(Onze
heures seize minutes)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour. Ayant constaté le forum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes de
fermer leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur le projet de loi n° 9, la
Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre
adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration
réussie des personnes immigrantes.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji (Nelligan); Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), par M. Kelley
(Jacques-Cartier); Mme Sauvé (Fabre), par Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne); M. LeBel (Rimouski), par
Mme Fournier (Marie-Victorin); et Mme Dorion (Taschereau), par
M. Fontecilla (Laurier-Dorion).
Auditions (suite)
La
Présidente (Mme Chassé) : Excellent. Merci. Ce matin, nous débuterons
les auditions par la ville de Montréal puis La Maisonnée. Nous avons
commencé à l'heure, tout va bien.
Je
souhaite donc la bienvenue à la ville de Montréal. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé,
puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
À une minute de la fin de votre exposé, je vais vous faire un petit
signe. Je vous invite donc à vous présenter et puis à commencer votre exposé.
Ville de Montréal
M. Beaudry (Robert) :
Robert Beaudry, élu du district de Saint-Jacques, responsable au comité
exécutif au développement économique et relations gouvernementales.
Mme
Filato (Rosannie) : Bonjour. Rosannie Filato, élue dans le district de
Villeray, à Montréal, membre du comité exécutif
au niveau du développement social et communautaire, l'itinérance, la jeunesse,
la condition féminine, les sports et loisirs.
M. Beaudry (Robert) : Mme la Présidente, Mme la vice-présidente, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous recevoir aujourd'hui
dans le cadre des consultations particulières du projet de loi n° 9.
À
l'instar de toutes les grandes métropoles du monde, Montréal se caractérise par
sa grande diversité ethnoculturelle. Principal
lieu d'accueil et d'intégration des personnes immigrantes en sol québécois, la
métropole reçoit chaque année plus de
70 % de l'immigration internationale destinée au Québec. En 2017, cela
représentait 33 000 nouveaux arrivants pour l'agglomération de
Montréal.
Loin
d'être un phénomène nouveau, la métropole s'est construite à travers une
succession de vagues migratoires, toutes
plus riches les unes que les autres. Il en résulte qu'une personne sur trois y
est d'origine immigrante. C'est là une des composantes majeures de la diversité montréalaise et de son ouverture
sur le monde. Riche de cette diversité, la ville de Montréal demeure soucieuse de favoriser l'intégration des nouveaux
arrivants sur son territoire. La métropole a d'ailleurs développé une
expertise reconnue en la matière.
Le gouvernement du
Québec a souligné la particularité de Montréal en ratifiant en 2016
l'entente-cadre sur les engagements du gouvernement du Québec et de la ville de
Montréal pour la reconnaissance du statut particulier de la métropole. Dans la foulée de cette reconnaissance,
la ville de Montréal et le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de
l'Inclusion ont conclu en 2018 une entente triennale en matière d'immigration,
de diversité et d'inclusion. Cette entente repose sur un partenariat innovant qui vise à rendre Montréal plus
accueillante et inclusive pour les personnes immigrantes, et plus
particulièrement celles nouvellement arrivées.
Le
projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique
du Québec et à répondre adéquatement aux
besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes
immigrantes, jette les bases de plusieurs changements structurants au processus d'immigration actuel. Certains de
ces changements sont énoncés clairement, d'autres doivent toutefois être
mieux définis.
Par
l'entremise des commentaires et recommandations présentés dans notre mémoire,
la ville de Montréal entend contribuer
à la bonification du projet de loi n° 9. Nous vous représentons également
quelques projets porteurs déployés sur le territoire montréalais pour
favoriser l'accueil et l'intégration des nouveaux arrivants. Je laisse
maintenant la parole à Mme Filato.
• (11 h 20) •
Mme Filato (Rosannie) :
Merci. Donc, le projet de loi propose la mise en oeuvre d'un parcours
d'accompagnement personnalisé pour
les nouveaux arrivants et d'une bonification de mesures visant la francisation.
La ville de Montréal se réjouit de
cette intention. La francisation et l'accès à un emploi demeurent des facteurs puissants d'intégration à
la société québécoise.
Ceci étant dit, le gouvernement doit toutefois y consacrer les ressources appropriées,
facteur essentiel de succès. Or, le niveau de financement et de ressources additionnelles pour livrer ces services et
assurer leur arrimage avec les initiatives locales demeure inconnu. Nous tenons à
souligner que les objectifs de la francisation doivent être liés à de nouvelles
enveloppes budgétaires provenant du gouvernement québécois.
En
tant que métropole et gouvernement de proximité, la ville de Montréal est un
acteur de premier plan en matière d'accueil
et d'intégration des nouveaux arrivants sur son territoire. C'est en effet le
quartier qui est le premier lieu d'identification,
là où se déroulent les relations quotidiennes et où le nouvel arrivant
apprivoise son nouvel environnement. En
tant que palier le plus près des citoyens, Montréal a le souci de consolider
ses interventions de proximité et de maximiser l'utilisation des ressources municipales telles que les bibliothèques,
les maisons de la culture, les installations sportives et les centres de
loisirs pour assurer un accueil de qualité et une intégration réussie des
nouveaux citoyens.
Montréal
entend plus que jamais assurer son leadership en matière d'accueil et
d'intégration des nouveaux arrivants. La
métropole travaille d'ailleurs depuis plusieurs mois à la mise sur pied de la
station nouveau départ en collaboration avec plusieurs ministères et
organismes fédéraux et provinciaux, dont le MIDI. Inspiré des meilleures
pratiques déployées dans le monde, il s'agit d'un centre de services intégré
cohésif et accessible qui regroupera les différentes instances gouvernementales, régionales et locales
concernées. Cette initiative s'inscrit en complémentarité directe aux démarches
que le MIDI souhaite mettre en oeuvre pour améliorer la qualité de l'accueil et
du soutien à l'intégration des nouveaux arrivants.
La station deviendra, à terme, l'un des principaux points de service à
Montréal, avec la particularité d'offrir des services spécifiques et adaptés permettant d'accélérer le processus
d'installation et d'intégration des nouveaux arrivants.
La
ville de Montréal recommande donc que le gouvernement prévoie des ressources financières
et humaines nécessaires et qu'il travaille de concert avec la ville de
Montréal pour la mise en place et la bonification de mesures en matière
d'accueil et d'intégration des nouveaux arrivants, notamment la francisation.
Ensuite, la ville de Montréal recommande que des ressources supplémentaires
soient allouées également à l'élaboration et la réussite d'un parcours individualisé en complémentarité avec l'approche
intégrée développée par la ville et ses partenaires locaux, soit la station
nouveau départ.
M. Beaudry
(Robert) : Et c'est là qu'on me passe la puck. Montréal accueille la
grande majorité des immigrants sélectionnés dans les catégories
économiques, c'est-à-dire ceux qui sont choisis en fonction de leurs diplômes,
de leur formation professionnelle et de l'adéquation de leurs compétences avec
les besoins du marché du travail.
Depuis
plus de 20 ans, l'immigration internationale demeure le moteur principal
de la croissance démographique de
l'agglomération. La ville de Montréal considère d'ailleurs qu'il s'agit d'une
richesse et d'un privilège d'accueillir de nouveaux arrivants qui viendront, de par leurs talents, leur créativité
et leur culture, contribuer à l'essor de nos entreprises et institutions
ainsi qu'à la vitalité et au rayonnement de notre société.
Bien que la métropole
ait l'avantage de pouvoir attirer des travailleurs qualifiés à l'emploi qui
correspondent a priori aux candidats
recherchés par les différentes entreprises présentées sur son territoire, des
défis persistent en matière de
disponibilité de main-d'oeuvre. Depuis quelques années, la tendance est claire,
le nombre de postes vacants s'accroît, et
la métropole est confrontée à une pénurie de main-d'oeuvre dans plusieurs
secteurs et catégories d'emploi. En 2018, pour la région métropolitaine de recensement de Montréal, ce sont
73 405 postes vacants qui ont été répertoriés. Il s'agit d'un enjeu
de taille qui risque, à terme, de freiner la croissance de la métropole et la
productivité des entreprises et institutions montréalaises.
Face
à ces constats, en conséquence avec la stratégie de développement
économique 2018-2022, Accélérer Montréal, la métropole déploie des
efforts importants et concertés pour attirer et mieux intégrer les nouveaux
arrivants. Montréal mobilise les entreprises
et partenaires locaux afin qu'ils soient des acteurs de changement dans la
perspective d'une croissance économique inclusive et durable.
Le
18 février dernier, Montréal a convié une quarantaine de membres de la
communauté d'affaires, des femmes, des
hommes d'influence du Grand Montréal,
des élus du Québec — d'ailleurs, vous étiez présent, M. le
ministre — pour
discuter de la stratégie Montréal inclusive
au travail. Cette démarche est une mesure-phare du plan d'action de la ville de
Montréal en matière d'intégration des nouveaux arrivants qui vise à
mobiliser et à sensibiliser la société montréalaise autour des enjeux d'intégration des immigrants au marché de l'emploi. Il
ressort de cet événement une volonté commune forte et l'affirmation claire
que l'intégration économique des nouveaux arrivants, c'est l'affaire de tous.
Lors
du lancement de la stratégie Montréal, les chefs d'entreprise de la métropole
ont également souligné le fait que
les organisations qui comptent parmi leur personnel des travailleurs immigrants
jouissent d'un meilleur rendement. Il faut
noter que ces travailleurs ont aussi besoin d'accompagnement et de soutien,
notamment de la part du gouvernement
du Québec, pour accélérer et améliorer la reconnaissance des diplômes et
leur expérience de travail.
La ville recommande
donc que les gouvernements promeuvent et soutiennent les initiatives locales
qui, comme stratégie Montréal inclusive au travail, favorisent
l'intégration en emploi en français des nouveaux arrivants ainsi que
la sensibilisation des employeurs aux besoins et aux réalités de ces
segments de la main-d'oeuvre.
Dans
la même lignée, il apparaît pertinent de prévoir des mesures destinées au
soutien de l'entrepreneuriat pour les nouveaux
arrivants. En effet, c'est près de 10 000 entreprises,
des PME, qu'on pourrait perdre d'ici 2024, au Québec, faute de main-d'oeuvre. À cet égard, le gouvernement peut être un
acteur de changement et agir en aidant les immigrants entrepreneurs, notamment ceux avec un statut temporaire, et faciliter
l'octroi de soutien financier pour lancer une entreprise.
La ville recommande que le gouvernement de Montréal
prévoie la mise en place de mesures et d'outils concrets visant à soutenir les nouveaux
arrivants entrepreneurs, quel que soit leur statut d'immigration.
Enfin, j'ajouterais que Montréal est préoccupée par l'effet combiné de la
réduction des seuils d'immigration annoncée et la priorisation accordée à une régionalisation de la main-d'oeuvre.
Une meilleure répartition de l'immigration au Québec permettra de mieux répondre aux besoins de
main-d'oeuvre de l'ensemble des régions et de réduire la fracture
sociodémographique qui a pu se creuser au fil du temps.
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste une minute.
M.
Beaudry (Robert) : Merci. Toutefois, la répartition de l'immigration
au Québec permettra de mieux répondre aux
besoins de main-d'oeuvre de l'ensemble des régions et de réduire la fracture...
Oh! oui, ça, je l'ai dit. Toutefois, vous comprendrez qu'il importe, dans la combinaison des deux mesures, qu'on
n'accroisse pas la pénurie de main-d'oeuvre déjà observée dans la métropole. En tant que principal moteur économique du
Québec, Montréal a besoin d'un apport significatif en immigration pour
faire face à ses réalités démographiques propres.
Mme Filato
(Rosannie) : En déposant son projet de loi n° 9,
le gouvernement a annoncé du même souffle l'annulation
de plus de 18 000 dossiers qui avaient été enregistrés avant le
2 août 2018. Nonobstant l'injonction qui a forcé le gouvernement à poursuivre l'étude des dossiers,
la ville de Montréal est très préoccupée par cette annonce, notamment par l'absence de mesures transitoires claires
visant à assurer une continuité dans le traitement des dossiers. De ce nombre,
plus de 5 600 personnes sont déjà
installées au Québec. Il s'agit de travailleurs et de familles, dont certaines
incluant des enfants nés au Québec.
La ville de Montréal considère que les solutions
proposées par le gouvernement doivent permettre de réduire l'insécurité des personnes touchées en leur
offrant des solutions concrètes. Au-delà des enjeux administratifs, il y a des
femmes, il y a des hommes, souvent des familles entières qui contribuent déjà à
la vie collective. Il est urgent que le gouvernement du Québec précise ses intentions
à l'égard de ces candidats.
La ville recommande
donc que le gouvernement s'engage à traiter dans les six prochains mois des
déclarations d'intérêt des personnes qui ont déposé une demande avant le
2 août 2018, qui déjà vivent au Québec et apportent leur contribution
à la société.
En
conclusion, j'aimerais rappeler que le partenariat entre la ville de Montréal
et le gouvernement du Québec a permis
la réalisation de nombreuses actions significatives, notamment en matière
d'accueil et d'intégration des nouveaux arrivants. Le projet de loi n° 9 est une nouvelle
occasion de poursuivre cette collaboration et de trouver des solutions concrètes
à des défis qui auront des impacts sur la prospérité du Québec et de la
métropole pour les années à venir.
Le
traitement avec égard et rapidité des demandes d'immigration déjà déposées par
des demandeurs résidant au Québec de
même que le soutien de mesures visant à la mise en place d'un continuum de
services intégrés visant à promouvoir l'intégration
socioéconomique des nouveaux arrivants sont, à notre avis, quelques exemples de
conditions du succès du processus d'immigration québécois. On vous
remercie de votre attention.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie de votre exposé. Le
ministre vous a gracieusement offert de son temps. Nous allons
maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mme Filato, M. Beaudry, bonjour, bienvenue à
l'Assemblée nationale. Merci pour votre participation à la commission
parlementaire.
Quelques
mots pour féliciter la ville de Montréal, notamment sur votre activité que vous
avez tenue le 18 février dernier.
J'ai participé au début de la journée, mais je trouvais que c'était une belle
initiative de la part de la ville de Montréal et de la mairesse également de
faire en sorte d'asseoir tous les acteurs autour de la table, les partenaires
économiques à la fois du privé, à la
fois du public, pour faire de Montréal inclusive... de sensibiliser. Je pense
qu'honnêtement c'est une belle initiative.
Puis
c'est vrai ce que vous dites lorsque vous dites : Bien, nous, en tant que
ville, bien, les gens s'identifient, dans un premier temps, à leur
quartier, souvent, c'est à leur rue, à leur quartier. Donc, c'est vrai qu'il y
a une réelle proximité. Puis vous êtes des
partenaires importants en matière d'immigration, notamment dans l'entente qui a
été signée en 2016 par le précédent gouvernement, mais aussi au point de vue de
l'intégration dans les différents services publics. Alors, je souligne
le travail de la ville de Montréal en ce sens-là.
Pour
ce qui est des... Allons-y avec la question des ressources. Dans le fond, vous
nous invitez... L'autre fois, lorsque j'ai
rencontré la mairesse, on a parlé de
la station nouveau départ. Ce que vous souhaitez faire, c'est d'avoir un
pôle central pour l'ensemble de la ville de Montréal, où tous les
services seraient là. C'est ce que je comprends?
• (11 h 30) •
M.
Beaudry (Robert) : Oui, absolument.
C'est un peu dans le même esprit que les «one-stop shops» qu'il y a
eu en Europe, une espèce de guichet unique dans lequel les services du MIDI, les services de la ville de Montréal,
du BINAM, le ministère,
aussi, du Travail et de la Solidarité sociale... pour offrir un service
360 degrés aux nouveaux
arrivants, donc vraiment
d'avoir un lieu de chute identifié sur l'île de Montréal.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Puis, pour le bénéfice des membres de la commission,
là, le BINAM, c'est le...
M. Beaudry
(Robert) : Le Bureau d'intégration des nouveaux arrivants de Montréal.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, vous avez un bureau, à l'intérieur de la
ville, qui déploie des ressources notamment
pour l'intégration.
M.
Beaudry (Robert) : Absolument.
Et on a d'ailleurs, aussi, un plan d'action du BINAM 2018-2022, ce que je faisais référence tout
à l'heure, pendant le préambule, là, l'entente qu'on a eu via Réflexe Montréal,
qui est une entente financière, là, de 12 millions par année, là, du gouvernement du Québec, à laquelle Montréal
vient investir le même montant d'argent.
M.
Jolin-Barrette : O.K.
Pour la station nouveau départ, vous voulez mettre tout le monde sous le même chapeau où les
personnes immigrantes pourraient avoir
accès. Est-ce que, dans cette perspective-là, vous visez uniquement l'immigration permanente ou, également, vous
offririez des services aux immigrants qui ont un statut temporaire? Parce
que, nous, dans le cadre du projet
de loi n° 9, ce qu'on veut
faire, c'est donner davantage d'outils, puis on veut étendre les services que le gouvernement du Québec va donner aux personnes qui ont un statut
temporaire au Québec, dans l'objectif de
les amener vers la permanentisation, donc intégration, francisation,
accompagnement à l'emploi. Est-ce que, vous, votre perspective, c'est
les deux ou c'est uniquement...
M. Beaudry (Robert) : ...en fait,
tous les nouveaux arrivants, peu importe le statut.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, ça
pourrait s'inscrire dans cette logique-là?
M. Beaudry (Robert) : Absolument.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Au
niveau de la régionalisation, vous dites : On n'est pas contre la
régionalisation, mais on veut garder
notre part du gâteau aussi parce qu'on a des défis en matière économique à
Montréal. J'en suis. Mais là il y a comme
un arbitrage à faire entre Montréal... entre les régions parce que, dans toutes
les régions aussi, il y a des difficultés d'attraction, de rétention aussi. 80 %, environ, des nouveaux
arrivants s'établissent dans la région métropolitaine de Montréal. Comment
vous voyez ça, là? Parce que, dans votre mémoire, vous dites : Bien oui,
on est en faveur, mais on veut aussi conserver...
M. Beaudry
(Robert) : Bien, en fait, c'est cette reconnaissance-là aussi de
l'impact économique, le moteur économique qu'est Montréal à travers tout
ça, ses besoins de main-d'oeuvre qui sont là. Au niveau des besoins, là, par
exemple, en main-d'oeuvre, nos postes vacants ne font que croître de trimestre
en trimestre. On a un besoin criant... Quand
Montréal va bien, c'est toutes les régions qui vont bien aussi. Donc, on
comprend ce besoin-là en région, puis on le reconnaît, puis on veut une
meilleure coordination à ce niveau-là.
Par contre,
ce qui nous inquiète beaucoup, c'est au niveau des seuils parce que, si on
baisse des seuils puis on veut répartir,
là... l'impact sur Montréal, ça va être quoi? Comment on est capables de le
traduire? Et ça, pour nous, c'est encore incertain à ce niveau-là. Alors, ce qu'on veut vous sensibiliser, c'est
vraiment... Montréal est un moteur économique. Montréal a un impact, un rayonnement sur le reste des
régions du Québec. Il ne faut pas la traiter comme une région comme les autres.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Selon
vous, là, qu'est-ce qu'il faut faire pour s'assurer que les immigrants occupent
un emploi à la hauteur de leurs
compétences? Parce que, tu sais, on voit, là, les taux de surqualification pour
les immigrants de cinq ans et moins. Le taux de chômage, également, est plus du
double aussi. Avez-vous des propositions pour voir comment est-ce qu'on
peut corriger ça?
M. Beaudry (Robert) : Bien, vous
voyez, dans... le rendez-vous dont vous avez assisté, c'est justement pour rassembler les chefs d'entreprise pour voir quelles
étaient les frontières, justement, à l'embauche des personnes immigrantes,
à leur... selon leurs capacités... selon leurs qualificatifs, pardon. Il y a la
reconnaissance des acquis. Il y a le fait aussi d'éviter de demander une expérience québécoise à ces nouvelles personnes
là quand elles arrivent sur le territoire aussi, de travailler avec les
employeurs pour aussi avoir une culture d'embauche qui reflète un peu ce qu'on
a à Montréal, cette diversité-là. Parce qu'il y a des entreprises qui nous
l'ont dit lors de ce rendez-vous-là, le fait d'intégrer des personnes immigrantes dans leur structure, ça amène une
nouvelle façon de voir justement l'intégration. Donc, les incitatifs, pour
nous, à ce niveau-là, sont très importants, et pour les entreprises
aussi.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis,
dans le cadre de l'entente que le gouvernement du Québec a avec la ville de
Montréal, dans le fond, c'est une entente qui vous convient actuellement?
M. Beaudry
(Robert) : Oui. En fait, ce qui est très important pour nous, c'est le
Réflexe Montréal. Comme je vous ai dit tout à l'heure, Montréal ne peut pas
être considérée comme une région comme les autres. Montréal a une entente
conjointe avec Québec. On a des canaux,
justement, de communication privilégiés pour faire atterrir les lois sur notre
territoire. On a des délégations de pouvoirs de la part de Québec à certains
niveaux, dont au niveau de l'immigration, au niveau du développement
économique, par exemple. Donc, ce canal-là nous convient. Il faut vraiment
qu'on puisse l'activer et que ça devienne vraiment un réflexe.
Quand on veut
intégrer une politique, on ne peut pas l'intégrer mur à mur à travers le Québec
sans aller voir Montréal, parce qu'on reçoit 75 % de l'immigration,
par exemple. Donc, c'est vraiment une situation particulière.
Mme Filato
(Rosannie) : En complément de réponse, en fait, oui, l'entente Réflexe
Montréal est très importante. Cependant,
si vous parlez des montants d'argent, c'est certain qu'aujourd'hui on a été
clairs. Il y a quand même des besoins financiers et en termes de ressources humaines qui
sont énormes. Et tout le monde ici le sait, les besoins évoluent. Donc, à travers les années, on voit énormément de
changements démographiques sur le marché de l'emploi également. Donc, c'est
la raison pour laquelle on est ici
aujourd'hui. On veut collaborer. On veut parler des besoins qui évoluent
justement, pour parler des ressources qui ont été négociées.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la réalité de la régionalisation,
tantôt, je vous ai bien entendu, vous dites : Nous, on a des besoins à
Montréal aussi. Il y a une situation aussi qui fait en sorte qu'il faut assurer
la vitalité des régions aussi. Donc, dans
la perspective que nous avons d'utiliser le nouveau système Arrima, c'est
notamment le fait aussi de prioriser, supposons, dans certaines circonstances... Bien, en fait, dans un premier temps, à
la base, on veut jumeler le profil des candidats avec les emplois disponibles, mais aussi on souhaite
assurer la régionalisation. Mais là je vous entends bien que vous avez des
besoins à Montréal aussi puis vous souhaitez... Cela étant dit, toutes les
régions du Québec aussi crient à l'aide, et puis il faut répondre à la réalité
des régions pour assurer l'occupation du territoire aussi. Ça, c'est une
réalité.
M. Beaudry (Robert) : On l'entend parfaitement. Puis on est membres de
l'UMQ, donc on siège avec nos partenaires villes. Donc, c'est une réalité. Mais, comme je disais tout à l'heure,
75 % de l'immigration au Québec est à Montréal. On a quand même le
plus gros PIB du Québec. Ce n'est pas quelque chose non plus à négliger à ce
niveau-là.
M. Jolin-Barrette : Sur l'aspect du projet de loi n° 9, vous
nous invitez à traiter en priorité les gens qui sont sur le territoire
québécois. Vous dites, dans votre mémoire, là : 5 600 personnes
sont sur le territoire québécois. Ce n'est pas tout à fait exact. Dans le fond, il y a 3 700 demandeurs
principaux qui ont déposé leurs demandes au moment où ils étaient physiquement sur le territoire québécois. Ça
pourrait représenter 5 600 personnes, mais ça, c'est si tous les
demandeurs étaient sur le territoire québécois.
Mais
je vous entends bien sur le fait que vous dites : Les gens qui sont en
emploi et qui sont sur le territoire du Québec, bien, on devrait les prioriser. Puis c'est mon intention aussi. Je l'ai
toujours dit, avec le dépôt dans Arrima, on veut faire en sorte d'inviter prioritairement les gens qui
sont sur le territoire québécois et en emploi. Cela étant dit, le projet de loi
ne change rien au statut des gens actuellement. Qu'il y ait le projet de loi
n° 9 ou non, le statut temporaire qu'ils avaient relève du gouvernement fédéral. Ça fait que ça, je
voulais juste éclaircir ça avec vous, là. Mais je vous entends bien sur le fait
que vous souhaitez qu'on les traite de façon prioritaire.
M. Beaudry
(Robert) : Oui. Puis il y a
une question aussi, à
ce niveau-là, au niveau du nombre, c'est de savoir le nombre exact à Montréal. Est-ce que
vous avez ces chiffres-là actuellement?
M. Jolin-Barrette :
Ce n'est pas possible de le savoir, notamment sur le fait... Et c'est pour ça,
là... Dans votre mémoire, vous dites, vous voulez qu'il y ait
un partage d'information entre le ministère
de l'Immigration et la ville. Il n'y avait pas de moyen d'assurer le suivi et la traçabilité, si je peux
dire, là. Donc, c'est pour ça que, dans le projet de loi n° 9, notamment,
ce qu'on fait, c'est qu'on s'assure de mettre des dispositions pour s'assurer du parcours personnalisé
des gens. Moi, mon objectif, là, avec
le projet de loi n° 9, là, c'est vraiment d'accompagner les gens dès
l'étranger, de leur offrir des services dès l'étranger, à la fois aux
immigrants permanents que les gens qui sont en situation temporaire ici, leur
offrir des services de francisation
et d'intégration, peu importe qu'ils soient temporaires ou permanents, pour
viser la permanentisation de leur
statut sur le territoire québécois. Mais on va voir ce qu'il est possible de faire
avec le ministère de l'Immigration, si on peut partager de l'information
avec la ville de Montréal.
M. Beaudry
(Robert) : Pour nous, le partage des données est très important aussi,
là, vous l'avez dit, et ça, c'est dans
l'optique d'un continuum de services après. Et, quand on dit : On veut
bonifier justement cette loi-là, on a besoin, en tant que ville, de clarification, comment ce partage-là, non nominatif,
là, on s'entend, des données va être fait aussi. C'est des questions qu'on a en tant que ville. Pour
nous, c'est très, très important, la traçabilité, justement, de ces
personnes-là sur le territoire. On ne
veut pas dédoubler les interventions qui vont se faire après et on veut réussir
au maximum l'intégration de ces personnes-là. Donc, c'est ce qu'on vous
amène à travers le mémoire. Pour nous, ça, c'est une considération très
importante.
M. Jolin-Barrette : Bien, je peux vous dire, je suis très sensible à
ce que vous me dites sur cet élément-là, parce qu'il faut vraiment travailler en partenariat. Puis, comme je vous l'ai
dit, vous êtes des acteurs, vraiment, sur le terrain. Donc, c'est
important.
Je pense que certains
collègues veulent poser des questions aussi, Mme la Présidente.
• (11 h 40) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Absolument. Il y a tout d'abord le
député de Sainte-Rose, s'il veut encore
se prévaloir de son droit de parole, puis ensuite le député de
Beauce-Sud.
M.
Skeete : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci
beaucoup pour votre présentation. Je
suis résident de Laval, alors on est voisins.
Une voix :
...
M. Skeete : On peut le dire aussi,
mais on peut aussi dire la région de Laval. Mais je me permets de vous poser une question parce que justement
les faits sont intéressants, que 75 % des immigrants qui choisissent le Québec
vont à Montréal. Mais on a appris par nos délibérations, ici, que
55 % des emplois disponibles au Québec se trouvent à l'extérieur de Montréal. Donc, je me demande, quand vous faites l'analyse
de ça et que vous voyez le projet du gouvernement en ce qui
a trait à la déclaration d'intérêt, est-ce
que vous pensez que de revoir la
façon qu'on place les immigrants qui choisissent le Québec... est-ce que de le demander en amont pour arrimer les types
d'emploi aux employeurs, est-ce que ça, c'est quelque chose que vous voyez d'un bon oeil? Est-ce que c'est une
façon de régler les besoins du marché du travail?
M. Beaudry (Robert) : Vous voulez
dire de... L'arrimage est intéressant...
M. Skeete : Bien, la déclaration
d'intérêt qui se fait par l'immigrant qui veut choisir le Québec, par la suite
de l'arrimer avec les emplois au Québec, est-ce que
vous voyez ça d'un bon oeil? Est-ce
que c'est quelque chose qui pourrait...
M. Beaudry
(Robert) : Nous, au niveau
des incitatifs, ça va. On veut inciter les gens, mais on ne souhaite pas les obliger
à aller vers les régions. Pour nous, ça, c'est un point qui est très important.
Montréal, dans son développement économique,
c'est un peu la position qu'on se donne, on offre des incitatifs pour attirer
sur notre territoire autant les personnes que les investissements directs étrangers. Mais on ne veut pas
contraindre les gens à aller vers des régions, vers des emplois.
M.
Skeete : Je suis curieux parce que c'est à Montréal qu'on trouve le plus
haut taux de surqualification. Donc, si le gouvernement propose de placer des
gens dans des endroits qui ont un vrai besoin, et vous, vous avez une
surcapacité en termes d'immigrants prêts à travailler, je me demande...
M. Beaudry
(Robert) : En 2018, on avait
173 000 emplois vacants à Montréal, et ça ne fait que croître de
trimestre en trimestre. Donc, pour nous, l'arrimage, je pense que c'est
là-dessus qu'il faut travailler parce que... Oui, vous avez raison, il y a des
gens qui sont surqualifiés à l'heure actuelle. Mais comment on est capables
d'optimiser justement notre travail en
commun, le gouvernement du Québec, la ville de Montréal, pour justement amener
les entreprises... Et c'est ce qu'on fait par des initiatives... Montréal inclusive au travail. C'est ce qu'on
veut faire aussi par notre projet de guichet unique, comment on arrive à ramener justement ces gens qualifiés
là vers le besoin... Parce qu'il y a des entreprises, à Montréal, qui ont des
besoins spécialisés. J'en rencontre à tous
les jours, et de plus en plus. Et toutes les grappes industrielles nous disent
actuellement que c'est... Le premier
enjeu, pour eux, c'est le manque de disponibilité de main-d'oeuvre, puis après
c'est même aussi dans les investissements directs étrangers. La première
question qui nous est posée quand on attire un investissement direct étranger, c'est : Est-ce que vous avez la
main-d'oeuvre sur le territoire à Montréal? On a les universités qui sont là,
qui sont présentes. Je veux dire, on est intéressants, on est attractifs.
Montréal a connu la plus grande croissance des villes du Canada. Il ne
faudrait pas mettre ça à risque en obligeant les gens à aller vers d'autres
régions.
M. Skeete : Merci.
M. Beaudry (Robert) : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) : Oui,
j'invite maintenant le député de Beauce-Sud à prendre la parole.
M. Poulin : Il me reste combien de
temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Chassé) : Huit
minutes.
M.
Poulin : Huit minutes? Parfait. Bien, merci encore une fois d'être là,
la ville de Montréal. Très content également de voir de jeunes élus prendre ce dossier-là à bras-le-corps. Je pense
que c'est fondamental également d'avoir un regard qui est neuf sur cet
enjeu-là.
Un sujet qui
préoccupe la société québécoise depuis déjà plusieurs années, c'est, bien
entendu, l'importance du fait français. Dans votre mémoire, vous parlez
justement, bon, de l'importance du français, mais on sait très bien que, lorsqu'une
personne fait le choix d'arriver au Québec et qu'elle a été qualifiée, elle ne
le parle pas nécessairement. Alors, on sait également
que Montréal, compte tenu de son historique, a des enjeux pour la sauvegarde et
la promotion de la langue française sur son territoire.
J'aimerais
vous entendre sur le rôle que les villes doivent jouer, comme la ville de
Montréal, pour s'assurer que, lorsque
les gens qui viennent ici... oui, des fois, font le choix du Canada, font le
choix du Québec, mais font aussi, très souvent, le choix de Montréal, avec la beauté de cette ville-là. Comment
pouvons-nous s'assurer que le français ait réellement un suivi important pour une ville comme la vôtre, que
ce soit lorsque vos employés, par exemple, l'utilisent, que ce soit via la
promotion que vous en faites sur le territoire? Alors, de quelle façon, comme
ville, vous pouvez faire en sorte que les immigrants
puissent, du moins, avoir un intérêt assez grand pour apprendre le français et
qu'ils aiment également apprendre cette nouvelle langue?
Mme Filato
(Rosannie) : Je vous dirais que, pour la ville de Montréal, c'est
essentiel. C'est certain que c'est la langue officielle à Montréal et c'est
très important. En fait, selon nous, il faut prendre une approche qui est holistique. Et c'est ce
qu'on propose avec la station nouveau départ également.
Mais, quand on parle du BINAM, quand on parle des
agents de liaison, par exemple, qui sont dans nos bibliothèques, la maison de la culture, c'est ce qu'ils
font sur le terrain, c'est ce qu'ils font, ils accueillent que ce soit l'immigrant qui est venu
pour des motifs économiques, donc, pour travailler, ou sa conjointe et ses
enfants. Ils offrent des cours de francisation. Ils offrent des
ateliers, par exemple, de groupe. C'est extrêmement important. Il faut le faire
dans une approche qui est dynamique, qui est
près des gens. Ces agents de liaison, c'est des gens qui vont... qui se
déplacement également sur le terrain. On a la chance d'en avoir une dans... En fait, je regarde M. Fontecilla parce qu'on est élus dans le même coin. On a une agente de liaison qui se promène, qui fait du porte-à-porte justement pour aller rejoindre ces
personnes qui, souvent, restent à la maison, qui ont un peu de
difficultés à s'intégrer à la société québécoise.
Mais
le rôle du français est très important, comme tout le rôle de l'intégration
sociale. On parle beaucoup d'intégration économique aujourd'hui, ce qui est
très important, mais il faut parler de l'intégration sociale également. C'est très, très difficile pour les conjointes, pour les
enfants, pour la famille. Je reviens aux 5 600, ou à peu près, M. le
ministre, personnes qui sont touchées
par ce projet de loi. La ville de Montréal est quand même préoccupée par ça. Et
c'est important de prendre toutes les mesures, de façon holistique, pour
permettre une bonne intégration.
M.
Poulin : Donc, vous reconnaissez que c'est un enjeu important, à la
fois, que le français... la promotion du français sur l'île de Montréal et de s'assurer également
que nos immigrants l'apprennent. Est-ce que vous jugez cependant qu'au courant des 15 dernières années, pour
reprendre un chiffre populaire, les efforts ont été suffisamment faits pour
s'assurer que, le français auprès de
nos immigrants, non seulement la promotion soit faite, mais que le désir
d'apprendre le français soit suffisamment au rendez-vous pour nos
immigrants qui sont, par exemple, du côté de Montréal?
Mme Filato (Rosannie) : En fait, notre objectif aujourd'hui, c'est de
regarder vers le futur, de travailler ensemble. On est ici pour collaborer avec le gouvernement pour voir comment... On
sait qu'il y a des défis. On sait qu'il y a des lacunes. On est là pour améliorer le tout avec vous, de
collaboration avec le gouvernement. C'est certain... Je reviens aux ressources,
ça va être important pour la ville de
Montréal. Et je peux également parler pour les régions, j'imagine. On a besoin
de plus de ressources. On parle de
l'importance de la francisation. Tout ce que je viens de nommer, les agents de
liaison, dans toutes nos
installations, à la ville de Montréal, toutes les femmes et les hommes qui
travaillent pour instruire la langue française et aider à l'inclusion sociale,
ça prend des ressources financières et humaines, et on ici pour vous en parler,
justement.
M.
Poulin : Diriez-vous que le
défi risque d'être en augmentation avec le temps? Parce que, qu'on le veuille ou pas, il y a
un passif qui est là. Il y a des gens qui n'ont pas appris suffisamment le français, qui ne le maîtrisent pas parce que peut-être qu'à une certaine époque on a manqué d'outils, on
a manqué de ressources pour faire en sorte que ces gens-là puissent
apprendre le français. Parce que c'est aussi ça, la réussite de l'intégration,
hein, au bout du compte, c'est de s'assurer que
ces gens-là puissent maîtriser le français. Et, lorsqu'on parle de l'importance de la régionalisation de l'immigration, c'est évident que, si on se décide d'aller, par exemple, en région, l'outil, c'est de parler français, compte tenu du fait que, très souvent, dans nos régions, au Québec,
on parle très majoritairement
français. Je vous dirais que le défi des ressources, vous me parlez de
l'avenir, mais, compte tenu du passif qu'on a, il faut peut-être mettre les
bouches doubles.
Mme
Filato (Rosannie) : On pourrait absolument mettre les bouchées
doubles. Les ressources doivent suivre. J'ai de la difficulté à généraliser... En fait, je pense, ce qui va être
important, c'est justement de nous assurer qu'on ait les ressources. Mais ce que vous amenez comme propos, c'est très
pertinent. Cependant, il faut avoir les données. Il faut partager les données
également. Combien de Montréalais et de
Montréalaises qui seront soit visées dans les 5 600 personnes ou
au-delà de ça parlent le français? Est-ce que c'était la problématique?
Il faut avoir ces discussions-là. Il faut avoir les données. Et l'objectif de
la ville de Montréal, aussi, aujourd'hui, c'est de dire que l'objectif de la
loi est louable. Il faudrait clarifier cependant certaines... en fait, les
moyens, je dirais, pour en arriver... Il ne faut pas généraliser. On parle
d'humains ici.
• (11 h 50) •
M.
Poulin : Mais vous êtes prêts à jouer un leadership dans le...
continuer à jouer un leadership, et peut-être même encore plus fort, dans le fait que le français est
fondamental à Montréal et que, nos immigrants, on doit tout mettre en place
afin qu'ils puissent avoir les outils pour pouvoir l'apprendre. C'est ce que
j'en comprends?
Mme Filato
(Rosannie) : On est toujours prêts à jouer un rôle de leadership.
M. Beaudry
(Robert) : Je pense
qu'on doit... tous les paliers de gouvernement réunis ensemble. Ça n'incombe pas à une ville ou à une autre. Le fait français est important, mais
c'est toute... Comme, tantôt, je parlais d'un continuum de services. C'est un accompagnement personnalisé
aussi, qu'une personne qui arrive sur le territoire... Ce n'est pas
tous les mêmes besoins. Le français
peut être une barrière pour un. Pour l'autre, ça va être
autre chose, l'habitation, l'employabilité. Donc, c'est pour ça que l'accompagnement
personnalisé, pour nous, est important.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
M. Beaudry
(Robert) : Mais on va vous suivre dans votre leadership et on va en
insuffler, du leadership.
