Journal des débats (Hansard) of the Committee on Citizen Relations
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
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Tuesday, November 5, 2024
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Vol. 47 N° 54
Special consultations and public hearings on Bill 74, an Act mainly to improve the regulatory scheme governing international students
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures quarante-cinq minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.
Alors, bienvenue à tous et à toutes en ce beau mardi matin.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi
numéro...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement
relatif aux étudiants étrangers. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Macaron (Notre-Dame-de-Grâce) est remplacée par Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont); Mme Prass (D'Arcy-McGee) est remplacée
par M. Morin (Acadie); et M. Bérubé (Matane-Matapédia) est remplacé par M.
Paradis (Jean-Talon).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, Mmes et MM. les députés, bienvenue à la commission.
Nous débuterons, ce matin, par les remarques préliminaires, puis nous... nous
entendrons le Commissaire à la langue française, l'Université du Québec, et
nous allons terminer par l'Université de Montréal, l'Université McGill,
l'Université Laval et l'Université de Sherbrooke conjointement.
J'invite maintenant le ministre de
l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration à faire ses remarques
préliminaires. M. le ministre, vous allez disposer de 6 minutes, et la
parole est à vous.
M. Roberge : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. D'abord, je veux saluer mes collègues qui sont présents avec
nous, autant des deux côtés, la partie gouvernementale et les oppositions. Très
content de voir que les formations politiques sont représentées. Merci aussi
aux équipes qui nous aident, en arrière, à répondre à toutes les questions. On
a ce matin pour commencer, le Commissaire à la langue française, mais il y a
plusieurs personnes qui ont accepté aussi de venir participer aux travaux. Ça
va durer deux jours de manière très intense, Mme la Présidente, mais on est
prêt à ça.
Il y a aussi d'autres personnes qui ne
viendront pas directement ici, en salle de commission, mais qui nous ont fait
parvenir des réflexions. Sachez que ce n'est pas parce que vous n'êtes pas ici,
en commission que vous ne serez pas entendus, puis que vos propos ne seront pas
considérés.
C'est un projet de loi qui est
intéressant, qui est important, qui s'inscrit dans un contexte où on a, en ce
moment, pratiquement 6 000 résidents non permanents sur le territoire
québécois. Il y a évidemment des étudiants étrangers parmi... j'ai dit
6 600, mais je m'excuse, je m'excuse, il n'y en a pas 6 000, il y en
a presque 600 000. Justement, quand on... quand on voit le nombre de zéros, ça
donne le tournis. Presque 600 000 résidents non permanents sur le
territoire québécois de diverses catégories. Certaines des catégories sont
décidées exclusivement par le gouvernement fédéral, d'autres par le
gouvernement du Québec, d'autres, c'est des compétences partagées.
J'en profite pour faire un rectificatif.
La semaine dernière à l'Institut du Québec rendait publique une étude dans
laquelle il y avait malheureusement certaines erreurs. On disait que le
gouvernement du Québec contrôlait à peu près 50 % des immigrants
temporaires sur le territoire québécois. Ce n'est pas exact, on est plus près de
30 %. D'ailleurs, mon équipe avait communiqué avec la rédactrice de
l'étude qui avait dit qu'effectivement ce n'était pas exactement ce qui était
écrit, qu'elle était prête à apporter des nuances si les gens communiquent avec
elle. Donc, j'invite nos amis journalistes à communiquer avec les gens qui ont
rédigé cette étude-là, parce que ce n'est pas parce qu'on répète quelque chose
plusieurs fois que ça devient plus vrai.
Évidemment, les étudiants étrangers sont
dans une catégorie à part. Quand on regarde tous les... les immigrants
temporaires qui sont... ce sont souvent de futurs immigrants permanents, de
nouveaux Québécois. Et il ne s'agit pas de dire : Bien, arrivons avec un
objectif de coupures paramétriques, ne voyons pas les étudiants étrangers comme...
comme des problèmes d'aucune manière. Ils viennent ici à l'invitation des
institutions. Ensuite, bien, ils sont reconnus à la fois par le gouvernement du
Québec et le gouvernement canadien, sans quoi ils ne pourraient pas venir ici.
Donc évidemment, le... les gouvernements ont une part de responsabilité. Puis
ensuite, bien, une fois qu'ils sont ici, ils contribuent au Québec.
Maintenant, quand on regarde les leviers
qu'on a au gouvernement pour gérer toute l'immigration, on se rend compte que,
pour ce qui est des étudiants étrangers, on a peu d'agilité gouvernementale. On
peut simplement, au moment où on se parle avant la sanction de cette loi-là,
décider du nombre d'étudiants sur le territoire québécois, combien de CAQ
seront... seront là.
• (9 h 50) •
Par contre, en ce moment, le gouvernement
ne peut pas décider si, quand on accepte un nombre très élevé, plus de
120 000 personnes, s'il y en a une grande majorité dans la... sur l'île de
Montréal, dans le Grand Montréal, dans des régions périphériques, dans des
régions éloignées. Est-ce qu'ils sont surtout en formation professionnelle dans
les cégeps, dans des programmes courts, dans des universités, dans les
deuxièmes et troisièmes...
M. Roberge : ...cycle.
Qu'est-ce qui est prioritaire pour le Québec? Qu'est-ce qui est prioritaire
pour ces régions? On pourrait faire comme le Parti québécois, dire : Bon,
nous autres, on va passer de 120 000 à 50 000, voilà. C'est sûr que, si on
faisait ça, bien, on n'aurait pas besoin du projet de loi dont on parle
aujourd'hui puis c'est sûr qu'on ferait fermer plusieurs programmes en région,
puis c'est sûr qu'on s'attaquerait aussi à des programmes qui sont vitaux soit
pour nos services publics ou pour notre économie.
Plutôt que de dire, là... de se donner une
cible de réduction à l'aveugle, comme ça, en chiffre ou en pourcentage, il faut
d'abord se donner, comme gouvernement, comme État national, la capacité d'agir
de manière chirurgicale. Donc, je veux rassurer les gens, on n'arrive pas du tout
ici en disant : Bon, bien, on s'en vient couper 5, 10, 15 %, ou
20000, 30000, 50000, 80 000 étudiants, on s'en vient dire : Considérant le
nombre total...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste une minute.
M. Roberge : ...merci,
d'immigrants temporaires sur le territoire québécois, considérant qu'il y a des
hausses fulgurantes dans certaines écoles privées professionnelles, considérant
la pénurie de logements, considérant les enjeux que ça peut poser pour nos
services publics, considérant qu'on a dans le PQI, le Programme québécois des
infrastructures, des sommes importantes et que, des fois, on veut agrandir des
institutions pour des étudiants qui n'étudient pas nécessairement dans des
secteurs prioritaires, donnons-nous... faisons-nous un cadeau, à nous,
Québécois, d'une agilité gouvernementale qui va nous permettre ensuite de
prendre les meilleures décisions.
Et j'espère qu'on va être capables de
bonifier ensemble ce projet de loi important suite, bien sûr, à l'éclairage que
vont apporter les gens qui vont contribuer dans les deux prochains jours.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, j'invite maintenant
le porte-parole de l'opposition officielle et député de l'Acadie à faire ses
remarques préliminaires, et votre temps est de 3min36s. La parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. le ministre, collègues de la barquette gouvernementale.
Je tiens à saluer ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont, collègues des
oppositions qui sont là.
Je suis heureux de commencer à travailler
ce projet de loi et d'écouter des groupes. J'ai lu avec beaucoup d'attention
les mémoires qui nous ont été présentés, lu également plusieurs articles de
journaux. Et il est rare qu'un projet de loi, en général, soulève autant de
critiques, d'inquiétudes. Même, on peut parler d'un lever de boucliers. Alors,
c'est assez remarquable, la façon dont ce projet de loi a été reçu par les
établissements d'enseignement, d'enseignement supérieur, et j'ai très hâte
d'entendre les groupes, pour être capable, évidemment, de dialoguer avec eux et
de faire entendre au gouvernement l'impact de ce projet de loi.
L'immigration a fait couler beaucoup
d'encre au Québec, beaucoup d'encre également écrite par la CAQ. On a
l'impression que l'immigration est toujours un problème pour le gouvernement de
la CAQ. Alors, évidemment, ça va être d'autant plus important d'étudier avec
beaucoup d'attention ce projet, ce projet de loi.
Quelques critères... le ministre parlait
d'agilité, quelques critères, mais aussi beaucoup de pouvoirs réglementaires.
Donc, c'est comme si, évidemment, on voulait donner un chèque en blanc au
gouvernement pour contrôler l'immigration. Alors, ça va être très, très
intéressant d'y consacrer... d'y consacrer beaucoup de temps. D'autant que,
dans bien des cas, on s'attaque à nos établissements d'enseignement supérieur,
aux universités, à des gens qui font de la recherche, qui sont invités à venir
ici pour faire des études supérieures. Donc, on va essayer de voir comment tout
ça va s'articuler.
Le ministre y faisait référence, il veut
que son projet de loi lui donne de l'agilité, lui permette de s'attaquer à
certains établissements. Bien, j'ai hâte d'en entendre parler et j'ai hâte d'en
discuter avec lui parce que, jusqu'à maintenant, à la lecture du projet de loi,
ce n'est pas très clair, les cibles qui sont visées par le ministre.
Alors, très heureux d'être ici. Très
heureux de commencer l'étude en écoutant des groupes. Et, si vous permettez,
Mme la Présidente, dans le temps qui reste, je céderais la parole, ou je vous
demanderais de céder la parole à ma collègue la députée de
Mont-Royal-Outremont, pour les remarques préliminaires.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien sûr. Il vous reste une minute, Mme la députée.
Allez-y.
Mme Setlakwe : Merci. Merci.
Donc, bonjour à tous. En complément à ce qui a été mentionné par mon collègue
député de l'Acadie, j'entends bien le ministre, qu'il souhaite se donner toute
l'agilité possible. Moi, j'ai bien hâte d'entendre les groupes. À titre de
porte-parole en enseignement supérieur...
Mme Setlakwe : ...jusqu'à
maintenant, je n'ai entendu que des inquiétudes. Le gouvernement s'octroie de
très larges pouvoirs dans ce dossier. Et ce qu'on entend, c'est qu'il va
falloir agir avec la plus grande précaution. Le ministre l'a dit, les étudiants
étrangers sont une catégorie à part. Il va falloir qu'on considère la grande
richesse qu'apportent ces étudiants étrangers, richesse au sens le plus large
du terme. Et on ne parle pas uniquement, là, donc, du volet financier pour les
établissements. Nos étudiants étrangers sont un atout essentiel. Leur apport
est est incommensurable, et donc il faut...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
Mme Setlakwe : Oui, maintenir
à tout prix l'attractivité du Québec dans cette course mondiale pour les
talents. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup, Mme la députée. J'invite maintenant
le député de Saint-Henri–Sainte-Anne et porte-parole du deuxième groupe
d'opposition à faire ses remarques pour une minute 12 secondes. La parole
est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Pas beaucoup de temps, mais merci à ceux qui viendront en
commission, merci aux équipes, merci aux députés du côté de l'opposition et du
gouvernement. Content de voir M. le ministre également. Merci, Mme la
Présidente d'être avec nous.
Écoutez, je me lance dans ce projet de loi
avec la collaboration habituelle, M. le ministre. J'appuie le principe, il
restera évidemment des détails à voir évidemment aussi dans l'application.
C'est un p.l., un projet de loi qui est relativement court, mais qui a le
potentiel de toucher des milliers de personnes étudiantes étrangères, mais
surtout nos institutions académiques, ici au Québec et plus particulièrement en
région. En dehors du projet de loi, puis on en reparlera, parce que les groupes
en parlent beaucoup, c'est là que le bât blesse, là, à mon avis, alors que
moins d'une année après avoir placé les étudiants hors cible dans l'admission
permanente, on fait un virage à 180 degrés du côté gouvernemental puis on
suspend le programme de l'expérience québécoise, diplômés. Alors, pour moi,
c'est là que le bât blesse, surtout, puis j'ai déjà lu des mémoires. Je sais
que les gens vont en parler, alors je vais continuer mon travail. Il va falloir
qu'on émette, je pense, des balises plus claires dans le projet de loi pour
être sûr...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Cliche-Rivard : ...de bien
encadrer le pouvoir gouvernemental dans le meilleur intérêt du public. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le député. Alors, on va terminer les remarques
préliminaires avec le député de Jean-Talon, également pour une période d'une
minute, 12 secondes. La parole est à vous.
M. Paradis : Salutations à
tous les collègues, à toutes les personnes qui seront entendues aujourd'hui et
demain. Merci de votre participation à nos travaux. C'est une question
importante dont on va discuter dans les prochains jours. C'est... bon, la place
des étudiants étrangers dans nos institutions d'enseignement supérieur. J'ai
écouté avec attention le ministre tout à l'heure nous dire, bien, que,
justement, il n'y a pas de chiffre, et c'est peut-être ça un des premiers
problèmes. Pourquoi est-on passé par voie législative pour parler de quelque
chose qui ne nécessitait pas un projet de loi? Ce qu'on attendait de ce
gouvernement, c'est une planification, ce sont des chiffres. Nous, en tout cas,
on a proposé notre planification dans un document qu'on a déposé la semaine
dernière, qui fixe des grandes orientations et qui est un appel au dialogue.
Donc, ce sera au moins une occasion d'avoir ce dialogue. On est très heureux
d'entendre toutes les personnes intéressées à ce sujet. Alors, bonnes
consultations particulières à tout le monde.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le député, Merci à vous tous et toutes.
On va donc débuter les auditions et je souhaite dans un premier temps la
bienvenue au Commissaire à la langue française. Mesdames et Messieurs, je vais
vous demander de vous présenter et vous êtes des habitués des commissions
parlementaires, vous avez une période de 10 minutes pour ce faire, donc
pour votre audition, et la parole est à vous.
M. Dubreuil (Benoît) : Bonjour,
merci beaucoup, merci à... merci de m'avoir invité. Bonjour à tous. Je suis accompagné
aujourd'hui de Stéphanie Cashman-Pelletier, qui est commissaire adjointe,
Maxime Simoneau, avocat, et Nebila Jean-Claude Bationo qui est agent de
recherche, qui est avec nous en ligne aujourd'hui.
Alors, en déposant le projet de loi
n° 74, le gouvernement du Québec propose d'agir pour améliorer
l'encadrement relatif aux étudiants étrangers. J'ai choisi de contribuer à
cette discussion en raison de l'importance de la présence des étudiants et des
diplômés étrangers sur la situation linguistique. Donc, je vais commencer en
rappelant qu'environ le tiers des résidents non permanents au Québec sont
d'abord arrivés, que ce soit directement ou indirectement, en raison des
études. Donc, on parle... on parle des titulaires d'un permis d'études,
titulaires d'un permis de travail postdiplôme, titulaires d'un permis de
conjoint d'étudiant. Leur augmentation doit être mise en relation avec les
diverses mesures qui ont été adoptées au fil des années par les gouvernements
du Québec et du Canada pour faciliter le financement des études et l'obtention
de la résidence permanente. Je pense à l'autorisation de travail hors campus,
au permis de travail postdiplôme, au programme de l'expérience québécoise et
aux changements à la grille de sélection du Québec.
• (10 heures) •
Donc, l'importance des étudiants étrangers
au Québec est évidemment visible, particulièrement au niveau universitaire,
avec une répartition qui demeure inégale entre les universités francophones et
anglophones. Donc, en 2023-2024, les universités anglophones accueillaient
environ 34 % des effectifs étrangers, une proportion qui est néanmoins en
baisse puisqu'elle était supérieure à 40 % il y a quelques années. Au
niveau collégial, les étudiants étrangers représentent moins de 8 % des
effectifs...
10 h (version non révisée)
M. Dubreuil (Benoît) : ...une
proportion qui est aussi en baisse après avoir connu une hausse fulgurante
entre 2019 et 2022, à la suite de l'inscription massive d'étudiants étrangers
dans certains collèges privés non subventionnés.
Pour ce qui est des cégeps, en 2023-2024,
la proportion d'étudiants étrangers n'y était que de 5 %, parmi lesquels
85 % est inscrit dans des établissements de langue française.
Alors, il y a deux sources de données qui
nous permettent d'en savoir plus sur la situation linguistique des étudiants
étrangers, d'abord, les données du recensement, ensuite, les données d'IRCC.
Les données d'IRCC indiquent qu'au 31 décembre 2023, 24 % des
titulaires d'un permis d'études de niveau universitaire et 43 % des
titulaires d'un permis de niveau collégial ne connaissaient que l'anglais. Ce
taux s'élevait à 46 % parmi les titulaires d'un permis de travail
postdiplôme et à 48 % parmi les titulaires d'un permis de conjoint. Alors,
ce sont des taux qui sont en légère amélioration par rapport à l'année
précédente, mais qui restent quand même les plus élevés de toutes les
catégories d'immigration temporaire ou permanente.
Pour ce qui est des données du
recensement, elles indiquent que 44 % des titulaires d'un permis d'études
utilisaient l'anglais de manière prédominante au travail en 2021 et que les
personnes qui allaient étudier au Québec, avant d'y obtenir la résidence
permanente, étaient moins susceptibles que les autres immigrants d'utiliser
principalement le français au travail, et j'inclus là-dedans les réfugiés et
les demandeurs d'asile.
Pour terminer sur ce sujet, je peux
mentionner aussi l'étude que nous avons rendue publique la semaine dernière,
qui confirme l'existence d'un lien fort entre la langue des études
postsecondaires et la langue de travail, même lorsque nous tenons compte des
caractéristiques linguistiques des diplômés, de leur langue de scolarisation au
primaire et au secondaire, de leur origine géolinguistique et de leur domaine d'emploi.
L'article 3 du projet de loi n° 74 donne au gouvernement la possibilité de prendre une
décision relative à la réception et au traitement des demandes présentées à
titre d'étudiants étrangers. Alors, nous accueillons favorablement cette
disposition. En effet, ces dernières années, la croissance rapide du nombre d'étudiants
étrangers a entraîné des répercussions parfois non désirées sur la société d'accueil
et sur les étudiants eux-mêmes. Pour cette raison, nous considérons essentiel
un meilleur encadrement de leur admission.
L'article 3 établit aussi des
facteurs que la décision gouvernementale doit prendre en compte. Nous
constatons que, parmi ces facteurs, la situation linguistique particulière du
Québec n'est pas mentionnée. Cette absence nous préoccupe à la lumière de la
situation défavorable du français parmi les étudiants et les diplômés
étrangers, de même qu'en raison du poids de ces groupes dans l'immigration
temporaire et permanente. Par conséquent, nous recommandons de mentionner de
manière explicite, parmi les facteurs considérés à l'article 3, le
français et son rôle comme langue commune de la nation québécoise.
Parmi les facteurs évoqués à l'article 3
du projet de loi, nous trouvons aussi le besoin de favoriser une diversité de
provenance des demandes de sélection. Nous reconnaissons qu'une telle diversité
peut enrichir l'expérience étudiante. Toutefois, elle demeure difficile à
mesurer. Donc, par exemple, les étudiants africains ou asiatiques sont loin de
former un tout homogène. Par ailleurs, la diversité de provenance des étudiants
étrangers ne semble pas un enjeu particulier dans le contexte québécois. Dans
les universités, par exemple, si on fait abstraction du cas des étudiants
français, qui représentent 29 % des étudiants, il n'y a aucun pays qui
représente plus que 8 % des effectifs. Alors, je compare cette situation
avec celle qu'on observe ailleurs au Canada, où 51 % des effectifs
viennent de deux pays, à savoir la Chine et l'Inde où il y a un problème de diversité.
Alors, plutôt que de chercher à accroître
la diversité de provenance des demandes de sélection, nous proposons plutôt de
viser une meilleure répartition des étudiants étrangers entre les
établissements, entre les ordres d'enseignement et entre les régions. Une
meilleure répartition permettrait à tous les étudiants du Québec de s'enrichir
au contact des étudiants étrangers. De plus, elle faciliterait la création de
réseaux de socialisation en français, notamment dans les régions et des
établissements où les étudiants étrangers sont aujourd'hui les moins nombreux.
Alors, la recommandation n° 2
est de recommander de remplacer, à l'article 3, le facteur relatif à la
diversité de provenance des demandes de sélection par un facteur relatif à une
répartition équilibrée entre les établissements, les ordres d'enseignement et
les régions.
Je passe au point suivant. Les articles 10,
11, 12 et 13 du projet de loi n° 74 donnent au
ministre de l'Éducation et au ministre de l'Enseignement supérieur le pouvoir
de recueillir auprès des établissements des renseignements qui permettront de
documenter l'admission et les inscriptions des étudiants étrangers. Alors, pour
nous, ce sont des dispositions qui sont essentielles. Actuellement, l'information
au sujet des étudiants étrangers est répartie entre les universités, le
ministère de l'Immigration et IRCC. Alors, pour cette raison, nous sommes
incapables de suivre le cheminement des étudiants à partir de leur demande d'admission
jusqu'à l'obtention de leur permis d'études et jusqu'à leur inscription dans l'établissement.
Selon...
M. Dubreuil (Benoît) : ...Statistique
Canada, en 2019, le quart des titulaires d'un permis d'études postsecondaires
au Canada n'étaient pas inscrits dans un établissement d'enseignement
postsecondaire reconnu. Dans la moitié des cas, nous ignorions même si les gens
étaient présents ou non sur le territoire, et, si oui, à quel titre.
Selon IRCC, au 31 décembre 2023,
il y avait 95 000, environ, permis d'études de niveau postsecondaire en
vigueur au Québec. Or, durant l'année scolaire, on comptait 71 000
étudiants étrangers dans les collèges et universités, soit un écart de
25 %. Je pense qu'un meilleur partage d'information permettrait peut-être
de réduire cet écart et de s'assurer que les personnes admises comme étudiantes
sont véritablement au Québec et sont véritablement aux études.
La croissance du nombre d'étudiants
étrangers au cours de la dernière décennie découle, en partie, je l'ai dit, des
décisions qui ont facilité l'accès au marché du travail et à la résidence
permanente pour les diplômés québécois et canadiens. Or, l'absence de
planification de cette croissance a entraîné des difficultés diverses. Par
exemple, les changements successifs au Programme de l'expérience québécoise ont
causé une incertitude parmi les candidats à l'immigration, puis une explosion
du nombre de titulaires d'un permis de travail postdiplôme. En outre,
l'admission à l'immigration permanente de plusieurs personnes qui ne
connaissaient pas le français ou qui avaient adopté l'anglais comme langue
habituelle de communication a accru la pression sur le français dans plusieurs
secteurs du marché du travail. Nous recommandons donc d'arrimer clairement et
explicitement les décisions gouvernementales concernant l'admission des
étudiants étrangers avec la planification pluriannuelle de l'immigration.
L'article 7, finalement, du projet de loi
permettrait au gouvernement de se soustraire à l'obligation de publier au
préalable, dans la Gazette officielle du Québec, les projets de
règlements concernant les articles 9 et 10 de la Loi sur l'immigration. Alors,
nous pensons que cette disposition priverait les parties intéressées de la
possibilité de soumettre des commentaires sur les projets de règlement en
question. Or, les décisions prises par règlement concernant les programmes
d'immigration — et je pense, notamment, aux critères visant la
connaissance du français — constituent des cadres normatifs cruciaux
au regard de mon mandat. Par conséquent, nous recommandons de réévaluer
l'article 7 du projet de loi, modifiant l'article 104 de la Loi sur
l'immigration, et qui propose de soustraire ces projets de règlement de
l'obligation de publication au préalable à la Gazette officielle du Québec,
comme le prévoit la Loi sur les règlements.
Alors, j'en arrive à ma conclusion, en
disant que nous accueillons favorablement le projet de loi qui nous est
présenté, qui donnera au gouvernement, s'il est adopté, des outils pour mieux
encadrer l'admission des étudiants étrangers, et nous espérons qu'en
définissant un cadre clair pour l'ensemble des acteurs nous éviterons de
reproduire les problèmes vécus ces dernières années. En effet, à la lumière des
données disponibles, des changements importants demeurent nécessaires pour que
l'accueil et l'intégration des étudiants étrangers contribuent pleinement à la
pérennité du français. Alors, nous croyons que les modifications que nous
proposons au projet de loi favoriseront la mise en œuvre de ces changements. Je
vous remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le commissaire. Alors, merci de votre
exposé. Elles ouvrent... cet exposé ouvre la porte à des discussions, que nous
allons entamer à l'instant. Alors, Mmes et MM. les élus, je vous donne vos
temps de parole. M. le ministre et votre banquette, vous avez
16 min 30 s. L'opposition officielle, vous aurez
9 min 54 s. Deuxième opposition, 3 min 18 s. Et
M. le député, 3 min 18 s. Alors, on va commencer avec vous, M.
le ministre. La parole est à vous.
M. Roberge : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci, M. le commissaire, pour ce rappel et puis pour tous
les chiffres apportés, qui sont éclairants à notre réflexion. Tout à l'heure,
j'ai entendu quelqu'un des oppositions qui a dit : Il ne fallait... il ne
fallait pas un projet de loi, il fallait donner des cibles, il fallait donner
des chiffres. Je pense, au contraire, qu'il faut avoir une... un état de
situation actuel qui soit très chiffré, qu'on ait beaucoup de données
démographiques, linguistiques, donc démolinguistiques pour après ça, se doter
de nouveaux leviers législatifs, pour, après ça, se donner des cibles, et
changer le cours des choses, inverser le déclin de la langue française, qui,
malheureusement, en ce moment, nous frappe.
• (10 h 10) •
Vous vous intéressez beaucoup à l'article
3 du... du projet de loi. Je le comprends très bien, parce que je pense qu'on
est au cœur du projet de loi quand on est dans l'article 3 parce que ça dit sur
quoi le gouvernement pourrait agir, alors qu'en ce moment il... il ne peut pas
agir avec... avec doigté. Vous nous parlez d'une meilleure répartition entre
établissements et régions. En 2023, presque 59 % des étudiants étrangers
étaient dans la...
M. Roberge : ...région de
Montréal. Pour vous, ça représente un problème, qu'il y ait autant d'étudiants
étrangers qui soient dans la région Montréal? Vous souhaiteriez une répartition
plus grande, pas tellement entre les établissements, mais entre les régions.
Est-ce que c'est ce que je comprends?
M. Dubreuil (Benoît) : Est-ce
qu'il y a trop d'étudiants étrangers à Montréal? C'est une bonne question.
Objectivement, je n'en suis pas absolument convaincu. On comprend
qu'actuellement on a un problème d'une croissance très, très, très rapide de la
population qu'on veut freiner parce qu'on voit que l'accumulation de capital ne
suit pas l'augmentation de la croissance de la main-d'œuvre. Est-ce qu'en
dehors de ça, dans le point de vue absolu, il y a vraiment trop d'étudiants
étrangers à Montréal? C'est une bonne question. Je pense que la question, elle
doit se poser en lien avec les visées à long terme sur l'immigration,
particulièrement en lien avec le PEQ, particulièrement en lien avec la
planification pluriannuelle. C'est pour ça, pour moi, le lien doit se faire.
Parce que, si on a des établissements d'enseignement qui embauchent des agents
recruteurs qui vont partout dans les pays en développement et dans les pays
émergents et qui disent aux élèves : Venez chez nous et non seulement vous
allez pouvoir travailler pendant vos études, vous allez pouvoir travailler
après vos études et vous allez avoir un chemin vers la résidence permanente,
alors, si on laisse des agents recruteurs dire cela, bien, il faut qu'on
s'assure qu'après c'est vrai. Donc, c'est pour ça qu'il faut une planification
intégrée avec un volume général d'étudiants étrangers qui est compatible avec
le nombre de personnes qu'on veut admettre ensuite, soit au PEQ, soit dans les
autres programmes d'immigration, économique, et autres. Donc, il faut vraiment
avoir un point de vue global.
Une fois qu'on a dit ça, dans l'absolu des
choses, est-ce qu'il y a trop d'étudiants étrangers à Montréal? Je n'en suis
pas convaincu. Est-ce qu'il y a un moment où, dans un établissement
d'enseignement, le nombre d'étudiants étrangers devient trop élevé? Moi, ma
préférence, c'est d'éviter d'avoir des établissements dont la mission devient
de plus en plus concentrée sur le fait de desservir une population étrangère,
et de s'assurer qu'il y a une meilleure répartition. Parce que, je pense que la
richesse des étudiants étrangers, on peut la vivre lorsqu'il y a un contact
interculturel qui se vit entre les étudiants québécois et les étudiants
étrangers.
D'où l'intérêt de la répartition. Et
là-dessus, je sais que c'est un thème qui intéresse beaucoup de parties
prenantes, c'est clair qu'en région il n'y a pas trop d'étudiants étrangers.
Peut-être qu'il manque de logements, mais, si vous avez un cégep de
2 000 étudiants ou 3 000 étudiants, qu'il y a 50 ou il y a
100 étudiants étrangers, c'est sûr qu'il n'y en a pas trop. Là, il y a une
question, peut-être, de croissance de la population avec un marché de
l'immobilier qui ne s'ajuste pas. Donc, ça, c'est un autre problème qui n'est
pas un problème pour le français. Mais moi, si vous avez des cégeps, par
exemple, qui vont avoir une cohorte de 15 étudiants, qui vont aller
chercher, par exemple, dans un milieu francophone, trois ou quatre étudiants
d'Afrique francophone, qui vont venir compléter leur cohorte, avec une structure
de coûts avantageuse, puis il va y avoir un contact interculturel, il n'y a pas
d'enjeu, s'il y a du logement.
M. Roberge : Merci. Oui, on
se rejoint, parce qu'on parle d'un projet de loi qui vient nous permettre de
jouer sur le nombre total d'étudiants étrangers sur le territoire québécois.
Mais c'est beaucoup plus juste que ça. C'est... On vient parler d'un projet de
loi qui nous permet d'agir sur plusieurs leviers, sur plusieurs critères. Vous
parliez de régionalisation, vous avez parlé de langue française, vous avez
parlé, d'une certaine manière, de mixité. Puis oui, on s'occupe d'immigration,
mais on s'occupe aussi de langue française puis on s'occupe aussi
d'intégration, hein? Le ministère Immigration, Francisation, Intégration. Puis
l'intégration est beaucoup plus possible quand il y a des interactions de
multiculturalisme... nous dirait : Chacun chez soi puis célébrons nos
différences et surtout conservons-les, tandis qu'on est plus dans une démarche
de vivre-ensemble, de cohésion sociale. C'est plus facile lorsque les gens
s'éloignent un peu de Montréal. Ceci, ça ne veut pas dire qu'il n'y aura... il
ne faut plus d'étudiants étrangers sur l'île de Montréal, on a une
concentration de grandes universités, évidemment, puis on a l'attraction.
Si je reviens... Je vous ai parlé un peu
de répartition régionale. Je reviens aussi sur l'article trois. Vous nous dites
qu'il faudrait inscrire «nommément le critère de la langue» parce que c'est
écrit «notamment», ce qui ouvre la porte. Mais le terme «langue» ou «langue
française» ou «critère linguistique» n'est pas là. Vous souhaiteriez le voir
dans l'article trois. Est-ce que vous... Est-ce que c'est bien ça? Puis est-ce
que vous avez un libellé à suggérer, que... Pouvez-vous? J'aimerais ça vous
entendre là-dessus.
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
On n'était pas nécessairement sur le libellé précis mais notre recommandation
pointe peut-être vers une formulation. Et, pour moi, je suis conscient qu'il y
a le libellé «capacité d'accueil» qui peut recouper plein de choses, mais pour
moi, c'est important de mentionner «la langue française» pour la raison très
simple que jusqu'à présent, si je regarde l'expérience...
M. Dubreuil (Benoît) : ...des
15 dernières années, on n'y est pas arrivé. C'est-à-dire qu'on a accueilli
plein de gens qui ont eu des belles carrières, qui ont eu un apport à la
société, mais, globalement, pour le français, le français ne sort pas assez
fort. Si c'étaient de très petits nombres puis on était juste chez les
doctorants, ou quelque chose comme ça, ce serait moins... ce ne serait pas
dramatique, mais là on est quand même sur des nombres assez élevés, comme je le
disais, environ le tiers de l'immigration temporaire qui a un lien avec les
études.
Donc, la raison pour laquelle on propose
de le mentionner explicitement, c'est que, dans les données que l'on a, basées
sur l'expérience des 15 dernières années, on n'a pas les bons chiffres. On
n'atteint pas le niveau qui est nécessaire pour maintenir la prédominance du
français au Québec et à Montréal.
M. Roberge : Et quel est,
selon vous, ce niveau à atteindre, cette cible?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
moi... Oui, bien, l'année dernière, moi, quand j'étais allé en commission
parlementaire sur la planification pluriannuelle, j'avais proposé une espèce de
répartition 95-15 d'utilisation du français par rapport à l'anglais. Je pense
que c'est un peu le genre d'équilibre qui, politiquement, pourrait être
acceptable pour l'ensemble des composantes de la société québécoise.
Il n'y a pas de manière objective de
déterminer ça. On est dans une société qui est plurielle, où les intérêts des
gens ne sont pas toujours alignés, où les gens n'ont pas les mêmes préférences
sur le plan linguistique. Donc, pour moi, l'idée, c'est vraiment de réussir à
créer une sorte de consensus, une sorte de juste milieu. En ce moment, je pense
qu'on ne l'a pas, on voit le français qui recule. Et comme... Vous avez vu les
études que j'ai publiées la semaine dernière, les endroits où le français
recule le plus, c'est chez les diplômés universitaires, dans la région de
Montréal, précisément. Donc, il faut recadrer pour ramener les aiguilles un peu
de l'autre côté. Il n'y a pas de réponse parfaite, je pense que ça reste un
compromis politique entre les grandes forces qui partagent la société
québécoise.
Et moi, j'avais proposé de se donner une
cible qui était quantitative parce que je pense qu'à partir du moment où on a
une cible puis qu'on s'entend tous dessus, ça vient dépolitiser aussi l'enjeu,
ça vient dédramatiser l'enjeu, puis on est capables de créer une plus grande
cohésion sociale dans une société qui est divisée sur cette question et qui le
restera probablement pour assez longtemps.
M. Roberge : Il me reste
combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 7min 45s.
M. Roberge : Parfait. Vous me
parlez de la langue française. Tantôt, on parlait de Montréal et les régions.
Là, on parle de la caractéristique de la langue. Il y a la question d'étudiants
francophones, étudiants étrangers francophones qui arrivent ici, qui étudient
dans des établissements francophones. Il y a des étudiants francophones qui
étudient dans des établissements anglophones. Si on se dotait de cibles, est-ce
qu'il faudrait y aller par la langue parlée des gens? On accueille un
pourcentage x, on va dire 80 % ou 90 % d'étudiants, par exemple, qui
maîtrisent la langue française, ou plutôt par institution, par programme?
Est-ce qu'on doit avoir 80, 90 % d'étudiants qui vont dans des programmes
de langue française? Est-ce qu'on fait une distinction? C'est-à-dire, si un
francophone va dans une institution anglophone, est-ce qu'on le compte ou on ne
le compte pas? Je veux dire... Là-dessus.
M. Dubreuil (Benoît) : C'est
une excellente question parce que tout est possible, tout est possible. Si vous
avez vu les études, encore une fois, que j'ai publiées la semaine dernière, on
voit des francophones qui étudient dans des établissements anglophones. Ils
sont moins susceptibles de travailler en français, mais ils sont encore
beaucoup plus susceptibles de travailler en anglais que des étudiants, par
exemple, qui vont venir de pays plutôt anglophones qui vont étudier en anglais.
Donc, c'est peut-être un moindre mal, à certains égards, mais ça doit faire
partie d'un compromis plus large.
Pour moi, ce qui est important, en bout de
ligne, ce sont les résultats, les résultats sur l'utilisation du français en
public, les résultats sur l'utilisation du français au travail et les résultats
aussi sur la culture, d'amener les gens à être exposés aussi à une culture
francophone, d'amener les gens à être exposés à une culture québécoise. Si on
voit qu'on atteint des résultats par rapport à ces indicateurs-là, je pense
qu'ensuite, dans les manières de le faire, il y a plusieurs façons.
• (10 h 20) •
Moi, je serais favorable à une répartition
des places ou des permis qui viendrait poser un certain nombre de grandes
balises entre les établissements francophones, entre les établissements
anglophones, entre Montréal et les régions, qui fonctionneraient avec une
planification à long terme de l'immigration et qui pourraient faire l'objet
d'ajustement si on voit que les résultats ne sont pas au rendez-vous. Et je
suis conscient aussi... je vais avoir un petit mot aussi pour tous les
représentants d'établissements d'enseignement supérieur qui vont passer après
moi, eux, ils ont des organisations à gérer, ils ont besoin de prévisibilité.
C'est sûr qu'idéalement, dans leur monde parfait, ces dirigeants peuvent toujours
être dans un contexte d'expansion, puis de grossir, et de grossir, et de
grossir. C'est le fun, quand on dirige une organisation, de créer des nouvelles
choses, et tout ça, mais je pense que ce dont les gens ont surtout besoin,
c'est de prévisibilité...
M. Dubreuil (Benoît) : ...donc,
même s'il y a un réaménagement qui doit se faire ou certains rééquilibrages, je
pense qu'on peut leur donner du temps, se donner une cible, se permettre de
bouger progressivement dans une direction pour que les gens puissent arranger
leurs affaires à l'intérieur de l'établissement.
J'éviterais aussi, je ne pense pas que ce
soit nécessaire, d'avoir une espèce de microgestion aussi trop avancée des
places. Les institutions d'enseignement sont autonomes, il faut fixer les
paramètres et les institutions d'établissement sont spécialistes, eux, pour
optimiser à l'intérieur des paramètres.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, la parole à la députée de Vimont. Oui, il vous reste
4 min 23 s.
Mme Schmaltz : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci d'être là, c'est toujours apprécié de vous
avoir en présentiel. Vous avez mentionné... Tantôt, dans votre exposé, vous
recommandez que l'on définisse davantage le français et son rôle. Vous l'avez
mentionné au tout début, là, de l'exposé. J'aimerais savoir les leviers. Quels
leviers vous envisagez pour qu'on puisse favoriser davantage la connaissance
justement du français auprès des étudiants étrangers?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
Mme Schmaltz : Si on
définit... si vous avez une définition, le rôle, là, que vous voyez, c'est
lequel?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
en fait, pour l'instant, ce dont... ce dont on parle plus précisément, c'est il
y a une liste de critères que le gouvernement devra... dont le gouvernement
devra tenir compte au moment de prendre sa décision de répartition ou de
plafonnement. Et l'idée, c'est que tous les gouvernements qui vont suivre
seront engagés à tenir compte de l'impact de leurs décisions sur la situation du
français. Donc, moi, c'est vraiment une recommandation en lien avec ce projet
de loi, de manière précise.
Cela dit, de manière plus large, pour
favoriser l'apprentissage et l'utilisation du français, on connaît quand même
quels sont les critères sur lesquels on peut jouer. C'est sûr que le fait de
connaître le français à l'arrivée, c'est extrêmement déterminant. Le fait
d'étudier en français, plus on reste longtemps à étudier en français, plus ça
augmente la probabilité de l'utiliser par la suite. Et comme il y aura
toujours, au Québec, une partie des... des gens qui vont venir étudier ou
vivre, qui vont être plutôt anglophones, mais avec ce groupe-là, qui va
toujours être le bienvenu, bien, il faut s'assurer justement d'avoir un
enseignement du français, pas dans l'espoir de les amener à utiliser le
français de manière... Ce n'est pas eux qui vont pousser pour utiliser le
français, O.K.? Mais il faut quand même leur donner des outils pour être
capables d'interagir dans la plupart des situations habituelles. Donc, pour
moi, il y a vraiment un équilibre qui est possible à partir du moment où on se
donne les bons paramètres puis qu'on fait évoluer la situation dans le bon
sens.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Alors, la députée d'Iberville a une question, puis
il reste encore 2 min de 18 s.
Mme Bogemans : Merci. Vous
parliez de mixité d'étudiants puis que déjà, au Québec, on était favorisés dans
une position enviable au niveau de cette mixité-là? Ce serait quoi concrètement
la place que vous feriez pour les étudiants étrangers francophones puis comment
bien les intégrer justement dans ce concept-là?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui,
c'est sûr qu'idéalement on veut avoir une bonne répartition. J'y reviens parce
que si on a des collèges et on le sait, ça arrive, on sait que ça existe. Il y
a eu l'épisode avec les étudiants originaires de l'Inde qui ont... le nombre
explosé en 2019-2020. Puis aujourd'hui, on le sait, il y a des collèges privés
non subventionnés dont le... qui reçoivent un nombre de permis d'études qui est
très, très, très élevé, des collèges que vous ne connaissez probablement pas,
dont vous ne savez probablement pas entendu parler. Et là, il y a des
centaines, des centaines de permis d'études qui sont délivrés. Et là on a des
gens qui ne vont pas être en contact avec des Québécois qui habitent ici. Ça va
être... c'est des collèges qui se spécialisent justement pour accueillir des
gens... pour accueillir des gens qui veulent essentiellement obtenir la
résidence permanente rapidement.
Donc, pour moi, la meilleure manière, ça
reste de distribuer les étudiants étrangers de la meilleure manière possible,
idéalement dans des environnements francophones. Quand vous avez une personne
immigrante qui arrive au Québec, qui parle déjà français, qui vient ici dans le
but de vivre en français et qui se retrouve dans un environnement social où
c'est le français, la langue habituelle, ça fonctionne. Il n'y a pas d'enjeu.
Puis il va y avoir une rencontre interculturelle où chacun va être confronté
dans ses valeurs, puis chacun va apprendre, chacun va grandir, puis il va avoir
une nouvelle culture qui va émerger de ça. Donc, c'est ça qu'on veut favoriser.
Et moi, je pense qu'il y a beaucoup d'établissements, au Québec, qui offrent ce
type de contextes d'intégration.
Mme Bogemans : Mais
concrètement, comment vous feriez ça? Vous suggérez une bonne répartition.
Est-ce que ça serait en fait une suggestion ou on impose? Parce qu.en fait ça
peut imposer un choix d'étudiants ou une mixité imposée par les établissements
ou, au contraire, même imposer un choix à l'étudiant qui décide de venir ici.
Donc, comment on fait ça?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 15 secondes.
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
il y a plusieurs... il y a plusieurs...
Mme Bogemans : Oh!
M. Dubreuil (Benoît) : Pour
moi, le 10 secondes? Il y a plusieurs mécanismes qui sont possibles. Je
pense qu'il va y avoir une deuxième discussion à avoir après l'adoption de ce
projet de loi par rapport à la mise en œuvre, justement, de cette décision
qu'on...
M. Dubreuil (Benoît) : ...complexe
qu'on va confier au gouvernement.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, la période impartie au gouvernement
est terminée. Je me tourne du côté de l'opposition officielle, et vous avez
9 min 54 s, M. le député.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. le commissaire, Mme la commissaire adjointe, Me Simoneau
et M. Batiatino, merci d'être avec nous aujourd'hui, merci de participer aux
travaux de la commission et merci pour le mémoire que vous avez déposé, c'est
très apprécié. J'ai quelques questions, et ma collègue la députée de
Mont-Royal-Outremont aura aussi quelques questions pour vous, M. le
commissaire.
Il est certain, c'est indéniable, le
français, c'est hyperimportant, c'est notre langue commune, c'est clair.
Cependant, si j'ai bien compris, et corrigez-moi si je fais erreur, dans votre
mémoire et dans les informations que vous avez partagées avec nous ce matin,
j'ai cru comprendre — en fait, c'est ma perception — qu'il
y a plusieurs étudiants étrangers, peut-être, qui auraient un impact sur la
vitalité de la langue française au Québec. Est-ce que je vous ai bien compris,
ou si ce n'est pas du tout le cas, puis au fond le nombre d'étudiants étrangers
n'a pas vraiment d'impact sur la vitalité de la langue française?
M. Dubreuil (Benoît) : Ce
n'est jamais les individus, hein. Un individu, par lui-même, ne peut jamais
avoir un impact sur une situation linguistique. C'est toujours la composition
globale, le nombre, comment ça transforme les milieux de travail, comment ça
transforme les contextes... l'interaction? C'est comme avec les voitures. Quand
on prend sa voiture, on n'a jamais d'impact sur l'environnement, c'est quand on
est 100 000 et 200 000 à la prendre en même temps que ça paraît.
Donc, moi, ce que je fais valoir,
c'est : quand on a 600 000 résidents non permanents au Québec — je
l'avais mentionné dans mon rapport de février — il y a des conséquences
sur le français, parce qu'il y a une très grande proportion de ces gens qui ont
plutôt adopté l'anglais... qui vont plutôt adopter l'anglais. Et, quand on
regarde les différents groupes, bien, ce n'est pas compliqué, c'est demandeurs
d'asile, c'est titulaires de permis de travail puis c'est tous les gens qui
sont associés de près ou de loin aux études. Ce dernier groupe est celui qui a
tendance à utiliser l'anglais le plus, et c'est là à mon avis qu'il y a un
correctif à apporter. Il y a un correctif aussi à apporter, je pense, avec les
demandeurs d'asile puis aussi avec les travailleurs étrangers temporaires.
Mais oui, tout ça, évidemment, ça a un
impact sur le français. Mais ce n'est jamais les individus, c'est toujours la
composition finale de comment ça affecte les structures démographiques.
M. Morin : Merci, merci pour
la précision, sauf qu'ici, dans le cadre du projet de loi, on parle
véritablement des étudiants étrangers. Donc, ce n'est pas l'ensemble de
l'immigration qui est visée, puis ça, je pense que c'est important de le
souligner.
Bon. Évidemment, on a tous des chiffres.
Ici, par exemple, j'ai des chiffres du Bureau de coopération interuniversitaire
qui nous disent que les étudiants internationaux... par établissement, là, on a
la liste, mais pour l'ensemble du réseau c'est 57 450. Et je voulais
discuter avec vous là-dessus, parce que j'ai lu les mémoires, et, dans les
mémoires... dans le mémoire publié par l'Université du Québec, on souligne
clairement que les personnes étudiantes à l'international contribuent à la
vitalité de la langue française et que 40 % de ces étudiants-là
proviennent de l'Afrique subsaharienne, 29 % de l'Europe.
Donc, au fond, il semblerait qu'il y a
quand même un apport important d'étudiants étrangers qui contribuent à la
vitalité de la langue française. Est-ce que vous pouvez nous en dire davantage
là-dessus?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
il y a deux points, puis je pense que vous allez le voir dans les consultations
aujourd'hui. Le nombre de personnes qui sont inscrites dans des universités et
des collèges, ce n'est pas si élevé que ça, on parle de peut-être 72 000
l'année dernière, mais il y a plus de 100 000 permis d'études. Donc,
il y a des gens qui ne sont pas là ou qui sont... On ne sait pas ils sont où,
en fait.
Puis en plus, bien, il y a les permis
post-diplôme, parce que les permis post-diplôme aussi, ça, c'est une catégorie
importante. C'est sûr que, du point de vue de l'établissement, quand la
personne complète ses études, s'en va sur un permis post-diplôme,
l'établissement se dit : Bien oui, mais ce n'est plus un étudiant
étranger, ce n'est plus chez nous. Certes, mais quand vous l'avez recruté,
quand votre agent recruteur est allé convaincre la personne de venir au Canada,
avoir le permis post-diplôme, ça faisait partie du produit que vous avez mis
sur la table. Donc, il faut voir ça vraiment comme un tout.
• (10 h 30) •
Mais je pense qu'il y a quand même une
avenue où on peut réduire le nombre de personnes qui sont liées aux études tout
en maintenant un gros bloc d'étudiants étrangers, il faut travailler sur le
post-diplôme. Le ministre Miller, à Ottawa, a déjà fait des annonces par
rapport aux conjoints qui vont faire diminuer de façon importante...
10 h 30 (version non révisée)
M. Dubreuil (Benoît) : ...importante
leur nombre, et ensuite, bien, il y a cet écart-là d'au moins 20 000, 25 000
personnes qui ont des permis d'études... ils se sont présentés sur le
territoire, et dont on ne sait pas ce qu'ils sont devenus.
Par rapport au français. Alors, moi, ce
que je note, c'est que, depuis l'année dernière... Vous savez, on a eu toute la
discussion par rapport aux permis d'études pour les étudiants africains avec le
gouvernement fédéral, qui avait les pieds sur les freins. Donc, ça, ce
problème-là semble avoir été résolu, ce qui a permis aux établissements
francophones, particulièrement en région, de connaître une croissance
importante de leur nombre d'étudiants étrangers. Donc, pour moi, ça, c'est un
développement qui est quand même favorable. Je pense qu'il faut que ces
établissements-là... Parce qu'il y a des établissements qui ne sont pas
habitués à accueillir des étudiants étrangers. Je sais que, des fois, c'est
difficile aussi de sélectionner les bonnes personnes qui vont avoir la capacité
de réussir, qui vont vraiment être prêtes pour faire leur programme, mais je
pense que ça peut nous aider à trouver un meilleur équilibre linguistique.
Parce que, traditionnellement, le problème, il était simple, c'est qu'évidemment,
à l'échelle internationale, l'anglais est juste beaucoup plus puissant que le
français. Donc, si on n'a pas pas de filtre et on dit : Bien, c'est la
compétition, puis tout le monde compétition avec tout le monde, c'est sûr que l'anglais
va sortir plus fort. Donc, il faut appliquer une politique, un filtre, s'assurer
qu'on a des résultats qui sont équitables.
M. Morin : Et, pour ce
faire... parce que vous avez utilisé le mot «prévisibilité», et j'en suis. D'ailleurs,
comme porte-parole de l'opposition officielle, j'ai suggéré au gouvernement de
créer le bureau intégré de la planification, pour qu'on soit justement capables
de planifier, et donc, pour moi, ça m'apparaissait essentiel. On a demandé au
gouvernement de tenir compte des travailleurs temporaires. Heureusement, ils
ont retenu notre suggestion très récemment, mais on le demandait depuis
longtemps. Donc... Et là on arrive avec un projet de loi qui donne un pouvoir
réglementaire important au gouvernement, avec la possibilité de ne pas avoir de
prépublication de ces règlements-là, vous l'avez souligné dans votre mémoire.
