ou le genre d'organisme que vous voulez avoir. C'est la question que je me pose.

M. LAFRENIERE: En même temps que cela imposerait des obligations, cela imposerait aussi des droits et pour l'exercice de ces droits que la corporation aurait, je pense qu'elle serait prête à supporter les obligations.

C'est entendu que ça lui enlève — comme à toutes les corporations qui seront régies par le code de profession — une certaine autonomie. C'est bien entendu, parce que le gouvernement ou l'Etat se réserve un droit de surveillance assez serré auprès de ces corporations et c'est justement pour atteindre la protection du public que c'est fait. Malgré ça, je pense que tout le monde y trouverait son profit si la Corporation des maîtres en centrale thermique était sous la juridiction du code des professions, quitte à se plier à toutes les exigences du gouvernement qui sont contenues dans le bill 250.

M. LE PRESIDENT: Vous voulez ajouter quelque chose?

M. LAVOIE: M. le Président, messieurs, au nom de l'association que je représente, il me fait plaisir de vous remercier sincèrement. Nous repartons d'ici cet après-midi — comme il est passé l'heure du midi — avec l'espérance de nouvelles favorables. Merci.

M. LE PRESIDENT: Au nom de la commission, je remercie la délégation. La commission ajourne ses travaux jusqu'à jeudi, à neuf heures et demie.

M. LAFRENIERE: Neuf heures et demie?

M. LE PRESIDENT: Neuf heures et demie ou dix heures. Regardez dans le feuilleton pour le savoir.

(Fin de la séance à 13 h 15)

Séance du ieudi 15 juin 1972 (Dix heures douze minutes)

M. BLANK (président de la commission spéciale sur les corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

La commission spéciale sur les corporations professionnelles est maintenant ouverte. En premier, nous entendrons l'Association des chirurgiens dentistes du Québec. Est-ce que le Dr Labelle est ici?

Association des chirurgiens dentistes du Québec

M. LE PRESIDENT: Je constate que vous avez deux mémoires, un sur les bills 250 et 254 et l'autre sur le bill 266. Voyant qu'il y a des choses dans les deux mémoires qui correspondent, est-ce qu'il serait possible de faire le résumé en discutant les trois bills ensemble? On vous questionnera sur les trois bills après.

M. LABELLE: M. le Président, je n'ai pas l'intention de faire la lecture intégrale des résumés de mémoires.

M. LE PRESIDENT: Merci beaucoup.

M. LABELLE: J'aimerais, pour économiser le plus de temps possible aux participants, soulever certains points qui nous semblent d'un plus grand intérêt. Nous aimerions commencer à commenter quelques points du bill 254, pour ensuite passer au bill 266 et terminer par le bill 250.

M. le Président, je tiens à vous remercier de nous avoir permis de venir ici pour pouvoir exprimer notre point de vue. J'aimerais au début vous présenter à la table, à mes côtés, les principaux membres de notre exécutif. A partir de ma gauche, le Dr Marcel Tenenbaum, qui est le vice-président; le Dr Pierre-Yves Lamarche, le secrétaire; Me Marc Lapointe, notre conseiller juridique. A ma droite, le Dr Claude Chicoine, trésorier de notre association; Mlle Francine Beaudoin, conseiller technique et le Dr Yves Poulin, vice-président de notre association.

Pour débuter, il va sans dire que les trois bills qui sont le sujet de discussion aujourd'hui revêtent pour nous une importance primordiale. Nous aimerions rendre bien clair le fait que nous avons déjà, depuis plusieurs années, recommandé à plusieurs occasions l'élargissement des fonctions du personnel auxiliaire à l'intérieur de la profession dentaire.

Nous étions conscients que la loi qui nous gouvernait était quelque peu désuète et déjà, dès 1968, dans le mémoire, notre association présentait au ministre de la Santé, l'honorable Jean-Paul Cloutier, un mémoire qui demandait... Si vous permettez, je vais simplement citer un paragraphe qui dit que les enquêtes à travers la province et le Canada ont démontré la

pénurie de dentistes face aux besoins de la population. Cette pénurie pourrait être largement atténuée si la loi dentaire était amendée, afin de donner plus de prérogatives à un personnel auxiliaire.

Déjà, en 1969, nous avions aussi l'occasion de présenter un autre mémoire, cette fois au comité d'étude des professions auxiliaires de la santé et qui faisait, encore une fois, ressortir l'urgence d'un personnel auxiliaire à l'intérieur de notre profession. Si j'ai voulu mentionner ces quelques points, c'est principalement pour faire voir le plus clairement possible que nous avons toujours prôné l'expansion d'un personnel auxiliaire en vue de rendre un service plus approprié à la population.

Si vous me le permettez, pour se référer plus spécifiquement au bill 254, je voudrais souligner à la page 19 de notre mémoire, le paragraphe 37 se référant à l'article 35 du bill 254. Je vais faire lecture de l'article 35 qui dit, sous l'étiquette Exercice illégal de l'art dentaire: "Sous réserve de l'article 25, nul ne peut poser l'un ou l'autre des actes décrits aux articles 23 et 24, s'il n'est pas dentiste".

En rapport avec cet article 35, nous aimerions voir ajouter, comme modification au bill 254, l'assurance que le dentiste pourra déléguer certaines fonctions à son personnel auxiliaire et cela en cabinet privé.

Dans la loi qui nous régit présentement, le dentiste n'a aucune liberté d'action dans ce sens et nous pensons qu'en vue de favoriser la distribution des soins il serait sûrement très important d'assurer ou par réglementation ou à l'intérieur du projet de loi que le personnel auxiliaire puisse effectuer des tâches pour autant qu'elles seraient déléguées et sous la responsabilité du dentiste.

En rapport avec le même mémoire, et ceci à la page 11, nous constatons, quant au personnel auxiliaire — à l'heure actuelle je pense qu'il y a un consensus de tout le monde— qu'il faut former autant que possible le personnel auxiliaire.

Cependant, là s'arrêtent nos connaissances.

Quand il s'agit de déterminer quelles seront les fonctions remplies par ce personnel auxiliaire, quel en sera le nombre et avec quelle rapidité devons-nous le former? Combien avons-nous besoin d'assistantes dentaires ou d'hygiénistes dentaires ou de techniciens dentaires? Je pense que nous sommes devant des données inexactes, devant des études, qui à toutes fins pratiques, n'ont jamais été effectuées à l'intérieur du Québec.

Si vous permettez, sur ce point, j'aimerais lire quelques paragraphes de notre mémoire et je cite, paragraphe 22: "Il n'existe aucune donnée quant au nombre de personnes qui oeuvrent dans le secteur à un quelconque titre. De plus, il faut, au départ, renoncer à l'utilisation des titres, secrétaires, réceptionniste, assistante dentaire, hygiéniste dentaire, puisque chacune de ces appellations est susceptible de couvrir des réalités différentes. Outre leur nombre, il faudrait connaître leur répartition géographique, leur fonction, c'est-à-dire la nature de leur tâche, leur mode de formation. Il faut s'interroger pour savoir si la totalité ou une partie de ces personnes pourraient, une fois certains ajustements effectués — c'est-à-dire le recyclage ou une certaine période de formation — constituer le noyau des futurs groupes d'auxiliaires. Il faut également se demander à quel rythme il serait possible d'intégrer dans les cabinets privés des dentistes du personnel auxiliaire. Car cette intégration nécessite que les deux conditions suivantes soient réalisées: qu'un tel marché soit existant et que les dentistes soient prêts à intégrer dans leur cabinet de nouvelles catégories de personnel. On peut se poser des questions quant à l'existence de ce marché au Québec. De plus, si l'on se réfère à l'étude de Hall, sur l'attitude des dentistes vis-à-vis de l'hygiéniste dentaire, la majorité des dentistes répondants qui n'emploient pas d'hygiénistes dentaires manifestent une attitude positive. Cependant, il est difficile de prévoir ce que serait leur comportement et leur vitesse d'adaptation car, dans les réponses, l'argument le plus souvent invoqué — c'est-à-dire que la dimension de la pratique ne justifie pas l'emploi d'hygiénistes — constitue-t-il un prétexte ou une réalité si cette dimension de la pratique était autre?

Un peu plus loin, à première vue, et je me réfère au paragraphe 39, page 20, il apparaît bien fondé de former et de constituer en corporation un groupe de personnes qui s'occuperont avant tout de l'aspect préventif. Cependant, nous ne pouvons répondre aux questions suivantes, c'est-à-dire leur nombre, le secteur où ces personnes oeuvreront, leurs liens avec les dentistes et l'étendue de leur champ d'activité.

Ceci, à mon sens, résume l'importance que nous voulons attacher à un personnel auxiliaire bien intégré au sein de la profession. Mais, d'un autre côté, il fait voir le manque de données précises sur lesquelles nous devrions compter avant d'élargir et de transférer certaines fonctions à ce personnel auxiliaire.

Ceci étant dit, et vous aurez eu l'occasion de le lire parmi les conclusions de nos mémoires, nous sommes d'avis qu'un comité d'étude devrait être formé en vue d'étudier les besoins du Québec et en vue de faire des recommandations dans le plus bref délai possible, quant au personnel auxiliaire pouvant s'intégrer à l'intérieur de la profession dentaire.

Si vous le permettez, M. le Président, ce sont là les principaux points que nous voulions aborder quant au bill 254; il nous ferait plaisir de vous faire connaître maintenant nos commentaires quant au projet de loi 266.

En résumé, quant au projet de loi 266, nous sommes en désaccord sur le libellé actuel du projet de loi, principalement pour les raisons suivantes: pour la prothèse partielle amovible, je pense que nous devrions très bientôt faire

une distinction et apporter les clarifications quant à la définition de la prothèse, prothèse dentaire, j'entends. La prothèse partielle amovible ne peut pour aucune considération constituer une activité professionnelle pour un groupe autre que les chirurgiens dentistes. Parce qu'à notre point de vue, pour accomplir une prothèse partielle amovible, il faut des notions poussées de diagnostic, de dentisterie opératoire, de couronnes et ponts, de périodontie et de radiologie.

S'il était utile de développer ces différents points, il nous fera plaisir, lors de la période de questions, de s'attarder sur les points que je viens d'énumérer.

Deuxièmement, une condition qui, à notre point de vue, nous semble essentielle: nous voulons et nous recommandons de recevoir l'assurance que le patient, avant la réalisation d'une pièce de prothèse complète, reçoive un examen et aussi qu'un diagnostic soit posé et qu'un choix de traitements soit fait. Nous constatons que toujours, avant la réalisation d'une pièce de prothèse complète, il faut un examen clinique et radiologique s'il est nécessaire qu'un diagnostic soit posé et qu'un choix de traitements soit établi.

A ce stade-là, il est essentiel que ces étapes soient effectuées par le chirurgien dentiste et nul autre. Un troisième point quant au projet de loi 266, c'est le suivant: la formation actuelle du technicien dentaire n'est aucunement reliée à l'activité professionnelle qu'on lui délègue dans le projet de loi 266.

Enfin, pour pouvoir simplement jeter un peu de clarté sur la définition de la prothèse, je pense qu'il faut d'abord faire les grandes divisions de la prothèse complète et de la prothèse partielle, ce qui semble avoir été complètement ignoré dans la rédaction du projet de loi 266. Même dans la prothèse complète, il y a une subdivision qu'on pourrait appeler la prothèse de type immédiat, la prothèse initiale et la prothèse de remplacement.

Quant à la prothèse partielle, il y a deux types de prothèses partielles qui sont la prothèse amovible et la prothèse fixe. Dans tout ce domaine de la prothèse, je vous inviterai dans quelques moments à poser toutes les questions que vous désirez au Dr Claude Chicoine qui se trouve à mes côtés.

Passons maintenant au projet de loi 250. A ce sujet, il s'agira pour nous principalement de questionner et d'obtenir certaines clarifications quant aux tarifs d'honoraires et aussi quant au fonds d'indemnisation. Mais plus spécifiquement, j'aimerais laisser Me Marc Lapointe discuter du sujet en relation avec le tarif d'honoraires.

M. LAPOINTE: Je pense bien que le mémoire de l'association est assez clair, je me contenterai de le résumer pour le moment. Il est question du bill 250 et du point particulier que nous voulons soulever dans le mémoire à la page i), au tout début du mémoire et nous aimerions mettre, comme nous le faisons dans le mémoire, en comparaison, l'article 83 m) du bill avec l'article 169, paragraphe f).

C'est-à-dire qu'il nous apparaît qu'il y aurait lieu d'apporter certaines clarifications ou certaines concordances entre ces deux textes afin qu'il n'y ait pas et qu'il ne se glisse pas dans la fixation des honoraires des incompatibilités qui feraient qu'on recouvrirait par deux parties de loi les mêmes actes posés par les mêmes professionnels. C'est dans son essence même la remarque que nous voulions faire sur cet aspect du tarif des honoraires. Quant à l'autre point qui a été soulevé, le fonds d'indemnisation, nous avons remarqué, à l'occasion de notre lecture au journal des Débats, que c'est un point qui a été traité à différentes reprises déjà et nous n'insistons pas plus. Sur le bill 250, par conséquent, c'est strictement cette question de la comparaison des deux textes de loi qui nous cause des ennuis et qui, nous croyons, pourrait amener des difficultés à l'avenir.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, on peut passer aux questions?

Le ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier les représentants de l'Association des chirurgiens dentistes pour leur mémoire. J'aurais peut-être un commentaire à faire en ce qui a trait à la nécessité de personnel auxiliaire ou d'hygiénistes dentaires. Nous sommes parfaitement d'accord et, même si des données précises n'existent pas, nous avons des approximations assez justes, malgré tout, parce que ce personnel est relativement rare. Il nous apparaît, sans nécessairement devoir attendre que le personnel, que des données ou des projections très précises puissent être faites, que des gestes peuvent être posés, entre-temps, sans risquer de nous engager dans une voie qui serait fausse. Il est évident que, malgré ces gestes, nous devrons nous orienter vers des prévisions qui nous permettront de mieux connaître les besoins et qui pourraient venir compléter celles constituées par le comité des professions auxiliaires de la santé et d'autres organismes. C'était simplement un commentaire sur ce point.

Quant au reste, M. le Président, je préférerais attendre les questions des autres membres de la commission.

M. CHICOINE: M. le Président, j'aimerais faire remarquer une chose à M. le ministre concernant les hygiénistes dentaires. Il y en a seulement quinze enregistrés au collège, mais il y en a peut-être 150 qui travaillent dans la province présentement et dont nous n'avons pas les enregistrements. Ceci pour vous dire que certains dentistes qui sont à l'avant-garde du progrès ont déjà formé dans leur bureau leur propre hygiéniste.

M. CASTONGUAY: Je suis au courant.

M. CHICOINE: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais dire au Dr Labelle qu'il est d'abord exact que des mémoires aient été présentés en 1968 au ministre de la Santé d'alors et que c'est ça qui a donné naissance — pas seulement ce fait — et qui a aidé à la création de la commission spéciale qui a été chargée d'enquêter sur les professions auxiliaires de la santé, sous la responsabilité du ministre d'Etat à la Santé, le député de Dubuc, mon collègue, le Dr Boivin.

En 1969, également, un mémoire a été présenté à cette commission. Je voudrais vous poser une première question: Etant donné qu'il y a des lois qui mettent en lumière d'autres professions de votre secteur de la santé, entre autres les denturologistes et les hygiénistes dentaires — je rattache ça au besoin que vous avez mentionné de personnel auxiliaire — et que la nécessité, — l'urgence de votre loi vous donne la possibilité que ce personnel auxiliaire travaille sous votre responsabilité, ce que les lois actuelles ne permettent pas — si la législation avait permis que le personnel auxiliaire, dans votre secteur, dans votre profession, travaille sous votre responsabilité, croyez-vous que ces demandes des denturologistes auraient quand même été faites à la commission parlementaire, parce que c'est la première occasion qu'il y a de faire ces demandes?

M. LABELLE: Je pense qu'on scrute plusieurs hypothèses présentement; je pense aussi qu'on fait face à une situation, comme je l'ai soulevé, qui comporte des inconnues. On ne sait pas trop où on s'en va. Tout le monde le dit et tout le monde est d'accord pour développer un personnel auxiliaire. Mais quel type de personnel auxiliaire? Quelles fonctions va-t-il remplir?

Nous favorisons le développement d'un personnel auxiliaire pouvant faciliter et pouvant distribuer plus facilement les soins de santé au public, nous sommes tous d'accord là-dessus. Mais ce que l'on constate de plus en plus, c'est qu'en étant tous d'accord sur un point, sur ce point-là en particulier, on est devant une situation ne comportant pratiquement que des inconnues pour l'avenir. De quel nombre avons-nous besoin? Quelles seront leurs fonctions bien précises? Quelle sera la relation entre le dentiste pratiquant et le personnel auxiliaire? Quels sont les besoins du Québec?

Je pense qu'on a, dans bien des cas, essayé de copier des situations qui existaient dans d'autres provinces ou dans d'autres pays, mais ça ne veut pas nécessairement dire que ce sont des situations qui correspondent au Québec. Il peut y avoir des divergences assez marquées quant aux besoins de la population en regard des soins dentaires.

En fait, peut-être que ça ne répond pas directement à votre question mais étant donné qu'elle est hypothétique...

M. CL0UTIER (Montmagny): Je suis d'accord, nous sommes dans le domaine hypothétique. Mais vous, les dentistes, vous avez des relations avec les techniciens dentaires depuis que la profession existe. Ils vous assistent dans votre travail. Nous constatons, par les lois qui nous sont offertes, qu'ils vont se dégager, ils demandent d'avoir un secteur qui leur soit réservé. Vous répondez que toutes les opérations qui sont rattachées à l'installation des prothèses ne se séparent pas et vous apportez à l'appui, dans votre mémoire, tout l'exposé de ça. Vous dites que ça fait partie d'un ensemble, d'un acte qui ne se sépare pas.

Cela m'a amené à vous poser la question suivante. Si vous aviez pu, si les lois actuelles avaient permis que les techniciens dentaires travaillent sous votre responsabilité, si le personnel auxiliaire dans le secteur ou dans le champ d'activités que vous exercez avait été reconnu par la législation, est-ce que ces demandes qui viennent de la part d'autres groupes dans le même secteur que vous occupez auraient été formulées? C'est une question hypothétique, je l'admets, mais c'est peut-être une analyse qu'on vous demande, à ce moment-ci, du comportement de ceux avec qui vous avez été appelés à travailler en plus étroite collaboration.

M. LABELLE: Si vous me permettez, je suis d'accord que les relations entre les techniciens dentaires et les chirurgiens dentistes auraient peut-être dû prendre une direction meilleure depuis déjà quelques années. Je pense qu'on aurait dû faciliter cette relation en tant que type de personnel auxiliaire, comme catégorie de personnel auxiliaire. Je pense qu'on aurait dû faciliter avant aujourd'hui la délégation de certaines fonctions.

Cela aurait peut-être évité les embarras que nous avons aujourd'hui et qui ne sont pas des problèmes sérieux, loin de là, mais qui ne sont pas toujours ce qu'on voudrait qu'ils soient. Par contre, je m'empresse d'ajouter ceci. Vous semblez exprimer l'opinion disant que nous ne voulons pas, en aucun cas, déléguer certaines fonctions aux techniciens dentaires et je pense que là n'est pas notre pensée du tout. Parce que nous ne nous opposons pas à déléguer certaines fonctions, nous insistons principalement sur le fait qu'il y a une phase essentielle qui doit être du ressort du chirurgien dentitste et c'est la suivante, c'est-à-dire l'examen, le diagnostic et le choix du traitement. C'est une condition essentielle et nous prétendons à juste titre que c'est du ressort du chirurgien dentiste, que c'est le seul qui est en mesure de poser cette phase qui précède la confection d'une prothèse.

Quand nous en serons à l'étape même d'une confection d'une prothèse, là, il pourra y avoir une délégation et je pense bien que, dans le

mémoire que nous avons présenté, nous ne nous opposons pas du tout à une délégation de fonctions à ce niveau, quant à la confection de prothèses. Nous disons tout simplement que, encore une fois, nous voudrions voir, avant l'adoption du projet de loi 266, la formation d'un comité qui sera en mesure d'ici quelques mois, de déterminer les fonctions de chacun. Mais, nous ne nous opposons aucunement à la délégation de fonctions dans la phase de la confection de la prothèse.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dans le contexte de votre réponse, cela voudrait dire que la définition de l'acte qui est donnée au bill 266, à l'article 6, est inacceptable sans que vous n'ayez eu l'occasion, dans le comité que vous venez de décrire, de discuter le champ d'exercice et les responsabilités qui seraient délégués aux den-turologistes.

M. LABELLE: C'est exact. Et d'ailleurs, je pense qu'on fait mention de la prothèse où il est essentiel que la définition de la prothèse que j'ai donnée tout à l'heure soit bien établie et bien clarifiée, parce que le mot prothèse est bien vague. Cela veut dire beaucoup.

M. CLOUTIER (Montmagny): Plus tard, nous aurons l'occasion de questionner l'autre groupe, s'il a des commentaires à faire. Il est vrai que vous n'aurez pas le droit de réplique aujourd'hui, mais de toute façon, nous essaierons de soulever les points qui nous paraissent les plus susceptibles d'intérêt pour éclairer cette zone grise dans ce secteur. Une autre question que je voudrais vous poser, Dr Labelle, est celle-ci: La profession des dentistes entre dans le champ des lois provinciales. Vous entrez dans le cadre du bill 69, dans ce réseau étatique des soins pour les enfants de zéro à sept ans. Evidemment, la demande viendra aussi pour que d'autres clientèles soient ajoutées; notamment, déjà, il y a eu des demandes pour que les enfants de huit, neuf et dix ans et aussi jusqu'à 18 ans, soient couverts en priorité. Croyez-vous que, dans l'état actuel de la profession, dans l'état actuel de la loi, vous êtes en mesure de répondre à cette demande énormément accrue des soins?

M. LABELLE: Je pense que c'est un peu ce qui ressort de tout le domaine dentaire, de la situation dentaire au Québec. Nous sommes devant la noirceur. Quels sont les besoins de la population au point de vue dentaire? Je pense que nous avons quelques données, mais elles sont discutables ou du moins, c'est l'avenir qui nous dira si elles sont bien justes. Quelle sera la proportion des gens qui se prévaudront de l'assurance dentaire? Est-ce que cela sera dans une proportion de 25 p.c. 30 p.c. ou 40 p.c? Là encore, je pense que nous n'avons pas de données précises là-dessus. Je pense que tout dépendra aussi de la couverture des soins, quel genre de soins seront exactement couverts; quoique là, nous commençons à avoir plus de précisions puisque le ministre des Affaires sociales a fait récemment une déclaration qui nous a rendus bien heureux, dans son ensemble, je dirais.

M. CLOUTIER (Montmagny): Laquelle, Dr Labelle? Pas celle au sujet des allocations familiales?

M. CASTONGUAY: Ils sont bien heureux, laissez-les dans leur béatitude.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, ils en ont arraché assez longtemps. Continuez, docteur.

M. LABELLE: Enfin, je pense tout de même que les dentistes devraient être en mesure de faire face à la demande pourvu qu'on favorise, dans le plus bref délai, l'élargissement des fonctions qui seront déléguées au personnel auxiliaire en cabinet privé, moyennant toujours une formation adéquate.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, Dr Labelle, on peut le dire, on n'a pas de statistiques actuellement, on ne sait pas quel serait le volume des soins requis par la population advenant le cas où la population de 0 à 18 ans soit couverte par un régime étatique, mais on peut tout de même entrevoir que la demande serait très considérable.

M. LABELLE: Oui, d'accord, mais je pense qu'on est assuré à ce moment-ci que le début du régime sera pour les enfants de sept ans, ceci couvre donc une population beaucoup moindre que si on couvrait toute la population jusqu'à 18 ans. Durant ce temps, je pense bien que le ministre des Affaires sociales sera en mesure d'évaluer, après un an ou deux de fonctionnement du régime, les retombées de ce régime.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous poursuivez certaines études actuellement, soit au Collège des chirurgiens dentistes ou à l'Association des chirurgiens dentistes, sur ces inconnues que nous avons, sur les profils d'exercice de vos professionnels de la santé, sur la répartition de vos effectifs, enfin toutes les données qui seront nécessaires, à un moment donné, à votre profession pour avoir une discussion assez serrée avec le gouvernement?

M. LABELLE: A l'heure actuelle, il y a une étude que nous avons fait effectuer l'an dernier par l'économiste Lacasse, qui s'intéresse particulièrement aux besoins du Québec et aux données du Québec en regard des soins dentaires et de la population dentaire. Il y a aussi des statistiques qu'on peut colliger au niveau fédéral, c'est-à-dire par l'intermédiaire de l'Association dentaire canadienne, qui fait habituellement des relevés périodiques.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quand vous avez suggéré tantôt une modification à la loi actuelle — je pense que c'est l'article 35 de la loi qui est proposée, la loi 254 — vous avez mentionné la responsabilité du personnel auxiliaire, mais en cabinet privé, non seulement en cabinet privé, j'imagine que c'est dans des institutions aussi, à l'hôpital, parce que vous avez dit que ce serait en cabinet privé.

M. LABELLE: Bien, disons que nous y attachons sûrement plus d'importance.

M. CLOUTIER (Montmagny): Plus d'importance.

M. LABELLE: Cela devrait être général, nous y attachons plus d'importance parce que la grande majorité des dentistes pratiquent en cabinet privé et que c'est réellement là où se distribueront, du moins encore pour l'instant et pour probablement quelques années, les soins dentaires.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je vous pose la question, docteur, parce que, dans le cadre du bill 65, avec les CLSC, il est possible que les soins dentaires se développent davantage dans le contexte de ces nouvelles institutions. C'est pour ça que je vous pose la question. Alors, vous n'excluez pas le champ de pratique, c'est le champ de pratique général de votre profession.

