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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Tuesday, November 5, 2024 - Vol. 47 N° 54

Special consultations and public hearings on Bill 74, an Act mainly to improve the regulatory scheme governing international students


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

9 h 30 (version non révisée)

(Neuf heures quarante-cinq minutes)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Alors, bienvenue à tous et à toutes en ce beau mardi matin.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi numéro...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Macaron (Notre-Dame-de-Grâce) est remplacée par Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont); Mme Prass (D'Arcy-McGee) est remplacée par M. Morin (Acadie); et M. Bérubé (Matane-Matapédia) est remplacé par M. Paradis (Jean-Talon).

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, Mmes et MM. les députés, bienvenue à la commission. Nous débuterons, ce matin, par les remarques préliminaires, puis nous... nous entendrons le Commissaire à la langue française, l'Université du Québec, et nous allons terminer par l'Université de Montréal, l'Université McGill, l'Université Laval et l'Université de Sherbrooke conjointement.

J'invite maintenant le ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous allez disposer de 6 minutes, et la parole est à vous.

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, je veux saluer mes collègues qui sont présents avec nous, autant des deux côtés, la partie gouvernementale et les oppositions. Très content de voir que les formations politiques sont représentées. Merci aussi aux équipes qui nous aident, en arrière, à répondre à toutes les questions. On a ce matin pour commencer, le Commissaire à la langue française, mais il y a plusieurs personnes qui ont accepté aussi de venir participer aux travaux. Ça va durer deux jours de manière très intense, Mme la Présidente, mais on est prêt à ça.

Il y a aussi d'autres personnes qui ne viendront pas directement ici, en salle de commission, mais qui nous ont fait parvenir des réflexions. Sachez que ce n'est pas parce que vous n'êtes pas ici, en commission que vous ne serez pas entendus, puis que vos propos ne seront pas considérés.

C'est un projet de loi qui est intéressant, qui est important, qui s'inscrit dans un contexte où on a, en ce moment, pratiquement 6 000 résidents non permanents sur le territoire québécois. Il y a évidemment des étudiants étrangers parmi... j'ai dit 6 600, mais je m'excuse, je m'excuse, il n'y en a pas 6 000, il y en a presque 600 000. Justement, quand on... quand on voit le nombre de zéros, ça donne le tournis. Presque 600 000 résidents non permanents sur le territoire québécois de diverses catégories. Certaines des catégories sont décidées exclusivement par le gouvernement fédéral, d'autres par le gouvernement du Québec, d'autres, c'est des compétences partagées.

J'en profite pour faire un rectificatif. La semaine dernière à l'Institut du Québec rendait publique une étude dans laquelle il y avait malheureusement certaines erreurs. On disait que le gouvernement du Québec contrôlait à peu près 50 % des immigrants temporaires sur le territoire québécois. Ce n'est pas exact, on est plus près de 30 %. D'ailleurs, mon équipe avait communiqué avec la rédactrice de l'étude qui avait dit qu'effectivement ce n'était pas exactement ce qui était écrit, qu'elle était prête à apporter des nuances si les gens communiquent avec elle. Donc, j'invite nos amis journalistes à communiquer avec les gens qui ont rédigé cette étude-là, parce que ce n'est pas parce qu'on répète quelque chose plusieurs fois que ça devient plus vrai.

Évidemment, les étudiants étrangers sont dans une catégorie à part. Quand on regarde tous les... les immigrants temporaires qui sont... ce sont souvent de futurs immigrants permanents, de nouveaux Québécois. Et il ne s'agit pas de dire : Bien, arrivons avec un objectif de coupures paramétriques, ne voyons pas les étudiants étrangers comme... comme des problèmes d'aucune manière. Ils viennent ici à l'invitation des institutions. Ensuite, bien, ils sont reconnus à la fois par le gouvernement du Québec et le gouvernement canadien, sans quoi ils ne pourraient pas venir ici. Donc évidemment, le... les gouvernements ont une part de responsabilité. Puis ensuite, bien, une fois qu'ils sont ici, ils contribuent au Québec.

Maintenant, quand on regarde les leviers qu'on a au gouvernement pour gérer toute l'immigration, on se rend compte que, pour ce qui est des étudiants étrangers, on a peu d'agilité gouvernementale. On peut simplement, au moment où on se parle avant la sanction de cette loi-là, décider du nombre d'étudiants sur le territoire québécois, combien de CAQ seront... seront là.

• (9 h 50) •

Par contre, en ce moment, le gouvernement ne peut pas décider si, quand on accepte un nombre très élevé, plus de 120 000 personnes, s'il y en a une grande majorité dans la... sur l'île de Montréal, dans le Grand Montréal, dans des régions périphériques, dans des régions éloignées. Est-ce qu'ils sont surtout en formation professionnelle dans les cégeps, dans des programmes courts, dans des universités, dans les deuxièmes et troisièmes...

M. Roberge : ...cycle. Qu'est-ce qui est prioritaire pour le Québec? Qu'est-ce qui est prioritaire pour ces régions? On pourrait faire comme le Parti québécois, dire : Bon, nous autres, on va passer de 120 000 à 50 000, voilà. C'est sûr que, si on faisait ça, bien, on n'aurait pas besoin du projet de loi dont on parle aujourd'hui puis c'est sûr qu'on ferait fermer plusieurs programmes en région, puis c'est sûr qu'on s'attaquerait aussi à des programmes qui sont vitaux soit pour nos services publics ou pour notre économie.

Plutôt que de dire, là... de se donner une cible de réduction à l'aveugle, comme ça, en chiffre ou en pourcentage, il faut d'abord se donner, comme gouvernement, comme État national, la capacité d'agir de manière chirurgicale. Donc, je veux rassurer les gens, on n'arrive pas du tout ici en disant : Bon, bien, on s'en vient couper 5, 10, 15 %, ou 20000, 30000, 50000, 80 000 étudiants, on s'en vient dire : Considérant le nombre total...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Il reste une minute.

M. Roberge : ...merci, d'immigrants temporaires sur le territoire québécois, considérant qu'il y a des hausses fulgurantes dans certaines écoles privées professionnelles, considérant la pénurie de logements, considérant les enjeux que ça peut poser pour nos services publics, considérant qu'on a dans le PQI, le Programme québécois des infrastructures, des sommes importantes et que, des fois, on veut agrandir des institutions pour des étudiants qui n'étudient pas nécessairement dans des secteurs prioritaires, donnons-nous... faisons-nous un cadeau, à nous, Québécois, d'une agilité gouvernementale qui va nous permettre ensuite de prendre les meilleures décisions.

Et j'espère qu'on va être capables de bonifier ensemble ce projet de loi important suite, bien sûr, à l'éclairage que vont apporter les gens qui vont contribuer dans les deux prochains jours. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, j'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de l'Acadie à faire ses remarques préliminaires, et votre temps est de 3min36s. La parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. le ministre, collègues de la barquette gouvernementale. Je tiens à saluer ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont, collègues des oppositions qui sont là.

Je suis heureux de commencer à travailler ce projet de loi et d'écouter des groupes. J'ai lu avec beaucoup d'attention les mémoires qui nous ont été présentés, lu également plusieurs articles de journaux. Et il est rare qu'un projet de loi, en général, soulève autant de critiques, d'inquiétudes. Même, on peut parler d'un lever de boucliers. Alors, c'est assez remarquable, la façon dont ce projet de loi a été reçu par les établissements d'enseignement, d'enseignement supérieur, et j'ai très hâte d'entendre les groupes, pour être capable, évidemment, de dialoguer avec eux et de faire entendre au gouvernement l'impact de ce projet de loi.

L'immigration a fait couler beaucoup d'encre au Québec, beaucoup d'encre également écrite par la CAQ. On a l'impression que l'immigration est toujours un problème pour le gouvernement de la CAQ. Alors, évidemment, ça va être d'autant plus important d'étudier avec beaucoup d'attention ce projet, ce projet de loi.

Quelques critères... le ministre parlait d'agilité, quelques critères, mais aussi beaucoup de pouvoirs réglementaires. Donc, c'est comme si, évidemment, on voulait donner un chèque en blanc au gouvernement pour contrôler l'immigration. Alors, ça va être très, très intéressant d'y consacrer... d'y consacrer beaucoup de temps. D'autant que, dans bien des cas, on s'attaque à nos établissements d'enseignement supérieur, aux universités, à des gens qui font de la recherche, qui sont invités à venir ici pour faire des études supérieures. Donc, on va essayer de voir comment tout ça va s'articuler.

Le ministre y faisait référence, il veut que son projet de loi lui donne de l'agilité, lui permette de s'attaquer à certains établissements. Bien, j'ai hâte d'en entendre parler et j'ai hâte d'en discuter avec lui parce que, jusqu'à maintenant, à la lecture du projet de loi, ce n'est pas très clair, les cibles qui sont visées par le ministre.

Alors, très heureux d'être ici. Très heureux de commencer l'étude en écoutant des groupes. Et, si vous permettez, Mme la Présidente, dans le temps qui reste, je céderais la parole, ou je vous demanderais de céder la parole à ma collègue la députée de Mont-Royal-Outremont, pour les remarques préliminaires.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Bien sûr. Il vous reste une minute, Mme la députée. Allez-y.

Mme Setlakwe : Merci. Merci. Donc, bonjour à tous. En complément à ce qui a été mentionné par mon collègue député de l'Acadie, j'entends bien le ministre, qu'il souhaite se donner toute l'agilité possible. Moi, j'ai bien hâte d'entendre les groupes. À titre de porte-parole en enseignement supérieur...

Mme Setlakwe : ...jusqu'à maintenant, je n'ai entendu que des inquiétudes. Le gouvernement s'octroie de très larges pouvoirs dans ce dossier. Et ce qu'on entend, c'est qu'il va falloir agir avec la plus grande précaution. Le ministre l'a dit, les étudiants étrangers sont une catégorie à part. Il va falloir qu'on considère la grande richesse qu'apportent ces étudiants étrangers, richesse au sens le plus large du terme. Et on ne parle pas uniquement, là, donc, du volet financier pour les établissements. Nos étudiants étrangers sont un atout essentiel. Leur apport est est incommensurable, et donc il faut...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

Mme Setlakwe : Oui, maintenir à tout prix l'attractivité du Québec dans cette course mondiale pour les talents. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci beaucoup, Mme la députée. J'invite maintenant le député de Saint-Henri–Sainte-Anne et porte-parole du deuxième groupe d'opposition à faire ses remarques pour une minute 12 secondes. La parole est à vous.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Pas beaucoup de temps, mais merci à ceux qui viendront en commission, merci aux équipes, merci aux députés du côté de l'opposition et du gouvernement. Content de voir M. le ministre également. Merci, Mme la Présidente d'être avec nous.

Écoutez, je me lance dans ce projet de loi avec la collaboration habituelle, M. le ministre. J'appuie le principe, il restera évidemment des détails à voir évidemment aussi dans l'application. C'est un p.l., un projet de loi qui est relativement court, mais qui a le potentiel de toucher des milliers de personnes étudiantes étrangères, mais surtout nos institutions académiques, ici au Québec et plus particulièrement en région. En dehors du projet de loi, puis on en reparlera, parce que les groupes en parlent beaucoup, c'est là que le bât blesse, là, à mon avis, alors que moins d'une année après avoir placé les étudiants hors cible dans l'admission permanente, on fait un virage à 180 degrés du côté gouvernemental puis on suspend le programme de l'expérience québécoise, diplômés. Alors, pour moi, c'est là que le bât blesse, surtout,  puis j'ai déjà lu des mémoires. Je sais que les gens vont en parler, alors je vais continuer mon travail. Il va falloir qu'on émette, je pense, des balises plus claires dans le projet de loi pour être sûr...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Cliche-Rivard : ...de bien encadrer le pouvoir gouvernemental dans le meilleur intérêt du public. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le député. Alors, on va terminer les remarques préliminaires avec le député de Jean-Talon, également pour une période d'une minute, 12 secondes. La parole est à vous.

M. Paradis : Salutations à tous les collègues, à toutes les personnes qui seront entendues aujourd'hui et demain. Merci de votre participation à nos travaux. C'est une question importante dont on va discuter dans les prochains jours. C'est... bon, la place des étudiants étrangers dans nos institutions d'enseignement supérieur. J'ai écouté avec attention le ministre tout à l'heure nous dire, bien, que, justement, il n'y a pas de chiffre, et c'est peut-être ça un des premiers problèmes. Pourquoi est-on passé par voie législative pour parler de quelque chose qui ne nécessitait pas un projet de loi? Ce qu'on attendait de ce gouvernement, c'est une planification, ce sont des chiffres. Nous, en tout cas, on a proposé notre planification dans un document qu'on a déposé la semaine dernière, qui fixe des grandes orientations et qui est un appel au dialogue. Donc, ce sera au moins une occasion d'avoir ce dialogue. On est très heureux d'entendre toutes les personnes intéressées à ce sujet. Alors, bonnes consultations particulières à tout le monde.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le député, Merci à vous tous et toutes. On va donc débuter les auditions et je souhaite dans un premier temps la bienvenue au Commissaire à la langue française. Mesdames et Messieurs, je vais vous demander de vous présenter et vous êtes des habitués des commissions parlementaires, vous avez une période de 10 minutes pour ce faire, donc pour votre audition, et la parole est à vous.

M. Dubreuil (Benoît) : Bonjour, merci beaucoup, merci à... merci de m'avoir invité. Bonjour à tous. Je suis accompagné aujourd'hui de Stéphanie Cashman-Pelletier, qui est commissaire adjointe, Maxime Simoneau, avocat, et Nebila Jean-Claude Bationo qui est agent de recherche, qui est avec nous en ligne aujourd'hui.

Alors, en déposant le projet de loi n° 74, le gouvernement du Québec propose d'agir pour améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers. J'ai choisi de contribuer à cette discussion en raison de l'importance de la présence des étudiants et des diplômés étrangers sur la situation linguistique. Donc, je vais commencer en rappelant qu'environ le tiers des résidents non permanents au Québec sont d'abord arrivés, que ce soit directement ou indirectement, en raison des études. Donc, on parle... on parle des titulaires d'un permis d'études, titulaires d'un permis de travail postdiplôme, titulaires d'un permis de conjoint d'étudiant. Leur augmentation doit être mise en relation avec les diverses mesures qui ont été adoptées au fil des années par les gouvernements du Québec et du Canada pour faciliter le financement des études et l'obtention de la résidence permanente. Je pense à l'autorisation de travail hors campus, au permis de travail postdiplôme, au programme de l'expérience québécoise et aux changements à la grille de sélection du Québec.

• (10 heures) •

Donc, l'importance des étudiants étrangers au Québec est évidemment visible, particulièrement au niveau universitaire, avec une répartition qui demeure inégale entre les universités francophones et anglophones. Donc, en 2023-2024, les universités anglophones accueillaient environ 34 % des effectifs étrangers, une proportion qui est néanmoins en baisse puisqu'elle était supérieure à 40 % il y a quelques années. Au niveau collégial, les étudiants étrangers représentent moins de 8 % des effectifs...


 
 

10 h (version non révisée)

M. Dubreuil (Benoît) : ...une proportion qui est aussi en baisse après avoir connu une hausse fulgurante entre 2019 et 2022, à la suite de l'inscription massive d'étudiants étrangers dans certains collèges privés non subventionnés.

Pour ce qui est des cégeps, en 2023-2024, la proportion d'étudiants étrangers n'y était que de 5 %, parmi lesquels 85 % est inscrit dans des établissements de langue française.

Alors, il y a deux sources de données qui nous permettent d'en savoir plus sur la situation linguistique des étudiants étrangers, d'abord, les données du recensement, ensuite, les données d'IRCC. Les données d'IRCC indiquent qu'au 31 décembre 2023, 24 % des titulaires d'un permis d'études de niveau universitaire et 43 % des titulaires d'un permis de niveau collégial ne connaissaient que l'anglais. Ce taux s'élevait à 46 % parmi les titulaires d'un permis de travail postdiplôme et à 48 % parmi les titulaires d'un permis de conjoint. Alors, ce sont des taux qui sont en légère amélioration par rapport à l'année précédente, mais qui restent quand même les plus élevés de toutes les catégories d'immigration temporaire ou permanente.

Pour ce qui est des données du recensement, elles indiquent que 44 % des titulaires d'un permis d'études utilisaient l'anglais de manière prédominante au travail en 2021 et que les personnes qui allaient étudier au Québec, avant d'y obtenir la résidence permanente, étaient moins susceptibles que les autres immigrants d'utiliser principalement le français au travail, et j'inclus là-dedans les réfugiés et les demandeurs d'asile.

Pour terminer sur ce sujet, je peux mentionner aussi l'étude que nous avons rendue publique la semaine dernière, qui confirme l'existence d'un lien fort entre la langue des études postsecondaires et la langue de travail, même lorsque nous tenons compte des caractéristiques linguistiques des diplômés, de leur langue de scolarisation au primaire et au secondaire, de leur origine géolinguistique et de leur domaine d'emploi.

L'article 3 du projet de loi n° 74 donne au gouvernement la possibilité de prendre une décision relative à la réception et au traitement des demandes présentées à titre d'étudiants étrangers. Alors, nous accueillons favorablement cette disposition. En effet, ces dernières années, la croissance rapide du nombre d'étudiants étrangers a entraîné des répercussions parfois non désirées sur la société d'accueil et sur les étudiants eux-mêmes. Pour cette raison, nous considérons essentiel un meilleur encadrement de leur admission.

L'article 3 établit aussi des facteurs que la décision gouvernementale doit prendre en compte. Nous constatons que, parmi ces facteurs, la situation linguistique particulière du Québec n'est pas mentionnée. Cette absence nous préoccupe à la lumière de la situation défavorable du français parmi les étudiants et les diplômés étrangers, de même qu'en raison du poids de ces groupes dans l'immigration temporaire et permanente. Par conséquent, nous recommandons de mentionner de manière explicite, parmi les facteurs considérés à l'article 3, le français et son rôle comme langue commune de la nation québécoise.

Parmi les facteurs évoqués à l'article 3 du projet de loi, nous trouvons aussi le besoin de favoriser une diversité de provenance des demandes de sélection. Nous reconnaissons qu'une telle diversité peut enrichir l'expérience étudiante. Toutefois, elle demeure difficile à mesurer. Donc, par exemple, les étudiants africains ou asiatiques sont loin de former un tout homogène. Par ailleurs, la diversité de provenance des étudiants étrangers ne semble pas un enjeu particulier dans le contexte québécois. Dans les universités, par exemple, si on fait abstraction du cas des étudiants français, qui représentent 29 % des étudiants, il n'y a aucun pays qui représente plus que 8 % des effectifs. Alors, je compare cette situation avec celle qu'on observe ailleurs au Canada, où 51 % des effectifs viennent de deux pays, à savoir la Chine et l'Inde où il y a un problème de diversité.

Alors, plutôt que de chercher à accroître la diversité de provenance des demandes de sélection, nous proposons plutôt de viser une meilleure répartition des étudiants étrangers entre les établissements, entre les ordres d'enseignement et entre les régions. Une meilleure répartition permettrait à tous les étudiants du Québec de s'enrichir au contact des étudiants étrangers. De plus, elle faciliterait la création de réseaux de socialisation en français, notamment dans les régions et des établissements où les étudiants étrangers sont aujourd'hui les moins nombreux.

Alors, la recommandation n° 2 est de recommander de remplacer, à l'article 3, le facteur relatif à la diversité de provenance des demandes de sélection par un facteur relatif à une répartition équilibrée entre les établissements, les ordres d'enseignement et les régions.

Je passe au point suivant. Les articles 10, 11, 12 et 13 du projet de loi n° 74 donnent au ministre de l'Éducation et au ministre de l'Enseignement supérieur le pouvoir de recueillir auprès des établissements des renseignements qui permettront de documenter l'admission et les inscriptions des étudiants étrangers. Alors, pour nous, ce sont des dispositions qui sont essentielles. Actuellement, l'information au sujet des étudiants étrangers est répartie entre les universités, le ministère de l'Immigration et IRCC. Alors, pour cette raison, nous sommes incapables de suivre le cheminement des étudiants à partir de leur demande d'admission jusqu'à l'obtention de leur permis d'études et jusqu'à leur inscription dans l'établissement. Selon...

M. Dubreuil (Benoît) : ...Statistique Canada, en 2019, le quart des titulaires d'un permis d'études postsecondaires au Canada n'étaient pas inscrits dans un établissement d'enseignement postsecondaire reconnu. Dans la moitié des cas, nous ignorions même si les gens étaient présents ou non sur le territoire, et, si oui, à quel titre.

Selon IRCC, au 31 décembre 2023, il y avait 95 000, environ, permis d'études de niveau postsecondaire en vigueur au Québec. Or, durant l'année scolaire, on comptait 71 000 étudiants étrangers dans les collèges et universités, soit un écart de 25 %. Je pense qu'un meilleur partage d'information permettrait peut-être de réduire cet écart et de s'assurer que les personnes admises comme étudiantes sont véritablement au Québec et sont véritablement aux études.

La croissance du nombre d'étudiants étrangers au cours de la dernière décennie découle, en partie, je l'ai dit, des décisions qui ont facilité l'accès au marché du travail et à la résidence permanente pour les diplômés québécois et canadiens. Or, l'absence de planification de cette croissance a entraîné des difficultés diverses. Par exemple, les changements successifs au Programme de l'expérience québécoise ont causé une incertitude parmi les candidats à l'immigration, puis une explosion du nombre de titulaires d'un permis de travail postdiplôme. En outre, l'admission à l'immigration permanente de plusieurs personnes qui ne connaissaient pas le français ou qui avaient adopté l'anglais comme langue habituelle de communication a accru la pression sur le français dans plusieurs secteurs du marché du travail. Nous recommandons donc d'arrimer clairement et explicitement les décisions gouvernementales concernant l'admission des étudiants étrangers avec la planification pluriannuelle de l'immigration.

L'article 7, finalement, du projet de loi permettrait au gouvernement de se soustraire à l'obligation de publier au préalable, dans la Gazette officielle du Québec, les projets de règlements concernant les articles 9 et 10 de la Loi sur l'immigration. Alors, nous pensons que cette disposition priverait les parties intéressées de la possibilité de soumettre des commentaires sur les projets de règlement en question. Or, les décisions prises par règlement concernant les programmes d'immigration — et je pense, notamment, aux critères visant la connaissance du français — constituent des cadres normatifs cruciaux au regard de mon mandat. Par conséquent, nous recommandons de réévaluer l'article 7 du projet de loi, modifiant l'article 104 de la Loi sur l'immigration, et qui propose de soustraire ces projets de règlement de l'obligation de publication au préalable à la Gazette officielle du Québec, comme le prévoit la Loi sur les règlements.

Alors, j'en arrive à ma conclusion, en disant que nous accueillons favorablement le projet de loi qui nous est présenté, qui donnera au gouvernement, s'il est adopté, des outils pour mieux encadrer l'admission des étudiants étrangers, et nous espérons qu'en définissant un cadre clair pour l'ensemble des acteurs nous éviterons de reproduire les problèmes vécus ces dernières années. En effet, à la lumière des données disponibles, des changements importants demeurent nécessaires pour que l'accueil et l'intégration des étudiants étrangers contribuent pleinement à la pérennité du français. Alors, nous croyons que les modifications que nous proposons au projet de loi favoriseront la mise en œuvre de ces changements. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le commissaire. Alors, merci de votre exposé. Elles ouvrent... cet exposé ouvre la porte à des discussions, que nous allons entamer à l'instant. Alors, Mmes et MM. les élus, je vous donne vos temps de parole. M. le ministre et votre banquette, vous avez 16 min 30 s. L'opposition officielle, vous aurez 9 min 54 s. Deuxième opposition, 3 min 18 s. Et M. le député, 3 min 18 s. Alors, on va commencer avec vous, M. le ministre. La parole est à vous.

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, M. le commissaire, pour ce rappel et puis pour tous les chiffres apportés, qui sont éclairants à notre réflexion. Tout à l'heure, j'ai entendu quelqu'un des oppositions qui a dit : Il ne fallait... il ne fallait pas un projet de loi, il fallait donner des cibles, il fallait donner des chiffres. Je pense, au contraire, qu'il faut avoir une... un état de situation actuel qui soit très chiffré, qu'on ait beaucoup de données démographiques, linguistiques, donc démolinguistiques pour après ça, se doter de nouveaux leviers législatifs, pour, après ça, se donner des cibles, et changer le cours des choses, inverser le déclin de la langue française, qui, malheureusement, en ce moment, nous frappe.

• (10 h 10) •

Vous vous intéressez beaucoup à l'article 3 du... du projet de loi. Je le comprends très bien, parce que je pense qu'on est au cœur du projet de loi quand on est dans l'article 3 parce que ça dit sur quoi le gouvernement pourrait agir, alors qu'en ce moment il... il ne peut pas agir avec... avec doigté. Vous nous parlez d'une meilleure répartition entre établissements et régions. En 2023, presque 59 % des étudiants étrangers étaient dans la...

M. Roberge : ...région de Montréal. Pour vous, ça représente un problème, qu'il y ait autant d'étudiants étrangers qui soient dans la région Montréal? Vous souhaiteriez une répartition plus grande, pas tellement entre les établissements, mais entre les régions. Est-ce que c'est ce que je comprends?

M. Dubreuil (Benoît) : Est-ce qu'il y a trop d'étudiants étrangers à Montréal? C'est une bonne question. Objectivement, je n'en suis pas absolument convaincu. On comprend qu'actuellement on a un problème d'une croissance très, très, très rapide de la population qu'on veut freiner parce qu'on voit que l'accumulation de capital ne suit pas l'augmentation de la croissance de la main-d'œuvre. Est-ce qu'en dehors de ça, dans le point de vue absolu, il y a vraiment trop d'étudiants étrangers à Montréal? C'est une bonne question. Je pense que la question, elle doit se poser en lien avec les visées à long terme sur l'immigration, particulièrement en lien avec le PEQ, particulièrement en lien avec la planification pluriannuelle. C'est pour ça, pour moi, le lien doit se faire. Parce que, si on a des établissements d'enseignement qui embauchent des agents recruteurs qui vont partout dans les pays en développement et dans les pays émergents et qui disent aux élèves : Venez chez nous et non seulement vous allez pouvoir travailler pendant vos études, vous allez pouvoir travailler après vos études et vous allez avoir un chemin vers la résidence permanente, alors, si on laisse des agents recruteurs dire cela, bien, il faut qu'on s'assure qu'après c'est vrai. Donc, c'est pour ça qu'il faut une planification intégrée avec un volume général d'étudiants étrangers qui est compatible avec le nombre de personnes qu'on veut admettre ensuite, soit au PEQ, soit dans les autres programmes d'immigration, économique, et autres. Donc, il faut vraiment avoir un point de vue global.

Une fois qu'on a dit ça, dans l'absolu des choses, est-ce qu'il y a trop d'étudiants étrangers à Montréal? Je n'en suis pas convaincu. Est-ce qu'il y a un moment où, dans un établissement d'enseignement, le nombre d'étudiants étrangers devient trop élevé? Moi, ma préférence, c'est d'éviter d'avoir des établissements dont la mission devient de plus en plus concentrée sur le fait de desservir une population étrangère, et de s'assurer qu'il y a une meilleure répartition. Parce que, je pense que la richesse des étudiants étrangers, on peut la vivre lorsqu'il y a un contact interculturel qui se vit entre les étudiants québécois et les étudiants étrangers.

D'où l'intérêt de la répartition. Et là-dessus, je sais que c'est un thème qui intéresse beaucoup de parties prenantes, c'est clair qu'en région il n'y a pas trop d'étudiants étrangers. Peut-être qu'il manque de logements, mais, si vous avez un cégep de 2 000 étudiants ou 3 000 étudiants, qu'il y a 50 ou il y a 100 étudiants étrangers, c'est sûr qu'il n'y en a pas trop. Là, il y a une question, peut-être, de croissance de la population avec un marché de l'immobilier qui ne s'ajuste pas. Donc, ça, c'est un autre problème qui n'est pas un problème pour le français. Mais moi, si vous avez des cégeps, par exemple, qui vont avoir une cohorte de 15 étudiants, qui vont aller chercher, par exemple, dans un milieu francophone, trois ou quatre étudiants d'Afrique francophone, qui vont venir compléter leur cohorte, avec une structure de coûts avantageuse, puis il va y avoir un contact interculturel, il n'y a pas d'enjeu, s'il y a du logement.

M. Roberge : Merci. Oui, on se rejoint, parce qu'on parle d'un projet de loi qui vient nous permettre de jouer sur le nombre total d'étudiants étrangers sur le territoire québécois. Mais c'est beaucoup plus juste que ça. C'est... On vient parler d'un projet de loi qui nous permet d'agir sur plusieurs leviers, sur plusieurs critères. Vous parliez de régionalisation, vous avez parlé de langue française, vous avez parlé, d'une certaine manière, de mixité. Puis oui, on s'occupe d'immigration, mais on s'occupe aussi de langue française puis on s'occupe aussi d'intégration, hein? Le ministère Immigration, Francisation, Intégration. Puis l'intégration est beaucoup plus possible quand il y a des interactions de multiculturalisme... nous dirait : Chacun chez soi puis célébrons nos différences et surtout conservons-les, tandis qu'on est plus dans une démarche de vivre-ensemble, de cohésion sociale. C'est plus facile lorsque les gens s'éloignent un peu de Montréal. Ceci, ça ne veut pas dire qu'il n'y aura... il ne faut plus d'étudiants étrangers sur l'île de Montréal, on a une concentration de grandes universités, évidemment, puis on a l'attraction.

Si je reviens... Je vous ai parlé un peu de répartition régionale. Je reviens aussi sur l'article trois. Vous nous dites qu'il faudrait inscrire «nommément le critère de la langue» parce que c'est écrit «notamment», ce qui ouvre la porte. Mais le terme «langue» ou «langue française» ou «critère linguistique» n'est pas là. Vous souhaiteriez le voir dans l'article trois. Est-ce que vous... Est-ce que c'est bien ça? Puis est-ce que vous avez un libellé à suggérer, que... Pouvez-vous? J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. On n'était pas nécessairement sur le libellé précis mais notre recommandation pointe peut-être vers une formulation. Et, pour moi, je suis conscient qu'il y a le libellé «capacité d'accueil» qui peut recouper plein de choses, mais pour moi, c'est important de mentionner «la langue française» pour la raison très simple que jusqu'à présent, si je regarde l'expérience...

M. Dubreuil (Benoît) : ...des 15 dernières années, on n'y est pas arrivé. C'est-à-dire qu'on a accueilli plein de gens qui ont eu des belles carrières, qui ont eu un apport à la société, mais, globalement, pour le français, le français ne sort pas assez fort. Si c'étaient de très petits nombres puis on était juste chez les doctorants, ou quelque chose comme ça, ce serait moins... ce ne serait pas dramatique, mais là on est quand même sur des nombres assez élevés, comme je le disais, environ le tiers de l'immigration temporaire qui a un lien avec les études.

Donc, la raison pour laquelle on propose de le mentionner explicitement, c'est que, dans les données que l'on a, basées sur l'expérience des 15 dernières années, on n'a pas les bons chiffres. On n'atteint pas le niveau qui est nécessaire pour maintenir la prédominance du français au Québec et à Montréal.

M. Roberge : Et quel est, selon vous, ce niveau à atteindre, cette cible?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, moi... Oui, bien, l'année dernière, moi, quand j'étais allé en commission parlementaire sur la planification pluriannuelle, j'avais proposé une espèce de répartition 95-15 d'utilisation du français par rapport à l'anglais. Je pense que c'est un peu le genre d'équilibre qui, politiquement, pourrait être acceptable pour l'ensemble des composantes de la société québécoise.

Il n'y a pas de manière objective de déterminer ça. On est dans une société qui est plurielle, où les intérêts des gens ne sont pas toujours alignés, où les gens n'ont pas les mêmes préférences sur le plan linguistique. Donc, pour moi, l'idée, c'est vraiment de réussir à créer une sorte de consensus, une sorte de juste milieu. En ce moment, je pense qu'on ne l'a pas, on voit le français qui recule. Et comme... Vous avez vu les études que j'ai publiées la semaine dernière, les endroits où le français recule le plus, c'est chez les diplômés universitaires, dans la région de Montréal, précisément. Donc, il faut recadrer pour ramener les aiguilles un peu de l'autre côté. Il n'y a pas de réponse parfaite, je pense que ça reste un compromis politique entre les grandes forces qui partagent la société québécoise.

Et moi, j'avais proposé de se donner une cible qui était quantitative parce que je pense qu'à partir du moment où on a une cible puis qu'on s'entend tous dessus, ça vient dépolitiser aussi l'enjeu, ça vient dédramatiser l'enjeu, puis on est capables de créer une plus grande cohésion sociale dans une société qui est divisée sur cette question et qui le restera probablement pour assez longtemps.

M. Roberge : Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 7min 45s.

M. Roberge : Parfait. Vous me parlez de la langue française. Tantôt, on parlait de Montréal et les régions. Là, on parle de la caractéristique de la langue. Il y a la question d'étudiants francophones, étudiants étrangers francophones qui arrivent ici, qui étudient dans des établissements francophones. Il y a des étudiants francophones qui étudient dans des établissements anglophones. Si on se dotait de cibles, est-ce qu'il faudrait y aller par la langue parlée des gens? On accueille un pourcentage x, on va dire 80 % ou 90 % d'étudiants, par exemple, qui maîtrisent la langue française, ou plutôt par institution, par programme? Est-ce qu'on doit avoir 80, 90 % d'étudiants qui vont dans des programmes de langue française? Est-ce qu'on fait une distinction? C'est-à-dire, si un francophone va dans une institution anglophone, est-ce qu'on le compte ou on ne le compte pas? Je veux dire... Là-dessus.

M. Dubreuil (Benoît) : C'est une excellente question parce que tout est possible, tout est possible. Si vous avez vu les études, encore une fois, que j'ai publiées la semaine dernière, on voit des francophones qui étudient dans des établissements anglophones. Ils sont moins susceptibles de travailler en français, mais ils sont encore beaucoup plus susceptibles de travailler en anglais que des étudiants, par exemple, qui vont venir de pays plutôt anglophones qui vont étudier en anglais. Donc, c'est peut-être un moindre mal, à certains égards, mais ça doit faire partie d'un compromis plus large.

Pour moi, ce qui est important, en bout de ligne, ce sont les résultats, les résultats sur l'utilisation du français en public, les résultats sur l'utilisation du français au travail et les résultats aussi sur la culture, d'amener les gens à être exposés aussi à une culture francophone, d'amener les gens à être exposés à une culture québécoise. Si on voit qu'on atteint des résultats par rapport à ces indicateurs-là, je pense qu'ensuite, dans les manières de le faire, il y a plusieurs façons.

• (10 h 20) •

Moi, je serais favorable à une répartition des places ou des permis qui viendrait poser un certain nombre de grandes balises entre les établissements francophones, entre les établissements anglophones, entre Montréal et les régions, qui fonctionneraient avec une planification à long terme de l'immigration et qui pourraient faire l'objet d'ajustement si on voit que les résultats ne sont pas au rendez-vous. Et je suis conscient aussi... je vais avoir un petit mot aussi pour tous les représentants d'établissements d'enseignement supérieur qui vont passer après moi, eux, ils ont des organisations à gérer, ils ont besoin de prévisibilité. C'est sûr qu'idéalement, dans leur monde parfait, ces dirigeants peuvent toujours être dans un contexte d'expansion, puis de grossir, et de grossir, et de grossir. C'est le fun, quand on dirige une organisation, de créer des nouvelles choses, et tout ça, mais je pense que ce dont les gens ont surtout besoin, c'est de prévisibilité...

M. Dubreuil (Benoît) : ...donc, même s'il y a un réaménagement qui doit se faire ou certains rééquilibrages, je pense qu'on peut leur donner du temps, se donner une cible, se permettre de bouger progressivement dans une direction pour que les gens puissent arranger leurs affaires à l'intérieur de l'établissement.

J'éviterais aussi, je ne pense pas que ce soit nécessaire, d'avoir une espèce de microgestion aussi trop avancée des places. Les institutions d'enseignement sont autonomes, il faut fixer les paramètres et les institutions d'établissement sont spécialistes, eux, pour optimiser à l'intérieur des paramètres.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, la parole à la députée de Vimont. Oui, il vous reste 4 min 23 s.

Mme Schmaltz : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci d'être là, c'est toujours apprécié de vous avoir en présentiel. Vous avez mentionné... Tantôt, dans votre exposé, vous recommandez que l'on définisse davantage le français et son rôle. Vous l'avez mentionné au tout début, là, de l'exposé. J'aimerais savoir les leviers. Quels leviers vous envisagez pour qu'on puisse favoriser davantage la connaissance justement du français auprès des étudiants étrangers?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui.

Mme Schmaltz : Si on définit... si vous avez une définition, le rôle, là, que vous voyez, c'est lequel? 

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, en fait, pour l'instant, ce dont... ce dont on parle plus précisément, c'est il y a une liste de critères que le gouvernement devra... dont le gouvernement devra tenir compte au moment de prendre sa décision de répartition ou de plafonnement. Et l'idée, c'est que tous les gouvernements qui vont suivre seront engagés à tenir compte de l'impact de leurs décisions sur la situation du français. Donc, moi, c'est vraiment une recommandation en lien avec ce projet de loi, de manière précise.

Cela dit, de manière plus large, pour favoriser l'apprentissage et l'utilisation du français, on connaît quand même quels sont les critères sur lesquels on peut jouer. C'est sûr que le fait de connaître le français à l'arrivée, c'est extrêmement déterminant. Le fait d'étudier en français, plus on reste longtemps à étudier en français, plus ça augmente la probabilité de l'utiliser par la suite. Et comme il y aura toujours, au Québec, une partie des... des gens qui vont venir étudier ou vivre, qui vont être plutôt anglophones, mais avec ce groupe-là, qui va toujours être le bienvenu, bien, il faut s'assurer justement d'avoir un enseignement du français, pas dans l'espoir de les amener à utiliser le français de manière... Ce n'est pas eux qui vont pousser pour utiliser le français, O.K.? Mais il faut quand même leur donner des outils pour être capables d'interagir dans la plupart des situations habituelles. Donc, pour moi, il y a vraiment un équilibre qui est possible à partir du moment où on se donne les bons paramètres puis qu'on fait évoluer la situation dans le bon sens.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Alors, la députée d'Iberville a une question, puis il reste encore 2 min de 18 s.

Mme Bogemans : Merci. Vous parliez de mixité d'étudiants puis que déjà, au Québec, on était favorisés dans une position enviable au niveau de cette mixité-là? Ce serait quoi concrètement la place que vous feriez pour les étudiants étrangers francophones puis comment bien les intégrer justement dans ce concept-là?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui, c'est sûr qu'idéalement on veut avoir une bonne répartition. J'y reviens parce que si on a des collèges et on le sait, ça arrive, on sait que ça existe. Il y a eu l'épisode avec les étudiants originaires de l'Inde qui ont... le nombre explosé en 2019-2020. Puis aujourd'hui, on le sait, il y a des collèges privés non subventionnés dont le... qui reçoivent un nombre de permis d'études qui est très, très, très élevé, des collèges que vous ne connaissez probablement pas, dont vous ne savez probablement pas entendu parler. Et là, il y a des centaines, des centaines de permis d'études qui sont délivrés. Et là on a des gens qui ne vont pas être en contact avec des Québécois qui habitent ici. Ça va être... c'est des collèges qui se spécialisent justement pour accueillir des gens... pour accueillir des gens qui veulent essentiellement obtenir la résidence permanente rapidement.

Donc, pour moi, la meilleure manière, ça reste de distribuer les étudiants étrangers de la meilleure manière possible, idéalement dans des environnements francophones. Quand vous avez une personne immigrante qui arrive au Québec, qui parle déjà français, qui vient ici dans le but de vivre en français et qui se retrouve dans un environnement social où c'est le français, la langue habituelle, ça fonctionne. Il n'y a pas d'enjeu. Puis il va y avoir une rencontre interculturelle où chacun va être confronté dans ses valeurs, puis chacun va apprendre, chacun va grandir, puis il va avoir une nouvelle culture qui va émerger de ça. Donc, c'est ça qu'on veut favoriser. Et moi, je pense qu'il y a beaucoup d'établissements, au Québec, qui offrent ce type de contextes d'intégration.

Mme Bogemans : Mais concrètement, comment vous feriez ça? Vous suggérez une bonne répartition. Est-ce que ça serait en fait une suggestion ou on impose? Parce qu.en fait ça peut imposer un choix d'étudiants ou une mixité imposée par les établissements ou, au contraire, même imposer un choix à l'étudiant qui décide de venir ici. Donc, comment on fait ça?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 15 secondes.

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, il y a plusieurs... il y a plusieurs...

Mme Bogemans : Oh!

M. Dubreuil (Benoît) : Pour moi, le 10 secondes? Il y a plusieurs mécanismes qui sont possibles. Je pense qu'il va y avoir une deuxième discussion à avoir après l'adoption de ce projet de loi par rapport à la mise en œuvre, justement, de cette décision qu'on...

M. Dubreuil (Benoît) : ...complexe qu'on va confier au gouvernement.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, la période impartie au gouvernement est terminée. Je me tourne du côté de l'opposition officielle, et vous avez 9 min 54 s, M. le député.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. le commissaire, Mme la commissaire adjointe, Me Simoneau et M. Batiatino, merci d'être avec nous aujourd'hui, merci de participer aux travaux de la commission et merci pour le mémoire que vous avez déposé, c'est très apprécié. J'ai quelques questions, et ma collègue la députée de Mont-Royal-Outremont aura aussi quelques questions pour vous, M. le commissaire.

Il est certain, c'est indéniable, le français, c'est hyperimportant, c'est notre langue commune, c'est clair. Cependant, si j'ai bien compris, et corrigez-moi si je fais erreur, dans votre mémoire et dans les informations que vous avez partagées avec nous ce matin, j'ai cru comprendre — en fait, c'est ma perception — qu'il y a plusieurs étudiants étrangers, peut-être, qui auraient un impact sur la vitalité de la langue française au Québec. Est-ce que je vous ai bien compris, ou si ce n'est pas du tout le cas, puis au fond le nombre d'étudiants étrangers n'a pas vraiment d'impact sur la vitalité de la langue française?

M. Dubreuil (Benoît) : Ce n'est jamais les individus, hein. Un individu, par lui-même, ne peut jamais avoir un impact sur une situation linguistique. C'est toujours la composition globale, le nombre, comment ça transforme les milieux de travail, comment ça transforme les contextes... l'interaction? C'est comme avec les voitures. Quand on prend sa voiture, on n'a jamais d'impact sur l'environnement, c'est quand on est 100 000 et 200 000 à la prendre en même temps que ça paraît.

Donc, moi, ce que je fais valoir, c'est : quand on a 600 000 résidents non permanents au Québec — je l'avais mentionné dans mon rapport de février — il y a des conséquences sur le français, parce qu'il y a une très grande proportion de ces gens qui ont plutôt adopté l'anglais... qui vont plutôt adopter l'anglais. Et, quand on regarde les différents groupes, bien, ce n'est pas compliqué, c'est demandeurs d'asile, c'est titulaires de permis de travail puis c'est tous les gens qui sont associés de près ou de loin aux études. Ce dernier groupe est celui qui a tendance à utiliser l'anglais le plus, et c'est là à mon avis qu'il y a un correctif à apporter. Il y a un correctif aussi à apporter, je pense, avec les demandeurs d'asile puis aussi avec les travailleurs étrangers temporaires.

Mais oui, tout ça, évidemment, ça a un impact sur le français. Mais ce n'est jamais les individus, c'est toujours la composition finale de comment ça affecte les structures démographiques.

M. Morin : Merci, merci pour la précision, sauf qu'ici, dans le cadre du projet de loi, on parle véritablement des étudiants étrangers. Donc, ce n'est pas l'ensemble de l'immigration qui est visée, puis ça, je pense que c'est important de le souligner.

Bon. Évidemment, on a tous des chiffres. Ici, par exemple, j'ai des chiffres du Bureau de coopération interuniversitaire qui nous disent que les étudiants internationaux... par établissement, là, on a la liste, mais pour l'ensemble du réseau c'est 57 450. Et je voulais discuter avec vous là-dessus, parce que j'ai lu les mémoires, et, dans les mémoires... dans le mémoire publié par l'Université du Québec, on souligne clairement que les personnes étudiantes à l'international contribuent à la vitalité de la langue française et que 40 % de ces étudiants-là proviennent de l'Afrique subsaharienne, 29 % de l'Europe.

Donc, au fond, il semblerait qu'il y a quand même un apport important d'étudiants étrangers qui contribuent à la vitalité de la langue française. Est-ce que vous pouvez nous en dire davantage là-dessus?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, il y a deux points, puis je pense que vous allez le voir dans les consultations aujourd'hui. Le nombre de personnes qui sont inscrites dans des universités et des collèges, ce n'est pas si élevé que ça, on parle de peut-être 72 000 l'année dernière, mais il y a plus de 100 000 permis d'études. Donc, il y a des gens qui ne sont pas là ou qui sont... On ne sait pas ils sont où, en fait.

Puis en plus, bien, il y a les permis post-diplôme, parce que les permis post-diplôme aussi, ça, c'est une catégorie importante. C'est sûr que, du point de vue de l'établissement, quand la personne complète ses études, s'en va sur un permis post-diplôme, l'établissement se dit : Bien oui, mais ce n'est plus un étudiant étranger, ce n'est plus chez nous. Certes, mais quand vous l'avez recruté, quand votre agent recruteur est allé convaincre la personne de venir au Canada, avoir le permis post-diplôme, ça faisait partie du produit que vous avez mis sur la table. Donc, il faut voir ça vraiment comme un tout.

• (10 h 30) •

Mais je pense qu'il y a quand même une avenue où on peut réduire le nombre de personnes qui sont liées aux études tout en maintenant un gros bloc d'étudiants étrangers, il faut travailler sur le post-diplôme. Le ministre Miller, à Ottawa, a déjà fait des annonces par rapport aux conjoints qui vont faire diminuer de façon importante...


 
 

10 h 30 (version non révisée)

M. Dubreuil (Benoît) : ...importante leur nombre, et ensuite, bien, il y a cet écart-là d'au moins 20 000, 25 000 personnes qui ont des permis d'études... ils se sont présentés sur le territoire, et dont on ne sait pas ce qu'ils sont devenus.

Par rapport au français. Alors, moi, ce que je note, c'est que, depuis l'année dernière... Vous savez, on a eu toute la discussion par rapport aux permis d'études pour les étudiants africains avec le gouvernement fédéral, qui avait les pieds sur les freins. Donc, ça, ce problème-là semble avoir été résolu, ce qui a permis aux établissements francophones, particulièrement en région, de connaître une croissance importante de leur nombre d'étudiants étrangers. Donc, pour moi, ça, c'est un développement qui est quand même favorable. Je pense qu'il faut que ces établissements-là... Parce qu'il y a des établissements qui ne sont pas habitués à accueillir des étudiants étrangers. Je sais que, des fois, c'est difficile aussi de sélectionner les bonnes personnes qui vont avoir la capacité de réussir, qui vont vraiment être prêtes pour faire leur programme, mais je pense que ça peut nous aider à trouver un meilleur équilibre linguistique. Parce que, traditionnellement, le problème, il était simple, c'est qu'évidemment, à l'échelle internationale, l'anglais est juste beaucoup plus puissant que le français. Donc, si on n'a pas pas de filtre et on dit : Bien, c'est la compétition, puis tout le monde compétition avec tout le monde, c'est sûr que l'anglais va sortir plus fort. Donc, il faut appliquer une politique, un filtre, s'assurer qu'on a des résultats qui sont équitables.

M. Morin : Et, pour ce faire... parce que vous avez utilisé le mot «prévisibilité», et j'en suis. D'ailleurs, comme porte-parole de l'opposition officielle, j'ai suggéré au gouvernement de créer le bureau intégré de la planification, pour qu'on soit justement capables de planifier, et donc, pour moi, ça m'apparaissait essentiel. On a demandé au gouvernement de tenir compte des travailleurs temporaires. Heureusement, ils ont retenu notre suggestion très récemment, mais on le demandait depuis longtemps. Donc... Et là on arrive avec un projet de loi qui donne un pouvoir réglementaire important au gouvernement, avec la possibilité de ne pas avoir de prépublication de ces règlements-là, vous l'avez souligné dans votre mémoire. Moi, la façon dont je le reçois, c'est que ça ne va pas beaucoup aider pour la prévisibilité. Avez-vous des recommandations au gouvernement là-dessus? Parce que, quand on dépose des projets de loi comme ça ou si des règlements sont adoptés, il faut quand même que des établissements d'enseignement soient capables de réagir adéquatement. Donc, vos suggestions sont les bienvenues.