Moi, la façon dont je le reçois, c'est que ça ne va pas beaucoup aider pour la
prévisibilité. Avez-vous des recommandations au gouvernement là-dessus? Parce
que, quand on dépose des projets de loi comme ça ou si des règlements sont
adoptés, il faut quand même que des établissements d'enseignement soient
capables de réagir adéquatement. Donc, vos suggestions sont les bienvenues.
M. Dubreuil (Benoît) : C'est
absolument essentiel. Moi, je... D'un côté, je pense que ce n'est pas aux
établissements d'enseignement de gérer les politiques d'immigration, mais, de l'autre,
je pense que les établissements d'enseignement ont le droit d'avoir un
environnement qui est prévisible. Moi, la lecture du projet de loi, je ne
voyais pas tout à fait clairement quel était l'arrimage qui était proposé entre
l'immigration temporaire, l'immigration permanente. Donc, je sais, c'est un
sujet, là, qui revient quand même beaucoup, qui a été discuté aussi bien à
Ottawa qu'à Québec. Moi, c'est un point sur lequel, je pense, ça mériterait
quand même une certaine clarification. Je pense que, maintenant, il y a un
consensus assez large à l'effet que... Si on est pour avoir un système d'immigration
qui est en deux étapes, parce que c'est de ça dont on parle quand on parle de
PEQ ou quand on parle de permis de travail et tous, si on veut un système d'immigration
en deux étapes, il faut que ce soit très bien attaché. Parce qu'on induit dans
le marché du travail et dans les établissements d'enseignement supérieur toutes
sortes d'incitatifs qui vont amener les acteurs à faire toutes sortes de
choses. Donc, si on veut que ça donne des bons résultats, il faut que ce soit
attaché serré.
M. Morin : Je vais céder la
parole, si vous me permettez, à ma collègue la députée de Mont-Royal Outremont.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Il vous reste encore 1 min 40 s.
Mme Setlakwe : Merci. Merci
pour votre contribution. Évidemment, on a plusieurs objectifs à réconcilier
pour nos universités, pour notre recherche et innovation. La présence d'étudiants
étrangers est essentielle pour maintenir certains programmes pour nos régions.
J'aurais deux questions pour vous, il reste peu de temps. Mais est-ce que vous
considérez, donc, les universités, en particulier, comme des vecteurs d'intégration?
Est-ce que vous vous êtes penchés sur leurs efforts en termes de francisation,
leurs programmes, les outils qu'ils mettent à la disposition des étudiants,
sachant qu'ils font un effort au niveau de la francisation? Et j'ai évidemment
en tête de maintenir l'autonomie de nos établissements ici, dans le cadre de l'exercice
qu'on mène. Et, deuxièmement, vous avez mentionné, donc, l'importance de répartir
les étudiants étrangers partout dans les régions et vous ne souhaiteriez pas
que les établissements dirigent dorénavant leur mission vers... leur mission d'enseignement
vers les étudiants étrangers. Mais là on sait, c'est documenté dans des
mémoires, qu'il y a... il y a une baisse d'inscription des étudiants québécois,
dans le réseau de l'UQ notamment. Donc, comment réconcilier tout ça?
M. Dubreuil (Benoît) : Il y a
plusieurs choses dans votre question. C'est sûr que... C'est sûr que c'est un
avantage, autant de prendre le point sur la question de favoriser l'apprentissage,
l'apprentissage du français. C'est sûr qu'en général, dans les établissements
francophones, à l'extérieur du doctorat, qui est un cas particulier, il n'y a
pas d'enjeu d'intégration en français. Hein, je pense que l'enjeu, c'est plus
les collèges qui vont se spécialiser à...
M. Dubreuil (Benoît) : ...avoir
juste des étudiants étrangers, et là les gens ne seront pas en contact avec
d'autres... avec des Québécois. Donc là, il y a un enjeu d'intégration
culturelle. Ensuite, ça pose évidemment la question des établissements en...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...le temps imparti à l'opposition officielle est terminé,
mais il y a d'autres questions qui vont venir. Alors, je cède la parole au
député de Saint-Henri—Sainte-Anne pour 3 min 18 s.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci beaucoup, M. le commissaire, pour votre présentation.
Écoutez, vous en avez parlé, puis je veux revenir là dessus, parce qu'il n'y a
effectivement aucune mention de manière explicite du français dans ce projet de
loi là, ni de près ni de loin. En fait, quand on fait un contrôle f, là, la
seule fois où «français, francisation» arrivent, c'est dans le titre du
ministre, et à aucune place y a-t-il le poids linguistique, le poids
directement, explicitement cité. Puis le ministre nous dit : Il y a
notamment. Mais moi, M. le commissaire, je refuse que le français soit un
«notamment», je pense que le français doit avoir sa place explicite, directe.
Et je me comprends mal comment on a pu oublier le français dans le libellé
précis de ce qu'on vient modifier dans le projet de loi. Je fais un commentaire
là-dessus en commençant, je pose ma question ensuite.
Vous parlez d'arrimer clairement la
planification temporaire, la planification permanente. Les collègues en
parlaient. Tant mieux. Le gouvernement finit par dire oui. Parce que, là, on
est rendu à 123 000 étudiants étrangers et on voit dans les
sélections au PEQ, finalement, l'année dernière, 3 800 sélections
pour 123 000. Évidemment, les 123 000 ne sont pas tous finissants,
ils n'ont pas tous réussi leurs études encore, et là on voit qu'on va passer à
15 000 potentiels, ce qui force le ministre à suspendre le programme.
Alors que, toutes choses étant égales par ailleurs, si on monte à
123 000 étudiants étrangers, force est de constater qu'on va aussi
augmenter le nombre de gens qui se qualifient. Donc, est-ce que ce sont ce
genre de choses là que vous demandez à mieux planifier ou à mieux intégrer?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
je vous dirais qu'on a un problème qui est le suivant, si on avait juste des
gens qui viennent, qui étudient puis qui repartent, on pourrait en admettre
probablement beaucoup plus. Mais on le sait, la capacité d'attraction du Québec
et du Canada, elle vient du fait que les gens, dans plusieurs cas, pensent ou
savent qu'ils vont avoir un accès à la résidence permanente. Donc, on est dans
une espèce de paradoxe où, en principe, on pourrait avoir encore beaucoup plus
d'étudiants étrangers, mais il faut qu'on s'assure qu'on est prêt à admettre
les gens qui, trois, quatre, cinq, six ans plus tard, vont arriver au bout du
pipeline. Puis si on ne fait pas ça, bien, on manque... il y a des gens
évidemment qui vont être déçus. Puis on a eu ces épisodes-là qui se sont
déroulés, auxquels vous faites référence. Donc, c'est ce qu'il faut, c'est
l'équilibre qu'il faut trouver.
M. Cliche-Rivard : Si vous me
permettez, on se met à jouer un petit peu au chat et à la souris en modifiant
le PEQ, bon an mal an, là, c'est presque la sixième modification en six ans, en
contrôlant les admissions, en limitant finalement... en imposant un critère de
travail, la première liste du ministre à l'époque qui avait été retirée, les
deux réformes, finalement une autre réforme. Bref, on est toujours à courir
après notre queue, finalement, si on ne planifie pas en amont un seuil qui va
fonctionner dans notre immigration temporaire.
M. Dubreuil (Benoît) : Je
pense que c'est un phénomène qu'on voit aussi bien à l'échelle québécoise que
canadienne. C'est-à-dire que, depuis la fin des années 2000, là, au tournant de
2010, on s'est dit : On va créer un système d'immigration en deux étapes.
Il y avait toutes sortes de bonnes raisons de faire ça, puis moi-même, j'étais
d'accord avec ça. O.K.? Le problème, c'est que, là, on déclenche des chaînes
causales où il y a un effet qui se crée, puis là ça prend... il y a une cause
qui apparaît puis ça prend cinq ans à voir l'effet.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Dubreuil (Benoît) : Donc
là, je pense qu'on commence à avoir fait un peu le tour des relations de cause
à effet puis c'est un excellent moment, justement, pour bien attacher les
choses.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va terminer avec le député de
Jean-Talon pour une période de 3 min 18 s. Le temps est à vous.
M. Paradis : Vous écrivez, et
vous l'avez mentionné tout à l'heure, que l'absence de planification de la
croissance des étudiants étrangers a entraîné des difficultés diverses, dont
une incertitude parmi les candidats à l'immigration puis une explosion du
nombre de titulaires d'un permis de travail postdiplôme, ce dont on vient de
discuter. «En outre, l'admission à l'immigration permanente de plusieurs
personnes qui ne connaissent pas le français ou qui avaient adopté l'anglais
comme langue habituelle de communication a accru la pression sur le français
dans plusieurs milieux.» C'est ce que vous écrivez.
Est-ce que cette planification ou ce
défaut de planification que vous mentionnez ici lors des 10 dernières
années... est-ce qu'on a besoin d'un projet de loi pour régler ce problème de
planification? Est-ce qu'on pouvait planifier avec les outils qu'on avait avant
le projet de loi?
M. Dubreuil (Benoît) : Questions
posées par des avocats à quelqu'un qui ne l'est pas. Je ne suis pas certain
qu'on avait nécessairement besoin d'un projet de loi. Je pense que les
dispositions à la loi sur l'immigration permettent de considérer ces variables
dans l'immigration permanente, il me semble.
• (10 h 40) •
M. Paradis : Est-ce que, dans
le projet de loi qu'on a devant nous...
M. Paradis : ...nous, tel
qu'il est écrit, on voit des indices de cette planification et de cet arrimage
que vous... que vous appelez de vos vœux, entre l'immigration temporaire, les
étudiants étrangers, et l'immigration permanente. Est-ce que vous voyez, dans
ce projet de loi là, des indices d'où le gouvernement veut nous amener sur
cette planification?
M. Dubreuil (Benoît) : Je
pense qu'à l'article 3 il y a quand même un certain nombre de facteurs
qui... qui présentent, qui laissent entendre qu'il y aura une décision
structurée. Donc, moi, je vois ça de façon positive. À l'article 3, on
mentionne aussi de tenir compte des orientations, je crois, de la planification
pluriannuelle. Donc, je pense qu'il y a quelque chose, là. Cela dit, je pense
qu'à la lumière des développements de la dernière décennie ou des derniers 15
ans, je pense que ça vaut la peine, peut-être de structurer ça de manière plus
explicite pour être sûr qu'on repart sur de bonnes... de bonnes bases.
M. Paradis : Mais on
aurait pu agir.
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
écoutez, ça fait quand même plusieurs années, là, que l'immigration, on part
d'un extrême à l'autre. Dans toutes les provinces canadiennes ou au niveau
fédéral, je pense... Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure, c'est
qu'on déclenche des chaînes qui ont des conséquences qui sont inattendues, qui
apparaissent cinq ans plus tard. Il y a une succession de responsables, aux
commandes, qui sont confrontés à des situations qui, à chaque fois, sont
uniques. Donc là, je pense qu'on comprend un peu les conséquences de ce qu'on a
fait en créant un système d'immigration à deux étapes. Je pense qu'en ce moment
on a l'expertise qui nous permet justement de nous asseoir puis de développer
un système qui va être cohérent, qui va fonctionner pour le français, pour
l'économie puis pour les personnes immigrantes aussi, au premier chef.
M. Paradis : À la page 76
de votre analyse de la situation du français au Québec, il y a un tableau
extrêmement important qui démontre en gros que la langue des études, et
particulièrement la langue du dernier diplôme, a un impact déterminant sur
l'insertion professionnelle en français ou en anglais. Donc, vous dites, ça,
c'est important, notamment pour l'avenir de la langue française. Sans parler du
nombre, est-ce que vous considérez que la répartition actuellement des
étudiants étrangers est la bonne?
M. Dubreuil (Benoît) : Je
pense qu'on n'y est pas encore tout à fait, là. Je le mentionnais tout à
l'heure, il y a eu quand même une croissance des étudiants africains dans les
cégeps, dans les centres de formation professionnelle, dans les... qui aide un
peu, mais...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, c'est... Le temps imparti au candidat, pas
au candidat, je m'excuse, au député est terminé. Merci beaucoup. C'est ce qui
met fin à cette première audition. Merci, M. le commissaire, Mme la commissaire
adjointe et messieurs. Merci de cette présentation. Je vais suspendre les
travaux quelques instants, le temps que le prochain groupe s'installe. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 43)
(Reprise à 10 h 47)
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
À l'ordre, s'il vous plaît! La séance reprend ses travaux. Nous recevons
donc, pour l'heure, l'Université du Québec avec ses représentants, M. Alexandre
Cloutier, président, Mme Céline Poncelet de Rancourt, vice-présidente à
l'enseignement et à la recherche, M. François Deschênes, recteur de
l'Université du Québec à Rimouski, ainsi que M. Vincent Rousseau, recteur de
l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.
Bienvenue à la Commission des relations
avec les citoyens. Alors, vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes
pour votre exposé et, ensuite, on va procéder à une période d'échange avec les
élus. La parole est à vous.
M. Cloutier (Alexandre) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, salutations à vous, les députés, de même qu'à
tout le personnel qui vous accompagne. Il y a un peu plus de 55 ans,
maintenant, ici, à l'Assemblée nationale, les parlementaires se dotaient d'une
université nationale, l'Université du Québec. L'Université du Québec répondait
à l'époque à un besoin immense qui était celui de l'écart de la diplomation des
francophones, particulièrement dans les régions du Québec. Encore aujourd'hui,
l'Université du Québec accueille... un étudiant sur deux est un étudiant de
première génération, c'est-à-dire que ses parents ne sont pas allés à
l'université, et continue donc de répondre à cette mission sociale importante.
Mais mine de rien, l'Université du Québec, aujourd'hui, est établie dans 40
municipalités, plus de 2 milliards de budget annuel, 7500 professeurs et chargés
de cours, près de 100 000 étudiants, ce qui en fait l'université francophone la
plus importante en Amérique du Nord, et a plus d'étudiants que l'Université de
Toronto, juste pour mettre les choses en perspective.
Lors du dépôt du projet de loi du gouvernement
du Québec, nous avons levé la lumière jaune orange parce que nous avons des
inquiétudes, et les inquiétudes que nous avons sont essentiellement liées au
fait qu'on connaît mal encore les intentions du gouvernement du Québec quant à
la mise en œuvre du projet de loi. Et donc une de nos recommandations, c'est
que l'Université du Québec et le monde universitaire participent à la
conversation nationale sur les mesures à mettre en place. Aujourd'hui, c'est un
projet de loi de nature large et générale, et donc, pour nous, ça nous apparaît
être préoccupant qu'on donne un tel outil au gouvernement sans connaître
réellement les intentions qui sont derrière le projet de loi.
Je veux revenir un petit peu en arrière,
en 2018, parce que c'est à partir de 2018 qu'il y a eu une augmentation
importante des étudiants internationaux. Et, en 2018, il y a un choix qui a été
fait, qui est celui de la déréglementation des étudiants internationaux, qui a
un impact majeur sur le financement des universités et, en quelque sorte, une
forme de... une forme de débalancement des ressources, où il y a eu une
concentration importante du financement auprès de certaines institutions. Puis
cette déréglementation a été revue récemment, dans la nouvelle formule de
financement, mais tout simplement, je veux illustrer que la formule de
financement des universités, elle est directement liée, présentement, à la
présence des étudiants internationaux.
Alors, sur ce, Mme la Présidente, je vais
céder la parole à mon collègue le recteur de l'Université du Québec à Rimouski,
M. François Deschênes.
• (10 h 50) •
M. Deschênes (François) : Merci.
Bonjour, Mme la Présidente. Bonjour à tous et à toutes. Évidemment, la question
du financement, comme on vient de l'entendre, est liée au financement des...
M. Deschênes (François) : ...mais,
trop souvent, on a tendance à réduire cet impact à l'impact financier des
universités. Les étudiants internationaux sont importants pour l'ensemble de la
communauté, et ça, il faut se le rappeler. Si on regarde juste les dimensions
économiques, parlons de la réalité au sein de l'Université du Québec, les
étudiants internationaux, si on applique une méthode développée par l'Institut
de la statistique du Québec, on réalise, dans le fond, qu'ils contribuent à hauteur
de 157 millions de dollars au PIB actuel. Ça correspond aussi, en
termes de dépenses, parce qu'ils viennent et se logent, ils se vêtissent et
consomment, donc bref, c'est l'équivalent de 1716 emplois supplémentaires.
Encore une fois, j'insiste, on... il ne
faut pas associer uniquement les étudiants internationaux à... au monétaire.
Donc, c'est très important de voir aussi la contribution qu'ils ont au niveau
culturel et social, que ce soit à l'intérieur de nos campus ou dans la société
en général. Donc, si on décline ça. Tout d'abord, en termes d'impact, ce sont
des étudiants qui sont à plus de 50 % au sein du réseau de l'Université du
Québec aux cycles supérieurs. Donc, ce sont un moteur en termes de
développement de la connaissance, de développement des innovations actuelles et
futures. Il importe de ne pas l'oublier.
Également, ce sont des moteurs
d'animation, si... pour ceux et celles qui ont visité des campus récemment, ces
étudiants vivent réellement les campus et sont très présents, ils contribuent à
la dynamique culturelle sur les campus et sociale. Ils développent des
activités, ils s'impliquent dans des activités, ils contribuent à partager leur
culture avec leurs collègues. Donc, c'est un élément qui est très important
également. Quand on parle de vitalité sociale, économique, on le voit à
l'intérieur de nos murs, mais évidemment dans la communauté également. Ce que
je viens de décrire à notre échelle s'applique dans le milieu où ils habitent.
Certes, on a observé une croissance au
cours des dernières années en termes de nombre d'admissions, en termes de
nombre d'inscriptions. Avec cette croissance vient un certain nombre de
problèmes, mais ce qu'il faut bien comprendre, c'est que les universités ont
été très proactives. Elles ont assumé leurs responsabilités. Donc, d'ores et
déjà, plusieurs mesures ont été mises en œuvre. Si on identifie qu'en... le
sommet atteint était de 99 258 demandes d'admission en 2023, donc c'est
une hausse, oui, de 269 % par rapport à 2018. Mais déjà, il y a des mesures
qui ont été mises en place pour mieux cibler les étudiants, étudiantes
prometteurs, identifier de manière plus précoce les demandes aussi qui étaient
multiples. Il y en a qui font des demandes dans toutes les universités
lorsqu'ils veulent venir à tout prix, mais pas nécessairement pour les bonnes
raisons. On a aussi mis en place des mesures pour filtrer en termes de
contraintes additionnelles au niveau financier pour être sûr qu'ils ont la
capacité de payer leurs études, des filtres supplémentaires aussi en termes
d'exigences de maîtrise de la langue française. Donc, déjà, si on regarde les
données récentes, je vais parler pour l'UQAR, mais les autres universités
pourront en dire tout autant, nous, on observe déjà une baisse de 23,6 %
des nouvelles inscriptions. Et, si on regarde les demandes d'admission, on a
28 % de baisse de demandes d'admission par rapport à 2023, donc au
31 octobre dernier.
Également, toutes ces mesures sont prises,
mais sont faites avec les partenaires. Pensons à l'Agence des services
frontaliers, au MIFI. Donc, c'est très important. On ne travaille pas en vase
clos, on travaille avec les partenaires concernés. Autre élément qu'il est...
importe de mentionner, c'est que, si on regarde à l'échelle du Québec, à
l'heure actuelle, la population étudiante globale a eu une croissance de... est
à peu près stable, donc à peu près 3 % d'augmentation sur cette
période-là. Donc, si on regarde l'explosion, parce qu'elle est qualifiée ainsi,
des étudiants internationaux dans nos murs, bien, ça veut aussi dire que, si on
est à quasi-stabilité, c'est qu'il y a eu une diminution des étudiants, des
étudiantes québécois qui fréquentent l'université. Donc, ce qui veut dire que.
si on a une telle diminution et qu'elle n'est pas compensée, bien, à terme, ce
sont des employés, des diplômés de moins pour les diverses organisations sur
l'ensemble du territoire québécois. Donc, encore une fois, c'est un levier pour
la vitalité économique de nos régions et du Québec dans son ensemble.
Souvent, on pense au logement aussi, on
dit : Ça crée une pression indue. Bien, vous venez de voir l'adéquation
avec l'effectif étudiant. Donc, moi, j'invite à la prudence. Ce ne sont pas
tous les étudiants internationaux qui doivent être taxés de cette pression sur
le logement. Et d'ailleurs les universités sont au front. Déjà, prenons
Rimouski, on vient de doubler les résidences étudiantes pour la prochaine
année. Donc, je crois que c'est un problème qui est déjà en partie derrière
nous. Je cède maintenant la parole à mon collègue Rousson.
M. Rousson (Vincent) : Mme la
Présidente, nous sommes reconnus pour notre autonomie, notre liberté
universitaire, des conditions qui sont jugées essentielles dans
l'accomplissement de nos missions, dans nos universités, telles que définies dans
la Loi sur la liberté universitaire. Les universités, notamment de l'Université
du Québec, à travers cette autonomie, comme l'a mentionné mon collègue de
Rimouski, sont à pied d'œuvre depuis plus d'une année pour contrecarrer les
répercussions de la hausse des demandes d'admission et des demandeurs
d'asile...
M. Rousson (Vincent) : ...le
projet de loi n° 74 peut créer des contraintes importantes quant aux
solutions mises en place et qui fonctionnent et celles qui sont présentement en
développement dans nos établissements.
Il y a un autre élément dans le projet de
loi, qui concerne la répartition par programmes, qui pourrait venir nuire au
développement de certaines disciplines tout aussi importantes que celles qui
seraient priorisées. Une des forces de l'enseignement supérieur, bien, c'est de
former des étudiants dans un large éventail de domaines.
Et je nous donne comme exemple
l'intelligence artificielle qu'il y a de cela quelques années n'était pas une
priorité, mais qui aujourd'hui est une condition essentielle pour le
développement de notre société. Mais ce type de formation là est établi
depuis... depuis les années 80 dans nos universités, donc se travaille sur
du long terme. Je pense également aux travaux en psychologie sociale qui ont
été menés par un chercheur de l'UQAM Camil Bouchard qui a amené au rapport Le
Québec fou de ses enfants et qui a mené à la création des CPE, qu'on connaît
aujourd'hui.
Une priorisation de certains programmes
dans une éventuelle répartition nous fait craindre pour plusieurs programmes,
notamment ceux en sciences humaines et en sciences sociales, pourtant jugées
essentielles pour comprendre le monde en transformation dans lequel nous vivons
actuellement.
Dans une logique similaire, une réduction
des étudiants internationaux aux cycles supérieurs pourrait nuire aux capacités
de recherche et d'innovation du Québec. C'est d'autant plus vrai que le
financement des organismes subventionnaires québécois et fédéraux nous impose
des travaux pour former la relève, et on a de la difficulté à trouver cette
relève-là auprès des étudiants et étudiantes québécois et québécoises.
Alors, l'Université du Québec a fait, dans
son mémoire, une série de recommandations : la première, de ne pas réduire
le nombre de personnes étudiantes internationales en enseignement supérieur, la
deuxième, que les établissements universitaires soient exclus de l'article
cinq, la troisième recommandation, dans l'éventualité où l'article cinq
n'exclurait pas les établissements universitaires, la nécessité de consulter
les universités doit être enchâssée dans ce projet de loi là, et que la portée
de tout scénario découlant de ces projets de loi exclut les cycles supérieurs,
autant les programmes de recherche que professionnelle.
Merci de votre écoute.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cet exposé et ces recommandations. On
commence donc la période d'échange. On va commencer par M. le ministre pour une
période globale de 16 minutes 30 secondes. La parole est à vous.
M. Roberge : Merci beaucoup.
Merci pour votre présentation. J'ai entendu beaucoup de passion et de fierté
dans vos propos. Je ne suis pas surpris. Je dois dire que, comme diplômé de
l'UQ, je partage cette fierté-là avec un réseau important qui a carrément
transformé le visage du Québec puis qui est responsable d'une grande partie de
ce que nous sommes aujourd'hui comme nation.
Je commence par un petit commentaire. Vous
avez mentionné tout à l'heure 2018, la déréglementation des frais de scolarité
qui ont causé beaucoup de dommages. Certains pourraient attribuer à tort à
notre gouvernement cette erreur parce qu'on est arrivés en 2018, mais je tiens
à mentionner que ça a été l'erreur du précédent gouvernement libéral, qui est
arrivé avec, je vous dirais, ce cadeau empoisonné suite à un lobby très
puissant. Parce que je le vivais dans l'opposition, puis je pense que mon
collègue aussi le vivait, parce qu'il était dans l'opposition en même temps que
moi, en 2014-2018, certains établissements anglophones qui voulaient absolument
cette déréglementation qui a finalement été donnée avant que nous arrivions. Et
on travaille encore à réparer les pots cassés avec ma collègue Pascale Déry.
Vous parlez d'une séquence, je pense
qu'elle est extrêmement importante, la séquence. Des fois, il y a beaucoup de
choses à faire, on est pressés de commencer le changement, mais il faut quand
même prendre le temps de bien faire les choses. La planification pluriannuelle,
qui inclut les permanents mais aussi les résidents temporaires, je pense qu'elle
est extrêmement importante. Il est temps qu'on aille dans cette direction-là.
Je l'ai annoncé la semaine dernière. La prochaine planification pluriannuelle
inclura tous les temporaires, dont les étudiants étrangers. Les gens
disent : Bien, dites-nous vos chiffres tout de suite. Bien, attention, on
annonce l'intention, après ça, on arrive avec un projet de loi qui nous permet
de faire cette planification-là, après ça, on consulte, puis après ça, on donne
les chiffres. Il ne s'agit pas... celui qui dit le premier chiffre ou le plus
gros chiffre gagne. Je ne pense pas que c'est ça que ce doit être.
• (11 heures) •
Maintenant, tout à l'heure on a entendu,
puis je pense que vous étiez dans la salle, le Commissaire de la langue
française qui nous a fait quelques propositions. Puis j'aime ça, en commission
parlementaire, des fois, tester des idées proposées des uns des autres, je vais
tester vos idées aussi avec ceux qui vont vous suivre. Il nous propose
d'inscrire nommément à l'article trois du projet de loi «le critère de la
langue française». Parce qu'il y a la... il y a «le critère des régions, le
critère des ordres d'enseignement, le critère des programmes». Il nous propose
d'inclure «le critère de langue». Que pensez-vous de cette proposition du commissaire?...
11 h (version non révisée)
M. Cloutier (Alexandre) : ...Bon,
d'abord, je vais... je vais reprendre du début. J'apprécie les commentaires
initiaux sur l'importance de l'Université du Québec. Je pense que les Québécois
devraient être aussi fiers de l'Université du Québec qu'ils le sont de la
Caisse de dépôt ou d'Hydro-Québec, parce que ça fait vraiment partie de leur
histoire nationale. Fin de la parenthèse.
Sur la proposition qui est faite par le
commissaire, on a quand même des réserves par rapport aux critères mêmes qui
sont identifiés dans le projet de loi, parce que ça pose des enjeux importants
sur la mainmise du gouvernement dans les différents programmes de nos
établissements, puis dans les... dans l'énumération qui est faite dans le
projet de loi, bien, on retrouve, justement, les programmes, on retrouve les
régions. On est donc très, je dirais, inquiets par rapport à la capacité
éventuelle de choisir les différents programmes qui pourraient bénéficier ou
non d'une intention gouvernementale de recevoir des étudiants internationaux.
Je pense que ça a été très bien mentionné par mon collègue de Rimouski, à l'effet
que les programmes se planifient de longue haleine, et il y a des programmes
qui doivent être soutenus, comme ils l'ont toujours été par le passé, et pour
lesquels on a une sensibilité particulière, puis là on pense, par exemple, aux
sciences humaines, aux sciences sociales, à la philosophie, la sociologie, etc.
Et, lorsqu'on commence à identifier des disciplines et dire aux universités là
où il est bon ou pas d'avoir des étudiants, bien, ça pose d'énormes problèmes.
Alors, pour ce qui est de l'enjeu de la
langue, bien, évidemment, à l'Université du Québec, vous aurez compris que
93 % de nos étudiants sont de langue française, alors, établis,
essentiellement... bien, pas «essentiellement», à 100 %, en fait, sur le
territoire québécois, et offre des programmes de langue française, et nos
étudiants internationaux ont la langue française comme langue d'usage. Bien,
pour toutes ces raisons, on se sent peut-être moins interpelés par l'enjeu de
la langue, considérant que notre offre à nous est une offre en français.
M. Rousson (Vincent) : Si je
peux me permettre, M. le ministre, en fait, nos étudiants, comme l'illustre M.
Cloutier, en fait, sont déjà... parlent français, et ceux qui ne le parlent
pas, on travaille à ce qu'ils soient fonctionnels en français dans nos régions,
dans nos établissements. Donc, les étudiants de l'Université du Québec sont un
outil essentiel au développement de la langue française au Québec, autant dans
les régions qu'à Montréal. Donc, on est un acteur prépondérant dans la... la
survie de la langue, dans le développement de la langue française, là.
M. Roberge : Je comprends
très bien la posture que vous avez, puis que d'autres vont revenir après vous,
des dirigeants d'établissements, de dire : Bien, en ce moment, on a plus
la mainmise sur nos établissements. Avec le projet de loi, le gouvernement se
donne des leviers. On n'aime pas bien, bien ça, je pense que c'est normal,
sincèrement, c'est un réflexe tout à fait naturel, mais... considérant qu'en ce
moment, le gouvernement peut fixer un nombre, un plafond, mais qu'il ne peut
faire, pratiquement, que ça. C'est à dire, il ne peut pas... il ne peut pas...
S'il décidait de réduire, ça pourrait réduire exclusivement en région, ça
pourrait réduire exclusivement dans les programmes stratégiques.
Est-ce que vous voyez du bon dans le fait
d'avoir une agilité gouvernementale, c'est-à-dire d'être capable, comme...
comme gouvernement, de protéger des choses? Parce que vous dites : Bien
là, s'il a le pouvoir d'agir de manière plus précise, il pourrait cibler
quelque chose que nous voulons protéger. Je comprends, mais si on ne se donne
pas ce pouvoir, et que le nombre continue d'augmenter, jusqu'à ce que quelqu'un,
moi, ou un autre après moi, décide de le réduire, il faut savoir aussi que ça
pourrait amener des réductions dans des endroits qui sont stratégiques. Donc,
est-ce que vous ne voyez pas une plus-value ou, dans le fond, non, le
gouvernement ne devrait pas avoir cette agilité gouvernementale, c'est vraiment
le sacro-saint pouvoir de liberté académique qui doit prévaloir en tout temps,
peu importe les nombres?
M. Cloutier (Alexandre) : En
fait, dans votre énoncé, je pense que vous identifiez aussi le problème, parce
que vous faites référence à vos successeurs, et ça inclut aussi des successeurs
avec une autre idéologie que la vôtre. Et ça, lorsqu'on donne un pouvoir au
gouvernement d'intervenir, en avant ou en arrière, bien, ça veut dire quoi? Ça
veut dire un yo-yo, ou ça veut dire un caractère imprévisible.
Dans le monde universitaire, on ne
planifie pas des programmes à court terme. On planifie, nécessairement, sur du
moyen et long terme. On construit des programmes avec des campagnes de
sensibilisation, des campagnes de promotion, incluant des campagnes de
recrutement, qu'on ne peut pas modifier à très court terme parce que...
M. Cloutier (Alexandre) : ...ce
sont des orientations qui sont données sur le moyen, long terme. Alors, parmi
les inquiétudes qu'on a, c'est justement un nouveau pouvoir assez général,
donné à un gouvernement sans trop de balises quant à l'utilisation éventuelle
de ce pouvoir-là. Et, à ce moment-ci, bien, comme c'est un projet de loi un peu
page blanche, bien, ça nous inquiète, évidemment, quant à l'utilisation même de
ces pouvoirs-là, considérant qu'on comprend mal, là, comment il sera appliqué.
M. Rousson (Vincent) : Si je
peux me permettre aussi, en fait, nous avons pris nos responsabilités, nous
avons eu... vu la hausse des demandes d'admission dans les dernières années,
notamment suite à la pandémie, qui est causée par des facteurs multiples. Donc,
on a pris nos responsabilités, les universités, notamment celles à l'intérieur
du réseau de l'Université du Québec. Mon collègue François a notamment énuméré
quelques orientations qui ont été prises par notamment l'Université du Québec à
Chicoutimi, à Trois-Rivières, à l'UQO et qui sont en train d'être implantées
dans l'ensemble des autres universités. Donc, on voit déjà, de par cette prise
de responsabilités, une baisse qui oscille entre 20 % et 30 % des demandes
d'admission et d'inscription dans nos universités provenant des étudiants
internationaux.
Donc, puisque nous avons pris nos
responsabilités, bien, on juge que, ce projet de loi là, bien, on ne devrait
pas être assujettis à celui-ci parce qu'on a déjà pris des actions, et ces
actions fonctionnent. On a, entre autres, des actions... Je parlais de
l'intelligence artificielle. Donc, on est en train de développer un outil pour
venir aider l'ensemble des universités membres du réseau de l'Université du
Québec, à travers l'intelligence artificielle, à dénicher des demandes
d'admission un peu plus frauduleuses ou suspectes pour nous aider, parce que
c'est clair que cette hausse de demandes d'admission est venue mettre beaucoup
de pression dans nos établissements. Donc, on n'a pas resté les bras croisés.
Donc, lorsqu'on parle de planification sur du moyen, long terme, oui, mais on
est également extrêmement agiles pour réagir rapidement aux conditions que la
société nous arrive, puis notamment la hausse des demandes d'admission.
Et c'est important aussi de mentionner
qu'il y a une grande distinction entre une hausse des demandes d'admission et
une hausse des inscriptions dans nos établissements, parce qu'elles ne se
traduisent pas... Puis là on a l'exemple de l'Université du Québec en
Outaouais, qui, dans la dernière année, ont eu 4 000 demandes d'admission
provenant d'étudiants internationaux étrangers. Ça s'est traduit autour de 430
inscriptions. Donc, il y a une énorme distinction à faire entre admissions et
inscriptions. Donc, si on venait mettre un cap, si je peux me permettre
l'expression, sur les demandes d'admission, bien, ça va venir contraindre nos
établissements dans les programmes de formation, dans la planification
également, là, des plans de formation de nos étudiants et de nos étudiantes.
M. Roberge : Bien, peut-être
un petit malentendu ici, parce que le CAQ émis par le gouvernement arrive après
l'admission et pas à la demande d'inscription. Donc, on ne parle pas de ça. On
ne parle pas de limiter les demandes d'admission, on parle une fois les gens
admis.
Bon, il y a quand même eu des enjeux, là,
à l'UQTR, il y a pas mal d'étudiants qui ont fait leurs demandes d'asile, à
l'UQAT, il y a eu un déficit. Puis, selon l'article de Radio-Canada, à peu près
1 million du déficit venait des déficits de paiement des étudiants étrangers. À
l'UQAR, il y a des gens qui nous disaient qu'il y a un article qui s'appelait
C'est la désillusion parce qu'ils étaient admis à l'UQAR, pardon, et finalement
ils devaient faire leur session dans les hôtels. Donc, il y a des enjeux. Je
comprends que chacun dans vos campus, chacun dans vos universités, vous vous
adaptez, vous réagissez à ces éléments-là, mais le libre marché nous amène à
des nombres qui sont très élevés. Est-ce que le nombre d'étudiants étrangers,
au Québec, devrait être infini, il ne devrait pas y avoir de plafond
considérant ce qui se passe, considérant l'enjeu de logement?
Quand vous dites : On ne voudrait pas
être assujetti, ça veut dire une forme de libre marché, autant par les régions,
tant par les campus, tant par la capacité d'admission. On voit qu'il y a un
paquet d'institutions qui nous demandent de l'argent pour agrandir leur
établissement. Il n'y a pas des dérapages, dans les dernières années, qui
devraient être prévus?
M. Cloutier (Alexandre) : Il
y a absolument des enjeux, puis on ne se met pas la tête dans le sable, puis
notre collègue pourra donner quelques éléments de détail. Je veux juste
rappeler, par contre, que l'Université du Québec avait un retard historique au
niveau de la présence des étudiants internationaux, un immense débalancement
entre les universités anglophones, les universités francophones. Et récemment
le Québec s'est dit : Ce n'est pas normal que les universités francophones
aient un tel retard. Au moment où on se parle, l'UQ est à 18 % de ses
étudiants qui sont des étudiants internationaux. Est-ce que c'est trop? Est-ce
que ce n'est pas assez? Bien, je vous soumets ça à votre réflexion. Mais on
n'est pas dans la démesure, on n'est pas dans le débordement, on n'est pas dans
l'exagération.
• (11 h 10) •
On peut en débattre, on peut en discuter,
mais ce qui est sûr, c'est que l'Université du Québec a travaillé très fort
pour...
M. Cloutier (Alexandre) : ...ce
retard-là. Puis vous savez quoi? On en est très fiers, d'avoir cette belle
diversité d'étudiants là au sein de nos établissements. Maintenant, ça pose des
enjeux, effectivement, de demandeurs d'asile, de paiement, mais on a mis en
place des mesures. Puis c'est important de vous les partager, ces mesures-là,
parce qu'il y a un caractère assez original, et on pense aussi qu'elles
fonctionnent. Je ne sais pas si mes collègues...
Mme Poncelin de Raucourt
(Céline) : Peut-être je peux compléter. Effectivement, vous donnez
l'exemple de l'UQO, on le mentionnait tout à l'heure, 4 000 demandes
d'admission et à peine 430 inscriptions. Tout le travail qui est fait par
rapport à ces étudiants-là, il y a un gros travail, effectivement, d'analyse
des demandes pour s'assurer de prendre les demandes les plus sérieuses. Et,
quand l'étudiant s'inscrit, on lui demande, à l'UQO, dorénavant, de payer la
totalité de la première année de ses droits d'inscription. Et ça, ça a eu un
effet marquant sur le sérieux des demandes et sur le taux de conversion, avec
des candidats qui sont sérieux, qui ont payé d'avance leur première année de
scolarité. Et donc ça, c'est des mesures qui ont été testées à l'UQO et qui
sont partagées entre les personnes qui accueillent et qui intègrent les
étudiants internationaux à l'intérieur du réseau pour voir l'effet des mesures
et pouvoir les mettre en place. On le disait tout à l'heure, pour les dépôts à
l'admission, il y a aussi des universités qui ont mis des dépôts qui peuvent
aller jusqu'à 5 000 $ au moment de faire la demande d'admission. Mais,
attention, ce sont des dépôts qui sont quasiment en totalité remboursables si
l'analyse de l'admission fait en sorte qu'on considère que c'est une
candidature qui n'est pas admissible. Donc, il faut aussi avoir cette
responsabilité sociale, je dirais, vis-à-vis des étudiants internationaux qu'on
accueille à l'intérieur de nos murs.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup.
M. Roberge : Ma collègue...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Oui, je vais reconnaître la collègue d'Iberville. Il vous
reste deux minutes quatre secondes.
Mme Bogemans : Merci. Moi, je
voulais vous entendre sur quelles balises on pourrait mettre en place pour dire
quels établissements seraient en mesure d'accueillir adéquatement les étudiants
étrangers. Parce que vous venez de le nommer, 18 % de votre clientèle
vient des étudiants étrangers. Vous avez déployé beaucoup d'efforts, vous
semblez aussi avoir mis en place des bonnes mesures. Mais comment s'assurer?
Parce que le projet de loi, c'est vraiment un signal clair qu'on va envoyer,
parce que, par exemple, les institutions privées qui se spécialisent uniquement
dans l'attraction d'étudiants étrangers dans des spécialités, ce n'est pas
nécessairement ce qu'on veut, puis c'est le message qu'on veut envoyer. Ça fait
que comment on pourrait bien le faire?
M. Deschênes (François) : Oui,
si vous me permettez, je pense que, à cette question-là, l'ensemble des
universités sont dignes de recevoir des étudiants internationaux. L'UQ, on a
bien fait la démonstration qu'on a pris nos responsabilités. Puis, quand on
pense, notamment, aux demandeurs d'asile, souvent, on regarde les exceptions,
mais c'est plus de 93 %, au moment où on se parle, d'étudiants qui
viennent, qui s'inscrivent et qui font bel et bien leur programme d'études.
Donc, c'est une très grande majorité. Certes, on est peut-être capables de
l'améliorer en travaillant ensemble, mais on a mis tout plein de mesures pour
resserrer cela. Quand on pense aux exemples des logements, les anecdotes qui
sont mentionnées, déjà on accompagnait nos étudiants, on leur envoyait des
messages : Ne venez pas si vous n'avez pas trouvé de logement avant. À un
moment donné, s'ils viennent quand même, il y a une limite à ce qu'on peut
faire, donc... mais c'est très anecdotique et en très petit nombre.
Et là, si on regarde toutes les mesures,
le logement, et tout ça, moi, ce que je vous dis, c'est que l'ensemble des
universités... Les universités du réseau de l'UQ peuvent être des
établissements désignés, amplement admissibles et adéquates pour recevoir des
étudiants internationaux sans que l'on ait de souci.
Mme Bogemans : Donc, c'est la
présence des mesures que vous mettez en place, particulièrement, qui sont
distinctives.
M. Cloutier (Alexandre) : Essentiellement,
s'il y en a qui mettrait en place des mesures pour contourner les règles dans
l'objectif de faire venir de l'immigration ici, au Québec, bien, que le
gouvernement s'y attarde spécifiquement.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fin à cette première
période d'échange. On poursuit avec l'opposition officielle pour une période de
9 min 54 s. Le député de la l'Acadie, la parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. Cloutier, Mme Poncelin de Raucourt, M. Deschênes, M.
Rousson, merci d'être là avec nous. Merci pour votre mémoire. Je vais continuer
avec la question que la collègue de la banquette gouvernementale vient de vous
poser. On a l'impression que le ministre, avec son projet de loi, essaie de
corriger quelque chose, mais ce n'est pas très clair, qu'est-ce qu'il veut
corriger. Et j'ai aussi l'impression qu'il utilise une espèce de couverture,
mégacouverture pour viser tout le monde, mais qu'il y a peut-être des problèmes
qui sont plus ciblés. Puis peut-être que ça, le gouvernement devrait s'en
occuper, plutôt que de pénaliser l'ensemble, ça, c'est mon interprétation à
moi. Ce que j'entends de vous, c'est que vous avez mis en place une série de
mesures pour vous assurer que les étudiants, étudiantes qui vont dans vos
établissements y sont pour les bonnes raisons, c'est pour faire de la
recherche. Alors, si on pouvait continuer sur cette lancée...
M. Morin : ...pouvez-vous nous
donner d'autres exemples de mesures que vous avez mises en place, qui fait en
sorte que vous êtes capable de gérer vos étudiants? Je trouve ça important
parce que, dans une de vos demandes, vous voulez être exclus de certaines
dispositions du projet de loi. Je peux comprendre que ça... ça, ça ne rassure
pas le ministre, mais, pour le rassurer puis rassurer la population, est-ce que
vous pouvez nous donner d'autres exemples de mesures que vous avez, qui fait en
sorte qu'au fond votre demande, elle est tout à fait légitime?
M. Cloutier (Alexandre) : Je
pense que mes deux collègues meurent d'envie de répondre. Je vais juste en
donner une... un élément, puis je vais laisser la parole à mes collègues. Un
des enjeux de l'Université du Québec, par rapport à d'autres universités, c'est
que notre bassin... notre bassin de recrutement est beaucoup en Afrique
francophone, évidemment, puisque nos étudiants sont francophones. Un des
enjeux, c'est toute la qualité des diplômes, la reconnaissance des acquis, la
reconnaissance de la formation. Puis là je vous laisse imaginer la complexité
de l'analyse des dossiers de tous les pays qui arrivent d'Afrique, avec toutes
les institutions différentes, des programmes d'enseignement différents. Donc,
ça prend une analyse très, très fine de chacune des candidatures. En ce moment,
l'UQ est en train de développer un guide. Mais là je vais arrêter de parler, parce
que ma collègue est nettement plus compétente pour vous l'expliquer. Je laisse
la parole à Céline.
Mme Poncelin de Raucourt
(Céline) : C'est ce qu'on appelle, entre nous, le superguide.
Effectivement, on a sélectionné les pays pour lesquels on a le nombre
d'admissions... de demandes d'admission le plus... le plus important, pour
lesquels on identifie aussi des cas de fraude les plus importants, et on montre
des exemples de spécimens de vrais diplômes, des spécimens de vrais bulletins.
Donc, on a pris toute notre base de données de toutes les demandes qu'on
reçoit. On a regardé aussi les étudiants qu'on a inscrits et qui ont cheminé
dans leur programme, et qui ont réussi. Et on a pris les documents associés à
leur demande d'admission pour pouvoir sortir des exemples de bulletins ou de
diplômes qui sont... qui sont sérieux et qui sont valables.
On va aussi télécharger directement auprès
des pays, auprès du ministère de l'Enseignement, la liste de leurs diplômés,
pour que nos registraires puissent vérifier qu'effectivement ce sont des vrais
diplômés. Parce qu'il y a un phénomène très important, en ce moment, dans le
monde, ce sont les agences, et on a un flot énorme de candidatures qui arrivent
dans les bureaux des registraires qui sont envoyées en bloc à toutes sortes
d'universités, et dans lesquelles il y a beaucoup de fraudes, parfois, au
détriment... même, souvent, au détriment des étudiants eux-mêmes, qui n'ont pas
conscience qu'ils sont envoyés en bloc, par des agences, dans nos
établissements. Donc, ça, c'est tout un travail.
Et on met l'intelligence artificielle dans
ce... dans ce superguide-là, parce que la quantité de documents à traiter est
énorme, et donc on utilise l'intelligence artificielle pour les conversions et
pour l'identification des fraudes. C'est un projet qu'on est en train de... de
mener en ce moment.
M. Morin : Je vous remercie.
Est-ce que quelqu'un d'autre...
M. Deschênes (François) : Peut-être,
au-delà de... de la dimension des fraudes, on a rehaussé les exigences à l'admission,
on a rehaussé les exigences en termes de maîtrise de la langue française.
Également, plusieurs universités, maintenant, exigent un seul programme, un
seul choix de programmes, ce qui fait en sorte que l'étudiant doit être
réellement intéressé à venir chez nous. Le report d'admission n'est plus
possible, il doit faire une nouvelle demande d'admission. Donc, c'est tout un
ensemble de mesures qui nous permet de cibler ceux et celles qui désirent
réellement venir étudier au Québec, et ça, bien, si on... il y en a tout plein
d'autres... si on les met bout à bout, bien, on voit déjà les effets appliqués
et concrets cette année.
M. Morin : Parfait, je vous
remercie. Quand j'ai lu l'article 3 du projet de loi, ma première impression,
puis j'aimerais vous entendre là-dessus, ça a été de me dire, woups, le
gouvernement, dans son plan annuel, veut contrôler, en fait, ce qui peut se
passer dans les universités ou dans les régions. Pour moi, la liberté
universitaire, c'est fondamental. Vous y avez fait référence, mais n'y a-t-il
pas là un enjeu, un danger à ce que le gouvernement veuille contrôler ce que
vous voulez enseigner ou les programmes que vous voulez développer dans vos
universités, étant entendu que l'université est là, avant tout, pour former des
gens avec un esprit critique, pour débattre puis, évidemment, faire de la
recherche.
• (11 h 20) •
M. Rousson (Vincent) : Si je
peux me permettre. Bien oui, en partie, on l'a mentionné tout à l'heure, les
métiers de demain ne sont pas nécessairement encore connus. On travaille à
former les programmes pour bâtir la société de demain. Donc, de dire
aujourd'hui que les programmes de formation que nous avons, c'est les métiers
d'avenir, bien, je mettrais un petit bémol, parce qu'il y a des recherches en
sciences humaines, en sciences sociales, en santé, en administration, en génie
qu'on a besoin de développer dans un large spectre pour arriver finalement à ne
pas avoir d'enjeux plus tard. Donc, de venir jouer dans... de venir limiter nos
étudiants, nos programmes, de déterminer certains éléments, oui, ça peut...
M. Rousson (Vincent) : ...ça
arrive... en fait, c'est qu'on va être pénalisé pour le plus tard. Ça... pour
moi, ça c'est clair. Il y a un enjeu réel aujourd'hui et demain, comme société.
Nos étudiants internationaux, en fait, puis je renchéris un peu sur ce que mon
collègue mentionnait... toute la réflexion derrière nos programmes, nos
demandes d'admission et l'intégration des étudiants internationaux, c'est un
processus qui est réfléchi autant à l'interne qu'à l'externe, donc autant sur
la capacité d'accueil de nos professeurs, sur la capacité de bourses que
l'université est capable d'offrir, sur la capacité de logements que nous avons,
sur la capacité de nos partenaires à accueillir nos étudiants stagiaires dans
nos programmes avec stages. Bref, il y a un arrimage entre l'interne à
l'université et nos partenaires externes, notamment en région, pour s'assurer
que notre capacité d'accueil, bien, on la respecte. Donc, on n'ouvre pas les
vannes à tout prix pour accueillir des étudiants internationaux. Donc, ça, il y
a vraiment une analyse approfondie dans nos établissements.
Donc, de venir limiter, ça va venir
contrecarrer, bien entendu, tout le travail en amont, et ça va venir affecter
les années à venir.
M. Morin : Parfait. Je vais
céder la parole à ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Mont-Royal—Outremont. La parole
est à vous. Donc, il vous reste deux minutes 38 s. Allez-y.
Mme Setlakwe : Merci. J'ai de
la difficulté à cerner une quelconque utilité pour vous, là, avec le projet de
loi. Vous semblez être complètement en contrôle de la situation, vous
bénéficiez d'une autonomie, vous devez bénéficier d'une autonomie, et vous
semblez avoir mis en place et continuer de mettre en place les mesures pour
éviter qu'il y ait des problématiques. Est-ce que je me trompe?
M. Cloutier (Alexandre) : C'est
évident qu'il y a des mesures qui sont mises en place. Maintenant, c'est
important aussi de dire qu'on le fait toujours en collaboration avec le
gouvernement du Québec. Même les orientations qui ont été prises pour le
développement des outils internationaux, on l'a fait avec la planification
stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur. C'est celle qui a été
adoptée au printemps, c'est encore les orientations qui avaient été données. On
est en constant dialogue aussi avec le ministère des Relations internationales
du gouvernement du Québec. On a participé à la commission parlementaire sur le
PEQ, par exemple, au printemps dernier. Donc, il y a ce dialogue-là avec nous,
il est permanent. S'il y a des enjeux à régler, on est ouverts au dialogue, on
est ouverts à essayer de trouver des voies de passage. La raison pour laquelle
on est inquiets avec le projet de loi, c'est parce que, dans le fond, je le
répète, c'est... On nous donne une intention puis on se donne des outils pour
mettre en œuvre cette intention, mais on sait tous que le diable est dans les
détails. Et les enjeux vont être soulevés quand on va connaître réellement le
fond des choses. Alors là, pour le moment, nous, on émet plusieurs réserves,
là, sur plein de sujets différents parce qu'on n'a pas encore identifié
exactement ce qu'il allait être mis en oeuvre.
