Journal des débats (Hansard) of the Committee on Citizen Relations
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
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Wednesday, September 13, 2023
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Vol. 47 N° 24
General consultation and public hearings on the consultation document entitled : Planning of Immigration to Québec for the 2024-2027 Period
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente et une minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie, je vous le
rappelle, afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la
consultation générale sur le cahier de consultation intitulé La planification
de l'immigration au Québec pour la période 2024-2027.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Picard (Soulanges) est remplacée par Mme Bogemans (Iberville);
Mme Tardif (Laviolette-Saint-Maurice), par M. Lemieux (Saint-Jean); Mme Garceau
(Robert-Baldwin), par M. Derraji (Nelligan); Mme Prass (D'Arcy-McGee), par Mme
Lakhoyan Olivier (Chomedey) et Mme Massé (Sainte-Marie-Saint-Jacques), par M. Cliche-Rivard
(Saint-Henri-Sainte-Anne).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, nous entendrons ce matin les groupes
suivants, le premier, le Commissaire à la langue française, et nous allons
poursuivre avec M. Marc Termote.
Je souhaite donc la bienvenue au
Commissaire de la langue française. Je vous rappelle que vous disposez d'une
période de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons par la suite à
la période d'échanges avec la ministre et avec les parlementaires.
Alors, vous allez pouvoir débuter en vous
présentant. Merci.
M. Dubreuil (Benoît) : Bonjour.
Alors, bonjour à tous, Mme la Ministre, Mmes, MM. les députés. Je vous remercie
vraiment de me recevoir aujourd'hui. Je suis accompagné aujourd'hui de mon
secrétaire général, Dominic Bédard, ainsi que de Fiacre Zoungni et Gaby Audet,
qui sont professionnels dans mon équipe.
Alors, un mot pour vous rappeler le mandat
du Commissaire à la langue française. C'est un poste qui a été créé l'an
dernier à la suite de l'adoption de la Loi sur la langue officielle et commune
du Québec, le français. La loi charge notamment le commissaire de faire le
suivi de la situation linguistique, de faire le suivi des mesures que le
gouvernement prend pour assurer la pérennité du français et de recommander des
mesures susceptibles de favoriser l'usage du français comme langue commune.
C'est donc avec un grand intérêt que j'ai
pris connaissance du document de consultation, et je me réjouis de l'importance
qu'on y accorde à la pérennité de la langue française. Alors, nous le savons,
la situation linguistique au sein de la population immigrante est de plus en
plus déterminante pour l'avenir du français. Depuis plusieurs décennies, une
proportion importante d'immigrants optent pour la langue française. Donc,
aujourd'hui, on a environ 60 % des immigrants qui utilisent principalement
le français au travail et dans l'espace public et on a un 20 %
supplémentaire qui l'utilisent soit à égalité soit de manière secondaire aux
côtés de l'anglais. Alors, c'est beaucoup, mais, si on souhaite maintenir la
place relative du français au Québec, il faut que ce soit encore plus.
Alors, l'objectif principal de mon
intervention, aujourd'hui, c'est de vous proposer d'établir une cible d'utilisation
du français dans l'espace public au sein de l'immigration économique. Alors, je
propose d'établir une cible que je fixe à 85 % et je recommande aux MIFI
de produire des données qui vont permettre de vérifier annuellement l'atteinte
de cette cible et aussi de rendre l'augmentation des volumes d'admission
conditionnelle à son atteinte.
Alors, prenons d'abord un pas de recul. On
observe, pour toutes les cohortes d'immigration arrivées depuis les années 80,
un 25 à 30 % de personnes qui optent de manière prédominante pour l'anglais
dans la vie publique, soit une proportion qui est deux fois plus élevée que
celle que l'on retrouve dans la société d'accueil. C'est une situation qui crée
une pression continue sur la place relative du français, particulièrement dans
le Grand Montréal. Le nombre de personnes qui utilisent le français augmente,
mais le nombre de personnes et la fréquence avec laquelle on utilise l'anglais
augmentent encore plus rapidement. Alors, pour que l'immigration ait un effet
neutre sur le poids de chaque langue dans l'espace public, il faudrait qu'elle
fasse croître les deux à une vitesse équivalente. Alors, pour le dire
simplement, il faudrait que les personnes immigrantes utilisent l'anglais environ
deux fois moins souvent que ce qu'elles font actuellement et ce qu'elles ont
fait dans les dernières décennies.
La recherche menée depuis des décennies a
permis de documenter de façon exhaustive les facteurs qui favorisent l'adoption
de l'anglais dans la vie publique. Le fait d'avoir un bon niveau d'anglais à l'arrivée,
le fait d'étudier en anglais, incluant aux études supérieures, et le fait de
provenir d'un pays ou d'une communauté où l'anglais joue un rôle véhiculaire
sont tous des facteurs étroitement liés au fait d'opter pour cette langue dans
l'espace public.
On sait par ailleurs qu'une part
importante de l'immigration qui opte historiquement pour l'anglais est très
difficile à rejoindre par les efforts de francisation. Dans certains cas, ça peut
être en raison d'une offre insuffisante. Dans d'autres cas, c'est parce que l'apprentissage
du français exigerait un investissement lourd, en termes de durée et d'intensité,
alors que les gens peuvent parvenir, des fois, sans trop de difficulté, à fonctionner
en anglais, particulièrement à Montréal.
Alors, la consultation gouvernementale
mise sur deux changements réglementaires importants afin d'accroître la place
du français dans l'immigration économique. D'abord, exiger des requérants
principaux une connaissance minimale du français. Ensuite, créer une voie
accélérée pour les personnes qui ont étudié en français. Ces propositions
touchent directement deux des facteurs les plus fortement...
M. Dubreuil (Benoît) : ...à
l'utilisation du français dans l'espace public, la connaissance du français à
l'arrivée est la langue des études.
J'ai cherché à estimer quel pourrait être
l'effet de ces modifications sur l'utilisation du français chez les personnes
admises à l'immigration économique. Alors, pour référence, au recensement de
2021, 62 % des immigrants économiques travaillaient le plus souvent en
français, 26 % le plus souvent en anglais et 10 % dans les deux
langues. Si on répartit les réponses multiples entre l'anglais et le français
et si on exclut les autres langues qui jouent un rôle marginal sur le marché du
travail, on arrive à un ratio de 68 % pour le français et de 32 %
pour l'anglais. Selon mes calculs, les mesures proposées permettront d'atteindre
une proportion beaucoup plus élevée. On pourrait atteindre au sein de
l'immigration économique, un 79 % pour le français et un 21 % pour
l'anglais. Pour ce qui est des migrations totales, le ratio serait plutôt de
76 % pour le français et de 24 % pour l'anglais. Alors, je tiens à
préciser ce sont des estimations nécessairement très approximatives compte tenu
des données qui sont à notre disposition et des incertitudes. Elles donnent
néanmoins un aperçu de l'ampleur des changements auxquels on peut s'attendre.
Dans tous les cas, la proportion se rapprocherait, mais elle n'atteindrait pas
tout à fait le niveau nécessaire pour éviter que l'immigration, de manière
générale, fasse baisser la place relative du français.
Je note plusieurs incertitudes quant aux
répercussions que pourraient avoir les mesures proposées. On sait qu'un grand
nombre de personnes admises connaîtront le français, mais ce n'est pas parce
qu'on connaît le français qu'on l'utilise de manière prédominante. D'abord, la
plupart des immigrants qui connaissent le français connaissent aussi l'anglais.
Parfois, ils connaissent l'anglais mieux que le français et ont tendance à
préférer son utilisation. Ensuite, les niveaux de français qui seront exigés,
soit les niveaux cinq et sept, sont vraisemblablement inférieurs à ceux qui
seraient nécessaires pour permettre aux gens d'exercer pleinement leur
profession en français, ce qui pourrait également les inciter à utiliser
l'anglais s'ils maîtrisent mieux cette langue. Finalement, on ne sait pas
comment vont évoluer les conditions d'accueil. Le déploiement de Francisation
Québec, par exemple, pourrait éventuellement mener à une hausse plus marquée de
l'utilisation du français. Mais je pense qu'on doit modérer nos attentes
puisque l'expérience des dernières décennies montre que les personnes qui
optent pour l'anglais à l'arrivée sont assez peu susceptibles de changer par la
suite pour un usage prédominant du français.
Alors, de mon point de vue, le principal
enjeu avec la proposition qui est sur la table est qu'il sera difficile d'en
faire le suivi. Pour savoir si le Français réussit à tirer son épingle du jeu
dans l'immigration permanente, je devrai attendre les données du recensement
qui seront diffusées à l'automne 2027, alors que la prochaine planification
de l'immigration sera déjà prête. Si on considère le temps qui sera nécessaire
pour analyser les données et modifier les programmes en conséquence, ça veut
dire qu'on pourra au mieux corriger le tir à partir de 2029. C'est ce qui
justifie vraiment la proposition principale que j'avance dans mon mémoire. Si
on veut pouvoir rajuster le tir sans devoir attendre quatre ou cinq ans, il
faut mettre en place un mécanisme de suivi qui va nous permettre d'ajuster la
sélection des immigrants d'une manière agile en fonction des résultats obtenus.
Plus précisément, je propose au ministère de créer une enquête de relance
auprès des immigrants économiques admis dans l'année. L'enquête devrait prévoir
un échantillon permettant l'analyse des principales variables qui influencent
l'utilisation du français, incluant la connaissance du français et de l'anglais
à l'arrivée, le pays d'origine, la langue des études, le domaine d'emploi. Pour
fins de comparaison, l'enquête pourrait aussi couvrir les personnes parrainées
et les personnes réfugiées.
Pour ce qui est des indicateurs, je
propose de reprendre les deux plus connus. Pour ce qui est de l'espace public,
à savoir l'indicateur de langue de travail utilisé par Statistique Canada et
l'indicateur de langue d'usage public utilisé par l'Office québécois de la
langue française. L'utilisation de la langue de travail permet de faire le pont
avec les données riches et exhaustives du recensement canadien, alors que
l'utilisation de l'indicateur de langue publique permet de couvrir les personnes
qui n'occupent pas d'emploi.
• (11 h 40) •
Pour ce qui est de la cible à atteindre,
je pars du principe que l'on souhaite au minimum qu'une éventuelle hausse de
l'immigration économique ne vienne pas accélérer un recul du français. Pour y
arriver, il faut que le français soit utilisé au moins aussi souvent dans
l'immigration économique que dans la population en général. Dans le mémoire, je
montre que la cible qui permet d'atteindre ce résultat se trouve entre
83 % et 87 % après répartition des réponses multiples et exclusion
des langues autres que le français et l'anglais. Alors, pour simplifier les
choses, je propose d'adopter une cible de 85 % pour le français et de
15 % pour l'anglais comme langue utilisée le plus souvent en public.
À noter que le mécanisme que je propose
concerne uniquement les immigrants économiques adultes et ne vient pas résoudre
les enjeux que l'on observe chez une partie des personnes parrainées, des
personnes réfugiées et n'ouvre pas la question en plus de l'immigration temporaire.
Pour ce qui est des seuils d'admission,
l'enjeu est simple si on ne réussit pas à atteindre la cible proposée, l'effet
de l'immigration sur la place du français pourrait demeurer globalement négatif
et le sera d'autant plus...
M. Dubreuil (Benoît) :
...plus que les volumes d'admission seront élevés. Pour cette raison, je
propose de rendre la hausse des seuils d'admission conditionnelle à l'atteinte
de la cible d'utilisation du français au sein de l'immigration économique.
Pour ce qui est de l'échéancier, je
propose de déployer une enquête de relance dès le début de 2025 auprès des
personnes adultes admises en vertu des nouvelles règles. Si l'assiette de
85 % est atteinte, on pourrait alors augmenter les volumes d'admission de
l'immigration économique à partir de 2026, soit une année plus tard que ce qui
est proposé dans le scénario un. En revanche, si la cible n'est pas atteinte,
la hausse serait reportée, le temps d'ajuster les critères d'admission et le
plan d'invitation du ministère.
Alors, j'arrive à la conclusion.
Simplement mentionner que je propose également de ne pas considérer dès
maintenant comme étant hors seuil les personnes admises au volet Diplômé du
Québec du PEQ. Les personnes diplômées des universités francophones sont en effet
les plus susceptibles d'utiliser le français au travail et doivent être admises
de manière prioritaire. Cependant, le fait de les considérer hors seuil
rendrait plus difficile l'atteinte de la cible au sein de l'immigration
économique. Alors, cela dit, si on peut démontrer au bout d'un an ou deux qu'on
est capable d'atteindre la cible de 85 % sans difficulté, cette décision
pourrait être réévaluée.
Alors, j'en profite pour conclure,
simplement pour mentionner que le mémoire présente aussi d'autres recommandations
complémentaires que je vous invite à consulter et par rapport auxquelles il me
fera plaisir de répondre à vos questions. Voilà.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Dubreuil. Nous allons donc entamer la
période d'échange, et je me tourne du côté de la banquette gouvernementale. Mme
la ministre, vous allez... au total, une période de 14 minutes. La parole est à
vous.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci, M. le Commissaire, M. le secrétaire général. Merci de
prendre part à cet exercice. D'une part, je voudrais saluer, M. le Commissaire,
le fait que vous avez revêtu vos habits de commissaire très rapidement et que
vous vous êtes mis au travail vraiment très rapidement. Et, bien, je salue, en
fait, le mémoire que vous avez déposé dans le cadre de cette commission
parlementaire. Je constate que vous nous partagez, dans un premier temps, des
informations, des données fort pertinentes, fort éclairantes. Et ça, c'est tout
à votre honneur. Et par ailleurs vous avez voulu vous montrer aussi
constructif, au sens où vous êtes allé plus loin que la présentation des
données, vous avez aussi cherché à nous aider à avancer sur ce chemin pour
mettre en valeur le fait français, la langue française au sein de la population
immigrante. Donc, merci pour ça, également.
Vous avez vu qu'on était très actifs, ces
derniers temps, et même depuis plusieurs années, en lien avec le fait français.
Au printemps dernier, on a proposé, en fait, une réforme importante de nos cinq
programmes d'immigration économique pour mettre en valeur le fait français. On
a également mis sur pied Francisation Québec au cours des dernières semaines,
un organisme qui va desservir un bassin très large de clientèles. On a, de
manière plus lointaine, doublé le budget de la francisation au Québec. On a
donné accès, également, aux mesures de francisation aux immigrants temporaires,
ce qui n'était pas le cas avant notre arrivée.
Donc, moi, j'aimerais vous entendre sur le
jugement que vous portez quant à ces différentes actions. En quoi
changent-elles la donne pour le fait français, particulièrement au sein de la
population immigrante et, plus largement, québécoise?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
Alors, c'est sûr que, pour ce qui est des changements réglementaires qui sont
proposés, je l'ai mentionné, là, je vais peut-être le répéter, ça va amener
l'utilisation du français au sein de l'immigration à des niveaux qu'on n'a pas
vus historiquement. Donc, je le maintiens, ça ne sera peut-être pas suffisamment
élevé pour atteindre vraiment le niveau dont on a besoin pour dire que,
globalement, l'immigration fait croître la proportion de Québécois qui
utilisent le français, mais, franchement, il y a quelque chose là-dedans qui
vient, quand même, là, propulser l'utilisation du français à des niveaux qui,
historiquement, n'ont pas été observés. Ensuite, vous faites référence, je
crois, beaucoup au déploiement et à l'engagement envers Francisation Québec.
Donc, moi, je me suis engagé publiquement
et j'ai déjà eu des discussions, en fait, avec votre ministère pour voir
comment on allait mettre ça en œuvre, mais je me suis déjà engagé à faire une
évaluation, un suivi du déploiement de Francisation Québec, et on va aller voir
les différents partenaires du ministère pour aller recueillir, en fait, leurs
points de vue, leurs perspectives, pour être en mesure, dans mon rapport
annuel, de présenter une vision globale de la qualité du déploiement et de
l'efficacité des mesures.
Il y a évidemment, derrière le déploiement
de Francisation Québec, je pense, un certain nombre d'objectifs qui font plutôt
consensus et auxquels je me rallie entièrement. L'idée d'avoir un guichet
unique, par exemple, je pense que c'était quelque chose que plusieurs acteurs
réclamaient depuis longtemps. Je pense que c'est quelque chose qui a suscité
l'adhésion...
M. Dubreuil (Benoît) : ...ensuite,
on comprend que mettre ça en place, c'est quand même une réforme administrative
qui est... voilà, qui est costaude, hein, puis donc ça prend quand même un
certain temps à réaliser. L'idée d'élargir la francisation aux différents
publics, je pense que c'est aussi une approche qui était consensuelle, que ce
soit aux personnes qui sont ici avec un permis de séjour temporaire, ou encore
des gens qui viennent du reste du Canada, ou encore la population même du
Québec qui n'aurait pas les compétences nécessaires en français. Donc, ça,
c'est des objectifs qui me semblent tout à fait pertinents.
Ensuite, ce que je dirais cependant, c'est
que, sur la question de la francisation, moi, je maintiens quand même, et je
veux envoyer le message aussi, qu'il faut quand même être assez prudents par
rapport à ce qu'on peut faire avec des mesures de francisation. Parce qu'on a
un historique aussi. On a un historique, au Québec, des dernières décennies où
on a fait de la francisation. Et on sait que ça peut donner des bons résultats
dans certaines circonstances, mais on sait qu'il y a d'autres circonstances
aussi où c'est plus difficile. Quand vous avez des gens, par exemple, qui ont
besoin d'une longue francisation, qui ont besoin d'une formation qui a une très
grande durée avec une très grande intensité, c'est plus difficile, évidemment,
pour l'État de financer l'entièreté de la formation mais aussi pour les gens. Parce
que les principaux coûts de la francisation, c'est toujours évidemment la
personne immigrante qui va les soutenir, hein? Ce qui coûte le plus cher quand
on se forme, c'est le temps qu'on ne passe pas à travailler, hein? C'est le
temps qu'on ne passe pas à faire d'autre chose, c'est les coûts de
renonciation, les coûts d'opportunité. Donc, la francisation, elle a fait ses
preuves, je pense, dans certains contextes, mais il faut quand même conserver
des attentes modérées.
Mme Fréchette : Merci.
J'aimerais que vous reveniez sur votre analyse, en fait, du PEQ — Diplômé, son
impact en fait. Je ne saisis pas tout à fait pourquoi le fait que ce serait
hors seuil nous éloignerait potentiellement d'un objectif. J'aimerais que vous
précisiez.
M. Dubreuil (Benoît) : Oui,
c'est que, selon mes calculs... et ça va dépendre, évidemment, de... Ça va
dépendre un peu de ce que vous avez dans votre de déclaration d'intérêts, ça va
dépendre un peu de la nature des candidatures que vous avez. Moi, je ne connais
pas les candidatures que vous avez, O.K.? Donc, c'est sûr que les gens qui
diplôment des universités francophones, ce sont parmi les candidats les plus
susceptibles par la suite d'utiliser le français en public. Donc, moi, ma
lecture, c'est que ça va être assez difficile d'atteindre déjà le seuil de
85 % en travaillant avec le PSTQ. Je pense que c'est possible, ça va
dépendre vraiment de la manière dont vous allez développer votre plan
d'invitation, mais je pense que ça... Ce n'est pas gagné, ce n'est pas gagné.
Si vous enlevez les candidats les plus forts en français du PSTQ et du seuil de
50 000, je pense que vous mettez la barre un peu plus haute. Alors, vraiment,
c'est ça, mon raisonnement.
Mais encore, moi, je ne connais pas non
plus quelle est la nature, justement, du profil des gens qui sont dans le
système. Peut-être que vous vous regardez le système et vous dites : Bien,
sur la base de nos analyses, on pense qu'on a suffisamment de marge de manœuvre
pour admettre, je ne me souviens plus le nombre exact pour l'immigration
économique, peut-être, 30 000 personnes et atteindre facilement le 85 %.
Parce qu'en fait ce qui est embêtant, puis c'est ce que je note dans mon
rapport, c'est qu'en bout de ligne, au Québec, ce qui compte, c'est, oui, la connaissance
du français, mais on connaît la situation aussi dans la grande région de
Montréal, il y a un taux de bilinguisme qui est extrêmement élevé, il y a une
possibilité, dès qu'on parle le français ou dès qu'on parle l'anglais, de faire
à peu près tout, tout ce qu'on veut.
Donc, ce qui va compter, souvent, sur le
marché du travail, c'est de savoir : est-ce que la personne est vraiment
plus confortable en anglais ou vraiment plus confortable en français? Hein,
souvent, ce qui détermine l'usage, là, c'est vraiment de voir dans quelle
langue la personne a le plus d'aisance. Donc, ce qu'il nous faut, idéalement,
c'est de s'assurer que, dans l'immigration économique, on ait une masse
suffisante de personnes qui, spontanément, vont être meilleures en français. Et
ça, peut-être que vous les avez dans votre système de déclaration d'intérêt.
Pour moi, de l'extérieur, c'est difficile à dire. Mais je pense que, dans le
développement plus fin de la sélection du plan d'invitation que vous allez
faire, c'est vraiment ce que vous devez rechercher.
• (11 h 50) •
Mme Fréchette : Pour le PEQ —
Diplômé, il n'y aura pas un passage à travers le système de déclaration
d'intérêt, là, il suffira de rencontrer les critères pour être sélectionné. On
imagine, en fait, de notre côté, que, si quelqu'un a étudié en français...
bien, qu'il y aura un niveau d'aisance et un confort envers la langue
française, qui en soi sera aidant pour le fait français.
M. Dubreuil (Benoît) : Absolument,
absolument.
Mme Fréchette : Dans votre
mémoire, vous proposez, donc, une nouvelle idée, là, une idée novatrice de
gestion adaptative des niveaux d'immigration sur la base des résultats
d'enquêtes sur l'utilisation du français au travail et dans l'espace public.
Alors, moi, j'aimerais ça vous entendre sur le côté faisabilité de cette
idée-là. Comment est-ce que vous voyez ça dans une perspective temporelle, ce
que ça prendrait pour mettre ça en place et à quelle vitesse, avec quelle
rapidité on pourrait se mettre à l'oeuvre?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
Alors là, il y a peut-être des éléments techniques que vous... il y a
certainement des...
M. Dubreuil (Benoît) : ...technique
que vous maîtrisez mieux que moi. Ce que je comprends, c'est qu'entre le moment
où vous émettez votre CSQ et le moment où l'admission se passe, il peut quand
même y avoir un bon délai, hein? Je sais que le délai a varié aussi avec le
temps, mais je pense qu'à partir du moment où les gens que vous allez
sélectionner selon les nouvelles règles vont commencer à être admis... Alors, à
quel moment ça aura lieu? Ça va dépendre un peu à quel moment les décrets
entrent en vigueur puis ça va dépendre des délais fédéraux, et tout. Mais, si
les gens commencent à entrer... à être admis, pardon, dans un an, ou début
2025, ou fin 2024, je pense que, dès... à ce moment-là, vous pourriez aller les
sonder avec une enquête, qui n'a pas besoin d'être 25 000 personnes, là, ça
peut être 4 000 ou 5 000 personnes, il faut voir, développer un échantillon,
vous pourriez travailler avec l'Institut de la statistique, qui ont cette
expertise-là. Et, je pense, dès le début 2025, vous pourriez aller contacter
les gens pour voir quelle langue ils utilisent en public.
Évidemment, un argument qu'on pourrait
faire, c'est dire : Bien, écoutez, les gens viennent d'arriver au Québec,
est-ce qu'ils ont vraiment eu le temps d'opter pour le français ou l'anglais?
Et là la réponse que je donnerais, c'est : Évidemment, comme on le sait
tous aujourd'hui, bien, la plupart des gens qui sont admis sont déjà au Québec,
et ceux qui ne sont pas déjà au Québec, bien, souvent, ils ont déjà une
connaissance avancée soit du français et de l'anglais, qui fait en sorte que,
dès qu'ils arrivent, bien, c'est déjà clair pour eux qu'ils vont fonctionner
dans une langue ou dans l'autre. Des fois, ils ont déjà une offre d'emploi.
Donc, les choses se placent quand même assez rapidement. Donc, je pense que ça
nous donne la possibilité d'être agile, d'être agile.
Donc, si vous arrivez dès le début de
2025, vous commencez à questionner les gens en utilisant des méthodologies qui
sont éprouvées... C'est pour ça que je ne propose pas non plus d'utiliser des
indicateurs qui n'existent pas. Moi, il y a peut-être des indicateurs que
théoriquement je préfèrerais développer, qui seraient meilleurs que ceux de
Statistique Canada ou de l'OQLF, mais comme ces indicateurs-là existent, comme
ils sont éprouvés, comme ça nous donne une base de comparaison, je pense que
c'est pertinent de les reprendre, parce que ça nous permet d'agir plus rapidement.
Et là, dès 2026, comme je l'ai dit dans mes remarques introductives, vous
auriez l'information en main pour savoir si vous êtes sur la cible, un peu en
bas de la cible ou beaucoup en bas de la cible. Je pense, si vous êtes à 83 ou
à 84, franchement, il n'y a pas d'enjeu, mais, si vous êtes à 60 ou à 62,
franchement, c'est un signal d'alarme qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne
pas, là, dans le mécanisme de sélection.
Mme Fréchette : D'ailleurs,
est-ce qu'il n'y a pas des facteurs aussi qui pourraient influencer le
comportement linguistique des personnes que l'on analysera et qui feraient en
sorte qu'on prenne des décisions en matière d'immigration sur la base d'un
comportement qui a été influencé par une diversité de facteurs, oui, en lien
avec l'immigration mais pas nécessairement non plus, ça peut être le cadre de
travail, et tout le reste?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui,
oui, oui. Bien, c'est sûr que le principal facteur qui détermine dans quelle
langue les gens vont fonctionner publiquement, c'est les compétences des gens.
O.K. Quelqu'un qui est beaucoup plus fort dans une langue va être naturellement
porté à utiliser davantage cette langue. Et ça vaut aussi sur le marché du
travail, sur le marché du travail, vous avez intérêt à trouver un emploi qui
vous permet de travailler dans la langue où vous êtes le plus fort, hein? Parce
que, quand vous travaillez dans la langue que vous êtes plus fort, c'est plus
facile de lire de la documentation. C'est plus facile de participer à des rencontres.
C'est plus facile d'expliquer à un client vos produits. C'est plus facile de
comprendre les besoins du client.
Donc, le premier critère, vraiment, c'est
vraiment le niveau relatif de compétence en français par rapport... par rapport
à l'anglais. Mais c'est sûr qu'au-delà de ça, il peut avoir des dynamiques
organisationnelles. Par exemple, si vous n'êtes pas très bon en anglais, mais
vous tombez dans une entreprise où tout le monde est unilingue francophone,
bien, la pression va être forte pour vous... sur vous d'utiliser le français
davantage, donc, ou si vous avez un employeur qui a un leadership
extraordinaire et qui réussit à imposer le français ou qu'il a des mesures
extrêmement efficaces de francisation, bien, ça va vous encourager aussi à utiliser
le français. Donc, il y a effectivement plusieurs facteurs qui sont à prendre
en considération. Et ce que je trouve intéressant, en fait, dans l'approche que
je propose, c'est qu'en fixant un résultat, un résultat qui est explicite, une
cible qui va être claire pour tout le monde, on se donne collectivement une
obligation de résultat.
Donc, ça vaut aussi pour les employeurs,
parce que les gens qui vont parler français ou anglais en milieu de travail,
ces gens-là, ils ont un patron, ils sont dans un environnement d'affaires.
Donc, ça veut dire que le patronat, les employeurs ont aussi un rôle à jouer
pour faire en sorte que, collectivement, on atteigne de bon niveau.
Mme Fréchette : Il nous reste
peut-être une minute...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Petite minute.
Mme Fréchette : Petite
minute. Alors, je vous amènerais sur une recommandation que vous faites,
d'informer les personnes souhaitant s'établir au Québec, de même que les
employeurs et les établissements d'enseignement, des exigences linguistiques
propres à chaque profession. On imagine que c'est un grand chantier, d'une
grande complexité aussi. Donc, j'aimerais ça que vous élaboriez davantage sur
ce thème.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
...secondes.
M. Dubreuil (Benoît) :
Écoutez, il y a un projet qui est en cours entre l'Université de Montréal et le
ministère de la Langue française, qui est un projet qui était piloté chez vous
précédemment par le professeur Christophe Chénier, qui est expert en
docimologie. Et ce qu'ils sont en train de faire, en fait, c'est, ils
regardent...
M. Dubreuil (Benoît) : ...la
classification nationale des professions, qui décrit, je pense, quelque chose
comme 500 emplois, et ils regardent... ils font le lien avec l'échelle des
niveaux de compétence en français, qui va de 1 à 12. Donc, pour chacun des
emplois, 500 emplois, on essaie d'établir un niveau précis.
Alors, ça, je pense que c'est important,
parce que je pense qu'il y a beaucoup de confusion par rapport à c'est quoi, le
niveau exact de français que l'on a besoin pour travailler dans tel ou tel
domaine, je pense qu'il y a beaucoup de confusion. Les gens ne sont pas
habitués de penser dans ces termes-là, et je pense qu'il y a beaucoup de
personnes immigrantes qui arrivent puis qui parfois vont avoir tendance à
sous-estimer quel est vraiment le niveau dont ils vont avoir besoin pour être
pleinement performants. Des employeurs aussi peuvent avoir tendance à le
sous-estimer. Donc, à mon avis, on aurait plus de transparence...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Dubreuil.
Mme Fréchette : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : On en dit, des choses, en 50 secondes.
Mme Fréchette : Oui, mine de
rien.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la ministre. Alors, je me tourne maintenant du
côté de l'opposition officielle, avec, je présume, le député de Nelligan, pour
une période totale pour votre banquette de 8 min 24 s. La parole est à vous.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Je n'ai pas beaucoup de temps, j'ai plein de questions. Donc, si on
peut, nous deux... Moi, je vais raccourcir mes questions, vous, vos réponses.
Premièrement, je tiens à saluer la qualité
de votre mémoire, une dizaine d'articles et de recherches scientifiques.
Statistique Canada, OQLF, c'est très bien documenté. Bravo! Je vais avoir des
questions dirigées sur uniquement le point 3.4 qui touche l'immigration
temporaire. C'est presque deux pages. Nous sommes invités en consultation pour
deux scénarios... 140 000... 150 000. Moi, j'aimerais bien vous entendre, aujourd'hui,
sur l'autre scénario qui est absent : les immigrants temporaires.
Je voulais voir si vous avez très bien
détaillé, vous avez très bien détaillé. J'aimerais vous entendre sur le PTET,
désolé parce que c'est très long, PTET, PMI. J'aimerais bien vous entendre sur
les autres intrants qu'on ne contrôle pas. Parce que si on veut s'assurer de
l'usage de la langue française, on ne peut pas juste voir l'immigration...
l'immigration permanente aujourd'hui. Depuis tout à l'heure, ce que vous avez
dit qui est excellent, on le contrôle déjà avec des déclarations d'intérêts. Il
y a quelque chose qu'on ne contrôle pas du tout, c'est tout ce qui touche
l'immigration temporaire. C'est 340 000 en 2023.
M. Dubreuil (Benoît) : Et
vous me demandez une réponse courte, hein?
M. Derraji : Non, non... pas
une réponse... Allez-y.
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
rapidement, rapidement. À mon avis, c'est sûr que le fait d'émettre un CSQ,
hein, de reconnaître quelqu'un pour la résidence permanente, pour moi, c'est quand
même une action qui est lourde de conséquences. Donc, quand on admet la
personne, elle va pouvoir rester 40, 50, 60 ans, le reste de ses jours au
Québec avec ses proches. À mon avis, il y a là quand même un poids, une
décision qui a un poids vraiment particulier. Et c'est important, c'est
vraiment le seul moment où on peut vraiment avoir un réel contrôle, il ne faut
pas qu'on se trompe. Mais vous avez raison, l'immigration temporaire a pris des
proportions qu'on n'aurait pas imaginées, hein, il y a quelques années.
Et, comme je l'ai mentionné dans mon
rapport annuel, c'est sûr, maintenant, avec les nombres que l'on voit,
forcément, il y a un impact sur la dynamique linguistique. On sait que, parmi
l'immigration temporaire, il y a un usage de l'anglais qui est encore plus
important qu'au sein de l'immigration permanente. Moi, à mon avis, ça prend une
discussion de fond, vraiment, là, sur l'immigration temporaire, et je vais même
dire... je vais aller plus loin, je dirais que ça prendrait au moins trois discussions
de fond. Ça prend une discussion de fond sur la question des demandeurs d'asile
et l'accueil des réfugiés. Parce que même s'il y en a beaucoup qui adoptent le
français, il y a quand même un défi qui demeure, et ça interpelle la
responsabilité fédérale et la gestion fédérale du système.
Il y a un deuxième débat qu'il faut avoir
qui porte vraiment sur la question des étudiants étrangers et les permis
postdiplômes, parce qu'on sait que c'est une catégorie où, en raison de la
place des institutions anglophones au Québec, on a 40 à 45 % des gens qui
étudient en anglais. On a 92 à 93 % des étudiants à l'échelle canadienne
qui étudient en anglais. Donc, c'est sûr que c'est difficile, par la suite, de
faire valoir le français sur le marché du travail. Ça, c'est une deuxième
discussion.
La troisième que vous proposez, c'est
vraiment sur les travailleurs temporaires et les PMI. Et là, mon problème,
c'est que j'ai beaucoup de difficultés à m'y retrouver, et j'ai beaucoup de
difficultés à trouver des gens qui sont capables de m'expliquer où on est.
• (12 heures) •
M. Derraji : Vous voulez que
je vous partage une histoire. Il y a des gens qui ne se qualifieront pas dans
les programmes du Québec, ils vont utiliser les PMI pour revenir... venir au
Québec, parce que vous avez vu le niveau de français qu'on demande aux PMI.
