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Étude des problèmes de
rentabilité
de l'industrie des pâtes et papiers
du Québec
(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui sont:
MM. Baril (Arthabaska), Bérubé (Matane), Bordeleau (Abitibi-Est),
Russell (Brome-Missisquoi) en remplacement de M. Bro-chu (Richmond); MM.
Desbiens (Dubuc), Pagé (Portneuf) en remplacement de M. Garneau
(Jean-Talon); MM. Giasson (Montmagny-L'Islet), Grenier
(Mégantic-Compton) en remplacement de M. Goulet (Bellechasse); M.
Gendron (Abitibi-Ouest) en remplacement de M. Grégoire (Frontenac); M.
Brassard (Lac-Saint-Jean) en remplacement de M. Joron (Mille-Îles); M.
Vaillancourt (Orford) en remplacement de M. Larivière
(Pontiac-Témiscamingue); MM. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Marcoux (Rimouski), Marquis
(Matapédia), Mercier (Berthier), Picotte (Maskinongé) en
remplacement de M. O'Gallagher (Robert Baldwin); M. Gagnon (Champlain) en
remplacement de M. Perron (Duplessis).
Avant de continuer l'interrogatoire des gens qui sont devant nous, la
Fédération des producteurs de bois du Québec, tout le
monde se rappelle, pour ceux qui étaient présents hier, qu'une
motion demandant d'entendre la Férédation des travailleurs du
Québec et le Syndicat canadien des travailleurs du papier de l'usine
Wayagamack m'avait été adressée hier par le
député de Portneuf. Cette motion, avant même d'être
discutée, avait été déclarée irrecevable par
la présidence qui basait essentiellement sa position sur le fait
qu'aucun mémoire, conformément au règlement, ne lui avait
été soumis au moment de cette motion.
Ce matin...
M. Pagé: Si vous me permettez, après que vous
eûtes déterminé et jugé que la motion que j'avais
formulée n'était pas recevable, j'ai, à ce
moment-là, demandé le consentement unanime des membres de la
commission pour faire fi de l'article 118 et permettre aux parties d'être
représentées et d'intervenir ce matin.
Étant donné que le gouvernement a été
sauvé par la cloche à six heures, je crois, M. le
Président, sur la foi du mémoire qui a été
déposé ce matin, sur la foi de l'information qu'on a que
l'UQTR...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf, est-ce que vous pourriez laisser la
présidence terminer ce qu'elle a à dire?
M. Pagé: Oui. Mais mon consentement unanime, je l'ai
demandé et j'aimerais avoir une réponse.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense
que la présidence va le demander dans quelques minutes, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: C'est bien.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'étais en train de dire, avant l'interruption du député
de Portneuf, que ce matin, j'ai, en ma possession, un mémoire qui m'a
été remis par les parties intéressées.
D'autre part, un nouveau changement important est survenu, à
savoir que l'Université du Québec à Trois-Rivières,
qui était censée intervenir ce matin après la
Consolidated-Bathurst, s'est volontairement engagée envers la
présidence à céder sa place aux parties
intéressées, c'est-à-dire à la
Fédération des travailleurs du Québec et au Syndicat
canadien des travailleurs du papier. Par conséquent, l'horaire de nos
travaux ne sera nullement bouleversé si les membres de la commission
acceptaient d'entendre les parties qui en ont fait la demande hier. Compte tenu
de ces deux faits nouveaux, c'est-à-dire l'arrivée d'un
mémoire et le consentement de l'Université du Québec,
à Trois-Rivières, je demande tout simplement aux membres de la
commission s'il y a consentement pour que les parties en cause soient entendues
immédiatement après la Consolidated-Bathurst.
M. Grenier: M. le Président. Suite aux déclarations
que le ministre nous a faites, hier soir, à 18 h 55, est-ce que vous
vous êtes assuré que la FTQ pourra être ici ce matin pour
présenter son mémoire?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton, je me suis assuré de
tout cela. J'ai même discuté avec ses représentants et ceux
de l'Université du Québec, à Trois-Rivières.
M. Grenier: C'est parce que l'argument principal d'hier indiquait
que c'était un peu tôt, ce matin, pour permettre à la FTQ
d'être présente, selon les propos du ministre, j'entends.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Au
moment où je vous entends, je suis d'ailleurs en train de croiser le
regard de M. Daoust que je reconnais. Les intéressés sont bel et
bien ici. M. le député du Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Y a-t-il consentement unanime de la part du Parti
libéral?
M. Pagé: Cela va de soi, monsieur. Cette question est
farfelue.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
consentement unanime est-il accordé?
M. Pagé: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
consentement unanime étant accordé, le Syndicat canadien des
travailleurs du papier et la Fédération des travailleurs du
Québec seront entendus immédiatement après la
Consolidated-Bathurst Limitée. Là-dessus, pour revenir à
notre travail d'hier, je cède la parole au député de
Portneuf, qui a des questions à poser à nos invités de la
Fédération des producteurs de bois du Québec.
Audition de mémoires
Fédération des producteurs de bois du
Québec (suite)
M. Pagé: Te! que je l'ai signalé à la fin
des questions formulées par le député du Lac-Saint-Jean je
pense, de toute façon, de celui qui avait à intervenir hier pour
et au nom du gouvernement, j'ai fait état que je céderais mon
droit de parole, au nom de l'Opposition officielle au député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, je voudrais d'abord dire
toute mon appréciation à l'endroit du mémoire qui nous est
présenté par la Fédération des producteurs de bois
du Québec. Nous comprenons fort bien que, sur l'invitation du ministre
des Terres et Forêts, la Fédération des producteurs de bois
du Québec devait sans doute s'intéresser à la situation
qui faisait l'objet de la tenue de la présente commission parlementaire.
Nous savons tous que la Fédération des producteurs
représente environ 20 000 propriétaires de boisé au
Québec, sauf erreur...
Il n'y en a pas 20 000 au Québec? En tout cas, vous pourrez me
corriger tout à l'heure si...
M. Carpentier (Jules): Au moins 50 000.
M. Giasson: D'accord. Entendons-nous sur le chiffre de 50 000,
peu importe, mais, en définitive, vous parlez ici au nom d'à peu
près tous les possesseurs de boisés privés dans la
province de Québec, propriétaires de boisés qui
dépendent largement de la santé ou de la condition que nous
pouvons retrouver à l'intérieur de l'industrie des pâtes et
papiers. Il y a également une dimension qui touche l'industrie du
sciage, mais on peut dire, somme toute, sans se tromper, que la mise en
marché du bois provenant des propriétés boisées
privées compte énormément sur l'industrie des pâtes
et papiers pour être en mesure d'écouler et de disposer de ce
produit. Il était facile de comprendre, partant de là, que vous
aviez intérêt à livrer vos opinions sur ce qu'est
l'état de l'industrie des pâtes et papiers, et surtout à
proposer les formules de rechange, à faire, tout au moins, des
suggestions et à apporter des indications au gouvernement qui aura, au
cours d'un avenir immédiat, au cours des prochains mois, à
déterminer un plan global d'action, à établir une
politique qui pourrait contribuer à modifier l'état actuel des
pâtes et papiers.
Cependant, je voudrais vous signaler, comme un des intervenants d'hier
l'a fait, que, même si vous localisez assez bien les problèmes que
vous jugez dans ce secteur, j'aurais pensé que, dans les recommandations
que vous pourriez faire au ministre des Terres et Forêts et au
gouvernement, vous auriez eu plus de précisions sur l'action directe que
celui-ci devait poser et que vous auriez indiqué également quels
seraient les autres agents économiques, quels qu'ils soient, qui
devraient intervenir dans l'action que le gouvernenent devra entreprendre.
Cependant, nous avons la possibilité de vous avoir devant nous.
Je présume que ce matin, dans les quelques minutes dont nous disposons,
nous pourrons peut-être avoir plus de précisions sur certaines des
recommandations que vous faites. Nous comprenons que le travail que vous avez
entrepris depuis quelques années en vue de modifier les règles du
jeu de la mise en marché du bois des producteurs privés vous a
amenés à faire face à bien des difficultés, beacoup
de difficultés.
Il est facile d'imaginer que vous êtes toujours à la
recherche de meilleurs systèmes, de meilleure organisation, de plus de
compréhension de la part de tous ceux qui ont une intervention à
faire dans le secteur des pâtes et papiers ou de l'industrie du
sciage.
Une première question que j'aurais à vous poser touche la
première recommandation que vous faites au gouvernement. Cette
recommandation se lit comme suit: Nous demandons au gouvernement du
Québec de constituer comme priorité, pour assurer la relance
économique du Québec vous parlez de la relance
économique en général la modernisation de
l'industrie des pâtes et papiers dont l'importance est primordiale. Je
comprends que tout le monde reconnaît qu'on a besoin de modernisme dans
ce secteur.
Beaucoup de gens ont évalué que l'un des principaux
problèmes de l'industrie était le vieillissement des usines et
des équipements. Cependant, de quelle façon aimeriez-vous voir le
gouvernement, l'État intervenir? Quels seraient les moyens? Quelles
seraient les avenues que le gouvernement devrait utiliser pour passer à
l'opération modernisation?
M. Belzile (Hugues): Je pense bien qu'on ne peut pas être
tellement plus précis que ce que l'on indique dans le mémoire
à la page 16, soit que l'État doit être présent.
Doit être présent comment? On n'est pas des spécialistes.
On n'a pas analysé d'une façon approfondie si l'État, par
le ministère des Terres et Forêts, doit agir directement sur ce
secteur ou s'il doit le faire par le truchement d'un organisme
paragouvernemental.
Je pense que les spécialistes de la gestion doivent se pencher
sur ce cas. On dit que la situation des pâtes et papiers au Québec
est dans un état lamentable. Tout le monde s'entend là-dessus. On
n'a même pas eu besoin de faire de démonstration. Je pense que
tout le monde s'entend pour dire qu'actuellement le secteur des pâtes et
papiers est à revoir complètement.
On a également consulté des spécialistes
dans différentes circonstances, qui nous tracent un tableau pas
trop rose pour les prochaines années, si la situation n'est pas
améliorée.
Dans notre secteur, on l'a dit je pense que vous l'avez
noté aussi il y a pour à peu près $80 millions de
bois vendu chaque année à cette industrie. La perspective de voir
fermer des usines dans certains secteurs nous inquiète fortement. C'est
la raison pour laquelle on se présente devant la commission
parlementaire, pour indiquer ces inquiétudes.
Quant à la participation de l'État dans le secteur, on
indique pourquoi on la considère comme fondamentale.
Ce n'est pas parce qu'on est favorable à tout nationaliser au
Québec. Ce n'est pas cela. C'est parce que, pour nous, le capital
privé, le secteur de transformation du bois dans le secteur des
pâtes et papiers s'est avéré incapable de réaliser
ce qu'il aurait dû réaliser, à notre avis. Malgré
certains facteurs négatifs, on l'a dit dans notre mémoire, il y a
beaucoup de facteurs positifs qui font qu'il aurait dû y avoir, qu'il
devrait y avoir une meilleure situation dans les pâtes et papiers
aujourd'hui.
À partir du moment où on fait un constat d'échec de
la gestion des pâtes et papiers, il faut essayer de trouver une solution
de rechange. Et parce que le secteur des pâtes et papiers est
dominé cela a été démontré par
quelques grandes industries au Québec à notre avis, le
seul groupe capable de donner la réplique ou vraiment de revoir tout ce
dossier, c'est l'État. L'État en a les moyens, d'autant plus que
le programme de reprise des concessions est à être
réalisé. Et parce que c'est sa propre ressource naturelle, la
collectivité, la forêt appartient à l'État, 80% de
la forêt appartient à l'État, on pense que c'est absolument
important que l'État intervienne.
De là a vous dire quelle structure il faudrait utiliser, on l'a
dit dans une des recommandations. On pense que l'État, sans être
le seul, devrait, par le truchement des organismes gouvernementaux, avoir un
rôle de démarreur dans certains projets. On ne pense pas qu'il
doive, par exemple, ramasser des usines qui sont en train de se
détériorer ou de disparaître éventuellement. Je ne
pense pas que l'État doive jouer le rôle de
récupérateur de moyens de production ou de transformation qui
n'ont aucun avenir. En tout cas, cela ne doit pas être son seul
rôle, de Père Noël ou de guérisseur de ces maux. Je
pense qu'il doit être maintenant l'instigateur de la mise en place
d'usines plus modernes. Selon des mémoires, en tous cas, quelques
mémoires qui ont été déposés et les
spécialistes qui ont été consultés, on dit que
c'est un problème de productivité, qui ne tient pas seulement au
fait que les ouvriers, peut-être, ne travaillent pas assez, je ne le sais
pas. L'industrie dit: Les ouvriers ne sont pas productifs. Mais,
productivité, on croit que le problème de la productivité
découle d'un équipement désuet qui n'a pas
été renouvelé et puis, à partir de cela, on dit:
L'industrie porte une responsabilité considérable de ne pas
l'avoir fait en temps. Il y a eu des années de vaches grasses, il faut
bien le dire. Je suis convaincu qu'il y a quelques années, l'industrie a
vécu des conditions assez intéressantes et c'est à ce
moment-là, qu'elle aurait dû suivre l'évolution,
c'est-à-dire intégrer plus de modernisme à
l'intérieur de ses usines.
Pour résumer, ce matin, on ne peut pas vous dire: C'est telle
structure qui devrait être utilisée. Dans la mesure où,
dans certains milieux, des groupes socio-économiques sont prêts
à s'impliquer, je pense que l'État doit créer toutes les
conditions pour favoriser cette implication. Quand je pense aux groupes
socio-économiques, les premiers visés sont les fournisseurs de
matières premières et les fournisseurs de travail. On pense que
c'est un motif de productivité, également, d'associer ces groupes
à la gestion de l'usine. On l'a dit dans le texte d'ailleurs, on pense
que c'est un motif de productivité, d'augmentation de la
productivité que le travailleur soit associé à la gestion
et également le fournisseur de matières premières. Je
pense qu'on est en face d'un travail éventuel pour élaborer une
structure qui soit utilisée pour l'intervention de l'État, mais
ce qu'on dit, c'est qu'il nous semble inévitable que l'État soit
présent, non pour aller chercher et ramasser les vieilles usines qui
tombent, mais également faire démarrer des projets qui
répondent vraiment aux besoins de ce secteur, tout en tenant compte des
marchés. On accompagne notre texte en disant que, plutôt que de
construire des usines, il faut tenir compte des marchés, c'est
sûr, mais travailler également à développer des
marchés parce qu'il y a d'autres pays qui l'ont fait et avec un certain
succès en tout cas.
M. Giasson: Vous indiquez que, parmi différentes actions
que l'État pourrait entreprendre, il pourrait y avoir la prise en charge
par l'État des usines comme telles. Mais, dans l'hypothèse
où, sous un appel de collaboration qui serait fait par l'État
à la grande industrie, collaboration qui serait accordée sur une
base volontaire de sa part, ou encore que l'État tenterait d'imposer,
dans l'hypothèse, dis-je où l'industrie, comme telle, ne
répondrait pas, voyez-vous d'autres solutions à une situation de
fait qui correspondrait à ce que je viens de décrire, que celle
de la prise en charge par l'État?
Autrement dit, est-ce qu'il y a d'autres agents économiques au
Québec qui, en dehors de l'industrie elle-même, pourraient, de
concert avec l'État, tenter de trouver des solutions de rechange si
l'industrie comme telle ne veut pas poser les gestes ou prendre les
décisions qui s'imposent en vue de modifier ce qui existe
présentement dans l'industrie des pâtes et papiers? Autrement dit,
est-ce que vous, comme organisme qui représentez plusieurs miIIiers de
Québécois qui font de la mise en marché, vous iriez
jusqu'à accepter de faire comprendre à tous vos membres, à
tous vos producteurs, qu'ils doivent souscrire un montant x sur chaque corde de
bois afin de leur permettre, dans un temps assez rapproché, de devenir
des gens impliqués directement dans la transformation de la
matière ligneuse.
M. Belzile: Oui, c'est toute la partie de la participation. C'est
bien beau de dire qu'en principe, on participe, mais la question est importante
dans le sens que nous autres, concrètement... Est-ce que les producteurs
sont prêts à s'impliquer dans la transformation ou la
création d'industrie? Une chose est évidente, c'est qu'il y a un
travail de promotion très important à faire pour réaliser
cet objectif qu'on vise et qui correspond à une volonté qui se
manifeste certainement de plus en plus dans ce milieu. Il suffit de suivre nos
différentes manifestations au cours d'une année,
assemblées générales de toutes sortes, pour se rendre
compte jusqu'à quel point notre groupe est maintenant assez
traumatisé par la situation actuelle. Parce que le gars qui va chercher
un revenu de $2000, $3000, $4000 ou $5000 par année en vendant son bois
à une industrie papetière et qui est en face de perspectives de
perdre ce revenu, je vous dis qu'il devient intéressé à
travailler à des solutions de rechange.
Il devient doublement intéressé à travailler
à des solutions de rechange pour que les solutions soient vraiment de
rechange, je veux dire qu'il ne travaille pas à pousser pour que le
même système existe. Il essaie d'inventer d'autres systèmes
dans le sens suivant. C'est qu'on est de plus en plus favorable à ce que
les agents socio-économiques des milieux s'impliquent parce que, comme
vous le dites, il y a un grand nombre de Québécois qui sont
impliqués dans une organisation comme la nôtre. Ces gens-là
oeuvrent également dans des milieux socio-économiques comme les
caisses populaires, les mouvements coopératifs de toutes sortes ou
d'autres organismes et, à partir de ça, ils sont en mesure
d'intéresser ces groupes à participer à des mouvements de
ce genre.
Ce qu'on dit, au fond, c'est qu'avant de mettre en branle tout ce
processus et de créer un pattern, de créer une situation, on
pense que l'État doit vraiment, pour partir, être un genre de
maître d'oeuvre dans un ou des projets à être mis en place,
quitte à se retirer au fur et à mesure que la population
s'organisera, que les gens du milieu comme le nôtre, que les gens du
milieu où une usine pourrait être construite, s'impliqueront. Ce
qu'on dit aussi dans notre mémoire, c'est que l'État devrait, par
exemple, disposer d'une expertise, d'un bureau d'expertise vraiment permanent
où des groupes, en dehors de la traditionnelle grande entreprise des
pâtes et papiers, pourraient intervenir dans ce secteur.
Il faut absolument que l'État mette en place ou constitue ce
groupe d'experts. Pour nous, c'est fondamental, parce que ce n'est pas
uniquement pour guérir le problème immédiat, mais c'est
vraiment à plus long terme. Je pense que, dans ce secteur en
particulier, il y a une stratégie de développement
économique qui doit être centrée à partir d'une
intervention de l'État, quitte à s'associer, de la façon
la plus large possible, des groupes socio-économiques des milieux
concernés.
C'est dans ce sens-là qu'on le voit. Des groupes comme les
nôtres, comme vous le dites, doivent s'impliquer financièrement et
cette volonté se manifeste. De plus en plus, on va parvenir à
réaliser certaines choses dans ce domaine-là. On a des
expériences concrètes qui sont à être
réalisées et cela répond relativement bien.
M. Giasson: À un moment donné, dans votre
mémoire, vous signalez que présentement la forêt
privée représente environ 10% du territoire boisé au
Québec et qu'au cours des dernières années la forêt
privée a produit 20% de la matière première servant
à alimenter les usines.
Quand vous examinez ces chiffres, au-delà de la reconnaissance du
fait que la forêt privée est mieux située, a une
productivité meilleure en croissance, ces chiffres ne nous
indiqueraient-ils pas, d'après vous, qu'il y aurait présentement
une surutilisation ou surproduction de matière ligneuse dans la
forêt privée? Autrement dit, 10% du territoire boisé
fournissent 20% de l'alimentation de l'industrie. Ou pourrait-on dire qu'il y a
véritablement une sous-utilisation chronique de la forêt
publique.
M. Belzile: Je n'engagerai pas une bataille sur les chiffres de
capacité de production ou pas, parce qu'il faut se fier aux inventaires
existants et aux chiffres que les spécialistes nous donnent. Je pense
que j'ai répondu à un de vos collègues hier, concernant la
surproduction possible au niveau des forêts privées. Globalement,
on vous dit que c'est essentiellement sur une période de dix ans, au
niveau des résineux, parce que les feuillus, on n'en parle pas, on
sous-produit à 60%.
Au niveau des résineux, on produit à peu près selon
la possibilité de production inventoriée sous la méthode
de production sylvicole, c'est-à-dire avec un rendement soutenu,
continu.
Cependant, dans certains cas, nous-mêmes, on met en doute ces
inventaires du ministère. Même le ministère les
révise actuellement. On a des indications récentes que la
possibilité est un peu sous-estimée, dans certaines
régions en tout cas. La possibilité disponible en inventaire est
sous-estimée.
Quant à la relation que vous faites avec la forêt publique,
je ne peux pas vraiment vous dire s'il y a sous-production de la forêt
publique. Ce que les spécialistes nous disent, c'est que la forêt
privée est plus productive parce qu'elle est située au sud du
Québec et le bois pousse mieux. C'est une réalité. Je ne
sais pas si André-Côme aurait quelque chose à dire
là-dessus, mais c'est une réalité qu'on nous affirme. La
forêt privée, étant au sud du Québec, est plus
productive. Quand on parle de la grande étendue de la forêt du
Québec, on a 10% de cette étendue, on tient compte des
forêts du Grand-Nord aussi, qui ne produisent pas beaucoup. Cela prend
plusieurs dizaines d'années à faire pousser un arbre dans ces
territoires. Dans le Sud du Québec, où se situe la forêt
privée, c'est là où le bois pousse le plus vite. En tout
cas, c'est là qu'on trouve l'explication des 10%-20%.
De plus, c'est que nous sommes dans un territoire où le bois est
plus accessible et les gens sont sur place pour le couper. On va donc chercher
au-
tant que possible la capacité totale de la forêt. Avec 10%
d'étendue, comme on dit, on approvisionne 20% et même plus. On dit
dans notre texte qu'avec l'aménagement de cette forêt, on pourrait
tripler la production, tout en respectant la possibilité, avec des
travaux sylvicoles appropriés.
M. Giasson: Afin de corriger un chiffre que j'ai avancé
tout à l'heure, j'ai parlé des 20 000 producteurs que vous
représentiez, pourriez-vous m'indi-quer quel est le nombre de
producteurs de bois, bon an mal an, qui vous paient un prélevé,
suite à la vente ou à la mise en marché de bois, aux
offices de producteurs ou aux syndicats de producteurs de bois?
M. Belzile: Je vous donne le chiffre précis de 1976 qui
est de 21 500 producteurs qui ont livré du bois, qui ont livré 1
310 000 cordes de bois.
M. Giasson: Ces chiffres varient-ils beaucoup d'une année
à l'autre?
M. Belzile: Non. L'année des grèves, en 1975,
c'étaient 18 000 ou 19 000 producteurs. Mais d'année en
année, cela varie autour de 20 000 ou 25 000 et ce ne sont pas
nécessairement toujours les mêmes producteurs. C'est près
de 20 000, 25 000 qui produisent annuellement. Le président a
répondu tantôt que, potentiellement, il y en a beaucoup plus,
parce qu'il y en a qui peuvent produire à tous les deux ans.
M. Giasson: Maintenant, dans une autre de vos recommandations,
vous indiquez que vous attendez du gouvernement, à brève
échéance, comme l'un des éléments de la
réforme, la mise sur pied de véritables programmes d'allocations
de la matière ligneuse ou des approvisionnements aux usines. Quel
rôle attendez-vous exactement du gouvernement à l'intérieur
de ce plan d'allocations, pour autant que vous êtes concernés?
Vous avez droit à une part de mise en marché ou d'utilisation des
capacités d'usines. Comment pourrez-vous garantir au gouvernement
qu'à l'intérieur d'un plan d'allocations, vous pourrez fournir
chaque année des volumes en vertu desquels le gouvernement ne serait pas
déjoué, compte tenu d'une situation qui fait que vous ne pouvez
pas véritablement obliger ou forcer tous les propriétaires de
boisé privé à couper telle année et couper tel
volume telle année?
Autrement dit, comment un plan d'allocations va-t-il pouvoir être
véritablement efficace et indiquer à l'industrie les sources
d'approvisionnement si, du côté de votre organisme, qui a, chaque
année, du bois à mettre en marché au nom de vos membres,
de vos propriétaires de boisés, vous n'êtes pas capables
d'obtenir d'eux une discipline qui ferait qu'ils pourraient vous garantir...
Autrement dit, je pourrais poser ma question d'une autre manière. Est-ce
que vous devrez déboucher sur des contingentements ou des quotas
à vos producteurs?
M. Belzile: Une première considération à ce
niveau, il faut commencer par traduire une réalité. La question
qu'on se pose actuellement ne regarde pas la garantie que nous pouvons offrir
à l'industrie de livrer les contrats que nous signons. Notre grosse
inquiétude, notre gros problème, c'est de trouver le moyen de
faire respecter les contrats signés par l'industrie. On vous a
illustré, comme exemple, hier, une situation flagrante au cours de
l'été. Ce n'est pas le premier ni le seul à s'être
produit.
C'est une considération que l'on tient à fournir et pour
nous, le régime ou le projet de plan d'allocation sur lequel on n'a pas
abdiqué encore, parce que le ministre nous a invités le printemps
dernier à faire connaître nos vues sur un avant-projet, quitte
à ce que ce projet soit traduit dans une législation à
être déposée, on le pensait, au cours de
l'été, mais on est sûr qu'il va être
déposé cet automne en tout cas, on l'espère
et que ce plan d'allocation nous assure d'un volume à être mis en
marché annuellement. C'est la première partie. L'origine du plan
d'allocation, quel que soit le mécanisme juridique, on y tient
absolument. Je veux dire qu'on crée un nouveau mécanisme ou qu'on
l'introduise au mécanisme qui nous régit actuellement, cela n'a
pas d'importance. Ce qu'il nous faut, c'est un régime qui permettrait
d'arbitrer sur des volumes. C'est la première considération.
La deuxième considération concerne nos engagements
vis-à-vis de l'industrie. Pour rendre cela le plus efficace et le plus
correct possible, vous avez raison dans la suggestion que vous faites, il nous
faut procéder par des contingentements. Déjà, nous avons
commencé à en appliquer dans certaines régions. Vous
connaissez sûrement le problème de la dissidence, M. le
député, qui se manifeste. Elle est reliée, entre autres,
à cette question. Au fur et à mesure qu'on doit imposer des
contraintes, qu'on doit, comme organisme ou comme groupe, signer des ententes
qui nous permettent de remplir des obligations le plus correctement possible,
il y a toujours un certain groupe de producteurs qui ne digèrent pas ce
genre de contraintes. On est obligé de vivre avec cela. On a fait le
pari d'essayer de convaincre tout le monde, c'est-à-dire de
procéder par la conviction plutôt qu'uniquement par la coercition.
Il reste une chose, c'est qu'à un moment donné, il faut
procéder par le truchement de la coercition. Il faut vraiment
procéder, quand il ne reste plus qu'un groupe minoritaire, il faut
vraiment prendre position une fois pour toutes.
La question des contingentements, comme je vous dis, est en train de
s'introduire. On essaie de le faire sans brusquer, sans briser quoi que ce soit
ou sans créer de remous inutiles. Pour nous, dans la perspective de mise
en application des plans d'allocation, il est très clair qu'il nous faut
procéder éventuellement par des contingents individuels
basés sur la capacité de production des boisés. Pour cela
d'abord, initialement, il nous faut une garantie que notre forêt trouvera
un débouché. Il nous faut d'abord cette garantie. Si on se
réfère au livre blanc du ministère des Terres et
Forêts publié en 1972, on reconnaissait implicitement une
première place à la forêt privée et aux
copeaux pour l'alimentation des usines. À partir du moment
où on a une garantie d'approvisionnement ou de livrer notre bois, on
s'engage systématiquement à introduire le système des
contingentements, parce qu'on pense que c'est la seule façon vraiment de
rendre le plus efficace possible notre mise en marché. Encore là,
je vous dis qu'on essaie de le faire avec le temps. On ne manque pas l'occasion
de convaincre les producteurs que c'est la formule pour vraiment s'assurer que
leur bois ne pourrira pas le long du chemin, mais, en même temps, il nous
faut nous assurer du côté de l'État que la partie qui doit
acheter notre bois s'engagera vraiment à le faire.
M. Giasson: Dans l'une de vos réponses hier, vous avez
indiqué un phénomène un peu curieux, c'est qu'au
début de la présente année de production, suite à
l'expiration de l'entente annuelle de l'an dernier, vous aviez
négocié des ententes sur des volumes de bois à être
livré aux différentes usines et qu'après coup, au cours de
l'été, on vous a informés qu'on ne pourrait plus accepter
à l'usine des volumes qui avaient été
négociés.
Ces coupures décrétées par l'industrie, quelles que
soient les usines qui les aient faites, représentent quel volume de
bois, en nombre de cordes de bois?
M. Belzile: Je vais seulement vous signaler le principal cas
parce qu'il y a un cas cette année et il est tellement crucial,
tellement important. Cela représente, essentiellement, 40 000 cordes de
bois.
M. Giasson: II n'y aurait qu'une industrie qui n'aurait pas
respecté...
M. Belzile: Une coupure de 40%.
M. Giasson: Comment cette coupure est-elle justifiée par
l'industrie?
M. Belzile: De 38% plus exactement.
M. Giasson: Comment cette coupure est-elle justifiée?
M. Belzile: Un cas de force majeure, c'est-à-dire un
problème de vente de papier. Encore là, c'est ce qu'on nous dit.
Comme on vous l'a indiqué hier, on n'est pas allé fouiller et,
même si on avait voulu, il aurait fallu avoir une bonne équipe de
détectives pour découvrir vraiment la raison fondamentale.
On se dit que la même compagnie qui continue de fonctionner a
sûrement trouvé un approvisionnement ailleurs, soit au niveau des
copeaux ou de la forêt publique. On ne sait pas. C'est ce qu'on voudrait
savoir, mais on trouve absolument inacceptable cette façon de
procéder et, avant de faire vérifier la validité de la
clause du contrat qui nous lie à cette industrie, pour savoir si elle a
raison oui ou non, le bois pourrit sur le bord du chemin. On aime vraiment
mieux vérifier auprès des autorités gouvernementales qui
donnent les permis de coupe et auprès des autres fournisseurs si
vraiment cette industrie a augmenté ses approvisionnements ou
vérifier si vraiment elle a perdu des contrats.
C'est peut-être cela, un cas de force majeure, mais il y a divers
cas de force majeure qui sont invoqués dans une clause de la convention,
qui peuvent être aussi bien invoqués par l'une ou l'autre des
parties, mais, dans le cas qui nous occupe, on nous dit que cela est un manque
de marché.
M. Giasson: Quel serait le volume de ce bois dont les compagnies
vous déclarent qu'elles ne peuvent pas recevoir toutes les
quantités qu'elles avaient convenu de recevoir à l'usine? Ce sont
40 000 cordes?
M. Belzile: Je vous indique le cas patent d'une compagnie.
Cependant, dans certains autres cas, il y a une clause qui laisse un jeu de
10%, même si on souhaiterait toujours être au poil quant au volume.
Supposons qu'on signe un contrat de 30 000 cordes, on voudrait essayer de
livrer 30 000 cordes.
On ne peut pas présumer jusqu'au 31 décembre parce que les
contrats finissent le 31 décembre. Seule une compagnie nous a
avisés officiellement d'une coupure aussi radicale, mais, dans d'autres
cas, il y a déjà des indications que des compagnies se
prévalent des 10%. Supposons un contrat de 30 000 cordes, disons un jeu
de 10%... Ceci est à l'intérieur du contrat. On est
condamné à vivre avec cela. On va vivre avec cela, mais,
lorsqu'il arrive que, dans une même année, toutes les compagnies,
les 25 ou 30 compagnies à qui on vend du bois, où il y a 1 500
000 cordes de bois d'engagées, si toutes les compagnies disent qu'elles
se prévalent des 10% ou qu'il y en a deux ou trois en plus qui invoquent
un cas de force majeure, vous voyez un peu le problème de garantie
d'approvisionnement dont on parlait tantôt.
M. Giasson: Au cours de 1975, nous avons eu une grève
quasi générale du côté de l'industrie des
pâtes et papiers. Elle a duré, si ma mémoire est
fidèle, environ quatre mois, cinq mois, selon les usines.
Vous aviez des ententes de négociées avec la plupart de
ces usines. De quelle façon avez-vous pu protéger les
intérêts de vos producteurs face à une telle fermeture
parce que, tout de même, les producteurs de bois sur les boisés
privés n'avaient pas prévu de grève dans l'industrie? De
quelle façon avez-vous pu faire face à cette situation et passer
à travers les problèmes qui découlaient de l'existence de
ces grèves dans beaucoup d'usines au Québec.
M. Belzile: Une première considération est qu'on ne
disposait pas des quotas de production dont on parlait tantôt pour dire
aux producteurs: Voici un cas de force majeure, vous devrez suspendre la
production. Cependant, par une action, par une intervention, appelons-la
morale, conti-
nuellement, on a indiqué aux producteurs de diminuer
substantiellement la production parce qu'on savait qu'il y avait des
grèves en cours. Il y en a qui avaient commencé au milieu de
l'été; d'autres ont commencé un peu plus tard, mais,
déjà, cela circulait au Québec. Dans le secteur des
pâtes et papiers, plusieurs usines étaient en négociation
et se dirigeaient vers des grèves.
On a parlé au pire; je veux dire qu'il y a vraiment eu diminution
de production. Cependant, il y a eu quand même une certaine production
qui n'avait pas trouvé preneur. Il nous a fallu négocier avec les
industries quand elles sont revenues en production. Il nous a fallu,
également, compter sur l'intervention du ministère, qui, à
ce moment-là nous a aidés à placer des volumes, quitte
à diminuer, par exemple, des permis de coupe. Je pense même qu'il
y avait eu une intervention du ministre des Terres et Forêts du temps
pour limiter la production dans les forêts publiques à 50%, je
crois. Le permis de coupe a été limité à 50%. Cela
a quand même eu un effet bénéfique sur le problème
des producteurs. Cela n'a pas réglé tous les problèmes,
mais on a quand même pu amoindrir le mal à ce niveau dans le
temps. Au cours des négociations subséquentes, on a essayé
d'aller chercher les volumes appropriés, mais, finalement, il y a eu un
volume de 300 000 ou 400 000 cordes de moins sur les deux ou trois
années touchées par cette grève-là, parce qu'il y a
toujours une projection qui peut se réaliser là-dessus.
Finalement, il y a 300 000 ou 400 000 cordes de bois qui n'ont pas pu
être coupées à cause de ces grèves-là alors
que normalement elles l'auraient été.
M. Giasson: J'aurais une autre question à vous poser
touchant une situation qui existe également, présentement, dans
le secteur. On a entendu dire à différentes occasions, depuis
quelques mois, que l'industrie ou quelques usines dans l'industrie des
pâtes et papiers étaient excessivement sévères sur
la qualité et l'âge du bois qui est livré. Vous avez
même déclaré qu'une usine a refusé une charge de
bois, un camion qui s'est présenté, pour la seule raison, si je
vous ai bien compris, que le bois était trop vieux. On n'a pas
donné d'autres raisons sur la qualité. Devant cette situation qui
semble s'être produite à quelques occasions et trop souvent cette
année, quelle est l'action que vous attendez du gouvernement pour
ramener l'industrie ou ces usines à la raison, parce que cela
m'apparaît des décisions unilatérales qui sont
décrétées de façon sauvage? Le terme,
d'après moi, n'est pas trop fort. Lorsqu'on refuse du bois à
l'usine sous le seul prétexte qu'il est trop vieux, quand il s'agit de
bois qui a été coupé en mars 1977, sauf erreur, cela
m'apparaît une décision absolument inadmissible et d'une nature
totalement discriminatoire à l'endroit des producteurs et des organismes
qui les représentent. Je ne puis comprendre qu'en 1977 on passe encore
de tels sapins aux Québécois. Si vous, vous n'avez pas de
possibilités à l'intérieur de vos marges de manoeuvre, je
crois que l'État, tout de même, qui doit veiller aux
intérêts de l'ensemble, qui est au-dessus de tout cela, devrait,
à un moment donné, ramener ces gens à la raison. Quelle
serait l'action que vous attendez de l'État là-dedans?
M. Belzile: Bon, justement, c'est dans une des recommandations.
Je trouve, entre autres, que c'est une des questions très pertinentes
à l'affaire. Nous sommes aussi traumatisés par cette affaire et
je vous disais hier que cela sent le Moven Age à plein nez et c'est
à peu près la réaction qu'on a. Depuis une couple de mois,
c'est presque systématique au niveau de certaines industries. Nos
conventions de mise en marché avec cette industrie, hélas,
donnent libre cours à une interprétation unilatérale,
comme on l'a dit. On a, bien sûr, l'intention de réviser
très sévèrement le contenu de ce contrat au niveau du
mesurage. Même en le révisant, même en indiquant le plus
clairement possible tous les paramètres qui doivent guider le mesurage
du bois, il faut absolument qu'il y ait un mécanisme légal ou
quelqu'un quelque part qui arbitre entre les deux parties. Comme vous dites, si
je pars demain matin avec une charge de bois, je m'en vais vous voir (vous
êtes l'acheteur) et puis, c'est vous, finalement, qui avez à
écrire le "bill" ou à dire: Ce bois est bon, à le mesurer
et dire: II y a tant de cordes ou non.
Il me semble que j'ai deux mots à dire. Vous mesurez le bois,
vous dites: II y a une coupure de 10% ou ton voyage de bois n'est pas bon. Il
me semble qu'il n'y a pas une tierce personne qui dise: Minute, dans ce voyage,
il y en a 90% qui est bon ou il est vraiment transformable. C'est une faiblesse
vraiment incroyable. On est peut-être un peu fautif dans tout cela.
Malgré les apparentes contraintes qu'on impose dans notre secteur,
c'est-à-dire les pouvoirs dits exorbitants qu'on applique, selon
certains, on a quand même des faiblesses considérables au niveau
des mécanismes légaux qui nous régissent, et celui
concernant le mesurage est vraiment faible.
Je ne sais vraiment pas; on va d'abord tenter de définir
très clairement une clause d'arbitrage qui devrait couvrir un
problème comme celui-là, mais à la rigueur il faudra
quelqu'un qui arbitre, qui prenne une décision sur la valeur
réelle du bois. Que le mesureur de l'industrie seul soit habilité
à dire: Ce bois est bon ou pas bon, ce n'est vraiment pas acceptable.
Quand on n'observe pas d'abus, on laisse passer, mais vraiment, cette
année, on qualifie d'abus la situation qui nous est faite. Vous
signaliez un cas, hier, mais il y en a eu beaucoup au cours de l'année.
D'ailleurs on fera le relevé, on est en train de compiler des chiffres
dans toutes les régions.
Le président me dit, entre autres, que dans certains cas, il y a
des voyages qui ne sont même pas mesurés; le gars, d'un coup
d'oeil, voit arriver le camion et dit: Pas bon, va-t'en. Pour montrer à
quel point c'est arbitraire et unilatéral, il y a des voyages qui
étaient dirigés à une usine donnée; la même
usine dit: Non, je n'en veux pas. Vous traversez à une usine voisine et,
pour une raison ou pour une autre, le mesureur était de bonne humeur ce
matin-là, le voyage rentre et il est très bon
en consommation. Je ne sais pas s'il est très bon, mais en tout
cas il est bon.
Pour compléter, c'est vraiment l'un des points qu'il nous faut
régler. On nous dit, en plus, que même au niveau de la même
compagnie, un changement de quart nous permettait de passer le même
voyage. Simplement le gars se retirait et se représentait.
M. Giasson: II est logique de croire que chaque office de
producteurs ou syndicat de producteurs dans les régions doit faire de la
statistique et tenir des inventaires sur les volumes de ce qu'on appelle le
vieux bois à l'intérieur du territoire.
Au cours de l'été, nous avons eu des commentaires. Les
gens nous ont indiqué qu'il y avait des quantités de ce qu'on
appelle le vieux bois, des quantités énormes qui traînaient
dans les territoires et que l'industrie ne voulait pas accepter. Je ne parle
pas du bois neuf parce que c'est difficile d'avoir des inventaires
précis. Au moment où on se parle, il y a des gens qui coupent.
Mais pour ce qui est de ce qu'on appelle le vieux bois prenons comme
base le bois qui est coupé depuis au-delà d'un an vos
inventaires de chaque office ou de chaque syndicat vous permettent de nous
indiquer quel est le volume, en cordes de vieux bois, c'est-à-dire du
bois qui date de plus d'un an de coupe. Qu'est-ce qu'on a exactement au
Québec? J'aimerais, si c'était possible nous avons le
président du syndicat de Québec-Sud pour M. Veilleux, de
nous dire quels sont les inventaires précis, dans Québec-Sud, sur
ce vieux bois qui date de plus d'un an de coupe. D'abord pour la province et,
de façon plus spécifique, du côté de
Québec-Sud.
M. Belzile: M. le député, je n'ai malheureusement
pas l'inventaire entre les mains. Il est à se faire dans certaines
régions. C'est quand même un travail d'assez longue haleine. On
veut qu'il soit le plus précis possible. On ne peut pas vous donner
exactement un chiffre; vous lancer un chiffre ne serait vraiment pas...
M. Giasson: Vous n'avez pas ces inventaires?
M. Belzile: Non.
M. Giasson: Du bois qui date de plus d'un an?
M. Belzile: Je ne l'ai pas ici. On est en train de le compiler et
ce sera une question de quelques heures pour le ramasser, mais je ne l'ai pas
devant-moi, ce matin. On pourrait donner certaines indications, au niveau de
certaines régions en particulier qui sont touchées.
M. Carpentier: Dans la région de Québec, qui
comprend le comté de Bellechasse et tout le territoire, on a 2000 cordes
de vieux bois de plus d'un an.
M. Giasson: Dans Québec-Sud?
M. Carpentier: Non, dans le territoire de Qué- bec, cela
comprend Bellechasse-Lévis, Lotbinière-Mégantic, Portneuf,
c'est tout le territoire de la région de Québec; on a 2000 cordes
de vieux bois.
M. Giasson: Vous avez des inventaires précis
là-dessus.
M. Carpentier: On a des inventaires et c'est spécialement
dans Bellechasse.
M. Giasson: Je vois le président de l'office de La
Pocatière, est-ce que vous avez des chiffres pour la zone de La
Pocatière?
M. Bernier (Jean): Oui, pour ce qui est de La
Pocatière, au printemps, on ne devait pas avoir plus de 9000
cordes de bois en inventaire qui dépassait un an. Présentement,
on en a 16 000 de livrées et on nous dit, suivant l'estimation qu'on a
faite au niveau des agents, qu'il y aurait encore entre 5000 et 6000 cordes de
bois de plus d'un an. Le facteur qui influence, c'est que, souventefois, ce
sont des bois coupés et laissés en forêt qui ne nous
étaient pas déclarés et qui n'étaient pas
déclarés aux agents. C'est la raison pour laquelle, à un
moment donné, vous voyez une variation aussi prononcée.
C'est assez difficile de planifier une mise en marché quand
ça procède de cette façon.
M. Giasson: Je sais que, du côté de La
Pocatière, il n'y a pas de problème majeur, de l'avis même
de ceux qui dirigent l'office et de ceux qui agissent comme
intermédiaires entre l'office et le producteur. Par contre, il serait
intéressant de connaître les chiffres de Québec-Sud si vous
les avez, M. Veilleux.
M. Veilleux (Jacques): On a fait un inventaire dans
Québec-Sud on fait un inventaire, grosso modo, deux fois par
année il y a environ un mois et demi qui nous donne 4000 cordes
de bois qui restent sur le parterre de coupe ou sur le bord des chemins, de
1975; 19 000 cordes, en 1976; avec le reste coupé en 1977, cela fait un
total d'environ 40 000 cordes.
M. Giasson: Ce qui signifie, somme toute, que le chiffre de 40
000 cordes qu'on a avancé pour votre région serait
exagéré?
M. Veilleux: 40 000 cordes est un chiffre vrai si on prend
l'inventaire global de tous les bois coupés en 1975, 1976 et 1977 qui
sont sur le terrain.
M. Giasson: Oui, mais, en 1977, ce n'est pas ce qu'on appelle le
vieux bois?
M. Veilleux: Non.
M. Giasson: Les volumes de bois...
M. Veilleux: 1975, 1976, c'est 23 000 cordes; 19 000 en 1976,
4000 en 1975.
M. Giasson: Au lieu de 40 000 cordes, c'est 23 000 cordes de bois
dont l'exploitation et la coupe remontent à 1976 ou 1975.
Est-ce que vous avez des possibilités de mise en marché
à l'intérieur des ententes que votre syndicat a signées
jusqu'à maintenant?
M. Veilleux: On avait des possibilités oui, en
contraignant les producteurs à en couper le moins possible. Si les
contrats avaient été respectés de la part des
utilisateurs, on aurait la possibilité de l'écouler cette
année. Mais on a un autre gros problème qu'on vous a
mentionné tout à l'heure qui est le vieux bois. Si on veut
recevoir, en grande partie, dans plusieurs usines, seulement du bois frais,
celui-là, qu'est-ce qu'on en fait?
D'ailleurs, les...
M. Giasson: Si l'industrie, M. Veilleux, ne change pas d'attitude
dans ses exigences face à l'acceptation de ce qu'on appelle le vieux
bois, comment allez-vous pouvoir libérer les producteurs de tels
volumes?
M. Veilleux: Par une intervention de l'État pour forcer
l'industrie à le prendre, parce qu'on n'est pas capable de le manger
actuellement ce bois-là.
Il faut qu'il passe aux industries pour être
transformé.
M. Giasson: Je m'aperçois que j'ai monopolisé pas
mal de temps. J'aurais d'autres questions, mais je cède mon tour pour
permettre aux autres formations d'intervenir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Brome-Missisquoi. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
la Fédération des producteurs de bois. Inutile de vous dire qu on
se rend compte de la valeur du dossier que vous nous présentez, qui est
vraiment étoffé. Vous avez pris votre rôle à coeur,
à savoir que vous n'êtes pas venu ici pour simplement utiliser
deux heures de la commission, mais lui fournir l'information dont on a besoin.
Pas besoin de vous répéter non plus que l'ensemble des
députés s'enrichit aux réponses que vous donnez et qui
sont fort pertinentes.
Personnellement, mêlé au milieu du bois,
représentant un comté vraiment rattaché à cette
industrie, j'apprends des choses. Je pense qu'on peut en apprendre longtemps
dans ce secteur. Vous véhiculez également certaines idées.
Si vous étiez en politique, je suis à peu près certain que
vous seriez de l'Union Nationale; c'est effrayant comme ça ressemble aux
politiques qui sont préconisées par le chef.
Vous faites des suggestions fort pertinentes quand vous nous dites qu'il
nous faudrait des groupes d'experts. Vous avez certainement puisé dans
les déclarations que faisait M. Biron quand il disait: On est
tanné de voir un gouvernement qui demande à ses industriels
uniquement de faire des rapports. Ce serait donc agréable d'avoir des
experts qui se promèneraient dans les industries pour trouver des
débouchés ou des façons d'une meilleure production. Je
pense bien que ce n'est peut-être pas une idée neuve, blague
à part. Ce sont certainement des changements que vous aimeriez voir
arriver. Encore plus, quand vous venez de mentionner, à la
réponse du député de Montmagny-L'Islet, la présence
de l'État dans ce secteur, vous n'avez peut-être pas
été jusqu'au bout de votre idée, mais vous étiez
bien engagé, en disant que l'État devait être
présent, parce que plus grand propriétaire, ainsi que les
travailleurs. Vous n'êtes pas allé plus loin.
J'aurais aimé vous entendre dire jusqu'où vous pensez que
l'État doit s'impliquer dans ce secteur, de même que les
travailleurs. C'est bien sûr que l'État ne peut pas être,
comme vous l'avez dit, un Père Noël. Il ne faudrait pas non plus,
par sa négligence d'action, que ce soit un Bonhomme Sept Heures pour les
industries. Ce n'est pas par des gestes posés qui fait que l'État
négligeait son rôle. Il y a peut-être une source
d'inquiétude vis-à-vis des industries.
Si vous jugez à propos de nous préciser ce rôle de
l'État et le rôle du travailleur, ce serait bien pertinent
à la question. Voulez-vous ajouter quelque chose immédiatement
à cette question?
M. Belzile: M. le député, j'ai peur de me
répéter. Je vais essayer d'être encore plus clair dans la
mesure où...
M. Grenier: Je pense que la commission a bien saisi, mais ce
serait peut-être afin de préciser davantage.
M. Belzile: D'accord. Quant à la recommandation
numéro huit, à laquelle vous faites allusion, je pense, quand on
dit que l'État doit créer des conditions selon lesquelles les
groupes impliqués... Quand on parle de créer des conditions, la
mise à la disposition de ces groupes, d'une expertise, c'en est une
condition. C'est un des premiers gestes que l'État doit poser. De plus,
parce que la situation est dramatique et urgente.
On ne peut pas demander, dans toutes les régions, aux
travailleurs d'usine, fournisseurs de matière première, caisses
populaires, à tous les groupes socio-économiques d'un milieu, de
mettre en branle un processus pour ériger une usine de transformation du
jour au lendemain. Il peut arriver que, dans certains cas, cela se
réalise, mais généralement au prix d'efforts
considérables et d'un engagement presque de tous les instants. Parce que
la situation est urgente, on dit que l'État doit vraiment, dans
plusieurs cas, intervenir dans le démarrage.
Au fur et à mesure que les groupes socio-économiques se
constituent, en d'autres termes, c'est la création d'une autre ligue des
pâtes et papiers qu'on souhaite un peu. On ne demande pas à
l'État de mettre de côté ceux qui sont là. Mais on
dit: Ils sont déjà suffisamment présents, ils n'ont
pas démontré vraiment toute la qualité de
gestionnaires qu'ils auraient dû démontrer, à notre avis,
compte tenu de toutes les circonstances. On pourra nous contredire
là-dessus, mais c'est l'impression qui se dégage de la situation
qui nous est faite actuellement.
On dit: L'État doit intervenir en mettant des experts à
notre disposition et en fournissant des moyens financiers également,
pour démarrer certains projets, là où des groupes
n'auraient pas le temps, à cause des conditions reliées à
la mise en place d'un groupe homogène dans une région
donnée. Il y a quand même tout un processus de consultation et de
concertation qui doit se réaliser dans une région, avant d'amener
la majeure partie des groupes socio-économiques à s'impliquer
dans un secteur comme cela, de leur faire comprendre que le secteur des
produits de la forêt, le secteur forestier au Québec, c'est un
secteur central, important, fondamental.
