(Onze heures vingt-neuf minutes)
Le Président (M.
Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum,
je déclare la séance de la Commission des
relations avec les citoyens ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je
demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 134, Loi visant
principalement à moderniser des règles relatives au crédit à la consommation et
à encadrer les contrats de service de règlement de dettes, les contrats
de crédit à coût élevé et les programmes de fidélisation.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président : Mme Guilbault
(Louis-Hébert) est remplacée par M. Lamontagne (Johnson).
Auditions
(suite)
Le
Président (M. Picard) : Merci. Ce matin, nous entendrons les
groupes Option Consommateurs et la Corporation des concessionnaires
d'automobiles du Québec.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Option Consommateurs. Vous
disposez d'une période de
10 minutes pour faire votre exposé. Vont s'ensuivre des échanges avec les
parlementaires. Dans un premier temps, je vous demanderais de vous
identifier et de faire vos commentaires, merci.
Option
Consommateurs (OC)
M. Corbeil
(Christian) : Christian Corbeil, directeur général d'Option
Consommateurs. M. le Président...
Mme Thériault
(Élise) : Élise Thériault, conseillère budgétaire et juridique chez
Option Consommateurs.
• (11 h 30) •
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : Sylvie De Bellefeuille, conseillère budgétaire et juridique
chez Option Consommateurs.
M. Corbeil (Christian) : M. le Président, Mme la ministre, Mmes
et MM. les députés, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos observations aujourd'hui.
Option Consommateurs est une association sans but
lucratif qui a pour mission de promouvoir et défendre les intérêts des
consommateurs et de veiller à ce que ces intérêts-là soient respectés, et ce, depuis 1983. Des milliers
de gens nous contactent chaque année pour des consultations budgétaires,
lorsqu'ils ont des problèmes avec un commerçant ou lorsqu'ils sont membres
d'une action collective.
Nous
accueillons favorablement les orientations proposées par le projet de loi n° 134. Elles sont nécessaires pour encadrer l'industrie du crédit parallèle, qui exploite la vulnérabilité des consommateurs. Me Thériault et De Bellefeuille
vous exposeront, ici, les grandes lignes de nos observations.
Mme Thériault (Élise) : Merci. Donc, le premier sujet dont j'aimerais
vous entretenir, c'est le paiement minimum sur les cartes de crédit. Nous nous réjouissons de l'adoption d'une
mesure encadrant le paiement minimum requis sur une carte de crédit et le fixant à 5 % du solde.
Toutefois, selon nous, la mesure d'implantation progressive qui est proposée
doit être révisée.
Lorsqu'une
mesure similaire avait été proposée en 2011, nous avions reçu plusieurs
commentaires de consommateurs qui
craignaient l'impact d'une augmentation de 1 % du paiement minimum.
Rappelons que, selon un récent sondage de l'Association canadienne de la
paie, 34 % des Québécois vivent d'une paie à l'autre.
L'article
69 du projet de loi propose de fixer à 2 % le paiement minimum pour la
première année. Et il est ensuite prévu
de l'augmenter de 1 % par an jusqu'à ce qu'il atteigne 5 %. Selon
nous, cela devrait se faire plus graduellement, puisque la mesure exige un effort financier beaucoup plus important au
cours de la première année qu'au cours des années suivantes. Cela permettrait aux consommateurs les
plus à risque d'avoir le temps de consulter les ressources en matière de
budget et d'endettement et de prendre des mesures appropriées.
Également,
nous croyons que le paiement minimum à 5 % devrait s'appliquer sur tous
les contrats conclus après l'entrée
en vigueur de la loi. En soumettant les nouveaux contrats à l'application
immédiate et complète de l'article 126.1, on évite au nouveau
détenteur de carte de crédit de subir une période de transition douloureuse.
On
se réjouit de l'interdiction formelle d'augmenter la limite de crédit sans la
demande express du consommateur tout
comme de l'interdiction d'augmenter cette limite au-delà de la demande du
consommateur. Toutefois, la loi devrait interdire également le
dépassement tout court de la limite de crédit, ce qui remet en cause la notion
même de limite.
Selon
notre expérience, ils sont rares, ceux qui savent en tout temps le montant
exact du solde de leur carte de crédit.
Les gens s'attendent qu'une transaction qui dépasse leur limite soit refusée.
Selon ce qui est proposé dans le projet de loi, la limite de crédit pourrait être dépassée sans aucune balise,
selon le bon vouloir du prêteur. Cela pose un très sérieux risque pour le consommateur, qui, souvent, ignore
qu'il a dépassé sa limite jusqu'à la réception de son état de compte.
Au surplus,
la rédaction actuelle de 128.1 oblige les émetteurs de cartes de crédit qui
laisseraient les consommateurs dépasser
leur limite à ajouter au versement minimum la portion des achats qui excède la
limite. Ainsi, de façon tout à fait paradoxale,
on entend alléger la charge des consommateurs en augmentant de façon graduelle
le pourcentage du paiement minimum exigé, mais, d'un autre côté, on
permet d'augmenter le paiement minimum de montants indéterminés qui peuvent aller jusqu'à plusieurs centaines de
dollars. Un consommateur qui ne pourrait pas payer son paiement minimum subira des conséquences notamment au niveau de son
dossier de crédit. Selon nous, toute opération qui a pour effet de
dépasser la limite, à l'exception des intérêts encourus, devrait être refusée.
On se réjouit
de l'initiative d'encadrer les programmes de fidélisation. Ça vient confirmer
que ce sont des contrats de
consommation et non des ententes à titre gratuit. Nous saluons l'interdiction
de date d'expiration des unités d'échange. Cependant, si un règlement
permettant l'expiration des points en cas d'inactivité venait à être adopté,
nous croyons qu'il devrait être au
moins aussi généreux que le régime ontarien. Plusieurs consommateurs accumulent
leurs points sur une longue période afin d'obtenir des avantages plus
intéressants comme des voyages. Nous sommes donc inquiets qu'on permette au consommateur de modifier
unilatéralement un élément essentiel du contrat, soit la valeur des unités
d'échange, et ce, même de façon
rétroactive. Il faut, selon nous, plutôt interdire toute modification
unilatérale qui aurait un effet rétroactif.
Mme De
Bellefeuille (Sylvie) :
Maintenant, concernant l'obligation de vérifier la capacité de remboursement
des consommateurs, nous saluons
l'introduction de la notion de responsabilisation du prêteur dans ce nouveau
projet de loi là. Cependant, notre
expérience nous permet d'affirmer que les consommateurs font confiance aux
institutions financières quand vient
le moment d'évaluer leur capacité de remboursement. Ils sont généralement à ce
moment-là dans une situation qui est vulnérable.
Notre
recommandation, ce serait que l'obligation d'évaluer la capacité de
remboursement, elle s'applique à tous les prêteurs et non seulement à
quelques-uns.
Chaque jour,
nous rencontrons des gens qui sont surendettés. La vaste majorité d'entre eux
vont obtenir leur prêt auprès de banques ou de caisses, pas auprès de prêteurs
parallèles. On a rencontré d'ailleurs récemment un consommateur qui
avait réussi à obtenir une carte de crédit le lendemain qu'il avait visité un
syndic de faillite. Donc, au niveau de l'évaluation
de la capacité de remboursement, je pense qu'il y a un travail qui n'a
peut-être pas été fait de la bonne façon.
Le projet de
loi, en ce moment, prévoit que les commerçants qui doivent respecter des
obligations légales de saine gestion
de pratiques sont réputés satisfaire à l'obligation de vérifier la capacité de
remboursement. Or, dans la pratique réelle,
nous, ce qu'on constate, c'est que, dans la réalité, cette évaluation-là, elle
est très déficiente. Selon nous, en plus, ces lois-là, ce qu'elles offrent, ce
sont des obligations qui sont générales de saine gestion, mais il n'y a aucune
obligation d'évaluer la capacité de
remboursement et, en cas de défaut de la part de l'institution financière, il
n'y a pas de recours qui est offert pour les consommateurs. Donc, pour
nous, c'est essentiel que l'ensemble des institutions financières soient
soumises à cette obligation-là.
Le scandale
qui a pris naissance il y a quelques mois, suite aux révélations de la CBC
concernant les pratiques de commerce
auprès des grandes banques, pour nous, est une belle illustration de nos
craintes. Rappelons que le diffuseur avait reçu plus de 1 000
courriels d'employés et d'anciens employés des cinq plus grandes banques du
Canada qui affirmaient que la pression indue
qu'ils recevaient pour vendre des produits ou pour atteindre des quotas les
incitait à soit violer la loi soit à
ne pas respecter les règles de l'art. Le scandale a tellement fait écho qu'il y
a actuellement une enquête sur cette
question-là. Dans ce contexte, il nous apparaît impensable d'établir une
présomption irréfragable à l'effet que les
institutions financières respectent réellement et vérifient réellement la capacité
de remboursement des consommateurs.
Concernant
l'encadrement des redresseurs financiers, on se réjouit particulièrement de ces
nouvelles règles-là. Ce sont des
services qui sont offerts à des consommateurs au moment où ils sont le plus
vulnérables, où ils sont vraiment une
cible facile pour ces commerces-là qui ont tendance à offrir des solutions qui
peuvent sembler très alléchantes au premier abord, mais qui, dans la
réalité, vont souvent plutôt amplifier le problème.
Nous avons
cependant certaines inquiétudes quand il s'agit de la notion de services qui
peuvent améliorer le rapport de crédit. Beaucoup de consommateurs qui
éprouvent des difficultés financières sont soucieux de préserver leur bon dossier de crédit. Le problème, c'est que le fonctionnement
du dossier de crédit et des pointages de crédit n'est pas vraiment connu
de la part des consommateurs. Ils ne savent pas vraiment comment ça fonctionne.
Sur le
dossier de crédit, il faut se rappeler que les cotes de crédit de 1 à 9 qui
sont attribuées à chaque paiement le sont en fonction de la date de paiement.
Alors, par exemple, une dette qui est en recouvrement, qui est notée 9,
qui est la pire note qu'on peut avoir, elle va rester au dossier même si le
consommateur paie la dette en entier. Alors, quand un redresseur financier
dit : Quand vous faites affaire avec nous, on va améliorer votre dossier
de crédit, ça ne peut pas vraiment être
vrai. Donc, ce sont vraiment, pour nous, des représentations qui sont fausses
et qui sont trompeuses, et même prétendre pouvoir le faire, à notre
avis, est quelque chose qui est faux. Christian.
M. Corbeil
(Christian) : Oui. Nous
réitérons notre appui au projet de loi n° 134. Nous croyons qu'en
s'attaquant aux pratiques prédatrices
qui touchent les consommateurs vulnérables les législateurs font un pas dans la
bonne direction, mais, cependant, il
reste encore beaucoup de travail à faire. D'autre part, si des entreprises
peuvent offrir des crédits coûteux, c'est
parce qu'elles répondent à un besoin présent sur le marché. Les grandes
institutions financières se sont désintéressées aux petits prêts, de
sorte qu'il est très difficile pour les ménages à faibles... à revenus modestes
de trouver du crédit à la
consommation à faible coût. D'autre part, le taux d'endettement des ménages a
maintenant dépassé le seuil des 167 %. Nous sommes très inquiets par rapport à cette situation. Il sera
primordial de se pencher rapidement sur les vraies causes du
surendettement.
Finalement,
nous tenons à souligner l'importance d'adopter, pour l'avenir, une terminologie
technologiquement neutre afin que les
utilisateurs de tous les modes de paiement bénéficient de la même protection.
Merci de votre attention.
• (11 h 40) •
Le
Président (M. Picard) : Merci. Nous allons procéder, pour la
période d'échange, avec Mme la ministre. Vous disposez de
16 minutes.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) : Merci, M. le Président. Vous me
permettrez évidemment de souhaiter la bienvenue à M. Christian Corbeil,
Mme De Bellefeuille et Mme Élise Thériault, sans lien de parenté,
évidemment. Bienvenue en commission
parlementaire. Je suis très heureuse de pouvoir vous entendre ce matin.
Évidemment, Option Consommateurs, je
dirais presque que nous sommes les meilleurs nouveaux amis qu'on ne peut pas
avoir, le ministre qui est responsable
de la protection des consommateurs et Option Consommateurs, qui travaille tous
les jours avec les consommateurs.
Dans
votre mémoire, bon, vous avez parlé de votre mission. Vous offrez des services
de consultation budgétaire et des
séances d'information. Donc, j'imagine que vous avez certainement vu plusieurs
cas qui ont le mérite d'être traités dans le projet de loi, qui sont
devant nous, auxquels on apporte des réponses.
Je
vais vous dire ce qu'on a dit aussi hier en commission : C'est que là vous
avez une portion du projet de loi qui avait été déposé en 2012, le projet de
loi n° 24, et c'est la première étape d'une révision de la loi pour mieux
protéger les consommateurs. Donc,
éventuellement, il y aura la suite et, évidemment, comme ministre responsable
de la Protection du consommateur, à
partir du moment où il y a des cas qui sont portés à mon attention, mon devoir,
c'est de me demander et de travailler
avec l'OPC et nos différents partenaires, qu'ils soient de la partie du monde
des affaires ou la protection du consommateur, comment on peut mieux
protéger les consommateurs.
Donc,
j'aimerais ça vous entendre, parce que vous n'en avez pas parlé, mes collègues
aussi ont des questions à poser sur le fait qu'il y a quand même des
entreprises qui offrent du crédit à coût élevé, très élevé, ce qu'on appelle deuxième chance au crédit, parce que j'imagine que
vous devez en voir, ou il y a des compagnies qui disent qu'il n'y a pas d'évaluation de leur historique de crédit à
partir... tu sais, la deuxième chance au crédit, qui est du crédit à coût très
élevé. J'aimerais ça que vous m'en parliez un peu plus.
Le Président (M.
Picard) : Me De Bellefeuille.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : En fait, ce qui nous inquiète vraiment, c'est
l'absence d'évaluation de la capacité de remboursement et l'absence
d'évaluation du dossier de crédit. Comme vous l'avez mentionné, effectivement,
il y a beaucoup de ces entreprises-là qui...
et, dans les dernières années, je vous dirais, on en voit même qui font de la
pub dans le métro. Nous pensons que
le projet de loi qui a été déposé a quand même plusieurs éléments qui vont
permettre d'encadrer davantage ces
commerces-là, d'une part en mettant, par exemple, les frais de... c'est déjà
prévu dans la loi, mais les frais de courtage, par exemple, qui doivent être
inclus dans les taux d'intérêt. C'est déjà dans la LPC, mais visiblement ce
n'est pas le cas dans bien des
contrats que nous, on a vus. Alors, le fait d'encadrer davantage et d'interdire
les courtiers d'obtenir de l'argent
directement du consommateur, ça, je pense que ça va être un frein à ce genre de
pratique là et ça va justement permettre d'aider ce genre... les
consommateurs de voir les coûts réels de ce type de prêt là.
L'obligation
d'évaluer la capacité de remboursement aussi, je pense, va également être
importante. Nous pensons par contre qu'il y
a toujours le petit risque que... Tel que rédigé, l'article prévoit que, quand
on fait une évaluation, on est réputé
avoir fait une bonne évaluation. Nous, notre crainte, c'est que
malheureusement, malgré l'évaluation, on prête quand même, même si le
prêt est manifestement déraisonnable. Alors, à ce niveau-là, si c'est possible
d'ouvrir un peu la porte à des recours en
cas d'abus de la part des prêteurs, je pense que ce serait quelque chose qui
serait bienvenu.
Mme Thériault
(Anjou
—
Louis-Riel) :
Parfait. Merci.
Le Président (M.
Picard) : Mme la ministre.
Mme Thériault
(Anjou
—
Louis-Riel) :
Je pense que la députée de Fabre voudrait...
Le Président (M.
Picard) : Mme la députée de Fabre.
Mme Sauvé :
Merci, M. le Président. Alors, bienvenue. Alors, bonjour à vous. Très
intéressant, votre mémoire, M. Corbeil,
Mme De Bellefeuille, Me Thériault.
Je suis très sensible
à votre appui à plusieurs règles qui ont été proposées et particulièrement les
règles qui permettent l'actualisation face
aux nouvelles pratiques commerciales. Je regardais un peu les chiffres les plus
récents par rapport au commerce en
ligne, et c'est phénoménal, comme évolution, l'achat par Internet. Je regardais
les derniers chiffres, écoutez, on
parle de 3 000... on parle de plus de 30 %, en fait, des adultes
québécois qui achètent sur Internet, un bond à chaque année de plus de 20 %. Alors, c'est une réalité à laquelle
on doit faire face. Et, honnêtement, bien sûr que le projet de loi fait
face à cette modernisation de nos pratiques.
Alors,
j'aimerais que vous nous fassiez un petit peu un état de situation, parce que
je sais que ça vous préoccupe, la
situation des acheteurs, des consommateurs sur Internet. J'aimerais que vous expliquiez un petit peu les témoignages, les situations des gens, au bénéfice, donc, des
gens qui nous écoutent.
Le
délai d'annulation. On achète un item sur l'Internet, on reçoit le relevé de
carte de crédit, et puis le montant est déjà perçu, alors qu'il n'y a
pas de délai d'annulation. Alors, je sais que vous êtes très sensible à ça et
vous souhaitez qu'il y ait
une échéance pour faire en sorte, entre
autres, qu'il y ait
un sept jours qui s'ajoute pour permettre justement, là, l'annulation.
