(Onze heures vingt-cinq minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission des relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie afin de procéder à des
auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet
de loi n° 1, Loi modifiant la Loi sur
les services de garde éducatifs à l'enfance afin d'améliorer l'accessibilité au
réseau des services de garde éducatifs à l'enfance et de compléter son
développement.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Lévesque (Chapleau) est remplacé par M. Tremblay
(Dubuc); M. Poulin (Beauce-Sud) est remplacé par M. Lefebvre (Arthabaska);
M. Polo (Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Tanguay (LaFontaine);
et Mme Perry Mélançon (Gaspé) est remplacée par Mme Hivon (Joliette).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Ce matin, nous entendrons les groupes suivants : la Coopérative
Enfant Famille et la Fédération des intervenants en petite enfance du
Québec-Centrale des syndicats du Québec.
Donc, je souhaite la bienvenue à Coopérative
Enfance Famille. Je vous rappelle, chers invités, que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi, nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.
Coopérative Enfance Famille
Mme Huard (Louise) : Mme la
Présidente, M. le ministre de la Famille, Mmes et MM. les députés, je m'appelle Louise Huard, je suis la présidente
de la Coopérative Enfance Famille, gestionnaire du guichet unique
d'accès aux services de garde de La Place 0-5. Je suis accompagnée par
Mme Marie-Claude Sévigny, directrice générale de la Coopérative Enfance
Famille.
Je tiens d'abord à vous remercier — excusez,
j'ai un peu la bouche sèche — à vous remercier de votre invitation à
cette commission parlementaire. En tant que partenaire du ministre de la
Famille depuis de nombreuses années, c'est l'occasion pour nous de souligner
que notre conseil d'administration a accueilli favorablement le projet de loi n° 1. M. le ministre, vous avez déposé un projet de loi
pour permettre d'atteindre un objectif ambitieux, celui d'accélérer la
complétion du réseau des services de garde, et le Québec en a grandement
besoin. Globalement, je pense que nous
partageons la même vision pour le développement du réseau des services de
garde, et nous collaborons activement avec vous dans le cadre de notre
partenariat.
Le guichet unique est, à de nombreuses reprises,
cité dans votre projet de loi. C'est dire la place centrale qu'il occupe dans
l'écosystème du réseau des services de garde. M. le ministre, vous avez dit,
pour reprendre vos mots, que, depuis
15 ans au Québec, c'est le meilleur outil que nous avons eu pour bien
planifier le développement du réseau, comprendre le besoin des parents
et s'assurer qu'on prend les meilleures décisions.
D'autre part, nous sommes heureuses de constater
que plusieurs des modifications proposées dans votre projet de loi vont d'ailleurs dans le sens de recommandations que nous
avions émises lors de la consultation publique, au printemps dernier,
dans le cadre du mémoire génération 2, que nous avions déposé. Toutefois, nous
avons aussi des préoccupations et questionnements relatifs à certains articles
de ce projet de loi, et le dépôt de notre mémoire auprès de la commission est
l'occasion de vous en faire part.
Depuis 2014, date à laquelle a été lancée La
Place 0-5, nous avons acquis une large expertise dans le développement
d'outils technologiques novateurs facilitant l'accès aux places en service de
garde. D'un guichet local, à guichet régional, puis, maintenant, à guichet
provincial, nous sommes le seul outil qui permet de faire le lien entre les
besoins des parents et l'offre de services de garde. C'est notre regard
d'experts que nous souhaitons partager avec vous pour assurer le succès de
votre projet de loi n° 1.
Je cède maintenant la parole à Mme Sévigny,
directrice générale de La Place 0-5. Merci.
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Mme la
Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie vraiment
pour l'invitation. Depuis maintenant sept ans, nous collaborons avec le
ministère presque quotidiennement. Aujourd'hui, il me fait plaisir d'échanger
avec vous d'une autre façon.
Tout d'abord, j'aimerais vous dire que rien ne
me fait plus plaisir que de savoir que vous allez développer des places, car,
pour faciliter l'accès aux places, bien, il faut des places. L'énoncé peut
sembler simpliste, mais toute discussion sur un guichet
unique d'accès aux places à octroyer serait inutile. Fort heureusement, c'est
votre premier engagement, un engagement ambitieux, développer
37 000 places supplémentaires au Québec, dans lequel vous comptez
vous investir à fond au cours des deux prochaines années. Bravo! Vous vous êtes
aussi engagés à faire en sorte que les éducatrices soient au rendez-vous dans
un contexte général de pénurie de main-d'oeuvre. Ce ne sera pas facile, mais il
le faut pour pouvoir avoir les 37 000 places.
• (11 h 30) •
Votre courbe idéalisée d'améliorer le réseau des
services de garde est haute, très haute. Qui plus est, vous envisagez que le
ministère de la Famille prenne en charge la refonte et l'opérationnalisation du
guichet unique. Vous savez, parfois, les gens pensent que le guichet d'accès,
c'est seulement une base de données, un simple gros fichier Excel accessible en
ligne. Le guichet d'accès que vous avez présentement, c'est bien plus que ça,
c'est une interface technologique et humaine entre les services de garde, les
parents puis le ministère de la Famille. Il est essentiel de tenir compte de tout ce qui se cache derrière La
Place 0-5 actuellement pour garantir le succès du futur guichet
unique, quelle que soit l'organisation qui le gère, vous, un tiers ou un
mélange des deux.
Le guichet d'accès qu'est La Place 0-5
est un outil performant, qui a évolué depuis 18 ans. Il est adapté aux
attentes du ministère, qui établissait les politiques et les balises de son
développement, phase I, phase II, un projet de lien pour envoyer des
données, phase I, phase II. Donc, il y a eu beaucoup de travail qui a été
fait et qui a été adapté à vos besoins.
Au printemps 2021, nous avons déposé un
projet, génération 2, une projection du guichet unique qui se veut plus
simple, plus transparent, plus complet. Génération 2 s'attaque à la
transparence des informations, autant pour le parent que pour le réseau, à la
complexité des politiques d'admission et leur applicabilité, pour protéger
l'accès aux clientèles vulnérables et les enfants à défis particuliers, aux
processus, pour s'assurer d'éliminer les passe-droits et les listes d'attente
parallèles. Tous ces points sont, selon nous... répondent, en tout cas, à vos
attentes puis ils vont tout à fait dans le sens du projet de loi que vous venez
de déposer. En fait, génération 2 pourrait être, dans sa forme et ses
intentions, le prochain guichet unique.
Que ce soit génération 2 ou non, vous aurez
des défis à relever pour vous assurer que votre vision se réalise.
Premièrement, vous devrez tout faire pour que votre projet de loi soit
applicable. Lors du dépôt du projet de loi n° 143 en
2017, les intentions d'intégrer le guichet unique obligatoire et incontournable
étaient là, mais les moyens n'ont pas suivi. Nous savons tous que le fait que
les services de garde puissent encore ne pas adhérer au guichet ou que les
parents puissent encore obtenir des places sans passer par le guichet ne...
fait en sorte que la loi n'est pas respectée, puis c'est souvent dû au fait que
les règlements et les directives ne sont pas mis en application. C'est dommage.
Ces éléments ont nui à l'image de La Place 0-5. Donc, ma
recommandation : les articles 59.2, 59.5, 59.6 et 59.10 doivent être
regardés dans toute leur profondeur et... leur donner du mordant si vous voulez
mettre en place un guichet unique efficace.
Deuxièmement, vous devrez vous assurer de mettre
en place un guichet pour les parents. C'est trivial, vous me direz, mais il
serait dommage que l'approche plus statisticienne prenne les devants. Les
parents ont besoin d'un outil simple, informatif, communicatif, à la limite,
relationnel.
Troisièmement, vous devrez penser à avoir une
gouvernance du guichet neutre et transparente. Le guichet unique, qui sert à
l'accès aux places de tous les parents du Québec, ne peut être un environnement
politique. Il doit intégrer tous les types de services de garde et viser le
meilleur pour le parent.
Quatrièmement, nous vous recommandons de
regarder l'évolution du guichet avec un regard de bon papa de famille, qui
prend soin de ses amis, de ses collaborateurs, qui voit à ne pas gaspiller des
ressources, mais à bâtir sur des bonnes bases, pour se propulser vers l'avant.
Cinquièmement, et dernier point, un guichet
unique peut être un pont stratégique entre les différents acteurs préoccupés
par l'accès aux places en services de garde. De rendre disponibles vos données,
comme vous le prévoyez, est une excellente nouvelle, puis je vous encourage à
pousser ça encore plus loin pour vraiment fédérer tous les intervenants, tous
les acteurs autour de cet objectif-là, qui est de créer et refondre un réseau
fort et structuré.
Avec ses 18 ans bien comptés, la
coopérative est un partenaire pertinent pour propulser le Québec en avant, avec
un outil encore plus novateur. Nous avons des idées, nous vous en avons exposé
quelques-unes. Nous semblons avoir envie du même succès. À vous de voir comment
vous saurez profiter des apprentissages de votre partenaire. Puis, entre vous
et moi, dans deux ans, avec 37 000 places créées, il n'y en aura
plus, de problème de guichet unique. Merci pour votre attention.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange, et je vais céder la parole au ministre pour
16 min 30 s.
M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la
présidente, bonjour à vous deux. C'est bien intéressant de vous recevoir avis
aujourd'hui pour avoir cet échange-là, parce que, je le dis d'entrée de jeu, je
pense que c'est l'éléphant dans la pièce, là. Je comprends bien que vous êtes
en désaccord avec cette idée qu'on a, l'idée que j'ai mise de l'avant, de
rapatrier, donc, les services que vous offrez actuellement, de les rapatrier à
l'intérieur du gouvernement, pour que ce soit le gouvernement, donc, qui
administre l'outil et qui soit propriétaire des données.
Je veux peut-être juste commencer, donc, en
disant : Le projet que nous proposons, que je propose, et... ce n'est
certainement pas un projet contre la coop Enfance Famille. Moi, je suis très
conscient... Et d'ailleurs vous l'expliquez dans votre mémoire, il y a tout un
chemin, là, qui a été parcouru, et je pense que vous avez fait un travail
exceptionnel, c'est-à-dire de passer d'à peu près rien... Bon, il y avait des
listes qui étaient très locales, il y a eu, ensuite, les
guichets régionaux, et, effectivement, vous avez fédéré tout ça pour en faire
un guichet national. En même temps, c'est assez récent, ça ne fait pas très,
très longtemps.
Donc, je veux souligner le travail que vous avez
fait, parce que ce n'est pas vrai que les gens de la coop sont des incapables
ou des incompétents. Moi, je pense qu'il y a énormément d'expertise à la coop
Enfance Famille. Et c'est un peu ça, le problème. Cette expertise-là, à mon
sens, c'est le gouvernement qui doit l'avoir. On souhaite se doter de cette
expertise-là pour être capables de mieux, d'abord, administrer le réseau, parce
que ce sont des données sur lesquelles on se
base. C'est non seulement, bon, un outil pour que les parents puissent
s'inscrire et obtenir une place, mais
c'est aussi un outil sur lequel se base le gouvernement pour développer le réseau,
et c'est un programme qui, à l'heure où on se parle, coûte... et c'est
un investissement à mon sens, mais c'est un programme qui coûte
2,8 milliards de dollars par année. Donc, cette expertise que vous avez,
je pense qu'elle doit se retrouver au gouvernement.
Il y a eu toute une amélioration à travers les
années, et je pense que, maintenant, l'évolution naturelle, maintenant qu'on
souhaite compléter le réseau et être plus efficaces, c'est de faire un pas de
plus encore vers l'avant et d'amener tout ça vers le gouvernement, et moi, j'ai
envie que vous y participiez. Donc, on ne veut pas le faire sans vous, on veut
le faire avec vous, avec les gens qui sont chez vous, qui pourraient,
effectivement, se joindre au gouvernement pour venir réaliser ce chantier-là.
Donc, la question que je vous poserais, bon, ça peut être très général, mais ne pensez-vous pas que c'est
légitime, pour le gouvernement, de vouloir se doter de cette expertise-là,
alors que c'est un programme qui nous coûte 2,8 milliards de dollars par
année et pour lequel on est imputables du développement?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Bien,
en fait, le guichet unique ne vous coûte pas 2,8 milliards, ça, c'est sûr
et certain. Le réseau vous coûte ça, oui, puis l'accessibilité aux places vous
coûte peu pour pouvoir être capables de le faire. Ensuite, ce que je vous
dirais, c'est que, oui, on peut vouloir travailler avec le ministère, on peut
vouloir aller de l'avant pour travailler avec le ministère, mais il faut
comprendre que, pour l'organisation, qui est une entreprise totalement privée, c'est difficile de penser qu'on
va laisser aller une entreprise privée, qui a été bâtie avec
l'expérience des services de garde, la confédération, la concertation des gens
du milieu... puis qu'on va tout laisser aller ça à une autre entreprise, tel
que le projet de loi... Vous l'avez inscrit, d'ailleurs, dans 59.1. Ce n'est
pas clair. Vous pourriez rapatrier, mais vous pourriez aussi la donner à un
tiers.
Donc, est-ce
que c'est normal que vous voudriez reprendre une certaine expertise? Oui. Mais, depuis sept ans, vous travaillez avec nous, donc il y a
une certaine expertise, déjà, chez vous. Et vous avez une compréhension de ce
qu'est un guichet unique. Puis l'expert réel du terrain, c'est la coopérative qui vous
l'apporte. De votre côté, vous êtes l'expert du développement des places, du développement des services, puis nous, nous vous apportons l'expertise de l'interface
parents.
• (11 h 40) •
M. Lacombe : À mon sens, il est là,
le problème. Et c'est peut-être là qu'on a une divergence d'opinions qui est
importante. Effectivement, vous êtes les experts et vous avez cette
expertise-là parce que c'est chez vous qu'elle s'est développée, parce qu'à
l'époque c'est le mandat qui vous a été donné. Mais maintenant que le
gouvernement souhaite développer davantage le réseau, le compléter, devenir
plus efficace, donc a besoin d'outils plus efficaces, à mon sens, c'est légitime de dire... Parce que vous avez dit : Nous
sommes les experts du développement. Effectivement, mais ça prend des
outils. Et nous, de notre côté, ce qu'on constate, c'est qu'on a besoin de
cette expertise-là au ministère. Puis,
c'est-à-dire, tantôt, vous parliez du ministère de la Famille. Moi-même, je
fais le lapsus. Mais ce qu'on dit, ce n'est pas nécessairement le
ministère de la Famille qui va s'en occuper. On veut que ce soit le
gouvernement, plus largement.
Donc, est-ce que — je répète ma
question — ce
n'est pas légitime que, pour un programme, les services de garde, effectivement, qui nous coûtent
2,8 milliards de dollars par année, est-ce que ce n'est pas légitime qu'on
souhaite, comme État, comme gouvernement, avoir l'outil entre les mains qui
nous sert à développer, se doter de cette expertise-là,
à l'interne du gouvernement, plutôt que de la sous-traiter, comme vous le dites
avec beaucoup de justesse, à une organisation qui est privée?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Je me
pose la question à savoir si c'est bon ou non de rapatrier à l'intérieur d'un
appareil gouvernemental quelque chose qui est aussi près de la population. Je
me pose la question à savoir... Quand on regarde ce que le ministère de la
Santé fait actuellement, pourtant, lui, il fait le contraire. Il ne rapatrie
pas à l'interne, il travaille avec des partenaires. Le ministère de la Santé
vient de signer un contrat de 12 ans, 36 millions, avec une
entreprise totalement privée, pour développer un site puis offrir un service
qui, pourtant, est pour l'appareil gouvernemental.
Donc, votre approche de rapatrier, moi, je ne la
comprends pas, dans l'univers dans lequel on est aujourd'hui. On travaille de
plus en plus, dans les entreprises, à essayer de laisser l'expertise là où elle
est puis travailler en collaboration, entre experts, pour arriver, ensemble, à
un succès. De rapatrier la base de données elle-même... En soi, vous la recevez à toutes les nuits. À toutes les
nuits, on vous envoie des données concernant les inscriptions, les mises
à jour des enfants. Vos gens, chez vous, prennent ces données-là, les mettent
dans un entrepôt de données, qui vous permet, par la suite, de tirer des
conclusions, de façon régulière, sur les besoins des parents. Rapatrier quoi, exactement,
de plus, quand vous dites «rapatrier»? Parce que, dans le fond, vous avez déjà
les données.
Si vous voulez rapatrier l'informatique, hein,
la mécanique du guichet, c'est quelque chose qui pourrait se faire, parce que, dans
le fond, vous pourriez vouloir garder, dans votre sein, la mécanique informatique.
Mais pour ce qui est de l'interface parents, pour ce qui est du soutien
parents, pour ce qui est de l'accompagnement des services de garde, écoutez, on
répond, par année, entre 70 000 et 40 000 appels de parents, des
parents inquiets, des parents qui se posent des questions. C'est nous qui
sommes cette interface-là aujourd'hui.
M. Lacombe :
...normal que ce soit une entreprise privée qui ait ce mandat-là, et que ce ne
soit pas le ministère de la Famille ou le gouvernement, plus largement, alors
qu'ultimement c'est le gouvernement qui est imputable de tout ça?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : En
fait, c'est une question de point de vue, rendus là. On a été un très bon
partenaire pour vous, à la limite, même, un bouc émissaire, à bien des moments,
parce que c'est nous qui avons été pointés du doigt comme...
M. Lacombe : Bien, écoutez, à chaque
fois que vous avez des enjeux... puis là je ne les pointerai pas parce que
c'est devant les tribunaux, là, mais, à chaque fois que vous avez des enjeux,
j'ai le micro sous le nez. Ça fait que je ne suis pas sûr à quel point,
politiquement, ça me sert d'avoir un bouc émissaire, comme vous le dites, là.
Je pense que ça, on pourrait en parler longtemps, là.
Mais je veux peut-être aussi poser une question,
parce que, tantôt, ça m'a quand même fait réagir. Vous dites : C'est une
entreprise privée, et nous, comme entreprise privée, on a de la difficulté à se
dire : On va laisser partir ce qu'on a bâti pour donner ça au
gouvernement. Est-ce que c'est juste de dire que l'entreprise privée dont vous
parlez, c'est un OBNL qui a été bâti avec des fonds publics, là, indirectement?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : En fait, je ne sais pas comment vous voulez expliquer
ça, mais la Coopérative Enfance Famille est née en 2003. Elle est née
d'un travail d'une table de concertation entre des gens de CLSC, des organismes
famille et des services de garde, qui, à l'époque, étaient des garderies
populaires, ou autres. C'est né de ça. La croissance...
M. Lacombe : D'où vient le
financement, là, qui a permis à la coop de se mettre sur pied puis d'opérer?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : La coopérative a toujours fonctionné seule. Ce sont
les fonds des services de garde qui ont permis la création de cette
entreprise-là. C'est par leur travail, dans certains cas, si on parle de
membres de conseils d'administration, par leur bénévolat, par leur travail de
concertation dans leurs milieux. C'est ça qui a permis à la création de la
Coopérative Enfance Famille, avant même qu'elle soit guichet unique. Et elle a
été approuvée par le ministère comme étant gestionnaire du guichet
régional.
M. Lacombe : Oui, mais je souhaitais
seulement établir le fait qu'effectivement vous vivez, vous vous développez...
Bien, la solution informatique, c'est le gouvernement, là, qui...
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Oui,
ça, c'est clair.
M. Lacombe : ...qui l'a défrayée. Effectivement,
les contributions des services de garde vous permettent d'opérer, contributions
des services de garde, évidemment, qui sont des fonds publics, là, parce
qu'elles proviennent du budget du gouvernement du Québec, là, qu'il leur verse
à chaque année. Donc, je voulais seulement établir le fait que, quand on parle
d'entreprise privée — parce
qu'il y a des gens qui nous regardent — il faut quand même bien
comprendre aussi que c'est un OBNL qui s'est bâti grâce à l'argent des Québécois
et des Québécoises.
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Elle
était créée avant. Le guichet unique a réussi à exister et à être fonctionnel,
tel qu'il est là, grâce aux fonds publics, ça, je ne peux pas dire le
contraire. Et aussi grâce aux garderies non subventionnées, qui ont quand même
amené leurs fonds.
M. Lacombe : Oui, c'est vrai.
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Mais,
avant 2014, c'était une entreprise totalement privée, qui fonctionnait avec les
gens qui voulaient bien participer à cette mission-là.
M. Lacombe : Oui, je comprends bien,
mais, majoritairement, de l'argent qui vient des Québécois et des Québécoises,
parce que c'est de l'argent qui vient des services de garde, là. Donc, si le
gouvernement ne finance pas les services de garde, évidemment, vous ne pouvez
pas être là, là. On ne parle pas d'entreprises privées qui investissent chez
vous, là. C'est ce que je veux dire.
Mme Sévigny (Marie-Claude) : C'est
une façon de dire les choses, mais c'était quand même un choix de l'ensemble de
ces corporations privées là...
M. Lacombe : De vous faire
confiance.
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Oui, exactement, de prendre de leurs fonds puis de
l'investir dans ce service-là. Pourquoi? Parce que ce service-là n'était pas
offert, nulle part ailleurs. Le ministère, à l'époque, n'offrait pas ce type de
service de soutien là, de gestion de l'accès aux places en services de garde.
C'est une entreprise privée qui l'a mis en place, puis qui l'a soutenu, qui a
été... qui l'a fait en déploiement local, régional, multirégional, puis qui, par la suite, a pu profiter, effectivement, de subventions
du ministère de la Famille pour mettre ça encore plus loin. Mais si cette entreprise
privée là n'avait pas créé ce guichet régional là ou ce guichet local là, vous
n'auriez pas eu l'expertise pour pouvoir être capables de bâtir un guichet
provincial.
M. Lacombe :
Je comprends ça et, d'entrée de jeu, je vous ai concédé que vous avez fait, effectivement,
beaucoup de travail. C'est la raison pour laquelle... Tantôt, vous
disiez : On se demande ce que vous voulez rapatrier en tant que tel, est-ce
que c'est les données, est-ce que c'est l'expertise? Je le disais, d'entrée de
jeu, ce qu'on souhaite rapatrier, c'est l'ensemble de tout ça, c'est, effectivement,
oui, la solution informatique mais aussi le personnel qui est là. Est-ce que
vous pensez que les gens de chez vous seraient intéressés de travailler, par
exemple, au gouvernement du Québec, avec nous, être à l'emploi du gouvernement
pour participer à ce pas vers l'avant, à ce nouvel outil qu'on souhaite mettre
sur pied?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Bien, si on avait une proposition, on la regarderait.
À ce jour, on n'a pas de proposition du gouvernement.
M. Lacombe :
Bien, la proposition que, nous, on fait, elle est claire. C'est qu'on souhaite
que cet outil-là soit opéré par le gouvernement, et on dit clairement que vous
avez de l'expertise qui nous intéresse beaucoup. Vous savez, on est en contexte
de pénurie de main-d'oeuvre. Des gens qui connaissent, effectivement, le
travail que vous faites, il n'y en a pas énormément. Ce que je veux aussi
lancer comme message aux gens qui nous écoutent, probablement, qui sont chez
vous, c'est qu'on aura besoin de leur expertise. Donc, il ne faut pas non plus
que ça devienne un enjeu corporatiste, où il y a des gens qui ont peur de
perdre leur emploi et qui, pour cette raison-là, se disent : Bien là,
nous, ça ne nous intéresse pas de faire partie du projet. Je veux juste être
clair et rassurant, on aura besoin de l'expertise des gens de chez vous pour
être capables de bâtir ce qu'on souhaite bâtir.
Et je rebondis là-dessus,
Mme la Présidente, en vous demandant : Il reste combien de temps à
l'intervention?
La Présidente (Mme
D'Amours) : 2 min 30 s, M. le ministre.
M. Lacombe :
Deux minutes? Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que ce serait quand
même toute une opportunité de faire un bond vers l'avant, avec l'outil que vous
avez, en l'intégrant au gouvernement, en pouvant profiter, par exemple, des
données qui sont présentes dans le cadre du Régime québécois d'assurance parentale
ou des données de l'État civil, donc de s'appuyer sur d'autres organisations à
l'interne, ici, au gouvernement, sur l'expertise, aussi, en matière de développement
du ministère, pour en faire une grande équipe unie, qui serait vraiment experte
en matière de développement puis de services aux parents pour l'inscription des
enfants?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Bien, la vision est magnifique. En soi, on ne peut pas
être contre la vertu. Je suis une femme d'affaires, développement des affaires.
Je viens d'univers qui ont travaillé des grosses bases de données. En soi,
c'est extraordinaire, cette opportunité-là, donc la vision est intéressante.
Mais le fait d'être aujourd'hui dans une entreprise privée qui a développé ce
produit-là, qui dit : Il faut y travailler, il faut absolument qu'on
travaille à une refonte... On a déposé génération 2, en mai, pas pour
rien, parce qu'on y croit, parce qu'on croit,
là, qu'il y a de l'amélioration possible et qu'il y a vraiment un potentiel
derrière tout ça. Mais, aujourd'hui, comme j'ai dit, on n'a rien, de la
part du gouvernement, qui nous assure un suivi. Puis, quand je suis assise dans
mon bateau, comme cheffe de... comme capitaine de mon bateau, avec mes
employés, puis que je rame sur une mer plate, avec une fin éventuelle, c'est
difficile de dire à mes employés : Continuez à ramer.
• (11 h 50) •
M. Lacombe :
Je comprends, je comprends. Là, il nous reste peu de temps, mais je vais
conclure en disant : Je pense que c'est clair, là, l'argument, là.
L'argument de fond que vous présentez, il est là. Et moi, je ne pense pas que
c'est un bon argument, je ne pense pas qu'on doit se baser sur cette peur-là
d'employés qui ont peur de perdre leur emploi pour se dire qu'on n'ira pas de
l'avant avec un outil qui est si important. Parce que, bref, ce que vous nous
dites, c'est : Vous devriez gérer... Vous dites : On devrait gérer le
guichet unique, mais le gouvernement devrait payer.
On devrait garder le lien avec les services de garde, mais c'est le gouvernement qui devrait avoir les sanctions. Vous
devriez... la coop devrait plancher sur le 2.0, le gouvernement devrait faire
confiance. Moi, je dis : Faisons-le ensemble,
faisons-le ensemble, à l'interne, au gouvernement.
C'est un outil trop important
pour qu'on le laisse, à mon sens, à
une organisation privée, qui, soit dit en passant, je veux
le souligner, là, est financée par des fonds qui sont publics, parce qu'ils viennent des services de garde, majoritairement. Donc, moi, je vous tends la main pour la suite des choses.
La Présidente (Mme
D'Amours) : ...maintenant, je cède la parole au député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci, et, si possible, Mme la Présidente, peut-être d'ajouter le temps de mes
collègues, si...
La Présidente (Mme
D'Amours) : J'ai besoin du consentement. Est-ce qu'il y a consentement
d'ajouter le temps des collègues qui ne seraient pas présents au député de
LaFontaine? Est-ce que j'ai consentement?
M. Lacombe :
Bien, écoutez, en toute bonne foi, je ne sais pas si c'est habituel, mais, moi,
je vais dire oui.
La Présidente (Mme D'Amours) : J'ai
le consentement. Donc, M. le député, oui...
M.
Tanguay : Vous pourrez me dire avec... me faire signe, je
vais.... Là, c'est commencé, puis... Bien, merci beaucoup, merci au ministre de
permettre ça. Je sais que ça lui fait plaisir de m'entendre, alors il se fait
un petit cadeau à lui-même, je le connais.
Heureux de vous
parler. Mme Sévigny, Mme Huard, merci d'être là, aujourd'hui, avec
nous. On pourra rétropédaler, si vous voulez, pour la portion de la collègue.
Il y a combien
d'enfants sur la liste d'attente à l'heure où on se parle?
Mme
Sévigny (Marie-Claude) :
Bien, en fait, je pense que ça, c'est rendu assez public ce printemps. Il y avait un fichier chez nous... En fait, chez nous, dans nos dossiers, il y a
86 787 enfants en attente,
mais qui sont des dossiers d'enfants qui ne sont pas purs, puis je ne dirai
pas... je répète toujours la même chose, parce que l'information sur la mise en
service, donc sur l'occupation, ne réside pas dans la base de données de La
Place 0-5, et elle dépend du bon gré des services de garde, et il n'y a
pas de directive qui les force à le faire, ou de sanctions. Donc, notre liste
ne peut pas être prise en compte, en disant...
M. Tanguay :
Non, non, je comprends, puis dans les questions que je vais poser, vous allez
voir que je comprends. Donc, c'est 86 787 en date d'aujourd'hui?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Du mois de mai.
M. Tanguay :
Du mois de mai. Parfait. Vous avez affirmé tout à l'heure, puis on l'a su, que
cette liste-là, il faut faire du travail là-dessus, là, parce qu'il y a des
doublons, et ainsi de suite, là. Cette liste-là est communiquée, à toutes les
nuits, au ministère de la Famille?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : À toutes les nuits. Les ajouts de nouveaux dossiers,
les modifications aux dossiers des enfants, les changements de choix de service
de garde, les changements de priorités sont envoyés, à chaque nuit, au ministère
de la Famille.