Donc, cela, on dit qu'on est en contradiction avec un gouvernement qui se dit
vouloir protéger la langue française. Vous êtes probablement la personne la
plus habile à venir aujourd'hui en commission parlementaire nous dire :
Vous faites fausse route. Pourquoi on fait fausse route? Parce qu'au lieu qu'on
parle de 40 000, de 50 000, j'aurais aimé prendre le temps nécessaire, en tant
que société, et dire que le français est très important pour nous, mais comment
on va le faire concrètement? Il y a tellement d'intrants, vous connaissez,
c'est qui, ces intrants? D'ailleurs, on se perd dans les intrants, mais est-ce
que, vraiment, on contrôle ce qui se passe par rapport à l'usage de la langue...
12 h (version non révisée)
M. Derraji : ...avec l'ensemble
des programmes qu'on ne contrôle pas du tout.
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
Écoutez, je ne peux pas vous donner tort, là, il y a eu une évolution au cours
des dernières années qui n'est pas québécoise, qui est canadienne, où il y a eu
des nouvelles... des nouveaux permis qui ont été créés, des nouveaux programmes
qui ont été créés, des nouvelles... de nouvelles exemptions qui ont été créées.
On sait qu'il y a des enjeux de gestion des données, des statistiques aussi au
sein du gouvernement fédéral. La possibilité justement de recouper et de
découper les données pour voir ce qu'il en est de la question du français, c'est
extrêmement difficile.
Et on a un changement en ce moment dans
les politiques d'immigration, certains ont qualifié ça, là, de création d'un
système à deux étapes, qui peut avoir un sens. Il y a des raisons pour
lesquelles, par exemple, on favorise les étudiants qui ont étudié ici pour leur
donner une voie d'accès rapide, il y a des raisons qui sont bien établies, mais
on est en train de créer un système qui n'a pas beaucoup de lisibilité ni pour
les décideurs ni pour les personnes immigrantes elles-mêmes. Donc, ça cause des
questions. Moi, j'ai écouté les consultations, hier, j'ai vu des gens qui sont
venus porter des témoignages. On voit que ça crée des dilemmes et des tensions
qui sont plutôt de nature socioéconomique aussi, des questions d'équité, des
questions de justice, mais il y a aussi des questions pour le français. Et moi,
j'aimerais pouvoir avoir un examen, là, vraiment détaillé de ça.
M. Derraji : Mais M. Dubreuil,
vous êtes quelqu'un de... qui fait beaucoup de recherches. Hier, vous avez
entendu des témoins qu'au Québec, il y a de l'esclavagisme. Un représentant des
Nations unies, il est venu au Québec, il a parcouru le Canada et il est venu au
Québec pour faire des entrevues directes avec des personnes concernées. Cette
consultation, on ne parle pas assez, pas uniquement des enjeux sociaux. Aujourd'hui,
avec vous, vous ramenez un autre élément. Hier, les membres de la commission
étaient confrontés à une réalité qu'on n'a pas vue avant. Moi, je l'ai vu parce
que je suis allé voir et rencontrer les travailleurs temporaires étrangers.
Mais ce que j'aimerais bien avoir avec vous, parce que vous êtes la personne la
plus habile à le faire, à part qu'on fait fausse route au niveau de la
francisation et au niveau de l'usage du français, c'est que ce scénario, moi,
je l'appelle le scénario trois, qui est le grand absent de cette consultation.
La ministre nous propose deux scénarios, 40 000, 50 000. Depuis le
début, et je suis content qu'il y ait des journalistes dans la salle, les
deux... 50 000, 60 000... On fait fausse route parce que, le débat
sur les seuils, ce n'est pas le vrai débat qu'on doit avoir aujourd'hui. Le
vrai débat, si notre intérêt est la promotion de la langue française qui est en
déclin, on fait fausse route, parce que le troisième scénario est absent, à
savoir les travailleurs temporaires étrangers. Est-ce que vous partagez avec
moi cette affirmation?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
je vais peut-être simplement revenir sur le point que je mentionnais, je pense
que la situation chez les personnes temporaires, pas juste les travailleurs
étrangers temporaires, aussi les étudiants et les demandeurs d'asile, ce sont
des questions qui méritent un examen approfondi. Cela dit, je reconnais aussi
quand même qu'à partir du moment où on émet un CSQ où on accorde la résidence
permanente, il y a quand même un élément supplémentaire qui se présente et qui,
à mon avis, peut être considéré en soi.
M. Derraji : Mais vous savez
que... mais c'est dangereux, parce qu'un travailleur temporaire étranger peut
continuer à travailler dans sa langue, peu importe, espagnole, anglaise pendant
plusieurs années.
M. Dubreuil (Benoît) : Absolument.
M. Derraji : Vous venez de
nous dire qu'on doit améliorer l'usage du français en milieu de travail.
Attendez, le CSQ, là, c'est plus tard. On parle d'améliorer l'usage de la
langue française maintenant. À moi, si vous me dites que vous êtes à l'aise,
que dans des environnements de travail, on laisse aller, ça mérite une
deuxième, troisième langue. Ce n'est pas ça, le problème. Vous êtes le
protecteur de la langue française.
M. Dubreuil (Benoît) : Absolument.
Mais je reconnais, je reconnais et je réinsiste sur le point. Il y a un enjeu,
il faut absolument considérer la situation chez les personnes temporaires pour
se donner une approche cohérente par rapport à la situation du français.
M. Derraji : Donc, le
troisième scénario qui est absent, vous en dites quoi?
M. Dubreuil (Benoît) : Écoutez,
je pense que ça mérite... On peut quand même discuter aussi de la question des
seuils, mais c'est sûr que, pour avoir le point de vue global, idéalement, on
aurait un ensemble de politiques qui serait cohérent.
Je pense qu'aujourd'hui, la façon dont les
choses ont évolué, pas juste au Québec, hein, au Canada, on voit de moins en
moins la cohérence entre les approches par rapport au temporaire puis comment
ça s'insère par rapport aux permanents. Il y a cette tension-là qu'on observe
dans les politiques à l'échelle canadienne aujourd'hui.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Le temps imparti à l'opposition officielle
est terminé. Je me tourne maintenant du côté de la deuxième opposition avec le
député de Saint-Henri—Sainte-Anne. Vous avez une période de 2 min 48 s. Le
temps est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup.
Merci pour votre présentation. Merci pour votre mémoire, je l'ai lu avec
attention. La place du français, moi aussi, dans l'immigration économique me
préoccupe grandement, c'est quelque chose qu'il faut vraiment travailler et
étoffer.
Vous avez mentionné être confiant sur
certaines mesures, deux mesures, là, qui sont modifiées ou dans les
propositions des différents programmes. Je me pose la question, cela dit, si
vraiment ces mesures-là vont apporter une différence. On parle du PEQ étudiant
tel que réformé, on réforme le PEQ étudiant en retirant l'exigence...
M. Cliche-Rivard : ...d'un an
de travail après le diplôme. Donc, il n'y a pas de lien vraiment, le diplôme
est acquis. La question, c'est : Est-ce qu'on retire un an ou on garde un
an de travail après? Pour moi, il n'y a pas d'impact direct sur le fait
français dans cette réforme-là. De l'autre côté, juste pour finir, on
fonctionne, depuis 2019, avec un système d'invitation pour notre programme
régulier temporaire. On a toujours choisi, depuis 2019, en amont, avec des gens
qui font des déclarations d'intérêt. On les a choisis, le ministère les a
choisis et, encore aujourd'hui, en 2023, ou en 2024, quand ça va être établi,
on va encore les choisir. Bref, la grille a peut-être changé un petit peu, mais
en amont, ça a toujours été le MIFI qui décidait ou qui déterminait à qui
envoyer une invitation.
Alors, la question que je me pose,
c'est... Moi, je ne suis pas certain que je suis confiant que ces deux mesures
là modifiées vont réellement avoir un impact puis vont vous permettre
d'accomplir vos cibles. Je le souhaite. C'est mon souhait profond, mais je ne
suis pas sûr que ce sont deux mesures structurantes. Et moi, je pense que la
place, justement, qu'on va donner à la francisation des temporaires et le... ça
doit être notre première priorité, ça doit être que tous les résidents
temporaires, une fois arrivés au Québec, commencent leur francisation. Il ne
devrait plus y avoir personne, au Québec, qui travaille ou qui étudie qui n'entend
pas, qui ne commence pas à s'initier au français tout de suite. Et les
entreprises vont être des participantes, des aides dans ça : francisation
payée en entreprises sur les heures de travail, cours de français dans les
institutions anglophones postsecondaires.
Je pense qu'on doit aller dans des mesures
structurantes plus fortes que de faire ce qu'on faisait déjà, c'est-à-dire
choisir déjà comme on choisit encore ou enlever un an d'expérience de travail
pour des gens qui se qualifiaient de toute façon. À mon humble avis, on doit
aller plus loin.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...30 secondes.
M. Dubreuil (Benoît) : Oui,
sur le fait qu'en fait la grande différence vient par rapport à l'admission des
personnes qui ont étudié en anglais ou non, hein, je pense que c'est vraiment
là que l'impact, on peut aller le chercher. Pour ce qui est du système
d'invitation, c'est sûr que, si on met un minimum de niveau 5 pour inviter
les gens, ça vient quand même exclure une partie des candidats qui avaient
très, très peu de chances d'opter pour le français. Sur la question de la
francisation des temporaires, j'entends bien, j'entends bien ce que vous dites
et, en principe, je suis d'accord. Par contre, ce que je voudrais simplement
mentionner, c'est que les coûts de la francisation...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Dubreuil. Malheureusement, c'est tout le
temps. Alors, calculez bien vos questions, s'il vous plaît. Je me tourne
maintenant du côté du député de Matane pour une période de 2 min 48 s. La
période est commencée.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. M. le Commissaire, bienvenue à l'Assemblée nationale. J'ai bien
pris note de votre intervention du début juin quant à vos premiers constats,
deux en particulier m'intéressent. Vous dites que, le nombre d'immigrants
temporaires, son explosion du nombre d'immigrants temporaires entraîne des
répercussions importantes sur la situation du français. On est à plus de
300 000, il pourrait en rentrer 100 000 par année qui s'additionnent.
Or, toutes les discussions jusqu'à maintenant, le gouvernement a choisi
d'occulter cette question-là, parfois même en ironisant lorsqu'on pose des
questions. Pourtant, ces personnes-là sont ici. Je ne sais pas pourquoi on choisit
de ne pas en parler, c'est très important.
L'autre question. Vous dites que
l'utilisation de l'anglais dans l'espace public qui est étroitement liée, pour
les allophones et les francophones, au fait d'avoir étudié dans un cégep ou une
université anglophone... Régulièrement, les différents ministres apprécient
placer sur leur compte Twitter qu'ils ont rencontré le premier ministre et que
c'est pour s'assurer de la fin du déclin du français. Je suggère bien
humblement, avec bien d'autres depuis longtemps, que le cégep en français est
une mesure nécessaire. Le premier ministre nous a dit qu'on était des
extrémistes — ça inclut Guy Rocher, je me trouve en bonne bonne
compagnie. Est-ce que... Ce que vous nous dites, notamment chez les allophones,
c'est que le fait de socialiser en anglais à l'âge adulte a un impact
considérable sur les habitudes linguistiques pour la suite des choses.
• (12 h 10) •
M. Dubreuil (Benoît) : C'est
sûr que le fait de passer plusieurs années dans un établissement d'enseignement
postsecondaire dans une langue, ça permet d'approfondir les compétences dans
cette langue. Puis c'est sûr que, quand ensuite on est plus fort dans une
langue, bien, la propension, la disposition à l'utiliser est plus grande. Vous
savez, pour être admis dans une université anglophone un peu partout sur la
planète, là, ça prend l'équivalent du niveau C1, hein, donc niveau 9, là,
selon notre critère, ou des fois on baisse un peu, on met des 8 forts,
hein, un B+ fort. Donc, c'est quand même un niveau assez élevé qu'on demande
aux gens, même pour s'inscrire dans une université anglophone. Ensuite, quand
les gens ont fait quatre ans de cours d'études en anglais, ils ne sont plus au
niveau 8 ou 9, là, ils sont rendus au niveau 10, puis les meilleurs
vont peut-être être rendus au niveau 11. Donc...
M. Bérubé : M. le
commissaire, comme on est moins sur l'enseignement supérieur, en ce qui nous
concerne, je vais profiter du fait qu'on est sur l'immigration. Donc, je vais
isoler les francophones de l'équation, mais je vais suggérer à la ministre que,
pour les allophones, il y ait cette volonté qui se dirige vers...
M. Bérubé : ...les
universités... en fait, sur les collèges francophones. Je pense que la ministre
peut, elle, à travers les outils qu'elle a, dire : Bien, c'est une mesure
qui est validée, là, ce n'est pas l'opposition qui le dit, c'est le commissaire
qui le dit. Il n'est pas trop tard pour le faire, et on pourrait décider de
commencer par faire cette expérience-là. Les enfants de la loi 101, cégep
en français, on est les seuls à défendre ça. Québec solidaire ne défend pas ça,
le Parti libéral...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député, merci beaucoup. Le temps est...
M.
Bérubé
: J'ai
tout dit ce que j'avais à dire là-dessus.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...s'est écoulé. M. le commissaire, merci beaucoup pour
l'apport à nos travaux. Je suspends quelques instants, le temps que le prochain
groupe s'installe. Merci.
(Suspension de la séance à 12
h 12
)
(Reprise à 12 h 14
)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend donc ses
travaux. Alors, je souhaite maintenant la bienvenue à maître... pas maître, Pr
Termote. Bonjour, M. Termote. Alors, vous allez disposer d'une période de
10 minutes pour... avant de débuter l'échange, mais vous allez vous
présenter et, par la suite, je vais pouvoir prêter la parole à nos
intervenants. La parole est à vous.
M. Termote (Marc) : Alors,
avant tout, je voudrais vous remercier de l'invitation parce que vraiment, à
mon âge très avancé, vous me donnez l'illusion que, peut-être, je peux encore
être utile à la société qui m'a accueilli il y a maintenant plus d'un
demi-siècle. Mais vous avez des journées très chargées, je vais aller le plus
vite possible.
Je ne peux que dire du bien de la
proposition qui concerne à faire augmenter progressivement le nombre des
immigrants permanents de 50 000 à 60 000. Je soutiens totalement
cette proposition. À ces 60 000, il faut ajouter ceux qui proviennent du
Programme d'expérience québécoise, disons un 10 000. Ce qui nous donnerait
quelque chose comme 70 000 immigrants permanents. Ça équivaut à un
taux d'immigration, c'est-à-dire le pourcentage d'immigrants par rapport à la
population, de 0,8, 8/10ᵉ de 1 %. C'est énorme. C'est un des taux
d'immigration les plus élevés au monde, ça. Alors, on est battu uniquement par
le reste du Canada. Et donc, en ce sens-là, il faut saluer cette proposition.
Le deuxième aspect fondamental de cette proposition, c'est que cette
immigration doit de plus en plus être, si possible, quasiment totalement
francophone. De sur le point de vue francophone, je reviendrai plus tard.
Moi, ce qui m'a intéressé dans les
60 000 qu'on propose, c'est que, finalement, ça rejoint...
M. Termote (Marc) : ...moi,
ce que j'avais proposé, il y a deux ans, dans un rapport au ministère de
l'Immigration, au MIFI, où j'avais, pour des raisons démographiques, proposé
58 000. Pour des raisons démographiques, la raison étant la suivante,
c'est que nous sommes quasiment, maintenant, dans une situation où la totalité
de la croissance démographique du Québec est liée à l'immigration.
L'accroissement naturel est quasiment nul, et va devenir négatif, et le sera de
plus en plus négatif. Alors, pour compenser les naissances manquantes et pour
assurer qu'on continue quand même à augmenter le nombre d'habitants, légèrement
mais n'empêche, il faut les remplacer, ces naissances manquantes par des
immigrants. C'était ça, le raisonnement qui était derrière ma proposition.
Et ça m'amène — et je vais aller
très vite parce que vous allez être serrés par le temps — j'ai quand
même quelques réserves, et la première réserve, c'est que, justement, on a
l'impression, en lisant la proposition, que c'est pour des raisons économiques
que l'on va passer de 50 000 à 60 000. Et d'abord l'accroissement de
50 000 à 60 000 est dû quasiment uniquement à l'immigration
économique. Je peux comprendre cette approche dans la mesure où l'immigration
économique est quasiment le seul levier sur lequel on a quasiment les pleins
pouvoirs au Québec, mais il ne faudrait pas qu'on pense que cette immigration
économique va nous enrichir.
C'est une utopie de penser que
l'immigration va enrichir la population, que ce soit la population québécoise
ou n'importe quelle autre société d'accueil. Toutes les études montrent très
clairement que l'immigration n'a un impact économique que très légèrement
négatif ou très légèrement positif, même quasiment zéro. Il y a même une étude
toute récente de l'Université de Waterloo, trois grands économistes bien connus
qui ont dit : Le Québec... pardon, le Canada s'est appauvri à cause de
l'immigration depuis 50 ans. Donc, détruisons cette utopie que l'impact
économique pourrait être profitable. Il y a... À mon avis, la justification
fondamentale est démographique.
Du point de vue démographique, justement,
il y a d'autres volets, il n'y a pas seulement les nombres, il y a la structure
par âge, et là il y a quand même, dans le cahier de consultation, dans le
cahier où on présente des propositions, un certain flottement. On insiste sur
le fait qu'il faut rajeunir la population, et on a bien raison, sauf que c'est
encore une fois une utopie de penser qu'on peut rajeunir la population grâce à
l'immigration. L'impact de l'immigration sur le rajeunissement de la population
est nul. On essaie d'agir sur 15 % de la population, le stock
d'immigrants, en rendant ce stock un peu plus jeune, mais on ne rajeunit
quasiment pas. En fait, la population d'âge actif vieillit grâce à cause de
l'immigration, parce qu'un immigrant arrive en moyenne à 30 ans, alors que
la population d'accueil arrive sur le marché du travail vers 20 ans. Ça,
c'est pour l'aspect démographique. En d'autres termes, le point fondamental de
l'illusion qu'on fait parfois, c'est de penser qu'un immigrant égale un bébé.
C'est une énorme différence.
Alors, l'aspect francophone? Là aussi,
j'applaudis bien sûr à cette approche. On va soumettre les immigrants à des
conditions très strictes. Il ne suffira pas, pour la plupart, de simplement
déclarer, après auto-évaluation, on connaît le français, et il y aura, pour
beaucoup, un examen et tout ça. Mais dans la proposition, et on le dit très
bien avec... et c'est très judicieux, qu'il y a un suivi à faire parce que si
on n'atteint pas les cibles en termes de francisation des immigrants, eh bien,
on va peut être rajuster les objectifs, les seuils. Donc, il y a un suivi à
faire, et à cet égard là, je suis très reconnaissant à cette approche qu'on
remet en cause.
• (12 h 20) •
Mais d'une façon générale, quand on parle
de francisation des immigrants, ça me sidère totalement l'insistance qu'on met
sur la francisation. On doit insister là-dessus, mais ça ne suffit pas. Ce
n'est que marginal. Il y a une étude qui a été publiée il y a deux ans par
l'Office de la langue française. Une étude faite par deux chercheurs de
Statistique Canada. Ce n'est pas Termote, c'est... donc, et qui disent
carrément... Ils ont fait des simulations en disant : Supposons que tous
les...
M. Termote (Marc) : ...immigrants
sont francophones... et 100 % francophones, là, pas après
l'autoévaluation. Ils sont tous francophones. Ils parviennent tous... ils
viennent tous de pays francophones. Leur langue maternelle serait le français,
etc., et la moitié va en région, etc., des scénarios de simulation totalement
utopiques, et ça ne fait que très légèrement freiner la baisse du français.
Pourquoi? Parce qu'il y a un phénomène fondamental qu'on oublie toujours dans
ce débat-là, c'est que l'essentiel du déclin du français au Québec est dû à la
sous fécondité des francophones. Il faut 2,1 enfants par femme... Et ne
mettons pas ça sur le dos des femmes, hein? Il faut 2,1 enfants par femme
pour renouveler une population, pour garder simplement constant le nombre de
locuteurs du français, du français ou de n'importe quel autre groupe. À
Montréal, parce que c'est à Montréal... En région, il n'y a pas de problème
pour l'avenir du français, mais à Montréal, les francophones ont en moyenne
1,1 enfant par femme. C'est la moitié du nombre nécessaire simplement pour
garder constant le nombre de locuteurs.
Alors, c'est évident que dans des
conditions pareilles, le nombre de... Et cette sous-fécondité, elle est là
depuis longtemps, hein? Elle a été cachée parce que le nombre de femmes en âge
d'avoir des enfants restait assez élevé. Maintenant, ces femmes du baby-boom
disparaissent, je peux dire, des âges reproductifs. Et donc le résultat, c'est
que maintenant on a un gros problème de ce côté-là. Et c'est l'étude de Stat
Can, publiée par l'office, disait en conclusion : C'est là qu'il y a le
problème. Sauf qu'on ne peut pas agir là-dessus. C'est éthiquement totalement
injustifié que de demander aux femmes... de faire des enfants au nom du français.
Donc, c'est pour ça que moi je ne peux pas
m'empêcher d'être pessimiste, mais je suis pessimiste uniquement pour Montréal.
Pour le reste du Québec, il n'y a pas de problème pour l'avenir du français.
Bon, je ne vais pas abuser de votre patience. On devrait parler
d'humanitaire...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste une minute, une minute.
M. Termote (Marc) : Oui.
Bien, l'humanitaire, on n'y touche pratiquement pas. Je trouve ça regrettable.
Et alors il y a bien sûr l'immigration temporaire, dont on pourra peut-être
parler plus tard. Je comprends que, comme ça, on est très... entre les mains du
Québec et qu'on a besoin d'un peu plus de temps pour travailler là-dessus.
Merci pour votre patience et merci de votre attention.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Vous avez encore quelques secondes, là. Je vous ai
bousculé, mais quelques secondes.
M. Termote (Marc) : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Dernier petit message?
M. Termote (Marc) : Ça me va
très bien, oui.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : D'accord. Merci beaucoup, Pr Termote pour votre
présentation. Alors, on va commencer maintenant la période d'échanges avec les
parlementaires. Je vais me tourner du côté de la ministre et du gouvernement
pour une période totale de 14 minutes. La parole est à vous.
Mme Fréchette : Oui. Merci
beaucoup, Pr Termote. Très contente d'avoir l'occasion de vous rencontrer à
nouveau. On s'était vus il y a quelques mois pour parler de l'étude, justement,
que vous aviez faite pour le ministère. Alors, merci d'avoir participé cette
fois-ci, donc, aux consultations sur l'immigration pluriannuelle. C'est
toujours intéressant de vous entendre et de vous lire.
Moi, je vous amènerais sur le thème... un
thème qui est fort important pour notre gouvernement, c'est celui de la
régionalisation de l'immigration. C'est une de nos priorités en matière
d'immigration, d'avoir davantage de personnes immigrantes qui vont s'implanter
en région, en dehors de la région métropolitaine de Montréal et qu'ils le
fassent idéalement dès leur arrivée au Québec, et non pas après quelques mois
ou années passés dans la métropole ou dans un autre grand centre.
Donc, moi, je voyais qu'à la
recommandation... À la page 22, la recommandation 3.7, vous évoquez
en fait la création de pôles d'immigration dans d'autres centres urbains que
dans la métropole, donc à l'extérieur de Montréal. Alors, moi, je me demandais
qu'est-ce que notre ministère pourrait faire pour favoriser la création de ces
autres centres urbains avec un noyau important de personnes immigrantes, là.
Quelle nouvelle mesure nous permettrait d'atteindre cet objectif-là? Je dois
dire qu'on a déjà pris un certain nombre de mesures au cours des dernières années,
et ça semble donner des résultats très intéressants, parce qu'on est passé à
20 % des personnes qui habitaient en dehors de la région métropolitaine de
Montréal en 2016, des personnes qui étaient arrivées deux ans auparavant, donc
20 % en 2016. En 2022, on était rendu à 31,5 % de personnes qui
habitaient en dehors de la région métropolitaine de Montréal deux ans après
leur arrivée, donc un bond de 50 % au cours des huit dernières années, ce
qui est très intéressant. Mais on ne veut pas s'arrêter là. Nous, notre
volonté, c'est d'aller de l'avant encore plus haut. Alors, qu'est-ce qui
pourrait être fait de votre point de vue pour favoriser encore cet élan-là?...
M. Termote (Marc) : ...je n'ai
intentionnellement pas parlé dans ma très brève présentation de la
régionalisation, me doutant bien que ça allait arriver sur le tapis. Et
effectivement, dans le cahier de consultation, on parle à plusieurs reprises de
la régionalisation. Le problème avec la régionalisation, c'est que... et je
trouve vos efforts très louables, c'est que ça fait 50 ans qu'on en parle
et que ça n'a quasiment pas bougé. Ça bouge un tout petit peu dans la mesure où
les immigrants s'installent dès leur arrivée, souvent un peu plus à l'extérieur
de la région métropolitaine de Montréal, mais c'est en périphérie de la région
métropolitaine. C'est plutôt un phénomène de déconcentration qu'un phénomène,
disons, de vraiment s'installer en région. Alors, ce... bien insister quand on
parle de la régionalisation, sur le fait que le profil des immigrants qui
s'installent en région est pas mal différent de ceux qui s'installent à
Montréal. On ne peut pas dire a priori s'ils ne sont pas éventuellement... s'il
n'y a pas une sélection, un biais de sélection, dans la mesure où beaucoup
d'immigrants qui s'installent en région, dans les quelques grands centres qui
en reçoivent, Québec, Trois-Rivières, Sherbrooke, eh bien, pour souvent...
nombre d'entre eux sont très scolarisés, ils font par exemple partie de
l'université ou de cégeps. Donc, il y a un biais de sélection, ou bien ils vont
travailler à l'autre niveau de scolarisation, éventuellement dans l'hôtellerie
et dans la restauration. Donc, oû ils peuvent avoir une niche, mais c'est quand
même une minorité. Ce qui est très important de souligner, ça rejoint votre
approche, c'est que ceux qui s'installent en région, même s'ils sont encore
très minoritaires, s'installent... s'intègrent beaucoup mieux et
linguistiquement et économiquement que ceux qui vont à Montréal.
Maintenant, pourquoi dans ces conditions,
continuent-ils, même s'il y a un certain progrès, à s'installer à Montréal,
c'est qu'au Québec comme dans toutes les autres sociétés d'accueil, on observe
le même phénomène, les immigrants vont là où leurs congénères, si je peux dire,
sont déjà présents, ils vont rejoindre leurs semblables. Ça a toujours été
comme ça. C'est partout pareil dans... en Ontario, ils vont à Toronto, en
Colombie-Britannique, ils vont à Vancouver, en Allemagne, ils vont à Berlin, et
cetera. Et donc c'est un phénomène général et il y a une raison bien forte à ça
et qui est, à mon avis, dominante, c'est l'importance des réseaux sociaux, pas
les réseaux sociaux médiatiques, là, mais les réseaux sociaux, familiaux,
géographiques. On rejoint ces semblables provenant du même village. Et c'est
dans ce sens-là que ma proposition est de dire : Bien, essayons de
poursuivre la même chose et commençons par Québec. Et j'ai compris qu'à Québec
on est en train de... de créer un début de pôle d'attraction pour créer un
niveau critique suffisamment élevé d'immigrants qui correspondraient à cette
idée qu'il faut faire jouer ce qu'on appelle dans le jargon le réseau des
parents et amis. Et donc... Sauf que ça, c'est un processus de très long terme.
Alors, vous commencez le court terme dès aujourd'hui, je vous en félicite, mais
ça va prendre du temps avant qu'on voit les effets. Et donc il ne faudrait pas
en plus... c'est très bien dire : On les attire, mais est-ce qu'ils vont
rester? Aux deux ans, ce n'est pas nécessairement suffisant. Et donc, il y a
des exemples... sur les réfugiés, mais ça, ça a donné des expériences
malheureuses. Il y a des leviers, mais ce n'est pas évident et ça prend surtout
beaucoup de temps pour réaliser.
• (12 h 30) •
Mme Fréchette : À partir de
quand vous considérez que le niveau critique minimal est atteint? Et est-ce
qu'il faut qu'il soit composé de gens d'une même communauté, ou le simple fait
d'avoir des immigrants, peu importe leur pays de provenance, constitue un
réseau fertile, un terreau fertile pour faire en sorte d'attirer d'autres
immigrants. Est-ce que, pour vous, c'est... il y a une distinction à faire?
M. Termote (Marc) : C'est
certainement... réflexion très pertinente dans la mesure où justement, ce
serait dangereux, à mon avis, de demander un seuil critique pour une seule
communauté. Une des chances de l'immigration... des qualités, c'est la
diversité, justement, on n'a pas les problèmes que d'autres pays
d'immigration... parce qu'il y a une diversité considérable. Et donc ce serait,
à mon avis, très dangereux de dire : On va arriver à créer un pôle,
disons, à Québec uniquement avec une ou deux communautés. Ce n'est pas... Ça
serait vraiment, à mon avis... Il ne faut pas que ce soit trop homogène, sinon
on va se créer des problèmes. Et c'est justement ça qui est compliqué...
12 h 30 (version non révisée)
M. Termote (Marc) : ...avec
multiplicité de communautés. Ça, ce n'est pas évident et ça va prendre du
temps. Ça va demander la présence et la collaboration soutenue des communautés
elles-mêmes. Et donc je vous souhaite bon courage, et je ne survivrai
malheureusement pas...
Mme Fréchette : Mais, comme
je vous dis, on est quand même sur la bonne voie, hein, les statistiques le
montrent. Il y avait eu une belle amélioration, là, de 50 % au cours des
sept, huit dernières années.
Je vous amènerais maintenant à la page 21,
votre recommandation 3.6, en fait. Vous faites référence au fait qu'il faudrait
limiter le regroupement familial aux enfants en bas âge et à la personne
conjointe. Qu'est-ce que vous entendez, en fait, par "enfants en bas
âge"? Est-ce que, de votre point de vue, là, ce ne serait pas tout enfant
d'âge mineur qui devrait être priorisé quand il s'agit de réunification avec
les parents? Vous donnez une priorité selon l'âge.
M. Termote (Marc) : Certainement.
Du point de vue humanitaire, c'est évident, il faut que tous les enfants
puissent être là. Sauf que j'ose dire que ce n'est pas en faisant venir des
enfants qui ont 18 ou 20 ans qu'on va rajeunir beaucoup la population. Pour
rajeunir une population, il faut faire venir des enfants en très bas âge. Des
orphelins, je faisais un plaidoyer pour l'adoption internationale. Je ne sais
pas si on a fait suffisamment d'efforts à ce sujet, donc pas question
évidemment de dire : On ne fait venir que des enfants entre zéro et cinq
ans. Il faut faire venir tous les enfants. Le regroupement familial, c'est de l'humanitaire
justement, et l'humanitaire... D'ailleurs, moi, en fait, indirectement, je
voudrais faire un plaidoyer pour arrêter, mais ça, c'est... on est en train d'y
arriver, de faire venir les parents. Faire venir des parents, ça vieillit la
population, les parents des immigrants, je veux dire, faire venir les frères et
soeurs, et cetera.
Dans mon plaidoyer, c'était :
Limitons-nous aux enfants et, si possible, en bas âge. Et de ce côté...
Indirectement, ça voudrait dire une immigration, disons, l'immigrant serait âgé
de 20 ans, il aurait peut-être des enfants de 0-1 an à 2 ans. Et il faudrait
essayer, à mon avis, de soutenir les jeunes ménages qui viennent s'installer
chez nous pour les inciter à avoir des enfants. Souvent, ils viennent de pays
qui ont trois, même un niveau de fécondité supérieur au nôtre, et on constate,
malheureusement, que, dans beaucoup de cas, ils s'adaptent très vite à la
fécondité de la population d'accueil. Et il faudrait essayer d'éviter ce
phénomène-là en les soutenant par bien... par plusieurs moyens financiers, les
jeunes ménages qui nous arrivent en les incitant financièrement à avoir des
enfants.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. J'aimerais rendre disponible le temps qui reste à une collègue.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, la députée de Vimont, il reste une
période de trois minutes 45 secondes. La parole est à vous.
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Termote. Bien heureuse de vous voir et de
pouvoir échanger pour les trois minutes qu'il nous reste. Alors, vous savez,
avec la loi 96 et francisation au Québec, l'approche qui a été retenue pour la
francisation comporte environ trois volets, on parle de la francisation des
individus, la francisation en entreprise et puis la francisation familiale,
donc parents et enfants. Que pensez-vous de ces approches?
M. Termote (Marc) : ...d'accord
avec chacune des trois approches. En entreprise, je dirais, le problème se pose
dans la mesure où vous ne choisissez pas toujours la langue de travail. D'abord...
anglais. À nouveau, la question se pose à Montréal, hein? En dehors de
Montréal, vous allez travailler en français, l'entreprise sera francophone,
vous n'avez pas beaucoup le choix. Mais, à Montréal, vous avez le choix, mais
vous n'avez pas nécessairement le choix de l'entreprise. Moi, ma langue de
travail, pendant des années, c'était l'anglais, parce que là, on est dans un
contexte international où l'anglais est privilégié.
Donc, l'entreprise, il faut y penser, bien
sûr, et agir par l'entreprise. Mais c'est, à mon avis... qui n'est pas évident.
Par contre, du côté familial, ça veut dire... à revenir à un de mes dadas, c'est
insister sur la langue parlée à la maison. C'est un des indicateurs. Je sais
très bien qu'on ne peut intervenir au gouvernement pour interdire dans la
langue... sur la langue d'usage public. On ne va pas...
M. Termote (Marc) : ...dans la
chambre à coucher, comme disait un certain ministre... premier ministre canadien.
Mais c'est, là, au sein du ménage, au sein de la famille qu'on transmet sa
langue, et, si on continue à choisir, là, l'anglais comme langue d'usage à la
maison — pour beaucoup d'immigrants, c'est le cas — on a un
sérieux problème. Alors donc, quand on parle d'individu, moi, je dis :
C'est plus que l'individu, c'est la famille, parce que c'est au sein du ménage
que se crée à mon avis l'attachement pour une culture et pour une langue.
Mme Schmaltz : O.K. Donc, si
j'ai bien compris, la troisième approche, qui est la francisation
famille-enfants, est une belle opportunité, là, de se familiariser.