Mme Setlakwe : Merci.
J'aimerais qu'on parle de vitalité des régions. On a entendu vos collègues, là,
M. Deschênes, M. Rousson, parler de la situation à Rimouski puis en
Abitibi-Témiscamingue. Parlez-nous de l'importance des étudiants étrangers par
rapport à la vitalité des régions, sachant aussi, puis ça a été dit, ça a été
mentionné dans votre mémoire, que les inscriptions des étudiants québécois sont
à la baisse et qu'on dépend donc des étudiants étrangers pour combler les
programmes?
M. Deschênes (François) : Oui,
bien, je vais me permettre de répondre à cette question. Écoutez, la présence
des étudiants internationaux est essentielle. On a parlé de la réalité
démographique de nos régions. Si on regarde pour l'UQAR, nous desservons cinq régions,
Chaudière-Appalaches, Bas-Saint-Laurent, Gaspésie et Île-de-la-Madeleine,
Côte-Nord. Ces cinq régions là, en termes de bilan migratoire, c'est négatif
pour les 15 à 24 ans, ce qui veut dire que, si on se fiait uniquement sur
ces populations-là, nous aurions moins de diplômés, moins de travailleurs par
la suite, moins de gens pour offrir les services à la population. Donc, vous
voyez que ce sont... ils sont essentiels pour cette vitalité-là et ils
contribuent aussi à la vitalité sociale et économique. Donc, pour nous, c'est
essentiel, pour la suite des choses, de pouvoir continuer à avoir une certaine
croissance.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, cette période d'échange est
terminée. Je me tourne maintenant du côté du député de Saint-Henri Sainte-Anne.
Vous avez une période de 3 min 18 s.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous pour votre présentation. Je n'ai pas
beaucoup de temps, je vais essayer d'y aller en rafale. Oui ou non, est-ce
qu'il y a un risque d'atteinte à l'autonomie de gestion d'universités avec le
p.l. 74?
M. Cloutier (Alexandre) : Il
y en a assurément un, qui a été bien mentionné par nos collègues. Je vous
rappelle que la Loi sur la liberté universitaire a été essentiellement vue sous
l'angle de la liberté universitaire, mais il y a un pan quand même important
qui a été moins discuté, c'est le volet de l'autonomie universitaire, qui est
tout aussi inclus dans la loi et qui fait partie des conditions fondamentales
de la vie universitaire, puis on ne peut pas dissocier un et l'autre. Et le
principe de l'autonomie universitaire est un principe qui a des balises
relativement claires, et, à nos yeux, les transgresser, bien, ça amène d'autres
risques. Ça amène même des risques de nature constitutionnelle. On pourrait
avoir un débat de juristes sur le caractère constitutionnel des principes de
cette loi.
M. Cliche-Rivard : Très
intéressant...
M. Cliche-Rivard : ...oui ou
non, vous avez été consulté en amont du dépôt de ce projet de loi là?
M. Cloutier (Alexandre) : Oui,
on a été consulté en ce sens, car on est constamment informés par le... des
intentions du gouvernement. Mais vous aurez compris que c'est un projet de loi
qui a peu de choses, alors on est consulté sur une orientation. Mais ce qu'on
déplore en quelque sorte ou la raison pour laquelle on est inquiets, c'est
parce que c'est le... c'est le fond de l'histoire qu'on veut connaître, mais
c'est... Donc ce qu'on souhaite, c'est d'être partie prenante à cette
conversation-là sur les mesures à mettre en place.
M. Cliche-Rivard : De la
suite.
M. Cloutier (Alexandre) : Mais
assurément que le dialogue constant avec le gouvernement sur les intentions.
M. Cliche-Rivard : Est-ce
que, selon vous, à ce stade-ci, le projet de loi n° 74
est nécessaire?
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
encore une fois, je pense que j'ai... ma réponse précédente répondait
essentiellement à la question. Comme on ne connaît pas encore le détail à ce moment-ci,
c'est plus l'inquiétude. Puis, comme je le disais tout à l'heure au ministre,
ce qui nous inquiète, ce n'est pas juste le ministre actuel, mais tous les
ministres qui vont se succéder et de quelle façon on va utiliser cette loi-là à
des fins qui ne le seraient pas, à nos yeux à nous, dans l'intérêt du Québec.
M. Cliche-Rivard : Est-ce que
vous inscrivez un nombre d'étudiants qui respectent vos capacités d'accueil
respectives?
Une voix : Je ne sais pas
si...
M. Cloutier (Alexandre) : Pardon?
M. Cliche-Rivard : Vos
capacités d'accueil respectives, est-ce que vous en inscrivez la respecte?
M. Cloutier (Alexandre) : Je
vais laisser mon collègue de Rimouski.
M. Deschênes (François) : Sans
équivoque, oui. Je vais vous donner un exemple. En 2013, nous avions
7 319 étudiants. On est autour de 7 000 présentement. Donc, on a
déjà démontré davantage.
M. Cliche-Rivard : Aviez-vous
été consultés en amont de la dernière planification pluriannuelle des seuils
permanents?
M. Cloutier (Alexandre) : Comme
je l'ai dit, on parle, il n'y a pas une semaine qui pense qu'on ne soit pas en
contact direct avec le gouvernement. Alors, ça serait... ça serait... ça ne
serait pas... C'est, oui, on leur parle. Maintenant, on n'a jamais le fin
détail. Comme vous le savez, vous avez des privilèges, comme parlementaires, de
connaître le détail des projets de loi. Alors, dans une... on ne peut pas
prétendre qu'on n'est pas consultés, non.
M. Cliche-Rivard : O.K. Et
donc, là, ce que vous dites, c'est finalement l'application... en fait, ce qui
est écrit là n'est pas tellement l'enjeu que comment il sera mis en oeuvre.
M. Cloutier (Alexandre) : Vous
avez bien saisi.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on termine avec le député de
Jean-Talon, encore une fois, 3 min 18 s. La parole est à vous.
M. Paradis : Alors, si je
résume, puis vous me direz si je résume bien. Vous dites qu'actuellement, avec
ce projet de loi, le ministre veut se donner des outils, mais on ne connaît pas
ses intentions, on ne sait pas ce qu'il veut faire avec ces outils-là, que, si
on suit ce qui est écrit dans le projet de loi n° 74,
ça donnerait une discrétion au ministre qui donnerait un yoyo compte tenu des
possibles changements de gouvernement et de vision sur ces questions-là. Vous
avez répondu à ma collègue de Mont-Royal--Outremont, que le projet de loi
n'était pas vraiment utile, et à mon collègue de Saint-Henri-Sainte-Anne, à
l'instant, que ce n'était pas nécessaire. C'est bien ça que vous pensez du
projet de loi n° 74? Est-ce que j'ai bien résumé?
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
je préfère mes propres propos, mais vous en faites un résumé auquel j'inviterais
les parlementaires au libellé exact de chacune des réponses que j'ai données.
Mais je vais laisser l'appréciation de mes réponses à vos collègues.
M. Paradis : Bon, est-ce que
sur ces questions, on a besoin du projet de loi n° 74
pour que le gouvernement s'assoie avec les institutions d'enseignement
supérieur au Québec et fasse une planification avec des chiffres, puis un
arrimage entre les besoins, puis les différentes considérations que vous avez
mises sur la table.
M. Cloutier (Alexandre) : C'est
une excellente question. J'ai saisi que la question a été posée aussi à notre
prédécesseur. Je ne rentrerai pas dans le débat est-ce que c'est nécessaire ou
pas, mais là où je suis profondément convaincu, par contre, c'est qu'on peut
absolument faire... on ne peut pas mettre de mesures en place sans consultation
préalable du monde universitaire, sinon ça va nécessairement donner des mauvais
résultats.
M. Paradis : Est-ce que, dans
le projet de loi n° 74, comme vous le voyez aujourd'hui,
vous... vous décelez justement cette planification-là? Est-ce que vous la
voyez, la planification de l'avenir pour les étudiants étrangers au Québec?
M. Cloutier (Alexandre) : Absolument
pas. Je comprends que le ministre nous a indiqué tout à l'heure qu'il y aurait
une consultation au printemps. Ça, par contre, ça m'a rassuré, je dois dire,
c'est... Je comprends que c'est au printemps qu'on connaîtra mieux les
intentions des... des temporaires, et ça inclut les étudiants internationaux.
Alors, je comprends qu'entre les deux, avant de mettre en œuvre ces mesures-là,
nous serons consultés. Mais en tout cas, c'est ce qu'on dit aujourd'hui, là,
nous, on veut être consultés de sur toutes formes de mesures qui pourraient
être mises en place, et l'absence de consultation serait une grave erreur.
D'ailleurs, dans les amendements qui vous sont proposés, on propose de prévoir
une période de consultation spécifique pour la mise en œuvre des éventuelles
mesures.
M. Paradis : Nous, au Parti
québécois, on a déposé, la semaine dernière, une planification. On a dit
qu'elles étaient nos intentions, et on se rejoint sur quelque chose, puis vous
avez commencé en parlant de la question du financement. Nous, on dit que la
clé, la première chose à discuter avec les institutions d'enseignement
supérieur, c'est la question du financement qui a induit peut-être un certain
nombre de tendances à partir de 2018. Est-ce que vous êtes d'accord donc qu'une
des clés de ce débat-là, c'est la question du financement.
• (11 h 30) •
M. Cloutier (Alexandre) : Je
ne commenterai pas l'ensemble du document que vous avez déposé. Je ne sais pas
si vous le souhaitez. Je vais simplement...
11 h 30 (version non révisée)
M. Cloutier (Alexandre) : ...dire
qu'on a des préoccupations quant à la présence des étudiants internationaux sur
notre territoire. Et, pour nous, les étudiants internationaux au sein des
universités jouent un rôle fondamental à plusieurs égards, tant en recherche,
en création, d'implication sur le territoire québécois, etc.
Pour ce qui est de l'enjeu financier,
effectivement, depuis 2018, ça a posé un réel enjeu. Et cet enjeu-là est
toujours en suspend, est corrigé en partie, récemment, mais à mon avis, demeure
un débat de société.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met un terme à cette audition.
Merci beaucoup de vous être prêtés à l'exercice. C'était intéressant.
Alors, la commission va suspendre ses travaux
quelques instants, le temps que le prochain groupe s'installe.
(Suspension de la séance à 11 h 31)
(Reprise à 11 h 36)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Alors, nous recevons, comme représentants, maintenant, des universités
de Montréal, McGill, Laval et Sherbrooke, donc, M. Daniel Jutras, recteur de
l'Université de Montréal, M. Deep Saini, recteur et vice-chancelier de l'Université
McGill, Mme Sophie D'Amours, rectrice de l'Université Laval, ainsi que M.
Pierre Cossette, recteur de l'Université de Sherbrooke.
Alors, mesdames, messieurs, vous
bénéficiez d'une période de 10 minutes pour votre présentation. Ensuite, on va procéder
à la période de discussion avec les élus. La parole est à vous.
Mme D'Amours (Sophie) : Mme
la Présidente, merci. Mmes, MM. les députés, M. le ministre, merci de nous
recevoir. Alors, comme vous l'avez annoncé, mon nom est Sophie D'Amours, je suis
rectrice de l'Université Laval et je suis accompagnée de mes collègues, que
vous avez présentés.
Alors, d'entrée de jeu, je souhaite vous
informer que nos quatre universités figurent parmi les 10 universités ayant la
plus forte intensité de recherche au Canada. Nous accueillons la moitié de tous
les étudiants universitaires du Québec et plus des deux tiers de tous les
étudiants inscrits à la maîtrise et au doctorat.
Je prendrais les prochaines minutes pour
partager avec vous notre perspective sur l'importance de la contribution des
étudiants internationaux pour nos établissements, mais aussi pour le Québec.
D'abord, j'aimerais souligner qu'en 2023, la proportion de permis d'études
attribués à des étudiants du Québec de niveau collégial et universitaire
représentait 11,4 % du total pour tout le Canada. Cette proportion est
bien en deçà du poids démographique du Québec, qui se situait à environ
22 %. Au Québec, les étudiants internationaux représentent de plus un
faible pourcentage de l'immigration temporaire, soit 12 % pour les
titulaires d'un permis d'études uniquement et 21 % en incluant les
titulaires de permis d'études et de travail. Toutefois, leur contribution est
essentielle au Québec, et ce, à plusieurs chapitres. Notamment, ils contribuent
activement à la réalisation de notre mission de recherche et d'enseignement.
Dans nos établissements, les étudiants internationaux contribuent aussi à
ouvrir les horizons des étudiants québécois, partagent leur savoir, leur
culture et de nouvelles façons de voir le monde.
Pour que nos universités continuent d'être
innovantes, pour qu'elles soient connectées avec le réseau international, il
nous faut continuer de développer ce pouvoir d'attraction. Les universités
québécoises sont engagées dans un réseau de connaissances où l'échange de
talents et d'idées transcende les frontières. Les étudiants internationaux que
recrutent les universités québécoises constituent aussi une source importante
de main-d'œuvre hautement qualifiée dont le Québec a besoin pour relever les
défis auxquels il est confronté. Leur apport est indispensable à l'innovation
et au développement des connaissances. Ils permettent au Québec de renforcer sa
position dans l'économie internationale du savoir et de tirer profit des
avancées de la recherche.
• (11 h 40) •
À l'heure actuelle, ils représentent près
de la moitié du nombre total d'étudiants inscrits au troisième cycle dans les
universités du Québec. Les étudiants internationaux jouent un rôle crucial dans
le soutien des activités de recherche de pointe dans nos universités, souvent à
titre d'assistants de recherche ou de doctorants, contribuant ainsi directement
à la production de connaissances et à l'avancement scientifique. Cette qualité
de la recherche et cette attractivité mènent à leur tour au développement de
projets novateurs, appuyés financièrement par les décideurs publics via les
organismes de...
Mme D'Amours (Sophie) : ...financement
de la recherche. Depuis 2014, le montant destiné à la recherche dans les
universités québécoises est passé d'un total de 1,4 milliard de dollars à
plus de 2 milliards de dollars. L'apport des étudiants internationaux à la
recherche universitaire a aussi un impact important sur la qualité de vie et la
prospérité du Québec. Selon Statistique Canada, leur impact économique se
chiffre à plus de 3,8 milliards de dollars au PIB du Québec. Qui plus est,
les candidats que nous attirons permettent la réalisation de découvertes,
d'innovations et de démarrages d'entreprise. Les étudiants de l'international apportent
donc sans contredit une contribution essentielle à la vie universitaire.
La croissance du nombre d'étudiants
internationaux découle d'ailleurs des orientations du ministère de
l'Enseignement supérieur, qui reconnaît depuis longtemps le rôle des étudiants
dans le développement du Québec. Les règles du ministère régissent le
financement public des universités, prévoient même des octrois afin de recruter
davantage d'étudiants internationaux, et ce, depuis plusieurs années. Le
ministère, dans sa planification stratégique 2023-2027, énonce clairement sa
volonté d'attirer davantage d'étudiants internationaux dans les collèges et
universités francophones et ajoute que c'est une priorité gouvernementale, tout
comme la rétention de ceux-ci une fois diplômés. Notre positionnement s'inscrit
donc dans cette logique, et nous encourageons le gouvernement à poursuivre dans
cette voie.
Je cède maintenant la parole à mon
collègue Pierre Cossette.
M. Cossette (Pierre) : Mesdames,
Messieurs, merci de nous accueillir ici. Comme l'a dit ma collègue Sophie,
l'Université de Sherbrooke, comme l'ensemble des universités représentées ici,
croit fortement que les étudiants internationaux sont une richesse pour notre
société et que le gouvernement québécois fait fausse route en les associant
souvent à un problème. Nos universités mènent une approche... prennent une
approche responsable et équilibrée au recrutement des étudiants internationaux,
et nous nous inquiétons que le projet de loi n° 74 empiète sur l'autonomie de
gouvernance académique des universités, qui a fait ses preuves, incluant dans
le recrutement d'étudiants internationaux. Nous nous inquiétons aussi qu'il ne
tient pas compte du fait que le processus de recrutement est complexe,
pluriannuel et ancré dans des orientations stratégiques au long cours des
universités.
Vous savez, le recrutement international
se base sur des liens de confiance avec des régions, des institutions ciblées
partout sur la terre, et ces relations-là se font dans un contexte extrêmement
compétitif. Et, pour un étudiant ou une étudiante international, il doit...
d'abord on doit l'attirer, attirer son attention, il doit faire une demande
d'admission qui doit être... nous, on évalue si la demande d'admission est
pertinente, il doit obtenir un certificat d'acceptation du Québec puis un
permis d'études fédéral afin d'être inscrit. C'est un processus qui est très
long, qui prend plusieurs mois, souvent des années, notamment dans les
programmes de recherche. Et, jusqu'à présent, ça fonctionne.
D'ailleurs, grâce à l'autonomie et
l'approche stratégique de nos institutions, elles sont devenues des lieux de
formation et de découverte avec des retombées mesurables pour le Québec et
attirent les meilleurs talents de partout dans le monde. Mais le projet de loi
n° 74 propose des règlements qui pourraient contraindre l'autonomie de nos
institutions, qui s'est avérée très bénéfique, on le pense, pour le Québec. Et,
en souhaitant se doter d'un pouvoir d'interdire la venue d'étudiants
internationaux ou de cibler sur la base d'un choix de programmes d'études, le
projet de loi n° 74 agit là où les universités ont la compétence pour
sélectionner les étudiants. Chercher à régir où étudieront les étudiants
internationaux afin de répondre à des priorités gouvernementales qui peuvent
changer affectera négativement la capacité de développement stratégique de nos
institutions, et ces changements vont empiéter sur la capacité de répondre de
façon... en même temps au long cours, mais en même temps de façon agile à ce
que nos institutions savent faire en lien avec leurs collègues et leurs
partenaires de la société québécoise.
Juste pour revenir sur certains points et
des questions qui ont été posées sur notre capacité d'accueil... Malgré le fait
que c'est complexe, l'admission, je veux vous rassurer sur une chose : nos
institutions mettent tout en place pour assurer l'intégration des personnes
étudiantes : des services d'accès au logement, des services
d'accompagnement et un accès aux cliniques de santé. Nous le faisons déjà et on
va continuer à le faire. Il faut également noter que, pour la plupart, les
étudiants internationaux arrivent au Québec seuls et en bonne santé. 80 %
ont moins de 30 ans. Ils ne sont pas un fardeau pour nos systèmes de santé et
d'éducation. On pourrait même argumenter qu'ils sont plutôt une source de
main-d'oeuvre pour répondre aux pressions identifiées.
L'autre élément très important, c'est de
mettre en contexte le volume d'étudiants internationaux. Dans nos universités
québécoises, ils ont passé de 3 600... 36 900 à 57 400. Donc,
c'est une hausse de 59 % sur 10 ans. On est très loin des 140 % dont
on évoque dans plusieurs documents. Donc, c'est une... Et c'est une croissance
qui est raisonnable, qui a été fortement encouragée par le gouvernement
québécois jusqu'à récemment et...
M. Cossette (Pierre) : ...et
elle est cohérente avec les orientations stratégiques de nos établissements et
du gouvernement, parce qu'entre autres les soutiens internationaux jouent un
rôle important dans la réalisation des objectifs de la stratégie québécoise de
recherche et d'innovation notamment. Donc, la croissance des étudiants
internationaux au Québec était prévue et encouragée, et ce, pour plusieurs très
bonnes raisons.
En conclusion, le ministre dit vouloir
s'attaquer de façon ciblée à des problèmes d'abus. On est d'accord avec cette
idée d'attaquer les abus. Or, le gouvernement prend maintenant une direction
différente avec la... une présentation d'un projet de loi dans les règlements
pour éliminer ou contraindre l'ensemble des universités, qui ne sont pas la
source des enjeux soulevés, qui ont simplement répondu à l'appel gouvernemental
d'augmenter leur recrutement international, qu'ils l'ont fait au bénéfice du
développement, de la recherche, de l'innovation québécoise et de l'ensemble de
notre société. Bref, nous pensons, nous recommandons que les établissements
visés à l'article 1 de la Loi sur les établissements d'enseignement de
niveau universitaire ne soient pas assujettis au projet de loi. Nous sommes
d'accord que s'il y a des mauvais conducteurs sur la route ou s'il y a un
problème à régler, je vais prendre une analogie médicale, je suis médecin, mais
il faut trouver la bonne maladie puis éviter les médicaments qui ont plein
d'effets secondaires. Donc, pour nous, le projet de loi n° 74 ne cible pas
la bonne maladie et est rempli d'effets secondaires. Et surtout, surtout, on
est très affecté, on vous demande de cesser d'associer les étudiants
internationaux des établissements universitaires à un problème. Ils sont une
source de richesse. Ils font partie de la solution pour le rayonnement, le
développement mais aussi pour le développement de la recherche, l'innovation et
de la prospérité du Québec. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Voilà. Merci beaucoup pour votre présentation. Alors, je me
tourne du côté de la banquette ministérielle, vous avez une période 16 min 34
s. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Je rassure les gens qui nous écoutent, mon gouvernement et
moi-même, on ne considère pas que les étudiants internationaux ou les étudiants
étrangers sont des problèmes à régler d'aucune manière. Je pense qu'il faut
cependant se donner la liberté de réfléchir lorsqu'on voit des problématiques
qui surviennent. On a des problématiques, notamment de logement. Et lorsqu'on
voit des chiffres très élevés. Il y a une dizaine d'années environ, il y avait
environ 50 000 étudiants étrangers. En ce moment, on est à 122 000.
Est-ce que ça veut dire, comme le Parti québécois, qu'il faut retourner à
50 000, qu'il faut réduire de 70 000, 72 000 le nombre
d'étudiants étrangers? Non. Ce n'est pas ce qu'on a dit. Je pense que ça ferait
mal à plusieurs établissements, plusieurs programmes, puis que ça mettrait à
mal les régions. Par contre, on peut nommer les choses, voir cette
progression-là, puis se questionner sur quelle manière, dire qu'il y a
peut-être des abus, puis se donner les outils pour être chirurgical, pour
reprendre des termes médicaux, parce qu'en ce moment... des termes médicaux,
pardon, parce qu'en ce moment le gouvernement, s'il veut agir, mais il ne peut
pas agir de manière précise. On ne contrôle que le seuil. C'est comme si on
gérait une écluse, on pouvait faire monter tous les bateaux ou baisser tous les
bateaux d'un coup. On ne peut pas décider qui passe à travers les écluses
d'aucunes, aucune manière. C'est comme si le gouvernement, en ce moment,
abdiquait un peu de son champ de compétence en immigration, alors que ça fait
partie des champs que l'on possède.
J'ai des questions assez précises. Puis je
suis content d'avoir les dirigeants de quatre parmi les grandes institutions
qu'on a ici au Québec. J'aimerais avoir quelques données qu'on pourrait
partager puis qui pourraient être intéressantes pour les Québécois. Dans vos
quatre institutions, quel est le pourcentage d'étudiants... il y a... en
comptant autant les... premier cycle, deuxième cycle, etc., il y a les
étudiants québécois, il y a les, ce qu'on appelle les CNRQ, là, les Canadiens
non résidents du Québec et les étudiants étrangers. Est-ce que vous êtes
capable de nous fournir, par établissement, quel est votre pourcentage dans
chacun de vos établissements, Québécois, CNRQ, et étudiants étrangers?
• (11 h 50) •
M. Saini (Deep) : Merci
beaucoup, M.. Très bonne question et question autour de laquelle il y a
beaucoup de mal compréhension en ce qui concerne McGill. Nous avons
actuellement environ 54 % de nos étudiants qui sont Québécois ou
Québécoises. Alors, seulement 46 % de nos étudiants viennent de
l'extérieur de Québec, dont environ 30 % international, et environ juste
en dessous de 3 % et le reste, c'est les étudiants CNRQ. Ce qu'il est
important de comprendre qu'à McGill...
M. Saini (Deep) : ...le pourcentage
des étudiants et le nombre réel des étudiants étrangers a resté constant, plus
ou moins, depuis le dernier décembre. Il y a une baisse légère du nombre des
étudiants étrangers, on n'est pas responsable pour l'augmentation énorme des
étudiants internationaux dont on parle ici, au Québec.
M. Cossette (Pierre) : À
l'Université de Sherbrooke, c'est 11.1 % d'étudiants internationaux. On a
eu une croissance dans les dernières années, mais on a eu une baisse déjà de
15 % des admissions internationales cette année. Vous savez, il y a eu une
douzaine d'annonces de différents paliers de gouvernement dans les derniers
temps. Ça heurte déjà beaucoup, O.K., mais on a déjà une diminution des
nouvelles admissions. Mais notre proportion d'étudiants internationaux, c'est
11 %. Pour les étudiants... Pour répondre précisément à votre question,
Canadiens hors Québec, c'est un tout petit pourcentage, là, donc, qui est
négligeable pour l'Université de Sherbrooke.
Mme D'Amours (Sophie) : Pour
l'Université Laval, c'est 11 % aussi, puis la même réalité pour les
étudiants canadiens, c'est un tout petit nombre. Et le reste, ce sont des
étudiants québécois. Je... C'est ça.
M. Jutras (Daniel) : Merci,
M. Roberge. Chez nous, c'est 16 % d'étudiants internationaux. Les
CNRQ représentent, à mon souvenir, moins de 250 étudiants à l'Université
de Montréal sur quelques dizaines de milliers d'étudiants. Je note au passage
que la très grande majorité de ces étudiants-là internationaux sont
francophones. L'anglais, comme langue d'usage, par exemple, ce n'est pas la
deuxième langue d'usage, c'est la sixième langue d'usage. Donc, les locuteurs
en anglais, ceux qui décrivent leur langue d'usage comme l'anglais,
représentent à peu près 200 personnes depuis les 10 dernières années
à l'Université de Montréal.
M. Roberge : Merci. Allez-y.
Mme D'Amours (Sophie) : Oui.
J'ajouterais un commentaire, parce que je pense que c'est important de
contextualiser dans un contexte international de la recherche. Les grandes
universités de recherche, en général, vont avoir un pourcentage d'étudiants
internationaux qui va tourner autour de 25 % à 30 % de leur bassin
étudiant, une proportion importante aux cycles supérieurs, comme c'est le cas
dans nos universités. Par exemple, dans des secteurs comme la recherche
médicale ou la recherche dans des domaines technologiques, l'agriculture, par
exemple, on va retrouver jusqu'à 60 % et 70 % d'étudiants
internationaux dans les laboratoires de recherche.
M. Roberge : Merci beaucoup
pour vos réponses très, très précises. Je comprends que vous semblez en
désaccord avec l'idée de réduire les étudiants, puis vous me corrigerez si ce
n'est pas le cas, je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche. Mais
est-ce à dire que vous souhaiteriez qu'il y ait davantage d'étudiants étrangers
sur le territoire? Dans le fond, est-ce que vous voulez un statu quo? Là, je ne
vous parle même pas du projet de loi, c'est-à-dire d'une agilité pour choisir
plus ou mieux, plus ou moins. Est-ce que vous pensez qu'en ce moment on est au
bon endroit? Il y a peut-être un petit ménage à faire, il faudrait réduire ou,
d'après vous, on est à 122 100, ça en prendrait 125, 130, 140?
M. Cossette (Pierre) : J'aimerais
rappeler que, dans les universités, c'est 57 000, hein? Donc... Et cette
croissance-là a été vraiment modeste dans les 10 dernières années,
beaucoup moins qu'ailleurs au Canada d'ailleurs. Comme l'évoquait Sophie, pour
répondre à cette question-là, il faudrait regarder c'est quoi notre progression
en recherche dans les universités québécoises? Parce que, malheureusement, les
étudiants, les étudiantes québécoises et québécois vont peu à la maîtrise et au
doctorat de recherche maintenant, ce qui fait que, dans les laboratoires de
pointe, physique quantique, en microélectronique, en ARN, en recherche de la
santé, c'est environ 50 %, un peu plus, des étudiants de maîtrise, de
doctorat de recherche, qui viennent de l'international. En fait, sans eux et
elles, on ne pourrait pas faire les projets de recherche pour lesquels on
reçoit des subventions.
Bon, je vais vous donner un autre chiffre.
On a 22 % de nos professeurs à l'université Sherbrooke qui viennent de
l'international, on accueille des gens, des grandes sommités. Donc, je vais
vous donner un exemple. On a eu deux chaires de recherche d'Excellence Canada.
L'une d'elle est une professeure espagnole qui travaillait à l'Université de
Berlin, qui vient travailler maintenant en physique quantique à une
l'Université de Sherbrooke. Si je lui pose la question à elle : Est-ce
qu'il y a assez d'étudiants internationaux? C'est plutôt l'inverse, elle va me
dire : Est-ce que je vais avoir le droit de recruter des meilleurs
étudiants de partout dans le monde pour venir travailler dans mon laboratoire à
l'Université de Sherbrooke? Parce que si elle n'a pas le droit, elle ne serait
pas venue travailler à l'Université Sherbrooke, donc, parce que c'est comme ça,
la recherche de pointe dans le monde.
Donc, le nombre total d'étudiants, c'est
une chose. Nous, on pense qu'on fait un excellent boulot pour les accueillir
puis s'en occuper. On ne les laisse pas tomber, on s'occupe vraiment de nos
étudiants, on fait un accueil de qualité. La progression, elle a été modeste
dans les dernières années. Donc, à ce stade-ci, on veut participer évidemment à
l'effort québécois, on pense que...
M. Cossette (Pierre) : ...nos
universités font un excellent boulot au bénéfice du Québec.
M. Saini (Deep) : Je peux
ajouter une chose, que, pour les grandes universités de recherche, la
compétition pour le talent, y inclus les étudiants, c'est international. Chez
nous, les étudiants souvent arrivent avec deux, trois offres par des autres
universités au monde, aux États-Unis, en Australie ou Angleterre, etc., alors
on compétitionne «on a»... sur échelle mondiale pour le talent de nos
étudiants. Et, pour faire de la recherche, dont on a environ 2 milliards
de dollars par année entre nos quatre universités, alors on a une
responsabilité de fournir les résultats qui sont attendus par les organismes subventionnaires.
Mme D'Amours (Sophie) : Si
j'ajoutais...
M. Jutras (Daniel) : Excusez.
Je pense que vous posez une bonne question, M. le ministre. Est-ce qu'il y a
trop d'étudiants internationaux au Québec? Puis moi, je dirais qu'une bonne
partie de la réponse, c'est de savoir si on a trop d'étudiants, qui sont parmi
les meilleurs au monde, qui choisissent de venir au Québec. Puis, la réponse à
ça, il faut que ce soit non. On veut que ces gens-là, qui sont des personnes
exceptionnelles, qui viennent contribuer à nos activités de recherche,
contribuent à la richesse de nos programmes viennent au Québec.
Alors, l'autre réponse à la question,
c'est : Est-ce qu'il y a des étudiants internationaux ici, en dehors de
nos universités... puis je parle de l'ensemble du réseau des universités qui
sont visées par l'article un, est-ce que les étudiants internationaux... puis
j'exclus les cégeps aussi, là, qui, je pense, font aussi un excellent boulot
dans la sélection, est-ce qu'il y en a, des étudiants internationaux, qui ne
devraient pas être ici parce qu'ils abusent d'un système? Puis vous avez évoqué
vous-même, dans la conférence de presse, des abus... nous, on n'a pas, en fait,
d'indications de ce à quoi vous référez, mais je vous crois sur parole, qu'il y
a des abus. C'est ces gens-là, je pense, qu'il faut contrôler.
Et ça, ça nous amène, nous, à réfléchir
aux moyens par lesquels on peut contrôler ces entrées-là. Puis, à notre avis,
le moyen, ce n'est pas d'imposer des plafonds à nos universités en fonction de
la région, du niveau d'étude, du cycle d'études, de la catégorie
d'établissement d'enseignement, du programme d'études. Ça, ça permettrait, par
exemple, de fixer un nombre maximal pour l'université dans le bas du fleuve par
opposition à une université à Montréal, fixer un nombre maximal pour les
étudiants au doctorat par opposition aux étudiants au premier cycle, et ainsi
de suite, là. Il y a une modulation, en d'autres termes, qui vient de
l'article 52.1 et la modification à l'article 52.1 qui me semble être
éloignée de l'objectif fondamental qui est de traiter le problème des
admissions irresponsables des étudiants internationaux.
Alors, nous, on pense que la solution pour
vous, c'est de viser les abus. Ce n'est pas de viser de manière globale avec
des mesures très, très granulaires, comme celles que je viens d'évoquer,
l'accueil d'étudiants internationaux exceptionnels qui contribuent à l'essor du
Québec.
Mme D'Amours (Sophie) : Et
j'ajouterais que les universités mettent en place des processus très rigoureux,
hein, pour faire la sélection de ces étudiants. On parle de dizaines de
milliers de demandes d'étudiants internationaux qui veulent venir étudier au
Québec. Et, à l'Université Laval, cette année, on accueillera
1 700 étudiants. Donc, il y a une sélection qui se fait, qui est très
importante.
Et, par ailleurs, dans le contexte actuel,
pour nous, la perte d'étudiants au niveau des nouvelles inscriptions cette
année, elle s'élève à 22 %. C'est un... C'est une grosse, grosse chute.
M. Roberge : Vous parlez des
inscriptions, des...
Mme D'Amours (Sophie) : Les
nouvelles inscriptions d'étudiants internationaux, alors ceux qui sont
maintenant à l'université, cet automne, par rapport à l'an dernier, on a une
perte d'étudiants de 22 %.
M. Roberge : O.K. Je
laisserais ma collègue de Vimont poursuivre, si vous voulez bien.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Alors, Mme la députée, il reste encore quatre
minutes 14 secondes.
Mme Schmaltz : Parfait,
merci, Mme la Présidente. Justement, je veux vous relancer là-dessus, sur le
rôle des agents de recrutement au sein des bureaux de registraire dans les
universités. De quelle façon... Est ce qu'ils suivent, de un, des formations
continues pour s'assurer justement de sélectionner les bonnes candidatures et
éviter cet aspect malheureux, frauduleux, là, qu'on va... qu'on va rencontrer?
Et puis tantôt vous disiez, bon, on a
chuté de 22 %, les inscriptions, etc. Est-ce que c'est lié peut-être à un
resserrement? C'est... C'est... Est-ce qu'on peut en tenir compte aussi?
• (12 heures) •
Mme D'Amours (Sophie) : Ce
que... Ce que l'on entend, c'est l'effet de 12 mesures, 12 annonces
différentes en lien avec la réalité des étudiants internationaux dans la
dernière année. Donc, il y a beaucoup d'incertitude par rapport à l'arrivée au
Québec...
12 h (version non révisée)
Mme D'Amours (Sophie) : ...l'arrivée
à l'université, et des processus. Donc, il y a une partie qui est associée à
ça. Il y a une partie qui peut être associée au contexte économique. Le
contexte économique est tel qu'un peu partout dans le monde il y a eu un effet
d'inflation, il y a eu des conditions qui, peut-être, semblaient être
favorables au départ, il ne s'est pas présenté, l'étudiant n'est pas venu au
moment où il devait venir. Donc, il y a plein de conditions qui sont difficiles
à préciser, mais l'effet est bien réel. Et il y a eu aussi des... des mesures
administratives qui ont été prises par les ministères de l'immigration, où il y
a eu une période de ralentissement dans l'émission de visas étudiants, puis il
y a eu une période où il ne s'est pas émis de visas étudiants. Donc, ça aussi a
eu un effet sur les inscriptions.
M. Cossette (Pierre) : Je
veux juste revenir sur un point. Je vais parler pour l'Université de
Sherbrooke. On n'utilise pas d'agence de recrutement international,
premièrement, donc. Et, deuxièmement, toutes les offres d'admission qui sont
faites sont faites sur la foi de la qualité du dossier, qu'on évalue. On n'a
aucun intérêt à admettre un étudiant qui va... puis... ou une étudiante puis la
mettre en situation d'échec, puis faire dérailler une classe, ou un groupe,
ou... Donc, on est très rigoureux, nous. Les étudiants, étudiantes qui viennent
à l'Université de Sherbrooke, c'est parce qu'ils viennent étudier, c'est parce
qu'ils viennent faire une session une année, un bac, une maîtrise, un doctorat.
Et c'est pour ça... on a peut-être juste 11 %, malgré qu'on est une
université qu'il y a eu des grands progrès en recherche. On a eu des progrès
intéressants au niveau des étudiants internationaux, mais 95 %, en
passant, viennent de la... 90 % à 95 % viennent de pays de la
francophonie. Donc, ça, c'est intéressant.
Mme Schmaltz : ...elle est
plus précise, c'est les critères de sélection. Est-ce que c'est juste les notes
académiques? C'est quoi exactement?
M. Cossette (Pierre) : C'est
les mêmes critères pour tous... pour tous les étudiants, qu'ils soient
internationaux ou non. Donc, si un programme donné utilise les notes, un
portfolio, ça va être la même chose pour les internationaux. Si un autre
programme, c'est que les notes, ça va être les notes. C'est sûr que, quand on
arrive dans les programmes de maîtrise et de doctorat de recherche, c'est un
processus très complexe, parce qu'il faut voir les lettres de référence, dans
quels laboratoires qu'ils ont travaillé. Est-ce que leur maîtrise équivaut
vraiment à une maîtrise? Est-ce qu'on veut les passer direct au doctorat? Donc,
ça, c'est... dans chaque discipline. C'est pour ça que c'est un processus
complexe et long, là. Il faut savoir si, dans tel pays X ou Y, puis telle
université, là, le diplôme, est-ce que... qu'est-ce que ça donne quand ces
étudiants-là arrivent dans un laboratoire, parce qu'il faut que ce soit
sécuritaire et bien fait.
Mme Schmaltz : Mais c'est
long? J'imagine que ça doit être très long, avoir le...
M. Cossette (Pierre) : C'est
très long, c'est très long.
Mme D'Amours (Sophie) : ...très
long, et ça se... ça s'opère tout au long de l'année. C'est-à-dire que, pour
les étudiants de maîtrise et de doctorat en recherche, l'offre ne se fait pas
en bloc, on ne fait pas une gestion en... je dirais, en lots de l'offre d'admission.
C'est un processus...
Mme Schmaltz : O.K. Donc,
comme vous dites, c'est cas par cas.
Mme D'Amours (Sophie) : Oui,
parce que ça prend des professeurs qui acceptent de superviser les travaux de
recherche, et ce sont eux qui font l'évaluation de la capacité de recherche.
Donc, il y a la... il y a la partie académique, qui est faite préalablement,
mais les professeurs vont décider ou non de superviser l'étudiant pour ses
travaux de recherche, et ça, c'est un processus qui est un peu plus long. Il y
a des entrevues, souvent, il y a des échanges avec la personne, etc. Et quand
tout est, finalement, positif, bien, la personne va recevoir une offre.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, merci beaucoup. Alors, c'est ce qui met fin à cette
première portion d'échange. Je me tourne du côté de l'opposition, avec le
député de l'Acadie, 9 min 54 s. La parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. Jutras, M. Saini, Mme D'Amours, M. Cossette, merci d'être
là, merci pour vos explications, votre mémoire. J'aurai quelques questions pour
vous. Et, corrigez-moi si je fais erreur, mais les chiffres que j'ai obtenus du
Bureau de coopération interuniversitaire pour le nombre d'étudiants
internationaux, le total, ce serait 57 450 au Québec. Le gouvernement nous
parle d'abus, d'abus et d'abus. On parle de 57 450 étudiants. Un peu plus
tôt, les gens de l'Université du Québec et du réseau nous ont parlé qu'ils
avaient des mesures en place. En avez-vous, des mesures en place? Est-ce que
vous effectuez un contrôle, et, si tel est le cas, est-ce que ce projet de loi
est inutile?
M. Cossette (Pierre) : Bien,
en fait, on a plein de mesures en place. Nous, l'année dernière, c'est 15 000
demandes d'admission internationales qu'on a eues, là puis on en a admis un peu
plus de 1 000, là, donc. Et, effectivement, nos chiffres d'admission, avec
toutes les turbulences qui ont eu lieu, sont en baisse, et on est très
préoccupés de ça. Comme le rappelait mon collègue de... le recteur Deep Saini,
de McGill, on est en compétition avec le reste du monde, là. Donc, nous, on...
l'idée d'avoir une agilité interne à nos institutions, puis une capacité d'aligner
les recrutements avec notre capacité de laboratoire, nos...
M. Cossette (Pierre) : ...nos
capacités, nos... stratégiques sont très importantes. Donc, c'est ça. Vous
pourrez déduire que, pour nous, on demande d'être exclu de l'application du
projet de loi, c'est parce qu'on pense pas que pour les universités... on ne
pense pas qu'on fait partie du problème, point, on pense qu'on est plutôt des
bons acteurs socioéconomiques et de développement du Québec. Et deux, on pense
qu'on est très responsable dans nos démarches d'admission. Donc, on ne comprend
pas pourquoi il y aurait des pouvoirs législatifs potentiels, hein, potentiels.
Parce que, là, on est... le diable est dans les détails, puis comment tout ça
va s'appliquer. Mais les pouvoirs potentiels sont vraiment énormes puis ils
viennent interférer directement avec la liberté universitaire au sens de notre
capacité à développer au long cours des orientations stratégiques.
Vous savez, il y a peu de gens, là, qui
auraient priorisé l'intelligence artificielle à Montréal, il y a 40 ans, ou
l'optique photonique à Laval, il y a 40 ans, ou la physique quantique à
Sherbrooke, puis, je vais dire, la recherche en ARN à McGill, il y a 40 ans,
là, ce n'était pas dans les priorités, là, parce qu'on ne savait pas encore les
applications. Mais aujourd'hui, s'il n'y avait pas au Québec 50 % de la
recherche en ARN de tout le Canada, puis il n'y avait pas McGill comme fer de
lance puis nous qui collaborons avec eux, il n'y aurait pas Moderna à Laval, là,
O.K.? Donc, ça, c'est concret, là, c'est comme ça. Notre capacité de recherche
dépend de notre capacité d'attirer les meilleurs talents au monde dans des
projets puis dans des visions au long cours. Donc, nous, on pense que l'état
actuel des choses a bien rendu service au Québec.
M. Morin : Merci. J'ai une
autre question pour vous. Vous y avez répondu, vous y avez touché un peu, mais
j'aimerais vous entendre davantage. Est-ce que vous croyez que l'article trois
du projet de loi, alors que le gouvernement veut éventuellement prendre des
décisions qui pourraient avoir un impact dans les programmes... est-ce que ça
pourrait avoir un impact sur la liberté universitaire et sur l'autonomie
universitaire? Et, si c'est le cas, est-ce qu'on ne s'engage pas là dans des
débats juridiques éventuellement? Parce que, moi, comme parlementaire, c'est ce
que je veux éviter. Alors, j'aimerais savoir... Puis l'indépendance, la
liberté, l'autonomie universitaire, c'est fondamental. Donc, j'aimerais vous
entendre là-dessus, s'il vous plaît.
M. Jutras (Daniel) : Bien,
peut-être que... Je peux revenir, en fait, à la réponse que je faisais tout à
l'heure au ministre Roberge. À notre avis, il faut essayer de choisir les
mesures... vous parlez de mesures de contrôle, là, nous, on n'en a pas, de
mesure pour restreindre le nombre d'étudiants internationaux, comme l'évoquait
M. Cossette. On a des mesures pour choisir les meilleurs et ceux qui sont
susceptibles de réussir chez nous. Il y a des mesures pour les accompagner dans
leur processus et dans leur cadre de vie aussi, logement et autres aspects de
leur vie.
Et donc, si on s'intéresse... moi, je suis
juriste, là, puis si on s'intéresse en anglais, on dit : au «mischief»,
c'est-à-dire à l'objet que l'on veut trancher dans la loi, par cette loi, à
l'objet législatif, l'objet législatif, ça devrait être de trancher les abus,
de s'intéresser aux abus puis de contrôler les abus. Et personnellement, et je
pense que c'est une opinion qui est partagée par nos collègues, on l'évoque
dans notre mémoire conjoint, l'amendement qui est proposé à l'article 52.1,
donc, à l'article trois de la... du projet de loi, en fait, n'est pas bien
adapté à cet objectif-là, parce qu'il permettrait éventuellement au ministre de
faire des distinctions dans la fixation des différents quotas, du nombre
maximal, en fonction de distinctions, en fait, qui sont des distinctions
académiques, de cycle d'études, le programme, la région, effectivement. Et ça,
à notre avis, c'est vraiment une... quelque chose qui est sans précédent dans
la détermination de ce qui est opportun dans la configuration des universités.
Vous savez, il y a eu des mesures, ces
dernières années, pour favoriser, par exemple, l'accroissement des effectifs
étudiants dans certaines disciplines. C'est l'opération main-d'œuvre, que vous
connaissez, c'étaient des incitatifs, hein, c'étaient des incitatifs financiers
pour les étudiants et pour les universités d'accroître les effectifs dans ces
disciplines importantes pour le Québec où il y a des besoins en main-d'oeuvre.
Là, on ne parle pas d'incitatifs, là, on parle d'interdiction, en fait, de
moyen qui permettra au ministre de déterminer que tel programme, on n'a pas
besoin d'autant d'étudiants. On va fixer un maximal, un chiffre maximal très,
très bas. Alors, oui, je pense que, là, il y a un risque d'atteinte ou en tout
cas de complication de l'exercice de la gouvernance académique pour nos
universités.
M. Morin : Merci. Je vais
céder la parole à ma collègue de Mont-Royal-Outremont.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...il vous reste quatre minutes, quatre secondes. Allez-y.
• (12 h 10) •
Mme Setlakwe : Merci.
J'aimerais revenir sur deux éléments, mais la recherche de pointe, je pense
qu'on ne peut pas en parler... on ne peut pas trop en parler. Est-ce qu'on doit
comprendre qu'ensemble vous constituez un écosystème, un îlot d'excellence
qu'il ne faudrait pas fragiliser? J'aimerais que vous en... que vous élaboriez
davantage. Vous avez mentionné, là, des exemples de collaboration et d'impacts
positifs sur l'économie. Et le deuxième thème sur lequel j'aimerais revenir, à
vous entendre parler, on constate que vous êtes des vecteurs d'intégration. On
a reçu plus tôt le Commissaire à la langue française. Donc, j'aimerais vous
entendre sur les... étant... ayant en tête l'autonomie des établissements...
Mme Setlakwe : ...établissements,
entendre les différents outils, les programmes que vous déployez pour franciser
les étudiants étrangers. Merci.
M. Saini (Deep) : Laissez-moi
répondre un peu de votre première question. Ma collègue ici, Mme Sophie
D'Amour, a... vient de dire qu'on a entre... Nos quatre universités, nous
sommes responsables pour 2 milliards de dollars de subventions
externes pour la recherche. Ça représente environ 80 % de toute la
recherche faite au Québec parmi les 20 institutions au niveau de
l'université. Alors... Et, entre nous quatre, on a un nombre énorme de
collaborations qui ne seraient pas possibles si on travaille en isolation. Alors,
on travaille ensemble. On a par exemple... M. Cossette a cité l'exemple d'ARN
messager. Toute la recherche à McGill implique les chercheurs de Sherbrooke et
vice versa. On a des collaborations étroites avec l'Université Montréal en
intelligence artificielle. On a des collaborations avec... également avec Laval
sur l'environnement, agriculture, etc., et dans d'autres domaines. Même pour la
francisation de nos étudiants, par exemple, on a un programme à McGill qui
envoie nos étudiants durant l'été pour passer huit semaines, en collaboration
avec Laval, pour maîtriser le français, la langue française.
Alors, oui, c'est certain que nous
représentons un écosystème, mais cet écosystème n'est pas limité à nos quatre
universités. Je pense que les 20 universités ou les institutions
équivalentes des universités au Québec font ensemble un écosystème qui est là
pour servir les intérêts économiques et les intérêts sociaux de notre province.
M. Cossette (Pierre) : Je
voudrais revenir sur le vecteur d'intégration parce que c'est un vecteur
puissant parce qu'aller obtenir un diplôme universitaire, qui souvent
s'accompagne de stages, parfois en entreprise, parfois dans le milieu
communautaire ou ailleurs, avec des projets de recherche appliquée notamment...
Bien, à la fin, bien, il y a une partie des personnes qui veulent rester, mais
ils sont... qui sont complètement intégrés déjà, ils ont déjà leurs réseaux.
Nous, à l'Université Sherbrooke, on a un centre de langues qui offre des cours
de francisation. Parce que je vous ai dit qu'il y a une majorité de nos
étudiants venait de la francophonie, mais la... on a quand même un bon nombre
d'étudiants, par exemple, iraniens, leur langue seconde... en général, le
français, ce n'est pas dans leur langue, même l'anglais, donc... Mais, quand
ils sortent de nos programmes, ils savent parler français, là, parce que,
sinon, ils ne pourraient pas faire nos programmes, donc, et... Mais ça demande
beaucoup de travail. Donc, on le fait avec soin. Mais il y a ces étudiants,
étudiantes là qui souhaitent immigrer à la suite, qui sont une richesse pour
notre société. Puis ceux qui retournent sont nos réseaux futurs de
collaboration à la fois académique et industrielle, c'est les futurs
partenaires avec qui on va travailler, là. Donc, c'est nos ambassadeurs et
ambassadrices, en fait, c'est des superambassadeurs et ambassadrices pour le
Québec au complet, là.
M. Saini (Deep) : Est-ce que
je peux ajouter un autre fait?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 10 secondes. Allez-y.