M. LABELLE: Absolument pas. Si nous avons soulevé ce point, c'est que, principalement dans la loi actuelle, le dentiste, si vous voulez, est forcé d'accomplir des tâches secondaires, qu'il pourrait déléguer à un personnel auxiliaire, par le fait même, il pourrait augmenter sa productivité. C'est dans la loi actuelle, ça. Par contre, le projet de loi 254, ne donne pas d'assurance que cette situation plus ou moins anachronique sera corrigée. Or, nous voudrions être assurés que le projet de loi 254 prévoie cette possibilité pour le dentiste de déléguer des fonctions de type secondaire, tout en demeurant sous sa responsabilité.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci, docteur.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, je voudrais demander au Dr Labelle, si dans son optique, si selon sa pensée, le personnel auxiliaire rattaché aux soins dentaires aura le droit de prendre des empreintes et de faire l'ajustement d'une prothèse dentaire?

M. LABELLE: Le personnel auxiliaire est à déterminer. Je peux en faire l'émunération — je parle à l'intérieur de la profession dentaire — à partir de la réceptionniste ou de la secrétaire dentaire, l'assistante dentaire, l'hygiéniste dentaire, le technicien dentaire, le denturologiste et même une autre catégorie qu'on appelle le technologiste dentaire qui s'apparente de très près et qui, à mon sens, est une meilleure terminologie pour identifier le denturologiste, mais enfin. Vous avez aussi le thérapeute dentaire qui est un autre type de personnel auxiliaire qu'on a développé principalement à l'intérieur de l'armée canadienne.

Tout ça, c'est l'ensemble des membres du personnel auxiliaire qui oeuvre à l'intérieur de la profession dentaire, sous la responsabilité du chirurgien dentiste. Quelles sont exactement leurs fonctions? C'est ce que nous avons dit tout à l'heure; à l'heure actuelle, nous sommes en face d'un imbroglio où il y a beaucoup de personnel auxiliaire dont les fonctions ne sont pas déterminées.

M. GUAY: Mais, en pratique, il y a quand même des rôles assez définis pour chacune de ces personnes. J'imagine que la réceptionniste ne prend pas d'empreintes, c'est sûr. Dans la pratique, il y a quand même des rôles qui se sont concrétisés avec le temps.

M. LABELLE: Des rôles qui se sont concrétisés de bureau en bureau; c'est une image différente que vous pouvez avoir d'un bureau à l'autre, suivant la façon dont il est organisé, suivant l'organisation interne d'un cabinet dentaire.

M. GUAY: Vous avez mentionné des tâches secondaires du dentiste; si vous parlez de tâches secondaires, vous avez à l'esprit que ce peut être, à peu près, un rôle qui pourrait être accompli par d'autres personnes. Pourriez-vous donner des exemples de tâches secondaires dont le dentiste pourrait se dispenser, par exemple?

M. LABELLE: D'abord et avant tout, on doit dire que le dentiste est un diagnosticien, si vous voulez, de la chose dentaire. C'est le rôle principal du dentiste. Par sa formation, c'est un thérapeute et c'est un diagnosticien du domaine bien spécifique de la bouche. Quels sont les rôles secondaires, les actes secondaires qu'il peut déléguer? Vous avez toute une série d'actes qu'il serait très difficile d'énumérer, parce que tout cela est en relation de la formation du personnel auxiliaire. Plus vous aurez un personnel auxiliaire qui est mieux formé, mieux préparé à remplir des tâches secondaires, plus vous pourrez lui déléguer des tâches secondaires.

M. GUAY: Je ne vous obligerai pas à répondre à l'autre question. Est-ce que les tâches accomplies par le denturologiste ou technicien dentaire font partie des tâches secondaires ou si ce sont des tâches premières?

M. LABELLE: Si vous permettez, j'aimerais

laisser la parole au Dr Chicoine qui, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, s'occupera principalement de répondre à ces questions.

M. CHICOINE: Pour répondre à votre question, disons que le terme tâche secondaire est peut-être mal choisi. Ce sont des pouvoirs qui seront délégués. Est-ce que cela répond un peu à votre question?

M. GUAY: Cela répond partiellement. Moi, je m'explique mal actuellement... Si on parle de tâches primaires et de tâches secondaires, comment expliquer quand même que 80 p.c. de la clientèle qui a besoin de services dans le domaine dentaire va directement chez un technicien dentaire au lieu d'aller chez le dentiste? Peut-être que cela pourrait préciser davantage le point de vue de la clientèle sur la chose en son entier.

M. CHICOINE: Je vais vous donner justement l'opinion de 80 p.c. de la population. Les gens disent toujours qu'au point de vue de leurs dents, le moyen le plus rapide, c'est d'en finir avec les troubles dentaires. Le moyen d'en finir, c'est d'en acheter des fausses le plus vite possible. Le raisonnement est d'autant plus intelligent qu'il est possible de réaliser cet achat en faisant des économies; il s'agit même de grosses économies puisqu'on a réussi à contacter un intermédiaire qui va nous obtenir l'appareil non seulement dans le gros mais, en plus, illégalement.

A coup sûr, l'aubaine en vaut tellement la peine qu'il est impérieux de négliger ses dents et sa condition buccale pour pouvoir enfin profiter de cet avantage réservé aux plus astucieux.

M. GUAY: Si on enlève le terme illégalité, parce que peut-être que, dans l'avenir, ce sera normalisé, il y a quand même...

M. CHICOINE: Cela ne change pas le problème.

M. GUAY: Je suis d'accord avec vous que cela ne règle pas le problème mais quand même il ne faut pas ignorer la réalité. Je pense qu'on ne peut pas se permettre cela parce que c'est un manque d'information. Si le rôle de chirurgien dentiste est de si grande importance et qu'il rend des services immenses à la population, il ne faut pas se le cacher, je m'explique encore mal, quand même, que 80 p.c. de la population — vous avez donné la version disant que 80 p.c. de la population va chez le denturologiste — mais, quand même, ce sont des faits, cela existe, alors comment corriger cette situation-là de votre part?

M. CHICOINE: Il s'agit tout simplement de savoir où on s'en va tout simplement. Dans le bill qui parle de la denturologie, c'est tellement vague qu'on ne sait pas si on parle de prothèse complète ou de prothèse partielle, de "template" ou de prothèse temporaire, avec ou sans reteneur direct ou indirect, on ne sait pas où on s'en va, c'est tellement large qu'on ne sait pas de quoi on parle présentement. Quand ce sera défini et que vous me direz de quoi je parle exactement, je serai bien heureux de vous parler de prothèse complète ou de prothèse partielle, mais on va s'entendre et on va donner les étapes aussi d'une prothèse complète, comment on fait une prothèse complète et là, on va savoir où on va. Présentement il n'y a rien de clair.

M. LABELLE: M. le Président, il est facile d'affirmer que 80 p.c. de la population va directement chez le denturologiste, je suis bien prêt à l'accepter si ce sont des données scientifiques, mais est-ce que vous avez réellement des données scientifiques qui prouvent cela? Autrement, je pense qu'on peut citer n'importe quel pourcentage, je pense qu'il vaut mieux avouer qu'on n'a réellement pas de chiffres à l'heure actuelle. Pourquoi avancer 75 p.c, 80 p.c. quand en fait on n'a rien sur quoi se fonder?

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN: Je reviens à la question du tarif que Me Lapointe posait un peu plus tôt. Est-ce que j'interprète bien le désir de votre association en disant que vous préféreriez qu'il n'y ait qu'un seul tarif et que ce soit le tarif négocié par convention collective?

MLLE BEAUDOIN: Disons que la question a été mise de l'avant sur le tarif d'honoraires, parce que cela soulève vraiment pour les dentistes un problème particulier. On est dans un système où éventuellement la couverture de soins sera peut-être universelle en ce qui concerne la population, mais pour l'instant elle ne l'est pas.

Je crois que, jusqu'à maintenant, on peut quand même, à partir du tarif d'honoraires et de la couverture de la chirurgie buccale qui couvre une certaine partie des soins à laquelle on aura additionné la couverture des soins dentaires pour les enfants qui, elle aussi, couvrira une partie importante de la couverture des soins, penser à établir une sorte d'équivalence entre ce qui existe chez les médecins et chez les dentistes. On pense qu'à ce moment-là le tarif conventionné couvrira suffisamment d'actes pour qu'il soit utilisé ou, en tout cas, que l'interprétation qu'on puisse en faire soit dans le même sens que dans la loi médicale.

M. LAURIN: Est-ce à dire que vous souhaiteriez que le Collège des chirurgiens dentistes ne se préoccupe plus de la tarification, n'ait plus aucune fonction en ce qui concerne la tarification?

MLLE BEAUDOIN: A ce moment-là, cela nous apparaîtrait plutôt inutile une fois assurée

la couverture des soins dentaires, parce qu'on a déjà les examens, la consultation, la radiologie, la restauration, la chirurgie; alors, au fond, ce qui reste cela devient largement marginal.

M. LAURIN: Quand vous dites à ce moment-là, est-ce que vous vous êtes fixé un délai, quelle durée entrevoyez-vous?

MLLE BEAUDOIN: Six secondes, six mois!

M. BOIVIN: Pourriez-vous me dire, Dr Labelle, combien de dentistes sont attachés aux hôpitaux?

M. LABELLE: Environ 350. M. BOIVIN: Sur combien?

M. LABELLE: Sur un total d'environ 1,700 pratiquants. En fait, il y a un grand total d'environ 1,800 enregistrés mais je pense qu'on doit calculer qu'il y en a environ 1,700 qui sont réellement des praticiens. Là-dessus il y en a 350 qui vont régulièrement en milieu hospitalier, d'après les chiffres que nous avons depuis un an.

M. BOIVIN: Savez-vous combien d'hôpitaux ne sont pas couverts par les dentistes? Combien d'hôpitaux négligent d'organiser un département de dentisterie?

M. LABELLE: D'une part, on doit faire une distinction entre les hôpitaux desservant les grands centres et ceux desservant les centres en dehors des grandes villes. A Montréal — je dis Montréal — je veux inclure aussi Québec et les principales villes de la province, mais surtout Montréal est peut-être mal servie par les dentistes, principalement parce qu'ils n'offrent pas ou peu de facilités ou encore parce que l'admission est très difficile. Tandis que, dans la plupart des centres hors des principales villes, je pense que la plupart des hôpitaux sont desservis occasionnellement ou périodiquement par des dentistes de la région.

M. BOIVIN: Je suis à la recherche des causes qui ont manqué à la formation du personnel auxiliaire. Je vous félicite de la présentation de votre mémoire, de la façon que vous le présentez aussi. Ne croyez-vous pas qu'il y a eu cloisonnement entre le médecin, les hôpitaux et les dentistes? Pour mieux m'expliquer, ne croyez-vous pas que le dentiste s'est trop confiné à son cabinet privé? Il a peut-être négligé — c'est une question que je vous pose, une opinion que je vous demande — de se coller à certaines institutions et a peut-être même négligé de donner certains soins dans les hôpitaux qui ont peut-être été laissés aux chirurgiens, ce qui a formé un certain cloisonnement entre la médecine proprement dite et les dentistes. C'est une question et je fais des affirma- tions pour vous amener à donner une opinion. Je crois que les institutions ont aidé davantage la médecine à former le personnel auxiliaire. Alors, croyez-vous que le confinement du dentiste dans son cabinet privé n'a pas été une cause? C'est l'aveu que vous nous faites ce matin en nous disant qu'on a négligé, peut-être, de former le personnel. La deuxième question: Est-ce que vous devez attendre de l'Etat, est-ce que le Collège des chirurgiens dentistes doit attendre de l'Etat la formation de ce personnel auxiliaire?

M. LABELLE: D'abord, à la première question, je pense qu'il n'y a eu aucune négligence de la part des dentistes en ce qui concerne le milieu hospitalier et le chirurgien dentiste. Ce qui arrive trop souvent, c'est une situation qui s'est toujours présentée dans le passé et encore jusqu'à présent, c'est que le milieu hospitalier est tout à fait décourageant; il n'est pas équipé en conséquence et n'offre aucune facilité aux dentistes pour y pratiquer à l'intérieur du milieu hospitalier. Premièrement, le milieu hospitalier, dans la majorité des cas, n'offre pas les facilités techniques qu'un cabinet dentaire peut avoir. Pour être plus précis, en guise d'exemple, dans une grande majorité des institutions hospitalières, encore aujourd'hui, il n'y a pas d'appareil de radiographie — je parle de radiographie d'appareil dentaire — il n'y a pas de fauteuil dentaire pour qu'un dentiste puisse pratiquer comme il pratique à l'intérieur de son cabinet. Là-dessus, le milieu hospitalier étant mal organisé au point de vue dentaire, par le fait même, les dentistes n'y étaient pas attirés.

Non seulement n'étaient-ils pas attirés mais ils étaient totalement découragés puisque, pour aller pratiquer en milieu hospitalier, il pouvait être nécessaire qu'ils prennent peut-être deux heures, ce qu'ils auraient pu effectuer en une demi-heure en cabinet privé, à cause de l'équipement, non seulement technique, mais aussi à cause du personnel auxiliaire er milieu hospitalier. Même le personnel auxiliaire, dans le milieu hospitalier, ne connaît, dans la majorité des cas, pas grand-chose du domaine dentaire et n'est pas en mesure d'assister le dentiste adéquatement.

M. BOIVIN: Quand vous dites qu'il y a 350 dentistes qui sont attachés aux hôpitaux, est-ce qu'ils font partie du bureau médical? Parce qu'il y a le règlement de la Loi des hôpitaux qui les rend égaux aux médecins. Est-ce que les dentistes se sont prévalus de ce que leur a accordé la Loi des hôpitaux et aussi les autres lois qui sont venues ensuite, même le bill 250?

M. LABELLE: En ce qui concerne tout le domaine du secteur hospitalier, j'aimerais que le Dr Pierre-Yves Lamarche, à ce stade-ci, puisse vous donner tous les renseignements nécessaires puisqu'il est bien au fait du problème hospitalier en rapport avec les chirurgiens dentistes.

M. LAMARCHE: En ce qui concerne votre première question, à savoir quel est le statut du dentiste en milieu hospitalier, vous faisiez allusion au fait que les portes étaient grandes ouvertes aux dentistes. Je pense que, grâce à la nouvelle loi, c'est-à-dire au projet de règlement qui accompagne le bill 65, le statut du dentiste sera largement rehaussé. Mais sous l'ancien règlement de la Loi des hôpitaux, c'est-à-dire en vertu du bill 44, les règlements de l'article 21, à ce moment-là, le dentiste était accepté en milieu hospitalier, simplement à titre de paramédical jusqu'à un certain point.

D'autre part, comme le Dr Labelle en a fait mention précédemment, dans la plupart des institutions hospitalières, le dentiste ne bénéficie, au niveau de la technique et de l'instrumentation, que d'un instrument très rudimentaire et même, à plusieurs reprises, dans des hôpitaux qui sont de grandeur appréciable, le dentiste est obligé de transporter avec lui ses instruments pour satisfaire par ses interventions chirurgicales lorsqu'il est appelé à le faire.

D'autre part, étant donné que la priorité est souvent donnée aux chirurgiens de chirurgie générale et à d'autres disciplines du milieu hospitalier, le dentiste, qui a à concentrer sa pratique presque générale dans son cabinet privé, doit souvent attendre une, deux ou trois heures, ce qui lui fait, dans une certaine mesure, négliger sa pratique. Donc, c'était un élément pour décourager les dentistes. Est-ce que ça répond à votre question?

M. BOIVIN: Oui, mais est-ce que le confinement dans le bureau privé n'a pas été une cause de la carence d'organisation de personnel auxiliaire? Les institutions, en un mot, ont aidé, il me semble, la médecine dans la formation des auxiliaires de médecins.

M. LABELLE: Je pense que ce que vous dites est vrai vis-à-vis de la profession médicale. Mais vis-à-vis de la profession dentaire, je pense que c'est tout à fait inexistant et que, comme je vous le dis, vu que, jusqu'à aujourd'hui, le milieu hospitalier ne se prête pas ou se prête très mal à la pratique dentaire, non seulement au point de vue technique mais, comme je le disais tout à l'heure, au point de vue du personnel auxiliaire, vous allez en milieu hospitalier et, dans bien des cas, vous pouvez avoir des infirmières licenciées qui sont très bien préparées pour assister le médecin mais qui ne connaissent absolument rien au point de vue dentaire. Alors, elles ne sont pas en mesure d'assister le dentiste adéquatement et aussi bien que notre propre personnel auxiliaire que nous avons formé en cabinet privé.

Nous souhaiterions que le milieu hospitalier forme de plus en plus le personnel auxiliaire et installe l'équipement approprié pour que le dentiste puisse pratiquer à son aise.

M. BOIVIN: Mais à qui revient la responsabilité de former ce personnel auxiliaire?

M. LABELLE: Jusqu'à maintenant, vous savez, on a toujours délégué cette tâche, je pense, plus ou moins aux corporations professionnelles, du moins à l'intérieur de notre profession. Je pense que ça relevait, avec le consensus de tout le monde, de la corporation professionnelle qui était le Collège des chirurgiens dentistes.

Quel succès avons-nous obtenu? Je pense que c'est très discutable et qu'il est temps plus que jamais que des organismes s'occupent activement de former le personnel auxiliaire. En plus de ça, comme on vous l'a mentionné tout à l'heure, à cause d'une loi qui était trop restrictive et qui défendait à tout personnel auxiliaire d'effectuer des fonctions, à ce moment-là, même le collège avec toute la bonne volonté qu'il aurait pu avoir, se voyait dans l'impossibilité de former un personnel auxiliaire parce que la loi le lui défendait et ne permettait pas la délégation de toute fonction à un personnel auxiliaire autre que le dentiste.

M. BOIVIN: J'aurais encore une petite question à poser au sujet de votre opinion sur les CLSC: Croyez-vous que les CLSC aideront le dentiste à former ce personnel auxiliaire et à donner davantage encore de services à la population?

M. LABELLE : Si vous me permettez, je vais vous dire franchement. D'une part, je pense que le Dr Pierre-Yves Lamarche pourrait y répondre quelque peu; d'autre part, je pense que le plus apte à répondre à cette question n'est nul autre que le ministère des Affaires sociales puisque nous sommes presque devant une incertitude en ce qui concerne le domaine dentaire. De quelle façon sera-t-il formé au milieu des CLSC? Je pense que le ministère des Affaires sociales serait sûrement le plus apte à répondre. D'ailleurs, nous serions heureux de connaître tous les détails là-dessus.

M. BOIVIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé-Sud.

M. FORTIER: M. Labelle, au sujet du personnel auxiliaire, actuellement la compétence du personnel auxiliaire est reliée à son expérience et non pas à certaines études.

M. LABELLE: C'est juste, le personnel auxiliaire que nous avons présentement dans nos cabinets a été formé uniquement par les dentistes eux-mêmes et c'est basé uniquement sur l'expérience beaucoup plus que... Il n'y a pas de normes qui sont établies ou du moins celles qui sont établies le sont depuis très récemment.

M. FORTIER: Très brièvement, pour tous les membres, pourriez-vous nous dire si l'auxiliaire dans un bureau de dentiste ne fait pas d'obturation, il n'arrache pas de dents, il prépare simplement le travail.

M. LABELLE: D'après la loi actuelle, disons que ce sont des tâches non pas secondaires mais, si on peut les appeler ainsi, tertiaires.

M. FORTIER: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rivière-du-Loup.

M. LAFRANCE: Dr Labelle, en ce qui concerne les bills 250 et 254, il ne semble pas y avoir, de la part de l'association professionnelle, de problèmes trop sérieux, sauf les amendements que vous avez proposés dans vos mémoires. En ce qui concerne le bill 266, vous semblez avoir beaucoup plus de réticence.

Est-ce que vous pourriez dire aux membres de la commission quels sont les buts des soins prothodontiques et la nature des soins qu'on peut donner à un patient, par exemple, en prothèse complète? Quelle est la différence des soins et des honoraires, si vous voulez, entre les dentistes et les denturologistes comme on les appelle aujourd'hui?

M. LABELLE : Si vous le permettez, je transmets cette question au Dr Chicoine.

M. CHICOINE: On peut peut-être parler des buts des soins prothodontiques, du moins en ce qui concerne la prothèse complète. Voici les buts quand on fait une prothèse complète: premièrement, conserver et prévenir la perte des tissus qui sont en place; deuxièmement, il faut restaurer et maintenir la fonction masticatoire; troisièmement, rétablir l'esthétique; quatrièmement, aider à la phonation; cinquièmement, favoriser le maintien de l'hygiène et de la santé dentaire et, sixièmement, assurer la stabilité et la durabilité de la pièce.

On a parlé tantôt de prise d'empreintes lorsqu'on parlait de prothèse complète. Il ne s'agit pas tout simplement de prendre des empreintes quand on fait une prothèse complète; c'est seulement un cinquième du travail et peut-être un peu moins que ça.

Quand on fait une prothèse complète, il faut d'abord faire un examen médico-dentaire. Il faut savoir à qui on a affaire. Est-ce que ce patient est en santé? Est-ce qu'il est malade? Est-ce qu'il a déjà souffert de maladies contagieuses? Tout le questionnaire médico-dentaire doit être bien établi. Il faut aussi connaître son patient au point de vue dentaire, en ce sens qu'il faut savoir quand les dernières extractions ont eu lieu. Il faut savoir aussi depuis quand il porte des prothèses, à quelle échéance il a échangé ces prothèses. Il faut connaître aussi l'évaluation psychique du patient, ceci pour la première phase, l'entrée en matière lorsqu'un patient vient vous voir.

Il ne s'agit pas de commencer à malaxer le matériel à la première visite. Il s'agit aussi de regarder ce qu'il y a en bouche. Comment est la voûte? Est-ce qu'elle est rétentive? Est-ce qu'elle est de dépouille? Est-ce qu'elle est régulière, résorbée, étroite? Il faut connaître aussi la relation entre les maxillaires. Est-ce que c'est un patient qui est prognathe, est-ce que c'est un patient qui est opisthognathe, est-ce que ses crêtes sont inversées?

Il faut connaître aussi l'espace entre les maxillaires eux-mêmes. Est-ce qu'il y a de la place pour mettre une prothèse ou n'y a-t-il pas d'espace? S'il n'y a pas de place, qu'est-ce qu'il faut faire? Il faut aussi regarder la muqueuse, si elle est normale, anormale ou ulcérée. Il faut regarder les insertions musculaires; la forme de la langue est importante. Voilà pour une première visite, avant de commencer à prendre les empreintes.

Et avant de commencer à prendre les empreintes, il faut savoir si on a affaire à une salive qui est claire, qui est visqueuse, qui est abondante ou qui ne l'est pas du tout. Il faut regarder le joint temporo-mandibulaire parce que l'articulation est importante dans un dentier. Il faut avoir des interprétations radiogra-phiques. Il faut poser un diagnostic. Il faut avoir un plan de traitement. Il faut regarder si le patient a besoin de soins préprothétiques et aussi établir un diagnostic. Voilà pour une première visite.

Et ensuite, on peut commencer à prendre une empreinte primaire. Une fois cette empreinte prise, il faut couler le modèle. Il faut là-dessus aller tout simplement fabriquer un porte-empreinte individuel qui vous donnera une empreinte beaucoup plus précise de la bouche. Une fois que cette deuxième empreinte est prise, vous avez toutes les insertions musculaires, les freins sont dégagés, à ce moment vous pouvez commencer à prendre une cire d'articulation, établir à quelle place les maxillaires iront, établir la position de vos dents. Il faut savoir si vous avez de la place avec la lèvre pour établir la phonation. Il faut savoir, au point de vue esthétique, de quelle façon vous allez procéder. Il faut savoir aussi quel genre de dents vous choisirez avant de faire un essayage et, une fois que votre essayage est fait, il faut reprendre une autre articulation, avant de faire la mise en bouche et voir aux corrections nécessaires. Voilà pour une prothèse complète. C'est ainsi qu'on doit faire cela. S'il y a d'autres façons de le faire, on ne me les a jamais enseignées et je ne veux pas les connaître.

M. LAFRANCE: A la lumière de ce que vous venez de dire, Dr Chicoine, est-ce que les hygiénistes dentaires, le personnel auxiliaire que vous employez aujourd'hui dans vos bureaux, ont la formation voulue pour aider un dentiste dans son bureau?

M. CHICOINE: En ce qui regarde la prothèse, non.

M. LAFRANCE: Je parle de façon générale, le travail de l'hygiéniste dentaire dans un

bureau de dentiste. Est-ce qu'il y a un cours spécial pour former les hygiénistes dentaires à l'heure actuelle?

M. CHICOINE: Présentement, à l'Université de Montréal, on est en train de former une quinzaine d'hygiénistes. Je n'ai pas le nombre exact. En ce qui regarde la prothèse, ces hygiénistes dentaires auront un rôle très restrictif, mais ils auront un rôle très grand en ce qui regarde la prévention. Et je pense que la prévention est une chose qui a été mise de l'avant par l'Association des chirurgiens dentistes. Parce que c'est bien beau d'avoir des soins curatifs, mais il faut aussi penser à la prévention.

M. LAFRANCE: Est-ce que vous croyez que les denturologistes, actuellement, ont la formation voulue pour fabriquer des prothèses dentaires? Je ne dis pas fabriquer, je voudrais dire partir de la phase initiale que vous avez mentionnée tout à l'heure, c'est-à-dire la phase de l'examen et du diagnostic et du plan de traitement.

M. CHICOINE: Si on me prouve que oui, je m'inclinerai. Seulement, il y a quand même certaines données qu'il faut posséder. Et je pense à la pathologie, par exemple. Si on veut avoir des cours en pathologie buccale, il faut d'abord connaître la pathologie générale. Si on veut avoir des cours en pathologie générale qui est l'anatomie macroscopique, il faut quand même connaître l'histologie. C'est-à-dire que, si on veut avoir des cours en pathologie, il faut avoir des cours en histologie. Si on veut avoir des cours en histologie, il faut avoir des cours en anatomie. Je me demande bien comment on peut faire un tout de tout cela, si on n'a pas des cours en physiologie. Alors, si vous voulez former quelqu'un, donnez-lui un cours de deux ans, ajoutez-lui deux autres années, vous ferez de lui un dentiste et vous aurez une bien meilleure réponse que vous avez présentement.

