(Neuf heures trente-deux minutes)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Bon matin, tout le monde. Je vous invite à prendre place. Je constate
le quorum, et je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte, et je vous souhaite la bienvenue,
et demande à tous de bien vouloir éteindre la sonnerie et le mode vibration de
leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie ce matin afin de poursuivre la consultation générale et les
auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé La
planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Skeete (Sainte-Rose) est remplacé par Mme Picard
(Soulanges); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji
(Nelligan); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par M. Fontecilla
(Laurier-Dorion); M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Perry
Mélançon (Gaspé).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Chassé) :
Excellent. Ce matin, nous entendrons les organismes suivants : tout
d'abord, l'Institut de recherche sur
l'intégration professionnelle des immigrants, ensuite, le Haut-Commissariat des
Nations unies pour les
réfugiés, par la suite, Montréal International, et nous finirons ce matin avec
la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Nous avons débuté à
l'heure, alors nous sommes des champions, fantastique!
Je souhaite donc la bienvenue aux représentants
de l'Institut de recherche sur l'intégration professionnelle des immigrants. Vous disposez de 10 minutes pour
faire votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire un signe
pour vous inviter à conclure. Je vous invite à tout d'abord vous présenter puis
à poursuivre avec votre exposé. Bienvenue.
Institut de recherche sur l'intégration
professionnelle des immigrants (IRIPI)
M. El-Hage
(Habib) : Merci. Merci, Mme la Présidente. Mesdames et messieurs, merci. Alors, Habib El-Hage, directeur de l'Institut
de recherche sur l'intégration professionnelle des immigrants, l'IRIPI. Je suis
accompagné par Mme Monica Schlobach, chercheure et coordonnatrice
scientifique à l'IRIPI.
Alors, lors
de cette présentation, nous ferons état des activités de l'IRIPI. Ensuite, nous
présenterons les grandes lignes de
notre mémoire et présenterons nos recommandations. Nous serons par la suite
disponibles à répondre à vos questions.
L'Institut de
recherche sur l'intégration professionnelle des immigrants, l'IRIPI, créé en
2009 par le collège de Maisonneuve, est un centre collégial de transfert
de technologies en pratiques sociales novatrices. Il a pour mission de contribuer au développement et au transfert
de pratiques sociales novatrices en vue de favoriser l'intégration sociale
et professionnelle des personnes immigrantes
et issues de l'immigration. C'est un lieu interdisciplinaire de recherche
appliquée. L'IRIPI travaille avec une variété
d'organisations impliquées dans le processus d'intégration des immigrants au
marché du travail et à la société québécoise. Ses trois principaux créneaux
sont la gestion de la diversité ethnoculturelle dans les entreprises et les organisations, les pratiques et médiation interculturelle, prévention,
lorsqu'on parle aussi de pédagogie interculturelle et autres, et les
pratiques sociales novatrices, tout ce qui est en lien avec les solutions.
L'enjeu
présenté dans cette consultation interpelle l'IRIPI. On a ressenti le besoin
d'être ici pour envoyer le message suivant :
L'IRIPI considère que l'arrimage entre les besoins du marché du travail, le
recrutement et les compétences des personnes
immigrantes n'est qu'une étape dans un processus complexe. Même si l'esprit du
nouveau programme Arrima est louable,
il n'en demeure pas moins que la sélection des nouveaux arrivants eu égard aux besoins des entreprises ne
garantit pas une bonne intégration en emploi ou en société.
L'IRIPI croit
que l'accompagnement des acteurs concernés — entreprises, écoles, villes, personnes immigrantes — dans
la gestion de la diversité ethnoculturelle
et l'intégration des personnes immigrantes est l'affaire de tous. C'est une
responsabilité qui doit être partagée par l'ensemble des parties
prenantes, des citoyens, des organismes communautaires et interpelle la
responsabilité sociale des entreprises et non seulement le MIDI. Toutefois, il
faut une vision, un leadership politique rassembleur.
On le dit souvent, l'intégration des personnes immigrantes débute par un
leadership politique. Dans ce sens, au-delà des aspects économiques
présentés dans le document de consultation, le gouvernement doit soutenir
davantage l'intégration des personnes immigrantes
par un investissement soutenu dans la gestion de la diversité ethnoculturelle
en entreprise, dans l'innovation, dans la
francisation en entreprise, dans le développement de la reconnaissance des compétences et assurer un meilleur soutien aux populations
vulnérables, notamment les demandeurs d'asile et les personnes ayant
un statut temporaire, les travailleurs saisonniers et étudiants étrangers, par
exemple.
Le document de consultation mise sur l'arrimage
entre compétences et besoins des entreprises. Alors, pour que l'arrimage
réussisse, il faut aller au-delà des considérations économiques et mettre des
efforts sur la collaboration, la concertation, la mobilisation des différents
acteurs de la société.
Malgré
la bonne intention du gouvernement d'accélérer le processus de sélection des
nouveaux candidats à l'immigration, plusieurs zones grises demeurent sans
explication, notamment en ce qui concerne la reconnaissance des compétences à l'étranger, l'orientation 4, la
favorisation des candidats ayant une connaissance des valeurs
démocratiques, l'orientation 7, et les problèmes d'accès aux services des
demandeurs d'asile.
À
propos des barrières à l'intégration, plusieurs obstacles persistent. Il existe
toujours aujourd'hui un consensus relatif sur ces derniers, par exemple le manque de pratiques de gestion de la
diversité sur le milieu de travail, de la discrimination, manque de réseaux social et professionnel,
difficulté d'accès à l'information, difficulté de reconnaissance des
diplômes, des qualifications et de
l'expérience professionnelle acquise à l'étranger de la part des divers acteurs
du marché du travail, employeurs,
ordres professionnels, établissements d'enseignement, par exemple. Dans le but
de faciliter le partage d'expertise dans
la reconnaissance des diplômes, des compétences des travailleurs immigrants,
l'IRIPI recommande au MIDI la mise en oeuvre
d'un système permettant la collaboration, le partage de bonnes pratiques et
initiatives novatrices entre le ministère, le MIDI, les entreprises et les acteurs du marché du travail ayant
développé des méthodes de reconnaissance des compétences.
À
l'image de la société québécoise, la diversité ethnoculturelle est présente
dans les entreprises. Si cette diversité est une source de richesse, elle ne va pas sans certains nombres de défis
qui doivent être ou faire l'objet d'une certaine attention particulière
de la part des gestionnaires.
Pour les personnes
immigrantes intégrées en entreprise et visant des postes de responsabilité ou
exigeant des compétences rédactionnelles, la
maîtrise de la langue française constitue parfois une barrière menant à un
effet de plafond de verre. Une étude
récente de l'IRIPI a souligné l'importance de la mise en oeuvre, notamment en
entreprise, d'une offre de francisation
compatible avec les exigences linguistiques des postes occupés par les
personnes immigrantes et aussi des postes que ces personnes envisagent
dans leur plan de carrière.
La recommandation 2,
c'est : «L'IRIPI recommande au MIDI de soutenir l'innovation dans les
initiatives des entreprises pour une
francisation en milieu de travail et dans le domaine de la gestion de la
diversité par un "apprentissage mutuel" de différents acteurs
impliqués dans le processus d'intégration des [personnes immigrantes,
c'est-à-dire les] entreprises, [les] organismes communautaires, cégeps, centres
de recherche, municipalités, etc.»
• (9 h 40) •
L'orientation
7 du document portant sur la
planification de l'immigration affirme que, dans les années à venir, le gouvernement du Québec souhaite favoriser la
sélection de personnes qui connaissent les valeurs démocratiques et québécoises
exprimées par la Charte des droits et
libertés de la personne du Québec. La remarque nous semble problématique et
renvoie à une longue polémique qui a fait couler beaucoup d'encre dans les
milieux académiques et médiatiques depuis les années 80. En effet,
procéder à une favorisation dans la sélection des personnes immigrantes qui
connaissent les valeurs démocratiques peut
faire l'objet de plusieurs interprétations qui promeuvent l'exclusion. À partir
de quels indicateurs une personne
candidate à l'immigration serait considérée conforme ou non aux valeurs
québécoises? La méconnaissance des valeurs
québécoises amène-t-elle une exclusion des candidats à l'immigration? Peut-on croire que les valeurs québécoises peuvent être apprises et valorisées en terre québécoise?
N'y a-t-il pas un danger de créer un sous-entendu préjudiciable entre ceux qui connaissent...
pardon, ceux qui nous ressemblent et les autres, c'est-à-dire ceux qui
proviennent de sociétés qui n'ont pas les mêmes codes et valeurs du
Québec?
Dans
ce sens, l'IRIPI recommande au MIDI de continuer les efforts qui favorisent
l'intégration, la pleine participation des personnes immigrantes et de
miser sur le développement des formations sur l'histoire du Québec, sur
l'histoire de l'immigration au Québec, les
valeurs de la société ainsi que le développement des compétences
interculturelles qui contribuent au développement des relations
harmonieuses entre les citoyens du Québec.
Le
document de consultation évoque l'importance des populations ayant un statut
temporaire, comme les étudiants étrangers
et les travailleurs temporaires. Cette population ou ces populations peut ou
peuvent vivre une certaine fragilisation due à un statut précaire, idem pour la population de demandeurs du
statut de réfugié. Il s'agit d'une population ayant souvent vécu des problèmes sociaux et économiques pouvant
les fragiliser psychologiquement, ce qui demande des services adaptés à
leur vécu migratoire.
Dans
le cas des demandeurs du statut de réfugié, leur statut incertain peut rendre
leur intégration socioprofessionnelle plus
longue et imprévisible. Les données provenant de nos enquêtes de terrain
portant sur la régionalisation des personnes immigrantes démontrent que nombre d'entreprises et d'autres acteurs ne
sont pas assez outillés pour répondre aux besoins des demandeurs d'asile et personnes réfugiées, qui
sont plus enclins à s'établir en région d'une manière plus durable que
les autres catégories d'immigration. Alors, l'IRIPI recommande au MIDI de
soutenir les efforts de collaboration, de partage des expériences et des
compétences entre les entreprises et les acteurs montréalais et régionaux qui
participent au processus d'intégration des
personnes réfugiées ou en attente de la reconnaissance du statut de réfugié
dans leurs démarches visant à mieux
répondre à leur besoin d'intégration. L'IRIPI recommande une prise en charge et
une évaluation des risques encourus par
les demandeurs du statut de réfugié, notamment lors des premiers mois au
Québec, soit avant l'obtention par eux d'un permis de travail et d'un emploi
correspondant à leurs aspirations.
Alors, pour conclure,
notre message est un message d'encadrement, de soutien, d'aide à la
francisation et une évaluation de ce qui existe déjà. Le Québec a toujours
innové dans ce domaine-là, il faut continuer dans ce sens. Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : M. El-Hage... c'est comme ça que je prononce?
M. El-Hage
(Habib) : El-Hage.
La Présidente
(Mme Chassé) : El-Hage.
M. El-Hage
(Habib) : Oui.
La Présidente (Mme Chassé) : Je
vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période
d'échange en débutant avec le parti formant le gouvernement. M. le ministre, la
parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. El-Hage,
Mme Schlobach, bonjour. Merci d'être à l'Assemblée nationale pour
présenter votre mémoire.
Écoutez, quelques questions, d'entrée de jeu.
Vous avez dit : Écoutez, il faut davantage soutenir l'intégration. Récemment, on a annoncé la mise en place d'un
parcours d'accompagnement personnalisé de 20 millions de dollars,
le fait aussi de donner une allocation pour
suivre la session Objectif intégration, qui renseigne sur les codes
socioculturels de la société
québécoise, qui donne les clés aussi pour l'intégration en milieu de travail,
qui fait un portrait général des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la
personne. En francisation, on a annoncé une bonification de l'allocation à temps plein de 141 $ à
185 $, on a également créé une nouvelle allocation à temps partiel — auparavant, c'était 0 $, maintenant c'est 15 $ par jour de
formation — on va
engager 80 nouveaux professeurs aussi en francisation, on crée des sessions intercalées pour que l'accès à la
francisation soit plus facile en fonction de l'horaire, on va avoir
éventuellement un guichet unique. Est-ce que ces mesures-là sont un pas dans la
bonne direction?
M. El-Hage
(Habib) : Je pense qu'elles
sont dans la bonne direction. Il faut voir maintenant leur impact. Il
faut voir par la suite qu'est-ce qu'on garde
et qu'est-ce qu'on ne garde pas. Et, comme tous les programmes qui ont eu lieu
jusqu'à maintenant depuis les
années 60-70, il y a eu énormément d'innovations au Québec dans les
programmes qui visent à intégrer, évidemment.
Il y a certains programmes, probablement, qu'il faut les revoir ou qu'il faut
les améliorer. C'est dans ce sens-là qu'on
dit : Il faut continuer à soutenir. Nous, on dit : Il faut continuer
à soutenir, justement, cette démarche d'intégration ici. Alors, je pense que, oui, en effet, c'est la bonne
voie. Maintenant, il va falloir peut-être attendre qu'est-ce que... c'est
quoi, l'impact de toutes ces mesures-là sur
les objectifs visés, évidemment,
mais on est sur une bonne voie. Depuis les années 70, on travaille sur ces programmes, on s'améliore. Il y a
des aspects qui sont moins intéressants, des programmes qui étaient moins intéressants, on les a passés, d'autres qui
sont plus intéressants, on a bonifié. Il faut continuer, c'est ce qu'on
dit.
M. Jolin-Barrette : Mais est-ce
que vous êtes d'accord
avec moi que c'est la première fois qu'il y
a autant d'argent, au ministère
de l'Immigration, pour faire en sorte d'assurer l'intégration puis la
francisation?
M. El-Hage
(Habib) : Je pense qu'on a
assez de sous, d'argent maintenant, et il faut les investir à cette bonne
place, évidemment. Je suis tout à fait d'accord avec ça.
M. Jolin-Barrette : O.K. Parce
que, juste pour illustrer mon propos,
ça revient à un choix politique puis ça revient à un choix de société. Quand on décide de consacrer les ressources
comme on l'a fait dans le dernier budget, puis de pouvoir vraiment
créer un parcours d'accompagnement personnalisé, et donner davantage de
ressources en francisation, notre objectif à nous, c'est vraiment
d'accompagner les personnes immigrantes dès l'étranger pour faire en sorte que
tout le processus d'intégration, bien,
puisse être couronné de succès. Mais je comprends ce que vous nous dites, c'est
que, dans le fond, avec le parcours,
supposons, on va être en mesure de juger les bienfaits dans quelques mois, quelques
années, puis vous nous invitez à
rester vigilants pour ajuster le programme si jamais il y a des choses qui ne fonctionnent pas ou d'une façon à le
bonifier.
M. El-Hage
(Habib) : Tout à fait, c'est
dans ce sens-là. En fait, le Québec a, depuis longtemps, créé des
programmes. On n'est pas dans un désert de
programmes là-dessus. C'est justement cet aspect-là, de l'évaluer, de voir
qu'est-ce qu'on garde, qu'est-ce
qu'on ajoute, qu'est-ce qu'on enlève, ça, c'est très important. Et, vu qu'il y
a beaucoup de sous, actuellement, je
pense, c'est une conjoncture intéressante de voir, d'évaluer tout ça et
d'investir là-dedans, d'ajouter, d'enlever et de bonifier.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Parlons un peu des valeurs. Tout à l'heure, vous disiez : Ça peut porter à
l'exclusion. Pouvez-vous expliquer davantage
qu'est-ce que vous voulez dire par là? Parce qu'on a modifié, dans le projet de
loi n° 9, la Loi
sur l'immigration justement pour faire référence aux valeurs québécoises
exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne, les valeurs démocratiques aussi. En
quoi le fait de prôner l'adhésion à ces valeurs ou, je vous dirais, aux
fondations de la société québécoise, ça milite en faveur de l'exclusion?
• (9 h 50) •
M. El-Hage
(Habib) : En fait, ce n'est
pas tout à fait comme ça qu'on le dit, on dit... Dans le texte de
consultation, ce qui a été dit, c'est :
On veut favoriser la sélection des personnes qui connaissent — qui connaissent — les valeurs. Notre interprétation, et on s'est posé des questions,
donc, si une personne ne connaît pas les valeurs québécoises à partir du
pays d'origine, elle serait exclue. On se
pose la question : Est-ce qu'elle va être exclue? Est-ce que ce candidat-là
qui ne connaissait pas au préalable
les valeurs québécoises, il serait tassé? Je connais plusieurs personnes qui
sont arrivées au Québec... J'en suis une,
de ces personnes-là. Dans les années 90, je ne connaissais pas les valeurs
québécoises, donc je serais exclu, dans ce cas-là, et bien d'autres
personnes, évidemment. C'est ça, notre interrogation. On est d'accord pour dire
qu'il se fait énormément de choses, au
Québec, d'une façon superintéressante sur le plan de l'éducation, de la
formation, justement, sur la question
des valeurs québécoises, et ça donne fruit. Alors, la question, on s'interroge
tout simplement : Pourquoi il faut la mettre en amont avant d'arriver? Vu qu'il y a beaucoup, beaucoup,
beaucoup de travail qui se fait ici, de l'accompagnement, justement, personnalisé, pourquoi ne pas garder ça
et le bonifier? Notre recommandation va dans ce sens-là, c'est de
dire : Travaillons là-dessus ici. Une fois qu'une personne est arrivée
ici, on est capables de l'intégrer.
Vous
savez, on le sait, sur cette question-là, il n'y a rien de mieux que de se
frotter aux gens, autrement dit de connaître
l'environnement social, de connaître l'environnement ambiant. Il faut
rencontrer les gens, il faut, c'est comme ça qu'on apprend. Les théories sur l'apprentissage, sur le contact nous
disent : C'est comme ça qu'on apprend, il faut être en contact avec les gens. Si quelqu'un veut
m'apprendre quelque chose, bien, c'est par ce moyen-là. Moi, je pense, mon
parcours personnel, c'est la famille
Quévillon, c'est la famille Tremblay, c'est la famille Gagnon, c'est la famille
Gascon. C'est elles qui m'ont montré
qu'est-ce que c'est, les valeurs québécoises, et c'est comme ça que j'ai aimé
les valeurs québécoises. Et, comme
moi, il y a des milliers de personnes, des millions de personnes qui ont appris
les valeurs québécoises comme ça. Personnellement,
je ne peux pas imaginer qu'à partir de l'étranger je vais apprendre ou
connaître... parce que c'est ça aussi, c'est
connaître les valeurs québécoises.
Oui, je peux les connaître, mais je préfère adhérer aussi. On peut faire un
beau travail ici, on le fait déjà.
C'est dans ce sens-là, c'est juste... c'est des interrogations. Est-ce qu'il va
y avoir une exclusion si je ne connais pas les valeurs québécoises?
M. Jolin-Barrette : Vous savez qu'actuellement toute personne
qui immigre au Québec doit signer une déclaration d'adhésion aux
valeurs québécoises. Donc, vous dites : Ça, ce n'est pas pertinent. Parce
que la question qui se pose, fondamentalement,
c'est de dire : Il est possible d'être accompagné, il est possible d'être
confronté à ces valeurs-là un coup au
Québec, mais, dès le départ aussi, il faut savoir dans quelle société
on s'en vient. Puis sur la question de l'engagement partagé, ça, c'est important, parce que, si dès le départ on dit : Moi,
la démocratie, moi, l'égalité entre les femmes et les hommes, moi, la non-discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, je n'adhère pas à ça, je ne suis pas convaincu que ça
va faire grandement avancer la société québécoise.
Alors,
je suis d'accord avec vous que la forme d'apprentissage, c'est quand on est
dans le bain, puis tout ça, mais il
n'y a rien qui empêche, dès le départ, en termes de contrat moral, au niveau
de l'immigration, de dire : Voici quels sont les paramètres de la société québécoise, sachez que la société québécoise est un État de
droit, sachez qu'on va faire en sorte d'avoir
une société qui est égalitaire, que les principes de non-discrimination sont
enchâssés, qu'on va faire en sorte que l'opportunité pour tous et chacun de faire de qu'il souhaite
dans la société québécoise est présente. Vous savez, un peu dans ce sens-là.
Moi, je ne considère pas que c'est une forme
d'exclusion, mais c'est plutôt de l'inclusion de dire : Voici les
paramètres de la société québécoise, dès le départ.
M. El-Hage (Habib) : Très bien, là-dessus je vous suis. Vous avez
parlé de valeurs morales, de contrat moral, on a déjà eu cette expérience-là en 1984, et ça a été évalué et remplacé par
le contrat civique pour une raison simple, c'est que le contrat moral, à l'époque, engageait seulement la
personne immigrante. Et, lorsque le Parti québécois est arrivé, il a
dit : Non, bien, il faut réfléchir
davantage, il faut engager davantage la solidarité, il faut engager davantage
la participation de tout le monde, là, et c'étaient des valeurs de
citoyenneté très pertinentes et intéressantes. Malheureusement, on n'en parle
pas aujourd'hui, ou moins.
Mon
intervention visait à dire, tout simplement... et c'est une question, de dire :
Est-ce que, si une personne ne connaît pas... un jeune de 18 ans qui ne
connaît pas au préalable les valeurs québécoises, est-ce qu'il va être
exclu — c'est
tout simplement ça — et pourquoi? Parce qu'il peut les apprendre
ici, il peut les connaître ici, parce qu'il va rencontrer du monde ici,
à l'école, il va avoir des cours ici, et tout ça. C'est tout simplement ça.
M. Jolin-Barrette :
Mais là-dessus vous dites : Le sens civique, l'adhésion civique. Bien,
j'en suis, parce que l'immigration, c'est un
engagement partagé de la société d'accueil et de la personne immigrante, donc
il faut s'assurer que tout le monde
travaille dans la même direction. Alors, nous, c'est très clair que notre plan
est justement là pour mobiliser les acteurs
locaux aussi. Puis on a vu beaucoup, dans le cadre de la consultation,
plusieurs entreprises qui sont venues nous dire : Écoutez, nous, là, on est partie prenante au
processus d'intégration, de francisation, on veut continuer, on s'assure...
Je pense, c'est Olymel qui nous
disait : Écoutez, la première semaine, c'est consacré à la caisse
populaire, trouver un logement, vraiment accompagner les gens. Alors, je pense que, du point de vue de la société
québécoise, l'effort, il est fait, puis vraiment les efforts sont déployés.
Alors,
écoutez, je vais m'arrêter ici parce que je sais que j'ai des collègues qui
veulent poser des questions, mais je vous remercie pour la présentation
du mémoire.
La Présidente
(Mme Chassé) : Effectivement, M. le ministre, votre collègue de
Chauveau désire prendre la parole. Allez-y.
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Heureux de vous
retrouver ainsi que tous les
collègues ce matin. M. El-Hage, Mme Schlobach, merci beaucoup de
votre présentation. Et, pour avoir été impliqué quand même un peu en immigration, il y a un élément que
vous avez mentionné que je trouve central, c'est la concertation pour...
On parle beaucoup de seuils, on parle
beaucoup d'accueil, mais pour réussir, c'est un travail collectif. Mais le fait
que vous avez mis l'emphase, ce
matin, sur la concertation, sur cette intégration-là, tous les partenaires
doivent être impliqués, est-ce que,
dans votre institut de recherche, vous avez identifié des lacunes en cette
matière? Parce que ma perception, dans la région de Québec, puis bien sûr, c'est peut-être différent ailleurs, mais il y avait quand même une relativement bonne
concertation entre les acteurs. Mais
avez-vous identifié des problèmes majeurs pour cette... à l'intérieur de la concertation,
qui favorisent l'intégration de nos personnes immigrantes lorsqu'elles
arrivent au Québec?
M. El-Hage (Habib) : Oui. En fait, ce qu'on a remarqué et ce qu'il
manquerait, quelques aspects dans cette chaîne de concertation, notamment, par exemple, entre régions, Montréal et
régions aussi... Ce que nous avons remarqué aussi, qu'on peut innover davantage aussi dans le sens de créer
ce qu'on appelle des tables situationnelles. Donc, ce n'est pas juste de
la concertation, mais
ce sont des tables situationnelles qui sont... qui peuvent être des
regroupements des professionnels, donc on
est au niveau professionnel, pas des décideurs, au niveau professionnel, qu'ils
peuvent travailler en concertation et partager des études de cas problématiques, mais aussi désigner un groupe ou
quelqu'un qui peut travailler sur la solution et faire un suivi par la
suite. Ce ne sont pas des communautés de pratique, ce sont des tables
situationnelles, et on a peu de tables situationnelles
au Québec. Dans l'Ouest, c'est beaucoup plus développé, ce qu'on appelle
communément les hubs. Ça peut être
très intéressant peut-être de voir comment des professionnels qui sont dans le
même domaine peuvent se regrouper, et faire
des études de cas, et désigner quelqu'un pour trouver des solutions par rapport
à un problème qui existe. Voyez-vous, on est loin... bien, on est... c'est différent d'une communauté de
pratique. On sait c'est quoi, une communauté de pratique, ça peut être
un regroupement de professionnels qui sont là pour échanger de l'information,
avoir des formations, et autres, mais ils ne travaillent pas sur
l'intervention, par exemple, pour trouver des solutions pratico-pratiques
rapides avec un porteur de dossier.
M. Lévesque
(Chauveau) : Est-ce que cette approche-là, vous parlez,
situationnelle... parce qu'un des défis qu'on a à relever, c'est la régionalisation de l'immigration. On sait que la
majorité vont dans la grande région de Montréal, c'est normal, il y a plus de diversités culturelles dans
la région métropolitaine qu'ailleurs au Québec. Mais est-ce que cette
façon de faire là, c'est des solutions que vous proposez pour favoriser,
notamment, la régionalisation?
M. El-Hage
(Habib) : En fait, ça peut être une façon, il faut l'étudier avec les
personnes les plus concernées. L'approche, à
l'IRIPI, est de dire : On coconstruit avec les personnes présentes,
évidemment, et souvent... Il ne faut pas oublier que, parmi les personnes les plus importantes, c'est la personne
immigrante elle-même, là, c'est-à-dire ceux qui peuvent représenter ces groupes-là et non seulement dans
un organisme ou dans un ministère, mais aussi la personne qui est là,
qui peut parler au nom de ses collègues, et
ça, c'est très important de l'inclure dans la solution, évidemment. Mais notre
approche, c'est de travailler avec tout le monde toujours et, à partir du
terrain, nous, on va présenter quelque chose, évidemment.
M. Lévesque (Chauveau) : J'aimerais poursuivre avec vous, M. El-Hage,
si vous me permettez, sur la régionalisation, justement. Quelles sont les principales barrières que vous avez
identifiées qui défavorisent la régionalisation? Qu'est-ce que vous
percevez, au sein des personnes immigrantes, qui fait que c'est difficile de
les amener à Québec, les amener au Saguenay—Lac-Saint-Jean, dans la région du
Bas-Saint-Laurent, pour ne nommer que celles-là? Quelles sont les
principales barrières?
M. El-Hage
(Habib) : Bien, ça revient toujours, et il y a un consensus là-dessus,
le réseau social, le réseau professionnel,
c'est vraiment des barrières. Des fois, ça peut être la question de... la
connaissance du français aussi, ça peut être une barrière. Si on parle
des barrières, ça peut être ceux-là qui reviennent le plus souvent. Donc, c'est
des barrières à travailler là-dessus aussi.
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. El-Hage
(Habib) : Pardon?
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. El-Hage
(Habib) : Oui. Alors, c'est ça, des barrières. Voilà.
La Présidente
(Mme Chassé) : Très bien. Oui?
M. Lévesque
(Chauveau) : Alors, je pense que je n'ai plus de temps, Mme la
Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Bien, il vous reste une dizaine de secondes.
M. Lévesque
(Chauveau) : Ah! tout simplement vous remercier, à ce moment-là.
J'aurais aimé parler de votre proposition au
niveau de l'histoire, l'enseignement de l'histoire aux personnes immigrantes,
mais, peut-être, mes collègues poseront des questions à ce niveau-là.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ah! c'est bien, la suggestion de
collaboration, j'aime ça. On est en train de réinventer les règles à
l'Assemblée nationale, j'adore ça.
M. Derraji :
On travaille en collégialité.
La Présidente
(Mme Chassé) : Et j'invite maintenant le parti formant
l'opposition officielle à prendre la parole. M. le député de Nelligan.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Allez-y.
• (10 heures) •
M. Derraji :
Vous pouvez l'inviter à Québec, hein? Il est juste à Montréal.
Mme Schlobach,
M. El-Hage, bienvenue. Merci pour votre présence et pour votre rapport.
J'ai entendu, lors de votre présentation, parler du leadership
politique, vous l'avez dit à deux ou trois reprises. Pour vous, c'est quoi, le
leadership politique?
M. El-Hage (Habib) : Bien, en fait, c'est prendre le bâton de pèlerin
et aller voir, aller mobiliser les parties prenantes de plus haut au plus bas aussi, donc aller voir les personnes, aller voir les grands groupes
et travailler à faire avancer d'une façon
concertée le dossier de l'immigration,
le dossier de la gestion de la diversité, les relations interculturelles, et
autres.
M. Derraji :
Et sentez-vous que ce leadership politique existe ou bien vous souhaitez qu'il
existe?
M. El-Hage (Habib) : Il a toujours existé, ce leadership, au Québec,
depuis Gérald Godin. Lorsqu'on ouvre les livres, on regarde l'histoire
de ce pionnier, si vous voulez, dans ce domaine-là. D'ailleurs, ce n'est pas
pour rien que l'interculturalisme est né
avec M. Godin à l'époque. Et tous les partis politiques, par la suite, ont
mis leur grain de sel aussi là-dessus
avec un leadership politique, donc c'est très important. Mon intervention est
de rappeler : Au-delà des impératifs économiques, au-delà de ça, là, il y a aussi et surtout le leadership
politique, il ne faut pas l'oublier. Je ne suis pas en train de
dire : C'est un moins ou plus, ce n'est pas ça.
M. Derraji :
Oui, c'est qu'il faut l'adopter.
M. El-Hage
(Habib) : Il faut le souligner.
M. Derraji :
Excellent. Vous avez soulevé des inquiétudes — et corrigez-moi si je me trompe — par rapport à la façon avec laquelle... je ne pense pas que vous
avez dit par rapport au test de valeurs, mais la façon avec laquelle on
s'attend à voir un résultat. Et, pour vous,
le résultat, c'est l'adhésion, c'est l'appartenance à cette société. Vous
pensez que le ministère, avec sa
façon avec laquelle il veut aller chercher ça, il se prend de la mauvaise façon
ou probablement pas de la bonne manière.
M. El-Hage
(Habib) : Juste comprendre, le résultat... quand vous dites le
résultat, quel résultat?
M. Derraji :
Bien, en fait, vous avez dit qu'il va y avoir des gens exclus et qui vont se
sentir exclus, etc.
M. El-Hage
(Habib) : Ah! O.K. Excusez-moi, oui.
M.
Derraji : Pour moi, c'est un résultat, et vous semblez être... vous
maîtrisez le sujet, vous êtes à la tête de l'Institut de recherche sur l'intégration professionnelle des
immigrants. Moi, ce que j'aimerais, avec vous, aujourd'hui, c'est nous
dire... parce que nous, nous avons eu le débat pendant le projet de loi
n° 9 par rapport au test des valeurs, et on comprend la volonté du ministre et du ministère par rapport au
test des valeurs. Moi, ma question, aujourd'hui, est très claire. Si on
s'attend à voir de l'adhésion — des résultats escomptés — probante,
vous, ça serait quoi, votre démarche?
M. El-Hage (Habib) : Ça serait d'aller mesurer comment ça se passe sur
le terrain. On veut savoir qu'est-ce que c'est exactement lorsqu'on veut dire... si je prends l'exemple, de favoriser
la sélection des candidats en amont, mais qu'est-ce que ça veut dire? Comment on peut favoriser la
sélection à partir de leur connaissance ou non des valeurs? Si on parle
de cet exemple-là, juste on veut savoir
qu'est-ce que ça veut dire, connaissance? Donc, il faut mesurer toutes ces
appellations-là et voir est-ce qu'il y a,
est-ce qu'il y aura une exclusion, par exemple, c'est dans ce sens-là. Une
personne qui ne connaît pas les valeurs, pour nous, elle peut les
apprendre après, ce n'est pas...
M. Derraji :
Mais c'est quand même intéressant, parce que le ministre vous a répondu, il
vous a dit : Écoutez, là, les valeurs,
pour moi, quelqu'un qui ne croit pas en l'égalité hommes-femmes, quelqu'un qui
ne croit pas à telle valeur, à telle valeur,
bien, il n'a pas de place à venir au Québec. Mais vous, vous allez beaucoup
plus loin que ça, c'est que, oui, on peut répondre que, oui, je suis pour l'égalité hommes-femmes, mais sur les
faits, sur le terrain, vous pensez que, probablement, il y aura matière
à apprentissage sur le terrain. Est-ce que j'ai...
M. El-Hage (Habib) : En fait, nous, on s'appuie sur ce monde qu'on
appelle les relations interculturelles, d'accord, sur les théories qui
touchent cet aspect-là. On parle de théories de contact, de l'apprentissage, et
ces théories-là nous apprennent que ça se construit
avec l'autre, donc il y a un apprentissage à faire au contact de l'autre. Et,
moi, ce que je dis : Je fais
confiance à ce que le Québec a innové depuis très longtemps et je fais
confiance au peuple québécois et à tout le monde qui entoure la personne
qui arrive. Et on dit aussi : L'intégration, ce n'est pas juste l'affaire
d'une personne ou d'un ministère, c'est tout
le monde, il faut que tout le monde participe. Et je suis certain... vous avez
autour de vous, autour de nous, tous
ici, peut-être ici, dans la salle, des personnes qui ont eu ces expériences-là
de contact, d'aller dans des familles, d'avoir eu des histoires,
raconter des histoires, et ça change aussi, au fur et à mesure, les
perceptions.
M. Derraji :
Donc, pour vous, le Québec, s'il suit la logique de faire un test avant
l'arrivée des immigrants, passe à côté
des résultats escomptés, et ce que vous proposez, c'est plus laisser le temps
aux gens qu'on accueille de vivre et de faire leur point de vue au
niveau local en coconstruction avec la société d'accueil et probablement, s'il
y a matière à accepter un test, que le test soit plus tard.
M. El-Hage
(Habib) : En fait, c'est que je... oui.
M. Derraji : C'est comme un parcours universitaire, on ne te questionne pas... on ne te fait pas passer un test
au début du cours, mais plutôt après
40 heures d'heures ou de... dans un cours ou un... Est-ce que
c'est la même logique que vous voulez...
M. El-Hage (Habib) : En fait, dans
certains programmes, il y a des tests avant le...
M. Derraji : Avant, oui.
M. El-Hage
(Habib) : Mais, moi, ce
n'est pas ça, ce que je dis. Ce que je dis : On questionne,
on veut savoir, on veut comprendre
comment ça se fait. Est-ce que ça va exclure des personnes? Si la personne ne connaît
pas — je
reviens encore au mot «connaître» — les valeurs, est-ce qu'elle
va être exclue?
M. Derraji : O.K. J'ai une petite dernière question,
après c'est ma collègue qui va poursuivre. Vous avez parlé d'une problématique,
que je partage avec vous aussi, c'est les services psychosociaux et services
juridiques aux immigrants temporaires. Ça
serait quoi, votre proposition par
rapport au MIDI? Est-ce que
vous pensez qu'il faut les inclure dans le parcours personnalisé? C'est
quoi, votre suggestion?
M. El-Hage (Habib) : En fait,
on s'est rendu compte à plusieurs reprises, par exemple, dans le cas de
certains étudiants étrangers qui ont des assurances ici, mais il nous arrive
parfois que ces étudiants-là, lorsqu'ils ont des besoins particuliers, n'ont pas les moyens de payer, par exemple, le psychologue ou le médecin, pour, par la suite, réclamer les assurances, alors ça devient un peu difficile.
C'est dans ce sens-là, peut-être, il faut voir, travailler sur ces difficultés-là.
M. Derraji : Et comment vous
voyez la solution?
M. El-Hage
(Habib) : Moi, ce que je
vois, là, c'est peut-être s'entendre avec les compagnies d'assurance pour
dire, peut-être, qu'ils puissent avoir accès aux services, et par
la suite le travail peut se faire entre la compagnie d'assurance et le
médecin ou la psychologue, par exemple.
M. Derraji : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, je comprends que la députée de Fabre... Bienvenue.
Mme Sauvé : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bon retour, Mme la vice-présidente.
Mme Sauvé : Merci. Bien
heureuse d'être de retour.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, absolument. J'entends que vous désirez prendre la parole?
Mme Sauvé : Oui, Mme la
Présidente. Combien de temps me reste-t-il?
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste trois minutes.
Mme Sauvé : Alors, je serai succincte. Alors, bienvenue à
vous deux. Très contente de vous entendre. Moi, je veux revenir sur le parcours individualisé. Vous avez
nommé des préoccupations, et c'est de la musique à mes oreilles quand
vous dites qu'il faut rencontrer les gens,
c'est comme ça qu'on apprend. Vous avez tellement raison. Pour avoir
été presque 20 ans de ma vie
dans l'approche globale d'accompagnement personnalisé des gens, alors, je veux vous poser
une question très précise sur les préoccupations que vous avez
sur le système collaboratif. Vous avez nommé que c'est l'affaire
de tous et vous avez nommé, dans
votre mémoire, également la place des organismes communautaires qui
ont développé une expertise, qui ont
développé des bilans de compétences — des
bilans de compétences — par
des conseils d'orientation qui sont reconnus et qui contribuent, évidemment, à l'accompagnement très qualitatif des personnes. Est-ce que
vous n'avez pas la crainte, la préoccupation qu'avec l'annonce du ministre,
l'ajout du 20 millions et des agents d'intégration on ne se retrouve pas
dans un dédoublement très sensible entre le
mandat, les quatre volets du mandat de l'agent d'intégration, qui sont très
souvent des copier-coller des mandats
d'organismes? Je pense entre autres
au Carrefour d'intercultures, à Laval, chez nous, qui font exactement,
exactement ce même premier travail de première ligne d'accompagnement
personnalisé.
M. El-Hage (Habib) : C'est une très bonne question. Je ne peux pas
répondre au complet à cette question-là, mais ce que je peux dire, c'est
que les organismes communautaires ont travaillé depuis longtemps avec le
ministère. C'est des partenaires du
ministère de l'Immigration depuis toujours. C'est dans ce sens-là, je pense,
que je ne peux pas savoir comment ça
va s'articuler. Je ne suis pas dans cette position-là, donc je préfère ne pas
répondre directement à cette... Mais je pense qu'historiquement, et on
le sait, les organismes communautaires étaient des partenaires, et ils le sont
toujours, je pense, partenaires
du ministère de l'Immigration, de la Diversité. Et, dans ce sens-là, la
collaboration doit continuer non pas d'une façon compétitive, mais
collaborative.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste 45 secondes au bloc d'échange.
Mme Sauvé : Bien, je vais vous remercier. Bien, je vais peut-être simplement
dire... Dans votre recommandation 2, vous avez parlé de valoriser des façons de faire innovantes pour la
francisation. Est-ce qu'il n'y a pas un état de situation où vous
envisagez des bonnes pratiques déjà existantes?
M. El-Hage (Habib) : Exactement. Oui, il y a beaucoup de bonnes
pratiques existantes, il faut les faire valoir. Nous, lorsqu'on a parlé de la francisation en entreprise
surtout, c'est peut-être... par exemple, comme innovation, c'est de
créer un fonds pour les entreprises qui
désirent créer ou innover dans ce domaine-là en entreprise. Ça peut être
l'utilisation d'une approche contextualisée, par exemple, en entreprise,
c'est-à-dire des pratiques de francisation très adaptées à un milieu
particulier. C'est dans ce sens-là.
• (10 h 10) •
Mme Sauvé :
Parfait. Merci beaucoup. Merci à vous deux.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien, merci. Nous sommes maintenant
rendus à donner la parole au deuxième groupe d'opposition. M. le député
de Laurier-Dorion, la parole est à vous. Allez-y.
M. Fontecilla : Merci, Mme
la Présidente. Je vous souhaite la
bienvenue à l'Assemblée nationale. Écoutez, à la page
9, vous dites que «différents [travaux] — je vous cite — ont permis de constater la présence des
discriminations qui prennent diverses
formes dans les milieux de travail», là, au-delà du caractère inacceptable
d'une discrimination, consciente ou
inconsciente, là, mais... Le but de la politique qui est mise de l'avant par le
gouvernement, c'est d'utiliser le plein potentiel économique des personnes qu'on reçoit ici.
Évidemment, cette discrimination, d'après ce que vous dites, empêche la
société québécoise d'utiliser ce
potentiel-là des personnes qui ont été sélectionnées. Est-ce que vous pensez
que le document, la consultation
pointe, éclaire, met en relief cette problématique-là, s'il y a des mesures qui
sont prises pour trouver des solutions? Et qu'est-ce qui pourrait être
fait, selon vous, pour contrer cette discrimination-là qu'on pourrait appeler
systémique?
M. El-Hage (Habib) : Bien, ce que je vois, c'est que le ministère, au
contraire, il investit, actuellement, là. C'est ce qu'on entend, il y a beaucoup d'investissements
qui vont dans ce sens-là, ce qui est une bonne chose aussi, là. Nous, on
se base aussi sur des recherches qui ont été
faites sur cette question-là. Ce qu'on pense, par exemple, dans cette
question... Je vous donne un exemple,
il y a quelques grandes entreprises qui ont des cadres de référence à
l'intérieur ou des politiques internes
sur les sujets qui touchent la gestion de la diversité, contre la
discrimination, et autres, d'accord? Moi, je pense, comme... un bel exercice, ça peut être
d'encourager d'autres entreprises d'aller dans ce sens-là — ça peut être des PME, ça peut être un regroupement de PME — d'aller dans le sens de créer un cadre de
référence interne, évidemment, d'encourager les bonnes pratiques, d'encourager des formations, et ainsi de suite. Ça
peut être une bonne solution, étant donné qu'actuellement il y a une conjoncture favorable, tout le monde
veut employer des personnes aussi, puis on le dit, on le nomme. Ça peut
être une bonne conjoncture de dire : On
va vous encourager aussi à développer des cadres de référence à l'interne, peu
importe comment on va l'appeler, plan d'action, ça peut être une politique
interne, ou autre.
La Présidente
(Mme Chassé) : En 30 secondes.
M. Fontecilla : Les risques encourus par les personnes réfugiées,
à quoi faites-vous allusion dans votre recommandation,
la dernière?
M. El-Hage (Habib) : Bien, en fait, on fait allusion aux demandeurs
d'asile ou aux familles, par exemple
l'accès aux garderies, l'accès, par exemple, à des services d'aide en emploi. Je sais que ça se fait, mais c'est très... comment je vais dire, il faut investir, je pense, là-dedans afin de
favoriser cette accessibilité de façon optimale aux personnes demandeurs
d'asile. C'est dans ce sens-là.
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça conclut.
M. El-Hage
(Habib) : Il y a un accès, mais c'est contingenté, là, actuellement.
Il y a certains organismes communautaires qui donnent quand même accès, mais
c'est contingenté, il faut investir.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc. Merci. Nous en
sommes maintenant au troisième groupe formant l'opposition. Mme la
députée de Gaspé, la parole est à vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci. Bonjour. On met beaucoup l'emphase sur la
reconnaissance des compétences, puis c'est
un volet qui est difficile, c'est difficile de mettre le doigt sur qu'est-ce
qu'on doit faire, exactement. Mais vous avez mentionné des outils qui sont développés par des organismes
communautaires, formation de bilans de compétences et plan d'action personnalisé, qui pourraient servir
d'exemple pour un potentiel système qui serait mis en place par le
gouvernement. Est-ce que vous pouvez
développer davantage pour qu'on puisse peut-être, je ne sais pas, informer le
ministre de solutions envisageables?
Mme Schlobach
(Monica) : Oui. En fait,
nous, ce qu'on a voulu exprimer comme message quand on a parlé de la question
de la reconnaissance des compétences, c'est le fait que c'est quelque chose qui concerne plusieurs acteurs dans la société, et il y a
certains acteurs qui ont développé certaines expertises. Donc, on peut parler
des organismes communautaires
qui font leur propre travail de reconnaissance de compétences...
Mme Perry
Mélançon : Oui, c'est
plus... tu sais, concrètement, quand on parle de formation, de bilans de
compétences, en quoi ça consiste? Est-ce que vous savez... Est-ce que
vous pourriez le détailler, oui?
Mme Schlobach
(Monica) : C'est que, dans
les organismes, les conseillers en emploi, ils font un bilan de
compétences avec les personnes immigrantes
pour trouver quelles sont les compétences existantes, quelles sont les
compétences transférables, quelles
sont les compétences à acquérir, et ils font tout un bilan pour voir comment
acquérir les compétences manquantes pour les objectifs en emploi des personnes.
Mme Perry
Mélançon : Donc, on parle vraiment
des gens qui sont déjà ici, puis qui se cherchent encore un
emploi, là, et que c'est plus difficile pour...
Mme Schlobach (Monica) : Oui,
on parle des gens qui sont arrivés en tant que...
Mme Perry Mélançon : Qui sont déjà
arrivés.
Mme Schlobach
(Monica) : Oui. Mais ce que
je voulais juste exprimer, c'est que ça, c'est juste un petit exemple de
toutes les expertises qui ont été
développées par plusieurs acteurs. Donc, par exemple, les ordres professionnels, ils sont en train de mettre en place des systèmes
de reconnaissance de compétences. C'est des initiatives qui commencent et qui gagneraient à être partagées par les différents
types d'acteurs. Les employeurs aussi, ils ont beaucoup de difficultés, mais ils ont quand même
trouvé des moyens de reconnaître. Donc, nous, notre recommandation, c'est vraiment de faire dialoguer ces différents acteurs,
parce que peut-être que la reconnaissance d'un acteur va aider l'autre à faire
mieux son travail.
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion, il reste 30 secondes.
Mme Perry Mélançon : Moi, ça va.
Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Mme Schlobach, M. El-Hage, je vous remercie pour votre collaboration à la commission.
Je suspends momentanément les travaux pour
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 16)
(Reprise à 10 h 18)
La
Présidente (Mme Chassé) : Nous sommes de retour, et je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Vous avez
10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vous invite
à conclure. Et je vous invite à tout d'abord vous présenter. Bienvenue.
Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR)
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente, et ravi de vous revoir. Jean-Nicolas Beuze,
je suis le représentant du Haut-Commissariat
des Nations unies pour les réfugiés, le HCR, basé à Ottawa, et je suis ici avec
ma collègue...
Mme Paciullo
(Emmanuelle) : Emmanuelle Paciullo, je travaille donc avec
Jean-Nicolas Beuze. Bonjour, tout le monde.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : ...basée à
Montréal. Et très heureux de revoir M. le ministre et de faire la
connaissance de vous tous aujourd'hui sur un
sujet qui est particulièrement important pour mon organisation, donc, l'agence
des Nations unies mandatée pour
protéger, mais aussi trouver des solutions au problème des réfugiés. Je ne vais
pas vous rappeler... ou je vais vous
rappeler en quelques mots les chiffres : 26 millions de réfugiés à
travers le monde, plus de 85 % resteront toujours dans les pays du Sud, proche des zones de conflits
au Moyen-Orient, en Afrique tropicale subsaharienne, plus près de chez nous, du côté du Mexique, de l'Amérique centrale,
ou les Vénézuéliens qui quittent en grand nombre, 4 millions ont
quitté leur pays depuis 2015.
Je crois que
ce qui est important, c'est de reconnaître que les questions que vous vous
posez et que le gouvernement vous pose sont des questions tout à fait
légitimes. Il faut se poser la question de nos capacités d'accueil dans un pays
comme le Canada ou dans la province du Québec
en particulier, qu'est-ce qu'on peut faire pour recevoir des gens à
titre humanitaire.