M. Dubreuil (Benoît) : C'est absolument essentiel. Moi, je... D'un côté, je pense que ce n'est pas aux établissements d'enseignement de gérer les politiques d'immigration, mais, de l'autre, je pense que les établissements d'enseignement ont le droit d'avoir un environnement qui est prévisible. Moi, la lecture du projet de loi, je ne voyais pas tout à fait clairement quel était l'arrimage qui était proposé entre l'immigration temporaire, l'immigration permanente. Donc, je sais, c'est un sujet, là, qui revient quand même beaucoup, qui a été discuté aussi bien à Ottawa qu'à Québec. Moi, c'est un point sur lequel, je pense, ça mériterait quand même une certaine clarification. Je pense que, maintenant, il y a un consensus assez large à l'effet que... Si on est pour avoir un système d'immigration qui est en deux étapes, parce que c'est de ça dont on parle quand on parle de PEQ ou quand on parle de permis de travail et tous, si on veut un système d'immigration en deux étapes, il faut que ce soit très bien attaché. Parce qu'on induit dans le marché du travail et dans les établissements d'enseignement supérieur toutes sortes d'incitatifs qui vont amener les acteurs à faire toutes sortes de choses. Donc, si on veut que ça donne des bons résultats, il faut que ce soit attaché serré.

M. Morin : Je vais céder la parole, si vous me permettez, à ma collègue la députée de Mont-Royal Outremont.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Il vous reste encore 1 min 40 s.

Mme Setlakwe : Merci. Merci pour votre contribution. Évidemment, on a plusieurs objectifs à réconcilier pour nos universités, pour notre recherche et innovation. La présence d'étudiants étrangers est essentielle pour maintenir certains programmes pour nos régions. J'aurais deux questions pour vous, il reste peu de temps. Mais est-ce que vous considérez, donc, les universités, en particulier, comme des vecteurs d'intégration? Est-ce que vous vous êtes penchés sur leurs efforts en termes de francisation, leurs programmes, les outils qu'ils mettent à la disposition des étudiants, sachant qu'ils font un effort au niveau de la francisation? Et j'ai évidemment en tête de maintenir l'autonomie de nos établissements ici, dans le cadre de l'exercice qu'on mène. Et, deuxièmement, vous avez mentionné, donc, l'importance de répartir les étudiants étrangers partout dans les régions et vous ne souhaiteriez pas que les établissements dirigent dorénavant leur mission vers... leur mission d'enseignement vers les étudiants étrangers. Mais là on sait, c'est documenté dans des mémoires, qu'il y a... il y a une baisse d'inscription des étudiants québécois, dans le réseau de l'UQ notamment. Donc, comment réconcilier tout ça?

M. Dubreuil (Benoît) : Il y a plusieurs choses dans votre question. C'est sûr que... C'est sûr que c'est un avantage, autant de prendre le point sur la question de favoriser l'apprentissage, l'apprentissage du français. C'est sûr qu'en général, dans les établissements francophones, à l'extérieur du doctorat, qui est un cas particulier, il n'y a pas d'enjeu d'intégration en français. Hein, je pense que l'enjeu, c'est plus les collèges qui vont se spécialiser à...

M. Dubreuil (Benoît) : ...avoir juste des étudiants étrangers, et là les gens ne seront pas en contact avec d'autres... avec des Québécois. Donc là, il y a un enjeu d'intégration culturelle. Ensuite, ça pose évidemment la question des établissements en...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...le temps imparti à l'opposition officielle est terminé, mais il y a d'autres questions qui vont venir. Alors, je cède la parole au député de Saint-Henri—Sainte-Anne pour 3 min 18 s.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M. le commissaire, pour votre présentation. Écoutez, vous en avez parlé, puis je veux revenir là dessus, parce qu'il n'y a effectivement aucune mention de manière explicite du français dans ce projet de loi là, ni de près ni de loin. En fait, quand on fait un contrôle f, là, la seule fois où «français, francisation» arrivent, c'est dans le titre du ministre, et à aucune place y a-t-il le poids linguistique, le poids directement, explicitement cité. Puis le ministre nous dit : Il y a notamment. Mais moi, M. le commissaire, je refuse que le français soit un «notamment», je pense que le français doit avoir sa place explicite, directe. Et je me comprends mal comment on a pu oublier le français dans le libellé précis de ce qu'on vient modifier dans le projet de loi. Je fais un commentaire là-dessus en commençant, je pose ma question ensuite.

Vous parlez d'arrimer clairement la planification temporaire, la planification permanente. Les collègues en parlaient. Tant mieux. Le gouvernement finit par dire oui. Parce que, là, on est rendu à 123 000 étudiants étrangers et on voit dans les sélections au PEQ, finalement, l'année dernière, 3 800 sélections pour 123 000. Évidemment, les 123 000 ne sont pas tous finissants, ils n'ont pas tous réussi leurs études encore, et là on voit qu'on va passer à 15 000 potentiels, ce qui force le ministre à suspendre le programme. Alors que, toutes choses étant égales par ailleurs, si on monte à 123 000 étudiants étrangers, force est de constater qu'on va aussi augmenter le nombre de gens qui se qualifient. Donc, est-ce que ce sont ce genre de choses là que vous demandez à mieux planifier ou à mieux intégrer?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, je vous dirais qu'on a un problème qui est le suivant, si on avait juste des gens qui viennent, qui étudient puis qui repartent, on pourrait en admettre probablement beaucoup plus. Mais on le sait, la capacité d'attraction du Québec et du Canada, elle vient du fait que les gens, dans plusieurs cas, pensent ou savent qu'ils vont avoir un accès à la résidence permanente. Donc, on est dans une espèce de paradoxe où, en principe, on pourrait avoir encore beaucoup plus d'étudiants étrangers, mais il faut qu'on s'assure qu'on est prêt à admettre les gens qui, trois, quatre, cinq, six ans plus tard, vont arriver au bout du pipeline. Puis si on ne fait pas ça, bien, on manque... il y a des gens évidemment qui vont être déçus. Puis on a eu ces épisodes-là qui se sont déroulés, auxquels vous faites référence. Donc, c'est ce qu'il faut, c'est l'équilibre qu'il faut trouver.

M. Cliche-Rivard : Si vous me permettez, on se met à jouer un petit peu au chat et à la souris en modifiant le PEQ, bon an mal an, là, c'est presque la sixième modification en six ans, en contrôlant les admissions, en limitant finalement... en imposant un critère de travail, la première liste du ministre à l'époque qui avait été retirée, les deux réformes, finalement une autre réforme. Bref, on est toujours à courir après notre queue, finalement, si on ne planifie pas en amont un seuil qui va fonctionner dans notre immigration temporaire.

M. Dubreuil (Benoît) : Je pense que c'est un phénomène qu'on voit aussi bien à l'échelle québécoise que canadienne. C'est-à-dire que, depuis la fin des années 2000, là, au tournant de 2010, on s'est dit : On va créer un système d'immigration en deux étapes. Il y avait toutes sortes de bonnes raisons de faire ça, puis moi-même, j'étais d'accord avec ça. O.K.? Le problème, c'est que, là, on déclenche des chaînes causales où il y a un effet qui se crée, puis là ça prend... il y a une cause qui apparaît puis ça prend cinq ans à voir l'effet.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Dubreuil (Benoît) : Donc là, je pense qu'on commence à avoir fait un peu le tour des relations de cause à effet puis c'est un excellent moment, justement, pour bien attacher les choses.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va terminer avec le député de Jean-Talon pour une période de 3 min 18 s. Le temps est à vous.

M. Paradis : Vous écrivez, et vous l'avez mentionné tout à l'heure, que l'absence de planification de la croissance des étudiants étrangers a entraîné des difficultés diverses, dont une incertitude parmi les candidats à l'immigration puis une explosion du nombre de titulaires d'un permis de travail postdiplôme, ce dont on vient de discuter. «En outre, l'admission à l'immigration permanente de plusieurs personnes qui ne connaissent pas le français ou qui avaient adopté l'anglais comme langue habituelle de communication a accru la pression sur le français dans plusieurs milieux.» C'est ce que vous écrivez.

Est-ce que cette planification ou ce défaut de planification que vous mentionnez ici lors des 10 dernières années... est-ce qu'on a besoin d'un projet de loi pour régler ce problème de planification? Est-ce qu'on pouvait planifier avec les outils qu'on avait avant le projet de loi?

M. Dubreuil (Benoît) : Questions posées par des avocats à quelqu'un qui ne l'est pas. Je ne suis pas certain qu'on avait nécessairement besoin d'un projet de loi. Je pense que les dispositions à la loi sur l'immigration permettent de considérer ces variables dans l'immigration permanente, il me semble.

• (10 h 40) •

M. Paradis : Est-ce que, dans le projet de loi qu'on a devant nous...

M. Paradis : ...nous, tel qu'il est écrit, on voit des indices de cette planification et de cet arrimage que vous... que vous appelez de vos vœux, entre l'immigration temporaire, les étudiants étrangers, et l'immigration permanente. Est-ce que vous voyez, dans ce projet de loi là, des indices d'où le gouvernement veut nous amener sur cette planification?

M. Dubreuil (Benoît) : Je pense qu'à l'article 3 il y a quand même un certain nombre de facteurs qui... qui présentent, qui laissent entendre qu'il y aura une décision structurée. Donc, moi, je vois ça de façon positive. À l'article 3, on mentionne aussi de tenir compte des orientations, je crois, de la planification pluriannuelle. Donc, je pense qu'il y a quelque chose, là. Cela dit, je pense qu'à la lumière des développements de la dernière décennie ou des derniers 15 ans, je pense que ça vaut la peine, peut-être de structurer ça de manière plus explicite pour être sûr qu'on repart sur de bonnes... de bonnes bases.

M. Paradis : Mais on aurait pu agir.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, écoutez, ça fait quand même plusieurs années, là, que l'immigration, on part d'un extrême à l'autre. Dans toutes les provinces canadiennes ou au niveau fédéral, je pense... Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure, c'est qu'on déclenche des chaînes qui ont des conséquences qui sont inattendues, qui apparaissent cinq ans plus tard. Il y a une succession de responsables, aux commandes, qui sont confrontés à des situations qui, à chaque fois, sont uniques. Donc là, je pense qu'on comprend un peu les conséquences de ce qu'on a fait en créant un système d'immigration à deux étapes. Je pense qu'en ce moment on a l'expertise qui nous permet justement de nous asseoir puis de développer un système qui va être cohérent, qui va fonctionner pour le français, pour l'économie puis pour les personnes immigrantes aussi, au premier chef.

M. Paradis : À la page 76 de votre analyse de la situation du français au Québec, il y a un tableau extrêmement important qui démontre en gros que la langue des études, et particulièrement la langue du dernier diplôme, a un impact déterminant sur l'insertion professionnelle en français ou en anglais. Donc, vous dites, ça, c'est important, notamment pour l'avenir de la langue française. Sans parler du nombre, est-ce que vous considérez que la répartition actuellement des étudiants étrangers est la bonne?

M. Dubreuil (Benoît) : Je pense qu'on n'y est pas encore tout à fait, là. Je le mentionnais tout à l'heure, il y a eu quand même une croissance des étudiants africains dans les cégeps, dans les centres de formation professionnelle, dans les... qui aide un peu, mais...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, c'est... Le temps imparti au candidat, pas au candidat, je m'excuse, au député est terminé. Merci beaucoup. C'est ce qui met fin à cette première audition. Merci, M. le commissaire, Mme la commissaire adjointe et messieurs. Merci de cette présentation. Je vais suspendre les travaux quelques instants, le temps que le prochain groupe s'installe. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 43)

(Reprise à 10 h 47)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La séance reprend ses travaux. Nous recevons donc, pour l'heure, l'Université du Québec avec ses représentants, M. Alexandre Cloutier, président, Mme Céline Poncelet de Rancourt, vice-présidente à l'enseignement et à la recherche, M. François Deschênes, recteur de l'Université du Québec à Rimouski, ainsi que M. Vincent Rousseau, recteur de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.

Bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. Alors, vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour votre exposé et, ensuite, on va procéder à une période d'échange avec les élus. La parole est à vous.

M. Cloutier (Alexandre) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, salutations à vous, les députés, de même qu'à tout le personnel qui vous accompagne. Il y a un peu plus de 55 ans, maintenant, ici, à l'Assemblée nationale, les parlementaires se dotaient d'une université nationale, l'Université du Québec. L'Université du Québec répondait à l'époque à un besoin immense qui était celui de l'écart de la diplomation des francophones, particulièrement dans les régions du Québec. Encore aujourd'hui, l'Université du Québec accueille... un étudiant sur deux est un étudiant de première génération, c'est-à-dire que ses parents ne sont pas allés à l'université, et continue donc de répondre à cette mission sociale importante. Mais mine de rien, l'Université du Québec, aujourd'hui, est établie dans 40 municipalités, plus de 2 milliards de budget annuel, 7500 professeurs et chargés de cours, près de 100 000 étudiants, ce qui en fait l'université francophone la plus importante en Amérique du Nord, et a plus d'étudiants que l'Université de Toronto, juste pour mettre les choses en perspective.

Lors du dépôt du projet de loi du gouvernement du Québec, nous avons levé la lumière jaune orange parce que nous avons des inquiétudes, et les inquiétudes que nous avons sont essentiellement liées au fait qu'on connaît mal encore les intentions du gouvernement du Québec quant à la mise en œuvre du projet de loi. Et donc une de nos recommandations, c'est que l'Université du Québec et le monde universitaire participent à la conversation nationale sur les mesures à mettre en place. Aujourd'hui, c'est un projet de loi de nature large et générale, et donc, pour nous, ça nous apparaît être préoccupant qu'on donne un tel outil au gouvernement sans connaître réellement les intentions qui sont derrière le projet de loi.

Je veux revenir un petit peu en arrière, en 2018, parce que c'est à partir de 2018 qu'il y a eu une augmentation importante des étudiants internationaux. Et, en 2018, il y a un choix qui a été fait, qui est celui de la déréglementation des étudiants internationaux, qui a un impact majeur sur le financement des universités et, en quelque sorte, une forme de... une forme de débalancement des ressources, où il y a eu une concentration importante du financement auprès de certaines institutions. Puis cette déréglementation a été revue récemment, dans la nouvelle formule de financement, mais tout simplement, je veux illustrer que la formule de financement des universités, elle est directement liée, présentement, à la présence des étudiants internationaux.

Alors, sur ce, Mme la Présidente, je vais céder la parole à mon collègue le recteur de l'Université du Québec à Rimouski, M. François Deschênes.

• (10 h 50) •

M. Deschênes (François) : Merci. Bonjour, Mme la Présidente. Bonjour à tous et à toutes. Évidemment, la question du financement, comme on vient de l'entendre, est liée au financement des...

M. Deschênes (François) : ...mais, trop souvent, on a tendance à réduire cet impact à l'impact financier des universités. Les étudiants internationaux sont importants pour l'ensemble de la communauté, et ça, il faut se le rappeler. Si on regarde juste les dimensions économiques, parlons de la réalité au sein de l'Université du Québec, les étudiants internationaux, si on applique une méthode développée par l'Institut de la statistique du Québec, on réalise, dans le fond, qu'ils contribuent à hauteur de 157 millions de dollars au PIB actuel. Ça correspond aussi, en termes de dépenses, parce qu'ils viennent et se logent, ils se vêtissent et consomment, donc bref, c'est l'équivalent de 1716 emplois supplémentaires.

Encore une fois, j'insiste, on... il ne faut pas associer uniquement les étudiants internationaux à... au monétaire. Donc, c'est très important de voir aussi la contribution qu'ils ont au niveau culturel et social, que ce soit à l'intérieur de nos campus ou dans la société en général. Donc, si on décline ça. Tout d'abord, en termes d'impact, ce sont des étudiants qui sont à plus de 50 % au sein du réseau de l'Université du Québec aux cycles supérieurs. Donc, ce sont un moteur en termes de développement de la connaissance, de développement des innovations actuelles et futures. Il importe de ne pas l'oublier.

Également, ce sont des moteurs d'animation, si... pour ceux et celles qui ont visité des campus récemment, ces étudiants vivent réellement les campus et sont très présents, ils contribuent à la dynamique culturelle sur les campus et sociale. Ils développent des activités, ils s'impliquent dans des activités, ils contribuent à partager leur culture avec leurs collègues. Donc, c'est un élément qui est très important également. Quand on parle de vitalité sociale, économique, on le voit à l'intérieur de nos murs, mais évidemment dans la communauté également. Ce que je viens de décrire à notre échelle s'applique dans le milieu où ils habitent.

Certes, on a observé une croissance au cours des dernières années en termes de nombre d'admissions, en termes de nombre d'inscriptions. Avec cette croissance vient un certain nombre de problèmes, mais ce qu'il faut bien comprendre, c'est que les universités ont été très proactives. Elles ont assumé leurs responsabilités. Donc, d'ores et déjà, plusieurs mesures ont été mises en œuvre. Si on identifie qu'en... le sommet atteint était de 99 258 demandes d'admission en 2023, donc c'est une hausse, oui, de 269 % par rapport à 2018. Mais déjà, il y a des mesures qui ont été mises en place pour mieux cibler les étudiants, étudiantes prometteurs, identifier de manière plus précoce les demandes aussi qui étaient multiples. Il y en a qui font des demandes dans toutes les universités lorsqu'ils veulent venir à tout prix, mais pas nécessairement pour les bonnes raisons. On a aussi mis en place des mesures pour filtrer en termes de contraintes additionnelles au niveau financier pour être sûr qu'ils ont la capacité de payer leurs études, des filtres supplémentaires aussi en termes d'exigences de maîtrise de la langue française. Donc, déjà, si on regarde les données récentes, je vais parler pour l'UQAR, mais les autres universités pourront en dire tout autant, nous, on observe déjà une baisse de 23,6 % des nouvelles inscriptions. Et, si on regarde les demandes d'admission, on a 28 % de baisse de demandes d'admission par rapport à 2023, donc au 31 octobre dernier.

Également, toutes ces mesures sont prises, mais sont faites avec les partenaires. Pensons à l'Agence des services frontaliers, au MIFI. Donc, c'est très important. On ne travaille pas en vase clos, on travaille avec les partenaires concernés. Autre élément qu'il est... importe de mentionner, c'est que, si on regarde à l'échelle du Québec, à l'heure actuelle, la population étudiante globale a eu une croissance de... est à peu près stable, donc à peu près 3 % d'augmentation sur cette période-là. Donc, si on regarde l'explosion, parce qu'elle est qualifiée ainsi, des étudiants internationaux dans nos murs, bien, ça veut aussi dire que, si on est à quasi-stabilité, c'est qu'il y a eu une diminution des étudiants, des étudiantes québécois qui fréquentent l'université. Donc, ce qui veut dire que. si on a une telle diminution et qu'elle n'est pas compensée, bien, à terme, ce sont des employés, des diplômés de moins pour les diverses organisations sur l'ensemble du territoire québécois. Donc, encore une fois, c'est un levier pour la vitalité économique de nos régions et du Québec dans son ensemble.

Souvent, on pense au logement aussi, on dit : Ça crée une pression indue. Bien, vous venez de voir l'adéquation avec l'effectif étudiant. Donc, moi, j'invite à la prudence. Ce ne sont pas tous les étudiants internationaux qui doivent être taxés de cette pression sur le logement. Et d'ailleurs les universités sont au front. Déjà, prenons Rimouski, on vient de doubler les résidences étudiantes pour la prochaine année. Donc, je crois que c'est un problème qui est déjà en partie derrière nous. Je cède maintenant la parole à mon collègue Rousson.

M. Rousson (Vincent) : Mme la Présidente, nous sommes reconnus pour notre autonomie, notre liberté universitaire, des conditions qui sont jugées essentielles dans l'accomplissement de nos missions, dans nos universités, telles que définies dans la Loi sur la liberté universitaire. Les universités, notamment de l'Université du Québec, à travers cette autonomie, comme l'a mentionné mon collègue de Rimouski, sont à pied d'œuvre depuis plus d'une année pour contrecarrer les répercussions de la hausse des demandes d'admission et des demandeurs d'asile...

M. Rousson (Vincent) : ...le projet de loi n° 74 peut créer des contraintes importantes quant aux solutions mises en place et qui fonctionnent et celles qui sont présentement en développement dans nos établissements.

Il y a un autre élément dans le projet de loi, qui concerne la répartition par programmes, qui pourrait venir nuire au développement de certaines disciplines tout aussi importantes que celles qui seraient priorisées. Une des forces de l'enseignement supérieur, bien, c'est de former des étudiants dans un large éventail de domaines.

Et je nous donne comme exemple l'intelligence artificielle qu'il y a de cela quelques années n'était pas une priorité, mais qui aujourd'hui est une condition essentielle pour le développement de notre société. Mais ce type de formation là est établi depuis... depuis les années 80 dans nos universités, donc se travaille sur du long terme. Je pense également aux travaux en psychologie sociale qui ont été menés par un chercheur de l'UQAM Camil Bouchard qui a amené au rapport Le Québec fou de ses enfants et qui a mené à la création des CPE, qu'on connaît aujourd'hui.

Une priorisation de certains programmes dans une éventuelle répartition nous fait craindre pour plusieurs programmes, notamment ceux en sciences humaines et en sciences sociales, pourtant jugées essentielles pour comprendre le monde en transformation dans lequel nous vivons actuellement.

Dans une logique similaire, une réduction des étudiants internationaux aux cycles supérieurs pourrait nuire aux capacités de recherche et d'innovation du Québec. C'est d'autant plus vrai que le financement des organismes subventionnaires québécois et fédéraux nous impose des travaux pour former la relève, et on a de la difficulté à trouver cette relève-là auprès des étudiants et étudiantes québécois et québécoises.

Alors, l'Université du Québec a fait, dans son mémoire, une série de recommandations : la première, de ne pas réduire le nombre de personnes étudiantes internationales en enseignement supérieur, la deuxième, que les établissements universitaires soient exclus de l'article cinq, la troisième recommandation, dans l'éventualité où l'article cinq n'exclurait pas les établissements universitaires, la nécessité de consulter les universités doit être enchâssée dans ce projet de loi là, et que la portée de tout scénario découlant de ces projets de loi exclut les cycles supérieurs, autant les programmes de recherche que professionnelle.

Merci de votre écoute.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup pour cet exposé et ces recommandations. On commence donc la période d'échange. On va commencer par M. le ministre pour une période globale de 16 minutes 30 secondes. La parole est à vous.

M. Roberge : Merci beaucoup. Merci pour votre présentation. J'ai entendu beaucoup de passion et de fierté dans vos propos. Je ne suis pas surpris. Je dois dire que, comme diplômé de l'UQ, je partage cette fierté-là avec un réseau important qui a carrément transformé le visage du Québec puis qui est responsable d'une grande partie de ce que nous sommes aujourd'hui comme nation.

Je commence par un petit commentaire. Vous avez mentionné tout à l'heure 2018, la déréglementation des frais de scolarité qui ont causé beaucoup de dommages. Certains pourraient attribuer à tort à notre gouvernement cette erreur parce qu'on est arrivés en 2018, mais je tiens à mentionner que ça a été l'erreur du précédent gouvernement libéral, qui est arrivé avec, je vous dirais, ce cadeau empoisonné suite à un lobby très puissant. Parce que je le vivais dans l'opposition, puis je pense que mon collègue aussi le vivait, parce qu'il était dans l'opposition en même temps que moi, en 2014-2018, certains établissements anglophones qui voulaient absolument cette déréglementation qui a finalement été donnée avant que nous arrivions. Et on travaille encore à réparer les pots cassés avec ma collègue Pascale Déry.

Vous parlez d'une séquence, je pense qu'elle est extrêmement importante, la séquence. Des fois, il y a beaucoup de choses à faire, on est pressés de commencer le changement, mais il faut quand même prendre le temps de bien faire les choses. La planification pluriannuelle, qui inclut les permanents mais aussi les résidents temporaires, je pense qu'elle est extrêmement importante. Il est temps qu'on aille dans cette direction-là. Je l'ai annoncé la semaine dernière. La prochaine planification pluriannuelle inclura tous les temporaires, dont les étudiants étrangers. Les gens disent : Bien, dites-nous vos chiffres tout de suite. Bien, attention, on annonce l'intention, après ça, on arrive avec un projet de loi qui nous permet de faire cette planification-là, après ça, on consulte, puis après ça, on donne les chiffres. Il ne s'agit pas... celui qui dit le premier chiffre ou le plus gros chiffre gagne. Je ne pense pas que c'est ça que ce doit être.

• (11 heures) •

Maintenant, tout à l'heure on a entendu, puis je pense que vous étiez dans la salle, le Commissaire de la langue française qui nous a fait quelques propositions. Puis j'aime ça, en commission parlementaire, des fois, tester des idées proposées des uns des autres, je vais tester vos idées aussi avec ceux qui vont vous suivre. Il nous propose d'inscrire nommément à l'article trois du projet de loi «le critère de la langue française». Parce qu'il y a la... il y a «le critère des régions, le critère des ordres d'enseignement, le critère des programmes». Il nous propose d'inclure «le critère de langue». Que pensez-vous de cette proposition du commissaire?...


 
 

11 h (version non révisée)

M. Cloutier (Alexandre) : ...Bon, d'abord, je vais... je vais reprendre du début. J'apprécie les commentaires initiaux sur l'importance de l'Université du Québec. Je pense que les Québécois devraient être aussi fiers de l'Université du Québec qu'ils le sont de la Caisse de dépôt ou d'Hydro-Québec, parce que ça fait vraiment partie de leur histoire nationale. Fin de la parenthèse.

Sur la proposition qui est faite par le commissaire, on a quand même des réserves par rapport aux critères mêmes qui sont identifiés dans le projet de loi, parce que ça pose des enjeux importants sur la mainmise du gouvernement dans les différents programmes de nos établissements, puis dans les... dans l'énumération qui est faite dans le projet de loi, bien, on retrouve, justement, les programmes, on retrouve les régions. On est donc très, je dirais, inquiets par rapport à la capacité éventuelle de choisir les différents programmes qui pourraient bénéficier ou non d'une intention gouvernementale de recevoir des étudiants internationaux. Je pense que ça a été très bien mentionné par mon collègue de Rimouski, à l'effet que les programmes se planifient de longue haleine, et il y a des programmes qui doivent être soutenus, comme ils l'ont toujours été par le passé, et pour lesquels on a une sensibilité particulière, puis là on pense, par exemple, aux sciences humaines, aux sciences sociales, à la philosophie, la sociologie, etc. Et, lorsqu'on commence à identifier des disciplines et dire aux universités là où il est bon ou pas d'avoir des étudiants, bien, ça pose d'énormes problèmes.

Alors, pour ce qui est de l'enjeu de la langue, bien, évidemment, à l'Université du Québec, vous aurez compris que 93 % de nos étudiants sont de langue française, alors, établis, essentiellement... bien, pas «essentiellement», à 100 %, en fait, sur le territoire québécois, et offre des programmes de langue française, et nos étudiants internationaux ont la langue française comme langue d'usage. Bien, pour toutes ces raisons, on se sent peut-être moins interpelés par l'enjeu de la langue, considérant que notre offre à nous est une offre en français.

M. Rousson (Vincent) : Si je peux me permettre, M. le ministre, en fait, nos étudiants, comme l'illustre M. Cloutier, en fait, sont déjà... parlent français, et ceux qui ne le parlent pas, on travaille à ce qu'ils soient fonctionnels en français dans nos régions, dans nos établissements. Donc, les étudiants de l'Université du Québec sont un outil essentiel au développement de la langue française au Québec, autant dans les régions qu'à Montréal. Donc, on est un acteur prépondérant dans la... la survie de la langue, dans le développement de la langue française, là.

M. Roberge : Je comprends très bien la posture que vous avez, puis que d'autres vont revenir après vous, des dirigeants d'établissements, de dire : Bien, en ce moment, on a plus la mainmise sur nos établissements. Avec le projet de loi, le gouvernement se donne des leviers. On n'aime pas bien, bien ça, je pense que c'est normal, sincèrement, c'est un réflexe tout à fait naturel, mais... considérant qu'en ce moment, le gouvernement peut fixer un nombre, un plafond, mais qu'il ne peut faire, pratiquement, que ça. C'est à dire, il ne peut pas... il ne peut pas... S'il décidait de réduire, ça pourrait réduire exclusivement en région, ça pourrait réduire exclusivement dans les programmes stratégiques.

Est-ce que vous voyez du bon dans le fait d'avoir une agilité gouvernementale, c'est-à-dire d'être capable, comme... comme gouvernement, de protéger des choses? Parce que vous dites : Bien là, s'il a le pouvoir d'agir de manière plus précise, il pourrait cibler quelque chose que nous voulons protéger. Je comprends, mais si on ne se donne pas ce pouvoir, et que le nombre continue d'augmenter, jusqu'à ce que quelqu'un, moi, ou un autre après moi, décide de le réduire, il faut savoir aussi que ça pourrait amener des réductions dans des endroits qui sont stratégiques. Donc, est-ce que vous ne voyez pas une plus-value ou, dans le fond, non, le gouvernement ne devrait pas avoir cette agilité gouvernementale, c'est vraiment le sacro-saint pouvoir de liberté académique qui doit prévaloir en tout temps, peu importe les nombres?

M. Cloutier (Alexandre) : En fait, dans votre énoncé, je pense que vous identifiez aussi le problème, parce que vous faites référence à vos successeurs, et ça inclut aussi des successeurs avec une autre idéologie que la vôtre. Et ça, lorsqu'on donne un pouvoir au gouvernement d'intervenir, en avant ou en arrière, bien, ça veut dire quoi? Ça veut dire un yo-yo, ou ça veut dire un caractère imprévisible.

Dans le monde universitaire, on ne planifie pas des programmes à court terme. On planifie, nécessairement, sur du moyen et long terme. On construit des programmes avec des campagnes de sensibilisation, des campagnes de promotion, incluant des campagnes de recrutement, qu'on ne peut pas modifier à très court terme parce que...

M. Cloutier (Alexandre) : ...ce sont des orientations qui sont données sur le moyen, long terme. Alors, parmi les inquiétudes qu'on a, c'est justement un nouveau pouvoir assez général, donné à un gouvernement sans trop de balises quant à l'utilisation éventuelle de ce pouvoir-là. Et, à ce moment-ci, bien, comme c'est un projet de loi un peu page blanche, bien, ça nous inquiète, évidemment, quant à l'utilisation même de ces pouvoirs-là, considérant qu'on comprend mal, là, comment il sera appliqué.

M. Rousson (Vincent) : Si je peux me permettre aussi, en fait, nous avons pris nos responsabilités, nous avons eu... vu la hausse des demandes d'admission dans les dernières années, notamment suite à la pandémie, qui est causée par des facteurs multiples. Donc, on a pris nos responsabilités, les universités, notamment celles à l'intérieur du réseau de l'Université du Québec. Mon collègue François a notamment énuméré quelques orientations qui ont été prises par notamment l'Université du Québec à Chicoutimi, à Trois-Rivières, à l'UQO et qui sont en train d'être implantées dans l'ensemble des autres universités. Donc, on voit déjà, de par cette prise de responsabilités, une baisse qui oscille entre 20 % et 30 % des demandes d'admission et d'inscription dans nos universités provenant des étudiants internationaux.

Donc, puisque nous avons pris nos responsabilités, bien, on juge que, ce projet de loi là, bien, on ne devrait pas être assujettis à celui-ci parce qu'on a déjà pris des actions, et ces actions fonctionnent. On a, entre autres, des actions... Je parlais de l'intelligence artificielle. Donc, on est en train de développer un outil pour venir aider l'ensemble des universités membres du réseau de l'Université du Québec, à travers l'intelligence artificielle, à dénicher des demandes d'admission un peu plus frauduleuses ou suspectes pour nous aider, parce que c'est clair que cette hausse de demandes d'admission est venue mettre beaucoup de pression dans nos établissements. Donc, on n'a pas resté les bras croisés. Donc, lorsqu'on parle de planification sur du moyen, long terme, oui, mais on est également extrêmement agiles pour réagir rapidement aux conditions que la société nous arrive, puis notamment la hausse des demandes d'admission.

Et c'est important aussi de mentionner qu'il y a une grande distinction entre une hausse des demandes d'admission et une hausse des inscriptions dans nos établissements, parce qu'elles ne se traduisent pas... Puis là on a l'exemple de l'Université du Québec en Outaouais, qui, dans la dernière année, ont eu 4 000 demandes d'admission provenant d'étudiants internationaux étrangers. Ça s'est traduit autour de 430 inscriptions. Donc, il y a une énorme distinction à faire entre admissions et inscriptions. Donc, si on venait mettre un cap, si je peux me permettre l'expression, sur les demandes d'admission, bien, ça va venir contraindre nos établissements dans les programmes de formation, dans la planification également, là, des plans de formation de nos étudiants et de nos étudiantes.

M. Roberge : Bien, peut-être un petit malentendu ici, parce que le CAQ émis par le gouvernement arrive après l'admission et pas à la demande d'inscription. Donc, on ne parle pas de ça. On ne parle pas de limiter les demandes d'admission, on parle une fois les gens admis.

Bon, il y a quand même eu des enjeux, là, à l'UQTR, il y a pas mal d'étudiants qui ont fait leurs demandes d'asile, à l'UQAT, il y a eu un déficit. Puis, selon l'article de Radio-Canada, à peu près 1 million du déficit venait des déficits de paiement des étudiants étrangers. À l'UQAR, il y a des gens qui nous disaient qu'il y a un article qui s'appelait C'est la désillusion parce qu'ils étaient admis à l'UQAR, pardon, et finalement ils devaient faire leur session dans les hôtels. Donc, il y a des enjeux. Je comprends que chacun dans vos campus, chacun dans vos universités, vous vous adaptez, vous réagissez à ces éléments-là, mais le libre marché nous amène à des nombres qui sont très élevés. Est-ce que le nombre d'étudiants étrangers, au Québec, devrait être infini, il ne devrait pas y avoir de plafond considérant ce qui se passe, considérant l'enjeu de logement?

Quand vous dites : On ne voudrait pas être assujetti, ça veut dire une forme de libre marché, autant par les régions, tant par les campus, tant par la capacité d'admission. On voit qu'il y a un paquet d'institutions qui nous demandent de l'argent pour agrandir leur établissement. Il n'y a pas des dérapages, dans les dernières années, qui devraient être prévus?

M. Cloutier (Alexandre) : Il y a absolument des enjeux, puis on ne se met pas la tête dans le sable, puis notre collègue pourra donner quelques éléments de détail. Je veux juste rappeler, par contre, que l'Université du Québec avait un retard historique au niveau de la présence des étudiants internationaux, un immense débalancement entre les universités anglophones, les universités francophones. Et récemment le Québec s'est dit : Ce n'est pas normal que les universités francophones aient un tel retard. Au moment où on se parle, l'UQ est à 18 % de ses étudiants qui sont des étudiants internationaux. Est-ce que c'est trop? Est-ce que ce n'est pas assez? Bien, je vous soumets ça à votre réflexion. Mais on n'est pas dans la démesure, on n'est pas dans le débordement, on n'est pas dans l'exagération.

• (11 h 10) •

On peut en débattre, on peut en discuter, mais ce qui est sûr, c'est que l'Université du Québec a travaillé très fort pour...

M. Cloutier (Alexandre) : ...ce retard-là. Puis vous savez quoi? On en est très fiers, d'avoir cette belle diversité d'étudiants là au sein de nos établissements. Maintenant, ça pose des enjeux, effectivement, de demandeurs d'asile, de paiement, mais on a mis en place des mesures. Puis c'est important de vous les partager, ces mesures-là, parce qu'il y a un caractère assez original, et on pense aussi qu'elles fonctionnent. Je ne sais pas si mes collègues...

Mme Poncelin de Raucourt (Céline) : Peut-être je peux compléter. Effectivement, vous donnez l'exemple de l'UQO, on le mentionnait tout à l'heure, 4 000 demandes d'admission et à peine 430 inscriptions. Tout le travail qui est fait par rapport à ces étudiants-là, il y a un gros travail, effectivement, d'analyse des demandes pour s'assurer de prendre les demandes les plus sérieuses. Et, quand l'étudiant s'inscrit, on lui demande, à l'UQO, dorénavant, de payer la totalité de la première année de ses droits d'inscription. Et ça, ça a eu un effet marquant sur le sérieux des demandes et sur le taux de conversion, avec des candidats qui sont sérieux, qui ont payé d'avance leur première année de scolarité. Et donc ça, c'est des mesures qui ont été testées à l'UQO et qui sont partagées entre les personnes qui accueillent et qui intègrent les étudiants internationaux à l'intérieur du réseau pour voir l'effet des mesures et pouvoir les mettre en place. On le disait tout à l'heure, pour les dépôts à l'admission, il y a aussi des universités qui ont mis des dépôts qui peuvent aller jusqu'à 5 000 $ au moment de faire la demande d'admission. Mais, attention, ce sont des dépôts qui sont quasiment en totalité remboursables si l'analyse de l'admission fait en sorte qu'on considère que c'est une candidature qui n'est pas admissible. Donc, il faut aussi avoir cette responsabilité sociale, je dirais, vis-à-vis des étudiants internationaux qu'on accueille à l'intérieur de nos murs.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup.

M. Roberge : Ma collègue...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Oui, je vais reconnaître la collègue d'Iberville. Il vous reste deux minutes quatre secondes.

Mme Bogemans : Merci. Moi, je voulais vous entendre sur quelles balises on pourrait mettre en place pour dire quels établissements seraient en mesure d'accueillir adéquatement les étudiants étrangers. Parce que vous venez de le nommer, 18 % de votre clientèle vient des étudiants étrangers. Vous avez déployé beaucoup d'efforts, vous semblez aussi avoir mis en place des bonnes mesures. Mais comment s'assurer? Parce que le projet de loi, c'est vraiment un signal clair qu'on va envoyer, parce que, par exemple, les institutions privées qui se spécialisent uniquement dans l'attraction d'étudiants étrangers dans des spécialités, ce n'est pas nécessairement ce qu'on veut, puis c'est le message qu'on veut envoyer. Ça fait que comment on pourrait bien le faire?

M. Deschênes (François) : Oui, si vous me permettez, je pense que, à cette question-là, l'ensemble des universités sont dignes de recevoir des étudiants internationaux. L'UQ, on a bien fait la démonstration qu'on a pris nos responsabilités. Puis, quand on pense, notamment, aux demandeurs d'asile, souvent, on regarde les exceptions, mais c'est plus de 93 %, au moment où on se parle, d'étudiants qui viennent, qui s'inscrivent et qui font bel et bien leur programme d'études. Donc, c'est une très grande majorité. Certes, on est peut-être capables de l'améliorer en travaillant ensemble, mais on a mis tout plein de mesures pour resserrer cela. Quand on pense aux exemples des logements, les anecdotes qui sont mentionnées, déjà on accompagnait nos étudiants, on leur envoyait des messages : Ne venez pas si vous n'avez pas trouvé de logement avant. À un moment donné, s'ils viennent quand même, il y a une limite à ce qu'on peut faire, donc... mais c'est très anecdotique et en très petit nombre.

Et là, si on regarde toutes les mesures, le logement, et tout ça, moi, ce que je vous dis, c'est que l'ensemble des universités... Les universités du réseau de l'UQ peuvent être des établissements désignés, amplement admissibles et adéquates pour recevoir des étudiants internationaux sans que l'on ait de souci.

Mme Bogemans : Donc, c'est la présence des mesures que vous mettez en place, particulièrement, qui sont distinctives.

M. Cloutier (Alexandre) : Essentiellement, s'il y en a qui mettrait en place des mesures pour contourner les règles dans l'objectif de faire venir de l'immigration ici, au Québec, bien, que le gouvernement s'y attarde spécifiquement.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fin à cette première période d'échange. On poursuit avec l'opposition officielle pour une période de 9 min 54 s. Le député de la l'Acadie, la parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Cloutier, Mme Poncelin de Raucourt, M. Deschênes, M. Rousson, merci d'être là avec nous. Merci pour votre mémoire. Je vais continuer avec la question que la collègue de la banquette gouvernementale vient de vous poser. On a l'impression que le ministre, avec son projet de loi, essaie de corriger quelque chose, mais ce n'est pas très clair, qu'est-ce qu'il veut corriger. Et j'ai aussi l'impression qu'il utilise une espèce de couverture, mégacouverture pour viser tout le monde, mais qu'il y a peut-être des problèmes qui sont plus ciblés. Puis peut-être que ça, le gouvernement devrait s'en occuper, plutôt que de pénaliser l'ensemble, ça, c'est mon interprétation à moi. Ce que j'entends de vous, c'est que vous avez mis en place une série de mesures pour vous assurer que les étudiants, étudiantes qui vont dans vos établissements y sont pour les bonnes raisons, c'est pour faire de la recherche. Alors, si on pouvait continuer sur cette lancée...

M. Morin : ...pouvez-vous nous donner d'autres exemples de mesures que vous avez mises en place, qui fait en sorte que vous êtes capable de gérer vos étudiants? Je trouve ça important parce que, dans une de vos demandes, vous voulez être exclus de certaines dispositions du projet de loi. Je peux comprendre que ça... ça, ça ne rassure pas le ministre, mais, pour le rassurer puis rassurer la population, est-ce que vous pouvez nous donner d'autres exemples de mesures que vous avez, qui fait en sorte qu'au fond votre demande, elle est tout à fait légitime?

M. Cloutier (Alexandre) : Je pense que mes deux collègues meurent d'envie de répondre. Je vais juste en donner une... un élément, puis je vais laisser la parole à mes collègues. Un des enjeux de l'Université du Québec, par rapport à d'autres universités, c'est que notre bassin... notre bassin de recrutement est beaucoup en Afrique francophone, évidemment, puisque nos étudiants sont francophones. Un des enjeux, c'est toute la qualité des diplômes, la reconnaissance des acquis, la reconnaissance de la formation. Puis là je vous laisse imaginer la complexité de l'analyse des dossiers de tous les pays qui arrivent d'Afrique, avec toutes les institutions différentes, des programmes d'enseignement différents. Donc, ça prend une analyse très, très fine de chacune des candidatures. En ce moment, l'UQ est en train de développer un guide. Mais là je vais arrêter de parler, parce que ma collègue est nettement plus compétente pour vous l'expliquer. Je laisse la parole à Céline.

Mme Poncelin de Raucourt (Céline) : C'est ce qu'on appelle, entre nous, le superguide. Effectivement, on a sélectionné les pays pour lesquels on a le nombre d'admissions... de demandes d'admission le plus... le plus important, pour lesquels on identifie aussi des cas de fraude les plus importants, et on montre des exemples de spécimens de vrais diplômes, des spécimens de vrais bulletins. Donc, on a pris toute notre base de données de toutes les demandes qu'on reçoit. On a regardé aussi les étudiants qu'on a inscrits et qui ont cheminé dans leur programme, et qui ont réussi. Et on a pris les documents associés à leur demande d'admission pour pouvoir sortir des exemples de bulletins ou de diplômes qui sont... qui sont sérieux et qui sont valables.

On va aussi télécharger directement auprès des pays, auprès du ministère de l'Enseignement, la liste de leurs diplômés, pour que nos registraires puissent vérifier qu'effectivement ce sont des vrais diplômés. Parce qu'il y a un phénomène très important, en ce moment, dans le monde, ce sont les agences, et on a un flot énorme de candidatures qui arrivent dans les bureaux des registraires qui sont envoyées en bloc à toutes sortes d'universités, et dans lesquelles il y a beaucoup de fraudes, parfois, au détriment... même, souvent, au détriment des étudiants eux-mêmes, qui n'ont pas conscience qu'ils sont envoyés en bloc, par des agences, dans nos établissements. Donc, ça, c'est tout un travail.

Et on met l'intelligence artificielle dans ce... dans ce superguide-là, parce que la quantité de documents à traiter est énorme, et donc on utilise l'intelligence artificielle pour les conversions et pour l'identification des fraudes. C'est un projet qu'on est en train de... de mener en ce moment.

M. Morin : Je vous remercie. Est-ce que quelqu'un d'autre...

M. Deschênes (François) : Peut-être, au-delà de... de la dimension des fraudes, on a rehaussé les exigences à l'admission, on a rehaussé les exigences en termes de maîtrise de la langue française. Également, plusieurs universités, maintenant, exigent un seul programme, un seul choix de programmes, ce qui fait en sorte que l'étudiant doit être réellement intéressé à venir chez nous. Le report d'admission n'est plus possible, il doit faire une nouvelle demande d'admission. Donc, c'est tout un ensemble de mesures qui nous permet de cibler ceux et celles qui désirent réellement venir étudier au Québec, et ça, bien, si on... il y en a tout plein d'autres... si on les met bout à bout, bien, on voit déjà les effets appliqués et concrets cette année.

M. Morin : Parfait, je vous remercie. Quand j'ai lu l'article 3 du projet de loi, ma première impression, puis j'aimerais vous entendre là-dessus, ça a été de me dire, woups, le gouvernement, dans son plan annuel, veut contrôler, en fait, ce qui peut se passer dans les universités ou dans les régions. Pour moi, la liberté universitaire, c'est fondamental. Vous y avez fait référence, mais n'y a-t-il pas là un enjeu, un danger à ce que le gouvernement veuille contrôler ce que vous voulez enseigner ou les programmes que vous voulez développer dans vos universités, étant entendu que l'université est là, avant tout, pour former des gens avec un esprit critique, pour débattre puis, évidemment, faire de la recherche.

• (11 h 20) •

M. Rousson (Vincent) : Si je peux me permettre. Bien oui, en partie, on l'a mentionné tout à l'heure, les métiers de demain ne sont pas nécessairement encore connus. On travaille à former les programmes pour bâtir la société de demain. Donc, de dire aujourd'hui que les programmes de formation que nous avons, c'est les métiers d'avenir, bien, je mettrais un petit bémol, parce qu'il y a des recherches en sciences humaines, en sciences sociales, en santé, en administration, en génie qu'on a besoin de développer dans un large spectre pour arriver finalement à ne pas avoir d'enjeux plus tard. Donc, de venir jouer dans... de venir limiter nos étudiants, nos programmes, de déterminer certains éléments, oui, ça peut...

M. Rousson (Vincent) : ...ça arrive... en fait, c'est qu'on va être pénalisé pour le plus tard. Ça... pour moi, ça c'est clair. Il y a un enjeu réel aujourd'hui et demain, comme société. Nos étudiants internationaux, en fait, puis je renchéris un peu sur ce que mon collègue mentionnait... toute la réflexion derrière nos programmes, nos demandes d'admission et l'intégration des étudiants internationaux, c'est un processus qui est réfléchi autant à l'interne qu'à l'externe, donc autant sur la capacité d'accueil de nos professeurs, sur la capacité de bourses que l'université est capable d'offrir, sur la capacité de logements que nous avons, sur la capacité de nos partenaires à accueillir nos étudiants stagiaires dans nos programmes avec stages. Bref, il y a un arrimage entre l'interne à l'université et nos partenaires externes, notamment en région, pour s'assurer que notre capacité d'accueil, bien, on la respecte. Donc, on n'ouvre pas les vannes à tout prix pour accueillir des étudiants internationaux. Donc, ça, il y a vraiment une analyse approfondie dans nos établissements.

Donc, de venir limiter, ça va venir contrecarrer, bien entendu, tout le travail en amont, et ça va venir affecter les années à venir.

M. Morin : Parfait. Je vais céder la parole à ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Mont-Royal—Outremont. La parole est à vous. Donc, il vous reste deux minutes 38 s. Allez-y.

Mme Setlakwe : Merci. J'ai de la difficulté à cerner une quelconque utilité pour vous, là, avec le projet de loi. Vous semblez être complètement en contrôle de la situation, vous bénéficiez d'une autonomie, vous devez bénéficier d'une autonomie, et vous semblez avoir mis en place et continuer de mettre en place les mesures pour éviter qu'il y ait des problématiques. Est-ce que je me trompe?

M. Cloutier (Alexandre) : C'est évident qu'il y a des mesures qui sont mises en place. Maintenant, c'est important aussi de dire qu'on le fait toujours en collaboration avec le gouvernement du Québec. Même les orientations qui ont été prises pour le développement des outils internationaux, on l'a fait avec la planification stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur. C'est celle qui a été adoptée au printemps, c'est encore les orientations qui avaient été données. On est en constant dialogue aussi avec le ministère des Relations internationales du gouvernement du Québec. On a participé à la commission parlementaire sur le PEQ, par exemple, au printemps dernier. Donc, il y a ce dialogue-là avec nous, il est permanent. S'il y a des enjeux à régler, on est ouverts au dialogue, on est ouverts à essayer de trouver des voies de passage. La raison pour laquelle on est inquiets avec le projet de loi, c'est parce que, dans le fond, je le répète, c'est... On nous donne une intention puis on se donne des outils pour mettre en œuvre cette intention, mais on sait tous que le diable est dans les détails. Et les enjeux vont être soulevés quand on va connaître réellement le fond des choses. Alors là, pour le moment, nous, on émet plusieurs réserves, là, sur plein de sujets différents parce qu'on n'a pas encore identifié exactement ce qu'il allait être mis en oeuvre.