Avant que tout cela soit fait, on risque d'attendre assez longtemps,
quand on sait qu'ériger des complexes comme ceux dont on parle, cela
doit reposer sur des études assez approfondies et également des
études de marché, pour trouver des débouchés
nouveaux pour le bois, mais également pour améliorer les
marchés existants.
C'est dans ce sens qu'on pense que l'État a vraiment un
rôle assez immédiat à jouer, non seulement immédiat
mais pour l'avenir. Je pense que c'est le type de présence de
l'État qu'on souhaite dans ce secteur pour l'avenir également,
pas pour régler le problème immédiat, cela coincide, mais
ce serait à long terme. On pense que l'État n'a pas le choix,
qu'il est condamné à intervenir dans ce secteur d'une
façon vraiment élaborée, quitte à se retirer au fur
et à mesure que les groupes seront en mesure d'assumer la gestion d'une
telle industrie. Je ne sais pas si cela répond à votre
question?
M. Grenier: Oui.
M. Belzile: On ne peut vraiment pas aller plus loin ce matin. Ce
n'est peut-être pas notre rôle de creuser toutes les conditions.
Mais ce qu'on peut vous dire, c'est que, comme représentants de
fournisseurs de matière première, nous sommes drôlement
intéressés à y participer et on vient vous dire qu'on a un
travail à faire pour intéresser davantage et on a un travail
à faire pour démontrer notre volonté. Ce n'est pas tout de
le dire, il faut aussi le démontrer. On vient vous dire qu'on est
intéressé à le faire et à participer avec
l'État.
M. Grenier: Merci. À la page 7 de votre programme, vous
parlez d'un réseau d'industries des pâtes et papiers capables
d'utiliser des essences de feuillus. Connaissez-vous des façons de
réaliser cette proposition dont vous faites mention?
M. Belzile: Vous voulez dire les essences de bois?
M. Grenier: Les essences de feuillus.
M. Belzile: Actuellement, il s'en utilise. On ne dit pas qu'il ne
s'en utilise pas. Pour répondre plus précisément à
votre question, le tremble et le peuplier sont des essences qu'on croit que
l'industrie en place pourrait utiliser à plus fort volume; dans le cas
d'installation d'industries nouvelles, on croit que l'utilisation à plus
fort volume des essences feuillues devrait être envisagée. Il y a
d'ailleurs des pays qui le font. On ne voit pas pourquoi cela n'aurait pas
été possible au Québec, surtout dans les régions
où l'industrie est dans la forêt privée. Comme on l'a
démontré, la forêt privée est majoritairement
constituée en volume d'essences feuillues. La grande majorité des
usines de transformation en place sont localisées dans les
régions où se trouve la forêt privée. On trouve que
cela est un manque du côté de l'industrie de transformation de ne
pas s'être avec le temps adaptée à ce
phénomène.
M. Grenier: II y a sûrement des rapports qui doivent nous
le dire, et on nous en a donné des tonnes, mais quel pourcentage de
feuillus utilise-t-on au Québec?
M. Belzile: Selon la capacité de production? M.
Grenier: Oui.
M. Belzile: Dans les meilleures années, 40%. M.
Grenier: C'est 40%?
M. Belzile: Selon la capacité de production des
boisés privés. Je pourrais indiquer en plus que la forêt
privée a plus de feuillus en pourcentage que si vous allez dans la
grande forêt publique, vers le nord. Le pourcentage de feuillus est plus
élevé dans ce coin-là.
M. Grenier: De ces 40%, est-ce qu'on fait de l'exportation ou de
l'utilisation sur place, et quel pourcentage de la forêt est
traité ici au Québec?
M. Belzile: C'est important. Il faudrait faire une nuance; il y a
une usine en particulier que j'ai à l'esprit, mais on pourrait penser
à d'autres, comme CIP à Hawkesbury, qui achète 80 000
cordes par année. À ma connaissance, c'est l'usine importante, en
dehors du Québec, qui achète des feuillus. 80 000 cordes, c'est
quand même 80 000 sur 400 000 cordes. C'est relativement important.
M. Grenier: Je ne veux pas ennuyer la commission avec cela, mais
Mégantic Manufacturing, utilise du bois franc, des feuillus; dans quelle
portion utilise-t-elle ceux du Québec ou ceux du Maine
principalement?
M. Belzile: Je n'en ai aucune idée, d'autant plus qu'elle
ne s'approvisionne pas dans les forêts privées.
M. Grenier: Un peu plus loin, à la page 11, vous parlez de
la désuétude de l'équipement et de
la mauvaise localisation de l'industrie. On a établi des
coûts assez importants pour la construction de nouvelles usines, et si on
tient compte du changement social d'une relocalisation, j'aimerais savoir si
c'est dans votre optique de relocaliser certaines industries et pensez-vous
qu'il y aurait là vraiment une économie à sortir des
industries du secteur où elles sont déjà installées
pour les relocaliser?
M. Belzile: Non. Notre approche n'est vraiment pas de fermer des
usines existantes, surtout celles qui fonctionnent. On n'a vraiment pas
l'intention de proposer des fermetures. C'est dans la perspective
d'érection de nouvelles usines.
Tout ce que nous voulons dire dans ce chapitre, c'est que l'industrie
qui a été construite il y a 50 ans a été construite
à partir de facteurs de localisation qui sont forcément
différents de ceux d'aujourd'hui. Vous avez toute la question de
l'environnement qui est entrée en ligne de compte. Dans ce
temps-là, il y avait une très forte proportion du bois qui
alimentait les usines, qui se faisait par flottage ou par chemin de fer.
Aujourd'hui, avec les camions perfectionnés et les routes
également il y a de plus en plus de meilleures routes on
peut penser à l'approvisionnement par camion. Cependant, les coûts
sont également très élevés. Parce qu'il faut penser
en fonction d'un retrait total du flottage du bois, on pense que le facteur de
la localisation reposant sur la proximité de la matière
première est, à notre avis, un des facteurs centraux, parce que
nous autres, dans la forêt privée, on vous dit que 25% de la
valeur du bois livré à l'usine sont versés au transport.
On trouve cela trop important et, malgré cela, on dit que, globalement,
l'industrie est mieux située par rapport à la forêt
privée qu'elle ne l'est pas rapport à la forêt publique,
parce que la forêt publique, depuis le temps, est reculée; il y a
moins de forêts publiques autour des usines qu'il y en avait il y a 50
ans. Il faut qu'elles aillent les chercher assez loin. Donc, la forêt
privée est, en général, un peu mieux située.
Malgré cela, il faut, dans la perspective de la construction de
nouvelles usines, tenir compte de ce facteur, parce que c'est probablement un
des coûts les plus importants, la question du transport. Il n'est pas
question de dire: On déménage ou on suggère la fermeture
de cette usine pour déménager ses installations ailleurs. Il
n'est vraiment pas question de cela.
M. Grenier: Le regroupement forestier, vous avez entendu parler
de cela, j'imagine bien...
M. Belzile: Oui.
M. Grenier: Cela fait peur à bien du monde dans certaines
régions. Voyez-vous l'efficacité de ce regroupement? Au niveau
où je les vois, dans notre région, ce sont principalement des
cultivateurs, dans un très grand nombre de cas, ou d'autres, des
retraités qui ont été des cultivateurs et qui sont
propriétaires de ces boisés qui ne sont pas encore couverts par
des lettres patentes. Cela inquiète un peu les gens de savoir qu'ils
entrent dans un contrat qui va durer dix, douze ou quinze ans avant
d'être les véritables propriétaires de leurs terrains, qui
leur appartiennent depuis peut-être une trentaine d'années. S'ils
n'ont pas les titres officiels, au moins, moralement, cela leur appartient pour
avoir été des contribuables. Voyez-vous l'efficacité de
cela?
M. Belzile: Oui. Je pense qu'il y a une question semblable qui a
été posée à un autre groupe
précédemment. Évidemment, on connaît cela et on est
un des groupes qui en a suggéré et qui en a proposé la
mise en place. C'est dans le but de réaliser la mise en valeur de la
forêt. Donc, à la question de savoir si on est d'accord, on est
plus que d'accord. On est parmi les promoteurs de cette formule.
Quant à la question de la propriété
libérée par contrat, c'est un peu plus mitigé que de dire
que le gars perd la jouissance de sa propriété pendant vraiment
quinze ans. Il s'engage par contrat à ne faire que les travaux qui sont
prescrits par une équipe technique, il aménage sa forêt en
fonction des meilleurs méthodes sylvicoles, premièrement.
Deuxièmement, il est actionnaire du groupement officiellement en mettant
sa propriété et il lui est fourni un nombre d'actions
équivalant à sa propriété évaluée.
Troisièmement, c'est lui qui administre ce groupement. Pour tout dire,
ce sont des groupes à dimension vraiment humaine où le gars est
vraiment impliqué dans sa gestion. Indépendamment de la formule
légale, cela ressemble beaucoup, à notre avis, aux
coopératives régionales ou locales qui pourraient se créer
pour différentes choses, parce que ce sont vraiment ces groupements qui
sont à la dimension de quelques paroisses. D'ailleurs, les
paramètres établissant la délimitation de ces groupements,
c'est tant de milliers d'acres qui correspondent à peu près
à cinq, six ou sept paroisses. Cela respecte vraiment la vie
socio-économique d'un milieu. On pense que, pour remettre en valeur,
parce qu'on y croit à la mise en valeur de la forêt, on dit que,
dans la perspective, au fond, où cela a un lien avec la modernisation,
dans la perspective d'établissement de nouvelles usines et
d'alimentation de ces usines, on croit beaucoup à l'avenir de la
forêt privée. On est peut-être partie à cela, mais on
y croit beaucoup. Je pense qu'il y a beaucoup de gens, maintenant, qui y
croient au Québec, que cette forêt a un rôle
extraordinairement important à jouer dans l'avenir, mais, pour lui faire
réaliser ce rôle, il nous faut absolument l'aménager, il
nous faut la faire produire à son maximum. C'est à partir d'une
politique de mise en valeur qu'on va le faire.
M. Grenier: Par ce regroupement forestier je pense l'avoir
bien compris; c'est là ma toute dernière question je pense
que vous fournissez aux gens qui font en partie, qui prennent comme un contrat,
la possibilité d'un reboisement, de plantation. Ils sont même
payés, à ce moment, s'ils travaillent sur leur
propriété. Je tâche de vous aider, car mon secteur est un
secteur dans la province qui a été glané par des gens qui
vendaient à des compagnies et, par la suite, on a vu fermer des
paroisses et, actuellement, 95% des gens reçoivent de
l'assistance sociale. C'est le cas, dans mon comté, de deux ou trois
paroisses, à cause du glanage qui a été fait par des
compagnies ou même par des particuliers.
Je pense que vous avez là une formule qui aura des effets d'ici
une quinzaine d'années au moins quinze, vingt ans et je
pense bien que cela mériterait d'être davantage connu parce que
cela inquiète encore un peu les gens mêlés à ce
système.
Je vous remercie au nom de notre parti.
M. Belzile: Tout simplement pour compléter sur la question
du regroupement, je pense que c'est une politique où on est les
promoteurs, mais on peut dire qu'on est copromoteur avec l'État, parce
que l'État est également d'accord et c'est un programme qui
remonte à quelques années.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Mégantic-Compton. Très rapidement,
puisqu'il ne reste qu'environ cinq minutes, M. le député
d'Abitibi-Ouest et M. le député d'Arthabaska.
M. Gendron: Ce sera très rapide. Je voudrais tout
simplement mentionner qu'à la page 15 vous m'apparaissez insister sur le
fait que l'État québécois aurait dû jouer, un plus
grand rôle dans la gestion des industries de pâtes et papiers.
Personnellement, je ne suis pas loin d'être d'accord avec vous, sauf que
j'aurais aimé que, sans faire une analyse bien exhaustive, vous puissiez
nous donner quelques précisions sur le type de gestion dont vous voulez
parler. Entre autres, de quelle façon seraient répartis les
niveaux de responsabilités? Qui prendrait les décisions? Comment
fonctionnerait une équipe aussi complexe, soit l'État employeur,
le gouvernement, les entreprises, éventuellement, les producteurs, tout
le monde impliqué au niveau des pâtes et papiers?
J'aimerais, tout simplement, que vous puissiez articuler un peu plus
l'image ou le portrait que cela pourrait donner au niveau de la gestion
interne.
M. Belzile: Étant donné que nous sommes dans une
société de type nord-américain, de type capitaliste, on
est encore convaincu que la gestion d'une entreprise ou le niveau de
responsabilité est directement proportionnel à l'apport d'un
groupe donné dans la construction ou dans la mise en place d'une
usine.
Il en va de même pour le secteur des pâtes et papiers et
l'espèce de structure qu'on envisage pour l'avenir. Je ne pourrais pas
vous donner ce matin un tableau bien détaillé de la
répartition, vous dire, supposons que les travailleurs de l'usine
devraient avoir tant d'actions, etc.
Je dis que c'est dans la mesure où chacun des groupes croit
vraiment à ce programme qu'il y participe selon l'importance qu'il a
dans ce groupe. Il doit avoir une participation à la gestion en fonction
de leur participation financière à ce projet.
M. Gendron: Je comprends que cela peut être difficile
d'expliciter davantage parce que, comme vous le dites, c'est quand même
relié à bien des facteurs économiques dans le contexte
actuel. Alors, comme il ne reste pas tellement de temps, j'aurais une question
rapide.
Lorsque l'Association des industries forestières du Québec
a comparu, elle a mentionné, à plusieurs reprises, que
l'approvisionnement au niveau des boisés privés n'était
pas tellement significatif. La raison principale était l'absence de
garanties au niveau des approvisionnements.
Or, selon les chiffres que vous avez mentionnés, toujours aux
alentours à peu près de 20%, je comprends mal qu'on puisse
alléguer que la raison pour laquelle c'est non significatif chez eux,
c'est qu'il n'y a pas de garanties au niveau des approvisionnements, alors que
vous prétendez le contraire.
M. Belzile: Moi aussi, M. le député, je comprends
mal cette position de l'industrie. Effectivement, c est bon an, mal an, 20%,
l'approvisionnement. En plus, le bois des forêts privées lui
coûte moins cher. Elle l'a confirmé dans son mémoire. Je
n'ai pas été témoin de sa comparution, mais on a pu voir
le contenu de son mémoire. Le bois de la forêt privée, ni
plus ni moins, subventionne les problèmes actuellement.
En tout cas, cela confirme ouvertement maintenant ce que des gens de
l'industrie nous disaient. On dit que ces 20% sont susceptibles d'augmenter et
on trouve cette réaction de l'industrie, à savoir que ce n'est
pas significatif...
Je trouve que 20% avec la perspective de l'augmenter substantiellement,
c'est quand même quelque chose.
Quant au niveau de la garantie, je pense que je ne
répéterai pas toute la réponse que j'ai donnée
à M. le député de L'Islet, tout à l'heure, sauf que
je tiens encore à répéter que, en même temps qu'on
va travailler à garantir nos contrats de livraisons de bois, il faut
trouver un moyen pour que l'industrie s'engage à respecter ses
signatures. C'est ce qu'on n'a pas eu jusqu'à maintenant. Alors, ils
sont vraiment assez mal placés, merci, actuellement, pour nous donner
des leçons à ce niveau. Vraiment, assez mal placés. On a
des exemples, depuis quelques années, qui nous démontrent que
s'ils étaient aussi respectueux de leurs engagements qu'on l'est, j'ai
l'impression que des volumes de bois qui traînent sur le bord des routes,
il y en aurait beaucoup moins.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Arthabaska.
M. Baril: Je suis à peu près certain que M. le
Président va me laisser quelques minutes supplémentaires parce
que j'aurais plusieurs questions à poser à la
fédération. C'est un domaine que je connais assez bien.
Premièrement, je félicite la fédération parce que
je suis toujours intéressé de voir qu'un organisme agricole a le
courage de ve-
nir défendre ses impressions ou ses méfiances
vis-à-vis de certaines compagnies ou vis-à-vis de
l'économie en général. Je vais essayer de faire
très vite.
Premièrement, j'aimerais savoir le pourcentage. Qui fait partie
de votre fédération? Est-ce uniquement des producteurs agricoles
ou est-ce qu'il y a des propriétaires de boisés privés en
tant que tels qui ont juste un boisé?
M. Belzile: Je ne sais pas si vous avez à peu près
une ou deux minutes. Je vous donne l'essentiel de la constitution d'un
organisme comme le nôtre. La fédération regroupe 13
syndicats et offices de producteurs de bois à l'échelle du
Québec. Les syndicats de producteurs de bois, ce sont des organismes
syndicaux qui administrent des plans conjoints de mise en marché. Le
plan conjoint, quand il a été voté, il a été
voté démocratiquement avec des exigences démocratiques
très sévères, on pourra vérifier, je ne vous donne
pas tous les chiffres surtout au niveau du bois dans le temps. Cela lie tout le
monde au niveau de la mise en marché. Toute la forêt autre que
celle appartenant à la Couronne est couverte par le plan conjoint et le
syndicat, dans le cas qui nous occupe, est l'organisme chargé
d'administrer ce plan. Cela part d'une loi qui s'appelle la loi sur la mise en
marché des produits agricoles qui a introduit des pouvoirs, laquelle loi
a été votée par des députés de
l'Assemblée nationale du Québec. Laquelle loi, également,
prévoit la mise en place ou l'institution, et elle existe, d'une
régie des marchés agricoles du Québec qui est
chargée d'appliquer cette loi. Et puis, toutes les actions concernant
l'action des plans conjoints sur la mise en marché sont
vérifiées, sont continuellement sous la surveillance de la
régie en question. Alors, en termes de mise en marché, tous les
producteurs sont couverts par une organisation comme la nôtre.
Quant à savoir combien de producteurs sont membres du syndicat,
pour pouvoir administrer le plan conjoint, il faut démontrer notre
représentativité, et c'est comme toute organisation
démocratique, il nous faut 50%. Au moment où on se parle, parce
qu'il en rentre régulièrement, il y a entre 30 000 et 35 000
producteurs et, malheureusement, je n'ai pas les chiffres devant moi, il y a 30
000 à 35 000 producteurs qui sont membres des syndicats qui administrent
des plans conjoints. Je ne sais pas si cela répond à votre
question; c'est l'essentiel de la structure qui nous régit.
M. Baril: En tous les cas, je vais m'arrêter là
parce que le temps joue contre la montre actuellement. Comment votre rôle
est-il perçu par les compagnies?
M. Belzile: J'espère qu'il est perçu correctement
parce qu'en 1977 l'industrie privée doit être pas mal moins
allergique à tout ce qui s'apparente au syndicalisme. Si elle est encore
allergique, il y a des responsables de l'industrie qui doivent ouvrir les yeux
sur la société actuelle. Quant à savoir comment elle est
perçue, vous voulez dire...
M. Baril: Pas au point de vue syndical, je veux dire: Est-ce que
les compagnies apprécient ou se fient sur le bois que vous pouvez leur
apporter? Est-ce que, pour elles, c'est un intérêt
particulier?
M. Belzile: On pensait que oui, mais si l'association qui a
déposé le mémoire parlait vraiment au nom de toutes les
compagnies, on apprend ce matin que ce n'est pas tout à fait cela. Par
ailleurs, pour être juste, parce qu'on a des contacts réguliers
avec un bon nombre d'industries, je pense que, dans plusieurs cas, on
apprécie notre participation, surtout, sans être méchant,
que notre bois leur coûte moins cher.
Je suppose que cela doit être une considération pour nous
apprécier.
M. Baril: Si votre bois et je sais que dans d'autres
mémoires il y a eu des chiffres là-dessus aussi leur
coûte moins cher, comment expliquez-vous qu'il y ait une compagnie
vous l'avez dit tout à l'heure, entre autres qui vous a
coupé de 40 000 cordes pour un an? Comment se fait-il qu'ils ne veulent
pas prendre votre bois ou qu'ils ne respectent pas l'entente qu'ils avaient
avec vous, si votre bois leur coûte meilleur marché, plutôt
que de le prendre sur les terrains leur appartenant? Est-ce question de
qualité du bois ou quoi? C'est relié à quoi, cette coupure
de 40%?
M. Belzile: On nous a dit, quand on nous a expliqué qu'on
devait couper, que, d'une part, ils perdaient des marchés. Pour pouvoir
les reconquérir, il leur fallait un plus fort pourcentage
d'épinettes noires parce que la fibre était de meilleure
qualité. Je ne suis pas un spécialiste, mais on nous disait qu'il
fallait un plus fort pourcentage d'épinettes et ces épinettes ils
allaient les chercher dans la région du Nord-Ouest
québécois. Ils étaient conscients que ce bois leur
coûtait beaucoup plus cher, mais cela permettait, disaient-ils, d'au
moins maintenir, sinon récupérer certains marchés. Nous
avons aussi l'impression qu'ils avaient peut-être trouvé un autre
approvisionnement ailleurs; on sait qu'il y a eu bien des copeaux dans
certaines usines de sciage depuis quelques mois et on nous dit que les meules
ont baissé depuis quelque temps. Alors on suppose qu'ils...
M. Baril: Y a-t-il moyen de savoir quelle compagnie vous a fait
une coupure de 40%? Êtes-vous mieux traités par une compagnie que
par une autre ou si, en général, elles respectent ieur contrat?
Ce serait vous êtes libres de le faire important que la
commission connaisse quelle compagnie tient compte de tous les facteurs qui
sont apportés ici. On est souvent porté à dire: II y a ci,
il y a ça, mais souvent on ne veut nommer personne. Donc tous ces gens
se regroupent en ce qu'on pourrait peut-être appeler l'immunité
capitaliste. On a peur de parler au cas où on ait des rebondissements et
qu'on nous coupe davantage l'année suivante. Mais, si on se dit tout le
temps cela, il n'y aura jamais rien qui se fera. Si vous ne voulez pas le dire,
c'est votre affaire, c'est
libre, mais je prétends que ce serait un avantage pour la
commission de savoir par quelle compagnie vous êtes ainsi
traités.
M. Belzile: Non, vous comprendrez qu'on n'a pas à nommer
une compagnie en particulier, pour la raison suivante: La compagnie avec
laquelle on a un problème, celle sur laquelle on a discuté
aujourd'hui, c'était pour illustrer ce qu'il pouvait y avoir sur la
fameuse question de garantie d'approvisionnement. Cette compagnie, l'an
passé, c'était celle qui collaborait le mieux pour nous, je veux
dire qui ne nous a pas créé de problème. En remontant dix
ans en arrière, probablement que les problèmes qu'on a pu avoir
ont touché à peu près toutes les compagnies. Finalement,
ce n'est pas que de la mauvaise collaboration qu'on a avec l'industrie; on a
illustré un problème particulier, cette année, pour
répondre au problème de la garantie de l'approvisionnement sur
laquelle on nous questionne. Mais je pense que ce qu'on peut vous dire c'est
que le ministère des Terres et Forêts est au courant. Il est au
courant du dossier en question et on sait qu'il fait un travail pour essayer de
nous aider à trouver un règlement à cette situation.
M. Baril: J'avais encore plusieurs questions, mais je vais
demander grâce au président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Dans ma
générosité, j'accorde une dernière intervention,
sans question, au député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, j'avais indiqué tout
à l'heure que j'aurais eu d'autres questions; il faudrait
reconnaître que ce n'est pas tous les mois qu'on a l'occasion et
l'avantage de rencontrer les représentants des producteurs de bois du
Québec. Cependant, je présume que vous reconnaissez tout de
même qu'en vertu des règlements d'exclusivité pour la mise
en marché du bois des forêts privées la Régie des
marchés agricoles du Québec, comme le lieutenant-gouverneur vous
ont placés dans un état de monopole. On s'est souvent battu
contre les entreprises qui ont établi des monopoles au Québec,
pour les fins que l'on connaît; ce n'est même pas particulier
à la grande industrie, on a vu cela dans d'autres secteurs
d'activité.
Cependant, je dois reconnaître que je le dis bien
sincèrement pour trouver des solutions véritables à
la mise en marché du bois des propriétaires de boisés
privés et être en mesure de jouer un rôle vraiment efficace
et de représenter ces gens et surtout leur assurer la stabilité
dans les prix, il m'apparaît personnellement qu'il fallait avoir des
pouvoirs un peu exceptionnels. J'ai été en mesure
d'évaluer de quelle façon l'Office des producteurs de ma
région a utilisé ses pouvoirs. Je dois le féliciter
très sincèrement, je l'ai observé. En dépit de tous
ces pouvoirs, ces gens ont eu cette capacité de répondre aux
attentes des producteurs dans une très large mesure et de ne pas
écarter du circuit des propriétaires de bois de volume assez
important, qui étaient dans ce commerce depuis des années; ils
ont eu cette sagesse de tenter de les convaincre pour les intégrer. Ce
qui fait que la plupart des problèmes, dans ma région, ont
trouvé leur solution; quand il n'y avait pas de solution, c'était
peut-être dû à l'industrie comme telle qui, pour ses propres
raisons que je ne veux pas discuter et que je ne connais même pas,
créait des difficultés sérieuses. Je terminerai par un
commentaire.
Face à cette situation monopolistique qui est la vôtre, en
vertu de l'exclusivité de vente, je présume que vous avez encore
cette sagesse de ne pas abuser de la situation et de pouvoir intégrer
tous les intervenants à l'intérieur de l'exploitation
forestière dans le circuit des boisés privés et tous ceux
qui font de la mise en marché, de ne pas créer de
préjudice à l'endroit de certaines personnes, même si votre
mandat vient très largement de petits producteurs, cultivateurs ou
autres, mais surtout de petits cultivateurs.
Encore une fois, je remercie la fédération et je
souhaiterais qu'on ait le plaisir d'avoir un autre échange pour aller au
bout de l'ensemble de votre situation, telle qu'intégrée à
l'intérieur de l'industrie des pâtes et papiers. Merci.
M. Carpentier: Je pense que pour essayer de les intégrer,
on va faire notre possible, mais vous êtes pareils dans le Parti
libéral, même si vous vouliez intégrer tout le monde, vous
ne seriez pas capables. Il y en aura toujours qui ne seront pas contents. On a
le même prix nous autres aussi.
Il va falloir suivre, c'est ça.
M. Pagé: II y en a qu'on ne voudrait pas.
M. Giasson: II faut dire qu'on n'espère pas les
intégrer tous. Pour autant qu'on intègre la majorité,
ça nous suffit.
M. Belzile: On a simplement remarqué qu'on n'a pas le
choix de ne pas être sage, comme vous dites, parce qu'il y a une
régie et une législation qui nous encadrent. On n'a vraiment pas
le choix.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Messieurs de la Fédération des producteurs de bois du
Québec, je vous remercie énormément au nom des membres de
la commission pour votre participation. Je vous remercie surtout d'être
venus, ce matin, puisqu'on vous a demandé un voyage additonnnel.
J'invite les représentants de la Consolidated-Bathurst
Limitée à venir présenter leur mémoire.
M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Pendant que les gens de la Consol s'installent ici,
je n'ai pas posé des questions au tout début ce matin, mais je me
demande quel est le menu de la journée, savoir si on réussira
à passer à travers ça; est-ce que vous avez pris des
ententes avec certains de ces gens qui doivent venir devant vous? On fait face
à sept or-
ganismes, à part ceux qui n'avaient pas terminé hier. De
toute évidence, on a du travail pour bien plus que toute la
journée; je me demande s'il n'y aurait pas lieu de demander aux gens,
qui seraient les derniers, de prendre congé et de revenir plus tard.
Parce que réellement, on va faire attendre des gens dans la salle qui ne
passeront pas aujourd'hui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
il est bien évident que l'horaire de la journée, comme vous le
dites, est chargé, mais je me demande s'il n'est pas encore trop
tôt pour prendre une décision semblable. Je
préférerais attendre à 16 h 30, 17 h ou 18 h, cet
après-midi, quitte à ne pas faire revenir ces personnes, ce
soir.
M. Grenier: Est-ce qu'on termine à 11 heures ce soir?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On
termine ce soir à 11 heures et on sait que même si la plupart
prennent deux heures, il peut arriver que certaines prennent trois quarts
d'heure ou une heure. Dans les circonstances, je pense qu'il est un peu
tôt pour prendre une décision semblable. Cet après-midi,
à 18 heures, il y aura moyen d'évaluer la situation;
d'accord?
Alors, je demanderais au porte-parole de la compagnie, s'il vous
plaît, de bien vouloir présenter ceux qui l'accompagnent. M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: Je n'en fais pas une proposition, je veux savoir s'il
y aurait possibilité de penser, au cours de la journée, nous
avons ici le recteur de l'Université du Québec, à
Trois-Rivières, qui a un mémoire à présenter.
Je me demande si, compte tenu qu'on va probablement parler
éventuellement d'un problème de la région, il y aurait
possibilité je n'en fais pas une demande, mais je voudrais que
vous y pensiez d'intégrer ce groupe à la suite des
mémoires qui vont être entendus et qui touchent la région
de Trois-Rivières, compte tenu que le recteur et un autre
spécialiste sont ici, au nom de l'Université du Québec
à Trois-Rivières.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
prends cette demande en délibéré.
M. Gagnon: Merci.
Consolidated-Bathurst Limitée
M. Stangeland (Oscar): M. le Président, il me fait plaisir
de présenter les délégués de la compagnie
Consolidated Bathurst. À mon extrême gauche, M. Jack Woods,
vice-président de la fabrication pour le groupe de pâtes et
papiers; M. Guy Dufresne, vice-président au marketing, secteur de
pâtes et papiers; à ma droite, M. Jim MacLeod,
vice-président dans le domaine forestier et responsable aussi des
scieries de la Consol. Mon nom est Oscar Stangeland, je suis
vice-président exécutif en charge du secteur des pâtes et
papiers.
M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la
commission, la compagnie Consolidated-Bathurst apprécie beaucoup cette
occasion de venir devant vous, lors de vos travaux et vos études sur
l'industrie et l'avenir des pâtes et papiers. Notre mémoire a
été soumis; il contient toutes les informations et tous les
détails sur la compagnie et sur l'industrie, comme on les voit. Nous
sommes ici ce matin pour en faire un résumé et aussi pour
répondre à vos questions.
La façon dont nous avons l'intention de procéder, c'est
que je vais donner une vue d'ensemble de l'industrie, comme on la voit à
cette heure-ci. Je vais résumer les entreprises ou secteurs principaux,
qui comprennent le secteur des pâtes et papiers; par la suite, je vais
demander à mes collègues de parler du domaine forestier, de
l'approvisionnement du bois pour nos usines. On va faire un
résumé de la situation comme on la voit, par rapport à la
pollution. On va avoir certaines précisions sur les résultats
financiers de la compagnie, où on est rendu; par la suite, on pourra
répondre aux questions et avoir un dialogue sur n'importe quel sujet que
vous voudrez bien aborder.
Nous croyons que cette commission est une étape très
appropriée dans les circonstances et nous espérons que tous les
mémoires et toutes les demandes vont être la première
étape d'un dialogue à long terme entre le gouvernement et les
autres intéressés dans l'industrie.
Avant de vous parler des secteurs ou des produits principaux de notre
groupe, je pense qu'il vaut la peine de préciser que, malgré le
fait que nous avons certains problèmes, nous ne croyons pas que
l'industrie soit si désuète qu'on le dit ces jours-ci. Je crois
que c'est exagéré et un peu alarmiste de dire que l'industrie
québécoise est vétuste, qu'elle est vieille, qu'elle ne
peut pas aller de l'avant ces jours-ci. Malgré certains
problèmes, je crois que l'industrie québécoise est dans la
même situation que les autres compagnies de pâtes et papiers de
l'Est du Canada et même sur le marché mondial ou sur la
scène mondiale. On n'a qu'à regarder les statistiques qui
démontrent la demande et la capacité qu'il y a pour nos produits
principaux, pour l'année 1976, sur une base mondiale, pour voir ce qui
se passe et quel est le problème principal.
Dans le papier journal, il y a une capacité de 27 millions de
tonnes de papier journal et la demande et la consommation étaient de
seulement 24 millions de tonnes, soit un surplus de capacité sur la
demande de 3 millions. Dans les pâtes, c'était la même
chose, un peu plus exagérée. La capacité mondiale est
d'environ 24 millions et je crois que la demande était de 20 millions
environ. Cela veut dire que l'économie mondiale de l'Occident traverse
une période assez difficile et c'est une période qui a des
implications sur les produits majeurs, toutes les industries majeures
mondiales. Les problèmes que nous avons ici aujourd'hui, dans les
pâtes et papiers, sont les mêmes que
ceux de l'acier, du cuivre et d'autres métaux. Je crois que,
lorsque le ministre a fait sa déclaration mardi, à l'ouverture,
il a dit que les problèmes ne sont pas insurmontables et que l'avenir
n'est pas aussi sombre qu'on en a l'impression, surtout au mois de septembre,
avec toute la pluie que nous avons eue. Je crois que nous avons un
problème de coût, mais c'est un problème de coût et
de croissance, de coût de fabrication qui ne s'applique pas seulement au
Québec, mais dans tout le Canada et même en Scandinavie. Avec le
surplus de capacité comparée à la demande, il n'y a eu,
dans plusieurs produits du secteur des pâtes et papiers, aucune
augmentation des prix de vente. Il y a même eu une baisse du prix de
vente de certains produits.
Nous sommes pris dans des ciseaux où le coût augmente de
façon assez accélérée et les prix restent les
mêmes ou baissent. Dans ces conditions, nous avons des résultats
financiers qui ne sont pas satisfaisants, qui sont insuffisants pour continuer
à moderniser, à rationaliser et à améliorer nos
affaires. Je crois que, parfois, nous sommes un peu plus pessimistes que nous
devrions l'être, parce que je crois que la demande mondiale, dans les
pâtes et papiers, va revenir, à court ou à long terme, avec
l'amélioration de l'économie de l'Occident et que cela va aider
beaucoup. Je ne dis pas qu'il n'y a pas certaines situations dans certaines
compagnies qu'on pourrait décrire comme étant des
situations-problèmes. Nous les avions dans notre groupe de pâtes
et papiers, nous allons en parler tantôt, mais je ne crois pas que ce
soit exact de parler en général d'un problème pour toute
l'industrie. Chaque compagnie diffère par ses produits et on peut dire
que les problèmes sont spécifiques à une compagnie et
même, dans une compagnie, les problèmes sont spécifiques
à certains produits au lieu d'être un malaise
général pour toute l'industrie.
J'aimerais discuter des entreprises principales de notre groupe de
pâtes et papiers et je commencerai par notre entreprise de papier
journal. C'est le produit dominant et c'est à peu près 60% de la
capacité de nos moulins. Approximativement, nous avons 1 million de
tonnes de capacité pour le papier journal. Il y a eu croissance
significative quand on regarde les chiffres. En 1960, nous produisions 786 000
tonnes; en 1967, 875 000 tonnes, et, en 1972, 893 000. Une croissance et une
augmentation continuelles. Nous avons toujours essayé de moderniser et
de rationaliser nos actifs dans le papier journal parce que nous croyons que,
sans cette amélioration continuelle, une entreprise est stagnante,
n'avance pas du tout.
Notre programme dans le secteur du papier journal a commencé
environ en 1965, quand nous avons installé une nouvelle machine à
papier à Grand-Mère; nous avons augmenté les bouilloires,
l'entrepôt, la capacité des meules et, en même temps, nous
avons fermé quatre des vieilles machines à papier journal, les
plus petites, les plus lentes qui existaient dans le temps à
Grand-Mère. Le coût de ce programme était dans les environs
de $35 millions. En 1970, nous avons installé, je crois, la
première machine à toiles jumelées à l'île
Wayagamack, pour un coût de $2 millions. En 1973, nous avons
acheté et installé une machine à papier journal. Cette
machine venait de la compagnie Eddy et nous l'avons installée à
notre usine à Shawinigan, encore avec une toile jumelée. Avec
cette nouvelle machine, nous avons augmenté la capacité de notre
production; en même temps, nous étions obligés
d'accroître la capacité de production de pâtes à ce
moulin. Tout ce programme en 1973 était dans les environs de $11
millions.
En 1974, nous avons décidé qu'il y aurait un programme de
modernisation de Port-Alfred. Nous avions dans ce temps vingt machines à
papier journal. Il y en avait des bonnes et des moins bonnes. Il y avait celles
qui étaient pas mal étroites et pas trop rapides. Nous avons
décidé, la direction, avec plus de bon sens, avec plus de
rendement, c'était d'augmenter la vitesse et de mettre l'usine de
Port-Alfred dans une position moderne et concurrentielle. En même temps
que nous avons décidé d'aller accroître la capacité
de Port-Alfred d'environ 100 000 tonnes, nous avons pris les décisions
préliminaires pour fermer les trois machines de Cap-de-la-Madeleine.
Ce programme majeur est encore en construction et il est de l'envergure
de $55 millions à $60 millions. Nous avons commencé avec deux de
ces machines à Port-Alfred. Nous avons accéléré la
vitesse de ces deux machines avec une augmentation d'environ 50% de leur
capacité. Nous avons installé les toiles jumelées.
Jusqu'à maintenant, les deux machines sont en place, cela nous a
coûté dans les deux dernières années un montant de
$25 millions. La deuxième étape du programme au
Cap-de-la-Madeleine est une augmentation de vitesse sur une troisième
machine et, en même temps, la construction d'une usine de pâtes
thermomécaniques d'une capacité d'à peu près 260
tonnes par jour. Nous sommes à mi-chemin de compléter
l'installation de l'usine de pâtes là-bas. Quand ce sera fini, il
y aura un autre $25 millions. La troisième machine à Port-Alfred
va avoir la vitesse voulue vers le mois de mars 1979.
Pendant cette même période, nous avons installé dans
les trois usines de papier journal des emballeuses automatiques pour les
rouleaux, à un coût d'à peu près $2 millions pour
les trois usines. En plus, nous avons des ordinateurs pour contrôler le
procédé, sur neuf des dix-sept machines. Nous avons
installé cinq systèmes pour contrôler I'humidité sur
la feuille de papier, ce qui est tout nouveau au Canada.
En général, nous avons eu un taux d'opération dans
le papier journal d'environ 84% à 90%.
Nous sommes, depuis cinq ans, dans une position où nous avons
confiance dans notre entreprise de papier journal. Nous croyons qu'elle est
capable de concurrencer sur une base mondiale. Nous avons fait notre devoir en
la maintenant jusqu'à ce jour et en la modernisant. Quant aux
problèmes dans le secteur du papier journal, nous croyons que nous
allons produire le papier journal au Québec pendant beaucoup
d'années et que ce
sera un investissement satisfaisant.
Dans les pâtes, ce produit comprend à peu près 15%
de notre capacité, soit à peu près 210 000 tonnes de
pâte blanchie provenant de l'usine de Pontiac, construite en 1967, et 50
000 tonnes de pâte non blanchie qui viennent de notre moulin de Bathurst,
dans le Nouveau-Brunswick.
Le marché pour ce produit est très cyclique. On a de
très bonnes années et on a des années où le volume
est bas, et des périodes où les prix sont inchangés ou
réduits.
Pour vous donner un exemple, je crois que dans la période de
1973-1974, il y a eu augmentation de prix dans les pâtes sur une base
mondiale, à chaque trimestre pendant deux ans. Cela veut dire qu'il y a
eu augmentation de prix à chaque trimestre durant une période de
deux ans, et depuis la fin de 1974, nous n'avons pas eu d'augmentation du tout
et même, dans certains cas, les produits ont baissé.
C'est un peu un produit comme le bois ouvré où on voit que
le prix change très très vite. C'est comme le blé ou c'est
comme le café. Ce genre de produit a des fluctuations
considérables dans les prix.
Et comme je l'ai mentionné auparavant, il y a eu un surplus de
capacité par rapport à la demande. Il y a même un
inventaire d'à peu près 3 millions de tonnes sur une base
mondiale, principalement parce qu'en Scandinavie, les moulins ont
fonctionné à pleine capacité et ils ont accumulé
l'inventaire sans prendre connaissance de la demande pendant cette
période.
Nous avons confiance que les pâtes vont redevenir, avec la relance
économique dans le monde, encore un produit valable, un produit pour
lequel les entreprises recevront une ristourne adéquate.
Il y a un secteur, dans les pâtes, qui nous inquiète un
peu. Une portion substantielle de notre production de pâte blanchie est
vendue aux compagnies de papier fin ici au Canada, et on sait que ces
compagnies ont des difficultés et je crois que les mémoires vous
démontreront ces difficultés. Mais, en général, on
parle d'une situation cyclique avec un rendement qui est aux environs de 6%
dans les cinq dernières années.
Chez nous, à la Consolidated-Bathurst, nos problèmes, si
on peut les appeler des problèmes, sont dans les grades de papier brun,
comme le carton doublure, le carton ondulé et le papier kraft. Cette
situation est une bonne illustration du fait qu'une usine moderne ne
résout pas les problèmes parce que notre usine de Chaleurs,
construite en 1966, est pour nous, à ce moment, un des problèmes
les plus grands. On a vu la même chose avec l'usine de carton doublure de
Labrador Liner Board, à Terre-Neuve, qui a fermé ses portes
après avoir investi plus de $300 millions. Les pertes sérieuses
dans ce secteur sont dues aux marchés d'outre-mer qui, cette
année, ont des prix pour le carton doublure d'environ $100 la tonne plus
bas que ce qui existait en 1974.
Je crois que les autres usines de carton doublure ont eu aussi des
coûts qui ont augmenté à un rythme de 17% par année
pour les quatre dernières années.
Une autre façon de vous illustrer ce problème, c'est de
parler de la différence du coût du bois entre les usines du Sud
des États-Unis et l'Est du Canada. Nous croyons que les fibres au Sud
des États-Unis sont d'environ $20 à $25 la tonne moins cher
qu'ici dans l'Est du Canada. Quand cela prend deux cunits de bois pour faire
une tonne de produit dans le carton doublure, on voit facilement la
difficulté de concurrencer avec les grosses usines de carton doublure
situées dans le Sud des États-Unis qui ont une production de 1000
tonnes, 1500 tonnes ou 2000 tonnes par jour. Quand l'économie des
États-Unis baisse un peu, elle jette cette production sur le
marché mondial et les prix outre-mer baissent très vite.
Notre diversification dans l'emballage nous aide beaucoup, parce que au
Canada, le prix du carton doublure est protégé par un tarif de
15%, et aussi, le prix est plus élevé que sur les marchés
mondiaux. Cela veut dire qu'en vendant au-dessus de 50% de notre production
à nos usines de contenants ou à nos usines qui fabriquent les
sacs de papier, nous sommes dans une position où nous avons un peu la
protection de ne pas être à la merci des marchés mondiaux
comme l'a été Labrador Liner Board. Pour ces raisons, avec des
pertes d'au-dessus de $20 millions par année, ces gens ont fermé
les portes après avoir dépensé, comme j'ai dit
tantôt, $250 millions.
La situation des coûts beaucoup plus élevés que la
concurrence place ce secteur de notre division de pâtes et papiers dans
une position sérieuse. Je crois que c'est dans le domaine de ce genre de
problèmes, qui, avec nous, est dans le papier brun, que cela
mérite des discussions profondes avec le gouvernement, avec les
syndicats des usines, avec tous les secteurs impliqués, non seulement
pour en regarder le problème, mais essayer de voir la solution de ce
genre de problème. Mais, nous croyons que nous devrions aller compagnie
par compagnie et, dans chaque compagnie, identifier le secteur où un
dialogue peut apporter une continuation de vos études pour que cela
puisse faire bénéficier tout le grand public.
Nous ne voulons pas d'un autre Labrador Lines Board chez-nous dans le
carton doublure. Dans le papier kraft, nous avons une situation semblable
à cause des coûts qui augmentent si vite, on a eu aussi la
grève dans les usines de papier vers la fin de 1975 et les premiers mois
de 1976 et nous avons perdu un secteur de notre marché aux producteurs
américains. Aussi, ce produit est vendu exclusivement au Canada. Avec
l'économie canadienne relativement faible, la demande a
été aussi faible et le papier kraft à cette heure-ci a des
problèmes.
Il y a un autre facteur dans le papier kraft, c'est la compensation dans
certains grades par d'autres produits. On voit les sacs en plastique dans
quasiment tous les magasins et cette situation est un autre facteur qui a
contribué à une demande assez stagnante pour ce produit.
Le papier kraft est fait à notre usine de Waya-gamak, de
Trois-Rivières, qui est moitié papier journal
spécialisé, à peu près 92 000 tonnes et 75 000
tonnes de papier kraft.
Mais nous sommes convaincus qu'avec un programme d'ensemble, une
concentration sur les coûts de l'opération, pour les rendre les
plus bas possible, une concentration sur de nouveaux investissements de
capitaux, surtout pour la réception de bois pour les copeaux dans
ce domaine-là nous pourrions surmonter ces problèmes.
Depuis déjà 18 mois, nous travaillons pour essayer
d'améliorer la situation et, déjà, il y a un
progrès assez intéressant; mais je peux vous dire que pour le
secteur du carton, soit doublure, soit ondulé et pour le papier kraft,
les résultats de notre division de la compagnie ont été
décevants, plus particulièrement au cours des deux
dernières années. Mais ce ne sont des problèmes sur
lesquels nous avançons et nous croyons qu'il y a des solutions.
Avant de demander à mes confrères de parler un peu de
leurs secteurs primaires, je voudrais parler un peu plus du problème de
la croissance des coûts que je considère le problème
général de l'industrie de la province et aussi du pays. Cela ne
change pas, dans l'industrie, entre le Québec et les autres provinces de
l'Est du Canada; c'est un problème d'inflation industrielle; si cette
inflation ne revient pas au bon sens, les compagnies exportatrices comme la
nôtre, qui sont obligées de concurrencer d'autres compagnies des
autres pays où les coûts n'augmentent pas si vite, vont prendre le
marché et nous ne serions pas capables de continuer.
Nous avons regardé dans le papier journal et cela s'applique
à tous les autres produits. Nos coûts de 1950 à 1976. Avant
les années soixante-dix, on note une augmentation de coût
d'à peu près 2,6% par année, pour les quatre facteurs qui
entrent dans une tonne de papier journal, soit le bois, la main-d'oeuvre,
l'énergie et les autres matériaux chimiques. Mais, depuis les
années soixante, cette augmentation a été de 12,1%
à comparer à 2,5% dans les années
précédentes qui comprenaient de 1950 à 1960.
Au cours des quatre dernières années, de 1973 à
1977, nous allons vers un niveau de 17,1% par année. Il n'y a pas une
industrie au monde qui peut endurer, à long terme, les
conséquences d'une croissance si vite et si haute. Ce qui s'applique
dans le bois, c'est 15,4% pour les dernières quatre années. Dans
la main-d'oeuvre, 16,9% par année. Dans l'énergie, 21,5% par
année et dans les autres matériaux qui entrent dans une tonne de
papier journal, 17,5%.
C'est une situation qui est, pour moi, des plus inquiétantes,
c'est une situation générale au Canada, surtout quand on compare
les efforts et les frais, tels qu'ils sont aux États-Unis est le pays
économiquement le plus grand au monde et aussi le marché primaire
pour nos produits. Dans l'industrie du papier, on pense toujours que le Canada
possède la plus grande, mais les États-Unis viennent bien avant
nous avec une croissance de coût peut-être pas la moitié de
la nôtre, mais pas loin de là. Les prix mondiaux vont être
établis par ceux qui concurrencent le plus efficacement et si le prix
augmente sur un niveau de croissance de coût de 5%, 6% ou 7% et nous, au
Canada, nous sommes sur une échelle de 17%, cela prend seulement une
couple d'années pour que la situation devienne très grave.
J'insiste peut-être un peu trop là-dessus, mais c'est une
situation que le public, que vous, messieurs les membres de la commission,
devez comprendre. C'est un peu notre recommandation principale dans ce domaine.
Je vous ai donné un aperçu de nos entreprises et j'aimerais que
M. Jim MacLeod nous donne en quelques mots un aperçu du domaine
forestier. Par la suite, M. Jack Woods va nous parler de la pollution et on va
terminer notre présentation avec M. Guy Dufresne sur les aspects
financiers de la situation.
M. MacLeod (Jim): M. le Président, M. le ministre,
messieurs les membres de la commission. Dans le domaine forestier, au cours des
45 dernières années, nous croyons avoir rempli en toute
responsabilité notre rôle de gestionnaire de l'État,
chargé de l'aménagement sur une base de rendement soutenu des
concessions, dont nous avions et dont nous avons encore la jouissance.
La preuve est qu'aujourd'hui, dans la plupart de nos unités
d'aménagement, nous récoltons du bois plus près de nos
usines qu'il y a quinze ou vingt-cinq ans. Ceci contredit carrément
l'opinion générale que le bois de notre industrie est toujours
plus loin de l'usine. En ce qui concerne notre rôle social, nous croyons
nous être adaptés aux changements de la société en
négociant et en achetant régulièrement des volumes
considérables de bois à pâtes des terrains privés
par l'entremise des offices de producteurs.
Nous avons commencé en 1960 à transiger avec des
producteurs de bois à pâtes et, depuis lors, je crois que nous
avons été en arbitrage devant la régie à quelques
reprises, mais le gouvernement a appliqué la loi Arsenault à
notre égard seulement deux fois. C'est un record qui n'est pas trop
mauvais.
Dernièrement, nous avons acheté des volumes de copeaux
toujours grandissants des compagnies de sciage. Dans le domaine de l'allocation
des essences secondaires, nous collaborons avec les officiers du MTF en
administrant des permis de coupe pour 175 000 cunits annuellement, ceci
couvrant 41 permissionnaires. En respectant le principe de l'utilisation
optimale des ressources, nous faisons des échanges de fibres d'un volume
de 70 000 cunits annuellement avec une trentaine de scieries et nous en
étudions deux autres avec les officiers dans le moment.
Le bois à pâtes et les copeaux achetés sont pour
nous une source d'approvisionnement indispensable, mais leurs coûts ne
sont pas avantageux, règle générale, à comparer au
coût du bois provenant de nos concessions. Dans nos soumissions, nous
avons démontré la différence de coût
dans chacune des trois divisions, mais j'aimerais souligner que la marge
entre les différentes sources n'est pas extraordinaire. Or, le
coût moyen de notre matière première est très
élevé, à comparer avec celui des régions
concurrentielles, surtout des États-Unis et aussi de la
Colombie-Britannique et des Maritimes.
Ce fait est certainement une de nos préoccupations majeures.
Certaines parties de nos opérations de coupe ont été
mécanisées avantageusement, principalement le débusquage
et le tronçonnage. Cependant, à cause de la location
géographique, dans la plupart de nos concessions où nous avons
beaucoup de peuplements feuillus et mixtes, nous avons fait plus de
mécanisation intégrée ou complète.