M. Tanguay :
Donc, le ministère de la Famille a le chiffre?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Le ministère de la Famille a la base de données au
complet.
M. Tanguay :
La base de données au grand complet.
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Oui.
M. Tanguay :
Parfait. À qui vous envoyez ça? À quel département? Comment s'appellent les
gens à qui vous envoyez ça?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : C'est le groupe de pilotage. C'est dans ICSGE.
M. Tanguay :
ICSGE, O.K. J'ai déjà vu l'acronyme, là, qui a changé récemment.
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Oui, c'est ça. C'est pour ça que je suis un petit peu
mal prise de vous répondre, là.
M.
Tanguay : D'accord, parfait. Vous avez dû tomber en bas de
votre chaise quand on questionnait... quand je questionnais, le 6 mai dernier, 6 mai 2021, le ministre,
quand je lui disais : Est-ce qu'il est possible, pour le ministère
de la Famille, de connaître plus précisément,
dans un délai plus court, le nombre total d'enfants sur la liste d'attente? Et
là il m'avait répondu, et je le cite : «Bien, ce n'est pas le
ministère de la Famille, d'abord, qui fait cette lecture-là, c'est la
Coopérative Enfance Famille qui est chargée de faire ça.» Vous avez dû tomber
en bas de votre chaise quand vous avez entendu ça?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : On a réagi, d'ailleurs, à ça, effectivement.
M. Tanguay :
Bon. Alors, une fois que l'on a dit ça, vous avez... Parce qu'après ça, il y
avait tout un débat, puis je vais fermer la parenthèse, à savoir qu'il ne
pouvait pas, comme ministère... Parce que vous, vous ne faites pas, justement,
le traitement de la donnée. Vous colligez la donnée, mais le traitement de la
donnée, qui nous fait passer — vous voyez qu'on connaît le dossier,
hein? — qui
nous fait passer de 86 787 à 50 000 plus, environ, ce traitement-là
est fait par le ministère de la Famille, n'est-ce pas?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Exact.
M. Tanguay :
Alors, s'il est capable de le faire le 31 décembre puis le 30 juin,
quand le ministre nous disait : Bien, on peut le faire juste deux fois par
année, à cause de vous, qu'on n'a pas la donnée, bien, il est capable de le
faire avec des approches analytiques, capable de le faire à toutes les
semaines, s'il le veut.
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Nous, la donnée est envoyée à chaque nuit. Comment
elle est traitée, ça ne fait pas partie de notre mandat. Notre mandat est de
s'assurer de prendre l'information sur les besoins des parents, de s'assurer de
donner tous les outils aux parents pour nous fournir cette information-là,
mettre à jour ces dossiers. Le reste, l'information est envoyée au ministère de
la Famille pour lui permettre, à lui, de prendre ses décisions et de travailler
la donnée.
M. Tanguay : Parfait. Vous...
Il y a combien de personnes qui sont à l'emploi de la coopérative?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Environ
36, 37, je pense, cette semaine. On a eu deux nouveaux ajouts.
M. Tanguay : O.K. Et vous
avez une répartition régionale. Comment ça se ventile au niveau régional?
J'imagine... ou vous êtes...
Mme Sévigny (Marie-Claude) : On est
tous au même endroit.
M. Tanguay : À Québec?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Non. En
fait, en ce moment, on est tous chacun dans nos maisons...
M. Tanguay : Oui, oui, tout à
fait.
Mme Sévigny (Marie-Claude) : ...dans
la région de Montréal.
M. Tanguay : Je ne vous
demanderai pas les adresses de résidence. Dans la région de Montréal, O.K. Et
ça prend ça, je veux dire, ça prend... Vous êtes, quoi, 36, 37, vous avez dit?
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Mettons, 37, puis je vous dirais que, là-dedans, plus de 50 % des employés
sont au service à la clientèle. Donc, ce sont des gens qui servent les parents,
donc, qui accompagnent les parents, ceux qui ont plus de difficulté avec le
site Internet, ceux qui ont plus de difficulté au niveau de la littératie,
difficulté au niveau de langue, qui on besoin d'un meilleur accompagnement.
Donc, c'est à ces gens-là qu'on va parler, pour... du côté parents. Et on a
aussi un service d'accompagnement pour les responsables en milieu familial, au
niveau de leur soutien technique, sur leur outil.
M. Tanguay : Combien de
personnes, à peu près, dédiées à ça?
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Comme je vous dis, au total, c'est à peu près une vingtaine d'employés.
M. Tanguay : Serait-il
possible... Puis je m'excuse, vous allez dire : Coudon, il est pressant,
lui. Mais c'est parce que je n'ai pas beaucoup de temps. Mais je vous remercie
beaucoup pour l'efficacité de vos réponses.
Pourriez-vous prendre l'engagement de communiquer
au secrétariat de la commission, s'il vous plaît, si vous le désirez — c'est
une demande que je vous fais — une sorte d'organigramme de qui fait
quoi? Donc, pour les services de garde en milieu familial, on a x nombre de
personnes, puis comment vous organisez votre travail. Parce que, si le ministre a le désir, dans le projet de
loi, de tout importer ça au sein du ministère de la Famille, vous pouvez
être assurée qu'on va s'assurer que le minimum de services garantis va être
assuré selon la ventilation. Parce que vous avez... Quand on dit, de façon
désincarnée : Bien, vous avez l'expertise, ce serait peut-être le fun de
ne pas la perdre, moi, je pense qu'il ne faut pas la perdre. Puis, quand vous
dites : Non, non, non, là-dessus, ça m'en prend... je dis un chiffre,
là... ça m'en prend 10, 12 pour faire le suivi des appels aux parents, il ne
faudra pas perdre ça en route, là...
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Effectivement.
M. Tanguay : ...parce
que c'est une liste, je vous dirais, qui est excessivement émotive. Il y a des
listes moins émotives que ça, là. Ce n'est pas une liste pour savoir si je vais
avoir un billet de spectacle, là. C'est une liste pour : Je vais-tu avoir
une place? Puis vous gérez de l'humain, puis ça, c'est excessivement important.
Je vais passer à une autre question, mais je ne
sais pas si vous vouliez compléter là-dessus?
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Bien, en fait, je vous rejoins pour ce qui est de tout le côté humain. Ça fait
partie de nos préoccupations au niveau de rapatrier le guichet. Comme je
disais, pour moi, rapatrier une base de données, rapatrier des 1 puis des 0 qui
servent à programmer quoi que ce soit, c'est mécanique, mais quand on pense à
un service qu'on offre à la population, qui est rendu aussi essentiel que l'accès
aux places en services de garde, bien, je pense qu'il faut faire attention,
effectivement, pour être capables d'offrir ce service-là. On répond, comme je
disais tantôt, à plus que 40 000 appels, par année, de parents, on
répond à plus de 8 000 courriels de parents. Donc, il faut être
capables de suivre ce soutien-là, plus ce qu'on fait pour les services de
garde, dans leur accompagnement, pour être capables, justement, d'offrir des
places aux parents.
• (12 heures) •
M.
Tanguay : On a vu qu'il y a eu... Puis je ne veux pas embarquer
dans le litige, s'il y a litige, là. Vous pourrez me répondre quand même. Depuis que l'on a vu qu'il
y a eu un bris de sécurité, est-ce que votre système informatique est à
point?
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Totalement sécuritaire.
M. Tanguay : Totalement
sécuritaire. Et ça, vous avez été, je crois, certifiés par une entité
gouvernementale, dont j'oublie le nom, qui vise, justement, à s'assurer et à
certifier de garantir la sécurité informatique des données, n'est-ce pas?
Comment s'appelle...
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Le
centre de cyberdéfense du gouvernement a été un de ceux qui a été... qui a mis un sceau, à la fin, avant qu'on ouvre,
effectivement. Mais il y a quand même trois auditeurs en cybersécurité
qui ont passé au travers de tous nos processus, de toutes nos façons de faire,
et actuellement nous sommes accompagnés par
une firme pour nous assurer de toujours maintenir les niveaux. Et je trouve
intéressant qu'hier la Vérificatrice générale a d'ailleurs déposé les
recommandations au niveau de la gestion de l'information dans l'appareil
gouvernemental, et je suis heureuse de vous dire que toutes les recommandations
qui sont faites, nous, on les applique.
M. Tanguay : Pouvez-vous me
confirmer que vous êtes capables d'offrir ce suivi excessivement important pour
les parents en français et en anglais?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : En
français, en anglais et même plus, dans certains cas.
M. Tanguay : Avez-vous des
exemples?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Bien,
au fil du temps, on a eu plus de 11 langues parlées différentes au service
à la clientèle.
M. Tanguay : Wow!
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Je ne
peux pas l'assurer...
M. Tanguay : Non, je
comprends.
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
...parce qu'évidemment on ne peut pas embaucher uniquement sur une base de langue. On embauche des gens pour leur
empathie, pour leur capacité à apprendre le service qu'il faut offrir chez
nous. Mais oui, on... dans le passé, on est capables de... on a été capables...
Aujourd'hui, on a quand même l'espagnol qui est toujours parlé, l'arabe qui est
toujours parlé.
M. Tanguay : Puis ça, c'est
important, parce qu'il y a des gens comme, tu sais, des nouveaux arrivants
première génération qui... je veux dire, c'est au coeur de leur vie aussi puis
de leur intégration. Encore une fois, vous ne pouvez pas le garantir, mais
de...
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Non,
mais on travaille avec des interprètes. On a toujours la possibilité d'avoir
quelqu'un au niveau de la famille qui nous aide à être capables de faire le
lien avec la famille qui ne parle pas ni français ni anglais.
M. Tanguay : O.K. Mme la
Présidente, il me reste combien de temps?
La
Présidente (Mme D'Amours) : Il vous reste, de votre temps de
11 minutes, 1 min 20 s, mais le consentement que
j'ai demandé aux gens... Pouvez-vous arrêter le temps, s'il vous plaît? Oui.
M. Tanguay : Ah! Merci.
Désolé.
La Présidente (Mme D'Amours) : Le
consentement que j'ai demandé ne tient plus, parce que la députée...
M. Tanguay : Mais pour ma...
l'autre collègue, deux minutes?
La Présidente (Mme D'Amours) : Bien,
par mesure d'équité, je le partagerais avec la députée.
M. Tanguay : Oui, oui, tout à
fait.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Parfait. Ça fait que, donc, on rajouterait... Le secrétaire va me le dire.
Une voix : ...
M.
Tanguay : Non, parce qu'à un moment donné il faut décider.
C'est-tu correct?
La Présidente (Mme
D'Amours) : Elle ne sera pas là, Mme la députée de Joliette, donc le
temps va être réparti. Vous aurez 1 min 20 s, un peu plus, là.
Pardon?
Le Secrétaire :
...
La
Présidente (Mme D'Amours) : 1 min 50 s de plus.
M. Tanguay :
Parfait. Je vous remercie beaucoup, je veux...
La Présidente (Mme
D'Amours) : Vous êtes à 2 min 68 s.
M.
Tanguay : Plus 1 min 50 s O.K.
La Présidente (Mme
D'Amours) : Non, en tout, en tout, en tout.
M. Tanguay :
Merci, Mme la Présidente. Désolé, on s'excuse. Alors, on peut repartir le...
Puis je m'excuse auprès du ministre, là, j'ai dû interrompre l'excellent
échange, là, qu'il suit avec grand intérêt. Il aime toujours ça, nous entendre.
Et ça, c'est important d'avoir ce réflexe-là. Je suis content que vous l'ayez
dit, parce que c'est important, c'est important d'avoir ce réflexe-là.
Avez-vous
eu des discussions, des approches? Le projet de loi a été déposé. Il y aura un
rapatriement, il y aura des changements. Avez-vous eu une quelconque
communication de la part du ministère, vous dire : Bon, bien, on est en
train de... Est-ce qu'il y a une vérification diligente qui a été faite de ce
que vous aviez? Il y a-tu de quoi qui a commencé dans le sens de : On va
vous rapatrier?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Des premières discussions ont eu lieu.
M. Tanguay :
O.K. À partir de quand?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : La veille du dépôt du projet de loi n° 1.
M. Tanguay :
O.K. Avez-vous des indications... Le ministre, vous l'avez souligné, se donne
le droit de le gérer, lui, le ministère, un tiers ou un autre organisme.
Avez-vous des indications sur comment ça va retomber?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : Non, pas pour l'instant.
M. Tanguay :
O.K. Vous dites — puis
ça, j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que je ne suis pas expert en
informatique — vous
dites : «Comment le gouvernement compte-t-il attribuer un rang unique aux
enfants, alors que la liste est en constant
mouvement?» C'est comme si vous me disiez, là... Bon, je vais prendre le
chiffre de 51 000, je ne prendrai pas le 86. Il y a un, deux,
trois, woup! jusqu'à 51. C'est comme si vous me disiez que : Moi, l'enfant
qui est le rang 112, si le 1 part pour avoir une place, il ne tombera pas
automatiquement à 111. C'est ce que vous dites?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : En fait, c'est très complexe, la gestion des rangs,
puis c'est pour ça que j'ai fait un petit
dessin d'autobus dans mon mémoire, parce que ça semble trivial, le rang, mais
ce ne l'est pas. On ne peut pas penser que les gens... les enfants qui
sont en attente d'une place sont en attente comme s'ils attendaient d'embarquer
dans l'autobus scolaire, ce n'est pas comme
ça. Premièrement, il y a plusieurs autobus, parce qu'il y a plusieurs
destinations. Donc, nécessairement, ils ne sont pas en attente dans le même
rang, selon l'endroit où ils vont aller, le nombre de personnes qui sont en
attente à ce même endroit-là, l'âge des enfants qui sont en attente en même
temps que le nôtre à cet endroit-là, et par la suite, bien, s'appliquent les
priorités qu'on va vouloir accorder.
Donc, si
effectivement on a un enfant qu'on veut prioriser, par exemple un enfant à
défis particuliers qu'on veut prioriser dans l'autobus pour un tel service de
garde, bien, s'il vient de déménager dans cette région-là puis qu'il est
priorisé, bien, ça se peut qu'il bumpe tout le monde puis qu'il devienne le n° 1 versus les autres. Ça fait que c'est pour ça que c'est
complexe, la gestion du rang.
La Présidente (Mme
D'Amours) : 30 secondes.
M. Tanguay :
30 secondes. Y a-t-il un moyen technique de faire ça? Il y a une
possibilité?
Mme Sévigny
(Marie-Claude) : C'est tout un algorithme qui... Ça permettrait de
suivre non seulement les rangs individuels... Mais un rang unique? Je ne le
vois pas.
M. Tanguay :
O.K. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
D'Amours) : Merci beaucoup, M. le député. Donc, je vais céder
maintenant la parole à la députée de Sherbrooke. Vous avez
3 min 40 s
Mme Labrie : Un cadeau du ciel.
Merci beaucoup. Je vais en profiter pour commencer par m'excuser d'avoir... de
ne pas avoir assisté à votre présentation, on est en train d'adopter le projet
de loi pour les tribunaux spécialisés, puis j'excuse ma collègue, qui était au
même endroit que moi. Donc, c'est pour cette raison-là qu'on n'était pas là.
Mais j'ai quand même votre mémoire sous les
yeux, puis justement je voulais discuter de la question du rang avec vous, parce que ça m'a fait sursauter quand
j'ai vu l'intention du ministre de donner le rang aux parents. Je comprends les enjeux que vous
nous décrivez. Est-ce que vous pensez que ça ne va pas créer des déceptions
supplémentaires de donner aux parents c'est quoi, leur rang, puis que
finalement ils constatent que, ah! ils étaient 38e pour l'installation qu'ils
avaient demandée, mais finalement ils sont rendus 42e ou... Finalement, ils
avancent, ils reculent.
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Poser la question, c'est y répondre. Autant c'est difficile pour nos gens de
service à la clientèle d'essayer d'expliquer aux parents : Je suis désolé,
je ne peux pas vous donner votre rang, ce qui est notre phrase qu'on répète de
façon quotidienne... que d'aller dire à un parent : Effectivement, vous
êtes le prochain sur ma liste, puis que finalement ce n'est pas vraiment le
prochain sur la liste, parce qu'il y a quelqu'un qui a une priorité
supplémentaire qui vient de s'ajouter dans l'autobus parce qu'il vient de
déménager, parce qu'il vient de... justement, d'embarquer dans cette liste-là,
et il a une priorité supplémentaire, ça vient bumper tout le monde, ça crée de
la déception.
Dans l'approche qu'on a proposée au niveau
génération 2, c'était beaucoup plus d'aller leur donner une indication du
nombre d'enfants de la même catégorie d'âge qui pouvaient être inscrits sur
cette liste-là comme eux. Ça ne donne pas une indication du rang, ça ne me
donne pas une indication de quand est-ce que je vais avoir une place, mais ça me donne une indication de la
difficulté peut-être pour moi d'avoir une place dans ce service de
garde là.
Par la suite, évidemment, au niveau
technologique, dans le temps, on peut accumuler de l'information qui va pouvoir
permettre d'aller faire des modèles prédictifs et, éventuellement, par type de
service de garde et peut-être même par service de garde, finir par donner une
idée de : dans cette région-ci, selon ce type de politique d'admission là,
dans ce genre de région là, ça pourrait prendre entre tant de temps et tant de
temps pour avoir une place. Mais ça ne sera jamais un rang précis, puis ça, je
ne le souhaiterais pas.
Mme Labrie : Donc, vous nous
déconseillez d'inscrire le rang...
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Tout à fait.
Mme Labrie : ...mais vous
pensez qu'il y a des moyens technologiques de fournir quand même un horizon
d'attente pour les parents. Ça, c'est possible?
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Qui n'est pas instantané, qui serait à bâtir, parce que, pour pouvoir avoir
cette information-là, il faut avoir bâti du passé pour pouvoir arriver à
dire : Aujourd'hui, selon nous, ça va prendre tant de temps. Il faut que
j'aie de la donnée passée pour pouvoir le dire.
Mme Labrie : Vous dites :
Parce que les politiques d'admission risquent de changer après l'adoption de la
loi, puis qu'on n'aurait pas assez de données pour le faire maintenant?
Mme Sévigny (Marie-Claude) :
Puis, encore là, moi, je ne les ai pas, ces données-là, je les... Je ne suis
pas... J'ai l'attente, mais je n'ai pas l'occupation. Donc, ça prend quelqu'un
qui va aller faire la jonction entre la date d'inscription du parent, la date à
laquelle il y a eu une occupation et quel était l'environnement dans lequel il
s'est mis en attente et qu'il y a eu l'occupation. Cette donnée-là doit être
prise, accumulée, bâtie dans un modèle prédictif pour pouvoir être capable
éventuellement de faire une projection.
Mme Labrie : Là, on part de zéro
pour ça en ce moment?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Moi, je
n'ai rien de mon côté.
Mme Labrie : O.K. Puis ça ressemble
à quoi, le délai moyen? Ça, vous dites que vous êtes... vous le savez... Ça,
vous n'avez aucune idée?
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Aucune
idée.
Mme Labrie : Vous n'avez...
Mme Sévigny (Marie-Claude) : Le ministère
de la Famille a probablement plus d'information que nous pour pouvoir être
capable de répondre à ça, vu qu'il a les dates d'inscription au guichet unique
et qu'il a, de l'autre côté, dans ses outils, la date d'occupation.
Mme Labrie :
Mais vous, la date...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, merci. Je suis désolée, le temps étant écoulé. Je vous remercie pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
d'accueillir nos prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 10)
(Reprise à 12 h 16)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à la Fédération des
intervenantes en petite enfance du Québec-Centrale des syndicats du Québec.
Avant de vous
parler, j'aurais besoin d'un consentement pour ce bloc
d'échange, ce qui veut dire qu'il y
aurait un échange de places, d'intervenants. Donc, j'ai besoin du consentement,
qu'on commence par la députée de Joliette... la députée, c'est-à-dire, de Sherbrooke,
ensuite la députée de Joliette, et on finirait avec le député de la première...
de l'opposition officielle. Alors, j'ai besoin du consentement.
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Donc, je vous rappelle, chères invitées...
Une voix : ...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Pardon, monsieur... Oui, et il est certain qu'on va devoir avoir un peu plus de
temps que prévu. Donc, j'ai besoin de votre consentement pour qu'on termine à
une heure... à quelques minutes plus tard que l'heure prévue.
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Donc, je vous rappelle, chères invitées, que vous avez 10 minutes pour
votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à
votre exposé. La parole est à vous.
Fédération des intervenantes en petite enfance du
Québec-Centrale
des syndicats du Québec (FIPEQ-CSQ)
Mme Camerlain (Line) : Bonjour.
Alors, je vous remercie, je remercie le ministre et les membres de la commission
d'avoir accepté de nous entendre aujourd'hui. Je suis Line Camerlain, vice-présidente
des la Centrale des syndicats du Québec, et
je suis accompagnée de Valérie Grenon, qui est présidente de notre Fédération d'intervenantes en petite
enfance, ce qu'on appelle la FIPEQ. La CSQ représente 200 000 membres
dont près de 13 000 font partie de la FIPEQ, travaillant dans les centres
de la petite enfance ou comme responsables en services éducatifs en milieu
familial régis et subventionnés à travers le Québec. Considérant le temps qui
nous est alloué, nous ferons un bref survol des recommandations principales de
notre mémoire.
Je commencerais en disant qu'à la lecture du
projet de loi, nous avons constaté avec satisfaction l'effort du gouvernement
du Québec pour remettre enfin le réseau de la petite enfance sur les rails.
Cependant, il est primordial à nos yeux que
les nouvelles places annoncées soient développées dans le réseau public de CPE
et de milieux familiaux. Un quart de siècle après l'implantation de la
politique familiale qui a fait la fierté et la renommée du Québec, plus rien ne
justifie que nous comptions actuellement plus de places en garderie privée
qu'en CPE. Pour nous, c'est clair, il faut un réseau de la petite enfance
composé à 100 % de places en CPE et en milieu familial régi et
subventionné, soit des places de qualité qui répondent aux besoins des
familles.
Je pourrais résumer le mémoire qu'on vous
présente aujourd'hui en quatre principes. Ces principes reflètent notre mission, nos valeurs et nos orientations.
Tous les enfants du Québec doivent avoir des chances égales d'accéder
à des services de qualité qui entraîneront
des répercussions tout au long de leur vie. Le développement de l'enfant fait
partie des responsabilités de l'État. Les services éducatifs à la petite enfance
ne sont pas des commodités marchandes. Et il faut assurer des conditions de
travail décentes à toutes les intervenantes et intervenants du réseau de la
petite enfance.
Aussi, nous recommandons que les enfants
occupant des places en garderie privée non subventionnée soient intégrés au
réseau public subventionné. De plus, en lien avec la mise à jour économique qui
sera présentée dans les prochaines heures, nous sommes aussi d'avis que le
crédit d'impôt pour frais de garde devrait être aboli. À ce sujet, nous
considérons que, si le crédit d'impôt n'est pas aboli, le ministère de la
Famille doit notamment imposer un moratoire sur la création des garderies non
subventionnées. Il faut également fixer des cibles de conversion de places en
privilégiant la conversion en CPE.
Je conclurais
en rappelant que depuis 1997 le Québec est un exemple pour l'ensemble de la population mondiale en matière de la petite
enfance. La politique familiale étant un de nos joyaux et, avec celle-ci, la
création des services éducatifs subventionnés, le Québec
a un taux de participation des femmes mères d'enfants parmi les plus élevés au monde. Pour la CSQ et la FIPEQ, il faut absolument
que l'esprit qui a mené à son développement... au développement de cette politique
demeure, c'est-à-dire de favoriser le développement des enfants et l'égalité
des chances pour tous. C'est fondamental pour nos tout-petits.
Je cède la parole à ma collègue.
• (12 h 20) •
Mme Grenon (Valérie) : Merci
beaucoup. Merci, Line. Et je voudrais quand même prendre le temps de remercier
les membres de la commission, là, de nous entendre aujourd'hui.
Nous croyons qu'il faut avoir le courage d'agir
pour le long terme afin d'avoir un développement cohérent au bénéfice de tous
les parents. Nous déplorons donc que, dans le projet de loi, le gouvernement
maintienne un système à deux vitesses, public et privé, donc, ce qui n'est pas
souhaité par nous ni par les parents. Il est important de rappeler que, parmi les places annoncées par le ministre de la
Famille en août dernier, près de
41 % sont développées en garderie
privée subventionnée, bien loin de la cible traditionnelle de 15 % du
ministère. De plus, dans l'étude d'impact réglementaire, le gouvernement estime que 75 % des personnes non
reconnues qui feront le saut en milieu familial régi ne seront pas
subventionnées. Je vais me permettre de redire ce que Line disait tout à
l'heure, que nous souhaitons un réseau de CPE et de milieux familiaux
entièrement régis et subventionnés.
Comme vous avez pu le constater également dans
notre mémoire, nous abordons notamment la question qui est très importante, c'est les ratios. Il y a deux choses sur les ratios
que je veux vous renommer. Nous recommandons entre autres que le
ministère évalue la possibilité par des projets pilotes que les RSE, donc les
responsables en services éducatifs en milieu familial, puissent accueillir
quatre enfants de moins de 18 mois si elles sont seules et six enfants de moins
de 18 mois si elles sont assistées, et bien sûr nous demandons également que le
ministère établisse des ratios éducatrice-éducateur par enfants par groupes et
non par installation.
Comme il est
présenté actuellement, nous craignons que le projet de loi crée des enjeux de
sécurité pour les enfants, puisqu'il
permet l'augmentation du nombre d'enfants par installation de 80 à 100, mais ne
limite pas le nombre d'enfants par
éducatrice. Il est clair pour nous que, peu importe le nombre de places au
permis, le ratio par éducatrice devrait être respecté en tout temps.
Actuellement, nous vivons déjà des problèmes criants concernant les ratios par
installation.
Nous avons aussi une préoccupation quant à la
disposition des CPE qui permettrait le rehaussement du nombre d'enfants par
installation. La modification des capacités maximales ne devrait pas se
traduire sur une surcharge de travail pour les intervenantes et les
intervenants en poste déjà en CPE. L'embauche du personnel nécessaire pourrait
et devra être envisagée. De plus, il est important pour nous que l'accueil des
nouveaux groupes ne suscite pas de pertes de locaux déjà existants dans les
CPE. Par exemple, plusieurs CPE ont des locaux destinés à la motricité. Donc,
ces locaux-là ne devraient pas être sacrifiés pour l'accueil de nouveaux
groupes.
Vous me permettrez également finalement
d'aborder un sujet qui me tient particulièrement à coeur, soit le service aux
enfants ayant des besoins particuliers. Nous proposons notamment dans notre
mémoire de réviser la politique d'intégration des enfants ayant des besoins
particuliers, bien sûr avec la collaboration des milieux de travail et des
parents, et de faciliter l'accès à différents services professionnels en
collaboration avec le ministère de la Santé et des Services sociaux. Nous
croyons important d'alléger le processus de reconnaissance de l'enfant ayant
des besoins particuliers, et surtout d'assurer la participation des éducatrices
et éducateurs et des RSE en milieu familial à l'ensemble des étapes de la
préparation et de la révision des plans d'intégration des enfants. Finalement,
nous sommes d'avis qu'il faut mettre en place un processus pour s'assurer que
les sommes allouées pour les enfants ayant des besoins particuliers soient
utilisées en conformité avec les besoins véritables des enfants ayant des
besoins particuliers et qu'il faut déplafonner le nombre limité de places EBP
en centre de la petite enfance ou en milieu familial régi et subventionné pour
donner une chance égale à tous les enfants qui en ont besoin. Je vous remercie.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange, et, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Lacombe : Merci. Pour
16 minutes...
La Présidente (Mme D'Amours) :
30 secondes.
M. Lacombe : ...30 secondes.
Merci. Bonjour à vous deux. Merci beaucoup de vous prêter à l'exercice ici
pour, évidemment, faire tout le travail qu'on a à faire pour améliorer le projet
de loi que j'ai déposé, qui, je dois le souligner,
est basé sur, notamment, de nombreux échanges qu'on a eus depuis le début
du mandat avec des partenaires, dont vous, qui nous aviez fait des
demandes, des recommandations, basé aussi sur la consultation qu'on a tenue au
printemps, ce qui nous a menés à déposer... bien, en fait, d'abord à présenter le
Grand chantier pour les familles, qui, je pense, est une excellente nouvelle — d'ailleurs,
vous l'avez salué — et
le projet de loi n° 1, qui sert à mettre donc en vigueur certaines des
propositions qu'on a à l'intérieur des 45 qui sont dans le Grand chantier, et,
là encore, bien, on mène d'autres consultations pour s'assurer qu'on a le
meilleur projet de loi possible. Donc, je pense qu'à la fin, bien honnêtement,
on aura quelque chose de pas pire.
