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Etude des crédits du ministère des
Terres et Forêts
(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!
La commission permanente des richesses naturelles et des terres et
forêts est réunie aujourd'hui pour étudier les
crédits budgétaires du ministère des Terres et
Forêts. Les membres de la commission pour aujourd'hui sont M. Baril
(Arthabaska), M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi), M.
Russell (Brome-Missisquoi) en remplacement de M. Brochu (Richmond), M. Desbiens
(Dubuc), M. Garneau (Jean-Talon), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Goulet
(Bellechasse), M. Grégoire (Frontenac), M. Joron (Mille-Iles), M.
Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski), M. Marquis
(Matapédia), M. Mercier (Berthier), M. O'Gallagher (Robert-Baldwin), M.
Perron (Duplessis).
Est-ce qu'il y a des changements ou des remplacements d'un
côté ou de l'autre?
M. Giasson: M. Lamontagne (Roberval)?
Le Président (M. Clair): A la place de M. Garneau, M.
Lamontagne (Roberval).
M. Roy: Avec votre permission, M. le Président, même
si je ne suis pas membre de la commission comme tel, j'aimerais participer aux
travaux de cette commission parlementaire.
Le Président (M. Clair): Je demanderai une information
à l'assemblée. En règle générale, dans
pareil cas, est-ce qu'il est de coutume de demander plutôt l'assentiment
de la commission ou plutôt de remplacer l'un des membres absents d'un
côté ou de l'autre?
M. Roy: Je ne peux remplacer personne. Si la commission donne son
consentement unanime...
Le Président (M. Clair): La commission est maîtresse
de ses travaux, est-ce qu'il y a unanimité pour accepter?
M. Giasson: M. le Président, pour ce qui est de
l'Opposition officielle, nous n'avons aucune objection à ce que le
député de Beauce-Sud participe aux travaux de notre
commission.
Le Président (M. Clair): Du côté de l'Union
Nationale?
M. Russell: M. le Président, je pense que notre
règlement dit que tout député peut venir poser des
questions à la commission. Le seul moment où il ne peut pas
participer, c'est s'il y avait un vote sur un sujet particulier; il ne peut pas
voter. La coutume est établie depuis longtemps. Je pense que cette
coutume a toujours été respectée.
M. Roy: Mais, comme il y a très peu de votes lors de
l'étude des crédits, je doute que le problème se pose.
Mais le député de Brome-Missisquoi a raison, M. le
Président. S'il y a un vote, évidemment, n'étant pas
membre de la commission, je ne peux pas participer.
Le Président (M. Clair): Cela va. Effectivement, en vertu
de l'article 148 paragraphe 3 de notre règlement, "lorsqu'une commission
étudie les crédits d'un ministère, tout
député peut se faire entendre, qu'il soit membre ou non de ladite
commission". Je vois qu'il y avait également consentement unanime de la
commission dans ce sens. Bien entendu, dans pareil cas, même si la
question n'est pas soulevée, je pense qu'un député n'a pas
le droit de vote, même s'il a le droit de se faire entendre
là-dessus.
Il y aurait maintenant lieu de désigner un rapporteur. Est-ce que
quelqu'un a une suggestion à faire? M. Marquis de Matapédia
accepterait-il d'agir comme rapporteur?
M. Marquis: D'accord. J'accepte si les autres partis...
M. Giasson: Accepté.
Le Président (M. Clair): M. Marquis de Matapédia
agira comme rapporteur.
Avant d'appeler l'élément 1 du programme 1, M. le ministre
des Terres et Forêts, si vous avez des remarques préliminaires ou
générales à faire.
Exposé général du ministre M.
Yves Bérubé
M. Bérubé: M. le Président, suivant la
tradition, je pense qu'il convient peut-être de ma part d'exposer
brièvement les politiques générales du ministère et
leurs implications budgétaires.
Comme les membres de cette commission pourront le constater au fur et
à mesure de la progression de l'étude que nous entreprenons
aujourd'hui, la programmation financière du ministère des Terres
et Forêts pour l'exercice 1977/78 tient compte, dans son ensemble, du
contexte d'austérité dans lequel s'est effectuée
l'allocation des ressources financières disponibles entre les divers
programmes gouvernementaux.
C'est ainsi que le taux d'accroissement des dépenses
ministérielles a été maintenu le plus bas possible, sauf
pour ce qui est de certaines activités dont l'intensification permettra
à la ressource forêt de jouer un rôle plus dynamique dans la
stabilisation de l'économie québécoise. Je pense, ici,
à la consolidation du potentiel forestier du Québec; je pense
à l'utilisation plus rationnelle des ressources forestières, aux
sources additionnelles d'emplois que générera une recrudescence
des activités dans ces secteurs particuliers.
Je pourrais, pour rendre la chose plus explicite, vous fournir le
détail d'un tableau qui montre,
par programme et par élément de programme, les variations
par rapport au cycle financier précédent. Mais j'ai l'impression
qu'un tel exercice ne contribuerait pas tellement à la discussion,
à ce stade du moins, puisque nous aurons l'occasion de revenir
là-dessus lors de l'examen plus détaillé des
crédits budgétaires du ministère.
J'estime, par contre, beaucoup plus utile et plus constructif de vous
présenter des considérations d'ordre plus général
qui vous permettront d'obtenir une vue d'ensemble de ce qui se passe au
ministère et, partant, de constater que les activités sur
lesquelles celui-ci met l'accent respectent bien les grandes orientations qu'il
s'est données ces dernières années dans la recherche d'une
gestion beaucoup plus dynamique et plus moderne de ses ressources
forestières et territoriales.
Les demandes financières du ministère des Terres et
Forêts, pour la période de 1977/78, totalisent la somme de $94 861
000 soit, par rapport au cycle budgétaire précédent, un
accroissement de quelque $13 millions que l'on retrace plus
particulièrement au programme 2, l'Amélioration de la
forêt, et au programme 4, l'Utilisation de la forêt. Ce sont deux
secteurs dans lesquels le ministère juge prioritaire d'intensifier son
action vu le rôle de plus en plus important que la forêt sera
appelée à jouer dans notre économie.
De sérieuses études démontrent en effet qu'au cours
des prochaines décennies les besoins en produits ayant comme base le
bois seront de plus en plus considérables et les pays qui
posséderont des réserves forestières importantes pourront
prendre une place de choix sur les marchés mondiaux. Plus
concrètement, la recherche de l'objectif principal visé, soit
l'accroissement maximal du potentiel forestier du Québec, se traduira
par des efforts plus marqués au niveau de certaines activités
précises telles, entre autres, le reboisement des superficies non
régénérées et des terrains à vocation
forestière, l'exécution des travaux sylvicoles, aptes à
augmenter la productivité de la forêt, et la construction de voies
d'accès à la ressource permettant une allocation plus rationnelle
et plus économique de la matière première entre les divers
utilisateurs.
Ce qu'il importe aussi de souligner, c'est que ces activités
privilégiées ne se limiteront pas nécessairement à
la forêt publique, mais elles pourront également, sous
réserve de modalités prédéterminées,
s'étendre aux terrains privés comme c'est le cas
présentement pour le reboisement des terrains des petits
propriétaires et pour les travaux de l'amélioration de la
forêt effectués dans le cadre d'ententes avec des organismes
groupant des propriétaires de terrains privés.
Pour ce qui est des autres activités, qu'on retrouve dans les
programmes du ministère, elles se poursuivront à peu près
au même rythme que par le passé, sauf en ce qui a trait
principalement au programme 3, élément 2, où il y a eu
diminution des crédits budgétaires destinés aux travaux
d'arrosage aérien contre les insectes et au programme 8,
élément 1, où des sommes d'argent additionnelles ont
été prévues pour les travaux d'arpentage dans le Grand
Nord. C'est le cas de l'entente avec les Cris et les Inuit et pour la
cartographie des plaines d'inondation dans le cadre d'une entente avec Ottawa
pour la protection contre les inondations.
En ce qui a trait aux politiques du ministère des Terres et
Forêts, je puis vous dire que depuis mon entrée en fonction j'ai
eu l'occasion de discuter, passablement en profondeur avec mes collaborateurs
immédiats, les grandes orientations que s'est données le ministre
ces dernières années dans les domaines relevant de sa
juridiction.
Il va sans dire que je suis entièrement d'accord avec les
objectifs recherchés à court, à moyen et à long
termes et cela plus particulièrement en ce qui a trait à la
réalisation de la réforme forestière entreprise par le
ministère. J'estime en effet que la ressource forêt
représente pour le Québec un levier indispensable à
l'amélioration de la situation économique dans certaines
régions où elle constitue, cette forêt, par son
caractère de durée et de permanence, souvent la seule source
d'emploi et de revenu apte à atténuer un chômage devenu
chronique. C'est pourquoi je vois d'un oeil favorable l'intensification des
efforts visant à augmenter le stock forestier et à en faciliter
la mise en valeur dans le meilleur intérêt de la population
québécoise.
J'ai la ferme conviction que le ministère s'est engagé
dans la bonne voie et que les sommes d'argent qu'il investit dans
l'amélioration des forêts publiques et privées constituent
un excellent placement qui devrait lui rapporter des dividendes
intéressants dans le futur. Quant aux orientations du ministère
dans le secteur des terres ou du territoire, je me suis rendu compte, à
l'examen des documents en chantier, que le ministère, en collaboration
avec des représentants des ministères dont les activités
concernent de près ou de loin la gestion du domaine public, travaille
depuis plusieurs mois déjà à l'élaboration d'une
politique gouvernementale de gestion foncière dont la mise en
application favorisera certainement une action centrale beaucoup plus
rationnelle et certainement plus dynamique dans un secteur que je sais
très controversé de nos jours.
Les problèmes les plus sérieux ont été mis
en évidence et je pense que les éléments de solution
proposés devraient concourir à faire disparaître le climat
d'incertitude qui s'est installé à la longue dans l'esprit de la
population par suite d'un manque des gouvernements d'affirmer clairement leur
position sur des questions aussi épineuses que celles de
l'aliénation ou la non-aliénation des terres publiques sur la
réserve des trois chaînes, et j'en passe. Ce projet de politique
de gestion du domaine public a été soumis à l'étude
du comité permanent de l'aménagement, lequel, une fois
terminées les consultations amorcées avec les ministères
et les organismes que la question concerne plus particulièrement,
devrait être en mesure de formuler ses recommandations aux
autorités gouvernementales.
C'est dire que, dès 1977, le ministère des Terres et
Forêts devrait être en mesure de modifier
ses règles et de réaliser ses transactions en fonction de
la nouvelle philosophie de gestion qui découle de cette politique. Or
cet examen un peu à vol d'oiseau des prévisions
budgétaires du ministère des Terres et Forêts, pour la
période 1977/78, devrait tout de même être suffisamment
indicatif pour que l'on puisse se rendre compte que le ministère,
malgré les contraintes dont il a dû s'accommoder, n'a pas
dévié de sa course et qu'il respecte toujours la ligne de
conduite qu'il s'est tracée dans les recherches d'une meilleure gestion
de ses ressources forestières.
D'aucuns pourront remarquer que les choses ne progressent par aussi
rapidement qu'on le prévoyait.
Je répondrai à cela que le ministère s'est
engagé dans une réforme qui nécessite l'apport des
ressources humaines, des ressources financières, du matériel
additionnel, dont la disponibilité ou la non-disponibilité
affecte nécessairement l'échéancier établi au
départ pour la réalisation des objectifs. J'ai l'impression,
cependant, que nous traversons peut-être des moments les plus durs et que
la conjoncture économique défavorable, qui ralentit
présentement notre progression, devrait s'améliorer avec le
temps. Ceci devrait nous permettre de rattraper le temps perdu.
Je m'excuse, messieurs, d'avoir retenu aussi longtemps votre attention.
Je l'ai fait en croyant qu'il serait profitable pour la bonne marche des
discussions qui vont suivre, de faire état du contexte dans lequel s'est
effectuée l'allocation des crédits budgétaires entre nos
différents programmes. Il fallait faire ressortir que le
ministère, en l'absence de moyens financiers pour maintenir un niveau
d'opération stable, n'avait pas d'autre choix que de ralentir certaines
activités qui, tout en ayant leur raison d'être, pouvaient, pour
un temps donné, être poursuivies à un régime
réduit, sans pour autant nuire à l'efficacité
générale du ministère.
Je termine là-dessus en vous remerciant de votre bonne attention
et en vous indiquant que je serai extrêmement heureux, avec l'aide, si
vous le permettez, de tous mes collaborateurs autour, de répondre aux
questions que vous jugerez opportun de me poser dans le cours de l'étude
plus détaillée des demandes financières du
ministère, pour l'exercice 1977/78. Merci.
Le Président (M. Clair): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, avant de procéder
à certains commentaires, au tout début de l'étude des
crédits du ministère des Terres et Forêts,
j'apprécierais vivement que le ministre nous présente les
fonctionnaires qui l'accompagnent, ce matin, afin que ces personnes qui
l'appuient soient connues de tous les membres de la commission.
