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Etude des problèmes de
rentabilité
de l'industrie des pâtes et papiers
du Québec
(Dix heures vingt-cinq minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui, le
quorum étant maintenant atteint à 10 h 25, sont: M. Baril
(Arthabaska), M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M.
Brochu (Richmond), M. Desbiens (Dubuc), M. Pagé (Portneuf) en
remplacement de M. Garneau (Jean-Talon); M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M.
Grenier (Mégantic-Compton) en remplacement de M. Goulet (Bellechasse);
M. Brassard (Lac-Saint-Jean) en remplacement de M. Joron (Mille-Iles); M.
Vaillancourt (Orford) en remplacement de M. Lari-vière
(Pontiac-Témiscamingue); M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Gendron (Abitibi-Ouest) en remplacement de
M. Marcoux (Rimouski); M. Marquis (Matapédia), M. Mercier (Berthier), M.
O'Gallagher (Robert Baldwin) et M. Ouellette (Beauce-Nord) en remplacement de
M. Perron (Duplessis).
Etant donné que les remarques sur le quorum sont inutiles, je
cède la parole au député de Berthier.
Compagnie de papier Rolland Limitée
(suite)
M. Mercier: Vous dites que les matières premières
principales sont les chiffons de coton, les pâtes au sulfate et au
bisulfite blanchies et les produits chimiques.
Première question: quel pourcentage de pâte feuillue
utilisez-vous? Deuxième question: Est-ce que vous pourriez en utiliser
davantage? Quel est le prix d'achat des chiffons de coton par rapport à
la pâte de bois? Est-ce qu'il pourrait survenir une plus forte
substitution d'une matière première à l'autre?
M. Rolland (Lucien): Parce que la pâte de bois feuillu est
meilleur marché que la pâte de résineux, nous avons
avantage à en employer le plus possible. C'est ainsi que dans les dix
dernières années, le pourcentage de pâte feuillue
employée est passé de 30% à 60% de toute la pâte que
nous employons.
La deuxième question...
M. Mercier: Est-ce que vous pourriez en utiliser plus? Vous dites
de 30% à 60%; vous devez atteindre le maximum à...
M. Rolland: Quand je vous dis que c'est maintenant 60%, vous
pouvez compter que c'est un maximum pratique. C'est une moyenne. Il y a des
qualités où nous n'en employons pas du tout comme lorsque nous
faisons la meilleure feuille de papier que nous pouvons faire, qui est de 100%
chiffon, et d'autres qualités, comme les formes continues, où
nous pouvons monter jusqu'à 80%. Mais, en moyenne, si on regarde tous
nos achats, c'est 60%, et nous ne croyons pas pouvoir augmenter ce pourcentage
de façon appréciable; nous essayons, par tous les moyens, de le
monter, parce que ça diminue le coût moyen de nos matières
premières.
M. Mercier: D'accord. La troisième, c'était: Quel
est le prix d'achat des chiffons de coton par rapport à la pâte de
bois?
M. Rolland: De mémoire, je dirais que le chiffon est
environ le double ou plus. Mais, évidemment, le prix de vente du papier
chiffon, lorsqu'il est uniquement fabriqué avec des chiffons, est plus
élevé en conséquence. C'est ainsi que notre chiffre
d'affaires moyen par tonne peut être d'environ $750, mais si nous isolons
une tonne de papier chiffon, utilisée par exemple pour faire des
certificats d'actions ou les débentures d'une compagnie ou du
gouvernement, ça peut monter jusqu'à $1500 la tonne.
M. Mercier: D'accord. Vous dites qu'une solution à
l'infrastructure de l'industrie des papiers fins consiste en la rationalisation
et la spécialisation de la production. Savez-vous dans quelle mesure vos
concurrents seront prêts à partager la production si la Loi sur
les coalitions est modifiée? Autrement dit, vous avez prétendu
dans votre rapport que c'est extrêmement difficile, à cause de la
Loi sur les coalitions, de partager les marchés de production. Est-ce
que vos concurrents, à votre avis, à supposer que cette loi soit
modifiée, que le gouvernement fédéral consente à
modifier cette loi, seraient d'accord pour un partage de production?
M. Rolland: Je peux vous dire un non très clair,
très précis à votre question, parce que nous n'avons pas
eu de conversation avec eux à ce sujet. Nous pouvons imaginer que
ça ne pourrait pas se faire du jour au lendemain.
Vous pouvez penser qu'il se ferait une bataille terrible ou, avec le
temps, une façon de se retrouver, après quelques années,
dans un état de rationalisation et de spécialisation, mais je ne
pense pas que cela puisse se faire facilement, automatiquement et sans
heurts.
M. Mercier: Vous avez également parlé, entre autres
choses, de l'invasion des produits américains. J'en déduis que
les autres producteurs canadiens doivent ressentir les mêmes
problèmes que vous à travers le Canada. A ce moment, exercez-vous
des représentations? Etes-vous seuls à faire pression sur le
gouvernement ou si les autres producteurs dans le domaine s'entendent
pour faire ces mêmes pressions et ces mêmes
recommandations?
M. Rolland: Nous sommes unanimes à faire les mêmes
recommandations; nous nous sommes servis, jusqu'à aujourd'hui, du
véhicule de l'Association canadienne des pâtes et papiers, nous
avons fait des représentations au CTCC à Ottawa, qui est le
véhicule pour entendre les récriminations des compagnies et des
citoyens par rapport à toutes les négociations du Tokyo Round, et
le CTCC doit faire rapport au gouvernement. Nous sommes ensuite allés,
comme groupe de concurrents, à Genève pour essayer de parler aux
négociateurs, mais je dois vous dire que la décision finale de
mettre sur la liste d'exceptions, dans les négociations, le cas des
papiers fins, provient du ministre des Finances fédéral et nous
n'avons aucune assurance qu'il va le faire.
M. Mercier: Quels sont les principaux projets de modernisation
dans vos usines pour l'avenir?
M. Rolland: Actuellement nous avons deux projets principaux. Nous
avons notre usine de Saint-Jérôme et celle de Mont-Rolland. A
l'usine de Saint-Jérôme, notre meilleure machine a
été installée en 1965, au prix d'environ $7 millions; en
1973 le conseil d'administration de la Compagnie Rolland a approuvé un
projet pour accélérer cette machine qui devait donner 14 000
tonnes de plus. Le projet était de $3,5 millions. Nous avons
été pris, pendant cette période, par une inflation
extraordinaire, nous avons dépensé jusqu'à maintenant $6
millions pour l'achat d'équipement, l'équipement est dans la cour
de l'usine et il nous manque $4 millions pour le terminer. Ceci devrait nous
rendre plus concurrentiel, une fois qu'on aura réussi à
compléter l'installation, mais, actuellement, en plus de ne pas avoir
les fonds, nous n'avons pas le marché pour écouler la production
accrue grâce à ce projet.
Nous avons une autre usine à Mont-Rolland où nous avons
deux machines qui sont anciennes. Une a été installée en
1904 et l'autre en 1912. Il y a eu des améliorations constantes
effectuées sur ces machines, mais avec le papier fin, tel que nous le
concevons d'une façon traditionnelle, nous croyons que cette usine ne
peut continuer à être rentable. C'est pourquoi au lieu de
l'abandonner et de la fermer, nous avons décidé de moderniser une
à une ces deux machines. Nous avons pris la première et nous
avons dépensé jusqu'à maintenant $4,5 millions pour le
faire. La vocation nouvelle de cette machine ne comprendra pas les papiers fins
traditionnels, et, nous avons acheté en Angleterre, de la compagnie
Wiggins Teape, au coût de $250 000, une technologie nouvelle pour faire
le papier de base pour les laminés décoratifs que vous voyez sur
les panneaux d'arborite ou de formica que vous installez peut-être dans
vos cuisines, extrêmement difficile à fabriquer.
Nous avons dépensé en développement, en plus des
$4,5 millions d'installation, $1 million l'an dernier, et nous nous acheminons
vers.un autre $1 million cette année. Nous avons réussi à
vendre quelque 20 ou 25 tonnes jusqu'à maintenant, cette année,
malgré ces dépenses de développement pour la production de
cette feuille qui est extrêmement difficile à faire.
M. Mercier: Dans quelle mesure pouvez-vous acheter les produits
québécois pour vos projets de modernisation en vous basant sur
vos investissements récents?
M. Rolland: Je peux vous dire que l'investissement le plus
récent, c'est en fait la machine no 8 à
Saint-Jérôme. Parmi les fabricants de machines à papier, au
Canada, il y a deux importants fabricants qui sont Dominion Engineering et
Beloit à Sorel, et nous avons déjà acheté de
l'équipement de Dominion Engineering tandis que la dernière
machine qui a été installée, la no 8, à
Saint-Jérôme, est une machine Beloit fabriquée à
Sorel.
M. Mercier: En tenant compte du principe de rationalisation et de
spécialisation de votre compagnie, vers quel produit voudriez-vous vous
orienter dans l'avenir? Est-ce que vous prévoyez développer de
nouveaux produits et vers quel type de produit est-ce que vous aimeriez vous
orienter? Est-ce que vous avez déjà une gamme suffisamment vaste
que vous vouliez vous en tenir à cela?
M. Rolland: Si on se spécialise et si on se rationalise,
on essaie d'éliminer certaines qualités et cela se fait en
fonction de l'équipement que nous avons. Nous avons deux machines
très modernes et nous en avons quatre plus petites et plus lentes, et,
nous cherchons continuellement des qualités qui pourraient prolonger la
vie de ces plus petites machines. Au fur et à mesure que la consommation
augmente et que notre marché augmente aussi, nous essayons de faire
passer les qualités que nous fabriquons en plus petite quantité
sur des machines qui peuvent fabriquer plus efficacement lorsque nous pouvons
trouver une façon rentable de le faire.
M. Mercier: Quel produit spécialisé pourrait
présenter des avantages au niveau des exportations outre-mer?
M. Rolland: Dans le papier spécialisé, qu'on
appelle un papier technique, comme le laminé décoratif, le
marché européen est très sophistiqué lui aussi. En
fait ce papier laminé décoratif que nous sommes en train de
développer dans notre usine de Mont-Rolland ira, à 90%, vers le
marché américain. Les occasions de percer le marché
européen, telles que nous les entrevoyons, sont plutôt
limitées parce que chacun de ces pays a développé une
industrie de papiers fins avant d'entrer sur le marché européen.
Ils sont complètement protégés par des tarifs, ils ont
éliminé les tarifs entre eux, mais il reste qu'il y a un tarif de
12% pour un Canadien qui veut entrer dans le marché européen en
ce moment, et, ils ont fait connaître leur volonté de ne pas
réduire ces tarifs à l'occasion du
Tokyo Round. Je ne sais pas ce qu'ils feront, mais on a l'information
qu'eux, en tant que fabricants sur le marché européen, n'ont pas
l'intention de demander de diminution des tarifs.
M. Mercier: A la page 13, vous soulignez qu'il y a seulement 20%
de la production canadienne des pâtes et papiers qui est
protégée par un tarif, alors que les produits fabriqués
par votre compagnie ne sont pas protégés par des tarifs
douaniers.
M. Rolland: Aucun.
M. Mercier: A la page 2, vous recommandez...
M. Rolland: Les 80%, c'est le papier journal et la pâte.
Tout le reste, le papier de toilette, le papier fin, le carton ondulé,
forment les 20%; les papiers fins, à l'intérieur de ce
pourcentage, de cette assiette, représentent entre 4% et 5%. Il y a 15%
d'autres papiers qui ne sont pas des papiers fins et qui sont
protégés, ce qui est très peu, d'ailleurs.
M. Mercier: A la page 2, vous recommandez la négociation
du libre accès des papiers fins canadiens au marché
américain. Jusqu'à quel point cette mesure peut-elle vous
être utile dans le contexte actuel de l'industrie nord-américaine
des papiers fins?
M. Rolland: Le développement d'un marché de papiers
fins en dehors du Canada est quelque chose de difficile, de lent et de
dispendieux. Quand un imprimeur de Chicago veut acheter du papier fin, il va
d'abord vous demander: Pourquoi est-ce que j'achèterais du papier
Rolland? Il n'en a jamais entendu parler et il achète peut-être
depuis 75 ans du papier de Hammernill.
C'est un problème complètement différent que
d'implanter une usine de pâte, une usine de papier journal et de dire
qu'on va prendre avec un ou deux contrats un client ou deux clients et lancer
l'affaire. Il faut développer une multitude de débouchés
avant de pouvoir profiter des économies de taille d'un marché
plus vaste. Mais c'est sûr que si on avait l'occasion de
pénétrer tranquillement le marché très vaste des
Américains, qui est difficile, encore une fois, à
protéger, parce que les marchands qui distribuent le papier aux
Etats-Unis sont intégrés verticalement avec les producteurs,
ça veut dire que même si tout le marché américain
nous était ouvert, il y a une certaine partie qui continuerait de nous
être fermée, parce que les distributeurs sont la
propriété de fabricants de papier. Mais nous croyons que nous
pourrions devenir beaucoup plus rentables, plus concurrentiels, si nous avions
accès à un marché plus grand.
Cela peut vous sembler paradoxal qu'on vous demande en même temps
d'être protégés et de pouvoir avoir accès au
marché américain, qui est plus vaste. Mais c'est à
condition que vous acceptiez la philosophie qui est peut-être celle des
négociateurs du GATT actuellement, de vouloir négocier sur une
base sectorielle. Autrement dit, si vous voulez nous donner une
réduction tarifaire dans le papier, aux Etats-Unis, on va vous donner
une réduction tarifaire au Canada. Mais ça n'a pas toujours
été dans le passé des négociations basées
sur un secteur. A tort ou à raison, je prétends qu'aux
dernières négociations, le papier fin, l'industrie secondaire du
Québec ou de l'Ontario ou du Canada a été la victime d'un
échange de protection qui a donné naissance au pacte de
l'automobile.
Personnellement, je me considère la victime du pacte de
l'automobile, parce que les réductions tarifaires qui ont fait le sujet
des négociations dans le secteur du papier ont profité au secteur
automobile. On peut en discuter, mais, en fait, c'est ce qui est arrivé.
Je crois que si, du jour au lendemain, il n'y avait plus de protection pour le
papier fin au Canada, cela demanderait une restructuration immédiate,
complète, rapide et excessivement dispendieuse. A mon avis, c'est soit
ça ou la mort subite. Si les tarifs diminuent tranquillement des deux
côtés, c'est la mort à plus long terme, à moins de
pouvoir se restructurer rapidement.
Quand on est né à un endroit et qu'on y a grandi pendant
85 ans, comme on l'a fait nous, 95 ans maintenant, qu'on est
protégé par des tarifs qui ont été organisés
pour pouvoir satisfaire à toutes les demandes d'un marché
restreint avec quelques machines, cela aurait été bien
différent si la population avait augmenté au même rythme
qu'aux Etats-Unis, mais cela ne l'a pas été. Ceux-ci se sont
rationalisés, ils se sont spécialisés graduellement. Au
lieu d'avoir quatre compagnies qui font du papier fin, ils en ont 200. Chacune
de ces 200 compagnies fait une qualité de papier, la fait bien, la fait
efficacement et peut venir couper nos prix ici.
Je pense qu'il n'est pas utopique de penser que nous pourrions, sans
faire de tort à l'industrie des papiers fins américains qui, je
vous le répète, est plus grosse que l'industrie du papier journal
au Canada, avoir accès tranquillement à ce marché, nous
développer et dire, à un moment donné, quand nous
deviendrions aussi efficaces qu'eux, avec des coûts aussi bas: D'accord,
on n'a plus besoin de la protection tarifaire et on va avoir le libre
échange.
Mais là, on parle d'une quinzaine d'années.
M. Mercier: Est-ce que la récente dévaluation du
dollar canadien, si elle se maintenait, vous donnerait un gros avantage face au
marché étranger, particulièrement au marché
américain?
M. Rolland: En pratique, c'est oui. C'est peut-être
paradoxal encore de dire que la dévaluation du dollar canadien est
avantageuse, mais cela agit comme un tarif additionnel, même si,
malheureusement, la dévaluation du dollar est plus élevée
qu'on ne semble le croire, parce que la dévaluation se fait par rapport
au dollar américain qui, lui, est dévalué par rapport
à d'autres monnaies plus solides et plus fortes, telles que le mark et
le yen, mais c'est sûr que la dévaluation du dollar cana-
dien agit comme une barrière tarifaire à ajouter à
celle qu'on a déjà et que c'est avantageux pour autant que nous,
nous sommes concernés, même si, pour le reste du pays, cela veut
dire une augmentation de l'inflation automatique à laquelle vous ne
pouvez absolument rien d'environ 2%, parce que vous payez 2% plus cher, en
moyenne, pour toutes les importations que font les Canadiens.
M. Mercier: Vous avez évoqué également hier,
dans votre présentation, le problème des commissions scolaires
qui achètent des papiers étrangers. Dans ce domaine, que pourrait
être une politique d'achat préférentiel au Québec?
Comment la définiriez-vous? Quel rôle le gouvernement pourrait-il
jouer là-dedans, pour favoriser un plus grand achat chez nous?
M. Rolland: La première chose, c'est que je vois
difficilement qu'en principe, un gouvernement, quel qu'il soit, quand il veut
acheter des produits qui sont fabriqués, soit aux Etats-Unis, soit au
Canada, les achète aux Etats-Unis ou ailleurs. Je peux difficilement me
convaincre de ce grand principe. Vous avez des lois sociales qui vont payer des
montants assez substantiels à des chômeurs et, si vous achetez du
papier fait à l'extérieur du pays, vous mettez en chômage,
au Canada, des gens qui ne pourront pas fabriquer ce papier. On vous a
expliqué hier que nous considérions cela comme une industrie
secondaire, parce que, en moyenne, une tonne de papier fin prend de seize
à dix-sept heures-homme de travail.
Mon collègue Jean Elie aimerait ajouter quelque chose à ce
sujet. On a discuté de ce point ensemble, hier; si vous le permettez, M.
le Président, je voudrais qu'il dise quelques mots là-dessus.
M. Elie (Jean): La réponse à votre question, en
plus de ce que M. Rolland a dit, serait la suivante: Vous êtes en train
de développer en ce moment, à moins que je ne me trompe, une
politique d'achat qui met évidemment l'accent beaucoup plus sur les
produits fabriqués tout d'abord ici, dans la province, et ensuite dans
le reste du pays.
Je pense qu'au niveau des organismes publics et parapublics, parce que
je considère quand même une commission scolaire comme un organisme
parapublic, c'est la direction à prendre. Sur une question de papier,
par exemple, un acheteur dans une commission scolaire ou dans un
ministère quelque part, à moins qu'il ne soit sensibilisé
à la conséquence de sa décision, peut évidemment
être incité à acheter un papier ou un produit
fabriqué à l'étranger. Au niveau du mécanisme
d'éducation, celui que vous considérez, par exemple les
rencontres que vous voulez avoir avec les ministères et avec les
organismes parapublics, c'est la voie à suivre, du moins pour ce qui est
des organismes publics et parapublics.
Dans ce même contexte, M. le Président, si vous permettez,
vous avez posé une question tout à l'heure à M. Rolland
concernant la question du dollar canadien et de la barrière tarifaire.
Si je peux ajouter un point, c'est celui-ci: Pour vous donner un exemple de la
différence des prix qui existe entre le papier fabriqué au Canada
et celui fabriqué aux Etats-Unis, c'est-à-dire des prix qui
peuvent être exigés, pour que ce soit au minimum rentable
on ne parle pas d'un niveau de rentabilité élevé au
cours des années 1975-1976 dont on a fait état hier soir, une
feuille "d'offset" par exemple, qui est une feuille d'impression, pouvait
arriver au Canada et être disponible au Canada, dans certains cas,
à 15% de moins que le prix que pouvait exiger, et encore pour une
rentabilité minime, un fabricant canadien.
Vous avez un tarif de 12% que le Canada impose sur les rentrées.
Malgré cela, on pouvait quand même rentrer ici avec un autre
écart de 3% à 4%. La dévaluation du dollar canadien
on peut tous présumer bien des choses là-dessus risque du
moins d'être temporaire à son taux actuel de 10%. Cela peut
peut-être revenir à 4%. C'est une protection temporaire, mais qui
n'assure pas ou qui ne comble pas cet écart. Je pense que c'est
très important.
M. Mercier: D'accord.
M. Rolland: Par contre, si je peux ajouter un mot, une politique
d'achat, si elle est préférentielle, devrait quand même
être assez discrète. Je peux facilement penser à la
fabrication d'une feuille de papier usinée au Québec,
transformée en Ontario et qui ne pourrait pas revenir au Québec,
qui mettrait en chômage quelqu'un au Québec, parce que le papier
fabriqué ici et transformé là-bas, ne peut plus revenir
ici.
M. Mercier: D'accord. Je vous remercie pour l'excellente
présentation de votre mémoire qui a apporté à la
commission une foule de renseignements utiles sur un domaine qu'on avait peu
touché jusqu'à maintenant. Je vous remercie.
Le Président (M. Marquis): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je tiens à
remercier les représentants de Papier Rolland, M. Rolland, son
président, M. Elie, pour le mémoire qu'ils nous ont
présenté qui contribue certainement à apporter une
approche nouvelle aux travaux de notre commission en ce qu'ils ont
touché, depuis hier soir, la question combien importante de l'industrie
des papiers fins au Canada.
Cette industrie, vous l'avez évoqué dans votre
mémoire, a un caractère domestique, en quelque sorte un
caractère national. On le constate d'ailleurs par les marchés et
par l'écoulement du produit de chacun des pays qui est, en très
grande majorité, écoulé sur un marché national et
c'est votre cas aussi. Vous avez très bien mis en lumière les
problèmes de mesures tarifaires, en quoi cela pouvait vous affecter et
jusqu'où cela pouvait contribuer à créer une situation
très précaire dans votre industrie.
Vous avez fait état tout à l'heure, dans votre
mémoire, des négociations dans le cadre du Tokyo Round et vous
avez fait part de représentations qui étaient faites ou qui ont
été formulées au gouvernement fédéral, d'une
rencontre que vous avez eue à Genève etc., mais j'aimerais savoir
quelle est la réaction du gouvernement fédéral aux
représentations que vous formulez. C'est quand même très
important pour l'avenir de votre industrie. Vous visez à avoir des
mesures protectionnistes qui, je le pense, sont légitimes et j'aimerais
bien connaître la réaction du gouvernement fédéral.
Jusqu'à maintenant, cela a été quoi?
M. Rolland: La réaction du gouvernement
fédéral a été de nous inviter à faire nos
recommandations et de les écouter. Pour autant que nous sommes
concernés, nous avons l'impression de dialoguer avec des joueurs de
poker qui tiennent les cartes pas mal serrées sur leur veston; je ne
sais pas si je peux vous dire autre chose que cela, mais je peux vous dire
qu'ils nous écoutent avec sympathie, que nous continuons nos
représentations en nous appuyant sur le principe que c'est la roue qui
crie qui reçoit un peu d'huile. Nous ne lâchons pas. Nous avons
facilement accès à toutes sortes de personnes qui nous disent:
Nous sommes sympathiques à votre cause, mais ce n'est pas nous qui
prendrons la décision finale, c'est le ministre des Finances.
Celui-là est plus difficile à voir, d'autant plus difficile qu'il
change souvent. Vous réaliserez que...
M. Pagé: Celui-là va rester probablement plus
longtemps. C'en est un bon, celui-là, il est en forme, il est jeune et
tout cela. On a failli l'avoir ici, vous savez. Je suis convaincu que...
M. Rolland: Un point que je voudrais préciser, c'est que
plus il y a de facteurs intangibles dans notre avenir, plus c'est difficile de
planifier des investissements, de planifier notre avenir. Un facteur aussi
important que la réduction ou l'élimination des tarifs nous garde
dans un climat incertain, et c'est un facteur qui nous empêche vraiment
de planifier intelligemment.