M. Termote (Marc) : Tout à
fait. Je pense que c'est l'approche cruciale. Si les ménages ne... Et là, il
faut quand même nuancer, parce que, moi, je suis convaincu que tous les
immigrants, quelle que soit leur origine, quelle que soit leur langue
maternelle, même ceux qui s'installent à Montréal, vont finir par passer au
groupe francophone. Si ce n'est pas eux, ce seront leurs enfants ou leurs petits-enfants.
Toutes les études montrent en... En moyenne, ça prend deux générations. Et ça,
c'est un problème fondamental qu'on oublie, et c'est que, ça, c'est l'aspect
individuel. Au niveau des individus, je suis convaincu qu'il n'y a pas de
problème pour les individus, les immigrants vont finir par se franciser. Le
problème, c'est que pendant les, disons, deux générations que ça prend, pendant
tout ce temps que ça prend, il y a deux autres phénomènes qui continuent, là,
de jouer à fond, c'est la sous-fécondité - on perd, on a un manque de moitié
des naissances, on l'a dit tout à l'heure - et l'immigration, qui continue
de...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Professeur Termote, je dois vous arrêter, la période
impartie au gouvernement est terminée. Mais je me tourne... Merci beaucoup,
mesdames. Je me tourne maintenant du côté du député de Nelligan, donc de
l'opposition officielle. Pour une période de 8 min 24 s, la
parole est à vous.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Merci, professeur Termote, pour votre présence et votre mémoire, un
autre mémoire très bien détaillé, avec beaucoup de références bibliographiques.
Je vais aller directement à la dernière
page. Vous faites quand même un constat très clair, je vais vous le lire :
«Une dernière remarque, qui n'est qu'une constatation, mais qui implique aussi
une suggestion pour l'avenir, porte sur l'immigration temporaire. Étant donné
l'ampleur qu'a prise cette dernière et les liens nombreux, étroits entre
immigration permanente et immigration temporaire, on aurait pu s'attendre à ce
que la planification actuelle, 2024-2027, qui nous est soumise envisage
simultanément les deux phénomènes. On peut comprendre que, par manque de temps
pour pouvoir proposer une planification solide, ce qui est le cas en matière
d'immigration permanente, on ait dû se résoudre à se limiter à cette dernière,
à l'exception de quelques considérations incidentes sur l'immigration
temporaire.»
Pensez-vous que cette planification
n'offre pas vraiment le vrai, réel portrait de l'immigration temporaire?
Surtout que depuis le début, comme ancien de l'OQLF, vous avez beaucoup
d'arguments sur la langue française. À un certain moment, je me suis dit :
Écoute, peu importe ce qu'on va proposer, vous allez dire que ça ne suffira
pas.
• (12 h 40) •
M. Termote (Marc) : Oui,
c'est exactement ça. Je reviens à mon argumentation fondamentale. C'est que le
nœud du problème, à mon avis - et ce n'est pas moi qui le dis, c'est
Statistique Canada, là, l'étude dont je parlais tout à l'heure - le nœud du
problème, c'est la sous-fécondité des francophones, tout simplement. Mais ça,
on ne peut pas jouer là-dessus. Donc, c'est pour ça que je suis pessimiste.
Maintenant, pour l'immigration temporaire,
c'est évident qu'on aurait théoriquement dû pouvoir présenter un programme
simultanément pour l'immigration permanente et l'immigration temporaire, les
deux étant présentées conjointement, disons, sauf que je peux comprendre qu'on
n'a pas eu le temps. D'ailleurs, c'est très facile de passer de... de parler
d'immigration temporaire, mais, disons, là, la capacité du Québec d'intervenir
dans le domaine est quand même pas mal limitée en ce qui concerne la migration
temporaire, et donc c'est... j'ai compris que maintenant, Mme la ministre a déjà
commencé des discussions avec Ottawa. Il faut passer par Ottawa si on veut...
Pour l'essentiel, là. Il y a quand même des points où on peut intervenir. Donc,
c'est pour ça que...
M. Derraji : Vous êtes
quelqu'un qui... M. Termote, vous êtes quelqu'un qui suit quand même tout ce
qui se passe sur le terrain. On parle de 340 000. Moi, je l'ai appelé le
troisième scénario absent de notre consultation. Il y a deux scénarios...
M. Derraji : ...60 000...
50 000, 60 000... 70 000, deux scénarios... statu quo ou
augmentation des seuils, mais on ne parle pas des temporaires. Tout au long de
votre mémoire... écoutez, j'ai même, un certain moment... vous nommez l'OQLF,
l'étude de 2021 : «Une modification dans la composition linguistique de l'immigration
économique n'ajouterait donc que quelques milliers de personnes de langue
française, tous indicateurs confondus, chaque année, sur une population de
plusieurs millions de personnes. Ainsi, de telles modifications
n'influenceraient que de manière limitée la progression des indicateurs.» Je
cite deux chercheurs, Houle et Corbeil. Qu'est-ce qu'on fait?
M. Termote (Marc) : C'est
exactement ça.
M. Derraji : Qu'est-ce qu'on
fait? Et j'ajouterais, parce que la question de la collègue était pertinente,
de la partie gouvernementale, quand on parle de la langue française, le
gouvernement ramène sur la table uniquement le projet de loi... la loi 96.
C'est ce qu'on dit aux Québécois par rapport à la protection de la langue
française. Est-ce que vraiment le gouvernement est en train de faire tous les
efforts nécessaires pour la promotion et la protection de la langue française?
M. Termote (Marc) : Alors,
j'ai deux points à vous... Je vais commencer avec le dernier point.
Effectivement, vous avez tout à fait raison, il n'y a pas que la francisation
des immigrants. On a l'air de dire que le problème du français, c'est dû au
manque de francisation des immigrants. On oublie qu'il y a des francophones de
langue maternelle française qui passent à l'anglais, et il y en a autant qui
passent à l'anglais que d'anglophones qui passent vers le français. Donc, il y
a un problème de francisation pas seulement pour les immigrants.
Maintenant, pour le point qui concerne
l'immigration temporaire, il faut quand même distinguer ici les flux et les
stocks. Les 340 000 dont vous parlez, c'est le stock de résidents non
permanents. Les 70 000 dont on parle, c'est un flux d'entrées annuelles.
Ce n'est pas du tout comparable. Ce qui se passe effectivement, c'est que, parmi
les 340 000 résidents non permanents, un certain nombre va passer...
va bénéficier d'une série de programmes qui leur permettent de devenir
permanents. Et c'est là qu'il y a un problème, c'est que là... C'est pour ça
que je disais tout à l'heure : Il faut que les deux soient traités
conjointement. J'ai quand même bon espoir qu'après les négociations qui s'en
viennent ou qui ont commencé avec Ottawa on va finir par trouver un moyen de
régler les deux en même temps, et donc... Mais je n'oserais pas parler de
340 000 versus 70 000. On ne peut pas confondre des stocks avec des
flux.
M. Derraji : Je vous...
M. Termote (Marc) : Des flux
annuels.
M. Derraji : Oui, pouvez-vous
aussi élaborer sur la loi 96?
M. Termote (Marc) : Bien, la
loi 96, elle ne concerne pas seulement... elle devrait concerner autre
chose que les immigrants, c'est un peu ça que je voulais dire. On oublie qu'il
y a un problème pour l'avenir du français, et, encore une fois, c'est
uniquement à Montréal, parce qu'à Montréal un immigrant a le choix. Dans toute
autre société d'immigration, l'avenir de la langue du pays d'accueil n'est pas
remis en... n'est pas remis en cause. Il n'y a aucun danger pour que le finnois
disparaisse en Finlande. Le finnois n'est pas une langue internationale, il me
semble, et tout le monde parle couramment l'anglais. Et ça vaut pour tous les
pays scandinaves, ça vaut pour les Pays-Bas, ça vaut pour la Flandre, en
Belgique, là... On parle flamand en Belgique, mais on parle aussi l'anglais. Ça
ne met pas en danger le flamand. Parce qu'il y a un problème fondamental
derrière tout ça, et je suis heureux que vous m'ayez obligé à en parler, c'est
le problème de la territorialisation linguistique. Si vous vous installez dans
n'importe quelle société d'accueil, vous êtes soumis à la loi du sol, vous
allez devoir... de la société où vous vous installez, sauf à Montréal, où,
comme immigrant, vous avez le choix, avec comme résultat qu'il y a quelques
centaines de milliers de personnes qui vivent depuis des années à Montréal et
qui ne connaissent même pas le français.
M. Derraji : Dans votre
mémoire, vous avez dit qu'il faut inclure dans le calcul les immigrants
temporaires. Pourquoi vous avez... vous pensez que les immigrants temporaires
doivent être inclus dans le calcul?
M. Termote (Marc) : Parce que
justement un nombre assez considérable d'immigrants temporaires vont choisir de
rester au Québec, et on a tout intérêt à essayer de les garder. Ils sont déjà
là. Ils se sont déjà, par définition, presque intégrés économiquement et
parfois, espérons-le, linguistiquement. Donc, c'est ce passage du statut de
temporaire... ce passage possible du statut de temporaire au statut de
permanent qui nous oblige à considérer les deux en même temps. Et on le fait d'une
certaine façon dans la présentation actuelle puisqu'on a prévu que...
M. Termote (Marc) : ...ceux
qui sont dans le Programme de l'expérience québécoise pour... bon, il n'y a pas
de plafond et on en tient compte. Donc, indirectement déjà avec...
M. Derraji : Oui, il me reste
30 secondes, j'aimerais bien vous entendre sur les efforts de
régionalisation. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Termote (Marc) : Oh! il y
a des efforts, mais là aussi, je suis, disons, un peu pessimiste parce que l'expérience
montre que c'est ultra difficile, que ça prend énormément de temps, et on n'est
pas les seuls à avoir ce problème-là, et on essaie de tous les côtés et il n'y
a aucun pays qui a réussi à régionaliser. On aura à faire des grands efforts.
J'applaudis, mais il faudra attendre longtemps avant qu'on voie les résultats,
je le crains.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, Pr Termote, merci beaucoup. On a terminé cette
partie des échanges avec l'opposition officielle. Je me tourne maintenant vers
la deuxième opposition avec le député de Saint-Henri Sainte-Anne, une période
de 2 min 48 s, le temps est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, professeur. Ce fut fort instructif. Je rebondis sur quelques
affaires. Vous avez parlé du beau rôle des familles immigrantes et des familles
avec des enfants, là, qui était un facteur positif quand ils arrivent dans leur
jeune âge. Jusqu'à récemment, on avait une pondération, une grille de
pondération qui accordait des points aux enfants dans notre grille de
pondération. Cette grille-là, par contre, elle disparaît, et il n'y a aucun
critère ou aucun point associé aux enfants dans la nouvelle grille
d'invitation. Donc, moi, je pose la question et je trouve ça dommage... on
pouvait obtenir jusqu'à huit points pour nos jeunes enfants. Je pense que
c'était une mesure qui entrait ou qui fonctionnait avec ce que vous avez
souligné.
Et je me permets sur un point... vous avez
dit l'immigration, bon, ce n'est pas démontré que ça nous enrichit ou, en tout
cas, vous avez parlé de ça dans votre étude aussi. Sur cette prémisse-là, je ne
suis pas certain, pour être franc. Mais je veux attirer votre votre attention
sur une composante qui, pour ma part, on oublie souvent et je vous la pose
comme ça. Qu'est ce que vous pensez de la richesse que nous apportent nos Dany
Laferrière, nos Kim Thuy, nos Boucar Diouf et tant d'autres? Es- ce que ce
n'est pas de la richesse, ça? Nos formations politiques ont toutes compté, à un
moment ou à un autre dans leur histoire, des gens issus de l'immigration.
Alors, pour moi, il y a là une richesse inestimable pour le Québec et sa
culture qu'il ne faudrait pas oublier dans ce calcul-là qui n'est pas
qu'économique.
M. Termote (Marc) : Je vais
rebondir tout de suite sur votre deuxième question, M. le député, parce que je
ne peux qu'être d'accord avec vous. Le Québec a connu un miracle économique
incroyable au cours des 50 dernières années et l'a aussi connu, grâce à
l'immigration, un enrichissement incroyable du point de vue culturel. Il y a
aujourd'hui une variété... Et selon peut prendre plusieurs critères là-dessus.
J'en ai un qui est, à mon avis, pas du tout négligeable, le critère
gastronomique. On a maintenant dans... même en région, de très bons
restaurants, etc., aussi bien de toutes les cuisines du monde. Et alors ça vaut
pour la gastronomie, ça vaut pour la littérature, etc. Donc moi, j'applaudis.
On a une richesse culturelle.
C'est pour ça que j'ai insisté tout à
l'heure sur le problème de la régionalisation justement. Cette lutte pour
régionaliser en ne se fondant que sur une ou deux communautés en dehors, donc
dans quelques centres en dehors de Montréal... cet enjeu, on a une qualité, au
Québec, d'une diversité incroyable dans l'immigration qui est une richesse et à
laquelle vous faites référence et à laquelle je ne peux que... à laquelle je
ne peux qu'être d'accord. Sauf qu'il y a une dimension culturelle qu'on ne peut
pas oublier et qui est quand même la langue, et là, il y a un gros problème à
Montréal encore une fois, j'insiste là-dessus, parce que la richesse culturelle
dont on parlait en même temps. Il y a un effort local colossal...
• (12 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est terminé. Cette période est terminée. Mais nous allons
poursuivre et finaliser la période d'échange avec le député de Matane-Matapédceia
pour une période, je vous rappelle, de 2 min 48 s. Le micro est
à vous.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. Pr Termote, je vous amène en page 23.3. Je vous cite : «La
définition de ce qu'est un immigrant francophone devrait être plus
contraignante. Du point qu'il suffise de déclarer lors de la procédure
d'admission que l'on connaît le français ne garantissait en aucune manière que
le français soit couramment utilisé dans l'espace public en général.» Je
m'arrête là. Ce que vous suggérez, c'est qu'on s'en tire relativement à bon
compte. On n'a qu'à dire qu'on est francophone pour qu'on nous laisse passer.
Qu'est-ce que vous suggérez de façon plus concrète pour s'assurer qu'on a
vraiment des gens qui sont francophones?
M. Termote (Marc) : Vous avez
soulevé une question qui me... évidemment m'interpelle également. C'est qu'il
ne faudrait pas que l'on s'arrête à une autodéclaration basée sur une auto-
évaluation. Mais la chose est en train de changer, et dans ce que j'ai compris,
ça va...
M. Termote (Marc) : ...changer.
Il va y avoir des examens. Moi, je serais très exigeant sur le niveau qu'on
utilise pour ces examens là. Et encore, je rejoins là dessus en disant :
C'est très bien, tout ça. Après il y a des examens très sévères, etc., etc. Est
ce qu'ils vont utiliser le français dans leurs contacts publics et est-ce
qu'ils vont utiliser le français à la maison parce qu'ils connaissent et qu'ils
ont prouvé par un examen qu'ils connaissent le français? C'est un... Un
immigrant qui arrive, il faut... Il a tellement de problèmes à régler en même
temps. Il arrive, pour la grande majorité encore, à Montréal, où ils
constatent, un, que le Québec est en déclin, est même devenu minoritaire. Est
ce qu'il va investir beaucoup dans une langue qui est en train d'être
marginalisée? Donc, c'est pour ça que je reste très sceptique quant à...
M. Bérubé : J'invite les
participants à la commission à prendre bonne note de ce que vous avez écrit.
C'est très clair et c'est un avertissement qui devrait nous servir dans la
rédaction de la loi. Je vous en amène rapidement sur la question de
l'intégration au français des nouveaux arrivants. On consent des efforts
considérables au primaire et au secondaire pour que les nouveaux arrivants
apprennent le français avec la Charte de langue française. Au collégial, libre
choix. Qu'est ce qui arrive en transfert linguistique si, les nouveaux
arrivants, il y a un libre choix? Est ce qu'ils se tournent majoritairement
vers l'anglais, vers le français? Puis qu'est ce qui arrive s'ils se tournent
vers l'anglais? Est ce qu'ils ont tendance à travailler en anglais, vivre en
anglais? Quelle est votre opinion là dessus?
M. Termote (Marc) : Bon. Vous
avez bien raison de dire que, théoriquement, il faudrait étendre au collégial
et même à l'universitaire. Sauf que, pour l'essentiel, ce sont des petits
chiffres, hein? Si vous regardez le nombre de personnes qui ont eu le...
M. Bérubé : Merci, Pr Termote.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. Termote. C'est tout le... C'est tout le temps que
nous avions. Donc, je vais suspendre les travaux jusqu'à 15 heures et vous
souhaiter, Mmes, MM. les députés, un bon dîner. Encore une fois, merci, M.
Termote pour la contribution à nos travaux.
M. Termote (Marc) : Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 53)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 04)
La Présidente (Mme Caron) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens va
reprendre ses travaux. Alors nous poursuivons les auditions publiques dans le
cadre de la consultation générale sur le cahier de consultation intitulée La
planification de l'immigration au Québec pour la période 2024-2027.
Cet après-midi, nous entendrons la
Centrale des syndicats du Québec, la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec, la Confédération des syndicats nationaux et la
Centrale des syndicats démocratiques. Alors, je souhaite la bienvenue aux
représentants de la Centrale des syndicats du Québec. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé au total et qu'ensuite, nous allons
procéder à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé. La parole est à vous.
M. Beauchemin (Mario) : Merci
beaucoup. Alors je me présente, Mario Beauchemin. Je suis troisième vice-président
à la Centrale des syndicats du Québec et je suis accompagné d'Isabelle-Line
Hurtubise à ma gauche et de Marie-Sophie Villeneuve à ma droite. Et si jamais j'ai
l'air intelligent cet après-midi, là, c'est grâce à elles.
Donc, allons-y. La Centrale des syndicats
du Québec, je pense que c'est important que je vous la présente un peu. Cette
centrale représente plus de 220 000 membres en éducation, en petite
enfance et en enseignement supérieur, en santé et services sociaux, ainsi que
dans les milieux de communication, du communautaire, du loisir et du monde
municipal. Et on compte également dans nos rangs une association de personnes
retraitées. Aujourd'hui, on voudrait mettre l'accent sur une vision inclusive
de l'immigration. Nous voulons que l'immigration au Québec soit fondée sur le
respect des droits de la personne, de la dignité et des aspirations des
personnes immigrantes. Nous souhaitons reconnaître leur apport essentiel à
notre richesse économique, mais aussi sociale et culturelle. Par ailleurs, on
accueille favorablement plusieurs propositions du gouvernement, en particulier
les suivantes : hausser l'apport des personnes admises sélectionnées par
Québec, réduire les délais de traitement des demandes, améliorer la
reconnaissance des acquis et des compétences et bonifier les données et la
documentation sur l'état de l'immigration et les capacités d'accueil du Québec.
Pour continuer, je souhaite maintenant...
ou nous souhaitons maintenant présenter nos recommandations qui sont relatives
à de graves enjeux de droits de la personne, à l'instar des...
M. Beauchemin (Mario) : ...centrales
syndicales et de nombreux organismes, nous sommes très préoccupés par le fait
que ces enjeux soient complètement ignorés lors de cette consultation. Dans un
premier temps, on pense à inclure l'immigration temporaire dans la
planification pluriannuelle, dans l'optique de mettre fin à l'exploitation et
aux abus. Nous sommes très préoccupés par l'exploitation et les abus vécus par
les travailleuses et les travailleurs migrants temporaires, particulièrement
les personnes admises dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers
temporaires, le PTET. Je rappelle que celui-ci a déjà été qualifié, et je cite,
«de terreau fertile pour des formes d'esclavage moderne», par le Rapporteur
spécial des Nations Unies, venu enquêter sur le sujet cette année. Son rapport
a été dévoilé la semaine passée, et j'invite nos élus à en prendre
connaissance, si ce n'est pas déjà déjà fait.
En fait, ce rapport met en lumière des
problématiques connues sur le terrain et auxquelles il convient de s'attarder
de façon urgente. La majorité des personnes admises dans ce programme sont
concentrées dans des emplois très difficiles et précaires. Le permis de travail
fermé... une entière dépendance de leur employeur. Et à titre d'historien, je
dirais qu'au cours de mes lectures ça m'a fait penser à la révolution
industrielle en Angleterre puis au concept de ville usine quand les paysans
allaient travailler en usine et qu'ils habitaient autour de l'usine et qu'ils
étaient sous la domination de l'employeur. J'ai comme l'impression qu'il y a un
retour en arrière ici.
Aussi, le parcours de ces personnes pour
accéder à la résidence permanente est jalonné d'obstacles qui rendent le projet
impossible. Dans un tel contexte, le recours grandissant aux travailleurs
immigrants temporaires, fortement encouragé par notre gouvernement, est
hautement problématique et indigne de nos valeurs. On doit corriger le tir sur
l'immigration... Nous devons corriger le tir et miser, pardon, sur
l'immigration permanente et le respect des droits de la personne. Nous appelons
donc le gouvernement du Québec à inclure l'immigration temporaire dans la
planification pluriannuelle, à travailler avec le gouvernement fédéral pour
favoriser l'accès à la résidence permanente des travailleurs et travailleuses
immigrants temporaires et à abolir dès maintenant le permis de travail fermé.
Ensuite, nous pensons qu'il faut prévoir
des mesures de soutien pour les femmes immigrantes. Les femmes immigrantes font
face à des enjeux et des obstacles à l'intégration professionnelle
particuliers. Cela est présenté en détail dans une étude approfondie du Comité
consultatif Femmes en développement de la main-d'œuvre de la Commission des
partenaires du marché du travail. Nous appelons donc le gouvernement à prendre
connaissance de l'étude et à élaborer des mesures d'accueil et de soutien
spécifiques pour les femmes immigrantes en étroite collaboration avec les
organismes qui interviennent auprès d'elles.
Je pense aussi qu'il faut favoriser la
régularisation du statut des personnes sans statut. Même si cela ne fait pas
partie des orientations présentées, on considère à la CSQ qu'il faut s'occuper
très rapidement de cet enjeu. Plusieurs milliers de personnes sont déjà
établies ici et intégrées au marché du travail, mais le fait d'être sans statut
les confine aux emplois informels, à l'ombre du travail au noir. Les risques
d'abus et d'exploitation y sont très élevés. Les femmes sans papiers risquent
particulièrement d'être exposées à plusieurs formes de violence et
d'exploitation, dont sexuelle. Nous appelons donc le gouvernement du Québec à
travailler rapidement à l'élaboration d'un programme de régularisation des
statuts.
• (15 h 10) •
Pour la suite de ma présentation, bien, je
vais m'attarder sur certaines orientations proposées par le gouvernement.
D'abord, la première qui concerne le rehaussement de la part de l'immigration
francophone. Selon nous, il s'agit d'une orientation très positive, mais nous
ne recommandons pas de sélectionner uniquement les personnes connaissant le
français. Nous pensons qu'il importe d'investir plutôt massivement dans des
programmes de francisation efficaces, ce qui m'amène à parler de
l'orientation 2. On est très inquiets de la façon dont Francisation Québec
est présentement implanté. Les échos que nous avons du milieu ne sont pas du
tout rassurants. Les personnes se présentent dans les centres d'éducation des
adultes, mais le personnel ne peut rien faire. Ils ne peuvent que les
inscrire... Ils ne peuvent pas les inscrire à la francisation. Ils peuvent tout
au plus les aider à s'inscrire sur la plateforme du ministère de l'Immigration,
de la Francisation et de l'Intégration, mais cette plateforme pose de nombreux
problèmes, elle n'est pas conviviale. Il y a 10 sections à remplir, et il
faut rappeler à ce moment-ci que plusieurs de ces personnes n'écrivent pas le
français ou ne savent pas lire, les téléchargements des documents exigés ne
fonctionnent pas toujours et, après cela, les personnes doivent attendre un
appel du MIFI pour être évaluées au téléphone, une évaluation qui ne dure que
quelques minutes et tous les délais rapportés sont extrêmement longs. En outre,
pendant ce temps, les personnes sont sans revenus d'allocations aussi longtemps
qu'elles ne débutent pas le cours de francisation, et les allocations ne sont
pas rétroactives. On nous signale aussi plusieurs erreurs de référence. Des
personnes de Terrebonne sont référées à Saint-Jérôme...
M. Beauchemin (Mario) : ...ou
des personnes de Mascouche sont référées à Saint-Jean-sur-Richelieu. Ce qu'on
nous rapporte aussi, c'est que le service téléphonique du MIFI est débordé. Le
personnel est impatient et il ne communique qu'en français, ce qui donne que les
personnes arrivent au compte-gouttes dans les cours, ce qui demande une
réorganisation des niveaux de français dans les... dans les classes, pardon, à
chaque semaine.
Les centres de services scolaires
inscrivaient et francisaient plus de 25 000 personnes annuellement et
elles ne peuvent plus le faire. Aujourd'hui, 95 % des personnes ayant
besoin de francisation n'ont pas pu s'inscrire au guichet unique. C'est comme
si le MIFI a pris cette décision sans connaître les réalités et les besoins des
personnes immigrantes. Elles ont besoin de contacts, de parler à des personnes
réelles, d'être rassurées et surtout d'être bien informées et guidées à travers
les processus. On insiste sur la nécessité de mettre en place rapidement des
solutions.
Nous voulons aussi attirer votre attention
sur une pratique que nous jugeons tout à fait incohérente et incompréhensible.
Nous faisons référence ici au fait que les examens administrés par les centres
d'éducation des adultes et reconnus par le ministère de l'Éducation ne le sont
plus par le MIFI depuis le 21 juillet 2020. Un ministère ne reconnaît pas les
examens pourtant reconnus par un autre ministère, et cela au sein d'un même
gouvernement. On peut parler ici d'une certaine incohérence. Pour être
sélectionnées, les personnes migrantes doivent maintenant fournir des
attestations de résultats d'un test de français conçu en France. Il n'est pas
étonnant de constater que plusieurs échouent à ces tests puisque nombre
d'expressions sont incompréhensibles au Québec. Et ces tests ne sont pas
gratuits. Ça varie entre 250 et 400 $, contrairement à ceux qui sont
reconnus par le ministère de l'Éducation. Il n'est pas rare qu'à la suite d'un
échec, certaines personnes embauchent un professeur en France pour des cours de
rattrapage à distance afin de préparer la reprise de ses tests. Nous trouvons
cette situation inacceptable. On demande donc que le MIFI se ravise en
acceptant les tests de français reconnus par le ministère de l'Éducation.
En ce qui concerne l'orientation six
maintenant sur l'importance de l'immigration économique, pour nous,
l'immigration ne doit pas avoir comme unique objectif de répondre à nos besoins
à court terme de main-d'œuvre. Nos devoirs envers l'immigration humanitaire et
le regroupement familial sont tout aussi importants. Or, ces deux volets ont
connu des baisses importantes ces dernières années. Les personnes demandeuses
d'asile sont déjà établies ici et en processus d'intégration. Les délais de
plus de 25 ans d'attente pour obtenir une décision, qui ont été révélés
dans les médias la semaine passée, sont absolument inadmissibles. Et la cause
majeure se trouve souvent dans nos seuils beaucoup trop bas. Bref, la CSQ est
d'avis qu'il faut augmenter le nombre de personnes admises dans les volets
humanitaires et du regroupement familial, en plus de respecter nos engagements
internationaux. Cela se justifie d'un point de vue économique puisque les
études démontrent que le taux de rétention à long terme des personnes migrantes
en région est significativement plus élevé pour les personnes réfugiées et
celles ayant leur famille auprès d'elles.
La Présidente (Mme Caron) : ...secondes,
s'il vous plaît.
M. Beauchemin (Mario) : En
conclusion, nous avons pris acte de la volonté de mobiliser l'immigration économique
afin de répondre à la pénurie de main-d'œuvre, notamment dans les services
publics. Il est important pour la CSQ de vous rappeler qu'un grand bassin de
personnel qualifié et diplômé dans ces secteurs existe au Québec. On se désole
de devoir le rappeler encore, la pénurie de main-d'oeuvre dans les services
publics est en grande partie causée par la dégradation des conditions et
d'organisation du travail.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Alors maintenant, je vais céder la parole à la
ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration. Vous avez
16 minutes 30 secondes.
Mme Fréchette : Oui. Merci,
Mme la Présidente. Alors merci à vous trois d'être présent parmi nous. Merci de
participer à cette consultation, à cet échange, donc, sur l'immigration
pluriannuelle pour les années 2024 à 2027. C'est très apprécié.
Je vais vous amener sur quelques sujets,
là, différents, mais je vais reprendre en fait une partie de votre allocution
concernant les permis de travail fermés. Les permis de travail fermés, c'est un
sujet que j'ai abordé avec mon homologue fédéral précédent, c'est-à-dire M.
Fraser, pour faire valoir que le fonctionnement actuel avec les permis de
travail fermés semblait générer certains enjeux, on le sait, de vulnérabilité
des travailleurs lorsqu'il y avait un comportement de la part de l'employeur
qui était inadéquat. Alors, j'ai demandé à ce qu'on puisse regarder les
alternatives à ces permis de travail fermés. Et là-dessus, j'aimerais vous
entendre. Quelle serait pour vous la meilleure alternative à considérer? Moi,
j'avais évoqué, bon peut-être l'idée d'un permis de travail régional, de telle
sorte que des régions, par exemple, plus éloignées...
Mme Fréchette : ...puisse bénéficier
de la présence de travailleurs étrangers temporaires d'une manière plus
sécurisante, avec un permis de travail fermé régional, parce qu'advenant qu'une
personne soit embauchée par un employeur qui n'a pas le bon comportement, bien,
qu'elle puisse cheminer vers un autre emploi dans la région plutôt que dans une
autre région au Québec. Donc, ça, c'est quelque chose qui était sécurisant pour
des régions éloignées d'avoir une alternative de cette nature-là. D'autres me
parlent plutôt de l'intérêt qu'il y aurait d'avoir un permis de travail
sectoriel, de telle sorte que des professions qui vivent des cycles économiques
semblables, mais pas superposés, je vous dirais, en termes de haute saison,
basse saison, pourraient se promener d'une entreprise à l'autre; des
entreprises qui vivraient des hautes saisons dans leur cycle économique à des
moments différents. Donc, pourraient, par exemple, travailler pour un employeur
dans la haute saison, en juin, et puis là, quand ce sera le creux de vague
rendu au début, bien là, ils chemineraient vers une autre entreprise du même
secteur qui, elle, vivrait sa haute saison au mois d'août. Donc, ça s'était vu
de manière positive par plusieurs organisations, entreprises qu'on a
rencontrées, qui offrent des emplois de type saisonnier.
Donc, j'aimerais avoir votre avis
là-dessus. Est-ce qu'il y aurait une autre formule qu'on devrait envisager? Et
parmi les formules qui existent, quelles seraient celles que vous
privilégieriez?
M. Beauchemin (Mario) : Oui.
Merci. En fait, la meilleure alternative pour nous, c'est celle qui met
réellement fin au risque d'abus, puis je pense que c'est au MIFI, au ministère
d'évaluer cela. Et pour nous, ces immigrants et immigrantes temporaires,
étrangers temporaires doivent jouir des mêmes droits que les personnes qui sont
établies au Québec et qui sont Québécois et Québécoises, ou qui sont résidents
permanents. Ils doivent avoir le droit de changer de travail, ils doivent avoir
le droit à une protection sociale, droit de porter plainte à la CNESST. Donc,
pour nous, ce que vous avez mis sur la table tout à l'heure nous semble
intéressant, en autant que ça aboutisse justement à une égalité des droits
entre les différentes personnes au sein de la population québécoise.
Mme Fréchette : J'aimerais
souligner à cet égard-là qu'en fait, les travailleurs étrangers temporaires
bénéficient du même encadrement, là, pour les droits du travail que n'importe
quel employé au Québec. Et ça, c'est important de sensibiliser et les
employeurs et les employés, et c'est quelque chose auquel on s'est engagés avec
la création en mars dernier, là, d'une escouade pour faire en sorte de bien
informer les employés de leurs droits, les employés, notamment les travailleurs
étrangers temporaires, pour être certains qu'ils soient bien au fait de ce qui
est permis, de ce qui est illégal puis des recours auxquels ils peuvent avoir
accès. Donc ça, pour nous, c'est essentiel, et c'est sûr qu'on va continuer à
porter un regard attentif à cette évolution-là. Et puis on enjoint également le
fédéral à être de la partie pour faire en sorte que ce soit le mieux promu
possible. Est-ce que, de votre côté, vous avez une action en ce sens-là auprès
de ce type d'employés?
M. Beauchemin (Mario) : Des
actions?
Mme Fréchette : Oui, des
actions pour les sensibiliser sur leurs droits.
M. Beauchemin (Mario) : Non,
mais je pense que c'est au ministère d'oeuvrer dans ce sens, parce que ces
employés et ces travailleurs migrants temporaires travaillent souvent de 12 à
14 heures par jour, six jours par semaine. Donc, pour eux, d'établir des
démarches, d'entreprendre des démarches pour s'informer de leurs droits, ce
n'est pas évident, c'est même quasi impossible. Donc, il y a vraiment une
initiative gouvernementale qu'il faut mettre en place pour pouvoir les en
informer.
Mme Fréchette : Dans votre
rapport, à la recommandation deux, donc page sept, vous indiquez que vous
souhaitez que le gouvernement du Québec prenne en compte la réalité et les
enjeux vécus par les femmes migrantes et élabore des mesures en conséquence.
Bon. Bien sûr, en collaboration avec les acteurs du milieu. Je me demandais à
ce sujet-là à quel genre de mesure vous pensez pour être davantage inclusif et
pour favoriser, là, l'intégration puis la sécurité des femmes immigrantes qui
travaillent au Québec.
• (15 h 20) •
Mme Villeneuve (Marie-Sophie) : Allô.
Merci beaucoup de nous recevoir aujourd'hui, je suis vraiment contente. Puis
c'est ma première fois, ça fait que je suis vraiment nerveuse, mais c'est vraiment
le fun qu'il y ait cette consultation-là sur un sujet aussi important.
Vraiment, rapidement, la Centrale des
syndicats du Québec, on n'est pas des spécialistes de l'immigration, mais on a
des valeurs de droits humains, de droits de la personne, de justice sociale
qu'on défend, on... Il y a des gens de plus en plus, des personnes migrantes
qui font partie des... qui travaillent dans les services publics puis qui
vivent des enjeux que les personnes nées ici ne vivent pas, dont les femmes.