M. Bérubé: M. Poulin, sous-ministre aux Terres et
Forêts; M. Gagnon, sous-ministre adjoint, également aux Terres et
Forêts, responsable de l'administration et de la gestion
financière; M. Lé-garé, sous-ministre; M. Boissinot, qui
s'occupe plus particulièrement de la conservation et M. Jean-Louis
Caron, qui travaille à la gestion régionale du
ministère.
Commentaires de l'Opposition M. Julien Giasson
M. Giasson: M. le Président, on ne peut, à ce
moment-ci, entreprendre l'étude des crédits du ministère
des Terres et Forêts sans se rappeler les changements profonds qui ont
été effectués au cours des récentes années
au Québec, à partir du moment où la volonté du
ministère, comme la volonté du gouvernement de l'époque
voulait apporter une transformation assez importante vis-à-vis de la
ressource forestière chez nous. On sait qu'il s'agit d'une ressource
renouvelable, une ressource qui, au Québec, parmi les différentes
richesses naturelles que nous avons, a une importance énorme.
Etant donné que c'est là une ressource renouvelable, il va
sans dire qu'on doit y apporter peut-être une attention encore plus
particulière puisque, dans le temps, on saura les conséquences et
les impacts que ceci aura toujours sur l'économie de notre province.
Cette réforme forestière, il y a longtemps qu'on
l'attendait au Québec. J'ai eu l'occasion, il y a quelques
années, il y a environ quatre ou cinq ans, d'assister à des
séances de travail au tout début de la réforme et
j'étais parfaitement d'accord avec tous les projets de réforme
proposés ou la quasi-totalité de ces projets. On avait dit depuis
longtemps que les Québécois n'étaient pas vraiment
propriétaires de la ressource, surtout par la tenure de droits
qu'avaient certaines entreprises et certaines compagnies sur la forêt du
Québec. On avait dit que l'existence des concessions forestières
chez nous ne donnait pas aux Québécois les marges de manoeuvre
qu'on devrait avoir comme groupe sur cette ressource. Je pense que la
réforme forestière au Québec a inauguré
véritablement un temps nouveau. Il est évident qu'elle fut
reçue avec une appréciation assez diverse dans les milieux du
Québec, selon les centres d'intérêt qu'avaient les
personnes qui l'évaluaient, qui la jugeaient, mais cette réforme
avait été acceptée.
En principe, elle a débouché sur des législations
qui ont commencé la mise en application de la réforme. Il y a
également d'autres législations qui devront suivre pour
compléter l'ensemble de la programmation de changements qu'on voulait
apporter.
On a trouvé à l'époque, surtout du
côté de l'Opposition, que le gouvernement mettait trop de lenteur
à procéder dans certains secteurs de la réforme. On a
reproché au gouvernement de ne pas faire les efforts suffisants au plan
du personnel, surtout au plan financier, pour réaliser un programme de
rétrocession ou de rachat de ces concessions forestières. Je me
souviens très bien, pour avoir participé à
différentes commissions
parlementaires touchant les terres et forêts, avoir entendu le
représentant de l'Opposition officielle d'alors reprocher assez
sévèrement ou amèrement au gouvernement de ne pas vraiment
traduire rapidement dans des faits concrets cette volonté de
réforme. Nous aurons, au cours des prochaines heures, l'occasion
d'entendre le ministre pour voir de quelle façon il entend fonctionner
vis-à-vis de cet élément de la réforme
forestière chez nous.
On ne peut également discuter de la programmation du
ministère des Terres et Forêts du Québec, avec tout ce que
cela comporte, sans avoir à l'esprit les problèmes qui sont
vécus présentement par les utilisateurs de la forêt.
Quand on pense à la situation que vit l'industrie des pâtes
et papiers, quand on connaît les impacts que cela peut avoir lorsque
viennent des ralentissements de ce côté, les impacts sur les
conditions sociales et sur les conditions économiques des
Québécois de certaines régions où sont
installées ces usines des pâtes et papiers, on se dit qu'il faudra
absolument prendre tous les moyens pour donner une meilleure position à
l'industrie des pâtes et papiers chez nous.
Il y a également la situation vécue par l'industrie du
sciage. Le ministre a eu l'occasion d'entendre les questions venues de
l'Assemblée nationale et posées par l'Opposition. Lui-même,
dans ses réponses, nous a indiqué qu'il était conscient
des difficultés vécues présentement par l'industrie du
sciage et également des problèmes majeurs que cela pouvait
occasionner dans certains territoires du Québec surtout là
où l'économie était basée, dans une forte
proportion, sur l'exploitation d'usines de sciage.
Il faudra naturellement que le ministre réponde aux questions que
nous aurons à lui poser également pour voir ce que le
ministère comme tel ou la société qui relève de ce
ministère est en mesure de faire pour pallier, dans l'immédiat et
à plus long terme, ces difficultés que nous vivons au
Québec.
Il y a également d'autres questions sur lesquelles nous aurons un
débat afin de savoir véritablement si nous sommes en mesure
d'apporter des changements ou des solutions aux problèmes vécus
par des Québécois. A ce moment-ci, je fais allusion à la
situation qu'on vit vis-à-vis de l'application assez stricte de la loi
touchant la réserve des trois chaînes qui a affecté
beaucoup de Québécois propriétaires de boisés ou de
terrains privés. Je pense qu'il serait temps qu'on débouche de ce
côté sur une orientation qui ferait que les gens sauraient enfin
de quelle façon on peut être vraiment propriétaire de
terrains qu'on croit avoir toujours possédés. C'est la
réalité que beaucoup de Québécois n'ont jamais su,
avant 1973 ou 1974, qu'ils possédaient des terrains sur lesquels ils
n'étaient pas effectivement propriétaires de toute la superficie.
On leur a même indiqué, au moment des travaux que ces
propriétaires avaient faits, qu'ils n'avaient pas le droit de
procéder à ces coupes. On a pénalisé ces gens et on
a exigé des droits de coupe multipliés par deux, trois, quatre ou
cinq fois, selon les cas. Il m'apparaît que nous devons aujourd'hui
savoir vers quoi se dirige le ministère pour trouver la solution logique
à cet état de choses.
Il y a également des situations qu'on aimerait voir
détaillées vis-à-vis du rôle qu'on a confié
à REXFOR ici, au Québec.
On sait qu'on a demandé, au cours des dernières
années encore, à REXFOR de faire des opérations de salut
public ou de dépannage vis-à-vis de certaines régions. Par
contre, dans d'autres champs d'activité, on a également
demandé à REXFOR de jouer un rôle différent. On lui
a permis, dans certains secteurs, de rivaliser, dans des programmes
d'aménagement forestiers, avec les compagnies privées, que ce
soit du côté du sciage, du côté du déroulage,
ou même des pâtes et papiers. On lui a permis de faire des
opérations sur une base à peu près équivalente,
c'est-à-dire que ce n'était pas un mandat qu'on donnait à
REXFOR d'aller dépanner une région ou de faire des
opérations ou des programmes là où c'était moins
avantageux pour les autres exploitants de la province.
Il y a également le développement des unités de
gestion qui prennent une importance capitale dans l'application de la
réforme. Il va falloir connaître de notre ministre de quelle
façon il entend appliquer, et à quel moment dans le temps, un
véritable programme d'allocation de la matière en ce qui a trait
aux terres et forêts. Dans ces belles régions, non seulement du
côté de la forêt publique, mais surtout du côté
de la forêt privée, nous vivons des problèmes qui font que
beaucoup de petits propriétaires de boisés privés sont
parfois dans l'incapacité, pour une période d'un ou deux ans, de
disposer de la ressource qui a été exploitée sur leur
forêt privée. Je crois que, pour être en mesure de
régler passablement bien dans le temps cette situation, seul un
véritable programme d'allocation des bois, des pâtes, de la
matière ligneuse pourra déboucher sur les solutions acceptables
pour les propriétaires de forêts privées.
M. le Président, il est entendu que je me réserve, tout au
long de l'étude des crédits, des programmes des
éléments et sous-éléments, le droit d'avoir plus de
précision sur le cheminement que le ministère va connaître
immédiatement. Je suis désireux d'entendre les réponses
que le ministre voudra bien nous donner, surtout vis-à-vis des
problèmes qui sont d'une actualité cuisante pour certaines
régions du Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Armand Russell
M. Russell: M. le Président, d'une façon sommaire,
je ne voudrais pas retenir indûment le ministre dans son désir de
discuter de ses crédits mais, comme membres de l'Opposition, nous avons
un rôle bien particulier, c'est de voir que le ministre justifie chacun
des dollars qu'il réclame
pour le fonctionnement de son ministère. Je voudrais, avant de
commencer l'étude des crédits, tâcher de les situer un peu
et dire la façon dont on aimerait que le ministère des Terres et
Forêts fonctionne pour le grand bien de l'industrie forestière du
Québec, et aussi pour ses citoyens.
Actuellement, nous savons que des changements ont été
amorcés, il y a déjà plusieurs années, sur la
recommandation des fonctionnaires du ministère. Ces changements
s'amorcent graduellement, d'année en année, mais ceci semble
marcher un peu à pas de tortue. Bientôt il sera peut-être
trop tard. Quand on examine un petit peu le potentiel forestier que nous avons,
l'étendue de terrain que nous pouvons utiliser et l'effort retenu qu'on
fait, je pense qu'on va arriver en retard lorsqu'il sera le temps d'appliquer
réellement les politiques qui sont à l'avantage de la population
québécoise. Pour résumer, si on regarde l'inventaire
forestier dans les bois durs, le Québec avait dans le passé cette
réputation d'être le foyer de l'industrie du meuble. Cette
réputation baisse actuellement.
On va se ramasser, tout à l'heure, avec notre industrie du meuble
qui va boiter un peu, à moins qu'on continue de changer la façon
de produire le meuble, en achetant des produits qui viennent des Etats-Unis ou
d'autres provinces canadiennes, parce que nous, ici, négligeons
d'imposer l'utilisation maximale de tous les déchets qui pourraient
être ramassés dans les forêts. On les laisse traîner,
on les laisse pourrir. On laisse certaines compagnies continuer à
exploiter de la façon qu'elles l'entendent.
En somme, je pourrais peut-être préciser certains points
sur lesquels je ne suis pas d'accord. Lorsqu'on laisse faire la coupe de billes
pour la scierie, on permet la coupe du billot à quatre pouces et demi
plutôt qu'à trois pouces et demi, lorsqu'on fait du bois de
papier. Parce que certaines usines disent: On ne veut pas acheter le bois de
papier qui viendrait de ces concessions, parce qu'il est fait pour une scierie.
Je ne vois pas la différence; on devrait, à mon sens, imposer
à celui qui fait la coupe de la forêt, de nettoyer au maximum et
de mettre seulement ce qui fait des billes pour la scierie en billes et que le
reste soit ramassé pour le bois de papier, et non pas laisser les usines
à papier payer le prix qu'elles veulent, parce qu'on en coupe du bois de
papier et qu'on le fait à perte. On ramasse des billots qui ne sont pas
bons pour la scierie, on exige qu'on en apporte à la scierie et, par le
fait même on entraîne une perte à la scierie en imposant ces
conditions. Je pense que c'est prêcher le ridicule. On a certaines
essences dont on impose l'exploitation aux scieries parce que cela fait partie
d'une coupe, sachant d'avance que les scieries ne peuvent pas en faire la mise
en marché parce qu'elles ne sont pas populaires sur le marché,
surtout lorsqu'il y a un surplus de bois de sciage.
Je pense qu'il y a d'autres utilisations qu'on pourrait faire de ces
essences. Ceci pourrait être fait avec des politiques plus rigides, plus
compréhensibles, plus flexibles dans l'attribution des droits.
Peut-être que le ministère sera obligé d'uti- liser cet
organisme qui a été créé, qu'on appelle REXFOR, qui
doit avoir un certain rôle à l'intérieur de
l'économie québécoise. Je n'accepte pas le fait qu'on
laisse des provinces comme les Maritimes, qui ont deux ou trois usines de
planche-particules expédier au Québec, alors qu'on n'en a qu'une
qui fonctionne à peine. Même les autres provinces comme l'Ontario,
le Manitoba, les provinces de l'Ouest expédient ici de la
planche-particules.
En plus de cela, si mes informations sont bonnes, dans l'industrie du
meuble, plus de 50% de la planche-particules qui est faite de déchets de
forêts, de déchets de scierie viennent des Etats-Unis. Cela se
produit quotidiennement. Nous, nous avons des programmes de dépenses
d'assistance sociale dans toutes les régions du Québec. Il me
semble qu'on pourrait utiliser ces montants pour bâtir des usines qui
pourraient faire la planche-particules à peu près dans toutes les
régions du Québec et faire l'inverse de ce qui se produit
actuellement, faire ce que font les Etats-Unis, c'est-à-dire l'exporter
presque au prix coûtant. On utiliserait ainsi une matière
première qui est gaspillée, actuellement. On donnerait du travail
à ceux qui désirent travailler.