M. Poulin :
Bien, merci beaucoup. Fort intéressant. Puis effectivement le français, c'est
quelque chose de fondamental pour
tout le monde. Mais il est important de se rappeler que, par moments, on a un
passif dans des endroits précis, et
c'est pour ça qu'il faut se donner tous les outils. Alors, je vous remercie.
Très content de vous compter comme un partenaire à nouveau dans cette
belle aventure. Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci.
J'invite maintenant la
députée de Saint-Henri—Sainte-Anne à prendre la parole.
Mme Anglade : Alors, bonjour. Un plaisir de vous revoir,
Mme Filato. Quant à M. Beaudry, c'est toujours un plaisir de se croiser, surtout quand c'est dans le comté
de Saint-Henri—Sainte-Anne, mais on est contents de vous avoir à Québec aujourd'hui.
Alors,
écoutez, sur la question de la réforme, il ne fait nul doute qu'on est en faveur
d'une régionalisation, d'une meilleure
intégration des immigrants, de faire en sorte que le fait français
soit appliqué de manière encore plus forte et plus sentie. Donc, de ce point
de vue là, on n'a pas d'enjeu.
M. Beaudry,
vous disiez tout à l'heure que Montréal connaît une pénurie de main-d'oeuvre historique, et là vous parliez de chiffre de 173 000 ou
73 000 emplois?
M. Beaudry
(Robert) : ...
Mme Anglade :
Pardon?
M. Beaudry
(Robert) : 73 000, oui.
Mme Anglade :
73 000, parce que le total, en principe, est autour de 120 000. Donc,
73 000 postes vacants. Aujourd'hui,
il y a 18 000 dossiers qui ne sont pas traités. Parmi ces
18 000 dossiers là, vous faites référence à ceux qui sont présentement au Québec. On a appris que
l'intention du gouvernement cette année, pour 2019, c'est de ne traiter que
400 dossiers au total, et parmi les
18 000 dossiers et parmi tout ce qui se passe dans le volet Arrima,
un total de 400 dossiers. Donc, 400 dossiers, quand on regarde
une pénurie de main-d'oeuvre, avec 73 000 juste pour Montréal, comment
vous réagissez à ça? Vous dites ça puis vous
dites : Bien, si, la prochaine année, il va y avoir juste
400 dossiers traités dans le nouveau système, incluant même mes
18 000 dossiers, quel est l'impact que ça a sur Montréal?
M. Beaudry
(Robert) : Nous, ce qui est important pour nous, puis c'est ce qu'on
dit dans le mémoire, c'est de traiter...
On veut le faire de façon personnalisée. Alors, c'est important aussi de
traiter ces dossiers-là. Pour nous, c'est important de les traiter de la façon la plus rapide, la plus
efficace possible. Il n'y a personne qui est contre la tarte aux pommes, là.
On veut tous une meilleure intégration.
C'est fondamental. Mais, nous, ce qu'on dit aujourd'hui, c'est : Faisons
attention, ce sont des humains qui
sont derrière ces dossiers-là, ce sont des gens qui sont aussi sur le
territoire. Donc, on veut la plus grande attention possible portée au
traitement de ces dossiers et que ça se fasse le plus rapidement possible.
Mme Anglade :
Le plus rapidement possible, ça veut dire quoi? Parce qu'historiquement on a
démontré que, dans les dernières années, le ministère est capable de
traiter l'ensemble des 18 000 dossiers. On a vu qu'il y avait des
hauts fonctionnaires du ministère de l'Immigration qui ont témoigné, qui ont
dit : En six mois, on est capables de traiter les
18 000 dossiers. Quand vous dites «le plus rapidement possible»,
qu'est-ce qui vous apparaît acceptable?
Mme Filato
(Rosannie) : En fait, dans nos recommandations, on recommande un délai
de six mois. Ce qui est important, je vais continuer en complément
d'information de M. Beaudry, je veux qu'on pense à l'humain derrière les
dossiers. Ce n'est pas des dossiers dont on parle, c'est des humains. De leur
demander de recommencer à zéro... Je reviens aux 5 600, c'est des gens qui contribuent déjà à la vie collective,
à la vie communautaire, à la vie sociale, à la vie économique, qui paient des impôts. Il ne faut pas les oublier.
On crée énormément d'insécurité si on ne traite pas les dossiers. Évidemment,
on ne va pas imposer un échéancier au
gouvernement québécois. On n'a pas le pouvoir de le faire, de toute façon. Mais,
en fait, on recommande six mois. On considère que c'est raisonnable pour ceux
et celles qui sont déjà sur le territoire québécois.
Mme
Anglade : En fait, c'est ça, ce qu'on a montré, c'est que, d'un point
de vue historique... tant d'un point de vue historique que d'un point de vue des commentaires de hauts
fonctionnaires du... d'anciens fonctionnaires du ministère, c'était absolument possible, d'où le problème de
seulement vouloir traiter 400 dossiers cette année, qui pourrait avoir des
répercussions sur le développement économique de la région métropolitaine.
Alors, j'aimerais vous entendre sur... Aujourd'hui,
vous en avez parlé un peu, M. Beaudry, mais j'aimerais vous entendre à
nouveau sur l'impact grandissant... J'ai
l'impression que la tension par rapport au manque de main-d'oeuvre, chaque
jour, est un peu plus élevée dans la région montréalaise. J'aimerais
vous entendre davantage là-dessus.
M. Beaudry
(Robert) : Le besoin de main-d'oeuvre et le besoin de talent aussi est
criant sur l'île de Montréal. Je l'ai dit
tout à l'heure, il y a des entreprises qui nous approchent et qui... C'est la
première question qu'ils nous posent. Montréal
International, que vous connaissez très bien, c'est un enjeu pour eux aussi
quand ils viennent nous voir. Est-ce qu'on
a cette disponibilité-là de talents? Actuellement, on voit qu'on a de la forte
pression dans certains secteurs, les TIC, les technologies de l'information et des communications, jeux vidéo, la
restauration. Donc, vraiment, dans le spécialisé et le non-spécialisé,
la demande est très, très forte.
Donc,
oui, on a un élan de croissance intéressant. On sait que, bon, il peut y avoir
un ralentissement de l'économie. On
est en fin de cycle. Donc, il y a toujours une crainte à ce niveau-là. Il faut
qu'on puisse s'assurer de rester concurrentiels, parce que Montréal, c'est aussi le «flagship» du Québec au niveau du
développement économique à l'international. Donc, il faut qu'on puisse répondre à ces approches-là
des entreprises. Il faut qu'on soit prêts aussi à les accueillir, tu sais, on
dit... Un terrain prêt pour la
première pelletée de terre, bien, c'est la même chose, là. Il faut qu'on ait
les ressources, au niveau humain, qui soient sur le terrain.
Mme Anglade : Donc, j'en
conclus que juste procéder... Puis là je vous entends quand vous me dites que
ce sont des humains, que ce ne sont pas des dossiers. Mais juste
procéder au traitement de 400 dossiers cette année peut avoir
définitivement un impact négatif d'un point de vue économique.
M.
Beaudry (Robert) : Ce qu'on dit, c'est vraiment... On veut que ça soit
traité dans les six prochains mois. On veut qu'il y ait une attention
particulière... Les mesures transitoires, pour nous, sont superimportantes.
Donc, oui, on veut avoir ces personnes-là prêtes à l'emploi. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Merci. Je cède la parole à la députée de
Bourassa-Sauvé. À vous la parole.
Mme
Robitaille : Merci. Merci d'être là aujourd'hui. Sur un autre front,
dans le projet de loi, on parle d'accoler une condition à la résidence
permanente, l'article 9 qui ajouterait l'article 21.1 à la loi, donc
accoler une condition à la résidence permanente et soumettre les gens à
une espèce de test de français, peut-être, test sur les valeurs québécoises,
les obliger peut-être à rester en région.
Qu'est-ce que vous pensez de ça? Quel impact vous pensez que ça pourrait avoir
sur la rétention des immigrants? Et,
vous, qu'est-ce que vous en pensez, là, pour l'être humain qui arrive, qui est
un immigrant puis qui voudrait... qui compte s'établir au Canada ou au
Québec? Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Filato
(Rosannie) : En fait, je vous dirais qu'on serait prudents en termes
de... On n'a pas la définition, nécessairement,
du test de valeurs, des tests qui sont proposés par la loi. On demanderait des
clarifications avant même de se
prononcer. Mais, comme mon collègue Beaudry l'a bien dit, en fait, on souhaite
plutôt des incitatifs que des mesures coercitives.
Mme
Robitaille : ...mais la carotte, en fait, pas quelque chose de
coercitif comme, peut-être, là... Quand vous lisez ça, est-ce que vous
avez l'impression que c'est plus coercitif que...
M.
Beaudry (Robert) : Comme on vous a dit tout à l'heure, nous, on ne
souhaite pas obliger les gens à aller vers les régions. On veut travailler main dans la main avec les régions. Les
municipalités, on a quand même une grande solidarité entre nous. C'est très important. On comprend ces
besoins-là qu'il y a en région puis on veut en faire aussi la promotion. C'est
important. Je disais tantôt : Quand
Montréal va bien, les régions vont bien. Bien, c'est inversement proportionnel.
Quand les régions vont bien, c'est Montréal aussi qui va bien. Mais nous ne
sommes pas dans l'optique d'obliger les gens à se retrouver dans des secteurs. On croit à la
mobilité des personnes. Pour nous, c'est important. Donc, oui, effectivement,
Montréal, dans son approche, dans son champ de compétence... On est plus dans
une approche d'attirer, comme vous dites, de carotte plutôt que de
bâton.
Mme
Robitaille : Est-ce que vous pensez que ça aurait un impact justement
sur la rétention des immigrants si on appliquait une clause comme
celle-là? Est-ce que ça aurait un impact?
M. Beaudry
(Robert) : Je peux difficilement me prononcer là-dessus.
Mme
Filato (Rosannie) : En fait, oui, on peut difficilement se prononcer
sur ça. On n'a pas tous les détails non plus par rapport à cette clause,
à cette proposition du gouvernement.
La Présidente (Mme
Chassé) : Je cède la parole au député de Nelligan.
M. Derraji :
Merci. Combien j'ai... s'il vous plaît?
La Présidente (Mme
Chassé) : Vous avez sept minutes.
• (12 heures) •
M.
Derraji : Ah mon Dieu! Merci. Merci à la ville de Montréal de venir
nous exposer vos préoccupations. Mais, avant
de passer à mes questions, je tiens à saluer vos efforts par rapport à
l'intégration des minorités visibles et les minorités ethniques depuis
les deux ou trois dernières années. Je sais comment le ministre
aime quand on parle du bilan. Ça, c'est un excellent projet qui a été initié par le précédent gouvernement et qui donne d'excellents résultats.
Et, dans le même ordre, parce que je sais qu'il a assisté à une très belle
rencontre dans la Maison des régions, je pense qu'on peut s'inspirer des
travaux du BINAM à travers l'ensemble de la
province du Québec. Je ne suis pas là pour vendre ni pour vanter les mérites de
ce BINAM, mais je pense que... je
pense, parce que je sais... je vois les collègues de... on représente tous des
régions, et sérieusement il y a des exemples concrets, et il vous a donné
l'occasion tout à l'heure, si vous êtes satisfaits de l'entente... Moi, à votre
place, vu les surplus budgétaires, je vais
lui demander de doubler le financement pour accompagner l'intégration des
immigrants, justement, pour en prendre soin dans toutes les régions du
Québec.
J'ai
deux remarques, et corrigez-moi si je me trompe. Vous avez levé un drapeau
rouge par rapport à l'effet de la régionalisation.
Considérez-vous que vous êtes victimes de la diminution des seuils
d'immigration, et que ça va vous affecter très à court terme, le fait de diminuer les seuils, et qu'au-delà de
diminuer les seuils d'immigration on rajoute un aspect qui est de la
régionalisation, et, somme toute, on est tous d'accord sur la régionalisation?
Donc, est-ce que vous
êtes victimes de ces deux constats?
M. Beaudry
(Robert) : Je ne dirais pas qu'on est victimes. Ce que je dirais,
c'est qu'on a une inquiétude par rapport à cette addition-là de mesures et qu'on souhaiterait justement de
travailler en collaboration avec le gouvernement pour voir l'impact que ça a,
comment ça se traduit sur Montréal. Donc, vraiment, nous, ce qu'on arrive
aujourd'hui... avec quoi on vient aujourd'hui, c'est une inquiétude.
M. Derraji :
Vous voulez...
Mme
Filato (Rosannie) : J'allais juste dire une inquiétude, mais aussi une
volonté de travailler ensemble avec les acteurs locaux également, avec
les régions, pour trouver des solutions concrètes.
M.
Derraji : Mais, je pense, cette inquiétude a été aussi démontrée par
d'autres partenaires. Hier, on l'a entendue de Montréal International.
Hier, on l'a entendue de la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Sérieusement, écoutez, Montréal, c'est aussi
une région parmi les autres régions. Je comprends l'idée derrière la
régionalisation, mais, devant moi, si
je suis un gestionnaire, pour combler les besoins, 73 000 postes
vacants, sachant la vitesse avec laquelle le MIDI va travailler et traiter les
prochains dossiers, moi, je pense que c'est un sentiment d'urgence, quand même,
si on veut s'assurer du développement économique à Montréal.
M.
Beaudry (Robert) : Je vous dirais que c'est pour ça qu'on travaille à
ces consultations-là, c'est pour ça qu'on a été contents de venir exposer nos inquiétudes, pour ça que d'autres
exposent aussi leurs inquiétudes. Donc, on n'est pas encore là, mais on
soulève la question, justement, pour qu'elle soit explicitée.
M. Derraji :
Oui. C'est très bien, c'est très bien soulevé. C'est quoi, votre demande, bien
concrètement?
M.
Beaudry (Robert) : Notre demande, c'est qu'au niveau de Montréal ça
n'affecte pas notre croissance économique, donc que cette mesure-là n'affecte
pas notre besoin en main-d'oeuvre et qu'elle n'affecte pas non plus de façon
négative les besoins en main-d'oeuvre des
régions. Ce qu'on veut, c'est trouver une solution, justement, pour qu'on soit
équitable à ce niveau-là, mais en fonction aussi de l'impact que
Montréal a au niveau de l'économie du Québec.
M. Derraji :
Si j'ai bien compris, je veux juste reprendre, les immigrants à l'extérieur, vu
la nouvelle formule d'Arrima, ils vont
remplir et ils vont être déjà destinés à une région. Et là on entend : le
seuil devient de 40 000. Là, c'est la première fois qu'on va
essayer 40 000. Vous ne voyez pas une menace par rapport à la ville?
M. Beaudry
(Robert) : On est inquiets.
M.
Derraji : Oui, O.K.
Deuxième question que vous évoquez, sérieusement, je la trouve
très bonne... Depuis le début, nous
avons concentré les discussions, nos
discussions, uniquement sur les employés. Plusieurs statistiques le démontrent, nous avons un réel problème par
rapport à la reprise d'entreprise. Il y a beaucoup d'entreprises qui ferment en
région. Justement, en région, j'ai eu
l'occasion de parcourir pas mal de régions, et c'est un réel, réel, réel
danger. Et, dans votre proposition, vous soulevez aussi le fait de ne pas
uniquement concentrer les efforts sur ramener les employés, mais aussi
ramener des entrepreneurs. Est-ce que c'est ça que vous suggérez?
M.
Beaudry (Robert) : Absolument, parce que le déficit démographique
qu'on vit, c'est 22 000 habitants, là, par année à Montréal... a un impact partout, sur toutes les sphères. La
sphère de l'entrepreneuriat... on est composé à près de 99 % de PME, là, sur l'île de Montréal. La
sphère sur le transfert de ces entreprises-là va avoir un impact immanquable,
et pas un impact dans 50 ans, là, c'est... En 2024, il y a des
statistiques qui nous font craindre que c'est 10 000 PME, à travers
le Québec, qu'on pourrait perdre, faute de repreneur.
L'immigration,
selon nous, est une solution, parce que, quand on regarde au niveau de
l'intention d'entreprendre, les
personnes immigrantes sur le territoire de Montréal... L'indice montréalais sur
l'entrepreneuriat nous montre qu'il y a une plus... on est à 35 %
d'intention d'entreprendre, versus 25 %, je pense, de la population en
général, chez les personnes immigrantes.
Donc, on voit là un moteur, des gens qui sont partis, donc qui ont déjà un
esprit entrepreneur. Ils ont quitté leurs
pays, ils sont arrivés dans un nouveau pays. Donc, oui, ce qu'on dit, c'est
que, là, il y a peut-être aussi une opportunité, une opportunité pour répondre à un besoin qui va poindre tout de suite.
Et ce besoin de reprise... Et on a des outils qui sont sur place. Je pense, par exemple, au CTEQ, qui est
un outil, là, qui permet de faire le maillage entre entrepreneurs cédants
et repreneurs. Donc, le côté immigration, entrepreneur, pour nous, c'est un...
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
M. Beaudry
(Robert) : Excusez-moi.
La Présidente (Mme
Chassé) : Allez-y.
M. Beaudry
(Robert) : C'est quelque chose sur lequel... On trouve ça très
intéressant, oui.
M.
Derraji : Mais vous
comprenez que nous sommes dans une situation très délicate. Un, on a arrêté l'étude du 18 000 dossiers. Même ma collègue
de Saint-Henri—Saint-Jacques vient de le dire, qu'on a 400 dossiers qu'on risque de traiter en 2019, et vous, l'urgence, vous la voyez
très court terme. Est-ce que vous êtes inquiets, après votre passage à la
commission, par rapport à l'évolution du traitement des dossiers?
M.
Beaudry (Robert) : On va
suivre le processus de la commission. Ce qu'on fait aujourd'hui, c'est qu'on expose
les enjeux qui vont poindre pour Montréal,
et on va suivre, et on va travailler en collaboration avec le gouvernement du Québec, justement, pour
pouvoir venir à bout de ces enjeux-là. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci.
Je cède la parole maintenant à la députée de Marie-Victorin.
Mme
Fournier : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Beaudry, Mme Filato, pour votre présentation. Je
reviens sur vos propos concernant les
18 000 dossiers annulés. Vous avez dit, avec justesse, que ça vous
apparaissait illogique que les gens
qui sont déjà au Québec, qui occupent déjà un emploi doivent
recommencer leurs démarches à zéro, et j'en suis également. Et, si je comprends
bien, votre proposition, au fond, c'est de traiter ces dossiers-là en
priorité du côté du gouvernement.
Mme Filato
(Rosannie) : En fait, oui,
je n'ai pas utilisé le terme «illogique», cependant, mais, oui, je pense
que ça serait important
de traiter les dossiers des personnes qui sont déjà sur le sol québécois.
À Montréal également, on n'a pas les données exactes, mais ça va être important.
C'est des gens qui contribuent déjà à la vie collective, qui paient des impôts, comme je l'ai dit tout à l'heure. Et c'est important d'enlever ce sentiment d'insécurité. C'est déjà des
personnes qui, peut-être pendant des années, ont vécu de l'insécurité, et maintenant
on crée un sentiment d'urgence en leur disant qu'ils vont possiblement devoir quitter, on va fermer
leurs dossiers. Je pense qu'on est tous d'accord avec l'approche d'un parcours
personnalisé. Je pense que ça doit
s'appliquer également aux 18 000 dossiers. On doit prendre
une approche personnalisée à ce niveau-là également. C'est des gens qui
méritent un certain suivi, qui ont vécu de l'insécurité pendant des années.
Mme
Fournier : Parfait. Puis,
pour les gens qui ne sont pas déjà au Québec, vous sembliez d'accord avec le fait de
traiter les dossiers selon le système des déclarations d'intérêt.
Mme Filato (Rosannie) : En fait,
pour les personnes qui ne sont pas... on n'a pas émis de recommandation à ce niveau-là, pour ceux et celles qui ne sont pas
au Québec en ce
moment, mais effectivement on souhaite que les dossiers soient
traités. De la même façon, quand on parle d'un parcours personnalisé, je pense
que ça va être important de leur offrir le même traitement.
M. Beaudry
(Robert) : Pour nous, ce qui
est important, c'est de clarifier la situation
pour ces personnes-là, de les
rassurer aussi par rapport au processus. On veut un parcours personnalisé. Il faut vraiment
qu'on ait un accompagnement
personnalisé aussi vers cette nouvelle mesure là.
Mme
Fournier : Tout à fait. Puis, concernant les fameux parcours personnalisés, vous avez fait
référence au projet de centre de
services intégré que vous avez à la ville
de Montréal. D'ailleurs, il y a
un projet comme ça, aussi, qui est en train
de voir le jour dans ma circonscription, à Longueuil, un projet de maison de l'accueil,
puis vous parliez justement des ressources qui sont nécessaires à
investir pour que ces projets-là fonctionnent bien. On sait que le gouvernement
va déposer son budget
le 21 mars prochain. Quelles sont vos attentes spécifiques en ce qui a
trait à ces projets que vous avez sur le territoire de la ville de
Montréal?
Mme Filato (Rosannie) : En fait, il
y a déjà des discussions entre M. le ministre et la mairesse de Montréal. M. Beaudry va continuer à travailler en étroite
collaboration avec le gouvernement, mais c'est certain, surtout avec le projet
de loi qui est proposé...
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste moins d'une minute.
• (12 h 10) •
Mme Filato
(Rosannie) : ...on va avoir besoin de plusieurs ressources
humaines et financières à ce
niveau-là. On parle d'un centre intégré, ça va être le principal
point de service. C'est certain qu'il va y en avoir d'autres. On a six territoires
prioritaires également
qui sont visés à Montréal, avec des agents de liaison, comme je le
mentionnais tantôt. Donc, oui, il y a un
centre intégré pour faciliter l'accès pour les nouveaux arrivants, mais on a
aussi dans nos quartiers respectifs des agents selon les territoires
prioritaires.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Merci, Mme
Filato, M. Beaudry. Montréal est une grande ville, une métropole. On dit
souvent que Montréal est une ville de savoir, ou, enfin, je pense
que ça continue, et donc les besoins en main-d'oeuvre sont très diversifiés.
On a entendu beaucoup, beaucoup
ici, en commission parlementaire, différents intervenants nous disant qu'on devait
baisser les... favoriser grandement l'immigration avec une scolarité plus faible, alors que Montréal
aussi compte des industries qui ont
besoin du personnel très qualifié. Où vous vous placez dans ces deux
extrêmes-là? Il faut aller vers l'un, vers l'autre ou il faut
avoir une approche plus diversifiée?
M. Beaudry
(Robert) : Évidemment,
je pense qu'il
faut regarder dans tous les secteurs.
Montréal, par
exemple, on a une concentration universitaire très forte, on attire énormément d'étudiants étrangers, et l'objectif,
c'est de les conserver, c'est de les garder. Donc, il doit y avoir des
efforts là-dessus.
Ceci étant dit, effectivement, il y a des besoins,
au niveau manufacturier, partout sur le territoire, même à Montréal aussi, où on a des besoins au niveau non
spécialisé. Je pense qu'on doit avoir un équilibre à ce niveau-là et vraiment y
aller en fonction des besoins qui
sont identifiés. C'est pour ça que la coordination d'actions est très
importante. Et, nous, ce qu'on vient
dire aujourd'hui, c'est qu'on a l'opportunité, via Réflexe Montréal, de
travailler main dans la main avec le gouvernement justement pour qu'on puisse identifier ces
enjeux-là. On a une bonne connaissance économique de notre territoire, on est
prêts à le partager, voir où sont les besoins, et les identifier, et mettre le
pied sur l'accélérateur en fonction.
Mme Filato
(Rosannie) : Et je tiens à rappeler qu'il y a quand même une grande
diversité d'immigration à Montréal. On parle
souvent d'intégration économique des travailleurs, mais on a des demandeurs
d'asile, des réfugiés, on accueille également des demandes d'immigration
pour la réunification familiale, et c'est la raison pour laquelle il faut prendre une approche qui est holistique, parce
qu'on ne peut pas uniquement parler d'intégration économique, mais également
d'intégration sociale. C'est primordial.
M.
Fontecilla : On a entendu souvent dire que le projet de loi n° 9
n'affecte pas les conditions des... le statut des personnes qui résident au Québec, mais il
introduit une incertitude quant au délai. Et on sait qu'il y a des permis de
travail qui arrivent à échéance, etc.
Est-ce que vous pensez que cette incertitude-là contribue à la rétention de la
main-d'oeuvre?
M.
Beaudry (Robert) : Comme on a dit tout à l'heure, l'incertitude, ce
n'est jamais une bonne chose. Il faut qu'on puisse clarifier les choses. Je ne
vois pas un peu la question au niveau de la rétention de la main-d'oeuvre,
mais, nous, ce qu'on vient dire
aujourd'hui, c'est vraiment : Rassurons ces personnes-là, ne faisons pas
vivre d'insécurité en leur offrant des
mesures transitoires fortes, en humanisant aussi cette situation-là pour les
accompagner de la meilleure façon. Donc, après, l'impact, là, sur la
rétention de la main-d'oeuvre, je ne pourrais pas vous dire.
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
M.
Fontecilla : ...diminution du seuil d'immigration, condition pour la
résidence permanente, abolition des dossiers, etc., là, est-ce que ça
envoie des bons messages à l'immigration au Québec?
M.
Beaudry (Robert) : Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on a de l'inquiétude
par rapport à, justement, notre attractivité, qui est, pour nous, très importante. Montréal s'est construite avec une
variété de communautés culturelles. On veut continuer à être attractifs, donc on veut qu'il y ait encore
des gens qui viennent à Montréal pour contribuer à cette prospérité-là. Merci.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci. Oui. Alors, je vous remercie pour votre contribution
aux travaux de la commission. C'est très apprécié.
Je suspends les
travaux pour quelques instants. J'invite mes collègues à rester au sein de la
salle, ici, par souci d'efficacité, parce qu'il y a une rencontre tout de suite
après la prochaine présentation. Merci.
(Suspension de la séance à
12 h 15)
(Reprise à 12 h 17)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Oui, à l'ordre, s'il vous plaît! Je
vous invite à reprendre votre place. Je vous invite à reprendre votre
place. Bonjour, bienvenue.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de La Maisonnée. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis par la suite nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. À
une minute de la fin de votre exposé et de vos réponses aux questions, je vous
ferai un signe. Je vous invite donc à vous présenter puis à débuter
votre exposé.
Service d'aide et de liaison
pour immigrants La Maisonnée
M. Drudi (Guy) : Merci, Mme la Présidente. Donc, mon nom est Guy
Drudi, je suis président du conseil d'administration de La Maisonnée.
Mme
Al Yahya (Nisrin) : Nisrin Al Yahya, donc, coordonnatrice de projets
en employabilité à La Maisonnée et présidente du comité consultatif
Personnes immigrantes.
M. Drudi (Guy) : Bien, sans plus tarder, nous allons vous présenter notre mémoire. Donc,
je vais peut-être mentionner que,
pour nous, ce qui est important, c'est d'assurer, oui, également, l'intégration
réussie des personnes immigrantes au Québec, mais en éliminant les obstacles
systémiques qui limitent à la fois leur accès au marché de l'emploi et la
prospérité socioéconomique. Donc, il
y a un double volet, il y a un double versant, c'est-à-dire qu'on n'est pas
gagnant-gagnant, mais on est perdant-perdant à ce niveau-là.
Juste
peut-être un court résumé, plus la courte présentation de La Maisonnée en
plus, par la suite, pour parler de la
problématique, et Mme Nisrin Al Yahya
va être en mesure de présenter l'ensemble des recommandations et la suite du
rapport.
• (12 h 20) •
Donc,
juste peut-être mentionner que, pour nous, le projet de loi n° 9 propose une démarche fragmentée. Il n'a pas, finalement, tout l'aspect
englobant de la politique sur l'immigration, la participation et l'inclusion
qui a été publiée et émise en 2015,
qui nous apparaissait, je dirais, assez complète. Là, actuellement, c'est assez
fragmenté, et les mesures favorisées sont
effectivement, à mon sens, limitées : l'apprentissage du français, les
valeurs démocratiques et des valeurs québécoises. Or, on le voit que ça revient souvent, alors que,
pour nous, et vous allez le voir, le constater, il y a des éléments beaucoup plus
concrets qui s'installent. Pour nous, la principale barrière à l'intégration
des personnes immigrantes est leur non-reconnaissance.
Donc, pour éliminer les obstacles systémiques qui les disqualifient, bien, il
faut avoir effectivement des mesures beaucoup plus concrètes, qu'on va
vous présenter tantôt.
Rapidement,
juste mentionner que La Maisonnée existe depuis 40 ans. Donc, lorsque le
gouvernement parle de prendre soin de la population immigrante, nous,
dans le fond, effectivement, c'est ce que l'on fait depuis 40 ans. On accueille 22 000 personnes par année et,
à ce niveau-là, donc, 10 000 personnes à travers 35 programmes
qui y sont aussi associés à partir de leur entrée, et jusqu'à
l'employabilité, et au parcours aussi.
J'entendais
M. le ministre parler de l'installation dans les régions. Je viens d'une région
et personnellement... on a des
programmes qui ont été d'ailleurs primés, aussi, puis appréciés par la ville de
Montréal lors du dernier rendez-vous culturel
sur, justement, le loisir comme vecteur d'intégration. Donc, juste mentionner
que l'intégration ne se base pas seulement sur l'intégration
socioéconomique, mais sur une intégration qui vise l'adaptation sociale.
Donc, La
Maisonnée a pour mission de faire de tout résident, ancien, nouveau, de
naissance, un citoyen à part entière. Donc,
pour ce faire, on intervient sur les deux volets, je dirais, au niveau de la
société d'accueil et les populations nouvellement arrivées. Mais on constate, et, dans le mémoire, je
l'ai fait ressortir avec mes collègues, on constate qu'il y a un volet dont
on ne parle pas dans le projet de loi, qui
est celui de la discrimination. Et cette discrimination, elle est déjà présente
lors de l'étude pionnière de 1996 qui
a été générée par le ministère lui-même, et qui, finalement, actuellement, est
encore présente suite à l'étude de Statistique Canada qui est sortie en
février 2019.
Et un autre
point que je veux mentionner, c'est qu'on ne parle pas simplement de choc
culturel, que ce soit de part et d'autre, mais de choc discriminatoire qui,
finalement, se base sur une stigmatisation de l'immigrant comme étant non formé, pas assez bien formé, alors que nous,
on constate, au contraire, dans nos activités de placement, que les gens
sont très appréciés.
Donc, en
quelque sorte, j'ai l'impression que le projet de loi n'est pas complet, parce
qu'il ne touche pas, je dirais, tout
l'ensemble d'une vision holistique, mais strictement fragmentaire et linéaire.
Donc, sans plus tarder, je vais passer la parole à Mme Nisrin Al Yahya, qui va nous présenter justement l'étude
du comité consultatif de la personne immigrante.
Mme Al
Yahya (Nisrin) : Bien, dans le fond, moi, ce que je tiens à
mentionner, c'est que nous savons très bien qu'il y a plusieurs défis que rencontre la personne immigrante quand
elle arrive ici, au Québec, et qui ont été documentés depuis plus d'une
vingtaine d'années, et qui perdurent malheureusement aujourd'hui.
Donc, l'un des plus grands défis pour ces
personnes-là, c'est la reconnaissance de leurs acquis de compétence, la reconnaissance de leur niveau de scolarité, la
déqualification professionnelle qu'ils subissent pas mal souvent. On a aussi
un gros problème au niveau de
l'apprentissage de la langue française. Parce qu'on parle de notre mission, en
tant que pays d'accueil, en tant que
province francophone, à améliorer l'accès à la langue française. Cependant, on
trouve que, malheureusement, ce n'est pas encore à la hauteur des
attentes de toutes les personnes qui sont dans la société.
Il y a aussi
la problématique des différents statuts d'immigration. On sait très bien
qu'aujourd'hui il y a plusieurs statuts
d'immigration avec lesquels arrivent les personnes, mais qui, malheureusement
aussi, n'ont pas nécessairement accès, tous, à différents services.
Donc, tout
ça, ça fait partie des défis qu'on a déjà rencontrés puis qu'on a déjà énumérés
depuis longtemps, mais qui ne sont
pas, aujourd'hui encore, traités de façon efficace et puis qu'on ne voit pas
que, dans notre projet de loi qui est présenté aujourd'hui, on a des
pistes de solution par rapport à ces défis-là.
Autre chose aussi qui est très important à
mentionner, c'est qu'au niveau du recrutement ou des processus de recrutement qui se font auprès des personnes
immigrantes, on sait très bien qu'au niveau des RH, par exemple, il n'y a pas
encore une méthodologie générale ou globale qui va être plus orientée vers une
interaction interculturelle.
Autre chose
que, nous, en tant qu'organisme, on essaie de faire, dans le fond, c'est
d'essayer de créer des liens avec la
société d'accueil via aussi les entreprises de la société. On sait très bien
que, nous, ce qui compte actuellement, c'est le cri des entreprises qui sont en
train de dire qu'on a besoin de main-d'oeuvre, on a besoin de gens qui
travaillent et que, pour une fois, immigration devrait rimer avec
solution.
Mais comment est-ce que l'immigration va devenir
une solution? Bien, déjà, il faut partir des bassins que nous avons ici, sur place, qui sont très employables et
qui ont les compétences et les qualifications, mais qu'on n'arrive pas encore
à intégrer en emploi. Il faut mentionner que
Statistique Canada, 2018, disait que 13,8 % des personnes immigrantes qui sont déjà ici sont encore en situation de chômage.
Donc, pourquoi ne pas déjà utiliser cette main-d'oeuvre existante et qui est
prête à aller vers le travail?
Au niveau du
comité consultatif Personnes immigrantes, il y a eu 25 recommandations qui
ont été ressorties. Je vais vous
épargner les détails, parce que ça va prendre trop longtemps, puis je sais que
Mme la présidente me regarde en me disant qu'il me reste une minute et
que... Deux? Parfait. Donc, en fait, on a beaucoup insisté sur quatre points en
particulier. Les quatre points sont
principalement... c'est l'accompagnement de toutes les personnes
immigrantes, tous statuts confondus,
avec des services, alors être plus inclusif dans une société qui a toujours eu
l'accueil à coeur. Un deuxième point qui est très, très important, c'est la
francisation, mais la francisation à vocation professionnelle. Ce n'est pas
juste apprendre le français pour
apprendre le français, mais aussi pour aller vers l'emploi avec notre français.
Une troisième chose que nous, on
recommande activement, c'est que la personne... les employeurs aient accès à
toutes les mesures qui sont déjà à leur disposition puis qu'ils ne connaissent peut-être
pas nécessairement ou qu'ils connaissent mais qu'ils sous-utilisent. Et un
quatrième élément, et non des moindres,
c'est de nous reconnaître en tant qu'organismes communautaires, en tant
qu'organismes de la société et qui ont toute une expertise qu'elles pourraient apporter
à nos instances, qu'elles soient publiques, qu'elles soient
entrepreneuriales. Donc, que ce soit au niveau de l'entreprise, que ce soit au
niveau de différentes instances, on est une expertise qui est incontournable.
Merci à vous.
M. Drudi (Guy) : Je voudrais
peut-être compléter, terminer en...
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste une quarantaine de secondes.
M. Drudi
(Guy) : ...mentionnant le
dernier paragraphe, s'il me reste 30 secondes. La population des jeunes et
des très jeunes travailleurs a
fortement baissé au Québec, et la province attire peu de migrants
interprovinciaux. Le fait, c'est que,
pour nous, dans le fond, on voit qu'il y a une diminution de l'offre d'emploi
et de la... du bassin d'emploi, j'entends, et des gens qui sont en mesure de pouvoir occuper ces emplois. Et
actuellement, bien, La Maisonnée estime que le projet de loi n° 9 ne remplit pas le mandat d'être attrayant et de faire
en sorte que les nouvelles populations arrivées puissent intégrer la nouvelle communauté.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci
pour votre exposé. J'ai l'impression que ça va susciter des beaux débats. La
période d'échange débute. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mme Al Yahya, bonjour,
merci d'être à l'Assemblée. M. Drudi, bonjour, merci d'être à
l'Assemblée. On se revoit dans un autre contexte, un fier Antonien de la
municipalité de Saint-Antoine-sur-Richelieu.
D'ailleurs, moi et M. Drudi... M. Drudi et moi, on a passé la
guignolée ensemble il y a quelques années, alors on a cogné aux portes du comté. C'était une pratique pour la
campagne électorale. On ne va pas chercher la même chose, par contre.
M. Drudi (Guy) : On a eu des succès
dans les deux occasions.
M. Jolin-Barrette : Oui, effectivement, c'est vrai, les gens sont
généreux à Saint-Antoine, particulièrement pour la guignolée, puis c'est
un exercice qu'on doit faire à chaque année.
Écoutez,
merci pour votre présence en commission parlementaire, merci pour votre
mémoire. Vous dites, bon : Le projet
de loi n° 9, c'est un projet de loi qui est fragmenté. Vous
dites : On ne touche pas à tous les aspects, dans le fond, qui touchent l'immigration. C'est vrai qu'on ne
touche pas à tous les aspects qui touchent l'immigration. Ce qu'on fait avec
le projet de loi n° 9,
c'est une première étape dans la réforme de l'immigration par la voie
législative. Donc, ce n'est pas toutes
les réformes que l'on va faire qui vont passer nécessairement par une
modification de la loi. Il y a certains programmes, il y a certaines politiques qui vont être mis en
place aussi, mais ça, ça ne passe pas par la voie législative, ça passe par la
voie, supposons, administrative gouvernementale.
Pour ce qui
est du projet de loi n° 9, ce qu'on fait, c'est qu'on vient changer, dans
un premier temps, la façon dont on sélectionne les immigrants, basée sur le
fait de dire : Bien, maintenant, on va prioriser le profil des candidats
en fonction des besoins du marché du travail.
• (12 h 30) •
Je suis
sensible à ce que vous avez dit tout à l'heure relativement au fait qu'il y a
beaucoup d'immigrants qui sont sur le territoire québécois actuellement qui...
le taux de chômage, c'est plus du double de la population native, pourquoi ne pas faire en sorte d'aller recruter dans les
personnes qui sont là? Je suis d'accord avec vous, il y a des efforts qui doivent
être faits à ce niveau-là puis il faut s'assurer que les gens qui sont sur le
territoire québécois, ils puissent être en emploi. Il n'y a pas de raison, au Québec présentement, que les gens soient au
chômage, on est quasiment en situation de plein-emploi. Alors, oui, il
faut travailler là-dessus pour les personnes qui sont sur le territoire québécois,
je suis d'accord avec vous.
