(Onze heures vingt-sept minutes)
Le Président
(M. Matte) : ...la Commission
des relations avec les citoyens ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à tout le personnel dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils.
La commission
est réunie afin de procéder aux consultations
particulières et aux auditions
publiques du projet de loi n° 143, Loi
visant à améliorer la qualité éducative et à favoriser le développement
harmonieux des services de garde éducatifs de l'enfance.
J'ai besoin de votre consentement, compte tenu
qu'on débute avant 11 h 30, puis on avait été convoqués pour
11 h 30. Pas de problème? Ça va?
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, il n'y a aucun remplacement.
Auditions (suite)
Le
Président (M. Matte) : Bien.
Ce midi, nous entendrons l'Ordre des psychoéducateurs et des
psychoéducatrices du Québec
ainsi que l'Association des éducatrices du milieu familial du Québec.
Donc, on commence à l'heure, donc ça va très bien pour ça.
Je souhaite la bienvenue aux représentants de
l'Ordre des psychoéducateurs-éducatrices. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour vous faire
entendre, puis par la suite on va procéder à une période d'échange. Sans plus
de préambule, je vous invite à vous présenter et à débuter.
Ordre des psychoéducateurs
et psychoéducatrices du Québec (OPPQ)
M. Leclerc(Denis) : Merci. Donc, M. le Président de la commission, M. le
ministre de la Famille — et j'en profite pour vous féliciter pour votre nomination récente — Mmes
et MM. les parlementaires, mesdames et messieurs, je suis Denis Leclerc, président de l'ordre, et je suis
accompagné de Marie-Christine Harguindéguy-Lincourt, coordonnatrice au développement
et au soutien professionnel à l'ordre.
L'Ordre des
psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec remercie la commission de l'invitation qui lui a été faite de commenter le projet de loi
n° 143. L'ordre a été créé en 2010, et les psychoéducateurs font partie du
système professionnel depuis 2000. À ce
jour, notre organisation compte plus de 4 600 membres, dont 85 %
travaillent dans le secteur public,
principalement dans les secteurs de la santé et des services sociaux ainsi que
de l'éducation. Une grande proportion
d'entre eux ont, dans le cadre de leur travail, des liens directs ou indirects
avec le secteur de l'éducation à la petite enfance et sont donc
concernés par le projet de loi n° 143. Notre ordre est d'ailleurs l'un des
signataires de la Déclaration pour la reconnaissance du droit de tous les
enfants à des services éducatifs de qualité dès la naissance, déclaration qui
découle du Sommet sur l'éducation à la petite enfance qui s'est tenu en mai
dernier.
• (11 h 30) •
D'entrée de jeu, je souligne que l'ordre est en
accord avec l'essentiel des principes et propositions du projet de loi n° 143. L'ordre y voit un effort
louable visant à rendre disponibles pour les parents une qualité et une
diversité de services de garde comparables pour l'ensemble du Québec.
Nous expliciterons maintenant notre position et nous introduirons certaines
recommandations que vous retrouverez dans notre mémoire.
L'ordre est
en accord avec l'insertion d'un article traitant de la promotion de la réussite
éducative. Nous appuyons cette
initiative, car elle souligne l'importance de la transition vers l'école pour
la réussite scolaire et sociale future des jeunes enfants. Nous insistons toutefois sur le fait que
les services de garde éducatifs à l'enfance, que nous appellerons
services de garde, doivent demeurer des
lieux de stimulation du développement, où l'apprentissage actif passe par le jeu, sans devenir des lieux de
scolarisation précoce.
La mission
d'un ordre étant la protection du public, notamment en contribuant au développement des services de qualité
offerts à la population, nous accueillons favorablement les ajouts
touchant la qualité de la prestation des services de garde.
Sachant que la qualité de ces services est souvent très variable, ce qui est
souligné par plusieurs auteurs, nous sommes très préoccupés de l'impact de ces écarts, surtout pour les clientèles
les plus vulnérables. La fréquentation d'un service de garde de
qualité influence positivement et à long terme le développement des enfants, tout particulièrement ceux provenant de milieux socioéconomiquement défavorisés. Le processus
d'évaluation et d'amélioration de la
qualité prévu au projet de loi deviendra donc un facteur positif dans la
trajectoire de développement de ces enfants.
Concernant les obligations du prestataire du
service de garde d'assurer la santé, la sécurité et le bien-être des enfants, l'ajout dans la loi de l'interdiction
d'adopter toute façon de faire ou attitude inappropriée susceptible
d'humilier l'enfant ou de porter atteinte à
sa dignité nous semble des plus justifiés. L'usage de mesures préjudiciables
pour l'enfant peut avoir des conséquences néfastes
sur le développement de celui-ci, tout particulièrement sur les aspects
affectifs et émotionnels.
Bien qu'en
accord avec les principales dispositions du projet de loi, l'ordre souhaite
formuler certaines recommandations reliées à notre mandat de protection
du public ainsi qu'à notre expertise concernant les enfants vulnérables. Comme
mentionné plus tôt, nous sommes favorables à la disposition touchant la
réussite éducative et la transition vers l'école.
L'importance d'intervenir tôt chez les jeunes enfants afin d'influencer
positivement leurs trajectoires développementale,
scolaire et sociale est bien connue, particulièrement pour les enfants
vulnérables. Par ailleurs, la qualité de
la transition vers l'école aura un effet sur l'adaptation au milieu scolaire,
tant sur le plan des apprentissages que sur celui de la socialisation.
Nous croyons donc qu'il serait nécessaire que le ministère propose aux services
de garde des objectifs clairs et des pistes
d'action concrètes, autant pour favoriser la réussite éducative que la
transition vers l'école, incluant des mesures particulières répondant
aux besoins des enfants plus vulnérables.
Comme je l'ai souligné précédemment, l'ordre
salue la disposition concernant le processus d'évaluation et d'amélioration de la qualité des services de garde
annoncée dans le projet de loi. L'ordre aurait cependant souhaité que le
ministère prévoie des évaluations de la qualité basées sur les meilleures
pratiques, à une fréquence prédéterminée, en plus
de celles sur demande du ministre. Nous considérons toutefois que le mécanisme
d'évaluation de la qualité ne doit pas se
limiter à la surveillance. Les services de garde ayant besoin d'accompagnement
doivent être soutenus par le biais d'offres de formation, mais encore
plus par la mise en place de modalités d'accompagnement reconnues plus
efficaces.
Nous trouvons
primordial que les services de garde puissent accueillir des enfants ayant des
besoins particuliers et qu'ils soient
soutenus pour le faire. L'inclusion des enfants ayant des besoins particuliers
doit, selon l'ordre, représenter un axe d'intervention prioritaire pour
les services de garde et le ministère. Un ajout au projet de loi en ce sens
viendrait identifier clairement les attentes
du gouvernement à cet égard. Nous croyons que des orientations, un guide
d'intégration ainsi que des ressources
spécialisées pour soutenir les responsables des services de garde qui intègrent
des enfants ayant des besoins particuliers devraient être mis en place
afin de soutenir cette vision.
Nous souhaitons maintenant aborder la question
de l'encadrement des situations d'expulsion. La décision d'expulser un enfant est lourde de conséquences
dans la vie de cet enfant et de sa famille, particulièrement si ceux-ci
sont vulnérables. Bien que le règlement sur
les services de garde éducatifs à l'enfance prévoie que les centres de la
petite enfance et les garderies doivent avoir une politique d'admission
et d'expulsion des enfants et que le ministère mette à leur disposition une fiche de référence à cet effet,
nous croyons que le projet de loi devrait également inclure un article en
ce sens. De plus, nos pensons qu'il est
également primordial d'agir en prévention pour éviter d'en arriver à expulser
des enfants des services de garde.
Une meilleure compréhension des conditions qui amènent un service de garde à
envisager l'expulsion d'un enfant permettrait, dans bien des situations,
d'éviter d'en arriver à cette solution extrême. Il nous semble donc pertinent
d'ajouter des mesures visant à prévenir et encadrer les expulsions.
Nous demeurons préoccupés des mesures générales
de soutien et de formation continue destinées aux intervenants qui accueillent des enfants vulnérables en services de
garde. Que ce soit pour l'inclusion
d'enfants ayant des besoins
particuliers ou pour prévenir les expulsions, l'importance d'avoir accès à des
ressources spécialisées demeure un enjeu
prioritaire. Nous considérons important que des professionnels puissent soutenir ces
intervenants et l'ordre espère que de
telles mesures seront prévues par le ministère. Ce soutien existe dans certains
cas, particulièrement lorsque l'enfant a reçu un diagnostic précoce et qu'il bénéficie de services du réseau de
la santé et des services sociaux, mais il demeure toutefois limité et ne
comble souvent pas l'ensemble des besoins des services de garde pour soutenir
l'inclusion.
Nous croyons également qu'il est nécessaire de
prévoir des actions qui continueront d'appuyer le travail intersectoriel lors de l'inclusion d'un enfant
ayant des besoins particuliers en services
de garde, notamment
en consolidant la collaboration avec les établissements de santé et des services sociaux et les milieux de garde sans négliger évidemment
le soutien aux parents.
Considérant ce qui précède, l'ordre recommande
au ministère de prévoir le développement d'un réseau de professionnels dédiés, composé notamment de psychoéducateurs, dont la
mission serait d'offrir du soutien aux services de garde et
aux familles qui ne bénéficient pas déjà d'un tel soutien à travers les réseaux
existants. Les psychoéducateurs étant formés
pour intervenir auprès des personnes aux prises avec des difficultés
d'adaptation, leur présence serait donc pertinente pour soutenir les services
de garde et les familles, notamment lorsque des difficultés se présentent dans
le processus d'inclusion et pour préparer la transition vers l'école.
Pour
conclure, nous tenons à saluer l'intention du gouvernement, avec le dépôt du
projet de loi n° 143, d'apporter des mesures législatives visant à la réussite éducative et l'amélioration de la qualité des
services de garde ainsi qu'à assurer encore
davantage la santé, la sécurité et le bien-être des enfants fréquentant ces
milieux. Nous sommes heureux d'avoir eu l'occasion de contribuer aux travaux en lien avec ce projet de loi et
nous espérons que nos réflexions seront utiles aux membres de la
commission. Merci.
Le
Président (M. Matte) : Je vous remercie pour votre exposé, c'était
bien clair. M. le ministre, je vous invite à débuter la période
d'échange.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, on
amorce aujourd'hui notre dernière journée de consultations sur le projet
de loi n° 143. Merci à vous de vous être déplacés pour vos
recommandations, vos observations sur ce projet de loi, je pense, qui est très
important pour l'avenir des services de garde au Québec.
Beaucoup
d'éléments très intéressants dans votre mémoire. Un peu à l'instar de certains
groupes que nous avons entendus hier,
vous nous mettez en garde contre la scolarisation précoce des enfants. Je pense
que vous saluez par contre le fait
que l'on souhaite introduire la notion de réussite éducative dans le projet de
loi, mais en même temps de préserver ce rythme de développement des enfants. Et je peux
vous assurer que c'est véritablement l'intention du gouvernement. En
même temps, ce que l'on souhaite, c'est de favoriser la transition vers l'école
pour que ces jeunes-là, ces enfants-là puissent
bien réussir lorsqu'ils feront leur admission dans les écoles primaires du
Québec. Mais quelle devraient être, selon vous, les paramètres qu'on
devrait garder en tête pour vraiment éviter de tomber dans une scolarisation
précoce?