M. Pagé: De progresser. Je suis d'accord là-dessus.
Je suis convaincu qu'à la suite des commentaires que vous formulez ce
matin, parce qu'il faut quand même appeler les choses par ce qu'elles
sont, mon bon ami, le député de Matane et ministre des Terres et
Forêts, reviendra probablement tout à l'heure sur cette question,
parce que c'est un point combien important de la philosophie politique du
groupe et du parti politique qui forme le gouvernement aujourd'hui, toute la
question de l'importance du rôle joué par l'industrie
québécoise dans ce beau et grand défi que constitue notre
pays, le Canada. J'aurais une question M. le ministre, je vous prie
que j'adresserais au ministre. Je suis certain que vous allez faire
vôtre la question que je vais formuler. Les règles du jeu sont
qu'on vit dans un pays qui est le Canada, M. le ministre, vous le savez sans
doute. Vous avez certainement été à même de
constater qu'à plusieurs reprises dans le passé, des groupes, des
organismes, des industries comme la vôtre avaient des
représentations à formuler à l'égard du
gouvernement fédéral. Je pense qu'on a un exemple patent ce
matin, de la nécessité d'une concertation des forces du
Québec pour contribuer à sensibiliser le gouvernement
fédéral à l'obligation qu'il a d'avoir un oeil plus que
vigilant sur ce secteur de l'industrie canadienne que constitue le papier fin.
M. le ministre, j'aimerais savoir dans quelle mesure votre gouvernement est
disposé à faire part des représentations du gouvernement
québécois aux autorités du gouvernement
fédéral on a parlé du ministre des Finances
dans le but d'ajouter votre voix à celle de l'entreprise pour, somme
toute, apporter plus de force, plus de pression sur le gouvernement
fédéral pour que celui-ci je suis certain, d'une part,
qu'il est conscient de l'impact du problème soit plus sensible et
plus déterminé non seulement à écouter, non
seulement à être sympathique aux représentations
formulées par l'industrie québécoise, mais aussi à
dire oui probablement et à mener ce principe dans le cadre des
négociations. M. le ministre, je pense là-dessus, que vos
collègues du Conseil des ministres pensent ainsi et je fais état,
notamment, du ministre des Affaires intergouvernementales qui a
déjà dit: Nous sommes dans le Canada, nous devons jouer les
règles du jeu telles qu'elles sont actuellement. Si votre gouvernement,
au chapitre du ministère des Terres et Forêts, dit: Les
règles du jeu, on les joue, je crois que cela devrait aboutir et
déboucher sur une prise de position clairement exprimée et
reflétant la solidarité du gouvernement du Québec à
l'égard des entreprises.
M. Bérubé: M. le Président, je pense
effectivement que c'est une question sur laquelle il faut se pencher et je ne
voudrais malheureusement pas prendre trop du temps de la commission pour
débattre une question politique, mais...
Une Voix: ... une question politique.
M. Bérubé: Non, mais je pense que vous avez raison
de la souligner...
M. Pagé: Je ne veux pas que ça devienne une
question politique.
M. Bérubé: Effectivement, je pense que M. Rolland
vient de souligner un aspect... C'est qu'il avait l'impression que sa firme a
servi d'otage au pacte de l'auto. Là-dessus, je pense que beaucoup de
gens dans l'industire en conviendront avec M. Rolland que c'est probablement le
fait, de la même façon que l'industrie de la chaussure a
également servi d'otage et il nous faut reconnaître que,
effectivement, certains secteurs industriels du Québec ont servi
d'otages à certaines négociations que le fédéral a
eues avec d'autres pays. Ceci est connu de longue date.
Egalement, ce qui est connu, c'est que le gouvernement
fédéral c'est la discussion que nous avons eue avec la
Quebec North Shore hier ré-
cupère 75% des impôts. Donc, s'il y a diminution de
taxation, elle devrait d'abord venir du gouvernement fédéral, qui
récupère la majeure partie des impôts, tel que nous l'a
souligné la société.
Donc, on se rend compte que, d'un côté, vous avez des
mesures gouvernementales fédérales visant à rationaliser,
soi-disant, notre économie et, d'autre part, vous n'avez aucun effort
fait par le gouvernement fédéral pour, justement, venir en aide
à des secteurs qui sont en mauvaise posture.
Je pense que ce que le gouvernement du Québec, dans la structure
actuelle de la Confédération, peut faire, c'est la même
chose que ce que l'ancien gouvernement pouvait faire, c'est-à-dire des
représentations auprès du gouvernement fédéral,
qu'il veuille bien condescendre à examiner notre problème, ce qui
nous amène, évidemment, à des taux de chômage qui
sont systématiquement toujours supérieurs à ceux du Canada
depuis 25 ans...
M. Pagé: Bon! Bon!
M. Bérubé: ... ce qui ne change absolument rien
à la situation.
Par conséquent, il ne fait aucun doute que nous allons continuer,
dans le plus pur style des gouvernements antérieurs, à
réclamer du gouvernement fédéral qu'on respecte
l'industrie nationale, l'industrie du Québec, mais nous devons convenir
que... Je pense que si nous voulons régler les problèmes à
la source, il va falloir autre chose. Il va falloir des outils que le
gouvernement du Québec n'a pas et je pense que c'est ceux-là
qu'il va falloir aller chercher.
M. Pagé: M. le Président, j'invoque le
règlement! J'invoque le règlement! Question de
règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! S'il vous plaît!
M. Pagé: M. le Président, ma question a
été très claire, très précise. Je savais,
j'étais assuré...
M. Bérubé: Ma réponse l'était tout
autant.
M. Pagé:... ce matin que le ministre profiterait de
l'occasion qui lui était offerte par un problème aussi
épineux...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Quelle
est la question de règlement, M. le député de
Portneuf?
M. Pagé: M. le Président, j'en arrive. J'ai
posé une question.
Une Voix: Quand on ouvre la porte...
M. Pagé: Ce n'est pas la porte que j'ai ouverte. Le
problème, il faut en discuter en toute objectivité, et si ce
n'est pas ça, de toute façon, pour la contribution que vous avez
fournie à la commission, vous...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, sur la question de règlement.
M. Pagé: ... si c'est possible, laissez-nous aller,
d'accord?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Quelle
est la question de règlement?
M. Pagé: Si c'est possible, qu'on ne politise pas le
débat, puisqu'on ne l'a pas politisé jusqu'à maintenant.
C'est un problème qui est très délicat.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf...
M. Pagé: Je vous demande, M. le ministre, êtes-vous
prêt à être solidaire des gens qui sont là et
ça va s'exprimer comment? Je ne vous demande pas une diatribe sur la
politique et le référendum, ça, votre chanson, on l'entend
tous les jours.
M. Bérubé: Nous serons solidaires de deux
façons, M. le député. Nous serons solidaires, d'une part,
en faisant des représentations dans le cadre constitutionnel
traditionnel en mettant toute la pression que la dernière
élection, évidemment, au gouvernement du Québec, va nous
donner, c'est-à-dire que je pense que le gouvernement
fédéral présentement, réalisant que les
Québécois ont leur voyage, peut peut-être être
amené à écouter d'un peu plus près, un gouvernement
qui se tient debout plutôt que les gouvernements antérieurs qui
vivaient à genoux.
Donc, déjà, il y a peut-être un certain
succès que l'on pourrait obtenir de ce côté-là, mais
là-dessus, évidemment, tout dépendra de l'ouverture. Or,
je pense, malheureusement, qu'un ministre comme M. Lalonde, s'occupant des
négociations fédérales-provinciales, n'est pas le bonhomme
ouvert sur le Québec qui va nous permettre de progresser.
M. Pagé: Ce n'est pas ça que je vous ai
demandé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! Monsieur le député...
M. Bérubé: D'une part... Ecoutez! Si vous voulez
discuter politique, on va discuter politique.
M. Pagé: Je vous demande qu'est-ce que vous allez faire
concrètement avant les négociations du Tokyo Round pour exprimer
la solidarité du gouvernement du Québec à l'égard
de ces gens-là?
M. Bérubé: Une expression du même genre, si
je vous disais que nous sommes en discussion présentement avec Ottawa
exactement sur ces questions, nous ferons le même genre de pressions que
les gouvernements du Québec ont toujours faites antérieurement.
Maintenant, je vous dis que le succès que nous obtiendrons sera
peut-être à la mesure de la crainte qu'Ottawa a de
voir le Québec se détacher du Canada. C'est possible qu'on
ait plus de succès que dans le passé. Cela, d'une part.
M. Pagé: Vous imputez déjà des motifs.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Pagé: Vous imputez déjà des motifs.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf, vous
posez des questions, vous devez vous attendre à recevoir des
réponses.
M. Pagé: Oui, il peut en donner, mais qu'il réponde
aux questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Bérubé: D'autre part, ce que nous allons faire,
c'est prouver aux Québécois que le gouvernement du Québec
a besoin de plus de pouvoirs, de manière à régler
directement des problèmes comme ceux soulevés ce matin.
M. Pagé: M. le Président, je savais que le ministre
profiterait de la question pour une bonne diatribe. Quand j'ai parlé
d'objectivité tantôt, dans le cadre de nos débats,
c'était important, et je dis souvent que ça va bien et c'est vrai
que nos travaux se déroulent très bien, de façon
objective.
En contrepartie à la réponse que vous nous donnez, M. le
ministre, j'irais jusqu'à dire que je n'aurais pas été
objectif, si, dans mes questions de ce matin sur la problématique que
vous connaissez et que je connais, j'avais tenté par mes questions de
faire ressortir l'avantage de l'appartenance du Québec au régime
fédéral. J'ai été suffisamment objectif pour ne pas
soulever cette question et j'étais en droit de m'attendre qu'un
ministre... Je pensais que vous auriez peut-être été le
dernier à soulever ces questions, peut-être un autre, mais je
m'attendais à autant d'objectivité de votre part.
Ma question est la suivante, M. le Président: II faut appeler les
choses par leur nom. Vous avez fait état, hier, de la production
québécoise en matière de papiers fins au Québec. Je
vais poser la question parce que, probablement, elle va venir de l'autre
côté dans un excès d'enthousiasme ou autrement.
M. Bérubé: Ah!
M. Pagé: II se produit, en termes de papiers fins, environ
300 000 ou 350 000 tonnes au Québec, c'est le cas, à peu
près?
M. Rolland: ... pour cent...
M. Pagé: Est-ce que le marché du Québec peut
s'autosuffire d'une part? D'autre partla question va être
posée brutalement est-ce à dire, en termes
d'autosuffisance, que votre entreprise favoriserait la séparation du
Québec dans ce cadre pour ses marchés? Car, pour ces gens, quand
ils parlent d'autosuffisance, c'est une solution à tout. Est-ce que
notre industrie est capable de s'autosuffire et, dans ce cas, est-ce que c'est
ce que votre industrie favoriserait? En quelque sorte, est-ce que la
séparation serait la solution aux problèmes que vous affrontez
actuellement?
M. Bérubé: Cela, c'est de la politique; j'ai
l'impression, moi, que je pourrais vous répondre.
M. Pagé: Non, on appelle les choses par leur nom, M. le
ministre. Vous, vous le savez, ce sera partisan, les autres sont beaucoup plus
sérieux.
M. Bérubé: Non, cela nous a été
très clairement expliqué, il s'agit d'une industrie nationale,
qui est protégée par des tarifs, qui vit au Canada d'une
façon artificielle. Par conséquent, si nous suivons la même
approche, nous pouvons suivre exactement la même philosophie.
M. Pagé: Ne profitons pas de la question que j'ai
posée pour faire un débat politique. Je veux bien être
compris, on parle souvent de l'autosuffi-sance de ce côté. Pour
eux, c'est bien important. Vous êtes dans le milieu, vous évoluez
dans le contexte des marchés, dans le contexte des mesures tarifaires,
etc., vous êtes là-dedans tous les jours. Il se produit au
Québec environ 350 000 tonnes, qu'est-ce qui arriverait? On a dit
tantôt que c'était très difficile de vivre dans le Canada.
Si on avait des barrières tarifaires autour du Québec, est-ce que
ce serait une solution à votre industrie?
M. Bérubé: Nous avons, mon cher collègue,
c'est ce que monsieur demande, des barrières tarifaires autour du
Canada.
M. Pagé: C'est à lui que je pose la question, M. le
ministre.
M. Rolland: La question peut être considérée
de différentes façons. Si vous la considérez d'une
façon strictement mathématique, j'imagine que oui; si vous la
considérez d'une façon économique, je dois répondre
non, je dois répondre que ce serait un pas en arrière. Quand la
compagnie Rolland était la seule compagnie de papiers fins, il y a 95
ans, elle suffisait en partie ou presque à produire les papiers qu'il
fallait pour le Canada, mais bien de l'eau a coulé dans le Saint-Laurent
depuis ce temps et je considère vraiment que s'il n'y avait qu'une seule
compagnie pour suffire aux besoins du Québec, ce serait un pas en
arrière, parce que le prix qu'il faudrait payer pour s'autosuffire
serait vraiment hors de proportion avec les avantages que vous pourriez en
retirer ou que les consommateurs pourraient en retirer.
M. Pagé: Merci, M. Rolland, cela démontre que,
parfois, en termes mathématiques, on peut
arriver à des conclusions, mais, en termes économiques,
quand on est dans le milieu, c'est autre chose. J'espère que vous en
tirez une leçon, messieurs.
Merci, M. Rolland.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Y a-t-il
d'autres intervenants? M. le ministre.
M. Bérubé: J'aurais une question, mais je n'ose
presque pas la poser.
M. Pagé: On ne vous force pas la main.
Une Voix: II vaut mieux se tourner la langue sept fois avant de
parler!
M. Bérubé: Néanmoins, si j'ai bien compris,
vous ne proposez pas la disparition des tarifs qui protègent notre
industrie nationale canadienne en ce qui a trait aux papiers fins. Donc,
présentement, M. Pagé a essayé, tendancieusement, de nous
appeler à parler de tarifs autour du Québec.
M. Pagé: Moi tendancieux?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bérubé: Mais vous ne proposez quand même
pas la disparition des tarifs sur la base du même raisonnement, parce
qu'il ne fait aucun doute que si nous abolissions les tarifs, nous aurions du
papier américain meilleur marché, mais ce n'est pas l'objectif.
Vous acceptez encore le principe des tarifs canadiens?
M. Rolland: Oui, c'est la recommandation que je fais à la
commission que le gouvernement du Québec fasse pression sur le ministre
des Finances pour que le papier fin soit mis sur la liste d'exceptions dans les
concessions tarifaires.
En conséquence, je recommande que les tarifs qui protègent
le papier fin des importations américaines soient maintenus, à
moins que je ne comprenne pas très bien votre question.
M. Bérubé: C'est ce qu'on a essayé de vous
faire dire, tout à l'heure, concernant une barrière tarifaire
protégeant l'industrie au Québec, de manière que celle-ci
puisse alimenter les besoins du Québec. Vous avez répondu
à cette question en disant que ce serait un pas en arrière, donc
que vous ne recommandez pas des tarifs québécois pour
protéger cette industrie, mais que vous recommandiez des tarifs
canadiens pour protéger l'industrie canadienne. En fait, vous appliquez
un raisonnement dans un cas, mais vous ne l'appliquez pas dans l'autre cas
puisque cela veut nécessairement dire que le Canada paierait plus cher
son papier fin en ce moment avec ses tarifs. Si nous avions des tarifs
québécois, cela voudrait dire que le Québec paierait plus
cher son papier fin, probablement un peu plus cher qu'ailleurs.
Vous n'allez pas suffisamment loin. Vous dites: Pas de tarif autour du
Québec, mais quand même des tarifs autour du Canada. C'est un
moyen terme, si je comprends bien, sur lequel vous êtes d'accord.
M. Rolland: Oui, je suis d'accord sur cela. M.
Bérubé: Merci, M. le Président.
M. Rolland: Je pense que je pourrais ajouter à ceci que la
structure de l'industrie du papier fin, même si la production est
concentrée sur une base de 40% dans la province, est telle que le
papier, une fois qu'il est imprimé ou qu'il est façonné,
se promène d'une province à l'autre. Je vous donnais l'exemple
tantôt d'une enveloppe dont le papier de base est fabriqué au
Québec, qui est ensuite converti en enveloppe en Ontario, et qui revient
ici. Alors, il y a un va-et-vient constant d'une province à l'autre qui,
dans le cas d'une séparation, amènerait la problématique
ou la considération de barrières tarifaires autour du
Québec. Je dois dire que c'est un point que je n'avais pas
envisagé dans ma présentation, mais qui amènerait des
complications inouïes en ce qui concerne les affaires, d'une façon
générale et particulièrement dans l'industrie du papier
fin.
M. Bérubé: De toute façon, je dois vous
rassurer et rassurer également le député de Portneuf que
l'objectif du présent gouvernement est la création d'une zone de
libre échange et que, par conséquent, il n'y aurait pas de tarifs
autour du Québec. Comme on vous avait amené sur une piste...
M. Pagé: Ne vous avancez pas trop là-dessus, vous
pourriez être corrigé par vos "boss".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît.
M. Pagé: Merci, M. le Président. M. Rolland et M.
Elie, on vous remercie beaucoup de votre participation.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci
beaucoup, M. Rolland et vos collègues, de votre participation à
la commission parlementaire. J'inviterais maintenant... M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Hier, j'avais
l'occasion de formuler une motion qui avait comme objectif, comme but ultime,
de permettre l'audition ce matin des représentants du Syndicat des
travailleurs de la compagnie Canadian Glas-sine ici à Québec et
on se rappellera, M. le Président, que vous aviez déclaré
à ce moment-là, ma motion non recevable parce que le syndicat en
question, les représentants de ces travailleurs, n'avaient pas, hier
soir, déposé le mémoire qui était requis pour
être entendu. M. le Président, mes informations sont à
l'effet qu'effectivement le mémoire a été
déposé tôt ce matin, au secrétariat
de la commission, d'une part et, d'autre part, après discussion
avec les représentants de sa majesté, le pouvoir, le parti de
l'autre côté, ceux-ci se sont montrés d'accord à ce
qu'on puisse procéder à l'audition des représentants de
Canadian Glas-sine ce matin. M. le Président, je réitère
ma motion à savoir que cette commission accepte d'entendre les
représentants du Syndicat des travailleurs de Canadian Glassine et ce,
dès ce matin.
M. le Président, j'ai discuté avec le ministre, je crois
qu'il serait opportun d'entendre le mémoire de Glassine en raison d'une
relation entre ce groupe, cette corporation et la compagnie Reed, avant de
procéder à l'audition du groupe Reed, en s'assurant cependant, je
pense que là-dessus tout le monde sera unanime, que nos
délibérations puissent se continuer, si besoin en est,
après 13 heures pour que l'on procède, somme toute, à
l'audition des gens convoqués pour ce matin.
Sur ce, M. le Président, il y avait consentement de part et
d'autre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
problèmes que vous causez sont seulement pour le président, qui
doit être à Jonquière pour 15 h 30. Est-ce qu'il y a
consentement unanime tout d'abord pour l'acceptation du mémoire, en
dehors des délais?
M. Bérubé: II pourrait y avoir consentement
unanime, si l'Opposition soulignait son intention de limiter la durée
des débats pour les différents intervenants. La raison en est
relativement simple, nous avons des gens de l'Est du Québec, qui
viennent de ma région, vous savez que ce n'est pas à la porte,
qui se sont déplacés ce matin et qui s'attendent à
être entendus.
M. Pagé: Ce sont des gens qui doivent être entendus
aussi.
M. Bérubé: Le seul danger que je vois poindre
à l'horizon, c'est si nous devions prendre deux heures pour chacun des
mémoires; cela voudrait dire six heures. Nous serions reportés,
de toute évidence, à 17 heures, ce qui est incompatible avec les
horaires. Si tous étaient d'accord pour limiter la durée, il me
semble qu'en limitant le Syndicat de la Canadian Glassine, qui n'a qu'un
mémoire quand même relativement restreint, il y aura surtout des
questions, et si en limitant la compagnie Reed à I heure ou 1 h 30,
ça nous donnerait 1 heure ou 1 heure 15 pour les gens de l'Est du
Québec. A ce moment-là, nous serions d'accord.
M. Pagé: Je pense qu'il n'est pas opportun de mettre un
carcan d'horaire, de minutes; tout le monde est unanime à constater que
nous pouvons, dans le délai accordé, entendre les trois groupes
qui nous restent et pour échanger avec eux; ça va dans le sens
des limites le temps que vous proposez. Si on en fait une proposition formelle,
M. le ministre, on sera lié par ça. Le climat est serein ce
matin, même si cela a peut-être parti raide un peu, mais ce n'est
pas grave, on peut s'entendre et se comprendre assurément.
M. Bérubé: M. le Président, j'aimerais quand
même en faire une proposition formelle.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant,
j'aimerais savoir s'il y a consentement unanime pour l'acceptation, en dehors
des délais, du mémoire de la Canadian Glassine.
M. Gendron: Pour ma part, oui, mais à condition qu'on
s'entende formellement sur le partage de l'horaire. C'est bien le "fun" une
discussion libre, mais je ne pense pas que, dans le contexte actuel, ce soit un
carcan qui nous empêche de travailler; au contraire, on travaillera d'une
façon plus rationnelle, sachant exactement quel temps est alloué
pour les trois mémoires qui nous restent, si on accepte ça. Mon
consentement serait dans ce sens.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Donc,
c'est un consentement conditionnel.
M. Gendron: C'est ça, conditionnel à une
proposition d'horaire, non pas pour en discuter une heure mais s'entendre un
peu. Je pense que, sur ce que M. Pagé mentionnait tantôt, il y
aurait moyen de s'entendre assez facilement pour une répartition du
temps pour les trois mémoires qu'on veut entendre cet
après-midi.
M. Pagé: D'accord.
M. Bérubé: Jusqu'à midi, le groupe
Glassine...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Bérubé: ... de midi à 13 h 15, Reed, et
jusqu'à quelle heure désirez-vous aller ensuite, M. le
Président? Vous avez des problèmes?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
Président va quitter à 13 heures et se fera remplacer,
étant donné qu'il y a consentement unanime, par un membre de la
commission.
M. Gendron: On pourrait suivre la même chose pour l'Est du
Québec, de 13 h 15 à 14 h 15.
M. Bérubé: 14 h 15. Vous êtes d'accord? M.
Pagé: D'accord.
M. Bérubé: Auquel cas, tout le monde est
d'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y a consentement unanime pour l'acceptation du mémoire, en dehors
des délais pour la Canadian Glassine?
M. Bérubé: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y a consentement unanime pour que la Canadien Glassine soit entendue
avant les Papiers Reed Ltée?
M. Bérubé: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y a consentement unanime en ce qui concerne les horaires qui viennent
d'être proposés?
Des Voix: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y a consentement pour que le président quitte à 13 heures
et se fasse remplacer par un autre membre de la commission?
M. Bérubé: Oui, M. le Président.
M. Pagé: Nous en serons peines, mais oui, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Etant
donné ces consentements unanimes, j'inviterais les représentants
du Syndicat de la Canadian Glassine à présenter leur
mémoire, la période des questions devant se terminer à
midi exactement.
Auriez-vous l'obligeance de vous présenter de même que vos
collègues?
Syndicat de la Canadian Glassine
M. Michenki (George): A ma gauche, le secrétaire
financier, M. Fernand Roy; à ses côtés, le
secrétaire correspondant, M. Paul-Eugène Marceau; à ma
droite, le secrétaire-trésorier, M. Eugide Paré; mon nom
est George Michenki, président du local 641.