Même si nous avons abandonné le flottage de plusieurs
petites rivières, l'importance du flottage sur la rivière
Saint-Maurice est primordiale pour nous. Par l'entremise de la Compagnie de
flottage de la rivière Saint-Maurice, nous avons établi et nous
maintenons d'excellentes relations avec les groupements qui utilisent la
rivière pour d'autres fins.
Les scieries autochtones rentables sont des sources de matière
première ligneuse importantes et assurées pour nous.
Nous collaborons pleinement avec ce secteur. La seule contrainte
à nos bonnes relations avec les industriels de sciage est que nous ne
sommes pas une organisation à but non lucratif.
En terminant, j'aimerait rendre hommage à ces industriels de
sciage, personnellement. Nous avons trois scieries au Québec,
intégrées avec l'usine de pâtes et papiers, et je suis
responsable de leur fonctionnement. Je vous assure que cela prend beaucoup
d'ingéniosité, un travail inlassable et une imagination
extraordinaire pour faire un profit avec ces scieries.
M. Stangeland: M. Woods, pourriez-vous nous parler de la
situation antipollution dans nos moulins, s'il vous plaît?
M. Woods (John P.): Brièvement, il y a trois sections
principales dans la protection de l'environnement. La première, c'est le
matériel solide en suspension dans les eaux des usines qui
s'écoule dans les rivières.
La deuxième, c'est la demande biologique en oxygène qui
concerne le système chimique principalement.
La troisième, c'est la règle de la qualité de l'air
de la cheminée-bouilloire et le traitement chimique par combustion.
Concernant la première section, si on regarde le graphique
à la page 93 du mémoire, nous avons fait des progrès
majeurs. Nous employons les mesures et suivons les ententes dans les bassins
pour l'épuration et la clarification des eaux usées. En
même temps, nous devons réduire la quantité d'eau
fraîche qui est très importante.
Notre usine, à Grand-Mère, produit des pâtes
chimiques au sulfite au rendement conventionnel de 48%. À Port-Alfred,
à Shawinigan, le système à haut rendement au sulfite
produit un rendement d'environ 74%.
Tous les systèmes de haut rendement au sulfite des
dernières usines installées dans l'année 1962 diminuent la
DBO de 50%.
Un procédé de récupération serait
très dispendieux, c'est-à-dire d'environ $1 million à
chaque usine. Nos usines à Pontiac, Wayagamack et Chaleurs produisent
des pâtes au sulfate et sont équipées d'un système
de récupération des produits chimiques et ne posent que des
problèmes relativement minimes à cet égard.
Consolidated-Bathurst fonctionne suivant le principe de traiter les
problèmes d'environnement dans les usines et de couper les
matières solides, en réduisant l'énergie. Chaque usine est
différente et, pour cette raison, les services de l'environnement du
Québec doivent regarder chacune de nos usines en relation avec les
normes posées et nous amener à utiliser le mieux possible les
capitaux disponibles. Nous avons dépensé $32,3 millions entre les
années 1955 et 1975.
M. Dufresne (Guy): L'aspect financier de Consolidated-Bathurst
pourrait se résumer comme suit:
Au cours des dix dernières années, le rendement sur
l'actif net moyen a été de 5,1%. Il y a eu des années,
comme les années 1970 et 1971, où on a eu des pertes et il y a eu
des années, comme 1974, où on a eu des gains substantiels. Je
crois qu'il n'est point besoin de démontrer à cette commission la
nécessité d'avoir des profits pour continuer les programmes
d'investissement.
À ce sujet, je voudrais vous donner l'expérience de la
Consolidated-Bathurst au cours des dix dernières années. Dans
l'ensemble, la compagnie a investi en immobilisations $329 millions. Sa
dépréciation, son amortissement était de $208 millions,
c'est-à-dire qu'elle a dépensé $121 millions de plus que
l'amortissement.
J'aimerais maintenant attirer votre attention sur les usines qui ont
été bâties il y a plusieurs années. J'aimerais que
la commission regarde en page 64 du mémoire. Vous avez là les
investissements qui ont été faits pour nos quatre divisions,
c'est-à-dire Shawinigan, Grand'Mère, Port-Alfred et Wayagamack,
qui totalisent pour les dix dernières années, de 1967 à
1976, $100 millions, alors que l'amortissement pour ces usines n'était
que de $47 millions. C'est-à-dire que nous avons dépensé
plus de deux fois le montant d'amortissement généré par la
compagnie.
Il est aussi bon de noter qu'en plus des montants d'immobilisations nous
avons dépensé en entretien, toujours dans le même
graphique, le tableau 7E, $114 millions pour ces mêmes usines. La
compagnie a eu comme politique, au cours de ces années-là, de
moderniser tous les secteurs de ses produits. Vous pourrez voir aux pages 57
à 59 du mémoire tous les principaux projets que la compagnie a
réalisés au cours des années.
Je voudrais mentionner quelques projets qui nous ont permis d'être
à l'avant-garde au point de vue technologique. Tout d'abord, comme l'a
mentionné M. John Woods, nous avons installé la pâte
sulfite à haut rendement qui a permis de réduire
de façon significative la pollution à deux de nos usines,
Port-Alfred et Shawinigan. Nous avons aussi été parmi les
pionniers pour les pâtes par raffineurs en installant un centre de
recherche en 1966 à Grand Mère et, comme l'a mentionné M.
Stangeland, nous installons aussi un centre de raffinage à notre usine
de Port-Alfred.
Il a aussi été mentionné qu'au point de vue
technologique nous avons utilisé des ordinateurs pour l'ordonnancement
de nos commandes, et ceci a rapporté des dividendes, car nous avons pu
augmenter notre capacité de cette façon. Deuxièmement,
nous nous servons des ordinateurs pour contrôler de plus en plus la
production sur les différentes machines et M. Stangeland a aussi
mentionné ce fait. En fin de compte, il serait bon de noter que
plusieurs instruments de contrôle qui ont été
développés à la Consolidated-Bathurst ont
été achetés par d'autres producteurs et sont
installés dans plusieurs pays du monde.
Je voudrais mentionner un autre aspect, soit l'augmentation des
coûts. M. Stangeland a parlé tantôt en terminant de
l'augmentation significative des coûts. Je pense que cela vaudrait la
peine que les membres de la commission aillent voir à la page 71 du
rapport pour voir le point que voulait illustrer M. Stangeland.
Comme vous pouvez le voir, il y a trois choses: le prix de vente,
l'indice du prix au consommateur et aussi l'augmentation des coûts que la
compagnie a dû subir au cours des dernières années. On
s'aperçoit ici que nos coûts ont suivi l'indice des prix à
la consommation pour les années 1950 à 1970. C'est seulement
durant les quelques dernières années que nous avons eu à
faire face à une augmentation significative.
Si on tourne à la page suivante, page 72, on s'aperçoit de
l'augmentation des coûts des différents secteurs. C'est ici qu'on
voit l'importance de la main-d'oeuvre qui a augmenté de 600% par rapport
à une augmentation de 200% pour l'indice du prix à la
consommation. C'est un sommaire de l'aspect financier de la compagnie
Consolidated Bathurst. Merci.
M. Stangeland: M. le Président, j'aimerais résumer
brièvement nos recommandations telles qu'elles sont dans le
mémoire. On dit que nos problèmes actuels ne peuvent être
résolus par des solutions simples ou à court terme. Pour sa part
la compagnie essaie activement, par tous les moyens, de redresser sa situation
économique. De son côté, la commission pourra aider
grandement l'industrie en définissant un contexte de travail dans lequel
pourra s'insérer des mesures énergiques à long terme.
Ainsi, la commission pourra se proposer de concourir à une plus grande
reconnaissance publique du rôle important joué par l'industrie des
pâtes et papiers dans le niveau de vie des gens de cette province. Je
crois que c'est important que tout le public comprenne assez bien les
données de la situation et aussi les données de la
réalité économique et le fait que nous sommes dans une
industrie mondiale et pas une industrie locale, même
nord-américaine.
Cela m'amène à la deuxième de nos recommandations:
sensibiliser l'opinion publique à notre réalité
économique et aux besoins de l'industrie. Troisièmement,
renseigner les ministres sur les effets secondaires et très peu
désirables de leurs règlements et décisions sur une
industrie dont la viabilité repose sur des exportations. Par cela, on
veut dire que dans les programmes sociaux, il faut tenir compte du coût,
il faut tenir compte aussi des dépenses en général qui
sont faites par ceux qui sont obligés de concurrencer sur une base
mondiale. Finalement, amorcer des entretiens d'une grande portée avec
les intéressés sur les questions prioritaires intéressant
les investisseurs des compagnies et les travailleurs de l'industrie.
M. le Président, on est prêt à répondre
à vos questions et on vous remercie pour cette chance de vous parler ce
matin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie beaucoup. M. le ministre.
M. Bérubé: Messieurs, je vous remercie de votre
mémoire que nous avons trouvé, au ministère, fort bien
étoffé, avec beaucoup de chiffres, et je pense, un des plus
solides mémoires qu'il nous ait été donné
d'examiner. Je tiens à vous en féliciter. Je crois qu'il va nous
être d'un appui précieux.
J'aurais, évidemment, un certain nombre de questions à
vous poser. Entre autres, vous avez souligné tantôt, je crois que
c'est M. Dufresne, que ia société avait dépensé
$121 millions de plus que l'amortissement. Or, lorsque je regarde la page 14 de
votre mémoire, je vois que les fonds générés par
l'amortissement sont de $294 millions, et je constate que les dépenses
en immobilisations ont été de $329 millions. Donc, je ne trouvais
que $38 millions. Il y a peut-être une explication que vous nous donnerez
sans aucun doute.
Le problème qui m'intéresse de plus près est le
suivant: vous indiquez des profits de $141 millions, et vous n'êtes pas
sans savoir que plusieurs des intervenants, et en particulier la CSN, la
première journée, se sont plaints d'un réinvestissement
insuffisant de la part de l'industrie dans la modernisation de ces usines. Or,
je dois constater que vous avez payé à vos actionnaires $103
millions au cours de cette même période de dix ans, donc que vous
avez distribué grosso modo j'ai peut-être fait erreur, je
viens de calculer autour de 70% à 75% de vos dividendes.
La question qui me vient à l'esprit est donc: Que
représente ce montant de 75% des profits que vous avez distribué
à vos actionnaires? Quel est le rendement moyen de l'action sur ces dix
dernières années? J'aimerais savoir également quelle est
la plus-value de l'action pour voir si vos actionnaires ont, effectivement,
récupéré un profit exagéré de
l'activité de la compagnie.
M. Stangeland: Je crois que le rendement sur les actifs a
été aux environs de 5,1% pour la compagnie comme compagnie. La
valeur aux livres de notre société, à l'heure actuelle,
est aux environs de $35 et nous avons, comme vous l'avez
mentionné, des dividendes de $103 millions de payés dans
les dix dernières années.
Si on prend $2 par part payés sur une valeur de $35, à
l'heure actuelle cela donne un rendement de 6%, dans ces optiques; mais il y a
des actionnaires qui ont acheté leurs parts à un prix beaucoup
plus élevé que le prix actuel. Il y en a d'autres qui les ont
achetées à un prix plus bas, mais je crois que le rendement sur
la valeur de leurs parts est aux environs de 6%.
M. Bérubé: Quelle est la plus-value moyenne de vos
actions sur une période de dix ans, c'est-à-dire l'augmentation
de la valeur des actions?
M. Stangeland: Quelle a été la valeur la plus
haute?
M. Bérubé: Non. L'augmentation moyenne de la valeur
de vos actions sur dix ans, par exemple.
M. Stangeland: Elle a baissé depuis ce temps en dollars
et, en dollars constants, cela a baissé beaucoup plus. Le prix dans les
années soixante a été aux environs de $40 la part et je
crois que le prix le plus haut à la Bourse a été de $50.
On est rendu aujourd'hui aux environs de $22 ou de $23 la part.
M. Bérubé: Je dois comprendre que quelqu'un qui
aurait investi dans la société Consolidated-Bathurst aurait
reçu un intérêt sur son placement d'environ 6% par
année, mais que son action aurait baissé on ne sait pas
pour l'instant d'à peu près combien ce qui fait que le
rendement est quelque part entre négatif 0 ou 6%, mais certainement
inférieur à 6%.
M. Stangeland: C'est bien cela. On parle des moyennes. Ceux qui
ont acheté les parts dans la période où on ne payait pas
de dividende pendant deux ans et demi dans le cycle de 1970-1971, ils n'ont
rien... Cela varie avec le temps et à partir du moment où vous
l'avez achetée et du moment où vous l'avez vendue.
Mais je crois qu'il n'y a pas eu une moyenne plus haute que 6% si on
prend les années 1970 et 1971, où je crois que nous n'avons pas
versé de dividende pendant onze trimestres consécutifs. Il n'y
avait pas de dividende de payé.
M. Bérubé: Je vous remercie.
M. Dufresne: Je voudrais peut-être répondre à
la question du ministre concernant les montants de $294 millions et $208
millions que j'ai donnés. La différence vient des impôts
différés et aussi des profits sur des débentures qu'on a
faits et autres sources. C'est pour cela qu'on a écrit: "...
amortissement, etc..."
M. Bérubé: Merci. Maintenant, j'aimerais revenir
à un certain nombre de chiffres que vous donnez en détail dans
votre mémoire je les ai ici qui portent en particulier sur
une comparai- son des coûts du bois, sur une comparaison des coûts
de production, en vertu desquels vous affirmez qu'en général
votre production est de $40 plus coûteuse que la production
équivalente, dans le Sud des États-Unis, de vos principaux
concurrents.
Je dois reconnaître cependant qu'il s'agit là de chiffres
que j'ai également retrouvés à peu près tels quels
dans le mémoire de l'association. Par conséquent, je suppose que
vous avez pris une moyenne et non des chiffres qui s'appliquent plus
spécifiquement à votre entreprise.
Néanmoins, vous pourriez sans doute répondre à un
certain nombre de questions qui me viennent à l'esprit. Ainsi, lorsqu'on
parle du coût du bois, évidemment, on peut dire que le bois
livré à l'usine vous revient, en moyenne, à $70 le cunit,
étant donné que c'est le chiffre qui nous a été
fourni.
Cependant, je constate que si le rendement d'un procédé au
sulfite, peut-être de 50 à 55 et même plus bas dans un bon
nombre de nos installations, dans un procédé
amélioré comme celui de Port-Alfred, vous pouvez obtenir
jusqu'à 70, 75; c'est ce que vous nous avez annoncé. Par
conséquent, cela représente une économie de 40% et ce qui
représente au point de vue de la valeur en bois à peu près
$21, donc, cela se compare avec $20 ou $25 de prix de bois différent.
Cela ne pourrait-il pas s'expliquer, cette différence entre les deux, en
présumant que, aux États-Unis, ils ont des procédés
à rendement supérieur au nôtre et que, par
conséquent, ils ont besoin d'acheter moins de bois pour produire la
même tonne de papier que vous, ou du moins que l'industrie
québécoise. L'explication principale que l'on trouverait dans le
coût du bois est peut-être moins dans le bois livré à
l'usine que dans, effectivement, la productivité des usines.
M. Stangeland: Non; d'après nous, les chiffres que nous
donnions sur le prix du bois dans le sud des États-Unis est livré
au moulin avant d'être transformé en pâte. Cela veut dire
que si l'on prend votre illustration, le différentiel va augmenter au
lieu de diminuer. Si le rendement sur leur bois est beaucoup plus
élevé à cause d'un nouveau processus de
thermo-mécanique, cela veut dire que le différentiel va
être encore plus grand au lieu d'être plus petit. Dans notre cas,
nous avons, essentiellement, trois grandes usines de papier journal et dans
deux de ces trois usines, nous avons une usine de pâte à haut
rendement qui nous donne à peu près un rendement de 75% sur le
bois et pas le 50% que nous avons dans un processus normal de bisulfite.
Quand on le compare avec une nouvelle usine de pâtes
thermomécaniques, on peut avoir un rendement de 90%. Mais là, on
parle d'entre 75% et 90%. Le coût de l'énergie va augmenter
d'à peu près deux fois, ce qui va baisser la différence
entre les deux. Le point principal à faire, c'est que les installations
que nous avions dans nos deux usines de pâtes à haut rendement
sont déjà là, sont en place, et elles fonctionnent
effectivement, elles
sont modernisées, elles sont capables de travailler encore et,
pour les remplacer, cela prendra un investissement de $25 millions à $50
millions. S'il était question de construire une nouvelle usine, alors,
je crois qu'il n'y aurait pas de question, une usine de papier journal,
à cette heure-ci, installerait une usine de pâte
thermomécanique.
M. Bérubé: Je me posais une question. Dans votre
mémoire, vous dites que le bois coûte de $20 à $25 de plus
la tonne. Cela me semble bien, d'après votre mémoire, que
c'était la tonne de papier produit, que vous rameniez tout à une
tonne de papier.
M. Dufresne: Est-ce que je pourrais éclaircir un point qui
a été mal compris? Dans nos usines où nous avons de la
pâte à haut rendement, la combinaison de pâte chimique et de
pâte mécanique nous donne un rendement d'à peu près
90% alors que le thermomécanique donne environ 92%. Alors, quand on
compare les deux, la différence est très faible. Alors, je pense
que c'est le point principal à noter dans notre cas.
M. Bérubé: Dans votre cas, plus
particulièrement, je pense que je serais d'accord avec vous, sauf que
dans le cas moyen de l'industrie québécoise où là
on donnait un $20 à $25 de plus par tonne de papier, d'après ce
que j'avais cru comprendre du mémoire, et les chiffres sont repris ici,
dans le même sens, et de façon plus explicite encore, je me
demande justement, si cette différence moyenne pour le Québec
n'est pas à cause d'une plus forte baisse de rendement comme telle,
plutôt qu'au coût du bois. Étant donné que vous avez
des procédés à beaucoup plus haut rendement, pouvez-vous
dire que le coût de bois, dans votre usine modernisée de
Port-Alfred, est aussi élevé et qu'il représente un $20
à $25 supérieur au coût de bois moyen du sud des
États-Unis? C'est, finalement, ma question.
Ce que je voudrais savoir, c'est dans vos usines, votre usine moderne de
Port-Alfred, votre bois est-il toujours de $20 à $25 plus cher que ce
que cela coûterait, de façon équivalente, aux
États-Unis?
M. MacLeod: M. le ministre, en fait de bois rond, principalement
eu sud des États-Unis où l'on fabrique 3 millions de tonnes
et c'est la concurrence la plus vive que nous ayons le coût
du bois, rendu aux usines là-bas, en bois rond, coûterait de $45
à $50 le cunit, tandis qu'ici, c'est de l'ordre de $65 à $70 le
cunit et la densité du bois, au sud des États-Unis, est plus
élevée; alors, ils ont la chance d'avoir plus de rendement par
cunit livré.
M. Bérubé: Je pense que ce fait a été
bien étayé dans votre mémoire; je me posais uniquement la
question à savoir si on ne pouvait pas compenser pour le coût du
bois plus élevé au Québec par une amélioration du
rendement dans certaines de nos usines modernes, en vous de- mandant: Dans
quelle mesure vous pouviez être compétitifs à ce moment.
Mais cela ne semble pas...
J'ai une autre question qui s'apparente énormément
à la première, si vous voulez; c'est celle des $15 à $20
de plus de main-d'oeuvre pour la production d'une tonne de papier au
Québec par rapport au sud des États-Unis toujours sans
qu'on puisse, évidemment, évaluer exactement où, au sud
des États-Unis et le mémoire de la CSN a jeté
quelque doute sur cette comparaison. Je dois d'ailleurs dire que j'ai
été frappé par une analogie que j'aimerais approfondir; on
y soulignait que, dans le Vermont, les salaires étaient les plus bas,
mais on pouvait démontrer que c'était l'endroit où
l'industrie forestière était la moins dynamique et la moins
prospère et que, par conséquent, la corrélation entre les
coûts de main-d'oeuvre ne semblait pas complètement
établie. Mais, revenons à ce point des $15 à $20 de plus
de main-d'oeuvre, par tonne de papier. La question que je me pose c'est que, si
la productivité des usines du sud des États-Unis ce sont
de nouvelles usines est de l'ordre du tiers inférieure ou
supérieure, selon qu'on prenne un chiffre ou un autre si elle est
donc différente du tiers de celle du Québec et que le coût
de la main-d'oeuvre au Québec représente à nouveau 35% de
la main-d'oeuvre, on constate que, pour des coûts de production de
l'ordre de $250 la tonne, cela nous donne, en gros, $30 d'économie
à cause de la main-d'oeuvre. Donc, la question que je me pose est la
suivante: Dans quelle mesure une augmentation de productivité de nos
usines ne pourrait-elle pas compenser pour certains écarts dans le
coût de la main-d'oeuvre?
M. Stangeland: II est évident que si une usine nouvelle
était construite avec une machine à papier d'une vitesse de 3000
pieds à la minute et une grandeur de 300 pouces, on aurait avec une
machine la même production que nous avons, à l'heure actuelle,
avec trois ou quatre de nos machines. Au lieu d'avoir des équipes sur
chacune des quatre machines, il y aurait simplement une machine avec une
équipe par cadre et l'entretien serait beaucoup plus bas. C'est pour ces
raisons qu'on dit qu'à l'heure actuelle, notre moyenne des heures-homme
par tonne de production chez nous est d'environ 6,4% à l'heure actuelle
à comparer avec le Sud des États-Unis où la moyenne est de
4,5% avec à la fois des usines qui sont plus neuves que les nôtres
et des usines qui ont de 20 à 30 ans d'existence.
Si on compare cela à une nouvelle machine qui sera
installée dans le Sud des États-Unis, là, on parle de la
main-d'oeuvre par tonne de papier d'à peu près 3 1/2 au lieu de
6, à peu près la moitié; votre proposition est valable.
S'il y a moyen, par un nouveau procédé, d'augmenter la
productivité, ça va compenser pour la différence dans la
main-d'oeuvre.
Mais ce n'est pas seulement la différence dans les taux qui est
importante, c'est la différence entre le nombre d'hommes par tonne de
papier qui est le facteur le plus sérieux dans le jeu.
M. Bérubé: Vous avez souligné une question
et je pense que les représentants de l'industrie, mardi dernier,
rappelaient également ce problème. C'est l'impact très
grave qu'a eu la grève de 1975-1976 sur vos marchés. J'aimerais
que vous explicitiez l'impact à long terme de cette grève. Quel
est, à votre point de vue, le pourcentage de marché que vous avez
perdu, ou, si on veut faire la comparaison d'une façon
différente, par exemple, si vos usines fonctionnent aujourd'hui à
85% de rendement de productivité, quel serait le niveau de production de
vos usines, n'eût été l'impact assez néfaste dont
vous parlez sur vos ventes par suite de la grève?
M. Stangeland: Je n'ai pas très bien expliqué la
situation, parce que nous avons perdu les marchés à cause de la
fermeture de nos moulins pendant la grève. Dans le secteur du papier
kraft, dans le secteur du papier journal et dans le secteur des pâtes,
quand on parle d'un genre de produit qui est plutôt "commodity type" et
qui est vendu sur une base mondiale, je crois que nous n'avons pas perdu nos
clients si dramatiquement. Il n'est pas question que les grands journaux...
Ceux qui publient des journaux aux États-Unis, à cause de cette
grève et à cause du nombre de grèves au Canada qui a
été, dans les deux années avant 1976, le deuxième
plus élevé au monde, à part l'Italie, et, en 1976,
c'était le plus élevé dans le monde de l'Ouest, les jours
perdus à cause de conflits entre les patrons et les syndicats, il y a
plusieurs de ces clients qui se posent des questions sur l'assurance de
recevoir du papier.
On dirait qu'ils ne nous pensent pas aussi fiables qu'on l'était
auparavant et pas aussi fiables, comme fournisseurs, qu'on l'était dans
les années avant 1970. Mais il y a aussi un autre facteur qu'on a
souligné dans notre mémoire; c'est qu'il y a un peu la politique
d'acheter chez nous dans tous les pays et on a le même sentiment avec nos
clients américains. Ils aiment être alimentés par les
usines qui sont établies dans leur pays et ils nous regardent comme des
fournisseurs secondaires.
C'est un changement survenu dans le domaine du papier journal, parce
que, dans les années trente, l'industrie canadienne fournissait 80% des
besoins des Américains. Là, on est rendu qu'on fournit de 60%
à 62% de leurs besoins. Il y en a plusieurs qui sont impliqués
dans la fabrication de papier journal aux États-Unis, qui disent
qu'avant l'année 1980 les usines américaines vont fournir au
moins 50% de leurs besoins. Tout ceci illustre qu'il est plus important que
jamais d'être concurrentiel parce que nous sommes regardés par nos
clients non pas comme le fournisseur majeur ou unique; nous sommes
considérés comme un fournisseur secondaire, si on peut dire.
M. Bérubé: J'aime assez votre réponse, parce
qu'elle m'amène immédiatement à une autre question. Vous
dites que l'industrie, au Québec est de plus en plus un fournisseur
secondaire. Je pense que ce fait a été souligné à
plusieurs reprises, maintenant. Il reste, néanmoins, que la production
du papier journal en particulier, en provenance du Québec,
représente environ 30% du marché américain du papier
journal, si je ne m'abuse, le reste du Canada fournissant 30%, les
États-Unis 30%, le reste, 10%, venant de pays extérieurs comme la
Suède ou autres, je pense.
La question que je me pose est la suivante: Puisque nous fournissons
30%, comme province, du papier vendu aux États-Unis, que les usines
américaines ne fonctionnent peut-être pas à 100% de
rendement, mais autour de 95% et peut-être ici de 90%, il y a donc,
évidemment, une possibilité de jeu qui pourrait
représenter, en gros, 10% qui pourraient être disponibles
présentement sur le marché.
Cela veut donc dire qu'il y a 20% de notre production qui non seulement
n'est pas à caractère secondaire ou marginal, mais est absolument
essentielle à l'approvisionnement des journaux actuellement.
La question que je me pose: Est-ce que vous verriez facilement une
consolidation des ventes de l'industrie papetière
québécoise à l'intérieur d'une régie de mise
en marché, pour être capable d'utiliser ces 20% qui sont quand
même absolument essentiels comme outil de négociation dans la
vente du papier au Québec, de manière à cesser de devenir
un producteur marginal? La question que je me pose, c'est est-ce que la
compétition entre les différents producteurs du Québec
n'est pas justement de nature à vous rendre marginal sur le
marché, alors qu'une union des différents producteurs serait de
nature à vous rendre essentiel au marché américain?
M. Stangeland: C'est une question un peu hypothétique et
les réponses, dans ces circonstances, sont parfois une aventure. On
parle d'un prix de commodité, si l'on peut dire. Il y a un prix de
papier journal livré à New York qui est de $305 américains
et ce prix demeure le même et s'applique à tous les clients.
Je crois que, jusqu'à maintenant, nous sommes une compagnie qui
est de l'entreprise privée. Nous suivons la demande et la poussée
du marché, la concurrence. D'après nous, d'après notre
expérience, nous croyons que le système actuel est le meilleur
qu'il y ait. Nous avons vu les systèmes où, dans certains pays,
on vend en consortium, mais on ne voit pas d'amélioration dans leur
situation.
Si on prend les pays Scandinaves qui ont un consortium pour les ventes
et si on regarde leur taux de production pour l'année 1976 et pour 1977
à venir jusqu'à maintenant, leur taux de production est de 70% ou
73% environ, et l'industrie canadienne va fonctionner à peu près
à 88% cette année. En prenant cela comme exemple, je ne vois pas
d'amélioration dans leur situation après avoir utilisé ce
mode de vente au cours des vingt dernières années.
M. Bérubé: M. Lachance, de l'Association de
l'industrie forestière, nous avait cependant dit que l'industrie
québécoise craignait dangereusement
la concurrence des Suédois sur le marché américain.
Enfin!
Je finirai par deux brèves questions. Vous mentionnez, dans votre
mémoire, autour de la page 68, que les usines de Trois-Rivières
et de New Richmond ne sont pas rentables. Un peu plus loin, dans votre
mémoire, vous mentionnez également, c'est à la page 100,
que "dans l'état actuel du marché, nous n'avons aucune raison de
garder en exploitation nos unités qui ne sont pas rentables." J'aimerais
savoir comment vous entrevoyez l'avenir de ces deux usines?
M. Stangeland: Je crois que ces références sont un
peu séparées. À la page 100 on parlait des trois machines
à papier journal au Cap-de-la-Madeleine. À Chaleurs et à
Wayagamack, Trois-Rivières, nous avons exprimé qu'elles ne sont
pas rentables à l'heure actuelle, mais nous croyons qu'elles le seront.
C'est essentiel qu'elles le soient. Nous avons des programmes en marche pour
essayer de les remettre sur pied. J'ai parlé un peu de la situation pour
Wayagamack à Trois-Rivières, et nous sommes convaincus qu'avec
les progrès faits depuis les dix-huit derniers mois, avec une croissance
de l'économie canadienne, nous sommes dans une position que l'usine, au
lieu de ne pas être rentable, va devenir rentable. À Chaleurs,
où est, comme je l'ai dit, une des plus modernes de nos usines,
étant bâtie depuis 1966 seulement, nous avons une situation plus
compliquée à cause du prix du carton ondulé qui est
établi par les grosses usines du Sud des États-Unis où les
coûts sont beaucoup plus bas que ceux que nous avons actuellement
à New Richmond.
Nous prenons toutes les mesures possibles pour faire descendre nos
coûts. Nous attendons la relance de l'économie mondiale avec une
augmentation de prix, qui va nous mettre dans une position un peu plus rentable
avec cette usine. C'est justement sur ces situations que nous pensons que la
commission pourrait continuer ses travaux après ces six jours, en
ouvrant et en continuant un dialogue sur ce genre de problèmes qui
existent dans certaines compagnies. Ce sont sur ces cas spécifiques que
nous aimerions ou que nous recommanderions que le gouvernement continue un
dialogue profond pour examiner toute la situation, pour voir si, à part
les efforts que nous faisons à l'heure actuelle, il n'y a pas d'autres
efforts qui peuvent être faits par le gouvernement ou par le grand public
pour que l'usine devienne en santé, rentable et capable de survivre.
M. Bérubé: Une dernière question, et je
voudrais en même temps rassurer le député de Portneuf,
puisqu'elle concerne la drave et qu'en dépit de ses déclarations
ce n'est pas encore la politique gouvernementale de bannir la drave. J'aimerais
que vous répondiez à la question...
M. Pagé: ... que vous parliez au ministre du Tourisme.
M. Bérubé: ... suivante. Elle porte essentiellement
sur la pollution causée par la drave. On dit qu'au cours de la drave le
bois perd environ 50% de son écorce et qu'elle est également
responsable d'une très forte quantité de tanin dans l'eau, qui
est peut-être le polluant le plus dangereux. Or, pour 1982, les normes de
protection de l'environnement en solides en suspension seront de l'ordre de 200
tonnes par jour permises. Or, le bois flotté, à deux millions de
cunits pour votre entreprise, cela représenterait environ 300 tonnes par
jour, donc excéderait les limites proposées par la norme de
protection de l'environnement. On avait soulevé une question hier, je
crois, qui portait sur la possibilité de faire l'écorçage
avant de mettre le bois en rivière. Quelle serait l'opinion de la
compagnie sur cette question, en particulier?
M. Stangeland: Je vais demander à M. MacLeod de
répondre mais, avant, j'aimerais ajouter les commentaires suivants:
Je ne crois pas qu'il y ait assez d'études ou assez de
données de base sur les conséquences de la drave avec les
écorces dans une rivière ou dans un cours d'eau. Les
données sont loin d'être précises, parce qu'il me semble
qu'après avoir eu la drave sur la rivière Saint-Maurice durant au
moins 70 ans, avec tout le bois qui a descendu cette rivière, s'il y
avait tellement d'écorce perdue dans la rivière, il n'y aurait
plus d'eau du tout. Il n'y aurait plus que de l'écorce et on marcherait
en plein milieu de la rivière.
Je suis né dans le coin de la Mauricie. J'ai nagé dans
cette rivière pendant plusieurs années quand j'étais jeune
et quand on dit que les billots sont nuisibles sur la rivière, c'est
complètement exagéré et j'ai une autre illustration
à vous donner. Dans les années soixante, il y avait un grand
projet chez nous qui disait: On va récupérer tout le bois qui a
calé dans la rivière et il doit y avoir des centaines ou des
milliers de cunits de bois qui ont calé dans la rivière et
quelqu'un a dit: Ce n'est pas pire comme idée, cela va être le
bois à bon prix. On a engagé un entrepreneur et on lui a
donné un contrat avec des plongeurs juste en bas du barrage de
Shawinigan et il a passé dix jours là et il a sorti à peu
près une dizaine de cordes et il a fait faillite. Il n'y avait pas de
bois du tout.
M. MacLeod: M. le ministre, j'ai toujours pensé que si M.
Stangeland avait un beau teint, c'est parce qu'il a plongé dans le
Saint-Maurice, mais le flottage du bois, d'après nous, les pauvres
bûcherons qui sommes obligés de le faire, incite plutôt une
opération agricole que sylvicole en comparaison avec la pollution qui
pourrait être causée par la fabrication, parce que si...
On pourrait faire une distinction un peu philosophique, si vous voulez,
mais je crois que si je crache dans la rivière Saint-Maurice, c'est une
forme de pollution, mais ce n'est pas une forme de pollution très
sérieuse.
Alors, pour nous qui coupons le bois, on peut comparer peut-être
avec la pollution qui se fait dans le moment où les feuilles tombent des
feuillus.
Il y en a peut-être des centaines de millions de tonnes qui
tombent dans les cours d'eau. C'est là
une matière organique et c'est une forme de pollution; personne
ne parle d'empêcher les feuilles de tomber dans les cours d'eau.
D'après nous, c'est exactement la même chose. M. le
Président, vous nous avez demandé de terminer avant une
heure.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. MacLeod: Nous pourrons revenir, si vous le voulez.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui,
d'accord; je vous demanderais donc, s'il vous plaît, si vous pouviez
être présents à 15 heures cet après-midi au
même endroit.
Avant de suspendre les travaux à 15 heures, j'aimerais informer
les journalistes présents qu'une conférence de presse qui devait
avoir lieu à 14 h 30 a été annulée.
Là-dessus, les travaux de la commission sont suspendus
jusqu'à 15 heures.
M. Bérubé: J'ai terminé mes questions, je
vous remercie.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
Reprise de la séance à 15 h 5
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, messieurs!
Suite à une demande qui m'a été faite, ce matin, et
après avoir discuté avec les représentants de
l'Université du Québec à Trois-Rivières, les
représentants de l'université ne seront pas entendus aujourd'hui,
comme ils me l'ont d'ailleurs demandé eux-mêmes, mais ils seront
reconvoqués par la commission. Leur mémoire sera entendu comme
tous les autres.
Deuxièmement, nous allons continuer à interroger les
représentants de la Consolidated Bathurst jusqu'à environ 15 h 45
ou 15 h 50 afin de permettre au nouvel intervenant d'avoir également ses
deux heures ou deux heures et dix. Là-dessus, je cède la parole
au député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je dois dire que,
concernant les remarques préliminaires...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
MacLeod n'a pas terminé. M. MacLeod.
M. Pagé: Bon, d'accord.
M. MacLeod: Merci, M. le Président. J'avais à peine
commencé ma réponse à la question mais je peux vous
promettre d'aller aussi vite que possible. Avant le lunch, j'étais
à décrire les feuilles d'érable qui tombaient dans les
cours d'eau et qui étaient une forme de pollution similaire à
l'écorce qui se détachait des billes qui flottaient. Dans la
rivière Saint-Maurice, nous avons fait une étude spéciale
sous l'estacade à Saint-Jean-des-Piles pour déterminer le niveau
de l'oxygène à cet endroit de la rivière où presque
tout le bois qui est flotté en bas de La Tuque est emmagasiné, de
temps en temps, parfois pendant plusieurs mois. Nous avons trouvé que le
niveau de l'oxygène était presque normal, un peu en bas de la
normale, mais certainement assez élevé pour le poisson. Ceci
s'explique. La réaction chimique de l'écorce au fond d'un cours
d'eau, quand l'écorce est en gros flocons, est très lente et il
n'y a presque pas de réaction alors, la demande d'oxygène n'est
pas trop élevée. Maintenant, la différence avec
l'écorce qui vient de l'usine est que l'écorce ou la fibre
échappée d'une usine est en particules très fines; alors,
la réaction chimique et le montant d'oxygène demandé sont
beaucoup plus élevés.
Maintenant, M. le ministre, vous avez demandé si on devrait
écorcer le bois en forêt. Étant donné que
l'écorce représente, d'après nous et d'après cette
étude, une source de pollution très grave ou même
appréciable, je crois que le fait d'écorcer dans le bois sera un
gaspillage d'à peu près $4 ou $5 le cunit, en plus du fait que
l'écorce qui se rend à l'usine est toujours une source
d'énergie. Pour moi, la drave n'est pas vraiment une source de pollution
chimique, mais naturellement, c'est une entrave pour les utilisateurs de la
rivière comme les sportifs, etc. Ces gens devraient utiliser l'eau comme
ils font avec nous, on devrait
coexister et je crois qu'un bateau hors bord de 80 forces est une
nuisance pour un canotier. Alors, le bois est une nuisance pour les deux. On
vit ensemble et, si tout le monde met un peu d'eau dans son vin, on pourra
vivre convenablement, même avec un certain tourisme. Parce que c'est
nostalgique de voir des milliers de cordes de bois descendre la majestueuse
rivière Saint-Maurice tous les ans.
En terminant, j'aimerais vous faire remarquer que dans l'État du
Maine, dernièrement, les gens qui se préoccupent de
l'environnement, ont demandé officiellement au législateur
d'obliger les compagnies papetières à recommencer la drave des
rivières, parce qu'ils sont pas mal fatigués de voir passer les
gros camions chargés de bois sur leurs routes, les dommages faits aux
routes et ils veulent conserver autant que possible l'énergie sous forme
de carburant. Alors, nous avons une source d'énergie dans les
rivières, qui ne coûte rien.
Pour toutes ces raisons, on devrait faire comprendre au monde que la
drave est vitale et c'est une méthode pour concurrencer avec d'autres
producteurs de papier qui n'ont pas le privilège d'avoir des voies comme
les rivières. Sur le Saint-Maurice, si nous faisons du camionnage, il y
aura un camion qui passera entre La Tuque et Grand-Mère, chargé
ou vide, toutes les 3,7 minutes, dix mois par année, 24 heures par jour.
Si ce n'est pas une source de pollution, je ne sais pas ce que c'est.
Le Président (M. Brassard): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président.
Tout d'abord, je voudrais, comme le ministre, remercier les
représentants de la compagnie Consolidated Bathurst, pour la
qualité du mémoire qu'ils nous ont déposé, lequel
démontre une étude très attentive. Ce que j'ai surtout
remarqué, c'est que votre entreprise a inclus dans l'information qu'elle
présente, dans son document, des chiffres sur la situation
financière, entre autres, et je vous en remercie.
Vous êtes la deuxième entreprise de pâtes et papiers
à comparaître devant nous. La précédente,
l'Association des industries forestières, dans son mémoire et ses
représentations, se réjouit comme vous des travaux de cette
commission et du fait que le gouvernement, par le biais du ministère des
Terres et Forêts, convoque cette commission. D'autre part, on semble
percevoir, dans les allégués, les informations, les commentaires
que vous formulez, que vous ne semblez pas favoriser l'intervention de
l'État; ou si intervention vous favorisez, c'est à un
degré moindre. Somme toute, vous dites: L'État peut intervenir,
mais ce n'est pas nécessairement par son intervention qu'on aura des
solutions.
De plus, dans les commentaires, dans le préambule, vous dites que
c'est un problème qui est peut-être exagéré, qu'il
ne faudrait pas avoir des commentaires alarmistes face à cette
situation.
À l'appui de cela, vous dites que la situation
générale, ce n'est peut-être pas un problème, que le
problème tourne beaucoup plus au niveau de certaines entreprises
spécifiques, compte tenu de leur localisation, peu importe pour quel
motif; de toute façon, on pourra en faire état tout à
l'heure.
Il y a quand même un problème. Tout le monde est unanime
à dire que les coûts de production sont tels, que le prix de
revient est tel qu'on n'est plus concurrentiel sur le marché
international. Vous avez fait état de l'augmentation annuelle.
Pour vous, j'ai une question à plusieurs volets. Est-ce que vous
pensez que le gouvernement devra faire une intervention, exercer une action,
d'une part, en ce qui concerne l'ensemble de l'industrie, intervention qui
pourrait conclure à une diminution des coûts de production
et on pourra échanger là-dessus ou croyez-vous qu'il ne
serait peut-être pas plus opportun, de la part du gouvernement,
d'intervenir spécifiquement dans les cas où il y a des
problèmes actuellement, tels que ceux dont vous avez fait état?
Je n'ai pas besoin de vous citer le cas de la Wayagamack, au
Cap-de-la-Madeleine, le cas de la Wayagamack à Trois-Rivières et
le cas de New Richmond.
On pourra y revenir tantôt. Essentiellement, ma question est
celle-ci: Est-ce que vous dites non à l'intervention de l'État?
Si vous dites oui à l'intervention de l'État, cette intervention
pourra-t-elle être axée, avoir comme objectif la situation
générale dans l'ensemble de l'industrie ou, encore,
favoriseriez-vous une intervention relative et spécifique dans les
usines où l'industrie connaît des problèmes
actuellement?
M. Stangeland: Je crois que la compagnie n'a jamais
été contre l'intervention du gouvernement dans ses affaires, ni
moi comme citoyen. Nous faisons déjà face à un taux de
taxation d'à peu près 46% de nos profits. Les gouvernements sont
déjà partenaires avec nous dans notre entreprise, et avec moi
aussi comme personne, dans mon entreprise personnelle. Sur la question de
l'approvisionnement en bois qui vient des terres de la couronne, depuis que
l'industrie a commencé, depuis que la compagnie a ses concessions
forestières, nous avons toujours dialogué et discuté avec
le gouvernement. Je crois que le mot "intervention", ces jours-ci, signifie
remplacer le système actuel, bouleverser ce qui existe, socialiser ou
contrôler la production et la transformation du bois, la vente des
produits. Dans cette optique, notre compagnie croit sincèrement, et je
le crois en tant qu'individu, que ce n'est pas la meilleure façon de
procéder. Nous sommes en Amérique du Nord et nous avons un
standard de vie que le reste du monde essaie d'atteindre. Nous croyons
sincèrement que le système actuel fonctionne assez bien sans
avoir une nouvelle intervention selon les termes que je comprends ici.
M. Pagé: D'accord, M. Stangeland. Quand j'ai parlé
d'intervention, tout le monde est unanime à constater que votre
industrie est en contact régu-
lier avec le ministère des Terres et Forêts, que votre
industrie est sujette à taxation aussi.
Quand je parlais d'intervention, c'est que vous semblez dire
d'ailleurs, vous l'avez formulé à la fin de votre réponse
que le gouvernement ne peut pas avoir d'intervention directe.
D'ailleurs, à une question qui vous était formulée par le
ministre lorsque celui-ci faisait état de la possibilité de la
création d'une régie pour la mise en marché du produit
fini, vous sembliez réticent.
C'est ma question et j'y reviens, parce que je pense qu'elle est
importante: Seriez-vous favorable à une intervention d'ordre
général du gouvernement pour la situation en
général de l'entreprise? Somme toute, il y a un problème
de coût de production. À moins que l'entreprise ne soit en mesure
de démontrer au gouvernement et à cette commission qu'elle a un
problème de coût de production, qu'elle n'est plus concurrentielle
et qu'elle est capable de le régler. À ce que je sache, la
préoccupation de tous et chacun d'entre nous est à ce niveau,
actuellement. Je répète ma question. Vous avez parlé de
nationalisation; on a parlé ce matin de la création d'une
régie pour la mise en marché; on a parlé hier de la
possibilité d'avoir un secteur témoin dans les pâtes et
papiers, etc; ce sont différentes formules qui méritent, tout au
moins, d'être analysées. Alors, si vous n'êtes pas
favorable, si l'industrie ou si votre entreprise n'est pas favorable à
un genre d'intervention d'ordre général comme celle-là,
croyez-vous que le gouvernement pourrait intervenir spécifiquement en ce
qui concerne les entreprises qui sont les plus affectées par le
problème actuellement?
M. Stangeland: Dans nos recommandations, nous voulons que le
gouvernement aide à sensibiliser l'opinion publique aux problèmes
et à la croissance des coûts qui est, à mon point de vue,
le problème général qui s'applique à toutes les
compagnies. Je pense que le gouvernement doit essayer un programme
d'éducation économique dans les écoles ou dans d'autres
milieux pour faire comprendre au grand public la réalité
économique et comment le système fonctionne. Je crois que c'est
dans ce genre d'interventions que je vois le mieux l'action du gouvernement.
Quand on parle de l'intervention directe dans l'industrie des pâtes et
papiers, on a seulement à regarder ce qui s'est passé ici au
Canada au cours des dix dernières années.
Il y a eu la construction de l'usine de papier kraft au Manitoba, le
Manfor, qui a coûté aux contribuables des centaines de millions de
dollars. On a vu le Labrador Liner Board s'établir à Terre-Neuve
à un coût aux contribuables d'au moins $350 millions. On voit
aussi le problème de Ca-bano; c'est construit, il n'y a pas de
marché pour le produit et c'est le contribuable qui paie. Je crois qu'il
y a un rôle à jouer, mais plutôt sur le climat
économique et social du Québec. C'est un rôle plutôt
détaché de la production des billes et des produits du
papier.
M. Pagé: Je vous remercie de votre réponse. Vous
allez quand même accepter avec moi... Votre réponse contient des
éléments très positifs, très valables et
très concluants, d'accord. D'accord qu'il faut favoriser
l'éducation populaire. D'accord qu'il faut sensibiliser davantage la
population aux problèmes du milieu. Mais, concrètement, tout le
monde est unanime à dire et à constater qu'il y a un
problème particulier pour certaines entreprises au Québec, dont
certaines de votre compagnie. D'autres intervenants avant si vous me
permettez, je vais terminer ma question là-dessus quand ils
faisaient état de mesures concrètes, demandaient des
réductions de taxes ou d'impôts au niveau, par exemple, des
coûts de transport, au niveau de l'énergie.
Pour régler le problème des usines, est-ce que vous croyez
que des gestes comme ceux-là, posés par le gouvernement, des
gestes concrets, au niveau de la fiscalité, peu importe d'ailleurs,
pourraient aider éventuellement? Votre association un des
premiers intervenants, mardi matina fait état d'une gamme de
mesures concrètes qui éventuellement pourraient être
considérées pour contribuer à régler
concrètement le problème de certaines entreprises. Est-ce que
vous faites vôtres ces représentations? À la lueur de
l'expérience que vous avez, parce que vous semblez avoir une
expérience très vaste, est-ce que vous pensez que par des
interventions ponctuelles et spécifiques, comme le transport,
l'énergie, la taxation, la fiscalité municipale, etc., il y
aurait moyen, si le gouvernement s'y adonnait, de régler
concrètement le problème des usines les plus affectées
actuellement?
M. Stangeland: De mon point de vue, ces mesures peuvent aider la
situation, mais les subventions ou les mesures, il faut que cela soit dans le
tracé du bon sens.
Si on essaie artificiellement à garder en jeu une entreprise ou
un produit pour lequel il n'y a pas de marché, ce sont des fonds
dépensés par les contribuables qui ne sont pas valables. Pour
revenir là où je pense que le gouvernement devrait intervenir,
c'est l'inflation aussi, c'est un sujet très difficile. Mais si c'est la
croissance de nos coûts qui est le problème général
pour l'industrie dans l'Est du Canada, alors c'est un problème dans
lequel le gouvernement peut intervenir en gérant ces opérations
sur une base qui ne contribue pas à l'inflation. Dans l'industrie
privée et dans les compagnies, nous pensons que tous les systèmes
d'indexation sont des fois néfastes parce qu'ils augmentent l'inflation.
Si on concurrence avec d'autres pays qui n'ont pas ces coûts, alors, cela
devient un problème.
Comme illustration, nous avons calculé le coût des
programmes comme les accidents du travail, la régie des rentes,
l'assurance chômage, le "medicare plan", le service de santé,
durant les cinq dernières années et nous avons vu une hausse de
ces coûts qui a atteint à peu près 18 cents l'heure; pour
toute notre main-d'oeuvre dans le secteur pâtes et papier on remarque un
montant de 41 cents. C'est encore un exemple qui montre que si le gouvernement
est vigilant et veut rectifier la situation, alors, il peut jouer un
rôle
dans ce sens-là, soit tenir dans une perspective normale et pas
trop exorbitante, les coûts.
M. Pagé: J'ai deux petites questions assez
particulières. Vous avez fait état des coûts de production.
J'aimerais savoir quel sera l'impact d'une éventuelle hausse des tarifs
d'électricité sur vos coûts de production, d'une part;
d'autre part, vous avez parlé de concurrence, et on a eu l'occasion d'en
discuter abondamment, ce matin, j'aimerais savoir quel sera l'impact sur vos
ventes, particulièrement, sur les marchés étrangers, de la
baisse du dollar canadien.
M. Stangeland: La première question, c'est l'impact sur le
coût de l'électricité. Mardi, quand l'industrie a
témoigné, j'ai mentionné que le coût était
approximativement de 15%. C'était le coût de l'énergie,
soit l'huile, soit l'électricité. Pour le papier journal, le
coût est à peu près de la moitié; cela veut dire que
le coût de l'électricité pour une tonne de papier journal
représente à peu près 7,5% de notre coût de
production. Comme je l'ai mentionné, l'énergie est justement
l'élément qui augmente le plus vite, à un niveau d'au
moins 21,5%, depuis les quatre dernières années, et nous sommes
en face d'augmentations, dans les taux d'électricité, de 20% en
général et, dans le cas de certaines industries, je crois que
notre coût va augmenter, cette année, de 30%. Cela n'aide pas du
tout. L'énergie, l'électricité est, parmi les ressources
que nous avons ici dans le Québec, notre facteur le plus puissant pour
jouer notre rôle de concurrence. On ne devrait pas perdre
complètement cet avantage et je crois que l'une des raisons pour
lesquelles l'industrie s'est installée au Québec, c'est qu'il y
avait beaucoup d'énergie à un taux et à un coût plus
bas qu'ailleurs. Maintenant que l'industrie est ici, pour la garder en bonne
santé et la laisser prospérer, il faut garder ce taux
d'énergie ou ce taux d'électricité, à mon opinion
personnelle, à un niveau plus bas que dans les autres pays. On a un
avantage, qu'on essaie de le garder le plus longtemps possible.
La deuxième question, c'est la question des ventes...