Là
où j'espère qu'on va pouvoir apporter, ce matin, des clarifications pour votre
bon jugement, c'est d'éviter cette dichotomie
entre des bons arrivants qui seraient sélectionnés seulement sur des critères
économiques et des moins bons ou des mauvais arrivants qui seraient
déterminés sur des bases humanitaires, parce que cette dichotomie, elle
n'existe pas vraiment dans les faits, et je
vais baser ma présentation en grande partie sur le recensement de 2016, qui est
le dernier recensement qu'on a pour le pays, sur lequel on a des
informations très particulières sur comment les réfugiés, en fait, s'intègrent.
• (10 h 20) •
Mais, avant
de commencer, j'aimerais juste vous féliciter tous, et les Québécoises et les
Québécois, pour vos actes de générosité
répétés à travers les décennies. On
ne parle pas de quelque chose de nouveau, le Québec a démontré à maintes
reprises sa solidarité avec les plus démunis en acceptant des réfugiés en grand
nombre, en étant un leader, sur la scène internationale, de la réinstallation
des réfugiés.
Mais je dois
aussi vous féliciter et je viens... ça fait deux ans et demi que je suis au
Canada, donc j'ai une perspective globale
et j'espère pouvoir en discuter, je tiens à vous féliciter tous pour la manière
dont vous intégrez les nouveaux arrivants et en particulier les réfugiés, car je crois que vous êtes un modèle en
l'espèce. Et j'aimerais, à travers cette présentation, vous rassurer, tout le monde, qu'il n'y a pas de
crainte quant à la manière dont les gens sont intégrés ici, y compris les
réfugiés avec des vulnérabilités, car, à la
fin de la journée, ils deviennent des Québécoises et des Québécois à part
entière, paient des impôts, s'intègrent, participent à la vie active de
vos communautés.
Ces questions
sont donc légitimes, et j'ai eu l'occasion d'écouter les précédents débats
avec, en particulier, la Table de
concertation, qui a parlé dans les mêmes termes que moi-même, je vais parler
maintenant. Il faut rappeler qu'avec le MIDI, le ministère de l'Immigration, les associations, la société civile
fait un travail formidable, mais aussi tous les Québécoises et Québécois qui viennent de différents milieux montrent à
maintes reprises leur attachement à cette solidarité internationale avec
les plus démunis.
Quelques
points. Vous serez peut-être
surpris de savoir que, parmi les nouveaux arrivants, les réfugiés sont
ceux qui ont le plus haut taux de citoyenneté.
À 89 %, ils battent tous les
records. Pourquoi? Parce qu'ils se sentent bien ici, parce qu'ils ont envie de s'intégrer, parce que c'est
leur nouveau chez eux et qu'ils ont un intérêt à rester à long terme et à
s'investir. Vous ne serez pas surpris, par
contre, de savoir que deux sur trois achètent une maison et donc contribuent à
l'économie, contribuent à payer des impôts, à la bonne santé du secteur de la
construction au Québec.
Vous serez,
par contre, peut-être surpris de savoir que leurs enfants font les meilleurs
scores à l'école, en particulier au
niveau de l'université. Et ça, c'est intéressant parce que ça veut dire que,
vraiment, ces familles investissent. Et on sait, si vous parlez à des familles de réfugiés, tous les
enfants vous disent : Mes parents me tannaient, me tannaient pour que
je sois le meilleur à l'école ou la meilleure à l'école. Mais c'est important
parce que ça veut dire que c'est des gens qui vont pouvoir redonner à la province en étant particulièrement intéressés dans
les domaines scientifiques, culturels ou autres, créer des emplois. On sait que 14 % des réfugiés
créent un emploi pour eux-mêmes ou pour d'autres Québécoises et
Québécois, 14 %. C'est, de nouveau, le
plus haut taux de tous les nouveaux arrivants. On l'explique par différents
phénomènes, entre autres le fait que
ce sont des gens qui ont une très grande résilience, qui viennent avec un
parcours difficile de vie, qui ont envie
de s'en sortir et qui vont être très innovants sur la manière de rétablir leur
statut, leur niveau social qu'ils ont perdu en quittant leur pays, souvent à cause des guerres, à cause des
persécutions, parce que ce sont des minorités sexuelles, parce que c'est une minorité religieuse. Donc, on a des
chiffres qui nous montrent que cette dichotomie entre arrivants
économiques et arrivants humanitaires, dans les faits, ne fonctionne pas
entièrement.
Je voulais
aussi parler un peu du secteur privé. La rétention, d'abord, elle est au niveau
des régions. Les réfugiés sont ceux, parmi les nouveaux arrivants, qui
restent le plus longtemps dans les régions. Ils sont distribués au Québec dans 14 villes. Les autres nouveaux arrivants ont
tendance à se déplacer vers Montréal, voire même vers Toronto :
opportunités économiques, d'éducation, etc.
Pour les réfugiés, ce n'est pas le cas, ils restent dans les régions. Pourquoi?
Parce que, de nouveau, ils ont une
loyauté énorme vis-à-vis des communautés qui leur ont donné une première chance
de se réintégrer et de se
reconstruire. Et donc, quand on parle de la démographie et de ces régions qui
se dépeuplent, avec des cégeps qui ferment, avec des centres de santé qui doivent fermer, pour les Québécoises et
les Québécois, c'est intéressant de faire venir des réfugiés. C'est intéressant aussi de faire venir
des réfugiés parce que, contrairement aux autres nouveaux arrivants, ils
ont souvent deux ou trois enfants, alors que
les autres nouveaux arrivants sont souvent célibataires, un couple et peut-être
un enfant. Donc, pour un pays comme le Canada, comme toutes les sociétés
occidentales, qui est en train de vieillir, pour nous tous et nos retraites, c'est important d'avoir des gens qui, un
jour ou l'autre, vont pouvoir
contribuer en payant des taxes à nos pensions. C'est important aussi parce
que c'est eux parmi lesquels... qui ont le plus de prestataires pour les bénéficiaires, c'est eux qui s'occupent des personnes âgées, des enfants avec handicap dans les crèches. Souvent, ils se «démotent» en termes de leurs
qualifications, mais pour eux, ce n'est pas si important que ça, parce qu'ils veulent recommencer à zéro
et ils veulent donner une chance à leurs enfants. Donc, il faut y penser quand
on pense à tous nos parents. Ici dans cette salle, on a tous des parents qui sont âgés, on le sera un jour. On ne
retrouve pas beaucoup de réfugiés parmi ces gens de services
sociaux à la communauté.
Ce sont eux aussi qui, souvent, parlent déjà le
français. Il ne faut pas oublier que les réfugiés, une grande partie viennent d'Afrique tropicale, de la région des
Grands Lacs, des Burundais, des Congolais, malheureusement maintenant des Camerounais, des Maliens. Ce sont
des gens qui ont un avantage dès le départ, puisqu'ils parlent déjà français.
Je vais vous donner une statistique qui m'a complètement bluffé. Vous vous rappelez qu'en 2015‑2016 le Canada a
accepté à peu près 25 000 Syriens ici, un geste énorme de
solidarité. À l'époque, je travaillais au Liban, donc je sais ce que ça
signifiait non seulement pour les réfugiés,
mais aussi pour le peuple et le gouvernement libanais, cette solidarité
canadienne. À l'heure où l'on parle,
donc moins de quatre ans plus tard, 60 % d'entre eux parlent déjà
français. 60 %, en moins de quatre ans, se sentent à l'aise de parler français, 90 % se sentent
à la maison ici, au Québec, se sentent chez eux. Ce besoin d'appartenance,
c'est quelque chose de très, très important.
Juste pour finir sur
pourquoi le HCR est intéressé à garder des niveaux élevés et peut-être même
d'élever les niveaux de réfugiés... Je vous
ai donné tous les arguments économiques, sociaux et culturels, mais, pour nous,
c'est aussi important parce qu'on va faire la différence pour des
femmes, des enfants pour lesquels il n'y a pas de solution en Amérique centrale, en Afrique, au Moyen-Orient ou
en Asie. On parle de femmes violées qui ont besoin de se reconstruire et
pour lesquelles on n'a pas les moyens de le faire sur place. On parle de
minorités sexuelles LGBTQ qui risquent d'être persécutées
même dans les pays où elles ont trouvé asile. On parle de gens qui ont besoin
de services médicaux, mais de choses toutes simples : un appareil
auditif pour un enfant...
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : ...quelque
chose qui ne coûtera absolument rien à la communauté québécoise, mais
qui permettra une nouvelle chance à une
famille entière. Donc, pour toutes ces bonnes raisons, j'encourage vraiment les
élus ici à considérer augmenter les niveaux de réinstallation des réfugiés au
Québec. Merci bien.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je vous remercie. Merci pour votre exposé. Nous
allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la
parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Beuze,
Mme Paciullo, bonjour. Merci d'être présents à l'Assemblée
nationale pour présenter vos observations.
Écoutez,
d'entrée de jeu, j'aimerais savoir comment ça fonctionne à l'interne, chez
vous, comme représentants au Canada,
là, du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Comment est-ce
que les prises de position sont mises de
l'avant? Comment c'est véhiculé? Comment, à l'interne, ça fonctionne pour
arriver à des conclusions de faire la promotion comme ça et des prises
de position publiques de la part du Haut-Commissariat au Canada?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Donc,
je représente ici le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, M. Filippo Grandi, qui est nommé par
l'Assemblée générale, par, donc, les
193 pays membres de l'ONU. Et, à ce titre, je le représente dans toutes les fonctions, que ce soient communications
publiques ou l'appui technique à la commission sur le statut des réfugiés, par exemple. Et, dans le cadre de la réinstallation, c'est une des priorités de mon
organisation, de notre organisation de faire valoir
les raisons pour lesquelles on demande à des pays comme le Canada
ou la province de Québec à augmenter ces niveaux de réinstallation.
M. Jolin-Barrette : Et cette
discussion-là, là, publique, là, elle est validée avec le Haut-Commissaire?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Bien
sûr, je représente le Haut-Commissaire aujourd'hui même.
M. Jolin-Barrette : Non, non, mais il y a une différence, là. Je
sais que vous le représentez, mais ce que je veux dire... Les prises de position publiques que le
Haut-Commissaire prend au Canada, elles sont validées par le Haut-Commissaire
des Nations unies?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Entièrement,
entièrement.
M. Jolin-Barrette : Par sa
personne propre?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Par
sa personne propre.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc,
toutes les prises de position publiques que vous prenez publiquement ici, elles
sont validées?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Oui.
M. Jolin-Barrette : Puis de
quelle façon ça fonctionne?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : C'est-à-dire
que toutes les...
M. Jolin-Barrette : Vous êtes
en contact quotidiennement, hebdomadairement?
• (10 h 30) •
M. Beuze (Jean-Nicolas) :
Alors, toutes les semaines, il y a un rapport qui va au siège, qui est lu par
plein de personnes, y compris le Haut-Commissaire, et puis, pour toutes les
questions sensibles, j'ai une ligne directe avec le Haut-Commissaire.
M. Jolin-Barrette : O.K. Vous avez dit tout à l'heure : Il y a
des bons arrivants et des moins bons arrivants. Moi, je ne suis vraiment pas dans cette logique-là. Je suis dans la
logique de dire : Le Québec est une terre d'accueil et a toujours été une terre d'accueil. Le Québec,
dans sa planification pluriannuelle, il y a différentes catégories d'immigration. À l'Assemblée nationale, ce qu'on fait présentement, c'est
qu'on étudie notamment les seuils pour les prochaines années.
Et
je comprends ce que vous faites, vous êtes pour une organisation qui dit : Écoutez, les réfugiés, il faut s'assurer qu'on puisse les accompagner, qu'il puisse y avoir
des pays qui vont les accueillir par solidarité internationale, et, au
même titre que les organisations patronales
ou économiques qui sont venues nous voir, qui nous ont dit : Écoutez,
nous, on souhaite vraiment davantage avoir de travailleurs économiques, et c'est
légitime de part et d'autre, parce
que, comme on dit, ce n'est
pas le même «core business» de chacune des organisations.
Mais où je ne
vous suis pas, c'est au niveau de la perception. Nous, on n'est vraiment
pas dans des bons nouveaux arrivants
ou des mauvais. On considère que chaque personne qui vient au Québec
est capable d'enrichir la société
québécoise, de participer pleinement. Sur
les obligations humanitaires, le Québec fait sa part et a démontré au cours des
années... et on parle, supposons des
demandeurs d'asile, au-delà des réfugiés, demandeurs d'asile qui ne sont pas
encore des réfugiés, au cours des
dernières années, le Québec a dépensé des centaines de millions de dollars pour
accueillir des demandeurs d'asile de façon irrégulière.
Alors,
j'aimerais connaître votre opinion de l'effort qui est fait sur le plan
international de la part du Québec. Est-ce que vous considérez que le Québec joue sa part? Est-ce que vous
considérez que le Québec consacre des ressources importantes à l'accueil
des demandeurs d'asile, à l'accueil des réfugiés depuis des dizaines d'années?
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Alors,
j'espère, M. le ministre, que ma langue n'a pas fourché. J'essayais justement
de démontrer qu'il n'y a pas de dichotomie
entre des bons et des mauvais nouveaux arrivants et que, justement, on se
rejoint tout à fait. Je suis heureux
d'entendre, par votre voix, que vous reconnaissez que les réfugiés sont des gens
qui vont contribuer tout autant que
n'importe quels nouveaux arrivants au Québec, et je suis heureux d'entendre
cela de votre part, M. le ministre, parce
que je crois que ça permet maintenant de s'engager sur les niveaux qu'on peut
espérer voir élevés pour ces besoins humanitaires.
Le Québec
fait sa part, bien sûr, comme beaucoup d'autres pays, mais ça dépend avec qui
on compare. Si on compare par rapport
aux pays du Sud... Le Liban a reçu 1 million de réfugiés pour une
population de 4 millions, le Bangladesh a reçu 1 million de
réfugiés en six semaines, donc...
M. Jolin-Barrette : ...par contre, là, au Liban, les réfugiés qu'ils
reçoivent, là... c'est un pays limitrophe à des zones de conflit. Est-ce que — et selon votre expérience, et je sais que
vous avez été à l'international — selon vous, les pays limitrophes à
des zones de conflit reçoivent davantage de réfugiés en raison de la situation
géopolitique, historiquement, là?
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Oui, bien
sûr, à n'en pas douter. Ils n'ont pas choisi cette position géographique et
souvent n'ont pas choisi les éléments géopolitiques qui ont provoqué les
mouvements de réfugiés.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais
ce qui est important...
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Mais
permettez-moi juste de revenir sur les pays occidentaux.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais je vais vous laisser, je vais vous
laisser, mais ce qui est important aussi, c'est de comparer avec des
comparatifs.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Alors, exactement,
laissez-moi venir à ce niveau-là. Si on regarde sur la réinstallation, le Canada
est parmi les leaders, avec les États-Unis, avec l'Australie, un certain nombre de pays
européens tels que la France, l'Allemagne,
la Suède. Le Canada se situe dans le top cinq ou six de ces pays par rapport aux pays de l'OCDE, par
exemple, si vous voulez comparer.
En termes, par contre,
d'arrivées irrégulières, le Canada reçoit très,
très peu de gens. Le Canada a
reçu 20 000 personnes l'année passée — les chiffres sont un petit peu bas cette
année — de
manière irrégulière au chemin de Roxham. Chaque mois, aux États-Unis, c'est 100 000. Si vous regardez l'Allemagne,
c'est dans les centaines de milliers par année, 20 000 au Canada.
Donc, si on veut comparer le Canada en termes de...
M. Jolin-Barrette : Attention, non, mais soyons précis. 20 000
au Canada, mais combien au Québec? La majorité des migrants irréguliers
sont au Québec.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Une grande partie des 20 000 reste au Québec, une partie passe sur
l'Ontario et 30 000 autres sont dans le reste du pays.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais attention, sur les migrants
irréguliers, les sommes dépensées par le gouvernement du Québec durant
la situation temporaire sont énormes, énormes et...
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Mais non,
mais je suis très heureux de ces progrès. Vous le savez qu'à Montréal les...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
mais je veux qu'on soit conscients de tout ça, là, de l'effort humanitaire qui
est fait par le gouvernement du Québec, que les contribuables québécois font
aussi. Le Québec est généreux et il fait plus que sa part.
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Tout
à fait.
M. Jolin-Barrette : Et, à
l'intérieur du Canada, au niveau
de l'accueil des demandeurs d'asile, tout repose sur le gouvernement du Québec en
termes d'accueil, d'installation temporaire. Les dépenses qui sont assumées par
le gouvernement du Québec, ce sont
des dépenses extraordinaires. Et, vous savez, quand vous regardez la population
québécoise... Vous dites : Aux États-Unis, c'est 100 000 par
mois, c'est un État beaucoup plus populeux que le Québec aussi, alors il faut
faire attention aussi quand on compare ça.
Parce que les gestes de solidarité qui sont faits par les Québécois, ils ont
été démontrés au cours des années, notamment au niveau de l'accueil des
réfugiés syriens au cours des années.
Vous savez,
le Québec est accueillant, le Québec fait sa part. Alors, j'entends votre
discours, mais il faut toujours prendre
en considération la situation particulière du Québec, le fait aussi que la
société québécoise offre un panier de services aux demandeurs d'asile qui est fort important. Et le gouvernement
fédéral doit s'assurer de faire sa part par rapport aux migrants
irréguliers en accueil humanitaire. Ce n'est pas vrai que c'est uniquement au
gouvernement du Québec et aux contribuables québécois de faire leur part.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Comme vous
le savez — je sais
que vous me suivez attentivement — j'ai rappelé ces obligations aussi au gouvernement fédéral à
maintes reprises. J'ai aussi félicité à maintes reprises le MIDI, votre
ministère, mais aussi les associations, et
les Québécoises, et les Québécois pour l'effort qu'ils ont fait en recevant ces
20 000 personnes irrégulières par le chemin de Roxham en 2017,
20 000 de nouveau en 2018 — les chiffres sont un peu plus bas, cette année, jusqu'à maintenant — comme
pour montrer que c'est un geste de solidarité important et qu'on comprend qu'il y a un coût, un coût que, je crois, honore le Québec et les Québécois
de bien vouloir payer, quand on sait que, même si... Comparons aux États-Unis, le Canada est 10 fois moins populeux que les États-Unis,
donc, en deux mois, si on multiplie les chiffres, en deux mois, les États-Unis
reçoivent le nombre de personnes que le Canada reçoit en un an.
M. Jolin-Barrette : Et est-ce
que ça signifie que le Québec ne fait pas sa part?
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Non, pas du
tout. Comme je viens de le dire, j'ai félicité à maintes reprises le
travail, et je crois que ça vous honore, et
j'espère que, dans cette pièce... et tous les Québécois sont fiers de ce que
vous fait, mais...
M. Jolin-Barrette : Mais, quand vous dites : Les États-Unis,
eux, en accueillent plus, donc, de votre discours, ce que j'entends,
c'est de dire : Bien, écoutez, le Québec pourrait en faire plus, le Canada
pourrait en faire plus.
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Je
n'ai pas dit «en reçoit plus», M. le ministre, j'ai juste essayé de continuer
votre comparaison, puisque vous m'avez dit que les États-Unis étaient plus
populeux. Je vous ai juste rappelé que, si on multiplie
par 100, 20 000, ça fait
200 000, c'est l'équivalent de deux mois aux États-Unis. C'était juste
pour continuer votre comparaison, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : O.K. Vous avez dit : Écoutez, les réfugiés
sont les meilleurs à l'école, tout à l'heure. Donc, je comprends que ce que vous nous dites, vous
dites : Écoutez, les gens persévèrent à l'école, demeurent dans les
régions. Là, il y a un petit bémol à
apporter aussi. Vous dites : Comparativement aux autres immigrants, les
réfugiés demeurent en région. Il faut
dire aussi que, lorsqu'on accueille des réfugiés, ils sont directement envoyés
dans les 14 régions de destination, chose qui n'est pas faite avec le regroupement familial ou les travailleurs
qualifiés. Avec les travailleurs qualifiés, ce qu'on souhaite faire, c'est donner priorité aux travailleurs
qualifiés qui auront une offre d'emploi validée en région puis, justement,
pour les inciter à demeurer en région. On
parle des travailleurs temporaires aussi, avec des contrats de travail liés en
région. Mais c'est encore important
de faire la nuance et d'expliquer pourquoi est-ce qu'ils demeurent davantage en
région, parce qu'à la base la ville d'accueil, elle était en région.
Alors, lorsque...
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : ...rappeler
dans les 14 villes et qu'ils ont un réseautage très important de soutien,
en particulier à travers les services
offerts par la province, mais aussi par la population, c'est ce qui leur donne
ce sens de loyauté qui font qu'ils vont rester et rester des membres
actifs de ces régions qui se dépeuplent, malheureusement.
• (10 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Mais à la base, à la base, lorsqu'ils arrivent au
Québec, ils sont amenés directement dans les différentes régions, d'où la
nuance avec, supposons, le taux de présence en région. Parce que c'est sûr que,
si dès le départ... ou lorsque vous
arrivez dans un nouvel État, puis vous vous installez directement en région, puis que vous vous faites des amis, que votre réseau
est là, bien, vous allez avoir un taux de présence plus élevé. Alors, c'est important
de dire ces nuances-là aussi.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Le recensement de 2016 apporte une nuance, M.
le ministre, si je peux me
permettre. Les gens qui sont arrivés au Canada,
et au Québec en particulier, dans les régions en particulier,
quittent en général entre un et cinq
ans plus tard, les réfugiés restent. Donc, même quand un nouvel arrivant a
trouvé un travail à... nommez n'importe laquelle des villes que vous représentez, le nouvel arrivant économique aura une tendance à se rendre sur Montréal plus rapidement, beaucoup plus rapidement
qu'une famille de réfugiés. Ce sont les statistiques du recensement.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais vous faites beaucoup
de raccourcis, parce qu'il y a plusieurs raisons qui expliquent cela, plusieurs raisons. Quand vous regardez en général aussi les
taux de surqualification auparavant, les taux de chômage également,
le fait que le Québec sélectionnait des immigrants en matière économique
qui ne répondaient pas nécessairement aux besoins du marché du travail,
donc nécessairement ça amène une attractivité vers Montréal, où il pouvait y
avoir davantage d'emplois aussi. Ça aussi, il faut dire ça dans
le cadre de votre discours aussi. Alors, je comprends que, comme je le disais tantôt, vous mettez beaucoup
l'accent sur les réfugiés parce que votre organisation fait principalement... s'occupe des réfugiés,
mais, dans le discours public que vous tenez, il faut faire attention à
l'ensemble de ces nuances-là, et je pense que c'est extrêmement
pertinent aussi.
En
ce qui concerne les seuils, vous nous dites : Il faudrait élever les
seuils en termes de nombre de réfugiés que l'on accueille. À combien
vous le chiffreriez?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Ça, on vous en laisse libre choix, c'est à vous
de savoir quels sont les moyens que vous voulez mettre à disposition. Mon point était de dire que, quand vous allez
visiter, peut-être ce week-end, vos personnes
âgées, vous allez vous rendre compte, si
vous demandez à travers les préposés
aux bénéficiaires, que bon nombre
d'entre eux sont des réfugiés, parce que ce sont des travaux qui ne sont
pas forcément si attractifs pour d'autres catégories de nouveaux arrivants ou
pour des Québécois pure laine.
Donc,
le point n'est pas de vous dire un nombre, mais de vous dire : Il faut
faire attention que cette dichotomie qui tend à dire que les réfugiés sont un poids, comme vous essayez de le
souligner en ce moment, ce n'est pas forcément la réalité que
l'on voit quand on regarde les bénéfices économiques, sociaux et culturels de
recevoir des réfugiés.
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Oui?
M. Jolin-Barrette :
Je n'ai jamais dit que les réfugiés étaient un poids. Je n'ai jamais dit, de
mon propos, cela. Les propos que vous me prêtez ne sont pas acceptables.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Désolé.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste une minute au bloc d'échange, M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette :
Vous savez, moi, comme député, je vais dans mon comté, puis effectivement je
visite les personnes âgées, qui ont
contribué à l'édification de la société
québécoise, qui ont contribué à bâtir
la société québécoise telle qu'on la connaît, une société québécoise qui est solidaire, qui a fait sa part au cours de l'histoire relativement à l'accueil, notamment, de différents réfugiés. Et, en ce qui concerne les préposés aux bénéficiaires, vous savez, cet emploi-là, c'est
un emploi extrêmement important, un
emploi qui doit être valorisé. Alors, lorsqu'on dit que c'est un emploi moins intéressant,
je ne suis pas d'accord avec vous, parce que
c'est extrêmement important de s'assurer qu'on s'occupe de tout le monde
au Québec. Et de dire que le travail qu'ils
font... Le travail qu'ils font, c'est un travail exceptionnel. Et de dire que
ce seront les réfugiés qui s'en occuperont, je ne suis pas d'accord. Ça
appartient à l'ensemble de la collectivité québécoise.
Et
les réfugiés ne sont pas un fardeau pour le Québec, et c'est pour ça que le
Québec va toujours faire en sorte de bien accueillir les gens, notamment
les migrants. Alors, vous comprendrez que je ne peux être en accord avec le
discours que vous tenez.
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça conclut le bloc d'échange avec le parti formant
le gouvernement. Merci.
Nous
passons maintenant au parti formant l'opposition officielle. Je comprends que
le député de Nelligan désire prendre la parole.
M. Derraji :
Par la suite, ça va être ma collègue de Bourassa-Sauvé.
La Présidente
(Mme Chassé) : De Bourassa-Sauvé, très bien, c'est noté. Allez-y.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Monsieur, madame, bienvenue. Merci pour votre
présence.
Écoutez,
nous avons entendu plusieurs groupes tout au long de cette semaine. Les
associations patronales sont venues nous
dire qu'il faut augmenter les seuils parce qu'il y a une pénurie de
main-d'oeuvre. Les organismes communautaires, ils avaient sur la table la question d'accompagnement.
Pourquoi vous avez senti le besoin et l'urgence de venir d'Ottawa parler
au nom du haut-commissariat aux réfugiés
aujourd'hui, pour la première fois, à une commission parlementaire pour
la planification de l'immigration?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : C'est une question importante. Nous avons cet engagement
auprès du gouvernement fédéral et auprès du Parlement fédéral de manière tout à fait continue. Pour la première fois, il y a des soucis, des
craintes, des préoccupations quant au niveau
d'immigration à titre humanitaire que la province de Québec pourrait
décider, qui pourrait avoir une influence sur les niveaux globaux pour
le Canada. Donc, c'était important pour nous de venir ici pour essayer d'apporter d'autres éléments au dossier de manière
à ce que vous puissiez aussi prendre en considération que les réfugiés peuvent remplir les besoins qui ont été exprimés
par différents acteurs, mais aussi pour rappeler que le travail du MIDI,
le travail des associations, le travail de
la société québécoise a été formidable dans l'intégration de ces
réfugiés qui ont, comme M. le ministre l'a rappelé, contribué à
l'édification de cette province.
M. Derraji :
Merci pour cette clarification. Et je tiens juste à vous le dire, et vous
l'avez très bien dit dans votre exposé, qu'aujourd'hui, là, ce qu'il faut retenir en tant que Québécois et en tant que
contribuables québécois : La société d'accueil a fait beaucoup.
Et je partage le point de vue du ministre, on a été très accueillants, le Québec a
fait sa part. Et, du moment que vous
êtes venu nous partager cette préoccupation, j'ai une demande à vous
formuler : Quand vous allez retourner
à Ottawa, il faut leur dire que la responsabilité, elle est partagée et que le fédéral,
dans sa relation avec le Québec, doit
prendre aussi en considération sa part de responsabilité. Parce que les
Québécois attendent déjà un retour de la part du fédéral depuis plusieurs mois et années, ce que le Québec a payé pour
l'accueil d'une manière très généreuse dans l'ensemble des régions.
Donc, en fait, c'est une responsabilité partagée qu'il faut prendre en
considération.
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Tout à fait d'accord, c'est pourquoi je serais
heureux de continuer à faire la navette entre ici et Ottawa. Mais laissez-moi juste vous rappeler un point très
important : après 15 ans d'être arrivés, 15 ans au Québec, les
réfugiés paient plus de taxes que ce que ça
a coûté à la province de les intégrer, tous les bénéfices sociaux
confondus : aide au logement,
aide à la francisation, aide pour les enfants. Après 15 ans, c'est tout
bénéfice pour la province parce que cette famille aura payé plus d'impôt, plus de taxes que ce que
vous avez investi en tant que contribuables à l'heure actuelle. 15 ans,
ce n'est absolument rien.
M. Derraji :
Je ne dis pas le contraire, non, non, je ne dis pas le contraire. C'est juste...
ce qu'on dit, c'est que la part des
responsabilités, elle est aussi partagée avec le fédéral, et aidez-nous aussi à
faire un pas et avancer avec le fédéral par rapport à ce que le Québec a
déjà fait, c'est juste ça.
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Mais, monsieur, je vous rappelle juste que les
réfugiés contribuent aussi, ce n'est pas seulement le fédéral. Les réfugiés, après 15 ans, auront payé plus que
ce que ça vous a coûté à vous tous et à tous vos électeurs de les faire arriver ici, les franciser, leur
trouver un emploi, leur trouver un logement, 15 ans. En 15 ans, c'est tout
bénéfice. Qui n'aimerait pas investir dans
des actions en bourse qui, après 15 ans, vous rapportent plus que ce que ça
vous a coûté?
La Présidente
(Mme Chassé) : Je comprends que la députée de Bourassa-Sauvé
désire prendre la parole.
Mme Robitaille :
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : 6 min 40 s.
• (10 h 50) •
Mme Robitaille :
6 min 40 s, O.K. Bien, merci beaucoup, M. Beuze. Merci
beaucoup, madame. C'est important de vous avoir ici aujourd'hui, d'avoir
votre point de vue.
Vous savez, depuis le début des consultations, on
a entendu plusieurs groupes, des gens d'affaires, des gens d'organismes communautaires, qui nous ont tous dit... qui nous
ont tous parlé de cette urgence, de ce problème de pénurie de main-d'oeuvre.
C'est une situation criante. Et on nous a
dit : On est à l'aube d'une croissance économique historique, le problème
est... On a, entre autres, la Chambre de
commerce de Montréal et la Fédération des chambres de commerce du Québec qui
nous ont dit : On est à l'aube
d'une croissance économique historique, le seul ingrédient qu'il manque, c'est
les bras, il manque de bras. Et une
façon de régler le problème, c'est l'immigration, et il ne faut pas baisser les
seuils d'immigration au Québec, et ils l'ont dit clairement, ils l'ont
répété. On a même des gens, hier, qui nous ont dit qu'il faudrait même en
accueillir plus que 52 000 et qu'on a
la capacité au Québec pour accueillir des immigrants, toutes catégories
confondues, et on l'a entendu souvent durant les derniers jours cette
semaine.
Alors,
vous, si je comprends bien, vous nous dites : On va arrêter cette
dichotomie-là entre réfugiés et immigrants, parce que ces réfugiés-là, ce sont des immigrants, et il faut s'en
souvenir. Ce sont des immigrants, et on devrait les considérer comme une solution à la pénurie de main-d'oeuvre
qui sévit au Québec, donc aussi comme une solution à cette pénurie de main-d'oeuvre là. Et il ne faut pas propager cette
idée fausse qu'ils sont un fardeau
pour la société. Et c'est vrai que moi aussi, je me pose la question s'ils ne sont pas...
Et le ministre nous dit : Je n'ai jamais
dit que c'était un fardeau pour la société, au contraire. Donc, si ce n'est pas un fardeau et si on ne les considère
pas comme ça, pourquoi on baisse? Et pourquoi on baisse le seuil au détriment de ces réfugiés-là qui, vous
nous dites, rapportent, paient, font leur part et contribuent à part
entière à... contribuent à la société québécoise d'une façon évidente? Est-ce
que vous pourriez, encore une fois, élaborer là-dessus?
Moi,
mon comté, c'est Bourassa-Sauvé. Il y a beaucoup de réfugiés là-bas, il y a beaucoup
d'enfants de réfugiés, et c'est
magnifique de voir... et, quand on pose la question aux enfants, ils sont tous
à l'école, des jeunes adultes, ils sont souvent à l'école, ils
travaillent, ils contribuent, et il y a, comme vous dites, beaucoup de préposés
aux bénéficiaires qui habitent Bourassa-Sauvé. Alors, j'aimerais que vous
élaboriez, justement, sur cet apport des réfugiés à la société québécoise.
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Alors, vous l'avez fait en des termes très
éloquents, mais laissez-moi juste vous rappeler deux ou trois points. Effectivement, les réfugiés s'intègrent de manière formidable, avec tout l'appui des
services sociaux, des services du
ministère, des services de la société civile. On sait qu'ils ont un désir
d'appartenir à la communauté québécoise qui est certainement très important, parce qu'ils n'ont pas le luxe de
retourner chez eux quand leur pays a été détruit, ou quand ils ont été persécutés à cause de leur religion,
ou qu'ils ont été persécutés à cause de leur orientation sexuelle. Donc,
ils ont une volonté de s'intégrer qui est
énorme. Ils sont passés par des moments très difficiles dans leur vie, ce qui
fait qu'ils ont aussi une résilience
et un attachement, des valeurs qui sont très importantes. Quand on interroge
les gens qui engagent, par exemple, les
préposés aux bénéficiaires, ils trouvent que les réfugiés sont souvent
surqualifiés, mais prêts à prendre ce travail et à le faire dans des conditions absolument admirables,
comme on l'a tous rappelé ici. On sait que leurs enfants travaillent
très fort à l'école pour réussir. Et ce
qu'il faut rappeler pour la province de Québec qui est très important, c'est
que 89 % — c'est
le plus haut taux de tous les nouveaux
arrivants — vont
devenir des Canadiens, des Québécoises et des Québécois et vont rester, y
compris dans ces 14 régions où ils ont été déployés et dans votre
circonscription, le cas échéant.
Mme Robitaille :
Il y a un élément important que vous avez amené, et vous en avez parlé au Devoir
aussi dans l'article que j'ai lu ce matin, il
y a deux catégories de réfugiés, si on peut dire : il y a les demandeurs
d'asile, sur lesquels on n'a pas de
prise, mais il y a ces réfugiés-là qui sont de la réinstallation au Québec, et
ceux-là, on a une certaine prise, et ceux-là,
on peut avoir un certain choix, c'est ce que vous dites. Et vous parlez que,
bien, justement, les Américains le font beaucoup d'aller choisir
certains réfugiés dans des camps de réfugiés pour répondre, entre autres,
parfois à des besoins économiques, vous
dites qu'en Ontario on le fait. Donc, les réfugiés aussi, on pourrait aller
choisir certains d'entre eux pour qu'ils répondent aux besoins
économiques. Pourriez-vous élaborer un peu là-dessus?
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Tout à fait, tout à fait. C'est un nouveau programme
qu'on a mis en place avec le gouvernement
fédéral qui a attiré beaucoup d'attention de la part de l'Ontario, des
Provinces maritimes, qui ont ce problème démographique criant, mais aussi dans les provinces des Prairies :
donner un avantage comparatif aux réfugiés pour qu'ils puissent entrer en compétition avec d'autres
nouveaux arrivants sur le terme économique. Vous savez que pour arriver
ici, avoir les points nécessaires pour
arriver en tant que nouvel arrivant économique, il faut avoir une expérience
dans le domaine qui date de moins de
six mois ou moins d'un an, ça dépend des programmes. Pour un réfugié, ce n'est
pas forcément possible parce que la
personne a pu être déplacée pendant deux ans, mais ça ne veut pas dire que
toute son expérience professionnelle a
été oubliée pendant l'exil. Une bonne infirmière ou un bon charcutier, même
s'il est déplacé pendant deux ans, il ne va pas perdre son habileté professionnelle. Donc, c'est de donner cet
avantage aux réfugiés pour qu'ils puissent venir en tant que nouveaux arrivants économiques, comme immigrants
économiques, mais avec, à un moment donné, le label de réfugiés sur leur
dos. Et ça démontre le fait de ce qu'on est tous en train de dire...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Beuze (Jean-Nicolas) : ...que les réfugiés sont des gens comme tous
autres nouveaux arrivants qui vont contribuer à l'économie et à la
culture québécoises.
Mme Robitaille :
Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Très bien, je vous remercie. Nous passons
maintenant au groupe formant la deuxième opposition. M. le député de
Laurier-Dorion, la parole est à vous.
M. Fontecilla :
Monsieur et madame, je vous remercie pour avoir pris la peine de vous déplacer
ici. Écoutez, est-ce qu'on peut
comprendre de votre propos que le document de consultation, les politiques qui
sont proposées par le ministère de l'Immigration
du Québec, là, concernant les réfugiés démontrent, comment dire, une mauvaise
compréhension de l'apport économique
des réfugiés, tenant compte que l'objectif principal de cette politique-là,
c'est la question économique, c'est régler une pénurie de main-d'oeuvre, arrimer les besoins de main-d'oeuvre avec
les profils de l'immigration, et donc, le document, il y a une certaine
méconnaissance de l'apport des réfugiés à l'économie du Québec?
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Tout à fait, et elle n'est pas particulière à cette
province, gouvernement, elle est généralisée
dans tout le monde occidental, où on a tendance à ostraciser, marginaliser les
réfugiés en pensant que ce sont simplement
des gens qui cherchent à... qui fuient leur pays, qui n'ont pas le choix, qui
fuient leur pays, mais qui sont un fardeau pour les économies qui les reçoivent. Donc, la méconnaissance, comme
vous le mentionnez, elle est partagée, malheureusement, dans beaucoup de
pays européens... occidentaux.
J'aimerais
aussi rajouter juste une chose, c'est qu'on parle beaucoup de l'apport
économique, et c'est important parce qu'il
faut changer le narratif sur les réfugiés, mais je crois que c'est aussi
important de rappeler notre devoir de solidarité. Les Québécoises, les Québécois, il l'a été rappelé
auparavant, ont, depuis des décennies, montré que le Québec était une
terre d'accueil. Tous autour de cette table
ont été accueillis par les Premières Nations. Tout le monde a un parcours, de
deux, trois, quatre générations antérieures, de bouger d'un endroit à un autre,
de s'intégrer, de devenir un membre à part entière
de la société québécoise. Je crois que les Québécoises et les Québécois que je
rencontre, que nous rencontrons très régulièrement sont attachés à ces
valeurs de démontrer que c'est une terre d'accueil, de solidarité pour des gens
qui n'ont pas eu la chance d'être nés dans un si beau pays que le Canada.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes.
M. Fontecilla :
Dites-moi, la situation actuelle, c'est qu'il y a une grande... il y a une
proportion de réfugiés qui sont parrainés
par des groupes de la société civile et une proportion parrainés par l'État. La
politique propose d'inverser cette proportion-là. Qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Beuze (Jean-Nicolas) : Il faut garder les deux. C'est important que les
Québécois puissent parrainer des réfugiés si... c'est souvent des
membres de leur famille qui ne pourraient pas...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : ...mais c'est important de garder le programme à
travers le gouvernement.
La Présidente
(Mme Chassé) : C'est très bien. Ça conclut le bloc d'échange avec
le deuxième groupe formant l'opposition. Nous passons maintenant au troisième
groupe formant l'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous.
Mme Perry Mélançon : Merci, Mme
la Présidente. Bonjour. Vous avez dressé un portrait assez positif de la rétention, par exemple, dans les régions,
l'innovation des réfugiés, bien, qui sont... ils ont un côté très innovant, la
création d'emplois et tout, mais je trouve
qu'il y a quand même une forme de tristesse dans cette espèce de résilience là
des réfugiés, quand on dit qu'avec la
reconnaissance qu'ils ont d'être là ils sont prêts à accepter, bon, des milieux
de vie, des milieux de travail un peu
comme on le veut, là. Donc, je ne veux pas parler en termes de nombre, mais je
voudrais plus savoir qu'est-ce qu'on
peut faire quand même de mieux. Vous avez parlé d'une bonne intégration, mais
il y a certainement, quand même, des enjeux
encore reliés à leur intégration dans nos milieux. Alors, est-ce que vous avez
des recommandations à ce niveau-là?
• (11 heures) •
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : Si, tout à
fait, et je comprends la tristesse que vous mentionnez. Néanmoins, pour
avoir... Comme M. le ministre l'a rappelé,
j'ai passé les 20 dernières années de ma vie à l'international, de
l'Afghanistan au Congo, et je peux
vous dire que, pour les réfugiés, se retrouver au Québec est une chance
absolument unique et incroyable. Et cette tristesse que nous, on peut
avoir, ils ne l'ont pas parce qu'ils sont simplement remplis de joie de pouvoir
recommencer, reconstruire leur vie et d'être si bien accueillis.
Alors, ce qui
peut être fait... et déjà, beaucoup est en place ici. Comme je l'ai dit dans
mon introduction, le modèle d'intégration
canadien et québécois est exemplaire. On voit que les résultats, en termes de
francisation, sont excellents. On a beaucoup
de réfugiés qui arrivent déjà avec une connaissance du français, que ce soient
les Centrafricains, les Maliens, les Camerounais,
les Burundais ou les Congolais, que j'ai mentionnés auparavant. On sait que ce
qui est important, c'est d'avoir un
réseautage. Pour trouver un travail, pour trouver une maison, comme dans toute
société, c'est le bouche-à-oreille qui marche
le plus souvent. On n'a pas toujours les diplômes, on ne sait pas toujours
comment la culture fonctionne pour se présenter
à une interview. Donc, ce que je crois qui est important, c'est de continuer à
soutenir financièrement et politiquement les associations de la société civile, les ONG qui s'occupent de l'intégration des réfugiés, de leur donner
les moyens de faire ce travail dans les meilleures conditions. J'étais, il
y a quelques mois...
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Beuze
(Jean-Nicolas) : ...au
centre multiculturel ici, de Québec, qui fait un travail absolument admirable. Vous avez entendu, il y a quelques
jours, sa directrice.
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Ça termine le bloc
d'échange et ça conclut la période d'échange avec tous les partis ici qui sont membres de la
commission. M. Beuze, Mme Paciullo, je vous remercie pour votre
contribution à la commission.
Je vais suspendre momentanément les travaux pour
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 1)
(Reprise à 11 h 3)
La Présidente (Mme Chassé) : Je
vous invite à prendre place. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de Montréal International. Vous avez 10 minutes pour votre
exposé. À une minute de la fin, je vais vous inviter à conclure par un signe de la main ou vocalement.
Et je vous invite à tout d'abord débuter en vous présentant. Bienvenue.
Montréal International (MI)
M. Bolduc
(Hubert) : Merci, Mme la Présidente. Donc, Hubert Bolduc, président-directeur général de Montréal International, et je suis accompagné de ma collègue Caroline Boucher,
qui est une experte en immigration, et — ça
adonne comme ça — M. Bouchard,
Francis, qui, lui, a travaillé sur la préparation de ce mémoire, notamment.
Donc, essentiellement, Montréal International
est une organisation public-privé qui existe depuis plus de 22 ans et qui est financée à la fois par le secteur privé et
par les différents paliers de gouvernement, la CMM, le fédéral et la
ville de Montréal de même que le
gouvernement du Québec. Nous avons plus de 200 ou tout près de 200 partenaires
du secteur privé qui financent nos
activités à hauteur de tout près de 3,5 millions de dollars par année et
nous représentons la CMM pour trois
mandats : d'abord, attirer et retenir des investissements étrangers — je suis à la planche n° 5 — donc, oui, faire venir les entreprises de l'international, mais aussi
s'occuper des ces filiales de sociétés étrangères qui sont présentes sur le
territoire; attirer et retenir des
organisations internationales — je passerai vite là-dessus parce que ce
n'est pas le sujet de ce matin; et finalement
attirer et retenir du talent — donc à la fois de l'attraction, de l'accueil
et de travailleurs temporaires qualifiés et d'étudiants en provenance de
l'international.
À la planche n° 6, vous voyez nos résultats depuis notre fondation, mais j'aimerais
attirer votre attention sur le fait que,
depuis trois ans, Montréal International est passée d'une organisation qui
attirait 1 milliard d'investissements directs étrangers à tout près de 2,5 milliards
d'investissements directs étrangers. Nous avons accompagné 150 travailleurs
temporaires qualifiés en 2015, nous avons
fait 650 en 2018. Nous étions une cinquantaine d'employés, nous sommes rendus
presque 100. Et enfin
le secteur privé nous finançait à hauteur de 1,7 million il y a trois ans,
et nous sommes aujourd'hui à tout près de 3,5 millions, ce qui m'amène à vous dire que nous sommes une
organisation performante et qui est appréciée à la fois des gouvernements
et du secteur privé pour le travail que nous faisons.
À la planche n° 7,
vous voyez spécifiquement ce que nous faisons en matière de talents, donc, oui,
attirer des travailleurs temporaires qualifiés, mais aussi les aider dans l'obtention
de leur permis de travail, leur fournir une formation en matière de processus d'immigration — c'est ce que ma collègue, notamment,
Mme Boucher fait — et enfin un travail qui a été de beaucoup augmenté au cours
des dernières années, celui de l'attraction et de la rétention d'étudiants internationaux. J'aurai l'occasion d'y revenir
dans mes réponses, mais il y a là un bassin de talents excessivement
pertinent pour le Grand Montréal.
Quand on fait
une plongée sur l'attraction de talents, bien, vous voyez, c'est tout près de
640 en 2018 que nous avons accompagnés,
ou embauchés, ou aidé des entreprises à embaucher, pour une augmentation de
350 % depuis 2015. Le salaire moyen — c'est, je pense, l'élément le plus important
de cette planche — il est
de 75 000 $. Donc, quand on veut augmenter la richesse des Québécois ou la richesse du
Québec, bien, évidemment, ça passe par du travailleur temporaire qualifié,
parce que ces gens-là gagnent un salaire tout près de deux fois supérieur au
salaire moyen québécois, si je ne m'abuse, bon.
Et donc pour
ce faire, nous conduisons, avec Québec International et Drummondville, des
missions d'attraction de talents qui
connaissent un succès phénoménal. Je vais vous donner l'exemple de Paris, au
mois de décembre l'année passée : nous
sommes partis avec une centaine d'entreprises québécoises, nous avons reçu
25 000 C.V. et nous avons conduit, pour le compte des entreprises et avec elles, tout près de 2 500 entrevues
d'embauche, ce qui a mené, dans notre cas, pour Montréal, à des
embauches concrètes de travailleurs qualifiés. Et ces missions, nous en avons
fait, donc, 14 l'année dernière, nous en faisions deux il y a trois ans, et ça,
c'est une réponse directe aux besoins des entreprises, qui nous demandent d'en
faire davantage.
Quand on
passe à la planche n° 14, eh bien, vous voyez que c'est à Montréal — dans le Grand Montréal, devrais-je dire — que le bassin de travailleurs temporaires ou
d'immigrants temporaires stratégiques est le plus important. Donc, dans l'histogramme de gauche, vous voyez les
travailleurs étrangers temporaires qualifiés, les TETQ, donc tout près
de 80 % de ces travailleurs sont dans
la grande région de Montréal, et dans l'histogramme de droite, bien, vous voyez
que c'est à peu près le même chiffre ou presque, 79 % en 2018, le
nombre d'étudiants internationaux.
Il y a dans
ces personnes des gens qui sont : a, sur le territoire; deux, qui parlent
la langue; trois, qui ont un diplôme reconnu,
un emploi, pour la plupart des gens, et évidemment un réseau de contacts. Comme
je dis à la blague, ils ont connu leurs
hivers, ils ont un copain, une copine, ils savent c'est quoi, la sloche, et
donc ce sont des gens qui, naturellement, sont excessivement bien intégrés. Ils constituent un bassin privilégié que
l'on ne peut pas... on ne peut pas perdre l'opportunité d'intégrer ce
bassin de talents à fort potentiel dans la société québécoise.