Parlez-moi un peu... Est-ce que c'est à ce point important de voir à corriger
le tir?
Le Président (M. Picard) : Me
Thériault, allez-y.
Mme Thériault (Élise) : Pour l'année
dernière seulement, on a été en contact avec plusieurs dizaines de consommateurs qui ont été victimes notamment
de fraude sur Internet. On parle de la fraude des échantillons gratuits,
où les gens s'abonnaient ou entraient leur
numéro de carte de crédit pour payer seulement les frais de livraison, qui étaient censés être de quelques dollars, et se
retrouvaient malgré eux abonnés à des petits pots de crème qui arrivaient mensuellement pour plusieurs centaines de
dollars. Et, à l'heure actuelle, la loi prévoit qu'on doit s'adresser au
créancier ou au commerçant pour faire
annuler un contrat dans un certain délai, qui est soit à partir du moment où
vous avez reçu votre courriel de
confirmation soit à partir du moment où vous recevez les choses et vous vous
rendez compte que ce n'est pas ce que vous avez commandé. Le problème,
c'est que, souvent, les gens se rendaient compte de la fraude après l'expiration de tous ces délais-là, au moment où
ils recevaient leur état de compte, et donc c'était impossible pour eux de
pouvoir faire la résolution du contrat dans
les temps, et ensuite ils perdaient, donc, le recours à la rétrofacturation,
qui est le fait de s'adresser à la
carte de crédit pour demander de se faire rembourser les sommes qui ont été
injustement prises.
Donc, en
rajoutant ce délai-là, on permet aux gens qui ne sont pas capables de rejoindre
le commerçant, soit parce qu'il est
un fraudeur ou soit pour une autre raison, par exemple, parce qu'il a
fermé ses portes, ou, aux gens dont le commerçant refuse d'effectuer un remboursement, on leur permet de résoudre leur contrat, d'accéder à la
rétrofacturation, même s'ils ont
dépassé les délais qu'il y avait précédemment, en ajoutant un délai qui est à
partir de la réception de l'état de compte. Et ça, c'est vraiment important, parce que beaucoup de gens se voyaient
privés d'un recours parce qu'ils se rendaient compte seulement au moment
de la réception de leur état de compte que ce qu'ils vivaient n'était pas ce
qu'ils avaient conclu comme contrat.
Mme
Sauvé : Dernière question
rapidement, vous avez parlé particulièrement de la situation
de fraude : Est-ce qu'il y a d'autres situations qui
nécessiteraient l'ajout du sept jours? Est-ce qu'il y a d'autres éléments de situation?
Mme Thériault (Élise) : Oui, tout à
fait. Il y a des commerçants, par exemple, qui peuvent refuser de faire le remboursement
parce que vous prétendez, par exemple, que ce que vous avez reçu, ce n'est pas
ce que vous aviez commandé. Bien, à ce moment-là, vous pourriez avoir ce délai-là. Si le commerçant refuse de vous
rembourser pour une autre raison, parce que
ça peut arriver surtout avec les achats sur Internet, les commerçants sont à
l'étranger, peuvent dire que, pour
une raison ou une autre, votre prétention, elle est fausse, bien, à partir du
moment où vous recevez votre état
de compte ou s'il y a une erreur de
facturation et vous vous en rendez compte à l'état de compte, bien, vous
pouvez recourir à la résolution et ensuite garder votre droit à la rétrofacturation.
Mme Sauvé : Ça nous donne une bonne
idée du portrait. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Beauce-Sud.
• (11 h 50) •
M.
Busque : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, mesdames et messieurs, représentants d'Option Consommateurs,
c'est un plaisir de vous avoir parmi nous
aujourd'hui. Un dossier très important et très intéressant qu'est, bien entendu,
l'accès au crédit.
Alors, on
sait qu'aujourd'hui... et ma collègue de Fabre vient d'en parler, on parle du
commerce par Internet, on sait que
l'achat est très facile et facilité de toutes sortes de façons et de toutes
sortes de nouvelles façons également. Alors, on connaît l'essor que les ventes en ligne ont connu et qui continuent
d'aller dans un sens où est-ce que c'est exponentiel. On connaît aussi,
on sait aussi que l'accès au crédit en tant que tel est quelque chose qui
était... qui est aujourd'hui beaucoup plus
facile que ça pouvait l'être il y a quelque temps. J'aimerais... je sais qu'il
y a une partie, vous en avez parlé un
peu dans votre présentation du début, mais, si on se réfère au début ou si on
remonte au début, au niveau de
l'accès au crédit et justement
l'évaluation de la capacité de rembourser ou la capacité de...
ou le niveau de crédit accordé, je sais que c'est un des points qui est sensible pour vous, j'aimerais vous
entendre plus précisément sur ce point-là plus précis qui, je pense,
là, est à l'origine, là, de certaines autres situations, là, qui peuvent
survenir par la suite.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : Oui.
Bien, en fait, ce qu'on remarque, c'est que le crédit est accordé très, très facilement. On parle, dans le projet de loi, on
s'attaque surtout aux cartes de crédit. Il y a les marges de crédit aussi qui
sont un problème. Beaucoup de marges de
crédit sont accordées. On remarque, par exemple, les marges de crédit
étudiantes, qui peuvent être à des
plafonds qui peuvent être très, très élevés, selon le type d'études que font
les étudiants, parce qu'on dit :
Vous allez être avocat, vous allez être médecin plus tard, vous allez être
riche. Donc, c'est problématique parce que ces gens-là se retrouvent par
la suite avec des dettes très, très élevées.
Même au
niveau des hypothèques. Je sais que ce n'est pas couvert par le projet de loi
actuellement, mais, au niveau des
hypothèques, au niveau des banques, au niveau des caisses, de façon générale,
souvent, on va dire qu'une hypothèque est
une bonne dette, dans la mesure où il y a un actif qui vient contrebalancer le
passif, et généralement la dette est plus petite que — du
moins, c'est ce qu'on souhaite toujours — le montant hypothécaire qui est attribué.
C'est vrai sur papier. Maintenant, pour le ménage qui a de la difficulté à faire ses paiements
hypothécaires, c'est un problème. Même si, sur papier, il est solvable, s'il n'arrive pas à faire ses paiements
hypothécaires, il se retrouve dans une situation qui est très pénible. Et ce n'est pas parce qu'on met une
pancarte «À vendre» demain matin qu'on va vendre nécessairement tout de
suite et au prix que l'on souhaite. Donc, ça aussi, c'est quelque chose qui est
problématique.
Je pense qu'il y a vraiment une importance de
revoir l'ensemble des règles qui touchent le crédit justement parce que, selon nous, le constat qu'on fait,
c'est que malheureusement beaucoup d'institutions financières prêtent trop
sans tenir compte de la réelle capacité de remboursement des consommateurs.
Mme Thériault (Élise) : Si je peux
me permettre d'ajouter... Si je peux me permettre d'ajouter également : historiquement, les banques et les caisses, les
institutions financières traditionnelles s'intéressaient davantage aux petits
prêts qui requièrent plus d'enquêtes, si on veut. Si on voulait un prêt de
5 000 $, 10 000 $, on pouvait aller à notre institution financière. Maintenant, si vous
requérez en bas de 15 000 $, et parfois même en bas de
20 000 $, on vous envoie directement
à une carte de crédit, laquelle n'a pas vraiment d'évaluation. On voit des
vendeurs de cartes de crédit dans des
kiosques dans les événements sportifs, dans les centres d'achat. Vous
remplissez une feuille rapidement sur le coin d'une table, on vous donne un t-shirt, une casquette, fini, c'est ça,
votre évaluation. À moins que vous ayez fait faillite la semaine passée,
vous allez l'avoir, votre carte de crédit.
Donc, avant,
vu qu'il y avait des outils de paiement qui étaient offerts ou des outils de
crédit qui étaient offerts par les institutions financières, qui
permettaient de combler les besoins, il y avait une évaluation un petit peu
plus approfondie, insuffisante, selon nous,
mais un peu plus approfondie, qui était faite, que ce qui est fait maintenant
dans le cadre de la vente de cartes de crédit. Ça, c'est certain.
M. Busque : Je vous remercie.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Portneuf. Trois minutes.
M.
Matte : Merci, M. le Président. Je suis très heureux de vous entendre
ce matin puis je vous félicite, là, sur la préparation, là, des notes et surtout les réponses que vous donnez.
C'est clair. Compte tenu qu'il me reste trois minutes, puis je ne veux pas dépasser mon temps limite ou
comme je ne veux pas dépasser ma marge de crédit sur ma carte aussi, je
vais être bref.
Je sais que
le contexte change, on est en 2017, puis beaucoup de situations nous amènent à
se questionner sur une possibilité
d'augmenter le dépassement de la limite de crédit. Mais, si on le fait, c'est
dans un contexte, puis on veut très bien l'encadrer.
Selon vous,
puis, dans votre préambule, vous n'avez jamais... ou je ne l'ai pas entendu, ce
serait quoi, pour vous, la limite de crédit qui pourrait être
acceptable? Puis ce que j'ai compris, c'est que vous dites que, si jamais on
doit accepter le dépassement, bien, il ne
faudrait pas que ce soit inclus dans le minimum à rembourser le mois suivant,
mais que ça fasse partie, là, d'un tout. En tout cas, j'aimerais ça que
vous puissiez me clarifier ces deux situations-là.
Mme
Thériault (Élise) : Dans un
premier temps, la limite acceptable, je ne crois pas qu'il y ait un chiffre
qu'on puisse donner parce que ça va
vraiment dépendre de chaque personne, et de sa situation financière, et de sa
capacité de remboursement, d'où l'intérêt de demander que chaque
personne ait une évaluation personnalisée de sa capacité de remboursement. Parce que votre situation, ce n'est
pas la même que la mienne ni que celle de quelqu'un d'autre dans la
salle ici, donc je ne peux pas dire pour une limite x.
Par contre,
pour la possibilité de dépasser, notre position est à l'effet qu'on ne devrait
jamais pouvoir dépasser notre limite
de crédit, à moins d'appeler et de demander une augmentation de notre limite.
J'ai entendu hier, j'ai écouté les
débats qui ont été faits avec l'Union des consommateurs, j'ai entendu
dire : Mais, si j'ai une urgence, un frigo que j'ai besoin... Bien, il est possible d'appeler
pour demander une augmentation dans un cas d'urgence, ce n'est pas très long
ni très compliqué à faire. Par contre, si
j'ai besoin d'un frigo aujourd'hui, et que je ne sais pas que ma carte de
crédit, il me reste peut-être 100 $ sur ma limite, et que je vais
acheter un frigo de 500 $, si, le mois prochain, j'ai un 400 $ qui
est ajouté sur mon paiement minimum et que
j'ai de la difficulté à payer ce paiement minimum là parce que, justement, je suis toujours au bord de ma limite, bien, la
personne qui va être dans cette situation-là va être directement poussée vers
la faillite. C'est une aberration pour cette personne-là d'avoir un
paiement minimum qui va être augmenté d'autant, et il y aura des conséquences sur son dossier de crédit parce qu'elle n'est
pas capable de faire son paiement. Et, en plus, la plupart des cartes de crédit vont donner une
pénalité quand vous ne faites pas votre paiement minimum, donc vous allez
avoir une augmentation de votre taux d'intérêt, ce qui va vous enfoncer encore
davantage dans l'endettement.
Le Président (M. Picard) :
Merci, Me Thériault. Il reste 15 secondes, ça fait que...
M. Matte : À la prochaine.
Le
Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Portneuf. Je
cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin, 10
minutes.
Mme
Fournier : On aurait pu me faire un prêt de 10, 15 secondes restantes,
je n'aurais pas demandé beaucoup d'intérêt.
Merci,
M. le Président. Bienvenue parmi nous, en commission parlementaire,
aujourd'hui. Merci de vous être déplacés, c'est très apprécié. Merci
pour votre présentation.
Vous l'avez abordé très brièvement tout à
l'heure, mais ce n'est pas dans votre mémoire, et on a eu plusieurs représentations hier, notamment de la Chambre des
notaires, qui nous ont abondamment parlé de la question des hypothèques parapluies. Puis je me demandais : Est-ce que
vous l'avez chiffré? De quelle façon ça participe, le recours aux hypothèques
parapluies, à l'augmentation de l'endettement des ménages québécois?
Mme De
Bellefeuille (Sylvie) : On
n'a pas fait d'étude qui chiffre à ce niveau-là, on a plus regardé plutôt le
niveau de la problématique que ça
peut représenter pour les consommateurs. Il y a quand même quelque chose
d'inéquitable avec les hypothèques
parapluies parce que, si, par exemple, vous avez une carte de crédit ou votre
conjoint a une carte de crédit auprès
de la même banque, votre carte de crédit, elle est couverte par l'hypothèque.
Normalement, l'équité voudrait que le taux
d'intérêt soit inférieur puisque, quand même, ça demeure un prêt garanti, alors
que, dans la réalité, ce n'est pas le cas. Et, d'autre part, vous pouvez
vous retrouver avec des conjoints... des dettes conjointes, par exemple, dans
le cas des hypothèques conjointes, où il y a
des dettes qui sont engagées par l'autre partie sans même que l'autre le sache.
Et, lorsqu'on arrive, par exemple,
ensuite pour vendre la maison, bien là il faut aussi régler la carte de crédit
de monsieur alors que madame n'est pas au courant ou vice versa. Donc,
ça peut poser des situations qui sont difficiles à ce niveau-là également.
Mme
Fournier : Merci. Mais
est-ce que vous appuyez, au fond, les recommandations de la Chambre des
notaires pour assujettir les hypothèques parapluies à la Loi de la
protection des consommateurs?
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : Oui.
Mme
Fournier : Oui? O.K. Super. Vous n'en parlez pas non plus dans votre
mémoire, j'imagine, parce que ce n'est
pas présent dans le projet de loi, mais toute la question de la sollicitation
sur les campus, sur les cégeps, dans les universités... Ça avait été discuté lors de l'étude du projet de loi
n° 24 en 2011. Donc, j'imagine que vous avez une opinion là-dessus,
puis j'aurais aimé vous entendre sur cette problématique-là particulière.
Mme Thériault (Élise) : Bien, c'est
certain qu'en 2011 on était d'accord avec les dispositions qui visaient à interdire la sollicitation dans les campus
universitaires et a fortiori dans les cégeps puisqu'il y a des mineurs qui
fréquentent le cégep. Maintenant, on n'en
a pas parlé parce que ce n'est pas dans le projet de loi actuel, mais c'est
clairement quelque chose qui nous
interpelle. Et de voir les pratiques des institutions financières qui vont sur
les campus pour offrir des cartes de
crédit, qui vont dans les campus pour solliciter les jeunes, pour leur donner
des marges, ma collègue l'a dit tantôt, selon le domaine d'études, vous allez être riches et vous pouvez... On
rencontre, en consultation, souvent, des étudiants qui sont très endettés et qui ont des grosses marges que
même un adulte qui travaille à temps plein ne sera pas capable d'obtenir.
Mme
Fournier : Vous avez tout à fait raison parce que même les
institutions financières laissent miroiter justement aux étudiants dans certains domaines d'études, par
exemple le droit, qu'ils sont capables d'avoir une marge de crédit, par exemple, de 100 000 $, alors que,
pourtant, dans la réalité, il y a plusieurs avocats qui ne font pas
100 000 $ par année, très loin, très loin de là. Alors, ça
laisse vraiment miroiter de fausses promesses. Puis, en ce sens-là, est-ce que
vous trouveriez nécessaire que le
législateur intervienne pour imposer une limite à la marge de crédit qui
pourrait être accordée aux étudiants en fonction de leur domaine
d'études ou carrément interdire ce genre de pratique là?
• (12 heures) •
Mme De
Bellefeuille (Sylvie) :
Bien, je pense qu'avec une obligation de vérifier la capacité de remboursement,
ça vient, un peu, déjà, encadrer de façon
peut-être un peu large. Mais, effectivement, le fait d'interdire ce genre de
pratique là, je pense qu'on ne peut qu'être favorables à ça, tout à
fait.
Mme Fournier : Puis comment vous
verriez ça dans l'application?
Mme De
Bellefeuille (Sylvie) : La
question est bonne. On n'a pas penché sur un projet d'article là-dessus. Je
suis certaine que les juristes de l'État ont quand même beaucoup d'imagination
aussi pour pondre un tel article. Mais ça devient... Le problème, c'est
d'évaluer la capacité de remboursement au moment où l'emprunt se fait, pas au
moment où... ce qu'on va avoir plus tard. Parce qu'il n'y a jamais de
certitude. Une personne peut compléter des études en droit ou en médecine et finalement faire tout à fait autre
chose, ou même travailler et ne pas avoir des salaires mirobolants. Alors,
c'est sûr qu'un domaine d'études n'est pas garant d'un revenu précis à venir,
tout à fait.
Mme
Fournier : Oui, tout à fait. Merci. Sur la question de l'augmentation
du seuil minimal, là, de remboursement, vous dites : «Nous croyons qu'il faut faire savoir aux
consommateurs que le paiement minimal de leur carte sera augmenté de [tant
dans] la prochaine année...» Comment vous verriez ça, encore une fois, là, dans
la réalité, dans l'application? Est-ce que
vous verriez : l'institution envoie un avis? Combien de temps d'avance?