M. Leclerc
(Denis) : Bien, avant de donner la parole à Mme Harguindéguy-Lincourt,
qui pourra compléter, évidemment, il existe
déjà des réflexions, qui ont été importantes, qui ont été faites au niveau des
programmes des services de garde,
notamment les programmes des CPE, mais qui sont plus larges, qui donnent
plusieurs balises à ce sens. Nous, ce
qui est important pour nous, c'est de garder en tête que la période de la
petite enfance, c'est une période courte mais en même temps constituée d'énormes changements, et chacune de ces
étapes-là, entre un enfant de deux ans et un enfant de trois ans, ça a beau être seulement une année,
déjà il y a des besoins en termes de préparation dans un continuum de
réussite éducative et d'éducation, déjà avec
des besoins différents. Donc, il y a vraiment quelque chose qui est important,
mais toujours en gardant à l'idée qu'on
n'est pas dans la scolarisation trop précoce, comme, bon, vous le dites, mais
plus dans un continuum. J'inviterais
Mme Harguindéguy-Lincourt, pour qui cette expertise-là est plus la sienne,
peut-être de continuer pour compléter la réponse.
• (11 h 40) •
Mme
Harguindéguy-Lincourt (Marie-Christine) : En fait, je pense qu'il y a
deux choses qu'on peut garder en tête
pour s'assurer d'avoir des bonnes balises, c'est-à-dire s'assurer qu'on propose
aux enfants des choses qui conviennent à leur façon d'apprendre. Et comment on apprend entre zéro et cinq ans?
C'est principalement par le jeu. Donc, la façon d'apprendre des choses peut nous guider pour éviter d'être dans une
scolarisation précoce. Je pense aussi qu'il faut tenir compte d'où sont rendus les enfants dans leur
développement et dans leurs intérêts. Donc, si un enfant a un intérêt pour les chiffres et lettres, pourquoi ne pas aller vers ça? Mais, si son intérêt
est ailleurs, je ne pense pas qu'il faut s'en tenir à quelque chose qui est rattaché à des apprentissages qu'ils
feront plus tard à l'école. Il y a des bases qu'ils pourront apprendre, qui sont là, qui sont solides et qui permettront plus
tard de faire ces apprentissages-là. Donc, je pense qu'il faut se
concentrer sur le développement de l'enfant,
sur leurs intérêts, et c'est là qu'on va s'assurer d'avoir mis en place ce
qu'il faut pour qu'ils apprennent bien sans tomber dans une
scolarisation précoce.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Très bien. Alors, évidemment, lorsqu'on parle de
transition vers l'école, il y a la préparation
des enfants en soi, mais on a abordé également hier la question de la communication entre les services de
garde et le milieu scolaire, comment on peut faire suivre l'information sur le
cheminement des enfants. Il peut y avoir des outils
de communication à mettre en place pour faciliter cette transition-là. Donc, la
proposition, hier, elle n'est pas dans le projet de loi, mais c'est quelque chose que nous avons testé avec certains groupes. Ça a été bien accueilli.
Mais on nous met en garde d'éviter de
stigmatiser les enfants, également. Par exemple, il pourrait peut-être
y avoir un risque avec un dossier standardisé des enfants. Mais en même
temps tout le monde convient que c'est important qu'il y ait davantage de communication entre les services de garde et le
milieu scolaire. Alors, est-ce que vous estimez également qu'il y a un
risque de stigmatisation si on met en place
un dossier standardisé de l'enfant, et, si oui, que devrions-nous faire pour
éviter cela?
M. Leclerc (Denis) : Pour ce qui est de la question du dossier standardisé, on ne s'est pas
arrêtés à savoir... on n'a pas
analysé de façon très précise cette proposition-là, donc je ne suis pas en
mesure de vous dire... On pourrait spontanément dire certaines choses, là, mais je ne m'avancerais pas trop là-dessus.
La stigmatisation, elle peut découler de cela, mais elle peut découler de différents autres éléments également, notamment d'enfants qui ont vécu des
difficultés puis qui reviennent identifiés ou catégorisés.
Comme
professionnels, nous, on a toujours tendance à mettre de l'avant davantage la
pertinence d'une information complète
et adéquate, en autant qu'elle est bien utilisée, que de freiner l'information
au risque qu'elle soit mal comprise. Ce
que je veux dire dans ça, c'est... Prenons l'exemple, si je transfère... Si on
prenait l'exemple entre une école primaire et une école secondaire, il
est important qu'on sache les enfants qui ont vécu des difficultés à l'école
primaire pour bien les accueillir à l'école
secondaire. Mais, pour avoir fait ma carrière en milieu scolaire, parfois on
disait : Ah! bien, moi, j'aime
mieux ne rien savoir pour ne pas partir avec des préjugés. Une approche d'un
professionnel est de dire : D'abord, c'est à nous de gérer nos préjugés, mais on a besoin d'avoir une bonne
information pour ne pas repartir à zéro. Alors, ce même élément là, il
pourrait se transposer pour, en le faisant bien, éviter que ça stigmatise de
façon négative l'enfant.
Autre
élément à votre question, la transmission d'information. Aujourd'hui, on parle
du côté davantage des services de
garde, des réseaux des services de garde, et je pense que c'est important de
pouvoir réfléchir au type d'information qu'on peut transmettre, un dossier standardisé ou d'autres modalités,
mais c'est le type d'information. Mais on aura beau avoir les meilleures
informations, s'il n'y a personne pour les recevoir, pour les analyser, pour
les accueillir... Donc, il y a ce pont-là
qui se fait, et, à ce titre-là, je pense qu'il y aura une réflexion importante
à faire avec le milieu scolaire. Plusieurs
commissions scolaires ont établi des collaborations avec les centres de la
petite enfance de leur quartier, et tout ça, pour aller obtenir cette information-là. Mais c'est souvent des
initiatives locales, et je pense qu'il y a un pont qui doit se faire mais qui ne peut pas que reposer sur les services
de garde, puisque, s'il n'y a pas de vis-à-vis, on va avoir des
difficultés.
Mme
Harguindéguy-Lincourt (Marie-Christine) : Je me permettrais
d'ajouter : Ces ponts-là, je pense que, s'ils sont dans des lieux où on assoit ensemble les
intervenants des services de garde, les intervenants du milieu scolaire,
pour s'assurer qu'ils travaillent dans le
même esprit, on limite à ce moment-là la stigmatisation et, dans la façon dont
ces outils de portrait là sont
construits, on peut aussi la limiter. Si on a un outil, par exemple, qui est
construit de façon à dire ce que l'enfant
est capable de faire et ce pour quoi il a besoin d'aide, on est dans autre
chose que dans lui apposer une étiquette. Donc, le contenu de ces
outils-là, d'après moi, peut faire en sorte qu'on peut limiter ça.
M. Fortin (Sherbrooke) :
Vous aviez souligné tantôt, dans votre présentation, que vous partagiez
l'objectif du projet de loi de
vraiment dénoncer des situations qui portent atteinte à l'estime de soi ou à la
dignité des enfants. C'est une question
qui a été largement abordée dans nos consultations cette semaine. Est-ce que,
selon vous, il y a lieu d'être plus précis,
dans notre projet de loi, à la définition de quelles peuvent être ces situations qui portent justement atteinte à la
dignité ou à l'estime de soi des enfants ou,
pour vous, le projet de loi est assez précis de la façon dont il est écrit
présentement?
M. Leclerc (Denis) : Déjà, l'intention est intéressante, et on le
soulève. Vous avez quand même pu, autant dans ma présentation que dans la lecture de notre mémoire, voir qu'on a une
centration assez importante par
rapport aux enfants vulnérables. Alors, porter atteinte à un enfant,
c'est évidemment dans des attitudes qu'on pourrait avoir qui ont
tendance à le rabaisser, à le dénigrer, des
éléments de violence, ou tout ça, puis c'est déjà au moins, j'aurais
tendance à dire, une base, en plus
d'être intéressante, qui nous apparaît même nécessaire
de préciser que c'est des choses qui sont en soi inacceptables.
Les
préjudices, maintenant, que les enfants peuvent avoir peuvent être
souvent en lien avec leurs caractéristiques, non pas autant avec des intentions, entre guillemets, qui
pourraient être malveillantes ou totalement inappropriées de la part de l'intervenant,
mais parfois moins bien adaptées à leur réalité. Alors, on a ce souci-là
d'offrir puis de bien encadrer les enfants qui seraient avec des
vulnérabilités particulières.
C'est
ce qui nous a amenés à se poser la question, à savoir : Est-ce qu'il n'y
aurait pas pertinence, dans le projet de loi, également d'inclure
quelque chose qui balise un peu ou qui donne une intention du ministère pour
baliser les situations d'expulsion? On est
conscients que ces situations-là sont quand même, et heureusement, relativement
rares. Ce n'est quand même pas tous...
tellement d'enfants. Mais prenons seulement l'image, là... je m'excuse de la
boutade, mais ça part mal dans la vie quand on s'est fait mettre à la
porte du service de garde d'une garderie. Et il y a des enfants qui vivent ça, et surtout des familles également,
tu sais, et nous, on se dit : Il faut encadrer. Le ministère a mis des
balises, c'est vrai, mais jusqu'à quel point
elles sont contraignantes? Peut-être qu'on pourrait me répondre qu'elles le
sont plus qu'on pense, mais elles ne
sont pas dans un projet de loi ou dans une loi qui encadre ça. Et on pense que,
sans être juristes, il aurait moyen
d'encadrer ça pour bien baliser qu'il y a quelque chose qui doit être mis en
place, autant pour limiter les situations, donc essayer de bien encadrer
la situation, bien suivre la situation avant d'en venir à une solution aussi extrême pour un enfant et sa famille, et également
du soutien au milieu pour éviter d'en venir à une telle situation. Donc,
c'est des éléments qu'on a soulevés, là, sur cette dimension-là.
Puis,
si je me permets d'ajouter, bien, en tant que psychoéducateurs, vous
comprendrez que l'expertise qu'on a au niveau
des enfants avec des problèmes d'adaptation fait en sorte que c'est souvent
cette clientèle-là, tout particulièrement, qui est celle avec laquelle
on pourrait travailler. Donc, on est d'autant plus sensibles à ça.
M.
Fortin (Sherbrooke) : Bien, justement, la question d'expulsion, c'est
le prochain sujet que je voulais aborder avec vous. C'est votre recommandation 6 dans votre mémoire. C'est
la première fois qu'on en entend parler cette semaine. Je suis tout à
fait d'accord avec vous, je pense que c'est, pour le moins, un événement
marquant dans la vie d'un enfant. On peut
ressentir du rejet. C'est un échec aussi, en quelque soi. Puis, dans une
période de zéro à cinq ans, j'imagine que
ça marque également l'existence d'un enfant. Mais ma question, vous en avez un
peu parlé, mais... parce que vous le soulignez
également dans votre mémoire, comme vous venez de le faire, qu'il y a des
politiques d'admission et d'expulsion. Alors,
en quoi le projet de loi pourrait venir baliser davantage, selon vous? Sur
quels éléments devrait-on aller plus loin que ce qui existe
présentement?