Quand on
passe à la planche 16... parce qu'il faut se poser la question : Est-ce
que ces gens-là répondent, oui ou non, adéquatement
aux besoins du marché du travail, hein, cette fameuse adéquation? Bien, à la
planche n° 16, bien, vous voyez que, quand on regarde les étudiants
internationaux, qui, je vous le rappelle encore, dans 80 % des cas, se
retrouvent dans le Grand Montréal, eh
bien, 72 % sont dans des STEM, donc sciences, technologies — malheureusement, c'est en
anglais — ingénierie,
«engineering», et mathématiques. Et donc ce sont des gens qui, dans le cas des
besoins du Grand Montréal, sont
excessivement recherchés, et donc les entreprises sont très contentes que nous
travaillions à attirer des étudiants internationaux et à les retenir à
l'issue de leur diplôme pour les raisons que je vous ai mentionnées
précédemment : bonne intégration, connaissance de la langue, connaissance
d'un réseau de contacts.
À la planche n° 17 — et ce
sera ma dernière planche, ensuite je vous amènerai sur des
recommandations — pourquoi
c'est important? Bien, vous voyez qu'il y a
une forte corrélation entre la richesse d'une métropole et le niveau de
scolarité de sa population. Et ce graphique
me désespère, mais il a l'avantage de dire la vérité franchement :
Montréal est en queue de peloton dans
des villes similaires, qu'elles soient canadiennes ou américaines. Et donc nous
nous devons de continuer nos efforts d'attraction d'étudiants
internationaux et de rétention de ces étudiants-là. Et je pense que, là encore,
il y a une opportunité pour laquelle nous ne pouvons passer à côté.
Vous avez vu
que nous avons inscrit plusieurs
recommandations. Je sais que vous aurez plusieurs questions,
mais je vais quand même mettre l'emphase
sur trois... Il me reste deux minutes, Mme
la Présidente? D'abord,
le PEQ-Étudiant, je pense que la démonstration a été faite qu'il y a
une valeur là. Il faut continuer et il faut rapidement
le remettre en fonction, et je crois comprendre que ce sont les intentions du gouvernement, alors, que le
PEQ-Étudiant soit reconduit au mois de novembre.
Nous faisons
des missions d'attraction de talents avec un fort succès, avec Québec, avec Montréal.
Cette année, nous sommes déjà en
avance sur les résultats de l'année dernière. Nous allons probablement franchir le cap des 1 000 emplois embauchés et arrivés en sol québécois. Je
crois que nous devons poursuivre ces efforts, nous devons en faire plus. Il y
a des territoires que nous ne couvrons pas.
Oui, évidemment, Paris est une cible facile, la Belgique aussi, la Suisse
aussi, mais il y a d'autres bassins
de talents que l'on se doit d'aller chercher pour combler les besoins des
entreprises. Et, encore une fois, ce sont les entreprises qui font les
embauches, nous ne faisons que faciliter leur travail.
Et enfin,
tout à l'heure, quelqu'un disait... je pense que c'est vous, M. le député, qui
parlait que c'est une responsabilité partagée
avec le gouvernement fédéral, l'immigration. Quand je suis arrivé en poste chez
Montréal International, le délai pour les
permis de travail était de huit semaines. Il est aujourd'hui de
16 semaines, c'est trop long. Et donc il faut qu'à la fois au Québec et à Ottawa on prenne conscience de
l'importance de la rapidité de faire venir ces gens sur le territoire
québécois. Cela termine, Mme la Présidente, avec 13 secondes d'avance, mes
propos.
• (11 h 10) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Quelle discipline, c'est fantastique!
On va vous mettre en mode coaching de tous les groupes qui passent ici. Alors, je vous remercie pour votre exposé,
et nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre,
la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. M. Bolduc, Mme Boucher, M. Bouchard,
merci d'être présents à l'Assemblée nationale pour nous présenter votre
mémoire.
Hier, on a eu la visite de Québec International
et puis ils proposaient... Parce que, dans le fond, vous et Québec International, vous faites, entre autres, des
mandats qui se ressemblent sur certains aspects au niveau du recrutement;
vous, davantage pour la région
métropolitaine de Montréal, Québec, davantage pour la région de Québec—Chaudière-Appalaches. Ils proposaient un calendrier de planification des
missions de façon à ce que le Québec soit coordonné à l'étranger. Qu'est-ce
que vous pensez de cette proposition-là qu'il y ait une coordination au niveau
des missions de recrutement à l'étranger?
M. Bolduc (Hubert) :
Je suis tout à fait d'accord puis, si je peux aider, je vais aider.
M. Jolin-Barrette : Bon,
génial.
M. Bolduc
(Hubert) : Parce que le
danger qui nous guette, c'est, si on commence à attaquer les bassins de
talents internationaux, excusez-moi
l'expression, de manière toute croche, bien, on va nuire à nos entreprises puis
on ne répondra pas à l'enjeu du rétrécissement des employés disponibles.
M. Jolin-Barrette : Dans vos missions de recrutement, vous allez
chercher, entre autres, beaucoup de travailleurs étrangers temporaires,
notamment beaucoup de travailleurs qui vont rentrer dans le cadre du PMI, du
Programme de mobilité internationale. Ça,
c'est un programme fédéral qui est, comment je pourrais-dire, plus rapide que
le PTET parce qu'il ne nécessite pas
nécessairement d'étude d'impact sur le marché du travail, et donc l'employeur
fait reconnaître l'emploi par le ministère de l'Emploi fédéral, là, qui
s'appelle Développement, Ressources humaines Canada ou... j'oublie le...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : ...oui,
j'oublie le titre officiel. Cela étant dit, c'est quoi, votre proportion de
travailleurs temporaires versus le nombre d'immigrants permanents que vous
allez chercher?
Mme Boucher
(Caroline) : En fait, on ne
va recruter que des travailleurs étrangers temporaires. C'est très rare
que les gens ont déjà la résidence permanente dans ceux qui viennent à nos
missions.
Et, pour
revenir sur la question du PMI, en fait, je ne dirais pas que c'est une
majorité des gens qui passent dans le PMI,
mis à part les jeunes, surtout en France, où on peut obtenir les jeunes
professionnels, les PVT, dans ces cas-ci, ils vont passer par l'Expérience internationale canadienne.
Mais la plupart des travailleurs qu'on va recruter vont passer dans le
volet des talents mondiaux, qui nécessite un
EIMT, un... Mais effectivement c'est une voie rapide avec un deux semaines,
donc il y a quand même beaucoup de ces
postes-là qui vont passer. Parce que, si on va en Tunisie ou si on va au Maroc,
ils n'ont pas accès aux jeunes professionnels, ils n'ont pas accès à des
PVT, donc il faut majoritairement, même je dirais presque entièrement, passer
dans le PTET.
M. Jolin-Barrette : Mais les
délais sont plus courts pour les types d'emplois que vous recrutez.
Mme Boucher
(Caroline) : Dans les 12 qui
sont dans le volet des talents mondiaux, effectivement, puis c'est une grosse majorité des candidatures que nous, on va
chercher. Mais il y en a aussi, par contre, beaucoup qui ne rentrent pas
dans ces 12 catégories là, et là on
parle d'un 16 semaines de délai de traitement, plus les délais du permis
de travail ensuite.
M. Jolin-Barrette : Est-ce que ça arrive, dans les démarches que vous
faites à l'international, que vous allez chercher des travailleurs qualifiés qui passent par le
programme régulier, tu sais, dans le fond, qu'ils ne prennent pas tout de
suite un permis de travail temporaire, mais qu'ils passent par le PRTQ,
supposons?
Mme Boucher
(Caroline) : Ce n'est pas
les candidatures que nous, on recherche. Nous, c'est vraiment un besoin
urgent des entreprises, donc on ne peut pas attendre qu'ils passent par la
résidence permanente, vu que, premièrement, il
fallait être sélectionné par le Québec et ensuite les deux ans au fédéral, donc
ça ne répond pas à un besoin immédiat. Donc, les gens qu'on va chercher, c'est pour qu'on obtienne les permis de
travail, puis les entreprises sont toutes prêtes à faire ces
démarches-là pour eux.
M. Jolin-Barrette : Donc, ce
sont toutes des entreprises, avec vous, qui ont un besoin actuel...
Mme Boucher (Caroline) :
Immédiat.
M. Jolin-Barrette : ...et qui
doit être comblé, actuellement.
Mme Boucher (Caroline) :
Absolument.
M. Jolin-Barrette : Bon. À partir du moment où les personnes arrivent
au Québec dans le cadre du recrutement que vous avez fait avec les entreprises, là, par la suite, qu'est-ce qui
arrive? Est-ce que vous les accompagnez vers le processus d'immigration
régulière? J'imagine que les entreprises qui vous accompagnent souhaitent
conserver à leur emploi ces personnes-là qui viennent travailler de façon temporaire dans leur
entreprise, mais qu'ils veulent conserver parce qu'ils ont déployé des
efforts à l'étranger pour aller les chercher.
M. Bolduc
(Hubert) : Exactement. Bien,
je vais donner un chiffre, mais, Francis, tu me corrigeras si c'est le
mauvais, mais, dans le cas d'Ubisoft, si je
prends cet exemple précis, je pense que la moitié de ses employés sont...
20 % de ses employés sont des
TETQ et 80 % de ses employés ont des intentions de faire la demande se
résidence permanente. C'est-u 80-20? Mais c'est à peu près ça.
M. Jolin-Barrette : Donc, dans
le modèle, là, dans lequel on évolue présentement et dans lequel vous évoluez,
à court terme, l'immigration temporaire peut permettre de répondre aux besoins
du marché du travail parce qu'ils viennent rapidement...
M. Bolduc (Hubert) : Absolument.
M. Jolin-Barrette : ...mais
que, par la suite, ces personnes demeurent au Québec ou veulent demeurer.
M. Bolduc
(Hubert) : Bien, ça, c'est
l'objectif, parce que, encore une fois, ces gens-là sont
formés, ils ont un travail, ils sont
en emploi, la plupart du temps ils parlent la langue. Donc, effectivement, c'est un bassin fort intéressant pour les faire basculer dans
la résidence permanente par la suite, et c'est la volonté des entreprises,
d'ailleurs, aussi.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Puis, lorsqu'on parle de basculer dans la résidence permanente, ces travailleurs
temporaires là, j'imagine que la majorité va soumettre leur dossier de
candidature dans le Programme de l'expérience québécoise après avoir travaillé
pendant un an, pour ceux qui parlent français.
M. Bolduc (Hubert) :
Absolument, le PEQ-Travailleur.
Mme Boucher
(Caroline) : Exactement.
Chez Montréal International, nous, on offre des séances d'information sur la résidence permanente. On les fait à toutes
les deux semaines avec mon équipe en français, en anglais. Donc, le
bassin de travailleurs qu'on va chercher, on
les aide à ce qu'ils comprennent très bien les programmes pour devenir
éventuellement résidents permanents.
M. Bolduc (Hubert) :
Puis on fait la même chose avec les étudiants à travers le PEQ-Étudiant.
Mme Boucher (Caroline) :
Exactement.
M. Jolin-Barrette : O.K. Le gouvernement a annoncé que désormais on
ouvrait les programmes aux personnes en situation temporaire, aux immigrants temporaires, en termes de
francisation, au niveau des allocations. Même chose pour le Parcours d'accompagnement personnalisé, il va être
ouvert. Pensez-vous que ça va aider pour l'intégration des travailleurs
étrangers temporaires vers le fait de les permanentiser?
M. Bolduc (Hubert) :
Absolument.
M. Jolin-Barrette : O.K. Qu'est-ce qui... On a un défi, au Québec, en
termes de régionalisation de l'immigration. Là, c'est sûr que je parle à
Montréal International, et on a eu la discussion aussi avec Québec
International. Comment est-ce qu'on fait
pour s'assurer que tout le monde soit gagnant à travers ça pour régionaliser
l'immigration, pour faire en sorte aussi
que Montréal ait sa part, mais surtout pour faire en sorte qu'il y ait une
répartition sur l'ensemble du territoire québécois?
M. Bolduc
(Hubert) : Bien, d'abord, il
ne faut pas déshabiller Jacques pour habiller Jean. Et, comme disait un
ancien premier ministre, je pense qu'on est capables de marcher puis
manger de la gomme en même temps. Et donc il y a moyen d'attirer des talents issus d'immigration en
région sans pour autant faire en sorte qu'il n'y en ait pas qui viennent à
Montréal. Et donc il faut se rendre aussi à l'évidence que 60 %...
34 % du total... non, le total des...
M. Bouchard
(Francis) : Bien, en fait,
oui, quand on regarde les postes vacants au Québec, les dernières
données disponibles, premier
trimestre 2019, juste sur l'île de Montréal, donc la région
administrative, c'est 34 % du total des postes vacants. Si on rajoute les autres portions de la
grande région de Montréal, donc dans Lanaudière, Laurentides,
Montérégie, Laval, donc on a évidemment plus
de la majorité des postes vacants au premier trimestre 2019 qui sont dans la
grande région de Montréal. Donc, il y
a des besoins qui sont importants, puis, à ce moment-là, ce n'est pas négligeable,
ces besoins-là.
• (11 h 20) •
M. Bolduc
(Hubert) : Donc, moi, je pense qu'il faut que l'expertise que
Montréal International, que Québec International
a développée... puis Québec International a plus d'ancienneté dans cette
expertise-là, je pense qu'il faut la mettre
à profit des régions. Comment? Je ne le sais pas. Est-ce que c'est à travers,
certainement, une meilleure coordination? Est-ce que c'est à travers votre ministère? Est-ce que c'est à travers
celui de l'Emploi? Est-ce que c'est à travers Investissement Québec? Je ne sais pas, mais la réalité, c'est
qu'il faut que les entreprises identifient des besoins, qu'ils nous fassent
parvenir ces besoins-là et qu'on les
accompagne à l'étranger pour qu'elles viennent interviewer des gens et les
embaucher et que, par la suite, nous, ou Québec, ou Drummondville, ou l'autre organisation
fasse l'accompagnement de permis de travail. Parce que c'est bien beau identifier des personnes, mais
c'est la première étape. Après ça, il faut faire les permis, il faut les faire venir, il faut s'occuper des conjoints, conjointes, il faut s'occuper
des enfants. Et donc, oui, la mission à Paris ou ailleurs, quand les entreprises font des embauches ou, du moins, identifient des
candidats, c'est intéressant, mais il
y a tout un travail en arrière
que nous, on fait pour que, trois mois plus tard, la personne arrive puis
commence à travailler.
Mais
il y a une mécanique à développer autour de celle que nous, nous avons
développée, qui fonctionne, qui marche, qui est excessivement appréciée par les entreprises qui y participent.
À preuve, on annonce les missions d'attraction de talents, puis 48 heures plus tard, il n'y a
plus de place, alors... Mais les besoins ne sont pas juste à Montréal,
et c'est pour ça que Drummondville, par exemple, a développé de l'aide
avec Sherbrooke, Trois-Rivières. Et donc ce modèle là, où Drummondville sert
une partie des régions avoisinantes, bien, il y a peut-être lieu que Québec
desserve davantage puis que Montréal desserve davantage, par exemple.
Mais
il y a une question d'agilité, de rapidité que les organisations comme la nôtre possédons, qui procure beaucoup d'avantages dans ces missions-là. Quand on
dit : On part en mission puis qu'on achète un demi-million de billets
d'avion... parce que les entreprises ne font rien, hein, elles s'inscrivent, on
achète les billets d'avion, on réserve les hôtels, on boucle la restauration, les déplacements. Ils font juste
arriver avec leurs pancartes, ils s'assoient au Palais des congrès de Paris,
puis ça commence, puis c'est aux cinq
minutes. Et M. Boulet, le ministre Boulet est venu, il y avait une queue à l'extérieur du Palais des congrès de
Paris pour les gens qui venaient s'inscrire dans les missions d'attraction de
talents. Alors, ça marche, puis il y a une belle phrase en anglais qui
dit : «If it ain't broken, don't fix it.»
M. Jolin-Barrette :
Donc, ce que vous nous dites, c'est que vous offrez un clés en main pour les entreprises.
M. Bolduc
(Hubert) : C'est un clés en main, puis ils aiment ça... elles
aiment ça, pardon.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur les assouplissements que vous souhaitez avoir
dans les différents programmes de travailleurs étrangers temporaires, supposons, au niveau des délais d'entrée express, pouvez-vous revenir un petit peu là-dessus?
M. Bolduc
(Hubert) : Bien, tu sais, les entreprises, quand elles se
présentent dans ces missions-là, ça fait déjà plusieurs mois qu'elles cherchent et qu'elles ne trouvent
pas. Et donc, quand on arrive, que ce
soit à Paris ou ailleurs,
et qu'on dit : On a trouvé le
programmeur JAVA bilingue anglais-polonais — et français,
parce qu'il s'en vient à Montréal, au
Québec — bien,
c'est demain, là, qu'ils veulent l'avoir chez eux. Et donc plus on va être
capables d'accélérer des processus, mieux
les entreprises vont se porter puis plus facile va être notre travail. Et
16 semaines, là, c'est quatre mois, c'est long dans une année. Et
donc, si on était capables de revenir à un huit semaines, ce qui est, somme
toute, le temps que la personne s'organise, sous-loue son appartement ou vende
son... c'est, selon moi, beaucoup plus raisonnable puis beaucoup plus
avantageux pour les entreprises.
M. Jolin-Barrette : Je vous remercie pour votre présence en
commission. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des
questions. Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Très bien. Je comprends que la députée de
Bellechasse désire prendre la parole. Allez-y.
Mme Lachance :
Merci, Mme la Présidente. Madame messieurs, merci d'être là. Merci de nous
partager votre expertise. Je vais y aller brièvement, Mme la Présidente. Il me
reste...
La Présidente
(Mme Chassé) : 4 min 30 s.
Mme Lachance :
...4 min 30 s, excellent. J'ai deux choses qui m'interpellent.
D'abord, vous avez parlé de votre succès
de la dernière mission de Paris et des 14 missions qui ont été réalisées
au cours de l'année. Dans ces missions-là quels types d'emplois ont été
comblés prioritairement?
M. Bolduc (Hubert) : Ça varie d'une mission à l'autre, mais je vous
dirais que, dans le cas du Grand Montréal, puis corrige-moi, Francis...
Mme Lachance :
D'une manière globale, là, si on...
M. Bolduc (Hubert) : De manière globale, je vous dirai qu'à peu près
plus de 50 %, c'est dans le domaine des TIC, technologies de l'information et de
communications, et ça ressemble pas mal aussi à ce que nous attirons comme
entreprises dans le Grand Montréal. Et donc
c'est à peu près les secteurs les plus prisés. Est-ce qu'il y en a d'autres?
Sûrement, mais, encore une fois, ça
dépend des entreprises qui viennent. Donc, si quelqu'un vient et dit :
Moi, j'ai besoin de camionneurs, puis
c'est une entreprise de Montréal, bien là, ça peut adonner, mais je vous dirais
que, de manière générale, c'est dans les secteurs à haute valeur ajoutée
et un salaire moyen de 75 000 $.
Mme Lachance :
C'est ce que vous aviez mentionné tout à l'heure. On sait que plusieurs de nos
entreprises peinent à trouver des travailleurs pour des postes
d'opérateur et de manoeuvre, des postes d'entrée. Est-ce que vous auriez des
suggestions à faire pour qu'ils puissent être intégrés dans ce processus-là?
M. Bolduc (Hubert) : Bien, je pense
qu'il va falloir faire des choix. Je donne toujours cet exemple de la grappe Mmode, Debbie Zakaib, ma collègue, qui cherche 1 000 couturières
à Montréal. Bon, est-ce que ce sont des emplois qui vont être faciles à dénicher et à faire venir au
Québec? Probablement pas. Mais ce sont les entreprises qui décident, qui
déterminent qu'est-ce qu'elles veulent aller
chasser, entre guillemets, comme talents à l'international. Et c'est sûr que
des bassins de grandes villes, de grandes
agglomérations comme Paris, comme Bruxelles, comme Londres, comme
San Francisco, évidemment, la
plupart du temps, on s'en va là pour chasser du talent de très, très grande
qualité. Mais il va falloir qu'on se pose des questions à savoir est-ce
qu'on veut faire du non qualifié.
Mme Lachance :
Excellent. J'aimerais aussi, dans un deuxième temps, revenir... À la page 25,
on a parlé des problématiques et des
recommandations. Vous nous mentionnez que les étudiants internationaux qui
graduent au Québec vivent des difficultés à l'emploi et parfois, même
souvent, quittent le Québec. Et, comme recommandation, bien, vous mentionnez de soutenir les activités de Québec
International à la rétention des étudiants. J'aimerais savoir pour quelles
raisons les étudiants quittent.
M. Bolduc (Hubert) : Bon, alors, il y a trois facteurs : d'abord,
un... puis c'est de moins en moins dans cet ordre-là, mais le premier, la complexité des processus
d'immigration — nous, on
a le mandat de les accompagner, de leur tenir la main et, Caroline et ses équipes, leur expliquer comment ça fonctionne;
deux, la langue, il faut qu'ils maîtrisent la langue — et ce
n'est pas juste le français, parce que l'étudiant maghrébin qui va à HEC faire
une maîtrise ou un D.E.S.G., la maîtrise de l'anglais est fondamentale s'il veut se trouver une job de gestionnaire
chez Desjardins — donc
l'anglais et le français; puis, troisièmement,
est-ce que je vais me trouver une job? Bon, ça, aujourd'hui, c'est un peu moins
problématique que ce l'était il y a deux ans ou trois ans, mais...
Notre
mandat, c'est de, justement, essayer d'identifier des talents dans les
universités puis de les mettre en relation avec les entreprises montréalaises, québécoises qui cherchent du talent.
Et on est un peu... il y a un ministre qui a déjà utilisé le mot de Tinder en commission parlementaire, donc
je vais faire la même chose, on est un peu le Tinder du travailleur...
de l'étudiant international puis de
l'entreprise québécoise, qu'elle soit internationale ou locale. C'est ça qu'on
fait, on fait le match. Avant, les
entreprises cherchaient toutes des Maurice Tremblay, bien, aujourd'hui ils sont
pas mal ouverts à toutes sortes de talents, quelle que soit sa
provenance.
La Présidente
(Mme Chassé) : Bon, il reste une minute au bloc d'échange.
Mme Lachance :
Merci. Donc, la raison pour laquelle les étudiants quittent, c'est parce que le
maillage ne se fait pas spontanément
entre l'étudiant, qui pourtant a étudié ici, et les entreprises qui cherchent
aussi ardemment plusieurs ressources.
M. Bouchard (Francis) : Si je peux me permettre, en fait, ce sera
impossible de retenir 100 % des étudiants, parce qu'il y a une portion des étudiants, puis selon
leur pays d'origine... Par exemple, un étudiant allemand ne vient pas
nécessairement au Québec,
éventuellement, pour se trouver un emploi de meilleure qualité que ce qu'il
pourrait trouver en Allemagne, il vient pour vivre une expérience. Donc, c'est sûr qu'on ne pourra pas retenir
100 % des étudiants, mais, de ceux qui restent, comme n'importe quel étudiant, comme n'importe quelle
personne qui entre sur le marché du travail, il y a des difficultés,
qu'elle soit d'origine québécoise ou d'ailleurs. Donc, il y a ces
difficultés-là qui s'additionnent également...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
M. Bouchard (Francis) : ...puis qu'on essaie de faciliter puis faciliter
notamment le maillage, là, avec les entreprises.
Mme Lachance :
O.K. Donc, bref, il y a quand même une grande proportion des étudiants qui
pourraient venir ici pour une expérience...
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange.
Mme Lachance :
Merci.
Une voix :
Puis il y en a qui ne veulent juste pas rester.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange. Très
bien, merci. Nous passons maintenant au parti formant l'opposition
officielle. M. le député de Nelligan, vous désirez prendre la parole?
M. Derraji :
Oui.
La Présidente
(Mme Chassé) : Allez-y.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. M. Bolduc, Mme Boucher, M. Bouchard,
bienvenue. Merci pour votre rapport très bien documenté.
Ma première
question : Vous avez eu le mandat de retenir les étudiants internationaux
avec quel ministère?
M. Bolduc (Hubert) : Alors, c'est une responsabilité partagée. Donc,
il y a un financement qui vient du MIDI et il y a une très forte collaboration qui vient avec le ministère de
l'Éducation, dont j'ai le privilège de rencontrer la sous-ministre cet
après-midi, justement, pour lui parler des succès que nous avons eus.
M. Derraji : Oui. Donc, le MIDI
vous finance à quelle hauteur par rapport à ce projet?
M. Bolduc (Hubert) :
Je vous dirais à peu près 2,5 millions, mais il faudrait que je vérifie
les ententes.
M. Derraji : Oui, et
l'Éducation?
M. Bolduc (Hubert) :
Je n'ai pas le chiffre par coeur.
M. Derraji : C'est un projet
qui tourne autour de combien, le projet en entier et financement public?
M. Bolduc
(Hubert) : Ah! écoutez, je
vous dirais que le financement total... puis, encore une fois, là, je n'ai
pas le chiffre en tête, mais je dirais peut-être 3 millions au total sur
plusieurs années, sur trois ans.
M. Derraji : O.K., sur trois
ans.
M. Bolduc
(Hubert) : Mais je vais
vérifier puis je vais vous trouver l'information avant la fin de la
commission.
M. Derraji :
Ah! mais ce n'est pas grave, je voulais juste comprendre l'ordre de grandeur de
ce projet qui... Je pense que vous
avez développé de l'expertise dans ce projet. Vous avez d'excellents résultats.
J'imagine que le projet réussit très bien. Moi, je vais revenir à...
M. Bolduc (Hubert) :
À vrai dire, pour... Ah! excusez-moi.
M. Derraji : Je vais revenir
plus à la démarche que vous faites pour retenir les étudiants étrangers. C'est
quoi, l'élément, pour vous, que vous
utilisez pour dire... Parce que j'ai vu la courbe, et, quand je vois qu'on est
en bas, là, par rapport... si on se compare aux autres métropoles...
C'est quoi, les arguments que vous mettez sur la table pour retenir ces
étudiants étrangers?
• (11 h 30) •
M. Bolduc (Hubert) :
Alors, on fait... À l'origine, là, ce qui s'est passé, c'est qu'on a sondé les
étudiants internationaux. On s'est
dit : Il y a là une qualité de main-d'oeuvre qu'on ne réussit pas à
garder. Donc, on a approché le gouvernement
il y a trois ans et on leur a dit : Il y a un potentiel là, il faudrait
essayer de les garder. Et donc c'est à ce moment-là que les programmes de rétention des étudiants ont commencé. Et
l'idée, c'est vraiment de déployer sur les campus, en partenariat avec
les universités, des activités pour faire connaître davantage — je
vais parler de Montréal — le
Grand Montréal, tant au niveau politique que
culturel, que sportif, qu'événementiel. Et donc, de mémoire, l'année dernière,
je crois que nous avons organisé tout près de 150 activités et qui ont
réuni au total environ 10 000 étudiants universitaires où, justement,
on leur a dit : Bien, venez, il y a une pièce de théâtre...
M. Derraji : Passeport culture.
M. Bolduc
(Hubert) : ... — exactement, le passeport culturel — de Lepage, ou il y a tel spectacle, ou il y
a telle activité au mont Royal. Donc,
en leur exposant comment il est agréable de vivre à Montréal, on espère être
capables d'en convaincre davantage de rester.
À l'origine,
le sondage, il démontrait que, sur 30 000 étudiants — là, c'est rendu 36 000, mais à l'époque
c'était sur 30 000 étudiants
internationaux — il y en
a 15 000 qui mentionnaient : Peut-être que j'aimerais ça rester après
mes études, et, sur ce 15 000,
on n'en conservait que 20 %, donc environ 2 500, 3 000. L'idée,
c'est de tripler le nombre d'étudiants qui demeurent après leurs études. Et je vais revérifier pour m'assurer que
le chiffre est bon, mais je pense qu'on est rendus à environ 6 000, puis les gens du ministère
pourront le confirmer ou l'infirmer. Donc, ça fonctionne d'aller à leur
rencontre et de leur exposer les avantages du Québec et du Grand Montréal.
M. Derraji : Donc, tous des
jeunes francophones, qui parlent français, issus des universités québécoises.
M. Bolduc (Hubert) :
Pas nécessairement.
M. Derraji : Des anglophones
aussi.
M. Bolduc (Hubert) :
Aussi, tout à fait.
M. Derraji : O.K. Là, la
technicalité pour pouvoir utiliser le programme, le PEQ, si j'ai bien compris,
pour les francophones, il n'y a pas de test de français, mais, pour les jeunes
issus des universités anglophones, ils doivent réussir le test.
M. Bolduc
(Hubert) : Exactement.
M. Derraji :
Donc, au bout de la ligne, la société québécoise... je ne peux pas dire «se
ramasse», mais s'approprie un fruit d'étudiants qui viennent de
l'international.
M. Bolduc (Hubert) :
Potentiels, oui.
M. Derraji :
Excellent. Là, ça me ramène à ma question : Comment vous avez eu
l'information que le moratoire a été implanté?
M. Bolduc (Hubert) :
C'est une bonne question, parce que j'étais en vacances, mais...
M. Derraji : Moi aussi.
M. Bolduc
(Hubert) : Je présume que...
Je pense que le ministère nous a informés, les gens, chez nous, là.
Caroline, je ne sais pas comment ça s'est fait, mais...
Mme Boucher (Caroline) : Je ne
me souviens plus. Je pense qu'on a eu un appel et un courriel, là. On a été
informés, je...
M. Derraji : Vous avez eu un
appel.
Mme Boucher (Caroline) : Je
crois, mais, écoutez, effectivement, je n'ai pas...
M. Derraji : O.K. Bien, ça
m'intéresse, comment vous avez eu l'information, parce que moi, je vais
partager comment j'ai eu l'information : par un article de journal, et on disait que le journaliste, par
hasard, il est parti chercher dans la Gazette et il a trouvé qu'il
y a le moratoire. Et vous savez pourquoi je vous pose cette question?
M. Bolduc (Hubert) :
Bien, j'aimerais ça le savoir, oui, parce que...
M. Derraji : Vous avez un
projet qui roule à 3 millions de dollars d'argent de contribuables, qui
est très, très important, avec des
résultats. En fait, aujourd'hui, là, personne, mais personne ne doit challenger ce programme.
Quand je vois que le gouvernement met un moratoire sur un projet, je pense qu'il doit mettre
aussi un moratoire sur les dépenses de ce projet. Et, si je mets un moratoire sur les dépenses du projet, parce que...
oui, on peut continuer nos activités de recrutement, et je ne challenge pas vraiment
votre travail, je sais vraiment ce que Montréal International fait, vous faites un excellent
travail, mais vous ne pensez pas que le fait
de ne pas inclure... Parce que moi, j'aurais aimé que... ne pas recevoir l'appel
ni recevoir un e-mail, mais inclure,
vous inclure dans la décision du moratoire. Moi, pour moi, je suis convaincu aujourd'hui, c'est une mauvaise décision de mettre le moratoire par rapport
à la rétention de ces jeunes étudiants internationaux.
Est-ce que
vous aurez une autre proposition aujourd'hui par rapport... Je sais que vous
avez dit que vous espérez que le
moratoire, au mois de novembre, donc... nous aussi, on l'espère. Mais vous ne
pensez pas que c'est en contradiction? D'un côté, on donne à un organisme avec qui on travaille le mandat de retenir
et, de l'autre côté, on lui dit : Bien, écoute, on a posé un
moratoire, sans l'inclure dans la décision du moratoire.
M. Bolduc
(Hubert) : Écoutez, on
entretient des relations excessivement privilégiées avec tous les ministères,
tant au niveau politique que
sous-ministériel, tous partis confondus. Et donc nous, on reçoit des mandats
des gouvernements qui des fois sont
interrompus, des fois sont modifiés. Franchement, je pense que, dans ce cas-ci,
est-ce que le gouvernement aurait pu
mieux nous informer ou nous a mal informés, franchement, je n'ai pas d'opinion,
je dis juste... Bien, nous, on continue de faire notre job et on reçoit
des deniers publics que l'on gère de manière très, très efficiente et de
manière la plus efficace possible, et puis
on continue notre travail, parce que, de toute manière, ces étudiants-là, bien,
ils ont fini la session en juin ou mai,
tout dépendant des niveaux scolaires, donc on les a déjà travaillés puis on va
recommencer à travailler avec ceux qui finissent au mois de décembre.
M. Derraji :
Oui, mais, M. Bolduc, je ne cherche
surtout pas à vous mettre mal à l'aise par
rapport à un partenaire qui finance votre projet. Ce n'est pas ça du tout,
mon but. Mon but aujourd'hui, en tant que société québécoise, où je dis
que vous avez des résultats par rapport à la
rétention d'étudiants internationaux, l'argent... les Québécois mettent de
l'argent dans la rétention, c'est des jeunes
qui parlent français, parfaitement intégrés qui veulent rester au Québec, et
que je ne parle pas avec le
partenaire qui livre ce projet, moi, je pense qu'il y a un manque au niveau du
ministère, parce que, pour moi, ça, c'est une dépense inutile pour le moment parce que je ne vous aide pas. Les
étudiants, quand ils viennent, et corrigez-moi si je me trompe, le pitch
de vente, il est quand même important, ce que vous faites.
Le fait de
rester au Québec, ça encourage certaines personnes à choisir le Québec et les
universités québécoises pour venir
étudier. Il y a une guerre de talents, mais aussi, les universités nous
parlent, c'est de plus en plus très difficile d'aller chercher des gens
qui vont payer presque quatre à cinq fois le prix d'accès aux études au Québec.
En fait, c'est ça, la problématique que je
ramène sur la table, et je comprends votre position. Moi, M. Bolduc, mon
but aujourd'hui, ce n'est pas vous
faire dire que c'est une très mauvaise ou bonne décision, le fait de mettre le
moratoire, c'est juste sensibiliser le ministère
que, probablement, ça serait beaucoup plus intéressant, avant de mettre un
moratoire, d'appeler Montréal International
et leur dire : Écoutez, là, on va mettre le moratoire, voilà le pourquoi,
et qu'on vous accompagne, parce qu'on met en péril ce programme; le
redémarrer par la suite, crise de confiance.
M. Bolduc (Hubert) : Écoutez, ça fait longtemps que je viens sur la
colline Parlementaire, et je connais de manière assez approfondie les rouages de l'État, et personnellement, moi, je... encore une fois, on nous a informés. Est-ce que
c'était de la meilleure manière? Je ne sais
pas, mais on a reçu l'information. C'est
sûr qu'on nous consulte sur ces
enjeux lorsque c'est nécessaire,
mais un gouvernement est élu pour poser des gestes — moi,
je ne suis pas au gouvernement — et,
si le gouvernement décide de poser ce geste, bien, peut-être
à lui poser la question à lui et peut-être pas à moi. Mais, bon, cela dit...
M. Derraji : Mais non, mais je sais, M. Bolduc, c'est
juste, on parle d'un programme, vous avez vendu le programme depuis le début, et je sais c'est quoi... Écoute,
je sais très bien les efforts que Montréal International déploie sur les campus. Moi, si c'est demain, là, je vais mettre
la bataille pour que ce programme continue, parce que je sais c'est quoi,
l'impact économique de ce programme. Donc, pour moi, aujourd'hui, c'est que, dans un contexte de collaboration, j'aurais
aimé qu'il y ait plus de communication entre le MIDI et vous, parce que
vous gérez un programme financé par les contribuables avec un contrat
avec le MIDI. C'est ça, moi, que je questionne, et vous n'êtes pas obligé de
répondre. Ce que je vous propose, c'est que c'est une bataille à mener
par rapport à ça.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes au bloc d'échange.
M. Derraji : Je n'ai pas entendu votre commentaire par rapport aux seuils. Vous faites beaucoup
de missions et vous avez avisé le ministère que c'est... de plus en
plus, il faut collaborer entre les villes et les organismes. Que pensez-vous
des seuils?
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Bolduc (Hubert) : Moi, je ne suis pas dans la question
des seuils, ce n'est pas ma priorité. Je m'occupe d'attirer des travailleurs temporaires qualifiés. Les
seuils, ça vous appartient, ça ne m'appartient à moi. Et ceux qui se
prononcent sur les seuils, tant mieux pour
eux, mais moi, je n'ai d'opinion sur les seuils, et ce n'est pas mon business,
comme je dis si souvent à mes gens chez nous.
M. Derraji :
Merci à vous trois.
M. Bolduc
(Hubert) : Merci à vous.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien, merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti
formant l'opposition officielle. Nous passons maintenant à la seconde opposition.
M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.
• (11 h 40) •
M. Fontecilla :
Merci. Bonjour, messieurs madame. Écoutez, la consultation sur laquelle on se penche a quand même quelques directions stratégiques, on pourrait appeler, là. D'une part,
là, la question de régler... ou la question de la pénurie
de la main-d'oeuvre, mais il
y a quelques objectifs, là, qui
transparaissent très bien, là, la question de la régionalisation de l'immigration et la question aussi de changer le système
pour favoriser, disons des candidats à l'immigration moins
qualifiés, pour éviter la surqualification, etc.
Vous,
vous êtes dans un domaine relativement... vous n'êtes pas dans le général, je crois,
vous êtes plutôt dans un créneau très
spécifique et vous n'êtes pas dans le
volume, même s'il y a une partie de votre travail qui fait dans le
volume, vos missions internationales, etc.,
mais vous êtes plutôt dans la recherche de la qualité, des talents rares ayant
certaines spécificités très particulières, là. Et pour Montréal, pour
les entreprises de Montréal, dans ce sens-là, de votre point de vue de votre organisme, est-ce que ça ne vous paraît pas qu'il
y ait une, comment dire... les objectifs de la consultation, là, sur
lesquels nous nous penchons ne sont pas tout
à fait vos objectifs, là, en termes de régionalisation et en termes de chercher
du personnel moins qualifié?
M. Bolduc (Hubert) : Bien, nous, évidemment, ce sont les entreprises
qui dictent un peu quels types de talents nous recherchons et, lorsqu'une entreprise investit pour aller à
l'international, c'est elle qui décide quels types de talents elle veut choisir et elle veut tenter d'attirer selon les
besoins qu'elle a. De manière générale, comme je l'ai dit tout à l'heure, ce
sont, la plupart du temps, du monde excessivement qualifiés, difficiles à
trouver dans le Grand Montréal. Est-ce qu'il y a un potentiel de conduire des missions pour du non qualifié? Sûrement, mais
est-ce que c'est ça qu'on veut faire? Moi, je me fie aux entreprises qui financent nos activités, qui
paient pour ces voyages, et ce sont elles qui font les embauches, donc
je me colle à leurs besoins et je m'arrange pour les faire arriver.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste 20 secondes au bloc.
M. Fontecilla : En même temps, vous nous avez montré un tableau
où il y a une corrélation entre qualifications et
richesse. Est-ce que c'est compatible avec les objectifs de la politique?
M. Bolduc
(Hubert) : Bien, je pense que d'attirer du talent dans les
grandes RMR que sont Montréal, Québec, Chicoutimi, Trois-Rivières, Sherbrooke,
oui, c'est compatible avec les objectifs de l'énoncé.
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Bolduc (Hubert) :
Encore une fois, les besoins, ce n'est pas nous qui les identifions, ce sont
les entreprises.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est très bien, merci. Nous passons maintenant au parti formant la troisième
opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous trois. C'est bien de voir des
organismes aussi bien encadrés, là,
pour les missions de recrutement, notamment, là, pour le Programme des travailleurs
étrangers temporaires. J'aimerais avoir un Gaspésie International, je
vous dirais, là, pour s'en occuper aussi.
Ma question...
Bon, on sait que c'est très complexe, là, justement, il y a beaucoup
de subtilités dans les demandes et l'évaluation de l'impact sur le marché du travail, l'EIMT, là,
est quand même assez complexe, et vous parlez de dispense
dans vos recommandations. J'aimerais savoir à qui vous faites référence, quels
candidats potentiels vous aimeriez qui soient dispensés de toute cette évaluation-là.
M. Bolduc
(Hubert) : L'exemple qui me
vient à l'esprit, rapidement, c'est celui du graphiste, là, je vais
prendre l'exemple de Technicolor, Technicolor est une grande société étrangère
basée à Montréal, et les graphistes ne sont pas reconnus. Alors donc, ça évolue beaucoup dans le temps. Je pense qu'il
faut que cette liste-là soit flexible, qu'on soit capables de la modifier rapidement et de la modifier en
fonction des besoins des entreprises et qui nous les manifestent, nous,
assez régulièrement en disant : Bien
voici, là, là, je ne sais pas, moi, il y a une rareté sur les programmeurs,
bien, vite, est-ce qu'on peut modifier la liste pour que les
programmeurs soient identifiés?
Mme Perry
Mélançon : Avoir plus de souplesse puis qu'on évalue les besoins,
qu'on actualise les besoins à une fréquence élevée.
M. Bolduc (Hubert) :
Absolument, oui.
M. Bouchard
(Francis) : Ou peut-être, une autre subtilité, en fait, pour les candidats qui ont déjà
obtenu un CSQ puis qui sont à
l'étranger en attente d'arriver au Québec, bien, de les faire arriver plus rapidement
au Québec sur un permis de travail en ayant une dispense, ça peut être pertinent aussi dans
l'optique de répondre aux besoins des entreprises, actuellement.
Mme Perry Mélançon : Bien
entendu. Merci. J'ai encore...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste une minute.
Mme Perry
Mélançon : Une minute, wow!
Vous mentionnez, là, le programme des entrepreneurs, est-ce que vous avez beaucoup
de ce type de clients là? Parce que, là, c'est un autre concept, là, ce n'est
pas des entreprises qui viennent vers vous, c'est des clients qui sont à
l'étranger. Comment ça fonctionne? Parce que Québec International, ils n'ont
pas parlé de ça.
M. Bolduc
(Hubert) : Le programme
start-up, ça ne fait pas longtemps qu'il existe. Souvent, ces entreprises-là
débarquent à Montréal et qu'on ne réponde peut-être
pas à certains critères, mais il faut comprendre que ce sont les
incubateurs qui donnent un peu le sceau de
la valeur de la start-up. Et donc, quand un «tandem launch» ou un texteur
évalue que telle entreprise ou tel entrepreneur a du talent, je pense
que, d'emblée, ça fait en sorte que cette personne-là est un candidat à un visa
start-up.
Mme Perry Mélançon : Et
qu'est-ce que le gouvernement peut faire pour valoriser tout ça?
M. Bolduc
(Hubert) : Bien, je pense
qu'il faut juste reconnaître la valeur des gens qui décident de financer
des start-up, nous, on court après, on les présente à ces incubateurs-là. Si
l'incubateur de renommée internationale dit «that's
a good talent», bien, je pense qu'il faut être capables d'aller rapidement
présenter la candidature, puis dire : Bien, voici, quelqu'un qu'on
devrait recevoir au Québec.
Mme Boucher (Caroline) : Si je
peux me permettre...
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
conclut le bloc d'échange avec le troisième groupe. Je vous remercie.
M. Bolduc, Mme Boucher, M. Bouchard, je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Alors, je
suspends momentanément les travaux afin de permettre au prochain groupe de
prendre la place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 45)
(Reprise
à 11 h 47)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Bon retour. Je vous invite à tous prendre place et je souhaite maintenant
la bienvenue aux représentants de la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec. Vous avez 10 minutes pour faire votre
exposé. À une minute de la fin, je vais vous inviter à conclure. Je vous invite
à tout d'abord vous présenter. Bienvenue.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)
M. Cadieux
(Serge) : Merci, Mme la Présidente. Serge Cadieux, je suis
secrétaire général de la FTQ. Je suis accompagné,
à ma gauche, de Denis Bolduc, qui est le président du SCFP-Québec et
vice-président de la FTQ, et, à ma droite,
de Gilles Grondin, qui est le conseiller responsable du dossier de la
francisation et des personnes immigrantes à la FTQ. Je remercie la commission de donner l'opportunité
à la FTQ de faire valoir son point de vue sur la question de
l'immigration.
Je
vais présenter sommairement... parce que vous avez lu notre mémoire, vous avez
vu, il y a 26 recommandations qui sont
faites. Je n'ai pas l'intention, dans la courte période que j'ai de m'adresser
à vous, de repasser les 26 recommandations, mais je vais vous faire part
des grands objectifs que la FTQ a relativement à ce dossier.
Premièrement, quand
on parle d'immigration, il y a trois objectifs importants pour nous.
Premièrement, il faut s'assurer de la
meilleure intégration des personnes immigrantes. La question des seuils, c'est
beau, mais ce n'est pas important, nécessairement, pour nous. Ce qui est
important, c'est que les personnes soient bien intégrées.
L'importance
de la francisation. S'il y a des gens qui arrivent au Québec et qui ne parlent
pas français ou qui ne parlent pas
suffisamment le français, il est important de les accompagner pour que ces
gens-là puissent être en mesure, à la fin de leur parcours, de maîtriser
la langue française.
Et le troisième
objectif, l'importance pour une société comme le Québec d'accueillir, dans une
perspective humanitaire, des gens de partout
et non pas seulement dans une perspective économique. On a entendu beaucoup...
j'ai entendu mes amis Yves-Thomas Dorval,
Stéphane Forget, évidemment, de demander une hausse des seuils et je vois
que c'est beaucoup pour des circonstances
économiques à courte durée. Je ne dis pas que ce n'est pas important. C'est
important, mais on ne peut pas baser
une politique d'immigration uniquement sur les besoins économiques. On a un
rôle humanitaire aussi à jouer, et la FTQ a toujours été derrière ces
principes-là.
• (11 h 50) •
On
croit aussi que l'immigration contribue de façon positive à l'évolution de la
société québécoise. C'est un plus, là.
Ce n'est pas un cadeau qu'on leur fait, c'est réciproque, là. On enrichit la
société québécoise quand on accueille des gens d'ailleurs. On croit aussi à la nécessité, je l'ai dit tantôt, d'une
excellente intégration, mais aussi d'une intégration socioculturelle et
linguistique de ces personnes-là. C'est important, là. C'est important que ces
personnes-là soient bien intégrées socioculturellement
et linguistiquement, et on croit à l'idée que la francisation doit être un
droit absolu. Ce n'est pas une option,
là, et le gouvernement, à partir du moment où on accueille des
personnes, on doit s'assurer de mettre en place les instruments qui vont
permettre à ces gens-là d'être capables de maîtriser le français.
Bon,
l'implication de la FTQ en matière
d'intégration des personnes immigrantes et de francisation remonte à
très, très loin, là. On a toujours été un
acteur important dans ces deux dossiers-là. Je vous dirais qu'il y a même des
syndicats affiliés à la FTQ qui
travaillent plus avec les personnes immigrantes que d'autres, exemple les
travailleurs dans le secteur du textile, où ils ont développé une expertise, c'est eux qui donnent des cours de
francisation aux nouveaux travailleurs arrivés. La même chose pour l'entretien ménager, souvent les gens
qui arrivent ici ne parlent ni l'anglais ni le français, donc c'est le
syndicat qui prend en charge la formation de ces travailleurs, ces
travailleuses-là. On le voit aussi dans le secteur agricole, là, il y a
beaucoup de travailleurs qui ne maîtrisent pas ni le français ni l'anglais,
donc le rôle des syndicats est important.