Je disais tout à l'heure que le ministère procède
à pas de tortue je n'accuse personne peut-être que
les politiciens sont les plus à blâmer. J'ai assisté,
depuis quelques années, à l'étude des crédits ici
et je pense que ma réclame a toujours été à peu
près la même. On a eu d'autres gouvernements qui ont
succédé aux uns et aux autres, avec le ferme propos de
procéder dans cette voie. J'ai moi-même parlé avec un des
anciens ministres des Terres et Forêts du gouvernement
précédent qui était désireux d'appliquer ces
politiques.
Je me rappelle aussi avoir discuté avec certains officiers du
ministère et aussi avec le ministre actuel. Je sais qu'il est
désireux d'appliquer ce que son parti a annoncé durant la
campagne électorale, la récupération de toutes les
forêts, qui seront la propriété du gouvernement, afin d'en
faire la distribution d'une façon rationnelle. On se retourne
aujourd'hui et on dit: C'est un manque de personnel, parce qu'il y a des
chômeurs; deuxièmement, on dit: On manque de crédits.
Si on peut exploiter des terrains en province et les payer au bout de
quatre, cinq ou six ans, pour des travaux de voirie, on devrait être
capable de prendre ces terrains, qui sont actuellement contrôlés
par des compagnies, à qui on n'a que des garanties d'approvisionnement
à donner. Je comprends que plusieurs de ces compagnies ont obtenu des
territoires au moyen d'une loi. Elles ont fait des dépenses
peut-être pas aussi énormes qu'elles le prétendent, mais il
y a certainement un dû qui leur revient. Ceci pourrait être
discuté après avoir pris possession du territoire, tout en leur
garantissant une alimentation rationnelle.
On sait que l'an dernier, une année bien particulière, il
y a eu des milliers de tonnes de copeaux gaspillées, ce qui a
occasionné des pertes considérables a des scieries. On a
toléré cela; le gouvernement a toléré cela. Je
pense que la même chose va se continuer. On freine certaines ventes,
on laisse les usines à papier s'approvisionner de ces copeaux
à leur guise, à leur prix, à leur avantage, au
détriment des scieries qui, actuellement, connaissent des conditions
très difficiles. Il faut connaître la condition du marché.
Je suis conscient que les officiers du ministère sont parfaitement au
courant de la situation actuelle. On sait ce qui se passe dans bien des
milieux, au point de vue des scieries. Il y en a plusieurs qui vont être
obligées de se retirer d'affaires et de laisser le contrôle
à quelques-unes des grosses scieries. Plusieurs ont été
vendues à des usines à papier. Plusieurs sont devenues la
propriété de REXFOR.
Ce qui m'intéresse on pourra poser des questions au
ministre tout à l'heure c'est de savoir quelle sera la nouvelle
politique qui va faire en sorte qu'on pourra rétablir ou garantir la
survie de ces petites scieries; ce sont de petites entreprises qui sont
nécessaires au développement et à l'utilisation
rationnelle de nos forêts. Il faudrait garantir à certaines
régions le maintien d'une main-d'oeuvre nécessaire pour nos
forêts. On ne doit pas penser à aller chercher des gens dans la
ville de Montréal pour aller faire de la coupe en forêt; c'est
illusoire. Si on laisse se vider certaines régions où des jeunes
sont élevés à faire de l'exploitation forestière
leur boulot, si on laisse ces jeunes se diriger vers les villes, demain, on
fera comme dans certaines régions agricoles, on pleurera, mais il sera
trop tard.
Je pense qu'il est temps plus que jamais que le ministère examine
d'une façon très objective cette situation je sais que le
ministre veut le faire d'une façon non partisane et qu'il voie
à ce que des correctifs soient apportés le plus rapidement
possible. Je veux l'assurer de l'appui du parti que je représente. Je
suis convaincu qu'il pourra aussi compter sur l'appui de l'Opposition
officielle pour apporter des politiques qui feront en sorte que les
Québécois pourront compter sur leurs richesses naturelles
renouvelables. Il faut maintenir ceci en mémoire: les forêts sont
renouvelables. Ce n'est pas comme les mines de cuivre, d'argent, d'or ou
d'autres métaux qui, elles, ne sont pas renouvelables. La forêt
peut se renouveler; c'est à nous de faire en sorte qu'on puisse la
maintenir de façon favorable et d'augmenter sa production, plutôt
que de la laisser décliner comme cela se fait actuellement.
Je ne veux pas plus longtemps retarder le début des travaux. Je
sais que les officiers du ministère ont une réponse à
toutes les questions qu'on va leur poser. On les interrogera avec toute
l'objectivité possible afin que cette commission soit consciente, en
détail, des politiques qui seront appliquées pour l'année
qui s'en vient.
Le Président (M. Clair): Le député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. Roy: Merci, M. le Président, au tout début,
j'aimerais faire quelques remarques évidemment, à la suite des
propos que vient de tenir le ministre. Egalement je voudrais revenir à
nouveau sur certaines remarques que j'avais faites l'an dernier, lors du
début de l'étude des crédits de cette commission
parlementaire. Effectivement, l'an dernier, c'est précisément le
27 avril, il y a exactement un an aujourd'hui, que nous entreprenions
l'étude des crédits de ce ministère important.
Le ministre a fait des remarques, tout à l'heure, pour
déplorer un peu la contingence budgétaire dans laquelle il se
trouvait pris, en quelque sorte, pour aller plus avant et beaucoup plus loin
dans la réforme forestière et vers une plus grande utilisation de
ces ressources, en ayant évidemment les moyens pour le faire. Quand je
compare le budget du ministère des Terres et Forêts avec le budget
global de la province et que je me rends compte qu'on n'accorde même pas
1%, soit 0,8% du budget de la province, dans un ministère qui touche une
ressource, je dirais la ressource no 1, la plus grande ressource que nous avons
au Québec, il est permis d'être inquiet.
Je me rends compte qu'on a suivi encore cette année, même
s'il y a une augmentation de 15% dans le budget par rapport au budget de l'an
dernier, cette coutume, cette habitude qu'on a de ne pas consacrer et ce
n'est pas un reproche que je fais au ministre des Terres et Forêts, cela
c'est peut-être la politique d'ensemble, la politique budgétaire
de l'ensemble du gouvernement de ne pas considérer comme on le
devrait les ministères à vocation économique. Le
ministère des Terres et Forêts est évidemment un
ministère clé, un ministère de développement
économique, compte tenu de cette immense ressource que nous trouvons
dans toutes les régions du Québec et qui contribue à une
utilisation de main-d'oeuvre, une création d'emplois considérable
dans tous les milieux.
Mes prédécesseurs ont parlé des régions
rurales, des producteurs de boisés privés, on a parlé des
compagnies forestières, des compagnies papetières, toute
l'industrie des pâtes et du papier. Mon collègue de
Brome-Missisquoi vient de parler de l'industrie du sciage, de l'industrie du
meuble. Ce sont des propos sur lesquels je suis entièrement d'accord.
Mais il va falloir, au niveau du gouvernement et au ministère des Terres
et Forêts, une volonté beaucoup plus grande que celle qui a
été manifestée jusqu'ici, de façon à
sensibiliser l'exécutif de la province afin d'avoir suffisamment de
budgets, pour être en mesure d'accorder les crédits
nécessaires et se donner les outils pour tirer le maximum de cette
ressource.
L'année dernière, j'ai fait une remarque d'un autre ordre.
Si, d'un côté, on examine les dépenses que le
ministère doit y consacrer, il faut également regarder les
revenus que le ministère doit obtenir par la mise en valeur de ses
ressources par les droits de coupe et autres. Et je dois faire à peu
près les mêmes remarques que l'an dernier, à savoir que
l'augmentation des revenus dans le trésor public ne correspond
aucunement à l'augmentation et le taux de développement de
l'économie québécoise. Encore cette année, on
prévoit, dans
le discours du budget qui nous a été
présenté par M. Parizeau, quelque $32 millions de revenu pour ce
qui a trait aux ressources forestières, alors que les revenus de 1975/76
ont été de $38 millions. Alors, loin de connaître une
augmentation, nous connaissons une diminution assez appréciable. Il y a
sûrement des causes à cela et évidemment il y aura bien des
questions que nous pourrons poser à l'occasion de l'étude,
programme par programme, des crédits du ministère.
Il y a également cette société que le Québec
s'est donnée, la société REXFOR pour la mise en valeur et
l'utilisation de certains territoires, l'exploitation de certains territoires
forestiers. Le but de la société était de procéder
à la récupération de certains territoires forestiers qui
étaient en perdition à cause de la construction des grands
barrages hydroélectriques. Et évidemment la mission, si vous
voulez, le rôle de cette société a été
étendu par le fait qu'aujourd'hui cette société fait des
exploitations sur les terres de la couronne, et elle conclut des accords avec
des compagnies de pâtes et papiers en vue de leur fournir du bois.
Il a été assez renversant de constater que cette fameuse
société de la couronne on appelle toujours cela une
société de la couronne, une société d'Etat
ne paie pas de droits de coupe, au moment où elle exploite les terres de
la couronne, contrairement à l'obligation qui est faite aux compagnies
papetières.
C'est une question que je pose depuis deux ans à
l'Assemblée nationale et à laquelle je n'ai pas eu de
réponse. Je n'ai pas eu l'occasion d'entendre de la part du ministre des
propos qui auraient pu nous rassurer; cette compagnie, lorsqu'elle exploite, en
compétition avec des compagnies forestières, les terres de la
couronne, devrait être soumise aux mêmes règles.
Je trouve, actuellement, que c'est avantageux, non pas pour les
Québécois, non pas pour le gouvernement du Québec, mais
pour les compagnies de faire faire des chantiers, de faire faire de
l'exploitation forestière par cette entreprise, parce que le faible
profit que réussit à faire cette société ne
correspond même pas à l'exemption des droits de coupe dont elle
est l'objet. C'est un facteur qui contribue à faire que la province, le
gouvernement n'a pas les revenus qu'il devrait avoir de tout ce secteur, de
cette grande richesse naturelle que nous avons.
J'aimerais aussi aborder un peu la question des boisés
privés. Il y a eu l'an dernier, on se le rappellera, une manifestation
devant le parlement, qui a été organisée par l'Association
des propriétaires de boisés privés du Québec.
Evidemment, cette association regroupe énormément de gens de mon
comté, de ma région. Une solution devait leur être
apportée au cours des prochains jours. Je ne fais pas de reproche au
ministre, ce n'est pas lui qui était là à ce moment. La
solution se fait toujours attendre. Il n'y a eu absolument rien de
décidé pour ce qui a trait à tout ce secteur
d'exploitation forestière dans nos régions. J'aimerais dire au
ministre que ces gens, actuellement, sont mal pris. La Régie des
marchés agricoles a les pouvoirs de statuer sur les organisations de
mise en marché de produits agricoles. Or, on est obligé de
considérer la forêt comme un produit agricole, alors qu'en
définitive elle n'a jamais été un produit agricole, et je
ne sache pas que cela puisse le devenir.
On en a parlé à ce moment. Je rappellerai au ministre les
propos qui ont été tenus par son collègue critique de
l'Opposition officielle du temps, le député de Saguenay. Il
disait qu'il était urgent qu'on dote le Québec d'une régie
des produits forestiers. Je n'en ai pas entendu parler, à ma grande
surprise, ce matin. Je ne sais pas si le nouveau titulaire du ministère
a mis ce projet de côté. J'aimerais, au cours de la
réplique qu'il nous donnera tout à l'heure, qu'il puisse nous
apporter des précisions de ce côté.
J'aimerais souligner à son attention que ces propriétaires
de boisés privés ne sont pas des agriculteurs comme tels. Ce sont
des gens qui ont toujours vécu de la forêt. Ce sont des gens qui
se sont occupés de transport du bois. Ce sont des gens qui ont
acheté du bois des agriculteurs, qui se sont occupés de le
livrer, de faire affaires avec les compagnies, mais ce sont des personnes qui
sont effectivement propriétaires d'étendues de terres
forestières assez grandes, assez vastes. C'est leur revenu. Avec
l'exclusivité qui a été accordée aux offices de
producteurs de bois, ces gens ont été mis de
côté.
D'ailleurs, je n'apprends rien ce matin au ministre, ni aux membres de
la commission, parce que cela a fait l'objet d'énormément de
discussions et de représentations, de part et d'autre. Il n'en demeure
pas moins qu'il y a eu des centaines, pour ne pas dire quelque milliers de
cordes de bois qui ont été littéralement
gaspillées. Il s'agit de se promener dans ces régions pour voir,
le long des routes, le gaspillage dont ces personnes ont été
victimes et les difficultés que cela leur a apportées. D'un autre
côté, je pense que nous ne sommes pas rendus à un stade,
dans le Québec, où on doit se permettre de gaspiller des efforts,
de l'énergie, ni de gaspiller cette ressource qui est extrêmement
importante.