Mme Setlakwe : Merci. J'aimerais qu'on parle de vitalité des régions. On a entendu vos collègues, là, M. Deschênes, M. Rousson, parler de la situation à Rimouski puis en Abitibi-Témiscamingue. Parlez-nous de l'importance des étudiants étrangers par rapport à la vitalité des régions, sachant aussi, puis ça a été dit, ça a été mentionné dans votre mémoire, que les inscriptions des étudiants québécois sont à la baisse et qu'on dépend donc des étudiants étrangers pour combler les programmes?

M. Deschênes (François) : Oui, bien, je vais me permettre de répondre à cette question. Écoutez, la présence des étudiants internationaux est essentielle. On a parlé de la réalité démographique de nos régions. Si on regarde pour l'UQAR, nous desservons cinq régions, Chaudière-Appalaches, Bas-Saint-Laurent, Gaspésie et Île-de-la-Madeleine, Côte-Nord. Ces cinq régions là, en termes de bilan migratoire, c'est négatif pour les 15 à 24 ans, ce qui veut dire que, si on se fiait uniquement sur ces populations-là, nous aurions moins de diplômés, moins de travailleurs par la suite, moins de gens pour offrir les services à la population. Donc, vous voyez que ce sont... ils sont essentiels pour cette vitalité-là et ils contribuent aussi à la vitalité sociale et économique. Donc, pour nous, c'est essentiel, pour la suite des choses, de pouvoir continuer à avoir une certaine croissance.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, cette période d'échange est terminée. Je me tourne maintenant du côté du député de Saint-Henri Sainte-Anne. Vous avez une période de 3 min 18 s.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous pour votre présentation. Je n'ai pas beaucoup de temps, je vais essayer d'y aller en rafale. Oui ou non, est-ce qu'il y a un risque d'atteinte à l'autonomie de gestion d'universités avec le p.l. 74?

M. Cloutier (Alexandre) : Il y en a assurément un, qui a été bien mentionné par nos collègues. Je vous rappelle que la Loi sur la liberté universitaire a été essentiellement vue sous l'angle de la liberté universitaire, mais il y a un pan quand même important qui a été moins discuté, c'est le volet de l'autonomie universitaire, qui est tout aussi inclus dans la loi et qui fait partie des conditions fondamentales de la vie universitaire, puis on ne peut pas dissocier un et l'autre. Et le principe de l'autonomie universitaire est un principe qui a des balises relativement claires, et, à nos yeux, les transgresser, bien, ça amène d'autres risques. Ça amène même des risques de nature constitutionnelle. On pourrait avoir un débat de juristes sur le caractère constitutionnel des principes de cette loi.

M. Cliche-Rivard : Très intéressant...

M. Cliche-Rivard : ...oui ou non, vous avez été consulté en amont du dépôt de ce projet de loi là?

M. Cloutier (Alexandre) : Oui, on a été consulté en ce sens, car on est constamment informés par le... des intentions du gouvernement. Mais vous aurez compris que c'est un projet de loi qui a peu de choses, alors on est consulté sur une orientation. Mais ce qu'on déplore en quelque sorte ou la raison pour laquelle on est inquiets, c'est parce que c'est le... c'est le fond de l'histoire qu'on veut connaître, mais c'est... Donc ce qu'on souhaite, c'est d'être partie prenante à cette conversation-là sur les mesures à mettre en place.

M. Cliche-Rivard : De la suite.

M. Cloutier (Alexandre) : Mais assurément que le dialogue constant avec le gouvernement sur les intentions.

M. Cliche-Rivard : Est-ce que, selon vous, à ce stade-ci, le projet de loi n° 74 est nécessaire?

M. Cloutier (Alexandre) : Bien, encore une fois, je pense que j'ai... ma réponse précédente répondait essentiellement à la question. Comme on ne connaît pas encore le détail à ce moment-ci, c'est plus l'inquiétude. Puis, comme je le disais tout à l'heure au ministre, ce qui nous inquiète, ce n'est pas juste le ministre actuel, mais tous les ministres qui vont se succéder et de quelle façon on va utiliser cette loi-là à des fins qui ne le seraient pas, à nos yeux à nous, dans l'intérêt du Québec.

M. Cliche-Rivard : Est-ce que vous inscrivez un nombre d'étudiants qui respectent vos capacités d'accueil respectives?

Une voix : Je ne sais pas si...

M. Cloutier (Alexandre) : Pardon?

M. Cliche-Rivard : Vos capacités d'accueil respectives, est-ce que vous en inscrivez la respecte?

M. Cloutier (Alexandre) : Je vais laisser mon collègue de Rimouski.

M. Deschênes (François) : Sans équivoque, oui. Je vais vous donner un exemple. En 2013, nous avions 7 319 étudiants. On est autour de 7 000 présentement. Donc, on a déjà démontré davantage.

M. Cliche-Rivard : Aviez-vous été consultés en amont de la dernière planification pluriannuelle des seuils permanents?

M. Cloutier (Alexandre) : Comme je l'ai dit, on parle, il n'y a pas une semaine qui pense qu'on ne soit pas en contact direct avec le gouvernement. Alors, ça serait... ça serait... ça ne serait pas... C'est, oui, on leur parle. Maintenant, on n'a jamais le fin détail. Comme vous le savez, vous avez des privilèges, comme parlementaires, de connaître le détail des projets de loi. Alors, dans une... on ne peut pas prétendre qu'on n'est pas consultés, non.

M. Cliche-Rivard : O.K. Et donc, là, ce que vous dites, c'est finalement l'application... en fait, ce qui est écrit là n'est pas tellement l'enjeu que comment il sera mis en oeuvre.

M. Cloutier (Alexandre) : Vous avez bien saisi.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on termine avec le député de Jean-Talon, encore une fois, 3 min 18 s. La parole est à vous.

M. Paradis : Alors, si je résume, puis vous me direz si je résume bien. Vous dites qu'actuellement, avec ce projet de loi, le ministre veut se donner des outils, mais on ne connaît pas ses intentions, on ne sait pas ce qu'il veut faire avec ces outils-là, que, si on suit ce qui est écrit dans le projet de loi n° 74, ça donnerait une discrétion au ministre qui donnerait un yoyo compte tenu des possibles changements de gouvernement et de vision sur ces questions-là. Vous avez répondu à ma collègue de Mont-Royal--Outremont, que le projet de loi n'était pas vraiment utile, et à mon collègue de Saint-Henri-Sainte-Anne, à l'instant, que ce n'était pas nécessaire. C'est bien ça que vous pensez du projet de loi n° 74? Est-ce que j'ai bien résumé?

M. Cloutier (Alexandre) : Bien, je préfère mes propres propos, mais vous en faites un résumé auquel j'inviterais les parlementaires au libellé exact de chacune des réponses que j'ai données. Mais je vais laisser l'appréciation de mes réponses à vos collègues.

M. Paradis : Bon, est-ce que sur ces questions, on a besoin du projet de loi n° 74 pour que le gouvernement s'assoie avec les institutions d'enseignement supérieur au Québec et fasse une planification avec des chiffres, puis un arrimage entre les besoins, puis les différentes considérations que vous avez mises sur la table.

M. Cloutier (Alexandre) : C'est une excellente question. J'ai saisi que la question a été posée aussi à notre prédécesseur. Je ne rentrerai pas dans le débat est-ce que c'est nécessaire ou pas, mais là où je suis profondément convaincu, par contre, c'est qu'on peut absolument faire... on ne peut pas mettre de mesures en place sans consultation préalable du monde universitaire, sinon ça va nécessairement donner des mauvais résultats.

M. Paradis : Est-ce que, dans le projet de loi n° 74, comme vous le voyez aujourd'hui, vous... vous décelez justement cette planification-là? Est-ce que vous la voyez, la planification de l'avenir pour les étudiants étrangers au Québec?

M. Cloutier (Alexandre) : Absolument pas. Je comprends que le ministre nous a indiqué tout à l'heure qu'il y aurait une consultation au printemps. Ça, par contre, ça m'a rassuré, je dois dire, c'est... Je comprends que c'est au printemps qu'on connaîtra mieux les intentions des... des temporaires, et ça inclut les étudiants internationaux. Alors, je comprends qu'entre les deux, avant de mettre en œuvre ces mesures-là, nous serons consultés. Mais en tout cas, c'est ce qu'on dit aujourd'hui, là, nous, on veut être consultés de sur toutes formes de mesures qui pourraient être mises en place, et l'absence de consultation serait une grave erreur. D'ailleurs, dans les amendements qui vous sont proposés, on propose de prévoir une période de consultation spécifique pour la mise en œuvre des éventuelles mesures.

M. Paradis : Nous, au Parti québécois, on a déposé, la semaine dernière, une planification. On a dit qu'elles étaient nos intentions, et on se rejoint sur quelque chose, puis vous avez commencé en parlant de la question du financement. Nous, on dit que la clé, la première chose à discuter avec les institutions d'enseignement supérieur, c'est la question du financement qui a induit peut-être un certain nombre de tendances à partir de 2018. Est-ce que vous êtes d'accord donc qu'une des clés de ce débat-là, c'est la question du financement.

• (11 h 30) • 

M. Cloutier (Alexandre) : Je ne commenterai pas l'ensemble du document que vous avez déposé. Je ne sais pas si vous le souhaitez. Je vais simplement...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Cloutier (Alexandre) : ...dire qu'on a des préoccupations quant à la présence des étudiants internationaux sur notre territoire. Et, pour nous, les étudiants internationaux au sein des universités jouent un rôle fondamental à plusieurs égards, tant en recherche, en création, d'implication sur le territoire québécois, etc.

Pour ce qui est de l'enjeu financier, effectivement, depuis 2018, ça a posé un réel enjeu. Et cet enjeu-là est toujours en suspend, est corrigé en partie, récemment, mais à mon avis, demeure un débat de société.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met un terme à cette audition. Merci beaucoup de vous être prêtés à l'exercice. C'était intéressant.

Alors, la commission va suspendre ses travaux quelques instants, le temps que le prochain groupe s'installe.

(Suspension de la séance à 11 h 31)

(Reprise à 11 h 36)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, nous recevons, comme représentants, maintenant, des universités de Montréal, McGill, Laval et Sherbrooke, donc, M. Daniel Jutras, recteur de l'Université de Montréal, M. Deep Saini, recteur et vice-chancelier de l'Université McGill, Mme Sophie D'Amours, rectrice de l'Université Laval, ainsi que M. Pierre Cossette, recteur de l'Université de Sherbrooke.

Alors, mesdames, messieurs, vous bénéficiez d'une période de 10 minutes pour votre présentation. Ensuite, on va procéder à la période de discussion avec les élus. La parole est à vous.

Mme D'Amours (Sophie) : Mme la Présidente, merci. Mmes, MM. les députés, M. le ministre, merci de nous recevoir. Alors, comme vous l'avez annoncé, mon nom est Sophie D'Amours, je suis rectrice de l'Université Laval et je suis accompagnée de mes collègues, que vous avez présentés.

Alors, d'entrée de jeu, je souhaite vous informer que nos quatre universités figurent parmi les 10 universités ayant la plus forte intensité de recherche au Canada. Nous accueillons la moitié de tous les étudiants universitaires du Québec et plus des deux tiers de tous les étudiants inscrits à la maîtrise et au doctorat.

Je prendrais les prochaines minutes pour partager avec vous notre perspective sur l'importance de la contribution des étudiants internationaux pour nos établissements, mais aussi pour le Québec. D'abord, j'aimerais souligner qu'en 2023, la proportion de permis d'études attribués à des étudiants du Québec de niveau collégial et universitaire représentait 11,4 % du total pour tout le Canada. Cette proportion est bien en deçà du poids démographique du Québec, qui se situait à environ 22 %. Au Québec, les étudiants internationaux représentent de plus un faible pourcentage de l'immigration temporaire, soit 12 % pour les titulaires d'un permis d'études uniquement et 21 % en incluant les titulaires de permis d'études et de travail. Toutefois, leur contribution est essentielle au Québec, et ce, à plusieurs chapitres. Notamment, ils contribuent activement à la réalisation de notre mission de recherche et d'enseignement. Dans nos établissements, les étudiants internationaux contribuent aussi à ouvrir les horizons des étudiants québécois, partagent leur savoir, leur culture et de nouvelles façons de voir le monde.

Pour que nos universités continuent d'être innovantes, pour qu'elles soient connectées avec le réseau international, il nous faut continuer de développer ce pouvoir d'attraction. Les universités québécoises sont engagées dans un réseau de connaissances où l'échange de talents et d'idées transcende les frontières. Les étudiants internationaux que recrutent les universités québécoises constituent aussi une source importante de main-d'œuvre hautement qualifiée dont le Québec a besoin pour relever les défis auxquels il est confronté. Leur apport est indispensable à l'innovation et au développement des connaissances. Ils permettent au Québec de renforcer sa position dans l'économie internationale du savoir et de tirer profit des avancées de la recherche.

• (11 h 40) •

À l'heure actuelle, ils représentent près de la moitié du nombre total d'étudiants inscrits au troisième cycle dans les universités du Québec. Les étudiants internationaux jouent un rôle crucial dans le soutien des activités de recherche de pointe dans nos universités, souvent à titre d'assistants de recherche ou de doctorants, contribuant ainsi directement à la production de connaissances et à l'avancement scientifique. Cette qualité de la recherche et cette attractivité mènent à leur tour au développement de projets novateurs, appuyés financièrement par les décideurs publics via les organismes de...

Mme D'Amours (Sophie) : ...financement de la recherche. Depuis 2014, le montant destiné à la recherche dans les universités québécoises est passé d'un total de 1,4 milliard de dollars à plus de 2 milliards de dollars. L'apport des étudiants internationaux à la recherche universitaire a aussi un impact important sur la qualité de vie et la prospérité du Québec. Selon Statistique Canada, leur impact économique se chiffre à plus de 3,8 milliards de dollars au PIB du Québec. Qui plus est, les candidats que nous attirons permettent la réalisation de découvertes, d'innovations et de démarrages d'entreprise. Les étudiants de l'international apportent donc sans contredit une contribution essentielle à la vie universitaire.

La croissance du nombre d'étudiants internationaux découle d'ailleurs des orientations du ministère de l'Enseignement supérieur, qui reconnaît depuis longtemps le rôle des étudiants dans le développement du Québec. Les règles du ministère régissent le financement public des universités, prévoient même des octrois afin de recruter davantage d'étudiants internationaux, et ce, depuis plusieurs années. Le ministère, dans sa planification stratégique 2023-2027, énonce clairement sa volonté d'attirer davantage d'étudiants internationaux dans les collèges et universités francophones et ajoute que c'est une priorité gouvernementale, tout comme la rétention de ceux-ci une fois diplômés. Notre positionnement s'inscrit donc dans cette logique, et nous encourageons le gouvernement à poursuivre dans cette voie.

Je cède maintenant la parole à mon collègue Pierre Cossette.

M. Cossette (Pierre) : Mesdames, Messieurs, merci de nous accueillir ici. Comme l'a dit ma collègue Sophie, l'Université de Sherbrooke, comme l'ensemble des universités représentées ici, croit fortement que les étudiants internationaux sont une richesse pour notre société et que le gouvernement québécois fait fausse route en les associant souvent à un problème. Nos universités mènent une approche... prennent une approche responsable et équilibrée au recrutement des étudiants internationaux, et nous nous inquiétons que le projet de loi n° 74 empiète sur l'autonomie de gouvernance académique des universités, qui a fait ses preuves, incluant dans le recrutement d'étudiants internationaux. Nous nous inquiétons aussi qu'il ne tient pas compte du fait que le processus de recrutement est complexe, pluriannuel et ancré dans des orientations stratégiques au long cours des universités.

Vous savez, le recrutement international se base sur des liens de confiance avec des régions, des institutions ciblées partout sur la terre, et ces relations-là se font dans un contexte extrêmement compétitif. Et, pour un étudiant ou une étudiante international, il doit... d'abord on doit l'attirer, attirer son attention, il doit faire une demande d'admission qui doit être... nous, on évalue si la demande d'admission est pertinente, il doit obtenir un certificat d'acceptation du Québec puis un permis d'études fédéral afin d'être inscrit. C'est un processus qui est très long, qui prend plusieurs mois, souvent des années, notamment dans les programmes de recherche. Et, jusqu'à présent, ça fonctionne.

D'ailleurs, grâce à l'autonomie et l'approche stratégique de nos institutions, elles sont devenues des lieux de formation et de découverte avec des retombées mesurables pour le Québec et attirent les meilleurs talents de partout dans le monde. Mais le projet de loi n° 74 propose des règlements qui pourraient contraindre l'autonomie de nos institutions, qui s'est avérée très bénéfique, on le pense, pour le Québec. Et, en souhaitant se doter d'un pouvoir d'interdire la venue d'étudiants internationaux ou de cibler sur la base d'un choix de programmes d'études, le projet de loi n° 74 agit là où les universités ont la compétence pour sélectionner les étudiants. Chercher à régir où étudieront les étudiants internationaux afin de répondre à des priorités gouvernementales qui peuvent changer affectera négativement la capacité de développement stratégique de nos institutions, et ces changements vont empiéter sur la capacité de répondre de façon... en même temps au long cours, mais en même temps de façon agile à ce que nos institutions savent faire en lien avec leurs collègues et leurs partenaires de la société québécoise.

Juste pour revenir sur certains points et des questions qui ont été posées sur notre capacité d'accueil... Malgré le fait que c'est complexe, l'admission, je veux vous rassurer sur une chose : nos institutions mettent tout en place pour assurer l'intégration des personnes étudiantes : des services d'accès au logement, des services d'accompagnement et un accès aux cliniques de santé. Nous le faisons déjà et on va continuer à le faire. Il faut également noter que, pour la plupart, les étudiants internationaux arrivent au Québec seuls et en bonne santé. 80 % ont moins de 30 ans. Ils ne sont pas un fardeau pour nos systèmes de santé et d'éducation. On pourrait même argumenter qu'ils sont plutôt une source de main-d'oeuvre pour répondre aux pressions identifiées.

L'autre élément très important, c'est de mettre en contexte le volume d'étudiants internationaux. Dans nos universités québécoises, ils ont passé de 3 600... 36 900 à 57 400. Donc, c'est une hausse de 59 % sur 10 ans. On est très loin des 140 % dont on évoque dans plusieurs documents. Donc, c'est une... Et c'est une croissance qui est raisonnable, qui a été fortement encouragée par le gouvernement québécois jusqu'à récemment et...

M. Cossette (Pierre) : ...et elle est cohérente avec les orientations stratégiques de nos établissements et du gouvernement, parce qu'entre autres les soutiens internationaux jouent un rôle important dans la réalisation des objectifs de la stratégie québécoise de recherche et d'innovation notamment. Donc, la croissance des étudiants internationaux au Québec était prévue et encouragée, et ce, pour plusieurs très bonnes raisons.

En conclusion, le ministre dit vouloir s'attaquer de façon ciblée à des problèmes d'abus. On est d'accord avec cette idée d'attaquer les abus. Or, le gouvernement prend maintenant une direction différente avec la... une présentation d'un projet de loi dans les règlements pour éliminer ou contraindre l'ensemble des universités, qui ne sont pas la source des enjeux soulevés, qui ont simplement répondu à l'appel gouvernemental d'augmenter leur recrutement international, qu'ils l'ont fait au bénéfice du développement, de la recherche, de l'innovation québécoise et de l'ensemble de notre société. Bref, nous pensons, nous recommandons que les établissements visés à l'article 1 de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire ne soient pas assujettis au projet de loi. Nous sommes d'accord que s'il y a des mauvais conducteurs sur la route ou s'il y a un problème à régler, je vais prendre une analogie médicale, je suis médecin, mais il faut trouver la bonne maladie puis éviter les médicaments qui ont plein d'effets secondaires. Donc, pour nous, le projet de loi n° 74 ne cible pas la bonne maladie et est rempli d'effets secondaires. Et surtout, surtout, on est très affecté, on vous demande de cesser d'associer les étudiants internationaux des établissements universitaires à un problème. Ils sont une source de richesse. Ils font partie de la solution pour le rayonnement, le développement mais aussi pour le développement de la recherche, l'innovation et de la prospérité du Québec. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Voilà. Merci beaucoup pour votre présentation. Alors, je me tourne du côté de la banquette ministérielle, vous avez une période 16 min 34 s. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Je rassure les gens qui nous écoutent, mon gouvernement et moi-même, on ne considère pas que les étudiants internationaux ou les étudiants étrangers sont des problèmes à régler d'aucune manière. Je pense qu'il faut cependant se donner la liberté de réfléchir lorsqu'on voit des problématiques qui surviennent. On a des problématiques, notamment de logement. Et lorsqu'on voit des chiffres très élevés. Il y a une dizaine d'années environ, il y avait environ 50 000 étudiants étrangers. En ce moment, on est à 122 000. Est-ce que ça veut dire, comme le Parti québécois, qu'il faut retourner à 50 000, qu'il faut réduire de 70 000, 72 000 le nombre d'étudiants étrangers? Non. Ce n'est pas ce qu'on a dit. Je pense que ça ferait mal à plusieurs établissements, plusieurs programmes, puis que ça mettrait à mal les régions. Par contre, on peut nommer les choses, voir cette progression-là, puis se questionner sur quelle manière, dire qu'il y a peut-être des abus, puis se donner les outils pour être chirurgical, pour reprendre des termes médicaux, parce qu'en ce moment... des termes médicaux, pardon, parce qu'en ce moment le gouvernement, s'il veut agir, mais il ne peut pas agir de manière précise. On ne contrôle que le seuil. C'est comme si on gérait une écluse, on pouvait faire monter tous les bateaux ou baisser tous les bateaux d'un coup. On ne peut pas décider qui passe à travers les écluses d'aucunes, aucune manière. C'est comme si le gouvernement, en ce moment, abdiquait un peu de son champ de compétence en immigration, alors que ça fait partie des champs que l'on possède.

J'ai des questions assez précises. Puis je suis content d'avoir les dirigeants de quatre parmi les grandes institutions qu'on a ici au Québec. J'aimerais avoir quelques données qu'on pourrait partager puis qui pourraient être intéressantes pour les Québécois. Dans vos quatre institutions, quel est le pourcentage d'étudiants... il y a... en comptant autant les... premier cycle, deuxième cycle, etc., il y a les étudiants québécois, il y a les, ce qu'on appelle les CNRQ, là, les Canadiens non résidents du Québec et les étudiants étrangers. Est-ce que vous êtes capable de nous fournir, par établissement, quel est votre pourcentage dans chacun de vos établissements, Québécois, CNRQ, et étudiants étrangers?

• (11 h 50) •

M. Saini (Deep) : Merci beaucoup, M.. Très bonne question et question autour de laquelle il y a beaucoup de mal compréhension en ce qui concerne McGill. Nous avons actuellement environ 54 % de nos étudiants qui sont Québécois ou Québécoises. Alors, seulement 46 % de nos étudiants viennent de l'extérieur de Québec, dont environ 30 % international, et environ juste en dessous de 3 % et le reste, c'est les étudiants CNRQ. Ce qu'il est important de comprendre qu'à McGill...

M. Saini (Deep) : ...le pourcentage des étudiants et le nombre réel des étudiants étrangers a resté constant, plus ou moins, depuis le dernier décembre. Il y a une baisse légère du nombre des étudiants étrangers, on n'est pas responsable pour l'augmentation énorme des étudiants internationaux dont on parle ici, au Québec.

M. Cossette (Pierre) : À l'Université de Sherbrooke, c'est 11.1 % d'étudiants internationaux. On a eu une croissance dans les dernières années, mais on a eu une baisse déjà de 15 % des admissions internationales cette année. Vous savez, il y a eu une douzaine d'annonces de différents paliers de gouvernement dans les derniers temps. Ça heurte déjà beaucoup, O.K., mais on a déjà une diminution des nouvelles admissions. Mais notre proportion d'étudiants internationaux, c'est 11 %. Pour les étudiants... Pour répondre précisément à votre question, Canadiens hors Québec, c'est un tout petit pourcentage, là, donc, qui est négligeable pour l'Université de Sherbrooke.

Mme D'Amours (Sophie) : Pour l'Université Laval, c'est 11 % aussi, puis la même réalité pour les étudiants canadiens, c'est un tout petit nombre. Et le reste, ce sont des étudiants québécois. Je... C'est ça.

M. Jutras (Daniel) : Merci, M. Roberge. Chez nous, c'est 16 % d'étudiants internationaux. Les CNRQ représentent, à mon souvenir, moins de 250 étudiants à l'Université de Montréal sur quelques dizaines de milliers d'étudiants. Je note au passage que la très grande majorité de ces étudiants-là internationaux sont francophones. L'anglais, comme langue d'usage, par exemple, ce n'est pas la deuxième langue d'usage, c'est la sixième langue d'usage. Donc, les locuteurs en anglais, ceux qui décrivent leur langue d'usage comme l'anglais, représentent à peu près 200 personnes depuis les 10 dernières années à l'Université de Montréal.

M. Roberge : Merci. Allez-y.

Mme D'Amours (Sophie) : Oui. J'ajouterais un commentaire, parce que je pense que c'est important de contextualiser dans un contexte international de la recherche. Les grandes universités de recherche, en général, vont avoir un pourcentage d'étudiants internationaux qui va tourner autour de 25 % à 30 % de leur bassin étudiant, une proportion importante aux cycles supérieurs, comme c'est le cas dans nos universités. Par exemple, dans des secteurs comme la recherche médicale ou la recherche dans des domaines technologiques, l'agriculture, par exemple, on va retrouver jusqu'à 60 % et 70 % d'étudiants internationaux dans les laboratoires de recherche.

M. Roberge : Merci beaucoup pour vos réponses très, très précises. Je comprends que vous semblez en désaccord avec l'idée de réduire les étudiants, puis vous me corrigerez si ce n'est pas le cas, je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche. Mais est-ce à dire que vous souhaiteriez qu'il y ait davantage d'étudiants étrangers sur le territoire? Dans le fond, est-ce que vous voulez un statu quo? Là, je ne vous parle même pas du projet de loi, c'est-à-dire d'une agilité pour choisir plus ou mieux, plus ou moins. Est-ce que vous pensez qu'en ce moment on est au bon endroit? Il y a peut-être un petit ménage à faire, il faudrait réduire ou, d'après vous, on est à 122 100, ça en prendrait 125, 130, 140?

M. Cossette (Pierre) : J'aimerais rappeler que, dans les universités, c'est 57 000, hein? Donc... Et cette croissance-là a été vraiment modeste dans les 10 dernières années, beaucoup moins qu'ailleurs au Canada d'ailleurs. Comme l'évoquait Sophie, pour répondre à cette question-là, il faudrait regarder c'est quoi notre progression en recherche dans les universités québécoises? Parce que, malheureusement, les étudiants, les étudiantes québécoises et québécois vont peu à la maîtrise et au doctorat de recherche maintenant, ce qui fait que, dans les laboratoires de pointe, physique quantique, en microélectronique, en ARN, en recherche de la santé, c'est environ 50 %, un peu plus, des étudiants de maîtrise, de doctorat de recherche, qui viennent de l'international. En fait, sans eux et elles, on ne pourrait pas faire les projets de recherche pour lesquels on reçoit des subventions.

Bon, je vais vous donner un autre chiffre. On a 22 % de nos professeurs à l'université Sherbrooke qui viennent de l'international, on accueille des gens, des grandes sommités. Donc, je vais vous donner un exemple. On a eu deux chaires de recherche d'Excellence Canada. L'une d'elle est une professeure espagnole qui travaillait à l'Université de Berlin, qui vient travailler maintenant en physique quantique à une l'Université de Sherbrooke. Si je lui pose la question à elle : Est-ce qu'il y a assez d'étudiants internationaux? C'est plutôt l'inverse, elle va me dire : Est-ce que je vais avoir le droit de recruter des meilleurs étudiants de partout dans le monde pour venir travailler dans mon laboratoire à l'Université de Sherbrooke? Parce que si elle n'a pas le droit, elle ne serait pas venue travailler à l'Université Sherbrooke, donc, parce que c'est comme ça, la recherche de pointe dans le monde.

Donc, le nombre total d'étudiants, c'est une chose. Nous, on pense qu'on fait un excellent boulot pour les accueillir puis s'en occuper. On ne les laisse pas tomber, on s'occupe vraiment de nos étudiants, on fait un accueil de qualité. La progression, elle a été modeste dans les dernières années. Donc, à ce stade-ci, on veut participer évidemment à l'effort québécois, on pense que...

M. Cossette (Pierre) : ...nos universités font un excellent boulot au bénéfice du Québec.

M. Saini (Deep) : Je peux ajouter une chose, que, pour les grandes universités de recherche, la compétition pour le talent, y inclus les étudiants, c'est international. Chez nous, les étudiants souvent arrivent avec deux, trois offres par des autres universités au monde, aux États-Unis, en Australie ou Angleterre, etc., alors on compétitionne «on a»... sur échelle mondiale pour le talent de nos étudiants. Et, pour faire de la recherche, dont on a environ 2 milliards de dollars par année entre nos quatre universités, alors on a une responsabilité de fournir les résultats qui sont attendus par les organismes subventionnaires.

Mme D'Amours (Sophie) : Si j'ajoutais...

M. Jutras (Daniel) : Excusez. Je pense que vous posez une bonne question, M. le ministre. Est-ce qu'il y a trop d'étudiants internationaux au Québec? Puis moi, je dirais qu'une bonne partie de la réponse, c'est de savoir si on a trop d'étudiants, qui sont parmi les meilleurs au monde, qui choisissent de venir au Québec. Puis, la réponse à ça, il faut que ce soit non. On veut que ces gens-là, qui sont des personnes exceptionnelles, qui viennent contribuer à nos activités de recherche, contribuent à la richesse de nos programmes viennent au Québec.

Alors, l'autre réponse à la question, c'est : Est-ce qu'il y a des étudiants internationaux ici, en dehors de nos universités... puis je parle de l'ensemble du réseau des universités qui sont visées par l'article un, est-ce que les étudiants internationaux... puis j'exclus les cégeps aussi, là, qui, je pense, font aussi un excellent boulot dans la sélection, est-ce qu'il y en a, des étudiants internationaux, qui ne devraient pas être ici parce qu'ils abusent d'un système? Puis vous avez évoqué vous-même, dans la conférence de presse, des abus... nous, on n'a pas, en fait, d'indications de ce à quoi vous référez, mais je vous crois sur parole, qu'il y a des abus. C'est ces gens-là, je pense, qu'il faut contrôler.

Et ça, ça nous amène, nous, à réfléchir aux moyens par lesquels on peut contrôler ces entrées-là. Puis, à notre avis, le moyen, ce n'est pas d'imposer des plafonds à nos universités en fonction de la région, du niveau d'étude, du cycle d'études, de la catégorie d'établissement d'enseignement, du programme d'études. Ça, ça permettrait, par exemple, de fixer un nombre maximal pour l'université dans le bas du fleuve par opposition à une université à Montréal, fixer un nombre maximal pour les étudiants au doctorat par opposition aux étudiants au premier cycle, et ainsi de suite, là. Il y a une modulation, en d'autres termes, qui vient de l'article 52.1 et la modification à l'article 52.1 qui me semble être éloignée de l'objectif fondamental qui est de traiter le problème des admissions irresponsables des étudiants internationaux.

Alors, nous, on pense que la solution pour vous, c'est de viser les abus. Ce n'est pas de viser de manière globale avec des mesures très, très granulaires, comme celles que je viens d'évoquer, l'accueil d'étudiants internationaux exceptionnels qui contribuent à l'essor du Québec.

Mme D'Amours (Sophie) : Et j'ajouterais que les universités mettent en place des processus très rigoureux, hein, pour faire la sélection de ces étudiants. On parle de dizaines de milliers de demandes d'étudiants internationaux qui veulent venir étudier au Québec. Et, à l'Université Laval, cette année, on accueillera 1 700 étudiants. Donc, il y a une sélection qui se fait, qui est très importante.

Et, par ailleurs, dans le contexte actuel, pour nous, la perte d'étudiants au niveau des nouvelles inscriptions cette année, elle s'élève à 22 %. C'est un... C'est une grosse, grosse chute.

M. Roberge : Vous parlez des inscriptions, des...

Mme D'Amours (Sophie) : Les nouvelles inscriptions d'étudiants internationaux, alors ceux qui sont maintenant à l'université, cet automne, par rapport à l'an dernier, on a une perte d'étudiants de 22 %.

M. Roberge : O.K. Je laisserais ma collègue de Vimont poursuivre, si vous voulez bien.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Alors, Mme la députée, il reste encore quatre minutes 14 secondes.

Mme Schmaltz : Parfait, merci, Mme la Présidente. Justement, je veux vous relancer là-dessus, sur le rôle des agents de recrutement au sein des bureaux de registraire dans les universités. De quelle façon... Est ce qu'ils suivent, de un, des formations continues pour s'assurer justement de sélectionner les bonnes candidatures et éviter cet aspect malheureux, frauduleux, là, qu'on va... qu'on va rencontrer?

Et puis tantôt vous disiez, bon, on a chuté de 22 %, les inscriptions, etc. Est-ce que c'est lié peut-être à un resserrement? C'est... C'est... Est-ce qu'on peut en tenir compte aussi?

• (12 heures) •

Mme D'Amours (Sophie) : Ce que... Ce que l'on entend, c'est l'effet de 12 mesures, 12 annonces différentes en lien avec la réalité des étudiants internationaux dans la dernière année. Donc, il y a beaucoup d'incertitude par rapport à l'arrivée au Québec...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme D'Amours (Sophie) : ...l'arrivée à l'université, et des processus. Donc, il y a une partie qui est associée à ça. Il y a une partie qui peut être associée au contexte économique. Le contexte économique est tel qu'un peu partout dans le monde il y a eu un effet d'inflation, il y a eu des conditions qui, peut-être, semblaient être favorables au départ, il ne s'est pas présenté, l'étudiant n'est pas venu au moment où il devait venir. Donc, il y a plein de conditions qui sont difficiles à préciser, mais l'effet est bien réel. Et il y a eu aussi des... des mesures administratives qui ont été prises par les ministères de l'immigration, où il y a eu une période de ralentissement dans l'émission de visas étudiants, puis il y a eu une période où il ne s'est pas émis de visas étudiants. Donc, ça aussi a eu un effet sur les inscriptions.

M. Cossette (Pierre) : Je veux juste revenir sur un point. Je vais parler pour l'Université de Sherbrooke. On n'utilise pas d'agence de recrutement international, premièrement, donc. Et, deuxièmement, toutes les offres d'admission qui sont faites sont faites sur la foi de la qualité du dossier, qu'on évalue. On n'a aucun intérêt à admettre un étudiant qui va... puis... ou une étudiante puis la mettre en situation d'échec, puis faire dérailler une classe, ou un groupe, ou... Donc, on est très rigoureux, nous. Les étudiants, étudiantes qui viennent à l'Université de Sherbrooke, c'est parce qu'ils viennent étudier, c'est parce qu'ils viennent faire une session une année, un bac, une maîtrise, un doctorat. Et c'est pour ça... on a peut-être juste 11 %, malgré qu'on est une université qu'il y a eu des grands progrès en recherche. On a eu des progrès intéressants au niveau des étudiants internationaux, mais 95 %, en passant, viennent de la... 90 % à 95 % viennent de pays de la francophonie. Donc, ça, c'est intéressant.

Mme Schmaltz : ...elle est plus précise, c'est les critères de sélection. Est-ce que c'est juste les notes académiques? C'est quoi exactement?

M. Cossette (Pierre) : C'est les mêmes critères pour tous... pour tous les étudiants, qu'ils soient internationaux ou non. Donc, si un programme donné utilise les notes, un portfolio, ça va être la même chose pour les internationaux. Si un autre programme, c'est que les notes, ça va être les notes. C'est sûr que, quand on arrive dans les programmes de maîtrise et de doctorat de recherche, c'est un processus très complexe, parce qu'il faut voir les lettres de référence, dans quels laboratoires qu'ils ont travaillé. Est-ce que leur maîtrise équivaut vraiment à une maîtrise? Est-ce qu'on veut les passer direct au doctorat? Donc, ça, c'est... dans chaque discipline. C'est pour ça que c'est un processus complexe et long, là. Il faut savoir si, dans tel pays X ou Y, puis telle université, là, le diplôme, est-ce que... qu'est-ce que ça donne quand ces étudiants-là arrivent dans un laboratoire, parce qu'il faut que ce soit sécuritaire et bien fait.

Mme Schmaltz : Mais c'est long? J'imagine que ça doit être très long, avoir le...

M. Cossette (Pierre) : C'est très long, c'est très long.

Mme D'Amours (Sophie) : ...très long, et ça se... ça s'opère tout au long de l'année. C'est-à-dire que, pour les étudiants de maîtrise et de doctorat en recherche, l'offre ne se fait pas en bloc, on ne fait pas une gestion en... je dirais, en lots de l'offre d'admission. C'est un processus...

Mme Schmaltz : O.K. Donc, comme vous dites, c'est cas par cas.

Mme D'Amours (Sophie) : Oui, parce que ça prend des professeurs qui acceptent de superviser les travaux de recherche, et ce sont eux qui font l'évaluation de la capacité de recherche. Donc, il y a la... il y a la partie académique, qui est faite préalablement, mais les professeurs vont décider ou non de superviser l'étudiant pour ses travaux de recherche, et ça, c'est un processus qui est un peu plus long. Il y a des entrevues, souvent, il y a des échanges avec la personne, etc. Et quand tout est, finalement, positif, bien, la personne va recevoir une offre.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, merci beaucoup. Alors, c'est ce qui met fin à cette première portion d'échange. Je me tourne du côté de l'opposition, avec le député de l'Acadie, 9 min 54 s. La parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Jutras, M. Saini, Mme D'Amours, M. Cossette, merci d'être là, merci pour vos explications, votre mémoire. J'aurai quelques questions pour vous. Et, corrigez-moi si je fais erreur, mais les chiffres que j'ai obtenus du Bureau de coopération interuniversitaire pour le nombre d'étudiants internationaux, le total, ce serait 57 450 au Québec. Le gouvernement nous parle d'abus, d'abus et d'abus. On parle de 57 450 étudiants. Un peu plus tôt, les gens de l'Université du Québec et du réseau nous ont parlé qu'ils avaient des mesures en place. En avez-vous, des mesures en place? Est-ce que vous effectuez un contrôle, et, si tel est le cas, est-ce que ce projet de loi est inutile?

M. Cossette (Pierre) : Bien, en fait, on a plein de mesures en place. Nous, l'année dernière, c'est 15 000 demandes d'admission internationales qu'on a eues, là puis on en a admis un peu plus de 1 000, là, donc. Et, effectivement, nos chiffres d'admission, avec toutes les turbulences qui ont eu lieu, sont en baisse, et on est très préoccupés de ça. Comme le rappelait mon collègue de... le recteur Deep Saini, de McGill, on est en compétition avec le reste du monde, là. Donc, nous, on... l'idée d'avoir une agilité interne à nos institutions, puis une capacité d'aligner les recrutements avec notre capacité de laboratoire, nos...

M. Cossette (Pierre) : ...nos capacités, nos... stratégiques sont très importantes. Donc, c'est ça. Vous pourrez déduire que, pour nous, on demande d'être exclu de l'application du projet de loi, c'est parce qu'on pense pas que pour les universités... on ne pense pas qu'on fait partie du problème, point, on pense qu'on est plutôt des bons acteurs socioéconomiques et de développement du Québec. Et deux, on pense qu'on est très responsable dans nos démarches d'admission. Donc, on ne comprend pas pourquoi il y aurait des pouvoirs législatifs potentiels, hein, potentiels. Parce que, là, on est... le diable est dans les détails, puis comment tout ça va s'appliquer. Mais les pouvoirs potentiels sont vraiment énormes puis ils viennent interférer directement avec la liberté universitaire au sens de notre capacité à développer au long cours des orientations stratégiques.

Vous savez, il y a peu de gens, là, qui auraient priorisé l'intelligence artificielle à Montréal, il y a 40 ans, ou l'optique photonique à Laval, il y a 40 ans, ou la physique quantique à Sherbrooke, puis, je vais dire, la recherche en ARN à McGill, il y a 40 ans, là, ce n'était pas dans les priorités, là, parce qu'on ne savait pas encore les applications. Mais aujourd'hui, s'il n'y avait pas au Québec 50 % de la recherche en ARN de tout le Canada, puis il n'y avait pas McGill comme fer de lance puis nous qui collaborons avec eux, il n'y aurait pas Moderna à Laval, là, O.K.? Donc, ça, c'est concret, là, c'est comme ça. Notre capacité de recherche dépend de notre capacité d'attirer les meilleurs talents au monde dans des projets puis dans des visions au long cours. Donc, nous, on pense que l'état actuel des choses a bien rendu service au Québec.

M. Morin : Merci. J'ai une autre question pour vous. Vous y avez répondu, vous y avez touché un peu, mais j'aimerais vous entendre davantage. Est-ce que vous croyez que l'article trois du projet de loi, alors que le gouvernement veut éventuellement prendre des décisions qui pourraient avoir un impact dans les programmes... est-ce que ça pourrait avoir un impact sur la liberté universitaire et sur l'autonomie universitaire? Et, si c'est le cas, est-ce qu'on ne s'engage pas là dans des débats juridiques éventuellement? Parce que, moi, comme parlementaire, c'est ce que je veux éviter. Alors, j'aimerais savoir... Puis l'indépendance, la liberté, l'autonomie universitaire, c'est fondamental. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

M. Jutras (Daniel) : Bien, peut-être que... Je peux revenir, en fait, à la réponse que je faisais tout à l'heure au ministre Roberge. À notre avis, il faut essayer de choisir les mesures... vous parlez de mesures de contrôle, là, nous, on n'en a pas, de mesure pour restreindre le nombre d'étudiants internationaux, comme l'évoquait M. Cossette. On a des mesures pour choisir les meilleurs et ceux qui sont susceptibles de réussir chez nous. Il y a des mesures pour les accompagner dans leur processus et dans leur cadre de vie aussi, logement et autres aspects de leur vie.

Et donc, si on s'intéresse... moi, je suis juriste, là, puis si on s'intéresse en anglais, on dit : au «mischief», c'est-à-dire à l'objet que l'on veut trancher dans la loi, par cette loi, à l'objet législatif, l'objet législatif, ça devrait être de trancher les abus, de s'intéresser aux abus puis de contrôler les abus. Et personnellement, et je pense que c'est une opinion qui est partagée par nos collègues, on l'évoque dans notre mémoire conjoint, l'amendement qui est proposé à l'article 52.1, donc, à l'article trois de la... du projet de loi, en fait, n'est pas bien adapté à cet objectif-là, parce qu'il permettrait éventuellement au ministre de faire des distinctions dans la fixation des différents quotas, du nombre maximal, en fonction de distinctions, en fait, qui sont des distinctions académiques, de cycle d'études, le programme, la région, effectivement. Et ça, à notre avis, c'est vraiment une... quelque chose qui est sans précédent dans la détermination de ce qui est opportun dans la configuration des universités.

Vous savez, il y a eu des mesures, ces dernières années, pour favoriser, par exemple, l'accroissement des effectifs étudiants dans certaines disciplines. C'est l'opération main-d'œuvre, que vous connaissez, c'étaient des incitatifs, hein, c'étaient des incitatifs financiers pour les étudiants et pour les universités d'accroître les effectifs dans ces disciplines importantes pour le Québec où il y a des besoins en main-d'oeuvre. Là, on ne parle pas d'incitatifs, là, on parle d'interdiction, en fait, de moyen qui permettra au ministre de déterminer que tel programme, on n'a pas besoin d'autant d'étudiants. On va fixer un maximal, un chiffre maximal très, très bas. Alors, oui, je pense que, là, il y a un risque d'atteinte ou en tout cas de complication de l'exercice de la gouvernance académique pour nos universités.

M. Morin : Merci. Je vais céder la parole à ma collègue de Mont-Royal-Outremont.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...il vous reste quatre minutes, quatre secondes. Allez-y.

• (12 h 10) •

Mme Setlakwe : Merci. J'aimerais revenir sur deux éléments, mais la recherche de pointe, je pense qu'on ne peut pas en parler... on ne peut pas trop en parler. Est-ce qu'on doit comprendre qu'ensemble vous constituez un écosystème, un îlot d'excellence qu'il ne faudrait pas fragiliser? J'aimerais que vous en... que vous élaboriez davantage. Vous avez mentionné, là, des exemples de collaboration et d'impacts positifs sur l'économie. Et le deuxième thème sur lequel j'aimerais revenir, à vous entendre parler, on constate que vous êtes des vecteurs d'intégration. On a reçu plus tôt le Commissaire à la langue française. Donc, j'aimerais vous entendre sur les... étant... ayant en tête l'autonomie des établissements...

Mme Setlakwe : ...établissements, entendre les différents outils, les programmes que vous déployez pour franciser les étudiants étrangers. Merci.

M. Saini (Deep) : Laissez-moi répondre un peu de votre première question. Ma collègue ici, Mme Sophie D'Amour, a... vient de dire qu'on a entre... Nos quatre universités, nous sommes responsables pour 2 milliards de dollars de subventions externes pour la recherche. Ça représente environ 80 % de toute la recherche faite au Québec parmi les 20 institutions au niveau de l'université. Alors... Et, entre nous quatre, on a un nombre énorme de collaborations qui ne seraient pas possibles si on travaille en isolation. Alors, on travaille ensemble. On a par exemple... M. Cossette a cité l'exemple d'ARN messager. Toute la recherche à McGill implique les chercheurs de Sherbrooke et vice versa. On a des collaborations étroites avec l'Université Montréal en intelligence artificielle. On a des collaborations avec... également avec Laval sur l'environnement, agriculture, etc., et dans d'autres domaines. Même pour la francisation de nos étudiants, par exemple, on a un programme à McGill qui envoie nos étudiants durant l'été pour passer huit semaines, en collaboration avec Laval, pour maîtriser le français, la langue française.

Alors, oui, c'est certain que nous représentons un écosystème, mais cet écosystème n'est pas limité à nos quatre universités. Je pense que les 20 universités ou les institutions équivalentes des universités au Québec font ensemble un écosystème qui est là pour servir les intérêts économiques et les intérêts sociaux de notre province.

M. Cossette (Pierre) : Je voudrais revenir sur le vecteur d'intégration parce que c'est un vecteur puissant parce qu'aller obtenir un diplôme universitaire, qui souvent s'accompagne de stages, parfois en entreprise, parfois dans le milieu communautaire ou ailleurs, avec des projets de recherche appliquée notamment... Bien, à la fin, bien, il y a une partie des personnes qui veulent rester, mais ils sont... qui sont complètement intégrés déjà, ils ont déjà leurs réseaux. Nous, à l'Université Sherbrooke, on a un centre de langues qui offre des cours de francisation. Parce que je vous ai dit qu'il y a une majorité de nos étudiants venait de la francophonie, mais la... on a quand même un bon nombre d'étudiants, par exemple, iraniens, leur langue seconde... en général, le français, ce n'est pas dans leur langue, même l'anglais, donc... Mais, quand ils sortent de nos programmes, ils savent parler français, là, parce que, sinon, ils ne pourraient pas faire nos programmes, donc, et... Mais ça demande beaucoup de travail. Donc, on le fait avec soin. Mais il y a ces étudiants, étudiantes là qui souhaitent immigrer à la suite, qui sont une richesse pour notre société. Puis ceux qui retournent sont nos réseaux futurs de collaboration à la fois académique et industrielle, c'est les futurs partenaires avec qui on va travailler, là. Donc, c'est nos ambassadeurs et ambassadrices, en fait, c'est des superambassadeurs et ambassadrices pour le Québec au complet, là.

M. Saini (Deep) : Est-ce que je peux ajouter un autre fait?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 10 secondes. Allez-y.