Mais, ceci dit, c'est ça, on peut toujours
l'améliorer. Donc, allons-y avec les questions que j'ai pour vous à la suite de
votre présentation, du dépôt de votre mémoire.
Je rebondis tout de suite sur quelque chose que
vous venez de dire. On est tous là pour, en principe, respecter la cible
informelle, parce qu'il faut dire que c'est informel, c'est une convention qui
veut que... bon, on acceptait dans la mesure du possible
85 % des projets en CPE, 15 % en garderie subventionnée. Par contre,
vous avez nommé bien précisément l'exemple de cet été, en donnant les
proportions, qui n'étaient évidemment pas 85-15. La question que je vous pose,
c'est : Qu'est-ce qu'on fait, comme cet été, concrètement, ça nous est
arrivé, lorsqu'on ne reçoit pas assez de projets de CPE pour atteindre cette
proportion-là? Est-ce qu'on attend, on refait un autre appel de projets ou on
va de l'avant, comme on l'a fait avec des garderies subventionnées?
Mme Grenon (Valérie) : Excusez-moi,
je voulais juste être sûre, ne pas l'enlever pour rien. Bien, dans le fond,
nous, ce qu'on souhaite... Puis je pense que dans le projet de loi, M. Lacombe,
vous allez peut-être atteindre un objectif de plus de CPE. Ce n'est pas la
première fois qu'on s'en parle, mais, souvent, quelqu'un qui veut créer un CPE
comme ça avec des parents, bien, c'est très complexe, donc probablement que
c'est là qu'on a moins d'appels d'offres. Un
CPE qui a déjà cinq installations, il y avait un frein, parce qu'il ne pouvait pas
en avoir plus. Puis là, je parle bien
de CPE, donc c'est des conseils
d'administration qui gèrent le CPE.
Bien, ces directions-là et ces conseils
d'administration là, bien souvent, sont plus chevronnés et plus
aptes à ouvrir d'autres installations, puis j'en ai même en tête, moi, que, selon moi, quand le projet de loi va être ouvert... pas être ouvert, mais être adopté, pardon, va
permettre...
M. Lacombe : On le souhaite, on le
souhaite.
Mme Grenon (Valérie) : ... — oui,
bien, nous aussi, on le souhaite, il y a certains aménagements, mais on le
souhaite sincèrement — et
va probablement permettre à l'ouverture de plus que ça. Oui, on est d'accord,
mais je pense qu'il faut se concentrer... Tu sais, les CPE ont démontré la
qualité...
M. Lacombe : Tout à fait, oui.
Mme Grenon (Valérie) : ...du service
qui a été fait, le nombre de plaintes est beaucoup moins... beaucoup moindre.
Donc, si on vise quelque chose, bien, on peut se mettre les moyens en place,
puis je pense que le projet de loi en est un, un moyen qui va permettre
possiblement... avoir peut-être plus d'offres, d'appels d'offres. Mais c'est
sûr qu'on peut être contraint par le tout, mais il faudrait éviter que ça
soit... excusez-moi le terme, mais des entreprises comme McDonald's qui ne
veulent faire juste que des chaînes de services de garde puis que la qualité
soit diminuée.
• (12 h 30) •
M. Lacombe : Oui. Je comprends.
Bien, ça, d'ailleurs, et c'est important pour moi, on veut se prémunir contre ça. Donc, dans le projet de loi, par exemple, on va retirer le nombre maximal d'installations pour les CPE, mais on ne le
fera pas, notamment, pour les entreprises, parce que, pour
nous, effectivement, c'est important qu'on ne développe pas des chaînes de
garderies.
Mais je suis certain, puis vous venez de le
confirmer, je pense, là, si je comprends bien, comme ministre de la Famille, je
suis devant un choix où, d'une part, il y a des parents, et vous le mentionnez
souvent, principalement des femmes qui veulent retourner sur le marché du
travail, qui attendent une place pour leur enfant, et, d'autre part, bien, j'ai
les projets qui entrent pour développer ces places-là, et, lorsqu'on n'en a pas
suffisamment, comme ça a été le cas cet été, pour aller de l'avant avec
85 % de places en CPE, 15 % en garderie privée, bien, je pense que le
bon compromis à faire, c'est d'y aller avec
le maximum de places en CPE, d'autoriser tout ce qu'on peut, mais évidemment,
pour la balance, d'autoriser le reste.
Et d'ailleurs, c'est ce qu'on a fait, là. Je
prends quelques secondes pour le dire. Par exemple, cet été, on a reçu moins,
en proportion, de projets de CPE que de projets de garderie privée subventionnée.
Par contre, on en a autorisé plus, en
proportion, évidemment. À la fin, les places qui ont été octroyées l'ont
été majoritairement, même si
on n'était pas à 85 %, en CPE. Mais ce
n'est pas toujours possible, parce que parfois les projets ne sont simplement
pas déposés.
Je rebondis sur autre chose. Vous avez parlé
tantôt de sécurité, d'enjeux de sécurité qui... Évidemment, il faut toujours
que les ratios restent sécuritaires. Vous avez aussi des questions, bon, quand
on augmente les capacités. En même temps, et je vous avoue que je trouve ça un
peu contradictoire, donc je veux peut-être vous permettre de l'expliquer, vous
nous dites que vous souhaitez permettre aux responsables de services de garde
ou de services éducatifs, comme vous
souhaitez qu'on les appelle, d'accueillir quatre poupons. Moi, je vous avoue
que je trouve que c'est beaucoup trop, et qu'à mon sens ça pose un enjeu
de sécurité. Quand on comprend qu'en milieu familial la personne doit aussi préparer le dîner, par exemple, et qu'avec quatre
bébés, sans avoir l'aide de collègues évidemment, comme dans un CPE, ça
peut représenter un défi de sécurité, à mon sens. Vous n'êtes pas d'accord avec
ça?
Mme Grenon (Valérie) : Dans les
faits, ce qu'on vous propose, c'est de mettre sur pied un projet pilote.
Essayons-le. On sait qu'il y a des responsables en milieu familial, on sait
qu'il y a un besoin énormément criant des parents, parfois, que, plus jeunes,
ils les envoient en milieu familial puis, parfois, ils les envoient en CPE par
la suite. Donc, nous, ce qu'on veut mettre
en place, c'est un projet pilote. On sait qu'il y a probablement plusieurs
responsables en milieu familial qui refusent des parents, des enfants, parce
qu'ils n'ont plus de places poupons. Donc, il y a peut-être une manière
d'essayer de trouver une solution, pour répondre aux besoins des familles, qui
pourrait être plus facilitante. Et, oui, on le sait qu'ils ont leurs dîners, la
responsabilité, mais c'est un petit cocon familial. Donc, le plus petit,
18 mois, pourrait être plus facilitant pour l'intégration. Beaucoup de familles
choisissent le milieu familial pour leurs jeunes enfants. Donc, nous,
l'important, c'est la sécurité, donc il faut le voir.
Puis,
en CPE, rappelons-nous-le, oui, des fois, on pense que les collègues sont à
côté, mais le CPE, l'éducatrice qui
est toute seule, avec cinq poupons, bien, parfois, elle est toute seule toute
la journée, cinq poupons. Il y a quelqu'un s'il y a une urgence, oui, mais, dans la grande
majorité du temps, un petit CPE n'a qu'une pouponnière de cinq enfants.
Mais je pense qu'en le mettant en projet pilote... Testons la sécurité, la
faisabilité de ça, mais on serait ouverts à être des partenaires pour un projet
pilote, ça, c'est clair.
M. Lacombe :
Mais on comprend que... En tout cas, moi, je pense qu'il y a des enjeux de
sécurité importants, là.
Mme Grenon
(Valérie) : Oui, on est d'accord. C'est pour ça qu'on veut le mettre
en projet pilote pour regarder ce qui peut être fait.
M. Lacombe :
O.K., d'accord. Sur le crédit d'impôt... C'est la bonne journée pour en parler,
donc parlons-en, peut-être,
rapidement. Parce qu'encore là, je vois peut-être une contradiction et je veux
avoir votre avis là-dessus : Est-ce que vous êtes contre la
majoration du crédit d'impôt? Juste pour clarifier ça, en partant.
Mme Camerlain
(Line) : Merci. Bien, nous avons salué la fin de la modulation des
tarifs, là. Ce qu'on souhaite, c'est qu'il n'y en ait plus, de crédit d'impôt.
Puis là on va le savoir dans quelques heures, mais je pense que,
malheureusement, ça n'ira pas dans... mon souhait ne sera pas exaucé, je vais
le dire comme ça. Alors, c'est pour ça qu'on vous a fait une recommandation. À
défaut d'aller de l'avant... Puis vous l'avez dans notre mémoire, le coût, là,
ça a quand même explosé, le coût pour le gouvernement, là.
M. Lacombe :
Oui, ça représente plusieurs centaines de millions, vous avez raison.
Mme Camerlain
(Line) : 748 millions, là, selon nos chiffres, pour 2021, en
crédits d'impôt. Puis ça avait débuté en... Bien, en 2005, 166 millions.
M. Lacombe :
Donc, philosophiquement, vous êtes contre. Je voulais juste établir ça.
Mme Camerlain
(Line) : On veut être contre. Puis on vous propose, à défaut, arrêtez
de... moratoire sur le nombre de garderies...
M. Lacombe :
Je comprends bien. Vous souhaitez qu'on convertisse tout ça en CPE.
Mme Camerlain
(Line) : Oui.
M. Lacombe :
Ça, je le comprends, mais je voulais voir...
Mme Camerlain
(Line) : Dotez-vous d'un plan de match.
M. Lacombe :
...si vous étiez pour ou contre. Mais qu'est-ce qu'on fait, dans l'intervalle,
avec les enfants? Parce que le plan que vous
proposez... Si on disait «parfait, on fait ça», il reste qu'il y a des
familles, aujourd'hui, là, à l'heure
où on se parle, qui n'ont pas de places subventionnées. On parle de jeunes
familles. Le coût de la vie augmente, c'est difficile pour elles, elles
paient cher. Donc, vous vous opposez à ce que l'État vienne les aider
financièrement?
Mme Camerlain
(Line) : Bien, à quelque part, quand tu as une garderie privée non
subventionnée, tu as une business, hein? Tu choisis ta clientèle, tu choisis où
tu la fais puis tu fais un profit. Donc, cette philosophie-là, pour nous, elle
est inacceptable. Ce qu'on souhaite, c'est la conversion.
M. Lacombe :
Je comprends.
Mme Camerlain
(Line) : Puis dotez-vous d'un plan de match. Pendant x années, je vais
en convertir, puis, dans x années, le crédit d'impôt sera aboli.
M. Lacombe :
Mais, en attendant, là, si on pense aux parents, puis on ne pense pas aux
entreprises, aux parents qui...
Mme Camerlain
(Line) : Un échéancier.
M. Lacombe :
...qui veulent plus d'argent dans leurs poches, qui veulent peut-être que les
éducatrices soient mieux rémunérées pour qu'il y ait moins de taux de
roulement, aussi, vous ne pensez pas que c'est une bonne idée de bonifier ce
crédit d'impôt là?
Mme Camerlain
(Line) : Non. Bien, on souhaite...
M.
Lacombe : Donc, ce n'est pas une bonne idée de remettre de l'argent
dans le portefeuille de ces familles-là, là, qui nous disent qu'ils en
ont vraiment besoin?
Mme Camerlain
(Line) : Bien, présentement, vous en avez un, crédit d'impôt. Ce qu'on
souhaite, c'est que vous vous dotiez d'un plan de match pour en venir à
dire : Dans x années, il n'y en aura plus.
M. Lacombe : D'accord. On ne peut
pas faire les deux en même temps, à votre sens?
Mme Camerlain (Line) : Non.
M. Lacombe : O.K., je comprends
bien. Je vais peut-être passer la parole à ma collègue, qui avait aussi des
questions.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à la collègue de
Bellechasse.
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente. Merci, mesdames, merci d'être là. Je lisais dans votre mémoire, à
la page 9, la recommandation 9, justement, à laquelle vous
recommandiez de mettre sur pied un comité de travail, en fait, pour formuler
des recommandations quant à l'élargissement des services éducatifs aux parents
en situation de travail atypique. Moi, j'aimerais vous entendre, parce que,
vous savez, on s'en occupe, on y pense. Donc, je veux vous entendre, sur cette
recommandation-là, élaborer davantage, s'il vous plaît.
Mme Grenon (Valérie) : Excusez-moi,
je n'ai pas mis les bonnes boucles d'oreille aujourd'hui.
Mme Lachance : Masque et boucles
d'oreille, ce n'est pas compatible.
Mme Grenon (Valérie) : Excusez-moi.
Ça vous arrive souvent?
M. Lacombe : Pas moi, pas moi. Aïe!
non, non, non.
Mme Grenon (Valérie) : O.K. Oui,
bien, excusez-moi, je ne veux pas gruger votre temps. Bien, nous, ce qu'on
veut, c'est s'asseoir, parce qu'on a déjà réfléchi dans le passé, puis ça date,
là, bien avant COVID. Il y a des besoins, il y a des besoins criants. On le vit
dans des familles, les métiers, des fois, des horaires atypiques, mais, des
fois, des chiffres coupés. Surtout, des fois, en milieux défavorisés, les
parents vont prendre un petit temps, le matin, pour aller travailler puis un
temps le soir. Donc, ce qu'on veut, c'est s'asseoir pour regarder comment qu'on
peut répondre aux besoins des familles, comment on peut attirer des
intervenantes à travailler sur un chiffre de soir ou un chiffre de nuit, parce qu'on s'entend que ce ne sera pas les mêmes, donc, et comment qu'on peut appliquer un
programme éducatif, pour la suite des choses, puis rendre l'enfant bien dans
son milieu, que ce soit en milieu familial ou en CPE.
Donc, on y croit, puis je pense qu'il y a un
besoin là, il y a des familles qui ont besoin de places de garde atypiques. Je
pense que la pandémie nous l'a démontré aussi dans les services de garde
d'urgence. Il y a même eu des approches faites pour voir ce qui pourrait être
fait. Donc, nous, on veut être partie prenante de ça, parce que je pense que ça
pourrait répondre à un besoin des familles, avec, peut-être, les milieux déjà
existants, ou créer d'autres milieux de vie pour faciliter le tout.
Mme Lachance : Puis vous avez dit
que vous l'aviez déjà étudié il y a quelques années. Donc, dans votre expérience ou dans ce que vous savez, les besoins
sont plus criants à certains niveaux. Comment vous voyez ça? Est-ce que c'est davantage des horaires
atypiques, on parle du temps partiel, ou est-ce que c'est davantage de
l'horaire atypique plus tôt le matin, plus tard le soir, la fin de semaine, la
nuit? Avez-vous des idées sur ça?
Mme Grenon (Valérie) : Bien, c'est
sûr que, si je regarde au niveau des CPE, nous, on ne représente pas de CPE qui font de la garde de soir ou de nuit, ça
fait que je ne peux pas me prononcer là-dessus, mais on a quand même plusieurs responsables en milieu familial qui font
deux chiffres, je vous dirais, donc un chiffre de jour et un chiffre de nuit,
et on sent qu'il y avait quand même un besoin. Donc, je pense qu'il faut le
regarder comme il faut.
Nous, notre inquiétude, ce n'est pas être de la
garde. Donc, bien, c'est sûr que, quand l'enfant dort, l'enfant dort la nuit.
Mais je pense qu'il y a un besoin. On le voyait plus au niveau du besoin
atypique du parent que de la garde atypique, parce que le lien d'attachement
est important pour les enfants. Je ne sais pas si j'avais bien compris votre question, mais, pour nous, là, une
intervenante qui viendrait juste un deux heures, trois heures le matin, qui
repart puis qui revient... Pour nous, là, il faut faire attention, quand même,
aux besoins de l'enfant. Le lien d'attachement est primordial, parce que c'est
les fondations, puis, après ça, il va pouvoir se développer. Nous, on le voyait
plus au niveau des horaires atypiques du parent utilisateur...
Mme Lachance : Je vous avais bien
compris.
Mme Grenon (Valérie) : ...de
regarder... O.K., c'est bon. Je voulais juste être sûre. Parfait.
Mme Lachance : J'avais très bien
compris. Merci beaucoup. J'aurais peut-être une autre question. Est-ce que vous
permettez, oui? Il y avait... Tout à l'heure, vous avez parlé du conseil
d'administration, en fait, vous avez évoqué l'importance
des conseils d'administration. On a eu quelques groupes au fil des derniers
jours, dont certains nous faisaient mention que c'était extrêmement important,
entre autres choses, qu'il y ait des membres du personnel du CPE ou des RSG qui
soient membres du conseil d'administration. J'aimerais vous entendre élaborer
sur le sujet. Est-ce qu'il y a un chiffre magique? Comment ça peut s'articuler,
pourquoi, et tout?
Mme Grenon (Valérie) : Dans le fond,
au niveau des responsables en milieu familial, dans les conseils
d'administration où qu'il y a des bureaux coordonnateurs, il y a, la grande
majorité du temps, une responsable en milieu familial. Ils se mettent leurs
critères, là, si, mettons, elle a besoin de quitter, tout dépendant du sujet.
Nous, au niveau du secteur des CPE, le conseil d'administration peut seulement avoir quelqu'un, et ne doit pas, obligatoirement, l'avoir.
Nous, on pense, sincèrement, que ça pourrait être intéressant d'avoir... que ce
soit une éducatrice ou une responsable en alimentation, mais quelqu'un qui
vient du personnel. Pourquoi? Parce que, des fois, il y a des projets, des idéologies que le conseil d'administration veut mettre, comme un programme en anglais
pendant 10 minutes. Bien, ce serait peut-être le fun que
l'éducatrice puisse amener son point de vue avant qu'il y ait des décisions de
prises, donc. Puis je dis «éducatrice», mais ça peut être tout membre du
personnel.
Donc, nous, on trouve que ça pourrait être même
avantageux parce que, dans le «day-to-day», bien, c'est l'intervenante qui est
là, et non pas, souvent, le conseil d'administration. Tu sais, les parents
peuvent avoir de superbonnes idées, mais, dans le «day-to-day», est-ce qu'on
est capables de l'appliquer? Donc, de là qu'on trouverait avantageux... Puis, on ne le dira jamais assez,
c'est une petite famille, avec les parents, donc il manque comme un
joueur dans le conseil d'administration, vu que ce n'est pas obligatoire,
actuellement, là, dans la loi.
• (12 h 40) •
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole au ministre pour 1 min 30 s.
M. Lacombe : Bien, peut-être juste
pour conclure. Bien, je suis content que la députée de Bellechasse vous ait
posé cette question-là, c'est revenu. Je vous dirais que c'est quelque chose
qu'on a entendu, donc, sur quoi on se penchera.
Je l'ai dit tantôt, l'objectif, c'est, bien sûr, d'améliorer le projet de loi.
Et je veux terminer — ça va
peut-être vous surprendre — non pas avec une question, mais avec un
commentaire, pour vous dire que les relations, évidemment, syndicales,
gouvernementales ne sont pas toujours faciles, je pense qu'on en sait tous
quelque chose. Et ça ne date pas d'hier, je pense que ça fait partie de
l'histoire, là, c'est un peu toujours comme ça.
Mais je voudrais quand même vous remercier pour
votre travail, parce que je sais que ce n'est pas un travail qui est facile. Vous représentez un groupe,
majoritairement, féminin, qui ne l'a pas eu facile, je dirais, dans les
dernières décennies, puis vous avez mené toute une bataille. Et je le dis parce
que, de l'extérieur, il peut sembler que... et je ne parle pas des négociations
en cours, là, mais il peut sembler qu'on est souvent en opposition. Mais je
veux vous dire que je suis très, très fier, quand même, du travail qu'on a fait
ensemble, vous féliciter pour votre lutte et vous dire que je pense, tout comme
vous, qu'on doit améliorer les conditions de travail. On l'a fait en milieu
familial, et je suis persuadé qu'on pourra, d'ici la fin du mandat, continuer
de collaborer ensemble pour laisser un réseau qui sera en bien meilleur état à
la fin. Merci beaucoup.
Mme Grenon (Valérie) : Merci à vous.
La
Présidente (Mme D'Amours) :
Maintenant, je cède la parole à la députée de Sherbrooke pour
2 min 45 s.
Mme Labrie : Merci, Mme la
Présidente. Quand on regarde le tableau qui est dans votre mémoire, sur le
nombre de RSE, on constate quand même qu'il y a une baisse significative dans
les dernières années, puis, si rien n'est fait, ça donne l'impression que, dans
10 ans, il n'en restera pas beaucoup, là. Pourtant, le ministre espère,
dans son projet de loi, attirer des milliers de PNR à rejoindre les bureaux
coordonnateurs. Vous les connaissez, les irritants envers les bureaux
coordonnateurs. Est-ce que vous pensez que les incitatifs qui ont été mis en
place dans les derniers mois, et ce qui est prévu dans le projet de loi, ça va
être suffisant pour freiner l'exode et recruter aussi des milliers de PNR dans
le réseau?
Mme Grenon (Valérie) : Bien, oui,
nous, l'exode... C'est sûr qu'il est arrivé des moments précis, dans l'histoire
des responsables en milieu familial, qui a fait un déclenchement, là, de
vouloir quitter le réseau et, même, de s'en aller dans de la garde privée. On
voit une volonté du gouvernement d'essayer de faire bouger les choses. Mais de
là que, dans notre mémoire, vous trouvez, dans l'annexe I... on a vraiment
consulté les responsables en milieu familial, actuellement, qui désireraient
quitter, de qu'est-ce qu'il y a, administrativement, pour vous aider à rester.
Donc, on s'entend que toute la charge administrative, au niveau de la place
subventionnée... Nos responsables veulent
maintenir une place subventionnée, mais il y a beaucoup de bureaucratie et
beaucoup de paperasse. Donc, on a quand même... Puis je ne prendrai pas
tout votre temps pour la lire, mais, vraiment, l'annexe I, c'est vraiment, là,
pour réduire le fardeau administratif. Donc, il y a peut-être des choses, là,
qui pourraient alimenter le projet de loi.
Le fameux incitatif que le ministère de la
Famille avait mis en place pour attirer de nouvelles responsables en milieu
familial, pour nous, on a salué que c'était une bonne nouvelle. Pour la
nouvelle personne, on s'entend que, pour qu'elle puisse s'équiper, que ce soit
même juste au niveau de la sécurité de sa maison pour accueillir des jeunes
enfants, on trouve ça bien, parce que c'est un fardeau de moins sur les
épaules. Puis on le sait, en milieu familial, c'est
des places qui peuvent être rapidement disponibles, là, un coup que toute l'installation
est prête. Donc, oui, on le salue.
Bien sûr, la perte
annoncée dans le chantier, là, du fameux 3 000 $ pour la deuxième
année, on est moins d'accord, parce que c'était une entente prévue au niveau
des membres, là, pour la deuxième année, du 3 000 $. Donc, c'est sûr
que, pour les nouvelles places, ça aurait pu être un incitatif, là, pour les
nouvelles, donc, pendant deux ans, un certain montant. Mais il y a encore
beaucoup de choses à faire, sincèrement. Beaucoup de gens ont quitté, parfois
vers le privé...
Mme Labrie : Voyez-vous un
engouement, dans les derniers mois, pour aller chercher un permis...
Mme Grenon (Valérie) : Il n'y a pas
un engouement actuellement. Je pense qu'on va le voir à plus long terme. C'est
sûr que les...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je suis désolée. Le temps étant écoulé, je vais céder maintenant la
parole à la députée de Joliette, toujours pour 2 min 45 s.
Mme
Hivon : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous. Et puis, rapidement, juste merci
pour le combat que vous menez présentement. Donc, ça prend beaucoup de force,
et puis j'espère que ça va se résoudre de la meilleure
des manières. Donc, on partage vraiment le même point
de vue sur l'importance
de développer les nouvelles places en CPE, de convertir les places de
garderies privées en places de CPE, de ne pas penser que le crédit d'impôt,
c'est la solution à long terme. On voit déjà des garderies privées qui
augmentent leurs tarifs depuis quelques semaines en prévision de ce nouveau
crédit d'impôt qui est écrit dans le ciel. Alors, on s'entend vraiment
là-dessus.
Moi, deux
questions. Une, très générale : Pour vous, la clé de voûte vers la qualité
des services, quelle est-elle? L'élément central sur lequel on doit focusser
pour la qualité des services? Et le deuxième élément, c'est — je
sais que ça vous tient vraiment à coeur, Mme Grenon — la
question de l'intégration des enfants qui ont des besoins particuliers. Je l'ai
demandé, hier, à Valorisons ma profession : Ce serait quoi, la Cadillac du
modèle pour favoriser un accompagnement autant des éducatrices que des
tout-petits qui ont des besoins particuliers?
Mme Camerlain
(Line) : Je vais y aller,
pour la qualité. Moi, je dirais que, pour s'assurer d'avoir de la
qualité, ça prend des conditions de travail puis du salaire. Puis, pour nous,
c'est une formation, donc on souhaiterait qu'on revienne à un ratio trois sur trois en CPE. Pour nous, c'est évident.
Donc, ça passe par de la formation, mais, pour qu'il y ait des
éducatrices puis des intervenantes formées, bien, ça prend des conditions de
travail puis des salaires qui suivent.
Mme Grenon (Valérie) : Au
niveau de l'accueil et de l'intégration des enfants en besoins particuliers, il
y a une chose qui est claire, il faut donner accès à tous les enfants qui
auraient besoin des sommes supplémentaires, donc un professionnel, que le
médecin déclare avoir des besoins, parce qu'actuellement il y a un plafond,
donc il y a des enfants qui ont une
inéquité. Donc, si le CPE ou le milieu familial a déjà son quota d'enfants qui
reçoivent la subvention, bien, s'il y a un enfant qui arrive... Puis il
y en a plein, en ce moment, de toute manière, d'enfants qui n'ont pas la
subvention, parce qu'il y a un quota, donc de là on n'offre pas la qualité et
les services nécessaires pour les enfants ayant des besoins particuliers. Donc,
on met encore un écart dans les capacités de l'enfant puis une difficulté au
niveau des vulnérabilités. Donc, il y a une affaire qui est claire, il faut donner
accès à la subvention à tous les enfants qui ont un médecin qui a amené, là, un
possible diagnostic ou un envisagement, là, de besoins, parce qu'en ce moment
il y a des enfants qui sont privés de ça.
Mme Hivon : C'est
vraiment lever le quota.
Mme Grenon (Valérie) : Oui, tout à
fait.
Mme
Hivon : Donc,
c'est la première chose. C'est
Mme Grenon (Valérie) : Première
chose, c'est clair.
Mme Hivon : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole au député de LaFontaine pour 11 minutes.
M. Tanguay : Merci
beaucoup. Merci à vous, Mme Camerlain et Mme Grenon. Au début, je
pensais à la fin de l'intervention du
ministre, quand il a dit : Bon, bien, là, dans le contexte actuel des
négociations, j'aimerais affirmer quelque chose. J'étais sûr qu'il
allait dire : Faites-vous-en pas, il n'y aura pas de loi spéciale. Mais,
ah! je suis resté au bout de ma faim. Je referme la parenthèse.
Les rapports RSE-bureau coordonnateur, qu'en
est-il? Parce qu'on a entendu ça hier. Et qu'est-ce qu'il faut changer? Et je
vous dirais même : Quel impact tangible que ça a peut-être pour
démobiliser certaines RSE? Jusqu'à quel point ça a un impact? J'aimerais vous
entendre là-dessus.
Mme Camerlain (Line) : ...juste
commencer, puis Valérie va donner des... répondre plus précisément. Mais, pour
nous, il faudrait harmoniser ou uniformiser davantage le travail qui se fait en
bureau de coordonnateur. Vous retrouvez, dans notre
mémoire, plusieurs éléments à cet égard, là. Que ce soit dans la loi ou dans
les règlements, là, il faut vraiment uniformiser les pratiques, parce qu'on
souhaite une collaboration puis des pratiques plus harmonieuses, je dirais ça
comme ça.
Mme Grenon (Valérie) : Pour compléter,
dans le fond, ce n'est pas normal que, dans tout le Québec au complet, il y a
des bureaux coordonnateurs que c'est des perles, que les responsables en milieu
familial ne quittent pas depuis des années, malgré la modulation, malgré tout
ce qui s'est passé, n'ont pas quitté, parce qu'ils sont des partenaires avec le
bureau coordonnateur, puis il y en a d'autres qui sont... ils se sentent comme
en prison, la police arrive, et c'est très contraignant. Donc, il faut vraiment
améliorer ça.
J'invite fortement... Puis je le répète, dans
notre annexe I, on a vraiment fait une liste de points importants pour les responsables, puis qui ne diminuera pas
la qualité, qui n'enlèvera pas la sécurité des enfants et qui va peut-être
même permettre à plusieurs PNR et plusieurs personnes, même... oubliez les PNR,
mais de femmes ou d'hommes à vouloir ouvrir
un milieu familial. Parce que je pense que l'important du temps qu'elles
doivent consacrer à leur métier, c'est de s'occuper des enfants, et du
développement des enfants, et de leur santé et sécurité, et non pas à passer
des heures à remplir des papiers, qui ne sont peut-être pas nécessaires, là, à
la structure.