Le député de Montmagny-L'Islet a également
parlé de la fameuse loi de la réserve des trois chaînes,
qui, on se le rappellera, a été suspendue il y a trois ans, avec
cette promesse que les personnes qui faisaient l'objet de poursuites ou de
réclamations les verraient suspendues.
Les gens qui avaient effectivement déboursé les sommes
réclamées par le ministère des Terres et Forêts
seraient remboursés selon les règles du jeu, autrement dit si la
loi était changée. Alors, il n'y a pas eu de développement
depuis cette époque relativement à cette loi. C'est toujours
l'épée de Damoclès au-dessus d'un certain nombre de
propriétaires fonciers du Québec, agriculteurs et
propriétaires de terrains boisés. Or, j'aimerais bien savoir du
ministre quelles sont les intentions du gouvernement, à savoir si une
loi est actuellement en préparation. Si oui, cette loi sera-t-elle
présentée devant l'Assemblée nationale pour être
étudiée et adoptée au cours de l'année?
La dernière remarque, je l'ai soulignée un peu tout
à l'heure, j'aimerais savoir du ministre ce que le nouveau titulaire du
ministère entend faire relativement au projet de la régie des
produits forestiers qui a été réclamée par
l'Opposition depuis plusieurs années. Le ministère semblait avoir
retenu l'idée de créer une régie des produits forestiers,
mais il y avait quand même une question de temps dont les officiers du
ministère avaient besoin pour préparer cette législation
et définir le rôle que pouvait jouer cette régie.
Le Président (M. Clair): Le ministre des Terres et
Forêts.
Réplique du ministre
M. Bérubé: Je crois que de très nombreux
problèmes ont été soulevés qui, en
général, impliqueraient souvent une discussion assez longue. Je
me demande s'il serait opportun immédiatement d'entamer une telle
discussion. Je noterai quand même certains points qui ont
été soulevés pour tenter d'apporter des réponses
qui seraient susceptibles de vous satisfaire, je l'espère.
Il faut reconnaître qu'il s'agit ici d'un nouveau gouvernement,
qu'un ministre dans un ministère forcément, à son
arrivée, doit tenir compte de ses orientations propres, des orientations
de son parti politique, il doit également tenir compte d'une certaine
continuité avec le gouvernement antérieur et, finalement, il doit
tenir compte de la pensée, de la réflexion originale et
personnelle des officiers de son ministère. Par conséquent, c'est
un délicat équilibre dans une période de transition entre
un passé qui nous est légué et que l'on ne peut
radicalement modifier du jour au lendemain. C'est, je pense, le cas d'un
problème budgétaire. Vous êtes parfaitement conscient qu'un
budget se prépare quand même plusieurs mois d'avance et que, par
conséquent, avant d'avoir fait une réflexion complètement
originale sur un nouveau rôle que pourrait jouer un tel et tel organisme,
il faut tout de même un certain nombre de mois et c'est un peu
serré pour qu'une telle réflexion influence directement le
budget. Cela veut donc dire que certaines des préoccupations du
ministère présentement qui sont le fruit d'un mixage à la
fois de la tradition antérieure et des nouvelles orientations, donc
certaines nouvelles politiques sont davantage présentement en voie de
préparation que prêtes à être
"opérationnalisées" sous forme d'une présentation
budgétaire.
C'est probablement pour cela que vous ne retrouverez pas dans le budget
comme tel toute l'expression de cette préoccupation que j'ai pu faire
mienne au cours des dernières semaines et des derniers mois.
Je tenterai de répondre à un certain nombre de questions.
D'une part, le problème de la régie des produits forestiers, le
problème des dissidents et le problème de l'allocation de la
matière ligneuse me semblent faire partie d'un tout. Ce tout, c'est
finalement de s'assurer qu'une proportion plus importante du bois provenant de
la forêt pri- vée serve à alimenter notre industrie,
l'industrie du sciage et l'industrie des pâtes et papiers.
Cela pose également le problème de la mise en
marché et de l'utilisation rationnelle. Nous avons donc accepté
de poursuivre une idée qui avait été conçue par
l'ancien gouvernement, celle d'une loi d'allocation de la matière
ligneuse. Nous avons peut-être modifié légèrement
l'approche, en ce sens qu'avant de soumettre une loi et de rendre
peut-être sa modification malaisée devant l'Assemblée
nationale, puisqu'il y a toujours des difficultés à voir une loi
taillée en pièces qui n'a pas été suffisamment
mûrie, nous avons choisi de l'aborder franchement avec l'industrie
papetière, l'industrie du bois de sciage et, également, les
syndicats des producteurs de bois de manière que cette réflexion
générale qui a cours présentement au Québec nous
amène justement à présenter un projet de loi qui soit
objectivement le plus valable possible.
Donc, l'approche, c'est plutôt présentement de faire une
discussion un peu ouverte à l'intérieur des principaux
partenaires de l'exploitation de la forêt pour tenter de présenter
un projet de loi sur l'allocation de la matière ligneuse qui soit
acceptable à la majorité.
Pour ce qui est de la régie des produits forestiers, à ce
moment, à mon point de vue, je pense qu'il est trop tôt. La
régie des produits forestiers sera peut-être l'évolution
naturelle qui résultera de l'application de la loi de l'allocation de la
matière ligneuse et non pas quelque chose qu'il faudrait viser
immédiatement. Je pense que je préférerais voir la loi en
application pendant quelques années pour voir dans quelle mesure
justement elle est efficace. Ceci m'amène peut-être à
parler présentement des surplus de bois. Vous savez qu'il semble que
l'écoulement de la matière ligneuse se fasse plus facilement
cette année que dans le passé. Ce n'est pas, il va sans dire,
parce que l'industrie des pâtes et papiers est en meilleure posture que
l'année dernière ou que l'industrie du bois de sciage est en
meilleure posture. C'est peut-être justement que l'industrie est
parfaitement consciente présentement que le gouvernement a l'intention
d'intervenir si elle ne veille pas à mettre un peu d'ordre dans
l'administration de ses affaires, ce qui, à ce moment, rend les
négociations peut-être un peu plus faciles.
Dans le cas des surplus de copeaux dont on a mentionné
l'existence tout à l'heure, je sais que, dans certaines régions,
on élabore des plans qui seraient assez astucieux et qui pourraient
peut-être permettre de régler ce problème.
Le problème des dissidents, comme vous l'avez si bien
souligné, relève, pour l'instant, de la Régie des
marchés agricoles. Le seul et unique problème que je vois en tant
que ministre des Terres et Forêts en ce qui a trait aux dissidents, c'est
que, dans la mesure où nous allons vouloir que l'industrie
forestière s'alimente à partir des boisés privés,
il faudra s'assurer que nous puissions leur garantir un approvisionnement
stable. Ceci n'est évidemment pas possible lorsqu'un exploitant
forestier a tendance, par exemple, à exploiter à
blanc un lot, ce qui est parfois nécessaire quand
évidemment la forêt est mûre, mais qui peut parfois vouloir
dire que, par suite de l'exploitation abusive d'une forêt, on ne pourra
pas soutenir la demande en produits forestiers.
Il faut donc s'assurer que ce qu'on appelle les dissidents ou les
propriétaires de boisés privés puissent fournir, dans tous
les cas, au ministère des Terres et Forêts une certaine garantie
que leur approvisionnement en matière ligneuse soit stable.
Présentement, les rencontres que j'ai eues ne me permettent pas
de conclure qu'ils sont en mesure de le faire et eux-mêmes reconnaissent
présentement que, même s'ils estiment que c'est effectivement un
objectif qu'ils ont en vue, ils ne peuvent pas, pour l'instant,
présenter, dans tous les cas, de moyens à leur disposition pour
justement garantir que l'exploitation puisse se faire d'une façon
rationnelle et puisse surtout garantir à l'industrie forestière
un approvisionnement stable. Par conséquent, je pense que, si le
ministère des Terres et Forêts doit intervenir, ce sera uniquement
pour nous assurer que l'exploitation de nos boisés privés, par
quelque intervenant que ce soit, soit faite d'une façon rationnelle qui
nous permette de garantir les approvisionnements, parce qu'on ne peut, de toute
évidence, pas obliger l'industrie forestière à
s'approvisionner à partir des boisés privés, si les
boisés privés ne peuvent pas, d'autre part, garantir un
approvisionnement à long terme.
On voit bien que l'exploitation forestière représente de
la mécanisation et de la main-d'oeuvre spécialisée. On ne
peut pas demander à une industrie de ne pas s'équiper pour le
travail en forêt publique si, d'autre part, elle n'est pas assurée
d'un approvisionnement stable de la forêt privée. Vous voyez donc
que le type de réflexion que nous faisons, c'est plutôt au niveau
de la stabilité des approvisionnements. De là vient l'importance
que nous avons attachée dans le budget actuel aux programmes de
revalorisation de la forêt privée, de manière à
répondre à cet objectif d'un approvisionnement stable.
Evidemment, ceci implique des contraintes pour tous les exploitants
privés et je ne sais pas si, présentement, la réflexion
est assez poussée de ce côté dans le secteur de la
forêt privée.
Quant au rôle de REXFOR, le gouvernement, vous le savez, a
donné comme mandat une réflexion à être
effectuée par le comité de développement économique
sur le rôle des sociétés d'Etat et sur leur interaction
avec le gouvernement. C'est une réflexion nécessaire parce qu'on
a été à même de constater que les
sociétés d'Etat, n'ayant jamais été soumises dans
le passé à de véritables orientations politiques par les
gouvernements, ont pris les orientations qui leur étaient propres. A
l'intérieur même des deux sociétés dont je suis
titulaire, soit SOQUEM et REXFOR, on peut constater des objectifs qui sont
complètement antithétiques. Je pense qu'il est nécessaire
d'abord que cette réflexion, du côté du gouvernement, soit
entreprise. En ce qui a trait au ministre même des Terres et
Forêts et à son impression sur le rôle qu'a
joué REXFOR, je reconnais que REXFOR a joué un rôle
éminemment utile dans le soutien d'entreprises locales qui auraient
dû disparaître à la suite de conditions de marché
difficiles.
Ceci a des implications, cependant, parce qu'il ne fait aucun doute que
lorsque le gouvernement intervient pour soutenir une industrie, il peut,
à ce moment, mettre en danger d'autres concurrents qui font affaires
avec le même marché. Par conséquent, c'est un rôle
qui est délicat à jouer; ce rôle social de REXFOR est un
rôle qui pourrait justement causer d'autres problèmes
ailleurs.
Deuxièmement, dans la mesure où on ne demande à
REXFOR qu'à intervenir dans les cas difficiles, dans les cas où
l'entreprise privée a déjà fait la preuve que
c'était non rentable, comme on a tendance en général
à dire que l'entreprise privée est plus efficace, semble-t-il,
que l'entreprise d'Etat pour démontrer la rentabilité, on voit
bien que, lorsqu'on demande à REXFOR continuellement de reprendre des
dossiers qui n'ont pu être rentabilisés par l'entreprise
privée, on demande à REXFOR un rôle presque inhumain. Il
est même étonnant de voir le succès avec lequel REXFOR a
réussi des opérations de sauvetage, comme dans le cas de
Béarn et Taschereau et Tembec, et je pense que c'est tout à son
honneur. Cela démontre bien que les sociétés d'Etat sont
capables de performances souvent supérieures à celles de
l'entreprise privée.
Le problème, cependant, c'est qu'il faut reconnaître que,
pour des dirigeants d'une entreprise comme REXFOR, qui seraient continuellement
amenés à régler des cas problèmes, cela peut
être très difficile sur le plan psychologique. Pour cette raison,
je pense, il convient que REXFOR fasse elle-même une évaluation du
rôle qu'elle entend jouer. Et si REXFOR nous dit que c'est le rôle
qu'elle entend jouer, donc ce rôle de sauvetage, elle le jouera. Il
faudra alors développer des critères d'évaluation de cette
société d'Etat qui seront, évidemment, différents
des critères de rentabilité économique qu'on pourrait
appliquer peut-être à la Société
générale de financement, par exemple, ou à SOQUEM.
C'est donc l'orientation de ma réflexion. Ce n'est pas une
contestation du rôle de REXFOR, mais plutôt une remise à
neuf de notre approche vis-à-vis des sociétés d'Etat,
entreprise par le gouvernement actuel, et en même temps ma propre
réflexion personnelle sur les problèmes que rencontre REXFOR.
Le député de Beauce-Sud a parlé de l'augmentation
des revenus de la forêt qui sont insuffisants. Je ne vous cacherai pas
que, dans mon esprit, je relie ce problème en grande partie,
également, au problème de la révocation des concessions
forestières. Si l'Opposition antérieure a trouvé que le
gouvernement ne procédait pas suffisamment rapidement dans la
révocation des concessions forestières, je continue à
partager cette opinion. Je pense que le gouvernement actuel, dans le budget qui
est présenté ici, ne pro-
cède pas suffisamment rapidement à la révocation
des concessions.