M. Saini (Deep) : Quelques secondes. O.K. À McGill, en ce qui concerne le français, 20 % de nos étudiants ont la langue... le français comme leur langue maternelle, 60 % de nos étudiants parlent les deux langues et environ 2 011... 2 100 de nos étudiants étrangers sont... viennent de France, sont tous des francophones.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est malheureusement terminé. On va poursuivre avec le député de Saint-Henri Sainte-Anne pour une période de 3 min 18 s. La parole est à vous.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous d'être parmi nous aujourd'hui. Écoutez, il n'y a pas si longtemps, un article du Devoir ce matin, en fait, qui sort, qui dit : «Québec refuse d'exempter les cégeps et universités du plafonnement des étudiants étrangers.» Et je lis : «En demandant d'être exemptés du projet de loi n° 74 visant à réduire le nombre d'étudiants étrangers, les cégeps et universités se montrent déraisonnables, selon le ministre de l'Immigration...», je ne nommerai pas son nom, on n'est pas supposé faire ça ici. Moi, je refuse de croire que l'Université du Québec, l'Université de Montréal, l'Université McGill, l'Université Laval, l'Université de Sherbrooke, l'Université Bishop's, l'Université de Concordia, l'ETS, et j'en passe, sont déraisonnables. Donc, je vais vous la poser comme ça. Recteurs, rectrices, êtes-vous déraisonnables?

Mme D'Amours (Sophie) : Je pense qu'il faut reconnaître qu'il y a, et ça a été dit, des abus. Il faut les... Il faut adresser ces abus. Puis je pense qu'on réitère notre perspective, qu'on ne fait pas partie de ces organisations qui génèrent ces abus-là. On pense qu'on est raisonnables dans la façon dont on traite la chose et nos processus sont rigoureux, sont exigeants...

Mme D'Amours (Sophie) : ...prennent plusieurs mois à être réalisés. Et puis ces recrutements-là et la richesse de ces personnes pour nos institutions, pour la formation de tous nos étudiants, la valeur d'être exposé à une réalité internationale, en 2024, dans une université, elle est essentielle. Si on fait le tour du monde et on va visiter les meilleures institutions en France, en Suisse, en Belgique, dans le monde francophone, comme dans le reste du monde, on y retrouvera une grande diversité de personnes. On a démontré qu'on n'est pas... On ne s'est pas mis dans une situation où on cherche à faire exploser le nombre d'étudiants internationaux dans nos quatre universités et dans les universités en général, au Québec, c'est la situation.

Et une des raisons premières de ça, c'est qu'on veut offrir aux étudiants et étudiantes qu'on a choisis toutes les chances de réussir. Et ça prend des services et des capacités qu'on déploie, ce qui veut dire que ça ne peut pas être infini. On ne peut pas se mettre dans cette situation-là parce que nos ressources à nous, on les gère de façon responsable.

M. Cliche-Rivard : Et, si ce plaidoyer-là, aujourd'hui, il n'est pas entendu puis que le projet reste tel quel, vous allez vous montrer déçue.

Mme D'Amours (Sophie) : Bien, on va penser que le Québec aura perdu une opportunité. Parce qu'il faut comprendre que chaque université est bien ancrée dans sa région. Et c'est vrai pour les universités de Montréal, c'est vrai pour Laval, c'est vrai pour Sherbrooke. Et la réalité ou la pertinence de certains programmes, ce ne sont pas les mêmes partout. Et je pense qu'il y a des universités, par leur ancrage, par la collaboration...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Je dois malheureusement vous arrêter, vous savez, je suis maître du temps.

Mme D'Amours (Sophie) : C'est parfait.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, cette portion d'échange est terminée, on va finaliser le tout avec le député de Jean-Talon pour une période de 3 min 18 s. 

M. Paradis : C'est court. La plupart des institutions d'enseignement, en fait, demandent d'être exclues de l'application du projet de loi n° 74. Alors, si les institutions d'enseignement, dont les vôtres, demandent à être exclues, il sert à quoi, le projet de loi n° 74? Il va rester quoi, du projet de loi?

M. Cossette (Pierre) : Le gouvernement a choisi de déposer le projet de loi n° 74 pour adresser un problème d'abus. Nous, on dit : On ne fait pas partie de l'abus. Donc, qu'est-ce que le gouvernement souhaite faire du projet de loi n° 74, ça lui appartient. Nous, on ne fait pas partie de l'abus, puis on pense que le travail qu'on fait avec les étudiants internationaux est bénéfique pour l'ensemble du Québec et pour plusieurs raisons qu'on a déjà citées.

Donc, moi, la pertinence du projet de loi n° 74, ce n'est pas à moi d'en débattre «at large». Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on ne fait pas partie de la l'abus, que la façon de faire, jusqu'à maintenant, a été très bénéfique pour le Québec. Puis on ne voit pas pourquoi on inclurait les universités, les établissements universitaires, puis on est les quatre... parce qu'en recherche, c'est particulièrement crucial, mais c'est vrai pour l'ensemble. On ne voit pas pourquoi on serait nclus dans ce projet de loi là.

M. Paradis : Plus tôt, ce matin, on a parlé de l'importance de l'arrimage puis de la planification globale des politiques d'immigration, notamment, en ce que... il y a... il peut y avoir deux étapes. On arrive comme étudiant international et ensuite on est reçu comme immigrant permanent. Est-ce que vous êtes d'accord avec cet arrimage, ou est -ce que... Quand vous dites que vous voulez être exclus du projet de loi n° 74, que vous avez dit tout à l'heure que le système actuel sert bien le Québec, est-ce que vous ne pensez pas que c'est important que le nombre d'étudiants internationaux admis au Québec soit vu dans sa globalité avec l'ensemble des politiques d'immigration?

M. Jutras (Daniel) : Bien, peut-être, je peux répondre à ça. Vous avez raison de souligner le fait que l'on traite différentes cohortes, hein, il y a des cohortes d'étudiants qui arrivent à l'entrée, qui sont admis dans les universités, qui étudient chez nous. Il y en a qui sont diplômés puis il y en a, parmi ceux-là, et ce n'est pas tous qui restent ici, au Québec, parfois via le Programme d'expérience québécoise dont on a parlé la semaine dernière. Alors, il faut bien distinguer ces cohortes-là. Effectivement, je pense qu'il faut avoir un regard global sur ce dont on parle. Mais, quand il s'agit de restreindre l'accès à des étudiants qui vont faire un passage ici puis retourner chez eux ensuite, là, il faut tenir compte des conséquences, je dirais, de leur présence sur les services publics au Québec et sur la longue durée, essayer de mieux comprendre la contribution qu'ils font au Québec.

• (12 h 20) •

Alors, de notre côté, je pense qu'il faut distinguer ces différents éléments là. Mais, effectivement, il faut avoir une vision globale de ce dont on parle et surtout une vision globale de l'apport que ces étudiants confèrent aux grandes universités québécoises, à toutes les universités québécoises et au Québec, à la fois pendant leur séjour...

M. Jutras (Daniel) : …une fois diplômés et même quand ils s'en vont chez eux comme ambassadeurs du Québec.

M. Paradis : Donc, vous voulez être exclus du projet de loi no 74, parce que, manifestement, vous trouvez que ce n'est pas la bonne façon de procéder. Mais là vous vous déclarez ouverts, ouverte à participer globalement avec le gouvernement à la planification de l'immigration.

M. Jutras (Daniel) : Bien, on collabore sûrement avec le gouvernement pour toutes les questions, là. Je veux être clair là-dessus.

M. Paradis : Très bien. Je vais revenir à un élément avec le ministre.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En 15 secondes.

M. Paradis : Je n'aurai pas le temps. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est le temps qui est imparti. Merci beaucoup. Merci de votre présence, Mme la rectrice, M. le recteur à cette audience.

Alors, je suspends les travaux juste jusqu'à la tenue des avis touchant les travaux des commissions. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 21)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 20 )

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Donc, on a... on va avoir un après-midi et un début de soirée assez chargés. Nous allons poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers.

Alors, cet après-midi, nous allons entendre les représentants des organisations suivantes : l'Union étudiante du Québec qui est avec nous, la Fédération des cégeps, l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration, l'Université Bishop's et l'Université Concordia conjointement, ainsi que la Fédération de l'enseignement collégial-CSQ.

Alors, madame, monsieur, attendez, je vais juste reprendre vos noms. M. Étienne Paré, président...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...ainsi que Mme Flora Dommanget — c'est bien ça? — Dommanget, coordonnatrice à l'enseignement supérieur. Vous bénéficiez donc d'une période de 10 minutes pour votre présentation, et ensuite nous allons discuter avec les parlementaires. La parole est à vous.

M. Paré (Etienne) : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci, Mesdames et Messieurs les députés, pour le temps que vous nous accordez aujourd'hui.

Peut-être, pour commencer, je mentionnerais simplement que l'Union étudiante du Québec, on est une association étudiante nationale qui représente 103 000 personnes étudiantes universitaires via 13 associations membres. Nos membres sont répartis partout à travers le Québec, allant de l'Abitibi-Témiscamingue à Sherbrooke, en passant par Chicoutimi, Drummondville, Lennoxville, Lévis et Montréal. La mission de l'Union étudiante du Québec, c'est de travailler à l'amélioration des conditions de vie et d'études de la population étudiante universitaire, tout en défendant les droits et les intérêts de celle-ci. C'est à cette mission de défense des droits de la population étudiante internationale du Québec que l'UEQ s'est penchée sur le projet de loi n° 74.

Tout d'abord, nous souhaitons mentionner le fait que la population étudiante internationale est indispensable et une richesse sur les nombreux campus universitaires. Nous souhaitons également souligner que, depuis les deux dernières moutures de la politique de financement des universités, soit celle de 2018 et celle de juin dernier, les personnes étudiantes internationales sont devenues essentielles au financement des universités québécoises. En effet, en annonçant une politique de financement des universités à coût nul en juin, le gouvernement est venu faire de la redistribution d'une partie des droits de scolarité de la population étudiante internationale la pierre angulaire du financement des nouvelles mesures annoncées. On souligne particulièrement l'importance des personnes étudiantes internationales dans les établissements anglophones de McGill et de Concordia, dont les droits de scolarité permettront de financer les nouvelles enveloppes visant principalement à aider le réseau de l'UQ. Nous constatons ainsi que de réduire le nombre d'étudiants internationaux vient directement menacer le financement des universités. Nous estimons ainsi qu'il est important que le gouvernement ait une action concertée en matière d'admission de la population étudiante internationale et ne vienne pas créer artificiellement un sous-financement des universités. Il faut éviter une situation où la main gauche du gouvernement ne parlerait pas à la main droite.

C'est d'ailleurs pour éviter cette situation potentiellement catastrophique que nous proposons nos trois premières recommandations de modification du projet de loi n° 74 dans notre mémoire.

En premier lieu, nous partageons les craintes mentionnées par les recteurs concernant la centralisation du pouvoir de décision aux mains du ministre de l'Immigration. Alors que l'on nous mentionne que le ministre de l'Immigration possède la vision d'ensemble, nous croyons plutôt que les ministres de l'Enseignement supérieur et de l'Éducation sont ceux ayant la vision d'ensemble des nécessités de leurs réseaux respectifs. Nous recommandons donc que l'article 5 du projet de loi n° 74 soit reformulé pour donner conjointement et en tout temps le pouvoir de recommandation concernant les demandes présentées à titre de personne étudiante internationale au ministère de l'Enseignement supérieur, de l'Éducation et de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration. Cet amendement nous assurerait une coordination adéquate des différents ministères impliqués, et ce, peu importe les ministres en poste et peu importe les gouvernements.

À cet effet, nous souhaitons également voir le projet de loi modifié pour inclure un processus de consultation publique obligatoire pour les scénarios proposés par le ministère de l'Enseignement supérieur. En nous basant sur le modèle consultatif en matière d'aide financière aux études, qu'on connaît particulièrement bien du côté de l'UEQ, nous en sommes venus à la conclusion qu'un tel mécanisme permettrait d'éviter les impacts négatifs sur le financement des universités. En vertu de la Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur, tout projet de règlement relatif au programme d'AFE doit être soumis au comité consultatif pour l'accessibilité financière aux études, qui a 30 jours pour produire un tel rapport qui viendra orienter la décision de la ministre de l'Enseignement supérieur. L'objectif ici est de s'assurer, encore une fois, d'éviter les effets de main gauche qui ne parle pas à la main droite.

La consultation publique des parties prenantes de l'enseignement supérieur demeure, selon nous, la meilleure solution pour éviter une situation où l'adoption de scénarios aurait des effets inattendus sur le financement des universités. Il nous apparaît clair que les acteurs du milieu participeraient avec enthousiasme à une telle consultation. On a vu d'ailleurs, là, qu'il y a des recteurs qui ont repris l'idée de la consultation. On sait qu'il y a des syndicats également qui vont le demander. C'est assez rare que les recteurs d'université, les associations étudiantes et les syndicats sont tous sur la même longueur d'onde sur quelque chose. Ça fait que je pense que ça parle quand même, là, sur le poids de cette demande. Puis... à cet effet-là, là, qu'on recommande que l'obligation de consultation, incluant un délai raisonnable, de la communauté étudiante universitaire, en lien avec des décisions sur l'encadrement des personnes étudiantes internationales, soit intégrée dans l'article 5 du projet de loi n° 74.

En plus de cette obligation, l'UEQ croit qu'il serait pertinent d'obliger les ministères concernés à publier un rapport d'évaluation des impacts des scénarios et de leur mise en œuvre suite à l'adoption du projet de loi. Cette mesure s'inscrit dans la logique de nos deux recommandations précédentes et vise à rendre le plus transparent possible les décisions prises par les trois ministres.

Notre troisième recommandation est donc qu'une obligation de publication, tous les deux ans, d'un rapport d'évaluation détaillé des décisions prises en vertu du projet de loi n° 74 soit intégrée dans l'article 4 du projet de loi. Nous croyons que l'échéance de deux ans viendrait également nous assurer d'évaluer les impacts réels, puisqu'une évaluation annuelle ne permettrait probablement pas de brosser un portrait complet des impacts et une évaluation sur plus de deux ans laisserait trop de temps avant d'évaluer les...

M. Paré (Etienne) : ...je vais maintenant céder la parole à ma collègue pour poursuivre la présentation de nos recommandations.

Mme Dommanget (Flora) : Merci. Au-delà du fait de venir perturber le financement des universités, le projet de loi proposé actuellement ne prend pas en compte l'ensemble des réalités que vivent les universités. C'est une ingérence qui se met en place pour contrôler la gestion des admissions. L'UEQ souhaite rappeler que la population étudiante internationale doit d'abord être vue comme un atout pour la société québécoise grâce à son apport d'idées et de connaissances, ce qui fait également le rayonnement de nos universités à l'international. Ce constat semble être partagé par le ministre de l'Immigration, qui s'est exprimé, mais ne se traduit pas dans la loi qui pourrait créer des effets négatifs, comme le mentionnaient les différents représentantes et représentants des différentes universités.

Il faut savoir qu'une baisse d'inscriptions est déjà observable dans le réseau universitaire. C'est encore plus critique quand on regarde ce qui se passe au niveau des cycles supérieurs et auprès d'universités plus à risque. On a, par exemple, l'Université Bishop's qui a atteint une baisse de 40,4 % d'inscriptions au deuxième cycle, cette même université qui avait été oubliée dans les dernières mesures mises en place et qu'il a fallu rappeler au gouvernement.

Rappelons encore une fois que c'est la recherche qui permet en grande partie le fait de faire rayonner les établissements universitaires québécois et le partage des connaissances. L'UEQ croit donc que ce sont des mesures incitatives telles que l'investissement de 80 millions de dollars sur quatre ans pour la rétention et l'attraction des personnes étudiantes internationales dans les régions du Québec et dans les secteurs en forte pénurie de main-d'oeuvre du ministre du Travail qui doivent être mises en place... qui doivent être mises de l'avant pour pallier à la pénurie de main-d'oeuvre et non l'ingérence du MIFI dans la gestion des admissions des universités. Notre recommandation quatre serait donc que l'objectif premier du projet de loi no 74 soit le rayonnement des établissements universitaires québécois et le partage des connaissances, particulièrement en ce qui a trait aux personnes étudiantes inscrites aux cycles supérieurs.

Dans la même lignée, l'UEQ souhaite souligner que les personnes étudiantes internationales peuvent actuellement changer d'établissement sans changer de cycle universitaire en informant simplement le IRCC. Cela favorise le partage de connaissances et permet une plus grande mobilité des personnes étudiantes internationales pour combler les régions qui en ont le plus besoin.

Ce qu'on veut éviter, c'est qu'une personne étudiante déjà sur le territoire et qui veut changer d'établissement se voie refuser son certificat d'acceptation du Québec par une surcharge administrative et se voit expulsé du pays. Le projet de loi no 74, avec son article 16, oblige l'étudiant à recevoir l'enseignement dans l'établissement pour lequel le ministre a donné son consentement. Nous proposons donc l'article 16 du projet de loi n° 74 soit modifié pour supprimer l'obligation de recevoir le consentement du ministre d'étudier dans un établissement précis.

Finalement, comme mentionné en premier lieu, l'article 5 du projet de loi décline certaines distinctions prises en compte en lien avec le nombre maximal de demandes reçues. On ne connaît pas encore les critères qui vont être utilisés, mais le ministre de l'Immigration a mentionné, lors de son point de presse le 10 octobre dernier, l'intention de dispenser certains programmes en français et qu'il fallait s'attendre à une réduction du nombre des personnes étudiantes issues de l'international sur l'île de Montréal. Entendons-nous, l'UEQ reconnaît l'importance de la préservation de la langue française. En ce moment, on a quand même une contradiction qui vient se créer entre le souhait du gouvernement de préserver la langue française et les mesures mises en place. D'un côté, le gouvernement met en place des cours de français pour les personnes étudiantes, mais il n'y a pas d'incitatif réel à aller étudier le français. C'est d'ailleurs ce qu'on dénonçait avec les mesures du PEQ. L'UEQ pense qu'il est important que des incitatifs soient mis en place pour encourager les personnes étudiantes à apprendre le français.

Et c'est dans ce constat que notre dernière recommandation est que le gouvernement québécois facilite la francisation des personnes étudiantes internationales anglophones dès le début de leur parcours universitaire pour contribuer à leur inclusion à la société et préserver la vitalité du français au Québec sans réduire leur nombre en raison de leur langue.

M. Paré (Etienne) : Je me permettrais maintenant de conclure en rebondissant sur les annonces de jeudi dernier. Du côté de l'Union étudiante du Québec, là, nous croyons que la population étudiante internationale du Québec contribue grandement à l'essor de la société québécoise, que ce soit en participant à l'avancement de la science en français sur notre territoire ou en venant offrir une main-d'œuvre qualifiée de grande qualité. Nous estimons que l'apport de la communauté étudiante internationale n'est plus à démontrer. C'est d'ailleurs pour ces raisons que nous dénonçons la volonté gouvernementale de suspendre sans préavis le Programme de l'expérience québécoise. Le PEQ est un problème formidable qui permet à des milliers de personnes étudiantes de réaliser leur rêve d'immigrer au Québec.

• (15 h 30) •

Alors que nous entendons les préoccupations du gouvernement concernant le nombre d'immigrants sur le territoire du Québec, nous nous expliquons bien mal pourquoi on couperait le PEQ. Il s'agit après tout de diplômés universitaires francophones. Les étudiants diplômés du PEQ ne menacent pas la vitalité du français, ils y contribuent. Ce sont des étudiants francophones qui sont sur le territoire depuis au moins trois ans, puisqu'ils ont complété leurs études universitaires ici. Ils sont généralement jeunes et vont contribuer à la société québécoise pendant de nombreuses décennies, notamment en payant des taxes et des impôts. Étant des diplômés universitaires, ils sont d'ailleurs des travailleurs qualifiés qui répondent aux priorités gouvernementales. L'obligation d'être francophone qui a été instaurée lors de la dernière réforme du PEQ...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Paré (Etienne) : ...est également venu régler les enjeux linguistiques qui auraient pu toucher les demandeurs du PEQ. C'est donc pour toutes ces raisons que nous expliquons bien mal la décision du gouvernement de suspendre le Programme de l'expérience québécoise. Nous demandons aux ministres de revenir sur sa décision. Je vous remercie. Ça finirait notre présentation.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Votre 10 minutes, top chrono. Alors, on va commencer la période d'échange. Les temps sont les mêmes que ce matin, 16 min  30 s pour le gouvernement. La parole est à vous, M. le ministre.

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation très claire, très étoffée. Je me souviens très bien d'avoir été exactement à votre place, il y a un petit peu plus de 25 ans, dans le mouvement étudiant, pour venir présenter aux parlementaires et aux ministres, des positions. Donc, merci de faire ce que vous faites. C'est important. Un mouvement étudiant est de faire entendre la voix des jeunes. Vous parlez, oui, des universités, mais vous parlez aussi toujours avec une vision d'avenir. Ça fait que c'est toujours rafraichissant.

Juste une petite mise en garde, vous avez parlé, à la fin de votre présentation, de suspendre le PEQ, vous avez dit : Couper le PEQ. Suspendre, d'accord? On va s'entendre, on a suspendu pour un peu plus de six mois les invitations au programme étudiant, mais il n'est pas coupé. C'est important de le préciser. Il faut rassurer les gens. On s'en parlait un petit peu avant le début des auditions.

Vous avez dit : Il n'y a pas d'incitatif pour apprendre la langue française pour les étudiants. Ça, ça m'étonne un peu considérant que, bien sûr, pour être dans le Programme de l'expérience québécoise étudiant, dans le PEQ diplômés, il faut maîtriser la langue française, soit pour l'avoir appris avant puis avoir étudié avant, soit pour être diplômé ici dans un programme francophone. Donc là, il y a une valorisation de la langue. Mais sinon, si je ne parle pas la langue française et que j'étudie dans un programme en anglais et que je veux faire ma vie au Québec, je ne peux pas appliquer dans le PEQ diplômés, mais je peux appliquer dans lePEQ travailleurs, auquel cas je suis obligé de maîtriser la langue française quand même. Tu ne peux pas être un immigrant économique si tu maîtrises pas la langue française. Donc, il me semble qu'il y a là une valorisation de la langue qui est... qui est assez claire, là.

Et parlant de valorisation de la langue dans un réseau autre que francophone, j'aimerais ça vous entendre, puisque on a la chance de vous avoir, sur les mesures proposées par ma collègue suite au plan d'action pour l'avenir sur la langue française, où on demande aux universités anglophones d'être des vecteurs de francisation puis de franciser les... les étudiants internationaux. Qu'est-ce que vous pensez de cette mesure-là?

Mme Dommanget (Flora) : Moi, je peux y aller. Bien, il y a plusieurs choses à prendre en compte. Déjà, le fait que justement, dans les universités, en ce moment, il y a des... il y a des cours qui vont pouvoir être donnés justement pour que les personnes étudiantes internationales puissent aller apprendre le français. Mais ce qu'on constate, c'est que c'est après leurs... leurs études qu.ils vont donc pouvoir appliquer à certains programmes, etc. Nous, ce qu'on pense, c'est qu'avec le PEQ, justement, il faudrait qu'il y ait des incitatifs directement qui y soient liés pour que ça soit pendant que les personnes étudiantes soient aux études, qu'il y ait cet incitatif et non après avoir complété leurs études, ce qui favoriserait finalement, bien, l'attraction autour du français.

M. Paré (Etienne) : Puis, pour répondre à la deuxième partie de la question, on est d'avis que les universités anglophones peuvent jouer ce rôle-là aussi d'un vecteur de francisation, puis c'est d'ailleurs l'idée de la demande. C'est que, si on offre des cours de français dans les universités, mais qu'on fait simplement les offrir sans contrainte, sans obligation, il n'y a pas nécessairement de gens qui vont être incités parce que t'as déjà beaucoup de charge de travail, t'as beaucoup de cours, tu as déjà beaucoup dans ton plat quand tu es aux études. Ça fait que, nous, ce qu'on se dit, c'est que si on crée un incitatif en permettant aux étudiants qui postulent au PEQ d'avoir faire... de faire un test de français plutôt que d'avoir un... étudier en français, ça viendrait créer cet incitatif supplémentaire là qui ferait en sorte que les gens iraient prendre des cours de français, puis on aurait cette francisation qui serait durant les études et non pas après, pendant qu'ils sont sur des permis de travail temporaires.

M. Roberge : O.K. Je pense qu'on a les deux, là, parce que, comme je l'ai dit, pour être résident permanent, pour être immigrant dans le secteur économique, puis c'est ce que sont les étudiants diplômés, il faut qu'ils apprennent la langue. Puis ensuite, avec la mesure qu'on a prise avec les universités anglophones, bien,  eux, ils vont être obligés de créer les incitatifs par ce qu'ils sont... ils ont l'obligation de franciser au moins 80 % de leurs étudiants pendant la formation. De toute façon, ils sont gelés là.

Vous avez parlé tout à l'heure... de dire : C'est important que la main gauche, la main droite soient bien arrimées, c'est important qu'il y ait une cohérence. Vous avez dit : Le ministre de l'Immigration doit se coordonner, c'est très important, avec le ministre de l'Éducation puis, dans ce cas-ci, la ministre de l'Enseignement supérieur. Puis vous nous dites qu'il fallait regarder l'article... je pense que c'est l'article 5 à cet égard-là. C'est ça. On dit : Une telle décision... la décision du gouvernement concernant...

M. Roberge : ...les demandes présentées, doit être prise sur la recommandation conjointe du ministre et selon leurs compétences respectives du ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport et du ministre de l'Enseignement supérieur. Donc, il me semble que c'est assez clair, ici, que le ministre de l'Immigration ne peut pas prendre cette décision-là seul. Il doit le faire avec les ministres concernés. Pouvez-vous m'expliquer qu'est-ce qu'il manque d'après vous, dans cet article-là?

M. Paré (Etienne) : Oui. Bien, en fait, c'est dans l'alinéa au-dessus, où est-ce qu'on mentionne qu'une décision du gouvernement est prise sur la recommandation du ministre, après consultation du ministre de l'Éducation et du ministre de l'Enseignement supérieur. Nous, ce qu'on pense, c'est que ça devrait être explicite dans tous les alinéas, qu'on souhaite que ce soit un pouvoir de recommandation des trois ministres ensemble, notamment parce qu'on n'est pas... On donne beaucoup de pouvoir au ministre de l'Immigration. Puis quand on crée un pouvoir gouvernemental comme celui-là, faut-il le considérer dans un... bien, dans une optique un peu plus intemporelle? Puis, comme on n'est pas à l'abri d'avoir un ministre de l'Immigration qui pourrait décider de se... bien, de ne pas se soucier de ce que lui recommanderaient ses collègues à l'Enseignement supérieur et à l'Éducation, bien, nous, on s'est dit, si c'était explicite dans la loi, que c'est bel et bien les trois qui ont un pouvoir de recommandation ensemble, bien, si jamais il y avait un ministre de l'Immigration futur avec une idéologie quelconque qui chercherait à outrepasser ses collègues, bien, en l'explicitant dans la loi, on s'évite un peu ce potentiel problème là.

M. Roberge : O.K. Je pense qu'il y a peut-être une incompréhension, là, juridique parce que, tout de suite après, ça dit : Malgré le premier alinéa, que vous n'aimez pas, une telle décision doit être prise sur la recommandation conjointe du ministre. On regardera, ici, s'il y a des ajustements à faire, là. Le cas échéant, on le fera.

On parle depuis tout à l'heure à la fois d'effectifs étudiants, de langue et de financement du réseau. Qu'est-ce que vous avez pensé de la décision du précédent gouvernement libéral en 2018, de déréglementer les frais de scolarité pour les étudiants internationaux? Quel était l'impact, d'après vous, sur les étudiants des différents secteurs, puis sur le réseau?

M. Paré (Etienne) : Bien, l'Union étudiante du Québec dénonce toute forme de hausse des droits de scolarité, quelles qu'elles soient, depuis sa création. Puis on a été vocal à l'époque, on n'était pas d'accord avec cette mesure-là. La déréglementation des droits de scolarité de la population étudiante internationale a créé un peu un phénomène où est-ce qu'on a été, justement, considérer ces gens-là un peu comme des vaches à lait, si on veut, du système parce qu'on est venu utiliser les droits de scolarité de la population étudiante internationale pour pallier au manque de financement public. À cet effet-là, c'est d'ailleurs pour ça qu'on est sortis fortement contre la politique de financement des universités, Mme Déry, bien, de Mme la ministre de l'Enseignement supérieur, pardon, puis également les annonces concernant les droits de scolarité des étudiants canadiens non résidents, puis des étudiants internationaux qui ont eu lieu à l'automne dernier, parce que, nous, on pense que la solution proposée par le gouvernement ne répond pas à la problématique qui a été créée en 2018.

Si on veut réellement éviter cette déréglementation-là, il faut revenir à l'ancien modèle avec un plafond de droits de scolarité pour éviter que les étudiants internationaux soient responsables du financement de nos universités. Puis la péréquation, telle qu'elle est proposée en ce moment, là, ne suffit pas pour combler les lacunes de l'investissement public.

M. Roberge : Merci. Je comprends que vous avez des réserves par rapport au projet de loi, vous l'avez exprimé dans votre présentation, mais est-ce que vous considérez qu'avec, quoi, 122 000 étudiants en ce moment sur le territoire québécois, étrangers. On était à 50 080, on est rendu à 120 quelque mille. C'est suffisant? C'est trop? Est-ce qu'il faudrait réduire? C'est quoi votre critère pour dire que soit qu'il y en a trop, soit qu'il n'y en a pas assez?

M. Paré (Etienne) : Bien, écoutez, l'Union étudiante du Québec, on représente des étudiants universitaires au Québec en ce moment. Puis je pense que, quand on parle des étudiants universitaires, c'est plus autour de 57 000, le chiffre exact. Personnellement, je ne pense pas que c'est ces 57 000 étudiants universitaires internationaux, là, qui ont l'impact qu'on pourrait leur porter. Je ne pense pas que c'est eux qui accentuent la crise du logement. Je ne pense pas que c'est eux qui nuisent à la vitalité du français au Québec.

• (15 h 40) •

Après ça, c'est certain que si sont venait réduire le nombre d'étudiants internationaux, nous, notre crainte, c'est que ça vienne affecter le financement des universités. Donc, naturellement, si on décide de couper dans le nombre d'étudiants internationaux, bien, il faut augmenter le financement public des universités parce que ça, c'est déshabiller l'un pour habiller l'autre, là, ce qu'on a fait avec la dernière politique de financement des universités, là.

M. Roberge : Dernière question avant de laisser la place à mes collègues. Quand, à l'Université de Montréal, il y a des paniers qui sont livrés chaque semaine, puis 72 % des paniers vont à des étudiants internationaux qui n'ont peut-être pas les moyens, en réalité, de subvenir à leurs besoins, quand, à l'UQAC, il y a des étudiants qui disent : Bien, je n'ai pas de loyer. Il faut que...

M. Roberge : ...je vais à l'hôtel. Puis c'est vrai dans d'autres universités aussi. Est-ce que vous ne pensez pas que trop d'étudiants internationaux peut nuire à d'autres à un moment donné? Parce que, je vous dirais, à un moment donné, c'est comme notre capacité d'accueil serait dépassée, on peut parler de crise du logement ou autre. Vous ne pensez pas qu'à un moment donné la fameuse devise, là, qu'on a déjà entendue, en prendre moins pour en prendre soin, ça éviterait des dérapages comme des étudiants qui sont obligés de passer une session à l'hôtel?

M. Paré (Etienne) : Je pense que, si on se met à parler de précarité financière de la population étudiante, la vraie conversation doit tourner autour des droits de scolarité des étudiants internationaux. Je pense que tant que les droits de scolarité vont être déréglementés puis qu'on va leur charger aussi... des montants aussi élevés, peu importe le nombre qu'on va recevoir sur le territoire, on va continuer de les maintenir dans une position de précarité. Je pense que c'est important qu'on revoie à la baisse les montants des droits de scolarité de la population étudiante internationale puis, après ça, bien, qu'une fois qu'on a revu ces montants-là à la baisse, je pense qu'on va avoir significativement moins d'enjeux au niveau de la précarité de ces gens-là.

M. Roberge : Ça ne répond pas à la question sur le logement. Mais je veux quand même laisser ma collègue sinon elle n'aura pas le temps de poser ses questions.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, je reconnais la députée d'Iberville. Il vous reste cinq minutes 42 secondes.

Mme Bogemans : Parfait. Moi, je voulais vous remercier pour votre présentation.

Puis tout d'abord, je voulais voir si vous croyez au bien-fondé d'avoir les données sur le parcours, le cheminement des étudiants étrangers au Québec.

M. Paré (Etienne) : Bien, tu sais, nous, on pense qu'en général plus qu'on a de données, mieux c'est, dans le sens où, nous, plus on a accès à de l'information, plus c'est facile d'évaluer les situations. Donc, oui, évidemment, si on était capables d'obtenir plus d'informations, bien, on croirait davantage à ce qu'on a, là.

Mme Bogemans : D'accord. Parce que la déréglementation des CAQ, tu sais, de mettre un étudiant dans un établissement, bien, ça coupe une certaine prise de données. Selon vous, ce serait quoi, le meilleur outil à mettre en place pour aller chercher ces données-là? Puis quel genre de données vous aimeriez qu'on aille chercher?

M. Paré (Etienne) : Je vous dirais qu'au niveau du CAQ, nous, la critique principale qu'on a émise, c'était qu'en inscrivant l'établissement sur le CAQ, on venait réduire la mobilité des personnes étudiantes qui sont sur le territoire du Québec. Notamment, quand qu'il y a des enjeux, par exemple, où... puis là, je vais prendre des exemples très spécifiques, là, mais aux cycles supérieurs, si quelqu'un est à la maîtrise ou au doctorat, a un problème avec son professeur associé, par exemple de harcèlement psychologique, harcèlement sexuel, peu importe, puis qu'il doit changer, s'il doit trouver une sommité dans son domaine, il y a de fortes chances qu'il doive changer d'établissement. Bien là, s'il faut qu'il repasse par tout le processus de demandes, ça peut être problématique. Puis, nous, une de nos craintes qu'on a, c'est qu'avec les nouvelles mesures, qu'il y ait des personnes qui soient perdues dans la machine administrative, tu sais, même pas volontairement, nécessairement, mais juste parce qu'on a atteint notre quota, on perd quelqu'un qui est déjà sur le territoire, par exemple. Ce serait une situation qu'on veut s'éviter.

Après ça, pour la collecte de données, je crois que c'est de donner les outils aux administrations universitaires et leur donner des directives claires sur le genre de données qu'on veut collecter. Je pense que les gens qui paient leurs droits de scolarité, ils ont accès à des comptes, ils ont accès à des informations, ils ont accès à... les données, les universités ont accès à ces données-là, de ces personnes-là, parce que sinon, s'ils n'ont pas accès, c'est parce que ça veut dire qu'ils ne sont pas dans l'établissement. Ça fait qu'est-ce que ce serait au ministère de collecter lui-même les droits de scolarité puis de les redistribuer dans le réseau avec un prix plafond des droits de scolarité des étudiants internationaux, je ne sais pas. C'est peut-être une idée qu'on pourrait explorer.

Mme Bogemans : Mais est-ce que vous trouveriez ça acceptable? Parce que, tu sais, vous soulevez, bon, des cas problématiques de relations, là. On comprend, là, que ce n'est absolument pas ce qu'on désire non plus. Mais est-ce qu'il y a des... par exemple, un chemin clair en cas d'exception ou harcèlement, tout ça, pour accéder à l'équivalent d'un permis ouvert d'étudiant serait une mesure acceptable dans l'exemple que vous avez nommé?

Mme Dommanget (Flora) : Oui. Bien, c'est sûr que plus on accompagne justement ces personnes, mieux c'est, dans le fond, tu sais. Ça peut être des services qui vont être directement mis en place avec les universités. Ça fait que nous, c'est sûr que, dans ce sens-là, puis il y a de l'accompagnement, de la collaboration à ce niveau-là, ça viendrait régler pas mal de problèmes à ce niveau-là puis ça permettrait justement à la population étudiante internationale, bien, d'avoir un meilleur service à ce niveau.

Mme Bogemans : Parfait. Donc, un CAQ nominé avec... ça pourrait fonctionner, mais avec des mesures claires, pour un étudiant qui aimerait accéder à la mobilité plus rapide, par exemple.

Mme Dommanget (Flora) : Oui, bien, ça. C'est sûr qu'il ne faudrait pas venir non plus, tu sais, ajouter une charge pour cette personne étudiante, tu sais. Il faut quand même qu'on puisse l'accompagner, pas que ce soit juste sa... tu sais, sa responsabilité en tant que telle. Il faut que des services puissent mettre... être mis en place vraiment pour venir supporter cette population.

Mme Bogemans : Parfait. Superintéressant. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Il reste encore deux minutes 15 secondes. Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le ministre.

M. Roberge : Quand on regarde la présence des étudiants ici, on nous dit que c'est une richesse. Je n'en doute pas. Ils viennent ici, d'abord, ils interagissent avec les gens, il y a une... l'avantage de la diversité puis de rencontrer...

M. Roberge : ...autant pour les étudiants étrangers que les gens qui sont ici, mais souvent les gens disent : Oui, mais ils contribuent, c'est des futurs Québécois, ils vont s'implanter. Est-ce que vous avez, d'après vous, des estimations, des chiffres, de quel pourcentage d'étudiants étrangers universitaires qui restent ensuite de manière durable sur le territoire québécois? Est-ce que vous avez ces données-là?

M. Paré (Etienne) : Bien, ça, c'est des données qu'on n'a pas, puis je pense qu'on parlait tantôt de quel type de données qui pourraient être intéressantes à collecter. Je pense que ça, ça en serait un bel exemple, notamment parce qu'une fois qu'ils sortent de l'établissement universitaire, il n'y a plus de suivi qui est fait par personne puis je pense que ça permettrait de faire une démonstration, si c'est le cas, est-ce que c'est vrai que les étudiants internationaux restent sur le territoire? Si c'est le cas, est-ce que c'est vrai qu'ils restent dans la région où ils ont étudié? Parce que si on était capable de faire la démonstration de ça, je pense que ça viendrait confirmer à quel point leur apport est essentiel.

Nous, ce qu'on voit sur le terrain, c'est que la population étudiante internationale, elle est très impliquée dans sa communauté. C'est des gens qui s'impliquent beaucoup dans les associations étudiantes, vont beaucoup s'impliquer dans les différents clubs, les différents regroupements sur les campus, ils contribuent à la vitalité de la région puis c'est quelque chose qu'on voit particulièrement dans les plus petits milieux. Je pense à l'UQAT, je pense à l'UQAC, où est-ce que, justement, le contact avec la population universitaire et la population régulière est plus proche que, par exemple, à Montréal parce que, là, il y a beaucoup trop de monde pour avoir ce genre de proximité là. Ça fait que je pense que ce serait intéressant de collecter des données là-dessus pour qu'on puisse brosser ce portrait-là, parce que je pense qu'on aurait des belles surprises, là, à ce niveau-là.

M. Roberge : Il reste-tu quelques secondes?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 24 secondes.

M. Roberge : 24 secondes. Ce matin, le Commissaire à la langue française nous a parlé des différents critères et nous a suggéré le critère de la langue. Quelle est votre opinion là-dessus?

Mme Dommanget (Flora) : Bien, c'est sûr que nous, on ne pense pas que c'est un critère suffisant. On pense que tout le monde devrait avoir la possibilité d'étudier le français. Ça fait que ça reviendrait simplement à discriminer la population étudiante qui ne parle pas français de base.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Vous allez comprendre, je suis la maîtresse du temps. Alors, on est rendu à l'opposition officielle pour une période, comme ce matin, de 9 min 54 s. M. le député de l'Acadie, la parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Paré, Mme Dommanget, merci d'être là. Merci pour votre mémoire. Je suis content de pouvoir échanger avec vous, parce qu'évidemment vous représentez les étudiants et étudiantes. Il y a quelques jours, le ministre de l'Immigration suspendait le PEQ. Maintenant, on est en train d'utiliser le p.l. n° 74. Il se sentent comment, vos étudiants? Parce qu'on a la chance de vous entendre, puis moi, j'aimerais ça... Tu sais, on parle des statistiques, on parle des chiffres, mais, en immigration, là, derrière des chiffres, il y a des humains, il y a du vrai monde, puis j'aimerais ça que vous puissiez nous en parler. C'est quoi, l'impact?

M. Paré (Etienne) : Oui. On a une population étudiante internationale extrêmement anxieuse présentement, notamment en raison du changement de discours, bon an mal an, depuis quelques années qu'on voit. On parle du Programme de l'expérience québécoise, là, ça fait quelques années qu'on revient sur des décisions à plusieurs reprises. Même si, individuellement, certaines de ces décisions n'ont pas nécessairement beaucoup d'impact concrètement, c'est l'accumulation de chacune d'entre elles qui viennent créer une source d'inconfort qui fait en sorte que tu ne sais pas, tu sais, tu es trois ans ici pour étudier. Si, d'une année à l'autre, ça change puis que, pendant tes trois ans d'études puis l'année que tu es là après tes études, ça a encore changé, c'est un peu dur de planifier ta vie.

Hier, on avait, dans nos bureaux à l'UEC, une rencontre d'un organisme partenaire, Le Québec, c'est nous aussi, qui a réuni plus d'une centaine de personnes qui cherchent à se mobiliser, justement, pour dénoncer les mesures du PEQ. On a entendu des histoires assez tristes des étudiants français, par exemple, qui ont dépensé tout leur héritage familial pour immigrer au Québec avec leurs deux enfants puis leurs conjoints, puis que, là, ils se retrouvent dans une incertitude. Ça crée de l'anxiété. Eux ont la crainte de devoir retourner en France en ayant investi toutes ces dizaines de milliers de dollars là pour immigrer ici, puis, finalement ne pas pouvoir l'avoir. Ça fait que je dirais que c'est vraiment de l'anxiété qu'on observe sur le terrain en ce moment, certaines frustrations puis une certaine colère également, là, à l'égard des différentes annonces gouvernementales.

M. Morin : Je vous remercie. Parce qu'évidemment les étudiants à l'international qui viennent ici, il y en a plusieurs qui retournent. On entendait ce matin des recteurs et rectrices d'universités nous parler que ce sont des ambassadeurs également du Québec à l'étranger quand ils retournent. Pensez-vous que ces mesures-là vont avoir un impact sur la réputation du Québec à l'étranger?

• (15 h 50) •

M. Paré (Etienne) : Ce qu'on observe depuis deux, trois ans, c'est notamment que, tu sais, il y a un discours assez controversé, que ce soient les mesures par le gouvernement du Québec et les mesures par le gouvernement du Canada. Je ne pense pas qu'on a particulièrement bonne presse en ce moment. Puis, à titre d'exemple, quand, en 2019, on avait modifié le Programme de l'expérience québécoise pour acheter un 12 mois de travail obligatoire, on avait vu une baisse des demandes...

M. Paré (Etienne) : ...une baisse fulgurante. On a vu que les étudiants internationaux passaient par d'autres provinces pour s'installer ici après, allaient en Ontario, allaient ailleurs, et on s'était dit : Bien, ça n'a pas de sens, on va revenir sur cette mesure-là. Puis c'est pour ça que l'an dernier on l'avait retiré, ce 12 mois de travail là, puis on était revenus à ce que c'était avant cette réforme-là.

Ça fait que clairement que ça a un impact. Tu sais, quand on entend les recteurs des universités ce matin nous dire qu'il y a une baisse des demandes puis une baisse des admissions de... je pense, c'est quoi, c'est des 20 %, des 15 % qu'on a observés cette année, je pense que c'est lié en partie au message, là, qu'on envoie à l'international, là.

M. Morin : Merci. Dans votre intervention, vous avez parlé rapidement de l'effet sur l'Université Bishop. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus? Est-ce que l'effet sur Bishop est plus dramatique? C'est une université... vieille université en région. Pouvez-vous nous en parler davantage? Est-ce que le gouvernement vise Bishop particulièrement? Est-ce que c'est le sentiment que vous avez?

Mme Dommanget (Flora) : Oui. Bien, si on compare un peu avec ce qui avait été fait l'automne dernier, tu sais, c'est sûr que Bishop avait été oublié dans les mesures... la mesure, justement, de la... de la hausse, etc. Tout ça, ça venait créer en fait, bien, un trou pour Bishop, qui allait... bien, qui dépendait fortement de cette population. Ça fait que là, en ce moment, on constate encore, tu sais, une baisse, et on peut supposer aussi que c'est le message que le gouvernement a envoyé à cette population-là, de... bien, de ne plus venir, au final, tu sais, là. Puis des universités comme ça qui vont être oubliées, ça, ça risque de faire dur. Justement, là, on parle d'une baisse de 40,4 % d'inscriptions au deuxième cycle. On s'entend aussi que la recherche, c'est ce qui fait le rayonnement à l'international. Ça fait que venir justement mettre des mesures comme ça qui dissuadent le monde de venir, ça en met un coup à l'international aussi.

M. Morin : Je vous remercie. Évidemment, quand on veut adopter des mesures, la planification... dialogue, je pense que c'est important. Dans l'opposition officielle, on demande une meilleure planification de la part du gouvernement.

J'aimerais attirer votre attention sur une disposition du projet de loi, l'article 7 — d'ailleurs, le Commissaire à la langue française en parlait dans son mémoire — où le gouvernement, par l'effet de cet article-là, si je comprends bien, veut se soustraire ou veut soustraire ses projets de règlements de l'obligation de publication au préalable à la Gazette officielle. Ça semble être l'inverse de la transparence ou d'une consultation. Est-ce que vous avez réfléchi à ça? Avez-vous des conseils à donner à nous, qui sommes le législateur, là-dessus?

M. Paré (Etienne) : Oui. Bien, c'est pour ça que nous, on s'est un peu inspirés du modèle de l'aide financière aux études, où il y a une obligation de consultation du comité pour avoir un rapport dans les 30 jours qui suivent l'annonce. Je pense que c'est la FNEEQ-CSN, là, qui propose justement d'avoir le projet de règlement 45 jours à l'avance, là. Après ça, on n'est pas des experts des procédures parlementaires, mais je pense que d'inclure spécifiquement et à l'écrit dans le projet de loi des mesures de consultation publique, c'est vraiment une meilleure politique publique, ça va être une meilleure façon de gouverner. Par souci de transparence, là, je pense que ce serait bien d'apporter ce type d'amendement, quand vous passerez en commission parlementaire, à ce moment-là, là.

M. Morin : Parfait. Je vous remercie. Alors, Mme la Présidente, je vais céder la parole à ma collègue de Mont-Royal-Outremont.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. La parole est à vous. Il reste encore 3 min 33 s

Mme Setlakwe : Merci. On se demande toujours, comme législateurs, aussi quelle est la problématique à la... qu'on tente de résoudre en déposant un projet de loi, et ici, non seulement on a de la difficulté à identifier la problématique, mais on semble être devant un flou quant à l'intention réelle du gouvernement. Est-ce que vous... puis vous, vous représentez énormément de... d'étudiants partout au Québec... Est-ce que... Est-ce qu'il y a une... Est-ce que vous êtes capables de... de saisir la problématique? Et est-ce que vous voyez qu'il y aurait des gestes à poser en région, à Montréal? Il est où, le... Il est où, le problème?

M. Paré (Etienne) : Oui. Bien, on... on s'explique bien mal, nous aussi, ce que le gouvernement essaie de faire avec ce projet de loi là, notamment parce qu'en raison des deux dernières moutures de la politique de financement des universités et en raison de la planification stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur des dernières... 2023-2027, on a fait du recrutement à l'international un pan essentiel du développement de nos universités, que ce soit à des fins de financement, que ce soit à des fins de rayonnement. On essaie de régler un problème que, si on qualifie ça de problème... Bon. Là, on pourrait avoir tout le débat idéologique que... Nous, on ne considère pas que c'est un problème, là, mais c'est quelque... un problème qu'on a créé de toutes pièces, dans le sens où, si on n'avait pas déréglementé les droits de scolarité, si on n'avait pas rendu la course à l'effectif d'étudiants internationaux la pierre angulaire du financement des universités, on ne se retrouverait pas dans cette situation-là...

M. Paré (Etienne) : ...qui, selon nous, n'est pas justifié. La population internationale, il faut arrêter d'en parler comme si c'était du bétail, là, tu sais, ce n'est pas juste des chiffres, ce n'est pas juste des nombres, c'est des gens avec des histoires, c'est des gens qui veulent s'installer, dans bien des cas, sur le territoire, qui veulent contribuer à l'essor, à la vitalité du Québec. Ça fait qu'on s'explique bien mal, là, ce qu'on essaie de régler ici, en ce moment, là.

Mme Setlakwe : Merci. Puis, pour revenir sur la question de la vitalité des régions, et on a... on comprend et on a entendu l'Université du Québec, ce matin, la présence des étudiants internationaux fait en sorte qu'on est capable de maintenir des programmes, assurer des cohortes. Est-ce que vous êtes inquiets qu'il y ait des programmes qui pourraient ne pas survivre et que ça pourrait affecter certaines régions?