Comment vous le voyez dans l'application?
Mme
Thériault (Élise) : Je pense
que la suggestion qui fait pas mal l'unanimité, c'est de donner cette
information-là sur l'état de compte.
Il y a déjà une obligation qui est prévue au projet de loi d'inscrire la durée,
là, le temps que ça va prendre pour
rembourser. Si on inscrit également le montant, c'est certain que ça ne prend
pas énormément plus de place sur l'état de compte, et c'est le document
par excellence que les gens vont consulter.
Mme
Fournier : Merci. Puis vous, vous croyez que ça... Parce que, tantôt,
vous avez dit que vous trouvez que ça
va trop vite, l'augmentation du seuil minimal, puis que vous craignez le choc
tarifaire que pourraient avoir certains consommateurs.
Parce qu'on
le sait que, souvent, les gens vont payer vraiment le minimum sur leur carte de
crédit, puis c'est la façon dont ils
préparent aussi leur budget mensuel. Alors, d'avoir une telle augmentation, là,
de 50 % d'un coup, c'est clair
que ça va avoir un impact important sur ces gens-là. Alors, plutôt que de le
faire progressivement, à 1 % par année, est-ce que vous aviez une
suggestion particulière à apporter là-dessus?
Mme Thériault (Élise) : La
suggestion qu'on avait faite en 2011, je crois, et que nous maintenons, c'est
d'avoir 0,5 % pour la première année, 1 % pour la deuxième année et
1,5 % pour la dernière année.
Mme
Fournier : O.K. Puis, pour l'application de ces deux taux-là, on parle
des nouvelles cartes de crédit ou sur les anciennes aussi?
Mme
Thériault (Élise) : En fait,
nous, ce qu'on... À l'heure actuelle, là, de la façon dont le projet de loi est
rédigé, le 1 % par année, ça
s'applique sur tout. Nous, ce qu'on demande, c'est que ça s'applique seulement
sur les cartes qui sont déjà
existantes et que tous les nouveaux contrats de carte de crédit conclus après
l'entrée en vigueur de la loi soient tout
de suite à 5 %. Parce que, si quelqu'un se prend une carte de crédit le lendemain
de l'entrée en vigueur de la loi, il va être à 2 % comme tous les autres, et, s'il remplit sa carte, il va
devoir subir la transition tout comme quelqu'un qui avait déjà une carte avant l'entrée en vigueur de la
loi; alors que, quand il part à zéro avec une nouvelle carte, il peut être à 5%, puis ça ne constitue pas une transition
douloureuse pour lui.
Mme
Fournier : O.K.
Super. Sur la question de la présomption de respect, que vous abordez
aux pages 5, 6 de votre mémoire,
selon vous, ça couvre quelle proportion de l'industrie? Au fond, quelle
proportion de l'industrie est exemptée par ça?
Mme De
Bellefeuille (Sylvie) : La
majeure partie... parce que la majeure partie des prêts, au niveau des cartes
de crédit, de façon générale, vont provenir soit des banques ou des caisses. Le
crédit parallèle, c'est quelque chose qui est important parce que c'est quelque chose qui est coûteux, mais ça va
viser surtout des clientèles vulnérables, alors que les prêts qui sont accordés par les grandes institutions
financières visent l'ensemble de la population. Donc, nous pensons que ça viserait probablement la majorité des
prêts; pas nécessairement la majorité des prêteurs, parce qu'il peut y avoir
beaucoup de petits prêteurs, mais une grande majorité des prêts.
Mme Fournier : Parfait. Et
finalement, sur la question des programmes de fidélisation, sur la question des
points, comme, par exemple, on a vu, dans le
cas des Air Miles, et on voit encore que, même si l'entreprise a renoncé à
faire disparaître la valeur complète
de certains points, il y a quand même des points qui ont dévalué de façon
importante depuis le 1er janvier... Et donc on comprend quand même qu'au fil du
temps c'est normal qu'on puisse avoir besoin de plus de points pour payer un bien ou un autre en raison
notamment de l'inflation. Donc, vous, je me demandais quelle était votre
position à ce sujet-là. Est-ce que vous croyez qu'on devrait interdire
totalement? Qu'on devrait permettre un certain seuil? Parce que, dans la loi,
actuellement, comme elle est formulée, ça va laisser... même, ça consacre la
liberté des gestionnaires du programme de modifier carrément, là, la valeur des
points.
Mme De
Bellefeuille (Sylvie) : Nous,
ce qu'on pense, c'est... Comme vous le soulignez, c'est sûr qu'avec l'évolution des prix il peut être normal qu'on veuille changer les tarifs pour le
futur, et ça, c'est quelque chose qui est logique, de la même façon que
n'importe quel autre service.
Le problème,
c'est pour les points qui sont déjà accumulés. Les gens qui ont accumulé leurs points
ont quand même une certaine expectative que leurs points ont une
valeur quelconque. Alors, quand on vient par la suite... On s'entend que,
malgré peut-être certaines prétentions, les consommateurs ont payé
pour ces points-là, ce n'est pas quelque
chose qui est gratuit. Ils ont payé par leur fidélité, par le fait qu'ils ont
acheté peut-être un peu plus cher auprès d'un commerçant
pour avoir leurs points; ils ont aussi payé par des informations personnelles sur leurs habitudes d'achat, qui, elles, ont une
valeur inestimable pour les commerçants.
Alors, de
venir changer les règles du jeu après coup, en disant : Bien, ce que vous
avez gagné maintenant vaut moins,
pour nous, c'est quelque chose qui est inacceptable. Alors, pour nous, c'est
clair que les changements pourraient avoir
l'effet, pour le futur, toujours dans un cadre de contrat à durée indéterminée, on
s'entend... Et les effets rétroactifs, pour nous, c'est clairement à la
perte des consommateurs et ça ne devrait pas être autorisé.
Mme Fournier : Parfait. Je vous
remercie.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Johnson,
6 min 30 s.
M. Lamontagne : Oui. Merci,
M. le Président. M. Corbeil,
Mme De Bellefeuille, Mme Thériault, c'est un plaisir de vous accueillir aujourd'hui. Quelques
petites questions. Quand on se réfère aux lois sur le recouvrement
de certaines créances, quand vous faites des représentations pour que
les représentants d'agents de recouvrement détiennent un certificat... On s'entend que les entreprises qui
prêtent sont déjà enregistrées, là, puis là ils ont des agents à eux qui font des appels, qui font des
démarches auprès des gens pour collecter l'argent. Ça fait que vous, vous dites
que ces gens-là devraient avoir des certificats. Oui.
Comment
on applique ça dans le réel, là? Moi, je suis chez moi, j'ai un prêt qui a été
donné en recouvrement, je reçois un
appel de quelqu'un qui me harcèle ou qui me téléphone, là, pour savoir quand
est-ce que je vais payer, et tout ça. Comment ça s'appliquerait, là, le
fait que la personne ait ou pas de certificat, ou...
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : Je pense que, d'abord, l'importance du
certificat, c'est de s'assurer que les employés qui font les appels font leur travail correctement. Le problème, c'est
que nous, on reçoit des appels de consommateurs qui se font dire à peu près n'importe quoi par
certains agents de recouvrement. Alors, l'idée d'avoir un certificat, on va
s'assurer, d'une part, que les agents
qui font ce travail-là sont au courant des règles du jeu — et on va espérer qu'ils vont les respecter.
Il y a beaucoup de roulement dans les
agences de recouvrement, au niveau du personnel, alors l'idée d'avoir un
certificat, pour nous, c'est une
sécurité supplémentaire. Déjà que ce n'est pas agréable d'avoir un appel d'une
agence de recouvrement, même quand la personne fait son travail correctement,
quand le consommateur se fait balancer des insultes par le téléphone,
c'est encore pire.
Je
pense que d'avoir un certificat et d'avoir un registre de qui a un certificat,
qui pourrait être accessible peut-être auprès
du Bureau de l'Office de la protection du consommateur, un peu comme il se fait
en ce moment au niveau des agents de
voyages, je pense que c'est quelque chose qui serait... c'est un peu le même
modèle. Alors, un consommateur qui a un appel d'un agent qui ne fait pas bien son travail pourrait, à ce
moment-là aussi, porter plainte, non seulement contre l'agent et contre
l'agence... Pour nous, je pense que c'est quelque chose qui serait tout à fait
favorable.
M.
Lamontagne : O.K. Ça veut dire que vous présumez que la personne qui
appelle doit s'identifier, donnerait un numéro d'employé, il y aurait
tout ça, là.
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : Je ne sais pas s'il y a un numéro d'employé ou un
numéro de certificat, mais, au moins,
à la demande du consommateur, la personne devrait pouvoir répondre. Et, dans le
courrier aussi qui est envoyé au
consommateur, s'il y a un agent qui signe une lettre, il devrait y avoir...
tout comme l'agence doit informer et mettre son numéro de permis,
l'agent devrait également indiquer son numéro de certificat.
M.
Lamontagne : Parfait. Dans l'article 103.2, quand il est question
des renseignements pour établir la solvabilité, là, du consommateur, vous parlez, dans votre mémoire, à la page 6, là,
vous dites : «En l'absence du texte de [...] règlement, il [...] est difficile d'évaluer si les critères
[...] devront être considérés par le prêteur sont suffisants.» On dit :
«En effet, l'application mécanique de
ces critères, par exemple dans un formulaire, ne protège aucunement le
consommateur contre la décision déraisonnable d'un commerçant de prêter
une somme malgré l'absence de capacité de remboursement...»
Pensez-vous qu'il
peut exister une situation où le consommateur serait protégé à 100 %
contre une décision déraisonnable, ultimement, d'un prêteur?
• (12 h 10) •
Mme De Bellefeuille (Sylvie) : Je pense que ce serait utopique, effectivement.
Mais le problème, c'est que le projet de
loi, tel que rédigé, met une présomption irréfragable. C'est-à-dire qu'une fois
qu'il a fait ce constat-là il est réputé avoir fait une évaluation. Alors que, nous, ce qu'on vient dire : Bien,
si on pourrait peut-être diminuer ça, peut-être en disant «présumé» plutôt que «réputé», ça pourrait au
moins ouvrir la porte à faire une plainte, par exemple, au
niveau d'un contrat qui serait abusif, par exemple.
Dans
un cas où le prêteur constate que la personne n'a pas de capacité de
remboursement, prête quand même à des taux
qui sont généralement plutôt élevés, parce que le taux d'intérêt représente le
risque, bien, au moins, on ouvre la porte au consommateur de dire :
Bien, regardez, là, cette décision-là, elle est déraisonnable, et j'aimerais
qu'on révise les conditions de mon contrat
en conséquence. Je pense que ça pourrait ouvrir au moins cette porte-là. On
s'entend que, dans la pratique, il n'y aura probablement pas beaucoup de
consommateurs qui vont utiliser, malheureusement, ce type de proposition là. Mais, si on ferme d'abord la porte
avec une présomption irréfragable, on enlève tout recours au consommateur.
M.
Lamontagne : Puis pour bien comprendre... Parce que, si, mettons, par
règlement, mettons, il y a une liste longue comme ça de critères, là,
qui font votre affaire, puis ça, c'est dans un formulaire, puis, à un moment
donné, le prêteur remplit tout ça, puis ça
finit qu'il ne devrait pas prêter, puis il décide de prêter quand même, bon, je
veux dire, il y a des recours qui sont prévus dans la loi. On ne peut
pas empêcher ça? On ne peut pas...
Mme Thériault (Élise) : Les recours qui sont actuellement prévus, ce
n'est pas la grosse affaire, là. Ça ouvre la porte à l'utilisation de l'article 8 sur les clauses abusives. Si je ne
m'abuse, il pourrait y avoir... C'est-u là-dedans, je ne le sais plus, je ne suis par sûre à 100 %, mais
je pense qu'il pourrait y avoir la perte du droit aux intérêts. Mais il n'y a
rien de garanti là-dedans, ça ne
protège pas le consommateur, là, qui voudrait faire changer ses modalités de
paiement; ou ça n'ouvre pas, là, de
recours extraordinaire. Et le consommateur doit s'adresser au tribunal pour le
faire. Et ça, s'adresser au tribunal, c'est très difficile, c'est très
demandant pour les consommateurs.
À
chaque fois qu'on parle à des gens puis qu'on leur dit : Bien, vous devez
aller à la Cour des petites créances, ça
s'arrête là, là. Il y a 90 % des gens à qui on parle qui ont un droit, qui
ont raison dans leur cause, puis, quand on leur dit qu'ils doivent aller à la Cour des petites créances, c'est trop dur
pour eux. Donc, il faut qu'il y ait un recours, ou une sanction, ou ouvrir la porte à quelque chose pour
que les consommateurs puissent avoir justice sans devoir absolument
aller au tribunal, faire trancher par un juge qu'effectivement c'était abusif.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Il reste 30 secondes, M. le
député.
M.
Lamontagne : Oui, rapidement. L'article 126.3, à la page 11 de votre
mémoire, quand il est question des délais pour demander des pièces justificatives, on a amené ça à 60 jours, mais
on mentionne aussi que, dans le Code civil, les gens avaient jusqu'à trois ans.
Avez-vous une idée pourquoi, peut-être, dans la loi, on ramène ça à 60 jours?
Avez-vous eu une discussion qui viendrait justifier ça?
Mme Thériault (Élise) : On n'en a pas discuté, mais il n'y a pas de
«ramener ça à 60 jours». Il n'y avait pas de telle obligation
avant. Donc, normalement, quand on a un droit, le délai de prescription, il est
de trois ans, donc j'ai trois ans pour revenir contre mon émetteur de carte de
crédit ou contre un commerçant s'il y a quelque chose.
Maintenant,
en venant nous mettre un délai de 60 jours pour obtenir les pièces
justificatives, ça fait que, si, dans deux
ans et demi, j'ai besoin de cette preuve, je ne peux plus l'obtenir, alors
qu'avant il n'y avait pas de délai, donc il m'était encore possible
d'obtenir cette preuve. Donc, pour nous, c'est un délai qui s'ajoute et qui est
inutile, voire nuisible.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Merci, Me Thériault, M. Corbeil,
Me De Bellefeuille. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux
de la commission.
Et je suspends
quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à
12 h 14)
(Reprise à 12 h 16)
Le Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux en recevant les représentants de la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec.
Vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre présentation.
Vont s'ensuivre des échanges. Vous êtes des
habitués des commissions
parlementaires, allez-y. Je vous
demanderais dans un premier temps de vous présenter pour fins
d'identification.
Corporation
des concessionnaires d'automobiles du Québec (CCAQ)
M. Gaudette
(Michel) : Merci, M. le Président. Mon nom est Michel Gaudette. Je
voudrais d'abord saluer Mme la ministre, Mmes et MM. les députés. Mon nom est Michel
Gaudette. Je suis vice-président du conseil
d'administration de la Corporation
des concessionnaires d'automobiles du Québec,
notre corporation provinciale dans l'industrie de l'automobile, et
propriétaire de huit concessions. Je suis également avocat depuis plus de
37 ans, et j'ai pratiqué le droit pendant plusieurs années, et encore. Mais permettez-moi de vous présenter mes
collègues et aussi mes confrères, Me Frédéric Morin...
M. Morin
(Frédéric) : Bonjour.
M. Gaudette
(Michel) : ...et Me Ian Sam Yue Chi.
M. Yue Chi
(Ian P. Sam) : Bonjour.
M. Gaudette (Michel) : Alors, notre corporation représente quelque 870 concessionnaires d'automobiles,
PME, et de camions lourds sur tout le
territoire de la province de Québec, lesquels distribuent plus de
450 000 véhicules neufs et
200 000 véhicules d'occasion annuellement. Aussi, la CCAQ se fait un
devoir de collaborer activement avec les instances gouvernementales, comme vous l'avez si bien
mentionné, M. le Président, dans les dossiers d'intérêt commun, que ce soit l'électrification des transports, la
protection des consommateurs, la formation et la qualification de la
main-d'oeuvre, et l'environnement, et aujourd'hui le crédit.
Par ailleurs, afin
d'assurer la qualité du service à la clientèle, la sécurité du public et le
respect des droits des consommateurs, les
concessionnaires membres de la CCAQ ont adopté, depuis longtemps, un code
d'éthique professionnel rigoureux
auquel ils s'engagent à se conformer. Consciente qu'un différend peut survenir
à l'occasion, la CCAQ s'est associée
avec la CAA-Québec afin de poursuivre cet objectif important. Et, comme vous le
savez, CAA-Québec réunit plus de
1 250 000 membres au Québec, et ce, depuis 1998. Nous y sommes
associés ensemble pour offrir gratuitement un service de conciliation et de médiation pour notre consommateur dans
ce programme. Ça suscite naturellement des échanges constructifs... et les
concessionnaires membres de la CCAQ et les membres de la CAA-Québec qui ont à présenter une demande. De plus, il permet à ces
derniers de faire respecter leurs droits, et ce, dans des courts délais de
règlement.
D'ailleurs,
vous trouverez, joints à la présente, les différents commentaires et
recommandations de la CCAQ relatifs aux
dispositions du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui, en
annexe 1, lesquels se limitent à traiter de celles qui touchent
notre secteur d'activité, comme je vous l'ai dit, l'industrie de l'automobile.