Associées, cependant, à ce problème de la
révocation, je pense qu'il y a deux approches. On peut d'abord, remettre
en question la méthode de rachat des concessions forestières
prévue par la loi. C'est donc une approche qui pourrait consister
à dire: Peut-être que l'on paie trop cher. Par conséquent,
on pourrait diminuer le paiement et, dans ce cas, on pourrait donc
accélérer la révocation. Compte tenu des finances
gouvernementales, étant donné les choix qu'il y a à faire,
il est douteux qu'on puisse mettre des sommes très considérables
au rachat de concessions forestières qui, en soi, représente un
investissement non productif comme tel. C'est donc un simple rachat.
Une autre approche qui pourrait être envisagée et
ici je rejoins le député de Beauce-Sud c'est celle
d'augmenter substantiellement les revenus provenant de la forêt. En
d'autre termes, si nos droits de coupe et les droits que nous demandons pour la
voirie forestière ne sont pas adéquats, on peut donc imaginer
qu'on augmente ces droits et que l'augmentation des revenus nous permet de
justifier une accélération du processus de révocation des
concessions forestières.
Une telle remise en cause, parce que vous avez une alternative, suppose
une réflexion. C'est cette réflexion que nous faisons
présentement. Nous avons évalué, par exemple, quel serait
l'impact de l'augmentation des revenus en provenance de la forêt; quel
serait l'impact sur cette industrie forestière. Il ne s'agit pas non
plus de la rendre encore moins rentable qu'elle ne l'est présentement.
Je pense que c'est à la suite de cette réflexion que nous serons
plus en mesure d'accélérer ce processus de révocation. Une
chose est certaine, c'est que vous en verrez l'effet dans le budget de
l'année prochaine.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: II y a seulement un petit point que j'aimerais reprendre,
parce que le ministre a employé le terme "dissident" en ce qui a trait
à l'Association des producteurs de boisés privés. Je pense
qu'il faudrait quand même être juste à l'endroit de ces
personnes. J'aimerais bien dire à l'honorable ministre que chez les
producteurs de boisés privés, il y a deux catégories bien
distinctes. Vous avez le cultivateur qui, par la force des choses, est
propriétaire d'une petite étendue de boisé, qui le met en
valeur de façon rationnelle, en mettant sur le marché, à
chaque année, une quantité limitée de bois.
Vous avez d'autres personnes qui n'ont rien à voir avec
l'agriculture, qui sont exclusivement des exploitants forestiers, qui mettent
des quantités de bois beaucoup plus considérables sur le
marché, à cause de leur étendue de terrain et de leur
spécialisation. Avec l'exclusivité qui a été remise
à l'office des producteurs et à cause des difficultés
à obtenir des contrats capables d'absorber la mise en marché de
la totalité du bois produit dans une région donnée, il est
évident qu'on répartit le nombre de passes en tenant compte du
nombre de producteurs, plutôt que de la quantité du bois qui peut
être mise sur le marché par ces gens. Cela a forcé, en
quelque sorte, un groupe de propriétaires de boisés privés
à se regrouper en une association pour demander d'avoir un statut pour
être en mesure de négocier et d'organiser la mise en marché
de leur bois.
Je ne veux pas qu'on défasse en quelque sorte le plan conjoint
des producteurs de bois qui est la propriété des agriculteurs et
qui est affilié à l'UPA. Ce serait retourner 20 ans en
arrière et retrouver des situations chaotiques, puis faire en sorte que
ces petits producteurs de boisés soient encore exploités comme
ils l'ont été dans le passé. Je pense qu'il ne faudrait
pas non plus, en corrigeant un abus, en créer un autre. C'est la raison
pour laquelle, ces gens, à ce jour, ne peuvent pas se retrouver dans nos
lois actuelles, à cause de la Régie des marchés agricoles.
Je tiens encore à le dire au ministre, c'est un problème crucial,
important, cela touche des centaines et des centaines de gens chez nous. Ces
gens ne peuvent pas se faire régir par la Régie des
marchés agricoles, la forêt n'est pas un produit agricole. C'est
tout le problème qu'il y a, c'est la raison pour laquelle ces gens vont
sûrement revenir à la charge. Il y a trop de capitaux
impliqués. Il y a des gens pour qui c'est leur gagne-pain leur vie et la
vie de leur famille. Cela a des conséquences économiques dans
plusieurs paroisses auxquelles on ne peut pas être indifférents.
Tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas une formule qui permettra à
ces gens d'avoir droit aussi de négocier la vente collective de leurs
produits, le problème va demeurer et c'est un impact économique
qui nous fait perdre des dizaines et des dizaines de milliers de dollars.
J'aimerais que le ministre soit bien conscient de cela. C'est pour cela
que je m'oppose, quand j'entends parler de dissidents. Ce ne sont pas des
dissidents, c'est un groupe de producteurs différents des autres.
Lorsqu'on les appelle des dissidents, on pourrait leur porter préjudice
en laissant présupposer que ce sont des hors-la-loi ou presque. Ce n'est
pas cela. Je tiens bien à insister auprès du ministre,
aujourd'hui; il va falloir que le ministère des Terres et Forêts
intervienne, parce que cela dépasserait, selon les informations et les
rencontres que nous avons eues avec les conseillers juridiques, les cadres et
les possibilités du ministère de l'Agriculture. Le
problème est là.
Le Président (M. Clair): Le député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, je veux seulement vous dire de
bien vouloir prendre acte que j'appuie à 100% les propos que le
député de Beauce-Sud vient de tenir concernant les
propriétaires de boisés privés.
Le Président (M. Clair): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, on vient d'aborder un
problème qui touche également quelque
peu la région que je représente. Pour ma part,
après avoir rencontré et discuté avec les gens qui forment
l'Association des propriétaires de boisés privés, j'en
conclus que c'est l'évidence même que nous devrions avoir, au
Québec, une régie des produits forestiers. C'était
là un des éléments de la réforme forestière
au Québec. Pour moi, ce n'est pas le moindre. Lorsque le ministre nous
dit qu'il faudra d'abord procéder à une loi en vue d'allouer les
bois, au Québec, à toutes les industries qui les utilisent et
qu'on pourra, dans un deuxième temps, procéder à la mise
sur place d'une régie de produits forestiers, je ne partage pas son
avis.
Les problèmes auxquels viennent de faire allusion les deux
députés qui m'ont précédé existent par
l'absence de cette régie des produits forestiers. Somme toute, je n'ai
jamais compris qu'on ait confié cela à la Régie des
marchés agricoles du Québec, avec tous les pouvoirs que cela
comporte. On ne peut ainsi, véritablement trouver une solution aux
propriétaires de boisés privés qui vivent uniquement de
l'exploitation de la forêt, qui sont de véritables forestiers. On
ne peut, par la loi de la régie des marchés agricoles, trouver la
solution et la capacité pour ces gens de s'adapter, de s'intégrer
à la remise en marché du bois.
Heureusement qu'à certains endroits les offices de producteurs de
bois ou les syndicats de producteurs de bois ont eu cette compréhension
et ont eu une largeur de vue qui a fait en sorte que ceux qu'on appelle les
propriétaires de boisés privés ont pu assez bien
s'intégrer et s'adapter au plan de mise en marché tel que
conçu soit par les offices de producteurs ou les syndicats de
producteurs.
A Sainte-Anne-de-la-Pocatière, entre autres, l'Office des
producteurs de bois a réservé une place dans la mise en
marché, dans la commercialisation du bois à ces gens qui
possèdent d'assez grandes étendues de boisé en leur
confiant un mandat, celui d'être les agents représentants de
l'Office des producteurs. Ce sont, pour la plupart, ces gens qui s'occupent de
l'achat du bois des propriétaires, des petits cultivateurs comme des
autres propriétaires de boisés privés. Ce sont ces
gens-là également qui s'occupent du transport, qui ont la
responsabilité de l'achat, du respect des règles du jeu telles
que déterminées par l'Office des producteurs et de rendre le bois
à l'usine. Cela, on le retrouve à très peu d'endroits au
Québec, cette capacité de compréhension et
d'intégration d'un groupe de producteurs qui n'ont rien à voir
avec l'agriculture, qui ne feront jamais d'agriculture, qui sont de vrais
forestiers. Je pense que l'office de la Pocatière est le seul endroit
où on a fait une place véritable à ces gens, ce qui a
résulté qu'il ne s'est pas perdu de bois par le vieillissement
dans cette région à cause de cette compréhension de
l'Office des producteurs qui a fait appel à la collaboration des gens
qui étaient de véritables producteurs de boisés
privés.
Si on avait pu, dans les autres régions du Québec, chez
les autres syndicats de producteurs, avoir autant d'ouverture d'esprit, autant
de tolérance et de compréhension, le problème vécu
par ces gens serait beaucoup moins aigu. Je le sais, parce que j'ai eu à
rencontrer les représentants de l'association de ce groupe l'an dernier;
je les ai rencontrés deux fois. Il y avait des problèmes qui
touchaient le ministère des Transports à cause de l'obligation de
passer sur une balance installée à Charny; je suis allé
les rencontrer là-bas avec un officier du ministère des
Transports. Je les ai rencontrés lorsqu'ils sont venus devant le
parlement, en juin 1976, j'ai discuté avec eux, et ces gens ont reconnu
que dans la région de la Pocatière les problèmes
étaient moins grands parce que l'Office des producteurs là-bas
avait laissé une place à l'intérieur de son plan de
commercialisation.
Comme on sent qu'il n'y aura pas de revirement suite aux audiences qu'a
tenues la Régie des marchés agricoles sur ce problème
l'automne dernier, il me paraît, de toute urgence, qu'on devrait avoir au
Québec notre régie des produits forestiers qui va tenir compte de
la commercialisation et de la mise en marché du bois des
véritables cultivateurs et qui va laisser une place également
à tout ce groupe de forestiers du Québec qui vivent exclusivement
d'exploitation forestière. C'est leur gagne-pain, comme le disait le
député de Beauce-Sud. Si on n'a pas de formule rapide permettant
à ces gens d'être à l'intérieur du système
une fois qu'ils vont connaître les règles du jeu, je suis
sûr qu'ils seront en mesure de les respecter on aura des gens qui
ne seront plus en mesure de faire face à leurs obligations. Il y a des
gens, dans ces groupes, qui ont des sommes de $100 000 d'investies en
machinerie, en acquisition de terrains, etc. Le problème est
sérieux et je ne crois pas qu'on doive retarder trop longtemps cet
élément de la réforme forestière qui est la
création d'une régie des produits forestiers au
Québec.
J'aimerais que le ministre me précise les raisons pour lesquelles
on doit retarder la création de cette régie et le plan
d'allocation. Je pense que les deux vont de pair. Dans un plan d'allocation, il
faudra qu'il y ait un organisme avec des pouvoirs assez grands afin d'effectuer
l'allocation des bois, c'est-à-dire faire les contingentements requis,
prévoir les volumes de coupe que les différents
propriétaires de boisés privés feront; l'organisme qui
pourrait être mandaté à l'application du plan d'allocation
des bois, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas une régie des
produits forestiers bien constituée. Le ministre pourrait-il me donner
les raisons pour lesquelles il juge valable de retarder ce principe d'une
régie des produits forestiers?
Le Président (M. Clair): Sur le même sujet, le
député de Bellechasse. Peut-être que le ministre pourra
répondre aux deux intervenants à la fois.
M. Goulet: Suite aux propos du député de
Montmagny-L'Islet, et toujours dans les remarques générales, il
existe certainement des solutions.
Dans trois comtés voisins, nous connaissons trois plans conjoints
différents. Ces plans conjoints ont eu un bon pourcentage de
succès dans les comtés de L'Islet et de Kamouraska et n'ont pas
eu de succès, par exemple, dans les
comtés de Beauce, de Bellechasse et de Dorchester. Ce que les
propriétaires de boisés privés ont demandé aux
ministères de l'Agriculture et des Terres et Forêts,
ministère que nous touchons aujourd'hui, c'est une enquête
impartiale. Ils veulent qu'il y ait enquête; il n'y a jamais eu
d'enquête impartiale. Cela a toujours été fait par la
Régie des marchés agricoles. Cela ne veut pas dire que cela n'a
pas été bien fait, mais on ne peut pas dire que l'enquête a
été impartiale.
Ces gens sont soumis à la Régie des marchés
agricoles et, d'après la loi j'ignore l'article, mais je l'ai lu
ils n'ont pas le droit d'être reconnus. Ils ne sont pas reconnus
comme producteurs agricoles, et ils sont régis par cette régie.
C'est là qu'est le problème: ils sont régis par la
Régie des marchés agricoles et, dans la loi, ils ne sont pas
reconnus; ils sont exclus de cela.
Alors, lorsque le député de Montmagny-L'Islet parle de
régie, je pense qu'il faudrait que le ministère s'y penche. Ce
serait une priorité d'après moi, parce que le problème
dure depuis quatre ans. Avec les gens qui viennent nous voir au bureau chaque
lundi, cela m'étonnerait qu'on passe le mois de juin sans avoir encore
des bûchers sur la colline parlementaire. Vraiment, il va falloir, tout
le monde, apporter une solution à ce problème, parce qu'il
existe. Il est plus grave qu'on ne le pense, parce qu'il y a trop d'argent
d'investi par ces gens pour qu'ils laissent tomber l'affaire.