M. LAFRANCE: Alors, vous croyez que le cours qui se donne au CEGEP Edouard-Montpe-tit ne répond pas aux exigences pour former un professionnel ou un personnel auxiliaire?

M. CHICOINE: Je pense qu'au CEGEP Edouard-Montpetit, ce qui se donne présentement, c'est un cours de technicien.

Et je me pose aussi la question, lorsqu'on parle de denturologistes, à savoir: Si la prothèse blesse, qu'est-ce qui va arriver à ce moment? Qui a la responsabilité du traitement?

M. LAFRANCE: Auriez-vous des suggestions à faire à la commission parlementaire en ce qui a trait à la formation du personnel auxiliaire vis-à-vis des dentistes?

M. CHICOINE: Il serait temps qu'on institue un cours d'assistante dentaire, mais que ce soit...

M. LAFRANCE: Sous la responsabilité de qui?

M. CHICOINE: Du comité d'étude. M. LAFRANCE: D'accord!

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier. Une question brève.

M. SAINT-GERMAIN: Oui, une brève question. La réponse serait non, je suppose. Nous avons mentionné et nous avons tous constaté personnellement qu'une minorité, sinon une majorité, de prothèses sont faites par des mécaniciens dentistes ou des denturologistes, quel que soit le nom. Tout à l'heure, on a mentionné qu'une enquête avait été faite et qu'on a évalué ou déterminé quelle était la philosophie des gens qui se procuraient des prothèses dentaires illégalement. Ce phénomène constant existe depuis plusieurs années. Est-ce qu'on pourrait me donner les causes profondes de cette tendance des gens à exiger ou à demander les services d'un mécanicien dentiste au lieu du dentiste lui-même?

M. CHICOINE: La cause la plus profonde est l'éducation des gens. C'est la première des causes.

M. SAINT-GERMAIN: Quelles sont les causes moins profondes?

M. CHICOINE : Il y a peut-être une question de prix qui entre en ligne de compte à ce moment. Il y a toujours la petite fille de 18 ans qui veut avoir des dentiers neufs comme cadeau de Noël.

M. LE PRESIDENT: Merci.

M. CASTONGUAY: Est-ce que je pourrais poser une question en terminant? Lorsque vous avez parlé de l'aspect psychique au moment de l'installation d'une prothèse, vous ne voulez pas aller aussi loin que demander un examen du psychiatre?

M. LE PRESIDENT: S'il vous plaît, il n'est pas permis de manifester ici. Vous pouvez écrire au ministre.

M. CHICOINE: Il y a quand même une chose; une prothèse dentaire, ce n'est pas comme une paire de lunettes. On ne met pas ça chez le patient et on ne dit pas: Habituez-vous avec une béquille.

UNE VOIX: Il l'a eu.

M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, est-ce que j'ai le droit?

M. CHICOINE: Il y a quand même une chose; il y a une fonction physiologique et on s'en sert tous les jours pour mastiquer et ça doit s'adapter sur des muscles, ça doit s'adapter avec une articulation temporo-mandibulaire qui est probablement l'articulation la plus compliquée du corps humain. C'est la raison pour laquelle on se réveille devant de si grands problèmes. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on entraîne des gens à faire des prothèses, mais qu'on leur donne des cours adéquatement, qu'on les forme adéquatement. Ce n'est pas une porte fermée que je vous apporte. Je vous dis: On ouvre la porte, seulement il faut que ces gens soient bien formés.

M. LE PRESIDENT: Au nom de la commission, je veux remercier l'association...

M. LAURIN: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Est-ce sur la question psychiatrique?

M. LAURIN: Non, non. Jusqu'ici, Dr Labelle, si je comprends bien, ce sont les dentistes qui, en pratique, ont formé presque exclusivement, soit les techniciens dentaires soit les denturologistes. A part le cours qui se donne au CEGEP Edouard-Montpetit, il y a très peu de cours formels organisés qui ont été donnés, contrairement à ce qui existe en médecine où les écoles universitaires se sont chargées de la formation des audiologistes, des physiothéra-peutes, des psychologues, des travailleurs sociaux. La formation, jusqu'ici, a commencé dans les cabinets privés, mais elle n'est pas beaucoup passée à un autre palier de l'éducation. C'est demeuré une formation d'apprenti jusqu'ici.

M. LABELLE: Oui. D'accord!

M. LAURIN: Et, à un moment donné, l'apprenti sorcier qui a été le dentiste a perdu le contrôle d'une formation dont il est à l'origine.

M. LABELLE: Je pense qu'il faut faire une distinction. En ce qui concerne tout le personnel auxiliaire à l'exception du technicien dentaire — et j'inclus surtout la catégorie des assistantes dentaires — celui-là est formé un peu selon le type artisanal, par les dentistes eux-mêmes. Par contre, en ce qui concerne les techniciens dentaires, pour la plupart, il y a un cours qui se donne et aussi beaucoup ont reçu leur formation à l'intérieur même de laboratoires dentaires.

M. LAURIN: C'est ce que je voulais dire.

M. LABELLE: Mais ils ne relèvent pas nécessairement de la formation de dentiste.

M. LAURIN: Du système éducatif.

M. LABELLE: Oui. En fait, il est sûrement temps de mettre un peu d'ordre là-dedans.

M. BLANK: Pour la troisième fois, je veux remercier l'Association des chirurgiens dentistes et sa délégation d'être venues ici présenter leurs vues.

C'est maintenant l'Association des techniciens dentaires.

Est-ce Mme Denise Leclaire qui présente le mémoire?

MME LECLAIRE: Non. C'est M. Aimé Saint-Louis, le président.

M. BLANK: M. Saint-Louis, le président, d'accord.

Association des techniciens dentaires

M. COGGER : M. le Président, si vous le permettez, je m'appelle Michel Cogger, je suis avocat et j'agis au nom de l'Association des techniciens dentaires. Avant de céder la parole à M. Saint-Louis, j'aimerais vous présenter les membres du conseil d'administration qui sont ici et qui représentent l'association.

En commençant par l'extrême gauche, M. Marcel Couture, un des directeurs de l'association; M. Claude Berthiaume; M. Roch Lefran-çois, vice-président; Mlle Denise Leclaire, secrétaire exécutive; M. Aimé Saint-Louis, président qui fera les représentations au nom de l'association et M. Claude Ayotte, secrétaire trésorier.

M. le Président, avant de céder la parole à M. Saint-Louis, je voudrais, au nom de mes clients, remercier la commission de l'occasion qui leur est offerte de faire valoir leur représentation en marge du bill 266.

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire, nous sommes très heureux de nous présenter devant la commission pour lui faire part de nos commentaires sur le projet de loi 266 concernant la denturologie.

Le mémoire que nous vous soumettons est le reflet du point de vue de la grande majorité des 545 membres de la Corporation des techniciens dentaires de la province de Québec. Nous approuvons presque en entier, presque en totalité le projet de loi 266. Nous profitons de l'occasion pour remercier et féliciter le gouvernement d'avoir présenté un projet de loi qui tient compte des besoins de la population et du réalisme de la situation. Nous avons seulement quelques réserves aux articles 6, 10 et 14 du projet de loi.

Pour commencer avec l'article 6, la Corporation des techniciens dentaires de la province de Québec aimerait voir la commission recommander au législateur d'ajouter et d'inscrire que le denturologiste peut prendre des empreintes et des articulés pour ne laisser aucune ambiguïté dans la loi.

Nous avons la certitude que, dans l'esprit de celui qui a rédigé le bill 266, le denturologiste peut, par cette loi, prendre les empreintes et les articulés. Si nous demandons cette garantie additionnelle à l'article 6, c'est que nous ne voulons pas revenir devant le législateur dans un an ou deux afin d'obtenir un amendement à cet article parce que la loi n'aura pas été assez claire.

Pour ce qui est de l'article 10, encore ici, la Corporation des techniciens dentaires de la province de Québec est persuadée que celui qui a rédigé le texte comprend que le denturologiste pourra avoir sa propre entreprise pour la fabrication de ces pièces de prothèses destinées à ses patients.

Cela va de soi qu'il pourra employer les futurs stagiaires du CEGEP Edouard-Montpetit afin de permettre à ceux-ci de parfaire leurs connaissances et aussi d'aider le denturologiste à servir un plus grand nombre de patients. C'est pourquoi nous demandons à la commission de recommander une nouvelle rédaction de l'article 10 qui permettra au denturologiste d'avoir un intérêt dans seulement — et ici j'insiste dans seulement — son laboratoire à lui.

L'article 14 de la loi 266 est sans contredit l'article qui nous préoccupe le plus. La loi actuelle des techniciens dentaires, chapitre 254, considère comme actes réservés au technicien dentaire certifié la confection et la réparation de pièces de prothèses buccales. Le. retrait de ces deux termes dans la Loi sur la denturologie nous laisse donc présumer que la confection et la réparation ne seront plus désormais réservées aux membres de la profession et conséquemment qu'elles seront permises à n'importe qui. L'article 14, précisant que rien ne saurait prohiber la vente à un denturologiste, confirme notre présomption.

L'absence de législation en ce qui a trait à la confection et la réparation des pièces de prothèses buccales causerait directement la perte des droits déjà acquis au technicien dentaire certifié d'exercer légitimement et exclusivement sa profession. Elle serait également l'occasion inespérée pour les fabricants de l'extérieur du Québec et du Canada, de prendre le contrôle du marché québécois de la prothèse dentaire et ce, au détriment de l'économie du Québec dans l'éventualité où l'Etat assumerait le coût des prothèses dentaires.

L'association demande donc aux membres de cette commission de recommander au législateur de modifier l'article 14 en y statuant sur la fabrication et la réparation de prothèses buccales de quelque nature que ce soit à savoir: En conservant leurs droits acquis aux propriétaires et employés de laboratoire de fabrication de prothèses partielles ou complètes, de ponts et couronnes, de prothèses orthodontiques et céramiques, en maintenant la législation actuelle qui oblige le propriétaire et les employés de laboratoire à être techniciens dentaires certifiés et membres de la corporation. Les propriétaires et les employés de tels laboratoires de fabrication n'auraient aucun droit aux actes strictements réservés à l'article 6, aux denturologistes et leur clientèle se limiterait aux dentistes et aux denturologistes. Maintenant, si vous le permettez, je suis prêt à répondre à vos questions.

M. CASTONGUAY: M. le Président, j'aimerais apporter une couple de précisions. Il est évident que ce projet de loi est présenté en fonction de certaines exigences quant à la formation. Il n'est pas question de dire: Tous ceux qui portent le nom de techniciens dentaires ou encore qui, n'étant pas membres de l'association, jouent un rôle quelconque dans la fabrication ou la dispensation de prothèses puissent devenir automatiquement membres de la corporation dont la formation est proposée ici. C'est une première chose et c'est pourquoi il sera intéressant d'entendre les représentants du CEGEP Edouard-Montpetit avec toutes les autres représentations qui ont été faites.

En second lieu je crois qu'il est aussi très important de distinguer entre le travail qui est proposé ou le champ d'exercice qui est proposé pour le denturologiste et la fabrication des prothèses. La fabrication de prothèses peut être faite de diverses façons. On a dit justement que bien des fois les prothèses sont fabriquées à l'extérieur. Ceci provient du fait que, tout comme c'est le cas pour d'autres types de prothèses, on peut aujourd'hui faire appel à des méthodes revêtant un caractère non pas industriel nécessairement, mais exigeant une organisation beaucoup plus élaborée. Compte tenu des dispositions des lois actuelles, le développement de tels laboratoires n'a pas été possible.

Il nous apparaît que ce sont deux choses différentes. J'ai mentionné déjà, à quelques reprises, que c'était notre intention d'apporter des amendements à la Loi de la protection de la santé publique. Dans cette loi, c'est notre intention de proposer qu'il y ait un mécanisme d'émission de permis pour les laboratoires, de telle sorte que des normes soient respectées, que ce soient des laboratoires d'analyse, que ce soient des laboratoires pour fabrication de prothèses ou autre chose. Je crois que ça s'impose. Il y a un champ d'activité qui touche directement la population et la protection de la population exige, je crois, qu'il y ait des normes et que des permis soient émis. Nous avons distingué clairement deux types d'activités et je crois que ce n'est pas par confusion, ce n'est pas par oubli de notre part, mais il m'apparaît qu'il y a deux types bien clairs d'activités qui doivent être distinguées.

Enfin, j'aurais une question, parce que je crois qu'elle est assez révélatrice de la situation actuelle. J'aimerais demander au représentant de l'association de nous donner un aperçu de la situation actuelle, par rapport à l'application de la loi formant l'association des techniciens dentaires. Combien de personnes sont membres de cette association? Combien, tout en étant

membres de l'association, ne respectent pas les dispositions de cette loi et combien à leur avis ne sont pas membres de cette association et posent des actes qui sont présentement, dans l'état actuel de la législation, prohibés par l'une ou l'autre des deux lois? Je pense que ça peut être assez révélateur aussi comme élément pour apprécier toute cette question.

M. SAINT-LOUIS: Comme je l'ai dit au commencement, notre délégation est entièrement d'accord sur le projet de loi présenté. Tout ce que je veux dire, c'est que je suis satisfait que vous nous ayez renseignés de ce qu'il adviendra des propriétaires de laboratoire et des gens qui ne veulent pas se destiner à la denturologie. C'était une inquiétude dans notre esprit, mais vous avez, par vos propos, éclairci notre idée là-dessus. Nous sommes assez satisfaits de ce que vous nous avez apporté.

Maintenant, pour ce qui est des gens qui sont membres de notre corporation, il y en a 545. Il y en a environ 50 p.c. qui pratiquent directement avec le public et qui servent le public en leur procurant des prothèses dentaires partielles ou complètes. Pour les autres 50 p.c. de ce nombre, il y en a un peu, moyennement, beaucoup qui pratiquent en même temps à servir le public et à servir le dentiste. Il y en a, je crois, 10 p.c. qui s'adonnent exclusivement à servir le public tandis que les autres 40 p.c. s'adonnent à servir le dentiste moyennement, beaucoup ou un peu. Ce sont à peu près les chiffres.

Vous avez aussi parlé de gens qui ne sont pas membres de notre association de techniciens dentaires. Il y a, dans la province de Québec, environ 400 personnes qui servent le public sans être membres de notre corporation ou de toute association. Je vais vous expliquer quelque chose. Il y a une certaine partie parmi ces 400 mécaniciens dentistes ou techniciens, environ 20 p.c. à 25 p.c, qui ont déjà été membres de notre association. Il serait assez facile de les recouvrer, de les faire revenir au sein de notre organisme, parce que ces gens-là ont déjà suivi des cours chez nous. Il faut vous dire qu'on a un cours de cinq ans, l'ancien cours des techniciens dentaires; c'était un cours de cinq ans par des cours du soir et cinq années de pratique dans un laboratoire. Dans cette catégorie de 400 personnes qui pratiquent illégalement en dehors de notre association, il y a en 25 p.c. environ qui ont déjà fait partie de notre association.

Ils ont quitté notre association, je vais vous expliquer pourquoi. C'est tout simplement pour que leur nom ne figure pas sur notre liste de membres, de crainte de représailles de la part du Collège des dentistes. C'est la grande raison pour laquelle ils nous ont quittés. J'espère que ça répond à votre question.

M. CASTONGUAY: Merci; ça répond en effet à la question. Je voudrais simplement, en

guise de commentaire, attirer l'attention sur le fait que cette réponse indique ici une situation qu'on ne peut ignorer. En effet si on tient compte du fait qu'il y a 400 personnes qui sont clairement en dehors de toute disposition législative, s'il y a un pourcentage de membres de votre association qui, tout en étant membres de l'association, passent outre aux dispositions de la loi, il y a là une situation qui ne peut être ignorée et dont on devra tenir compte lorsque nous arriverons aux étapes finales de l'étude de ces projets de loi.

J'insiste sur ce point parce que, présentement, dans l'état actuel de la situation, peu importe, les causes sont importantes, mais la population n'est pas protégée comme elle doit l'être, si on croit au principe du maintien des corporations professionnelles qui réservent aux membres d'une corporation la pratique de certains actes, leur imposent des normes de formation, et des conditions d'exercice. Nous sommes donc dans une situation qui va complètement à l'encontre de ces principes, si on y croit.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER: (Montmagny): M. le Président, vous avez entendu tantôt la définition qu'on a donnée de la prothèse complète. Est-ce que vous êtes sensiblement d'accord sur cette définition, cette série d'exigences ou d'impératifs contenus dans la définition qu'on a donnée tantôt? Est-ce que vous avez des commentaires à faire sur cette définition?

M. SAINT-LOUIS: Il y a des façons de prendre les empreintes, des façons de faire des prothèses dentaires qui ne nécessitent pas, à mon avis, tout cet échantillonnage d'examens et de gestes. C'est sûr que le technicien dentaire d'aujourd'hui peut prendre deux ou trois empreintes de la façon que le Dr Chicoine a définie tout à l'heure. Le technicien dentaire peut certainement faire toutes ces opérations, mais il est bien certain que le technicien dentaire n'est pas et ne doit pas être celui qui va diagnostiquer des maladies. Nous sommes là pour poser des prothèses quand la dent naturelle a été enlevée.

M. CLOUTIER (Montmagny): A votre avis, dans quel pourcentage des cas d'installation de prothèses n'y a-t-il aucune complication et que vous pouvez procéder, à l'intérieur de votre définition, la définition qui est proposée ou l'autre définition que vous suggérez, ou que vous ajoutez dans la définition que vous suggérez?

M. SAINT-LOUIS: Je n'ai pas saisi votre question.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quel est le

pourcentage de cas qui pourraient, sans aucune complication, relever du denturologiste pour l'installation d'une prothèse? Est-ce qu'il y a 50 p.c. des cas où il n'y a aucune...

M. SAINT-LOUIS: Plus que ça.

M. CLOUTIER (Montmagny): ... espèce de problème?

M. SAINT-LOUIS: A mon avis, il y a beaucoup plus que ça. Il y a au moins 80 p.c. des cas où il n'y a pas nécessité de faire un examen de la bouche pour procéder à la fabrication des prothèses dentaires par le denturologiste. Quand on dit qu'il y a beaucoup de prothèses dentaires, par exemple 4,000 prothèses dentaires qui sont fabriquées au Québec, ce ne sont pas des bouches qui ont été vidées deux mois avant. Mais une prothèse dentaire doit être refaite au moins tous les quatre ou cinq ans, si ce n'est avant parce que les tissus de la bouche se rétrécissent toujours. Comme la vue change durant toute la vie d'une personne humaine, la bouche change elle aussi continuellement.

C'est pour ça qu'il y a tant de prothèses dentaires de faites au Québec, parce que c'est une des provinces les plus édentées au Canada, et même en Amérique du Nord, même au monde, si on peut dire.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ce n'est pas une province comme les autres.

M. SAINT-LOUIS: Non, mais il reste quand même qu'à chaque quatre ou cinq ans, il faut refaire les prothèses. A ce moment-là, ça ne nécessite pas un examen parce que c'est un remplacement d'une prothèse qui n'est plus adaptée normalement. Ensuite, vous avez tous les cas ordinaires qui ne nécessitent pas d'examen spécial.

Lorsque le technicien dentaire constate qu'il y a la moindre anomalie, tout de suite, je crois que nos techniciens dentaires sont assez intelligents pour référer la personne soit à un médecin ou à un dentiste.

M. CLOUTIER (Montmagny): On a parlé tantôt du niveau de formation du technicien dentaire et, maintenant, du denturologiste. Le ministre a apporté certaines précisions. Dans votre opinion, selon votre champ d'expérience dans ce domaine, quel serait le niveau de formation additonnelle que vous entrevoyez à ce moment-ci? On va entendre tantôt les gens du CEGEP Edouard-Montpetit, mais avant que nous n'entendions leur témoignage, quel serait le contenu de cette formation additionnelle et quelle serait sa durée selon vous?

M. SAINT-LOUIS: A mon avis, les étudiants actuels, au CEGEP Edouard-Montpetit, ont quinze années de scolarité. Ils ont étudié pendant quinze ans. Us doivent subir un stage dans un laboratoire dentaire d'une année, ce qui fait seize ans d'études. A la suite de ça, il serait permis, à mon avis, il serait peut-être souhaitable même qu'un technicien dentaire diplômé de ces écoles suive un cours de trois ou six mois pour se perfectionner dans la prise d'empreintes et des articulés.

Je voudrais revenir â l'ancien technicien dentaire, l'ancienne formation...

M. CLOUTIER (Montmagny): Excusez, avant que vous terminiez cet aspect, à quel endroit l'étudiant suivrait-il ce cours de trois à six mois, chez un dentiste?

M. SAINT-LOUIS: Non, il pourrait le suivre au CEGEP Edouard-Montpetit.

Je voudrais revenir aussi à l'ancienne méthode du technicien dentaire. Le technicien dentaire devait, pour accéder à l'étude de la technologie dentaire qui était l'école de l'association et qui a été fermée il y a trois ou quatre ans, avoir un diplôme de onzième année et suivre des cours du soir en technologie dentaire. C'est entendu qu'il n'avait pas la formation de ceux d'aujourd'hui mais il reste quand même que ces étudiants ont suivi des cours du soir et, le jour, ils faisaient leurs travaux pratiques dans des laboratoires. Et cela, pendant cinq ans.

Je crois que, pour ce temps-là, le technicien dentaire a toujours fait le travail du dentiste et a toujours bien servi le dentiste. Maintenant, je crois qu'il peut servir le public.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: Je veux vous poser la question suivante : Pour un technicien dentaire qui est au service, si je peux m'exprimer ainsi, d'un dentiste, est-ce que c'est possible pour lui de vérifier le travail qu'il fait? Par exemple, si je suis technicien dentaire et si je fabrique des prothèses pour un dentiste, comment puis-je vérifier la qualité de mon travail?

M. SAINT-LOUIS: C'est assez difficile, excepté pour ceux qui travaillent dans le même bureau qu'un dentiste. Il y a souvent des laboratoires dentaires à l'arrière du cabinet du dentiste. Cela, c'est extrêmement rare. Dans la grande majorité des cas, le technicien dentaire ne peut jamais voir le travail fini dans la bouche du client. Il y a énormément de travaux de prothèses dentaires qui sont faits où le dentiste prend l'empreinte et envoie le tout, même par courrier, au laboratoire et celui-ci le retourne au dentiste. A ce moment-là, c'est absolument impossible que le technicien dentaire vérifie le résultat de son travail dans la bouche du client.

C'est la même chose dans les villes. Prenez par exemple, Montréal, Québec et plusieurs

autres villes, le technicien dentaire a habituellement son laboratoire à dix rues peut-être dans une autre partie de la ville plutôt que près de chez le dentiste, parce que le technicien dentaire dessert habituellement cinq ou six dentistes. Il ne peut pas être dans le cabinet de chacun des dentistes. Il est donc très rare, à mon avis, que le technicien dentaire puisse vérifier les travaux qui sont mis en bouche par le dentiste.

M. GUAY: Si je vous posais cette question, c'est qu'assez souvent — on l'a portée à mon attention à plusieurs reprises — le temps qu'il faut à un patient qui se rend chez le dentiste et qui commande une prothèse dentaire est très long avant qu'il reçoive cette prothèse. Dans les cas exagérés, cela prend des mois avant que la prothèse ne soit reçue et que le patient ne puisse s'en servir.

M. SAINT-LOUIS: Si vous me permettez, j'ajouterais quelque chose ici. Vous prenez par exemple les réparations de dentiers. Quelqu'un qui brise sa prothèse est obligé d'aller chez le dentiste, par la loi actuelle; le dentiste appelle le commissionnaire du laboratoire dentaire, le commissionnaire vient chercher la prothèse. Cela peut prendre une ou deux journées. Tandis que si les denturologistes avaient leur bureau, leur cabinet, ils pourraient faire la réparation du dentier, même s'il est brisé en deux, dans une heure ou une heure et demie. C'est le plus de temps que cela peut prendre.

M. GUAY: Quel est votre lien de parenté avec les dentiphysionomistes? Est-ce un groupe avec lequel vous avez des relations étroites? Quel est leur travail? Nous n'aurons pas la chance de les entendre en commission. C'est la raison de ma question.

M. SAINT-LOUIS: Les dentiphysionomistes, c'est une longue histoire. J'ai entendu parler de l'association que ce groupe de gens a formée il y a environ un an. M. Castonguay nous demandait tout à l'heure s'il y avait d'autres personnes à l'extérieur de la Corporation des techniciens dentaires qui pratiquaient illégalement, ces gens-là en sont une partie. Ils sont environ une cinquantaine qui pratiquent illégalement. Quand ces gens ont entendu dire qu'il y aurait une loi qui permettrait aux techniciens dentaires denturologistes de servir le public, ils se sont dépêchés à former une association pour essayer de joindre les rangs. Ce sont des gens qui ont été formés à la va-comme-je-te-pousse par d'autres personnes. Ils ont appris cela comme ils le pouvaient. Mais ils n'ont pas les qualifications, les connaissances des techniciens dentaires de notre association parce que nos membres ont toujours été suivis par la Corporation des techniciens dentaires depuis 1944. Et ceux-là, nous ne les connaissons pas. Nous ne pouvons même pas évaluer quelles sont leurs connaissances.

M. GUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN : Je vous ai entendu dire tout à l'heure qu'il y avait 400 de vos membres qui ne voulaient pas être inscrits au registre de l'association parce qu'ils craignaient que ceci vienne à la connaissance du Collège des chirurgiens dentistes. Pourriez-vous nous dire ce que craignent ces techniciens dentaires? Et d'une façon plus générale, quelles ont été et quelles sont les relations entre le Collège des chirurgiens dentistes et votre association?