M. le Président, MM. les membres de la commission, Canadian
Glassine, un cas trop simple... Tel est le sujet du mémoire
présenté à la commission parlementaire par les
employés de Canadian Glassine Co., Limited, filiale du groupe Reed
Limited, de Toronto, Ontario.
Nous voudrions en tout premier lieu remercier cette commission de
l'occasion qu'elle nous offre de faire entendre la voix des travailleurs de la
compagnie Canadian Glassine Co., Limited au moment bien précis où
notre avenir devient de plus en plus incertain, en présence d'une
compagnie qui radicalise ses positions et au moment où nos nombreuses
demandes d'aide auprès des responsables gouvernementaux ne semblent
avoir eu aucun effet.
Le bref mémoire que nous vous soumettons s'en tient strictement
au cas de Canadian Glassine et non au problème général des
pâtes et papiers. En suivant de près votre commission, nous avons
pu trouver des cas qui ressemblent au nôtre, des cas de gens qui, comme
nous, espèrent beaucoup de l'ouverture d'esprit que manifeste votre
commission.
Nous aurions certes aimé vous présenter un mémoire
traitant de l'état général des pâtes et papiers,
mais nos ressources financières et humaines ont été
mobilisées pour tenter de trouver des solutions aux problèmes
tragiques que vivent actuellement les travailleurs de l'usine.
Messieurs, la compagnie Canadian Glassine Co. Ltd., filiale du groupe
Reed, exploite une usine à Québec depuis plus de 25 ans, et
celle-ci procure du travail à 135 travailleurs. Cette usine fabrique un
papier spécial et son seul concurrent au Canada, la compagnie Domtar
Alliance se trouve en Ontario.
Nous avons négocié une convention collective de bonne foi
d'une durée de deux ans qui se termine le 30 avril 1978. Cette
convention collective a été soumise et acceptée par la
Commission antiinflation, parce que la compagnie Canadian Glassine Co. Ltd.,
était considérée comme une filiale du groupe Reed.
Le 8 août 1977, la compagnie informait simultanément le
syndicat et le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre de la fermeture de
l'usine dans les trois mois suivants, ceci en accord avec la loi du
ministère du Travail. Cette compagnie ne ferme pas ses portes parce
qu'elle est en difficulté financière, mais bien parce qu'elle est
mal administrée. De plus, elle demande au syndicat d'accepter des
conditions de travail moindres pour camoufler l'incompétence de ses
administrateurs.
Nous demandons que les membres de la commission parlementaire exigent
premièrement du groupe Reed, lorsqu'il présentera son
mémoire, qu'il dise quelles sont les relations financières du
groupe Reed et de la Canadian Glassine Co. Ltd.; deuxièmement, quel est
le chef de la direction de la Canadian Glassine; troisièmement, à
qui se rapporte le chef de la direction; quatrièmement, quels sont les
profits annuels de Canadian Glassine Co. Limited, depuis les dix ou vingt
dernières années; cinquièmement, quelle somme d'argent a
reçue la compagnie Canadian Glassine, depuis dix ans, des
différents paliers de gouvernement.
Ce sont là, messieurs, quelques faits sur l'histoire de Canadian
Glassine. Nous avons joint, en annexe, photocopie de trois lettres que les
travailleurs ont reçues datées du 8 août, du 31 août
et du 3 octobre 1977. Nous aurions aussi pu joindre photocopie des
télégrammes expédiés à MM. René
Lévesque, Rodrique Tremblay, Bernard Landry et Yves
Bérubé, de qui nous attendons des réponses.
Nous sommes à votre disposition, messieurs, pour répondre
à vos questions et nous demandons à la commission parlementaire
d'exiger du groupe Reed qu'il prenne ses responsabilités et, à la
lumière d'un plan de relance que vous comptez présenter au
début de l'année 1978, qu'il maintienne son usine de papier
spécialisé située à Québec. Merci de votre
attention.
Je voudrais demander à la commission d'accepter les paroles que
je dis. Peut-être que ce n'est pas du bon français, en tout cas,
j'essaie du mieux possible.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
très bien. M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Vous posez, dans votre court mémoire, quand
même un jugement de valeur, à savoir que, d'après vous,
cette compagnie ne
ferme pas ses portes parce qu'elle est en difficultés
financières, mais bien parce qu'elle est mal administrée.
M. Michenki: Parce qu'en premier lieu, elle nous avait dit
qu'elle était en difficultés financières et
qu'après cela, elle avait avancé qu'il y aurait 6% d'augmentation
pour l'année suivante.
M. Gendron: Je comprends, mais pour porter un tel jugement de
valeur, est-ce que cela signifie que vous avez, d'après vous, les
éléments rationnels ou ce qu'il faut pour porter un tel
jugement?
M. Michenki: Oui, on en avait discuté avec l'ancien
gérant qui a été mis à pied, non, pas mis à
pied, en tout cas, excusez mes paroles...
M. Gendron: Non, ce n'est pas grave.
M. Michenki: ... qui a pris sa retraite
prématurément.
M. Pagé: C'est assez clair.
M. Gendron: Par la suite, vous mentionnez que vous aimeriez que
la commission parlementaire pose une série de questions lors du
témoignage ou de l'exposé du rapport de Rééd. Je
voudrais seulement savoir si, au niveau de ces questions, vous disposez de
certains éléments de réponses ou si c'est tout simplement
pour avoir une confrontation entre...
M. Michenki: Cela dépend de la question, monsieur.
M. Gendron: Les cinq questions que vous posez dans votre
mémoire, vous dites que vous aimeriez que la commission parlementaire
puisse poser ces questions à la compagnie Rééd. Je veux
savoir si, sur ces questions, vous disposez de certains éléments
de réponse et si c'est pour faire une espèce de confrontation
entre ce que...
M. Michenki: C'est cela, monsieur, parce qu'on avait reçu
quelques réponses des sous-ministres sur l'affaire de Canadian Glassine.
Ils n'ont pas été capables de nous donner par écrit cette
réponse.
M. Gendron: D'accord, je vous remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je ne me
permettrai que des commentaires. Est-ce à dire qu'on me laisse une
demi-heure ou quoi? Non.
M. Gendron: On va revenir.
M. Pagé: Ah oui! Cela veut donc dire... C'est parce que
vous avez besoin d'étudier le dossier, je présume.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plait, à l'ordre! Ne perdons pas notre temps. S'il vous
plaît!
M. Pagé: M. le Président, on m'a dit que j'avais
quinze minutes, étant donné que ce matin... quoique si on tient
pour acquis que l'Opposition représente 60% des électeurs
québécois, on pourrait avoir quand même 60% du temps, mais
on va s'entendre sur 50%, ce qui reflète bien la force et la position du
Parti libéral du Québec.
M. Bérubé: La force...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Pagé: Votre mémoire nous arrive à un
temps qui est certainement très opportun, parce que nous sommes à
étudier toute cette question de l'avenir de l'industrie des pâtes
et papiers au Québec, du papier fin, etc., un moment où, non
seulement le gouvernement, non seulement les parties en présence,
l'industrie, les travailleurs, les différentes associations sont
conscientes de l'envergure de ce problème.
Cela aboutit à la commission parlementaire que nous vivons depuis
deux semaines, commission parlementaire qui, quant à moi, je
l'espère, saura déboucher sur des mesures où le
gouvernement aura certainement à intervenir et qui devront, non
seulement jeter la base de solutions à long terme, mais j'espère
aussi que ces mesures pourront s'appliquer dans des délais suffisamment
brefs pour pallier les préoccupations que plusieurs régions du
Québec ont connues depuis quelque temps. On a des exemples aussi
frappants et aussi désolants que le cas de l'usine Wayagamack au
Cap-de-la-Madeleine; on a eu hier à étudier, à
échanger sur le cas d'East Angus. A prime abord, le problème que
vous soulevez ce matin évoque pour moi un problème ou une
situation peut-être comparable à ce que d'autres industries,
d'autres entreprises ont connu dans d'autres régions. Cependant, je me
permettrai le commentaire suivant: je ne veux pas, vous savez, depuis le
début des travaux de cette commission, je l'ai dit à plusieurs
reprises, c'est important d'être objectif, entacher nos positions, nos
actions ou nos commentaires d'éléments politiques, mais je me
permettrai donc quand même le commentaire suivant: Je suis surpris de
constater que, somme toute, la prise de conscience, non seulement populaire,
mais du gouvernement, des groupes du syndicat et même de la partie
syndicale, n'ait pas été aussi clairement exprimée dans
votre cas que cela a pu l'être dans le cas de la Wayagamack ou dans le
cas d'East Angus, parce que votre entreprise, Canadian Glassine, à
Québec, a quand même un impact régional important dans
l'économie de la ville et de la région de Québec,
particulièrement dans le comté de Limoilou, où vous
êtes.
A quelques reprises, à l'Assemblée nationale, parce que le
problème est sur la table depuis le
mois de mai déjà, la question que vous nous formulez ce
matin a aussi été formulée à l'Assemblée
nationale. On se rappelera que, le 10 août, j'avais eu l'occasion de
poser une question à M. le ministre des Terres et Forêts, question
reprise par mon collègue qui était pleinement solidaire de mes
objectifs, mon collègue de Jean-Talon, M. Garneau. Le 16 août, on
avait eu échange assez intéressant, M. le ministre et moi, sur le
problème que vous connaissez actuellement. M. Michenki, vous avez fait
état dans votre mémoire de démarches auprès du
ministère des Terres et Forêts, jusqu'à maintenant, par
voie de télégramme; j'aimerais savoir, dans un premier temps, si
vous avez fait des démarches précises, spécifiques
auprès du ministère des Terres et Forêts, et, dans un
deuxième temps, j'aimerais évidemment connaître le
résultat de ces démarches ou les positions qui ont
été adoptées. Le 16 août, à
l'Assemblée nationale, et le ministre pourra ajouter son mot tout
à l'heure, d'autant plus qu'on a du temps, M. le ministre avait fait
état que le ministère des Terres et Forêts ne se sentait
pas de responsabilités suffisantes pour intervenir dans votre dossier,
parce que Canadian Glassine ne procédait pas à l'extraction de
matières premières, etc. De toute façon, M. le ministre
pourra faire état de sa position ou de la position qu'il évoquait
à ce moment. Ce que le ministre disait, c'était que le
problème relevait surtout du ministère de l'Industrie et du
Commerce. J'aimerais savoir, suite à la réponse que le ministre
des Terres et Forêts a formulée le ou vers le 16 août
dernier ici, à l'Assemblée nationale c'est inscrit au
journal des Débats si vous avez eu des contacts avec le
ministère de l'Industrie et du Commerce, en plus d'en avoir avec le
ministère des Terres et Forêts. Je dois vous dire, et je termine
là-dessus, avant que vous ne me répondiez, que je suis surpris de
constater que le problème que vous connaissez n'ait pas
été rendu public, qu'il n'y ait pas eu une prise de conscience
publique au niveau de la région, de façon aussi aiguë et
avec autant d'acuité que cela a été fait dans d'autres
régions, parce que le problème auquel vous faites face, je pense,
est quant à moi, tout aussi aigu et il est très important pour la
région de Québec. Je crois qu'on était en droit de
s'attendre à une prise de position, une expression de solidarité
de la part de la population, de la part des groupes, de la part des
députés de la région de Québec aussi. Ma question
est donc: Vos démarches, les résultats, Terres et Forêts,
Industrie et Commerce?
M. Michenki: Après le télégramme qui a
été envoyé à tous les ministres concernés,
nous avons constitué un dossier je ne sais pas où il est
rendu aujourd'hui nos représentants avaient pris contact avec le
ministère des Terres et Forêts dont le sous-ministre, ou une autre
personne du bureau, nous avait dit que c'était du ressort de M. Fortin
et de M. Rodrigue Tremblay. De là, nous sommes partis avec le dossier et
nous sommes allés voir M. Fortin, et nous avons expliqué notre
cas. Nous avons laissé notre dossier. Deux jours plus tard, M. Fortin
nous a rappelé et nous a dit que cela ne le concernait pas et qu'il
référait cela à M. Hurtubise. Ce dernier a
étudié cela pendant quelques jours et m'a rappelé lui
aussi et m'a dit que cela ne le concernait pas et qu'il référait
cela à M. Filion.
M. Pagé: II était où M. Filion?
M. Michenki: A Montréal, chez le ministre Pierre-Marc
Johnson. Donc j'avais contacté ce M. Filion à qui j'avais
expliqué la situation et il m'a dit de lui laisser cela pour la fin de
semaine. J'ai attendu pendant une semaine et j'ai fait des démarches
ici, à Québec, pour rejoindre M. Filion. Finalement, j'ai pu
avoir le numéro de téléphone de son bureau à
Montréal. Il m'a assuré qu'il allait descendre pour faire
enquête, pour savoir comment il se faisait que la Canadian Glassine
faisait telle ou telle chose.
Entre-temps, M. Filion avait contacté quelqu'un de la Canadian
Glassine et on lui avait dit que les négociations avaient
traîné et que cela avait été remis. J'attends du
nouveau. J'aurais cru que M. Filion m'aurait rappelé, mais c'est moi qui
ai rappelé M. Filion. Il m'a dit qu'il ne restait pas beaucoup de temps
et qu'il ne pouvait pas faire grand-chose. C'est là que cela s'est
terminé.
M. Pagé: D'accord, au niveau des démarches et de ce
qui a été fait par le gouvernement. De toute façon,
j'espère que M. le ministre pourra nous préciser cela tout
à l'heure. Vous évoquez, dans votre mémoire, que, somme
toute, le problème serait le suivant. Cette entreprise était,
selon votre affirmation, rentable. La relation entre la partie patronale et la
partie syndicale, entretenue qu'elle était par le directeur ou le
contremaître général qui a pris prématurément
sa retraite suite à une transaction, si j'ai bien compris... Le tableau
qui nous est présenté c'est qu'il y aurait eu quelques sinon
plusieurs transactions dans un délai assez bref et que l'entreprise,
selon les allégations du dernier actionnaire ou du dernier patron, ne
serait plus rentable. Vous invoquez le fait que l'entreprise était
rentable il n y a pas longtemps et vous considérez qu'à la
lumière des informations de l'ancien contremaître
général, c'était une compagnie qui faisait ses frais et
qui avait suffisamment de liquidité pour pouvoir continuer non seulement
à fonctionner mais à progresser. J'aimerais savoir si vous
pourriez nous donner plus de détails sur cette question parce que c'est
vraiment la pierre d'achoppement de tout le reste puisque le motif
invoqué pour la fermeture éventuelle, c'est le fait que
l'entreprise ne fait pas ses frais. J'aimerais avoir plus de détails
là-dessus et j'aimerais, de plus, que vous nous informiez de ce qui
s'est passé chez vous depuis un certain temps. Quant à moi, j'ai
regardé votre dossier avec beaucoup d'intérêt et j'ai
été à même de constater que Canadian Glassine, de
prime abord tout au moins de toute façon les gens de Reed tout
à l'heure, par leur collaboration aux travaux de notre commission,
pourront nous le confirmer ou
nous l'infirmer avait effectué plusieurs transactions
depuis quelques années.
M. Michenki: En 1974, la compagnie a eu un octroi du gouvernement
fédéral et du gouvernement provincial pour remettre une vieille
machine en état...
M. Pagé: En passant, combien de machines avez-vous?
M. Michenki: Nous en avons deux. Dans ce temps-là,
c'était juste avant la négociation avant celle-ci, la compagnie
nous a demandé de prendre cela "easy", de ne pas demander trop...
M. Pagé: D'accord.
M. Michenki: ... pour lui donner une chance. La compagnie nous a
dit que lorsque toute la machinerie serait remise en bon état, cela
serait très rentable. En ce temps-là, cela appartenait à
Reed, qui avait dit avoir fait une enquête de six mois avant de prendre
cette décision.
M. Pagé: D'investir?
M. Michenki: Oui.
M. Pagé: Et par la suite?
M. Michenki: En ce temps-là, c'était Reed, parce
que M. Ingram avait des actions dans cette compagnie-là du
côté américain. Cette division est affiliée à
Fine Grade Specialty Paper, avec quatre autres filiales sur le
côté américain. Après que cette machine eut
été terminée et qu'elle eut commencé à
fonctionner, la compagnie a commencé à faire des
difficultés, disant que la machinerie n'allait pas assez vite pour
couvrir les frais. Entre-temps, nos anciens vendeurs ont été
congédiés, la compagnie a acheté leurs droits pour un
montant assez important; aujourd'hui, la dette de la compagnie...
M. Pagé: Avez-vous terminé votre réponse, M.
Michenki?
M. Michenki: Je ne sais plus où j'en étais.
M. Pagé: On en était aux transactions. Qu'est-il
arrivé par la suite?
M. Michenki: Après cela, Reed International a
acheté la part de M. Ingram, qui avait 20% des actions dans cinq des
compagnies impliquées. Aujourd'hui, cela appartient à Reed
à 100%. Depuis que Reed a pris possession des compagnies à 100%,
elle a engagé un nouveau directeur, qui est là depuis un an et
cela va de mal en pis depuis ce temps.
M. Pagé: Entre-temps, évidemment, j'aimerais que
vous m'entreteniez de ce qu'a pu être la production en termes de volume
depuis quelques an- nées, comparativement à ce qu'elle peut
être aujourd'hui; j'aimerais aussi avoir plus de commentaires sur cette
question des conditions de travail. Vous avez évoqué le fait que
vous aviez une convention collective qui liait les parties jusqu'au mois de mai
1978 et que, lors de l'avis de fermeture, il y aurait eu une reprise des
négociations.
M. Michenki: II y en a eu trois.
M. Pagé: Quelle est la production parce que mon
temps est limité ?
M. Michenki: Je vais laisser M. Roy répondre.
M. Roy (Fernand): En 1974, nous n'avions qu'une machine en marche
et nous faisions environ 18 millions de livres de papier par année sur
une période de six jours par semaine. Quand on a reconstruit l'autre
machine, cela a pris un an et demi avant de terminer la construction de la
machine qui a d'ailleurs été mise en marche en février
1976. Nous faisions en moyenne 24 millions de livres par année, à
cinq jours par semaine, sur les deux machines. On nous a toujours dit qu'il
fallait faire des échantillons pour en venir à une
rentabilité des deux machines, allant peut-être jusqu'à six
jours ou même sept jours de travail.
Les employés n'ont jamais refusé de travailler sept jours.
La compagnie nous a d'ailleurs dit que cela lui prendrait sept jours. Les
employés ont été d'accord même à donner les
sept jours, mais on nous a dit qu'on n'avait pas le marché. C'est comme
cela que la compagnie en est venue à nous envoyer des lettres nous
disant que la machine no 1 sur laquelle elle avait investi $2 millions,
était fermée après un an et quelques mois de
fonctionnement, qu'elle ne fonctionnerait plus. C'est là qu'elle en est
venue à continuer d'opérer, mais sur la machine no 2, l'ancienne,
qui est plus large, qui produit plus. On nous a demandé des
réductions de personnel dans l'usine pour fonctionner avec moins
d'employés et pour que cela soit plus rentable, disant qu'on avait perdu
environ $1,4 million depuis deux ans et demi, mais qu'auparavant, en 1974 et
même avant, on faisait de l'argent. C'est au moment où elle a
commencé à reconstruire la machine qu'elle nous a dit qu'elle
perdait de l'argent de mois en mois. C'est normal qu'une compagnie qui a $2
millions d'investissements ne s'attende pas à faire des gros profits les
premiers mois. C'est d'ailleurs ce qui est arrivé au bout d'un an et
demi. On nous a dit que ce n'était plus rentable et que cette machine
devait cesser de fonctionner.
M. Pagé: Et la date de fermeture aurait été
prévue pour le début de novembre prochain.
M. Roy (Fernand): Oui, le 9 novembre. C'est très proche
et...
M. Pagé: M. le Président, une dernière
question. Mon temps est terminé et je vais essayer de la formuler assez
rapidement. Compte tenu de la si-
tuation qui prévautremarquez qu'on aurait pu y passer
beaucoup plus de temps, et j'espère que le ministre, par ses questions,
pourra jeter plus de lumière dans ce dossier il y a quand
même un fait qui est indéniable de toute façon on
pourra échanger avec les représentants de la compagnie Reed tout
à l'heure. Il y a suffisamment selon moi, M. le Président,
d'éléments qui restent à préciser, de questions
à débattre vraiment et à voir d'une façon un peu
plus acceptable dans ce dossier, il y a suffisamment d'éléments,
dis-je, que la situation qui prévaut quand même chez vous depuis
le mois de mai aurait pu impliquer une prise en charge de ce dossier par le
gouvernement. Ma question au ministre est celle-ci: vous êtes un
représentant du gouvernement. Il y a un problème dans cette
entreprise et cela affecte 135 travailleurs ici, dans la région, et
c'est important pour notre économie. Je voudrais que vous
interprétiez ma question comme une suggestion que je vous formule.
Avez-vous l'intention d'intervenir, même si jusqu'à maintenant,
suite à des questions que je vous ai posées à
l'Assemblée nationale, vous m'avez répondu que ce n'était
pas de votre ressort et que, par surcroît, les représentants, ce
matin, nous informaient qu'on semble avoir un peu joué au ping-pong; le
dossier n'est pas à l'Industrie et Commerce, c'est à M. Landry,
c'est au ministre d'Etat, c'est au pupille, c'est au tuteur, etc. A la
lumière des faits, en tant que membre du gouvernement, vous avez une
responsabilité précise qui vous appartient, d'autant plus que si
ce secteur relève peut-être de l'Industrie et du Commerce, vous
avez, selon moi, en tant que ministre des Terres et Forêts, que vous le
vouliez ou non, votre mot à dire dans ce secteur de production.
Avez-vous l'intention d'agir? Parce que la fermeture est prévue pour le
début de novembre et au début de novembre je comprends que vous
aurez à fêter un anniversaire et que vous serez enthousiastes,
mais il y a des gens qui vont fêter d'une autre façon, qui vont se
retrouver sans emploi dans la région de Québec. Ajoutez à
cela l'élément que je vous ai cité au début,
à savoir que je trouve déplorable qu'il n'y ait pas eu de prise
de conscience de la part du gouvernement, des groupes sociaux, des
média, des syndicats et de tout le monde concerné par la
fermeture de cette entreprise. Ce sont suffisamment d'éléments
pour que vous, en tant que membre du gouvernement, interveniez de quelque
façon que ce soit auprès de la compagnie pour voir ce qui en est
réellement, pour voir quelles sont les possibilités que les deux
machines puissent continuer et j'aimerais de plus ma question ne se
limite pas au niveau de l'intention j'aimerais savoir quels sont vos
commentaires sur les propositions ou la façon dont cela pourrait se
faire. C'est ma dernière question, M. le Président.
M. Bérubé: M. le député, votre
question relève moins du ministre des Terres et Forêts comme tel
que du gouvernement en général. C'est le problème, qu'on
peut soulever, des fermetures d'usines. Fermetures d'usines qui se produisent
aussi bien dans le meuble, dans la chaussure, dans le textile, dans le papier
et dans d'autres industries. Fermetures qui causent à chaque fois un
problème social, un problème de chômage. Des fermetures
qu'on ne peut pas toujours éviter. Vous admettrez avec moi que si l'on
cite par exemple l'industrie suédoise des pâtes et papiers, il
faut reconnaître que dans l'espace de dix ans, c'est-à-dire
jusqu'en 1970, il y a 37 usines, en Suède, qui ont fermé. Il y en
a évidemment beaucoup d'autres qui ont été reconstruites,
l'objectif étant évidemment une rationalisation et une
modernisation de leur industrie. Il faut donc parfois procéder à
des fermetures et je pense que dans tout organisme vivant il y a des cellules
qui meurent et des cellules qui naissent et cela caractérise la vie. Par
conséquent, en ce sens, le problème que vous soulevez, c'est
toute la philosophie que pose le problème des fermetures. A
l'intérieur du gouvernement, présentement, je pense que nous
réfléchissons au problème de l'attitude
générale du gouvernement face aux fermetures, problème de
réorganisation industrielle. Mais, cette commission s'assemble
aujourd'hui pour discuter du problème de l'industrie des pâtes et
papiers. Aussi, voyons dans quel esprit le gouvernement a abordé le
problème de l'industrie des pâtes et papiers jusqu'à
maintenant.