Je
vous dirais aussi, puis je pense que vous devez le prendre en considération...
donc, les syndicats peuvent faire beaucoup. Quand on parle d'intégration
des travailleurs étrangers, des personnes immigrantes, bien, pour les intégrer,
évidemment, la meilleure façon de les
intégrer, c'est qu'ils puissent avoir un emploi et, deuxièmement, qu'ils soient
capables de parler français et de comprendre
le français, et les syndicats peuvent jouer un rôle important, encore plus
important que le rôle qu'ils jouent
là. Évidemment, ça prend du support financier. Et là où on a vu que ça
fonctionne, dans les 30 dernières années,
là — on a une
bonne expérience — bien, on
a des ententes avec des entreprises, et avec le support de la Commission
des partenaires du marché du travail — ça aussi, M. le ministre, la Commission des
partenaires du marché du travail est un acteur important, là, pour l'intégration des personnes immigrantes — bien, il y a des cours de formation qui se
donnent pendant les heures de
travail. Parce que, tu sais, quand on dit à quelqu'un : Tu vas travailler
toute la journée puis après ça tu vas aller suivre des cours, bien, ce n'est pas nécessairement la façon de bien les
intégrer. Donc, on vous dit ça, c'est deux choses qui sont importantes pour nous, donc l'implication des
syndicats et l'implication de la Commission des partenaires du marché du
travail. Il y a tous les acteurs... pas
tous, mais il y a des acteurs importants là-dedans : les syndicats, les
employeurs, le ministère de l'Éducation, les groupes communautaires,
donc il est important de bien les impliquer.
Bon,
maintenant, je vais reprendre cinq enjeux que l'on considère importants dans la
vision qu'on a de l'immigration au
Québec, là, aujourd'hui, en 2019. Bon, c'est sûr qu'il y a une question de
rareté de la main-d'oeuvre, là, qu'on voit, là, qu'on voit ici, qu'on voit ailleurs aussi, mais c'est un des enjeux;
deuxième, la protection des droits des travailleurs et des travailleuses étrangers temporaires, qui est un
enjeu pour nous; troisième, la reconnaissance des acquis et des
compétences — ça
aussi, c'est un enjeu qui n'a pas été réglé,
qu'il faut poursuivre; quatrième, le maintien du statut du français comme
langue commune — c'est
un combat de tous les jours, puis il faut le continuer, il ne faut pas baisser
les bras; et, cinq, réussir l'intégration
des personnes immigrantes dans notre société. Je vais reprendre les cinq points
de façon... ces cinq grands points là pour vous dire des pistes de
solution, comment on le voit.
Sur la rareté
de la main-d'oeuvre, il y a plus qu'un secteur en particulier qui est touché,
hein, il y a aussi le secteur manufacturier,
touristique, des services. Donc, il y a plusieurs secteurs de l'activité
économique qui est touché par la rareté de la main-d'oeuvre. On dit oui à l'immigration,
mais il faut aussi prendre les mesures pour ramener le monde sur le marché
du travail, et une des façons, et on le dit
depuis longtemps, il faut que ces gens... il faut qu'il y ait une attraction,
il faut qu'il y ait des bonnes
conditions de travail, hein? J'écoute des gens dire : Il faut augmenter
les seuils pour amener des travailleurs étrangers ici occuper des emplois que le monde ne veulent pas occuper.
Le monde ne veulent pas les occuper parce que, tu sais, en bas de 15 $ de l'heure, c'est
difficile. Donc, je pense que ça prend un arrimage, là, il ne faut pas
ramener... il ne faut pas que ça soit
de la main-d'oeuvre à... du cheap labor, là. Il ne faut pas augmenter les
seuils pour dire : Bien, on va faire une économie sur les travailleurs immigrants. Donc, ça, ce n'est pas une
bonne solution. Ça prend des efforts aussi en littératie et en numératie
pour tout le monde pour être capables de ramener la main-d'oeuvre le plus
possible sur le marché... la main-d'oeuvre potentielle sur le marché du
travail. Et ça prend la mise en place d'un plan d'action pour favoriser la
régionalisation de l'immigration, puisque cette pénurie touche de nombreuses
régions du Québec. Ce n'est pas juste à Montréal et à Québec que ça se passe,
ça se passe aussi dans les régions, la Gaspésie, les Îles, ailleurs, donc.
Bon, deuxième
point, sur le statut des travailleurs étrangers temporaires, depuis un an, beaucoup
de discussions autour des besoins de
la main-d'oeuvre temporaire. Pour nous, il y a une nécessité que
l'on respecte les droits fondamentaux des travailleuses et des travailleurs étrangers. Je vous donne un exemple,
on a modifié le Code du travail pour exclure de la syndicalisation le secteur agricole. Ils ne doivent pas être traités
comme des travailleurs de seconde zone. Les droits qui sont donnés aux
travailleurs qui proviennent ici, du Québec... Les travailleurs étrangers, on
en a besoin, bien, nous, en contrepartie, on
doit les traiter aussi de la même façon qu'on va traiter n'importe quel
travailleur ou travailleuse. Pour nous, c'est fondamental.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste une minute à votre exposé.
M. Cadieux (Serge) :
Bon, la reconnaissance des acquis et des compétences, c'est un enjeu majeur
pour les personnes immigrantes et un élément
central d'une intégration réussie. Donc, on ne peut pas faire venir des gens,
et demander que les gens aient des
qualifications, puis ne pas les reconnaître, puis ne pas reconnaître
l'expertise qu'ils ont. Il faut accélérer, il faut en avoir plus.
Sur, bon, la langue française, bien, écoutez, il
y a beaucoup de choses qui est dit sur la langue française, mais il y a peu de mesures qui est mis en place, il y a
peu de financement qui est mis en place pour s'assurer que les gens qui arrivent au Québec puissent maîtriser la langue française. On applaudit, d'ailleurs, la mesure qui a été annoncée cette
semaine par le ministre sur l'accompagnement et sur la francisation, mais ça va...
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
M. Cadieux
(Serge) : ...évidemment,
il ne faut pas négliger ça, ça en prend plus. On aura l'occasion d'échanger,
là, avec des questions.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est très bien. Merci, M. Cadieux, pour votre exposé. Nous allons maintenant
débuter la période d'échange avec les différents partis. M. le ministre, la
parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme
la Présidente. M. Cadieux, M. Grondin, M. Bolduc, bonjour. Merci
d'être là aujourd'hui.
Commençons
par la fin de votre intervention, sur la francisation. Là, on a dévoilé, au
mois de juillet, dans le fond, 70 millions de dollars justement pour faire la bonification en francisation. Maintenant,
on passe de 141 $ à 185 $
pour les cours à temps plein, de
0 $ à 15 $ par jour, les allocations à temps partiel, plus de
professeurs en francisation puis on va faire des cours aussi en intercalaire pour faire en sorte que quelqu'un qui arrive
après deux, trois semaines, bien, puisse intégrer un cours de français
plus rapidement plutôt que d'attendre jusqu'à la fin du cycle.
Je voulais
vous demander... vous disiez : Bien, parfois le syndicat fait de
l'intégration, fait de la francisation, c'est entre les travailleurs, les collègues de travail, tout ça. C'est quoi,
votre vision, là, pour la francisation par rapport au rôle des
entreprises, par rapport au rôle des syndicats dans l'accompagnement? Parce que
c'est un des facteurs d'intégration importants, là, avec l'emploi, là. Mais
comment vous voyez ça, là, avec les entreprises puis, vous, votre rôle par
rapport aux entreprises en termes de francisation?
M. Cadieux
(Serge) : Les entreprises
doivent permettre aux travailleurs immigrants qui ont besoin de suivre
des cours de français de pouvoir suivre ces
cours de français là pendant les heures de travail. C'est fondamental pour
nous. Et les syndicats, ce qu'ils font, actuellement, ils utilisent des
formateurs pour apprendre le français aux travailleurs et travailleuses. Donc, ça, c'est un bon exemple, ça
doit être maintenu. La Commission des partenaires du marché du travail donne du financement aussi pour que ça, ça soit
fait. Mais le rôle des syndicats et des employeurs, c'est de permettre,
dans leur milieu de travail, là, qu'il y ait les conditions gagnantes pour que
les gens puissent faire l'apprentissage du français.
M. Jolin-Barrette : Mais
actuellement, là, la FTQ, elle engage des professeurs pour faire de la
francisation?
M. Cadieux (Serge) :
Absolument.
M. Jolin-Barrette : O.K. Où?
Dans les entreprises? Ils se promènent d'entreprise en entreprise...
• (12 heures) •
M. Cadieux (Serge) : Oui, dans les entreprises, ça se fait, ou dans
des centres, dans des centres de formation des différentes organisations
syndicales. Il existe des centres de formation où l'employeur libère les
travailleurs puis qu'ils viennent suivre des cours de formation. C'est ça,
hein, Gilles?
M. Grondin (Gilles) : Je peux
donner l'exemple, si vous permettez, l'union des employés de service, section locale 800, dans l'entretien ménager, qui font
venir des gens dans leurs locaux et ils donnent de la formation, justement,
et les gens sont libérés de leur travail
pour avoir accès à ces cours-là, et c'est le syndicat qui rembourse. Comme des
principes de libération syndicale un peu, c'est le syndicat qui
rembourse à l'employeur les frais de salaire de la personne.
Je pense que la clé... il y a deux clés du
succès là-dedans, c'est : un, il faut que ça soit facile pour les
personnes immigrantes et, deux, il faut que
ça se fasse pendant les heures de travail parce que c'est là qu'est la
réussite, comme on a pu voir d'autres expériences à l'étranger aussi,
dans les pays scandinaves, entre autres, là.
M. Jolin-Barrette : O.K. Puis, pour la FTQ, combien de personnes,
annuellement, participent à ces mesures de francisation là que vous
offrez?
M. Cadieux
(Serge) : Je vous dirais qu'il y a plusieurs
centaines de personnes. Évidemment, ça varie d'une année à l'autre, là, mais, je vous dirais, dans les
secteurs comme le secteur du vêtement, bien, on a passé beaucoup,
beaucoup de travailleuses et de travailleurs, l'entretien
ménager aussi, beaucoup. C'est sûr que ça, c'est les secteurs les plus
propices. Je regarde aussi avec les TUAC,
dans les usines de volaille, il y a beaucoup de travailleurs étrangers qui ne parlaient pas
le français, donc il y a
aussi des cours. Il y a eu des ententes avec l'employeur pour libérer le
monde pour qu'ils viennent suivre des
cours de formation, donc, et ça réussit. Ça réussit, ces gens-là apprennent le
français et puis ils sont capables de s'intégrer dans la société québécoise
et deviennent des résidents permanents, éventuellement.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question de la libération, là,
pouvez-vous m'expliquer, là, comme... vous disiez, dans le fond : L'employeur paie l'employé, il
le libère de ses heures de travail, et par la suite le syndicat rembourse le
salaire de l'employé à l'employeur.
M. Cadieux
(Serge) : Oui, mais il y a
des subventions qui sont données par la Commission des partenaires du
marché du travail, il y a une enveloppe qui
existe. Je vais vous donner un exemple, M. le ministre. Je siège à la
Commission des normes, de l'équité,
de la santé et sécurité, on alloue quelque chose comme, grosso modo,
12 millions annuellement pour faire de la formation en santé-sécurité aux associations d'employeurs, aux
associations syndicales, c'est un bon exemple. On devrait en faire plus pour la francisation, parce que
c'est la prise en charge par le milieu. Donc, ces gens-là s'organisent, il y
a de la formation qui est donnée pendant les
heures de travail, le travailleur ou la travailleuse ne perd pas d'argent, donc
elle a son salaire normalement, puis le
gouvernement donne des subventions pour ça. Donc, en matière de santé-sécurité,
c'est 75 %, mais il y a
différentes formules, là. Ça peut être 100 %, 75 %, ça dépend des différentes
formations, mais c'est un bel exemple à
suivre. Ça réussit en santé-sécurité, ça réussit en francisation là où ça
existe. Puis on n'a pas besoin de créer des nouvelles infrastructures,
ça existe déjà. On a déjà ces infrastructures-là.
Évidemment,
là, je parle pour le monde qui est sur le marché du travail. C'est sûr, la
condition, il faut que les gens soient
sur le marché du travail. La Commission des partenaires du marché du travail,
bien, il faut que les gens soient sur le marché du travail. Il y a d'autres choses à faire en amont de ça quand
les gens arrivent puis qu'ils n'ont pas un emploi, c'est sûr, mais on vous donne une piste de solution, on
vous parle de ce qu'on connaît, nous. On est capables d'être efficaces
dans les différents milieux de travail.
M. Jolin-Barrette : Mais, dans le fond, ce que je décode de ce que
vous me dites, c'est qu'il ne faut pas que le travailleur soit pénalisé durant ses heures de travail. Dans le fond,
pour l'inciter au niveau de l'apprentissage... bien, supposons qu'il
travaille 40 heures-semaine, bien, il doit être payé 40 heures-semaine.
Mais la proportion de temps, quand les employés sont libérés, là, pour aller
suivre les cours de français, c'est combien d'heures par semaine, ça?
M. Cadieux
(Serge) : Non, bien, ce
n'est pas cinq jours par semaine, là, les formules. Il y a des formules, du
point de vue plus pointu, là...
M. Grondin
(Gilles) : Je n'ai pas le
détail. Je ne connais pas nécessairement le détail, mais c'est quelques
heures, mais ces quelques heures là...
M. Jolin-Barrette : Non, non, c'est ça, quelques heures sur le
40 heures, mais, exemple, c'est un quatre heures, c'est un huit
heures par semaine?
M. Grondin
(Gilles) : Puis, à partir du
moment où il y a déjà une entente, qu'il y a déjà une mise en place de
faite, bien, même pour l'employeur, c'est
facilitant parce qu'il sait ce qui s'en vient puis ça lui amène de la
main-d'oeuvre qui, par la suite, peut
devenir... peut opter pour d'autres postes, des postes plus qualifiés, des
postes plus spécialisés. Donc, l'importance de la francisation est sans
contredit très grande.
M. Jolin-Barrette : O.K. J'aimerais ça qu'on revienne sur la
question, là, de la reconnaissance des compétences puis des ordres professionnels. Supposons que vous
dites : Bon, il faut qu'on puisse reconnaître leur expertise, leurs
compétences, je suis
d'accord avec ça, c'est pour ça qu'on veut le faire dès l'étranger. Mais
parfois, exemple, il arrive des situations où il y a des métiers réglementés, puis là, supposons, dans la construction,
il y a les questions de bassins, tout ça. Comment vous envisagez ça, là,
quelqu'un qui... supposons, pour avoir les cartes, pour rentrer dans le bassin
par rapport à un travailleur étranger, là?
M. Cadieux
(Serge) : Bien, il faut
s'assurer qu'il a l'équivalent, qu'il a les qualifications nécessaires pour
être un électricien aussi au Québec.
Puis, vous savez, il y a des exemples, on a des échanges avec l'Ontario. Ce
n'est pas le même système en Ontario.
Donc, on peut s'inspirer de ce qui se passe sur la reconnaissance des acquis en
Ontario versus au Québec, ils n'ont
pas le même système. Donc, il y a des possibilités de faire ça. Mon ami Jean
Boulet, je l'entendais hier disant qu'il manque des préposés aux bénéficiaires. Il y en a, des préposés aux
bénéficiaires ailleurs, là. Il n'y a pas juste nous autres qui prend
soin des malades puis des personnes âgées. Donc, ce n'est pas une profession,
là, mais il faut être en mesure de reconnaître
que ces gens-là sont capables de faire... C'est sûr que ça devient plus pointu
quand on parle de professions parce que, là, les ordres professionnels
s'en mêlent, mais...
M. Jolin-Barrette : Mais ce que je veux dire, même au-delà des ordres
professionnels, il y a certaines juridictions de métiers aussi qui ont des règles strictes aussi. Alors, ce que je
veux dire, c'est qu'il y a un effort à faire aussi à la fois des ordres professionnels, du marché du travail, mais aussi
des milieux aussi dans lesquels il y a des bassins, puis tout ça. Dans
le fond, mon message, c'est plus de dire, comme : Il faut que tout le
monde y mette du sien aussi.
M. Cadieux
(Serge) : Absolument. Il y a
une ouverture de notre part là-dessus, il n'y a aucun problème avec ça.
À partir du moment où le travailleur de
n'importe quel autre pays, c'est un électricien, puis il rencontre les mêmes
normes que nous ici, puis qu'il a une reconnaissance, puis il va avoir
sa carte de compagnon électricien, bien, pour nous, ce n'est pas un problème,
là.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des
collègues qui veulent poser des questions. Bien, merci beaucoup pour
votre présentation.
La Présidente (Mme Chassé) : Je
reconnais le député de Chauveau, qui désire prendre la parole. Allez-y.
M. Lévesque (Chauveau) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. M. Cadieux...
La Présidente (Mme Chassé) :
Pour sept minutes, M. le député.
M. Lévesque (Chauveau) :
Combien?
La Présidente (Mme Chassé) : Sept
minutes.
M. Lévesque
(Chauveau) : Sept minutes? Merci beaucoup. Merci beaucoup,
M. Cadieux et les membres de votre équipe, toujours intéressant de
vous entendre. Et vous avez... Le coeur un peu de... Bien, un des éléments clés
de ces discussions-là qu'on tient depuis
quelques jours, c'est les fameux seuils d'immigration. Et vous avez mentionné
d'entrée de jeu que, pour vous, c'était peu important, le nombre de personnes,
et vous avez même utilisé l'expression cheap labour. Est-ce que les seuils, à ce moment-là... Quel serait le seuil
acceptable? Bon, on sait qu'on les a... le gouvernement, actuellement, a un enjeu de le diminuer temporairement pour
éventuellement le rehausser, et on en prend moins pour en prendre soin, l'objectif étant de mieux intégrer, mieux
franciser et mieux faire entrer les gens. C'est un peu la perception que vous
avez, c'est qu'on est peut-être... peut-être que le seuil en soi, ce n'est pas
un débat de nombre qu'on devrait avoir.
M. Cadieux
(Serge) : Bien, moi, je
dis : À partir du moment où on est capables de rencontrer les cinq
objectifs que je vous ai donnés, il y
en aura 100 000 par année, on n'a pas de problème. Si on est capables
juste d'en intégrer 45 000 parce que
c'est les... mais qu'on est capables véritablement de les intégrer en fonction
des cinq objectifs qu'on s'est donnés, ça sera 45 000, si c'est 60 000, ça sera 60 000. C'est parce
qu'il faut être en mesure de traiter correctement ces gens-là, il faut être en mesure... puis ça passe par l'intégration.
Donc, l'intégration, ça veut dire une job, une job de qualité, qu'il ne
s'en vient pas vivre dans la pauvreté ici,
qu'il est capable de s'intégrer à la culture québécoise, qu'il est capable de
comprendre, de parler le français.
Donc, plus l'État va mettre de l'argent et des moyens pour que les gens
puissent être intégrés selon des critères objectifs, il n'y en a pas, de limite. Pour nous, il n'y en a pas, de
limite. Pour nous, ce n'est pas un débat de limite. Et moi, je vous dis ça, et notre position, elle est comme ça
aujourd'hui, elle va être comme ça dans cinq ans. Elle ne changera pas
en fonction des fluctuations de l'économie. Elle n'a jamais été en fonction de
la fluctuation de l'économie.
Là, il y a
des gens qui montent aux barricades parce qu'ils ont des problèmes de trouver
de la main-d'oeuvre, mais il faut se
poser la question : Est-ce qu'ils sont préoccupés par leurs conditions de
vie, leurs conditions de travail, comment ils vont vivre au Québec, dans
quelles conditions ils vont vivre au Québec? Nous, on se préoccupe de ces
questions-là. À partir du moment où on est capables de les accueillir
correctement, ce n'est pas un problème, les seuils, pour nous.
M. Lévesque
(Chauveau) : Ce que j'apprécie de votre discours, c'est justement...
c'est que vous êtes axés davantage sur le qualitatif que sur le
quantitatif, et j'ai l'impression que, depuis quelque temps, on a un débat
quantitatif.
• (12 h 10) •
M. Cadieux
(Serge) : Tout à fait.
M. Lévesque
(Chauveau) : Pourquoi en accueillir plus? Oui, bien sûr, hein,
pourquoi fixer... C'est quoi, la mesure pour arriver à 40 000, à
50 000, à 60 000? On parle de 100 000 dans certains cas. Puis
les groupes, les groupes des employeurs, les
groupes qui représentent des groupes d'entrepreneurs, bien, ils nous parlent
souvent d'un chiffre. Et, oui, je pense qu'éventuellement il faut avoir
une adéquation, mais il faut intégrer ces gens-là.
Mais il y a
une question que je veux vous poser également, M. Cadieux et les membres
de votre équipe. Vous êtes impliqués
dans différents secteurs d'activité,
la FTQ. C'est le plus gros syndicat au Québec, vous représentez des
travailleurs dans à peu près
tous les secteurs d'activité. Tout à
l'heure, on a eu Montréal
International qui nous a parlé de travailleurs à valeur ajoutée, donc des travailleurs avec des compétences plus plus,
mais on le sait que les besoins, notamment en région...
M. Cadieux (Serge) :
Ce n'est pas là, là.
M. Lévesque
(Chauveau) : ...notamment
en région, notamment en région, ce ne sont pas toujours
des travailleurs ultraqualifiés, ce
sont des travailleurs manufacturiers, vous en avez parlé tout à l'heure. Vous avez parlé... dans le secteur touristique, il y a plusieurs... et on a eu les restaurateurs qui sont venus
nous parler, qui nous en ont parlé. De votre côté, comment vous voyez ça, les besoins de vos membres?
Qu'est-ce qu'ils vous disent, là, les entreprises auxquelles vous
êtes impliqués? Qu'est-ce qu'ils vous disent? Et qu'est-ce
que vous pouvez faire également
pour favoriser la régionalisation
de l'immigration au Québec?
M. Cadieux
(Serge) : Bien, écoutez,
il faut se poser la question : Pourquoi on n'est pas capables de retenir nos gens dans les régions aussi? Je veux dire, avant, tu
sais... Donc, ce que je disais d'entrée
de jeu, c'est un tout, ça. Ça prend
des conditions qui sont attrayantes aussi.
Vous savez, moi, je dis à mes amis du côté patronal, des associations
patronales : Vous vous opposez à
la hausse du salaire minimum, bien, peut-être si le salaire était un peu plus élevé, vous auriez du monde qui serait... Parce que, je le sais,
les chiffres qu'on a de la Commission des partenaires du marché du travail, la pénurie
de main-d'oeuvre, 70 %
des gens qu'on a besoin, c'est des gens non spécialisés. Et il y en a des gens
déjà au Québec, là, qui pourraient
occuper ces emplois-là, puis que c'est qu'ils font? Bien, ils vont travailler
en Ontario, ceux qui sont sur la limite, parce que le salaire minimum
est plus élevé en Ontario, ils vont au Nouveau-Brunswick parce que c'est plus
élevé au Nouveau-Brunswick.
Donc, il y a
un paquet de conditions qu'on doit faire pour nos travailleurs ici, mais la
même chose pour les travailleurs immigrants.
Les travailleurs immigrants qu'on va recevoir, eux aussi, on doit les traiter
convenablement. Donc, c'est ce que je
dis, parce que le gros de la main-d'oeuvre que le Québec a besoin actuellement,
c'est de la main-d'oeuvre non spécialisée. 70 % des besoins de main-d'oeuvre, c'est de la main-d'oeuvre non
spécialisée. Qu'est-ce qui va faire en sorte qu'un travailleur immigrant va venir au Québec plutôt qu'aller en
Ontario ou qu'aller en Colombie-Britannique? Bien, il va regarder c'est
quoi, les conditions.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste une minute au bloc d'échange.
M. Lévesque
(Chauveau) : Mais c'est la même chose d'une région à l'autre. Si on
augmente les salaires dans une industrie,
le travailleur qui a le choix d'aller travailler à Montréal ou d'aller
travailler à Baie-Comeau, qu'est-ce qui va faire qu'il va choisir Baie-Comeau? Et qu'est-ce qu'on peut faire pour inciter
le travailleur... Ma collègue de Bellechasse, dans son comté, a des
besoins énormes. Mon collègue de Beauce a des besoins énormes. À Québec, on a
des besoins énormes. Comment on fait,
M. Cadieux? Qu'est-ce que vous nous suggérez pour régionaliser notre
immigration? Parce que le salaire va être panquébécois, là.
M. Cadieux
(Serge) : Oui, oui, oui,
comme il l'est actuellement, comme il l'est actuellement. Bien, écoutez,
je pense qu'on doit réfléchir à ça.
Honnêtement, je n'ai pas la réponse à ça. Mais ce qu'on vous dit : Il faut
véritablement... tu sais, il ne faut pas fermer les régions, là, hein?
Donc, il faut travailler pour les régions, là...
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Cadieux (Serge) : ...donc il faut trouver des solutions qui vont être durables.
M. Lévesque (Chauveau) : Pas
évident.
M. Cadieux (Serge) :
Non, ce n'est pas évident, vous avez raison.
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Ça conclut le bloc
d'échange avec le parti formant le gouvernement. On passe maintenant au
parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, à vous de
prendre la parole.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Messieurs, bienvenue, merci pour votre présence. Parlez-moi de
votre organisation. Vous représentez 600 000 travailleurs?
M. Cadieux (Serge) :
Oui.
M. Derraji :
Oui. Comment ça marche, le processus décisionnel chez vous, genre, pour le
mémoire que vous avez présenté aujourd'hui?
M. Cadieux (Serge) :
On a des instances décisionnelles. On a un congrès qui est l'instance
décisionnelle, donc il y a des délégués de chacun
des syndicats affiliés qui participent à ce congrès-là, qui adoptent des
résolutions, qui adoptent des
déclarations de politiques, ce qui nous donne, à Daniel Boyer et à moi, notre
mandat pour les trois années à venir. Mais entre trois ans, il y a plein de choses qui se passent. Donc, on a un
conseil général, qui est un minicongrès, là, donc c'est une instance décisionnelle où il y a des représentants
de chacun des syndicats affiliés qui prennent les décisions entre les
congrès, et il y a un bureau de direction,
un bureau de direction formé d'une vingtaine de personnes provenant des
différents syndicats qui mettent en opération les décisions.
M. Derraji : Merci, merci.
M. Cadieux (Serge) :
C'est très, très démocratique.
M. Derraji :
Oui, oui, bien, je ne négocie pas ça, et vous semblez maîtriser vos processus
décisionnels. Donc, le rapport qu'on a devant nous aujourd'hui a passé
par tout ce processus?
M. Cadieux
(Serge) : Oui, a été
approuvé par le bureau de direction. Et, vous savez, sur les questions
d'immigration, ce n'est pas d'aujourd'hui
que la FTQ se penche... et sur la francisation, évidemment. Là-dedans, vous
retrouvez des décisions qui ont été prises par... des décisions
antérieures, là, de la FTQ ou qui n'ont pas été changées, donc ces décisions-là
sont les mêmes.
M. Derraji : Bien, justement,
bien là, je vois une contradiction, M. Cadieux.
M. Cadieux (Serge) :
Ah oui?
M. Derraji : Oui, je vois une
contradiction, parce que, si vous me dites qu'il n'y a aucun changement...
M. Cadieux
(Serge) : Je n'ai pas dit
ça, je n'ai pas dit ça. Je n'ai pas dit : Il n'y a aucun changement, j'ai
dit : Quand il n'y a aucun changement...
M. Derraji : O.K., aucun
changement, donc...
M. Cadieux
(Serge) : ...quand il n'y a aucun changement, on reproduit
la décision. Mais, vous savez, la FTQ a plus de 60 ans d'existence, même plus de 100 ans d'existence,
avec ses fondateurs, on change d'idée, hein, de temps en temps. Donc, la
position qu'on avait en 1957, elle peut avoir évolué aujourd'hui, en 2019.
M. Derraji : Donc, vous êtes en
train de me dire qu'on peut dire qu'il y a l'ère de M. Cadieux et il y a
l'ère de M. Boyer.
M. Cadieux (Serge) :
Non.
M. Derraji :
Oui, mais justement, parce que je vais vous citer la déclaration de
M. Boyer et j'aimerais bien que vous clarifiiez, parce que c'est
tout à fait le contraire de ce que je lis maintenant dans votre rapport.
M. Boyer a déclaré, le 21 septembre 2018, il n'y a pas longtemps,
donc à la veille du déclenchement des élections : «"Avec le nombre
actuel d'immigrants que nous accueillons,
nous ne comblerons pas tous les emplois disponibles, c'est évident. Ça sera
encore plus difficile si nous en réduisons le nombre" — c'est
très clair, la réduction...
M. Cadieux (Serge) :
Mais en quoi c'est contradictoire?
M. Derraji : ...affirme le
président de la FTQ, Daniel Boyer.»
M. Cadieux (Serge) :
Oui. Je suis tout à fait d'accord. J'aurais pu faire la même déclaration.
M. Derraji :
Bien, il y a deux déclarations, et qu'il ne veut pas la réduction des seuils.
Et cette déclaration, c'est suite au début de la campagne électorale, où
nous sommes tous d'accord que le gouvernement caquiste, à l'époque, la CAQ proposait une réduction des seuils. Vous, vous
venez aujourd'hui nous dire : Écoutez, on ne veut pas parler de seuils,
pour nous, il faut qu'on reste là où on est. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Cadieux (Serge) : La question importante, ce n'est pas la question
de seuils, c'est comment on les accueille, les personnes immigrantes. Si on est capables d'en accueillir 70 000
dans les conditions qu'on vous dit, on n'a rien contre. Si on n'est pas capables de les accueillir
convenablement, qu'on est capables d'en accueillir convenablement uniquement
50 000, vous devriez en accueillir
50 000. Moi, monsieur, j'aime mieux avoir quatre enfants que d'en avoir 10
puis qu'ils vivent dans la pauvreté. Je veux dire, ce n'est pas plus compliqué que ça.
C'est simple comme image, mais le Québec devrait se comporter de cette
façon-là aussi.
M. Derraji :
Mais, si je vous dis, M. Cadieux, tout au long de ces... des personnes qui
étaient dans votre place nous disent qu'on a la capacité d'accueil.
M. Cadieux
(Serge) : Bien, parfait.
M. Derraji :
Je vais vous citer l'exemple de l'Estrie. L'Estrie, l'organisme qui est venu,
il dit : Écoute, on peut accueillir
plus, ALPA, à Montréal. La plupart des partenaires qui sont en contact première
ligne, ils nous disent : On est capables d'accueillir plus.
Moi,
ce que j'aimerais bien aujourd'hui de votre fédération, de la FTQ, c'est
éclairer le gouvernement par rapport à
sa position de baisser les seuils à 40 000, de les augmenter à
43 000. Vous siégez dans la même table où j'ai eu l'honneur de siéger pendant quatre ans, à la CPMT, vous êtes
en contact avec les associations patronales. Unanimement, les
associations patronales, je sais que vous
partagez probablement l'ensemble de leurs points, mais il y a un cri d'alarme,
il y a un cri d'alarme, M. Cadieux,
par rapport à la pénurie de main-d'oeuvre. Vous ne semblez pas, je dirais... et
corrigez-moi, c'est probablement une
impression, vous ne semblez pas être préoccupés par rapport au nombre qu'on
accueille ou je dirais que, pour vous, ça va de rester dans les seuils
qu'on a.
M. Cadieux (Serge) : Je n'ai pas dit ça puis je trouve que vous me
portez... vous me prêtez des intentions. J'ai...
M. Derraji :
Oui, ce n'est pas grave, aucun problème, éclairez-moi.
M. Cadieux (Serge) : Bien, écoutez, moi, je vous l'ai dit, si on est
capables d'en accueillir 70 000 dans les meilleures conditions, accueillons-en 70 000. Si on est
capables d'en accueillir uniquement 55 000 dans des bonnes conditions,
il faut en accueillir 55 000. Je ne
suis pas en train de vous dire que... Vous autres, là, vous vous faites une
bataille sur combien on va en
accueillir, sans tenir compte de la question de la qualité dans laquelle vous
allez les accueillir. On n'est pas là-dedans, nous. Nous, on n'est pas là-dedans. Nous, on dit : L'immigration
est importante pour le Québec, mais ce n'est pas juste... ce n'est pas de la marchandise, là. Il faut les
accueillir dans des bonnes conditions. Ce n'est pas de la marchandise jetable,
là. Il ne faut pas dire : On va en
amener 65 000 parce qu'Yves-Thomas Dorval,
son monde a besoin de 60 000 travailleurs, peu importent les conditions de travail qu'ils vont avoir. C'est un ensemble, c'est ça qu'on vous
dit. Nous, on représente les travailleurs
puis les travailleuses. C'est le fun de les accueillir, mais c'est le fun de
leur donner des conditions de travail qui sont respectables. Il ne faut
pas les sortir de la pauvreté pour les amener dans la pauvreté au Québec, là.
M. Derraji :
Non, aucun problème, M. Cadieux. Je comprends votre point de vue. Moi, je
vous ai juste partagé la déclaration de votre prédécesseur,
M. Daniel Boyer.
M. Cadieux
(Serge) : Que je partage à 100 milles à l'heure.
• (12 h 20) •
M. Derraji :
Donc, pour vous, ce sera encore plus difficile si on en réduisait le nombre,
parce que le nombre où on était,
M. Cadieux, on était à 52 000. Le gouvernement, pour sa campagne électorale, a
proposé aux Québécois 40 000. Cette année, il y a 40 000, il propose 43 000. Votre prédécesseur,
il était contre. Moi, c'est juste ça que je veux savoir : Est-ce qu'il y a un changement de position au niveau de
la FTQ par rapport au nombre qu'on accueille? Je peux vous assurer, on
ne mène pas de bataille. Ce qui nous intéresse, ce qui nous intéresse...
M. Cadieux
(Serge) : Non, il n'y a aucune position... La FTQ...
M. Derraji : ... — je
veux juste terminer — ce
qui nous intéresse, c'est répondre à l'essor économique et à la vitalité des régions. La plupart des groupes
qui sont venus, que ce soient les associations patronales ou les groupes
d'accueil, insistent sur la problématique qu'on vit au niveau de la pénurie de main-d'oeuvre,
y compris dans les services publics.
M. Cadieux
(Serge) : Temporaire, la pénurie de main-d'oeuvre temporaire.
Nous, on se préoccupe aussi des conditions dans lesquelles les gens vont être
accueillis. C'est la différence, probablement, entre vous et moi.
M. Derraji : Non, je ne vois pas de différence parce que je
partage aussi votre point de vue par
rapport à la façon avec
laquelle on va intégrer.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Alors, j'imagine que je donne la parole à la députée
de Fabre, et vous avez trois minutes.
Mme Sauvé :
Parfait. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça me fait plaisir.
Mme Sauvé :
Alors, MM. Cadieux, Grondin et Bolduc, bienvenue. Merci pour votre
présentation, pour la qualité de vos mémoires. D'entrée de jeu, je vous dirais
que vous faites bien de nous référer beaucoup à la Commission des partenaires
du marché du travail, que je connais bien, alors que, dans votre recommandation
1, vous souhaitez être reconnu comme acteur de cette réflexion-là. La Commission
des partenaires vous reconnaît comme acteur autour de la table, alors je pense
que ça mérite... ce parallèle-là est méritant, parce qu'effectivement... dans
la réflexion que vous avez et le lien terrain que vous avez avec, bien sûr, les
milliers d'employés et les réalités des entreprises.
Donc, moi, je veux
revenir un peu, là... On a eu un débat quantitatif et qualitatif, alors je
pense qu'il faut discuter des deux, mais revenons sur l'aspect plus qualitatif,
qui avait d'ailleurs été repris par mon collègue d'en face, que je salue. On
parle, bien sûr, de quantitatif, mais de qualitatif dans le succès
d'intégration. Alors, je veux vous entendre nous redire, entre autres... puis
moi, je me préoccupe beaucoup des soins aux aînés et du réseau de la santé, les
préposés aux bénéficiaires, les milliers de postes vacants. Alors, on parle de
qualitatif, on parle de conditions de travail, on parle d'attractivité, parce
qu'on sait que les personnes immigrantes occupent une grande partie des postes
de préposé aux bénéficiaires. Je veux vous entendre encore sur le message que
vous avez à lancer au gouvernement pour s'assurer d'une attractivité de ces
personnes-là, on en a grandement besoin. Au niveau qualitatif, je veux que vous
nous en parliez.
M. Cadieux
(Serge) : Bien, écoutez, je l'ai dit un peu tantôt, ça se joue beaucoup
dans les conditions de travail, là, tu sais, on doit donner... Regardez, déjà,
dans le secteur hospitalier, il y a des gens qui y étaient qui en sont sortis
parce que les conditions de travail sont difficiles.
Mme Sauvé :
Absolument.
M. Cadieux
(Serge) : Si on amène des personnes immigrantes, bien, ils vont
faire le même constat, ces personnes-là. Donc, c'est pour ça, quand je
dis : C'est s'attaquer au faux problème de voir le nombre, le nombre. Je
veux dire, je comprends, là, que les gouvernements... je comprends que c'est
votre tasse de thé à vous autres, mais nous autres, c'est dans quelles
conditions ces gens-là vont être accueillis au Québec, et c'est important. Puis
je vais donner un exemple, hein...
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste 40 minutes au bloc d'échange.
M. Cadieux
(Serge) : ...rappelez-vous, là, le rapport
du Vérificateur général en 2017 blâmait le gouvernement sur la question du français
des personnes immigrantes, qu'il n'y avait pas suffisamment d'énergie, de
programmes qui étaient mis en place pour s'assurer que les gens soient en
mesure de parler et de comprendre le français. Donc, c'est ça qu'on vous dit,
on vous dit : Accueillez-en autant que vous voulez...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Cadieux
(Serge) : ...mais assurez-vous que vos programmes sont
conformes pour remplir l'ensemble de l'oeuvre.
Mme Sauvé :
Je vous entends bien. Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Très bien, merci. Ça conclut le bloc d'échange
avec le parti formant l'opposition
officielle. Nous passons maintenant
au parti formant la deuxième opposition. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.
M. Fontecilla :
Merci. M. Cadieux, M. Bolduc, M. Grondin, je vous souhaite la
bienvenue à l'Assemblée nationale. J'entends votre propos, et ça me rappelle
les propos qu'on a entendus hier ou avant-hier de la part de M. Robert
Laplante, là, qui disait qu'une politique d'immigration, ce n'est pas une
politique de la main-d'oeuvre. C'est un élément, c'est un élément important,
mais c'est un élément parmi d'autres. Ce qu'il faut discuter, c'est... il ne
faut pas confondre les deux, et ça nous amène vers des dérives, là.
Vous êtes les seuls
intervenants, à moins que je me trompe, là, qui nous parlent de la Commission
des partenaires du marché du travail. Ça, ça a été absent, alors que nous avons
parlé des questions des politiques d'emploi, des questions de la main-d'oeuvre
abondamment lors cette commission. Vous avez amené la question du 15 $,
qui est excessivement important, et de réactivation de la main-d'oeuvre,
attirer des gens pour combler des postes. Et le 15 $, qu'on appelle, comme
salaire minimum, c'est une condition sine qua non, là, pour mettre au monde...
ramener du monde sur le marché du travail, là.
Mais je voudrais vous
questionner sur une proposition qui a été faite par l'Association des
restaurateurs du Québec, là, qui nous disait qu'il fallait appliquer dans ce
secteur-là le même programme qui est appliqué dans le secteur agricole, avec
des travailleurs temporaires dans le secteur agricole, où il y a entre autres
une obligation de... le statut, la permanence de la personne au Québec dépend
du lien d'emploi, il est obligé de travailler pour le même employeur, là, comme ça se passe dans quelques fermes, ce qui
rend les travailleurs et travailleuses relativement vulnérables. Est-ce
que vous pensez qu'il faudrait appliquer ce type de politique là au Québec?
M. Cadieux (Serge) : Absolument pas. D'ailleurs, c'est dans notre
mémoire. Je n'ai pas eu le temps de le résumer, mais clairement on le dit que ça doit être exportable, là, que le
travailleur peut travailler dans... que ça ne soit pas rattaché à un emploi en particulier ou à un employeur en
particulier. Il ne faut surtout pas suivre le modèle de l'immigration où,
entre autres, je le disais tantôt, on a même
modifié le Code du travail pour soustraire le droit à la syndicalisation de ces
travailleurs-là. Pour nous, il est fondamental...
que ce soit un travailleur immigrant ou un travailleur québécois, il faut que
ces gens-là aient les mêmes conditions, aient les mêmes conditions,
aient les mêmes droits. Donc, on ne peut pas faire des catégories particulières
pour les travailleurs immigrants.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut le bloc d'échange avec le parti formant la deuxième opposition.
On est rendus à la troisième opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est
à vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci. Merci de
votre présentation, de votre présence en commission. Vous dites que vous
souhaitez mettre davantage la main à la
pâte, là, pour tout ce qui est intégration des nouveaux arrivants, ce qui est
très bien, à mon avis. Il faut que le ministère collabore avec tous les
partenaires, là, du monde du travail. Alors, je voulais savoir... Il y a plusieurs niveaux de discrimination. Il y
en a à l'embauche, mais il y en a aussi dans les équipes de travail. Et,
comme vous êtes plus en lien avec les travailleurs,
j'aimerais savoir : Est-ce que vous compteriez vous engager à essayer de
lutter contre la discrimination dans les équipes de travail? Comment vous
pourriez prendre votre place à ce niveau-là?
M. Cadieux (Serge) : Non, non, mais on le fait. Je vous dirais que la
majorité des syndicats ont des politiques, à l'intérieur même des organisations syndicales, contre la discrimination,
contre le harcèlement entre collègues de travail, là. Donc, ce rôle-là,
ce n'est pas nouveau. Ça, ce rôle-là, on le joue, là, d'une façon régulière à
l'intérieur des différentes organisations dans les milieux de travail, là, ça
existe déjà.
Mme Perry
Mélançon : Et puis par
rapport à la reconnaissance des acquis, plusieurs groupes en ont parlé, là,
depuis lundi, mais il y a peu de solutions,
en ce moment, là, qui sont sur la table, actuellement. Est-ce que vous avez des
suggestions? Qu'est-ce qui pourrait être
fait? Est-ce que c'est plus les ordres professionnels qui devraient assouplir
certaines exigences ou est-ce que le gouvernement devrait explorer
d'autres avenues?
M. Cadieux
(Serge) : Bien, écoutez, nous, ce qu'on a, c'est que c'est long
aussi, le processus, hein? Il y a des ententes — moi,
je suis membre du Barreau du Québec — je
le sais, à une certaine époque, j'étais sur un comité pour les reconnaissances, il y a des ententes avec la
France, exemple, mais ce n'est pas évident, là, il y a beaucoup de
bureaucratie, c'est long. Donc, je pense
qu'on doit être plus agiles. C'est clair qu'on doit améliorer l'agilité là-dedans.
Et on doit aussi des fois forcer les
corporations professionnelles, la ministre de la Santé l'a fait récemment. Je pense que
c'est des choses qui doivent être faites, là, nécessairement.
Mme Perry
Mélançon : Donc, de
travailler davantage avec le ministère du Travail et tous les autres pour arriver
à une solution le plus rapidement possible.
M. Cadieux (Serge) : Oui,
absolument. Il ne faut pas que ça
soit en silo, hein, il faut que ça soit une préoccupation gouvernementale,
donc qui implique plusieurs ministères.
Mme Perry
Mélançon : Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) :
C'est très bien. Merci, M. Cadieux, M. Grondin,
M. Bolduc, pour votre contribution à la commission, vraiment.
Je suspends les
travaux jusqu'à 14 heures. Alors, on se retrouve. Bon lunch.
(Suspension de la séance à
12 h 30)
(Reprise à 14 h 2)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Bon retour de lunch. La Commission
des relations avec les citoyens
reprend ses travaux, et je demande à toutes les personnes de bien
vouloir éteindre la sonnerie et le mode vibration de leurs appareils
électroniques.
Nous sommes réunis aujourd'hui,
cet après-midi, pour poursuivre la consultation générale et les auditions
publiques — et
je pense qu'on les termine cet après-midi, M. le ministre?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
La Présidente
(Mme Chassé) : Oui.
M. Jolin-Barrette :
Bien, ça dépend de vous, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
dépend de moi?
M. Jolin-Barrette :
Si vous voulez nous garder plus longtemps.
La
Présidente (Mme Chassé) : Bien, regardez, mon doux! Quelle
influence que j'ai — sur le
cahier de consultation intitulé La
planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022, et je
vous avouerai que je ne vous laisserai pas vivre beaucoup de suspense,
on va terminer cet après-midi, à moins d'événements fortuits.
Alors, nous
entendrons cet après-midi l'Association québécoise des avocats et avocates en
droit de l'immigration, les Manufacturiers et exportateurs du Québec, la
Commission des partenaires du marché du travail et la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante.
Nous avons
débuté à l'heure, bravo! Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de
l'Association québécoise des avocats
et avocates en droit de l'immigration. On s'est déjà rencontrés. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. À la fin, à une minute de la fin, je vais vous faire
un signe pour vous inviter à conclure. Et je vous invite tout d'abord à
vous présenter puis à débuter.
Association québécoise des avocats et avocates
en droit de l'immigration (AQAADI)
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bonjour. Bonjour à tous et à toutes. Bonjour, Mme la
Présidente. Me Guillaume Cliche-Rivard,
je suis président de l'AQAADI, l'Association québécoise des avocats et avocates
en droit de l'immigration.
M. Kim (Ho Sung) : Je suis
Me Ho Sung Kim, un des administrateurs de l'AQAADI.
Mme Tardif (Sylvie) :
Me Sylvie Tardif, vice-présidente de l'AQAADI.
La Présidente (Mme Chassé) :
...exposé. Allez-y.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Merci beaucoup, et merci de l'invitation, et merci aussi
de prendre le temps de nous écouter. Merci, M. le ministre. On a
parcouru avec attention le document, votre planification, et puis on a quelques
commentaires. Je vais axer ma présentation
sur deux volets : un volet un petit peu plus familial, regroupement
familial, refuge, et un deuxième volet à tendance plus économique.
D'abord, je
veux réitérer que l'AQAADI est toujours ici dans un mode collaboratif, dans un
mode d'ouverture, dans un mode de
solution. On entend plusieurs choses dans les médias, on entend plusieurs
choses aussi de la part de différents partenaires
à l'effet qu'il y aurait ou qu'il y a, en fait, les statistiques le démontrent,
une pénurie de main-d'oeuvre en ce moment au Québec. Il y a une crise,
si on se permet l'expression. Ce n'est pas juste moi qui le dis, mais il y a
différents intervenants qui sont venus le
dire ici cette semaine. Alors, je pense qu'on peut travailler ensemble, tous et
toutes, pour trouver des solutions
pour tenter d'améliorer la situation, pour permettre rapidement qu'on puisse
pallier à ce manque de main-d'oeuvre. Je pense, c'est la priorité qu'on
a tous et toutes, puis c'est dans cette approche-là qu'on vient aujourd'hui
ici.
Le premier
volet que je veux couvrir est par rapport à l'orientation n° 2
et à l'augmentation de la catégorie économique de l'ordre de 65 %. D'emblée, l'augmentation du nombre d'immigrants
économiques, on la salue, et il n'y a pas de problème avec ça. Là où j'ai peut-être une petite
inquiétude, c'est si cette augmentation-là vient au détriment d'autres
catégories. Et le HCR, le
haut-commissariat aux réfugiés, en a parlé ce matin et d'autres groupes en ont
parlé ce matin aussi, mais, si on maintient
des seuils similaires ou si on les augmente un petit peu et qu'en même temps on
demande une augmentation du seuil d'immigration économique, bien, il y a
quelqu'un qui va payer, là. Ce sont des vases communicants sur un quota, et il y a des groupes qui vont payer. Et ces deux
groupes-là, majoritairement, ce sont les groupes de la réunification familiale
et le groupe du refuge.
Vous n'êtes
pas sans savoir que pour parrainer un époux, une épouse, un conjoint ou un
enfant au Canada, en
ce moment — dans
toutes les provinces, c'est pas mal égal — c'est 12 mois, le délai d'attente du moment
où on dépose la demande de
parrainage. Ça veut dire qu'il y a des enfants, des conjoints et des conjointes
qui sont séparés des leurs pendant 12 mois.