M. Pagé: Oui, l'impact de la baisse du dollar
canadien.
M. Stangeland: Sur l'impact de la baisse du dollar canadien, je
peux dire que ce changement dans la valeur du dollar n'aide pas beaucoup les
compagnies, mais je puis vous dire que si on n'avait pas cette assistance ou
que si on n'avait pas cet avantage temporaire, les résultats des
compagnies auraient été bien pénibles. Cette année,
pour les premiers six mois, les résultats pour toutes les compagnies de
papier n'ont pas été aussi bons que l'année passée.
Cela nous donne un petit avantage, mais on croit que c'est un avantage
temporaire et cela n'améliore pas assez la situation pour que nous ayons
assez de fonds pour continuer notre programme de modernisation et faire avancer
nos entreprises.
L'usine Wayagamack
M. Pagé: Je vous remercie. Vous me permettrez maintenant
d'aborder un aspect bien spécifique de vos opérations parce que,
d'une part, il en a été question à plusieurs reprises ici,
à l'Assemblée nationale et parce que, d'autre part, c'est la
première fois, en tant qu'Opposition officielle, qu'on a l'occasion
d'échanger avec vous des propos sur cette question. Il s'agit
évidemment du cas de la compagnie Wayagamack, au
Cap-de-la-Madeleine.
Dans le document que vous déposiez ce matin, vous invoquez
plusieurs motifs à l'appui de votre décision de fermer cette
usine pour le 15 octobre prochain; vous joignez à ça un tableau
des dépenses en immobilisation et des frais d'entretien, de
réparation et de la production dans chacune de vos usines, etc.
J'aimerais d'abord savoir depuis quand cette usine est en activité sous
l'égide de votre compagnie. De plus, si on prend le tableau 7D à
la page 64 de votre mémoire, on constate que, comparativement aux autres
usines sous l'égide de votre compagnie, au niveau des dépenses en
immobilisation, on a vite fait de constater que cette usine en particulier a eu
une part de gâteau assez mince des dépenses en immobilisation
depuis 1955. Au moins, les chiffres qu'on a ici vont jusqu'en 1955.
J'aimerais que, d'une part, vous nous informiez, premièrement,
depuis quand cela fonctionne, avec Consol., comment expliquer le fait que,
depuis 22 ans ou 21 ans, avec les chiffres qu'on a, cette entreprise soit le
parent pauvre de toutes les autres usines. J'aimerais, pour l'information des
membres de la commission, si c'était possible, que M. Dufresne nous
donne les chiffres faisant état des profits spécifiques de cette
usine.
J'aurai d'autres questions par la suite.
M. Stangeland: L'usine du Cap-de-la-Madeleine, on peut dire que
cela a été, dès le début, je ne veux pas dire que
c'est l'enfant le plus faible, mais c'était une usine sans pâte
chimique. C'était une usine avec trois machines seulement et
c'étaient des machines et une usine qui avaient été
fermées pendant dix ans, de 1929 jusqu'à la guerre en 1939. Cela
n'a jamais été une usine. Tout le monde, dans la gérance,
savait qu'avec la modernisation, avec l'évolution, c'était une
usine qui ne resterait pas telle quelle.
On peut produire aujourd'hui, avec une machine à papier, ce qu'on
produit avec six machines à papier comme celles que nous avions au
Cap-de-la-Madeleine. En commençant notre programme en 1974, pour rester
concurrentiels, nous avons choisi naturellement, avec bon sens, où on
devait investir notre argent pour qu'on puisse changer l'usine et
l'améliorer, la placer dans une position concurrentielle pour une
période de 40 à 50 ans.
On ne peut pas choisir usine par usine; nous sommes obligés,
comme entreprise, de gérer les vingt machines à papier journal
que nous avons et de choisir, parmi elles, où mettre notre argent
pour améliorer la situation. C'est pour ces raisons que les
dépenses en immobilisation au Cap-de-la-Madeleine totalisent seulement
$9 millions au cours des années 1955 à 1976.
Quant à votre autre question sur les profits par usine, nous
annonçons aux actionnaires nos résultats financiers par compagnie
et nous divisons nos résultats par secteur de pâtes et papiers et
par secteur des emballages. Dans le secteur des pâtes et papiers, on
parle du papier journal, on parle des pâtes et on parle du carton et des
autres produits. La manière dont on gère nos affaires, c'est
qu'on ne compile pas les résultats par usine ou par machine; on compile
ça par genre de produits.
On peut dire que le produit papier journal comprend une entreprise dans
le secteur des pâtes et papiers dans la compagnie Consolidated-Bathurst,
comme la pâte forme une entreprise dans un secteur dans une compagnie.
C'est dans ces dimensions que nous tenons compte des résultats et c'est
dans ce contexte que nous gérons. On ne peut pas gérer une
entreprise de papier journal avec trois machines qui vont avoir ces
résultats et quatorze autres qui vont avoir d'autres résultats.
Il faut les combiner.
M. Pagé: D'accord. À cause de la concurrence,
à cause des autres entreprises qui fonctionnent dans le même
secteur d'activités, je comprends que les entreprises puissent
être réticentes à faire état de leurs profits,
à parler de profits ou de budget d'ordre général.
Mais si vous voulez, je voudrais bien qu'on entretienne une relation de
bonne foi...
M. Gagnon: Est-ce que vous me permettez une question?
M. Pagé: Si vous voulez me laisser compléter ma
question.
M. Gagnon: Je voudrais juste demander une information.
M. Pagé: Je pense qu'on va donner notre consentement
unanime, quant à nous, si on veut prolonger. Mais il me reste encore
quelques questions. Je suis certain que vous pourrez participer; d'ailleurs, on
l'apprécierait.
M. Gagnon: Merci.
M. Pagé: Je ne m'explique pas qu'une entreprise, qu'une
compagnie comme la vôtre puisse dire: On ferme telle usine parce qu'elle
n'est pas rentable ou peu importe le motif, mais généralement
c'est le motif de la rentabilité. Si, au point de vue comptable, on est
capable, de constater une défaillance au point de vue de la
rentabilité, on est aussi capable de dire les chiffres, si
rentabilité il y a.
Dans les circonstances, si vous ne croyez pas qu'il soit
d'intérêt public ou opportun de faire état de ces
chiffres-là, j'aimerais autant qu'on me dise: Écoutez, M. le
député, on ne le dit pas. Et on va passer à un autre. Mais
moi, je suis convaincu que, parmi les 20 compagnies que vous avez, si vous
êtes en mesure de dire: Celle-là n'est pas rentable, vous
êtes certainement en mesure de dire: Celle-là, on fait des profits
avec ou on ne fait pas de profits avec. Il me semble que ce n'est pas...
Pourquoi je vous le demande? C'est parce que c'est important, compte
tenu des dépenses qui ont été faites, compte tenu des
dépenses qui auraient pu être faites. Si on remarque la
production, en 1960, elle était de 96 000 tonnes. Une dizaine
d'années plus tard, en 1972, elle était de 100 000 tonnes. En
1975, elle est encore de 100 000 tonnes. Dans votre mémoire, lorsque
vous faites mention de cette entreprise, vous dites que la capacité
maximale de production sur ces machines était de 105 000 tonnes par
année. Cela démontre et vous le dites dans votre
mémoire que la productivité était bonne.
Si la productivité était bonne, comment expliquer qu'il
n'y a pas eu d'investissements? Est-ce qu'au point de vue mécanique et
au point de vue de l'équipement je ne suis pas ingénieur
vous vous êtes déclarés satisfaits de cette usine?
Je ne m'explique pas cette situation. Je crois que la question sur les profits,
sur la rentabilité de l'usine, en particulier, est un
élément important pour dégager des réponses aux
nombreuses questions qu'on se pose.
M. Stangeland: Ma réponse est que, pour améliorer
l'usine du Cap-de-la-Madeleine, il fallait recommencer à neuf. Il
fallait presque reconstruire ce qu'il y a là. Il faut mettre une usine
de pâte mécanique. Il faut installer une nouvelle machine et
"scraper" les trois qui sont là. Il fallait changer tout l'entreposage,
les meules, toute la réception du bois. Pour vraiment améliorer
la situation, cela prendra un investissement et un changement quasiment total
de la situation. Notre devoir est de choisir, parmi toutes les usines où
on fabriquait du papier journal, laquelle, dans le bon sens, était la
meilleure pour y apporter des changements.
Nous serons bientôt rendus à 17 machines de papier journal.
Mais il ne faut pas s'imaginer qu'il va encore rester 17 machines à
papier dans 20 ans d'ici. Le progrès se fait en remplaçant les
plus vieilles et, normalement, quand on remplace, on remplace avec une qui fait
le travail de trois ou quatre. C'est exactement ce qui est arrivé
à Grand-Mère, quand nous avons fermé quatre machines en
1966 et que nous avons installé une nouvelle machine. En 1977, nous
sommes en mesure de fermer trois machines et de les remplacer par trois
machines qui seront 50% plus productives. Au lieu d'acheter une nouvelle
machine, on en prend trois qui sont valables et dont on peut améliorer
la vitesse et tout cela, et on les met dans une position très
avancée. Par conséquent, nous étions obligés de
fermer les trois anciennes et la décision a vraiment été
prise en 1974 quand nous nous sommes engagés dans notre grand programme
d'expansion à Port-Alfred dans le Saguenay.
M. Pagé: Cette décision était prise depuis
1974!
M. Stangeland: Quand on est arrivé devant les
administrateurs pour avoir leur appui pour commencer à dépenser
$55 millions, c'était prévu, c'était discuté que la
vie des trois machines de l'usine du Cap-de-la-Madeleine était quasiment
écoulée et qu'avec la production accrue à Port-Alfred,
l'usine du Cap-de-la-Madeleine serait fermée.
M. Pagé: Tout à l'heure, j'ai bien formulé
la question des profits et j'y reviens encore. Pouvez-vous faire état
des profits de cette entreprise depuis dix ans? Et j'ajouterai ceci-,
pouvez-vous faire état devant cette commission, fournir à cette
commission, quelle a été la dépréciation qui a
été prise, en terme fiscal, sur ces équipements-là
depuis dix ans aussi? Lorsque j'ai parlé de profits
peut-être M. Dufresne pourrait-il me répondre? il n'y a pas
de doute que quand une entreprise constate qu'il n'y a pas rentabilité
à un endroit, elle doit aussi être capable de constater quand il y
a rentabilité. Je vais vous donner un exemple et j'aimerais avoir vos
commentaires. On a déjà fait état dans la presse de $119
000 de revenus ou de bénéfices à l'usine de la Wayagamack
ce n'étaient pas des gens de l'intérieur qui avaient tous
les chiffres en main qui en arrivaient à ce chiffre-là
pour le premier trimestre. Quels sont vos commentaires?
M. Stangeland: Quand le ministère a fait faire une
étude sur l'usine de la Wayagamack du Cap, il y avait des comptables,
des ingénieurs à qui on avait donné le mandat d'examiner
la situation. Nous avons discuté avec le ministère. Nous avons
ouvert nos livres et nous avons mis à leur disposition tous les
détails financiers sur les opérations de tout le secteur du
papier journal incluant l'usine du Cap-de-la-Madeleine. Je crois que, dans
cette optique, la compagnie a fourni toutes les informations demandées.
Je ne suis pas prêt aujourd'hui, devant cette commission, a entrer dans
un autre dialogue sur les chiffres. Je veux simplement dire qu'en
général, depuis l'année 1970, les résultats
financiers de l'usine du Cap-de-la-Madeleine n'ont pas été
favorables.
M. Pagé: Dernière question, M. le Président.
Je me permettrai un commentaire avant de poser ma dernière question.
J'aurais aimé et je pense que c'est le voeu des membres de cette
commission qu'on puisse avoir des chiffres exacts au niveau des profits
et de la dépréciation en ce qui concerne cette usine
spécifiquement.
Je me permettrai de vous dire qu'il est peut-être acceptable de
faire état, de la part d'une entreprise, de chiffres au gouvernement.
Mais je ne m'explique pas que, si on peut transmettre des chiffres et des
états financiers au gouvernement, on se refuse à le faire
à l'Assemblée nationale, parce que c'est l'Assemblée
nationale ici. C'est une commission parlementaire qui est une pro- longation de
l'Assemblée, et c'est même au-delà du gouvernement. C'est
un commentaire que je fais avant ma dernière question, qui est celle-ci:
Dans une déclaration dans la Tribune, de Sherbrooke, du lundi 26
septembre dernier, le ministre des Terres et Forêts faisait état
d'un plan général de modernisation et de rationalisation pour
l'usine Domtar à East Angus. N'ayant pas été dans le
secret des dieux pendant toutes les négociations et les discussions que
vous avez eues avec le ministre, si le gouvernement proposait à votre
compagnie, pour l'usine Wayagamack du Cap-de-la-Madeleine, l'ébauche
d'un plan de modernisation et de rationalisation, un programme qui pourrait
être amorcé dans les plus brefs délais et peut-être
avec d'autres gens ou un comité assisté d'autres personnes, si le
gouvernement du Québec, par la voix du ministre des Terres et
Forêts, vous faisait état de cela aujourd'hui, 29 septembre,
est-ce que votre entreprise serait disposée à attendre les
conclusions de ce rapport ou document avant de procéder à la
fermeture de l'usine Wayagamack au Cap-de-la-Madeleine?
M. Stangeland: La réponse, c'est non.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les deux
heures que la commission accorde à chaque intervenant sont
passées mais, puisque le ministre et le député de Portneuf
ont pris beaucoup de temps à formuler leurs questions, je cède
maintenant la parole au député de Brome-Missisquoi et, par
après, au député de Champlain, tout en vous mentionnant
qu'il ne faudrait quand même pas éterniser la présence de
la Consol, puisque nous attendons le syndicat par après. Disons que,
très brièvement, ce sera le député de
Brome-Missisquoi et, par après, le député de
Champlain.
M. Russell: M. le Président, ce n'est pas mon habitude
d'éterniser les débats. Par contre, je voudrais que la commission
me donne le privilège, comme au gouvernement et à l'Opposition
officielle, de poser quelques questions. Je voudrais le faire d'une
façon très brève. Pour ce faire, je vais poser une
question à deux ou trois volets pour accélérer les
travaux. Cette commission a été convoquée pour clarifier
la situation, le climat qui semble exister actuellement dans le domaine des
scieries, des pâtes et papiers. De ce fait, on a invité des
sociétés comme la vôtre à étaler des
chiffres, donner leurs commentaires, apporter leur expérience afin que
cette commission puisse en venir à des conclusions pour tâcher de
modifier, si nécessaire, ou faire des lois pour corriger un peu cette
situation.
Plusieurs personnes ont commencé à déposer des
rapports. L'autre soir, on a fait état de compagnies multinationales, en
laissant croire que même la compagnie que vous représentez
était une compagnie multinationale et que les actionnaires
étaient des étrangers. Je voudrais que quelqu'un d'entre vous,
celui qui s'occupe des chiffres, en particulier, nous dise si je suis dans
l'erreur lors-
que je prétends que cette compagnie a plus que 75% de capitaux
canadiens, qu'elle a son siège social ici dans le Québec, que la
plupart de ses officiers, même s'ils ont des noms anglophones, sont
bilingues et que la presque totalité parle les deux langues. Est-ce que
je suis dans l'erreur ou si on peut affirmer devant cette commission que ces
faits sont réels?
M. Stangeland: Pour répondre à la première
question, en 1976, on avait 86,1% de nos parts qui étaient
détenues par des actionnaires qui résidaient ici au Canada.
Nous avons un grand actionnaire qui possède 12% des actions, en
Angleterre, c'est un groupe de journaux qui appartiennent au Daily Mail
Group.
La deuxième question, c'est le siège social et les bureaux
de la compagnie. Ils sont certainement établis ici au Québec
depuis que la compagnie a été incorporée en 1931.
La troisième question, c'était sur...?
M. Russell: Les administrateurs sont-ils tous bilingues ou
à peu près tous bilingues? Quel pourcentage?
M. Stangeland: Je crois que nous avons donné ces
informations dans notre mémoire lors de l'étude de la loi 101 en
commission parlementaire, mais nous n'avons pas eu la chance de donner nos
commentaires. Je n'ai pas ces informations ici, mais je crois que je peux dire
que dans nos bureaux et dans nos affaires, chacun parle la langue...
Il y a un fort pourcentage qui peut parler les deux langues.
M. Russell: M. le Président, je pense que ceci
établit... Je voudrais simplement passer à d'autres questions
assez rapidement. La partie de votre fabrication... Vous êtes une
compagnie multinationale, mais plus de 50% de votre production est faite au
Québec.
M. Stangeland: Dans le secteur des pâtes et papiers, 90% de
nos actifs sont au Québec. Il n'y a qu'une usine au Nouveau-Brunswick.
Les sept autres sont ici, au Québec, et nous avons quatre scieries,
trois au Québec et une en Ontario.
M. Russell: Quel pourcentage de cette marchandise est vendue
à l'extérieur du Québec?
M. Stangeland: À peu près 85% est vendu à
l'extérieur du Québec.
M. Russell: Je pense que cela me suffit en ce qui concerne le
"marketing", comme on dit en bon "canayen", la mise en marché.
Je voudrais parler un peu de la production qui m'intéresse, les
coûts de production, les augmentations et aussi l'exploitation
forestière. C'est un domaine qui m'intéresse beaucoup. Comme je
suis limité par le temps, je vais essayer de le faire assez rapidement,
en passant d'abord, à la ques- tion de l'immobilisation et de la
dépréciation de la compagnie.
J'ai déjà posé cette question à d'autres
organismes qui ont comparu devant nous, faisant état de l'immobilisation
que les compagnies de pâtes et papiers avaient faite dans leurs
installations depuis onze ans. Si je m'en tiens aux chiffres qui me sont
présentés par votre société, je remarque que vous
avez des immobilisations qui ont été faites pour $193 millions,
tandis qu'il y a des dépréciations pour au-delà de $300
millions, ce qui veut dire que vous n'auriez pas réinvesti ou à
peu près 60% ou 70% de la valeur de dépréciation.
M. Dufresne: Non. Voici ce qui arrive. Vous prenez la page 64.
Vous vous référez aux $193 millions. Cela s'applique seulement
aux cinq divisions, aux cinq usines qui sont là. Le reste était
une illustration. Ce sont les usines où on fabrique du papier
journal.
Comme on a mentionné au début de notre rapport, on a
investi $329 millions, et l'amortissement, comme je l'ai mentionné ce
matin, était de $208 millions pour la compagnie.
Si on regarde ces usines, on a investi, au cours des dix
dernières années, $100 millions pour ces usines, l'amortissement
était de $47 millions. Donc, nous avons investi plus de deux fois la
valeur de l'amortissement.
M. Russell: Sur une période de dix ans?
M. Dufresne: Sur une période de dix ans. On a refait les
chiffres jusqu'à 1930 et c'est à peu près dans le
même sens.
M. Russell: C'est dans le même sens. Si je m'en tiens au
bilan, aux états financiers et que je regarde les immobilisations
et je ne les interprète pas de façon finale, parce que je sais
qu'on peut torturer les chiffres de tout bord et de tout côté, les
biaiser et leur faire dire bien des choses il semble que la compagnie
procède d'une façon assez sage d'abord, comme la plupart des
compagnies, de maintenir au moins l'immobilisation équivalente à
peu près à l'amortissement.
M. Dufresne: Oui, elle a fait plus que cela.
M. Russell: Elle a fait plus.
M. Dufresne: Dans le cas des cinq usines, elle a fait deux fois
plus que cela. En d'autres termes, elle a investi deux fois plus que
l'amortissement.
M. Russell: Dans ces cinq usines? M. Dufresne: Dans ces
cinq usines. M. Russell: Mais le total de...
M. Dufresne: Pour les autres, dans le total, pour les dix
dernières années et je me répète
l'amortissement était de $208 millions et nous avons investi $329
millions, c'est-à-dire une fois et demie.
M. Russell: Je pense bien qu'on pourrait continuer
là-dessus assez longtemps. Cela ne changerait peut-être pas
beaucoup.
Dans la question du coût d'exploitation, on a affirmé ce
matin que le coût de la main-d'oeuvre représentait 35% du
coût de production. Si je me fie aux chiffres de la statistique
fédérale, globalement, dans ce domaine particulier, en 1974, et
je précise 1974, ce n'est pas en 1976, je pense bien que vous donniez
des chiffres peut-être de 1977, c'est à 16,4 pour le Canada.
Est-ce que je suis induit en erreur par les statistiques canadiennes?
M. Dufresne: Qu'est-ce que c'est qui était de 16,4?
M. Russell: Le coût de la main-d'oeuvre pour la production
du papier ou de pâte, dans l'industrie en général au
Canada.
M. Dufresne: Je pense que M. Stangeland a mentionné, lors
de la première présentation, que le pourcentage, le coût de
la main-d'oeuvre représente 35%. C'est la transformation en usine. En
plus de cela, si vous voulez inclure le coût de la main-d'oeuvre dans le
bois, pour couper le bois, à ce moment-là, cela représente
50%. Cela dépend donc de ce qu'ils entendent dans leurs
statistiques.
M. Russell: Je parle de la main-d'oeuvre en usine.
M. Dufresne: La main-d'oeuvre en usine représente 35% en
1976.
M. Russell: Pour 1976, donc, les statistiques canadiennes ne sont
pas trop valables.
M. Dufresne: Mais, en ce qui concerne les statistiques, cela
dépend quelle base, quelle définition ont prend. Est-ce qu'on
prend seulement les salaires, est-ce qu'on prend les
bénéfices?
M. Russell: Non, on parle des salaires en 1974. Ce sont les
statistiques canadiennes, c'est pour simplement tâcher d'essayer de
clarifier cette situation, parce qu'on travaille normalement avec des
statistiques faites soit par le ministère de l'Industrie et du Commerce
ici, à Québec, ou des statistiques qui viennent du gouvernement
canadien. C'est ce qui nous permet de porter des jugements. Quand vous nous
arrivez avec des chiffres comme cela, on se pose des questions et on vous
demande de nous éclairer dans ce domaine.
M. Dufresne: Alors, on vous le dit, cela comprend 50%, dont 35%
pour la transformation.
M. Russell: M. le Président, en ce qui concerne
l'exploitation forestière, vous avez fait état du flottage du
bois. Vous avez aussi parlé des coûts d'exploitation des scieries.
Si je comprends bien, vous exploitez les deux. Vous faites la coupe de bois et
vous exploitez aussi des scieries. J'ai pris note des remarques de M. MacLeod,
qui disait que c'était difficile pour des scieries de faire des profits.
Il en a la responsabilité dans sa société et il ne peut
pas arriver tellement à en réaliser. Par contre, quand on parle
des coûts que vous payez pour votre bois, le matériel qui entre
chez vous, vous voulez garder le flottage pour vous aider à maintenir
les coûts assez bas; donc, vous achetez aussi du bois des concessions et
on le transporte par camion. Si je m'en tiens aux chiffres des mémoires
qui nous ont été présentés, il semble que le prix
que vous payez pour votre approvisionnement de l'entreprise privée ou de
ceux qui coupent sur vos concessions et qui transportent le bois par camion,
est moindre que celui du bois que vous flottez sur la rivière, parce
qu'on a donné... je voudrais qu'on corrige cette situation, parce que
cela laisse une mauvaise impression devant cette commission. On a parlé
de $70 le cunit pour le bois en usine fabriqué sur vos concessions et la
plus grande partie de ce bois est flottée. Vous avez parlé d'un
coût de quelque $50 pour le bois que vous achetiez, soit sur des terrains
privés ou de ceux qui coupaient sur vos concessions et qui le
transportaient par camion. Comme vous avez parlé des copeaux tout
à l'heure, on va y revenir.
M. MacLeod: Je vous réfère, M. Russell, aux
graphiques 2, 3 et 4 des pages 36, 37 et 38 de notre mémoire; nous avons
fait ces graphiques des coûts de livraison à l'usine sans frais
d'administration, avant les frais d'administration, sur une base de tonne
anhydre de fibre et les facteurs de conversion sont dans ces tables. Vous
remarquerez que dans la division de Saint-Maurice, les concessions
forestières sont moins dispendieuses que les autres sources de fibre.
Dans Saguenay, c'est le contraire, les concessions forestières nous
coûtent un peu plus cher à cause de la distance de charriage et
dans cette section de Chaleurs, c'est presque tout à niveau, c'est de
l'ordre de $50 la tonne anhydre. Pour les achats de copeaux, naturellement,
pour les achats de bois, et pour les concessions, ce sont des moyennes pour les
divisions.
Il y a des secteurs qui nous coûtent plus cher; il y a des copeaux
qui coûtent plus cher, il y en a qui coûtent moins cher parce que
ce sont des moyennes. Ceci explique les différences entre les trois
sources d'approvisionnement.
M. Russell: C'est un peu les raisons pour lesquelles, en
regardant vos graphiques, j'ai posé ces questions parce que, dans les
mémoires qui ont été déposés
précédemment par d'autres organisations, on a fait état de
$70 le cunit, qui était le coût moyen pour le bois coupé.
Dans vos graphiques, cela ne semble pas représenter $70.
M. Macleod: Je suis porté à croire, mais
peut-être n'est-ce pas vrai, que nous sommes plus efficaces dans la
récolte de bois que la moyenne présentée par les autres
industries en général, mais, encore, ce sont des moyennes. Nous
avons un secteur du Saguenay où le bois est très dispendieux
à cause de l'éloignement des concessions. D'autres compagnies ont
le même pro-
blème. Naturellement, le coût de flottage réduit
considérablement le coût du bois de concession livré
à l'usine et, dans le Saint-Maurice, la raison pour laquelle c'est
autour de $50 la tonne anhydre, c'est parce que la plus grande partie de ce
bois est dravée tandis que, dans la région du Saguenay, c'est
transporté par camion.
M. Russell: Quelle est la distance sur laquelle vous flottez
votre bois sur le Saint-Maurice?
M. Macleod: C'est un peu inférieur à 200 milles,
175 milles, en moyenne, sur la rivière.
M. Russell: Ceux qui transportent du bois d'une distance de 125
milles doivent payer un peu plus cher. N'auraient-ils pas le droit au
même coût que celui que vous payez lorsque vous achetez ce
bois?
M. Macleod: Le bois que l'on achète est acheté des
sources d'approvisionnement proches de l'usine et il y en a qui sont plus loin
de l'usine. Nous essayons de faire le meilleur achat possible. Alors, on fait
le magasinage, si vous voulez, entre les sources d'approvisionnement, dans le
but d'avoir le bois au meilleur marché possible. Comme je l'ai
expliqué, nous ne sommes pas une société à but non
lucratif. Dans le domaine forestier, nous sommes obligés de faire des
efforts continus afin de diminuer le coût. Parfois, nous sommes en
conflit avec des gens qui nous approvisionnent, mais on transige en hommes
d'affaires et, finalement, on réussit à avoir des contrats.
M. Russell: N'êtes-vous pas d'accord pour admettre que vous
ne transigez pas sur le même pied que la scierie qui négocie avec
la Consolidated?
M. Macleod: Peut-être n'êtes-vous pas au courant,
mais nous nous sommes fait couper l'herbe sous le pied il y a trois ou quatre
ans par l'industrie de sciage et nous n'avons pas fait de plaintes dans ce
temps parce qu'elle avait le gros bout du bâton dans le temps, et cela
peut revenir.
Si vous regardez le coût des copeaux, il y avait une augmentation
de $30 à $55 la tonne anhydre depuis 1973.
M. Russell: M. le Président, si on veut en revenir aux
copeaux... Je pourrais peut-être terminer là-dessus; je vois que
le temps avance et ce serait peut-être long, mais je pense qu'il serait
important d'établir ceci: Actuellement, le prix des copeaux vendus
à une scierie est d'environ $58 à $60 le cunit.
Évidemment, la scierie débite et transporte ces copeaux, paye
leur transport et les vend actuellement à $50 ou $51 la tonne, ce qui
équivaut à peu près à un cunit, ce qui amène
la scierie à prendre seulement ce qu'elle est obligée de prendre
dans le bois et à laisser là ce qu'elle n'est pas obligée
de prendre, tandis que, si elle avait un prix raisonnable pour ses copeaux et
peut-être payait un peu moins cher pour sa coupe... Parce que la plupart
des scieries qui exploitent sur des limites forestières de compagnies
comme la vôtre payent plus cher pour leur droit de coupe que les scieries
qui exploitent sur les terrains de la couronne. On est donc pris par les deux
bouts; est-ce que ces scieries sont prises par les deux bouts? Hier, on a
parlé de $15; à certains endroits, je sais que c'est $14 et on
paye le prix de coupe plus cher. Par contre, on a moins cher pour les copeaux
si on compare les distances parce que vous établissez le prix des
copeaux à tant la tonne, au moulin, plus le transport. Il se
présente ceci actuellement: Vous avez chez vous, dans la région
de la Mauri-cie, des copeaux qui arrivent du nord du Québec, qui vous
coûtent $60 la tonne et plus. Vous achetez des copeaux de scieries qui
exploitent sur vos concessions et qui payent un droit de coupe plus
élevé que ces scieries et qui ont des conditions plus difficiles
que les gens de l'Abitibi pour exploiter, qui sont payés $50, $51 ou $52
la tonne rendue à vos usines. C'est cela.
Quand vous parlez de transiger en hommes d'affaires, je pense que la
scierie n'a pas tellement le choix; elle doit accepter des conditions quasi
établies. Si ça ne marche pas d'une façon, ça
marche de l'autre. Je voudrais savoir pour quelle raison ces scieries ne
pourraient pas avoir le même traitement que les autres qui coupent sur
des terrains de la couronne.
M. MacLeod: Vos chiffres sont justes et le système
fonctionne comme ça dans le moment. Je pense qu'il y a une
différence. Nous, on achète autant que possible vos copeaux et,
dans votre cas, on achète tous les copeaux parce qu'ils sont bon
marché comparativement aux copeaux qui viennent de l'Abitibi où
le taux de fret est de plus de $20 la tonne. Là-bas, on achète le
moins possible de copeaux, malgré le fait que, de temps en temps, le
ministère nous demande d'en acheter davantage.
Actuellement, le taux en Abitibi est très élevé au
niveau de la scierie comparé au vôtre. Mais chez nous, le
coût, rendu à notre usine, est très élevé.
Rendus à notre usine, leurs copeaux coûtent très cher et,
en effet, vous portez une partie de ce fardeau des usines qui sont loin. Mais
les copeaux à terre sont tous dans l'Abitibi dans le moment. Quand il y
avait un surplus extraordinaire de copeaux, il y a un an et demi ou deux ans,
c'était au même endroit, parce que les compagnies, naturellement,
achètent au meilleur marché possible.
M. Russell: M. le Président, je pense que c'est
établi assez clairement, les conditions qui prévalent
actuellement; je ne parle pas seulement d'une usine en particulier; je parle
des usines en général. Ma dernière question est celle-ci:
Quel serait le pourcentage additionnel de copeaux que vous pourriez utiliser
dans vos usines en plus de ceux que vous utilisez actuellement?
M. MacLeod: Dans le moment, dans les usines de papier journal,
nous achetons presque tous les copeaux possibles parce que c'est seulement 25%
de notre approvisionnement, le reste est en
billes à cause du processus de pâte mécanique qui
exige que ce soit en billes.
À Ottawa, on achète pas mal de copeaux, mais nous avons du
bois produit sur les concessions en faisant la récolte du bois de
sciage, etc, qu'on est obligé d'absorber. Alors, peut-être qu'on
pourrait en prendre davantage, mais il n'y a pas trop de scieries à cet
endroit. À Chaleurs, en Gaspésie, nous achetons tous les copeaux
possibles et même à des endroits assez loin de l'usine. S'il y en
avait d'autres en Gaspésie, on en achèterait.
M. Russell: M. le Président, il y a plusieurs autres
questions que je pourrais poser, mais je vais tâcher de me conformer au
temps limite que nous avons et donner la chance à un autre qui voudrait
poser des questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Temps
limite, d'ailleurs, qui est déjà largement dépassé.
Quoi qu'il en soit, j'accorde la parole au député de
Champlain.
M. Gagnon: Merci, M. le Président. Devant la
décision de la fermeture de l'usine de la Wayagamack, suite aux
questions qu'a posées le député de Portneuf, je reste un
peu surpris de savoir que la compagnie ne sait pas les profits qu'elle fait
avec ses différentes usines. Vous avez répondu au
député de Portneuf que tout ce qui regarde un secteur est mis
dans le même paquet, si on peut dire, et vous décidez de fermer
une usine comme ça. Sur quoi on se base pour décider de fermer
une usine si on ne sait pas si cette usine est rentable ou ne l'est pas?
Une deuxième question, dans le même ordre d'idées:
Est-ce que l'usine qui ferme au Cap-de-la-Madeleine produit actuellement des
profits?
M. Stangeland: À la première question, je voulais
dire qu'on rend publics nos résultats financiers par produit et par
compagnie. Nous tenons des statistiques variant pour chaque usine; nous avons
nos coûts, nous avons le prix de vente; tout ça, c'est usine par
usine, c'est même département par département.
Mais il y a aussi tout l'intérêt que nous payons comme
compagnie, qui est exigé pour tous les produits rendus au bureau chef;
cet intérêt est de $25 millions. Ces jours-ci, il y a tous ces
facteurs qui sont ajoutés comme déductions sur les
résultats. Pour vous donner les chiffres finals, je dis qu'il faut que
ce soit par produit, tel que c'est publié dans notre rapport financier
de la compagnie.
Pour répondre à la deuxième question, s'il y a
profit à l'heure actuelle, cela dépend comment on mesure ces
profits. Il est évident qu'avec le fait que nous fermons le 15 octobre,
nous avons fait le moins possible de réparations et d'entretien de cette
usine. Dans ces circonstances, il y avait un montant d'environ $1,5 million qui
est, comme on peut dire, sauvé, ou pas dépensé, cette
année. Il y a aussi la question de la pâte chimique et aussi le
prix du transfert de ce...
Mais je pense que vous êtes au courant que la FTQ a fait circuler
un document financier et in- terne de la compagnie pour les quatre premiers
mois de l'année qui démontrait, d'après ces chiffres et
ces manières d'accumuler ce genre d'information, qu'il y avait un profit
sur la base d'opération. Cette situation existe encore pour la
période de cette année, jusqu'à maintenant.
Mais en réponse supplémentaire, je dis que c'est à
cause de certaines circonstances comme le fait qu'il n'y a pas de coût
d'entretien ou de réparation chargé contre ces résultats
et aussi le fait que la pulpe est transférée au coût,
plutôt qu'au prix du marché.
M. Gagnon: Vous confirmez qu'actuellement l'usine fait des
profits et ce, depuis combien de temps environ?
M. Stangeland: Elle ne fait pas de profits d'après notre
interprétation des montants, basée surtout sur la période
des dernières années.
M. Gagnon: Vous avez parlé, cela m'a surpris et surtout
réjoui, du rôle social. Vous avez mentionné qu'il y avait
quelqu'un qui s'occupait de cet aspect. On a dit, même au sujet du
flottage du bois, qu'il y avait un rôle social que jouait la compagnie,
et qu'on avait même rencontré les gens qui pouvaient être
intéressés aux rivières autant que la compagnie qui fait
le flottage du bois.
J'aimerais vous entendre expliquer quel est, selon vous, le rôle
social qu'une compagnie comme la vôtre a joué dans une
région comme la Mauricie où la vocation est celle des pâtes
et papiers. Vous avez contribué à donner cette contribution au
coeur du Québec. Quel est votre rôle social? Et face à une
fermeture d'usine, de quelle façon entendez-vous jouer réellement
le rôle social, tel que vous allez le définir?
M. Stangeland: Je crois que le rôle dominant dans l'aspect
social d'une compagnie comme la nôtre, dans la Mauricie, c'est de tenir
nos actifs à jour, de gérer les actifs pour qu'ils puissent
concurrencer, rester vitaux et rentables pour payer les salaires aux
employés, de payer les taxes aux municipalités et de payer des
taxes sur les profits au gouvernement, de payer des dividendes aux
actionnaires. On croit que c'est le rôle le plus important à jouer
sur l'aspect social.
Face à la fermeture d'un de nos moulins, notre rôle est de
diminuer le plus possible les effets de la fermeture, pas de ne pas fermer,
mais d'essayer de réduire le plus possible les effets sur les
employés.
Nous avons essayé de faire notre possible pour faire placer les
gens qui sont affectés. Nous avons conçu des programmes de
retraite prématurée, nous avons développé un
programme pour réduire l'impact au minimum et ce, à un coût
considérable. Nous sommes prêts à dire que nous croyons que
le programme de préretraite avec les avantages que nous avons
avancés aux employés était le meilleur possible. De ce
côté-là, nous avons fait ce que nous pouvions.
M. Gagnon: Devant une population comme
celle de La Mauricie qui est extrêmement sensibilisée au
problème que vous allez créer par la fermeture de la Wayagamack
du Cap-de-la-Madeleine, devant l'affluence de demandes, de pressions et de
sollicitations provenant de toutes les couches de la société du
Cap-de-la-Madeleine, qu'avez-vous à répondre lorsqu'on vous
demande de retarder une fermeture comme celle-là, le temps qu'on puisse
se retourner et essayer d'amener autre chose pour vous aider à jouer
votre rôle social et réduire l'impact que vous allez produire par
la fermeture de cette usine? Qu'avez-vous à répondre à la
population devant les médias d'information? Est-ce que c'est le
même non que vous avez répondu au député de Portneuf
ou s'il y a encore des possibilités de vous demander instamment de
retarder la fermeture de cette usine? Si elle doit fermer, elle fermera, mais
au moins on aura peut-être le temps d'essayer d'aider les gens qui seront
éventuellement en chômage. Qu'avez-vous à répondre
à la population?
M. Stangeland: Nous avons très sérieusement
considéré la question il y a plusieurs mois. Nous avons tenu
compte des responsabilités que nous pensions avoir. Nous avons des
responsabilités envers la région, nous avons des
responsabilités envers nos actionnaires, nous avons des
responsabilités envers les $50 millions qui ont été
investis depuis 1974 pour améliorer l'usine de Port-Alfred. Il y a
plusieurs aspects dont il faut tenir compte. Dans l'ensemble de la situation,
nous avons décidé qu'il était nécessaire de
maintenir notre décision, que nous croyons sincèrement la
meilleure pour l'ensemble de nos employés et qui est finalement une
évolution dans le bon sens pour une compagnie, une entreprise capable de
continuer à concurrencer. Ce n'est peut-être pas une
réponse très précise, mais c'est vraiment notre point de
vue là-dessus.
M. Gagnon: Vous avez mentionné que, si vous fermiez
l'usine du Cap-de-la-Madeleine, c'était dans le but, ou c'était
un des buts, d'investir à l'île que vous appelez l'île
Wayagamack. Pourrait-on savoir le plan et l'échéancier de ces
investissements? Quand commencent exactement les investissements à
l'île, dans combien de temps, sur une période de combien
d'années, pour qu'on puisse au moins assurer à un certain nombre
de travailleurs qu'ils vont conserver leur emploi à l'île?
M. Stangeland: Durant les trois dernières années...
J'ai déjà mentionné une nouvelle emballeuse de rouleaux,
à un coût de $700 000, qui était déjà
installée. Nous avons une machine de papier journal à toiles
jumelées sur l'île, une de nos quatre machines à toiles
jumelées parmi les dizaines qui existent au Canada. On est en train de
reconstruire la cheminée sur l'île à un coût de $1
million. Tout cela démontre que nous sommes sérieux et nous avons
l'intention de garder cette usine rentable, viable, une force
économique. Je crois que la gérance de la division et
nous-mêmes avons élaboré un programme pour,
premièrement, réduire nos coûts et nous rendre
concurrentiels.
Nous sommes en train de regarder la deuxième étape de ce
programme qui va être mise en place bientôt.
M. Gagnon: Bientôt. On ne peut pas avoir
d'échéance de date approximative. Est-ce qu'on peut dire, par
exemple, que le printemps prochain, il y aura des investissements
considérables à l'île?
M. Stangeland: II y a eu, cette année...
M. Gagnon: Je ne parle pas d'entretien ou d'amélioration,
mais on sait que vous avez l'intention, on nous a dit, de rendre l'usine de
l'île rentable. Quand cela commence-t-il? Quel montant peut-on
prévoir?
M. Stangeland: Nous avons dépensé en 1976 $3,3
millions et en 1975, $2,2 millions. Cette année, je crois que nous en
sommes environ à $3 millions. Nous préparons notre budget pour
l'année prochaine. Nous avons des projets en marche. Nous voulions que
l'usine de l'île devienne rentable le plus vite possible, mais ce n'est
pas en faisant un dessin, on va faire cela... Cela prend du temps, on travaille
là-dessus, mais cela dépend aussi des marchés. Nous sommes
face à face avec des profits insuffisants. Nous sommes face à
face avec une coupure dans notre budget pour des dépenses en
immobilisation. Le secteur des pâtes et papiers concurrence avec
l'emballage pour les fonds disponibles. Une de nos priorités, c'est de
résoudre le problème de l'usine de l'île. Nous
avançons au rythme le plus vite possible.
M. Gagnon: Le plus vite possible. Je pense que j'ai
terminé, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui?
M. Mercier: J'aurais une question à poser si les gens de
l'Opposition étaient d'accord. Ce serait tout simplement pour
compléter en ce qui concerne le rôle social qu'avait abordé
le député de Champlain... Ce ne sera pas très long.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
trois brèves questions. Le député de Berthier, de
Maskinongé et de Mégantic-Compton, à la condition que les
deux autres acceptent, puisque j'avais reconnu auparavant les
députés de Maskinongé et de Mégantic-Compton.
M. Picotte: M. le Président, j'aimerais savoir, de la part
des gens qui sont à la table, combien cela pourrait coûter
à votre compagnie pour maintenir l'usine Wayagamack du
Cap-de-la-Madeleine pendant un an, dans le contexte actuel?
M. Stangeland: Si le coût des 80 000 à 100 000
tonnes de produits fabriqués au Cap-de-la-Madeleine est supérieur
de $35 la tonne, on parle d'un montant de $2,5 millions.
M. Picotte: Alors, c'est aux alentours de $2,5
millions de déficit. Est-ce que cela ne justifie pas, à ce
moment, les profits que vous avez faits dans le passé? Je pense que le
premier rôle social, à ce moment, que vous seriez tenus de jouer,
ce serait justement de permettre au gouvernement, face à cette
situation, de prolonger d'un an l'existence de l'usine, au coût que vous
avez mentionné tantôt. Le premier rôle social que vous
devriez jouer, ce devrait être celui-là. Cela permettrait au
gouvernement de trouver des solutions, et quitte à ce qu'a dit le
député de Champlain tantôt, si cela va fermer, cela va
fermer; mais d'ici un an, avec la concertation de tous les
intéressés, on aura peut-être l'occasion de trouver autre
chose pour la population de la Mauricie.
M. Stangeland: Monter de faux espoirs, c'était une des
choses qu'on ne voulait pas faire. Nous avons examiné la situation de
plusieurs façons, comme j'ai essayé de l'exprimer et de
l'expliquer, et d'après nous, je ne dis pas avec un impact social
minimum...
C'est au moins 375 employés. Pour plus de 170, leur cas est
déjà réglé. L'âge moyen des employés
affectés à ce moment est de 26 ans. Leurs services avec la
compagnie sont d'une moyenne de quatre ans.
M. Picotte: Qu'est-ce que vous faites maintenant?
M. Stangeland: Nous avons élaboré des programmes
pour essayer de résoudre le problème le plus vite possible.
M. Picotte: Je n'ai plus de questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, très
brièvement, avant de terminer, on sait que ce sont des efforts, de part
et d'autre, dont il est peut-être pénible d'entendre parler, tant
du côté des employés qui sont là que des membres
ici, à cette table, à savoir ce qu'attend le gouvernement avec
une fermeture annoncée et encore 300 chômeurs de plus.
Peut-on savoir vous avez répondu tout à l'heure non
suite à la déclaration qu'on a entendue du
Cap-de-la-Madeleine et l'autre qu'on a entendue d'East Angus, s'il y a eu des
offres du gouvernement? Vous êtes-vous vraiment assis à la table
avec ce nouveau gouvernement pour discuter de la survie de la Wayagamack? Y
a-t-il eu des discussions sérieuses entreprises? On comprend qu'une
compagnie, par définition, c'est toujours dur, c'est une espèce
de corps sans âme. Elle fait une partie de travail social qu'elle juge
pouvoir faire, mais, après cela, quand ce n'est pas rentable, une
compagnie ne vit pas là. Ce n'est pas une association de Dames de
Sainte-Anne, tout le monde sait cela, mais y a-t-il eu une table de travail
sérieuse où la compagnie s'est assise et où le
gouvernement a fait des approches sérieuses avec la compagnie pour
régler ce problème?
On n'a rien su dans le public.
M. Stangeland: La réponse est oui.
M. Grenier: Est-ce que les offres du côté du
gouvernement étaient, d'après vous, suffisamment sérieuses
pour que cela puisse ébranler votre décision? La réponse
est non?
M. Stangeland: Je comprends mal votre commentaire sur une offre.
Il y a eu discussion avec le gouvernement sur la fermeture, et je dis oui
à cela.
M. Grenier: On entend par là des discussions
sérieuses. Il y a peut-être des choses qu'on ne peut pas dire,
mais, à un certain moment, il va falloir voir clair quelque part. On
veut bien prendre des décisions et on vient ici pour éclairer la
commission; la déclaration dans le public a été choquante.
Il ne faut pas se surprendre. Cela a été choquant pour la table
de travail qui est ici d'apprendre la nouvelle alors qu'on se faisait dire dans
le cas d'East Angus, qu'on prendrait une décision après
l'étude en commission parlementaire. Mais la, avant même
d'informer cette commission, avant même qu'on ait le dépôt
sur la table, on apprend que c'est fermé et que le problème est
réglé.
C'est assez surprenant. Cela coûte des milliers de dollars pour
assembler ces gens à cette table. Ils sont censés être
éclairés et aider le gouvernement à prendre des
décisions, mais, avant même cela, on annonce que cela ferme. Je ne
vous jette pas tout le blâme, mais je voudrais bien savoir si vous pouvez
nous informer, aujourd'hui, nous dire si, lorsque le gouvernement s'asseoit
à une table, il a envie de présenter des propositions
sérieuses, toujours dans l'esprit dont je vous parlais tout à
l'heure...
Une compagnie n'est pas là seulement pour faire des bonnes
oeuvres. Le jour où elle ne fait pas d'argent, en général,
elle n'est plus là. Cela ne surprend personne; mais, entre un profit
considérable et un profit moindre, a-t-il été
établi que le profit que vous faisiez, au moment de la date de
fermeture, aurait pu être assez raisonnable pour continuer? C'est ce
qu'on aimerait savoir ici. Si ce n'est pas raisonnable pour continuer, comme
une compagnie doit faire de l'argent, le gouvernement a-t-il aidé
à ces 30% du Cap-de-la-Madeleine, en faisant d'autres propositions qui
auraient pu vous permettre de continuer?
Il me semble qu'on est en mesure de savoir ceci.
M. Stangeland: Je crois que ce sont plutôt des questions
que vous posez au gouvernement, au ministre, et non pas à la
compagnie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Berthier.
M. Grenier: Pour préciser ce que le président de la
compagnie dit, soyez assuré que cette question va revenir le 13 au
matin, parce que les représentants d'East Angus seront ici et le
dossier, j'y ai pris une part très active et, à ce moment, le
ministre aura à y répondre.
J'ai voulu être un député qui n'a pas... Je vois que
cela a été la part du député de... Il a fait
préparer un mémoire. Il a préparé un mémoire
avec l'ensemble de la population. Je n'ai pas voulu me mêler du
problème d'East Angus, si ce n'est que de mettre au monde ce
comité que vous appelez, là-bas, "la sauvegarde de l'usine
Wayagamack".
C'est le comité ad hoc, ce qui est à peu près la
même chose. Je ne m'en suis pas mêlé et j'ai posé des
questions sans jamais vouloir politiser le débat en Chambre. Mais je
peux vous dire une chose, c'est que le 13, on aura de la lumière,
certainement, de la part du ministre, sur la Wayagamack et East Angus. Cela
durera le temps que cela prendra, mais on aura la lumière qu'il faut le
13.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, je demanderais à la salle de ne pas manifester et une
dernière intervention au député de Berthier.
M. Mercier: À la suite d'une excellente question du
député de Portneuf, tout à l'heure... Il posait la
question: Est-ce que le gouvernement peut faire quelque chose pour aider, une
intervention quelconque qui puisse aider la compagnie à surmonter ses
difficultés? Vous avez répondu, en somme, que le gouvernement
était déjà partenaire dans l'entreprise avec 46% des
impôts et que, finalement, le rôle du gouvernement devrait se
limiter à maintenir un bon climat social et de bonnes relations de
travail. Là-dessus, je voudrais ajouter que le rôle du
gouvernement, je pense bien que vous en conviendrez, a des implications
économiques parfois. Quand on parle, par exemple, d'aide à la
voirie forestière; quand on parle de concessions forestières;
quand on parle, également, de dégrèvement d'impôt
cela arrive à certaines occasions quand on parle de
subventions à des entreprises à certains moments... Je pense
qu'il y a des circonstances où l'entreprise trouve intéressant
que le gouvernement joue un rôle économique.
Maintenant, dans le domaine social, je pense que vous serez d'accord que
l'entreprise peut également jouer un rôle dans ce domaine
extrêmement important. Je pense bien que, quand une entreprise ferme, le
gouvernement est pris avec un problème social considérable, ce
qui complique beaucoup sa tâche de maintenir un bon climat social et de
bonnes relations de travail. Vous êtes certainement d'accord que cela
influence tout un climat et que cela a des répercussions qui
dépassent largement la région. À ce moment-là,
lorsque vous êtes dans une certaine situation, il semble bien que
l'important, quand vous avez à choisir entre votre rôle social et
le rôle économique, c'est le rôle économique, mais,
à l'inverse, lorsqu'on est dans les mêmes situations, il
semblerait bien que l'important pour le gouvernement, cela devrait être,
non pas le rôle économique, mais le rôle social. Est-ce que
vous estimez que le rôle d'un gouvernement, c'est de payer les pots
cassés?
M. Stangeland: Pardon, je n'ai pas compris votre...
M. Mercier: Est-ce que vous estimez que le rôle d'un
gouvernement devrait se limiter simplement à réparer les erreurs
et les dégâts occasionnés par les décisions
strictement économiques, prioritairement économiques de certaines
entreprises?
M. Stangeland: Non, je ne le crois pas, mais, comme entreprise
privée et comme compagnie, avant de remplir un rôle social, quel
qu'il soit, il faut engendrer des profits pour que l'entreprise puisse vivre.