Mme Dommanget (Flora) : Bien oui, c'est sûr qu'on est très, très... très... comment on pourrait dire? On a une grande crainte à ce niveau-là, tu sais. Et, en plus, on ne comprend pas trop qu'est-ce qui se passe, puisque, bien, il y a des mesures qui sont quand même mises en place pour faire en sorte qu'il y ait plus de personnes étudiantes internationales en région, je pense notamment aux exemptions qui avaient été mises en place par le ministre du Travail, mais, ici, on viendrait donc réduire de nouveau cette population étudiante en région. On ne sait pas trop qu'est-ce qui se passe. Ça fait que c'est sûr qu'on a des grandes craintes qu'il y a des programmes qui peuvent être mis de côté. Quand on parle, justement, tu sais, de la pénurie de main-d'oeuvre, tu sais, qu'est-ce qu'on cible exactement? On est un peu dans le flou, à ce niveau-là, et on a peur, justement, que, mettons, tout ce qui peut être arts, etc., puisse être mis de côté et oublié alors que c'est ce qui fait aussi la richesse du Québec.

Mme Setlakwe : Merci. On a terminé?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 16 secondes.

Mme Setlakwe : Ah! On est dans le flou avec vous. Est-ce que vous croyez que... Parce que vous allez même dans l'objectif du projet de loi, puis il faudrait dire clairement que les étudiants étrangers qui viennent travailler dans nos laboratoires de recherche sont un atout essentiel. Est-ce que vous diriez qu'il faudrait...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est terminé. Il restait 16 secondes. Merci. On entame le prochain groupe avec... le deuxième groupe d'opposition officielle. 3 min 18 s. La parole est à vous.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci d'être là. Merci de votre intervention. Votre dernière intervention, sur la fin, là, me faisait me remémorer le nombre de fois où vous avez dit, finalement, ce que vous avez présenté aujourd'hui, sur les modifications du PEQ 2019, on s'en souvient, première réforme du PEQ, avec des listes de programmes désuets, là, qui n'existaient pas, finalement, ou, en tout cas, majorité ou un certain nombre, annulés. Deuxième réforme, la même année ou l'année suivante, avec des exigences de travail, pas de droits acquis malgré ce qui avait été promis, annulé aussi. Ensuite, réforme avec l'exigence de travail en 2020, quelques droits acquis, celui-là a pris vigueur en 2020 pour... finalement, en 2023, baisse catastrophique des admissions au PEQ diplômé, on finit par retirer l'exigence de travail. Puis, à peu près au même moment, on décide que les candidats du PEQ diplômé sont la panacée de l'immigration économique. On les retire des seuils en disant : Il n'y a plus de limite, c'est ceux-là qu'on veut. Pour finalement, quelques mois plus tard, en 2024, les suspendre complètement pendant huit mois. Et là je me permets de penser que, si on suit la séquence, en juin prochain, quand le programme veut réouvrir, on va probablement revenir avec l'exigence de travail.

Honnêtement, là est-ce qu'on ne navigue pas en plein brouillard au détriment de la vie et de la réalité des étudiants internationaux du Québec?

M. Paré (Etienne) : En ce moment, on maintient des gens qui ont sacrifié beaucoup pour venir ici, qui paient des droits de scolarité gigantesques pendant plusieurs années dans l'espoir d'avoir un emploi, une formation de qualité, puis de s'installer sur le territoire, puis de contribuer à la vitalité économique du Québec. On aura la chance, assurément, d'en rediscuter lors des prochaines consultations sur la planification en immigration, mais c'est certain que, pour nous, revenir à un 12 mois de travail au PEQ, c'est venir réduire l'attraction de ce programme-là. La dernière mouture par la prédécesseure du ministre de l'Immigration était ce qui nous semblait le mieux, ça fait qu'on espère bien qu'on aura une bonne écoute de ce côté-là lors des prochaines consultations.

• (16 heures) •

M. Cliche-Rivard : Et tout ça, au final, pour qu'avant cette modification-là, on tourne à autour de 8000 CSQ émis par année, dans cette catégorie-là, pour diminuer à quelques milliers, finalement, 1952, en 2022, puis 3600, en 2023, pour remonter finalement à 15 000. Donc, si on fait une moyenne, là, on tourne toujours autour de 7000, 8000. Donc, l'ensemble de ça...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Cliche-Rivard : ...finalement, ça aura juste été un mirage ou une communication politique sur le dos des étudiants internationaux.

M. Paré (Etienne) : Puis, bien, ça revient à l'anxiété qui est vécue en ce moment. Je pense qu'on envoie des signaux un peu contradictoires à la population étudiante internationale. Puis on vient leur créer du stress inutile en donnant l'impression qu'on fait de la politique sur leur dos. Un processus d'immigration, ce n'est pas quelque chose qui se planifie en un an. Ça prend plusieurs années, particulièrement quand on est un étudiant international, on vient étudier ici pendant trois ans au minimum avant de pouvoir postuler. C'est beaucoup de temps dans une vie, c'est beaucoup d'argent, c'est beaucoup d'investissement.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup pour votre intervention.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci... Merci. Alors, on termine avec le député de Jean-Talon, une période de trois minutes, 18 secondes.

M. Paradis : Vous nous appelez à nous rappeler à quel point l'apport des étudiants étrangers, c'est une richesse pour le Québec. Et ça, je pense que c'est important de réitérer qu'ici pas mal tout le monde s'entend là-dessus. En fait, tout le monde s'entend sur cette question-là. Le ministre l'a mentionné. Mes collègues des trois... des deux autres partis d'opposition, et nous, on l'a mentionné aussi à quel point, c'est important.

Il y a neuf ans, c'est-à-dire en 2015, il y avait 50 000 permis pour des étudiants étrangers qui étaient octroyés à chaque année, on est passés à 70 000, en 2017-2018, puis aujourd'hui à 125 000. Moi, j'ai été actif à l'échelle internationale pendant ces années-là. Et le Québec a toujours... même à cette époque-là, était reconnu comme un endroit généreux pour l'accueil des étudiants. Ça, je pense que c'est important de le dire, mais là il y a eu un pic. Qu'est-ce qui s'est passé? Bien, il y a eu deux choses, il y a les règles de financement qui ont été changées, dans la dernière année du gouvernement libéral, puis l'arrivée au pouvoir de la CAQ. Et ça, vous le mentionnez dans votre mémoire, c'est là-dessus que je vous amène. Vous, vous dites que les... la politique actuelle a pour conséquence de lier les sommes octroyées aux universités au nombre de personnes étudiantes internationales rejoignant leurs bancs. Et là vous dites : Actuellement, si on ne révise pas les règles de financement et qu'on baisse le nombre d'étudiants, ça va avoir l'impact du définancement. Nous, dans nos orientations, on dit : Il faut s'attarder à la question du financement et on suggère de revenir à des règles similaires à celles d'avant 2018. Moi, j'aimerais vous entendre sur cette question-là des règles de financement pour les études supérieures au Québec.

M. Paré (Etienne) : Oui. On a pris connaissance, là, de la proposition du Parti québécois dans votre planification pour l'immigration. Comme je l'ai mentionné au ministre de l'Immigration, si on veut réduire le nombre d'étudiants internationaux, nous, on n'a pas de chiffre à vous proposer, évidemment, là. Il faudrait absolument revoir le financement public des universités, parce qu'on a créé cette dépendance, hein, on a fait une politique à coût nul, qui a été annoncée en juin dernier. Ça veut dire que tous les nouveaux investissements, hein, les programmes d'incitatifs pour l'opération pénurie de main-d'oeuvre, la redistribution de la richesse dans le réseau francophone, dans le réseau de l'UQ, toutes ces sommes-là sont dépendantes des inscriptions de la population étudiante internationale, principalement dans les établissements anglophones de McGill et de Concordia. Si on veut réellement réduire le nombre d'étudiants internationaux, il faut plus d'investissements publics dans le financement des universités. Sinon, on se crée un problème dans lequel on va avoir de la difficulté à se remettre. Surtout considérant que, là, ça va faire bientôt six ans qu'on a décidé qu'un des aspects importants du financement des universités, c'était le recrutement à l'international. On a déployé beaucoup d'effort pour le faire. Bien, si on décide de changer complètement l'orientation, il va falloir que le portefeuille s'ouvre pour ça, là.

M. Paradis : Puis là, quand vous... quand vous regardez le projet de loi n° 74, est-ce que vous voyez cette intention-là? Est-ce que vous voyez cette planification-là, c'est-à-dire de rediscuter des règles de financement en même temps qu'on discute des seuils et surtout des outils que le ministre veut se donner?

M. Paré (Etienne) : Bien, la raison pour laquelle on propose d'instaurer dans la loi des consultations, un rapport aux deux ans des mesures qui ont été mises en place, c'est parce qu'en ce moment on débat d'un projet de loi, mais on n'a aucune idée de c'est quoi, les scénarios qui vont être amenés. Puis je pense que c'est un peu un exercice... une occasion manquée d'avoir cette conversation-là, possiblement justement, parler de financement des universités, parler de ces seuils-là.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fait à cette audition. Alors, merci pour votre présence pour l'enrichissement à nos travaux.

La commission va suspendre quelques instants, le temps de recevoir le prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 05)

(Reprise à 16 h 08)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux.

Alors, nous recevons la Fédération des cégeps avec comme représentants Mme Marie Montpetit, présidente-directrice générale, bienvenue, M. Francis Brown Mastropaolo, directeur des affaires internationales, Mme Manon Couturier, directrice générale du cégep de Baie-Comeau, ainsi que M. André Gobeil, directeur général du cégep de Rimouski. Alors, bienvenue à cette audition...

M. Gobeil (André) : ..

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : «De Rimouski», de Chicoutimi, j'ai enlevé trop vite mes lunettes.

M. Gobeil (André) : ...confusion qu'on fait souvent, on vous en excuse.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Je les ai retirées trop vite. Alors, vous allez avoir 10 minutes pour présenter vos propos. Ensuite, on va entamer la période de discussion avec les parlementaires. La parole est à vous.

Mme Montpetit (Marie) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, mesdames messieurs les députés, salutations également à votre équipe qui vous accompagne. Au nom de la Fédération des cégeps et des 48 cégeps publics qui en sont membres, je tiens à remercier les membres de la commission pour ce temps de parole qui me permet d'aborder des enjeux importants pour le réseau collégial québécois.

En conférence de presse le 10 octobre dernier, le ministre l'Immigration, de la Francisation et de l'intégration a indiqué que le projet de loi n° 74 vise à admettre un nombre d'étudiants et d'étudiantes internationaux qui respectera la capacité d'accueil du Québec. En simple, il a décrit ce projet de loi comme une solution à une situation complexe. Pour s'assurer que la réponse du gouvernement soit à la fois ciblée et efficace, sans se détourner des répercussions réelles du projet de loi n° 74, nous voulons donc attirer l'attention de la commission sur plusieurs points de vigilance incontournables.

• (16 h 10) •

La fédération soulève trois enjeux majeurs dans ce projet de loi. Tout d'abord, il établit un amalgame risqué en suggérant une participation des 48 cégeps publics à un problème duquel ils ne font pas partie. Non, les cégeps ne sont pas une porte d'entrée incontrôlable pour les étudiantes et les étudiants internationaux. Bien au contraire, ils font partie de la solution à de nombreux défis qu'affronte la société québécoise. Ensuite, le projet de loi présente des objectifs flous quant à sa mise en application. Nous ignorons les éléments guidant sa mise en œuvre. La portée du projet de loi est large...

Mme Montpetit (Marie) : ...et général. Et ses pouvoirs pourraient porter atteinte à l'autonomie des cégeps et réduire leur contribution partout au Québec.

Finalement, il pourrait créer une situation qui met à risque la vitalité et l'accessibilité à de nombreux programmes de formation dans toutes les régions administratives du Québec, où les besoins de main-d'œuvre demeurent importants.

Le réseau des cégeps a connu ces dernières années une croissance raisonnable, contrôlée et éthique de sa population étudiante internationale. À l'automne 2023, ces étudiants représentaient environ 5 % de notre effectif global, soit près de 9 000 étudiants internationaux sur 200 000. Je tiens à préciser que ces résultats sont alignés avec les priorités et les initiatives gouvernementales. C'est le cas pour les objectifs, notamment de sa politique internationale et de protection de la langue française, mais aussi pour ceux touchant aux solutions de la pénurie de main-d'œuvre. Les cégeps, comme je l'ai mentionné, sont une solution et non pas un problème.

Aussi, les cégeps ne tirent pas de primes pécuniaires par l'accueil d'étudiants internationaux. Ces derniers contribuent plutôt à notre capacité de contribuer à la vitalité de nos collectivités. La seule prime qui accompagne leur arrivée, c'est celle de maintenir l'accessibilité à de nombreux programmes d'études dans des domaines de formation où les besoins de main-d'œuvre demeurent importants. Sans ces étudiants internationaux, le démarrage de nombreuses cohortes serait compromis. La conséquence de ces programmes non offerts priverait en premier lieu la jeunesse québécoise d'un accès à l'enseignement supérieur. Et, en second lieu, le secteur public est privé de l'emploi d'une main-d'œuvre qualifiée dans tous les secteurs de l'économie et des services.

Lors d'une consultation récente auprès de notre réseau, 25 cégeps nous ont fait part de l'importance de cette population pour le maintien de leurs programmes. Qu'il soit question de la région de Montréal, de l'Abitibi, de la Gaspésie, de la Mauricie, des Laurentides, de Lanaudière, de la Montérégie, de Laval, du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de Chaudière-Appalaches. Tous expriment une même préoccupation : limiter l'accueil d'étudiants internationaux aurait un effet domino direct sur les programmes et accentuerait la rareté de la main-d'œuvre que les entreprises et organismes publics partout au Québec, subissent déjà.

Mes collègues directeurs généraux qui m'accompagnent pourront vous donner des exemples concrets dans la période de questions et vous prouver que cela affecte et affectera directement des citoyens des circonscriptions que vous représentez. C'est pour ça que la Fédération des cégeps recommande que les cégeps soient exemptés de tout plafond réduisant le nombre d'étudiants et d'étudiants internationaux et obtiennent l'assurance de pouvoir continuer de desservir leur mission d'accessibilité et de contribution à la collectivité.

La Fédération des cégeps est aussi très inquiète par rapport à la centralisation d'un pouvoir décisionnel à cet égard. Confier une telle responsabilité à un ministère, respectueusement, qui n'a pas l'expertise de l'enseignement supérieur peut mener à des décisions arbitraires et mal alignées avec les réalités du réseau collégial. C'est pourquoi la fédération recommande de mettre en place une concertation obligatoire avec le ministère de l'Enseignement supérieur et les cégeps avant toute décision qui affecterait leur capacité d'accueil. Cette collaboration garantirait des décisions éclairées, tenant compte des besoins du réseau et des priorités locales.

La promotion à l'international des programmes d'études découle des besoins locaux d'accessibilité pour la jeunesse québécoise, des besoins de main-d'œuvre en lien avec les secteurs d'emploi et des ententes partenariales. Même si un arrimage avec les objectifs et les priorités gouvernementales en matière d'immigration peut être souhaitable, ils ne doivent pas se substituer aux objectifs et aux priorités en matière d'enseignement supérieur, notamment ceux des cégeps. Toute ingérence dans l'autonomie des cégeps dans l'adoption de leurs priorités en matière de gestion de leur offre éducative et d'attraction d'étudiants et d'étudiants internationaux doit absolument être évitée. C'est pourquoi la Fédération des cégeps recommande que toute décision liée à la gestion des demandes prises en vertu de la Loi sur l'immigration au Québec concernant les étudiants et les étudiants internationaux soit également prise en consultation avec les ministères sectoriels concernés et les établissements d'enseignement publics concernés ou les organisations qui les représentent.

Aussi, les personnes qui prévoient poursuivre leurs études dans un autre pays s'informent des possibilités d'études des mois, parfois même des années, avant de démarrer le processus administratif, tant au niveau scolaire que migratoire. Pour que nos relations partenariales fonctionnent, il faut minimalement que ces personnes intéressées puissent mettre leur confiance dans ce genre de projet. Les cégeps doivent donc pouvoir travailler au niveau international dans un environnement caractérisé par la stabilité et la prévisibilité. Dans cette optique, la Fédération des cégeps recommande de prévoir un délai minimal de 18 mois dans l'application de toute nouvelle mesure de restriction liée à l'immigration dans le réseau collégial, afin de permettre une planification adéquate et de maintenir la stabilité de nos ententes à l'international.

Nous rappelons ici que les projets d'étude internationaux se planifient sur le long terme. Pour que le Québec continue d'attirer des talents, il est essentiel de garantir la prévisibilité de nos politiques et de protéger la réputation du Québec comme destination d'étude fiable et accueillante. Même si le projet de loi ne précise pas des modalités opérationnelles, la fédération estime essentiel de souligner les multiples points de vigilance...

Mme Montpetit (Marie) : ...à prendre en considération lors d'une éventuelle mise en application des clauses proposées. Je vous invite à en prendre connaissance ainsi que nos recommandations pour éviter ces risques en lisant le mémoire qui a été déposé à la commission.

Je tiens par contre à souligner que toute tentative d'établir des plafonds maximaux sur une base trop spécifique, voire chirurgicale, pour reprendre les mots du ministre de l'Immigration, s'avère un exercice extrêmement périlleux. Rappelons-nous l'expérience vécue lors des modifications apportées au PEQ, volet Diplômés, en novembre 2019 et qui avait été fortement dénoncé par la fédération. Cet exemple a démontré les multiples enjeux et angles morts d'une approche de ce type.

La Fédération des cégeps invite donc le gouvernement à la prudence dans de possibles amalgames que crée le projet de loi n° 74 en assimilant tous les établissements à une même problématique et en imposant des mesures qui risquent de générer plus de tort que de bénéfices pour notre réseau et pour tout le Québec.

Nous demandons à cette commission de considérer les enjeux de manière équilibrée et de prendre en compte les besoins spécifiques, mais aussi la mission du réseau collégial, particulièrement pour les régions qui dépendent de ses étudiants pour répondre aux défis de main-d'œuvre et pour maintenir l'accessibilité à l'éducation.

Les cégeps sont bien plus que des institutions éducatives, ils sont un pilier de développement social, culturel et économique pour le Québec. En limitant possiblement notre capacité à accueillir des étudiants internationaux, ce projet de loi pourrait mettre à mal notre mission éducative.

Les deux directeurs généraux présents ici pour témoigner de tous les points de vigilance, inquiétudes et exemples de risques associés à ce projet de loi, au nom des 48 cégeps, je vous encourage donc à saisir l'opportunité d'écouter leur voix qui porte celle des cégeps de toutes les régions du Québec. Merci aux membres de cette commission pour votre écoute et pour votre engagement envers ce sujet. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci pour cette présentation. On va donc entamer la période de discussion. M. le ministre et les députés de la banquette, la parole est à vous. Seize minutes 30 secondes.

M. Roberge : Merci bien. Merci pour votre présentation, à vous qui avez déjà été autour de cette table dans un rôle différent. Merci aux gens du terrain, des gens des établissements aussi qui sont là pour nous aider, nous éclairer un petit peu. Quelques commentaires puis une question. Vous avez dit qu'il faut faire attention, c'est-à-dire que ce ne serait pas normal que le ou la ministre de l'Immigration décide tout seul de ce qui va se passer dans le réseau d'enseignement supérieur, dans les cégeps, directement dans les programmes. Je suis d'accord avec ça. C'est pour ça, que l'article 5, là, annonce... énonce vraiment qu'on doit avoir ici, là, des recommandations conjointes quand on va toucher... la formation professionnelle, ce sera avec le ministre de l'Éducation, quand ça touchera l'enseignement supérieur, ça sera directement avec la ministre de l'Enseignement supérieur, je pense que c'est important. De la même manière, ce n'est pas normal non plus que, par exemple, un réseau où... pardon, le ministre de l'Éducation ou de l'Enseignement supérieur décide, sans en parler avec la ministre de l'Immigration, du nombre de personnes qui seraient sur le territoire québécois comme résidents non permanents. Donc, d'une certaine manière, l'Enseignement supérieur ne peut pas décider des politiques migratoires puis les politiques migratoires ne peuvent pas décider pour l'Enseignement supérieur. On travaille toujours en équipe. Mais là on propose de le mettre par écrit dans des amendements pour être certains que la concertation soit obligatoire, peu importe les gens qui vont nous succéder, parce qu'on sait tous qu'il y aura d'autres personnes qui prendront nos places un jour. Donc, je voulais préciser ça parce que je pense que c'est important.

Vous avez dit qu'il y a environ... ce n'est pas... non, c'est juste un petit commentaire, mais vous allez pouvoir commenter sur les commentaires en masse, en masse, j'achève. Vous avez dit qu'environ 5 % d'effectif total sont des étudiants étrangers dans votre réseau. En ce moment, ma question, ce serait de dire, si on regarde plutôt Montréal, sur l'île de Montréal ou dans la région de Montréal : Est-ce que c'est le même pourcentage ou est-ce que cette proportion-là est plus grande, donc du pourcentage d'étudiants étrangers, parmi vos effectifs dans le Grand Montréal?

• (16 h 20) •

Mme Montpetit (Marie) : Vous me permettrez de... puis je passerai la parole, vous me permettrez de répondre à votre premier commentaire. On a vu effectivement que, dans le projet de loi, ça tient compte d'une collaboration avec le ministère de l'Enseignement supérieur et le MEQ. Ce qu'on ajoute, par contre, c'est qu'on souhaite être concertés aussi comme réseau. Ce qu'on vit, d'ailleurs, puis je me permets de faire une parenthèse, un aparté, ce que l'on vit depuis quelques semaines dans le réseau collégial, où on se fait... où on se fait ajouter entrave et contrainte de toutes sortes qui viennent... qui viennent, entre autres un gel de recrutement, qui a été annoncé la semaine dernière, des plafonds d'investissement, des plafonds sur nos heures rémunérées, ce sont des mesures qui ont été imposées par le Conseil du trésor via le ministère de l'Enseignement supérieur dans lesquelles on n'a pas été concertés comme réseau, donc d'où l'importance d'aller ajouter la concertation avec le réseau. Parce qu'on sait qu'il y a toujours une bonne collaboration, là, il y a peut-être quelques anicroches, mais on trouve important de venir le mentionner, de l'ajouter dans le projet de loi...

M. Roberge : ...oui. Et pour ma question sur le pourcentage d'étudiants étrangers dans le Grand Montréal, est-ce que c'est 5 % partout à la grandeur du Québec ou, dans le Grand Montréal, il y a un pourcentage qui est plus élevé d'étudiants étrangers?

M. Brown Mastropaolo (Francis) : Oui, je peux... je peux répondre à cette question-là. En fait, premièrement, au niveau du total des étudiants internationaux, en fait, il y a 36 % de nos étudiants internationaux qui sont dans la communauté métropolitaine de Montréal, donc ce qui veut dire 64 % qui sont en dehors de cette communauté métropolitaine là. Donc, ce qu'on peut... ce qu'on peut aller, par extension, c'est que le pourcentage, il est moindre dans la région de Montréal qu'ailleurs au Québec en termes d'étudiants. Donc, il y a une plus grande proportion d'étudiants internationaux dans les cégeps qui sont hors de la communauté métropolitaine de Montréal.

Mme Montpetit (Marie) : Et vous me permettrez, M. le ministre, de compléter, mais vous avez ces exemples-là aussi qui sont notés dans le mémoire. On a ajouté quand même plusieurs cas concrets de cégeps qui... dans la région métropolitaine, qui viennent combler... qui viennent... qui viennent recruter pour des besoins. Je pense, par exemple, à des programmes de médecine nucléaire, qui sont extrêmement importants, présentement, pour le réseau de la santé. Certains cégeps de Montréal vont recruter dans des programmes spécifiques, comme le font d'autres cégeps. C'est pour ça qu'on... on soulignait le fait que ces étudiants internationaux là sont importants pour le maintien de programmes dans, vraiment, l'ensemble des cégeps, là, sur tous les territoires.

M. Roberge : Une petite question, encore, de... de démographie, de tailles de cohortes. On sait qu'il y a beaucoup de programmes qui ont peu d'étudiants, que plusieurs programmes survivent, les cohortes survivent grâce à la présence d'étudiants étrangers, qui viennent travailler aussi, mais qui viennent aussi permettre à des Québécois de suivre un programme, souvent, près de chez eux, plutôt que de s'expatrier ou juste de renoncer à leur programme de formation. Je l'ai dit, mais je vais le répéter, ma collègue et moi, on a une très, très, très grande sensibilité... Loin de nous l'intention de faire fermer des programmes, aucunement, je le mentionne.

Ceci dit, dans les dernières années, il y avait eu une baisse du nombre de Québécois qui étaient inscrits dans les cégeps, puis j'ai vu ça comme un argument, de dire : Bien, coudon, il y a moins de Québécois, il faut, pour maintenir nos cohortes, davantage d'étudiants étrangers. Je pense que, les prochaines années, quand on se projette sur deux, trois, cinq, 10 ans, on voit un rehaussement graduel du nombre de Québécois. Est-ce qu'il ne faut pas reconsidérer le nombre d'étudiants étrangers, en disant : Bon, bien, quand les Québécois étaient moins là, les étudiants étrangers sont venus, nous ont permis de garder des programmes vivants, les Québécois reviennent graduellement, on garde les étudiants étrangers, mais peut-être qu'on en a moins besoin pour assurer la survie des programmes?

Mme Montpetit (Marie) : C'est une... C'est une question extrêmement légitime. Puis on vous a apporté un tableau didactique, je sais que vous aimiez bien ça à l'époque, si vous me permettez.

M. Roberge : Comme à l'Assemblée.

Mme Montpetit (Marie) : Exactement. Vous avez la hausse ici du nombre d'étudiants internationaux totaux. Puis elle est dans... il est dans le mémoire, hein, de ce dossier-là. Les petites lignes bleues que vous voyez en haut... en bas, là, c'est... c'est le réseau collégial public, c'est les cégeps. Donc, vous voyez que, quand même, je veux dire, on est une petite proportion dans le problème peut-être que vous essayez de circonscrire.

Et vous avez raison qu'il y a eu une baisse des étudiants pendant une certaine époque, et la solution a été de se retourner vers l'international, aussi beaucoup, à la demande... tu sais, on a répondu à l'appel du gouvernement dans des opérations main-d'oeuvre, entre autres, pour aller combler des besoins de pénurie, je pense entre autres aux projets en soins infirmiers notamment. Donc, c'est un équilibre qui s'est fait. Mais comme vous voyez, c'est pour ça qu'on le... on le mentionne et le répète, il y a une autorégulation des cégeps, il y a une autonomie qui s'est faite. C'est une... C'est un... C'est un équilibre qui s'est fait. Et il faut faire très attention. Ce n'est pas... Ce n'est pas une recette magique non plus d'aller recruter à l'international quand il faut un nombre minimal. Puis je laisserai mes collègues, qui sont... qui sont très bien placés pour compléter. Quand il faut un nombre minimum d'étudiants pour pouvoir démarrer une cohorte, c'est vraiment là que l'équilibre se joue, dans le fond.

Mme Couturier (Manon) : Oui. J'aimerais un peu ajouter la réalité de la Côte-Nord, là, qui est un peu différente de l'ensemble de ce que vous venez de nommer, M. le ministre. La Côte-Nord est la seule région qui se dévitalise encore. On a... nos collègues des universités l'ont dit, là, on a un seuil migratoire négatif au niveau de la population d'âge d'étudier dans nos collèges. Donc, la réalité, là, de pouvoir aller recruter à l'international maintient certains programmes... et nous permettre de fournir une main-d'œuvre qualifiée à l'ensemble de nos entreprises autour de nous. Donc, notre rôle, il est beaucoup plus grand que simplement, là, donner une formation.

J'ajouterais, je vous dirais, 0 % de fois il y a eu des étudiants québécois qui ont été refusés dans un programme parce qu'il y avait des étudiants issus de l'international. En tout cas, pas à ma connaissance, là. Je ne voudrais pas m'avancer pour des choses que je ne connais pas, mais à mes yeux à moi, là, ce n'est pas arrivé, ça, qu'on laisse... on diminue le nombre d'étudiants québécois pour augmenter le nombre d'étudiants issus de l'international. Donc, je me questionne un peu sur...

Mme Couturier (Manon) : ...sur cette prémisse-là.

M. Gobeil (André) : Si je peux me permettre d'ajouter également, je vous... je nous inviterais tous à la prudence... d'instrumentaliser, pardon, nos étudiants internationaux. Ah! ça fonctionne bien, quand c'est des Québécois, c'est bon. Ah! il n'y a plus de Québécois, bien, on va faire rentrer... Je pense que ça va au-delà de ça, puis ça va même au-delà du maintien des programmes dans des communautés comme celle de Rimouski ou celle de Chicoutimi. C'est aussi une diversité qui est importante, je pense, au développement des humains, et c'est un peu notre fonction première, aussi, comme... comme dirigeants d'établissements d'enseignement supérieur. On a une volonté d'accompagner tout le monde. Puis, moi, ce que je peux témoigner, c'est : autant dans ma communauté, à Chicoutimi, que lorsque j'étais à Matane, de voir la contribution des étudiants internationaux va bien au-delà du maintien de programmes, va bien au-delà aussi des emplois d'accompagnement dans des... des emplois, là, d'étudiants ou encore les emplois qu'ils vont occuper une fois qu'ils sont diplômés, ça va au-delà de ça. Et ça, je pense qu'il faut garder le cap dans cette volonté-là au Québec. Puis, jusqu'à présent, on le fait très bien, et on l'a toujours fait très bien. En termes de solidarité, nous, on le fait avec... Vous savez, on parle souvent des guerres de clochers, là, mais on est trois cégeps dans notre... quatre cégeps dans notre région, on travaille ensemble et on définit des choses. Et récemment on a mis en place un projet sur... dans le cadre d'un chantier du pôle de l'enseignement supérieur, on a travaillé sur un chantier sur l'établissement durable des personnes issues de l'immigration, de quelle façon on peut les accompagner aussi à ce qu'ils contribuent au développement de notre milieu. Et ça, je pense que ça va au-delà des vases communicants étudiants québécois, étudiants internationaux.

M. Brown Mastropaolo (Francis) : ...de complémenter. En fait, il ne faut pas oublier qu'il y a aussi des guides qui existent, en fait. Donc, on a parlé de l'autonomie des cégeps, la capacité de gestion. Ouvrir un programme à l'international, ce n'est pas automatique, ça dépend de la capacité d'accueil. Donc, dans un cégep, il y aura des programmes qui seront ouverts, d'autres qui seront fermés parce qu'il y a suffisamment d'étudiants. Donc, il y a un mécanisme d'autorégulation qui existe. Et, dans certains programmes... bien que le cégep peut disposer d'un nombre appréciable d'étudiants, dans certains programmes, il manque encore de ces étudiants-là. Et c'est dans la prévision des perspectives d'emploi, notamment, où on décide d'ouvrir ou de réfléchir à ouvrir à cette clientèle-là. Donc, c'est pour respecter notre mission. Donc, il y a des balises, il y a des réflexions qui vont plus loin que les simples mécanismes aussi, là, qui nous habitent.

M. Roberge : Merci beaucoup pour vos réponses. C'est très, très, très apprécié. Je laisserais ma collègue poursuivre.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : D'accord. Alors, il vous reste encore cinq minutes 56 secondes. La parole est à vous.

Mme Bogemans : Parfait. Premièrement, tout à l'heure, les universités sont venues nous exposer, là, une panoplie de mesures au registraire qu'ils mettent en place, ça va jusqu'à l'intelligence artificielle pour la reconnaissance des acquis de manière diversifiée, puis être certain, par certaines mesures, là, de la pleine disponibilité des étudiants étrangers, quand ils arrivent, pour se consacrer à leurs études. Quel genre de mesures la Fédération des cégeps ou les cégeps de manière distinctive mettent-ils en place au Québec pour être certains que les étudiants étrangers inscrits sont bien prêts aux études puis faire le tri dans les demandes d'inscription dès le départ?

Mme Couturier (Manon) : Bien, il y a clairement... Nous, on est très petits, là. Donc, il y a clairement une sélection qui se fait dès le départ, selon le dossier scolaire de l'étudiant. Donc, c'est notre registraire qui analyse tous ces dossiers-là, on s'entend qu'il y a quand même un bon nombre d'inscriptions, mais c'est beaucoup plus dans l'accueil, lorsqu'ils arrivent que... qu'ils sont pris en charge, là. Ils sont pris en charge par une équipe vraiment complète, tant au niveau social qu'au niveau académique, pour s'assurer de les maintenir en réussite. Donc, il y a des rencontres régulières. Donc, une fois qu'ils sont... qu'ils ont passé la porte... Je n'ai pas beaucoup de programmes contingentés au niveau collégial. Donc, c'est vraiment plus le dossier scolaire qui va faire foi de l'accueil chez nous. Mais, une fois que c'est fait, ils sont accompagnés, ils sont suivis par une équipe... puis une petite communauté, donc on a une communauté qui se mobilise autour de l'intégration, jusqu'à leur trouver une première... aller faire une première épicerie avec eux. On va jusque là. Donc, ils sont vraiment pris en charge de façon très humaine. Mais, au niveau de la sélection, je réitère, là, c'est vraiment le dossier scolaire qui va faire foi, là, selon l'étude de notre registraire.

Mme Bogemans : Parfait. Donc, la capacité de loger les étudiants ou d'être certain, par exemple, que l'étudiant arrive avec un logement déjà avant d'être au Québec, est-ce que ce sont des choses qui sont regardées? Ou la capacité financière de payer l'année en cours, l'année pour laquelle il est accepté?

• (16 h 30) •

Mme Couturier (Manon) : ...capacité financière, elle est déjà vérifiée, là, dans... Pour s'inscrire, il faut déjà démontrer qu'on a la capacité financière de s'en venir étudier chez nous. Nous, chez nous... bien là, c'est la tactique cégep de Baie-Comeau, là, nos résidences leur sont réservées. En première année, les étudiants sont logés par nous, et la communauté prend en charge le reste. Honnêtement, l'enjeu de logements, je l'entends beaucoup. Chez nous, quand nos étudiants ont besoin, la communauté y tient, à sa population étudiante, donc, en général, les gens répondent présent. J'ai zéro étudiant qui n'ont pas... qui ne trouve pas de logement chez nous.

M. Gobeil (André) : Moi, j'ai un promoteur, cette année, qui a transformé un ancien couvent pour accueillir des étudiants en se disant : Bien, écoutez, c'est important, je ne veux pas faire ça pour d'autre chose, j'aurais pu transformer ça en condos, mais j'ai décidé de le faire pour des... pour accueillir des étudiants, autant des étudiants d'ailleurs au Québec...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

M. Gobeil (André) : ...les étudiants internationaux. Pour les mesures, on en a plein aussi. Au-delà de l'évaluation de la capacité de l'étudiant à venir étudier chez nous, à la formation continue, on a développé des capsules d'accueil aussi pour accompagner l'étudiant, des tests diagnostiques, s'il y a des éléments qui sont à améliorer en mathématiques, en français, on a des éléments de cette nature-là. On a des gens sur le terrain qui font aussi des événements pour pouvoir permettre aux étudiants d'aller chercher les codes, les codes culturels locaux et les partager avec... avec eux. Puis par la suite, tantôt, je parlais... on est en train... le chantier dont je parlais sur l'établissement durable, on est en train de travailler dans une approche laboratoire vivant à travailler à ce qu'on développe des outils pour accompagner l'ensemble de notre communauté sur le vivre-ensemble, mais aussi s'assurer que les personnes se sentent bien incluses dans notre... dans notre milieu. Puis jusqu'à présent, bien, on est en train de développer des solutions et des mettre en application. Donc, pour nous, je pense que l'accueil, ce n'est pas un enjeu, puis leur... leur capacité à contribuer à notre milieu non plus.

Mme Bogemans : C'est certain que le cégep contribue à ouvrir les esprits, là, à plein de niveaux, je pense, chez les jeunes qui sortaient du secondaire entre autres. Mais je regardais les chiffres d'embauche du cégep, là, des 10 dernières années, un petit peu partout au Québec, puis on dit que l'augmentation fulgurante du personnel de soutien. Est-ce qu'il pourrait avoir un lien avec desservir davantage la population étudiante étrangère, selon vous?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, si je peux me permettre par rapport à ça, puis c'est une... c'est une très bonne question que de vous posez dans un contexte de gel de recrutement, je le répète, qui est imposé au réseau collégial public et non au réseau privé. Présentement, il y a un contexte où c'est une population étudiante qui a... qui a évolué. Moi, je fais toujours référence, je suis sortie du cégep il y a 25 ans, on avait un certain profil, on avait des parcours qui étaient peut-être plus similaires aussi les uns des autres. Aujourd'hui, on a une population étudiante qui a toutes sortes de besoins, besoins particuliers notamment, entre autres. Donc, ça amène d'avoir des ressources supplémentaires qui sont nécessaires. Donc souvent, quand on regarde ces chiffres-là, il faut tenir compte de... du soutien psychosocial qui est apporté aux étudiants, du soutien au niveau de TDAH, dyslexie. Vous le savez, il y a de plus en plus, puis maintenant c'est des diagnostics ou sans diagnostic aussi qu'il y a de l'accompagnement qui est donné par des API. Donc, c'est ce qu'on peut retrouver notamment dans... dans les chiffres, là.

Mme Bogemans : Parfait. Donc, c'est ce que vous dites, travailleurs sociaux entre autres, puis services adaptés, c'est vraiment là-dessus que ça se localise puis ça fait partie de la...

M. Gobeil (André) : Mais ce n'est pas en coloration de... en corrélation, pardon, directement avec les internationaux, c'est l'ensemble de la réalité de nos collèges. Donc, on ne pourrait pas associer. Puis, encore une fois, c'est un amalgame dangereux à faire. C'est vraiment la réalité dans laquelle on est actuellement. Les besoins ont changé des étudiants, puis nous on répond aux besoins dans ces conditions-là. Et ce n'est pas nécessairement le fait d'avoir une hausse des étudiants internationaux qui nous a amenés à hausser les ressources qui étaient nécessaires pour pouvoir accompagner la réussite dans nos collèges.

Mme Bogemans : C'est pour l'ensemble de la clientèle étudiante, là, mon commentaire.

Mme Couturier (Manon) : J'ai le goût de faire un lien, mais j'arrive de l'Éducation, là. Donc, il y a eu des bonnes décisions qui se sont prises où est-ce qu'on a arrêté de courir après les diagnostics pour donner des services aux étudiants, puis on a réussi à amener plus d'étudiants vers un diplôme d'études secondaires. Puis c'est un excellent chemin. Ça fait qu'il y a plus d'étudiants qui ont accès, d'étudiants québécois qui ont accès à l'enseignement supérieur. Mais ça a fait que l'enseignement supérieur a eu à s'ajuster à cette nouvelle réalité là d'étudiants, parce que notre souhait à nous aussi, c'est d'amener ces étudiants-là vers une réussite. Donc, il faut nous aussi ajuster la façon dont on intervient auprès de ces jeunes-là. Donc, je pense que je ferais plus ce parallèle-là plus que de parler d'un rehaussement d'étudiants international.

Mme Bogemans : Bien, je comprends, puis ça, c'est tout à fait louable...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Merci... C'est ce qui met fin à cette première ronde d'échange. Alors, je me tourne du côté de l'opposition officielle pour la deuxième ronde d'échange. Le député de l'Acadie, vous avez neuf minutes 54 secondes.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Montpetit, M. Mastropaolo, Mme Couturier, M. Gobeil, merci d'être là.

J'ai... j'ai trois cégeps dans ma circonscription, Bois-de-Boulogne, Vanier, Saint-Laurent. Je parle à tous les D.G. des cégeps. Alors, on a parlé de gel de recrutement, de PEQ suspendu, d'une lettre que vous avez reçue au mois de juillet où vous ne pouvez plus à peu près rien dépenser ou investir, puis là, bien, il y a le p.l. 74. J'ai beaucoup d'empathie pour ce que vous vivez.

Il y a des fois je me demande : Coudon, est-ce que le gouvernement de la CAQ vous cible particulièrement? Vous rendez un service énorme à la population du Québec. Mais j'aimerais... Vous êtes avec nous, j'aimerais que vous me parliez concrètement, là, parce que, là, bien, évidemment, le ministre veut se donner plein de pouvoirs, mais on ne sait pas trop lesquels, mais en tout cas il y en a dans le p.l. 74, qu'est-ce que ça fait à un cégep dans une ville comme Baie-Comeau, Chicoutimi? Concrètement, sur le terrain, là, c'est... ça doit être positif, je ne peux pas croire, avec tout ce que vous faites.

M. Gobeil (André) : On a six minutes?

M. Morin : Oui, oui, c'est ça, vous en avez six, minutes, bien, allez-y punché.

M. Gobeil (André) : Bien, on est des acteurs de développement économique importants pour nos milieux, non seulement dans la transformation ou aussi de l'acquisition des compétences qui sont...

M. Gobeil (André) : ...ça sert à ce développement-là. Mais on est également des acteurs de développement social, de développement culturel. On joue un rôle majeur dans nos communautés, en termes de catalyseurs d'opportunités, si je peux me permettre de dire ça ainsi. Moi, j'ai passé ma vie dans les cégeps, puis j'ai été autant dans le Bas-Saint-Laurent. J'ai été à Matane, à Rivière-du-Loup, puis maintenant je suis à Chicoutimi, je suis retourné chez moi. Et puis si j'y suis resté... j'aurais pu faire tellement d'autres choses, j'y suis resté parce que j'y crois, à cette mission-là. Et puis on le fait bien, on travaille fort, on a des résultats qui sont probants. Moi, j'ai vu des projets de développement économique qui sont nés grâce à des initiatives de cégeps.

Et puis on est également des fournisseurs de services pour notre communauté. Chez moi, j'ai une salle de spectacles qui est opérée par des partenaires mais qui est localisée chez moi. J'offre des services de piscine pour la ville de Chicoutimi et autres types de services de cette nature-là. Puis je pense que je vais laisser la parole à Manon, parce que Manon aussi pourra rajouter du rôle qu'elle joue, principalement à Baie-Comeau.

Mme Couturier (Manon) : Bien, écoutez, à Baie-Comeau, en fait, on est l'enseignement supérieur. On ne se le cachera pas, là, l'enseignement supérieur existe à Baie-Comeau parce que le cégep de Baie-Comeau existe. L'UQAR a une antenne, mais elles sont dans nos locaux. J'en profite pour dire que ce serait bien qu'ils aient un peu plus d'espace pour pouvoir donner un service un peu plus étayé. On est la région la moins scolarisée au Québec, donc si on n'a pas l'enseignement supérieur à Sept-Îles et à Baie-Comeau, bien, c'est dangereux. Honnêtement, nos jeunes ont accès à de l'enseignement supérieur parce qu'on est là. J'ajoute à ça, évidemment, qu'on est pilier de la communauté aussi. On est... on est collés sur nos entreprises, on est source de recherche et d'innovation. Notre CCTT développe, au niveau de la forêt boréale, moult projets en recherche et en innovation pour venir répondre aux besoins de l'industrie autour de nous. Donc, tout le reste, mon collègue l'a déjà dit, là, mais notre présence, elle est centrale, en fait, à nos communautés.

M. Morin : Donc, vous êtes des incontournables dans votre région. Puis je vous écoute avec attention, ça me touche. Donc, Baie-Comeau, là, vous êtes le centre d'enseignement supérieur pour la région. Ce n'est quand même pas banal.

Dans le projet de loi, à l'article 3, le ministre veut se donner les pouvoirs de regarder certains programmes puis certaines orientations. Dans le restant des articles du projet de loi, on parle beaucoup d'un pouvoir réglementaire, mais on ne sait pas ce que ça va donner en bout de piste. Trouvez-vous ça dangereux pour votre autonomie puis pour vos programmes?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, je pense que c'est le principal problème de ce projet de loi, c'est que c'est une coquille qui ne caractérise pas les intentions qui viennent avec. J'espère que vous aurez l'occasion, dans les échanges que vous aurez sur l'étude détaillée, de préciser les intentions du législateur, mais c'est une pièce législative qui est floue sur ses objectifs, qui manque de balises. Le ministre l'a mentionné, combien d'étudiants internationaux veut-il de moins, il ne le sait pas à l'heure actuelle. Donc, c'est sûr que, oui, c'est une préoccupation sur notre autonomie, sur les objectifs qui sont poursuivis.

Et le ministre le mentionnait tout à l'heure, puis, évidemment, on croit sa parole, là-dessus, on n'a pas d'autre choix, sur ses intentions par rapport au projet de loi, mais la pièce législative va lui substituer dans le temps. Et la question, c'est comment sera-t-elle utilisée par la suite si les balises ne sont pas suffisamment importantes. Donc, elle ne peut pas être laissée à l'utilisation improvisée ou aux idéaux partisans ou politiques qu'il pourrait y avoir dans l'avenir. Donc, oui, il y a une préoccupation par rapport à ce projet de loi là.

M. Gobeil (André) : Et puis la collègue D.G., récemment, qui citait un illustre artiste, Peter Parker, Spider-Man, il disait : Aux grands pouvoirs viennent des grandes responsabilités. Et puis ce sont des grands pouvoirs, mais on se permet de douter sur les responsabilités, avec ce qu'on vit, avec l'énumération que Marie vient de nous faire, notamment, sur la réalité dans laquelle nous sommes confrontés dans les dernières semaines et mois.

M. Morin : Je vous remercie. Je vais maintenant laisser la parole à ma collègue la députée de Mont-Royal-Outremont.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Il vous reste encore 4min 35 s.

Mme Setlakwe : Merci. Moi, je comprends, généralement, que le réseau public des cégeps puis l'apport des étudiants étrangers ne constituent aucunement un problème pour vous. O.K.

Je pense qu'il faut revenir sur votre approche, en termes de répondre à des besoins ou ce que les programmes permettent de combler comme besoins. Et j'irais même... Puis je vais vous laisser élaborer parce que je sais que vous avez des exemples, s'il vous plaît, et il y en a dans le mémoire, mais je pense, pour le bénéfice de la commission, il faudrait que ce soit mentionné. Que vous êtes arrimés, c'est ce que je crois comprendre, avec le futur des services publics, vous répondez à des besoins précis. Il y a un exemple qui a été soulevé, là, la médecine nucléaire à Montréal, mais j'aimerais que vous élaboriez, autant en région qu'à Montréal.

• (16 h 40) •

Et je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais j'ai l'impression, parce qu'on a entendu le ministre utiliser le terme «chirurgical» dans son approche, c'est ce qu'on souhaite aussi, mais j'ai l'impression que vous, vous faites... vous avez une approche chirurgicale...

Mme Setlakwe : ...par rapport à répondre à des besoins en termes de service public et autre.

M. Gobeil (André) : Bien, écoutez, c'est... On a parlé de... nucléaire, mais, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, puis je pourrais parler au nom de mes trois autres collègues, on répond à des besoins qui sont criants en matière de développement. En électronique industrielle, actuellement, une chance qu'on a des étudiants internationaux qui non seulement font le parcours au complet, qui diplôment et qui se trouvent des emplois dans notre région, mais je pourrais vous dire la même chose pour diététique, je pourrais vous dire la même chose pour inhalothérapie, je pourrais vous dire également la même chose pour soins infirmiers.

On l'avait dans le mémoire, la présentation, entre autres, d'une initiative qu'on a faite avec des étudiants internationaux en soins infirmiers. Chez nous, ça a été un succès réel pour... au cégep de Chicoutimi et au CIUSSS du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Donc, c'est sûr et certain qu'on est là puis qu'on contribue à maintenir un tissu de service public, mais également une vitalité économique, industrielle et commerciale chez nous.

Mme Setlakwe : Merci.

Mme Couturier (Manon) : J'ai peut-être envie d'ajouter, là, techniques forestières, chez nous, qui va venir répondre aux besoins de Résolu, bien, ce sont... la grande majorité, hein, on est autour de 80 % d'étudiants issus de l'international qui sont dans ces cohortes-là et qui sont engagés par nos entreprises. Donc, on vient répondre aux besoins.

On a de la difficulté à recruter, au Québec, à cause de foresterie qui est un peu plus difficile à vendre dans notre coin. J'ajoute à ça toute... On a un programme unique qui vient répondre aux besoins de nos pourvoiries locales. Donc, on se colle à notre milieu, on se colle aux besoins dans l'offre de formation qu'on donne. Génie électrique, qui répond aux besoins de techniciens chez Hydro-Québec, qui sont en train de faire des réfections de barrages, qui vont avoir besoin de nos étudiants en génie électrique, dans lequel il y a des étudiants issus de l'immigration aussi, dans nos programmes. Donc, on est vraiment collés sur les besoins locaux, là.