Nous comprenons que
le législateur a adressé plusieurs situations concernant certains enjeux dans
d'autres secteurs d'activité. À cet égard,
nous saluons l'initiative du gouvernement de réglementer les prêts usuraires,
les services de règlement de dettes
et les programmes de fidélisation. Maintenant, permettez-moi de transmettre le
mot à mon collègue, Me Ian Sam Yue Chi, pour poursuivre le mémoire.
• (12 h 20) •
M. Yue
Chi (Ian P. Sam) : Alors, on
va être brefs. Vous avez notre mémoire. Je présume que vous l'avez lu. Il est court, il est concis, mais il est
directement sur les éléments cruciaux pour notre industrie. J'ose espérer que
ça va alimenter vos réflexions et les
discussions qui auront lieu pour le restant de cette commission parlementaire
ci. D'ailleurs, on a suivi vos travaux depuis hier. C'est fort
intéressant, tout ça.
Je fais un
constat déjà, je ne sais pas si ça va évoluer différemment pour les prochaines
consultations, les prochains jours,
mais on parle beaucoup de crédit variable, hein? Je pense que c'était un des
principaux enjeux de ce projet de loi là, projet de loi qui est somme toute
assez large, touche différentes industries, comme Me Gaudette l'a exprimé.
Mais, nous, pour l'automobile, le crédit qu'on fait, il est somme toute
assez, je dirais, restreint quant à la forme.
Ce qu'on
fait, c'est des contrats de vente à tempérament, hein? On finance l'achat de
véhicules dans des contextes où les éléments sont connus d'avance,
c'est-à-dire le prix, le taux d'intérêt, les mensualités, etc. Il y a une
évaluation qui est faite par les différents
prêteurs, dans notre industrie, de la capacité de payer du consommateur, déjà.
Ça fait partie des processus. Vous le
savez, hein, il y a des demandes de crédit qui sont complétées, on demande
différentes informations. Également,
les prêteurs vont aller vérifier au niveau des dossiers de crédit des agences
comme Equifax et TransUnion.
Donc, on ne
prête pas à l'aveugle, on prête normalement en toute connaissance de cause.
Donc, il y a des choses qui se font
déjà. Et je distingue notre industrie, ou plutôt notre type de crédit qu'on
fait dans l'automobile, du crédit variable. Pourquoi? Puis, encore une fois, je le répète : Parce que c'est
différent, parce que les éléments du prêt sont connus d'avance par le
consommateur.
Par ailleurs,
il semble y avoir certaines problématiques particulières que le gouvernement
veut adresser, et avec raison, puis je salue vos initiatives. Mais, pour ce qui
est de notre industrie, je pense qu'on devrait, je ne dirais pas être sur un autre régime, mais être compris et
entendus, et que ça se reflète dans le projet de loi à être adopté, parce qu'il
n'y a pas de problématique particulière à la nôtre, notre industrie.
D'ailleurs,
on a déposé, en annexe à notre mémoire, une étude d'Equifax sur la dette
automobile au Canada ainsi qu'un communiqué de presse d'Equifax qui sont
très, très récents. C'est les derniers qui sont sortis dans le dernier trimestre. Et ce qu'on s'aperçoit, c'est que la
dette des ménages du pays, bien, c'est seulement 4 % de cette dette-là qui est attribuable au crédit automobile. C'est très
peu élevé. Si on exclut les dettes hypothécaires, on est à 11,7 % de la
dette de consommation qui est
attribuable au crédit automobile. Donc, on pense qu'au moment où on se parle la dette automobile est très bien gérée.
Par ailleurs, le taux de délinquance est en diminution, on est à 0,99 % de taux de délinquance. Et
il est en diminution depuis 2016, c'est-à-dire que ça a diminué de
6 % depuis. Bref, je le répète, la gestion de la dette générale à la consommation,
spécifiquement même dans l'automobile, se porte très bien. Considérant les
constats dégagés dans cette enquête-là d'Equifax, qui est une agence de crédit,
je pense, crédible, on pense qu'il n'est pas utile d'envisager des dispositions qui amèneraient un fardeau administratif supplémentaire pour les commerçants
et les prêteurs, sans valeur ajoutée
réelle au consommateur puisque, je le répète, l'évaluation de la capacité de
payer, dans les faits, je vais parler pour nous, elle est faite.
Or, la cristalliser, cette obligation-là, dans
un règlement qui est à être adopté, dont on ne connaît pas la teneur pour le moment, selon moi, selon notre position,
ça viendrait ajouter un fardeau, de sorte que moi, je dois pouvoir représenter
au gouvernement, à l'office, que j'ai fait
la démarche. Or, je la fais déjà. C'est-u nécessaire que je me constitue une
preuve, que j'en aie un fardeau
réglementaire de le faire? Je le fais, je l'ai toujours fait, du moins, pour ce
qui est du crédit automobile.
Alors, bref,
on vous réfère évidemment à votre politique sur l'allègement réglementaire. On
est d'avis que les principes sont intéressants, les principes sont bons, mais
c'est sans valeur ajoutée pour le consommateur. Parce que, s'il y en avait une, valeur ajoutée... Écoutez, bien
honnêtement, on est tout à fait ouverts à être plus transparents et à offrir
des droits au consommateur — je pense que c'est somme toute très
sain — mais,
dans ce cas-ci, on ne la voit pas, la valeur ajoutée. Par contre, on voit le fardeau administratif. Donc, c'est le
premier point qu'on voulait adresser. Évidemment, je ne parle pas des dispositions spécifiques du
projet de loi, on pourra y référer lors de vos questions. Je vais transmettre
le...
M. Morin
(Frédéric) : En fait, pour poursuivre un petit peu dans la même
foulée, là, juste pour votre information, dans le rapport d'Equifax,
vous avez un tableau qui est très représentatif, à la page 9 du document, où on
voit tous les pourcentages, en fait, des
dettes au niveau de la population en
général. Donc, Ian en a parlé :
l'auto, ça représente 4 %;
les cartes de crédit, 5 %; les marges
de crédit personnelles, on est à 15 %; le prêt hypothécaire, 67 %. Donc, comme on dit, une image vaut mille mots. Il n'y a
pas de problématique dans le secteur de l'automobile, comme on vient de le
mentionner, et notre secteur, c'est 4 %.
Nous, vous savez, on fait affaire avec toutes
les institutions financières, toutes les institutions bancaires. On a également
différents programmes ou promotions, des taux réduits. On travaille avec ce
qu'on appelle les sociétés de crédit
affiliées aux constructeurs. Donc, on travaille avec les Crédit Ford de ce
monde, Honda Canada Finance, BMW Canada
Finance, Nissan Canada, Toyota Crédit — vous savez, toutes les marques sont bonnes
chez nous — la
Corporation des services financiers Mercedes, La Financière General
Motors, Crédit Volkswagen Canada, Hyundai, etc.
Là, nous, où
on se questionne, c'est quand le législateur, à l'article, du projet de loi,
numéro 19, vient mettre sur un genre de piédestal les institutions financières
en créant une présomption que les banques, que Desjardins et autres personnes suivent des pratiques de gestion saine
et prudente ou encore ont de saines pratiques commerciales en matière de crédit
à la consommation. Donc, nous, pour votre information... Évidemment, les
constructeurs, les captives ou les sociétés de crédit n'ont pas eu le
privilège que nous, on a, d'être ici, mais, vous savez, nous, la CCAQ, on est
très constructifs, on est très proactifs et habituellement, quand on parle, on
est très crédibles.
Donc, tous
ces gens-là que j'ai nommés précédemment, on a tous des saines pratiques de
gestion, on a tous des saines pratiques
commerciales en matière de crédit qui sont prudentes, diligentes, etc., en
faveur du consommateur. On ne fait pas dans le crédit spécialisé. Crédit
spécialisé, ça peut vouloir dire : première chance, deuxième chance, etc.
Ça veut dire aussi que ça peut être
différent de ce que vous allez appeler le prêt à taux d'intérêt élevé. Donc,
Desjardins, à titre d'exemple, ne
fait pas dans le prêt d'intérêt à taux élevé. Et Desjardins, selon nos
informations, ne fait pas dans le crédit alternatif non plus. Tous les gens que j'ai nommés, toutes les sociétés
de crédit affiliées aux constructeurs ne font pas dans ce genre de prêt
là non plus.
Alors
là, vous mettez sur un piédestal les institutions financières, en fait, les
banques. Et tout ce que vous avez entendu
aujourd'hui... hier, c'est un problème au niveau des cartes de crédit, un
problème au niveau des marges de crédit. Deux poids, deux mesures. Vous dites, d'un côté : Écoutez, il faut
faire quelque chose au niveau des banques, avec les cartes de crédit, les marges de crédit, ça n'a pas
de bon sens, et, du même côté, vous mettez ces gens-là sur un piédestal
en leur disant qu'eux suivent des pratiques, donc ils n'auront pas à se
soumettre aux règlements.
Écoutez, ça ne peut
pas fonctionner. Donc, nous, on vous demande de vous questionner sérieusement
sur cet aspect-là et on vous suggère de ne pas adopter cette disposition-là qui
crée la présomption. L'autre...
Le
Président (M. Picard) : Merci, Me Morin. Vous poursuivrez lors
de l'échange avec la partie gouvernementale ou des députés de
l'opposition. Mme la ministre, il reste 13 minutes à votre temps.
Mme
Thériault (Anjou—Louis-Riel) : Oui, merci, M. le Président. On vous a cédé trois de nos
précieuses minutes pour que vous
puissiez continuer à présenter votre point de vue. Donc, d'entrée de jeu, Me
Chi, Me Morin et M. Gaudette, merci d'être en commission
parlementaire avec nous. Évidemment, une commission parlementaire, lorsqu'on
est en consultations particulières, c'est
vraiment pour entendre les points de vue des différentes parties, à droite, à
gauche, au centre par rapport au
projet de loi. Donc, je trouve que c'est intéressant, parce que ça vous permet
d'expliquer votre point de vue.
Je
vais mentionner d'office que, comme ministre qui était responsable de la
politique d'allègement réglementaire, l'Office
de la protection du consommateur a atteint ses objectifs. Et je trouve que
cette politique-là, c'est vraiment une très bonne politique, parce que,
dorénavant, dans la règle du un-pour-un, lorsqu'un ministère va vouloir
introduire un nouveau formulaire, on devra en retirer un de valeur égale ou
plus, dans toute la grande famille des formulaires... des procédures
administratives. Donc, je pense que tout le monde va s'en tirer gagnant. Le
but, ce n'est pas de rajouter par-dessus,
mais vous comprendrez qu'ici on parle de protection du consommateur, donc c'est
s'assurer que les droits des consommateurs soient protégés.
• (12 h 30) •
Je
dois également dire, puis je pense que c'est important, que vous êtes des
membres bien en règle de l'Office des professions, que vous détenez
des permis, que vous collaborez régulièrement et que vous êtes aussi des partenaires de l'Office
de la protection des consommateurs,
non pas l'Office des professions, pardon, et... ce n'est pas tout à fait pareil, et que vous avez quand même
860 concessionnaires qui ont tous des permis qui ont été émis par l'office
des consommateurs.
Donc,
évidemment, je pense que, lorsqu'on regarde une législation
comme ça, pour nous, ce qui est important, ce n'est
pas tellement quand les choses vont bien, c'est quand ça
commence à ne pas aller bien. Puis vous savez comme moi que, comme dans n'importe quel secteur, quand il y a
une personne qui fait quelque chose de pas correct, qui contourne les règles, quand tu as un concessionnaire
automobile délinquant, entre guillemets, tout va retomber quand même
sur les autres concessionnaires. Puis
je ne dis pas que c'est le cas de vos concessionnaires, sauf que c'est quand même
ce qui peut arriver aussi. Les lois
sont là; normalement, les gens doivent les respecter. Ça ne veut pas
dire que, parce qu'elles sont là, que les gens vont les respecter.
J'aimerais — je
vais vous le dire d'entrée de
jeu — vous entendre parler sur la publicité. Parce que
la publicité des concessionnaires
automobiles, ce qui m'a toujours fasciné, c'est qu'à chaque fois qu'il y a une
publicité d'un concessionnaire qui
passe il y a une panoplie de petits caractères en bas, là, particulièrement à la télévision, qu'on est incapables
de lire, parce que l'image n'est pas là assez longtemps, c'est écrit vraiment
très petit, et ce n'est pas parce que j'ai un problème de vision. Sauf
que je comprends très bien qu'évidemment il y a différentes formes de
promotions, de publicités, et que, quand tu
es à la radio, bien, ce n'est pas la même chose que quand tu es à la
télévision. Puis, quand tu es là, ce
n'est pas la même chose que sur les médias sociaux non plus. Par contre,
une des remarques qu'on entend souvent, c'est que tant les voitures... exemple, on va voir le modèle de luxe, alors que la
publicité, c'est le modèle de base. Donc, il y a comme une différence.
Mais
j'aimerais ça vous entendre sur les nouveaux médias qu'on a, les nouveaux
véhicules au niveau de la publicité. Puis, puisque je viens de prendre à peu près trois minutes, j'ai
des collègues qui ont des questions aussi à poser. Mais,
je veux vous rassurer, les commentaires, dans votre mémoire, ont été pris en considération, sont analysés.
Vous savez que l'office travaille au bien-être de tous, évidemment, et
avec ses partenaires aussi.
M.
Morin (Frédéric) : Écoutez,
Mme Thériault, si je peux me permettre, Mme la ministre, nous, on est
très proactifs, donc vous savez qu'on
travaille, puis vous l'avez mentionné, régulièrement avec les gens de l'OPC. La publicité, ça fait
longtemps qu'on en parle avec les gens de l'office. Nous aussi, on est en mode
solution à ce niveau-là, hein? Si ça vous prend un arrêt sur image pour
voir le descriptif d'une publicité qui passe à la télévision, bien, nous aussi,
on est en désaccord avec ça. Vous savez également
qu'on a malheureusement beaucoup de recours devant les tribunaux sur différents
sujets et on se doit de mettre un certain nombre de descriptifs plus important.
Mais,
pour répondre à votre question, ça fait plusieurs années qu'on demande à l'office, entre autres, de moduler sa publicité en fonction des médias. Il y a quelques
années, on a introduit la notion de caractère prépondérant dans la publicité. Donc, nous, on est vraiment
en mode solution avec les gens de l'office et on avait proposé différentes
mesures justement pour qu'est-ce qui arrive quand on fait une
publicité à la radio, qu'est-ce qui arrive quand on fait une publicité
dans les journaux, etc.
Pour revenir à votre question, vous savez que la publicité, il faut demeurer un petit peu créatif mais tout en respectant
les législations. Lorsqu'on parle d'un véhicule neuf, habituellement, le constructeur veut annoncer son nouveau modèle. Le nouveau modèle, effectivement, c'est celui qui est souvent illustré, dans l'objectif
de susciter un intérêt au
niveau du consommateur. Dans le cas du décret sur la vente de véhicules
d'occasion, puis, encore là, vous voyez, on a collaboré avec les gens de
l'OPC, on a nous-mêmes dicté les règles de l'Association des marchands de
véhicules d'occasion du Québec
et la CCAQ, et on est allés voir l'office en disant : C'est ça
qu'on veut, et vous avez adopté le décret. Donc, dans le décret, il y a différentes mesures aussi qui concernent la
publicité, et on se doit d'afficher le véhicule qui est offert en vente.
Dans le cas
d'un véhicule neuf, ça peut poser différentes problématiques, parce qu'on
peut avoir une publicité qui est nationale. Donc, nous, ce qu'on vous
soumet, c'est qu'effectivement il pourrait y avoir, dans des peut-être caractères plus lisibles, on s'entend, une mention
qu'effectivement le véhicule représenté c'est le modèle «limited»,
etc., et non mettre le véhicule annoncé qu'il correspond à celui qui est
réellement offert en vente. Parce que c'est difficile pour nous, tu
sais... Puis peut-être que M. Gaudette peut contribuer, là.
M.
Gaudette (Michel) :
J'aimerais ça, Mme la ministre, vous informer que, pour le consommateur,
présentement, c'est une bénédiction, je vais vous dire pourquoi. Depuis
1986, on vit une véritable déflation en termes de valeur de véhicules et le financement.
Ce que je veux vous dire : dans ma jeunesse, je me suis acheté un Renault
10, j'ai payé 1 900 $, endossé par
mon père, et mon taux d'intérêt était de 19,5 %, financé par Beneficial
Finance. Et, aujourd'hui, vous allez
avoir un véhicule d'une valeur de 25 000 $, 30 000 $,
40 000 $ à 0 % avec une prolongation gelée jusqu'à 84 mois.
Et pourquoi 84 mois? C'est parce que mon petit Renault 10, là, il avait à peu
près trois, quatre éléments mécaniques dedans :
l'embrayage, le moteur... puis ça faisait défaut. Aujourd'hui, avec la haute technologie, nos véhicules, juste pour vous
donner un rapport de réparations, les ateliers qui avaient 25 stations, aujourd'hui,
on travaille avec huit, neuf, 10 stations.
Qu'est-ce que ça veut dire? Et au lieu d'aller aux 5 000 kilomètres ou
même moins, aujourd'hui, on est rendus à 25 000 kilomètres. Avec de l'huile synthétique, c'est encore plus
long. Alors, je suis certain que vous avez constaté ça.