M. Saini (Deep) : Quelques
secondes. O.K. À McGill, en ce qui concerne le français, 20 % de nos
étudiants ont la langue... le français comme leur langue maternelle, 60 %
de nos étudiants parlent les deux langues et environ 2 011... 2 100
de nos étudiants étrangers sont... viennent de France, sont tous des
francophones.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est malheureusement terminé. On va poursuivre avec le
député de Saint-Henri Sainte-Anne pour une période de 3 min 18 s. La parole est
à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci à vous d'être parmi nous aujourd'hui. Écoutez, il n'y a
pas si longtemps, un article du Devoir ce matin, en fait, qui sort, qui
dit : «Québec refuse d'exempter les cégeps et universités du plafonnement
des étudiants étrangers.» Et je lis : «En demandant d'être exemptés du
projet de loi n° 74 visant à réduire le nombre d'étudiants étrangers, les
cégeps et universités se montrent déraisonnables, selon le ministre de
l'Immigration...», je ne nommerai pas son nom, on n'est pas supposé faire ça
ici. Moi, je refuse de croire que l'Université du Québec, l'Université de
Montréal, l'Université McGill, l'Université Laval, l'Université de Sherbrooke,
l'Université Bishop's, l'Université de Concordia, l'ETS, et j'en passe, sont
déraisonnables. Donc, je vais vous la poser comme ça. Recteurs, rectrices,
êtes-vous déraisonnables?
Mme D'Amours (Sophie) : Je
pense qu'il faut reconnaître qu'il y a, et ça a été dit, des abus. Il faut
les... Il faut adresser ces abus. Puis je pense qu'on réitère notre
perspective, qu'on ne fait pas partie de ces organisations qui génèrent ces
abus-là. On pense qu'on est raisonnables dans la façon dont on traite la chose
et nos processus sont rigoureux, sont exigeants...
Mme D'Amours (Sophie) : ...prennent
plusieurs mois à être réalisés. Et puis ces recrutements-là et la richesse de
ces personnes pour nos institutions, pour la formation de tous nos étudiants,
la valeur d'être exposé à une réalité internationale, en 2024, dans une
université, elle est essentielle. Si on fait le tour du monde et on va visiter
les meilleures institutions en France, en Suisse, en Belgique, dans le monde
francophone, comme dans le reste du monde, on y retrouvera une grande diversité
de personnes. On a démontré qu'on n'est pas... On ne s'est pas mis dans une
situation où on cherche à faire exploser le nombre d'étudiants internationaux
dans nos quatre universités et dans les universités en général, au Québec,
c'est la situation.
Et une des raisons premières de ça, c'est
qu'on veut offrir aux étudiants et étudiantes qu'on a choisis toutes les
chances de réussir. Et ça prend des services et des capacités qu'on déploie, ce
qui veut dire que ça ne peut pas être infini. On ne peut pas se mettre dans
cette situation-là parce que nos ressources à nous, on les gère de façon
responsable.
M. Cliche-Rivard : Et, si ce
plaidoyer-là, aujourd'hui, il n'est pas entendu puis que le projet reste tel
quel, vous allez vous montrer déçue.
Mme D'Amours (Sophie) : Bien,
on va penser que le Québec aura perdu une opportunité. Parce qu'il faut
comprendre que chaque université est bien ancrée dans sa région. Et c'est vrai
pour les universités de Montréal, c'est vrai pour Laval, c'est vrai pour
Sherbrooke. Et la réalité ou la pertinence de certains programmes, ce ne sont
pas les mêmes partout. Et je pense qu'il y a des universités, par leur ancrage,
par la collaboration...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois malheureusement vous arrêter, vous savez, je suis
maître du temps.
Mme D'Amours (Sophie) : C'est
parfait.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, cette portion d'échange est terminée, on va
finaliser le tout avec le député de Jean-Talon pour une période de 3 min 18 s.
M. Paradis : C'est court. La
plupart des institutions d'enseignement, en fait, demandent d'être exclues de
l'application du projet de loi n° 74. Alors, si les institutions
d'enseignement, dont les vôtres, demandent à être exclues, il sert à quoi, le
projet de loi n° 74? Il va rester quoi, du projet de loi?
M. Cossette (Pierre) : Le
gouvernement a choisi de déposer le projet de loi n° 74 pour adresser un
problème d'abus. Nous, on dit : On ne fait pas partie de l'abus. Donc,
qu'est-ce que le gouvernement souhaite faire du projet de loi n° 74, ça lui
appartient. Nous, on ne fait pas partie de l'abus, puis on pense que le travail
qu'on fait avec les étudiants internationaux est bénéfique pour l'ensemble du Québec
et pour plusieurs raisons qu'on a déjà citées.
Donc, moi, la pertinence du projet de loi
n° 74, ce n'est pas à moi d'en débattre «at large». Nous, ce qu'on dit, c'est
qu'on ne fait pas partie de la l'abus, que la façon de faire, jusqu'à
maintenant, a été très bénéfique pour le Québec. Puis on ne voit pas pourquoi
on inclurait les universités, les établissements universitaires, puis on est
les quatre... parce qu'en recherche, c'est particulièrement crucial, mais c'est
vrai pour l'ensemble. On ne voit pas pourquoi on serait nclus dans ce projet de
loi là.
M. Paradis : Plus tôt, ce
matin, on a parlé de l'importance de l'arrimage puis de la planification
globale des politiques d'immigration, notamment, en ce que... il y a... il peut
y avoir deux étapes. On arrive comme étudiant international et ensuite on est
reçu comme immigrant permanent. Est-ce que vous êtes d'accord avec cet
arrimage, ou est -ce que... Quand vous dites que vous voulez être exclus du
projet de loi n° 74, que vous avez dit tout à l'heure que le système actuel
sert bien le Québec, est-ce que vous ne pensez pas que c'est important que le
nombre d'étudiants internationaux admis au Québec soit vu dans sa globalité
avec l'ensemble des politiques d'immigration?
M. Jutras (Daniel) : Bien,
peut-être, je peux répondre à ça. Vous avez raison de souligner le fait que
l'on traite différentes cohortes, hein, il y a des cohortes d'étudiants qui
arrivent à l'entrée, qui sont admis dans les universités, qui étudient chez
nous. Il y en a qui sont diplômés puis il y en a, parmi ceux-là, et ce n'est
pas tous qui restent ici, au Québec, parfois via le Programme d'expérience
québécoise dont on a parlé la semaine dernière. Alors, il faut bien distinguer
ces cohortes-là. Effectivement, je pense qu'il faut avoir un regard global sur
ce dont on parle. Mais, quand il s'agit de restreindre l'accès à des étudiants
qui vont faire un passage ici puis retourner chez eux ensuite, là, il faut
tenir compte des conséquences, je dirais, de leur présence sur les services
publics au Québec et sur la longue durée, essayer de mieux comprendre la
contribution qu'ils font au Québec.
• (12 h 20) •
Alors, de notre côté, je pense qu'il faut
distinguer ces différents éléments là. Mais, effectivement, il faut avoir une
vision globale de ce dont on parle et surtout une vision globale de l'apport
que ces étudiants confèrent aux grandes universités québécoises, à toutes les
universités québécoises et au Québec, à la fois pendant leur séjour...
M. Jutras (Daniel) : …une fois
diplômés et même quand ils s'en vont chez eux comme ambassadeurs du Québec.
M. Paradis : Donc, vous
voulez être exclus du projet de loi no 74, parce que, manifestement, vous
trouvez que ce n'est pas la bonne façon de procéder. Mais là vous vous déclarez
ouverts, ouverte à participer globalement avec le gouvernement à la
planification de l'immigration.
M. Jutras (Daniel) : Bien, on
collabore sûrement avec le gouvernement pour toutes les questions, là. Je veux
être clair là-dessus.
M. Paradis : Très bien.
Je vais revenir à un élément avec le ministre.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En 15 secondes.
M. Paradis : Je n'aurai
pas le temps. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est le temps qui est imparti. Merci beaucoup. Merci de
votre présence, Mme la rectrice, M. le recteur à cette audience.
Alors, je suspends les travaux juste
jusqu'à la tenue des avis touchant les travaux des commissions. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 21)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 20
)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, s'il vous plaît! La Commission des relations avec
les citoyens reprend ses travaux. Donc, on a... on va avoir un après-midi et un
début de soirée assez chargés. Nous allons poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 74,
Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants
étrangers.
Alors, cet après-midi, nous allons
entendre les représentants des organisations suivantes : l'Union étudiante
du Québec qui est avec nous, la Fédération des cégeps, l'Association québécoise
des avocats et avocates en droit de l'immigration, l'Université Bishop's et l'Université
Concordia conjointement, ainsi que la Fédération de l'enseignement
collégial-CSQ.
Alors, madame, monsieur, attendez, je vais
juste reprendre vos noms. M. Étienne Paré, président...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...ainsi que Mme Flora Dommanget — c'est bien ça? — Dommanget,
coordonnatrice à l'enseignement supérieur. Vous bénéficiez donc d'une période
de 10 minutes pour votre présentation, et ensuite nous allons discuter
avec les parlementaires. La parole est à vous.
M. Paré (Etienne) : Oui,
merci, Mme la Présidente. Merci, Mesdames et Messieurs les députés, pour le
temps que vous nous accordez aujourd'hui.
Peut-être, pour commencer, je
mentionnerais simplement que l'Union étudiante du Québec, on est une
association étudiante nationale qui représente 103 000 personnes
étudiantes universitaires via 13 associations membres. Nos membres sont
répartis partout à travers le Québec, allant de l'Abitibi-Témiscamingue à
Sherbrooke, en passant par Chicoutimi, Drummondville, Lennoxville, Lévis et
Montréal. La mission de l'Union étudiante du Québec, c'est de travailler à
l'amélioration des conditions de vie et d'études de la population étudiante
universitaire, tout en défendant les droits et les intérêts de celle-ci. C'est
à cette mission de défense des droits de la population étudiante internationale
du Québec que l'UEQ s'est penchée sur le projet de loi n° 74.
Tout d'abord, nous souhaitons mentionner
le fait que la population étudiante internationale est indispensable et une
richesse sur les nombreux campus universitaires. Nous souhaitons également
souligner que, depuis les deux dernières moutures de la politique de
financement des universités, soit celle de 2018 et celle de juin dernier, les
personnes étudiantes internationales sont devenues essentielles au financement
des universités québécoises. En effet, en annonçant une politique de
financement des universités à coût nul en juin, le gouvernement est venu faire
de la redistribution d'une partie des droits de scolarité de la population
étudiante internationale la pierre angulaire du financement des nouvelles
mesures annoncées. On souligne particulièrement l'importance des personnes
étudiantes internationales dans les établissements anglophones de McGill et de
Concordia, dont les droits de scolarité permettront de financer les nouvelles
enveloppes visant principalement à aider le réseau de l'UQ. Nous constatons ainsi
que de réduire le nombre d'étudiants internationaux vient directement menacer
le financement des universités. Nous estimons ainsi qu'il est important que le
gouvernement ait une action concertée en matière d'admission de la population
étudiante internationale et ne vienne pas créer artificiellement un
sous-financement des universités. Il faut éviter une situation où la main
gauche du gouvernement ne parlerait pas à la main droite.
C'est d'ailleurs pour éviter cette
situation potentiellement catastrophique que nous proposons nos trois premières
recommandations de modification du projet de loi n° 74 dans notre mémoire.
En premier lieu, nous partageons les
craintes mentionnées par les recteurs concernant la centralisation du pouvoir
de décision aux mains du ministre de l'Immigration. Alors que l'on nous
mentionne que le ministre de l'Immigration possède la vision d'ensemble, nous
croyons plutôt que les ministres de l'Enseignement supérieur et de l'Éducation
sont ceux ayant la vision d'ensemble des nécessités de leurs réseaux
respectifs. Nous recommandons donc que l'article 5 du projet de loi
n° 74 soit reformulé pour donner conjointement et en tout temps le pouvoir
de recommandation concernant les demandes présentées à titre de personne
étudiante internationale au ministère de l'Enseignement supérieur, de
l'Éducation et de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration. Cet
amendement nous assurerait une coordination adéquate des différents ministères
impliqués, et ce, peu importe les ministres en poste et peu importe les
gouvernements.
À cet effet, nous souhaitons également
voir le projet de loi modifié pour inclure un processus de consultation
publique obligatoire pour les scénarios proposés par le ministère de
l'Enseignement supérieur. En nous basant sur le modèle consultatif en matière
d'aide financière aux études, qu'on connaît particulièrement bien du côté de
l'UEQ, nous en sommes venus à la conclusion qu'un tel mécanisme permettrait
d'éviter les impacts négatifs sur le financement des universités. En vertu de
la Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, tout projet de règlement
relatif au programme d'AFE doit être soumis au comité consultatif pour
l'accessibilité financière aux études, qui a 30 jours pour produire un tel
rapport qui viendra orienter la décision de la ministre de l'Enseignement
supérieur. L'objectif ici est de s'assurer, encore une fois, d'éviter les
effets de main gauche qui ne parle pas à la main droite.
La consultation publique des parties
prenantes de l'enseignement supérieur demeure, selon nous, la meilleure
solution pour éviter une situation où l'adoption de scénarios aurait des effets
inattendus sur le financement des universités. Il nous apparaît clair que les
acteurs du milieu participeraient avec enthousiasme à une telle consultation.
On a vu d'ailleurs, là, qu'il y a des recteurs qui ont repris l'idée de la
consultation. On sait qu'il y a des syndicats également qui vont le demander.
C'est assez rare que les recteurs d'université, les associations étudiantes et
les syndicats sont tous sur la même longueur d'onde sur quelque chose. Ça fait
que je pense que ça parle quand même, là, sur le poids de cette demande.
Puis... à cet effet-là, là, qu'on recommande que l'obligation de consultation,
incluant un délai raisonnable, de la communauté étudiante universitaire, en
lien avec des décisions sur l'encadrement des personnes étudiantes
internationales, soit intégrée dans l'article 5 du projet de loi
n° 74.
En plus de cette obligation, l'UEQ croit
qu'il serait pertinent d'obliger les ministères concernés à publier un rapport
d'évaluation des impacts des scénarios et de leur mise en œuvre suite à
l'adoption du projet de loi. Cette mesure s'inscrit dans la logique de nos deux
recommandations précédentes et vise à rendre le plus transparent possible les
décisions prises par les trois ministres.
Notre troisième recommandation est donc
qu'une obligation de publication, tous les deux ans, d'un rapport d'évaluation
détaillé des décisions prises en vertu du projet de loi n° 74 soit
intégrée dans l'article 4 du projet de loi. Nous croyons que l'échéance de
deux ans viendrait également nous assurer d'évaluer les impacts réels,
puisqu'une évaluation annuelle ne permettrait probablement pas de brosser un
portrait complet des impacts et une évaluation sur plus de deux ans laisserait
trop de temps avant d'évaluer les...
M. Paré (Etienne) : ...je vais
maintenant céder la parole à ma collègue pour poursuivre la présentation de nos
recommandations.
Mme Dommanget (Flora) : Merci.
Au-delà du fait de venir perturber le financement des universités, le projet de
loi proposé actuellement ne prend pas en compte l'ensemble des réalités que
vivent les universités. C'est une ingérence qui se met en place pour contrôler
la gestion des admissions. L'UEQ souhaite rappeler que la population étudiante
internationale doit d'abord être vue comme un atout pour la société québécoise
grâce à son apport d'idées et de connaissances, ce qui fait également le
rayonnement de nos universités à l'international. Ce constat semble être
partagé par le ministre de l'Immigration, qui s'est exprimé, mais ne se traduit
pas dans la loi qui pourrait créer des effets négatifs, comme le mentionnaient
les différents représentantes et représentants des différentes universités.
Il faut savoir qu'une baisse
d'inscriptions est déjà observable dans le réseau universitaire. C'est encore
plus critique quand on regarde ce qui se passe au niveau des cycles supérieurs
et auprès d'universités plus à risque. On a, par exemple, l'Université Bishop's
qui a atteint une baisse de 40,4 % d'inscriptions au deuxième cycle, cette
même université qui avait été oubliée dans les dernières mesures mises en place
et qu'il a fallu rappeler au gouvernement.
Rappelons encore une fois que c'est la
recherche qui permet en grande partie le fait de faire rayonner les
établissements universitaires québécois et le partage des connaissances. L'UEQ
croit donc que ce sont des mesures incitatives telles que l'investissement de
80 millions de dollars sur quatre ans pour la rétention et l'attraction
des personnes étudiantes internationales dans les régions du Québec et dans les
secteurs en forte pénurie de main-d'oeuvre du ministre du Travail qui doivent
être mises en place... qui doivent être mises de l'avant pour pallier à la
pénurie de main-d'oeuvre et non l'ingérence du MIFI dans la gestion des
admissions des universités. Notre recommandation quatre serait donc que
l'objectif premier du projet de loi no 74 soit le rayonnement des
établissements universitaires québécois et le partage des connaissances,
particulièrement en ce qui a trait aux personnes étudiantes inscrites aux
cycles supérieurs.
Dans la même lignée, l'UEQ souhaite
souligner que les personnes étudiantes internationales peuvent actuellement changer
d'établissement sans changer de cycle universitaire en informant simplement le
IRCC. Cela favorise le partage de connaissances et permet une plus grande
mobilité des personnes étudiantes internationales pour combler les régions qui
en ont le plus besoin.
Ce qu'on veut éviter, c'est qu'une
personne étudiante déjà sur le territoire et qui veut changer d'établissement
se voie refuser son certificat d'acceptation du Québec par une surcharge
administrative et se voit expulsé du pays. Le projet de loi no 74, avec son
article 16, oblige l'étudiant à recevoir l'enseignement dans l'établissement
pour lequel le ministre a donné son consentement. Nous proposons donc l'article
16 du projet de loi n° 74 soit modifié pour supprimer l'obligation de recevoir
le consentement du ministre d'étudier dans un établissement précis.
Finalement, comme mentionné en premier
lieu, l'article 5 du projet de loi décline certaines distinctions prises en
compte en lien avec le nombre maximal de demandes reçues. On ne connaît pas encore
les critères qui vont être utilisés, mais le ministre de l'Immigration a
mentionné, lors de son point de presse le 10 octobre dernier, l'intention de
dispenser certains programmes en français et qu'il fallait s'attendre à une
réduction du nombre des personnes étudiantes issues de l'international sur
l'île de Montréal. Entendons-nous, l'UEQ reconnaît l'importance de la
préservation de la langue française. En ce moment, on a quand même une
contradiction qui vient se créer entre le souhait du gouvernement de préserver
la langue française et les mesures mises en place. D'un côté, le gouvernement
met en place des cours de français pour les personnes étudiantes, mais il n'y a
pas d'incitatif réel à aller étudier le français. C'est d'ailleurs ce qu'on
dénonçait avec les mesures du PEQ. L'UEQ pense qu'il est important que des
incitatifs soient mis en place pour encourager les personnes étudiantes à
apprendre le français.
Et c'est dans ce constat que notre
dernière recommandation est que le gouvernement québécois facilite la
francisation des personnes étudiantes internationales anglophones dès le début
de leur parcours universitaire pour contribuer à leur inclusion à la société et
préserver la vitalité du français au Québec sans réduire leur nombre en raison
de leur langue.
M. Paré (Etienne) : Je me
permettrais maintenant de conclure en rebondissant sur les annonces de jeudi
dernier. Du côté de l'Union étudiante du Québec, là, nous croyons que la
population étudiante internationale du Québec contribue grandement à l'essor de
la société québécoise, que ce soit en participant à l'avancement de la science
en français sur notre territoire ou en venant offrir une main-d'œuvre qualifiée
de grande qualité. Nous estimons que l'apport de la communauté étudiante
internationale n'est plus à démontrer. C'est d'ailleurs pour ces raisons que
nous dénonçons la volonté gouvernementale de suspendre sans préavis le
Programme de l'expérience québécoise. Le PEQ est un problème formidable qui
permet à des milliers de personnes étudiantes de réaliser leur rêve d'immigrer
au Québec.
• (15 h 30) •
Alors que nous entendons les
préoccupations du gouvernement concernant le nombre d'immigrants sur le
territoire du Québec, nous nous expliquons bien mal pourquoi on couperait le
PEQ. Il s'agit après tout de diplômés universitaires francophones. Les
étudiants diplômés du PEQ ne menacent pas la vitalité du français, ils y
contribuent. Ce sont des étudiants francophones qui sont sur le territoire
depuis au moins trois ans, puisqu'ils ont complété leurs études universitaires
ici. Ils sont généralement jeunes et vont contribuer à la société québécoise
pendant de nombreuses décennies, notamment en payant des taxes et des impôts.
Étant des diplômés universitaires, ils sont d'ailleurs des travailleurs
qualifiés qui répondent aux priorités gouvernementales. L'obligation d'être
francophone qui a été instaurée lors de la dernière réforme du PEQ...
15 h 30 (version non révisée)
M. Paré (Etienne) : ...est
également venu régler les enjeux linguistiques qui auraient pu toucher les
demandeurs du PEQ. C'est donc pour toutes ces raisons que nous expliquons bien
mal la décision du gouvernement de suspendre le Programme de l'expérience
québécoise. Nous demandons aux ministres de revenir sur sa décision. Je vous
remercie. Ça finirait notre présentation.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Votre 10 minutes, top chrono. Alors, on va
commencer la période d'échange. Les temps sont les mêmes que ce matin, 16 min
30 s pour le gouvernement. La parole est à vous, M. le ministre.
M. Roberge : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci pour votre présentation très claire, très étoffée. Je me
souviens très bien d'avoir été exactement à votre place, il y a un petit peu
plus de 25 ans, dans le mouvement étudiant, pour venir présenter aux
parlementaires et aux ministres, des positions. Donc, merci de faire ce que
vous faites. C'est important. Un mouvement étudiant est de faire entendre la
voix des jeunes. Vous parlez, oui, des universités, mais vous parlez aussi
toujours avec une vision d'avenir. Ça fait que c'est toujours rafraichissant.
Juste une petite mise en garde, vous avez
parlé, à la fin de votre présentation, de suspendre le PEQ, vous avez dit :
Couper le PEQ. Suspendre, d'accord? On va s'entendre, on a suspendu pour un peu
plus de six mois les invitations au programme étudiant, mais il n'est pas
coupé. C'est important de le préciser. Il faut rassurer les gens. On s'en
parlait un petit peu avant le début des auditions.
Vous avez dit : Il n'y a pas d'incitatif
pour apprendre la langue française pour les étudiants. Ça, ça m'étonne un peu
considérant que, bien sûr, pour être dans le Programme de l'expérience
québécoise étudiant, dans le PEQ diplômés, il faut maîtriser la langue
française, soit pour l'avoir appris avant puis avoir étudié avant, soit pour
être diplômé ici dans un programme francophone. Donc là, il y a une
valorisation de la langue. Mais sinon, si je ne parle pas la langue française
et que j'étudie dans un programme en anglais et que je veux faire ma vie au
Québec, je ne peux pas appliquer dans le PEQ diplômés, mais je peux appliquer
dans lePEQ travailleurs, auquel cas je suis obligé de maîtriser la langue
française quand même. Tu ne peux pas être un immigrant économique si tu
maîtrises pas la langue française. Donc, il me semble qu'il y a là une
valorisation de la langue qui est... qui est assez claire, là.
Et parlant de valorisation de la langue
dans un réseau autre que francophone, j'aimerais ça vous entendre, puisque on a
la chance de vous avoir, sur les mesures proposées par ma collègue suite au
plan d'action pour l'avenir sur la langue française, où on demande aux
universités anglophones d'être des vecteurs de francisation puis de franciser
les... les étudiants internationaux. Qu'est-ce que vous pensez de cette
mesure-là?
Mme Dommanget (Flora) : Moi,
je peux y aller. Bien, il y a plusieurs choses à prendre en compte. Déjà, le fait
que justement, dans les universités, en ce moment, il y a des... il y a des
cours qui vont pouvoir être donnés justement pour que les personnes étudiantes
internationales puissent aller apprendre le français. Mais ce qu'on constate, c'est
que c'est après leurs... leurs études qu.ils vont donc pouvoir appliquer à
certains programmes, etc. Nous, ce qu'on pense, c'est qu'avec le PEQ,
justement, il faudrait qu'il y ait des incitatifs directement qui y soient liés
pour que ça soit pendant que les personnes étudiantes soient aux études, qu'il
y ait cet incitatif et non après avoir complété leurs études, ce qui
favoriserait finalement, bien, l'attraction autour du français.
M. Paré (Etienne) : Puis,
pour répondre à la deuxième partie de la question, on est d'avis que les
universités anglophones peuvent jouer ce rôle-là aussi d'un vecteur de
francisation, puis c'est d'ailleurs l'idée de la demande. C'est que, si on
offre des cours de français dans les universités, mais qu'on fait simplement
les offrir sans contrainte, sans obligation, il n'y a pas nécessairement de
gens qui vont être incités parce que t'as déjà beaucoup de charge de travail, t'as
beaucoup de cours, tu as déjà beaucoup dans ton plat quand tu es aux études. Ça
fait que, nous, ce qu'on se dit, c'est que si on crée un incitatif en
permettant aux étudiants qui postulent au PEQ d'avoir faire... de faire un test
de français plutôt que d'avoir un... étudier en français, ça viendrait créer
cet incitatif supplémentaire là qui ferait en sorte que les gens iraient
prendre des cours de français, puis on aurait cette francisation qui serait
durant les études et non pas après, pendant qu'ils sont sur des permis de
travail temporaires.
M. Roberge : O.K. Je pense qu'on
a les deux, là, parce que, comme je l'ai dit, pour être résident permanent,
pour être immigrant dans le secteur économique, puis c'est ce que sont les
étudiants diplômés, il faut qu'ils apprennent la langue. Puis ensuite, avec la
mesure qu'on a prise avec les universités anglophones, bien, eux, ils vont
être obligés de créer les incitatifs par ce qu'ils sont... ils ont l'obligation
de franciser au moins 80 % de leurs étudiants pendant la formation. De
toute façon, ils sont gelés là.
Vous avez parlé tout à l'heure... de dire :
C'est important que la main gauche, la main droite soient bien arrimées, c'est
important qu'il y ait une cohérence. Vous avez dit : Le ministre de l'Immigration
doit se coordonner, c'est très important, avec le ministre de l'Éducation puis,
dans ce cas-ci, la ministre de l'Enseignement supérieur. Puis vous nous dites
qu'il fallait regarder l'article... je pense que c'est l'article 5 à cet
égard-là. C'est ça. On dit : Une telle décision... la décision du
gouvernement concernant...
M. Roberge : ...les demandes
présentées, doit être prise sur la recommandation conjointe du ministre et
selon leurs compétences respectives du ministre de l'Éducation, du Loisir et du
Sport et du ministre de l'Enseignement supérieur. Donc, il me semble que c'est
assez clair, ici, que le ministre de l'Immigration ne peut pas prendre cette
décision-là seul. Il doit le faire avec les ministres concernés. Pouvez-vous
m'expliquer qu'est-ce qu'il manque d'après vous, dans cet article-là?
M. Paré (Etienne) : Oui.
Bien, en fait, c'est dans l'alinéa au-dessus, où est-ce qu'on mentionne qu'une
décision du gouvernement est prise sur la recommandation du ministre, après
consultation du ministre de l'Éducation et du ministre de l'Enseignement
supérieur. Nous, ce qu'on pense, c'est que ça devrait être explicite dans tous
les alinéas, qu'on souhaite que ce soit un pouvoir de recommandation des trois
ministres ensemble, notamment parce qu'on n'est pas... On donne beaucoup de
pouvoir au ministre de l'Immigration. Puis quand on crée un pouvoir gouvernemental
comme celui-là, faut-il le considérer dans un... bien, dans une optique un peu
plus intemporelle? Puis, comme on n'est pas à l'abri d'avoir un ministre de
l'Immigration qui pourrait décider de se... bien, de ne pas se soucier de ce
que lui recommanderaient ses collègues à l'Enseignement supérieur et à
l'Éducation, bien, nous, on s'est dit, si c'était explicite dans la loi, que
c'est bel et bien les trois qui ont un pouvoir de recommandation ensemble,
bien, si jamais il y avait un ministre de l'Immigration futur avec une
idéologie quelconque qui chercherait à outrepasser ses collègues, bien, en
l'explicitant dans la loi, on s'évite un peu ce potentiel problème là.
M. Roberge : O.K. Je
pense qu'il y a peut-être une incompréhension, là, juridique parce que, tout de
suite après, ça dit : Malgré le premier alinéa, que vous n'aimez pas, une
telle décision doit être prise sur la recommandation conjointe du ministre. On
regardera, ici, s'il y a des ajustements à faire, là. Le cas échéant, on le fera.
On parle depuis tout à l'heure à la fois
d'effectifs étudiants, de langue et de financement du réseau. Qu'est-ce que
vous avez pensé de la décision du précédent gouvernement libéral en 2018, de
déréglementer les frais de scolarité pour les étudiants internationaux? Quel
était l'impact, d'après vous, sur les étudiants des différents secteurs, puis
sur le réseau?
M. Paré (Etienne) : Bien,
l'Union étudiante du Québec dénonce toute forme de hausse des droits de
scolarité, quelles qu'elles soient, depuis sa création. Puis on a été vocal à
l'époque, on n'était pas d'accord avec cette mesure-là. La déréglementation des
droits de scolarité de la population étudiante internationale a créé un peu un
phénomène où est-ce qu'on a été, justement, considérer ces gens-là un peu comme
des vaches à lait, si on veut, du système parce qu'on est venu utiliser les
droits de scolarité de la population étudiante internationale pour pallier au
manque de financement public. À cet effet-là, c'est d'ailleurs pour ça qu'on
est sortis fortement contre la politique de financement des universités,
Mme Déry, bien, de Mme la ministre de l'Enseignement supérieur, pardon,
puis également les annonces concernant les droits de scolarité des étudiants
canadiens non résidents, puis des étudiants internationaux qui ont eu lieu à
l'automne dernier, parce que, nous, on pense que la solution proposée par le
gouvernement ne répond pas à la problématique qui a été créée en 2018.
Si on veut réellement éviter cette
déréglementation-là, il faut revenir à l'ancien modèle avec un plafond de
droits de scolarité pour éviter que les étudiants internationaux soient
responsables du financement de nos universités. Puis la péréquation, telle
qu'elle est proposée en ce moment, là, ne suffit pas pour combler les lacunes
de l'investissement public.
M. Roberge : Merci. Je
comprends que vous avez des réserves par rapport au projet de loi, vous l'avez
exprimé dans votre présentation, mais est-ce que vous considérez qu'avec, quoi,
122 000 étudiants en ce moment sur le territoire québécois,
étrangers. On était à 50 080, on est rendu à 120 quelque mille. C'est
suffisant? C'est trop? Est-ce qu'il faudrait réduire? C'est quoi votre critère
pour dire que soit qu'il y en a trop, soit qu'il n'y en a pas assez?
M. Paré (Etienne) : Bien,
écoutez, l'Union étudiante du Québec, on représente des étudiants
universitaires au Québec en ce moment. Puis je pense que, quand on parle des
étudiants universitaires, c'est plus autour de 57 000, le chiffre exact.
Personnellement, je ne pense pas que c'est ces 57 000 étudiants
universitaires internationaux, là, qui ont l'impact qu'on pourrait leur porter.
Je ne pense pas que c'est eux qui accentuent la crise du logement. Je ne pense
pas que c'est eux qui nuisent à la vitalité du français au Québec.
• (15 h 40) •
Après ça, c'est certain que si sont venait
réduire le nombre d'étudiants internationaux, nous, notre crainte, c'est que ça
vienne affecter le financement des universités. Donc, naturellement, si on
décide de couper dans le nombre d'étudiants internationaux, bien, il faut
augmenter le financement public des universités parce que ça, c'est déshabiller
l'un pour habiller l'autre, là, ce qu'on a fait avec la dernière politique de
financement des universités, là.
M. Roberge : Dernière
question avant de laisser la place à mes collègues. Quand, à l'Université de
Montréal, il y a des paniers qui sont livrés chaque semaine, puis 72 % des
paniers vont à des étudiants internationaux qui n'ont peut-être pas les moyens,
en réalité, de subvenir à leurs besoins, quand, à l'UQAC, il y a des étudiants
qui disent : Bien, je n'ai pas de loyer. Il faut que...
M. Roberge : ...je vais à
l'hôtel. Puis c'est vrai dans d'autres universités aussi. Est-ce que vous ne
pensez pas que trop d'étudiants internationaux peut nuire à d'autres à un
moment donné? Parce que, je vous dirais, à un moment donné, c'est comme notre
capacité d'accueil serait dépassée, on peut parler de crise du logement ou
autre. Vous ne pensez pas qu'à un moment donné la fameuse devise, là, qu'on a
déjà entendue, en prendre moins pour en prendre soin, ça éviterait des
dérapages comme des étudiants qui sont obligés de passer une session à l'hôtel?
M. Paré (Etienne) : Je pense
que, si on se met à parler de précarité financière de la population étudiante,
la vraie conversation doit tourner autour des droits de scolarité des étudiants
internationaux. Je pense que tant que les droits de scolarité vont être
déréglementés puis qu'on va leur charger aussi... des montants aussi élevés,
peu importe le nombre qu'on va recevoir sur le territoire, on va continuer de
les maintenir dans une position de précarité. Je pense que c'est important
qu'on revoie à la baisse les montants des droits de scolarité de la population
étudiante internationale puis, après ça, bien, qu'une fois qu'on a revu ces
montants-là à la baisse, je pense qu'on va avoir significativement moins
d'enjeux au niveau de la précarité de ces gens-là.
M. Roberge : Ça ne répond pas
à la question sur le logement. Mais je veux quand même laisser ma collègue
sinon elle n'aura pas le temps de poser ses questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, je reconnais la députée
d'Iberville. Il vous reste cinq minutes 42 secondes.
Mme Bogemans : Parfait. Moi,
je voulais vous remercier pour votre présentation.
Puis tout d'abord, je voulais voir si vous
croyez au bien-fondé d'avoir les données sur le parcours, le cheminement des
étudiants étrangers au Québec.
M. Paré (Etienne) : Bien, tu
sais, nous, on pense qu'en général plus qu'on a de données, mieux c'est, dans
le sens où, nous, plus on a accès à de l'information, plus c'est facile
d'évaluer les situations. Donc, oui, évidemment, si on était capables d'obtenir
plus d'informations, bien, on croirait davantage à ce qu'on a, là.
Mme Bogemans : D'accord.
Parce que la déréglementation des CAQ, tu sais, de mettre un étudiant dans un
établissement, bien, ça coupe une certaine prise de données. Selon vous, ce
serait quoi, le meilleur outil à mettre en place pour aller chercher ces
données-là? Puis quel genre de données vous aimeriez qu'on aille chercher?
M. Paré (Etienne) : Je vous
dirais qu'au niveau du CAQ, nous, la critique principale qu'on a émise, c'était
qu'en inscrivant l'établissement sur le CAQ, on venait réduire la mobilité des
personnes étudiantes qui sont sur le territoire du Québec. Notamment, quand
qu'il y a des enjeux, par exemple, où... puis là, je vais prendre des exemples
très spécifiques, là, mais aux cycles supérieurs, si quelqu'un est à la
maîtrise ou au doctorat, a un problème avec son professeur associé, par exemple
de harcèlement psychologique, harcèlement sexuel, peu importe, puis qu'il doit
changer, s'il doit trouver une sommité dans son domaine, il y a de fortes
chances qu'il doive changer d'établissement. Bien là, s'il faut qu'il repasse
par tout le processus de demandes, ça peut être problématique. Puis, nous, une
de nos craintes qu'on a, c'est qu'avec les nouvelles mesures, qu'il y ait des personnes
qui soient perdues dans la machine administrative, tu sais, même pas
volontairement, nécessairement, mais juste parce qu'on a atteint notre quota,
on perd quelqu'un qui est déjà sur le territoire, par exemple. Ce serait une
situation qu'on veut s'éviter.
Après ça, pour la collecte de données, je
crois que c'est de donner les outils aux administrations universitaires et leur
donner des directives claires sur le genre de données qu'on veut collecter. Je
pense que les gens qui paient leurs droits de scolarité, ils ont accès à des
comptes, ils ont accès à des informations, ils ont accès à... les données, les
universités ont accès à ces données-là, de ces personnes-là, parce que sinon,
s'ils n'ont pas accès, c'est parce que ça veut dire qu'ils ne sont pas dans
l'établissement. Ça fait qu'est-ce que ce serait au ministère de collecter
lui-même les droits de scolarité puis de les redistribuer dans le réseau avec
un prix plafond des droits de scolarité des étudiants internationaux, je ne
sais pas. C'est peut-être une idée qu'on pourrait explorer.
Mme Bogemans : Mais est-ce
que vous trouveriez ça acceptable? Parce que, tu sais, vous soulevez, bon, des
cas problématiques de relations, là. On comprend, là, que ce n'est absolument
pas ce qu'on désire non plus. Mais est-ce qu'il y a des... par exemple, un
chemin clair en cas d'exception ou harcèlement, tout ça, pour accéder à
l'équivalent d'un permis ouvert d'étudiant serait une mesure acceptable dans
l'exemple que vous avez nommé?
Mme Dommanget (Flora) : Oui.
Bien, c'est sûr que plus on accompagne justement ces personnes, mieux c'est,
dans le fond, tu sais. Ça peut être des services qui vont être directement mis
en place avec les universités. Ça fait que nous, c'est sûr que, dans ce
sens-là, puis il y a de l'accompagnement, de la collaboration à ce niveau-là,
ça viendrait régler pas mal de problèmes à ce niveau-là puis ça permettrait
justement à la population étudiante internationale, bien, d'avoir un meilleur
service à ce niveau.
Mme Bogemans : Parfait. Donc,
un CAQ nominé avec... ça pourrait fonctionner, mais avec des mesures claires,
pour un étudiant qui aimerait accéder à la mobilité plus rapide, par exemple.
Mme Dommanget (Flora) : Oui,
bien, ça. C'est sûr qu'il ne faudrait pas venir non plus, tu sais, ajouter une
charge pour cette personne étudiante, tu sais. Il faut quand même qu'on puisse
l'accompagner, pas que ce soit juste sa... tu sais, sa responsabilité en tant
que telle. Il faut que des services puissent mettre... être mis en place
vraiment pour venir supporter cette population.
Mme Bogemans : Parfait.
Superintéressant. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste encore deux minutes 15 secondes. Est-ce qu'il
y a d'autres questions? M. le ministre.
M. Roberge : Quand on regarde
la présence des étudiants ici, on nous dit que c'est une richesse. Je n'en
doute pas. Ils viennent ici, d'abord, ils interagissent avec les gens, il y a
une... l'avantage de la diversité puis de rencontrer...
M. Roberge : ...autant pour
les étudiants étrangers que les gens qui sont ici, mais souvent les gens
disent : Oui, mais ils contribuent, c'est des futurs Québécois, ils vont
s'implanter. Est-ce que vous avez, d'après vous, des estimations, des chiffres,
de quel pourcentage d'étudiants étrangers universitaires qui restent ensuite de
manière durable sur le territoire québécois? Est-ce que vous avez ces
données-là?
M. Paré (Etienne) : Bien, ça,
c'est des données qu'on n'a pas, puis je pense qu'on parlait tantôt de quel
type de données qui pourraient être intéressantes à collecter. Je pense que ça,
ça en serait un bel exemple, notamment parce qu'une fois qu'ils sortent de
l'établissement universitaire, il n'y a plus de suivi qui est fait par personne
puis je pense que ça permettrait de faire une démonstration, si c'est le cas,
est-ce que c'est vrai que les étudiants internationaux restent sur le
territoire? Si c'est le cas, est-ce que c'est vrai qu'ils restent dans la
région où ils ont étudié? Parce que si on était capable de faire la
démonstration de ça, je pense que ça viendrait confirmer à quel point leur
apport est essentiel.
Nous, ce qu'on voit sur le terrain, c'est
que la population étudiante internationale, elle est très impliquée dans sa
communauté. C'est des gens qui s'impliquent beaucoup dans les associations
étudiantes, vont beaucoup s'impliquer dans les différents clubs, les différents
regroupements sur les campus, ils contribuent à la vitalité de la région puis
c'est quelque chose qu'on voit particulièrement dans les plus petits milieux.
Je pense à l'UQAT, je pense à l'UQAC, où est-ce que, justement, le contact avec
la population universitaire et la population régulière est plus proche que, par
exemple, à Montréal parce que, là, il y a beaucoup trop de monde pour avoir ce
genre de proximité là. Ça fait que je pense que ce serait intéressant de
collecter des données là-dessus pour qu'on puisse brosser ce portrait-là, parce
que je pense qu'on aurait des belles surprises, là, à ce niveau-là.
M. Roberge : Il reste-tu
quelques secondes?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 24 secondes.
M. Roberge : 24 secondes.
Ce matin, le Commissaire à la langue française nous a parlé des différents
critères et nous a suggéré le critère de la langue. Quelle est votre opinion
là-dessus?
Mme Dommanget (Flora) : Bien,
c'est sûr que nous, on ne pense pas que c'est un critère suffisant. On pense
que tout le monde devrait avoir la possibilité d'étudier le français. Ça fait
que ça reviendrait simplement à discriminer la population étudiante qui ne
parle pas français de base.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Vous allez comprendre, je suis la maîtresse
du temps. Alors, on est rendu à l'opposition officielle pour une période, comme
ce matin, de 9 min 54 s. M. le député de l'Acadie, la parole est
à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. Paré, Mme Dommanget, merci d'être là. Merci
pour votre mémoire. Je suis content de pouvoir échanger avec vous, parce
qu'évidemment vous représentez les étudiants et étudiantes. Il y a quelques
jours, le ministre de l'Immigration suspendait le PEQ. Maintenant, on est en
train d'utiliser le p.l. n° 74. Il se sentent
comment, vos étudiants? Parce qu'on a la chance de vous entendre, puis moi,
j'aimerais ça... Tu sais, on parle des statistiques, on parle des chiffres,
mais, en immigration, là, derrière des chiffres, il y a des humains, il y a du
vrai monde, puis j'aimerais ça que vous puissiez nous en parler. C'est quoi,
l'impact?
M. Paré (Etienne) : Oui. On a
une population étudiante internationale extrêmement anxieuse présentement,
notamment en raison du changement de discours, bon an mal an, depuis quelques
années qu'on voit. On parle du Programme de l'expérience québécoise, là, ça
fait quelques années qu'on revient sur des décisions à plusieurs reprises. Même
si, individuellement, certaines de ces décisions n'ont pas nécessairement
beaucoup d'impact concrètement, c'est l'accumulation de chacune d'entre elles
qui viennent créer une source d'inconfort qui fait en sorte que tu ne sais pas,
tu sais, tu es trois ans ici pour étudier. Si, d'une année à l'autre, ça change
puis que, pendant tes trois ans d'études puis l'année que tu es là après tes
études, ça a encore changé, c'est un peu dur de planifier ta vie.
Hier, on avait, dans nos bureaux à l'UEC,
une rencontre d'un organisme partenaire, Le Québec, c'est nous aussi, qui a
réuni plus d'une centaine de personnes qui cherchent à se mobiliser, justement,
pour dénoncer les mesures du PEQ. On a entendu des histoires assez tristes des
étudiants français, par exemple, qui ont dépensé tout leur héritage familial
pour immigrer au Québec avec leurs deux enfants puis leurs conjoints, puis que,
là, ils se retrouvent dans une incertitude. Ça crée de l'anxiété. Eux ont la
crainte de devoir retourner en France en ayant investi toutes ces dizaines de
milliers de dollars là pour immigrer ici, puis, finalement ne pas pouvoir
l'avoir. Ça fait que je dirais que c'est vraiment de l'anxiété qu'on observe
sur le terrain en ce moment, certaines frustrations puis une certaine colère
également, là, à l'égard des différentes annonces gouvernementales.
M. Morin : Je vous remercie.
Parce qu'évidemment les étudiants à l'international qui viennent ici, il y en a
plusieurs qui retournent. On entendait ce matin des recteurs et rectrices
d'universités nous parler que ce sont des ambassadeurs également du Québec à
l'étranger quand ils retournent. Pensez-vous que ces mesures-là vont avoir un
impact sur la réputation du Québec à l'étranger?
• (15 h 50) •
M. Paré (Etienne) : Ce qu'on
observe depuis deux, trois ans, c'est notamment que, tu sais, il y a un
discours assez controversé, que ce soient les mesures par le gouvernement du
Québec et les mesures par le gouvernement du Canada. Je ne pense pas qu'on a
particulièrement bonne presse en ce moment. Puis, à titre d'exemple, quand, en
2019, on avait modifié le Programme de l'expérience québécoise pour acheter un
12 mois de travail obligatoire, on avait vu une baisse des demandes...
M. Paré (Etienne) : ...une
baisse fulgurante. On a vu que les étudiants internationaux passaient par
d'autres provinces pour s'installer ici après, allaient en Ontario, allaient
ailleurs, et on s'était dit : Bien, ça n'a pas de sens, on va revenir sur
cette mesure-là. Puis c'est pour ça que l'an dernier on l'avait retiré, ce 12
mois de travail là, puis on était revenus à ce que c'était avant cette
réforme-là.
Ça fait que clairement que ça a un impact.
Tu sais, quand on entend les recteurs des universités ce matin nous dire qu'il
y a une baisse des demandes puis une baisse des admissions de... je pense,
c'est quoi, c'est des 20 %, des 15 % qu'on a observés cette année, je
pense que c'est lié en partie au message, là, qu'on envoie à l'international,
là.
M. Morin : Merci. Dans votre
intervention, vous avez parlé rapidement de l'effet sur l'Université Bishop.
Est-ce que vous pouvez nous en dire plus? Est-ce que l'effet sur Bishop est
plus dramatique? C'est une université... vieille université en région.
Pouvez-vous nous en parler davantage? Est-ce que le gouvernement vise Bishop
particulièrement? Est-ce que c'est le sentiment que vous avez?
Mme Dommanget (Flora) : Oui.
Bien, si on compare un peu avec ce qui avait été fait l'automne dernier, tu
sais, c'est sûr que Bishop avait été oublié dans les mesures... la mesure,
justement, de la... de la hausse, etc. Tout ça, ça venait créer en fait, bien,
un trou pour Bishop, qui allait... bien, qui dépendait fortement de cette
population. Ça fait que là, en ce moment, on constate encore, tu sais, une
baisse, et on peut supposer aussi que c'est le message que le gouvernement a
envoyé à cette population-là, de... bien, de ne plus venir, au final, tu sais,
là. Puis des universités comme ça qui vont être oubliées, ça, ça risque de faire
dur. Justement, là, on parle d'une baisse de 40,4 % d'inscriptions au
deuxième cycle. On s'entend aussi que la recherche, c'est ce qui fait le
rayonnement à l'international. Ça fait que venir justement mettre des mesures
comme ça qui dissuadent le monde de venir, ça en met un coup à l'international
aussi.
M. Morin : Je vous remercie.
Évidemment, quand on veut adopter des mesures, la planification... dialogue, je
pense que c'est important. Dans l'opposition officielle, on demande une
meilleure planification de la part du gouvernement.
J'aimerais attirer votre attention sur une
disposition du projet de loi, l'article 7 — d'ailleurs, le
Commissaire à la langue française en parlait dans son mémoire — où le
gouvernement, par l'effet de cet article-là, si je comprends bien, veut se
soustraire ou veut soustraire ses projets de règlements de l'obligation de
publication au préalable à la Gazette officielle. Ça semble être
l'inverse de la transparence ou d'une consultation. Est-ce que vous avez
réfléchi à ça? Avez-vous des conseils à donner à nous, qui sommes le
législateur, là-dessus?
M. Paré (Etienne) : Oui.
Bien, c'est pour ça que nous, on s'est un peu inspirés du modèle de l'aide
financière aux études, où il y a une obligation de consultation du comité pour
avoir un rapport dans les 30 jours qui suivent l'annonce. Je pense que c'est la
FNEEQ-CSN, là, qui propose justement d'avoir le projet de règlement 45 jours à
l'avance, là. Après ça, on n'est pas des experts des procédures parlementaires,
mais je pense que d'inclure spécifiquement et à l'écrit dans le projet de loi
des mesures de consultation publique, c'est vraiment une meilleure politique
publique, ça va être une meilleure façon de gouverner. Par souci de
transparence, là, je pense que ce serait bien d'apporter ce type d'amendement,
quand vous passerez en commission parlementaire, à ce moment-là, là.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie. Alors, Mme la Présidente, je vais céder la parole à ma collègue de
Mont-Royal-Outremont.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. La parole est à vous. Il reste encore
3 min 33 s
Mme Setlakwe : Merci. On se
demande toujours, comme législateurs, aussi quelle est la problématique à la...
qu'on tente de résoudre en déposant un projet de loi, et ici, non seulement on
a de la difficulté à identifier la problématique, mais on semble être devant un
flou quant à l'intention réelle du gouvernement. Est-ce que vous... puis vous,
vous représentez énormément de... d'étudiants partout au Québec... Est-ce
que... Est-ce qu'il y a une... Est-ce que vous êtes capables de... de saisir la
problématique? Et est-ce que vous voyez qu'il y aurait des gestes à poser en
région, à Montréal? Il est où, le... Il est où, le problème?
M. Paré (Etienne) : Oui.
Bien, on... on s'explique bien mal, nous aussi, ce que le gouvernement essaie
de faire avec ce projet de loi là, notamment parce qu'en raison des deux
dernières moutures de la politique de financement des universités et en raison
de la planification stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur des
dernières... 2023-2027, on a fait du recrutement à l'international un pan
essentiel du développement de nos universités, que ce soit à des fins de
financement, que ce soit à des fins de rayonnement. On essaie de régler un
problème que, si on qualifie ça de problème... Bon. Là, on pourrait avoir tout
le débat idéologique que... Nous, on ne considère pas que c'est un problème,
là, mais c'est quelque... un problème qu'on a créé de toutes pièces, dans le
sens où, si on n'avait pas déréglementé les droits de scolarité, si on n'avait
pas rendu la course à l'effectif d'étudiants internationaux la pierre angulaire
du financement des universités, on ne se retrouverait pas dans cette
situation-là...
M. Paré (Etienne) : ...qui,
selon nous, n'est pas justifié. La population internationale, il faut arrêter
d'en parler comme si c'était du bétail, là, tu sais, ce n'est pas juste des
chiffres, ce n'est pas juste des nombres, c'est des gens avec des histoires,
c'est des gens qui veulent s'installer, dans bien des cas, sur le territoire,
qui veulent contribuer à l'essor, à la vitalité du Québec. Ça fait qu'on
s'explique bien mal, là, ce qu'on essaie de régler ici, en ce moment, là.