Et ça, si on met un quota ou si on diminue le nombre de regroupement familial qu'on accepte, on va créer
un effet de retardement sur cette
réunification familiale là. Et j'ai bien peur, puis c'est ce que je voudrais
juste souligner aujourd'hui, que ce
12 mois là devienne 13, ou 14, ou 15. Il ne faudrait sûrement pas,
certainement pas qu'en voulant augmenter le seuil économique on soit en
train de retarder la réunification d'enfants avec leurs parents. Donc, pour
moi, ça, c'est un volet absolument important puis intéressant de souligner. Je
suis certain que ce n'est pas ça, l'orientation du ministère, je suis certain que ce n'est pas là qu'on s'en va,
mais je voudrais juste quand même souligner que, si on diminue le pourcentage
de... ou si on diminue le pourcentage d'un
en laissant des quotas similaires ou en laissant des chiffres plus ou moins
égaux, bien, il y a des gens qui vont devoir écoper.
Et ça, c'est
la même chose dans le volet du refuge. Le volet du refuge fonctionne en deux
étapes au Canada, vous le savez
aussi. D'abord, on doit être sélectionné, on doit faire l'objet d'une audience
devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et on reçoit notre statut de réfugié. Une audience,
en ce moment, au Canada prend entre deux et trois ans, selon les différents programmes. Et, du moment où
on a une décision positive, on applique à la résidence permanente, et
cette résidence permanente là prend jusqu'à deux ans dans toutes les provinces,
là, le Québec ne fait pas différent des autres, et le Québec émet aussi son certificat de sélection, et donc ce qui veut
dire entre quatre et cinq ans d'attente pour le réfugié, la personne reconnue réfugiée avant de devenir
résident permanent. Dans les cas où la famille est séparée, c'est-à-dire
où une personne est partie avant l'autre, ou
les enfants sont restés, ou certains enfants sont restés, ces enfants-là ou ces
membres de la famille là ne pourront pas
venir avant l'obtention de la résidence permanente. Et donc, si on vient à
augmenter un petit peu aussi les seuils ou, en fait, si on vient augmenter les délais de
traitement en diminuant les seuils dans ces catégories, on vient aussi créer un délai d'attente plus grand
avant que ces familles soient réunifiées, et ça, pour moi, c'est un enjeu
qui m'est important. Je comprends très
bien... puis je suis certain que ce n'est pas l'objectif, mais c'est un dommage
collatéral puis c'est un dommage collatéral qu'il faut retenir.
Alors, ce
qu'on proposerait puis ce qu'on propose, à notre avis, c'est certainement... si
le ministère veut augmenter le nombre
d'immigrants économiques, on n'a aucun problème à ça, mais de ne pas le faire
au détriment des autres catégories plus
vulnérables et au détriment des enfants ou des époux qui sont à l'étranger. Un
enfant qui attend à l'étranger six mois de plus, trois mois de plus, quatre mois de plus, c'est un enfant qui
n'apprend pas le français tout de suite, c'est un enfant qui ne se scolarise pas tout de suite, c'est un enfant
qui n'intègre pas la société canadienne tout de suite. Mais c'est un
enfant qui va vivre toute sa vie au Canada,
c'est un enfant qui est sélectionné, c'est un enfant qui va devenir citoyen
canadien, alors, moi, je pense qu'au
contraire... le plus rapidement on permet l'intégration de ces enfants-là et le
plus on réduit les délais ou le plus rapidement
on permet la réunification des familles, je pense que c'est gagnant-gagnant
pour tout le monde. Et donc ne causons pas
de tort en voulant faire un dommage. Soyons juste certains, certaines de bien
régulariser ou réguler ce facteur. Ça, c'est mon premier point, et je
vois que j'ai passé beaucoup de temps.
Mais, sur le
deuxième, c'est le volet 3, sur l'intégration, la favorisation et
s'assurer — en fait,
le volet 1 et 3 — que nos
immigrants économiques répondent bien aux besoins et que ces immigrants
économiques là soient capables de répondre à la pénurie de main-d'oeuvre
actuelle. Vous n'êtes pas sans savoir que la suspension du programme
étudiant... de l'admissibilité au programme
étudiant ou du dépôt des demandes pour le PEQ pour le programme étudiant nous
inquiète beaucoup. On sait que c'est un
programme qui va revenir, mais, en ce moment, on est à la veille d'une rentrée
universitaire, nous, on a des contacts dans
les universités, les décanats, les responsables de recrutement, les
responsables d'admission des étudiants étrangers, en ce moment, sont
très, très, très inquiets à savoir vers où on s'en va. Parce que des étudiants
qui reprennent une deuxième année ou une
troisième année de programme, on comprend bien que l'effet... ou le moral
n'est pas tout à fait là quand on pensait se
qualifier ou on ne sait pas si on va se qualifier dans quelques mois, on ne
sait pas ce qui attend la
modification, s'il y aura modification dans le PEQ. Alors, il y a beaucoup,
beaucoup d'incertitudes, et c'est certain que ça cause un grave préjudice aux universités, parce que vous n'êtes pas sans
savoir que les étudiants étrangers paient des frais de scolarité assez importants et permettent aux
universités, quand même, d'avoir un bon... disons, de bons revenus, et il
ne faudrait certainement pas que ça diminue.
• (14 h 10) •
On a adopté
le projet de loi n° 9... bien, le Parlement a adopté le projet de loi
n° 9 il y a deux mois maintenant. On a commencé à procéder avec des invitations dans le nouveau système
d'Arrima, mais on n'a encore émis aucun certificat dans le programme régulier à ce jour, à ma
connaissance. Je peux me tromper, mais, à ce jour, il n'y a aucun certificat de
sélection dans le Programme régulier de
travailleurs qualifiés qui a été émis dans les deux mois d'été qui viennent de
passer. On avait sollicité ou demandé
des programmes transitoires ou des mesures transitoires pour permettre
rapidement que des gens puissent être
sélectionnés cet été. Malheureusement, en pénurie de main-d'oeuvre, la
problématique étant qu'il n'y a personne qui a été sélectionné. Il y a des invitations qui ont été faites, mais il n'y
a pas de CSQ qui ont été délivrés. Je comprends que la mise en place d'une réforme prend du temps, là, je
comprends ça, mais c'est quand même inquiétant quand on entend le marché,
quand on entend les acteurs économiques nous
dire qu'on est en pénurie maintenant, mais que, dans les deux derniers mois,
il n'y a pas eu de sélection.
Alors, je
vais m'arrêter là-dessus parce que je n'ai pas beaucoup de temps. On a des
solutions. Je suis très, très ouvert à
discuter de solutions. Il y a des programmes temporaires, je sais que le
ministre va certainement en parler. Et on est vraiment en mode collaboratif, on est ici pour souligner
des points, en mode plus d'approche pour trouver des solutions ensemble,
puis c'est vraiment dans cette orientation-là qu'on veut être aujourd'hui.
Merci beaucoup.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci à vous, Me Cliche-Rivard. Alors, nous
allons maintenant débuter la période d'échange, tout d'abord avec le
parti formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Me Cliche-Rivard,
Me Tardif, Me Sung Kim, bonjour, merci d'être à l'Assemblée
nationale. On se retrouve en commission à nouveau.
Écoutez,
j'aimerais qu'on discute en général de... et vous avez plusieurs clients qui
sont des immigrants. J'aimerais qu'on
discute un peu plus sur le concept de régionalisation, parce que j'imagine que
vous accompagnez vos différents clients dans leurs démarches, à la fois, j'imagine, pour les personnes qui sont
en situation temporaire, quand c'est des permis de travailleurs étrangers
temporaires ou quand c'est des PMI, mais aussi avec le processus régulier
d'immigration puis peut-être même aussi avec
le PEQ, que vous intervenez. Alors, je voudrais savoir quelle est votre opinion
par rapport à la régionalisation pour
savoir comment est-ce qu'on fait pour s'assurer que, sur l'ensemble du
territoire québécois, on puisse assurer la présence des personnes
immigrantes sur l'ensemble du territoire.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : On est très, très, très en faveur d'une régionalisation,
ça, c'est certain. Je pense que c'est important, puis les pénuries de
main-d'oeuvre sont accentuées selon différentes régions, puis ça, c'est très
vrai. Maintenant, je pense que, sur le
pouvoir de sélection, sur le pouvoir d'offres d'emploi validées, notamment, on
voit, à travers la grille actuelle,
où... il y a un certain nombre de points pour une offre d'emploi validée sur la
région de Montréal, mais il y a
beaucoup plus de points, jusqu'à 14 points, à l'extérieur de l'île de Montréal.
Alors, ça, c'est une façon de faire beaucoup plus de points dans la
grille et c'est une façon, je pense, d'améliorer ou de favoriser la
régionalisation.
Maintenant,
dans les permis de travail, c'est sensiblement la même chose aussi, où on peut
faire un permis de travail avec une
offre d'emploi, et l'offre d'emploi est associée à une région. Là où je
voudrais peut-être juste mettre un bémol, c'est où, une fois sélectionné puis une fois
devenu résident permanent, bien, il y a une liberté de circuler puis une
liberté de s'établir là où on voudra. Et
donc je pense qu'avec des «incentives», là, si vous permettez l'anglicisme,
avec des avantages ou avec une
facilitation, les gens vont rester, les gens vont s'établir puis vont demeurer
là où ils le sont, je l'espère. Mais on va vous suivre dans la
régionalisation, c'est certain, parce que les besoins sont régionaux aussi.
M. Jolin-Barrette : Mais revenons là-dessus, là. Vous disiez,
bon : Avec le permis de travail temporaire, c'est destiné à une région, donc c'est un permis de travail
fermé envers une entreprise précisément, supposons, quand on est dans le
PTET, le Programme des travailleurs
étrangers temporaires. Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, du fait que le
permis de travail temporaire soit donné pour
un employeur précisément et que ça permette, dans le fond, d'assurer la
régionalisation des travailleurs étrangers temporaires?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Il y a différentes catégories, mais il y a une
catégorie, effectivement, du permis de travail
fermé, il y a certains programmes qui ont des permis de travail ouverts,
notamment pour le conjoint ou la conjointe dans une situation de
parrainage. Ça, c'est un programme qui est... un permis de travail ouvert, et
là on ne peut pas vraiment contrôler
l'employeur, et ça permet aussi la mobilité du résident permanent qui est
associé ou le citoyen qui est associé au permis. Même chose pour le ou
la réfugiée, qui peut bouger avec son permis de travail ouvert, même chose pour
plusieurs autres catégories.
Maintenant,
pour obtenir un permis de travail fermé avec EIMT, étude d'impact sur le
marché, il faut démontrer qu'il y a
une pénurie de main-d'oeuvre dans un secteur puis il faut avoir une offre
d'emploi. Alors, oui, je n'ai pas de problème à avoir un permis de travail fermé associé à un emploi puis à un
employeur, c'est ce qui existe déjà et ça fonctionne quand même bien, du
moment où la personne respecte les conditions, du moment où c'est l'employeur
aussi qui respecte les conditions qui
étaient associées aussi à l'offre d'emploi. Je pense que le programme
de PTET pourrait effectivement
être accéléré dans sa détermination, puis on
pourrait obtenir le permis de travail plus rapidement. Ça, ça relève
partiellement du niveau fédéral.
Mais, oui, on approuve, on n'a pas de problème avec la régionalisation jusqu'à l'obtention de la résidence, où là les
gens sont libres de s'établir là où ils le voudront.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc,
pour vous, il n'y a pas de problématique, pour répondre à la pénurie de main-d'oeuvre,
d'utiliser le Programme des travailleurs étrangers temporaires avec un permis
de travail fermé dans les différentes régions du Québec. Ça, ça signifie
que, pour une période d'un an, supposons, et renouvelable, un travailleur
étranger temporaire qui a été recruté à l'étranger, bien, il va être assigné
avec un employeur en région, et ça va faire en sorte qu'éventuellement, s'il devient résident permanent, peut-être
même qu'il va vouloir demeurer dans cette région-là parce que son réseau s'est fait là, tout ça. Donc, vous êtes
pleinement à l'aise avec ça, avec le fait qu'on puisse avoir
des permis de travail fermés.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien oui, parce que
ça existe déjà, M. le
ministre, c'est déjà
comme ça que la situation actuelle, elle est. Alors, avec respect, cette situation-là
existant déjà et ayant la pénurie de main-d'oeuvre actuelle, ça ne suffit pas, dans la
mesure où... c'est juste ça. Mais, oui, oui, on est d'accord.
M. Jolin-Barrette : Non, mais en fait je vous pose la question
parce qu'il y en a qui critiquent ce fait-là. Il y en a qui
disent : Écoutez, il ne devrait pas y avoir de permis de travail
fermés, il devrait juste y avoir des permis de travail ouverts.
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Non, nous, on est ouverts aux permis de travail fermés. Puis il existe une disposition... le gouvernement fédéral vient de développer un permis de travail pour
personnes en situation vulnérable, ce qui veut dire que, si la personne devait être victime d'abus de l'employeur, il y a
une disposition du fédéral qui permettrait de passer en permis de travail ouvert, s'il en
faisait la détermination. Alors, pour moi, le gouvernement fédéral, là, est
venu répondre à une problématique, parce qu'effectivement, quand
on associe l'emploi seulement avec un employeur, il peut y avoir des abus des fois, souvent non, la
majorité du temps, non, mais là maintenant il y a une passerelle, il y a une
possibilité pour ces gens-là en situation
d'abus de passer sur un permis de travail pour personnes vulnérables. Alors,
pour moi, ça répond un peu à l'inquiétude, et, oui, il n'y a pas de
problème avec le permis de travail fermé, de notre côté.
M. Jolin-Barrette : Quand vous conseillez vos clients, là, par
rapport au Québec, supposons, dès l'étranger ou ils sont ici, et puis ils veulent devenir résidents
permanents, puis passer par le Programme régulier des travailleurs
qualifiés, est-ce que votre association les
encourage à s'établir en région? Comme, quand vous avez des clients de
l'international, est-ce que vous leur dites : Bien, vous devriez
aller vous établir en région? Est-ce que ça fait partie de vos considérations?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Ça fait partie des considérations. Ça fait aussi partie
des besoins, ou des demandes, ou ce
que client désire aussi comme intégration, ou comme vie, ou qu'est-ce qui est
adapté aussi à son parcours personnel et professionnel. Si le client est dans un secteur clé qui se retrouve
certainement plus à Montréal, bien, dans ce cas-là, on va s'adapter avec les besoins du client. Mais, s'il y
a pénurie de main-d'oeuvre à l'étranger... Puis à plusieurs occasions,
le client, c'est l'entreprise, ce n'est pas
le client à l'étranger nécessairement. Et on a beaucoup d'entreprises,
justement, en région qui viennent nous solliciter pour qu'on puisse les
aider à aller chercher de la main-d'oeuvre à l'étranger, et là on répond
directement aux besoins de pénurie de main-d'oeuvre. Alors, ça se fait vraiment
des deux côtés.
Au niveau du
PRTQ ou de la grille de sélection, certainement que, si quelqu'un est capable
d'avoir une offre d'emploi en région
qui va lui permettre de faire plus de points, s'il est capable de l'obtenir chez
les contacts, c'est certain qu'on va le recommander. Chaque dossier est un cas d'espèce,
comme vous le savez. Mais ça peut arriver, par exemple, dans un dossier où le frère est déjà établi à Montréal ou un autre
dossier où le frère ou la soeur est déjà établi à Québec ou ailleurs,
dans une autre région, bien là, on va aider
à la meilleure intégration avec la famille. Mais donc chaque dossier est un cas
d'espèce. Mais, si on peut favoriser la
région avec nos entreprises puis avec nos entreprises clientes, on est très,
très, très en faveur de la régionalisation parce qu'il y a des besoins
dans toutes les régions du Québec.
M. Jolin-Barrette : Et vous
parlez beaucoup, dans le fond, de la pénurie de main-d'oeuvre, des besoins de régionalisation. On veut augmenter la proportion
de travailleurs qualifiés, à l'immigration économique, à 65 %
justement pour répondre à cette pénurie-là.
Et tout à l'heure, vous parliez des réfugiés et du regroupement familial. Il
faut dire aussi, puis ça, ce n'est
pas tout le monde qui le sait... dans le fond, dans la catégorie économique,
là, sur les travailleurs qualifiés, bien, souvent, vous avez un requérant principal, qui est le demandeur, la
personne immigrante, mais il y a des personnes liées aussi dans la
demande d'immigration. Donc, quand on dit qu'on accepte x nombre de
travailleurs qualifiés ou d'immigration économique,
bien, ce n'est pas uniquement des travailleurs, là, c'est monsieur, madame plus
les enfants aussi. Donc, le Québec accueille des familles, ce n'est pas
uniquement des travailleurs qu'on accueille au niveau de l'immigration permanente. Puis ça, je pense, c'est important de
le rappeler quand on parle de regroupement familial, parce que,
lorsqu'on est dans la catégorie économique, c'est des familles aussi qu'on
accueille.
• (14 h 20) •
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
C'est vrai, c'est vrai, puis la grille est pondérée en fonction de la famille, c'est-à-dire qu'on peut même faire plus de points
dans la grille si on a des enfants et selon l'âge des enfants, parce
qu'on détermine que ça permet une meilleure
intégration puis c'est bien pour l'avenir du Québec. De l'autre côté, la grille
est aussi pondérée avec notre conjoint,
notre conjointe, c'est-à-dire que les seuils à atteindre dans la grille de
sélection sont différents si on est
avec conjoint ou sans conjointe. Alors, effectivement, on va accueillir des
conjoints et des conjointes, qui ne sont pas le requérant principal, mais la plupart du temps ces conjoints-là vont
permettre de faire plusieurs points aussi, et c'est souvent, souvent des gens qui sont aussi diplômés. Alors,
pour nous, dans quelques occasions, c'est difficile de dire qui est
vraiment le requérant principal. On accepte
aussi deux requérants. Il y en a un qui est principal, mais les deux pourraient
se qualifier dans plusieurs, plusieurs, plusieurs situations.
Et je dirais
juste aussi, en terminant, que la pénurie de main-d'oeuvre, elle touche aussi
tous les secteurs. Elle touche, bien
sûr, le volet qui se qualifie ou le candidat qui se qualifie au PRTQ, mais
aussi dans les catégories moins qualifiées. On a aussi une pénurie de main-d'oeuvre en matière de préposés aux
bénéficiaires, par exemple, ou dans plusieurs autres secteurs qui, eux, ne se qualifient pas nécessairement au
PRTQ et qui sont répondus, notamment ou nommément, par d'autres programmes, que ça soit la réunification
familiale, que ça soit par l'immigration économique mais le deuxième conjoint
ou que ça soit par d'autres. Donc, c'est un
tout, nos besoins économiques, vous le savez plus que moi, probablement. On
a des besoins globaux et pas juste en termes de haute qualification, mais aussi
en termes de moyenne ou basse qualification.
M. Jolin-Barrette : Parfait.
M. Kim
(Ho Sung) : Juste pour ajouter, pour le volet du regroupement
familial, on ne parle pas juste des épouses et des enfants. On doit penser aux parents aussi, parce que les jeunes...
la famille d'un jeune travailleur qualifié qui vient ici avec des jeunes enfants, ils vont avoir besoin
d'aide de leur famille, alors... puis souvent ils vont essayer de parrainer
leurs parents aussi, qui vont aider ces
jeunes couples de travailler puis amener leur apport économique pour notre
province. Puis le parrainage des parents, c'est un programme assez
important aussi.
M. Jolin-Barrette : Donc, dans ce que vous dites sur votre dernière
intervention, vous dites, pour que ça soit clair pour tout le monde, là : Au niveau du regroupement familial, là,
dans le fond, supposons qu'il y a une famille qui vient dans le cadre de l'immigration économique, monsieur,
madame, les enfants, bien, vous dites : Par la suite, au regroupement
familial, il est possible que cette
famille-là qui a immigré comme travailleur qualifié dans la catégorie
immigration économique veuille faire
venir les grands-parents des deux côtés. Donc, le regroupement familial, c'est
au niveau des ascendants puis au niveau des descendants, donc les
enfants, mais aussi les grands-parents.
Écoutez, je
vous remercie pour la présentation de votre mémoire. Je sais que j'ai des
collègues qui veulent poser des questions.
La
Présidente (Mme Chassé) :
C'est la députée de Bellechasse qui prend la parole? Allez-y, il vous reste
4 min 30 s.
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
me fait plaisir.
Mme Lachance :
Madame messieurs, merci d'être là. Merci pour votre exposé. Je vais y aller
brièvement. Vous avez critiqué le seuil d'immigration, qui, selon vous,
n'est pas assez élevé. Selon vous, quel serait le seuil à atteindre?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Moi, je pense que le seuil à atteindre ne devrait plutôt
pas être fixé par nous, certainement pas,
mais plutôt par les besoins de... puis les besoins puis les capacités
d'intégration, un mélange des deux. Le
nombre à dire exact, moi, je le qualifierais plutôt... je le demanderais
peut-être plus aux chambres de commerce ou aux industries qui sont actuellement en pénurie de main-d'oeuvre. Pour moi,
du moment où il y aura une pénurie de main-d'oeuvre, ça
ne sera pas adéquat ou judicieux de parler de quotas ou de seuils, dans la
mesure où, quand il y a des emplois, quand il
y a une capacité d'emploi réelle ou quand quelqu'un est prêt à venir s'intégrer
au Québec avec un emploi, il ne devrait pas y avoir de seuil et on ne
devrait pas arrêter de traiter les demandes en novembre ou en octobre parce
qu'on a atteint le 40 000, ou le
50 000, ou le 55 000. Si ces gens-là sont en emploi puis ils sont
capables de s'intégrer, moi, je ne pense pas que l'idée d'un seuil devrait être la bonne, mais plutôt à quel point on est
capables de les intégrer en emploi rapidement, selon les besoins du marché. Je pense que ça, c'est plus
judicieux puis ça va améliorer, probablement, ou répondre davantage aux
besoins de l'économie québécoise.
Mme Lachance :
Merci. Vous le dites bien, la capacité d'accueil est tributaire de la capacité
d'intégration qu'on a et vous avez aussi bien nommé la pénurie de
main-d'oeuvre, qui est quand même importante chez nous.
J'aimerais
ça revenir à l'orientation 2, en fait, dans votre mémoire, où vous nous
mentionnez qu'«une augmentation des
services à l'intégration servira possiblement davantage la catégorie des
immigrants économiques qu'humanitaires». Vous vous basez sur quoi pour
avancer ceci?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, il y a un élément qui est important pour nous,
puis c'est quelque chose dont on
devra parler rapidement aussi, c'est la reconnaissance des acquis puis la
reconnaissance des diplômes, puis ça, je sais que le gouvernement en a
fait une priorité, puis on a très, très hâte d'entendre les orientations
là-dessus. Mais, si on fait le parallèle
avec le nouveau programme de suivi ou le parcours personnalisé, si on fait la
suite de ce parcours personnalisé là pour
se faire reconfirmer que notre
diplôme n'est pas reconnu, ça ne va pas vraiment être utile pour ces
personnes. Alors, je pense que ce parcours personnalisé là doit aller davantage
en corrélation avec une aide au
niveau de la reconnaissance des acquis
et des diplômes, dans la mesure où c'est ça qui est difficile pour l'immigrant
économique qui est sélectionné sur la base de ses qualifications, de ses diplômes, de ses emplois de maintenant
arriver ou réussir une intégration dans laquelle, si certains de ces
diplômes-là ne sont pas reconnus, c'est sûr qu'eux vont avoir un certain besoin
d'aide ou une certaine attente qui sera déçue.
Alors,
travaillons ensemble, travaillons tous et toutes ensemble pour reconnaître ces
acquis-là pour que ces gens-là puissent, le plus vite possible, aider la
société québécoise dans ce dont pourquoi ils ont été sélectionnés et formés et investissons là-dedans plutôt que dans un
programme d'accueil, ou d'intégration, ou de suivi qui ne va pas les aider
autre que leur dire que leur programme n'est pas reconnu. Pour moi, c'est là la
clé : investissons ou trouvons des solutions de reconnaissance d'acquis pour que ces gens-là puissent, le plus
rapidement, réussir leur parcours. Ça, c'est la clé. Et, pour l'instant, on est très, très, très en attente puis
on a très, très hâte de travailler avec le ministère puis le gouvernement
pour qu'on puisse reconnaître les acquis et les diplômes des candidats à
l'immigration qui sont sélectionnés pour ces mêmes, disons, facteurs-là.
Mme Lachance :
Me reste-t-il quelques secondes?
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste une minute.
Mme Lachance :
Excellent. En terminant, vous mentionnez que le niveau de rétention au niveau
des immigrants économiques est à
parfaire, donc qu'il est plus faible. Avez-vous des données? Vous êtes-vous
basés sur une statistique?
Mme Tardif
(Sylvie) : L'expérience seulement.
Mme Lachance :
Donc, ce n'est pas...
Mme Tardif (Sylvie) : Ce qu'on voit dans nos pratiques, depuis
25 ans que je suis avocate en immigration, c'est que, curieusement, la personne qui vient ici en besoin,
vulnérable ou parrainée a déjà une motivation, améliore sa vie automatiquement,
souvent va prendre tous les moyens pour
améliorer son sort, malgré peut-être son peu de compétences, alors que
l'immigrant économique a presque une
attente. Il veut arriver, oui, avec des compétences qu'il veut mettre à profit
pour le Québec, et quand... confronté
à des obstacles, ça va être le premier déçu. Alors, on a des problèmes de
rétention, en fait, pas sur des chiffres mais par expérience, davantage
dans la clientèle économique que dans la clientèle humanitaire.
Mme Lachance :
...
Mme Tardif
(Sylvie) : Non.
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça va conclure.
Mme Lachance :
Merci.
Mme Tardif
(Sylvie) : Je vous en prie.
Mme Lachance :
Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, la députée de
Bellechasse. On passe maintenant au groupe formant l'opposition
officielle. Le député de Nelligan prend la parole. Allez-y.
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. Madame messieurs, bienvenue à la commission, toujours un
plaisir de vous rencontrer dans un autre contexte, pas le
p. l. n° 9, beaucoup plus agréable de
parler de la prochaine planification.
Vous ramenez un point
important au niveau de l'orientation 1, et c'est la
première fois, de mémoire, que je l'entends.
Je ne vais pas aborder les arguments que vous mettez sur la table par rapport à
la pénurie de main-d'oeuvre, parce que
je pense qu'à la dernière journée nous avons beaucoup entendu au niveau de la
pénurie, mais vous ramenez l'Accord Canada-Québec
et vous semblez être critiques par rapport à ça parce que ça met en péril déjà
les engagements du Québec par rapport
au Canada, surtout qu'on veut aller rechercher nos pouvoirs par rapport au
Canada. Mais le Québec, selon vous, maintenant,
avec la nouvelle planification pour les deux prochaines années, comment il se
positionne et comment il sera après deux ans?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, on se retrouve dans une même tangente où
l'augmentation... où, en tout cas, le
gouvernement actuel fédéral, là, vous savez qu'il y a des élections à venir,
mais le gouvernement actuel veut... prévoit ou augmente ses cibles pour les années à venir puis les augmente d'une
manière significative. Alors, dans une logique où le Québec garde des seuils similaires ou les augmente
mais de manière limitée, bien, la disproportion ou la distorsion va
continuer de s'accentuer dans les prochaines
années. Et avec la capacité et le taux de rétention qu'on a en plus, peut-être
qu'il faudrait avoir le réflexe inverse, il faudrait avoir le réflexe
inverse d'en inviter davantage pour être certains de préserver notre équité
démographique.
M. Derraji :
O.K. Je vais pousser le raisonnement avec vous, parce que c'est un point très
important, ça n'a pas été abordé
avant. Pouvez-vous éclairer la population de manière générale sur en quoi ça va
affecter le Québec? Là, vous parlez vraiment très macro au niveau de...
mais concrètement, si on garde les seuils que le gouvernement caquiste propose présentement, 40 000, 43 000, on va
aller doucement à 52 000 ou à 51 000 en 2022, c'est quoi, l'impact
réel, concret pour M. et Mme Tout-le-monde, si je vous dis de
vulgariser ça?
• (14 h 30) •
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, oui, l'impact le plus concret, c'est le
débalancement démographique, c'est-à-dire
qu'il va y avoir plus d'Ontariens et moins de Québécois, et plus de Canadiens
du reste du Canada et moins de Québécois, et ça, dans l'urne,
au niveau du gouvernement fédéral ou du vote fédéral, bien, ça va avoir un
impact. On a vu, dans les dernières
années, la modification de la carte électorale fédérale, dans laquelle les
provinces, outre que le Québec, ont proportionnellement gagné par rapport... en termes de sièges, là, en pourcentage, alors là il
y a un débalancement. C'est
sûr que plus la pénurie de main-d'oeuvre au Québec va s'accentuer aussi, plus le Québec va
perdre des contrats, plus qu'économiquement
il va y avoir des emplois perdus et plus qu'il va y avoir aussi un
débalancement, si on n'est pas capables de répondre aux besoins économiques
du Québec, bien, des débalancements ou des déplacements vers les autres
provinces pour les entreprises.
Alors, il y a des
volets à tous les niveaux. Plus qu'on continue dans un débalancement, le moins
le Québec sera avantagé. Certainement, dans une logique de démographie où la
population est vieillissante, ça, c'est un problème qui touche le reste du Canada, mais le reste du Canada tente de le gérer
avec un pourcentage d'immigration plus élevé, et donc tend à débalancer le vieillissement, alors que
nous, bien, on semble aller plutôt... pas à contre-courant, mais rejoindre
plus difficilement cette capacité à diminuer l'impact démographique, là, ou le
vieillissement de la population.
M. Derraji :
C'est très intéressant, Me Cliche-Rivard, ce que vous ramenez sur la table
parce que, depuis le début, les gens
disaient qu'il n'y a que des arguments économiques pour contrer la pénurie de
main-d'oeuvre. Ce que vous êtes en train
de dire aujourd'hui au gouvernement caquiste, de faire attention aussi par
rapport à la place du Québec au Canada. Et vous pensez qu'avec cette nouvelle politique d'immigration pour les deux
prochaines années, le gouvernement caquiste va nuire à la place du
Québec au niveau canadien?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, ce que je peux dire, c'est que ce n'est pas en
train de l'aider, ça, je peux le dire. Nuire, c'est l'avenir qui le
dira, mais ça ne me semble pas être la tangente appropriée. En diminuant des
seuils de 50 000 à 40 000 cette
année, bien, ça fait 10 000 de moins de néo-Québécois. Et, si on fait
10 000... 8 000 l'année prochaine versus le Canada et proportionnellement, bien, on arrive à plusieurs
dizaines de milliers, et là ça fait un débalancement. Donc, c'est sûr
que les mathématiques répondent à votre question, là.
M. Derraji : Oui, merci
beaucoup. Je peux même ajouter qu'il y a
un débalancement... si je prends le point
de vue du patronat, qu'il réclame 60 000, on a un débalancement de
20 000. Merci pour votre point.
Deuxième
point, et là je ne pense pas qu'on va être d'accord, écoutez, j'ai écouté votre
échange avec le ministre et, écoutez,
corrigez-moi si je me trompe, vous semblez être d'accord avec les travailleurs
temporaires. Juste, corrigez-moi, parce que, là, je veux juste
comprendre le fond de votre pensée. Pourquoi vous êtes pour une immigration
temporaire comme solution au niveau... à nos besoins en main-d'oeuvre?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, je n'ai jamais dit que ça allait être une
solution, j'ai dit : Le programme existe, le travailleur temporaire
répond à un besoin temporaire.
M. Derraji :
Mais vous avez... oui, permis de travail fermé.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Permis de travail fermé, qui se qualifient, eux aussi, à
la résidence permanente. Quand on travaille un an dans un permis de
travail fermé au Québec puis on parle français, on se qualifie à la résidence permanente. Ce sont des volets qui vont permettre la
permanence, la qualification à la résidence permanente. Pour moi, augmenter le nombre de travailleurs étrangers
temporaires, ce n'est pas la solution à tous les miracles et, au contraire,
c'est quand on intègre quelqu'un de manière
permanente, c'est quand on lui offre la capacité d'acheter une maison, quand
on lui offre la capacité d'envoyer ses
enfants à l'école, s'établir, c'est quand on réussit, justement, à créer un
ancrage d'une manière permanente
qu'on répond à une situation de débalancement démographique ou qu'on répond de
manière plus régulière et permanente
à une pénurie de main-d'oeuvre. La solution n'est pas dans le programme
temporaire étranger, le programme temporaire... le PTET existe déjà, un
programme qui ne suffit pas à lui-même pour répondre à la pénurie. On a, en ce moment — puis il y avait un article de CBC ce
matin — une
vingtaine de mille de permis de travail fermés émis au Québec, et on augmente. Cela étant dit, il y a encore
120 000, ou 110 000, ou 140 000 emplois disponibles. Alors,
juste pour compléter, la solution n'est pas seulement dans le
temporaire, il faut en même temps amener des permanents.
M. Derraji :
Oui, parce que je ne pense pas que c'est moi qui va vous faire dire que... les
incertitudes que ça laisse à la fois
chez la personne qui vient avec un permis de travail fermé, aussi pour
l'employeur, vu les risques, hein? Vous avez vu probablement des
changements de loi que même le permis de travail fermé risque de ne pas être
reconduit pour une résidence permanente.
Ma deuxième
question : Pensez-vous que plus... la solution, ça va être la grille de
sélection, les immigrants permanents que
plus du temporaire? Il y a une école de pensée qui dit : Bien, écoutez,
c'est plus de la permanence qu'on veut avec une modification de la
grille de sélection et non pas des travailleurs temporaires.
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Moi, je pense que la réponse se situe un petit peu entre les deux. Je pense qu'il y a
différents besoins, il y a des besoins qui sont temporaires puis il y a
des besoins qui sont permanents. Il y
a une qualification d'immigration temporaire dans laquelle il faut démontrer une étude d'impact sur le
marché, c'est-à-dire une pénurie de main-d'oeuvre dans un secteur clé. On espère qu'une pénurie de
main-d'oeuvre, ça ne durera pas pour toujours, on espère régler la pénurie de main-d'oeuvre et on espère qu'il va y
avoir des modifications à cette pénurie de main-d'oeuvre là. Le travailleur étranger temporaire, jusqu'à ce
qu'il se qualifie, il répond à un besoin temporaire, c'est-à-dire,
effectivement, il faut justifier le
caractère temporel de l'offre d'emploi,
mais il y a aussi d'autres qualificatifs qu'on recherche,
dans une société, qui sont permanents. Alors, pour moi, la
solution se trouve entre les deux, dans une économie ou une planification
de l'économie ou de l'immigration qui se retrouve à avoir une immigration temporaire qui répond à des besoins
temporaires, mais une immigration globale permanente sur la base de qualifications permanentes de longue
durée pour nos immigrants.
M. Derraji : Merci. J'aimerais bien vous entendre par rapport au test des valeurs. Et ce matin nous avons eu un chercheur qui, lui, ramenait une nouvelle façon de
voir... que lui, en tant qu'immigrant qui est venu au Québec en 1990 ou, en tout cas,
dans les années 90, il a plus évolué avec la société. Il nous disait... il
nommait des noms de familles avec qui il a évolué. Selon vous, est-ce que le gouvernement, avec la
démarche, avec l'orientation qu'il propose, s'en va vraiment vers une bonne direction avec son
test des valeurs?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, pour
moi, ce n'est pas la bonne tangente et, pour moi, je trouve que ce que
ça insinue, c'est que les valeurs ne sont
pas bonnes. Si on a besoin d'un test, c'est parce que le message qu'on envoie,
c'est que probablement que les valeurs que vous avez en ce moment... ou on a un doute que les valeurs que vous avez en ce moment correspondent aux nôtres. Alors, pour moi, c'est comme si on envoyait un
message aux immigrants qu'on présume qu'ils ne respectent pas
ces valeurs. Pour moi, ce n'est pas tout à fait le bon fonctionnement.
Quand on
signe une déclaration d'engagement dans un certificat de sélection du Québec,
on s'engage à respecter l'égalité
hommes-femmes, on signe sur l'honneur. On s'engage à respecter la neutralité de
l'État, on s'engage à une société libre
et démocratique, à un État de droit, on fait cet engagement-là
envers le Québec déjà, et c'est des choses qui est pris très au sérieux, où le demandeur, chacun des candidats
signe sa déclaration, et envoie, et fait cette promesse-là et cet
engagement-là envers le gouvernement du
Québec. C'est quelque chose qui est très solennel pour nos clients, nos clientes, et c'est quelque
chose qui est très respecté et qu'ils
comprennent très bien. Et, pour moi, de dire qu'on a besoin de les
tester par la suite, ces valeurs-là, ça
insinue qu'il y a un problème, et ce problème-là, pour moi, n'a pas
été démontré. Pour moi, on ne m'a pas
démontré qu'il y avait un problème avec les valeurs des nouveaux arrivants. Et donc pourquoi créer un test,
alors que, manifestement, je ne vois pas la
problématique actuelle ni à venir sur les valeurs? Au contraire, je pense que
ces gens-là qui choisissent le Québec adoptent, et respectent, et
entérinent nos valeurs, et je pense que c'est plutôt ce message-là qu'on
devrait leur envoyer.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste une minute au bloc d'échange.
M. Derraji :
Je veux vous ramener, très rapidement, pas sur les 18 000 dossiers, mais
ce qui a été ajouté, les 3 000 qui résident ici, au Québec.
Avez-vous de l'écho par rapport à leurs dossiers?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, ces gens-là ont, pour la plupart, fait une
déclaration d'intérêt dans Arrima et, pour l'instant, ils n'ont pas été
invités, à moins d'avoir une... une offre d'emploi validée, pardon.
M. Derraji :
O.K., excusez, je veux juste comprendre, parce qu'au projet de loi n° 9 on s'est engagés à ce que ces gens
régulent leur situation rapidement, donc, dans la plateforme. Donc, est-ce que
vous êtes en train de dire qu'ils ont appliqué dans Arrima et il n'y a
aucun CSQ qui a été envoyé? Est-ce que c'est ça que vous semblez dire?
La Présidente
(Mme Chassé) : En concluant.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Je vais vous le dire clairement : Depuis l'adoption
d'urgence du p.l. n° 9 le 14 juin, il n'y a pas eu de certificat de sélection émis dans le programme
régulier. Dans le programme régulier, il n'y a pas de sélection, aucune
en deux mois. Alors, ça répond à votre question.
M. Derraji : C'est préoccupant.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je te remercie... je vous remercie,
pardon. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant l'opposition
officielle. Nous passons maintenant à la seconde opposition. M. le député de
Laurier-Dorion, la parole est à vous.
M. Fontecilla :
Merci. M. Cliche, Mme Tardif, M. Ho Sung Kim, bienvenue à l'Assemblée
nationale. Peut-être juste une petite
question d'éclaircissement. Les travailleurs temporaires dans le domaine
agricole, qui sont obligés de travailler pour un seul employeur, là,
est-ce qu'ils sont admissibles à une demande de résidence permanente?
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Pas à ma connaissance. Ce n'est pas mon domaine de pratique précis, mais...
M. Fontecilla : En tout cas,
pour ce secteur-là, ce n'est pas... O.K., pas à votre connaissance.
M. Kim
(Ho Sung) : Bien, je pense qu'au niveau des compétences, oui, mais je
pense que la durée du permis de travail n'est pas plus que 12 mois, donc
il ne se qualifiera pas au PEQ.
M. Fontecilla :
Donc, c'est des gens qui sont condamnés à revenir au Canada puis partir, etc.,
sans jamais pouvoir aspirer à devenir résidents permanents.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Alors, s'ils réussissent à se déclarer dans Arrima et
s'ils ont des diplômes, ce qui, on
devine, va être difficile, on va se dire la vérité, parce qu'habituellement
quand on est travailleur agricole on n'a pas un bac en ingénierie, la vérité, je pense que ça va être
très, très, très difficile, et effectivement on se retrouve dans un cercle
où on ne deviendra pas résident.
• (14 h 40) •
M. Fontecilla :
Et je voudrais vous amener du côté des quotas concernant les réfugiés. On a
entendu ce matin le haut-commissaire des Nations unies au Canada pour
les réfugiés et, d'un côté, il avait... il mettait l'emphase sur l'apport économique, au-delà de la question humanitaire, de
ces personnes-là, et, d'autre part, on entendait un discours comme quoi on paie quand même beaucoup, ça nous coûte cher,
là. Dites-moi, la baisse qui est prévue, là, vous l'avez mentionné, là, dans la politique, des cibles d'immigration,
est-ce que, selon vous, ça fait... non seulement, en fait, ça n'honore pas la
politique d'hospitalité, la tradition
d'hospitalité du Québec, là, en matière d'accueil humanitaire, mais aussi, ça
pourrait constituer une... ça pourrait nuire à l'économie du Québec à
long terme?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, le quota, ce qu'il va créer, parce que le Québec
n'a pas une capacité de sélection,
c'est... il n'y a pas une commission de l'immigration au Québec, là, c'est
vraiment une commission fédérale, c'est la Convention de 1951 sur les réfugiés qui détermine, avec une
commission fédérale... qui va déterminer si vous avez le statut ou non. Du moment où vous avez le statut,
puis ça, c'est décidé par le fédéral, vous appliquez sur la résidence,
et là le Québec va délivrer un CSQ. La
question, c'est : C'est quoi, les délais pour que le Québec vous émette le
CSQ? Et, si vous avez le quota, si le
quota est déjà rempli, bien là, on va perdre du temps, en fait. Et là où
l'élément est vraiment problématique, c'est au niveau humain...
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : ...au niveau de permettre aux familles d'être ensemble
le plus rapidement possible. Alors, à moyen terme, c'est sûr que ça peut
faire très mal à des familles qui ne sont pas réunies.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est très bien. Ça conclut le bloc d'échange avec la seconde opposition. Nous
passons maintenant au groupe formant la troisième opposition. Mme la députée de
Gaspé, la parole est à vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci. Bonjour,
bon après-midi, heureuse de votre présence dans le cadre de cette consultation.
Je vais rentrer dans le vif du sujet concernant
le programme PTET. Vous avez mentionné, bon, que c'est un processus très lourd et coûteux,
administrativement. C'est vrai, j'ai parlé à plusieurs employeurs de ma région,
puis, pour 38 employés, par
exemple, ça peut se chiffrer à 250 000 $
et c'est à refaire chaque année. Donc, moi, ça me paraît catastrophique quand j'entends des chiffres comme ça. Comment
est-ce qu'on arrive à réduire les coûts, administrativement? Est-ce que
c'est l'État qui doit s'en charger? Comment est-ce qu'on peut alléger le
fardeau financier pour les employeurs?
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Bien, il y a certainement une discussion ou... je suis certain qu'il y en a,
des discussions déjà avec le gouvernement
fédéral pour accélérer le programme. Le programme d'EIMT est
particulièrement plus
long au Québec que dans d'autres provinces, et les autres provinces ont
beaucoup de programmes accélérés, en 10 jours, des procédures d'urgence qui n'existent pas au
Québec. Alors, c'est certain que le gouvernement fédéral et le
gouvernement du Québec vont pouvoir se parler puis trouver des solutions pour
accélérer.
Mais le Québec a aussi d'autres options, dans la
mesure où, quand on sélectionne quelqu'un à l'étranger, cette personne-là ne peut pas venir avant l'obtention de
sa résidence permanente, c'est-à-dire ne pourra pas venir avant
18 mois, un an, alors que, dans toutes
les autres provinces du Québec... du Canada, pardon, du moment où on a une
sélection par les provinces, on peut
venir tout de suite avec un permis de travail quand on a une offre d'emploi. Et
ça, c'est dans toutes les autres
provinces, et je me demande vraiment pourquoi le Québec ne fait pas cette
demande-là au fédéral, qu'il accepte pour toutes les autres provinces, ce qui veut dire que du moment où on
choisirait un immigrant à l'étranger, on le sélectionnerait, on pourrait
le faire venir tout de suite sur un permis de travail, ce qui réglerait
beaucoup de la pénurie.
Mme Perry
Mélançon : Merci. Vous avez parlé, bon, de l'ajout de bureaux
d'immigration du Québec, que vous accueillez
favorablement, je crois, à l'international, là. Est-ce que vous avez des
attentes particulières? Comment on peut améliorer la gestion de ces
bureaux d'immigration du Québec?
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Bien, pour moi, il va y avoir... la première chose à l'international, c'est une
confiance à rétablir. Pour moi, l'adoption
du projet de loi n° 9 a fait mal au Québec, a fait mal à l'image du
Québec, et la suspension du PEQ, en
ce moment, à l'étranger continue de faire mal à l'image du Québec. Alors, il va
devoir y avoir un rétablissement de
confiance, peut-être un mea culpa, peut-être des excuses officielles pour avoir
fait perdre beaucoup d'années et
d'argent à des familles. Pour moi, ça, c'est troublant, puis les bureaux à
l'étranger vont devoir travailler fort pour rétablir la confiance. On n'a pas entendu le premier ministre
ni le ministre faire des excuses dans l'adoption du p.l. n° 9 à des
dizaines de milliers de familles...
La Présidente (Mme Chassé) : Je
vous invite à conclure.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : ...et, pour moi, ça pourrait commencer par là avant de
rétablir l'image du Québec à l'étranger.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends momentanément les travaux pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 14 h 44)
(Reprise à 14 h 45)
La Présidente (Mme Chassé) :
Bon retour. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants des Manufacturiers et exportateurs du Québec.
Simplement mentionner qu'on a... La dernière fois qu'on s'est
rencontrées... Votre nom, c'est... attendez, votre nom, c'est?
Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ)
Mme Proulx
(Véronique) : Véronique Proulx.
La
Présidente (Mme Chassé) : Véronique Proulx. Vous pesiez quelques
livres de plus puis... Elle s'est lestée de ses quelques livres, et elles sont entre les mains de sa maman, hein? Vous
étiez magnifique et vous l'êtes encore aujourd'hui.
Mme Proulx
(Véronique) : Merci, c'est gentil.
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est un plaisir de vous retrouver,
vraiment. Alors, vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une
minute de la fin, je vais vous inviter à conclure par un signe. Et débutez par,
tout d'abord, vous présenter. Allez-y.
Mme Proulx (Véronique) : Oui, bien sûr. Alors, Véronique Proulx,
présidente-directrice générale de Manufacturiers et exportateurs du
Québec. Je suis avec mon collègue Giany Huyghues-Despointes, qui est
coordonnateur aux métiers manufacturiers, qui est vraiment le spécialiste de la
main-d'oeuvre au sein de notre association.
Alors, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous donner l'opportunité de venir
présenter notre mémoire aujourd'hui.
Je me permets de vous en faire une synthèse et pas nécessairement dans l'ordre
présenté dans le mémoire, mais on pourra par la suite, pendant la
période d'échange, revenir sur certains points si vous le souhaitez.
Alors,
dans un premier temps, pénurie de main-d'oeuvre, quel est l'impact de la
pénurie de main-d'oeuvre sur le secteur
manufacturier au Québec? Vous le savez, c'est l'enjeu numéro un du secteur
manufacturier. Au premier trimestre de
2019, on comptait plus de 16 000 postes vacants dans le secteur. 60 %
de ces postes vacants là requièrent un secondaire V et moins, 40 %, c'est un D.E.C. ou un D.E.P.,
donc on parle de métiers techniques. La pénurie est présente chez tous
nos membres dans les différentes régions du
Québec, dans les entreprises de toutes tailles, toutefois l'impact qu'elle
prend est très différent.