Alors, c'est
pour le bénéfice du consommateur. Il a accès à un moyen de locomotion comme il
n'y a jamais eu depuis
1986, ça a juste descendu. Et l'agressivité de nos manufacturiers rend le
produit tellement disponible et avec des taux d'intérêt, comme Me Morin l'a dit, de 0 % à aller
jusqu'à 4,99 %, puis, dans des crédits spécialisés, ils n'en font pas.
Mais, même à ça, les véhicules d'occasion,
on va avoir des taux d'intérêt qui vont aller en bas de 7 %. Alors, je pense
que c'est un bénéfice, à mon avis, pour les consommateurs et c'est pour ça qu'en ce qui concerne ce que
vous visez au niveau de la loi
je pense que c'est plutôt le crédit alternatif où on a plus ou moins de prises
en termes de concessionnaires.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Beauce-Sud.
M. Busque : Je vous remercie
beaucoup, M. le Président. Alors, M. Gaudette, M. Morin, M. Sam Yue Chi...
C'est ça? Est-ce que je l'ai bien prononcé?
M. Yue Chi (Ian P. Sam) : Absolument.
M.
Busque : C'est merveilleux.
Alors, on a eu le plaisir de déjà se connaître, pour deux d'entre vous, dans une
vie antérieure, parce que j'ai eu
l'occasion, là, le privilège de travailler dans le secteur automobile, là.
C'est un secteur que j'ai vraiment apprécié, c'est un secteur qui est extrêmement
dynamique et pour toutes sortes de raisons.
J'ai été, je
vous avouerai... j'ai été un peu surpris, dans l'information que vous avez
donnée, agréablement surpris, je vous
dirais, dans la relation, la portion d'endettement, mettons, attitrée à
l'automobile dans le portrait global. Sincèrement, si
vous m'aviez posé la question, j'y serais allé avec un chiffre beaucoup
plus élevé. Parce qu'on sait, aujourd'hui, la... bien,
la facilité d'obtention du crédit. Mais il y a aussi une chose qu'on
sait, c'est qu'aujourd'hui au
niveau des véhicules... Puis vous l'avez mentionné, M. Gaudette, il y a quelques
années, on achetait un véhicule et on pouvait le garder, cinq, six,
sept, huit, 10 ans. Aujourd'hui, il y a beaucoup plus de rotation au niveau, là, des véhicules.
Les nouveaux véhicules sortent plus rapidement.
Les nouveaux modèles sortent aussi
plus rapidement que ça se faisait antérieurement, justement pour
répondre à un besoin de changement et un besoin toujours aussi pressant de
nouveauté. Il y a beaucoup de technologie
maintenant aussi dans les véhicules, ce qui vient renforcer ce sentiment de besoin
de changement. Alors, sincèrement, le 4 % m'a surpris.
Bien entendu,
on sait que, dans le domaine particulier de l'automobile, il y a effectivement un besoin de crédit très important. Je me réfère aussi à
l'exemple que vous avez donné. Il y a quelques années, on pouvait acheter un véhicule, le payer cash ou emprunter, mais il y
avait cette possibilité-là, et moi, j'ai déjà entendu ça, là : Ah! je l'ai
payé cash. Aujourd'hui, je pense que
c'est des choses qu'on voit très, très rarement, le paiement en cash, à cause
justement de la facilité du crédit.
Une voix : ...
• (12 h 40) •
M.
Busque : Bien, c'est ça.
Alors, il y a du financement sur l'achat et il y a aussi les locations. Alors,
considérant, quand même, il y a, vous
l'avez mentionné, 450 000 véhicules neufs, 200 000 véhicules neufs
par année au Québec, c'est impressionnant
qu'est-ce qu'on peut générer comme activité. Je me demandais : Est-ce
qu'il y a des refus? Vous avez parlé
de 4 %. On a parlé qu'il y avait 0,9 % de délinquance. Mais est-ce
qu'il y a un pourcentage de gens qui désirent louer, qui désirent
acheter et qui sont refusés?
M.
Gaudette (Michel) : Il y a des moyens, M. le député, il y a des moyens
actuellement qui sont offerts aux consommateurs.
Il faut comprendre qu'on est au Québec. On a un territoire qui est immense,
bien, pour nous autres, mais ça prend
un moyen de locomotion. On doit se déplacer. Et les moyens de transport en
commun, et tout ça, oui, mais il reste qu'on
a des besoins. Et, comme vous dites, les refus, on passe d'une étape à l'autre.
Si on ne peut pas être admis, par exemple, par le crédit offert par le
manufacturier, alors, à ce moment-là, là on s'en va vers une autre source de
financement.
Mais
là ce que vous voulez attaquer, je pense, c'est le crédit spécialisé. Parce que
tous, majoritairement, je dirais à 90 %,
on a besoin d'un moyen de locomotion, et, quand on est refusés dans les
premiers stades, bien là, le taux d'intérêt va augmenter parce que le risque augmente. Alors là, on va s'adresser à des
financements spécialisés que les banques vont offrir et puis, ensuite de
ça, des organisations privées vont offrir. Alors, je pense, c'est dans cette
section-là, tout en permettant aux
consommateurs de pouvoir avoir accès à l'automobile, mais, en même temps, être
capable de... ou, des fois, il peut
avoir des problèmes de crédit qu'il a eu antérieurement, une faillite, des
choses comme ça, il faut lui permettre aussi de rétablir son crédit puis
tout en ayant accès à un véhicule.
Et
je vous souligne, Me Béchard l'a déjà souligné ici, mon P.D.G., qu'on a un
million de véhicules actuellement qu'il
faudrait qu'on tourne, puis qui sont usagés, qui n'ont plus la même technologie
qu'aujourd'hui, on l'a déjà présenté, et ce véhicule-là, c'est lui qui
va être utilisé en crédit spécialisé. Malheureusement... Excusez, M. le
Président...
Le
Président (M. Picard) : Merci, Me Gaudette. Je cède maintenant
la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour une période de
10 minutes.
Mme Poirier : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, il me fait
plaisir d'être là. On a parlé précédemment de l'hypothèque parapluie, qui va
inclure, dans certains cas, la dette automobile. Moi, je voudrais voir... Et,
dans votre tableau, là, que vous nous avez présenté, on parle de
67 %; dans le fond, le 4 % pourrait s'inclure dans le 67 %, là.
Je voudrais voir, pour vous, ça veut dire
quoi comme changement dans l'industrie de l'automobile et les impacts des
personnes qui pourraient se voir
éventuellement prises dans un problème de crédit. Parce qu'il peut y avoir une
dévaluation de maison qui peut arriver, il peut y avoir une augmentation
du taux d'intérêt hypothécaire qui va avoir une influence directe.
Alors,
moi, je veux voir, là, ce lien-là qu'on fait dans l'hypothèque parapluie qui
pourrait inclure l'hypothèque... bien,
qui pourrait inclure la dette automobile, je voudrais voir, pour vous,
qu'est-ce que ça veut dire comme changement.
M.
Morin (Frédéric) : En fait, si je peux me permettre, écoutez, juste
pour vous rassurer, ça, c'est une infime partie des clients qui achètent les véhicules chez nous, parce que,
comme vous le savez, pour avoir une marge de crédit hypothécaire,
habituellement, il faut avoir des bonnes conditions. Ici, on est tous des gens
qui sont privilégiés. Mais effectivement
c'est un phénomène qu'on constate aussi. Je vous dirais que très peu de nos
clients achètent un véhicule et nous paient comptant. Ceux qui nous
paient comptant, à ce moment-là, c'est possible pour Desjardins de prendre une hypothèque légale comme notre hypothèque sur notre
maison sur le véhicule, mais c'est possible aussi que ce client-là arrive avec un chèque visé, par exemple, de
32 000 $ qui provient de sa marge de crédit hypothécaire. Mais ça,
vraiment, là, c'est l'exception.
Encore une fois, il n'y a pas tous les clients qui se qualifient à ce
niveau-là, mais quand que nous, on
parle de 4 %, on ne peut pas inclure ça, parce que vous avez compris que,
le 67 %, on parle de prêts hypothécaires, donc, ça, c'est vraiment exclu. Est-ce que c'est 1 % de nos
transactions? Je vous dirais : Écoutez, on n'a pas de statistique par
rapport à ça, mais c'est très, très faible.
Mme
Poirier : Par contre, je comprends que c'est un phénomène qui
est en progression. C'est une nouvelle façon d'utiliser le crédit et on peut en être inquiets. Mais je comprends
qu'on n'en est pas là pour le moment, mais on peut en être inquiets...
C'est parce que j'ai juste huit minutes puis je veux maximiser.
Vous
nous parlez d'un questionnement sur la présomption, là, concernant les
catégories. J'aimerais ça que vous puissiez aller un petit peu plus
loin, là, dans cette dynamique-là. Quand vous nous parlez que ça crée une
disparité de traitement, puis de concurrence
déloyale entre les prêteurs, ce que j'en comprends, c'est que les catégories
qui se verraient visées par l'article de loi, pour vous, bénéficient
d'un privilège. C'est ce que j'en comprends.
M.
Morin (Frédéric) : Bien,
sans considérer que c'est un privilège, c'est certain que, bon, il faut se
placer toujours dans un contexte de saine concurrence, hein, on
veut offrir le meilleur produit au consommateur au meilleur coût possible,
aux meilleures conditions. Nous, on n'est
pas là pour, dans le fond, faire une transaction automobile avec des taux
élevés. Nous, on est là pour vendre
un véhicule au client, et, s'il a besoin de financement, bien, quelle est la
source de financement qui est la
meilleure pour toi, aux meilleures conditions possibles? Et, comme M. Gaudette
l'a dit, on va commencer avec les manufacturiers, on va descendre avec
les institutions financières, etc.
Donc, pour nous, étant
donné que les gens que j'ai mentionnés tout à l'heure ont déjà des saines pratiques
commerciales ou des pratiques commerciales
équitables et prudentes au niveau des consommateurs — là, je
parle encore une fois de toutes les sociétés de crédit affiliées aux
constructeurs — pour
nous, c'est complètement deux poids, deux
mesures. Donc, les banques qui nous fournissent des cartes de crédit à
22 %, vous considérez qu'effectivement eux, ils ont de saines pratiques, et eux, à ce moment-là, n'auront pas à
remplir les mêmes obligations que nous, les sociétés de constructeurs, aurons à remplir. Là, on est
dans un contexte de déréglementation, on considère que non seulement ce n'est pas compétitif, ce n'est pas avantageux pour
le consommateur, mais, en plus, nous, on va être réglementés, en fait, les
associations canadiennes de constructeurs vont être réglementées, alors que
certaines banques offrent du crédit spécialisé.
Donc, on offre du crédit spécialisé à des taux plus élevés que les sociétés de
crédit affiliées aux constructeurs, et
on vient dire : Vous avez de bonnes pratiques, de saines pratiques, et
c'est la même banque qui se promène dans les campus universitaires.
M.
Gaudette (Michel) : On est
un peu de la gauche, là, vous voyez, hein? Alors, ce qu'on veut dire, c'est
qu'on ne voudrait pas priver notre
consommateur d'un taux d'intérêt à 0 %. Honnêtement, on ne peut pas
espérer mieux que ça, mais on ne veut
pas priver le consommateur de cette déflation qui fait que la compétition qu'il
y a entre les manufacturiers, qui sont très agressifs, puis Mme la
ministre l'a dit tantôt, même dans leurs publicités, pour essayer d'attirer le consommateur... Mais c'est un privilège que le
consommateur a, alors on ne veut pas le priver d'avoir accès au produit
puis en même temps à un crédit qui est facilité parce ce que c'est subventionné
par les manufacturiers, qui, eux, ont beaucoup d'argent.
M. Morin
(Frédéric) : Ce qu'on vous dit, dans le fond, c'est qu'on veut une
règle uniforme mais pour tout le monde.
Donc, pas de présomption, pas de disparité, tout le monde est heureux, c'est
les mêmes règles, c'est uniforme, et c'est dans le respect total du
consommateur, et c'est à son avantage.
Mme
Poirier : Merci. Merci pour cette précision. Vous parlez du
pouvoir réglementaire trop large, vous titrez votre paragraphe comme ça. Je pense que vous avez vécu le projet de loi
n° 104 précédemment. J'aimerais que vous nous fassiez peut-être un
parallèle, là, avec votre appréciation de ça.
M. Yue Chi
(Ian P. Sam) : Bien, il y a
un très beau parallèle à faire. Justement, projet de loi n° 104 ou loi n° 104,
devrait-on dire aujourd'hui, est en vigueur,
cette loi-là, je ne sais pas si vous étiez au courant, et il y a une année
modèle qui est visée — là on parle d'une autre loi, évidemment, là,
mais c'est intéressant ce que vous amenez, là — l'année modèle, c'est l'année modèle 2018 qui est la première
visée. On distribue déjà ces véhicules-là, mais le règlement n'est pas encore
adopté, alors c'est tout à fait particulier.
Pour ce qui
est de cette loi-là... ce projet de loi là, bien, il y a deux éléments d'importance,
qui sont cruciaux pour qu'on puisse
vous amener tout l'éclairage nécessaire dans votre prise de décision, c'est la
définition de contrat de crédit à coût
élevé. C'est quoi, un contrat de crédit à coût élevé? On n'en a aucune idée
présentement. On en fait quand même, du crédit alternatif, dans nos concessionnaires, c'est-à-dire que la
personne qui ne se qualifierait pas en crédit régulier va pouvoir obtenir, dans
certains cas, du crédit alternatif. Mais l'analyse qui est demandée par
l'office est faite, c'est-à-dire qu'on
demande... on vérifie les revenus disponibles, on demande le bureau de crédit
pour savoir c'est quoi, le Beacon Score, et on évalue qu'effectivement
c'est un client qui peut être plus à risque.
Donc, comment
ça impacte la décision? Bien, ça impacte sur le montant que la banque va être
prête à financer et sur le taux de crédit, évidemment, parce
que, le risque étant plus élevé, la
banque, nécessairement, va offrir un crédit à un coût un
peu plus élevé. Mais c'est tout à fait naturel, puis c'est un écosystème tout à
fait fragile qu'on doit s'assurer
de préserver.
Or, en
ajoutant les obligations légales sans réelle valeur ajoutée pour le
consommateur, on pense que ça pourrait fragiliser
l'écosystème puis, pour l'aspect, évidemment,
compétition, on va dire, entre les différents prêteurs, ça existe, puis c'est très imminent, puis ça bénéficie
amplement aux consommateurs actuellement. Les prêteurs veulent tous prendre des
parts de marché dans notre secteur, O.K.? Alors, ça, c'est un fait.
Pour ce qui
est des chiffres de notre tableau, en fait, sachez que ce n'est pas nos
chiffres à nous, hein, c'est l'enquête d'Equifax
et la plus récente. Donc, ça peut paraître étonnant, mais c'est des chiffres
qui, somme toute, sont... m'apparaissent crédibles.
• (12 h 50) •
Mme
Poirier : J'aurais
juste une dernière petite question, il me reste une minute. Vous n'êtes pas
d'accord avec la modification à l'article 251.2, qui fait en sorte que le projet de loi viendrait faire en sorte qu'on ne vient pas... qu'on viendrait... Je veux juste bien saisir mon affaire. Vous dites que, dans le fond, vous
n'êtes pas d'accord à ce qu'on inscrive le fait qu'une personne a demandé une poursuite ou a demandé une
intervention. Qu'est-ce qui fait que, pour vous, ça vient brimer le
consommateur?
M. Morin (Frédéric) : Est-ce que vous
parlez de l'article qui...
Mme Poirier : 251.2
M. Morin (Frédéric) : ...pour nous,
favorise la délinquance?
Mme Poirier : Oui.
M. Morin (Frédéric) : Oui?
Le Président (M. Picard) : En
30 secondes, s'il vous plaît.
M. Morin (Frédéric) : Donc, écoutez...
Mme Poirier : Dans lequel le
consommateur exerce un droit.
M. Morin
(Frédéric) : ...nous, on est
entièrement d'accord avec, disons, le principe de base, si on peut appeler
ça comme ça. C'est certain que le
consommateur qui remet son véhicule, ça reste un droit. Le consommateur qui
remet son
véhicule puis qui paie les trois derniers mois qu'il lui reste, ça, ça ne
devrait pas être rapporté, parce que c'est l'exercice d'un droit. Celui qui, effectivement, rapporte le véhicule, nous, on devrait continuer
de permettre une annotation à son dossier
de crédit même si c'est un droit parce
que c'est à ce consommateur-là aussi
qu'il faut rendre service. Parce que, si on
ne met pas d'annotation à sa feuille de route, entre guillemets, son dossier de
crédit, il va sortir du concessionnaire où il a remis son véhicule et il
va aller s'en acheter un autre.
Donc,
nous, on pense que ça vient créer le contraire de ce que le législateur
souhaiterait, c'est-à-dire permettre au consommateur non pas d'améliorer son sort au niveau
de son dossier de crédit, mais, en plus, de lui créer des nouvelles
opportunités de s'acquérir un nouveau véhicule. Donc, on ne pense pas que ça
soit l'objectif souhaité, mais on est d'accord avec le fait que, s'il remet son
véhicule, il est à jour, il fait les trois dernières mensualités, on ne fera
pas de note au dossier de crédit.
Le
Président (M. Picard) :
Merci, Me Morin. Je cède maintenant la parole à M. le député de Johnson pour
une période de six minutes.
M.