M. Tanguay : Puis, Mme
Grenon, je vous amène sur un aspect, j'imagine, de ça. Vous dites : «Les
RSE demandent que ce soit simplifié le processus d'inscription d'un enfant et,
particulièrement, celui d'un enfant remplaçant, qui ne fréquentera que
temporairement le service éducatif.» J'aimerais vous entendre un peu plus sur
ça.
Mme Grenon (Valérie) : Bien, plus
précisément, c'est qu'il y a beaucoup de... c'est beaucoup plus difficile, il y a des enfants, parfois, que leur contrat
part... Je vais donner un exemple, un enfant qui quitterait, quelques
semaines, dans un autre pays, parce qu'on le vivait. Bien, juste trouver un
remplaçant, c'est très complexe. Donc, il y a une perte de subventions. Donc,
essayer de, rapidement, mettre un processus pour que l'enfant puisse prendre la
place en attendant. Bien, comme ça, un, on aide une autre famille de plus, puis
il n'y a pas de perte monétaire, là, parce que les subventions, là, vont
rouler, là, rapidement.
M. Tanguay : Et, en milieu familial, les services non régis,
quelle est votre réception? J'aimerais vous entendre. Il y a le mémoire,
là, mais quelle est votre... comment qualifiez-vous... ou quels sont vos
commentaires par rapport à l'approche qui est faite dans le projet de loi, là?
• (12 h 50) •
Mme Grenon (Valérie) : Bien, pour
nous, tout a débuté avec la loi n° 143 qui a été adoptée. On a vu une
avancée là-dessus. C'est sûr que, pour nous, on salue qu'on baisse les ratios
encore plus, mais il faut le faire le plus rapidement possible. Quatre ans est
peut-être trop long. Moi, je pense à santé et sécurité. Actuellement, s'il se
passe quelque chose, c'est les parents qui doivent dénoncer. Donc, il y a
peut-être un processus à mettre en place. Est-ce que c'est mettre un an pour s'assurer qu'ils aillent chercher les formations
pour se préparer à s'en aller... régi, subventionné? Puis, pour nous, ça
ne doit être que régi, subventionné. Les familles du Québec veulent une place à
8,50 $. Tantôt, on parlait de manque de
places. Bien, je pense que, si on s'en va vers seulement le subventionné, au
niveau des places non reconnues en ce moment, vers reconnues et
subventionnées, on va aider à répondre aux besoins des familles, et ça va
permettre à ces femmes-là et ces hommes-là, même, d'accueillir des enfants à
besoins particuliers, qui, en ce moment, ne peuvent pas en accueillir parce
qu'ils ne sont pas subventionnés. Donc, je pense que c'est un beau cercle où
qu'on pourrait embarquer, pour la qualité.
M. Tanguay : Puis, si vous me
permettez l'expression, c'est un «win-win» pour la personne qui offre le service, la RSE, et pour les parents, évidemment,
puis le développement de l'enfant. Donc, si je vous comprends bien, là, dans le projet de loi, il est prévu au plus de
deux enfants. Vous, vous diriez, aussitôt qu'il y a un enfant, vous
l'incluriez, là.
Mme Grenon (Valérie) : Ah! tout à
fait.
M. Tanguay : Il n'y aura pas
de limite, là. Aussitôt que tu en as un, tu pourrais être subventionné.
Pourquoi à partir de... Pourquoi juste un, tu ne serais pas subventionné, puis
il n'y aurait pas de lien, là? Mais vous, vous le feriez dès qu'il y a un
enfant?
Mme Grenon
(Valérie) : Oui. On parle bien de personnes qui offrent un service à
la semaine, tout le temps, là. Je ne
parle pas de personnes qui pourraient garder un enfant pour accommoder
quelqu'un une journée, là. Ça, c'est clair.
M. Tanguay : O.K. Quel impact
vous pensez, sur le terrain, parce que j'imagine que vous en rencontrez, vous
avez des conversations, quel impact que ça, ça risque d'avoir, ça? Est-ce qu'il
y en a qui vont dire : Bien, à ce compte-là, non, parce que moi, je ne
veux pas être régi, pour x, y raisons, bonnes ou moins bonnes? Quel impact vous
pensez que ça va avoir, ça, sur peut-être des fermetures de non régis, je vais
dire ça de même?
Mme Grenon (Valérie) : Bien, c'est
sûr que c'est fragile, il faut faire attention, parce qu'il y en a qui ont
quitté le réseau régi subventionné pour certaines raisons. Ce qui est ressorti
beaucoup sur le terrain, il y en a qui sont revenus beaucoup, il y en a qui
sont... bien, pas beaucoup, mais il y en a qui sont revenus à cause de la
modulation des frais de garde. On se rappellera que, lors
de la modulation des frais de garde, il y a des parents qui mettaient de la
pression auprès des responsables pour qu'ils s'en aillent non régis, non
subventionnés, à cause de la modulation, et l'arrêt de la modulation, qu'on
souligne et qu'on est bien contents que ça n'existe plus, bien, on
a vu l'effet inverse. Le crédit d'impôt, ça va continuer à aider aussi, cette
démarche-là.
Mais il y a une chose qui est claire, il y a
beaucoup de paperasse. Il ne faut pas oublier que ces personnes-là, ce qu'elles
veulent, c'est travailler avec les enfants, donc toute la paperasse
administrative, ça, c'est une chose à régler, et l'harmonie au niveau des
bureaux coordonnateurs. Je vous le dis, il y en a que c'est des polices, puis
il y en a que c'est des amours, puis qui accompagnent et qui soutiennent les
responsables. Donc, l'harmonisation des BC. Puis il ne faut juste pas se... pas
se souvenir... il faut se souvenir, pardon, que ça reste des responsables en
milieu familial, qui sont des travailleuses autonomes, donc qui suivent les
règlements, mais qui n'ont pas besoin d'un employeur, qui seraient les bureaux
coordonnateurs.
M. Tanguay : Et ça,
pensez-vous que, ça, on peut mettre ça dans la loi, un peu, la philosophie qui
devrait animer les bureaux coordonnateurs? Est-ce que vous pensez qu'on devrait
le mettre dans la loi?
Mme Grenon (Valérie) : Bien, je
pense que oui, parce que, si on veut utiliser le système employeur, c'est le
gouvernement qui est l'employeur, entre guillemets, des responsables en milieu
familial, à cause des subventions, et vous nommez les bureaux coordonnateurs
pour tout gérer les choses, pour distribuer les subventions, s'assurer des
fiches d'assiduité. Donc, je pense que, oui, c'est à vous de voir, avec la
personne que vous donnez le mandat, de s'assurer que c'est égal pour tous.
Puis, oui, je pense que, si on l'encadre dans la loi, ça va permettre... je
cherche mon mot... les écarts de conduite de certains bureaux coordonnateurs.
M. Tanguay : Vous cherchez
votre mot, mais moi, tantôt... ça fait trois fois que j'essaie de me
rappeler de la question, puis là je l'ai...
Mme Grenon (Valérie) : C'est bon,
allez-y.
M. Tanguay : ...puis je vais
vous la dire avant que je la perde, parce que vous m'avez inspiré une question.
Vous dites que la paperasse, vous voulez que ça diminue, diminue, puis vous
êtes encore sous la paperasse, là. Depuis trois ans, avez-vous vu une modification
substantielle de ça? Est-ce qu'il y a un chemin qui a été fait ou... Quelle est
l'ampleur de la tâche devant nous, là, par rapport à la paperasse?
Mme Grenon (Valérie) : Il n'y a pas
eu de diminution. Je vous dirais même que le dossier de l'enfant, pour les
responsables en milieu familial, ça a été un supplément de dossiers de
l'enfant. Puis loin de moi de dire qu'on est contre, mais ça reste quand même
qu'il y a eu des tâches supplémentaires faites dans l'administration de tout
ça. Mais, non, il n'y a pas eu de diminution faite actuellement.
M. Tanguay : Diriez-vous que
la réalité sur le terrain, qui plus est, c'est que, pour l'éducatrice qui doit
remplir les rapports, bien, il faut qu'elle le fasse sur un temps qui n'est pas
dédié, puis que, ça, ça ajoute une cinquième balle avec les quatre premières avec
lesquelles ils ont à jouer, en termes de tâches, de responsabilités, de ci, de
ça, ils doivent trouver du temps? Puis, dans bien des cas, pour en avoir
rencontré puis — mais
c'est vous qui vivez davantage avec
elles — ça se
fait sur du temps, des fois, personnel, là. Puis croyez-vous que, si c'est
important, puis vous le dites que c'est important, on le sait que c'est
important, il faudrait prévoir aussi du temps pour bien le faire? On parle de
développement de l'enfant.
Mme Grenon (Valérie) : Bien, on est
tout à fait d'accord. Quand on... Si on fait le comparatif avec la négociation
des responsables en milieu familial, on a obtenu des gains pour permettre de le
faire. Au niveau de la négociation des CPE, c'est en cours, c'est une de nos
revendications. On avait déjà du temps. Ça fait que, oui, on essaie de faire
les ajustements, pour ne pas... comme vous venez de le dire, pour que ça se
fasse bien assis, pas fatigué le soir puis pas le matin, un samedi. C'est un
travail de qualité que nos intervenantes veulent faire. On est d'accord pour le
faire, mais il faut prendre bien le temps de le faire, pour ne pas le remplir à
la va-vite, et que ça n'ait pas l'objectif de soutenir le parent, et aller
jusqu'à, même, la transition, là, à cinq ans.
M. Tanguay : Vous avez dit un
peu plus tôt, à... je pense que c'était ma collègue de Sherbrooke, vous n'avez
pas vu, je ne sais pas, là, d'engouement, je pense que c'était ça, là, par
rapport aux nouvelles personnes, qui viendraient dire, bien, lever la main,
dire : Bien, O.K., bien, à ce compte-là, moi, je vais être RSE, ça me
tente. Vous n'avez pas vu un engouement. Pensez-vous que tout a été dit
là-dessus? Pensez-vous qu'il y a d'autres choses à faire ou l'entente est si
extraordinaire qu'on a juste à s'asseoir puis à regarder les effets, qui vont
découler de source, d'eux-mêmes?
Mme Camerlain (Line) :
...réglementaire, c'est une piste. La valorisation de la profession. Nous, on
réclame qu'on les appelle des RSE, mais il y a une valorisation. Siéger sur des
conseils d'administration, c'est une façon de valoriser puis de faire la
promotion de ces belles professions-là. Ça en est, d'autres pistes
intéressantes à poursuivre, pour les RSE.
M.
Tanguay : Puis vous dites là-dedans, justement, pour continuer
avec vous, vous avez une recommandation disant qu'il devrait y avoir, je
dis ça de même, là, une campagne publicitaire, ou... je ne sais pas.
Pouvez-vous m'en parler? Qu'est-ce qui... Parce que, bien souvent, on se
dit : On fait une campagne publicitaire. Vous, vous y croyez que ça
pourrait avoir un impact tangible, puis j'aimerais savoir, pour que ça ait un
impact tangible... Parce que faire une campagne... pour une campagne
publicitaire qui dure trois mois, à un moment donné, on ne veut pas que ce soit
un coup d'épée dans l'eau. Ça
prendrait quoi, comme campagne publicitaire, pour dire : O.K., ça, ça parle à notre
monde, puis ça, oui? Qu'est-ce que vous imaginez?
Mme
Camerlain (Line) : Bien,
nous avons une recommandation à l'effet de hausser les budgets
promotionnels qui sont par région, parce que là c'est... veux veux pas, pour
attirer, recruter, il faut que tu valorises aussi. Donc, conditions de travail,
salaires, puis tu fais la valorisation de la profession, puis tu en fais la
promotion. Alors, si, dans une région, on
est en déficit de places, bien, quelle belle occasion d'investir plus de
budgets dans ces régions-là pour... Alors,
on a une recommandation pour hausser les budgets, parce qu'ils sont assez
minimes, là, par bureau de
coordonnateur.
M. Tanguay : Puis dans votre
mémoire... vous m'excuserez si ça m'a échappé, là, auquel cas, ce sera de ma
faute, là... À l'article 52 du projet de loi, il est dit que... vous le
savez, le ministre va se donner un plus large pouvoir réglementaire, puis à l'article 52,
il est inscrit d'ajouter, à 8.1, 8.2, 8.3, d'établir... le ministre pourra
«établir le délai de délivrance, la teneur [...] la forme [et] l'attestation,
faisant état de l'expérience cumulée aux fins de qualification», puis les deux
autres articles sont...
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
suis désolée...
M. Tanguay : Ah! déjà?
La Présidente (Mme D'Amours) :
...c'est tout le temps que nous avions. Donc...
M. Tanguay : Ah! j'ai
10 min 20 s. Non? C'est correct? O.K.
La Présidente (Mme D'Amours) : Non,
je n'ai plus de temps, mon cher monsieur. Donc, je vous remercie pour votre contribution
à nos travaux, mesdames.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 14 h 06)
La Présidente (Mme D'Amours) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend
ses travaux.
Nous
poursuivons les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi
n° 1, Loi modifiant la Loi sur les services de garde
éducatifs à l'enfance afin d'améliorer l'accessibilité au réseau de services de
garde éducatifs à l'enfance et de compléter son développement.
Cet
après-midi, nous entendrons les groupes suivants : la Coalition des parents d'enfants à besoins
particuliers du Québec, la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec et la Société québécoise de la
déficience intellectuelle.
Donc, je souhaite la bienvenue à la Coalition
des parents d'enfants à besoins particuliers. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.
Coalition de parents d'enfants à besoins
particuliers du Québec (CPEBPQ)
Mme Nugent (Bianca) : Merci,
Mme la Présidente. Merci à tous les parlementaires et les personnes qui les soutiennent de m'accueillir aujourd'hui au nom des
milliers de parents d'enfants à besoins particuliers du Québec, qui sont
réunis sous la forme d'une voix d'expert par expérience. L'expérience d'être un
parent d'enfant à besoins particuliers est
une expérience qui revêt d'exceptions, qui revêt aussi nécessairement une
importance qui nous apparaît capitale dans notamment le continuum d'apprentissages qui touchent nos enfants. Je
suis Bianca Nugent, présidente et porte-parole depuis 2017 de la Coalition des parents d'enfants à besoins particuliers
du Québec, qui est un organisme incorporé à titre... à but non lucratif. La coalition se veut la voix des
experts, comme on dit, de... par expérience. Elle est composée de centaines
de membres individuels et associatifs dont
81 % des parents s'identifient comme parents, mais également comme
membres des enseignants, des éducatrices à
la petite enfance, des éducatrices spécialisées, des professionnels et des
alliés, comme leurs grands-parents ou
les autres membres ou proches de leur famille. La mission de la CPEBPQ vise à
défendre et à promouvoir les intérêts des enfants à besoins
particuliers, à accroître leur bien-être et leur participation sociale et à sensibiliser et soutenir les membres quant au
parcours d'apprentissage de leur enfant et évidemment aussi sensibiliser
les différents acteurs oeuvrant en éducation et, dans un sens plus large, ceux
oeuvrant en santé et en services sociaux.
Alors, la modification
du... En fait, le projet de loi n° 1 nous interpelle tout
particulièrement, en ce sens que pour nous les besoins particuliers sont ceux
reliés à l'intensité de soutiens et ressources nécessaires à apporter aux enfants ayant une condition neurodéveloppementale,
ou une variation neurologique, ou un handicap visible ou invisible, une déficience physique ou intellectuelle, une
psychopathologie reconnue dans la définition
d'enfant handicapé par l'Office des personnes handicapées du Québec.
Pour la CPEBPQ, ces besoins sont concomitants à leur situation de vie, à leur
réalité familiale, sans se limiter évidemment aux conditions ou situations de
leurs limitations ou incapacités.
• (14 h 10) •
Nous sommes
d'avis que, si ces conditions et cette situation de vie ne sont pas prises en
compte dans l'évaluation des besoins
et s'il n'y a pas une évaluation d'intensité de soutiens ainsi que les
ressources et les adaptations requises pour permettre l'intégration de
nos enfants dans les services de garde éducatifs à la petite enfance, ça peut constituer
un enjeu complexe, et même voire créer un
désavantage à un accès juste et équitable aux apprentissages nécessaires à
leur développement. Cette défavorisation à
l'apprentissage, comme on l'aime l'appeler à la coalition, est susceptible de suivre nos
enfants tout au long de leur continuum d'apprentissage, qui débute bien avant
l'enfance... bien avant, pardonnez-moi, l'entrée à l'école. Cette situation aussi peut constituer une
discrimination systémique qui enfreint leurs droits fondamentaux. Alors,
en regard du principe d'égalité des chances, la CPEBPQ est d'avis que le gouvernement
québécois devrait se doter de nouveaux indicateurs permettant de mesurer les
facteurs qui mènent à cette défavorisation, en prendre en compte aussi quant à
l'accessibilité, notamment ici, en ce qu'il est question, aux services de
garde.
Au Québec, l'Office des personnes handicapées
estime environ à 7 % la proportion des enfants 0-4 ans en situation
de handicap. En 2017, Retraite-Québec a évalué, quant à eux, la proportion à
environ 12, 5 enfants reconnus handicapés pour 1 000 de zéro à cinq
ans. Alors, on le voit bien, Mme la Présidente, que, bien que ces données sont
non exhaustives et non représentatives de la diversité de tous les enfants à
besoins particuliers du Québec, ces données convergent vers une même
réalité : les incapacités et les limitations des enfants du Québec sont en
forte croissance. À cet effet, la CPEBPQ se réjouit que le gouvernement du
Québec tient à améliorer la Loi sur les services
de garde, et notamment l'accessibilité à tous les enfants, mais nous sommes
cependant préoccupés de lire combien le
terme «besoins» est davantage associé à ceux des services de garde qu'à ceux
des enfants dans le projet de loi. Ce manque de référence aux besoins
particuliers des enfants, et surtout comment y répondre à l'aide — qui,
pour nous, nous sommes d'avis... — d'une évaluation de l'intensité de soutiens
et de ressources requises pour favoriser leur intégration, nous interpelle fortement. Alors, notre intention
dans ce mémoire et notre présence aujourd'hui n'est pas de réclamer une
obligation de résultat, Mme la Présidente, mais certainement de réitérer
l'importance d'une obligation de moyens. Cette obligation de moyens
incomberait, par la voie d'une politique-cadre, oui, notamment, aux services
éducatifs à l'enfance pour soutenir le plein développement de tous les enfants
du Québec, précisément les enfants à besoins particuliers qui ont un fond de
vulnérabilité délimitant le développement de
leur plein potentiel, d'où l'importance d'évaluer le soutien nécessaire à leur
intégration et ainsi qu'au développement de leurs acquis et leur
apprentissage.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Donc,
nous allons maintenant commencer la période d'échange, et je vais céder la
parole à l'adjointe parlementaire, la députée de Bellechasse. Le gouvernement
dispose de 16 min 30 s
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente. D'abord, je tiens à vous remercier, Mme Nugent, d'être ici avec nous aujourd'hui. Je vous ai bien entendue,
puis je voudrais qu'on revienne sur certains points dont vous avez
discuté. Vous nous avez parlé de
l'importance de l'évaluation de l'intensité de soutien et de l'évaluation des
besoins pour agir en toute équité
avec les enfants à besoins particuliers ou en situation de handicap. Dans cette
optique-là, ce que j'aimerais savoir,
j'aimerais savoir : Comment pensez-vous qu'on peut bien identifier, bien
repérer et bien évaluer ces besoins-là?
Mme Nugent (Bianca) : Merci
pour votre question. En fait, Mme la Présidente, il existe en ce moment un
outil qui est utilisé par plusieurs juridictions à travers le monde, cet outil
s'appelle l'échelle d'intensité de soutien. Elle a été promue en fait par
l'association américaine de la déficience intellectuelle, et elle est
présentement utilisée aussi notamment par le gouvernement ontarien dans
l'évaluation du soutien, justement, qui permet à l'aide d'un questionnaire, par
exemple sur l'ensemble des activités reliées à la vie quotidienne — et ce
questionnaire-là est aussi adapté pour les enfants — permet d'évaluer
finalement l'intensité du soutien en fréquence, en durée et quel type de
soutien un enfant a besoin pour finalement vivre une journée normale typique.
À l'aide de cette évaluation, nous sommes d'avis
que, si le gouvernement est intéressé, il pourrait sensiblement s'en inspirer
pour développer une évaluation individualisée, comme le projet de loi semble
sous-tendre, afin qu'on puisse déterminer à ce moment-là quels seraient les
soutiens à mettre, en quelle fréquence et à quelle durée. Ceci permettrait
évidemment de répondre non seulement adéquatement, mais de manière
individualisée aux besoins particuliers des enfants.
Comme vous le savez, en ce moment, les enfants à
besoins particuliers sont en forte croissance, on le voit dans le réseau de la
petite enfance mais aussi à l'école, et, malheureusement, mis à part, bon,
certains outils qui ne font pas partie du même continuum... comme on le sait,
la petite enfance est sous l'égide du ministère de la petite enfance et... le ministère
de la Famille, pardon, et, évidemment, l'éducation au ministère de l'Éducation — alors,
souvent, les plans d'intervention, les évaluations multiples qui sont faits ne sont pas
standardisés et ne suivent pas l'enfant.
Mme Lachance : D'accord. Écoutez,
vous parlez du continuum, vous exprimez très bien l'idée, et d'ailleurs dans
votre mémoire vous nous citez l'exemple de l'Ontario. Vous savez, ici, on a
Agir tôt, vous avez entendu parler. La volonté, évidemment,
du gouvernement est justement de pouvoir établir ce continuum entre les services
de garde et l'école.
Mais j'aimerais vous entendre, parce que vous
citez l'exemple de l'Ontario, qui depuis 2012 intègre ces services. Est-ce que
vous pouvez nous en parler puis m'expliquer un peu, nous expliquer comment ça
fonctionne?
Mme Nugent (Bianca) : Oui, tout
à fait. En fait, j'ai participé, à titre de travailleuse sociale membre de
l'Ordre des techniciens et travailleurs sociaux de l'Ontario, à la modernisation
de la loi sur les services de garde de l'Ontario à l'époque pour le compte
d'une association en éducation des services à l'enfance francophones. Et dans
cette optique, la volonté du gouvernement ontarien était de s'assurer que le
profil et, évidemment, les besoins de tous les enfants fréquentant un service à
l'enfance de l'Ontario suivent tout au long d'un continuum. Alors, à cet effet,
ils ont développé... dans un premier temps, ils ont rapatrié finalement les
services à l'enfance sous l'égide du ministère de l'Éducation, ils ont
développé un programme d'apprentissage pour les jeunes enfants qui commence à
quatre ans, évidemment dans une optique d'intervenir tôt, sachant très bien que
le réseau scolaire et évidemment les professionnels qui y oeuvrent... à tenir
compte justement aussi que les éducatrices à la petite enfance en Ontario sont
membres de leur ordre professionnel ainsi que tous les enseignants. Alors, dans
cette perspective-là, ce continuum est assuré par le fait que, dès l'âge de
quatre ans, les services de la petite enfance sont intégrés à même les installations
scolaires, permettant non seulement, bon, de maintenir la vitalité des communautés,
mais surtout de s'assurer que tous les intervenants ou les principaux acteurs
amenés à soutenir le développement des apprentissages dans une perspective
globale de développement voient l'enfant évoluer de près.
Alors, est-ce que le Québec est prêt pour
ramifier ce réseau-là? Pas nécessairement. Je pense qu'on a quand même plusieurs
gains avec, là, notre réseau de CPE actuel. Mais, en soi, il y aurait évidemment
des modalités qui seraient intéressantes à considérer, notamment par exemple le
développement d'un code permanent dès l'entrée de l'enfant au sein d'un service
de garde. Ce code permanent serait finalement le début de son continuum
d'apprentissage et demeurerait pareil tout au long de son parcours éducatif. Ça
permettrait aussi aux fournisseurs prestataires des services à l'enfance
d'avoir accès aux mêmes outils que le réseau scolaire a, notamment... que ça
soit les guides d'intervention, que ça soit d'autres outils ou ressources qui
sont partagés. Alors, dans une perspective de concertation de tous les acteurs,
au début... je pense que nous sommes d'avis qu'il faut intervenir au début du
continuum et de ramifier pour éviter des ellipses entre les deux systèmes.
Mme Lachance : Merci. Mme la
Présidente, je vais laisser ma collègue prendre la parole.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole à la collègue de Soulanges.
Mme Picard : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour. Merci beaucoup pour votre apport à nos travaux. J'aimerais vous entendre par rapport... Je ne sais pas si vous avez vu... Dans le projet de loi, on suggère que, lorsqu'il y a un refus du service éducatif... de
le mentionner par écrit aux parents. Donc, si on va en ce sens, est-ce que vous
pensez que c'est une bonne idée? Est-ce que
vous pensez que ça a assez de mordant pour éviter surtout la discrimination
que les enfants peuvent subir?
Mme Nugent (Bianca) : En
fait... Merci pour la question. J'aimerais réitérer que, malheureusement, on
n'a pas eu la chance, là, dans notre mémoire, en raison, là, de la... du peu de
temps auquel on a été avisés de notre participation, à toucher à tous les
points. Mais, sur ce point-là, nous sommes d'avis qu'il serait important,
considérant justement du fond de vulnérabilité des enfants à besoins
particuliers du Québec, de se doter d'un registre de toute forme de refus, de
toute forme d'expulsion, de bris de service auquel un enfant en situation de
handicap, tel que reconnu par l'Office des personnes handicapées du Québec,
serait amené à vivre. À ce moment-là, selon nous, ça serait la seule manière de
s'inscrire dans un processus d'amélioration continue, en ayant évidemment un
seuil de référence sur le nombre d'enfants qui sont malheureusement amenés à
subir ce genre de situations.
• (14 h 20) •
Mme Picard :
Merci beaucoup. J'aimerais aussi savoir comment la formation initiale et
continue du personnel pourrait être bonifiée, selon vous, pour avoir un
soutien maximal, optimal pour les enfants à besoins particuliers.
Mme Nugent (Bianca) : Merci.
Nous nous sommes déjà prononcés sur cette question-là pour le réseau scolaire dans notre mémoire présenté lors de la...
en fait, la Politique de réussite éducative. Je pourrais... Je peux vous dire
que, même si on ne s'est pas prononcés dans
ce mémoire-ci, on maintient toujours l'importance de s'assurer, dans une
perspective justement du maintien de la
qualité des services, de l'offre de services, de s'assurer que le personnel éducateur, notamment les éducatrices à la
petite enfance, soit visé par un suivi serré de son portfolio de formations
continues, et à cet effet je rappelle
aussi que le gouvernement ontarien va aussi dans ce sens. Bon. Comme je
l'ai mentionné précédemment, les
éducatrices à la petite enfance en Ontario sont membres d'un ordre professionnel
évidemment visé par des normes de pratique et des standards élevés. Alors, dans une
perspective non seulement de valorisation de leur profession...
la CPEBPQ est d'avis que les
éducatrices devraient d'emblée s'engager dans une perspective, là, de
rehaussement de leurs pratiques.
Mme Picard : Merci.
Concernant... Dans votre mémoire, vous avez parlé de la préparation au
continuum d'apprentissage vers l'école... en
fait, du service éducatif vers l'école. J'aimerais vous entendre de vive voix
sur votre vision, sur comment vous voyez la chose, qui pourrait être
bonifiée, améliorée.
Mme Nugent
(Bianca) : Cette recommandation-là s'inscrit vraiment dans une
perspective de ne pas laisser tomber nos enfants entre les craques, si je peux
m'exprimer ainsi, qui peuvent arriver à tout moment dans un processus
d'apprentissage, que ce soit un enfant par exemple qui est amené à rester à la
maison pour cause de maladie, que ce soit un enfant qui fréquente un service de
garde à temps partiel, que ce soit un enfant qui, en raison de ses conditions, est amené à avoir davantage
de soutien. À défaut d'avoir un continuum clair au niveau de l'apprentissage auquel... où est-ce que tous les documents
relatifs au profil, à l'évolution de la situation et de la réalité familiale de
cet enfant-là ne sont pas consignés dans un... comment je pourrais dire, dans
un registre qui serait accessible tout au long de son parcours, et même à son
entrée à l'école, bien, ça lui crée une défavorisation à l'apprentissage, comme on l'a libellée ainsi, là,
dans notre introduction. Cette défavorisation à l'apprentissage, en
fait, est une idée suite au constat que le seul indice, en ce moment, qui est
utilisé semble être l'indice relatif à la situation socioéconomique. Évidemment,
on sait très bien que la diversité des enfants d'aujourd'hui dépasse finalement
le salaire et l'éducation, là, de la mère, il y a d'autres facteurs qui nous
apparaissent extrêmement importants pour veiller à ce que ce continuum-là ne
soit pas discontinué et puis veiller à ce que nos enfants puissent se
développer à leur plein potentiel.