Alors, je vous donne quelques exemples. J'ai un membre qui est dans le
Centre-du-Québec, qui a 600 employés, qui
refuse des commandes à chaque semaine, à chaque mois faute d'avoir la
main-d'oeuvre nécessaire. Donc, on n'est pas dans la croissance, on n'est pas dans la consolidation, on est vraiment
en train de perdre des parts de marché. Nous avons un autre membre sur
la Rive-Sud de Montréal, 750 employés, il doit maintenant sous-traiter
certaines tâches qui étaient faites à
l'interne. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas la main-d'oeuvre nécessaire. Tout ça
lui coûte 1 million de plus par année. C'est une entreprise qui est dans un secteur qui est très compétitif,
les marges sont faibles, donc, nécessairement, ça nuit à sa compétitivité. Je peux également vous citer le cas
de Rotobec, en Montérégie, qui avait fait une entrevue à Radio-Can et
qui avait mentionné qu'ils s'implantaient
aux États-Unis et non au Québec parce qu'ils n'avaient pas accès à la main-d'oeuvre
nécessaire, donc, et nécessairement, là, on
perd des investissements qui auraient pu se faire au Québec. On comprend
que la pénurie est un important frein à la
croissance du secteur manufacturier. Dans ce contexte-là et à partir de ces
données-là, ma présentation va porter essentiellement sur trois
points : les seuils, la grille de sélection et l'intégration des
immigrants.
Les
seuils. Alors, les données démontrent clairement que le bassin de travailleurs
n'est pas suffisamment grand pour répondre aux besoins du secteur
manufacturier. Ce n'est pas nécessairement une question d'attractivité ou de
salaire, particulièrement dans ce
secteur-là, les entreprises rémunèrent quand même bien leurs employés par
rapport à d'autres secteurs d'activité.
Essentiellement, c'est qu'il n'y a pas suffisamment de gens, et dans le secteur
manufacturier, c'est très difficile d'aller
chercher les clientèles éloignées du marché du travail. On a parlé beaucoup des
travailleurs expérimentés, on a parlé des jeunes, on a parlé des gens
qui ont certains handicaps, difficile de les intégrer dans des chaînes de
montage, et c'est pourquoi, pour le secteur
manufacturier, l'immigration est vraiment la voie privilégiée. Et, compte tenu
des données que l'on voit, que l'on
constate, pour nous, il faut augmenter les seuils. Qu'en est-il du nombre?
Alors, on va se rallier à nos nombreux
collègues de la communauté d'affaires qui ont fait des présentations ici, qui
ont invoqué le seuil de 60 000, qui serait un seuil souhaitable
pour tous les secteurs d'activité.
Maintenant,
les seuils, c'est une chose, il faut aussi avoir une grille de sélection qui
permet de favoriser l'immigration dans
le secteur manufacturier. Il y a trois points sur lesquels on doit travailler
si on veut vraiment attirer davantage d'immigration
permanente qui a un intérêt, une volonté de travailler dans le secteur. Le
premier, c'est le français. Alors, actuellement,
on demande un niveau 7 dans la grille de sélection, on propose de le baisser.
Pourquoi? Parce qu'un travailleur qui
arrive, un immigrant qui arrive de l'Asie, des Philippines ou de l'Amérique
latine, en partant, sera disqualifié s'il souhaite passer par l'immigration permanente. Or, beaucoup
de ces travailleurs-là de l'Asie et de l'Amérique latine passent par le
PTET, le programme des travailleurs temporaires étrangers, travaillent dans le
secteur manufacturier au Québec. Si on abaissait
le niveau un peu, si on leur permettait... on leur donnait plus de temps pour
apprendre le français, ce sont des gens qui souhaiteraient... et qui
pourraient passer via l'immigration permanente et poursuivre leur carrière dans
le secteur manufacturier. On ne dit pas que
le français n'est pas important, au contraire, on parle de rabaisser un peu le
niveau, parce que le niveau est quand même excessivement élevé, leur
donner plus de temps, plus de moyens pour pouvoir l'apprendre.
• (14 h 50) •
Deuxième point, reconnaissance
des compétences versus les diplômes. Alors, ce qu'on propose, c'est une reconnaissance par compétences. Présentement, dans la grille, il n'y a pas d'espace où on peut... il n'y a
pas de critères qui nous permettent
de reconnaître les compétences que les gens ont acquises à l'étranger dans le
secteur manufacturier. Un immigrant qui a travaillé cinq ans, 10 ans dans une entreprise
manufacturière, qui a fait de la soudure, de la mécanique, toutes sortes de tâches, il a la connaissance, il a la
compétence et il a l'intérêt aussi de venir travailler dans le
secteur. Alors, pour nous, c'est un élément qui devrait s'y retrouver,
encore une fois, pour favoriser l'immigration pour le secteur.
Le
dernier, et non le moindre, c'est le niveau de scolarisation. Et je vous
rappelle, 60 % des postes
vacants requièrent un
secondaire V et moins. Présentement, quelqu'un qui n'a pas de diplôme de
secondaire V n'aura pas de points dans la grille au niveau de la diplomation. Encore une fois, on comprend
pourquoi cette grille-là existe et pourquoi on veut donner plus de points plus le diplôme professionnel est
élevé, mais, si on veut pouvoir répondre aux besoins du secteur manufacturier, on propose de revoir cette pondération-là, de
permettre à des gens qui ont peut-être une moins forte diplomation mais qui ont des compétences de pouvoir se qualifier plus facilement via l'immigration permanente
et — je vais
revenir par la suite — on propose aussi d'accompagner et de former ces gens-là
pour assurer leur mobilité une fois qu'ils arrivent au Québec.
Alors,
ça m'amène au troisième point, l'intégration, et non le moindre. Alors, c'est
bien de faire venir plus de gens, de
pouvoir revoir les critères de sélection pour répondre aux besoins du marché du
travail dans le manufacturier, mais il faut également les intégrer. On a parlé de francisation, et le gouvernement a
fait plusieurs annonces récemment en ce sens, et ça a été bienvenu dans notre secteur. Spécifiquement,
sur la francisation, on propose essentiellement d'élargir et de rendre
plus flexible l'offre de formation autant pour le travailleur que pour
l'entreprise. Alors, on a des entreprises qui nous disent : Une PME en
région, 50 employés, moi, j'ai deux personnes que j'ai besoin de mettre en
francisation, si je vais voir le ministère
de l'Éducation, on me dit que ça prend une cohorte de 10, donc je n'ai pas
accès aux subventions. J'ai besoin de 10 personnes, puis ils doivent
être d'un niveau similaire aussi. Donc, je n'ai pas de moyens pour pouvoir
former ces gens-là en entreprise. Et j'aurai
plusieurs autres suggestions que je pourrai vous faire par la suite, mais
essentiellement, c'est la notion de flexibilité qu'on demande.
Capacité
d'accueil en région. Encore une fois, c'est une chose d'amener les gens ici, de
les amener en région, qu'ils trouvent
un emploi, mais il y a toute la question de l'intégration, donc
infrastructures. Où est-ce qu'ils vont habiter? Quelles écoles leurs enfants vont aller? Est-ce qu'il y a
du transport, un emploi pour le conjoint? Et présentement il n'y a pas
de leadership au niveau de l'écosystème
régional. Pour nous, l'intégration en région, ça se fait via les organismes
régionaux. Mais on demande au gouvernement
d'identifier avec les régions un partenaire qui peut assurer ce leadership-là,
que ce soient les municipalités, les
CRPMT, il y a plusieurs organes qui existent, et ça peut être à géométrie
variable, mais l'idée, c'est d'en avoir un par région pour amener
l'écosystème à travailler ensemble au bénéfice du travailleur et de
l'entreprise.
Et finalement, et non
le moindre, la formation en continu. Donc, on disait : Ce serait
intéressant de faire venir des gens qui ont
peut-être un moins grand... un niveau de diplomation plus faible, pardon, mais
il faut aussi leur offrir de la formation en continu. Dans le secteur
manufacturier, on parle beaucoup du PAMT, qui est un programme d'accompagnement.
Essentiellement, on prend un travailleur
expérimenté avec quelqu'un qui vient d'arriver et on le forme sur le plancher.
Donc, les gens qui arrivent, qui sont issus
de l'immigration, qui n'ont pas un haut taux de diplomation ou des gens qui
arrivent avec des métiers très techniques, est-ce qu'on pourrait leur
offrir systématiquement le PAMT pour s'assurer de les former, d'augmenter leur mobilité? Et, on le sait, dans le
secteur manufacturier... dans tous les secteurs, en fait, d'ici 10 ans,
30 % des postes seront fortement
transformés, seront complètement changés, donc nos travailleurs doivent être
capables d'évoluer, de suivre
l'évolution technologique. Et on parle d'industrie 4.0, il va y avoir beaucoup
de changements à venir dans le secteur manufacturier,
et on veut s'assurer de la mobilité de ces travailleurs-là, s'assurer qu'ils
soient capables de contribuer au succès des entreprises, et ça sera
gagnant, encore une fois, autant pour les travailleurs que pour les employeurs.
Donc,
en conclusion, on souhaite que le gouvernement revoie ses seuils à la hausse. On souhaite revoir
la grille de sélection au niveau
des trois critères que l'on a mentionnés pour favoriser une main-d'oeuvre manufacturière. La grille telle qu'elle est présentement ne permet pas au secteur manufacturier à
espérer que l'immigration permanente puisse pallier en partie ses besoins. Et finalement
on demande de travailler encore davantage au
niveau de l'intégration pour faciliter, favoriser l'intégration, l'intégration au sein des entreprises manufacturières. Alors, je vous
remercie. Ça me fera plaisir d'échanger avec vous pour la suite.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous. Mme Proulx, pouvez-vous m'aider à me dire comment je
prononce le nom de famille de votre collègue?
Mme Proulx
(Véronique) : Giany Huyghues-Despointes.
La Présidente
(Mme Chassé) : Huyghues-Despointes? Aussi simple que ça?
Mme Proulx
(Véronique) : Oui, exactement.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. C'est plus compliqué au niveau
de l'écrit que de la prononciation. Merci de l'éclairage.
Alors, je passe maintenant
la parole au ministre pour le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement.
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Mme Proulx, M. Huyghues-Despointes, bonjour,
merci d'être présents en commission pour nous présenter votre mémoire.
Dans
une de vos recommandations sur laquelle vous être revenue, vous
dites : Au niveau de la grille de sélection, ça ne favorise pas le manufacturier. Dans l'ancien
système, avec l'ancienne grille, avec la grille, on se retrouvait dans
une situation où c'est vrai que, si vous aviez un doctorat, une maîtrise, un bac,
bien, votre pointage était plus élevé. Par
contre, avec le nouveau système,
avec Arrima, ce qu'on souhaite faire, c'est en fonction des besoins du marché du travail. Donc, si on invite des gens
qui travaillent dans votre industrie, bien, ils vont être sélectionnés en fonction de
leurs compétences, de leur champ de
travail professionnel, et ensuite la grille s'applique. Mais ce que
je veux dire, à la base, si l'invitation porte là-dessus, dans ce secteur-là, vous vous retrouvez dans une situation
où vous n'êtes pas en compétition avec les autres secteurs. Donc, ça, c'est la beauté d'Arrima, de faire en
sorte qu'en fonction de la pénurie de
main-d'oeuvre dans les différents
secteurs on peut inviter en fonction des différentes régions aussi.
Là,
la grille de sélection aussi, il y a des améliorations à apporter, mais c'est sûr que, vu qu'on change
de système, ce n'est plus la même
logique en fonction de l'utilisation de la grille de sélection. Donc, ça fait
en sorte que vous n'allez pas être pris
dans la même situation que c'était le cas dans le passé avec le premier
arrivé, premier servi, basé sur le nombre d'années d'études, principalement,
qui donnait un nombre de points fort important dans la grille de sélection.
Ça
fait que c'était juste pour mettre la table, là, pour les fins de la discussion,
pour orienter, parce qu'on est bien conscients
que, justement, l'ancienne grille et l'ancienne méthode de
sélection faisaient en sorte que ça ne répondait pas nécessairement
aux besoins du marché du travail. Donc, c'est pour ça qu'on est allés dans ce
sens-là, là, entre autres, et que, par ailleurs, il était nécessaire
de rembourser les 18 000 dossiers pour faire en sorte de pouvoir justement
répondre aux besoins des différentes entreprises.
Au niveau
de la régionalisation, vos membres, est-ce qu'ils font appel beaucoup
aux travailleurs étrangers temporaires?
Mme Proulx
(Véronique) : De plus en plus, de plus en plus.
M. Jolin-Barrette :
Vous diriez à hauteur de quel volume environ?
Mme Proulx
(Véronique) : Je vous dirais... j'ai envie de vous dire...
M. Huyghues-Despointes
(Giany) : ...
Mme Proulx (Véronique) : Moi, j'irais jusqu'à 30 %. 30 %, pas en
termes de nombre d'employés, mais 30 % des entreprises qui
appliquent sur le PTET.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis j'imagine qu'ils ont des récriminations par rapport à la durée de temps puis par rapport au nombre de personnes
qu'on peut avoir dans le Programme de travailleurs étrangers temporaires.
Mme Proulx
(Véronique) : Bien sûr, bien sûr, bien sûr, et plusieurs
autres.
M. Jolin-Barrette : O.K. Ça, c'est quelque chose qui me préoccupe
grandement, puis on travaille vraiment
pour avoir un assouplissement au niveau
du Programme des travailleurs étrangers temporaires, parce que, justement,
ça peut être une solution pour
répondre à la pénurie de
main-d'oeuvre. Et par la suite ces personnes-là
peuvent être permanentisées par le biais
du Programme régulier des travailleurs qualifiés, mais
l'important, c'est de répondre tout de suite aux besoins du
marché du travail. Donc, là-dessus, sachez que je suis très
préoccupé relativement au fait qu'il
y a certains délais et qu'il y a un plafond aussi associé à
l'utilisation de ce programme.
Mais revenons
sur la régionalisation. Est-ce que c'est difficile pour vos membres d'aller
chercher des gens pour s'établir en région?
Mme Proulx
(Véronique) : Si c'est difficile de les amener en région?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme Proulx
(Véronique) : Absolument, absolument. Donc, on travaille avec certaines entreprises
pour les aider à identifier des
candidats qui sont basés à Montréal, parce qu'il y a un taux de chômage quand même qui est plus élevé à Montréal
au niveau des gens issus de l'immigration depuis moins de cinq ans, difficile, ils rencontrent plusieurs
freins. Les gens se sont installés,
ils ont leur vie, leur appartement, etc., donc il y a toute la notion de
déménagement, de déplacement.
Il y a
aussi la notion d'infrastructures d'accueil. J'ai souvent cité le cas d'une entreprise, dans les Cantons-de-l'Est,
qui est à 1 h 30 min de Montréal.
Autour d'elle, il y a un tout petit village, donc il n'y a pas
d'appartements, il n'y a pas de transport
en commun. C'est très, très difficile d'amener les gens pour s'établir
là-bas, alors que l'entreprise, c'est ce qu'elle souhaite, elle est prête
à offrir des bonnes conditions. L'infrastructure d'accueil n'est pas là, et
c'est très similaire dans plusieurs régions du Québec.
M. Jolin-Barrette : Puis
qu'est-ce que vous pensez qu'on peut faire pour améliorer ça?
• (15 heures) •
Mme Proulx
(Véronique) : Bien, on voit,
dans certaines... il y a eu certains cas à succès, O.K.,
certaines entreprises qui ont réussi,
qui ont mobilisé les intervenants, notamment l'entreprise Exceldor, qui est basée à Saint-Anselme, à l'extérieur de Québec. Alors, ce qu'elle a fait... c'est une
grande entreprise, là, donc elle a fait venir 200 travailleurs issus de
l'immigration basés à Montréal et leurs familles, elle les a amenés à
Saint-Anselme, mais elle a pris l'initiative de rallier tous les partenaires,
donc commissions scolaires, les syndicats, la municipalité, pour être capable
d'avoir une offre de services complète à offrir à ces gens-là, d'être capable
de les intégrer.
Maintenant,
Exceldor, c'est une grande entreprise, ce n'est pas nécessairement à la portée
de toutes les entreprises ou de
toutes les PME. Et c'est pourquoi on se dit : Est-ce qu'on peut prendre
les modèles à succès au Québec — parce qu'il y en a eu d'autres, je pense, en Abitibi — et de voir comment on peut répliquer ça,
mais en travaillant avec les acteurs régionaux, parce que je ne pense pas qu'il y ait un modèle qui va faire partout,
mais en travaillant avec les instances régionales? Mais présentement, ce qu'on voit, c'est qu'il n'y a pas
de leadership clair dans les régions pour dire : O.K., c'est qui, le
porteur, et c'est qui qui rallie les gens,
puis c'est qui qui fait en sorte qu'on va avoir une offre pour les gens qui
viennent s'installer dans notre région?
M. Jolin-Barrette : Tout à l'heure, vous abordiez la question de la
francisation. Comment est-ce que vous voyez ça, la francisation en entreprise? Parce que, là, le ministère a annoncé des
sommes supplémentaires en matière de francisation, une bonification, une allocation. Tout à l'heure,
préalablement à votre passage, on a eu la FTQ qui disait : Bien,
écoutez, nous, on veut franciser directement en entreprise, on veut que les
entreprises utilisent davantage les subventions disponibles. Comment vous voyez ça, là, la francisation en
entreprise? Est-ce que vous pensez que c'est préférable de libérer les
gens pour qu'ils aillent suivre des cours avec le ministère, avec les
commissions scolaires ou de faire la francisation directement en entreprise?
Mme Proulx
(Véronique) : En entreprise,
parce que parfois les gens, justement, n'ont pas de moyen de transport, donc difficile de se rendre à l'extérieur. Après
ça, c'est la question est-ce qu'on le fait sur les heures de travail ou pas.
C'est clair que, dans un contexte de
pénurie, pour certaines entreprises, ça devient très difficile de libérer des
gens pour de la formation, que ça
soit de la francisation ou autre, c'est un défi. Mais je pense qu'à prime abord
ça devrait se faire en entreprise, mais
avec plus de flexibilité au niveau des groupes. Et je pense que j'en avais
parlé au p.l. n° 9 aussi, de dire : Est-ce qu'on peut regarder d'autres moyens? Est-ce qu'on peut
utiliser des plateformes technologiques, de l'apprentissage en ligne
plutôt que de toujours passer par le même
modèle de : on a un groupe x avec un professeur qui se déplace puis on
fait la formation? Je pense qu'il faut être plus créatifs dans l'offre
que l'on fait pour pouvoir s'adapter à la réalité du travailleur et de
l'entreprise également.
M. Jolin-Barrette : Mais déjà, en fait, dès l'étranger, le ministère
de l'Immigration donne des cours de francisation en ligne qui sont disponibles. Mais, si on revient à la francisation en
entreprise, là, parce qu'on entend les deux côtés, vous, vous dites : Écoutez, c'est sûr qu'une
entreprise ne peut pas se permettre de perdre des heures de travail, supposons,
dans une semaine régulière pour faire de la francisation, donc on est prêts à
faire de la francisation, mais en dehors des heures. La FTQ disait tantôt : Écoutez, déjà, c'est difficile, tu sais, si
vous travaillez puis, après les heures de travail, vous devez suivre votre cours de
francisation. Comment est-ce qu'on réconcilie tout ça, là? Parce
qu'objectivement on souhaite que tout le monde puisse apprendre le français rapidement. Mais là, d'un côté, vous,
vous dites : Bien, il ne faut pas que ce soit durant les heures de
travail, la FTQ dit : Ça doit être durant les heures de travail. Comment
on réconcilie ça?
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, je ne
dis pas que ça doit absolument ne pas être pendant les heures de
travail, je pense que c'est très variable, à
l'image du tissu industriel du Québec. Donc, il y a certaines entreprises qui
ont la capacité, qui peuvent se le
permettre, et dans d'autres cas, je pense notamment aux PME, c'est beaucoup
plus difficile. Alors, je ne réponds pas
clairement à votre question, mais je pense qu'il faut avoir cette
flexibilité-là, au même titre que les entreprises n'ont pas la même
réalité.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des
collègues qui veulent poser des questions. Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : La députée de Les Plaines désire
prendre la parole. Allez-y, vous avez sept minutes.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'avais des
questions par rapport au français, là, mais
vous avez répondu. Par ailleurs, dans la partie de votre mémoire où, à juste
titre, vous mentionnez qu'immigration et intégration vont de pair, évidemment, on le sait, il faut que... c'est
la clé du succès, vous mentionnez d'autres irritants que ceux dont on vient de parler, et il y en a quelques-uns
que... Bon, on le sait, il y a des solutions, différents groupes en ont
apportées, mais il y en a d'autres que vous soulevez que j'aimerais vous
entendre parler encore plus. Vous parlez des exigences administratives, vous parlez également des minorités visibles racisées.
J'aimerais ça vous entendre un petit peu plus sur des points qui n'ont
pas nécessairement été soulevés par tout le monde, mais que vous vivez chez des
manufacturiers.
Mme Proulx
(Véronique) : En fait,
peut-être une précision, le rapport qui a été produit par le CCPI, qui est
sous le parapluie de la Commission des partenaires du marché du travail,
identifie les freins à l'intégration des immigrants.
Maintenant,
du côté du secteur manufacturier, je ne peux pas vous répondre, par exemple,
par rapport aux minorités racisées
parce que je n'ai pas cette information-là ou ce contenu-là à vous apporter,
c'est plutôt une réalité qui nous a été apportée du côté des travailleurs. Mais je vous dirais que, encore une
fois, quand on travaille bien au niveau de l'intégration en région et qu'on a plusieurs organismes, les
organismes communautaires, la ville, les employeurs, tout le monde
travaille ensemble, on va favoriser
l'intégration et atténuer l'ensemble de ces facteurs-là également au niveau des
minorités racisées, mais ça prend
vraiment un tout cohérent pour que les acteurs puissent travailler ensemble. Je
vous donne un exemple concret : dans le cas d'Exceldor, de la
formation a été offerte aux chefs de projets... aux chefs d'équipe, en fait,
pour la gestion interculturelle, donc
favoriser l'intégration des gens au sein de l'entreprise. Donc, c'est un
exemple, au niveau des employeurs, qui a été fait pour entre autres
atténuer cet aspect-là.
Mme Lecours (Les Plaines) : O.K.
Et au niveau des exigences administratives, vous entendez quoi par là?
Mme Proulx
(Véronique) : Giany, tu peux-tu?
M. Huyghues-Despointes
(Giany) : Bien, au niveau
des exigences administratives, c'est sûr que c'est excessivement complexe pour un employeur lorsqu'il emploie une
personne qui vient de l'étranger. Tout l'aspect que Mme Proulx a
évoqué relatif, justement, à sa
francisation, à la gestion de la diversité culturelle, ça passe par un certain
nombre de programmes qui existent
aussi, par exemple le programme PRIIME, qui favorise l'inclusion des personnes
immigrantes, mais c'est aussi beaucoup
de gestion pour l'entreprise que de savoir à qui s'adresser pour faire la
demande. Et parfois il y a aussi des délais, que l'on comprend, qui sont un petit peu plus difficiles à suivre pour
l'entreprise. Alors, c'est sûr qu'une entreprise qui est éloignée des grands centres, qui se trouve en
région va avoir beaucoup plus de difficultés à avoir accès à cette offre de
services là en termes de connaissance de
l'offre. Je ne parle pas tant d'avoir accès à un bureau de Services Québec, là,
mais vraiment d'avoir cette
connaissance-là. Donc, il y a un certain nombre de freins systémiques qui ne
favorisent pas, pour les entreprises en région du Québec, l'intégration
des personnes immigrantes.
Puis
Mme Proulx évoquait tout à l'heure les... enfin, vous évoquiez, pardon,
les personnes racisées. Les personnes racisées,
les minorités ethniques en général, la difficulté au niveau des planchers de
production, c'est souvent les biais ou les préjugés négatifs à l'égard de l'immigration qui sont à détruire. Mais
là, je veux dire, on fait aussi poser sur l'entreprise et sur l'employeur une responsabilité qui ne devrait pas
être d'avoir à gérer cette réalité de diversité culturelle. Donc, il faut
leur donner les moyens et leur donner
l'accès à des sources d'aide pour pouvoir pallier, justement, à ces
difficultés-là qu'elles rencontrent.
Je veux dire, elles ne sont pas des spécialistes des ressources humaines non
plus. Toutes n'ont pas forcément, d'ailleurs, des services de ressources
humaines qui peuvent travailler à cette gestion de la diversité culturelle,
donc il faut leur donner accès à cela.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Bien, justement, c'est le problème de beaucoup de PME.
Mais là vous représentez des manufacturiers. Est-ce que vous êtes en
train de me dire que beaucoup de manufacturiers n'ont pas de département de
ressources humaines? J'imagine que oui, là.
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, le
secteur manufacturier, c'est 90 % des entreprises... En fait, il y a
23 000 entreprises au Québec, il y en a seulement 1 000 qui ont
plus de 100 employés. Alors, on est vraiment dans une industrie de PME
également, c'est la même réalité.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Je veux revenir à la régionalisation, parce que c'est
au coeur aussi de la problématique de la main-d'oeuvre que... une grosse
partie de la problématique qu'on vit. Vous avez mentionné que c'est difficile, notamment, ne serait-ce que pour loger des
personnes dans certaines... Mais comment est-ce qu'on peut attirer et garder
les gens en région, les immigrants en
région? Est-ce que vous avez des suggestions à nous faire? Vous avez des
membres qui sont partout en région.
Mme Proulx
(Véronique) : Oui, oui, oui.
On travaille, d'ailleurs, sur un projet, justement, qui vise à faire le
pont entre les gens issus de l'immigration à
Montréal et les entreprises en région, donc, dans un an, on sera capables de
vous en parler encore plus. Mais je vous
dirais que ce qu'on constate pour l'instant, souvent c'est le conjoint ou la
conjointe qui décroche un emploi en
région, donc la première chose, c'est : le conjoint ou la conjointe doit
se trouver un emploi également, donc
comment est-ce qu'on l'aide à trouver cet emploi-là? L'intégration des enfants
au sein de la communauté, au sein de l'école,
d'avoir accès à un logement, encore une fois, le transport en commun, si on est
dans un emploi à plus faibles revenus, on
n'aura pas nécessairement une voiture — si on est en région, ça prend une
voiture — donc ce
sont tous des facteurs qui font en
sorte que c'est difficile de garder les gens en région. Et je rajouterais aussi
le fait que lorsqu'on a une communauté multiculturelle
qui s'installe en région — ça n'a pas nécessairement besoin d'être gens tous de la même
région, du même pays ou des mêmes
origines — ça
favorise l'intégration dans la région, ça fait en sorte que les gens vont avoir
envie de rester. Ils vont retrouver un peu d'eux-mêmes, finalement, dans
cette région-là.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Dernier point, parce que c'est dans... au tout début, là, vous faites...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste 1 min 30 s.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Une minute? Parlez-moi de l'importance, pour les
manufacturiers, de l'immigration... de... Voyons, où est-ce que l'ai vu?
Je m'excuse. C'est l'immigration...
Mme Proulx
(Véronique) : Travailleurs...
Mme Lecours (Les Plaines) :
...des investisseurs, je m'excuse.
Mme Proulx
(Véronique) : Ah! oui, tout à fait. Mais en fait ça...
Mme Lecours (Les Plaines) :
Vous l'avez mentionné dans... je ne le vois plus.
• (15 h 10) •
Mme Proulx
(Véronique) : Oui,
absolument. En fait, les immigrants économiques, les immigrants
investisseurs, de par les fonds qu'ils investissent, ça permet... de par les
fonds qu'ils investissent, il y a un fonds qui s'appelle immigrants investisseurs, et les entreprises manufacturières
peuvent y déposer des projets, et
80 % de ces programmes-là vont au secteur manufacturier, et ça permet de subventionner d'importants projets d'investissement au Québec. Et c'est un programme qui est très
apprécié de la part des entreprises,
ça permet de supporter leur investissement, et c'est pourquoi on demande de
maintenir le niveau d'immigrants investisseurs, parce que ça finance
indirectement plusieurs projets au Québec.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Est-ce que vous avez d'autres solutions que celle-là?
Mme Proulx (Véronique) :
Que celui-là?
Mme Lecours (Les Plaines) :
Oui.
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
Mme Proulx
(Véronique) : Celui-là nous convient très bien, il est très
apprécié.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Ça conclut le bloc d'échange
avec le parti formant le gouvernement. Nous passons maintenant au parti
formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, vous débutez?
M. Derraji : Oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Mme Proulx, M. Despointes, bienvenue. Je
veux juste prendre une petite seconde
pour dire merci de prendre du temps de votre congé de maternité et venir nous
parler. C'est très, très, très apprécié. Merci beaucoup. Je sais ce que
c'est, je ne prétends pas...
Des voix : ...
M. Derraji :
Laissez-moi terminer. Vous pouvez me laisser terminer, quand même. Bien, j'ai
deux enfants et j'ai vécu ça avec ma
femme, donc, pas forcément être enceinte pour pouvoir le sentir, bon. Donc, je
sais ce que c'est, ma femme avait des
équivalences à faire pour son... et donc je vous salue. Merci beaucoup de venir
nous entretenir par rapport à...
La Présidente
(Mme Chassé) : C'est très bien, on est fiers de vous.
M. Derraji :
...nous entretenir par rapport à la planification. Ça, ça t'arrange, ça, hein?
Le ministre n'attend que ça, hein, de moi, il n'attend que ça de moi.
La Présidente
(Mme Chassé) : C'est important. Vous êtes des modèles dans la
matière.
M. Derraji :
Ne me coupez ce temps, s'il vous plaît, madame.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je suis désolée.
M. Derraji :
Non, ce n'est pas grave.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je valorisais.
M. Derraji :
Oui, oui, mais il faut le dire, c'est du travail bénévole, les organisations
qui viennent nous présenter leur point de vue, donc je tenais absolument
à ouvrir cette petite parenthèse. Merci beaucoup.
Première question, je
vais la commencer par la dernière question de ma collègue par rapport aux
immigrants investisseurs. Vous avez souligné
l'importance de ce programme parce qu'il finance beaucoup de choses, donc, que
ce soit pour les PME, mais il finance un
programme que votre collègue vient de dire, le programme PRIIME. Mais je tiens
juste à vous le dire, parce que vous devez
sensibiliser le ministère, on est à moins de 57 %, donc, par rapport aux
objectifs qu'on avait l'habitude
d'avoir dans les dernières années. Et nous avons reçu avant vous ces groupes
spécialisés dans ce programme. Et nous,
on sensibilise, de notre part, le gouvernement qu'il faut faire attention parce
que, de facto, ça risque d'affecter les ressources allouées que ce soit au programme PRIIME ou au financement
des bourses qu'on donnait aux PME. Même un groupe... je tiens à vous informer qu'un groupe nous a dit qu'ils
reçoivent 10 demandes de subvention et ils sont capables de répondre à une seule. Donc, je tiens juste à
clarifier ce point, parce que, si vous voulez continuer vos démarches au
niveau du gouvernement qu'il doit revoir ses
cibles, il y a une crainte par rapport à la pérennité du programme PRIIME.
Donc, ça, c'est une petite information.
Deuxième question ou
première question, plus : Avez-vous des recommandations par rapport au
programme PRIIME? Je sais que le secteur
manufacturier l'utilise pas mal aussi. S'il y a quelque chose à améliorer dans
le programme PRIIME par rapport à
l'inclusion des immigrants en bas de cinq ans au Québec, avez-vous des
recommandations à faire?
Mme Proulx (Véronique) : Je vous dirais... et je vais laisser mon collègue
poursuivre, mais je vous dirais qu'a priori c'est un programme qui est apprécié, qui est utilisé de la part du
secteur manufacturier. Est-ce qu'il y a des améliorations à apporter?
M. Huyghues-Despointes (Giany) : La grosse amélioration, je vous dirais... je vous
donnerais la réponse suivante : On peut avoir le meilleur produit
du monde, si on ne communique pas et qu'on n'utilise pas les bons véhicules de communication, il ne parvient pas à la clientèle à
laquelle on voudrait qu'il parvienne. Donc, fondamentalement, il y a énormément d'entreprises manufacturières qui ne
connaissent pas le programme. Là, on parle d'entreprises qui sont en
région, dont la plupart... une grande parte de nos membres sont en région, et
c'est vraiment dans la... l'existence même de ce programme-là n'est pas connue
des entreprises.
M. Derraji :
O.K., oui, et surtout on parle de la régionalisation, parce que moi, j'essaie
aussi de collaborer avec le MIDI.
Donc, ce que vous êtes en train de dire est très important, c'est que le
programme existe, les entreprises en région ne sont pas au courant de ce programme. Maintenant, on arrive à la
solution. Est-ce que vous pensez que c'est le MIDI qui doit faire la
promotion ou vous, que vous êtes en contact avec les entreprises?
Mme Proulx (Véronique) : Alors, je vous dirais qu'en tant que membre de la
Commission des partenaires du marché du
travail c'est clair qu'on souhaite faire partie de la solution et pouvoir
communiquer cette information-là à nos membres. Est-ce que le MIDI doit le faire? Certainement, via les bureaux de
Services Québec, via le réseau régional puis, je dirais même, via le MEI, etc. Je pense que tous les acteurs en
région doivent en faire la promotion, et les... en tout cas, du moins
notre association patronale, ça nous ferait
plaisir de le faire. Je vous dirais, peut-être, je rajouterais un point sur
l'amélioration : il y a le communiquer,
donc faire savoir que ça existe, mais il y a aussi la perception qui peut venir
avec. Si on arrive comme travailleur puis qu'on vient avec une
subvention, il y a peut-être une connotation négative aussi. Ça fait que je
pense qu'il y a un peu de communication à faire autour de ça pour que ce soit
plus valorisé et valorisant.
M. Derraji :
O.K. Merci beaucoup. Là, j'ai besoin de vous pour défaire un mythe. Le mythe, c'est que le patronat vient pour demander du cheap labor, ça veut dire
que... vraiment de la main-d'oeuvre non qualifiée à bas salaire. Là, on fait face à ce mythe, mais je vous pose la
question : Avez-vous fait des études par rapport à la moyenne
salariale ou la nature des postes en pénurie dans votre secteur
manufacturier?
Mme Proulx
(Véronique) : À la moyenne salariale ou à... pardon?
M. Derraji : La nature des
postes, donc les postes en pénurie...
Mme Proulx
(Véronique) : Oui. Bien, en fait, quand on regarde, encore une
fois...
M. Derraji : ...ou le taux
horaire, ce qui vous semble faisable.
Mme Proulx
(Véronique) : O.K.
Bien, je vous dirais que, quand on regarde les postes vacants, les 16 000,
60 % requièrent un secondaire V et
moins, 40 %, un D.E.C. ou une A.E.C., ce sont des métiers techniques, des
métiers qui sont très bien payés.
Maintenant,
quand on regarde là où il peut y avoir un préjugé, c'est sur ceux qui ne
requièrent pas de diplomation, finalement.
Ce sont souvent des postes d'entrée : journalier, commis. Les salaires
varient en fonction des régions, mais ce sont aussi des postes, je vous dirais, qui sont appelés à se
transformer, et c'est pourquoi on insiste autant sur le fait que ces gens-là, qu'ils soient issus de l'immigration ou
non, soient accompagnés et formés, parce que, dans quelques années, on souhaite que les entreprises prennent le
virage 4.0, qu'ils investissent davantage, ce seront des emplois qui vont
demander davantage de connaissances. Maintenant, au niveau des salaires, Giany.
M. Huyghues-Despointes
(Giany) : Oui. En fait, nous
avons un comité main-d'oeuvre, au sein de Manufacturiers et exportateurs du Québec, qui réunit la petite,
la moyenne et la grande entreprise. On a fait une étude, l'an dernier,
concernant, justement, la moyenne des salaires pour les postes spécialisés et
non spécialisés : 70 % des entreprises qui ont des travailleurs sur leur plancher qui sont des
travailleurs spécialisés les rémunèrent tous au-dessus de 25 $ de l'heure,
et pour les postes non spécialisés, ils sont tous au-dessus de 20 $
de l'heure, on n'a rien en bas pour les non spécialisés.
M. Derraji : O.K. Donc,
présentement, vos besoins en termes de main-d'oeuvre, il n'y a rien en bas de
20 $.
M. Huyghues-Despointes (Giany) :
Rien.
M. Derraji : Ça varie entre
20 $ et 25 $.
M. Huyghues-Despointes (Giany) :
Et plus, et plus.
M. Derraji : Et plus, oui, on parle de... plus spécialisés, ça
va augmenter. Excellent. Bon, merci pour la réponse.
Ça me ramène
au contexte lui-même de la pénurie de main-d'oeuvre. Il y a
deux écoles de pensée : du temporaire et du permanent. Première question : Pourquoi, selon vous, 30 % — je l'ai noté, à moins si je me trompe — de vos membres essaient de trouver la
solution via le PTET comme solution à leur problématique de main-d'oeuvre?
Mme Proulx
(Véronique) : Parce qu'il
n'y a pas suffisamment de travailleurs au Québec pour répondre à leurs besoins.
M. Derraji :
Donc, il n'y a pas assez de travailleurs au Québec, on utilise le PTET, mais on
peut utiliser aussi d'autres programmes.
Est-ce qu'il y a une raison du choix d'uniquement ce programme gouvernemental
pour amener des travailleurs?
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, à
part l'immigration permanente, le PTET, je ne suis pas certaine de voir
quel autre programme auquel vous faites référence, mais je vous dirais que
c'est le PTET... Présentement, il n'y a pas de solution, les entreprises se retrouvent devant un mur, on n'a
personne... je n'ai personne pour être capable de répondre à mon client, à ma ligne de production. Donc, ils
doivent rapidement trouver des solutions, et plusieurs d'entre eux
disent : Il y a urgence, on y va, on va à l'étranger, on va aller chercher
des travailleurs parce qu'ici il n'y a personne qui postule même sur nos
emplois.
M. Derraji : Je comprends votre
enjeu, c'est tout à fait vrai. Mais là on s'entend, c'est du temporaire.
Mme Proulx
(Véronique) : Oui, absolument.
M. Derraji :
Donc, l'incertitude pour l'entreprise reste là parce qu'ils doivent dealer avec
changement de gouvernement, changement de loi, changer le temporaire en
permanent. Pensez-vous que...
Mme Proulx
(Véronique) : Oui, tout à
fait, tout à fait, puis j'ai même des entreprises qui utilisent le PTET
pour des emplois saisonniers. Et certaines
d'entre elles... j'en ai une, entre autres, dans la grande région de Montréal,
qui a plusieurs grands détaillants
américains qui sont ses clients, bien, elle n'a pas pu livrer à temps. Les gens
ne sont pas arrivés à temps sur le
PTET — les
délais sont parfois très longs — et elle a dû... elle n'a pas été capable de
livrer, l'année d'après elle a perdu ce client-là. Alors, effectivement,
ce n'est pas nécessairement une solution idéale.
M. Derraji :
C'est triste de dire qu'au Québec, maintenant, on perd des contrats à cause
qu'on n'a pas de la main-d'oeuvre. Ma
dernière question avant de céder la parole à ma collègue : Pensez-vous que
la solution, c'est plus aller vers les travailleurs réguliers permanents avec
une modification de la grille et que c'est utopique aujourd'hui de dire
que nos besoins sont du temporaire et que
c'est ça, la solution? Parce qu'au fait on fait face à deux écoles de pensée.
Il y a une école de pensée qui
dit : Je vais aller mener la bataille avec Ottawa, programme travailleurs
temporaires étrangers, pour vous
ramener... et diminuer les délais pour amener et répondre à la crise de
main-d'oeuvre. Il y a une autre école de pensée, qu'est-ce qu'elle dit? Au Québec, on peut changer la grille de
sélection, répondre au marché du travail, mettre le tout dans Arrima et répondre adéquatement, d'une manière
permanente, aux besoins et aux défis de la main-d'oeuvre. Vous allez
choisir quelle option?
Mme Proulx (Véronique) : Je vais prendre un peu des deux. Alors, je vous
dirais que l'immigration permanente est
la voie à long terme, mais on doit modifier la grille, pour nous, c'est très
clair. Et je comprends très bien qu'Arrima permet d'identifier les gens qui sont en... les métiers
où il y a des déficits de... en fait, d'identifier les métiers où il y a une
pénurie de main-d'oeuvre, mais néanmoins la
grille doit être revue, et en parallèle le programme des travailleurs
temporaires étrangers permet de répondre à court terme. Mais ça nous
prend les deux mesures, mais, encore une fois, avec une modification au niveau
de la grille sur le permanent.
M. Derraji :
Donc, ici je peux dire que, dans la prochaine planification que le ministre et
le ministère s'apprêtent à lancer au mois de novembre, vous vous
attendez à voir un changement de grille de sélection, d'avoir plus de souplesse...
• (15 h 20) •
Mme Proulx (Véronique) : On souhaite avoir une hausse et un changement au niveau de
la grille, effectivement.
M. Derraji :
...un changement, et vous vous attendez à avoir plus de souplesse au niveau du programme
de la résidence permanente.
Mme Proulx
(Véronique) : Tout à fait.
M. Derraji :
O.K. Merci.
Le Président
(M. Lévesque, Chauveau) : Merci, M. le député de Nelligan. Mme la
députée de Fabre, il vous reste 1 min 15 s.
Mme Sauvé : Eh là là! Alors, merci, M. le
Président. Bienvenue, merci beaucoup. Très rapidement, je vais vous demander... Vous avez parlé des PAMT, un programme auquel je crois beaucoup
pour ceux qui n'ont pas de diplôme et qui
n'ont pas... et qui ont besoin de reconnaissance de leurs compétences. Votre lecture... Parce que
le PAMT suffisait au moment où on se
trouvait il y a quelques années. Maintenant, avec la rareté de main-d'oeuvre, il faut bonifier, il faut valoriser, le programme est peu connu. Est-ce que vous
pensez que la desserte des PAMT dans les régions du Québec suffit? Est-ce qu'il ne faudrait pas valoriser, financer davantage? Et est-ce qu'on a une diversité des métiers pour répondre aux besoins de PAMT?
Mme Proulx (Véronique) : Alors, la réponse, c'est oui, on a besoin de
mieux le faire connaître pour qu'il soit plus utilisé, mais je dirais que ce n'est pas la seule solution. C'est celle
qu'on a mise de l'avant, mais il faut donner de la flexibilité à l'employeur de mettre en place différents moyens
qui sont à sa portée pour former les gens qui arrivent ou qui sont
présents. Et on a d'ailleurs...
on a été très innovants dans la dernière année pour proposer des projets de formation
duale. Je pense qu'il ne faut
pas rester fermés, mais le PAMT, pour répondre à votre question, oui, devrait
être bonifié, devrait être davantage financé, mais également offrir d'autres
moyens aux entreprises.
Le Président
(M. Lévesque, Chauveau) : Merci beaucoup. Alors, ça conclut, malheureusement,
les échanges avec l'opposition officielle. Maintenant, la parole est au deuxième groupe d'opposition,
et je cède la parole à M. le
député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Merci. Mme Proulx, M. Huyghues-Despointes, bienvenue à l'Assemblée
nationale. Écoutez, j'entends votre propos,
et pour la deuxième fois, vous faites beaucoup mention de la question de la création d'un
écosystème pour attirer des gens en région,
là. On entendait un autre intervenant, lors de ces consultations, qui nous disait, là — et
je pense qu'il n'a pas tort, là : La tendance mondiale, là, c'est s'installer dans
les grands centres urbains, O.K.? Donc, on est un peu... on va à... contre
les courants. Et, dans ce sens-là, vous êtes une des rares... en fait, je pense
que vous êtes la seule intervenante de la
communauté des affaires, là, qui fait mention de la nécessité d'avoir des
services en région, là. Est-ce qu'il
ne faudrait pas aussi, ou surtout, avoir une politique de développement
régional qui crée, justement, là, des communautés dynamiques, vivantes, etc., qui accueillent les
personnes immigrantes et qui empêchent aussi que les personnes des
régions s'en aillent, là? Parce qu'il y a
beaucoup de gens des régions, des natifs qui s'en vont. Est-ce qu'il ne
faudrait pas instaurer une politique de développement des régions, de
revitalisation des régions?
Mme Proulx
(Véronique) : De revitalisation des régions pour pouvoir
attirer davantage les travailleurs?
M. Fontecilla :
Tout à fait.
Mme Proulx (Véronique) : Écoutez, c'est une bonne question. C'est clair
que, présentement, il y a une amélioration à apporter parce que les gens, autant les travailleurs que les
employeurs, sont laissés à eux-mêmes. Est-ce que ça prend une politique ou un autre moyen? Ça, je ne peux pas...
je ne commenterai pas sur le moyen, mais c'est clair qu'il y a quelque chose qui doit être fait pour pouvoir ramener ces
gens-là, les amener à travailler ensemble pour mettre en place
l'infrastructure et les services nécessaires.
M. Fontecilla :
Est-ce que vous pensez que c'est aux employeurs, aux manufacturiers, dans ce
sens-là — vous
avez mentionné quelques exemples — de mobiliser les milieux, la commission
scolaire, la municipalité?
Mme Proulx
(Véronique) : Non, non.
M. Fontecilla :
Cela appartient... ça devrait appartenir... une responsabilité qui devrait
appartenir à d'autres instances.
Mme Proulx
(Véronique) : À d'autres
instances, pas aux employeurs ni aux manufacturiers. Je le mentionnais, Exceldor, c'est un exemple, c'est une grande
entreprise, mais la plupart des entreprises n'ont pas les moyens ou les
ressources de faire ça, ne sont pas des
experts en la matière, vont vouloir participer et contribuer, mais ils n'ont
pas les ressources pour pouvoir réaliser ce genre d'initiative là.
M. Fontecilla : En d'autres
mots, des employeurs sont en train de faire une job qui ne leur appartient pas,
qui appartient à l'État.
Mme Proulx
(Véronique) : Oui, oui.
M. Fontecilla :
Et, dites-moi, dans vos... à la page 4, pour les travailleurs temporaires,
5.5, là, le point 2 : «Étendre la durée du Programme des travailleurs étrangers temporaires à deux ans
pour les travailleurs peu spécialisés — bas salaire», pourriez-vous nous
expliquer davantage...
Mme Proulx (Véronique) : Oui, parce que les gens qui arrivent sur le PTET
sur le bas salaire, ils ont un visa d'un an.
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
Mme Proulx
(Véronique) : Alors, on sait
que ça coûte parfois entre 2 000 $ à 10 000 $ pour faire
venir un travailleur. Donc, d'une
part, l'entreprise perd un travailleur, elle l'a formé pendant un an et elle le
perd après un an, deuxièmement ce travailleur-là
ne se qualifie pas pour... bien, pour le PEQ, hein, parce qu'il n'a pas deux
années d'expérience de travail. Donc, on demande au gouvernement
fédéral...
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
Mme Proulx
(Véronique) : ...de le prolonger sur deux ans.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie. Ça conclut
le bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Nous débutons le bloc d'échange avec le troisième groupe
d'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Vous avez parlé
rapidement du PAMT, oui, qui devrait être
déployé à plus grande échelle, bonifié, notamment, et puis, bien là, on parle
du jumelage avec un employé qui est plus expérimenté. Donc, j'imagine
que l'employé a un revenu supplémentaire dans ces cas-là? Comment ça
fonctionne, là, au niveau de...
Mme Proulx
(Véronique) : Bien, en fait, non, il n'a pas un revenu
supplémentaire.
Mme Perry Mélançon : Il n'est
pas... C'est ça, il n'y a pas de...
Mme Proulx
(Véronique) : Non, c'est-à-dire que, si on bénéficie de subventions
via Services Québec, on va recevoir de la formation et pour le
formateur et la personne qui suit a formation, mais il n'y a pas de... non,
non.
Mme Perry Mélançon : O.K. Donc,
il n'y a pas de coût, là, qui soit épongé par l'entreprise ou par...
Mme Proulx
(Véronique) : Bien, en fait,
ça relève de chaque entreprise de voir si elle va offrir quelque chose de différent, mais il n'y a
pas rien de systématique, oui.
Mme Perry
Mélançon : O.K. Puis, dans
les métiers du secteur manufacturier, c'est certain qu'il y a beaucoup... bon, c'est l'apprentissage des programmes informatiques, puis après ça c'est des tâches
qui sont quand même répétées, donc l'apprentissage peut se faire facilement à
l'intérieur, comme vous dites, c'est
pour ça qu'il faut miser sur une formation à l'interne. Est-ce que vous pensez que ces
métiers-là devraient faire partie, par
exemple, de la liste de traitements
simplifiés ou qu'on revoie la liste d'emplois et qu'on ajoute certains métiers?