Lamontagne : Merci, M. Morin, M. Chi, M. Gaudette. C'est un plaisir de
vous accueillir.
Un,
je dois vous dire que je suis sensible à la représentation que vous faites
quant à la question d'équité, là, entre les... pour une même catégorie de prêt, là, que les gros
prêteurs, là, qui souhaiteraient être sur une même base, très sensible à ça.
Je
suis surpris de votre demande puis vos réponses par rapport à la question
de la publicité. Vous dites qu'on devrait permettre qu'une image qu'on voit ne soit pas celle qui est associée au
prix. Puis ce que vous mentionnez, c'est... vous dites qu'en réalité... ce qu'on veut, c'est qu'on peut permettre de
susciter l'intérêt du consommateur, hein, c'est ça que... Mettons, la publicité qu'on verrait d'un véhicule,
il y aurait davantage d'équipement sur la publicité que le prix qui est
annoncé, c'est ça que j'ai compris, que
vous, vous trouvez que c'est une bonne pratique de faire ça. J'ai de la misère
avec ça.
M. Yue Chi (Ian P. Sam) : Bien, si je peux me permettre, écoutez,
les règles sont rigides, hein, les règles au niveau de la publicité dans
la LPC sont rigides, elles sont fermes, elles sont définies, mais qu'on passe
d'un média à l'autre, ça ne marche
plus, là, c'est-à-dire que pour faire une publicité dans un journal,
c'est facile de mettre des mentions, de mettre des légales... du légal, c'est-à-dire, que ça soit lisible, puis c'est facile pour le
consommateur de s'y retrouver, puis de faire la part des choses dans
tout ça.
Par contre,
si on parle d'un spot publicitaire radio, c'est une tout autre histoire, c'est-à-dire que j'ai du contenu obligatoire
à mettre dans ma publicité. Or, dans un spot radio de des fois 10, 15 secondes,
c'est, en fait, impossible de le
mettre. Donc, ça ne permet pas aux concessionnaires de faire des publicités, je
dirais, intéressantes et valables à la radio.
Pour
ce qui est de la télévision, c'est aussi une autre problématique, c'est-à-dire que, pour ce qui est du légal, puis c'est vrai, puis vous avez tout à fait raison, on a du légal dans le bas de l'écran, on n'a pas le temps de le
voir, ça passe en une demi-seconde, ça ne fonctionne pas. Mais l'objectif
du fabricant qui va passer la publicité à la télé, c'est de se conformer à la
loi en vigueur. Est-ce qu'on ne pourrait pas assouplir les règles en fonction
du média?
Vous
savez, les publicités télévisuelles, de plus en plus, sont de type mode de vie,
«lifestyle», donc je vais mettre un
super véhicule, le plus beau véhicule que j'ai à vendre du plus haut modèle,
dans un contexte particulier, avec des gens tout à fait heureux de conduire leur véhicule. Est-ce que ce n'est pas
légitime, en quelque sorte, de présenter une belle image des véhicules que j'ai à vendre dans une
publicité télévisuelle de cette manière-là? Bon, c'est une question de valeur
et ça peut devenir philosophique aussi.
Nous, ce qu'on dit, c'est que, justement, pour la télé, au lieu d'être
hypocrites puis de passer du légal en
une demi-seconde, modulons les règles en fonction du média, enlevons cette
obligation-là pour les spots télé, puis on a atteint notre objectif.
M.
Lamontagne : Moi, je pense
qu'il y aurait lieu de s'assurer, peu importe le média, là,
que, si on a une image qui est
projetée d'un produit, s'il y a un prix qui est associé à cette image-là, bien,
je veux dire, il faut que ce
soit un prix qui est directement relié à l'image, pas juste une idée de susciter l'intérêt.
On sait c'est quoi, on arrive, on a vu un beau véhicule, on arrive chez le
concessionnaire : Ah! bien, ce n'est pas ça. Si tu veux les barres, c'est
10 $ de plus par mois,
c'est 20 $ de plus par mois, finalement, bien, tu sors de là, ça te coûte
85 $ de plus par mois. Première des choses.
Une autre chose
aussi, à l'article 13, où vous mentionnez, par rapport au crédit à coût élevé,
vous dites : On comprend «les objectifs du législateur[, mais,] cependant,
dans le secteur automobile, certains consommateurs moins fortunés ont tout de même besoin d'un véhicule»
pour se déplacer. Ça, je comprends ça, là. Mais en quoi le fait que les
gens moins fortunés aient besoin d'un véhicule viendrait faire que, dans le
fond, on devrait moins les protéger?
M.
Morin (Frédéric) : ...si je peux me permettre. Écoutez, hier, on a
écouté les gens du Barreau du Québec, un des avocats qui étaient présents parlait d'un taux de 47 %, une
décision de la Cour d'appel, et où la Cour d'appel aurait dit, puis je
n'ai pas lu la décision, là, que ce n'était pas lésionnaire.
Donc,
c'est sûr, lorsqu'on parle de coûts de contrat de crédit à coût élevé, en tant
que législateurs, vous devez vous positionner. En fait, il faut toujours
garder un bon dosage entre ce qui est l'équilibre au niveau du consommateur, sa
protection, mais aussi son besoin. Si l'État
intervient trop dans cette section-là, où les gens sont plus vulnérables, où
les gens sont plus... appelons-les
démunis, là où ça devient un peu dangereux, c'est de faire en sorte que ces
gens-là qui ont besoin d'une auto,
puis les gens n'ont pas nécessairement tous besoin d'une auto, mais ceux qui en
ont besoin, hein, je travaille de
nuit, à titre d'exemple, donc il ne faudrait pas que ces gens-là qui sont
acceptés actuellement ne le soient plus parce qu'on a mis des règles
trop rigoureuses.
Donc, il faut
vraiment équilibrer tout ça parce que, si on met trop de règles qui sont trop
rigoureuses, ce qui va arriver, c'est que, de toute façon, ils vont aller
acheter un véhicule ou vont en louer un, et cette entreprise-là n'aura probablement pas de
permis de l'Office de la protection du consommateur. Donc, c'est juste une
question d'équilibrer le bon dosage. En fait, je vais appeler ça un
équilibre nécessaire.
M.
Lamontagne : Parfait. Excellent. Combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Picard) : 30 secondes.
M.
Lamontagne : O.K. Le deux jours versus le 10 jours, je comprends, tu
sais, quand vous dites maintenant qu'on prolongerait le 10 jours, là, que les gens puissent résilier leur
contrat, je comprends votre point, en disant : Écoute, il ne faut pas que ça devienne une période d'essai pour
le... Ça, je comprends ça. Y aurait-u moyen, mettons, de dire qu'on associe un kilométrage? Parce que je pense que
l'automobile, par rapport à ça, c'est un secteur particulier, il y a vraiment
une usure du véhicule, là, mais de dire...
de donner plus que deux jours aux consommateurs, je pense que c'est légitime.
Moi,
j'achète, je prends possession du véhicule le vendredi matin; quand je suis
rendu au lundi après-midi, je n'ai plus
le droit de résilier mon contrat. Y aurait-u un moyen, pour l'industrie de
l'automobile, d'amener une variable qui ferait peut-être qu'on donnerait une protection, je veux dire, accrue
sans nécessairement venir vous pénaliser dans le sens de l'usure du
véhicule, là?
M.
Morin (Frédéric) : Nous, dans le projet de loi n° 24 antérieur,
on a déjà fait ce débat-là avec les gens de l'Assemblée nationale, et même les parlementaires, on était
tous d'accord, les gens de l'office : le deux jours, il faut qu'il soit
maintenu, ça peut amener différents
abus de la part du consommateur. Mais, vous savez, il y a aussi ce qu'on
appelle les jours non juridiques.
Donc, souvent, si vous prenez livraison d'un véhicule le jeudi, bien, le jeudi,
il ne comptera pas, le premier jour,
ça va être le vendredi, samedi, dimanche, puis on est déjà rendus au lundi. Les
gens aussi, quand ils achètent une automobile,
ils consultent sur Internet, ils viennent faire des essais routiers. Il peut se
passer plusieurs jours. Ils rencontrent le directeur commercial. Donc,
nous, pour la stabilité des...
Le Président (M.
Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Morin
(Frédéric) : Pardon?
Le Président (M.
Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M.
Morin (Frédéric) : Donc, en terminant, il y a une exception pour les
véhicules neufs, et on est très heureux que le législateur la
maintienne, et on souhaite le maintien du deux jours dans l'usagé.
Le
Président (M. Picard) : Je vous remercie, Me Yue Chi, Me
Gaudette et Me Morin, pour votre contribution aux travaux de notre
commission.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13
heures)
(Reprise à 15 h 4)
Le
Président (M. Picard) :
À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
des relations avec les citoyens
reprend ses travaux. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 134, Loi
visant principalement à moderniser des règles relatives au crédit à la
consommation et à encadrer les contrats de service de règlement de dettes, les
contrats de crédit à coût élevé et les programmes de fidélisation.
Nous
entendrons, cet après-midi, le Mouvement Desjardins, la Fédération canadienne
de l'entreprise indépendante et le Conseil canadien du commerce de
détail.
Comme
la séance de travail a commencé avec cinq minutes de retard, j'aurais besoin
d'un consentement pour poursuivre nos travaux jusqu'à...
17 h 20, c'est bien ça? Consentement? Merci beaucoup.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Mouvement Desjardins. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. Dans
un premier temps, je vous
demanderais de vous présenter et de nous exposer votre vision du projet de loi.
Mouvement
Desjardins
M. Thibault (Hubert) : Merci, M.
le Président. Merci beaucoup. Salutations, d'abord, à Mme
la ministre, aux parlementaires qui participent à la commission. À ma droite, M. Philippe St-Aubin, qui est
directeur principal, Risques et analytique
d'affaires, donc c'est un des membres importants du Mouvement Desjardins qui gère toute la problématique des risques de crédit.
À
ma gauche, d'abord, Me Guillaume Talbot-Lachance, des affaires juridiques, qui
est responsable des dossiers concernant
les consommateurs. Et finalement, à l'extrême gauche, M. Yvan-Pierre Grimard,
qui est le directeur des relations gouvernementales pour le Québec au
Mouvement Desjardins.
Premier commentaire, ça serait pour
porter à votre attention combien on a été heureux de discuter, aussi souvent
qu'on l'a voulu, avec les gens de l'Office de la protection du consommateur. Leur écoute a été extrêmement appréciée, et on... qu'elles ont été disponibles à chaque
fois qu'on a eu besoin de les rencontrer, alors on veut souligner cette
ouverture.
Les
éléments de notre mémoire ont été apportés à leur attention, alors on ne
reviendra pas sur chacun des points. Il y a
même des points sur lesquels ils ont déjà exprimé qu'ils formuleraient des recommandations positives auprès du gouvernement, auprès de la ministre. On souhaite
s'attarder, dans ce premier 10 minutes, à des éléments qui nous
apparaissent extrêmement centraux.
Les
questions qu'on veut soulever sont particulièrement importantes, parce qu'elles nous apparaissent cruciales,
pour certaines d'entre elles, pour l'efficacité
des mesures mises en branle par le projet
de loi n° 134. L'exemple
le plus probant, à notre avis, concerne cette proposition de porter à
5 % le paiement minimum sur les cartes de crédit. Le Mouvement Desjardins considère que c'est certainement l'une des mesures avec le meilleur potentiel, pourrait-on dire, sur la capacité de diminuer l'endettement des
consommateurs. C'est une mesure même que nous avons déjà
mise en place dans le passé sur l'ensemble de nos cartes de crédit.
L'expérience,
cependant, nous a amenés à deux constats qui nous
apparaissent importants. Le premier constat, c'est que le passage
à un minimum de 5 % peut être assez contraignant, pour ne pas dire brutal
même, dans certaines circonstances, pour des gens, des détenteurs de carte de
crédit qui sont déjà aux prises avec des situations
un peu difficiles. Ça a été vrai au
point où, pour nos cartes à faible taux, alors les cartes qui servent en
particulier pour nos membres, nos consommateurs
avec un petit peu de difficultés, on est revenus à un niveau de 2 %.
Pourquoi? Parce que le choc avait été trop brutal pour eux et avait créé des situations
difficiles. Alors, notre constat, à cet égard-là, c'est que, pour aller vers
une disposition comme celle-là, il faut prévoir une période de
temps suffisante pour permettre aux gens d'adapter leurs habitudes de
consommation à cette nouvelle réalité.
C'est
ce que fait le projet de loi n° 134. On pense tout de même que le gouvernement devrait se garder un mécanisme
de souplesse additionnel, au cas où arriverait une récession économique ou qu'il y ait une flambée un peu
significative des taux directeurs sur les
cartes de crédit. Alors, le gouvernement devrait se garder la possibilité de
réagir si un tel phénomène interviendrait.
Le
deuxième élément qu'on a constaté... Évidemment, on a été les seuls à porter le
montant minimum, le paiement minimum
à 5 % d'un coup sec, les autres émetteurs de cartes de crédit n'ont pas
suivi le mouvement, et on a vu un certain glissement pour nos membres qui étaient un peu plus coincés, si vous me
permettez l'expression. Beaucoup d'entre eux ont commencé à utiliser des cartes où il n'y avait pas de paiement
minimum. Alors, un certain glissement de la clientèle, ce qui avait pour effet de stériliser, si vous voulez,
l'effet de la mesure escompté. Cela tient au fait, évidemment, que... et
ça soulève la plus importante de nos
interrogations, quand vous allez voter et appliquer cette mesure-là... il faut
que tous les joueurs, tous les émetteurs de cartes procèdent en même
temps de la même façon. Notre crainte à cet égard concerne l'attitude que les
institutions fédérales, les banques, pour ne pas les nommer, vont avoir.
• (15 h 10) •
Vous l'avez vu dans
le passé, vous l'avez entendu également, aussi, du ministre fédéral des
Finances : le gouvernement fédéral
considère que la juridiction sur les banques lui est exclusive et que la loi du
Québec sur la protection du consommateur et les lois des autres
provinces sur ce sujet ne s'appliquent pas aux institutions fédérales.
Récemment,
vous l'avez vu, le ministre, dès 2012, dans le cadre de l'affaire
Marcotte, une affaire qui a marqué l'évolution de l'encadrement juridique sur la protection du consommateur, le ministre
fédéral est intervenu dans la cause pour
appuyer l'argument des banques à
l'effet qu'elles n'étaient pas
soumises à la loi québécoise, d'une
part; d'autre part, il a introduit, dans la Loi sur les banques, un
préambule qui avait pour effet de réitérer la position du gouvernement à l'effet que la loi québécoise
ne pouvait pas s'appliquer en cette matière.
Dans
la suite des choses aussi, il avait déclaré... Pour vous donner une idée de la
détermination avec laquelle il poursuit
ses objectifs, le ministre
des Finances avait déclaré que le
préambule était, disait-il, et je le cite, avait pour objet de «préciser l'objectif de veiller à ce que
toutes les activités bancaires au Canada soient régies exclusivement selon les
mêmes normes fédérales de haute qualité». En 2012, il répondait au ministre québécois
de la Justice, qui lui avait demandé
d'harmoniser les dispositions et de faire en sorte que les banques respectent
la loi québécoise... il avait écrit, dans
sa réponse : «Le caractère exclusif et national des normes législatives et
réglementaires applicables aux activités bancaires est nécessaire au bon
fonctionnement du système bancaire canadien.»
Plus
récemment encore, vous vous souvenez, le gouvernement fédéral, le ministre des
Finances avait proposé, dans le
projet de loi C-29, de réitérer cette exclusivité. Le projet de loi
prévoyait — je cite
le projet de loi : «Sauf disposition contraire prévue sous son régime, la présente partie vise à avoir
prépondérance sur les dispositions des lois et règlements provinciaux
relatives à la protection des consommateurs et aux pratiques commerciales
visant ceux-ci.»
Ce
n'est qu'en raison des objections de certains sénateurs du Québec à la Chambre
des communes et aussi grâce à la
motion unanime que vous avez adoptée à l'Assemblée nationale que le ministre a finalement
retiré ce projet de loi en indiquant cependant qu'il entendait revenir
rapidement avec de nouvelles dispositions législatives.
Même
chose quand on regarde comment les banques réagissent à tout ce débat. Aussi
récemment que le 29 septembre
dernier, alors la semaine dernière, l'Association des banquiers canadiens
écrivait, dans un mémoire déposé au
ministre fédéral des Finances, je cite le mémoire : «La stabilité et
l'efficience des banques canadiennes reposent sur un système de réglementation [nationalisé], avec des
lois qui s'appliquent à l'échelle du pays, un seul organisme de réglementation
responsable de la sécurité et de la vigueur du système — le
Bureau du Surintendant des institutions financières — et un seul organisme de réglementation responsable
de la protection» du consommateur. On comprend bien qu'ils n'avaient pas
à l'esprit ici l'Office de la protection du consommateur du Québec.
On a beaucoup entendu que la Cour
suprême avait tranché la question de l'application de la loi sur les
institutions fédérale. À notre avis,
on oublie des nuances importantes qu'il faut apporter au jugement, à
l'interprétation du jugement de la
Cour suprême. Il faut se rappeler d'abord que la Cour suprême a tranché en
fonction des faits et des dispositions spécifiques
qui étaient sur la table. La cour a d'abord rejeté l'argument de l'Office de la
protection du consommateur et du Procureur
général à l'effet que les frais de conversion sur les transferts de devises
devaient être inclus dans le taux général. Ce faisant, la cour concluait qu'«on ne peut prétendre que l'obligation
de mentionner certains frais accessoires à un type de crédit à la consommation [...] porte une
atteinte importante à l'exercice de la compétence fédérale qui permet de
légiférer en matière de prêt bancaire» ou elle l'entrave.