Nous avons d'abord dû constater que, dans le passé, les
gouvernements n'étaient pas équipés pour faire face
à des problèmes, ce qui fait qu'on créait, à
quelques reprises, des cas ad hoc je pense au cas de Tembec, on a fait
de l'ad hoc dans le sciage particulièrement on a fait beaucoup de
ad hoc. Le danger d'une telle approche nous a été mis sur le nez
par les gens de l'industrie. Ils disaient: Vous soutenez souvent des
entreprises non rentables et, par le biais de votre action, vous
dérentabilisez nos autres entreprises, ce qui fait que vous causez des
faillites. C'est l'argumentation qu'on a entendue. Je ne sais pas si elle est
vraie ou fausse. C'est difficile à juger quand on n'a pas d'autres
éléments qu'une prise de décision purement ponctuelle. Il
faut donc à un certain moment avoir une vue d'ensemble.
Le gouvernement a décidé d'avoir une vue d'ensemble.
Idéalement, ce serait évidemment d'avoir une vue d'ensemble de
l'industrie au Québec, je pense que ce serait l'idéal, mais ce ne
serait pas réaliste puisque nous pressurerions les ressources humaines
que nous avons à tel point que nous perdrions toute efficacité.
Nous avons donc dû faire un choix. Le choix que nous avons fait, comme
gouvernement, c'est celui de nous attaquer à l'industrie de
première transformation, c'est-à-dire l'industrie qui prend du
bois, de la matière ligneuse, pour en faire un produit. Ceci nous a
amenés à nous pencher sur le problème d'un grand nombre
d'usines au Québec, mais évidemment, de par la définition
que nous avons adoptée, à ne pas considérer le cas de
Glassine.
Dans toutes les études préliminaires que nous faisons
depuis décembre, nous n'avons donc jamais abordé le
problème des usines comme celui soulevé ce matin. En partant,
nous n'avions pas d'information. Lorsque le problème de Wayaga-
mack et d'East Angus s'est posé, nous avons estimé avoir
un devoir moral au moins d'examiner la situation, parce qu'il s'agissait
là d'usines qui relevaient du mandat qui nous avait été
accordé. Mais le cas de la Canadian Glassine ne relevait pas de notre
mandat; pour cette raison, nous avons dit aux gens de Glassine: II semble bien,
pour autant que nous sommes concernés, que nous n'avons pas pour
l'instant le mandat de regarder ce type d'industrie et le gouvernement ne nous
l'a pas confié. D'autre part, nous avons des ressources humaines
limitées et j'ai déjà dit en Chambre que je pense que ce
serait dangereux pour le gouvernement de faire du cas par cas. Le nombre
d'usines qui ferment au Québec est évidemment élevé
chaque année, de même qu'en Ontario ou ailleurs. Si, chaque fois,
nous mobilisons une équipe de deux, trois ou quatre fonctionnaires pour
faire l'étude, ce qui va se produire, c'est que, très rapidement,
nous allons mobiliser tous les ministères à faire du cas par cas,
et on ne réglera pas les problèmes structurels de base de notre
économie. Il faut donc faire un choix à un certain moment. Nous
avons fait un choix, celui de nous attaquer au problème global de
l'industrie de première transformation et nous avons dû
forcément faire des sacrifices. Par sacrifices, on veut dire que dans
les autres secteurs, nous suivons la procédure normale,
c'est-à-dire que si, à un moment donné une entreprise doit
fermer ses portes, qu'elle doit négocier avec son syndicat de nouvelles
conditions de travail, nous disons que cela relève du ministère
du Travail ou que cela peut relever du ministère de l'Industrie et du
Commerce, s'il est équipé pour y faire face. Il est très
probable que le ministère de l'Industrie et du Commerce, comme dans le
passé, ne soit pas équipé pour y faire face et que, par
conséquent, le ministère de l'Industrie et du Commerce soit
amené à dire: Ecoutez, après examen, nous ne nous sentons
pas présentement en mesure de répondre à votre attente;
nous pensons que c'est une question de relations de travail et que cela devrait
se négocier entre le syndicat et l'entreprise, comme, d'ailleurs, chaque
fois qu'il y a une situation comme celle-là, les gens qui sont
impliqués, ce sont quand même les travailleurs et l'entreprise. En
gros, cela vous résume donc un peu notre philosophie.
M. Pagé: II y a une autre question que je poserais au
ministre. C'est très bien, cela. Nous souscrivons au principe d'aborder
le problème dans son envergure générale, nous y
souscrivons. A plusieurs reprises, depuis le début des travaux de cette
commission, on a parlé d'un plan de relance qui pourrait être
éventuellement annoncé par le gouvernement. Des informations dans
la presse ont même fait état du moment...
M. Bérubé: Dans les usines, $6 millions.
M. Pagé: Ces $6 millions dans les usines, cela a
été dégonflé assez rapidement. Vous n'en parlez
plus. Parlons d'autre chose. On a fait état que, possiblement, dans le
prochain budget, il y aurait des mesures particulières qui seraient
mises de l'avant par le gouvernement. Tout cela dans le cadre d'un plan de
relance qu'il reste à définir. Abstractions faite du fait que
nous sommes ici pour étudier le problème en
général, abstraction faite du motif que vous invoquez que vous ne
voulez pas agir de façon ponctuelle, cas par cas, de façon ah
hoc, abstraction faite de tout cela, ne croyez-vous pas qu'en attendant un plan
de relance pourrait éventuellement contribuer à améliorer
la situation qu'on connaît au chapitre des papiers fins?
Entre-temps, suite à des représentations du
ministère ou du gouvernement, la couronne dans le sens large, dont vous
faites partie, le gouvernement, pourrait intervenir pour voir, tout au moins,
avec la compagnie, s'il n'est pas possible de continuer les activités
telles qu'elles sont actuellement, jusqu'à ce qu'un plan de relance soit
proposé. Je ne sais pas, M. le ministre, mais cela n'aurait pas pris le
travail de tout votre effectif; vous auriez pu, et vous pourriez encore, entrer
en communication avec l'entreprise pour voir, de la façon la plus
sommaire possible, pour établir une relation, un contact pour voir s'il
n'est pas possible, pour la compagnie, de continuer ses activités
jusqu'à ce qu'un plan de relance quelconque soit proposé par le
gouvernement. Cela pourrait peut-être permettre et contribuer à
sauver l'industrie ici, à Québec. Il ne faut pas vous
dégager comme cela d'une responsabilité que vous avez, M. le
ministre, en tant que membre du gouvernement. La responsabilité vous
appartient. Vous avez fait état de cas où l'ancien gouvernement
avait agi de façon ad hoc. C'est le cas de Tembec; l'ancien gouvernement
a peut-être agi de façon particulière pour le cas du
Nord-Ouest québécois. Mais cela a été concluant.
Ils ont d'ailleurs déposé un mémoire et ils seront en
mesure d'en faire état. Ils ont d'ailleurs un programme
d'investissements prévus. A plusieurs reprises vous reprochez, et je ne
veux pas entrer là-dedans, vous reprochez à l'ancien gouvernement
d'avoir agi de façon ad hoc dans des cas particuliers, mais Tembec est
un exemple éloquent de la conclusion positive d'une intervention comme
celle-là. Ce que je dis, ce n'est pas de s'associer à
l'entreprise pour élaborer un programme de relance,
spécifiquement à la Canadian Glassine, ce n'est pas ce que je
dis. Je demande qu'un contact soit établi, un contact officiel, un
contact formel, dans les plus brefs délais, parce que cela traîne
depuis le mois de mai et l'échéancier du début de novembre
s'en vient à grands pas, entre le gouvernement et les
représentants de la compagnie, pour voir s'il est possible de surseoir
à la fermeture de l'entreprise jusqu'à ce qu'un plan de relance
soit énoncé par le gouvernement. Cela ne prendrait pas beaucoup
d'efforts des gens de votre ministère, M. le ministre.
M. Bérubé: Le seul et unique problème que je
vois à cela, il est relativement simple. C'est que, effectivement,
dès la fermeture de la Wayagamack, il y a eu des contacts
immédiats entre le gouvernement et la société. Le seul
problème c'est que si la société vous dit blanc, vous avez
deux choix.
Soit que vous les croyiez sur parole, soit que vous demandiez à
vérifier. Or, je pense qu'il ne fait aucun doute que si je devais
rencontrer les dirigeants de l'entreprise de la Canadian Glassine, et si je
devais leur demander: Etes-vous rentables ou non? Ils me répondraient
non puisqu'ils ne peuvent pas se contredire eux-mêmes. Ils vont donc me
répondre non.
M. Pagé: Dans d'autres cas, vous avez eu des chiffres.
M. Bérubé: A ce moment-là, je n'ai d'autre
solution que de dire il faut des chiffres.
M. Pagé: Oui.
M. Bérubé: II faut donc les faire vérifier
par des comptables...
M. Pagé: Oui.
M. Bérubé: ... il faut vérifier
l'état technologique de l'entreprise et c'est ce que le gouvernement,
ayant des ressources humaines limitées, a choisi de ne pas faire.
M. Pagé: M. le ministre, quand même, vous avez
suffisamment d'effectifs et je connais suffisamment la compétence des
gens qui sont en arrière de vous, je sais que ce sont des gens
déterminés, compétents et qui font un bon boulot. Ces
gens-là sont capables...
M. Bérubé: Ils font de l'excellent boulot. Mais ce
qui fait qu'ils font un excellent boulot, c'est qu'on leur donne les moyens et
le temps nécessaires pour faire un bon boulot.
M. Pagé: ... d'avoir un tableau financier de
l'entreprise.
M. le Président, je vous dirai qu'autant j'étais
peiné tout à l'heure quand je disais que le cas de Canadian
Glassine n'avait pas fait l'objet d'une conscientisation des gens de la
région de Québec, du gouvernement, des députés de
la région de Québec parce qu'il y a un caucus
régional entre autres autant je déplore le fait qu'avec
les milliers d'employés au gouvernement du Québec, avec le budget
qu'on a adopté ici lors de l'étude des crédits
alloués au ministère des Terres et Forêts, à la
lumière des gens compétents et capables de faire le boulot que
vous avez dans votre ministère, vous invoquiez comme ultime motif: "Nos
gars n'ont pas le temps". M. le ministre, excusez-moi, non seulement c'est
déplorable, mais c'est inacceptable, purement et simplement. Ce n'est
pas acceptable de se faire répondre cela ce matin. On n'a pas le
temps.
M. Bérubé: C'est une question de choix, de
priorité. Et les priorités ont été prises de se
diriger vers une politique qui traitait l'industrie des pâtes et papiers
de première transformation et s'il peut se retrouver demain des
faillites dans une entre- prise fabriquant des boîtes de carton, le
ministère n'a pas l'intention d'intervenir pour faire une
évaluation sur la rentabilité de l'usine faisant des boîtes
de carton.
M. Pagé: Oui, mais ce sont des cas hypothétiques,
M. le ministre. Le cas est là.
M. Bérubé: Ce ne sont pas des cas
hypothétiques. A un moment donné, il a fallu...
M. Pagé: Le cas est là et ce ne serait pas
compliqué. Est-ce à dire que vous dites non définitivement
aux requêtes formulées par ces gens ce matin? Vous aviez promis
d'être un bon gouvernement. On ne demande pas mieux, que vous en soyez un
bon et on vous suggère d'en être un bon. Vous avez une
responsabilité sociale à l'égard de ces gens.
M. Bérubé: Je pense que ce serait beaucoup plus
malhonnête de ma part de leur faire croire que nous allons faire quelque
chose, alors qu'en pratique, sachant que nous n'en avons pas les moyens, nous
ne ferons rien. Je préfère dire carrément, compte tenu des
ressources humaines, compte tenu des délais que nous avons à
respecter, compte tenu des budgets que nous devons préparer, compte tenu
des négociations que nous devons entreprendre avec Ottawa, compte tenu
d'un paquet d'échéanciers immédiats, que c'est
malhonnête de leurrer les gens et c'est ce que je refuse de faire.
M. Pagé: M. le Président, merci. Les gens jugeront
par eux-mêmes. C'est déplorable, c'est inacceptable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! Le temps alloué selon la motion qui a
été adoptée unanimement est expiré. J'inviterais
maintenant la Papeterie Reed Ltée et ses représentants à
venir présenter le mémoire de celle-ci.
M. Pagé: Messieurs, merci et bonne chance. M. Michenki:
Merci beaucoup.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Puis-je
demander au porte-paroje de se présenter et de présenter ses
collègues, s'il vous plaît?
Papeterie Reed Ltée
M. Maclver (Donald): M. le Président, M. le ministre, MM.
les députés, je suis Donald Maclver, président et
directeur général de Papeterie Reed Ltée. Permettez-moi de
vous présenter mes collègues à cette table: A ma droite,
M. André Sarasin, directeur de la fabrication, M. Peter Williams,
directeur résident, division de Forestville; M. Stewart Gordon,
vice-président exécutif; à ma gauche, M. Raoul Buser,
vice-président du groupe technique; M. Elzéar Paquette, directeur
du domaine forestier et chef forestier; M. Kenneth Greaves, premier
vice-président.
Papeterie Reed Ltée a respectueusement soumis son mémoire
à la commission permanente
des richesses naturelles et des terres et forêts. Aujourd'hui,
nous vous présentons un résumé des points importants de
notre mémoire qui méritent une attention particulière.
Nous avons joint à ce résumé quelques photographies
illustrant certaines phases de nos exploitations. Nous demandons que ce
résumé, ainsi que les photographies, soient
considérés comme faisant partie des dossiers de la
commission.
Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir invités à
participer à cette commission parlementaire en vue d'étudier les
perspectives, l'avenir de l'industrie des pâtes et papiers du
Québec.
La nature même de cette demande démontre que le ministre
des Terres et Forêts considère le travail de la commission ainsi
que notre participation comme des étapes positives, ne pouvant
déboucher que sur un meilleur avenir pour l'industrie des pâtes et
papiers et pour le Québec tout entier. Nous souscrivons pleinement
à cette approche. Maintenant, M. Elzéar Paquette va vous
présenter le résumé de notre mémoire.
M. Paquette (Elzéar): M. le Président, M. le
ministre, MM. les députés, notre compagnie, autrefois connue sous
le nom de Anglo-Canadian Pulp and Paper Mills Lid, célèbre cette
année le 50e anniversaire de sa fondation. Pendant un
demi-siècle, le nom "Anglo" a fait partie du vocabulaire des citoyens de
la ville de Québec. Depuis 1975, te nom de la compagnie est Papeterie
Reed Ltée, une filiale de Les Papiers Reed Ltée, compagnie qui
fabrique et vend des pâtes et papiers, des produits d'emballage et de
décoration, des produits chimiques, du bois et des produits finis pour
la construction.
Les Papiers Reed Ltée est une compagnie canadienne dont les
actions sont transigées sur les marchés de la bourse de
Montréal et de Toronto. Au cours de ce dernier demi-siècle, notre
compagnie a développé, dans la ville de Québec, une
industrie que l'on peut considérer à juste titre comme le plus
important complexe industriel de la vieille capitale. Avec quatre machines
à papier journal, nous produisions 400 tonnes de papier par jour en
1927. Aujourd'hui, ces mêmes quatre machines peuvent produire 980 tonnes
par jour. Au cours des années, nous avons ajouté deux machines
à pâte commerciale au bisulfite, une machine à carton et
une usine de produits chimiques. L'ensemble de notre complexe constitue
approximativement 20% des activités de Les Papiers Reed Ltée.
D'autre part, un des points névralgiques de notre complexe industriel
est situé sur la Côte-Nord, à 200 milles à l'est de
Québec; c'est Fores-tville, notre centre des exploitations
forestières, d'où nous vient la majeure partie de
l'approvisionnement ligneux nécessaire au fonctionnement continu de
notre usine à Québec.
Un aspect particulièrement important des travaux de la commission
est la politique clairement énoncée par le ministre et selon
laquelle il est nécessaire de favoriser le développement des
richesses forestières du Québec. C'est une approche
encourageante, puisque c'est reconnaître que la forêt est une
ressource renouvelable qui peut être améliorée et qui
représente un actif très important pour l'économie du
Québec.
Nous croyons qu'il est souhaitable de maintenir les emplois actuels et
d'augmenter les possibilités d'emplois productifs et
intéressants. Nous croyons qu'il existe un consensus
général en faveur de la multiplicité des investissements
dans le secteur manufacturier au Québec. Nous croyons aussi qu'il est
nécessaire que les industries québécoises soient
compétitives dans d'autres parties du monde. Nous croyons que le
Québec veut maintenir les établissements de recherche et le
développement qui permettront à notre industrie de se maintenir
à l'avant-garde du progrès technique. Enfin, nous croyons que
tout le secteur de la société québécoise est
conscient que le potentiel humain du Québec doit être
développé au maximum.
Papeterie Reed Ltée est entièrement d'accord sur tous ces
objectifs et buts à poursuivre. Nous avons soumis notre mémoire
dans l'espoir que les résultats des travaux de la commission puissent
déboucher sur de meilleurs moyens de réaliser nos objectifs
communs, grâce au raffermissement de notre industrie, dans un esprit de
compréhension et de coopération.
Les réalisations passées de notre compagnie nous ont
procuré une expérience précieuse et nous permettent
d'envisager ensemble et avec confiance nos plans pour l'avenir. Certaines de
nos réalisations sont décrites en détail dans notre
mémoire. Qu'il nous soit permis ici d'énumérer
brièvement les plus importantes. C'est ainsi que depuis 1927, date de la
mise en opération de notre complexe manufacturier de Québec, la
production de papier journal a plus que doublé. Dans le domaine de
l'exploitation forestière, nous avons introduit de l'équipement
moderne qui nous a permis d'atteindre, selon des méthodes nouvelles, un
niveau de productivité qui a incité nos concurrents à nous
imiter, tant au Québec qu'ailleurs. Nous avons mis au point un
système de transport de bois par barge qui est unique au Québec.
Nous avons pris des mesures en vue de réduire l'impact de nos
opérations sur l'environnement naturel. Certaines d'entre elles sont
uniques dans l'industrie canadienne des pâtes et papiers. A titre
d'exemple, mentionnons l'établissement d'une usine chimique de
fabrication de lignosulfonates. Bien que ces produits chimiques soient en
eux-mêmes d'une grande importance, leur fabrication est basée sur
les sous-produits tirés de nos opérations de cuisson de
copeaux.
C'est ainsi que nous avons pu éliminer une partie importante des
matières polluantes contenues dans les effluents de l'usine, diminuant
ainsi la portée de nos problèmes écologiques.
De plus, nous avons démontré que nous étions
disposés et prêts à participer avec d'autres entreprises et
divers gouvernements dans le but de résoudre des problèmes
communs ou de réaliser des objectifs conjoints. L'entente
réalisée avec la Communauté urbaine de Québec, qui
a finale-
ment permis la construction de l'incinérateur actuel, est un
exemple de collaboration remarquable. Grâce à nos achats de vapeur
provenant de l'incinérateur, l'installation pour le brûlage des
déchets a été en mesure de fonctionner de façon
plus rentable et d'épargner au contribuable un fardeau fiscal accru,
tout en réduisant de façon appréciable nos besoins en
énergie produite de façon conventionnelle.
Un autre exemple de notre attitude de copar-ticipation réside
dans la collaboration étroite avec les gouvernements
fédéral, provincial et municipaux dans la planification, le
financement et la réalisation d'un vaste système des eaux
usées. Grâce à ce projet, les eaux usées de notre
usine sont dirigées vers le diffuseur de Québec
métropolitain.
Nous croyons que toutes ces réalisations permettent d'entretenir
des espoirs pour l'avenir et nous considérons que ce climat de confiance
est un avantage pour notre compagnie.
Par ailleurs, il nous fait tous reconnaître que l'industrie doit
surmonter de nombreux problèmes et certains relèvent de la
compétence de l'industrie ou du gouvernement et d'autres sont hors de
notre contrôle. C'est pourquoi nous devons insister sur la
nécessité d'un examen rationnel des problèmes que nous
avons à affronter et sur l'obligation d'établir les
priorités d'une façon réaliste. Surtout, nous devons tous
admettre que, dans le monde entier, la fabrication des pâtes et papiers
est une activité intensément compétitive,
nécessitant de très importants capitaux.
Quels que soient les critères et les méthodes
employés, tous les concurrents de notre industrie savent que leurs
exploitations doivent être rentables afin d'engendrer les capitaux requis
pour entretenir et améliorer leurs usines, attirer de nouveaux
investissements et, enfin, faire face à toutes leurs obligations.
Nous pensons donc que la commission doit reconnaître que notre
industrie doit demeurer rentable, sans quoi les autres objectifs ne pourront
être atteints. A cette fin, il faut donc qu'une entreprise soit en mesure
de manufacturer des produits de haute qualité à des coûts
compétitifs, des produits qui pourront être vendus en pays
étranger en dépit de la concurrence et des coûts
élevés de transport.
La direction de Papeterie Reed Ltée s'est fermement
engagée à poursuivre son programme d'amélioration de la
productivité et de la qualité de ses produits de façon
à pouvoir satisfaire aux nombreuses exigences venant des clients, des
gouvernements, des employés, des actionnaires et de la
société en général.
A notre avis, il est de la plus haute importance de convenir que le
Québec ne doit pas laisser échapper l'avantage des
investissements importants que l'industrie papetière détient
aujourd'hui dans la province.
Nous croyons fermement qu'avec l'accroissement de la demande sur les
marchés, des projets entièrement nouveaux naîtront au sein
de notre industrie au Québec. Ces projets devraient être bien
accueillis en raison des nombreux bénéfices qu'ils procureraient
au Québec. Cependant, on ne doit pas oublier que la préoccupation
première doit être de maintenir et d'améliorer la
productivité et la rentabilité des usines déjà
existantes, qui semblent être viables.
Nous sommes donc d'avis qu'il serait dangereux de n'accorder
d'importance qu'aux nouveaux projets et de négliger les industries
existantes car cela pourrait avoir de graves répercussions au point de
vue social et sous d'autres aspects.
Ceci dit, nous sommes les premiers à admettre que certaines
usines ne sont sans doute pas viables à long terme. Dans de tels cas, le
gouvernement serait peut-être tenté de soutenir, de telles
installations afin de préserver des emplois ou d'autres avantages. Une
fois de plus, nous devons faire appel à la prudence.
A notre avis, il serait contraire aux intérêts du
Québec d'accorder à long terme de trop grands avantages à
des usines périclitantes aux dépens de celles qui semblent avoir
un avenir intéressant. Dans le cas de Papeterie Reed Ltée, nous
avons de bonnes raisons d'envisager l'avenir avec confiance. Cependant, nous
sommes réalistes et nous reconnaissons que notre complexe manufacturier
est relativement ancien, lorsqu'on le compare aux installations de certains de
nos concurrents dans le monde.
Nous avons étudié ce problème dans tous ses
détails et nous sommes arrivés à la conclusion qu'il
était plus logique de moderniser nos machines existantes que d'installer
de nouvelles machines à papier journal.
Nous sommes convaincus que le gouvernement reconnaît l'importance
et la valeur de l'industrie des pâtes et papiers et qu'il cherche
activement les moyens pour en développer tout le potentiel. Cependant,
la société québécoise dans laquelle nous
évoluons, devra, à court terme, comprendre les
réalités concernant l'avenir de notre industrie, maintenir un
climat social et économique sain, enfin, aider l'industrie des
pâtes et papiers à reprendre sa place compétitive sur le
marché mondial. Dans notre mémoire, nous avons décrit
d'une part les avantages que nous possédons, et d'autre part, les
problèmes que nous avons à affronter. Nous sommes convaincus que
nous possédons au Québec une exploitation viable, mais nous
sommes conscients que des investissements importants devront être faits
afin d'assurer notre viabilité à long terme.