M. SAINT-LOUIS: Sur 400 personnes qui pratiquent illégalement, qui sont en dehors de la Corporation des techniciens dentaires, j'ai dit tout à l'heure qu'il y a 25 p.c. de ces 400 qui ont déjà été membres chez nous. Voici ce que ces 25 p.c. craignent. Premièrement, le Collège des chirurgiens dentistes faisait des perquisitions dans leurs laboratoires et, s'il s'y trouvait une prothèse dentaire n'appartenant pas à un dentiste, pour laquelle il n'y avait pas une ordonnance de dentiste, le technicien dentaire devait comparaître devant les cours de justice et payer une amende. Quand cela se produisait à deux ou trois reprises, il pouvait perdre tout son équipement. Or, les équipements des laboratoires sont assez dispendieux. Et c'est pour ces raisons que 25 p.c. des 400 — c'est très ambigu et très complexe cette affaire — se sont retirés mais ces 25 p.c. qui ont été formés par l'Association des techniciens dentaires pourraient revenir chez nous s'il y avait une loi leur permettant de transiger avec le public. Je ne me souviens pas de votre deuxième question.

M. LAURIN: Les relations générales entre le Collège des chirurgiens dentistes et votre association, ce qu'elles ont été, ce qu'elles sont.

M. SAINT-LOUIS: Les relations entre l'Association des techniciens dentaires et le Collège des dentistes, jusqu'en 1966, ont été assez cordiales et assez fréquentes. Pour la simple raison que ceux qui dirigeaient la Corporation des techniciens dentaires à ce moment-là étaient en grande partie les propriétaires de laboratoires qui servaient le dentiste. Je ne sais pas si c'était obligatoirement ou s'ils faisaient exprès pour ignorer la situation qui prévalait à cette époque, en 1966, et qui est pire ou à peu près semblable aujourd'hui, mais on ne daignait pas regarder le problème en face. C'est pour cela qu'on ne parlait jamais de pratique illégale: on savait que ça existait, mais on n'en parlait pas et les relations étaient assez cordiales avec le Collège des dentistes à ce moment-là, jusqu'en 1966.

Mais en 1964, 1965 et 1966, il y a eu un mouvement des techniciens dentaires qui ont pris en main leur avenir. Ils voulaient demander à l'Association des techniciens dentaires de reconnaître que la pratique illégale existait et

les dirigeants du bureau de l'association ne voulaient rien entendre. Donc, une équipe s'est formée au sein des techniciens dentaires et s'est présenté contre l'équipe adverse; elle a renversé le bureau de direction. A ce moment-là, je me souviens, j'étais de cette équipe-là en 1966, la première chose que nous avons faite a été d'écrire une lettre au Collège des dentistes pour les rencontrer, pour discuter du problème qui existait à ce moment-là. Nous avons reçu un accusé de réception nous disant qu'une rencontre serait probablement organisée. L'année s'est écoulée et il n'y a pas eu de rencontre. L'année suivante, ce même bureau de direction a encore répété la lettre pour une rencontre avec les dentistes et, encore une fois, nous avons reçu un accusé de réception nous disant qu'il y aurait une rencontre prévue. L'année s'est passée, il n'y a rien eu et cela dure depuis 1966 et nous sommes en 1972. Nous avons répété les lettres pour discuter du problème avec le Collège des dentistes et celui-ci n'a jamais voulu rencontrer le bureau de direction qui, aujourd'hui, dit qu'il y a une situation de fait qui aurait dû être discutée avec les dentistes, mais ça na pas été fait.

M. LAURIN: Autre question. Si je comprends bien, le programme de formation des techniciens dentaires dont vous avez fait état tout à l'heure a été élaboré depuis longtemps par votre association de techniciens dentaires?

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAURIN: Est-ce que ce programme a déjà fait l'objet de discussions entre votre association et la faculté de chirurgie dentaire ou le Collège des chirurgiens dentistes? Deuxièmement, est-ce que ce programme a été approuvé en quoi que ce soit par ces deux mêmes corps et est-ce qu'il fait l'objet ou d'un contrôle ou d'une surveillance ou d'une collaboration entre votre association et ces deux mêmes corps?

M. SAINT-LOUIS: C'est une très bonne question parce que, justement, ça met en cause le technicien dentaire. Depuis 1944, depuis la loi de la Corporation des techniciens dentaires, il y avait un comité de pédagogie pour l'Association des techniciens dentaires. Ce comité était composé de quatre dentistes et de quatre techniciens dentaires et c'est ce comité qui a déterminé les cours que les techniciens dentaires, à l'époque devaient suivre. Les représentants étaient un représentant du Collège des dentistes, un représentant de l'Université de Montréal, un représentant de l'université McGill et puis il y avait un autre dentiste, là je ne me souviens pas qui il représentait, mais je sais qu'il y avait quatre dentistes et quatre techniciens dentaires et c'est ce comité qui a déterminé les cours que les techniciens dentaires avaient à suivre.

Ce comité déterminait les examens que le technicien dentaire devait subir et, bien souvent, les dentistes venaient faire les examens de nos étudiants techniciens dentaires. Cela a été notre école pendant vingt ou vingt-cinq ans, jusqu'à ce que nous ayons le CEGEP Edouard-Montpetit.

M. LAURIN: Vos remarques laissent entendre qu'il y a un certain nombre — je vous laisse préciser ce nombre — de techniciens dentaires qui ne travaillent pas pour les dentistes, mais qui font affaires et transigent directement avec le public. Est-ce que votre association exerce un contrôle, une surveillance sur la qualité des soins, si on peut les appeller comme ceci, que ces techniciens dentaires donnent?

M. SAINT-LOUIS: Non, il n'y a pas de surveillance et la raison en est très simple. La Corporation des techniciens dentaires ne peut pas aller voir les travaux que les techniciens dentaires placent en bouche, pour la simple raison que l'Association des techniciens dentaires serait complètement hors la loi elle-même, parce qu'elle ferait un travail qui ne lui revient pas, parce que c'est défendu à un technicien dentaire de pratiquer et de servir le public. C'est pour ça que nous, en voyant arriver ce projet de loi, nous lui souhaitons la bienvenue. Parce que, avec le code de déontologie et le bureau de direction qui va être constitué avec la Corporation des denturologistes, il y aura, à ce moment, des exigences et la Corporation des denturologistes pourra surveiller les travaux et faire des examens dans les laboratoires et dans les cliniques de denturologistes.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé-Sud.

M. FORTIER: Actuellement, il n'y a pas de différence, quant à la pratique, entre un technicien dentaire et un denturologue?

M. SAINT-LOUIS: Non.

M. FORTIER: Il n'y a pas de différence.

M. SAINT-LOUIS: Pour être denturologiste, il faut obligatoirement être membre de l'Association des techniciens dentaires. Le denturologiste est celui qui veut, par ses revendications, changer la loi. Ils se sont constitués en association pour revendiquer leurs droits. Ce sont tous des membres de l'Association des techniciens dentaires.

M. FORTIER: Avec la possession de cette loi, tous les techniciens dentaires vont faire des prothèses sur ordonnance médicale des dentistes.

M. SAINT-LOUIS: Ce n'est pas ce qui est marqué ici, dans le projet de loi.

M. FORTIER: Non, mais je vous pose la question.

M. SAINT-LOUIS: Non, pas nécessairement. Le denturologiste pourra servir le public, si j'ai bien compris la loi.

M. FORTIER: Oui, mais sans ordonnance. M. SAINT-LOUIS: Sans ordonnance.

M. FORTIER: Sans ordonnance du dentiste. Très bien.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rivière-du-Loup.

M. LAFRANCE: M. le Président, vous avez dit au début de votre exposé que votre association comprenait 545 membres. Est-ce que cela représente tous les techniciens dentaires qui pratiquent à l'heure actuelle dans la province de Québec?

M. SAINT-LOUIS: Non. J'ai répondu à cette question.

M. LAFRANCE: Combien y a-t-il — je vais poser la question d'une autre façon — à l'heure actuelle, de techniciens dentaires dans la province de Québec, qu'ils soient enregistrés ou non, à l'association?

M. SAINT-LOUIS: Il y a les 545 membres chez nous et il y en a environ 400 en dehors.

M. LAFRANCE: Est-ce que vous comptez là-dedans les propriétaires de laboratoire?

M. SAINT-LOUIS: Non.

M. LAFRANCE: Vous ne les considérez pas comme techniciens dentaires?

M. SAINT-LOUIS: Non; parmi les 545, les propriétaires de laboratoire sont membres de la Corporation des techniciens dentaires.

M. LAFRANCE: Les propriétaires de laboratoire sont actuellement membres de l'Association des techniciens dentaires de la province de Québec?

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: Tous les propriétaires? M. SAINT-LOUIS: Tous les propriétaires.

M. LAFRANCE: D'accord. Vous avez mentionné qu'il y avait des membres qui avaient laissé votre association par crainte de représailles de la part du ministère de la Justice, ou du moins, de la part du Collège des chirurgiens dentistes. Par contre, vous mentionnez que parmi les 545 membres, il y en a 50 p.c. qui font de la pratique illégale à l'heure actuelle.

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: Alors, ceux-là ne sont pas peureux?

M. SAINT-LOUIS: Ils ne sont pas peureux.

M. LAFRANCE: Alors, ils défient la loi, simplement, tandis que les autres ne veulent pas le faire.

M. SAINT-LOUIS: C'est cela.

M. LAFRANCE: Est-ce qu'en plus des 545 il y en a parmi les 400 qui font de la pratique illégale?

M. SAINT-LOUIS: Je n'ai pas saisi cette question.

M. LAFRANCE: Parmi les 400 qui restent, est-ce qu'il y en a qui font de la pratique illégale?

M. SAINT-LOUIS: Il en font tous. M. LAFRANCE: Plus 50 p.c. des 545? M. SAINT-LOUIS: C'est cela. M. LAFRANCE: Cela fait du monde.

M. SAINT-LOUIS: C'est pour cela qu'on souhaite la bienvenue au projet de loi parce que cela va clarifier la situation.

M. LAFRANCE: Mais avant que le projet de loi ne soit voté, on pratique toujours dans l'illégalité.

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: On défie la loi.

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: Depuis que le bill est inscrit est-ce qu'il n'y a pas eu une escalade du côté des techniciens dentaires vis-à-vis de la pratique illégale?

M. SAINT-LOUIS: Vous voulez dire depuis que le bill a été déposé?

M. LAFRANCE: Depuis que le bill a été déposé.

M. SAINT-LOUIS: C'est sûr. Nos membres techniciens dentaires se sont dit: Voilà un pas dans la bonne direction. Les gens ont commencé à...

M. LAFRANCE: Alors, c'est un pas dans la bonne direction que de défier la loi.

M. SAINT-LOUIS: C'est-à-dire que c'est un pas dans la bonne direction de défier la loi mais je vous dirais que la population a besoin de nos services. Je sais qu'il y a entre 1,600 et 1,800 dentistes dans la province de Québec, de ce nombre il y en a une bonne partie qui ne pratique plus, de ce nombre il y en a une bonne partie qui est malade ou retirée. S'il fallait aujourd'hui pour demain pour le technicien dentaire denturologiste, que ce projet de loi qui a été présenté ne soit pas adopté, que nous soyons éclipsés de la province de Québec, que nous n'ayons plus le droit de pratiquer, que la loi devienne rigide, que nous ne puissions d'aucune façon servir le public, qu'arriverait-il alors? La population serait joliment embêtée parce que le nombre de dentistes qu'il y a dans la province de Québec ne pourrait jamais suffire à servir pour les prothèses dentaires. Par-dessus le marché, on va payer l'examen des bouches de un an à sept ans pour les enfants.

M. LAFRANCE: Pas seulement l'examen, les traitements.

M. SAINT-LOUIS: Les traitements pour les enfants de zéro à sept ans. A ce moment-là, je ne vois pas comment les dentistes vont pouvoir desservir la population pour ce qui est des prothèses dentaires et ce sera joliment embêtant pour la population.

M. LAFRANCE: Alors, vous trouvez que la population de la province de Québec, à l'heure actuelle, se satisfait et serait malheureuse si on prenait des dispositions voulues pour empêcher l'illégalité chez nous.

M. SAINT-LOUIS: Je crois sincèrement que oui, parce qu'elle serait privée de gens qui sont compétents et qui la desservent dans le moment.

M. LAFRANCE: Alors, croyez-vous que les habitants de la province de Québec seraient heureux si à un moment donné le ministère de la Justice disait: Etant donné qu'il y a des gens indésirables dans la province, qu'on les laisse aller et qu'on continue à les laisser défier la loi. Je ne parle pas seulement des denturologistes, je parle en général. Est-ce que la population serait protégée?

M. SAINT-LOUIS: Ce sont des gens qui viennent nous voir. Vous allez prendre un dentiste, par exemple, qui a des rendez-vous d'ici à deux mois ou trois mois; la personne qui a besoin d'une prothèse dentaire est obligée d'attendre deux mois pour avoir une prothèse dentaire. Cette personne-là veut se marier, dans deux semaines, je veux bien croire que c'est illégal ce que nous faisons...

M. LAFRANCE: C'est nécessaire pour se marier? Cela aide...

M. SAINT-LOUIS: Je vais vous dire quelque chose. Les techniciens dentaires denturologistes n'ont absolument pas le droit de s'annoncer comme tels, mais, par-dessus le marché, la population réussit quand même à nous trouver et à demander nos services, alors qu'on n'a même pas le droit de s'annoncer comme tels.

M. LAFRANCE: Tantôt vous avez mentionné que tous les denturologistes actuellement font partie de l'Association des techniciens dentaires, est-ce exact?

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: Les représentants des denturologistes qui vont venir tout à l'heure sont exactement les mêmes que vous représentez?

M. SAINT-LOUIS: C'est le syndicat professionnel des denturologistes, oui.

M. LAFRANCE: Mais ils font tous partie de votre association?

M. SAINT-LOUIS: Ils font tous partie de notre association.

M. LAFRANCE: Il n'y a aucune exception?

M. SAINT-LOUIS: Aucune exception. Je vous disais tout à l'heure que, avant 1966, le bureau de direction fermait les yeux. Nous avons été — j'étais de cette équipe-là qui a pris le pouvoir à l'association en 1966 — réalistes, nous avons dit: Il y a une situation de fait, les membres enfreignent la loi, on va l'admettre publiquement et on va demander au gouvernement de changer la situation de fait. Je ne veux pas blâmer les bureaux antérieurs, mais il reste qu'il fallait être réaliste à un moment donné et dire: Voici une situation, on la propose au gouvernement, le gouvernement en a pris connaissance. Nous avons été honnêtes dans notre illégalité.

M. LAFRANCE: Alors, vous avez profité d'une situation et vous avez encouragé une situation pour forcer la main, pour vous faire reconnaître légalement?

M. SAINT-LOUIS: Non, nous avons, à mon avis, constaté que la population avait besoin de nos services. Ce n'est pas par méchanceté ou malhonnêteté, mais nous avons constaté que la population avait besoin qu'on la serve et c'est pour ça que nous avons continué.

M. LAFRANCE : Vous avez mentionné tout à l'heure que des prothèses habituellement peuvent durer quatre ou cinq ans et que c'est bon de changer ça à tous les quatre ou cinq ans.

Vous avez mentionné aussi que vous pouvez faire des prothèses sans examen et que vous les changez à tous les cinq ans, sans examen. Qu'est-ce que vous faites par exemple des cas pathologiques? Vous avez dit que vous les référiez au dentiste, mais sans examen comment faites-vous pour détecter l'état pathologique dans une bouche.

M. SAINT-LOUIS: Quand nous voyons qu'une bouche a quelque chose le moindrement défectueux, qu'il y a quelque chose qui n'est pas normal, à ce moment-là on peut référer la personne à un médecin ou à un dentiste. Nous ne sommes pas là pour passer des examens, pour faire des diagnostics, loin de là. Tout ce que nous voulons faire, c'est de remplir la bouche.

M. LAFRANCE: Remplir la bouche, c'est ça qui est important, D'accord. Vous avez mentionné aussi qu'il y avait un comité qui avait été formé de quatre dentistes et de quatre techniciens dentaires afin de déterminer quel cours serait adaptable ou pourrait être donné pour la formation d'un technicien dentaire. Est-ce exact?

M. SAINT-LOUIS: Cela, c'est l'ancienne...

M. LAFRANCE: L'ancien cours. Mais ces cours n'ont pas été préparés en vue de faire des denturologistes mais bien des techniciens dentaires.

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: Alors, vous-même, êtes-vous denturologiste ou technicien dentaire?

M. SAINT-LOUIS: Je suis denturologiste.

M. LAFRANCE: Bon. Une petite remarque en passant; vous disiez aussi tout à l'heure que vous ne pouviez pas surveiller à l'heure actuelle.

M. SAINT-LOUIS: Pardon?

M. LAFRANCE: Vous ne pouviez pas surveiller à l'heure actuelle.

M. SAINT-LOUIS: Absolument pas, parce que...

M. LAFRANCE: Alors, du fait d'avoir un bill, comment allez-vous faire la surveillance par la suite?

M. SAINT-LOUIS: L'association formera un code de déontologie et un comité de discipline pour faire la surveillance, ce qui sera prévu par le bill 250.

M. LAFRANCE: Etes-vous d'accord sur le bill 250?

M. SAINT-LOUIS: Oui. M. LAFRANCE: Merci.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, sur le même sujet, est-ce que, actuellement, le ministère des Affaires sociales ne paye pas pour les assistés sociaux des factures directement aux techniciens dentaires et aux laboratoires?

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. CASTONGUAY: Quand est-ce que ça a commencé?

M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre demande quand c'a commencé. Je pense que ça existait du temps de l'ancien ministre et c'est pour ça que je suis bien à l'aise pour poser la question.

M. SAINT-LOUIS: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose? La semaine dernière, un bureau du bien-être social d'une région —je ne veux pas nommer la région — a téléphoné à l'Association des techniciens dentaires parce qu'il n'y avait pas de technicien dentaire denturologiste dans sa région, de voir à lui en suggérer un pour que ce type aille demeurer dans cette région, et on en a suggéré un. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: Je ne sais pas si vous possédez des chiffres... Combien de prothèses dentaires sont fabriquées hors du Québec actuellement pour des Québécois? Est-ce qu'il y en a un bon nombre?

M. SAINT-LOUIS: Oui, il y a sûrement un bon nombre de prothèses dentaires qui sont fabriquées par des laboratoires de la région de Toronto et qui sont faites pour le Québec.

M. GUAY: Maintenant, est-ce qu'il y a des provinces où la profession de technicien dentaire est légalisée de la façon que vous le demandez?

M. SAINT-LOUIS: Oui, il y a la Colombie-Britannique et l'Alberta.

M. GUAY: Est-ce que ça ne pourrait pas justement expliquer commerit il se fait que le Québec soit si mal organisé actuellement?

M. SAINT-LOUIS: Cela se pourrait.

M. GUAY: De toute façon, c'est peut-être une observation personnelle, on a souligné qu'un nombre assez important de denturologistes ou techniciens dentaires de vos membres

étaient traduits devant les tribunaux, est-ce qu'ils l'ont été à cause de plaintes enregistrées par des patients mal servis?

M. SAINT-LOUIS: Il y a 28 ans que je suis technicien dentaire, que je suis membre de la Corporation des techniciens dentaires, et jamais je n'ai vu une plainte qui ait été faite devant les tribunaux, par les patients parce qu'il y avait eu des maladies ou des infections. Les plaintes portées devant les tribunaux ont toujours été des plaintes faites par des agents provocateurs du Collège des dentistes.

M. GUAY: Qu'est-ce qui se passerait, demain matin, si on vous enlevait même le droit de faire des prothèses? Quel conflit pourrait se produire, si vous faites une grande partie des prothèses et que très peu de dentistes fabriquent eux-mêmes leurs prothèses dentaires, si votre association abandonnait complètement ce secteur?

M. SAINT-LOUIS: S'il ne nous était plus permis de faire les prothèses, je crois bien que la population de la province de Québec serait très mal prise, pour la simple raison que nous fabriquons, je crois, 99.9 p.c. des prothèses dentaires, soit légalement ou illégalement.

M. GUAY : Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Vous pratiquez actuellement illégalement. Est-ce que vous ne payez pas de loyer, de taxes d'aucune sorte probablement même pas d'impôt sur le revenu ou, du moins, très peu...

M. SAINT-LOUIS: Je voudrais répondre tout de suite à cette question, parce que je ne voudrais pas laisser les membres de la commission dans le doute que je ne paie pas mes impôts. J'ai tous mes rapports d'impôt depuis que je suis en affaires.

M. SAINT-GERMAIN: Oui, on comprend bien ça mais...

M. SAINT-LOUIS: Et je paie des taxes, et des taxes d'affaires à la ville de Montréal; je paie des taxes d'eau, je paie tout.

M. SAINT-GERMAIN: De toute façon, lorsque vous allez être en corporation, si jamais vous l'êtes, le fait d'être obligé de payer toutes ces taxes, de payer un loyer, de payer les taxes municipales, taxes d'affaires, du téléphone et enfin tout ce que vous voulez, vous obligera certainement à augmenter le prix de vos services.

M. SAINT-LOUIS : Je ne le crois pas, pour la simple raison que ceux qui pratiquent dans le moment sont très satisfaits des honoraires qu'ils reçoivent. Il n'y aura pas d'accroissement de dépenses parce que, réellement, dans le moment, il y a plusieurs bureaux de denturologistes qui sont très bien organisés. Je ne vois pas pourquoi, du jour au lendemain, s'ils avaient le droit, ils hausseraient les tarifs.

M. SAINT-GERMAIN: Et vous allez être responsables de la pratique illégale, j'entends d'empêcher la pratique illégale.

M. SAINT-LOUIS: C'est sûr, mais je vous ferai remarquer, par exemple, que ça va être plus facile parce qu'il n'y aura pas... Ce ne sera pas comme dans le moment, c'est de l'anarchie complète, à tous les points de vue.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que le législateur peut être confiant que vos honoraires n'augmenteront pas au même niveau pratiquement que ceux des dentistes? Parce que si ce phénomène arrivait, il y aurait tout de même des mécaniciens dentistes ou des techniciens dentaires qui continueraient cette pratique illégale. Ce n'est pas pour arrêter demain matin, même si la loi était acceptée. Est-ce qu'on a une garantie que, dans dix ou quinze ans, le même phénomène qui existe aujourd'hui n'existera pas de nouveau?

M. SAINT-LOUIS: Concernant la question des prix, peut-être que le président des denturologistes pourra en parler mais, personnellement, je ne vois pas pourquoi la situation changerait tellement pour la simple raison que vous allez éviter un intermédiaire. Le fait de rencontrer le patient et le fait de servir ce même patient plutôt que de passer par un autre, sera toujours meilleur marché, dans des conditions semblables.

M. SAINT-GERMAIN: Merci.

M. KENNEDY: Est-ce que votre clientèle va vous voir lorsque les dents naturelles sont extraites ou si elle y va avant?

M. SAINT-LOUIS: Dans la majorité des cas, les dents sont déjà extraites.

M. KENNEDY: Vous ne faites pas d'extraction?

M. SAINT-LOUIS: Non.

M. KENNEDY: Vous n'empiétez pas alors sur le terrain des dentistes?

M. SAINT-LOUIS: En aucune façon, ce n'est pas notre domaine. Nous sommes des prothésistes pour faire des prothèses.

M. KENNEDY: D'accord.

M. GUAY: Vous ne faites pas non plus de prothèse fixes?

M. SAINT-LOUIS: Jamais, nous n'envisageons pas de faire des prothèses fixes.

M. GUAY: Vous pourriez peut-être faire la fabrication mais non l'installation?

M. SAINT-LOUIS: C'est cela. M. GUAY: Ah bon!

M. SAINT-LOUIS: Nous avons tous étudié pour faire des prothèses fixes mais c'est un domaine qui ne nous concerne d'aucune façon.

M. GUAY: Alors, au pis aller, si jamais le patient n'est pas satisfait de vos services, temporairement, il peut quand même l'enlever, et retourner vous voir.

M. SAINT-LOUIS: Certainement.

M. LE PRESIDENT: Je voudrais remercier l'Association des techniciens dentaires. Comme il est présentement 12 h 30, nous suspendrons nos travaux pour revenir à 16 heures cet après-midi. A ce moment-là, nous entendrons les représentants du CEGEP Edouard-Montpetit, et les trois autres groupes selon la liste.

M. SAINT-LOUIS: Je voudrais profiter de l'occasion pour remercier, au nom des 545 membres de l'Association des techniciens dentaires, la commission parlementaire de nous avoir écoutés. Merci.

(Suspension de la séance â 12 h 28)

Reprise de la séance à 16 h

M. BLANK (président de la commission spéciale sur les corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

CEGEP Edouard-Montpetit

M. LE PRESIDENT: Nous sommes prêts à commencer la séance. Les représentants du CEGEP Edouard-Montpetit sont-ils ici? Bienvenue. Vous êtes M. Sainte-Marie?

M. AUPRIX: Non. Je représente M. Benoît Sainte-Marie. Je suis responsable de l'Ecole technique dentaire au CEGEP Edouard-Montpetit.

M. LE PRESIDENT: Votre nom, s'il vous plaît?

M. AUPRIX: Paul Auprix. Je voudrais présenter, tout d'abord, le procureur du collège, Me Serge Brault, à ma gauche, et deux étudiants dont le vice-président et le vice-président de l'Association des étudiants en techniques dentaires au CEGEP, M. Provencher et M. Ash. Si vous le permettez, je passerai tout de suite la parole au procureur du collège avec lequel nous avons travaillé pour préparer le mémoire qui a été présenté à la commission. M. Serge Brault.

M. BRAULT: Si vous le permettez, M. le Président, étant donné que notre texte est assez volumineux je me permettrai de dégager ce qui semble au CEGEP Edouard-Montpetit être les points essentiels que je résumerai. S'il y a lieu, vous pourrez nous adresser les questions que les membres de la commission auront à nous poser.