Donc, ce n'est pas à nous de détailler les mesures à prendre parce que nous ne
sommes pas les spécialistes, mais j'attire votre attention sur un rapport du
Comité consultatif Femmes en développement de la main-d'oeuvre de la Commission
des partenaires du marché du travail, il s'appelle Analyse qualitative de
parcours d'insertion de femmes immigrantes au marché du travail et
conditions...
Mme Villeneuve (Marie-Sophie) : ...mission
de réussite observée, un rapport de 2019 qui a une belle liste de
recommandations de mesures. J'attire aussi votre attention sur les réseaux de
femmes immigrantes qui existent au Québec. Il y en a des excellents. Le volet
Femmes de la TCRI, qui est la table qui regroupe l'ensemble des groupes
communautaires en immigration, qui est partout au Québec, ils ont des personnes
de ressources extraordinaires. Ils ont émis des études, ils ont émis des
rapports, ils ont émis des recommandations. Donc, si vous êtes intéressés à en
savoir plus sur la table, il y a déjà des recommandations intéressantes qui
viennent de groupes et de réseaux qui travaillent auprès des femmes
immigrantes. Et donc c'est pour ça qu'on ne peut pas répondre de façon
détaillée à votre question. J'ai plusieurs constats du rapport, mais je trouve
que c'est... Vous avez déjà accès à ces groupes là parce que plusieurs sont
financés par votre ministère. Donc, je vous invite vraiment à travailler avec
ces groupes là, là dessus, parce que c'est elles qui sont les mieux placées
pour vous indiquer les mesures à suivre pour mieux les accompagner et les
soutenir.
Mme Fréchette : ...de
l'écosystème des organisations actives en immigration et, de notre côté, on
s'est assuré d'œuvrer en collaboration avec ces organismes là qui sont sur le
terrain, soit en accompagnement, soit en intégration des personnes immigrantes
pour assurer une connexion avec la société d'accueil ou encore en francisation.
Donc, depuis notre arrivée au pouvoir, on a signé plus de 200 ententes de cette
nature là avec des organismes, beaucoup des organisations communautaires qui
travaillent auprès des personnes immigrantes. Pour la plupart, c'est leur
principal axe d'intervention et d'action. Alors particulièrement, il y a
plusieurs membres de la TCRI qui sont dans les organisations avec lesquelles on
travaille, et qu'on s'assure d'être en contact avec eux via nos bureaux
régionaux, nos antennes régionales. On a ouvert neuf directions régionales et
74 antennes régionales. Alors, soyez assurés qu'on couvre le terrain.
Contrairement au gouvernement précédent qui s'était assuré de fermer tous ses
bureaux en région, nous, on s'est assuré d'être connecté aux régions, de ne pas
tourner le dos aux régions et plutôt de travailler en collaboration avec
l'ensemble des organisations qui sont actives et qui ont une valeur importante
à apporter dans le processus et la réussite des processus d'immigration des
personnes qui viennent chez nous...
Mme Villeneuve (Marie-Sophie) : Je
peux vous donner un exemple, excusez-moi. Les femmes sont majoritaires dans les
catégories regroupement familial et femmes réfugiées. C'est deux catégories où
l'accès à des services de francisation, des allocations puis des services
publics sont très réduits. Ça fait que, donc, entre autres, c'est ça qui est
demandé dans les recommandations à mettre de l'avant. Ça fait que ça va très
loin, là. Très contente de voir, mais on aurait aimé ça avoir une orientation
spécifique pour... avec des mesures qui changent un peu. C'est les conditions
de la catégorie réfugiés et regroupement familial. Par exemple, les femmes du
regroupement familial sont beaucoup plus dépendantes de leurs parrains. Et ça
les place dans des situations d'isolement puis de vulnérabilité. Il n'y a rien
à Québec actuellement qui adresse ça. Donc, je suis contente de voir que vous
les... cette volonté là de les soutenir davantage, mais on aurait aimé une
orientation vraiment spécifique qui va plus loin pour elles.
Mme Fréchette : Effectivement.
Et qu'est ce que vous verriez comme une autre caractéristique pour ce qui est
des femmes immigrantes? Qu'est ce qui les distingue également, là, pour qu'on
soit bien au fait de la nature des enjeux possibles?
Mme Villeneuve (Marie-Sophie) : Une
autre chose qui est ressortie du rapport, c'est : leur taux de
surqualification en emploi est le plus haut au Québec. Donc, c'est aussi ça,
c'est... Au Québec, de tous les groupes démographiques, les femmes immigrantes
diplômées sont les plus surqualifiées. Donc, elles ont des emplois de très bas
niveau. Souvent, c'est très en deçà de leurs qualifications. Et ils ont aussi
documenté beaucoup de préjugés, malheureusement, auxquels elles font face, là,
une espèce de conjonction de préjugés qui les affectent particulièrement, qui
font que même dans les emplois où elles sont surqualifiées, elles sont
considérées comme pas qualifiées pour faire ce job-là. Donc, c'est détaillé
aussi, l'exemple des préjugés qui impactent plus particulièrement, qui
affectent plus particulièrement les femmes immigrantes. Ça fait que, moi, j'ai
trouvé que c'était quand même une belle étude. Et il y avait plusieurs
références intéressantes aussi à suivre dans cette étude-là. C'est de la
sensibilisation des employeurs, etc.
Mme Fréchette : Effectivement.
Mme la Présidente, il me reste combien de temps?
La Présidente (Mme Caron) : Il
reste six minutes, Mme la ministre.
Mme Fréchette : D'accord.
Vous appuyez notre proposition d'orientation numéro neuf sur la
régionalisation. En fait, vous considérez que la régionalisation de
l'immigration est alignée précisément... bien, uniquement, en fait, sur des
objectifs économiques et que ça génère des inégalités. Pouvez-vous me détailler
un peu votre perception, votre vision des choses de ce côté là en matière de
régionalisation? Et qu'est ce que vous proposeriez d'avoir comme approche?
M. Beauchemin (Mario) : Encore
une fois, comme l'a dit ma collègue tout à l'heure par rapport aux femmes
immigrantes, on n'est pas des... La CSQ n'est pas un spécialiste de la
régionalisation et de l'immigration, mais on vous recommande de consulter en
détail, incluant ces recommandations, l'étude de Marie-Thérèse Chicha, Valérie
Asselin et Éliane Racine, La région régionalisation des...
M. Beauchemin (Mario) : ...porter
les limites des politiques et des programmes. Comité. C'est un comité
consultatif sur les personnes immigrantes de la Commission des partenaires du
marché du travail. Et là-dedans, on trouve, à titre d'exemple, comme
recommandations, une augmentation du financement des organismes communautaires
et des acteurs de la francisation et le fait de réinvestir massivement dans les
services publics, car l'étude démontre que le principal frein à une
régionalisation durable est le manque d'accès à un logement ainsi qu'à des
services d'éducation et de santé de qualité.
Mme Fréchette : Merci. Je
voulais revenir sur les chiffres que vous avez donnés pour Francisation Québec,
parce que ce sont des chiffres qui datent, et je voulais vous mettre à jour, en
fait, parce que des gens qui sont en attente de cours, bien, jusqu'à ce que le
cours ne démarre pas, c'est sûr qu'ils sont en attente. Là, Il y a des cours
qui ont été démarrés. Alors, je voulais vous donner les chiffres. Donc, depuis
le 1ᵉʳ juin, le nombre de demandes qui ont été déposées à Francisation Québec
est d'environ 27 000, 27 000 demandes qui ont été déposées depuis le 1ᵉʳ juin.
Et, si on regarde les élèves qui sont inscrits ou qui le seront au cours des
prochains jours, on a eu 14 800 personnes qui soit sont inscrites ou le seront
au cours des prochains jours. Donc, ça change pas mal la donne par rapport aux
chiffres que vous avez donnés, qui est tiré d'un article qui est paru au mois
d'août.
Donc, voilà, je voulais vous mettre au
fait de ce changement-là, quand même, qui donne un portrait fort différent de
la situation. Et vous dire également qu'entre le 1ᵉʳ avril et le 30 juin, on a
eu 30 000 personnes, demandes qui ont été traitées et qui suivent des cours,
c'est ça, qui ont été francisés, là, qui suivent des cours. Et ça, ça
représente, par rapport à l'année antérieure, une hausse de 46 % des
demandes qui ont été traitées. Alors, vous voyez qu'avec nos mesures de
francisation qu'on a, nous, rendues accessibles aux immigrants temporaires,
parce que, sous les libéraux, ce n'était pas le cas, vraiment, il y a des bonds
importants qui ont été faits en matière de francisation, avec des hausses de
46 % d'une année à l'autre.
Vous voyez qu'on met les bouchées doubles,
et on réalise quand même que la demande est très importante. On continue d'être
à l'embauche de professeurs pour s'assurer de bien répondre à la demande, mais
l'élan, il est là, il est donné, et c'est, ni plus ni moins, que l'équivalent
d'une université en francisation qu'on est en train de mettre en place avec
Francisation Québec, tellement l'ampleur de la demande est importante. Et
c'est, en fait, une organisation qui a été mise sur pied après que beaucoup
d'autres se soient lancées dans des promesses de mise sur pied de Francisation
Québec. Nous, on l'a fait et on est en train de réaliser. Franchement, je pense
que c'est un défi important qui va aider à la protection et à la promotion du
français de manière assez claire et nette.
À ce sujet-là, je voulais vous entendre
sur le fait que vous ne valorisiez pas totalement l'idée de mettre l'accent,
comme on le fait, sur la connaissance du français. Donc, j'aimerais vous
entendre à ce sujet-là. Vous disiez ne pas être totalement d'accord avec l'idée
d'avoir des immigrants que francophones à 96 % d''immigration économique
qui soit francophone. Est-ce que j'ai mal interprété vos dires?
M. Beauchemin (Mario) : Non,
on est en faveur d'argumenter la part de l'immigration francophone.
Mme Fréchette : Au point où
on le propose?
M. Beauchemin (Mario) : Pour
nous, le seuil, là, je pense qu'il faut commencer par s'occuper adéquatement de
ceux et celles qui sont ici et de mettre en place... Vos chiffres sont
intéressants, ce n'est pas ce qu'on nous dit sur le terrain, mais on va
retourner vérifier par contre. Mais c'est important la part... l'augmentation
de la part d'immigration francophone, l'immigration économique. Mais, comme on
l'a dit, pour nous, c'est important aussi de s'occuper et de franciser ceux qui
sont les travailleurs temporaires.
• (15 h 30) •
Mme Fréchette : Ah! bien, ça,
c'est ce qu'on a fait, hein, précédemment, avant qu'on arrive au pouvoir, ce
n'était pas assumé comme responsabilité. Mais, nous, on s'est assuré de rendre
disponibles les mesures de francisation aux immigrants temporaires. On s'en
occupe, des immigrants temporaires, et non seulement on s'en occupe, mais, en
fait, ils constituent la moitié des apprenants à l'heure actuelle chez
francisation Québec. Donc, c'est une excellente nouvelle, parce qu'en fait ils
répondent à l'appel qu'on leur a lancé à l'effet que le français est important,
et ils sont au rendez-vous pour prendre des cours de francisation.
M. Beauchemin (Mario) : Donc,
s'il y a des cours de francisation sur les lieux de travail pendant les heures
de travail, ils continuent à être rémunérés. Ça nous fait extrêmement plaisir.
Mme Fréchette : Oui, puis la
francisation en entreprise, on va mettre un grand accent là-dessus. Déjà, le
ministère MESS s'en occupe, s'en charge. À partir du 1ᵉʳ novembre, c'est
Francisation Québec qui va prendre, sous son aile, ces démarches. Mais ça va
s'inscrire en continuité, et puis c'est sûr que c'est un angle qui est très
important pour nous, parce qu'il faut amener le français vers les travailleurs
et pas attendre que, nécessairement, les travailleurs viennent vers le français.
Je pense qu'il faut que ce soit à double sens. Il faut les engager dans un
processus d'apprentissage du français et espérer qu'ils poursuivent ce
cheminement-là de leur propre chef par la suite. Merci.
La Présidente (Mme Caron) : Merci...
15 h 30 (version non révisée)
La Présidente (Mme Caron) : ...alors,
nous allons maintenant passer à l'opposition officielle. Alors. Je donne la
parole au député de Nelligan pour 12 min 23 s.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présence. J'espère que votre première présence se
déroule très bien.
La Présidente (Mme Caron) : ...
M. Derraji : C'est ça. Bien,
prenez de l'eau. Bienvenue à vos trois. Excellent rapport, des bons points qu'on
partage.
Vous savez, hier, fin de journée, on était
tous choqués d'entendre le témoignage de Gracia. Grâce et Clara, c'est des
visages qui existent. Aujourd'hui, vous êtes en train de me dire, en commission
parlementaire, de faire attention aux immigrants temporaires. Je vous invite à
voir si ce n'était pas déjà fait, le reportage, l'essentiel. Et je trouve qu'en
vous que cette consultation manque quelque chose d'extrêmement important. J'entends...
Depuis les deux derniers jours, la ministre ne parlait que des Libéraux qui...
On a quitté le pouvoir en 2018. Je tiens à rappeler que ça fait presque six ans
maintenant, à l'aube de la sixième année de ce gouvernement. On est à des
chiffres astronomiques en termes d'immigrants temporaires. Quand c'est rendu
que, pour la première fois, ce n'était pas le cas avant, que même un rapport
des Nations Unies vienne au Canada et même au Québec, faire un rapport sur, je
dirais, des choses qu'on n'a jamais pensé avoir au Québec. On parle de l'esclavagisme.
Ce n'est pas la première fois que je l'entends. J'ai été invité à des
rencontres avec des groupes. C'est des faits et ça existe. Quand on parle que
des gens pas loin d'ici, à Lévis, paient 100 $ la semaine et quand j'entends
aujourd'hui que ce n'est pas le rôle des syndicats d'aller faire des démarches
pareilles, c'est quoi votre lecture d'une consultation qui ne prend pas le
temps de dresser ce portrait des émigrants temporaires? Parce qu'on s'en va
vers trois ans, c'est une planification pour les trois prochaines années.
M. Beauchemin (Mario) : En
fait, nous, si on avait juste une recommandation à retenir puis à proposer au
gouvernement, c'est d'inclure, dans leur planification pluriannuelle, la
question des immigrants étrangers temporaires, et qu'on revienne le plus
rapidement possible à mettre sur la table des solutions, parce que, comme vous
l'avez dit, comme le rapporteur des Nations unies l'a dit, c'est inacceptable,
en 2023, que des personnes, qu'elles soient migrantes ou pas, subissent de
telles conditions de travail.
M. Derraji : Oui. Je vais
vous envoyer le projet de loi que j'ai déposé l'automne dernier. Vous allez le
voir, et j'espère que vous me partagez vos commentaires. Si jamais le
gouvernement ne retient pas votre proposition par rapport à inclure les
immigrants temporaires dans le calcul, ce serait quoi votre constat ou votre
conclusion?
M. Beauchemin (Mario) : Ma
conclusion, ça serait qu'il faudrait que la société civile se mobilise comme
est déjà en train de le faire. Ça circule déjà sur les réseaux sociaux. Il y a
un après la projection du film Richelieu, qui est un quasi documentaire.
M. Derraji : Oui.
M. Beauchemin (Mario) : Il y
a eu un appel du réalisateur et des personnes migrantes temporaires dans la
salle qui demande à la population d'écrire à leur député, en incluant dans
cette lettre-là des éléments de solution pour mettre fin à leurs terribles
conditions de travail.
M. Derraji : Oui. Vous savez
que le slogan de la CAQ depuis le début En prendre moins, en prendre soin, vous
croyez toujours aujourd'hui qu'après cinq ans au pouvoir de la CAQ, on prend
moins, on prend soin?
M. Beauchemin (Mario) : Prends
soin en tout respect, M., je ne pense pas que je vais me prononcer sur cette
question.
M. Derraji : Pardon?
M. Beauchemin (Mario) : En tout
respect, je ne crois pas que je vais participer à ce débat un peu partisan.
M. Derraji : Pas de problème.
La Présidente (Mme Caron) : Il
reste 8 min 40 s à l'opposition officielle.
M. Derraji : Je ne comprends
pas pourquoi on dit merci à notre parti, mais ce n'est pas grave, vous avez le
droit de remercier.
Une voix : ...
M. Derraji : Oui. Vous pouvez
adresser à la présidence. Revenons au...
La Présidente (Mme Caron) : Le
seul député qui a droit de parole, c'est celui à qui j'ai donné le droit de
parole. Alors, même les réactions ne sont pas permises, et je n'en permettrai
pas d'autre.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente, pour cette mise au point.
Je reviens au seuil. On ne parle pas des
travailleurs temporaires, mais on parle de deux scénarios. Est-ce que les deux
scénarios vous conviennent aujourd'hui?
M. Beauchemin (Mario) : Nous,
je vous dirais bien franchement, les deux scénarios — je ne sais pas
si j'ai le droit d'utiliser ce mot là — on s'en fout un peu. Nous, ce
qu'on veut, c'est qu'on augmente la part d'immigration humanitaire et de
regroupement familial parce que c'est en baisse depuis plusieurs années, et qu'on
s'occupe comme il faut et qu'on donne des conditions et un accès égal à tous
ces immigrants...
M. Beauchemin (Mario) : ...au
marché de l'emploi et qu'on leur donne des conditions de travail, qu'on leur
donne... qu'on leur mette... qu'on mette à leur disposition des infrastructures
qui vont leur permettre de s'intégrer à la société québécoise. Et, moi,
question de seuil ou de plafond, on ne veut pas embarquer dans ce jeu-là.
M. Derraji : Mais vous avez
raison de ne pas embarquer dans le jeu des seuils, je vous l'accorde. Je suis
de cet avis depuis plusieurs mois, et d'ailleurs c'est pour cela qu'on voulait
qu'on parle du portrait global. Mais vous venez de donner des bons arguments
qu'on n'en prend pas soin, des immigrants... de répondre à la question que je
vous ai posée au début. Mais, quand on voit de l'esclavagisme, est-ce qu'on
prend soin? C'est des faits.
Donc, ce qu'on veut, comme société
démocratique... Vous aussi, vous représentez des intérêts d'un groupe. Nous, on
est parlementaires, nous, on voudrait une commission parlementaire. Notre
souhait, avec une planification pluriannuelle, c'est justement s'assurer de
prendre soin de ces gens.
Je vais reposer la question. Vos constats
sur le terrain, votre proximité avec les travailleurs... J'ai entendu votre
collègue parler de plusieurs rapports qui parlent des femmes immigrantes. Vous
parlez de l'inclusivité. Vous avez ramené beaucoup d'arguments solides. Je vais
répéter ma question. Est-ce que les efforts utilisés vous démontrent qu'on
prend soin de ces immigrants qu'on accueille sur le territoire?
M. Beauchemin (Mario) : Bon,
première chose. Tout à l'heure, j'ai affirmé... en fait, j'ai dit que je ne
voulais pas me prononcer sur un slogan politique, hein, sur un slogan partisan.
Maintenant, on peut utiliser les termes «en prendre soin», mais, nous, ce qu'on
dit... puis la CSQ représente surtout des travailleuses et des travailleurs du
secteur public et parapublic, mais on a des gens quand même qui travaillent sur
le terrain, et ce qu'on sait entre autres, de notre côté, c'est qu'il y a un
problème avec la francisation, malgré les chiffres que la ministre nous a
dévoilés tout à l'heure, il y a un problème avec Francisation Québec, il y a un
problème avec la plateforme MIFI. Donc, est-ce qu'on peut parler d'en prendre
soin? Moi, quand je parle de mes membres, j'ai représenté longtemps des profs
de cégep, je ne dis pas que je vais prendre soin des profs de cégep, je vais
dire que je veux leur donner de meilleures conditions de travail.
M. Derraji : Oui, on s'entend.
M. Beauchemin (Mario) : Donc,
c'est ce que je veux dire.
M. Derraji : Non, on
s'entend...
M. Beauchemin (Mario) : Si
donner des meilleures conditions de travail, assurer un accès équitable aux
services publics, mettre... investir dans les services publics pour justement
avoir accès à de meilleurs services, ça veut dire en prendre soin, alors...
M. Derraji : Oui, oui, c'est
très clair.
M. Beauchemin (Mario) : ...on
peut bien le dire, là, que c'est en prendre soin.
M. Derraji : C'est très
clair. Vous avez répondu. On peut comprendre entre les lignes.
Je reviens à Francisation Québec. On peut
vous partager beaucoup d'informations aussi, parce que même moi, je suis
surpris de ce que je vois par rapport à Francisation Québec. Mais, au-delà de
la plateforme, vous avez dit quelque chose d'extrêmement important, c'est les
cours, les gens ont besoin d'échanger, ont besoin... Est-ce que vous
reprochez... vous avez une critique par rapport à la démarche du ministère
d'aller vers Francisation Québec? Est-ce que j'ai cru comprendre qu'on s'en va
vers la mauvaise direction?
M. Beauchemin (Mario) : Écoutez,
au départ, je pense que c'était une bonne idée. Un guichet unique pour mieux
gérer les demandes nous semblait une bonne idée. Ce qu'on dit présentement,
c'est que c'est mal implanté et ça fonctionne mal. C'est ce qu'on dit.
M. Derraji : Ça ne va pas
bien.
M. Beauchemin (Mario) : Je
veux dire, on a de la misère avec les plateformes numériques au Québec, on
dirait.
M. Derraji : Oui, oui. Donc,
je peux comprendre que, même sur cet enjeu qui est primordial pour le Québec,
la langue française, le gouvernement est en train de l'échapper.
• (15 h 40) •
M. Beauchemin (Mario) : D'après
ce qu'on observe sur le terrain, d'après les rapports que nous avons consultés,
on peut dire que, pour l'instant, oui, on est en train de l'échapper.
M. Derraji : Oui, je ne sais
plus quoi vous dire, comme, par rapport à ça, parce que je sais que... Je ne
veux pas vous ramener là, mais il y a plein de slogans sur la protection de la
langue française. J'attends encore une autre publicité d'un ministre pour dire
qu'on va la promouvoir et la protéger. J'ai de la misère à comprendre comment
on va s'assurer de protéger la langue française au Québec si le gouvernement,
qui a tout mis sur Francisation Québec, bien, il la livre mal.
Francisation sur le milieu de travail,
qu'est-ce qu'on va faire avec les travailleurs temporaires étrangers qui
travaillent toute la semaine? Je suis allé ce week-end... Ils ont un seul jour.
Ils ont un seul jour pour quitter. Ils travaillent toute la semaine. J'étais
très heureux de parler avec eux, et de leur offrir des médailles, et de partager
avec eux ma passion du soccer. Ils n'ont pas le temps. Comment on va faire?
M. Beauchemin (Mario) : C'est
une bonne question.
M. Derraji : Avez-vous une
réponse?
M. Beauchemin (Mario) : Je
n'en ai aucune idée.
M. Derraji : Régionalisation,
est-ce qu'on y croit? La ministre vous parle que les bureaux, ils ont fermé,
eux, ils ont ouvert les bureaux. Est-ce qu'on a réussi le mandat de
régionaliser l'immigration?
M. Beauchemin (Mario) : Nous,
ce qu'on dit, et je vais le répéter, c'est qu'un des...
M. Beauchemin (Mario) : ...la
régionalisation, c'est quand on... habitent en région des immigrants
humanitaires avec leur famille. Donc, si on pouvait augmenter le seuil de ce
type d'immigration, je pense qu'on pourrait réussir davantage en termes de
régionalisation.
M. Derraji : Est-ce que vous
savez que pour des Québécois maintenant qui attendent leur conjoint ou
conjointe, le délai est rendu de 25 mois? Il y a des gens qui me
disent : On brise des coeurs. C'est ça, la réalité. Les gens de Québec
Réunifié nous écoutent. Il y a des gens qui ont des délais de 25 mois.
Donc on parle de regroupement familial. On est encore loin. C'est quoi?
M. Beauchemin (Mario) : Mais
c'est ce qu'on demande, on demande au MIFI de travailler là-dessus, justement,
là.
M. Derraji : Oui, mais ça
fait quand même six ans, et les délais s'accumulent, s'accumulent,
s'accumulent. O.K. J'essaie de trouver quelque chose de positif dans votre
mémoire. C'est un excellent mémoire, mais je dis : Excellent par rapport à
la planification parce qu'on nous invite à une planification avec des objectifs
sur trois ans. C'est ce qu'on veut se donner. Mais si j'ai à vous reposer la
question avec ce que vous venez d'évoquer et si c'est à refaire, et vous êtes
responsable d'une planification pluriannuelle, c'est quoi, les trois éléments
sur lesquels vous allez insister?
M. Beauchemin (Mario) : Bon,
je pense qu'on l'a dit dans le mémoire, d'inclure dans la planification
pluriannuelle les travailleurs et travailleurs étrangers temporaires. Prendre
en considération davantage les femmes migrantes. Et régulariser le statut des
personnes qui sont sur le territoire présentement.
M. Derraji : Quand vous
dites : Régulariser, est-ce que vous parlez des sans-papiers?
M. Beauchemin (Mario) : Oui.
M. Derraji : Avez-vous une
idée sur le nombre de sans-papiers?
M. Beauchemin (Mario) : Sur
le nombre de sans-papiers?
M. Derraji : Sur le nombre de
ces personnes.
M. Beauchemin (Mario) : Non.
M. Derraji : Non? Pas grave.
Une voix : ...pas notre job.
M. Derraji : Non, non, non,
mais je sais. Non, non, je sais, ce n'est pas... Je dis... Parce que, quand on
demande une régularisation, peu importe, on a une idée de... est-ce qu'il
s'agit de 10 000, de 20 000, de 30 000, de 5 000.
C'est une question qu'on pose juste pour savoir sur quoi on s'aligne. Quand on
vous dit que...
La Présidente (Mme Caron) : En
conclusion. Il vous reste 20 secondes.
M. Derraji : L'élément de la
régionalisation, encore une fois, pensez-vous que le fait d'ouvrir des bureaux,
c'est la seule chose pour aider à régionaliser l'immigration?
M. Beauchemin (Mario) : Je ne
pense pas qu'il y ait une solution unique à un problème aussi complexe.
M. Derraji : Merci à vous.
La Présidente (Mme Caron) : Je
vous remercie, le temps est écoulé. Alors, je vais maintenant céder la parole
au député de Saint-Henri–Sainte-Anne pour quatre minutes et huit secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci beaucoup pour votre présentation. Ça m'a fait penser à plein de
choses, puis, en même temps, je recevais un courriel des travailleurs d'Olymel
qui... certains sont toujours sans permis malgré que l'Assemblée nationale ait
voté une résolution unanime pour des permis de travail ouverts. Il y en a qui
n'ont pas de solution en ce moment, et ça m'a fait penser à ça, parce que c'est
ça, la réalité du permis de travail fermé, c'est que tu es complètement aux
aléas de ton entreprise. Il y a le rapport des Nations unies, on en a parlé. Ce
rapport là a fait qu'on ne peut plus fermer les yeux, là, on le sait. L'ONU
nous l'a mis en plein visage. Ça fait mal à lire, mais c'est un rappel, un dur
rappel à la réalité. Et je me tourne vers mes collègues. Je vais déposer une
demande de mandat d'initiative pour qu'on creuse la question des permis de
travail fermés. Je pense que ça nous concerne en tant que Québécois et je pense
que Mme la ministre, vous avez soumis que vous étiez à évaluer des
alternatives, je pense que ce serait important qu'on travaille de façon non
partisane à améliorer les conditions de travail de nos travailleuses, de nos
travailleurs et qu'on fasse des exigences, des demandes et qu'on aille plus
loin avec l'IRCC, avec le fédéral pour dire que ça suffit, là. Moi, quand je
lis comme législateur ou quand j'apprends comme député qu'il y a des conditions
qui sont propices à l'esclavagisme au Québec, ça... je ne suis pas capable
d'entendre ça. Je ne suis pas capable de lire ça et je pense qu'on devrait
travailler tous ensemble pour qu'on étudie la question puis qu'on la règle le
plus vite possible. Et j'espère que la main tendue sera prise.
Vous parlez de vision inclusive, 10 à
25 ans de délai de traitement, certaines... dans certaines catégories.
Est-ce que vous jugez que c'est possible et acceptable, ça, en 2023 pour le
Québec, que certaines personnes attendent 25 ans pour obtenir la
résidence?
M. Beauchemin (Mario) : Poser
la question, c'est pas mal y répondre, hein? Mais non.
M. Cliche-Rivard : Et est-ce
que... puis je me retourne encore, est-ce que... puis je ne peux pas croire que
c'est ça, l'intention réelle, j'ose croire qu'il y a un oubli ou il y a un
arriéré qui n'a pas été calculé. Il y a une méconnaissance ou je ne sais pas,
IRCC n'a pas donné les bons chiffres. Je ne peux pas croire. Je ne peux pas
comprendre que...
M. Cliche-Rivard : ...vraiment,
il y a une intention véritable de séparer des Canadiens, des époux, des
Québécois pendant trois ans, qui a une intention véritable que des réfugiés
reconnus qui sont victimes de persécution et de mort dans leurs pays d'origine,
de risque de mort, doivent attendre 10 ans pour leur résidence et
25 ans pour les plus vulnérables des vulnérables, là, les humanitaires, je
ne peux pas concevoir que c'est ça, la volonté.
Alors, ça fait quelques fois qu'on en
parle. Mme la ministre, vous avez répondu, tout à l'heure, sur Francisation
Québec avec des chiffres à jour. Là, vous les avez vus, les chiffres, depuis le
dépôt du plan, Le Devoir a amené des chiffres. Est-ce qu'on peut avoir une mise
à jour là-dessus? Parce que je ne crois pas que c'est vraiment ça qui est
voulu, je ne peux pas croire que c'est ça qui est voulu. En fait, ce n'est pas
ça qui est voulu, j'en suis presque certain.
Sur la régularisation, est-ce que vous
avez une idée de qui on viserait? Est-ce que vous, vous êtes en mode tout le
monde? Est-ce qu'on fait par étape? Est-ce qu'on vise des secteurs d'emploi?
Est-ce qu'on vise les régions? Est-ce qu'on vise un délai de gens, combien de
temps ils sont restés? Est-ce que vous avez pensé à ça pour commencer, pour une
première phase?
M. Beauchemin (Mario) : Non,
on n'a pas travaillé là-dessus, mais ce qu'on demande, par contre, c'est que le
ministère y travaille et se penche sur cette question-là. Mais je ne pense pas
qu'on doit mettre les intérêts économiques de l'avant, par exemple.
Mme Villeneuve (Marie-Sophie) : Si
je peux ajouter, mais, tu sais, c'était déjà mentionné dans le document de consultation
puis ça fait partie des orientations proposées, c'est-à-dire qu'on manque de
données sur l'immigration puis sur aussi notre capacité d'accueil, c'est déjà
reconnu. Donc, c'est très important de... Ce n'est pas à nous à compter le
nombre de personnes, mais on ne le sait même pas au Canada puis on ne le sait
même pas au Québec, les chiffres n'existent pas nulle part. Donc, il faut
d'abord savoir de qui l'on parle. Puis, pour savoir de qui on parle, bien, il
faut documenter, puis ça, ça ne peut pas être le travail, bien entendu, des
centrales syndicales. Mais, pour nous, c'est urgent de s'y atteler. Il y a des
gens qui peuvent faire cette job-là dans notre société.
La Présidente (Mme Caron) : En
conclusion.
Mme Villeneuve (Marie-Sophie) : Donc,
voilà.
M. Cliche-Rivard : Bien, j'en
profite pour vous remercier. Il y a beaucoup d'humanité dans ce que vous dites.
Merci.
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Merci, le temps écoulé. Alors, je vous remercie beaucoup, tous les trois,
d'avoir participé à nos travaux. Merci pour votre mémoire.
Nous allons suspendre quelques instants
avant de reprendre avec le groupe suivant.
(Suspension de la séance à 15 h 48)
(Reprise à 15 h 53)
La Présidente (Mme Caron) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux de la Commission
des relations avec les citoyens. Donc, je souhaite la bienvenue à la Fédération
des travailleurs et travailleuses du Québec. Je vous rappelle que vous avez 10
minutes au total pour votre présentation. Je vous invite donc à vous présenter
et à commencer immédiatement, puis on poursuivra ensuite avec les échanges.
M. Bolduc (Denis) :Merci. Merci, Mme la Présidente. Merci à la commission de
nous recevoir, la FTQ. Je me présente. Denis Bolduc, je suis le secrétaire
général de la FTQ, et je suis accompagné de Gilles Grondin à ma droite et
Guillaume Lavoie à ma gauche, qui sont conseillers syndicaux à la FTQ.
Alors, la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec représente 600 000 membres dans toutes les
régions du Québec. La diversité des secteurs économiques qu'on représente avec
nos syndicats affiliés nous permet de rassembler un grand nombre de personnes
immigrantes qui vivent différentes situations au travail et dans la vie de tous
les jours. Pour la FTQ, une société prospère, comme le Québec, a le devoir
moral de recevoir et d'intégrer dans de bonnes conditions les personnes
immigrantes. Notre immigration ne doit pas être planifiée uniquement dans une
perspective économique à court terme. Elle doit contenir une vision à moyen et
même à long terme, centrée sur l'importance d'accueillir ici des personnes qui
rêvent d'un autre avenir pour eux et leurs proches. Les orientations présentées
par le MIFI donnent l'occasion à la FTQ de réaffirmer plusieurs principes
importants auxquels les syndicats adhèrent en matière d'immigration et aussi de
francisation. Cette consultation s'inscrit dans un contexte de changements
démographiques inédits dans l'histoire du Québec. Elle soulève des questions et
enjeux importants, entre autres quant à la capacité de l'État québécois de
protéger et de maintenir son modèle économique, son identité culturelle et
linguistique de même que son poids démographique au sein du Canada. Il demeure
pertinent de rappeler aux membres de cette commission le caractère plus que
minoritaire du français sur le continent nord-américain.