• (11 h 50) •
M. Leclerc (Denis) : Comme je vous l'ai dit, c'est davantage... Bon, ce qui nous a amenés un
peu à aller dans ce sens-là, c'est quand on a vu justement les balises
qui sont dans l'article 3, là, où on dit : Les mesures dégradantes,
les punitions exagérées, le dénigrement, les
menaces, donc on a à éviter ça. Et on s'est dit : C'est une protection
qu'on fait pour les enfants qui
pourraient être plus vulnérables. Ça, c'est déjà une intention. Et, à ce
moment-là, nous, on s'est dit : Qu'est-ce qui se passe dans les situations plus extrêmes? On pourrait en venir à
une situation d'expulsion. Et on est allés voir ce qui se faisait. C'est les documents dont on fait
référence. On s'est simplement posé la question : Est-ce que ces
éléments-là vont suffisamment loin et est-ce qu'il n'y aurait pas
pertinence de le mettre en termes de mesures législatives? J'ai de la difficulté, puis nous avons de la difficulté à
dire : Ça devrait s'écrire de telle manière, à tel endroit, et tout, mais,
on se dit, c'est un élément très, très important, très, très majeur.
Prenons encore une
fois le parallèle avec le milieu scolaire, bien, l'éducation étant obligatoire,
des enfants, une commission
scolaire, il y a des balises très, très, très claires, et, avant de pouvoir
expulser un enfant, on se dit, il y a une réflexion à faire en
parallèle, pas nécessairement les mêmes, mais il y a une réflexion à faire en
parallèle.
Tout
ça dans un contexte où on est conscients que certains milieux de garde ne
peuvent pas, ne sont pas équipés pour accompagner adéquatement un enfant
qui a des besoins très importants. C'est certain, ça. Mais, à ce moment-là, est-ce que,
tout simplement, on dit : «Bien, moi, je ne peux pas, puis allez voir
ailleurs, cognez à la porte à côté», ou il y a des ressources pour s'assurer que les parents ne sont pas laissés à
eux-mêmes, que l'enfant est quand
même pris en charge par une
ressource qui peut être plus spécialisée, et ainsi de suite? Je ne sais pas si
Marie-Christine a des choses à...
M.
Fortin (Sherbrooke) : Bien,
comme il reste peu de temps, M. le
Président, notre collègue de Fabre
souhaitait poser une question, je vais lui laisser le temps restant.
Le Président (M.
Matte) : Mme la députée de Fabre, c'est à vous.
Mme Sauvé : Merci, M. le Président.
Madame, monsieur, un grand plaisir de vous entendre et de lire votre mémoire. Je peux vous dire d'entrée de jeu que je
connais bien l'expertise des psychoéducateurs pour avoir travaillé en collégialité avec eux
auprès des jeunes dans le passé. Donc, très contente de vous entendre. Et la
question que j'ai pour vous fait appel à cette expertise que vous avez
dans l'évaluation des besoins, entre autres par rapport aux enfants qui ont des
diagnostics précoces. Vous avez mentionné, c'est à la recommandation 8, la
nécessité, bien sûr, de favoriser l'accompagnement et la formation. Je veux
mettre l'accent sur la formation continue. Vous parlez à quel point c'est important. J'aimerais vous entendre sur, un peu,
l'évolution du portrait, à la lumière de votre expertise. Est-ce
qu'effectivement les problématiques
des enfants en lien avec des diagnostics précoces, c'est une situation qui a
évolué? À quel niveau? Qualifiez un peu tout ça, le portrait de
situation, pour la nécessité d'une formation continue, un peu en accéléré.
M. Leclerc (Denis) : Je vais inviter
ma collègue à répondre.
Mme Harguindéguy-Lincourt
(Marie-Christine) : En fait, ce qu'on constate, c'est qu'il y a de
plus en plus d'enfants avec des besoins
particuliers qui sont inclus dans les services de garde. Il y a aussi de plus
en plus d'intervenants qui s'y
consacrent, au soutien de ces services de garde là. Par contre, il y a encore
plein, plein, plein de besoins. Donc, la pertinence de la formation continue est tout à fait présente. Cette
formation-là doit, selon nous, exister dans un format de formation, mais
dans du format de soutien également, parce que les deux sont tout à fait
complémentaires. Par une formation, on va aller chercher les connaissances. Par
le soutien, on pourra aller chercher les façons de faire pour les appliquer aux
différentes situations que les services de garde pourront rencontrer.
Donc, d'après
moi, il y a une complexité, de par le plus grand nombre d'enfants qui sont
inclus dans ces milieux-là. Il doit donc y avoir davantage de ce
soutien, de cette formation-là, malgré qu'il y en ait plus qu'avant.
Mme Sauvé : Merci.
Le
Président (M. Matte) : C'est
bien. Il vous reste quelques secondes. Ça va? J'invite la députée de Joliette
à poursuivre les échanges avec nos invités.
Mme
Hivon : Merci beaucoup, M. le
Président. Merci à vous deux de votre
présentation. C'était très intéressant de lire votre mémoire, très axé, donc, sur comment favoriser la réussite
éducative, comment agir le mieux possible. Vous dites dans votre recommandation 1 que vous souhaitez qu'il y ait
des orientations très concrètes pour guider les services de garde éducatifs dans la mise en place des
modalités favorisant la réussite éducative et la transition. Qu'est-ce que
vous avez en tête comme orientations très
concrètes? J'imagine que vous ne les voyez pas nécessairement dans le projet de loi. On sait qu'il y a un
programme, donc, qui est offert, un programme éducatif. Est-ce que
vous parlez des orientations concrètes sur lesquelles l'évaluation va se
baser ou vous êtes même en amont de ça en disant : On veut des
orientations plus concrètes dans le programme éducatif?
Mme
Harguindéguy-Lincourt (Marie-Christine) : En fait, on n'a pas quelque chose de très, très arrêté en tête, mais
ce qu'on souhaite, c'est que les services de garde puissent savoir un peu plus
quoi faire quand ils veulent favoriser cette
réussite éducative là. C'est que ça peut être vaste, ça peut être compris de
façon différente entre un milieu et un autre milieu, autant pour la transition vers l'école. Il y a un
document qui existe, au ministère, qui est les principales choses qu'on peut faire pour avoir une transition scolaire de
qualité. Donc, pourquoi ne pas les orienter davantage vers ça à même le
projet de loi pour qu'ils puissent savoir : Bon, bien si moi, je veux faire une
transition vers l'école de qualité, bien, comment je dois m'y prendre? Qu'est-ce que c'est les ingrédients,
les actions à poser? Donc, c'est un peu dans cet esprit-là qu'on avait
fait cette recommandation-là, sans avoir nécessairement en tête déjà des
actions ou des pistes très, très concrètes.
Mme
Hivon :
Mais est-ce que l'idée, ce serait de bonifier le contenu du programme éducatif
comme tel? J'essaie juste de comprendre
un peu, je dirais, les interactions entre la loi, le programme éducatif, son
application, l'évaluation. Donc,
quand vous dites : «On verrait ça dans la loi», mais, dans la loi, on se
comprend que c'est les principes généraux, donc le programme comme tel,
il n'est pas recopié dans la loi, est-ce que votre souci, c'est vraiment que,
dans la loi, on aille plus loin ou c'est qu'on bonifie le programme en donnant
plus de moyens, plus d'éléments concrets?
Mme
Harguindéguy-Lincourt (Marie-Christine) : En fait, on ne s'est pas
penchés sur est-ce qu'il faut aller plus loin ou pas dans le programme. L'obligation d'avoir un programme
éducatif existe pour les services de garde, mais ce n'est pas obligé qu'ils prennent celui du ministère. Par
contre, ce qu'on pense, c'est qu'il faut que ça aille plus loin, parce
que c'est trop général, ce qui est dans le
projet de loi. Donc, d'après nous, il faut préciser un peu pour guider leur
action. Mais on ne s'est pas... on n'a pas réfléchi plus loin que ça.
Mme
Hivon : À la
recommandation 2, vous parlez, là, vraiment en lien avec le processus
d'évaluation, vous militez pour qu'il y ait, donc, quelque chose, une fréquence
prédéterminée. Hier, on entendait un groupe, le Conseil québécois des services éducatifs, en fin de journée, qui parlait que ça
pourrait être, par exemple, avant le renouvellement du permis, donc une fois, je dirais, par échéance,
donc par durée du permis. Est-ce que c'est quelque chose comme ça que
vous avez en tête? Je voyais peut-être «cinq ans» dans votre mémoire?
M. Leclerc (Denis) : On s'était
d'ailleurs penchés... Est-ce qu'on met un chiffre ou on ne le met pas? Puis on parlait, si on l'avait mis, probablement quelque
chose autour d'un cinq ans. L'idée, effectivement, est de faire quelque chose de régulier le plus possible, ce qui nous
apparaît une bonne pratique, qui est celle d'aller voir autant les
milieux qui fonctionnent bien que ceux qui fonctionnent
moins bien. Et on dit, en plus des possibilités, que ce soit à la demande du ministre. Mais on sait que ce que ça prévoit,
c'est à la demande du ministre, donc on risque, dans ce temps-là,
d'avoir une situation où on va plutôt
pointer les milieux qui sont identifiés comme étant problématiques, ou qui ont
été dénoncés, ou quoi que ce soit. Bon,
bien, il y a deux éléments là-dedans. Si on a une régularité, de un, on n'est
pas seulement sur le principe des milieux qui sont problématiques, on
est de façon plus large. Et, en plus, d'un côté, on peut avoir une évaluation qui peut être supportante pour des
petits détails à améliorer, donc on n'est pas dans les gros problèmes. Et
parfois il n'y a pas de dénonciation, mais il y a des milieux qui peuvent être
problématiques.
Donc, une
régularité nous semble une meilleure pratique que seulement sur demande. Puis,
en termes d'intervalles, bien, les différentes modalités... On trouvait
un petit peu embêtant d'amener un chiffre qu'on aurait eu à justifier. Pourquoi cinq plutôt que sept? Bon. Mais on parle
d'à peu près des intervalles qui correspondent à ce que d'autres ont pu
dire, oui.
Mme
Hivon :
Donc, dans votre esprit, tous les services de garde devraient faire l'objet
d'évaluations à un moment ou à un autre, avec une fréquence
prédéterminée.
M. Leclerc
(Denis) : Oui. L'ampleur de
l'évaluation, maintenant, est à voir. Que ce soit en termes de
ressources que ça demande et d'efforts pour
les milieux, on ne parle pas de... Vous savez, dans le réseau, il y a
l'agrégation, là, les milieux doivent se soumettre, à un intervalle
assez régulier...
Une voix : L'agrément.