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, la liste des métiers...
M. Huyghues-Despointes
(Giany) : Est-ce que vous faites référence à la liste des professions
en pénurie régionalisée, la liste de...
Mme Perry
Mélançon : Qui n'ont pas besoin de passer par le processus, là, de...
M. Huyghues-Despointes
(Giany) : De l'EIMT?
Mme Perry
Mélançon : Exactement, de l'EIMT puis d'effort de recrutement au
niveau local, là.
M. Huyghues-Despointes (Giany) : C'est sûr que la démarche voudrait que, dans la
logique des choses, lorsqu'on veut
travailler à une adéquation entre les besoins... pour les besoins du marché du travail, il faut s'assurer qu'effectivement se retrouvent sur cette liste-là les métiers qui sont vraiment
en pénurie. Il faut qu'il y ait, bien entendu, une analyse prospective qui soit faite pour déterminer si la liste est
encore à jour, ou s'il y a des métiers qu'il faut enlever, ou il y a
des métiers qu'il faut rajouter à cette liste, effectivement. Mais cette
diligence-là doit être faite, effectivement.
Mme Perry
Mélançon : Donc, vous
trouvez qu'actuellement la
liste devrait être mise à jour parce qu'il y a des professions que,
souvent, vous devez passer par le processus.
M. Huyghues-Despointes (Giany) : On n'a
pas eu ce son de cloche là. Au niveau de nos manufacturiers, on ne nous a pas fait mention du fait qu'effectivement
il y a certains métiers qui n'apparaissaient
pas sur la liste. Mais effectivement, dans
l'intelligence du marché du travail, donc dans les informations que le marché du travail doit avoir, il faut que cette mise à jour soit faite de manière régulière afin de s'assurer, justement,
d'avoir les bonnes personnes aux bons endroits avec les bonnes
qualifications.
Mme Perry
Mélançon : Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) :
C'est très bien. Merci, Mme Proulx, bon retour en congé de
maternité. M. Huyghues-Despointes, merci d'avoir été avec nous.
Merci pour votre contribution à la commission.
Je suspends
momentanément les travaux afin que le prochain groupe puisse prendre place.
(Suspension de la séance à
15 h 28)
(Reprise à 15 h 29)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Nous sommes de retour, et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Commission
des partenaires du marché du travail.
Bonjour. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. À une minute
de la fin, je vais vous faire un signe pour
vous inviter à conclure. Et je vous invite à, tout d'abord, vous présenter.
Allez-y.
Commission des partenaires du
marché du travail (CPMT)
Mme Murray (Audrey) : Merci. Alors, Audrey Murray, présidente de la Commission des partenaires du marché du travail
et du Conseil Emploi Métropole, et je suis accompagnée, à ma gauche, par
Michèle Houpert, qui est directrice du secrétariat de la commission. Alors, merci à la commission de nous accueillir,
merci, Mme la Présidente, ainsi qu'à ses membres.
• (15 h 30) •
Rapidement,
donc, la Commission des partenaires
du marché du travail, c'est un organisme
qui a plus de 20 ans maintenant. C'est la seule instance nationale, parmi les organismes
publics du Québec, qui réunit les forces vives du marché du
travail. Vous avez, en annexe de notre mémoire, la composition des membres de
la commission. Donc, vous avez, représentés,
évidemment, les gens du secteur de la main-d'oeuvre, des employeurs, la voix des réseaux de l'éducation du Québec et des groupes communautaires qui agissent
en emploi.
Et,
pour faire son travail, la commission, elle s'appuie sur un réseau important : 29
comités sectoriels qui réunissent des
employeurs, des syndicats, des gens qui sont actifs dans ces secteurs
d'activité, 17 conseils régionaux à travers le Québec et sept comités
consultatifs, qui ont pour mission d'aider le ministre de l'Emploi et la commission
à avoir des stratégies gagnantes pour
intégrer des groupes sous-représentés en emploi, dont les immigrants, bien sûr, et le Conseil
Emploi Métropole, qui est un
organisme territorial, donc qui rassemble les forces vives du Montréal
métropolitain — vous
avez entendu certains de ses membres à cette commission — donc
qui portent un regard sur le marché du travail du Montréal métropolitain. Et ce que je vais vous présenter
aujourd'hui dans les recommandations, ce que vous avez retrouvé dans le mémoire, s'appuie sur un travail qu'on a fait
collectif de cocréation avec, évidemment, l'assemblée délibérante, mais
aussi le comité consultatif en immigration de même que le Conseil Emploi
Métropole.
Donc,
pour avoir écouté les interventions précédentes, je me suis dit qu'on vous
avait quand même bien nourri sur le
contexte du marché du travail, mais je vais me permettre quelques commentaires
avant d'arriver à nos recommandations pour
vous dire que d'abord, dans la dernière année... dans les deux dernières
années, dans la dernière année en particulier, on a beaucoup amélioré nos outils pour essayer de
comprendre les enjeux du marché du travail. Donc, à ce moment-ci, avec les équipes d'Emploi-Québec, avec les différents
ministères qui participent avec la CPMT à comprendre les enjeux du
marché du travail, on a été en mesure
d'identifier les besoins, hein, pour les 10 prochaines années à 1,4 million
de nouvelles personnes qu'on aura
besoin pour remplacer et remplir les nouveaux emplois. On a aussi été en
mesure, avec la liste des 500 professions, de qualifier la
situation régionale de ces différentes professions-là à travers le territoire du
Québec.
Bien sûr, il
y a des choses qui sont bonifiables, on va vous en parler dans nos
recommandations, mais c'est pour vous
dire qu'on améliore... et on sait, et les gens vous en ont parlé, ils ont
beaucoup utilisé et référé à ces documents-là qu'on a été capables de mettre au jeu dans la dernière année, et
d'ailleurs le gouvernement en place a posé plusieurs gestes en tenant compte de ces informations-là qu'on a pu
mettre au jeu. Et face à cette situation-là qui est, en même temps,
positive, parce que le Québec vit une
période économique qui est une belle période, on a évidemment des défis, voire
des opportunités. Il y a plusieurs
leviers qui peuvent nous permettre de remédier à cet enjeu-là, pas seulement le
recours à l'immigration, bien sûr,
parmi celles-ci — vous les
connaissez — évidemment,
l'intégration des nouvelles technologies, le recours à des groupes sous représentés. D'ailleurs, on améliore tous les
indicateurs de l'emploi, en ce moment, au Québec — c'est historique quand on y porte attention — puis, bien évidemment, miser sur le
développement des compétences de notre main-d'oeuvre active, parce qu'on
aura besoin qu'elle soit prête à accompagner les changements qui sont en
marche.
Au niveau de
l'immigration, on a pris soin, dans notre mémoire, de vous rappeler aussi... on
a essayé de faire la synthèse de ce
qu'on sait qui est, en ce moment, des défis pour nos employeurs. Nos
entreprises sont en mode à s'adapter à ce
nouveau marché du travail là, elles ont des défis pour y arriver. Et, en regard
de l'immigration — on a
essayé de faire la synthèse — on vous en a parlé, il y a des difficultés,
des lourdeurs, des longueurs, des coûts, des difficultés aussi à
intégrer au sein de leur milieu de travail
des groupes qui n'avaient pas l'habitude de l'être, de développer des outils
pour s'adapter, pour adapter leur
main-d'oeuvre, leur nouvelle main-d'oeuvre. Et même chose, évidemment, du côté
des immigrants, c'est un vaste projet que de décider d'aller vivre dans
un autre pays, alors les immigrants rencontrent aussi... et les immigrantes,
leurs défis quand elles arrivent au Québec, et on a tenté de le résumer.
Il ne faut
pas négliger que c'est également une occasion d'amélioration pour l'offre de
services gouvernementale et pour les
organismes qui travaillent sur le terrain à accompagner l'accueil et
l'intégration du marché du travail des immigrants. Donc, sans aller dans le détail, on voulait
simplement mettre en contexte et vous dire que, du point de vue de la CPMT,
il y a quand même un constat qu'on sait des
choses, et que les gens sont en marche pour relever des défis, et que plusieurs
gestes ont été posés dans la dernière année pour y remédier.
Donc,
sommairement, en regard de la première orientation qui est soumise à l'étude de
cette commission, la CPMT est
d'accord avec une augmentation graduelle, évidemment, du nombre de personnes
immigrantes pour combler les besoins dans le contexte actuel. Sans
s'être entendu sur un nombre précis, la fourchette la plus élevée est apparue
celle qu'on recommande à la commission de
retenir. Et peut-être que vous l'avez entendu, on a des membres de la
commission qui sont venus vous
rencontrer pour vous parler, certains, d'une cible de 60 000 plutôt que de
la fourchette qui est proposée, jusqu'à 52 000, et ça vient appuyer une recommandation qu'on fait à la
commission, donc, de continuer d'améliorer nos outils pour mieux comprendre, en termes quantitatifs,
régionalement, globalement, c'est quoi, l'écart entre l'offre et la demande
dans nos différents métiers et professions
qui sont les plus importants puis qu'on essaie d'être plus précis sur le nombre
d'immigrants qu'on espère trouver en comprenant mieux les causes de ces
déficits-là.
Donc, la
recommandation qu'on fait, c'est de continuer à avoir une vue évolutive des besoins
qu'a le Québec, en ce moment, à
travers toutes ses régions en termes de métiers et professions et, de façon
plus spécifique, en termes de cibles qu'on pourrait avoir pour les immigrants et de partager cette vue-là pour être
capables de la mettre au jeu et essayer de converger et de partager l'information pour s'entendre sur ce
qui est un besoin collectif. Évidemment, ce qu'on souhaite aussi, ce
qu'on propose à la commission d'envisager,
c'est peut-être la construction d'un tableau de bord qui miserait sur des
informations stratégiques communes et
publiques qui nous permettrait de mieux comprendre, d'une part, nos besoins,
mais aussi d'avoir une mesure
d'impact de notre capacité d'accueil à travers, par exemple, l'offre de
services qui est offerte sur tout le territoire, de mieux comprendre s'il y a des enjeux aussi au niveau des
infrastructures d'accueil et d'avoir des mesures communes de nos enjeux
d'intégration pour faciliter la conversation puis être capables d'être en
amélioration continue sur l'offre de services gouvernementale.
Donc, sur la
deuxième orientation, vous avez pu en prendre connaissance, évidemment que la
commission appuie la proposition d'augmenter à 65 % d'ici 2022, là, la part de l'immigration économique. D'ailleurs,
je prends soin de vous dire que mon
propos au nom de la commission vise exclusivement l'immigration économique.
Considérant la mission de la commission,
on s'est vraiment concentrés seulement sur ce volet-là avec les membres de la
Commission des partenaires.
Au niveau de
la troisième orientation, qui pose la question : Est-ce qu'on devrait
miser sur la sélection permanente des
travailleurs étrangers?, de l'expérience... parce qu'on n'a pas documenté cet
aspect-là, mais des échanges et de l'expertise des gens de terrain qui alimentent la CPMT, il semble que ce puisse être
positif de viser le fait... de miser, plutôt, sur les travailleurs étrangers temporaires qui souhaitent
peut-être faire un passage permanent, puisque ces gens-là ont une
expérience, sont présents sur le territoire, donc offrent des conditions de
succès potentiel pour s'intégrer au marché du travail.
Au niveau de
la quatrième orientation, qui est de tenir compte des besoins court terme pour
être capables de choisir les immigrants en provenance du Programme
régulier des travailleurs qualifiés, on pense que l'objectif est noble, mais évidemment qu'à ce moment-ci on évalue à peu près
à entre 18 et 36 mois le délai. Ce délai-là est aussi lié à des délais
de traitement au niveau du gouvernement
fédéral. Donc, ce qu'on suggère à la commission, c'est bien sûr de tenter de
tenir davantage compte des besoins court
terme. Mais toutefois on pense que les délais actuels — bon, on pourrait les réduire, certainement — vont peut-être davantage permettre de
répondre à des besoins moyen terme et qu'il faut continuer les efforts avec le gouvernement fédéral. La CPMT a appuyé
fortement le ministre de l'Immigration et de l'Emploi, dans la dernière année, dans les efforts pour trouver des
allègements et essayer de bien cerner la situation que vit le Québec au Canada
en ce moment. Il reste une minute, donc j'accélère.
Pour la
cinquième orientation, qui est d'accélérer l'arrivée des personnes immigrantes
dans la catégorie Immigration économique,
évidemment on est favorables et, encore une fois, on dit que ça nécessite
probablement des efforts continus dans les négociations avec le fédéral,
puisqu'on dépend également des délais du côté fédéral.
Et la
sixième, d'appuyer le recrutement des employeurs en région, pour nous, ça semble
également un incontournable. Pour chacune des orientations qui nécessite
de dessiner des nouveaux services ou des programmes, on a pris soin de recommander à la commission que ces programmes-là
soient construits autour du parcours des immigrants et des entreprises
quand il s'agit de s'adresser à eux plutôt que des responsabilités peut-être
des ministères ou des organismes...
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
Mme Murray
(Audrey) : ...de manière à
s'assurer qu'on ait l'impact recherché d'aider le Québec à traverser
cette période de prospérité alors qu'on a un enjeu de rareté. Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Merci, Mme Murray.
Alors, nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous.
• (15 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mme Murray,
Mme Houpert, bonjour. Merci pour votre présentation de votre mémoire. À la page 4 du mémoire, je lisais : «1,4 million d'emplois seront à pourvoir entre 2017 et 2026, dont plus de 80 %
résulteront de la demande de remplacement générée surtout par les départs à la
retraite.» Et là : «La nouvelle offre de main-d'oeuvre proviendra : des jeunes actuellement aux études, 54 %;
de la future population immigrante, 22 %; de la hausse du taux d'activité des personnes âgées de
15 à 64 ans, 12 %; [ensuite] des personnes de 65 ans ou plus qui
resteront plus longtemps sur le marché du
travail, 7 %; [et] des personnes en chômage qui intégreront le marché du
travail, dont les personnes
immigrantes et les personnes handicapées, 4 %.» Quand on lit la note de
bas de page, on voit qu'à la note 5 on dit :
«Le modèle tenait compte d'un volume d'environ 50 000 personnes
immigrantes admises au Québec par année.»
Alors, on
dit : 22 % des besoins du marché du travail vont être comblés par les
personnes immigrantes sur un seuil de
50 000. Alors, moi, ce que je constate, avec les orientations proposées
par le gouvernement, on n'est pas très loin du 50 000. Alors, je constate qu'avec les seuils qui sont au jeu
présentement, bon, on est dans la cible fixée par ce qui est dit par la...
Mme Murray (Audrey) :
La CPMT.
M. Jolin-Barrette : ...la CPMT...
Mme Murray (Audrey) :
Vous n'êtes pas le seul.
M. Jolin-Barrette : ... — oui — justement, alors on est dans le cadre des
projections pour répondre aux besoins du marché du travail.
Mme Murray
(Audrey) : En fait,
l'information qu'on a la plus précise et la plus à jour en ce moment...
Évidemment, il peut y avoir différentes
méthodes puis différentes façons de calculer. Je pense qu'il y a des gens qui
vous ont présenté une façon de voir,
puis c'est la richesse d'avoir une commission parlementaire puis d'avoir
différents points de vue, mais du point de vue de la CPTM, avec les outils avec lesquels on travaille, c'est les
hypothèses qui reposent sur les évaluations qui ont été faites. Donc, c'est la raison pour laquelle il n'y
a pas eu de consensus sur le nombre à la commission, on n'a pas convergé
vers un nombre précis. Mais ce qui était
certain, c'est que tout le monde s'entendait pour dire qu'il fallait être dans
la palette maximale, la fourchette
maximale de ce que le gouvernement proposait et surtout il fallait continuer de
gagner en espace positif pour mieux accueillir, et intégrer, et choisir.
Donc, pour la
commission, quand vous réunissez les dirigeants patronaux, syndicaux, du communautaire
en emploi et de l'éducation, ce que je peux traduire de cette
conversation-là, c'est qu'on est davantage à dire : Oui, le nombre est important, on ne peut pas nier les enjeux.
Écoutez, j'ai fait le tour des comités sectoriels dans la dernière année, et
chaque comité sectoriel qu'on rencontre,
c'est la priorité numéro un. Vous parlez avec les grappes et les créneaux
ACCORD du Québec, c'est la première
priorité au coeur de leur vision stratégique. Mais à la commission, ce qui
ressort, c'est : On a encore de
l'espace pour s'améliorer, pour mieux choisir, mieux accueillir, mieux
intégrer, donc allons avec la fourchette maximale si on ne convient pas d'un nombre précis appuyé sur les études
qui sont disponibles et misons sur des stratégies d'accueil et d'intégration
puis des programmes qui vont répondre aux besoins pour nous permettre de
relever le défi.
M. Jolin-Barrette : C'est intéressant, ce que vous dites, parce qu'à
la table, justement, vous avez, dans le fond, les deux, trois, quatre côtés, si on peut dire, dans
le fond, des gens qui proviennent de tous les milieux, puis justement ils
ne sont pas capables de s'entendre sur un
seuil précis, mais en fonction des chiffres qu'on a, on est, comme on dit, sur
la cible en fonction des études établies pour assurer de répondre aux
besoins du marché du travail.
Mais j'en suis
beaucoup sur le fait de s'assurer que chaque personne qui choisit le Québec
puisse occuper un emploi à la hauteur de ses compétences, puisse répondre à ce
à quoi on s'attend d'elle aussi. Alors, le Parcours d'accompagnement
personnalisé, il est là pour ça, justement, pour faire en sorte que les
personnes immigrantes soient accompagnées
tout au long du processus puis on améliore les choses qui étaient faites, mais
surtout le ministère de l'Immigration retrouve sa place centrale par
rapport aux personnes immigrantes au niveau de l'intégration.
Une
question sur le PTET. On est en discussion avec le gouvernement fédéral pour
avoir des assouplissements. Là, je pense que votre organisation, elle
souhaite également des assouplissements de la part du gouvernement fédéral.
Puis pourquoi vous voulez ces
assouplissements-là? Puis c'est quoi, les conséquences à ne pas avoir ces
assouplissements-là pour vos membres?
Mme Murray (Audrey) : En fait, le raisonnement de la commission à cet
égard-là, c'est qu'en ce moment on a besoin
de maximiser tous les leviers qui sont à la disponibilité pour répondre aux
besoins du marché du travail. Je le disais d'entrée de jeu, l'immigration, évidemment, est un volet. Il y a
d'autres aspects qu'on regarde, à la commission, on ne regarde pas juste l'immigration, mais au niveau de
l'immigration, évidemment, chacun des leviers disponibles ont fait l'objet
d'un examen, et le fait d'accueillir des
travailleurs étrangers temporaires et des travailleurs économiques fait partie,
évidemment, des leviers qu'on veut parfaire pour répondre.
Au
niveau du PTET, effectivement, je pense que la position, elle a été commune, de
dire : Bien, sans compromettre le
droit des travailleurs, travailleuses qui arrivent au Québec dans un statut
temporaire, il faut trouver une façon d'alléger et d'adapter les normes, en ce moment, du programme
pour permettre une meilleure adéquation avec les besoins. J'entendais...
je crois que c'est Olymel qui est venue vous parler de l'enjeu du plafond de
10 % par entreprise, qui est un des enjeux importants, des coûts qui sont associés, de la longueur administrative
et du dédoublement de production d'études sur le marché du travail, qui est à faire. Donc, effectivement, la commission a
donc appuyé les efforts du gouvernement pour essayer d'obtenir des allègements tout en restant
cohérente puis en disant : Bien, il faut aussi améliorer les autres
leviers puis voir s'il n'y a pas d'autres programmes qui pourraient
aussi nous aider à améliorer la situation.
M. Jolin-Barrette : Et sur la question du 10 % pour le programme
Travailleurs étrangers temporaires, ce qu'il est important de comprendre
aussi, c'est que, pour les PME, le 10 %, il est très important parce que,
quand c'est des petites entreprises, ils ont un moins grand nombre de
travailleurs, donc ça impacte d'autant plus pour l'entreprise. Les grandes entreprises aussi, ça a un impact important, mais
ce que je veux dire, sur la masse critique du nombre d'employés, ça fait
véritablement une différence.
Au
niveau du marché du travail, souvent... et on a eu la Chambre de commerce
Montréal métropolitain qui est venue, on
a eu des gens qui sont venus davantage de régions aussi, comment est-ce qu'on
réconcilie tout ça, les besoins de main-d'oeuvre en fonction de Montréal versus les régions, par rapport aux
seuils aussi? Parce qu'il y a une grande concentration des personnes immigrantes dans la région de
Montréal. Notre désir, nous, c'est d'assurer une plus grande
régionalisation. Mais comment on s'assure
aussi de ne pas freiner la croissance dans la région métropolitaine de Montréal
non plus? Comment la commission voit ça?
Mme Murray
(Audrey) : Mais je pense que, dans...
La Présidente (Mme Chassé) :
...
Mme Murray (Audrey) : Merci. Merci, Mme la Présidente. Donc, je pense
que le défi, en fait, pour le Québec, c'est notamment d'essayer d'avoir une approche collaborative plus qu'on ne l'a
jamais eue entre nos différentes tensions qu'on rencontre, en ce moment, dans le marché du travail. Donc, évidemment, je
pense qu'on ne peut pas avoir... laisser aller la métropole ou se mettre dans une dynamique où les
régions viennent à Montréal voler les immigrants, tu sais, on pourrait
avoir des images... Je pense qu'il faut
qu'on travaille ensemble, les besoins ne sont pas les mêmes. Je pense que c'est
important de continuer de raffiner. Quand même, à Montréal, on a une
concentration de certains secteurs d'activité qui ne sont pas nécessairement les
mêmes qu'en région.
Donc,
il faut qu'on continue à avoir une bonne information puis qu'on utilise les
leviers comme on le peut à travers les
programmes, à savoir : On sait qu'il y a des programmes qui nous aident
plus que d'autres à inviter les immigrants à venir en région, notamment quand c'est lié à une offre d'emploi, puis
sinon il faut qu'on crée en région un écosystème qui va permettre un accueil de l'immigration et aussi
qu'on soit capables d'informer les immigrants qu'on a des besoins et
qu'ils sont disponibles, les emplois, en région.
Donc, je pense qu'en
améliorant notre façon de comprendre nos besoins, de communiquer ces besoins-là
aux immigrants... parce que je reviens avec
cette idée-là, on est dans une dynamique où le Québec en a besoin, mais il faut
aussi, donc, leur donner la chance de bien
comprendre ce dont on a besoin et les avantages qu'ils vont retrouver à se
retrouver en région et/ou dans les
grands centres. Ils ont aussi des aspirations, évidemment, comme les autres
travailleurs et travailleuses du Québec. Mais je pense que l'espace,
l'écosystème en région devient aussi un levier important.
M. Jolin-Barrette : Sur la question de la francisation, la FTQ, tout
à l'heure, nous disait : Bien, écoutez, c'est possible d'utiliser les
programmes de la CPMT. En quoi consistent ces programmes-là? De quelle façon
que ça fonctionne?
• (15 h 50) •
Mme Murray (Audrey) : En fait, le programme de la... il y a deux
programmes à la CPMT, en fait, on vient de les réunir, mais à travers le fonds du 1 %, qui, je vous le rappelle,
est le fruit, essentiellement, des cotisations des employeurs qui ont une certaine masse salariale, on est capables
de financer la francisation pour les individus, mais on administre aussi
le programme pour donner de l'argent à des
promoteurs collectifs qui veulent agir en entreprise pour organiser des cohortes et former des travailleurs,
travailleuses qui ont besoin d'être francisés. Donc, il y a les deux volets qui
sont possibles.
M. Jolin-Barrette : Juste pour clarifier pour les membres de la
commission, là, le fonds du 1 %, c'est quoi? En quoi...
Mme Murray (Audrey) : En fait, c'est le Fonds de développement et de
reconnaissance des compétences. Donc, c'est
le fonds qui a été édicté en 1997, je crois, si on me demande de faire
l'historique — je suis
une jeune présidente, pas jeune, mais une jeune présidente — et
donc c'est un fonds qui est financé à même, essentiellement, la cotisation des entreprises. Mais maintenant le gouvernement du
Québec compense le fait qu'on a changé le niveau de financement auprès des entreprises, donc il y a aussi des crédits
budgétaires du gouvernement qui sont dédiés à des programmes
spécifiques, il y a sept programmes. Donc,
c'est un fonds qui a environ 70 millions de dollars par année qui sont
investis exclusivement pour le
développement des compétences de la main-d'oeuvre qui est en emploi. Donc, le
focus est vraiment de s'assurer que le Québec et les entreprises, on
mise sur l'évolution des compétences des gens qui sont en emploi au Québec. Et
donc il y a une partie qui est utilisée,
depuis quelques années, pour aussi accompagner les immigrants. D'ailleurs, le
ministre de l'Emploi a accepté une
recommandation récente de la CPMT de renforcer ce programme de francisation là.
On a augmenté les fonds qui y sont
dédiés pour être capables d'être présents à côté du ministère de l'Emploi, du
MIDI et de l'Éducation, parce qu'on est plusieurs joueurs sur la
patinoire de la francisation, donc, pour être capables de bien faire les
choses, mais en entreprise.
M. Jolin-Barrette : Parfait. Et je vous remercie pour la présentation
du mémoire. Je pense que j'ai des collègues qui veulent poser des
questions. Merci.
Mme Murray
(Audrey) : Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Le député de Chauveau désire prendre la parole.
Allez-y.
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme Murray,
toujours un plaisir de vous retrouver. J'ai
eu le plaisir de vous rencontrer à quelques reprises, et je voudrais avoir
votre avis... Évidemment, avec la... plusieurs de vos membres sont venus nous faire des
présentations, puis je pense que la Commission des partenaires du marché du
travail peut jouer un rôle clé, justement.
Vous unissez beaucoup de gens, et votre vision n'est pas corporatiste, dans le
sens que vous représentez autant les
employeurs que les personnes immigrantes, que le milieu de l'éducation, que le
milieu communautaire. En ce sens-là,
c'est très intéressant, et j'aimerais avoir votre avis de la perception de vos
membres sur le fameux parcours personnalisé
que le ministre a annoncé récemment. Au-delà des fameux débats qu'on a sur les
quotas, là, sur le nombre qu'on devrait
accueillir... C'est-u 40 000? C'est-u 42 000? Il y en a qui vont
jusqu'à 100 000, dans certains cas. Ce n'est pas facile d'établir vraiment le nombre. Et prendre le temps
de bien établir le nombre qu'on a besoin, ça va évoluer avec le temps
aussi, on le sait. Mais par contre ce qui ne
change pas, c'est la façon d'accueillir notre monde. On doit améliorer ça si on
veut les garder chez nous, si on veut les
garder en région. Quelle est votre lecture du parcours personnalisé? Est-ce que
c'est bien perçu? Est-ce qu'on peut continuer à l'améliorer? Avez-vous
des suggestions à nous faire à ce niveau-là?
Mme Murray
(Audrey) : Bien, en fait, je pense, de façon générale, le
parcours, il est apprécié, il a été souligné comme
étant un geste important du gouvernement. Donc, pour la CPMT, pour les membres
de la CPMT, je pense que cette approche,
cet engagement-là est très bien accueilli. Évidemment, je n'ai pas eu une
conversation approfondie, puis on est au début du déploiement de ce parcours personnalisé, mais, disons, de ce
qu'on peut déjà lire dans les avis qui ont été fournis, par exemple, par le comité consultatif en
immigration, mais aussi par d'autres comités pour des groupes sous-représentés...
Je
reviens avec le fait que, dans les politiques publiques, en ce moment, dans le
monde, il y a des pratiques innovantes pour
construire des programmes et des services gouvernementaux qui vont mettre les
personnes qui vont les utiliser au coeur
de ces processus-là. Et je pense que, s'il y a un élément qu'on a tenté de
soulever, puis je profite de votre question pour le réitérer à cette commission, c'est que ce que le gouvernement est en
train de faire est très important pour la prospérité du Québec, pour la santé, aussi, collective du
Québec. On a besoin de bien accueillir nos immigrants. On a besoin aussi
de s'assurer que, dans les milieux de
travail, les équipes de travail accueillent... comprennent bien ce qui est en
train de se passer et que ça se passe
bien, ce contact-là entre les immigrants et le personnel dans les entreprises,
que nos gestionnaires soient bien équipés pour faire ce travail-là, que
nos entreprises se sentent à l'aise de le faire.
Donc,
je pense que le parcours personnalisé va être un succès dans la mesure où on
s'assure de bien positionner les gens
qui vont en bénéficier au coeur de la façon dont on va le construire et aussi
qu'on se donne des repères, des indicateurs d'impact pour être en amélioration continue, quitte à se donner des
nouveaux moyens, des cellules d'innovation, des façons différentes de bâtir et d'évaluer nos façons de
faire. Parce qu'en ce moment ce qu'on sait, c'est qu'il y a une complexité
dans l'offre de services parce que cette offre de services là, elle a été
construite autour des responsabilités ministérielles, ou d'organisations, ou des différents groupes qui
interviennent, que ce soient les municipalités ou les différents organismes,
et à cet égard-là on a une occasion, je pense, importante de mettre à niveau la
façon dont on s'y prend.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste 30 secondes au bloc d'échange.
M. Lévesque
(Chauveau) : Bon, je vais le prendre. Je voulais vous parler de
régionalisation, très rapidement. C'est inégal, on voit des groupes qui sont prêts à en accueillir plus, qui
disent, dans certaines régions : Amenez-en, on est prêts à les prendre; dans d'autres régions, c'est inégal.
Vous avez des comités sectoriels dans chacune des régions. Est-ce qu'on
est capables de régionaliser vraiment dans l'ensemble des régions du Québec?
Mme Murray (Audrey) :
Bien, en fait, dans notre mémoire...
La Présidente
(Mme Chassé) : Très brièvement, en quelques secondes.
Mme Murray (Audrey) : ...oui, on vous a mis en annexe un exemple de parcours de
francisation qui s'est fait en agriculture.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
conclut.
Mme Murray (Audrey) : Les comités sectoriels sont des leviers pour accompagner la
régionalisation, assurément.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça met fin au bloc d'échange
avec le parti formant le gouvernement. Nous sommes rendus au parti
formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, vous désirez prendre
la parole?
M. Derraji : Oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Mesdames, bonjour, un plaisir de vous revoir. Je
tiens juste à dire et à déclarer que
j'ai été membre de la Commission des partenaires du marché du travail pendant
quatre ans. Donc, la dernière fois,
pendant les discussions du projet de loi n° 9, j'ai oublié de le mentionner,
donc là, aujourd'hui, je le mentionne. Merci pour votre excellent travail, et je reconnais les chiffres, surtout les
chiffres de la page 4, que je me rappelle, en étant aux réunions,
et je les ai devant moi. Mais je veux juste que vous me rassuriez un peu. Quand
on voit 22 %, en bas de page, il y a 50 000, est-ce qu'on tient
compte du taux de rétention?
Mme Murray
(Audrey) : Bien, en fait,
les hypothèses sur lesquelles reposent les chiffres qui sont présentés
dans la liste des 500 professions, parce qu'en fait c'est un document, là,
qui est public, hein, donc, tient compte...
M. Derraji : Je ne parle pas
des professions, je parle du seuil de la future population.
Mme Murray
(Audrey) : Oui, mais c'est
dans le même document, c'est pour ça que j'ai ai référé, là. Je suis
désolée, ce n'était pas précis, mais c'est
là qu'on retrouve l'analyse qui est citée dans le document. Il y a différentes
hypothèses qui sont sous-jacentes
pour arriver à ce nombre-là. Et l'information qu'on a sur le taux de roulement,
c'est une information, à mon avis,
qu'on doit bonifier, le taux de rétention des immigrants, combien on garde,
combien nous quittent après être arrivés ici, donc c'est des informations... Donc, il y a des hypothèses que les
économistes d'Emploi-Québec ont mises derrière les chiffres. Et, vous savez, cette liste-là et les
chiffres derrière, donc le 1,4 million, avec les hypothèses de qui pourra
combler, en termes de groupes, les besoins
qu'on a, on est en train de la mettre à jour, actuellement, et on est dans un
processus où, comme je le disais dans
le mémoire, que je vous le suggérais, on a souhaité améliorer notre façon de
s'y prendre. Donc, on est en train de revoir les chiffres, là.
M. Derraji :
Oui. Mon intention, vraiment, ce n'est pas de vous ramener dans un débat de
chiffres, parce que je sais comment
ça marche, et vraiment loin de là de vous faire dire : Écoutez, est-ce
qu'ils font une bonne planification de 43 000
ou on doit aller chercher 60 000? Vous êtes très, très à l'aise de
refléter les points de vue très diversifiés autour votre table. Mais moi, je vais vous ramener à votre
domaine d'expertise, et c'est ça qui m'intéresse aujourd'hui. On dit que
la pénurie est exagérée. Est-ce que vous êtes d'accord ou non, la pénurie de
main-d'oeuvre au Québec est exagérée?
Mme Murray
(Audrey) : Bien, en fait,
c'est comme n'importe quel phénomène, elle s'exprime de façon différente
dépendamment des secteurs, des régions, des
professions puis des métiers. Donc, je ne sais pas à qui vous référez dans
le fait d'affirmer qu'elle est exagérée. Je
pense que c'est un phénomène réel et tangible que vivent nos entreprises à
travers le Québec puis que vit aussi notre
main-d'oeuvre, parce qu'on entend aussi l'impact sur la main-d'oeuvre, qui doit
prolonger ses heures, donc des enjeux de
pénibilité au travail qui sont en train de s'installer dans les milieux de
travail du fait de la situation.
Donc, je pense que c'est réel. Ensuite, il y a des degrés, il y a des niveaux,
et c'est là que je dis que c'est important, pour bien accompagner le
Québec dans cette transition-là, de raffiner notre compréhension.
M. Derraji :
Excellent. Et c'est là où vous avez dressé une liste de professions et vous
avez dit qu'à moyen terme, pour la
période allant jusqu'à 2021, la grande majorité des professions — et là, c'est là où moi, je vois le signal
d'alarme, au-delà du débat sur les chiffres — 387 sur
500 professions seront en équilibre et offriront ainsi de bonnes perspectives
d'emploi aux personnes à la recherche d'un emploi. Qu'est-ce que je dois
retenir de tout ça?
• (16 heures) •
Mme Murray (Audrey) : Bien, ce qu'il faut retenir, c'est que, dans
l'exercice qu'on est en train de faire, on va devoir préciser la situation pour ces 387 métiers et professions.
Il va falloir être plus spécifiques, il va falloir avoir un spectre de qualifications qui soit plus précis, et l'idéal, mais je ne sais pas si on pourra s'y rendre, mais je le propose dans le mémoire, c'est qu'on puisse, à terme, quantifier l'écart
entre l'offre et la demande pour les métiers et professions par région.
Donc, c'est des modèles qui existent déjà. Dans
le secteur de la construction, on a un modèle quantifié des écarts entre
l'offre et la demande, donc c'est
possible d'avancer. D'ailleurs, les comités sectoriels ont contribué cette année
à la façon de générer l'information dans un processus où ils ont été davantage
sollicités. Et ce qu'on est en train d'essayer de comprendre, c'est aussi les causes de ces déficits ou non-déficits,
parce qu'on comprend que les causes qui peuvent s'exprimer, par exemple, dans les difficultés de recrutement ne
sont pas toujours liées nécessairement au fait qu'on ne sort pas assez
de finissants. On peut avoir assez de finissants
dans un domaine, mais on va avoir des enjeux de recrutement pour
différentes raisons qu'on est en train d'essayer de documenter pour mieux
comprendre.
M. Derraji :
Ma dernière question, c'est concernant les salaires. On entend, ces derniers
jours, dire : Écoutez, bien, les
entreprises qui paient 12 $, 15 $, c'est normal. C'est comme si
c'était un fait, et on doit l'accepter, ils ne doivent plus payer 12 $, 15 $. C'est quoi, la moyenne
salariale de cette pénurie? Donc, les demandes que vous recevez... parce que
je sais que vous avez des projets et des...
bien, que vous encouragez les entreprises à aller chercher de la main-d'oeuvre
et de les accompagner. Quand on sollicite votre aide au niveau de la CPMT,
c'est quoi, la soumission des salaires que vous recevez en moyenne?
Mme Murray (Audrey) : Bien, en fait, vous savez, parmi les 29 comités
sectoriels... hier, je parlais avec la dirigeante de TechnoCompétences, qui s'occupe du secteur des
technologies, qui me disait que, bon an, mal an, on a 5 200 postes
à combler puis on a seulement 4 000
finissants, donc, nécessairement, on a des écarts, en ce moment, qu'il faut
qu'on arrive à combler autrement.
Donc, c'est pour vous dire que, dans l'enjeu de rareté qu'on vit et dans la
pertinence d'avoir des leviers efficaces
en immigration, on est dans des besoins qui couvrent large, c'est-à-dire on a
des enjeux à trouver des gens en science
de données comme on a des enjeux à trouver des gens dans le secteur du tourisme
et du détail qui font partie de la vitalité du Québec.
M. Derraji :
C'est excellent. Et je pense que vous êtes l'un des rares organismes qui est
capable de parler avec des faits et
des chiffres. Ma question très directe : La moyenne, l'intervalle de
salaire que vous avez vu depuis votre début l'année dernière, avez-vous
une idée sur la moyenne salariale? Est-ce qu'on vous sollicite pour du
10 $ l'heure, du 12 $ l'heure ou du 40 $, 50 $ l'heure?
Mme Murray (Audrey) : En fait, c'est une bonne question, Mme la
Présidente, mais je vais devoir la prendre en délibéré. On aurait
peut-être dû se poser la question, mais je n'ai pas la réponse aujourd'hui.
M. Derraji :
Merci de me le proposer parce que, vraiment, ça m'intéresse de voir, de
recevoir... si les membres de la commission
souhaitent recevoir la réponse, les projets que vous financez au nom de la
CPMT, la moyenne salariale. Et, si vous
avez des exemples, je suis vraiment très intéressé à recevoir cette
information. Merci, Mme Murray. Je vais céder la parole à ma
collègue.
La Présidente
(Mme Chassé) : Très bien. Alors, nous prenons note et nous
verrons comment vous transmettre l'information lorsque nous la recevrons.
M. Derraji :
Oui, s'il vous plaît, oui.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. Mme la députée de Fabre, vous avez
3 min 20 s.
Mme Sauvé : Mon Dieu! C'est très bien. Merci. Bienvenue. Alors, je vais essayer
quand même de faire rapidement parce que j'ai plusieurs questions. Merci
pour votre mémoire.
Je
veux revenir sur le FDRCMO, le Fonds de développement et de reconnaissance des
compétences de la main-d'oeuvre, parce que, pour moi, c'est une solution
intéressante, la francisation en entreprise. Moi, j'ai présidé longtemps le Conseil régional des partenaires du
marché du travail dans ma région, et on en a fait une priorité, parce
que c'est une décision, évidemment,
régionale d'attribuer ce fonds à différents axes du développement des
compétences. Est-ce qu'il n'y a pas
lieu pour la commission de jouer un rôle, un rôle aviseur ou un rôle de soutien
aux régions qui se retrouvent devant cette nouvelle réalité d'accueil
des personnes immigrantes, à favoriser que le FDRCMO soit donc appliqué de
façon plus importante à la francisation en entreprise?
Mme Murray (Audrey) : Bien, certainement que le FDRCMO peut être un
levier pour les régions. D'ailleurs, on a des projets pilotes qu'on a
financés, pas nécessairement pour la francisation en entreprise, mais c'est
pour dire que certainement que ça peut être
un lieu d'expérimentation, parce que, vous savez, la francisation en
entreprise, on doit aussi mieux
comprendre comment on peut s'y prendre dans les différentes formules pour
réussir à bien accompagner les personnes et les entreprises. Tout à l'heure, les Manufacturiers et exportateurs
vous l'exprimaient, il y a une difficulté en ce moment, et c'est une bonne et une mauvaise nouvelle, du
fait qu'on est dans le plein-emploi
et qu'on a de la difficulté à dégager les gens, il faut qu'on trouve des façons innovantes de s'y prendre. Donc,
les régions peuvent miser sur le fonds. Elles ont la possibilité de venir chercher un appui financier pour expérimenter puis, par la
suite, obtenir un financement pour la francisation.
Mme Sauvé : Merci. Une question, un élément qui n'a pas été abordé jusqu'à maintenant.
On parle de compétences, bien sûr, pour faire face aux besoins du marché
du travail, on n'a pas parlé des compétences des accompagnateurs de ces
personnes, et, quand je fais le tour du Québec, il n'y a pas de formation. Au
niveau du bac, il n'y a aucun bac pour l'accompagnement
des personnes immigrantes au Québec qui existe. Alors, il y a des cours au
niveau du bac en travail social, maîtrise
en médiation. Il n'y a rien qui existe, alors qu'au niveau de l'employabilité,
il y a des bacs en carriérologie. Est-ce que vous avez un rôle
stratégique, à la Commission des partenaires? Est-ce que vous avez adressé
cette réflexion?
La
Présidente (Mme Chassé) : Il reste une minute au bloc d'échange.
Mme Murray (Audrey) :
Bien, certainement que... Vous voyez, dans les différents programmes qui
sont nés dans les dernières années,
on a beaucoup favorisé l'apprentissage en entreprise. Donc, on a fait
développer par le... on a financé le développement par les cégeps d'une
formation de formateur. Donc, ça me fait beaucoup penser à ce que vous
suggérez, c'est-à-dire c'est sûr qu'on a une
expertise, au Québec, au sein de nos organismes communautaires dans
l'accompagnement des personnes immigrantes
et certainement qu'on peut continuer de construire sur cette expertise-là, mais
il faudrait voir, peut-être qu'il y
aurait lieu... d'ailleurs, dans les nouveaux programmes qui sont lancés pour le
fonds, on va accepter désormais de financer
la formation des équipes de travail et des gestionnaires dans l'accompagnement
des groupes sous-représentés en entreprise, dont les immigrants.
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
Mme Murray (Audrey) :
Donc, on a élargi le spectre des activités qu'on peut soutenir pour
favoriser le succès de l'intégration,
sachant que, même s'il n'y a pas de bac, on sait les facteurs de succès
d'intégration dans les milieux de travail puis il faut impliquer le
milieu de travail pour accueillir ces groupes-là.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc. Merci. Maintenant, nous
sommes rendus au bloc d'échange avec le parti formant la deuxième
opposition. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.
M. Fontecilla : Merci. Mme Murray, Mme Houpert, merci d'être ici avec nous.
J'avais hâte de vous entendre, parce que du point de vue très
particulier dans lequel nous nous plaçons, on a l'impression que l'immigration,
c'est une politique de main-d'oeuvre, alors
que c'est un élément d'une politique de la main-d'oeuvre. J'avais hâte de voir
votre point de vue, qui est très... plus global, disons.
Écoutez,
j'ai très peu de temps, je vais aller à ce qui me paraît l'essentiel. Quelque
chose qui n'a pas été beaucoup nommé
lors de ces auditions, c'est la question... vous faites mention de la question
de comment quantifier, finalement. Des fois, ça a l'air, nos
discussions... la question des cibles ont l'air un peu d'être une question
ésotérique, dans le sens de mystérieux :
60 000, 55 000,
49 000, sur quoi se base-t-on? Mystère et boule de gomme, là. Vous dites
qu'«il est actuellement impossible de
savoir — et je
vous cite — même de
façon approximative, les besoins de main-d'oeuvre quantitatifs pour les professions les plus en demande tant pour
l'ensemble du Québec que par région administrative» et vous avez une recommandation : «De doter le Québec d'une
vue partagée et évolutive d'indicateurs socioéconomiques et de
coefficients régionaux...»
Je
vais vous poser une question qui peut paraître... Est-ce que nous sommes en
train de discuter dans le vide concernant les cibles d'immigration? Je
vais aller à l'extrême, là.
Mme Murray (Audrey) : Non, non. Je l'ai dit d'entrée de jeu, je pense
que, quand même, on a beaucoup amélioré les outils disponibles pour le Québec pour avoir une vue sur les besoins
de main-d'oeuvre et être capables de formuler des hypothèses. Évidemment qu'il faudrait qu'on
devienne meilleurs, puis qu'on soit plus prédictifs, puis qu'on mette au
jeu de façon transparente, je pense, les
hypothèses qui sous-tendent nos estimations puis notre façon de l'évaluer, mais
je ne pense pas qu'en ce moment on parle dans le vide. Je pense que le
Québec s'est doté d'outils qui lui permettent de faire une proposition à la
population.
Puis,
vous savez, on le dit aussi dans le mémoire, l'aspect quantitatif est
important, mais on est encore à des écarts de double de taux de chômage pour les personnes immigrantes qui sont au
Québec depuis moins de cinq ans, donc on a de l'espace pour s'améliorer. Donc, c'est une chose d'avoir des cibles puis
de vouloir être précis, je pense qu'il faut continuer de le viser, mais en même temps, à la commission, je
l'ai dit, ce qui est très important, c'est d'aussi se mesurer et être au
clair sur nos indicateurs de succès en
termes d'accueil et d'intégration. Et là on a des améliorations, puis il y a
des gestes qui sont posés en ce moment, je pense, pour qu'on y remédie.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste quelques secondes au bloc d'échange.
M. Fontecilla :
Il reste quelques secondes. Merci beaucoup.
Mme Murray
(Audrey) : Merci à vous.
• (16 h 10) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Nous sommes rendus au bloc
d'échange avec le groupe formant le troisième parti d'opposition. Mme la
députée de Gaspé, la parole est à vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci beaucoup. Bonjour. Ça va aller assez rondement parce qu'on s'était préparé la même question, étant donné que vous êtes en partenariat
avec le gouvernement sur la méthodologie derrière le calcul du seuil, du
40 000, le fameux 40 000, mais,
bon, je pense que vous y aviez bien répondu, là. L'orientation... vous parlez
d'une orientation ou d'une
recommandation, plutôt, pour faciliter le recrutement à l'étranger par les
employeurs. Pouvez-vous me détailler un petit peu ou aller plus en
profondeur?
Mme Murray
(Audrey) : En fait, ce qu'on
a compris de l'orientation du gouvernement, c'est d'appuyer les régions,
les entreprises dans les régions pour le
recrutement. On pense que c'est un besoin. On le voit bien, là, que les
entreprises sont à la demande auprès de leurs
municipalités, auprès de différents joueurs pour trouver des façons justes pour
elles de s'approprier une compréhension de
bon niveau des règles. Donc, c'est certain qu'on voit positivement le fait de
vouloir les accompagner dans ce recrutement international là, puis, on l'a dit, tous les leviers doivent
être à la disponibilité en ce
moment. Et le fait de recruter des travailleurs étrangers temporaires est la seule façon qu'on a d'assurer le lien
avec la région pour l'instant avec un
emploi régional, sinon c'est volontaire. Donc, on pense que c'est important
de pouvoir les soutenir et de bien
coordonner cet exercice-là parce
qu'en fait on ne veut pas que des entreprises
se retrouvent dans une situation où elles vont
recruter sans avoir bien compris les conditions puis finalement
elles n'atteignent pas leurs objectifs en bout de piste.
Mme Perry
Mélançon : Donc, l'idéal, ce
serait d'implanter un parcours aussi pour les... bien, d'accompagnement
pour les employeurs le plus rapidement possible.
Mme Murray
(Audrey) : Bien, en fait, je pense
que ce qu'on comprend de l'orientation du gouvernement, c'est qu'on
souhaite avoir une meilleure coordination puis une meilleure stratégie d'accompagnement. Donc, effectivement, on est d'accord avec ça, oui. Merci
La Présidente (Mme Chassé) :
45 secondes.