Par ailleurs, nous recommandons que le gouvernement, en collaboration
avec l'industrie, premièrement, établisse les priorités en
favorisant d'abord le maintien et la meilleure action des usines existantes
douées d'un avenir viable; deuxièmement, favorise le
développement de projets nouveaux seulement aux endroits où ils
seront justifiés, et en autant que le marché pourra absorber une
production additionnelle, sans affecter la mise en marché des produits
des usines en place; troisièmement, accorde une attention toute
spéciale aux principaux facteurs pouvant affecter notre position
compétitive mondiale tels que les taux
d'imposition fiscale, les coûts du transport et de la
main-d'oeuvre et la productivité en général.
En ce qui nous concerne, nous avons fait une étude minutieuse des
diverses options qui s'offraient à nous. Nous avons mis au point un plan
global couvrant toutes nos activités. L'objectif principal de ce plan
est d'accroître progressivement la productivité, tout en
contrôlant les coûts de fabrication et surtout en améliorant
la qualité de nos produits. Notre plan global repose sur un programme
d'investissement par étape. C'est là pour nous l'approche la plus
raisonnable et la plus raéliste, car les revenus des investissements de
chaque étape pourront générer une bonne partie du capital
nécessaire pour la réalisation des phases successives.
L'imposition de normes écologiques trop rigides, surtout si elles
étaient imposées à court terme, aurait pour effet
d'interrompre l'échéancier de notre programme et pourrait mettre
en danger la viabilité future de notre établissement. Nous
demandons respectueusement à la commission de bien vouloir
considérer avec attention certains points particuliers qui pourraient
signifier la réussite ou compromettre les réalisations de notre
plan d'action.
En conséquence, nous recommandons, premièrement, que le
gouvernement du Québec reporte à 1985 l'entrée en vigueur
des normes écologiques relatives à nos effluents liquides. Durant
ce temps, Papeterie Reed Ltée continuera à mettre en oeuvre les
mesures destinées à l'assainissement de l'air et procédera
à des améliorations qui auront pour effet de réduire les
pertes des effluents liquides.
Deuxièmement, que le gouvernement du Québec
établisse un système, de sorte que l'industrie qui investit dans
des projets concernant l'environnement et dont la rentabilité ne peut
être qu'à long terme, pourrait être encouragée
à le faire par des allégements de taxes ou par des subventions ou
encore par le financement d'obligations à un taux
préférentiel par les municipalités ou la province.
Troisièmement, que le gouvernement du Québec porte une
attention particulière à des problèmes relatifs à
l'emplacement de notre usine, tels que le remplacement des terrains de grande
valeur perdus à la suite de l'expropriation pour la construction de
l'autoroute Dufferin-Montmorency, l'amélioration de nos voies
d'accès, une aide immédiate afin de trouver une solution au
problème du dragage dans l'estuaire de la rivière
Saint-Charles.
Quatrièmement, que le gouvernement aide Papeterie Reed
Ltée à poursuivre son plan d'action en vue d'économiser
l'énergie, notamment en prolongeant et en améliorant le programme
actuel de l'amortissement accéléré des équipements
destinés à la conversion et à la conservation de
l'énergie, en établissant des tarifs préférentiels
pour l'énergie hydroélectrique, plus particulièrement en
ce qui concerne l'énergie électrique excédentaire;
Cinquièmement, que le gouvernement four- nisse une aide
financière spéciale pour couvrir le coût des
investissements nécessaires à l'expansion de l'usine Lignosol,
permettant ainsi de créer des emplois, d'augmenter les exportations,
d'améliorer le rendement de la matière ligneuse et de
réduire l'impact des activités de notre usine de pâtes et
papiers sur l'environnement naturel.
Nous avons, dans notre mémoire, attiré l'attention de la
commission sur notre devoir de maintenir une organisation stable concernant nos
opérations forestières à Forestville. En raison de
l'importance du volume et de la qualité du bois venant de nos
concessions forestières, à cause de notre responsabilité
de préserver le caractère de viabilité de Forestville,
enfin pour garder nos coûts de production aussi bas que possible et
à un niveau compétitif, en conséquence, nous
recommandons:
Premièrement, que le ministère des Terres et Forêts
reconnaisse la nécessité que nous puissions suivre un plan
d'approvisionnement stable et établi suivant la possibilité de
nos concessions forestières actuelles;
Deuxièmement, que les contraintes occasionnées par toute
perturbation découlant de situations de pénurie ou de surplus de
matière ligneuse soit partagées équitablement entre notre
compagnie et nos fournisseurs.
Comme les forêts privées du Québec constituent une
importante source d'approvisionnement pour l'industrie des pâtes et
papiers et l'industrie du sciage et parce que cette source d'approvisionnement
est indispensable pour certaines usines qui, autrement, ne pourraient continuer
à fonctionner, nous recommandons:
Premièrement, que le ministère des Terres et Forêts
prenne les mesures qui s'imposent afin de connaître de façon plus
précise l'état et le volume marchand actuel des forêts
privées;
Deuxièmement, que le ministère des Terres et Forêts
établisse la possibilité annuelle de coupe des forêts
privées par régions bien définies.
En terminant, énonçons clairement ce que doivent
être nos priorités. Tout d'abord, il nous faut améliorer la
productivité et la qualité de nos produits afin de pouvoir
engendrer le capital nécessaire à des expansions futures. Ayant
ainsi établi une base solide, il nous sera ensuite possible de
poursuivre la réalisation de programmes importants, tel celui de la
modernisation de l'usine. A court terme, nos principaux efforts devront donc
surtout porter sur l'augmentation de la productivité et
l'amélioration de la qualité des produits. En même temps,
nous nous efforcerons de résoudre les problèmes qui ont un impact
direct sur l'environnement, comme par exemple les émissions
atmosphériques.
Par conséquent, il faut de toute nécessité que la
commission comprenne notre situation actuelle et accepte le programme
d'amélioration que nous proposons car, tout comme plusieurs autres
industries au Québec, nous risquons de perdre les derniers avantages que
nous possédons présentement. Si nous perdons ces avantages, nous
perdons tout. Cependant, si nous pouvons obtenir
l'aide nécessaire, nous sommes assurés que Papeterie Reed
Ltée pourra non seulement prospérer, mais également
honorer ses engagements sociaux qui sont de plus en plus nombreux et
exigeants.
Messieurs, c'est dans un esprit de compréhension et de
coopération que notre mémoire vous a été
soumis.
M. Maclver: M. le Président, je suis président de
la compagnie Les Papiers Reed Ltée depuis le mois de mai dernier. Au
cours de cette courte période à la direction de notre compagnie,
je me suis rendu compte que nous avions, dans la province de Québec, une
équipe opérationnelle efficace et expérimentée.
Cette équipe a mon entière confiance. De plus, je suis convaincu
qu'avec l'appui soutenu du gouvernement, nos activités au Québec,
soit plusde 20% des intérêts de Reed au Canada, vont continuer
à être rentables et viables à long terme, pour autant,
cependant, que nous soyons assurés d'un approvisionnement de
matière ligneuse de bonne qualité, à un prix
compétitif, et pour autant que nous soyons toujours libres de vendre nos
produits finis sur le marché de notre choix.
Je regrette de ne pas avoir l'habile voulue pour m'exprimer en
français pour répondre correctement à vos questions. C'est
pourquoi je sollicite votre indulgence pour les réponses que j'aurai
à donner en anglais aux questions qui seront de ma
responsabilité. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie beaucoup, votre français est excellent. Je cède la
parole au député de Dubuc.
M. Desbiens: M. le Président, je remercie d'abord les
messieurs de la compagnie Reed de la présentation de leur mémoire
et de la réponse qu'ils ont ainsi donnée à l'invitation de
la commission. Comme je n'ai pas à me convaincre de mon
objectivité à chaque intervention, comme notre collègue de
l'Opposition, je passe immédiatement à l'étude du
mémoire.
Evidemment, le temps est limité et un fait nouveau s'est
présenté ce matin, en commission, soit le mémoire du
syndicat de Canadian Glassine; ceci m'amène à changer un peu mes
questions et aussi à les limiter. Vous ne serez peut-être pas
surpris que je vous pose des questions qui nous ont été
recommandées par le syndicat de Canadian Glassine.
Est-ce que vous seriez disposés à y répondre? A la
première question, on demandait quelles sont les relations
financières entre le groupe Reed et Canadian Glassine?
M. Maclver: M. le Président, au sujet de cette question
concernant Canadian Glassine, je comprends et partage les inquiétudes du
député. Je dois vous dire que Papeterie Reed Limitée n'est
pas directement impliquée dans la direction de cette compagnie.
Cependant, je suis conscient du problème et je suis
disposé à tenter de répondre aux questions, mais je
préfère que l'on continue et termine tout ce qui concerne
Papeterie Reed Ltée. Ensuite, nous parlerons de Canadian Glassine.
M. le Président, seriez-vous d'accord avec cette proposition?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
ce sont les membres de la commission qui vont en disposer.
M. Desbiens: Le temps est quand même limité. Je vais
y aller, dans ce cas. A la page 69 de votre mémoire, c'est
évidemment sur les relations patronales-ouvrières, vous
mentionnez que les relations entre la direction de la Papeterie Reed et les
syndicats ont été relativement stables depuis ('existence de
l'usine, à Québec et vous mentionnez, dans le deuxième
paragraphe, que vous rencontrez régulièrement les
représentants des syndicats de l'usine, hors de la table de
négociation, ce qui vous permet, selon vous, un échange
d'opinions et d'informations. Vous ajoutez, au dernier paragraphe, que, pour
améliorer le rendement de la main-d'oeuvre et pour que cela se
réalise dans un climat de compréhension, il faut que les trois
parties concernées, compagnie, syndicats et gouvernement, participent ou
se concertent.
Ce n'est pas la première fois, dans les mémoires qui nous
sont transmis, qu'on lit ce genre de recommandations. Quand on
considère, d'autre part, le mémoire, et je suis bien
obligé d'y revenir, qui nous a été transmis ce matin par
Canadian Glassine, je vous pose la question: Jusqu'à quel point
êtes-vous prêts, comme société, comme compagnie,
à établir vraiment ce climat qui permettrait une concertation
véritable entre les trois agents?
M. Maclver: The question, I think, goes to the competitive
position of the industry. Our philosophy is that many parties have a very great
interest in the future of this industry, certainly the company, certainly the
employees, certainly the unions and certainly governments.
The industry, its competitiveness in the future and its very future
itself are very important to all three parties, plus others as well, the
community, suppliers, customers.
In our view, relative to the existing non competitive position of the
industry, it will take the cooperation of at least these three parties who have
an interest in the future of the industry to bring the industry back to a
competitive position, vis-à-vis our major competitors, particularly
those of the Southern United States. As to the exact modes of the cooperation
you are suggesting between the three parties, the first thing which we must
begin to do is enter into dialogue and hopefully arrive at solutions which
should be based on the mutual interests' that we have on a long term basis in
the industry.
I think that one of the problems that we have had in the past is an
inadequate amount of dialogue between the various parties, which has created a
lack of understanding and a great suspicion as between the parties. And the
first
step which we must take is to commence this dialogue.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y en a un qui pourrait traduire, s'il vous plaît?
M. Buser (Raoul): Je vais récapituler ce que M. Maclver a
dit. Essentiellement, il dit que, pour l'avenir de l'industrie, les trois
parties sont très importantes, que tout le monde doit avoir cela comme
objectif et qu'une coopération des trois partenaires est essentielle. Il
faut qu'on soit compétitif dans le marché, dans notre cas, c'est
surtout dans le sud des Etats-Unis. Cette coopération entre les trois
agents est essentielle. M. Maclver a aussi expliqué des points plus
précis. Ce qu'il veut dire, c'est qu'un dialogue doit être
entrepris et amélioré entre les trois parties en présence,
et que la compréhension doit s'établir pour que les trois parties
n'entretiennent pas de suspicion l'une envers l'autre et qu'il en
résulte plus de coopération.
M. Desbiens: A ce moment, pour qu'il y ait coopération, il
est nécessaire qu'un climat de confiance existe entre les trois parties.
Dans quelle mesure ou de quelle façon votre compagnie
prévoit-elle procéder pour établir ce climat de confiance
dans les relations? Par exemple, dans les rencontres, si vous
réaffirmez, évidemment, votre volonté de participation
à une concertation entre les trois agents économiques, est-ce
que, dans le cas de la fermeture prévue de la Canadian Glas-sine, j'y
reviens il y a eu avec le syndicat une rencontre et est-ce que vous lui avez
exposé clairement la situation?
M. Maclver: La Papeterie Reed Limitée n'a rien à
faire avec Canadian Glassine, la direction de Canadian Glassine n'est pas ma
responsabilité. Canadian Glassine est une compagnie soeur. La même
compagnie, Reed International, détient la majorité des actions
des deux compagnies, mais Canadian Glassine n'a rien à faire avec La
Papeterie Reed Ltée. Canadian Glassine est un client de la Papeterie
Reed Limitée pour les pâtes sulfites et la vapeur.
Comme client, la Canadian Glassine est la plus proche au point de vue
des relations existantes avec nous.
En effet, le point, je crois que c'est clair, c'est que notre compagnie
mère est Reed International, à Londres, Angleterre, qui a des
actions dans les papiers Reed au Canada, mais aussi des actions dans une
compagnie américaine qui est reliée à Canadian Glassine.
Les directives vont, de Londres à Boston, à ici, directement
à Canadian Glassine.
Nous, on vend à Canadian Glassine la vapeur et la pâte,
mais on n'a rien à faire dans les décisions prises de jour en
jour, ce qui se passe cela vient de l'Angleterre. Les intérêts en
sont directement reliés à l'Angleterre.
M. Desbiens: C'est la compagnie Reed d'Angleterre.
M. Buser: Oui.
M. Desbiens: Vous n'aviez rien à voir, d'aucune
façon, ni à l'administration, ni à la production, ni aux
relations ouvrières avec Canadian Glassine?
M. Buser: Non.
M. Desbiens: Une dernière question peut-être, au
niveau du conseil d'administration de la Canadian Glassine, est-ce qu'il s'y
retrouve des membres de Reed Canada?
M. Maclver: II n'y a pas de directeur de Papeterie Reed
Ltée qui soit aussi directeur de Canadian Glassine. L'année
dernière, quand j'ai accepté le poste de directeur
général de la Papeterie Reed Ltée, mon
prédécesseur, M. Billingsley, avait été directeur
de Canadian Glassine jusqu'à l'an dernier. Mais, depuis l'année
dernière, il n'y a eu personne de la Papeterie Reed Ltée à
la direction de Canadian Glassine.
M. Desbiens: M. le Président, je vais passer à un
autre domaine, le domaine de la forêt: A la page 38 de votre
mémoire, vous faites référence au reboisement et à
la sylviculture. Deux constatations mériteraient sûrement quelques
éclaircissements. D'abord, à la page 38, vous dites: "Des
études faites sur la Côte-Nord, démontrent que, de
façon générale, la régénération
naturelle s'installe très bien et croît en abondance dans les
parterres exploités". Serait-il possible de savoir quelles sont les
études auxquelles vous faites référence? Est-ce qu'il
existe une étude qui traite exclusivement de Forestville?
M. Paquette (Elzéar): M. le Président, concernant
le reboisement et la sylviculture, et en particulier ces deux questions
particulières, lorsqu'on dit: De façon générale,
sur la Côte-Nord, c'est l'observation d'un forestier qui a vécu 28
ans sur la Côte-Nord, qui a eu connaissance d'une foule d'études
qui ont été faites et qui a vu ce qui se passait à
côté de chez lui et tout cela. Lorsque je dis cela, cela me
concerne directement. Maintenant, quand vous demandez ce qui s'est passé
directement avec nous, en page 39, très clairement, je rapporte des
faits qui sont le résultat d'une étude faite l'année
dernière dans nos concessions forestières, sur la
régénération tant préétablie que la
régénération qui s'installe après les coupes, parce
que, chez nous, ce sont des coupes à blanc que l'on fait et on se
demande souvent ce qui se passe ensuite.
Effectivement, une étude a été faite chez nous, et
cette étude a quelque chose de particulier. C'est qu'on a comparé
ce qui se passait dans un territoire où on exploite de façon
mécanisée par rapport à ce qui se passait dans un
territoire adjacent où on exploite de façon conventionnelle, ceci
de façon à pouvoir, en même temps, comparer les
résultats. Je n'ai pas, naturellement, cité ce rapport qui a
été présenté par un officier du ministère
des Terres et Forêts, je me suis borné à indi-
quer ici la conclusion la plus importante de ce rapport. Cela concerne
un travail qui a été fait chez nous, dans le territoire que nous
avons exploité au cours des cinq dernières années, disons,
ou à peu près.
M. Desbiens: Dans votre mémoire, toujours, on dit que
parce que la compagnie ne peut exploiter toute la possibilité de ses
concessions, situées je crois au nord de Forestville, vous êtes
obligés d'acheter des boisés Drivés et des copeaux qui
proviennent des scieries. A ce moment, évidemment, cela affecte le
coût du bois qui est produit sur votre concession. Est-ce que la
compagnie peut compter, par rapport à cela, sur une main-d'oeuvre
suffisante pour exploiter toute la possibilité de sa concession et
à quel coût?
M. Paquette (Elzéar): J'aimerais, avant que quelqu'un
d'autre parle plus spécifiquement sur le dernier point de votre
question, lorsque vous dites que la compagnie ne peut exploiter toute sa
possibilité... Ce que l'on veut faire ressortir, c'est que notre
compagnie n'a pas suffisamment de concessions forestières pour
satisfaire à tous les besoins de l'usine de Québec. En d'autres
termes, s'il n'y avait pas, disons, de matière ligneuse qui nous venait,
soit des boisés privés ou des scieries, eh bien, mon Dieu, il
nous faudrait une plus grande superficie dans nos concessions pour pouvoir
satisfaire aux besoins de l'usine.
Nous n'avons pas suffisamment de concessions. Nous n'en avons jamais eu
suffisamment pour couper, disons donc, exploiter un maximum, par exemple, de
400 000 cordes par année. Et, déjà dans le passé,
on nous retenait; on voulait parfois, en couper davantage, mais on nous disait:
Votre concession ne le permet pas. Aménagée sur une base de
rendement soutenu, il est impossible d'aller chercher plus que tel montant.
C'est ce qu'on veutdire: Quechez nous, on ne peut pas, on n'a jamais eu
suffisamment de concessions pour satisfaire entièrement aux besoins de
l'usine.
M. Desbiens: Oui, mais justement, est-ce que sur la concession
que vous avez, est-ce que vous utilisez chaque année la
possibilité totale?
M. Paquette (Elzéar): Pas pour le moment. Dans les
années où cela allait bien dans l'industrie des pâtes et
papiers, où la production était près d'un maximum,
où les marchés étaient là, vous savez comme moi que
c'est cyclique cette patente, alors, quand cela allait bien, on ne pouvait pas
aller chercher tout le bois qu'on aurait voulu dans nos concessions et on avait
des difficultés à obtenir à l'extérieur
l'approvisionnement nécessaire pour l'usine. Dans le moment, nous sommes
dans une situation opposée à celle que je viens de vous
décrire et à ce moment-ci, parce qu'il faut maintenir nos achats
de matières premières venant des boisés privés et
de l'industrie du sciage, nous sommes obligés de réduire,
réduire, réduire, à Forestville.
M. Desbiens: La dernière année, par exemple, vous
avez pu couper toute votre possibilité?
M. Paquette (Elzéar): Vous vous référez
à l'an passé?
M. Desbiens: Non, la dernière année que vous avez
coupé toute votre possibilité.
M. Paquette (Elzéar): Cela peut être il y a environ
quatre ou cinq ans. C'est depuis ce temps qu'on coupe moins.
M. Desbiens: Vous ne croyez pas qu'il y ait vraiment un
problème de main-d'oeuvre? C'est-à-dire que vous pouvez compter
sur toute la main-d'oeuvre dont vous avez besoin?
M. Paquette (Elzéar): On dit ailleurs, au point de vue
main-d'oeuvre, que c'est un problème qui va se faire sentir de plus en
plus. Il faut l'accepter cela. Surtout pour des gens qui exploitent sur la
Côte-Nord parce que la main-d'oeuvre de base, les ouvriers forestiers,
sur la Côte-Nord, ce n'est pas là qu'on les trouve. La
majorité de nos ouvriers forestiers nous viennent de la Côte-Sud.
On a pu constater, à un moment donné, que le potentiel diminuait
et on prévoit que si les conditions du marché reviennent à
ce qu'elles étaient déjà, si on augmente notre production
à l'usine, dont on va augmenter nos coupes, nos exploitations à
Forestville.
A ce moment-là cela va prendre plus d'ouvriers forestiers et on
se demande quand on va commencer à avoir des difficultés. On
prévoit que cela s'en vient, d'autant plus, comme je le disais tout
à l'heure, que sur la Côte-Nord, le potentiel de la main-d'oeuvre
vient de l'autre côté de la rivière et la rivière
est large chez nous, c'est le fleuve et puis il y a chez nous, sur la
Côte-Nord, comme vous le savez, l'industrie Outarde, qui elle, ne trouve
pas plus que nous, sur la Côte-Nord, des ouvriers forestiers; ils
viennent de la Côte-Sud.
C'est pourquoi chez nous, quand on parle de main-d'oeuvre reliée
à la production, mon Dieu, si on doit faire face... Vous savez, on fait
face depuis deux ans, à une situation où on doit mettre à
pied des ouvriers spécialisés. Quand je dis ouvriers
spécialisés je suis obligé d'ouvrir une parenthèse
et de vous parler de nos fonctionnements mécanisés.
Il y a de nombreuses années, voyant venir une pénurie de
main-d'oeuvre, on a dit: II faut de toute évidence, investir dans des
fonctionnements mécanisés. Alors, depuis ce temps, c'est ce que
nous avons fait, et pour obtenir le meilleur rendement dans les fonctionnements
mécanisés, cela prend du temps, cela prend un paquet d'essais, de
façon à pouvoir arriver au meilleur rendement possible de
l'équipe rendement-machine-homme. Alors, il faut des ouvriers
spécialisés, des ouvriers qui sont polyvalents, qui peuvent
conduire des machines, qui peuvent les réparer au besoin, etc., etc.
Dans une situation comme celle qui a été la nôtre
l'année passée et il y a deux ans, où, rendu au mois de
décembre, on était obligé de dire à tout le monde:
On ne peut pas couper plus que ce que nous avons déjà
coupé on est obligé de dire, il n'y a plus de travail pour vous
autres. Ces gens-là, au mois
de décembre, ils nous demandent: Quand est-ce que nous allons
recommencer? Cela va dépendre de tel facteur, mais ce ne sera pas avant
le mois de mai prochain. C'est pour cela qu'on dit: Nos gars pour lesquels on a
dépensé d'abord l'argent sur les machines, un investissement
très dispendieux, un investissement chez le personnel, les cours qu'on
leur fait suivre. Encore l'année passée, on a réussi
à garder nos ouvriers spécialisés, en leur donnant des
cours durant la période où ils étaient en chômage,
mais c'est une situation qui ne durera peut-être pas
éternellement.