M. Leclerc (Denis) : L'agrément.
Excusez, je cherchais le bon terme, l'agrément. Donc, c'est excessivement
demandant pour un milieu. On est conscients que les milieux de garde n'ont pas
ces ressources-là, donc il faut ajuster en
fonction de cette réalité-là. Mais, oui, avoir une régularité d'évaluation nous
semble une bonne pratique pour s'assurer... Vous savez, d'entrée de jeu, ce qu'on a dit, c'est d'essayer d'avoir une
qualité puis une uniformité le plus possible en termes de qualité de services, non pas en termes de tous
les services qui offrent la même chose, mais une certaine uniformité. Alors, une évaluation qui serait plus large, qui
serait plus fréquente et régulière nous semble une bonne pratique, en ce
sens-là.
Mme
Hivon :
O.K. Puis, quand vous parlez, dans cette même recommandation-là, de tierces
personnes, donc pour procéder à cette
tâche-là, vous avez en tête une tierce personne qui travaille en... qui est
reliée au ministère? Vous avez une tierce
personne qui est complètement indépendante? Une tierce personne qui est déjà à
l'intérieur, donc, des services?
• (12 heures) •
M. Leclerc
(Denis) : L'idée étant
d'avoir une objectivité la plus grande possible
pour les personnes qui assument ce rôle-là. Donc, même si c'est au niveau
du ministère, on doit distinguer, jusqu'à un certain point, le rôle de ces personnes-là au niveau, là, de ce rôle-là d'évaluation pour s'assurer qu'on a un regard le plus objectif possible.
Encore là, on a mis de l'avant un principe
sans pouvoir... il mériterait d'être analysé sur jusqu'à quel point cette
tierce personne là est même extérieure au ministère, supposons... c'est
rarement une personne, on conviendra, là, mais l'organisation ou la structure,
d'avoir quelque chose qui a la plus grande neutralité et objectivité possible.
Le terme
«tierce personne» nous amène à penser à l'extérieur, mais honnêtement on ne
veut pas, d'entrée de jeu, dire, selon nous, que ça doit être
obligatoirement extérieur, mais avec la plus grande objectivité et neutralité
possible.
Mme Hivon :
O.K. Et puis vous parlez, c'est intéressant, dans votre mémoire, là — puis ma collègue en a glissé un mot — sur les enfants qui présentent des défis
particuliers, des besoins particuliers. On sait que c'est un gros enjeu,
donc, l'intégration de ces enfants-là. Et
j'étais curieuse de savoir si... de profiter un peu de votre présence pour que
vous nous disiez si vous estimez qu'à l'heure actuelle l'état de la
situation de l'intégration de ces enfants-là pose des problèmes importants dans le réseau, dans les services de
garde qu'on a en ce moment, et, au contraire, si vous avez des exemples probants, et quels sont les bons éléments sur
lesquels miser ou les changements que l'on pourrait faire pour faciliter
ou s'assurer que ces enfants-là puissent être intégrés correctement dans les
services de garde. Parce qu'on a toutes sortes d'histoire d'enfants qu'on
refuse ou d'enfants dont le milieu n'est pas adapté, de manque de collaboration
avec Santé et Services sociaux. Alors, j'étais curieuse... de votre point de
vue expert, si vous aviez des conseils pour nous, des recommandations.
M. Leclerc
(Denis) : Bien, avant de
donner la parole sur des éléments plus cliniques par ma collègue, il y a
certains paradoxes par rapport au travail
avec les enfants en besoins particuliers puis les enfants plus vulnérables en
petite enfance, le paradoxe étant le
suivant : on va avoir plus de ressources qui vont se mobiliser, notamment
par le réseau de la santé et services sociaux, à partir d'un moment où un
enfant aura un diagnostic ou sera au moins dans un processus, aura été
identifié formellement puis sera dans un processus. Encore là, des fois c'est
un peu inégal et imparfait, mais il y aura peut-être plus de ressources dans ce
temps-là.
Mais le
paradoxe, c'est qu'à cet âge-là souvent les diagnostics ne sont pas encore
possibles de donner, et il y a des besoins,
puis ces besoins-là peuvent être pour une multitude de problématiques que les
enfants ont. Donc, si on continue à donner l'accès aux services quand
les enfants, de façon individuelle, sont identifiés comme étant un enfant avec
un problème de tel ordre ou tel ordre, le dépistage...
Le
Président (M. Matte) : Je vous remercie. Le temps étant écoulé,
je passe la parole à la députée de Louis-Hébert.
Mme Guilbault : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci, madame monsieur, merci d'être parmi nous. Et
j'ai envie de vous laisser le temps de compléter votre réponse parce que
j'avais justement, moi aussi, cette question-là. Vous évoquez, à quelque part, que la qualité des services de garde
éducatifs à l'enfance, c'est très inégal, notamment sur cet aspect-là, et donc c'est ça. Alors, comment,
justement, vous, vous voyez ça? D'abord, est-ce qu'il y a des statistiques?
Est-ce qu'on a une idée du volume d'enfants
de ce type-là qui est actuellement dans les installations? Et justement
vous entendre sur la meilleure façon de composer avec cette situation-là, et
tout ça. Ça fait que...
M. Leclerc
(Denis) : Je vais répondre à...
Mme Guilbault :
...vous laisser finir votre réponse, finalement.
M. Leclerc (Denis) : C'est ça. Bien, c'est gentil. Juste pour répondre
à votre dernière question, à l'ordre, on n'a pas les ressources puis
on n'a pas les statistiques à nous. Peut-être que Marie-Christine peut référer
à certaines choses.
Je
veux juste compléter vite. Ce que je disais, dans le fond, c'est qu'il faut
trouver un moyen de pouvoir soutenir les
enfants vulnérables sans que ce soit
basé uniquement sur l'identification formelle qui va être, elle, tributaire de
toutes les limites des ressources du milieu,
à savoir : est sur la liste d'attente, ainsi de suite, donc avoir des
services, un soutien de proximité,
notamment professionnel, on parle de professionnels dédiés, donc, qui peuvent
être des psychoéducateurs, des orthophonistes.
D'autres intervenants peuvent soutenir les intervenants en place pour supporter
les enfants qui sont fragiles et qui
peuvent développer des vulnérabilités plus tard ou qui sont peut-être des
enfants déjà avec des grandes vulnérabilités, mais les comportements sont moins explosifs, moins marqués, mais ils ont
besoin quand même de soutien. Donc, c'est un peu ce que je souhaitais
dire au niveau du paradoxe.
Maintenant, je vais
laisser Marie-Christine, au niveau des moyens plus concrets.
Mme Harguindéguy-Lincourt
(Marie-Christine) : Bien, en fait, je vais peut-être juste revenir sur
un des éléments qui avaient été dans la
question de votre collègue. Comment
ça se passe? Est-ce qu'il y a des histoires réussies, moins réussies? Bien, un peu comme vous le savez déjà, il
y en a de toutes sortes. Il y en a très bien réussies, partiellement réussies, pas réussies du tout. Donc, moi, je
pense qu'un des facteurs qui fait que ces histoires d'inclusion là sont
réussies, c'est un soutien, un soutien qui
est adapté autant aux besoins de l'enfant, aux besoins du milieu, à
l'interaction entre ces deux
milieux-là et aussi aux besoins des parents, leurs besoins concernant
l'inclusion de leur enfant dans un service de garde. Donc, si un soutien peut s'attarder à tous ces besoins-là,
prendre des actions concrètes et adaptées,
ça, c'est un des facteurs qui font que des inclusions sont réussies dans
les milieux de garde.
Mme Guilbault :
Parfait, merci. Et justement, sur la question des parents, je vais vous
amener... vous avez soulevé un point très intéressant qui, je pense, n'a pas été abordé par vos prédécesseurs. Vous
dites : «...la cohérence entre les
approches éducatives utilisées en milieu de garde et à la maison est un facteur
déterminant pour l'inclusion réussie des enfants ayant des besoins particuliers.» Est-ce que, d'abord, actuellement, à votre connaissance, ça se fait, cette espèce d'approche là, si
on veut, concertée ou, en tout cas, en communication étroite entre le milieu de
garde et la famille? Et est-ce que c'est un
besoin qui a été exprimé par des parents, ou est-ce que vous sentez que c'est
une lacune chez certaines familles,
ou est-ce que c'est le milieu, à l'inverse, qui aurait plutôt exprimé cette nécessité-là? Qu'est-ce qui vous a amenés,
finalement, à inclure cet élément-là dans votre mémoire?
Mme Harguindéguy-Lincourt
(Marie-Christine) : En fait, dans les histoires d'inclusion réussies,
il y a aussi cette collaboration-là
entre le milieu de garde et les parents, ne serait-ce que si on met un plan de
soutien au développement en place,
donc des actions concrètes reliées aux besoins de l'enfant. Si c'est les mêmes
à la maison et dans le service de garde,
on va aller beaucoup plus rapidement vers une atteinte de nos objectifs que si
on va chacun de notre côté. Ça fait que ça, c'est le gros bon sens, si
vous voulez, mais c'est un peu ça qu'on veut mettre en lumière.
Le
parent, c'est le premier agent du développement de son enfant, c'est le premier
acteur, donc c'est primordial qu'il
soit impliqué, et non seulement impliqué... Si on travaille de la même façon...
On n'est pas en train de dire qu'il faut faire pareil, pareil à la maison et dans le service de garde, mais, si
nos actions, notre compréhension des besoins de l'enfant sont les mêmes, à ce moment-là on va gagner du
temps. Puis on sait qu'intervenir tôt en petite enfance, c'est un
facteur de réussite si on veut amoindrir les vulnérabilités des enfants.
Mme Guilbault :
Vous dites que l'ordre recommande au ministère de prévoir le développement d'un
réseau de professionnels dédiés. Est-ce qu'on comprend qu'actuellement ces ressources-là n'existent pas dans le réseau, ou est-ce que vous en recommandez plus, ou est-ce que vous
recommandez la création de ces ressources-là? Actuellement, autrement
dit, qui s'occupe de ce service-là dans le réseau?
Mme Harguindéguy-Lincourt
(Marie-Christine) : En fait, présentement, il y a le réseau de la
santé et des services sociaux qui parfois sont en soutien aux services de garde, qui parfois sont en soutien à une famille dont l'enfant a eu un diagnostic, et ils font un rapport dont les recommandations peuvent éclairer le service
de garde. Il y a certains services
de garde qui vont aller chercher les services en privé parce qu'ils n'ont pas ce
qu'il faut pour répondre à leurs besoins comme milieu pour accompagner
ces enfants-là. Donc, il y a toutes sortes de scénarios possibles. Et, à notre
avis, si on veut s'assurer d'une qualité, de
donner une accessibilité à tous les enfants, dont ceux qui sont vulnérables, ça
prendrait des professionnels qui
seraient en soutien à ces milieux-là pour qu'ils puissent s'assurer de bien
faire les choses et de faire les choses de façon à répondre aux besoins
de tous.