Mme Montpetit (Marie) : Puis, par exemple, dans les exemples qui sont très patents, là, c'est, par exemple, je prends... Il y en a plein, hein, il y en a plusieurs, effectivement, dans le mémoire, mais le cégep de Thetford, par exemple, qui a une technique du génie plastique. Ce sont des étudiants qui viennent de l'international. C'est un programme qui est unique, qui a un caractère national, qui supporte l'ensemble de l'industrie de la plasturgie, donc 500 entreprises au Québec. Est-ce qu'on a les moyens de se passer de ce programme-là faute d'étudiants internationaux? Je pense que c'est les questions qu'il faut se poser.

Puis le projet de loi, évidemment, quand on l'a reçu, ça fait partie des questions qu'on s'est posées : Quel problème on essaie de régler avec ce projet de loi là. Qu'est-ce qu'on cible exactement? C'est pour ça qu'on veut vous sensibiliser vraiment au fait que le réseau collégial public, à l'heure actuelle, puis on vous a montré les chiffres... Effectivement, c'est très chirurgical, comme approche, de venir répondre à... un programme pour répondre à un besoin local, régional ou national qui ne peut être comblé faute d'étudiants québécois.

Mme Setlakwe : Merci. Donc, est-ce qu'on peut dire que les étudiants étrangers sont essentiels à la population?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, ils sont essentiels pour répondre dans cette boucle-là, effectivement, à des besoins de pénurie de main-d'œuvre. Je pense qu'on n'est pas en moyen de se passer de gens qui vont faire de la médecine nucléaire, ni dans les programmes, les différents programmes qu'on a élaborés. Il y a des programmes qui sont comblés aussi. En technique d'éducation à la petite enfance, on l'a vu dans les médias à plusieurs reprises, dans les dernières années, à quel point c'est encore un enjeu, dans nos services, de garde de trouver des gens. C'est pour ça qu'il y a du recrutement qui est fait à l'international.

La réponse, entre autres, dans le réseau de la santé, en soins infirmiers, 46 programmes sur 48 cégeps à l'heure actuelle. Il y a du recrutement qui a été fait, à la demande, justement, du gouvernement, d'aller faire du recrutement à l'international pour venir s'aider à répondre à nos propres besoins, comme société. Donc, il faut être très prudent dans les décisions qui vont être prises parce que ce n'est pas seulement le réseau collégial que ça met à mal.

Merci beaucoup. C'est ce qui me fin cette partie échanges. On va toutefois poursuivre avec la deuxième opposition et le député de Saint-Henri-Sainte-Anne. 3min18 s

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre excellente présentation. Écoutez, d'entrée de jeu, en conférence de presse, le ministre donnait des exemples, hein : un collège privé qui a augmenté de 246 % d'admissions en pas un an, janvier 2023 à mai 2024, un autre qui a vu sa clientèle monter de 1392 sur la même période. Mais, essentiellement, il n'y a rien de tout ça qui vous concerne. Donc, vous, vous êtes à dire : Écoutez, qu'est ce qu'on fait là, finalement, nous, hein? Je vous mets des mots dans la bouche, mais : Faites vos affaires, corrigez ce que vous avez à corriger sur certaines institutions ou certains établissements d'enseignement privés qui dépassent les bornes, mais nous, là, à 9000, en tant que regroupement, on ne devrait pas être concernés par votre projet de loi. C'est ce que vous dites?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, je me permets de le remontrer. Je trouve que c'est un tableau qui est très, très parlant. Sur la totalité des étudiants internationaux, on est la petite ligne bleue. Et non, effectivement, on ne se sent pas... C'est pour ça que je pense qu'il faut être très prudent de ne pas jeter le bébé, ou le réseau collégial, avec l'eau du bain et d'être très prudent dans la décision. Donc, c'est pour ça qu'on soulignait d'entrée de jeu l'importance de ne pas faire un amalgame et de mettre l'ensemble des établissements dans le même bain, là.

M. Cliche-Rivard : Par contre, ce matin, en mêlée de presse, ayant connu vos revendications, le ministre les a jugées comme étant...

M. Cliche-Rivard : ...déraisonnable. Est-ce que vous, vous avez une réponse face à ce critère, raisonnable ou pas, là, de votre revendication? J'imagine que vous, vous la pensez raisonnable. Qu'est-ce que ça vous fait d'entendre ça que vos revendications sont déraisonnables aux yeux du ministre?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, est-ce que c'est la revendication d'être concertés et consultés en amont, notamment...

M. Cliche-Rivard : Celle de vous exclure...

Mme Montpetit (Marie) : De nous exclure? Bien, écoutez, on serait... on sera bien curieuses d'entendre ses arguments pour le fait de nous inclure. Je comprends qu'il y a une volonté de se donner les moyens de serrer la vis, comme ça a été mentionné, dans des cas d'abus.

M. Cliche-Rivard : Avec raison.

Mme Montpetit (Marie) : Ce n'est pas le cas du réseau collégial, il n'y a pas... il n'y a pas d'exemple en ce sens. Vous avez des exemples qui répondent à la raison pour laquelle on va à l'international, recruter. Il n'y a pas d'enjeu pécunier, ce n'est pas une vache à lait, ce n'est pas, ce n'est pas... ce n'est pas l'essence même de la démarche. C'est vraiment pour répondre à la mission éducative et répondre aux besoins du Québec.

M. Cliche-Rivard : Non, quand même. Puis, vous l'avez montré plusieurs fois dans votre tableau, la petite ligne jaune, elle baisse pas mal aussi, il y a des choses qui ont... qui ont été faites. On voit qu'en 2020 ils sont presque au triple de votre petite ligne verte, là, puis, finalement, on diminue jusqu'à être en dessous de vous en 2023. Donc, il y a des correctifs qui ont été apportés. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y a pas de récalcitrants. Au contraire, il y a des gens qui... il va falloir qu'on corrige puis il y a des choses qu'il va falloir qu'on... qu'on améliore mais, vous l'avez dit, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Puis vous, vous êtes... vous ne devriez pas être concernés par ce projet de loi là, dans la mesure où ça fonctionne bien pour les cégeps, là.

Mme Montpetit (Marie) : Bien, vous me permettrez d'ajouter que, dans le plan stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur, qui a été déposé il y a tout juste un an, le recrutement à l'international était encore une priorité...

M. Cliche-Rivard : Voilà.

Mme Montpetit (Marie) : ...notamment pour répondre à des cibles francophones, parce que la majorité des étudiants, aussi, internationaux parlent le français, viennent répondre à des... des besoins qu'on a localement. Et, je le répète, on a répondu à... plusieurs fois à l'appel du gouvernement pour répondre à des besoins. Donc, même au niveau des augmentations qu'il y a eu, dans les dernières années, dans le réseau collégial public, c'est, généralement, en réponse à des initiatives gouvernementales qui ont été mises en place.

M. Cliche-Rivard : Mais vous faites bien de mentionner le virage à 180 degrés. On venait de mettre le PEQ diplômé à l'extérieur des cibles, puis finalement on vient suspendre ce programme-là pour huit mois. Alors, on ne sera pas au premier revirement de situation, mais, quand même. Merci d'avoir été là. Merci beaucoup.

Mme Montpetit (Marie) : Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va terminer nos échanges avec le député de Jean-Talon pour une période de 3 min 18 secondes.

M. Paradis : Oui, en fait, je vais continuer dans la foulée de mon collègue de Saint-Henri-Sainte-Anne. Vous nous dites essentiellement qu'il y a une grande différence entre le réseau universitaire et le réseau des cégeps, et particulièrement le réseau des cégeps publics. Le tableau que vous nous avez montré déjà, à quelques reprises, montre qu'en gros il y a une stabilité ou il y a une croissance raisonnable, contrôlée et éthique du nombre d'étudiants au cégep. Et il n'y a pas de pic à partir de 2018, ce qui n'est pas le cas dans le réseau universitaire, mais il y a un pic. Est-ce que vous êtes d'accord qu'il y a une question de mode de financement qui vient compter dans cette différence-là? Parce que, vous l'avez mentionné tout à l'heure : Nous, on n'a pas de prime à avoir des étudiants internationaux. C'est une question de philosophie, de contribution, de nécessité dans certaines régions. C'est bien ça?

M. Gobeil (André) : Tout à fait. Effectivement.

M. Paradis : Bon, et là vous nous dites : Il faut des règles, il faut tenir compte aussi des besoins dans chaque région et vous demandez une vision régionale de ces enjeux-là. On est d'accord avec vous. Vous nous parlez aussi de l'importance d'avoir de la prévisibilité. Vous le rappelez, dans votre mémoire, à la page 17, qu'il y a un plan pour un étudiant international, ça se prévoit longtemps à l'avance, que la réputation du Québec à l'échelle internationale compte. Est-ce que vous voyez c'est quoi, les prévisions du gouvernement dans le projet de loi n° 74 pour les cégeps? Est-ce que vous avez cette prévisibilité actuellement?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, écoutez, ce qu'on ce qu'on voit à l'heure actuelle, c'est, vous mentionnez...  Votre collègue mentionnait le fait quatrième volte-face en moins de cinq ans, une dizaine de modifications qui ont été faites... tout ce qui encadre les étudiants internationaux dans la dernière année, tant par le gouvernement fédéral, que par le gouvernement provincial. Je pense qu'il faut être prudent de jouer au yoyo, ce n'est pas un robinet qu'on peut ouvrir, qu'on peut fermer. On est dans une situation, je ne vous l'apprendrai pas, comme parlementaires au Québec, où il y a près de 1 million de Québécois qui vont prendre leur retraite d'ici 2030. Il faut trouver une façon de combler et répondre à ces besoins de main-d'oeuvre là, notamment, dans des secteurs névralgiques publics.

Donc, il faut avoir, je le répète, une prévisibilité, parce que c'est des mois et des mois et des années de travail d'aller faire du recrutement à l'international pour répondre à des besoins. Il faut laisser l'agilité aux cégeps aussi d'être capables de s'ajuster selon les besoins qui peuvent être modifiés. Donc, la prévisibilité, c'est absolument nécessaire.

• (16 h 50) •

M. Paradis : Et est-ce que vous savez où est-ce que le gouvernement veut aller relativement aux cégeps? Parce que là, actuellement, ce qu'on a, c'est du mur-à-mur, on ne fait pas la distinction entre les réseaux. Est-ce que vous avez une idée de ce qu'ils voient pour les cégeps?

Mme Montpetit (Marie) : Bien, c'est le principal problème du projet de loi, c'est cette ambiguïté ou c'est ce flou où il n'y a pas de balise comme telle, et qu'on ne voit pas les objectifs qui sont recherchés par la suite. Qu'est-ce qui arrivera une fois que le projet de loi sera adopté? Est-ce que c'est une diminution? C'est une diminution dans quel type de...

Mme Montpetit (Marie) : ...de quelle façon, à quel rythme, ça fait partie des éléments qui ne figurent pas à l'heure actuelle dans le projet de loi,

M. Gobeil (André) : Oui. Non, mais je disais que cette prévisibilité-là, pour nous, est essentielle. Parce que lorsque... à chaque fois qu'il y a une annonce, la vitesse que les nouvelles circulent, on sent les impacts. Une année, le ministre Boulet a parlé notamment de gratuité pour des étudiants internationaux, et tout de suite on a senti... dans l'ensemble du Canada, on a senti une réaction. Il n'y a plus personne qui voulait aller ailleurs. Ils voulaient tous venir au Québec parce qu'ils pensaient que c'était gratuit.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Sur ces bons mots, je vous remercie à nouveau de la l'apport ...(panne de son)...

Et ...(panne de son)... quelques instants, le temps que le prochain groupe s'installe. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 51)

(Reprise à 16 h 56)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, nous recevons...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration, qui est représentée par Me Patrice Brunet, membre du conseil d'administration, ainsi que Maître Ismaël Boudissa, membre du conseil d'administration également. Alors, bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. Alors, le déroulement : vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour votre... la présentation de votre argumentaire, l'essentiel de votre mémoire, ensuite, on va procéder à une période de questions avec les parlementaires. La parole est à vous.

M. Brunet (Patrice) : Merci de nous recevoir. C'est un plaisir d'être avec vous aujourd'hui pour présenter nos observations au projet de loi.

Je veux commencer avec un préambule. L'AQAADI, l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration, est une organisation qui regroupe et représente plus de 500 avocats spécialisés en immigration au Québec, membres du Barreau du Québec. Nous avons des intérêts qui sont... qui rejoignent des objectifs d'équité, de recherche de la justice et également, pour le sujet qui nous occupe aujourd'hui, de prévisibilité d'un système d'immigration qui transcende les intérêts pécuniaires des avocats, mais aussi les intérêts des travailleurs étrangers et aussi des entreprises que nous représentons.

Donc, c'est avec grand intérêt que l'AQAADI a pris connaissance du projet de loi qui a été... qui a été déposé. Puis on désire saluer également les orientations générales du projet de loi pour prendre en compte les orientations et les objectifs fixés au plan annuel d'immigration des besoins économiques et de main-d'oeuvre.

Nous tenons à souligner que la grande majorité des étudiants étrangers sont des étudiants de bonne foi dont la contribution à la société québécoise est impossible à déterminer avant souvent plusieurs années et parfois plusieurs décennies.

Nous allons concentrer notre intervention et nos commentaires aujourd'hui sur le caractère d'imprévisibilité et le caractère soudain que le projet de loi accorde au ministre en poste. Et nous souhaitons apporter nos observations sur ce point puisque le programme des étudiants étrangers doit bénéficier d'une prévisibilité pour des raisons sociales, mais également pour des raisons économiques.

Alors, en préambule, on ne remet aucunement en question la compétence et l'autorité du gouvernement de pouvoir fixer des objectifs, de pouvoir fixer des quotas en matière d'immigration. C'est la prérogative du gouvernement du Québec et aussi du gouvernement du Canada, évidemment, de pouvoir établir des chiffres, mais tout ça doit être fait dans un contexte qui respecte non seulement les traditions du Québec, mais aussi qui respecte les fondements de la société dans laquelle nous sommes. Donc, nos observations ont été regroupées sous cet angle.

7. Le chiffre 7. Donc, les échanges culturels et intellectuels innovation, recherche, développement économique, réseaux internationaux, constitution et renouvellement des CAQ, retour au pays d'origine, rétention des talents. Je vais être bref, vous avez déjà copie de notre mémoire. Donc, pour vous mettre en contexte, c'est pour vous... pour vous le rappeler, vous le savez tous que depuis l'antiquité les étudiants étrangers ont été des vecteurs d'échange culturel et intellectuel. Les étudiants grecs et romains voyageaient à Alexandrie et à Athènes, mais aussi vous savez que les cathédrales de France ont été pour la... en grande partie fabriquées par les travailleurs qui venaient d'Italie et par les étudiants qui... les étudiants en arts.

• (17 heures) •

Une étude récente portant sur 6 000 étudiants étrangers dans 114 pays indique que 66 % des étudiants étrangers considèrent plus d'un pays dans leur décision d'étudier à l'étranger. Et le Canada et l'Australie ayant récemment annoncé leur souhait de limiter le nombre d'étudiants étrangers, les étudiants explorent déjà d'autres options comme destinations potentielles. Donc, le Québec risque de perdre. En créant un climat d'incertitude sur le traitement des permis d'études, le Québec risque de perdre des candidats qui sont essentiels et qui sont importants, au bénéfice non seulement d'autres pays, mais également d'autres provinces canadiennes. Les étudiants étrangers contribuent également souvent à l'innovation et à la recherche dans le pays d'accueil. Je ne vous referai pas les présentations des dirigeants des établissements d'enseignement qui ont été devant vous, mais ces retombées ne sont que rarement immédiates et peut-être...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Brunet (Patrice) : ...recomptabilisé après quelques années ou même après quelques décennies. Nous considérons que les établissements d'enseignement ont tous les outils et les compétences nécessaires pour choisir les étudiants étrangers appropriés, et il serait... il est surprenant et même nouveau, novateur, pas nécessairement dans le bon sens, que le gouvernement du Québec intervienne dans la décision des institutions d'enseignement pour choisir quels seraient les étudiants qui devraient bénéficier d'un permis d'études.

 Les étudiants étrangers, évidemment, on ne pourrait pas passer sous silence le développement économique des étudiants étrangers. Selon une étude de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain portant sur 2019‑2020, donc avant la pandémie, les 50 000 étudiants de l'extérieur qui fréquentaient les établissements universitaires apportaient des retombées économiques au montant de 722 millions de dollars dans la région, la grande région de Montréal seulement. Donc, l'imprévisibilité de l'impact du projet de loi pourrait mettre en péril cet impact économique et la renaissance économique attendue du centre-ville de Montréal.

Et finalement, évidemment, un étudiant étranger qui complète ses études au Québec est un ambassadeur du savoir à travers le monde, non seulement pendant ses études, mais lorsqu'il retourne dans son pays d'origine, il apporte un savoir technologique, mais également tout un réseau de contacts et est un ambassadeur pour le souvenir du Québec de son... de son passage au Québec pour les décennies qui suivent. Je passe la parole à mon collègue Me Boudissa.

M. Boudissa (Ismaël) : Oui. Donc, on parle de prévisibilité, c'est c'est exactement notre point, mais il faut aussi travailler sur, une fois qui sont déjà ici au Québec, comment peut les accompagner dans leur cheminement académique parce qu'il faut comprendre que, selon le Règlement sur l'immigration du Québec, un étudiant doit faire de ses études sa principale activité. Et ça, ce n'est nullement défini, ni dans le règlement ni dans aucun guide de procédure interne. Donc, au niveau fédéral, qu'est-ce que ça veut dire de poursuivre ses études? C'est d'être minimalement inscrit à temps partiel et d'avancer raisonnablement vers l'obtention de son diplôme. Au Québec, la conception des choses et comment le MIFI applique et interprète son règlement, c'est qu'il faut être absolument inscrit à temps plein, et ce, pendant toutes les sessions.

Donc, c'est certain, il va sans dire que ce n'est pas toujours possible d'être inscrit à temps plein, que ce soit à cause de la disponibilité des cours, hein, il faut avoir parfois des cours qui ont des prérequis, il y a des cours qui ne sont pas offerts à toutes les sessions. Alors, un étudiant, à cause de comment son département fait la grille de cours, pourrait être amené à ne pas pouvoir faire le cours qui est nécessaire pour son diplôme et être inscrit à temps partiel. Renouvellement du CAQ. Le CAQ est refusé. Et à ce moment-là, bien, l'étudiant se retrouve sans recours. Il doit faire soit administratif ou aller dans une autre province. Et actuellement, le MIFI est extrêmement strict et ne considère aucune condition particulière que ce soit problème de santé mentale, isolement. Donc, les étudiants locaux ont eux aussi tout le loisir d'être des étudiants à temps partiel. Mais malheureusement, les étudiants immigrants n'ont pas... n'ont pas ce luxe.

Donc, il y a aussi... Il y a une question de bienveillance de la part du MIFI et d'accompagner les étudiants étrangers lors de leur cheminement académique. Et ça, ce serait... ça aurait été une belle occasion de justement définir qu'est ce que c'est de faire ses études sa principale activité. Ce n'est pas parce que j'ai quatre cours ou trois cours que je ne suis pas au Québec pour étudier. Cela est d'autant plus vrai puisque le nouvel article 104.2 du même règlement prévoit que le ministre peut rejeter une demande si la personne n'a pas fait de ses études sa principale activité dans les cinq dernières années. Donc, là, à ce moment-là, avec seulement une cession à temps partiel, selon comment le règlement est rédigé, on pourrait ne plus pouvoir déposer demande pendant cinq ans, et il va sans dire que ça peut poser beaucoup de problèmes sur le... sur le cheminement.

Ensuite, la proposition dans ce projet de loi de lier le CAQ, le certificat d'acceptation du Québec à une école peut, dans le même... même esprit, limiter ce que l'étudiant peut faire. Donc nous, ce qu'on recommanderait, c'est de plutôt, si l'établissement d'enseignement est dans la liste qui est préalablement définie par le MIFI, bien, à ce moment-là, l'étudiant pourrait changer d'établissement pour des raisons diverses. C'est sûr qu'il faut, quand on parle de prévisibilité et de comment le gouvernement envoie ses messages, il faut parler de la rétention des talents puis de qu'est-ce qu'il se passe après le diplôme.

Donc, l'année dernière, la ministre Fréchette disait qu'on va exempter les personnes qui sont diplômées du quota, puisque ce sont des immigrants parfaits. Ils parlent français, ils sont déjà logés, il n'y a vraiment aucun problème. Et le ministère n'avait probablement pas prévu que plusieurs personnes allaient désormais...

M. Boudissa (Ismaël) : ...déposer la demande puisqu'ils sont maintenant admissibles, et là, une année plus tard, bien, on les suspend pendant huit mois parce qu'on n'avait comme pas vraiment anticipé, malheureusement, qu'on allait devoir traiter toutes ces demandes. Et donc c'est un peu ça, le message que l'on veut donner aujourd'hui. Il y a beaucoup d'incohérence, puis, pour nous, ça touche à des principes fondamentaux d'équité procédurale, d'une certaine expectative d'un droit, même si le gouvernement a tout à fait le droit de faire ses propres limites, ses propres seuils, mais il faut quand même penser à au moins l'année prochaine si les seuils ne seront pas dépassés.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Juste petit rappel, au cas où ça reviendrait. Ici, on nomme les élus par leur circonscription ou leur titre, à ce moment-ci. Alors, on commence la discussion avec la banquette gouvernementale. Seize minutes 30 secondes.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Il y a... Il y a un paquet d'établissements qui sont passés devant vous... avant vous aujourd'hui, qui nous ont parlé de la richesse que ça représente pour le Québec, pour les établissements, pour la recherche, pour les régions, d'avoir des étudiants étrangers, des étudiants internationaux. Je suis parfaitement d'accord avec ce qu'ils ont déclaré ici. On est d'accord. Il ne s'agit pas de fermer les vannes, dire qu'on ne veut plus d'immigrants, on ne veut plus d'étudiants étrangers, ce n'est pas le cas. Je pense qu'on veut tout simplement avoir un meilleur contrôle, parce que, quand on parle d'étudiants étrangers, on parle aussi de notre politique migratoire, on parle du nombre de résidents non permanents sur le territoire, puis la capacité d'accueil n'est pas infinie.

Je vais donner un exemple de dérapage actuel, dans l'état de droit actuel. Du 1er janvier au 30 juin 2023, il y avait... Pardon. C'est ça. Du 1er janvier au 30 juin 2023, il y avait 4 400 CAQ études délivrés pour le secteur privé. Un an plus tard, pour le même secteur privé, dans... en enseignement supérieur ici, 16 053 CAQ études. On est passé de 4 400 à 16 053. On n'est pas dans nos cégeps, on n'est pas dans nos grandes universités, dans nos universités UQ, etc. Donc, il y a quand même certains secteurs où il faut se poser des questions.

Si on n'adoptait pas le projet de loi actuel, notre seul outil pour essayer de colmater cette brèche, ça serait de réduire le nombre de CAQ émis, en espérant que ça soit dans ces institutions-là que les CAQ ne sont pas émis. Parce qu'en ce moment on n'a pas d'outil législatif qui nous permet d'avoir l'habileté, quand je dis être chirurgical, là, d'aller cibler un programme, une région, etc.

Donc, considérant ceci, je vous donne un exemple, j'aurais pu en donner d'autres, est-ce que vous ne trouvez pas légitime qu'un État national qui veut gérer son immigration se donne les moyens d'agir correctement pour éviter les abus sans s'attaquer aux institutions qui assurent notre développement économique puis, je vous dirais, l'occupation de notre territoire?

M. Brunet (Patrice) : La réponse, c'est que je suis 100 % d'accord avec ce que vous avancez, avec le seul bémol que... évidemment, il y a un bémol, qu'on doit s'assurer qu'il y a une certaine prévisibilité dans le temps. Un projet d'études se planifie au moment de l'adolescence dans le pays d'origine de l'étudiant, lorsqu'il a 15 ans, 16 ans, 17 ans, il ou elle. Et donc il y a des décisions qui sont prises en amont qui mériteraient d'avoir une planification sur plusieurs années, évidemment en collaboration avec les établissements d'enseignement qui, eux, ne seraient pas confrontés à admettre aux études, dans un programme académique, un étudiant, pour que, finalement, cet étudiant-là soit refusé parce qu'il n'a pas pu avoir son CAQ et qu'il doive possiblement perdre son année académique, sa première année académique, parce qu'il n'a pas pu entrer dans un établissement au Québec même s'il avait une lettre d'admission.

• (17 h 10) •

Donc, le principe du projet de loi, nous sommes d'accord avec. Par contre, le diable est dans les détails. Pour prévoir une planification pluriannuelle, pour qu'on sache, entre 2026 et... On a vu les chiffres du gouvernement, vous avez déjà planifié...

M. Brunet (Patrice) : ...les entrées au niveau des CSQ qui seront émis, il y a des CAQ qui seront émis pour... jusqu'en 2026. Donc, une planification pluriannuelle pour prévoir par exemple, peut-être aussi... de façon aussi granulaire que par établissement, combien ils pourront admettre d'étudiants étrangers pour les universités et les établissements... les établissements, pour qu'ils puissent eux-mêmes aussi planifier. Et, de cette manière, ça va permettre d'avoir une prévisibilité pour l'étudiant et pour ses parents de prévoir leur cheminement académique. Ne faites pas... ne faisons pas d'erreur, l'erreur ici de croire que tout le monde veut venir au Québec. Oui, beaucoup de gens veulent venir au Québec, mais on veut s'assurer de continuer à attirer les candidats académiques de premier choix et non pas ceux qui vont choisir le Québec par défaut, parce que toutes les autres portes leur auront été fermées.

M. Boudissa (Ismaël) : Oui, puis j'ajouterais aussi qu'on... c'est ça, on n'est pas contre le désir de vouloir mieux contrôler quels établissements d'enseignement peuvent dispenser des cours et donner des diplômes. C'est sûr que, quand c'est un collège privé ou un établissement privé, le gouvernement a moins de marge de manœuvre. Par contre, on aimerait faire confiance au législateur quand il dit qu'il veut simplement s'attaquer au problème que vous... que vous... le ministre parle sur les établissements privés. Par contre, ce que ça fait, c'est que, là, aujourd'hui, il y a une suspension de toutes les demandes de sélection permanente, tous établissements confondus. Donc, c'est ça, le problème de prévisibilité, c'est que, oui, le ministre ou le gouvernement veut se donner plus de pouvoir, plus de marge de manœuvre, mais comment le pouvoir va être exercé, ça, c'est la question qui nous touche plus particulièrement.

M. Roberge : Mais il y a... vous, vous me parlez de la décision qu'on a prise la semaine dernière, qui n'est pas l'objet du projet de loi, mais qui touche la notion... l'immigration et du PEQ, le fameux programme PEQ diplômé. La capacité d'accueil du Québec, elle n'est pas infinie. Je veux dire, il y a plus de gens qui veulent venir que de gens qu'on peut accepter. Puis vous l'avez dit, idéalement, on choisit, on repêche au premier tour, comme on dit, hein, et je pense que c'est le cas encore aujourd'hui. Mais quand je dis que notre capacité d'accueil n'est pas... n'est pas illimitée, bien, écoutez, on a des étudiants qui sont venus ici, qui ont énormément de misère à se trouver des logements, qui en trouvent qui sont très loin de leur institution, ça coûte beaucoup plus cher que ce qu'ils pensaient. Et même, en venant, ils contribuent à augmenter les loyers pour ceux qui sont déjà là. Plusieurs arrivent finalement... demande l'asile, leur projet d'études n'en était pas un. En pourcentage, c'est peu, mais il y a des resserrements à faire. D'ailleurs, les universités nous l'ont dit ce matin, qu'ils prenaient acte de ça puis qu'il allait y avoir des resserrements.

Donc, quand on sait que notre capacité d'accueil n'est pas infinie, quand on sait que les cégeps et les universités nous demandent d'ailleurs de l'argent pour agrandir leurs institutions, en partie pour accueillir des étudiants étrangers, il faut s'assurer, je pense, comme État national, qu'une grande partie des gens qui arrivent ici, bien, vont arriver dans des régions où on va être capables de les accueillir, vont en majorité étudier dans la langue nationale, vont étudier dans des secteurs qui sont en pénurie, soit qui sont des secteurs porteurs pour notre économie, soit qui sont en pénurie, là, santé, éducation, services sociaux. Il me semble que c'est la moindre des choses que de faire ça.

Et, si on ne le fait pas, Ottawa va le faire. Ils ont commencé d'ailleurs, hein? On dit qu'on contrôle notre immigration dans certains secteurs, notamment pour les étudiants. Il faut prendre note que, depuis quelques semaines, Ottawa essaie... il le fait pour le reste du Canada, mais essaie de nous imposer un plafond pour les étudiants québécois. Et si, nous, nous ne faisons pas notre plafond, eux vont nous en faire, ils vont nous l'imposer. C'est ça qu'on est en train de faire puis ils sont en train de sélectionner... où les secteurs qui, d'après eux, vus d'Ottawa, devraient être les secteurs porteurs pour notre économie.

Donc, considérant tout ça, je sais qu'on pourrait souhaiter le libre marché, là, mais considérant tout ça, le libre marché n'est pas possible, là, jusqu'à l'infini, considérant notre capacité d'accueil et ce qu'Ottawa tente de faire. Est-ce que vous ne pensez pas que ce n'est pas la meilleure solution que de reprendre le contrôle de notre destin puis de voir aux intérêts du Québec avant que le Canada débarque puis essaie de gérer nos étudiants étrangers?

M. Boudissa (Ismaël) : Sur la question du logement, c'est... On comprend que l'objet du projet de loi, c'était... on parlait beaucoup de... en un an, deux ans, trois ans, les étudiants étrangers, ça allait exploser. Mais la crise du logement, qui a été, rappelons-le, récemment reconnue, ne date pas d'il y a deux, trois ans. Donc, c'est sûr que de dire que la crise du logement, c'est attribuable à l'augmentation des étudiants étrangers, ou on ne va pas donner les certificats de sélection du Québec parce que...

M. Boudissa (Ismaël) : ...que notre capacité d'accueil, elle n'est pas illimitée. C'est certain que, nous, on voit un petit problème avec ce lien-là qui est direct puis qui, semble-t-il explique la nécessité de déposer le projet de loi qui, rappelons-le, nous, on salue le fait qu'on doit mieux contrôler quels établissements d'enseignement doivent être reconnus et où les étudiants peuvent étudier sur la question d'Ottawa. Mais au final, les CAQ sont quand même délivrés par le gouvernement du Québec. Donc, même si Ottawa fait des plafonds ou dit : On va avoir... On va approuver des permis d'études pour tel établissement ou pour tel secteur, au final, si la personne n'a pas son CAQ, elle n'ira pas... elle ne pourra pas déposer une demande de permis d'étude. Donc, c'est en ce sens que, pour nous, le gouvernement du Québec, dans le programme des étudiants étrangers, a beaucoup de pouvoir et veut s'en donner plus. Mais la question c'est comment ça va être exercé et comment on va pouvoir mieux informer la population quand ils font le choix du Québec. Parce que, quand ils font le choix du Québec, bien, nécessairement, ça vient avec des petites obligations du côté de la société qui les accueille.

M. Brunet (Patrice) : Il y a deux points sur lesquels j'aimerais rajouter également. Pour avoir bien suivi l'actualité politique dans le reste du Canada, la réflexion et le réflexe du ministère de l'Immigration, fédéral, de limiter les permis et les visas d'étudiants hors Québec vient d'une problématique qui est beaucoup moins importante au Québec des établissements d'enseignement privés qui utilisaient le programme de visas d'étudiants aux fins de l'immigration, je dirais, plus que principalement, mais presque exclusivement. Donc, il y avait un modus operandi de certaines... certains établissements dans le reste du Canada qu'on ne retrouve pas vraiment ici au Québec. Maintenant, c'est à Immigration Canada et au MIFI à faire les contrôles. Vous avez tous les moyens pour exercer ces contrôles-là, mais il ne faut pas non plus réagir de façon... de façon exagérée sur ce que le Canada a décidé de faire pour restreindre leurs permis.

Et je veux tout simplement terminer en soulignant que ça prend aussi une cohérence. Vous avez... Vous avez souligné justement qu'on devrait peut-être privilégier les études dans des domaines qui sont en pénurie de main-d'oeuvre, mais, en même temps, on vient de suspendre les PEQ diplômés. Donc, qu'est-ce qui arrive avec ces diplômés à qui on ne donne pas l'accès à la résidence permanente par la suite? Donc, ça mérite une certaine réflexion, peut-être un pas de recul pour s'assurer qu'on est cohérent dans l'établissement de nos politiques.

M. Roberge : Juste avant de passer la parole à ma collègue, une suspension de quelques mois, ça ne veut pas dire que le programme est terminé, là. Attention! Ma collègue d'Iberville.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, le temps de parole est partagé avec la députée d'Iberville. Alors, la parole est à vous. Il reste 4 min 15 s

Mme Bogemans : Parfait. Merci, Mme la Présidente. Premièrement, j'avais des questions parce que vous disiez tout à l'heure que tant que l'établissement est reconnu, l'étudiant pourrait changer de place sans faire de modifications à son CAQ. Comment... Quel outil on pourrait mettre en place pour bien les suivre à ce moment-là?

M. Boudissa (Ismaël) : À l'heure actuelle, le CAQ, le consentement du ministre est délivré pour le niveau d'études et le programme. Donc, une personne pouvait changer d'établissement tant et aussi longtemps que c'était le même niveau d'études. Là, c'est... Dans le nouveau projet de loi, on veut aussi imposer une condition qui est : Si tu avais fait une demande dans cet établissement, tu dois poursuivre tes études dans tout l'établissement au complet. Donc, si la personne veut changer, elle devra faire une nouvelle de CAQ. Donc, c'est un peu ça, le problème que l'on y voyait, c'est que ça fait une embûche supplémentaire. Puis surtout, comme on le disait, il y a des problèmes dans les renouvellements de CAQ. Et là, à ce moment-là, la personne, bon, peut-être qu'elle manque une session, elle n'a pas son CAQ, il faut qu'elle change. Donc, ça fait... Ça fait beaucoup d'embûches pour l'étudiant qui, au final, si l'établissement pour lequel il veut faire la modification se trouve sur la liste reconnue par le ministère, remplit toutes les conditions et les critères que le ministère indique, bien, pourquoi le limiter à cet établissement précis là? C'est un peu ça, la question.

Mme Bogemans : Puis moi, ma question était vraiment... Parce que la banque de données sur le cheminement scolaire, c'est quand même intéressant puis on est capable de savoir, par exemple, leur niveau de francisation au bout de leurs études, quelle est la langue de travail, dans quel domaine, est-ce que c'est significatif? Puis tantôt, vous nommiez bien le gros impact sur notre société. Ça fait que quel genre d'outils de contrôle et de suivi on pourrait mettre en place? Puis est-ce que vous trouvez que le CAQ pourrait être limitatif à ce moment-là?

• (17 h 20) •

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, l'outil de contrôle, c'est déjà ce qui est proposé dans le projet de loi, ce serait qu'il y ait une liste d'établissements autorisés. Et, à ce moment-là, à partir du moment qu'une personne veut faire la modification, bien, elle pourrait simplement informer le ministère, comme ça se fait déjà au niveau du fédéral, qu'on veut changer d'école. Bien, tant que c'est dans la liste des établissements...

M. Boudissa (Ismaël) : ...d'enseignement autorisé, on informe le ministère, et ça finit là, puisque l'établissement ait... reçu le veto du ministère du Québec.

Mme Bogemans : Parfait. Je comprends que pour vous, c'est suffisant. Ensuite, vous nommiez que, dans le parcours, le choix scolaire de décider d'étudier à l'international, ça se faisait très tôt dans la vie des personnes. Comment le Québec pourrait mettre en place des mesures pour bien outiller les jeunes dans leur décision ou, au moins, qu'ils... que ce soit dans leur choix, le Québec, finalement, puis s'assurer que ce soit dans les domaines qu'on a besoin au Québec, qui sont porteurs, pour faire des étudiants étrangers qui peuvent s'intégrer pleinement en tant que nouveaux Québécois?

M. Brunet (Patrice) : Je pense qu'on est dans une situation ici où on a un système qui fonctionne quand même très, très bien depuis des décennies. Il y a peut-être des... il y a toujours des ajustements qu'on peut apporter, mais cette discussion-là devrait avoir lieu, selon nous, avec les institutions d'enseignement, les établissements d'enseignement. Et s'il y a des chiffres à accorder, s'il y a des chiffres à se négocier, ça se fait avec les établissements d'enseignement sur plusieurs années qui leur permettraient d'accepter ou non de se concentrer sur certains domaines d'études et d'accepter ou non certains étudiants, avec toujours une prévisibilité qui serait administrative plutôt que politique.

Maintenant, je ne veux pas enlever l'intervention du politique non plus. On... ce n'est pas ce qu'on suggère. Le politique devrait quand même établir les grandes... les grandes lignes, la planification pluriannuelle, et devrait également intervenir auprès des établissements d'enseignement. Mais une fois que les chiffres sont entendus pour les années qui viennent, bien, c'est aux établissements d'enseignement à, tout simplement, les gérer administrativement.

Mme Bogemans : Puis dans l'attraction des grands talents, parce que ça doit faire partie aussi, dans la même ligne de pensée, d'attraction d'étudiants étrangers aussi, et même québécois, là, ça rehausse la valeur de tout le réseau, qu'est ce qu'on peut faire davantage au Québec?

M. Brunet (Patrice) : Simplement, leur donner une prévisibilité, parce que le Québec est très... se vend très, très bien. Les délégations qu'on a à l'étranger font leur travail. Les établissements d'enseignement également ont des... les ambassadeurs un peu partout dans le monde, les ambassadeurs sont également les anciens diplômés qui recommandent d'étudier dans les...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup.

M. Brunet (Patrice) : Pardon.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, le temps imparti au gouvernement est terminé. Je me tourne du côté de la position officielle avec le député de l'Acadie, mais c'est le nom de sa circonscription. Allez-y.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente, pour la précision. Mais vous savez, Acadie, on n'en sort pas, c'est partout. Alors, content, content que vous soyez là, Me Brunet, Me Boudissa. Ça déborde un peu l'analyse ou l'étude du projet de loi, mais on y a fait référence, le PEQ a été suspendu, il y a un moratoire. Pas très longtemps, le gouvernement a changé des règles du PEQ. Là, on va avoir un projet de loi qui va donner beaucoup de pouvoir au gouvernement. Dans votre pratique, les étudiants ou les gens qui terminent leur diplôme, ils doivent faire appel à vous, ils doivent être inquiets, parce qu'ils ne doivent pas savoir ce qui va arriver avec, évidemment, leur statut. Est-ce que vous avez, vous, une augmentation de vos demandes de consultation?

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, par rapport aux demandes d'augmentation, c'est sûr que notre clientèle nous écrit constamment, nous contactent constamment à chaque fois qu'il y a une annonce : Suis-je touché? Suis-je pas touché? Donc, certainement qu'on est appelé à se prononcer. Mais ce qui est encore plus inquiétant, c'est que lorsque l'on donne un conseil juridique à... le 30 octobre à 17 heures, on ferme l'ordinateur, on le rouvre le lendemain, tout ce que je viens de dire, c'est... ça ne s'applique pas au final. C'est ça, le problème de prévisibilité. Puis on posait la question : Comment on peut mieux accompagner les étudiants pour faire le choix du Québec? Bien, déjà, si on leur dit : Aïe, il y a un accès à la résidence permanente, que ce soit vrai, puis qu'on ne décide pas du jour au lendemain de le suspendre pendant huit mois, qui est quand même, en immigration, une période extrêmement longue puisque, pendant ce huit mois là, la personne doit soit renouveler son statut, soit penser à une autre stratégie. Et d'autant plus que les critères d'admissibilité pour un permis de travail fermé, dans le PTET, ont été resserrés, il y a beaucoup de personnes qui vont devoir retourner dans leur pays suite aux dernières annoncements... aux dernières annonces plutôt. Donc, c'est sûr que c'est difficile pour nous de naviguer, parce qu'on reçoit des... puis on n'est jamais informé d'avance, là, on reçoit la nouvelle comme tout le monde et puis on doit informer nos clients. Donc, c'est un peu ça, la prévisibilité. Le gouvernement veut donner... se donner plus de pouvoir, c'est sa prérogative, mais encore faut-il bien l'utiliser. Et malheureusement, dans le passé, avec tous les ajustements qu'il y a eu au PEQ justement, c'est difficile pour nous d'avoir confiance en... au gouvernement...

M. Boudissa (Ismaël) : ...dans l'établissement des critères d'admissibilité pour la résidence permanente actuellement.

M. Morin : Oui, mais là-dessus, vous n'êtes pas tout seuls, je peux vous le dire. Ceci étant, là il y a un moratoire sur le PEQ, donc, il y a des gens qui doivent avoir terminé leurs études, qui voulaient avoir un renouvellement, mais qui vont tomber pendant le moratoire, donc ils ne l'auront pas. Ça fait qu'on les a formés, mais ils vont s'en aller chez eux.

M. Boudissa (Ismaël) : Oui, dans le reste du Canada.

M. Morin : Bien, c'est ça. Donc, on a formé des gens ici, puis on va les envoyer ailleurs.

M. Brunet (Patrice) : Il y en a beaucoup qui y songent parce que...

M. Morin : Parfait, parfait. 

Une voix : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Quel est le règlement? Quel est le règlement...

M. Roberge : On fait part... C'est dangereux, là, parce qu'on parle de vraies personnes, là. On diffuse une information qui est fausse, qui peut changer le cours de vie. Ce qu'on dit ici, on a une responsabilité, là. Puis là ce que mon collègue vient de dire, ce n'est pas exact. Puis on dit qu'il y a des gens qui sont...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci... 

M. Roberge : Je ne peux pas laisser passer n'importe quoi, là...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est juste... S'il vous plaît...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vais juste vous demander d'être prudent dans vos propos, s'il vous plaît... Oui. 

M. Morin : Je suis d'accord. Alors, le ministre m'a empêché de parler comme parlementaire. Je trouve ça particulièrement dangereux, mais je vais évidemment me ranger à votre décision.

Ceci étant... Alors, merci pour votre réponse. Donc, avec ce projet de loi, j'ai l'impression que le gouvernement se donne un chèque en blanc et qu'ils vont être capables de modifier les règles au fur et à mesure qu'ils vont les faire. Donc, pour les gens qui sont ici, vous avez parlé d'absence de prévisibilité, comment ils vont être capables de naviguer là-dedans, comment vous allez être capable de les conseiller. Est-ce que vous ne craignez pas qu'on va augmenter des litiges, parce qu'à un moment donné il y en a qui vont contester les décisions du gouvernement?

M. Brunet (Patrice) : C'est difficile de rentrer dans des hypothèses de litige pour le futur. Nous, ce sur quoi on se concentre, c'est vraiment... Vous posiez la question, comment on réagit par rapport aux inquiétudes de nos clients qui nous appellent, qui nous écrivent, notre mot, pour l'instant, depuis quelque temps, c'est la prudence. On les incite à la prudence, avant de prendre des décisions qui impliquent des investissements de plusieurs dizaines de milliers de dollars, d'attendre. On a l'obligation également de conseil auprès de nos clients. S'ils nous demandent d'autres options et qu'on les connaît, qu'on est compétents pour leur offrir d'autres options... Mon collègue a évoqué le reste du Canada, il y a plus de stabilité, pour l'instant, pour le reste du Canada.

Puis je vais simplement terminer ma réponse en soulignant qu'il s'est créé une habitude, depuis le COVID, d'avoir... de réglementer l'immigration à coups de décrets et de mesures d'urgence. Mais il faut être très, très prudent.  On aimerait vous rappeler collectivement le contexte dans lequel ces décrets-là ont été adoptés. Ils ont été adoptés dans un contexte d'ouverture. On parlait de permis de travail qui permettait de changer d'employeur en dedans de deux semaines, qui sont toujours en cours maintenant. Donc, c'est dans un contexte d'ouverture. Donc, dans ce contexte-là, il y a peu de victimes, il y a seulement des bénéfices pour la société également. Ici, il y a cette habitude qui semble être récente, d'y aller, également, au niveau fédéral, d'y aller par coups de décrets avec effet instantané, mais en restriction.

Alors là, il faut faire une distinction, parce que, quand on le fait en restriction, il y a des vies qui sont affectées. Il y a des décisions financières qui sont affectées. Et puis il y a un message qui est envoyé à l'étranger, que le Québec, c'est peut-être... peut-être qu'on devrait attendre que tout ça se stabilise, parce qu'il y a beaucoup de poussières dans les airs. Alors, c'est le message que j'aimerais que vous reteniez, qu'on vous transmet de la part de nos clients qui sont les étrangers, mais également les entreprises du Québec.

M. Morin : Dans le projet de loi, le ministre veut modifier la Loi sur l'immigration pour enlever la prépublication des règlements, c'est à l'article 7, on parlait de prévisibilité. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, c'est sûr que de donner un préavis, c'est un peu ça, le point de notre intervention aujourd'hui, c'est les préavis, c'est la prévisibilité. Donc, c'est sûr que, lorsque le gouvernement souhaite enlever la période de préavis comme s'il avait besoin d'agir en urgence, alors, comme on le rappelle, que c'est normalement des choses qui se planifient sur des années, donc c'est certain que nous, s'il n'y avait pas besoin d'ajouter cette disposition-là dans le projet de loi, ou si, plutôt, le gouvernement se disait qu'il pourrait prépublier ces nouvelles mesures, ce serait évidemment, ça va sans dire, l'idéal.

• (17 h 30) •

M. Morin : Je vous remercie. Ma collègue va avoir... Oui.

M. Brunet (Patrice) : La période, comme je le répète, la période de décision, pour un permis d'études...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Brunet (Patrice) : ...c'est différent probablement d'un permis de travail ou même de la résidence permanente, ça se fait sur plusieurs années. Et donc cette prépublication va donner, c'est vous les parlementaires, quoi, quelques semaines, quelques mois, mais ça...  Ce qu'on demande, c'est une planification pluriannuelle sur plusieurs années.

M. Morin : Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Alors, la parole à la députée de Mont-Royal Outremont. Il vous reste deux minutes 41 s.

Mme Setlakwe : Merci. J'aimerais qu'on revienne sur un élément de votre mémoire. Vous y avez fait allusion, mais on n'a pas... vous n'avez pas élaboré, donc j'aimerais que vous élaboriez sur Montréal. Puis je n'ai pas peur d'aller là, moi, j'ai peur qu'on coupe à Montréal. Autant je suis préoccupée par le développement de nos régions, il faut qu'on parle de Montréal, qui est une ville universitaire extraordinaire. Les étudiants internationaux, on les a à Montréal, on les veut à Montréal. Moi, j'habite Montréal depuis 30 ans. C'est une facette de notre ville que j'adore. Vous parlez... Et moi, j'ai peur ici, donc... Et j'implore le gouvernement de faire très attention à imposer un moratoire sur les étudiants internationaux à Montréal, dans un contexte où la pièce législative qu'on a sous les yeux, elle est très large, elle est... il y a peu de balises, elle n'est pas encadrée, il n'y a aucune prévisibilité. J'aimerais que vous élaboriez, s'il vous plaît, sur l'impact sur l'économie à Montréal.

M. Brunet (Patrice) : Bien, écoutez, ça me fait plaisir d'élaborer avec mes opinions personnelles, mais je vais limiter ma réponse aux opinions de l'association que je représente et puis du rôle que j'ai comme avocat qui représente des étudiants, des travailleurs étrangers et des entreprises.

Montréal, on le sait, c'est le moteur économique du Québec, c'est une des plus grandes villes au Canada. Et, autour de ce moteur économique, il y a une vie étudiante qui est importante et cette vie étudiante là doit être nourrie par des étudiants étrangers. Il n'y a pas une société qui peut se développer simplement avec son propre peuple. Les civilisations ont été bâties à travers les migrations et les étudiants étrangers font partie de cette équation. Et je ne pense pas que le Québec va innover s'il décide de fermer sa porte... ses portes... sa porte... ses portes aux étudiants étrangers. Mais je sais que le gouvernement ne veut pas aller là, il veut simplement se doter de balises et, j'en conviens, il a le droit.