Il y a une chose, M. le Président, dans la situation actuelle:
l'année passée puis avant cela, quand on était
forcé d'acheter, d'augmenter nos achats, ce n'était pas nous qui
décidions, vous le savez d'ailleurs, je pense, alors en ce faisant on
jouait contre nous, on jouait contre le fait, que l'on a décrit ici
même dans le résumé du mémoire, que Forestville doit
être un endroit, une base. Il faut la garder, la maintenir et non
risquer, si les conditions devenaient pires qu'elles ne le sont
présentement, d'être forcé d'acheter quand même,
à partir des boisés privés et des scieries et uniquement
diminuer à Forestville, Bien mon Dieu, où est-ce qu'on va aller
avec cela?
M. Desbiens: Les ouvriers spécialisés, j'imagine
qu'ils demeurent à Forestville surtout?
N|. Paquette (Elzéar): Ils demeurent à Forestville
et en forêt.
M. Desbiens: M. le Président, j'avais plusieurs questions,
parce que le mémoire est assez complet et c'est bien; je pourrais
peut-être en poser une dernière. Comment expliquez-vous la demande
d'une aide financière spéciale pour l'expansion de Lignosol,
à la page 76 de votre mémoire, quand précédemment,
à la page 63, vous exprimiez que les sous-produits et Lignosol
connaissent une vogue croissante et, à la page 65, que l'usine Lignosol
est devenue une entreprise commerciale prospère. Il semble que cela
vienne en contradiction avec ce que vous mentionnez ou avec votre philosophie
de base énoncée à la page 10?
M. Buser: II y a trois raisons. Il faut détailler un peu
sur ce point. L'usine Lignosol est un objectif qu'on avait depuis longtemps. Ce
sont des années et des années de recherche qui ont abouti dans
l'usine; on trouve que c'est quelque chose d'unique. On est arrivé
à un point où on a des problèmes
énergétiques et on a étudié encore plus pour
trouver des solutions encore plus avant-gardistes. C'est la solution de
l'osmose à rebours. Une des réponses, c'est qu'il y a quand
même un risque. C'est quelque chose de nouveau. C'est une nouvelle
technologie. Il y a deux risques. Il y a un risque, sur la mise en marche, de
limiter. Et l'autre, c'est la mise en marché des produits. Ce sont des
produits un peu nouveaux. Cela prend du temps.
Maintenant, dans la situation économique, ce n'est pas le temps
de faire des investissements d'une envergure assez grande où les risques
sont là. Si on a l'argent pour faire des investissements, on aime mieux
les faire sur des choses plus établies. Le deuxième point: II
faut qu'on développe le marché. Ce n'est pas une vente où,
on vend tout le produit de l'usine immédiatement. Il faut le
développer, il faut aller aux Etats-Unis, travailler avec les acheteurs
et avec les produits qui alimentent le Lignosol et développer le
marché. Cela prend du temps; un ou deux ans.
Un point clé dans cela aussi c'est que cela peut aider
l'industrie en général dans le Québec. On trouve qu'avec
ce système, sur lequel on a déjà fait des recherches
depuis 20 ou 30 ans, on a une solution assez unique à la pollution, pour
les usines de pâte de sulfite. Le Lignosol nous permet d'avoir un
rendement assez élevé sur la matière première et ce
serait une façon de rendre l'usine de sulfite rentable, de la garder en
opération, et on pourrait alimenter les usines environnantes qui ont
besoin de pâtes chimiques à base de sulfite. Ce sont ces trois
points.
M.. Desbiens: Je vous remercie beaucoup. J'aurais bien
aimé poser d'autres questions, mais je veux passer la parole...
Le Président (M. Gendron): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. D'abord, M.
Maclver, M. Paquette et MM. du groupe Reed, je tiens à vous remercier de
votre participation aux travaux de notre commission. C'est avec beaucoup
d'intérêt qu'on a lu votre mémoire. Evidemment, on l'a lu
attentivement, particulièrement, compte tenu du rôle important que
vous jouez au point de vue économique dans la région de
Québec, plus particulièrement, dans la ville de Québec.
Votre participation ici est certainement appréciée par les
membres de la commission, et, je tiens à vous faire part que je voudrais
unir ma voix à tous ceux qui vous ont fait part de leur
appréciation des activités de la compagnie dans la région
de Québec. C'est important pour l'économie de notre région
et c'est apprécié, non seulement, par les membres du parlement,
mais aussi par la population.
Dans votre mémoire, vous énoncez que la solution au
problème général que connaît votre industrie
actuellement, qui, somme toute, est un problème de coût de
production qui implique un autre problème au niveau de la concurrence
internationale, n'est pas nécessairement dans un programme axé
sur la construction de nouvelles usines programme général
de modernisation ou de construction pour de nouvelles entreprises. Vous
souhaitez, cependant, une intervention du gouvernement et j'ai cru percevoir
que, dans cette action du gouvernement, vous ne favorisiez pas une action
ponctuelle et spécifique s'appliquant aux industries, aux usines qui,
actuellement, ont des problèmes, mais que vous favorisiez plutôt
une intervention de façon générale comme d'autres l'ont
formulé récemment devant notre
commission, c'est-à-dire que le gouvernement, de par son action
puisse agir en même temps pour toute l'entreprise et que les programmes
mis de l'avant puissent bénéficier à toutes les
entreprises. Nous avons eu à discuter beaucoup sur le genre
d'interventions souhaité par l'industrie. On a eu des échanges
très intéressants; je donne l'exemple du coût de transport
qui a été assez longuement débattu pendant les travaux de
cette commission. Quelles seraient les mesures que vous favoriseriez? Vous
semblez favoriser, comme d'autres intervenants, des mesures à
caractère fiscal. Ma question est la suivante: Quelles sont les mesures
que, à la lumière de vos activités, vous seriez
appelés à favoriser davantage? Est-ce que vous croyez, par
exemple, que le gouvernement doit se diriger vers des assouplissements fiscaux?
Est-ce que vous croyez qu'il est préférable de s'en aller vers
des coûts beaucoup moins directs, comme le transport? Une question bien
particulière à laquelle j'aimerais avoir une réponse:
Est-ce que vous considérez que, si le ministère des Terres et
Forêts met sur pied un système de droit de coupe variable, cela
pourrait être profitable à votre industrie, à votre usine,
et si oui, dans quelle mesure? Somme toute, c'est cette gamme de questions
peut-être un peu générales, exprimées de
façon un peu générale, que j'aimerais que vous
précisiez; j'aimerais que vous me fassiez part du champ ou des avenues,
au niveau des interventions, que vous favorisez comme interventions
immédiates de la part du gouvernement.
M. Maclver: With respect to the question of specifically what
type of help we would like immediately, the condition and outlook for the
industry are such that the companies will have a very difficult time generating
sufficient cash internally to both modernize and increase the productivity of
their mills and make them more cost-effective, but in addition to that, there
will be fairly large expenditures required for pollution matters. Insofar as
the mutual interest of both industry and government, I think that the question
of pollution expenditures is a legitimate area wherein governments could be
expected to help. Now, that help could be specific in terms of a particular
mill having environmental standards applied on a sensible basis with due regard
for the costs, the investment levels required, the timing of them and the
benefits to be gained from them. In our view, mills are different, and
particular mills are different in that respect, and it would be a very
legitimate area wherein government could provide low-cost financing, increased
fiscal measures, increased tax write-offs, that type of thing that would
provide, in effect, financial assistance where there is low, or perhaps even
low returns involved for the company and its shareholders.
Insofar as other aspects are concerned, research grants would certainly
be most welcome by the industry in both the environmental and the developmental
areas. But over all, I would like to make a specific point, and that is that
insofar as our philosophy is concerned, we believe in protecting what we have
before we go forward with, particularly, new mills. If the government were to
become involved in selective help, one thing which they must or they should,
with respect, keep in mind, is that we do have a financial structure within the
industry, and the various companies do compete with each other for financing
and capital, just as they do in the marketplace for customers.
In a specific intervention on the part of the government in one company
as opposed to others could have very significant one term effects on the
competiteve position of the others within the industry and particularly these
of that company's ability to raise capital in the markets, either financial
markets in Canada or in the Uneted States.
M. Buser: L'industrie en général a des
problèmes pour alimenter ses fonds de roulement dans ces périodes
de problèmes économiques et surtout en ce qui concerne les
problèmes de pollution. Mais ce sont des choses d'intérêt
mutuel entre le gouvernement et l'industrie. Il devrait y avoir moyen de
trouver des solutions. En général, il faudrait que chaque usine
soit étudiée séparément et peut-être que des
subventions soient versées ou que des interventions soient faites sur
des points spécifiques, car chaque usine a des problèmes
différents.
Ce pourrait être de l'aide financière sous forme d'emprunts
à bas taux d'intérêt, des mesures fiscales ou des
subventions pour la recherche. Un point spécifique là-dedans,
c'est qu'on veut protéger les investissements qu'on a; c'est pour cela
qu'on favorise le développement des usines existantes qui sont
rentables. Le problème est qu'il y a de la concurrence pour le capital
et nos concurrents sont sur le même marché à la recherche
de capitaux. Ce qu'on n'aimerait pas, c'est que cette aide favorise une
compagnie plus que l'autre, sur les marchés.
M. Pagé: J'aurais aimé échanger beaucoup
plus longuement avec vous sur cette question, mais mon temps est limité
à 15 minutes. A la page 11 de votre résumé, vous
recommandez au gouvernement "de reporter à 1985 l'entrée en
vigueur des normes écologiques relatives à nos effluents
liquides".
Vous avez de plus fait état que l'industrie, que l'entreprise, en
général, avait un problème au niveau de son fonds de
roulement, ce qui ne lui permettait pas de penser à d'autres projets,
c'est-à-dire que l'entreprise ne faisait pas suffisamment de profits
pour concevoir d'autres projets. Est-ce que vous pouvez me confirmer ou
infirmer que votre compagnie, ici, à Québec, a déjà
élaboré ou est à élaborer actuellement un programme
d'investissements à moyen terme, sur une période de quelques
années, cinq ou six ans? Et si c'est le cas, j'aimerais savoir en quoi
ce programme est rattaché à la recommandation que vous formulez
en demandant au gouvernement de reporter à 1985 l'entrée en
vigueur des normes écologiques.
M. Sarasin (André): Je peux répondre à cette
question. En demandant que le délai soit reporté jusqu'en 1985 et
soit basé sur le principe que,si les conditions économiques
étaient bonnes d'ici 1985, on pourrait s'autosuffire,
c'est-à-dire répondre aux exigences dont on pourra discuter
à ce moment-là ou qui seront en train d'être
discutées, nous apportons une réponse à une partie de
votre question. En réponse à l'autre partie de votre question, il
nous faut absolument améliorer la qualité de notre produit, si on
veut faire des profits et que ces profits puissent être réinvestis
pour corriger l'environnement et nous permettre d'améliorer la
productivité de notre usine et soutenir la concurrence. Ceci est un
facteur très important, dans un cas ou dans l'autre.
Si des mesures sont trop rigides et doivent être soumises à
une réglementation sur des périodes trop restreintes, nous ne
pourrons pas alors suffire à la tâche et nous serons soumis
à une très sérieuse concurrence, parce que la
majorité des pays chez lesquels nous exportons parce que nous
exportons beaucoup de nos produits construisent dans le moment des
usines et ces usines vont s'autosuffire éventuellement. Peut-être
qu'elles vont même devenir exportatrices, comme nous, et le
problème en deviendra encore plus grave. Le seul marché auquel on
va pouvoir faire concurrence sera le marché américain. Or, les
Américains ont eux-mêmes amélioré leurs usines et
offrent aujourd'hui un produit qui est similaire au nôtre.
Si on pouvait améliorer nos usines à un rendement
équivalent au leur, la qualité de notre fibre, qui a toujours
été le facteur dominant de notre usine québécoise,
reprendrait de l'avant et on serait dans une position concurrentielle
très favorable. Ce qui est important pour nous, c'est de regagner la
qualité de notre qualité, de redevenir compétitifs; pour
ce faire, il nous faut des capitaux et il faut qu'on regarde la
disponibilité de ces capitaux. Les conditions du marché vont
être les critères de base les plus importants à
considérer, parce que ce sont eux qui vont déterminer comment on
va pouvoir faire des profits pour les réinvestir.
Dans ce qu'on sait, dans le contexte présent, il n'y a pas de
retard quant aux normes de la pollution pour les matières liquides, mais
nous aurons des problèmes très sérieux pour faire face
à la concurrence.
M. Pagé: D'accord. Je vous remercie, j'aurais aimé
qu'on passe plus de temps sur cette question des projets, mais je me dois
d'intervenir à ce moment-ci sur le cas qui a été
soulevé ce matin, celui de Canadian Glassine.
M. le Président, M. Maclver, vous avez fait état, dans
votre déclaration d'ouverture, je l'ai bien noté, et je vous
cite, que votre entreprise n'est pas directement impliquée dans Canadian
Glassine, d'où j'en conclus que vous êtes indirectement
impliqués. Vous en avez d'ailleurs fait état, lorsque vous avez
dit que Canadian Glassine était une filiale de Reed International.
Je suis d'accord qu'il y a cette relation de compagnies sous une
même juridiction, sous une même compagnie mère ou sous un
même "holding", mais il y a quand même une relation plus
étroite, au point de vue commercial, entre votre usine de Québec
et Canadian Glassine. J'aimerais avoir des informations sur cette relation
commerciale, en termes de production de pâtes, par exemple. On m'a dit
que vous fournissiez du matériel. Dans le jargon du métier, c'est
de la "slush", me dit-on quelque chose comme cela. Vous m'excuserez, je ne suis
pas dans le métier, mais, quand même, j'aimerais savoir si cela
fait longtemps que votre usine de Québec fournit ce matériel
à Canadian Glassine, d'une part, et d'autre part, j'aimerais savoir si
les coûts exigés de Canadian Glassine pour ce matériel sont
les mêmes, s'ils sont plus bas ou encore plus élevés que
les coûts que Canadian Glassine aurait à payer si elle
s'alimentait ailleurs qu'à l'gsine que vous exploitez ici à
Québec.
M. Maclver: Reed Paper is a Canadian public company and 15% of it
is owned by Canadians. As such, any other basis of dealing with Canadian
Glassine on other than an arms-length basis would be a conflict of interests
relative to our minority shareholders, and of course, we would not be prepared
to indulge in that type of thing.
Insofar as the mechanical aspects of the slush pulp production and the
steam supply... André, could you comment on that?
M. Buser: C'est une relation commerciale; la vente de pâte
se fait comme avec n'importe quel autre concurrent et n'importe quel autre
client. Il y a 15% des actionnaires de Reed Paper qui sont Canadiens et s'il y
avait des relations autres que commerciales, on aurait des conflits
d'intérêt avec les actionnaires.
M. Sarasin peut peut-être vous donner des détails sur la
pâte, la production...
M. Pagé: D'accord, M. le Président, MM. les
représentants, vous allez comprendre que mon temps est limité et
que j'ai d'autres questions, alors je voudrais quand même avoir
l'opportunité de poser les quelques questions qu'il me reste à
poser. D'accord, M. le Président?
Vous dites que le prix demandé à Canadian Glassine pour la
fourniture de pâte est le même que sur le marché
régulier. Pouvez-vous m'infir-mer une information voulant que depuis
quelque temps, il y ait eu une diminution du prix des pâtes vendues
à Canadian Glassine, parce que Canadian Glassine aurait pu s'alimenter
en pâtes chez ITT à un prix inférieur à celui qui
était payé à votre entreprise?
M. Maclver: The senior management of Reed Deerron, which is an
American Company controlled by Reed International, was replaced in March or
April of 1977. The new chief executive officer is a gentleman by the name of
Malcolm Glenn. His objectives were to turn around
Canadian Glassine and bring it back to a positive cash flow-in
profitability. One of the things which he did was to go and re-negotiate with
all of his supplyers in an attempt to reduce the supply costs. As such, as a
consequence of his going around to all of their supplyers, he also approached
Reed Canada and requested that we re-negotiate our supply agreements with him.
At that point in time, as I said, we would with any independent party, and new
agreements satisfactory to Mr Glenn, in his capacity as chief executive of
Deerron and Canadian Glassine, were finalized with him.
Insofar as our position was concerned, we were more than pleased that
the new management of Reed Deerron and Canadian Glassine were taking a very
vital, significant interest in the Glassine operations, simply because they
were important to us as a customer, since, if we do not have that customer, it
is going to have an impact on our own employment and our own operations, both
in the mill and woodlands.
M. Buser: La compagnie Canadian Glassine est vraiment directement
liée à la compagnie Deerron aux Etats-Unis. Le nouveau
président en est M. Malcolm Glenn.
Son premier objecti était de remettre l'établissement de
Canadian Glassine sur pied. Il a commencé à renégocier
avec tous les fournisseurs. Dans cette optique, nous avons
renégocié un contrat avec lui. Nous sommes très
intéressés à vendre notre pâte; si on ne peut pas
vendre cette pâte, cela nous crée des problèmes, des
problèmes d'emploi et des problèmes de bénéfices,
naturellement. Nous avons donc négocié de bonne foi et l'accord
pour le renouvellement du contrat a été fait avec M. Glenn.
M. Pagé: A d'autres prix? Le nouveau contrat que vous avez
négocié, suite à la nomination du nouveau président
de Canadian Glassine, a-t-il impliqué d'autres prix que ceux qui
étaient payés préalablement?
M. Maclver: The price, after the renegotiation, was lower than it
was previously. In other words, Mr. Glenn made the comment, after the
negotiations were over, that he considered that the price was equitable
relative to the present state of pulp markets. I might add that, during the
spring and summer of this year, the pulp markets worldwide have been
degenerating very rapidly, to the point where, during this summer, in Europe,
there was no such thing as a market price for pulp.
Le Président (M. Gendron): Compte tenu de l'horaire...
M. Pagé: M. le Président, je m'excuse, il me reste
deux ou trois petites questions. Vous voyez que cela va bien.
Le Président (M. Gendron): Un instant! M. le
député de Portneuf, je pense qu'on avait quand même convenu
d'une entente, et je dois la faire respecter, au nom de la commission. J'allais
vous indiquer que je vous permettrais une dernière question, parce que
le député de Montmagny-L'Islet m'a aussi indiqué qu'il
aimerait poser une question. Entendez-vous entre vous pour une dernière
question là-dessus, parce que je me verrai dans l'obligation de
respecter l'entente.
M. Pagé: D'accord. Je demande le consentement unanime pour
avoir la possibilité de poser deux autres questions.
Le Président (M. Gendron): Est-ce que le consentement
unanime est accordé?
M. Brassard: Refusé.
Le Président (M. Gendron): Refusé.
M. Pagé: Je vais donc poser une dernière
question...
Le Président (M. Gendron): Et ce sera la dernière
au niveau de la compagnie Reed.
M. Pagé: Oui. Cela fait mal, par exemple. C'est là
qu'on constate que cela fait mal au gouvernement. On constate que vous ne
voulez pas qu'on parle de cette question.
Le Président (M. Gendron): Je m'excuse, mais...
M. Pagé: M. le Président, j'y arrive, je pose ma
question, qui aura évidemment quelques volets. Vous avez fait
état que votre compagnie était une compagnie soeur ou une
compagnie parente de Canadian Glassine. Vous avez, de plus, fait état
que vous étiez indirectement liés à Canadian Glassine. Il
y a quand même un élément qu'il faut constater, c'est que
les deux entreprises sont sous la juridiction de la même compagnie. Il
faut quand même constater et il ne faut pas se le cacher, il faut quand
même se l'avouer, que, dans tous les cas de compagnies mères avec
compagnies filiales, la relation est plus qu'étroite, elle est
très intime, et, généralement, ce sont les gens des
mêmes compagnies qui siègent au conseil d'administration de la
compagnie mère.
M. Maclver, je présume et j'aimerais que vous me le
confirmiez qu'en tant que président et directeur
général des entreprises exploitées ici à
Québec, que vous êtes membre du conseil d'administration de Reed
International, de la compagnie mère. Je présume, de plus, que
vous avez à siéger, en tant que membre du conseil
d'administration, pour étudier toutes les activités de la
compagnie mère, en incluant votre entreprise, où vous
siégez comme président, et aussi, la compagnie Canadian Glassine.
J'aimerais que vous me confirmiez ces éléments.
Le deuxième volet de ma question est le suivant: Je comprends que
des entreprises sont actuellement placées face à un
problème de rentabi-
lité. Nous avons constaté, à la lumière des
travaux de cette commission, que, pour pallier ce problème de
rentabilité, ce n'était pas toujours nécessaire
d'intervenir au niveau du gouvernement, que ce n'était pas toujours
nécessaire d'intervenir dans des actions telles que celles
recommandées.
Mais, dans certains cas, un réaménagement ou des
modifications au niveau de la gestion de l'entreprise, au niveau du
fonctionnement de l'entreprise pourraient apporter des éléments
positifs en termes de rentabilité pour cette même entreprise.
Concrètement, on en a eu un exemple hier avec East Angus où les
représentants nous ont confirmé qu'il y a quelques mois, il y
avait dans certains cas, cinq cadres pour cinq employés, et
qu'après un réaménagement de la gestion et du
fonctionnement de l'entreprise, c'était devenu rentable.
Par surcroît, cet élément de non-rentabilité
pour un motif de gestion et de fonctionnement a été
allégué par les représentants du syndicat ce matin.
Compte tenu de cet élément, compte tenu aussi que le
gouvernement du Québec, même s'il n'a pas voulu intervenir ce
matin, chose que j'ai déplorée, a quand même
évoqué la possibilité de rendre public, d'ici le
début de 1978, un plan de relance de l'industrie des pâtes et
papiers; compte tenu que lors de l'annonce de ce plan de relance, une
entreprise comme Canadian Glassine pourrait éventuellement, à la
lumière de ce programme, en arriver à une meilleure position
financière, j'avais demandé au ministre s'il était
disposé à intervenir auprès des dirigeants de la compagnie
pour leur demander de surseoir à leur décision de fermer
l'entreprise jusqu'à ce que ce plan de relance soit rendu public.
En tant que membre du conseil d'administration de Reed International,
est-ce que votre entreprise serait disposée à accepter de
maintenir ouverte l'usine Canadian Glassine jusqu'à ce que le
gouvernement rende public un programme de relance de l'industrie
forestière ou encore jusqu'à ce que le gouvernement annonce des
mesures précises, suite aux délibérations des travaux de
cette commission?
Je m'excuse des nombreux volets à ma question, mais vous
comprendrez que, face au refus des membres de la majorité
ministérielle, à ce que je puisse poser deux ou trois questions,
j'ai dû m'exprimer de cette façon.
Le Président (M. Gendron): J'inviterais les
représentants de la compagnie à être le plus succincts
possible, compte tenu qu'on a dépassé de dix minutes le temps
alloué, tel que convenu par les membres de la commission.
M. Maclver: I am not a director of Reed International. No person
who is employed as part of my management team at Reed Paper is a director of
Reed International. Insofar as Canadian Glassine is concerned, that company is
the responsibility of Mr Malcom Glenn who is its chief executive and the chief
executive of its American parent company. Insofar as the possibility of keeping
the company opened is concerned, I have had conversations with Mr Glenn as to
what he was doing from a number of points of view. I have mentionned that I did
have an interest in Glassine as one of our customers and its closing down would
have an impact on our own operations.
The next aspect that I was interested in was our position in this
community in terms of our reputation, and basically, our public relations and
our community relations. That was a very big consideration in the conversations
that were held.
In addition to that, there is the question of jobs. I need my job. I
need it to feed my family. I think that it is fair to say that Mr Glenn needs
his too. In terms of making all attempts to have some part of Glassine have a
chance to survive and to retain jobs, I am satisfied, on the basis of what Mr
Glenn has told me, as to what has been done. They have gone to all possible
lengths to give that mill, on the basis of one machine, a chance of surviving
thereby saving approximately 72 of the 110 jobs involved.
In my view, based on the knowledge that I have of that company, its
markets and its prospects, and in addition to that, the knowledge that is
contained within Reed Paper's management team, there is very little that Mr.