Alors,
son jugement, après avoir rejeté l'argument que les frais de conversion
devaient être introduits dans les frais
d'intérêt, l'argument de la cour était de dire : La loi du Québec — la loi de protection du consommateur — n'oblige qu'à publiciser, qu'à informer le consommateur de l'existence de ces
frais, et, dans cette mesure, n'était pas contraire aux dispositions fédérales du règlement sur le coût
d'emprunt, et les deux lois n'étaient pas incompatibles à ce moment-là.
La Cour suprême,
cependant, mentionne également que, si tant est qu'on devait avoir un véritable
conflit qui interviendrait entre les deux lois, à ce moment-là, la théorie de
la suprématie de la loi fédérale recevrait application et devrait être appliquée.
Je
vous cite une partie du jugement de la Cour suprême : «Si la province avait prescrit un délai de
grâce ou un mode de
calcul de l'intérêt différent ou un autre régime régissant les éléments devant
être indiqués, il pourrait y avoir un conflit
d'application ou une atteinte à l'objectif fédéral d'établissement [des] normes
nationales exclusives — à
supposer, sans en décider, qu'un tel objectif
[peut] être démontré. À l'heure actuelle, cependant, les normes
fédérales et provinciales sont identiques.»
Un
peu plus loin, on mentionnait également aussi... pardon. Alors, ça, c'est le jugement de
la Cour suprême. Et les dispositions que propose le projet de loi n° 134
en matière de paiement minimum nous semblent entrer plus directement dans le coeur de ce que prétendent être les activités bancaires sur le
crédit que strictement l'obligation de publiciser les frais de conversion de
l'époque. Alors, il est loin d'être certain qu'un jugement de la Cour suprême
sur l'application aux banques de la disposition sur le paiement minimum
serait avalisé par les tribunaux.
Le Président (M.
Picard) : En terminant, M. Thibault, s'il vous plaît.
M. Thibault (Hubert) : Oui. Alors, une telle situation
risque de rendre... de stériliser l'application de la loi et, en même
temps, de créer un contexte
concurrentiel extrêmement défavorable pour le Mouvement Desjardins, qui
serait le seul à appliquer une disposition qui pourrait faire en sorte que bien de nos membres, bien de nos
détenteurs soient contraints de glisser vers des compétiteurs pour
pouvoir continuer à avoir des cartes de crédit sans paiement minimum.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède la parole à Mme la ministre.
16 minutes.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) : Merci, M. le Président. Tout
d'abord, merci, MM. Thibault,
St-Aubin, Grimard et Talbot-Lachance,
d'être avec nous cet après-midi. Évidemment, tous vos propos sont enregistrés, vos commentaires ont tous été pris en considération déjà par les gens de l'Office de la protection du consommateur, avec lesquels vous avez mentionné collaborer et très bien collaborer. Je pense
que c'est apprécié aussi. Il faut voir autant l'office que la ministre
qui s'occupe de protéger les consommateurs comme étant des alliés, parce qu'évidemment
mon but, c'est de protéger les consommateurs, mais je pense que tout est une question
de dosage et d'équilibre aussi.
Vous
avez parlé du remboursement minimum. Je vais vous faire parler là-dessus un petit peu plus, parce que, bon, lorsque le projet de loi n° 24 a été
déposé, vous avez appliqué directement le remboursement minimum de 2 % à
5 %, vous y avez été d'une manière
assez drastique et rapide. Vous avez certainement eu de l'expérience qui est... nous permet de bénéficier... tu sais, ça nous permet de
bénéficier de votre expérience, pour être bien sûrs que, ce qu'on s'apprête à
faire, on le fasse de la bonne
manière. Présentement, ce qui est prévu, c'est d'avoir un minimum... on
est à 2 % minimum, et de graduellement augmenter, sur une période
de trois ans, jusqu'à 5 %.
Par contre,
vous avez dit qu'on a vu les gens se tourner vers des cartes de crédit sans
minimum. Ça, j'aimerais ça que vous
m'expliquiez ce que vous voulez dire par là, première des choses. Mais
attendez, je vais vous poser une autre question...
M. Thibault
(Hubert) : Oui, absolument.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) : ...pour vous laisser tout le plancher, parce que mes collègues
vont vouloir vous poser des questions.
Moi, je vais rester sur le seuil minimum. Et, présentement, dans la loi qui
a été déposée, il n'y a absolument rien qui parle des nouvelles cartes de crédit,
sinon que tout le monde peut présumer qu'elles seraient assujetties...
Présentement, c'est 2 %, dans un an, à l'adoption, ça passera à
3 %, après ça, graduellement, chaque année, on rajoute 1 %.
Que
diriez-vous, puisqu'on s'aligne sur le 5 %, que toute nouvelle personne
qui reçoit une nouvelle carte de crédit qui... on le sait, très souvent, ça peut être des jeunes, pour avoir une
relation saine de consommation avec le crédit, de prendre des bons plis tout de
suite, je vais le dire comme ça, que, pour les nouvelles cartes qui seront
émises, que nous passions directement à 5 %, ce qui permet aussi de retarder ou d'éviter l'endettement
excessif, je dirais, chez les nouveaux détenteurs de carte de crédit?
Donc, j'aimerais vous entendre parler sur la mise
en application pour les nouvelles cartes de crédit : Est-ce qu'on doit faire 2 %, 3 %, 4 %, 5 %
ou s'il n'y a pas moyen, pour les nouvelles, d'aller directement à 5 %? Et le zéro, aussi, que vous avez parlé tout à
l'heure.
M.
Thibault (Hubert) : Parlant
des nouvelles cartes, effectivement, de passer immédiatement à 5 %, on
évite la problématique dont on parlait, l'une des deux problématiques,
qui est celle de dire : Le choc tarifaire, appelons ça comme ça, pour les
détenteurs qui existent déjà.
Cependant,
notre deuxième commentaire, lui, demeure : Il faut s'assurer que tous
les émetteurs de carte de crédit soient
astreints aux mêmes règles. Parce que, nous, quand on l'a fait, et on entend
les banques que ça ne s'appliquera pas à eux, on est assez craintifs. Évidemment, les nouveaux détenteurs pourront être tentés de
dire : Bien, plutôt que de m'astreindre
à un paiement minimum de 5 %, je vais aller sur une carte d'une banque
étrangère, où finalement je n'aurai pas ou peu de paiement minimum.
Philippe, veux-tu compléter...
• (15 h 20) •
M.
St-Aubin (Philippe) : Oui.
Je peux peut-être vous préciser. Il y a des cartes de crédit,
quand on dit : Pas de paiement
minimum, au fond, c'est les intérêts uniquement. Donc, il y a beaucoup
de nos compétiteurs qui sont à un frais minimum, là. Ça peut être un 25 $ ou intérêts qui sont dus. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on
l'indique. Donc, ça peut des fois
aller en bas du 2 % même, c'est possible. Je n'ai pas tous les noms en
tête, là, mais c'est sûr que, dans notre vigie, on le regarde, et on le
sait, que ça existe.
M.
Thibault (Hubert) : Pour
conclure, dans le fond, dans notre mémoire, ce qu'on suggérait à la commission,
on pense que ça serait d'intérêt que vous
demandiez aux banques quelle va être leur attitude par rapport à cette
mesure-là. Alors, on vous suggérerait
d'inviter, par exemple, leur association pour voir comment ils réagissent. Et
s'ils indiquaient qu'ils ne se
considèrent pas liés, on pense que, pour éviter un débat judiciaire, qui, pour
nous, a duré 10 ans, l'affaire Marcotte, et dans lequel on a été
pris, je dirais, dans un contexte concurrentiel extrêmement difficile avec les
banques...
Bien, si les banques disent : Non, non, on
considère que ça ne s'applique pas à nous, on suggérerait que vous clarifiiez la situation en allant en référer à la
Cour d'appel immédiatement avant de mettre en vigueur cette disposition-là,
ce qui permettrait de clarifier ça une fois
pour toutes puis de faire en sorte que les règles du jeu soient claires pour
tout le monde.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) :
Mme la présidente m'informe qu'il
y a déjà eu des discussions avec les banques.
Et la compétence du Québec en matière de protection du consommateur s'applique,
même si c'est des banques à charte
fédérale, et il est évident qu'ils vont prendre des engagements dans ce
sens-là. Mais j'entends vos commentaires, j'entends vos craintes aussi,
mais je vous avoue que vous allez trouver en ma personne une ardente
défenderesse des compétences du Québec.
M.
Thibault (Hubert) : Nous
tous. Mais je vous rappelle qu'ils ont déposé un mémoire, la semaine dernière,
le 29 septembre, dans lequel ils
disent malheureusement le contraire. Ils disent qu'ils souhaitent que le
gouvernement fédéral, avec un régime exclusif, auquel... lequel va leur
permettre de se soustraire de l'application de la loi du Québec.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) :
Bien, je fais juste vous faire
remarquer que, très souvent, les gens vont déposer des mémoires avec des souhaits, mais nul n'est au-dessus des
lois. Et les lois du Québec s'appliquent parfaitement dans nos champs de compétence. Puis je peux vous
assurer qu'on va tout faire en sorte pour que nos lois soient respectées,
y compris par les institutions financières à charte fédérale.
M.
Thibault (Hubert) : On reste
d'avis, quant à nous, qu'il y a un risque important quand on lit le jugement de
la Cour suprême. J'espère au moins
que, si la situation devait survenir, le gouvernement du Québec va prendre les
dispositions pour prendre les recours judiciaires contre les banques, le
jour 1 où elles ne respecteront pas sa loi.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) : Je vous comprends bien et je vous
rassure. Je pense que j'ai des collègues, M. le Président...
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée de Fabre.
Mme Sauvé : M. le Président, chers
collègues, bonjour et bienvenue, MM. Thibault, St-Aubin, Grimard, Talbot-Lachance. Je veux revenir... puis vous en
avez parlé beaucoup et vous l'avez écrit beaucoup dans votre mémoire... la situation du rehaussement du
paiement minimum de 2 % à 5 %. Vous avez parlé de votre expérience,
et bien sûr la transition rapide qui a amené
à des circonstances difficiles et exigeantes pour les consommateurs. Vous êtes
très à l'aise avec l'idée que, dans
le projet de loi, on étale et on mette un accent sur une transition
qui permette un calendrier de trois ans. Mais vous avez nommé, puis vous
avez dit tantôt aussi qu'elle serait souhaitable, une souplesse additionnelle.
J'ai besoin
de vous entendre clarifier cette notion de souplesse additionnelle puis je vais
vous dire pourquoi. C'est qu'en fait
vous parlez que cette souplesse additionnelle, bien sûr elle est liée à
l'expérience que vous avez vécue, mais aussi
c'est lié à deux autres facteurs : les fluctuations de la situation
économique et les comportements des consommateurs,
qui, vous le dites, sont souvent difficiles à prévoir.
Alors,
comment on s'y prend concrètement pour aller vers une souplesse additionnelle,
compte tenu, d'un côté, des comportements qui sont difficilement
prévisibles et une situation économique qui fluctue?
M.
Thibault (Hubert) : Nous, on
pense que le projet de loi et la disposition du projet
de loi, elle est correcte,
hein? L'étaler sur quatre ans pour nous amener à 5 %, ça va. On dit :
S'il devait survenir une récession économique... Les récessions économiques effectivement ont comme effet de compliquer la situation financière, en
particulier des gens qui sont plus
endettés; alors une situation économique pourrait avoir pour effet de compliquer encore
plus la situation et de les pousser vers une situation
de défaut ou d'insolvabilité. Et là la progression du taux du paiement minimum
pourrait exacerber cette situation-là
pour eux. Dans une telle circonstance, le gouvernement pourrait avoir à
juger, de dire : Je vais donner un petit peu d'oxygène, compte tenu de la récession économique, ou compte tenu si
les taux d'intérêt devaient progresser
très rapidement. Ça s'est déjà vu dans le passé aussi.
La ministre pourrait juger opportun d'avoir une façon d'intervenir qui est plus rapide que de convoquer
le Parlement, puis de faire passer une nouvelle loi, et de retarder ce qui
est prévu, et coulé dans le ciment, si vous
permettez l'expression, dans la loi. Alors, c'est juste, simplement, de vous garder une
souplesse additionnelle en cas de pépin dans l'économie ou dans les taux
d'intérêt.
Mme
Sauvé : Parfait, merci
beaucoup. J'ai une dernière question concernant la libération d'un consommateur
solidaire. Je sais que vous êtes assez en
faveur au niveau des cartes de crédit, mais, au niveau des marges de crédit,
j'ai besoin de vous entendre, encore
là, concrètement là-dessus. Comment, concrètement, deux consommateurs qui ont
une marge de crédit conjointe peuvent
se libérer, alors, au niveau des marges de crédit? J'ai besoin... Parce que je
sens que la position a besoin d'être un petit peu clarifiée là-dessus.
M. Thibault (Hubert) : En fait, on
va, oui, demander à notre spécialiste.
M. Talbot-Lachance (Guillaume) :
Donc, en fait, comme on en a déjà discuté beaucoup avec l'office, la situation, en ce qui concerne les marges de
crédit, est un peu différente, parce que, pour une carte de crédit, vous avez
deux consommateurs qui ont chacun leur carte de crédit, et donc, à la minute
qu'il y en a un qui demande à être libéré, bien, la carte de crédit qu'il a est tout simplement annulée et les
paiements qui passaient avec ce numéro-là nécessairement vont être
bloqués.
Cependant,
quand on a une marge de crédit qui est liée à un compte, qui est également un
compte conjoint dont les actifs sont également partagés, ça devient...
disons que ça peut avoir plus de conséquences négatives sur l'autre consommateur si jamais il y a annulation de la
solidarité. Parce qu'à ce moment-là, en pratique, ce que ça risque de nous
obliger de faire, c'est de, un, limiter les
avances, puis de rencontrer les consommateurs afin de voir qu'est-ce qu'on fait
non seulement avec la marge, mais aussi avec
le compte. Donc là, s'il y a des chèques qui ont été émis, ça se peut que les
chèques rebondissent. Donc, les paiements préautorisés auprès des
fournisseurs... Disons qu'opérationnellement c'est plus complexe.
Cependant, ce qu'on dit dans notre mémoire,
c'est qu'on est d'accord à ce que cette mesure-là s'applique aux marges de crédit, mais qu'on espère quand même que
les consommateurs vont contacter les caisses, comme ils le font
présentement, pour discuter, plutôt que d'envoyer des avis qui vont nous
obliger à mettre fin aux avances avec des conséquences
qu'ils n'auront peut-être pas prévues — et sur un et sur l'autre. Donc, je vous
dirais qu'essentiellement on est d'accord, c'est juste que, dans la
pratique, il y avait des conséquences peut-être moins souhaitables.
Donc, on
préférerait évidemment le processus que nous, on a déjà mis en place, qui est à
l'avantage, à notre avis, là, des consommateurs, parce qu'on accepte de
les libérer, bien sûr.
Mme Sauvé : Et, dans le fond, c'est
fort de l'expérience...
M. Talbot-Lachance (Guillaume) :
C'est ça.
Mme
Sauvé : ...avec ce que vous
avez vécu comme difficultés, vous avez déjà mis ce processus-là en place qui, à
votre avis, est facilitant, là.
M. Talbot-Lachance (Guillaume) :
Exactement.
Mme Sauvé : O.K. Merci beaucoup pour
vos réponses.
Le Président (M. Picard) : M.
le député de Portneuf.
M.
Matte : Merci, M. le Président. Bien, ça me fait plaisir de vous
rencontrer et j'apprécie votre présence ici. Dans votre mémoire, à la page 10, lorsque vous parlez de
l'augmentation de la limite et le dépassement de la limite, vous dites que vous
trouvez que l'avis est inutile pour informer le consommateur qu'il est en excès
d'une dette. J'aimerais ça que vous
puissiez me vulgariser, parce que j'ai de la difficulté à comprendre pourquoi
que vous trouvez que c'est inutile puis que vous prévoyez que ça devra
être plus ajouté dans le relevé de compte, là, O.K.?
M.
Talbot-Lachance (Guillaume) : Premièrement, étant donné que l'avis
risque d'être envoyé de façon papier, on
se disait que ça allait occasionner, de toute façon, un délai quand même assez
grand. Disons, ça peut peut-être être une semaine entre l'envoi de la
lettre, la réception, donc, de l'avis. Et donc que l'information à l'effet
qu'il y avait eu un dépassement de limite
allait peut-être arriver un peu tard pour l'objectif qui, finalement, est
d'aviser le consommateur le plus rapidement possible que : Oh! vous
êtes en situation de dépassement, vous devriez arrêter, un, d'utiliser votre carte de crédit, ou encore de régulariser la
situation. Donc là, ça donne finalement un délai très grand, puis je pense
d'ailleurs que le Barreau était aussi du même avis. Voilà.