Le Président (M. Clair): Le député de
Brome-Missisquoi sur le même sujet.
M. Russell: M. le Président, d'une façon
très brève, je crois bien que les remarques qui ont
été faites du côté de l'Opposition ne sont pas en
vue d'embêter le ministre, c'est simplement pour tenter
d'éclaircir cette situation qui semble être un peu ambiguë
actuellement.
Un cultivateur qui fait de la coupe comme revenu supplémentaire,
je peux comprendre qu'il peut être reconnu par cette Régie des
marchés agricoles, tandis que celui qui vit totalement de la coupe de
bois de ses terrains ne peut être traité par cette même
régie, c'est évident. C'est un peu comme les camionneurs
artisans; celui qui a un camion et l'autre qui en a dix, ce n'est pas tout
à fait la même chose. C'est ce qu'on voudrait que le ministre
prenne en main pour y apporter des correctifs. Je sais que le problème
est très complexe. Ce n'est pas facile d'arriver et de trancher la
question, parce qu'il y a aussi des cultivateurs qui font des coupes aussi
considérables, si non plus, que d'autres qui ont des boisés
privés, c'est vrai. Mais il faudrait peut-être tirer la ligne
quelque part. On voudrait, d'un côté, que les gens, la population
du Québec, ceux qui sont intéressés à cela
augmentent l'utilisation de territoires privés en vue de faire une
récolte de bois. D'un autre côté, on tente de les
pénaliser en apportant des mesures restrictives pour faire en sorte de
les mettre en péril. C'est aussi grave que cela.
Je pense que le ministre possède un personnel assez
compétent, assez bien renseigné sur le sujet pour pouvoir faire
une analyse de la situation et prendre les mesures qui s'imposent en vue de
protéger celui qui veut réellement faire son boulot de la coupe
en territoires privés.
Le Président (M. Clair): Le député de
Rimouski sur le même sujet.
M. Marcoux: Mes propos iraient dans le même sens que ceux
du député de Montmagny-L'Islet. Il a souligné que, dans sa
région, on semblait s'être entendu concrètement. Je pense
que, dans la région du Bas-Saint-Laurent, le problème des
dissidents, en tout cas, est un problème très marginal, parce que
le syndicat des producteurs de bois semble... C'est une région où
il y a les deux types: d'abord, des agriculteurs pour qui, le boisé,
c'est marginal, mais qui tirent une partie de leurs revenus du boisé; il
y a aussi des exploitants forestiers dont la majorité ou presque la
totalité des revenus vient du boisé. La coordination ou la
façon dont sont répartis les contingentements ou la distribution
qui est faite par le syndicat des producteurs semble répondre aux
besoins de la population de cette région.
On a souligné que c'est un problème très
délicat. Je pense que des mesures rapides dans ce secteur pourraient
peut-être jeter plus d'huile sur le feu qu'autre chose. On a fait la
comparaison avec la question des artisans. C'est bien sûr que le
problème central, si on prend le camionnage, entre le vrac et les
artisans, c'est d'avoir un poste de distribution qui soit neutre, un organisme
qui soit neutre entre les deux pour l'affectation des camions aux
différents emplois ou aux différents travaux qu'il y a à
faire.
Je voulais donner un exemple d'une autre région, en plus de celle
du député de Montmagny, où les problèmes semblent
avoir été résolus par les gens qui étaient
concernés, à l'avantage des deux types d'exploitants forestiers:
ceux pour lesquels c'est marginal, et ceux pour lesquels c'est presque
l'essentiel de leur revenu.
Le Président (M. Clair): Le ministre des Terres et
Forêts.
M. Bérubé: Je pense que l'on soulève ici,
comme vient de le rappeler le député de Brome-Missisquoi, un
problème qui est passablement complexe, ce qui m'a amené à
les rencontrer à plusieurs reprises, justement, pour tenter
moi-même de comprendre le sens du problème, puisqu'il s'agit d'un
problème éminemment politique.
Je ne sais pas si l'Opposition serait d'accord, à
l'élément 4, au programme 4, en fait, nous aurons à
discuter de tout le programme de l'aide à la forêt privée.
On pourrait peut-être reprendre, à ce moment, cette discussion en
profondeur et, justement, peut-être réfléchir ensemble,
d'un commun accord, sur tous les problèmes que cela soulève. Je
pense que vous avez raison de soulever cette question. Il m'est, à moi,
en tout cas, difficile, pour l'instant, d'avoir une idée claire
là-
dessus. Je vois des avantages. Je vois des inconvénients et je
pense qu'une discussion à ce sujet pourrait nous être passablement
utile à tous et pourrait nous aider, justement, à trouver une
solution plus immédiate.
On m'a demandé de répondre uniquement pourquoi je
n'envoyais pas la régie. Evidemment, dans mon esprit c'est
peut-être là où il y aurait lieu d'avoir, justement, une
discussion plus en profondeur le problème de l'Association des
propriétaires de boisés privés je m'excuse de les
avoir appelés dissidents réside dans le fait que les
cultivateurs sont également des propriétaires de boisés
privés, ce qui fait qu'on ne sait plus trop lequel représente
quoi. Finalement, le problème relié à ce qu'on appelle les
dissidents est peut-être un problème lié au problème
de vente de bois, dans la mesure où si tout le monde pouvait vendre le
bois qu'il est en droit d'attendre d'écouler, il n'y aurait
peut-être pas le problème, justement, de l'Association de
propriétaires de boisés privés. Ce qui fait que, si on
peut mettre sur pied une technique, une loi qui nous permette de garantir
l'écoulement des bois, peut-être qu'on réglerait ce
problème, qui nous apparaît présentement extrêmement
important dans trois régions du Québec finalement. Partout
ailleurs, au Québec, ce problème est tout de même
extrêmement restreint. Je connaissais la région de
Québec-Sud, mais on se souvient qu'il y a Montmagny et Bellechasse
où ces problèmes se retrouvent également. Par
conséquent, c'est un problème qui est assez localisé.
Peut-être que, si on arrivait à régler le problème
d'écoulement des bois en provenance de ces régions, arriverait-on
en même temps au moins à diminuer l'impact qu'il a
présentement.
C'est pour cela que, lorsque vous me demandez pourquoi attendre
l'organisation de la régie, je vous dirai simplement qu'en fait, au
moment où le livre blanc a proposé la création d'une
régie des produits forestiers, tous les intervenants se sont
opposés à une telle régie, à l'exception de la CSN.
En d'autres termes, tous ont fait l'unanimité pour ne pas avoir la
Régie des produits forestiers, ce qui fait qu'il est un peu normal que
la pensée n'ait pas évolué, à l'origine, en faveur
d'une telle régie. Qu'aujourd'hui la situation ait changé, cela
est possible, mais si on se remet dans le contexte historique,
évidemment, cela nous oblige à faire un rajustement. On peut se
demander, justement, si ce n'est pas plus un problème de vente de bois,
présentement, qu'un problème fondamental de mise en marché
par la régie. C'est une question que je pose, plus qu'une
réponse.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, pour faire suite à ce que
vient de dire le ministre, je voudrais rappeler tout simplement que, lors de
l'étude des crédits de l'année dernière, il y a
exactement un an aujourd'hui, le représentant de l'Opposition officielle
et je cite ses paroles, extraites de la page B-843 du journal des
Débats le député de Sa- guenay disait ceci: "C'est
extrêmement important d'en arriver et l'ex-ministre des Terres et
Forêts nous l'affirmait un peu lors de l'étude des crédits,
l'an dernier à une régie des produits forestiers qui aura
la responsabilité de redistribuer la production entre les
différents marchés". Voici ce que disait M. Lessard:
"Actuellement, ce sont les grandes compagnies forestières qui ont le
gros "bargaining power". Il ne faut pas exclusivement laisser, malgré
je dis malgré les offices de commercialisation et
malgré les offices de mise en marché de l'Union des producteurs
agricoles, malgré les plans conjoints, je pense que le gros bâton,
ce sont encore les compagnies forestières". Il dit ceci: "On l'a vu l'an
dernier, je l'ai vu dans ma région, on l'a vu dans la Beauce, dans la
Gaspésie, quand les grandes compagnies décident de ne pas acheter
les produits forestiers qui sont produits par des producteurs privés,
tout cela reste simplement sur les terres et ces produits ne se vendent
pas..."
C'est la raison pour laquelle j'étais à peu près
convaincu je le dirai bien franchement, je suis aussi un peu
déçu de constater que la Régie des produits
forestiers qui a tant été prônée par les
représentants de l'Opposition officielle, avec qui nous étions
d'accord sur ce plan, est laissée en plan cette année, et on veut
reprendre la discussion de ce côté.
J'aimerais bien que l'honorable ministre, et je le dis sans malice, sans
lui tendre des pièges, examine un peu l'attitude et les propos qui ont
été tenus à cette commission parlementaire au cours des
années précédentes qui exigeaient qu'une action soit
prise, que le gouvernement ait au moins un outil pour voir à la
redistribution de la mise en marché du bois.
Il y a tout un problème que je n'ai pas soulevé. Il y a le
problème des feuillus de la région des Bois-Francs, de la
région de la Beauce. Il y a un gaspillage énorme d'essences
forestières. S'il y avait une étude faite de ce
côté, pour examiner quelles seraient les possibilités
d'approvisionnement d'une usine, on pourrait considérer peut-être
un projet de construction d'une usine pour l'utilisation de ces essences
forestières de façon à éviter le transport qui est
toujours dispendieux vers des grands centres et vers des marchés qui ne
sont pas toujours accessibles.
On pourrait même aller encore plus loin. Mais de toute
façon, sur ce point en particulier, je pourrais revenir lors de
l'étude du programme no 4. J'aimerais bien rappeler au ministre les
propos que son prédécesseur à la commission parlementaire
avait tenus au moment où il était dans l'Opposition parce que je
ne voudrais pas que, de ce côté de la table, on reprenne les
anciens propos et que nous soyons toujours obligés de tenir les propos
que les autres tenaient avant nous.
Autrement dit, les hommes changent de côté de la table mais
il ne faudrait pas que les mêmes discours demeurent aux mêmes
places.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Ce qui m'a surpris,
c'est lorsque le ministre dit que les autres associations, je ne sais pas
comment il les a appelées, ne sont pas en faveur, sauf la CSN. Ecoutez,
c'est compréhensible. Posez la question à la CSN: Etes-vous pour
la FTQ? Posez la question au Parti québécois: Etes-vous pour le
Parti libéral? On n'a pas besoin de poser la question, on connaît
la réponse. Je vous donne un exemple. Dans le plan conjoint
Québec-Sud, qui est régi par l'UPA, je ne sais pas si le ministre
est au courant actuellement. Afin de démontrer qu'ils ne sont pas en
faveur qu'on reconnaisse d'autres régies, on exige des gens qui font
partie de l'Association des propriétaires de boisés privés
de renoncer à cette association moyennant une vente de bois. On leur
dit: Signe-moi cela ici. Si tu renonces à faire partie de l'Association
des propriétaires de boisés privés, on va te prendre 200,
300, 400 ou 500 cordes de bois. Je l'ai vu cette semaine, pas plus tard que
lundi, M. le Président. Demandez à ces gens: Etes-vous pour la
régie? Il n'est pas nécessaire de le leur demander, je sais que
c'est non et tout le monde sait que c'est non. Ce n'est pas à eux qu'il
faut le demander. C'est pourquoi je disais tout à l'heure que cela
prendrait une enquête impartiale. Si je fais faire l'enquête par un
syndicat pour connaître l'utilité d'un autre syndicat, si on veut
appeler cela ainsi, il n'est pas nécessaire de faire faire
l'enquête. Je pense qu'on a la réponse, et c'est là que
c'est dangereux. C'est ce qui se produit actuellement. On fait faire des
enquêtes par des groupes qui sont intéressés. C'est
physiquement impossible pour eux d'être impartiaux. C'est là que
réside le problème et il dure depuis quatre ans. Cela ne veut pas
dire que les deux n'ont pas raison. Il faudrait sortir ces gens à un
moment donné du contexte.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Bellechasse, je pense que nous avions convenu tout à l'heure d'un commun
accord de discuter de ce sujet au programme 4. On pourrait peut-être
appeler immédiatement l'élément 1 du programme 1.
M. Goulet: M. le Président, j'avais même fait signe
que oui moi aussi.
Le Président (M. Clair): Elément 1 du programme
1.
M. le ministre des Terres et Forêts.
Connaissance de la forêt
M. Bérubé: Je vous présente M. Pierre
Dorion, directeur du service de la recherche, qui m'assistera dans ce
dossier.