Mme Picard : Merci beaucoup.
Merci, Mme la Présidente.
Mme Nugent (Bianca) : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Mme la
Présidente, vous m'accordez combien de temps?
La Présidente (Mme D'Amours) :
5 min 20 s
Mme Lachance : Merci. Je veux
revenir sur le continuum, si vous permettez, parce que je trouve ça très intéressant
puis particulièrement important, parce que c'est justement la volonté que nous
avons, entre autres avec Agir tôt. Vous mentionnez tout à l'heure que, dans les
faits, il serait intéressant que même les enfants qui sont à la maison ou qui
sont... pour cause de maladie puissent avoir accès. J'aimerais que vous
m'expliquiez un peu comment vous voyez ça. Un enfant qui est à la maison,
comment on peut faire le continuum?
Mme Nugent (Bianca) : Bien, en
fait, évidemment, dans une perspective que l'accès à un service à l'enfance,
c'est quand même une prérogative finalement parentale, ce n'est pas tous les
parents qui vont nécessairement décider d'y inscrire leur enfant. Par contre, évidemment,
on le sait qu'il vaut mieux intervenir tôt. En lien avec le programme Agir tôt, si je peux me permettre, il y a
aussi évidemment des obstacles à l'accès. Évidemment, vous
comprendrez que dans cette perspective-là on n'est pas en mesure de s'assurer
finalement des prémisses de la loi que tous les enfants aient accès aux
services, au soutien, aux ressources dont ils ont besoin.
Alors, dans cette optique-là, c'est une des
raisons pourquoi le gouvernement ontarien a décidé de reprendre sous son égide,
sous l'égide du ministère de l'Éducation la petite enfance, parce que vous
savez très bien que dans cette perspective-là, ça devient obligatoire, au
niveau de la fréquentation, à partir de l'âge de quatre ans, un peu comme
d'autres pays européens le font à partir de l'âge de trois ans. Est-ce que le Québec
est mûr, est prêt, est disposé à aller dans ce sens? Je crois qu'on devrait évidemment
tendre dans cette visée-là. Mais une des manières d'y aller de manière
harmonieuse, ça serait d'abord et avant tout de s'assurer qu'à partir du moment
où est-ce qu'un parent décide d'inscrire son enfant, je pense que là il y a une
fenêtre d'opportunité à ce moment-là pour automatiquement donner un code
permanent à l'enfant pour s'assurer que son profil et son développement sont
suivis de manière standardisée et coordonnée par tous les professionnels qui
vont l'entourer tout au long de son cheminement d'apprentissage.
Mme Lachance : Merci. Donc, si je comprends bien, c'est extrêmement important aussi d'évaluer les enfants et de justement
avoir une image, une photographie pour savoir exactement comment on peut, pour
chaque enfant, les amener à être outillés pour justement avancer et évoluer
d'une bonne manière. C'est bien ça?
Mme Nugent (Bianca) : Oui, tout
à fait, et, honnêtement, cette évaluation d'intensité de soutien développe un
index, et elle est révisée à tous les trois ans. Alors, l'idée, ce n'est pas de
prendre une photo et s'attendre que la photo ne change pas tout au long, là, du
développement de l'enfant. Alors, il est important, évidemment, qu'une fois
qu'on se dote d'un outil d'évaluation, qu'il y ait, évidemment, des mises à
jour continuelles. Pour la petite enfance, il est recommandé d'y aller à tous
les ans. Alors, à ce moment-là, ça permet d'avoir un portrait clair, sensé,
sans biais. Évidemment, quand l'évaluation est faite par la personne même qui
reçoit une subvention, on peut s'attendre à ce qu'à ce moment-là il y ait un
conflit d'intérêts.
Mme Lachance : Merci. Évidemment,
Mme Nugent, ça a été un plaisir de vous lire. D'entendre que vous vous
réjouissez de l'amélioration de la loi, évidemment, c'est un plaisir pour nous,
parce qu'on voit qu'on travaille, qu'on travaille ensemble. Vous savez, c'est
par la participation des groupes qu'on peut y arriver. Et, quand je vous ai
lue, aussi, vous aviez émis des réserves en ce qui a trait à l'allocation à
l'intégration d'un enfant handicapé en service de garde et aussi à la mesure exceptionnelle, et,
je tiens à vous assurer, bien que ça ne soit pas dans la loi, dans le cadre
de la loi, c'est notre volonté, et ce sera aussi... ça fait partie du travail.
Mme Nugent (Bianca) : Bien,
merci. Mais, si je peux me permettre un dernier commentaire, grâce à une
évaluation d'intensité de soutien, ayant un index clair, ça vous permettrait
finalement d'allouer le bon montant au bon moment, en temps opportun et de
manière adéquate pour chaque enfant, et ça ne serait pas nécessairement une
subvention qui serait générale et globale, mais plutôt basée sur l'index.
Mme Lachance : Donc, on est beaucoup
plus spécifique aux besoins d'un enfant à un moment de sa vie en le suivant
tout au long de son continuum?
Mme Nugent (Bianca) : Oui. Un
enfant, par exemple, autiste peut avoir besoin de plus gros montants dans les deux, trois premières années d'intégration,
mais, finalement, si tout est mis en place en termes de soutien,
ressources et outils, peut avoir besoin de
moins d'argent rendu à l'âge de quatre ans, ou cinq ans, ou vers l'âge de
rentrer à l'école.
Alors, intervenir et agir tôt, pour nous, c'est
s'assurer de se donner les moyens pour le faire.
Mme Lachance : Donc, écoutez, on vous a bien entendue. Agir tôt, vous le
savez, c'est extrêmement
important pour le gouvernement, et c'est dans cette optique-là que le travail
se fait actuellement.
Mme Nugent (Bianca) : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, merci beaucoup.
Mme Lachance : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole au député de LaFontaine pour une période de
11 minutes.
• (14 h 30) •
M. Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bon après-midi, Mme Nugent, très heureux de
pouvoir discuter avec vous.
J'aimerais reprendre la balle au bond. Vous
dites qu'il faut être capable d'identifier justement les besoins spécifiques
pour pouvoir adapter les ressources financières nécessaires pour répondre aux
besoins d'épanouissement de l'enfant à besoins particuliers. Comment ça se
fait, ça, de façon pratico-pratique, là? Puisqu'on a l'adjointe parlementaire
du ministre de la Famille qui vient de dire que c'est ce qu'ils vont faire, là,
pour bien comprendre, là, qu'est-ce qui...comment ça se... c'est fait par qui,
c'est fait comment? Puis la modulation, c'est selon quels critères? Parce que
c'est une chose que de le dire, mais ce n'est pas tout à fait simple puis il ne
faut pas rater la cible? Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, mettre un
petit peu plus de chair autour de l'os.
Mme Nugent (Bianca) : Très bien.
Bien, je vais vous donner un exemple, parce que j'ai été en fait formée pour
non seulement évaluer, mais aussi soutenir les familles à l'évaluation des
services, notamment pour des adultes avec une déficience intellectuelle. Alors,
l'outil d'intensité de soutien, l'échelle d'intensité de soutien, SIS, est
disponible dans plusieurs langues, est utilisée, comme je vous dis, dans plus
de 127 juridictions. Il y a même un chercheur de l'Université de Montréal
qui a participé à son élaboration. Alors, il s'agit à ce moment-là de...
Évidemment, c'est des travailleurs sociaux indépendants ou une équipe ou une
agence ou un... qui est mandaté pour faire cette évaluation-là. Nous, on
recommanderait évidemment, dans une perspective que le gouvernement aille en ce
sens-là, par exemple, que le comité consultatif soit adjoint, finalement, d'une
équipe d'évaluateurs par région qui procéderait, finalement, à l'évaluation de
cette intensité-là, évidemment, en collaboration avec les prestataires de
services à l'enfance, en collaboration avec les parents, afin de répondre,
finalement, aux questions qui sont demandées dans cette échelle de soutien-là.
Je vous donne un exemple de question : On
demande quel type de soutien un enfant aurait besoin pour participer,
finalement, aux rassemblements. Alors, à ce moment-là, est-ce que c'est «pas de
soutien du tout», est-ce que c'est un accompagnateur, est-ce que c'est un
accompagnateur en tout temps ou un accompagnateur à mi-temps? Par la suite, la
durée. L'accompagnateur doit-il, selon une échelle de quatre, rester en tout
temps en présence avec l'enfant, uniquement au besoin, uniquement pour environ
les 30 premières minutes, une heure ou deux? Alors, une fois que toutes
ces questions-là sont posées, évidemment, automatiquement, il y a un calcul
d'index, l'index, finalement, d'intensité de soutien. Cet index-là permet,
finalement, au prestataire, et c'est ce qui a cours en ce moment en Ontario, de
déterminer à ce moment-là quel type de soutien, mais, évidemment, à quel coût
et qui est le mieux à même d'offrir ce soutien-là.
Dans une perspective de services à l'enfance, on
pourrait peut-être déterminer que certains enfants... un éducateur spécialisé
pourrait être suffisant dans le milieu, peut-être deux, en fonction du nombre
d'enfants ayant un haut taux... un haut index, je pourrais dire, là,
d'intensité de soutien. Alors, en fait... Et évidemment, plus un prestataire de
services aurait des enfants avec un haut fort index, plus d'argent il recevrait
pour embaucher, finalement, des éducateurs spécialisés, des préposés, un peu
comme dans les écoles des préposés aux enfants handicapés ou n'importe quelle
autre personne susceptible... des orthophonistes qui viendraient en soutien.
Comme vous le savez, les parents d'enfants à besoins
particuliers, on croule sous la fatigue décisionnelle, la charge mentale. On
est amenés à, surtout en bas âge, à amener nos enfants deux, trois, quatre fois
par semaine rencontrer des spécialistes qui ont chacun leurs outils
d'évaluation, qui ne se rendent pas nécessairement au service de garde. Ça fait
qu'imaginez-vous un service intégré avec des évaluateurs formés à l'utilisation
de cet outil-là, qui, finalement, leur seul et simple rôle serait de s'assurer
que l'intensité de soutien nécessaire à l'apprentissage de tous les enfants québécois
soit mise en place, et ce, tout au long de leur continuum d'apprentissage.
M. Tanguay : Y a-t-il un
enjeu... On parle beaucoup de pénurie de main-d'oeuvre. Y a-t-il un enjeu de
ressources, au Québec, à l'heure où on se parle?
Mme Nugent (Bianca) : Bien, tout à
fait. Bien, c'est un enjeu de ressources. C'est un enjeu qu'on le voit, en ce
moment, là, il y a des revendications dans les rues, il y a de la grève en ce
moment, parce que non seulement il y a un enjeu au niveau des ressources, mais
est-ce que les ressources aussi sont adéquatement soutenues dans leur rôle
primordial qu'ils ont, d'accompagner des jeunes enfants dans le développement
de leur potentiel? Alors, que ça soit au niveau des éducatrices, que ça soit au
niveau des orthophonistes, que ça soit au niveau, évidemment, d'autres
spécialistes qui sont dans le cercle de l'enfant, surtout en bas âge, on doit
se préoccuper sur la suite des choses, d'où le pourquoi qu'on doit mesurer
quelle intensité de soutien on doit apporter à ces enfants-là. Ça, ça
permettrait de ne pas faire de gaspillage de ressources, justement.
M. Tanguay : Et ça, je trouve
ça formidable. Puis, je veux dire, comme société, comme État, on devrait être
capables, en 2021, justement, de modeler selon le besoin, hein? On fait
beaucoup de mur-à-mur. On donne 43 $ par enfant par jour, c'est un peu la
moyenne de calcul que vous avez obtenue. On fait beaucoup de mur-à-mur, mais
besoins particuliers, pour certains, ça peut être un peu moins, puis pour
d'autres, bien, beaucoup plus.
Là, là, la loi sera ouverte devant nous. Vous
avez dit : Il y aurait peut-être lieu de mettre, dans les comités
consultatifs, une représentante ou un représentant là-dessus, donc, ça, il
faudrait venir modifier la loi. J'aimerais savoir si vous avez identifié
d'autres éléments pour donner suite à ce que je trouve être une idée
formidable, là, que vous venez très bien d'expliquer. Y a-t-il d'autres
modifications dans la loi que nous devrions inclure dans l'article par article
qu'on va faire? On a déjà, donc, identifié les comités consultatifs. Est-ce
qu'il y a d'autres choses? Est-ce qu'on ne devrait pas le mettre, le principe
de «on s'en va vers là» dans la loi? Parce que j'aime beaucoup ça, moi, quand
une loi... et on ne va pas tout y mettre, il y aura un règlement. Mais, quand
on dit dans la loi : On va vers ça puis on l'a enchâssé dans la loi, puis
c'est une obligation, là, le gouvernement n'a pas le choix, là.
Mme Nugent (Bianca) : Bien,
tout à fait. D'abord de bien identifier comme j'en ai fait état. Dans le projet
de loi, lorsqu'on fait mention de besoins, c'est souvent des besoins des
prestataires ou des services éducatifs de garde, et on ne parle pas de besoins
des enfants. Alors, si on parle des besoins des enfants, en fait cette
échelle-là d'intensité de soutien pourrait très bien se faire pour l'ensemble
des enfants parce qu'à partir du moment où est-ce qu'on est en mesure de
déterminer quand on procède à une inscription d'un enfant, il y a toujours une
évaluation d'intensité de soutien qui est nécessaire. Puis, à ce moment-là,
dans une perspective justement d'agir tôt et d'intervenir tôt, bien, c'est là
où est-ce qu'il est important de l'ajouter.
Un autre élément aussi important, c'est la
notion d'âge, hein? Vous comprendrez que nos enfants ne se développent pas dans
une perspective d'âge chronologique, hein? Ils se développent à leur rythme.
Alors, le libellé n° 2 qui fait état... avant l'âge
de six ans, on sait que c'est en référence à l'inscription à l'école. Je pense
qu'il est temps, au Québec, qu'on se dote d'un changement de paradigme puis
qu'on réalise, justement, dans une perspective d'inclusion, que ce n'est pas
tous les enfants qui peuvent commencer l'école à six ans et que, justement,
dans une perspective d'intervention précoce, il vaut mieux parfois laisser un
enfant, comme la Loi sur l'instruction publique le permet... de permettre à un
enfant au primaire de rester deux ans supplémentaires. Mais pourquoi ne pas
permettre à un enfant à besoins particuliers de rester justement deux ans
supplémentaires? Je sais qu'il y a d'autres intervenants qui ont parlé d'un an.
Pour nous, un an, c'est court.
M. Tanguay : O.K. J'ai
deux autres points puis, excusez-moi, je ne veux pas vous presser avec le
temps, mais il me reste 2 min 30 s. J'ai deux autres points,
dans un autre ordre d'idées, mais toujours évidemment sur le sujet. Il sera
donné priorité à certaines catégories, je vais dire ça entre guillemets, là,
d'enfants sur la liste, pour obtenir une place. Il n'est pas inscrit dans la
loi que nous devrions, donc, mettre dans le top des priorités des places pour
des enfants à besoins particuliers, parce que, justement, il faut agir tôt. On
le sait que, dans leur cas, là, il faut agir tôt. Alors, c'est triste de dire
ça, mais tant qu'il y aura une liste d'attente, il va falloir faire des choix.
C'est triste, hein, en passant, que vous ayez des besoins particuliers ou pas,
vous devriez avoir une place, puis ça sera mon deuxième point, mais ne
trouvez-vous pas que l'on devrait donc faire inscrire, dans la loi, à
l'article 30, là, lorsqu'il dit : Le ministre établit la priorité
notamment en ce qui a trait au contexte socioéconomique de l'enfant. On devrait
peut-être ajouter : Et en ce qui concerne ses besoins particuliers aussi?
Mme Nugent
(Bianca) : Bien, je vous dirais qu'effectivement c'est une excellente
proposition, et puis j'ai fait aussi état d'un indice de défavorisation à
l'apprentissage. Il n'y a rien qui nous empêcherait de mettre en place cet
indice quand même assez rapidement. On a assez de bons chercheurs en petite
enfance au Québec pour pouvoir se doter, justement, de cet indice-là, qui
permettrait d'ajouter, justement, les besoins particuliers, parce qu'il y a la situation de vie aussi. Un enfant autiste qui a été adopté,
à la protection de la couronne, ne va pas avoir les mêmes besoins qu'un enfant
autiste qui est né d'une famille au Québec.
Je vous donne
l'exemple, et je me mets aussi dans cette situation-là, c'est mon cas, et mon
fils a été expulsé de cinq milieux de garde avant son entrée à l'école. Alors,
je peux vous dire que cette réalité-là, elle existe, elle est partagée. Elle
n'est pas un cas uniquement unique. Et, pour nous, il est important que, dans
le libellé, il y a une mention des facteurs défavorisant l'apprentissage des
jeunes enfants. Et ces facteurs, bien, pourraient être plus que les besoins
particuliers.
• (14 h 40) •
M. Tanguay :
Et je vous ai très bien entendue, là. Je n'avais pas l'air, mais je vous ai très
bien entendue et écoutée, puis effectivement ça participe, justement, de ce que
l'on disait.
J'ai un dernier élément...
Une voix :
...
M. Tanguay :
Ah! mais je voulais juste que l'on applique... J'ai demandé au secrétaire, il
m'a dit oui, là. Oui? Est-ce qu'on peut consentir pour prendre le temps de la collègue
de Joliette?
La Présidente (Mme
D'Amours) : Est-ce que... partagé avec votre collègue?
M. Tanguay :
Oui, oui, tout à fait, je partage toujours.
La Présidente (Mme
D'Amours) : Parfait. Est-ce que j'ai le consentement?
M. Tanguay :
Consentement?
La Présidente (Mme
D'Amours) : Donc, vous pouvez continuer pour...
M. Tanguay :
Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
D'Amours) : Allez-y.
M. Tanguay :
Merci aux collègues. Il me reste une minute, de toute façon, tout ça pour une
minute, mais pour une question importante. Votre recommandation 4
dit : il faut réfléchir, il faut changer l'approche puis il faut que ça
soit fait dans un continuum. On a déposé un projet de loi qui ferait en sorte
que les services de garde seraient un droit, comme le droit d'aller à l'école,
le droit scolaire. Et, en ce sens-là, ça nous permettrait, oui, de faire en
sorte que chaque enfant ait une place parce que ce serait un droit, mais aussi
d'inscrire tout ce qui se fait dans les services de garde comme étant les
premiers pas, littéralement, vers ce qui va nous amener à un continuum
scolaire. Alors, j'imagine que, ça, vous y...
Mme Nugent
(Bianca) : Bien évidemment, nous...
M. Tanguay :
...vous y souscrivez?
Mme Nugent
(Bianca) : Oui, j'ai compris. Merci beaucoup. En fait, toute initiative
qui vise, finalement, à briser la discontinuité entre la petite enfance et le
préscolaire, pour nous, est une initiative qui est positive. Puis évidemment
tout est une question de comment. D'abord, dans un premier temps, rien ne sert
de se précipiter. Ce que l'Ontario a fait, ça leur a pris quand même
10 ans d'étude sur le développement du cerveau des enfants pour prendre en
compte de l'importance d'agir et d'intervenir tôt dans leur continuum
d'apprentissage. Le Québec est loin d'être arrivé à ce point-là, mais si on est
en mesure de, d'ici à ce qu'on y arrive, mettre en place des dispositions qui
garantissent que chaque enfant va avoir l'opportunité et l'avantage de pouvoir
avoir accès à l'égalité des chances de développer son plein potentiel, pour
nous, c'est positif.
M. Tanguay :
Merci à vous.
La
Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la
parole à la députée de Sherbrooke pour 3 min 40 s.
Mme Labrie :
Merci. J'aimerais vous poser une question de votre expérience personnelle.
Donc, sentez-vous bien à l'aise de me le dire si vous ne souhaitez pas répondre
à cette question-là, là, vous en avez tout à fait le droit. Vous avez mentionné
tout à l'heure que ça vous est arrivé, comme parent, que votre se fasse
expulser, là, de services de garde. Est-ce que vous êtes à l'aise de nous
parler davantage de ça? Est-ce que... C'était dans quel type de service de
garde? Quels arguments on utilisait pour expliquer ça? Parce qu'on entend
régulièrement des histoires de ce type-là, puis je trouve ça intéressant que
vous puissiez nous partager ça.
Mme Nugent
(Bianca) : Bien, merci pour votre question. Oui, en fait, je suis tout
à fait à l'aise. Et ça me permet aussi de ramener la discussion sur un point,
sur le faible taux de financement, finalement, relié à l'allocation à
l'intégration d'un enfant puis le supplément pour enfant à besoins... pour
enfant handicapé. En fait, ça, c'était un CPE, mais le CPE que ma fille a
elle-même fréquenté, qui connaissait bien notre famille et qui, finalement, se
disait, finalement, apte et capable, là, finalement, de soutenir l'intégration
de notre enfant, mais au bout de deux... en fait, dès le mois de... dans un premier temps, on nous a demandé d'inscrire
notre enfant à temps plein, parce qu'évidemment il faut comprendre que
le supplément, l'allocation, est lié à la fréquentation aussi. Alors, ça aussi,
c'est...
Mme Labrie : Pas à temps partiel? Ce
n'est pas possible de recevoir ça pour un enfant à temps partiel? O.K.
Mme Nugent (Bianca) : Bien, en fait,
il y a... Ce n'est pas le même taux. Alors, déjà là que c'est 43 $, et puis
je peux vous dire que ça n'a pas beaucoup augmenté parce que, moi, je vous
parle, là, d'une situation, là, qui date, là, déjà de, en fait, neuf ans.
Alors, mon fils fréquente en ce moment l'école secondaire. Alors, juste pour
vous dire que, dès ce moment-là, et c'est un enfant en situation d'adoption, le
congé parental n'était pas terminé, alors, on avait demandé à ce que la
fréquentation soit à temps partiel, et c'est ce qu'on nous a répondu, que ça
serait difficile à justifier le supplément dans cette circonstance-là. Et déjà
que le supplément, par la suite, une fois mon fils intégré, ne comblait pas
finalement l'accompagnement, le soutien en un à un qu'il nécessitait. Alors,
d'où le pourquoi qu'avec une intensité... une échelle d'intensité de soutien avec
un index, ça permettrait de bonifier ce supplément‑là en fonction de l'index,
et non pas en fonction, de manière globale et généralisée, de la situation de
handicap d'un enfant. La situation de handicap d'un enfant parle simplement des
obstacles dans son environnement qui l'empêchent, finalement, là, de se
développer, ça ne parle pas nécessairement de ses besoins.
Alors, d'où le pourquoi que c'était important de
faire une évaluation, là, de l'intensité de soutien, parce que ça, ça aurait permis de garder, finalement,
l'éducatrice qui ne pouvait veiller sur lui que trois heures par jour. Alors,
dans ce sens-là, trois heures, ce n'était
pas suffisant à son intégration. Il y a eu des crises, il y a eu des
dysfonctionnements qui ont finalement mené à une décision par le conseil
d'administration à son expulsion, en raison du fait que, dans la loi puis dans
les règlements, il est indiqué qu'un prestataire de services, et, comme on l'a
indiqué, et ça, c'est très inquiétant, qu'encore
dans le libellé, en ce moment, dans le projet de loi, c'est en fonction des
besoins et en fonction des ressources des services de garde que le droit va être respecté. Nous, on vous met en
alerte sur cette disposition-là parce que c'est justement pour ces mêmes
raisons là de manques de ressources que les enfants ont des bris de service ou
sont expulsés. Alors, on ne va pas régler la situation si on ne trouve pas un
moyen de bien financer le soutien à l'intégration.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci.
Mme Labrie : Merci. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, madame, pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
d'accueillir les prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 14 h 47)
(Reprise à 14 h 51)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec
(FTQ)
M. Bolduc (Denis) :
Bonjour, Mme la Présidente. Merci. Mmes et MM. les parlementaires, bonjour.
Merci de nous accueillir aujourd'hui. Je suis Denis Bolduc, secrétaire général
de la FTQ. M'accompagne Wilfried Cordeau, conseiller à la recherche à la FTQ.
Alors, je tiens à vous remercier encore une fois, là, de nous donner la chance
de nous exprimer sur ce projet de loi, un
projet de loi qui est important pour les familles du Québec, particulièrement
pour les travailleuses et les travailleurs qu'on représente, des travailleurs, travailleuses
qui comptent et attendent beaucoup du réseau
des services de garde éducatifs à l'enfance pour pouvoir concilier leurs
obligations familiales et professionnelles.
Alors, mais
c'est aussi un projet de loi important pour les personnes qui travaillent
chaque jour dans les services de garde,
et parmi lesquelles on a... la FTQ compte également plusieurs membres. Puisque
nous sommes ici, permettez-moi de
souligner le grand dévouement de ces femmes, surtout, et de ces hommes qui ont
à coeur le bien-être des enfants du Québec. C'est à ces travailleuses à
qui, depuis plus d'un an et demi de pandémie, la société québécoise a demandé beaucoup, a demandé de demeurer en première ligne,
chaque jour, au péril de leur santé, à qui nous devons tant aujourd'hui.
Nous vivons, ces jours-ci, des moments que je
qualifierais de mouvementés, dans le réseau. Nous ne pouvons pas nous permettre
d'abandonner ces personnes, et j'invite le gouvernement à mettre la bonne
volonté nécessaire pour
que cette commission parlementaire, ce projet de loi, le plan d'action qui
l'accompagne mais aussi la négociation collective
en cours, parviennent à leur offrir cette reconnaissance, à leur offrir des
milieux de travail sains, épanouissants, et dans lesquels ils et elles
auront le goût de continuer à s'investir autant.
On attendait avec appétit le dévoilement d'un
livre blanc et l'ouverture d'un vaste débat de société sur la conciliation
travail-vie personnelle et sur l'ensemble des services qui sont offerts aux
jeunes, aux enfants de 0-5 ans. C'est un peu décevant que la démarche
ministérielle n'ait pas abouti complètement. J'invite le ministre à poursuivre,
d'ailleurs, ses réflexions en ce sens, car, au-delà du projet de loi et du plan
d'action qu'il a présenté le mois dernier, nous demeurons convaincus que
plusieurs enjeux importants seront à régler sur ces questions.
La FTQ voit dans le projet de loi ainsi que dans
le plan d'action déposé par le ministre le 21 octobre dernier une volonté
de compléter le développement du réseau et de se donner les moyens d'y
parvenir. Dans l'ensemble, la FTQ accueille cette démarche positivement. Ça
répond ainsi à un certain nombre de nos préoccupations, qu'on porte,
d'ailleurs, depuis plusieurs années. Par contre, on pense que le projet de loi
et le plan d'action pourraient aller encore beaucoup plus loin. On salue la volonté
ferme du gouvernement de parachever le développement du réseau, puis, pour
prendre les paroles du premier ministre, au plus sacrant, et notre sentiment se
résume ainsi : il était grand temps.
Trop de temps a été perdu, ces dernières années,
en tergiversations, en compressions, en collusions, en tarifications, alors que
les familles du Québec avaient des besoins concrets, des besoins criants, et
que la rareté de main-d'oeuvre se faisait sentir de plus en plus fortement. Malheureusement,
le temps perdu ne peut pas être rattrapé. Aujourd'hui, il y a quand même plus
de 51 000 enfants, et autant de familles, qui attendent désespérément
une place qui n'existe pas encore. De nombreux parents, et surtout des femmes,
dois-je le rappeler, doivent reporter leur retour sur le marché du travail ou
revoir leur aménagement professionnel pour s'occuper d'enfants qui ne
bénéficient d'aucun service. C'est une situation aussi insoutenable pour les familles
qu'inacceptable pour la société québécoise.
Le gouvernement, avec le projet de loi, se
retrousse enfin les manches, mais il ne dispose que de bien peu de temps pour
fournir les 37 000 places subventionnées qu'il a promises. Pour nous,
il est crucial de réduire les étapes, réduire les obstacles administratifs pour
mener à terme les projets, d'accroître la capacité du ministère de connaître
les besoins dans les milieux et les régions, et de se doter d'outils
prévisionnels, d'accueillir des projets en continu, et même, de les initier là
où les besoins existent, même s'il manque de promoteurs, d'augmenter sa
capacité d'accueil, la capacité d'accueil des CPE, de mettre de l'ordre dans la
gestion du guichet unique, d'autoriser le recours à des installations
temporaires pendant la construction d'une nouvelle installation. Tout ça, nous
l'avons soulevé lors des consultations du printemps dernier, et nous sommes
heureux de constater que le projet de loi et le plan d'action qui l'accompagne
s'y attaquent de front.
Toutefois, on remarque certaines imprécisions
dans le projet de loi. C'est pourquoi on a quand même quelques bémols ou mises
en garde à faire. Premièrement, les besoins sont criants en matière de places
et services pour les poupons, spécifiquement, notamment parce que les parents
qui complètent leurs congés parentaux n'ont souvent pas accès à des places
avant que l'enfant atteigne 18 mois d'âge. Il faudrait minimalement
établir une projection et fixer des cibles à court terme concernant le
développement de ce type de places.