Mais il y a un message qui est lancé à l'international puis c'est un message qui existe actuellement. Il est toujours temps de remettre le génie dans la bouteille, mais peut-être qu'il est trop tard pour les deux ou trois prochaines années. Il y a un message d'incertitudes qui vont affecter les grandes institutions d'enseignement, les établissements d'enseignement de Montréal. Vous avez eu des témoignages et vous allez continuer à en avoir, que ce soit de la Polytechnique ou de McGill. Les étudiants étrangers qui viennent dans un pays, qui viennent à Montréal souhaitent possiblement continuer à faire leur vie au Québec. Et le PEQ — Diplômés fait partie de cette équation-là. On vient de le retirer. Ça va peut-être revenir en juillet et...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci. Cette portion vient de se terminer. On poursuit avec le député de Saint-Henri Sainte-Anne pour une période de trois minutes 18 secondes.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, Me Boudissa, Me Brunet. Merci d'être ici aujourd'hui. Je vais aller sur des éléments techniques qu'on n'a pas discutés encore, l'article 1, là, sur le nouveau processus d'établissement d'enseignement désigné. À la fin de votre mémoire, vous parlez également d'équité procédurale. Puis j'aimerais ça vous entendre sur ce volet-là à savoir, là, on a un processus de désignation, est-ce qu'on a des critères, est-ce qu'on a un processus de suspension de désignation, bref, des institutions, là, qui vont être visées ou pas visées ou qui, tout d'un coup, feraient l'objet de suspension. Comment vont-ils se gouverner là-dedans?

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, c'est certain que si on voit du point de vue des établissements d'enseignement, c'est quoi, les critères pour l'obtenir, qu'est-ce qui fait que je peux perdre mon permis, donc... Puis là on remarque à la lecture du projet de loi que les préavis puis les avertissements, ce n'est pas vraiment vers là qu'on s'enligne. Donc, c'est sûr que ça, c'est une question que les établissements doivent... d'enseignement doivent eux-mêmes se poser. Donc, ça nous touche moins, nous, tu sais, l'association de juristes, mais c'est certain que les établissements d'enseignement vont devoir réagir rapidement et vont devoir, c'est ça, être vraiment à l'affût de ce qui est publié dans...

M. Cliche-Rivard : Ça fait que critères définis, avis, droit de réponse...

M. Boudissa (Ismaël) : C'est sûr, c'est très flou, c'est très flou.

M. Cliche-Rivard :  ...contestations, des éléments d'équité procédurale devraient être ajoutés, là.

M. Boudissa (Ismaël) : C'est très flou puis ça laisse place à un peu de bon vouloir du gouvernement en fonction de ce qui lui concerne.

M. Brunet (Patrice) : Oui, puis on pourrait voir comment c'est décliné par la suite, mais effectivement, il faut être prudent. En même temps, on a vu l'expérience du reste du Canada où il y avait des établissements d'enseignement qui étaient... qui étaient créés pour des fins d'immigration, je vais le dire comme ça...

M. Brunet (Patrice) : ...on ne veut pas que ça se répète au Québec. Puis ce n'est pas une mauvaise chose d'être proactif et d'anticiper ça, mais les détails seront importants puis les... s'il y a une révocation, ça prendra un processus qui sera équitable et qui va respecter toutes les parties.

M. Cliche-Rivard : Puis, dans la même veine, j'aimerais ça vous entendre sur la question d'un éventuel droit acquis ou de droits acquis pour les étudiants, les étudiantes qui sont visés par cesdits programmes advenant une révocation de désignation. On est déjà aux études, par exemple, dans un... dans une deuxième année de cégep ou d'un diplôme technique, on est sur le point de finir, là notre désignation suspend. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Puis, plus largement, dans tout le contexte de droit acquis qui a touché les étudiants internationaux dans les deux, trois, quatre, six dernières années, à savoir les modifications du PEQ et autres, puis la prévisibilité dont vous parlez, puis il ne vous reste pas beaucoup de temps, mais j'aimerais ça vous entendre sur l'importance du droit acquis pour les étudiants.

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, le droit acquis, c'est un concept assez particulier, il y a des critères qu'on doit respecter, mais c'est certain que, pour nous, on y voit une problématique, ne serait-ce que sur le plan humain, que... d'une personne qui reçoit un CAQ pour une école, finalement, deux ans sur trois, l'école perd sa désignation, on ose espérer que le gouvernement va donner un certain droit acquis pour les gens qui sont déjà aux études. Par contre, dans le passé, ça n'a pas toujours été le cas. Il a fallu se battre beaucoup puis faire des interventions plutôt médiatiques là-dessus. Donc, finalement, le droit acquis a été respecté pour la première mouture du PEQ, qui a finalement imposé une expérience de travail, qui a été enlevée l'année dernière, qui a... qui s'est soldé par une explosion des demandes, puis, finalement, on a... on a fini le programme. Donc, pour nous, la question des droits acquis, elle n'est jamais discutée lors des annonces. Par contre, ça doit être quelque chose qui doit être, pour nous, plus...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci.

M. Boudissa (Ismaël) : ...respecté.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Cette période se termine, mais, en fait, on... il nous reste un intervenant en la personne du député de Jean-Talon, pour trois minutes 18 secondes.

M. Paradis : Vous soulignez... je suis dans la foulée, là, de la discussion précédente, vous soulignez, à la page six de votre mémoire, là, la spectaculaire volte-face du gouvernement, entre le 1er novembre 2023 et le 1er novembre 2024, en ce qui concerne notamment les étudiants étrangers. Et là vous dites que ça, ça a l'impact suivant : «L'instabilité des décisions gouvernementales en matière d'immigration depuis plusieurs années ne leur inspire pas confiance», en parlant des personnes visées.

Quand vous regardez le projet de loi n° 74 actuellement, est-ce que vous voyez poindre quelque chose qui vous indique qu'on va vers de la stabilité? Est-ce que vous avez des chiffres? Est-ce que vous avez des données par rapport à ce que le gouvernement vise à faire en matière de planification?

M. Brunet (Patrice) : C'est... C'est un peu le sujet de notre inquiétude aujourd'hui, c'est que ça laisse une trop grande marge de manœuvre au ministre de pouvoir décider, selon l'humeur politique instantanée, de... des... de l'émission des CAQ. Et, je le répète, on n'a... on n'a aucune difficulté à ce que le politique détermine des objectifs, mais ils doivent être mesurés, calculés et anticipés dans le temps et non pas instantanés. Le projet de loi qui est soumis ici donne le pouvoir au ministre de prendre des mesures instantanées, et ça, c'est ce qui nous préoccupe.

M. Paradis : Très bien. Je vous amène ailleurs, ce n'est pas dans votre mémoire et dans votre témoignage, mais j'aimerais profiter de votre présence pour vous poser cette question-là. Ce matin, le commissaire à la langue française nous a parlé de cet enjeu ou de ce... de cette différence entre le nombre de personnes qui sont admises comme étudiants étrangers au Québec et le nombre de personnes inscrites. En gros, 125 000 personnes admises, 80 000 personnes inscrites au collégial ou à l'université. Et puis, dans un autre témoignage, on nous a invités à faire la différence entre les deux. Puis le commissaire a dit : Mais la différence entre les deux, on ne sait pas exactement où vont ces personnes-là, où sont ces personnes-là. Vous qui êtes dans le domaine, est-ce que vous avez une partie de la réponse à cette question-là?

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, peut-être quelques pistes de réflexion. Si la personne a son CAQ... n'a pas nécessairement son permis d'études. Il y a eu, dans le passé, des enjeux de refus d'étudiants destinés au Québec. Donc, si la personne a son CAQ... peut finalement ne jamais venir étudier au Québec, peut finalement bifurquer puis aller dans le reste du Canada. Il y en a une petite proportion qui soit demandent l'asile, soit transforment vers travailleurs. Mais, au final, la disparité entre les admissions vers le Québec et les inscriptions, pour nous, ça ne dénote pas un abus du système ou que les personnes viennent sous de faux prétextes. Souvent, c'est que soit la personne n'a pas son permis d'études et bifurque dans une autre province ou change de projet ou de pays, tout simplement.

• (17 h 40) •

M. Paradis : Donc, ce qui veut dire que, cette année, là, si on... c'est 125 000 personnes admises, 80 000 personnes inscrites, ça fait quand même une importante différence, là. Ça veut dire 45 000 personnes entre les admissions puis les inscriptions. Puis ça, c'est... ce que vous nous dites, là, c'est...

M. Paradis : ...c'est une partie de la réponse ou c'est le gros de la réponse?

M. Boudissa (Ismaël) : Bien, c'est-à-dire, à savoir si c'est une grosse disparité, bien, je ne saurais pas me prononcer là-dessus. Je n'ai pas vu les chiffres, je n'ai pas vu l'étude. Donc, voilà.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fin à nos discussions. Je vous remercie pour l'apport à nos travaux. Je vais suspendre la commission, le temps de... que les prochains puissent s'installer. Au revoir.

(Suspension de la séance à 17 h 41)

(Reprise à 17 h 47)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, je vais souhaiter la bienvenue à nos prochains intervenants qui sont les représentants de l'Université Bishop's, avec... représentés par M. Sébastien Lebel-Grenier, principal et vice-chancelier, ainsi que Mme Geneviève Gagné qui est Secrétaire général. Bienvenue. Ainsi que ceux de l'Université Concordia, représentés par M. Graham Carr, qui est recteur et vice-chancelier, ainsi que M. Pascal Lebel, Directeur général des relations gouvernementales. Alors, comme tous les autres, vous bénéficiez de 10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite, nous allons procéder à la période de discussion avec les élus. La parole est à vous.

M. Carr (Graham) : Bien, merci de nous permettre de participer au processus consultatif portant sur le projet de loi n° 74. Au cours des derniers mois, les étudiants internationaux ont souvent été montrés du doigt dans le discours public. Pourtant, selon de nombreuses données, le Québec ne peut pas se permettre de réduire de beaucoup le nombre d'étudiants internationaux universitaires.

D'abord, le Québec fait face à une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée. Les étudiants internationaux formés au Québec représentent un réservoir de talents précieux. De plus, réduire le nombre d'étudiants internationaux aura un impact majeur sur le financement des universités. Le sous-financement structurel des universités québécoises est déjà estimé à 2 milliards de dollars. Face à cela, le gouvernement a encouragé les établissements à augmenter leur recrutement international pour compenser le manque de financement public, apportant près de 520 millions de dollars par année. L'imposition de quotas pourrait entraîner des pertes significatives et aggraver davantage le sous-financement. Enfin, aussi l'essor de la recherche et de l'innovation québécoise qui serait en péril. Les universités, notamment à travers leurs chercheurs et étudiants aux cycles supérieurs, jouent un rôle crucial dans la recherche et le développement du Québec. Limiter le nombre d'étudiants internationaux dans les cycles supérieurs diminuera inévitablement la qualité et le volume de recherche et développement du Québec.

• (17 h 50) •

Pour renforcer la compétitivité du Québec, protéger et promouvoir la langue française, maintenir la viabilité financière des universités et soutenir l'essor de la recherche et de l'innovation québécoise, nous recommandons cinq modifications au projet de loi. D'abord, nous recommandons que les futurs quotas, un futur plafonnement ne s'applique pas aux étudiants universitaires. Nous souhaitons aussi que l'ensemble des établissements universitaires soient désignés d'office par l'article un du projet de loi n° 74. De plus, nous suggérons que l'article sept soit modifié afin de conserver la période de consultation à la Gazette officielle du Québec. Nous aimerions aussi que le projet de loi... prévoie le dépôt à l'Assemblée nationale d'une analyse comparative d'impact sur les établissements du réseau universitaire à la suite de nouvelles mesures. Enfin, nous recommandons qu'un plafond au quota ne se fasse pas sur la base de la langue d'enseignement...

M. Carr (Graham) : ...nous comprenons l'importance pour le gouvernement du Québec de pouvoir mieux contrôler le nombre d'immigrants temporaires sur son territoire, mais au-delà des chiffres, des seuils et des cibles, nous parlons d'individus talentueux qui considèrent le Québec comme un lieu d'opportunité, d'individus comme Gina Cody, arrivée à notre université en 1979 en provenance d'Iran, première femme à obtenir un doctorat en génie du bâtiment au Canada et aujourd'hui à la tête d'une grande entreprise en ingénierie. Elle a reçu un doctorat honorifique de l'Université de Sherbrooke il y a deux ans et elle est maintenant chancelière de l'Université Concordia. Au cours de sa carrière à la constamment redonné à la société qui l'a accueillie.

L'impact positif des étudiants étrangers, leur contribution à notre économie et à notre société sont indéniables pour le Québec et doivent être pris en compte. Merci pour votre écoute.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Mme la Présidente, mesdames, messieurs les parlementaires, je vais me concentrer sur certains éléments.

Premièrement, nous demeurons extrêmement surpris que les étudiants internationaux soient présentés comme un problème pour le Québec. On les voit vraiment comme une opportunité essentielle pour le développement du Québec pour attirer le talent et favoriser l'innovation ici, au Québec. Et la caractérisation de la situation que... ou du problème que poseraient les étudiants internationaux nous apparaît surprenante également.

Donc, quelques éléments sur Bishop's. Bishop's, c'est la deuxième plus petite université en termes d'étudiants internationaux au Québec. Il y a la TELUQ qui est un peu plus petite. On a 417 étudiants internationaux.... On prévoit avoir 417 étudiants internationaux cette année. Mais j'aimerais vous parler du portrait un peu plus complet des étudiants internationaux. Et je vous réfère à la page neuf de notre mémoire. Depuis 2014, parce que le ministre a utilisé les chiffres depuis 2014, on parle d'une augmentation de 24.4 % des étudiants internationaux au sein des universités de langue anglaise. Entre 2023 et 2024, il y a eu une chute de 9.4 % des étudiants internationaux. Pour l'Université Bishop's, la chute est de 27.7 %. Donc, c'est une chute qui est extrêmement significative pour nous et qui a un impact réel sur nos opérations, notre capacité de poursuivre notre mandat, qui est vraiment axé sur la diversité du corps étudiant.

Nous sommes une université qui est concentrée sur une mission qu'on appelle un « liberal education degree», donc qui est vraiment fondée sur une éducation libérale. Et ce modèle pédagogique repose sur la diversité du corps étudiant. L'incertitude qui a été créée ces dernières années a mis à mal notre capacité de poursuivre dans cette mission pédagogique.

Si on regarde les chiffres plus globalement, et encore une fois je vous réfère à la page neuf, les étudiants internationaux dans les universités à charte francophones ont augmenté de 46,9 % depuis 2014. Dans les universités du réseau de l'UQ, ils ont augmenté de 137,8 %. Alors, ces chiffres-là ne devraient pas être vus comme une menace. C'est en fait la réussite des mesures qui été ont mises en place... le succès des mesures qui ont été mises en place par le gouvernement, qui a encouragé les universités, particulièrement en région, à recruter des étudiants internationaux pour peupler les programmes et assurer la bonne gestion, la capacité de ces institutions-là de croître. Donc, encore une fois, on est surpris qu'ils soient caractérisés comme un problème.

Les chiffres pour les universités, le ministre a parlé de 120 000 étudiants, je crois que les chiffres ont été énoncés ce matin. Pour les universités, ça représente 57 000 étudiants. Donc, des personnes qui sont inscrites, qui sont dans nos universités, des vrais individus qui sont présents au Québec, c'est 57 000. Donc, on considère que ce n'est pas un problème de fond, c'est des personnes qui apportent vraiment une valeur réelle au Québec.

Maintenant, le climat d'incertitude qui a débuté l'an dernier a créé vraiment un impact significatif sur le recrutement. Ça a été le cas pour l'Université Bishop's. Mais je vous dirais qu'il y a d'autres éléments d'incertitude, qui sont sous-jacents au projet de loi, qui sont extrêmement préoccupants pour nous. Premièrement, l'article sept, le fait qu'on prévoit ne pas publier... prépublier, oui, tout à fait, ne pas prépublier les règlements est extrêmement préoccupant. Et, en termes de capacité des institutions de répondre et de dialoguer avec le gouvernement, bien, évidemment, ça élimine cette possibilité-là. L'absence de consultation préalable est extrêmement préoccupante pour nous. Vous savez, les...

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...et le recrutement des étudiants internationaux se planifie sur plusieurs années, pas sur quelques jours et quelques semaines.

Le projet présente également une attaque assez directe sur l'autonomie universitaire. Les investissements qu'on fait en termes de ressources humaines, de ressources matérielles, d'investissements en infrastructures sont basés sur une planification à long terme et sur des éléments d'excellence dans lesquels on pense pouvoir avoir un impact réel. De soumettre ces décisions-là, assujettir ces décisions-là à la volitique... la volonté politique du moment remet complètement en cause le modèle qui est à la base des relations entre le gouvernement et les universités au Québec, modèle qui a été réaffirmé dans la Loi sur la liberté académique. Donc, là aussi, on a de la difficulté à voir comment ça se justifie dans le contexte québécois.

Évidemment, le fait que les nos établissements ne soient pas désignés dans la loi, ne soient pas considérés comme des établissements désignés est une autre préoccupation aussi. C'est une autre... un autre niveau d'incertitude. Je vais maintenir à ceci pour l'instant. Je présume que vous aurez plein de... beaucoup de questions, mais je... en terminant, rappeler que les étudiants internationaux n'ont pas connu une hausse hors de contrôle dans les universités québécoises, certainement pas dans les universités de langue anglaise. Ils constituent un atout essentiel pour la compétitivité du Québec.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup pour ces présentations. Alors, on va commencer la période d'échange avec le ministre et la banquette gouvernementale. 16 min 30 s, la parole est à vous.

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci de vous être déplacés. Merci pour vos mémoires. J'apprécie particulièrement les données, les graphiques, les comparables. C'est intéressant effectivement de remettre les choses en perspective avec des chiffres puis aussi la... autant en comparaison entre les différentes institutions puis l'évolution dans le temps.

Juste quand même une précision, ça fait quelques personnes qui utilisent le mot «problème», Je n'ai pas utilisé le mot «problème» pour parler d'étudiants étrangers. Les étudiants étrangers ou internationaux ne sont pas des problèmes que nous essayons de régler. Nous ne disons pas qu'il n'en faut plus. Il y en avait, il va y en avoir encore. Les gens arrivent, puis ils n'arrivent pas ici en s'imposant. Ils arrivent ici parce qu'ils sont acceptés par les institutions, parce qu'ils reçoivent aussi un CAQ de la part du gouvernement du Québec, une autorisation de la part du gouvernement canadien. On pense qu'on devrait mieux contrôler l'arrivée de certains étudiants. On pense qu'il faut se poser la question lorsque les nombres augmentent. Puis on peut s'entendre sur qu'est-ce qu'une augmentation modérée, raisonnable, exagérée ou pas. Mais en aucun cas mon gouvernement ou moi-même on pense que des étudiants étrangers sont des problèmes. Ce sont des personnes qui viennent ici, qui veulent améliorer leur sort. Dans certains cas, ils veulent rester ici. Dans votre cas, ils veulent venir ici améliorer des compétences puis repartir. Mais je veux quand même replacer ça parce que, bien, parce que ce n'est pas exact.

Quand on regarde ce qui se passe en ce moment à l'échelle du Canada, on voit que le gouvernement fédéral a, l'an passé, annoncé une diminution de 35 % du nombre d'étudiants étrangers hors Québec, 35 % d'un coup, en un an, pas 35 % annoncé sur deux ans ou sur trois ans, 35 % en un an. Puis là ils nous disent : Bien, l'an prochain, ça va être un autre 10 %. Donc, 45 % en deux ans, c'est beaucoup. L'an passé, ça n'avait pas touché directement le Québec. Là, on se rapproche, là. Il y avait... On est sur la limite. Et ils ont aussi dit qu'ils voulaient toucher les secteurs via les permis de travail. Ensuite, ils veulent aussi toucher les secteurs, donc les programmes.

• (18 heures) •

Voyant cette initiative du gouvernement fédéral qui arrive sans nous consulter dans un champ de compétence, je pense, qui est le nôtre, est-ce que vous ne pensez pas que ça serait une bonne chose qu'on fasse une conversation nationale, comme ce qu'on fait ici avec les collègues parlementaires et les experts qui viennent défiler pour voir... Et si nous décidions par nous-mêmes qu'est ce qu'on ferait, est-ce qu'on déciderait d'en avoir davantage? Est-ce qu'on déciderait d'avoir le même nombre, mais peut-être dans des régions différentes, dans des secteurs différents? Est-ce qu'on voudrait réduire modérément, énormément, réduire de plus de 50 %, passer de 100 000 à 50 000 comme le Parti québécois? Je pense que c'est sain d'avoir cette discussion-là. Et ma question, c'est justement, voyant ce que le gouvernement fédéral est en train de faire, est-ce que vous ne pensez pas que ça serait mieux que ce soit notre État national, après une conversation comme celle que nous avons, qui devrions prendre ces décisions-là? Parce que le gouvernement canadien, je ne pense pas qu'il vous a... Je ne pense pas qu'il vous a convoqué en commission, comme nous le faisons, avant d'annoncer leur décret...


 
 

18 h (version non révisée)

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...Donc, sur le premier élément, vous avez parlé du... de l'idée de mieux contrôler. En fait, on est... Là aussi, on aimerait avoir plus de... une meilleure compréhension de ce qui est visé, parce qu'en lisant le projet de loi on voit une duplication de pouvoirs existants. Vous avez déjà des pouvoirs étendus lorsque vous attribuez les certificats d'acceptation du Québec, vous avez un pouvoir d'enquête qui est assez étendu, donc on ne voit pas en quoi la création d'un pouvoir discrétionnaire qui a un effet immédiat, donc qui n'implique pas nécessairement un dialogue, va aider à avoir cette conversation nationale. Je vous corrige aussi sur le fait que ça n'a pas eu d'impact l'an dernier, l'Université Bishop's a perdu 27,7 % de ses étudiants internationaux. C'est un impact, c'est un impact qui est très, très réel.

Donc, oui, c'est bien qu'il y ait une consultation. On est heureux de pouvoir venir vous parler de nos préoccupations aujourd'hui, ici, à l'Assemblée nationale, et c'est une bonne chose, mais la réalité, c'est que ce qu'on vise, ce qu'on prévoit dans la loi, c'est un pouvoir qui n'est pas encadré par un mécanisme de consultation. Et en fait c'est une application immédiate des règlements qui sont proposés à travers l'article 7. Donc, vous comprendrez qu'on n'a pas beaucoup confiance en l'idée que ce soit un dialogue qui soit engagé avec les universités, parce que les décisions qui vont être prises vont être des décisions qui risquent d'affecter l'ensemble des priorités stratégiques. C'est le gouvernement qui, de façon discrétionnaire, va pouvoir s'immiscer dans les programmes, dans les priorités universitaires, et ça, c'est une attaque frontale à l'autonomie des universités.

M. Carr (Graham) : Et pour ma part, si je peux répondre, M. le ministre, oui, je pense que tout le monde pense que c'est une bonne idée d'avoir une conversation sur l'immigration, mais, du côté universitaire, et moi, je parle pour l'Université Concordia, mais j'ai bien entendu plusieurs de mes collègues ce matin, je pense que l'enjeu, pour nous, c'est déjà on fait un très bon accueil pour les étudiants internationaux qui viennent étudier ici au Québec et on a besoin de ces étudiants, on a besoin de ces étudiants, surtout pour supporter nos programmes de recherche et développement qui sont très, très, très importants pour nous à l'Université Concordia. Alors, à mon avis, les étudiants internationaux représentent un grand atout pour le Québec et ça a été démontré pendant les dernières années. Et même le gouvernement l'a reconnu, l'a reconnu cette réalité, quand il a encouragé les universités, surtout les universités francophones, de faire encore plus de recrutement à l'extérieur avec un financement pour les aider de le faire, auquel l'université à l'anglais, à l'expression anglaise n'ont pas l'accès. Alors, je pense qu'il y a une reconnaissance, pendant même la dernière année, de l'importance de recruter les étudiants internationaux pour l'ensemble des universités au travers le réseau.

M. Roberge : Merci. Ce matin, notre premier intervenant, c'est le Commissaire à la langue française, qui a publié quelques études depuis la semaine dernière, notamment un tableau qui m'interpelle sur la probabilité d'utiliser le français au travail. On dit, bon, lorsque les gens font leur scolarité de base, primaire, secondaire en français, collégial en français, université en français, 88 % des chances qu'ils travaillent en français. Scolarité de base en français, cégep en anglais, on revient à l'université en français, 70 % de chance de travailler en français, donc on perd 18 % même si on fait le bac ou la maîtrise en français. Scolarité de base en français, collégial en français, mais la dernière tranche après quoi, 15 ans de scolarité en français, si on fait la scolarité universitaire en anglais, on tombe à 59 % de chance de travailler en français. Et si on fait primaire, secondaire en français, mais qu'on fait cégep et université en anglais, 32 % de chance de travailler en français. Quand on voit ces chiffres-là, ça peut nous interpeller quand même. Et ma question, c'est : Qu'est ce que vous pouvez faire de plus? Je sais que vous en faites déjà, de dire qu'il ne se passe rien, ce serait faux. Mais qu'est ce que vous pouvez faire de plus pour vous assurer que les gens qui diplôment dans vos institutions soient plus aptes et aient davantage de chances de travailler en français? Je ne suis pas contre le fait qu'ils maîtrisent la langue anglaise à 100 %...

M. Roberge : ...je souhaite que mes filles soient plus bilingues que moi, d'ailleurs elles le sont déjà, même si je me débrouille. Ceci dit, je souhaite que les gens travaillent en français. Vous pouvez faire quoi de plus que ce que vous faites?

M. Lebel (Pascal) : C'est une excellente question. Sur ce côté-là, bon, il y a tout le volet francisation qu'on travaille. On a des stages, notamment beaucoup des stages coops, à l'Université Concordia, en... où on va, évidemment, les encourager, ils vont... les étudiants vont aller travailler en français. Mais, au-delà de tout ça, ces études-là que le commissaire a partagées... Et j'imagine que... Bon, je n'ai pas toutes les sources, mais une des sources qui est souvent citée, elle a été citée notamment par le gouvernement dans son document sur la langue française, c'est... une étude de Statistique Canada de M. Lemyre. Et je comprends toute la notion de ces chiffres-là, mais la première chose que dit cette étude-là, de M. Lemyre, c'est... puis je vais la citer, c'est : «Il est également important de garder à l'esprit que le lien entre la langue de travail et la langue d'enseignement de l'établissement où a été obtenu le dernier diplôme peut résulter en préférences linguistiques antérieures aux études secondaires. De ce fait, il est impossible, impossible, d'établir un lien causal entre langue d'enseignement des établissements postsecondaires et la langue utilisée au travail.»

C'est important parce que, lorsqu'on regarde les statiques plus graves puis on fait ce lien-là, ça veut dire que, par exemple, des institutions francophones à Montréal, bien, c'est... le taux est double aussi pour les étudiants francophones, par exemple, pour travailler en anglais. C'est lié au fait qu'ils sont à Montréal, ce n'est pas le fait qu'ils sont allés à une université à... une université francophone à Montréal. On ne ferait pas ce lien-là, ce n'est pas un lien causal. Puis il ne faut pas oublier... Puis ça serait encore plus important si c'était le cas parce que 75 % des gens qui ont un diplôme... qui sont francophones, qui ont un diplôme d'une université francophone, c'est... dans 75 % des cas, c'est eux qui travaillent en anglais, donc... Mais ce n'est pas un lien causal, donc ce n'est pas... il faut faire à ce niveau-là.

L'autre chose qu'on doit aussi regarder, c'est dans quels secteurs vont ces gens-là. Puis un des trucs qui est amusant à ce niveau-là, c'est que le secteur le plus surreprésenté parmi nos étudiants qui sont francophones puis qui étudient chez nous, puis qu'ensuite travaillent en anglais, c'est le secteur de l'éducation. Et l'étude, justement, de Statistique Canada... énonce justement le fait que c'est parce que l'enseignement langue seconde en anglais est... c'est beaucoup des étudiants qui viennent chez nous. Donc, évidemment, ils travaillent en anglais mais ils travaillent dans les polyvalentes puis dans les écoles primaires au Québec.

Donc, on comprend tout ça. Ceci dit, je pense que, le commissaire a amené ces chiffres, il y a une corrélation, mais il n'y a pas nécessairement de causalité, puis c'est les études de... les études sur lesquelles sont basées qu'ils le disent. Maintenant, oui, on est toujours très, très ouverts. On fait beaucoup, je pense, pour le français, on a beaucoup de mesures, et on est justement en train de travailler avec le gouvernement, justement pour les étudiants... excusez-moi, les étudiants internationaux, pour les franciser le plus possible puis développer des programmes. Puis je pense qu'on a une bonne... pour l'instant, un bon travail qui est fait là, à ce niveau-là, là, pour développer quelque chose.

M. Carr (Graham) : Et, si je peux ajouter, déjà, à Concordia, les étudiants qui viennent de France sont très présents dans nos établissements et il y a... Avec les tendances d'inscription qu'on a remarquées pendant les deux dernières années et avec les annonces à venir, moi, je suis convaincu que, l'année prochaine, les Français seront la cohorte la plus importante d'étudiants internationaux à Concordia. Alors, ce n'est pas que les étudiants qui viennent des pays non francophones qui choisissent d'étudier avec nous autres.

Sur la question de qu'est-ce qu'on peut faire pour les aider à... de maîtriser le français. Comme vous le savez, l'année passée, les trois universités anglophones ont proposé au premier ministre de franciser à 40 % des étudiants étrangers non francophones qui viennent chez nous. On travaille déjà sur cet... vis-à-vis cet objectif parce qu'on veut donner la plus grande possibilité pour nos étudiants de faire des stages, des stages de coop, etc., avec les entreprises québécoises, comme une partie de leur formation académique chez nous. Alors, nous sommes très investis dans la francisation... nous sommes déjà très investis dans la francisation de nos étudiants. Nous sommes à la recherche d'encore plus d'étudiants internationaux francophones. Alors, je pense que nous sommes dans la bonne... dans la bonne piste... sur la bonne piste vis-à-vis votre question.

• (18 h 10) •

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui, très rapidement. Merci, M. le ministre, pour la question, c'est une excellente question, là. Première chose qui est peut-être évidente, là, mais c'est que ma communauté est francophile, elle a choisi un francophone pour diriger une institution anglophone qui existe depuis 180 années. Donc, je crois que ça en dit beaucoup. Maintenant, sur le fond, nous...

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...bon, déjà, un éventail très étendu de mesures pour aider à franciser puis à retenir... à donner les compétences linguistiques, mais les compétences professionnelles aussi aux étudiants internationaux qui viennent chez nous. On veut attirer le talent et leur donner ce qu'ils ont... ce dont ils ont besoin pour réussir au Québec et être intégrés au Québec. Et je ne vais pas répéter ce que mon collègue vous a dit, mais essentiellement on travaille présentement avec le gouvernement du Québec pour voir comment on peut ensemble s'entraider, se soutenir dans notre volonté d'augmenter l'offre. Et ça, c'est très, très important. On a besoin de l'appui du gouvernement du Québec pour augmenter l'offre de francisation à nos étudiants qui ne parlent pas français. Et nous espérons que cet appui-là va continuer parce qu'il est absolument cardinal si nous... si le gouvernement souhaite que nous soyons véritablement les partenaires que nous pouvons être pour aider à la francisation, la promotion du français et la promotion de la société québécoise.

M. Roberge : Je vous remercie pour vos réponses. Je suis désolé de laisser seulement deux minutes à ma collègue, mais je vais la laisser aller quand même avec sa question.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Députée de Châteauguay, il vous reste une minute 49.

Mme Gendron : ...d'être là, Mme, messieurs. J'avais une petite question. Vous avez mentionné un peu plus tôt que vous devez, en fait, avoir des investissements majeurs dans les infrastructures, je pense qu'on parlait ici de Bishop's. Je voudrais savoir quelle est la nature des investissements pour améliorer, justement, le service aux étudiants. Voici ma première question. Et la deuxième : Quelles mesures vous prenez pour accompagner les étudiants étrangers, là, dans vos... dans vos universités respectives?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui. Donc, pour... En fait, il y a deux niveaux de questions, là. Sur la question des infrastructures... vous donner un exemple. Par exemple, l'Université Bishop's est vraiment parmi les meneurs à l'échelle internationale sur l'étude sur les exoplanètes. Donc, notre département d'astrophysique est vraiment reconnu partout dans le monde comme étant un des fleurons dans le domaine. Bien, ça, ça repose sur la capacité de faire venir au Québec des étudiants internationaux qui vont travailler dans nos laboratoires, travailler avec nos chercheurs, donc... Et, en termes d'infrastructures, il y a beaucoup d'infrastructures. Il y a des subventions majeures qui ont été reçues, notamment de la Fondation canadienne pour l'innovation, pour développer ce programme, ce créneau de recherche là. Si, du jour au lendemain, on n'est plus capables de faire venir des étudiants internationaux, ça tombe à l'eau. Donc, ça a un impact vraiment fondamental sur des priorités de recherche qui sont particulièrement importantes pour une petite université comme Bishop's. Nous, c'est environ 2 600 étudiants, là. Donc, quand on fait des choix stratégiques comme ceux-là, c'est qu'on concentre des ressources extrêmement limitées parce qu'on est convaincus qu'on a là un créneau d'excellence qui va faire avancer notre société. Donc, l'incertitude met au risque l'ensemble de ces éléments-là.

Pour l'appui, bien, on a vraiment tout un éventail très large de mesures. Notamment, on a un bureau qui est en appui aux étudiants internationaux qui vise à s'assurer de leur intégration. On a des activités d'accueil...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est malheureusement...

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Excusez-moi.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...ce qui met fin à cette première étape de discussion, mais je me tourne du côté de l'opposition officielle avec une période de neuf minutes 54 secondes. La parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, pour des raisons de procédure, là, vous avez été arrêté, mais votre réponse est importante. Ça fait que, sur mon temps, je vais vous permettre de la continuer, s'il vous plaît, pour le bénéfice de la commission.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui. Donc, par exemple, on a des mesures d'accueil qui sont particularisées pour les étudiants internationaux. Nous, on est une université où une proportion très significative des étudiants habitent sur le campus. Donc, on a toutes sortes d'activités pour l'accompagnement de ces étudiants-là, pour s'assurer qu'ils soient bien intégrés à notre communauté. Puis, ensuite, bien entendu, on les dirige vers des cours de francisation s'ils ne parlent pas le français. On a aussi beaucoup d'étudiants français. C'est pour nous la plus importante composante de nos étudiants internationaux. Donc, c'est quand même assez important de le savoir. Et je crois que c'était vraiment sur les services, là, qui... d'appui. Donc, par ailleurs, on a un ensemble de services très riches qui sont donnés à nos étudiants, particulièrement parce que ces étudiants-là habitent au sein de notre communauté. Donc, il y a vraiment un accompagnement individualisé.

M. Morin : Parfait. Merci. Merci beaucoup. On nous a dit, un peu plus tôt aujourd'hui, parce qu'on a entendu, et c'était très intéressant, les recteurs, rectrices d'universités francophones... à un moment donné, les gens ont dit que le projet de loi pouvait peut-être empêcher des abus, en fait, des gens qui voudraient abuser du système, et les recteurs nous ont expliqué toutes les mesures qu'ils avaient en place pour bien empêcher ces abus-là. Est-ce que vous avez des mesures chez vous? Est-ce que vous pouvez nous en... nous en parler?

M. Carr (Graham) : Oui. Alors, je pense que le... quelque chose très important, c'est de comprendre que les grandes universités comme l'Université Concordia ont...

M. Carr (Graham) : ...on a toute une histoire avec le recrutement d'étudiants à l'échelle... internationaux. Alors, ça veut dire qu'on a travaillé depuis des années et des années, parfois depuis des décennies, pour développer des liens avec des écoles, des institutions à l'étranger, pour s'assurer que les étudiants qui viennent de ces établissements sont bien accueillis, qu'ils ont réussi dans leurs travaux. Et quelque chose qui est très, très important, de notre côté : on n'a jamais utilisé des agents de recrutement. Tout le travail de recrutement est fait par notre propre personnel. Et ça, c'est très, très important. Alors, même avec plusieurs milles d'étudiants internationaux chez nous, le taux de demandes pour l'asile, par exemple, c'est moins de 1 % de tous les étudiants internationaux chez nous. Alors, ce n'est pas beaucoup.

M. Morin : Je vous remercie. Oui?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui, peut-être juste pour ajouter, très rapidement, là-dessus, donc, évidemment, nous, c'est des très petits nombres, donc c'est un suivi qui est extrêmement personnalisé qui est fait. Et je vous dirais, peut-être, la seule bonne chose qui est sortie de la... des mesures fédérales qui ont été annoncées dans la dernière année, c'est que, dorénavant, ils communiquent avec nous, notamment, ils nous demandent de valider les dates d'admission qui ont été fournies. Et ça, ça nous a permis et ça a permis au fédéral d'identifier des cas qui étaient abusifs. Donc, on avait déjà un système qui était très, très rigoureux, mais cette nouvelle mesure là rend extrêmement difficiles des cas d'abus. Donc, on est confiants que c'est vraiment extrêmement marginal, s'il y en a.

M. Morin : Je vous remercie.

M. Carr (Graham) : Est-ce que je peux juste ajouter.

M. Morin : Oui, bien sûr.

M. Carr (Graham) : C'est quelque chose qu'il faut ajouter chez nous : le taux de réussite d'étudiants internationaux, c'est plus que 90 %. Et ils réussissent à terminer leur... le baccalauréat en quatre ans. Alors, ils sont très performants comme cohortes d'étudiants. Il faut souligner ça quand on parle des étudiants internationaux, comment ils sont performants. Et je pense que ça, c'est une réalité partout à travers le réseau.

M. Morin : Je vous remercie. Est-ce que vous vivez la même chose à Bishop?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Absolument. Absolument. Ces étudiants-là sont extrêmement performants, ils sont vraiment une richesse pour l'institution, mais aussi pour les dynamiques de classe, et c'est des étudiants qui réussissent très bien.

M. Morin : Parfait. Je vous remercie. On nous a dit aussi, un peu plus tôt, qu'entre autres l'article 3 du projet de loi pouvait, tout dépendant de ce que fera le gouvernement, parce qu'évidemment c'est un projet de loi, il n'y a pas beaucoup d'articles, il y aura éventuellement beaucoup de règlements qu'on ne connaît pas, mais que ça pourrait avoir un impact sur l'autonomie et la liberté académiques, que le gouvernement pourrait donc s'insurger dans l'autonomie des universités et dans le savoir. Pouvez-vous nous en dire un peu plus là-dessus?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Absolument. En fait, une des grandes craintes qu'on a, c'est exactement celle-là, c'est-à-dire que c'est un... ce qu'on cherche à faire, c'est donner un pouvoir qui est purement discrétionnaire, donc il pourrait se fonder sur un ensemble de critères. Certains sont énoncés, mais c'est... cette liste-là n'est pas limitative.

Et ces critères vont avoir un impact direct sur les choix stratégiques que nos institutions vont avoir faits. Donc, par exemple, si on choisit la langue et on choisit de restreindre la capacité, notre capacité de faire venir des étudiants parce qu'on est une institution de langue anglaise, clairement, c'est quelque chose qui va contrecarrer les choix stratégiques qui ont été faits par l'université, notamment en matière de recherche, mais aussi en matière de programmes d'enseignement qui visent à répondre à des besoins réels de la société québécoise.

M. Morin : Et vous nous avez dit un peu plus tôt que, chez vous, particulièrement Bishop, les décisions gouvernementales du gouvernement du Québec, récemment, ont créé un véritable impact. Vous avez parlé de 27,7 % de réduction. Et donc ça pourrait avoir un impact sur certains de vos programmes, donc, sur la recherche fondamentale que vous faites?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Absolument. Si on regarde le programme de recherche au deuxième cycle en «computer science», donc en informatique, il y a une chute importante d'étudiants qui va avoir un impact sur la capacité de poursuivre les recherches pour certains de nos professeurs.

M. Morin : Et j'imagine que vous avez obtenu déjà des subventions ou des bourses pour faire cette recherche-là.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Exactement.

M. Morin : Donc, il y a vraiment un impact, donc, chez vous, c'est majeur, là. Je vous remercie. Je vais céder la parole à ma collègue.

• (18 h 20) •

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Il vous reste 3 min 24 s.

Mme Setlakwe : Merci. Juste pour continuer sur cette chute qui est quand même extrêmement importante, de 28 %, à Bishop's, comment vous l'expliquez? Parce qu'on se souviendra que, l'automne dernier, il y avait eu cette décision de hausser les droits de scolarité. Finalement, le gouvernement a reculé quant à Bishop's. Comment est-ce qu'on explique cette...

Mme Setlakwe : ...substantielle.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Oui, donc les frais... les droits de scolarité, c'était relativement aux étudiants qui proviennent du reste du Canada, et ils représentent pour nous un nombre important d'étudiants, là, c'est environ 26 %. On rajoute aussi, dans la même catégorie de frais de scolarité, les étudiants français, qui sont un 4 %, pour un total de 30 %. Mais, si on prend le reste du Canada, c'est 26 %. Donc, on a vraiment mis l'essentiel de nos énergies à corriger le tir avec des étudiants qui considéraient venir à Bishop's, de leur expliquer que les mesures gouvernementales ne signifiaient pas qu'ils ne seraient pas les bienvenus au Québec ou dans les Cantons-de-l'Est ou à Bishop's. Et on a connu un certain succès là-dessus. La baisse a été d'environ 10 % pour les étudiants du reste du Canada. Donc, on a pu limiter l'impact, mais, pendant qu'on faisait ça, on est une petite université, on a des ressources limitées, bien, on ne pouvait pas se battre contre la perception qui a été reçue à l'international du fait que les non-francophones n'étaient plus les bienvenus au Québec. Et ça a eu un impact sur notre capacité de recruter.

Mme Setlakwe : Merci. La dernière chose qu'on souhaite comme législateurs, c'est de poser des gestes, adopter des mesures qui pourraient affaiblir nos institutions. Avez-vous que le... ces mesures cumulées, et ce qu'on est en train de discuter ici avec le projet de loi n° 74, ce qui crée de l'incertitude... est-ce que vous avez l'impression qu'on pourrait... ça pourrait avoir le potentiel de vous affaiblir davantage?

M. Carr (Graham) : Oui, parce qu'il y a beaucoup de changements dans les politiques pendant les dernières années. Ça sème la confusion et le manque de prévisibilités pour les étudiants et pour les établissements. Et on sait qu'il y a beaucoup d'étudiants qui sont encore très intéressés par les possibilités de poursuivre leur formation dans les universités québécoises. Sauf qu'avec toute l'imprévisibilité, il va être... il risque... d'ailleurs. Et chez nous, on a remarqué une chute de presque 16 % des étudiants internationaux vis-à-vis l'année passée. Alors, c'est manquant. Et ça, c'est... maintenant, c'est deux ans de suite avec une... avec une chute d'étudiants étrangers. Je trouve ça très décevant pour nous et pour le Québec.

Mme Setlakwe : En effet. Et je pense qu'il reste à peine une minute. Pouvez-vous...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 45 secondes.

Mme Setlakwe : ...élaborer un peu sur les domaines nichés, là, dans lesquels Concordia se démarque et à quel point vous êtes donc connectés sur les besoins de l'industrie?

M. Carr (Graham) : Oui. Alors, je peux commenter sur l'importance de toute la recherche, développement qu'on fait dans le domaine de l'électrification. Et on a eu une grande subvention fédérale de 123 millions de dollars il y a deux ans. L'année prochaine, on veut recruter 250 étudiants au niveau doctorant pour aider... pour nous aider à faire cette recherche. Et on a fait l'annonce il y a trois semaines d'un campus thématique à Shawinigan en collaboration avec le cégep de Shawinigan, le CNETE, pour profiter de l'écosystème en énergie verte en Mauricie.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, il nous reste deux intervenants. Le... la deuxième opposition pour trois minutes, 18 secondes.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous tous et toutes pour votre présentation. Vous l'avez dit d'emblée, là, ce que vous demandez, c'est d'être exemptés, finalement, du projet de loi. Ce matin, je comprends que le ministre qualifiait cette demande-là de déraisonnable. Ça fait qu'à partir de là, j'essaie d'avancer pour voir s'il existe un terrain d'entente. Puis peut-être que vous me répondrez à l'effet qu'il n'y en a pas, puis ça sera bien correct comme ça. Moi, je soutiens sur le fond votre position. Est-ce qu'une position où on n'exclurait finalement pas l'ensemble des universités, mais le deuxième et le troisième cycle, par exemple, ça vous intéresserait ou si vous maintenez votre position?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Bien, pour notre université, qui est vraiment une université qu'historiquement a été fondée sur l'éducation au premier cycle, en premier lieu, les cycles supérieurs représentent 3 % de nos étudiants. Donc, évidemment, si on ne fait qu'exclure le deuxième et le troisième cycle, ça ne nous protège pas du tout. Et on va avoir un impact, on est exposé à une incertitude et des impacts potentiels qui peuvent être vraiment destructeurs.

M. Cliche-Rivard : Voulez-vous répondre également?

M. Carr (Graham) : Oui. Alors, j'espère que suite à la... les témoins de mes collègues universitaires, peut-être le ministre... vont reconsidérer son positionnement. Parce que c'est clair qu'il y aura un impact négatif. Il y a déjà un effet négatif sur nos établissements, et pas que les universités anglophones, c'est marqué dans les universités francophones aussi. Et je pense que ça, c'est... ça, c'est quelque chose qu'on veut éviter...

M. Cliche-Rivard : Sur les deuxièmes, troisièmes cycles, là...

M. Carr (Graham) : Sur le deuxième, troisième cycle, mais aussi...

M. Carr (Graham) : ...au niveau du baccalauréat.

M. Cliche-Rivard : Parfait. Vous mentionnez d'être désigné d'office. Une désignation, par contre, ça peut s'enlever. Donc, ce que vous vous demandez, plutôt, ce serait une désignation d'office permanente, là, dans la loi, qui ne peut pas être retirée par désignation par la suite.

M. Carr (Graham) : Exact.

M. Cliche-Rivard : Vous avez mentionné, puis c'est un bon point, tout à l'heure, de dire, suivant tous ceux qui ont été entendus, puis vous avez raison de le dire: Depuis le début de la journée, je ne suis pas sûr que le ministre passe un bon moment, dans le sens où l'ensemble des intervenants sont venus nous dire finalement que...

Une voix : ...

M. Cliche-Rivard : Bien oui, avec nous, peut-être, oui, mais l'ensemble des intervenants sont venus dire que, finalement, il n'y a pas grand monde qui voit du positif dans ce projet de loi là. Est-ce que vous, dans votre communauté, il y a qui que ce soit qui en veut ou qui a jugé du positif du projet de loi n° 74, à votre connaissance?

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Non. Ça crée beaucoup d'incertitudes, et puis ça crée d'autres craintes dans notre communauté. Vous savez, on parlait de l'impact des mesures de l'an passé, ça a précipité notre université en déficit cette année, en situation de déficit. On est en plan de redressement. Vraisemblablement, il va y avoir des compressions qui vont avoir un impact sur de réelles personnes. On est en train de travailler là-dessus. De l'incertitude supplémentaire, c'est la dernière chose dont nous avons besoin.

M. Cliche-Rivard : Donc, pure et dure, vous, vous ne comprenez pas l'objectif ou vous vous ne comprenez pas pourquoi on est là aujourd'hui. Vous êtes très inquiet.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Non, on ne comprend pas... Écoutez, moi, je ne peux pas parler pour l'ensemble des secteurs, puis le ministre a une vue d'ensemble, donc je respecte vraiment sa discrétion. Ce pour lequel je suis ici pour témoigner, c'est le secteur universitaire, et, pour le secteur universitaire, je ne vois pas la pertinence du projet.

M. Cliche-Rivard : Pour le secteur universitaire, est-ce qu'il y a du bon dans le projet de loi n° 74?

M. Carr (Graham) : Si je peux répondre à l'autre question, moi, je peux parler pour les universités en région, mais je pense que les chiffres démontrent l'importance du réseau des étudiants internationaux.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Je dois malheureusement vous arrêter, le temps imparti au deuxième groupe d'opposition est terminé. On va finaliser le tout avec le député de Jean-Talon pour 3 min 18 s.

M. Paradis : J'ai beaucoup aimé les commentaires introductifs du ministre, hein, où il disait : Le plein contrôle en matière d'immigration. Moi, je dirais qu'il y a un mot qui qualifie ça, ça s'appelle l'indépendance du Québec. Cela étant dit, vous avez aussi un dialogue avec lui sur la question, là, de pointer les étudiants étrangers. Moi, je ne me souviens pas qu'un parti représenté à l'Assemblée nationale a dit : Le problème, c'est les étudiants étrangers. Certainement pas mon parti. Aucun document, aucune intervention publique qui est à cet effet là. On parle de politique publique, politique publique, y compris sur les seuils d'immigration, y compris pour les étudiants étrangers. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi qu'il est légitime d'avoir un dialogue national sur ces questions-là et qu'on peut l'avoir sans stigmatiser, sans pointer du doigt personne?