Pour ce qui
est des gens qui ne sont pas encore présents sur le territoire québécois,
nous, on veut changer le système
pour s'assurer qu'il y
ait un maillage entre le fait de l'emploi disponible puis le profil de la
personne, pour ne pas que d'autres situations comme ça, où le taux de chômage est plus du
double que la population native, ça continue d'arriver. Il faut prendre
des moyens, puis un des moyens pour ça, c'est de s'assurer qu'il y ait une
adéquation.
L'autre
élément qui est extrêmement important, c'est la surqualification. Puis c'est pour ça
que je vous dis que ça ne fonctionne pas bien actuellement, le système
d'immigration, parce
qu'on n'a pas réussi, comme société,
au fil des années, à s'assurer que les gens occupent un emploi à la
hauteur de leurs compétences.
Alors, ma
question, c'est : À partir du
moment où on fait ça dans le projet de loi n° 9, comment est-ce que vous, comme organisme communautaire, vous voyez cette façon de procéder là? Qu'est-ce qui vous manque pour, au niveau de... Vous disiez tantôt : On veut être
reconnus comme organisme communautaire, comme partenaires. Je suis d'accord,
vous êtes des partenaires du ministère de l'Immigration. Comment est-ce qu'on
fait pour vous accompagner davantage là-dedans, dans votre mission?
Mme Al
Yahya (Nisrin) : C'est une bonne question. Dans le fond, nous, ce
qu'on est en train de dire, là, c'est que l'accompagnement devrait se faire à trois niveaux. Vous parlez du fait
d'arrimer les compétences des personnes qui vont arriver d'ailleurs avec les besoins du marché du travail. C'est un
objectif très louable, dans le fond, mais la problématique, c'est que
qui garantit que les personnes, une fois qu'elles arrivent ici, vont vouloir
travailler exactement dans un même domaine? Comment est-ce qu'on va pouvoir évaluer?
Et est-ce que les personnes vont travailler en synergie avec des équipes
qui sont déjà en place? Comment est-ce qu'on
va s'assurer que la communication interculturelle en milieu professionnel va
se passer de la meilleure manière que ce soit?
Je
pense que c'est ça, le rôle de nous, en tant qu'organisme communautaire,
comment accompagner les entreprises via,
entre guillemets, de la sensibilisation et de l'éducation en milieu de travail,
mais aussi en accompagnant les personnes pour qu'elles soient bien accueillies, ne pas se sentir démunies et ne
pas, surtout, se sentir écrasées par l'obligation d'être avec un
employeur. En fait, ce qu'on est en train de dire, là, c'est qu'une personne
qui arrive avec plein de compétences devrait
avoir accès au marché du travail, mais aussi à un bassin d'employeurs divers,
et pas à un seul employeur avec lequel elle
va être attachée, et qu'au cas où il y a un problème avec cet employeur-là elle
ne va pas être en mesure de quitter l'emploi parce qu'elle n'a pas
d'autre option.
M. Drudi (Guy) : Si je peux me permettre, M. le ministre, juste un petit complément,
c'est que, dans le fond, ça relève
d'une vision néolibérale du marché de l'immigration, là. Et, dans ce sens-là,
je veux juste mentionner que ça rompt avec
une tradition d'accueil du Québec. Et ça, je trouve, là, que c'est essentiel,
important, dans la confiance que les gens ont dans l'approche québécoise, qui est fondée sur l'interculturalisme.
Et, dans ce sens-là, actuellement, cette vision néolibérale ne vise qu'à
combler des besoins statutaires qui sont en évolution.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, en fait, juste pour préciser, là, le projet de loi
n° 9, là, ce qu'il fait, il ne lie pas les candidats à l'immigration à un employeur. Ça, c'est le permis de travail
fédéral qui fait ça. Moi, je n'ai pas de juridiction là-dessus. Et le permis de travail fédéral peut
être une solution, entre autres, pour s'assurer que les gens puissent aller en
région, puissent répondre à un besoin du marché du travail. Et par la suite,
moi, mon objectif, c'est de les permanentiser. À partir du moment où vous êtes un immigrant permanent, vous n'êtes pas
lié avec quelconque employeur qui existe. Mais les contrats de travail temporaires, il faut comprendre qu'ils sont liés
avec un employeur précis quand c'est un permis de travail fermé. Des
fois, il y a des permis de travail ouverts aussi, ça dépend de la catégorie.
Mais ça, c'est fédéral.
Cela
étant dit, moi, dans le projet de loi n° 9, ce que je fais, c'est que je
me donne les outils, les pouvoirs pour pouvoir donner des services aux personnes qui sont en situation temporaire
aussi. Ça, c'est nouveau, là, ça n'existait pas. Donc, nous, on veut pouvoir s'assurer de franciser...
intégration, employabilité aux immigrants qui sont sur le territoire québécois
en statut temporaire aussi. Ça, c'est nouveau, puis on est dans cette
démarche-là.
Pour
ce qui est de l'immigration permanente, supposons avec Arrima, nous, ce qu'on
dit, c'est qu'on ne veut plus de
situation du fait où la résultante, c'est le fait que, les gens, leur taux de
chômage est beaucoup plus élevé ou qu'ils sont surqualifiés. C'est pour ça qu'on veut avoir le maillage. Puis, nous, ce
qu'on dit, c'est, notamment pour la régionalisation : Bien, on souhaite inviter en priorité ceux qui
auront un lien avec un employeur, pour dire : Bien, écoutez, parmi la banque
de candidats, vous allez être embauché par un employeur, vous avez une offre
d'emploi validée, bien, on va vous faire venir beaucoup plus rapidement
au Québec, et particulièrement en région.
On
peut mettre des critères pour les régions pour faire en sorte, un, d'assurer la
vitalité des régions, mais aussi s'assurer d'amener des incitatifs à
aller en région. C'est la logique dans laquelle on pense. Ce n'est pas une
approche qui est néolibéraliste, c'est une
approche qui est respectueuse des droits de tous et chacun, parce que,
notamment, la réalité aujourd'hui,
quand on regarde l'immigration, c'est que ce n'est pas très respectueux. On n'a
pas bien accompagné, on n'a pas bien
intégré, on ne s'est pas assuré que les gens occupent un emploi à la hauteur de
leurs compétences, puis la résultante, c'est qu'il y a eu beaucoup de
rêves déçus. Alors, moi, là, c'est la perspective dans laquelle je suis
présentement.
M. Drudi
(Guy) : Là, à ce moment-là, c'est un découpage que vous faites, M. le
ministre, qui est, à mon sens, réducteur. Parce qu'effectivement il existe un
accompagnement. Et là, où est-ce que l'accompagnement est bien financé,
à ce moment-là, les organismes sont en mesure de donner de très bons résultats.
La question, maintenant, que je voulais... sauf que ces subventions-là ou, en
fait, ces ressources-là ne sont pas disponibles, et ne sont pas disponibles
nécessairement en région. Nous, on travaille avec les régions également,
et les employeurs viennent nous voir.
D'ailleurs, une chose
que j'ai oublié de mentionner tantôt, nous sommes un partenaire principal du
Mouvement Desjardins. Donc, à ce moment-là,
donc, ils nous font confiance pour pouvoir, mettons, produire, je dirais, des
maillages, comme vous dites. Et, dans
ce contexte-là, moi, ce que je dis, c'est que ce dont on ne parle pas et qui
est très présent dans toutes les études de 1996 jusqu'à aujourd'hui,
c'est ce qu'on appelle la discrimination, le choc discriminatoire, la discrimination systémique et indirecte, et
quelques fois directe, mais ça, c'est une autre question. Mais je veux juste
dire que, dans le projet et dans ce
que vous proposez aux employeurs, bien, actuellement, ça, c'est moins présent
que la coercition qui est mise sur
les requérants au niveau de l'immigration. C'est ça, moi, en fait que je... et
ça rompt, comme je vous ai dit tantôt, le contrat, qui est le contrat
d'accueil, la tradition d'accueil au niveau du Québec. Et nous, dans le fond,
on l'a vécu depuis 40 ans. Nous autres, ça fait depuis 40 ans. On a
été le premier organisme multiethnique à accueillir, je dirais, les
populations immigrantes à Montréal. Il y en a eu d'autres qui étaient
religieux, mais nous, on était laïques. Donc, c'est juste pour vous dire, dans
le fond, qu'à quelque part, l'expertise, on l'a développée plus, plus, plus.
M. Jolin-Barrette : Oui. Je peux vous rassurer, l'objectif du projet
de loi est de s'assurer de bien intégrer les personnes immigrantes, de
faire en sorte aussi d'avoir un parcours personnalisé et de déployer des
ressources. Moi, je me retrouve dans une
situation où la Vérificatrice générale, en 2017, dit : Il n'y a pas de
mesures de suivi notamment sur la francisation, sur l'intégration. Il n'y a pas de leadership qui est exercé par le
ministère de l'Immigration. Alors là, on change ça, puis on va
travailler en partenariat avec les organismes comme le vôtre pour s'assurer
que...
Parce que
tout le monde dans le réseau de l'immigration a son rôle à jouer, à la fois les
cégeps, les universités en francisation, et les commissions scolaires, à la
fois vous, comme organisme communautaire, en termes d'intégration, de francisation aussi, parce
qu'il y a beaucoup de professeurs du MIDI qui sont dans les organismes comme
les vôtres. Le ministère de
l'Immigration, aussi, sa job maintenant, ça va être de coordonner l'action
gouvernementale en matière d'immigration
et d'intégration, parce qu'avant on avait Santé d'un bord, Éducation de
l'autre, Emploi et Solidarité sociale, puis
il n'y avait personne qui était imputable. Tout le monde était imputable dans
son petit carré de sable. Mais là ça change, ça va être l'Immigration qui va être imputable. On ramène de la
cohérence gouvernementale pour s'assurer d'avoir une vision, là, qui est
sur l'ensemble du gouvernement. Ça fait qu'on va être des partenaires avec vous
là-dedans.
Et, pour ce
qui est des résultats, moi, je compte bien faire en sorte de m'assurer que les
gens qu'on accueille, ils puisent
être bien intégrés, puis on leur donne les outils aussi pour ce faire. Alors,
je suis vraiment dans la même logique que vous au niveau de l'accompagnement, de l'intégration, l'accompagnement
personnalisé. Je pense que mes collègues ont des questions aussi, mais
je vous remercie beaucoup, puis on aura l'occasion de se revoir à
Saint-Antoine.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. le ministre. Je cède la parole maintenant au député de Chauveau.
• (12 h 40) •
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est un plaisir,
M. Drudi, Mme Al Yahya. Merci beaucoup d'être là
aujourd'hui. Puis je trouve ça intéressant parce que, pour avoir été impliqué,
dans les dernières années, dans un organisme relativement similaire au vôtre,
là, le SAAI à Québec, le service d'aide et d'accueil aux immigrantes et
immigrants, je trouve ça très intéressant d'avoir un organisme communautaire
qui vient nous parler.
Puis
évidemment je suis conscient que, le projet de loi, puis le ministre l'a bien
expliqué, là, il y a peut-être des éléments
que vous auriez aimé voir apparaître, mais on place les assises juridiques pour
améliorer la situation. Et, pour l'avoir vécu comme vice-président de l'organisme, on le voit, là, les problèmes
de francisation, les problèmes d'intégration à l'emploi, les problèmes de la reconnaissance des acquis,
c'est des problèmes qui deviennent... qui sont récurrents, qui sont mentionnés
par les citoyens qu'on accueillait, et les
organismes communautaires peuvent jouer un rôle très important, je crois, dans
l'intégration des personnes immigrantes au
Québec. Puis votre travail est important, puis ça fait longtemps que vous êtes
là, puis vous êtes certainement un des plus gros, si ce n'est pas le
plus gros, au Québec.
Comment le
gouvernement — moi,
c'est ça qui me questionne — comment le gouvernement peut vous aider à
faire mieux, vous et votre réseau, et comment on peut intégrer davantage le
milieu communautaire dans la réussite de l'intégration?
Parce que, qu'on le veuille ou non, il y a des gens qui sont venus au Québec,
et on en a perdu. Il y a beaucoup de
personnes qui quittent vers l'Ontario, vers d'autres provinces canadiennes ou
vers d'autres pays, malheureusement. Donc, l'objectif, c'est de les garder chez nous. C'est bien beau de les
accueillir, mais après ça il faut qu'ils aient le goût de rester à La
Maisonnée.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Je vais
peut-être vous répondre à travers le volet de l'employabilité, parce qu'une personne qui est en emploi dans son domaine de
compétence, sans être déqualifiée, avec des emplois de qualité, avec la possibilité d'être maintenue et bien intégrée dans
le milieu aussi, à travers tout le système, à savoir avoir une bonne éducation
pour ses enfants, un bon emploi pour son
conjoint, avoir aussi accès à tous les services, c'est ça qui va faire que la
personne veuille rester. Par contre,
si on voit miroiter dans les autres provinces ce qu'on n'a pas chez nous, bien,
c'est certain que la personne va se dire : Bien, c'est quoi,
l'équation? Je vis au Canada.
Aussi, je
vous dirais que quelque chose de très important, c'est que, nous, l'une de nos
valeurs de base, puis je ne cesserai
jamais de le dire, c'est la langue française. Alors, comment faire que les gens
aiment notre langue et comment qu'ils peuvent
se l'approprier aussi? Parce que, et c'est pour ça qu'on parlait de franciser
en milieu de travail, les gens ont besoin de travailler très rapidement, parce que la personne, quand elle arrive,
elle a besoin de mettre du pain sur sa table. Et puis c'est un parcours
migratoire qui est long et qui est lourd.
Ce qu'on est
en train de voir, ce n'est pas le jour d'aujourd'hui, quand la personne est là,
que je veux la maintenir, mais c'est quoi qui était derrière son rêve
d'immigration? Comment est-ce que je vais pouvoir réaliser son rêve avec elle?
Alors, je pense que le gouvernement, dans
son rôle, devrait comme renforcer d'une part un financement, d'autre part une
capacité d'accès et puis aussi
d'accompagnement des organismes communautaires dans leur intervention auprès
des entreprises, parce que c'est un
volet qui, actuellement, n'existe pas. On parle d'accompagnement de la
personne, mais on ne parle pas de l'accompagnement de l'entreprise en
tant que telle pour mieux inclure et préserver.
M. Lévesque (Chauveau) : Le volet
employabilité, le volet reconnaissance des acquis et le volet francisation, beaucoup de groupes nous en ont parlé et vont
continuer à nous en parler. Je suis entièrement d'accord, puis c'est primordial
et au coeur de l'intégration des personnes immigrantes,
mais il y a un bout que j'aurais aimé que, peut-être, vous alliez un peu plus loin parce que peu auront l'expertise que
vous avez sur les autres difficultés : se trouver un logement,
l'accompagnement pour remplir des
fois des formulaires gouvernementaux, la période de l'impôt, il y a tellement
de problèmes sociaux liés à l'intégration
qui fait que les gens trouvent ça lourd, des fois, d'être au Québec. Et je sais
qu'il y a peu d'organismes qui vont
venir nous parler qui ont l'expertise pointue que vous avez dans
l'accompagnement de ces personnes-là. Pouvez-vous nous en parler pour
nous sensibiliser à cette problématique?
Mme Al
Yahya (Nisrin) : Oui, bien sûr. En fait, en ce qui concerne le
logement, par exemple, La Maisonnée a tout
un volet au niveau du logement, elle s'occupe carrément de la personne à partir
de ses premières démarches d'installation, l'obtention du logement. On a aussi un service de dépannage alimentaire,
on a des groupes d'achats qui sont présents au sein de nos services. On a aussi la possibilité pour
les personnes d'avoir accès à faire leurs déclarations d'impôt. D'ailleurs,
ça s'en vient très rapidement, je ne
rappelle ça à personne. Mais, en fait, en même temps, ce qu'il y a de très
génial là-dedans, c'est qu'on offre une trentaine de services sous notre
toit, et c'est là où notre expertise est un incontournable. Je vous dirais aussi qu'on a des programmes de jumelage, on a des
programmes d'accompagnement plus au niveau de la vie culturelle, on a des
programmes de bénévolat.
En
fait, La Maisonnée, c'est un tout, et c'est pour ça qu'on n'est pas juste un
organisme qui accueille la personne au
départ de son... dès qu'elle arrive, mais on est là pour elle pendant des
années et des années. Je vous dirais que nos meilleurs bénévoles, c'est des bénévoles qui sont passés par
nos services depuis 10, 15, 20 ans. Et je pense que c'est là qu'il faut
qu'on aille chercher comment rendre l'individu un citoyen à part entière, à
travers nos organismes communautaires.
M. Drudi (Guy) : Et ce que je voulais juste peut-être compléter, c'est qu'actuellement
le projet de loi cible le volet socioéconomique par l'emploi, mais nous,
on développe actuellement, à travers la recherche, en partenariat avec le LABRRI et l'UQTR le volet loisirs et intégration.
Donc, il y a une partie où est-ce que les gens travaillent puis il y a une partie où les gens ne travaillent pas, mais c'est
là que les contacts avec la société d'accueil se font davantage, et ça, c'est... On a fait deux recherches
exploratoires, et il y a une troisième qui va effectivement surgir, si jamais
le ministère de l'Enseignement, du Loisir et du Sport daigne nous financer à ce
niveau-là.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée
de Les Plaines.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Merci, Mme la Présidente. Merci d'être ici aujourd'hui.
Plus
je vous entends parler, plus vous devez connaître AMINATE — oui? — qui
est un organisme... je vois les services que vous offrez, donc c'est à peu près la même chose. Après de
longues discussions avec la directrice générale de l'organisme, elle me disait... puis je vous expose
la situation puis je vais vous poser la question sous-jacente, elle me disait
aussi que la grande difficulté des gens,
c'est de se faire connaître dans le milieu du travail, évidemment, et que les
employeurs potentiels puissent bien
connaître aussi les opportunités qu'ils ont. Vous l'avez noté, surtout dans la
grande région de Montréal, il y a peu d'emplois pour la capacité... au
niveau des nouveaux arrivants.
Donc, elle me
disait... Et voici ma question : Comment est-ce que les employeurs
pourraient, selon vous, mieux comprendre la réalité et mieux encadrer des
personnes en les accueillant dans leurs entreprises?
Mme Al
Yahya (Nisrin) : En fait, je pense que ça se passe à deux niveaux. Le
premier niveau, c'est l'accueil de la
personne immigrante dans son milieu de travail, et le deuxième niveau, c'est
l'accompagnement de l'entreprise dans ses démarches d'intégration pour
la personne immigrante.
Donc
là, je reviens à la question de M. le ministre de comment est-ce que le
communautaire pourrait accompagner. Dans
le fond, l'accueil de la personne immigrante ne se fait... On a beau vouloir
intégrer une personne immigrante en emploi, tous les employeurs
aujourd'hui en veulent, mais, maintenant, est-ce que le plancher est prêt?
Est-ce que les autres collègues de travail
sont prêts à les recevoir? C'est ça qu'il va falloir qu'on essaie de préparer.
Donc, il faut qu'on prépare le milieu, déjà, au niveau des entreprises,
pour qu'ils accueillent bien la personne immigrante.
Et
aussi qu'il faut qu'on accompagne les ressources humaines, mais pas juste les
ressources humaines, les gestionnaires
aussi, à travers des espaces de dialogue, à travers une adaptation des
pratiques, à travers, surtout et de façon très importante, un élément, à
savoir une compréhension des codes culturels. Très souvent, on se fait
approcher parce qu'il y a un problème de
communication beaucoup plus qu'un problème de compétence technique. Et puis la
question qui revient souvent : Qu'est-ce que je dois faire avec ça?
Mais le «qu'est-ce que je dois faire avec ça», ça fait partie de nos savoir-être, comment on définit... Et il y a eu
une étude, au niveau de l'IRIPI, par exemple, qui avait mentionné que la plupart
des employeurs n'avaient pas nécessairement
besoin de personnes immigrantes avec des compétences très élevées parce que, les compétences en savoir-faire, on peut les
leur apprendre, mais il faut qu'ils apprennent les savoir-être des personnes d'ici. Nous ne voulons pas dire que les personnes
immigrantes n'ont pas un savoir-être, mais qu'il faut adapter ce savoir-être à
un savoir-être compris ici, auprès de nos entreprises.
Et
je peux tout simplement citer l'exemple du soutien du regard. Le soutien du
regard est considéré comme une insulte
pour certains pays desquels nos personnes immigrantes sont ressortissantes, et
ils baissent le regard par respect pour l'individu, alors que nos ressources humaines pensent qu'il a quelque
chose à cacher ou il y a quelque chose de malhonnête dans ce qui est raconté. Donc, c'est tout ça qu'il
va falloir qu'on essaie d'améliorer au niveau de l'adaptation de nos pratiques.
• (12 h 50) •
M. Drudi (Guy) : Je compléterais en disant que les compétences spécifiques, il n'y a
aucun problème. Et je pense que le
projet de loi, malheureusement, vise les compétences spécifiques. Et, dans ce
sens-là, le principal échec est attribué aux compétences génériques. Et,
parmi les compétences génériques, je vais vous en nommer qui provoquent un choc
discriminatoire, c'est le fait d'être né à
l'étranger, d'être différent physiquement, notamment au niveau de la couleur de
la peau, de parler une langue maternelle différente, de posséder un
accent différent, d'avoir la consonance d'un patronyme différent, d'avoir une
religion différente et ne pas avoir d'ancêtres québécois.Mais là, à ce
moment-là, il faut vraiment faire ce qu'on
appellerait une éducation interculturelle des employeurs parce qu'autrement,
que ce soit en région ou à Montréal, il va y avoir effectivement toujours ce
constat d'échec.Nous, quand on intervient à l'intérieur des
entreprises, bien, c'est exactement
sur ces volets-là des compétences génériques que l'on travaille. Et on obtient
des succès. Et habituellement les emplois trouvés sont des emplois qui
conviennent à la formation, je dirais, des requérants.
Et l'autre point
aussi que je veux mentionner, c'est qu'on parle des premières générations
d'immigration, mais quelquefois ça peut
aller jusqu'à la troisième génération d'immigration, qui subissent le même choc
discriminatoire que leurs
grands-parents. Là, à ce moment-ci, pour nous, si le ministère
veut intervenir correctement, ce serait à ce niveau-là.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Il reste à peine une minute. Est-ce
qu'il y a une autre intervention de la part du groupe qui forme le
gouvernement?
M. Jacques :
...rapidement, là, vous avez dit que...
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, le député de Mégantic, je vous invite à prendre la parole.
M. Jacques :
Excusez, Mme la... Merci, Mme la Présidente. Vous avez dit plus tôt qu'il y
avait 13,8 % des immigrants qui
étaient en chômage et vous servez aussi... vous aidez à l'aide alimentaire à
5 000 familles. Donc, ces familles-là, là, c'est des gens qui
arrivent ou des gens que ça fait un bout de temps qui sont là?
Mme Al
Yahya (Nisrin) : Bien, en fait, ça dépend, ça dépend des situations,
de la précarité. Il y a des personnes qui
viennent d'arriver, il y a des personnes qui sont là depuis un peu plus
longtemps. Nous, comme Maisonnée, on essaie toujours d'aller chercher les personnes qui ont vraiment ce besoin-là de
façon très claire à travers leur... en fait, qui frôlent le seuil de la pauvreté, à quelque part.
Cependant, à chaque fois qu'on est dans une situation où la personne est là
depuis plus longtemps, on va aussi essayer de l'aider sur son volet
employabilité. On va vraiment travailler là-dessus.
M. Jacques :
Y a-tu une façon de les amener rapidement, le plus tôt possible? Y a-tu une
façon miracle de les amener en emploi rapidement?
Mme Al
Yahya (Nisrin) : Ah! j'aurais bien voulu. Les miracles... En fait, le
miracle, le seul miracle, sérieusement, c'est de pouvoir... Parce que ça dépend, je ne peux pas généraliser,
vous comprenez, ça dépend parce que c'est des cas par cas. Il y a des
cas où c'est beaucoup plus compliqué...
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
Mme Al
Yahya (Nisrin) : ...il y a d'autres cas où c'est beaucoup plus simple,
dépendamment de la situation, oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Malheureusement, je dois céder la parole à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme la députée.
Mme Anglade :
Merci. Merci beaucoup de votre présentation. Dans votre document de
présentation, justement, vous écrivez
que «le projet de loi n° 9 constitue une rupture dans l'histoire du Québec
comme terre d'accueil». C'est un message
qui est très fort, qui est très révélateur également. Et je conçois très bien
qu'on veuille améliorer la situation de l'immigration.
On dit tout
le temps que c'est un système qui ne fonctionne pas, mais il faut rappeler
quand même que, lorsqu'on regarde les
chiffres, lorsqu'on regarde l'intégration, si on se compare à d'autres
sociétés, on a été capable de faire un bon bout de chemin au Québec, en termes de résultats d'intégration, avec des
résultats fort positifs également. Alors, on insiste beaucoup sur les éléments qui ne fonctionnent pas,
mais la réalité, c'est qu'il y en a beaucoup qui fonctionnent également
et qu'il nous faut les renforcer. Alors, on est tous d'accord avec l'idée de
les renforcer.
Il y a deux
raisons pour lesquelles j'ai l'impression, quand je lis la question de la rupture...
qui me viennent en tête. La première,
c'est que, dans la manière dont on parle d'un projet de loi... des gens,
lorsqu'on parle des 18 000 dossiers, on banalise la situation, on traite la situation de
manière extrêmement cavalière. Et cette manière cavalière de traiter les choses
fait en sorte que les gens se disent :
Bien, dans le fond, est-ce qu'on veut vraiment prendre soin des gens puis on
est vraiment intéressés? Parce que, si c'était le cas, on ne ferait pas
les choses de cette manière-là.
Et l'autre
volet, c'est l'aspect qui est davantage coercitif. Là, on introduit une notion
très coercitive dans est-ce qu'on a
une résidence permanente conditionnelle, et cette notion de coercition fait en
sorte que ça vient teinter de manière très négative le projet de loi
dans son ensemble.
Est-ce que
vous êtes d'accord avec les commentaires que je fais? Et est-ce qu'il y a
d'autres éléments qui, à votre avis,
nuisent à notre capacité de collectivement être plus en faveur de ce projet de
loi? Parce qu'il y a des éléments qui sont positifs malgré tout.
M. Drudi
(Guy) : Oui, en fait, juste
peut-être mentionner, c'est qu'effectivement la rupture dans l'histoire du
Québec, c'est le fait de dire qu'on
change les règles du jeu malgré, je dirais, les personnes qui ont formé, dans
leurs têtes et avec leurs familles, un projet migratoire. Et donc on
change de bout en bout. Alors, ça veut dire que, dans le fond, la société
québécoise ne devient plus crédible dans sa démarche, je dirais, d'accueil des
personnes immigrantes. Et ceci est très fondamental parce qu'il s'agit d'un
contrat relationnel. Et nous, on le voit.
Comme
Mme Nisrin Al Yahya disait, c'est que chaque situation est personnalisée,
et, dans ce sens-là, le fait de personnaliser
la démarche au niveau du projet de loi est intéressant, mais, cependant,
personnaliser strictement au niveau de
l'employabilité, ça devient très dangereux. Parce que nous, on a une démarche
personnelle, personnalisée également, à travers, je dirais, l'ensemble des services. Comme j'ai entendu tantôt une collègue
du BINAM dire, nous, en fait, ce ne sont
pas des dossiers, mais des personnes, des trajectoires de vie. Et, quand je dis
que nous accueillons 20 000 personnes,
bien, nous accueillons
20 000 personnes. Calculé sur 40 ans, on est à
800 000 personnes qui ont été accueillies par La Maisonnée, pas par le Québec, par La Maisonnée.
Donc, dans ce sens-là, lorsqu'on fait une fête interculturelle, je dirais, de fin d'année pour les... on a 90 %
de 400 personnes qui viennent pour la première fois fêter Noël avec nous.
Donc, voyez-vous ce que je veux dire? C'est que
ça se trouve à être une démarche, même à travers les voyages, personnalisée. Mais ceci, lorsqu'on leur
dit : Vous êtes ici, ou votre conjoint s'en vient, ou... et là, à ce moment-là,
lui, non, il ne
pourra pas, il va falloir qu'il refasse la demande, là, on a un double
discours. On dit : Venez au Québec, on vous accueille, mais, d'un autre côté, on leur dit : Écoutez,
recommencez. Bien, vous savez comme moi que ce n'est pas juste recommencer
à faire une formule en ligne, là, c'est des drames sociaux.
Mme
Anglade : Il est évident qu'il y a
un double discours. Il y a un double discours qui est tellement
clair et apparent, je pense que tout le monde s'en rend bien compte, notamment,
encore une fois, dans la manière de
traiter les cas qui nous interpellent.
Dans les
dernières semaines — ça
ne fait pas longtemps que le projet
de loi a été déposé, hein, ça fait
trois semaines qu'il a été déposé — dans
les dernières semaines, quels sont les commentaires que vous avez... Comment
qualifiez-vous ce que vous vivez sur
le terrain, de manière plus spécifique,
et comment vous comparez ça à ce qui se passe d'habitude sur le terrain?
Juste avoir une meilleure appréciation pour la chose.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien, je
vous dirais que, sur le terrain, il y a beaucoup de peur, beaucoup de craintes,
beaucoup d'incompréhension, beaucoup de
«qu'est-ce qui va nous arriver». Est-ce qu'on va pouvoir rester? Est-ce que mon
conjoint va pouvoir arriver dans les délais? Est-ce que mes enfants vont
pouvoir se joindre à moi?
Toutes ces peurs et ces craintes, on n'a pas
d'éléments pour le moment, aujourd'hui, d'y répondre. On entend beaucoup : Vous êtes en train de briser mes
rêves. Ça fait six ans, sept ans, huit ans que je suis en attente. J'ai fait un
projet pour pouvoir venir, mais là je
ne sais plus où est-ce que je vais être rendu. On a beau essayer de calmer les
angoisses, mais on n'a pas encore assez d'éléments pour sécuriser les
gens. Donc, ce qu'on espère, c'est pouvoir les sécuriser le plus rapidement
possible par rapport à ce qui va advenir de leur cas et de leur situation.
Mme
Anglade : Et, dans les trois semaines, ce qui est un peu court quand
même pour créer un tel émoi, honnêtement, avez-vous déjà observé ce
genre de réaction dans la population?
Mme Al
Yahya (Nisrin) : On a reçu des courriels, carrément, de dire
comme : Comment ça va se faire? Comment on va pouvoir vivre?
Comment ça va marcher? Est-ce qu'on va...
En fait, je
vous dirais que tout élément qui est incompris provoque ce genre de
comportement en réaction. Donc, c'est
une action qui a nécessité une réaction parce qu'il y a eu une incompréhension.
Maintenant encore, d'habitude, nous, en tant qu'organisme, on a tous les
éléments pour rassurer les gens, pour les ramener à terre, pour expliciter ce
qui est derrière, mais, aujourd'hui, on n'a
pas encore d'éléments de réponse et on attend. On est comme tout le monde, on
attend.
M. Drudi
(Guy) : Dans le fond, dans
nos réponses, on est fragmentés autant que le projet de loi nous apparaît, dans
un premier temps, parce qu'on se trouve à... Et ceci fragilise aussi la
relation et la confiance, parce que n'oubliez pas que nous, on représente le Québec aussi, je veux dire,
dans notre démarche d'accueil. Et, dans ce sens-là, quelques fois, quelques
fois, je le sais qu'on fait des efforts pour
que cela ne se produise pas, mais on peut très bien nous jumeler à une
politique qui, finalement, les discrimine, là.
Mme
Anglade : Voilà plusieurs semaines qu'on dit qu'on n'a pas de réponse
aux questions que l'on pose. On le dit, on le répète, on essaie d'en obtenir,
on n'en a pas. Est-ce que vous vous sentez dans la même position présentement
ou est-ce qu'il y a eu un élément de clarté qui a été amené?
Mme Al Yahya (Nisrin) : C'est une
très bonne question. Je vous dirais qu'on a beaucoup de questions sans vraiment
avoir de réponses concrètes, solides qu'on peut donner à la population qui nous
la pose.
• (13 heures) •
M. Drudi (Guy) : Puis une réponse
qu'on a entendue, c'est que les 3 000 qui étaient déjà présents seraient,
entre guillemets, priorisés à l'intérieur de
six mois. Nous, dans le fond, ce qu'on dit, c'est que, très bien, ça serait
effectivement souhaitable que ça
puisse avoir lieu rapidement et qu'il y ait toute une armada qui puisse — et non pas un Arrima, mais une armada — vraiment s'installer pour pouvoir, je
dirais, traiter les demandes à la satisfaction non seulement des employeurs,
mais des organisations.
Mme
Anglade : Peut-être qu'il y a des personnes qui pourront vous
confirmer que les 3 000 ont été priorisées, mais la seule chose que nous avons entendue jusqu'à
présent, c'est qu'il y a 400 dossiers qui vont être traités cette année.
C'est la seule chose dont nous pouvons être...
Mme Al
Yahya (Nisrin) : Je vous
dirais qu'aujourd'hui, dans le cadre de la rareté et de la pénurie de la
main-d'oeuvre et que c'est des
personnes qui sont actuellement en emploi puis qui ont des positions, ce ne
serait probablement pas une situation
favorable, ni pour nous, ni pour l'économie, ni pour le développement social,
si jamais on n'accélère pas le traitement de ces dossiers-là.
Mme
Anglade : ...le 400 n'est pas exact, quelqu'un peut me confirmer le bon
chiffre? Ça me fera plaisir de l'avoir. Je ne sais pas si le ministre veut
confirmer quelque chose? Je peux lui donner mon temps de parole s'il veut
confirmer, si le 400 n'est pas exact.
La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce
que je peux autoriser le ministre à...
M.
Jolin-Barrette : Bien oui, certainement. Ce que je peux dire à la
députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
c'est que, lorsqu'elle pose des questions,
elle doit se baser sur ce qu'on a dit, et ce que j'ai toujours dit, c'est qu'on
allait prioriser les 3 700 demandes qui étaient sur le
territoire québécois par le biais du système Arrima.
Alors,
pour la suite des choses, on va faire le débat ici en étude détaillée après les
semaines du mois de mars. On a la collaboration de votre parti pour
réformer le système d'immigration, mais surtout je l'invite, lorsqu'elle
questionne les témoins, à dire la vérité aux témoins sur l'étendue des propos
que j'ai tenus notamment en Chambre et notamment à l'extérieur.
Mme
Anglade : Je vais répondre à la question. Je vais répondre à la
question à nouveau puis je vais clarifier la situation. Ce que l'on comprend, c'est que, pour 2019, ce qui a été
présenté par le sous-ministre adjoint du ministère, c'est qu'il y aura
400 dossiers qui seront étudiés dans le système Arrima, de même que les
18 000. C'est ça, l'information que nous avons. Si ce n'est pas
exact, je n'ai pas entendu de commentaire différent à ce propos-là.
Maintenant, je vais
céder la parole à un de mes collègues pour la suite des choses.
La Présidente (Mme Chassé) : Et je vous invite à poser les questions à
l'organisme qui est avec nous. Je vous invite à poser la question à
l'organisme qui est avec nous. La députée de Bourassa-Sauvé, merci, allez-y.
Mme
Robitaille : Combien de temps il me reste?
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste six minutes.
Mme
Robitaille : O.K. Bien, justement, sur ce thème-là de la rupture avec
la tradition d'accueil québécoise, dans le passé, de tradition, quand un immigrant arrivait ici puis il avait
une résidence permanente, il avait la sécurité d'avoir la résidence permanente
puis, à partir de là, bon, il travaillait, il apprenait le français. Bon, ce
n'était pas parfait, mais, au moins, il avait la sécurité d'être ici puis
de commencer un nouveau chapitre de sa vie.
Or,
dans le projet de loi, on veut accoler une condition à la résidence permanente.
Ça peut être, tu sais : vous allez être permanent quand vous allez passer le test de français ou quand vous
allez passer le test de valeurs. Ce n'est pas très, très clair, mais il
y a des conditions qui seraient accolées. Comment vous voyez ça, vous, dans la
tradition québécoise d'accueil? Est-ce que ça vous trouble un peu?
M. Drudi (Guy) : Bien, très précisément, là... c'est-à-dire qu'il y ait, je dirais, des
recommandations, c'est effectivement quelque chose qui pourrait, mettons, comme
aider. Voyez-vous, ce qui se passe, là, actuellement, là, premièrement, les régions ne sont pas
comparables... En termes d'équipements, il y a des régions qui peuvent être un
petit peu plus vulnérables, et,
lorsque vous accueillez ou lorsqu'une personne a un projet pour venir immigrer
au Québec, il faut être capable de
bien le renseigner. Et, lorsqu'on a une précision sur, justement, l'environnement
qui va attendre la personne et sa famille, bien, je dirais que, là, à ce
moment-là...
Vous
savez, on a une TCRI, là, une table de concertation des organismes qui
s'occupent des réfugiés et de l'immigration,
et on a aussi le Regroupement des organismes de la francisation du Québec qui
couvre aussi tout le Québec. On est
en mesure de pouvoir solliciter les organismes qui sont sur place pour faire en
sorte qu'ils reçoivent justement les soins
dont ils ont besoin pour pouvoir obtenir un emploi et bien s'intégrer. L'idée
actuellement, c'est que, si on leur dit... on leur laisse supposer que, s'ils
ne peuvent pas, je dirais, avoir une mobilité à l'intérieur du territoire... là
encore, je veux dire, on vient comme, je dirais, obscurcir le discours
d'accueil.
Mme
Al Yahya (Nisrin) : Je vais vous répondre, peut-être, si vous
permettez. Dans le fond, pourquoi la personne immigre? C'est ça, la question qu'on devrait se poser à la base. Ceux
qui arrivent avec une résidence permanente ont quitté leurs pays pour trois
types de raisons, principalement, soit une résidence économique, donc améliorer
des conditions de vie, soit
politique, soit sociale. Mais, dans les trois situations, posez la question à
n'importe quel immigrant, il va vous dire : Je cherche la sécurité,
et je cherche la tranquillité, et je cherche la paix d'esprit.
Alors,
le problème dans ce genre de situation, c'est justement que, s'il va être insécurisé par rapport à «je ne sais pas ce qui va
m'arriver», on pourrait les perdre, justement, et on pourrait ne plus pouvoir les garder chez
nous comme on le désire. Et, en fin du compte, je reviens à ce que
disait M. Drudi justement, c'est là où on voit la coupure, parce que la personne, quand elle est arrivée comme résidente
permanente, elle se disait : Bien, je suis là pour ma vie, je reconstruis,
je recommence à zéro. L'idée, c'est
de ne pas, justement, la mettre dans la précarité, et je pense que, si jamais
elle va avoir à débattre encore une fois de sa résidence permanente, ça
pourrait précariser sa situation.