Deuxièmement, le déploiement des
37 000 places, bien qu'il concerne des milieux subventionnés, ne fait
l'objet d'aucune cible de distribution au sein du réseau des services de garde.
Nous pensons que, pour des raisons de transparence, de gestion participative,
de qualité et de diversité des services éducatifs, il est impératif que le
modèle du CPE soit privilégié dans ce déploiement.
Et, troisièmement, on note que le gouvernement
demeure très circonspect quant à l'offre de garde atypique. Dans le contexte
actuel de pénurie de main-d'oeuvre, le Québec doit, plus que jamais, prendre en
compte la diversité des besoins des parents
en matière de garde, notamment les parents qui doivent composer avec des
horaires atypiques.
On a au Québec un réseau des services à
l'enfance dont l'offre est très fragmentée. Dans les faits, les CPE et les
milieux familiaux se trouvent en compétition avec des garderies privées, des
garderies non subventionnées, des milieux familiaux non reconnus et, depuis quelques
années, avec des maternelles quatre ans. Pour la FTQ, cette logique de marché
et de compétition est très préoccupante. On considère que le principe de
concurrence n'a pas sa place dans les services de garde éducatifs. Le CPE et la
garderie commerciale n'opèrent pas selon la même logique. L'un est à but non
lucratif et a pour mission de soutenir le développement des enfants, l'autre
est lucratif et il vise à faire des profits. Après 20 ans de développement
du réseau, on continue de se demander comment la mise en compétition de ces
deux objectifs différents sera gagnante pour les enfants et les parents. Alors,
que retire le Québec de la concurrence entre les CPE, qui assurent du personnel
adéquatement formé, de la formation continue et des conditions de travail
décentes, et les garderies commerciales qui ne partagent pas ces mêmes
préoccupations? Alors, il est grand temps qu'un ménage soit fait pour favoriser
une qualité de services plus harmonisée, plus constante et plus sûre sur
l'ensemble du territoire. C'est notamment pourquoi nous allons jusqu'à demander
des services de garde universels et gratuits.
Alors, pour les bonnes nouvelles, on doit saluer
la réaffirmation de la mission de lutte contre la pauvreté des services de
garde subventionnés par l'obligation d'accueillir des enfants vulnérables sur
le plan socioéconomique. On accueille également l'abolition des milieux non
reconnus et l'obligation de détenir un permis et d'être pleinement reconnu pour
pouvoir dispenser des services en milieu familial. Les mesures transitoires
pour inciter des personnes de milieux non reconnus à régulariser leur situation
nous apparaissent aussi sages et justes.
• (15 heures) •
Il y a des bémols, des interrogations, des
inquiétudes. D'abord, le gouvernement n'affiche pas clairement sa position
concernant la qualité, pourtant reconnue, du modèle des CPE. On se serait
attendu à ce qu'il profite de l'occasion pour donner un dernier coup dans le
développement du réseau pour mettre les centres de la petite enfance au coeur du projet. On gagnerait, ainsi, à la fois en
quantité et en qualité. Au contraire, rien ne nous permet de croire que c'est
son intention, ce qui constitue, selon nous, une erreur à long terme. Au
contraire, bien que le gouvernement dise vouloir miser sur les places
subventionnées, il ne fait même pas semblant de fermer le robinet du développement
commercial soutenu par les garderies non subventionnées. D'abord, elles
bénéficieront du soutien direct de l'État par une bonification du crédit
d'impôt pour frais de garde. Il y a... Enfin, les GNS, les garderies non
subventionnées, auront accès au même guichet unique que les prestataires
subventionnés sans aucune contrepartie quant à l'accueil d'enfants vulnérables.
Notre lecture est à l'effet qu'elles pourront tout bonnement offrir des
services à des tarifs sociaux, homogènes sur le plan socioéconomique.
Alors, pour conclure, parce que j'arrive au bout
de mon temps, la FTQ croit profondément dans le modèle des CPE et invite le gouvernement à le soutenir avec vigueur en l'inscrivant au
coeur de sa politique de parachèvement du réseau de services de garde.
On doit
franchement une fière chandelle aux personnes qui font vivre le réseau des CPE,
et, dans le contexte, je sais que...
je suis conscient que le projet de
loi n° 1 n'a pas pour objet de régler les négociations en cours avec
les travailleurs des CPE, il n'a pas été écrit pour ça, je le sais, mais
on parle ici de changements législatifs dont l'objectif est d'améliorer le
réseau public de garde à l'enfance, qui fait des jaloux, je peux vous le dire,
dans les autres provinces canadiennes. Et on peut vouloir... On ne peut pas
vouloir prendre soin du réseau sans prendre soin des gens qui l'opèrent...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
M. Bolduc
(Denis) : ...et donc on exhorte le gouvernement...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, monsieur...
M. Bolduc (Denis) :
...d'entendre cet appel pour qu'il y ait des conditions intéressantes.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, M. Bolduc. Nous allons maintenant commencer la période
d'échanges, et je cède la parole à l'adjointe parlementaire, la députée de
Bellechasse.
Mme Lachance : Je vous
remercie, Mme la Présidente. MM. Bolduc et Cordeau, merci, bonjour. Je
suis contente d'avoir l'occasion de discuter avec vous. Vous avez fait état de
plusieurs points. Je vais essayer d'en rediscuter puis peut-être de les
préciser puis de revenir.
D'abord, vous avez mentionné l'importance des
places poupons. Et je tiens à le souligner, dans l'appel de projets en continu,
j'imagine... Je ne sais pas si vous l'avez bien vu, mais les places poupons
sont obligatoires pour obtenir, en fait, des possibilités de places tout court.
Donc, chaque appel de projets devra contenir un certain nombre de places
poupons. Donc, je ne sais pas si ça peut vous rassurer, mais, oui, les places
poupons sont une priorité et elles en font partie.
Maintenant,
dans votre mémoire, à la page 10 et à la page 11, et je vous cite : Vous êtes favorables à une
stratégie de développement de places en CPE qui s'appuierait sur des
installations déjà existantes, expérimentées et ancrées dans leurs milieux. Il peut être envisageable de reconsidérer le maximum
d'enfants que chaque installation peut accueillir de manière raisonnable. Est-ce que, selon vous, le
passage de 80 à 100, c'est considéré comme raisonnable? Qu'est-ce que
«raisonnable»? Est-ce qu'on est sur la bonne voie?
M. Bolduc (Denis) :
Bien, raisonnable, ça dépend du milieu des installations, du personnel en
place, de leurs qualifications, du nombre de personnes, etc., comment ils
peuvent fonctionner. Pour les places poupons, vous dites, oui, c'est
obligatoire, là, pour obtenir... pour pouvoir fonctionner, mais il y a... Moi,
je connais des femmes, là, enceintes qui, elles, ont deux, trois mois de
grossesse, puis elles stressent déjà, elles stressent déjà. Je vais avoir un
congé parental, oui, mais, au bout du congé parental, je ne sais pas si je vais
avoir une place. Je ne le sais pas si je vais
avoir une place pour ma petite fille, mon petit garçon. Puis elles font des
démarches, des démarches, des démarches, puis elles ne trouvent pas.
Puis, plus... moins qu'elles trouvent plus elles stressent, et elles n'ont pas
besoin de ça. L'enfant vient au monde, puis elles sont encore là-dedans. Et je
ne sais pas, il faut trouver cette solution-là, il faut qu'il y ait suffisamment
de places pour les rassurer, ces femmes-là, pour dire que, quand l'enfant va
naître, vous allez avoir du temps pour s'occuper de l'enfant puis au bout de
votre congé parental, bien, il va y avoir une place pour votre enfant en
garderie. Cassez-vous pas la tête avec ça. C'est ça que... c'est ça qu'il faut
viser.
Maintenant, un nombre minimal de places, est-ce
que ça va résoudre cette problématique-là? Ça dépend, là, du seuil qu'on fixe,
là, mais il faut qu'il soit quand même assez rassurant. Puis je pense qu'en
faisant les études, les recherches démographiques, tout ça, je pense que c'est
des chiffres qu'on peut prévoir, qu'on peut quand même évaluer, là, les
besoins, avec le rythme de naissance qu'on connaît, etc. Je pense qu'il y a des
gens plus compétents que moi qui peuvent arriver à ça. Mais il faut quand même
trouver un... quand on parle de places minimums, il faut trouver un chiffre qui
va rassurer les femmes.
Mme Lachance : Vous savez, vous
l'avez dit, il y a un rattrapage à faire, hein? On part de loin. Il y a
plusieurs places en création actuellement pour des enfants qui actuellement
attendent une place. Je vous entends bien. Et c'est la volonté, vous le savez,
de pouvoir se donner les moyens de créer des places à la mesure des besoins, au
fur et à mesure. Donc, je pense que c'est là où on se situe actuellement.
Vous avez aussi évoqué,
puis je trouve ça très intéressant, vous avez parlé des besoins des parents. On
le sent, le besoin des parents est au coeur de vos priorités. Lorsque vous
parlez des poupons, bien, c'est un besoin qui est imminent pour les mamans qui,
actuellement, sont enceintes. Mais vous avez parlé aussi des besoins atypiques.
Quand on parle de places atypiques, vous parlez... Est-ce que je peux vous
permettre... Pouvez-vous élaborer davantage ce... bien, on sait ce que c'est
qu'une place atypique, mais exactement comment vous voyez ça?
M. Bolduc
(Denis) : Wilfried pourra compléter, mais il y a de plus en plus de
personnes qui travaillent sur des horaires
de soir, de fin de semaine, et donc il faut cette souplesse-là dans le réseau
pour pouvoir offrir le service aux gens qui sont un petit peu en dehors,
là, du créneau habituel, là, de la journée type, là, d'une travailleuse
québécoise. Et ça devient un peu un stress, là, quand... Encore une fois, tout
est relié, tout est un peu relié à ça, là. C'est vraiment stressant. Parce que j'en ai vu beaucoup, là,
c'est stressant d'avoir un enfant, un petit bébé, d'être enceinte, d'avoir
un petit bébé, tu fais des démarches puis,
mois après mois, tu ne trouves pas, tu ne trouves pas. Puis, quand... si, par-dessus,
tu as un horaire qui convient moins au cadre normal, bien, ça devient encore
plus compliqué. Alors, il faut prendre soin des gens qui ont des horaires comme
ça, qu'on appelle atypiques. Je ne sais pas si, Wilfried, tu peux ajouter sur
cette question-là
M. Cordeau (Wilfried) : Oui, merci
beaucoup. Donc, effectivement, c'est quelque chose qui ressort très fort de la
part de nos membres, là, la variation des situations d'emploi pour des raisons
de travail à temps partiel ou d'horaires brisés, discontinus, etc. Donc, des
besoins pour avoir accès à des services la fin de semaine, ce n'est évidemment
pas dans le modèle unique de la garderie qu'on connaît qu'on va trouver une
réponse à ces besoins-là. Alors, il y aura à réfléchir, puis on n'a pas nécessairement
de solution miracle à proposer, mais je pense que, sur des mécanismes
d'incitatifs, par exemple, notamment, parce que, des fois, ça engendre des
frais supplémentaires que d'avoir des éducatrices qui pourraient, par exemple,
prolonger leur semaine ou, en tout cas, réorganiser des horaires de travail, ça
doit se faire... se discuter, évidemment, dans les milieux de travail, par les
équipes. Je pense, encore une fois, le modèle CPE est intéressant pour ça,
parce qu'il y aura une gestion, une réflexion partenariale étroite entre
l'équipe de travail, la direction et les parents pour bien identifier les
besoins puis identifier les solutions à ces besoins-là.
Donc, ça, c'est des choses qui peuvent se faire dans ces milieux-là, mais on
fait aussi appel à des haltes-garderies. On a vu, en tout cas, ce qu'on a compris du projet de loi, c'est qu'il y
a un pas qui est fait pour les milieux d'enseignement, ce qui est fort
intéressant et demandé depuis très longtemps. Est-ce qu'on peut aller plus loin
en trouvant des formules pour les milieux de
travail, où on pourrait, soit à proximité, ou, dans certains milieux de
travail, des fois il y a des employeurs qui sont plus gros que d'autres,
par exemple, offrir des modalités pour avoir des haltes-garderies qui permettent
aux travailleurs et travailleuses qui sont dans ces milieux-là ou à proximité
d'avoir accès, quand c'est nécessaire, parce qu'il y a un dépannage, parce que
ce soir il faut que je reste un peu plus longtemps au bureau, parce que mon
horaire de travail n'est pas nécessairement régulier, que je puisse avoir accès
à un service la fin de semaine? Donc, évidemment, là, c'est du travail
partenarial et c'est des incitatifs peut-être financiers ou des subventions supplémentaires, des coups de pouce financiers qui
peuvent aussi aider à débloquer des situations dans ces milieux-là.
• (15 h 10) •
Mme
Lachance : Merci. Je vais
partager le temps avec ma collègue et je vous reviendrai dans quelques
minutes pour la suite.
La
Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée de Soulanges.
Mme Picard : Merci, Mme la
Présidente. Demander aux personnes offrant de la garde non reconnue par le
ministère de la Famille d'intégrer le réseau des services éducatifs à
l'enfance, c'est un changement important. Il est proposé par le projet de loi.
J'aimerais vous entendre sur deux points. Premièrement, croyez-vous au
bien-fondé de ce changement, et pourquoi? Et deuxièmement, que répondriez-vous
à celles et ceux qui disent que cette décision pourrait entraîner la fermeture
de certains milieux de garde parce que les PNR refuseraient d'intégrer le
réseau du ministère de la Famille?
M. Cordeau (Wilfried) : Alors, merci
pour cette question. Écoutez, on n'est pas, évidemment, des grands experts de
cet enjeu-là. On a été très surpris, lors des consultations, au printemps,
justement, d'avoir un chiffre qui est, je pense, 41 000 personnes, à
peu près, personnes... enfants, qui étaient évalués, je pense, dans ce type de
situation-là, qui est assez inquiétante, de savoir que, dans les faits, on a
une loi qui, actuellement, autorise différents modèles. On l'a dit tout à
l'heure, une fragmentation importante de l'offre. Il y a une réflexion
d'ensemble à y avoir. Il y aura lieu de se poser des questions, il y a
différents modèles. Celui-ci en est un, on est contents de voir qu'il y a une
action qui est entreprise à travers le projet de loi, le plan d'action,
l'intention gouvernementale, à savoir non pas que c'est quelque chose... c'est-à-dire
que c'est quelque chose qui échappe au contrôle du ministère, donc évidemment
des normes de qualité, de suivi, de possibilités d'encadrement et de services,
j'imagine, auprès de ces enfants-là et de ces familles-là.
Donc, il y a un besoin qui existe.
Manifestement, ce besoin-là ne trouve pas réponse pour les parents de ces
enfants-là dans le réseau actuel, tel que reconnu, en tout cas, régi. Ces
parents-là se tournent vers des milieux qui ne le sont pas. Je pense que ça
soulève toutes sortes de questions. On est heureux de voir qu'il y a de
l'argent sur la table, qu'il y a des mécanismes de transition qui sont mis en
place pour, justement, que ce rapatriement-là, entre guillemets, de ces
services-là, se fasse de façon harmonieuse dans un giron gouvernemental
ministériel plus, à mon avis, adéquat, qui va permettre
des garantir une traçabilité, une certaine évaluation de la qualité puis en
respect des normes. Donc ça, c'est ce qu'on souhaite. C'est ce qu'on lit à
travers l'intention. Donc, le bien-fondé, pour nous, il est à cet égard-là. Est-ce
que... Concernant la fermeture de certains milieux, je ne peux pas me prononcer
dans la mesure où... C'est ce qui nous fait dire qu'on est heureux de voir des
mesures transitoires, c'est-à-dire qu'on s'attend à ce qu'il y ait un mécanisme
qui soit incitatif et qui donne les moyens à ces gens-là de poursuivre leurs activités
autrement, sans nécessairement d'avoir de rupture de services pour les enfants
et les parents de ces milieux-là.
Mme
Picard : Merci. Je vous
amènerais, pour ma prochaine question, à votre recommandation
n° 14. Vous dites : «Que la participation
des éducatrices et la reconnaissance de leur expertise [doit être] facilitées
en les intégrant dans la structure décisionnelle des établissements.» On a
entendu, hier, une demande similaire d'un autre groupe. Et à ma connaissance
c'est déjà possible. On peut avoir jusqu'à deux membres du personnel qui
peuvent siéger sur un C.A. des CPE. Donc, j'aimerais savoir comment ça se passe
dans les milieux où c'est déjà le cas, et comment un siège réservé changerait
les choses pour les éducatrices. Donc, j'aimerais entendre surtout votre
réponse sous l'angle de la reconnaissance des éducatrices.
M. Bolduc (Denis) :
Nous, on... puis ce n'est pas unique au réseau des CPE ou au réseau des services
de garde, mais quand on veut faire accepter des changements, que ce soit bien
accueilli, que les gens ne mettent pas, ce que je dis souvent, là, les freins
sur les quatre roues, là, bien, il faut intégrer les travailleurs, les travailleuses,
dans les processus. Et ça, c'est un bel exemple, il n'y a pas personne de mieux
placé que les éducatrices puis les gens qui gravitent autour, là, des
éducatrices, pour savoir comment ça fonctionne, comment ça fonctionne de minute
en minute, là, dans un service de garde. Et donc on ne peut pas se priver de
leur expertise et on a tout intérêt à les intégrer dans tous les processus. Et
c'est gagnant, là. Je ne vois pas, logiquement, là, pourquoi on pourrait
s'opposer à ça. Qui pourrait s'opposer à ça,
là? Tu sais, c'est tout à fait logique que l'éducatrice soit impliquée dans
ces... dans les structures décisionnelles des établissements. C'est
elles qui donnent le service, c'est elles qui voient comment, là... qui ont l'expertise des enfants, comment
travailler avec les enfants, tout ça. C'est vraiment... Pour moi, ça va de
soi, là.
Mme
Picard : Donc, j'imagine
que, dans les milieux où ça se passe déjà
comme ça, vous voyez une différence entre les C.A. des organisations?
M. Bolduc (Denis) :
Ah! Est-ce que tu as des informations là-dessus, Wilfried?
M. Cordeau (Wilfried) : Bien,
écoutez, est-ce qu'il y a une différence? De mon expérience personnelle, pour
avoir fréquenté... en fait, pas moi, personnellement, mais mes enfants, deux
modèles de service, la différence est importante en l'existence d'un système
participatif où les parents sont inclus, et le personnel l'est, d'un système
dans lequel il n'y a pas cette possibilité-là, dans une garderie privée, par
exemple. La différence est importante, à la fois pour que les parents puissent
faire valoir une certaine vision du service qu'ils ont envie d'avoir dans le
milieu, c'est vrai aussi pour les éducatrices lorsqu'elles sont autour de la
table. Moi, j'ai vécu ça, également. La profondeur des réflexions est beaucoup
plus importante, dans la mesure où, par exemple, si on veut implanter un
système de couches lavables, on a à la fois les parents qui ont un intérêt à
avoir ce système-là et les éducatrices sont en mesure d'expliquer, en contexte
dans lequel elles travaillent, ce qu'il est possible de faire, ce qu'il n'est
pas possible de faire. Donc, la profondeur, elle est là.
Par ailleurs, pour ce qui est de la
participation des éducatrices, selon la recommandation qu'on a faite, elle ne
vise pas que les CPE, tous les CPE ne les impliquent pas nécessairement de la
même façon, mais ça devrait pouvoir être vrai pour d'autres modèles de services
qui sont donnés. Et, par ailleurs, je prends note également... je prends l'occasion
de noter que, dans le projet de loi, actuellement, on a aussi retiré les
milieux de garde des comités consultatifs régionaux, contrairement aux comités
consultatifs actuels. Donc, ça, ce n'est pas quelque chose qu'on a spécifiquement
noté, mais c'est quelque chose qui nous inquiétait dans la mesure... de voir justement
cette réflexion de profondeur, d'expérience du terrain, comment vous la voyez,
en tant que gouvernement, à partir du moment où ces milieux-là ne seront pas représentés,
là, et leurs personnes ne seront pas représentés dans ces comités de
consultation qui auront pour objectif, là, d'après ce que je comprends,
d'identifier les besoins sur le territoire. Donc, quand on dit : à tous
les échelons, dans notre esprit, c'est un peu la démarche.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je vais céder maintenant la parole à la députée de Bellechasse pour
1 min 30 s.
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente. Dans cette discussion, ce qu'on constate, c'est évidemment le... on
sent votre appui face à la complétion du réseau, que c'est important. Vous
l'avez mentionné, il y a des parents qui attendent, il y a des parents en
devenir qui attendent. Et certains moyens dont on s'est donné, dont, entre
autres, je vous dirais, concernant les installations temporaires, vous êtes favorables,
mais vous recommandez au ministère de n'autoriser qu'un petit nombre
d'exemptions à la fois pour une même installation. Ça, j'aimerais ça que vous
m'expliquiez un peu puis que vous me donniez des exemples de comment ça peut
s'articuler.
M. Bolduc (Denis) :
D'abord, sur les installations temporaires, on se pose quand même plusieurs
questions, là. «Temporaires», ça veut dire combien de temps? Parce que ça peut
être long, hein, un projet de construction. Et donc, il y
a ça. Il y a toute la question de la santé, la sécurité, le bien-être des
enfants, les services qui sont offerts aux enfants,
bien, il faut que le lieu, là, soit approprié pour ça. Alors, on avait quelques
zones grises, là, quant à... Qu'est-ce
que ça veut dire, «temporaires», dans ce contexte-là, là, ce que...
Mme Lachance : Bien, écoutez, justement,
c'est ce que j'ai demandé comme précision. Ça commence avec la mise en chantier
et ça se termine avec la fin de la mise en chantier.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
suis désolée. Le temps étant écoulé, Mme la députée, merci.
Mme Lachance : Merci, Mme la
présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Donc,
je cède maintenant la parole au député de LaFontaine pour une période de
11 minutes.
M. Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bien, à mon tour de vous
saluer, MM. Bolduc et Cordeau, merci pour votre temps. Je n'ai que
11 minutes pour un vaste sujet, vaste sujet pour lequel j'ai noté d'entrée
de jeu que vous auriez aimé, donc, qu'il y
ait une plus large consultation, qui nous aurait permis, donc, d'avoir un plus
vaste débat et, j'imagine, en bout de piste un projet de loi qui serait plus
costaud. C'est ce que vous auriez aimé, n'est-ce pas?
M.
Bolduc (Denis) : Oui. Bien,
notamment sur la question des maternelles quatre ans, là, je pense qu'on a
quand même des doublons, là, hein? Quand
on... Pourquoi on met... En fait, c'est ce qu'on demande, hein, on met un...
Mettons un moratoire, là, sur le développement
des maternelles quatre ans, consolidons, développons comme il faut notre réseau
de services de garde, voyons comment ça
fonctionne puis, après ça, faisons la réflexion pour compléter si on a besoin,
là, de maternelles quatre ans, comment on le
fait, etc. Parce que c'est un tout, tout ça, là. Et puis là, on avait... on a
des... Ça, c'est une partie. Alors, ce qu'on fait, là, actuellement,
c'est une partie, parce que les enfants de zéro... pour les enfants 0-5 ans, et donc il y a des choses
qui se croisent, là. Je ne sais pas si, Wilfried, tu voulais ajouter là-dessus,
là, mais...
• (15 h 20) •
M. Tanguay : Bien, nous, dans
le fond, c'est un peu comme une mosaïque, hein, le réseau, hein, tu sais, je
veux dire... puis là, on essaie... on parle un peu de conversion. Bon, il y a
70 000 places non subventionnées, là, qui ne sont pas à 8,50 $,
qui sont à 35 $, 40 $, 50 $, il y en a 70 000. On évalue
que, bien, finalement, il y en a peut-être un 10 000 qui n'est pas occupé.
Là, on parlait de faire une conversion, pour commencer, projet pilote de
3 500. Et, en ce sens-là, je suis forcé d'être d'accord avec vous, là,
autrement dit. J'aimerais ça, vous entendre, M. Cordeau, vous alliez
intervenir par rapport à ça, là, d'avoir une vision globale de ce qu'on veut,
puis après ça, j'aurai des questions sur : une fois qu'on a dit ça... Bon,
on n'a pas la vision globale, puis les maternelles quatre ans, là, je ne veux
pas vous assommer, mais on a vu les statistiques, là. On évalue une classe à peu
près à 800 000 $, puis je suis certain que je ne suis pas à jour, là,
dans les chiffres, le coût pour une classe, 800 000 $, alors qu'un
CPE, en moyenne, c'est 2 millions, pour le construire. Et on a vu que
beaucoup d'éducatrices en CPE sont parties pour aller aux maternelles quatre
ans. Alors, c'est comme si, effectivement, la mosaïque, là, ou la catalogne, si
vous me permettez l'expression, elle se développe un peu cahin-caha, je vais
dire ça de même.
M. Cordeau (Wilfried) : Bien, écoutez,
je ne reprendrai pas vos termes, mais, en même temps, ça résume les questionnements
qu'on se pose. C'est-à-dire que, depuis la politique familiale, il y a des
choix politiques qui ont été faits, il y a une vision d'ensemble du développement
des services, de façon très large, qui dépasse les services de garde, selon
moi, de zéro à cinq ans au Québec, qui a été... qui s'est... un ensemble de
choix politiques qui ont guidé le développement de ces services-là, je dirais, coup sur coup. C'est-à-dire que la vision d'ensemble, les objectifs sociaux qu'on vise à
atteindre avec ces différents services-là, que ce soient les services sociaux,
les services d'encadrement, les services complémentaires, les services de garde
eux-mêmes, le choix d'avoir ou non des maternelles qui commencent à quatre ans
ou à cinq ans, c'est des choix qui ont été faits dans le temps les uns
par-dessus les autres.
Mais ce qu'on aurait voulu, nous, suite aux
consultations et à l'annonce d'un livre blanc, c'était... en fait, ce qu'on espérait, c'était un plus vaste débat pour
que le Québec, 25 ans après la politique familiale, puisse se questionner à savoir qu'est-ce
qu'on veut pour les enfants de 0-5 ans, servir quels objectifs. On parle beaucoup
de diagnostic, on parle d'équité, on parle de vouloir identifier des difficultés.
C'est fort louable, mais est-ce que le projet de loi, est-ce que le plan
d'action, actuellement, suffisent? On pense que ce sont des pistes
intéressantes qui ne sont peut-être pas complètes.
On s'attendait à avoir un débat qui transcendait ça, justement,
pour poser la question de l'éclatement des services qui sont offerts, la fragmentation par le milieu
non reconnu tout à l'heure, on parle de maternelles quatre ans, une
pléiade de services qui, peut-être,
s'opposent les uns les autres ou, en
tout cas, sont en compétition, selon
la lecture qu'on en a faite et qu'on
a présentée dans notre mémoire, et qui mérite des questionnements qui vont
au-delà du projet de loi, selon nous.
M. Tanguay : Oui, oui,
oui. Non, tout à fait, tout à fait. Et j'ai peut-être une petite question plus
précise puis après ça une question qui va suivre qui va être un peu plus large.
Quand vous dites, dans votre mémoire, que «le gouvernement pourrait d'ores et déjà
s'engager à ce qu'une [proportion] significative [du] 37 000 places
promises d'ici 2025 soit développée en CPE», la proportion de 85 % vous
va? C'est à peu près ça qui est... ou c'est une autre proportion que vous avez
en tête? Parce qu'il est pas mal reconnu que le fameux 85 %, pour ceux qui
ne plaideraient pas, par ailleurs, que ce soit 100 % en CPE, là, mais...
Puis ce n'est grave si vous n'avez pas de chiffres, là, je vais...
M. Bolduc
(Denis) : Non, moi, je n'avais pas vraiment de chiffres...
M. Tanguay : O.K., pas
de problème.
M. Bolduc (Denis) :
...mais, dans un monde idéal, je dirais 100 %, moi.
M. Tanguay : O.K. Alors,
je vais remplacer «proportion significative» par «100 %». C'est bon, O.K.,
on va amender ça. O.K. Bon, bien, justement... Puis là je veux dire... Puis là
c'est important, ce qu'on vient de dire, parce que c'est le contexte dans
lequel on est, puis le reste de notre conversation va être dans ce contexte-là,
où on se dit, bon, bien, on n'a peut-être pas tous les outils, puis on a
peut-être fait l'économie d'un débat de fond. Bon, quand même, là, l'ambition
du gouvernement, qui en fait 2 000, vous dites, grosso modo, dans votre
évaluation, dans la dernière année, des places subventionnées, c'est d'en faire
37 000 en quatre ans. Wow!