M. Carr (Graham) : Moi, j'ai déjà dit que je suis d'accord avec avec une discussion sur ça, en répondant à la question du ministre.

M. Paradis : Très bien.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Puis, en fait, ce que j'ai souligné, c'est que le projet tel qu'il est présenté ne prévoit pas de dialogue continu sur les seuils. Donc, c'est un projet qui donnerait un pouvoir discrétionnaire avec effet immédiat. Et, pour l'instant, il n'y a pas eu de discussion avec nous. Ce dont on a besoin, c'est de la prévisibilité. Et donc, si on va avec des seuils qui sont déterminés pour un horizon à plus long terme, c'est quelque chose qui, certainement... si on est interpellé, on fait partie de cette conversation-là, c'est quelque chose avec lequel on est tout à fait à l'aise, mais ce n'est pas ce que prévoit le projet de loi.

M. Paradis : Très bien. Et ça, vous êtes plusieurs, en fait, à peu près unanimement, comme mon collègue de 3shsa le mentionnait, plusieurs sont venus nous dire la même chose. Donc, on demande de la prévisibilité, on veut savoir c'est quoi, la planification, c'est quoi, les intentions. Et là, ce que vous nous dites, c'est, quand vous regardez le projet de loi n° 74, vous n'en voyez pas. Ça n'aide pas à stabiliser.

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Non.

M. Paradis : Très bien. Ce matin, on a reçu le Commissaire à la langue française qui nous a rappelé que la langue d'obtention des études et la langue d'obtention du dernier diplôme est importante. Et selon les données de son dernier rapport, bon, au Québec, là, disons, grosso modo, la langue parlée à la maison, là, c'est 80 % français et 80 % autre langue. Puis là, il dit : Bien, pour l'instant, dans la répartition des étudiants étrangers, on n'est pas dans cette proportion là. Dans ses derniers chiffres, lui, c'est 61 % de l'effectif des étudiants étrangers poursuivent leurs études dans une université de langue française et 39 % dans une université de langue anglaise, c'est-à-dire qu'il y a une dichotomie. Lui, ce qu'il nous suggérerait, c'est qu'il devrait y avoir des critères pour faire une répartition régionale et entre les établissements pour arriver à cette proportion-là. Qu'est-ce que vous en dites?

• (18 h 30) •

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : Bien, c'est encore une autre attaque à l'autonomie universitaire. Donc, les universités choisissent de s'investir dans des domaines des créneaux d'excellence, investissent des ressources pour ces créneaux-là. Les universités sont en concurrence aussi et elles attirent les étudiants. Donc, ensuite, ce que vous nous... ce que vous proposez, c'est que nous décidions pour les étudiants où ils vont aller étudier. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne dans le...


 
 

18 h 30 (version non révisée)

M. Lebel-Grenier (Sébastien) : ...dans le système universitaire. Donc, est-ce qu'il peut y avoir des incitatifs? Absolument, et ce sont d'ailleurs des incitatifs qui ont été mis en place pour le gouvernement pour favoriser le recrutement d'étudiants français, particulièrement en région, avec des conditions qui sont favorables, un financement particulier qui... qui permet de réaliser cet objectif-là. Ça, c'est vraiment le pouvoir du gouvernement, qui est un pouvoir de créer des incitatifs, mais... à la place des étudiants...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, merci beaucoup, c'est ce qui met fin à cette audition. Merci énormément pour l'apport à nos travaux.

Alors, je suspends la commission quelques instants, le temps de recevoir nos prochains intervenants.

(Suspension de la séance à 18 h 31)

(Reprise à 18 h 35)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, comme derniers intervenants, nous recevons les représentants de la Fédération de l'enseignement collégial-CSQ, qui sont avec nous par la voie des ondes, en vidéoconférence. Alors, nous avons M. Youri Blanchet, président de la Fédération de l'enseignement collégial, M. Youri Boulanger, vice-président de la Fédération de l'enseignement collégial, ainsi que M. Julien Poirier, conseiller de la centrale syndicale du Québec. Alors, messieurs...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour votre présentation, et par la suite, on va entamer la période d'échange avec les élus. Alors, le temps commence maintenant pour vous. La parole est à vous.

(Visioconférence)

M. Blanchet (Youri) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Peut-être juste une précision. Je crois que vous avez nommé Hugo par mon prénom. C'est Hugo Boulanger, vice-président de la FEC. C'est une petite erreur que je voulais simplement rectifier.

Bonjour. Merci de nous accueillir ce soir. Nous allons faire très rapidement puisque le temps nous... qui nous est imparti est très court. Je commencerais simplement par vous dire, peut-être, vous témoigner d'une petite doléance. C'est qu'en fait nous aurions aimé déposer un mémoire, mais on opte pour une présentation orale puisque le temps qui nous... qui nous était donné, le délai était très court. Et nous sommes une très petite équipe, la FEC, nous représentons un certain nombre de cégeps, mais notre équipe n'est pas tellement grande. Donc, je tenais quand même à dire que la... d'avoir reçu cette invitation si tard ne nous a pas permis, la FEC elle-même, de faire le mémoire. Par contre, la CSQ représentée ici par mon collègue Julien Poirier, déposera un mémoire demain.

Peut-être simplement pour vous dire que nous représentons des cégeps de l'Est qui sont très fortement concernés par les étudiants internationaux dans leur clientèle étudiante. On représente quatre cégeps de l'Est, donc de l'Est du Québec, là, Rimouski, Rivière-du-Loup, Matane, Gaspé, les Îles-de-la-Madeleine aussi, mais les étudiants internationaux y sont un peu moins présents, ainsi qu'un cégep, là, de la Côte-Nord, Baie-Comeau, qui reçoit aussi des étudiants internationaux.

Ce qu'on peut vous dire, d'entrée de jeu, c'est que nous sommes très inquiets de ce projet de loi là, inquiets pour nos cégeps, tout simplement, bien entendu, pour l'offre de programmes, pour le maintien aussi à niveau des cégeps avec un nombre d'étudiants adéquat... d'étudiants et d'étudiantes adéquat, qui permet un financement qui est conséquent. Mais aussi, il ne faut pas l'oublier, pour nous, en région, en fait, puis je dis «pour nous» parce que je suis... je suis à Rivière-du-Loup, donc pour nous, en région, la part des étudiants étrangers est indéniable, tant au niveau économique, parce qu'on on les voit, là, dans les emplois, occuper des emplois locaux, mais aussi au niveau sportif et culturel, ce qu'on... ce qu'on oublie souvent. Moi, dans mon petit... dans mon petit hameau, bien, dans ma petite ville, dans le soccer entre autres, il y a plusieurs coachs qui sont des étudiants et étudiantes du cégep, qui... entre autres qui viennent de l'île de la Réunion, qui viennent coacher les jeunes... les jeunes au soccer. Ou, par exemple, au niveau culturel, plusieurs s'impliquent, ne serait-ce que dans toute l'offre musicale régionale, le Festival de cinéma, en participant comme bénévoles. Donc, ils rendre... ils rendent le milieu vivant, ils contribuent de façon significative aussi en région à l'apport économique, bien entendu, mais aussi culturel.

Et, ce qu'on peut dire aussi, c'est qu'en fait, même dans les cégeps, sans mettre à risque le maintien d'un programme, souvent, ils permettent simplement que de donner un peu d'oxygène, d'augmenter le nombre minimal d'étudiantes et d'étudiants qui y sont présents et, ce faisant, améliorer les conditions. Parce qu'un meilleur financement permet l'achat, entre autres, d'équipements supplémentaires, mais aussi en augmentant les groupes, bien, ça permet peut-être un meilleur dynamisme aussi qu'on pourrait dire à l'intérieur de nos institutions.

Nous sommes très conscients, je tiens à le dire, de l'intention ou de l'objectif du gouvernement ici, qui est de juguler l'immigration qui est un peu... bon, qu'on pourrait nommer comme galopante actuellement, je veux dire, nous sommes très conscients qu'il y a beaucoup de monde, mais nous pensons en toute humilité que de, couper, disons, l'accès à des étudiants étrangers aux études supérieures, mais particulièrement pour les cégeps dans notre cas, n'est pas la bonne solution et pourrait mettre à mal peut-être même, en tout cas dans une certaine mesure, l'offre économique en région, mais aussi culturelle. Parce que ces étudiants-là aussi, je dois le dire, c'est des immigrants qui sont de qualité. Tout à l'heure, j'entendais que c'est souvent des étudiants qui... et des étudiantes qui performent bien, effectivement, ils performent bien, mais ils ont l'intention de s'installer. Ce sont des étudiants et des étudiantes qui, dans la majorité des cas... nous... en tout cas entre autres au cégep de Rivière-du-Loup et dans d'autres institutions, on accueille majoritairement des étudiants qui sont francophones de souche, donc il n'y a pas de barrière de langue. Et souvent ils vont contribuer à l'amélioration de la société par la suite.

• (18 h 40) •

Donc, je vais passer la parole à mon collègue Hugo dès maintenant, là, qui est du cégep de Rimouski. Merci de votre attention.

(Visioconférence)

M. Boulanger (Hugo) : Merci. Effectivement, je suis enseignant au cégep de Rimouski dans un programme qui s'appelle Technologies d'analyses biomédicales, donc un programme de santé qui est actuellement en faible effectif. Donc, je joins ma voix à celle de mon collègue Blanchet, qui y va d'un cri du cœur avec l'importance des étudiants étrangers pour nos programmes en région.

Si je peux aller plus concrètement, l'addition de...

M. Boulanger (Hugo) : ...ces élèves-là, ça permet d'atteindre le seuil minimal de financement des programmes, ce qui rend possible leur lancement, leur déploiement. Donc, on vient garantir une offre de formation élargie, notamment dans le secteur de la santé, où les besoins de recrutement sont critiques. Donc, juste pour vous donner un exemple concret, l'année passée à Rimouski, on a réussi à faire agréer 20 infirmières qui étaient formées à l'étranger par le biais d'un AEC. Donc, ces 20 personnes là ont tout de suite joint les rangs des CSSS pour consolider l'offre de soins en région.

Il y avait des projets similaires également dans la région du Témiscouata, là, où on cherche à pallier le manque de personnel dans des secteurs critiques comme l'obstétrique et la chirurgie, où y a des ruptures de services, là, de façon chronique. Je ne vous le cacherai pas, les cégeps de région dépendent de l'arrivée de ces étudiants-là. Je pense à Matane, à Gaspé, où on y va de la survie de l'institution, là, ni plus ni moins. Les cégeps, dans une ville de région, ce sont des moteurs socioéconomiques, des pôles culturels. Et, si on veut... Si on ne peut pas en assurer la pérennité, bien, on va freiner le développement régional. On en est là maintenant, en 2024.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...encore du temps.

M. Boulanger (Hugo) : M. Poirier.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Oui, vous avez...

M. Boulanger (Hugo) : Je voulais juste laisser un peu de temps à M. Poirier. C'est pour ça...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Ah! O.K. Parfait. M. Poirier.

M. Poirier (Julien) : Merci beaucoup. Julien Poirier. Je suis conseiller à la Centrale syndicale du Québec. Je remercie Youri et Hugo pour les introductions. Merci aussi à votre... toutes les personnes présentes pour votre temps et votre attention aujourd'hui sur ce projet de loi. Donc, oui, à propos du p.l. no 74, on est plutôt de l'avis que c'est... D'une part, on est sensibles, on comprend à quelles... à quelles inquiétudes est-ce que cela fait écho. En revanche, on aurait privilégié une approche différente, et on ne croit pas que la plupart des... de ces... la majorité de ce qui est proposé dans le projet de loi soit nécessaire.

En contrepartie, les risques qui sont liés à ce projet de loi là sont difficiles à ignorer. Et on... On a une vive inquiétude, entre autres, là, comme l'a mentionné mon collègue Youri, sur la disponibilité puis la qualité générale de l'offre de... qui sera disponible en la région, mais également pour la vitalité puis la... oui, là, exactement, la vitalité de nos créneaux d'excellence, qui sont parfois uniques dans certaines de nos régions du Québec. Et puis ce sont des équipes parfois qui prennent du temps à être mises sur pied et à être pleinement opérationnelles.

Donc, pour ce faire, et comme le mentionnait mon collègue Hugo, parfois, si dans ces scénarios la population d'étudiantes et d'étudiants étrangers peut faire la différence, ça enrichit grandement à la fois les parcours de vie et les parcours éducatifs de ces personnes-là, mais également la population étudiante québécoise pour qui l'offre est grandissante, ainsi que tout l'écosystème de formation ainsi que de création des savoirs qui est propre, là, aux cégeps dans les régions, mais pour l'ensemble du réseau. Donc, pour nous, un projet de loi qui contient un certain nombre de risques, qui n'est pas non plus l'approche qu'on aurait privilégié pour... pour s'attaquer, là, aux divers... aux divers enjeux qui... qui sont ciblés, là, par le projet de loi.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Il vous reste encore 1 min 45 s si vous voulez conclure. Ou si ça va, on y va avec la période de questions?

M. Blanchet (Youri) : Je vous dirais, je pense, qu'on va y aller avec la période de questions. On pourrait continuer, mais je pense qu'on va... on va répondre aux questions. Merci

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Parfait. Merci beaucoup. Alors, je me tourne du côté du gouvernement avec M. le ministre. Une période de 16 min 30 s vous est allouée.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présence, même virtuelle. Vous êtes là puis c'est intéressant d'avoir des gens qui ont des propos comme les vôtres, qui arrivent de différentes régions, de différentes institutions. Vous nous parlez de la vitalité des établissements, des cégeps, beaucoup en région, de plusieurs programmes qui sont gardés en vie grâce aux étudiants internationaux. C'est quelque chose que je connais très bien et quelque chose que je salue. Je pense que c'est nécessaire.

Il y a beaucoup, beaucoup de programmes en région qui, grâce aux étudiants internationaux étrangers, arrivent à combler des besoins de main-d'oeuvre ou arrivent à rester en vie, tout simplement, là. Je sais qu'il y a eu une période creuse dans les cégeps où il y a eu, pendant certaines années, de moins en moins d'étudiants. Ça remonte, mais graduellement et de manière inégale.

Je me souviens, au début du premier mandat, j'avais la responsabilité de l'enseignement supérieur, puis une des premières décisions que j'avais prises avec le gouvernement, ça a été de refaire la formule de financement et de permettre, justement, les petites cohortes puis d'avoir une formule de financement qui est différenciée pour s'assurer de ne pas avoir du du mur à mur en matière de financement en enseignement supérieur...

M. Roberge : ...une fois que ceci est dit, puis avec l'intention gouvernementale très, très claire de ne pas faire de mur-à-mur, puis de s'assurer de la vitalité des cohortes des cégeps en région, puis des... de s'assurer qu'on répond aux besoins économiques et qu'on répond aux besoins gouvernementaux, dans plusieurs programmes, je vais nommer santé, éducation, on pourrait en nommer d'autres, une fois qu'on a dit ça, on voit bien qu'il y a quand même eu une augmentation généralisée du nombre d'étudiants étrangers. Je ne parle pas juste des cégeps, je parle de tous les étudiants étrangers, 50 000 il y a 10 ans, 122 000 en ce moment. Il y a des enjeux de logement, puis je ne dirai certainement pas que c'est à cause des étudiants étrangers, mais il y a plusieurs facteurs. Puis évidemment, quand des dizaines de milliers de personnes arrivent, on a besoin de dizaines de milliers de logements, on ne peut pas dire que ça a zéro impact. Il y a plusieurs intrants, quand arrive un phénomène comme ça, mais on ne peut pas dire que ça n'a pas d'impact.

Donc, une hausse très, très importante, des enjeux en termes... en termes de logement, une courbe démographique qui change, parce qu'on voit qu'il y aura davantage de Québécois qui vont s'inscrire dans les cégeps dans les prochaines années. Considérant tout ça, est-ce que vous pensez que le gouvernement du Québec devrait garder le statu quo actuel, c'est-à-dire simplement pouvoir déterminer le nombre total d'étudiants étrangers sur le territoire québécois ou il ne devrait pas plutôt se doter de leviers pour être capable d'agir dans certains secteurs, où il y a des abus notamment, puis de préserver des cohortes, des programmes, notamment, des cégeps en région?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Votre micro est fermé. Vous pouvez l'allumer.

M. Blanchet (Youri) : Oui, à distance, il y a toujours la souris avec deux écrans. Je suis vraiment désolé. Je cherchais ma souris, ce n'est pas drôle.

Oui, bien, M. le ministre, effectivement, je pense, bon, vous brossez quand même un tableau pour lequel on n'est pas en désaccord, c'est-à-dire sur l'ensemble des choses, c'est-à-dire la vitalité, la formule de financement qui a été révisée. Et ça, je le salue d'ailleurs, parce que ça a donné de l'oxygène vraiment aux petites cohortes dans les cégeps de région, entre autres, ce financement révisé là. La hausse importante aussi, au cours des dernières années, on ne la nie pas non plus. Hausse, par exemple, qui a été, entre autres... à laquelle... qui peut être attribuée en partie, là, à des institutions, entre autres, qui accueillaient des étudiants dans des espèces de... peut-être une espèce d'usine à diplôme, là. On a vu ça, mais le gouvernement agit là-dessus, puis ça, on pense que c'était probablement nécessaire, être une anglophone qui venait, entre autres, bon, d'Inde ou autres. Ça, je ne pense pas que c'est là-dessus, nous, qu'on est... En fait, pas que je ne pense pas, assurément, nous ne sommes pas sur ça. On est vraiment sur les étudiants qui sont dans la filière régulière de la formation régulière au cégep, dans les institutions qui ont pignon sur rue depuis nombre d'années. Alors, on est vraiment là.

Puis, aussi - juste, parce que j'ai pris en note aussi  la question du logement - on est très, très au fait des difficultés aussi de logement dans les régions. Par contre, actuellement, on réussit quand même à loger à peu près tout le monde, là, je veux dire, je n'ai pas les chiffres partout, partout, je sais que ça a été... Je sais qu'il y a eu... Il a fallu dédoubler d'efforts au début de l'année, entre autres, dans certains lieux là, comme Gaspé, où il y avait vraiment un manque, même à Rimouski. Mais des solutions ont été trouvées, ont été apportées et on a réussi. Une chose aussi que vous avez dite, qui est très, très vrai, c'est-à-dire nous assistons actuellement à une augmentation- ça a été un problème en début d'année d'ailleurs, un beau problème quand même - mais une augmentation des inscriptions au cégep, parce qu'on sait très bien qu'il y a eu une augmentation aussi, avant nous, dans le réseau scolaire.

• (18 h 50) •

Ceci étant dit, par exemple, ce n'est pas garanti que l'augmentation de ces étudiants-là, c'est les cégeps de région, entre autres, les cégeps qui sont plus éloignés, qui vont en bénéficier. Parce que je tiens juste à dire qu'actuellement, nous, quand on parle des cégeps de région, il reste encore des places dans nombre de cégeps de région, alors qu'on refuse des étudiants dans les grands centres, dans les gros cégeps. Ça fait que ça, ici, il y a peut-être un déséquilibre et peut-être l'attrait aussi des grands centres qui vient jouer. Donc, ce que je veux dire, c'est que ça ne nous garantit pas les seuils pour maintenir nos établissements dans une vitalité maximale, disons ça comme ça, ou avec un financement qui est le plus adéquat possible pour remplir la mission de développement des cégeps en région, parce qu'ils ont une mission aussi de participer au développement économique, culturel, social dans les régions. Donc, une longue réponse, mais pour dire que...

M. Blanchet (Youri) : ...finalement, nous croyons que le projet de loi, bien, devrait... devrait tenir compte... En fait, c'est sûr qu'on pourrait vous demander aussi d'en être exemptés, mais j'ai su que ce n'était probablement pas une voie qui était prometteuse. Par contre, une chose est certaine, c'est que nous, on constate... Parce qu'on représente toutes sortes de cégeps, hein, puis aussi de centres, là, ça fait que... nous savons aussi la situation de ces cégeps-là. C'est que c'est moins criant pour eux, c'est moins nécessaire, dans plusieurs des cas, là, l'apport des étudiants étrangers, alors que...

Le cri du cœur qu'on vous lance, nous, aujourd'hui, c'est de dire que nous avons une connaissance fine, sur le terrain, d'établissements en région pour qui, si on enlève les étudiants étrangers, bien, il y a... au delà de l'impact même dans l'institution, il y a un impact aussi dans la communauté. Moi, je disais à mes collègues, même, en préparation de cette présentation aujourd'hui, que, dans mon... ma petite ville, si, certains commerces, il n'y a pas les étudiants étrangers pour venir répondre aussi aux besoins, bien, ils risquent de, bien, fermer ou ne pas ouvrir les mêmes... pas offrir les mêmes heures d'ouverture. Ça fait qu'il y a un impact jusque... économique, là, et ça, je pense qu'il faut en être vraiment conscients.

Donc, je ne suis pas en train de vous imposer une solution, mais je veux quand même que vous soyez très conscients des difficultés que ça peut amener dans la vitalité régionale aussi, ça. Et, à cet effet, bien, peut-être que la loi, dans l'esprit où elle est présentée, bien, devrait avoir certains, peut-être, garde-fous ou verrous de sécurité pour, entre autres, les institutions pour lesquelles c'est nécessaire.

Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter quelque chose ici?

M. Boulanger (Hugo) : Je pourrais peut-être ajouter juste un petit quelque chose, si vous me permettez. La plupart des cégeps en région, effectivement, ont fait face à des défis au niveau du logement, mais ils ont su être agiles pour trouver des solutions puis les mettre en place pour accueillir les étudiants qui ont été admis.

Je tiens également à ce qu'on considère les efforts qui ont été déployés dans l'Est du Québec pour l'établissement d'ententes. Donc, il y a eu des... une bonne partie de fonds, là, significatifs, à tout le moins, qui ont été investis pour envoyer des délégations en France, en Belgique, en Afrique, pour établir des ententes de transfert, soit après la diplomation, au PUT ou PTS, par exemple, pour aller chercher de l'expertise à l'extérieur, pour qu'on puisse les diplômer au local et les remettre en jeu, là, dans l'économie locale. Évidemment, si on vient juguler de façon trop sévère cette arrivée d'étudiants là, bien, on vient un peu... bien, on constate que cet argent-là aura été investi en vain. Donc, c'est beaucoup d'argent, d'énergie, de ressources qui ont été déployées, tant... dans l'établissement de ces ententes-là, et je trouverais ça vraiment dommageable, là, de... de se retrouver devant rien au lendemain de... l'adoption de cette loi.

M. Poirier (Julien) : Oui. J'ajouterais aussi, à la question du ministre Roberge, à propos des abus... Bien, déjà, je souhaitais souligner que le... il y a... il y a, effectivement, eu, au tournant de la décennie 2020, quand... bien, même un petit peu avant, là, à la fin de la décennie 2010, il y avait quand même une population importante d'étudiants étrangers qui... qui fréquentaient des établissements plutôt privés, non subventionnés, et qui fréquentaient surtout des programmes AEC, puis on peut observer, dans les données, une forte augmentation de cette population là, qui était, bon, parfois, recrutée à l'international, par le biais d'agences, qui venaient étudier, et tout ça.

Puis, au moment de présenter le projet de loi, je pense qu'à juste titre monsieur... pardon, le ministre Roberge a bien mentionné qu'il y avait un problème là dessus, puis il y avait une certaine marchandisation, là, dans l'esprit de ces opérations là ou de ce fonctionnement là, de la résidence au Québec ou de la citoyenneté canadienne. Or, les leviers actuels qui sont à la disposition du ministre, bien, de notre point de vue, ont plutôt fonctionné. Puis ce qu'on observe depuis 2020, depuis l'année scolaire 2020-2021, c'est une réduction de la fréquentation, là, suite aux actions qui ont été menées par le gouvernement. Donc, on souhaitait, d'une part, là, saluer le fait que, d'une certaine manière, le problème des abus qui était détecté avait déjà été bien entrepris, là, du côté du gouvernement. Donc, on le salue, de ce côté là.

Pour le logement, bien, je joins ma joie... ma joie aussi, mais ma voix à celle de mes collègues. Je vais... On considère le logement comme, quand même, une situation qui est... La pression sur les logements avait une... très multifactorielle, puis la... une situation qui est très, bon, structurelle dans sa nature. On ne pense pas que, pour ce que l'on risque en agissant avec le présent projet de loi, que ça aurait un effet qui est suffisant, là... pour... pour atténuer. Donc, ce serait tout pour moi, pour la question.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. M. le ministre.

M. Roberge : Oui. Merci pour votre réponse en trio. Je vais laisser mes collègues poursuivre avec des questions. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...la députée d'Iberville. Il reste 5 min 20 s.

Mme Bogemans : Parfait. En termes des établissements reconnus pour accueillir...

Mme Bogemans : ...les étrangers... les étudiants étrangers, pardon, ce serait quoi les incontournables, les balises qu'il faudrait mettre en place pour s'assurer que les établissements soient prêts à bien accueillir les étudiants étrangers puis pour les faire reconnaître dans notre réseau?

M. Blanchet (Youri) : Là, les balises, en fait, bien sûr, tout à l'heure, je nommais que nous, on... là, présentement, notre plaidoyer est d'abord et avant tout pour le régulier, donc des cégeps qui ont... que nous connaissons dans les 48 du cégep de la province, là. Donc, c'est là-dessus, là, que nous sommes actuellement.

Pour ce qui est des conditions nécessaires à la mise en... bien, à l'accueil des étudiants, entre autres, parce que, ça, c'est un élément, là, dont on s'est parlé d'ailleurs en préparation, on se disait qu'il y a quand même une nécessité d'offrir un espèce de filet de sécurité ou une offre d'accueil personnalisée ou adaptée aux étudiants étrangers. Et d'ailleurs, puis dans l'Est, je vous dirais qu'on... en tout cas, dans les cégeps qu'on présente, il y a vraiment une préoccupation qui s'est développée à ce sujet et plusieurs choses ont été mises en place, dont, entre autres, une section d'accueil des étudiants étrangers pour leur parler, entre autres, des différences académiques, ne serait-ce que le système académique français, ou que ce soit à l'île de la Réunion, dans un domaine outre-mer, ou en France, bien, est différent, ou même en Afrique du Nord, je veux dire, ce n'est pas la même chose. Ça fait que, ça, c'est une chose. On prévoit aussi un accueil pour les vêtements d'hiver, ces trucs-là. Donc, parce qu'on s'est rendu compte, dans les premières expériences, qu'on laissait peut-être qu'on accueillait... en fait, qu'on désirait avoir ces étudiants-là, mais sans leur offrir un soutien, c'est ça, nécessaire pour leur permettre une meilleure intégration et une meilleure connaissance. Ça fait que c'est ce que je dirais.

Pour ce qui est des choix des établissements, c'est sûr que moi, j'aimerais mieux qu'on ne choisisse pas, là, mais si on a... si on a à choisir puis à se dire : Écoutez, dans quel endroit, ou quelle filière, ou quel cégep, dans le sens où on pourrait accepter plus d'étudiants par exemple? Mais je pense qu'une des choses importantes, bien, on l'a nommée, les cégeps de régions ou les cégeps qui en dépendent, ne serait-ce que par la communauté, ça, c'est une chose importante, mais certains programmes aussi qui sont super importants, tous les programmes en santé en région, on a beaucoup de difficultés à recruter de l'extérieur, alors que si on accueille dans les programmes en santé, bien, ces étudiants-là et ces étudiantes-là restent souvent par la suite, surtout lorsque la... quand elles ont le Programme d'expérience québécoise possible, là, restent par la suite.

Donc, c'est... je ne sais pas si je réponds bien à votre question, mais c'est un peu ce que je pourrais dire. Je ne sais pas si mes collègues voulaient ajouter quelque chose.

M. Boulanger (Hugo) : Je peut-être témoigner de mon expérience. On a accueilli, là, il y a peut-être deux ans, là, une cohorte qui était composée à 50 % environ d'élèves, là, qui provenaient d'Afrique subsaharienne, donc des élèves qui sont, le plus souvent, formés vraiment de façon très pointue au niveau fondamental et théorique, mais qui ont un peu moins accès à des équipements de laboratoire. Bien, la direction s'est montrée agile à Rimouski rapidement lorsqu'on a fait état du problème, là, parce qu'ils n'étaient vraiment pas au même niveau que les élèves nationaux. Donc, on nous a offert des ressources pour qu'on puisse mieux les encadrer, leur offrir du temps d'exposition aux laboratoires pour, justement, les amener au seuil minimal de la compétence pour qu'ils puissent se développer au même rythme que les étudiants issus, soit des collèges ou des écoles secondaires. Donc, des fois, le problème peut paraître assez important, mais les solutions ne sont pas très coûteuses ou très compliquées à mettre en place, il suffit d'un peu d'ouverture.

Mais je souligne aussi, ce que Youri vient de mentionner, tout le comité d'accueil qui se met en place, là, lorsqu'on reçoit ces cohortes-là. C'est impressionnant, là, ce que les gens font. On les accueille à Montréal, on organise des autobus, on les amène en région, on leur fait faire le tour de la ville, on leur indique les endroits stratégiques où ils peuvent s'approvisionner, par exemple. Il y a tout un pan culturel également qui est mis au jeu. On forme des clubs d'entraide pour eux, on essaie de faire du maillage avec les étudiants réguliers. Donc, c'est vraiment... c'est beau de voir ça, en vérité, là, ça apporte une belle diversité en région qui est parfois un peu homogène, là, on va se le dire.

• (19 heures) •

Mme Bogemans : Parfait.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...

Mme Bogemans : Bon, en 50 secondes. C'était super complémentaire avec ce que vous mettiez déjà sur la table. Mais au niveau de l'emploi puis de la rétention, vous l'avez touché un petit peu, là, M. Youri, mais est-ce que vous pouvez élaborer sur la question : Dans quelles conditions les étudiants étrangers restent le plus en région?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En 30 secondes.

M. Blanchet (Youri) : Mais O.K. Je vais essayer d'aller vite. Donc, bien, dans quelles conditions? C'est que, souvent, le fait de venir en région où ils établissent des liens, puis, comme je disais tantôt, pendant qu'ils sont aux études, participent à des activités culturelles, au sport local, tout ça, puis, bien, ils développent vraiment...


 
 

19 h (version non révisée)

M. Blanchet (Youri) : ...vraiment un amour pour la région. Nous, on a énormément d'étudiants qui demeurent par la suite. Puis ça va même jusqu'aux institutions culturelles. Là, on a le Festival Vues dans la tête de..., un festival de cinéma à Rivière-du-Loup, entre autres, qui est reconnu par le milieu du cinéma. Bien, écoutez, on... c'est un ancien étudiant qui a été à la tête de ce... un ancien étudiant français qui a été à la tête, directeur de ce festival-là pendant des années. Donc, c'est vraiment de cette manière-là.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Hein, je vous demande de parler vite. Je suis la gardienne du temps, hein? Alors, je me tourne du côté de l'opposition officielle pour son temps de parole, 9 Minutes 54 secondes. La parole est à vous, M. le député.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci, merci d'être là avec nous. On nous a dit un peu plus tôt que ce projet de loi pouvait servir à corriger des abus. Maintenant, je comprends que, dans votre réalité à vous, dans votre quotidien, la part d'étudiants étrangers, ces abus-là, il y a des mesures en place. Est-ce que c'est quelque chose qui vous inquiète aussi ou si ce n'est pas quelque chose que vous voyez dans votre quotidien?

M. Blanchet (Youri) : Je me permets... ou Julien... Bref, je vais quand même y aller. Écoutez, non, on a... Dans notre quotidien, nous, on ne voit pas ce problème d'abus là parce que, dans l'enseignement régulier, ce n'est pas que des gens qui viennent financer un système, hein, ils sont intégrés de manière différente, bien soutenus. Ce dont... En fait, on peut faire référence à... mon collègue Julien, tout à l'heure, le nommait, entre autres, les a AEC qui étaient... qui sont offertes ou qui ont été offertes en grande partie dans des institutions privées non subventionnées. C'est là qu'on a identifié plusieurs abus, mais aussi certains cégeps avaient développé une antenne, par exemple, ailleurs, et offraient ça. Mais tout ça, ça, je pense que le ministre a tous les pouvoirs, tout est... en tout cas, c'est assez réglé, je pense, là-dessus. Puis nous, dans les instances dont... qu'on représente actuellement, nous ne vivons pas ces problèmes d'abus là, aucunement.

M. Morin : Je vous remercie. Puis, en fait, ce que je comprenais aussi des réponses précédentes, c'est que le ministre, actuellement, a des moyens législatifs à sa disposition pour agir. J'aimerais revenir rapidement sur... Vous avez mentionné qu'il y a des ententes de transferts, notamment avec la France, qui sont bénéfiques. Je comprends que le gouvernement doit investir dans ces transferts-là. Est-ce que le projet de loi... Parce qu'évidemment, dans le projet de loi, il y a beaucoup de dispositions qui vont donner un pouvoir réglementaire au ministre. Est-ce qu'il y a une possibilité que ça ait un impact sur ces ententes de transfert là qui sont en partie financées par l'État?

M. Boulanger (Hugo) : Je peux me permettre de tenter une réponse. Bien, je pense qu'il faut... qu'il faut évidemment conclure que, si on vient restreindre le nombre d'arrivants, bien, les ententes qui ont été établies deviennent caduques. Et ces ententes-là, ce sont les cégeps qui les ont financées, ils ont fait le choix d'investir une partie de leur budget pour envoyer des délégations établir ces ententes-là. Donc, ce que je crains, c'est qu'on investit cet argent-là en vain, alors qu'on avait quand même d'autres postes budgétaires à combler, là. On s'entend que le réseau collégial est considéré vétuste à peut-être 65 % et on aurait pu investir dans d'autres postes financés. Là, on a choisi d'aller chercher de la clientèle internationale dans l'espoir de continuer à offrir une gamme large de programmes à nos étudiants locaux, nationaux, évidemment, à ces gens-là. Donc, c'est un choix qu'on fait. Puis je trouve un peu... un peu déchirant, là, de voir la situation évoluer comme ça, là.

M. Morin : Je vous remercie. Est-ce que vous craignez que le projet de loi a un impact sur l'autonomie et la liberté académique?

M. Blanchet (Youri) : Si vous permettez. Bon, l'autonomie et la liberté académique des profs en tant que tels, pas en première lecture, pas à vue d'oeil, là. Comme ça, je ne pense pas qu'il y ait un effet là. Par contre, assurément qu'il peut y avoir un impact sur la tâche enseignante en région, sur le nombre d'enseignants, ça, c'est clair, mais aussi sur la qualité de vie de nombres d'enseignants, parce que, quand on tombe à temps partiel, bien, parce qu'il manque des étudiants, c'est sûr que ce n'est pas l'idéal. Plus à ce niveau-là, je vous dirais, peut-être l'effet qui pourrait être attendu.

M. Morin : Plusieurs, plusieurs groupes aujourd'hui nous ont parlé qu'évidemment développer des programmes, ça prend du temps, ça ne se fait pas en quelques mois, donc il faut une prévisibilité, une planification. Dans le projet de loi, à l'article 7 notamment, le gouvernement veut enlever son obligation de prépublier des règlements, donc qui empêcherait finalement d'être avisé, un dialogue. Est-ce que c'est quelque chose que vous craignez? Et quel sera l'impact chez vous...

M. Poirier (Julien) : ...pardon. Oui, sur la question de la concertation, c'est certain que ça devrait être quelque chose qui est systématique pour des questions qui sont aussi complexes, avec des impacts qui peuvent être profonds sur les réseaux qui sont tissés et maillés, entre autres, en région, mais pas que, sur l'ensemble du territoire québécois. Donc, ici, pour maximiser la prévisibilité, ça prend vraiment des instances de concertation sur le long terme, en continu, mais surtout qui sont systématiques.

Et le problème avec un projet de loi comme celui-ci, c'est le danger de bousculer ou de... ou de... je ne veux pas dire «sectionner», là, mais d'intervenir négativement sur des réseaux qui, effectivement, prennent beaucoup de temps, là, plusieurs années, voire parfois une décennie ou plus, pour se mettre en place, entre autres, ceux qui soutiennent des créneaux d'excellence dans certains domaines du savoir sur l'ensemble du territoire. Donc, par exemple, si on a une entente bilatérale, là, mes collègues discutaient tout à l'heure de transfert et de partenariat... si, par exemple, on en accueille moins, ça peut compromettre un certain nombre d'ententes avec des partenaires internationaux, le tout sur trame de fond d'internationalisation de l'enseignement supérieur. Et, présentement, le Québec, on pense, se positionne bien sur l'ensemble du territoire. Il y aurait un risque, par ce projet de loi là, qu'une intervention puisse avoir un effet négatif là-dessus. On s'en inquiète, ça nous interpelle.

M. Morin : Question très, très précise : Est-ce qu'il y a du bon dans ce projet de loi là? Est-ce que c'est utile, puis êtes-vous en faveur ou pas? Parce que, écoutez, à date, là, je peux vous dire, il y a comme un consensus de tous les groupes aujourd'hui. Alors, j'aimerais ça vous entendre, là-dessus, s'il vous plaît.

M. Blanchet (Youri) : Écoutez, je vais y aller. Je n'ai même pas consulté mes collègues, je ne leur ai pas dit : C'est moi qui vais répondre, mais moi, je vous dirais que nous croyons fermement que les étudiants étrangers, dans le contexte de l'enseignement régulier ne sont qu'un apport bénéfique au système d'éducation québécois et à la... et à la population québécoise et à sa communauté.

Nous savons qu'il y a un problème à cause, bon, qu'il y a un nombre d'immigrants énorme, hein, 588 000, je pense, temporaires sur le territoire, quelque chose comme ça. Bref, nous le savons, mais nous pensons fermement que la solution n'est pas de couper dans l'accueil des étudiants étrangers. Pour nous, c'est... en fait, c'est une des meilleures filières d'accueil d'immigrants et d'accueil de nouveaux arrivants, là, qui vont contribuer à la société québécoise par la suite. Écoutez, des gens qui ont... économiquement, ils sont capables de subvenir à leurs besoins, d'aller aux études. Ce sont des jeunes personnes en santé, hein, moins de 30 ans, dans la plupart des cas, des gens qui s'intègrent bien, en général, à la cause de la langue, entre autres, qui vont s'impliquer dans leur communauté, qui vont tenter d'y rester par la suite. Sincèrement, nous ne voyons pas beaucoup d'éléments négatifs à l'apport des étudiants étrangers, et le projet de loi, bien, pourrait mettre à mal ces bénéfices pour la société québécoise et le réseau.

M. Morin : Merci. Alors, je vais céder la parole à ma collègue. Merci

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Donc, Mme la députée de Mont-Royal-Outremont, il vous reste d2min 9 s.

Mme Setlakwe : Merci. Donc, pour clarifier, en ce qui concerne les cégeps publics, vous êtes d'accord avec la position que vous... d'ailleurs, qui a été mise de l'avant aujourd'hui par la Fédération des cégeps, ils devraient être exclus du projet de loi.

M. Blanchet (Youri) : Oui.

Mme Setlakwe : Très bien, merci. Vous avez bien en fait les deux questions. Vous avez... Bien, en fait, j'ai deux questions. Vous avez parlé de... et il y a eu des exemples qui ont été soulevés, là, du fait que vous êtes arrimés, vos programmes sur le terrain avec les besoins de la population, notamment, là, en termes de service public, soins de santé, tout ça. J'aurais voulu que vous élaboriez un petit peu plus là-dessus, me donner d'autres exemples.

Et, finalement, s'il reste quelques instants, pourquoi vous portez un carré bleu? On aimerait que vous élaboriez là-dessus aussi, s'il vous plaît. Merci.

• (19 h 10) •

M. Blanchet (Youri) : Bon. Je vais y aller avec le carré bleu. Je vais commence comme ça, tout simplement, très rapidement. Le carré bleu, c'est parce que c'est comme un petit symbole, suite aux hauts plafonds qui ont été effectués cet été dans les budgets d'investissement, là, dans le... entre autres, là, mobilier, achat de matériel pédagogique et autres. Bien, c'est pour signifier notre désaccord avec cette décision puis aussi qu'on veut que le plafond soit enlevé et que... finalement, que les projets d'investissement qui avaient été mis en place et acceptés au printemps dernier puissent se poursuivre. Alors, c'est vraiment dans la perspective de cette revendication. Alors, voilà, ça clarifie.

Pour ce qui est des programmes en région, peut être une petite réponse pour vous donner un peu plus, parce qu'on a parlé de Techniques de la santé, tout à l'heure, bon, mais, entre autres, il y a des programmes...

M. Blanchet (Youri) : ...de loisirs, des programmes en urbanisme, des programmes de tourisme, des programmes... graphisme, design d'intérieur. Donc, c'est tous des gens qui sont appelés à travailler en région par la suite ou à remplir des postes qui sont à pourvoir dans les différentes entreprises et commerces des régions, alors c'est vraiment... ça touche beaucoup de choses. Donc, c'est au-delà de soins infirmiers ou, c'est ça, des techniques de santé. Voilà.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci beaucoup, M. Blanchet. C'est ce qui termine cette autre partie de discussion. Il nous reste deux intervenants. Le prochain, qui représente la deuxième opposition, la parole est à vous.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous tous de votre belle présentation. Je vous écoutais, là, puis... sur votre accueil, sur l'intégration, vraiment, je trouve ça magnifique. Vous avez tout un réseau, de l'entraide, de l'ouverture, de l'adaptation, puis, bien, on reconnaît là l'accueil québécois. Donc, bravo.

Je vous écoute puis, en ce qui vous concerne, là, ça va bien actuellement, si je comprends bien. Vous dites un peu : Laissez-nous donc faire ce qu'on fait bien, hein? C'est ce que je comprends un peu. Puis vous dites : On connaît notre réseau, on connaît le terrain, donc je ne vois pas pourquoi... ou vous ne voyez pas pourquoi il y aurait matière à intervention ou à modification. Je vous ai-tu bien compris? Vous semblez bouche bée.

M. Boulanger (Hugo) : Je pense que vous saisissez l'essentiel du message effectivement.

M. Cliche-Rivard : Et je pense qu'il y a... il n'y a pas beaucoup mieux que vous pour connaître votre réalité locale et régionale. Puis je pense que ça, il faut qu'on... il faut qu'on le redise. Avez-vous l'intention ou, en fait, avez-vous l'impression d'avoir été consultés ou avez-vous l'impression qu'il y a une ouverture? Est-ce que vous sentez que le message perce, là, ou vous sentez que c'est assez fermé comme porte, là?

M. Blanchet (Youri) : Écoutez, on a beaucoup d'espoir d'être ici ce soir, je vous dirais ça comme ça. Nous... On comptait beaucoup là-dessus. Parce que, non, on n'a pas été consultés en amont de l'écriture de p.l. 74, bien sûr. Aujourd'hui, on sait que ça peut avoir un impact limité, notre présentation, c'est relativement court, les gens ont leur idée en tête, mais nous espérons quand même humblement que notre témoignage aujourd'hui pourra faire changer du moins le fusil d'épaule ou la perception, là, sur les étudiants étrangers dans nos institutions. Parce que, vous l'avez bien dit, on a une expertise pour bien les accueillir, on a mis en place des systèmes aussi de soutien et pour s'assurer que personne ne soit laissé derrière, mais je ne vous cacherai pas qu'il y a quand même, ici et là, des petits problèmes, mais on les identifie rapidement et on leur offre une... on leur donne une solution.

M. Cliche-Rivard : Puis vous faites bien de le dire parce que vous êtes plusieurs à avoir un petit vent d'espoir quand même. Je regarde M. le ministre, qui me fait quand même un grand sourire au moment où je parle. Je le souhaite aussi. Puis je pense que plusieurs des intervenants, intervenantes souhaitent que la consultation particulière qu'on fait en ce moment donne des résultats, donc, j'espère. On dit, des fois, que la nuit porte conseil, là, on verra qu'est-ce que le ministre dit demain d'entrée de jeu, s'il y a d'autres médias qui se présentent. Si le mot «déraisonnable» aura peut-être été laissé devant la porte, cette fois-ci, ou en tout cas à l'extérieur de ces murs. Mais, voilà, je vous entends, je vous sais préoccupés, là.

Vous avez dit «risques difficiles à ignorer», «vives inquiétudes», «inquiétudes», quand même, ce sont des mots lourds, donc ce qu'on vous promet, c'est de continuer de faire écho à vos revendications. Merci d'avoir été là aujourd'hui. Merci beaucoup.

M. Blanchet (Youri) : Le choix de nos mots n'est pas anodin effectivement.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Avant que la nuit s'installe, on va terminer avec le député de Jean-Talon, pour une période de trois min 18 s.

M. Paradis : On a reçu plus tôt aujourd'hui aussi la Fédération des cégeps qui est venue nous dire, entre autres, bien, qu'ils ne voyaient pas quelles étaient les intentions du ministre, particulièrement dans le cas des cégeps, qu'on ne voit pas la planification derrière le projet de loi. Si, moi, je vous disais que le projet de loi pourrait, par exemple... ou la planification du gouvernement pourrait reconnaître spécifiquement l'apport des étudiants étrangers dans les régions, que ceux qui... les étudiants étrangers qui font le choix d'étudier en région seraient privilégiés, qu'en aucun cas d'éventuelles diminutions des seuils globaux d'étudiants étrangers qui l'envisagent ne devraient avoir d'impact sur les programmes spécifiques dans les régions, si je vous disais qu'il devrait dire qu'il va revitaliser particulièrement les programmes des cégeps en région, par exemple avec des bourses d'études ciblées pour les étudiants étrangers qui vont... qui...

M. Paradis : ...vont s'établir en région, qui vont étudier en région, la promotion des programmes des cégeps francophones en région, la majoration du montant par élève dans les cégeps francophones en région, ça vous dirait quoi, vous?

M. Blanchet (Youri) : Bien, écoutez, c'est un peu comme de la musique à mon oreille, là, ce que vous dites, dans le sens où c'est sûr que l'idéal, c'est de ne pas avoir de projet de loi, mais nous, on vient quand même défendre une situation, un portrait qu'on a tenté de vous rendre le plus réaliste possible, qui est celui de cégeps de région, et tout ce que vous venez d'énumérer peut répondre, effectivement, à nos préoccupations puis à nos vives inquiétudes qu'on a, parce que nous le croyons... Puis je le répète encore, en région, ce n'est pas toujours facile. Mon collègue Hugo disait que parfois la... même la diversité ou l'accueil d'immigrants n'est pas simple non plus. Ça leur prend un emploi... tu sais, ça prend quelque chose pour les accueillir, donc ce n'est pas naturel de venir. Donc, si on met en place des systèmes, dont entre autres des bourses de mobilité régionale, avoir... ne pas donner de seuil maximal en... à des cégeps de région... Tu sais, quand je pense au cégep de Matane, entre autres, là, pour vous donner un exemple... mais il y a le tiers des étudiants du cégep de Matane qui sont issus de l'international. C'est important, là, le tiers. Donc, on enlève le tiers, on a un problème à Matane.

Alors, voilà. Tout ce que vous avez nommé serait une bonne chose, dans l'idée où parfois une solution... quand on ne peut mettre de côté quelque chose, bien, si on apporte des solutions alternatives mitoyennes qui peuvent au moins répondre à nos préoccupations, bien, nous en serions déjà heureux.

M. Paradis : Bien, ce que je viens de vous mentionner, c'est un résumé des pages 77 et 78 de la planification du Parti québécois qu'on a présentée la semaine passée, et ça rejoint en quelque sorte les propositions faites ce matin par le commissaire à la langue française, qui proposait, lui aussi, de ne pas avoir des solutions mur à mur mais de prévoir une répartition par établissements d'enseignement mais aussi par régions des étudiants étrangers. Merci beaucoup de votre présence.

M. Blanchet (Youri) : Bien, merci. Merci à vous.

M. Paradis : Au revoir.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, sur ce, permettez-moi à nouveau de vous remercier pour l'apport à nos travaux. J'allais vous dire : Bon retour, mais vous n'êtes pas trop loin de la maison. Alors, merci beaucoup.

Je vous... Je suspends... pas «suspends», j'ajourne les travaux au mercredi 8... 6 novembre 2024, après les avis touchant les travaux des commissions. Bonne soirée, mesdames et messieurs.

(Fin de la séance à 19 h 18)


 
 

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