En termes d'activité de la recherche, la priorité aux
recherches est accordée à l'amélioration de la recherche,
à la connaissance de la forêt, à la planification et
à l'utilisation de la forêt et à l'origine également
des recherches sur l'utilisation des effectifs pour la lutte contre la tordeuse
des bourgeons.
En fait, je serai prêt à répondre à
l'ensemble des questions que vous aimeriez poser quand je me serai
trouvé dans la quantité invraisemblable de papier...
voilà.
Le Président (M. Clair): Cela fait fonctionner
l'industrie, exactement.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Pour la bonne marche des travaux, j'aimerais
connaître l'orientation qu'on pourrait leur donner. Par exemple, j'aurais
aimé poser des questions au ministre sur le vaste programme qu'il a
à l'esprit en vue de la rénovation totale et complète de
l'industrie des pâtes et papiers. Est-ce qu'on peut l'aborder
immédiatement ou le ministre préfère-t-il qu'on attende un
autre programme?
M. Bérubé: Vous pouvez le faire. C'est plutôt
au niveau de la recherche sur l'écosystème, ou sur
l'écologie forestière. Nous sommes donc peut-être un peu en
dehors...
M. Giasson: ...le programme 4... M. Bérubé:
D'accord! Oui.
M. Giasson: M. le Président, on pourra aborder cette
question au programme 4, comme on l'indique. Au cours des dernières
années, j'ai eu des contacts assez fréquents avec les
fonctionnaires du ministère des Terres et Forêts et j'y ai
rencontré un esprit de collaboration et un désir de servir assez
exceptionnels. Toutes les relations avec les fonctionnaires que j'ai eues dans
le passé se sont traduites par des rencontres très productives et
j'ai été favorablement surpris du désir de servir
qu'avaient ces gens et de leurs connaissances approfondies des dossiers que
nous abordions. Or, quelle ne fut pas ma surprise, récemment, de lire
dans un journal, à la suite d'une entrevue que le ministre avait
donnée, soit le Devoir, une remarque du ministre qui déplorait ne
pas avoir trouvé la compétence et la rigueur intellectuelle chez
ses fonctionnaires face à l'orientation qu'il voulait donner à
son ministère.
J'aimerais que le ministre précise davantage, parce que cela n'a
aucune relation avec les constatations que j'ai faites personnellement dans les
contacts que j'ai eus avec toute l'équipe du ministère des Terres
et Forêts.
M. Bérubé: Le député serait-il
surpris que cela n'a pas non plus aucune relation avec l'expérience que
j'ai acquise au ministère des Terres et Forêts? Je sympathise avec
le travail souvent difficile d'un journaliste qui doit, en quatre heures,
essayer de retenir l'essentiel d'un grand nombre de sujets couverts. Dans le
cas qui vous inquiète, malheureusement, le journaliste a fait un
raccourci entre
deux idées différentes qui a conduit à une
présentation pour le moins douteuse. Je ne vous cacherai pas
qu'effectivement l'expérience que j'ai du ministère des Terres et
Forêts est une expérience éminemment agréable si on
réfère à nos nombreuses discussions qui sont toujours dans
un esprit très ouvert, et, je crois qu'elles sont extrêmement
passionnantes. Donc, d'une part, je pense que je n'ai pas l'intention de
commenter votre remarque. Si vous me demandez dans quel secteur je trouve que
le ministère doit évoluer, parce que cela répond davantage
à votre question, je vous dirai que dans le domaine du
développement économique dans le secteur de l'industrie
forestière, ce n'est certainement pas la vocation passée du
ministère.
Le loi permet justement que le ministère s'engage dans cette
activité. Cependant, il faut reconnaître que le
développement de l'industrie forestière, que ce soit celle du
sciage ou celle des pâtes et papiers, a d'abord relevé de
l'industrie privée. Le ministère a eu comme vocation
l'aménagement de la ressource, de l'approvisionnement en bois, et
beaucoup moins le problème, justement, du développement
économique de ce secteur de l'industrie primaire. Par conséquent,
cela peut expliquer pourquoi, devant l'abondance de dossiers à
caractère économique qui afflue maintenant vers le
ministère, nous sommes amenés à constater,
particulièrement depuis janvier, je dois dire, que s'il devait y avoir
une nouvelle consolidation de l'orientation actuelle du ministère, cela
devrait être justement dans le secteur de l'économie
forestière, donc, de la capacité du ministère
d'évaluer des dossiers de rentabilité, d'investissement. Par
conséquent, c'est l'orientation qu'on devrait prendre.
Je pense que nous sommes unanimes, au ministère à
reconnaître que c'est cette orientation qui a été mise de
côté dans le passé, pour peut-être d'excellentes
raisons; je pense que je ne suis pas en mesure de les juger aujourd'hui. Mais
je pense que c'est dans ce secteur que nous devons faire des efforts et que ces
efforts deviendront apparents, je pense, dans les années qui vont venir.
Pour cette année, elle n'affecte pas le budget, sauf peut-être,
parfois dans la réallocation de postes de certains domaines du
ministère vers, justement, ce domaine de l'économie
forestière, du développement forestier qui n'apparaissent
évidemment pas au budget ici.
M. Giasson: Dans un premier temps, si j'ai bien saisi les propos
du ministre, le ministre aurait été mal cité par le
journaliste et, effectivement, il n'accepte pas les commentaires ou les propos
que le journal a rapportés.
M. Bérubé: Je refuse complètement ce
paragraphe.
M. Giasson: Vous reconnaissez la qualité de
l'équipe qui vous entoure.
M. Bérubé: 95% de l'article étant valables,
les derniers 5%, je pense qu'il ne faut pas trop en tenir rigueur au
journaliste.
M. Russell: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: ... à l'élément 1, il y a une
baisse de crédits pour la recherche de $2 174 000 à $1 900 000.
Est-ce que le ministre veut minimiser la recherche? Est-ce qu'il y a un
changement de politique, une diminution de fonctionnaires? Quelle est
l'économie que le ministre fait?
M. Bérubé: L'économie, en fait, porte sur
une coupure de $400 000 sur un programme de recherche portant sur la tordeuse
des bourgeons de l'épinette. On peut se demander: Pourquoi couper ce
programme de recherche? Je pense que vous êtes peut-être au courant
que l'épidémie de la tordeuse des bourgeons de l'épinette
est en régression. D'ailleurs, vous verrez que, dans les programmes
d'arrosage que nous discuterons ultérieurement je ne saurais dire
à quel numéro il y a également des coupures cette
année. C'est que l'épidémie progresse en direction de
l'est et quitte présentement le Québec. Elle est encore
extrêmement sévère en Gaspésie, mais elle est, quand
même, en voie de régression un peu partout au Québec. Dans
ces conditions, il était normal que le gouvernement, étant
amené à faire des coupures, on ait choisi de faire des coupures
dans des secteurs où justement c'était peut-être moins
urgent. Une des premières coupures que nous avons pratiquées,
c'est cette coupure de $400 000 au niveau du programme de recherche sur la
lutte contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette.
M. Russell: Est-ce qu'il s'agit d'une diminution de personnel
à cet article?
M. Bérubé: Est-ce que vous me permettez
peut-être, dans les questions techniques, de laisser la parole à
un fonctionnaire? De coutume, on permet à un fonctionnaire de
répondre, mais il le fait toujours au nom du ministre et c'est toujours
comme si c'était le ministre qui parlait. Alors je les ai bien mis en
garde de ne pas me citer de façon tendancieuse. Il ne s'agit pas d'une
coupure de personnel.
M. Giasson: A quel endroit est localisé le personnel qui
travaille au service de recherche du ministère? Est-ce qu'on le retrouve
uniquement à Québec ou si c'est réparti en province dans
des stations forestières de recherche?
M. Bérubé: Au complexe scientifique, sauf un
ouvrier qui travaille à la station forestière de Duchesnay.
M. Giasson: On les retrouve tous au complexe scientifique. Il y a
combien de personnes affectées à ce service?
M. Bérubé: II y a 67 personnes.
M. Russell: Au complexe scientifique.
M. Bérubé: Moins un ouvrier qui travaille à
la station forestière de Duchesnay où nous avons des recherches
puisque c'est la vocation de la station forestière de servir à la
recherche et à l'éducation en conservation.
M. Giasson: Mais Duchesnay est la seule station forestière
au Québec où il se fait un programme de recherche comme tel ou si
d'autres stations peuvent poursuivre également des programmes de
recherche?
M. Bérubé: C'est la seule station organisée
avec un personnel et des bâtisses aussi bien.
Le Président (M. Clair): L'élément 1 du
programme 1 sera-t-il adopté?
M. Russell: M. le Président, une simple question ici. Je
crois qu'il y a 67 fonctionnaires permanents, dont 66 travaillent au centre de
recherche, mais il y en a aussi 29 à temps partiel. Est-ce que ces
employés vont retrouver encore leur emploi cette année? A quelle
place les utilise-t-on ces employés à temps partiel?
M. Bérubé: En fait, c'est le total des
étudiants durant l'été, des ouvriers qu'on engage en
forêt pour les reboisements expérimentaux, les traitements
sylvicoles expérimentaux, et aussi, des professionnels affectés
à des projets spécifiques, de même que quelques
fonctionnaires occasionnels aussi.
M. Russell: Une autre question, M. le Président. A la
catégorie 6, loyers, on voit qu'il y a une augmentation assez
substantielle. Est-ce que les $30 000 qui sont demandés pour les loyers
représentent le montant qui était au programme l'an dernier?
Le Président (M. Clair): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Oui, M. le Président, merci.
Au service de recherche, on poursuit des travaux de classification
écologique des forêts du Québec. Lorsqu'on fait ce travail,
quels sont les buts précis ou les faits qu'on veut atteindre? Dans le
programme de classification écologique des forêts au
Québec.
M. Bérubé: Les buts sont de décrire des
types des régions écologiques homogènes. Cela
dépend de l'échelle à laquelle on veut travailler. A
grande échelle, ce sont des régions et puis ensuite, quand on
passe à des unités plus petites, il y a des systèmes
écologiques et enfin on tombe aux types écologiques. Mais le but
de cela c'est de connaître, selon l'échelle à laquelle on
travaille, des forêts homogènes qui vont réagir de
façon sembla- ble quand on veut les traiter, quand on veut les
aménager. Comme c'est basé sur la description du terrain, la
forme de terrain, les sortes de matériel, comme le gravier ou l'argile,
etc., cela peut servir aussi pour des fins de tracés de chemins. Cela
peut servir pour des fins de difficulté d'exploitation, puisque cela
tient compte de la pente, etc.
C'est en fait la définition de la forêt,
c'est-à-dire de l'objet des travaux forestiers.
M. O'Gallagher: Est-ce que toute cette information est
montrée sur des cartes forestières?
M. Bérubé: Certainement, oui.
M. O'Gallagher: Maintenant, y a-t-il d'autres cartes
forestières, concernant le Québec, disponibles, autres que
Mont-Laurier, Iles-de-la-Madeleine, Ottawa et Cap-Chat? Si oui, lesquelles sont
disponibles?
M. Bérubé: Je ne sais pas exactement de quoi vous
voulez parler. Au point de vue des cartes que la recherche peut fournir, il y a
eu les cartes d'inventaire des terres du Canada qui sont publiées
à deux échelles, l'échelle 250 millièmes qui est
publiée, en fait, par le fédéral, puisque c'est une
entente fédérale-provinciale. L'échelle à 50
millièmes n'est pas publiée, mais on peut la fournir, à
Québec même, sur demande.
M. Giasson: Vous les avez pour tous les territoires, toutes les
régions du Québec. C'est cela?
M. Bérubé: Pour le Québec
mérédional, c'est-à-dire qu'il y a eu une limite nord qui
allait à peu près avec la limite des terrains colonisés.
Ensuite de cela, il y a eu quelques études écologiques dans
certains territoires qui ont été faites, en partie, pour fins de
recherche, pour déterminer les méthodes de classification
écologique. Il y a une carte publiée, actuellement, c'est la
carte du comté de Rivière-du-Loup.
M. Giasson: On peut conclure que toutes ces cartes sont
disponibles pour quelqu'un qui voudrait les consulter, et on peut se les
procurer au ministère des Terres et Forêts.
M. Bérubé: Celle-là.
M. Russell: Est-ce que je dois comprendre que, sur ces cartes, on
a l'indication des essences de bois dans chaque territoire?
M. Bérubé: Cela dépend de la série de
cartes. Les cartes d'inventaire des terres du Canada étaient
basées sur la capacité productive de la forêt et non pas
sur la production actuelle. C'est-à-dire qu'il s'agissait de
déterminer quelle essence croîtrait là naturellement ou
quelle combinaison d'essences.
Ce sont ces essences qui sont indiquées sur la carte. Vous pouvez
avoir un endroit donné où c'est indiqué "sapin et bouleau
jaune", c'est-à-dire le
merisier, et peut-être que cet endroit est actuellement en culture
ou encore c'est un bûché ou un brûlé ou encore,
après un brûlé, il est redevenu en trembles et on a du
tremble de 30 ans. Mais cela indique les essences qui croîtraient
là, naturellement. Cela, c'est pour les cartes d'inventaire des terres
du Canada.