M. Leclerc
(Denis) : Si vous permettez,
ce que je souhaiterais ajouter à cette question-là, c'est que, pour
nous, on veut... Il y a des enfants qui ont
des diagnostics, comme j'ai expliqué, puis il y a des enfants qui sont
vulnérables. Mais, globalement, ce qu'on souhaite, c'est de pouvoir supporter les
intervenants pour qu'ils puissent travailler avec l'ensemble de ce continuum-là. Des intervenants dédiés vont être
en support aux milieux par rapport à des enfants en particulier, mais ils
vont être en support aux intervenants par rapport à l'ensemble des enfants. Et,
si on se limite toujours aux enfants identifiés
puis qu'on offre du support par
rapport à ces enfants-là, bien, les
autres juste à la frontière, les autres qui peuvent être fragiles de
façon transitoire, les parents qui se sont séparés, l'enfant est fragile, bon,
tout ça... On pense que des professionnels
dédiés qui travaillent en support, globalement, aux milieux de garde dans un
territoire donné, bien, vont augmenter
de façon générale l'ensemble de la qualité des services d'un service de garde pour l'ensemble des enfants dans leurs moments de
fragilité ou dans leurs fragilités permanentes ou plus soutenues, plus importantes.
Le Président (M. Matte) : Je vous
remercie de votre contribution aux travaux de la commission.
Et je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 10)
(Reprise à 12 h 12)
Le Président (M. Matte) : Rebonjour.
Ça nous fait plaisir de vous accueillir ici. Je vous informe que vous avez 10 minutes pour faire un exposé, et par
la suite nous avons une période d'échange. Avant de débuter votre
exposé, il serait intéressant qu'on puisse vous connaître. Donc, si vous voulez
vous présenter.
Association des éducatrices
et éducateurs en milieu
familial du Québec inc. (AEMFQ)
Mme D'Amours (Nathalie) :
Bonjour. Mon nom est Nathalie D'Amours, présidente et directrice générale de l'association des éducatrices
en milieu familial du Québec. Je suis accompagnée par Mme Marie-Michèle
Blouin, à titre de parent utilisateur d'un service de garde en milieu
familial privé.
Alors, merci,
M. le Président, M. le ministre, Mmes les députées, M. le député. Merci pour
cette invitation et merci pour le
grand privilège de nous laisser le mot de la fin. Alors, aujourd'hui nous
aurons le rôle courageux de présenter la voix discordante. Il en faut
toujours une. On dit que ça fait avancer les débats. Espérons-le.
Alors, j'ai
déposé notre mémoire récemment. Alors, je sais que vous n'avez pu le consulter,
mais je vais quand même respecter le
cadre de la commission et sauter dans le vif du sujet, quoique sachez
qu'aujourd'hui j'aimerais bien avoir le débit de Louis-José Houde.
Enfin.
Alors, notre mémoire vous présente la définition
du milieu familial et les maints éléments de la qualité d'un milieu familial. La qualité en milieu familial,
elle existe, il faut juste savoir l'évaluer avec autre chose que les grilles
qu'on applique mur à mur d'un prestataire à l'autre. Lorsqu'on fait fi de cette
distinction, on fait fi de sa qualité.
L'Association
des éducatrices poursuit deux objectifs : la reconnaissance
professionnelle de l'éducatrice en milieu familial et la défense de son statut de travailleur autonome. Depuis
2008, nous militons pour la défense de l'éducatrice en milieu familial. Qu'elle oeuvre en garde régie ou
privée, la responsabilité est la même, la présence aux enfants est la
même. Alors, à ce titre, aujourd'hui on se
présente avec un préjugé favorable à la garde en milieu familial privé au nom
du droit de tous d'avoir une opinion différente, et de faire des choix
différents, et de pouvoir s'impliquer.
Mais qui sont
ces éducatrices en milieu familial privé? Dans un premier temps, ce sont des
éducatrices en milieu familial régi
qui ont quitté le milieu peu à peu depuis 2008. Ce sont des jeunes diplômées
qui n'ont pas trouvé d'emploi ou qui,
après une expérience en installation, ont voulu fonder leurs familles et
continuer d'exercer leur profession au sein d'un service de garde en milieu familial. Ce sont des femmes, des
professionnelles qui, suite à une nouvelle maternité, décident de concilier travail-famille et de
continuer à contribuer aux besoins financiers. Ce sont des femmes qui
voient leur vie changer lorsqu'elles ont un tout-petit devant eux.
Cet enfant
est le mien, que j'ai eu voilà bien des années, qui a eu le privilège d'être en
milieu familial et qui a eu une éducatrice en milieu familial, une mère
engagée à son développement qui a su aller chercher toutes les expertises qui
devaient être acquéries pour son bien et tous les autres enfants que
j'accueillais. Je ne crois pas avoir menacé le développement de son cerveau
aucunement pendant toute sa croissance. D'ailleurs, aujourd'hui, c'est un beau
jeune homme, et j'en suis fière.
Mais ces
éducatrices en milieu familial privé ont bâti un service de garde en toute
légalité, elles n'ont rien fait d'illégal.
Aujourd'hui, on se permet de catégoriser ces gens-là de gardiennes, de médiocres,
de milieu sans qualité, tout simplement
parce que le réseau n'a pas le contrôle ou une entrée dans leurs résidences.
Sur quoi se base-t-on? Hier, on a entendu
le conseil québécois reconnaître qu'il y avait quand même de la qualité mais
qu'on ne pouvait en être sûrs. Donc, on avouait que ce qu'on voulait,
c'est le contrôle.
Mais, dans le but de résumer le mémoire, que je
vous laisserai consulter, je vais revenir sur les trois points que M. le
ministre a annoncés, les trois points majeurs : la sécurité, la qualité,
la pérennité du réseau.
La sécurité. Le
projet de loi propose de baisser le ratio en garde privée. Pourquoi les enfants
seraient plus sécuritaires dans un ratio
moindre en privé mais autant sécuritaires dans le même ratio en régie? Si la
sécurité passe par le ratio, il
faudrait voir une concordance plutôt que diminuer l'un au profit de l'autre. La
sécurité, c'est peut-être plus par la présence de vérifications, d'absence
d'empêchements. Ce serait pertinent de rendre possible aux éducatrices privées
de faire la recherche d'empêchements.
Plusieurs le souhaitent, elles n'ont pas d'outil. Elles se font refuser dans le
système actuel.
La
qualité. Notre mémoire expose la qualité en milieu familial. Je suis venue, à
sept changements législatifs, en parler.
Mais on a aussi des propositions pour s'assurer de la qualité en services de
garde privés. C'est possible. Un seul article
de loi concerne les services de garde privés, actuellement, concernant leur
ratio sur six enfants qu'elles peuvent accueillir, mais rien n'empêche
d'avoir d'autres articles de loi augmentant l'obligation.
Et
le projet de loi se nomme «le développement harmonieux des services de garde
éducatifs à l'enfance». Alors, nous nous questionnons : En quoi
forcer la main à des milliers de femmes d'intégrer un réseau peut catégoriser
l'opération comme «développement harmonieux des services éducatifs»? En 1997,
on a intégré dans le régime des CPE
2 000 éducatrices régies sans les consulter, sans leur demander leur
avis, sous prétexte qu'elles n'étaient pas organisées pour se défendre.
20 ans après, avec un réseau mature, tout ce qu'on trouve à faire, c'est
répéter l'expérience, forcer 3 000 éducatrices privées à joindre de
force le réseau. Pourquoi? On se questionne.
Nous, ce que nous comprenons
et ce que nous avons aimé dans l'énoncé de M. le ministre, c'est de parler de pérennité du réseau. Ça a le profit d'être juste,
transparent dans les propos. Le projet de loi, pour nous, n'est plus ni
moins l'instauration d'un monopole de services québécois pour la garde en
petite enfance et un monopole de pression et de représentation.
Nous
comprenons, par ce projet de loi, la volonté d'éliminer la concurrence que
représente la garde privée au profit de
la garde régie. On comprend que le système public, que nous avons contribué à
bâtir, pendant les 10 premières années, de façon très accrue, est malheureusement, peut-être, mis de côté ou
délaissé pour les 10 autres années. Ce qu'on comprend, c'est que le réseau a de la difficulté à se faire
valoir, à s'imposer, prétextant que l'intérêt financier des parents
bénéficiant de retours anticipés d'impôt leur enlève toute conscience favorable
au bien-être de leurs enfants et de leurs besoins. Mme Blouin pourra vous
témoigner de cette position-là.
Alors,
notre position serait de résoudre les problèmes du réseau qui ont eu pour effet
la migration des services de garde
régis vers le privé. Ce serait une solution beaucoup plus efficace. Et notez
que la facilité n'a jamais été le leitmotiv pour le choix des éducatrices,
d'aucune manière, car la facilité en milieu familial n'existe pas jour après
jour. Alors, de là l'importance de passer en dernier, ça nous permet de
faire quelques commentaires.
• (12 h 20) •
Le Président
(M. Matte) : Il vous reste une minute, madame.
Mme D'Amours (Nathalie) : Alors, notre mémoire, en page 20, présente
nos propositions. Alors, je répondrai aux questions, aux clarifications,
au besoin, de vos questions. Je vais laisser terminer Mme Blouin.
Mme Blouin
(Marie-Michèle) : M. le ministre, MM., Mmes les députés, j'ai
réorganisé mes activités professionnelles aujourd'hui pour venir vous présenter le point
de vue des milliers de parents qui
vont se retrouver sans service de garde au lendemain de l'adoption du projet
de loi n° 143.
Je
dois vous dire que j'ai été choquée par la lecture de ce projet de loi là et principalement par le fait qu'il discrédite totalement
les parents dans leurs compétences parentales et dans le type de valeurs et le
style éducatif qu'ils désirent transmettre à leurs enfants.
Pour
ma part, j'ai envie de transmettre différentes valeurs à mes enfants et puis je
considère que c'est aux parents de le
faire, et non au gouvernement. Avec le projet
de loi n° 143, je comprends que
c'est le gouvernement qui décide que c'est lui qui élève nos enfants. Donc, les parents sont réduits à être
des producteurs d'enfants, et puis tous les enfants sont éduqués selon un modèle de pensée qui est plutôt
unique. À mon avis, le parent doit être le principal acteur dans
l'éducation de ses enfants. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il est légitime pour lui qu'il puisse choisir le modèle de
garde qui lui convient, qui convient à ses valeurs familiales et à son
style de vie également.
Le Président
(M. Matte) : Je dois vous interrompre. J'invite le ministre à
poursuivre des échanges.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Bien, je veux
tout simplement savoir si madame avait terminé, parce que
c'est le premier parent qu'on entend
cette semaine, alors, si vous avez encore des remarques à nous faire, moi, je
vous laisserais un peu de mon temps.
Le Président
(M. Matte) : La générosité du ministre vous permet de prendre son
temps pour pouvoir poursuivre, madame.
Mme Blouin
(Marie-Michèle) : Merci,
c'est apprécié. Alors, ce que je disais, c'est que je considère que
c'est au parent à décider du type de valeurs
qu'il veut transmettre à ses enfants. Alors, si je veux que mon enfant apprenne
l'anglais, bien, je vais choisir un service de garde qui offre une immersion anglaise. Si je veux qu'il bouge, je vais aller
vers un service de garde qui offre des activités sportives de manière plus augmentée, là. Et puis je pense
qu'avec le modèle de service de garde en milieu familial on se retrouve
avec une offre de services qui est bonifiée en ce sens-là. Donc, c'est pourquoi
je suis contre l'abolition, en quelque sorte, de ce modèle de garde.