Je crois que le rôle primordial des compagnies, des entreprises, c'est de
produire des profits. Avec ces profits, on paie les salaires, on paie les
taxes, on investit, on modernise, on tient l'entreprise en marche. C'est cela,
je crois, l'élément le plus important que peut jouer une
entreprise dans le secteur social.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
toute dernière. M. le député Champlain.
M. Gagnon: Vous avez mentionné tantôt qu'on avait un
rôle à jouer comme gouvernement et comme société.
Vous avez mentionné qu'on devait sensibiliser la société,
l'opinion publique aux problèmes qu'affrontent des usines comme la
vôtre. Je me demande actuellement de quelle façon je jouerai ce
rôle, comme vous l'avez suggéré, quand, en fait, toute une
population est sensibilisée dans le plus profond de son être et
réclame de toute urgence qu'on ne ferme pas immédiatement une
usine et que, devant cela, vous restez absolument immuable, vous restez
absolument complètement froid. Je me demande de quelle façon vous
pensez qu'on peut jouer le rôle que vous avez mentionné
tantôt, c'est-à-dire qu'il faudrait sensibiliser la population aux
problèmes des compagnies. N'y aurait-il pas un premier geste pour
montrer que, réellement, on travaille ensemble?
N'y aurait-il pas un premier geste de dire: Cela fait 70 ou 75 ans qu'on
est quelque part dans le paysage? 70 ans et six mois, ce n'est pas la fin du
monde, compte tenu que vous ne faites pas de pertes actuellement. N'y aurait-il
pas un premier geste justement pour vous renseigner comme vous nous avec
suggéré de le faire tantôt? Qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Stangeland: Non, la question est si générale que
c'est assez difficile d'y répondre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Stangeland: Je ne veux pas revenir là-dessus, mais je
pense que les programmes que nous avons élaborés n'étaient
pas seulement un geste; c'était un geste sérieux avec un
coût substantiel d'à peu près $1 million. Nous avons aussi
essayé de placer les gens affectés à toutes fins
pratiques. Dans notre esprit et dans notre conscience, nous avons fait le mieux
possible.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie, messieurs de la Consolidated Ba-
thurst. Les deux heures que vous aviez ont été, de
beaucoup, dépassées. Je vous remercie de votre collaboration et
j'invite maintenant le Syndicat canadien des travailleurs du papier et la
Fédération des travailleurs du Québec à
présenter leur mémoire.
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gagnon: M. le Président, est-ce que je pourrais vous
demander une question de règlement ou d'information?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: M. le député représentant l'Union
Nationale a souligné tantôt le fait qu'il avait participé
à un comité ad hoc, c'est-à-dire qu'il l'avait mis sur
pied.
Afin de ne pas politiser le problème, il ne s'était pas
impliqué dans le problème, ce que je respecte comme façon
de travailler. Il cherchait le nom du député qui avait
participé à notre comité pour la sauvegarde de la
Wayagamack et qui s'était réellement impliqué. Je veux
juste dire que ce n'était pas dans le but de politiser le
problème; c'est que c'était un problème extrêmement
grave chez nous. La même chose probablement qu'à East Angus. Cela
a été en fait, notre façon d'agir. Je n'ai pas pu me tenir
à l'extérieur de ce problème, parce que je pense que
c'était la survie d'un paquet de travailleurs chez nous. Je voudrais
juste qu'on sache bien que ce n'était pas dans le but de le politiser,
mais c'était dans le but d'apporter le plus d'efforts possible pour le
régler.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce
n'était ni une question de règlement, ni une question de
privilège, ni de directive, mais ce qui est dit est dit.
Je demanderais au porte-parole du groupe de bien vouloir nous
présenter ceux qui l'accompagnent.
Syndicat canadien des travailleurs
du papier et Fédération des
travailleurs
du Québec
M. Daoust: M. le Président, nous avons, ce matin,
accueilli positivement la décision que vous avez prise de nous recevoir
à la fin de la présentation de la Consolidated Bathurst. Je
voudrais mentionner que nous n'avons été informés qu'hier
que le Syndicat canadien des travailleurs du papier et la FTQ pouvaient
être entendus par cette commission le 13 octobre prochain. Je sais que M.
le ministre des Terres et Forêts a fait des déclarations, disant
que cette date avait été fixée parce que le mémoire
du Syndicat canadien des travailleurs du papier et de la FTQ n'avait pas
été reçu et c'est vrai. Ce qui nous a
empêchés de vous faire parvenir le mémoire global sur
l'ensemble du problème, ce sont les espoirs qui ont été
générés depuis plusieurs mois, à la suite de
multiples rencontres, d'entrevues qui nous laissaient entrevoir que le cas de
la Wayagamack allait être réglé.
Or, jeudi dernier, le ministre, devant un groupe de travailleurs
convoqués par le Conseil régional des travailleurs de la
région de la Mauricie, a fait état de son point de vue sur la
fermeture de la Wayagamack et tout ça a poussé le syndicat et la
FTQ à changer l'orientation de ses documents.
Par ailleurs, dès le moment où nous avons
été informés que la Consolidated-Bathurst venait se
présenter ici ce matin, le 29 septembre, nous vous avons envoyé
le télégramme que vous avez reçu et vous en avez
disposé ce matin. Il n'est donc pas exclu, loin de là, que nous
revenions le 13 octobre prochain vous présenter un point de vue global
et reprendre le débat, puisqu'il y aura des questions qui vous seront
posées a l'égard de la fermeture de la Wayagamack.
Aujourd'hui, nous limitons nos remarques au problème de cette
fermeture d'usine. On se souvient tous que c'est au tout lendemain de
l'arrivée du printemps que la compagnie Wayagamack...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si vous
voulez présenter vos partenaires...
M. Daoust: À ma gauche, le président du syndicat
local 216 du Syndicat canadien des travailleurs du papier, groupe Wayagamack,
André Cha-rest.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît.
M. Daoust: À ma droite, Serge Lord, représentant et
un des porte-parole de ce syndicat, et à ses côtés,
André Leclerc, conseiller technique, représentant la FTQ.
Je vous rappelais donc que c'est au lendemain de l'arrivée du
printemps que la Wayagamack annonçait brutalement à ses 400
travailleurs que l'usine fermerait le 15 septembre prochain. À
l'occasion du sommet économique qui s'est tenu à Pointe-au-Pic,
il s'est fait, vous vous en souviendrez, une manifestation des travailleurs de
la Wayagamack qui sont venus rencontrer les participants du sommet
économique. Parmi les participants, il y avait évidemment des
gens de la FTQ, dont le président, il y avait le premier ministre du
Québec, M. René Lévesque, il y avait le président
de Power Corporation qui a beaucoup à dire dans le fonctionnement de
cette entreprise, M. Paul Desmarais.
Il y a eu une brève rencontre et, dans les jours qui ont suivi,
je crois, la compagnie a fait connaître sa décision de prolonger
d'un mois le délai qui avait été antérieurement
mentionné, celui du 15 septembre, pour porter la date de la fermeture au
15 octobre. Un peu plus tard, le ministre des Terres et Forêts à
l'Assemblée nationale, au lendemain de la Saint-Jean-Baptiste, pour
être plus précis, faisait état de la constitution de cette
commission sur tout le problème des pâtes et papiers, rendait
public le mandat et convoquait les parties à se présenter devant
la commission pour aborder les problèmes qui sont ceux de l'industrie
des pâtes et papiers.
Je vous souligne rapidement et un peu plus tard, je demanderai à
ceux qui m'accompagnent de commenter certaines actions et d'expliciter leur
pensée sur certaines actions posées soit au niveau
régional ou au niveau québécois et aussi de donner leur
point de vue à l'égard de certaines déclarations et
certains chiffres de la compagnie.
Entre autres, le 25 juillet, un comité pour la sauvegarde de
l'usine Wayagamack rendait un rapport public en le présentant au
ministre des Terres et Forêts. Tout ça fera l'objet de certains
commentaires de la part de ceux qui m'accompagnent.
Je vais vous donner maintenant la présentation de la FTQ et du
Syndicat canadien des travailleurs du papier dans le cas de Wayagamack. Vous
avez ce document, je vais vous le lire, il n'est pas très long.
M. le Président, M. le ministre des Terres et Forêts,
Messieurs les membres de la commission. Wayagamack, un cas si simple. La
Fédération des travailleurs du Québec et le Syndicat
canadien des travailleurs du papier jugent inacceptable la position de
laisser-faire adoptée par le gouvernement du Québec face à
la fermeture de l'usine du Cap-de-la-Madeleine de la Consolidated-Bathurst, la
Wayagamack. L'attitude passive du gouvernement qui accepte la disparition
à court terme de 400 emplois et, à plus long terme, celle de 800
autres emplois dans la région de Trois-Rivières constitue un aveu
d'impuissance devant les compagnies multinationales.
Le choix délibéré du cabinet des ministres, qui a
refusé d'exercer toute forme de pression sur la Consol et Power
Corporation, qui la contrôle, sème chez nous bien des doutes quant
à la volonté politique réelle qu'a ce gouvernement de
mettre de l'ordre dans l'industrie la plus importante de l'économie
québécoise.
Rappelons-le, nous n'avons jamais demandé au gouvernement de
donner indéfiniment la respiration artificielle à une usine
moribonde. Un rapport détaillé préparé par notre
syndicat conjointement avec un comité de citoyens de la région a
démontré clairement: 1) que l'usine, malgré la
vétusté de ses équipements, faisait encore des profits;
2)qu'il y avait possibilité de réduire des coûts de
production importants: à titre d'exemple, l'approvisionnement en bois;
3) qu'on n'avait pas étudié sérieusement des solutions de
rechange; 4)que cette fermeture aurait des conséquence prochaines sur
l'emploi dans l'autre usine Wayagamack de Trois-Rivières; 5) que les
conséquences sociales de cette fermeture seraient
considérables.
Tous ces faits ont été vérifiés et
jugés fondés par le gouvernement. Le syndicat ne demandait, de la
part de ce dernier, qu'un délai de quelques mois nous pensons
à une année pour permettre à la compagnie, à
des acheteurs éventuels ou au gouvernement lui-même de trouver des
solutions de rechange.
Le gouvernement a préféré se situer dans la logique
de la compagnie et accepter cette ferme- ture qui va permettre à la
Consolidated Bathurst de faire encore plus de profits en rationalisant ses
opérations. Cette attitude de colonisé nous porte à croire
que le gouvernement actuel, dans la plus pure tradition des gouvernements
précédents, va concevoir ses interventions économiques
comme des appuis à l'entreprise privée. Cette dernière
continuera à être la seule à définir l'orientation
économique du Québec.
Dieu sait que ce gouvernement, et le parti qui est le sien, ne nous a
sûrement pas habitués à penser cela, tout au long des
campagnes électorales et tout au long des échanges de vues qui se
sont faits publiquement ici, au Québec, à l'égard du
rôle d'un gouvernement vis-à-vis de l'entreprise privée et
vis-à-vis des compagnies qui se moquent éperdument du sort de
leurs travailleurs et qui rejettent du revers de la main un rôle social
qui doit être le leur.
Le ministre des Terres et Forêts, M. Bérubé, a
d'ailleurs été clair là-dessus. S'adressant aux
travailleurs de la région de la Mauricie réunis par le Conseil
régional des travailleurs FTQ, il a affirmé: "Après
l'examen du dossier, j'aurais un problème de conscience de forcer une
compagnie, qui n'agit pas dans l'illégalité, à continuer
contre sa volonté ses opérations". Une telle philosophie de la
légalité fait abstraction des bénéfices fabuleux
accumulés par les compagnies papetières au Québec, depuis
quelque cent ans, grâce au pillage de nos richesses naturelles et
à l'exploitation de la main-d'oeuvre.
C'est admettre qu'une compagnie n'a aucune responsabilité sociale
et qu'elle n'a à répondre qu'à ses actionnaires.
D'ailleurs, il est au moins deux points sur lesquels la Consol, comme d'autres
compagnies, nage joyeusement dans l'illégalité: les
règlements sur la pollution et l'article de l'arrêté en
conseil sur la production continue.
Nous demandons encore une fois une intervention ferme du gouvernement.
Selon nous, il n'est pas trop tard. S'il ne peut obtenir un court délai
de la part d'une compagnie qui fait des profits et s'il accepte à
l'avance toutes les règles du jeu de la légalité
capitaliste, nous doutons de sa capacité de dynamiser l'industrie
entière.
Je dois vous avouer que nous sommes bouleversés de
réaliser que ceux qui ont été les plus près des
décisions qui ont été prises ou qui sont près des
décisions qui doivent être prises nous ont semblé
être beaucoup plus séduits par la thèse de la
rentabilité économique qu'a pu soumettre la Consolidated
Bathurst.
Il me semble qu'un gouvernement, c'est plus que cela. Il faut que ce
soit plus que cela. Nous autres, on a cru que c'était plus que cela et
on y croit encore, incidemment. Mais on attend des preuves. Un gouvernement
doit tenir compte de la globalité de ce qui se passe dans une
société ou dans une industrie.
Cette compagnie a des responsabilités sociales, elles en ont
toutes. Elles s'en éloignent avec énormément de candeur et
d'effronterie, pour être bien franc, dans la plupart des cas. Il me
semble qu'un gouvernement a trop à payer, trop à assumer sur le
plan social un gouvernement, c'est
nous par des mises à pied puisque somme toute quand il y a
des prestations de sécurité sociale, des prestations
d'assurance-chômage, c'est le gouvernement, quel qu'il soit, qui les
assume, qui les transmet, qui les paie. Mais ce sont les contribuables qui,
à même la fiscalité et à même les taxes,
fournissent, de ces contributions et de ces prestations-là, les
montants. Un gouvernement n'est pas un bureau d'administration de compagnie.
Cela m'inquiète de voir qu'on ait été séduit
je vous le dis bien carrément, cela me bouleverse par tout
l'aspect de rentabilité que la compagnie a pu présenter. Je
trouve cela malheureux. On aura des questions à vous poser un peu plus
tard, mais juste avant, je voudrais que Serge Lord commente quelque peu
certaines déclarations de la compagnie et certains documents qui sont
annexés à ce mémoire je ne sais pas, je pense
qu'ils y sont annexés que nous vous avons
présentés.
M. Lord (Serge): On voudrait d'abord s'excuser de la
qualité de la reproduction du document. Je pense qu'il a
déjà beaucoup circulé au cabinet du ministre
Bérubé. Il a beaucoup circulé. De toute façon, vous
savez que ce n'est pas nous qui avons préparé ce document, ce
n'est pas nous qui en avions la copie originale. C'est un document et ce
pourquoi nous voulons le commenter, c'est que dans notre approche du
problème de la Wayagamack, si on dit que c'est un cas sain, on voudrait,
comme Fernand Daoust l'a demandé, que le gouvernement obtienne de cet
employeur, de la compagnie, un délai d'un an. On pense que ce serait
faisable, s'il y avait volonté politique, d'autant plus qu'il ne s'agit
pas dans ce cas de discréditer l'intervention de l'État. On sait
qu'il y a beaucoup de gens qui nous parlent du problème de la Wayagamack
en disant: Ce que nous ne voulons pas, c'est discréditer l'intervention
de l'État. Ce document a été préparé par le
contrôleur de la compagnie et il a circulé au niveau des
vice-présidents de la Consolidated Bathurst. Ce document nous
démontre que pour les quatre premiers mois de l'année 1977, la
compagnie a fait un profit de $119 000. Ce qui nous permet d'inférer que
si la compagnie s'en donnait la peine, il serait possible, pour répondre
à la question du député de Champlain, ou d'un autre
député ici, d'obtenir la somme des profits qui ont
été produits par cette usine. Nous l'avons ici. Nous nous rendons
compte que, dans son système comptable, pour les quatre premiers mois de
1977, la compagnie a de toute évidence un bilan séparé.
À ce moment-là, il serait possible d'avoir une histoire
complète du cas de la Wayagamack.
La réponse qui a été donnée à la
question du député de Champlain, à savoir si l'usine
perdait de l'argent actuellement, la compagnie dit non. Cela coûterait
combien pour la garder en marche. Cela coûterait $35 la tonne, $2,5
millions. Ce que nous soumettons bien respectueusement, c'est que ce document
est un document qui n'est pas contredit et qui nous démontre que la
compagnie fait des profits. La compagnie admet qu'elle n'en perd pas. À
ce moment-là, le gouvernement n'a pas à pren- dre les
crédits de l'État pour subventionner cette compagnie.
L'autre exemple auquel je me réfère je regarde le
mémoire de Consolidated Bathurst nous dit que les salaires sont
exorbitants. Je regarde à la page 76 du mémoire et on nous dit
que les coûts de la main-d'oeuvre, pour 1976, se situent à $65.49
la tonne. Il y a un autre document ici qui est assez intéressant. On
s'excuse encore de la qualité de la reproduction, mais on peut
l'expliquer et on pourrait aussi le transcrire pour les besoins de la
commission, de toute façon la compagnie devrait le fournir pour
expliquer sa position.
Ce document, c'est le bilan des coûts de production de la
compagnie Consolidated Bathurst de 1968 à 1976. Ce document nous montre,
et je vous réfère à sa dernière page, où
c'est écrit ici "Cost per ton, operating labour", à peu
près vers le premier tiers du document, $30,84 la tonne. Cela
coûtait à l'usine Wayagamack qui, soi-disant, n'est pas rentable
et qu'on doit fermer, le coût de la main-d'oeuvre, $30,84 la tonne. Le
coût direct pour la production d'une tonne de papier était de
$148. Ce qui veut dire que le coût de la main-d'oeuvre à l'usine
Wayagamack, où la productivité est soi-disant basse, etc.,
représente 20% du coût de fabrication. Ce qui confirme les
études qui ont été faites à peu près partout
ailleurs, que vous citiez, M. le député, à savoir que le
coût de la main-d'oeuvre dans la fabrication du papier journal se situe,
selon les méthodes comptables, entre 16% et 20%. Ceci vaut pour les pays
Scandinaves, pour le sud des États-Unis aussi. C'est 16% ou 20% du
coût de fabrication, c'est 10% à peu près du coût de
vente. Ce qui nous amène à dire que, dans un secteur à
forte capitalisation, comme le secteur des pâtes et papiers,
évidemment, le problème, ce n'est pas les salaires, quoi qu'en
dise la compagnie.
Par comparaison, si on regarde en haut ici, "wood cost per ton", on
arrive au montant de $63. Cela coûtait $63 par tonne de papier produite
pour le bois. C'est, je pense bien, assez révélateur du
problème de la Wayagamack. On essaie de faire croire que les salaires
sont trop élevés, soit à la Wayagamack, soit dans
l'industrie du papier, alors que, finalement, c'est marginal, c'est moins
important que le bois, c'est moins important que la capitalisation, là
où il y a des usines neuves. La compagnie ne perd pas d'argent. La
compagnie fait même de l'argent au moment où on se parle. À
ce moment, il nous paraît irrationnel et inadmissible que les
opérations de cette compagnie cessent. Finalement, je pense
qu'André va parler de l'impact de la fermeture, des démarches qui
ont été faites. Quoi que les compagnies nous disent, que tant de
personnes ont été replacées, que tant de personnes ont
pris leur retraite, etc., il reste quand même qu'au 15 octobre, si la
décision de la compagnie est maintenue, il y aura un déficit net
de 400 emplois que le gouvernement devra combler. C'est peut-être le
chiffre qui devrait nous intéresser. Savoir qu'il y a X personnes qui
ont pris leur retraite ne règle pas le problème des jeunes
travailleurs qui viennent sur le marché du travail.
M. Charest (André): Je pense que je peux reprendre un peu
ce que la compagnie nous a offert de dire, c'est qu'il faudrait quand
même sensibiliser la population quand il y a des problèmes
sociaux, des fermetures d'usines. Cela n'appartient pas exclusivement à
l'entreprise privée de régler les problèmes sociaux. Cela
appartient aussi au gouvernement. Pour cela, je pense bien que, pour le
syndicat local, avec la Fédération des travailleurs du
Québec, le premier geste qu'on avait à faire dans le cas de la
fermeture d'une usine qui impliquait 400 emplois et dont le multiplicateur
d'emplois est quand même dans une région, pour un travailleur dans
l'industrie du papier, de 2,8 emplois qu'on crée chaque fois qu'il y a
un emploi de créé dans l'industrie du papier, cela veut dire
qu'il y a 1500 employés dans la région proche de
Trois-Rivières qui seront mis à pied par la décision de la
compagnie. Puisque le rôle d'un syndicat est de protéger la
sécurité d'emploi de ses membres, de protéger, autrement
dit, aussi l'environnement et d'avoir de meilleures conditions de travail
où cela est possible, le rôle du syndicat a donc été
de mobiliser et de sensibiliser la population, parce que cela débordait
justement les 400 emplois de Wayagamack; on allait affecter 1500 emplois au
déficit social dans la Mauricie, dans la région de
Trois-Rivières.
Je pense que le travail du syndicat au niveau local, on n'a pas besoin
de le répéter aujourd'hui, c'est un travail qui a
été fait dans toute la Mauricie. Tous les media d'information
répètent depuis quatre mois, que cette compagnie a des
responsabilités sociales à assumer.
Le gouvernement a des responsabilités sociales à assumer
et puis la population s'inquiète des gestes qui seraient posés
par un gouvernement qui dit avoir un préjugé favorable envers les
travailleurs, premièrement; qui dit aussi avoir un préjugé
pour les responsabilités sociales, parce qu'on avait beaucoup de
solutions avant. Eh bien! aujourd'hui, on a dit: On va sensibiliser la
population de façon que cela ne devienne pas seulement le
problème de 400 employés de la Wayagamack, mais que cela devienne
un problème de région, si, réellement, c'est un
problème qui confronte toute une population, si c'est un problème
qui va affecter toute une population et si c'est une cause juste, en fin de
compte.
Cela a été unanime. Je pense que je dois dire à ce
moment-ci que cela m'impressionne de voir que les députés, tant
d'un parti que d'un autre, soient aussi au courant du cas de la Wayagamack
à ce moment-ci. C'est sûrement parce qu'ils se sont penchés
sur ce problème depuis assez longtemps et que c'est une cause de
fermeture d'usine qui va peut-être faire histoire au Québec parce
qu'on a un cas simple, la Wayagamack.
C'est une compagnie qui fait des profits; un gouvernement qui dit: II y
a des problèmes dans l'industrie du papier. On va les régler. On
a une commission parlementaire; un gouvernement qui dit: On a des solutions de
rechange. Tout cela motive pour un délai. Alors, ce sont des
éléments dont la population s'est emparée pour dire: C'est
vrai. De force, on n'obligera pas une compagnie à rester en place, parce
qu'elle peut faire plus de profits ailleurs. Du point de vue économique,
c'est bien reconnu parce que l'appui qu'on a dans la population, ce sont des
chambres de commerce, c'est l'association des manufacturiers, c'est le secteur
de l'éducation, c'est le secteur de la pastorale, c'est le
clergé, c'est l'évêque; c'est, en fin de compte, tout ce
qu'on peut mobiliser dans une population, et cela a été
mobilisé.
Je ne vois aucun groupement et même les députés qui
ne sont pas du parti au pouvoir, ceux qui nous entourent, que cela soit de
Nicolet-Yamaska ou de Maskinongé, je pense que tout le monde se dit
aujourd'hui: C'est une cause type, la Wayagamack au Québec, tellement
type, tellement simple que, si on la laisse tomber, il n'y aura plus de
bataille qui se fera dans de tels cas parce que tout a été
employé. Je pense que, décemment, un gouvernement doit gouverner
pour une population et non pas gouverner exclusivement pour des compagnies.
Dans le cas présent, la population s'est prononcée par un
paquet de rencontres. Le comité de citoyens a tout réuni dans ce
comité, tout ce qu'on avait de mobilisation; le 25 juin, comme Fernand
Daoust le disait: Ce comité a voulu refléter que,
déjà, une population était sensibilités. À
partir de là, quand on dit qu'un gouvernement doit gouverner pour la
population, que c'est un gouvernement qui est à l'écoute d'une
population, quand la population s'est prononcée, c'est à ce
moment qu'un gouvernement doit réagir.
On a fait notre travail. Le comité de citoyens a fait son
travail. La Fédération des travailleurs du Québec a fait
son travail. Le Syndicat canadien des travailleurs du papier a fait son
travail. Les députés de notre région ont fait leur
travail. Les députés de l'Opposition et du gouvernement ont fait
leur travail. Le gouvernement, c'est qui? Quand tout le monde se prononce, il
n'y a qu'une compagnie qui décide et elle dit au gouvernement: C'est
non.
Alors, on vient d'avoir une preuve. Qui mène? Si on doit dire,
à ce moment, pour prendre les démarches qui ont été
faites... Le 18 mars, on a été obligé, quand même,
d'aller dire au ministre Couture: On a des informations suivant lesquelles
Wayagamack va fermer. Vous nous cachez des choses qu'on est en droit de savoir.
Une fois pris, il a dit: J'avais dit, je m'étais engagé à
ne pas le dire, mais je n'ai pas juré de ne pas le dire.
C'est vrai que cela va fermer. Cela, c'est le 18 mars.
Le 30 mars, on a rencontré le ministre Bérubé. On a
quand même établi ce qu'on avait à dire sur la situation
à Wayagamack. On avait quelques éléments parce que cela
faisait seulement, sept jours, officiellement, que la compagnie avait
annoncé cette fermeture. Alors, le ministre Bérubé a
été rencontré. Il y avait le ministre Duhaime, il y avait
le ministre Couture, il y avait le ministre Landry qui a passé avec nous
à peu près trois ou quatre minutes. De toute façon, tout
le monde était bien sensibilisé et on trouvait pas mal
révoltant que cette fermeture soit annoncée si brutalement dans
des conditions semblables. Alors, on a conti-
nué nos démarches. Le gouvernement devait s'empresser de
faire des démarches de son côté envers la compagnie pour
empêcher cette fermeture.
Le 28 juin, le ministre Bérubé je comprends qu'il
était très occupé par la session, car l'Assemblée
nationale siégeait à ce moment-là nous avait dit
à ce moment-là qu'il n'y avait rien eu de fait à partir du
30 mars, que c'était un fouillis dans le ministère, qu'on n'avait
pas tellement de personnes compétentes, qu'on rebâtissait ces
équipes et qu'on prenait le dossier en main. Il a dit qu'il avait
été mandaté par le cabinet et que c'était lui qui
s'occupait du dossier.
Alors, partant de ce moment-là, il n'y a rien qui nous laissait
voir que c'était pour être pessimiste. Le 14 juillet, il y a eu
une rencontre avec des fonctionnaires des Terres et Forêts. Ils avaient
visité l'usine pendant environ une heure, une heure et quart, je dirais
peut-être une heure et demie, selon les informations qu'on a eues des
personnes à l'entrée de l'usine. Des hauts fonctionnaires ont
visité l'usine pendant une heure et demie pour enfin conclure, eux
aussi, après une heure et demie, que ce n'était pas rentable.
Alors, le 20 juillet, Bernard Landry avait reçu une
délégation de la Wayagamack pour nous dire tout simplement qu'on
ne devrait pas être les derniers morts de la guerre. Il y a une
commission parlementaire, une compagnie qui fait des profits, le chômage,
la relance économique. Alors, tout cela pour nous dire: Non, on ne
devrait pas être les derniers morts de la guerre et on va les civiliser,
les compagnies, à l'avenir.
Bon, le 1er août, le rapport du comité de citoyens a
été remis au ministre Landry, en l'absence du ministre
Bérubé. Le ministre Landry le recevait au nom du gouvernement et
il a dit je cite le Nouvelliste, le journal régional, un
journaliste était présent Vous allez voir qu'une fois le
rapport remis, ce ne sera pas long qu'on va se tourner de bord pour aider la
Wayagamack. C'était le 1er août. Le 10 août, il y a eu une
rencontre avec le ministre Landry pour nous dire de ne pas
désespérer. Le télégramme du 12 août nous
disait que lui, le ministre Landry, s'affairait avec le ministre des Terres et
Forêts à trouver une solution rapide et aussi permanente pour
répondre aux justes revendications des travailleurs de la Wayagamack.
C'était le télégramme de Landry. Le 23 août, on a eu
aussi une rencontre avec le ministre Bérubé. Là, les
fonctionnaires avaient remis leur rapport. Le ministre Bérubé
nous a bien dit que, pour lui, strictement sur la question économique,
il fermerait les portes s'il était le propriétaire. Par contre,
il y avait aussi l'impact social à considérer et, comme ministre,
il prendrait une décision et il ferait des recommandations au cabinet,
en faisant les deux, du côté social et économique. Alors,
il n'y a rien qui nous a laissé croire que le ministre
Bérubé ne verrait pas l'impact social.
On a dit: On va leur faire confiance parce qu'on a tout le monde dans ce
gouvernement.
On a quand même vu quinze ministres; quinze ministres qu'on a
rencontrés ici, dans des salles ou des réunions convoquées
ou par occasion où l'on discutait dix ou quinze minutes. Il n'y en a pas
un qui nous a dit: Votre cas est désespéré. Continuez les
gars, ne lâchez pas, votre cause est bonne. Quand même je ne veux
rien déformer, on pourra me corriger si je ne mentionne pas exactement
les faits, mais le ministre Bérubé devait faire une
recommandation qu'il se réservait. Je lisais dans le journal des
Débats que le député de Maskinongé avait
posé la question: Quelle solution était recommandée? Le
ministre Bérubé a dit: Je réserve ces recommandations pour
le cabinet.
On n'a certainement pas eu connaissance des recommandations, mais ce
qu'on sait c'est que le 30 août on a rencontré le ministre
Parizeau qui nous a dit: Peut-être que la vocation du papier pour
Wayagamack... il ne faut peut-être pas penser à tenir cela comme
si cela devait continuer dans le papier journal. Mais, par contre, cette sorte
de machinerie, largeur et vitesse très convenables pour des produits qui
s'adaptent très bien. Le ministre Parizeau disait qu'on n'accepterait
pas de fermer une usine avant qu'on ait une solution de rechange.
On a marché dans cette condition. Au pis aller, je pense qu'on
veut garder des emplois. On ne veut pas créer plus de chômage
qu'il y en a dans la région avec 15% présentement et qui va les
dépasser à l'automne.
Le 6 septembre, les ministres Parizeau, Landry et Johnson confirmaient
les mêmes choses, qu'on ne doit pas accepter de fermeture tant qu'on
n'aura pas trouvé une nouvelle vocation à cette usine.
C'est le 22 septembre que le ministre Bérubé est venu nous
rencontrer, au Cap-de-la-Madeleine, pour et au nom de la compagnie,
probablement, pour nous dire que c'est quand même la compagnie qui ferme
ses portes. Le ministre Bérubé nous a dit qu'il n'y avait rien
à faire. Donc, c'est le gouvernement qui n'a rien à faire,
même s'il y a des profits, même s'il y a du chômage,
même s'il y a une commission parlementaire, et même si on doit
trouver une nouvelle vocation. M. Bérubé, je pense que vous avez
été brave de venir, je le reconnais, vous avez été
brave de venir dans la région. Mais quand même, vous vous
attendiez qu'une région qui avait été aussi
mobilisée que la nôtre présentement accepte aussi
facilement qu'on se retire de nos responsabilités sociales au moment
où cela devient un drame chez nous, comme cela en sera un le 15 octobre.
On ne demande pas que ce soient des mesures coercitives à tout prix, on
demande qu'un gouvernement soit humanitaire envers les travailleurs, qu'on ait
une solution de rechange en attendant, et qu'on ait aussi l'appui de toute une
population et de tous les membres de cette commission. Merci.
M. Daoust: Je vais conclure par les six points qui sont contenus
à la page 3 et 4.
Nous réclamons, premièrement, que le ministre
dépose toutes les études qu'il a fait effectuer sur les
opérations de la Consolidated-Bathurst au Québec. Ce
gouvernement, qui s'est toujours dit limpide on pourrait parler de
transparence puisque c'est un mot qu'on a tous adopté depuis
quelque temps qui s'est toujours dit limpide dans son
administration et qui recherche la concertation des partenaires sociaux, peut
bien mal justifier de se conformer à la confidentialité que
réclame la compagnie.
Deuxièmement, que le ministre fasse connaître ses positions
sur les alternatives présentées par le comité de citoyens
et le syndicat. Il a d'ailleurs reconnu en privé que ces propositions
étaient applicables.
Troisièmement, qu'il fasse tout en son pouvoir pour maintenir les
opérations de la Wayagamack, de la Consolidated-Bathurst, et qu'il se
donne le pouvoir d'être partie liée à la gestion temporaire
des opérations.
Quatrièmement, qu'il fasse connaître les
possibilités de recyclage de l'usine jusqu'ici envisagées qu'il
associe le syndicat à la recherche de ces solutions de rechange.
Cinquièmement, qu'il mette sur pied, en collaboration avec le
syndicat, un programme de recyclage de la main-d'oeuvre en usine en tenant
compte de la nouvelle vocation de cette dernière.
Enfin, sixièmement, qu'il reconnaisse une priorité
exclusive d'embauche à tous les travailleurs éventuellement
affectés par la cessation de la production actuelle.
Voici donc les questions que nous vous posons, le programme que nous
vous soumettons et à l'égard duquel nous aimerions bien
connaître vos vues.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. Daoust et également les autres. M. le ministre.
M. Bérubé: J'ai l'impression que plusieurs points
ont été soulevés. Je m'expose à en avoir
raté un certain nombre, mais je suppose qu'on pourra facilement les
reprendre.
D'une part, à l'exposé de M. Charest, je dois dire que je
regrette infiniment qu'il y ait pu y avoir, si ceci a été le cas,
des membres du gouvernement qui aient pu, par leurs déclarations,
certainement pas remplies de mauvaise volonté, susciter des espoirs,
faire voir des solutions là où, à l'époque, il n'y
en avait pas encore et là où nous étions à la
recherche de solutions. J'ai également été heureux de
constater que, lors de la rencontre que j'ai eue avec les représentants
de la Fédération des travailleurs du Québec, plusieurs des
participants aux diverses rencontres que j'ai eues avec ce syndicat ont
souligné en public que j'avais, tout au cours de ces rencontres,
évité soigneusement de soulever le moindre espoir et qu'on
reconnaissait au moins que, de ce côté, j'avais été
honnête.
Je pense donc que je devrai continuer à agir de la même
façon. Je pense que ceci est nécessaire, un gouvernement doit
être le plus transparent possible et profondément honnête
et, lorsqu'un gouvernement n'a pas de réponse, il doit normalement
s'abstenir de laisser croire qu'il en a.
Quant au problème du maintien de l'entreprise pour une
durée indéterminée de six mois à un an, je pense
que la question a été posée à quelques reprises, la
réponse du vice-président de la société a
été tout aussi claire qu'elle l'a été lorsque je
lui ai fait les mêmes demandes à deux reprises: la réponse
est non. Cela a été, à chaque fois, un non
catégorique. Faire porter au gouvernement l'odieux d'une décision
qu'il n'a pas prise, mais qui a été prise, et vous l'avez tous
entendu, d'une façon absolument péremptoire et sans appel de la
part de la compagnie, je pense que c'est faire porter la culpabilité par
le mauvais coupable. Par conséquent, je pense qu'il est
nécessaire que ceci soit souligné.
Quant au problème de la fermeture de l'usine, j'ai beaucoup
apprécié en particulier le mémoire de la CSN non
pas par opposition à votre mémoire qui a cherché
à nous présenter des solutions de rechange. En particulier, ils
ont souligné l'idée d'une caisse de stabilisation de l'emploi,
qui m'est apparue, en tout cas à première vue, comme une
hypothèse intéressante de solution. Car il faut dire que le
problème des fermetures d'usines n'est pas unique au
Cap-de-la-Madeleine; je sais que ceci ne consolera pas beaucoup les
travailleurs de la Wayagamack qui sont sans doute ici aujourd'hui. Mais, en
même temps que la Wayagamack ferme, je pourrais citer des entreprises de
mon propre comté et je pourrais citer des entreprises dans les Cantons
de l'Est et un peu partout au Québec qui ferment
présentement.
Par conséquent, le problème de la fermeture des
entreprises n'est pas le problème de la Wayagamack, c'est un
problème courant dans une société. Par conséquent,
face à une telle fermeture, ce qu'il faut poser comme question, c'est:
Est-ce qu'un gouvernement utilise tous les moyens légaux à sa
disposition de manière à s'assurer que les droits sont
respectés? Je dois malheureusement rappeler à la
Fédération des travailleurs du Québec qu'un gouvernement
est tenu, par sa fonction, de voir à la rédaction de lois et,
d'autre part, a l'administration des lois. Je tiendrais à souligner
qu'on a fait grand état dans la presse et dans beaucoup de milieux que
le gouvernement mettait trop d'accent dans ses lois à caractère
social et insuffisamment d'accent sur le côté
économique.
Pourtant, vous soulevez là une question fondamentalement
importante: voici un problème à caractère social pour
lequel il n'existe malheureusement pas de loi au Québec et sur lequel on
devrait se pencher. Vous soulevez donc l'importance pour un gouvernement de se
préoccuper de lois à caractère social et votre
intervention ne peut pas être plus claire qu'elle ne l'a
été aujourd'hui.
Donc, notre premier rôle est un rôle de rédaction des
lois; c'est également un rôle d'administration des lois dans un
esprit de strict respect des lois adoptées par les Législatures
antérieures.
J'aimerais poser à la Fédération des travailleurs
du Québec, la question suivante: Quel moyen légal la
Fédération des travailleurs du Québec propose-t-elle au
gouvernement qui, à la fois, respecterait le principe que le
problème de la fermeture d'usine n'est pas un problème unique,
mais un problème généralisé, d'une part, et nous
permettrait, en même temps, de régler votre problème?
M. Lord: Je voudrais d'abord, M. Bérubé, vous dire
que le problème de la fermeture de la Wayagamack, ce n'est pas un
problème de fermeture comme on en trouve partout. C'est une fermeture
dans un secteur clé, dans un secteur où il y a une commission
parlementaire, dans un secteur où on annonce une forte reprise
très bientôt, une annonce qui a été faite par une
compagnie qui ne perd pas d'argent. Ce n'est pas une compagnie qui accumule
déficit sur déficit. C'est une compagnie qui dit: En fermant
à Trois-Rivières, on va faire plus d'argent. C'est finalement le
choix entre deux genres de sociétés.
Les mesures légales que le gouvernement pourrait prendre pour
empêcher la fermeture de cette usine, il ne faut quand même pas
oublier que vous n'êtes plus dans l'Opposition, vous êtes
maintenant les législateurs. Vous êtes les législateurs,
vous pouvez faire n'importe quoi. Vous pourriez forcer la compagnie à
maintenir ses opérations le temps de trouver une nouvelle vocation, vous
pourriez la forcer à opérer trois mois, six mois, etc. Vous
pourriez le faire.
Vous pourriez appliquer les règlements antipollution. Vous allez
nous dire que cela est discriminatoire et vous voulez avoir des lois qui
s'appliquent universellement. Le principe est bon. Il reste quand même
que c'est un cas particulier. C'est un cas qui est différent.
L'administration précédente avait appliqué des mesures
discriminatoires lors de la période de soi-disant marasme de 1971-1972.
Il y avait eu la fermeture de l'usine Tembec, il y avait eu une fermeture, par
la compagnie Domtar à Trois-Rivières, de quatre machines, Domtar
qui est maintenant devenue Kruger. L'administration libérale du temps
avait dit: L'industrie est en difficulté; ce qu'on va faire, on va
l'aider. Il s'agissait de lui donner un rabattement de $2.50 du cunit de bois,
sur chaque cunit de bois coupé. Mais les compagnies qui ne maintiennent
pas toutes leurs opérations, à ce moment-là, ces
compagnies se trouvent disqualifiées.
Le Parti québécois ne créerait pas un
précédent dangereux en usant de mesures soi-disant
discriminatoires vis-à-vis de la compagnie. Une chose nous
étonne; c'est peut-être à ce sujet que j'aimerais vous
renvoyer la balle. Vous nous avez dit, quand vous êtes venu à
Trois-Rivières l'autre fois, que peut-être, sans soulever de faux
espoirs je vous en sais gré il y aurait une nouvelle
vocation pour cette usine.
Alors, ce qu'on vous dit, c'est que s'il est pour y avoir une nouvelle
vocation, jusqu'à ce que cette nouvelle vocation soit définie,
soit déterminée, maintenez les opérations. À cela,
vous nous dites: Non. Ce qui met en question le sérieux de cette
soi-disant recherche d'une autre vocation.
Pour répondre à votre question, vous êtes
législateurs, vous pourriez faire à peu près n'importe
quoi, plus spécifiquement l'application des règlements
antipollution.
M. Bérubé: Relativement au point que vous venez de
soulever, j'ai l'impression que vous pensez surtout à une loi
d'exception, c'est-à-dire que cela serait une loi spéciale
forçant le maintien des opérations de cette entreprise, si je ne
m'abuse.
M. Lord: Si on recule à un certain nombre d'années,
M. Bérubé, les lois spéciales ont abondé au
Québec généralement contre les travailleurs. Ce serait
peut-être un heureux précédent d'en faire une en faveur des
travailleurs.
M. Bérubé: Relativement au problème de la
pollution, j'ai l'impression que le ministre de l'environnement pourrait
peut-être répondre à cet aspect.
M. Léger: Dans votre mémoire, vous affirmez,
à un moment donné, en parlant de la Wayagamack du
Cap-de-la-Madeleine, que la compagnie nage dans l'illégalité
concernant les règlements sur la pollution.
Les règlements sur la pollution concernant les usines des
pâtes et papiers, sont des règlements fédéraux et
les chiffres que j'ai ici démontrent que vous avez partiellement
raison.
En effet, les normes de matières en suspension et de la DBO
requis et ceux de la production actuelle de pollution par rapport à la
production de la compagnie démontrent qu'au Cap-de-la-Madeleine,
à l'usine qui a fermé ses portes, selon le règlement
fédéral, les mesures requises étaient d'un pourcentage de
1,82 et qu'elles donnaient des résultats de 1,5 au niveau des
matières en suspension. Au niveau de la DBO, les normes requises
étaient de 1,57% de la production et la DBO qui était
déversée par la compagnie du Cap-de-la-Madeleine était de
1,3. Donc, au niveau du règlement fédéral, parce qu'il n'y
a pas encore de règlement provincial là-dessus, la compagnie qui
était au Cap-de-la-Madeleine respectait cela.
La partie pour laquelle vous avez raison, c'est la partie de la
compagnie qui est située sur l'île, qui dépasse les normes
fédérales. À l'île, l'objectif était de 1,88,
alors qu'elle dépasse à 2,5 au niveau des matières en
suspension; au niveau de la DBO, les objectifs du règlement
étaient de 2,7 et on les dépasse à 4,3. La compagnie, sur
l'île, les dépasse donc.
Cependant, le règlement fédéral de 1971 comporte
une faiblesse en ce sens qu'il n'y a pas de date limite pour les usines qui
étaient en opération. Ces normes étaient effectives
à la date du règlement pour les usines qui se construisaient ou
les usines qui augmentaient ou modifiaient leur fonctionnement.
C'est donc dire qu'il faudra nécessairement qu'il y ait un
règlement provincial, que j'ai d'ailleurs annoncé à
l'ouverture de la commission, de façon que nous soyons très
armés pour le réaliser.
Ceci n'empêche quand même pas la compagnie d'agir, elle
disait tantôt qu'elle avait aussi une préoccupation sociale.
Sachant les normes qui sont les objectifs du règlement
fédéral et sachant que nous sommes déjà en train
d'y répondre pour parler des normes provinciales, elle devrait penser
elle-même à investir un peu, surtout de ses profits qu'on
annonçait tantôt, pour respecter ce qui est
actuellement un règlement fédéral, mais qui,
malheureusement, n'a pas de date d'acceptation ou de mise en place pour les
usines existantes.
Elle devrait au moins viser cela et j'espère que la compagnie
m'entend très bien là-dessus. Je n'ai pas eu l'occasion d'en
parler tantôt parce que vous en parliez dans votre mémoire. Ce
sont les renseignements que j'ai actuellement.
M. Bérubé: On pourrait passer maintenant à
un certain nombre de vos recommandations. Je suppose que vous les faites en vue
d'avoir une réponse. La première, évidemment, porte sur le
dépôt des études. Je pense que vous avez été
vous-mêmes à même de constater que l'entreprise ne veut pas
publier les chiffres des opérations de ses usines. Or, je dois dire
qu'avant de prendre position personnellement sur ce dossier, j'ai tenu à
avoir tous les éléments en main. Nous avions donc demandé
à la compagnie si elle accepterait, sur une base confidentielle, de nous
fournir l'ensemble des informations de toutes ses opérations, de
manière à nous permettre de poser un jugement quant à la
rentabilité possible de cette entreprise par rapport à ses autres
unités.
La compagnie s'est prêtée à cette demande de notre
part, sous le couvert de la confidentialité, évidemment, et tant
et aussi longtemps que l'entreprise ne me libérerait pas de cette
confidentialité, il est absolument impensable pour moi de violer cette
parole. De la même façon, si le syndicat devait me prêter
des renseignements sur une base confidentielle, je me considérerais
comme totalement incapable de violer la confidentialité, la parole que
j'aurais donnée au syndicat. Donc, lorsque je donne une parole à
quelqu'un, quel qu'il soit, je ne la reprends jamais.
Pour ce qui est de faire connaître mes positions sur les options
présentées par le comité de citoyens et le syndicat,
j'aimerais peut-être que vous me les résumiez rapidement, de
manière que je puisse prendre position.
M. Daoust: On vous avait, à ce moment,
suggéré quelques mesures temporaires, le comité de
citoyens, et je me réfère au rapport du comité de
citoyens, à la page 10, où on avait isolé deux solutions
principales qui, croyons-nous, et je cite le document, "seraient de nature
à justifier le délai que nous demandons; il s'agit de
l'approvisionnement en bois et de l'utilisation des copeaux". On vous disait:
L'approvisionnement en bois, selon... Il s'agissait finalement de changer le
mode d'approvisionnement en bois de l'usine Wayagamack. Il y avait aussi
l'usage de copeaux.
M. Bérubé: Oui, effectivement, cette proposition a
été vérifiée de la part des fonctionnaires de notre
ministère. Elle a été jugée également
applicable, pouvant, cependant, représenter des problèmes
à la compagnie. La compagnie a invoqué un certain nombre de
raisons, les principales étant que l'état de l'équipement
pour la réception de copeaux était inadéquat, d'une part
je pense qu'elle n'a pas l'équipement nécessaire
qu'également, l'état de l'équipement pour la
préparation de pâtes mécaniques, étant en assez
mauvais état, inacceptable, à ce moment, ces gens pensaient
qu'ils auraient des problèmes, et également pour des
problèmes de livraison. Par conséquent, ils ont, à
nouveau, rejeté cette proposition qui leur avait été
faite, à laquelle j'avais, effectivement, souscrit, à la suite
des recommandations des fonctionnaires de mon ministère.
Qu'il fasse tout en son pouvoir pour maintenir les opérations de
la Wayagamack par la Consolidated-Bathurst et qu'il se donne le pouvoir
d'être partie liée à la gestion temporaire des
opérations, je pense que, pour autant que le ministre est
concerné, ce n'est pas une décision du ministre, mais c'est une
décision du gouvernement. Par conséquent, pour autant que je suis
concerné, je suis d'accord avec une telle approche. Je pense
qu'évidemment le gouvernement doit tenir compte d'un certain nombre de
circonstances je les ai mentionnées tantôt c'est le
problème de situations analogues au Québec, du besoin d'une
législation ou de mesures généralisées dans le cas
de fermeture d'usine. Le gouvernement a donc pris une décision qui,
évidemment, relève de lui et non pas du ministre des Terres et
Forêts. Par conséquent, si le gouvernement a jugé bon de ne
pas prendre une telle mesure temporairement, c'est après
l'évaluation la plus objective possible de la situation, et compte tenu
du coût financier, sans doute, qui était attaché à
une telle mesure.
Maintenant, qu'il fasse connaître les possibilités de
recyclage de l'usine jusqu'ici envisagées, qu'il associe le syndicat
à la recherche de ces solutions; là-dessus, je serais en entier
d'accord pour associer le syndicat à cette procédure, si le
syndicat veut s'associer à nous. Ma seule réserve est de ne pas
rendre publique cette association, c'est-à-dire que je demanderais que
le syndicat s'associe à nous sur une base de confidentialité
à la recherche de solutions. Pourquoi? Parce que, lorsqu'une population
est durement éprouvée par une fermeture d'usine, lorsque le taux
de chômage est élevé, il existe continuellement des espoirs
qui sont soulevés dans la population. Je sais que, lors de mon
séjour, en particulier, au Cap-de-la-Madeleine, on parlait
déjà de la vente imminente de l'entreprise à une autre
société et je savais pertinemment qu'elle ne pouvait se faire
puisque j'avais déjà pris contact avec cette
société et qu'elle m'avait dit qu'elle n'était pas
intéressée. Donc, il y a continuellement des rumeurs. On ne peut
jamais savoir d'où elles sortent, mais elles fusent de partout. Ce qui a
comme résultat de susciter des espoirs dans la population, espoirs qui
retombent tout aussitôt. Je pense qu'un gouvernement, comme un syndicat,
a le devoir de ne pas susciter de faux espoirs.
Par conséquent, je pense que, dans le contexte de travail en
commun avec le syndicat à la recherche de solutions, je pense qu'il n'y
a aucun problème de mon côté. Nous serions, au contraire,
des plus heureux d'associer le comité de citoyens à nos travaux,
je pense, dans la mesure où on accepte de conserver ce travail dans le
cadre, quand même, d'une certaine confidentialité pour
éviter que de faux espoirs soient soulevés dans la
population.
Quant aux possibilités de recyclage de l'usine, je pense que la
réponse, je viens de la donner. Qu'il mette sur pied, en collaboration
avec le syndicat, un programme de recyclage de la main-d'oeuvre. En usine, je
pense que ce problème relève du milieu du travail, mais je
pourrais certainement lui transmettre cette recommandation. Elle me
paraît d'autant plus fondée que si, effectivement, à la
suite de nos travaux, nous pouvions mettre la main sur une solution, je pense
qu'il faudrait très rapidement mettre sur pied un tel programme.
Quant à la priorité exclusive, évidemment, il
s'agit là d'une recommandation qui résulterait carrément
d'une solution définitive trouvée à la situation. Donc,
pour autant que les articles 4, 5 et 6 sont concernés, cela ne semble
pas faire d'obstacle.