Mme
Robitaille : Donc, ce n'est pas très gagnant pour la rétention des
immigrants au Québec.
Mme Al Yahya
(Nisrin) : Exactement. Selon moi, oui, ce n'est pas très gagnant.
Mme
Robitaille : Et, si, par exemple, les régions ont plus de difficulté à
accompagner leurs nouveaux arrivants, finalement
le nouvel arrivant, dans une région, a peut-être... est moins bien placé que
quelqu'un à Montréal qui aurait tous les services pour passer le fameux
test, s'il y en a un, etc.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien, je
vous dirais qu'à ce moment-là on devrait se donner les moyens pour pouvoir
mieux accompagner les gens en région parce que les régions sont dans ce
besoin-là. Et elles ont tellement besoin de main-d'oeuvre, je vous dirais, on entend les
employeurs crier : Au secours! On a besoin de continuer notre travail,
sinon on va fermer boutique. Et je pense que régionaliser l'immigration n'est
pas une mauvaise idée, mais c'est qu'il va falloir juste restructurer sur de bonnes bases, donner les
moyens aux régions aussi. Puis pourquoi n'y aurait-il pas des antennes dans
les MRC pour pouvoir justement créer cet arrimage entre la population
immigrante et la société d'accueil?
Mme
Robitaille : Oui, parce que, dans votre rapport, vous parlez de choc
culturel, choc discriminatoire pour des immigrants qui sont à Montréal, où il y
a... la population immigrante est ici à la grande majorité. Donc, dans les régions,
le risque est pire.
Mme Al
Yahya (Nisrin) : ...beaucoup plus grand, certainement, et puis je vous
dirais aussi que le choc culturel n'est pas dans un sens. Le choc
culturel va dans les deux sens.
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste moins d'une minute.
Mme Al
Yahya (Nisrin) : Le choc culturel est autant celui de la personne
immigrante que la personne de la société d'accueil, parce que ça va nous toucher dans ce qui est viscéral en
nous. Ça peut être autant une langue, une religion ou une façon d'être, mais ça nous touche
viscéralement. Alors, qu'on soit acteur de la société d'accueil ou une personne
immigrante, on peut subir ce choc-là,
donc les deux doivent être préparés. On dit souvent qu'on a préparé les
immigrants mais qu'on a oublié la société d'accueil.
Mme Robitaille : ...le travail...
vous voyez beaucoup, beaucoup de travail à faire.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Il va y
avoir plus de travail à faire...
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Merci beaucoup. Je cède maintenant la
parole à la députée de Marie-Victorin.
Mme
Fournier : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous deux pour votre
présence, votre présentation. C'est un plaisir de vous entendre.
D'abord, vous
parliez du fait que le projet de loi n° 9, pour vous,
représente une approche très fragmentée qui ne répond pas nécessairement à
l'approche holistique que vous préconisez. Effectivement, je pense que les
attentes sont grandes pour la suite
du côté du gouvernement. On espère qu'il puisse déposer justement des mesures
qui viennent pallier à ce qui est
manquant dans le projet de loi n° 9, notamment pour ce qui a trait à l'accès à la
francisation. Parce que c'est bien
beau qu'on se donne le pouvoir... et je pense que c'est une bonne chose de
pouvoir offrir les services gouvernementaux aux travailleurs temporaires qui voudraient, par exemple, pouvoir
bénéficier de la francisation, mais encore faut-il qu'il puisse y avoir des places en francisation,
n'est-ce pas? Est-ce que c'est un problème que vous rencontrez fréquemment, le manque
de places ou la désorganisation dans le réseau de services de francisation?
• (13 h 10) •
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien, je
dirais que c'est surtout la lenteur des attentes, parce qu'il y a beaucoup de... Des
fois, les gens arrivent puis ils veulent s'inscrire à un cours à temps complet,
il n'y a pas assez de places, donc ils vont devoir aller à des temps partiels. Entre-temps, ils se trouvent des
emplois dans le réseau, très souvent des emplois élémentaires, donc ils
ne vont plus aller faire de la francisation, ils vont juste être emportés dans
la vie au quotidien.
Donc, ce
serait plus de créer plus de places, en termes de francisation, créer la
possibilité aussi de pouvoir avoir accès
à des classes de francisation tout au long de l'année, dépendamment du moment
de l'arrivée de la personne, parce que ça aussi, c'est très important. Et puis
moi, je soulignerai aussi l'importance d'avoir des classes qui sont diversifiées
en termes de francisation. Je peux m'expliquer par rapport à ça.
Je vous
dirais que l'une des situations qui étaient très critiques en 2016-2017,
c'était que la plupart des classes de francisation étaient composées de
personnes qui étaient arrivées en tant que... les réfugiés syriens. Donc, les
classes étaient, pour la plupart, des
arabophones qui parlaient entre eux la langue puis qui étaient là face à un
enseignant. Donc, comment est-ce que je vais transmettre un savoir? Et
c'est pour ça que je parlais tout à l'heure de l'intérêt de faire prévaloir l'importance du français pour nous, en
tant que société. L'une des choses sur laquelle il faut vraiment insister, c'est
l'identité québécoise, et puis c'est quoi, l'impact de cette identité-là dans
le parcours de la personne migratoire, et où est-ce qu'elle se situe par
rapport à cela.
M. Drudi
(Guy) : Au niveau de la
francisation, c'est assez exceptionnel. On reçoit plusieurs... une forte
immigration maghrébine, dont la langue maternelle est le français. Mais ce que
j'ai entendu, dans une recherche que j'ai faite, moi, en fait, auprès d'un employeur important, c'est qu'ils ne
parlaient pas le français des affaires. Donc, voyez-vous, ce qui se passe actuellement, là, c'est un peu comme si on
déboussole beaucoup, là, les personnes, parce qu'ils sont francophones, et c'est
leur langue... mettons, une langue parlée dans leur pays. Et ce qu'on arrive à
dire, c'est que...
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste moins d'une minute.
M. Drudi
(Guy) : ...ce n'est pas
convenable. Donc, voyez-vous, actuellement, là, je veux dire, on doit, à ce moment-là, avoir certains programmes ou, en fait,
adapter les programmes pour qu'il puisse y avoir une correspondance
entre les attentes et les besoins.
Mme
Fournier : Un genre de mise à niveau, au fond.
M. Drudi
(Guy) : On pourrait dire.
Mme Fournier :
O.K. Puis, rapidement, est-ce que vous voyez aussi des problèmes avec le
classement dans les tests en ligne pour la francisation?
Mme Al Yahya (Nisrin) :
Oui, parce qu'il n'y a pas beaucoup... il y a beaucoup de personnes qui ne sont
pas à l'aise avec l'outil informatique déjà
quand elles arrivent de leur pays d'origine. Donc, quand elles vont faire le
test de classement, elles vont prendre beaucoup plus de temps que
nécessaire pour finaliser le test.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de
Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Merci. Bonjour. Merci, encore une fois, de nous apporter
une vision un petit peu plus complexe de ce que c'est, l'immigration, parce que le projet de loi vise uniquement à
créer un lien d'emploi, puis voilà, là, c'est dans le sac, comme on dit. Ce que je comprends de votre propos,
c'est que, pour réussir une adaptation, une intégration globale à la société du Québec, c'est ce qu'on veut, là, il ne
suffit pas seulement que de trouver un emploi, là. J'aimerais vous entendre.
Mme
Al Yahya (Nisrin) : Bien, en fait, ce qui est très important, c'est de
prendre la personne dans son intégralité. La personne, quand elle arrive ici,
elle est en perte de repères, elle est en perte de reconnaissance. Elle n'est
plus fonctionnelle, même si elle est très qualifiée et très compétente. Donc,
ça prend un temps d'acculturation, d'adaptation à la société d'accueil
avant qu'elle puisse reprendre des façons de faire et des façons d'être qui
vont être adéquates pour la société d'accueil.
Je
vous dirais, les pires échecs qu'on a vus, c'est quand une personne arrive de
l'extérieur puis qu'elle a un emploi une semaine plus tard. Très souvent, ces
gens-là vont nous revenir deux, trois ans plus tard pour nous dire : J'ai
perdu mon emploi puis je ne sais pas quoi faire, je ne sais même pas
comment préparer un C.V.
Alors,
c'est pour ça qu'on trouve que c'est compliqué quand même de ne pas... L'idée,
c'est, si jamais la personne est en
emploi, effectivement, au bout d'une semaine, qu'elle ait aussi accès à
d'autres ressources qui vont l'accompagner au niveau de son intégration
dans la vie sociale de Québec et de Montréal.
M. Drudi
(Guy) : L'intégration vise à jumeler, si je peux dire, là, trois
processus d'adaptation : l'adaptation fonctionnelle,
qui tient lieu, donc... avec la langue, le logement, l'emploi et la
scolarisation; ensuite, l'adaptation sociale, qui vise à se créer des réseaux; et l'adaptation culturelle, qui vise à
être présent dans les représentations collectives de la société. Et, pour nous, le processus d'intégration,
c'est de faire en sorte que la personne nouvellement arrivée et sa famille
puissent finalement se développer, avoir une mobilité sociale en fonction de
ses intérêts.
Le projet de loi
n° 9 vise les intérêts des employeurs mais ne vise pas nécessairement les
intérêts des personnes immigrantes. Donc, je
dis qu'il faut compléter avec les recommandations que l'on fait, qui
proviennent d'une recherche qui s'est étendue sur 25 ans par rapport à une
présence, je dirais, des obstacles systémiques qui ont été réunis dans la recherche
du comité consultatif de la personne immigrante.
M. Fontecilla : Est-ce qu'établir des conditions, des tests
linguistiques, des tests de valeurs favorise l'intégration à long terme
d'une personne issue de l'immigration, ou faire dépendre leur résidence...
Mme
Al Yahya (Nisrin) : Je vous dirais que, pour convaincre, il faut être
convaincu et que, si la personne n'est pas convaincue que c'est
important pour elle de faire ça pour elle...
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
Mme
Al Yahya (Nisrin) : ...afin qu'elle puisse s'intégrer dans la société,
bien, ce n'est pas le test qui va faire la différence.
M.
Fontecilla : ...beaucoup de demandes, surtout des gens qui ont été
refusés, là, qui ont été... bon, dont, le dossier, on ne sait pas ce qui
s'est... qu'est-ce qui arrive, là. Est-ce que ça coûte cher, les démarches,
l'ensemble des démarches, là, pour demander... rester au Québec, là?
Mme Al Yahya
(Nisrin) : Ça coûte très cher. Oui, ça coûte très, très cher.
M.
Fontecilla : ...le montant?
Mme
Al Yahya (Nisrin) : Je ne peux pas vous donner de montant, ce n'est
pas du tout mon domaine d'expertise. Mais
je vous dirais qu'à travers l'accompagnement de mes collègues au niveau de
différents dossiers je vois beaucoup de gros montants passer pour que la
personne puisse obtenir sa résidence permanente.
M. Drudi
(Guy) : Parce qu'il ne s'agit pas simplement, je dirais, du déboursé
pour donner le droit d'accès, si je peux
ainsi m'exprimer, mais il s'agit de tout ce qu'on appelle l'externalisation des
dépenses. Et actuellement le projet
de loi n° 9, moi, je tiens à le préciser, fait
reposer le fardeau sur le requérant. Merci.
La Présidente (Mme
Chassé) : Vraiment, je vous remercie pour votre contribution aux
travaux.
Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.
Merci, tout le monde.
(Suspension de la séance à 13 h 16)
(Reprise à 15 h 1)
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. La Commission des relations avec les
citoyens reprend ses travaux. Je demande...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Aïe! Les amis, allo! Je vous en prie.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) : Oui, ça
va. Merci. La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux dans la joie. Je demande à toutes les
personnes de la salle de bien vouloir fermer son téléphone cellulaire ou ses
appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations particulières
et les auditions publiques sur le projet de loi n° 9,
la Loi visant à accroître la prospérité
socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie des personnes immigrantes.
Cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : la Fédération québécoise des municipalités, accueil et liaison pour arrivants et le Protecteur
du citoyen.
Je souhaite
donc la bienvenue à la Fédération
québécoise des municipalités. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis par la suite nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
Une minute avant la fin, je vous ferai un signe. Je vous invite donc à vous
présenter et à débuter.
Fédération
québécoise des municipalités (FQM)
M. Soucy
(Yvon) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, je
me présente, je suis Yvon Soucy,
préfet de la MRC de Kamouraska et premier vice-président de la FQM.
M'accompagnent — m'accompagnent
et m'apostrophent, là...
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Soucy
(Yvon) : ... — Maryse
Drolet, conseillère politique à la FQM, et Pierre Châteauvert, qui est
directeur Recherche et politique,
à la FQM également. Donc, merci
beaucoup d'accueillir la Fédération québécoise des municipalités
dans le cadre de cette commission parlementaire sur le projet de loi n° 9.
Fondée en
1944, nous célébrons cette année nos 75 années d'existence. La fédération
est porte-parole des régions et regroupe près de 1 000 municipalités locales et régionales
au Québec. En fait, ce sont quatre municipalités sur cinq qui sont membres chez
nous sur une base volontaire. Notre rôle est de faire entendre la voix des
régions, de porter les ambitions locales
et régionales et de défendre les intérêts des gouvernements de proximité. La
Fédération québécoise des municipalités constitue le plus grand
rassemblement du monde municipal au Québec.
Lors de la
dernière assemblée des MRC du Québec, qui s'est tenue en décembre dernier,
l'ensemble des préfets se sont positionnés sur des principes et des
revendications en prévision du dépôt de ce projet de loi. De plus, notre
commission permanente sur le développement social, les institutions...
et la démocratie, pardon, s'est penchée sur la question le 18 février dernier. Le présent mémoire
reflète donc la vision sur la régionalisation de l'immigration de l'ensemble
des élus que nous représentons.
La Fédération
québécoise des municipalités accueille favorablement le projet de loi
n° 9, Loi visant à accroître la prospérité
socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie
des personnes immigrantes, pour les précisions et les références à l'importance
de la régionalisation de l'immigration qui
y sont apportées. Cela fait plus de 10 ans que la FQM en fait la demande,
lors de son passage à la commission Bouchard-Taylor, lors des
consultations sur les modifications à la Loi sur l'immigration en 2016, fait
ici même, à cette commission. Nos demandes ont enfin été entendues. Nous sommes
patients.
Les commentaires et recommandations de la FQM
porteront spécifiquement sur les articles visant la mise en oeuvre de la régionalisation de l'immigration, le
rôle des municipalités locales et des municipalités régionales de comté.
Rappelons ici que, selon un rapport de l'Institut du Québec daté du
18 septembre 2018, 76 % des 52 388 immigrants
permanents accueillis en 2017 se sont établis à Montréal. Seulement 16 %
des nouveaux arrivants, depuis 2011, ont choisi
de vivre en région. Ces données nous interpellent. C'est pourquoi, à la
fédération, parler d'immigration, c'est bien plus qu'accueillir de nouveaux travailleurs pour combler nos besoins en
main-d'oeuvre. Parler d'immigration, c'est aussi parler d'accueillir de nouvelles familles, de nouveaux enfants dans nos
écoles, de nouveaux collègues et de futurs amis. Les MRC et les municipalités
sont ainsi des acteurs clés de toute démarche de régionalisation de
l'immigration. Le rôle des municipalités et des MRC dans toute l'opération d'accueil et
d'intégration des nouveaux arrivants doit être reconnu dans ce projet de
loi.
La FQM
souhaite rappeler ici l'adoption du projet de loi n° 122 qui reconnaît les
municipalités comme de véritables gouvernements de proximité depuis juin 2017.
Rappelons également que l'Assemblée nationale a confié à la MRC la compétence en développement économique local et
régional, indiquant qu'une municipalité régionale de comté peut prendre
toutes les mesures afin de favoriser le développement local et régional sur son
territoire.
Ainsi, la
première recommandation de la fédération sera de demander que ce projet de loi
reconnaisse la MRC et la municipalité, en tant que gouvernements de
proximité, comme acteurs clés de toute démarche de régionalisation de
l'immigration par le gouvernement du Québec.
Le projet de loi fait référence à la
coordination de la mise en oeuvre des services d'accueil, de francisation et
d'intégration des personnes immigrantes ainsi qu'à l'importance de bâtir des
collectivités plus inclusives, contribuant à
l'établissement durable en région des personnes immigrantes. Pour la
fédération, le rôle des MRC et des municipalités est indéniable dans ces actions de coordination,
notamment lorsqu'il est question des services d'accueil, de francisation et
d'intégration pour les immigrants allant en
région. Bien sûr, ces responsabilités de coordination confiées aux
municipalités et aux MRC devront être accompagnées d'une décentralisation des
ressources financières à la hauteur de ces responsabilités. Il en va de même pour les interventions de
promotion de l'apport de l'immigration au dynamisme des régions ou toute autre
opération de promotion et de mise en valeur de vivre en région... de la vie en
région.
Pour appuyer
la mise en oeuvre de la loi, la Fédération québécoise des municipalités demande
qu'une politique de régionalisation
de l'immigration soit élaborée, qui prévoie l'implication active des MRC dans
le processus de régionalisation de l'immigration.
Ainsi, la FQM
demande que soient conclues des ententes d'au moins cinq ans entre le ministère
de l'Immigration, de la Diversité et
de l'Inclusion, le MIDI, et les MRC d'une même région administrative pour
assurer la coordination et l'adaptation de mesures d'accueil et
d'intégration des personnes immigrant en région.
La FQM demande
également que le MIDI ouvre des bureaux régionaux dont la mission sera
d'assurer une coordination efficiente
entre l'accueil et... en région, en concertation avec les MRC. Ces bureaux
verront à l'application et à la mise en oeuvre de la politique de
régionalisation de l'immigration.
La FQM
demande que soit reconnu le rôle des MRC et de leurs services de développement
économique dans tout le processus
d'identification des besoins de main-d'oeuvre, de sélection des travailleurs
immigrants qui seront invités à s'établir en région.
La FQM
demande que les interventions d'accueil, de francisation et d'intégration des
personnes immigrantes soient régionalisées, décentralisées à l'échelle des MRC.
À titre de gouvernements de proximité, les MRC sont les mieux placées
pour assurer la coordination et la
concertation des groupes et intervenants sur leurs territoires. La FQM demande
que cette délégation de compétences soit accompagnée des ressources
financières suffisantes.
Finalement,
la Fédération québécoise des municipalités demande que toute discussion entre
le MIDI et les régions concernant la
régionalisation de l'immigration et ses modalités de décentralisation ait lieu
à la table régionale des préfets, présente dans chacune des régions du
Québec.
En
conclusion, j'aimerais aussi rappeler que la personne qui immigre choisit un
emploi, mais aussi un milieu de vie pour elle-même et sa famille. Ainsi,
accueillir de nouveaux arrivants dans un milieu, c'est aussi accueillir des
personnes remplies de rêves et
d'espoir de se réaliser pleinement, des familles qui souhaitent bâtir une
nouvelle vie. Les municipalités et
les MRC sont les mieux placées pour comprendre et répondre localement et
rapidement aux besoins des nouveaux arrivants, et, ce faisant, facilitent leur intégration. La reconnaissance et le
respect des champs de compétence de chacun des paliers de gouvernement,
comprenant les gouvernements de proximité, que ce soient les MRC ou les
municipalités, devront être inscrits
dans la loi pour assurer le succès de toute démarche de régionalisation de
l'immigration, et ce, dans le meilleur intérêt de la société québécoise
tout entière.
Je vous remercie, et nous sommes prêts à
répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci.
Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange.
M. le ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la
Présidente. M. Soucy, M. Châteauvert, Mme Drolet, bonjour. Merci
d'être à l'Assemblée pour venir présenter votre mémoire.
Alors,
j'entends bien ce que vous nous dites relativement au fait que vous souhaitez,
en lien avec les municipalités qui
sont membres de la FQM, qu'il y ait des pouvoirs qui soient dévolus au sein des
MRC puis qu'ils soient vraiment en charge, dans le fond, de
l'intégration au niveau régional. C'est bien ça?
M. Soucy (Yvon) :
Absolument.
• (15 h 10) •
M.
Jolin-Barrette : O.K.
Comment je pourrais dire... comment est-ce que le rôle du ministère de l'Immigration
peut s'inscrire en lien avec la proposition que vous faites? Parce que, là, depuis l'an
passé, je crois, il y a 21 ressources du ministère de l'Immigration dans les bureaux de Services Québec,
de l'emploi. Là, le ministère recommence à s'établir en région pour avoir un
parcours personnel. Ça va s'inclure, dans le fond, avec ce qu'on
veut faire, de l'accompagnement, plus de ressources pour les
temporaires, pour les permanents sur l'ensemble du territoire québécois.
Comment est-ce qu'on peut travailler ensemble là-dessus avec les ressources du ministère de l'Immigration puis les MRC? Comment vous voyez ça?
M. Soucy
(Yvon) : Bien, écoutez, actuellement, je pense que le ministère...
les ressources sont principalement consacrées
à Montréal. Il commence à y avoir une décentralisation vers
les régions, mais actuellement c'est quand
même très peu.
Je peux vous dire, moi, je suis préfet de la MRC
de Kamouraska, nous avons une personne qui travaille en mobilisation avec une entente
que nous avons avec le MIDI. On constate, là, que les besoins... Moi, il n'y a
pas une semaine que je ne me fais pas
interpeler par des entrepreneurs qui manquent cruellement de main-d'oeuvre, qui actuellement freine des
projets de développement. Puis nous, en fait, là, on pense que les municipalités régionales de comté, les municipalités
locales doivent faire partie du processus
d'accueil, d'intégration. On est dans la mobilisation chez nous, là,
mais, malgré le fait qu'on n'est même pas assurés d'avoir du financement, là, on se dirige déjà vers l'accueil, l'intégration parce qu'on a besoin de ressources. Puis c'est pour ça que nous, on croit que, par
territoires de MRC, les besoins vont être beaucoup plus facilement
identifiables, puis on va pouvoir y répondre également beaucoup plus facilement
par notre proximité que nous avons, par
exemple, avec les chercheurs d'emploi, avec les communautés qui veulent se
revitaliser, qui veulent maintenir des services de proximité.
Donc, notre
lien avec la région, évidemment, c'est pour toute la question des programmes,
mais on pense qu'à l'échelle d'une municipalité régionale de comté et des
municipalités locales on a un travail à faire puis on est prêts à le faire.
M. Jolin-Barrette : ...l'étendue de
votre proposition, là, vous nous dites... Est-ce que, dans le fond, supposons qu'on dévoluerait vers les MRC, vous prendriez en
charge, supposons, la francisation, l'intégration dans vos bâtiments propres de
la MRC, dans le fond, ou vous voulez continuer de travailler en partenariat
avec les organismes communautaires? C'est quoi, votre vision, là,
là-dessus, là?
M.
Soucy (Yvon) : Écoutez,
actuellement, on est en partenariat, là... Je prends chez nous, on a un comité
immigration qui réunit plusieurs intervenants, on a un comité également
plus politique pour donner les orientations, puis il y a déjà plusieurs organisations qui travaillent à
l'accueil et l'intégration. Mais tout ça, sur un territoire de MRC, ça
nécessite une coordination, ça nécessite
quand même un travail important. Donc, c'est vraiment à ce niveau-là que nous
voyons notre rôle. M. Châteauvert.
M.
Châteauvert (Pierre) : Et,
M. le ministre, si vous permettez, effectivement, le lien avec le ministère,
dans le passé... avant 2015, le
ministère appuyait son action beaucoup sur les conférences régionales des élus,
et, bon, tout ça a sauté, est
disparu. Les MRC ont été obligées de pallier et de créer une intervention sur
le territoire, et la majorité de nos membres, effectivement, sont très
actifs là-dessus.
La
décentralisation, ça ne veut pas dire... ça nécessite aussi un accompagnement,
c'est-à-dire une déconcentration, une
présence en région. Avec d'autres ministères qui sont très présents, qui ont
des directions régionales fortes, genre... je prends l'Agriculture, le
ministère des Affaires municipales, il est toujours possible de discuter et
d'adapter les programmes, les
interventions pour mieux répondre aux besoins. Parce que, souvent, ce qui se
passe, c'est qu'au niveau soit de la table des MRC, qui regroupe toute une
région, avec la direction régionale, ils s'entendent sur une façon de faire, et
souvent, même, ça se reproduit, ça,
au niveau de la MRC pour adapter encore plus les interventions, pour avoir une
intervention plus efficace.
C'est ce
modèle-là qu'on aimerait beaucoup développer avec vous, M. Soucy a
développé, effectivement, son expérience, on la voit un peu partout sur le
terrain, mais que vous soyez là, que le ministère soit davantage présent et
avec des gens qui sont capables d'adapter les mesures en fonction des
besoins, donc pas nécessairement qui reproduit ce qui vient de Montréal, du central, mais aussi capables d'adapter pour mieux
intervenir. Parce que, des histoires, des exemples, là, on en a plein, des cas
absolument magnifiques, mais, parce que ça ne correspond pas à telle règle, et
tout ça, le projet est refusé, alors qu'il aurait pu avoir des impacts
positifs.
Donc, c'est
sûr que c'est le message qu'on aimerait vous lancer, puis de dire que... de
travailler en symbiose, nous autres aussi, c'est le message qu'on lance
à l'ensemble des ministères. Puis, avec le MIDI, c'est particulièrement criant
comme besoin.
M.
Jolin-Barrette : Bien, c'est
un des plans que nous avons, de renforcer le ministère de l'Immigration. Dans
la loi, on met le rôle de leadership
aussi, mais on veut aussi s'assurer qu'on donne au ministère les ressources
pour s'assurer de l'accompagnement. Ça fait que très certainement je
vais être intéressé à travailler avec vous, avec l'ensemble des MRC puis avec les différentes municipalités pour
s'assurer que ça fonctionne. Parce que moi, je pense qu'on a le devoir de faire
en sorte que ça fonctionne mieux, de faire en sorte aussi d'avoir une
plus grande régionalisation.
Comment vous voyez ça? Dans le système Arrima,
moi, j'avais l'idée notamment de faire en sorte de prioriser, supposons, les
candidats avec des offres d'emploi validées en région en lien avec les
employeurs. Comment vous envisagez ça? Parce
qu'en fait, je vais vous dire, là, Montréal est venue avant vous ce matin puis
ils disaient : Nous, on est en faveur de la régionalisation, mais on a des
grands besoins à Montréal aussi. Je sais que, dans toutes les régions du
Québec, il y a une pénurie de main-d'oeuvre aussi. Que me conseillez-vous,
là, pour faire l'arbitrage là-dedans?
M.
Soucy (Yvon) : Écoutez, nous
avons aussi nos services de développement économique dans chaque territoire
des MRC, là, que ça soit intégré à la MRC ou
par les CLD. Je pense qu'on... Comme je vous le disais tantôt, on est en mesure
d'identifier les besoins, puis c'est certain
que, des besoins, nous en avons. Je regardais juste chez nous, là, issus de l'immigration, pour une communauté qu'on pense
quand même assez homogène, là, on a 475 personnes qui sont issues de
l'immigration chez nous, provenant de 25 nationalités différentes.
Donc,
moi, ce que je pense, c'est qu'on peut voir des histoires à succès, si on
régionalise l'immigration, là, très certainement.
M. Jolin-Barrette : Et est-ce que vous accueillez favorablement le fait que le gouvernement
souhaite aller de l'avant avec une réforme qui va baser la sélection des
immigrants en fonction des besoins de main-d'oeuvre que nous avons?
M.
Soucy (Yvon) : Puis, écoutez, c'est clair, là, qu'on doit
répondre aux besoins de nos entreprises, mais moi, j'ajouterais qu'on doit bien
accueillir puis bien intégrer également les personnes qui vont arriver chez
nous, parce que, sinon, malheureusement, ces
gens-là ne développeront pas leur sentiment d'appartenance, puis c'est le
facteur clé, selon moi, d'une intégration réussie. Puis c'est pour ça
qu'on doit avoir les moyens, par territoires de MRC, les municipalités régionales, les municipalités locales, de bien
assurer la coordination, d'avoir les ressources nécessaires, d'avoir un financement
adéquat pour faire en sorte que ces
accueils, ces intégrations-là seront réussis puis que les gens vont rester chez
nous, vont se sentir chez eux. Mais
évidemment on est en faveur qu'il y ait une adéquation entre les besoins de nos
employeurs et les personnes qu'on va accueillir.
M. Jolin-Barrette : Sur la question, là, des bureaux régionaux que vous voulez qui soient
mis en place, présentement les agents
du ministère de l'Immigration se retrouvent dans les centres locaux d'emploi ou
Services Québec, est-ce que cette formule-là vous convient ou vous
souhaitez vraiment que le ministère implante des bureaux distincts?
M.
Soucy (Yvon) : Je vais laisser mon collègue répondre.
M. Châteauvert (Pierre) : En fait, oui, effectivement, c'est une présence,
c'est déjà mieux que ce qu'il y avait avant, là. Il faut développer, mais ce qu'on a de besoin aussi, oui, c'est une
présence, mais un accompagnement pour, des fois, adapter les mesures. Donc, que ça passe par... que vous ayez une entente
de gestion avec les centres locaux d'emploi, on a aucun problème avec
ça.
L'objectif ultime,
c'est que vous soyez là, que vous accompagniez la démarche et que vous puissiez
adapter. Des fois, il y a des choses, là,
qui ne fonctionnent pas, tu sais, des... Supposons, si on... Tantôt, on parlait
de cas des réfugiés, pour répondre
aux besoins. Dans le coin de Sainte-Françoise, dans la MRC de Bécancour, eux
autres, ils se sont dit... C'est une
population agricole, c'est un milieu agricole. Ils se sont dit : On a
besoin de travailleurs agricoles. Ils ont travaillé avec les groupes à Montréal pour attirer les réfugiés
qui étaient des agriculteurs dans leurs pays au lieu de les faire installer
dans le centre-ville de Montréal.
C'est un succès incroyable, mais le nombre d'embûches qu'ils ont dû traverser
pour que ça fonctionne... tu sais,
c'est des milieux où est-ce que tu as besoin d'un permis de conduire. Même,
juste aller à la SAAQ, ça a été un défi. Donc, c'est cette notion-là de
pouvoir être accompagné par le ministère pour, des fois, régler les choses.
Parce
que vous avez le lien avec l'ensemble des autres machines. Donc, que ça passe
par la... Ça prend une présence active et capable d'adapter la réalité.
Donc, effectivement, la gestion... la façon que vous vous structurez, vous avez
énormément d'ententes avec Emploi-Québec.
Effectivement, ça fonctionne, des choses comme ça. Mais, pour la présence
en région, Emploi-Québec, c'est un très,
très, très bon partenaire, mais sauf que le résultat, il faut qu'il soit là.
Notre souhait, c'est la capacité d'adapter les mesures, et de façon active,
avec les intervenants sur le territoire qui sont regroupés au niveau des municipalités et coordonnés au niveau des MRC
puis la table des MRC. Mais le monde municipal est très bien structuré à
ce niveau-là, puis, quand les ministères en profitent, ça fonctionne très bien.
M. Jolin-Barrette : Puis, j'imagine, dans plusieurs MRC, c'est vraiment criant, les besoins
que vous avez présentement. Il doit y
avoir des entreprises à risque dans plusieurs MRC. C'est quoi, le portrait,
l'écho que vous avez, là, à la FQM, des différentes municipalités?
• (15 h 20) •
M. Soucy (Yvon) : L'an dernier, on a produit une étude sur,
justement, la réalité économique puis de l'emploi, on vous la fera parvenir, mais qui a fait un bruit certain,
sur le fait que, même si les taux de
chômage baissent, la réalité, c'est
que la main-d'oeuvre, les emplois
s'en vont. Les emplois quittent. Mais on va vous transférer, à votre cabinet
puis aussi aux membres de la commission,
là, cette étude-là, puis on vous invite tous d'en prendre connaissance. Vous allez voir que, même
si, des fois, les chiffres sont bons, en arrière de ça se cache une réalité. Le
nombre d'emplois réels diminue et le nombre
de personnes pour occuper les emplois qui sont disponibles diminue également,
étant donné le vieillissement, et tout ça.
Donc, il y a vraiment
une problématique, et c'est l'avenir des régions, là, qu'on pense que... On
parlait toujours, il y a quelques années : Le taux de chômage est
important. Non, c'est l'inverse qui se passe actuellement.
(Interruption)
La
Présidente (Mme Chassé) :
On est en train de corriger... On fait des tests et petits
ajustements pour bien vous entendre.
M. Soucy
(Yvon) : Parfait. Je...
M. Jolin-Barrette :
Le type d'emplois qui sont disponibles dans les régions, qu'est-ce qui ressort
du profil qui est requis?
M. Soucy
(Yvon) : Très, très diversifié. On était
au salon de l'emploi à Montréal il y a quelques semaines, la... bien, en fait, le Bas-Saint-Laurent, mais pour
la MRC de Kamouraska, puis on a une diversité d'emplois, là. Ça va de
travailleur en usine mais jusqu'à des emplois comme
des...
Une voix : Des ingénieurs.
M. Soucy
(Yvon) : Oui, oui, absolument,
des ingénieurs ou... Écoutez, je prends seulement Bombardier, chez nous, qui est
constamment en recrutement, beaucoup de centres spécialisés également
qui recherchent des travailleurs très,
très qualifiés. C'est très diversifié, là.
M. Châteauvert
(Pierre) : La FQM a une
corporation informatique municipale. On est structuré, on a une mutuelle, la municipalité, l'assurance puis la corporation. Et, même si elle
n'est pas très loin de Québec, elle est quand même dans un territoire
rural. On a de la difficulté à... Et, même au niveau du fonctionnement
même du monde municipal, ce n'est pas facile, parce que, là, on a ce service des ressources humaines et des gens qui travaillent à
temps plein pour combler des postes,
là, pour amener des gens, et tout ça. Et ça, c'est... Les entreprises,
on a simplement... L'été dernier, je me souviens, j'ai fait la véloroute du bleuet, puis on voyait,
toutes les entreprises, c'était assez hallucinant, là, tout ce qu'on
offrait pour attirer des gens. Donc, c'est de tous les corps d'emploi,
en région, qu'il y a un manque.
M. Jolin-Barrette : Le projet
de loi n° 9 touche l'immigration permanente. Puis, en terminant de mon côté, parce que je vais laisser la parole à mes collègues,
au niveau de l'immigration temporaire, un des objectifs que nous avons, c'est
que, les immigrants qui sont en situation temporaire, on puisse les
permanentiser, d'offrir des ressources. En fait, le projet de loi n° 9,
c'est ce qu'il va nous permettre de faire, de s'assurer de pouvoir donner du
service maintenant aux personnes en statut
temporaire au Québec pour les franciser et les intégrer. Est-ce qu'à court
terme des assouplissements dans le
Programme des travailleurs étrangers temporaires, ça peut être une voie pour
répondre rapidement à la pénurie des différentes régions?
M. Châteauvert
(Pierre) : M. le ministre,
nous, ce qu'on peut vous dire, c'est que toute mesure est nécessaire. Toute
mesure est nécessaire de faciliter les choses. Parce qu'il y a des gens qui
contactent les services de développement puis qui
ont déjà des liens avec des entreprises, mais qui ne sont pas capables
d'accueillir parce qu'il y a des blocages au niveau de la structure. Nous, toute, toute mesure est
nécessaire parce que c'est... L'étude qu'on va envoyer à la commission, vous
allez voir, c'est criant, les besoins. Puis là il est une question d'avenir et,
effectivement, de la structure économique des régions. Nous autres, là,
c'est le message qu'on veut vous lancer aujourd'hui.
M. Soucy
(Yvon) : Puis je conclurais
que moi, comme élu, comme préfet de MRC, là, je ne peux pas concevoir, là,
qu'actuellement des entreprises... Puis j'en ai encore rencontré un,
entrepreneur, ce matin puis qui nous dit qu'il manque de main-d'oeuvre actuellement. Les gens ne peuvent
pas offrir les services auxquels leurs clients s'attendent. Les gens mettent
le frein sur des projets de développement,
même de consolidation d'entreprise. Pour quelqu'un, pour un élu, là... puis je
pense que c'est la même perception pour tous
les élus, on souhaite que nos territoires se développent. Puis, lorsqu'on voit que
nos entreprises, malheureusement, ne peuvent pas le faire, bien, on se sent
assez démunis.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant
le député de Beauce-Sud à prendre la parole.
M. Poulin : Merci beaucoup, Mme
la Présidente, de m'indiquer le temps qu'il nous reste.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste 9 min 8 s.
M. Poulin :
Neuf minutes. Parfait. Merci beaucoup. Alors, bonjour. Content de vous voir et
de vous revoir. D'ailleurs, on a un
rendez-vous ensemble vendredi, avec la FQM, pour parler de différents enjeux
qui touchent la jeunesse québécoise. Alors,
on aura la chance effectivement de discuter à nouveau de l'occupation du
territoire, de l'importance de nos régions et de parler également de la ruralité, hein, qui est un mot très rare
ici, à l'Assemblée nationale. Parce qu'au-delà, bien entendu, des régions qu'on utilise, on a des municipalités
qu'il y a moins de 1 000 personnes, moins de 500 personnes et
qui ont des défis extrêmement précis, entre autres au niveau de
l'immigration.
Tout à l'heure... bien, hier, en fait, ma
collègue la députée de Bourassa-Sauvé nous rappelait à juste titre que l'immigration, c'est autre chose que seulement un
emploi, et c'est vrai. La survie des écoles de village dans nos régions, dans
nos plus petites municipalités, c'est
important. La survie de nos cégeps, de certains programmes également, dans nos
cégeps, des centres universitaires également dans nos régions. Alors, on voit à
quel point que l'immigration, c'est un enjeu qui est social, qui est
économique et qui est fort important pour le développement de nos régions.
Tout ça
m'amène à vous dire que, compte tenu de tous les défis qu'on a et des défis que
les MRC ont, vous en avez pas mal, de défis. Et, entre autres, depuis
l'abolition des CLD, qui, dans certaines régions, ont été mis avec les MRC,
d'autres ont demeuré avec une certaine
autonomie, avec les gouvernements de proximité dont vous vous revendiquez,
selon l'ancien, précédent
gouvernement, mais également avec le nouveau gouvernement, vous en avez pas mal
dans votre cour. Vous faites même l'objet vous-mêmes de pénurie de
main-d'oeuvre pour avoir des directeurs municipaux, pour avoir des secrétaires dans vos municipalités. Vous avez des enjeux
également pour livrer la marchandise même dans ce que doit être une
municipalité au Québec.