Pour les cartes écologiques, là encore, cela va
dépendre. Si c'est la série évolutive qui est
indiquée, c'est le stade final de l'évolution naturelle. Si, par
contre, c'est une carte qui vous indique chaque stade de la série
évolutive comme, par exemple, la carte du comté de
Rivière-du-Loup, à ce moment-là, vous avez les essences
qui étaient là au moment où la carte a été
faite.
M. Russell: Si je veux obtenir une carte avec les essences qu'il
y a sur un territoire, actuellement, puis-je l'obtenir de votre service?
M. Bérubé: Pas à la recherche, c'est
l'inventaire forestier, à ce moment-là. En fait, c'est le
prochain élément que vous allez étudier.
M. Giasson: Le service de recherche a entrepris des travaux dans
la forêt domaniale des Appalaches en vue d'un projet pilote pour les
unités de gestion. On prévoyait que les travaux pourraient
être terminés en 1977. Effectivement, est-ce que les travaux sont
sur le point de se terminer et quels sont les résultats? Que peut-il
découler de ces travaux de recherche visant ce plan pilote qu'on a
bâti et qui servirait de portrait ou d'image en vue de développer
d'autres unités de gestion au Québec?
M. Bérubé: En fait, ce qui est actuellement en
cours dans la forêt des Appalaches, c'est l'essai de la méthode de
classification écologique qui a été
préconisée par un groupe multidisciplinaire et interorganismes.
C'est ce qui est en cours depuis deux ans et on doit continuer
l'été prochain. Maintenant, il est question, au cours de la
prochaine année, d'essayer de travailler à l'élaboration
d'un programme d'informatique qui permettra, en utilisant les programmes
déjà en cours, d'étudier l'effet de révolution de
la tordeuse des bourgeons de l'épinette sur la forêt. Autrement
dit, il y aurait une partie du programme qui étudie l'évolution
naturelle de la forêt et une autre partie qui étudie
l'évolution naturelle d'une épidémie de tordeuses. C'est
l'interaction entre les deux qui serait traitée par le programme
d'ordinateurs auxquels on pourrait poser des questions concernant
l'aménagement forestier.
M. Giasson: Mais ce projet pilote...
M. Bérubé: II n'y a pas de projet pilote
d'aménagement en ce qui concerne la recherche dans la forêt
domaniale des Appalaches.
M. Giasson: Je vois ici, dans le rapport du ministère,
qu'on fait bien allusion à un projet pilote en vue d'aménager des
unités de gestion.
M. Bérubé: C'est cela, c'est l'établissement
du programme d'ordinateurs. Quand le programme sera au point, à ce
moment-là, on pourra l'essayer dans la forêt domaniale des
Appalaches, dans l'unité de gestion des Appalaches.
M. Giasson: Le plan de recherches ne serait pas encore
terminé?
M. Bérubé: II n'est pas terminé encore.
C'est le but qu'on vise.
M. Giasson: Justement, dans cette recherche qui a
été faite, dans la forêt domaniale des Appalaches, visant
également une étude des phénomènes découlant
de l'épidémie de la tordeuse, est-ce que cela va déboucher
sur des décisions?
Va-t-on procéder à des programmes de coupe de façon
à récupérer les secteurs ou les parcelles qui sont
vraiment endommagées? On sait que du côté du sapin les
dommages sont beaucoup plus lourds que du côté de
l'épinette.
Est-ce que cela va déboucher nécessairement sur une
décision d'entreprendre des programmes de coupe qui n'étaient pas
prévus, avant la venue de l'épidémie de tordeuses?
M. Bérubé: Evidemment, quand le résultat de
la recherche est terminé, ce résultat est passé aux
gestionnaires, ceux qui doivent prendre des décisions concernant
l'aménagement. Puis, ce sont eux qui prendront les décisions en
conséquence.
M. Giasson: Des décisions qui vont suivre les
résultantes de la recherche effectuée sur le territoire, sur les
parcelles. C'est une affaire importante; on a décidé, à un
moment donné, dans une région qui a subi le passage de la
tordeuse... Qu'est-ce qu'on fait avec l'essence qui est sur place et qui va
disparaître à brève échéance? Est-ce qu'on la
laisse se gaspiller sur place ou si on bâtit des programmes de
récupération dans ces secteurs-là, ou si on modifie le
programme d'ensemble? Va-t-on vers les secteurs endommagés pour laisser
d'autres secteurs qui devaient subir des traitements ou de
l'aménagement, mais n'étant pas endommagés par
l'épidémie, on les garde en réserve pour
récupérer le plus de forêt possible qui va se perdre de
toute façon? Cela prend une importance assez grande à mon
sens.
Le Président (M. Clair): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, c'est un aspect
très important qui est soulevé actuellement au niveau de la
récupération. Je dois dire que déjà, au
ministère, ce n'est pas exclusivement de la recherche, mais la
connaissance actuelle des dégâts causés à la
forêt par la tordeuse, on en tient compte dans les permis de coupe, dans
les plans d'exploitation de la forêt. L'objectif serait évidemment
de récupérer en totalité tous les bois qui sont
affectés et en perdition. L'effort maximum est fait déjà
au niveau des plans d'exploitation que nous acceptons des compagnies, des
concession-
naires, des permissionnaires. Il est peu probable, cependant, que nous
réussissions a récupérer le bois qui est en perdition, il
y en a trop.
M. Giasson: On peut déduire que c'est une
préoccupation au ministère de voir à modifier les
programmes de coupe, d'exploitation et d'aménagement en tenant compte de
ravages qui peuvent se produire de façon plus intense dans des secteurs
par rapport à d'autres secteurs.
M. Bérubé: Mais ce n'est pas le rôle du
service de la recherche comme tel de préparer des plans de gestion.
Alors, il s'agit donc davantage de faire des études fondamentales sur le
comportement de la forêt, lorsqu'elle est soumise à des
contraintes naturelles comme la tordeuse, par exemple, et de voir son
comportement en milieu naturel et non pas de faire des plans de gestion.
M. Giasson: L'information que la recherche peut apporter,
à un autre palier de décision opérationnelle, permet au
ministère de récupérer des essences qui vont se perdre, si
ce n'est pas fait dans une période de deux ou trois ans.
M. Bérubé: Exactement.
Le Président (M. Clair): Le député de
Robert-Baldwin.
M. O'Gallagher: Toujours sur la recherche, où en est rendu
votre projet de recherche sur la sélection et l'amélioration du
peuplier dans la vallée du Saint-Laurent, plus précisément
à Matane et à Villeroy?
M. Bérubé: Cela progresse normalement. On a
planté, vers 1969, les premières plantations et on a
déjà une bonne idée des lignées de peupliers qui
donnent les meilleurs rendements, compte tenu du climat régional, compte
tenu de certaines maladies aussi qui peuvent exister dans ce coin, compte tenu
aussi de la croissance naturelle de chacun des hybrides de peupliers ou de
chacune des espèces qu'on a plantées là.
Evidemment, tout cela doit se poursuivre, parce que, même si le
peuplier est une essence à croissance rapide, il reste qu'il y a encore
une foule de choses à chercher et à préciser. On a tout de
même déjà des résultats préliminaires qui
nous permettent de recommander une dizaine d'hybrides ou de
variétés de peupliers à planter ailleurs.
M. Giasson: Après, quoi vous avez commencé
en 1969 sept ou huit ans de croissance, vous avez déjà des
indications qui permettent de faire des choix entre les différents types
de peupliers que vous avez.
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: L'expérience que la recherche a poursuivie du
côté du mélèze à Bonaventure et à
Duchesnay est-elle concluante jusqu'à présent?
Est-ce que ces plantations sont aussi récentes que celles des
forêts de Villeroy et de Matane?
M. Bérubé: Elles ont été
commencées après. On est moins avancé. On en est à
l'installation. En fait, ce qu'on fait, dans une première étape,
on sélectionne dans la nature différents individus qui semblent
avoir une belle forme, une excellente croissance et on reproduit cela à
Duchesnay, à la pépinière expérimentale, en plus de
ce qu'on obtient par des échanges avec d'autres provinces ou d'autres
pays, qui proviennent de régions où le climat est semblable au
nôtre. On essaie cela à Duchesnay et, déjà, dans la
pépinière, on peut voir que certains plants ne résistent
pas au gel, par exemple. Ils ne semblent pas donner de bons rendements. On peut
éliminer ceux-là.
Ensuite, on va planter des jeunes arbres dans un réseau
d'arboretums (une vingtaine) établi à travers le Québec.
C'est là encore, après quelques années, qu'on peut
comparer les arbres qui sont placés dans des conditions climatiques un
peu différentes de celles de Duchesnay et, avec l'âge, on peut
voir si leur bon rendement se maintient.
Alors, là on en est à la phase des jeunes plantations dans
les arboretums. Déjà, évidemment, celles qui ne semblent
pas vouloir donner un bon rendement, on peut les éliminer.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Montmagny-L'islet.
M. Giasson: Quel est le type d'industries, au Québec, qui
requiert surtout le mélèze? C'est une essence qu'on ne peut pas
tout de même utiliser à des fins multiples, je crois.
M. Bérubé: Actuellement, c'est surtout les
pâtes et papiers, comme à New Richmond, où on utilise le
mélèze. Le mélèze peut être aussi
utilisé pour le sciage.
M. Giasson: II y a un marché de sciage pour le
mélèze?
M. Bérubé: J'ai dit qu'il pourrait être
utilisé pour le sciage. Il est utilisé ailleurs dans d'autres
pays.
Le Président (M. Clair): Le député de
Pontiac-Témiscamingue.
M. Larivière: Le ministère a-t-il d'autres projets
expérimentaux pour l'année qui vient? Si oui, quelles plantes et
à quel endroit?
M. Bérubé: Si on veut parler selon les essences,
celles sur lesquelles on travaille le plus sont le peuplier, le
mélèze et aussi le pin gris. Le pin gris est une essence à
croissance rapide, comme tout le monde sait, qui peut donner un bon rendement
en plantation. Il y a aussi un autre problème, c'est que le pin gris
qu'on trouve naturellement dans le Québec, lorsqu'il est coupé
à plusieurs endroits se régénère mal. Alors, on
peut avoir de grandes su-
perfides de forêts qui ne se régénèrent pas.
On a établi, en collaboration avec d'autres organismes, un programme de
recherche concernant le peuplier, qui traite en bonne partie des
méthodes pour régénérer les bûcheries et les
différentes méthodes de plantation aussi. Malgré qu'on ait
aussi quelques recherches concernant la sylviculture, les peuplements de pins
gris naturels et la fertilisation aussi des pins gris naturels.
Ensuite de cela, on a passablement de recherches qui sont plus anciennes
concernant la sylviculture du sapin. Certaines datent de 1959. Pas seulement de
sapins, mais aussi des épinettes, celles-là concernant
plutôt la sylviculture de peuplement naturel et la fertilisation.
Le Président (M. Clair): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, simplement quelques
remarques. On parlait de mélèzes et de peupliers tout à
l'heure.
Je pense que cela prend deux marchés possibles dans cela,
l'industrie des pâtes et papiers et l'industrie de la planche-particules
où cela peut être rentable. On se rappellera quand même,
quand on parle des pâtes et papiers, que les usines paient les prix
qu'elles veulent parce qu'il y a des surplus. En ce qui concerne la
planche-particules, il n'y a pas d'utilisateur actuellement. Vous avez une
industrie à Cabano je crois qu'elle est installée
les Papiers Cascades, qui est une cartonnerie et qui pourra l'utiliser avec
avantage.
M. Giasson: Le problème de recherche...
M. Bérubé: Dans le domaine de la recherche,
où nous faisons des recherches sur une essence qui est plus ou moins
utilisée actuellement, on a un certain nombre d'années pour
convaincre l'industrie des bons résultats qu'on pourra obtenir avec ces
essences. Nous avons une vingtaine d'années dans le cas des plantations
de mélèzes; d'ici là les conditions économiques
peuvent changer beaucoup. Connaissant les qualités technologiques de ces
essences, comme le mélèze, il s'agit donc de convaincre
l'industrie.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Bérubé: II y a aussi une chose, si on les plante
sur de grandes superficies, cela devient plus intéressant pour
l'industrie d'accepter ces essences que si quelqu'un se présente avec un
chargement de mélèzes à l'usine.
Le Président (M. Clair): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, je dois vous signaler qu'en
vertu d'un ordre que l'Assemblée nationale nous a donné hier nous
devons ajourner nos travaux à midi, mercredi. Je propose donc
l'ajournement des travaux.
Le Président (M. Clair): La commission
parlementaire...
M. Giasson: On pourrait remettre cela sine die en
attendant...
Le Président (M. Clair): La commission
parlementaire...
M. Giasson: ...le prochain ordre de la Chambre.
Le Président (M. Clair): ...ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 12 h 4)