M. Daoust: Écoutez, M. le ministre, on vous saisit de six
questions fort importantes sans aucun doute. On a entendu vos réponses
rapides. On n'est pas tout à fait d'accord avec ce que vous nous avez
dit à la première de nos questions sur les règles de
confidentialité. Il y a ici une commission parlementaire. Vous avez
provoqué des espoirs, comme ministre, en lisant le mandat à
l'Assemblée nationale. Je m'en souviens fort bien. J'étais
là. Tout le monde était emballé à l'idée
que, pour une fois au Québec, une commission parlementaire se pencherait
sur les perspectives d'avenir de tout le secteur des pâtes et papiers au
Québec. Vous le savez, puisque vous l'avez rédigé, il y a
tout dans ce mandat. Il y a absolument tout. Je me dis que le cas de la
Wayagamack entre dans ce mandat. Je ne peux pas voir comment les membres d'une
commission parlementaire puissent faire un acte de foi dans des documents
qu'ils ne pourront même pas consulter. Cet acte de foi, nous, on ne peut
pas le faire, connaissant la Consolidated-Bathurst et l'ayant entendue depuis
des années aux tables de négociation.
La confidentialité, c'est bien beau, mais il ne faut pas, non
plus, sombrer dans la naïveté. On peut se faire raconter des
histoires. On s'en fait raconter à coeur de jour et Dieu sait qu'on peut
vous donner des exemples précis; le cas de la CIP, la Tembec où
le président de l'entreprise nous a dit que ce n'était pas
rentable. Aujourd'hui, Tembec, c'est profitable drôlement pour les gens
qui en sont les actionnaires et les propriétaires. Si on n'avait pas eu
les manifestations qu'on a eues et si on n'avait pas eu un ministre pour
écouter et c'est un ministre libéral, Kevin Drummond, un
de vos collègues autrefois les requêtes syndicales à
ce moment, il n'y aurait pas de Tembec aujourd'hui.
Je fais les analogies qu'il faut faire à certains moments et je
ne suis pas critique à l'égard de qui que ce soit qui est autour
de cette table, mais on a eu à ce moment des appuis. On a eu
accès à des documents. On a été mis dans le coup,
dans le vrai sens du mot. On ne l'est pas à ce moment-ci.
Vous nous demandez de faire un acte de foi. Je ne crois pas en votre
infaillibilité, pas plus que je ne souhaite que vous croyiez à la
mienne. Ce se- rait bien épouvantable si, de part et d'autre, on se
pensait infaillible.
Mais vous nous demandez un acte de foi en tous ces documents que la
compagnie vous a déposés. Nous n'y croyons pas. Qu'est-ce que
vous voulez? On ne demande pas mieux qu'on nous le prouve. Cela nous ferait mal
peut-être si on nous le prouvait je vous le concède
mais je me dis que les membres de la commission parlementaire, les
syndiqués, le syndicat, ceux qui sont ici ne peuvent pas se contenter
d'un ministre qui dit: J'ai vu et je suis convaincu. On ne peut pas accepter
cela en toute franchise. On est aussi bien de se parler bien franchement. Je
trouve que c'est tout à fait inacceptable et je trouve que vous vous
réfugiez à ce moment-ci dans une position un peu trop
technocratique, pour être bien franc. C'est plus fondamental que cela, le
problème des travailleurs de la Wayagamack, pour qu'on rejette notre
demande, en parlant de confidentialité.
Les autres questions, je ne veux pas les commenter trop à ce
moment-ci ou tout au moins vous répondre. Il y en a qui sont positives
et il y a peut-être des pistes de solution.
Je voudrais que votre commission parlementaire et vous-même,
puisque vous êtes l'homme clé, vous êtes le ministre, vous
ayez cette volonté de ne pas saboter votre propre commission
parlementaire, de ne pas faire en sorte que cela devienne la risée des
travailleurs québécois.
Une commission parlementaire qui s'est donné un tel mandat, qui
veut fouiller à fond... C'est la première fois, M. le ministre,
vous le savez. Vous nous avez parlé de votre ministère. J'ai
été bouleversé d'entendre de votre bouche à quel
point c'était plus ou moins organisé cette affaire, que vous
aviez eu des dossiers minces comme une feuille de papier.
On a vu un ministre qui a toute la compétence technique et je
m'incline devant votre compétence technique, pour saisir ces
problèmes, commission parlementaire et tout et là, je me dis:
Cela va être la risée des gens s'il n'y a pas de moyen de discuter
des problèmes comme ceux-tà, et d'y aller à fond. Est-ce
qu'ils ont raison, est-ce qu'ils ont tort? Et, encore une fois, je le
répète, je trouve qu'ils sabotent votre commission parlementaire,
les représentants de la Consolidated Bathurst. Ce sont des saboteurs de
votre commission parlementaire et je vais vous dire pourquoi. Je pense qu'ils
sont indécents de ne pas accepter de prolonger la vie de l'usine tant et
aussi longtemps que votre commission parlementaire n'aura pas fini ses travaux.
Cela, vous ne pouvez pas l'accepter, comme ministre, et nous, nous ne
l'acceptons pas, en tout cas. Je trouve cela épouvantable et je me dis:
Un gouvernement qui a le moindrement et je ne dis pas cela de
façon méchante, vous êtes capable d'avoir du cran, il n'y a
aucun doute là-dessus, et on aime cela quand vous en avez mais un
gouvernement qui peut avoir la volonté de parler dans la face des gens,
que ce soient des compagnies, ou d'autres, cela peut être nous autres
à l'occasion, il se fait respecter. Une compagnie qui vous sabote en
fermant son usine, en faisant du chantage, en faisant ce qu'on ap-
pelle de plus en plus de la déstabilisation, je trouve cela
épouvantable. Mais un gouvernement qui n'a pas les... vous savez quoi,
de réagir à ce moment-là, alors, il se définit un
peu et je trouve cela malheureux.
Je n'aimerais pas prolonger le débat là-dessus parce qu'on
peut devenir, tout ce qu'on en est, peut-être un peu émotif, mais
j'aimerais que vous y mettiez le paquet. Notre requête, vous l'avez. La
compagnie nous entend, ils sont peut-être encore ici. J'aimerais que
votre commission parlementaire et tous ceux qui ont de quoi à dire
là-dedans il y en a qui ne sont pas ici, il y a le cabinet des
ministres et il y a le premier ministre j'aimerais qu'il y ait des gens
qui se parlent comme on se parle cet après-midi et qu'ils disent
à la compagnie: Écoutez, il y a des projets incroyables, on peut
fouiller cela à fond, alors, n'allez pas saboter les tentatives qui
s'amorcent afin qu'on y voie plus clair tout ce qu'on en est.
Il me semble que Paul Desmarais a quelque chose à dire
là-dedans et au-delà des législations. Je pense bien que,
peut-être, tôt ou tard, il faudra y venir, vous l'avez
évoqué. Mais un gouvernement a des moyens de pression. Les
compagnies ont des moyens de pression incroyables. Mais ce qui
m'inquiète, c'est qu'à ce moment ce sont eux qui semblent les
plus forts, et je le dis avec une profonde tristesse, pour être bien
franc. Alors, j'aimerais bien que vous considériez nos questions comme
des avis, si c'est possible, et que dans les plus brefs délais on
n'aimerait pas attendre au 13 parce que c'est un peu loin qu'il y ait
des rencontres, des entrevues et qu'il y ait des requêtes formelles
auprès de cette compagnie de surseoir à sa décision de
fermer l'usine dans une quinzaine de jours. Le 15 octobre, c'est quasiment
demain matin. Se livrer à toute cette gymnastique de répondre aux
questions, vous connaissez notre objectif, c'est celui-là, et je pense
que vous avez des moyens de pression et je voudrais que vous les utilisiez.
Toute la commission, je ne parle pas seulement au ministre, toute la
commission. Quelqu'un a dit que la commission, je crois que vous l'avez
mentionné, c'est l'émanation de l'Assemblée nationale,
c'est un peu le peuple du Québec. Alors, que toute la commission fasse
un voeu solennel et dise à la compagnie: De grâce, maintenez votre
usine ouverte au moins jusqu'au moment où on produira notre rapport.
M. Leclerc: Ce qui est aussi incroyable c'est que la compagnie
s'amène devant vous et vous parle de l'usine de l'île dont elle va
maintenir les opérations, vous parle des projets d'investissements
qu'elle a et vous dit: Écoutez, c'est impossible de vous dire dans
combien de temps et combien d'argent on va mettre là-dedans. Cette
même compagnie néglige de mettre cela sur la table et cela
est inquiétant pour les travaux ultérieurs de votre commission
et de vous dire qu'elle a ouvert treize, quatorze ou quinze usines en
Allemagne de l'Ouest depuis quelques années. Une compagnie qui a pris
une expansion à l'extérieur du Québec, comme elle l'a
fait, peut très bien avoir, comme projet à long terme, de peu
à peu réduire ses opérations au Québec et de
transporter sa production ailleurs. Personne ici ne semble inquiet de cela. Le
ministre nous a dit, tout heureux, dans des rencontres avec le syndicat, qu'il
avait eu accès aux livres de la compagnie. À quels livres? Aux
livres des opérations de la compagnie au Québec qui a aussi des
opérations dans le reste du Canada et qui a aussi des opérations
aux États-Unis partiellement et aussi en Allemagne de
l'Ouest.
Vous ne pouvez avoir une vue d'ensemble sur l'industrie du papier, ici
au Québec, quand vous n'examinez qu'une partie des opérations de
certaines compagnies et que vous vous contentez de réponses aussi
évasives que celles que vous a données, tout à l'heure, le
vice-président. Je pense que vous allez avoir une vision très
partielle de l'avenir de l'industrie, ici, au Québec et les
interventions possibles du gouvernement vont être très
conséquentes à cette vision partielle.
M. Pagé: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
Motion priant Consolidated-Bathurst
de retarder la fermeture de son usine
du Cap-de-la-Madeleine
M. Bérubé: Je pense que vous avez vous-mêmes
reconnu qu'un certain nombre de réponses étaient partielles et
que nous n'obtenons pas toujours le type de réponse que nous aimerions
obtenir. Je pense que tous les députés se sont essayés. La
société a procédé à une analyse de la
situation, elle a pris une décision; une décision qui,
semble-t-il, date non pas de récemment, mais date, semble-t-il, de 1974.
Donc, depuis des années, la société avait
déjà pris la décision de fermer; par conséquent, on
peut imaginer qu'ayant pris cette décision de longue date elle
hésite à revenir en arrière.
On fait la suggestion que cette commission, je pense que cela traduirait
très bien notre sentiment à tous, fasse une motion, ici, pour
demander formellement par respect pour les travaux de cette commission
parlementaire qui vise à établir des solutions pour l'industrie
des pâtes et papiers que l'entreprise Consolidated-Bathurst
maintienne ses opérations du Cap pour une durée d'au moins six
mois à un an.
Je pense que j'ai le texte, ou M. Gagnon pourrait peut-être
choisir de le faire. Veux-tu le faire?
M. Pagé: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf, la parole est à M. le ministre et non
pas à M. le député de Champlain.
M. Bérubé: Que cette commission émet le voeu
que la compagnie Consolidated-Bathurst de Wayagamack, retarde se fermeture
jusqu'à ce qu'elle obtienne la conclusion de cette commission.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En
faites-vous une motion, M. le ministre?
M. Bérubé: Oui, j'en fais une motion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En bonne
et due forme?
M. Bérubé: On pourrait peut-être la modifier
et l'écrire un peu mieux, mais...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II est
proposé par le député de Matane et ministre des Terres et
Forêts que cette commission parlementaire émette le voeu que la
compagnie Consolidated-Bathurst de Wayagamack retarde la fermeture de l'usine
jusqu'à ce qu'elle obtienne la conclusion de cette commission
parlementaire.
M. Leclerc: La fin de vos travaux.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
conclusions de la commission parlementaire, c'est...
M. Leclerc: Ce n'est pas l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
façon dont c'est rédigé, ce n'est pas
nécessairement la fin de la commission, mais les conclusions de la
commission parlementaire, ce qui pourrait vouloir dire une période
après la fin de la commission.
M. Giasson: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Question de règlement, est-ce que vous
pourriez préciser à nouveau le texte de la motion qui vient
d'être déposée?
M. Grenier: M. le Président, devant toute cette question,
d'abord, je trouve fort étrange que devant un problème aussi
important que celui-là, le ministre soit rendu à rédiger
une résolution sur le coin de la table, au crayon. Je pense bien qu'on
devrait se donner un répit. Il reste quelques minutes avant le
dîner. Le ministre, assisté de ses fonctionnaires ou même
des personnes du milieu, pourrait nous présenter, plus tard une
résolution correcte, afin qu'on puisse voter, l'adopter. Bien sûr
que la commission va faire l'unanimité autour d'une proposition de ce
genre. Vous auriez quelque chose de plus correct.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En
fait...
M. Léger: M. le Président, sur le point de
règlement.
M. Giasson: ... en faveur de la résolution.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Que
cette commission parlementaire émette le voeu que la compagnie
Consolidated-Bathurst de Wayagamack retarde la fermeture de l'usine
jusqu'à ce qu'elle obtienne la conclusion de cette commission.
Évidemment que la formulation elle-même, le mot à mot de la
motion peut être modifié.
M. Grenier: M. le Président, les conclusions, la fin du
rapport, le ministre a parlé de six mois, prenez donc l'heure du
dîner pour présenter un texte qui va faire l'affaire des gens du
milieu, qui va peut-être faire l'affaire de la compagnie aussi, qui
ferait l'affaire de la commission. Je pense qu'on devrait remettre ça
après le dîner et revenir avec cette résolution.
M. Bérubé: Sur la question de règlement, M.
le Président, je pense que je serais d'accord avec le
député de Mégantic-Compton.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
nouvelle motion sera présentée à 20 heures ce soir.
Là-dessus, je cède la parole au député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'avais hâte
de parler, combien? Huit minutes. Messieurs, je vous remercie de déposer
un tel mémoire, je présume qu'il a fallu faire vite. On a
regardé, on a lu attentivement votre mémoire,
particulièrement le chapitre des recommandations que vous formulez.
À la proposition no 4, vous recommandez que "le gouvernement fasse
connaître les possibilités de recyclage de l'usine jusqu'ici
envisagées. Qu'il associe le syndicat à la recherche de ces
solutions de rechange".
Je suis convaincu, par la teneur de la conversation que vous avez eue
avec M. le ministre tout à l'heure, de plus, par d'autres
expériences analogues au Québec, où, face à de
telles éventualités, les travailleurs ont eu à se
regrouper pour voir s'il était possible pour eux d'en arriver au
maintien de l'opération d'une usine sous une forme de gestion
différente...
Vous avez, dans le mémoire que vous avez déposé,
cité des chiffres relatifs aux profits de l'usine Wayagamack, division
de la Consol au Cap-de-la-Madeleine pendant le premier trimestre, (lesquels
n'ont pas été réfutés lorsque j'ai posé la
question cet après-midi à la compagnie).
Je suis convaincu que, d'une part, vous avez des problèmes
à avoir tous les chiffres, vous avez vu comment nous, on avait des
problèmes ici, même si nous sommes le prolongement du Parlement.
Je suis convaincu à la lumière des chiffres que vous avez
et c'est ce que je constate dans la recommandation no 4 que les
travailleurs, ceux qui ont fait tourner cette entreprise depuis plusieurs
années, sont certainement intéressés à analyser et
à voir toutes les méthodes de gestion possibles. Je comprends
que, pour faire une étude qui se veut logique et concluante, il faut que
vous ayez les chiffres et il faut que vous ayez les documents de travail.
Vous avez fait état, M. Daoust, du travail, du mandat et de
l'objectif de cette commission. Je suis surpris qu'à la lumière
de ces objectifs que, conjointement, on s'est donné pour mission
d'atteindre je pense que, jusqu'à maintenant, le forum a
été très objectif, c'étaient vraiment des solutions
mais je suis surpris de voir qu'à l'intérieur de
discussions comme celles-là interviennent des critères de
confidentialité. Cela me dépasse.
Quand je faisais état cet après-midi que le Parlement est
quand même souverain, je m'excuse. Si on veut parler de la
confidentialité, on a l'article 153. Je me permets de vous le lire:
"Lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter
devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents et que cette
personne refuse de le faire, la commission fait rapport de ce refus au
président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour que la
demande de la commission soit satisfaite".
M. le Président, la question est trop importante pour qu'on joue
de procédures, de débats et de motions. Dès
l'arrivée de nos interlocuteurs, suite à une fin de non-recevoir
à la question que j'avais formulée à la compagnie,
demandant de déposer les profits, de déposer les chiffres, je
croyais... et M. le ministre pourrait se reprendre dans son intervention et
dire: Je peux, en tant que ministre, faire état de ces chiffres.
J'ai préparé une motion non pas dans le but d'appliquer
l'article 153, parce qu'on peut avoir les mêmes résultats sans
être obligé de passer par l'article 153. Si vous voulez me laisser
terminer, M. le Président, je vais être très bref.
Je vais citer le cas de jurisprudence dans lequel j'ai eu à agir
il y a quelques mois, lorsque la commission parlementaire de la justice a
siégé pour étudier le problème de deux policiers
par auto-patrouille. On se rappellera qu'à ce moment-là la
commission avait formulé un voeu.
Une commission, parce qu'ici, c'est législatif, peut formuler un
voeu au gouvernement, au
Conseil des ministres et au cabinet. Libre au cabinet de donner une
suite positive ou négative à ce voeu.
Motion pour dépôt de documents
J'avais préparé une motion et je considère que le
débat est clos sur la première motion jusqu'à 20 heures.
M. le Président, je vous ferais la motion suivante: Que la commission
parlementaire des richesses naturelles et des terres et forêts formule le
voeu que le ministre des Terres et Forêts dépose à cette
commission, compte tenu de l'intérêt et de l'urgence du cas de la
Wayagamack du Cap-de-la-Madeleine, tous les documents, échanges,
documents de même nature qui ont servi aux discussions entre la compagnie
Consolidated-Bathurst, le ministère des Terres et Forêts ou le
syndicat. C'est la motion que je fais. Je vous en remets copie. Cela s'est fait
à la commission parlementaire de la justice et là, j'arrête
tout de suite. Je ne veux pas m'éterniser sur les motions et sur la
procédure. On pourra, là aussi, voter à 20 heures. Pour
résumer, cela s'est déjà fait, d'une part. D'autre part,
la commission peut formuler ce voeu au ministre et libre au ministre d'y donner
suite et, si le ministre refuse, on a toujours 153.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf, vous venez de me donner du travail pour la
période de 18 heures à 20 heures puisque, compte tenu de l'heure
et compte tenu de cette motion que je voudrais étudier plus à
fond, je voudrais également examiner la jurisprudence que vous venez de
me citer. Compte tenu de tous ces faits et compte tenu de l'heure
avancée, je suspends les travaux jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 17 h 57)
Reprise de la séance à 20 h 14
Organismes reconvoqués à une
séance ultérieure
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, messieurs! Avant de reprendre les travaux de cette commission, je dois
informer certains organismes, qui avaient été convoqués
aujourd'hui et qui ne pourront présenter leur mémoire faute de
temps, qu'ils vont être reconvoqués par le secrétariat des
commissions pour venir présenter leur mémoire. Des
événements imprévus et imprévisibles qui sont
survenus aujourd'hui ont fait en sorte que toutes les personnes et tous les
organismes qui ont été convoqués ne pourront être
entendus. Je vous demande de comprendre cette situation, même si,
parfois, c'est difficile à comprendre.
Or, compte tenu du fait que nous ajournerons nos travaux à 23
heures pour les reprendre le 11 octobre prochain, à 10 heures, j'avise
donc l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, l'Association
des propriétaires de boisés privés de la province de
Québec Inc., et M. Bertrand Harvey qu'ils ne pourront être
entendus ce soir et qu'ils seront reconvoqués par le secrétariat
des commissions.
D'autre part, le prochain organisme qui est censé être
entendu, c'est la compagnie Donohue Ltée et l'autre organisme,
après, c'est les papiers Reed Ltée. J'ai été
informé que le président et directeur général des
papiers Reed Ltée serait venu spécialement ici, à
Québec, aujourd'hui, alors qu'il vient de l'extérieur du
Québec, je pense, de Toronto. Évidemment, le président ne
peut pas d'office modifier l'ordre des comparutions devant la commission, mais
je tenais, quand même, à faire état de ce fait pour voir
s'il n'y aurait pas possibilité, pour les deux parties qui pourraient
être entendues ce soir, c'est-à-dire la compagnie Donohue
Ltée et les papiers Reed Ltée, de peut-être en venir
à une entente quelconque.
En ce qui concerne les trois autres organismes, je vous remercie
d'être venus. Nous nous excusons de ne pouvoir vous entendre, mais soyez
assurés que vous serez reconvoqués et que votre mémoire
sera entendu par la commission parlementaire.
L'usine Wayagamack Motion en discussion
(suite)
Or, conformément à une sorte d'entente tacite qui
était survenue avant la suspension de 18 heures, le ministre des Terres
et Forêts avait présenté une motion et il avait
été convenu, à ce moment-là, que cette motion
serait reformulée à 20 heures. Également, le
député de Portneuf avait présenté une seconde
motion sur un sujet différent, qui n'avait été
déclarée ni recevabte, ni irrecevable par la présidence,
à ce moment-là.
Après consultation, je pense qu'il est de mise et je pense que
c'est conforme à ce qui s'est passé de permettre que cette
première motion nous soit reformulée, première motion qui
avait été présen- tée par le ministre des Terres et
Forêts. Lorsque la commission aura disposé de cette motion, je
rendrai ma décision sur la recevabilité de la motion du
député de Portneuf. Si cela convient à tous les membres de
la commission, je cède la parole au ministre des Terres et
Forêts.
M. Bérubé: M. le Président, je pense que je
suis d'un commun accord avec les membres du Parti québécois
assistant à cette commission et je pense, également, tenant
compte de l'opinion générale de l'ensemble des
députés de notre formation politique que j'ai été
à même de connaître à plusieurs reprises, qu'il est
de mon devoir de vous présenter la motion suivante:
Nonobstant toute considération économique et vu l'impact
social de la fermeture de l'usine Wayagamack de la Cie Consolidated Bathurst
Ltée., la commission parlementaire des richesses naturelles et des
terres et forêts émet le voeu que la compagnie retarde la
fermeture de son usine du Cap en attendant les conclusions des travaux de la
commission parlementaire et permettant ainsi la recherche d'une solution de
remplacement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
déclare la motion techniquement recevable et conformément aux
règlements, toutes les motions sont débattables. Est-ce que cette
motion sera adoptée?
M. Pagé: M. le Président, une motion comme
celle-là devient débattable. L'Opposition officielle a un temps
déterminé, alors je céderai mon droit de parole, au nom de
l'Opposition officielle, à mon collègue de Maskinongé.
M. Léger: M. le Président, sur un point de
règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Léger: Le ministre a présenté une motion,
mais il n'a pas encore utilisé son droit de parole pour expliquer le
contenu. Il n'a fait que l'énoncer. Normalement, on devrait permettre au
ministre d'expliquer les raisons qui le motivent et, par la suite, l'Opposition
pourrait répondre en connaissance de cause.
M. Pagé: Pas de problème, mais ce n'est pas moi qui
l'ai arrêté. Le ministre a arrêté de parler et on m'a
passé la parole.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, effectivement le ministre a le droit de parole
conformément à l'article 160 de notre règlement.
M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, cette question
de la fermeture de l'usine de Wayagamack préoccupe, je pense, le
gouvernement depuis maintenant bon nombre de mois.
Elle nous préoccupe, non seulement parce qu'il s'agit d'un
conflit qui fait la manchette des journaux, mais préoccupe le
gouvernement surtout parce que c'est un problème qui remet le
gouvernement actuel face à des engagements politiques qu'il n'a jamais
eu l'intention de renier et qu'il n'aura jamais l'intention de renier.
L'affinité qui existe entre les travailleurs du Québec et le
gouvernement actuel est bien connue et je pense qu'elle n'est pas pour
disparaître rapidement. Certes, lorsqu'un parti politique arrive au
pouvoir, il se retrouve avec des contraintes, des limitations qui ne lui
permettent pas toujours de réaliser tous les objectifs qu'il s'est
fixés et peut-être de les réaliser aussi rapidement qu'il
le voudrait.
L'essentiel, c'est certainement d'aller dans la bonne direction. C'est
certainement de ne pas renier ses objectifs. Or, dès le départ,
dans le conflit qui a opposé le syndicat de la FTQ avec la
société Consolidated, je dois dire que l'ensemble de la
députation du Parti québécois s'est rallié
dès le début avec la position soutenue par le syndicat. D'une
part, quant aux fermetures d'usine, lorsqu'un taux de chômage est aussi
élevé que celui que nous connaissons présentement,
lorsqu'une société fait face à des problèmes de
développement économique, lorsqu'une entreprise comme la
Consolidated a vécu dans un milieu, dans une municipalité du
Québec pendant des années et qu'elle a finalement bâti sa
richesse sur le travail d'une population, nous continuons de croire qu'on ne
peut, à ce moment-là, nier le fait que l'entreprise ait des
responsabilités sociales.
Cependant, nous devons aussi reconnaître que l'entreprise
privée telle que nous la connaissons ne peut survivre que dans la mesure
où elle fait des profits et qu'elle est concurrentielle. C'est
d'ailleurs l'objectif de la commission parlementaire. Aussi, j'ai tenu,
dès le début, quand cette situation s'est posée, à
connaître tous les éléments du dossier économique.
Je n'ai pas caché je l'ai dit publiquement après
avoir analysé le dossier avec les chiffres que la société
avait bien voulu me fournir, je n'ai pas caché que, d'un strict point de
vue économique, je ne pouvais m'opposer à la décision de
la société. Je me suis néanmoins adressé à
la société à deux reprises pour lui souligner que du point
de vue social, en tenant compte de l'aspect humain de la question, j'estimais
que l'entreprise faisait une erreur en n'accordant pas un certain délai
à la fermeture.
Aussi, en acceptant, au nom du gouvernement, de présenter cette
résolution, je pense que je pose là un geste de continuité
avec mes positions antérieures et je pense en même temps
décrire profondément la pensée de notre parti.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, je ne voudrais pas être
désagréable envers le ministre qui a présenté une
telle motion, mais je trouve que, de la part du gouvernement, présenter
une motion aussi générale, c'est une idée farfelue. Je
vais expliquer mon point tout au long des quelques minutes durant lesquelles
j'utiliserai mon droit de parole.
Simplement, M. le Président, si cela avait été
présenté par un député du parti au pouvoir,
j'aurais compris son manque d'expérience face à ces
problèmes et j'aurais mieux accepté cela encore que venant de la
part d'un membre du cabinet. On sait très bien, M. le Président,
lorsqu'on a quelque peu d'expérience parlementaire que, en attendant la
conclusion de la commission, tel qu'il est dit dans la motion, cela peut
vouloir dire bien des choses. Cela peut surtout vouloir dire que la date peut
être vers les 17, 18 ou 20 octobre. La conclusion de la commission veut
simplement dire que lorsque les travaux de la session vont reprendre, le 18
octobre, le rapporteur de la commission, le député d'Abitibi-Est
ou Ouest je ne sais pas exactement ...
M. Bordeleau: Est.
M. Picotte: ... Est - fera rapport en Chambre de notre
étude à cette commission parlementaire et, alors, cela pourra
être ce qu'on veut dire par la conclusion de la commission.
Or, M. le Président, il ne faut quand même pas rêver
en couleur. Une telle motion vient encore leurrer les travailleurs de la
Wayagamack pour la raison suivante. On a mentionné, tantôt, au
rapport de la Fédération des travailleurs du Québec, qu'on
avait laissé, aux travailleurs de la Wayagamack depuis le 17 mars
dernier, espoir sur espoir quant à la réouverture ou à la
continuation de l'usine Wayagamack. Messieurs, cette motion vient simplement
vous dire, encore une fois: II faut espérer que cela va continuer encore
un bout de temps. Je ne crois pas du tout que cette motion soit importante dans
le contexte actuel, parce qu'elle tend à retarder de quelques jours
seulement la fermeture de la Wayagamack.
Je pense que ce n'est pas du tout ça qui était le but
visé par une telle motion. Comme Opposition officielle, nous serions
prêts à souscrire à une telle motion, M. le
Président, en espérant qu'elle aurait eu une portée encore
plus longue que cela et encore plus importante. Lorsque j'ai
ques-tionnné cet après-midi le vice-président de
Consolidated-Bathurst, ce dernier m'a mentionné que ça
coûterait, pour exploiter son usine durant un an, environ $2,5 millions
de déficit.
Compte tenu que, déjà, la compagnie, pour participer au
problème social c'est bien comme ça qu'elle l'a dit
va accepter de verser $1,3 million pour la caisse de retraite
prématurée de ses employés, compte tenu que cette
compagnie a utilisé notre main-d'oeuvre, nos rivières, nos
richesses naturelles, compte tenu qu'il peut exister environ $1,2 million de
différence, je pense qu'il est de notre devoir, en commission
parlementaire, d'exiger que la compagnie Consolidated-Bathurst laisse son usine
de la Wayagamack fonctionner pour une période plus longue.
Amendement à la motion de M.
Bérubé
À ce moment-là, M. le Président, en terminant,
j'apporterais simplement l'amendement suivant:
remplacer les mots "en attendant la conclusion de la commission" par les
mots, "d'ici un an, soit le 30 septembre 1978".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Brome-Missisquoi, étant donné qu'il y a
un amendement, que je déclare immédiatement recevable et
reçu, à ce moment-là, la discussion sur la motion
principale est suspendue, et, alors que vous auriez eu normalement le droit de
parler en troisième lieu sur la motion principale, je dois, sur
l'amendement, reconnaître la première personne qui m'adresse la
parole, et j'ai entendu le ministre, qui voulait parler sur la motion
d'amendement.
Après ça, le député de Portneuf et, en
troisième position, le député de Brome-Missisquoi, sur
l'amendement.
M. Russell: M. le Président, je suis habitué
d'aller en troisième.
M. Grenier: Cela achève, M. le Président, on va
tomber en première, ça ne sera pas long.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur
l'amendement, M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, malheureusement,
il m'apparaît que l'amendement, tel que présenté, va moins
loin que la proposition que nous avons faite.
La proposition que nous avons faite dit bien: En attendant les
conclusions des travaux de la commission parlementaire et en permettant ainsi
la recherche d'une solution de remplacement.
L'objectif est bien de retarder la fermeture jusqu'à ce que l'on
ait soit les conclusions de la commission parlementaire, soit une solution de
remplacement. Or, si on pose, a priori, une période d'un an de
délai, il pourrait très bien se retrouver que nous ayons, dans
les semaines qui viennent, une solution, par exemple un autre type d'industrie
devant s'implanter, auquel cas, si on devait accepter l'amendement qui nous est
proposé ici, nous serions donc dans l'obligation d'attendre une
année avant d'introduire ce changement à la vocation de
l'entreprise. On se rend donc compte qu'en voulant délimiter
carrément dans le temps et c'était une hypothèse
que nous avions envisagée nous nous posons des obstacles qui,
finalement, se révèlent beaucoup plus contraignants que de
demander que l'entreprise reste ouverte jusqu'à ce qu'il y ait une
solution de remplacement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je suis surpris
par l'intervention du ministre. Je ne peux pas conclure, mais je peux
présumer que le gouvernement va voter contre cet amendement.
Quel est le motif réel de l'amendement proposé par le
député de Maskinongé? On a eu, après la suspension
de six heures, à discuter ensemble sur le déroulement de nos
travaux.
On a constaté que la motion déposée par le
ministre, à la toute fin, écrite sur le coin de la table,
reflétait une situation où on était vraiment pris d'alarme
et il fallait faire quelque chose et essayer de sauver la face.
Si on prend les termes, et pourquoi l'amendement...
M. Gagnon: Si on ne faisait pas tant de politique sur un
problème aussi grave. Il n'est pas question de sauver la face, il est
question de sauver le travail de ces gens-là.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Pagé: Vous pourrez intervenir...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur
l'amendement, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Le ministre dit que, si on accepte la motion
telle que déposée, pour un an, l'amendement tel que
déposé, on sera lié. Il faut quand même constater
que c'est un voeu que la commission va formuler. C'est un voeu purement et
simplement. On s'est fait répondre cet après-midi que
c'était non. Quel est l'intérêt de présenter une
motion comme celle-là à ce moment-là, autant celle qui est
en discussion que celle qui est amendée? C'est de créer une
pression sur l'entreprise, une pression additionnelle. L'Assemblée
nationale, par sa prolongation, la commission parlementaire des richesses
naturelles et des terres et forêts j'aurais espéré
que cela aurait été unanime et j'espère encore que cela
pourra être unanime ne vous demande pas seulement de rester
ouverts jusqu'au dépôt du rapport qui pourrait être fait
vers le 18 ou le 19 octobre.
La session commence le 18 octobre; l'usine doit fermer le 15 octobre.
Qu'est-ce que cela changerait si le rapport était fait vers le 20
octobre avec les conclusions des délibérations de la commission?
Cela ne changerait pas grand-chose. Par surcroît, il y a une autre motion
qui est déposée; je ne veux pas discuter du fond, mais qu'on
prenne seulement l'hypothèse où cette motion que j'ai
déposée serait acceptée et qu'hypothétiquement
encore là, c'est un voeu le ministre dise qu'il accepte de
souscrire au voeu formulé et qu'il dépose les chiffres. Dans
votre mémoire, à la recommandation no 4, vous demandez d'avoir
les éléments suffisants pour pouvoir songer à une autre
formule, peut-être une formule de gestion nouvelle de cette entreprise.
Vous voulez avoir les chiffres réels sur la viabilité et sur la
rentabilité. Ce ne sont pas des choses qui peuvent se faire en trois ou
quatre jours, si le rapport ou les conclusions de la commission arrivent le 18,
le 19, le 20 ou le 25 octobre ou même le 1er novembre ou le 1er
décembre.
On croit c'est ce qu'on soumet respectueusement; on n'a pas
l'intention de faire de la politi-
que avec cela et je ne voudrais pas qu'on commence ce
débat-là, parce que cela pourrait nous mener loin qu'un
délai d'un an serait un délai minimum raisonnable. À
plusieurs reprises depuis le début des travaux de cette commission, je
pense que tous les membres ont été unanimes à dire que
cette commission devenait un forum, un échange d'idées de chacun
des membres de la commission, bien souvent abstraction faite de l'appartenance
de quiconque à un parti politique, plutôt conscients que nous
sommes, depuis le début des travaux de cette commission, des besoins
réels des travailleurs et des intérêts à
défendre et à sauvegarder dans l'étude de toute cette
question des pâtes et papiers. Cela s'est bien passé
jusqu'à maintenant. On formule le voeu, par notre amendement, qu'on
prenne plutôt un délai d'un an. Moi, je sais que ce n'est qu'un
voeu. Cet après-midi, c'est à un mur de béton qu'on s'est
buté. C'était non. On sait que ce n'est qu'un voeu et une
pression additionnelle. Quant à moi, je ne veux pas présumer,
mais j'espère que cet amendement recevra l'approbation de la
majorité et, je l'espère, à l'unanimité des membres
de la commission.
Cet après-midi, le président faisait état de la
démarcation entre le gouvernement et l'Assemblée nationale. Ce
dossier a été traité avec le gouvernement. On est à
l'Assemblée nationale ici. C'est ce qu'il y a de plus
élevé au Québec.
Si le voeu qui est formulé est accepté, ce sera une
pression additionnelle de l'Assemblée nationale à la suite de
tout le travail immense qui a été fait au point de vue
régional par les groupes, les organismes, les corps de pression, etc. Je
pense que, raisonnablement, telle que la motion était, c'est ce pourquoi
on l'a amendée, parler d'un résultat, il n'y a absolument rien de
certain. Cela va être quand? Cela va être le 20 octobre comme cela
peut être dans cinq mois, dans quatre mois, dans deux mois ou dans trois
mois. Or, on croit beaucoup plus raisonnable qu'à l'intérieur du
voeu il faut bien se rappeler que c'est toujours un voeu il y ait
un délai limite et qu'il soit fixé au 30 septembre.
Je termine en disant que nous, de l'Opposition, on appuiera cette motion
et on est heureux de la présenter. J'espère souvent un
temps d'arrêt porte à réflexion que le ministre
pourra revenir sur sa position et que, conjointement, collectivement et de
façon unanime, on pourra dire oui à cette motion. Ce sera, de la
part de l'Assemblée nationale unanimement, de tous les partis
politiques, une pression additionnelle sur la compagnie. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, je suis un peu perdu dans
tout ce débat, après avoir écouté cet
après-midi la compagnie en question et les propos tenus par le ministre,
et aussi après avoir suivi certaines déclarations qui ont paru
dans les jour-neaux.
Je ne voudrais pas ce soir que mes interventions soient reconnues comme
des interventions politiques. Je voudrais regarder ceci d'une façon
très objective. Je suis un peu surpris de l'attitude du ministre, lui
qui a pris une position très catégorique après avoir
examiné et je l'espère, depuis le mois de mars, depuis ce
temps les chiffres que lui a présentés la compagnie et
avoir déclaré devant les ouvriers de cette usine de façon
catégorique qu'il ne pouvait pas forcer la compagnie à revenir
sur sa décision. Et ce soir, qu'on nous présente une motion comme
celle-là, cela m'amène à être d'accord sur la
façon dont la motion a été présentée et
amendée pour deux raisons bien particulières.
Premièrement, si le gouvernement est d'accord avec la compagnie pour une
question économique, c'est évident que la motion ne suffit pas
pour permettre à d'autres organismes qui sont intéressés
à trouver une solution valable pour régler le problème,
comme l'a dit le député de Maskinongé.
Il est évident qu'au début ou à la fin d'octobre,
le rapport de la commission sera déposé en Chambre et, là,
la compagnie pourra, le lendemain, fermer ses portes. Donc, je crois qu'il
s'agit actuellement d'établir d'une façon très ferme une
date précise afin de permettre et je vais vous dire tout à
l'heure pourquoi à tous ces organismes qui s'occupent de ce cas
de tâcher de trouver une solution valable à ceux qui sont pris
avec le problème.
Je ne comprends pas, depuis tout ce temps, que le gouvernement ne soit
pas arrivé à une autre solution, très ferme dans ce cas,
qu'accepter celle de la compagnie. Crée-t-on un problème à
la compagnie? Elle a dit non. Elle-même, cet après-midi, a
tacitement admis qu'elle ne faisait pas de déficit. On ne demande pas de
créer un fardeau additionnel à la compagnie, on lui demande
simplement de retarder au 30 octobre 1978 la fermeture de cette
société. Je pense que c'est là une chose bien
raisonnable.
Bien au contraire, si la compagnie perdait des millions et des millions,
on serait peut-être injustifié de le faire, mais ce n'est pas le
cas. Deuxièmement, je pense que les gens qui veulent réellement
essayer de corriger ce problème doivent avoir un peu de temps pour
retourner le tout. Si la compagnie, comme elle l'a admis, cet
après-midi, qu'elle était au courant de cette fermeture depuis
1974, avait, il y a deux ans, au moins en 1975, donné avis soit au
gouvernement ou à ses employés qu'en 1977 ce serait fermé,
là on pourrait dire qu'elle a donné au moins un délai
raisonnable.
Mais, dans les circonstances, je trouve qu'il y avait un manque de la
compagnie. De l'autre côté, je ne peux admettre qu'un
gouvernement, quel qu'il soit, que ce soit un gouvernement libéral, un
gouvernement péquiste ou même un gouvernement de l'Union
Nationale, n'ait pas pu, dans six mois, trouver une solution pratique à
un problème aussi fragile que celui-là. Dans les circonstances,
je pense que cet amendement est juste et raisonnable. Je pourrais soulever
plusieurs autres raisons, mais je pense que seulement cela suffit pour dire que
je suis d'accord avec l'amendement à cette motion proposé par le
député de Maskinongé. Je vais me déclarer en faveur
de son amendement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: II va de soi que l'amendement qui est proposé
est dans l'esprit de la motion elle-même. Le problème que nous
envisageons, nous serons obligés de le réenvisager au cours de la
deuxième quinzaine d'octobre avec le cas d'East Angus, qui est loin
d'être réglé également. Même s'il y a des
députés qui pourraient prétendre qu'on fait de la
politique, on n'en fait pas ce soir puisque les journalistes qui sont ici
n'écrivent pas une ligne. L'heure de tombée des journaux est
passée. Il n'y a plus rien qui va s'écrire demain.
Ce n'est pas dans ce but qu'on va travailler à la commission et
cela va aller d'autant mieux qu'il n'y en a pas qui travaillent pour la presse
ce soir, mais il y a peut-être des vérités qu'on doit se
dire. J'ai rarement vu un rapport aussi froid comme analyse et aussi correct
que celui qui vient de nous être déposé par la FTQ cet
après-midi et qui fait l'analyse d'une situation; c'est effrayant comme
elle ressemble à celle d'East Angus qu'on envisagera la semaine
prochaine.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur
l'amendement, M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: J'y viens. Je voudrais bien que le temps qu'on se
donne ici sur l'amendement, ce soit un temps où le ministre pourra se
pencher pour trouver des éléments de solution. Dans un cabinet il
y a des ministres qui sont forts et il y en a d'autres qui sont plus faibles.
L'amendement qu'on propose, c'est pour donner un peu de prestige, un peu d'aide
au ministre pour aller se battre au cabinet pour obtenir des choses. Le
ministre Lazure a obtenu pour la santé la carte médicale gratuite
pour toutes les personnes qui ont 65 ans et plus. Quand on se bat dans un
cabinet, si on est ministre, il y aurait peut-être eu lieu d'amener un
amendement à celui de Lazure et lui dire: Les 65 ans et plus, qui
comprennent Maurice Bellemare, Jean Lesage et le juge Trahan et du monde de
même, ils pourraient payer leurs médicaments, eux.
Non, non, ce que je vous dis là, ce sont des recommandations que
vous pourrez apporter au cabinet parce que l'enquête est
déjà là et on sait les personnes qui peuvent payer leurs
médicaments.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton, sur l'amendement, s'il vous
plaît.
M. Grenier: M. le Président, je pense que je suis en plein
dans le coeur de l'amendement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce n'est
pas la commission des affaires sociales.
M. Grenier: Je veux qu'on se donne un an.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. Là c'est conforme.
M. Grenier: Quand on se donne un an pour étudier cela,
c'est pour permettre au ministre d'aller voir ce qui se passe là. Il y a
des sommes qui vont se perdre. Je ne suis pas sûr du tout que Jean
Lesage, Maurice Bellemare et le juge Trahan sont contents de voir payer leurs
médicaments par la société et peut-être bien que
l'argent qu'on pourrait récupérer avec cela pourrait aider.
On ne connaît pas encore la situation de la Consolidated au
Cap-de-la-Madeleine. Peut-être bien qu'on apprendra, quand vous aurez
déposé vos documents comme on le réclame ici au
numéro 1, qu'ils n'ont pas assez d'argent pour fonctionner. Je ne le
sais pas. Le ministre le sait peut-être. La compagnie le sait
sûrement. Les gens qui sont ici ne le savent pas et la population ne le
sait pas.
Si ces gens n'ont pas d'argent, il faut le récupérer
quelque part. Je suis capable d'admettre que le gouvernement ne peut quand
même pas que dépenser tout le temps. Il faut qu'il prenne l'argent
quelque part. Il y a une bataille à livrer là. Il y en a un, un
ministre qui est là, M. Léger, de l'environnement. Il peut vous
aider pour cela. Notre résolution va nous aider pour cela. Cela ne
coûterait pas plus cher de récupérer de l'argent si jamais
la compagnie en a besoin. La preuve n'est pas faite qu'elle en ait besoin. On
le verra. On vous demande un an pour réfléchir là-dessus.
La résolution dans le contexte actuel sans amendement ne me plaît
pas, parce qu'on a pas assez de recul pour savoir où on va aller avec
cela.
On a proposé un an. Cela me semble logique. On avait un
amendement tout près de nous autres, mais conme on parle toujours le
troisième, on se fait voler nos amendements. Ce n'est pas la
première fois.
M. Pagé: Pauvres vous autres, vous faites
pitié!
M. Grenier: Ah non, on va arriver les premiers, ce ne sera pas
long.
M. Pagé: Que vous faites pitié!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît.
M. Grenier: Donnez-nous une élection
générale et on tombera les premiers.
M. Pagé: C'est donc terrible!
M. Grenier: En dehors de cela, je voudrais bien qu'on prenne les
moyens de trouver, ce qu'il faut pour régler le problème et je ne
suis pas sûr devant les déclarations du ministre, cet
après-midi, qu'on l'ait dans notre sac, ce qu'il faut pour régler
le problème parce que quand il est rendu que c'est un voeu qu'on
émet, à l'égard d'une compagnie, ce n'est pas fort un
voeu, alors, à partir de là, je ne suis pas sûr qu'on va
l'avoir vis-à-vis de la compagnie et je ne suis pas sûr qu'on ne
pourrait pas, d'ici un an, se trouver des moyens de pression pour obliger la
compagnie à ouvrir. Tout
le monde sentait cet après-midi que la compagnie n'est pas
bénéficiaire du bien-être social, selon toute
vraisemblance. Il semble bien qu'elle est capable de fonctionner encore pendant
un an et il n'y a pas beaucoup de monde qui va en souffrir. Il y aura
peut-être moins de gens qui iront souper au Toit de Québec, mais
en attendant, il y aurait peut-être lieu de faire fonctionner la
compagnie pour permettre à ses employés... je fais le même
plaidoyer, parce que la semaine prochaine, il faudra parler d'un autre groupe,
soit une ville qui va fermer cette fois-là, non pas une compagnie, c'est
une ville complète qui va fermer, la semaine prochaine ou dans deux
semaines. Je pense bien qu'il serait peut-être bon qu'on envisage tout de
suite des éléments de solution et on veut vous aider. Je voudrais
bien que le cabinet soit sensibilisé à cela et j'aimerais qu'il y
ait du monde ici qui nous écoute. Le ministre du Travail devrait
être assis là, au lieu de vendre des cartes du PQ à East
Angus ce soir. J'aimerais le voir assis là. Ce serait important qu'il
soit ici. C'est son ministère qui est impliqué ce soir aussi. Il
y a 400 personnes qui sont représentées par quelques-uns ici et,
eux, ils sont mis à pied. Ce n'est plus qu'une question de quinze jours
et pendant ce temps-là on fait des blitz et on vend le PQ et on se
promène à East Angus principalement. Et je vais lui dire
personnellement, je vais le voir après la veillée. J'aimerais
qu'on l'entende. J'aimerais qu'il soit ici pour qu'il entende ce qui s'y dit et
que l'on se parle entre nous. Cela ne sera même pas écrit demain
matin dans les journaux.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton, sur l'amendement s'il vous
plaît!
M. Baril: ... chez vous.
M. Grenier: Je les règle mes problèmes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Arthabaska. M. le député de
Mégantic-Compton sur l'amendement.
M. Grenier: C'est votre député d'Arthabaska qui
m'amène en dehors de mon problème.
Une voix: Ne vous chicanez pas! Soyez calmes, soyez sereins!
M. Grenier: M. le Président, je dis que de notre
côté on sera en faveur de cet amendement et que c'est un moindre
mal. Le gouvernement actuel, qui avait toutes les solutions avant le 15
novembre, il faudrait faire attention quand on est dans l'Opposition et qu'on
n'a jamais été le gouvernement, on fait face à des
problèmes comme celui de ce soir, comme celui d'aujourd'hui. C'est
fatigant de rencontrer des gens qui ne sont pas satisfaits. Mais, quand on se
faisait dire qu'ils avaient tous les éléments de solution, il
semble en manquer. On veut vous aider à en trouver une, et on va
siéger ici et on va essayer de vous aider. On va se donner un an et on
va siéger à nouveau en commission avec le même monde.
J'écoutais des gens qui disaient cet après-midi qu'ils
étaient surpris de voir comment il y avait des gens qui étaient
sensibilisés au problème de la Wayagamack.
Ces gens qui sont ici sont de bonne foi, mais on sait qu'il y a des gens
qui sont ici, à cette table, et on voit jusqu'à quel point,
à la suite des questions qui ont été posées en
Chambre, les gens sont saisis de ce problème. On est en mesure de vous
aider, on ne fait pas seulement une opposition pour déplaire au
gouvernement et mettre du sable dans l'engrenage, on veut trouver des
solutions. Ce que je vous ai dit tout à l'heure, c'est peut-être
bien plus sérieux que vous ne pensez, il y a des sommes qui vont se
gaspiller, et si le ministre Lazure a trop d'autorité au cabinet et fait
faire des dépenses comme celles-là au gouvernement, il faut aller
récupérer.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur
l'amendement, s'il vous plaît, pour la quatrième fois!
M. Grenier: On demande d'avoir une offre, il faut tout de
même offrir quelque chose au ministre. Il est allé offrir, tout
à l'heure, aux gens qui sont ici, de trouver une solution. C'est le
monde à l'envers. On a élu le gouvernement pour administrer la
province. Que le gouvernement trouve des solutions et qu'il dise à la
FTQ qui est ici: On va en discuter autour de la table. Très bien, mais
dire à la FTQ: On n'a pas de solution, pourriez-vous nous aider?
M. Gagnon: L'amendement!
M. Grenier: Voyons donc! J'ai mon voyage de ça! Le
gouvernement propose des solutions et demande aux gens de les appuyer et de les
discuter, c'est cela, l'administration.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gagnon: D'accord! Il n'y a pas de journaliste ici.
M. Grenier: Ce n'est pas là-dessus que je compte, mais je
compte que le gouvernement va trouver des éléments de solution et
va demander à la table, ici, de les analyser.
M. Gagnon: Commencez par vous impliquer, monsieur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grenier: Pas de dire aux gens: Trouvez-nous des solutions.
Quand c'est rendu que le ministre demande aux gens: Avez-vous quelque
chose? Nous, on n'en a pas.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton...
Une voix: C'est une consultation. M. Gagnon:
L'amendement!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton, s'il vous plaît! Je
pense qu'il est, à ce stade-ci, de mon devoir de vous dire, d'abord,
pour la cinquième fois, de revenir sur l'amendement et, d'autre part, de
dire je pense que cela touche à mon mandat de président
que cette prolongation de l'Assemblée nationale ne peut
qu'émettre des voeux, puisque vous avez laissé entendre qu'on
émettait un voeu de l'Assemblée nationale. En fait, à
titre de président, je dois vous dire qu'elle ne peut, à ce
stade-ci, qu'émettre un voeu; le gouvernement peut faire autre chose,
mais je suis président d'une commission parlementaire qui est la
prolongation de l'Assemblée nationale et cette Assemblée ne peut
qu'émettre un voeu.
D'autre part, j'aimerais également, puisque je pense que c'est
mon devoir de président, informer que non seulement les intervenants
peuvent interroger le ministre et les députés, mais que les
députés de quelque parti politique que ce soit
peuvent également interroger les intervenants.