Le CEGEP Edouard-Montpetit, étant donné son rôle particulier dans la formation des techniciens dentaires, s'est senti concerné par le dépôt de la loi 266. Il s'est senti, par ailleurs, obligé d'intervenir. Maintenant, l'intérêt du CEGEP n'est pas le même que celui des corps professionnels ou des professionnels eux-mêmes qui exercent ou exerceront la profession qui sera créée par le bill 266. Comme tel, le CEGEP Edouard-Montpetit tient à informer la commission qu'il n'est pas du tout préoccupé par la structure de l'organisme créé, c'est-à-dire en majeure partie par les dispositions du bill 250 qui concernent la structure de la denturologie elle-même.

Le gros de son intérêt est centré sur le travail que l'on exigera des personnes qu'on a appelées denturologistes et, soit dit en passant, nous avons souligné dans notre mémoire que ce terme nous semblait impropre et inexistant pour désigner ce que les techniciens dentaires seront appelés à faire.

Nous sommes aussi intéressés par ce qu'il adviendra de nos programmes soclaires et des diplômes que nous décernerons, mais que pour l'instant, nous décernons en technique dentaire.

Nous avons formulé différentes observations sur différents articles du projet de loi et nous proposons des amendements à cinq de ces articles.

En gros, il y a l'article 6 comme tel qui concerne l'exercice de la profession. Nous croyons qu'il y aurait lieu de préciser le champ d'exercice et que, s'il est clairement attribué aux techniciens dentaires le droit de prendre des empreintes et des articulés, cela soit clairement exprimé dans la loi; parce qu'il nous a semblé, par l'analyse qui est en annexe II du mémoire, que des confusions pourraient surgir, étant donné le texte de l'article 35, entre autres, du bill 254.

Pour ce qui est de l'article 6, nous croyons que la prise d'empreintes et d'articulés qui est exprimée là devrait l'être plus clairement et que le droit de fabriquer les prothèses soit clairement donné aux personnes que l'on appelle des denturologistes.

M. Auprix pourra vous expliquer tantôt les programmes scolaires qui sont annexés au mémoire, à l'annexe I, qui font que nous croyons qu'il est essentiel que les denturologistes aient le droit de fabriquer les prothèses qu'ils peuvent, par ailleurs, poser et remplacer. Quant à l'article 8 d), en deux mots, il est dit à cet endroit que la corporation pourra faire subir des examens professionnels. Nous croyons qu'il doit être clairement précisé que l'étendue de ces examens professionnels doit se limiter au contrôle des matières d'ordre professionnel comme le code déontologique, la loi de la corporation, le code des professions, mais ne doit pas faire double avec les examens qui sont passés afin d'obtenir le diplôme reconnu au sens du bill 250 et qui suit un programme scolaire qui est déjà approuvé par l'Etat.

Pour ce qui est de l'article 10, qui traite des intérêts que ne peut avoir un denturologiste dans une entreprise de fabrication, étant donné que nous demandons à l'article 6 qu'il soit clairement précisé que le denturologiste pourra fabriquer des prothèses mais que l'article 10, à ce moment-là, sans devenir inutile, ferait double emploi avec une disposition du code des professions qui prévoit expressément que dans le code déontologique on énumérera les commerces incompatibles avec l'exercice d'une profession, nous croyons qu'à ce moment-là l'article 10 devra purement et simplement être abrogé et référé au code déontologique de cette future profession.

Quant à l'article 12, qui traite de la pratique illégale, étant donné que dans nos programmes scolaires les étudiants sont appelés à poser des actes qui ressembleront à ceux qu'un denturologiste détenteur d'un permis posera, nous croyons qu'il doit y avoir une disposition ajoutée à l'article 12 qui créera une exception en ce qui a trait à la pratique illégale lorsque des gestes seront posés par des étudiants dans le cadre d'un programme scolaire reconnu.

Quant à l'article 14 qui traite de l'impossibi- lité pour la corporation de réglementer l'exercice de la profession au point de défendre la vente de prothèses à un dentiste ou à un denturologiste, la question que nous nous posons est la suivante: Etant donné le libellé du texte, à qui la corporation ne pourra-t-elle pas défendre de vendre des prothèses à un dentiste? La question est celle-ci: A qui cette prohibition s'adressera-t-elle? A cet égard, nous pensons que le texte est imprécis et devrait être précisé.

Quant à l'article 17, au CEGEP Edouard Montpetit il y a actuellement deux programmes scolaires qui fonctionnent en parallèle. Il y a l'ancien programme qui se termine en automne 1972 et qui concerne les étudiants régis par l'ancien programme scolaire de l'Association des techniciens dentaires qui comportait 300 heures de cours réparties sur cinq ans.

Etant donné que les étudiants termineront leur année scolaire, vraisemblablement, en décembre prochain, et que ces étudiants, à ce moment ne seront pas membres de l'association au sens de l'article 17, nous croyons que le délai prévu, pour être admis à l'exercice de la denturologie, devra être étendu de six mois, afin que ces étudiants puissent devenir membres, à temps, de la corporation et ainsi profiter de la disposition de l'article 17.

Nous proposons également un amendement au deuxième paragraphe de l'article 17, en ce qui a trait à l'étendue de l'examen que devront passer les membres en exercice de l'association. Etant donné que nous proposons à l'article antérieur de limiter cet examen au code déontologique, nous croyons que, pour les gens qui ne détiendront pas de diplôme récent, il devrait y avoir un examen qui tienne compte de ce fait et possiblement porte sur d'autres matières que le code déontologique.

Quant au titre de technicien dentaire, apparemment aboli par cette loi, en ce sens qu'il est réservé aux gens qui le portent actuellement, on se pose la question vu que nous, au CEGEP Edouard-Montpetit, nous continuons de dispenser un enseignement en technique dentaire et que l'on donne un diplôme d'études collégiales en technique dentaire. Est-ce que ces gens, diplômés en technique dentaire, ne devraient pas s'appeler des techniciens dentaires?

Quant à l'article 20, qui nous préoccupe beaucoup, à vrai dire, avec les articles 12, 17 et 6, il traite de l'abrogation de la Loi des techniciens dentaires. Je dois vous dire que nous avons mis un peu de mordant dans notre texte à l'article 20, à la suite de pressions faites par des étudiants, notamment en technique dentaire, mais qui reçoivent une formation différente de celle qui est donnée aux gens qui se destinent à la denturologie. Autrement dit, tous les étudiants du CEGEP Edouard-Montpetit, en technique dentaire, ne veulent pas et ne se destinent pas à la denturologie.

Dans la mesure où, par l'article 20, on abolit purement et simplement la Loi des techniciens

dentaires qui régissait, et qui régit encore d'ailleurs, toute la question de la technique dentaire pour ne légiférer que sur la question des prothèses amovibles, tous les techniciens dentaires qui se spécialisent dans la prothèse fixe et qui, actuellement, sont régis par cette loi, cesseront d'être couverts et, à toutes fins pratiques, cela pourrait signifier que n'importe qui, détenteur d'un diplôme ou non, pourra s'adonner à la fabrication des prothèses dentaires fixes.

Nous pensons que toute la question des techniques dentaires, de la fabrication des prothèses, doit être réglementée et que l'effet de la loi 266 n'est pas de réglementer toute cette question, même si on y ajoute la loi 254. Les étudiants du CEGEP Edouard-Montpetit, qui étudient la prothèse fixe, se considèrent un peu laissés pour compte et demandent que la question de la fabrication des prothèses, en général et globalement, soit réglementée par l'Etat.

Et c'est pourquoi nous demandons que l'article 20, qui abolit la Loi des techniciens dentaires, ne soit pas proclamée en vigueur tant que cette réglementation générale, concernant l'ensemble de la technique dentaire, ne sera pas elle-même mise en vigueur.

Voilà, en quelques mots, le résumé du mémoire soumis par le CEGEP Edouard-Montpetit.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les représentants du CEGEP Edouard-Montpetit pour le mémoire qu'ils viennent de nous présenter. J'ai mentionné ce matin, de toute façon, je ne sais pas si les représentants du CEGEP étaient ici, que c'est certainement notre intention de réglementer, par le truchement de la Loi de la protection de la santé publique et d'établir des normes touchant les laboratoires ou tout ce qui touche à la fabrication de prothèses, par l'émission de permis et avec les mécanismes de contrôle appropriés.

Ce qui signifie et ce qui explique d'ailleurs pourquoi, dans le bill 250 et le bill 266, en ce qui a trait aux techniciens dentaires, ce que nous voulons assurer, c'est la protection de leur titre, étant donné que, en ce qui a trait à la fabrication, ce sera transposé par un autre mécanisme.

D'ailleurs, vous soulignez vous-même dans le mémoire le fait que les modes de fabrication peuvent être autres que des modes de fabrication individuelle ou artisanale. J'espère que ceci apporte une certaine clarification. Quant à la concordance à apporter, j'ai pris note de vos commentaires quant aux dates.

Maintenant, j'aimerais poser deux questions, M. le Président. Voici la première: Qu'est-ce qui a poussé les autorités du CEGEP Edouard-Montpetit à établir un tel cours et quelles ont été, au moment où ce cours a été établi, les communications qui ont pu avoir lieu avec divers niveaux d'institutions dans le domaine de l'éducation, de l'enseignement, soit au plan universitaire, soit avec le ministère de l'Education? Et voici la deuxième: On a fait état ce matin — et si j'ai bien compris vos réactions lorsque j'ai rappelé mes commentaires de ce matin, vous étiez ici — de la nécessité d'un certain niveau de formation pour poser certains actes. Sans reprendre toute la discussion, est-ce que vous pourriez nous dire de quelle façon, selon vous, le contenu de vos cours peut permettre de poser des actes qui ne sont pas permis présentement par la Loi des techniciens dentaires, actes qui seraient posés advenant la formation d'une corporation comme celle qui est suggérée par le bill 266?

Notez que, encore une fois je ne veux pas inutilement compliquer ma question, je ne fais pas d'énumération, de distinction entre les prothèses partielles ou totales, etc.

M. AUPRIX: Je vais essayer d'être le plus bref possible pour vous expliquer un peu l'évolution qui s'est faite pour en venir à établir l'Ecole des techniques dentaires au CEGEP Edouard-Montpetit.

Il y a à peu près sept ou huit ans, il a été formé un comité consultatif constitué de membres du Collège des dentistes, des représentants des deux universités et des représentants de l'Association des techniciens dentaires pour organiser une école qui permettrait de former des techniciens dentaires ou de donner une formation supplémentaire aux techniciens dentaires par rapport à l'école qu'ils avaient dans le temps. Il y a eu plusieurs contacts avec le ministère de l'Education.

Le ministère de l'Education était aussi présent à ces discussions, il était membre du comité consultatif pour la formation de l'école des techniciens dentaires.

La première décision du ministère de l'Education était, avant l'avènement du CEGEP, d'installer l'école des techniciens dentaires à l'université Laval, à l'institut des techniques à Ahuntsic. Après le phénomène CEGEP, il y a eu arrêt momentané des discussions, à savoir où irait la technique dentaire et au sujet de l'adaptation des programmes au niveau collégial.

Il y a eu rencontre avec le ministre de l'époque. J'ai rencontré le ministre Cardinal qui venait d'être nommé et il m'a dit de voir les CEGEP qui seraient intéressés à donner le cours de technicien dentaire et, avec le ministère de l'Education, de voir à établir avec la DIGEC, la direction générale de l'enseignement collégial, des programmes et d'ouvrir l'école le plus tôt possible dans un CEGEP qui serait intéressé et qui avait les locaux disponibles.

A ce moment-là, j'ai fait quatre CEGEP: Rosemont, Maisonneuve, Vieux-Montréal et Ahuntsic et ils n'avaient pas les locaux qui nous auraient permis d'ouvrir l'école de technique dentaire dans les plus brefs délais possible.

Après avoir, rencontré les autorités du CEGEP de Longueuil, le conseil d'administration du CEGEP de Longueuil avait accepté de fournir un étage au complet, les locaux, les facilités pour ouvrir l'école de technique dentaire. La DIGEC a émis son sceau et le ministère de l'Education a accepté. C'est comme cela qu'est née l'école de technique dentaire au CEGEP Edouard-Montpetit.

Pour les questions des programmes. Il y a eu un comité qui a été formé et qui comprenait des techniciens dentaires, des professeurs universitaires et du Collège des dentistes et des gens du ministère de l'Education, de la DIGEC, pour organiser un programme de technique dentaire.

En 1968, l'école s'est ouverte au CEGEP Edouard-Montpetit. Depuis ce temps, avec le ministère de l'Education, nous adaptons les programmes pour faire des techniciens dentaires, des techniciens qui répondraient réellement à la demande et aux besoins du public, directement ou indirectement.

En ce qui concerne la formation des individus, au sujet des cours, le technicien dentaire, comparativement à ce qu'il recevait autrefois, reçoit aujourd'hui une formation de base et une formation générale, une formation scientifique et technique, les cours de philosophie et de français, les cours scientifiques et les cours d'anatomie, biologie, physiopathologie, microbiologie, ceci toujours adapté à la technique dentaire.

Les cours de physiopathologie sont donnés par les mêmes professeurs d'université, les Drs Bussières et Metzler, qui donnent les cours aux dentistes à l'université, des professeurs de carrière. Les cours d'anatomie dentaire sont donnés par trois dentistes qui enseignent partiellement à l'université et qui ont leur bureau personnel. Les cours de microbiologie dentaire sont donnés par un médecin et les cours de biologie dentaire sont donnés par un biologiste faisant partie du département de biologie du collège Edouard-Montpetit. Les cours de spécialité sont donnés par des techniciens dentaires certifiés. Disons qu'au départ on avait certains problèmes, sachant très bien qu'on n'était pas préparé au point de vue pédagogique pour faire de l'enseignement. Nous avons bâti les locaux, nous avons bâti les programmes et, actuellement, je dois dire que nous approchons les $600,000 d'investissement au collège Edouard-Montpetit avec sept laboratoires d'enseignement. Les professeurs sont recrutés chez les techniciens dentaires et, avec l'expérience que nous avons vécue depuis quatre ans, nous avons fixé notre choix sur des jeunes techniciens dentaires pour pouvoir leur permettre de se former en pédagogie. Actuellement, tous les professeurs qui enseignent en technique dentaire sont enregistrés à des cours pour l'obtention du brevet d'enseignement spécialisé vers la licence. Est-ce que ça répond à votre question, M. le ministre?

M. CASTONGUAY: Oui. Il y aurait peut-être, si possible, quelques commentaires sur le contenu des cours par rapport à ce qui a pu être dit ce matin, quant à l'aptitude de vos diplômés à poser des actes qui dépassent ceux posés présentement dans le cadre de la loi des techniciens dentaires, c'est-à-dire à transiger directement avec le public pour certains actes.

M. AUPRIX: Les programmes qui sont actuellement dans l'annuaire du gouvernement, du ministère de l'Education, sont facilement adaptables selon les changements de loi. Si le bill 266 est adopté tel qu'il est demandé actuellement, le cours de denturologie deviendra une option au niveau de la troisième année. Il y aura, à ce moment, trois options possibles au niveau de la troisième année, ce qui n'empêchera pas de faire un cours postscolaire par la suite. Le seul cours que l'on voit qui pourrait être ajouté pour devenir denturologiste serait le cours de prise d'empreintes et d'articulés. C'est à peu près le seul cours pour le spécialiste qui se dirigerait en denturologie. Il y aurait sensiblement le même cours au point de vue de la formation générale et scientifique et, au point de vue technique, il serait spécialisé dans la prothèse amovible; à partir de la troisième année, il ne toucherait pas aux prothèses fixes ou au métal.

M. CASTONGUAY: Merci, M. le Président. M. LE PRESIDENT: Le député de Laurier.

M. MARCHAND: Une question supplémentaire. Vos professeurs, vous les recrutez, vous dites, parmi les jeunes techniciens. Quelle est leur pratique?

M. AUPRIX: Leur spécialité?

M. MARCHAND: Leur pratique. Quelle est leur pratique, leur expérience pratique?

M. AUPRIX: Disons qu'ils ont en moyenne cinq à sept ans d'expérience pratique dans un laboratoire.

M. MARCHAND: En denturologie?

M. AUPRIX: Du tout.

M. MARCHAND: Pas du tout?

M. AUPRIX: Du tout. Disons que chez nous — au ministère de l'Education, d'ailleurs, on en a discuté depuis deux ans — le mot denturologie est tabou, parce qu'on en parle sûrement, mais officiellement, on n'en parle pas. Dans les corridors, c'est sûr que les étudiants doivent s'en parler; ils s'en parlent certainement.

M. MARCHAND: Calculez-vous que le tabou va disparaître?

M. AUPRIX: Si la loi est adoptée, oui.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): D'abord, un commentaire, M. le Président, non pas pour vous provoquer. Vous avez soulevé un point extrêmement important, celui de l'abolition de la Loi des techniciens dentaires. Vous avez vu, par les remarques qui ont été faites ce matin, que vous aviez raison de souligner ce point, pour qu'on ne se retrouve pas dans une situation inacceptable ou embrouillée.

Pour ma part, je suis satisfait de la réponse du ministre à l'effet qu'un autre projet de loi va couvrir ce secteur. Il y aura lieu de tenir compte, dans la préparation de cette législation, des remarques que vous avez faites et que d'autres feront possiblement à ce sujet.

Mes questions seraient les suivantes: Est-ce que vos étudiants, étant donné qu'un seul CEGEP donne le cours, se recrutent dans la région de Montréal exclusivement ou si vous avez des étudiants qui viennent d'un peu partout, en province?

M. AUPRIX: A la suite des demandes, on fixe actuellement le nombre d'étudiants, qui était l'an passé de 80 et cette année de 60. Nous avons eu cette année des demandes de 300 étudiants. On fait d'abord passer un test d'aptitudes aux étudiants et le test révèle les possibilités quant au choix de l'étudiant. Dans le choix, cela varie entre 50 p.c. et 55 p.c. de la région de Montréal et le reste, hors de la région.

C'est entendu que la demande est beaucoup plus forte dans la région de Montréal. On pourrait probablement choisir tous les étudiants dans la région de Montréal. On s'arrange pour avoir à peu près 50 p.c. à 55 p.c. de la région de Montréal et 45 p.c. à quelque pourcentage près, hors de Montréal.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quel est le pourcentage d'admissions reçues auquel vous ne pouvez pas donner satisfaction?

M. AUPRIX: Il se fait 300 demandes. Prenons cette année, pour exemple, il s'est fait 300 demandes au mois de mars. Sur ce nombre 150 demandes sont irrecevables, c'est-à-dire ne sont pas admissibles dans aucune option du CEGEP, aussi bien en technique dentaire qu'en technique administrative ou d'autres techniques ou cours généraux. Sur les 150, nous en prenons 60.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous croyez, avec l'expérience que vous avez maintenant —depuis 1968, cela fait quatre ans — qu'il serait bon qu'un CEGEP dans une autre région, disons Québec, donne aussi le cours de technicien dentaire?

M. AUPRIX: Si on n'élargit pas la loi pour permettre aux techniciens d'avoir un horizon un peu plus vaste, le marché du travail pour les techniciens dentaires est assez restreint. Avec le nombre de 60 qui sortirait par année — je prends le nombre qui entre au CEGEP au début de la première année — en prévoit que 40 ou 45 finiront à la fin de la troisième année. Cela comble amplement les besoins du marché du travail en technique dentaire.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que, depuis que le cours est commencé en 1968, vous avez eu l'occasion de vérifier selon la pratique, la qualité de l'enseignement, une fois qu'ils ont commencé? Cela fait quatre ans.

M. AUPRIX: Les premiers finissants sont sortis cette année. On s'est organisé pour les faire suivre régulièrement. On veut rencontrer les propriétaires de laboratoire qui ont des étudiants comme employés. On veut savoir ce qui leur manque, ce qui leur faudrait en supplémentaire. On adaptera les programmes selon l'expérience mais il faudra quelques années avant qu'on ajuste réellement les programmes selon le marché du travail.

M. CLOUTIER (Montmagny): A la lumière des observations faites devant cette commission, à la séance précédente et à cette séance, est-ce que, déjà, vous pouvez entrevoir certaines modifications qui seraient souhaitables à votre programme d'enseignement?

M. AUPRIX: Oui. On se propose, dès cette année, d'amplifier la pratique au lieu de la théorie, c'est-à-dire qu'on voudrait éventuellement faire un cours de 85 p.c. de pratique et 15 p.c. de théorie. On s'aperçoit que, dans les laboratoires, l'individu — la fille ou le garçon sait très bien quoi faire mais il n'a pas encore la dextérité ou la vitesse pour le faire. L'employeur, qui veut avoir ces gens s'attend quand même à une certaine production parce qu'il ne le fait pas pour rendre service. Il le fait peut-être un peu pour rendre service mais surtout pour que son industrie ait une certaine sorte de production.

L'individu lui-même devrait avoir un peu plus de connaissances ou de pratique en laboratoire pour se permettre d'arriver sur le marché du travail et pouvoir produire même s'il veut travailler à son compte après son année de stage, être capable de gagner sa vie sans travailler 50 ou 75 heures par semaine.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quelle est l'équivalence entre le diplôme que vous accordez et un diplôme semblable qui serait accordé à l'extérieur du Québec? Un diplôme correspondant qui serait accordé... Est-ce que vos étudiants, une fois diplômés du CEGEP en techniques dentaires, pourraient aller pratiquer dans d'autres provinces ou aux Etats-Unis?

M. AUPRIX: Très facilement. J'ai visité

l'école de Toronto; il y en a une autre au Canada, l'école d'Alberta. En Alberta, c'est une école de denturistes. J'ai son programme. J'ai passé une semaine à l'enseignement, à l'école de Toronto. Je pense que l'école du Québec peut avantageusement se comparer avec les deux autres écoles du Canada. Nos finissants peuvent aller n'importe où dans le Canada sans être gênés. D'ailleurs les Etats-Unis déjà demandent de nos finissants. Ils disent: Envoyez-nous la quantité que vous voulez. Simplement parce qu'un étudiant est allé faire un stage d'un mois dans un laboratoire à Albany. On nous a dit: Si ce sont des gens comme ceux-là que vous formez, envoyez-nous-en tant que vous voulez.

M. CLOUTIER (Montmagny): Il faudrait seulement les leur prêter.

M. AUPRIX: Oui, je suis bien d'accord. Si on a un surplus on peut peut-être déborder.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, quelques brèves questions parce que plusieurs ont déjà été posées. Je remercie d'abord les membres de les avoir posées à ma place. Est-ce que les étudiants inscrits à vos cours reçoivent, dans un laps de temps quelconque, la technique ou la façon de prendre les empreintes?

M. AUPRIX: Pas du tout.

M. GUAY: Est-ce que cela vous arrive de faire du recyclage, c'est-à-dire des techniciens dentaires qui auraient pratiqué pendant un certain temps et qui désireraient se recycler par exemple?

M. AUPRIX: A l'automne, le CEGEP Edouard-Montpetit inscrit le perfectionnement pour les techniciens dentaires déjà diplômés; il y aura perfectionnement I dans les techniques d'abord, montage de prothèses amovibles partielles et complètes; il y aura des cours de spécialisation en ponts et couronnes et céramique dentaire et métallurgie. Il y aura aussi des cours offerts en anatomie dentaire et en biologie dentaire.

M. GUAY: Parmi les professeurs, est-ce qu'il y a également des dentistes?

M. AUPRIX: Oui. Pas exactement en technique dentaire, mais en physiopathologie, ce sont deux dentistes, professeurs de carrière à l'Université de Montréal, les mêmes professeurs qui enseignent aux dentistes. Il y a trois autres dentistes qui enseignent en anatomie dentaire et, à compter de septembre cette année, nous aurons une clinique dentaire, un bureau de dentiste qui fait partie du département. Cinq dentistes ont été engagés et chacun enseignera sa spécialité, chaque jour de la semaine; ils fourniront du travail aux étudiants qui travaillent sur des cobayes — excusez le mot — des modèles, et ils pourront observer les résultats en bouche à l'aide d'un circuit fermé de télévision. Une caméra est installée en face de la chaise du dentiste et, à chaque laboratoire, les étudiants voient le travail qui a été fait par un autre étudiant.

M. GUAY: Avez-vous déjà reçu des recommandations de la part du Collège des chirurgiens-dentistes?

M. AUPRIX: C'est-à-dire qu'actuellement nous avons formé au CEGEP Edouard-Montpetit un comité consultatif maison. On sait que les comités consultatifs qui faisaient partie de l'éducation ont été transférés au ministère du Travail et la collaboration était assez difficile, cela faisait un intermédiaire de plus. Chez nous, au CEGEP Edouard-Montpetit, nous avons organisé un comité consultatif maison composé de deux dentistes représentant les deux universités, McGill et Montréal, un du Collège des dentistes, le président de l'Association des techniciens dentaires, un propriétaire de laboratoire, un employé, un étudiant, le directeur général du collège, le directeur du service pédagogique du collège et moi-même.

M. GUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT (Marchand): Le député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, est-ce que tous vos finissants travaillent exclusivement dans des laboratoires? Est-ce que vous les formez expressément pour ce genre de pratique?

M. AUPRIX: Exclusivement. C'est-à-dire que l'étudiant en techniques dentaires au collège Edouard-Montpetit apprend tout l'éventail des techniques, c'est-à-dire aussi bien en prothèses complètes ou partielles amovibles qu'aux couronnes et ponts ou céramique qui s'appellent les prothèses fixes ou la métallurgie, qui s'appelle nobilium, ticonium, vitalium, et les alliages.

M. LAURIN: Est-ce qu'on pourrait interpréter cela en disant que vous formez exclusivement vos techniciens pour qu'ils puissent travailler à remplir les ordonnances des dentistes?

M. AUPRIX: Actuellement, oui. On ne peut pas faire autrement, selon la loi. Comme c'est une maison d'éducation du ministère de l'Education, c'est assez difficile de faire autrement.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Le cours au CEGEP, c'est deux ans de base, de cours généraux.