Parmi les 62 recommandations émises
par la FTQ dans le cadre de cette consultation figurent plusieurs propositions
pour assurer le visage français du Québec et son caractère distinct, donc la
mise en place de moyens importants pour favoriser l'apprentissage de cette
langue, notamment dans les milieux de travail. La question, donc de la
francisation prend une place importante dans notre mémoire, vous avez pu le
constater. La vision de la FTQ sur l'immigration au Québec s'articule autour de
cinq principales thématiques : une société qui réussit l'intégration des
personnes immigrantes, une société où le français est la langue commune, les
besoins de main-d'oeuvre, les ententes... la gouvernance de l'immigration, le
statut des travailleurs et travailleuses étrangers temporaires. On en parle
beaucoup ici depuis hier, de la question des...
M. Bolduc (Denis) :...Travailleurs étrangers temporaires. Je vais prendre
quelques instants également pour vous parler de ces personnes qu'on accueille
ici et qui souvent se font abuser et même exploiter dans certains cas ici, au
Québec.
Alors, la hausse significative des
travailleurs étrangers temporaires dans le système d'immigration du Québec est
alarmante. Pour la FTQ, cette immigration temporaire ne doit d'aucune façon
constituer une réponse structurante satisfaisante pour régler à court terme les
problèmes de pénurie de main-d'oeuvre et encore moins de servir de fondement
légitime au modèle économique de certains secteurs d'activité.
On insiste fortement sur la nécessité de
mettre fin au permis de travail fermé afin de permettre aux individus de
trouver un travail plus adéquat, s'il y a lieu, et d'être moins dépendants de
leur employeur. Il faut aussi s'assurer que les conditions d'accueil de ces
personnes, je parle ici d'hébergement, de transport, de soins de santé, soient
décentes et veiller à ce que les conditions de vie et de travail soient comparables
à ce que des travailleurs et des travailleuses locaux auraient droit.
On nous rapporte régulièrement, chez nos
syndicats affiliés FTQ, des cas d'abus de certains employeurs. On ne dit pas
que c'est l'entièreté des employeurs qui agissent incorrectement avec les
travailleurs et travailleurs... travailleuses étrangers, mais il y a quand même
des cas quand même importants qui nous sont révélés. Donc évidemment, on pense
qu'une solution est de permettre les permis ouverts sur soit une base régionale
ou sectorielle. Parce que j'écoutais la présentation précédente, et ce n'est
pas glorieux quand même, le rapport du rapporteur spécial des États... des
Nations unies, qu'on a pu... Qui a été rendu public la semaine dernière
concernant de l'esclavagisme moderne ici, au Québec. On a... ça fait mal, lire
ça. Et donc on pense que les permis fermés doivent être abolis. On doit avoir
recours à des permis ouverts, comme je disais, peut-être sur une base régionale
ou encore sectorielle.
Puis je dirais également que pour... il y
a l'argumentaire patronal qui dit que... qui est financier, essentiellement.
C'est... Généralement, c'est ce que j'entends, là, des employeurs, c'est
que : moi, comme employeur, je vais investir 5 000 $,
10 000 $, 15 000 $ pour faire venir un travailleur étranger
temporaire ici, au Québec, puis je vais me le faire voler, après trois mois,
quatre mois, six mois, par mon concurrent un petit peu plus loin. Bien, si
c'est ça, si c'est juste ça, la problématique, bien, moi, je pense que la solution...
Une des solutions que la FTQ vous propose, c'est d'examiner la possibilité de
faire en sorte que les frais, les frais engendrés pour faire venir des
travailleurs étrangers, bien, si le travailleur change d'employeur, bien, qu'il
y ait un système qui permette de compenser le... je vais dire l'employeur
numéro un par l'employeur numéro deux ou l'employeur numéro trois. Et donc ça
peut être une solution. Mais la meilleure solution, selon nous, c'est quand
même d'ouvrir largement les permis de travail pour les travailleurs étrangers
temporaires.
Alors, les défis de... le défi
l'immigration, ça demeure toujours un sujet d'actualité important, et
l'implication de tous et de toutes demeure une des conditions de succès. Or, en
plus des milieux de travail, les groupes actifs de la société civile demeurent
des joueurs importants dans le succès de la francisation, de la participation
et de l'intégration des personnes immigrantes.
• (16 heures) •
Au Québec, le défi de la participation des
personnes immigrantes à la société d'accueil est accentué par la nécessité de
maintenir la langue nationale, c'est-à-dire le français. Dans ce contexte, nous
souhaitons plus que jamais une gouvernance responsable, cohérente et efficace
en matière de francisation. Nous jugeons aussi essentiel de préciser que les
mesures qui viseront à soutenir la francisation des personnes immigrantes
devront aussi être facilitantes pour ces dernières, et ce, dans la
compréhension et le respect de leur réalité. Nous croyons que les avantages à
une offre de francisation sur les lieux de travail, et j'insiste là-dessus, sur
les lieux de travail sont indéniables. Les conditions d'un tel succès reposent
sur l'implication et la concertation des membres de la direction, du syndicat
et du personnel, notamment, via les comités de francisation.
Depuis 2011, la FTQ place l'enjeu de la
rareté de la main-d'oeuvre au cœur de ses préoccupations. Or, on constate qu'en
ce moment pratiquement toutes les régions et tous les secteurs d'activité
économique et toutes les catégories de qualification sont touchés par cette
pénurie. Des solutions doivent...
16 h (version non révisée)
M. Bolduc (Denis) :...et une immigration structurante fait partie de ces
solutions.
Comme on sait, la clé d'une bonne
politique d'immigration et d'intégration est la mise en place d'actions
coordonnées et bien concertées. Bien que la FTQ souhaite toujours que le Québec
exerce un contrôle plus important en matière d'immigration, nous appelons à une
meilleure collaboration entre les gouvernements québécois et canadien d'ici la
conclusion de ces ententes afin d'assurer une plus grande efficacité dans la
planification et la gestion de l'immigration.
On a procédé à l'analyse des 12 orientations
qui sont proposées dans le document de consultation du MIFI. Vous voyez donc d'où
découlent les nombreuses recommandations que vous avez sûrement eu l'occasion de
lire déjà. Et je vois que le temps file, alors je vais passer à la conclusion
avant que vous me rameniez à l'ordre, Mme la Présidente.
Donc, je conclus en disant que se doter d'une
véritable politique visionnaire en immigration, c'est convenir de prendre tous
les moyens qui sont mis à la disposition de l'État du Québec pour s'assurer du
succès de cette démarche. Des centaines de milliers de personnes ont mis ou
mettront, dans les prochaines années, entre nos mains leur destinée et leurs
projets de vie. Il importe de les considérer d'une manière digne en agissant
avec diligence dans leur processus d'immigration et d'intégration. Nous devons
leur ouvrir nos portes, mais en protégeant aussi ce que nous sommes, ce qui
nous distingue en Amérique du Nord. La langue française est minoritaire sur le
continent nord-américain et nous devons y prendre soin. En contrepartie, ça
requiert aussi, de la part de la société d'accueil, des marques de respect et d'intégrité
pour ces nouvelles personnes immigrantes.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup pour votre présentation. Alors, je vais maintenant céder la parole à
la ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration. Alors,
vous avez 16 min 30 s.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci à vous, M. Bolduc, merci de prendre part à cette
commission parlementaire, à venir nous présenter vos idées avec un mémoire
intéressant et touffu. Alors, je vais vous amener sur différents différents
sujets.
Dans le cadre de votre intervention
notamment, vous avez indiqué que vous trouviez qu'il y avait quand même un
nombre important de travailleurs temporaires qui étaient présents sur le
territoire. Il y a effectivement eu une hausse importante, là, ces dernières
années. Et dans votre mémoire, vous faites la promotion, tout de même, de l'idée
voulant que l'on doive assouplir le programme des travailleurs étrangers
temporaires. Donc, on imagine que, si on assouplit le programme pour le rendre
plus facile d'accès, ça, c'était à la page 14, donc qu'il risque d'y avoir
encore davantage de gens qui recourent à ce programme de travailleurs étrangers
temporaires. Vous faites la promotion de l'élargissement du Programme de l'expérience
québécoise pour les travailleurs à des professions peu qualifiées et vous
proposez le prolongement des séjours des travailleuses et travailleurs. Donc,
je me demandais comment vous conciliez cette idée qu'il y a beaucoup de gens
qui ont le statut de travailleurs temporaires, alors que vous proposez des
mesures qui rendraient plus attrayant le recours à ces programmes.
M. Bolduc (Denis) :Oui. Bien, moi je siège à la Commission des partenaires du
marché du travail et, évidemment, à chaque rencontre, on parle de la pénurie de
main-d'œuvre, requalification, évidemment, de formation. Et on a eu, il y a
déjà de cela un an et demi... on a été interpellé à la Commission des
partenaires du marché du travail concernant les seuils, le 10 % de
travailleurs admis dans les entreprises. Donc, on a demandé l'opinion de la
CPMT sur cet avis-là. Évidemment, c'est une table consensuelle. Alors, on est
allé... et on est arrivé à un résultat où on disait : Bien, comme
consensus, au Québec, on pourrait accepter 20 % de travailleurs étrangers
dans un établissement, une entreprise dans certains secteurs. Et le fédéral est
arrivé avec une solution qui a monté ça à 20 %. Donc, c'était 20 %
dans certains secteurs, puis 30 % pour certains secteurs. Et le fédéral
est arrivé avec 30 % et 20 % dans tous les secteurs.
Alors, il y a cette pression, quand même,
qui existe, là, des travailleurs d'avoir recours à l'immigration pour combler
la pénurie de main-d'œuvre. Ce n'est pas la solution, mais on...
M. Bolduc (Denis) :...mais on doit de regarder et, dans... sur tout ce
processus-là, on dit : Bien oui, il faut accueillir des immigrants... des
personnes immigrantes pour combler cette pénurie-là. Mais essentiellement, puis
c'est ce qu'on essaie de dire là clairement, dans le mémoire, c'est que, oui,
on veut accueillir des gens, mais il faut les accueillir convenablement, qu'ils
aient les mêmes droits que les travailleurs, les travailleuses québécois de
souche, là, qu'ils aient accès aux mêmes... aux programmes, à l'éducation en
santé, services de garde, transports en commun, etc., les mêmes droits. Puis...
Donc, dans ce contexte-là, on dit : Oui, c'est une belle solution, mais il
faut quand même resserrer certains trucs, puis le permis... on parle de
francisation aussi, là. Alors, il y a différents... Oui, on est prêts à en
accueillir beaucoup, des personnes immigrantes, mais dans la mesure où on peut
leur fournir un logement puis des services convenables.
Mme Fréchette : Donc, c'est
davantage le cadre dans lequel ces personnes évoluent, ces travailleurs
évoluent qui vous interpelle davantage que le nombre. C'est ce que j'en déduis?
M. Bolduc (Denis) :Oui, exactement. Et je vous donne un exemple que ce n'est
pas... les deux personnes concernées ne sont pas des personnes immigrantes,
mais juste pour donner l'ampleur de la difficulté sur cette question-là
concernant le logement, précisément. On avait, à la FTQ, il y a quelques mois à
peine, un projet de stagiaire d'été, on avait un boucher puis une personne
animatrice à la radio qu'on a... On a trouvé une place qui était prête à les accueillir,
dans une ville de l'Abitibi, une petite ville de l'Abitibi. Station de radio
communautaire, une boucherie, donc on a nos places. On règle tout, toutes les
affaires, il reste à leur trouver un logis pour un stage d'été une dizaine de
semaines. On a été incapables de trouver deux places pour les loger en Abitibi,
dans cette petite ville là. Alors, si on... On parle beaucoup de
régionalisation en immigration, là, bien, ça, c'est un défi vraiment important.
Il est immense, ce défi-là.
Mme Fréchette : Je suis bien
au fait de ça, dans le cadre de la tournée régionale, je m'en suis fait parler
abondamment. Restons sur la question du fait français, vous proposez... à la
page 14, donc, vous recommandez de rendre l'acceptation des candidatures
pour le Programme des travailleurs étrangers temporaires, donc le PTET,
conditionnelle à un engagement de francisation de la part des employeurs
lorsque les travailleurs étrangers ne proviennent pas d'un pays francophone.
Comment est-ce que vous verriez que ça fonctionne, là, ce système-là?
J'aimerais entendre votre proposition.
M. Bolduc (Denis) :
...à l'engagement des employeurs, on a des beaux exemples à la FTQ quand même.
On a, par exemple, l'usine Peerless, à Montréal, qui fabrique des vêtements. Je
suis allé visiter avec Gilles, justement. Il y a peut-être un an, peut-être
moins même, on est allés visiter les gens qui désiraient... En fait, ce qui
nous intéressait, c'était de voir comment fonctionne la mécanique pour inscrire
les gens aux cours de francisation là-bas, et c'est les Nations unies, hein,
ils ont des gens d'une multitude de pays. Bien, ils ont réussi à mettre en
place, avec l'employeur, collaboration du syndicat, des cours de français sur
les lieux de travail. Nous, on est convaincus, là, que c'est la meilleure
recette à utiliser, parce que les gens sont déjà sur les lieux de travail. Ça
peut être une prolongation de la journée, quand les journées ne sont pas trop
longues, ou encore intégré dans l'horaire de travail, et là on leur donne des cours
de français de façon régulière, payés par l'employeur sur les lieux de travail.
C'est comme ça qu'on voit, là, la façon idéale de franciser, de faciliter la
francisation des travailleurs étrangers dans les entreprises. Et évidemment
nous, on peut le faire dans les milieux syndiqués. C'est plus difficile, là, de
le faire là où il n'y a pas de syndicat.
• (16 h 10) •
Mme Fréchette : Bien, c'est
une orientation aussi qui nous interpelle beaucoup. Si on s'en remet aux
étudiants étrangers, dans le cadre de votre mémoire, vous parlez, à la
page 30, que le Québec doit travailler, bon, avec le fédéral pour faire en
sorte d'assurer une plus grande présence, une présence plus importante, là,
d'étudiants étrangers francophones. Quelle approche vous proposeriez d'adopter
par rapport à l'attraction d'étudiants étrangers francophones? Est-ce que vous
pensez qu'une approche incitative serait la voie à adopter ou plutôt une
approche de réduction du nombre d'étudiants étrangers anglophones? Jusqu'où
iriez-vous en termes d'actions à mettre en place pour assurer...
Mme Fréchette : ...une plus
grande présence d'étudiants francophones.
M. Bolduc (Denis) :Si vous me permettez, Mme la Présidente, Gilles... mon
collègue Gilles pourrait répondre.
M. Grondin (Gilles) : Écoutez,
on n'a, évidemment, pas l'ensemble des réponses que vous pouvez avoir, mais
c'est certain qu'il devra y avoir une sorte de coercition, finalement,
possiblement pour arriver à nos fins et s'assurer qu'il y ait une plus grande
présence. On voit les universités à Montréal, l'UQAM, l'UdeM, qui ont aussi des
difficultés économiques, notamment à l'UQAM, l'augmentation importante du
nombre d'étudiants à Concordia, à McGill. Et il devra y avoir des mesures, je
pense, pour faciliter la présence d'étudiants francophones dans nos
universités. On sait le blocage aussi qui existe à Ottawa avec une multitude
d'étudiants africains qui demandent et qui ne reçoivent pas des permis. Donc,
je pense... on pense, nous, de notre côté, qu'il doit y avoir et on doit
renforcer... Il faut vivre à Montréal aussi pour bien voir aussi comment la
réalité montréalaise s'anglicise aussi.
Mme Fréchette : Donc, vous
parlez de mesures pour assurer une plus grande présence d'étudiants
francophones mais aussi de mesures pour réduire le nombre d'anglophones.
M. Grondin (Gilles) : On n'a
pas de position de centrale sur la question, je ne peux pas parler au nom de la
FTQ, mais je pense qu'il faut assurément augmenter la présence d'étudiants
francophones. S'il faut, pour des raisons économiques, diminuer celle des
anglophones, comme aussi... Et je pense que le commissaire à la langue
française, ce matin, a bien présenté l'ensemble du portrait sur la question de
toute la socialisation des jeunes, des gens qui vont au cégep, à l'université,
dans les cégeps anglophones, et autres, je pense que le Commissaire à la langue
française l'a bien démontré ce matin aussi.
Mme Fréchette : Merci. Une
dernière question de ma part au sujet de la formation en francisation au
travail. Là, vous évoquez le modèle du secteur de l'entretien ménager qui
semble être intéressant. Est-ce que vous pourriez nous en parler davantage?
M. Bolduc (Denis) :Oui, c'est notre affiliée UES 800, l'Union des
employés et employées de services 800, qui est impliquée quand même
fortement dans ce dans ce dossier-là. C'est que, dans ce secteur-là, il y a
entente avec les employeurs et le syndicat pour procéder à la francisation, là,
des personnes. Alors, ça passe par un programme de la CPMT. Je ne me trompe
pas, hein? Ça passe par un programme de la Commission des partenaires du marché
du travail, et il y a une partie du salaire des personnes qui sont libérées
pendant leur cours de francisation qui est remboursée par le programme. Le
syndicat même s'implique financièrement, l'UES 800, là, c'est un...
s'implique même financièrement pour favoriser la francisation de ses membres
dans ce secteur d'activité économique qu'est l'entretien ménager.
Mme Fréchette : Parfait.
Bien, merci. Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Caron) : Alors,
je vais céder la parole à la députée d'Iberville. Il reste cinq minutes 55 à
votre groupe.
Mme Bogemans : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Moi, je voulais vraiment vous féliciter pour votre
ouverture. On sent vraiment votre implication, votre dévouement envers la
cause. Puis l'ouverture que vous démontrez aujourd'hui, je trouve que c'est
porteur de solutions. Donc, je voulais vous remercier pour ça.
Vous avez porté à notre idée plein de...
une foule de sujets, en fait, qui sont vraiment porteurs. Puis nous autres, au
gouvernement, on se concentre pour avoir une économie forte dans toutes les
régions du Québec. On a plusieurs exemples avec le développement de la filière
batterie, avec les projets zone innovation, les projets signatures innovation,
partout au Québec, dans le but d'apporter puis de diversifier aussi les pôles
économiques à la grandeur des régions du Québec puis attirer également les
immigrants dans les régions, tout comme offrir des bonnes possibilités d'emploi
pour les Québécois qui sont déjà ici.
Donc, je voulais vous entendre, dans le
fond, parce que vous avez suggéré, dans la régionalisation, vraiment un comité
interministériel piloté par un comité de travail. Puis je voulais vous entendre
un petit peu plus sur cette idée-là, comment ça pourrait se déployer.
M. Grondin (Gilles) : Ce
qu'on constate ou ce qu'on a constaté... Et je rappelle à cette commission ce
que j'avais présenté une autre fois, dans un autre contexte de la loi
n° 96, c'est notamment le film Langue à l'ouvrage que nous avons fait à la
FTQ portant sur la question de l'immigration et des succès en francisation.
Mais ce qu'on a pu constater dans ce film-là, c'est notamment... et on le voit
en images, c'est le peu... le problème de logement, un problème de transport,
ça peut aller jusqu'au problème de services de garde, d'accès. Donc, il y a
vraiment nécessité qu'on ouvre et qu'on favorise cette implantation-là en
région. Ce n'est pas juste de dire : On en envoie 75, on trouve des
petites cabanes pour eux. Non, c'est aussi de les accompagner dans la région,
donc par des différents moyens, par les groupes communautaires qui seront
présents. C'est pour ça qu'une de nos premières recommandations, c'est de
continuer le financement aussi des groupes communautaires.
Puis le transport est un autre problème.
Le film est tourné, notamment, à Saint-Anselme, tout près de Lévis. Mais
combien de gens veulent aller à Lévis ou à Québec...
M. Grondin (Gilles) : ...pendant
leur fin de semaine et ont des problèmes de transport pour s'y rendre. Comme
ils vivent dans des grandes maisons à cinq, six dans la maison, parce qu'il n'y
a pas de trois et demi, il n'y a pas de quatre et demi dans le village de
Saint-Anselme ou très peu. Alors, vous voyez, ça, c'est des réalités
importantes à saisir.
Mme Bogemans : Oui, mais au
niveau du déploiement d'un comité interministériel sur la régionalisation,
comment vous nous suggérez, dans le fond de mettre en place...
M. Grondin (Gilles) : Bien,
c'est parce qu'on entend souvent que les gens travaillent en silo, hein?
Mme Bogemans : Oui.
M. Grondin (Gilles) : On
entend souvent que les gens, en haut lieu, comme en région, travaillent en
silo, d'où l'importance de vraiment s'assurer que ça ne soit pas en silo
puis... Parce que l'être humain qui arrive là, il ne va pas juste au MIFI. Il
faut qu'il inscrive son enfant... Tu sais, il y a l'importance de prendre cette
personne-là, cet humain-là dans son entièreté, là, donc d'où... Ça peut aller
jusqu'à des comités, mais cela dit, c'est plus entre vos mains qu'entre les
miennes, là. Mais c'est aussi de le voir... à le travailler un peu avec tout le
monde. Et, dans le film, on en parle, il y a des gens qui disent : C'est
important qu'on se parle entre nous pour bien se comprendre.
Mme Bogemans : Oui. Puis
tantôt vous parliez de... au niveau des permis ouverts de sectoriel ou de
région. Est-ce que vous avez, par exemple, des exemples à nous soumettre ou des
scénarios particuliers?
M. Bolduc (Denis) :Bien, en fait, ça pourrait être dans un secteur d'activité
économique précis, par exemple, je ne sais pas moi, dans l'agroalimentaire, on
en a beaucoup, hein? On en a énormément de travailleurs étrangers temporaires
dans l'agroalimentaire. Bien, peut-être dans une région donnée, bien, que cette
personne-là, s'il a un permis ouvert puis qu'il vit une situation difficile
chez un employeur, il se fait abusé ou... bien qu'il ait la possibilité... ou
dans la fermeture, dans le cas de la fermeture de cette... d'une usine
spécifique à laquelle il est rattaché, bien, il devient comme emprisonné, il ne
peut plus rien faire. Donc, ouvrir le sectoriel, soit par secteur économique ou
dans une région, alors ouvert à la région, parce qu'on a vu... Puis il ne faut
pas s'imaginer, là, que ce n'est pas régulier, là, les cas d'abus, là. Il y en
a, moi, je dirais, quotidiennement, à différents degrés. Je pourrais vous
donner... Ça m'a été rapporté, là, par un syndicat affilié récemment, un cas
d'une entreprise sur la Rive-Sud de Montréal, où le gestionnaire se promène sur
le plancher puis devant les travailleurs étrangers temporaires, bien, il fait
le signe d'avion en voulant dire : Bien, tu vas faire ce que... Tu ne te
plaindras pas puis tu vas faire ce que je vais te demander de faire parce que
moi j'ai le pouvoir de te retourner chez vous. Alors, ça, c'est plus de
l'intimidation, du harcèlement qui paraît moins, là, que les cas qui sont
rapportés dans les nouvelles, les cas... mais ça nous est rapporté
régulièrement parce qu'on est présents, je vous le disais en introduction, dans
à peu près tous les secteurs économiques au Québec.
Mme Bogemans : Oui. Bien,
c'est certainement inacceptable, là, puis il y a déjà des initiatives qui sont
mises en place, entre autres, par l'escouade de la CNESST. Puis c'est certain
que c'est... Toute forme, de toute façon, d'intimidation sur les lieux de
travail n'est pas acceptable, puis on s'emploie à l'enrayer au plus possible.
Mais ma dernière question pour vous,
c'était : Comment les centrales syndicales en général et la FTQ peuvent
contribuer à l'intégration des personnes en région? Avez-vous des initiatives
particulières?
La Présidente (Mme Caron) : En
25 secondes.
M. Bolduc (Denis) :En 25 secondes, bien, je pourrais donner rapidement un
outil, un outil, là, qui existe actuellement puis qu'on souhaite qu'il soit
déployé davantage. C'est les comités de francisation en entreprise,
100 employés et plus. Nous, on souhaiterait que... puis... on souhaiterait
que ce soient les entreprises de 50 employés et plus. Bien, là où il y a
des comités de francisation, on pourrait les utiliser pour, justement, mettre
en place, promouvoir des programmes de francisation en entreprise.
• (16 h 20) •
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Alors, je vais maintenant céder la parole à l'opposition officielle. Député de
Nelligan, alors c'est 12 minutes, 23 secondes pour votre groupe.
M. Derraji : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Merci à vous trois pour votre rapport, mais surtout, surtout,
surtout des 62 recommandations. C'est très détaillé. Il y a des choses où
j'ai des questions, mais une bonne majorité, vous soulevez de bons points.
Je vais commencer avec la
recommandation 61. La FTQ demande au gouvernement du Québec de prendre des
mesures pour favoriser l'inclusion des travailleurs étrangers temporaires dans
le calcul du seuil d'immigration.
Une voix : ...
M. Derraji : Oui, 61. C'est
page 48. C'est bon? C'est bon?
Une voix : ...
M. Derraji : Pouvez-vous
élaborer un peu?...
M. Derraji : Pouvez-vous
élaborer un peu?
M. Grondin (Gilles) : Je peux
tenter une explication aussi sur cette question. Je pense que, comme a
mentionné le collègue de la CSQ précédemment, à un moment donné, la question
des travailleurs étrangers temporaires doit aussi être considérée dans
l'ensemble du portrait de l'immigration. C'est dans ce sens-là qu'on veut...
qu'on l'amène, notamment, donc c'est dans cette réflexion-là aussi qu'on l'a
apportée, cette dite recommandation-là.
M. Derraji : O.K. Donc...
Oui. Donc, ce que vous dites : le portrait qu'on a, actuel, ne représente
pas le réel portrait - excusez-moi l'utilisation des deux «portrait», c'est
juste pour aller vite - et que, si on inclut les TET, on ne va plus parler de
50 000 ou de 60 000. Donc, le narratif sur la place... Je vous laisse
choisir qui va répondre. Le narratif sur la place publique changera. On ne peut
plus dire : Est-ce que - dans une campagne électorale - je vais baisser le
seuil à 40 000 ou à 30 000? D'autres vont dire 60 000, un autre
qui... Va dire 80 000. D'ailleurs, la position au Parti libéral, nous, on
dit que le débat sur les seuils est une question qui est dépassée, vu que pour
la première fois un gouvernement a presque multiplié par trois le nombre de
temporaires. Donc, ce que vous dites aujourd'hui au niveau de la planification
qu'on a devant nous... que dorénavant, si on veut être juste et avoir le
portrait réel, on doit tout inclure?
M. Grondin (Gilles) : O.K. Ce
qu'on dit, c'est qu'à un moment donné, effectivement - on l'a dit il y a quatre
ans en commission parlementaire sur le même sujet - on a dit : On n'est
pas des experts, pour déterminer quel doit être le chiffre du seuil exactement
précis, et on n'a surtout pas accès à toutes les données. Je ne sais pas si
vous avez accès à plus de données que nous, mais, en ce qui concerne par
exemple la présence de travailleurs étrangers temporaires sur le sol québécois,
on entend toutes sortes de chiffres; la présence de sans-papiers, on entend
aussi, tout le monde, toutes sortes de chiffres. Donc, c'est dans cette
perspective-là aussi qu'il faut comprendre l'entièreté de l'oeuvre, au niveau
de l'immigration, et de l'offre de services aussi qu'on doit faire à ces
gens-là.
M. Derraji : Oui, c'est...
M. Bolduc (Denis) :Les vannes ont été ouvertes, hein, dans les dernières
années.
M. Derraji : Désolé, je ne
vous ai pas entendu. Qu'est-ce qui a été ouvert?
M. Bolduc (Denis) :Les vannes.
M. Derraji : Les vannes de
quoi?
M. Bolduc (Denis) :De l'immigration des travailleurs étrangers temporaires.
Alors, je vous parlais tout à l'heure des pourcentages de travailleurs... du
nombre de travailleurs qui sont acceptés ou permis dans les entreprises. Ça a
été augmenté, et même, en certaines situations, on constate qu'on dépasse même
ces maximums-là...
M. Derraji : Oui, mais...
M. Bolduc (Denis) :...puis ça, c'est un contexte de négociations avec le
fédéral, là, il y a du fédéral là-dedans, là.
M. Derraji : Oui. Quand vous
dites «les vannes», «les vannes», c'est le gouvernement qui a ouvert les
vannes.
M. Bolduc (Denis) :Oui.
M. Derraji : Pourquoi, selon
vous...
M. Bolduc (Denis) :
À cause de la pénurie de...
M. Derraji : ...du
temporaire?
M. Bolduc (Denis) :À cause de la pénurie de main-d'oeuvre, le contexte de
pandémie dans lequel on a été plongés et la pression qui a été mise aussi par
les employeurs pour avoir de plus en plus de travailleurs étrangers pour avoir
recours aux... puis la démographie, hein, du Québec. Donc, il y a...
M. Derraji : Donc, ces
travailleurs temporaires répondent à un besoin, comblent un besoin de pénurie,
mais la réponse du gouvernement aujourd'hui nous invite à ne parler que des
résidents permanents. Donc, on laisse toujours la porte à quelqu'un d'autre qui
va choisir que j'ai un manque, j'ai 20 %, 30 %, ça dépend du secteur, le
fédéral nous l'autorise. Mais, au Québec, on est maîtres de notre politique
d'immigration, mais on n'en parle pas, parce qu'on s'occupe juste du permanent.
M. Bolduc (Denis) :On aimerait que le Québec rapatrie ces pouvoirs en
immigration.
M. Derraji : Ah! je... Sur le
travailleur temporaire étranger...
M. Bolduc (Denis) :
Je ne sais pas si vous voulez embarquer sur...
M. Derraji : Ah! oui, oui,
oui. Non, non, non, je l'ai mentionné, j'ai fait... Avant même l'arrivée de Mme
la ministre, je l'ai mentionné, en tant que nouvelle élue et ministre, j'ai
mentionné qu'on doit rapatrier le programme des travailleurs temporaires
étrangers.
Mais ma question, elle est la
suivante : À part qu'on n'a jamais cru à la pénurie de main-d'oeuvre, à
part qu'on a essayé de dire aux Québécois que le besoin, c'est juste 40 000, on
s'entend que le narratif va changer. C'est que personne ne peut aller en
élections et dire : Mes seuils seront de 50 000 ou de 60 000. C'est un
faux débat, parce qu'on ne parle pas de 50 000 ou de 60 000, là. Vous êtes
sur le terrain, vous représentez des travailleurs, vous pouvez nous dire
aujourd'hui... Est-ce que, vraiment, c'est 50 000 de 60 000 qu'on a, comme
immigrants?
M. Bolduc (Denis) :C'est davantage.
M. Derraji : Hein?
M. Bolduc (Denis) :C'est clairement davantage, là, c'est clairement...
Immigration, toutes catégories confondues, c'est beaucoup plus que 50 000,
60 000...
M. Derraji : Absolument.
M. Bolduc (Denis) :...sii on tient compte des travailleurs étrangers
temporaires. Mais les chiffres...
M. Derraji : Mais vous ne
pensez pas que... Mais pourquoi on dit que... On parle sur la place publique...
un certain narratif de 50 000, 60 000, et on ne veut pas parler de
travailleurs temporaires étrangers. Est-ce que vous avez cette impression? ...
M. Grondin (Gilles) : ...oui,
j'ai cette impression-là, mais c'est une impression qui court depuis de
nombreuses années. Pas juste de cette consultation aussi, de la précédente et
de l'autre d'avant aussi. On est toujours sur cette fameuse question des seuils
à 45, à 50 à 55, à 60, à 22, peu importe. Et c'est le cas de plusieurs
commissions. Donc, est-ce que c'est l'ensemble de la fonction publique qui nous
amène toujours sur ce sujet-là? Je parle d'une commission parlementaire dans
laquelle le Parti libéral était aussi au pouvoir à l'époque. Donc, c'est depuis
2011 aussi que nous, on parle de problème de la pénurie de main-d'œuvre, elle
va s'en venir, là. Qu'est-ce qu'on a eu comme réponse? Au niveau structurel, au
niveau de l'économie, ce n'est pas toujours aussi précis que ça. Et idem pour
ce qui est de la question des travailleurs étrangers temporaires qui, oui,
prend de plus en plus de place. Mais pour nous aussi, on a toujours maintenu et
on le dit là-dedans, dans notre mémoire, c'est qu'aussi qu'à des places il
faudrait peut-être qu'on augmente le salaire minimum pour favoriser aussi le
retour en emploi de certaines personnes.
M. Derraji : Oui, vous avez
raison. Je dis juste à préciser quelque chose, c'est que les données vous, vous
les suivez aussi, le nombre de travailleurs temporaires étrangers n'a jamais au
seuil qu'on a maintenant.
M. Grondin (Gilles) : Je l'ai
dit, oui.
M. Derraji : Donc, oui, oui,
je suis d'accord avec vous qu'il y avait la problématique des travailleurs
temporaires étrangers sur la table, je vous l'accorde, mais il n'y avait pas du
20 %, 30 % partout. Ça vient d'être fait. Vous l'avez même vous-même mentionné.
Et on n'a jamais été, au Québec, à des seuils de 50 000 travailleurs
temporaires étrangers. Prenez juste le cas du programme de mobilité
internationale, vous allez voir qu'on est rendu à des 40 000.
Mais cette recommandation, pourquoi je
vous ai mentionné de me parler de cette recommandation 61? Parce que je
vous ramène à la recommandation 24.
M. Grondin (Gilles) : 24.
M. Derraji : O.K. Je vous
laisse le temps d'aller la voir. Vous demandez au gouvernement de se doter
d'indicateurs précis complets pour mesurer les besoins et les effets relatifs à
la migration, notamment pour mieux suivre la situation de l'insertion
économique, linguistique et géographique des nouveaux arrivants afin de
planifier les programmes et les mesures nécessaires, et que ces données soient
rendues publiques. Mes quels indicateurs vous souhaitez ou vous aimeriez avoir?
M. Bolduc (Denis) :Juste sur le nombre, le nombre de personnes immigrantes au
Québec, on entend toutes sortes de chiffres.