Mme Setlakwe : Merci. Puis,
pour revenir sur la question de la vitalité des régions, et on a... on comprend
et on a entendu l'Université du Québec, ce matin, la présence des étudiants
internationaux fait en sorte qu'on est capable de maintenir des programmes,
assurer des cohortes. Est-ce que vous êtes inquiets qu'il y ait des programmes
qui pourraient ne pas survivre et que ça pourrait affecter certaines régions?
Mme Dommanget (Flora) : Bien
oui, c'est sûr qu'on est très, très... très... comment on pourrait dire? On a
une grande crainte à ce niveau-là, tu sais. Et, en plus, on ne comprend pas
trop qu'est-ce qui se passe, puisque, bien, il y a des mesures qui sont quand
même mises en place pour faire en sorte qu'il y ait plus de personnes
étudiantes internationales en région, je pense notamment aux exemptions qui
avaient été mises en place par le ministre du Travail, mais, ici, on viendrait
donc réduire de nouveau cette population étudiante en région. On ne sait pas
trop qu'est-ce qui se passe. Ça fait que c'est sûr qu'on a des grandes craintes
qu'il y a des programmes qui peuvent être mis de côté. Quand on parle,
justement, tu sais, de la pénurie de main-d'oeuvre, tu sais, qu'est-ce qu'on
cible exactement? On est un peu dans le flou, à ce niveau-là, et on a peur,
justement, que, mettons, tout ce qui peut être arts, etc., puisse être mis de
côté et oublié alors que c'est ce qui fait aussi la richesse du Québec.
Mme Setlakwe : Merci. On a
terminé?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 16 secondes.
Mme Setlakwe : Ah! On est
dans le flou avec vous. Est-ce que vous croyez que... Parce que vous allez même
dans l'objectif du projet de loi, puis il faudrait dire clairement que les
étudiants étrangers qui viennent travailler dans nos laboratoires de recherche
sont un atout essentiel. Est-ce que vous diriez qu'il faudrait...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est terminé. Il restait 16 secondes. Merci. On entame le
prochain groupe avec... le deuxième groupe d'opposition officielle. 3 min 18 s.
La parole est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci d'être là. Merci de votre intervention. Votre dernière
intervention, sur la fin, là, me faisait me remémorer le nombre de fois où vous
avez dit, finalement, ce que vous avez présenté aujourd'hui, sur les
modifications du PEQ 2019, on s'en souvient, première réforme du PEQ, avec des
listes de programmes désuets, là, qui n'existaient pas, finalement, ou, en tout
cas, majorité ou un certain nombre, annulés. Deuxième réforme, la même année ou
l'année suivante, avec des exigences de travail, pas de droits acquis malgré ce
qui avait été promis, annulé aussi. Ensuite, réforme avec l'exigence de travail
en 2020, quelques droits acquis, celui-là a pris vigueur en 2020 pour... finalement,
en 2023, baisse catastrophique des admissions au PEQ diplômé, on finit par
retirer l'exigence de travail. Puis, à peu près au même moment, on décide que
les candidats du PEQ diplômé sont la panacée de l'immigration économique. On
les retire des seuils en disant : Il n'y a plus de limite, c'est ceux-là
qu'on veut. Pour finalement, quelques mois plus tard, en 2024, les suspendre
complètement pendant huit mois. Et là je me permets de penser que, si on suit
la séquence, en juin prochain, quand le programme veut réouvrir, on va
probablement revenir avec l'exigence de travail.
Honnêtement, là est-ce qu'on ne navigue
pas en plein brouillard au détriment de la vie et de la réalité des étudiants
internationaux du Québec?
M. Paré (Etienne) : En ce
moment, on maintient des gens qui ont sacrifié beaucoup pour venir ici, qui
paient des droits de scolarité gigantesques pendant plusieurs années dans
l'espoir d'avoir un emploi, une formation de qualité, puis de s'installer sur
le territoire, puis de contribuer à la vitalité économique du Québec. On aura
la chance, assurément, d'en rediscuter lors des prochaines consultations sur la
planification en immigration, mais c'est certain que, pour nous, revenir à un
12 mois de travail au PEQ, c'est venir réduire l'attraction de ce programme-là.
La dernière mouture par la prédécesseure du ministre de l'Immigration était ce
qui nous semblait le mieux, ça fait qu'on espère bien qu'on aura une bonne
écoute de ce côté-là lors des prochaines consultations.
• (16 heures) •
M. Cliche-Rivard : Et tout
ça, au final, pour qu'avant cette modification-là, on tourne à autour de 8000
CSQ émis par année, dans cette catégorie-là, pour diminuer à quelques milliers,
finalement, 1952, en 2022, puis 3600, en 2023, pour remonter finalement à
15 000. Donc, si on fait une moyenne, là, on tourne toujours autour de 7000,
8000. Donc, l'ensemble de ça...
16 h (version non révisée)
M. Cliche-Rivard : ...finalement,
ça aura juste été un mirage ou une communication politique sur le dos des
étudiants internationaux.
M. Paré (Etienne) : Puis,
bien, ça revient à l'anxiété qui est vécue en ce moment. Je pense qu'on envoie
des signaux un peu contradictoires à la population étudiante internationale.
Puis on vient leur créer du stress inutile en donnant l'impression qu'on fait
de la politique sur leur dos. Un processus d'immigration, ce n'est pas quelque
chose qui se planifie en un an. Ça prend plusieurs années, particulièrement
quand on est un étudiant international, on vient étudier ici pendant trois ans
au minimum avant de pouvoir postuler. C'est beaucoup de temps dans une vie, c'est
beaucoup d'argent, c'est beaucoup d'investissement.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour votre intervention.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci... Merci. Alors, on termine avec le député de
Jean-Talon, une période de trois minutes, 18 secondes.
M. Paradis : Vous nous
appelez à nous rappeler à quel point l'apport des étudiants étrangers, c'est
une richesse pour le Québec. Et ça, je pense que c'est important de réitérer qu'ici
pas mal tout le monde s'entend là-dessus. En fait, tout le monde s'entend sur
cette question-là. Le ministre l'a mentionné. Mes collègues des trois... des
deux autres partis d'opposition, et nous, on l'a mentionné aussi à quel point,
c'est important.
Il y a neuf ans, c'est-à-dire en 2015, il
y avait 50 000 permis pour des étudiants étrangers qui étaient octroyés à
chaque année, on est passés à 70 000, en 2017-2018, puis aujourd'hui à 125 000.
Moi, j'ai été actif à l'échelle internationale pendant ces années-là. Et le
Québec a toujours... même à cette époque-là, était reconnu comme un endroit
généreux pour l'accueil des étudiants. Ça, je pense que c'est important de le
dire, mais là il y a eu un pic. Qu'est-ce qui s'est passé? Bien, il y a eu deux
choses, il y a les règles de financement qui ont été changées, dans la dernière
année du gouvernement libéral, puis l'arrivée au pouvoir de la CAQ. Et ça, vous
le mentionnez dans votre mémoire, c'est là-dessus que je vous amène. Vous, vous
dites que les... la politique actuelle a pour conséquence de lier les sommes
octroyées aux universités au nombre de personnes étudiantes internationales
rejoignant leurs bancs. Et là vous dites : Actuellement, si on ne révise
pas les règles de financement et qu'on baisse le nombre d'étudiants, ça va
avoir l'impact du définancement. Nous, dans nos orientations, on dit : Il
faut s'attarder à la question du financement et on suggère de revenir à des
règles similaires à celles d'avant 2018. Moi, j'aimerais vous entendre sur
cette question-là des règles de financement pour les études supérieures au
Québec.
M. Paré (Etienne) : Oui. On a
pris connaissance, là, de la proposition du Parti québécois dans votre
planification pour l'immigration. Comme je l'ai mentionné au ministre de l'Immigration,
si on veut réduire le nombre d'étudiants internationaux, nous, on n'a pas de
chiffre à vous proposer, évidemment, là. Il faudrait absolument revoir le
financement public des universités, parce qu'on a créé cette dépendance, hein,
on a fait une politique à coût nul, qui a été annoncée en juin dernier. Ça veut
dire que tous les nouveaux investissements, hein, les programmes d'incitatifs
pour l'opération pénurie de main-d'oeuvre, la redistribution de la richesse
dans le réseau francophone, dans le réseau de l'UQ, toutes ces sommes-là sont
dépendantes des inscriptions de la population étudiante internationale,
principalement dans les établissements anglophones de McGill et de Concordia.
Si on veut réellement réduire le nombre d'étudiants internationaux, il faut
plus d'investissements publics dans le financement des universités. Sinon, on
se crée un problème dans lequel on va avoir de la difficulté à se remettre.
Surtout considérant que, là, ça va faire bientôt six ans qu'on a décidé qu'un
des aspects importants du financement des universités, c'était le recrutement à
l'international. On a déployé beaucoup d'effort pour le faire. Bien, si on
décide de changer complètement l'orientation, il va falloir que le portefeuille
s'ouvre pour ça, là.
M. Paradis : Puis là, quand
vous... quand vous regardez le projet de loi n° 74, est-ce que vous voyez
cette intention-là? Est-ce que vous voyez cette planification-là, c'est-à-dire
de rediscuter des règles de financement en même temps qu'on discute des seuils
et surtout des outils que le ministre veut se donner?
M. Paré (Etienne) : Bien, la
raison pour laquelle on propose d'instaurer dans la loi des consultations, un
rapport aux deux ans des mesures qui ont été mises en place, c'est parce qu'en
ce moment on débat d'un projet de loi, mais on n'a aucune idée de c'est quoi,
les scénarios qui vont être amenés. Puis je pense que c'est un peu un
exercice... une occasion manquée d'avoir cette conversation-là, possiblement
justement, parler de financement des universités, parler de ces seuils-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fait à cette audition.
Alors, merci pour votre présence pour l'enrichissement à nos travaux.
La commission va suspendre quelques
instants, le temps de recevoir le prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 05)
(Reprise à 16 h 08)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux.
Alors, nous recevons la Fédération des
cégeps avec comme représentants Mme Marie Montpetit, présidente-directrice
générale, bienvenue, M. Francis Brown Mastropaolo, directeur des affaires
internationales, Mme Manon Couturier, directrice générale du cégep de
Baie-Comeau, ainsi que M. André Gobeil, directeur général du cégep de Rimouski.
Alors, bienvenue à cette audition...
M. Gobeil (André) : ..
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : «De Rimouski», de Chicoutimi, j'ai enlevé trop vite mes
lunettes.
M. Gobeil (André) : ...confusion
qu'on fait souvent, on vous en excuse.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je les ai retirées trop vite. Alors, vous allez avoir
10 minutes pour présenter vos propos. Ensuite, on va entamer la période de
discussion avec les parlementaires. La parole est à vous.
Mme Montpetit (Marie) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, mesdames messieurs les députés,
salutations également à votre équipe qui vous accompagne. Au nom de la
Fédération des cégeps et des 48 cégeps publics qui en sont membres, je
tiens à remercier les membres de la commission pour ce temps de parole qui me
permet d'aborder des enjeux importants pour le réseau collégial québécois.
En conférence de presse le 10 octobre
dernier, le ministre l'Immigration, de la Francisation et de l'intégration a
indiqué que le projet de loi n° 74 vise à admettre un nombre d'étudiants
et d'étudiantes internationaux qui respectera la capacité d'accueil du Québec.
En simple, il a décrit ce projet de loi comme une solution à une situation
complexe. Pour s'assurer que la réponse du gouvernement soit à la fois ciblée
et efficace, sans se détourner des répercussions réelles du projet de loi
n° 74, nous voulons donc attirer l'attention de la commission sur
plusieurs points de vigilance incontournables.
• (16 h 10) •
La fédération soulève trois enjeux majeurs
dans ce projet de loi. Tout d'abord, il établit un amalgame risqué en suggérant
une participation des 48 cégeps publics à un problème duquel ils ne font
pas partie. Non, les cégeps ne sont pas une porte d'entrée incontrôlable pour
les étudiantes et les étudiants internationaux. Bien au contraire, ils font
partie de la solution à de nombreux défis qu'affronte la société québécoise.
Ensuite, le projet de loi présente des objectifs flous quant à sa mise en
application. Nous ignorons les éléments guidant sa mise en œuvre. La portée du
projet de loi est large...
Mme Montpetit (Marie) : ...et
général. Et ses pouvoirs pourraient porter atteinte à l'autonomie des cégeps et
réduire leur contribution partout au Québec.
Finalement, il pourrait créer une
situation qui met à risque la vitalité et l'accessibilité à de nombreux
programmes de formation dans toutes les régions administratives du Québec, où
les besoins de main-d'œuvre demeurent importants.
Le réseau des cégeps a connu ces dernières
années une croissance raisonnable, contrôlée et éthique de sa population
étudiante internationale. À l'automne 2023, ces étudiants représentaient
environ 5 % de notre effectif global, soit près de
9 000 étudiants internationaux sur 200 000. Je tiens à préciser
que ces résultats sont alignés avec les priorités et les initiatives
gouvernementales. C'est le cas pour les objectifs, notamment de sa politique
internationale et de protection de la langue française, mais aussi pour ceux
touchant aux solutions de la pénurie de main-d'œuvre. Les cégeps, comme je l'ai
mentionné, sont une solution et non pas un problème.
Aussi, les cégeps ne tirent pas de primes
pécuniaires par l'accueil d'étudiants internationaux. Ces derniers contribuent
plutôt à notre capacité de contribuer à la vitalité de nos collectivités. La
seule prime qui accompagne leur arrivée, c'est celle de maintenir
l'accessibilité à de nombreux programmes d'études dans des domaines de
formation où les besoins de main-d'œuvre demeurent importants. Sans ces
étudiants internationaux, le démarrage de nombreuses cohortes serait compromis.
La conséquence de ces programmes non offerts priverait en premier lieu la
jeunesse québécoise d'un accès à l'enseignement supérieur. Et, en second lieu,
le secteur public est privé de l'emploi d'une main-d'œuvre qualifiée dans tous
les secteurs de l'économie et des services.
Lors d'une consultation récente auprès de
notre réseau, 25 cégeps nous ont fait part de l'importance de cette
population pour le maintien de leurs programmes. Qu'il soit question de la
région de Montréal, de l'Abitibi, de la Gaspésie, de la Mauricie, des
Laurentides, de Lanaudière, de la Montérégie, de Laval, du
Saguenay-Lac-Saint-Jean et de Chaudière-Appalaches. Tous expriment une même
préoccupation : limiter l'accueil d'étudiants internationaux aurait un
effet domino direct sur les programmes et accentuerait la rareté de la main-d'œuvre
que les entreprises et organismes publics partout au Québec, subissent déjà.
Mes collègues directeurs généraux qui
m'accompagnent pourront vous donner des exemples concrets dans la période de
questions et vous prouver que cela affecte et affectera directement des
citoyens des circonscriptions que vous représentez. C'est pour ça que la
Fédération des cégeps recommande que les cégeps soient exemptés de tout plafond
réduisant le nombre d'étudiants et d'étudiants internationaux et obtiennent
l'assurance de pouvoir continuer de desservir leur mission d'accessibilité et
de contribution à la collectivité.
La Fédération des cégeps est aussi très
inquiète par rapport à la centralisation d'un pouvoir décisionnel à cet égard.
Confier une telle responsabilité à un ministère, respectueusement, qui n'a pas
l'expertise de l'enseignement supérieur peut mener à des décisions arbitraires
et mal alignées avec les réalités du réseau collégial. C'est pourquoi la
fédération recommande de mettre en place une concertation obligatoire avec le
ministère de l'Enseignement supérieur et les cégeps avant toute décision qui
affecterait leur capacité d'accueil. Cette collaboration garantirait des
décisions éclairées, tenant compte des besoins du réseau et des priorités
locales.
La promotion à l'international des
programmes d'études découle des besoins locaux d'accessibilité pour la jeunesse
québécoise, des besoins de main-d'œuvre en lien avec les secteurs d'emploi et
des ententes partenariales. Même si un arrimage avec les objectifs et les
priorités gouvernementales en matière d'immigration peut être souhaitable, ils
ne doivent pas se substituer aux objectifs et aux priorités en matière
d'enseignement supérieur, notamment ceux des cégeps. Toute ingérence dans
l'autonomie des cégeps dans l'adoption de leurs priorités en matière de gestion
de leur offre éducative et d'attraction d'étudiants et d'étudiants
internationaux doit absolument être évitée. C'est pourquoi la Fédération des
cégeps recommande que toute décision liée à la gestion des demandes prises en
vertu de la Loi sur l'immigration au Québec concernant les étudiants et les
étudiants internationaux soit également prise en consultation avec les
ministères sectoriels concernés et les établissements d'enseignement publics
concernés ou les organisations qui les représentent.
Aussi, les personnes qui prévoient
poursuivre leurs études dans un autre pays s'informent des possibilités
d'études des mois, parfois même des années, avant de démarrer le processus
administratif, tant au niveau scolaire que migratoire. Pour que nos relations
partenariales fonctionnent, il faut minimalement que ces personnes intéressées
puissent mettre leur confiance dans ce genre de projet. Les cégeps doivent donc
pouvoir travailler au niveau international dans un environnement caractérisé
par la stabilité et la prévisibilité. Dans cette optique, la Fédération des
cégeps recommande de prévoir un délai minimal de 18 mois dans
l'application de toute nouvelle mesure de restriction liée à l'immigration dans
le réseau collégial, afin de permettre une planification adéquate et de
maintenir la stabilité de nos ententes à l'international.
Nous rappelons ici que les projets d'étude
internationaux se planifient sur le long terme. Pour que le Québec continue
d'attirer des talents, il est essentiel de garantir la prévisibilité de nos
politiques et de protéger la réputation du Québec comme destination d'étude
fiable et accueillante. Même si le projet de loi ne précise pas des modalités
opérationnelles, la fédération estime essentiel de souligner les multiples
points de vigilance...
Mme Montpetit (Marie) : ...à
prendre en considération lors d'une éventuelle mise en application des clauses
proposées. Je vous invite à en prendre connaissance ainsi que nos
recommandations pour éviter ces risques en lisant le mémoire qui a été déposé à
la commission.
Je tiens par contre à souligner que toute
tentative d'établir des plafonds maximaux sur une base trop spécifique, voire
chirurgicale, pour reprendre les mots du ministre de l'Immigration, s'avère un
exercice extrêmement périlleux. Rappelons-nous l'expérience vécue lors des
modifications apportées au PEQ, volet Diplômés, en novembre 2019 et qui avait
été fortement dénoncé par la fédération. Cet exemple a démontré les multiples
enjeux et angles morts d'une approche de ce type.
La Fédération des cégeps invite donc le
gouvernement à la prudence dans de possibles amalgames que crée le projet de
loi n° 74 en assimilant tous les établissements à une même problématique
et en imposant des mesures qui risquent de générer plus de tort que de
bénéfices pour notre réseau et pour tout le Québec.
Nous demandons à cette commission de
considérer les enjeux de manière équilibrée et de prendre en compte les besoins
spécifiques, mais aussi la mission du réseau collégial, particulièrement pour
les régions qui dépendent de ses étudiants pour répondre aux défis de main-d'œuvre
et pour maintenir l'accessibilité à l'éducation.
Les cégeps sont bien plus que des
institutions éducatives, ils sont un pilier de développement social, culturel
et économique pour le Québec. En limitant possiblement notre capacité à
accueillir des étudiants internationaux, ce projet de loi pourrait mettre à mal
notre mission éducative.
Les deux directeurs généraux présents ici
pour témoigner de tous les points de vigilance, inquiétudes et exemples de
risques associés à ce projet de loi, au nom des 48 cégeps, je vous
encourage donc à saisir l'opportunité d'écouter leur voix qui porte celle des
cégeps de toutes les régions du Québec. Merci aux membres de cette commission
pour votre écoute et pour votre engagement envers ce sujet. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci pour cette présentation. On va donc entamer la
période de discussion. M. le ministre et les députés de la banquette, la parole
est à vous. Seize minutes 30 secondes.
M. Roberge : Merci bien.
Merci pour votre présentation, à vous qui avez déjà été autour de cette table
dans un rôle différent. Merci aux gens du terrain, des gens des établissements
aussi qui sont là pour nous aider, nous éclairer un petit peu. Quelques
commentaires puis une question. Vous avez dit qu'il faut faire attention,
c'est-à-dire que ce ne serait pas normal que le ou la ministre de l'Immigration
décide tout seul de ce qui va se passer dans le réseau d'enseignement
supérieur, dans les cégeps, directement dans les programmes. Je suis d'accord
avec ça. C'est pour ça, que l'article 5, là, annonce... énonce vraiment
qu'on doit avoir ici, là, des recommandations conjointes quand on va toucher...
la formation professionnelle, ce sera avec le ministre de l'Éducation, quand ça
touchera l'enseignement supérieur, ça sera directement avec la ministre de
l'Enseignement supérieur, je pense que c'est important. De la même manière, ce
n'est pas normal non plus que, par exemple, un réseau où... pardon, le ministre
de l'Éducation ou de l'Enseignement supérieur décide, sans en parler avec la
ministre de l'Immigration, du nombre de personnes qui seraient sur le
territoire québécois comme résidents non permanents. Donc, d'une certaine
manière, l'Enseignement supérieur ne peut pas décider des politiques migratoires
puis les politiques migratoires ne peuvent pas décider pour l'Enseignement
supérieur. On travaille toujours en équipe. Mais là on propose de le mettre par
écrit dans des amendements pour être certains que la concertation soit
obligatoire, peu importe les gens qui vont nous succéder, parce qu'on sait tous
qu'il y aura d'autres personnes qui prendront nos places un jour. Donc, je
voulais préciser ça parce que je pense que c'est important.
Vous avez dit qu'il y a environ... ce
n'est pas... non, c'est juste un petit commentaire, mais vous allez pouvoir
commenter sur les commentaires en masse, en masse, j'achève. Vous avez dit
qu'environ 5 % d'effectif total sont des étudiants étrangers dans votre
réseau. En ce moment, ma question, ce serait de dire, si on regarde plutôt
Montréal, sur l'île de Montréal ou dans la région de Montréal : Est-ce que
c'est le même pourcentage ou est-ce que cette proportion-là est plus grande,
donc du pourcentage d'étudiants étrangers, parmi vos effectifs dans le Grand Montréal?
• (16 h 20) •
Mme Montpetit (Marie) : Vous
me permettrez de... puis je passerai la parole, vous me permettrez de répondre
à votre premier commentaire. On a vu effectivement que, dans le projet de loi,
ça tient compte d'une collaboration avec le ministère de l'Enseignement
supérieur et le MEQ. Ce qu'on ajoute, par contre, c'est qu'on souhaite être
concertés aussi comme réseau. Ce qu'on vit, d'ailleurs, puis je me permets de
faire une parenthèse, un aparté, ce que l'on vit depuis quelques semaines dans
le réseau collégial, où on se fait... où on se fait ajouter entrave et
contrainte de toutes sortes qui viennent... qui viennent, entre autres un gel
de recrutement, qui a été annoncé la semaine dernière, des plafonds
d'investissement, des plafonds sur nos heures rémunérées, ce sont des mesures
qui ont été imposées par le Conseil du trésor via le ministère de
l'Enseignement supérieur dans lesquelles on n'a pas été concertés comme réseau,
donc d'où l'importance d'aller ajouter la concertation avec le réseau. Parce
qu'on sait qu'il y a toujours une bonne collaboration, là, il y a peut-être
quelques anicroches, mais on trouve important de venir le mentionner, de
l'ajouter dans le projet de loi...
M. Roberge : ...oui. Et pour
ma question sur le pourcentage d'étudiants étrangers dans le Grand Montréal,
est-ce que c'est 5 % partout à la grandeur du Québec ou, dans le Grand
Montréal, il y a un pourcentage qui est plus élevé d'étudiants étrangers?
M. Brown Mastropaolo (Francis) : Oui,
je peux... je peux répondre à cette question-là. En fait, premièrement, au
niveau du total des étudiants internationaux, en fait, il y a 36 % de nos
étudiants internationaux qui sont dans la communauté métropolitaine de
Montréal, donc ce qui veut dire 64 % qui sont en dehors de cette
communauté métropolitaine là. Donc, ce qu'on peut... ce qu'on peut aller, par
extension, c'est que le pourcentage, il est moindre dans la région de Montréal
qu'ailleurs au Québec en termes d'étudiants. Donc, il y a une plus grande
proportion d'étudiants internationaux dans les cégeps qui sont hors de la
communauté métropolitaine de Montréal.
Mme Montpetit (Marie) : Et
vous me permettrez, M. le ministre, de compléter, mais vous avez ces
exemples-là aussi qui sont notés dans le mémoire. On a ajouté quand même
plusieurs cas concrets de cégeps qui... dans la région métropolitaine, qui
viennent combler... qui viennent... qui viennent recruter pour des besoins. Je
pense, par exemple, à des programmes de médecine nucléaire, qui sont
extrêmement importants, présentement, pour le réseau de la santé. Certains
cégeps de Montréal vont recruter dans des programmes spécifiques, comme le font
d'autres cégeps. C'est pour ça qu'on... on soulignait le fait que ces étudiants
internationaux là sont importants pour le maintien de programmes dans,
vraiment, l'ensemble des cégeps, là, sur tous les territoires.
M. Roberge : Une petite
question, encore, de... de démographie, de tailles de cohortes. On sait qu'il y
a beaucoup de programmes qui ont peu d'étudiants, que plusieurs programmes
survivent, les cohortes survivent grâce à la présence d'étudiants étrangers,
qui viennent travailler aussi, mais qui viennent aussi permettre à des
Québécois de suivre un programme, souvent, près de chez eux, plutôt que de
s'expatrier ou juste de renoncer à leur programme de formation. Je l'ai dit,
mais je vais le répéter, ma collègue et moi, on a une très, très, très grande
sensibilité... Loin de nous l'intention de faire fermer des programmes,
aucunement, je le mentionne.
Ceci dit, dans les dernières années, il y
avait eu une baisse du nombre de Québécois qui étaient inscrits dans les
cégeps, puis j'ai vu ça comme un argument, de dire : Bien, coudon, il y a
moins de Québécois, il faut, pour maintenir nos cohortes, davantage d'étudiants
étrangers. Je pense que, les prochaines années, quand on se projette sur deux,
trois, cinq, 10 ans, on voit un rehaussement graduel du nombre de
Québécois. Est-ce qu'il ne faut pas reconsidérer le nombre d'étudiants
étrangers, en disant : Bon, bien, quand les Québécois étaient moins là,
les étudiants étrangers sont venus, nous ont permis de garder des programmes
vivants, les Québécois reviennent graduellement, on garde les étudiants
étrangers, mais peut-être qu'on en a moins besoin pour assurer la survie des
programmes?
Mme Montpetit (Marie) : C'est
une... C'est une question extrêmement légitime. Puis on vous a apporté un
tableau didactique, je sais que vous aimiez bien ça à l'époque, si vous me
permettez.
M. Roberge : Comme à
l'Assemblée.
Mme Montpetit (Marie) : Exactement.
Vous avez la hausse ici du nombre d'étudiants internationaux totaux. Puis elle
est dans... il est dans le mémoire, hein, de ce dossier-là. Les petites lignes
bleues que vous voyez en haut... en bas, là, c'est... c'est le réseau collégial
public, c'est les cégeps. Donc, vous voyez que, quand même, je veux dire, on
est une petite proportion dans le problème peut-être que vous essayez de
circonscrire.
Et vous avez raison qu'il y a eu une
baisse des étudiants pendant une certaine époque, et la solution a été de se
retourner vers l'international, aussi beaucoup, à la demande... tu sais, on a
répondu à l'appel du gouvernement dans des opérations main-d'oeuvre, entre
autres, pour aller combler des besoins de pénurie, je pense entre autres aux
projets en soins infirmiers notamment. Donc, c'est un équilibre qui s'est fait.
Mais comme vous voyez, c'est pour ça qu'on le... on le mentionne et le répète,
il y a une autorégulation des cégeps, il y a une autonomie qui s'est faite. C'est
une... C'est un... C'est un équilibre qui s'est fait. Et il faut faire très
attention. Ce n'est pas... Ce n'est pas une recette magique non plus d'aller
recruter à l'international quand il faut un nombre minimal. Puis je laisserai
mes collègues, qui sont... qui sont très bien placés pour compléter. Quand il
faut un nombre minimum d'étudiants pour pouvoir démarrer une cohorte, c'est
vraiment là que l'équilibre se joue, dans le fond.
Mme Couturier (Manon) : Oui.
J'aimerais un peu ajouter la réalité de la Côte-Nord, là, qui est un peu
différente de l'ensemble de ce que vous venez de nommer, M. le ministre. La
Côte-Nord est la seule région qui se dévitalise encore. On a... nos collègues
des universités l'ont dit, là, on a un seuil migratoire négatif au niveau de la
population d'âge d'étudier dans nos collèges. Donc, la réalité, là, de pouvoir
aller recruter à l'international maintient certains programmes... et nous
permettre de fournir une main-d'œuvre qualifiée à l'ensemble de nos entreprises
autour de nous. Donc, notre rôle, il est beaucoup plus grand que simplement,
là, donner une formation.
J'ajouterais, je vous dirais, 0 % de
fois il y a eu des étudiants québécois qui ont été refusés dans un programme
parce qu'il y avait des étudiants issus de l'international. En tout cas, pas à
ma connaissance, là. Je ne voudrais pas m'avancer pour des choses que je ne
connais pas, mais à mes yeux à moi, là, ce n'est pas arrivé, ça, qu'on
laisse... on diminue le nombre d'étudiants québécois pour augmenter le nombre d'étudiants
issus de l'international. Donc, je me questionne un peu sur...
Mme Couturier (Manon) : ...sur
cette prémisse-là.
M. Gobeil (André) : Si je
peux me permettre d'ajouter également, je vous... je nous inviterais tous à la
prudence... d'instrumentaliser, pardon, nos étudiants internationaux. Ah! ça
fonctionne bien, quand c'est des Québécois, c'est bon. Ah! il n'y a plus de
Québécois, bien, on va faire rentrer... Je pense que ça va au-delà de ça, puis
ça va même au-delà du maintien des programmes dans des communautés comme celle
de Rimouski ou celle de Chicoutimi. C'est aussi une diversité qui est
importante, je pense, au développement des humains, et c'est un peu notre
fonction première, aussi, comme... comme dirigeants d'établissements d'enseignement
supérieur. On a une volonté d'accompagner tout le monde. Puis, moi, ce que je
peux témoigner, c'est : autant dans ma communauté, à Chicoutimi, que
lorsque j'étais à Matane, de voir la contribution des étudiants internationaux
va bien au-delà du maintien de programmes, va bien au-delà aussi des emplois
d'accompagnement dans des... des emplois, là, d'étudiants ou encore les emplois
qu'ils vont occuper une fois qu'ils sont diplômés, ça va au-delà de ça. Et ça,
je pense qu'il faut garder le cap dans cette volonté-là au Québec. Puis,
jusqu'à présent, on le fait très bien, et on l'a toujours fait très bien. En
termes de solidarité, nous, on le fait avec... Vous savez, on parle souvent des
guerres de clochers, là, mais on est trois cégeps dans notre... quatre cégeps
dans notre région, on travaille ensemble et on définit des choses. Et récemment
on a mis en place un projet sur... dans le cadre d'un chantier du pôle de
l'enseignement supérieur, on a travaillé sur un chantier sur l'établissement
durable des personnes issues de l'immigration, de quelle façon on peut les
accompagner aussi à ce qu'ils contribuent au développement de notre milieu. Et
ça, je pense que ça va au-delà des vases communicants étudiants québécois,
étudiants internationaux.
M. Brown Mastropaolo (Francis) : ...de
complémenter. En fait, il ne faut pas oublier qu'il y a aussi des guides qui
existent, en fait. Donc, on a parlé de l'autonomie des cégeps, la capacité de
gestion. Ouvrir un programme à l'international, ce n'est pas automatique, ça dépend
de la capacité d'accueil. Donc, dans un cégep, il y aura des programmes qui
seront ouverts, d'autres qui seront fermés parce qu'il y a suffisamment
d'étudiants. Donc, il y a un mécanisme d'autorégulation qui existe. Et, dans
certains programmes... bien que le cégep peut disposer d'un nombre appréciable
d'étudiants, dans certains programmes, il manque encore de ces étudiants-là. Et
c'est dans la prévision des perspectives d'emploi, notamment, où on décide
d'ouvrir ou de réfléchir à ouvrir à cette clientèle-là. Donc, c'est pour
respecter notre mission. Donc, il y a des balises, il y a des réflexions qui
vont plus loin que les simples mécanismes aussi, là, qui nous habitent.
M. Roberge : Merci beaucoup
pour vos réponses. C'est très, très, très apprécié. Je laisserais ma collègue
poursuivre.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : D'accord. Alors, il vous reste encore cinq minutes 56
secondes. La parole est à vous.
Mme Bogemans : Parfait.
Premièrement, tout à l'heure, les universités sont venues nous exposer, là, une
panoplie de mesures au registraire qu'ils mettent en place, ça va jusqu'à
l'intelligence artificielle pour la reconnaissance des acquis de manière
diversifiée, puis être certain, par certaines mesures, là, de la pleine
disponibilité des étudiants étrangers, quand ils arrivent, pour se consacrer à
leurs études. Quel genre de mesures la Fédération des cégeps ou les cégeps de
manière distinctive mettent-ils en place au Québec pour être certains que les
étudiants étrangers inscrits sont bien prêts aux études puis faire le tri dans
les demandes d'inscription dès le départ?
Mme Couturier (Manon) : Bien,
il y a clairement... Nous, on est très petits, là. Donc, il y a clairement une
sélection qui se fait dès le départ, selon le dossier scolaire de l'étudiant.
Donc, c'est notre registraire qui analyse tous ces dossiers-là, on s'entend
qu'il y a quand même un bon nombre d'inscriptions, mais c'est beaucoup plus
dans l'accueil, lorsqu'ils arrivent que... qu'ils sont pris en charge, là. Ils
sont pris en charge par une équipe vraiment complète, tant au niveau social
qu'au niveau académique, pour s'assurer de les maintenir en réussite. Donc, il
y a des rencontres régulières. Donc, une fois qu'ils sont... qu'ils ont passé
la porte... Je n'ai pas beaucoup de programmes contingentés au niveau
collégial. Donc, c'est vraiment plus le dossier scolaire qui va faire foi de
l'accueil chez nous. Mais, une fois que c'est fait, ils sont accompagnés, ils
sont suivis par une équipe... puis une petite communauté, donc on a une
communauté qui se mobilise autour de l'intégration, jusqu'à leur trouver une
première... aller faire une première épicerie avec eux. On va jusque là. Donc,
ils sont vraiment pris en charge de façon très humaine. Mais, au niveau de la
sélection, je réitère, là, c'est vraiment le dossier scolaire qui va faire foi,
là, selon l'étude de notre registraire.
Mme Bogemans : Parfait. Donc,
la capacité de loger les étudiants ou d'être certain, par exemple, que
l'étudiant arrive avec un logement déjà avant d'être au Québec, est-ce que ce
sont des choses qui sont regardées? Ou la capacité financière de payer l'année
en cours, l'année pour laquelle il est accepté?
• (16 h 30) •
Mme Couturier (Manon) : ...capacité
financière, elle est déjà vérifiée, là, dans... Pour s'inscrire, il faut déjà
démontrer qu'on a la capacité financière de s'en venir étudier chez nous. Nous,
chez nous... bien là, c'est la tactique cégep de Baie-Comeau, là, nos
résidences leur sont réservées. En première année, les étudiants sont logés par
nous, et la communauté prend en charge le reste. Honnêtement, l'enjeu de
logements, je l'entends beaucoup. Chez nous, quand nos étudiants ont besoin, la
communauté y tient, à sa population étudiante, donc, en général, les gens
répondent présent. J'ai zéro étudiant qui n'ont pas... qui ne trouve pas de
logement chez nous.
M. Gobeil (André) : Moi, j'ai
un promoteur, cette année, qui a transformé un ancien couvent pour accueillir
des étudiants en se disant : Bien, écoutez, c'est important, je ne veux
pas faire ça pour d'autre chose, j'aurais pu transformer ça en condos, mais
j'ai décidé de le faire pour des... pour accueillir des étudiants, autant des
étudiants d'ailleurs au Québec...
16 h 30 (version non révisée)
M. Gobeil (André) : ...les
étudiants internationaux. Pour les mesures, on en a plein aussi. Au-delà de l'évaluation
de la capacité de l'étudiant à venir étudier chez nous, à la formation
continue, on a développé des capsules d'accueil aussi pour accompagner l'étudiant,
des tests diagnostiques, s'il y a des éléments qui sont à améliorer en
mathématiques, en français, on a des éléments de cette nature-là. On a des gens
sur le terrain qui font aussi des événements pour pouvoir permettre aux
étudiants d'aller chercher les codes, les codes culturels locaux et les
partager avec... avec eux. Puis par la suite, tantôt, je parlais... on est en
train... le chantier dont je parlais sur l'établissement durable, on est en
train de travailler dans une approche laboratoire vivant à travailler à ce qu'on
développe des outils pour accompagner l'ensemble de notre communauté sur le
vivre-ensemble, mais aussi s'assurer que les personnes se sentent bien incluses
dans notre... dans notre milieu. Puis jusqu'à présent, bien, on est en train de
développer des solutions et des mettre en application. Donc, pour nous, je
pense que l'accueil, ce n'est pas un enjeu, puis leur... leur capacité à
contribuer à notre milieu non plus.
Mme Bogemans : C'est certain
que le cégep contribue à ouvrir les esprits, là, à plein de niveaux, je pense,
chez les jeunes qui sortaient du secondaire entre autres. Mais je regardais les
chiffres d'embauche du cégep, là, des 10 dernières années, un petit peu
partout au Québec, puis on dit que l'augmentation fulgurante du personnel de
soutien. Est-ce qu'il pourrait avoir un lien avec desservir davantage la
population étudiante étrangère, selon vous?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
si je peux me permettre par rapport à ça, puis c'est une... c'est une très
bonne question que de vous posez dans un contexte de gel de recrutement, je le
répète, qui est imposé au réseau collégial public et non au réseau privé.
Présentement, il y a un contexte où c'est une population étudiante qui a... qui
a évolué. Moi, je fais toujours référence, je suis sortie du cégep il y a 25 ans,
on avait un certain profil, on avait des parcours qui étaient peut-être plus
similaires aussi les uns des autres. Aujourd'hui, on a une population étudiante
qui a toutes sortes de besoins, besoins particuliers notamment, entre autres.
Donc, ça amène d'avoir des ressources supplémentaires qui sont nécessaires.
Donc souvent, quand on regarde ces chiffres-là, il faut tenir compte de... du
soutien psychosocial qui est apporté aux étudiants, du soutien au niveau de
TDAH, dyslexie. Vous le savez, il y a de plus en plus, puis maintenant c'est
des diagnostics ou sans diagnostic aussi qu'il y a de l'accompagnement qui est
donné par des API. Donc, c'est ce qu'on peut retrouver notamment dans... dans
les chiffres, là.
Mme Bogemans : Parfait. Donc,
c'est ce que vous dites, travailleurs sociaux entre autres, puis services
adaptés, c'est vraiment là-dessus que ça se localise puis ça fait partie de
la...
M. Gobeil (André) : Mais ce n'est
pas en coloration de... en corrélation, pardon, directement avec les
internationaux, c'est l'ensemble de la réalité de nos collèges. Donc, on ne
pourrait pas associer. Puis, encore une fois, c'est un amalgame dangereux à faire.
C'est vraiment la réalité dans laquelle on est actuellement. Les besoins ont
changé des étudiants, puis nous on répond aux besoins dans ces conditions-là.
Et ce n'est pas nécessairement le fait d'avoir une hausse des étudiants
internationaux qui nous a amenés à hausser les ressources qui étaient
nécessaires pour pouvoir accompagner la réussite dans nos collèges.
Mme Bogemans : C'est pour l'ensemble
de la clientèle étudiante, là, mon commentaire.
Mme Couturier (Manon) : J'ai
le goût de faire un lien, mais j'arrive de l'Éducation, là. Donc, il y a eu des
bonnes décisions qui se sont prises où est-ce qu'on a arrêté de courir après
les diagnostics pour donner des services aux étudiants, puis on a réussi à
amener plus d'étudiants vers un diplôme d'études secondaires. Puis c'est un
excellent chemin. Ça fait qu'il y a plus d'étudiants qui ont accès, d'étudiants
québécois qui ont accès à l'enseignement supérieur. Mais ça a fait que l'enseignement
supérieur a eu à s'ajuster à cette nouvelle réalité là d'étudiants, parce que
notre souhait à nous aussi, c'est d'amener ces étudiants-là vers une réussite.
Donc, il faut nous aussi ajuster la façon dont on intervient auprès de ces
jeunes-là. Donc, je pense que je ferais plus ce parallèle-là plus que de parler
d'un rehaussement d'étudiants international.
Mme Bogemans : Bien, je
comprends, puis ça, c'est tout à fait louable...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci... C'est ce qui met fin à cette
première ronde d'échange. Alors, je me tourne du côté de l'opposition
officielle pour la deuxième ronde d'échange. Le député de l'Acadie, vous avez
neuf minutes 54 secondes.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, Mme Montpetit, M. Mastropaolo, Mme Couturier, M. Gobeil,
merci d'être là.
J'ai... j'ai trois cégeps dans ma
circonscription, Bois-de-Boulogne, Vanier, Saint-Laurent. Je parle à tous les D.G.
des cégeps. Alors, on a parlé de gel de recrutement, de PEQ suspendu, d'une
lettre que vous avez reçue au mois de juillet où vous ne pouvez plus à peu près
rien dépenser ou investir, puis là, bien, il y a le p.l. 74. J'ai beaucoup d'empathie
pour ce que vous vivez.
Il y a des fois je me demande :
Coudon, est-ce que le gouvernement de la CAQ vous cible particulièrement? Vous
rendez un service énorme à la population du Québec. Mais j'aimerais... Vous
êtes avec nous, j'aimerais que vous me parliez concrètement, là, parce que, là,
bien, évidemment, le ministre veut se donner plein de pouvoirs, mais on ne sait
pas trop lesquels, mais en tout cas il y en a dans le p.l. 74, qu'est-ce que ça
fait à un cégep dans une ville comme Baie-Comeau, Chicoutimi? Concrètement, sur
le terrain, là, c'est... ça doit être positif, je ne peux pas croire, avec tout
ce que vous faites.
M. Gobeil (André) : On a six
minutes?
M. Morin : Oui, oui, c'est
ça, vous en avez six, minutes, bien, allez-y punché.
M. Gobeil (André) : Bien, on
est des acteurs de développement économique importants pour nos milieux, non
seulement dans la transformation ou aussi de l'acquisition des compétences qui
sont...
M. Gobeil (André) : ...ça
sert à ce développement-là. Mais on est également des acteurs de développement
social, de développement culturel. On joue un rôle majeur dans nos communautés,
en termes de catalyseurs d'opportunités, si je peux me permettre de dire ça
ainsi. Moi, j'ai passé ma vie dans les cégeps, puis j'ai été autant dans le
Bas-Saint-Laurent. J'ai été à Matane, à Rivière-du-Loup, puis maintenant je
suis à Chicoutimi, je suis retourné chez moi. Et puis si j'y suis resté...
j'aurais pu faire tellement d'autres choses, j'y suis resté parce que j'y
crois, à cette mission-là. Et puis on le fait bien, on travaille fort, on a des
résultats qui sont probants. Moi, j'ai vu des projets de développement
économique qui sont nés grâce à des initiatives de cégeps.
Et puis on est également des fournisseurs
de services pour notre communauté. Chez moi, j'ai une salle de spectacles qui
est opérée par des partenaires mais qui est localisée chez moi. J'offre des
services de piscine pour la ville de Chicoutimi et autres types de services de
cette nature-là. Puis je pense que je vais laisser la parole à Manon, parce que
Manon aussi pourra rajouter du rôle qu'elle joue, principalement à Baie-Comeau.
Mme Couturier (Manon) : Bien,
écoutez, à Baie-Comeau, en fait, on est l'enseignement supérieur. On ne se le
cachera pas, là, l'enseignement supérieur existe à Baie-Comeau parce que le
cégep de Baie-Comeau existe. L'UQAR a une antenne, mais elles sont dans nos
locaux. J'en profite pour dire que ce serait bien qu'ils aient un peu plus
d'espace pour pouvoir donner un service un peu plus étayé. On est la région la
moins scolarisée au Québec, donc si on n'a pas l'enseignement supérieur à
Sept-Îles et à Baie-Comeau, bien, c'est dangereux. Honnêtement, nos jeunes ont
accès à de l'enseignement supérieur parce qu'on est là. J'ajoute à ça,
évidemment, qu'on est pilier de la communauté aussi. On est... on est collés
sur nos entreprises, on est source de recherche et d'innovation. Notre CCTT
développe, au niveau de la forêt boréale, moult projets en recherche et en innovation
pour venir répondre aux besoins de l'industrie autour de nous. Donc, tout le
reste, mon collègue l'a déjà dit, là, mais notre présence, elle est centrale,
en fait, à nos communautés.
M. Morin : Donc, vous êtes
des incontournables dans votre région. Puis je vous écoute avec attention, ça
me touche. Donc, Baie-Comeau, là, vous êtes le centre d'enseignement supérieur
pour la région. Ce n'est quand même pas banal.
Dans le projet de loi, à l'article 3, le
ministre veut se donner les pouvoirs de regarder certains programmes puis
certaines orientations. Dans le restant des articles du projet de loi, on parle
beaucoup d'un pouvoir réglementaire, mais on ne sait pas ce que ça va donner en
bout de piste. Trouvez-vous ça dangereux pour votre autonomie puis pour vos
programmes?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
je pense que c'est le principal problème de ce projet de loi, c'est que c'est
une coquille qui ne caractérise pas les intentions qui viennent avec. J'espère
que vous aurez l'occasion, dans les échanges que vous aurez sur l'étude
détaillée, de préciser les intentions du législateur, mais c'est une pièce
législative qui est floue sur ses objectifs, qui manque de balises. Le ministre
l'a mentionné, combien d'étudiants internationaux veut-il de moins, il ne le
sait pas à l'heure actuelle. Donc, c'est sûr que, oui, c'est une préoccupation
sur notre autonomie, sur les objectifs qui sont poursuivis.
Et le ministre le mentionnait tout à
l'heure, puis, évidemment, on croit sa parole, là-dessus, on n'a pas d'autre
choix, sur ses intentions par rapport au projet de loi, mais la pièce
législative va lui substituer dans le temps. Et la question, c'est comment
sera-t-elle utilisée par la suite si les balises ne sont pas suffisamment
importantes. Donc, elle ne peut pas être laissée à l'utilisation improvisée ou
aux idéaux partisans ou politiques qu'il pourrait y avoir dans l'avenir. Donc,
oui, il y a une préoccupation par rapport à ce projet de loi là.
M. Gobeil (André) : Et puis
la collègue D.G., récemment, qui citait un illustre artiste, Peter Parker,
Spider-Man, il disait : Aux grands pouvoirs viennent des grandes
responsabilités. Et puis ce sont des grands pouvoirs, mais on se permet de
douter sur les responsabilités, avec ce qu'on vit, avec l'énumération que Marie
vient de nous faire, notamment, sur la réalité dans laquelle nous sommes
confrontés dans les dernières semaines et mois.
M. Morin : Je vous remercie.
Je vais maintenant laisser la parole à ma collègue la députée de
Mont-Royal-Outremont.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Il vous reste encore 4min 35 s.
Mme Setlakwe : Merci. Moi, je
comprends, généralement, que le réseau public des cégeps puis l'apport des
étudiants étrangers ne constituent aucunement un problème pour vous. O.K.
Je pense qu'il faut revenir sur votre
approche, en termes de répondre à des besoins ou ce que les programmes
permettent de combler comme besoins. Et j'irais même... Puis je vais vous
laisser élaborer parce que je sais que vous avez des exemples, s'il vous plaît,
et il y en a dans le mémoire, mais je pense, pour le bénéfice de la commission,
il faudrait que ce soit mentionné. Que vous êtes arrimés, c'est ce que je crois
comprendre, avec le futur des services publics, vous répondez à des besoins
précis. Il y a un exemple qui a été soulevé, là, la médecine nucléaire à
Montréal, mais j'aimerais que vous élaboriez, autant en région qu'à Montréal.
• (16 h 40) •
Et je ne veux pas vous mettre des mots
dans la bouche, mais j'ai l'impression, parce qu'on a entendu le ministre
utiliser le terme «chirurgical» dans son approche, c'est ce qu'on souhaite
aussi, mais j'ai l'impression que vous, vous faites... vous avez une approche
chirurgicale...
Mme Setlakwe : ...par rapport
à répondre à des besoins en termes de service public et autre.
M. Gobeil (André) : Bien,
écoutez, c'est... On a parlé de... nucléaire, mais, dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, puis je pourrais parler au nom de mes trois autres
collègues, on répond à des besoins qui sont criants en matière de
développement. En électronique industrielle, actuellement, une chance qu'on a
des étudiants internationaux qui non seulement font le parcours au complet, qui
diplôment et qui se trouvent des emplois dans notre région, mais je pourrais
vous dire la même chose pour diététique, je pourrais vous dire la même chose
pour inhalothérapie, je pourrais vous dire également la même chose pour soins
infirmiers.
On l'avait dans le mémoire, la
présentation, entre autres, d'une initiative qu'on a faite avec des étudiants
internationaux en soins infirmiers. Chez nous, ça a été un succès réel pour...
au cégep de Chicoutimi et au CIUSSS du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Donc, c'est sûr et certain qu'on est là
puis qu'on contribue à maintenir un tissu de service public, mais également une
vitalité économique, industrielle et commerciale chez nous.
Mme Setlakwe : Merci.
Mme Couturier (Manon) : J'ai
peut-être envie d'ajouter, là, techniques forestières, chez nous, qui va venir
répondre aux besoins de Résolu, bien, ce sont... la grande majorité, hein, on
est autour de 80 % d'étudiants issus de l'international qui sont dans ces
cohortes-là et qui sont engagés par nos entreprises. Donc, on vient répondre aux
besoins.