Donc,
en faisant adopter le projet de loi, je pense que c'est
3 000 services de garde qui vont fermer leurs portes, laissant autour de 39 000 enfants sans
service de garde, loin d'un milieu qu'ils connaissent et puis qu'ils aiment
profondément, en désorganisant totalement la
vie de famille des jeunes parents. Actuellement, je crois que le projet
de loi va supprimer un réseau dont l'offre correspond exactement
aux besoins de plusieurs parents. Donc, je suis venue ici pour vous
demander des correctifs au projet de loi, dans le meilleur intérêt de nos
enfants.
Le Président
(M. Matte) : Je vous remercie. M. le ministre, c'est à vous de
poursuivre.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Merci
beaucoup. Merci, M. le Président. Tout d'abord, merci
beaucoup à vous deux pour votre témoignage.
Merci d'avoir pris votre temps en tant que parents pour venir ici pour nous
témoigner de votre expérience.
Vous parlez
d'une voix discordante. Peut-être discordante par rapport à ce qu'on a
entendu ici, en commission, cette
semaine, mais pas discordante par
rapport à ce qu'on entend, quand même.
Je l'ai mentionné dans les médias, comme l'ensemble des députés, je pense, je reçois plusieurs
correspondances par rapport au projet
de loi n° 143, et surtout
les dimensions qui concernent les services de garde en milieu familial non régis. D'ailleurs, notre président me soulignait qu'il a
reçu depuis hier 43 courriels à son bureau sur cette question-là. Alors, quand
même, je sais que les responsables en services
de garde en milieu familial non régis n'ont pas nécessairement une vie
associative, alors pas vraiment de groupe qui veut venir témoigner ici. Il
y a vous qui le faites aujourd'hui. Mais en même temps c'est pourquoi j'ai pris soin de dire qu'on entendait les
gens qui se donnaient la peine de nous écrire aussi.
Je veux également
vous dire que ce n'est pas du tout l'intention du gouvernement de limiter la
liberté de choix des parents.
Moi-même, je suis un parent, et
jamais je n'accepterai que l'État fasse des choix pour moi, pour mes
enfants, et jamais je n'accepterai qu'on
impose non plus aux parents de faire des choix, parce que la relation de
confiance entre un parent et le
service de garde, elle est très importante, parce que des enfants en bas âge
n'ont pas nécessairement la capacité de
nous dire comment ça a été aujourd'hui à la garderie ou au service de garde.
Alors, de là la relation de confiance avec les responsables, elle est excessivement importante, et c'est ce qui
garantit un peu aux parents que son enfant va pouvoir évoluer dans ce
milieu-là, va être également en sécurité.
Ceci étant
dit, je pense que c'est quand même la responsabilité de l'État, en respectant
cette liberté de choix là, de s'assurer qu'on ait des milieux où les
enfants vont se développer, où les enfants seront également en sécurité. Alors,
maintenant, moi, la question que j'ai posée
dans mes remarques d'introduction et que j'ai posée également dans les
médias depuis plusieurs jours, c'est, en fait : Est-ce que les moyens qui
sont prévus dans le projet de loi nous permettent d'atteindre ces objectifs-là?
Je comprends
que vous avez certaines réticences. Je vais aller directement sur la question
du ratio. Je comprends que vous vous
opposez à la baisse du ratio de six à quatre parce que vous dites :
Pourquoi, en milieu familial régi, eux autres seraient capables de s'occuper de six enfants, puis, en non régi, on
serait limités à quatre, on n'est pas capables à six en question, dans
une perspective d'équité? Alors, moi, la question que j'aurais envie de vous
poser : Dans cette même perspective
d'équité là, est-ce que vous considérez qu'on devrait comptabiliser les enfants
de la responsable de service de garde en milieu familial non régi dans
le décompte, comme c'est le cas en milieu régi?
Mme D'Amours
(Nathalie) : Définitivement.
Alors, on croit qu'une harmonisation du ratio aurait deux effets positifs : uniformiserait les ratios, mais en
plus apporterait une équité procédurale. Dans la loi actuelle, sans la
modification, le service privé a droit à six
enfants reçus. À la limite, l'éducatrice régie est pénalisée, c'est elle qui
subit une inéquité versus... Mais
c'est ce qui explique aussi la première migration des éducatrices en milieu
familial régi vers le privé. Lorsque la
loi a été adoptée, permettant six enfants reçus en service de garde privé,
toutes les éducatrices qui n'avaient pas leur plein ratio, donc qui avaient droit à six mais qui en avaient quatre au
permis, mais qui n'avaient pas le droit de combler, ou celles qui avaient deux enfants puis le revenu
de quatre était insuffisant pour leurs besoins familiaux... c'est une
des raisons de la première migration. Alors,
de ramener un ratio équitable pour les deux milieux respecte le milieu
familial en général et respecte le caractère
sécurité-ratio, parce que c'est ce ratio-là qui a été reconnu comme
sécuritaire. Alors, on appliquerait le même, effectivement.
Et la question
se pose : Si on parle d'harmonisation et d'équité, est-ce que les services
de garde privés, actuellement, apportent
différents modèles, vont apporter, par exemple, le modèle pouponnière, où il va
y avoir peut-être quatre poupons
plutôt que deux? Mais c'est ce qui faisait la distinction des services de garde
privés. Ça a été une raison aussi de la migration du régi. Les éducatrices qui voulaient se dédier aux poupons
ne pouvaient pas en prendre plus que deux en garde régie, alors allaient au privé, jusqu'à quatre, ou
pouvaient aller jusqu'à six, mais c'était un choix. Alors, il y a cette
notion-là aussi qui pourrait être envisagée dans l'étude du ratio.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Mais, justement, par rapport à la question des poupons,
est-ce que vous pensez que c'est réaliste
d'assurer le développement, l'encadrement et la sécurité pour une éducatrice
avec six poupons dans son service de garde?
Mme D'Amours (Nathalie) : Une
éducatrice, six poupons, à mon avis personnel, c'est beaucoup. Mais quatre
poupons peut être beaucoup plus facile que deux poupons et deux enfants de
quatre ans. Tout est une question d'organisation. J'ai été éducatrice
10 ans moi-même, alors je parle par expérience. Lorsqu'on est bien
organisée et structurée, un poupon de plus ou de moins, à court terme, c'est
très facile d'envisager la chose.
• (12 h 30) •
M. Fortin
(Sherbrooke) : Vous abordez dans votre exemple une des raisons qui
peut pousser certaines éducatrices de
passer du milieu régi au milieu non régi. Hier, j'ai évoqué le cas d'une
éducatrice qui m'a écrit. Elle me disait : Ça fait 12 ans que je suis dans le réseau, j'ai été
10 ans en régi et je suis passée au mode non régi parce qu'il y avait une
lourdeur bureaucratique, et ça faisait en
sorte que j'avais moins de temps à consacrer aux enfants dont j'étais
responsable et à ma propre famille.
Et on m'a répondu à ça qu'on devrait plutôt voir ça comme étant le contraire,
devenir régi, c'est avoir l'aide du bureau coordonnateur, et que, si on
souhaite éviter beaucoup de paperasse, bien, on a tout simplement à maintenir des places privées et
donc non subventionnées, continuer d'émettre des reçus d'impôt, et ça évite
justement toute cette lourdeur bureaucratique.
Alors, est-ce
que vous êtes d'accord avec cette vision des choses? Et qu'est-ce qui, selon
vous, limite vraiment la volonté de responsables de services de garde en
milieu familial non régis à passer en mode régi?
Mme D'Amours
(Nathalie) : Lorsqu'on parle
de lourdeur administrative, de la part d'une éducatrice qui a été régie pendant des années, on ne parle pas juste de
paperasse. On parle de la lourdeur administrative systémique. Alors, évidemment, il y a de la paperasse. On parle de
l'entente de services. Que tu sois au privé ou au régi, tu dois avoir
une entente de services. C'est un minimum
d'encadrement. Là, il y a quelques exigences de paperasse supplémentaires
sur les fiches d'assiduité et les rapports
de rétribution qui viennent gérer, finalement, la gestion des contributions
réduites, mais la rigueur
administrative aussi. C'est tout dans le relationnel avec le bureau
coordonnateur. Toute la question relationnelle de l'encadrement, de la vision, du jugement de valeur
par rapport à tes valeurs, de ta façon de faire, ça se négocie, ça
s'impose, ça se renégocie. Mais plus les
années passent, plus l'expérience fait en sorte que tu te lasses et tu préfères
te baser sur tes propres expériences et qualités et de te délester de ce
poids constant de négociation et de combativité.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Je veux juste savoir si je vous ai bien entendue. Vous
êtes quand même ouverte à ce qu'il y
ait des obligations en termes de sécurité, de vérification, d'habilitation
sécuritaire ou d'absence d'empêchements pour qu'on puisse rassurer les parents qu'il n'y a pas de personne, par
exemple, majeure qui habite dans un domicile, qui a des antécédents judiciaires, ou autres, qui aurait
vraiment des empêchements à ce qu'il y ait un service de garde dans un
milieu familial privé. Est-ce que je me trompe lorsque je dis ça?
Mme D'Amours
(Nathalie) : Non, du tout.
D'ailleurs, nos propositions en page 20 proposent cinq points bien précis, alors : d'uniformiser le ratio, comme
nous avons mentionné; de mettre en place un système de vérification des empêchements, effectivement, pour la sécurité de
tout adulte lié au milieu; d'ajouter des critères de service de qualité
aux services privés par l'exigence à déposer à leur clientèle de leur démarche
éducative, parce que c'est possible, le cadre éducatif
est très viable en milieu familial — on a contribué à la rédaction du dernier
programme éducatif, on serait malvenus de le contester; copie de leur
assurance responsabilité, copie d'adhésion à un code d'éthique qui entourerait
leur gage de pratique professionnelle. On peut aller aussi vers le premier
soin. Il y a des possibilités à faire.
C'est
possible aussi d'élaborer une campagne d'information de la clientèle du milieu
privé. C'est possible de les retracer
par les retours anticipés d'impôt, de leur adresser : Voilà les nouvelles
exigences, voilà vos droits eu égard à ces nouvelles exigences. Il est possible de mettre des choses en place,
comme il est aussi possible de mettre des protocoles efficaces qui
pourraient régir le milieu familial non subventionné, soit par la collaboration
de municipalités, par l'octroi de licences
ou directement auprès du ministère. Il est possible de faire quelque chose de
souple, qui respecte le statut de travailleur autonome et qui donne le
goût aux gens de continuer de s'investir en petite enfance.
M. Fortin
(Sherbrooke) : Vous avez mentionné que vous avez participé à la
rédaction du programme éducatif du ministère.
Il y a eu plusieurs représentations cette semaine qui nous demandent d'imposer
ce programme-là. Comment ça serait reçu dans votre milieu?
Mme D'Amours (Nathalie) :
Imposé en service régi?
M. Fortin (Sherbrooke) : Dans
l'ensemble des services, le programme éducatif du ministère de la Famille.