Alors, ma question
est la suivante : Lorsque vous... D'ailleurs, je tiens à saluer votre
mémoire qui est assez incroyable, où je
retrouve des mots en faveur de l'ajout de cet article, «appuie le projet de
loi». Donc, c'est très intéressant à lire, tout ça... d'ailleurs, qui, votre
appui, faut-il le rappeler, corrobore ce qu'on entend auprès des entreprises
dans les régions du Québec, qui sont très satisfaites de ce projet de loi.
Alors,
ma question : Compte tenu de tout ce travail que vous avez à faire dans
vos municipalités, les enjeux qui touchent
nos MRC au Québec, comment pourrions-nous être efficients en ajoutant tout ce
volet-là au niveau de l'immigration, qui
d'ailleurs, à juste titre, se retrouve dans certains carrefours
jeunesse-emploi, par exemple, avec des ententes qui avaient été développées
avec les bureaux régionaux du MIDI? Alors, comment pourrions-nous atteindre cet
objectif-là face à tout le travail que je viens de vous exposer, que
vous avez déjà devant vous?
M. Soucy (Yvon) : Écoutez, je vous ramène à l'exemple de la MRC de
Kamouraska. On le fait, là. Depuis un peu plus d'un an, on est dans la phase mobilisation. Mais je vais vous dire
qu'on s'est vite rendu compte en faisant le portrait qu'on était même rendu beaucoup plus loin, qu'on
était beaucoup plus rendu à répondre concrètement aux besoins de nos employeurs. Puis notre rôle, là, c'est... puis
notre rôle est essentiel, c'est un rôle de coordination à l'échelle d'un
territoire de MRC, puis en
complémentarité avec toutes les organisations qui travaillent à faire en sorte
d'amener des gens chez nous, là.
Puis
là on parle d'immigration, mais on est aussi dans une démarche d'attractivité
chez nous. Puis il y a plusieurs régions,
au Québec, qui sont dans des démarches d'attractivité, puis c'est le rôle des
municipalités régionales de comté. On a été constituées, bon, bien sûr, pour
planifier l'aménagement du territoire, mais également pour assurer la
concertation sur un territoire de
MRC. Donc, moi, je vous dirais qu'on est en plein dans ce pour quoi on a été
créées, puis, si on ne le fait pas, qui va le faire en fait, là?
M. Poulin :
Mais cette notion-là de gouvernement de proximité, elle est hyperimportante,
compte tenu du fait que vous
connaissez vos milieux, vous connaissez vos MRC puis vous êtes bel et bien
conscients de la réalité qu'il y a sur le territoire.
Ma
question, c'est : Est-ce qu'on va réussir à atteindre tous nos objectifs
et à atteindre, justement, ces objectifs-là de vitalité, de ruralité, d'occupation du territoire? Voyez-vous, chez
nous, en Beauce, je travaille l'Internet haute vitesse puis la
couverture cellulaire avec la MRC parce qu'ils ont l'expertise, ils savent
exactement où ils s'en vont. Alors, si on en
rajoute... Parce que, très souvent, les municipalités veulent plus de pouvoirs,
plus d'actions mais nous disent : Les sommes financières ne suivent
pas, les outils ne suivent pas pour travailler. Alors, moi, je veux m'assurer,
dans votre revendication qui, je crois,
mérite d'être analysée... Comme le ministre l'a souligné, il faut certainement
s'assurer que, si jamais vous avez ce
pouvoir-là, je le mets entre guillemets, vous puissiez avoir tous les outils
pour atteindre vos objectifs.
M. Soucy (Yvon) : Absolument, puis c'est indiqué dans notre
mémoire, à quelques reprises, qu'on demande que cette délégation de
compétences soit accompagnée des ressources financières suffisantes. Donc, je
suis heureux de voir qu'on est entendus, puis espérons que ça se concrétisera.
M. Châteauvert
(Pierre) : La problématique est intense, et les gens le font déjà,
O.K.? On ne compte plus le nombre de MRC et
aussi de tables de préfets de MRC, là, le regroupement au niveau de la région,
qui ont lancé des opérations de concertation
pour organiser l'accueil ou organiser l'action. La MRC n'accueillera pas
l'immigrant, mais elle va coordonner les
groupes qui vont accueillir l'immigrant, la famille, les gens du scolaire, et
tout ça, autour d'une table. On peut vous fournir des modèles d'un peu partout, de ce qui se passe
un peu partout, et c'est ça qui se passe actuellement sur le terrain. Ça se
fait parce qu'il y a une urgence.
Atteindre
une qualité égale partout, je n'y crois pas. L'État n'y réussit même pas
lui-même avec l'ensemble des ressources qu'il a sa disposition. Mais
d'améliorer le processus, d'améliorer le système, d'aller plus loin... Les gens
sont mobilisés. Il faut savoir
qu'être préfet il y a 20 ans puis être préfet aujourd'hui, ça demande pas
mal d'heures. Ça se rapproche de ce
que vous vivez, vous, comme milieu à l'Assemblée nationale, en termes
d'obligations, en termes d'implication, en termes de réunions, en termes de concertation, en termes de ci, en
termes de ça. Donc, les gens s'impliquent parce que c'est l'avenir de
leur communauté qui est en jeu, point.
• (15 h 30) •
M. Poulin :
Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je comprends bien que la députée de
Les Plaines désire prendre la parole.
Mme Lecours (Les Plaines) : Oui, Mme la Présidente, merci beaucoup. Merci
beaucoup d'être ici aujourd'hui. Enfin, on... bien, pour ma part, je mets un
visage derrière les trois lettres, l'acronyme. En fait, je ne répéterai pas ce
que mon collègue a dit. Je suis bien contente d'avoir passé au travers de votre
mémoire et de voir effectivement qu'en majorité vous êtes d'accord avec
le projet de loi qu'on présente aujourd'hui.
Par
ailleurs, j'ai arrêté sur des statistiques : 16 % d'immigrants,
seulement qu'en région, et combien ils restent aussi, c'est ce qui importe
beaucoup en ce moment. Vous êtes pour l'arrimage, pour la régionalisation.
Mais, une fois que les gens, les immigrants sont rendus en région,
qu'ils ont un emploi, qu'ils sont francisés, parce qu'il y en a aussi qui
connaissent bien le français, qui arrivent en région, et tout ça, l'idée, c'est
de trouver les moyens pour qu'ils demeurent.
Moi, une petite histoire dans ma
circonscription, je me suis liée d'amitié avec quelqu'un qui vient d'arriver,
ça fait à peine un an, qui parle très
bien français, qui a un emploi, ça va bien, mais elle s'ennuie, là. Elle a
passé quelques mois à Montréal puis
elle se dit : Hum, je serais tentée d'y retourner, mais je sais que je
n'ai pas d'emploi là-bas. Ici, ça va bien, et tout ça.
Comment est-ce que
notre gouvernement, que ce soit le MIDI ou d'autres aussi, là, j'ouvre grandes
les portes... comment est-ce qu'on pourrait aider vos membres, les
municipalités, à s'assurer qu'elles soient attrayantes? Je n'aime pas le mot «attractives», là, j'aime mieux
«attrayantes». Comment est-ce qu'on peut s'assurer qu'on va conserver les gens dans leur milieu de vie? Parce qu'on l'a dit,
hein, ce n'est pas juste un emploi, c'est un individu derrière cet emploi-là. Comment
est-ce qu'on peut vous aider? Quel type...
M. Soucy (Yvon) : Moi, j'ai déjà entendu, là, que ce qu'il faut
créer le plus rapidement, là, c'était une présentation que j'avais eue, c'est... bien, je vous parlais
tantôt du sentiment d'appartenance, c'est créer rapidement des souvenirs
heureux pour ces gens-là. Donc, il faut vraiment... ça prend des
communautés qui sont mobilisées, là.
Je
vais prendre Saint-Alexandre-de-Kamouraska, chez nous, là, qui a une importante
usine puis qui accueille des travailleurs
temporaires, une cinquantaine, de façon continue, puis, en majorité, ce sont
des Philippins. La communauté est mobilisée, là, derrière ces gens-là
pour faire en sorte qu'ils se sentent chez eux, que ce soit... Parce que, comme
je le disais tantôt, ce n'est pas juste
d'accueillir des gens pour combler les besoins de nos entreprises, c'est
d'accueillir des gens qui vont
participer à la collectivité, qui vont être, espérons-le, un jour, des
concitoyens, qui vont peut-être participer à la vie de la communauté.
Donc, je vous dirais que c'est toute une communauté qui doit être en oeuvre.
Puis les
municipalités, là, mettent en branle une foule d'initiatives, là : je
pense, par exemple, aux politiques familiales,
les comités de développement, les comités familles. Il y a une multitude de
comités, dans nos municipalités, qui font
en sorte... qui peuvent être mis à profit pour faire en sorte que ces gens-là
soient bien entourés puis soient bien accueillis.
Donc, quand on
disait... Il y a une responsabilité partagée dans tout ça, là. Le ministère,
évidemment, là, a une responsabilité, les MRC ont un rôle de coordination, puis
les municipalités locales, un peu plus un rôle beaucoup plus terrain, là, au
niveau de tous les organismes.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci.
M.
Soucy (Yvon) : Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie. Je suis désolée. Je cède
maintenant la parole à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Anglade : Alors, très contente de vous voir ici. Et puis, bien, la
dernière fois, c'était à La Pocatière, là c'est à Québec, hein? Mais on
pourra renouveler l'expérience à La Pocatière.
Écoutez, en fait, je
vais faire du pouce sur ce que ma collègue des Plaines disait par rapport au
rôle qui est plus large que simplement
l'emploi. Certaines personnes qui sont venues nous présenter leurs mémoires,
ici, nous ont dit que, bon, on
comprend bien l'objectif d'arrimer davantage les besoins de main-d'oeuvre avec
l'immigration, mais c'est beaucoup plus large que ça. On l'a dit à
maintes reprises.
Quels
sont les éléments que vous aimeriez voir, sur lesquels on devrait davantage
insister, dans le projet de loi, qui feraient
en sorte qu'on prendrait d'autres éléments en considération par rapport à
l'intégration comme milieu de vie, pas simplement l'emploi, mais d'autres choses que vous aimeriez voir? Vous
dites : Dans un monde idéal, là, dans un projet de loi, j'aurais mis a, b,
c en plus parce que ça a vraiment... ça donnerait une perspective beaucoup plus
générale de l'intégration dans les municipalités.
M. Soucy (Yvon) : Bien, écoutez, comme je le disais lors de la lecture, on salue le fait qu'il y a
une volonté de régionaliser l'immigration.
Ça, c'est une demande que nous avions depuis longtemps. Plus concrètement, là,
je crois que ce qu'on veut voir,
c'est d'avoir les moyens, là, pour que cette régionalisation de l'immigration
là se fasse comme il faut dans nos territoires de MRC. Donc, les moyens,
ce sont les ressources à notre disposition, les ressources humaines, les
ressources financières, de bonnes ententes avec le ministère, pas du court
terme, là.
Regardez,
actuellement, chez nous, on est dans la phase mobilisation. Bon, on a décidé,
là, le conseil, on est unanimes à dire : Il faut poursuivre. Mais on n'est
même pas assurés d'avoir le financement. On imagine qu'on va l'avoir, mais en tout cas, actuellement, on n'est
même pas assurés d'avoir le financement. Donc, on aurait besoin d'ententes
à long terme. Nous, dans notre mémoire, on dit : Des ententes au moins de
cinq ans entre le ministère et les MRC. Là, à ce moment-là, on pourrait
vraiment planifier de façon adéquate, là, tout le processus d'accueil et
d'intégration.
Mme
Anglade : Est-ce que ça se résume, selon vous, à simplement avoir les
bons moyens financiers? Parce que ça se peut que la réponse soit oui.
M.
Soucy (Yvon) : Non, non, absolument pas.
Mme
Anglade : Non, non, mais d'un point de vue... le ministère vous
accorde les moyens financiers nécessaires ou est-ce qu'il y a d'autres
éléments que vous aimeriez voir?
M.
Châteauvert (Pierre) : Non,
en fait, c'est comme on indique dans notre mémoire, il y a toute une structure,
il y a une approche, une implication,
en fait, une association avec les intervenants locaux, notamment, au niveau de
l'identification des emplois
disponibles. Chaque MRC a un service de développement économique, ou CLD, ça
dépend s'il est intégré ou pas. Ces
gens-là, lorsqu'on parle à ces gens-là, on parle aux entreprises, ils sont en
connexion avec les entreprises, donc ils sont capables d'identifier des
besoins.
Au niveau des
MRC, au niveau des tables de MRC, il y a de plus en plus de... en fait, même,
je pense que c'est la quasi-totalité, maintenant, qui ont des groupes, des
regroupements de groupes communautaires qui sont associés à cette démarche-là
d'immigration, donc qui sont capables de parler, cette structuration-là.
En fait, notre message, c'est de connecter ce
qui se fait en bas... ce qui s'est fait depuis la disparition des CRE, et tout ça, que les MRC, les tables ont pris la
relève et avec un peu de moyens, même pas de moyens, là, donc, elles se sont organisées,
il s'est bâti des liens, il s'est bâti des expériences, des choses
intéressantes, c'est de prendre ça, c'est de connecter
ça avec l'action du ministère, avec un ministère présent en région. Grosso
modo, c'est ce qu'on dit, pour que ça soit encore plus efficace. Parce qu'il y
a des sous qui s'investissent, mais nous, on pense que ça peut aller encore
plus loin.
Et les gens, on le voit, les gens se... les
élus, et tout ça, investissent aussi directement à partir de leur budget là-dedans. Ils mettent des fonds, ils mettent des
ressources, ils utilisent des fonds qui sont à leur disposition pour réaliser des expériences. On le voit un peu
partout. Tantôt, je faisais référence
à Centre-du-Québec, la MRC de Bécancour au complet, dans une démarche collective de...
tout ça, qui implique les groupes. Donc, les expériences se multiplient. C'est ça, notre message aujourd'hui.
Mme Anglade : Alors, merci de la réponse. Tout à l'heure vous preniez l'exemple de Philippins qui viennent, qui sont en grand
nombre dans une ville en particulier. On voit dans certains endroits des
autobus de personnes qui viennent de Montréal, qui font une heure de trajet, deux heures de
trajet, qui viennent travailler dans des localités, qui repartent à la fin
de la journée. Ça se vit présentement, ça se vit présentement au Québec. Pas
certaine que ce soit la bonne approche, à terme, pas certaine du tout que ce
soit la bonne approche. J'aimerais vous entendre là-dessus puis de voir comment
est-ce qu'on est... Parce que des entreprises sont rendues à faire ça aujourd'hui,
hein, comme vous le savez.
M. Soucy
(Yvon) : Non, non. Puis effectivement, si on pouvait accueillir ces gens-là plutôt dans nos communautés, puis, encore une fois, j'ai l'impression de me répéter, mais bien les
accueillir, bien les intégrer puis faire
en sorte que ça ne soit pas juste des
travailleurs pour répondre à des besoins, mais des gens qui
vont habiter, qui vont vivre, qui vont contribuer à la vie de la communauté,
je pense que ce serait bien.
• (15 h 40) •
M. Châteauvert
(Pierre) : Si vous
permettez, je pourrais ajouter qu'aussi, ces travailleurs-là, ces gens-là,
souvent, c'est dans des conditions
qui sont misérables et qui ne sont pas toujours intéressantes. À ce moment-là, nous autres,
ce qu'on vous a dit tout à l'heure, ce que M. Soucy vous transmettait comme message, c'est qu'on
désire que ça soit des membres de la communauté qui viennent travailler,
oeuvrer et contribuer à la communauté.
On le voit,
les gens de Sainte-Françoise, tantôt, l'exemple, ils ont été prendre des
réfugiés syriens qui étaient des agriculteurs,
qu'on est en train d'établir dans un quartier urbain, et ils les ont amenés en
région. Passez par Sainte-Françoise, allez voir, l'école est pleine, et il n'y
a plus de résidences de disponibles parce qu'ils s'en viennent tous là. Et ça
profite aux agriculteurs du coin.
Puis c'est des grosses entreprises agricoles de toutes natures, toutes
productions. Et ces gens-là sont en
train de devenir des citoyens. Ils sont déjà là, là, mais ils savent... avec
l'appartenance, et tout ça. Puis ils ont un fun noir dans ce coin-là, là, c'est
le cas de le dire, ils ont du fun, ce n'est pas possible, là. Et, le préfet,
là, qui est préfet puis qui est maire, c'est d'une fierté totale, cette
affaire-là, là. C'est vraiment une expérience extraordinaire.
Donc, c'est
ça que nous autres, on pense. Parce que, ces gens-là, je pense qu'en quelque
part ils sont exploités aussi. Puis il faut absolument, je pense, effectivement,
intervenir.
Mme Anglade : Merci. Je sais que le
député de Nelligan a plusieurs questions.
La Présidente (Mme Chassé) : ...le
député de Nelligan à prendre la parole.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça fait
plaisir.
M. Derraji : Merci pour votre intervention et votre rapport.
Écoutez, j'ai une inquiétude et je vais vous partager mon inquiétude. En fait, je me suis inspiré de l'intervention du collègue de Beauce-Sud qui nous a parlé d'une multitude d'enjeux que
vous vivez notamment par
rapport au manque de main-d'oeuvre et de personnel aussi. Et je vous comprends, parce que, là, maintenant,
vous allez avoir d'autres tâches supplémentaires pour nous accompagner et accompagner
la régionalisation de l'immigration.
Parlant de l'intégration, je ne vais pas
aborder, pour une fois, le volet économique, je pense que les MRC, vous comprenez très
bien, vous êtes en contact avec...
via les CLD, vos services de développement économique de vos régions respectives. Mais ce matin
nous avons eu une excellente présentation d'un organisme qui travaille avec le ministère,
qui nous a présenté le choc d'intégration, notamment
le choc discriminatoire, le choc culturel. Et je vais vous présenter un cas concret, c'est juste pour vous dire :
Est-ce que vous avez pensé à ça? Mais, si vous n'avez pas pensé à ça, c'est le
moment de le demander au ministère, d'être accompagné.
L'exemple
parfait qui me vient à l'esprit, c'est l'exemple de Shawinigan, où CGI a fait un effort énorme de ramener
des ingénieurs et où on a vu... quand les
gens, ils ont commencé à demander le fait d'avoir un lieu de culte, on a vu ce
qui s'est passé au niveau de la ville. On peut penser aussi aux cimetières
et les problèmes que... la pression que ça met sur les conseils de ville. Et donc on veut... On sait la
volonté du ministère, c'est l'arrimage, c'est l'accompagnement, mais on oublie que parfois il y a des paramètres qu'on ne
contrôle pas.
Et ma question,
elle est très simple. Les PME n'ont pas les moyens d'accompagner la diversité,
elles n'ont pas de département de ressources humaines. Est-ce que les
villes, aujourd'hui, et les MRC, et les préfets sont capables d'accompagner et
de régler ce genre de problématique?
Mme Drolet (Maryse) : Bien, moi,
j'ai envie de vous partager différentes expériences qu'on a vues dans plusieurs MRC du Québec : Rocher-Percé,
Portes ouvertes sur le lac au Lac-Saint-Jean. En fait, ça illustre les propos
de M. Soucy : Quand on travaille
ensemble, on peut faire des choses merveilleuses. Et, les MRC, ce qu'elles
souhaitent, c'est travailler,
justement, avec les organismes du milieu, notamment les carrefours
jeunesse-emploi, les différentes organisations communautaires qui sont particulières, qui ne sont pas uniformes et qui
travaillent avec leurs couleurs, dans les territoires, à faire en sorte
que les communautés se connaissent.
La clé pour que, justement, on accueille à bras
ouverts les communautés qui viennent chez nous, c'est de mieux se connaître et c'est tout simple. Et les
différentes organisations prévoient différentes activités, des soupers, des
dîners où on se partage nos cultures. Et, une fois qu'on se connaît
mieux, les demandes particulières qui nous arrivent, elles sont beaucoup mieux
accueillies et beaucoup mieux respectées aussi. Alors, il y a plein d'exemples
comme ça.
C'est sûr
qu'on ramène toujours les situations qui ont été plus difficiles ou mal vécues.
Mais les exemples à succès, il y a en
a plein, plein, plein, au Québec, et c'est sur ces exemples-là qu'on dépose nos
recommandations. Il faut qu'on travaille ensemble, et au contraire,
justement, on va sauver énormément de sous et d'énergie à mieux se concerter,
arrimer nos interventions et faire en sorte que, justement, les gens qu'on
accueille soient heureux du choix qu'elles auront fait de venir en région. Pour maintenir, vous avez vu,
dans les chiffres qu'on a sortis, je pense, qu'on a besoin d'équilibrer un petit
peu l'accueil des personnes qui viennent à l'étranger dans nos belles régions
du Québec.
M.
Derraji : Je n'ai aucun doute par rapport à ça. Et, écoutez, moi-même,
j'ai eu l'occasion de parcourir le Québec en long et en large. Mais nous avons des faits devant nous. Si on suit
la stratégie de régionalisation, qu'on veut tous la réussir, c'est que, si on veut que les municipalités, les
MRC, les préfets jouent un rôle très important, moi, à mon avis, je pense que
c'est une charge supplémentaire au-delà de ce que vous avez au quotidien pour
vos citoyens. C'est ça, mon inquiétude.
M. Soucy (Yvon) :
Bien, écoutez, je pense qu'on est capables de l'assumer. Et puis ça faisait
partie de nos représentations également pour
devenir de véritables gouvernements de proximité puis... Mais, écoutez, on veut
avoir les moyens puis, on l'a dit tantôt, votre collègue l'a dit,
évidemment on ne veut pas non plus se faire transférer des responsabilités sans
avoir le moyen de les assumer. Actuellement, on fait face à une situation, là,
qui est vraiment criante, puis c'est partout
au Québec, là. Puis on est interpelés, les élus, puis on est sans moyen ou sans
solution face à ces problématiques-là. Bien, écoutez, nous, on ne
demande pas mieux que de travailler, de se mettre à l'oeuvre, de travailler,
puis de faire en sorte de bien accueillir
les gens chez nous, là, puis de répondre aux besoins, aux défis que nous avons,
là. Moi, je ne vois pas ça comme un
problème, là. On est capables de le faire. On l'a fait dans une multitude de
dossiers, de responsabilités qui nous ont été confiées au fil des années,
puis on l'a toujours bien assumé, parfois sans moyen, mais, bon... Sans
moyen, je pense qu'on veut un petit peu moins le faire qu'on l'a déjà fait.
M.
Derraji : ...je n'étais pas
en train de vous dire que j'ai un doute. Je vous dis juste de rester au fait
qu'il y a cet enjeu et, justement, avec toutes les demandes qui vont
venir de la régionalisation, de prendre en considération que la rétention est
aussi importante, à part la régionalisation. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Est-ce
que la députée de Bourassa-Sauvé veut prendre la parole?
Mme Robitaille : Oui. Combien de
temps on a?
La Présidente (Mme Chassé) :
3 min 30 s.
Mme Robitaille : Merci à tous les
trois. Très intéressant. Écoutez, j'ai passé mes étés à Kamouraska, il y a plusieurs
années, et à cette époque-là je ne pouvais pas imaginer qu'il y avait
475 personnes de 25 nationalités différentes qui seraient là aujourd'hui.
Ça doit être un paysage très différent de quand j'étais petite. Mais je me
demandais : À Kamouraska, par exemple, qui fait la coordination de l'intégration?
Est-ce que c'est l'entreprise? Est-ce que c'est la municipalité? Est-ce que
c'est les organismes communautaires? Comment ça fonctionne?
M.
Soucy (Yvon) : Bien, actuellement, là, comme je vous le disais, on commence à assurer une certaine coordination à la MRC. On a un comité immigration qui rassemble les différentes organisations. Puis, bien, on était plus, officiellement,
dans la phase mobilisation, là. Là, on veut vraiment s'en aller vers la phase
accueil, intégration. Donc, évidemment, le carrefour
jeunesse-emploi, avec les projections 16-35, chez nous, en fait beaucoup.
Le cégep de La Pocatière... je ne l'ai pas
dit, on a la chance d'avoir un cégep en région, le cégep de La Pocatière
accueille quand même une clientèle immigrante assez importante.
Probablement, c'est un peu ce qui fait en sorte qu'on a beaucoup
d'immigrants également qui choisissent de
vivre chez nous par la suite. Donc, toutes les organisations, le réseau de la
santé, évidemment, les entreprises qui accueillent,
toutes les... les organisations, pardon, actuellement, assument un
certain rôle. Mais, la coordination,
on est au début du processus,
la coordination commence à se faire à la MRC actuellement.
Mme Robitaille : Au niveau de la
MRC?
M. Soucy (Yvon) :
Oui.
Mme Robitaille : Puis qu'est-ce que
vous souhaiteriez, dans un monde idéal, là? Quel devrait être le rôle du ministère
de l'Immigration dans ça? Est-ce qu'il devrait prendre un rôle de leadership ou
vous donner les moyens pour faire... pour prendre le leadership dans votre
région, pour l'intégration?
M.
Soucy (Yvon) : Bien, évidemment,
là, comme je vous le disais, il doit y avoir certainement une coordination régionale, là, des programmes
puis les directions régionales, comme qu'on en discutait dans notre mémoire,
mais à l'échelle des territoires de MRC. Comme chez nous, actuellement,
une personne, on se rend compte que ce n'est peut-être pas suffisant, là. Pour
répondre aux besoins chez nous, là, je vous dirais, juste en coordination,
toutes les activités de mobilisation, accueil, intégration, je pense qu'on
aurait deux personnes à la MRC puis on n'en aurait pas de trop, là. Puis je
vois difficilement, en tout cas pour notre territoire, là, comment ça pourrait
être ailleurs qu'à l'échelle de la MRC. Mais
là, par la suite, c'est sûr que nos municipalités... je vous parlais de
Saint-Alexandre-de-Kamouraska qui accueille beaucoup d'immigrants,
nos deux villes, Saint-Pascal, La Pocatière, ont leurs initiatives
puis ont leurs actions, là. Donc, c'est un travail collectif...
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste une minute.
M. Soucy (Yvon) :
C'est un travail collectif, tout ça.
Mme Robitaille : Merci.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) : Ah!
Une voix : Bien, écoutez...
M. Soucy (Yvon) :
...revenir au Kamouraska, pas de problème. Vous êtes tous les bienvenus.
Mme
Robitaille : Certainement. Cet été, je vais venir faire un tour, oui, oui, sans faute, oui. Je
tiens mes promesses. Je tiens mes promesses.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci. J'invite maintenant la députée de Marie-Victorin à prendre la parole.
• (15 h 50) •
Mme Fournier : Merci, Mme la Présidente.
Merci à vous trois pour la présentation. J'ai bien aimé
que vous puissiez nous parler davantage de la nécessaire régionalisation de
l'immigration. Vous avez abordé la question des bureaux régionaux de
l'immigration. On sait que ça avait fait couler beaucoup d'encre dans les
dernières années, les bureaux, qui avaient
été abolis par le précédent gouvernement. Avant, finalement, la fin du mandat,
annoncer en grande pompe que les bureaux seraient réouverts... Mais,
bon, il n'est jamais trop tard pour bien faire. Donc, tant mieux.
Je
voulais savoir où c'en était dans les régions que vous représentez, justement.
On a parlé tantôt des agents qui étaient présents, mais est-ce que,
formellement, il va y avoir des nouveaux bureaux, là, qui seront ouverts à
court terme?
M. Soucy (Yvon) :
Je vais laisser M. Châteauvert répondre, si...
M.
Châteauvert (Pierre) : Bien,
en fait, effectivement, le ministère est en train de multiplier les intervenants en région, là, pour les rencontrer, pour voir. La première
phase, ça a été de se présenter, hein, parce que c'étaient des nouveaux postes
qu'on a créés. Ça a commencé il y a un an et demi, je crois, quelque chose
comme ça, la prise de connaissance. Et aussi ces gens-là avaient aussi à entrer
en contact avec les autres membres de la CAR, des conférences administratives
régionales. Donc, ils avaient à se bâtir un réseau, de partir la roue, comme on
dit.
Il y a
des liens qui se font, mais les demandes sont tellement importantes que je
pense que nous, on croit que ça prend plus de ressources. Parce que le
message qu'on vous lançait tout à l'heure, c'est que la décentralisation, ça
prend aussi une déconcentration, un accompagnement. Le ministère a une entente
qui fonctionne bien, là, avec Emploi-Québec, ça fait très longtemps que ça existe, là. Effectivement, si le ministère, tu sais, passe par Emploi-Québec, bien, nous,
ce qu'on a besoin, comme on disait, c'était
de la flexibilité, en fait, un accompagnement, de la discussion
et de la flexibilité pour
adapter les mesures pour mieux répondre aux territoires... ou aux communautés.
C'est ce qu'on a besoin.
Mais évidemment
moi, je vais dire que ce qu'on voit aujourd'hui, là, puis ce qu'on voyait il y a
deux ans, il y a un changement. C'est clair qu'il y a une
volonté de vouloir retourner sur le territoire. Parce que ce qui s'est passé,
ça a été difficile, on
ne se le cachera pas, ça a été difficile. De reprendre le flambeau après des
années de traditions, c'est-à-dire
de liens avec les groupes communautaires à travers les CRE, les conférences régionales des élus de l'époque, ça n'a pas été simple, ça n'a pas été simple. Mais donc, là,
les gens prennent la relève, reprennent le flambeau, et on aimerait beaucoup une présence du ministère.
Mme
Fournier : Donc, les
intentions sont là, il y a de la volonté, mais il manque encore les ressources.
C'est ce que je comprends.
M. Châteauvert (Pierre) : Bien, tu
sais, on est au début, là. Effectivement, il faut commencer à travailler. Puis
là il y a un projet de loi, puis c'est ça, nos propositions pour aller encore
plus loin.
Mme Fournier : Sinon, en
termes de ressources, est-ce que vous incluez également les ressources
financières? Est-ce que vous avez des attentes à cet égard-là dans le budget
qui sera déposé le 21 mars?
M.
Soucy (Yvon) : Oui, absolument,
là. Puis c'est mentionné à plusieurs
reprises dans notre mémoire,
là, on a besoin des ressources financières pour bien accomplir ces
mandats.
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste moins d'une minute.
M. Soucy (Yvon) :
Oui, puis des ententes à long terme, évidemment, là.
Mme
Fournier : J'imagine
que c'est la même chose aussi pour, bon, les organismes
qui sont sur le territoire de vos municipalités, pour toute la notion de médiation
interculturelle à laquelle vous faisiez référence, là, tant pour les gens qui
arrivent ici que pour la société d'accueil dans les régions que vous
représentez.
M.
Soucy (Yvon) : Oui. Puis je pense
que, pour la société québécoise, tout ça sera gagnant, là, puis autant pour
les régions du Québec qui en ont besoin.
Mme Fournier : D'accord.
Merci.
M. Soucy (Yvon) :
Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci.
J'invite maintenant le député de Laurier-Dorion à prendre la parole.
M.
Fontecilla : Bonjour, messieurs dame. À la page 11 de votre
mémoire, vous demandez que le service d'accueil et de francisation soit
adapté avec... qu'il se fasse localement. Est-ce que vous en demandez la
coordination, du service d'accueil de
francisation? Mais, plus concrètement, comment vous pensez... quelle formule de
francisation privilégiez-vous?
M.
Châteauvert (Pierre) : En
fait, ce qu'on vous dit comme message, dans une communauté en région, et on le
voit... Et là je fais référence à Sainte-Françoise, c'est des gens qui ne...
L'expérience de Sainte-Françoise... Puis il y en a ailleurs, on a nommé Rocher-Percé, un peu partout
sur le territoire, avec des groupes qui sont là, en termes de francisation, des
groupes populaires et des intervenants aussi qui sont engagés par soit la MRC,
la municipalité ou la... avec l'aide souvent
du ministère ou à partir des propres fonds. C'est très rapide. C'est un milieu
francophone très, tu sais, complet, et avec les échanges, les activités
qui sont organisées, ça se fait de façon très, très rapide.
Mais c'est
certain qu'il y a, comme M. Soucy disait, un défi de coordination, de
structuration. Il y a des intervenants sur le territoire, et ça, ce
qu'on dit, c'est que ça devrait être coordonné, la MRC, la table des MRC, et
tout ça, puis de structurer. Mais c'est
certain que ce n'est pas les municipalités et ce n'est pas les MRC qui peuvent
faire ça, ce sont des groupes, ce
sont les commissions scolaires, des fois c'est le soir, avec le professeur,
qu'on demande, là, parce que le professeur qui enseigne aux enfants, bien, le soir, il va... et souvent, aussi,
avec la collaboration des entreprises, des entreprises locales, tout ça
se fait. C'est une coopération puis c'est une collaboration de tout le monde
qui se met ensemble pour arriver.
Parce que le
besoin... Le propriétaire de l'entreprise, l'agriculteur qui a besoin d'un
réfugié, de la force de travail pour faire fonctionner sa ferme, il
prend aussi les moyens. Ils mettent en place... Dans une région, il y a une
ferme de coopérative, justement, pour pallier
aux autres problèmes, des problèmes de ces agriculteurs, tu sais, qui ne sont
pas nécessairement juste agricoles, là, tu sais, tout ce qui est à côté.
Donc, ces gens-là s'organisent pour accompagner les travailleurs qui sont saisonniers, les travailleurs, les immigrants, des
choses comme ça, pour la francisation. Donc, ils font appel à toutes les ressources disponibles sur le
territoire puis ils s'arrangent pour que ça fonctionne. Mais il faudrait aller
plus loin.
M.
Soucy (Yvon) : Si vous le
permettez, j'ai repris souvent une phrase de mon président, que j'apprécie. En
fait, je pense que, si on accueille des immigrants en région puis dans des
régions francophones comme la nôtre, là, des problèmes de francisation, là, au bout de quelques années,
il n'y en aura pas, là, il n'y en aura pas. Puis en plus, bien, peut-être
qu'ils gagneront un accent coloré
comme l'accent des Îles, ou peu importe, là — je viens de la Gaspésie. Mais on pense que,
dans un milieu francophone comme chez
nous, pratiquement à 100 %, là, c'est beaucoup plus facile pour une
personne immigrante de s'intégrer dans la communauté, de se franciser
facilement, parce que les occasions sont beaucoup plus grandes.
M. Fontecilla : Le projet
de loi prévoit que le ministre peut imposer des tests de valeurs et
linguistiques. Est-ce que vous pensez que c'est une bonne façon de
retenir la main-d'oeuvre en région?
M. Soucy (Yvon) : Bien, comme je vous le disais, moi, je pense bien
que, si quelqu'un arrive au Bas-Saint-Laurent puis qu'il a encore des problèmes avec la langue au bout de trois ans,
là, ce n'est pas parce qu'il n'aura pas essayé, là. Ça devrait bien
aller. Puis, je pense, chez nous... bien, écoutez, je ne pense pas...
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
M. Soucy (Yvon) : ...oui, oui, je ne pense pas qu'actuellement ça
cause problème, là. Les gens qui arrivent chez nous, dans des communautés
francophones, la francisation se fait, selon moi, beaucoup plus facilement.
C'est comprenable. À Montréal, bien, les communautés sont présentes, les
gens se retrouvent. Puis je pense que je ferais la même chose si j'étais dans un autre pays puis que j'avais la
chance d'être dans ma communauté, j'aurais plus de difficulté à apprendre la
langue du pays que si je m'en vais en région, dans un autre pays.
M.
Fontecilla : Merci.
M.
Soucy (Yvon) : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci beaucoup. Je vous remercie pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Et je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place. Merci.
(Suspension de la séance à
15 h 57)
(Reprise à 15 h 59)
La Présidente (Mme
Chassé) : Je vous invite à reprendre place. Merci.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Accueil liaison pour arrivants. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons par
la suite à la période des échanges avec les membres de la commission. À une minute de la fin, comme je
vous ai dit tantôt, je vais vous faire une indication. Et je vous invite donc
à vous présenter puis à débuter.
Accueil liaison pour arrivants (ALPA)
M. Mallette (Éric) : Avec plaisir. Mme la Présidente, M. le ministre,
Mmes et MM. les membres de la commission. Mon nom est Éric Mallette, et je suis membre du conseil d'administration
d'ALPA, Accueil liaison pour arrivants. Et je suis accompagné de René
Fréchette, notre directeur général.
• (16 heures) •
Je veux d'abord vous
remercier de nous avoir invités. C'est un bel honneur. Et nos commentaires et
nos recommandations sont ceux d'une organisation qui travaille tous les jours
avec les personnes immigrantes et les employeurs
sur le terrain. ALPA est situé dans l'est de Montréal, près du Stade
olympique. Chaque année, notre excellente équipe de
22 spécialistes, dont plusieurs sont issus de la diversité, accompagne plusieurs
milliers de nouveaux arrivants de l'ensemble
du territoire de la métropole.
ALPA parle 10 langues. Notre offre intégrée de services couvre quatre volets :
l'accueil et l'intégration, la francisation,
l'emploi, la régionalisation. Nous fêterons notre 35e anniversaire
d'existence cette année. Tant à Montréal que pour les régions du Québec,
ALPA est un partenaire important dans le succès du parcours d'intégration des
nouveaux arrivants. Je parie que des familles desservies par ALPA vivent dans
vos circonscriptions.
Comme
membre du conseil d'administration, je m'implique dans cette cause parce que
j'y crois profondément et bien sincèrement. Depuis 10 ans, en plus de
faire ALPA, je suis aussi associé dans un cabinet de recrutement et de
formation à Montréal, La Tête
chercheuse. Je constate sur le terrain à quel point la tâche est complexe pour
les immigrants et aussi pour les
employeurs qui veulent les accueillir ou qui les accueillent. Le C.A.
multidimensionnel d'ALPA est
diversifié et très solide. Les
compétences des sept membres sont variées et complémentaires, leur provenance
est tant institutionnelle que
corporative. Nous demeurons très vigilants sur les meilleures pratiques de
gouvernance et avons récemment adopté une planification stratégique triennale.
Nous nous sommes aussi dotés d'une vision, soit celle de devenir la référence
au Québec en matière des services aux personnes immigrantes, rien de moins.