Alors, quoi c'est qui manque, si vous me
permettez l'expression, dans le projet de loi ou dans l'univers? Selon vous, il
y a-tu des choses qui manquent, qui ne sont pas là, là, pour qu'on puisse
dire : Bien, ça tient la route, ou vous me dites : Bien, écoutez, on
n'a même pas eu le débat, je ne serais même pas capable de vous le dire, mais
si je regarde le passé récent, ça ne tient pas la route? Puis je ne veux pas
vous mettre des mots dans la bouche, puis généralement, M. Cordeau, c'est
une bonne chose de ne pas reprendre mes expressions, ça va vous éviter des
problèmes. Mais qu'est-ce qui manquerait pour que ça tienne la route ou... On
ne peut même pas l'identifier parce qu'on n'a pas eu le débat?
M. Bolduc (Denis) :
Je ne le sais pas, qu'est-ce qui manquerait pour arriver à l'objectif.
M. Tanguay : Est-ce que ça
tient la route?
M. Bolduc (Denis) :
Bien, c'est pas mal ambitieux. On souhaiterait...
M. Tanguay : Vous êtes
gentil.
M. Bolduc (Denis) :
On souhaiterait que le gouvernement y arrive, mais c'est quand même... Vous
dites «quatre ans», mais c'est plutôt trois ans et demi.
M. Tanguay : Moi aussi,
j'étais gentil, là.
M. Bolduc (Denis) :
Oui, c'est 37 000 places en trois ans et demi. C'est beaucoup, c'est
ambitieux, c'est un... Mais il faut être ambitieux, là.
M. Tanguay : Il faut être
réalistes.
M. Bolduc (Denis) :
Il faut, en même temps, se donner les outils. Mais je ne sais pas comment le
gouvernement — moi,
je ne l'ai pas vu, en tout cas — comment le gouvernement entend, là, y
arriver, là.
M. Tanguay : O.K. Vous faites
état — bon,
on veut développer le réseau — vous faites état de la nécessité de
conserver — puis
j'imagine que vous faisiez référence, à ce moment-là, au comité consultatif,
là, qui identifie les projets, et tout ça,
puis on va aller jouer, avec le projet de loi, dans la composition du comité
consultatif — vous
soulignez l'importance de préserver la mobilisation des milieux et des
communautés. Pouvez-vous m'en parler?
M. Cordeau (Wilfried) : Bien,
écoutez, c'est un souhait plus générique, là. On n'est évidemment pas des
experts des mécaniques de comités consultatifs. Nous, l'inquiétude qu'on avait
soulevée dans le cadre de la consultation, au printemps, c'était l'absence
manifeste, là, ou, en tout cas, je dirais, des... plutôt, un grand besoin de
stratégies et d'outils prévisionnels, à savoir que, dans les faits,
l'évaluation des besoins, telle qu'on la comprend jusqu'à présent, telle
qu'elle se fait, selon notre lecture, jusqu'à présent, c'est qu'elle se fait
sur le plan régional, au niveau local, et ça
remonte vers le ministère. Il y a des allers-retours, et il y a éventuellement
une action qui se prend, là.
Ce qu'on comprend, c'est qu'on veut resserrer un
peu ça, avoir une espèce de meilleure vision d'ensemble, à travers des comités
qui ont un mandat beaucoup plus clair, ce qui est intéressant. Donc, dans le
fond, que le ministère se donne des outils statistiques et de prévision très
proches du terrain, c'est quelque chose de très important. Il ne faut pas que
ça s'arrête à un exercice, je dirais, institutionnel, là, il faut que ça prenne
en compte les besoins des gens qui sont sur le terrain. Donc, évidemment, les
communautés, les services eux-mêmes, mais les représentants des communautés
pour bien identifier, effectivement, qu'est-ce qui s'en vient dans les
prochaines années, quels sont les besoins, comment... en quantité, mais en
qualité également — on
parlait tout à l'heure de garde atypique. Donc, il faut quand même qu'il y ait
une connexion sur le terrain qui se fasse et que ça ne soit pas juste un
exercice d'appareil, si je peux résumer ça de cette façon-là.
M. Tanguay : Tout à fait,
puis vous avez de la suite dans les idées. Dans votre mémoire, quand vous
prenez ce fil-là, ce fil rouge là, puis vous l'amenez également quant au
nouveau guichet unique. Vous dites : Le nouveau guichet
unique, je vous cite, là : «...la FTQ n'est pas pleinement convaincue
qu'un rapatriement — j'essaie
de lire vite — au
ministère soit la solution optimale...» Puis vous dites que vous vous
interrogez «sur les nombreuses modalités entourant la gestion du guichet
unique». J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Bolduc (Denis) :
On en parlait justement juste avant d'entrer, on ne sait pas comment ça va
fonctionner. Ça va être déterminé par
règlement ou... Ça va être déterminé par règlement? Qu'est-ce qui va arriver?
Alors, on comprend que quand un père va inscrire un enfant, il va avoir
un numéro. En tout cas, on comprend, un rang, un numéro, et donc est-ce que les
obligations concernant les CPE puis les garderies commerciales ne sont pas les
mêmes? Elles ne sont pas obligées. Concernant la situation socioéconomique des
enfants, les garderies commerciales n'ont pas d'obligation. En tout cas, c'est
notre lecture des faits. Alors, le parent qui va... ça va être son tour, son
numéro va être tiré, et ça ne fait pas tout à fait son affaire, là, la
garderie, là, où elle est située, pour différentes raisons, etc. Est-ce
qu'il... qu'est-ce qui va arriver? Il va-tu avoir... Il a un droit de refus
mais...
M. Tanguay : Normalement...
On va poser la question à l'article par article, mais normalement, il perdrait
son tour, mais on va se poser la question.
M. Bolduc (Denis) :
Bien, on se pose des questions comme ça, là.
M. Tanguay : Oui, O.K.
Dernière chose, parce que vous êtes, la FTQ... travailleurs, horaires
atypiques. C'est-tu «plus qu'hier, moins que demain» travailleurs, horaires
atypiques? Quel est l'état du marché?
M. Bolduc (Denis) :
Oh! Statistiquement, dans nos rangs?
M. Tanguay : Oui, il y en
a-tu plus? Avec nos vies, on est toujours connectés, puis tout ça, là.
La Présidente (Mme D'Amours) : En
15 secondes.
M. Bolduc (Denis) :
Dans le secteur de la santé, en tout cas, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup
d'horaires atypiques.
M. Tanguay : Il y en a
beaucoup, hein?
M. Bolduc (Denis) :
Dans le privé, peut-être un peu moins, mais je n'ai pas de statistique.
M. Tanguay : Mais c'est une
réalité concrète.
M. Bolduc (Denis) :
Oui, oui, oui, c'est...
M. Tanguay : O.K.
Merci.
• (15 h 30) •
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Donc, je vais maintenant céder la parole à la députée de Sherbrooke pour
2 min 45 s
Mme Labrie : Merci, Mme la
Présidente. Vous nous amenez dans votre mémoire... vous nous parlez de votre préoccupation
sur la qualité, vous en avez parlé aussi dans votre présentation. On sait que
c'est variable selon le type de service de garde éducatif, on sait que ça
dépend de la qualification aussi. Puis, en ce moment, ni dans la loi, ni dans
le projet de loi, il n'y a quoi que ce soit pour améliorer la qualité des
services ou informer les parents de c'est quoi, l'état de la qualité dans les services
de garde qu'ils fréquentent, par exemple, pour lesquels ils se font offrir une
place. C'est préoccupant dans le contexte où il y a une volonté de développer
«au plus sacrant», là, pour reprendre les mots du premier ministre.
Il y en a
certains qui nous ont exprimé le besoin que les évaluations de qualité des services de garde qui ont déjà eu lieu soient rendues publiques, notamment
pour que les parents puissent y avoir accès. Qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Cordeau (Wilfried) : Bien, écoutez,
moi, je n'ai pas... on n'a pas eu ce genre d'échos là de la part de nos membres
sur le terrain sur cette question-là comme telle. Qu'est-ce qu'on en pense? De
façon générale, j'aurais tendance à dire que minimalement il faut avoir des évaluations
de qualité sur une base nationale, peut-être apportées au niveau régional.
Après, si je comprends bien votre question, ça serait établissement par établissement?
Mme
Labrie : Ça serait qu'il y
en a déjà, des évaluations de qualité, mais elles ne sont pas rendues
publiques, les parents n'ont pas accès aux
résultats de ces évaluations-là. Donc, la proposition que certains ont
faite, c'est de les rendre disponibles,
là, que les parents puissent savoir quel est le résultat des évaluations
de qualité de leur milieu, par
exemple.
M. Cordeau
(Wilfried) : Je ne peux pas répondre à cette question-là, sinon mettre
en garde à savoir quel objectif ça sert, parce qu'on sait que dans d'autres
services, par exemple en santé ou en éducation, ce genre d'outil là peut aussi servir de façon, je dirais, indirecte à amplifier
un enjeu de... une dynamique de marché qu'on dénonce un petit peu dans notre
mémoire. Alors, j'aurais tendance à... Je ne peux pas me prononcer à savoir...
Ça va dépendre des objectifs qui sont servis.
Par contre,
est-ce que les parents devraient avoir accès, minimalement,
aux programmes qui sont... programmes éducatifs et avoir
une connaissance de ce qui se passe ou de ce qui est proposé dans leur milieu?
Ça, certainement, là. Mais, pour ce qui est de l'évaluation, je n'ai personnellement
aucune opinion là-dessus.
Mme Labrie :
O.K. Est-ce que, vous, vous avez entendu parler par vos membres des impacts des
incitatifs qui ont été mis sur pied, par exemple pour contrer la pénurie de
personnel dans le réseau, ou quoi que ce soit?
La Présidente (Mme
D'Amours) : En 10 secondes.
M.
Bolduc (Denis) : C'est-à-dire, dans
10 secondes, c'est court. Mais...
Mme Labrie :
Les incitatifs des derniers mois, avez-vous entendu parler que ça avait des
retombées au niveau du recrutement de main-d'oeuvre?
M.
Bolduc (Denis) : Bien oui, mais on est...
La Présidente (Mme
D'Amours) : Merci. Je suis vraiment désolée.
M.
Bolduc (Denis) : On était dans ça cette semaine, d'ailleurs.
La
Présidente (Mme D'Amours) : Je suis la gardienne du temps, et c'est
terminé pour la députée de Sherbrooke. Je vais maintenant céder la
parole à la députée de Joliette pour 2 min 45 s
Mme Hivon :
Oui. Merci beaucoup de votre présentation. Alors, voyez-vous, au moment où on
débat ici de cet important projet de loi, il y a un minibudget, et puis on
apprend qu'il y a une bonification substantielle du crédit d'impôt pour les
frais de garde en garderie privée, là. Je viens de voir des informations
parcellaires, au moins un demi-milliard de bonification. Nous, selon nos
calculs, la conversion complète — c'est ce qu'on préconise, pour n'avoir
que des places en CPE — c'est
des coûts de fonctionnement d'environ 1 milliard par année. On sait que
les maternelles quatre ans ont coûté... vont coûter, là, au bout du
développement, plus de 2,5 milliards. Donc, on voit les choix qui sont
faits. Selon nous, ce ne sont pas les choix optimaux pour viser la qualité.
Compte tenu que vous vous prononcez dans votre mémoire sur le crédit d'impôt,
quels seraient vos commentaires, là, sur le fait qu'il y a une bonification
substantielle du crédit d'impôt pour les garderies privées?
M. Bolduc
(Denis) : Bien, ça va certainement à l'encontre de ce qu'on
souhaiterait, là. Les garderies privées, hein, c'est là où il y a le plus de
plaintes. La qualité des services offerts, c'est reconnu, en CPE, elle est
meilleure que dans les garderies privées. Non, ça va vraiment à l'encontre de
ce qu'on souhaiterait, là, oui.
Mme Hivon :
O.K. Vous amenez un autre point intéressant à la recommandation 6 dans
votre mémoire. En fait, vous parlez de l'importance d'accroître la concertation
entre les services en petite enfance et les services... le milieu scolaire, le
réseau de la santé pour qu'il y ait vraiment une complémentarité. Quel est pour
vous, là, vraiment le nerf de la guerre pour essayer de travailler plus en
concertation avec les enfants des services de garde éducatifs puis les autres
milieux?
M. Cordeau
(Wilfried) : Bien, dans le cas de ces services complémentaires là en
particulier, évidemment, il y a toute la question du diagnostic, qui n'est pas
toujours facilement accessible pour les familles, d'une part. D'autre part, ça
dépend également de l'âge des enfants et, évidemment, le signalement qui peut
être fait ou la détection de besoins particuliers ou d'enjeux particuliers.
Mais, de façon générale, ce que les membres de la FTQ qui travaillent sur le
terrain nous rapportent, c'est qu'il y a aussi le sentiment qu'à un moment
donné, c'est comme si les enfants, une fois qu'ils quittent le service de
garde, tout est à recommencer quand ils arrivent à l'école. Donc, il n'y a pas
de continuité, pas de transmission dans l'information ou dans les services qui
peuvent être connectés les uns aux autres durant la durée de leur passage au
service de garde vers le scolaire. Donc, c'est un défi supplémentaire pour ces
enfants-là et ces familles-là, quand vient le temps d'avoir accès à des
services, que d'avoir souvent à attendre en plus des délais, mais d'avoir à recommencer des fois des processus, là. Donc,
il y a peut-être une question de concertation. On parlait de... je
pense, dans le projet de loi de questions de dossier éducatif de l'enfant. Je
ne le nomme peut-être pas bien.
Mme Hivon :
Non, c'est ça.
M. Cordeau
(Wilfried) : Il y a des questions à se poser à cet égard-là, peut-être,
pour assurer évidemment une confidentialité, mais que l'information pertinente
soit transmise aux bonnes places.
La
Présidente (Mme D'Amours) : Merci, merci beaucoup. C'est tout le temps
que nous avions. Donc, je vous remercie, M. Cordeau et M. Bolduc,
pour la contribution aux travaux de notre commission.
Et je suspends les
travaux quelques instants afin d'accueillir les prochains témoins. Merci.
(Suspension de la séance à
15 h 36)
(Reprise à 15 h 49)
La Présidente (Mme
D'Amours) : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à la
Société québécoise de la déficience intellectuelle. Chers invités, je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi
nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la commission. Je
vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à
vous.
Société québécoise de la
déficience intellectuelle (SQDI)
Mme Larose
(Anik) : Merci, Mme la Présidente. Donc, mon nom est Anik Larose, je
suis la directrice générale de la Société québécoise de la déficience
intellectuelle. Et je suis accompagnée...
M. Ragot
(Samuel) : De Samuel Ragot. Je suis conseiller à la défense et à la
promotion et à la défense des droits, à la société.
• (15 h 50) •
Mme Larose
(Anik) : Alors, merci de nous donner cette opportunité-là.
Le projet de loi qui
nous concerne, dans l'ensemble, est un bon projet de loi. La perspective
d'amélioration de l'accessibilité aux services de garde éducatifs, dans une
perspective de justice sociale, est certainement rafraîchissante dans le
contexte d'austérité des 15 dernières années.
Malgré tout, de
nombreux éléments peuvent encore être bonifiés, et bon nombre de dispositions
devront être précisées lors de la mise à jour des règlements rattachés à la
loi. À travers ces processus, il importera de s'assurer que non seulement l'accessibilité aux populations moins favorisées soit
effective, mais aussi que d'autres populations vivant dans des
conditions d'exclusion soient prises en compte. C'est notamment le cas des
familles ayant des enfants avec des besoins particuliers.
Pour la Société
québécoise de déficience intellectuelle, il est clair que l'inclusion des
enfants handicapés dans les services de garde éducatifs est une condition sine
qua nonà leur inclusion dans leur communauté, dans leur quartier, mais également pour leurs parents. C'est
également la condition afin de permettre, surtout aux femmes, d'accéder
au marché du travail. Vous n'êtes pas sans savoir que la dépendance financière
à un conjoint, si celui-ci est violent, vient mettre un verrou supplémentaire à
cette cage que sont la violence et la domination. Pour une mère, avoir un enfant handicapé ne devrait pas automatiquement
sonner le glas à une vie professionnelle et à une indépendance
financière.
J'insiste donc,
exclure ces enfants des services de garde éducatifs revient trop souvent à
exclure les parents du reste de sa communauté. On parle de réseau naturel d'entraide,
de fêtes d'enfants, de sentiment de faire partie du même groupe même si notre
enfant a un développement singulier. Cette exclusion a des conséquences connues
qui se nomment : isolement, détresse, pauvreté, épuisement.
Cette vision
d'inclusion que nous valorisons repose également sur les droits inscrits à la
Convention relative aux droits de l'enfant ainsi que dans la Convention
relative aux droits des personnes handicapées. Ces dernières garantissent aux
enfants une inclusion pleine et entière dans la société ainsi qu'aux parents le
droit de bénéficier des services et établissements de garde d'enfants,
nonobstant leur condition sociale ou leur handicap. Il est important que le
Québec respecte ses engagements internationaux et mette en oeuvre ces droits.
Comme mentionné, la
société considère que l'inclusion des personnes en situation de handicap, peu
importe leur âge, est fondamentale. Traditionnellement, les jeunes enfants sont
souvent sous la responsabilité des mères, et exclure ces enfants revient à
exclure les mères — j'en
parlais tantôt — de
la société et du marché du travail ainsi que d'une vie pleinement épanouie et
marquée par la capacité de faire ses propres choix.
Par ailleurs, autant
l'inclusion des enfants que l'on juge différents est bénéfique pour la société,
mais également pour les autres enfants, qui grandissent en côtoyant des
camarades extraordinaires sans avoir peur de cette différence. En revanche, ces
liens bénéfiques et inclusifs auront des effets inestimables pour les enfants
ayant des besoins particuliers. On le sait, les enfants, et particulièrement
ceux qui présentent une déficience intellectuelle, apprennent par mimétisme,
par répétition. Il importe donc qu'ils soient en contact avec des enfants
neurotypiques afin de les stimuler et favoriser leur développement. C'est une
relation gagnant-gagnant.
En ce sens,
abandonner la spécialisation des services de garde éducatifs est également une
très bonne chose. Comment peut-on aspirer à être sur le même trottoir que les
autres à 21 ans, si dès la plus petite enfance on ne nous en donne pas
accès? Il s'agissait d'une des recommandations que la société avait formulées
lors de la consultation préalable sur les services de garde, et nous la
répétons avec autant d'insistance aujourd'hui.
Il importe également
que l'accessibilité financière soit augmentée pour les familles ayant un enfant
à besoins particuliers. Ces familles sont souvent plus précaires financièrement
et peuvent rencontrer des difficultés à payer pour des services de garde
éducatifs privés, voire publics, parfois. En ce sens, les indicateurs utilisés
pour accélérer l'inclusion d'enfants venant de milieux défavorisés devraient
également prendre en compte la composition du milieu familial afin de s'assurer
des particularités de chacun.
M. Ragot
(Samuel) : Dans ce contexte-là, il importe d'analyser les dispositions
du projet de loi avec une analyse différenciée selon les sexes
intersectionnelle, aussi appelée l'ADS+, afin de bien évaluer et mettre en
lumière l'impact sur certaines populations plus sensibles d'être exclues ou de
vivre des situations de précarité. C'est d'autant plus vrai que, si le projet de
loi veut rétablir une certaine forme
de justice sociale pour les communautés défavorisées, il ne s'adresse
pas nécessairement aux populations marginalisées par d'autres formes
d'oppression systémique, par exemple la langue, la couleur de peau, le statut de
migration ou le handicap, qui sont pourtant d'importants facteurs conditionnant l'inclusion sociale. Ainsi, il
aurait été important d'inclure l'ADS+
dans les articles traitant de l'inclusion des populations moins
favorisées.
Un autre point pour la société qui est important
est la question du rôle de l'État dans la gestion de l'offre de services de
garde. Le projet de loi véhicule de façon assez poussée le marché des services
de garde, et il s'agit à notre avis d'une bonne chose en général, puisque de
nombreuses situations de favoritisme et de copinage ont été rapportées dans les
dernières années. Cela dit, il importe que l'État se dote d'autres moyens de
régulation et de dispensation des services que la seule dépendance au secteur
privé. Il est en effet frappant qu'il soit proposé que le premier article de la
loi comprenne une réserve à l'exercice du droit à l'accès à un service de
garde. Le projet de loi précise en effet que, et je cite, «ce droit s'exerce en
tenant compte de la disponibilité, de l'organisation et des ressources des
prestataires de services de garde». Cela est problématique pour nous. En effet,
l'exercice d'un droit donné par l'État ne devrait jamais être conditionnel à la
disponibilité de tierces parties non gouvernementales. L'État a une obligation
de moyens et de résultats qui est absente ici. Si le projet de loi va plus loin
que l'actuelle loi en ce qui concerne les conditions de création de places, les
conditions d'appariement et compagnie, nous doutons malgré tout que tout cela
sera suffisant pour répondre à tous les besoins sur l'ensemble du territoire.
Enfin, le projet de loi met en avant la question
de l'accessibilité financière aux services. C'est pertinent, mais
l'accessibilité dépasse les seules questions financières. L'accessibilité
concerne également l'accès aux documents, à l'information, aux démarches à
réaliser afin de pouvoir bénéficier d'un service ou exercer un droit, entre
autres. Bien que le projet de loi favorise la transparence des processus et de
certaines informations, il est important de ne pas oublier que tout ne peut pas
se faire sur Internet et que des services individualisés devront être
disponibles pour les populations qui n'ont pas accès à la technologie ou qui
présentent un niveau de littératie limité. Rendre l'information disponible par
téléphone, par exemple, ou à des guichets de Services Québec, ou encore dans
des organismes communautaires famille sera important.
Mme Larose (Anik) : En conclusion,
le projet de loi n° 1 est un projet de loi dont la visée est noble et à
laquelle la société souscrit entièrement. En ce sens, nous accueillons
favorablement les changements proposés. Toutefois, la société aimerait que les
besoins des familles ayant des enfants avec des besoins particuliers soient
pris en compte dans le projet de loi. La discrimination dans les services de garde éducatifs peut être très
forte, et il importe de s'assurer que le gouvernement agisse et mette en
place les conditions permettant d'y mettre fin. À cet effet, la Société
québécoise de la déficience intellectuelle surveillera la publication des
règlements qui devront être modifiés par la loi, et, comme à son habitude, elle
offre sa pleine collaboration au ministre. Je vous remercie de votre écoute.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mme Larose, M. Ragot, merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant
commencer la période d'échange. Je cède la parole à l'adjointe parlementaire du
ministre, Mme la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Madame, monsieur,
merci d'être là cet après-midi avec nous. C'est fort intéressant de vous entendre, on sent à quel point vous êtes impliqués,
et, sincèrement, je suis heureuse de pouvoir discuter avec vous
aujourd'hui.
Parmi les points que vous notez dans votre
mémoire, entre autres choses, un m'a soulevé quelques questions, parce que vous
avez marqué, là, dans vos suggestions d'ajouter «conciliation
travail-famille-études», donc toujours dans un souci d'équité, je comprends.
Dans la loi, dans la présente loi, nous donnons la possibilité de création de
haltes-garderies dans les cégeps et les universités. Est-ce que ça convient?
Comment vous voyez cela?
M. Ragot (Samuel) : Bien, écoutez,
merci pour votre question. Bien, je pense que la première chose, en fait, et
c'est surtout une question de principe à cette étape-là, puisque... bien, en
fait, la proposition qui modifierait la loi met vraiment en avant la question
de la conciliation travail et famille, et je pense que ça aurait été important
de rajouter aussi cet aspect-là d'études. Pour la petite histoire, là... moi,
j'ai fait partie d'un conseil d'administration universitaire à l'UQAM où il y
avait des enjeux habituellement liés aux garderies et compagnie, et ça avait
été très difficile de travailler à créer ce
genre de situation là, et c'est sûr que l'avoir dans la loi comme une question
de principe aiderait clairement parfois à développer des projets qui
permettent une vraie conciliation travail-études-famille.
Mme Lachance : Je vous entends bien.
Vous avez aussi parlé de suggestion de retirer la possibilité pour les services
de garde éducatifs de refuser des enfants. Actuellement, on a... il y a...
Évidemment, ça a été soulevé, et on demande une notification par écrit. Est-ce
que ça vous convient? Est-ce que ça supporte votre idée?
• (16 heures) •
Mme Larose (Anik) : C'est certain
qu'il faut s'assurer de bien encadrer ça. Vous comprendrez que, quand on...
Bien, j'ai moi-même une fille handicapée qui a été dans les services de garde
il y a déjà quelques années. Ça peut être très facile de mettre de côté un
enfant puis de trouver des raisons quand on a un enfant handicapé. Donc, je vous dirais qu'il va falloir... il faut être extrêmement
vigilant. Pour moi, c'est clair que, oui, ça prend un écrit, mais tout est dans
le regard aussi qu'on porte, parce qu'on peut toujours trouver... tu sais, ça peut-être
assez facile de trouver des raisons pour
lesquelles un enfant n'a pas sa place quand on a un enfant handicapé. Donc,
tout ne se règle pas avec un papier.
C'est ça que je veux vous dire, c'est toute l'éducation qu'il faut refaire préalablement qui est importante aussi et de
bien comprendre les besoins de l'enfant et du milieu pour s'assurer que ça soit
un bon mix entre les deux.
Mme Lachance : Quand vous
parlez d'un bon mix, vous parlez d'une bonne intégration dans le milieu?
Mme Larose (Anik) : D'une bonne
intégration, et il y a plusieurs éléments pour qu'il y ait une bonne intégration.
Donc, il y a de la sensibilisation du milieu, ça, c'est certain, la sensibilisation.
Quand je parle du milieu, ce n'est pas juste des éducateurs, de la direction,
des autres parents également, du conseil d'administration. J'ai fait partie
d'un conseil d'administration de CPE à l'époque où il y avait une volonté
claire d'intégration. Donc, on mettait en
place... Et, très souvent, quand il
y a une volonté comme ça dans un
milieu, on devient beaucoup plus ouverts à l'ensemble des enfants. Ce
n'est pas juste bon pour des enfants qui ont des besoins particuliers, mais ça
ouvre à toutes sortes de particularités ou
même à juste accueillir des enfants avec leur propre réalité. Donc, c'est tout
un travail en amont, à mon sens, qu'il faut faire et qu'il faut prendre
le temps de le faire, mais il y a des réussites, par exemple. Et, en tout cas,
je mets ma casquette de parent, pour l'avoir vécu, c'est extraordinaire. Et
c'est extraordinaire aussi pour les familles de se sentir incluses dans son
quartier, comme n'importe quel parent, quand l'enfant est connu et reconnu dans
son quartier, c'est formidable.
Mme Lachance : Quand vous
parlez de travail en amont, ça m'amène à me questionner sur la formation initiale. Est-ce
qu'il y a des bonifications... Est-ce que vous avez des idées de suggestions de bonifications qui devraient être ou qui pourraient être faites au niveau de
la formation des éducatrices?
Mme Larose (Anik) : Bien, écoutez,
je ne suis pas une experte du cursus, là, de formation, mais je me doute bien
que d'en parler plus, ça ne peut pas nuire, donc... Et peut-être aussi d'y
aller sous forme de témoignages, de pouvoir voir c'est quoi, l'impact. Si vous saviez
l'impact positif, dans une famille, que ça peut avoir, et de... Et j'insiste beaucoup
quand je disais, dans ma communication, que, quand on est un enfant de trois,
quatre ans, de ne pas pouvoir être sur le même trottoir que les autres, comment
on peut l'être quand on va être rendu à 21 ans? Ça sera impossible. Et de
pouvoir être intégré, inclus dans un service de garde éducatif, ça permet également
d'être ouvert à pouvoir être intégré à l'école ensuite. Donc, c'est vraiment...
c'est des petits pas, hein, qui se font, et les enfants qui ont une déficience
intellectuelle apprennent tellement de leurs camarades, et très souvent, les
camarades offrent une éducation que les parents ne peuvent pas donner et que
l'éducatrice ne peut pas donner non plus.
Mme Lachance : Donc, dans leur
interaction, c'est ce que vous dites?
Mme Larose (Anik) : Dans leur
interaction ou bien, donc, d'apprendre les comportements sociaux qu'on doit
avoir. Donc, c'est comme ça. Puis un enfant régulier, neurotypique, va être ami
et ne verra pas, nécessairement : Ah! mon Dieu, cette personne-là a un
chromosome de plus, il doit être bizarre. Non, c'est mon ami, il s'appelle...
elle s'appelle Marie, puis c'est tout. Alors, voilà, c'est ça, l'ouverture et
le changement, changer la société.
Mme Lachance : Merci. Écoutez,
je vais laisser ma collègue prendre la parole pour, évidemment, poser des
questions, et on aura l'occasion de peut-être rediscuter dans quelques minutes.
Merci.
Mme Larose (Anik) : Merci à
vous.
La
Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée de Soulanges.
Mme Picard : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous deux.
Une voix : Bonjour...
Mme Picard : Tout d'abord, je
ne voulais pas passer sous silence qu'il vous reste, je crois, deux petites
journées, Mme Larose, à votre mandat comme directrice générale. Je voulais
d'abord vous remercier pour votre implication dans cette grande cause que vous
portez à bout de bras depuis 2015. Donc, je pense que votre présence ici
aujourd'hui nous est très précieuse. Merci énormément, au nom de tous les
parents d'enfants handicapés. Merci.