Glenn has not done, that could be done by anyone. The company is loosing money
at a horrific rate. They are now tracking at the rate of almost a million
dollars a year in losses. The whole of the information was communicated to the
employees via their Union representatives. The company made no bones about
financial disclosure and/or anything else, and their attempts to arrive at an
agreement on the conditions necessary for any chance of viability of that
mill.
Insofar as I am aware, there have been at least two votes by the
employees who did not choose to accept what management presented as the working
conditions, if you like, and the contract changes necessary to even give the
company a chance to break even. That is the decision of the employees and there
is nothing much that any management can do in the face of employees taking a
decision that they are not prepared to work in an operation under those
conditions.
My view is that Mr Glenn has acted as a good manager, as a responsible
executive of a company who does value its reputation. I do not think, on the
basis of what I am aware of, relative to that operation, that I could have done
any more. In the final analysis, the decision is that of the employees. It was
theirs to make, and as of last week, their decision was no. As a related
matter, due to the lenghty discussions with the union, customers of Canadian
Glassine have been making arrangements elsewhere, at which point the sales
potential of the mill drops to a level which makes even the original proposal,
in all probability, unfeasible.
My understanding is that customers of Canadian Glassine are placing
their orders elsewhere, and, at this point in time, it could very
well be too late. In any case, it is the decision of the employees of
Glassine.
Le Président (M. Gendron): Alors, messieurs, au nom des
membres de cette commission, je tiens à remercier les
représentants de la compagnie Papeterie Reed Ltée, et
j'inviterais maintenant les représentants du Conseil de la forêt
de l'Est du Québec à venir nous présenter leur
mémoire.
Conseil de la forêt de l'Est du
Québec
M. Dubé (Arthur): M. le Président, MM. les membres
de la commission, messieurs, nous voulons vous remercier de votre
amabilité, sinon votre sympathie à notre endroit, pour avoir
consenti à prolonger au-delà de la période
réglementaire votre période de travail pour permettre de nous
entendre. Vous allez me permettre de nous présenter; évidemment,
notre délégation est restreinte. Cela peut paraître
paradoxal, parce qu'on dit qu'on vit dans l'Est du Québec, qu'il y a
là un taux de chômage extraordinaire, que nous ne nous retrouvons
que deux aujourd'hui. C'est qu'il reste encore quelques membres du conseil qui
travaillent de temps à autre.
Permettez que je vous présente mon camarade de droite, M. Lucien
Turbide, technologiste, mesureur licencié et surintendant des
approvisionnements à la Cie Internationale de Papier du Canada, division
de Matane, et votre humble serviteur, Arthur Dubé, cultivateur,
coadministrateurdu même conseil.
Nous avons voulu présenter ce mémoire qui, vous l'avez
constaté, vous l'avez entre les mains, est très sobre et
présenté par des gens simples. Nous espérons bien que ce
mémoire ne causera pas de traumatisme et ne provoquera pas de
discussions idéologiques comme on en entend parfois.
Nous passons au sujet, M. le Président, immédiatement,
étant donné que plusieurs souhaitent se retrouver près de
la table.
Dans un premier temps, nous désirons formuler certaines remarques
sans lesquelles la compréhension de ce mémoire risque
d'être incomplète.
Le Conseil de la forêt de l'Est du Québec, un conseil
spécialisé du Conseil régional de développement de
l'Est du Québec, est un organisme régional, représentatif
des intérêts et des éléments particuliers du secteur
de la forêt, qui a des fonctions de consultation, d'animation,
d'information et de concertation dans le cadre de la planification de ce
secteur.
Plus spécifiquement, le Conseil de la forêt de l'Est du
Québec se compose de représentants en provenance de l'industrie
des pâtes et papiers, de l'industrie du sciage, des associations
coopératives forestières et des Syndicats de producteurs de bois
du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie. J'ajouterais, également,
ce qui n'a pas été mentionné, qu'il est l'interlocuteur
privilégié auprès du bureau régional du
ministère des Terres et Forêts de ladite région.
Les limitations du mémoire. Bien que la commission parlementaire
soit centrée sur les problèmes de l'industrie des pâtes et
papiers, il nous est apparu difficile de nous y limiter et nous avons dû,
à l'occasion, déborder sur l'ensemble des activités
reliées à la forêt. Le questionnaire du minitre
Bérubé ouvrait, d'ailleurs, la porte à cette
possibilité.
Nous devons aussi noter que notre mémoire vaut surtout pour l'Est
du Québec, même si certaines des constatations ou des
recommandations qu'on y retrouve peuvent valoir pour l'ensemble du
Québec.
La forêt dans l'économie régionale. La région
de l'Est du Québec, rappelons-le, couvre le territoire qui
s'étend de La Pocatière à Gaspé et aussi les
Iles-de-la-Madeleine.
L'économie régionale. Notre région est aux prises
avec de sérieux problèmes de développement
économique. Le taux de chômage y atteint
régulièrement le double de la moyenne du Québec; on y
constate aussi un exode de l'ordre de 5000 départs par année sur
une population de 320 000 citoyens.
D'autre part, la structure de l'emploi y accuse aussi des
caractéristiques particulières; on y remarque 23% des emplois
dans le secondaire contre 32% pour le Québec, la différence se
concentrant essentiellement dans les activités primaires.
C'est aussi la région où le revenu per capita est le plus
faible et où la part des paiements de transfert est la plus forte.
La part de la forêt. La forêt productive de l'Est du
Québec compte pour 7,5% de la forêt productive
québécoise, mais présente près de 10,5% ou 1 800
123 cunits des possibilités annuelles de coupe du Québec.
C'est la forêt qui possède le taux le plus
élevé de productivité du Québec, soit 130
unités, ce qui permettrait, depuis la loi 101, de passer à plus
de français, dans une étude de 100 pieds cubes au mille
carré, contre 92,9 pour l'ensemble du Québec. Un bref calcul nous
permet d'évaluer à près de 1250 000 unités de 100
pieds cubes la moyenne totale annuelle de coupe dans les forêts publiques
et privées.
Au cours de l'année financière 1975/76, les diverses
exploitations forestières ont versé, dans l'Est du Québec,
plus de $22 millions en salaires, ce qui représente un revenu annuel
moyen de $5807 par travailleur, alors que les industries de transformation ont
versé en salaires près de $30 millions pour un revenu annuel
moyen de $7767 par travailleur.
La population de l'Est du Québec a donc tiré de la
forêt, un revenu global de $52 millions au cours de l'année
financière 1975/76. Toujours pour l'année en cours 1975/76, les
exploitations forestières ont créé 1291 emplois par le
biais des sociétés et groupements, 1630 dans le secteur des
pâtes et papiers et 887 dans le secteur du sciage pour un total de 3810
emplois directs.
La transformation a créé, pour sa part, par le biais des
pâtes et papiers, 1307 emplois contre 1933 pour le sciage et 600 pour les
scieries de ser-
vice, pour un total de 3840 emplois, sans parler des 200 emplois
permanents reliés au fonctionnement du bureau régional du
ministère des Terres et Forêts.
De plus, l'ensemble, "bois, papier, meuble," représente 60% de la
distribution cumulative de la production manufacturière de la
région selon la valeur ajoutée contre 15% pour la
moyenne du Québec.
La part des pâtes et papiers: Le secteur des pâtes et
papiers employait en 1975-1976, pas moins de 1630 personnes pour ses
exploitations forestières, et 1307 pour la transformation proprement
dite. De plus, on évalue généralement aux alentours de 2,5
le multiplicateur d'emploi des activités de transformation des
pâtes et papiers.
Par ailleurs, force nous est de constater que le secteur des pâtes
et papiers est absolument essentiel, non seulement au progrès mais
à la survie des localités suivantes: Cabano, Chandler,
New-Richmond. Dans le cas de Rivière-du-Loup et de Matane, la base
économique est plus diversifiée mais les usines de pâtes et
papiers constituent là aussi un élément central de
l'économie locale.
Les initiatives populaires. On voit émerger au Québec,
depuis quelques années, des formes nouvelles d'organisation de la vie
économique faisant appel à la participation des employés
et des collectivités locales, à la gestion et au financement des
entreprises. Ces tentatives sont, pour la plupart d'entre elles, reliées
d'une façon ou d'une autre à la forêt, voire aux
pâtes et papiers.
Notre région n'a pas échappé à ce mouvement
et y a même joué un rôle de précurseur par la
cartonnerie ou l'usine de papier à cannelure populaire de Cabano qui est
maintenant en fonction. Dans le même ordre d'idée, on assiste
actuellement à un projet populaire d'usine de papier-journal à
Val-Brillant, dans la vallée de la Matapédia.
L'approvisionnement. La forêt constitue une ressource aux
potentiels multiples et l'approvisionnement des usines de pâtes et
papiers doit être harmonisé en regard des utilisations pour fins
récréatives ou pour le sciage. En ce sens, la révocation
des concessions n'a de signification que si elle permet l'utilisation maximale
de la forêt, de façon à ce que chaque utilisateur y trouve
sa part. A ce propos, nous devons déplorer les délais dans la
confection des plans de gestion des unités de la forêt publique
dans notre région.
Il faut noter d'autre part, que près de 43% de
l'approvisionnement des usines de pâtes et papiers de la région
provient des forêts privées. Ce phénomène, si on
l'envisage à la lumière des données qui nous indiquent que
la forêt privée dans l'ensemble de la région est
utilisée à 125% de son potentiel, met en relief la
nécessité d'un programme vigoureux et intensif de
sylviculture.
On sait déjà que la sylviculture crée beaucoup
d'emplois par dollar investi; le ministre des Finances a déjà
signifié qu'il accorde une grande importance à cette question
surtout pour une région à chômage élevé comme
la nôtre. Mais la sylviculture, en plus de créer des emplois,
permet d'augmenter considérablement le potentiel de nos forêts,
d'ailleurs les études de Lussier, puis de Séguin, ont
établi ce fait et incité l'Etat à se lancer dans des
programmes d'aménagement intensif des forêts privées.
C'est d'autant plus important que, tout en permettant la stabilisation
de l'habitat rural, la sylviculture augmente le potentiel forestier de la zone
habitée où l'on trouve déjà les infrasctrutures et
la main-d'oeuvre requises pour l'exploitation forestière, ce qui
constitue un avantage de localisation pour les usines de pâtes et papiers
et aussi de sciage.
Finalement, en relation avec les questions d'approvisionnement, il faut
parler du problème de la tordeuse. Comment expliquer qu'on n'ait pas
encore réussi à'trouver des armes efficaces et non polluantes
contre ce fléau?
Par ailleurs, il faut orienter les pratiques sylvicoles et le
reboisement en fonction d'essences plus résistantes et favoriser
l'utilisation des feuillus de bois dur par nos usines de transformation.
Vous avez le tableau à la page 11. On a vu plus haut l'importance
de l'industrie des pâtes et papiers dans l'économie
régionale. Jetons maintenant un regard rapide sur les usines de notre
région. Vous avez le tableau, vous l'avez consulté, vous allez
sûrement me dispenser d'en donner lecture.
Dans le cas de Val-Brillant, ce qui n'est pas indiqué, 25%, ce
sont des copeaux prévisibles. C'est prévu à même la
forêt publique, mais par le biais des usines de sciage, donc de
copeaux.
Il se déage de ce portrait que, règle
générale, les usines de la région sont relativement jeunes
et de petite taille. D'après le portrait-type de l'usine
régionale en 1971, elle comptait 248 employés contre 520 pour la
moyenne du Québec, soit 47%, mais elle avait des expéditions de
$10 582 000 contre $18 387 000 pour la moyenne du Québec, soit 57%.
Faute de données plus récentes, nous ne pouvons certifier que
cette productivité supérieure s'est maintenue, mais,
d'après nos observations, nous avons de bonnes raisons de le croire.
Toutefois, il ne faut pas en tirer la conclusion qu'il n'y a pas de
problèmes.
Perspectives d'avenir. Il est toujours un peu hasardeux de jouer au
devin mais il faut le faire pour dégager des perspectives d'avenir, tant
à la lumière des tendances actuelles que du point de vue de
nouvelles avenues à explorer.
L'approche de l'OPDQ. Récemment, pour le sommet
économique, l'OPDQ publiait dans Développement Québec,
volume 4, numéro 5, "Les secteurs productifs de l'économie
québécoise". Voyons ce qu'on y dit au sujet des pâtes et
papiers: "Par contre, le secteur des papiers et produits connexes (pâtes
et papiers) devrait légèrement améliorer sa position et la
demande étrangère devrait continuer d'être suffisamment
vigoureuse pour le maintenir. Quoique les forêts du sud,
avantagées par des cycles de croissance plus courts, puissent constituer
une source sérieuse de concurrence sur le plan international, le
Québec
pourrait exploiter le fait que son bois (essences différentes)
permet la production d'un papier de qualité supérieure. Le
secteur des papiers et produits connexes est déjà engagé
dans un processus de mécanisation qui devrait rajeunir la structure de
ce secteur. Il est souhaitable qu'on cherche à mettre au point des
techniques qui diminuent la pollution et économisent l'énergie.
Cela pourrait placer le Québec à lavant-garde mondiale sur le
plan technologique. Dans ce secteur, en particulier, il est important de
trouver de nouvelles productions. On devrait pouvoir produire sur une plus
grande échelle du papier fin et raffiné, pour contrecarrer les
mesures américaines qui nous incitent présentement à
exporter plus de pâte que de produits finis".
La diversification des productions. Le bois de pâte et ses
dérivés entrent déjà dans la composition d'une
foule de produits. Ce tableau préparé par le Canadian Wood
Council nous en donne un aperçu.
Vous avez, dans le tableau, à l'heure où on se parle, tout
ce qui est produit à même le bois de pâte et qui entre dans
la production; il n'est probablement pas nécessaire de vous en donner
lecture.
Le Québec, de par sa situation privilégiée dans le
secteur des pâtes et papiers, pourrait certainement accentuer sa
production dans ces domaines très diversifiés et ainsi
élargir la contribution de l'industrie dans l'ensemble de son
économie.
Energie et environnement. Dans une société où
s'épuisent les réserves de ressources non renouvelables, on
commence à chercher du côté de la matière ligneuse
des sources d'énergie nouvelles; on n'a qu'à penser au
méthylène qui pourrait, à partir des résidus de la
transformation du bois, servir à alimenter en énergie les usines
existantes et même devenir un combustible pour automobiles.
On peut et on doit également regarder du côté du
meuble et de la construction où le bois pourrait avantageusement
remplacer certains produits qui font largement usage de ressources non
renouvelables, comme le pétrole de certains meubles en plastique ou
l'acier qui nécessite énormément d'énergie pour sa
production.
Dans le domaine des pâtes et papiers, on peut et on doit regarder
tout le secteur de l'emballage. Il y aurait là des économies
d'énergie substantielles à réaliser, sans compter qu'en
plus de favoriser l'emploi québécois et de revitaliser le
secteur, ces mesures contribueraient à assainir notre balance des
paiements et garantiraient la sûreté de nos approvisionnements. De
plus, les produits du papier offrent l'avantage d'être recyclables.
L'intégration. Sans avancer qu'on doit rechercher
l'intégration corporative au niveau des entreprises, il nous
apparaît qu'une stratégie d'ensemble du développement
forestier du Québec doit tenir compte de plusieurs facettes. A titre
d'exemple, mentionnons la stratégie d'entreprise de Boise Cascade
Corporation. Vous avez un texte qui est en langue étrangère pour
moi, mais pour ceux qui manipulent les langues, vous pourrez en prendre
connaissance. D'ailleurs, je pense qu'on donne le texte français plus
loin.
On trouvera de plus amples explications à l'annexe 1 du
présent document. Il nous apparaît que l'Etat, par son pouvoir
législatif et réglementaire, par son intervention
économique (différentes sociétés d'Etat) et aussi
comme gestionnaire de la majorité du territoire forestier du
Québec peut servir de trait d'union entre les diverses entreprises
forestières. A cet égard, le projet de Val-Brillant peut servir
de laboratoire.
Conclusions et recommandations. L'industrie forestière et
particulièrement celle des pâtes et papiers occupe une place
centrale dans l'Est du Québec. Elle est génératrice de
plusieurs emplois, tant au primaire qu'au secondaire et pour les
localités de notre territoire où elle est implantée, elle
constitue une activité vitale. De plus, les initiatives populaires se
font jour chez nous dans ce secteur.
Règle générale, nos usines sont de petite taille,
mais récentes et d'une productivité supérieure à la
moyenne. Elles connaissent certains problèmes, mais la sylviculture et
le reboisement de nos forêts, les plus productives du Québec,
devraient assurer leur approvisionnement. L'Etat peut jouer un rôle
majeur par des mesures favorisant la diversification de la production, la
conservation de l'énergie et l'intégration. Nous avons un certain
nombre de recommandations qui sont les suivantes:
Que l'Etat intensifie les programmes de sylviculture et de reboisement
déjà en application dans l'Est du Québec et cherche
à les adapter encore mieux aux particularités
régionales;
Que l'Etat s'attache à améliorer et à consolider la
gestion des forêts domaniales et rétrocédées et
qu'il veille à faire appliquer la réglementation qui se rattache
à son exploitation;
Que l'Etat accélère la confection des plans de gestion des
unités de la forêt publique de l'Est du Québec;
Que l'on intensifie les recherches pour trouver des méthodes
sûres et sécuritaires de lutte contre la tordeuse. Ce mandat
pourrait constituer une priorité de l'Institut national de la recherche
scientifique.
Que des mesures incitatives favorisent l'utilisation des bois durs pour
le secteur des pâtes et papiers, tant pour les nouvelles usines que pour
la reconversion des usines existantes;
Que l'Etat entreprenne un programme de modernisation du secteur des
pâtes et papiers dont l'application porterait sur les usines actuelles et
sur l'implantation de nouvelles usines;
Que l'Etat élabore un programme de promotion industrielle
axé sur la diversification des produits industriels
dérivés de la forêt;
Que l'Etat, dans le cadre de sa politique énergétique,
mette l'accent sur l'utilisation des produits dérivés de la
forêt;
Que l'Etat se serve des instruments à sa disposition pour agir
comme plaque tournante ou trait d'union de l'intégration de tout le
secteur forestier;
Que l'Etat se donne une stratégie d'ensemble du
développement forestier et définisse clairement le rôle de
ses structures d'intervention et moyens d'action;
Que l'enseignement professionnel forestier soit mieux organisé et
fasse l'objet d'une promotion adéquate.
M. le Président, si vous le permettez, je pense que vous n'avez
pas en main ce document; c'est un produit de dernière heure, contenant
quelques détails qui ont été omis dans le rapport et qui
pourraient avoir une certaine utilité.
Concernant l'usine de Price ou de Gaspésia Ltée à
Chandler, il y a eu des investissements vers les années 1972 ou 1974
d'environ $30 millions pour la modernisation de cette entreprise.
On a fait état de Boise Cascade Corporation tout à
l'heure, compagnie dont le siège social est à Idaho, aux pieds de
la quarante-cinquième. Cette compagnie est en cent
quarante-troisième position sur la liste des 500 plus importantes
entreprises industrielles, selon la revue Fortune de mai 1976. Les ventes ont
atteint, pour l'année précédente, $1 458 050 000, et elle
emploie, dans ses diverses usinesintégrées, près de 29 000
personnes.
En page 15, le premier élément de notre stratégie
d'entreprise consiste à concentrer nos activités dans le secteur
des matériaux de construction et dans celui des produits du papier qui
sont nos deux activités de base.
Le deuxième élément de notre stratégie
d'entreprise est notre intention d'affecter le tiers de nos dépenses de
capital dans nos activités de transformation et de distribution, de
façon à maximiser la capacité d'engendrer des revenus que
nous offrent nos produits dérivés du bois.
Finalement, nous prévoyons optimiser les relations entre les
secteurs du papier et des matériaux de construction, en consacrant
à chacun une part égale de notre programme d'investissement.
Enfin, depuis la rédaction du mémoire, le ministre des
Terres et Forêts a laissé entrevoir la possibilité de la
création d'un fonds forestier pour la sylviculture et on a convié
le Conseil de la forêt à une réunion de travail sur le plan
de gestion du Grand Portage.
M. le Président, MM. les membres, merci.
Le Président (M. Gendron): Je vous remercie. M. le
ministre Bérubé.
M. Bérubé: Un des problèmes que vous
soulevez, dans l'Est du Québec, M. Dubé, se rattache au
problème de la surexploitation en forêt privée. A votre
avis, est-ce qu'un programme de sylviculture qui augmenterait le potentiel de
la forêt privée va résoudre le problème, ou est-ce
que cela ne pourrait qu'inciter les gens, qui récupéreraient les
investissements de l'Etat sous forme d'aide à la sylviculture, à
accélérer les coupes?
En d'autres termes, voyez-vous le besoin d'en arriver
éventuellement, dans le domaine de la forêt privée,
à des législations du type de celles qui existent en
Suède, qui garantiraient que les inves- tissements, dans la sylviculture
ne sont pas carrément de l'argent jeté dans un puits sans fond?
J'aimerais avoir votre réflexion sur ce problème en particulier,
qui, je pense, peut s'avérer assez sévère, compte tenu des
budgets considérables qu'on consent présentement.
M. Dubé: II y a plusieurs volets à votre question.
Concernant la première partie, les chiffres qui sont ici viennent
évidemment du ministère des Terres et Forêts. On doit dire,
à notre grand désarroi que d'abord, on a été
inventorié, surinventorié, depuis quinze ans; depuis le
défunt BAEQ, il y a eu des firmes qui ont fait des inventaires. Il n'y a
pas beaucoup de ces inventaires qui ont une concordance. On retrouve des
écarts considérables qui nous laissent, pour le commun des
mortels, très perplexes. C'est peut-être vrai, mais comme il y a
des écarts plus que considérables, on s'interroge beaucoup sur la
valeur desdits inventaires. Est-ce qu'on pourra en arriver à quelque
chose...? C'est possible, ce que vous mentionnez, qu'il y ait eu de
l'exploitation plus que la possibilité de renouvellement dans certains
secteurs, mais encore là, on n'en a pas la certitude, puisque les divers
inventaires produits, soit par le ministère ou par des firmes
privées, nous révèlent qu'ils sont loin de concorder, avec
des marges très appréciables.
Concernant votre deuxième partie, vous savez déjà
qu'il y a un engagement de quinze ans qui a été pris par les
propriétaires forestiers qui veulent contribuer, qui veulent jouir des
biens de l'Etat, dans l'aménagement. Il y a un contrat de quinze ans et
à l'intérieur de cette période, on a une assurance morale
et peut-être davantage, qu'il n'y aura pas dilapidation des biens de
l'Etat cî-investis. Après quinze ans, vous pouvez vous demander ce
qui va se produire.
Maintenant, il faut vous indiquer que, par le biais de l'organisme qui a
juridiction non pas sur la coupe, mais sur la mise en marché des
produits, nous avons établi, dans tout le secteur des pâtes et
papiers, le contingentement qui, d'une part, se veut respectueux de la
forêt privée, de la forêt tout court, et, d'autre part, veut
approvisionner les usines existantes ou à venir.
Il reste encore le secteur du sciage, mais, à l'heure où
on se parle, il y a une décision prise à savoir que, l'an
prochain, le contingentement s'appliquera intégralement, pas dans tout
l'Est du Québec, bien sûr, mais dans la partie du
Bas-Saint-Laurent, au Syndicat des producteurs du Bas-Saint-Laurent, à
juridiction. Il y aura un contingentement établi. Au fur et à
mesure que nous aurons une plus grande connaissance de la forêt, par des
inventaires plus appropriés, notre intention, tant et aussi longtemps
que les producteurs nous le permettront et que les administrateurs qui seront
là le voudront bien, est de ne pas dépasser le contingentement,
au moins à moyen terme, si on découvre qu'à court terme il
est difficile de passer d'une étape à l'autre; si on
découvre vraiment qu'on a dépassé de beaucoup la
capacité de nos forêts, il ne sera peut-être pas pensable,
à court terme, de revenir à la normale.