M. AUPRIX: C'est trois ans, le cours.

M. SAINT-GERMAIN: C'est dans la troisième année seulement qu'il y a une option, que l'étudiant prend son option.

M. AUPRIX: Actuellement, il n'y a pas d'option. Le cours est général, universel, si vous voulez. La première année, l'étudiant fait surtout des cours généraux et quelques cours de spécialité. Il suit des cours de philosophie, français, physique, biologie, anatomie et de matériaux dentaires. La deuxième année et la troisième année, les cours en sont presque exclusivement de spécialité et de matière générale, dans le sens qu'on fait de tout: les prothèses fixes, amovibles, et métal.

Si le bill 266 venait à se faire, il y aurait une modification des cours au niveau de la troisième année, pour en faire une option spécialisée de denturologie, de prothèses fixes ou de métallurgie.

M. SAINT-GERMAIN: Vos étudiants qui finissent actuellement leurs études est-ce qu'ils sont aptes à déterminer si une bouche est normale de façon à ce qu'ils puissent prescrire des ordonnances?

M. AUPRIX: Non. Ils ont une formation biologique, physiologique, anatomique pour s'apercevoir s'il y a une anomalie quelconque, et diriger le patient vers un dentiste ou un médecin.

M. SAINT-GERMAIN: Ils ne peuvent pas dire qu'un patient est apte à recevoir une pièce de prothèse actuellement, lorsqu'ils ont fini le cours?

M. AUPRIX: Oui, ils peuvent, avec les cours de physiologie, pathologie, microbiologie, anatomie et biologie, s'apercevoir si la bouche est saine ou non. Ils sont capables de s'apercevoir s'il y a une anomalie quelconque. De là à dire que c'est telle chose qu'il y a là, et à dire que c'est tel remède que ça prend, ils ne le font pas.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que c'est là une addition au cours qui était donné antécé-demment aux techniciens dentaires?

M. AUPRIX: Oui.

M. SAINT-GERMAIN: Vous avez parlé d'un comité consultatif maison, est-ce qu'il a fonctionné ce comité?

M. AUPRIX: Régulièrement. M. SAINT-GERMAIN: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rivière-du-Loup.

M. LAFRANCE: M. le Président, étant donné que vous représentez le CEGEP Edouard-Montpetit, ma première question serait: Quelle est votre opinion sur l'appellation denturologis-te?

M. AUPRIX: Je pense que vous pouvez voir dans le mémoire qu'on a préparé, dans les premières pages...

M. BRAULT: Lorsqu'il s'est agi d'interpréter le texte, on s'est basé sur ce vieux principe qui dit qu'on interprète un texte de loi à partir du sens ordinaire des mots. On est allé le vérifier et on a découvert que le mot n'était nulle part. On a vérifié auprès d'un comité du Collège des médecins qui porte un nom technique mais qui s'intéresse aux termes techniques de la médecine également auprès de l'Office de la langue française; à aucun des deux endroits on n'a pu nous dire ce que signifiait le mot denturologie sans que nous en lisions la définition. Par la suite, on s'est adressé à un linguiste ou un traducteur qui nous a dit : Oui, on comprend ce que ça veut dire, mais, comme question de fait, au plan technique, au plan sémantique, le mot est mal construit. Ce qu'on fait dans notre mémoire à la page 2, à la note en bas, on vous répète l'opinion qu'on nous a donnée nous disant qu'on ne peut pas construire un néologisme à partir d'un terme français complet qui est le mot denture et d'une racine grecque qui est le mot "logie". Il faudrait prendre deux racines grecques ou deux mots français apparemment.

M. LAPRANCE: Est-ce que le mot "denti-physionomiste" vous dit quelque chose?

M. AUPRIX: J'ai vu ce terme dans une revue, l'an passé, et c'est tout ce que j'en sais.

M. LAFRANCE: Est-ce que vous connaissez une association qui s'appelle l'Association des dentiphysionomistes du Québec?

M. AUPRIX: Non.

M. LAFRANCE: Connaissez-vous M. André Verreau?

M. AUPRIX: Pour en avoir entendu parler, il en est le président.

M. LAFRANCE: Est-ce qu'il fait partie de l'Association des denturologistes?

M. AUPRIX: Pas à ma connaissance.

M. LAFRANCE: C'en est un qui a eu peur et qui s'est dissocié des denturologistes. Vous avez dit tout à l'heure qu'au CEGEP Edouard-

Montpetit vous formiez des techniciens dentaires. La seule formation que vous donnez à l'heure actuelle au CEGEP Edouard-Montpetit est une formation technique pour former des techniciens dentaires.

M. AUPRIX: Oui, selon les termes de la loi actuelle.

M. LAFRANCE: Vous avez aussi mentionné qu'il était possible d'avoir une option après la troisième année.

M. AUPRIX: Pas après, mais pendant.

M. LAFRANCE: Pendant la troisième année. A l'heure actuelle, vous n'êtes pas rendus à la troisième année?

M. AUPRIX: Oui.

M. LAFRANCE: Est-ce que vous donnez l'option spéciale?

M. AUPRIX: Non.

M. LAFRANCE: Vous ne la donnez pas.

M. AUPRIX: J'ai dit tantôt à M. Laurin qu'on ne peut pas la donner tant et aussi longtemps que la loi ne sera pas adoptée. C'est une école totalement financée par le gouvernement, le ministère de l'Education, on ne peut pas déroger à la loi.

M. LAFRANCE: Quand vous avez eu l'approbation du ministère de l'Education pour former des techniciens dentaires, est-ce que vous avez mentionné au ministère de l'Education que vous aviez l'intention de former des denturologistes?

M. AUPRIX: Il n'en fut aucunement question.

M. LAFRANCE: Quoiqu'il en soit question au CEGEP Edouard-Montpetit.

M. AUPRIX: J'ai dit tantôt que le mot était tabou; on peut s'en parler dans les passages mais il n'en est pas question pendant les cours.

M. LAFRANCE: J'imagine que ce doit être dans les passages parce que les cours se donnent au CEGEP.

M. AUPRIX: Non, monsieur.

M. LAFRANCE: Ils ne se donnent pas au CEGEP?

M. AUPRIX: Ces cours-là?

M. LAFRANCE: Les cours de techniciens dentaires?

M. AUPRIX: Oui, mais pas les cours de denturologie.

M. LAFRANCE: Mais vous en parlez, justement, dans les corridors.

M. AUPRIX: Il peut s'en parler.

M. LAFRANCE: Dites-moi donc quelle est la différence entre le technicien dentaire et le denturologiste.

M. AUPRIX: Le denturologiste est un technicien dentaire qui a décidé de travailler directement auprès du public. Il fait des prothèses amovibles.

M. LAFRANCE: Qui a décidé, tout simplement, sans aucune formation parce que vous ne la donnez pas.

M. AUPRIX: Il a toute la formation nécessaire.

M. LAFRANCE: Qui la lui donne? Actuellement, il n'y a pas de denturologistes.

M. AUPRIX: Je regrette, il y a l'Association des denturologistes du Québec. Il y a un mémoire de présenté par l'association.

M. LAFRANCE: Est-ce qu'ils existent ou s'ils n'existent pas?

M. BRAULT: Si vous me permettez, d'abord, je vous ai donné, tantôt, la limite de l'intervention du CEGEP Edouard-Montpetit. D'une part, il y a tout le débat qui peut impliquer des gens qu'on accuse de pratique illégale de part et d'autre, mais par ailleurs, le CEGEP Edouard-Montpetit forme des techniciens dentaires parce que, si on veut, l'accueil légal que l'on fait aux gens qui sont formés en technique dentaire se limite à celui que le CEGEP Edouard-Montpetit offre, c'est-à-dire aux techniques dentaires reconnues depuis X années et que M. Auprix a expliquées tantôt. Mais le CEGEP Edouard-Montpetit comme tel ne peut pas non plus former des techniciens dentaires denturologistes tant que les techniciens dentaires denturologistes ne seront pas reconnus. C'est vous-même qui l'avez souligné ce matin, je vous ai entendu, avec un représentant d'une association. Il existe un certain nombre de gens qui se disent denturologistes. Mais, pour l'instant, ils ne sont reconnus nulle part. C'est un état de fait que sans doute cette loi-ci a décidé de prendre en considération. Mais, comme tel, le CEGEP Edouard-Montpetit se doit de dispenser un enseignement qui s'inscrit dans le cadre des métiers légalement reconnus. C'est ce que fait le CEGEP, mais il se dit, par ailleurs, apte à faire plus ou à faire autre chose si une loi lui permet de former des techniciens qui se dirigeront vers autre chose.

M. LAFRANCE: Etes-vous capable de me dire, au CEGEP Edouard-Montpetit, le nombre d'heures d'enseignement en anatomie, en physiologie, en pathologie, en histopathologie en micropathologie et en physiopathologie?

M. BRAULT: Je vous renvoie à la page 37 du mémoire. M. Auprix pourra vous donner le détail. Le tableau à droite indique le nombre d'heures.

M. AUPRIX: Prenez la page 37 et allez à la cinquième ligne. Vous voyez: Anatomie dentaire I et les chiffres 1-3-3; 1 désigne l'enseignement théorique, le premier 3 l'enseignement pratique et le deuxième 3, un travail personnel que le professeur donne à chaque élève; c'est par semaine ça. Vous allez en deuxième session...

M. LAFRANCE: C'est en nombre d'heures?

M. AURPIX: C'est ça, par semaine. Vous allez à: Anatomie dentaire, en deuxième session, la quatrième ligne, vous voyez: Anatomie dentaire II. Vous voyez encore sept heures par semaine. Cela veut dire que, pendant l'année, ils ont sept heures par semaine. Biologie humaine I et II, la pondération est augmentée en 3-2-3; cela veut dire huit heures par semaine.

Si vous allez en cinquième session, vous voyez: Physio-pathologie, 0-2, deux heures; quatre heures et aussi, en sixième session, encore quatre heures. Vous avez aussi microbiologie, en deuxième session, la dernière ligne du bas, 3-1-3, ce qui donne sept heures.

M. LAFRANCE: Vous avez mentionné tantôt qu'il y avait des dentistes qui donnaient des cours au CEGEP Edouard-Montpetit. Pouvez-vous me donner les noms?

M. AUPRIX: Le Dr Bussières enseigne l'histologie en physio-pathologie — c'est un des deux professeurs de l'Université de Montréal qui enseigne aussi en art dentaire — et le Dr Metzler, qui donne l'autre cours de physio-pathologie. Le Dr LaHaye enseigne l'anatomie dentaire I. Les Drs Brunet, LaHaye et...

M. LAFRANCE: Ils n'y vont pas souvent, vous ne les connaissez pas.

M. AUPRIX: Ils se divisent le groupe. M. LAFRANCE: Il y en a moins que ça. M. AUPRIX: Et le Dr Bordeleau.

M. LAFRANCE: Vous confectionnez les prothèses dentaires. Vous savez qu'une prothèse dentaire ou deux prothèses dentaires peuvent causer des lésions au niveau de l'articulation temporo-mandibulaire...

M. AUPRIX: Des lésions?

M. LAFRANCE: Des lésions au niveau de l'articulation temporo-mandibulaire. Connaissez-vous l'articulation temporo-mandibulaire?

M. AUPRIX: Oui.

M. LAFRANCE: Vous la connaissez? Est-ce que ça peut arriver qu'il se produise des lésions à ce niveau à la suite de prothèses dentaires, de fabrication de prothèses?

M. AUPRIX: Cela pourrait arriver.

M. LAFRANCE: Dans ces conditions, quel recours pourrait avoir le citoyen ou de quelle façon pourrait-on régler le problème? De quelle façon les denturologistes pourraient-ils régler le problème légalement?

M. AUPRIX: En le référant à un spécialiste en chirurgie buccale.

M. LAFRANCE: Ah bon! on cause le dommage et on les réfère à d'autres après. Merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

L'Association des denturologistes du Québec.

M. BRAULT: Nous vous remercions de nous avoir entendus.

M. LE PRESIDENT: Je demanderais à l'Association des denturologistes du Québec, à son représentant, de bien vouloir s'identifier et identifier son groupe.

Association des denturologistes du Québec

M. MASAROLA: M. le Président, mon nom est Yvan Masarola. Je suis avocat et conseiller juridique de l'Association des denturologistes du Québec. Cet après-midi, le président de l'Association des denturologistes, M. Michel Saint-Louis, vous fera l'exposé des commentaires qu'il a à faire relativement au bill 266.

J'aimerais cependant vous présenter les membres du bureau de direction de l'association. Commençant à ma gauche, M. Gaston Choquette, M. Sylvain, M. André Lamaire, le vice-président Yvon Goudreau, le président Michel Saint-Louis et, à ma droite, M. Yvan Duchesne, M. Jean Blache et le secrétaire-trésorier, M. Jean-Pierre Leroux.

Je voudrais maintenant céder la parole à M. Michel Saint-Louis, le président, qui vous fera ses commentaires sur le bill 266.

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, messieurs les membres de la commission, l'Association des denturologistes du Québec voudrait, premièrement, remercier cette commission de l'avoir invitée à présenter un mémoire sur le code des professions. L'Association des denturologistes

du Québec compte 255 membres qui sont tous membres en règle de l'Association des techniciens dentaires de la province de Québec. C'est d'ailleurs une condition sine qua non pour faire partie de notre association.

La formation de cette association découle du fait que plusieurs techniciens dentaires, constatant les services qu'ils rendaient à la population et voyant la persécution du Collège des chirurgiens dentistes de la province de Québec par ses arrestations continuelles et la saisie de l'équipement complet dans leur laboratoire, ont décidé de former cette association afin de pouvoir revendiquer les droits qui leur reviennent.

Depuis plus de dix ans, ils demandent la reconnaissance de leur profession. L'Association des denturologistes du Québec désire remercier et féliciter le gouvernement pour avoir reconnu, par le bill 266, une situation de fait qui existe depuis longtemps. Nous appuyons entièrement le bill 266, sauf que nous soumettons aux membres de cette commission quelques amendements à l'article 6 de ce bill qui définit la profession de la denturologie, afin qu'il n'y ait aucune équivoque quant à l'interprétation de cette loi.

A l'article 6 de la Loi sur la denturologie, il est dit: "Constitue l'exercice de la denturologie tout acte qui a pour objet de vendre, de fournir, de poser ou de remplacer des prothèses dentaires amovibles qui remplacent la dentition naturelle. Dans l'exercice de sa profession, il est interdit à un denturologiste de poser un acte qui a pour objet de diagnostiquer ou de traiter les maladies des dents, de la bouche ou des maxillaires chez l'être humain."

L'association des denturologistes demande un amendement à cet article, afin qu'il n'y ait aucune ambiguïté. Comme nous avons pu le remarquer ce matin et à d'autres réunions de cette commission, nous ne tenons plus à avoir devant les tribunaux les guerres que nous avons eues depuis plus de 50 ans. Afin qu'il n'y ait pas d'équivoque, par rapport au bill 254 qui dit à l'article 24: "Nonobstant toute autre loi générale ou spéciale, les dentistes sont habilités..., à prendre des empreintes et des articulés et à faire l'essai, la pose l'adaptation, et la vente des dispositifs adjoints ou conjoints. Aux fins du présent article, les mots "dispositifs adjoints" désignent une prothèse dentaire amovible qui remplace la dentition naturelle et les mots "dispositifs conjoint désignent une prothèse fixe qui est ajoutée ou intégrée à la dentition naturelle."...

Et l'article 25 dit: "Sous réserve des droits et privilèges expressément accordés par la loi à d'autres professionnels, les actes décrits aux articles 23 et 24 sont réservés aux dentistes."

Alors, les denturologistes, comme je le disais, afin qu'il n'y ait pas d'équivoque, aucune ambiguïté, demandent qu'à l'article 6 de la Loi sur la denturologie, soient intégrés la prise d'empreintes, les articulés, l'essai, l'adaptation et "qui a pour objet de fabriquer et de réparer."

La fabrication et la réparation n'étant pas incluses à l'article 6, par rapport à l'article 10 de la Loi sur la denturologie qui dit qu'il est interdit à un denturologiste d'avoir des intérêts dans un laboratoire dentaire, nous demandons, encore une fois, que le législateur puisse introduire la fabrication et la réparation.

Parce que, pour un denturologiste, il est bien clair que pour rendre un service impeccable à un patient, il est très important de pouvoir fabriquer et réparer cette prothèse dentaire. Nous nous sommes renseignés et nous savons que c'est bien dans l'esprit du législateur. Mais, je crois que les membres de cette commission n'auront certainement aucune objection à recommander à l'Assemblée nationale que des lois soient claires et précises, afin que la population puisse les interpréter comme il se doit.

Maintenant, nous demandons, s'il est possible, que les membres de cette assemblée recommandent à l'Assemblée nationale que l'article 6 soit constitué comme tel: Constitue l'exercice de la denturologie tout acte, dont la prise d'empreintes, les articulés, l'essai, l'adaptation et qui a pour objet de fabriquer, de réparer, de vendre, de fournir, de poser ou de remplacer les prothèses dentaires amovibles qui remplacent la dentition naturelle. Tout ceci pour bien éclairer la population et afin qu'il n'y ait aucune équivoque dans l'esprit des tribunaux si, plus tard, nous sommes appelés, encore une fois, devant eux.

M. le Président, je remercie les membres de m'avoir écouté et maintenant, je suis à leur disposition pour répondre aux questions.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les représentants de l'Association des denturologistes pour le mémoire qu'ils nous ont présenté et, compte tenu de la nature des commentaires qui ont été faits et des explications que j'ai tenté d'apporter en ce qui a trait aux amendements que nous envisageons quant à la Loi de l'hygiène publique, je n'aurai pas de questions, pour le moment, à poser.

M. LE PRESIDENT: M. le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, après l'adoption de la loi 266 qui reconnaîtrait officiellement votre profession, est-ce que vous avez prévu certains programmes de formation additionnels pour ceux, parmi vos membres, qui pourraient requérir une telle formation?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, pour répondre au député de Montmagny; dans l'esprit des membres de l'association des denturologistes, les membres, quant à nous, sont compétents pour prendre des empreintes et des articulés puisque, depuis 50 ans, cela se pratique au Québec. Maintenant, notre association, qui, entre parenthèses, a été instituée par la Loi

des syndicats professionnels le 13 avril 1970, ne s'opposera sûrement pas à ce qu'il y ait des cours de recyclage ou de perfectionnement pour que nos membres puissent, dans l'avenir, bien servir le public.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous avez fait état du nombre de membres que vous comptez dans votre association?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, notre association compte —je l'ai mentionné tout à l'heure — 255 membres.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quelle est leur répartition sur le territoire du Québec? Est-ce qu'il y a concentration dans les villes?

M. SAINT-LOUIS: La répartition, sur le territoire du Québec, se situe à environ 50 p.c. dans la région de Montréal, 35 p.c. dans la région de Québec et, dans la région de l'Abitibi, il y a quatre ou cinq denturologistes; dans la région de Hull, deux denturologistes et dans la région des Cantons de l'Est, environ une quinzaine.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous faisiez état tantôt, par incidence, des difficultés que vous avez eues depuis cinquante ans à pratiquer une profession qui n'a pas de reconnaissance officielle, si ce n'est la reconnaissance par la Loi des syndicats professionnels en 1970. Est-ce qu'il y a eu beaucoup de poursuites de la part du Collège des dentistes?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, je ne puis apporter une réponse exacte.

M. CLOUTIER (Montmagny): Non, je ne vous demande pas...

M. SAINT-LOUIS: Je peux vous dire que, avant que des techniciens dentaires ne se groupent pour former une association afin de pouvoir, au moins, se défendre devant les tribunaux, je puis vous dire que plusieurs techniciens dentaires étaient poursuivis par le Collège des chirurgiens dentistes. Je puis aussi vous dire que beaucoup de techniciens dentaires ont souffert de cela à cause de l'équipement qui était saisi. Dans l'Association des techniciens dentaires, avant 1960, on peut mettre 10 p.c. à 15 p.c. du nombre, qui étaient à ce moment 350 ou 400 techniciens dentaires. Depuis que l'Association des denturologistes de Québec a été formée, depuis nos contestations devant nos tribunaux et depuis que la population a été mise au courant de cette situation, le Collège des chirurgiens dentistes a sensiblement diminué les arrestations contre les denturologistes.

M. CLOUTIER (Montmagny): Récemment — quand je dis récemment, c'est depuis que la Loi des syndicats professionnels vous a recon- nus — est-ce qu'il y a eu des poursuites fréquentes ou si c'est très rare?

M. SAINT-LOUIS: Oui, il y a eu des poursuites après la formation de notre syndicat professionnel. Cela a toujours été en diminuant surtout après que nous eûmes fait une démonstration devant le Collège des chirurgiens dentistes et que tous les journaux ou presque de la province en eurent parlé. Je parle surtout de la région de Montréal puisque dans la région de Québec, il y a encore des poursuites, il y a encore des denturologistes qui se font saisir leur matériel.

M. CLOUTIER (Montmagny): L'Association des techniciens dentaires nous a parlé ce matin, de ses relations avec les dentistes. Est-ce que vous avez, vous-même comme association, des contacts, soit avec le Collège des chirurgiens dentistes ou l'Association des chirurgiens dentistes?

M. SAINT-LOUIS: L'Association des denturologistes a rencontré, il y a environ cinq ou six mois, deux membres du comité exécutif de l'Association des chirurgiens dentistes au 759 est, rue Mont-Royal, qui est le secrétariat des denturologistes. Après une discussion franche, sincère, les deux membres de cet exécutif, qui étaient présents ce matin, ont avoué qu'ils n'avaient pas tellement d'objections, quant à eux, à ce que les denturologistes puissent prendre des empreintes et des articulés. C'est la seule rencontre que nous avons eue.

Etant le président de mon conseil exécutif, j'ai fait part de ma rencontre aux membres de mon conseil. Par après, il me semble que ces relations n'étaient plus très favorables, c'est-à-dire que l'Association des dentistes ne semblait plus très favorable à ces rencontres.

M. CLOUTIER (Montmagny): De leur témoignage devant la commission parlementaire — témoignage auquel vous avez assisté — est-ce que vous pouvez en conclure que leur attitude vis-à-vis de votre association ou le dialogue qui semblait être établi est changé ou si les chirurgiens dentistes seraient prêts à entreprendre une discussion avec votre association, préalablement à l'adoption de ces lois spécifiques et du bill 250?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, je ne peux répondre à la place des membres de l'Association des chirurgiens dentistes. Quant à nous, l'Association des denturologistes est toujours prête à discuter avec n'importe qui. Nous appuyons fortement le gouvernement et croyons que le gouvernement, avant de présenter un tel projet de loi, a certainement eu des comités qui ont étudié cette chose, pour que les denturologistes puissent pratiquer publiquement. C'est évident que si nous avons une rencontre avec l'Association des chirurgiens

dentistes, qui semble peut-être moins s'opposer que le Collège des chirurgiens dentistes — parce que nous avons découvert, ce matin, que l'Association des chirurgiens dentistes serait peut-être prête à ce que les denturologistes aient le droit de prendre des empreintes, mais sous surveillance directe d'un dentiste ou sur ordonnance d'un médecin.

Alors, nous ne pouvons accepter cela parce qu'il a été prouvé en Colombie-Britannique, où le projet de loi avait ainsi été adopté, que les denturologistes de cette province pouvaient avoir le droit de fabriquer ou de prendre les empreintes sous ondonnance d'un dentiste. Seulement un an après, le gouvernement de cette province a été obligé d'amender cette loi parce que les dentistes profitaient de cette occasion de donner une ordonnance... Il faut bien se dire qu'une fois le projet de loi 266 voté, le public aura toujours le choix entre un denturologiste et un dentiste. Les dentistes, par cette loi, comme nous avons pu comprendre, ont toujours le droit de prendre des empreintes et même de fabriquer des prothèses dentaires.

Comme je le dis, dans d'autres provinces, cette ordonnance devait permettre à une personne d'aller chez un denturologiste. Le gouvernement a été obligé d'amender cela parce que le dentiste profitait trop de cette chose, au rabais sur une ordonnance, si vous faites faire vos prothèses dentaires ici plutôt que d'aller chez un dentiste. Je n'ai aucune objection à ce que les dentistes puissent faire des dentiers ou des prothèses dentaires mais je crois que, quand aux relations des dentistes, nous sommes toujours prêts à discuter, mais quant à nous, vous pouvez être assurés que nous appuyons le gouvernement pour le bill 266.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: Vous demandez un amendement à l'article 6. Si cet amendement vous était refusé, est-ce que vous seriez obligés de vous considérer comme étant dans l'illégalité?

M. SAINT-LOUIS: Non, pas du tout. Nous ne nous considérerions pas dans l'illégalité mais nous demandons cet amendement afin qu'il n'y ait plus d'état de guerre entre, d'une part, des techniciens dentaires qui voudraient devenir denturologistes par rapport à l'état de guerre entre l'Association des techniciens dentaires et le gouvernement, ou l'état de guerre aussi entre l'Association ou la future corporation des denturologistes avec le Collège des chirurgiens dentistes, afin que nos membres ne soient plus traduits devant les tribunaux et que les dentistes plaident que, sous droits et privilèges expressément accordés par la loi 254, les actes décrits aux articles 23 et 24 sont réservés aux dentistes. Alors, l'acte de la prise d'empreintes, des articulés et de l'essai étant inscrit à l'article 24 et n'étant pas inscrit au nôtre, c'est pour cela que nous demandons à ce qu'il soit inscrit afin que ce soit bien clair.

M. GUAY: Ce serait une clarification nécessaire. Deuxième question, étant donné que les denturologistes ou techniciens dentaires fournissent à une grande partie de la population qui a besoin de prothèses — on a mentionné que c'était peut-être 80 p.c. — est-ce que vous avez eu dans le passé un moyen de publicité quelconque pour acquérir cette nombreuse clientèle?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, pour répondre au député de Dorchester, les denturologistes desservent 80 p.c. de la population et les denturologistes, après avoir lu un débat de la commission parlementaire, je puis vous assurer une chose, c'est que les denturologistes n'ont jamais fait de porte à porte; pis encore, ils n'ont jamais fait de publicité. Parce que les denturologistes, pour pratiquer en public, pour prendre des empreintes devaient toujours prendre quelqu'un qui été référé par un autre à cause justement de la peur de prendre un agent provocateur qui aurait été envoyé par le Collège des chirurgiens dentistes afin de monter une cause contre les denturologistes.