On a de la difficulté à recruter, au
Québec, à cause de foresterie qui est un peu plus difficile à vendre dans notre
coin. J'ajoute à ça toute... On a un programme unique qui vient répondre aux
besoins de nos pourvoiries locales. Donc, on se colle à notre milieu, on se
colle aux besoins dans l'offre de formation qu'on donne. Génie électrique, qui
répond aux besoins de techniciens chez Hydro-Québec, qui sont en train de faire
des réfections de barrages, qui vont avoir besoin de nos étudiants en génie électrique,
dans lequel il y a des étudiants issus de l'immigration aussi, dans nos
programmes. Donc, on est vraiment collés sur les besoins locaux, là.
Mme Montpetit (Marie) : Puis,
par exemple, dans les exemples qui sont très patents, là, c'est, par exemple,
je prends... Il y en a plein, hein, il y en a plusieurs, effectivement, dans le
mémoire, mais le cégep de Thetford, par exemple, qui a une technique du génie
plastique. Ce sont des étudiants qui viennent de l'international. C'est un
programme qui est unique, qui a un caractère national, qui supporte l'ensemble
de l'industrie de la plasturgie, donc 500 entreprises au Québec. Est-ce qu'on a
les moyens de se passer de ce programme-là faute d'étudiants internationaux? Je
pense que c'est les questions qu'il faut se poser.
Puis le projet de loi, évidemment, quand
on l'a reçu, ça fait partie des questions qu'on s'est posées : Quel
problème on essaie de régler avec ce projet de loi là. Qu'est-ce qu'on cible
exactement? C'est pour ça qu'on veut vous sensibiliser vraiment au fait que le
réseau collégial public, à l'heure actuelle, puis on vous a montré les
chiffres... Effectivement, c'est très chirurgical, comme approche, de venir
répondre à... un programme pour répondre à un besoin local, régional ou national
qui ne peut être comblé faute d'étudiants québécois.
Mme Setlakwe : Merci. Donc,
est-ce qu'on peut dire que les étudiants étrangers sont essentiels à la
population?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
ils sont essentiels pour répondre dans cette boucle-là, effectivement, à des
besoins de pénurie de main-d'œuvre. Je pense qu'on n'est pas en moyen de se
passer de gens qui vont faire de la médecine nucléaire, ni dans les programmes,
les différents programmes qu'on a élaborés. Il y a des programmes qui sont
comblés aussi. En technique d'éducation à la petite enfance, on l'a vu dans les
médias à plusieurs reprises, dans les dernières années, à quel point c'est
encore un enjeu, dans nos services, de garde de trouver des gens. C'est pour ça
qu'il y a du recrutement qui est fait à l'international.
La réponse, entre autres, dans le réseau
de la santé, en soins infirmiers, 46 programmes sur 48 cégeps à l'heure
actuelle. Il y a du recrutement qui a été fait, à la demande, justement, du
gouvernement, d'aller faire du recrutement à l'international pour venir s'aider
à répondre à nos propres besoins, comme société. Donc, il faut être très
prudent dans les décisions qui vont être prises parce que ce n'est pas
seulement le réseau collégial que ça met à mal.
Merci beaucoup. C'est ce qui me fin cette
partie échanges. On va toutefois poursuivre avec la deuxième opposition et le
député de Saint-Henri-Sainte-Anne. 3min18 s
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci beaucoup pour votre excellente présentation. Écoutez,
d'entrée de jeu, en conférence de presse, le ministre donnait des exemples,
hein : un collège privé qui a augmenté de 246 % d'admissions en pas
un an, janvier 2023 à mai 2024, un autre qui a vu sa clientèle monter de 1392
sur la même période. Mais, essentiellement, il n'y a rien de tout ça qui vous
concerne. Donc, vous, vous êtes à dire : Écoutez, qu'est ce qu'on fait là,
finalement, nous, hein? Je vous mets des mots dans la bouche, mais :
Faites vos affaires, corrigez ce que vous avez à corriger sur certaines
institutions ou certains établissements d'enseignement privés qui dépassent les
bornes, mais nous, là, à 9000, en tant que regroupement, on ne devrait pas être
concernés par votre projet de loi. C'est ce que vous dites?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
je me permets de le remontrer. Je trouve que c'est un tableau qui est très,
très parlant. Sur la totalité des étudiants internationaux, on est la petite
ligne bleue. Et non, effectivement, on ne se sent pas... C'est pour ça que je
pense qu'il faut être très prudent de ne pas jeter le bébé, ou le réseau
collégial, avec l'eau du bain et d'être très prudent dans la décision. Donc,
c'est pour ça qu'on soulignait d'entrée de jeu l'importance de ne pas faire un
amalgame et de mettre l'ensemble des établissements dans le même bain, là.
M. Cliche-Rivard : Par
contre, ce matin, en mêlée de presse, ayant connu vos revendications, le
ministre les a jugées comme étant...
M. Cliche-Rivard : ...déraisonnable.
Est-ce que vous, vous avez une réponse face à ce critère, raisonnable ou pas,
là, de votre revendication? J'imagine que vous, vous la pensez raisonnable.
Qu'est-ce que ça vous fait d'entendre ça que vos revendications sont
déraisonnables aux yeux du ministre?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
est-ce que c'est la revendication d'être concertés et consultés en amont,
notamment...
M. Cliche-Rivard : Celle de
vous exclure...
Mme Montpetit (Marie) : De
nous exclure? Bien, écoutez, on serait... on sera bien curieuses d'entendre ses
arguments pour le fait de nous inclure. Je comprends qu'il y a une volonté de
se donner les moyens de serrer la vis, comme ça a été mentionné, dans des cas
d'abus.
M. Cliche-Rivard : Avec
raison.
Mme Montpetit (Marie) : Ce n'est
pas le cas du réseau collégial, il n'y a pas... il n'y a pas d'exemple en ce
sens. Vous avez des exemples qui répondent à la raison pour laquelle on va à
l'international, recruter. Il n'y a pas d'enjeu pécunier, ce n'est pas une
vache à lait, ce n'est pas, ce n'est pas... ce n'est pas l'essence même de la
démarche. C'est vraiment pour répondre à la mission éducative et répondre aux
besoins du Québec.
M. Cliche-Rivard : Non, quand
même. Puis, vous l'avez montré plusieurs fois dans votre tableau, la petite
ligne jaune, elle baisse pas mal aussi, il y a des choses qui ont... qui ont
été faites. On voit qu'en 2020 ils sont presque au triple de votre petite ligne
verte, là, puis, finalement, on diminue jusqu'à être en dessous de vous en 2023.
Donc, il y a des correctifs qui ont été apportés. Je ne suis pas en train de
dire qu'il n'y a pas de récalcitrants. Au contraire, il y a des gens qui... il
va falloir qu'on corrige puis il y a des choses qu'il va falloir qu'on... qu'on
améliore mais, vous l'avez dit, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du
bain. Puis vous, vous êtes... vous ne devriez pas être concernés par ce projet
de loi là, dans la mesure où ça fonctionne bien pour les cégeps, là.
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
vous me permettrez d'ajouter que, dans le plan stratégique du ministère de
l'Enseignement supérieur, qui a été déposé il y a tout juste un an, le
recrutement à l'international était encore une priorité...
M. Cliche-Rivard : Voilà.
Mme Montpetit (Marie) : ...notamment
pour répondre à des cibles francophones, parce que la majorité des étudiants,
aussi, internationaux parlent le français, viennent répondre à des... des
besoins qu'on a localement. Et, je le répète, on a répondu à... plusieurs fois
à l'appel du gouvernement pour répondre à des besoins. Donc, même au niveau des
augmentations qu'il y a eu, dans les dernières années, dans le réseau collégial
public, c'est, généralement, en réponse à des initiatives gouvernementales qui
ont été mises en place.
M. Cliche-Rivard : Mais vous
faites bien de mentionner le virage à 180 degrés. On venait de mettre le PEQ
diplômé à l'extérieur des cibles, puis finalement on vient suspendre ce
programme-là pour huit mois. Alors, on ne sera pas au premier revirement de
situation, mais, quand même. Merci d'avoir été là. Merci beaucoup.
Mme Montpetit (Marie) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va terminer nos échanges avec le
député de Jean-Talon pour une période de 3 min 18 secondes.
M. Paradis : Oui, en fait, je
vais continuer dans la foulée de mon collègue de Saint-Henri-Sainte-Anne. Vous
nous dites essentiellement qu'il y a une grande différence entre le réseau
universitaire et le réseau des cégeps, et particulièrement le réseau des cégeps
publics. Le tableau que vous nous avez montré déjà, à quelques reprises, montre
qu'en gros il y a une stabilité ou il y a une croissance raisonnable, contrôlée
et éthique du nombre d'étudiants au cégep. Et il n'y a pas de pic à partir de
2018, ce qui n'est pas le cas dans le réseau universitaire, mais il y a un pic.
Est-ce que vous êtes d'accord qu'il y a une question de mode de financement qui
vient compter dans cette différence-là? Parce que, vous l'avez mentionné tout à
l'heure : Nous, on n'a pas de prime à avoir des étudiants internationaux.
C'est une question de philosophie, de contribution, de nécessité dans certaines
régions. C'est bien ça?
M. Gobeil (André) : Tout à
fait. Effectivement.
M. Paradis : Bon, et là vous
nous dites : Il faut des règles, il faut tenir compte aussi des besoins
dans chaque région et vous demandez une vision régionale de ces enjeux-là. On
est d'accord avec vous. Vous nous parlez aussi de l'importance d'avoir de la
prévisibilité. Vous le rappelez, dans votre mémoire, à la page 17, qu'il y a un
plan pour un étudiant international, ça se prévoit longtemps à l'avance, que la
réputation du Québec à l'échelle internationale compte. Est-ce que vous voyez
c'est quoi, les prévisions du gouvernement dans le projet de loi n° 74 pour les
cégeps? Est-ce que vous avez cette prévisibilité actuellement?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
écoutez, ce qu'on ce qu'on voit à l'heure actuelle, c'est, vous mentionnez...
Votre collègue mentionnait le fait quatrième volte-face en moins de cinq ans,
une dizaine de modifications qui ont été faites... tout ce qui encadre les
étudiants internationaux dans la dernière année, tant par le gouvernement
fédéral, que par le gouvernement provincial. Je pense qu'il faut être prudent
de jouer au yoyo, ce n'est pas un robinet qu'on peut ouvrir, qu'on peut fermer.
On est dans une situation, je ne vous l'apprendrai pas, comme parlementaires au
Québec, où il y a près de 1 million de Québécois qui vont prendre leur retraite
d'ici 2030. Il faut trouver une façon de combler et répondre à ces besoins de
main-d'oeuvre là, notamment, dans des secteurs névralgiques publics.
Donc, il faut avoir, je le répète, une
prévisibilité, parce que c'est des mois et des mois et des années de travail
d'aller faire du recrutement à l'international pour répondre à des besoins. Il
faut laisser l'agilité aux cégeps aussi d'être capables de s'ajuster selon les
besoins qui peuvent être modifiés. Donc, la prévisibilité, c'est absolument
nécessaire.
• (16 h 50) •
M. Paradis : Et est-ce que
vous savez où est-ce que le gouvernement veut aller relativement aux cégeps?
Parce que là, actuellement, ce qu'on a, c'est du mur-à-mur, on ne fait pas la
distinction entre les réseaux. Est-ce que vous avez une idée de ce qu'ils
voient pour les cégeps?
Mme Montpetit (Marie) : Bien,
c'est le principal problème du projet de loi, c'est cette ambiguïté ou c'est ce
flou où il n'y a pas de balise comme telle, et qu'on ne voit pas les objectifs
qui sont recherchés par la suite. Qu'est-ce qui arrivera une fois que le projet
de loi sera adopté? Est-ce que c'est une diminution? C'est une diminution dans
quel type de...
Mme Montpetit (Marie) : ...de
quelle façon, à quel rythme, ça fait partie des éléments qui ne figurent pas à
l'heure actuelle dans le projet de loi,
M. Gobeil (André) : Oui. Non,
mais je disais que cette prévisibilité-là, pour nous, est essentielle. Parce
que lorsque... à chaque fois qu'il y a une annonce, la vitesse que les
nouvelles circulent, on sent les impacts. Une année, le ministre Boulet a parlé
notamment de gratuité pour des étudiants internationaux, et tout de suite on a
senti... dans l'ensemble du Canada, on a senti une réaction. Il n'y a plus
personne qui voulait aller ailleurs. Ils voulaient tous venir au Québec parce
qu'ils pensaient que c'était gratuit.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Sur ces bons mots, je vous remercie à
nouveau de la l'apport ...(panne de son)...
Et ...(panne de son)... quelques instants,
le temps que le prochain groupe s'installe. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 51)
(Reprise à 16 h 56)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Alors, nous recevons...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...l'Association québécoise des avocats et avocates en
droit de l'immigration, qui est représentée par Me Patrice Brunet, membre du
conseil d'administration, ainsi que Maître Ismaël Boudissa, membre du conseil
d'administration également. Alors, bienvenue à la Commission des relations avec
les citoyens. Alors, le déroulement : vous allez bénéficier d'une période
de 10 minutes pour votre... la présentation de votre argumentaire,
l'essentiel de votre mémoire, ensuite, on va procéder à une période de
questions avec les parlementaires. La parole est à vous.
M. Brunet (Patrice) : Merci
de nous recevoir. C'est un plaisir d'être avec vous aujourd'hui pour présenter
nos observations au projet de loi.
Je veux commencer avec un préambule.
L'AQAADI, l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de
l'immigration, est une organisation qui regroupe et représente plus de
500 avocats spécialisés en immigration au Québec, membres du Barreau du
Québec. Nous avons des intérêts qui sont... qui rejoignent des objectifs
d'équité, de recherche de la justice et également, pour le sujet qui nous
occupe aujourd'hui, de prévisibilité d'un système d'immigration qui transcende
les intérêts pécuniaires des avocats, mais aussi les intérêts des travailleurs
étrangers et aussi des entreprises que nous représentons.
Donc, c'est avec grand intérêt que
l'AQAADI a pris connaissance du projet de loi qui a été... qui a été déposé.
Puis on désire saluer également les orientations générales du projet de loi
pour prendre en compte les orientations et les objectifs fixés au plan annuel
d'immigration des besoins économiques et de main-d'oeuvre.
Nous tenons à souligner que la grande
majorité des étudiants étrangers sont des étudiants de bonne foi dont la
contribution à la société québécoise est impossible à déterminer avant souvent
plusieurs années et parfois plusieurs décennies.
Nous allons concentrer notre intervention
et nos commentaires aujourd'hui sur le caractère d'imprévisibilité et le
caractère soudain que le projet de loi accorde au ministre en poste. Et nous
souhaitons apporter nos observations sur ce point puisque le programme des
étudiants étrangers doit bénéficier d'une prévisibilité pour des raisons
sociales, mais également pour des raisons économiques.
Alors, en préambule, on ne remet
aucunement en question la compétence et l'autorité du gouvernement de pouvoir
fixer des objectifs, de pouvoir fixer des quotas en matière d'immigration.
C'est la prérogative du gouvernement du Québec et aussi du gouvernement du
Canada, évidemment, de pouvoir établir des chiffres, mais tout ça doit être
fait dans un contexte qui respecte non seulement les traditions du Québec, mais
aussi qui respecte les fondements de la société dans laquelle nous sommes.
Donc, nos observations ont été regroupées sous cet angle.
7. Le chiffre 7. Donc, les échanges
culturels et intellectuels innovation, recherche, développement économique,
réseaux internationaux, constitution et renouvellement des CAQ, retour au pays
d'origine, rétention des talents. Je vais être bref, vous avez déjà copie de
notre mémoire. Donc, pour vous mettre en contexte, c'est pour vous... pour vous
le rappeler, vous le savez tous que depuis l'antiquité les étudiants étrangers
ont été des vecteurs d'échange culturel et intellectuel. Les étudiants grecs et
romains voyageaient à Alexandrie et à Athènes, mais aussi vous savez que les
cathédrales de France ont été pour la... en grande partie fabriquées par les
travailleurs qui venaient d'Italie et par les étudiants qui... les étudiants en
arts.
• (17 heures) •
Une étude récente portant sur
6 000 étudiants étrangers dans 114 pays indique que 66 %
des étudiants étrangers considèrent plus d'un pays dans leur décision d'étudier
à l'étranger. Et le Canada et l'Australie ayant récemment annoncé leur souhait
de limiter le nombre d'étudiants étrangers, les étudiants explorent déjà
d'autres options comme destinations potentielles. Donc, le Québec risque de
perdre. En créant un climat d'incertitude sur le traitement des permis
d'études, le Québec risque de perdre des candidats qui sont essentiels et qui
sont importants, au bénéfice non seulement d'autres pays, mais également
d'autres provinces canadiennes. Les étudiants étrangers contribuent également
souvent à l'innovation et à la recherche dans le pays d'accueil. Je ne vous
referai pas les présentations des dirigeants des établissements d'enseignement
qui ont été devant vous, mais ces retombées ne sont que rarement immédiates et
peut-être...
17 h (version non révisée)
M. Brunet (Patrice) : ...recomptabilisé
après quelques années ou même après quelques décennies. Nous considérons que
les établissements d'enseignement ont tous les outils et les compétences
nécessaires pour choisir les étudiants étrangers appropriés, et il serait... il
est surprenant et même nouveau, novateur, pas nécessairement dans le bon sens,
que le gouvernement du Québec intervienne dans la décision des institutions d'enseignement
pour choisir quels seraient les étudiants qui devraient bénéficier d'un permis
d'études.
Les étudiants étrangers, évidemment, on ne
pourrait pas passer sous silence le développement économique des étudiants
étrangers. Selon une étude de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain
portant sur 2019‑2020, donc avant la pandémie, les 50 000 étudiants
de l'extérieur qui fréquentaient les établissements universitaires apportaient
des retombées économiques au montant de 722 millions de dollars dans la
région, la grande région de Montréal seulement. Donc, l'imprévisibilité de l'impact
du projet de loi pourrait mettre en péril cet impact économique et la
renaissance économique attendue du centre-ville de Montréal.
Et finalement, évidemment, un étudiant
étranger qui complète ses études au Québec est un ambassadeur du savoir à travers
le monde, non seulement pendant ses études, mais lorsqu'il retourne dans son
pays d'origine, il apporte un savoir technologique, mais également tout un
réseau de contacts et est un ambassadeur pour le souvenir du Québec de son...
de son passage au Québec pour les décennies qui suivent. Je passe la parole à
mon collègue Me Boudissa.
M. Boudissa (Ismaël) : Oui.
Donc, on parle de prévisibilité, c'est c'est exactement notre point, mais il
faut aussi travailler sur, une fois qui sont déjà ici au Québec, comment peut
les accompagner dans leur cheminement académique parce qu'il faut comprendre
que, selon le Règlement sur l'immigration du Québec, un étudiant doit faire de
ses études sa principale activité. Et ça, ce n'est nullement défini, ni dans le
règlement ni dans aucun guide de procédure interne. Donc, au niveau fédéral, qu'est-ce
que ça veut dire de poursuivre ses études? C'est d'être minimalement inscrit à
temps partiel et d'avancer raisonnablement vers l'obtention de son diplôme. Au
Québec, la conception des choses et comment le MIFI applique et interprète son
règlement, c'est qu'il faut être absolument inscrit à temps plein, et ce,
pendant toutes les sessions.
Donc, c'est certain, il va sans dire que ce
n'est pas toujours possible d'être inscrit à temps plein, que ce soit à cause
de la disponibilité des cours, hein, il faut avoir parfois des cours qui ont
des prérequis, il y a des cours qui ne sont pas offerts à toutes les sessions.
Alors, un étudiant, à cause de comment son département fait la grille de cours,
pourrait être amené à ne pas pouvoir faire le cours qui est nécessaire pour son
diplôme et être inscrit à temps partiel. Renouvellement du CAQ. Le CAQ est
refusé. Et à ce moment-là, bien, l'étudiant se retrouve sans recours. Il doit
faire soit administratif ou aller dans une autre province. Et actuellement, le
MIFI est extrêmement strict et ne considère aucune condition particulière que
ce soit problème de santé mentale, isolement. Donc, les étudiants locaux ont
eux aussi tout le loisir d'être des étudiants à temps partiel. Mais
malheureusement, les étudiants immigrants n'ont pas... n'ont pas ce luxe.
Donc, il y a aussi... Il y a une question
de bienveillance de la part du MIFI et d'accompagner les étudiants étrangers
lors de leur cheminement académique. Et ça, ce serait... ça aurait été une
belle occasion de justement définir qu'est ce que c'est de faire ses études sa
principale activité. Ce n'est pas parce que j'ai quatre cours ou trois cours
que je ne suis pas au Québec pour étudier. Cela est d'autant plus vrai puisque
le nouvel article 104.2 du même règlement prévoit que le ministre peut
rejeter une demande si la personne n'a pas fait de ses études sa principale
activité dans les cinq dernières années. Donc, là, à ce moment-là, avec seulement
une cession à temps partiel, selon comment le règlement est rédigé, on pourrait
ne plus pouvoir déposer demande pendant cinq ans, et il va sans dire que ça
peut poser beaucoup de problèmes sur le... sur le cheminement.
Ensuite, la proposition dans ce projet de
loi de lier le CAQ, le certificat d'acceptation du Québec à une école peut,
dans le même... même esprit, limiter ce que l'étudiant peut faire. Donc nous,
ce qu'on recommanderait, c'est de plutôt, si l'établissement d'enseignement est
dans la liste qui est préalablement définie par le MIFI, bien, à ce moment-là,
l'étudiant pourrait changer d'établissement pour des raisons diverses. C'est
sûr qu'il faut, quand on parle de prévisibilité et de comment le gouvernement
envoie ses messages, il faut parler de la rétention des talents puis de qu'est-ce
qu'il se passe après le diplôme.
Donc, l'année dernière, la ministre
Fréchette disait qu'on va exempter les personnes qui sont diplômées du quota,
puisque ce sont des immigrants parfaits. Ils parlent français, ils sont déjà
logés, il n'y a vraiment aucun problème. Et le ministère n'avait probablement
pas prévu que plusieurs personnes allaient désormais...
M. Boudissa (Ismaël) : ...déposer
la demande puisqu'ils sont maintenant admissibles, et là, une année plus tard,
bien, on les suspend pendant huit mois parce qu'on n'avait comme pas vraiment
anticipé, malheureusement, qu'on allait devoir traiter toutes ces demandes. Et
donc c'est un peu ça, le message que l'on veut donner aujourd'hui. Il y a beaucoup
d'incohérence, puis, pour nous, ça touche à des principes fondamentaux d'équité
procédurale, d'une certaine expectative d'un droit, même si le gouvernement a
tout à fait le droit de faire ses propres limites, ses propres seuils, mais il
faut quand même penser à au moins l'année prochaine si les seuils ne seront pas
dépassés.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Juste petit rappel, au cas où ça
reviendrait. Ici, on nomme les élus par leur circonscription ou leur titre, à
ce moment-ci. Alors, on commence la discussion avec la banquette
gouvernementale. Seize minutes 30 secondes.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présentation. Il y a... Il y a un paquet
d'établissements qui sont passés devant vous... avant vous aujourd'hui, qui
nous ont parlé de la richesse que ça représente pour le Québec, pour les
établissements, pour la recherche, pour les régions, d'avoir des étudiants
étrangers, des étudiants internationaux. Je suis parfaitement d'accord avec ce
qu'ils ont déclaré ici. On est d'accord. Il ne s'agit pas de fermer les vannes,
dire qu'on ne veut plus d'immigrants, on ne veut plus d'étudiants étrangers, ce
n'est pas le cas. Je pense qu'on veut tout simplement avoir un meilleur
contrôle, parce que, quand on parle d'étudiants étrangers, on parle aussi de
notre politique migratoire, on parle du nombre de résidents non permanents sur
le territoire, puis la capacité d'accueil n'est pas infinie.
Je vais donner un exemple de dérapage
actuel, dans l'état de droit actuel. Du 1er janvier au 30 juin 2023, il y
avait... Pardon. C'est ça. Du 1er janvier au 30 juin 2023, il y avait
4 400 CAQ études délivrés pour le secteur privé. Un an plus tard,
pour le même secteur privé, dans... en enseignement supérieur ici,
16 053 CAQ études. On est passé de 4 400 à 16 053. On n'est
pas dans nos cégeps, on n'est pas dans nos grandes universités, dans nos
universités UQ, etc. Donc, il y a quand même certains secteurs où il faut se
poser des questions.
Si on n'adoptait pas le projet de loi
actuel, notre seul outil pour essayer de colmater cette brèche, ça serait de
réduire le nombre de CAQ émis, en espérant que ça soit dans ces institutions-là
que les CAQ ne sont pas émis. Parce qu'en ce moment on n'a pas d'outil
législatif qui nous permet d'avoir l'habileté, quand je dis être chirurgical,
là, d'aller cibler un programme, une région, etc.
Donc, considérant ceci, je vous donne un
exemple, j'aurais pu en donner d'autres, est-ce que vous ne trouvez pas
légitime qu'un État national qui veut gérer son immigration se donne les moyens
d'agir correctement pour éviter les abus sans s'attaquer aux institutions qui
assurent notre développement économique puis, je vous dirais, l'occupation de
notre territoire?
M. Brunet (Patrice) : La
réponse, c'est que je suis 100 % d'accord avec ce que vous avancez, avec
le seul bémol que... évidemment, il y a un bémol, qu'on doit s'assurer qu'il y
a une certaine prévisibilité dans le temps. Un projet d'études se planifie au
moment de l'adolescence dans le pays d'origine de l'étudiant, lorsqu'il a
15 ans, 16 ans, 17 ans, il ou elle. Et donc il y a des décisions
qui sont prises en amont qui mériteraient d'avoir une planification sur
plusieurs années, évidemment en collaboration avec les établissements d'enseignement
qui, eux, ne seraient pas confrontés à admettre aux études, dans un programme
académique, un étudiant, pour que, finalement, cet étudiant-là soit refusé
parce qu'il n'a pas pu avoir son CAQ et qu'il doive possiblement perdre son
année académique, sa première année académique, parce qu'il n'a pas pu entrer
dans un établissement au Québec même s'il avait une lettre d'admission.
• (17 h 10) •
Donc, le principe du projet de loi, nous
sommes d'accord avec. Par contre, le diable est dans les détails. Pour prévoir
une planification pluriannuelle, pour qu'on sache, entre 2026 et... On a vu les
chiffres du gouvernement, vous avez déjà planifié...
M. Brunet (Patrice) : ...les
entrées au niveau des CSQ qui seront émis, il y a des CAQ qui seront émis
pour... jusqu'en 2026. Donc, une planification pluriannuelle pour prévoir par
exemple, peut-être aussi... de façon aussi granulaire que par établissement,
combien ils pourront admettre d'étudiants étrangers pour les universités et les
établissements... les établissements, pour qu'ils puissent eux-mêmes aussi
planifier. Et, de cette manière, ça va permettre d'avoir une prévisibilité pour
l'étudiant et pour ses parents de prévoir leur cheminement académique. Ne
faites pas... ne faisons pas d'erreur, l'erreur ici de croire que tout le monde
veut venir au Québec. Oui, beaucoup de gens veulent venir au Québec, mais on
veut s'assurer de continuer à attirer les candidats académiques de premier
choix et non pas ceux qui vont choisir le Québec par défaut, parce que toutes
les autres portes leur auront été fermées.
M. Boudissa (Ismaël) : Oui,
puis j'ajouterais aussi qu'on... c'est ça, on n'est pas contre le désir de
vouloir mieux contrôler quels établissements d'enseignement peuvent dispenser
des cours et donner des diplômes. C'est sûr que, quand c'est un collège privé
ou un établissement privé, le gouvernement a moins de marge de manœuvre. Par
contre, on aimerait faire confiance au législateur quand il dit qu'il veut
simplement s'attaquer au problème que vous... que vous... le ministre parle sur
les établissements privés. Par contre, ce que ça fait, c'est que, là,
aujourd'hui, il y a une suspension de toutes les demandes de sélection
permanente, tous établissements confondus. Donc, c'est ça, le problème de prévisibilité,
c'est que, oui, le ministre ou le gouvernement veut se donner plus de pouvoir,
plus de marge de manœuvre, mais comment le pouvoir va être exercé, ça, c'est la
question qui nous touche plus particulièrement.
M. Roberge : Mais il y a...
vous, vous me parlez de la décision qu'on a prise la semaine dernière, qui
n'est pas l'objet du projet de loi, mais qui touche la notion... l'immigration
et du PEQ, le fameux programme PEQ diplômé. La capacité d'accueil du Québec,
elle n'est pas infinie. Je veux dire, il y a plus de gens qui veulent venir que
de gens qu'on peut accepter. Puis vous l'avez dit, idéalement, on choisit, on
repêche au premier tour, comme on dit, hein, et je pense que c'est le cas
encore aujourd'hui. Mais quand je dis que notre capacité d'accueil n'est pas...
n'est pas illimitée, bien, écoutez, on a des étudiants qui sont venus ici, qui
ont énormément de misère à se trouver des logements, qui en trouvent qui sont
très loin de leur institution, ça coûte beaucoup plus cher que ce qu'ils
pensaient. Et même, en venant, ils contribuent à augmenter les loyers pour ceux
qui sont déjà là. Plusieurs arrivent finalement... demande l'asile, leur projet
d'études n'en était pas un. En pourcentage, c'est peu, mais il y a des
resserrements à faire. D'ailleurs, les universités nous l'ont dit ce matin,
qu'ils prenaient acte de ça puis qu'il allait y avoir des resserrements.
Donc, quand on sait que notre capacité
d'accueil n'est pas infinie, quand on sait que les cégeps et les universités
nous demandent d'ailleurs de l'argent pour agrandir leurs institutions, en
partie pour accueillir des étudiants étrangers, il faut s'assurer, je pense,
comme État national, qu'une grande partie des gens qui arrivent ici, bien, vont
arriver dans des régions où on va être capables de les accueillir, vont en
majorité étudier dans la langue nationale, vont étudier dans des secteurs qui
sont en pénurie, soit qui sont des secteurs porteurs pour notre économie, soit
qui sont en pénurie, là, santé, éducation, services sociaux. Il me semble que
c'est la moindre des choses que de faire ça.
Et, si on ne le fait pas, Ottawa va le
faire. Ils ont commencé d'ailleurs, hein? On dit qu'on contrôle notre
immigration dans certains secteurs, notamment pour les étudiants. Il faut
prendre note que, depuis quelques semaines, Ottawa essaie... il le fait pour le
reste du Canada, mais essaie de nous imposer un plafond pour les étudiants
québécois. Et si, nous, nous ne faisons pas notre plafond, eux vont nous en
faire, ils vont nous l'imposer. C'est ça qu'on est en train de faire puis ils
sont en train de sélectionner... où les secteurs qui, d'après eux, vus
d'Ottawa, devraient être les secteurs porteurs pour notre économie.
Donc, considérant tout ça, je sais qu'on
pourrait souhaiter le libre marché, là, mais considérant tout ça, le libre
marché n'est pas possible, là, jusqu'à l'infini, considérant notre capacité
d'accueil et ce qu'Ottawa tente de faire. Est-ce que vous ne pensez pas que ce
n'est pas la meilleure solution que de reprendre le contrôle de notre destin
puis de voir aux intérêts du Québec avant que le Canada débarque puis essaie de
gérer nos étudiants étrangers?
M. Boudissa (Ismaël) : Sur la
question du logement, c'est... On comprend que l'objet du projet de loi,
c'était... on parlait beaucoup de... en un an, deux ans, trois ans, les
étudiants étrangers, ça allait exploser. Mais la crise du logement, qui a été,
rappelons-le, récemment reconnue, ne date pas d'il y a deux, trois ans. Donc,
c'est sûr que de dire que la crise du logement, c'est attribuable à
l'augmentation des étudiants étrangers, ou on ne va pas donner les certificats
de sélection du Québec parce que...
M. Boudissa (Ismaël) : ...que
notre capacité d'accueil, elle n'est pas illimitée. C'est certain que, nous, on
voit un petit problème avec ce lien-là qui est direct puis qui, semble-t-il
explique la nécessité de déposer le projet de loi qui, rappelons-le, nous, on
salue le fait qu'on doit mieux contrôler quels établissements d'enseignement
doivent être reconnus et où les étudiants peuvent étudier sur la question
d'Ottawa. Mais au final, les CAQ sont quand même délivrés par le gouvernement
du Québec. Donc, même si Ottawa fait des plafonds ou dit : On va avoir...
On va approuver des permis d'études pour tel établissement ou pour tel secteur,
au final, si la personne n'a pas son CAQ, elle n'ira pas... elle ne pourra pas
déposer une demande de permis d'étude. Donc, c'est en ce sens que, pour nous,
le gouvernement du Québec, dans le programme des étudiants étrangers, a beaucoup
de pouvoir et veut s'en donner plus. Mais la question c'est comment ça va être
exercé et comment on va pouvoir mieux informer la population quand ils font le
choix du Québec. Parce que, quand ils font le choix du Québec, bien,
nécessairement, ça vient avec des petites obligations du côté de la société qui
les accueille.
M. Brunet (Patrice) : Il
y a deux points sur lesquels j'aimerais rajouter également. Pour avoir bien
suivi l'actualité politique dans le reste du Canada, la réflexion et le réflexe
du ministère de l'Immigration, fédéral, de limiter les permis et les visas
d'étudiants hors Québec vient d'une problématique qui est beaucoup moins
importante au Québec des établissements d'enseignement privés qui utilisaient
le programme de visas d'étudiants aux fins de l'immigration, je dirais, plus
que principalement, mais presque exclusivement. Donc, il y avait un modus
operandi de certaines... certains établissements dans le reste du Canada qu'on
ne retrouve pas vraiment ici au Québec. Maintenant, c'est à Immigration Canada
et au MIFI à faire les contrôles. Vous avez tous les moyens pour exercer ces
contrôles-là, mais il ne faut pas non plus réagir de façon... de façon exagérée
sur ce que le Canada a décidé de faire pour restreindre leurs permis.
Et je veux tout simplement terminer en
soulignant que ça prend aussi une cohérence. Vous avez... Vous avez souligné
justement qu'on devrait peut-être privilégier les études dans des domaines qui
sont en pénurie de main-d'oeuvre, mais, en même temps, on vient de suspendre
les PEQ diplômés. Donc, qu'est-ce qui arrive avec ces diplômés à qui on ne
donne pas l'accès à la résidence permanente par la suite? Donc, ça mérite une
certaine réflexion, peut-être un pas de recul pour s'assurer qu'on est cohérent
dans l'établissement de nos politiques.
M. Roberge : Juste avant
de passer la parole à ma collègue, une suspension de quelques mois, ça ne veut
pas dire que le programme est terminé, là. Attention! Ma collègue d'Iberville.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci, M. le ministre. Alors, le temps de parole est partagé avec la
députée d'Iberville. Alors, la parole est à vous. Il reste
4 min 15 s
Mme Bogemans : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Premièrement, j'avais des questions parce que vous
disiez tout à l'heure que tant que l'établissement est reconnu, l'étudiant
pourrait changer de place sans faire de modifications à son CAQ. Comment...
Quel outil on pourrait mettre en place pour bien les suivre à ce moment-là?
M. Boudissa (Ismaël) : À
l'heure actuelle, le CAQ, le consentement du ministre est délivré pour le
niveau d'études et le programme. Donc, une personne pouvait changer
d'établissement tant et aussi longtemps que c'était le même niveau d'études.
Là, c'est... Dans le nouveau projet de loi, on veut aussi imposer une condition
qui est : Si tu avais fait une demande dans cet établissement, tu dois
poursuivre tes études dans tout l'établissement au complet. Donc, si la
personne veut changer, elle devra faire une nouvelle de CAQ. Donc, c'est un peu
ça, le problème que l'on y voyait, c'est que ça fait une embûche
supplémentaire. Puis surtout, comme on le disait, il y a des problèmes dans les
renouvellements de CAQ. Et là, à ce moment-là, la personne, bon, peut-être
qu'elle manque une session, elle n'a pas son CAQ, il faut qu'elle change. Donc,
ça fait... Ça fait beaucoup d'embûches pour l'étudiant qui, au final, si
l'établissement pour lequel il veut faire la modification se trouve sur la
liste reconnue par le ministère, remplit toutes les conditions et les critères
que le ministère indique, bien, pourquoi le limiter à cet établissement précis
là? C'est un peu ça, la question.
Mme Bogemans : Puis moi,
ma question était vraiment... Parce que la banque de données sur le cheminement
scolaire, c'est quand même intéressant puis on est capable de savoir, par
exemple, leur niveau de francisation au bout de leurs études, quelle est la
langue de travail, dans quel domaine, est-ce que c'est significatif? Puis
tantôt, vous nommiez bien le gros impact sur notre société. Ça fait que quel
genre d'outils de contrôle et de suivi on pourrait mettre en place? Puis est-ce
que vous trouvez que le CAQ pourrait être limitatif à ce moment-là?
• (17 h 20) •
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
l'outil de contrôle, c'est déjà ce qui est proposé dans le projet de loi, ce
serait qu'il y ait une liste d'établissements autorisés. Et, à ce moment-là, à
partir du moment qu'une personne veut faire la modification, bien, elle
pourrait simplement informer le ministère, comme ça se fait déjà au niveau du
fédéral, qu'on veut changer d'école. Bien, tant que c'est dans la liste des
établissements...
M. Boudissa (Ismaël) : ...d'enseignement
autorisé, on informe le ministère, et ça finit là, puisque l'établissement
ait... reçu le veto du ministère du Québec.
Mme Bogemans : Parfait. Je
comprends que pour vous, c'est suffisant. Ensuite, vous nommiez que, dans le
parcours, le choix scolaire de décider d'étudier à l'international, ça se
faisait très tôt dans la vie des personnes. Comment le Québec pourrait mettre
en place des mesures pour bien outiller les jeunes dans leur décision ou, au
moins, qu'ils... que ce soit dans leur choix, le Québec, finalement, puis
s'assurer que ce soit dans les domaines qu'on a besoin au Québec, qui sont
porteurs, pour faire des étudiants étrangers qui peuvent s'intégrer pleinement
en tant que nouveaux Québécois?
M. Brunet (Patrice) : Je
pense qu'on est dans une situation ici où on a un système qui fonctionne quand
même très, très bien depuis des décennies. Il y a peut-être des... il y a
toujours des ajustements qu'on peut apporter, mais cette discussion-là devrait
avoir lieu, selon nous, avec les institutions d'enseignement, les
établissements d'enseignement. Et s'il y a des chiffres à accorder, s'il y a
des chiffres à se négocier, ça se fait avec les établissements d'enseignement
sur plusieurs années qui leur permettraient d'accepter ou non de se concentrer
sur certains domaines d'études et d'accepter ou non certains étudiants, avec
toujours une prévisibilité qui serait administrative plutôt que politique.
Maintenant, je ne veux pas enlever
l'intervention du politique non plus. On... ce n'est pas ce qu'on suggère. Le
politique devrait quand même établir les grandes... les grandes lignes, la
planification pluriannuelle, et devrait également intervenir auprès des
établissements d'enseignement. Mais une fois que les chiffres sont entendus
pour les années qui viennent, bien, c'est aux établissements d'enseignement à,
tout simplement, les gérer administrativement.
Mme Bogemans : Puis dans
l'attraction des grands talents, parce que ça doit faire partie aussi, dans la
même ligne de pensée, d'attraction d'étudiants étrangers aussi, et même
québécois, là, ça rehausse la valeur de tout le réseau, qu'est ce qu'on peut
faire davantage au Québec?
M. Brunet (Patrice) : Simplement,
leur donner une prévisibilité, parce que le Québec est très... se vend très,
très bien. Les délégations qu'on a à l'étranger font leur travail. Les
établissements d'enseignement également ont des... les ambassadeurs un peu
partout dans le monde, les ambassadeurs sont également les anciens diplômés qui
recommandent d'étudier dans les...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup.
M. Brunet (Patrice) : Pardon.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, le temps imparti au gouvernement est terminé. Je me
tourne du côté de la position officielle avec le député de l'Acadie, mais c'est
le nom de sa circonscription. Allez-y.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente, pour la précision. Mais vous savez, Acadie, on n'en sort pas, c'est
partout. Alors, content, content que vous soyez là, Me Brunet, Me Boudissa. Ça
déborde un peu l'analyse ou l'étude du projet de loi, mais on y a fait
référence, le PEQ a été suspendu, il y a un moratoire. Pas très longtemps, le
gouvernement a changé des règles du PEQ. Là, on va avoir un projet de loi qui
va donner beaucoup de pouvoir au gouvernement. Dans votre pratique, les étudiants
ou les gens qui terminent leur diplôme, ils doivent faire appel à vous, ils
doivent être inquiets, parce qu'ils ne doivent pas savoir ce qui va arriver
avec, évidemment, leur statut. Est-ce que vous avez, vous, une augmentation de
vos demandes de consultation?
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
par rapport aux demandes d'augmentation, c'est sûr que notre clientèle nous
écrit constamment, nous contactent constamment à chaque fois qu'il y a une
annonce : Suis-je touché? Suis-je pas touché? Donc, certainement qu'on est
appelé à se prononcer. Mais ce qui est encore plus inquiétant, c'est que
lorsque l'on donne un conseil juridique à... le 30 octobre à 17 heures, on
ferme l'ordinateur, on le rouvre le lendemain, tout ce que je viens de dire,
c'est... ça ne s'applique pas au final. C'est ça, le problème de prévisibilité.
Puis on posait la question : Comment on peut mieux accompagner les
étudiants pour faire le choix du Québec? Bien, déjà, si on leur dit : Aïe,
il y a un accès à la résidence permanente, que ce soit vrai, puis qu'on ne
décide pas du jour au lendemain de le suspendre pendant huit mois, qui est
quand même, en immigration, une période extrêmement longue puisque, pendant ce
huit mois là, la personne doit soit renouveler son statut, soit penser à une autre
stratégie. Et d'autant plus que les critères d'admissibilité pour un permis de
travail fermé, dans le PTET, ont été resserrés, il y a beaucoup de personnes
qui vont devoir retourner dans leur pays suite aux dernières annoncements...
aux dernières annonces plutôt. Donc, c'est sûr que c'est difficile pour nous de
naviguer, parce qu'on reçoit des... puis on n'est jamais informé d'avance, là,
on reçoit la nouvelle comme tout le monde et puis on doit informer nos clients.
Donc, c'est un peu ça, la prévisibilité. Le gouvernement veut donner... se
donner plus de pouvoir, c'est sa prérogative, mais encore faut-il bien
l'utiliser. Et malheureusement, dans le passé, avec tous les ajustements qu'il
y a eu au PEQ justement, c'est difficile pour nous d'avoir confiance en... au
gouvernement...
M. Boudissa (Ismaël) : ...dans
l'établissement des critères d'admissibilité pour la résidence permanente
actuellement.
M. Morin : Oui, mais
là-dessus, vous n'êtes pas tout seuls, je peux vous le dire. Ceci étant, là il
y a un moratoire sur le PEQ, donc, il y a des gens qui doivent avoir terminé
leurs études, qui voulaient avoir un renouvellement, mais qui vont tomber
pendant le moratoire, donc ils ne l'auront pas. Ça fait qu'on les a formés,
mais ils vont s'en aller chez eux.
M. Boudissa (Ismaël) : Oui,
dans le reste du Canada.
M. Morin : Bien, c'est ça.
Donc, on a formé des gens ici, puis on va les envoyer ailleurs.
M. Brunet (Patrice) : Il y en
a beaucoup qui y songent parce que...
M. Morin : Parfait, parfait.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Quel est le règlement? Quel est le règlement...
M. Roberge : On fait part...
C'est dangereux, là, parce qu'on parle de vraies personnes, là. On diffuse une
information qui est fausse, qui peut changer le cours de vie. Ce qu'on dit ici,
on a une responsabilité, là. Puis là ce que mon collègue vient de dire, ce
n'est pas exact. Puis on dit qu'il y a des gens qui sont...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci...
M. Roberge : Je ne peux pas
laisser passer n'importe quoi, là...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est juste... S'il vous plaît...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vais juste vous
demander d'être prudent dans vos propos, s'il vous plaît... Oui.
M. Morin : Je suis d'accord.
Alors, le ministre m'a empêché de parler comme parlementaire. Je trouve ça
particulièrement dangereux, mais je vais évidemment me ranger à votre décision.
Ceci étant... Alors, merci pour votre
réponse. Donc, avec ce projet de loi, j'ai l'impression que le gouvernement se
donne un chèque en blanc et qu'ils vont être capables de modifier les règles au
fur et à mesure qu'ils vont les faire. Donc, pour les gens qui sont ici, vous
avez parlé d'absence de prévisibilité, comment ils vont être capables de
naviguer là-dedans, comment vous allez être capable de les conseiller. Est-ce
que vous ne craignez pas qu'on va augmenter des litiges, parce qu'à un moment
donné il y en a qui vont contester les décisions du gouvernement?
M. Brunet (Patrice) : C'est
difficile de rentrer dans des hypothèses de litige pour le futur. Nous, ce sur
quoi on se concentre, c'est vraiment... Vous posiez la question, comment on
réagit par rapport aux inquiétudes de nos clients qui nous appellent, qui nous
écrivent, notre mot, pour l'instant, depuis quelque temps, c'est la prudence.
On les incite à la prudence, avant de prendre des décisions qui impliquent des
investissements de plusieurs dizaines de milliers de dollars, d'attendre. On a
l'obligation également de conseil auprès de nos clients. S'ils nous demandent
d'autres options et qu'on les connaît, qu'on est compétents pour leur offrir
d'autres options... Mon collègue a évoqué le reste du Canada, il y a plus de
stabilité, pour l'instant, pour le reste du Canada.
Puis je vais simplement terminer ma
réponse en soulignant qu'il s'est créé une habitude, depuis le COVID,
d'avoir... de réglementer l'immigration à coups de décrets et de mesures
d'urgence. Mais il faut être très, très prudent. On aimerait vous rappeler
collectivement le contexte dans lequel ces décrets-là ont été adoptés. Ils ont
été adoptés dans un contexte d'ouverture. On parlait de permis de travail qui
permettait de changer d'employeur en dedans de deux semaines, qui sont toujours
en cours maintenant. Donc, c'est dans un contexte d'ouverture. Donc, dans ce
contexte-là, il y a peu de victimes, il y a seulement des bénéfices pour la
société également. Ici, il y a cette habitude qui semble être récente, d'y
aller, également, au niveau fédéral, d'y aller par coups de décrets avec effet
instantané, mais en restriction.
Alors là, il faut faire une distinction,
parce que, quand on le fait en restriction, il y a des vies qui sont affectées.
Il y a des décisions financières qui sont affectées. Et puis il y a un message
qui est envoyé à l'étranger, que le Québec, c'est peut-être... peut-être qu'on
devrait attendre que tout ça se stabilise, parce qu'il y a beaucoup de
poussières dans les airs. Alors, c'est le message que j'aimerais que vous
reteniez, qu'on vous transmet de la part de nos clients qui sont les étrangers,
mais également les entreprises du Québec.
M. Morin : Dans le projet de
loi, le ministre veut modifier la Loi sur l'immigration pour enlever la
prépublication des règlements, c'est à l'article 7, on parlait de
prévisibilité. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
c'est sûr que de donner un préavis, c'est un peu ça, le point de notre
intervention aujourd'hui, c'est les préavis, c'est la prévisibilité. Donc,
c'est sûr que, lorsque le gouvernement souhaite enlever la période de préavis
comme s'il avait besoin d'agir en urgence, alors, comme on le rappelle, que
c'est normalement des choses qui se planifient sur des années, donc c'est
certain que nous, s'il n'y avait pas besoin d'ajouter cette disposition-là dans
le projet de loi, ou si, plutôt, le gouvernement se disait qu'il pourrait
prépublier ces nouvelles mesures, ce serait évidemment, ça va sans dire,
l'idéal.
• (17 h 30) •
M. Morin : Je vous remercie.
Ma collègue va avoir... Oui.
M. Brunet (Patrice) : La
période, comme je le répète, la période de décision, pour un permis d'études...
17 h 30 (version non révisée)
M. Brunet (Patrice) : ...c'est
différent probablement d'un permis de travail ou même de la résidence
permanente, ça se fait sur plusieurs années. Et donc cette prépublication va
donner, c'est vous les parlementaires, quoi, quelques semaines, quelques mois,
mais ça... Ce qu'on demande, c'est une planification pluriannuelle sur
plusieurs années.
M. Morin : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Alors, la parole à la députée de Mont-Royal
Outremont. Il vous reste deux minutes 41 s.
Mme Setlakwe : Merci. J'aimerais
qu'on revienne sur un élément de votre mémoire. Vous y avez fait allusion, mais
on n'a pas... vous n'avez pas élaboré, donc j'aimerais que vous élaboriez sur
Montréal. Puis je n'ai pas peur d'aller là, moi, j'ai peur qu'on coupe à
Montréal. Autant je suis préoccupée par le développement de nos régions, il
faut qu'on parle de Montréal, qui est une ville universitaire extraordinaire.
Les étudiants internationaux, on les a à Montréal, on les veut à Montréal. Moi,
j'habite Montréal depuis 30 ans. C'est une facette de notre ville que j'adore.
Vous parlez... Et moi, j'ai peur ici, donc... Et j'implore le gouvernement de
faire très attention à imposer un moratoire sur les étudiants internationaux à
Montréal, dans un contexte où la pièce législative qu'on a sous les yeux, elle
est très large, elle est... il y a peu de balises, elle n'est pas encadrée, il
n'y a aucune prévisibilité. J'aimerais que vous élaboriez, s'il vous plaît, sur
l'impact sur l'économie à Montréal.
M. Brunet (Patrice) : Bien,
écoutez, ça me fait plaisir d'élaborer avec mes opinions personnelles, mais je
vais limiter ma réponse aux opinions de l'association que je représente et puis
du rôle que j'ai comme avocat qui représente des étudiants, des travailleurs
étrangers et des entreprises.
Montréal, on le sait, c'est le moteur
économique du Québec, c'est une des plus grandes villes au Canada. Et, autour
de ce moteur économique, il y a une vie étudiante qui est importante et cette
vie étudiante là doit être nourrie par des étudiants étrangers. Il n'y a pas
une société qui peut se développer simplement avec son propre peuple. Les
civilisations ont été bâties à travers les migrations et les étudiants étrangers
font partie de cette équation. Et je ne pense pas que le Québec va innover s'il
décide de fermer sa porte... ses portes... sa porte... ses portes aux étudiants
étrangers. Mais je sais que le gouvernement ne veut pas aller là, il veut
simplement se doter de balises et, j'en conviens, il a le droit.