Mme Perry Mélançon : Ça va.
Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Non?
Bien, je vous remercie, Mme Murray et Mme Houpert, pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends momentanément les travaux pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 12)
(Reprise à 16 h 14)
La Présidente (Mme Chassé) :
Nous sommes de retour. Je souhaite maintenant...
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite à l'ordre. À l'ordre,
s'il vous plaît! Un peu plus dissipés, vous êtes le dernier groupe que l'on accueille pour notre
mandat de consultation cette semaine. Bienvenue. La cerise sur le sundae,
tiens.
Alors,
bienvenue aux représentants de la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. À une
minute de la fin, je vais vous inviter à conclure par un signe de la main. Et
je vous invite à tout d'abord vous présenter. Allez-y.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)
M. Gaudreault
(Simon) : Merci, Mme la
Présidente, M. le ministre, distingués membres de la commission. Alors, oui,
je fais les présentations sans plus attendre. Simon Gaudreault, directeur
principal de la recherche nationale pour la FCEI. Je suis accompagné aujourd'hui d'Audrey Azoulay, économiste, qui a
entre autres rédigé une bonne partie, là, du mémoire que l'on a déposé à la
commission, et de Mme Annie Larochelle, présidente de Phil Larochelle
Équipement, un membre de la FCEI, qui
va nous exposer, là, un peu plus tard dans notre présentation, la réalité de
l'entreprise, là, en matière de pénurie de main-d'oeuvre et
d'immigration.
J'entre tout
de suite dans le vif du sujet. Comme vous le savez, la FCEI, c'est le plus
grand regroupement de PME au Canada
avec 110 000 propriétaires de PME, dont environ un sur cinq, là, est situé
au Québec. Les tout derniers chiffres disponibles
sur l'étendue des pénuries de main-d'oeuvre confirment que le marché du travail
québécois ne dérougit pas. La FCEI a
d'ailleurs dévoilé la semaine dernière son plus récent rapport, là, des postes
à pourvoir, que l'on publie trimestriellement. Donc, les chiffres pour le deuxième trimestre de 2019 au Québec, c'est
un taux de postes vacants de 3,9 %, un sommet au Canada, à égalité avec la Colombie-Britannique, 116 000
postes à pourvoir dans les entreprises depuis au moins quatre mois parce
que les employeurs ne sont pas en mesure de trouver les employés recherchés,
c'est pratiquement le double d'il y a trois
ans. 50 % des entreprises indiquent qu'une pénurie de main-d'oeuvre
qualifiée limite leurs ventes ou l'augmentation de leur production et 40 % indiquent qu'une pénurie de
main-d'oeuvre non qualifiée les limite de la même manière. On notera également que les entreprises de moins de cinq
employés, donc nos microentreprises, sont plus durement touchées par les
pénuries de main-d'oeuvre. Par exemple, le
taux de postes vacants pour ces entreprises-là à l'échelle canadienne, c'est
5,4 %, soit plus du double de celui des entreprises de 100 employés et
plus.
J'aimerais
aussi mentionner que les données montrent clairement que les postes vacants ont
un impact sur les salaires. Les
entreprises canadiennes avec au moins un poste vacant prévoient une hausse
globale moyenne des salaires de 2,3 %, contre 1,5 % pour celles qui n'en ont aucun. Et, malgré cet
effort-là que les PME consentent déjà, là, en matière de bonification des conditions de travail, il semble que le
problème, en fait, se situe en grande partie ailleurs. Dans le graphique 2
du mémoire que nous avons fait parvenir
dans le cadre des présentes consultations, vous verrez qu'en matière de
problèmes de recrutement rencontrés
par les PME du Québec le manque de candidats disponibles dans leur région
surpasse nettement leur difficulté à satisfaire les attentes des candidats en matière
de conditions de travail, incluant la rémunération. En d'autres mots,
bien, peu importe le niveau du taux horaire
affiché sur l'offre d'emploi ou même que ce taux y figure tout court, on reçoit
bien souvent peu ou pas de C.V., il n'y a personne
pour combler le poste. Donc, n'en déplaise à certains chroniqueurs, nos
PME font tout sauf rigoler, à l'heure actuelle.
De
plus, en dépit de la situation actuelle déjà problématique, rien n'indique que
la tendance s'essoufflera de manière significative.
En effet, même si l'économie devait hypothétiquement ralentir, notre réalité
démographique continuera à poser un
défi à notre marché du travail et à notre économie dans un futur plus ou moins
immédiat. Face à ce défi-là, l'immigration est l'une des solutions
évidentes, parmi d'autres aussi, soutenues par la FCEI.
Les
PME du Québec, c'est 99 % des entreprises, la moitié du PIB du secteur
privé et de l'emploi au Québec. C'est pourquoi
la FCEI, en tant que leur principale représentante, a pris une part active dans
les récentes actions et discussions portant
sur la pénurie de main-d'oeuvre et l'immigration. Elle a émis ses commentaires
en décembre dernier sur le plan d'immigration
du Québec et, en février, à l'occasion des consultations sur le projet de loi n° 9. On a de plus accueilli favorablement la mise en oeuvre par le
gouvernement de La Grande Corvée, le lancement de la plateforme Arrima et le
déploiement du nouveau Parcours d'accompagnement personnalisé pour les
personnes immigrantes.
Comme
la FCEI a eu l'occasion de le mentionner lors de son passage en commission sur
le projet de loi n° 9 cet hiver,
ce dont les employeurs du Québec ont besoin, c'est d'un meilleur arrimage de
l'immigration avec les besoins du marché
du travail. À l'heure actuelle, il y a un mauvais casting entre le profil des
personnes accueillies au Québec et les postes
disponibles dans les entreprises. Alors que les postes à combler requièrent
très majoritairement des compétences de base ou de niveau technique ou professionnel, le Québec a plutôt
accueilli des personnes beaucoup plus qualifiées. Selon les données de l'ISQ, le taux de surqualification
des immigrants est passé de 37 % en 2006 à 44 % en 2017 et s'est
aggravé chez les immigrants ici depuis plus de cinq ans, il est passé de
33 % en 2006 à 42 % en 2017. La FCEI insiste donc aujourd'hui sur la priorité qui doit être accordée
à la qualité de l'intégration économique des nouveaux arrivants et qui
passe indéniablement par l'adéquation de
leurs compétences aux véritables besoins du marché du travail. Nous
recommandons aussi au gouvernement de
modifier la grille de sélection de l'immigration économique pour qu'elle
insiste davantage sur des critères
qui traduisent les besoins du marché du travail québécois et réduisent la
surqualification des candidats admis. Enfin, pour la FCEI, le choix du bon casting passe également par un recours
plus dynamique aux travailleurs étrangers temporaires.
Je
m'arrête ici, car nous tenions à faire entendre aujourd'hui en commission le témoignage
d'une entreprise membre de la FCEI
qui illustre la réalité actuelle du marché du travail au Québec et comment ça
se passe pour les PME qui utilisent le système
d'immigration. Il nous fera plaisir, par la suite, de détailler davantage nos
perspectives et recommandations lors de la séance de questions et
réponses avec la commission. Donc, je cède la parole à Mme Larochelle.
• (16 h 20) •
Mme Larochelle (Annie) : Merci, M. Gaudreault. Mme la Présidente,
membres de la commission, je vous remercie de me donner l'occasion de
m'exprimer aujourd'hui devant la commission afin de vous partager une tranche
de notre expérience en recrutement international.
Pour
vous situer, Phil Larochelle Équipement est une compagnie manufacturière de
troisième génération spécialisée dans
la fabrication d'équipements de camion, de déneigement et de semi-remorque
d'excavation ultrastable. L'entreprise demeure
à ce jour un des premiers fabricants d'équipements de ce genre au Canada et
elle siège fièrement, depuis ses origines en 1932, sur la 2e Avenue à
Limoilou. La clientèle que nous desservons depuis nos débuts sont les
contracteurs privés, municipalités et gouvernements à travers le Québec, le
Canada et les États-Unis.
Il y a environ
maintenant quatre ans, nous avons identifié une plus grande difficulté à
combler nos besoins de main-d'oeuvre de
production. Une nouvelle réalité s'est installée, combinée aux multiples
démarrages des chantiers Davie, qui
chaque fois venaient puiser profondément dans notre précieux bassin de travailleurs
expérimentés. Déjà en 2015, la réalité
latente de la pénurie de main-d'oeuvre se formalisait, et, malgré des efforts
soutenus et des moyens d'attraction les plus innovateurs, nous n'avons
pu combler les postes vacants. Après trois ans d'efforts et d'épuisement de
ressources, l'entreprise s'est donc
retrouvée face à un nouveau seuil historique d'employabilité qui compromettait
inéluctablement sa survie opérationnelle.
De
par la situation actuelle, le moteur économique que représentent les
entreprises québécoises se retrouve ainsi poussé au bord de l'essoufflement. À titre d'information, pendant trois
ans d'efforts soutenus, nous avons réussi à embaucher 20 travailleurs locaux, trois ans. Nous n'avons
réussi qu'à en retenir trois, les 17 autres n'ayant pas su avoir ou
démontrer les qualifications suffisantes.
Ça, Mme la Présidente, ça s'appelle se retrouver au fond du baril. Il fut un
temps où l'entreprise québécoise
souffrait de manque d'entrepreneurs et de releveurs, nous en sommes maintenant
à un manque de travailleurs. Nous sommes donc au bas de la pyramide des
besoins de la structure socioéconomique.
Le
recrutement, aujourd'hui, siège au sommet de l'art de la vente, Mme la
Présidente. Il s'agit maintenant d'un long processus d'efforts de recherche en continu, combinant stratégies
d'attraction, séduction, qualification et rétention. Nous comptons aujourd'hui des travailleurs étrangers que
j'ai moi-même été sélectionner en Asie et que j'ai qualifiés
techniquement. Mais, croyez-moi, Mme la Présidente, il a fallu me mettre
le couteau entre les dents, compte tenu des circonstances
que vivait l'entreprise. Plusieurs obstacles et contraintes se sont rapidement
dressés au travers du processus. Les délais
de Service Canada, probablement l'étape la plus éprouvante de toute notre
expérience. Avant de voir arriver notre cohorte de travailleurs, neuf mois se sont écoulés, Mme la Présidente,
neuf mois de longs délais, d'incertitude, de décisions contradictoires de la part du service fédéral, et
ce, malgré la conformité rigoureuse de notre dossier. Service Canada
oeuvre actuellement dans un processus
bureaucratique alourdi et détaché de la réalité, un processus truffé de conventions
inutiles qui est, de plus, périlleux pour
les entreprises québécoises. Service Canada agit avec détachement par rapport à
l'urgence de la crise que pose la pénurie de main-d'oeuvre au Québec.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste une minute au bloc d'échange... à votre exposé.
Mme Larochelle
(Annie) : Les entreprises
québécoises se font traiter et répondre avec condescendance et se font souvent servir des décisions sans appel. Ces
dernières se voient laissées au pilori, en attente d'être sacrifiées non pas
par un manque de demande du marché, mais
leur incapacité à maintenir leurs opérations économiques. En ce qui nous
concerne, notre entreprise était positionnée
avec quatre importants contrats municipaux multiannées pour la fourniture
d'équipements de camion représentant
plusieurs millions de dollars de revenus. Ma question : Pourquoi en est-il
autrement pour les autres programmes de recrutement de talents?
Je tiens à
souligner que l'expérience est toute autre avec le palier provincial. Dans
notre cas, les 10 semaines requises au fédéral se sont vues damer le pion pour un délai de seulement une
semaine pour le volet provincial. Ça a été très efficace. Il faut
revoir...
La Présidente (Mme Chassé) : En
concluant.
Mme Larochelle (Annie) : Oui.
Excusez-moi, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
10 secondes.
Mme Larochelle (Annie) : Oui.
L'histoire de Phil Larochelle Équipement est celle d'un acteur...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ah! le ministre vous donne de son temps.
Mme Larochelle (Annie) : Oui?
La
Présidente (Mme Chassé) : Oui. Alors, prenez le temps de bien
conclure, le ministre vous donne de son temps.
Mme Larochelle
(Annie) : Est-ce que je
conclus immédiatement ou je termine? Vous me permettez de terminer?
M. Jolin-Barrette : Oui,
allez-y, allez-y.
Mme Larochelle (Annie) : Je
vous remercie. C'est le manque d'expérience, M. le ministre. Pardonnez-moi.
Ma question... bon, alors, je tiens à souligner
que l'expérience est tout autre... bon, j'en ai parlé.
Je pense que
le Québec fait des efforts considérables pour porter assistance au niveau du
recrutement international, mais il
subsiste encore quelques incongruités. La liste des métiers qualifiables au traitement
simplifié dans le cadre de l'EIMT, actuellement, trop peu de métiers y
figurent. Il faudrait élargir la liste le plus rapidement possible avec l'aide
des comités sectoriels de la main-d'oeuvre, car le plafond d'employabilité de
10 % implique la capacité d'une entreprise à assurer sa croissance à partir d'une base d'embauche sur le plan
local, ce qui n'est vraisemblablement plus le cas en ce qui nous concerne. La rareté des compétences ne
discrimine plus et se trouve dans un éventail de qualifications
tellement plus élargi aujourd'hui.
Deuxième
point, une apparence d'inéquité au niveau de l'accès à l'aide financière pour
le recrutement international. Pour
l'instant, seule l'offre de recrutement de Québec International se
qualifie pour les entreprises qui en retiennent les services. Autrement, il en va jusqu'à coûter
20 000 $ par travailleur. Il s'agit d'un investissement important
pour une entreprise comme la nôtre,
comme pourrait l'être une pièce d'équipement important, mais les créanciers
d'une entreprise ne capitalisent pas
la valeur de l'investissement dans l'humain comme étant des actifs tangibles.
Les besoins en matière de main-d'oeuvre de Phil Larochelle Équipement ne cadraient malheureusement pas
avec l'offre actuelle de Québec International, ce qui n'a fait
qu'augmenter le fardeau de risque du projet.
La Présidente (Mme Chassé) :
Est-ce qu'on approche de la fin de votre exposé?
Mme Larochelle (Annie) : Je
termine, madame.
La Présidente (Mme Chassé) :
Fantastique.
Mme Larochelle
(Annie) : Le Programme
d'apprentissage en milieu de travail pourrait être également révisé afin
de reconnaître l'éligibilité des travailleurs étrangers temporaires et ainsi
appuyer la démarche pour en faire de meilleurs candidats à l'immigration et de
futurs contribuables québécois.
Comme dernier point, j'aimerais vous signifier
mon appui à l'idée de retirer l'imposition au niveau des heures supplémentaires payées aux travailleurs. La France
est un bon exemple que cette initiative peut grandement contribuer à pallier au problème de manque de main-d'oeuvre.
L'histoire de Phil Larochelle Équipement est celle d'un acteur
important au niveau socioéconomique pour la ville de Québec et à l'échelle
canadienne.
Pour
terminer, je salue l'intérêt de la commission qui se penche sur les solutions
pour permettre au Québec de traverser la
crise de main-d'oeuvre actuelle, et j'espère que ma présence aujourd'hui pourra
servir à enrichir votre réflexion à ce sujet. Je vous remercie
sincèrement. Merci, M. le ministre.
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, M. le ministre, la parole est à vous, et il vous reste
13 min 30 s.
• (16 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Parfait. Merci, Mme la Présidente.
M. Gaudreault, Mme Larochelle, Mme Azoulay, bonjour, merci pour votre présentation. Et puis,
Mme Larochelle, merci d'être présente aujourd'hui, parce que je pense que
c'est une excellente illustration de la
réalité que les entrepreneurs comme vous vous vivez, notamment au Programme des
travailleurs étrangers temporaires. Ça fait plusieurs mois que je le dis qu'on
demande au gouvernement fédéral d'avoir des assouplissements,
et c'est une démonstration claire que vous venez de faire de pourquoi est-ce
que c'est nécessaire d'avoir un assouplissement,
et surtout sur la durée des délais aussi, notamment sur l'étude d'impact du
marché du travail. Dans certaines circonstances,
il est tout à fait nécessaire d'être plus efficaces, et là, de votre propos, ce
que je constate, c'est qu'au niveau du gouvernement
fédéral, bien, ça a pris des mois et des mois, et vous avez eu toutes sortes de
difficultés aussi. Alors, il faut comprendre
que le marché du travail québécois, il est particulier au Québec, et on a tous
les outils au Québec pour faire en sorte de pouvoir gérer ce
programme-là uniquement au Québec. J'ai bien pris note également des ressources
pour les entreprises au niveau du
recrutement, le coût par personne recrutée, également l'importance de la
flexibilité aussi que vous souhaitez avoir. Alors, c'est bien noté, puis
je vous remercie pour ce témoignage-là.
Bon, globalement, là,
au niveau de l'ensemble des entreprises, on a un défi, bon, avec les
travailleurs étrangers temporaires. En ce
qui concerne la régionalisation, vous avez des entreprises dans la région de
Montréal, vous avez des membres qui
sont dans les autres régions. On souhaite aller de l'avant avec une plus grande
régionalisation, mais comment faire
pour ne pas y aller au détriment, supposons, de la région de Montréal métropolitain? Avez-vous des pistes de
solutions?
M. Gaudreault
(Simon) : Bien, disons que
ce que... Merci, M. le ministre, pour votre question. Vous avez
raison, là, de vouloir parler de régionalisation de l'immigration, c'est certainement un aspect important qui, à notre avis, peut
contribuer à favoriser, disons, une meilleure intégration et, de ce fait-là,
là, meilleure réussite, là, du parcours d'immigration pour plusieurs candidats. C'est un fait que 85 %, environ, là, de notre immigration va
plutôt se destiner à la grande région de Montréal, alors qu'on sait, là, que ça représente un peu moins de la
moitié de la population du Québec. Donc, il y a des défis de ce côté-là, et très certainement qu'en
favorisant une meilleure régionalisation, en distribuant un peu mieux les
candidats sur tout le territoire du Québec, bien, on viendrait, à ce moment-là,
rapidement satisfaire aux besoins de davantage d'entreprises, là, qui sont à la
recherche, finalement, de la perle rare. On espère, en tout cas, qu'on a réussi
à illustrer aujourd'hui qu'il y a définitivement un très sérieux enjeu de
main-d'oeuvre à l'échelle du Québec.
Une
façon de faire cette régionalisation-là, à notre avis, qui peut être examinée,
c'est dans la grille de sélection des immigrants
de la catégorie économique, la grille de sélection du Québec. Présentement, on
est d'avis que c'est une grille qui favorise
une certaine surqualification chez nos candidats à l'immigration et donc qui
accorde beaucoup de points, par exemple, au niveau de la scolarité.
Est-ce qu'on ne peut pas regarder, si jamais on décidait de moins mettre
l'accent là-dessus, l'intégration dans la
grille de facteurs pour régionaliser l'immigration? Ça peut être une avenue de
solution, là, du point de vue de la FCEI.
Il
y a d'autres mesures qui peuvent être mises en place par le gouvernement. Vous
avez annoncé, M. le ministre, très récemment,
des mesures d'intégration des immigrants, rapidement les contacter, que ce soit
même en amont dans le parcours, dans
la démarche d'immigration, mais aussi rapidement lorsqu'ils arrivent au Québec,
leur présenter les différentes opportunités
dans les parcours d'immigration, incluant celles qui seraient à l'extérieur de
la région de Montréal. Ça peut être aussi une façon de favoriser
l'établissement de davantage d'immigrants en région.
Vous
savez, sachant que l'on était en commission cette semaine, j'ai saisi
l'opportunité d'engager des conversations, étant à Montréal, avec différents immigrants, et un des immigrants à qui
j'ai posé la question cette semaine : Si vous aviez une suggestion à faire au ministre et aux distingués
membres de la commission, en matière d'amélioration de l'immigration, laquelle serait-elle... Alors, on parle d'un
immigrant qui est à Montréal, qui conduit, évidemment, hein, un taxi, c'est
le classique, mais qui a déjà entamé son
parcours il y a de très nombreuses années, et je lui ai demandé :
Qu'est-ce que vous auriez aimé avoir,
dans votre démarche d'immigration, que vous n'avez pas eu?, et il m'a
répondu : Davantage d'opportunités de m'établir en région, donc, et c'était spontané de sa part. Alors, je
pense qu'il y a du travail à faire de côté-là, et ça peut se faire, comme je viens de le souligner, autant
du côté de la grille, du pointage que dans le soutien à l'intégration chez
nos immigrants de la part du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Merci. Je vais céder la parole, Mme la
Présidente. Juste une spécification sur la grille, avec Arrima, on va sélectionner en fonction des
invitations qu'on va faire, donc principalement en fonction des besoins du
marché du travail. Donc, j'entends votre
message relativement à la grille, mais prioritairement, actuellement,
supposons, au niveau du pointage, au
niveau du nombre d'années d'études, bien, avec les invitations que nous
faisons, puisque nous les faisons en fonction
des différents besoins, cette présence-là, cette pondération associée au nombre
d'années d'études est, comment je pourrais dire, moins importante parce
que c'est un processus en deux étapes maintenant.
Mais je vais céder la
parole, Mme la Présidente, juste je vais seulement reprendre à la fin, à trois
minutes de la fin, environ.
La
Présidente (Mme Chassé) : À trois minutes de la fin? Alors, je
reconnais la députée de Soulanges. Vous avez 7 min 30 s,
donc vous avez quatre minutes. Allez-y.
Mme Picard :
C'est bon. Merci. Merci beaucoup. Merci pour votre témoignage aussi,
Mme Larochelle.
J'avais
une question par rapport à la francisation. Vous dites que c'est un peu
complexe pour peut-être libérer les employés
pour la formation. Pouvez-vous élaborer pour peut-être nous donner des
suggestions pour la francisation en milieu de travail et le rôle que
pourraient jouer les employeurs?
M. Gaudreault
(Simon) : Bien, je vous dirais que, oui, c'est... Votre question est
pertinente, dans le sens où ça nous
permet de rappeler la réalité, hein, de nos entreprises au Québec. Je l'ai
mentionné brièvement, 99 % de nos entreprises au Québec sont des PME. Mais, lorsqu'on regarde
plus en détail, on voit que les trois quarts de nos entreprises ont
moins de 10 employés, au Québec. Même si on descend encore, la moitié ont moins
de cinq employés, hein? Donc, notre économie et nos milieux de travail sont essentiellement des milieux de travail de
microentreprises. La flexibilité, dans ce contexte-là, et les moyens sont peut-être
plus limités que dans l'image, des fois, qu'on se fait d'une grande entreprise,
où il y aurait possibilité de libérer, par exemple, un employé pour aller faire un cours de francisation lors des heures
de travail, des fois ce n'est juste
pas possible. Et aussi, du côté des employeurs, ce qu'il est possible de faire
lorsqu'on a une très petite opération, là,
avec du soutien, pas juste au niveau de la libération des heures pour suivre
des cours de francisation, mais aussi d'autres mesures qui pourraient
être mises en place, la capacité, autrement dit, est un peu plus limitée.
Donc, c'est
simplement cette réalité-là que l'on voulait porter à l'attention des membres
de la commission et du gouvernement. Lorsqu'on fait, si vous voulez, le design de nos
programmes de francisation, il faut se rappeler ça. Ce qui ne veut pas
dire que nos employeurs, au Québec, n'ont pas la grande volonté de réussir le
parcours d'intégration de leurs candidats,
de leurs employés immigrants, bien au contraire. Je pense qu'on l'a dit tout à l'heure, là, la situation pose un grand
défi, à l'heure actuelle, donc on veut les retenir, on va faire les
efforts nécessaires, mais à
l'intérieur, si vous voulez,
des moyens et de la réalité, là, de l'entreprise.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste une minute à votre bloc d'échange.
Mme Picard : O.K. J'ai peut-être, oui, une dernière question aussi. Pour la main-d'oeuvre immigrante temporaire, est-ce
que vous savez si les membres ont
fait des démarches pour que les travailleurs étrangers puissent, en fait, avoir
leur résidence permanente? Est-ce que
vous êtes au courant si ça s'est déjà fait? Avez-vous des expériences
à nous raconter sur ceux qui étaient temporaires et qui veulent devenir
permanents?
Mme Larochelle
(Annie) : Bien, ce que
j'entends, à l'heure actuelle... Moi, j'ai été en accueillir 10, tout frais
de juin, et déjà ils me demandent de
connaître les frais, justement, pour déposer une application pour aller
chercher leur résidence permanente. Donc, les 10 que j'ai été chercher,
sélectionner, j'étais dans la crème, je les ai... ils sont hautement motivés à demeurer des contribuables québécois.
Ils ne sont pas ici à titre, ah! opportuniste ou quoi que ce soit. Notamment,
avant qu'ils quittent le pays là-bas, je
leur ai payé un cours de francisation. Et rendus... ils arrivent ici, dès la première
semaine... moi, je suis de l'école qui pense
qu'avant que le confort s'installe trop il faut encore profiter de la
turbulence, donc je les ai tout de
suite inscrits. Ils font
12 heures de français par semaine, donc je les libère le vendredi
après-midi et également un quatre heures tous les samedis entre juillet et
décembre, ils auront fait trois niveaux de français, à ce moment-là. Je travaille avec une équipe
formidable du Centre R.I.R.E., sur la rue de la Couronne ici, à Québec.
L'équipe de M. Songa, ils sont merveilleux, ils ont une qualité d'enseignement
et d'intervenants absolument inestimable. Ce n'est pas si pire.
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, ça conclut, pour pouvoir permettre au ministre de reprendre la parole. M.
le ministre.
• (16 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Oui. Écoutez, je
vous remercie grandement
pour votre passage en commission
parlementaire. Je vais simplement
profiter des dernières minutes qui nous restent du temps de parole pour
remercier l'ensemble des membres de la commission puis de souligner le fait que je crois que les
travaux ont été constructifs et riches en échanges. Je tiens à remercier les organisations et les acteurs de la société québécoise qui se sont exprimés devant cette commission et qui ont contribué à la réflexion. La présence de ceux-ci
démontre l'intérêt et l'importance du débat que nous avons eu sur l'immigration,
sur les seuils rattachés à l'immigration.
Les différentes présentations ont permis de
faire ressortir plusieurs consensus, tout d'abord la nécessité d'améliorer notre système d'immigration, qui a parfois été négligé au cours des 15 dernières années. Je
souligne également l'importance de l'action du Québec en matière de francisation
et d'intégration des personnes immigrantes ainsi qu'un meilleur accompagnement
tout au long du processus, comme nous l'avons annoncé la semaine dernière.
Un autre consensus
qui s'est dégagé est la nécessité pour le ministère de l'Immigration et ses partenaires de faire mieux, notamment en regard de l'accompagnement des
employeurs, et ça, nous y travaillons et nous allons agir dans ce
domaine-là. Je retiens aussi l'urgence d'agir afin de répondre aux besoins de
main-d'oeuvre du Québec.
Les échanges
ont été constructifs. Le gouvernement analysera sérieusement l'ensemble des
propositions, et nous continuerons à travailler sans relâche pour
moderniser notre système d'immigration. Nous aurons l'occasion, d'ici le
1er novembre, de vous présenter le fruit de ces réflexions.
En terminant,
Mme la Présidente, vous me permettrez de souligner le travail exceptionnel des
employés du ministère de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, qui ont travaillé sans
relâche sur cette consultation, et ce, depuis plusieurs mois. Donc, dans un premier temps, Mme la
Présidente, j'aimerais remercier en particulier M. Jacques Leroux, sous-ministre
adjoint, qui m'a accompagné tout au long de cette commission,
Mme Anne-Marie Fadel, directrice
générale de la recherche et de
la planification par intérim, Mme Marie-France Martin, directrice de la planification
de l'immigration, M. Louis Bélanger, directeur général des opérations en immigration, Me Matteo Miriello, avocat à la direction
des affaires juridiques, M. Sébastien Bernard, conseiller et
adjoint à la direction de la planification de l'immigration, Mme Annie
Beauchemin, conseillère stratégique au secrétariat général. J'aimerais
remercier également tous les employés du ministère qui ont contribué durant le processus, également
mes collègues députés de la partie gouvernementale qui nous ont accompagnés durant
ces quatre jours, un grand merci à vous tous, et les collègues
des oppositions qui ont contribué à cette commission, tout en vous remerciant, Mme la Présidente, d'avoir présidé, M. et Mme la secrétaire, l'ensemble
du personnel de l'Assemblée aussi qui nous accompagne
tout au long des travaux. Alors, merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. le ministre. Alors, ça conclut le dernier bloc d'échange du
parti formant le gouvernement. J'invite maintenant, pour le dernier bloc d'échange du parti formant l'opposition officielle à échanger avec vous, M. le député de Nelligan.
Vous prenez la parole.
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. Je seconde le
ministre par rapport aux remerciements à tout le personnel, les
gens du ministère, les collègues qui
ont contribué et aussi les différents groupes et vous aussi d'avoir présidé les
travaux. Merci.
M. Gaudreault,
Mme Larochelle, Mme Azoulay, bienvenue. Merci pour votre présence et
pour l'excellent rapport. Première question,
je l'adresse à vous, Mme Larochelle. Merci pour votre témoignage. Je pense
que votre présence donne... et le
choix est très bien fait par la FCEI, c'est tout à votre honneur de ramener un
cas réel parce que, parfois, les gens, ils ont tendance à dire : Écoutez, on exagère la pénurie, les 116 000 postes que vous avez déclarés pour le
quatrième trimestre d'affilée, c'est
exagéré, 1 million de postes pour les 10 prochaines années, c'est exagéré,
mais il y a beaucoup de choses que, malheureusement,
c'est des mythes qui circulent. Le fait d'avoir une femme d'affaires présente
avec nous aujourd'hui, ça nous enlève un peu de la poussière et pour
voir avec d'autres lunettes.
Ma première
question s'adresse à vous, Mme Larochelle. Vous répondez quoi à quelqu'un
qui vous dit : Il faut rendre les postes vacants plus attrayants
pour les Québécois si vous voulez absorber la pénurie de main-d'oeuvre?
Mme Larochelle (Annie) : Nous
avons usé de toutes les stratégies.
M. Derraji : Donc, vous avez
aussi rendu les postes attrayants pour les Québécois, et ça n'a pas marché.
Mme Larochelle (Annie) : Le
trois ans que je mentionnais dans mon allocution, un peu plus tôt, représente
la quantité d'efforts. Ça représente quand même
36 mois, là, où est-ce qu'on a intensifié, on a augmenté, on a varié, on
a usé de moyens incroyables, du
référencement : 1 000 $
si tu restes six mois, 1 000 $ si tu me réfères quelqu'un. Il n'y
a rien qu'on n'a pas mis sur la table, et
ça, c'étaient toutes des sommes que je ne disposais pas, bien entendu, au
niveau de mon modèle économique, mais
avec le résultat qu'en trois ans j'ai réussi à engager 20 personnes pour les
postes que j'avais à offrir, je n'en ai gardé que trois, malgré tout ça.
Et je tiens à vous mentionner que les conditions
de travail qu'on offre sont absolument incroyables. Les gens terminent à 3 h 30 du lundi au jeudi, de
6 h 45, terminent à 12 h 30
tous les vendredis. Moi-même, je n'ai jamais pensé avoir une telle
qualité de vie, là, à titre de dirigeante d'entreprise, c'est tout autre.
M. Derraji : Je vous comprends, et, pour moi, c'est une
réalité que je savais avant de venir en politique. J'ai eu l'occasion
de parcourir le Québec, j'étais très proche de plusieurs
entrepreneurs, et, moi, ça me révolte quand on entend ou que j'entends le premier ministre... En fait,
ce que je viens de vous citer, c'est le premier ministre du Québec
qui l'a dit hier. C'est que, pour
moi, ça me révolte de voir que les entrepreneurs
au Québec ne font rien pour rendre les postes attrayants, et la solution, c'est aller chercher de la
main-d'oeuvre à l'extérieur. Donc, c'est pour cela que je vous ai posé la
question. Une autre question, c'est par rapport aux salaires.
Mme Larochelle (Annie) : Est-ce
que j'ai bien répondu à votre question?
M. Derraji : Ah! moi, ça a été
très clair.
Mme Larochelle (Annie) : Oui?
D'accord.
M. Derraji : Parce que je sais
que ce n'est pas vrai que les entrepreneurs québécois ne rendent pas les postes
attrayants au Québec. Moi, là, je suis outré
quand j'entends que la seule solution que le premier ministre avait à dire
hier, c'est rendre les postes vacants plus attrayants pour les Québécois. Ce
n'est pas la réalité des entrepreneurs, ce n'est pas vrai.
Mme Larochelle
(Annie) : Je veux quand même
juste vous dire que nous sommes une société qui est conventionnée, nous avons un système de relations de
travail. Et donc, malgré tout, je suis obligée d'aller au-delà des
barèmes, des prérequis d'embauche,
j'ai mis des programmes internes. Je recrute qui que ce soit qui a un
pouls et qui respire, et par la suite, s'il peut apprendre, bien, je lui enseigne, puis je le forme, puis j'essaie
de faire quelque chose avec. Moi, je suis au fond, là.
M. Derraji : Oui. Et vous les
francisez même avant qu'ils arrivent ici sur vos... de vos revenus.
Mme Larochelle (Annie) : Oui.
Oui, parce que, pour moi, la francisation, c'est le gage de la réussite d'une intégration et c'est le gage que ces gens-là vont
devenir de vrais contribuables. C'est ce qu'on veut, en bout de ligne, on ne veut pas qu'ils quittent.
M. Derraji : Oui, oui.
Mme Larochelle, je n'ose même pas vous poser une autre question.
Mme Larochelle (Annie) :
Excusez-moi.
Des voix : Ha,
ha, ha!
M. Derraji : Parce que, quand j'entends que les gens, à
12 $, à 15 $, ils vont avoir des difficultés, vous, vous
avez des difficultés, et, j'en suis sûr
et certain, et corrigez-moi si je me trompe, je ne pense pas que vos salaires,
c'est du 12 $ ou du 15 $.
Mme Larochelle (Annie) : Non,
monsieur, ça commence à 19 $.
M. Derraji : Oui, c'est ça. Ça,
c'est des postes d'entrée, Mme Larochelle?
Mme Larochelle (Annie) : Oui.
M. Derraji : Ça peut aller
jusqu'à combien?
Mme Larochelle (Annie) :
25 $.
M. Derraji : 25 $. Merci de nous préciser cette réalité,
parce que, j'en suis sûr et certain... et là M. Gaudreault peut
aussi intervenir, l'exemple que vous avez ramené aujourd'hui de l'entreprise de
Mme Larochelle représente un portrait généralisé?
Est-ce qu'on peut dire qu'on généralise, on peut faire une extension du
portrait de Mme Larochelle aux membres de la commission aujourd'hui?
M. Gaudreault
(Simon) : Disons que la
dernière fois où on a mesuré, par
exemple, le taux de salaire horaire
moyen dans les PME du Québec,
là, c'est quand même assez récent, il y a 12 mois ou moins, on
était à 19 $ de l'heure. Donc, on se
rappelle, donc, les PME ont des moyens qui sont assez limités, comme je le
soulignais tout à l'heure. Mais cela étant dit, ce chiffre-là
illustre une diversité, là, de postes dans une diversité d'industries, alors
c'est clair qu'il y a et il va toujours y
avoir, et les PME sont une pépinière pour ça, des postes d'entrée de niveau,
hein, où on fait notre entrée sur le marché du travail, et il y a, à l'autre bout du spectre, une série de postes,
incluant dans les PME, avec des qualifications relativement élevées, qui vont payer un taux de salaire horaire
plus élevé. Et il est vrai que... et la FCEI appuie cela, d'ailleurs, et il
s'agit, à notre avis, d'une des solutions au
défi de la main-d'oeuvre, il est vrai qu'il faut augmenter la productivité de
nos entreprises, et ça peut passer
par de l'automatisation, qui va nous permettre d'améliorer le niveau de vie et
aussi de surmonter une partie du défi de la pénurie de main-d'oeuvre.
Mais cela
étant, il va toujours demeurer une diversité de postes dans notre économie, de
l'entrée sur le marché du travail
jusqu'à des postes d'une spécialisation plus élevée. Le défi, évidemment, pour
notre économie, est de s'assurer que les employeurs, avec leur diversité
de modèles économiques, sont bien supportés et peuvent continuer à développer
leurs entreprises à l'intérieur de la réalité actuelle.
M. Derraji :
Oui, merci, M. Gaudreault. Je vais revenir, si vous le permettez, à
Mme Larochelle. Écoutez, je sais que vous ne faites pas de la politique. Nous, on le fait, on est dans un
processus de consultation pour une nouvelle politique qui va commencer, si l'échéancier est respecté, au mois
de novembre. On va avoir, pour les deux prochaines années, une nouvelle
politique d'immigration. Dans un monde idéal...
Mme Larochelle (Annie) : ...
M. Derraji : Hein?
Mme Larochelle (Annie) : Et je
la salue.
M. Derraji : Oui. Dans un monde idéal, qu'aimeriez-vous que le
gouvernement... fait pour vous accompagner, pour vous
aider à surmonter les obstacles de la pénurie de main-d'oeuvre?
Mme Larochelle
(Annie) : Nous en donner les
moyens financiers, parce que, dans notre cas, étant donné qu'on ne pouvait
pas travailler avec le principal agent qui appuie l'initiative
de l'immigration au Québec, qui est Québec
International, c'est de nous donner des
moyens de se qualifier pour avoir un appui financier. Chez nous, ça a
représenté un investissement de plusieurs...
M. Derraji : Combien d'employés
vous avez au sein de votre entreprise, Mme Larochelle?
Mme Larochelle (Annie) : Nous
avons, au siège social, 50 employés et nous avons, dans le groupe familial, également
une autre entreprise qui compte une quinzaine d'employés. Ma
perspective, en fonction du développement
que nous avons et du positionnement privilégié de par la renommée dont jouit
notre entreprise, me permet d'anticiper qu'à l'intérieur de deux ans je
pourrais doubler mon chiffre d'affaires si j'avais la main-d'oeuvre, ce qui
n'est pas peu dire.
M. Derraji : O.K. Donc, vous pouvez doubler votre chiffre
d'affaires si on vous donne la main-d'oeuvre
nécessaire.
• (16 h 50) •
Mme Larochelle (Annie) : Oui, si j'ai les travailleurs. J'ai d'ailleurs
planifié retourner en mission cet automne.
M. Derraji :
O.K. Pour aller chercher d'autres employés.
Mme Larochelle
(Annie) : Je vais ouvrir un autre quart de travail.
M. Derraji : Donc, quand on dit que la pénurie de main-d'oeuvre freine vraiment la croissance économique, freine la croissance des salaires, parce que vous avez
des salaires quand même au-delà de la moyenne, ce n'est pas un mythe,
c'est un fait. Vous, ça vous limite, la pénurie de main-d'oeuvre, dans votre
croissance.
Mme Larochelle (Annie) : En fait, la pénurie de main-d'oeuvre affecte, justement, la croissance, ça va de
soi, mais elle attaque le maintien
des activités économiques et elle crée, à la limite, une pression négative sur
les organisations, parce que,
écoutez, les gens qui sont à bord de ces entreprises-là, qui voient que ça ne
va pas, qu'est-ce que vous pensez qu'ils ont envie de faire? Bien, ils ont envie de sauter en dehors du bateau.
Donc, ça va créer même un phénomène d'attrition de l'entreprise, parce qu'ils ont peur pour leurs
emplois, ils voient très bien que le modèle n'est plus soutenable. Donc,
on n'a d'autre choix que de faire quelque
chose. Et ce qui m'inquiète, si le gouvernement n'adresse pas la situation
basée sur les besoins des entreprises...
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste une minute au bloc d'échange.
Mme Larochelle (Annie) : ...je crains que l'arrivée de l'intelligence
artificielle sera mal introduite et supplantera définitivement l'apport
humain dans les entreprises, parce que la nature déteste le vide, on s'entend.
Alors, je crains ça également.
M. Derraji :
Mme Larochelle, je partage vos inquiétudes et je peux vous assurer que ma
formation politique va mener ce combat, parce qu'on l'a dit qu'on ne
veut pas être... et que le gouvernement devienne un gouvernement antiéconomique, parce que des mesures pareilles ne
vous aident pas à aller chercher la croissance nécessaire. Et je termine
en vous disant : Prenez-soin de vous, parce qu'on a besoin de femmes comme
vous en affaires. Merci, Mme Larochelle.
Mme Larochelle
(Annie) : Merci, monsieur.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça conclut le bloc d'échange
avec le groupe formant l'opposition officielle. Nous sommes rendus au deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Laurier-Dorion, c'est votre dernier bloc d'échange du mandat. Allez-y.
M. Fontecilla :
Merci. Mesdames monsieur, merci d'être ici. Écoutez, je voudrais connaître
votre position sur la question de la
francisation. Vous mettez l'emphase sur cette question-là, qui est importante
quand même, surtout au Québec, là. Est-ce que vous seriez d'accord avec
la francisation en entreprise?
M. Gaudreault
(Simon) : Bien, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, M. le député,
il est clair que d'avoir l'aspect... le fait français, hein, lors du parcours
ou de la démarche d'immigration permet, évidemment, de favoriser l'intégration des candidats ou des immigrants dans
leur milieu de travail, dans leur communauté. Maintenant, la question
est de savoir, par rapport à la réalité de ces petites entreprises là, est-ce
qu'on a les moyens de francisation qui sont adaptés à leur réalité. Donc, il faut avoir, si vous voulez, en tête à la fois
l'objectif, qui est de s'assurer d'une intégration harmonieuse, qu'on francise nos immigrants qui vont, par
exemple, travailler dans les différentes régions du Québec, et à la fois
respecter la capacité, la flexibilité, par
exemple, que peuvent offrir les plus petites entreprises et les moyens dont
elles disposent. Donc, il y a cet équilibre-là que l'on doit atteindre
dans les parcours de francisation.
Mais
cela étant dit, une des meilleures façons aussi de franciser nos immigrants,
c'est, bien sûr, de les intégrer, hein, dans un emploi au sein d'une entreprise, là, qui est souvent, hein, chez
nos membres, là, les PME, une grande famille, et ensuite dans une
communauté. Alors, ça, c'est un facteur de succès pour l'intégration réussie
des immigrants et donc, souvent, leur francisation.
M. Fontecilla :
Merci. Écoutez, à la page 4, vous nous présentez un tableau Problèmes
de recrutement rencontrés par
les PME du Québec, là. Alors
qu'on parle beaucoup de surqualification des immigrants, je vois, dans votre
graphique, là, que la question «les
candidats sont surqualifiés par rapport aux besoins de mon entreprise», c'est à
l'avant-dernière place, là. Expliquez-moi, il me semble qu'il y a une
contradiction.
M. Gaudreault
(Simon) : Oui. Il faut faire attention lorsqu'on interprète ces
résultats-là. Alors, lorsqu'on pense à la qualification, hein, quand on est un chef d'entreprise, on pense au lien
par rapport aux besoins de mon entreprise. Alors, parmi les candidats
qu'ils ont vus, est-ce qu'ils en ont vu tant que ça qui ne peuvent pas répondre
aux besoins de l'entreprise? Peut-être que c'est à ce point de vue là qu'on a
un 8 %. Souvent, ce qu'on va voir, comme employeur...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Gaudreault
(Simon) : ...bon, ce sont des candidats qui se présentent avec un
certain besoin, qui vont présenter, si vous voulez, leur candidature de
la meilleure manière possible, et parfois...
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
M. Gaudreault
(Simon) : ... — oui — alors,
parfois, on n'arrive pas à répondre aux besoins. Mais je vous dirais
qu'il faut nuancer un peu lorsqu'on parle de surqualification ou de
sous-qualification, du point de vue de l'employeur.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie. Nous
sommes rendus au dernier bloc d'échange avec le troisième groupe formant
l'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous. Allez-y.
Mme Perry
Mélançon : Merci. D'abord,
j'aimerais vous remercier d'être présents puis de clore la consultation avec cette formule-là, qui a été vraiment
enrichissante. C'est toujours un plaisir d'entendre des cas réels puis de voir
qu'on travaille pour essayer de régler ces situations-là qui sont très
problématiques, donc merci.
J'aimerais
poser une question, si vous me permettez, Mme Larochelle. J'aimerais
savoir, quand vous dites que vous avez
eu des décisions contradictoires au fédéral, tout ça, ça a été des longs
délais, est-ce que vous avez dû passer par votre député fédéral pour
tenter de régler la situation? Avez-vous eu des conversations avec votre député
fédéral?
Mme Larochelle
(Annie) : Alors, j'ai eu la
chance d'être excessivement bien conseillée, j'avais un excellent avocat
en immigration avec une fiche recommandée du
plus haut niveau de par son expérience avec Service Canada, et c'est la première chose qu'il m'a dit d'éviter : Ne
tourne pas ton dossier en politique parce que ça irrite le processus et tu vas
faire fermer ton dossier. Donc, ce n'est certainement pas une porte qu'on m'a
recommandée.
Mme Perry
Mélançon : Merci. Bon, parce
que, c'est ça, à titre de députée, je reçois des cas comme ça, des
dossiers, puis on tente de travailler avec le palier fédéral, avec la députée
au point de vue fédéral...
Mme Larochelle (Annie) : Ça les
irrite.
Mme Perry
Mélançon : ...et je vous
dirais qu'effectivement ça ne donne jamais quelque chose de concluant.
Donc, j'aimerais savoir, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, je m'adresse à vous, est-ce que vous êtes en
faveur à ce que le gouvernement du Québec aille chercher le maximum de pouvoirs
au niveau fédéral?
M. Gaudreault
(Simon) : Bien, disons que
notre vision est plus au niveau, présentement, de l'administration
et du côté opérationnel du système. Alors là, ce qu'on voit et ce qu'on travaille
avec mes collègues de notre bureau à Ottawa, hein, qui
sont les partenaires principaux, là, à la FCEI, du gouvernement fédéral, on essaie d'introduire plus d'efficience dans le système.
Je pense que ce qu'on a essayé d'illustrer aujourd'hui par le cas de Mme Larochelle et ce qu'on essaie de
travailler avec le gouvernement fédéral, le ministre en a parlé tout
à l'heure, c'est un besoin qu'il y ait
un peu plus d'efficacité dans le système. Alors, je
pense qu'au final ce qui compte pour
les entrepreneurs, indépendamment, je vous dirais, peut-être, de la juridiction, c'est, à la fin de la journée : Est-ce qu'on est
arrivés à recruter nos candidats dans un temps raisonnable? Et vous savez qu'en affaires le temps, c'est de l'argent,
donc c'est le principal besoin, présentement, à
l'heure actuelle, d'accélérer
les processus.
Mme Perry
Mélançon : Merci. Bien, pour
conclure, je trouve que votre recommandation 2 dans votre document fait un bon résumé, là, puis, peut-être,
j'aimerais le souligner puis le rappeler au gouvernement, au ministre, qui
est là, je trouverais ça bien de le
lire, donc : «La FCEI recommande au gouvernement de publier
l'agenda prévu pour la mise en
place efficace des nouveaux dispositifs de
sélection, d'accueil et d'accompagnement des immigrants et de prévoir au plus
vite les collaborations qui permettront de
supporter ces dispositifs.» Donc, je pense qu'avec tous les groupes qu'on a
entendus, là, c'est une demande que
je me permets de faire, de réitérer aussi au gouvernement, de connaître
l'agenda qui va suivre dans les prochaines semaines, prochains mois,
donc merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Je remercie
M. Gaudreault, Mme Azoulay et Mme Larochelle pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je remercie,
moi aussi, tous les membres de la commission pour cette belle semaine de
travail. Je pense que ça a été éclairant. Je vous félicite pour votre
professionnalisme.
Ça ajourne,
hein, ça termine le mandat qu'on avait cette semaine, et nous nous retrouvons
pour un autre mandat le 17 septembre, à 10 heures. Bonne
continuation d'été. Merci à tout le monde.
(Fin de la séance à 16 h 59)