La
planification stratégique
vise plusieurs objectifs qui sont spécifiques, mesurables et ancrés dans un
échéancier. J'en souligne deux :
l'évaluation en profondeur et la révision des programmes dans un souci
d'amélioration continue et un rapprochement avec les employeurs. Notre
organisation est agile. Nous gardons l'oeil ouvert pour toujours mieux répondre
aux besoins des nouveaux arrivants. Tous nos dossiers sont traités
électroniquement pour mieux suivre le parcours des participants. Nous offrons des heures d'ouverture plus étendues le soir
et les samedis, incluant les classes de français. Et on s'implique dans de
nombreux comités du milieu des affaires, du milieu communautaire et dans les
réseaux spécialisés en immigration. Bref, notre démarche est sérieuse et
appuyée par des experts de divers secteurs d'activité. Pour vous présenter les commentaires et les recommandations
d'ALPA sur le projet de loi n° 9, je laisse la parole à René Fréchette, directeur
général.
M. Fréchette
(René) : Merci. Merci de votre accueil. J'aborderai trois thèmes, tous
avec la perspective de l'engagement partagé : d'abord, l'engagement
individuel, puis l'engagement collectif, et enfin je vais vous parler de
régionalisation. Ça va faire un beau lien avec ce que vous avez entendu avant
moi.
L'engagement
partagé implique d'abord la personne immigrante. Il vise à renforcer son
pouvoir d'agir pour qu'elle puisse
participer pleinement dans toutes les sphères de la vie en société. Pour que
l'intégration réussisse, le modèle exige une implication de la société
d'accueil, qui doit aussi s'engager pleinement.
Parlons
d'abord de l'engagement individuel de chaque personne immigrante à prendre part
à la vie québécoise. À sa première visite chez ALPA, chaque nouvel arrivant
rencontre un membre de notre équipe qui évalue ses besoins en s'assurant
de couvrir à la fois les dimensions
économique, linguistique, culturelle, citoyenne et communautaire. ALPA compte
35 ans d'expérience dans le développement de tels parcours. Nous
tenons à renforcer l'importance de le réviser et de l'adapter tout au long du parcours d'immigration. Ça permet
trois choses. Ça permet de tenir compte des besoins spécifiques de la personne
et d'offrir un soutien plus efficace s'il y a des besoins accrus. Ça permet
aussi de couvrir les dimensions de la vie
adulte, comme la maîtrise du français, comprendre le marché du travail ou
encore la compréhension des valeurs et des codes de la vie quotidienne au Québec. Aussi, ça favorise le sentiment
d'appartenance au Québec en offrant les clés de la réussite aux
personnes immigrantes.
À
cet égard, ALPA salue les conclusions du rapport de la Vérificatrice générale
du Québec et l'article 4, sixième point du projet de loi, portant
sur le renforcement de la connaissance des besoins pour offrir des services
adaptés et à mesurer la satisfaction de la clientèle quant aux services reçus.
Nous confirmons volontiers notre engagement à toujours
mieux adapter notre offre de services. On le fera à partir de nos analyses,
mais aussi à partir des résultats des études qui seront effectuées par le MIDI, comme mentionné au neuvième point de
l'article 3 du projet de loi. Nous souhaiterions que les données
que recueillera le MIDI soient partagées.
M. Mallette (Éric) : Nous allons maintenant parler d'un point auquel
je crois profondément, il s'agit de l'engagement collectif de la
société, notamment l'engagement des employeurs à soutenir l'intégration des
personnes immigrantes.
Pour
répondre à la nouvelle réalité du marché du travail, un marché où le
recrutement de la main-d'oeuvre qualifiée et le maintien en emploi sont des
défis, ALPA veut se rapprocher des employeurs. C'est un objectif de notre plan
stratégique. L'organisme créera dès
cette année une nouvelle direction de développement et services aux
entreprises. Une équipe de conseillers de confiance en diversité accompagnera
donc les employeurs dans une démarche personnalisée en s'appuyant sur des diagnostics rigoureux. Pour ce projet
pilote, nous sommes en lien avec le Conseil du patronat du Québec, qui nous
confirme que, même si des boîtes à outils
génériques existent, les employeurs veulent parler à des conseillers qui comprennent
leurs besoins spécifiques et qui sont prêts
à les épauler dans leurs démarches. On pourra ainsi démystifier, par exemple, les
questions de reconnaissance des compétences, de formation et d'expérience de
travail, offrir des services de médiation interculturelle pour favoriser le
maintien en emploi et développer une offre de formation. Cette initiative
d'ALPA permettra aussi de favoriser un meilleur arrimage entre les besoins de
l'employeur et les compétences des personnes immigrantes
déjà établies au Québec, appuyer les employeurs, notamment les PME, qui
généralement n'ont pas de service des ressources humaines, pour mieux
gérer la diversité et prévenir la discrimination. Par exemple, l'implantation
de programmes de parrainage et de mentorat interculturel a prouvé son
efficacité en milieu de travail.
ALPA
salue l'orientation préconisée dans l'article 10 du projet de loi
n° 9, qui permet au gouvernement d'imposer par règlement des conditions aux employeurs pour le recrutement de
personnes immigrantes ou pour la validation d'une offre d'emploi. À titre d'exemple, le gouvernement
a récemment obligé les entreprises à se doter de politiques sur la prévention
du harcèlement. Avec un accompagnement, les
employeurs ont pu se préparer adéquatement à cette transition. Une approche similaire
ne pourrait-elle pas s'appliquer en gestion de la diversité?
M. Fréchette
(René) : Enfin, je vous parle de la régionalisation de l'immigration,
qui doit allier l'engagement individuel et l'engagement collectif pour réussir.
ALPA reconnaît que la
présence des personnes immigrantes à l'extérieur de la région de Montréal
pourrait être plus élevée si les conditions
propices étaient réunies. Comment soupeser les avantages et inconvénients d'une
approche qui cherche à encourager,
comparativement à une approche que nous voyons comme contraignante à
l'article 9 du projet de loi? Notre expérience sur le terrain
démontre que l'engagement forcé donne rarement des résultats positifs à long
terme.
Je citerai trois
exemples de mesures auxquelles on pourrait penser pour améliorer les chances de
succès de la régionalisation :
améliorer l'information disponible à l'étranger sur les régions du Québec pour
contrer la méconnaissance des réalités régionales et mettre en place un
accompagnement personnalisé dès l'étranger; s'assurer de la disponibilité des services d'accompagnement dans toutes les
régions du Québec où l'offre varie; enfin, poursuivre les efforts amorcés
pour développer des pratiques innovantes, comme le projet pilote du MIDI en
cours à Montréal en ce moment en concertation avec trois organismes, dont ALPA,
et qui travaillent en partenariat avec la Fédération des chambres de commerce du Québec. Les débouchés de ce type de
partenariat sont déjà porteurs, comme les campagnes publicitaires ciblées
ou les séjours exploratoires collés aux besoins des employeurs des régions.
Avant
de conclure, voici une synthèse des recommandations que vous trouvez dans notre
mémoire. Sur l'engagement individuel,
on souhaite offrir un accompagnement personnalisé à la personne immigrante qui
s'engage dans un parcours à partir de l'étranger. Pour être pertinent et
efficace, il est essentiel que ce parcours soit souple, flexible et adapté aux
besoins différenciés de chaque personne,
quels que soient son statut et son parcours migratoire. En ce sens, la mise à
profit de l'expertise éprouvée des organismes spécialisés dans l'accueil et le
soutien à l'intégration est un gage de réussite.
Recommandation sur
l'engagement collectif de la société. Sur le plan collectif, toujours dans une
perspective...
La Présidente
(Mme Chassé) : Simplement vous mentionner qu'il vous reste une
minute.
M. Fréchette
(René) : Une minute? Ah! d'accord.
M. Jolin-Barrette : ...
La Présidente (Mme Chassé) : Le
ministre vous offre ses minutes.
M. Fréchette (René) : Merci
beaucoup, M. Jolin-Barrette. Sur le plan collectif, toujours dans une
perspective d'engagement partagé, le Québec doit mettre tout en oeuvre pour
mieux accompagner les employeurs, lesquels seraient assujettis à de nouvelles conditions, afin que les personnes immigrantes
deviennent une solution encore plus pertinente à la sévère pénurie de
main-d'oeuvre qui sévit actuellement.
Dernière
recommandation, l'importance des enjeux de régionalisation commande un effort
accru assorti d'investissement de ressources et de moyens conséquents dans toutes
les régions du Québec. Pour réussir, la mobilisation et la
concertation de tous les acteurs s'imposent.
• (16 h 10) •
M.
Mallette (Éric) : Fort de
35 ans d'expérience, donc — et
j'achève, c'est promis — ALPA
a contribué au succès du parcours de milliers de personnes immigrantes
devenues des citoyennes et des citoyens du Québec. L'emploi étant un volet important du projet de loi, nous croyons qu'il faut garder une image d'employeur de choix pour le Québec
afin qu'il rayonne à travers le monde. Il faut assurer que les personnes
immigrantes voient le Québec comme une société inclusive où l'on peut
réaliser ses plus belles ambitions. Soyons là assurés qu'ils passeront ensuite
le mot.
Chez ALPA,
nous souhaitons collaborer avec vous dans le cadre de ce vaste chantier qui
vise à mettre en place des conditions qui favoriseront une intégration
réussie. Quand tous les acteurs de la société s'engagent pleinement de façon
collaborative, tout le monde y gagne.
Je vous remercie
de votre écoute. Nous espérons pouvoir alimenter vos réflexions. Et, bien
sincèrement, merci pour le travail
que vous faites au sein de cette commission. Le chasseur de têtes en moi sait que ça ne doit
pas toujours être facile. Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je vous
remercie pour votre intéressant exposé. Nous allons maintenant
débuter la période des échanges. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Fréchette, M. Mallette, merci beaucoup pour votre
présentation. D'entrée de jeu, je tiens à vous remercier aussi puis à
vous féliciter pour le travail que vous faites. Donc, j'ai compris : 22 professionnels qui sont chez vous qui
travaillent à temps plein, plus de 1 000 personnes en francisation
par année dans une trentaine de classes aussi. Honnêtement, ça, c'est un
bel exemple du travail qui est fait par les organismes en collaboration avec le ministère, puis, moi, c'est
ce que je veux qu'on fasse, que tous les partenaires puissent travailler en
collaboration. Dans le projet de loi
n° 9, ce qu'on fait, c'est que le ministère de l'Immigration vient
coordonner l'action des ministères,
qu'on parle d'une seule voix, maintenant, qu'il y ait un ministère d'imputable
pour l'immigration, l'intégration en
francisation. Puis on veut continuer à collaborer avec les partenaires du
réseau, alors, qu'ils soient institutionnels, comme vous, qu'ils soient
communautaires. Donc, ne lâchez pas votre bon travail, on continue.
Sur la
question de la régionalisation, vous nous recommandez, à la
recommandation 3, de prendre des campagnes de sensibilisation pour l'intégration puis sensibiliser la communauté
d'accueil à la régionalisation. Je suis d'accord avec vous. Encore faut-il qu'on réussisse à amener les
gens dans les différentes régions. Avez-vous des suggestions de stratégie
pour réussir à accompagner les gens en
région? C'est sûr qu'avec le nouveau système, là — je ne sais pas si vous étiez là tout à
l'heure — ce que
je disais, c'est qu'on souhaite donner, entre autres, la priorité aux personnes
immigrantes, avec le nouveau système, qui vont avoir une offre d'emploi
validée en région puis faire en sorte que, lorsqu'ils ont l'emploi, il y a un maillage, on les envoie en région
directement. Mais, pour maintenir, là, les gens en région ou même pour les
inciter... Tantôt, les gens, parmi
vos prédécesseurs qui sont venus, ils disaient, bon : Il y a...
11,4 % de taux de chômage chez les immigrants de moins de cinq ans, supposons, dans la région de Montréal. Comment
on fait pour vendre les régions, pour inviter les gens en région?
M.
Fréchette (René) : Il y a plusieurs façons de l'envisager, cette
situation-là. Quand on référait aux campagnes de sensibilisation... On parlait aux campagnes de sensibilisation dans
les milieux d'accueil. On a beaucoup parlé de l'emploi comme vecteur principal d'intégration. C'est sûr
que, quand le frigo est vide, il n'y a pas grand monde qui a le goût de rester nulle part. Donc, l'emploi, c'est la base.
Maintenant, la régionalisation, c'est souvent une situation qui se vit en famille.
Il faut donc s'assurer qu'il y a des ressources compétentes pour faire de
l'accompagnement spécialisé dans les milieux d'accueil.
Puis, quand je mentionnais tout à l'heure que
l'offre varie, bien, elle varie dans la taille des organisations. Bon, ALPA, on a 22 spécialistes dans les différents
secteurs dont on vous a parlé, donc c'est sûr que, nous, ça fait 35 ans
qu'on vit tous les jours des
situations d'accueil. Dans les régions, il n'y a pas nécessairement les
infrastructures, en termes de connaissance de l'immigration. Donc, il
peut y avoir des organismes famille, il peut y avoir des organismes jeunesse, mais c'est une tout autre réalité que
d'accompagner une famille issue de l'immigration que juste une famille qui est
partie de la municipalité d'à côté, puis qui vient s'installer, puis qui ne
connaît pas trop les services. Donc, il y a les besoins de services dans
différentes langues.
Je sais que
vous en avez parlé abondamment, de la francisation. La décision de familles
d'aller s'installer en région... Il faut que tout le monde soit capable
de se franciser. Les enfants vont à l'école, le père va au travail. Si l'épouse
reste à la maison,
bien, ça, ça va peut-être faire en sorte que, six mois plus tard, s'il n'y a
personne qui lui adresse la parole et qu'elle
n'a pas encore commencé à se franciser, elle va être la première à dire :
Chéri, tu as beau avoir un emploi, mais, moi, c'est fini; on reprend les
affaires et on s'en va à Montréal parce que, là-bas, je peux parler à des gens
et, peut-être, je vais pouvoir me franciser, si l'offre n'est pas bien
structurée dans la région où ils sont. Donc, des services pertinents, des
campagnes de sensibilisation des milieux d'accueil.
La
concertation des milieux d'accueil. Les employeurs ne peuvent pas porter sur
leurs épaules le poids de l'intégration. Ils en ont trop. L'autre jour, j'ai un employeur qui est chez moi, dans
mon bureau, et qui me dit : Écoutez, il va-tu falloir que j'aille à la caisse populaire avec la famille?
Ma réponse fut : Peut-être pas vous, mais il va falloir qu'il y ait
quelqu'un qui y aille. Et il faut
qu'on soit capable d'outiller les milieux d'accueil puis que les gens
comprennent que... Puis c'est toujours l'exemple que je donne, là. Il y
a peut-être des Tremblay puis des Gagnon dans la salle, là, mais, si vous vous
appelez Tremblay et Gagnon et que vous êtes
installés dans la région, il n'y a pas personne qui a besoin de vous expliquer
comment ça marche, la caisse populaire. Mais, si vous arrivez
d'ailleurs, il faut qu'il y ait des ressources compétentes.
Donc,
pour moi, l'enjeu, c'est que, les gens qui arrivent en région, on leur offre un
emploi puis on se dit : Bien, regarde, tu as une job, tu devrais être content. Bien, ça ne marche pas, juste la
job. Ça prend plus que ça. Et, toutes ces facettes-là, c'est le milieu qui doit se concerter. Il y en a
eu, des expériences à succès à travers le Québec. Je pense à l'Abitibi, entre
autres, où il y a eu des organismes qui se
sont concertés avec tout le milieu. Et, quand ta job est menacée puis que tu te
dis : Pour que notre entreprise
survive, ça va prendre de la main-d'oeuvre supplémentaire — on est rendus là, vous l'entendez depuis le début de la commission — et qu'il y a des immigrants qui peuvent
faire partie de la solution... Mais, s'ils arrivent, il faut qu'on les
garde, puis là les gens vont commencer à se mobiliser.
Donc,
moi, je pense que c'est l'effort... Quand je parlais d'engagement collectif, de
concertation des milieux, c'est des
moyens qui existent, puis il y en a d'autres qu'on suggère dans le mémoire.
Donc, je vous dirais que... Mais le mot à retenir, pour moi, c'est
«concertation».
M. Jolin-Barrette : C'est une responsabilité partagée, dans le fond. La société d'accueil a
autant une responsabilité que la
personne immigrante. Je suis d'accord avec vous là-dessus. C'est pour ça que,
dans le projet de loi n° 9, on veut faire un parcours
d'accompagnement personnalisé déjà dès l'étranger pour faire en sorte que les
gens, ils aient déjà des ressources, puis
que, par la suite, ici, le ministère de l'Immigration retrouve son rôle de
leadership puis participe, fasse un suivi
d'accompagnement, puis qu'on déploie vraiment les ressources pour voir que tout
va bien. Mais il faut travailler avec les organismes comme vous puis il
faut bonifier ça également.
Sur
la question, là... Sur la recommandation sur «l'engagement individuel de chaque
personne immigrante à prendre part activement à la vie québécoise, dans
le respect des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises exprimées par
la charte», là aussi, vous voulez qu'on amène un accompagnement pour faire
connaître le Québec, dans le fond?
M.
Fréchette (René) : Oui, tout à fait. Le parcours personnalisé à partir
de l'étranger, tout à fait une bonne idée parce que plus... mieux on est
préparé, plus il y a de chances, en fait, que le parcours réussisse. Je soulève
peut-être un drapeau en disant qu'il existe
le besoin que ce parcours-là soit modulé en cours de route. Donc, il faut des
experts. Dans notre cas, on se
définit comme des professionnels dans le domaine de l'intégration, donc on est
capables de réajuster ce programme-là, qui devrait être un outil pour
toutes les personnes immigrantes, donc tous, sans exception.
En ce moment, il y a
une étude du BINAM, le bureau de l'immigration de la ville de Montréal, qui
nous dit qu'il y a presque au-delà de
40 % des immigrants qui ignorent tout de l'existence des services
d'accueil et d'intégration, 40 %.
Ça fait que, si vous pensez au chiffre que vous avez entendu tout à l'heure,
qu'il y a... je ne me souviens pas du chiffre qu'on vous a donné, du pourcentage d'immigrants qui s'installent à
Montréal versus les régions, ça fait beaucoup de gens qui sont laissés
dans le noir et qui doivent... qui perdent du temps. C'est ça, l'enjeu
principal, c'est qu'il y a une perte de
temps colossale parce qu'on ne sait pas où aller. On cogne à des portes qui ne
sont pas les bonnes, on prend des jobs qui
ne sont pas les bonnes parce qu'on a été mal conseillé, notre voisin, notre
cousin, lui, il le sait, hein, parce que lui, il a émigré il y a 10 ans puis il va vous
dire : Regarde, ne fais pas ça, fais comme ce que je te dis, alors que nous,
on se réclame d'être des organismes qui sont capables d'éviter ces
problématiques-là.
Donc, l'accompagnement personnalisé, oui, mais
fait par des spécialistes qui connaissent ça et qui sont capables de
réajuster le tir en cours de route.
• (16 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Sur la question, là, des jumelages interculturels, là, j'aimerais
ça vous entendre un peu plus
là-dessus. Qu'est-ce que vous envisagez par les jumelages interculturels?
M. Fréchette
(René) : Bien, c'est une formule qui existe déjà. Elle existe à Montréal.
Elle existe parfois en région. Tout à l'heure, vous me demandiez un truc pour que ça fonctionne en régionalisation.
Le jumelage interculturel, c'est une
formule qui est éprouvée, qui fonctionne bien. Donc, une famille qui arrive de
l'extérieur et qui est prise sous l'aile d'une famille québécoise et qui se charge... pas dire qu'ils vivent en
commune, là, mais qui se charge d'aller cogner à la porte puis d'éviter que ça
fait cinq jours qu'il n'y a personne qui nous a adressé la parole. Donc, il y a
toujours quelqu'un qui appelle
pour vérifier : Regarde, on s'en va au ballon-balai ce soir... Mon Dieu!
Le ballon-balai, je ne sais pas d'où vient cet exemple-là, mais, en tout cas, on s'en... — ah!
c'est le fun, hein, jouer au ballon-balai? — donc, on s'en va faire du sport, on s'en va voir un spectacle, on s'en va
participer à une activité, venez avec
nous. Et l'épouse, qui, souvent, est celle qui se retrouve à la maison,
bien, il y a quelqu'un qui s'occupe de son intégration. Jumelage interculturel,
c'est dans ce sens-là, les deux cultures se marient.
Puis l'objectif, ce n'est pas d'assimiler les
gens. Ils vont toujours rester des immigrants dans leur coeur, dans le sens
qu'ils vont toujours garder leurs racines, mais ce qu'on veut, c'est qu'ils
s'intègrent à la vie québécoise. On ne leur demande pas
de devenir des Tremblay et des Gagnon, mais on leur demande de vivre en
harmonie avec les Tremblay et les Gagnon de ce monde puis de toutes les autres
familles, les Fréchette, les Mallette et compagnie.
M. Mallette
(Éric) : Si je peux me permettre aussi, M. le ministre, les
équivalents à ça existent en termes de parrainage et de mentorat au sein des
entreprises. Donc, avec le nouveau service qu'on veut offrir, la division de
développement et de services aux entreprises, une des suggestions sera
justement d'encourager ce parrainage et ce mentorat, qui, au-delà des murs de
l'entreprise, peut perdurer également dans la société. Et ça fait que des
individus qui sont parfois bien intégrés au travail réussissent aussi à
s'intégrer en communauté.
M.
Jolin-Barrette : Je vous remercie grandement pour votre présentation.
J'ai des collègues, je sais, qui veulent poser des questions. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le député de
Sainte-Rose à prendre la parole.
M. Skeete :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre présentation.
J'aurais, en fait, deux questions, elles sont peut-être larges, je vous demanderais
d'être succincts, s'il vous plaît, par équité à mes collègues.
Quand vous dites
«interculturalisme», c'est un terme qui est souvent discuté ici, mais
j'aimerais ça entendre votre définition de l'interculturalisme, surtout quand
on le compare au multiculturalisme, s'il vous plaît.
M. Fréchette
(René) : L'interculturalisme amène un véritable échange de cultures.
Chacun reste... garde sa culture en partie, à tout le moins, mais il se
construit des ponts entre les deux. Multiculturalisme, on peut rester chacun
chez nous puis garder... rester qui on est, mais... On vit tous dans la même
société, oui, mais, dans l'interculturalisme, puis, au Québec,
l'interculturalisme s'est teinté du fait français, il y a donc cette
particularité qui amène les gens à devoir
créer des ponts entre les cultures, et là il y a un rapprochement qui
s'effectue dans un contexte d'interculturalisme, dans le contexte
interculturel.
M. Skeete :
Oui. Ça fait que, si je comprends bien ce que vous dites, c'est que, dans un
monde multiculturaliste, dans le fond, on n'a pas grand-chose à faire en tant
que société d'accueil puis la personne qui est reçue, mais, dans
l'interculturalisme, bien là, il y a une obligation et de la société
accueillante et de la personne qui vient.
M. Fréchette
(René) : C'est l'engagement partagé dont je parlais tout à l'heure,
tout à fait.
M. Skeete :
...est l'interculturalisme. Parfait.
M. Fréchette
(René) : Oui, oui, oui, tout à fait.
M. Mallette
(Éric) : ...l'inclusion versus l'intégration aussi.
M. Skeete :
Bien, O.K., je comprends, puis c'est ce que j'avais compris. Merci.
La
deuxième question que j'ai, puis j'ai trouvé ça intrigant, je suis
curieux, vous parlez d'imposer des conditions à l'employeur sur la francisation.
Est-ce que vous pouvez élaborer davantage là-dessus?
M.
Fréchette (René) : Dans les faits, c'est dans le projet de loi. Le
projet de loi parle d'imposer des conditions aux employeurs. Ces conditions-là vont être imposées par règlement. Donc,
nous, c'est des pistes qu'on a suggérées en lien, entre autres, avec la francisation, parce qu'au
coeur de tout ce projet de loi il y a un fil conducteur qu'on voit beaucoup,
c'est la volonté de franciser les
personnes immigrantes. Donc, quand on réfère, dans les conditions, et qu'on
apporte des pistes, il y en a, entre
autres, qui parlent d'un certificat de francisation, c'est une des solutions
qu'on propose en lien avec cette notion de conditions du projet de loi.
M.
Skeete : Donc, à votre sens, dans l'esprit de l'interculturalisme,
vous ne voyez pas de problème à ce que, d'un côté, une partie demande quelque chose de la personne qui est reçue,
mais, de l'autre côté, l'employeur qui va en subir aussi un bénéfice, et la société aussi qui va l'accueillir,
a une responsabilité.
M.
Fréchette (René) : C'est la
notion d'engagement partagé. Donc, quand je viens vivre, oui, je m'engage dans un processus où est-ce que j'ai fait le choix
de venir vivre dans une région où on parle français. Donc, oui, c'est
l'engagement partagé, effectivement.
M. Skeete :
Merci beaucoup.
M. Fréchette
(René) : Bienvenue.
La Présidente (Mme Chassé) : Y
a-t-il d'autres interventions de la part du groupe formant... Est-ce que le député
de Beauce-Sud désire prendre la parole?
M. Poulin : Effectivement.
Je peux trouver un sujet, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) : Bien,
j'en ai...
M. Poulin : Moi, il me reste combien
de temps?
La Présidente (Mme Chassé) : Juste
un moment. J'ai l'impression que...
M. Poulin : Ah! je peux les laisser
à la députée de Bellechasse sans problème.
La Présidente (Mme Chassé) : Oui,
hein? Alors, la députée de Bellechasse, je vous invite à prendre la parole.
Mme Lachance : Merci beaucoup. Vous
vous êtes... Merci d'être là, d'abord. C'est très intéressant, la manière dont
vous nous abordez le sujet.
Vous avez traité... Tout à l'heure, vous vous
êtes définis comme des professionnels de l'accueil d'immigrants. Puis on voit,
dans les régions et un peu partout, beaucoup d'initiatives se créer, puis c'est
tant mieux, c'est merveilleux. Par contre,
on a un souci de cohérence, dans tout ça, puis d'arrimage. Est-ce que
vous avez une vision d'une organisation
qui devrait... ou qu'il serait souhaitable
d'avoir dans nos régions pour que tout ça, bien, ça se tienne et puis qu'on
puisse bénéficier de cet apport-là?
M. Fréchette (René) : La mobilisation,
c'est la base de tout, hein? On a entendu les gens de la fédération des
municipalités dire à quel point les milieux se mobilisaient. Donc, c'est le
point de départ. En termes d'organisation, j'aurais tendance à vous dire que ce
qui est difficile pour les personnes immigrantes, c'est de se démêler dans tout
ce qui existe comme services. Et c'est dans
les initiatives qu'on propose, en termes de régionalisation... qu'on suggère,
en fait, pardon, qui est de créer des... La concertation va amener les gens à
centraliser les services. Donc, c'est sûr que, quand l'offre de services, elle est intégrée, puis qu'on
n'a pas besoin d'aller cogner à cinq organisations différentes, c'est beaucoup
plus facilitant dans la démarche
d'intégration. Donc, ma suggestion serait vraiment, par rapport à votre
question, d'amener les regroupements d'individus puis de centraliser les
services. À cet égard-là, le rôle du MIDI, d'agir comme centre de coordination,
en quelque sorte, des ressources, c'est une bonne nouvelle.
Mme Lachance : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce
que le député de Beauce-Sud désire prendre la parole?
M. Poulin : Il restait combien de
temps?
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
resterait six minutes.
M. Poulin : Ah, quand même, hein? Je
peux vous le donner si, tantôt, vous m'en redonnez, par exemple, mais ça, je ne
suis pas certain. Ça, je ne suis pas certain, par exemple, si on refait un
échange.
La Présidente (Mme Chassé) : Les
amis, on va se concentrer sur les échanges avec nos invités.
M. Poulin : Oui, certainement.
Alors, je suis content de vous entendre. Votre présentation a été très claire. Alors, c'est peut-être pour ça que les questions
se font un peu tardives. Mais, quand même, vous avez une expertise depuis
1984, ce qui n'est pas banal et également qui, j'imagine, est assez rare dans
l'univers de tout ce qui se fait en matière d'immigration au Québec depuis
plusieurs années.
Là où je souhaitais vous entendre... Parce qu'on
parle beaucoup de vagues d'immigration, soit la première, la deuxième, la
troisième vague d'immigration. Le projet de loi parle beaucoup de l'élément
présent, où on parle des futurs immigrants
qui viendront collaborer à l'essor économique, social et culturel du Québec.
Mais je veux vous entendre sur les gens qui sont ici depuis longtemps et
qui ont réussi à s'intégrer. Quelle a été, selon vous, la clé de voûte pour favoriser cette immigration-là? Parce que, très
souvent, il y a des gens qui venaient immigrer ici, et l'homme ou la femme
demeurait à la maison pour élever la famille. Donc, ça a apporté certains
retards de francisation. J'ai bien dit : L'homme ou la femme demeurait à la maison. Je l'ai spécifié, effectivement.
Alors, je l'ai rerespécifié. C'est très important parce que c'est un
choix très noble que ces gens-là faisaient. Mais ça a apporté des défis en
matière d'intégration. Alors, comment aviez-vous
fait avec si peu de ressources au début, en 1984, pour quand même avoir des
exemples extraordinaires de réussite en matière d'immigration?
• (16 h 30) •
M. Fréchette (René) : Je n'étais pas
là en 1984, mais ce que je peux vous dire, c'est que la formule qui fonctionne, c'est celle qu'on a appliquée puis qui
est dans le projet de loi, c'est l'approche personnalisée, c'est faire en sorte qu'il n'y a pas deux parcours identiques.
Tous les gens sont uniques, ont des histoires uniques. Et c'est la capacité que
nous, on a, comme équipe d'accompagnement, de s'adapter à ces besoins-là, de
les déceler puis d'être en mesure d'orienter vers les bonnes ressources. Et c'est là que l'intégration à la société réussit mieux. Donc, pour avoir, bon, vu ce que
mes prédécesseurs ont fait au sein de l'organisation ALPA, c'est cette
question de personnalisation des services qu'on fait en accueil, en intégration, qu'on fait en francisation. Bon, un peu moins parce qu'on est... les services sont dispensés par le MIDI. Donc, notre rôle, comme organisme communautaire en francisation, il est relativement limité. Nous, on a développé des services
complémentaires comme des ateliers de conversation, par exemple, qui permettent
aux gens de pratiquer en dehors des
heures de cours, en emploi, par cours personnalisés, puis en régionalisation
par cours personnalisés. Donc, le mot-clé, c'est personnalisé.
M. Poulin : Et, j'imagine, au
bout de tout ça, on ne fait pas ça tout seul, hein? Bien entendu, vous, vous
avez l'impulsion, vous avez la volonté,
comme vous le dites, d'intégration, de franciser, et tout ça. Tout à l'heure,
on était avec les gens de la ville de
Montréal qui... À juste titre, mutuellement, on se rappelait l'importance de la
francisation puis on se rappelait l'importance également d'accompagner
les gens qui sont déjà au Québec et qui n'ont pas réussi à apprendre suffisamment
le français à trouver des outils pour pouvoir le faire.
Alors, est-ce que vous avez une écoute ou, du
moins, une très ferme volonté de la part de vos partenaires de mettre le pied sur l'accélérateur pour la
francisation, y compris pour les gens qui demeurent actuellement au Québec?
Parce que tout ça a un effet
multiplicateur, on s'entend. Les gens qui viendront au Québec dans les
prochaines années, s'ils arrivent dans un bassin où les gens soit apprennent le
français, sont déjà francisés, entre guillemets, ça va faciliter l'intégration,
et tout ça. Alors, est-ce que vos partenaires ont cette vision-là même à
travers les immigrants qui sont ici présentement?
M. Fréchette (René) : Je veux
élargir ma réponse à plus que juste la francisation. Les immigrants qui sont de
deuxième génération ou de troisième génération, il y a une problématique
importante, c'est qu'ils n'ont souvent pas accès aux services d'organismes
comme nous. Et on présume parfois que... Puis je sais qu'il y a des discussions
en ce moment, là. Les services d'accueil, c'est en train d'évoluer. Mais, au
moment où on se parle, on est beaucoup sur une contrainte de 0-5 ans. Donc, après cinq ans, on considère que la
personne est intégrée, ce qui n'est pas le cas. Et tantôt je trouvais ça
merveilleux qu'à Kamouraska on réussisse à apprendre le français en trois ans.
Ça m'apparaît court pour venir à bout de
faire tout ça. Mais nous, on accompagne des gens qui sont là depuis cinq ans et
qui tergiversent encore avec un certain nombre d'objectifs dans leur
parcours d'intégration.
Donc, oui, il y a une volonté de francisation,
il y a une volonté des partenaires avec lesquels on travaille, mais il y a
aussi un certain nombre de contraintes. Entre autres, dans les programmes de
francisation, on sent que c'est des programmes
qui auraient besoin d'être plus souples, mieux adaptés, et qui... En ce moment,
malheureusement, on voit des taux d'abandon spectaculaires, taux
d'abandon de participation. Je ne dis pas des gens qui arrêtent de se franciser
complètement, mais qui laissent tomber les cours en cours de route.
M. Poulin : Mais qui abandonne?
Est-ce que c'est l'immigrant qui a déjà un emploi, dont le français n'est peut-être pas utile à son travail? Est-ce que
c'est des gens qui sont avancés... d'un certain âge, et qui se disent :
Bon, j'en aurai peut-être moins besoin? Qui sont ces gens qui
abandonnent?
M. Fréchette (René) : La
priorité...
La Présidente (Mme Chassé) : ...vous
mentionner qu'il vous reste un peu plus d'une minute.
M. Fréchette
(René) : D'accord. Les gens qui abandonnent les cours de français,
c'est souvent pour des impératifs économiques.
Donc, quand il faut manger, on fait un choix et on se dit : Je vais
laisser tomber les cours de français et je vais travailler. Et, croyez-moi, c'est assez facile de travailler à
Montréal. Je ne vous dis pas que vous allez devenir un V.P. d'une compagnie, là, mais trouver un emploi
alimentaire quand on ne parle pas français, ça se fait très facilement. Donc,
les motifs d'abandon, c'est souvent lié à
des impératifs économiques, comme je disais. Ce n'est pas nécessairement une question d'âge, quoique c'est sûr que, plus on
avance en âge — puis je
suis obligé de l'avouer — on est moins souples. Donc, apprendre une nouvelle langue, c'est plus difficile, c'est clair. Et,
dans certains cas, on se décourage, on abandonne, on laisse tomber.
Donc, il n'y a pas qu'un facteur, il y en a plusieurs.
M. Poulin : Ces minutes ont été
très enrichissantes. Merci beaucoup.
M. Fréchette (René) : Merci, ça
me fait plaisir.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. J'invite maintenant la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne à prendre la
parole.
Mme Anglade :
Merci. Nous avons plusieurs collègues ici qui veulent prendre la parole. Alors,
merci d'être avec nous.
Première
question que j'ai pour vous, juste pour qu'on comprenne bien, dans les
dernières années, vous qui avez... On a la chance d'avoir des gens qui
connaissent le milieu depuis longtemps. Quelles sont les grandes différences,
dans les cinq dernières années, que vous avez vues sur le terrain en
matière d'intégration des immigrants? Si vous en avez vu, partagez avec nous
qu'est-ce qui a évolué, qu'est-ce qui a changé dans les dernières années.
M.
Mallette (Éric) : Si je peux
me permettre, moi, je vais commencer d'abord par parler du marché de l'emploi,
que je connais comme représentant d'un
cabinet de recrutement. Ce que je juge qui se passe présentement est
certainement causé
par la pénurie d'emploi. Même dans les secteurs que nous représentons, qui ne
sont pas nécessairement des secteurs technologiques,
on s'aperçoit que la période de carrière avant de pouvoir changer d'un emploi à
l'autre est de plus en plus courte.
Quand j'ai commencé, disons, même il y a 10 ans, mais il y a cinq ans
aussi, il y avait encore des employeurs qui nous disaient : Bien, je ne considérerai pas ce candidat-là, qu'il
soit une personne immigrante ou non, parce que, son dernier emploi, il
n'est même pas là depuis deux ans ou il n'est même pas là... il n'est pas resté
dans son dernier emploi depuis trois ans.
Alors, la loyauté à l'emploi était vraiment valorisée. Aujourd'hui, en
situation de pénurie de talents, l'employeur va dire : Ah! il a
fait un an à l'autre endroit, je m'en fous, je veux l'engager.
Alors, ça,
c'est la situation d'emploi plus globale. Évidemment, ce que je vous dirais en
termes plus de l'embauche de personnes immigrantes, ce que je constate,
c'est qu'il y a lentement une volonté de les accueillir, mais les barrières systémiques existent encore à l'entrée,
malheureusement, et les employeurs sont encore frileux et amplifient la
complexité du processus d'immigration. Alors, ça, c'est ce que j'observe
du côté de l'emploi. Maintenant, René, tu peux...
M. Fréchette (René) : Peut-être un
mot sur l'amplification de la complexité du processus. C'est qu'il y a une
méconnaissance de la part des employeurs par rapport aux différents statuts
d'immigration. Et je vais prendre un exemple, parce qu'une des grandes
différences, c'est qu'on a vu apparaître au Québec une réalité qu'on avait déjà
connue, mais qui est arrivée massivement à l'été 2017, c'est l'arrivée des
demandeurs d'asile, et ça, ça a changé le paysage.
Chez nous, chez ALPA, on a dit qu'on était près du Stade olympique. Qu'est-ce
qui a frappé l'imaginaire collectif, c'est quand on a vu le Stade olympique
converti en centre d'hébergement. Et là nous, on est sur Pie IX, à trois
coins de rue du stade, donc on a eu
beaucoup de demandeurs d'asile qui sont venus chez nous. Les demandeurs
d'asile, si vous n'êtes pas familiers...
ils n'ont pas droit à beaucoup de services dans les organismes communautaires.
Nous, on a fait le choix de leur en
offrir, pas au détriment de la clientèle qu'on dessert normalement, mais en
surplus. Donc, on est allés chercher les ressources du secteur privé pour nous appuyer puis créer des ressources
qui aident les demandeurs d'asile. Ça, c'est une réalité qui a changé
dans les cinq dernières années. Il y a beaucoup plus de demandeurs d'asile.
Une autre
réalité, c'est la complexité des besoins. Les besoins se sont complexifiés au
cours des cinq dernières années. Il y
a des réalités qui ont changé. Les immigrants, avant, ils n'arrivaient pas chez
nous avec un téléphone cellulaire. Et là vous allez vous dire : Mon
Dieu! On a un peu cette image de la personne immigrante qui a de la difficulté
à vivre. Les téléphones cellulaires, à
travers le monde, il y a beaucoup d'endroits où c'est plus facile d'en obtenir
qu'ici, et ça coûte moins cher. Donc, quand ils arrivent ici, ils vivent
un petit choc culturel, un choc financier, de voir combien ça coûte.
Mais il y a
eu, donc, toute une évolution dans le visage, dans le profil des personnes
immigrantes, et elles arrivent avec des objectifs, dans certains cas, qui sont
beaucoup plus clairs par rapport à l'accompagnement dont elles ont besoin.