Mais il y a un message qui est lancé à l'international
puis c'est un message qui existe actuellement. Il est toujours temps de
remettre le génie dans la bouteille, mais peut-être qu'il est trop tard pour
les deux ou trois prochaines années. Il y a un message d'incertitudes qui vont
affecter les grandes institutions d'enseignement, les établissements d'enseignement
de Montréal. Vous avez eu des témoignages et vous allez continuer à en avoir,
que ce soit de la Polytechnique ou de McGill. Les étudiants étrangers qui
viennent dans un pays, qui viennent à Montréal souhaitent possiblement
continuer à faire leur vie au Québec. Et le PEQ — Diplômés fait partie de cette
équation-là. On vient de le retirer. Ça va peut-être revenir en juillet et...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci. Cette portion vient de se terminer. On
poursuit avec le député de Saint-Henri Sainte-Anne pour une période de trois
minutes 18 secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci, Me Boudissa, Me Brunet. Merci d'être ici
aujourd'hui. Je vais aller sur des éléments techniques qu'on n'a pas discutés
encore, l'article 1, là, sur le nouveau processus d'établissement d'enseignement
désigné. À la fin de votre mémoire, vous parlez également d'équité procédurale.
Puis j'aimerais ça vous entendre sur ce volet-là à savoir, là, on a un
processus de désignation, est-ce qu'on a des critères, est-ce qu'on a un
processus de suspension de désignation, bref, des institutions, là, qui vont
être visées ou pas visées ou qui, tout d'un coup, feraient l'objet de
suspension. Comment vont-ils se gouverner là-dedans?
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
c'est certain que si on voit du point de vue des établissements d'enseignement,
c'est quoi, les critères pour l'obtenir, qu'est-ce qui fait que je peux perdre
mon permis, donc... Puis là on remarque à la lecture du projet de loi que les
préavis puis les avertissements, ce n'est pas vraiment vers là qu'on s'enligne.
Donc, c'est sûr que ça, c'est une question que les établissements doivent... d'enseignement
doivent eux-mêmes se poser. Donc, ça nous touche moins, nous, tu sais, l'association
de juristes, mais c'est certain que les établissements d'enseignement vont
devoir réagir rapidement et vont devoir, c'est ça, être vraiment à l'affût de
ce qui est publié dans...
M. Cliche-Rivard : Ça fait
que critères définis, avis, droit de réponse...
M. Boudissa (Ismaël) : C'est
sûr, c'est très flou, c'est très flou.
M. Cliche-Rivard : ...contestations,
des éléments d'équité procédurale devraient être ajoutés, là.
M. Boudissa (Ismaël) : C'est
très flou puis ça laisse place à un peu de bon vouloir du gouvernement en
fonction de ce qui lui concerne.
M. Brunet (Patrice) : Oui,
puis on pourrait voir comment c'est décliné par la suite, mais effectivement,
il faut être prudent. En même temps, on a vu l'expérience du reste du Canada où
il y avait des établissements d'enseignement qui étaient... qui étaient créés
pour des fins d'immigration, je vais le dire comme ça...
M. Brunet (Patrice) : ...on ne
veut pas que ça se répète au Québec. Puis ce n'est pas une mauvaise chose
d'être proactif et d'anticiper ça, mais les détails seront importants puis les...
s'il y a une révocation, ça prendra un processus qui sera équitable et qui va
respecter toutes les parties.
M. Cliche-Rivard : Puis, dans
la même veine, j'aimerais ça vous entendre sur la question d'un éventuel droit
acquis ou de droits acquis pour les étudiants, les étudiantes qui sont visés
par cesdits programmes advenant une révocation de désignation. On est déjà aux
études, par exemple, dans un... dans une deuxième année de cégep ou d'un
diplôme technique, on est sur le point de finir, là notre désignation suspend.
J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Puis, plus largement, dans tout le
contexte de droit acquis qui a touché les étudiants internationaux dans les
deux, trois, quatre, six dernières années, à savoir les modifications du PEQ et
autres, puis la prévisibilité dont vous parlez, puis il ne vous reste pas
beaucoup de temps, mais j'aimerais ça vous entendre sur l'importance du droit
acquis pour les étudiants.
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
le droit acquis, c'est un concept assez particulier, il y a des critères qu'on
doit respecter, mais c'est certain que, pour nous, on y voit une problématique,
ne serait-ce que sur le plan humain, que... d'une personne qui reçoit un CAQ
pour une école, finalement, deux ans sur trois, l'école perd sa désignation, on
ose espérer que le gouvernement va donner un certain droit acquis pour les gens
qui sont déjà aux études. Par contre, dans le passé, ça n'a pas toujours été le
cas. Il a fallu se battre beaucoup puis faire des interventions plutôt médiatiques
là-dessus. Donc, finalement, le droit acquis a été respecté pour la première
mouture du PEQ, qui a finalement imposé une expérience de travail, qui a été
enlevée l'année dernière, qui a... qui s'est soldé par une explosion des
demandes, puis, finalement, on a... on a fini le programme. Donc, pour nous, la
question des droits acquis, elle n'est jamais discutée lors des annonces. Par
contre, ça doit être quelque chose qui doit être, pour nous, plus...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci.
M. Boudissa (Ismaël) : ...respecté.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Cette période se termine, mais, en fait,
on... il nous reste un intervenant en la personne du député de Jean-Talon, pour
trois minutes 18 secondes.
M. Paradis : Vous
soulignez... je suis dans la foulée, là, de la discussion précédente, vous
soulignez, à la page six de votre mémoire, là, la spectaculaire volte-face du
gouvernement, entre le 1er novembre 2023 et le 1er novembre 2024, en ce qui
concerne notamment les étudiants étrangers. Et là vous dites que ça, ça a
l'impact suivant : «L'instabilité des décisions gouvernementales en
matière d'immigration depuis plusieurs années ne leur inspire pas confiance»,
en parlant des personnes visées.
Quand vous regardez le projet de loi n° 74
actuellement, est-ce que vous voyez poindre quelque chose qui vous indique
qu'on va vers de la stabilité? Est-ce que vous avez des chiffres? Est-ce que
vous avez des données par rapport à ce que le gouvernement vise à faire en
matière de planification?
M. Brunet (Patrice) : C'est...
C'est un peu le sujet de notre inquiétude aujourd'hui, c'est que ça laisse une
trop grande marge de manœuvre au ministre de pouvoir décider, selon l'humeur
politique instantanée, de... des... de l'émission des CAQ. Et, je le répète, on
n'a... on n'a aucune difficulté à ce que le politique détermine des objectifs,
mais ils doivent être mesurés, calculés et anticipés dans le temps et non pas
instantanés. Le projet de loi qui est soumis ici donne le pouvoir au ministre
de prendre des mesures instantanées, et ça, c'est ce qui nous préoccupe.
M. Paradis : Très bien. Je
vous amène ailleurs, ce n'est pas dans votre mémoire et dans votre témoignage,
mais j'aimerais profiter de votre présence pour vous poser cette question-là.
Ce matin, le commissaire à la langue française nous a parlé de cet enjeu ou de
ce... de cette différence entre le nombre de personnes qui sont admises comme
étudiants étrangers au Québec et le nombre de personnes inscrites. En gros,
125 000 personnes admises, 80 000 personnes inscrites au
collégial ou à l'université. Et puis, dans un autre témoignage, on nous a
invités à faire la différence entre les deux. Puis le commissaire a dit :
Mais la différence entre les deux, on ne sait pas exactement où vont ces
personnes-là, où sont ces personnes-là. Vous qui êtes dans le domaine, est-ce
que vous avez une partie de la réponse à cette question-là?
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
peut-être quelques pistes de réflexion. Si la personne a son CAQ... n'a pas
nécessairement son permis d'études. Il y a eu, dans le passé, des enjeux de
refus d'étudiants destinés au Québec. Donc, si la personne a son CAQ... peut
finalement ne jamais venir étudier au Québec, peut finalement bifurquer puis
aller dans le reste du Canada. Il y en a une petite proportion qui soit
demandent l'asile, soit transforment vers travailleurs. Mais, au final, la
disparité entre les admissions vers le Québec et les inscriptions, pour nous,
ça ne dénote pas un abus du système ou que les personnes viennent sous de faux
prétextes. Souvent, c'est que soit la personne n'a pas son permis d'études et
bifurque dans une autre province ou change de projet ou de pays, tout
simplement.
• (17 h 40) •
M. Paradis : Donc, ce qui
veut dire que, cette année, là, si on... c'est 125 000 personnes
admises, 80 000 personnes inscrites, ça fait quand même une
importante différence, là. Ça veut dire 45 000 personnes entre les
admissions puis les inscriptions. Puis ça, c'est... ce que vous nous dites, là,
c'est...
M. Paradis : ...c'est une
partie de la réponse ou c'est le gros de la réponse?
M. Boudissa (Ismaël) : Bien,
c'est-à-dire, à savoir si c'est une grosse disparité, bien, je ne saurais pas
me prononcer là-dessus. Je n'ai pas vu les chiffres, je n'ai pas vu l'étude.
Donc, voilà.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fin à nos discussions. Je
vous remercie pour l'apport à nos travaux. Je vais suspendre la commission, le
temps de... que les prochains puissent s'installer. Au revoir.
(Suspension de la séance à 17 h 41)
(Reprise à 17 h 47)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Alors, je vais souhaiter la bienvenue à nos prochains intervenants qui
sont les représentants de l'Université Bishop's, avec... représentés par M.
Sébastien Lebel-Grenier, principal et vice-chancelier, ainsi que Mme Geneviève
Gagné qui est Secrétaire général. Bienvenue. Ainsi que ceux de l'Université
Concordia, représentés par M. Graham Carr, qui est recteur et vice-chancelier,
ainsi que M. Pascal Lebel, Directeur général des relations gouvernementales.
Alors, comme tous les autres, vous bénéficiez de 10 minutes pour faire
votre présentation, et par la suite, nous allons procéder à la période de
discussion avec les élus. La parole est à vous.
M. Carr (Graham) : Bien,
merci de nous permettre de participer au processus consultatif portant sur le
projet de loi n° 74. Au cours des derniers mois, les étudiants
internationaux ont souvent été montrés du doigt dans le discours public.
Pourtant, selon de nombreuses données, le Québec ne peut pas se permettre de
réduire de beaucoup le nombre d'étudiants internationaux universitaires.
D'abord, le Québec fait face à une pénurie
de main-d'oeuvre spécialisée. Les étudiants internationaux formés au Québec
représentent un réservoir de talents précieux. De plus, réduire le nombre
d'étudiants internationaux aura un impact majeur sur le financement des
universités. Le sous-financement structurel des universités québécoises est
déjà estimé à 2 milliards de dollars. Face à cela, le gouvernement a
encouragé les établissements à augmenter leur recrutement international pour
compenser le manque de financement public, apportant près de
520 millions de dollars par année. L'imposition de quotas pourrait
entraîner des pertes significatives et aggraver davantage le sous-financement.
Enfin, aussi l'essor de la recherche et de l'innovation québécoise qui serait
en péril. Les universités, notamment à travers leurs chercheurs et étudiants
aux cycles supérieurs, jouent un rôle crucial dans la recherche et le
développement du Québec. Limiter le nombre d'étudiants internationaux dans les
cycles supérieurs diminuera inévitablement la qualité et le volume de recherche
et développement du Québec.
• (17 h 50) •
Pour renforcer la compétitivité du Québec,
protéger et promouvoir la langue française, maintenir la viabilité financière
des universités et soutenir l'essor de la recherche et de l'innovation
québécoise, nous recommandons cinq modifications au projet de loi. D'abord,
nous recommandons que les futurs quotas, un futur plafonnement ne s'applique
pas aux étudiants universitaires. Nous souhaitons aussi que l'ensemble des
établissements universitaires soient désignés d'office par l'article un du
projet de loi n° 74. De plus, nous suggérons que l'article sept soit
modifié afin de conserver la période de consultation à la Gazette officielle du
Québec. Nous aimerions aussi que le projet de loi... prévoie le dépôt à
l'Assemblée nationale d'une analyse comparative d'impact sur les établissements
du réseau universitaire à la suite de nouvelles mesures. Enfin, nous
recommandons qu'un plafond au quota ne se fasse pas sur la base de la langue
d'enseignement...
M. Carr (Graham) : ...nous
comprenons l'importance pour le gouvernement du Québec de pouvoir mieux
contrôler le nombre d'immigrants temporaires sur son territoire, mais au-delà
des chiffres, des seuils et des cibles, nous parlons d'individus talentueux qui
considèrent le Québec comme un lieu d'opportunité, d'individus comme Gina Cody,
arrivée à notre université en 1979 en provenance d'Iran, première femme à
obtenir un doctorat en génie du bâtiment au Canada et aujourd'hui à la tête
d'une grande entreprise en ingénierie. Elle a reçu un doctorat honorifique de
l'Université de Sherbrooke il y a deux ans et elle est maintenant chancelière
de l'Université Concordia. Au cours de sa carrière à la constamment redonné à
la société qui l'a accueillie.
L'impact positif des étudiants étrangers,
leur contribution à notre économie et à notre société sont indéniables pour le
Québec et doivent être pris en compte. Merci pour votre écoute.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Mme
la Présidente, mesdames, messieurs les parlementaires, je vais me concentrer
sur certains éléments.
Premièrement, nous demeurons extrêmement
surpris que les étudiants internationaux soient présentés comme un problème
pour le Québec. On les voit vraiment comme une opportunité essentielle pour le
développement du Québec pour attirer le talent et favoriser l'innovation ici,
au Québec. Et la caractérisation de la situation que... ou du problème que
poseraient les étudiants internationaux nous apparaît surprenante également.
Donc, quelques éléments sur Bishop's.
Bishop's, c'est la deuxième plus petite université en termes d'étudiants
internationaux au Québec. Il y a la TELUQ qui est un peu plus petite. On a
417 étudiants internationaux.... On prévoit avoir 417 étudiants
internationaux cette année. Mais j'aimerais vous parler du portrait un peu plus
complet des étudiants internationaux. Et je vous réfère à la page neuf de notre
mémoire. Depuis 2014, parce que le ministre a utilisé les chiffres depuis 2014,
on parle d'une augmentation de 24.4 % des étudiants internationaux au sein
des universités de langue anglaise. Entre 2023 et 2024, il y a eu une chute de
9.4 % des étudiants internationaux. Pour l'Université Bishop's, la chute
est de 27.7 %. Donc, c'est une chute qui est extrêmement significative
pour nous et qui a un impact réel sur nos opérations, notre capacité de
poursuivre notre mandat, qui est vraiment axé sur la diversité du corps
étudiant.
Nous sommes une université qui est
concentrée sur une mission qu'on appelle un « liberal education degree», donc
qui est vraiment fondée sur une éducation libérale. Et ce modèle pédagogique
repose sur la diversité du corps étudiant. L'incertitude qui a été créée ces
dernières années a mis à mal notre capacité de poursuivre dans cette mission
pédagogique.
Si on regarde les chiffres plus
globalement, et encore une fois je vous réfère à la page neuf, les étudiants
internationaux dans les universités à charte francophones ont augmenté de
46,9 % depuis 2014. Dans les universités du réseau de l'UQ, ils ont
augmenté de 137,8 %. Alors, ces chiffres-là ne devraient pas être vus
comme une menace. C'est en fait la réussite des mesures qui été ont mises en
place... le succès des mesures qui ont été mises en place par le gouvernement,
qui a encouragé les universités, particulièrement en région, à recruter des
étudiants internationaux pour peupler les programmes et assurer la bonne
gestion, la capacité de ces institutions-là de croître. Donc, encore une fois,
on est surpris qu'ils soient caractérisés comme un problème.
Les chiffres pour les universités, le
ministre a parlé de 120 000 étudiants, je crois que les chiffres ont
été énoncés ce matin. Pour les universités, ça représente
57 000 étudiants. Donc, des personnes qui sont inscrites, qui sont
dans nos universités, des vrais individus qui sont présents au Québec, c'est
57 000. Donc, on considère que ce n'est pas un problème de fond, c'est des
personnes qui apportent vraiment une valeur réelle au Québec.
Maintenant, le climat d'incertitude qui a
débuté l'an dernier a créé vraiment un impact significatif sur le recrutement.
Ça a été le cas pour l'Université Bishop's. Mais je vous dirais qu'il y a
d'autres éléments d'incertitude, qui sont sous-jacents au projet de loi, qui sont
extrêmement préoccupants pour nous. Premièrement, l'article sept, le fait qu'on
prévoit ne pas publier... prépublier, oui, tout à fait, ne pas prépublier les
règlements est extrêmement préoccupant. Et, en termes de capacité des
institutions de répondre et de dialoguer avec le gouvernement, bien,
évidemment, ça élimine cette possibilité-là. L'absence de consultation
préalable est extrêmement préoccupante pour nous. Vous savez, les...
M. Lebel-Grenier
(Sébastien) : ...et le recrutement des étudiants internationaux se
planifie sur plusieurs années, pas sur quelques jours et quelques semaines.
Le projet présente également une attaque
assez directe sur l'autonomie universitaire. Les investissements qu'on fait en
termes de ressources humaines, de ressources matérielles, d'investissements en
infrastructures sont basés sur une planification à long terme et sur des
éléments d'excellence dans lesquels on pense pouvoir avoir un impact réel. De
soumettre ces décisions-là, assujettir ces décisions-là à la volitique... la
volonté politique du moment remet complètement en cause le modèle qui est à la
base des relations entre le gouvernement et les universités au Québec, modèle
qui a été réaffirmé dans la Loi sur la liberté académique. Donc, là aussi, on a
de la difficulté à voir comment ça se justifie dans le contexte québécois.
Évidemment, le fait que les nos
établissements ne soient pas désignés dans la loi, ne soient pas considérés
comme des établissements désignés est une autre préoccupation aussi. C'est une
autre... un autre niveau d'incertitude. Je vais maintenir à ceci pour
l'instant. Je présume que vous aurez plein de... beaucoup de questions, mais
je... en terminant, rappeler que les étudiants internationaux n'ont pas connu
une hausse hors de contrôle dans les universités québécoises, certainement pas
dans les universités de langue anglaise. Ils constituent un atout essentiel
pour la compétitivité du Québec.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour ces présentations. Alors, on va
commencer la période d'échange avec le ministre et la banquette
gouvernementale. 16 min 30 s, la parole est à vous.
M. Roberge : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci de vous être déplacés. Merci pour vos
mémoires. J'apprécie particulièrement les données, les graphiques, les
comparables. C'est intéressant effectivement de remettre les choses en
perspective avec des chiffres puis aussi la... autant en comparaison entre les
différentes institutions puis l'évolution dans le temps.
Juste quand même une précision, ça fait
quelques personnes qui utilisent le mot «problème», Je n'ai pas utilisé le mot
«problème» pour parler d'étudiants étrangers. Les étudiants étrangers ou
internationaux ne sont pas des problèmes que nous essayons de régler. Nous ne disons
pas qu'il n'en faut plus. Il y en avait, il va y en avoir encore. Les gens
arrivent, puis ils n'arrivent pas ici en s'imposant. Ils arrivent ici parce
qu'ils sont acceptés par les institutions, parce qu'ils reçoivent aussi un CAQ
de la part du gouvernement du Québec, une autorisation de la part du
gouvernement canadien. On pense qu'on devrait mieux contrôler l'arrivée de
certains étudiants. On pense qu'il faut se poser la question lorsque les
nombres augmentent. Puis on peut s'entendre sur qu'est-ce qu'une augmentation
modérée, raisonnable, exagérée ou pas. Mais en aucun cas mon gouvernement ou
moi-même on pense que des étudiants étrangers sont des problèmes. Ce sont des
personnes qui viennent ici, qui veulent améliorer leur sort. Dans certains cas,
ils veulent rester ici. Dans votre cas, ils veulent venir ici améliorer des
compétences puis repartir. Mais je veux quand même replacer ça parce que, bien,
parce que ce n'est pas exact.
Quand on regarde ce qui se passe en ce
moment à l'échelle du Canada, on voit que le gouvernement fédéral a, l'an
passé, annoncé une diminution de 35 % du nombre d'étudiants étrangers hors
Québec, 35 % d'un coup, en un an, pas 35 % annoncé sur deux ans ou
sur trois ans, 35 % en un an. Puis là ils nous disent : Bien, l'an
prochain, ça va être un autre 10 %. Donc, 45 % en deux ans, c'est
beaucoup. L'an passé, ça n'avait pas touché directement le Québec. Là, on se
rapproche, là. Il y avait... On est sur la limite. Et ils ont aussi dit qu'ils
voulaient toucher les secteurs via les permis de travail. Ensuite, ils veulent
aussi toucher les secteurs, donc les programmes.
• (18 heures) •
Voyant cette initiative du gouvernement
fédéral qui arrive sans nous consulter dans un champ de compétence, je pense,
qui est le nôtre, est-ce que vous ne pensez pas que ça serait une bonne chose
qu'on fasse une conversation nationale, comme ce qu'on fait ici avec les
collègues parlementaires et les experts qui viennent défiler pour voir... Et si
nous décidions par nous-mêmes qu'est ce qu'on ferait, est-ce qu'on déciderait
d'en avoir davantage? Est-ce qu'on déciderait d'avoir le même nombre, mais
peut-être dans des régions différentes, dans des secteurs différents? Est-ce
qu'on voudrait réduire modérément, énormément, réduire de plus de 50 %, passer
de 100 000 à 50 000 comme le Parti québécois? Je pense que c'est sain
d'avoir cette discussion-là. Et ma question, c'est justement, voyant ce que le
gouvernement fédéral est en train de faire, est-ce que vous ne pensez pas que
ça serait mieux que ce soit notre État national, après une conversation comme
celle que nous avons, qui devrions prendre ces décisions-là? Parce que le
gouvernement canadien, je ne pense pas qu'il vous a... Je ne pense pas qu'il
vous a convoqué en commission, comme nous le faisons, avant d'annoncer leur
décret...
18 h (version non révisée)
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...Donc,
sur le premier élément, vous avez parlé du... de l'idée de mieux contrôler. En
fait, on est... Là aussi, on aimerait avoir plus de... une meilleure
compréhension de ce qui est visé, parce qu'en lisant le projet de loi on voit
une duplication de pouvoirs existants. Vous avez déjà des pouvoirs étendus
lorsque vous attribuez les certificats d'acceptation du Québec, vous avez un
pouvoir d'enquête qui est assez étendu, donc on ne voit pas en quoi la création
d'un pouvoir discrétionnaire qui a un effet immédiat, donc qui n'implique pas
nécessairement un dialogue, va aider à avoir cette conversation nationale. Je
vous corrige aussi sur le fait que ça n'a pas eu d'impact l'an dernier, l'Université
Bishop's a perdu 27,7 % de ses étudiants internationaux. C'est un impact,
c'est un impact qui est très, très réel.
Donc, oui, c'est bien qu'il y ait une
consultation. On est heureux de pouvoir venir vous parler de nos préoccupations
aujourd'hui, ici, à l'Assemblée nationale, et c'est une bonne chose, mais la
réalité, c'est que ce qu'on vise, ce qu'on prévoit dans la loi, c'est un
pouvoir qui n'est pas encadré par un mécanisme de consultation. Et en fait c'est
une application immédiate des règlements qui sont proposés à travers l'article 7.
Donc, vous comprendrez qu'on n'a pas beaucoup confiance en l'idée que ce soit
un dialogue qui soit engagé avec les universités, parce que les décisions qui
vont être prises vont être des décisions qui risquent d'affecter l'ensemble des
priorités stratégiques. C'est le gouvernement qui, de façon discrétionnaire, va
pouvoir s'immiscer dans les programmes, dans les priorités universitaires, et
ça, c'est une attaque frontale à l'autonomie des universités.
M. Carr (Graham) : Et pour ma
part, si je peux répondre, M. le ministre, oui, je pense que tout le monde
pense que c'est une bonne idée d'avoir une conversation sur l'immigration,
mais, du côté universitaire, et moi, je parle pour l'Université Concordia, mais
j'ai bien entendu plusieurs de mes collègues ce matin, je pense que l'enjeu,
pour nous, c'est déjà on fait un très bon accueil pour les étudiants
internationaux qui viennent étudier ici au Québec et on a besoin de ces
étudiants, on a besoin de ces étudiants, surtout pour supporter nos programmes
de recherche et développement qui sont très, très, très importants pour nous à
l'Université Concordia. Alors, à mon avis, les étudiants internationaux
représentent un grand atout pour le Québec et ça a été démontré pendant les dernières
années. Et même le gouvernement l'a reconnu, l'a reconnu cette réalité, quand
il a encouragé les universités, surtout les universités francophones, de faire
encore plus de recrutement à l'extérieur avec un financement pour les aider de
le faire, auquel l'université à l'anglais, à l'expression anglaise n'ont pas l'accès.
Alors, je pense qu'il y a une reconnaissance, pendant même la dernière année,
de l'importance de recruter les étudiants internationaux pour l'ensemble des
universités au travers le réseau.
M. Roberge : Merci. Ce matin,
notre premier intervenant, c'est le Commissaire à la langue française, qui a
publié quelques études depuis la semaine dernière, notamment un tableau qui m'interpelle
sur la probabilité d'utiliser le français au travail. On dit, bon, lorsque les
gens font leur scolarité de base, primaire, secondaire en français, collégial
en français, université en français, 88 % des chances qu'ils travaillent
en français. Scolarité de base en français, cégep en anglais, on revient à l'université
en français, 70 % de chance de travailler en français, donc on perd
18 % même si on fait le bac ou la maîtrise en français. Scolarité de base
en français, collégial en français, mais la dernière tranche après quoi, 15 ans
de scolarité en français, si on fait la scolarité universitaire en anglais, on
tombe à 59 % de chance de travailler en français. Et si on fait primaire,
secondaire en français, mais qu'on fait cégep et université en anglais,
32 % de chance de travailler en français. Quand on voit ces chiffres-là,
ça peut nous interpeller quand même. Et ma question, c'est : Qu'est ce que
vous pouvez faire de plus? Je sais que vous en faites déjà, de dire qu'il ne se
passe rien, ce serait faux. Mais qu'est ce que vous pouvez faire de plus pour
vous assurer que les gens qui diplôment dans vos institutions soient plus aptes
et aient davantage de chances de travailler en français? Je ne suis pas contre
le fait qu'ils maîtrisent la langue anglaise à 100 %...
M. Roberge : ...je souhaite
que mes filles soient plus bilingues que moi, d'ailleurs elles le sont déjà,
même si je me débrouille. Ceci dit, je souhaite que les gens travaillent en
français. Vous pouvez faire quoi de plus que ce que vous faites?
M. Lebel (Pascal) : C'est une
excellente question. Sur ce côté-là, bon, il y a tout le volet francisation
qu'on travaille. On a des stages, notamment beaucoup des stages coops, à
l'Université Concordia, en... où on va, évidemment, les encourager, ils vont...
les étudiants vont aller travailler en français. Mais, au-delà de tout ça, ces
études-là que le commissaire a partagées... Et j'imagine que... Bon, je n'ai
pas toutes les sources, mais une des sources qui est souvent citée, elle a été
citée notamment par le gouvernement dans son document sur la langue française,
c'est... une étude de Statistique Canada de M. Lemyre. Et je comprends toute la
notion de ces chiffres-là, mais la première chose que dit cette étude-là, de M.
Lemyre, c'est... puis je vais la citer, c'est : «Il est également important
de garder à l'esprit que le lien entre la langue de travail et la langue
d'enseignement de l'établissement où a été obtenu le dernier diplôme peut
résulter en préférences linguistiques antérieures aux études secondaires. De ce
fait, il est impossible, impossible, d'établir un lien causal entre langue
d'enseignement des établissements postsecondaires et la langue utilisée au
travail.»
C'est important parce que, lorsqu'on
regarde les statiques plus graves puis on fait ce lien-là, ça veut dire que, par
exemple, des institutions francophones à Montréal, bien, c'est... le taux est
double aussi pour les étudiants francophones, par exemple, pour travailler en
anglais. C'est lié au fait qu'ils sont à Montréal, ce n'est pas le fait qu'ils
sont allés à une université à... une université francophone à Montréal. On ne
ferait pas ce lien-là, ce n'est pas un lien causal. Puis il ne faut pas
oublier... Puis ça serait encore plus important si c'était le cas parce que
75 % des gens qui ont un diplôme... qui sont francophones, qui ont un
diplôme d'une université francophone, c'est... dans 75 % des cas, c'est
eux qui travaillent en anglais, donc... Mais ce n'est pas un lien causal, donc
ce n'est pas... il faut faire à ce niveau-là.
L'autre chose qu'on doit aussi regarder,
c'est dans quels secteurs vont ces gens-là. Puis un des trucs qui est amusant à
ce niveau-là, c'est que le secteur le plus surreprésenté parmi nos étudiants
qui sont francophones puis qui étudient chez nous, puis qu'ensuite travaillent
en anglais, c'est le secteur de l'éducation. Et l'étude, justement, de
Statistique Canada... énonce justement le fait que c'est parce que
l'enseignement langue seconde en anglais est... c'est beaucoup des étudiants
qui viennent chez nous. Donc, évidemment, ils travaillent en anglais mais ils
travaillent dans les polyvalentes puis dans les écoles primaires au Québec.
Donc, on comprend tout ça. Ceci dit, je
pense que, le commissaire a amené ces chiffres, il y a une corrélation, mais il
n'y a pas nécessairement de causalité, puis c'est les études de... les études
sur lesquelles sont basées qu'ils le disent. Maintenant, oui, on est toujours
très, très ouverts. On fait beaucoup, je pense, pour le français, on a beaucoup
de mesures, et on est justement en train de travailler avec le gouvernement,
justement pour les étudiants... excusez-moi, les étudiants internationaux, pour
les franciser le plus possible puis développer des programmes. Puis je pense
qu'on a une bonne... pour l'instant, un bon travail qui est fait là, à ce niveau-là,
là, pour développer quelque chose.
M. Carr (Graham) : Et, si je
peux ajouter, déjà, à Concordia, les étudiants qui viennent de France sont très
présents dans nos établissements et il y a... Avec les tendances d'inscription
qu'on a remarquées pendant les deux dernières années et avec les annonces à
venir, moi, je suis convaincu que, l'année prochaine, les Français seront la
cohorte la plus importante d'étudiants internationaux à Concordia. Alors, ce
n'est pas que les étudiants qui viennent des pays non francophones qui
choisissent d'étudier avec nous autres.
Sur la question de qu'est-ce qu'on peut
faire pour les aider à... de maîtriser le français. Comme vous le savez,
l'année passée, les trois universités anglophones ont proposé au premier ministre
de franciser à 40 % des étudiants étrangers non francophones qui viennent
chez nous. On travaille déjà sur cet... vis-à-vis cet objectif parce qu'on veut
donner la plus grande possibilité pour nos étudiants de faire des stages, des
stages de coop, etc., avec les entreprises québécoises, comme une partie de
leur formation académique chez nous. Alors, nous sommes très investis dans la
francisation... nous sommes déjà très investis dans la francisation de nos
étudiants. Nous sommes à la recherche d'encore plus d'étudiants internationaux
francophones. Alors, je pense que nous sommes dans la bonne... dans la bonne
piste... sur la bonne piste vis-à-vis votre question.
• (18 h 10) •
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui,
très rapidement. Merci, M. le ministre, pour la question, c'est une excellente
question, là. Première chose qui est peut-être évidente, là, mais c'est que ma
communauté est francophile, elle a choisi un francophone pour diriger une
institution anglophone qui existe depuis 180 années. Donc, je crois que ça
en dit beaucoup. Maintenant, sur le fond, nous...
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...bon,
déjà, un éventail très étendu de mesures pour aider à franciser puis à
retenir... à donner les compétences linguistiques, mais les compétences
professionnelles aussi aux étudiants internationaux qui viennent chez nous. On
veut attirer le talent et leur donner ce qu'ils ont... ce dont ils ont besoin
pour réussir au Québec et être intégrés au Québec. Et je ne vais pas répéter ce
que mon collègue vous a dit, mais essentiellement on travaille présentement
avec le gouvernement du Québec pour voir comment on peut ensemble s'entraider,
se soutenir dans notre volonté d'augmenter l'offre. Et ça, c'est très, très
important. On a besoin de l'appui du gouvernement du Québec pour augmenter
l'offre de francisation à nos étudiants qui ne parlent pas français. Et nous
espérons que cet appui-là va continuer parce qu'il est absolument cardinal si
nous... si le gouvernement souhaite que nous soyons véritablement les partenaires
que nous pouvons être pour aider à la francisation, la promotion du français et
la promotion de la société québécoise.
M. Roberge : Je vous remercie
pour vos réponses. Je suis désolé de laisser seulement deux minutes à ma
collègue, mais je vais la laisser aller quand même avec sa question.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Députée de Châteauguay, il vous reste une minute 49.
Mme Gendron : ...d'être là,
Mme, messieurs. J'avais une petite question. Vous avez mentionné un peu plus
tôt que vous devez, en fait, avoir des investissements majeurs dans les
infrastructures, je pense qu'on parlait ici de Bishop's. Je voudrais savoir
quelle est la nature des investissements pour améliorer, justement, le service
aux étudiants. Voici ma première question. Et la deuxième : Quelles
mesures vous prenez pour accompagner les étudiants étrangers, là, dans vos...
dans vos universités respectives?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui.
Donc, pour... En fait, il y a deux niveaux de questions, là. Sur la question
des infrastructures... vous donner un exemple. Par exemple, l'Université
Bishop's est vraiment parmi les meneurs à l'échelle internationale sur l'étude
sur les exoplanètes. Donc, notre département d'astrophysique est vraiment
reconnu partout dans le monde comme étant un des fleurons dans le domaine.
Bien, ça, ça repose sur la capacité de faire venir au Québec des étudiants
internationaux qui vont travailler dans nos laboratoires, travailler avec nos
chercheurs, donc... Et, en termes d'infrastructures, il y a beaucoup
d'infrastructures. Il y a des subventions majeures qui ont été reçues,
notamment de la Fondation canadienne pour l'innovation, pour développer ce
programme, ce créneau de recherche là. Si, du jour au lendemain, on n'est plus
capables de faire venir des étudiants internationaux, ça tombe à l'eau. Donc,
ça a un impact vraiment fondamental sur des priorités de recherche qui sont
particulièrement importantes pour une petite université comme Bishop's. Nous,
c'est environ 2 600 étudiants, là. Donc, quand on fait des choix
stratégiques comme ceux-là, c'est qu'on concentre des ressources extrêmement
limitées parce qu'on est convaincus qu'on a là un créneau d'excellence qui va
faire avancer notre société. Donc, l'incertitude met au risque l'ensemble de
ces éléments-là.
Pour l'appui, bien, on a vraiment tout un
éventail très large de mesures. Notamment, on a un bureau qui est en appui aux
étudiants internationaux qui vise à s'assurer de leur intégration. On a des
activités d'accueil...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est malheureusement...
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Excusez-moi.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
...ce qui met fin à cette première étape de discussion, mais je me tourne
du côté de l'opposition officielle avec une période de neuf minutes
54 secondes. La parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, écoutez, pour des raisons de procédure, là, vous avez été
arrêté, mais votre réponse est importante. Ça fait que, sur mon temps, je vais
vous permettre de la continuer, s'il vous plaît, pour le bénéfice de la
commission.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui.
Donc, par exemple, on a des mesures d'accueil qui sont particularisées pour les
étudiants internationaux. Nous, on est une université où une proportion très
significative des étudiants habitent sur le campus. Donc, on a toutes sortes
d'activités pour l'accompagnement de ces étudiants-là, pour s'assurer qu'ils
soient bien intégrés à notre communauté. Puis, ensuite, bien entendu, on les
dirige vers des cours de francisation s'ils ne parlent pas le français. On a
aussi beaucoup d'étudiants français. C'est pour nous la plus importante
composante de nos étudiants internationaux. Donc, c'est quand même assez
important de le savoir. Et je crois que c'était vraiment sur les services, là,
qui... d'appui. Donc, par ailleurs, on a un ensemble de services très riches
qui sont donnés à nos étudiants, particulièrement parce que ces étudiants-là
habitent au sein de notre communauté. Donc, il y a vraiment un accompagnement
individualisé.
M. Morin : Parfait. Merci.
Merci beaucoup. On nous a dit, un peu plus tôt aujourd'hui, parce qu'on a
entendu, et c'était très intéressant, les recteurs, rectrices d'universités
francophones... à un moment donné, les gens ont dit que le projet de loi
pouvait peut-être empêcher des abus, en fait, des gens qui voudraient abuser du
système, et les recteurs nous ont expliqué toutes les mesures qu'ils avaient en
place pour bien empêcher ces abus-là. Est-ce que vous avez des mesures chez
vous? Est-ce que vous pouvez nous en... nous en parler?
M. Carr (Graham) : Oui.
Alors, je pense que le... quelque chose très important, c'est de comprendre que
les grandes universités comme l'Université Concordia ont...
M. Carr (Graham) : ...on a
toute une histoire avec le recrutement d'étudiants à l'échelle...
internationaux. Alors, ça veut dire qu'on a travaillé depuis des années et des
années, parfois depuis des décennies, pour développer des liens avec des
écoles, des institutions à l'étranger, pour s'assurer que les étudiants qui
viennent de ces établissements sont bien accueillis, qu'ils ont réussi dans leurs
travaux. Et quelque chose qui est très, très important, de notre côté : on
n'a jamais utilisé des agents de recrutement. Tout le travail de recrutement
est fait par notre propre personnel. Et ça, c'est très, très important. Alors,
même avec plusieurs milles d'étudiants internationaux chez nous, le taux de
demandes pour l'asile, par exemple, c'est moins de 1 % de tous les
étudiants internationaux chez nous. Alors, ce n'est pas beaucoup.
M. Morin : Je vous remercie.
Oui?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui,
peut-être juste pour ajouter, très rapidement, là-dessus, donc, évidemment,
nous, c'est des très petits nombres, donc c'est un suivi qui est extrêmement
personnalisé qui est fait. Et je vous dirais, peut-être, la seule bonne chose
qui est sortie de la... des mesures fédérales qui ont été annoncées dans la
dernière année, c'est que, dorénavant, ils communiquent avec nous, notamment,
ils nous demandent de valider les dates d'admission qui ont été fournies. Et
ça, ça nous a permis et ça a permis au fédéral d'identifier des cas qui étaient
abusifs. Donc, on avait déjà un système qui était très, très rigoureux, mais
cette nouvelle mesure là rend extrêmement difficiles des cas d'abus. Donc, on
est confiants que c'est vraiment extrêmement marginal, s'il y en a.
M. Morin : Je vous remercie.
M. Carr (Graham) : Est-ce que
je peux juste ajouter.
M. Morin : Oui, bien sûr.
M. Carr (Graham) : C'est
quelque chose qu'il faut ajouter chez nous : le taux de réussite
d'étudiants internationaux, c'est plus que 90 %. Et ils réussissent à
terminer leur... le baccalauréat en quatre ans. Alors, ils sont très
performants comme cohortes d'étudiants. Il faut souligner ça quand on parle des
étudiants internationaux, comment ils sont performants. Et je pense que ça,
c'est une réalité partout à travers le réseau.
M. Morin : Je vous remercie.
Est-ce que vous vivez la même chose à Bishop?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Absolument.
Absolument. Ces étudiants-là sont extrêmement performants, ils sont vraiment
une richesse pour l'institution, mais aussi pour les dynamiques de classe, et
c'est des étudiants qui réussissent très bien.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie. On nous a dit aussi, un peu plus tôt, qu'entre autres l'article 3 du
projet de loi pouvait, tout dépendant de ce que fera le gouvernement, parce
qu'évidemment c'est un projet de loi, il n'y a pas beaucoup d'articles, il y
aura éventuellement beaucoup de règlements qu'on ne connaît pas, mais que ça
pourrait avoir un impact sur l'autonomie et la liberté académiques, que le
gouvernement pourrait donc s'insurger dans l'autonomie des universités et dans
le savoir. Pouvez-vous nous en dire un peu plus là-dessus?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Absolument.
En fait, une des grandes craintes qu'on a, c'est exactement celle-là,
c'est-à-dire que c'est un... ce qu'on cherche à faire, c'est donner un pouvoir
qui est purement discrétionnaire, donc il pourrait se fonder sur un ensemble de
critères. Certains sont énoncés, mais c'est... cette liste-là n'est pas
limitative.
Et ces critères vont avoir un impact
direct sur les choix stratégiques que nos institutions vont avoir faits. Donc,
par exemple, si on choisit la langue et on choisit de restreindre la capacité,
notre capacité de faire venir des étudiants parce qu'on est une institution de
langue anglaise, clairement, c'est quelque chose qui va contrecarrer les choix
stratégiques qui ont été faits par l'université, notamment en matière de
recherche, mais aussi en matière de programmes d'enseignement qui visent à
répondre à des besoins réels de la société québécoise.
M. Morin : Et vous nous avez
dit un peu plus tôt que, chez vous, particulièrement Bishop, les décisions
gouvernementales du gouvernement du Québec, récemment, ont créé un véritable
impact. Vous avez parlé de 27,7 % de réduction. Et donc ça pourrait avoir
un impact sur certains de vos programmes, donc, sur la recherche fondamentale
que vous faites?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Absolument.
Si on regarde le programme de recherche au deuxième cycle en «computer
science», donc en informatique, il y a une chute importante d'étudiants qui va
avoir un impact sur la capacité de poursuivre les recherches pour certains de
nos professeurs.
M. Morin : Et j'imagine que
vous avez obtenu déjà des subventions ou des bourses pour faire cette
recherche-là.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Exactement.
M. Morin : Donc, il y a vraiment
un impact, donc, chez vous, c'est majeur, là. Je vous remercie. Je vais céder
la parole à ma collègue.
• (18 h 20) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Il vous reste 3 min 24 s.
Mme Setlakwe : Merci. Juste
pour continuer sur cette chute qui est quand même extrêmement importante, de
28 %, à Bishop's, comment vous l'expliquez? Parce qu'on se souviendra que,
l'automne dernier, il y avait eu cette décision de hausser les droits de
scolarité. Finalement, le gouvernement a reculé quant à Bishop's. Comment
est-ce qu'on explique cette...
Mme Setlakwe : ...substantielle.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui,
donc les frais... les droits de scolarité, c'était relativement aux étudiants
qui proviennent du reste du Canada, et ils représentent pour nous un nombre
important d'étudiants, là, c'est environ 26 %. On rajoute aussi, dans la
même catégorie de frais de scolarité, les étudiants français, qui sont un
4 %, pour un total de 30 %. Mais, si on prend le reste du Canada,
c'est 26 %. Donc, on a vraiment mis l'essentiel de nos énergies à corriger
le tir avec des étudiants qui considéraient venir à Bishop's, de leur expliquer
que les mesures gouvernementales ne signifiaient pas qu'ils ne seraient pas les
bienvenus au Québec ou dans les Cantons-de-l'Est ou à Bishop's. Et on a connu
un certain succès là-dessus. La baisse a été d'environ 10 % pour les
étudiants du reste du Canada. Donc, on a pu limiter l'impact, mais, pendant
qu'on faisait ça, on est une petite université, on a des ressources limitées,
bien, on ne pouvait pas se battre contre la perception qui a été reçue à
l'international du fait que les non-francophones n'étaient plus les bienvenus
au Québec. Et ça a eu un impact sur notre capacité de recruter.
Mme Setlakwe : Merci. La
dernière chose qu'on souhaite comme législateurs, c'est de poser des gestes,
adopter des mesures qui pourraient affaiblir nos institutions. Avez-vous que
le... ces mesures cumulées, et ce qu'on est en train de discuter ici avec le
projet de loi n° 74, ce qui crée de l'incertitude... est-ce que vous avez
l'impression qu'on pourrait... ça pourrait avoir le potentiel de vous affaiblir
davantage?
M. Carr (Graham) : Oui, parce
qu'il y a beaucoup de changements dans les politiques pendant les dernières
années. Ça sème la confusion et le manque de prévisibilités pour les étudiants
et pour les établissements. Et on sait qu'il y a beaucoup d'étudiants qui sont
encore très intéressés par les possibilités de poursuivre leur formation dans
les universités québécoises. Sauf qu'avec toute l'imprévisibilité, il va
être... il risque... d'ailleurs. Et chez nous, on a remarqué une chute de presque
16 % des étudiants internationaux vis-à-vis l'année passée. Alors, c'est
manquant. Et ça, c'est... maintenant, c'est deux ans de suite avec une... avec
une chute d'étudiants étrangers. Je trouve ça très décevant pour nous et pour
le Québec.
Mme Setlakwe : En effet. Et
je pense qu'il reste à peine une minute. Pouvez-vous...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 45 secondes.
Mme Setlakwe : ...élaborer un
peu sur les domaines nichés, là, dans lesquels Concordia se démarque et à quel
point vous êtes donc connectés sur les besoins de l'industrie?
M. Carr (Graham) : Oui.
Alors, je peux commenter sur l'importance de toute la recherche, développement
qu'on fait dans le domaine de l'électrification. Et on a eu une grande subvention
fédérale de 123 millions de dollars il y a deux ans. L'année
prochaine, on veut recruter 250 étudiants au niveau doctorant pour
aider... pour nous aider à faire cette recherche. Et on a fait l'annonce il y a
trois semaines d'un campus thématique à Shawinigan en collaboration avec le
cégep de Shawinigan, le CNETE, pour profiter de l'écosystème en énergie verte
en Mauricie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, il nous reste deux intervenants.
Le... la deuxième opposition pour trois minutes, 18 secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci à vous tous et toutes pour votre présentation. Vous l'avez
dit d'emblée, là, ce que vous demandez, c'est d'être exemptés, finalement, du
projet de loi. Ce matin, je comprends que le ministre qualifiait cette
demande-là de déraisonnable. Ça fait qu'à partir de là, j'essaie d'avancer pour
voir s'il existe un terrain d'entente. Puis peut-être que vous me répondrez à
l'effet qu'il n'y en a pas, puis ça sera bien correct comme ça. Moi, je
soutiens sur le fond votre position. Est-ce qu'une position où on n'exclurait
finalement pas l'ensemble des universités, mais le deuxième et le troisième
cycle, par exemple, ça vous intéresserait ou si vous maintenez votre position?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Bien,
pour notre université, qui est vraiment une université qu'historiquement a été
fondée sur l'éducation au premier cycle, en premier lieu, les cycles supérieurs
représentent 3 % de nos étudiants. Donc, évidemment, si on ne fait
qu'exclure le deuxième et le troisième cycle, ça ne nous protège pas du tout.
Et on va avoir un impact, on est exposé à une incertitude et des impacts
potentiels qui peuvent être vraiment destructeurs.
M. Cliche-Rivard : Voulez-vous
répondre également?
M. Carr (Graham) : Oui.
Alors, j'espère que suite à la... les témoins de mes collègues universitaires,
peut-être le ministre... vont reconsidérer son positionnement. Parce que c'est
clair qu'il y aura un impact négatif. Il y a déjà un effet négatif sur nos
établissements, et pas que les universités anglophones, c'est marqué dans les
universités francophones aussi. Et je pense que ça, c'est... ça, c'est quelque
chose qu'on veut éviter...
M. Cliche-Rivard : Sur les
deuxièmes, troisièmes cycles, là...
M. Carr (Graham) : Sur le
deuxième, troisième cycle, mais aussi...
M. Carr (Graham) : ...au
niveau du baccalauréat.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
Vous mentionnez d'être désigné d'office. Une désignation, par contre, ça peut
s'enlever. Donc, ce que vous vous demandez, plutôt, ce serait une désignation
d'office permanente, là, dans la loi, qui ne peut pas être retirée par
désignation par la suite.
M. Carr (Graham) : Exact.
M. Cliche-Rivard : Vous avez
mentionné, puis c'est un bon point, tout à l'heure, de dire, suivant tous ceux
qui ont été entendus, puis vous avez raison de le dire: Depuis le début de la
journée, je ne suis pas sûr que le ministre passe un bon moment, dans le sens
où l'ensemble des intervenants sont venus nous dire finalement que...
Une voix : ...
M. Cliche-Rivard : Bien oui,
avec nous, peut-être, oui, mais l'ensemble des intervenants sont venus dire que,
finalement, il n'y a pas grand monde qui voit du positif dans ce projet de loi
là. Est-ce que vous, dans votre communauté, il y a qui que ce soit qui en veut
ou qui a jugé du positif du projet de loi n° 74, à
votre connaissance?
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Non.
Ça crée beaucoup d'incertitudes, et puis ça crée d'autres craintes dans notre
communauté. Vous savez, on parlait de l'impact des mesures de l'an passé, ça a
précipité notre université en déficit cette année, en situation de déficit. On
est en plan de redressement. Vraisemblablement, il va y avoir des compressions
qui vont avoir un impact sur de réelles personnes. On est en train de
travailler là-dessus. De l'incertitude supplémentaire, c'est la dernière chose
dont nous avons besoin.
M. Cliche-Rivard : Donc, pure
et dure, vous, vous ne comprenez pas l'objectif ou vous vous ne comprenez pas
pourquoi on est là aujourd'hui. Vous êtes très inquiet.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Non,
on ne comprend pas... Écoutez, moi, je ne peux pas parler pour l'ensemble des
secteurs, puis le ministre a une vue d'ensemble, donc je respecte vraiment sa
discrétion. Ce pour lequel je suis ici pour témoigner, c'est le secteur
universitaire, et, pour le secteur universitaire, je ne vois pas la pertinence du
projet.
M. Cliche-Rivard : Pour le
secteur universitaire, est-ce qu'il y a du bon dans le projet de loi n° 74?
M. Carr (Graham) : Si je peux
répondre à l'autre question, moi, je peux parler pour les universités en
région, mais je pense que les chiffres démontrent l'importance du réseau des
étudiants internationaux.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois malheureusement vous arrêter, le temps imparti au
deuxième groupe d'opposition est terminé. On va finaliser le tout avec le
député de Jean-Talon pour 3 min 18 s.