Mme
D'Amours (Nathalie) : Bien,
les orientations éducatives qui sont présentées, qui sont données, en tout
cas, sont déjà, à mon sens à moi, demandées
par le cadre législatif à tout service éducatif. La problématique lorsqu'on
parle de programme éducatif, c'est son
application dans le milieu distinct et des personnes qui l'évaluent avec la
même paire de lunettes, qu'importe la
direction qu'elles regardent. Mais le programme éducatif, les orientations
éducatives de la loi n'ont jamais été contestés de notre part. Est-ce que toutes les
orientations devraient l'être pour le service
de garde privé? Oui, je suis
d'accord avec ce point-là, parce qu'il n'est pas difficile à rencontrer. Ce
n'est pas du tout difficile lorsqu'il est démystifié,
et il n'y a aucune éducatrice en milieu familial qui se lève en disant :
Je donne un service de non-qualité, je fais en sorte que les enfants de mon service de garde ne se développent pas
sainement. Elles veulent toutes le bien, elles sont dédiées à la petite
enfance. Alors, si on leur donne des outils et qu'on démystifie les choses, je
suis convaincue qu'on aurait leur collaboration.
On peut
reconnaître l'expertise de tous les réseaux des centres à la petite enfance,
c'est souhaitable, mais il ne faut pas,
dans un même souffle, enlever la qualité parentale de tous les autres ou de
toutes les autres expertises qui existent.
M. Fortin (Sherbrooke) : Très bien.
La députée de Richmond avait une question.
Le
Président (M. Matte) : Mme la députée de Richmond, c'est à vous à
poursuivre. Il vous reste deux minutes.
Mme
Vallières : Merci
beaucoup, M. le Président. J'irai rapidement. Merci beaucoup, mesdames, de
votre présence.
Je voulais revenir
sur les propos de mon collègue ministre qui dit que l'État ne devrait... et on
ne veut pas, comme parents, que l'État décide de l'endroit où on veut que nos
enfants aillent. J'ai fait le choix personnel... J'ai deux belles grandes adolescentes maintenant, mais
à l'époque elles allaient dans un milieu privé non régi, justement.
C'est un choix personnel qu'on avait fait.
Elles y étaient avec des cousins, cousines, ça fait que ça amène un autre
aspect aussi.
Vous
allez aussi plus loin... parce que j'avais pris, là, le temps de bien regarder
ce que vous nous avez fourni comme documentation,
de parler d'un comité, éventuellement, pour mettre en lien le régi et le privé.
Est-ce que ça peut aller aussi... puisque
vous êtes ouverts à formation, l'aspect sécurité, et tout ça, et quand vous
parlez d'harmonisation. Dans le fond, c'est
quoi, le but de ce comité-là pour vous? Parce que vous le nommez, mais sans
trop en donner de détails. Qu'est-ce que vous iriez chercher de plus
dans un tel comité?
Mme D'Amours (Nathalie) : Dans le comité que nous proposons, c'est en lien
avec une plus grande compréhension du
statut de travailleur autonome, de sa responsabilité et de son rôle. Et, pour éviter la vision unique,
nous proposions d'avoir et le regard privé et le regard régi dans le but
d'un service de qualité à l'enfant.
Et
c'est pour ça que ça nous faisait plaisir d'être accompagnées par un parent
utilisateur, pour avoir une voix qui témoigne
que la qualité, elle est présente, qu'elle est appréciée et que le service de
base actuellement imposé aux travailleurs autonomes, au fil des ans, malheureusement, a enlevé certaines caractéristiques qui étaient si riches au milieu
familial comme la possibilité d'étendre leur offre de services ou d'assouplir leur offre de services
pour l'un ou l'autre des besoins. C'était dans cette vision-là qu'on
parle de travail commun.
Le Président (M.
Matte) : Je vous remercie. J'invite la députée de Joliette à
poursuivre nos échanges.
Mme
Hivon : Oui.
Bonjour à vous deux. Je vous remercie sincèrement, à mon tour, de votre présentation. Vous dites que vous avez un point de vue discordant, mais, vous savez, tout
ça est relatif par rapport à qui on se place. Donc, je vous remercie. Nous, ici, c'est important qu'on
entende tous les points de vue et qu'on confronte ces points de vue là.
Je pense que c'est comme ça qu'on arrive aux meilleures solutions.
Avant
de vous poser des questions, je veux juste bien comprendre, donc, votre
association, elle représente qui. Parce que vous dites des éducatrices.
Est-ce que c'est uniquement des éducatrices, donc, formées, qui ont fait le
cours, le D.E.C., tout ça, ou toutes sortes
de formations? Parce que là je vous entends, vous défendez beaucoup le point de
vue des services de garde non régis, mais, à la page 6, je lis que
vous vous présentez au nom d'éducatrices regroupées dans deux bureaux
coordonnateurs.
Donc,
je veux juste comprendre. Est-ce que vous relevez de bureaux coordonnateurs,
mais vous portez aussi le point de vue des non-régis aujourd'hui, donc
les deux points de vue?
• (12 h 40) •
Mme D'Amours
(Nathalie) : Aujourd'hui, nous portons les deux. Nous sommes une
association reconnue, dûment reconnue selon
la loi sur la représentation de certaines responsables de garde, parce que la
loi nous impose de passer par là. Deux bureaux coordonnateurs ont eu le
courage de quitter le modèle syndical et de faire une demande d'être représentés par une association professionnelle,
que nous sommes. Mais, au sein de notre association professionnelle,
notre mission est la reconnaissance du statut de travailleur autonome, la
défense du statut de travailleur autonome et la reconnaissance du milieu familial. Et, à ce titre, on considère que ça va au-delà du cadre administratif, régi ou non
régi.
Mme
Hivon :
Donc, en fait, vous n'êtes pas affiliés à aucun syndicat.
Mme D'Amours
(Nathalie) : Nous ne sommes pas un syndicat.
Mme
Hivon :
Donc, c'est ça, exactement, donc vous êtes vraiment une entité distincte et
vous portez la voix des deux. Et est-ce que, quand vous dites «éducatrices», il
y a différents types de formation, donc, des gens que vous représentez via
votre association?
Mme D'Amours
(Nathalie) : Nous nous nommons éducatrices parce que la loi nous
demande un rôle d'éducation. Il y a un programme éducatif à appliquer, des jeux
éducatifs, des sorties éducatives, d'accompagner les premiers éducateurs des
enfants, les parents. Nous avons toujours considéré que la personne qui a toute
cette mission et qui est 10 heures avec les enfants avait le droit au
titre d'éducatrice en milieu familial.
Aujourd'hui,
beaucoup d'éducatrices sont formées. Au fil du temps, il y a eu énormément de
formations. Il y a énormément d'éducatrices en milieu familial qui, au
point de départ, n'étaient pas formées, sont allées chercher une reconnaissance, des accréditations, ont fait
reconnaître leur expertise, leur expérience. Mais le métier d'éducatrice
n'étant pas une profession protégée, on considérait que ce titre définissait
beaucoup mieux le rôle et les responsabilités professionnelles
que le titre de responsable de service de garde en milieu familial. On peut
être responsable de bien des choses. Ça ne définit pas tout le rôle et
l'importance de l'éducatrice en milieu familial.
Mme
Hivon :
O.K. Pour en venir aux exigences, donc, qui sont différentes, parce qu'il n'y a
pas d'exigence comme telle — évidemment, ça le dit par l'expression,
là — dans le
milieu non régi, on entend beaucoup, de la part de toutes sortes d'intervenants, mais de gens aussi,
de parents... Puis je vais faire une parenthèse, je pense qu'il n'y a
personne qui pense... puis, de tous les
intervenants qui étaient, je dirais, défavorables au milieu non régi, il n'y a
personne qui a dit qu'il n'y avait
pas de qualité dans le milieu non régi non plus. Je pense que tout le monde va
reconnaître qu'il peut y avoir des
services de qualité, de très grande qualité dans tous les milieux. Nous, notre
souci, parce qu'on doit, je dirais, favoriser la plus grande qualité possible, c'est de s'assurer que cette qualité-là,
elle soit offerte partout puis qu'il y ait des mécanismes qui puissent
nous aider, aider le ministre, le ministère, mais nous, comme législateurs, à
s'assurer de cette qualité-là.
Donc, le problème, il ne vient
jamais... C'est comme pour des résidences d'aînés, il y a eu tout un processus
de transformation pour qu'il y ait des
accréditations, puis tout ça, le problème, il ne vient jamais de ceux qui sont
de qualité, il vient de ceux qui ne
sont pas de qualité puis où on voit des histoires d'horreur. Donc, dans cette
optique-là, pour s'assurer de ça, on
voit qu'il n'y a aucune exigence, puis, dans le fond, c'est par la dénonciation
que quelqu'un peut savoir qu'il y a un problème.
Alors, quand on dit
que, dans le fond, les exigences ne sont pas si grandes puis que, dans le
milieu non régi, il n'y a absolument rien,
tu sais, pas de notions de sécurité, de notions éducatives qui sont
obligatoires, ou de mesures de contrôle, comment vous répondez à ça?
Mme D'Amours (Nathalie) : De là, bien, à mon introduction, hein, la voix
discordante. Nous ne sommes pas d'accord avec la lecture qu'il n'y a pas
de qualité. On l'a entendu. On a entendu de la médiocrité. Lorsqu'on parle d'histoires d'horreur, on parle de milieu déjà
illégal. Que faisons-nous pour les milieux illégaux? Est-ce qu'on a
vraiment les moyens de lutter contre le
milieu illégal au ratio qui n'a pas d'allure? Est-ce qu'on fait quelque chose?
Est-ce qu'en baissant les ratios on va être capables de contrevenir...
d'enrayer l'illégalité? Non, ce n'est pas ça.
Nous,
on vous propose d'ajouter des éléments qui vont venir soutenir les parents qui
font le choix de ce service de garde
privé, parce que l'éducatrice en milieu familial a beaucoup plus de souplesse
pour élargir son offre de services et la bonifier. Elle a beaucoup moins de contraintes administratives pour
justifier chacun de ses choix, peut, au jour le jour, bonifier pour
quelques heures ou pas un besoin ponctuel d'un parent. Alors, nous, on
dit : Encadrons, proposons, n'imposons
pas le modèle tel quel, parce que de prendre un carré et de le rentrer de force
dans le modèle du cercle, on va arriver au même résultat. On l'a fait en
1997. En 2017, on est ici pour parler de la même chose.
Alors,
peut-on innover avec les nobles objectifs que nous partageons tous, la sécurité des enfants? Il n'y a
pas un parent qui ne partage pas cet objectif-là.
Il n'y a pas une éducatrice qui se dédie à la petite enfance qui ne partage pas
cet objectif-là. Alors, cessons de dire que, parce qu'il n'y a pas de règle,
elles sont illégales ou inacceptables, parce qu'il y a du beau, il y a du bon. Il y a des parents qui confient leurs
enfants, puis chaque matin leurs parents confient la prunelle de leurs
yeux. Alors, faisons tout simplement mettre des mesures en place pour assurer
cette qualité-là aux parents.