Alors, il faut bien se dire que, quand quelqu'un réfère une personne à un denturologiste afin qu'il puisse se faire faire des prothèses dentaires, c'est parce que lui-même aura été satisfait et les denturologistes n'avaient, avant cette année, aucune publicité. Alors, pour référer quelqu'un à un autre afin qu'il puisse se faire faire des prothèses dentaires, il faut tout de même que cette personne ait été satisfaite.

M. GUAY: Maintenant, sur quoi vous basez-vous pour affirmer un chiffre aussi important que 80 p.c. de la clientèle ayant besoin de prothèses dentaires?

M. SAINT-LOUIS: Nous nous basons, pour répondre à M. Guay, sur une déclaration du Dr Nadeau, un des six spécialistes en prothèse dentaire au Québec, qui est à l'Université de Montréal, dans la presse du 5 janvier 1970. Il a déclaré lui-même que 80 p.c. de la population avait recours dans le temps à des techniciens dentaires pour se faire fabriquer des pièces de prothèse dentaire amovible.

M. GUAY: Est-il arrivé dans le passé que des médecins vous ont référé directement des clients qui avaient besoin d'une prothèse dentaire, au lieu de les diriger vers un dentiste?

M. SAINT-LOUIS: Oui, il est arrivé à maintes reprises que des médecins ont référé des patients; j'ai même des lettres que des médecins ont envoyées à des patients pour qu'ils puissent faire affaire avec un denturologiste afin de se faire fabriquer des pièces de prothèse dentaire. Ce sont des médecins qui avaient vu la bouche

du patient et qui ont référé ce patient à un technicien dentaire.

M. GUAY: Maintenant, il semblerait que les dentistes reçoivent les plaintes qui sont formulées à l'endroit des dentorologistes. Est-ce que vous recevez des plaintes de patients qui ont été traités par des dentistes? Peut-être que c'est toujours vice versa l'histoire des plaintes ou encore recevez-vous des plaintes directement de vos patients?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, pour répondre au député de Dorchester, il est évident que nous ne sommes pas une corporation et nous n'avons pas l'intention non plus de voir à ce que les patients soient bien traités ou de référer une plainte au Collège des chirurgiens dentistes. Venant de nous, je pense qu'elle serait refusée. Mais nous avons, chaque jour, de nombreuses plaintes. J'en ai des plaintes contre les chirurgiens dentistes. Le député de Dorchester a soulevé une question, il me fait plaisir de répondre, parce que, quand on a parlé d'adaptation de prothèse dentaire, on a dit que seul un dentiste pouvait adapter une prothèse dentaire. Je trouve ça un peu drôle, parce que j'ai des patients ou mes confrères ont des patients dont les prothèses auraient été faites par un dentiste qui aurait commis des erreurs. Quand on vient me dire que, pour adapter une prothèse dentaire, il faut peut-être sept, huit ou neuf matières, c'est un peu fort. Quand après une lettre envoyée au Collège des chirurgiens dentistes, on se permet de répondre à cette dame: En réponse à votre lettre, nous tenons à vous faire savoir que, dans certains cas, la période d'ajustage et d'adaptation de pièces de prothèse complète est parfois longue et demande beaucoup de patience et de persévérance, je ne crois pas que ce fut le dentiste qui a adapté, avec tous les cours qu'il aurait pu suivre, la pièce de prothèse dentaire. Mais, je crois que — et c'est signé par le Dr Roger Charette, du comité des griefs — ce ne sont plus les cours. Le collège répond que la personne doit s'adapter au dentier, que ça prend parfois quelque temps. Il ne faut tout de même pas déborder et dire qu'il faut de sept à neuf matières pour adapter une prothèse dentaire. Une prothèse dentaire s'adapte, on la met dans la bouche, si elle touche trop fort, c'est entendu que ça va peut-être blesser un peu; à ce moment-là, le denturologiste n'a qu'à en enlever un peu, la prothèse dentaire s'adapte et quelquefois la personne revient au bout de deux ou trois jours et la prothèse dentaire s'étant adaptée, rentrée quelque peu, il faut en enlever encore un peu, on en enlève. Cela arrive dans 95 p.c. des cas, mais il ne faut pas sept, neuf et dix matières pour adapter une prothèse dentaire à une gencive.

M. GUAY: Croyez-vous que si vous aviez désormais le droit de prendre des empreintes, cela pourrait éviter un grand nombre d'erreurs par exemple dans la fabrication de prothèses? Quand je parle d'erreurs, par exemple, je parle d'un client qui recevrait une prothèse mal fabriquée à cause d'empreintes mal prises. Que serait-ce si vous aviez également le droit de faire ce qu'on appelle l'installation?

M. SAINT-LOUIS: Il est évident, M. le Président, que lonsqu'un denturologiste fabrique une pièce de prothèse dentaire amovible, il a beaucoup plus de chance de bien réussir sa pièce de prothèse, parce qu'il voit directement son patient.

De là, il peut placer des dents avec un moule qui correspond à la figure du patient, avec la couleur qui correspond à celle de la figure, des yeux et des cheveux du patient. Ce sont tous des facteurs très importants afin de bien confectionner une prothèse dentaire.

Mais lorsqu'on reçoit des empreintes de la part d'un dentiste, quand bien même l'ordonnance serait remplie jusqu'au moindre détail, ce n'est pas comme lorsqu'on voit directement le patient. J'imagine que, pour confectionner un habit sur mesure, si vous voyez la personne, vous prenez les mesures vous-même, le résultat en sera de beaucoup amélioré.

M. GUAY: Une grande partie de votre clientèle est sans doute due à un prix moins élevé pour la confection de prothèses. Mais comment expliquez-vous — si c'est possible, je ne vous oblige pas à répondre — qu'une prothèse dentaire ait coûté, il y a quelques années, $700? Est-ce que c'est explicable?

M. SAINT-LOUIS: Qu'une prothèse dentaire coûte $700?

M. GUAY: Disons, comme spécification, que c'est une prothèse en vitalium.

M. SAINT-LOUIS: De la part d'un denturologiste, vous voulez dire?

M. GUAY: Apparemment, c'est un dentiste qui n'aurait peut-être pas fabriqué la pièce, mais qui aurait tout de même commandé la pièce. Et l'an dernier, cette même prothèse aurait coûté $350, uniquement en réparations. Est-ce que c'est quand même possible de trouver, chez un denturologiste, un prix aussi élevé pour fabriquer ou réparer une prothèse dentaire?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, on va prendre la réparation de prothèse dentaire que le député de Dorchester mentionne. Je crois personnellement que, pour une réparation de prothèse dentaire en vitalium, un métal qui est de très bonne qualité, $350 — je crois que mes confrères seront de mon avis — c'est très exagéré.

M. GUAY: Maintenant, j'ai vu les factures. Comme dernière question, M. Saint-Louis, en toute franchise, pouvez-vous nous dire si on

exclut le député de Rivière-du-Loup qui est carrément contre le projet de loi 266?

M. LAFRANCE: M. le Président, le député de Dorchester est encore novice en politique. Vous devriez peut-être le rappeler à l'ordre et lui dire qu'il n'a pas le droit de prêter des intentions à un collègue.

M. GUAY: ... à l'odre.

M. BROCHU: M. le Président, sur la même question de règlement. Etant novices, c'est peut-être ce qui fait que nous portons davantage intérêt aux vrais problèmes.

M. SAINT-LOUIS: Est-ce que je peux répondre à la question?

M. LAFRANCE: Non, il n'y a pas de question.

M. SAINT-LOUIS: La question est de savoir qui est, à ma connaissance, contre le bill 266.

M. GUAY: Je pourrais présenter ma question autrement. Est-ce que vous avez eu des représentations démontrant une contradiction avec le projet de loi 266, face aux denturologis-tes ou aux techniciens dentaires?

M. SAINT-LOUIS: A notre connaissance, ceux qui ont apporté des objections au bill 266: le Collège des chirurgiens dentistes, l'Association des chirurgiens dentistes, l'Association des prothodontistes et la Ligue d'hygiène dentaire. Mais je crois que ce sont tous des dentistes. Je ne sais pas si le député de Rivière-du-Loup est un dentiste. Je dis cela parce que M. Guay a dit qu'il était contre.

A part cela, je n'ai rencontré personne. Au contraire, j'ai fait des émissions de radio au poste CKLM, au poste CKVL, au poste CJRP de Québec et au poste CHRS. Je peux vous dire, M. le Président, que le public qui appelait était en faveur du bill 266 à 99 p.c.

M. GUAY: Dernière question, M. le Président. Est-ce que les denturologistes s'opposent à la loi des dentistes?

M. SAINT-LOUIS: Aucunement, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN: Quelle différence établissez-vous entre, d'une part, un technicien dentaire et un denturologiste et, d'autre part, entre l'Association des techniciens dentaires et l'Association des denturologistes?

M. SAINT-LOUIS: La différence entre un technicien dentaire et un denturologiste, c'est que le technicien dentaire se dévoue unique- ment à desservir le dentiste, c'est-à-dire comme auxiliaire du dentiste, à fabriquer les pièces de prothèse dentaire, les ponts fixes, couronnes et ponts et les partiels en métal.

Tandis que le denturologiste dessert le public, c'est-à-dire en lui fabriquant — en prenant les empreintes nécessaires — des pièces de prothèse dentaire complète ou partielle.

M. LAURIN: Est-ce à dire que le denturologiste ne travaille jamais sur ordonnance d'un dentiste mais directement à la demande d'un citoyen?

M. SAINT-LOUIS: Le denturologiste travaille pour une personne qui s'adresse à lui pour se faire fabriquer des pièces de prothèse dentaire amovible sans aucune ordonnance.

M. LAURIN: Donc, si j'en crois ce qu'on nous disait ce matin, à l'Association des techniciens dentaires, les 255 membres que vous représentez s'inscriraient dans les 400 membres dont on nous parlait ce matin...

M. SAINT-LOUIS: 500.

M. LAURIN: ... qui pratiquent dans l'illégalité?

M. SAINT-LOUIS: Oui, tous les membres de notre association sont membres de l'Association des techniciens dentaires.

M. LAURIN: Et donc pratiquent dans l'illégalité?

M. SAINT-LOUIS: Certains ne sont pas membres de notre association et sont de l'Association des techniciens dentaires, mais pratiquent quand même dans l'illégalité.

M. LAURIN: Vous avez parlé de la situation qui prévaut dans d'autres provinces du pays. Vous avez parlé de la Colombie-Britannique qui avait, tout en reconnaissant les denturologistes, émis un article à l'effet que le travail du denturologiste ne pouvait se faire que sur ordonnance d'un dentiste. Vous dites que cet article a été rescindé à la demande de la population?

M. SAINT-LOUIS: Je ne puis vous dire si c'est à la demande de la population. Mais cet article a été retiré de la loi qui régissait les denturologistes parce qu'il semblait y avoir conflit, que la population n'était pas d'accord sur cet article.

M. LAURIN: Combien d'autres provinces au Canada reconnaissent la denturologie?

M. SAINT-LOUIS: L'Alberta.

M. LAURIN: Il n'y a pas d'autres provinces, jusqu'ici?

M. SAINT-LOUIS : Non. Il y a des projets de loi présentés dans d'autres provinces.

M. LAURIN: Dans combien d'autres provinces?

M. SAINT-LOUIS: L'Ontario, le Nouveau-Brunswick et la Saskatchewan.

M. LAURIN: Est-ce que des provinces se sont prononcées contre la denturologie?

M. SAINT-LOUIS: Le Manitoba, dernièrement, a rejeté un bill sur la denturologie, à 21 contre 22.

M. LAURIN: Et dans d'autres provinces, vous n'êtes pas au courant?

M. SAINT-LOUIS: Non, les autres provinces ne l'ont pas encore rejeté.

UNE VOIX: La Nouvelle-Ecosse. M. SAINT-LOUIS: Peut-être.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rivière-du-Loup, Dr Lafrance, dentiste.

M. LAFRANCE : M. Saint-Louis, pour continuer dans le même ordre d'idées, est-ce que vous êtes le frère de M. Aimé Saint-Louis?

M. SAINT-LOUIS: Je suis le frère de M. Saint-Louis.

M. LAFRANCE: Je pense que vous auriez intérêt à vous documenter peut-être un peu plus parce que ce n'est pas le Manitoba mais la Nouvelle-Ecosse qui a rejeté dernièrement le bill des denturologistes.

M. SAINT-LOUIS: J'ai pu faire erreur. Je m'en excuse.

M. LAFRANCE: De la part d'un président, je pense que c'est absolument indispensable parce que vous semblez avoir une très bonne mémoire quand il s'agit de l'Alberta et de la Colombie-Britannique.

M. LAURIN: M. le Président, j'invoque le règlement. Je ne pense pas que le député de Rivière-du-Loup ait le droit de mener un contre-interrogatoire de cette façon.

M. TETLEY: Au contraire, M. le Président, je crois qu'il a certainement le droit.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Comme j'ai dit ce matin, il n'y a aucune manifestation permise dans la salle. Si je pense que les remarques dépassent les règlements, je les arrêterai.

M. TETLEY: Je crois, M. le Président, que tout député a le droit de contre-interroger un témoin ou quelqu'un devant notre commission parlementaire. Le témoin en question a certainement témoigné d'une certaine façon et je crois qu'il est disposé à répondre aux questions.

M. LAFRANCE: M. le Président, je vous remercie. Je n'ai fait que continuer — une note explicative — le genre de contre-interrogatoire. On a ouvert une porte et j'en ai profité. Je reviens à d'autres questions. Comment expliquez-vous qu'à la suite de la loi de la denturologie, dans les deux provinces de l'Ouest, il y ait eu une augmentation du prix des prothèses dentaires? Est-ce que vous êtes au courant?

M. SAINT-LOUIS: Oui. Je ne communique pas tous les jours avec ces provinces pour savoir tous les résultats. Comment l'expliquer? Je ne peux pas plus l'expliquer que ce que le député de Dorchester a soulevé tout à l'heure, pourquoi les dentistes avait chargé $700 pour une pièce de de prothèse dentaire et $350 pour une réparation.

M. LAFRANCE: Si vous prenez un cas particulier, sans connaître exactement ce qui s'est produit dans ce cas, je pense qu'il est assez difficile d'en discuter. Vous l'admettrez avec moi parce qu'on peut ouvrir des cas particuliers à différents niveaux.

J'aurais une autre question à vous poser. Vous dites dans votre mémoire que les denturologistes possèdent les connaissances requises à la prise d'empreintes. C'est textuel dans votre mémoire. Tout à l'heure, nous avons entendu les représentants du CEGEP Edouard-Montpetit et ils ont dit qu'au CEGEP Edouard-Montpetit les cours de denturologistes ne sont pas donnés. Où avez-vous pris la formation requise?

M. SAINT-LOUIS: Nous nous sommes formés nous-mêmes. C'est un problème qui existe depuis 50 ans. Depuis 50 ans, la population fait appel aux denturologistes, comme on les appelle maintenant, ceux-là qui étaient appelés techniciens dentaires, autrefois. Nous nous disons compétents et nous disons que les résultats que nous avons prouvent ce que nous avançons. Je crois que si le public en majorité était mal servi, il n'aurait pas constamment recours à nos services. Nous n'avons appris dans aucune école, dans aucun CEGEP comment prendre des empreintes parce que la loi 254 dit que seuls les dentistes ont le droit de prendre des empreintes. Ce serait illogique qu'une école ou un CEGEP enseigne à quelqu'un comment prendre des empreintes si la personne qui enseigne n'est pas dentiste. Mais avec la loi 266, je crois que le gouvernement, qui a préparé ce projet de loi, l'a étudié avant de le déposer, il me semble que le gouvernement, dans les écoles de techniques dentaires, ajoutera à cette formation pour

devenir denturologiste, des cours adéquats et appropriés.

M. LAFRANCE: Ma question était la suivante: Où avez-vous pris votre formation? Et vous m'avez répondu: Le problème existe depuis 50 ans. Ce n'est pas la question, le problème existe depuis cinq, dix ou cinquante ans. Je voudrais savoir où vous avez pris votre formation.

M. LE PRESIDENT: Je pense qu'il a répondu à la question. Il a dit qu'il l'a fait par apprentissage.

M. SAINT-LOUIS: Nous avons appris par nous-mêmes à prendre les empreintes.

M. LAFRANCE: Bon. Dans un autre endroit de votre mémoire, si vous voulez, je vais vous lire le texte: "Dans l'exercice de sa profession — je ne peux vous dire à quelle page, parce que ce n'est pas numéroté — il est interdit à un denturologiste de poser un acte qui a pour objet de diagnostiquer ou de traiter les maladies des dents, de la bouche et des maxillaires chez l'être humain. Il est évident que les denturologistes n'ont jamais eu la prétention de poser des diagnostics, conscients qu'ils sont qu'un tel acte n'est pas de leur ressort. Mais le denturologiste est obligé, avant d'effectuer la fabrication de prothèses dentaires amovibles, d'apprécier l'état des gencives et de la bouche pour savoir si telles bouche et gencives sont prêtes à recevoir des prothèses dentaires amovibles. "J'aimerais que vous me donniez la définition d'un diagnostic, si ce n'est d'apprécier l'état des gencives.

M. SAINT-LOUIS: Pour répondre au député de Rivière-du-Loup, lorsque le denturologiste reçoit son patient, il ne veut pas avoir la prétention de poser un diagnostic comme ceci, c'est-à-dire que, s'il voit une anomalie, de dire au patient qu'il a telle ou telle maladie, et qu'il faudrait faire ceci ou faire cela. Lorsqu'un patient vient nous voir, nous regardons sa bouche, et nous voyons s'il peut y avoir une décoloration des tissus. A notre avis, cela peut être une anomalie. Immédiatement, nous reférons cette personne chez un médecin ou chez un dentiste. Deuxièmement, l'aspect digital. Si nous touchons une gencive et que la personne ressent une douleur, à notre avis, c'est une anomalie. Peut-être pas quand la personne a les dents fraîchement extraites, alors que les empreintes ne doivent pas être prises, mais une personne dont les dents ont été enlevées depuis plus d'un an. Quand nous touchons la gencive et qu'il y a une douleur, nous constatons une anomalie et nous reférons cette personne à un dentiste ou à un médecin.

Troisièmement, sur les dents, si nous touchons une dent qui est le centre de la douleur, encore une fois nous référons cette personne à un dentiste ou à un médecin qui, seul, a la compétence de diagnostiquer ces choses ou d'apporter les traitements qu'il faut.

M. LAFRANCE: Alors, tout ce que vous venez de faire là, ce n'est pas un diagnostic?

M. SAINT-LOUIS: D'après moi, non, c'est une constatation.

M. LAFRANCE: Quelle différence faites-vous entre une constatation et un diagnostic?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, ces questions sont, d'après moi, des questions techniques. Je ne suis pas médecin. La différence entre une constatation et un diagnostic, pour moi — je n'ai pas fait les études d'un médecin, je ne peux pas donner un paragraphe — mais je peux vous dire que je puis constater que j'ai une blessure ici. Si cela saigne, je n'ai pas besoin d'être un médecin pour savoir qu'il faut que je place un ruban gommé ou, s'il y a quelque chose, d'aller voir un médecin. Mais ce n'est pas un diagnostic que de voir, lorsqu'un client ouvre la bouche, et de constater qu'il n'y a plus de dent dans cette bouche et que la personne a une couleur de gencive qui n'est pas ordinaire. Nous la référons chez un médecin ou un dentiste.

M. LAFRANCE: Alors, avant de poser un acte médical, il n'est pas nécessaire, d'après vous, de poser un diagnostic?

M. SAINT-LOUIS: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai pas saisi la question.

M. LAFRANCE: Je vais la répéter. Avant de poser des prothèses dentaires ou avant de poser un acte médical, ce n'est pas nécessaire, d'après vous, de faire un diagnostic?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, nous ne faisons pas de diagnostic. Si nous trouvons qu'il y a anomalie dans la bouche, nous référons la personne chez un dentiste qui, lui, fera le diagnostic.

M. LAFRANCE: Alors, pour vous, un diagnostic, c'est de déterminer une anomalie, point?

M. SAINT-LOUIS: Je n'ai jamais dit ça, M. le Président.

M. LAFRANCE: Vous dites que vous faites un diagnostic ou...

M. SAINT-LOUIS: Non.

M. LAFRANCE: ... une appréciation. Si vous voyez, dans la bouche d'un patient, une anomalie, vous le référez à un dentiste. Donc vous faites un diagnostic.

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, je peux demander au Dr Lafrance ce qu'il entend par un diagnostic.

M. LAFRANCE: C'est vous qui proposez le nom diagnostic ici et c'est vous justement qui dites que vous ne posez pas de diagnostic. Mais il faut savoir de quoi vous parlez, si vous parlez de diagnostic.

M. SAINT-LOUIS: Mais nous ne posons pas de diagnostic; nous constatons s'il y a des anomalies, nous les référons.

M. LAFRANCE: Bon, d'accord. On ne s'étendra pas plus longtemps là-dessus. Si vous voulez, on va arrêter là. Je vais vous poser autre chose.

Vous avez mentionné tout à l'heure la répartition des denturologistes dans la province. Si j'ai bonne mémoire, je pense que vous avez dit ça tout à l'heure. Quel est le nombre prévu des denturologistes, une fois que la loi sera adoptée?

M. SAINT-LOUIS: Si le bill 266 est adopté, la future Corporation des denturologistes du Québec, des membres de l'Association des techniciens dentaires qui voudront y être incorporés, peut se situer, en pourcentage, à 60 p.c.

M. LAFRANCE : Pouvez-vous me donner des exemples, des cas que vous avez déjà? Vous faites de la denturologie à l'heure actuelle, je pense?

M. SAINT-LOUIS: Oui.

M. LAFRANCE: Alors la loi n'est pas passée et vous en faites?

M. SAINT-LOUIS: Oui, j'en fais.

M. LAFRANCE: Bon. Alors, pouvez-vous me donner des exemples de cas que vous avez déjà référés à des dentistes, dans des cas d'anomalies?

M. SAINT-LOUIS: Des cas que j'ai déjà référés à un dentiste?

M. LAFRANCE: Que vous, les denturologistes, avez référés à des dentistes parce qu'il y avait des anomalies.

M. SAINT-LOUIS: C'est déjà arrivé fréquemment. Par exemple, sans diagnostiquer, lorsque nous avons constaté qu'il y avait, disons, des petits os, des petits ossements, immédiatement, sans dire au patient que cela devait être enlevé ou qu'il devait attendre, on lui disait de consulter un dentiste.

M. LAFRANCE: Si, par hasard, il y avait une dent incluse?

M. SAINT-LOUIS: Si par hasard, il y avait une dent incluse...

M. LAFRANCE: Si, par hasard, il y avait une dent incluse, vous ne posez pas de diagnostic. Qu'est-ce qui vous dit qu'il y a une dent incluse, là?

M. SAINT-LOUIS: On l'envoie chez le dentiste se faire radiographier.

M. LAFRANCE: Vous ne le savez pas. Vous n'avez pas posé de diagnostic.

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, je peux dire au député de Rivière-du-Loup que j'ai déjà travaillé dans des laboratoires pour des dentistes et que la grande majorité ne prend pas de radiographie avant de prendre des empreintes.

M. LAFRANCE: Vous avez travaillé pour un dentiste?

M. SAINT-LOUIS: Non, pour des laboratoires.

M. LAFRANCE: Vous avez travaillé pour des laboratoires et vous savez que les dentistes ne prennent pas de radiographie?

M. SAINT-LOUIS: Oui, parce que beaucoup de dentistes prenaient leurs empreintes dans notre laboratoire. Souvent.

M. LAFRANCE: C'est un beau laboratoire que vous avez. J'imagine que c'est grand.

M. SAINT-LOUIS: Le laboratoire Charbon-neau.

M. LAFRANCE: Ah bon! Comment pouvez-vous dire que tous vos patients sont satisfaits, sachant que dans bien des cas où ces patients sont insatisfaits, ils n'ont aucun recours contre vous devant les tribunaux? Parce que s'ils s'en vont devant un tribunal, ils sont aussi coupables que vous, à l'heure actuelle.

M. SAINT-LOUIS: Si quelqu'un était mécontent de nos services et voulait absolument faire corriger la situation, il s'adresserait au Collège des dentistes qui, je crois, se ferait un plaisir de nous amener devant les tribunaux sans mettre aucune charge et aucune offense sur le témoin. C'est déjà arrivé après que le denturolo-giste eut peut-être répété sa prothèse dentaire six ou sept fois. Je ne crois pas que le Collège des dentistes se gênerait pour intenter une cause contre un denturologiste.

M. LAFRANCE: Connaissez-vous l'Association des dentiphysionomistes du Québec?

M. SAINT-LOUIS: J'en ai entendu parler, parce qu'elle nous a écrit une lettre nous

demandant si elle pouvait être intégrée à notre association. Nous avons dit que pour être membre de notre association, il fallait être membre de l'Association des techniciens dentaires de la province de Québec et nous n'avons pu avoir d'autres relations avec elle.

M. LAFRANCE: Elle ne fait pas partie de l'association des techniciens dentaires?

M. SAINT-LOUIS: Nullement.

M. LAFRANCE: En ce qui concerne l'appellation de denturologiste, son étymologie, d'où ça vient? Qui a fabriqué ce nom? Etes-vous capable de me donner des renseignements là-dessus? J'aimerais en connaître un peu plus.

M. SAINT-LOUIS: Là-dessus, je crois que, si mon confrère, M. Yvon Goudreau, peut prendre la parole — M. Goudreau depuis le commencement a travaillé au mouvement de la den-turologie depuis 1957 — il pourrait apporter une réponse qui pourrait satisfaire les membres de cette commission.