Mais je vais dire «dans certains cas», parce
que, le meilleur exemple, les Français détenteurs de PVT qui arrivent au Québec
et qui ont souvent l'impression qu'eux,
parce qu'ils sont Français, qu'ils parlent français, ils n'ont pas besoin de
conseils en intégration, ils ont
juste à s'installer sur Le Plateau—Mont-Royal, puis tout va se faire tout seul, ce
n'est pas comme ça que ça se passe.
Donc, la diversité des besoins, la complexité des profils font en sorte que
l'expertise des organismes comme le nôtre, c'est d'autant plus
important.
Mme
Anglade : Bien que je pense que, sur Le Plateau—Mont-Royal, il y a quand même un peu de vrai
là-dedans.
Mais,
écoutez, il y a une chose qui, il me semble, se produit présentement, puis je
pense que tous les parlementaires devraient
être très sensibles à ça, le milieu économique se transforme à vitesse grand V
au Québec. Et, même si on aime dire que c'est du simple au double dans
les taux de chômage des immigrants 0-5 ans, la réalité, c'est que c'est en
chute drastique et rapide, parce que
nécessité fait loi, hein? À un moment donné, comme vous le disiez tout à
l'heure, les employeurs vont aller
recruter les gens. Il me semble qu'il faut qu'on ait un degré d'agilité dans
notre système. On ne peut pas toujours utiliser...
Ce n'est pas évident de dire ça à l'Assemblée nationale, avec les projets de
loi, mais il faut qu'il y ait une agilité, dans le système, qui nous permette d'aller chercher, d'aller recruter
des gens. Moi, j'ai l'impression que le phénomène de pénurie de main-d'oeuvre s'est terriblement
accéléré. Et j'ai l'impression qu'il ne va faire que s'accélérer dans les
prochaines années, dans les prochains
mois, et que notre responsabilité, c'est de nous assurer d'être beaucoup plus
agressifs non seulement en matière d'intégration, mais en matière
d'accueil.
Et là je vous
amène sur les seuils d'immigration parce que j'aimerais vous entendre
là-dessus. Quand vous parlez des seuils d'immigration par rapport aux
pénuries de main-d'oeuvre, il me semble qu'on va dans la mauvaise direction et que c'est l'économie qui nous dicte aussi qu'on
va dans la mauvaise direction. Très contente de vouloir mettre plus d'argent
en matière d'intégration, mais j'aimerais vous entendre sur cet enjeu-là.
• (16 h 40) •
M. Fréchette
(René) : Deux choses que j'aimerais dire. La première, c'est :
Oui, il y a une diminution du taux de chômage.
Les immigrants trouvent du travail, mais il y a une précarité d'emploi qui est
très présente. Et là-dessus je pense qu'il
faut être attentif pour ne pas combler des emplois de façon... des emplois,
finalement, où règne une certaine précarité.
Ça, c'est une
chose. Dans le projet de loi, on fait beaucoup un arrimage entre les emplois et
les gens. On a entendu qu'il y a un
besoin de main-d'oeuvre non spécialisée au Québec. Oui, effectivement, mais je
ne pense pas qu'il faut uniquement se
tourner vers l'immigration pour combler ces postes-là parce que ça serait faire
fausse route à moyen terme puis à long terme. Notre société s'enligne vers une
société du savoir. Et il y a un certain nombre de gens qui naissent aujourd'hui
dont les jobs n'existent même pas au moment
où ils viennent au monde parce que ça va apparaître dans les prochaines années.
Donc, si on recrute des gens qui sont non spécialisés et qu'on compte
uniquement sur l'immigration pour combler ces postes-là, qu'est-ce qui va arriver quand il y a une machine qui va
remplacer cette personne-là? Qu'est-ce qu'elle va faire, cette
personne-là? Et moins on est éduqué, moins on a de compétences transférables,
moins on est mobile en termes d'emploi. Et
c'est des gens qui risquent de revenir au crochet de la société parce qu'ils
auront été mal accompagnés au départ.
Mme Anglade :
Donc, ce que vous dites, c'est : Oui, il faut arrimer davantage — j'en
suis — mais
attention parce que, le deux tiers des
emplois, qui sont des emplois qui nécessitent moins de formation, si on fait
juste ça, on va se créer... on s'achète du trouble à long terme, on
s'achète des problèmes.
M. Fréchette (René) : Exact.
Mme Anglade :
Je veux revenir sur votre question de la précarité, qui, à mon avis, est très
intéressante, c'est que... Quel est
le meilleur outil pour combattre la notion de précarité d'emploi aujourd'hui?
Parce que les taux de chômage, comme je
disais, sont en baisse drastique. Quels sont les gestes à poser pour penser la
précarité? Est-ce que c'est la transformation de l'économie qui va faire
en sorte qu'au bout du compte on va être capable d'avoir des emplois moins
précaires?
M. Fréchette (René) : Bien, il
y a ça. Vas-y, Éric.
M. Mallette
(Éric) : Bien, j'allais
juste... De manière générale, sur le marché de l'emploi, ce qu'on constate,
c'est une espèce de phénomène de vases
communicants. Un emploi précaire ici devient un emploi intéressant ailleurs, particulièrement avec toute l'évolution
technologique en ce moment. Alors, ça, c'est du côté de l'emploi de mon marché,
mais, René...
Mme Anglade : ...ici devient un
emploi intéressant ailleurs?
M. Mallette
(Éric) : Ce que je veux
dire, c'est qu'il y a plusieurs emplois qui deviennent assez transitoires de
par la technologie qui évolue assez rapidement.
Mme Anglade : D'accord.
M. Mallette
(Éric) : Alors, on perd un
emploi là qui redevient un nouvel emploi là, mais il a évolué légèrement. Alors,
c'est ce que je parle.
Mme Anglade : D'où la nécessité
d'avoir des gens qui sont capables de franchir les étapes également avec la
transformation technologique?
M. Mallette (Éric) : À mon
avis.
Mme Anglade : D'accord.
M. Mallette
(Éric) : Et c'est vrai, à
mon avis, pour les personnes immigrantes, mais c'est aussi vrai du marché de
l'emploi, que je constate, de manière plus globale.
Mme Anglade : Donc, l'agilité
des gens.
M. Mallette
(Éric) : L'agilité, la
transformation numérique, la capacité de vite s'adapter aux changements, c'est
quelque chose qui est très, très existant aujourd'hui.
Mme Anglade : Excellent.
Parfait.
M. Mallette (Éric) : L'accès à
des outils technologiques, etc., aussi.
Mme Anglade :
Merci. Je sais que mes collègues ont d'autres questions. J'en aurais d'autres,
mais je vais céder la parole à...
La
Présidente (Mme Chassé) : Oui, absolument. Je cède la parole à la
députée de Bourassa-Sauvé. Merci à vous.
Mme Robitaille : Merci. Oui,
Bourassa-Sauvé, Montréal-Nord... Alors, toute la problématique des nouveaux arrivants, on la connaît, à Montréal-Nord. Mais,
en fait je voulais continuer sur la même lancée que mon collègue de Beauce-Sud,
qui, malheureusement, n'est pas ici, mais
c'était une discussion très intéressante, justement, sur la francisation, sur
l'intégration. Vous disiez qu'après cinq ans on a l'impression que la
personne est intégrée, mais souvent ça prend beaucoup plus de temps que ça. Dans Montréal-Nord, dans
Bourassa-Sauvé, il y a des multiples cas d'Italiens, justement, qui sont
arrivés, et, pour des raisons
économiques, ils ont dû travailler, et puis ça a pris du temps, mais, en bout
de ligne, ils l'ont appris, le français.
On est ici
pour mieux comprendre toute la problématique, parce qu'on va regarder un à un
les articles du projet de loi, et il y a un article, l'article 9,
qui veut insérer un article qui s'appelle 21.1, qui ajouterait des conditions à
la résidence permanente, c'est-à-dire, on dit que le ministre peut imposer à
l'immigrant des conditions qui affecteraient la résidence permanente, O.K., conférée en vertu de la loi afin
d'assurer, entre autres, toutes sortes de choses, dont l'intégration linguistique,
sociale et économique du ressortissant. On
avait les gens de La Maisonnée ce matin et on parlait de ça. On se disait que,
finalement,
l'immigration, pour un individu qui
vient ici, c'est plus que juste une job, mais c'est vraiment
tourner la page, commencer un nouveau chapitre, construire une nouvelle
vie ailleurs. Et cette personne-là a besoin d'un minimum de sécurité pour aller plus loin, pour bien
s'intégrer. Quelle est votre impression? Est-ce que mettre des
conditions à la résidence permanente, c'est une bonne idée pour l'intégration
d'un individu?
M. Mallette
(Éric) : De manière générale, moi, je crois beaucoup aux mesures
incitatives et encourageantes.
Mme
Robitaille : O.K. Donc, si on veut intégrer, franciser, la réponse est
claire, ce n'est pas nécessaire.
M. Fréchette
(René) : En fait, je dirais qu'en 35 ans d'histoire, ALPA, on
a... Évidemment, on a beau être des spécialistes, on ne détermine pas les politiques
publiques. On applique les paramètres. On s'est toujours adaptés aux paramètres
qui nous ont été transmis. Donc, on le fera encore dans le contexte actuel.
Si
vous me demandez, et c'est ce que vous faites : Est-ce que
c'est une bonne idée d'imposer des conditions?, moi, je pense que non, dans la mesure où, quand on dit
«trois ans», qui est la période nécessaire à obtenir la citoyenneté canadienne, ça va
peut-être faire en sorte que ces gens-là vont décider de partir ailleurs s'ils
échouent le test de français. Par contre, comme
on ne connaît pas à ce moment-ci le niveau d'exigence du français qui va être
demandé, est-ce que c'est un niveau de base, est-ce qu'un
niveau... donc c'est difficile de se prononcer clairement. À prime abord, pas
favorable, mais tout dépendant de ce que ce sera sur le terrain et comment ça
va se transposer.
Mme
Robitaille : Dans le
parcours du combattant, là, quand il est ici, il y en a, des tests, à
différents moments de son intégration, non? Bien, en tout cas, on
évalue, d'une certaine façon...
M.
Fréchette (René) : Oui. Les
gens qui entreprennent le processus de francisation dans les cours qui sont offerts par le
MIDI passent un examen à la fin de chaque niveau puis... Oui, oui, oui, tout à
fait, ça existe.
Mme
Robitaille : Alors, quoi
faire pour s'assurer d'une bonne intégration? En fait, quel est le rôle des organismes communautaires comme le vôtre
pour une bonne intégration d'un immigrant? Est-ce
qu'il doit... Est-ce qu'un organisme comme le
vôtre devrait prendre le leadership ou ce leadership-là devrait venir du ministère?
M. Fréchette
(René) : En francisation?
Mme
Robitaille : Oui, en francisation, en intégration en général?
M. Mallette
(Éric) : Si tu permets, René?
M. Fréchette
(René) : Oui, vas-y, je t'en prie.
M. Mallette
(Éric) : Nous croyons vraiment au parcours personnalisé et mené par
des experts. En ce sens, nos 22 spécialistes sont très, très bien équipés,
à notre avis, pour faire ça, d'autant plus qu'ils sont polyglottes.
M.
Fréchette (René) : Mais, tu sais, il y a une réalité, c'est que,
depuis nombre d'années, le ministère ne rend pas de services directs aux personnes immigrantes, dans le sens que les
immigrants qui arrivent à Montréal, ils ne vont pas au bureau du ministère de l'Immigration pour recevoir
des services. Le ministère a développé des ententes avec des organismes qui
rendent ces services-là directement aux personnes immigrantes. Donc, je pense
qu'à ce moment-ci, puis c'est ce que j'entendais
tout à l'heure de la bouche du ministre, le MIDI ne veut pas se substituer aux
organismes, veut travailler en partenariat avec les organismes.
Donc,
moi, je pense qu'on pourrait jouer... on joue déjà ce rôle-là, mais on pourrait
continuer à le jouer. Puis, dans l'établissement des parcours personnalisés, je
pense que les mieux placés pour faire ça, c'est les organismes, comme
ALPA, qui ont l'expertise, qui ont
l'expérience, qui ont la connaissance puis qui ont la capacité. Le lien de
confiance dont il a été question ce
matin avec les gens de La Maisonnée, le lien de confiance qui se crée avec une
personne immigrante qui arrive, qui
n'a pas de réseau, qui ne connaît personne... Son réseau, là, ça devient son
intervenante sociale qu'elle rencontre et avec qui il y a un lien qui se crée. Bien, c'est là que la confiance
fait en sorte qu'il y a un parcours personnalisé qui va être mieux
réussi que si c'est fait par quelqu'un qui est dans un petit bureau quelque
part à l'aéroport, là.
M. Mallette
(Éric) : Et, si je peux me permettre, qu'on permet de suivre...
La Présidente (Mme
Chassé) : ...pour vous dire qu'il vous reste une minute.
M. Mallette
(Éric) : ...qu'on peut suivre dans le temps et évoluer à la lumière
des enjeux vécus par la personne immigrante.
Mme
Robitaille : Brièvement, pour résumer pour le ministre, qui n'était
pas ici, l'idée d'une condition à la résidence permanente : pas
nécessairement une bonne idée pour aller vers une certaine...
M. Fréchette
(René) : Sans en connaître les détails puis les subtilités au moment
où on se parle. Donc, sur le principe, on est plus favorables à des mesures
incitatives qu'à des mesures contraignantes.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci
beaucoup. Je cède la parole à la députée de Marie-Victorin.
• (16 h 50) •
Mme
Fournier : Merci, Mme la Présidente. Merci pour la présentation. Mes questions porteraient sur la question de
la francisation. Vous avez fait mention qu'il y avait
environ 40 % des nouveaux
arrivants au Québec qui ignoraient tout des services d'accueil et
d'intégration, O.K., à Montréal spécifiquement. Quand on sait que, globalement
au Québec, il y a environ deux tiers des
personnes immigrantes qui, en arrivant ici, ne s'inscrivent pas en
francisation, puis là je parle seulement pour celles qui ne maîtrisent
pas le français, est-ce que vous pensez que ceci explique cela et que c'est
parce qu'il n'y a pas assez de connaissances sur les services qui sont offerts?
M.
Fréchette (René) : Il y a plusieurs raisons. À mon avis, la
méconnaissance des services, c'est la première. Quand on ne sait pas que ça existe, on ne peut
évidemment pas s'y rendre. La deuxième, c'est que les programmes de francisation
manquent de souplesse. Donc, les programmes de francisation doivent être...
En ce moment,
si vous arrivez au Québec et vous manquez le début de la session... Parce qu'en
ce moment c'est organisé comme au
cégep. Vous manquez le début de la session au cégep, vous êtes obligé
d'attendre à la session d'hiver. En francisation, c'est la même chose.
Qu'est-ce qui se passe pendant les 12, 13, 14 semaines où vous ne suivez
pas de cours de français? Êtes-vous
assis chez vous à attendre la prochaine session? Non, parce qu'il faut vivre.
Vous avez vous à nourrir. Vous avez
peut-être une famille à nourrir. À cet égard-là, vous allez trouver un emploi.
Et l'image que souvent je fais, c'est que
c'est comme quelqu'un qui décroche de l'école puis qui se dit : Bien, je
vais arrêter, je vais travailler un an, puis après ça je vais retourner aux
études. Décrochage scolaire. Donc, décrochage de francisation, c'est la même
chose. Donc, le fait que tous les programmes partent en même temps
partout, ce n'est pas idéal.
Mme
Fournier : Donc, selon vous, ça devrait être mieux adapté et
qu'on puisse commencer des cours de francisation quand on arrive au
Québec?
M.
Fréchette (René) : En continu et dans une approche plus souple, plus
personnalisée, qui va faire en sorte que les gens vont mieux se
franciser, oui.
Mme
Fournier : Puis est-ce que vous avez remarqué un manque de
places, tout simplement, dans les cours de francisation?
M.
Fréchette (René) : Bien, dans notre cas, en ce moment, là, notre
programme de francisation arrive au maximum de ses capacités, mais c'est des questions de locaux, là. Mais je sais
que, dans le réseau, il y a encore de la capacité pour en prendre
davantage. Ce qui est problématique pour nous, je l'ai souligné tout à l'heure,
c'est le taux d'abandon. Et il faut donc
revoir les programmes pour diminuer les taux d'abandon, puis comprendre
pourquoi les gens abandonnent, puis qu'est-ce qu'on peut faire pour
intervenir pour diminuer ces taux-là, parce que ça, c'est assez endémique, là. Je
vous parle de taux, là, chez nous, qui
peuvent aller parfois à 60 % des
élèves... 66 % des élèves qui lâchent leurs cours de français en cours de
session.
M.
Mallette (Éric) : Puis, si
je peux me permettre, aussi, c'est juste important de rappeler que nous ne
sommes que des prêteurs de locaux dans ce dossier-là.
M. Fréchette
(René) : Donc, dans le sens où nous, on n'intervient pas sur les
programmes, sur les formules, et tout.
M. Mallette (Éric) : Le contenu.
M.
Fréchette (René) : On a une entente avec le MIDI puis on opère les
cours tels qu'ils sont formulés et qu'ils sont donnés par les
enseignants embauchés par le MIDI.
Mme
Fournier : Mais, sur la question de l'abandon, est-ce que vous
diriez que les tests de classement, qui ont connu des ratés, ont beaucoup à voir avec les taux
d'abandon? Parce que les contacts qu'on avait avec les professeurs pouvaient
laisser sous-entendre ça, en tout cas en partie.
M.
Fréchette (René) : Il s'est dit beaucoup de choses sur le test de
classement. Il y a eu une levée de boucliers assez importante quand ça a
été imposé.
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste près de 30 secondes.
M.
Fréchette (René) : Je ne
sais pas ce qui va arriver avec ça. Le son de cloche qu'on a eu récemment,
c'est que ça allait être abandonné, puis on allait revenir à une évaluation
personnalisée avec un individu. Donc, je ne sais pas si le test de classement a vraiment été si problématique parce
qu'il n'y avait pas tant de reclassement en plus par rapport à ce qui se
faisait avant.
Mme
Fournier : Merci beaucoup.
M. Fréchette
(René) : Bienvenue.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de
Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Bonjour. Moi, j'aimerais vous entendre parler des
18 000 dossiers qui vont être annulés. Est-ce que vous en connaissez beaucoup? Est-ce que beaucoup
de ces gens-là travaillent, ne travaillent pas? Est-ce qu'ils risquent de
quitter? Qu'est-ce qui se passe avec ces gens-là?
M. Fréchette
(René) : 18 000, aussi, vous avez entendu parler de ça, vous?
M.
Fontecilla : Vaguement.
M.
Fréchette (René) : Écoutez,
j'aurais envie de vous dire qu'évidemment c'est une décision qui relève... Nous, les impacts qu'on ressent, en fait, sur le terrain...
Puis je veux revenir à ce qu'on est. On est un organisme qui fait de
l'intégration puis de
l'accompagnement. On ressent de l'inquiétude. On ressent de l'incertitude. On
entend les gens qui viennent vers nous
et qui s'inquiètent de leur sort, à juste titre, et on n'a pas l'information à
ce moment-ci pour les réconforter où les orienter pour leur dire :
Ce qui va arriver avec vous, c'est telle chose. On ne le sait pas.
Puis
je vais corriger tout de suite pour dire qu'on ne parle pas, chez nous, de
dossiers, mais on parle de personnes. Donc,
ces 18 000 dossiers là,
comme on parle, on n'est pas en train de parler de boîtes dans une salle d'archives, on est en train de parler d'êtres humains. Et, nous, dans nos valeurs, l'humanisme, c'est
la valeur numéro un. Donc, si vous dites : Est-ce que c'est inquiétant
pour ces gens-là?, oui. Est-ce qu'ils nous en parlent? Oui. Est-ce qu'on peut faire quelque chose?
Non, que de constater, on espère en tout cas, qu'il va y avoir une révision de
cette question-là.
M.
Fontecilla : Concernant la question...
On a beaucoup parlé de la question de la discrimination systémique, donc non pas une discrimination directe, là, mais on
dirait que la nécessité fait loi : les employeurs n'ont plus de complexe à embaucher des personnes issues de la diversité,
surtout les minorités visibles, et ce qui est une bonne chose. Mais ces gens-là
se retrouvent en entreprise aujourd'hui, là, et vous dites que ça prend un engagement
des entreprises, là. Qu'est-ce
que vous voulez dire, là, par... Ça se traduit comment concrètement, cet
engagement-là?
M. Fréchette
(René) : L'engagement partagé des entreprises, dans ce contexte-là,
c'est une démarche réelle de gestion de la
diversité, donc une politique de gestion de la diversité, une formation
des équipes de travail, des collègues de
travail qui ne vont pas stigmatiser ou ostraciser une personne qui est issue de
l'immigration. Donc, pour nous, là où les employeurs ont
un rôle à jouer, c'est un rôle de facilitateur dans leur milieu de travail pour
faire en sorte que le maintien en emploi, ce
qui est un enjeu majeur en ce moment, le maintien en emploi, puisse être corrigé...
puisse avoir des meilleurs taux de
succès plutôt, ce que je devrais dire, en permettant aux
milieux qui accueillent des gens issus des minorités visibles de se sentir bienvenus puis inclus dans le milieu
de travail.
M.
Fontecilla : Vous pensez que l'État devrait appuyer cet accompagnement
des entreprises?
M. Fréchette
(René) : Bien, je pense que, définitivement, l'accompagnement, c'est
la meilleure formule. Les employeurs sont
déjà submergés de plein de choses à faire. S'ils n'ont pas d'accompagnement, il
y a fort à parier que ça ne va pas être une priorité, puis ils ne vont
pas réussir à le faire seuls. Ils ont besoin d'aide.
M. Mallette (Éric) : Et, certainement, nous nous lançons dans cette direction-là avec une
nouvelle direction du service aux entreprises. Alors, nous sommes également
équipés pour le faire. Nous allons nous équiper pour le faire.
La Présidente (Mme
Chassé) : ll vous reste 30 secondes.
M.
Fréchette (René) : On va continuer dans cette direction-là. Et je
pense que le milieu a... C'est important que les employeurs aient de l'aide
là-dedans parce que c'est des situations qui sont complexes. Nous, c'est notre
quotidien. Je ne peux pas demander à
un employeur de comprendre toutes les subtilités qui vont faire en sorte qu'on
va désamorcer des situations qui pourraient être problématiques en
termes de racisme systémique ou de discrimination.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie pour votre dynamique
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux pour quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
la place. Merci.
(Suspension de la séance à
16 h 58)
(Reprise à 17 h 1)
La
Présidente (Mme Chassé) : Je
vous invite à prendre place. À
l'ordre, s'il vous plaît! Je pense
que Mme Rinfret aimerait avoir
un nouveau verre d'eau. Oui. Je souhaite maintenant la bienvenue à la
Protectrice du citoyen et à son équipe. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous ferai signe à une minute de la fin. Je
vous invite donc à vous présenter et à débuter votre exposé.
Protecteur
du citoyen
Mme
Rinfret (Marie) : Merci, Mme la Présidente. Alors, Marie Rinfret, Protectrice du citoyen. M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Mmes, MM. les députés, membres de la Commission des relations avec les citoyens, permettez-moi de vous remercier
d'avoir accepté la demande du Protecteur du citoyen d'être entendu sur le
projet de loi n° 9. Je vous présente les personnes qui
m'accompagnent : à ma droite, M. Claude Dussault, vice-protecteur aux services aux citoyens et aux usagers, et, à ma
gauche, Mme Sophie Thomas, déléguée aux enquêtes au Protecteur du citoyen.
Le Protecteur
du citoyen est un ombudsman impartial et indépendant qui veille au respect des
personnes dans leurs relations avec
les services publics. Nous avons quatre mandats distincts, je vous les présente
brièvement. D'abord, nous agissons pour prévenir et corriger des
situations de non-respect des droits, d'abus, de négligence, d'inaction ou
d'erreur commises par un ministère ou un
organisme du gouvernement du Québec. Nous intervenons également auprès du
réseau de la santé et des services
sociaux en deuxième recours après le commissaire aux plaintes et à la qualité
des services. Nous agissons en
premier recours à la suite d'un signalement par une tierce personne. À titre
d'ombudsman correctionnel du Québec,
nous recevons les plaintes des personnes incarcérées dans les
17 établissements de détention sous la responsabilité du ministère
de la Sécurité publique. Et enfin, depuis mai 2017, nous traitons les
divulgations d'actes répréhensibles à
l'égard des organismes publics et les plaintes en cas de représailles liées à
ces divulgations. Nos services sont gratuits, et nous agissons
confidentiellement.
Le Protecteur du citoyen peut aussi, lorsqu'il
le juge conforme à l'intérêt général, commenter les projets de loi présentés à l'Assemblée nationale et, lorsqu'il
l'estime opportun, proposer des modifications. C'est dans ce contexte que
nous nous présentons devant vous aujourd'hui.
D'entrée de jeu, le Protecteur du citoyen
souscrit aux objectifs du projet de loi n° 9 qui
consistent notamment à assurer une meilleure
adéquation entre l'immigration économique et les besoins de main-d'oeuvre du
Québec. Le projet de loi devrait
aussi permettre d'améliorer les délais de traitement des demandes et de régler
le problème de l'inventaire des dossiers. À cet égard, déjà dans son rapport
annuel 2016-2017, le Protecteur du citoyen sonnait l'alarme.
Qu'adviendra-t-il, demandions-nous
alors, des 10 000 demandes reçues en ligne à l'été 2016 via le
nouveau portail Mon projet Québec et toujours
non traitées au 31 mars 2017 ainsi que des 21 000 demandes
reçues en format papier avant le 31 décembre 2015? Plus tard, soit en janvier 2018, le compte
n'était guère plus encourageant, 24 000 dossiers en inventaire. Au
30 septembre de la même année,
on en était à près de 20 000 dossiers. Au fil des ans, le ministère
avait trop de demandes d'immigration eu égard aux cibles fixées.
Or, aujourd'hui, comme suite des choses et
parallèlement à la mise en place d'un nouveau système basé sur la déclaration
d'intérêt des candidats et des candidates, appelé Arrima, le ministre fait face
à une situation critique. Le traitement de 18 000 dossiers, soumis il
y a parfois plusieurs années, n'a jamais été complété.
On peut
saluer la volonté du ministre de vouloir résoudre ce problème d'inventaire.
Toutefois, face à des candidatures d'immigration
qui sont avant tout des projets de vie, le ministre adopte une seule
approche : la suppression des dossiers et un remboursement partiel des frais encourus par les candidats et
candidates. Il s'agit, selon moi, d'une solution essentiellement
administrative pour un problème humain.
L'article 20 du projet de loi n° 9 précise en effet qu'il est mis fin à toute demande
présentée au ministre dans le cadre du Programme
régulier des travailleurs qualifiés avant le 2 août 2018 si, à la
date de la présentation du projet
de loi, il n'a pas pris de décision de sélection, de refus ou de rejet
concernant cette demande. L'article prévoit le remboursement sans intérêt des
droits exigibles.
Pour moi,
nous sommes clairement dans une opération de contrôle des dommages. Or,
à défaut de faire mieux, le contrôle
des dommages devrait consister à tenter, avec empathie et équité, de limiter
des dégâts dont on est forcé de reconnaître la gravité. Nous sommes ici
dans l'atténuation des inévitables conséquences négatives.
Ceci m'amène
à partager avec vous ce qui me préoccupe le plus : Quels seront, au regard
de cet article 20, les impacts et les préjudices pour les quelque 45 000 personnes visées par les
18 000 dossiers dont l'étude n'aurait pas été complétée, mais
plus particulièrement pour les quelque 6 000 personnes qui vivent au
Québec et dont la demande n'a toujours pas fait l'objet d'une décision de
sélection au ministère? En effet, si l'article du projet de loi n° 9
affectera l'ensemble des personnes et des
familles qui projetaient de venir faire leur vie au Québec, il y aura un impact
encore plus considérable pour les personnes qui y habitent, qui y ont
intégré le marché du travail et qui participent activement à la société
québécoise.
Depuis la présentation du projet de loi
n° 9, le Protecteur du citoyen a reçu de nombreuses plaintes qui reflètent
l'inquiétude de gens qui habitent au Québec et qui appréhendent les effets de
la nouvelle législation sur eux et sur leurs familles.
Pour bien illustrer la réalité, j'aimerais vous donner deux exemples de
plaintes que nous avons reçues depuis la présentation du projet de loi.
Un candidat
arrivé au Québec il y a trois ans a une offre d'emploi validée par un employeur
dans un secteur d'activité où il y a
une pénurie de main-d'oeuvre. Son permis de travail expire en
octobre 2019. Il s'est plaint à nous parce qu'il craint de devoir
quitter le Québec, n'ayant pas reçu de décision sur sa demande de certificat de
sélection. Un autre détient un diplôme universitaire du Québec, il a suivi des
cours de français, mais il n'atteint pas encore le seuil minimal pour être
admissible au Programme de l'expérience québécoise. Son permis de travail
expire lui aussi à l'automne prochain. S'il n'obtient pas son certificat de
sélection, il devra quitter le Québec.
Malgré
que le ministère dirige les candidats déjà en sol québécois vers le Programme
d'expérience québécoise, ce programme
n'offre pas une solution pour toutes et tous, et ce, pour les raisons
suivantes. Il exige notamment une connaissance du français oral de niveau intermédiaire avancé. Or, de nombreux
candidats, dont un grand nombre sont des diplômés du Québec, n'atteignent pas encore ce niveau de
maîtrise de la langue. Pour les travailleurs temporaires étrangers, le même
programme exige d'avoir occupé un emploi à
temps plein pendant 12 des 24 derniers mois. Quant aux travailleurs
autonomes, ils en sont exclus. Ces candidats pourraient bien sûr se
tourner vers le Programme des travailleurs autonomes, mais les exigences financières de ce programme, en termes
de dizaines de milliers de dollars, pourraient ne pas être à la portée de tous.
En conséquence,
je recommande que l'article 20 du projet de loi n° 9 soit modifié
afin de prévoir que le premier alinéa ne
s'applique pas aux demandes faites par des personnes qui habitent au Québec et
que le ministère donne priorité à ces demandes et les traite dans les
plus brefs délais.
Parlons
maintenant des autres dossiers, soit les 14 300 demandes concernant
un peu plus de 39 000 personnes qui projetaient de venir vivre
au Québec. Nous faisons face ici à un problème causé notamment par l'écart
entre les cibles ministérielles retenues au
fil des ans et le nombre de demandes reçues. Concrètement, si les
14 300 demandes de personnes ne
vivant pas au Québec devaient être étudiées selon un mode accéléré, nombre de
gens se qualifiant aux fins du programme ne pourraient quand même pas y
être admis, étant donné l'atteinte du seuil maximal du nombre de personnes
acceptées annuellement.
Il en résulte
qu'advenant l'adoption du projet de loi n° 9 il serait, selon moi, plus
équitable pour les candidats et les candidates
toujours intéressés à immigrer au Québec d'être remboursés avec intérêt pour
les frais de leurs demandes initiales. De
plus, le remboursement proposé devrait comprendre les sommes déboursées par ces
personnes à l'appui de leurs demandes pour passer les tests de
compétence linguistique.
En conséquence, je recommande que le deuxième
alinéa de l'article 20 du projet de loi n° 9 soit modifié pour prévoir que le remboursement des droits exigibles
payés par le demandeur porte intérêt selon le taux légal et que le coût des tests linguistiques reconnus par le ministère soit remboursé aux demandeurs dont le
dossier est supprimé. Je considère...
• (17 h 10) •
La Présidente (Mme Chassé) : ...
Mme Rinfret (Marie) : Pardon?
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste une minute.
Mme
Rinfret (Marie) : Très bien.
Je considère également comme allant de soi que tous les candidats et candidates
à l'immigration dont le dossier serait
supprimé reçoivent du ministère une lettre signée leur expliquant le contexte,
soit la réception d'un trop grand
nombre de demandes au regard des cibles ministérielles fixées. Elle exprimerait
aussi les regrets de l'administration
de procéder à la suppression des dossiers. En pareil cas, les excuses sont bien
peu de chose, mais elles peuvent
témoigner que nous ne sommes pas indifférents ni insensibles, comme terre
d'accueil, aux espoirs de ceux et celles qui s'adressent à nous.
De plus,
tenant compte des nombreuses démarches que des personnes ont eu à effectuer
pour constituer leurs dossiers de candidature et des frais associés, il
m'apparaît essentiel que le ministère retourne à chacun et chacune tout document
en format papier qui a été produit à l'appui
de leurs demandes. La même lettre les invitera à déposer, s'ils le souhaitent,
une nouvelle demande par l'intermédiaire du système Arrima. Des recommandations
sont faites en conséquence.
Pour
conclure, j'ai pris note, lors des remarques préliminaires, de l'engagement
selon lequel le nouveau système Arrima
devrait permettre de traiter dans un délai de six mois les candidatures des
personnes invitées à déposer une demande de certificat de sélection du Québec. Soyez assurés que je suivrai
attentivement l'atteinte de cette cible. Je vous remercie pour votre
attention.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je
vous remercie pour votre exposé. Le ministre vous a offert certaines de ses minutes.
Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole
est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Mme Rinfret, M. Dussault, Mme Thomas, bonjour. Merci
de participer aux travaux de la commission. C'est un plaisir de vous retrouver.
D'entrée de jeu, je pense qu'on s'entend sur un point, à l'effet que le fait que le gouvernement du Québec actuel ait des dossiers en inventaire, c'est notamment
dû au fait que, préalablement, il n'y avait pas eu de gestion de la demande
qui était en lien avec nos cibles d'admission. Donc, ça, je comprends que vous
êtes en accord avec ça.
Mme Rinfret (Marie) : C'est une question?
Excusez-moi.
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est une question.
Mme
Rinfret (Marie) :
Excusez-moi. Je pense que c'est un fait. On est confrontés aujourd'hui à 18 000 dossiers qui concernent 45 000 personnes
dans le dossier du Programme régulier des travailleurs qualifiés.
M.
Jolin-Barrette : Puis le
Protecteur du citoyen est conscient aussi que, dans le fond, cette
accumulation de dossiers là résultait
du fait que la gestion de la demande n'était pas faite adéquatement avec les cibles d'accueil du Québec. Bien, ça a créé un inventaire. Ça, c'est sur l'inventaire québécois,
mais, parallèlement à ça, aussi, sur les dossiers qui étaient traités, supposons, pour diminuer
l'inventaire québécois, en lien avec la gestion de la demande qui était
incontrôlée... faisait en sorte que
le gouvernement du Québec émettait certains CSQ et, à partir du moment où il y avait
un CSQ, envoyait les dossiers CSQ à Ottawa, créant un autre inventaire.
Donc, actuellement, à Ottawa, là, il y a 40 000 personnes,
40 000 travailleurs qualifiés qui
ont un CSQ et qui sont en attente aussi d'obtenir leur résidence permanente, mais ça, c'est en lien aussi avec les dernières années. Il y a
un inventaire aussi par rapport au fait que ça ne respectait pas les cibles
d'accueil du Québec. Ça fait que la situation
actuelle quand moi, je rentre en poste, c'est cette réalité-là. Vous êtes
d'accord avec moi là-dessus?
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez,
M. le ministre, pour être bien au fait de la situation
québécoise... Nous n'avons pas enquêté du côté du
gouvernement fédéral. Ce n'est pas notre mandat. Je ne vous cacherai pas
cependant que nous sommes extrêmement
préoccupés par les 18 000 dossiers. Nous avons sonné l'alarme, depuis 2016
à tout le moins. Notre rapport annuel
d'activité en faisait état en 2016-2017. Au mois de novembre dernier, j'ai
rappelé encore une fois cette situation en enjoignant le ministère à considérer toutes les alternatives nécessaires
pour faire en sorte que, de fait, le système Arrima puisse
éventuellement être appliqué, parce qu'il s'agit là, de fait, d'un système qui
répond mieux aux dossiers en immigration.
M. Jolin-Barrette : Les lacunes
avaient déjà été identifiées par rapport à la gestion de la demande. Moi, c'est
notamment pour ça que je souhaite utiliser
le système Arrima, parce que ce que j'ai constaté aussi, c'est que le taux de
refus, là, au Programme régulier de travailleurs qualifiés, c'est
d'environ 50 %.
Lorsqu'on parle, supposons, d'un accueil
respectueux, ou du processus, ou la démarche aussi, moi, je suis très sensible à cette réalité-là que les gens
investissent plusieurs années, font des démarches. La moitié des dossiers sont
rejetés parce qu'on dit :
Soumettez votre demande, payez le montant, puis on sait pertinemment qu'un
candidat sur deux va être rejeté. Ça
fait qu'ils perdent, environ, le 1 000 $, plus les tests de français,
plus tout ça. Puis en plus, parmi ceux qu'on accueille, parmi les gens
qu'on accueille, bien, ils ne répondent pas aux besoins du marché du travail
bien souvent, parce que, la grille de
sélection, telle qu'elle était faite aussi, le processus de pointage fait en
sorte que, bien, souvent, on accueillait des gens qui ne répondaient pas
au marché du travail puis en plus, souvent, on n'assurait pas la
régionalisation non plus.
Ça fait que
ça fait en sorte que les taux de chômage, les cinq premières années, sont plus
du double de la population native. On
se ramasse aussi avec un taux de surqualification de 59 % des immigrants
de moins de cinq. Ça veut dire, ça, qu'ils occupent une job pour laquelle ils
sont surqualifiés. Ça amène beaucoup de frustration. On voit les reportages à
la télévision, à la radio, des gens
qui, dans leurs pays d'origine, ils exerçaient un métier, ils avaient une
formation, ici ils sont barrés au
Québec. Moi, je ne suis pas à l'aise avec ça du tout. Je veux faire en sorte
qu'ils puissent occuper un emploi dans leur domaine de compétence.
L'autre
élément aussi, c'est la reconnaissance des compétences avec les ordres
professionnels, parfois, lorsque c'est des
professionnels, ou même la reconnaissance des acquis. L'autre fois, je donnais
l'exemple d'une thanatologue, à l'effet que — une
thanatologue française — pour pratiquer au Québec, ça prend un permis du ministère de la
Santé, mais, pour donner le permis du ministère de la Santé, le
ministère de la Santé demande une attestation d'un établissement collégial
québécois. Mais là il n'y a plus d'établissement collégial qui émet des
attestations. Ça fait que, là, la personne qui est thanatologue en France ne peut pas pratiquer au Québec à cause de
raisons administratives. Ça, on veut changer ça aussi dans le projet de
loi en lien avec la coordination qu'on veut conférer au ministère de
l'Immigration.