M. Paradis : J'ai beaucoup
aimé les commentaires introductifs du ministre, hein, où il disait : Le
plein contrôle en matière d'immigration. Moi, je dirais qu'il y a un mot qui
qualifie ça, ça s'appelle l'indépendance du Québec. Cela étant dit, vous avez
aussi un dialogue avec lui sur la question, là, de pointer les étudiants
étrangers. Moi, je ne me souviens pas qu'un parti représenté à l'Assemblée
nationale a dit : Le problème, c'est les étudiants étrangers. Certainement
pas mon parti. Aucun document, aucune intervention publique qui est à cet effet
là. On parle de politique publique, politique publique, y compris sur les
seuils d'immigration, y compris pour les étudiants étrangers. Est-ce que vous
êtes d'accord avec moi qu'il est légitime d'avoir un dialogue national sur ces
questions-là et qu'on peut l'avoir sans stigmatiser, sans pointer du doigt
personne?
M. Carr (Graham) : Moi, j'ai
déjà dit que je suis d'accord avec avec une discussion sur ça, en répondant à
la question du ministre.
M. Paradis : Très bien.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Puis,
en fait, ce que j'ai souligné, c'est que le projet tel qu'il est présenté ne
prévoit pas de dialogue continu sur les seuils. Donc, c'est un projet qui donnerait
un pouvoir discrétionnaire avec effet immédiat. Et, pour l'instant, il n'y a
pas eu de discussion avec nous. Ce dont on a besoin, c'est de la prévisibilité.
Et donc, si on va avec des seuils qui sont déterminés pour un horizon à plus
long terme, c'est quelque chose qui, certainement... si on est interpellé, on
fait partie de cette conversation-là, c'est quelque chose avec lequel on est
tout à fait à l'aise, mais ce n'est pas ce que prévoit le projet de loi.
M. Paradis : Très bien. Et
ça, vous êtes plusieurs, en fait, à peu près unanimement, comme mon collègue de
3shsa le mentionnait, plusieurs sont venus nous dire la même chose. Donc, on
demande de la prévisibilité, on veut savoir c'est quoi, la planification, c'est
quoi, les intentions. Et là, ce que vous nous dites, c'est, quand vous regardez
le projet de loi n° 74, vous n'en voyez pas. Ça
n'aide pas à stabiliser.
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Non.
M. Paradis : Très bien. Ce
matin, on a reçu le Commissaire à la langue française qui nous a rappelé que la
langue d'obtention des études et la langue d'obtention du dernier diplôme est
importante. Et selon les données de son dernier rapport, bon, au Québec, là,
disons, grosso modo, la langue parlée à la maison, là, c'est 80 % français
et 80 % autre langue. Puis là, il dit : Bien, pour l'instant, dans la
répartition des étudiants étrangers, on n'est pas dans cette proportion là.
Dans ses derniers chiffres, lui, c'est 61 % de l'effectif des étudiants
étrangers poursuivent leurs études dans une université de langue française et
39 % dans une université de langue anglaise, c'est-à-dire qu'il y a une
dichotomie. Lui, ce qu'il nous suggérerait, c'est qu'il devrait y avoir des
critères pour faire une répartition régionale et entre les établissements pour
arriver à cette proportion-là. Qu'est-ce que vous en dites?
• (18 h 30) •
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Bien,
c'est encore une autre attaque à l'autonomie universitaire. Donc, les
universités choisissent de s'investir dans des domaines des créneaux
d'excellence, investissent des ressources pour ces créneaux-là. Les universités
sont en concurrence aussi et elles attirent les étudiants. Donc, ensuite, ce
que vous nous... ce que vous proposez, c'est que nous décidions pour les
étudiants où ils vont aller étudier. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne
dans le...
18 h 30 (version non révisée)
M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...dans
le système universitaire. Donc, est-ce qu'il peut y avoir des incitatifs?
Absolument, et ce sont d'ailleurs des incitatifs qui ont été mis en place pour
le gouvernement pour favoriser le recrutement d'étudiants français,
particulièrement en région, avec des conditions qui sont favorables, un
financement particulier qui... qui permet de réaliser cet objectif-là. Ça, c'est
vraiment le pouvoir du gouvernement, qui est un pouvoir de créer des
incitatifs, mais... à la place des étudiants...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, merci beaucoup, c'est ce qui met fin à cette
audition. Merci énormément pour l'apport à nos travaux.
Alors, je suspends la commission quelques
instants, le temps de recevoir nos prochains intervenants.
(Suspension de la séance à 18 h 31)
(Reprise à 18 h 35)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Alors, comme derniers intervenants, nous recevons les représentants de
la Fédération de l'enseignement collégial-CSQ, qui sont avec nous par la voie
des ondes, en vidéoconférence. Alors, nous avons M. Youri Blanchet, président
de la Fédération de l'enseignement collégial, M. Youri Boulanger,
vice-président de la Fédération de l'enseignement collégial, ainsi que M.
Julien Poirier, conseiller de la centrale syndicale du Québec. Alors,
messieurs...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes
pour votre présentation, et par la suite, on va entamer la période d'échange
avec les élus. Alors, le temps commence maintenant pour vous. La parole est à
vous.
(Visioconférence)
M. Blanchet (Youri) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Peut-être juste une précision. Je crois que vous
avez nommé Hugo par mon prénom. C'est Hugo Boulanger, vice-président de la FEC.
C'est une petite erreur que je voulais simplement rectifier.
Bonjour. Merci de nous accueillir ce soir.
Nous allons faire très rapidement puisque le temps nous... qui nous est imparti
est très court. Je commencerais simplement par vous dire, peut-être, vous
témoigner d'une petite doléance. C'est qu'en fait nous aurions aimé déposer un
mémoire, mais on opte pour une présentation orale puisque le temps qui nous...
qui nous était donné, le délai était très court. Et nous sommes une très petite
équipe, la FEC, nous représentons un certain nombre de cégeps, mais notre
équipe n'est pas tellement grande. Donc, je tenais quand même à dire que la...
d'avoir reçu cette invitation si tard ne nous a pas permis, la FEC elle-même,
de faire le mémoire. Par contre, la CSQ représentée ici par mon collègue Julien
Poirier, déposera un mémoire demain.
Peut-être simplement pour vous dire que
nous représentons des cégeps de l'Est qui sont très fortement concernés par les
étudiants internationaux dans leur clientèle étudiante. On représente quatre
cégeps de l'Est, donc de l'Est du Québec, là, Rimouski, Rivière-du-Loup,
Matane, Gaspé, les Îles-de-la-Madeleine aussi, mais les étudiants
internationaux y sont un peu moins présents, ainsi qu'un cégep, là, de la
Côte-Nord, Baie-Comeau, qui reçoit aussi des étudiants internationaux.
Ce qu'on peut vous dire, d'entrée de jeu,
c'est que nous sommes très inquiets de ce projet de loi là, inquiets pour nos
cégeps, tout simplement, bien entendu, pour l'offre de programmes, pour le
maintien aussi à niveau des cégeps avec un nombre d'étudiants adéquat...
d'étudiants et d'étudiantes adéquat, qui permet un financement qui est
conséquent. Mais aussi, il ne faut pas l'oublier, pour nous, en région, en
fait, puis je dis «pour nous» parce que je suis... je suis à Rivière-du-Loup,
donc pour nous, en région, la part des étudiants étrangers est indéniable, tant
au niveau économique, parce qu'on on les voit, là, dans les emplois, occuper
des emplois locaux, mais aussi au niveau sportif et culturel, ce qu'on... ce
qu'on oublie souvent. Moi, dans mon petit... dans mon petit hameau, bien, dans
ma petite ville, dans le soccer entre autres, il y a plusieurs coachs qui sont
des étudiants et étudiantes du cégep, qui... entre autres qui viennent de l'île
de la Réunion, qui viennent coacher les jeunes... les jeunes au soccer. Ou, par
exemple, au niveau culturel, plusieurs s'impliquent, ne serait-ce que dans toute
l'offre musicale régionale, le Festival de cinéma, en participant comme
bénévoles. Donc, ils rendre... ils rendent le milieu vivant, ils contribuent de
façon significative aussi en région à l'apport économique, bien entendu, mais
aussi culturel.
Et, ce qu'on peut dire aussi, c'est qu'en
fait, même dans les cégeps, sans mettre à risque le maintien d'un programme,
souvent, ils permettent simplement que de donner un peu d'oxygène, d'augmenter
le nombre minimal d'étudiantes et d'étudiants qui y sont présents et, ce
faisant, améliorer les conditions. Parce qu'un meilleur financement permet
l'achat, entre autres, d'équipements supplémentaires, mais aussi en augmentant
les groupes, bien, ça permet peut-être un meilleur dynamisme aussi qu'on
pourrait dire à l'intérieur de nos institutions.
Nous sommes très conscients, je tiens à le
dire, de l'intention ou de l'objectif du gouvernement ici, qui est de juguler
l'immigration qui est un peu... bon, qu'on pourrait nommer comme galopante
actuellement, je veux dire, nous sommes très conscients qu'il y a beaucoup de
monde, mais nous pensons en toute humilité que de, couper, disons, l'accès à
des étudiants étrangers aux études supérieures, mais particulièrement pour les
cégeps dans notre cas, n'est pas la bonne solution et pourrait mettre à mal
peut-être même, en tout cas dans une certaine mesure, l'offre économique en
région, mais aussi culturelle. Parce que ces étudiants-là aussi, je dois le
dire, c'est des immigrants qui sont de qualité. Tout à l'heure, j'entendais que
c'est souvent des étudiants qui... et des étudiantes qui performent bien,
effectivement, ils performent bien, mais ils ont l'intention de s'installer. Ce
sont des étudiants et des étudiantes qui, dans la majorité des cas... nous...
en tout cas entre autres au cégep de Rivière-du-Loup et dans d'autres
institutions, on accueille majoritairement des étudiants qui sont francophones
de souche, donc il n'y a pas de barrière de langue. Et souvent ils vont
contribuer à l'amélioration de la société par la suite.
• (18 h 40) •
Donc, je vais passer la parole à mon
collègue Hugo dès maintenant, là, qui est du cégep de Rimouski. Merci de votre
attention.
(Visioconférence)
M. Boulanger (Hugo) : Merci.
Effectivement, je suis enseignant au cégep de Rimouski dans un programme qui
s'appelle Technologies d'analyses biomédicales, donc un programme de santé qui
est actuellement en faible effectif. Donc, je joins ma voix à celle de mon
collègue Blanchet, qui y va d'un cri du cœur avec l'importance des étudiants
étrangers pour nos programmes en région.
Si je peux aller plus concrètement,
l'addition de...
M. Boulanger (Hugo) : ...ces
élèves-là, ça permet d'atteindre le seuil minimal de financement des
programmes, ce qui rend possible leur lancement, leur déploiement. Donc, on
vient garantir une offre de formation élargie, notamment dans le secteur de la
santé, où les besoins de recrutement sont critiques. Donc, juste pour vous
donner un exemple concret, l'année passée à Rimouski, on a réussi à faire
agréer 20 infirmières qui étaient formées à l'étranger par le biais d'un
AEC. Donc, ces 20 personnes là ont tout de suite joint les rangs des CSSS
pour consolider l'offre de soins en région.
Il y avait des projets similaires
également dans la région du Témiscouata, là, où on cherche à pallier le manque
de personnel dans des secteurs critiques comme l'obstétrique et la chirurgie,
où y a des ruptures de services, là, de façon chronique. Je ne vous le cacherai
pas, les cégeps de région dépendent de l'arrivée de ces étudiants-là. Je pense
à Matane, à Gaspé, où on y va de la survie de l'institution, là, ni plus ni
moins. Les cégeps, dans une ville de région, ce sont des moteurs
socioéconomiques, des pôles culturels. Et, si on veut... Si on ne peut pas en
assurer la pérennité, bien, on va freiner le développement régional. On en est
là maintenant, en 2024.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...encore du temps.
M. Boulanger (Hugo) : M. Poirier.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Oui, vous avez...
M. Boulanger (Hugo) : Je
voulais juste laisser un peu de temps à M. Poirier. C'est pour ça...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Ah! O.K. Parfait. M. Poirier.
M. Poirier (Julien) : Merci
beaucoup. Julien Poirier. Je suis conseiller à la Centrale syndicale du Québec.
Je remercie Youri et Hugo pour les introductions. Merci aussi à votre... toutes
les personnes présentes pour votre temps et votre attention aujourd'hui sur ce
projet de loi. Donc, oui, à propos du p.l. no 74, on est plutôt de l'avis
que c'est... D'une part, on est sensibles, on comprend à quelles... à quelles
inquiétudes est-ce que cela fait écho. En revanche, on aurait privilégié une
approche différente, et on ne croit pas que la plupart des... de ces... la
majorité de ce qui est proposé dans le projet de loi soit nécessaire.
En contrepartie, les risques qui sont liés
à ce projet de loi là sont difficiles à ignorer. Et on... On a une vive
inquiétude, entre autres, là, comme l'a mentionné mon collègue Youri, sur la
disponibilité puis la qualité générale de l'offre de... qui sera disponible en
la région, mais également pour la vitalité puis la... oui, là, exactement, la
vitalité de nos créneaux d'excellence, qui sont parfois uniques dans certaines
de nos régions du Québec. Et puis ce sont des équipes parfois qui prennent du
temps à être mises sur pied et à être pleinement opérationnelles.
Donc, pour ce faire, et comme le
mentionnait mon collègue Hugo, parfois, si dans ces scénarios la population
d'étudiantes et d'étudiants étrangers peut faire la différence, ça enrichit
grandement à la fois les parcours de vie et les parcours éducatifs de ces
personnes-là, mais également la population étudiante québécoise pour qui
l'offre est grandissante, ainsi que tout l'écosystème de formation ainsi que de
création des savoirs qui est propre, là, aux cégeps dans les régions, mais pour
l'ensemble du réseau. Donc, pour nous, un projet de loi qui contient un certain
nombre de risques, qui n'est pas non plus l'approche qu'on aurait privilégié
pour... pour s'attaquer, là, aux divers... aux divers enjeux qui... qui sont
ciblés, là, par le projet de loi.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Il vous reste encore
1 min 45 s si vous voulez conclure. Ou si ça va, on y va avec la
période de questions?
M. Blanchet (Youri) : Je
vous dirais, je pense, qu'on va y aller avec la période de questions. On
pourrait continuer, mais je pense qu'on va... on va répondre aux questions.
Merci
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Parfait. Merci beaucoup. Alors, je me tourne du côté du
gouvernement avec M. le ministre. Une période de 16 min 30 s
vous est allouée.
M. Roberge : Merci, Mme
la Présidente. Merci pour votre présence, même virtuelle. Vous êtes là puis
c'est intéressant d'avoir des gens qui ont des propos comme les vôtres, qui
arrivent de différentes régions, de différentes institutions. Vous nous parlez
de la vitalité des établissements, des cégeps, beaucoup en région, de plusieurs
programmes qui sont gardés en vie grâce aux étudiants internationaux. C'est
quelque chose que je connais très bien et quelque chose que je salue. Je pense
que c'est nécessaire.
Il y a beaucoup, beaucoup de programmes en
région qui, grâce aux étudiants internationaux étrangers, arrivent à combler
des besoins de main-d'oeuvre ou arrivent à rester en vie, tout simplement, là.
Je sais qu'il y a eu une période creuse dans les cégeps où il y a eu, pendant
certaines années, de moins en moins d'étudiants. Ça remonte, mais graduellement
et de manière inégale.
Je me souviens, au début du premier
mandat, j'avais la responsabilité de l'enseignement supérieur, puis une des
premières décisions que j'avais prises avec le gouvernement, ça a été de
refaire la formule de financement et de permettre, justement, les petites
cohortes puis d'avoir une formule de financement qui est différenciée pour
s'assurer de ne pas avoir du du mur à mur en matière de financement en
enseignement supérieur...
M. Roberge : ...une fois que
ceci est dit, puis avec l'intention gouvernementale très, très claire de ne pas
faire de mur-à-mur, puis de s'assurer de la vitalité des cohortes des cégeps en
région, puis des... de s'assurer qu'on répond aux besoins économiques et qu'on
répond aux besoins gouvernementaux, dans plusieurs programmes, je vais nommer
santé, éducation, on pourrait en nommer d'autres, une fois qu'on a dit ça, on
voit bien qu'il y a quand même eu une augmentation généralisée du nombre
d'étudiants étrangers. Je ne parle pas juste des cégeps, je parle de tous les
étudiants étrangers, 50 000 il y a 10 ans, 122 000 en ce moment. Il y a des
enjeux de logement, puis je ne dirai certainement pas que c'est à cause des
étudiants étrangers, mais il y a plusieurs facteurs. Puis évidemment, quand des
dizaines de milliers de personnes arrivent, on a besoin de dizaines de milliers
de logements, on ne peut pas dire que ça a zéro impact. Il y a plusieurs
intrants, quand arrive un phénomène comme ça, mais on ne peut pas dire que ça
n'a pas d'impact.
Donc, une hausse très, très importante,
des enjeux en termes... en termes de logement, une courbe démographique qui
change, parce qu'on voit qu'il y aura davantage de Québécois qui vont
s'inscrire dans les cégeps dans les prochaines années. Considérant tout ça,
est-ce que vous pensez que le gouvernement du Québec devrait garder le statu
quo actuel, c'est-à-dire simplement pouvoir déterminer le nombre total
d'étudiants étrangers sur le territoire québécois ou il ne devrait pas plutôt
se doter de leviers pour être capable d'agir dans certains secteurs, où il y a
des abus notamment, puis de préserver des cohortes, des programmes, notamment,
des cégeps en région?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Votre micro est fermé. Vous pouvez l'allumer.
M. Blanchet (Youri) : Oui, à
distance, il y a toujours la souris avec deux écrans. Je suis vraiment désolé.
Je cherchais ma souris, ce n'est pas drôle.
Oui, bien, M. le ministre, effectivement,
je pense, bon, vous brossez quand même un tableau pour lequel on n'est pas en
désaccord, c'est-à-dire sur l'ensemble des choses, c'est-à-dire la vitalité, la
formule de financement qui a été révisée. Et ça, je le salue d'ailleurs, parce
que ça a donné de l'oxygène vraiment aux petites cohortes dans les cégeps de
région, entre autres, ce financement révisé là. La hausse importante aussi, au
cours des dernières années, on ne la nie pas non plus. Hausse, par exemple, qui
a été, entre autres... à laquelle... qui peut être attribuée en partie, là, à
des institutions, entre autres, qui accueillaient des étudiants dans des
espèces de... peut-être une espèce d'usine à diplôme, là. On a vu ça, mais le
gouvernement agit là-dessus, puis ça, on pense que c'était probablement
nécessaire, être une anglophone qui venait, entre autres, bon, d'Inde ou
autres. Ça, je ne pense pas que c'est là-dessus, nous, qu'on est... En fait,
pas que je ne pense pas, assurément, nous ne sommes pas sur ça. On est vraiment
sur les étudiants qui sont dans la filière régulière de la formation régulière
au cégep, dans les institutions qui ont pignon sur rue depuis nombre d'années.
Alors, on est vraiment là.
Puis, aussi - juste, parce que j'ai pris
en note aussi la question du logement - on est très, très au fait des
difficultés aussi de logement dans les régions. Par contre, actuellement, on
réussit quand même à loger à peu près tout le monde, là, je veux dire, je n'ai
pas les chiffres partout, partout, je sais que ça a été... Je sais qu'il y a
eu... Il a fallu dédoubler d'efforts au début de l'année, entre autres, dans certains
lieux là, comme Gaspé, où il y avait vraiment un manque, même à Rimouski. Mais
des solutions ont été trouvées, ont été apportées et on a réussi. Une chose
aussi que vous avez dite, qui est très, très vrai, c'est-à-dire nous assistons
actuellement à une augmentation- ça a été un problème en début d'année
d'ailleurs, un beau problème quand même - mais une augmentation des
inscriptions au cégep, parce qu'on sait très bien qu'il y a eu une augmentation
aussi, avant nous, dans le réseau scolaire.
• (18 h 50) •
Ceci étant dit, par exemple, ce n'est pas
garanti que l'augmentation de ces étudiants-là, c'est les cégeps de région,
entre autres, les cégeps qui sont plus éloignés, qui vont en bénéficier. Parce
que je tiens juste à dire qu'actuellement, nous, quand on parle des cégeps de
région, il reste encore des places dans nombre de cégeps de région, alors qu'on
refuse des étudiants dans les grands centres, dans les gros cégeps. Ça fait que
ça, ici, il y a peut-être un déséquilibre et peut-être l'attrait aussi des
grands centres qui vient jouer. Donc, ce que je veux dire, c'est que ça ne nous
garantit pas les seuils pour maintenir nos établissements dans une vitalité
maximale, disons ça comme ça, ou avec un financement qui est le plus adéquat
possible pour remplir la mission de développement des cégeps en région, parce
qu'ils ont une mission aussi de participer au développement économique,
culturel, social dans les régions. Donc, une longue réponse, mais pour dire
que...
M. Blanchet (Youri) : ...finalement,
nous croyons que le projet de loi, bien, devrait... devrait tenir compte... En
fait, c'est sûr qu'on pourrait vous demander aussi d'en être exemptés, mais
j'ai su que ce n'était probablement pas une voie qui était prometteuse. Par
contre, une chose est certaine, c'est que nous, on constate... Parce qu'on
représente toutes sortes de cégeps, hein, puis aussi de centres, là, ça fait
que... nous savons aussi la situation de ces cégeps-là. C'est que c'est moins
criant pour eux, c'est moins nécessaire, dans plusieurs des cas, là, l'apport
des étudiants étrangers, alors que...
Le cri du cœur qu'on vous lance, nous,
aujourd'hui, c'est de dire que nous avons une connaissance fine, sur le
terrain, d'établissements en région pour qui, si on enlève les étudiants étrangers,
bien, il y a... au delà de l'impact même dans l'institution, il y a un impact
aussi dans la communauté. Moi, je disais à mes collègues, même, en préparation
de cette présentation aujourd'hui, que, dans mon... ma petite ville, si,
certains commerces, il n'y a pas les étudiants étrangers pour venir répondre
aussi aux besoins, bien, ils risquent de, bien, fermer ou ne pas ouvrir les
mêmes... pas offrir les mêmes heures d'ouverture. Ça fait qu'il y a un impact
jusque... économique, là, et ça, je pense qu'il faut en être vraiment
conscients.
Donc, je ne suis pas en train de vous
imposer une solution, mais je veux quand même que vous soyez très conscients
des difficultés que ça peut amener dans la vitalité régionale aussi, ça. Et, à
cet effet, bien, peut-être que la loi, dans l'esprit où elle est présentée,
bien, devrait avoir certains, peut-être, garde-fous ou verrous de sécurité
pour, entre autres, les institutions pour lesquelles c'est nécessaire.
Je ne sais pas si mes collègues veulent
ajouter quelque chose ici?
M. Boulanger (Hugo) : Je
pourrais peut-être ajouter juste un petit quelque chose, si vous me permettez.
La plupart des cégeps en région, effectivement, ont fait face à des défis au
niveau du logement, mais ils ont su être agiles pour trouver des solutions puis
les mettre en place pour accueillir les étudiants qui ont été admis.
Je tiens également à ce qu'on considère
les efforts qui ont été déployés dans l'Est du Québec pour l'établissement
d'ententes. Donc, il y a eu des... une bonne partie de fonds, là,
significatifs, à tout le moins, qui ont été investis pour envoyer des
délégations en France, en Belgique, en Afrique, pour établir des ententes de
transfert, soit après la diplomation, au PUT ou PTS, par exemple, pour aller
chercher de l'expertise à l'extérieur, pour qu'on puisse les diplômer au local
et les remettre en jeu, là, dans l'économie locale. Évidemment, si on vient
juguler de façon trop sévère cette arrivée d'étudiants là, bien, on vient un
peu... bien, on constate que cet argent-là aura été investi en vain. Donc,
c'est beaucoup d'argent, d'énergie, de ressources qui ont été déployées,
tant... dans l'établissement de ces ententes-là, et je trouverais ça vraiment
dommageable, là, de... de se retrouver devant rien au lendemain de... l'adoption
de cette loi.
M. Poirier (Julien) : Oui.
J'ajouterais aussi, à la question du ministre Roberge, à propos des abus...
Bien, déjà, je souhaitais souligner que le... il y a... il y a, effectivement,
eu, au tournant de la décennie 2020, quand... bien, même un petit peu avant,
là, à la fin de la décennie 2010, il y avait quand même une population
importante d'étudiants étrangers qui... qui fréquentaient des établissements
plutôt privés, non subventionnés, et qui fréquentaient surtout des programmes AEC,
puis on peut observer, dans les données, une forte augmentation de cette
population là, qui était, bon, parfois, recrutée à l'international, par le
biais d'agences, qui venaient étudier, et tout ça.
Puis, au moment de présenter le projet de
loi, je pense qu'à juste titre monsieur... pardon, le ministre Roberge a bien
mentionné qu'il y avait un problème là dessus, puis il y avait une certaine
marchandisation, là, dans l'esprit de ces opérations là ou de ce fonctionnement
là, de la résidence au Québec ou de la citoyenneté canadienne. Or, les leviers
actuels qui sont à la disposition du ministre, bien, de notre point de vue, ont
plutôt fonctionné. Puis ce qu'on observe depuis 2020, depuis l'année scolaire
2020-2021, c'est une réduction de la fréquentation, là, suite aux actions qui
ont été menées par le gouvernement. Donc, on souhaitait, d'une part, là, saluer
le fait que, d'une certaine manière, le problème des abus qui était détecté
avait déjà été bien entrepris, là, du côté du gouvernement. Donc, on le salue,
de ce côté là.
Pour le logement, bien, je joins ma
joie... ma joie aussi, mais ma voix à celle de mes collègues. Je vais... On
considère le logement comme, quand même, une situation qui est... La pression
sur les logements avait une... très multifactorielle, puis la... une situation
qui est très, bon, structurelle dans sa nature. On ne pense pas que, pour ce
que l'on risque en agissant avec le présent projet de loi, que ça aurait un
effet qui est suffisant, là... pour... pour atténuer. Donc, ce serait tout pour
moi, pour la question.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. M. le ministre.
M. Roberge : Oui. Merci pour
votre réponse en trio. Je vais laisser mes collègues poursuivre avec des
questions. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...la députée d'Iberville. Il reste
5 min 20 s.
Mme Bogemans : Parfait. En
termes des établissements reconnus pour accueillir...
Mme Bogemans : ...les
étrangers... les étudiants étrangers, pardon, ce serait quoi les
incontournables, les balises qu'il faudrait mettre en place pour s'assurer que
les établissements soient prêts à bien accueillir les étudiants étrangers puis
pour les faire reconnaître dans notre réseau?
M. Blanchet (Youri) : Là, les
balises, en fait, bien sûr, tout à l'heure, je nommais que nous, on... là,
présentement, notre plaidoyer est d'abord et avant tout pour le régulier, donc
des cégeps qui ont... que nous connaissons dans les 48 du cégep de la province,
là. Donc, c'est là-dessus, là, que nous sommes actuellement.
Pour ce qui est des conditions nécessaires
à la mise en... bien, à l'accueil des étudiants, entre autres, parce que, ça,
c'est un élément, là, dont on s'est parlé d'ailleurs en préparation, on se
disait qu'il y a quand même une nécessité d'offrir un espèce de filet de
sécurité ou une offre d'accueil personnalisée ou adaptée aux étudiants
étrangers. Et d'ailleurs, puis dans l'Est, je vous dirais qu'on... en tout cas,
dans les cégeps qu'on présente, il y a vraiment une préoccupation qui s'est
développée à ce sujet et plusieurs choses ont été mises en place, dont, entre
autres, une section d'accueil des étudiants étrangers pour leur parler, entre
autres, des différences académiques, ne serait-ce que le système académique
français, ou que ce soit à l'île de la Réunion, dans un domaine outre-mer, ou
en France, bien, est différent, ou même en Afrique du Nord, je veux dire, ce
n'est pas la même chose. Ça fait que, ça, c'est une chose. On prévoit aussi un
accueil pour les vêtements d'hiver, ces trucs-là. Donc, parce qu'on s'est rendu
compte, dans les premières expériences, qu'on laissait peut-être qu'on
accueillait... en fait, qu'on désirait avoir ces étudiants-là, mais sans leur
offrir un soutien, c'est ça, nécessaire pour leur permettre une meilleure
intégration et une meilleure connaissance. Ça fait que c'est ce que je dirais.
Pour ce qui est des choix des
établissements, c'est sûr que moi, j'aimerais mieux qu'on ne choisisse pas, là,
mais si on a... si on a à choisir puis à se dire : Écoutez, dans quel
endroit, ou quelle filière, ou quel cégep, dans le sens où on pourrait accepter
plus d'étudiants par exemple? Mais je pense qu'une des choses importantes,
bien, on l'a nommée, les cégeps de régions ou les cégeps qui en dépendent, ne
serait-ce que par la communauté, ça, c'est une chose importante, mais certains
programmes aussi qui sont super importants, tous les programmes en santé en
région, on a beaucoup de difficultés à recruter de l'extérieur, alors que si on
accueille dans les programmes en santé, bien, ces étudiants-là et ces
étudiantes-là restent souvent par la suite, surtout lorsque la... quand elles
ont le Programme d'expérience québécoise possible, là, restent par la suite.
Donc, c'est... je ne sais pas si je réponds
bien à votre question, mais c'est un peu ce que je pourrais dire. Je ne sais
pas si mes collègues voulaient ajouter quelque chose.
M. Boulanger (Hugo) : Je
peut-être témoigner de mon expérience. On a accueilli, là, il y a peut-être
deux ans, là, une cohorte qui était composée à 50 % environ d'élèves, là,
qui provenaient d'Afrique subsaharienne, donc des élèves qui sont, le plus
souvent, formés vraiment de façon très pointue au niveau fondamental et
théorique, mais qui ont un peu moins accès à des équipements de laboratoire.
Bien, la direction s'est montrée agile à Rimouski rapidement lorsqu'on a fait
état du problème, là, parce qu'ils n'étaient vraiment pas au même niveau que
les élèves nationaux. Donc, on nous a offert des ressources pour qu'on puisse mieux
les encadrer, leur offrir du temps d'exposition aux laboratoires pour,
justement, les amener au seuil minimal de la compétence pour qu'ils puissent se
développer au même rythme que les étudiants issus, soit des collèges ou des
écoles secondaires. Donc, des fois, le problème peut paraître assez important,
mais les solutions ne sont pas très coûteuses ou très compliquées à mettre en
place, il suffit d'un peu d'ouverture.
Mais je souligne aussi, ce que Youri vient
de mentionner, tout le comité d'accueil qui se met en place, là, lorsqu'on
reçoit ces cohortes-là. C'est impressionnant, là, ce que les gens font. On les
accueille à Montréal, on organise des autobus, on les amène en région, on leur
fait faire le tour de la ville, on leur indique les endroits stratégiques où
ils peuvent s'approvisionner, par exemple. Il y a tout un pan culturel
également qui est mis au jeu. On forme des clubs d'entraide pour eux, on essaie
de faire du maillage avec les étudiants réguliers. Donc, c'est vraiment...
c'est beau de voir ça, en vérité, là, ça apporte une belle diversité en région
qui est parfois un peu homogène, là, on va se le dire.
• (19 heures) •
Mme Bogemans : Parfait.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...
Mme Bogemans : Bon, en 50 secondes.
C'était super complémentaire avec ce que vous mettiez déjà sur la table. Mais
au niveau de l'emploi puis de la rétention, vous l'avez touché un petit peu,
là, M. Youri, mais est-ce que vous pouvez élaborer sur la question :
Dans quelles conditions les étudiants étrangers restent le plus en région?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En 30 secondes.
M. Blanchet (Youri) : Mais
O.K. Je vais essayer d'aller vite. Donc, bien, dans quelles conditions? C'est
que, souvent, le fait de venir en région où ils établissent des liens, puis,
comme je disais tantôt, pendant qu'ils sont aux études, participent à des
activités culturelles, au sport local, tout ça, puis, bien, ils développent
vraiment...
19 h (version non révisée)
M. Blanchet (Youri) : ...vraiment
un amour pour la région. Nous, on a énormément d'étudiants qui demeurent par la
suite. Puis ça va même jusqu'aux institutions culturelles. Là, on a le Festival
Vues dans la tête de..., un festival de cinéma à Rivière-du-Loup, entre autres,
qui est reconnu par le milieu du cinéma. Bien, écoutez, on... c'est un ancien
étudiant qui a été à la tête de ce... un ancien étudiant français qui a été à
la tête, directeur de ce festival-là pendant des années. Donc, c'est vraiment
de cette manière-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Hein, je vous demande de parler vite. Je
suis la gardienne du temps, hein? Alors, je me tourne du côté de l'opposition
officielle pour son temps de parole, 9 Minutes 54 secondes. La parole
est à vous, M. le député.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci, merci d'être là avec nous. On nous a dit un peu plus
tôt que ce projet de loi pouvait servir à corriger des abus. Maintenant, je
comprends que, dans votre réalité à vous, dans votre quotidien, la part d'étudiants
étrangers, ces abus-là, il y a des mesures en place. Est-ce que c'est quelque
chose qui vous inquiète aussi ou si ce n'est pas quelque chose que vous voyez
dans votre quotidien?
M. Blanchet (Youri) : Je me
permets... ou Julien... Bref, je vais quand même y aller. Écoutez, non, on a...
Dans notre quotidien, nous, on ne voit pas ce problème d'abus là parce que,
dans l'enseignement régulier, ce n'est pas que des gens qui viennent financer
un système, hein, ils sont intégrés de manière différente, bien soutenus. Ce
dont... En fait, on peut faire référence à... mon collègue Julien, tout à l'heure,
le nommait, entre autres, les a AEC qui étaient... qui sont offertes ou qui ont
été offertes en grande partie dans des institutions privées non subventionnées.
C'est là qu'on a identifié plusieurs abus, mais aussi certains cégeps avaient
développé une antenne, par exemple, ailleurs, et offraient ça. Mais tout ça,
ça, je pense que le ministre a tous les pouvoirs, tout est... en tout cas, c'est
assez réglé, je pense, là-dessus. Puis nous, dans les instances dont... qu'on
représente actuellement, nous ne vivons pas ces problèmes d'abus là,
aucunement.
M. Morin : Je vous remercie.
Puis, en fait, ce que je comprenais aussi des réponses précédentes, c'est que
le ministre, actuellement, a des moyens législatifs à sa disposition pour agir.
J'aimerais revenir rapidement sur... Vous avez mentionné qu'il y a des ententes
de transferts, notamment avec la France, qui sont bénéfiques. Je comprends que
le gouvernement doit investir dans ces transferts-là. Est-ce que le projet de
loi... Parce qu'évidemment, dans le projet de loi, il y a beaucoup de
dispositions qui vont donner un pouvoir réglementaire au ministre. Est-ce qu'il
y a une possibilité que ça ait un impact sur ces ententes de transfert là qui
sont en partie financées par l'État?
M. Boulanger (Hugo) : Je peux
me permettre de tenter une réponse. Bien, je pense qu'il faut... qu'il faut
évidemment conclure que, si on vient restreindre le nombre d'arrivants, bien,
les ententes qui ont été établies deviennent caduques. Et ces ententes-là, ce
sont les cégeps qui les ont financées, ils ont fait le choix d'investir une
partie de leur budget pour envoyer des délégations établir ces ententes-là.
Donc, ce que je crains, c'est qu'on investit cet argent-là en vain, alors qu'on
avait quand même d'autres postes budgétaires à combler, là. On s'entend que le
réseau collégial est considéré vétuste à peut-être 65 % et on aurait pu
investir dans d'autres postes financés. Là, on a choisi d'aller chercher de la
clientèle internationale dans l'espoir de continuer à offrir une gamme large de
programmes à nos étudiants locaux, nationaux, évidemment, à ces gens-là. Donc,
c'est un choix qu'on fait. Puis je trouve un peu... un peu déchirant, là, de
voir la situation évoluer comme ça, là.
M. Morin : Je vous remercie.
Est-ce que vous craignez que le projet de loi a un impact sur l'autonomie et la
liberté académique?
M. Blanchet (Youri) : Si vous
permettez. Bon, l'autonomie et la liberté académique des profs en tant que tels,
pas en première lecture, pas à vue d'oeil, là. Comme ça, je ne pense pas qu'il
y ait un effet là. Par contre, assurément qu'il peut y avoir un impact sur la
tâche enseignante en région, sur le nombre d'enseignants, ça, c'est clair, mais
aussi sur la qualité de vie de nombres d'enseignants, parce que, quand on tombe
à temps partiel, bien, parce qu'il manque des étudiants, c'est sûr que ce n'est
pas l'idéal. Plus à ce niveau-là, je vous dirais, peut-être l'effet qui
pourrait être attendu.
M. Morin : Plusieurs,
plusieurs groupes aujourd'hui nous ont parlé qu'évidemment développer des
programmes, ça prend du temps, ça ne se fait pas en quelques mois, donc il faut
une prévisibilité, une planification. Dans le projet de loi, à l'article 7
notamment, le gouvernement veut enlever son obligation de prépublier des
règlements, donc qui empêcherait finalement d'être avisé, un dialogue. Est-ce
que c'est quelque chose que vous craignez? Et quel sera l'impact chez vous...
M. Poirier (Julien) : ...pardon.
Oui, sur la question de la concertation, c'est certain que ça devrait être
quelque chose qui est systématique pour des questions qui sont aussi complexes,
avec des impacts qui peuvent être profonds sur les réseaux qui sont tissés et
maillés, entre autres, en région, mais pas que, sur l'ensemble du territoire
québécois. Donc, ici, pour maximiser la prévisibilité, ça prend vraiment des
instances de concertation sur le long terme, en continu, mais surtout qui sont
systématiques.
Et le problème avec un projet de loi comme
celui-ci, c'est le danger de bousculer ou de... ou de... je ne veux pas dire
«sectionner», là, mais d'intervenir négativement sur des réseaux qui,
effectivement, prennent beaucoup de temps, là, plusieurs années, voire parfois
une décennie ou plus, pour se mettre en place, entre autres, ceux qui
soutiennent des créneaux d'excellence dans certains domaines du savoir sur
l'ensemble du territoire. Donc, par exemple, si on a une entente bilatérale,
là, mes collègues discutaient tout à l'heure de transfert et de partenariat...
si, par exemple, on en accueille moins, ça peut compromettre un certain nombre
d'ententes avec des partenaires internationaux, le tout sur trame de fond
d'internationalisation de l'enseignement supérieur. Et, présentement, le
Québec, on pense, se positionne bien sur l'ensemble du territoire. Il y aurait
un risque, par ce projet de loi là, qu'une intervention puisse avoir un effet
négatif là-dessus. On s'en inquiète, ça nous interpelle.
M. Morin : Question très,
très précise : Est-ce qu'il y a du bon dans ce projet de loi là? Est-ce
que c'est utile, puis êtes-vous en faveur ou pas? Parce que, écoutez, à date,
là, je peux vous dire, il y a comme un consensus de tous les groupes
aujourd'hui. Alors, j'aimerais ça vous entendre, là-dessus, s'il vous plaît.
M. Blanchet (Youri) : Écoutez,
je vais y aller. Je n'ai même pas consulté mes collègues, je ne leur ai pas dit :
C'est moi qui vais répondre, mais moi, je vous dirais que nous croyons
fermement que les étudiants étrangers, dans le contexte de l'enseignement
régulier ne sont qu'un apport bénéfique au système d'éducation québécois et à
la... et à la population québécoise et à sa communauté.
Nous savons qu'il y a un problème à cause,
bon, qu'il y a un nombre d'immigrants énorme, hein, 588 000, je pense,
temporaires sur le territoire, quelque chose comme ça. Bref, nous le savons,
mais nous pensons fermement que la solution n'est pas de couper dans l'accueil
des étudiants étrangers. Pour nous, c'est... en fait, c'est une des meilleures
filières d'accueil d'immigrants et d'accueil de nouveaux arrivants, là, qui
vont contribuer à la société québécoise par la suite. Écoutez, des gens qui
ont... économiquement, ils sont capables de subvenir à leurs besoins, d'aller
aux études. Ce sont des jeunes personnes en santé, hein, moins de 30 ans, dans
la plupart des cas, des gens qui s'intègrent bien, en général, à la cause de la
langue, entre autres, qui vont s'impliquer dans leur communauté, qui vont
tenter d'y rester par la suite. Sincèrement, nous ne voyons pas beaucoup
d'éléments négatifs à l'apport des étudiants étrangers, et le projet de loi,
bien, pourrait mettre à mal ces bénéfices pour la société québécoise et le
réseau.
M. Morin : Merci. Alors, je
vais céder la parole à ma collègue. Merci
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Donc, Mme la députée de Mont-Royal-Outremont, il vous reste
d2min 9 s.
Mme Setlakwe : Merci. Donc,
pour clarifier, en ce qui concerne les cégeps publics, vous êtes d'accord avec
la position que vous... d'ailleurs, qui a été mise de l'avant aujourd'hui par
la Fédération des cégeps, ils devraient être exclus du projet de loi.
M. Blanchet (Youri) : Oui.
Mme Setlakwe : Très bien,
merci. Vous avez bien en fait les deux questions. Vous avez... Bien, en fait,
j'ai deux questions. Vous avez parlé de... et il y a eu des exemples qui ont
été soulevés, là, du fait que vous êtes arrimés, vos programmes sur le terrain
avec les besoins de la population, notamment, là, en termes de service public,
soins de santé, tout ça. J'aurais voulu que vous élaboriez un petit peu plus
là-dessus, me donner d'autres exemples.
Et, finalement, s'il reste quelques
instants, pourquoi vous portez un carré bleu? On aimerait que vous élaboriez
là-dessus aussi, s'il vous plaît. Merci.
• (19 h 10) •
M. Blanchet (Youri) : Bon. Je
vais y aller avec le carré bleu. Je vais commence comme ça, tout simplement,
très rapidement. Le carré bleu, c'est parce que c'est comme un petit symbole,
suite aux hauts plafonds qui ont été effectués cet été dans les budgets
d'investissement, là, dans le... entre autres, là, mobilier, achat de matériel
pédagogique et autres. Bien, c'est pour signifier notre désaccord avec cette
décision puis aussi qu'on veut que le plafond soit enlevé et que... finalement,
que les projets d'investissement qui avaient été mis en place et acceptés au
printemps dernier puissent se poursuivre. Alors, c'est vraiment dans la
perspective de cette revendication. Alors, voilà, ça clarifie.
Pour ce qui est des programmes en région,
peut être une petite réponse pour vous donner un peu plus, parce qu'on a parlé
de Techniques de la santé, tout à l'heure, bon, mais, entre autres, il y a des
programmes...
M. Blanchet (Youri) : ...de
loisirs, des programmes en urbanisme, des programmes de tourisme, des
programmes... graphisme, design d'intérieur. Donc, c'est tous des gens qui sont
appelés à travailler en région par la suite ou à remplir des postes qui sont à
pourvoir dans les différentes entreprises et commerces des régions, alors c'est
vraiment... ça touche beaucoup de choses. Donc, c'est au-delà de soins
infirmiers ou, c'est ça, des techniques de santé. Voilà.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup, M. Blanchet. C'est ce qui termine
cette autre partie de discussion. Il nous reste deux intervenants. Le prochain,
qui représente la deuxième opposition, la parole est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci à vous tous de votre belle présentation. Je vous écoutais,
là, puis... sur votre accueil, sur l'intégration, vraiment, je trouve ça
magnifique. Vous avez tout un réseau, de l'entraide, de l'ouverture, de
l'adaptation, puis, bien, on reconnaît là l'accueil québécois. Donc, bravo.
Je vous écoute puis, en ce qui vous
concerne, là, ça va bien actuellement, si je comprends bien. Vous dites un
peu : Laissez-nous donc faire ce qu'on fait bien, hein? C'est ce que je
comprends un peu. Puis vous dites : On connaît notre réseau, on connaît le
terrain, donc je ne vois pas pourquoi... ou vous ne voyez pas pourquoi il y
aurait matière à intervention ou à modification. Je vous ai-tu bien compris? Vous
semblez bouche bée.
M. Boulanger (Hugo) : Je
pense que vous saisissez l'essentiel du message effectivement.
M. Cliche-Rivard : Et je
pense qu'il y a... il n'y a pas beaucoup mieux que vous pour connaître votre
réalité locale et régionale. Puis je pense que ça, il faut qu'on... il faut
qu'on le redise. Avez-vous l'intention ou, en fait, avez-vous l'impression
d'avoir été consultés ou avez-vous l'impression qu'il y a une ouverture? Est-ce
que vous sentez que le message perce, là, ou vous sentez que c'est assez fermé
comme porte, là?
M. Blanchet (Youri) : Écoutez,
on a beaucoup d'espoir d'être ici ce soir, je vous dirais ça comme ça. Nous...
On comptait beaucoup là-dessus. Parce que, non, on n'a pas été consultés en
amont de l'écriture de p.l. 74, bien sûr. Aujourd'hui, on sait que ça peut
avoir un impact limité, notre présentation, c'est relativement court, les gens
ont leur idée en tête, mais nous espérons quand même humblement que notre
témoignage aujourd'hui pourra faire changer du moins le fusil d'épaule ou la
perception, là, sur les étudiants étrangers dans nos institutions. Parce que,
vous l'avez bien dit, on a une expertise pour bien les accueillir, on a mis en
place des systèmes aussi de soutien et pour s'assurer que personne ne soit
laissé derrière, mais je ne vous cacherai pas qu'il y a quand même, ici et là,
des petits problèmes, mais on les identifie rapidement et on leur offre une...
on leur donne une solution.
M. Cliche-Rivard : Puis vous
faites bien de le dire parce que vous êtes plusieurs à avoir un petit vent
d'espoir quand même. Je regarde M. le ministre, qui me fait quand même un grand
sourire au moment où je parle. Je le souhaite aussi. Puis je pense que
plusieurs des intervenants, intervenantes souhaitent que la consultation
particulière qu'on fait en ce moment donne des résultats, donc, j'espère. On
dit, des fois, que la nuit porte conseil, là, on verra qu'est-ce que le
ministre dit demain d'entrée de jeu, s'il y a d'autres médias qui se
présentent. Si le mot «déraisonnable» aura peut-être été laissé devant la
porte, cette fois-ci, ou en tout cas à l'extérieur de ces murs. Mais, voilà, je
vous entends, je vous sais préoccupés, là.
Vous avez dit «risques difficiles à
ignorer», «vives inquiétudes», «inquiétudes», quand même, ce sont des mots
lourds, donc ce qu'on vous promet, c'est de continuer de faire écho à vos
revendications. Merci d'avoir été là aujourd'hui. Merci beaucoup.
M. Blanchet (Youri) : Le
choix de nos mots n'est pas anodin effectivement.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Avant que la nuit s'installe, on va terminer avec le
député de Jean-Talon, pour une période de trois min 18 s.
M. Paradis : On a reçu plus
tôt aujourd'hui aussi la Fédération des cégeps qui est venue nous dire, entre
autres, bien, qu'ils ne voyaient pas quelles étaient les intentions du
ministre, particulièrement dans le cas des cégeps, qu'on ne voit pas la
planification derrière le projet de loi. Si, moi, je vous disais que le projet
de loi pourrait, par exemple... ou la planification du gouvernement pourrait
reconnaître spécifiquement l'apport des étudiants étrangers dans les régions,
que ceux qui... les étudiants étrangers qui font le choix d'étudier en région
seraient privilégiés, qu'en aucun cas d'éventuelles diminutions des seuils
globaux d'étudiants étrangers qui l'envisagent ne devraient avoir d'impact sur
les programmes spécifiques dans les régions, si je vous disais qu'il devrait
dire qu'il va revitaliser particulièrement les programmes des cégeps en région,
par exemple avec des bourses d'études ciblées pour les étudiants étrangers qui
vont... qui...
M. Paradis : ...vont s'établir
en région, qui vont étudier en région, la promotion des programmes des cégeps
francophones en région, la majoration du montant par élève dans les cégeps
francophones en région, ça vous dirait quoi, vous?
M. Blanchet (Youri) : Bien,
écoutez, c'est un peu comme de la musique à mon oreille, là, ce que vous dites,
dans le sens où c'est sûr que l'idéal, c'est de ne pas avoir de projet de loi,
mais nous, on vient quand même défendre une situation, un portrait qu'on a
tenté de vous rendre le plus réaliste possible, qui est celui de cégeps de
région, et tout ce que vous venez d'énumérer peut répondre, effectivement, à
nos préoccupations puis à nos vives inquiétudes qu'on a, parce que nous le
croyons... Puis je le répète encore, en région, ce n'est pas toujours facile.
Mon collègue Hugo disait que parfois la... même la diversité ou l'accueil
d'immigrants n'est pas simple non plus. Ça leur prend un emploi... tu sais, ça
prend quelque chose pour les accueillir, donc ce n'est pas naturel de venir.
Donc, si on met en place des systèmes, dont entre autres des bourses de
mobilité régionale, avoir... ne pas donner de seuil maximal en... à des cégeps
de région... Tu sais, quand je pense au cégep de Matane, entre autres, là, pour
vous donner un exemple... mais il y a le tiers des étudiants du cégep de Matane
qui sont issus de l'international. C'est important, là, le tiers. Donc, on
enlève le tiers, on a un problème à Matane.
Alors, voilà. Tout ce que vous avez nommé
serait une bonne chose, dans l'idée où parfois une solution... quand on ne peut
mettre de côté quelque chose, bien, si on apporte des solutions alternatives
mitoyennes qui peuvent au moins répondre à nos préoccupations, bien, nous en
serions déjà heureux.
M. Paradis : Bien, ce que je
viens de vous mentionner, c'est un résumé des pages 77 et 78 de la
planification du Parti québécois qu'on a présentée la semaine passée, et ça
rejoint en quelque sorte les propositions faites ce matin par le commissaire à
la langue française, qui proposait, lui aussi, de ne pas avoir des solutions
mur à mur mais de prévoir une répartition par établissements d'enseignement
mais aussi par régions des étudiants étrangers. Merci beaucoup de votre
présence.
M. Blanchet (Youri) : Bien,
merci. Merci à vous.
M. Paradis : Au revoir.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, sur ce, permettez-moi à nouveau de vous remercier
pour l'apport à nos travaux. J'allais vous dire : Bon retour, mais vous
n'êtes pas trop loin de la maison. Alors, merci beaucoup.
Je vous... Je suspends... pas «suspends»,
j'ajourne les travaux au mercredi 8... 6 novembre 2024, après les avis touchant
les travaux des commissions. Bonne soirée, mesdames et messieurs.
(Fin de la séance à 19 h 18)