Là-dessus, je vous demande de revenir à l'amendement.
M. Grenier: Sur l'amendement, M. le Président. Je ne
demanderai pas au gouvernement de faire autre chose, seulement de faire quelque
chose. Ce sera déjà un début, s'il fait quelque chose. Je
voudrais bien... on va avoir l'occasion tout à l'heure de revenir sur le
fond de la motion, et on va avoir ensuite l'occasion de revenir sur le
mémoire puisqu'on n'a encore pu interroger personne, à cause des
motions, mais on reviendra sûrement là-dessus pour pouvoir
interroger les gens qui sont là et qui ont peut-être des
éléments de solution à nous donner.
Je vais vous dire que l'amendement, tel qu'il est là, bien
sûr qu'on va l'appuyer, et je suis convaincu que cette motion qui va
être recevable à l'unanimité, sans aucun doute, va
être de nature à aider le ministre à aller défendre
son projet auprès du cabinet, lui donner de la force, et il arrivera
là-bas en disant qu'il y a unanimité des partis d'Opposition qui
sont ici représentés, c'est notre but de vous aider, pas autre
chose que cela. Je pense que la situation est rendue assez loin et elle peut se
multiplier ailleurs, pas parce que le ministre manque de
sincérité. S'il est un ministre que je respecte dans le
gouvernement, c'est le ministre des Terres et Forêts et je veux vous le
dire. Vous n'avez jamais manqué de sincérité devant ces
gens qui sont là et devant l'Assemblée nationale non plus,
jamais. Il serait peut-être bon qu'on dise aux autres de se taire un peu
plus, par exemple, de ne pas vous embarquer dans des engrenages et de ne pas
aller semer des espoirs, si ce n'est pas vrai, mais à vous, M. le
Président, le ministre des Terres et Forêts n'a répondu que
la vérité tout le temps. C'est un homme pondéré et
j'aime à le lui dire, même si, à la prochaine
élection, un candidat de l'Union Nationale lui donne de la
difficulté, c'est un ministre qui a été
pondéré dans ses propos.
Mais, dans des situations comme celle que vit actuellement le
Cap-de-la-Madeleine, on n'a pas le droit d'aller semer des espoirs comme cela
s'est fait à Sherbrooke, encore la semaine passée, alors qu'un
ministre déclare une chose et que le premier ministre dit autre chose.
On a affaire à un ministre pondéré, qui connaît les
problèmes en profondeur, je pense. Personnellement, j'ai eu à le
rencontrer et je me suis rendu compte qu'il connaît ces problèmes.
Est-ce qu'il a tous les éléments de solution? Peut-être
pas, on est ici pour l'aider. Ce n'est pas facile, on le sait. On va tenter
d'en trouver. On se donne un an pour ça avec l'amendement.
Vous pouvez être sûr que, si vous réunissez la
commission pour ça, on va tenter de trouver des éléments
de solution. Vous avez des gens autour de vous et ce ne sont pas des gens
dépourvus, on le sait, au ministère des Terres et Forêts.
Ils sont capables de vous proposer des éléments de solution qui
seront peut-être acceptés par ces gens-là, les gens du
milieu et les membres de l'Opposition qui sont ici pour vous aider.
Mais, de grâce, que les autres arrêtent de vous nuire
là-dedans, on fait ça pour vous aider, avec cette proposition. On
reviendra sur la discussion de fond.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Montmagny-L'Islet, sur l'amendement.
M. Giasson: Très brièvement, M. le
Président. Évidemment, je donne un appui à la motion
d'amendement proposée par le député de Maskinongé.
Mais, personnellement, je ne voudrais pas qu'on consacre tellement de temps aux
débats autour de l'amendement et de la motion principale parce que cette
motion, telle que présentée par la commission parlementaire,
même si c'est un désir du ministre des Terres et Forêts
lui-même, selon moi, va demeurer simplement un voeu pieux et ne
dépassera jamais le stade des bonnes intentions, comme on en a vu tant
de fois par le passé.
Comment voulez-vous croire qu'une telle motion, qui émet
simplement un voeu, puisse être entendue et écoutée de la
part de la compagnie lorsqu'il y a quelques moments à peine, le ministre
lui-même nous indiquait qu'à deux occasions, il a
communiqué avec la compagnie pour faire une pression en vue de
convaincre la compagnie de retarder la fermeture de l'usine et que sa voix n'a
pas été entendue, lui qui a la responsabilité du secteur
des terres et forêts, donc des pâtes et papiers? Comment croire que
ce voeu pieux puisse être entendu par les autorités de la
compagnie lorsque, cet après-midi, nous avons entendu une réponse
tellement catégorique de la part du représentant de cette
compagnie?
À tout événement, personnellement, je serais plus
intéressé à reprendre le débat avec les
représentants de la fédération puisque, dans les
recommandations que ces gens font, il m'apparaît
que certaines recommandations mériteraient d'être
examinées en profondeur. Personnellement, je vous indique que j'appuie
la motion de mon collègue de Maskinongé, mais je ne crois pas
qu'on débouche sur grand-chose et que ce soit même une
étape valable vers une solution dans le sens des recherches des
travailleurs de la Wayagamack.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: Merci, M. le Président. Je ne ferai pas un long
discours sur le problème de la Wayagamack. Je pense que tout le monde
connaît mes positions là-dessus. Je voudrais juste dire que la
proposition, telle que présentée, me plaît, mais, à
mon point de vue, elle n'est pas tout à fait assez explicite. On a
apporté un amendement à un an qui ne me satisfait pas tout
à fait. Je me demande je ne voudrais pas allonger les
procédures si un sous-amendement ne ferait pas le consensus. Je
ne sais pas si ça peut allonger les procédures, ce n'est pas du
tout dans ce sens que je le fais.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Parfois,
les sous-amendements raccourcissent les procédures.
Sous-amendement
M. Gagnon: On dit "reporter à un an". Un an, cela peut
nous empêcher de trouver une nouvelle vocation à l'usine à
l'intérieur d'une période donnée. J'ajouterais, en
sous-amendement, "à un an ou jusqu'à ce qu'on trouve une nouvelle
vocation à cette usine". Est-ce que cela pourrait améliorer?
M. Grenier: "Filibuster".
M. Picotte: II n'y a rien là.
M. Gagnon: C'est la même chose?
M. Pagé: Mais est-ce que vous avez le droit de faire un
sous-amendement?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Russell: "Filibuster".
M. Gagnon: De toute façon, ce que je veux apporter, en
fait, c'est l'éclaircissement en ce sens que, si on trouve une nouvelle
vocation d'ici un, deux ou trois mois...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que vous en faites un sous-amendement?
M. Gagnon: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que vous pouvez me rédiger votre sous-amendement?
Je vais essayer de vous lire cette motion principale telle
qu'amendée et sous-amendée, si le sous-amendement était
adopté. "Nonobstant toute considération économique et vu
l'impact social de la fermeture de l'usine Wayagamack de la compagnie
Consolidated-Bathurst Ltée, la commission parlementaire des richesses
naturelles et des terres et forêts émet le voeu que la compagnie
retarde la fermeture de son usine du Cap-de-la-Madeleine d'ici le 30 septembre
1978 ou jusqu'à ce qu'une solution de remplacement soit trouvée".
C'est cela?
M. Gagnon: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cela
veut dire, si je la comprends bien, que si une solution n'est pas
trouvée le 30 septembre 1978, la compagnie doit demeurer ouverte, parce
qu'il n'y a pas de solution de remplacement.
M. Russell: Le 30 septembre est une date limite.
M. Vaillancourt (Orford): De la façon dont je le
comprends, le 30 septembre serait la date limite, mais cet amendement apporte
une ouverture en disant que, s'il y avait un règlement avant le 30
septembre, le cas serait réglé.
Des voix: Adopté.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! M. le député de Portneuf.
M. Pagé: ... quant à nous, nous considérons
que ce sous-amendement n'ajoute pas beaucoup à l'amendement
présenté par le député de Maskinongé qui
était en discussion. Je trouve cependant curieux qu'on souscrive
à l'amendement, en y ajoutant quelques mots, lorsque le ministre, deux
ou trois minutes avant, disait que ce n'était pas acceptable. Mais quand
même, sans vouloir prolonger le débat, on est favorable. Qu'on
passe à autre chose et j'espère que ce sera adopté, d'une
part, unanimement, et que cela sera transmis dans les plus brefs délais
à la compagnie.
Adoption de la motion telle qu'amendée et
sous-amendée
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion principale du député de Matane, telle
qu'amendée par le député de Maskinongé et
sous-amendée par le député de Champlain, sera
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion est adoptée.
S'il vous plaît! Une deuxième motion m'avait
été présentée quelques minutes avant l'heure de
la
suspension des travaux par le député de Portneuf.
Après avoir délibéré sur cette motion, je la
déclare recevable et, en conséquence, je cède la parole au
député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président...
M. Grenier: Est-ce qu'on pourrait avoir copie des amendements et
de la motion?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense
qu'ils vous sont distribués à l'instant même.
M. Grenier: D'accord.
Motion pour dépôt de documents
(suite)
M. Pagé: M. le Président, je vous remercie d'avoir
déclaré ma motion recevable. Je vais simplement résumer
les motifs que j'ai invoqués cet après-midi, à l'appui de
la présentation que j'en ai faite, à savoir que, la commission
parlementaire étant la prolongation de l'Assemblée nationale,
nous avions le droit d'exiger le dépôt de ces documents en vertu
de notre règlement. J'avais fait référence à
l'article 153 de notre règlement qui, lorsqu'un groupe, un organisme,
une personne physique ou une personne morale comparaît et qu'on cite un
document, nous donne le droit d'exiger le dépôt de ces documents.
Dans les cas où c'est demandé et que c'est refusé, lorsque
le rapport se fait à la Chambre, rapport est fait au président
qu'il y a eu refus de produire ledit document.
M. le Président, tout tourne autour de cette fameuse question: la
rentabilité du budget spécifique et particulier de l'usine
Wayagamack au Cap-de-la-Madeleine. Qu'est-ce que le portrait du tableau
financier en termes de bénéfices, en termes de
dépréciation, au point de vue de la fiscalité? Quel est le
dossier? Je pense qu'il aurait été très utile aux membres
de la commission d'avoir les chiffres exacts pour travailler ou
délibérer. M. le ministre a invoqué la
confidentialité, l'engagement qu'il avait pris à l'égard
de la compagnie de ne pas divulguer les chiffres ou le dossier qui lui avait
été fourni pour étudier toute cette question avant qu'il
n'en arrive à cette conclusion dont il nous a fait part cet
après-midi et qui avait précédemment été
faite aux travailleurs, la semaine dernière.
Compte tenu, de plus, qu'à la recommandation no 4 du
mémoire présenté par la Fédération ceux-ci
demandent à cette commission d'avoir les éléments, d'avoir
le plus de renseignements possible pour étudier et le dossier de la
Wayagamack, d'une part, et, d'autre part, envisager des formules de gestion
différentes, forts de l'expérience qui a été faite
dans d'autres domaines.
M. le Président, selon moi il est absolument essentiel, si on
veut que le travail soit fait de façon valable et concluante, avec
toutes les coordonnées, il est essentiel pour ces gens d'avoir les
informations pertinentes. C'est donc dans cet esprit qu'à plusieurs
reprises, de façon répétée, nous avons
demandé cet après-midi, et comme j'en faisais état tout
à l'heure lors de la discussion de l'autre motion, on s'est buté
à une fin de non-recevoir. Le motif du ministre de refuser,
alléguant les engagements qu'il avait pris à l'égard de la
compagnie, je formule le voeu, par ma motion, que le ministre c'est
vraiment en tant qu'assemblée je formule le voeu que cette
commission demande, par le voeu qu'elle formule, requière de la part du
gouvernement, sous l'égide du ministre des Terres et Forêts, de
fournir à la commission et, par le fait même aux parties
intéressées, tout le dossier, tous les renseignements pertinents
quant à l'analyse financière, l'étude des budgets, le
bilan, etc., enfin tout ce qui était au dossier on peut
présumer que c'était au dossier pour une étude
sérieuse, et que le ministre des Terres et Forêts a certainement
entre les mains.
J'espère, je conclus là-dessus parce que je ne veux pas
prendre tout le temps de la commission, j'espère que cette motion que
vous avez jugée recevable, M. le Président, recevra aussi
l'approbation unanime des membres de la commission.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: Compte tenu, comme le ministre l'a mentionné
cet après-midi, qu'au moment même du début du
problème de la Wayagamack et pour obtenir les chiffres, toutes les
informations voulues pour être capable d'avancer et essayer de trouver
une solution au problème, le ministre a dû s'engager à
garder la confidentialité des chiffres, c'est à ces conditions
que la compagnie a accepté d'ouvrir ses livres. Je pense qu'il faut
respecter la parole d'un ministre qui a toujours été franc
à venir jusqu'à maintenant, et qui a toujours respecté sa
parole. C'est pour cela qu'à cette résolution je proposerais un
amendement qui pourrait être ajouté après les mots "veut
que": "que la société Consol-Bathurst dégage le ministre
des Terres et Forêts de ses engagements à la
confidentialité " et se poursuivrait par la suite. J'en ai un peu
donné l'explication. Cela permettrait au ministre de ne pas manquer
à sa parole, et de la façon dont la résolution est faite,
c'est simplement la commission qui demande à la compagnie de permettre
de rendre ces chiffres publics.
M. Grenier: Le fait d'avoir une motion dégage
déjà le ministre. Le ministre n'est pas responsable que la
commission ait déposé une motion, et le député de
Portneuf a déposé une motion. À ce moment-là, il
est déjà dégagé. C'est le sens de mon intervention.
La motion du député de Portneuf était pour dégager
le ministre. On va perdre du temps avec un amendement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
l'article 70 dit qu'un amendement doit se rapporter directement au sujet de la
motion proposée. Je pense que la motion d'amendement se rapporte au
sujet de la motion proposée. Il ne peut avoir que les objets suivants:
retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres. Je pense que la
motion d'amendement du député de Champlain ajoute des mots. Il
est irrecevable si son effet est
d'écarter la question principale. La question que le
président doit se poser: Est-ce que la motion d'amendement du
député de Champlain a pour effet d'écarter le sens
principal de la motion du député de Portneuf, qui émettait
le voeu que le ministre rende publics les renseignements qui lui avaient
été donnés par la compagnie? Or, j'estime que cet
amendement ne va pas à l'encontre de la question principale et qu'au
contraire il la complète. Si je me fie aux dernières
interventions du député de Mégantic-Compton qui disent que
la motion du député de Portneuf, c'est ce qu'elle voulait dire,
je ne pense pas que cette motion d'amendement aille à l'encontre de la
question principale puisque le voeu que formule le député de
Portneuf serait encore compris dans la motion amendée, si celle-ci
était adoptée.
D'autre part, il n'y a aucune condition qui est écrite dans la
motion d'amendement. Autrement dit, la motion d'amendement du
député de Champlain ne comporte pas de si ou de condition. On
ajoute un voeu, le voeu que l'on formule au ministre est encore là, mais
on exprime également le voeu à la compagnie Consolidated qu'elle
dégage le ministre de sa responsabilité ou de son engagement. Or,
je ne pense pas que cette motion soit irrecevable; au contraire, je la
déclare recevable, compte tenu du fait qu'elle ajoute des mots, qu'elle
a rapport au sujet de la motion du député de Portneuf et qu'elle
n'écarte pas le sens principal de la motion du député de
Portneuf qui était de voir le ministre rendre publics ces documents.
M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Vous vous êtes prononcé, et je ne veux
pas intervenir mais on va la discuter; on peut bien l'ajouter, bien sûr,
à la proposition du député de Portneuf. Mais j'avais
l'impression que vous étiez pour la déclarer ce grand
terme qui nous allait si bien dans la loi 101 superfétatoire. Il
me semble qu'elle vient d'en donner un peu plus que le client n'en demande. Le
seul fait qu'on avait déjà une motion, je pense qu'on
dégage le ministre, c'est public; c'est bien clair que la motion qu'on
amène là est, de toute évidence, une motion qui a pour
effet de dégager le ministre du cachet intime qu'il devait avoir avec la
compagnie. Cela ne me dérange pas d'accepter l'amendement du
député de Champlain, mais je pense qu'on perd quelques minutes
à en donner un peu plus que le client n'en demande.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, l'amendement
présenté ajoute quelque peu, si on peut dire, à la motion
déposée. De toute façon, c'est un voeu. Si la compagnie ne
veut pas lui donner une suite positive, elle n'est pas obligée parce que
c'est strictement un voeu. La même chose, si elle ne veut pas
dégager la responsabilité du ministre pour lui donner bonne
conscience au chapitre de la confidentialité. La compagnie pourra dire:
Je ne vous relève pas de la confidentialité, je ne vous
relève pas de l'engagement que vous avez pris, cela ne sera pas plus
compliqué que cela. De toute façon, si j'ai déposé
cette motion, c'est pour créer une pression et pour éviter de se
prévaloir de l'article 153 parce que celui-ci nous donne le droit
d'exiger, de la compagnie, de le déposer au retour en Chambre. Or,
j'espère que le voeu exprimé par la commission sera non seulement
entendu mais accepté par la compagnie; de toute façon, si c'est
refusé, il reste l'article 153.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Effectivement, M. le député de Portneuf, vous avez
parfaitement raison quant à l'interprétation de l'article 153,
qui dit que le président peut prendre les moyens nécessaires pour
que la demande de la commission, demande d'ailleurs qui a été
faite, soit satisfaite. Nous n'en sommes pas rendus au stade de l'application
de l'article 153, nous en sommes au stade des voeux. Est-ce que l'amendement du
député de Champlain sera adopté?
M. Russell: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion, telle qu'amendée, est adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Pagé: Vote enregistré.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le vote
enregistré ayant été demandé sur l'adoption de la
motion telle qu'amendée, j'ai cru...
M. Pagé: Pardon?
Vote sur la motion amendée
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'ai cru
reconnaître que l'amendement était adopté, mais lorsque
j'ai dit: "Est-ce que la motion tel qu'amendée est adoptée?", on
a demandé un vote enregistré. M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: C'est parce que le ministre veut s'abstenir. Le
ministre ne veut pas voter. À ce moment, c'est de demander un vote
enregistré.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Baril, Arthabaska?
M. Baril: Pour. M. Pagé: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bérubé, Matane?
M. Bérubé: Abstention.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Bordeleau, Abitibi-est?
M. Bordeleau: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Russell,
Brome-Missisquoi?
M. Russell: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Desbiens, Dubuc?
M. Desbiens: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Pagé, Portneuf?
M. Pagé: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Giasson,
Montmagny-L'Islet?
M. Giasson: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Grenier,
Mégantic-Compton?
M. Grenier: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne
vous rappelle pas encore assez souvent à Tordre. Gendron, Abitibi-Ouest?
Brassard, Lac Saint-Jean? Vaillancourt, Orford?
M. Vaillancourt (Orford): Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Lévesque, Kamouraska-Témiscouata?
M. Lévesque: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Marcoux,
Rimouski? Marquis, Matapédia? Mercier, Berthier?
M. Mercier: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Picotte,
Maskinongé? Gagnon, Champlain?
M. Gagnon: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion telle qu'amendée hormis que j'aie une feuille de la
séance d'hier, mais il me semble que vous étiez membre hier
Une voix: Je ne serais pas membre aujourd'hui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un
instant, s'il vous plaît.
Une voix: On n'a pas eu de remplacement ce matin.
M. Pagé: Voyez la délicatesse qu'on a eue de vous
laisser parler, M. le ministre, dans un effort de contribution.
M. Bérubé: Je vous le revaudrai.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Malheureusement, le nom du ministre de l'environnement n'est pas sur la liste
pour aujourd'hui. La motion tel qu'amendée est adoptée.
M. Pagé: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
vous demander simplement une question technique soit de faire parvenir un
télégramme à la compagnie pour exprimer le voeu que la
commission vient de formuler?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Effectivement, dans les deux cas. Je pense que le député de
Portneuf avait posé ses questions. Le député de
Brome-Missisquoi, est-ce que l'Union Nationale avait posé ses questions
sur le mémoire de la FTQ?
M. Russell: Pas encore.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pas
encore. Considérant le fait qu'il est maintenant 21 heures et 12
minutes, que nous sommes sur des questions de procédure et de motion
depuis environ une heure, compte tenu du fait que ce n'est pas la faute,
évidemment, des gens qui sont en face de nous, mais compte tenu du fait
également qu'il y a quand même deux autres intervenants qui sont
dans la salle et qui souhaiteraient commencer leur intervention, je demande la
collaboration de tout le monde pour essayer de faire en sorte de faire avancer
les débats le plus possible. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Pour notre parti, pas besoin de vous dire, d'abord
qu'on n'a pas régularisé les périodes de questions
à cette commission-ci. C'est donc dire que quand on arrive pour parler,
en troisième position, il se trouve toujours qu'il y a des gens qui se
sont fait approcher par un autre groupe, et cela nous prive de nos questions.
Mais dans ce cas-ci, bien précisément, pour les gens, comme on
l'a dit, qui ont présenté un mémoire peut-être bref,
mais qui parle dans des termes on ne peut plus vrais, nous allons être
courts, bien sûr, et leur dire jusqu'à quel point nous sommes
sensibles au travail qui se fait dans la région du Cap-de-la-Madeleine,
et sensibles également au mémoire qu'ils présentent qui a
l'air de correspondre exactement à la trop triste réalité
qui se passe à Wayagamack.
Les gens qui sont ici, qui accompagnent les représentants des
travailleurs qui sont à notre table, sont, bien sûr, eux aussi
soucieux de connaître des éléments de solution à
leur problème. Je voudrais bien qu'ils comprennent que de ce
côté-ci de la table, je pense des deux côtés de la
table, il n'y a personne qui désire voir tant de mises à pied
dans une quinzaine de jours. Ces gens portant la tête trop haute pour en
faire des bénéficiaires du bien-être social ou bien des
chômeurs qui deviendront professionnels si cela devait trop durer. Nous
limiterons notre période de questions à
ne pas en poser afin de leur dire toute l'appréciation que nous
avons pour le mémoire, puisqu'on l'a regardé, on l'a
étudié et on a entendu les questions qui ont obtenu des
réponses, des questions qui étaient claires, des autres gens
autour de la table et des réponses pas moins précises qui sont
venues de ces gens. Avec quelle conviction ils ont défendu leur
mémoire.
Je peux vous dire que dans la personne de M. André Charest, qui
est le président là-bas, vous verrez sans doute et je vous invite
à venir voir le président du comité ad hoc qui a
peut-être communiqué avec vous depuis quelque temps, sinon il
aurait dû, parce que vous êtes venus ici avec tellement de
conviction et tellement de justesse défendre ce dossier que vous avez
des problèmes communs. Ce que vous dites dans des mots très brefs
sera dit dans un autre mémoire qui s'en vient peut-être un peu
plus volumineux, mais un mémoire qui ne dit pas moins que le
vôtre. Je voudrais bien que vous ayez réussi, aujourd'hui, avec
les quelques minutes qui vous ont été allouées à
sensibiliser tout le monde ici et que votre intervention ait réussi
à donner assez de poids, par la motion qu'on vient de se donner,
à notre ministre des Terres et Forêts pour qu'il réussisse
à convaincre le cabinet de l'appuyer.
Vous savez, vous êtes rompus à ces choses, vous les
témoins qui êtes ici aujourd'hui; vous êtes rompus à
ces choses, savoir de quel appui il a besoin au cabinet pour faire ensuite les
pressions sur cette compagnie afin qu'elle continue d'opérer au moins
jusqu'à ce qu'on ait trouvé des éléments de
solution. On connaît trop les gens de la Mauri-cie, leur courage, ce
n'est pas leur intention du tout d'arrêter de travailler le 15 octobre.
Vous êtes des gens qui avez réussi, dans ce trop court cahier,
à résumer la pensée de cette volonté triflu-vienne;
je voudrais bien que vous compreniez que nous, de notre parti, nous voudrions
vous voir réussir et que ce délai qu'on s'est donné, cette
période de douze mois, fasse qu'en dedans de cette année, on ait
trouvé les éléments de solution qui permettraient à
cette population de continuer à travailler.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y a d'autres intervenants? M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, j'ai pris connaissance du
mémoire de la fédération des travailleurs et
également de l'autre mémoire qui a été
préparé par le comité de citoyens. À la page 10 du
mémoire du comité des citoyens, les auteurs proposent
différentes hypothèses que pourrait utiliser la compagnie en vue
de diminuer les coûts de la matière première à
l'usine. On retrouve, entre autres, comme mesure temporaire, une suggestion de
fournir l'usine du Cap-de-la-Madeleine en transportant par camion le bois
déjà rendu à l'usine de Trois-Rivières, ce qui
pourrait aisément constituer une économie de $15 le cunit, selon
le voeu même de la Consolidated-Bathurst. À quel moment la
compagnie vous a-t-elle fait part de ces chiffres?
M. Charest: Concernant les chiffres de $15 d'économie, ce
sont des rapports confidentiels, disons, qui circulent à
l'intérieur de la division locale de la Wayagamack; ils nous sont
parvenus par l'entremise de personnes intéressées au dossier. On
sait que ce sont des chiffres qui sont officiels et qui ont pu être
vérifiés avec certains cadres de la compagnie. Cette
économie, justement, est due au fait que, au moulin du Cap, qui doit
fermer, le bois provenait autrefois de l'île d'Anti-costi, ou bien des
Escoumins. Comparativement au bois qui était acheminé au moulin
de l'île par le Saint-Maurice, il y avait une économie d'environ
$15 à $20 pour le bois utilisé à l'île
comparativement au bois utilisé au Cap par voie fluviale. Ces chiffres,
ce sont des chiffres qui viennent de la compagnie, des chiffres que l'on peut
vérifier à l'annexe que vous avez en arrière. Sur le total
d'environ 90 000 cunits de bois utilisés pour alimenter le moulin du Cap
dans une année, l'économie résulterait du transport du
bois qui provient du moulin de l'île et qui serait écorcé
et la manutention serait faite au complet. Il s'agirait seulement de le
transporter par camion pour le diriger vers les défibreurs sans
opération de manutention du bois au moulin du Cap. C'est une
économie d'au moins $1 million par année comme solution
temporaire, en plus des profits qu'on y fait présentement. C'est la
solution à court terme que le syndicat, à l'appui de chiffres de
la compagnie, préconise pour avoir un délai. Et avec ce chiffre
d'un million qui s'ajoute au profit déjà existant, je pense qu'on
peut faire la balance entre le coût social que cela peut coûter
pour 400 chômeurs et le recyclage des usines pour la période qu'on
demande. Il faut que ce soit une nouvelle vocation ou qu'on trouve un acheteur
qui serait intéressé à faire produire ses machines sur une
nouvelle catégorie de papier ou par transformation.
M. Giasson: Vous parlez d'un profit existant, mais, par contre,
cet après-midi, le représentant de la compagnie, à une
question qui lui a été posée à savoir quel serait
le déficit possible pour maintenir en opération pendant 12 mois
l'usine du Cap-de-la-Madeleine, ne nous a pas parlé de profit.
Il a cité un chiffre de déficit éventuel de $2,5
millions, je crois. C'est assez difficile de savoir où est la
vérité.
M. Charest: Si on se réfère au journal des
Débats, le ministre lui-même a avoué, après avoir vu
le rapport confidentiel de la Consolidated, que cette compagnie, du moins, ne
perdait pas d'argent. La compagnie elle-même a avoué que le
chiffre de $119 000 de profit durant les quatre premiers mois d'activité
de 1977 était exact parce que ce chiffre était le chiffre de la
compagnie. Ce n'est pas le syndicat ou d'autres personnes qui ont
inventé ces chiffres, ce sont des chiffres confidentiels qui circulaient
à l'intérieur des hauts cadres de la compagnie et ce fut
avoué. Par contre, quand on veut fermer une usine, on apporte beaucoup
de considérations, de dépréciations et on ar-
rive quand même à des déficits. La compagnie invoque
aussi que la pâte chimique qui est acheminée au moulin du Cap, par
l'usine de Shawinigan, produit un déficit, quand on sait très
bien que la compagnie Consolidated-Bathurst à Wayagamack, au moulin de
l'île, a une usine, des machines pour faire sa pâte chimique et
qu'elle ne les utilise pas présentement; on aime mieux acheter et
revendre à l'intérieur de la compagnie de la pâte chimique.
Nous, on voit ces choses, on les constate et, quand cela se transpose par des
chiffres ou qu'on nous annonce ces choses, on est un peu perplexe pour savoir
quelle valeur ont ces arguments pour ceux qui sont en dehors du dossier. Ce
sont ces choses qu'on constate et qu'on vérifie et que tout le monde
peut constater. Elle a de la machinerie à Wayagamack pour faire sa
pâte chimique, mais elle aime mieux se vendre à elle-même de
la pâte chimique pour produire un déficit sur ce produit.
M. Giasson: Lorsque vous proposez également que le
gouvernement intervienne en demandant à REXFOR de se porter
acquéreur du bois qui serait cueilli chez les cultivateurs, dans votre
esprit, est-ce que ça devrait être REXFOR qui devrait assumer le
déficit découlant de cet achat de bois que REXFOR devrait payer
au moins selon les prix négociés entre les syndicats de
producteurs de bois et l'industrie?
M. Lord: Je pense, M. le député, que la
réponse à cela a été apportée par le
ministère des Terres et Forêts lui-même cet
été. C'est que, comme mesure temporaire, on voulait que
l'approvisionnement en bois de l'usine ne se fasse pas à partir des
Escoumins si cela crée le déficit. Le ministère des Terres
et Forêts a fait un recensement du bois qui avait été
coupé par les cultivateurs dans la région immédiate de
Trois-Rivières et le ministère des Terres et Forêts nous a
dit, à ce moment, qu'il y avait quelque 40 000 cunits de bois qui
dormaient chez les cultivateurs des environs. C'est pour cela qu'on n'a pas
demandé que REXFOR assume un déficit ou quoi que ce soit. C'est
que REXFOR, comme société d'État ou comme véhicule
de l'État, pourrait acheminer ce bois, pourrait servir
d'intermédiaire pour acheminer ce bois à l'usine.
L'argument que le comité de citoyens amenait, à
l'époque, c'était pour contrer un argument éventuel de la
compagnie qui dirait substantiellement que, maintenant, on serait
peut-être prêt à changer d'idée, mais il n'y a pas de
bois, alors qu'en fait, à Trois-Rivières, il y a 40 000 cunits
qui dorment. C'est un peu cela qui est le sens de la remarque du comité
de citoyens.
M. Giasson: Mais cela ne pourrait pas réduire de
façon considérable le prix de la matière première
qu'est le bois parce que les petits propriétaires, là-bas, ont
des prix déjà déterminés, fixés par entente,
par négociation avec les compagnies qui l'achètent.
M. Lord: Le gouvernement, REXFOR, les producteurs de bois peuvent
fournir le bois à une usine comme celle de Trois-Rivières
les 40 000 cunits à un coût d'environ $53 à $55 le
cunit. Ce sont les coûts qui nous avaient été donnés
par le ministère des Terres et Forêts.
Pour une solution à court terme, pour une période de temps
de six mois, d'un an, ces gens peuvent fournir le bois à ce prix. Ce
serait évidemment une épargne considérable si on admet que
la compagnie doit payer jusqu'à $70 le cunit quand elle exploite
elle-même son propre bois. Dans ce sens, pour une solution d'urgence, ce
serait évidemment quelque chose de faisable aisément; ce serait
aussi une solution qui permettrait non pas d'alléger un déficit,
mais d'accroître des profits pour cette compagnie.
Le Président (M. Lévesque,
Kamouraska-Témiscouata): S'il n'y a pas d'autres intervenants, je
voudrais remercier les représentants des travailleurs de la FTQ et le
comité des citoyens. Merci beaucoup pour votre mémoire et votre
présentation.
M. Daoust: Juste un tout petit mot. Nous désirons
remercier la commission de nous avoir reçus, je l'ai mentionné ce
matin. Mes remarques seront très brèves; elles seront dans le
sens de celles que faisait M. Grenier. Nous souhaitons que le gouvernement
apporte toute l'attention, toute l'insistance qui s'imposent auprès de
la compagnie à l'égard du premier voeu que vous avez voté
unanimement. On souhaite aussi qu'au niveau du gouvernement, au niveau du
cabinet, le voeu qui a été voté par la commission se
reflète dans la façon dont on va aborder la compagnie. Envoyer un
télégramme, la commission en a décidé, c'est votre
décision, mais je pense qu'il faut faire accompagner ce
télégramme de toute la conviction et de tous les moyens qu'un
gouvernement a à sa disposition afin qu'on ait des réponses
positives et pas un non aussi fracassant que celui qu'on a entendu cet
après-midi.
Alors, on compte bien sur le ministre, sur les ministres puisqu'il y en
a deux ici, et sur tous les députés. On aimerait bien que
d'autres chefs de parti, M. Biron ainsi que M. Gérard-D. Levesque
fassent connaître leur point de vue publiquement à l'égard
de ce voeu exprimé unanimement par votre commission. Merci beaucoup.
M. Pagé: J'aurais un commentaire, M. Daoust. J'agissais
pour et au nom de l'Opposition officielle, donc de tout le parti. D'accord?
M. Daoust: Parfait.
M. Pagé: Ce n'était pas en mon nom personnel. En
plus d'être en mon nom personnel, c'était au nom du parti. Je veux
bien qu'on se comprenne.
M. Daoust: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'inviterais maintenant les représentants de la compagnie Donohue
Limitée à venir présenter leur mémoire.
Bonsoir, messieurs. Je demanderais maintenant au porte-parole de la
compagnie de bien vouloir s'identifier et de présenter également
ceux qui l'accompagnent. !
Compagnie Donohue Limitée
M. Walsh (Edmond-P.): Je suis E.P. Walsh, président de la
compagnie, et je demanderais à nos représentants de s'identifier
eux-mêmes en commençant de ce côté-ci.
M. Roberge (Jean): Jean Roberge, directeur des projets
spéciaux.
M. Drouin (Gérald): Gérald Drouin,
vice-président à l'administration.
M. Auger (Percy): Percy Auger, vice-président
exécutif.
M. Fortin (André): André Fortin,
vice-président, domaine forestier.
M. Marcoux (André): André Marcoux,
vice-président "senior".
M. Walsh: M. le Président, messieurs, cette commission
parlementaire nous fournit l'opportunité de vous soumettre certains
points qui ont une incidence sur les perspectives d'avenir de l'industrie des
pâtes et papiers au Québec et plus particulièrement sur
l'avenir de notre compagnie. La compagnie Donohue, incorporée en 1920,
exploite à Clermont, dans le comté de Charlevoix, une usine de
papier journal. Par l'intermédiaire de sa filiale, Donohue
Saint-Félicien Inc., formée en 1975, elle exploite trois scieries
dans la région du Lac-Saint-Jean et est en voie de construire aussi une
usine de pâte kraft blanchie.
L'usine de Clermont dont la capacité de production est de 160 000
tonnes de papier journal par année aura des expéditions d'une
valeur excédant $73 milliards pour l'année en cours. La presque
totalité de cette production est expédiée aux
États-Unis. Afin de soutenir cette exploitation, la compagnie doit
s'approvisionner en matière ligneuse de trois sources distinctes:
Premièrement, par l'exploitation forestière des
territoires qui lui sont affermés. Cette exploitation est faite aux deux
tiers par les employés de la compagnie et au tiers, par des syndicats
coopératifs de paroisses de la région, nommément les
Syndicats coopératifs de Saint-Siméon, Sagard,
Saint-Fidèle, Grands Fonds, Anse Saint-Jean et Ferland-Boileau.
Deuxièmement, par l'achat des bois résineux disponibles
des terrains privés de la région tels que mis en marché
par le séminaire de Québec, l'Office des producteurs du
comté de Charlevoix et celui de la Côte Nord.
Troisièmement, par l'achat de copeaux provenant de l'industrie du
sciage.
Dans le comté de Charlevoix, notre compagnie emploie
présentement 1260 personnes et a des bordereaux de paie de quelque $17,5
millions par année, ce qui en fait le plus important employeur de la
région. Les taxes et les prélèvements versés par la
compagnie aux gouvernements s'élevaient, en 1976, à près
de $13 millions. La valeur des bois achetés localement et en provenance
des terrains privés se chiffre à $1,5 million.
M. le Président, à la lecture de ce mémoire, vous
serez à même de constater que, tout en répondant aux
questions que le ministre nous a fait parvenir, nous vous exposons un
problème que nous considérons d'importance primordiale, à
savoir l'approvisionnement en bois de l'usine de Clermont.
Avant 1972, la compagnie Donohue possédait, sur la rive sud du
fleuve, des concessions et francs-alleux qui furent échangés avec
la province et remplacés, en novembre 1972, par un protocole d'accord
devant assurer l'approvisionnement de l'usine de Clermont.
Malheureusement, certaines clauses de ce protocole ne sont pas encore
concrétisées, avec le résultat que nous sommes toujours en
pourparlers avec les autorités pour résoudre ce problème.
De plus, au cours des dernières années, des développements
à l'intérieur et à proximité de notre région
ont contribué à rétrécir considérablement
les superficies boisées disponibles pour l'alimentation de notre
usine.
Face à une demande accrue de matière ligneuse de la part
de notre compagnie et d'autres utilisateurs, les terres publiques de Charlevoix
pourraient connaître à un certain moment une rupture de stock
marchand et il est impératif de prendre immédiatement des mesures
pour éviter cette rupture de stock. Une solution à long terme
s'impose pour garantir la pérennité et la rentabilité de
l'usine de Clermont.
Maintenant, nous allons répondre aux questions qui nous ont
été soumises par le ministre des Terres et Forêts.
Sur les terrains privés, dans la région de Charlevoix, la
reforestation date du début des années cinquante, alors que notre
compagnie achetait certains lots dans le but de les aménager par de la
plantation et des coupes rationnelles des peuplements résiduels.
Grâce à cet exemple, nous retrouvons aujourd'hui, sur les
terrains privés de Charlevoix, des plantations vieilles de 20 ans et des
peuplements contenant des bois de valeur qui pourraient être soumis
à une coupe pré-commerciale. Ces boisés, toutefois, ne
représentent qu'un faible pourcentage de la superficie du
territoire.
Sur les terres publiques, affermées à notre compagnie, la
coupe s'est toujours effectuée dans la forêt à
maturité et le problème de régénération ne
se pose à peu près pas.
En matière de reboisement, notre participation s'est fait sentir
par la présentation, au ministère des Terres et Forêts,
d'un programme de plantation dans les brûlis qui fut
réalisé par le ministère de 1970 à 1973. Une
formule incitative serait souhaitable pour encourager l'industrie qui investit
dans les travaux de reboisement et de sylviculture.
La comparaison du coût des bois des deux sources telles les terres
publiques et les terres privées n'est pas chose facile puisqu'il faut
faire intervenir les éléments de qualité des billes et le
poids spécifique de ces mêmes billes.
Il est reconnu de tout temps que les terres privées fournissent
un plus fort pourcentage d'essences de sapin et d'épinette blanche
coupés à des diamètres plus petits, ce qui influe
énormément sur le poids spécifique, le rendement par
unité de mesure et les pertes lors de la transformation. La superficie
des terres privées de notre secteur étant relativement faible, le
volume qu'elles produisent ne représente qu'un minime pourcentage de nos
besoins. Comparativement aux terres privées, les terres publiques ont
l'avantage d'être d'abord aménagées pour la production de
fibre, ce qui garantit un volume à quasi-perpétuité. Les
peuplements s'y trouvant sont composés d'essences à haut
rendement, et le diamètre des billes y est beaucoup plus fort. Les
massifs exploitables sont très étendus, donnant place à
une mécanisation plus poussée et à des volumes
d'exploitation beaucoup plus importants.
Les bois de terres privées comportent l'avantage d'être
disponibles sur une bonne partie de l'année, à des distances de
transport moins longues, avec une infrastructure routière existante et
adéquate, bénéficiant de services déjà
organisés et d'une main-d'oeuvre suffisante.
Les bois des terres publiques que nous exploitons sont à des
distances souvent très considérables et la topographie du terrain
est très difficile. Ces contraintes obligent donc à maintenir un
niveau d'inventaire relativement élevé, les livraisons se faisant
beaucoup plus sporadiquement. Les conditions difficiles de terrain rendent la
construction des routes très coûteuse et les normes
gouvernementales, de leur côté, tendent de plus en plus à
en accroître le coût unitaire.
Réduction des coûts du bois. Malgré les efforts de
mécanisation, nos coûts de production du bois demeurent plus
élevés que ceux de la moyenne des industries canadiennes. Des
conditions topographiques très difficiles nous obligent à
être plus sélectifs en ce qui a trait à la
mécanisation. La compagnie est alors nettement défavorisée
du côté concurrentiel. Au début, la mécanisation a
permis d'équilibrer les hausses salariales car la productivité
augmentait sans que l'équipement mécanique soit trop
coûteux. Depuis quelques années, des machines sophistiquées
et dispendieuses sont apparues sur le marché, mais n'ont pas toujours
fourni la production désirée. De plus, il a été
constaté qu'il fallait une bonne équipe de soutien et de service
afin d'obtenir des résultats satisfaisants, d'où un coût
additionnel. Il en résulte donc aujourd'hui que la mécanisation
ne réduit par réellement les coûts, mais permet de les
stabiliser dans certains cas et de pallier occasionnellement la pénurie
de travailleurs.
Mesures pour minimiser les coûts du transport du bois. Une partie
importante des bois consommés à l'usine de Clermont sont
flottés sur la rivière Malbaie. Nous devons conserver ce mode de
transport afin de minimiser notre consommation d'énergie et nos
coûts en général. L'éventualité de la
création d'un parc sur la rivière Malbaie, pourrait avoir des
conséquences désastreuses pour notre compagnie.
Si, par exemple, un tel aménagement devait avoir pour
conséquence l'élimination du flottage sur la rivière
Malbaie, il en résulterait une augmentation de $8 la corde sur le
coût moyen de tous les bois ronds de ce secteur, et ce, en ne
considérant que les coûts annuels supplémentaires de
transport et d'entretien de chemins.
Une telle augmentation du prix de la matière première
placerait notre compagnie dans une position concurrentielle très
défavorable, parce que, dû principalement à la topographie
très accidentée de notre concession forestière, notre
coût de revient du bois est déjà un des plus
élevés de l'industrie.
En conséquence, la compagnie trouve inacceptable le projet de
créer un parc, car il en va de sa survie. L'élimination du
flottage, à la suite de la création de ce parc,
entraînerait pour la compagnie un déboursé immédiat
de l'ordre de $2 millions pour l'achat d'équipement roulant. De plus, le
gouvernement aurait à construire ou à améliorer des routes
pour $8,5 millions afin de permettre un transport routier adéquat. De
nouvelles zones d'approvisionnement près de l'usine devraient être
définies et, de préférence, contiguës à nos
concessions.
Passons maintenant à la transformation du bois. De plus en plus
on parle de la désuétude de la machinerie et des
procédés de fabrication de l'industrie des pâtes et papiers
au Québec. À l'usine de Clermont, nous exploitons quatre machines
à papier journal. L'une d'elles, de construction
québécoise, fut installée en 1969 et, à elle seule,
fabrique presque la moitié de notre produit. Les trois autres machines
sont plus âgées. Cependant, elles furent modernisées au fur
et à mesure que de nouvelles techniques étaient
développées et que les sommes d'argent nécessaires
étaient disponibles de sorte qu'aujourd'hui les tambours séchoirs
et leurs supports sont les seules pièces de l'équipement original
qui soient encore en service.
L'âge de la machinerie ne veut pas nécessairement dire
désuétude. Si, par exemple, nous remplacions nos trois vieilles
machines par une seule de production égale, nous y gagnerions du
côté productivité, mais ce nouvel investissement ne serait
pas rentable dans les conditions économiques actuelles. Même en
utilisant ces trois vieilles machines à papier journal, notre
productivité est satisfaisante et la qualité de notre produit
fait qu'il est bien accepté par les grands quotidiens
américains.
La capacité de production de papier journal à l'usine de
Clermont est passée de 71 000 tonnes qu'elle était en 1955
à 126 000 tonnes en 1965, et à 260 000 tonnes en 1975.
Position concurrentielle sur le marché américain. Au mois
de janvier 1972, le Conseil des producteurs de pâtes et papiers du
Québec présentait à la commission parlementaire des terres
et forêts un mémoire sur la capacité de concurrence de
l'industrie des pâtes et papiers du Québec. La plupart des
désavantages économiques énumérés dans ce
mémoire se sont amplifiés depuis et affectent aujourd'hui notre
entreprise.
Pour en nommer quelques-unes, on peut dire: C'est le coût de
l'acide, le coût de la main-d'oeuvre, les coûts de construction de
nouvelles machines, le coût de livraison de notre produit et les
taxes.
Pour la modernisation de notre matériel, et afin
d'améliorer son chiffre d'affaires et sa productivité, comme on
l'a dit tout à l'heure, nous avons installé une nouvelle machine
en 1969. Depuis le début de son exploitation jusqu'à 1971, la
compagnie avait toujours acheté sur le marché libre la pâte
chimique nécessaire pour la production de papier journal à
l'usine de Clermont, ce qui le rendait moins rentable et à la merci du
marché des pâtes.
Afin de pallier cette lacune, une usine de pâte chimique fut
construite en 1971.
Il en résulte qu'au cours des dix dernières années,
soit de 1967 à 1976, notre compagnie a fait des dépenses en
immobilisation à Clermont de $40 millions. De ce montant, $20 millions
proviennent des profits de la compagnie et un montant supplémentaire a
été obtenu sous forme de financement à long terme. Il
faudrait signaler cela n'apparaît pas dans notre mémoire
que nous avons reçu aussi $4,7 millions de subvention du
MEER.
Pour la même décennie, les dépenses d'entretien se
chiffrent à $25 millions. Au cours de l'année en cours, $4,5
millions seront dépensés pour l'entretien et les
réparations. On peut donc affirmer que, dans notre cas, en plus d'avoir
modernisé nos installations, nous avons maintenu notre équipement
et notre machinerie en bonne condition pour en assurer une opération
efficace.
De 1971 à ce jour, la somme de $3 millions a été
dépensée pour améliorer la qualité de l'air et
faire la récupération des solides en suspension dans les
effluents de l'usine. Beaucoup demeure à faire et ce n'est qu'un
rendement plus élevé sur nos investissements qui permettra
l'accélération des dépenses capitales pour
l'environnement.
Notre compagnie a toujours eu comme politique de réinvestir dans
l'entreprise la majorité des fonds générés par
l'exploitation.
Projets de modernisation. Dans sa planification à long terme,
notre compagnie prévoit produire au moins la moitié de ses
besoins de pâte mécanique par le procédé de
pâte raffinée.
Cependant, il ne faudra pas voir dans l'avènement de la
pâte mécanique et raffinée la solution à tous les
maux de l'industrie. Des améliorations de ce procédé sont
encore à l'étude afin d'éliminer les problèmes de
fabrication et de qualité du produit. Nous voulons dire par le produit
le papier journal.
Nous devons considérer en profondeur chacune des variantes des
procédés à pâte mécanique raffinée et
chimimécanique avant de faire le choix le plus approprié à
notre exploitation.
À ce sujet s'ajoutent d'autres projets de moindre envergure qui
sont destinés à améliorer la ren- tabilité de
l'usine, la protection de l'environnement et la qualité du produit.
Cependant, ces projets ne pourront se réaliser sans une garantie
satisfaisante de volume de matière ligneuse à un coût
concurrentiel.
L'utilisation des feuillus. L'utilisation des feuillus ne se prête
pas bien à la fabrication du papier journal. À comparer à
la fibre de résineux, la fibre de feuillus est très courte,
à moins de force et, en conséquence, produit un papier journal de
qualité inférieure.
Pour que l'usage de ces feuillus soit efficace, ces bois doivent
être traités séparément des résineux dans la
préparation de la pâte et le coût d'un tel système
pour feuillus seulement devient prohibitif à cause du manque
d'économie d'échelle dans le comté de Charlevoix. Tous nos
besoins en copeaux sont présentement comblés par l'industrie du
bois de sciage; cependant, nous devons prévoir une diminution de la
disponibilité de copeaux à moyen terme.
Les écorces et les sciures que nous engendrons sont
brûlées pour produire de la vapeur. La possibilité de
brûler les branches des résineux ré-suitant de
l'exploitation forestière est à l'étude.
Du côté de la recherche et du développement, notre
compagnie est membre de l'Institut canadien de recherche sur les pâtes et
papiers et de l'Institut canadien de recherche en génie forestier qui,
tous deux, effectuent leur travail dans la banlieue de Montréal et nous
bénéficions de leurs efforts.
Le coût de la main-d'oeuvre et des avantages sociaux que nous
payons en forêt et à l'usine représentent plus du tiers du
coût de production d'une tonne de papier journal. Toutefois, ce chiffre
n'inclut pas la main-d'oeuvre comprise dans les copeaux et les bois que nous
achetons.
Nous n'éprouvons pas de difficulté à recruter la
main-d'oeuvre nécessaire à la bonne marche de l'usine et de
l'activité forestière, sauf pour les hommes de métier,
expérimentés ou non, mais possédant un diplôme
d'études collégiales en formation professionnelle.
J'aimerais dire un mot sur notre filiale de Do-nohue
Saint-Félicien qui fut formée en 1975 pour réaliser le
développement d'un complexe forestier à Saint-Félicien.
Cette filiale est détenue à 60% par la Compagnie Donohue et
à 40% par British Columbia Forests Products Ltd.
L'implantation de ce complexe forestier intégré implique
la construction d'une usine de pâte kraft blanchie d'une capacité
annuelle de 262 000 tonnes et l'acquisition de trois scieries de la
région pouvant produire annuellement 150 millions de pieds de bois de
construction.
Cette réalisation est rendue possible grâce à une
subvention substantielle des gouvernements du Québec et du Canada.
La construction de l'usine et les améliorations en forêt et
aux scieries progressent d'une façon assez satisfaisante. Le seul
problème important qui demeure toujours en suspens est celui du
déversement des effluents de l'usine. Les investissements que nous
allons faire sont de l'ordre de $300 millions et je crois que ces
investissements
représentent le plus important projet dans les produits
forestiers jamais entrepris au Québec. Le début des
activités de l'usine kraft est prévu pour le deuxième
semestre de l'année prochaine.
Permettez-moi, en terminant, M. le Président, de vous souligner
que notre compagnie est consciente du rôle économique et social
qu'elle joue tant dans le comté de Charlevoix que dans la région
du Lac-Saint-Jean. De plus, notre compagnie a toujours assumé ses
responsabilités tant à l'égard de ses actionnaires, de ses
employés et des communautés où elle est présente et
ce, en réinvestissant la majorité de ses profits dans
l'entreprise pour la moderniser et en assurer sa croissance.