Donc, je suis
sensible à cette réalité-là, mais je vous explique le contexte dans lequel on
prend notre décision. Puis l'objectif,
c'est vraiment que ça cesse, cette façon-là de traiter les gens puis de
dire : Bien, venez au Québec, mais vous allez venir ici, puis on ne
sait pas ce qui va vous arriver. C'est un peu le contexte dans lequel on est
présentement.
Sur l'aspect
des cas que vous avez eus, là, qui vous ont appelé, au niveau du Protecteur du
citoyen, vous en citez deux,
notamment un qui... Le premier cas que vous citez, là, un candidat arrivé au
Québec il y a trois ans, une offre d'emploi validée par un employeur dans un secteur d'activité où il y a une
pénurie de main-d'oeuvre. Son permis de travail expire en octobre 2019, il s'est plaint à nous parce
qu'il craint de devoir quitter le Québec. Le projet de loi ne change rien à sa situation, à cette personne-là, parce que, dans le
fond, lui, il pourrait appliquer dans le PEQ, s'il a une expérience de travail
de 12 mois, et il est sur un permis de
travail fédéral. Mais le projet de loi, il ne change rien à ça. Et ce qu'on a
dit, là, dès le départ, là, c'est que, pour les candidats qui ont
appliqué sur le territoire québécois, il y a 3 700 personnes... oui,
3 700 demandeurs qui ont appliqué sur le territoire québécois.
Pour ceux qui sont encore sur le territoire québécois, qui répondent aux besoins du marché du travail, moi, j'ai dit : On
va les inviter prioritairement dans Arrima. Mais, dans le cas du candidat numéro un, théoriquement, il
serait admissible au PEQ, mais on ne connaît pas sa situation particulière.
Pour le
deuxième, lui, la problématique, c'est au niveau de la connaissance du
français, parce qu'il est diplômé ici, mais
il n'a pas encore atteint le seuil minimal du PEQ. Mais on ne sait pas s'il est
en emploi présentement. Alors, lui, on pourrait
également le passer dans Arrima, aussi, pour faire en sorte que, s'il est déjà
sur le territoire québécois, il est en emploi... pour ne pas... pour le
permanentiser.
Mais l'objectif du projet de loi aussi, c'est de
faire en sorte que, toutes les personnes qui sont au Québec en situation temporaire, on puisse les accompagner,
on puisse leur donner des ressources pour éventuellement les amener vers la
permanence.
Je ne sais
pas qu'est-ce que vous pensez de ça, de ce qu'on souhaite faire au niveau des
temporaires, les amener vers la permanence, déployer des ressources pour
eux. Voyez-vous ça d'un bon oeil?
• (17 h 20) •
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez,
pour répondre à votre question relativement aux deux cas de plainte que nous
avons reçus, les deux personnes ne se
qualifient pas au PEQ en raison de leur niveau de français, qui est assez
exigeant par rapport au programme... — et là je me trompe toujours
dans l'acronyme, là — le
Programme régulier des travailleurs qualifiés. Voilà.
Alors,
à cet égard-là, il y a des enjeux majeurs pour eux. Il y a une insécurité, et
ça, le précédent intervenant l'a manifesté également. Nous, on le sent chez les gens qui nous
appellent. Il y a beaucoup d'insécurité, il y a beaucoup d'inquiétude par rapport à leur situation.
Ce sont des gens qui sont établis au Québec, qui vivent, en fait, au Québec,
et, partant de là, ont des emplois,
contribuent à la société québécoise, et ne savent pas si leur certificat de sélection
du Québec, de la façon dont ils l'ont demandé, au
moment où ils l'ont demandé, pourrait leur être émis.
En fait, ce qu'ils lisent, c'est que leur
dossier va être supprimé, et on leur demanderait d'aller sur la plateforme Arrima, où il y a déjà 90 000 personnes qui ont soumis leur
candidature. Ils ne savent pas si les conditions qu'ils remplissaient au moment où ils ont déposé leur demande de
certificat de sélection seront encore valides au moment de l'examen de la
demande. Parce qu'ils vont être invités,
hein? Ce n'est pas juste de faire une déclaration d'intérêt, c'est d'attendre
d'avoir l'invitation pour déposer, pour...
M. Jolin-Barrette : Là-dessus, j'ai
été très clair. J'ai dit : Pour les candidats au Québec, on souhaite les
inviter prioritairement. Ça, dès le départ, dès le dépôt du projet de loi, je
l'ai dit.
Pour ce qui
est aussi de leur statut, là, le projet de loi ne change rien à leur statut.
Parce qu'on enlève le projet de loi
n° 9, là... Ces deux candidats-là, là, ils ont déposé leurs demandes dans
le PRTQ, O.K.? Il n'y avait aucune garantie qu'ils allaient être
sélectionnés puis que leurs dossiers allaient passer. Ça, là-dessus, vous êtes
d'accord avec moi, sur le fait qu'il n'y avait aucune garantie qu'un CSQ allait
être délivré.
Mme Rinfret (Marie) : C'est vrai.
M. Jolin-Barrette : ...50 % de
taux de refus. On s'entend là-dessus.
Mme Rinfret (Marie) : C'est vrai.
Oui.
M.
Jolin-Barrette : Moi, ce que
je dis, c'est qu'avec Arrima, pour les gens qui sont en emploi ici, qui sont
sur le territoire québécois, on va
les inviter prioritairement. Donc, là-dessus... Et je les invite rapidement à
déclarer leur intérêt et à faire en sorte qu'on puisse les inviter. Mais, juste
pour mettre les choses claires, avec le PRTQ, il n'y avait aucune garantie.
Et, l'autre
élément, c'était une situation où ils sont temporaires, le statut est temporaire.
Notre objectif, éventuellement, c'est de s'assurer de la permanentisation de
toutes ces personnes-là qui répondent aux besoins du marché du travail.
Mais je pense qu'on se rejoint là-dessus.
Mme Rinfret (Marie) : Mais, là où il
faudra faire attention, M. le ministre, et j'ai déjà passé le message il y a deux ans... Le diable est dans les détails. Et, à
cet égard-là, il va... Je vous présente ces dossiers, vous précisez votre pensée,
c'est parfait. Maintenant, il n'en demeure
pas moins que ces personnes-là auront avancé des sous, et là leur dossier va
être supprimé. Ils ne seront pas basculés automatiquement dans Arrima.
Ils vont devoir éventuellement faire à nouveau des déboursés. Est-ce que les
tests linguistiques qu'ils avaient passés il y a deux ans vont toujours être
valides dans le système Arrima? C'est des
inquiétudes qui sont vécues au quotidien par les personnes qui, au moment où on
se parle, sont en emploi au Québec.
Ils y vivent, ils y contribuent comme... au sein de la société québécoise. Leur
permis de travail, qui dépend du
certificat de sélection du Québec... On ne sait pas trop, en octobre 2019,
est-ce qu'Arrima va être en fonction. Est-ce
que je vais avoir reçu mon certificat de sélection, dans l'hypothèse, bien sûr,
où il me sera délivré? C'est toutes des situations, M. le ministre, qui,
au-delà des dossiers, concernent des personnes qui vivent au Québec, qui ont
fait le choix de contribuer à notre
société et qui malheureusement, tout à coup, se retrouvent dans le vide et
n'ont pas l'heure juste, parce que la situation est en mouvance, là.
Ce qui fait que la proposition, la
recommandation qu'on formule rejoint ce que vous me dites, en ce sens que les personnes qui vivent au Québec seraient
traitées prioritairement dans Arrima. Moi, ce que je vous propose, c'est que les
personnes qui vivent au Québec soient traitées prioritairement dans le système
actuel, donc qu'elles n'aient pas elles-mêmes à reprendre les démarches, à
reformuler, à remplir à nouveau les formulaires, à attendre de la part du ministère une invitation. Le dossier, il est, pour
la plupart du temps, complet. Ce n'est pas un nouveau dossier qui a été déposé
il y a quelques semaines, c'est un dossier complet qui n'attend peut-être
qu'un examen d'un fonctionnaire puis
une décision. Alors que, si on lui
dit tout de go : On supprime votre dossier, retournez dans Arrima, vous
allez avoir une voie royale, bien, il faut quand même reprendre toutes les
démarches, mettre encore une fois la
main dans ses poches, décaisser des
sous, reprendre des tests de français. Bref, on ne facilite pas la vie à des gens qui déjà
occupent des emplois, dans des emplois
où il y a une pénurie de main-d'oeuvre, puis qui
contribuent à la société québécoise avec nous, en l'occurrence dans le
dossier qui nous a été soumis depuis trois ans.
M. Jolin-Barrette : Je comprends et je vous entends. Quelques points, par
contre. Premier point, dans le Programme régulier
des travailleurs qualifiés, et c'était là avant que j'arrive
aussi, les tests de français, après deux ans, il fallait que les gens les refassent. C'était la norme administrative. On est en train de regarder ça,
là, mais c'était la réalité. Puis, à cause que les délais étaient pas mal plus que deux ans, en moyenne
36 mois, ça veut dire que tous les candidats devaient repayer le
test de français. Ça, c'est une réalité, j'en ai pris acte, puis on est en
train de regarder ça. Premier élément.
Alors, pour
ce qui est de la question des coûts rattachés au test de français, je comprends
votre argument, mais il y a des
nuances à apporter là-dessus, parce que, de toute façon, les tests de français
auraient dû être renouvelés. Premier
élément.
Deuxième élément, le permis de travail fédéral, le
renouvellement n'est pas conditionnel au CSQ. Le fédéral fait ses renouvellements, ça touche uniquement le
fédéral, mais le fait que le CSQ soit émis, ce n'est pas ça qui rentre en ligne
de compte. Donc,
l'émission du CSQ ne fait pas en sorte que vous renouvelez le permis fédéral.
Les deux, ce n'est pas lié puis ce
n'est pas conditionnel. Parce que, quand vous dites : Celui-ci est
habituellement conditionnel à la détention d'un certificat de sélection
du Québec, ce n'est pas le cas, ce n'est pas exact. Ça fait que là-dessus on ne
s'entend pas.
Sur le fait de dire :
Ils sont en emploi, je comprends, les gens qui vous ont interpelée, ceux-ci
étaient en emploi. Ça ne veut pas dire que tous les candidats qui sont au
Québec sont en emploi nécessairement.
L'autre élément
aussi, parmi les 3 700 demandeurs principaux, les demandeurs qui ont
fait leurs demandes au Québec, un, on ne
sait pas combien il y en a encore au Québec; deux, on ne sait pas combien sont
en emploi; trois, c'est pour ça qu'on instaure notamment, dans le projet
de loi n° 9, un suivi, une traçabilité, un parcours d'accompagnement
personnalisé, justement pour s'assurer de l'intégration des personnes
immigrantes.
Ça
fait que c'est quelques nuances que je souhaite apporter. Mais je vous entends
bien puis je suis très sensible à la réalité
des personnes qui sont sur le territoire québécois, qui veulent demeurer sur le
territoire québécois, et le choix du gouvernement,
c'est de les inviter prioritairement dans Arrima. Et, pour ce qui est de la
déclaration d'intérêt, c'est gratuit, on
rembourse les gens et on va inviter prioritairement ces personnes-là. Donc, à
ce stade-ci, le gouvernement est dans cette position-ci, mais je suis
sensible aux arguments que vous soulevez.
Je ne sais pas si
j'ai des collègues qui veulent intervenir.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Il n'y a personne
qui s'est signifié. Ah oui! Peut-être la députée des Plaines. Allez-y.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je vous invite à prendre la parole.
Mme Lecours
(Les Plaines) : C'est beau? Je suis heureuse de faire votre rencontre,
Mme Rinfret, mesdames et messieurs.
Il
y a un aspect aussi, dans le projet de loi n° 9, que j'aimerais que vous
abordiez, parce que, bon, j'imagine que vous allez être d'accord avec moi qu'une intégration réussie, c'est un
gain économique, mais surtout, c'est un gain humain aussi pour la société québécoise. Et, à cet égard,
justement, le projet de loi n° 9 vise également le principe de
l'intégration réussie. Il y a des
services qui sont offerts actuellement. J'aimerais vous entendre sur la qualité
de ces services-là. Et ma deuxième
question, c'est : Comment pourrait-on les améliorer davantage, justement,
pour régler certaines de ces problématiques?
• (17 h 30) •
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, au moment où on se parle, les interventions que nous avons
faites auprès du MIDI portaient
davantage puis presque essentiellement, je vous dirais, aux délais relatifs à
la délivrance du certificat de sélection du Québec. D'entrée de jeu, dans mon allocution, j'ai mentionné
souscrire aux objectifs visés par le projet de loi. Et, à cet égard-là, bien
sûr, l'intégration, tout comme l'adéquation avec les besoins du marché du
travail, c'en fait partie, et ça, on
le salue. On l'a demandé d'ailleurs, déjà, à plusieurs reprises. Et on
considère que ça répond aux recommandations qu'on a pu déjà formuler au ministère de mieux
planifier, de mieux organiser, de mieux orchestrer les demandes en immigration
pour, justement, y avoir une adéquation.
Il
est important que vous sachiez que nous n'avons pas compétence sur les
partenaires qui peuvent offrir des services aux personnes immigrantes.
Donc, les gens qui, par exemple, offrent des cours de français, donc tout ce
qui a trait à la francisation, nous n'avons pas compétence. Donc, je ne peux me
prononcer sur la qualité des services qui y sont offerts.
Mme
Lecours (Les Plaines) : Je comprends votre réserve. C'est juste que,
quand je regarde le candidat que ça fait trois ans qu'il est ici, il détient un diplôme universitaire, et il a
même suivi des cours de français, puis il ne se qualifie pas, je me
disais : Est-ce qu'à quelque part c'est une question d'offre qui n'est
pas... disons, qui n'est pas arrimée, pour faire un jeu de mots, avec
les besoins?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, c'est une hypothèse, et j'aurais tendance effectivement à
l'explorer. Maintenant, pour être
admissible au Programme sur l'expérience québécoise, l'exigence du français est
élevée, là. On n'est pas dans le
langage courant. Ce qui fait que, bien, à cet égard-là, il y a des gens qui ne
se qualifient pas, ne passent pas ces tests de français parce que, bien, ils occupent un emploi, ils ont une famille,
ils n'ont pas le temps d'aller suivre les cours qui leur permettraient
d'acquérir un niveau plus avancé du français mais qui par ailleurs leur permet
d'obtenir un certificat de sélection du Québec en vertu du Programme régulier
des travailleurs qualifiés. Voilà.
Mme Lecours (Les
Plaines) : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions du
groupe formant le gouvernement? M. le ministre, je vous donne la parole.
M.
Jolin-Barrette : Juste un autre détail. Dans votre mémoire, vous dites
d'informer les gens. On leur a envoyé deux
courriels, dans leurs dossiers, à l'effet du suivi qu'il fallait apporter à
leurs dossiers. Donc, pour toutes les personnes, on les oriente vers le programme régulier... vers Arrima ou vers le
Programme de l'expérience québécoise. Et je le dis et je le répète, pour les gens qui vont vouloir venir au
Québec, en lien avec les besoins du marché du travail, on va les inviter
par Arrima. Donc, toutes les personnes ont
été contactées par courriel déjà pour connaître le suivi associé à leurs dossiers.
Mme
Rinfret (Marie) : Si vous me
permettez, M. le ministre, je le sais parce que les gens nous transmettent, de fait, les courriels qu'ils ont reçus. Je dois
cependant vous signifier, puis je vais le dire comme je le pense, le manque
d'empathie reçue de la part des
personnes qui reçoivent le courriel, qui est assez anonyme, qui ne leur permet
pas de penser qu'ils peuvent être accompagnés dans cette transition.
Vous savez,
les gens qui font appel au Protecteur du citoyen, c'est, à terme, leur ultime recours.
Ils se sentent absolument démunis
dans cette situation et, bien qu'informés, ils n'ont pas l'impression d'avoir
l'heure juste, ils ne savent plus
trop vers où se retourner, qu'est-ce que ça veut dire, «Arrima». Ils ont déposé
leurs dossiers, ils ont essayé de savoir où en étaient leurs dossiers,
ce n'est pas trop évident. De sorte que...
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste une trentaine de secondes.
Mme
Rinfret (Marie) : ... — merci — de sorte qu'il y a peut-être, là également,
un enjeu de communication, de la part du ministère, à l'égard des
personnes qui seront visées, qui sont visées par la transition dont on parle
aujourd'hui, quelles qu'elles soient, quelles qu'elles soient.
M. Jolin-Barrette : Je comprends. Cela étant dit, l'information est
disponible puis elle est communiquée. Donc, je comprends, ce que vous nous dites, c'est : faire preuve de
davantage... Bien, en fait, le
courriel, il m'apparaît clair, mais ce que vous nous dites, c'est qu'il
pourrait être plus clair.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Je dois céder la parole à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme Anglade : Moi, ce que j'entends, Mme la Protectrice du citoyen — je
vous salue, et ça, de même que vos collègues — et
en tout respect pour le ministre, moi, ce que j'entends, c'est que les communications ne fonctionnent pas bien présentement. Et moi, à titre de députée, je le sais parce que
des gens nous en parlent constamment. Et ce n'est pas les deux courriels qu'ils ont reçus qui feraient
l'affaire, de toute façon, parce
qu'ils ont besoin d'avoir davantage
d'information, d'être mieux
guidés.
Et c'est
toute la complexité, en fait, du système d'immigration, évidemment. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut traiter de manière cavalière, c'est un processus
qui est long, qui est complexe. Et, quand on commence à rentrer dans le détail, comme vous le disiez vous-même,
entrer dans les détails, c'est là qu'on constate qu'il y a un travail de fond qui
est à faire, qui doit être
respectueux de la personne. Puis je pense que c'est ce que les gens expriment.
Du moins, c'est ce que je lis dans votre rapport.
J'aimerais revenir sur un certain nombre de
choses, les inventaires, premièrement, 2011, il y avait environ près de 100 000 dossiers en inventaire et, au
fil des années, qu'il y a eu une diminution de ces inventaires-là. Et je
n'aime pas utiliser le terme
«inventaire», mais c'est quand même... c'est des inventaires de dossiers, même si on
parle de personnes, qui ont diminué
au fil du temps. Donc, depuis 2011, vous vous êtes exprimée, j'imagine, sur la question,
et de dire qu'il fallait absolument
qu'il y ait une réduction de ce nombre-là à terme. C'est ce que je comprends de
ce que vous dites puis de vos rapports précédents.
Mme Rinfret (Marie) : Absolument.
Mme Anglade : Et, lorsqu'on était à 95 000, année en année, il y a eu des réductions. L'année dernière,
il y a eu 20 000 dossiers
de traités dans la réduction des inventaires. Donc, il y a eu une réduction
significative qui s'est faite au cours des dernières années également,
vous le reconnaissez.
Lorsque l'on
parle des 18 000 dossiers des personnes qui sont touchées par ça,
j'entends le ministre qui nous dit que, dans Arrima, les personnes qui sont
installées au Québec vont avoir une priorité. Cependant, ce que l'on sait de la
part du sous-ministre adjoint, c'est que
c'est 400 dossiers qu'ils ont l'intention de traiter dans Arrima cette
année. C'est le chiffre que nous avons. Est-ce que vous avez la même
compréhension ou vous n'avez pas de visibilité là-dessus autre que ce
chiffre qui a été partagé la semaine dernière par le sous-ministre adjoint du
ministère de l'Immigration?
Mme Rinfret
(Marie) : Écoutez, c'est le
seul chiffre qu'on... On en a pris acte, nous aussi, au moment, là, où on l'a
entendu. De la même manière, il y a des chiffres également qui apparaissent,
sur les seuils, les cibles d'émission de certificats de sélection du Québec, dans la décision de la Cour
supérieure du Québec, qui découlent d'un affidavit, d'une déclaration
assermentée, là, du sous-ministre adjoint.
Mme Anglade :
D'accord. Dans le document que vous nous présentez, vous avez des
recommandations et vous dites que l'article 20 du projet de loi
n° 9 devrait être modifié pour prévoir le remboursement des droits
exigibles, mais également le coût des tests
linguistiques. Vous ne faites pas référence, par exemple, à d'autres coûts
additionnels comme les services de
traduction, comme la certification de documents. Est-ce qu'il y a une raison
pour laquelle vous ne faites pas référence à ces autres coûts qui sont
quand même associés à la demande?
Mme Rinfret
(Marie) : C'est que ces
autres coûts, ils pourront... Dans le fond, les documents pourront être utilisés
dans le cadre d'une nouvelle demande. Comme par exemple, si la personne veut
déposer une nouvelle demande dans le système
Arrima, elle aura déjà les documents authentifiés. Cependant, les tests
linguistiques, comme le ministre nous l'a dit tout à l'heure, eux, ils
ont une date de péremption. C'est qu'après deux ans on est tenu de passer de
nouveaux tests. Donc, une personne qui était sur le point
d'obtenir son certificat de sélection du Québec et dont les tests linguistiques
avaient été passés il y a 18 mois, par
exemple, bien, si elle doit se réinscrire, il va falloir qu'elle passe de
nouveaux tests, ce qui va engendrer des nouveaux coûts pour la personne,
pour les mêmes tests.
Mme
Anglade : Ça, c'est à supposer aussi que la personne qui a fait sa
demande puisse de manière... puisse faire sa déclaration d'intérêt de
toute façon dans Arrima. Mais, si c'est...
Mme Rinfret (Marie) : Bien sûr.
• (17 h 40) •
Mme Anglade : O.K. De toute façon.
Bien, parce que ce qui nous a été présenté hier, c'est qu'au-delà de ces montants-là puis de ce que vous suggérez... c'est
qu'au-delà du 19 millions de remboursement pour supprimer l'ensemble
des dossiers il y aurait des coûts
additionnels. Et hier il y a des avocats qui sont venus nous parler d'un risque
de poursuite, également, de la part
des personnes qui sont touchées par ça, parce que, justement, elles
demanderaient à avoir compensation pour
certains des frais si leur dossier n'est tout simplement pas traité. Est-ce que vous avez un commentaire par rapport à ça? Peut-être que c'est trop juridique
pour vous pour commenter, mais je vous soumets quand même la question.
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez,
pour ma part, j'ai le souhait profond que les gens n'auraient pas à déposer de
demande auprès des tribunaux judiciaires. Ils peuvent toujours
s'adresser au Protecteur du citoyen s'ils ont le sentiment qu'un préjudice leur a été causé. Maintenant,
dans le projet de loi, à l'article 20, il y a
une clause, un alinéa qui prévoit, là, l'absence de recours, alors il faudra
voir. Les gens ont à exercer les recours auxquels ils pensent qu'ils ont droit,
en somme.
Mme
Anglade : Mme la protectrice, vous êtes habituée à recevoir
des plaintes, vous êtes habituée, c'est ça, votre... une partie de votre rôle. Et on dit : «Depuis
la présentation du projet de loi — ça ne fait pas encore trois semaines qu'il a
été déposé — le
Protecteur du citoyen a reçu de nombreuses plaintes...» Est-ce que vous pouvez
qualifier de «nombreuses plaintes» par
rapport à ce que vous voyez d'habitude? Est-ce que c'est un nombre très
important? Ça se compare à quoi, en général, dans ce que vous avez vécu
par le passé? Vous avez pas mal d'expérience.
Mme
Rinfret (Marie) : C'est un
nombre qui est très important par rapport au volume de plaintes auquel on est
habitués d'avoir concernant le ministère. Pour, donc, l'espace de deux
semaines, là, on a reçu au-delà de 60 plaintes qui concernent le
projet de loi n° 9 et la situation qui est soulevée
par le projet de loi, en fait par l'article 20 essentiellement.
Mme
Anglade : Très bien. Juste pour clarifier, les cas que vous avez
mentionnés, je sais que le ministre n'était pas en accord, donc je veux juste clarifier une chose. Alors : «Un
candidat, arrivé au Québec il y a trois ans, a une offre d'emploi
validée par un employeur[...]. Son permis de travail expire en octobre[...]. Il
s'est plaint à nous parce qu'il craint de devoir
quitter le Québec.» En quoi est-ce que c'est directement lié à la décision de
ne pas traiter le dossier? Je veux juste bien comprendre. Est-ce que
c'est... Parce qu'il dit : Si j'avais le CSQ maintenant, je n'aurais pas
ce problème-là. C'est simplement ça?
Mme Rinfret
(Marie) : Oui, parce qu'avec
son CSQ, son permis de travail, en fait, ça simplifie. Et le ministre a raison quand il vient préciser l'élément qui se
retrouve dans mon allocution, ce n'est pas conditionnel, mais ça vient
simplifier l'obtention du permis de travail par le gouvernement fédéral.
Mme
Anglade : Alors, en somme, votre recommandation très forte étant de
traiter les 18 000 dossiers, tant d'un point de vue humain que d'un point de vue du système. Parce que vous
êtes habituée à voir le système et les transitions, et vous savez que les transitions peuvent être
difficiles. Donc, en somme, ce que vous dites, c'est : Traitez les
18 000 dossiers le plus
rapidement possible pour qu'on puisse maintenant passer à Arrima. En fait,
c'est très... ça se résume à ça, et c'est essentiellement le coeur de
votre préoccupation aujourd'hui. Ce n'est pas la nouvelle loi, ce n'est pas le
système Arrima lui-même, c'est vraiment cette transition qui est présentement
mal gérée. C'est ça?
Mme
Rinfret (Marie) : Bien, ce
qu'on demande, c'est de clarifier effectivement la situation pour les
45 000 personnes visées par
les 18 000 dossiers. Dans les recommandations qui sont formulées
devant vous aujourd'hui, il y a deux voies de passage. Une première qui vise les personnes qui vivent au Québec :
on demande que leurs dossiers soient traités en priorité et, conséquemment, qu'elles n'aient pas à
reprendre l'ensemble de leur démarche et des procédures dans le nouveau système
Arrima. Et, quant aux
14 300 autres dossiers, qui, pour leur part, visent approximativement
39 000 personnes, elles ne vivent pas encore au Québec, ce
qu'on demande, c'est effectivement que les droits exigés soient remboursés,
avec intérêt, et également que les tests
linguistiques qu'ils ont dû assumer et qui seront périmés si elles déposent une
nouvelle demande dans le système Arrima, par exemple, leur soient
remboursés.
Mme
Anglade : Parfait. Je vais maintenant céder... Je vous remercie, donc,
de vos commentaires. J'aimerais céder la parole à un de mes collègues.
D'abord, je vais commencer par le député de Jacques-Cartier.
La Présidente (Mme Chassé) :
...Jacques-Cartier.
M. Kelley : Mme la
Présidente, nous avons combien de temps qui reste?
La
Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste six minutes.
M.
Kelley : Six minutes? Parfait. Juste une question. Après votre
échange avec le ministre, est-ce que vous pensez que le MIDI ou le
ministre va présenter ses excuses envers les personnes qui ont reçu des... deux
courriels?
Mme Rinfret (Marie) : Ma recommandation s'applique à l'ensemble des personnes,
donc aux 45 000 personnes visées par les 18 000 dossiers. Je
pense que, comme société, on doit être en mesure d'exprimer aux gens envers
qui on a créé des attentes, hein... Les personnes
qui ont déposé une demande de certificat de sélection du Québec
attendent du MIDI, du gouvernement du Québec que leurs dossiers soient
étudiés, ils attendent une décision sur leurs demandes.
Et
conséquemment, aujourd'hui, on fait le constat qu'en raison de l'inventaire,
en raison du volume de dossiers et compte
tenu des seuils d'immigration qui sont fixés on ne pourra pas les traiter, de sorte qu'on souhaite
passer immédiatement au nouveau système de gestion des demandes
d'immigration, appelé Arrima, et on veut faire maison nette. Et, par conséquent,
on supprime les 18 000 demandes, les 18 000 dossiers.
Je
pense qu'au minimum on doit leur écrire, leur expliquer cette situation, leur
rembourser les droits exigibles qu'ils ont payés, avec intérêt, leur rembourser
les tests linguistiques qu'ils devront repasser à nouveau, puisque... dans
l'hypothèse où ils veulent appliquer
sur le système Arrima, bien leur expliquer le système Arrima et les inviter à
nous faire part de leurs demandes, dans l'hypothèse où ils veulent
toujours venir au Québec, bien sûr.
M.
Kelley : O.K. Mais est-ce que vous pensez que le ministère va
présenter ses excuses ou est-ce que vous n'avez pas vraiment cette
confiance présentement?
Mme Rinfret (Marie) : Moi, je pense que oui, je pense que, comme... C'est une recommandation
que l'on formule. Je pense que toute
personne qui a fait un projet de vie de venir s'installer au Québec et dont on
souhaite qu'elle réapplique dans notre système Arrima, bien, devrait
effectivement recevoir des excuses de la part du ministère pour
expliquer : Malheureusement, on ne peut traiter votre dossier parce
qu'on... raison x, trop de volume, trop de ceci, on a installé un nouveau système qui va mieux fonctionner, puis on
vous demande de nous manifester votre intérêt, et, si on a besoin de vous,
on va vous inviter à poser votre dossier, qui sera à ce moment-là étudié.
M. Kelley :
Merci.
La Présidente (Mme
Chassé) : J'invite le député de Nelligan à prendre la parole.
M. Derraji :
Il me reste combien de temps, s'il vous plaît?
La Présidente (Mme
Chassé) : Trois minutes.
M.
Derraji : Trois minutes.
Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre rapport. À la lumière de la recommandation 4, quand j'essaie de la lire, j'ai comme l'impression
que vous avez fait une lecture que le MIDI n'était pas prêt à gérer une
crise et que cette crise, malheureusement,
de déchiqueter les 18 000 dossiers, a des conséquences très graves,
des conséquences très graves à court
terme, vu qu'il y a des gens qui sont déjà sur le territoire, mais aussi des
vies humaines, des gens en attente d'une réponse. Pensez-vous qu'en tant
que votre rôle de blâmer le gouvernement et de blâmer le ministère par rapport à ce qui vient d'arriver c'est uniquement
des excuses qui vont atténuer un peu ce qu'on est en train de faire vivre à ces
gens?
• (17 h 50) •
Mme Rinfret (Marie) : Je vous remercie de votre question parce que ça me permet de préciser
mon rôle et de venir préciser
également que je ne suis pas ici pour blâmer personne. À titre de Protectrice
du citoyen, je vous fais part de mon expérience,
de l'expertise que j'ai pu recueillir, que mon équipe a pu recueillir au fil
des 50 ans de notre existence. Ça, c'est une chose.
Maintenant, la
recommandation 4, elle répond à un grand souhait d'empathie, et également
à obtenir pour les personnes qui veulent
venir au Québec d'avoir l'heure juste, de bien comprendre ce qui s'est passé le
9 ou le 7 février 2019, à savoir : on a fait un constat, on a
trop de dossiers et on a mis en place
un nouveau système qui va mieux fonctionner, alors on vous avise qu'on a
dû supprimer votre dossier, on vous rembourse des frais payés, on vous
rembourse pour les tests linguistiques que
vous avez dû assumer et par ailleurs on vous invite à manifester votre intérêt
au sein du nouveau système Arrima.
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste une trentaine de secondes.
Mme Rinfret
(Marie) : Merci. C'est l'objectif visé. Cette solution-là, elle se
veut une réponse à l'insécurité, à l'inquiétude des gens qui vont voir leurs
dossiers supprimés.
M. Derraji :
Merci.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à la députée de
Marie-Victorin.
Mme Fournier : Merci, Mme
la Présidente. Merci beaucoup pour votre présentation. On sent toute la sensibilité que vous avez à l'égard du présent dossier, donc
je trouve que c'est comme un cri du coeur, puis ça fait du bien de vous
entendre.
Je
vais vous amener d'abord sur ce que vous avez dit dans votre présentation, mais
ce qui est également mentionné à la page 3 de votre mémoire, sur le fait que votre rapport, en 2016-2017,
sonnait déjà, disons, l'alarme sur la question des demandes reçues en ligne. Selon vous... Bien qu'on
ne puisse pas revenir en arrière, mais qu'est-ce que le gouvernement aurait dû faire à l'époque
pour corriger tout de suite le tir? Ça peut nous servir de leçon peut-être pour
l'avenir.
Mme Rinfret
(Marie) : Je vous dirais que, et, à ce titre-là, le système Arrima est
bien réfléchi, au moment... L'inventaire a
été causé par un volume de demandes d'immigration qui était beaucoup
plus grand que les seuils, donc que notre, je vais dire, capacité
d'accueil en fonction des cibles, des seuils, des quotas, peu importe comment
on les appelle, d'immigration à recevoir dans tel programme ou dans tel autre.
Et c'est ce qui fait qu'année après année, à partir du moment où le seuil était atteint, on mettait en suspens le reste des
dossiers qu'on avait reçus et on reprenait l'étude des dossiers l'année suivante, quand on avait... quand on
mettait à niveau... qu'on recommençait, dans le fond, la délivrance
des certificats de sélection du Québec — excusez-moi.
Mme
Fournier : Donc, à ce
moment-là, le problème devrait être réglé par le nouveau système, comme
vous le dites?
Mme Rinfret
(Marie) : Oui.
Mme Fournier :
Bon. Tant mieux. Vous avez parlé évidemment des nombreuses plaintes que vous
avez reçues concernant la décision d'annuler
les 18 000 dossiers. Nous aussi, on a beaucoup d'appels dans nos
bureaux de circonscription. Mes attachés politiques me faisaient remarquer qu'on
avait rarement vu ça, là, pour un dossier, qu'il y ait autant de gens qui nous interpellent. Puis, en fait, c'est qu'il
y a beaucoup, beaucoup d'incertitude, parce qu'il y a même des gens qui viennent
nous voir ou qui nous téléphonent qui ne sont pas visés par l'élimination des
dossiers. Puis c'est d'ailleurs ce que nous rapportaient
certains organismes un peu plus tôt, aujourd'hui, également. Est-ce que c'est
votre cas aussi? Est-ce que vous recevez des appels, des plaintes des
gens qui ne sont pas visés, mais qui, par l'incertitude causée ou par la
mauvaise communication gouvernementale, pensent qu'ils vont perdre, par
exemple, leurs certificats de sélection du Québec?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, c'est notre rôle comme ombudsman, lorsqu'on reçoit ce type
d'appel, et, oui, bien sûr, on en
reçoit, on réfère les personnes aux bons organismes, aux bons endroits pour
qu'ils puissent obtenir l'aide qu'ils recherchent et le support qu'ils
recherchent.
La Présidente (Mme
Chassé) : Je veux seulement vous informer qu'il vous reste une minute.
Mme Fournier :
Bien, une question pour terminer. Est-ce que vous donneriez comme
recommandation au gouvernement qu'à l'avenir
il puisse réfléchir davantage ses communications gouvernementales en termes
humains plutôt qu'en termes administratifs comme il a semblé le faire
dans le projet de loi n° 9?
Mme Rinfret (Marie) : Encore une fois, et je pense qu'ici ça se pose avec encore plus
d'acuité, de planifier, de gérer la
transition. Et moi, je dis : Planifiez, gérez la transition en plaçant la
personne au coeur de la prestation de services. C'est ça qui va devenir
primordial et c'est ça qui va permettre aux personnes d'être rassurées dans
l'administration de l'application du projet
de loi, lorsqu'il sera adopté, ou encore du système Arrima, ou des transferts,
ou de la bascule, selon l'orientation que vous aurez prise à titre de
législateur en ce qui concerne le projet de loi n° 9.
Mme Fournier :
Merci.
La Présidente (Mme
Chassé) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de
Laurier-Dorion.
M.
Fontecilla : Merci pour
votre exposé très, très clair. Et, justement, mettre la personne au coeur de la prestation de services... Est-ce que vous qualifieriez les agissements du gouvernement, du MIDI, de manque d'humanité par rapport au traitement de ces
dossiers-là?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, je ne suis pas devant vous pour qualifier les agissements de
qui que ce soit. Ce que je
souhaite... On est en présence d'une situation que j'ai qualifiée de critique dans le cadre de
mon allocution. On a la chance, moi, j'ai la chance de vous partager les
constats que j'ai faits à partir de l'expérience, à partir de notre expertise,
et j'invite les... je vous invite, à titre de parlementaires, mais j'invite également
l'administration publique à démontrer... particulièrement dans ce dossier-ci, parce qu'on la sent, l'insécurité, on l'entend,
les inquiétudes également, de faire preuve d'empathie, donc de placer vraiment, ici, les personnes au coeur de la
prestation de services pour s'assurer que, dans toute communication comme dans toute décision, on se
mette à leur place, puis qu'on comprenne qu'ils vont comprendre ce qu'on veut dire, puis qu'on va les accompagner
comme on veut le faire avec les objectifs prévus dans le projet de loi
n° 9.
M. Fontecilla :
Vous n'avez pas parlé du critère de l'âge, qui joue quand même un rôle
important dans le pointage de la grille de sélection. Est-ce que vous pensez
que cette question-là, l'âge de la personne, dans le traitement du dossier,
devrait... l'âge considéré, ça devrait être l'âge au moment du dépôt de la
demande?
Mme Rinfret
(Marie) : C'est pour cela notamment, en ce qui concerne les personnes
qui vivent au Québec déjà et qui sont en
attente d'une décision sur leur demande de certificat de sélection du Québec,
qu'on demande que leur demande soit
traitée en fonction des conditions au moment où ils ont déposé leur demande,
plutôt qu'effectivement si on leur demande de refaire une nouvelle
demande... Ça fait beaucoup de mots «demande», hein? Mais, si on exige qu'ils
déposent leur nouvelle demande sur le système Arrima, bien là, peut-être qu'ils
ne se qualifieront plus, effectivement.
M. Fontecilla : Justement, le
ministre invite les gens qui restent au Québec à déposer dans Arrima. On sait qu'il y a 6 000 personnes et on sait en
même temps qu'il va y avoir 400 permis... certificats de sélection du
Québec émis à la fin de l'année.
Est-ce que ça vous paraît juste, équitable comme traitement, là, pour ces
personnes-là, comme voie de solution, là?
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste une minute.
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez, à
cet égard-là, je ne suis pas ici, encore une fois, pour me prononcer sur les
seuils, les cibles d'immigration. Il
devra y avoir... Quelle que soit la solution que vous reteniez, qui sera
retenue, le traitement des demandes,
de l'ensemble des demandes devra être équitable et respectueux des personnes en
fonction de leur statut et du type de programme sur lequel ils
appliquent.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, merci beaucoup. Nous vous remercions
pour votre contribution aux travaux de la commission.
La commission ajourne ses travaux. On se
retrouve demain, jeudi 28 février, après les affaires courantes.
(Fin de la séance à 17 h 59)