Mais, pour répondre spécifiquement à votre
question, vous pouvez être assurés, au nom des administrateurs qui
sont là présentement, que c'est notre désir d'avoir le
plus grand respect de la forêt privée et de collaborer très
étroitement avec l'Etat, parce que, quand l'Etat intervient, c'est nous
qui intervenons, vu qu'il intervient avec notre argent et on voudrait que cet
argent ne soit pas dilapidé dans le milieu.
M. Bérubé: Je voudrais profiter du fait que vous
êtes ici, de votre très grande expérience de la forêt
privée et de votre participation très active à tout
l'aménagement de cette forêt de l'Est, pour pousser un peu plus
avant ce problème de l'inventaire de la forêt privée. C'est
un problème qui a été soulevé au moment du projet
de Val-Brillant, puisque nous avons dû faire un inventaire, et qui est
présentement soulevé aussi dans Québec-Sud, pour des
problèmes de quotas à assigner aux différents producteurs.
Or, des discussions que j'ai eues avec certains de nos fonctionnaires indiquent
des problèmes dans la confection de ces inventaires.
D'une part, il est difficile, dans la forêt privée, puisque
chaque cultivateur exploite son lot, de parler d'une certaine
homogénéité de la forêt. Dans la forêt
publique, en général, on coupe sur des grandes superficies. On
peut donc prélever une place échantillon et supposer, à
partir de l'échantillonnage, que l'ensemble de la forêt
répond à ce qu'on vient de calculer. Sur la forêt
privée, on peut avoir un cultivateur qui est sous aménagement,
qui a donc une forêt plus productive. On peut avoir à
côté un cultivateur qui surexploite, ce que je suppose, avec les
mesures que vous mettez en vigueur, qu'on pourrait évidemment limiter,
mais vous pouvez également avoir à côté un
cultivateur qui n'exploite pas sa forêt, donc, il y a des surplus. Ce qui
veut donc dire que, continuellement, le taux de l'exploitration de la
forêt varie, ce qui rend difficile l'échantillonnage de la
forêt privée et ce qui rend difficile la confection d'un
inventaire aussi précis que l'inventaire sur la forêt publique.
Ceci nous amène, à ce moment-là, continuellement, dans les
discussions, à réévaluer ce que, en moyenne, cela donne,
et on parle tout le temps de moyenne dont on n'est jamais vraiment sûr.
Est-ce que ce sont des difficultés qui peuvent finalement être
surmontées et comment? Avec l'expérience que vous avez,
suggérez-vous des moyens? Quels moyens suggérez-vous pour
répondre à ces questions?
M. Dubé: Je pense bien qu'il n'y a pas de formule magique.
Vous venez d'énoncer une situation de fait, pour un ordre de grandeur,
dans le territoire régi par le Syndicat des producteurs de bois du
Bas-Saint-Laurent, il y a plus de 11 000 propriétaires de lots de toute
étendue en forêt privée. Cela ajoute à la
complexité; plus de 11 000, évidemment, cela peut aller de cinq
acres, jusqu'à 1000 ou 1500 acres. Il est certain que tous les lots ne
sont pas sous aménagement et peut-être que tous les
propriétaires ne mettront pas leurs lots sous aménagement. Il y a
déjà un progrès sensible.
Nous sommes très optimistes sur ce point, car il y a beaucoup de
producteurs, surtout au fur et à mesure qu'on voit que
l'expérience se continue et que les travaux sont bien faits, il y a de
plus en plus de gens qui mettent leur lot sur l'aménagement. Il est
certain, comme vous l'avez mentionné, qu'il y a des gens qui ont
coupé plus que leur potentiel. Il y en a d'autres qui n'en ont pas
coupé plus puisque chacun est autonome. Cela semble vouloir durer encore
au moins pour un temps. On pourrait bien constituer demain des ilôts de
fermes forestières dans certaines paroisses, mais dans les paroisses
plus agricoles, on ne voit pas comment chaque cultivateur va se départir
de sa partie forestière pour constituer un bloc forestier. Cela ne nous
a pas encore touché à l'heure actuelle.
Maintenant, nous fondons beaucoup d'espoir sur les
sociétés et groupements en place, non seulement,
d'aménager rapidement et progressivement, mais d'agir comme moyen de
suppléance auprès des producteurs ou des propriétaires de
boisés qui n'ont pas de possibilités. Je donne quelques exemples:
Vous avez un cultivateur qui a 100 têtes de bétail et qui est
seul, ou 80 pour être plus modeste, plus conservateur; ne lui demandez
pas d'aller en forêt. Même s'il a une belle forêt, il n'a pas
le temps d'y aller. Vous avez des gens pour l'aménagement, vous avez
aussi tous ceux qui sont ici le savent un garagiste, vous avez un
propriétaire de magasin, vous avez des avocats, ce n'est pas du mauvais
monde, vous avez même des ingénieurs forestiers qui mettent des
lots sur l'aménagement et comme ils sont pris ailleurs, ils n'y
travaillent pas.
Evidemment, ce sont tous du bon monde. Ces gens, évidemment, ne
peuvent, ne risqueraient pas de laisser aller n'importe qui dans leurs
boisés. Je suis de ce nombre. Quand on est à travailler pendant
deux générations, on ne laisserait pas cela même si on a
confiance en tout le monde. Mais s'il nous arrive des gens bien
préparés, des contremaîtres, des hommes qui savent
où ils vont, on n'aura pas d'hésitation à les laisser
entrer et à faire faire les coupes nécessaires, que ce soit de la
coupe à blanc, que ce soit de la coupe par bande ou de la coupe
sylvicole. Sur cela on fonde un certain espoir.
Mais il ne faut pas, non plus, pécher par excès,
évidemment, être trop optimiste. Graduellement, avec tous les
mécanismes, on pourrait arriver, sans vous affirmer
catégoriquement, aujourd'hui, dire: On vous donne cette assurance et
soyez sans crainte. Je pense que tout le monde y travaille et tout le monde est
conscient du problème et on essaie de faire le mieux dans le meilleur
des mondes avec les mécanismes que nous avons mis en place et qu'on
continue de mettre en place.
Le Président (M. Gendron): Une dernière question,
M. le ministre Bérubé.
M. Bérubé: Question à plusieurs volets.
M. Pagé: Vous allez finir par apprendre votre
métier.
M. Bérubé: Dans le cas des programmes de
sylviculture, un des problèmes qu'on a porté à mon
attention est celui de la compétition des programmes menés par
les groupements et sociétés, en ce qui a trait à la
main-d'oeuvre forestière et la compétition avec les scieries,
avec les autres exploitations forestières. En d'autres termes, on me
souligne que les taux payés par les groupements forestiers sont souvent
tellement avantageux qu'il y a intérêt pour les gens à
quitter leur emploi à la scierie pour aller travailler au groupement ou
encore quitter les exploitations forestières.
Vu l'importance du programme, parce que je constate que cela emploie
presque autant que l'industrie des pâtes et papiers dans l'Est du
Québec, est-ce que ce problème vous apparaît un
problème réel ou au contraire a-t-il été grandement
exagéré?
M. Dubé: II est réel si vous posez la question au
sens que ce sont des choses qui se produisent; je pense bien que c'est oui.
C'est possible que certains employés de scieries ou d'autres secteurs,
à un moment donné, viennent travailler sur des travaux de
sylviculture. Vous savez que dans certains secteurs, encore là en
paradoxe avec un taux de chômage, on manque de travailleurs,
malgré le fait, comme vous le dites, qu'il peut y avoir changement
d'emploi; certaines sociétés ont suffisamment de travailleurs,
d'autres en manquent. A un tel point que dans certains cas il n'est pas certain
qu'elles puissent dépenser tous les budgets qui leur ont
été attribués.
Il est peut-être trop tôt pour se prononcer, mais en tout
cas il y a certaines appréhensions. C'est un point qui a
été soulevé à la journée forestière
et on regrette infiniment que vous et vos collègues et d'autres n'ayez
pu être présents, lors de la rencontre à Saint-Damase plus
précisément.
M. Bérubé: La brume, M. Dubé.
M. Dubé: Ah oui, la brume. Evidemment en forêt... On
souhaite qu'elle se dissipe et que le beau temps clair revienne pour tout le
Québec. Cela a été soulevé, mais je ne pense pas...
C'est peut-être un fait qui se produit; est-ce que cela dépend du
fait que les travaux de sylviculture sont trop alléchants ou que le
secteur du sciage est trop faible? Je pense que dans les pâtes et
papiers, et je prends à témoin mon camarade de Matane, je ne
pense pas qu'il y ait plusieurs travailleurs, dans l'usine de Matane, qui
quittent, à moins de vouloir travailler au grand air. Cela est bien
possible, on peut travailler pour un salaire moindre quand on veut être
au grand air, mais cela démontre, je pense, et cela vous le savez mieux
que nous, que le secteur du sciage est un secteur plutôt faible, surtout
quand les usines sont de taille plus petite et que la
récupération n'est pas toujours intégrale. C'est un
marché que vous connaissez mieux que moi, et qui, vous le savez, est
caboteux; même si les pâtes et papiers ont des difficultés,
celui du sciage il faut le vivre pour le savoir est
difficile.
Même si c'est un fait qui se produit, et il ne se produit pas, en
tous les cas, de façon excédentaire, parce qu'on ne refuse pas de
main-d'oeuvre, on en manque, je pense que, si votre question a pour effet
d'indiquer que les salaires sont trop élevés, c'est non. Qu'on
recherche ensemble à faire des économies d'échelle, pour
que notre entreprise de sylviculture coûte meilleur marché, on a
tout intérêt à le faire. Je le mentionnais tout à
l'heure, la rente d'Etat, c'est la nôtre. On n'est pas assez dupe pour
croire que, soit l'Etat québécois ou l'Etat canadien, ne fera pas
d'argent, alors l'Etat québécois, c'est notre argent.
Maintenant, à l'heure où on se parle, évidemment ce
sera peut-être d'autre chose, une opinion très personnelle: je ne
pense pas qu'on doive chercher à prouver, à moins qu'on ne nous
prouve le contraire, que les salaires sont trop élevés, si on
compare avec les salaires payés pour un travail identique, soit dans la
forêt publique, soit par la Société d'exploitation REXFOR.
Il y a des barèmes, vous le savez mieux que nous; cela s'achemine durant
les négociations, il y a des barèmes.
En d'autres termes, je pense que personne n'est en train de s'enrichir
à même les deniers de l'Etat présentement. Les travailleurs
ont besoin de se faire un salaire raisonnable pour vivre et ce n'est pas un
salaire comparable à celui qu'on peut rencontrer dans d'autres secteurs
d'activité.
Le Président (M. Gendron): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Bonjour, M. Dubé. Il me fait vraiment plaisir
de constater que le Conseil de la forêt de l'Est est dignement
représenté par un citoyen de la région du
Bas-Saint-Laurent. Je connais vos états de service passés dans le
milieu social de votre région et votre participation soutenue à
plusieurs organisations dans un esprit de vouloir toujours faire davantage pour
la région que vous représentez.
Pour ma part, je reconnais que vous avez fait un bel effort pour tenter
de nous décrire dans votre mémoire, la situation telle que vous
la vivez, telle que vous la percevez chez vous, et de nous indiquer
également, ce qui a été pour moi une information nouvelle,
la place très importante que prenait le secteur forestier dans la
région du Bas-Saint-Laurent. Évidemment, nous sommes
limités dans le temps suite à des ententes prises avec la
présidence, de concert avec les membres de la commission.
Cependant, vous avez soulevé dans votre mémoire, des
choses fort intéressantes, d'autant plus intéressantes, que la
place du secteur forestier dans l'économie de votre région est
énorme, si on compare cela à d'autres régions du
Québec. Vous avez invoqué des faits comme une surexploitation de
la forêt privée, vous avez signalé le besoin de
développer de nouvelles entreprises de transformation à partir
d'expériences vécues au
Québec, dont une, entre autres, à Cabano, chez vous. Un
autre élément que vous avez indiqué, c'était la
volonté, soit des syndicats ou de l'Office des producteurs, de
procéder, dès cette année ou l'an prochain, à
l'application d'un programme de contingentement, c'est-à-dire
d'établir, ce qu'on pourrait appeler les quotas, dans la production
forestière, comme on en retrouve dans d'autres productions
agricoles.
C'est là un élément intéressant, parce qu'il
serait tout neuf pour ce qui est des produits forestiers. J'aimerais
connaître votre point de vue sur les critères, les normes ou la
base sur lesquels on pourrait attribuer des quotas aux propriétaires de
forêts privées. On sait que ces gens sont très nombreux et
qu'ils sont répartis dans un vaste territoire. Comment pensez-vous qu'on
peut rêver à l'application de contingentements dans le domaine de
la forêt?
M. Dubé: M. le Président, pour répondre
à notre ami Julien, je dois dire que c'est déjà
commencé pour tout le secteur des pâtes, c'est en voie de
réalisation présentement. Il n'y a que le sciage qui ait
été laissé temporairement en plan, parce qu'on dit
souvent: Qui trop embrasse, mal étreint, quand on en a un grand nombre.
On a donc commencé par les pâtes. Vous nous demandez comment nous
avons procédé. Il est bien certain qu'on a surtout
procédé par l'étendue des boisés. Vous allez dire
que c'est un critère qui ne se tient pas beaucoup. C'est évident,
on est d'accord avec vous, mais on a procédé avec les
éléments que nous avons, la grandeur des boisés.
Je répondrais à M. le ministre tout à l'heure
qu'à la suite d'inventaires mieux soutenus et plus concrets, on pourrait
arriver à déterminer de plus près, nonobstant les
difficultés, la capacité de chacun des boisés. Chez vous,
vous avez un potentiel d'une corde à l'acre. Cela n'est pas
exagéré. Votre voisin, s'il a coupé à blanc il y a
20 ans ou 15 ans, n'en a tout simplement pas.
On admet au départ que le critère d'étendue du
boisé a une valeur, mais pas la vraie valeur. Il faudrait
connaître la capacité pour établir de vrais contingents
à partir de la possibilité d'écoulement de la production.
Il y a des limitations: celle de la capacité de déboiser et celle
de la capacité d'écoulement de la production. Quand la demande
est plus forte, on peut accélérer la coupe. Quand la demande est
un peu moins forte, il faut la diminuer, il faut contingenter, diminuer les
contingents et pour répartir le gâteau entre l'ensemble je ne
dirais pas des propriétaires de boisés, mais de ceux qui mettent
du bois en marché, soit annuellement ou tous les deux ans. Tous les
propriétaires de boisés ne mettent pas en marché
annuellement. Ce ne sont pas tous des professionnels, vous le savez mieux que
moi. C'est un peu le cheminement que l'on fait. On a commencé avec les
éléments que nous avions, mais, graduellement, on n'est pas
satisfait, et il y a des inventaires, des données photographiques, et
tout cela nous aide à progresser pour en arriver à avoir une
formule plus équitable entre l'ensemble des propriétaires de
boisés ou des producteurs de bois qui les mettent en marché
annuellement.
M. Giasson: Au-delà de cela, vous savez fort bien comment
cela fonctionne. Il y a d'abord une partie des boisés privés qui
sont possédés par des cultivateurs. Est-ce que votre
contingentement va faire en sorte que vous allez demander à un
cultivateur, entre autres, comme à d'autres propriétaires qui
n'ont rien à voir avec l'agriculture, est-ce que vous allez lui faire
savoir qu'il peut, une année donnée, procéder à une
coupe de telle quantité dans son boisé et une autre année
lui dire: Tu ne peux pas couper cette année parce que la structure nous
oblige à t'indiquer que notre capacité de mise en marché
ne te permet pas d'apporter ta contribution, ta part au volume de coupe?
M. Dubé: Notre processus est le suivant: on interroge,
avec la liste, à ce stade-ci de l'année, les propriétaires
de boisés, cela s'est fait il y a quelque temps, on leur demande quels
sont leurs intentions, leurs projets de coupe pour la prochaine année.
Ce n'est pas un contrat. Même s'ils nous indiquent qu'ils vont mettre 100
cordes en marché, cela n'est pas une détermination tacite
à savoir qu'on va en mettre en marché, c'est une intention qu'on
révisera au cours de la période d'avant la coupe, au printemps.
La situation peut changer, un type se fracture une jambe, il est à
l'hôpital. Il voulait couper, et, d'autre part, il peut vouloir couper.
C'est toujours en regard de la capacité de son boisé, comme je
l'ai indiqué tout à l'heure.
Naturellement, il n'y a d'obligation pour personne de couper, je pense
qu'on l'a déjà dit, on ne peut forcer personne. C'est une
première année, on prévoit être peut-être
obligé de mettre de l'avant des formules incitatives, dans le sens qu'on
pourrait cumuler le contingentement. Si, à une période
donnée, ce contingentement n'a pas été utilisé, il
se perd. Il faut que le producteur ou le propriétaire de boisé
prenne la chose au sérieux.
Si vous déclarez à un moment donné, disons au mois
d'avril, que vous avez l'intention de couper 10 000 pieds de bois pour le
sciage, 50 cordes de bois de pâte de toutes catégories, si vous
prenez cela à la légère, disant: Si cela adonne, j'en
couperai, si cela n'adonne pas, je n'en couperai pas, cela ne fera pas du tout
l'affaire. On en est rendu à s'engager, on l'a vu dans le
mémoire, et ce sont des engagements formels sur des quantités.
Vous allez constater avec nous qu'il y a plusieurs usines du territoire qui
s'alimentent presque exclusivement à la forêt privée. C'est
le cas de Matane, de Cabano et de Rivière-du-Loup. On est obligé
d'y aller avec des données précises. La compagnie s'engage
à acheter et on s'engage à vendre. Vous voyez que ce n'est plus
la situation de grandes industries, comme Reed, comme CIP à
Trois-Rivières ou certaines autres, qui prennent 12%, 15% de leur
approvisionnement dans la forêt privée et qui ont aussi la
forêt publique.
On a plusieurs usines qui ne peuvent pas compter, où à peu
près pas, comme à Matane, sur la forêt publique. Il n'y en
a pas du tout. C'est la
forêt privée, en plus du vieux carton, qui fait tourner
l'usine. Vous voyez comme c'est important que le propriétaire de
boisé, quand il donne une intention de coupe, la respecte dans toute la
mesure du possible. Autrement, on va perdre les guides et on ne pourra pas
répondre à nos objectifs de négociation et aux besoins de
l'usine donnée.
M. Giasson: Vous avez également fait mention du volume que
peuvent représenter les usines de sciage de votre région,
déplorant peut-être un peu que ces usines soient un peu petites
pour être en mesure de jouer un rôle efficace et concurrencer
d'autres usines de sciage dans ce contexte du marché qu'est celui du
bois de sciage. Est-ce que vous avez examiné la possibilité en
fonction du potentiel des forêts privées, comme le potentiel qui
pourrait exister dans les forêts domaniales du Bas-Saint-Laurent?
Avez-vous examiné la possibilité de déboucher sur le
concept de l'aménagement, de la construction d'une usine de sciage qui
serait fort volumineuse par rapport à ce que vous avez là-bas et
qui pourrait donner de meilleures garanties, d'abord, de survie, de permanence
et assurer de meilleurs prix à ceux qui devront alimenter cette usine de
sciage? Est-ce que, dans votre esprit, cela ne pourrait pas s'exécuter
par le lancement d'une société publique ou de ce que vous avez
vécu, les initiatives populaires chez vous? Vous pourriez y
intéresser la population, en souscrivant d'abord des fonds, du
capital-actions, quitte à compléter cela par la venue de
partenaires. Est-ce que cela ne serait peut-être pas un des moyens de
faire face au problème que vous vivez du côté de
l'industrie du sciage?
M. Dubé: Je pense qu'il faut distinguer: c'est vrai et
c'est moins vrai. Il y a déjà certaines industries qui se tirent
très bien d'affaire. Elles ne sont pas parmi les plus grandes, mais
elles sont d'une taille raisonnable et qui leur permet de faire des
économies d'échelle. Il y en a un certain nombre. Il y en a
également, surtout dans certains secteurs, qui sont beaucoup plus
petites, moins sophistiquées, en ce sens que, quand on est petit, on ne
peut pas toujours récupérer sa matière à 100%. Il y
en a déjà qui sont en bonne posture et qui sont en mesure de
rivaliser au point de vue des emplois, de payer leurs employés pour
rivaliser avec les travaux similaires qui se font dans le milieu.
C'est vrai dans d'autres secteurs. Dans ce cas, cela ne veut pas dire
qu'on ne devrait pas tenter quelque chose. C'est bien sûr que cela
devrait se faire. On a vu qu'à la suite des études du BAEQ, il y
avait plusieurs millions je ne me souviens pas de l'ordre exact de
grandeur du montant qui était prévu d'après les ententes
Canada-Québec pour justement moderniser notre secteur du secondaire.
Cela aurait consisté en un regroupement de certaines petites usines et
de certaines un peu plus grosses pour avoir un ensemble d'usines de taille
raisonnable, pas de très grandes usines.
Si on les alimente en partie à la forêt privée, il
ne faut pas trop s'éloigner de la matière non plus. Cela ne s'est
à peu près pas fait. On n'a pas profité des fonds qui
étaient disponibles. Chacun a tenté de développer, souvent
autour du clocher, une petite affaire au niveau paroissial. Ce sont certes de
bons sentiments, mais cela ne favorise pas toujours l'économie
régionale et cela peut même nuire à la concurrence qui peut
s'exercer sur ce marché qui en est un très difficile.
Rien ne nous empêche d'entreprendre des efforts, mais le
succès que ces efforts pourraient avoir, on ne le sait pas.
Le Président (M. Gendron): Je m'excuse auprès des
membres de la commission et auprès de nos distingués
invités du Conseil de la forêt de l'Est du Québec, mais,
compte tenu des engagements que la commission avait pris, je dois mettre fin
aux travaux de la commission. Un instant, M. le député de
Portneuf. Oui, alors, allez-y, parce que j'allais annoncer l'ajournement.
M. Pagé: M. le Président, il a été
convenu, à notre grande surprise, que la commission siégerait
mardi matin. Nous avons accepté, évidemment, parce que nous
voulons souscrire aux travaux. Cependant, compte tenu du fait que nous avons
une réunion de l'aile parlementaire mardi, nous nous sommes entendus, M.
le ministre et moi, pour que nos travaux puissent commencer mardi matin
à dix heures, pour se terminer au plus tard à midi, et reprendre
ensuite après la période des questions de
l'après-midi.
Le Président (M. Gendron): C'est exact. M. Pagé:
D'accord, c'est confirmé?
Le Président (M. Gendron): De toute façon, nous
aurons l'occasion de...
M. Bérubé: Je fais confiance à mon
distingué collègue de l'Opposition qui, j'en suis certain, ne me
tendra aucun traquenard.
M. Pagé: La loyale Opposition de Sa Majesté.
M. Bérubé: La loyale Opposition de Sa
Majesté.
M. Pagé: Vous êtes la Majesté, vous
êtes la Couronne.
M. Bérubé: J'espère que vous allez la
rencontrer, Sa Majesté, lorsqu'elle viendra nous rendre visite.
M. Pagé: Non, je laisse cela à votre chef qui s'en
va se promener.
Le Président (M. Gendron): A l'ordre, messieurs! Si vous
le permettez, je convoque les membres de la commission.
La commission parlementaire est ajournée jusqu'à mardi
matin, 10 heures, à la salle 81-A, le 18 octobre. Merci.
M. Bérubé: Merci beaucoup, messieurs.
(Fin de la séance à 14 h 22)