M. Derraji : Oui.
M. Bolduc (Denis) :Ce n'est jamais le même chiffre. Il y a les... il y a
différentes catégories. On parlait des... Je vous entendais, tout à l'heure,
parler des sans-papiers. On ne peut pas savoir combien ils sont, ils sont sans
papiers. Et donc c'est important que... et nous, on n'a pas les moyens de le
faire. Le gouvernement a probablement les moyens d'aller chercher des
statistiques pour...
M. Derraji : Est-ce que vous
formulez aujourd'hui... est-ce que vous formulez aujourd'hui une demande
officielle que le gouvernement se penche sur la question des sans-papiers,
d'avoir le portrait réel?
M. Bolduc (Denis) :Bien, de l'ensemble des de l'immigration au Québec, d'avoir
un portrait. Parce que si on n'a pas la photo, c'est difficile de faire des
retouches dessus, là, si on ne l'a pas devant nous. Je ne sais pas si tu veux
ajouter.
M. Derraji : Et cette photo,
ça reflète aussi la fameuse capacité d'accueil parce que ça a été, je dirais,
pendant longtemps, la fameuse phrase pour clore le débat : La capacité
d'accueil du Québec est atteinte. Mais quand je pose la question :
Donnez-moi juste une seule étude qui parle de la capacité d'accueil. On n'en
parle pas.
Parfois, on entend des gens qui veulent,
dans certaines régions, ramener plus d'immigrants. Mais présentement, ils
vivent une crise de logement. On va les loger où? Donc en fait, ce que j'ai
avec votre proposition, c'est que si on ne se donne pas des indicateurs, si on
n'a pas le portrait réel, on navigue dans le vide.
• (16 h 30) •
M. Grondin (Gilles) : Bien,
c'est pratiquement comme ça que commence n'importe quelle expérience
scientifique aussi, là. Il faut que tel un portrait, peu importe, pour le
comprendre. Que ce soit dans une expérience en physique, en chimie ou en
n'importe quoi, il faut un portrait, tu sais.
Moi, je suis dans le dossier d'immigration
depuis quelques années et j'ai notamment travaillé à la rédaction du précédent
rapport, ce qu'on a fait il y a quatre ans, et je m'étais largement inspiré du
précédent. Et à toutes les fois, on ramène nous, comme Fédération de
travailleurs, cette question-là d'avoir des données précises sur l'immigration
afin de pouvoir ensuite émettre des recommandations. Mais c'est... toutes les
centrales syndicales vont vous dire la même chose, là, on n'a pas ces données
précises là et on ne sait pas nécessairement toujours comment donner des
réponses face à ça. Vous-même, vous allez chercher ces réponses-là?
M. Derraji : Oui, sur les
données, il y en a pas mal. On peut vous partager nos données sur les
immigrants temporaires parce que je ne peux pas déposer un projet de loi pour
inclure les travailleurs temporaires étrangers si je n'ai pas fait mes
recherches. On va vous partager. Il y en a. C'est plusieurs catégories, programme
de mobilité internationale. Il y a des étudiants, il y en a pas mal.
Maintenant, on arrive à en avoir, et j'irais même... et je salue l'équipe de
Mme la ministre, on a même des chiffres par rapport à la francisation.
Maintenant, on en a. Maintenant, c'est sur l'espace public où on doit prendre
le temps de dire quels indicateurs on veut.
Quand on veut parler de la
régionalisation, le groupe qui était juste avant vous, ce n'est pas uniquement
ouvrir des bureaux qu'on va aider dans la régionalisation. On parle de
l'accompagnement. Il y a beaucoup d'autres mesures qu'on doit mettre en place
pour favoriser l'inclusion en région. Je reviens à la...
16 h 30 (version non révisée)
M. Derraji : ...recommandation
16. Recommandation 16. Vous voulez dire quelque chose?
M. Grondin (Gilles) : Non,
mais j'ai juste dit que c'est ce qu'on a mentionné précédemment.
M. Derraji : Oui, pas de
problème. Recommandation 16 : Que le gouvernement du Québec rende publique
la liste de tous les employeurs s'étant vus refuser une étude d'impact du
marché du travail pour des raisons de non-conformité. Pourquoi?
M. Lavoie
(Guillaume) :Oui. Bien ça, en fait, c'est
parce qu'il existe un double programme au Canada, c'est-à-dire qu'il y a un il
y a des règlements canadiens pour lesquels les employeurs qui se voient imposer
des sanctions pécuniaires administratives ou des sanctions même les interdisant
de faire venir des travailleurs étrangers pour le futur qui sont rendus
publiques. Alors qu'au Québec on a également, dans le règlement sur l'immigration,
certaines conditions pour lesquelles le MIFI peut interdire à des employeurs d'émettre
un IMT, de faire venir donc des travailleurs étrangers pour les années futures.
Mais l'application qui est faite par le MIFI de ces dispositions là, n'est pas
rendue publique, et on n'a pas de données sur... Encore une fois, c'est une
absence de données qu'on a sur l'application qu'en fait le MIFI. Donc, c'est le
sens de la recommandation.
M. Derraji : O.K. Vous siégez
à la CPMT. Est ce que toutes vos demandes sont... Parce que j'ai vu pas mal de
recommandations, que vous formujlez par rapport à la CPMT. Vous avez quelque
chose, là...
La Présidente (Mme Caron) : En
15 secondes, s'il vous plaît.
M. Derraji : ...d'important à
citer aujourd'hui?
M. Bolduc (Denis) :La CPMT a déposé un mémoire. Je ne sais pas s'ils ont
été...
M. Derraji : Oui, oui, ils
vont être là, mais vous...
M. Bolduc (Denis) :Oui? Ils vont être là? C'est une position de consensus à la
CPMT. Ça va moins loin que... Par exemple, sur les permis fermés, il n'y a pas
de consensus à la CPMT sur cette question là.
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Alors, le temps est écoulé. Je vais maintenant céder la parole au député de
Saint-Henri Sainte-Anne. Donc, c'est quatre minutes huit secondes pour votre
grouper.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci beaucoup pour votre mémoire et vos recommandations. Si vous
êtes les quatre centrales ici, aujourd'hui, à faire un point de presse en bloc,
unis, on va se le dire quand même, avec des vice-présidents et autres,
permettez-moi de vous demander, l'heure est grave quand même, là. Vous avez un
message fort, Vous ne vous seriez pas déplacés si vous ne jugiez pas que l'heure
était assez pressante et grave.
M. Bolduc (Denis) :Oui. Bien, ça fait... ça fait des années qu'on intervient
sur l'immigration. Aujourd'hui, on a décidé, les quatre centrales, de le faire,
de donner un signal effectivement collectif, fort, ensemble. C'est plus d'1
million de travailleurs, travailleuses au Québec qui parlent à travers nos
quatre centrales. Et, oui, parce que ça fait longtemps qu'on parle de la
question de l'immigration. La Commission des droits de la personne parlait en
2011, concernant les travailleurs agricoles, de discrimination systémique.
Alors, ça fait longtemps, là, que cette question là des travailleurs étrangers
nous préoccupe, autant à la FTQ que chez mes collègues des autres centrales.
M. Cliche-Rivard : Mais j'apprécie
le geste fort et j'espère qu'il sera entendu parce que ce n'est pas tous les
jours qu'on voit ça quand même. Puis vous avez des orientations quand même dans
le même sens? Puis, je veux dire, ça fait... ça fait beau à voir.
M. Bolduc (Denis) :Des fois, on s'obstine. Oui, effectivement.
M. Cliche-Rivard : Vous
avez... Vous avez parlé des planifications précédentes, la planification de
2019 notamment. J'étais assis à cette table en 2019, et on en a eu une
quarantaine de groupes qui étaient entendus. Et ce qui est ressorti de la
planification, en fait de la discussion et puis des consultations, c'est exactement
le même document qui avait été soumis préalablement. Donc, essentiellement
parlant, après 40 groupes, c'est le même document qui a été adopté sans
modification. Aujourd'hui, on est là, on a 80 groupes qui vont être entendus,
notamment vous, mais il y en a d'autres. Est-ce que vous souhaitez, j'imagine
que oui, qu'il y ait des modifications? Et quel message ça enverrait si, après
80 groupes, le plan tel quel était adopté?
M. Bolduc (Denis) :Bien, qu'on n'est pas écoutés. C'est des... C'est la beauté
d'une commission parlementaire, c'est de permettre à des groupes de venir s'exprimer.
C'est de la démocratie à l'état pur. Alors, on invite des groupes venir s'exprimer.
Puis après ça, bien ça quand même appartient au gouvernement de prendre des
décisions. Si on le voit dans les résultats, dans les décisions qui sont
prises, bien, après ça, on peut juger s'il y a eu une écoute ou pas. Alors, on
espère qu'il y aura une bonne écoute, Mme la ministre.
M. Grondin (Gilles) : J'ajouterais
peut-être un petit quelque chose. J'ai la chance de participer à des forums
internationaux sur différents enjeux, et beaucoup de pays nous... Beaucoup de
syndicats de ces pays-là nous envient de pouvoir pratiquer une sorte de
dialogue social ici, comme on fait tout le temps, peu importe lequel parti au
pouvoir, là, dans une perspective de démocratie. On ne peut que saluer ça.
M. Cliche-Rivard : Puis vous
avez raison de le dire. C'est vrai qu'on a cette belle liberté d'expression,
puis qu'on est écouté, puis que finalement on a une belle planification de par
la loi, là. Donc, on est... on est contents...
M. Cliche-Rivard : ...mais
j'espère, moi aussi, que, des 80 groupes, il y aura des choses qui seront
retenues, qu'il y aura des choses qui seront adaptées, ajustées. Vous en avez
parlé, il y a un volet qui parle de tenir compte du nombre de gens qui vont se
qualifier dans le PEQ pour fixer notre seuil prospectif, hein? Finalement, si
on a, à terme, je ne sais pas, 20 000, 30 000, 40 000 candidats
qui se qualifient au PEQ et que, finalement, dans ces catégories-là, il y a
seulement 4 000, 5 000, 6 000, 8 000 personnes qui
sont qualifiées... pardon, qui sont sélectionnées dans le seuil, on va avoir un
problème.
La Présidente (Mme Caron) : 15 secondes.
M. Cliche-Rivard : Donc,
vous, vous voulez une étude prospective aussi?
La Présidente (Mme Caron) : Rapidement.
Il vous reste 10 secondes pour répondre.
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Bolduc (Denis) :Oui, il restait deux, trois secondes.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup pour... d'avoir contribué à nos travaux. Alors, nous allons suspendre
quelques minutes avant de reprendre avec le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 16 h 37)
(Reprise à 16 h 44)
La Présidente (Mme Caron) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux. Alors, je
souhaite la bienvenue aux représentants de la Confédération des syndicats
nationaux. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation et vous
présenter. Donc, 10 minutes au total. Et on poursuivra par la suite avec
les échanges. Alors, la parole est à vous.
Mme Lelièvre (Katia) : Merci
beaucoup. Bonjour, je m'appelle Katia Lelièvre, je suis vice-présidente à la
CSN. Et je suis accompagnée aujourd'hui par Julien Laflamme, qui est conseiller
politique, ainsi que Marie-Hélène Bonin, qui est conseillère à la recherche,
spécialisée en immigration. C'est un plaisir pour nous de pouvoir venir vous
porter le point de vue de la CSN dans la consultation d'aujourd'hui.
La CSN est une centrale syndicale qui
représente 330 000 travailleurs de tous les secteurs d'activité au
Québec. On représente des milliers de personnes immigrantes, dont beaucoup de
travailleurs étrangers temporaires. Nous sommes bien à même de constater les
problèmes vécus par nos membres à plusieurs niveaux, soit la santé-sécurité, la
connaissance des droits, la communication, l'inclusion, la représentation
syndicale et l'accès aux services, pour ne nommer que ceux-là. Les défis se
sont multipliés au cours des dernières années et, de façon plus notable, depuis
que les règles entourant la main-d'oeuvre immigrante ont été assouplies.
Tout d'abord, pour la CSN, le thème de
l'immigration doit être abordé de façon inclusive, humaniste et en ayant une
vision globale. On doit aussi être en concordance avec les valeurs qu'on
représente comme CSN, c'est-à-dire la solidarité. Le débat ne peut pas porter
uniquement sur des chiffres de la résidence permanente dans la planification
annuelle, on ne dit pas ce qui arrivera des dizaines et des dizaines de
milliers de travailleurs étrangers temporaires et des immigrants temporaires
qui sont déjà ici. Au Québec, il y a plus de ces travailleurs temporaires que
dans n'importe quelle autre province canadienne. Ils ne font pas partie de la
planification. Contrairement aux étudiants étrangers diplômés, il n'y a aucun
scénario dans le cadre de cette consultation-là aujourd'hui, pour rendre
permanente la résidence de ces travailleurs qui sont pourtant essentiels au Québec.
Une autre question importante est la
précarité et la vulnérabilité des personnes immigrantes sans statut de résident
permanent. Que ce soit pour les demandeurs d'asile, les travailleurs étrangers
temporaires ou les sans-papiers, toutes ces personnes sont actuellement chez
nous sans résidence permanente. Plusieurs familles sont séparées de nombreuses
années, les conditions d'admissibilité sont difficiles à remplir, les frais
sont importants et les délais sont interminables. Ils demeurent donc dans cette
situation extrêmement pénible pendant beaucoup trop longtemps. Comme nous le
mentionnons dans nos recommandations sur l'inventaire et les délais d'obtention
de la résidence permanente, pour la CSN, il est impératif d'améliorer la
collaboration avec le fédéral afin de permettre à tous les travailleurs
migrants d'accéder à la résidence permanente et d'accélérer le processus de
régularisation...
Mme Lelièvre (Katia) : ...des
personnes sans statut ou à statut précaire. De plus, les frais exigés par les
deux gouvernements pour soumettre des demandes de sélection et d'admission
représentent une somme considérable pour les bas salariés, les travailleurs
étrangers temporaires, sans compter les gages financiers qui sont exigés par le
Québec comme preuve de capacité à soutenir sa famille. Dans certains cas, ces
montants, qui s'additionnent aux frais de transport, prennent de nombreuses
années à être épargnés. D'ailleurs, de 2015 à 2018, c'est moins de 1 %, en
fait, c'est 0,8 % des travailleurs étrangers temporaires qui ont obtenu la
résidence permanente. Ça dit tout. La marche est tellement haute qu'elle
explique sans doute le peu de succès des programmes pilotes en immigration
permanente, des préposés aux bénéficiaires et des travailleurs en
agroalimentaire, deux groupes qui sont représentés par nos syndicats et dont on
connaît bien les maigres salaires. Pour nous, le processus doit être rendu plus
rapide et accessible financièrement aux candidats à la résidence permanente.
Au niveau des besoins du marché du travail,
la CSN a de nombreuses et importantes préoccupations, comme vous pourrez le
constater dans nos recommandations sur l'orientation sept du cahier de
consultation. Les permis fermés des travailleurs étrangers temporaires, les
contraignent... en contraignent plusieurs à subir des conditions de travail
qui, je le dirai pour la quatrième fois, comme le disait le rapporteur de
l'ONU, s'apparentent à de l'esclavagisme moderne. Et si ces conditions-là
deviennent insupportables, les travailleurs doivent en faire la preuve, ce qui
est loin d'être facile pour obtenir un permis de travailleur vulnérable et
tenter de se trouver un autre employeur. Il n'y a aucun Québécois qui vivrait
ou n'accepterait de vivre une telle situation.
Pour la CSN, le Programme des travailleurs
étrangers temporaires doit répondre à des besoins temporaires de travail. Les
besoins permanents devraient être comblés par des travailleurs étant résidents
permanents, puisque le déficit démographique du Québec, il va continuer à
croître dans les prochaines années. Nous réitérons donc nos demandes afin de
mettre fin au permis fermé lié à un seul employeur, de faciliter la mise en
place de permis sectoriels ou régionaux, de mesures compensatoires entre
employeurs, ainsi que de permettre l'accès à la résidence permanente après un
an de travail en sol québécois.
De même, le rôle et le financement de la
CNESST doivent être bonifiés pour offrir davantage de formation afin de
permettre aux personnes immigrantes de connaître leurs droits pour faciliter leurs
plaintes et leurs réclamations. Des inspections non annoncées devraient être
plus fréquentes dans les milieux de travail employant des travailleurs
étrangers temporaires et dans les agences de placement, comme on l'a mentionné
au point 7.2 de nos recommandations. Pour ce qui est de la deuxième
orientation du gouvernement, visant l'accroissement des connaissances du
français des personnes migrantes, la création de Francisation Québec est bien
accueillie par la CSN, qui en supporte l'ensemble des objectifs. Par contre,
nous sommes inquiets du peu d'informations disponibles sur les mesures qui
seront mises en place pour leur réalisation, particulièrement en ce qui
concerne la francisation au travail. La barrière de la langue est un enjeu
réel, autant dans nos milieux de travail que pour la rétention des personnes
immigrantes en région. Ça met à risque la santé-sécurité de l'ensemble des
travailleurs dans les entreprises et ça les prive de droits fondamentaux et, de
plus, ça envenime les relations de travail sur les lieux de travail. Quand on
n'est pas capable de se parler, on n'est pas capable de se comprendre. Pour
nous, la mise en place de l'organisme Francisation Québec et l'offre à venir en
entreprise devrait se faire en collaboration avec les milieux de travail,
qu'ils soient publics ou privés, tous... en incluant tous les acteurs, y
compris les syndicats. Le processus d'approbation des études d'impacts sur le
marché du travail et les certificats d'acceptation du Québec devraient être
rendus conditionnels à un engagement de la part des employeurs à assurer la
francisation des travailleurs étrangers temporaires en milieu de travail sans
perte de salaire pendant les heures de travail, s'ils recrutent des
travailleurs à l'étranger et qu'ils ne sont pas francophones.
• (16 h 50) •
Je le disais plus tôt, pour la CSN,
l'immigration devrait être réfléchie de façon globale. À ce titre, nous croyons
que l'ensemble des partenaires du marché du travail doivent pouvoir compter sur
un appui gouvernemental. Les syndicats et d'autres organisations offrent des
activités de formation, de soutien et de conseil psychosociales visant une
meilleure intégration dans les milieux de travail. Le secteur communautaire est
extrêmement sollicité, autant par les entreprises que par les travailleurs
immigrants. Le financement de certains de ces organismes-là est famélique
malgré l'explosion des besoins, et ce, dans toutes les régions du Québec. Les
conditions de travail et d'exercice sont souvent difficiles et les moyens
financiers ont un impact majeur sur la rétention de main-d'œuvre dans ces
organismes-là. Donc, ils doivent être financés de façon adéquate pour répondre
aux immenses besoins de la population afin de favoriser l'intégration dans les
milieux de vie. Leur financement doit être rehaussé, comme je viens de le dire,
et accordé à la mission. C'est important, ça aussi.
Pour ce qui est de l'orientation neuf du
gouvernement, soit la régionalisation de l'immigration, nous croyons aussi que
ce défi doit être pris dans...
Mme Lelièvre (Katia) : ...la
globalité avec l'ensemble des acteurs locaux. L'accès au logement est un enjeu
important. Il faut éviter de faire des développements immobiliers
spécifiquement pour les personnes immigrantes. L'histoire nous démontre que la
ghettoïsation de l'immigration est une erreur. L'exemple de la France et de nos
voisins du Sud nous montre que ça amène des clivages culturels importants et
des problèmes sociaux majeurs. La clé de la réussite de l'intégration des
nouveaux immigrants, c'est la mixité sociale.
Le gouvernement, avec les acteurs
régionaux et municipaux, doit adopter une vision à long terme basée sur
l'évolution démographique et les besoins d'habitation des différentes régions
du Québec. Il faut favoriser l'émergence d'un marché résidentiel non
spéculatif. De même, il faut accroître l'accès aux services de proximité aux
personnes migrantes et leurs familles, tels que l'accès aux soins de santé,
d'éducation, de formation, de francisation, des services de garde éducatifs, le
transport, etc. Et ça aussi, ça doit se faire en concertation avec les acteurs
régionaux.
En conclusion, il est évident que les
besoins démographiques et les besoins de main-d'œuvre ne sont pas près de
diminuer au Québec. Nous devons, comme société, s'attaquer au défi de prendre
soin des personnes immigrantes, c'est-à-dire de les accueillir convenablement,
respectueusement et dignement. Il est évident que le Québec devra en accueillir
plus, mais faisons-le bien, en respectant nos engagements humanitaires et internationaux.
Une grande proportion de la population ne connaît pas les conditions de travail
et les conditions de vie souvent exécrables dans lesquelles sont condamnées ces
personnes migrantes. Elles ont le courage de se déraciner, elles ont la volonté
d'améliorer leur sort et prennent l'initiative de changer leur vie. Ces
personnes méritent de trouver au Québec une terre d'accueil à la hauteur de nos
valeurs, et nos valeurs qui sont d'équité et de justice sociale. On s'est
battus longtemps pour cette justice sociale là. Nous devons reconnaître leur
apport important dans notre économie et essentiel à l'ensemble de la société.
Puis on l'a bien vu, pendant la pandémie, à quel point ils étaient essentiels,
ces travailleurs-là.
L'heure est à l'ouverture de part et
d'autre. Le peuple québécois est riche de ses valeurs, généreux et solidaire,
comme il l'a de nombreuses fois montré en ouvrant ses portes à des populations
qui vivaient des drames dans leurs pays d'origine. Il serait temps que ça
transparaisse de nouveau dans notre façon d'accueillir les immigrants. Merci.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup. Alors je vais maintenant céder la parole à la ministre de
l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration pour 16min 30s pour votre
groupe parlementaire.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci à vous pour prendre part à cet exercice-là, fort
important, un exercice démocratique sur un sujet qui capte beaucoup l'attention
au niveau collectif, comme on le sait.
Alors, bien, d'une part, je voulais, bien,
réagir à certains de vos propos, là, ou vous disiez qu'il était très difficile,
voire inaccessible, là, pour des gens avec des compétences plus manuelles,
plus, comment dire, intermédiaires d'accéder à la résidence permanente. Et,
pour nous, c'était effectivement un enjeu, également. Alors, c'est pour ça
qu'on a présenté, au printemps dernier, la réforme des programmes d'immigration
permanente, réforme dans laquelle, en fait, on crée une passerelle qui
permettra à des gens qui ont des compétences plus manuelles d'accéder à la
résidence permanente, parce qu'on en fera un volet entier, là, du programme de
sélection des travailleurs qualifiés. C'est le programme qui remplacera le
programme régulier des travailleurs qualifiés. Alors, pour vous dire qu'on
était en action sur cette dimension-là, parce qu'effectivement il y a beaucoup
de besoins au Québec pour ce type d'expérience, d'expertise, et je crois que,
du côté des travailleurs étrangers, bien, il y avait beaucoup à offrir. Donc,
en créant cette passerelle-là, on va se trouver à offrir un nouveau canal
d'accès à la résidence permanente pour des travailleurs étrangers temporaires
qui voudraient rester au Québec.
Je voulais apporter une précision aussi
par rapport à un des passages de votre mémoire, là, à la page 13, bas de la
page 13... la page 16... non, page 13. Vous mentionnez que le programme pilote
d'immigration permanente pour l'intelligence artificielle, technologies de
l'information, les effets visuels, permet de sélectionner un nombre indéterminé
de personnes non francophones. Donc, je voulais juste mentionner qu'en fait il
y a une enveloppe, en fait, un nombre prédéfini de personnes non francophones
qui peuvent être captées par ce programme-là. On parle de 150 personnes,
maximum, de non-francophones. Donc, ce n'est pas, ce n'est pas un programme qui
est sans plafond, comme on pourrait dire. Il y a une part du groupe, la moitié
du groupe de 300 qui est francophone et l'autre moitié qui est d'un maximum de
150 personnes, pour le volet en francisation.
Je voulais vous amener sur la
francisation, d'ailleurs. Vous soulignez...
Mme Fréchette : ...Page 10,
là, l'importance de développer l'offre de services d'apprentissage du français
en entreprise. On est également de cet avis-là, bien sûr, mais vous proposez de
le faire en collaboration avec tous les acteurs privés et publics, dont les
syndicats. Alors, je me demandais quel type de rôle, vous, vous souhaiteriez
assumer en matière de francisation en entreprise, jusqu'où irait votre
implication dans cette démarche-là?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :En fait, la façon dont on
agit déjà, c'est de promouvoir, auprès de nos syndicats, la disponibilité de
services qu'il y avait, en tout cas jusqu'à présent, à travers les programmes
de formation de main-d'oeuvre de la CPMT et des partenariats qu'on pouvait
créer avec des organismes qui fournissaient la formation en milieu de travail,
exactement comme les gens de la FTQ vous l'ont expliqué tout à l'heure, dans
les usines, dans les cas qu'ils ont mentionnés. Donc, on pense qu'on peut
continuer à faire cette promotion-là puis à épauler, et l'employeur et le
syndicat, dans les démarches administratives nécessaires, ce qu'on a fait
jusqu'à présent, là, toutes les paperasses à remplir pour aller chercher les
subventions pour la personne formatrice, la personne qui... Puis pour les
salaires aussi.
Mais avant, en amont de ça, ce qu'on
voudrait, c'est que, maintenant qu'il semble que tout ça va passer de la CPMT à
Francisation Québec, on aimerait être consultés. On aimerait être considérés
comme parties prenantes, ce qui était le cas quand on était à la CPMT. Mais là,
on ne sait pas du tout ce que Francisation Québec compte faire en entreprise,
et on ne comprend pas comment ça se fait qu'on est gardés dans le noir, là,
même six mois après l'annonce de la création de Francisation Québec.
Mme Fréchette : Bien, une
précision par rapport à ce volet-là. En fait, la partie francisation en
entreprise n'est pas encore sous l'aile de Francisation Québec, qui est basée
au Mifi. Elle est encore sous le ministère de l'Emploi. Donc, en ce sens-là, le
transfert est à venir. Donc, ça va être à partir du 1er novembre que
Francisation Québec va se charger également du volet Francisation en entreprise.
Donc, c'est là que va s'amorcer une nouvelle étape du redéploiement de
Francisation Québec. Ceci pourrait expliquer cela. Donc, voilà, il y a tout ce
volet-là qui reste à venir.
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Le temps presse pour nous
consulter.
Mme Fréchette : Je vous
amène, dans ce cas-là, à la recommandation 7.1. Vous y avez fait
référence, là, dans votre intervention. Vous demandez, en fait, la fin des
permis de travail fermés. Donc, vous recommandez la mise en place de permis de
travail semi-fermés, soit sectoriels ou régionaux. J'aimerais vous entendre sur
quel avantage et quel inconvénient associez-vous à chacune de ces
alternatives-là, soit régionale ou sectorielle? Et est-ce que vous imaginez
aussi d'autres options qui puissent remplacer un permis de travail fermé?
• (16 heures) •
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
pour nous, en théorie, les permis pourraient être ouverts. On le sait très bien
que, pour les employeurs, ça représente une embûche de taille. Mais nous, on...
pour nous, on... Les travailleurs sont libres de vendre leur force de travail à
qui ils désirent le... la vendre. Évidemment, les permis régionaux ont
l'avantage de maintenir les gens dans une région donnée et de ne pas les
déraciner, les permis sectoriels ont l'avantage de maintenir les compétences,
mais les permis ouverts ont l'avantage de permettre aux gens de choisir
l'emploi qu'ils désirent occuper.
Alors, pour nous, c'est sûr que ce qu'on
tente de faire, c'est de donner le... De plus de liberté possible à ces travailleurs-là.
Il faut savoir que la CSN, en tout cas, on est très interpelés par nos
syndicats, qui vivent beaucoup de difficultés dans les milieux de travail. On
entend des histoires qui sont, ne serait-ce qu'au niveau de la santé et
sécurité... Si les centrales syndicales sont toutes venues devant vous
aujourd'hui, c'est parce que les enjeux sur le terrain, ils sont réels. Nos
membres nous interpellent de façon continuelle là-dessus. On a des enjeux
sociaux importants dans les milieux de travail. Puis, si on laisse tout dans
les mains des employeurs comme c'est le cas actuellement, bien, vous savez, les
syndicats, on s'est élevés dans le dans le temps pour éviter les abus des
employeurs, mais on a encore cette fibre-là, on a la même. Et nos syndicats sur
place, bien, ils nous remontent toute cette information-là. Je pense qu'on doit
être inclus parce que, pour nous, le travailleur est important, pas seulement
le travail qu'il accomplit.
Mme Fréchette : C'est pour ça
aussi qu'on est en action, pour mieux informer les travailleurs, notamment, les
travailleurs étrangers temporaires, avec l'escouade, là, qu'on a développée
avec la CNESST. Donc, à ce stade-ci...
17 h (version non révisée)
Mme Fréchette : ...je vais...
La Présidente (Mme Caron) : Il
vous reste neuf minutes pour votre groupe, alors est-ce qu'une autre députée...
Alors, la députée d'Iberville, la parole est à vous.
Mme Bogemans : Super. Dans le
mémoire, vous semblez appuyer les démarches qu'on a instaurées en intégration
puis en installation régionale des nouveaux arrivants. Vous dites cependant qu'on
peut manquer de résultats. Je voulais que vous alliez plus en approfondir sur
ce sujet-là.
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Bien, en fait, ce qu'on
comprend des partenaires, par exemple, de la TCRI, les organismes qui sont sur
le terrain, c'est que c'est l'enracinement à long terme qui est compliqué,
surtout que la main-d'œuvre qui s'installe dans les régions, c'est la main-d'œuvre
à permis temporaire. Si c'étaient des gens à qui on accordait une résidence
permanente, puis qui pouvaient venir tout de suite avec leur famille, puis que
les enfants rentraient tout de suite à l'école en français, déjà on serait dans
un engrenage pour les garder dans la région. Mais le fait que les gens sont sur
un permis temporaire, qu'ils ne savent pas trop quelles sont leurs possibilités
réelles de rester ici à long terme, que leurs familles sont derrière,
finalement, les gens ont de la difficulté à rester dans les régions, puis c'est
ça qui nous préoccupe.
Puis nous puis nos membres veulent que les
gens restent dans les régions, veulent que les entreprises continuent à opérer.
Ça fait qu'il faut vraiment trouver le moyen d'en créer, puis notamment en
favorisant davantage la résidence permanente des travailleurs qualifiés et de
leurs familles, et le plus rapidement possible, parce que le plus longtemps on
garde les gens dans l'incertitude, bien, le plus difficile, ça va être de les
ancrer dans la région.
Mme Bogemans : Avec la
réforme du PRTQ, qui est maintenant le PSTQ, on a maintenant un volet pour les
travailleurs moins qualifiés, travailleurs manuels. Pensez-vous que c'est une
piste de solution durable au problème?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Bien, c'en est une. Par
contre, on a été quand même surpris de voir que, dans l'introduction des quatre
volets de ce programme-là, le volet qui concerne ces travailleurs-là, c'est le
seul où on exige une expérience préalable d'un an avant de pouvoir se qualifier
à la sélection. Et on se demandait s'il n'y avait pas un peu une confusion, là,
des programmes. Parce que le programme de l'expérience québécoise, c'est un
autre programme, ce n'est pas le programme de sélection des travailleurs
qualifiés. Ça fait qu'on a posé des questions là-dessus.
Mais sinon, l'idée même d'élargir la
sélection aux travailleurs les moins qualifiés, on trouve que c'est un pas en
avant important puis on le reconnaît certainement. Maintenant, il va falloir
voir si les délais, les coûts et les autres exigences ne vont pas être d'autres
obstacles qui font que ça ne donnera pas plus de résultats. Il faut s'attaquer
à tous les obstacles.
Mme Bogemans : Parfait.
Super. C'est quand même une des bonnes avancées au niveau du PSTQ, c'est que le
requérant principal maintenant... bien, c'était déjà comme ça, mais peut faire
la demande pour l'ensemble de sa famille immédiate aussi directement. Ça fait
que c'est quand même une avancée majeure pour les travailleurs étrangers
temporaires qui peuvent... qui pourraient maintenant être permanents puis faire
une seule demande, un seul frais. Tu sais, quand on parle de frais élevés quand
même versus un frais par personne puis des délais multiples, là, ils pourraient
tous passer ensemble, ça faciliterait et ça changerait... et ça va changer la
donne, en fait, selon nous.
Je voulais vous entendre aussi sur quels
sont les moyens que les centrales syndicales peuvent avoir sur l'intégration
des nouveaux arrivants en région?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
nous, on est déjà en train de travailler pour l'inclusion dans nos syndicats
locaux. On a fait une trousse à l'usage de nos syndicats pour expliquer l'ensemble
des droits, puis tout ça. On tente aussi de créer des comités dans les lieux de
travail, de relations interculturelles pour s'assurer qu'on échange sur nos
cultures, que ces gens-là ne se retrouvent pas tout seuls une fois que le corps
de travail est terminé, qu'on peut créer des liens dans les régions. Donc,
nous, on le fait au niveau syndical et on travaille aussi en partenariat avec
le communautaire, souvent, pour tenter de favoriser l'intégration.
Mais, comme vous le disiez, quand les
familles ne sont pas là, c'est plus difficile. On a des expériences où est ce
que, malgré qu'on a fait venir des travailleurs dans certains endroits, je
pense, entre autres, à la série de Rivière-aux-Rats où est-ce qu'il y a eu ces
comités-là, mais les gens sont retournés parce qu'ils étaient tout seuls, loin
de leur famille, et ils n'avaient pas d'attaches sociales. Ça fait que c'est
important de créer ces lieux-là, on pense 8 heures dans... au moins, en
tout cas...
Mme Lelièvre (Katia) : ...un
travailleur étranger temporaire en passe souvent plus que huit dans son milieu
de travail. Donc, ces liens-là, c'est déjà les premières assises de
l'intégration dans le Québec, avec nos valeurs, avec notre langue, avec
l'ensemble de ce qu'on est comme société québécoise.
Mme Bogemans : C'est
superintéressant. Quel genre d'activités vous mettez en place?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :...formation. On fait de
l'encouragement puis du coaching, aussi, à participer aux activités, par
exemple. Une des choses qui est un enjeu important, c'est la santé et sécurité
au travail. C'est donc dire qu'il faut qu'il y ait des délégués, en santé et
sécurité au travail, qui sont des immigrants, des personnes immigrantes et des
temporaires, pour s'assurer que l'information puisse circuler.