Mme
Hivon : Je vous entends très bien. Vous êtes consciente
qu'en ce moment ce qu'on nous dit beaucoup, c'est qu'il y a une totale... je dirais qu'il y a une
totale différence, même pas de vérification des antécédents judiciaires,
vous le mentionniez, pas d'exigence d'avoir
un cours de premiers soins en milieu non régi, pas de plan d'évacuation,
d'extincteur. Donc, ça, je comprends que,
tous ces éléments-là, vous êtes d'accord pour vous y conformer, y compris, là,
si j'ai bien compris la réponse à la
question du ministre, un programme éducatif formel qui pourrait être le même.
Est-ce que c'est ça que j'ai compris?
Mme
Blouin (Marie-Michèle) : Moi, je suis tout à fait d'accord avec le
fait que la sécurité doit être primordiale, mais je pense qu'on doit aussi considérer la capacité parentale à en
juger. Donc, je pense que le parent, en allant reconduire son enfant, en allant le chercher à tous les
jours, c'est la personne la plus à même pour juger de la qualité, de la
sécurité, de la propreté des lieux, de la
qualité des interactions de l'éducatrice envers son enfant, et je crois
beaucoup en sa capacité, en fait, à être le meilleur évaluateur pour son
milieu.
Mme
Hivon :
Parce que je veux juste revenir, là, sur ces éléments-là que vous soulignez à
la page 20, s'il y a certaines mesures,
un encadrement qui est mis en place, il va falloir qu'il y ait une forme, je
dirais, de mécanisme pour s'assurer
du respect de ces obligations-là. Donc, comment vous voyez ça par rapport au
ministère? Comment on s'assurerait que ces éléments-là que vous mettez
de l'avant, en matière de sécurité, de programme éducatif, sont respectés?
Mme Blouin
(Marie-Michèle) : Sans être un bureau coordonnateur, on peut parler
d'inspecteurs, de visites à intervalles
réguliers, qu'elles soient surprises ou pas. Je pense que ça vise à répondre au
critère numéro un, qui est la sécurité, puis je pense qu'on peut y
arriver avec ce genre de mesures là.
Mme
Hivon :
Est-ce qu'il me reste du temps? Oui?
Le Président (M.
Matte) : Deux minutes.
Mme
Hivon :
Deux minutes. O.K. Pour la sécurité, je comprends. En fait, moi, ma volonté,
c'est d'arriver au meilleur résultat
possible avec les meilleurs moyens possible. Donc, je pense qu'on veut tous ça
ici, puis la seule question que ça me
pose, c'est que je me dis... Je comprends vos arguments sur la lourdeur, tout
ça, mais là je me dis : Si on remet des critères, justement, pour dire : bien, nous aussi, on s'en
assure, de la sécurité, puis ce n'est pas vrai que, nous, ça ne nous dérange pas les antécédents... Parce que je pense
que tout le monde va convenir que ça, c'est des choses qu'on veut offrir
comme minimum aux parents. Ensuite, c'est de
se dire : O.K., mais pourquoi on aurait un système où il y a quelques
critères puis un autre système où il y a
plus de critères? Puis qui va s'assurer de la conformité de ces critères-là?
Donc, si on revient au même, puis on
a des inspections, puis on a des visites, puis tout ça, dans le fond, pourquoi
dire : Bien, on va migrer vers un
seul système, quitte à revoir peut-être des irritants dans le système? Je ne
sais pas si vous me suivez. Donc, comment on s'assure de ça?
• (12 h 50) •
Mme D'Amours (Nathalie) : Bien,
c'est parce que vous avez un milieu régi qui se conforme à un ensemble de législations et vous avez un milieu privé qui a
zéro législation. Il y a une différence entre zéro et des règles
minimales. Il y a une
différence entre confier à une tierce partie l'ensemble de la responsabilité de
contrôle ou bien laisser le contrôle au parent utilisateur.
Nous, on
croit que le parent utilisateur doit être l'élément de contrôle numéro un. Au
niveau systémique, si on distribue
une licence, soit par le biais du ministère, soit par les municipalités, dans
laquelle on demande la preuve de la recherche
d'empêchement, qu'on recherche la preuve d'assurance, qu'on recherche peut-être
une exigence de plus, l'étape administrative,
papier simple, assure le minimum garanti, et ensuite la clientèle, à qui
revient la responsabilité de la qualité des services donnés à son enfant, prend le relais. Alors, il y a un
élément administratif. Alors, le gouvernement, lui, légifère au niveau
de sa responsabilité sur les éléments de qualité. L'administratif...
Le
Président (M. Matte) : Je
m'excuse, nous allons poursuivre les échanges avec la députée de Louis-Hébert.
Mme Guilbault : Merci beaucoup, M.
le Président. Merci, mesdames. J'ai envie, comme mon collègue, de souligner l'intérêt d'avoir parmi nous un parent
qui vient témoigner de quelque chose, d'une expérience bien concrète de la réalité, effectivement, de choisir un
service de garde, chose que tout le
monde ici, ou presque, a déjà dû
faire et que moi-même, je débute tranquillement. Alors, merci beaucoup
d'être ici.
J'ai envie de reprendre aussi un peu le flambeau
ou, en tout cas, le sujet de ma collègue qui était évoqué précédemment. On sent que, par les propos que vous avez tenus, les réponses que vous
avez données, notamment à M. le ministre, et aussi les puces que je vois ou les points que
je vois à la page 20, vous avez une ouverture à ce que les milieux non régis répondent quand même à un minimum
d'exigences, ou en tout cas resserrent un petit peu les critères, je
dirais, de qualité, ou en tout cas acceptent de se prêter à certaines exigences
qui pourraient être émises. Donc, ça impliquerait effectivement, comme disait la
collègue, une certaine forme de vérification de ces objectifs-là qui seraient
atteints, et on sent que vous êtes ouvertes à ça.
Par contre, on sent aussi que vous estimez que
relever d'un bureau coordonnateur ou être un RSG, comme on appelle, apporte une lourdeur bureaucratique que beaucoup
de femmes ont choisi de quitter pour toutes sortes de raisons. Donc, ma question, c'est... Et hier il y a des gens qui ont évoqué le fait de,
mettons, partir d'un milieu non régi et devenir accrédité, relever d'un bureau coordonnateur, sans pour autant
revendiquer des places subventionnées, en disant qu'accepter d'être
accrédité sans revendiquer des places subventionnées, ça n'apporte pas la même
lourdeur bureaucratique.
Est-ce que
ça, pour vous, c'est un compromis qui est réaliste? Je présume que non, si ces
dames-là demeurent dans les milieux non régis. Alors, j'aimerais vous
entendre là-dessus. Autrement dit, si vous acceptez une certaine part d'administration supplémentaire qui est
sous-entendue par ce à quoi vous acceptez de vous prêter, en quoi ce serait
différent ou en quoi ce serait moins lourd que ce qui est exigé en ce moment
pour être accrédité par un bureau coordonnateur, sans places subventionnées?
Mme D'Amours (Nathalie) : Ce n'est
pas la même chose. Être reconnu par un bureau coordonnateur, sans subvention, existe depuis plusieurs années déjà,
alors depuis 2005 exactement. Alors, ce n'est pas d'hier que ça existe.
Des éducatrices l'ont fait et l'ont quitté.
Le modèle du bureau coordonnateur, lorsqu'on parle de lourdeur administrative,
ce n'est pas juste la paperasse liée à la
subvention. Donc, si je me fais reconnaître comme éducatrice sans subvention,
j'évite un peu de paperasse, mais je reste
dans le modèle lourd qui est en place. Et si, en 2008, les éducatrices, lors de
notre sondage, avaient répondu à 51 % vouloir s'en aller vers la garde
privée si tous les risques qui se présentaient, entre autres la syndicalisation, liés à la subvention... Bien, au
début, elles ont fait confiance, et peu à peu se sont lassées, et ont
quitté vers la garde privée.
Alors, si on
ne veut pas retourner dans le même cycle, il ne faut pas retourner les
éducatrices au même endroit qu'elles ont quitté. Alors, il faut avoir le
courage organisationnel de dire : Ce modèle-là ne fonctionne pas dans son intégralité, parce que les gens désirent en
sortir. Qu'est-ce que je fais pour améliorer tout en gardant les objectifs?
Les objectifs sont nobles. La loi, les objectifs sont nobles, mais les lois ne
sont jamais assez précises.
Et, lorsqu'il y a des trous dans la loi, le
système gouvernemental, le système du milieu comble les trous, et quelquefois bien loin de la volonté initiale des
législateurs. Vous n'avez pas de garantie aujourd'hui que la volonté que
vous avez dans les actes ou dans les
articles que vous rédigerez, ce sera réellement ça qui est appliqué. C'est pour
ça que plusieurs groupes demandent
plus de clarification. Dans mon mémoire, il y a aussi quatre propositions pour
rectifier les problèmes de la garde
régie. Si on les rectifie, on va cesser la migration vers la garde privée. Ça
aussi, ça peut être un élément numéro un à se poser comme question.
Aujourd'hui,
la syndicalisation, lorsque les éducatrices sont syndiquées, elles le sont à
vie. Elles ont été syndiquées sous le
modèle fonctionnaire, elles n'ont pas les avantages du fonctionnaire. La seule
façon pour une éducatrice... Elles ne peuvent
plus n'être pas syndiquées. Elles peuvent être représentées par une association
représentative, mais elles n'ont pas le
droit de choisir comme n'importe quelle entreprise dans le monde privé, parce
qu'une éducatrice en milieu familial ne fait pas partie de la fonction publique, c'est un travailleur autonome.
Vous l'avez nominée dans la loi n° 51 comme un travailleur
autonome. Donc, ce n'est pas un travailleur... Si c'est un travailleur
autonome, ce n'est pas un syndiqué, un employé de l'État. Alors, il faut cesser
continuellement de les mettre dans le même panier.
On a entendu
des discours dire : Il faut que tout le monde ait les mêmes exigences, les
mêmes éléments de contrôle, les
mêmes... Oui. Alors, qu'est-ce qu'on répond aux éducatrices en milieu familial
qui sont prestataires, à qui on demande le même cadre, les mêmes
éléments d'analyse, les mêmes outils de contrôle, mais à qui on donne beaucoup
moins de moyens pour les rencontrer?
C'est facile
d'ajouter des obligations et des obligations. Aujourd'hui, on ajoute
l'obligation de la réussite éducative. À ce que je sache, c'est ce
qu'elle fait depuis 1997. Qu'est-ce que la notion de réussite éducative va
apporter de plus pour
les éducatrices en milieu familial régi? Des normes de plus? Des contrôles de
plus? De la lourdeur de plus pour elles? Elles ont déjà toute la structure du bureau coordonnateur qui met ça en
place bien avant qu'il y ait une loi sur le sujet.
Elles sont passionnées. Vous avez vu leur
passion sur la qualité des services éducatifs et leur engagement au programme éducatif. Elles n'ont pas attendu une
loi pour imposer ça. Pour le milieu familial, c'est déjà très présent.
C'est un des éléments de la lourdeur. Est-ce que le programme éducatif décrit en
application au milieu familial a sa place?
Le Président (M. Matte) : Je vous
remercie pour votre contribution à nos travaux.
Mémoires déposés
Avant de
conclure l'audition, je procède au dépôt des mémoires pour les organismes et
les personnes qui n'ont pas pu se faire entendre.
Et, la commission ayant accompli son mandat,
j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 57)