M. GOUDREAU: M. le Président, vers 1964 et 1965, avec Me Jules Geoffroy qui est aujourd'hui juge, nous avons travaillé pendant presque deux ans à trouver un nom qui définirait très bien la future personne qui pourrait transiger directement avec le public. Nous avons passé toutes sortes de noms imaginables. On avait un seul nom qu'on retenait toujours et qui pouvait vraiment définir un type pour faire des prothèses dentaires, c'était dentiste. La confusion aurait été épouvantable, il ne fallait pas la retenir. Il y a un autre nom qui est aussi tout à fait français, c'est le nom mécanicien dentiste que les anglais de l'Ouest retiennent, soit "dental mechanist". Chez nous, un autre obstacle survenait. Si nous marquions notre nom comme le fait le chirurgien dentiste, par exemple Dr Lafrance, d.d.s., nous aurions marqué M. Michel Saint-Louis, m.d. Autre confusion. Il fallait créer un nom de toutes pièces. Nous nous sommes aperçus, à un moment donné, que le nom de denturologiste convenait vraiment, à l'exception du suffixe, au mot denture. Nous avons retenu denturologiste, mais peut-être le changer pour denturologue, changer le suffixe logiste pour "logue"... Si les linguistes préfèrent nous suggérer un autre nom, à ce moment, je ne vois aucun inconvénient à ce que nous portions un autre nom.

M. LAFRANCE: Etes-vous d'accord avec votre ancien président — je crois que c'est M. Bleau — qui nous disait l'an passé, le 11 mars, de regarder dans le dictionnaire Larousse, que le nom de denturologiste y était inscrit?

M. GOUDREAU: Dans le dictionnaire Larousse, c'est impossible. Jean-Marie Laurence linguiste, nous a dit: Si un jour, vous êtes légalisés sous ce nom, peut-être qu'en 1984 le dictionnaire Larousse le retiendra. C'est impossible, mais il y a quelque chose.

Je suis allé au même séminaire que le distingué représentant du collège, le Dr Gosse-lin, j'ai appris le même latin et le même grec que lui. Il a dit que le mot denture n'était pas français. J'ai ici un dictionnaire — j'ai fouillé dans les étagères, cela sent un peu le moisi — et j'ai trouvé que le mot denture existe dans ce dictionnaire latin-français et français-latin, édité à Paris en 1929. Un autre point aussi extrêmement important à retenir pour le choix du nom, parce qu'on veut être judicieux et que ce soit vraiment français, c'est que quand on regarde dans un vieux dictionnaire Cassell, et qu'on cherche le mot dentier, on nous dit : "Set of teeth". Partant de là on retourne à "set", et à "set of teeth" on nous dit: Denture ou râtelier. On est toujours embêté entre deux choses, on est pris dans un dilemme. Il s'agit de définir un nom. Moi, personnellement, l'avocat et tous mes confrères, nous avons jugé qu'au Québec, pour une fois, on ne copiait pas, on créait quelque chose.

M. LAFRANCE: M. le Président, en ce qui me concerne, je crois que l'Association des denturologistes ne nous a pas assez éclairés. Il y a des points qui sont encore obscurs. Comme je pense qu'on n'est pas capable de nous donner plus d'explications, j'ai fini mon intervention.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous croyez que lorsque vous avez déterminé visuellement les conditions de la bouche du patient, c'est suffisant, au point de vue de la sécurité, et que le patient peut accepter une prothèse après cet examen élémentaire?

M. SAINT-LOUIS: Oui. Evidemment, M. le Président, depuis longtemps, comme je l'ai dit, nous fabriquons, directement pour le public, des pièces de prothèse dentaire. Il n'y a aucun danger pour le patient parce que la pièce est amovible. S'il y a quoi que ce soit, rien n'empêche le patient de retirer sa pièce.

M. SAINT-GERMAIN: Quelle est la scolarité moyenne des membres de votre association? Quelle est leur formation de base?

M. SAINT-LOUIS: Tous les membres de notre association sont classés par le gouvernement du Québec avec une quinzième année de scolarité. Avant que les cours soient institués au CEGEP Edouard-Montpetit, les futurs techniciens dentaires devaient avoir complété une onzième année et cinq années de cours en technologie dentaire, deux soirs par semaine, en plus de travailler dans des laboratoires dentaires, pour l'apprentissage technique, pendant cinq ans.

M. SAINT-GERMAIN: J'aimerais, M. le Président, poser la même question que j'ai posée ce matin. Quelles sont, croyez-vous, les causes profondes ou moins profondes de ce phénomène qui font que les patients font appel, même illégalement, aux mécaniciens dentistes au lieu de faire appel aux dentistes qui ont pourtant, il faut le reconnaître, une compétence indiscutable en ce domaine?

M. SAINT-LOUIS: Je crois, M. le Président, qu'inévitablement les patients ou les personnes édentées réclament les services d'un denturologiste parce que, premièrement, il y a la question de prix. Evidemment, on peut dire qu'une fois reconnus, les denturologistes hausseront leurs prix. Je ne vois pas pourquoi ils hausseraient leurs prix. Les denturologistes sont très satisfaits des prix qu'ils ont dans le moment. On dit que les denturologistes, une fois reconnus, pour avoir des chaises et tout le cabinet devront hausser leurs prix. Je crois que c'est faux parce que beaucoup de denturologistes ont déjà leur cabinet, leurs chaises et leur laboratoire et les prix sont restés les mêmes. Maintenant, lorsqu'on dit que les denturologistes peuvent avoir les mêmes prix que les dentistes, je crois que c'est faux. Si la personne est obligée de voir un dentiste, inévitablement il reste qu'il y a encore l'intermédiaire qui doit prendre les empreintes pour les envoyer par message intercepté à un laboratoire. Cela fait deux personnes. Prenons seulement une réparation de prothèse dentaire, une réparation de prothèse dentaire brisée en deux.

Si vous allez la porter chez le dentiste qui, lui, la met dans une enveloppe et la donne au messager pour qu'il la porte au technicien dentaire, ce dernier la répare pour la remettre au messager qui lui, la redonne au dentiste qui la remet au patient. Il n'y a même pas d'ordonnance à remplir; il n'y a même pas d'empreintes à prendre, non plus. Toutes ces personnes-là doivent être payées.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous croyez que la cause déterminante est exclusivement la question de prix?

M. SAINT-LOUIS: Non. Je crois que les patients qui font affaires directement avec celui qui fabrique la prothèse dentaire ont un meilleur service, parce que celui-ci sait pour qui il la fabrique. Un dentiste ne fabrique pas lui-même sa prothèse dentaire; il l'envoie au technicien. Le technicien qui fabrique cette prothèse dentaire, dans la majorité des cas, a une ordonnance où c'est simplement écrit: Finir dentiers du haut et du bas pour vendredi, 4 heures. E ne sait même pas si c'est un homme ou une femme, la couleur de ses yeux, sa grandeur et la physionomie de son visage. Lorsque le denturo-logiste fabrique la prothèse directement pour son patient, il peut donner un bien meilleur service.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: Deux dernières questions. On nous a dit que, dans la fabrication d'une prothèse dentaire, il y avait plusieurs matériaux différents. Quand un denturologiste ou un technicien dentaire fabrique une prothèse pour le compte d'un dentiste ou pour un client qu'il traite directement, est-ce qu'il emploie les mêmes procédés, les mêmes matériaux?

M. SAINT-LOUIS: Pour prendre des empreintes?

M. GUAY: Pour fabriquer la prothèse dentaire.

M. SAINT-LOUIS: Exactement les mêmes matériaux. C'est la même chose que si le patient va chez le dentiste.

M. GUAY: En fait de fabrication et de qualité de prothèse, il n'y a pas de différence quand le client passe par un dentiste ou s'il traite directement avec vous?

M. SAINT-LOUIS: Aucunement. Les matériaux sont les mêmes que si le patient se rend chez le dentiste.

M. GUAY: Un autre point que je voudrais toucher; juste une autre question là-dessus. Est-ce que les ordonnances que vous recevez des dentistes sont toujours complètes? Dans les études d'un technicien dentaire ou d'un dentu-rologiste — j'ai écouté quand le CEGEP Edouard-Montpetit a comparu — il semblait y avoir énormément de points enseignés. Est-ce que ces ordonnances sont toujours aussi complètes que le désirerait le denturologiste ou le technicien dentaire?

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, pour répondre au député de Dorchester, je puis vous dire que les propriétaires de laboratoire que j'ai rencontrés m'ont tous avoué que les ordonnances pour fabriquer une pièce de prothèse dentaire n'étaient pas assez complètes. Il y a des dentistes qui remplissent très bien les ordonnances, mais je ne crois pas que la majorité des ordonnances soient remplies adéquatement.

M. GUAY: Cela voudrait dire qu'il est préférable que celui qui fabrique la prothèse voie le patient?

M. SAINT-LOUIS: Même si l'ordonnance est très bien remplie, il n'y a rien pour remplacer la présence de la personne.

M. GUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. BROCHU: M. le Président, j'avais demandé la parole.

M. LE PRESIDENT: Le député de Richmond.

M. BROCHU: Je pense que l'amendement que M. Saint-Louis a proposé tout à l'heure, il a vraiment touché le fond du problème auquel ces spécialistes font face depuis leur existence et l'amorce de solution possible se situe là aussi. On peut parler de la continuité du service donné par un denturologiste, relativement au réajustement des prothèses et à la suite de services qui peuvent être donnés. On peut aussi parler de la qualité des services, dans le sens de la fabrication d'une prothèse en fonction d'une personne précise. Vous avez parlé de son teint, de sa forme de visage, etc., ce qui est impossible dans l'autre cas. A cela, je souscris entièrement.

Maintenant, j'aurais une question à poser, non pas au président de l'association mais au médecin qui remplace M. Castonguay. Il a dû s'absenter tout à l'heure. Est-ce que Dr Fortier, vous pourriez nous faire part de l'intention du ministère relativement à l'amendement qui a été proposé par l'association qui vient de déposer un mémoire devant nous, amendement tendant à préciser davantage la définition afin que ces gens-là soient en mesure d'exercer librement, sans être obligés d'exercer "bootlegger" en matière de denturologie.

Est-ce que vous êtes en mesure de nous informer des intentions du ministère à ce moment-ci?

M. FORTIER: Nous prendrons connaissance de l'amendement et nous aviserons l'association de la décision du ministère. Nous allons aviser de la décision du ministère quand les fonctionnaires l'auront étudié.

M. BROCHU: Mais est-ce qu'il est dans le plan d'ensemble de définir de façon plus complète le champ d'exercice précis?

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, ce sera décidé quand nous aurons une réunion entre les membres de la commission.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Juste une remarque, parce que le député de Richmond pose une question précise sur l'intention du législateur à ce moment-ci. Nous nous étions entendus, au début des travaux de cette commission, pour entendre tous les témoignages des 140 organismes qui ont des représentations à faire à la commission et, au terme des audiences, nous aurions fait des représentations et le ministre aurait répondu à des questions précises quant à son intention. Parce qu'il peut arriver, en cours de route, qu'il y ait d'autres représentations contraires. Alors, il faut avoir tout l'ensemble du...

M. BROCHU: D'accord, quand on siégera strictement à la commission parlementaire...

M. CLOUTIER (Montmagny): La dernière séance...

M. BROCHU: ... pour étudier ces questions-là. D'accord.

M. GUAY: C'est ce qu'on appellera des séances de délibération.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est ça, comme on l'a fait pour le bill 65.

M. LE PRESIDENT: Il n'y a pas d'autres questions? Je remercie l'Association des dentu-rologistes du Québec de leur mémoire et pour la célérité avec laquelle ils ont répondu à toutes les questions. Je vous remercie et je demanderais...

M. SAINT-LOUIS: M. le Président, j'aimerais remercier tous les membres de cette commission de bien avoir voulu nous entendre.

M. LE PRESIDENT: Au nom des membres de la commission, nous vous remercions et je demanderais à l'Association professionnelle des propriétaires de laboratoires dentaires de la province de Québec de bien vouloir prendre place.

Association professionnelle des propriétaires de laboratoire dentaire

M. BOIVIN (Normand): M. le Président, j'aimerais d'abord vous présenter les gens qui m'accompagnent. A ma gauche, M. Jean Laforte, directeur du conseil de l'association; M. Guy Therrien, secrétaire et M. Pierre Arsenault, membre du conseil.

Nous tenons d'abord à vous remercier de l'intérêt que vous portez à notre problème, nous de l'association...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous pourriez vous identifier vous-même?

M. BOIVIN: Normand Boivin, président de l'association.

M. LE PRESIDENT: Merci.

M. BOIVIN: Nous de l'Association des propriétaires de laboratoires dentaires ne croyons pas qu'ils nous revienne de discuter du principe sur lequel a été structuré le bill 266. Cependant nous nous interrogeons sur deux sujets bien précis, soit celui de la fabrication et celui de la formation du personnel qualifié. Car nous qui aimerions demeurer dans le domaine de la fabrication sommes portés à trouver qu'il paraîtrait ironique — après avoir investi de fortes sommes dans la création de nos entreprises, avoir dépensé temps et efforts pour obtenir et

maintenir notre compétence et de nous être efforcés de maintenir notre intégrité selon le contexte actuel qui nous régit — de voir une nouvelle profession oeuvrer dans son nouveau domaine ainsi que dans le nôtre, celui de la fabrication.

Pour ce qui a trait au personnel qualifié, loin de nous l'idée de mettre en question les capacités de nos organismes d'enseignement. Nous vous demandons sérieusement s'il ne serait pas préférable qu'en plus du CEGEP Edouard-Montpetit l'enseignement de la technologie dentaire soit donné aussi au niveau arts et métiers. Cette demande est basée surtout sur le fait de la crise aiguë actuelle qui existe au niveau du personnel qualifié et la demande toujours grandissante, et qui va le devenir encore plus, de nos services.

Nous misons fortement sur le CEGEP pour nous fournir nos futurs chefs de file mais nous aimerions que les arts et métiers réussissent à nous fournir nos techniciens au banc. Ce sont les seules remarques que nous avons à apporter, les seules suggestions. Je suis disponible pour vos questions.

M. LE PRESIDENT: Je demanderais au député de Gaspé-Sud s'il a des questions.

M. FORTIER : Au nom de M. Castonguay, je remercie les porte-parole de l'Association des propriétaires de laboratoires dentaires de la province de Québec. Nous prenons bonne note de vos explications et, après étude, nous vous ferons connaître les résultats de ces discussions.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny-

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je vais demander à M. Boivin, le président, quelle est la moyenne de l'investissement qui est fait dans les laboratoires.

M. BOIVIN (Normand): Vous savez, l'échantillonnage d'un laboratoire de notre association — nous avons 39 membres — l'échantillonnage quant à l'ampleur de laboratoire est très varié.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quand vous dites 39 membres, ce sont 39 laboratoires?

M. BOIVIN (Normand): Ce sont 39 propriétaires de laboratoire, oui. Quant à l'ampleur des laboratoires, c'est très varié. Il est assez difficile d'établir une moyenne à cause des restrictions de la loi actuelle. La montée, l'organisation d'une certaine envergure représentait des problèmes sérieux du côté du personnel.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez une magnifique occasion de nous dire un peu comment est organisé un laboratoire, les laboratoires que vous avez, dans lesquels vous avez investi. Est-ce que c'est surtout de l'équipe- ment? Est-ce que vous pourriez, brièvement, nous donner...

M. BOIVIN (Normand): Le laboratoire dentaire étant un domaine purement technique, notre investissement touche d'abord l'équipement pour la coulée des différents métaux que nous sommes appelés à manipuler. Il y a également l'instrumentation qui représente un montant moins élevé mais le gros de l'investissement à venir jusqu'à aujourd'hui a été consacré à la formation de notre personnel.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous pourriez quand même citer un chiffre? Un laboratoire bien équipé.

M. BOIVIN (Normand): C'est selon l'ampleur des laboratoires, c'est pour cela qu'il y a un peu de difficultés.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, d'accord.

M. BOIVIN (Normand): Un laboratoire qui comprend de 45 à 50 techniciens peut représenter un investissement de $125,000.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dans votre mémoire, vous réclamez que la fabrication soit réservée exclusivement au laboratoire et que le dentiste et le denturologiste ne donnent que des services professionnels.

M. BOIVIN (Normand): Nous estimons que nous sommes les gens compétents pour la fabrication et, en plus de cela, si on accorde tout à la nouvelle profession et qu'on nous laisse avec les miettes, nous nous poserons peut-être de sérieuses questions quant à la solvabilité ou à la rentabilité de demeurer dans le domaine que nous aimerions garder. Parce que, logiquement, selon la nouvelle loi, il ne nous est pas défendu de joindre les rangs de M. Saint-Louis.

M. CLOUTIER (Montmagny): Si les denturologistes étaient encore devant nous, je leur poserais la question suivante: Est-ce que, s'ils n'avaient que les services professionnels sans la fabrication, les denturologistes pourraient vivre avec seulement cette section de...

M. BOIVIN (Normand): Les dentistes réussissent à vivre. Alors, je ne vois pas pourquoi les denturologistes ne réussiraient pas non plus.

M. CLOUTIER (Montmagny): Les dentistes font une gamme d'actes professionnels beaucoup plus étendue que...

M. BOIVIN (Normand): Je ne veux pas non plus me lancer dans des études économiques au niveau de la denturologie. C'est un domaine qui, d'abord, ne m'intéresse pas. Quel est le

potentiel éventuel qui leur est offert? Malheureusement, c'est...

M. CLOUTIER (Montmagny): Je pose la question à votre groupe. Si la fabrication est permise aux denturologistes, est-ce que ça compromet sérieusement, je ne dis pas l'expansion, mais l'existence de vos laboratoires?

M. BOIVIN (Normand): Du côté de la rentabilité, absolument pas, parce que la prothèse complète, si on ne leur réserve que la prothèse complète, n'est que le tiers ou le quart de nos activités. Au laboratoire dentaire, si on veut subdiviser nos activités, nous avons la prothèse complète, la prothèse partielle et amovible. En prothèse partielle fixe, nous avons la prothèse partielle fixe or et plastique et prothèse partielle fixe or et porcelaine. Or, la prothèse complète n'est qu'un tiers de nos activités.

M. CLOUTIER (Montmagny): Quel est le mode de rémunération que vous entretenez à l'endroit de techniciens qui travaillent dans vos laboratoires?

M. BOIVIN (Normand): C'est basé sur leur expérience et leur productivité.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que c'est à salaire?

M. BOIVIN (Normand): C'est à salaire hebdomadaire.

M. CLOUTIER (Montmagny): A salaire hebdomadaire. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: En ce qui concerne la formation des techniciens, est-ce que vous avez fait des recommandations précises au CEGEP Edouard-Montpetit?

M. BOIVIN (Normand): J'ai moi-même fait partie du comité consultatif original. On a déploré, à maintes reprises, un manque flagrant de consultation au niveau de l'industrie. Mais la chose semble vouloir graduellement se corriger

M. GUAY : Est-ce que vous concevez vos employés comme étant des gens compétents?

M. BOIVIN (Normand): On en a de tous les niveaux.

M. GUAY: D'accord! J'aurais une autre question. Est-ce que vous recevez également, de la part des dentistes, des commandes...

M. BOIVIN (Normand): Des ordonnances. M. GUAY: ... des ordonnances — c'est le mot que je cherchais — directement des dentistes et vous fabriquez de la même façon en fait que les techniciens dentaires?

M. BOIVIN (Normand): Mais nous sommes techniciens dentaires.

M. GUAY: Vous êtes techniciens dentaires mais propriétaires de laboratoire.

M. BOIVIN (Normand): C'est un attribut qui n'a rien à voir avec nos qualifications techniques.

M. GUAY : D'accord ! Mais vous êtes organisés, peut-être, sur une base beaucoup plus industrielle qu'eux?

M. BOIVIN (Normand): C'est notre seule façon de survivre.

M. GUAY: D'accord!

M. LAURIN: Est-ce que vos laboratoires constituent le débouché unique et exclusif des techniciens dentaires qui sont formés par les diverses écoles?

M. BOIVIN (Normand): Si je comprends bien votre question, oui. Maintenant, l'option leur est toujours offerte, après leur année de stage, d'ouvrir eux-mêmes leur propre entreprise.

M. LAURIN: Est-ce qu'il y en a beaucoup qui le font?

M. BOIVIN (Normand): Le pourcentage est très élevé.

M. LAURIN: Quelle est la proportion des techniciens dentaires qui travaillent dans vos 39 laboratoires et ceux qui ont leur propre entreprise individuelle?

M. BOIVIN (Normand): Il y en a 80 p.c. qui travaillent à leur compte, pour se servir d'une expression bien populaire chez nous, et 20 p.c. qui sont salariés.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rivière-du-Loup.

M. LAFRANCE: M. le Président, à la page 4 de votre mémoire, vous manifestez des craintes au sujet de concurrence venant de l'extérieur du Québec, si le projet de loi est adopté tel quel.

M. BOIVIN (Normand): On s'est peut-être mal exprimé, on ne dit pas que le projet de loi va créer un danger de concurrence provenant de l'extérieur. Le danger est ici depuis les dix dernières années. La chose est établie. Toronto a envahi Montréal précisément depuis les dix dernières années.

M. LAFRANCE: Est-ce que, dans votre mémoire, vous demandez un amendement au projet de loi actuel pour protéger les techniciens dentaires qui veulent continuer à faire de la technique dentaire, ou si vous demandez un projet de loi qui fait la distinction?

M. BOIVIN (Normand): Ce qu'on avait demandé originalement devant la commission sur la santé et le bien-être social était de faire disparaître une bonne partie des restrictions qui faisaient partie de notre loi ou de la loi actuelle pour nous donner un peu plus de liberté d'action au niveau de l'embauchage pour permettre une expansion plus rapide et, automatiquement, faire face de façon juste à la concurrence de l'Ontario, parce qu'on ne croit pas réellement pouvoir résoudre le problème strictement en demandant une loi.

M. LAFRANCE: Est-ce que la loi adoptée en 1964, si j'ai bonne mémoire, selon les statuts refondus de 1964, vous satisfait actuellement, ou satisfait les techniciens, à cause des restrictions du côté de l'embauchage?

M. BOIVIN (Normand): Du tout. M. LAFRANCE: Très bien, merci.

M. GUAY: Est-ce que vous réussissez à répondre à toutes les demandes qui vous sont faites actuellement?

M. BOIVIN (Normand): Malheureusement, il faut admettre que non.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous avez dans votre clientèle actuellement des techniciens dentaires qui font affaires avec le public, illégalement vous me direz, mais qui en fait tout de même le font. Est-ce que vous avez des clients parmi ces gens?

M. BOIVIN (Normand): Dire ou jurer qu'on a jamais travaillé pour des techniciens ou des confrères qui transigent directement avec le public, c'est impossible. Mais, par politique, en règle générale, on ne le fait pas.

M. SAINT-GERMAIN: Vous ne le faites pas à cause de la pression.

M. BOIVIN (Normand): A cause des implications légales.

M. SAINT-GERMAIN : Maintenant, si cette loi entrait en vigueur, si une loi légalisait la situation des techniciens dentaires, est-ce que vous prévoyez que vous auriez là une clientèle valable?

M. BOIVIN (Normand): Si on prévoyait?

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous pourriez avoir avec les denturologistes une clientèle valable?

M. BOIVIN (Normand): Sûrement. D'ailleurs c'est la raison pour laquelle dans le mémoire, au début, je soulignais le problème du personnel qualifié. On a déjà de la difficulté à répondre à la demande et on sait que la demande va continuer de s'accroître. Avec l'arrivée du bill sur la denturologie, cela ne pourra pas faire autrement que d'y ajouter encore. Comme actuellement notre statut juridique nous enferme dans un carcan du côté de l'embauchage, si la loi actuelle est abrogée, nous, nous ne demandons pas mieux, on dit hourra! On va avoir une liberté d'action du côté de l'embauchage et du côté de l'exploitation de nos entreprises.

M. SAINT-GERMAIN : Maintenant, vous demandez qu'il y ait un autre cours que celui donné au niveau du CEGEP Edouard-Montpetit. Est-ce le nombre, l'insuffisance de candidats ou de finissants au CEGEP ou la qualification de ces finissants?

M. BOIVIN (Normand): Nous, nous sommes portés à croire que les qualifications ou le degré d'éducation offert par Edouard Montpetit justifieraient mal qu'on les laisse strictement dans un domaine de productivité. On verrait ces gens qui vont jouir d'une éducation supérieure, dans des postes de commande, en charge de services, ainsi de sujte.

M. SAINT-GERMAIN: Comme vous faites partie vous-même de l'Association des techniciens dentaires, si la loi était votée, je suppose que vous pourriez vous aussi faire affaires directement avec le public.

M. BOIVIN (Normand): L'optionm'est offerte comme aux autres. L'option est offerte à tous les membres de l'Association des techniciens dentaires.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rivière-du-Loup.

M. LAFRANCE: M. le Président, vous faites partie de l'Association des techniciens dentaires, vous venez de l'avouer. Vous semblez, vous, les propriétaires de laboratoire dentaire, très respectueux de la loi, comment vous sentez-vous à côtoyer des gens qui ne respectent pas la loi?

M. BOIVIN (Normand): Il faut dire qu'il y a eu à plusieurs reprises des discussions très vives, mais comme c'est un domaine qui ne nous intéresse pas du tout, pour autant que notre domaine va demeurer rentable, nous nous sommes très peu penchés sur leurs problèmes.

M. LAFRANCE: Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Je remercie l'Association professionnelle des propriétaires de laboratoire dentaire de la province de Québec, qui fut très bien représentée par M. Normand Boivin.

M. BOIVIN (Normand): Merci.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux sine die.

M. CLOUTIER (Montmagny): Il y avait un autre groupe, M. le Président.

M. LAFRANCE: Ils sont annoncés là-dessus, mais ils n'ont pas été convoqués.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ils n'ont pas été convoqués, c'est remis à une séance ultérieure.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 8)

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