Mais tout ça est très sérieusement limité
quand il n'y a pas de français, quand il n'y a pas de langue commune. C'est
vraiment l'obstacle numéro un qu'on... Encore cette semaine, je parlais avec la
présidente d'un syndicat, qui me disait : On en a plein, des travailleurs
étrangers temporaires, mais on n'est pas capables de communiquer avec eux. Elle
a dit : Moi, je ne parle pas ni espagnol ni anglais. À chaque fois, il
faudrait qu'on paie pour un interprète. On ne va pas inviter l'interprète de
l'employeur à l'assemblée générale du syndicat. Et puis c'est un petit syndicat
de travailleurs pauvres, qui a, donc, peu de moyens. Puis on en a 2 500,
syndicats. On ne peut pas payer, au niveau de la centrale, pour de
l'interprétation partout, à tous les jours. C'est vraiment un casse-tête.
Donc, même quand les travailleurs ont les
mêmes droits, on n'arrive pas à les faire respecter, ces droits-là, si on n'a
pas de langue commune. La langue commune est nécessaire pour protéger,
informer, éduquer, représenter. Sans ça, c'est des droits sur papier.
La Présidente (Mme Caron) : ..il
reste deux minutes...
Mme Bogemans : Super. Mais,
en réalité... Je le comprends vraiment. Mais, pour revenir... Parce qu'au
niveau, par exemple, des familles, avec, encore une fois, le PFTQ, si on met en
place des initiatives, par exemple, comme les haltes-garderies, durant la
francisation, pour les personnes, justement, avec des horaires atypiques ou
pour qu'ils puissent y aller quand ils sont disponibles, est-ce que vous
trouvez que c'est une initiative qui est valable?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
en fait, toute initiative qui va permettre un accès aux services, à notre avis,
c'est une démarche qui est valable. Ces gens-là ont beaucoup de difficultés à
obtenir les services dont ils ont besoin, souvent, puis, Marie-Hélène l'a bien
dit, là, entre autres, par la barrière de la langue. Plus vite on va franciser
ces gens-là, plus vite ils vont pouvoir s'intégrer, plus vite ils vont pouvoir
bénéficier des droits qu'ils ont. Ça fait que, pour nous, là, toutes les... que
ce soient une halte-garderie ou d'autres solutions que le gouvernement va
trouver, si ça permet une certaine flexibilité dans l'apprentissage du
français, bien, pour nous, c'est gagnant.
Mme Bogemans : Oui, définitivement.
La même chose au niveau de l'intégration, puis qu'on puisse calibrer, là... On
a rencontré des municipalités hier, puis plusieurs organisations, aussi, qui
font des activités multiculturelles, comme vous dites, puis, à la longue, c'est
non seulement des activités multiculturelles, mais, tout simplement, une fête
familiale, où tout le monde s'intègre. Puis je pense qu'à partir du moment où
on est capables de lever l'étiquette multiculturelle et que ce soit simplement
standard, pour tout le monde, et que tout le monde se sentent bien inclus, il
se sentent interpelés par l'invitation, on a réussi l'inclusion puis
l'intégration dans chacune de nos régions, ça, c'est définitif.
Mais par rapport, par exemple, aux
nouveaux projets de développement qu'on a ici, au Québec, comme la filière
batterie, comme les zones d'innovation...
• (17 h 10) •
La Présidente (Mme Caron) : En
terminant. Il reste 15 secondes.
Mme Bogemans : Ah! bon, bien
je vous laisser là-dessus. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Alors, je vais maintenant céder la parole à l'opposition officielle au député
de Nelligan, pour 12 min 23 s.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Premièrement, merci pour votre mémoire, pour votre présence. Je
vais commencer par la page 23. En fait, votre conclusion ressemble un peu aux
deux derniers groupes. Je veux vous citer. Le gouvernement met, sur la table,
deux scénarios, scénario un, scénario deux. Votre conclusion, que les deux se
ressemblent. Et, un peu plus loin, vous dites la chose suivante : «Cet
état de fait rend presque impossible le vivre-ensemble, l'inclusion,
l'intégration dans de nombreux milieux de travail.» C'est des mots forts.
«Donc, dans un tel contexte, il ne peut être question de choisir si les
admissions devraient s'établir à 50 000 ou à 60 000 personnes par
année quand 130 000 résidentes et résidents temporaires arrivent,
annuellement, au Québec.» Au fait, c'est la conclusion, avant même cette
commission...
D'ailleurs, je ne sais pas si vous avez vu
le projet de loi que j'ai déposé l'automne dernier. Sinon, on va vous
l'envoyer...
M. Derraji : ...est-ce que
vous pensez que cette commission aurait dû, avant de la lancer, de prendre en
considération le vrai portrait réel des travailleurs temporaires étrangers? Je
vais vous dire pourquoi. Vous êtes le seul groupe qui mentionne le vivre
ensemble. Moi, je pense que nous tous, on travaille pour le vivre ensemble,
vous aussi. Je pense que vous aussi, vous travaillez sur l'inclusion, les élus
aussi. L'intégration, vous aussi, vous travaillez sur l'intégration. Nous
aussi, en tant qu'élus, on veut les meilleurs outils pour l'intégration. Mais,
selon vous, le fait de ne pas prendre dans le portrait les travailleurs
temporaires étrangers, tout cela risque d'être impossible.
Mme Lelièvre (Katia) : Oui,
mais, en fait, on crée aussi un goulot d'étranglement, c'est-à-dire qu'il y a
plus de gens qui entrent qu'il y en a qu'on accepte. À la longue, bien, on
accumule des gens qui sont en attente. Donc, pour nous, dire quel doit être le
chiffre sans bien connaître... Puis on ne sait pas non plus... le gouvernement
fédéral ne sait pas non plus au Canada comment il y a de sans-papiers. On n'est
pas capables d'avoir de chiffre. Donc, c'est difficile de se baser sur un
chiffre de consultation quand, pour nous, ce chiffre-là crée vraiment un goulot
d'étranglement avec tous les gens qui sont ici de façon temporaire, pourtant
temporaire des fois pendant deux ans, cinq ans, 10 ans, 20 ans. Alors, on est
temporaire longtemps.
M. Derraji : Je vous
remercie, parce que vous savez quoi? Quand ce débat est arrivé sur la table, il
y a beaucoup de gens qui se sont posé des questions parce que ce n'est pas tout
le monde qui comprend un peu les intrants pour venir au Québec, il y a
plusieurs programmes. Mais maintenant, hier, je ne sais pas si vous l'avez vu,
on a eu un témoignage qui a bouleversé beaucoup de collègues. Il y avait aussi
un reportage incluant une autre personne, je ne me rappelle plus son nom, Carole
ou Claire, le reportage Les essentiels. Maintenant, on a des visages derrière
ces travailleurs temporaires étrangers.
Vous êtes à la tête d'une organisation
avec une mission qui respecte le rôle des travailleurs. Comment vous pouvez
interpréter l'arrivée d'un représentant des Nations unies pour faire un rapport
sur ce qui se passe dans nos milieux de travail, dans le Canada et aussi au
Québec?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
en fait, nous, quand on a rencontré le rapporteur spécial de l'ONU, on était très
contents de pouvoir lui parler parce que ça fait longtemps qu'on décrit la
situation en entreprise, ça fait longtemps qu'on dit : On ne peut pas...
On ne peut pas tolérer, au Québec, de traiter des gens comme ça. On ne peut pas
demander à des gens de venir de l'extérieur nous porter... nous prêter main
forte et de nous aider dans nos milieux de travail, mais les traiter comme des
citoyens de seconde zone. Alors, bien, voilà. Pour nous, c'est évident qu'on
doit tenir en compte ces gens-là.
M. Derraji : Oui. Pensez-vous
que cette commission rate sa cible parce que les deux scénarios qui sont sur la
table ne sont pas du tout réalistes ou ne donnent pas le vrai portrait?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Je pense que cette
commission-là n'est pas pire que les précédentes à ce niveau-là, ça a toujours
eu un focus seulement sur les seuils au niveau de la couverture de presse, les
déclarations publiques, le brouhaha, mais, en réalité, ça ne peut pas... on ne
peut pas planifier l'immigration au Québec en ne s'occupant que de fixer des
seuils, qui, soit dit en passant, ne sont pas des plafonds mais des seuils.
Ça fait que ce n'est pas... Tu sais,
n'essayez pas de nous faire dire qu'ils sont pires que les libéraux étaient
avant. Avant aussi on focussait là-dessus. Mais le problème, c'est qu'il faut
reconnaître que maintenant on est dans un contexte où, plus que jamais, les
résidents temporaires sont maintenant la grande majorité des personnes
immigrantes au Québec. Puis ça, c'est une nouvelle réalité qui est le résultat
d'un paquet de décisions puis d'un paquet d'acteurs, et il faut la reconnaître,
cette réalité-là, puis il faut composer avec la réalité.
M. Derraji : Vous avez
raison, mais je vais juste ramener une nuance, en tout respect. Il n'y avait
jamais, jamais, jamais autant d'immigrants temporaires que maintenant. La
preuve, j'étais là à la dernière consultation... Je pense, autour de la table,
je suis l'un des rares qui a assisté à la dernière consultation. Non, vous,
comme intervenant. Oui, oui... Non, non, moi, je parle des élus, parce que mon
collègue, il était intervenant. Vous étiez là, et je me rappelle, corrige-moi,
mon cher collègue, on parlait plus de la réforme, la mauvaise réforme du PEQ,
on parlait de la réduction des seuils, on parlait de déchiqueter 18 000
dossiers...
M. Derraji : ...il n'y avait
pas beaucoup de travailleurs temporaires étrangers sur la table, parce que le
phénomène commençait, en tout respect, le phénomène commençait. Et le fédéral
vient de changer 20, 30... 20 à 30 % la présence des travailleurs
temporaires étrangers. Donc, oui, mais, en tout respect à ce que vous venez de
dire, mon but, ce n'est pas de revenir en arrière, mon but, c'est regarder le
futur. Cette planification, c'est pour les trois prochaines années. Vous êtes
là aujourd'hui pour lever un drapeau. Je vous pose la question directe :
Vous êtes pour le scénario 1 ou le scénario deux. Vous dites dans votre
mémoire : Écoutez, c'est à l'encontre de l'intégration, de l'inclusion, le
vivre-ensemble. Bien, si quelqu'un n'a pas compris pourquoi on est là, on est
là pour l'intégration, le vivre-ensemble et l'inclusion. Ce qu'on fait, c'est
ça, c'est ce qu'on veut tous autour de la table. Mais le fait de ne pas inclure
le portrait réel de travailleurs temporaires étrangers, on s'éloigne de la
mission même d'une vraie planification.
Vous avez évoqué les projets pilotes. Vous
êtes critiques à l'égard de ces deux projets pilotes. Pourquoi cet échec des
deux projets pilotes selon vous?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
en fait, nous, ce qu'on dit, ce n'est pas que les projets pilotes n'étaient pas
bon, ce qu'on dit, c'est que les toutes les conditions qu'il faut accumuler et
tous les frais qui sont inhérents à cette demande-là ont comme impact de
limiter la capacité des travailleurs à être en mesure de faire une demande puis
d'être acceptés comme résidents permanents. Alors, on a parlé de ces
programmes-là en lien avec, entre autres, les frais qui étaient demandés. Puis
en agroalimentaire puis pour les préposés aux bénéficiaires, c'est deux
domaines où est-ce qu'on représente, quand même, passablement de travailleurs
et qu'on connaît bien leurs conditions de travail. Et on pense que ça peut
avoir un impact, les frais puis la hauteur des frais qui sont demandés aux
travailleurs pour devenir permanents.
M. Derraji : Donc, selon
vous, le fait de demander des frais aux travailleurs pour qu'ils postulent via
le projet pilote est un handicap, il faut les éliminer, ces frais.
Mme Lelièvre (Katia) : Bien, ce
qu'on dit, c'est qu'il y a beaucoup de frais et que ça coûte très cher pour les
travailleurs. Ça leur prend souvent des années à économiser cet argent-là.
M. Derraji : Dans votre
mémoire, vous dites aussi qu'«il faut réduire drastiquement le volume du
programme des travailleurs étrangers temporaires pour qu'ils ne répondent qu'à
des besoins temporaires de main-d'œuvre à court terme, ainsi que faciliter
l'accès à la sélection québécoise en continu de toutes les personnes détenant
un permis temporaire». Bon, je vais essayer de résumer, ça, c'est vos propos.
Si on réduit d'une manière drastique le nombre de travailleurs temporaires
étrangers, l'autre côté, il va y avoir une pénurie, parce que ça existe, la
pénurie, soit le seul choix qu'il existe, c'est augmenter les travailleurs
permanents. Quelle est votre solution?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
en fait, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on devrait analyser quels sont des
besoins temporaires et quels sont des besoins permanents. Il y a plusieurs
entreprises pour lesquelles on a des travailleurs temporaires dans des besoins
permanents. Si on fait l'analyse qu'on va avoir besoin de travailleurs dans ces
entreprises-là pendant de nombreuses années, on devrait ajuster en fonction que
ces gens-là viennent de l'immigration permanente et accepter des résidents ici
en fonction des besoins du marché du travail. C'est vrai que le nombre de
travailleurs étrangers temporaires a augmenté, il a explosé dans les dernières
années, mais la pénurie de main-d'oeuvre et la conjoncture actuelle en est la
cause. Puis les travailleurs en entreprise, ils ne sont pas fâchés de voir
arriver du renfort.
J'étais dans un 50ᵉ anniversaire d'un
syndicat en fin de semaine, Cisco, pour ne pas le nommer, et il me
disait : Nous, on était contents. Notre employeur nous obligerait à faire
2 h de temps supplémentaire par jour pour arriver à combler le travail. On
était obligés, à chaque jour, de faire ça. Et là, tout d'un coup, est arrivé
des travailleurs, puis c'est venu nous permettre d'avoir un rythme de vie
normal. Donc, en milieu de travail, ils ne sont pas vus, ces gens-là, comme des
gens qui viennent voler des jobs. Ils sont vus plutôt...
• (17 h 20) •
M. Derraji : ...j'étais en
tournée régionale, et les gens, au contraire, on m'a dit : Écoute, je
viens d'avoir un soudeur tunisien, ça me permet d'avoir mon week-end
tranquillement, ça fait longtemps, je ne l'ai pas eu. Mais là ma question, elle
est sur : Si on diminue de manière drastique le nombre de travailleurs temporaires
étrangers, ça veut dire, on doit augmenter le nombre de travailleurs
permanents. Et c'est là ma question, les deux seuils que vous avez devant vous,
si on réduit d'une manière drastique les PTET, on va se ramasser avec quel
seuil?
M. Laflamme (Julien) : Oui.
Pour nous, c'est évident que les besoins permanents vont augmenter dans un
avenir prévisible. Les prévisions d'Emploi-Québec sont à l'effet que, dans les
10 prochaines années, il va y avoir 1,6 million d'emplois à pourvoir, que ce
soit en raison des départs à la retraite ou en raison de la croissance
économique. Donc, on est capable de savoir qu'il y a des besoins permanents ou,
en tout cas, d'une durée assez longue, qui sont devant nous. Et on doit tenir
en compte, parce que si on n'en tient pas compte, là, on parlait...
M. Laflamme (Julien) : ...de
130 000 détenteurs de permis de travail temporaire présentement, mais
c'est des chiffres qui sont en augmentation rapide et cet écart-là va continuer
à se creuser pas juste dans les trois prochaines années, là, mais dans un
horizon de moyen, long terme. Alors, il y a des besoins qui sont de nature
permanente, et on pense...
M. Derraji : Non, non, c'est
un bon point. C'est un bon point. Donc, les besoins sont de nature permanente
et la réponse du gouvernement, c'est du temporaire, est-ce que j'ai bien
résumé? O.K. Mais selon vous, pourquoi, face à une demande permanente, le
gouvernement opte pour du temporaire, c'est quoi l'intérêt? Si on sait que
c'est du permanent, et la solution du gouvernement, c'est tout faire pour
alléger, avoir du temporaire, pourquoi?
La Présidente (Mme Caron) : Il
reste 30 secondes.
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Bien, en partie, c'est
par manque de collaboration entre nos paliers de gouvernement. Je pense que
là-dessus, ce n'est pas seulement un enjeu du Québec, c'est un enjeu fédéral
aussi puis c'est aussi un enjeu d'employeurs; des employeurs qui ne veulent
plus se donner la peine de chercher des candidatures à travers le Québec dans
les marchés d'emplois qui sont moins mobilisés et qui veulent de la
main-d'oeuvre toute de suite, tout de suite, tout de suite, là, sans afficher
les postes, sans rien, là, sans faire la preuve de leur recherche.
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Le temps est écoulé. Alors, merci beaucoup. Je vais maintenant céder la parole
au député de Saint-Henri—Sainte-Anne. Vous avez 4 min 8 s.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour vos interventions. Je voulais d'abord réagir ou rebondir. La
réforme du PSTQ, là, elle ne change rien pour le fait de pouvoir inclure ou pas
les familles. Les familles ont toujours pu être incluses dans une demande
d'immigration économique, et ce n'est pas ça qui va changer la donne. La
question, c'est plutôt comment ça se fait que les familles ne sont pas déjà
ici? C'est ça, la vraie question. Et les familles devraient déjà être ici avec
leur père, leur mère, là. C'est ça, l'enjeu.
Et, en termes de question de l'inclusion
puis de favoriser l'inclusion, on parlait de halte garderie, moi, je resouligne
que c'est ce gouvernement qui a fait appel du jugement de la Cour supérieure
qui accordait l'accès aux garderies subventionnées aux mères demandeurs d'asile
et qui va en appel de ça pour contester ce jugement-là. Si ça, ce n'est pas une
mesure anti-inclusion, je me demande qu'est-ce que c'est.
Les frais en double, vous en parlez, et je
veux qu'on en parle. On n'en parle pas assez. Comment ça se fait qu'on paie...
IRCC, une personne paie 1 365 $ pour une personne et qu'aussi le MIFI
demande 869 $, donc près de quoi deux mille cent quelques pour une
personne, alors que tous les immigrants ou tous les futurs immigrants qui se
qualifient pour les autres provinces vont payer juste le fédéral, le frais de
1 365 $? Comment ça se fait que le Québec est désavantagé à ce
point-là et que nos candidats paient en double?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Ça revient à ce qu'on
disait tout à l'heure, plus de collaboration est nécessaire clairement entre
nos deux paliers de gouvernement. On devrait avoir une exemption des frais
fédéraux. Si on fait la sélection au Québec, que toutes les démarches
administratives sont faites au Québec, bien, c'est normal qu'on paie les frais
au gouvernement du Québec plutôt qu'au gouvernement fédéral puis on devrait
donc être exempté de payer aux deux paliers. Ça, ça nous apparaît évident.
M. Cliche-Rivard : Ça,
corrigez-moi si je me trompe, c'est la même chose pour les travailleurs, le
permis de travail, on paie le CAQ, on paie le permis de travail, on paie les
frais de conformité avec l'employeur, c'est la même chose dans tous nos
domaines d'immigration, on paie en double, alors que c'est le Québec qui fait
tout le travail de sélection. L'IRCC ramasse mille trois cents quelques pour
faire finalement une évaluation de base, une évaluation de sécurité médicale,
mais aucune évaluation économique de qualifications, c'est quand même
troublant.
Vous avez parlé des quatre volets de la
réforme du PSTQ et vous avez parlé que ça générait ou qu'il y avait de
l'inconnu, donc qu'on se posait beaucoup de questions. Moi, j'en ai aussi des
questions. Est-ce que vous, vous savez combien de personnes vont être sélectionnées
dans chacun de ces volets-là quand le programme va être en vigueur?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Absolument pas.
M. Cliche-Rivard : Est-ce que
vous, vous savez quelle part chaque catégorie va prendre? Catégorie un,
25 %, catégorie... Est-ce que vous savez ça?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Non.
M. Cliche-Rivard : Non? Et
est-ce que vous savez quand les gens vont être choisis, là, une fois par mois,
deux fois par mois, une fois par année?
Mme Bonin
(Marie-Hélène) :Non, c'est assez... ce
n'est pas très clair comment ça fonctionne, en fait, pour le commun des
mortels? Disons que, quand des gens dans nos syndicats nous demandent comment
le système fonctionne, on passe beaucoup, beaucoup d'énergie à essayer
d'expliquer des choses sur lesquelles on n'a pas toute l'information puis on
n'a pas toutes les données. Qu'on avait avant plus d'informations, je pense,
sur le site du MIFI qu'on en a maintenant, que ça a tout changé de bord, là.
M. Cliche-Rivard : Ce n'est
pas ça qui est rassurant pour nos travailleurs, on s'entend. Ce n'est pas cette
réforme-là qui nous donne un coup de souffle en disant : Wow, maintenant
je sais comment je vais me qualifier...
M. Cliche-Rivard : ...je
trouvais aussi que c'est gênant, puis je voudrais vous entendre là-dessus,
c'est gênant que l'ONU vienne au Canada faire notre job à notre place. Vous ne
trouvez pas? La commission, on aurait dû l'avoir avec les élus du Québec, on
devrait l'avoir. De savoir que le rapporteur spécial des Nations unies vienne
vous entendre, vous, avant que nous, on vous entendre sur les conditions de
travail des travailleurs...
La Présidente (Mme Caron) : En
conclusion... secondes.
M. Cliche-Rivard : ...j'ai un
petit pépin avec ça.
Mme Lelièvre (Katia) : Si je
peux me permettre, là, en conclusion, bien, moi aussi, je pense que c'est un
peu déplorable qu'on ait crié dans le désert comme ça pendant de nombreuses
années. Heureusement que, maintenant, on a l'impression que les oreilles se
tendent, autant au niveau de la population que des partis politiques, des élus,
puis jusqu'à l'ONU. Espérons que la situation va changer pour ces personnes
vulnérables là, parce que c'est difficilement tolérable de penser qu'au Québec
on maintient des gens dans une telle précarité puis vulnérabilité.
M. Cliche-Rivard : Merci.
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Alors, le temps est écoulé. Je vous remercie d'avoir contribué à nos travaux.
Et on va suspendre la séance pour quelques
minutes, le temps de faire place au prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 17 h 27)
17 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 17 h 32)
La Présidente (Mme Caron) : Alors,
à l'ordre! Les travaux de la Commission des relations avec les citoyens vont
reprendre. Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Centrale des
syndicats démocratiques. Alors, je vous rappelle que vous avez 10 minutes
en tout pour faire votre présentation et vous présenter, et ensuite on
poursuivra aux échanges... on procédera aux échanges plutôt. Alors, la parole
est à vous.
M. Vachon (Luc) :Bon, bonjour. Alors, je suis Luc Vachon. Je suis le
président de la Centrale des syndicats démocratiques et je suis accompagné de
mon collègue Samuel-Élie Lesage, qui est conseiller syndical à la recherche à
la CSD. Alors, je vous remercie. Merci, Mme la ministre. Merci, Mme la
Présidente, mesdames, Messieurs les députés. Alors, merci de nous accueillir. C'est
fort apprécié de nous accueillir, nous permettre de nous exprimer aujourd'hui.
Alors, d'emblée, nous désirons souligner l'importance
de cette consultation et tout spécialement dans le présent contexte politique,
économique et social, où malheureusement, le sujet de l'immigration polarise et
clive plutôt qu'il guide la discussion démocratique et saine. Nous souhaitons
que les présentes consultations soient un pas vers une appréciation plus
réaliste de l'immigration au Québec. En résumé, le MIFI propose deux scénarios,
un qui maintiendrait essentiellement le statu quo aux seuils totaux d'immigration
et un second qui proposerait une hausse marquée de ces derniers pour atteindre
60 000 personnes en 2027. De plus, le MIFI accorde une place majeure
à la régionalisation de l'immigration et à la francisation.
Mentionnons finalement qu'en juin dernier
le MIFI a procédé par voie réglementaire à des modifications substantielles au
programme d'immigration. Soulignons en premier lieu les bons coups des propositions
du MIFI. Sans souscrire formellement l'entièreté des scénarios proposés, nous
témoignons notre appui à la volonté du MIFI d'augmenter les seuils d'immigration
dans les années à venir. Ce changement de cap, parce qu'il faut le dire, ça en
est un, contraste positivement avec les dernières années. De plus, soulignons
que les changements proposés au programme d'immigration permanente en
simplifient le processus, tandis que les propositions d'accepter les étudiants
et les étudiants internationaux en mode continue, est franchement excellent.
Les orientations du MIFI concernant la
régionalisation et la francisation sont aussi encourageantes. Nous
reconnaissons l'évolution qu'il y a présentement... au cours... qui a cours
présentement au sein du MIFI. Nous ne pouvons qu'espérer que cette ouverture au
dialogue se maintienne dans l'avenir. Mme la ministre, c'est tout à votre
honneur, à vous et votre équipe. C'est donc en mode critique, mais constructif
que nous désirons commenter les propositions du MIFI et nous avons cependant à
cet effet plusieurs soucis concernant les orientations générales qui guident
les propositions. Nous tenons malgré cela à souligner les aspects positifs et
nous répondons dès maintenant présents aux prochaines occasions que nous aurons
à travailler ensemble.
En ce qui concerne l'immigration
économique. En une formule, nous regrettons que la proposition du MIFI semble
identifier l'immigration économique sous une seule forme et faire de cette
dernière le principal axe de ses politiques migratoires québécoises. À cet
égard, nous ne pouvons que déplorer que, peu importe le scénario proposé par le
MIFI, les parts des personnes immigrantes admises pour les volets du
regroupement familial et d'immigration humanitaire baissent par rapport à l'immigration
économique. En se fiant sur les données du MIFI et en nous appuyant sur les
scénarios voyant à la hausse les seuils, la part de l'immigration économique en
2022 était de 66,3 %. Elle atteindrait 69.9 % en 2027. Cette
variation semble faible en apparence, mais elle se traduit par une baisse
importante tant dans les catégories du regroupement familial que de l'immigration
humanitaire. A contrario, des tendances migratoires des dernières années qui
voient l'immigration augmenter, tous volets confondus, nous jugeons qu'il est
contre-productif de refroidir de la sorte les projets de personnes immigrantes,
peu importe leur catégorie. Une personne voudrait-elle immigrer au Québec si on
freine sa capacité à faire immigrer sa famille?
Quant au volet des réfugiés, des
limitations...
M. Vachon (Luc) :...suggérées contreviennent aux engagements internationaux
du Québec. Bref, augmenter le nombre de personnes immigrantes répondant aux
besoins économiques du Québec, certes, mais nous ne pouvons accepter de le faire
au détriment des autres volets. Et faut-il rappeler que ces personnes seront
aussi des travailleuses et travailleurs et des personnes qui participeront à
l'économie et s'impliqueront dans leur communauté?
Nous déplorons le silence du MIFI dans ses
propositions quant au programme des travailleurs étrangers temporaires ainsi
que l'équivalent dans certains domaines spécifiques. Certes, le MIFI prévoit
que les seuils d'immigration permanente augmenteraient sensiblement, ce qui
inclut, ipso facto, l'accès à la résidence permanente par l'entremise du
programme de l'expérience québécoise, mais on ne peut pas ignorer que les
recours aux personnes immigrantes temporaires a explosé dans les dernières
années. De 2015 à 2022, au Québec, le nombre de permis temporaires délivrés
dans le cadre du PTET a augmenté de 234 %. L'enjeu ici n'est pas de
décrier en tant que tel l'usage du PTET, mais de dénoncer que le recours élevé
au PTET contribue à créer une immigration à deux vitesses entre les bons
immigrants, ceux qui possèdent les qualifications recherchées par les
employeurs et les autres qu'on relègue aux emplois moins qualifiés, moins
rémunérés et plus exposés aux abus.
L'actualité récente a suffisamment fourni
de malheureux cas d'abus pour convaincre que le PTET place des personnes
immigrantes dans une grande situation de vulnérabilité. Nous trouvons
regrettable que l'immigration permanente n'augmente qu'au compte-gouttes,
tandis que le recours à l'immigration temporaire augmente drastiquement. Il y a
là un déséquilibre qui ne peut pas être corrigé si on n'aborde pas les deux
ensemble. C'est d'autant plus vrai car nous savons fort bien que plusieurs
travailleuses et travailleurs immigrants temporaires sont ici non pas pour des
besoins temporaires, mais pour des besoins permanents de main-d'œuvre qui ne
peuvent être comblés par la voie de la permanence.
En ce qui concerne les qualifications, il
en est de même. Si les entreprises recrutent des travailleurs étrangers
temporaires, c'est assurément que, d'une part, les qualifications correspondent
aux besoins économiques qu'elles ont. En réalité, nous savons tous que,
souvent, les qualifications de ces personnes sont souvent bien supérieures à ce
qui est requis pour l'emploi.
Pour nous, le Québec doit initier un changement
de cap en favorisant l'immigration permanente plutôt que temporaire. Cela se
fait en premier lieu, en intervenant directement là où le Programme de
travailleurs étrangers temporaires est injuste, en remplaçant le permis de
travail fermé par un permis de travail ouvert. Le permis de travail fermé est
injuste, car il rend la personne immigrante temporaire particulièrement
vulnérable en la privant de changer d'emploi. Que ce soit en changeant soi-même
les règles ou en intervenant auprès d'Ottawa, le gouvernement du Québec doit
lancer un signal fort, démontrant que les jours du permis de travail fermé
tirent à leur fin. Mentionnons d'ailleurs que le rapporteur spécial de l'ONU a
ouvertement dénoncé la semaine dernière que le permis de travail fermé, bon, rend
les personnes immigrantes temporaires vulnérables. Ça a été énoncé à quelques
reprises, mais nous le savions déjà, même avant. Des réflexions ont déjà eu
lieu quant à la manière d'opérer un tel changement. Retenons ici que ce
changement est autant possible que nécessaire.
• (17 h 40) •
En second lieu, le MIFI doit augmenter
l'accessibilité à la résidence permanente pour les personnes immigrantes
temporaires présentes sur le territoire du Québec. Les difficultés d'accès
consistent en une autre facette de ce système à deux vitesses, combiné avec les
modifications apportées au PEQ, au règlement sur l'immigration en juin dernier.
Les propositions du MIFI limiteront arbitrairement la capacité des personnes
immigrantes temporaires d'accéder à la résidence permanente. Certes, nous
reconnaissons que le nouveau système inclura inclura un plus grand nombre de
niveaux de compétences, techniquement en passant, dans le cadre du PEQ, des
niveaux zéro, a, b aux catégories zéro, un, deux, trois, mais il relègue les autres
dans un trou noir condamné à espérer qu'elles seront sélectionnées par le MIFI
dans le cadre du volet Compétences manuelles et intermédiaire.
Nous défendons que toutes les personnes
immigrantes temporaires puissent pleinement avoir accès au PEQ, peu importe son
niveau de qualification, comme c'était d'ailleurs le cas avant 2018. Mieux
encore, la proposition du MIFI en mode continu pour les étudiants
internationaux est excellente et devrait être étendue à l'ensemble des
personnes salariées immigrantes temporaires qui sont déjà présentes au Québec.
En d'autres mots, les seuils d'immigration doivent refléter la réelle capacité
d'accueil du Québec en prenant en compte les personnes déjà présentes au Québec
et qui pourraient désirer accéder à la permanence. Il ne faudrait pas que les
plafonds migratoires, ce qui est vrai... ce qui est plus vrai que des seuils,
en fait, ou leur niveau de qualification viennent empêcher de s'installer au
Québec de manière permanente, alors que ces personnes sont déjà ici, au Québec.
Ils ont acquis une expérience professionnelle et sont normalement déjà...
M. Vachon (Luc) :...engagé dans une démarche de francisation. Nous jugeons
en plus que le fait que le Québec ait déjà investi dans ces personnes, que...
les efforts déployés pour les inclure seront moindres et débutent déjà sur une
note positive.
En ce qui concerne la francisation, comme
nous l'avons expliqué plus tôt, nous reconnaissons la nouvelle vigueur des
orientations du MIFI concernant l'encadrement des personnes immigrantes, la
régionalisation, l'inclusion de ces dernières, notamment par la reconnaissance
de leurs compétences et acquis, et, au sujet de la francisation, d'ailleurs, de
bons pas ont été menés, mais davantage doit être fait. Un goût amer nous est resté
quand nous avons appris, en novembre dernier, qu'une fraction seulement de 697
millions de dollars versés par le fédéral dans le cadre de l'Accord Canada
a été dépensée. Une intensification des efforts est donc de mise, et même
possible.
À cet égard, nous soulignons les
orientations du MIFI... auraient pour conséquence de freiner la part des
personnes admises sur la base des critères linguistiques. Et, si je voulais
conclure de manière très importante, le dernier élément serait, à ce
moment-ci... le dernier élément, la question des 55 ans et plus, qui devrait,
non plus, ne pas être considérée là-dedans. Il s'agit, selon nous, d'une
limitation qui ne trouve pas son écho et sa place. Merci.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup. Alors, je vais maintenant céder la parole à la ministre de
l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration. Votre groupe a 16min 30
s.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci, M. Vachon. Merci à la CSD de prendre part à
l'exercice, on a apprécié lire vos propositions. Merci pour le travail qui a
été réalisé pour prendre part à cette conversation fort importante.
Avant de plonger dans des questions, je
voudrais juste faire une petite précision, parce que vous disiez que vous
souhaitiez prioriser des gens, là, qui sont déjà établis sur le territoire
québécois, lorsque viendra le temps de faire... d'octroyer la résidence
permanente. Bien, c'est une orientation déjà que l'on a pour la réforme, là,
des programmes d'immigration. On veut faire en sorte de prioriser, autant que
faire se peut, des gens qui sont déjà établis au Québec lorsque viendra le
temps d'octroyer la résidence permanente, en tout cas, d'y contribuer. Donc, ça
fait en sorte... Ça passe notamment par le fait que des personnes qui sont
travailleurs étrangers temporaires pourraient se voir octroyer, en fait, une
sorte de priorisation pour la conversion vers la résidence permanente. Parce
que, pour nous, c'est des gens déjà utilisant la capacité d'accueil qui est à
prévoir pour des personnes immigrantes, donc qui ont déjà un logement, qui sont
déjà en processus d'intégration, qui connaîtront le français, qui ont déjà
traversé un hiver ou deux. Alors, pour nous, ça, c'est le gage d'une bonne
rétention, d'un parcours d'immigration réussi. Alors, c'est pour ça qu'on va
vouloir prioriser ces personnes. Donc, je voulais vous en faire part.