En conséquence, M. le Président, il est impératif
que le problème d'approvisionnement en matière ligneuse pour
l'usine de Clermont soit solutionné à long terme car ce
problème majeur, en plus d'empêcher la croissance normale de notre
entreprise, risque même de mettre son existence en péril.
Enfin, nous souhaitons que les dirigeants des gouvernements, des
syndicats et de notre compagnie travaillent ensemble sur des objectifs communs
afin d'assurer à notre collectivité un meilleur
bien-être.
Les représentants qui sont ici et moi avons 160 années
d'expérience dans l'industrie des produits forestiers. Nous sommes
à votre disposition pour discuter de notre mémoire et
répondre à vos questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
monsieur le président. Au nom du gouvernement, je cède la parole
à un député de la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, le député de Dubuc.
M. Desbiens: Je remercie la compagnie Do-nohue de nous avoir
présenté son mémoire. Bien que l'on constate qu'elle nous
fait part tout particulièrement de ses problèmes
d'approvisionnement dans le secteur de son usine de Clermont, elle apporte
néanmoins certains éléments intéressants sur les
questions qui ont été posées dans la déclaration
ministérielle.
Dans plusieurs milieux, et cela a été mentionné
depuis l'ouverture de la commission, on a souvent parlé des nouvelles
techniques de la pâte mécanique raffinée qui seraient
susceptibles d'amener une économie importante de matière
première et même de diminuer considérablement les
problèmes de pollution. En regard de ce qui semble des
difficultés d'approvisionnement à l'usine de Clermont, est-ce que
votre compagnie ne serait pas d'opinion de modifier ses techniques?
M. Walsh: Comme nous l'avons mentionné, M. le
député, nous avons des programmes pour faire des installations de
pâte mécanique raffinée, mais dans le moment il y a
plusieurs raisons pour lesquelles nous ne voulons pas aller de l'avant
très rapidement.
Comme nous l'avons mentionné, nous avons une usine pour fournir
notre clientèle. Il y a eu plusieurs usines qui ont eu des
problèmes assez sérieux avec le papier quand elles ont
commencé le système de pâte mécanique
raffinée. Des compagnies qui ont plusieurs usines peuvent
répondre aux exigences de leurs clients plus facilement que nous qui
avons seulement une usine.
Deuxièmement, il faut avoir les fonds disponibles. Dans le projet
de Saint-Félicien, notre compagnie, comme je l'ai mentionné tout
à l'heure, détient 60% des actions. L'action-capital, dans cette
société, se chiffre par $70 millions. Cela veut dire que notre
investissement est de $42 millions. Comme vous le savez, notre argent a
été déposé, c'est l'argent qui entre en premier. La
nouvelle usine ne fonctionne pas pendant une période de trois ans;
alors, on ne retire aucun bénéfice de ces investissements.
De plus, nous avons des engagements financiers à l'égard
de Donohue Saint-Félicien. Je demanderais à mon collègue,
M. Auger, de vous souligner quelques-uns de ces engagements qui nous imposent
des contraintes quant aux fonds disponibles.
M. Auger: Les prêteurs américains ont voulu
s'assurer, dès le début de l'exploitation de cette usine, que la
compagnie aurait des fonds suffisants pour payer les intérêts de
ces emprunts et payer, à l'échéance, les montants
d'amortissement annuels. Ils ont exigé des deux actionnaires, notre
compagnie et British Columbia Forest Limited, de garantir un montant qui est
pour notre compagnie de $7,5 millions et, pour British Columbia Forest, de $5
millions après le début de l'exploitation.
Si, au cours d'une année, les entrées d'argent à
même le résultat d'exploitation ne sont pas suffisantes, nous
sommes obligés de fournir les fonds nécessaires pour faire face
aux intérêts et au paiement de remboursement de la dette.
Cette obligation va en s'accumulant. Supposons qu'une année il y
a suffisamment de fonds, on n'est pas obligé de mettre notre million.
L'année suivante, on manque de fonds, ça s'accumule jusqu'au
montant total de nos engagements.
M. Desbiens: Je reviens à la question d'approvisionnement;
en 1972, quand on vous avait enlevé une concession sur la rive sud, on
ne vous avait pas accordé les copeaux de la scierie Samoco de
Sacré-Coeur? Vous n'avez jamais profité de cette offre? Est-ce
qu'il y a des raisons bien spéciales?
M. Walsh: Le protocole d'accords prévoyait que la
compagnie aurait un approvisionnement garanti de 323 000 cordes par
année ou des conditions non réglées encore. Il avait
été prévu qu'il y aurait 54 000 cordes qui proviendraient
de la forêt domaniale du Saguenay, et 25 000 cordes du parc des
Laurentides. Ces montants, nous ne les avons pas. De plus, il y a autre chose
actuellement, un manque d'environ 100 000 cordes ou 100 000 tonnes pour
l'approvisionnement de l'usine.
La question des copeaux, l'entente prévoyait que, s'il venait
à y avoir une usine de transformation dans la région de
Sacré-Coeur, la compagnie
aurait le premier droit de refus sur ses copeaux, qu'il n'y aurait pas
de conséquences financières pour notre compagnie.
Si vous voulez d'autres explications sur les copeaux de Samoco, nous ne
les prenons pas, nous avons des raisons et je demanderais à notre
vice-président senior de l'exploitation à Clermont de vous donner
les raisons techniques. Par la suite, M. Drouin vous donnera les raisons
financières.
M. Marcoux (André): La raison pour laquelle nous ne
prenons pas les copeaux de Samoco, c'est dû à une très
basse densité. Nous avons une usine de bisulfite qui produit environ 160
tonnes par jour. Si on utilisait les copeaux de Samoco à cette
très basse densité, nous aurions une perte de 20% de production
de pâte bisulfite. C'est la raison pour laquelle on ne les utilise pas
présentement.
M. Desbiens: Les machineries ou l'installation technique de
l'usine ne rendraient pas leur utilisation rentable, c'est ça? C'est la
forme d'installation technique que vous avez à l'usine de Clermont?
M. Marcoux: Non, c'est l'équipement que nous avons...
M. Desbiens: L'équipement.
M. Marcoux: ... qui ne nous permet pas de produire plus avec ces
copeaux.
M. Walsh: Cela voudrait dire que nous allons produire moins de
pâte chimique et il faudrait acheter la pâte chimique de
l'extérieur à un coût très élevé qui
affecterait nos coûts. M. Drouin peut vous donner les détails.
M. Drouin (Gérard): On croit qu'en utilisant les copeaux
de Samoco avec une densité plus faible, on aurait une baisse de
production à notre usine, c'est-à-dire que notre usine de
bisulfite fonctionne au maximum de sa capacité actuellement. On aurait
une baisse annuelle de production d'environ 15%. Ces 15% qui sont tellement
requis pour produire notre papier journal, on aurait à le prendre sur le
marché libre en achetant de la pâte. Cette pâte
achetée sur le marché libre se vend aujourd'hui à un prix
qui va de près de $300 la tonne, tandis que lorsqu'on le produit, c'est
beaucoup plus économique.
À ce moment-là, on calcule qu'on perdrait entre $1 million
et $2 millions.
M. Desbiens: Je vous remercie. Toujours dans le domaine de
l'approvisionnement, dans le secteur de l'usine de Clermont, dans Charlevoix,
à combien évaluez-vous les possibilités de coupe annuelle,
à combien d'années? Est-ce que vous avez des calculs
là-dessus?
M. Fortin: Les chiffres qui existent pour l'approvisionnement
disponible pour l'usine de Clermont indiquent qu'il y a un approvisionnement
pour une période de 18 ans. C'est pour cela que, dans le mémoire,
nous faisons mention de la possibilité d'une rupture de stock. Une
rupture de stock, en définitive, c'est peut-être un mot technique,
c'est tout simplement un manque de peuplement exploitable ou à
maturité, a un moment donné, et pour une période X.
Pour répondre directement à votre question, M. le
député, avec ce qu'on connaît aujourd'hui, avec
l'approvisionnement que nous avons aujourd'hui, nous avons un approvisionnement
pour quelque 18 ou 20 ans.
M. Desbiens: Dans toutes les forêts publiques de
Charlevoix?
M. Fortin: C'est cela.
M. Desbiens: Après 18 ou 20 ans, vous n'êtes plus
capable d'exploiter la forêt dans le secteur?
M. Fortin: C'est-à-dire que les forêts qui existent,
à part celles-là, n'auront pas encore atteint la maturité
pour être exploitées.
M. Desbiens: M. le Président, une dernière
question. Je vais laisser la chance à d'autres par la suite. Ce serait
une question sur Saint-Félicien. J'aimerais avoir une idée du
nombre d'emplois qui vont être créés par l'implantation de
votre usine de Saint-Félicien.
M. Walsh: Avec les trois scieries, l'exploitation
forestière et l'usine kraft, il y aura 2000 emplois permanents.
M. Desbiens: 2000. Strictement à l'usine, cela veut
dire...
M. Walsh: À l'usine de pâte kraft, environ 300.
M. Desbiens: 300. Dans une nouvelle qui est parue dans un
quotidien au Saguenay-Lac-Saint-Jean, au cours du mois de juillet, on y
mentionne que des dirigeants de Donohue Saint-Félicien, et je cite le
journal: "... avaient fait part d'une étude de rentabilité sur le
coût du transport de la production éventuelle de l'usine de
Saint-Félicien, d'une part, jusqu'à La Baie et, d'autre part,
jusqu'à Pointe-au-Pic."
Est-ce qu'on peut savoir où en est rendue votre étude?
Quelles en sont les conclusions?
M. Walsh: M. le député, ces études sont
très préliminaires. Je ne crois pas que ce soit la compagnie qui
ait donné ces informations. L'usine va produire, d'ici un an. Nous
étudions les possibilités d'expédier une partie de notre
pâte qui sera vendue en Europe. Mais il n'y a pas de décision pour
savoir quel moyen nous allons prendre pour faire l'expédition par
bateau.
M. Desbiens: Votre étude n'est pas terminée? M.
Walsh: Non, elle est loin de l'être.
M. Desbiens: Est-ce que c'est dire qu'une fois que cette
étude sera terminée... Combien de temps prévoyez-vous
encore avant qu'elle soit terminée? Est-ce que les conclusions de cette
étude seront connues du public?
M. Walsh: Oui. Je crois que, d'ici six mois, cela devrait
être pas mal terminé. Cela ne veut pas dire que nous allons
simplement expédier la pâte, soit à un endroit ou à
un autre. Cela peut aller à plusieurs endroits pour l'exportation.
M. Desbiens: Une dernière question là-dessus.
Est-ce que vous avez, au cours de cette étude, eu des rencontres avec
l'Alcan pour l'utilisation de son quai à la Baie-des-Ah! Ah!, par
exemple?
M. Walsh: On a eu des discussions préliminaires avec
l'Alcan.
M. Desbiens: Je vous remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Messieurs, je voudrais d'abord vous remercier du
mémoire que vous avez déposé à la commission
parlementaire. Je ne vous cache pas qu'il est intéressant de prendre
connaissance de l'ensemble de votre mémoire, au-delà des
problèmes, des difficultés que vous soulevez, auxquelles vous
faites allusion.
D'abord, ce qui est intéressant au départ, c'est qu'il
semble bien que vous constituez une entreprise dans laquelle la
Société générale de financement a des
intérêts.
M. Walsh: La Société générale de
financement a des intérêts par sa participation dans la compagnie
Donohue. La Société générale de financement
détient en effet 43% des actions ordinaires de la compagnie Donohue,
mais la société générale détient 54% des
actions votantes. La participation de la SGF à Donohue
Saint-Félicien, au point de vue des actionnaires est par l'entremise de
la compagnie Donohue. De plus, la Société générale
de financement a acheté $25 millions de débentures dans la
compagnie Donohue Saint-Félicien. La participation comme actionnaire est
indirectement par la compagnie Donohue.
M. Giasson: C'est tout de même une des entreprises dans
laquelle la Société générale de financement a des
intérêts qui présentent un visage financier
intéressant. Ce n'est pas le cas dans toutes les entreprises où
la SGF est présente, d'une façon ou de l'autre, soit par du
capital-actions soit par souscription de prêts.
M. Walsh: La Société générale de
financement a joué un rôle très important dans la
réalisation du projet. Comme on vous l'a dit tout à l'heure,
c'est un projet énorme. Nous croyons que ce que nous avons réussi
est presque un miracle, mais nous n'aurions pas pu le faire sans le concours de
la Société générale de financement et bien
d'autres, mais la Société générale de financement a
été très importante dans ce projet.
M. Giasson: Parmi les questions que vous soulevez qui semblent
vous poser des inquiétudes, vous y faites allusion dès le
début de votre mémoire et vous y revenez à la fin au
moment de clore le mémoire, c'est celle des approvisionnements à
votre usine de Clermont. Or, lorsque en 1972 vous vous êtes
départi de la concession que vous aviez sur la rive sud, le potentiel ou
la capacité de pousse ou de production annuelle de cette concession de
la rive sud était de combien de mille cordes?
M. Walsh: La possibilité, dans le temps, était de
l'ordre de 50 000 cordes par année. Nous croyons si vous nous
permettez de le dire que la possibilité était
peut-être un peu plus forte que cette quantité, après que
le ministère eut fait un peu d'étude sur les possibilités
de la concession.
M. Giasson: Au moment où vous avez accepté
l'échange avec le ministère, si j'ai bien compris, le
ministère vous assurait une capacité d'approvisionnement annuel
de 54 000 cordes en provenance de la forêt du Saguenay et de 25 000 du
parc des Laurentides?
M. Walsh: C'est bien cela.
M. Giasson: Mais, est-ce que le ministère a fait
défaut de respecter ses engagements depuis 1972, depuis la date de la
transaction?
M. Walsh: Nous sommes en pourparlers depuis ce temps-là et
ce n'est pas réglé.
M. Giasson: Ce n'est pas réglé, mais vous avez tout
de même un bon espoir que cela se parachève assez
prochainement.
M. Walsh: C'est très important, parce que
l'approvisionnement est la base de l'industrie et l'ignorance de toutes les
conditions d'approvisionnement ne nous permet pas de faire une planification
qui est nécessaire à l'usine. C'est très important de
connaître le détail de l'approvisionnement.
M. Giasson: Reconnaissez-vous que ce problème de
l'approvisionnement que vous redoutez s'est principalement créé
à partir du jour où vous avez décidé d'augmenter de
façon considérable la production de votre usine de Clermont par
l'interaction d'une nouvelle machine? Parce que vous avez cité des
chiffres de production à certaines périodes et on réalise
que c'est une production augmentée de façon
considérable.
M. Walsh: Le total prévu au protocole se chiffre par 323
000 cordes, dont 47 000 tonnes de copeaux. Il n'est pas question de discuter
des copeaux, ce sont les autres formes, comme le bois
rond, qui viennent avant les copeaux. Peut-être que M. Fortin peut
vous donner...
M. Giasson: Cela, ce sont les prévisions présentes,
mais quelle était la production que vous faisiez, effectivement, en
1965, par exemple? Quelle était la quantité de tonnes de
papier?
M. Walsh: En 1965, on l'a dit tout à l'heure, si je m'en
souviens bien, c'était 126 000 tonnes.
M. Giasson: C'était 126 000 tonnes et, là, vous
passez dans une projection de 300...
M. Walsh: Oui, mais le protocole prévoyait tout cela, M.
le député. On n'a pas fait d'expansion depuis 1972, l'expansion
s'est faite avant.
M. Giasson: 1972 a vu la dernière grande expansion de
l'entreprise chez vous.
M. Walsh: 1971. M. Giasson: 1971. M. Walsh: C'est
cela.
M. Giasson: Et l'échange de concessions contre d'autres
garanties s'est fait l'année suivante? Mais je comprends votre
inquiétude lorsque vous nous signalez que les capacités de la
forêt de Charlevoix vous assurent des approvisionnements pour environ 18
ans, mais après, c'est quoi? Où est la source de vos
approvisionnements?
M. Walsh: Pour compléter, disons que l'agrandissement de
l'usine n'a pas été une décision unilatérale de la
compagnie Donohue Ltée; cela avait été discuté au
préalable avec le ministère concerné, le ministère
des Terres et Forêts. Entre-temps, avant la signature du protocole de
1972, il y avait des lettres d'entente qui stipulaient que l'approvisionnement
serait assuré, qu'un approvisionnement adéquat correspondrait aux
exigences de l'usine.
Votre autre question est à savoir quelles seraient les autres
sources d'approvisionnement. Évidemment, on est mal placé, je
pense, pour en parler nous-mêmes, mais je pense que c'est une
décision qui relève du ministère des Terres et
Forêts, et c'est ce que nous discutons avec lui dans le moment.
M. Giasson: Vous avez fait également allusion, à un
moment donné, à un effort d'aménagement. D'abord, vous
avez acquis des terrains privés, je pense. Est-ce volumineux en acres,
les terrains privés, que vous auriez achetés au cours des
récentes années?
M. Fortin: Les terrains privés sont de l'ordre de 202 lots
précisément. Cela représente plus de 580 acres. Comme il
est mentionné dans le rapport, ce n'est pas une grande superficie par
rapport au total de nos besoins mais c'est assez pour poursuivre des
expériences et peut-être prendre des décisions plus
positives, à l'avenir, en ce qui regarde les lots privés.
M. Giasson: Je note que vous suggérez qu'une formule
incitative serait souhaitable pour encourager l'industrie qui investit dans des
travaux de reboisement et de sylviculture. Dans votre esprit, quelle serait la
nature de ces formules incitatives? Seraient-ce des rabattements au point de
vue fiscal?
M. Fortin: Justement, les rabattements fiscaux pourraient
être une solution qui pourrait être envisagée sous forme de
rabattements d'impôts ou sous forme, par exemple, de réduction de
droits de coupe en proportion du volume des travaux qui pourraient être
effectués. Aussi, quand il est question d'investir dans la sylviculture,
je pense que n'importe quelle industrie voudrait avoir la garantie que c'est
elle qui va bénéficier des travaux qui seront
exécutés.
Évidemment, cela pourrait être discuté avec des
fonctionnaires du gouvernement; il y aurait peut-être d'autres formules
qui pourraient peut-être être de beaucoup meilleures que
celles-là.
M. Giasson: Je note aussi que vous semblez craindre
l'aménagement d'un parc public à l'intérieur du territoire
qui vous approvisionne. Y a-t-il vraiment une rumeur d'aménagement d'un
parc dans le secteur de la rivière Malbaie?
M. Fortin: Effectivement, il y a un projet de parc sur la
rivière Malbaie et c'est ce qui nous a rendus et ce qui nous rend encore
très inquiets. Cette allusion...
M. Giasson: Un parc provincial?
M. Fortin: Ce serait un parc; il y a un projet de loi en cours,
je pense, et ce serait un parc qui serait créé en vertu de cette
loi; provincial exactement.
M. Giasson: Est-ce qu'on peut supposer que, selon la tradition
qui existe dans l'aménagement des parcs au Québec, les
exploitations forestières seraient interdites à
l'intérieur du territoire du parc?
M. Fortin: D'après la formulation du projet de loi, s'il
demeure tel quel, il est absolument interdit de faire aucune autre
activité, sauf les activités récréatives pour ce
qui a trait réellement aux activités de camping, canot, etc.
Toute autre activité sera exclue à l'intérieur d'un parc,
si on s'en tient à la formulation du projet de loi tel qu'il existe
à l'heure actuelle.
M. Giasson: Est-ce que vous auriez des indices de superficie dans
l'aménagement éventuel?
M. Fortin: Je regrette, je n'ai pas ce chiffre à la
portée de la main.
M. Giasson: Je comprends votre inquiétude. Ce ne serait
pas de nature à corriger favorablement les problèmes ou les
inquiétudes en matière d'approvisionnement que vous avez
déjà, que vous citez largement dans votre mémoire.
M. Fortin: Le volume ligneux qui serait impliqué, c'est un
point qui est minime comparé à la drave qui passe
nécessairement sur la rivière Malbaie, qui passerait à
l'intérieur de ce parc, et qui serait très probablement
prohibée en assumant qu'il y aurait la création effective d'un
parc.
M. Giasson: Les dommages pour vous autres seraient plus lourds
par l'interdiction de procéder au flottage du bois que les
quantités d'approvisionnement qui vous seraient enlevées à
l'intérieur du parc.
M. Fortin: C'est exactement cela, M. le député.
M. Giasson: il serait intéressant de connaître
l'attitude du ministre face à cette situation et face au projet
d'aménagement du parc à la rivière Malbaie. Lorsque vous
avez installé une nouvelle machine qui, à elle seule, produit une
quantité presque égale aux trois machines que vous aviez
déjà en installation, l'installation de la nouvelle machine s'est
soldée par quel coût?
M. Walsh: À quel coût...
M. Giasson: Quel coût, l'installation de la machine plus
grosse et plus moderne?
M. Walsh: Y compris, disons, les installations pour la pâte
mécanique et pour la vapeur et la machine à papier, les
coûts de construction, disons, sans les investissements et les fonds de
roulement, la machine nous a coûté environ $19 millions. On a
débuté durant l'année 1967. Aujourd'hui, la même
machine nous coûterait entre trois et quatre fois plus, par les
augmentations des coûts de construction.
M. Giasson: Le jeu de l'inflation. Vous signalez également
avoir investi $3 millions au cours des récentes années pour
améliorer la qualité de l'environnement, la qualité de
l'air et diminuer les solides en suspension. J'ai remarqué que, plus
loin, vous sembliez être inquiets par les sommes qui seraient
nécessaires pour continuer le programme en matière de protection
de l'environnement. Vous évaluez ces programmes, selon les exigences
présentes de la réglementation, à combien de millions?
Posons le problème pour d'ici cinq ans.
M. Walsh: M. Marcoux.
M. Marcoux (André): Nous avons dépensé $3
millions, comme il est mentionné, de 1971 à 1976. Nous venons
présentement de compléter une installation de $1 million,
laquelle est mise en marche cette semaine. C'est un système de
récupération des rejets qui doit baisser notre pourcentage aux
environs de 2%. Maintenant, pour les matières en suspension, nous allons
travailler en 1978 pour baisser nos pertes à l'égout.
Maintenant, pour la question de la DBO, demande biologique en
oxygène, pour la récupération des liqueurs usées,
il y a certains systèmes qui existent, mais ce n'est pas encore
prouvé que ce soit très efficace. Il y a encore beaucoup de
recherches à exécuter sur ces moyens de
récupération ou d'incinération des liqueurs. Ce que nous
comptons faire au sujet de la DBO, comme je l'ai mentionné, c'est
installer une usine de TNP, de trois cents tonnes par jour, vers les
années 1980 ou 1981, pas avant ce moment à cause des fonds qui
sont nécessaires. Et pour l'année 1978, nous comptons diminuer
nos pertes en gaz de l'usine de bisulfite.
M. Giasson: Lorsque vous avez décidé de
procéder dans le développement du projet de Do-nohue,
Saint-Félicien, on peut déduire que vous aviez foi en la
capacité du marché vis-à-vis du produit que vous allez
produire à Saint-Félicien. Je présume que vous ne voyez
aucun problème pour disposer de la production qui va sortir de
là-bas. Vous voyez une capacité pour la compagnie de jouer des
coudes et d'avoir sa place à l'intérieur du grand marché.
Vous ne semblez pas avoir de craintes de ce côté, comme on peut le
retrouver chez d'autres entreprises qui voient l'avenir avec
énormément de pessimisme.
M. Walsh: M. le député, il faut vous dire que quand
nous avons pris la décision, disons en principe, en 1975 et, finalement,
la décision finale, disons en 1976, le marché de la pâte se
portait bien et puis la vente de la pâte était aussi très
bonne. Par contre, avant que nous ayons pu compléter notre financement,
il a fallu que nous ayons des contrats de vente à long terme pour la
presque totalité de la production. Nous avons ces contrats de vente.
Nous avons confiance dans l'avenir au point de vue de la pâte kraft parce
que c'est une pâte qui peut servir dans presque n'importe quel produit de
papier, que ce soit du papier journal, du papier fin, du papier à
écriture ou du papier à emballage ou du papier sanitaire.
Par notre association, nous croyons que nous avons un service de vente
parmi les meilleurs au monde et puis, comme je vous l'ai dit, dans une
période de quelques mois, ils ont pu signer 260 000 tonnes de ventes
pendant des périodes de dix à vingt-cinq ans. C'est une
clientèle de compagnies très importantes, particulièrement
aux États-Unis et en Europe, ce qui fait que nous croyons que nous avons
un très bon carnet, si vous voulez, de clients.
M. Giasson: À Saint-Félicien, je présume que
vous n'avez pas de crainte en matière d'approvisionnement dans ce
secteur?
M. Fortin: Non, nous avons un protocole avec le ministère
des Terres et Forêts qui assure l'approvisionnement pour le complexe de
Saint-Félicien.
M. Giasson: Messieurs, je vous remercie encore une fois de la
façon dont vous avez donné suite à nos inquisitions. Je
voudrais féliciter l'entreprise de Donohue pour le rôle qu'elle
joue dans le comté de Charlevoix. Elle est de loin le plus grand
employeur là-bas et je pense qu'elle va jouer un rôle
également très important du côté du Lac-Saint-Jean,
par l'addition qu'elle fait à Saint-Félicien. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, d'une façon
très brève, car j'aimerais donner une chance à d'autres
qui veulent commenter ce mémoire ce soir. Par contre, vous me permettrez
de poser quelques questions à des représentants de la compagnie
Donohue qui ont bien voulu venir nous présenter ce mémoire.
Ils nous apportent certaines inquiétudes qu'ils ont actuellement
dans leurs négociations, la garantie d'approvisionnement en ce qui
concerne l'usine qui existe depuis quelques années dans le
Québec. Je suis d'accord avec vous, c'est invraisemblable, lorsqu'on
voit qu'un gouvernement, depuis cinq ans, retarde à négocier un
approvisionnement pour une usine qui emploie un nombre d'employés ou qui
garantit du travail à un nombre d'employés aussi important que
celui que vous utilisez actuellement.
M. le Président, j'aimerais demander aux représentants de
la compagnie: Quel est le pourcentage de copeaux qu'elle utilise dans votre
usine fonctionnant actuellement avec vos trois machines?
M. Walsh: Actuellement, nous utilisons environ presque le tiers
de nos besoins, mais nous ne pouvons pas utiliser plus que cela parce que les
copeaux vont dans la pâte chimique et pour les meules que nous avons,
cela prend des billots, on ne peut pas mettre des copeaux.
M. Russell: Vous utilisez le maximum possible de copeaux que vous
avez en approvisionnement. C'est un peu la raison pour laquelle vous n'achetez
pas les copeaux de Samoco, autre que celle que vous avez mentionnée tout
à l'heure?
M. Walsh: Vous posez une question qui est peut-être un peu
embarrassante. Nous avons une filiale...
M. Russell: Mais, qui peut certainement être
concluante.
M. Walsh: ... comme nous l'avons mentionné tout à
l'heure, qui exploite trois scieries. Nous avons beaucoup de copeaux à
vendre actuellement et...
M. Russell: Oui, mais si j'ai bien compris tout à l'heure,
vous allez utiliser ces copeaux à Saint-Félicien. Vous avez une
usine qui va utiliser combien de copeaux à Saint-Félicien?
M. Walsh: Peut-être n'avez-vous pas compris que les
scieries fonctionnent actuellement, ce sont des scieries que nous avons
acquises...
M. Russell: Oui, j'avais compris, je suis parfaitement au
courant.
M. Walsh: ... ces scieries produisent des copeaux et nous ne
trouvons pas de débouchés pour toute cette production.
M. Russell: D'accord, mais demain; j'ai dit demain, l'usine que
vous construisez à Saint-Félicien va utiliser ces copeaux.
M. Walsh: Oui, absolument.
M. Russell: Donc, ce n'est pas tout à fait pour la raison
que vous avez mentionnée que vous n'utilisez pas les copeaux de Samoco.
Cela pourrait être un facteur, ce que vous avez mentionné tout
à l'heure est un facteur.
M. Walsh: À long terme, on pourrait utiliser les copeaux
de Samoco dans la pâte mécanique avec un bon résultat.
Quand nous allons installer la pâte mécanique raffinée nous
pourrions utiliser les copeaux de Samoco dans ce temps-là.
M. Russell: Est-ce que cela veut dire que ça prendrait des
modifications à l'usine actuelle?
M. Walsh: Oui.
M. Russell: De combien?
M. Marcoux (André): ... présentement construit une
usine de 300 tonnes. On parle de $60 000 par tonne, ce qui ferait environ $18
millions pour installer cette usine. À ce moment, on pourrait utiliser
les copeaux de Samoco et, en produisant 300 tonnes de pâte
thermomécanique, il y aurait une économie de 25 000 cunits par
année.
M. Russell: Mais, en faisant ces modifications, est-ce qu'il est
possible, à ce moment, que vous utilisiez plus de copeaux que vous en
utilisez actuellement?
M. Marcoux (André): Oui, absolument parce que
là...
M. Russell: C'est quand même assez important parce que vous
avez beaucoup de copeaux dans la région qui sont transportés
à des distances plus éloignées et qui pourraient
être utilisés chez vous. Je ne suis pas au courant où
Samoco transporte ses copeaux, mais vous êtes certainement l'une des
usines les plus près de Samoco actuellement.
M. Marcoux (André): Oui, c'est cela.
M. Russell: Si on les transporte ailleurs, c'est Samoco qui en
souffre et c'est une perte de transport, tandis que si on faisait les
modifications à
l'usine chez vous, ils pourraient être transportés chez
vous. Ceci deviendra nécessaire, si je comprends bien, après que
votre opération à Saint-Félicien sera
démarrée, ce qui est en 1978 je crois n'est-ce pas?
M. Walsh: Nous l'espérons.
M. Russell: Vous espérez que ce soit en 1978, mais
à ce moment vous n'aurez pas assez de copeaux à
Saint-Félicien, vous serez obligés d'acheter d'autres choses que
des copeaux?
M. Walsh: Une petite partie, oui.
M. Russell: Vous avez parlé tout à l'heure de
coût d'approvisionnement assez élevé dans votre
région.
M. Walsh: Oui.
M. Russell: Quel est le coût du cunit de votre bois,
actuellement, rendu à votre usine? Si je me reporte aux mémoires
qui nous ont été présentés préalablement,
cela semble se rapporter aux alentours de $70 le cunit. Dépassez-vous
ces prix?
M. Fortin (André): Oui, nous nous situons en haut de la
moyenne.
M. Russell: En haut de $70.
M. Fortin (André): En haut de $70.
M. Russell: Pour le bois que vous exploitez vous-même,
malgré que vous faites du flottage?
M. Fortin (André): C'est cela.
M. Walsh: C'est au-delà de $75 du cunit.
M. Russell: Donc, vous allez être heureux d'avoir des
copeaux dans ce cas?
M. Walsh: Les copeaux nous coûtent assez cher, parce que
les distances sont considérables et le coût du transport est
élevé aussi.
M. Marcoux (André): Le transport, en moyenne, nous
coûte $26 ou $27 la tonne.
M. Russell: Plus $40, ça fait $66. M. Marcoux
(André): Oui. La tonne. M. Russell: La tonne, oui,
d'accord.
M. Fortin: Clermont, géographiquement parlant, n'est pas
bien localisé pour acheter des copeaux. Sauf Samoco, comme on vient de
le dire ou quelques autres petites usines dans les environs, nous sommes
obligatoirement face à la situation de payer le transport sur des
distances énormes. Les autres sources d'approvisionnement, comme vous
pouvez l'imaginer, sont l'Abitibi ou le Lac-Saint-Jean; c'est très
loin.
M. Russell: Est-ce que quelqu'un connaît la production
on pourrait le savoir en fouillant dans les documents de Samoco
actuellement, 60 millions de pieds par année? Ce qui veut dire 50 000
tonnes rentables, après être rendues chez vous.
M. Desbiens: Cela ira jusqu'à 90 000 tonnes.
M. Russell: 90 000 tonnes, ce qui veut dire que votre
investissement sera une chose assez intéressante, qui soit faite le plus
rapidement possible, après que Saint-Félicien sera en marche,
pour répondre à vos besoins. Est-ce que ceci ne serait pas
suffisant pour répondre à votre désir d'avoir une
alimentation garantie? Actuellement, vous n'avez pas encore ce que vous avez
demandé ou ce qui vous avait été promis en 1972, ce n'est
pas réglé.
Mais, si vous faites les transformations que vous proposez, vous
pourriez prendre peut-être une plus grande partie de vos besoins en
copeaux. À ce moment-là, ça veut dire que vous auriez
moins besoin de garantie.
M. Walsh: Cela règle la situation, M. le
député, mais ça ne résout pas tous les
problèmes.
M. Russell: Non, c'est évident ça ne
résoudra pas tous les problèmes, mais une bonne partie.
M. le Président, je ne veux pas m'attarder là-dessus. Je
pense qu'on est mieux de passer aux autres sujets; j'aurais d'autres questions
en ce qui concerne les coûts et votre dépense d'immobilisation.
Dans votre mémoire vous n'avez pas de chiffres précis; les
coûts d'immobilisation actuellement, est-ce que ça dépasse
les coûts de votre dépréciation? Je ne parle pas de
nouveaux projets.
M. Auger: De 1967 à 1971, les dépenses en
immobilisation ont été de l'ordre de $39 millions. Au bout de
cette période, nous avons fait des emprunts à long terme pour
environ $18 millions et il y a eu les subventions qui ont été
mentionnées plus tôt de $4,7 millions; ça veut dire que,
sur $39 millions d'immobilisation, $20 millions sont venus de
l'extérieur et $19 millions à même nos
bénéfices qui ont été réinvestis.
M. Russell: Vos bénéfices et votre
dépréciation.
M. Auger: La dépréciation pendant la même
période a été de $17 millions, je crois.
M. Russell: Ce qui semble une chose très normale, je
pense. Une compagnie qui est en bonne posture devrait toujours investir
à peu près selon sa dépréciation, c'est la norme
normale des manufactures. Vous faites un emprunt de $20 millions pour faire une
immobilisation additionnelle, si je comprends bien. À ce
moment-là, vous avez doublé votre production, vous faites une
immobilisation additionnelle de $20 millions, c'est parfaitement normal.
En ce qui concerne les coûts, dans votre mémoire, vous
mentionnez que vos coûts de main-
d'oeuvre représentent à peu près le tiers du
coût de votre production de papier. Est-ce que c'est un chiffre assez
régulier, chez vous, que la main-d'oeuvre en forêt et en usine
représente le tiers?
M. Drouin: II faut considérer, lorsqu'on dit que la
main-d'oeuvre représente le tiers, qu'on a une partie de nos bois qui
sont achetés et une partie de nos copeaux achetés aussi. On ne
considère pas la main-d'oeuvre dans les copeaux et dans les bois
achetés. À ce moment-là, on peut dire que, si on
fabriquait fort probablement tous nos bois, on aurait de la main-d'oeuvre qui
pourrait représenter entre 35% et 50% du coût. On pourrait aller
jusqu'à 50%, si on incluait hypothétiquement...
M. Russell: Si je me reporte à vos coûts en usine,
ça peut représenter à peu près 18% à
20%?
M. Drouin: Pardon?
M. Russell: Simplement les coûts en usine peuvent
représenter 18% à 20%?
M. Drouin: Les coûts à l'usine représentent
26,5% de la main-d'oeuvre.
M. Russell: 26,5%. Vous êtes en haut de la moyenne.
M. Drouin: Non, on n'est pas en haut de la moyenne. On est pas
mal dans la moyenne.
M. Russell: J'ai donné cet après-midi les
coûts de la moyenne canadienne qui étaient de 16% en 1974. Si je
prends les chiffres d'inflation que l'on m'a donnés, qui étaient
de 17% par année, pour les années 1975 et 1976, ces 17% de 16%
nous amènent à peu près à 20% du coût total,
pour l'année 1976. Quand je fais des vérifications de documents
qui me viennent directement de la Consol, leurs propres documents, et que je
fais les calculs, cela arrive à peu près à 20%. C'est la
raison pour laquelle je vous pose la même question, parce que vous faites
du papier journal, vous utilisez des copeaux, peut-être en pourcentage
moindre que la Consol, et j'aimerais savoir la raison pour laquelle votre
coût de main-d'oeuvre est beaucoup plus élevé.
M. Drouin: II faut dire que la main-d'oeuvre de 26% que je donne
comprend aussi les bénéfices marginaux qui sont de l'ordre de
30%.
M. Russell: Et l'administration? M. Drouin: Oui, tout est
compris.
M. Russell: Ce n'est pas seulement la main-d'oeuvre.
M. Walsh: De plus, nous avons un bureau à Clermont qui
produit toutes les statistiques de la compagnie. Nous n'avons pas, comme
d'autres compagnies, la comptabilité au siège social. Nous la
faisons plutôt à l'usine. Quant à nos coûts, on les
met de cette manière, dans les coûts à l'usine. On comprend
nos bureaux là-bas, etc.
M. Drouin: L'ingénierie.
M. Walsh: Toutes les compagnies ne calculent pas leurs
coûts de la même façon. Quelquefois, cela ne se compare
pas.
M. Russell: M. le Président, je vous remercie. J'aurais
beaucoup d'autres questions que j'aimerais discuter avec vous tous. On aura
d'autres occasions pour en reparler. Pour le reste des questions, j'en ferai
des déductions, suivant les rapports qui m'ont été
présentés et les chiffres qu'on a reçus de la part
d'autres compagnies. On pourra tirer nos propres conclusions. Il serait
peut-être trop long de les passer les uns après les autres, ce
soir. Je vous remercie M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Abitibi-Est.
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
au problème de copeaux qui a été soulevé plus
tôt par quelques intervenants. Vous mentionnez, dans votre rapport,
à la page 18, que vos besoins en copeaux sont présentement
comblés par l'industrie du sciage. On a dit tout à l'heure que
vous aviez trois usines de sciage qui vous fournissaient une certaine
quantité de copeaux. J'aimerais savoir si, actuellement, vous achetez
quand même d'autres copeaux de l'extérieur? Serait-il exact que
ces copeaux viendraient de la région du Nord-Ouest?
M. Fortin: C'est juste. Nous achetons aussi des copeaux de
l'extérieur et ils viennent de la région de l'Abitibi.
M. Bordeleau: Toujours à la même page, vous
prévoyez une diminution de la disponibilité de copeaux à
moyen terme. Je comprends qu'avec la mise en production de l'usine de
Saint-Félicien, vous allez en prendre une bonne partie. Mais je ne vois
pas tellement le problème quand je pense qu'actuellement il y a
apparemment des tas de 200 000 tonnes de copeaux dans la région de
l'Abitibi. Quel problème voyez-vous dans cette diminution possible,
d'ici quelques années?
M. Fortin: Évidemment en 1978, 1979 et 1980, il est
raisonnable de penser qu'il n'y aura pas de manque de copeaux dans quelque
région de la province. Après cette période, si on
considère le départ de Donohue Saint-Félicien pour un
facteur et que le domaine des pâtes et papiers fonctionne sur une plus
grande échelle, tout cela mis ensemble va nécessairement amener,
peut-être pas un manque de copeaux, mais le surplus va
définitivement disparaître.
M. Bordeleau: Mais, à ce moment-là, pour vous
protéger d'une chose comme celle-là, je n'ai
pas de conseils à vous donner, n'y aurait-il pas
possibilité de signer des ententes, des contrats à long terme
avec des usines de sciage qui ont actuellement des surplus?
M. Fortin: Actuellement, c'est un sacrifice pour notre compagnie
d'acheter des copeaux à l'extérieur, littéralement
parlant, mais c'est une des raisons pour laquelle nous continuons à
respecter des contrats avec d'autres usines du Nord-Ouest.
M. Bordeleau: Ah bon! C'est tout. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Je voudrais revenir sur deux points, rapidement. On
a d'abord mentionné tantôt qu'il y avait 2000 emplois au total
à Saint-Félicien, ce qui comprenait les trois scieries plus les
travailleurs forestiers. Y a-t-il une proportion de ces travailleurs forestiers
qui sont nécessaires uniquement pour fournir l'usine kraft ou si tout le
bois passe par les scieries avant de...
M. Walsh: C'est ce qu'on appelle un complexe
intégré. Toutes les billes vont passer par les scieries, il y a
là une sélection de billes et toute la préparation des
copeaux va se faire aux scieries. Il n'y a pas de cour à bois à
l'usine kraft, on va simplement avoir un stock de copeaux.
M. Desbiens: Je reviens à la question de
l'approvisionnement de l'usine de Clermont. Votre inquiétude semble si
grande que je pense que vous nous l'avez communiquée. Vous avez
mentionné tantôt, en réponse à une de mes questions,
qu'il y avait danger d'une rupture de stock après 18 ans, 20 ans,
avez-vous dit. J'avais des chiffres qui allaient à 80 ans et plus. Y
a-t-il un moyen quelconque de rapprocher ces chiffres?
M. Fortin: Si on avait des cartes et si on parlait ensemble, on
pourrait trouver la raison pour laquelle nous avons une différence.
M. Desbiens: Quand vous calculez 18 ans, tenez-vous compte des
autres possibilités de fourniture de bois que vous utilisez
présentement, copeaux et achats à l'extérieur?
M. Fortin: Absolument. Les copeaux sont déduits et les
bois achetés à l'Office des producteurs sont aussi
déduits, de même que les autres sources d'approvisionnement qu'on
peut avoir, comme les grands propriétaires forestiers. C'est un chiffre
duquel on déduit la quantité, le volume ligneux disponible qui
est à maturité à l'heure actuelle et qui pourrait
être de l'ordre, pour donner un exemple, de 3,5 millions de cunits, au
rythme de 200 000 cunits par année; si on fait la division, cela donne
autour de 17 ou 18 ans.
M. Desbiens: Vous m'avez dit que vous ne te- nez pas compte de
l'achat du bois à l'extérieur? Cela a été
déduit?
M. Walsh: Cela a été déduit. J'ai
utilisé 200 000 cunits, ce ne sont pas les besoins de l'usine. C'est
inférieur aux besoins de notre usine.
M. Desbiens: Je vais être obligé de réviser
mes chiffres! Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Bérubé: Je voudrais poser quelques questions
concernant votre organisation, en ce sens que je pense que la
société Donohue est présentement partiellement
contrôlée par la Société générale de
financement.
J'aimerais savoir, à l'heure actuelle, quel est le pourcentage
des actions détenues par la SGF?
M. Walsh: Les actions ordinaires, M. le ministre, sont
détenues à 43%, les actions votantes à 54%.
M. Bérubé: Bon, d'une part. D'autre part,
reliée comme telle à votre réseau de vente, j'aimerais
savoir d'abord quelle est la situation en ce qui a trait à la vente pour
votre entreprise. Ecoulez-vous facilement vos produits sur le marché
mondial ou américain? Et j'aimerais savoir un peu comment est
organisé votre réseau de mise en marché parce que, d'une
façon générale, on souligne qu'une des plus grosses
difficultés que l'on rencontre dans le secteur des pâtes et
papiers, c'est qu'on fait appel à un cartel, à un club
fermé, qu'il n'est pas facile de se glisser là-dedans. Or, la
société Donohue, qui est tout de même une
société relativement petite bien qu'avec Saint-Félicien,
vous allez entrer dans les majeures, mais, étant donné qu'avec
votre usine de Clermont, vous êtes quand même dans les petites,
comment arrivez-vous à vous tailler une part de marché?
J'aimerais savoir un peu comment vous faites votre distribution, si vous pouvez
nous décrire un peu votre réseau de vente dans le monde.
M. Walsh: Puis-je vous questionner? Voulez-vous qu'on parle du
papier journal ou de la pâte?
M. Bérubé: Du papier journal.
M. Walsh: Du papier journal. Comme nous l'avons dit tout à
l'heure, nous avons une capacité de 260 000 tonnes par année.
Cette année, l'usine va produire environ 240 000 à 242 000
tonnes, nous prévoyons nos ventes de l'ordre de 234 000 tonnes.
Effectivement, à la fin de l'année, nous allons avoir un stock
plus élevé qu'à l'ordinaire. La compagnie a toujours vendu
sur le marché américain. La seule fois qu'on a
expédié un peu de papier au Québec, c'était pendant
la période où il y avait une pénurie, et c'était
pour en dépanner quelques-uns, et une petite partie de notre production
est expédiée en France. Nous avons tou-
jours eu de très bonnes relations directes avec nos clients, et
nous leur avons toujours donné, en collaboration avec tous nous
ouvriers, une très bonne qualité et un service, je crois,
impeccable, et nous avons toujours eu une bonne collaboration.
De plus, il y a une autre condition assez importante qui nous aide,
c'est que nous avons deux filiales où nous avons des
intérêts de journaux assez importants aux États-Unis qui
sont associées minoritairement dans une partie des actifs à
Clermont. De ce côté, cela nous aide aussi.
M. Bérubé: Quel pourcentage de papier
écoulez-vous à travers ces chaînes de journaux?
M. Walsh: Environ 50%.
M. Bérubé: Environ 50%. Donc, vous partez avec 50%
de votre produit..
M. Walsh: Un peu moins de 50%.
M. Bérubé: Vous avez donc, en gros, 50% de votre
production qui est un marché captif et 50% que vous écoulez sur
le marché libre.
M. Walsh: C'est le mot qu'on utilise parfois, le mot
"captif".
M. Russell: II y aurait la question du Cap-de-la-Madeleine.
M. Bérubé: Maintenant, avez-vous des bureaux de
vente établis un peu partout, ou faites-vous toutes ces ventes à
partir de Montréal?
M. Walsh: Non. Nous avons un service de ventes à
Québec et nous avons, à New York, des représentants
exclusifs pour la compagnie Dono-hue. Ce ne sont pas des employés, mais
ils font notre représentation.
M. Bérubé: Je vois.
M. Walsh: Nos conseillers juridiques nous ont toujours dit: Ne
faites pas d'affaires aux États-Unis.
M. Bérubé: Peut-être une dernière
question. Vous soulignez, comme tel, votre problème d'approvisionnement
en bois et les très grandes difficultés que vous avez avec le
ministère des Terres et Forêts. J'ai bien lu votre mémoire.
Forcément, j'ai des gens au ministère des Terres et Forêts
qui ont eu quelques réponses à glisser et m'en ont glissé
une à l'oreille. En particulier, ils ont dit: Ne pourrait-on pas
implanter un système de thermomécanique au lieu d'attendre 1981,
mais le faire plus rapidement, ce qui vous permettrait d'utiliser vos copeaux
de Samoco pour lesquels vous avez un droit de premier refus, si je ne m'abuse,
et que vous n'utilisez pas? Ceci vous permettrait de réduire vos besoins
en fibres d'à peu près 25 000 tonnes, donc vous permettrait de
vivre largement des concessions que vous avez dans la région de
Charlevoix, c'est-à-dire vous permettrait de les faire durer 88
ans au lieu de 18 ans. Que pensez-vous de cette suggestion que nous font nos
conseillers du ministère?
M. Walsh: M. le ministre, vous nous posez une question
très intéressante, parce que c'est moi-même, disons, qui
suis le plus au courant de ce protocole. Si je peux vous mentionner quelques
faits; quelques journées avant que nous ayons à signer le
protocole, tout était, disons, convenu. Ils nous ont dit: Avant de
signer, il faut ajouter une autre clause. Je vais vous lire la clause, si vous
me le permettez. "Advenant que la construction d'une nouvelle usine
c'est à propos des 54 000 cordes de la région du
Sacré-Coeur, de la forêt domaniale du Saguenay de
transformation de bois soit autorisée par le ministère des Terres
et Forêts dans la région du Bas-Saguenay sud, secteur nord, la
garantie d'approvisionnement ci-haut mentionnée se trouvera
annulée. Il y aura lieu de prévoir une nouvelle formule, de tenir
compte des nouvelles implications financières qui pourraient en
résulter pour Donohue."
L'approvisionnement en copeaux produits par la nouvelle usine serait
considéré comme une formule de remplacement. Cela fait que la
phrase "il y aura lieu de prévoir une nouvelle formule qui tiendra
compte des nouvelles implications financières qui pourraient en
résulter pour Donohue", nous sommes à votre disposition pour
discuter de cela le plus tôt possible. Comme vous le savez, nous avons
fait les installations, et tout dernièrement, les meules que nous avons
installées, en 1967, nous ont coûté $9 millions... Si nous
allons à la pâte mécanique, il va falloir arrêter ces
meules, pas nécessairement les meules que nous avons installées
en 1967, mais il va falloir arrêter des meules. Cela fait que cela a des
conséquences assez sérieuses du côté des
implications financières, comme on le dit ici, assez importantes pour la
compagnie.
M. Bérubé: Le rendement, par contre, en pâte
ou en fibre, n'étant pas passablement supérieur à celui
que vous avez présentement, est-ce que ce rendement ne compenserait pas
partiellement pour les problèmes de remplacement
d'équipements?
M. Walsh: Oui, M. le ministre, M. Marcoux l'a mentionné
tout à l'heure qu'en installant un système de 300 tonnes par jour
de pâte mécanique raffinée, nos besoins diminuent de 25 000
tonnes par année.
M. Bérubé: Je vous remercie infiniment messieurs.
J'ai pris beaucoup de plaisir à votre présentation. Je pense que
la société Donohue représente quand même un des
fleurons de l'industrie québécoise des pâtes et papiers.
Elle est bien de chez nous et cela me faisait énormément plaisir
de vous accueillir ici ce soir et je vous remercie de votre gentillesse.
M. Russell:... demandé, c'est une suggestion, qu'ils nous
invitent à visiter leur usine. Ce serait intéressant à
visiter.
M. Walsh: Vous êtes toujours invités à
Clermont et aussi à visiter l'usine à Saint-Félicien que
vous allez trouver très impressionnante.
M. Russell: J'ai déjà eu le plaisir de visiter
Clermont.
M. Walsh: Ah! vous avez déjà eu l'occasion de...
Dernièrement?
M. Russell: En 1969. M. Walsh: En 1969.
M. Bérubé: Je dois dire que le ministre
d'État au développement économique vient tout juste de
visiter votre usine de Saint-Félicien et il est revenu absolument
émerveillé.
M. Russell: Bon!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Messieurs les représentants de la société Dono-hue, au nom
de tous les membres de la commission, je vous remercie de votre collaboration
et de votre participation à cette commission parlementaire. Merci
beaucoup, bonsoir.
M. Walsh: Nous vous remercions aussi, M. le Président,
ainsi que tous les membres. Bonsoir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont ajournés au mardi le 11 octobre, à
10 heures, à la salle 81-A.
(Fin de la séance à 22 h 58)