Mme Larose (Anik) : Merci.
Mme Picard : Je voulais vous
poser plusieurs questions. En fait, dans votre mémoire, vous faites référence aux enfants avec des situations de handicap et des
enfants avec des besoins particuliers. Pouvez-vous nous expliquer...
faites-vous une distinction entre les deux, entre les enfants en situation de
handicap et les enfants à besoins particuliers? Parce qu'on sait, quand ils
sont en jeune âge, le diagnostic est souvent difficile à percevoir, et donc
j'aimerais voir si vous faites une distinction, vraiment, entre les deux.
Mme Larose
(Anik) : C'est sûr que moi, ce que je connais, c'est la déficience
intellectuelle. Donc, moi, je ne me suis
jamais prétendue être experte dans d'autres formes de limitations
fonctionnelles. Donc, on sait qu'en déficience intellectuelle, à moins
qu'il y ait un syndrome comme la trisomie où, une heure après la naissance, on
sait que l'enfant va avoir une déficience intellectuelle, on ne sait pas encore
quel sera le niveau de sa déficience intellectuelle, mais on le sait que cette
personne, cet enfant-là a une déficience intellectuelle. Mais, parfois, ce
n'est pas le cas, c'est suite au développement de l'enfant, où là il y a un
retard de développement et là, à ce moment-là, c'est plus tard, c'est quand
viendra, proche de l'entrée à l'école, où il va y avoir une évaluation, où on
va pouvoir statuer s'il y a une déficience intellectuelle.
Donc, c'est sûr qu'on nomme parfois «besoins
particuliers». Donc, parfois, on utilise les mots, hein, on a tout un jargon,
nous, mais je vous dirais que c'est sûr que le mémoire qu'on vous présente, on
a une pensée pour tous les enfants qui sont
en situation de handicap, tous les enfants qui ont des particularités, des
besoins particuliers. Mais, comme je disais tantôt à votre collègue,
moi, je reste assez convaincue que quand on ouvre aux enfants handicapés, aux
enfants avec des besoins particuliers, bien, on ouvre à l'ensemble. Donc, c'est
bénéfique à l'ensemble des enfants.
Dans le parcours, si vous me permettez, de ma
fille, tant au niveau de la garderie qu'au niveau de l'école, très souvent, les
interventions qu'on faisait avec elle donnaient des idées d'intervention à
l'éducatrice ou au professeur pour d'autres
enfants qui étaient tout à fait neurotypiques. Donc, au contraire, ça amène un
plus, ça amène une expertise et, peut-être, des petits trucs pour
faciliter l'intégration de tous.
Donc, je vous dirais que, peut-être,
effectivement, dans le mémoire, on oscille entre «besoins particuliers» et
«situation de handicap», mais je vous dirais que, globalement, c'est sûr que,
nous, c'est la déficience intellectuelle, mais globalement, de permettre à des
enfants qui sortent de la boîte, hein, du développement standard, d'avoir leur
place et qu'on ne les refuse pas à la porte, prétextant que c'est trop de
trouble ou que ça coûte trop cher ou que ce n'est pas leur place.
Mme Picard : Vous suggérez aussi
qu'on fasse leur priorisation dans les politiques d'admission. Comment
voyez-vous qu'on pourrait le faire, étant donné, justement, qu'on n'aurait pas,
peut-être, de diagnostic? Comment on pourrait s'assurer d'une priorisation si
on n'a pas de diagnostic précis?
Mme Larose (Anik) : C'est sûr que
dans ces cas-là, peut-être que c'est plus difficile, mais il y en a d'autres
qu'il y en a, des diagnostics, donc peut-être de s'assurer, au moins, qu'il y
ait une préoccupation ou une volonté et que ça soit tangible, là, que ça ne
soit pas juste un voeu pieux, là, mais que ça soit tangible puis qu'on se
dise : Dans ce milieu-là, on souhaite inclure un certain nombre d'enfants
puis qu'il y ait des places qui soient... Parce que, pour les parents,
malheureusement, quand ils font des démarches puis qu'ils nomment que leur
enfant a des besoins particuliers ou un handicap, bien, tout d'un coup,
peut-être que le numéro de téléphone va se perdre ou, en tout cas, je sais que, maintenant, c'est plus informatisé,
et tout ça, mais ça s'est souvent vu. Donc, tout d'un coup, cet enfant-là
est moins intéressant. On voyait... C'est sûr, moi, je suis rendue presque une
grand-mère, mais je regardais les parents qui
vendent quasiment leurs enfants... qui vantent leurs enfants pour pouvoir avoir
une place. C'est sûr que moi, d'arriver avec ma fille trisomique,
j'aurais perdu en partant, donc... mais alors qu'on le sait, que ces enfants-là
peuvent bénéficier énormément de cette intégration-là puis ça peut changer leur
parcours de vie.
• (16 h 10) •
Mme Picard : Je vous amènerais dans
une tout autre situation. En fait, je ne sais pas si vous avez déjà eu contact
avec cette situation-là, mais il y a certains parents qui présentent eux-mêmes
une déficience intellectuelle. Est-ce que, dans ce projet de loi là, on
pourrait les aider particulièrement ou en général, là, dans... Avez-vous une suggestion
pour eux?
Mme Larose
(Anik) : Merci de votre question,
parce qu'on a eu cette discussion-là, Samuel et moi, justement. Parce que
c'est sûr que ces cas, ils ne font pas légion, donc il n'y en a pas beaucoup,
sauf qu'il faudrait avoir une préoccupation pour ces parents-là. Je vais être honnête avec
vous, on n'a pas creusé la question, là, en
ce qui concerne la commission
parlementaire, mais effectivement je pense que ça ne serait pas à négliger, et de s'assurer justement
que leurs propres enfants puissent avoir une place et puis que ces
parents-là soient d'autant plus inclus dans leur communauté.
M. Ragot (Samuel) : Si je peux me
permettre, Mme la députée, ce qu'on voit souvent, c'est le recours à la
protection de la jeunesse pour enlever les enfants aux personnes qui présentent
une déficience intellectuelle, ce qui est évidemment problématique,
puisqu'évidemment un encadrement psychosocial est toujours à prioriser par
rapport à enlever un enfant d'une famille. Bien, c'est aussi d'ailleurs ce que
privilégie la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Alors,
en premier lieu, je pense qu'évidemment renforcer les services, donner du
soutien aux familles de personnes qui présentent une déficience intellectuelle,
c'est sûr que c'est la première des choses. Ça ne répond pas nécessairement à
votre question directement, mais ce serait un des éléments de réponse dans
l'immédiat.
Mme Picard : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Merci beaucoup.
Mme Larose (Anik) : Merci.
La
Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Merci beaucoup. Donc, je vais céder la parole à la députée de Bellechasse.
Mme Lachance :
Merci, Mme la Présidente. Vous me laissez combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme D'Amours) :
2 min 15 s.
Mme Lachance : Merci. Je vous ai
entendus, puis vous êtes revenus, lors de la discussion avec ma collègue, sur les possibilités de refus, les exclusions des
milieux de garde. Vous avez soulevé un point en nous laissant entendre
que plusieurs raisons pouvaient devenir un motif de refus, et j'ai bien, tout à
l'heure, discuté avec vous en précisant est-ce que vous pensez que le fait de
l'écrire puisse, si on veut, pousser la réflexion puis obliger à ce que ce soit
plus senti au niveau des refus, puis ça, je veux vous réentendre. Puis vous
avez aussi suggéré d'inclure, dans le projet de loi, le devoir de donner des alternatives
aux parents en cas de refus. Vous pensez à quelle alternative?
M. Ragot (Samuel) : Alors, Mme
la députée, je pense que malheureusement on le voit dans beaucoup de
circonstances, prouver qu'un refus est basé sur un motif de discrimination en
vertu de la charte est très difficile. C'était un peu la raison pour laquelle
on a dit : Si on refuse carrément que les services de garde puissent
refuser, bien, on n'a plus ce problème-là. Ils sont obligés d'accepter, puis
ils ne peuvent pas trouver mille et une façons de contourner, bien, pour ne pas
dire que c'est un motif de discrimination essentiellement. Est-ce qu'on va être
capable, juste en ayant de l'écrit, de régler cette question-là? On ne pense
pas. On pense qu'il y a toujours, malheureusement, plein de façons de trouver
une bonne raison qui ne sera pas le handicap, hein, pour exclure.
Pour ce qui est de la recommandation, bien,
c'est de dire : Bien, écoutez, on était rendu, dans la liste, à faire cet
appariement-là, et là on se fait refuser, on retourne dans la liste. Il ne faut
pas attendre un autre six mois parce que, si c'était un enfant qui a des
besoins particuliers, six mois, dans un développement pour une personne qui a
une déficience intellectuelle, c'est long, ou qui a un trouble du spectre de
l'autisme, c'est long, puis il faut qu'il y ait une alternative qui soit
fournie, puis ça met aussi un peu la pression non pas sur les familles puis les
parents, mais sur le système d'appariement, ce qui devrait être le cas de toute
façon puisque ces familles-là vivent déjà avec beaucoup de contraintes administratives,
beaucoup de contraintes dans leurs vies quotidiennes, dans tout le
fonctionnement de la fratrie quand il y a
des frères et soeurs, par exemple. Donc, c'est quelque chose qui vient un peu
enlever ce fardeau-là, le mettre sur le système d'appariement à la
place.
La
Présidente (Mme D'Amours) : Merci, M. Ragot. Merci, Mme la
députée. Il est maintenant le temps de céder la parole au député de
LaFontaine pour une période de 11 minutes.
M. Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Eh bien, bonjour, Mme Larose, bonjour,
M. Ragot. Heureux de pouvoir discuter avec vous.
Dans votre mémoire, vous précisez que le projet
de loi réintroduit le droit à l'accès à un service de garde et vous précisez,
même si c'est encore le cas aujourd'hui dans la loi actuelle, mais on reprend
les exclusions, là, les motifs d'exclusion, donc, c'est un droit, oui, aux
services de garde, mais en tenant compte de la disponibilité de l'organisation et des ressources des prestataires
de services de garde. Et je vous cite, et j'aimerais vous entendre là-dessus :
«Il est problématique que l'État se
déresponsabilise et fasse plutôt porter le fardeau à de tierces parties dans
l'exercice d'un droit. Non seulement c'est
irresponsable, mais l'exercice d'un droit donné par l'État ne peut jamais être
conditionnel à la disponibilité de tierces parties non gouvernementales. L'État
a une obligation de moyens et de résultats qui est absente ici.» J'aimerais
vous entendre sur cette importante affirmation.
M. Ragot
(Samuel) : Bien, merci, M. le député de LaFontaine. Bien, je vais faire une analogie qui est vraiment
très simple et qui va illustrer un peu notre position. Si, demain matin,
j'allais dans le réseau de la santé puis qu'on me disait : Non, l'hôpital est rendu privé, puis ils n'ont pas de
place, je ne pense pas que ça fonctionnerait. Vous comprenez? Dans le fond, c'est que l'État a quand même une...
l'État est le garant de l'exercice d'un droit, sauf que, dans ce cas-là,
précis, cet exercice d'un droit là est délégué à des tierces personnes qui ne
sont pas l'État, qui sont essentiellement des corporations privées, parce
qu'une OBNL, ça reste quelque chose qui est séparé de l'État, par exemple — quand
on parle des CPE, c'est des organismes à but
non lucratif — puis on
n'a pas nécessairement de solution de clé en main, là, on n'a pas de
solution facile pour régler cette problématique-là, mais c'est quand même une
problématique qui existe, qu'il est important de mettre en lumière, puis ça
peut... Est-ce que ça va être de rajouter plus d'argent? Est-ce que ça va être
de créer un réseau public, comme ça se fait par exemple en Europe? Tu sais,
c'est toutes les questions qui pourraient être abordées. C'est sûr qu'au
Québec, le réseau s'est créé plus dans un réseau privé subventionné ou un
réseau communautaire subventionné, mais on pourrait réfléchir à d'autres façons
de rendre plus accessibles ces services-là. Puis on le voit, les limites,
actuellement, là, c'est long de créer ce genre de réseau là quand on veut
partir une OBNL, ou une garderie, ou un service de garde, bien, c'est très long
à faire. Encore une fois, on n'a pas de solution clé en main, mais c'est quand
même une problématique qui est bel et bien réelle.
M. Tanguay : Et vous y
verriez la problématique comme étant toujours existante si, du jour au
lendemain, tout le réseau était en CPE? Pour vous, il y aurait quand même cet
écueil-là qui demeurerait, parce que ce serait indépendant, juridiquement, de l'État,
là?
M. Ragot (Samuel) : C'est une bonne
question. Encore une fois, il n'y a pas de solution facile, de... Tu sais, on
ne parle pas non plus nécessairement de nationaliser le réseau, tu sais, il y a
sûrement des entre-deux, des justes mesures à aller
chercher, mais il y a peut-être une ouverture à avoir au niveau de créer des
ressources publiques, là, vraiment dans le giron de l'État en tant que tel.
M. Tanguay : Mais par contre,
évidemment, le débat qu'on a eu était... faisait suite à l'idée forte que vous
reprenez, autrement dit, que ce soit un véritable droit et qu'en ce sens-là,
bien, qu'on se donne les moyens. Donc, sur le principe que ça devienne un
droit, on peut prendre l'analogie avec le droit scolaire, bien, à ce moment-là,
le droit de fréquenter un établissement scolaire, ça, sur le principe que ce
soit un droit, ça, c'est une affirmation forte de votre part également?
M. Ragot (Samuel) : Bien, M. le
député de LaFontaine, écoutez, c'est ce que le projet de loi et la loi disent. Bien, c'est aussi ce que les obligations
internationales du Québec disent : L'accès à un service de garde ou des mesures de garde pour les enfants, qu'ils soient
handicapés ou... que ce soit dans la convention relative au droit des enfants
ou au droit des personnes handicapées, il y a deux articles, au moins, qui en
parlent puis c'est des obligations que le Québec
a. On a ratifié ces conventions-là.
Donc, c'est des obligations en droit local, en droit à l'intérieur de l'État
québécois. Il importe, encore une fois, de les rendre effectifs.
M. Tanguay : Tout à
fait. Donc, on enlèverait la
partie... vous dites, là, que c'est tributaire de telle excuse, telle excuse, telle excuse. Ça, vous enlèveriez ça,
évidemment, pour faire écho de nos obligations, notamment
internationales?
M. Ragot (Samuel) : Effectivement.
M. Tanguay : Parfait. Vous
avez parlé avec ma collègue, un peu plus tôt, des défis particuliers. Dans
votre mémoire, au bas de la page 4, vous dites : «Bien que le projet
de loi favorise la transparence des processus et de certaines informations, il
est important de ne pas oublier que tout ne peut pas se faire sur Internet, et
que des services individualisés devront être disponibles pour les populations
qui n'ont pas accès à la technologie ou qui présentent un niveau de littératie
limité.» J'aimerais ça vous entendre là-dessus, sur une réalité terrain que
l'on voit. Et ce n'est pas tout de dire : Ah! Bien, le service est
accessible, mais le service est-il accessible de manière équitable et
égalitaire à tous? Non, quand on comprend qu'il y a une fracture, parfois,
technologique et qu'il y a des défis de littératie, également, très tangibles.
J'aimerais savoir, vous... puis vous entendre, Mme Larose et
M. Ragot, sur l'importance pour l'État d'être conscient de ça puis de
répondre à ces besoins particuliers là aussi, là.
Mme Larose (Anik) : Bien, tout à
fait, puis je sens dans votre question cette préoccupation-là aussi puis je
m'en réjouis. Parce qu'effectivement il y a bon nombre de personnes, je pense
que la statistique, c'était 49 %, là, de personnes qui n'ont pas un niveau
de littératie suffisant, malheureusement. Donc, il faut toujours avoir en tête
ça. Souvent, on a tendance à l'oublier, hein, parce qu'on est nous-mêmes dans
des technologies, dans le... ainsi de suite et on a tendance à l'oublier.
Puis pour faire du pouce sur votre collègue qui
nous parlait, justement, de parents qui ont eux-mêmes une déficience
intellectuelle, bien, d'autant plus. Donc, je pense que tout le monde y
gagnerait. Puis quand on rend les choses plus accessibles, bien, on facilite la
vie à un bon nombre de personnes. Donc...
• (16 h 20) •
M. Tanguay : Tout à fait,
puis j'aime l'échange que l'on a parce que c'est un réflexe que l'on doit
avoir. Écoutez, on s'est donné socialement, collectivement, une nouvelle loi
qui favorise bien davantage, notamment en matière de justice, de pouvoir
déposer des procédures de manière électronique, et ainsi de suite. Alors là on
a levé un drapeau rouge, en disant : Faites attention à la fracture
technologique, parce qu'à un moment donné ce n'est pas tout le monde qui a accès
à Internet, puis ce n'est pas tout le monde qui peuvent fonctionner, puis de
dire : Bien... Alors, ça, c'est une chose.
Deuxième des choses, on va avoir un débat
également, projet de loi n° 7... puis ça participe de tout ça, ce
réflexe-là. On va dire : Ah! bien là, des élections, dans moins d'un an,
là, dans un contexte COVID, on va faire en sorte que les gens puissent voter de
façon plus largement, par la poste. On va envoyer, par la poste, les bulletins
de vote, puis ça ne sera pas compliqué, ils vont lire, ils vont remplir, ils
vont mettre ça... Ce n'est pas donné à tout le monde, au même niveau, de, par
exemple, voter par la poste avec une aussi grande facilité. Alors, ça, c'est un
réflexe que l'on doit avoir, là, les 125 élus, n'est-ce pas?
Mme Larose (Anik) : Tout à fait. Je
suis tout à fait d'accord avec vous, puis que ça soit pour le projet de loi
qu'on parle aujourd'hui ou, justement, le niveau de compréhension pour les
personnes qui ont une déficience intellectuelle, hein, il y a toute l'adaptation
avec un langage plus simplifié, ainsi de suite, pour leur permettre de bien
comprendre. C'est souvent... puis ça aide également aux gens qui maîtrisent
moins bien le français.
M. Tanguay : Ah! tout à fait.
Dernier point, puis c'était intéressant, un peu plus tôt, avant vous, on avait
la coopérative qui gère la liste d'attente 0-5 ans et... Place 0-5,
pardon, et qui disait : Bien, nous... j'arrondis, là, presque la moitié de
nos 37 employés sont consacrés pour presque la moitié, peut-être 40 %,
c'est moi qui évalue ça, c'était à peu près une douzaine sur 37, sont consacrés
au service à la clientèle, aux parents qui appellent, puis ils ont su
développer, même, une capacité, pas juste de répondre en anglais, elle
dit : À un certain moment donné, puis ce n'est pas une obligation légale,
mais on pouvait parler 11 langues. Parce qu'il y a des nouveaux arrivants,
puis ils veulent savoir comment ça fonctionne, alors il y
a tout ce réflexe-là à ne pas perdre, puis si on dit... Là, je ne veux pas...
il ne reste pas beaucoup de temps, puis c'est vous qu'on veut entendre, ce
n'est pas moi, là, mais je trouve ça intéressant de ne pas perdre ça en chemin,
en disant : Bien, on va tout centraliser, ça va être guichet unique. Aïe!
ça va être Cadillac, notre affaire. Mais ce n'est pas tout le monde qui sont à
la même page, là.
Mme Larose (Anik) : Non, non. Les
petites boîtes toutes bien cannées, là, ça ne marche pas, puis je peux vous
dire, en déficience intellectuelle, on ne rentre jamais dans la boîte.
M. Tanguay : C'est ça. Deux
sujets, parce que je ne veux pas passer à côté. Vous dites : «Retirer la
possibilité pour les services de garde éducatifs de refuser des enfants sans
motif sérieux et avéré ou pour tout motif qui
soit fondé sur un critère de discrimination interdit par la charte». J'aimerais
vous entendre sur l'importance de ça, là.
Mme Larose (Anik) : Bien, écoutez,
c'est parce que c'est... on a tellement eu d'exemples de situations où, dès que
l'enfant à besoins particuliers, en retard de développement, une déficience
intellectuelle, qu'on... le milieu ne souhaite pas l'accueillir pour
différentes raisons, là, puis les parents peuvent donner plein de raisons
qu'ils entendent, mais il faut s'assurer, justement, que ces milieux-là
puissent avoir les conditions qui permettent d'accueillir ces enfants-là au
même titre que les autres enfants, et que...
M. Tanguay : Puis on a
bien noté que vous nous invitez, donc, à bonifier l'article 59.12 quand il
dit : Bien, si vous le refusez, faites juste exprimer vos motifs, mais là
il va falloir qualifier les motifs.
Mme Larose (Anik) : ...mettre
les vraies raisons, là, puis des raisons costaudes, là, oui.
M. Tanguay : Exact. Et,
pour moins d'une minute qu'il me reste, votre suggestion n° 7 :
«Inclure le fait de devoir donner des
alternatives aux parents en cas de refus d'un service de garde éducatif, ainsi
que des recours en cas de situation
discriminatoire autres que le Tribunal
des droits de la personne.» Ça, on
vous entend bien, ça prend, puis on le voit dans certains ministères et organismes,
des organes de révision de certaines décisions qui vous permet de
pouvoir plaider votre cause sans devoir
aller plaider ça devant un juge ou une juge. J'aimerais vous entendre là-dessus,
c'est important.
Mme Larose (Anik) : Bien, vous
comprendrez que, déjà, d'avoir un enfant handicapé, on s'entend que c'est quand
même plus lourd que peut-être d'avoir un enfant régulier. Donc, si, en plus, on
doit s'en ajouter avec un dédale de... et puis de... Donc, c'est ça qui est
plus difficile, je vous dirais. Très souvent, le quotidien, c'est une chose,
mais toute la paperasse, et tout ce qu'il y a autour, et puis de s'assurer
d'avoir une place pour notre enfant, c'est ça qui est encore plus lourd.
M. Tanguay : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Merci beaucoup.
M. Tanguay : Merci à
vous.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Sherbrooke pour
2 min 45 s.
Mme Labrie : Merci, Mme la
Présidente. Je vais vous amener, moi aussi, sur les recommandations 6 et 7
que vous nous faites. Vous faites référence
au refus d'enfants. J'aimerais que vous nous disiez, dans le cas d'enfants
qui ont une déficience intellectuelle, est-ce que l'enjeu se situe surtout au
niveau du refus ou bien vous constatez aussi des situations où on annonce à l'enfant
qu'il ne pourra pas rester dans le milieu une fois qu'il avait déjà été
accueilli?
Mme Larose (Anik) : Je vais
être honnête avec vous, c'est très spécifique, je n'ai pas nécessairement de...
Bien, c'est sûr que, quand un enfant est dans le... déjà rentré, par expérience,
souvent, il va y rester ou... à moins qu'il développe un problème de
comportement qui va perturber vraiment le fonctionnement du groupe. Très souvent,
en déficience intellectuelle, c'est de rentrer qui est difficile parce qu'il y
a... il faut faire face aux préjugés qui viennent avec... Donc, quand on
réussit à rentrer, puis qu'il y a un bon encadrement, puis que l'enfant,
parfois, développe des problèmes de comportement, pas parce qu'il est particulièrement
tannant, là, mais c'est parce qu'il n'est pas capable de se faire comprendre, parce
qu'on ne répond pas à ses besoins, c'est une façon de communiquer, et, quand il n'arrive pas à le faire d'une certaine façon, ou qu'on ne lui donne pas des
alternatives pour pouvoir s'exprimer... Bien, tout le monde comprend, un
coup de poing, ce que ça veut dire, mais ce n'est peut-être pas la bonne chose
à apprendre... (panne de son) ...apprendre qu'il y a d'autres alternatives pour
exprimer sa colère, par exemple. Je vous donne un exemple.
Mme Labrie : Parfait. Bien, je vous
le demandais parce que les... on nous a mentionné que, pour les enfants qui
avaient un TSA, par exemple, souvent, c'est ça, il y avait des situations
d'expulsion parce que, finalement, on disait : On n'est pas équipés,
finalement, pour... Mais j'entends que, dans votre situation, c'est vraiment en
amont, le problème, qu'il se situe. Donc, ça veut dire
que les mesures d'aide, donc, comment vous les qualifieriez, les mesures
d'aide, quand... une fois que l'enfant est admis?
Mme Larose (Anik) : Bien, il faut
toujours s'assurer qu'elles soient présentes, et en bonne quantité, et que le
milieu comprenne la façon que l'enfant fonctionne. Qu'il y ait une belle
collaboration aussi, idéalement, avec la famille, parce que c'est un milieu
également, on le dit, éducatif, donc, de permettre, justement, d'avoir une
espèce de lien entre la famille puis le CPE, pour qu'il y ait des choses qui se
travaillent de part et d'autre. Mais c'est certain que, quand... toute la question
de problèmes de comportement ou d'adaptation du comportement, c'est sûr que ça,
c'est un élément qui peut très facilement faire basculer cet aspect-là. On le
vit un peu moins en déficience intellectuelle, peut-être, qu'en TSA, c'est une
autre particularité, mais on vit d'autres formes de préjugés aussi, qu'on parle
moins parfois.
M. Ragot (Samuel) : Si je peux me
permettre...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Nous procédons maintenant au temps de parole de la députée de Joliette,
pour une période de 2 min 45 s.
Mme
Hivon : Oui,
bonjour à vous deux, merci beaucoup pour votre présentation. Et,
Mme Larose, je veux aussi vous remercier pour toutes ces années
d'engagement extraordinaire pour l'inclusion. Et puis j'ai eu la chance de collaborer avec vous à de multiples titres.
Alors, c'est vraiment avec beaucoup de sincérité que je veux vous
remercier, puis je pense qu'aujourd'hui on a un autre témoignage éloquent de
votre engagement, alors merci beaucoup.
• (16 h 30) •
Je veux vous amener sur toute la question, bon,
du guichet unique et de la priorisation. Vous faites ressortir, là, avec
beaucoup de pertinence, aux pages 6 et 7, que vous adhérez, bien sûr, au
concept de priorisation d'enfants provenant de milieux moins favorisés, socioéconomiques
moins favorisés, mais vous nous invitez, comme on l'a effleuré tout à l'heure, là, à vraiment, aussi, donner une priorisation aux enfants qui ont un handicap. Donc,
concrètement parlant, vous voulez que, dans la loi, on mette les deux sur un
pied d'égalité? Et ensuite, dans l'attribution des places, comment vous voyez,
là, le fonctionnement de ça pour que ce soit optimal, disons?
Mme Larose (Anik) : Bien, c'est sûr
que moi, j'aspirerais, effectivement, qu'il y ait une... que ça soit nommé, parce
que ça permettrait de... C'est toujours
un peu : le parent part avec son bâton de pèlerin puis il se
demande s'il va réussir à avoir une place, et puis on sait que c'est compliqué
pour tout le monde, donc imaginez quand on a un enfant handicapé. Donc, si,
oui, ça peut être nommé et s'assurer que ça puisse se faire, moi, je serais la
femme la plus heureuse.
Dans la mécanique, comment ça peut se faire?
C'est certain que je pense que les milieux doivent être mieux formés. On
parlait, tantôt, là, de formation, là, des éducateurs, des éducatrices,
également dans les formations au niveau des directions. Il y a des milieux qui
sont bien formés, qui sont bien outillés pour accompagner. Tout d'un coup, les
appréhensions baissent très souvent. Donc, qu'il y ait un bon travail de
terrain qui soit fait en amont, ça serait une chose extraordinaire, et de
pouvoir, également, pouvoir travailler en synergie avec le réseau de la santé.
Parce que souvent ces enfants-là, ils arrivent avec... ils ont, espérons, un
dossier qui est ouvert, et puis qui est avec une éducatrice, puis qui permette,
justement, d'avoir des passerelles ou un lien avec... et puis qu'il y a un
travail en synergie qui soit fait. Parce que, quand on a un enfant handicapé,
bien, tout ce qui est travaillé à la maison, bien, peut être travaillé en CPE,
tu sais, travailler avec l'éducatrice. Il faut qu'il y ait une espèce de
cohérence puis que... Moi, j'ai toujours dit que le parent, c'est un peu
l'intervenant pivot, hein? C'est lui qui fait un peu tout le lien entre ça.
Donc, s'assurer que ça, ça puisse se faire, donc... Et puis ça, ça va être à
l'avantage des enfants qui vont mieux se développer, encore mieux.
Mme
Hivon : Merci.
C'était tout le temps que j'avais, malheureusement.
La
Présidente (Mme D'Amours) : Merci, merci. Mme Larose,
M. Ragot, merci infiniment pour votre contribution aux travaux de
notre commission.
Mémoires déposés
Avant de conclure les auditions, je procède au
dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus
lors de nos auditions publiques.
Je vous remercie pour votre contribution, chers
collègues, à nos travaux.
La commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à 16 h 33)