C'est pour ça aussi qu'on a développé la
passerelle, donc le volet deux dans le programme de sélection des travailleurs
qualifiés, parce qu'on voulait prioriser aussi ce type de profil, mais qui a
des compétences manuelles ou intermédiaires, donc, pour l'accès à la résidence
permanente. Donc, simplement une précision pour vous dire qu'on est en action
sur ce volet là.
Bien sûr, on n'estime pas que ça va
pouvoir, comment dire, répondre à 100 % de nos besoins, les gens qui sont
déjà sur le territoire, on pense qu'il va falloir quand même en avoir une part
importante, là, de gens qui viendront de l'étranger, mais on les accompagnera
le plus tôt possible dans le processus.
Je voulais également apporter une petite
précision sur un passage de votre mémoire, à la page 18, là, où vous mentionnez
que vous ne souhaitez pas que les admissions en continu du PEQ, dans le
scénario un, soient comptabilisées dans les cibles d'admission prévues pour les
travailleurs qualifiés. Or, effectivement, ce ne sera pas le cas. Donc, les
diplômés du PEQ... PEQ diplômés, en fait, ne seront pas comptabilisés dans ce
scénario-là, si c'est celui qui est adopté, ne seront pas comptabilisés dans le
seuil. Donc, on est sur la voie que vous proposez, bref.
Si je vous amène sur les permis de
travail, bon, vous recommandez, donc, à la page 20, là, de travailler avec le
fédéral pour abolir les permis de travail fermés. Comment est-ce que vous vous
voyez les impacts d'une transformation du permis de travail, tant pour les
employeurs, là, que pour les employés? Qu'est-ce que, pour vous, ça va changer,
là, en termes de modes de fonctionnement, et quels types de modes de
fonctionnement vous préféreriez? Est-ce que ce seraient des permis de travail
sectoriels ou des permis de travail régionaux? J'entends, là, des promoteurs
des deux écoles de pensée, là, je voulais savoir, est-ce que vous avez fait
votre nid sur une des deux approches?
M. Vachon (Luc) :En toute franchise, j'ai beaucoup de difficulté à voir
comment des approches qui mettent des conditions...
M. Vachon (Luc) :...Même si elles semblent allégées, vont prendre effet
réel. Parce que la raison pour laquelle le permis fermé est problématique,
c'est l'état de vulnérabilité dans laquelle la personne est. On peut penser
qu'on va faire des permis ouverts, sectoriels ou régionaux, il reste comment la
personne immigrante qui arrive ici avec, souvent, bon, des fois, une connaissance
plus faible du français, comment elle va pouvoir exercer ses droits réels. Bon.
Puis il y a plusieurs scénarios. Puis on peut dire : Ah! si l'autre
employeur va compenser la part de l'investissement, mais encore là, ça veut
dire que la personne doit se mettre en recherche d'emploi une fois rendue ici.
Donc, une personne qui est déjà dans une zone de vulnérabilité, comment elle va
en sortir? C'est... Il y a toujours l'apparence le droit puis l'exercice de
droit réel qui devient problématique.
La solution parfaite, c'est clair que
c'est le permis ouvert, c'est le permis ouvert. Après il y a le jeu des
conditions de travail qui va rentrer en ligne de compte. Après, il y a le jeu
des règles de l'emploi puis du marché de l'emploi qui vont jouer.
Bon. Je sais que c'est... on va nous
dire : oui, mais là, les employeurs ont mis beaucoup d'argent. Bien, c'est
parce qu'on prend le problème, à mon avis, par le mauvais bout. On prend le
problème par... comme si la solution du temporaire, c'était ça, la réponse. La
vraie réponse, elle est par la permanence. Parce que, puis d'autres l'ont
énoncé avant nous, si ça a augmenté comme ça, les temporaires, puis dans les
milieux de travail où on se retrouve à du 40 %, 50 % de main-d'œuvre
immigrante, et ils ne sont pas là pour combler des besoins temporaires... Donc,
la correction, ce n'est pas de savoir à la fin comment on va compenser. La
question c'est comment on va pouvoir combler de manière permanente. Et
automatiquement, plus on va combler correctement de manière permanente, moins
on aura d'enjeux au niveau du temporaire et moins on décriera la question du
permis ouvert, qui sera un scandale puis qui va coûter bien cher, parce qu'on
ne l'utilisera plus, ça, ou beaucoup moins. Puis, quand on va l'utiliser, on va
l'utiliser pour des besoins temporaires. Puis après, je répète, les règles du
marché de l'emploi joueront, les employeurs feront ce qu'ils doivent faire pour
garder leur main-d'œuvre.
Mme Fréchette : Alors, bien,
merci. Vous dire qu'on est déjà, donc, en discussion avec le fédéral, là, sur
cette question-là. Bien sûr, c'était avec mon homologue antérieur que ces
discussions-là ont eu lieu, donc on va relancer la discussion avec le nouveau
ministre de l'Immigration au fédéral en espérant pouvoir avancer sur des
alternatives potentielles.
Vous dire également qu'au sujet de
l'accompagnement, là, des travailleurs étrangers temporaires dans la
connaissance de leurs droits, notamment, là, tous les travailleurs étrangers
temporaires légalement admis sur le territoire, pour une période consécutive
d'un an, ont droit de s'inscrire à Accompagnement Québec. Et Accompagnement
Québec, là, ça permet notamment de connaître les droits qui... Pour lesquels
ils sont couverts, et favoriser aussi, là, une meilleure intégration. Donc, ça,
c'est une des mesures qui est en place sous notre gouvernement, là, pour faire
en sorte d'accompagner les temporaires et de faciliter la compréhension de
leurs droits et d'assurer un meilleur respect de ces droits-là.
• (17 h 50) •
Je vous amène maintenant sur la
francisation. Vous soulignez, là, donc, bien sûr, l'importance, là, de l'accès
aux services d'apprentissage du français. Nous en sommes, bien entendu. On fait
beaucoup en matière de francisation, notamment, pour les travailleurs étrangers
temporaires. C'est nous qui avons octroyé ce droit à la francisation pour les
travailleurs temporaires, ce qui n'était pas permis sous les libéraux. Donc,
pour nous, c'était bien important d'accompagner les gens, et partout au Québec
aussi, de le faire à travers un réseau de bureaux et d'équipes qui sont
déployés partout sur le territoire du Québec. Parce qu'on sait bien que, des
bureaux, au-delà des bureaux comme tels, ce sont surtout des équipes qui sont
sur le terrain à pied d'œuvre, qui travaillent avec les travailleurs étrangers
temporaires. Et c'est ce qu'on a déployé comme réseau.
Et non seulement on a déployé ce
réseau-là, mais... Et le service aussi Accompagnement Québec, mais on a aussi
signé des ententes avec plus de 200 organisations partout au Québec pour
faire en sorte de bien accompagner les travailleurs étrangers temporaires dans
leur processus d'arrivée au Québec, d'intégration au Québec et de connexion
aussi à la société québécoise.
Donc, ça, c'est toutes des mesures que
l'on a déployées ces dernières années pour faire en sorte d'accompagner
adéquatement ces personnes qui répondent à des besoins du marché du travail.
Donc, de quelle manière est-ce que vous
voyez qu'on puisse améliorer la formation en francisation sur les lieux du
travail? Quelle est votre perception de ce qui pourrait être bonifié? Parce que
c'est un des segments de Francisation Québec qui sera transféré au MIFI, si on
veut, qui, pour l'instant...
Mme Fréchette : ...le
ministère de l'Emploi. Donc, est-ce qu'il y a des mesures que vous verriez
qu'on devrait mettre de l'avant?
M. Vachon (Luc) :Bien, d'abord, la francisation sur les lieux du travail,
c'est excellent. Je suis sceptique à l'idée que ce soit possible dans tous les
milieux. Cela dit, une entreprise de 100, 150, 200 employés qui a un noyau
suffisant de main-d'oeuvre immigrante et qui a... puis qui a besoin de
francisation, ça va, j'y crois. Une entreprise qui a 30 employés puis qui
a trois employés immigrants, qui va faire la francisation en milieu de travail
avec les ressources, puis tout ça, j'ai de la misère à comprendre comment on va
coordonner ça, parce que souvent, ce qu'on entend et ce qui est réel, ceci dit,
c'est le manque de ressources, que ce soit en ressources humaines, en... tout
ça, au niveau des PME.
Donc, je pense qu'il y a un rôle important
au niveau de coordination de tout ça, pour faire en sorte que, même dans les
plus petites entreprises, il y ait une possibilité de réseautage de noyautage,
tout ça. Et là-dessus, il y a... bon, il y a déjà de quoi, là, on a tous les
réseaux de services aux entreprises au Québec, tout ça, qui peuvent contribuer
à ça. La structure existe, elle existe déjà. Je pense qu'il n'y a pas d'enjeu
de réalisation là-dessus. Mais après, bien entendu, puis ça, je ne sais pas si
ça répond à votre question, mais bien entendu, il y a un encadrement au niveau
du milieu de travail qui doit être fait. Il y a l'accompagnement, parce que la
promotion de l'apprentissage de la langue doit provenir aussi du milieu de
travail. Parce que si ce n'est pas important, en milieu de travail, ça va être
dur pour la personne de considérer que c'est une réelle importance. Le temps
dégagé pour permettre d'apprendre, ça fait partie de l'équation parce que les
scénarios qu'on a entendus, c'est des gens qui sont dans des conditions un
petit peu horribles, qui doivent travailler de longues heures.
Puis, si ce n'est pas une deuxième job
par-dessus puis qu'après on lui dit : Il faut que vous alliez vous
franciser. Vous travaillez de nuit, vous allez faire de la francisation un bout
l'avant-midi, vous allez vous recoucher l'après-midi, vous allez recommencer.
Ça ne peut pas donner les résultats qu'on s'attend que ça va donner, ça, alors.
Et donc le temps de travail, des plages horaires disponibles, un accompagnement
qui est fait, une validation aussi de la qualité de la formation, parce que ça,
c'est hyper important, si on veut qu'on ait des résultats à l'autre bout, il
faut s'assurer qu'on ait une certaine cohésion, une cohérence dans ce qu'on
donne comme francisation.
Mme Fréchette : Bien, merci.
Mme la Présidente, il nous reste combien de temps?
La Présidente (Mme Caron) : Cinq
minutes 25. Mme la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Oui. Merci
beaucoup. En fait, moi, je voulais, en lien avec l'ancien programme PRTQ, le
nouveau PSTQ, maintenant, il y a une passerelle pour les compétences
intermédiaires et manuelles. Puis je voulais voir si les critères de sélection
du programme vous semblent correspondre mieux aux besoins de vos membres.
M. Vachon (Luc) :Pas tant.
Mme Bogemans : Pour quelles
raisons, précisément?
M. Vachon (Luc) :Parce qu'en fait, nous, ce qu'on propose, puis c'est un
petit peu... Mme la ministre a compris quelque chose de la page 18, mais
qui n'est pas exactement ça. Nous, ce qu'on propose, c'est que, quand ils sont
ici, les temporaires, qu'ils soient aussi, comme c'est pour le PEQ étudiant,
qu'ils soient dans un PEQ aussi pour eux et qu'ils ne soient pas considérés dans
les... je veux dire, toujours entre les seuils puis le plafond, parce qu'à mon
avis il y a une espèce de paradoxe, mais qu'ils ne soient pas considérés
là-dedans puis parce qu'ils ont déjà... ils sont déjà ici, ils sont... comme on
dit, ils sont déjà dans des besoins permanents, et ils sont déjà inscrits en
parcours de francisation. Donc, la raison... le besoin pour lequel ils sont là,
il est démontré, il est démontré. Donc, à partir du moment où ils franchissent
les critères de francisation, tout ça, puis ils ont l'expérience de travail,
ils pourraient rentrer continuellement, venir s'inscrire en continu en dehors
du nombre qui est déjà... qui est déterminé dans les ratios, là, ou dans les
seuils.
Mme Bogemans : Du ratio
économique, plus précisément.
M. Vachon (Luc) :Voilà.
Mme Bogemans : Parfait. Puis
mon autre question, c'était considérant... vous avez dit que le PEQ, c'était
une bonne nouvelle au départ, là, en débutant. Pouvez-vous nous expliquer pour
quelles raisons ça vous rejoint?
M. Vachon (Luc) :Bien, le PEQ étudiant, normalement, ce qu'on saluait, c'est
qu'en fait, quand on avait des discussions là-dessus, on se disait : Si
quelqu'un est arrivé ici, a fait sa formation, que ce soit au cégep ou à
l'université, en français, est diplômé en français, si la personne a été
capable de réussir ça, à notre avis, ça doit être parce que...
M. Vachon (Luc) :...il y a une maîtrise, mais je pense que ça répondait par
soi-même, là. Puis on se disait, bien, de ne pas les considérer dans le nombre,
ça nous semblait... Parce que le nom, il est toujours là, omniprésent en termes
de débat sur la capacité d'intégration ou la capacité d'accueillir. Mais quand
quelqu'un a fait ce parcours-là, on ne devrait pas vraiment avoir de grands
questionnements sur la capacité qu'on a de l'intégrer au Québec. Ça semble
démontré.
Mme Bogemans : O.K. Parfait.
Puis, au niveau des actions que vous posez à la Centrale syndicale pour le
multiculturalisme et la régionalisation. Pouvez-vous me donner des exemples?
M. Vachon (Luc) :Oui. Bien, la partie régionalisation, ça, comme je disais
un peu plus tôt, quand le milieu de travail accompagne... Parce que la
régionalisation, puis ça, c'est pour ça... ce n'est pas moi qui l'invente, je
l'ai entendu déjà de quelqu'un qui était une dame immigrante qui donnait de la
formation, puis qui expliquait un peu. La réussite de l'intégration en région,
ça passe d'abord par l'intégration sociale. Et là aussi, on se dit : Bon,
bien, O.K., l'intégration sociale, ça va. Le milieu de travail a un rôle dans
l'intégration sociale. Il doit s'impliquer. Il doit s'assurer que l'ensemble du
milieu social aussi contribue à l'intégration de la personne qu'ils
accueillent. Donc, c'est en ce sens là qu'il y a une sensibilisation qui est
fait auprès de nos gens de dire : Bien quand ils viennent chez vous, il y
a tout cet encadrement-là de s'assurer que les gens sont accueillis, intégrés
et dans le milieu de travail, et regarder voir si on ne peut pas aller plus
loin. Bon, ça fait que, ça, c'est ce bout-là.
Est-ce qu'on fait assez actuellement? La
réponse, c'est non. Nous autres aussi, on doit faire plus puis on doit faire
mieux. Mais ceci dit, c'est une des... Prenez le premier élément de
sensibilisation. Donc, nous, nous, on ne cherche pas à faire de la
francisation. Il y a des gens qui sont très bons pour faire la francisation.
Nous, ce qu'on dit, c'est les conditions de réussite, c'est qu'il ait du temps
de dégagé du milieu du travail et qu'on s'occupe de l'intégration sociale. Il y
a des syndicats qui font ce qui a été mentionné un peu plus tôt, des activités.
Et je sais qu'il y a un syndicat, là, qui a plusieurs, plusieurs cultures à
l'intérieur et qui organise des activités, mais pas des activités québécoises
pour intégrer les autres nationalités, mais les intégrer des activités des
autres nationalités pour intégrer les Québécois à ça. Je trouve ça génial.
Puis, c'est l'apprentissage de la culture. C'est eux qui apprennent la nôtre,
mais la bonne façon aussi de faire en sorte que ces gens-là vivent ensemble,
c'est que les cultures soient connues de tout le monde, là. C'est un partage.
La Présidente (Mme Caron) : En
conclusion, 15 secondes.
M. Vachon (Luc) :Ah! moi, j'ai fini.
La Présidente (Mme Caron) : Parfait.
Merci.
Une voix : ...
M. Vachon (Luc) :Oui...
La Présidente (Mme Caron) : Merci.
Alors, je vais céder la parole à l'opposition officielle, à la députée de
Chomedey. Vous avez 12 min 23 s pour votre groupe.
Mme Lakhoyan Olivier : Bonjour.
Merci beaucoup, c'est vraiment très intéressant vous écouter et vous lire, bien
sûr. Et puis on a... on a entendu beaucoup de monde, donc ça va enrichir nos
informations et on va pouvoir prendre de meilleures décisions.
• (18 heures) •
Parlant de francisation, en tant que
députée, je reçois beaucoup d'appels des citoyens, des réfugiés, des
sans-papiers. Tout ce beau monde-là qui veulent apprendre le français. Ils
viennent ici, ils veulent apprendre le français. J'ai vraiment grandi là-dedans.
Je suis une fille immigrante. J'ai déménagé ici très jeune, hein? Je ne vais
pas dire combien d'années. Et puis j'ai toujours grandi là-dedans, des
questions d'immigration, comment je peux faire ci. Donc je suis entourée de ces
sujets-là parce que les gens veulent venir ici, veulent apprendre le français.
Mais ça ne veut pas dire qu'ils ont la chance, dans leur pays, de l'apprendre.
Les conditions dans d'autres pays, ce n'est pas comme ici. Et puis surtout, ils
viennent des pays, disons tiers-monde, pas d'autres pays occidentaux. Donc, ils
viennent pour une meilleure vie, donc ils veulent travailler, ils veulent
apprendre le français absolument.
D'abord, il y a des préconditions
d'apprentissage, le français maintenant, ou connaître un niveau de français. Ça
et comment... qu'est-ce que vous pensez là-dessus? D'abord, j'aimerais
commencer avec celle-là : Est ce que... est ce qu'il ne faut pas donner la
chance à tout le monde d'avoir une opportunité de venir ici et apprendre le
français une fois ici? Parce que déjà on connaît...
18 h (version non révisée)
Mme Lakhoyan Olivier : ...qu'il
y a un grand chiffre des gens qui ne sont pas immigrants, à part les
travailleurs, là, il y a des sans-papiers, il y a des réfugiés, il y a des cas
humanitaires. Donc, ces gens-là, c'est sûr, il y a une majorité qui ne parle
pas le français puis il y a une autre partie qui parle français. Donc, côté
humanitaire, ne pensez-vous pas qu'on devrait quand même accepter les
immigrants pour venir ici mais qui apprennent le français ici? Comme mes
parents ont fait, d'ailleurs. Je m'excuse, mes parents, quand ils sont venus,
ils ne parlaient pas le français ni l'anglais, ils ont appris les deux. Même,
ma mère est allée au cours de francisation. Mais, si mon père ne serait pas
admis, je ne serais pas ici aujourd'hui. Donc, ça, c'est ma première question.
M. Vachon (Luc) :Tu vas vouloir intervenir? Je vais vous dire une chose.
Tout d'abord, il y a des niveaux de français qui sont déterminés, et là il y
avait... on a fait des débats sur la hauteur du niveau. Je pense que ce qui
était surtout le vrai débat qu'on aurait dû faire puis qu'on a tenté de faire à
un moment donné, ce n'est pas tant le niveau, mais c'est la durée qu'on
demandait pour l'apprendre, pour atteindre ce niveau-là, qui, à notre avis,
était irréaliste à ce moment-là. Puis ensuite, des fois, il y a une question d'exigence
d'un certain niveau puis, en plus, dans la durée où c'était requis, que je vais
être tout à fait honnête, que probablement plusieurs Québécois auraient eu de
la difficulté à réussir.
La vraie... Des fois, j'ai de la misère
avec la question de mettre l'enjeu de la protection de la langue sous la
responsabilité de l'immigration. J'ai de la difficulté avec ça, parce que moi,
je pense que la question de la protection de la langue, si c'est réellement un
enjeu, elle devrait commencer par nous au départ, elle devrait commencer par
nous. Quand on a... on est au Québec avec un déficit de littératie puis de
numératie qui atteint près de 50 %, la première question qu'on devrait se
poser, c'est : est-ce que c'est vraiment l'immigration qui met... a mis ça
en péril? Je ne suis pas convaincu, hein? Alors, on cherche toujours à prendre
le débat ailleurs. Moi, je pense que, le premier débat, on devrait regarder
nous, comment on se comporte au départ, après ça peut-être pas reproduire les
mêmes erreurs au niveau de l'immigration.
Mais est-ce qu'on ne devrait absolument
pas accueillir des personnes immigrantes si elles ne parlent pas le français?
Bien, vous êtes un exemple de la réponse. Moi, je pense qu'il y a de la place
pour beaucoup de gens. Puis après, c'est comment on accueille, comment on offre
les opportunités de s'intégrer. Et ça, c'est à géométrie très variable. Parce
que, là, vous faites une référence aux réfugiés, et le problème des réfugiés,
souvent, s'ils n'apprennent pas le français, le problème, c'est qu'on les garde
dans l'ombre, le problème, c'est qu'on les garde dans la quasi-clandestinité
parce qu'on ne veut pas leur reconnaître un statut. Intégrez-vous, mais
cachez-vous. Je ne sais pas comment on fait ça socialement. Tu n'as pas le
droit aux protections sociales, tu n'as pas le droit, en fait, à rien, mais tu
dois t'intégrer. Je ne sais pas comment socialement on peut croire à ça.
Alors, ceci dit, c'est de là que la
question de la régularisation rentre en ligne de compte. Parce que ces gens-là,
et vous avez entièrement raison, puis vous en avez eu ici, c'est des gens qui
veulent s'intégrer, qui veulent apprendre la langue, qui veulent... qui
travaillent, pour beaucoup, travaillent déjà, souvent clandestinement ou
souvent au noir puis de manière précaire, mais ils contribuent déjà, ils sont
déjà là. Ça fait que moi, je pense que, si on fait mieux, là, la question de la
langue va devenir un deuxième niveau, va devenir un deuxième niveau, puis ça va
nous permettre de décoller de l'arbre pour voir la forêt qui est cachée
derrière.
M. Derraji : Je vais me
permettre, je vais me permettre, ma collègue a posé une question extrêmement
importante par rapport à la langue française et à l'intégration. Je suis très
content d'entendre votre réponse, et c'est grâce à votre réponse que je me sens
interpelé. Vous avez évoqué un point qu'au fait, dans la société occidentale,
on fait tout pour ne pas tomber dans des ghettos. Je ne sais pas, est-ce que c'est
vous ou l'ancien groupe, vous avez parlé de faire attention de ne pas
construire des logements proches, je pense, c'est l'ancien groupe. D'ailleurs,
j'ai oublié de vous poser cette question, mais je trouve tellement ça
important...
M. Derraji : ...parce que si
on regarde l'industrialisation européenne, avec l'arrivée de la main-d'oeuvre
africaine à l'époque, et on voit les problèmes de société qu'on essaie de
ramener au Québec, moi, certainement, je dis : Écoute, bien, ça n'a aucun
bon sens. On ne parle pas de la même chose, et c'est justement ce que vous
venez de répondre à ma collègue. Si aujourd'hui on ne fait pas attention avec
des groupes et des sous-groupes, c'est que de facto, le législateur ne veut pas
les voir. Ils sont là, mais on ne veut pas les voir. Ils sont là, là, sur le
territoire, mais on ne veut pas les voir, parce qu'on ne les inclut pas, on
n'en parle pas. J'aurais aimé aujourd'hui qu'on parle... Parlons des réfugiés.
Parlons des demandeurs d'asile. Les... groupes... Tous les groupes aujourd'hui,
ils ont parlé des sans-papiers. Parlons des travailleurs temporaires étrangers.
Parlons de ceux et celles qui viennent du programme de la mobilité
internationale. Mais non, les scénarios qu'on a aujourd'hui, c'est tellement
normé et cadré que je me dis : Es- ce qu'on n'est pas en train de rater
une occasion en or? Et, sérieux, aujourd'hui, je tiens à remercier tous les
groupes, surtout les quatre syndicats, les quatre centrales. Vous avez ramené
sur la table d'autres enjeux qu'on n'a pas vus hier. C'est sûr que c'est trois
semaines, mais c'est tellement important ce que vous venez de dire, parce que
ça me rappelle juste les critiques des modèles d'intégration, d'assimilation
des migrations européennes. Et on voit l'échec. Moi, je suis allé dans certains
pays. Un certain moment, je me dis : Est-ce que c'est cette société qu'on
veut au Québec? Je ne pense pas. Je ne pense pas que c'est ce qu'on veut, mais
je veux reposer la question des autres. Désolé si j'ai été long parce que vous
m'avez interpellé avec votre réponse, que je trouve très juste, parce que je ne
m'attendais pas. Est-ce qu'avec cette sous catégorisation de plusieurs
catégories d'immigration et l'offre qu'on a sur la table maintenant d'études et
de scénarios on rate un débat de fond sur l'intégration des immigrants?
M. Vachon (Luc) :Est-ce qu'on rate un débat de fond? C'est une excellente
question. Ceci dit, ce qu'on ne connaît pas, ça fait toujours peur. Et pour
nous, au Québec, c'est relativement nouveau ce déploiement de l'immigration là,
vraiment, là. Il y a des zones, il y a des régions qui étaient plus familières
avec ça, mais toute la question de la régionalisation, le premier... Reculons
il y a deux, trois ans, il y a des régions qui n'en avaient pas de main-d'oeuvre
immigrante, là. Nous, on a des groupes, là, puis c'est vrai pour tous les
autres, là, où ils se sont retrouvés tout à coup avec de la main-d'oeuvre
immigrante. Ils ne savaient même pas comment composer avec ça. C'est une
nouvelle réalité. C'est une nouvelle réalité, bon. Alors, on a un peu
d'inquiétude à savoir ce que ça va faire là, le débat de la langue qui rentre
là-dedans. On ne sait pas trop comment composer avec ça puis on hésite.
Alors, est-ce qu'on va rater la cible?
Moi, je pense que c'est une belle occasion pour faire un débat social plus
profond que ça. Je pense que c'est ça... comme ça qu'on doit le saisir, le...
de manière évolutive.
M. Derraji : Est-ce qu'on le
fait?
M. Vachon (Luc) :En fait, on commence à le faire. Aujourd'hui, ça... ce qui
se fait là, normalement, c'est une démonstration du début d'une réflexion plus
profonde sur la société québécoise puis comment on va faire cette
intégration-là dans le futur, de manière plus réelle, comment on va regarder
les vraies affaires, puis qu'on va en parler correctement, puis qu'on va mettre
les moyens pour y répondre. Puis, quand on va accepter de le faire comme il
faut puis qu'on va être plus familier, ce qu'on comprend, ça nous effraie
moins.
Alors, c'est... Je pense que socialement, au
niveau québécois, il y a beaucoup de faux débats dans cette histoire-là. Donc,
il y a toute une question d'apprivoiser le sujet puis de mieux le comprendre.
• (18 h 10) •
M. Derraji : ...des faux
débats. Avez-vous des exemples en tête?
M. Vachon (Luc) :Bien, j'en aurais plusieurs. J'ai la question de la langue,
la question de la main-d'œuvre immigrante, la question des besoins temporaires
versus permanents. Tu sais, ça en est tous des faux débats, parce que quand on
parle... puis la question de l'intégration. O.K., parfait, on va prendre la
permanence pour être capable de les intégrer comme il le faut. Mais, pendant
qu'on ferait un débat sur 60 000 personnes permanentes, il y en a
300 000 temporaires derrière qui sont là puis que... pour lesquels...
On ne regarde pas, mais, en fait, c'est des faux temporaires qui sont des
immigrants permanents, pour des besoins permanents. Puis moi, j'ai vu des
situations, là. Tout récemment, là, tout récemment, je me... Ce n'est même pas
dans le cadre du travail, là. Ce n'est même pas dans le cadre du travail, c'est
dans le cadre d'une activité sociale, où je me présente là et je m'en vais
jaser avec une personne, là, qui travaillait là. Ça fait sept années qu'elle
est au Québec, 11 mois...
M. Vachon (Luc) :...par année...
La Présidente (Mme Caron) : En
conclusion.
M. Vachon (Luc) :11 mois par année, et elle ne parle presque pas le
français, quelques mots, parce qu'elle travaille six jours sur sept. Puis là il
n'était pas 4 heures de l'après-midi, quand je lui ai parlé, là, il était 20
heures passées le soir, puis elle travaillait toujours.
M. Derraji : Merci pour votre
présence.
M. Vachon (Luc) :Ça, c'est peut-être une question... une réponse au faux
débat.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup. Ça s'est terminé exactement à zéro seconde. Alors, je vais maintenant
céder la parole au député de Saint-Henri-Sainte-Anne pour 4min 8s.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour votre présentation et vos réponses. Moi, j'ai accueilli
favorablement le volet deux, ladite passerelle. Je pense que c'est intéressant,
je trouvais que c'était une bonne nouvelle, mais je trouvais que, finalement,
ça reconnaissait qu'on n'aurait jamais dû retirer les emplois moins qualifiés
du PEQ travailleur. Je pense qu'il y a là une réponse à pourquoi ce volet deux
là était nécessaire.
Vous avez parlé un peu de régularisation,
puis je trouve qu'on n'en a pas parlé assez aujourd'hui, donc je vais vous
questionner là-dessus. Des questions : À votre avis, est-ce qu'on
gagnerait à les ramener, ces gens-là, dans l'économie légale, dans l'économie
formelle, notamment en matière de taxes et impôts? Est-ce qu'on aurait à gagner
à faire ça?
M. Lesage (Samuel-Élie) : Juste
répéter... moi votre question, s'il vous plaît.
M. Cliche-Rivard : Oui. En
matière de taxes et impôts, là, de ramener ces gens-là dans la régularité, dans
l'économie formelle, j'imagine qu'on aurait un gain économique à faire ça, à
leur donner un statut?
M. Lesage (Samuel-Élie) : Bien,
c'est un gain économique, question taxes-impôts, la chose va de soi. Ce qu'il
faut plutôt se dire, c'est que ce sont des gens qui pourraient pleinement,
complètement, avec leurs expériences, leurs formations, leurs personnalités,
qui elles sont à... en travaillant, dans leur communauté. Alors, c'est surtout
ça, puis c'est pour ça qu'on mettait aussi de l'avant... Plus tôt dans la
journée, on m'a posé la question de... à ce programme-là, bon, on n'est pas
très loin, mais une chose qui est nécessaire... il est essentiel que ces
personnes-là soient au moins adéquatement reconnues quant à leurs
qualifications, leurs compétences, pour qu'elles puissent pleinement participer
à la société. Puis je pense qu'on pourrait dire l'apport économique ou
sociopolitique, il est, entre autres, là. Enfin, ces personnes-là seront
reconnues pleinement, à leur juste valeur, notamment en termes de ce qu'elles
peuvent faire au niveau professionnel.
M. Cliche-Rivard : Et
j'imagine aussi que vous êtes d'accord qu'on gagnerait à leur assurer une
couverture médicale complète, en termes de couverture de santé publique, ce
serait très avantageux.
M. Lesage (Samuel-Élie) : C'est
même une évidence.
M. Cliche-Rivard : C'est une
évidence. Donc, c'est une évidence aussi qu'on gagnerait à respecter leurs
droits de travailleurs et leurs droits de locataires dans les droits de base
que la société s'est donnée?
M. Vachon (Luc) :La réponse, c'est sûr que c'est oui, c'est sûr. La vraie
question, c'est : Sont-ils des êtres humains, hein? Bon.
M. Cliche-Rivard : C'est la
question qu'on se pose.
M. Vachon (Luc) :Alors, une fois qu'on a répondu oui à ça... Et là je
m'excuse, parce que, moi, je suis un syndicaliste, mais... puis, oui, j'ai des membres,
puis tout ça, mais la raison pour laquelle on est ic, les quatre, c'est que la
plupart des... les éléments de motivation qui nous ont amenés ici, ce ne sont
pas nos membres, c'est : il se passe des choses, socialement, sur
lesquelles nous devons nous engager. Et, à un moment donné, j'étais à une
rencontre, une petite mobilisation à Montréal, justement, pour les réfugiés ou
les personnes sans statut. Et il y a un témoignage d'une personne qui m'a
beaucoup touché. C'est une jeune fille de 12 ans qui s'est adressée aux membres
puis qui a dit : Moi, là, je suis ici, et mes parents, là... elle est née
ici, là... mais mes parents, là, sont toujours sans statut, puis je veux me
construire une vie au Québec, je ne sais pas si j'ai le droit d'y rêver. Oh boy!
Puis je vous assure, là, dans la gang qu'il y avait là, là, il n'y avait aucun
membre CSD, même aucun membre d'aucune organisation syndicale. Ce n'était pas
ça, l'enjeu.
M. Cliche-Rivard : Alors,
pourquoi on ne le fait pas? Pourquoi on... Si vous me dites, c'est la base de
la dignité humaine, c'est l'humanité...
M. Vachon (Luc) :Il y a plein d'enjeux, hein?
M. Cliche-Rivard : ...pourquoi,
pourquoi on...
M. Vachon (Luc) :Je ne suis pas un spécialiste, moi, de la question des sans
papiers, des statuts, tout ça. Je ne suis pas un spécialiste, il y a des
groupes qui sont excellents dans ça, qui vous diront qu'est-ce que ça prend.
Pas moi, mais moi, tout ce que je dis, c'est est-ce qu'ils peuvent contribuer à
la société québécoise? Absolument. Et puis vous avez probablement... Je pense,
qu'elle est passée ici, mais il y a une femme qui avait participé avec nous, on
avait été à une rencontre, elle parle très bien le français, elle est ici, elle
contribue déjà.
La Présidente (Mme Caron) : En
conclusion. 10 secondes.
M. Vachon (Luc) :Elle attend juste que la société québécoise lui ouvre les
portes.
M. Cliche-Rivard : Donc, la
balle est dans le camp de la ministre?
M. Vachon (Luc) :La balle est dans notre camp, à nous tous, hein, soit dit
en passant.
La Présidente (Mme Caron) : Merci
beaucoup. Alors, je vous remercie d'avoir contribué à nos travaux, d'avoir
déposé un mémoire. La commission va...
La Présidente (Mme Caron) : ...ajourner
ses travaux jusqu'à jeudi 14 septembre 2023, après les avis touchant les
travaux des commissions. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 18 h 17)