Par
contre, nous, ce qu'on veut éventuellement mettre en place, c'est des alertes
volontaires que les consommateurs vont
pouvoir choisir d'avoir. Par exemple, s'ils veulent recevoir un courriel ou un
texto, ou s'ils veulent être avisés qu'ils ont atteint un certain montant sur leur limite de crédit et qu'ils
souhaitent recevoir ce genre d'avis là, c'est quelque chose qu'on regardait,
là.
• (15 h 30) •
Le Président (M. Picard) : M.
le député.
M. Matte : Je voudrais toujours
poursuivre... vous le savez, le projet de loi n° 134, il veut vraiment
rajeunir, améliorer le détenteur de cartes de crédit et le crédit.
Selon les détenteurs que vous avez chez vous, Desjardins, c'est-u un
pourcentage qui est élevé de détenteurs qui recherchent cette flexibilité-là
afin d'extensionner leur marge de crédit?
M. Talbot-Lachance (Guillaume) :
Oui, je pense que Philippe St-Aubin...
M.
St-Aubin (Philippe) : Tout
d'abord, un dépassement de limite de crédit, c'est un dépassement temporaire.
Donc, nous, comment on le perçoit, c'est vraiment
une facilité. Donc, pour répondre à votre question, la... moi, je vous
dirais que la... évidemment, ce n'est pas la majorité des détenteurs qui
souhaitent ou qui vont dépasser leur limite de crédit, mais c'est vraiment important dans les cas où, par exemple, des dépenses plus
élevées ou des voyages, des choses comme
ça, plutôt... Il y a beaucoup de gens qui préfèrent ça plutôt que de devoir
augmenter leur limite de crédit à un niveau plus élevé. Donc, c'est vraiment une facilité. Puis on le ramène après ça, évidemment...
Ce n'est pas une augmentation de limite permanente. Donc, je vous dirais
que c'est une facilité, oui, qui est très appréciée.
Par contre,
avec le temps, nous, ce qu'on s'est rendu compte, puis ça, on l'a fait dans les
dernières années, on a revu à la
baisse un petit peu pour le mettre dans l'esprit d'un dépassement
temporaire, on a revu à la baisse les maximums, sur certaines de nos cartes de
crédit, de dépassement de limite de crédit. La majorité de nos détenteurs, en ce moment, c'est 5 % de
dépassement.
Le
Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin. 10 minutes.
Mme
Fournier : Oui, bonjour.
Donc, merci d'être parmi nous aujourd'hui en commission
parlementaire. Ça me fait plaisir de vous recevoir pour traiter du projet de loi n° 134. Je voulais vous parler d'abord, donc, du
seuil minimal de paiement sur les cartes de crédit. Vous avez parlé tout à l'heure, là, des possibilités, par
exemple, d'avoir une récession
économique ou une hausse significative, là, des intérêts directeurs, qui
pourrait avoir des impacts importants sur les consommateurs.
Mais ce qu'on entend aussi beaucoup, c'est que même l'augmentation, là, la
première année, de 2 % à 3 %, qui représente quand même une augmentation de 50 % des frais de
crédit, ça pourrait être extrêmement difficile pour les consommateurs.
Est-ce que
vous voyez ça de façon aussi plus progressive ou vous croyez que c'est quand
même une bonne chose qu'en un an on puisse passer de 2 % à 3 %? En
fait, au-delà d'être une bonne chose, est-ce que vous pensez que ça peut
avoir des impacts négatifs sur les consommateurs?
M. Thibault (Hubert) : Je passerais peut-être
la parole à un collègue, mais, avant ça, vous dire que, dans les discussions avec l'OPC, on a cru comprendre que
l'office elle-même réfléchissait à mettre une progression un petit peu plus étalée. Alors, difficile
pour nous de dire : 1 % par année, trop rapide ou pas. L'expérience
qu'on a, par contre, ça a été de
dire : De 1 % à 5 % d'un coup sec pour une catégorie de consommateurs,
ça, c'était beaucoup trop contraignant et trop violent. À
savoir quelle est la bonne gradation, ça, c'est plus compliqué. Philippe, peut-être,
tu as peut-être des idées.
M.
St-Aubin (Philippe) : J'ai
des idées, mais je vous dirais qu'en 91... en 91... pardon, en 2011, on l'a
fait, on est passés de 3 % à 5 %, et, pour beaucoup de nos
détenteurs, de nos membres, ça a été très, très difficile. Ce qu'il faut comprendre, c'est que souvent — Hubert
l'a expliqué tout à l'heure — c'est
des détenteurs de cartes à taux réduit. Donc, ces gens-là vont quand même emprunter sur ces cartes-là, et c'est plus
difficile pour ces personnes-là. Donc, ce qu'on se rend compte, c'est que, si on y va trop brusquement, on a poussé beaucoup
de gens vers des situations de difficultés financières, on a été obligés de les accompagner. Puis je vous dirais...
mettons qu'on dit que c'est 0,5 %, je ne le sais pas, c'est quoi, le bon chiffre, mais on sait que, peu importe le pourcentage, il y en a pour qui ça va être difficile, et on va
devoir les accompagner. Ce que ça
veut dire, c'est qu'il va falloir revoir un petit peu soit les limites
de cartes de crédit... il va falloir...
on ne peut pas faire ça sans les accompagner, parce qu'il y a des gens pour qui
ce n'était pas prévu et ça va les mettre
en... À long terme, on croit que c'est une bonne chose, mais, à court terme, malheureusement, ça a des impacts négatifs, c'est certain.
M.
Thibault (Hubert) : Il faut faire attention aussi parce que, dans le fond, si
on pousse trop... Notre but, ce n'est pas
non plus de faire en sorte que les consommateurs aient des notes à leur état de
crédit à l'effet qu'ils n'ont pas respecté le paiement minimum. Ça, ce n'est
pas leur rendre service. Alors, il
faut vraiment faire en sorte d'établir une mécanique qui
va leur permettre d'arriver à de meilleures habitudes de consommation mais avec
un équilibre avec leurs besoins réels et légitimes de consommation.
Mme
Fournier : Oui, je comprends bien. Quand vous parlez justement d'accompagnement, vous dites aussi, dans
votre mémoire, là, que «le projet de loi ne permet pas [...] de déterminer,
individuellement et ponctuellement avec un consommateur en difficultés financières, d'un
paiement minimum moindre». Qu'est-ce
que vous entendez par là? Est-ce que vous parlez, par exemple,
d'ententes de paiement dans le cas où un consommateur ne serait pas capable?
Comment voyez-vous ça dans l'application?
M. St-Aubin (Philippe) : Oui, effectivement, dans ces cas-là, ce qu'on
fait, c'est qu'on prend entente avec les gens qui sont... On le fait,
donc on l'a fait comme ça plutôt en mode réaction à l'époque parce qu'on
n'anticipait pas ces changements-là, mais,
si c'était à survenir, on essaierait le plus possible d'anticiper les
changements, de revoir, au fond, les
paiements que le consommateur peut effectuer, et, temporairement, ça pourrait
vouloir dire, par exemple, que le 5 % n'est pas possible. Dans des cas
particuliers, ça pourrait arriver. Mais, pour nous, c'est mieux de faire ça que
de devoir effectivement, comme on
disait, avoir des éléments défavorables sur la fiche de crédit — ce n'est pas des choses qu'on
veut — ou
même, des fois, ça peut pousser les gens vers la faillite. Ça peut arriver.
Mme Fournier :
Merci. Justement, puisque vous avez quand même une expérience, là, puisque vous
l'avez fait chez Desjardins, la
passation de 1 % à 5 %... donc, vous êtes quand même bien en mesure
d'envisager quelle inégalité concurrentielle vous pourriez avoir avec
les autres institutions financières qui sont à charte fédérale. Donc,
j'aimerais peut-être que vous puissiez nous
parler plus concrètement des impacts directs sur le Mouvement Desjardins de
cette inégalité qui pourrait être engendrée.
M. Thibault
(Hubert) : Dans l'affaire Marcotte, finalement, où l'office et le
Procureur général du Québec plaidaient que
les frais de conversion — alors, les frais à charger pour changer des dollars canadiens en
euros ou en dollars américains — devaient être introduits dans le taux
général applicable sur les cartes, ce qui était un peu illogique ou créait
une situation un peu particulière. On aurait
demandé aux gens qui ne payaient pas leur solde au complet et qui ne voyagent
généralement pas d'assumer ces frais-là en lieu et place de ceux qui voyagent
et qui paient leur compte au complet. La cour a déterminé... a dit la chose suivante, et particulièrement plus
clairement encore en Cour d'appel : Si la cour en est arrivée à reconnaître que ces frais de conversion avaient
effectivement pour... devaient être inclus dans le taux de crédit, il y aurait
eu une incompatibilité avec la
réglementation fédérale. Les enjeux pour le Mouvement Desjardins, on parle de
très, très gros volume, hein, sur une
période de 10 ans et plus, les enjeux pour le Mouvement Desjardins,
c'étaient 100 millions de dollars.
Alors, on risquait... et on est passés assez proche d'une décision qui aurait
fait en sorte que seul le Mouvement Desjardins
aurait été astreint à cette disposition-là, à la mettre dans le taux de crédit
général, et les banques en auraient été exemptées.
Alors,
c'est le genre de conséquences qui, pour le Mouvement Desjardins, peuvent être
assez lourdes. Et c'est pourquoi,
dans le cas de l'autre disposition, on dit : Assurons-nous que les banques
vont effectivement respecter et que les tribunaux vont reconnaître que cette disposition précise de la loi s'applique également aux banques, aux
banques commerciales, aux banques fédérales.
M. Talbot-Lachance
(Guillaume) : Puis, peut-être,
si je peux me permettre, c'est que ça accentue aussi déjà un
phénomène qui existe à l'heure actuelle. Si on regarde, par exemple, la structure de
la carte de crédit Desjardins, c'est très
simple : il y a les frais de conversion de devises, il y a
le taux d'intérêt facturable, puis il y a des frais annuels qui
peuvent s'appliquer s'il y a
des avantages spécifiques. C'est
tout. Si vous regardez maintenant un produit bancaire traditionnel, vous allez avoir ces frais-là, vous pourrez avoir
presque systématiquement des frais de dépassement de limite, des frais d'inactivité, des frais de... un transfert de
solde à 0 % d'intérêt, mais avec un frais fixe de 3 % de transfert de
solde ou même jusqu'à 5 %, donc... Et là on peut se demander si ces
frais-là sont déjà conformes à la Loi sur la protection du consommateur telle qu'elle est rédigée
présentement. Donc, le 5 %, c'est un ajout supplémentaire, finalement,
qui, à notre avis, aura des conséquences sérieuses. Et les consommateurs
qui iront vers les produits bancaires, si les banques ne l'appliquent pas, évidemment, seront désavantagés,
compte tenu de l'explication que je viens de vous donner sur la structure
de leurs produits.
Mme Fournier :
Parfait. Donc, c'est clair qu'on comprend bien votre inquiétude. Puis je me
demandais donc si, vous, par exemple,
ça pourrait vous rassurer qu'on inscrive spécifiquement dans la loi que les
banques à charte fédérale sont assujetties à la présente loi.
• (15 h 40) •
M. Thibault (Hubert) : L'inscrire, bon, ce n'est pas mauvais, mais
est-ce qu'elles vont reconnaître que vous avez la capacité de les obliger à respecter la loi? Ça, c'est un doute
sérieux que nous, on a. Quand on lit les écrits de l'Association des banquiers, quand on entend les propos du
ministre fédéral qui est vraiment déterminé à faire en sorte de mettre en place
un régime fédéral qui va protéger les banques, on se dit que c'est certain,
c'est écrit dans le ciel, il va y avoir des procédures judiciaires dans lesquelles le Mouvement Desjardins va,
encore une fois, se retrouver à
mi-chemin entre le Procureur général du Canada puis le Procureur général
du Québec dans une bagarre juridique qui va durer 10 ans. Et, pendant ces 10 ans là, seul le Mouvement
Desjardins va respecter ces dispositions-là. Alors, ça va stériliser la mesure qu'on
veut mettre en place pour aider nos consommateurs, puis, en même temps, bien, ça va
créer un contexte concurrentiel extrêmement défavorable à Desjardins.
Encore
une fois, dans le dossier de Marcotte, quand on lit le jugement de la Cour
d'appel, le juge Dalphond, qui a rédigé
pour la cour dit : Effectivement, si jamais on avait conclu que les frais
de conversion devaient être dans le taux de crédit, il y aurait eu un véritable conflit, et là la prépondérance
fédérale aurait joué, et les banques auraient été exemptées de ça, alors que Desjardins aurait été finalement
astreint à un potentiel de jugement de 100 millions. Ce n'est quand même
pas rien.
Mme
Fournier : Tout à fait.
Le Président (M.
Picard) : Une minute, Mme la députée.
Mme
Fournier : O.K. Une petite question peut-être très rapide pour
terminer, concernant les programmes de fidélisation,
vous dites que vous craignez que l'application des dispositions puisse être dans des contextes hors du champ
d'application souhaité par le législateur. Je me demandais de quelles situations
dont vous parliez à ce moment-là.
M.
Talbot-Lachance (Guillaume) :
C'est que la terminologie qui a été utilisée pour définir les programmes
de fidélisation nous semblait très
large. Puis on l'a déjà vu dans d'autres dispositions, par exemple, l'article 230, paragraphe c, de
la LPC, où une rédaction trop large engendre des litiges qui n'ont pas été
envisagés au moment. Puis, si on regarde ce qui a été adopté en Ontario, ça nous semblait, à notre avis, plus précis.
Mais, sans non plus dicter au législateur quoi faire, on voulait attirer l'attention sur le fait que la terminologie utilisée pour
définir finalement l'ampleur des dispositions nous
semblait peut-être un peu trop floue.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède la parole à M. le député de Johnson.
M.
Lamontagne : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci de votre visite aujourd'hui. C'est un plaisir de vous accueillir.
En
lien avec vos commentaires en page 7 de votre mémoire, là, sur le recours à l'encontre du prêteur pour les prêts d'argent puis le crédit variable, vous faites
mention, là, de vraiment où le prêteur pourrait se ramasser exposé, dans
certaines situations, à des montants
beaucoup, beaucoup plus larges que... Moi, quand je lis ça, tu sais, ça ouvre
une porte, puis c'est quasiment une
boîte de Pandore un petit peu que... J'aimerais ça vous entendre
spécifiquement, là, j'ai lu ce que vous avez écrit, mais de vive voix. Puis ultimement, c'est certain que l'intention
en arrière de ça, c'est toujours de chercher à donner une protection additionnelle au consommateur.
Mais, en vous entendant, j'aimerais aussi... Vous me faites part de votre
préoccupation, mais y aurait-u moyen de
faire un pont entre cette espèce de boîte là qu'on pourrait ouvrir par une
telle loi puis aussi le désir de protéger davantage le consommateur? Y
a-tu une piste de solution un petit peu, là?
M. Thibault (Hubert) : Je peux commencer peut-être, puis Guillaume
complétera. Mais nous, on considérait que la disposition actuelle, qui permet au consommateur d'opposer au prêteur les arguments
qu'il pourrait faire valoir contre le
commerçant qui lui a vendu un bien déficient, faisait assez bien le travail.
Là, ce qu'on fait dans le projet de loi, c'est qu'on permet au consommateur d'invoquer, même, en demande, si son
commerçant a cessé ses activités ou a disparu, de poursuivre le prêteur avec lequel le commerçant a eu une
collaboration. Ça nous apparaît assez large. Premier élément pour le baliser, c'est certainement de limiter
cette exposition du prêteur au montant du capital du prêt qui a été envoyé.
Un
des effets pervers qu'on va certainement vivre, c'est que ça va nous obliger à
revoir la relation qu'on a avec — je ne
me trompe pas, Philippe — des milliers de commerçants avec lesquels on offre une offre de
financement sur place, et donc ça va
diminuer l'offre de crédit chez ces commerçants-là. Bon, dans certains cas, on
peut penser que c'est déjà trop large
comme offre, mais, dans certains cas, c'est très utile. Prenez tous les biens
durables, les frigidaires, les poêles, les
choses... les éléments comme ça, il y a beaucoup de consommateurs qui
bénéficient d'une offre de crédit au moment opportun dont ils ont besoin. Alors, ça, ça va nous obliger... parce que
le risque ne sera plus le même, ça va obliger les institutions financières à
revoir toutes leurs procédures là-dessus, probablement de restreindre l'offre à
ce moment-là. Philippe.
M. St-Aubin (Philippe) : Bien, c'est de restreindre l'offre aux marchands,
dans le fond, le type de marchand, et de
pousser beaucoup plus loin, pour nous, l'analyse de ces marchands-là avec qui
on fait affaire. Nous, en ce moment, c'est
sûr qu'on le fait, mais on ne va pas jusqu'à aller sur place voir le marchand,
quel type de produit il offre, la qualité de ses produits, et tout ça. Pour nous, c'est difficile de faire ça.
Donc, dans le doute, on va s'abstenir, c'est certain, puis on va restreindre l'offre. Là, on parle beaucoup du Financement
AccordD, dans ce cas-là, chez certains de ces marchands-là avec qui on
fait affaire en ce moment.
M.
Lamontagne : O.K. Puis l'offre, à ce moment... Oui, excusez-moi.
M.
Talbot-Lachance (Guillaume) :
Oui. J'ajouterais aussi que le fait que le critère de la collaboration régulière a été changé pour
le critère de la simple collaboration, qui n'a pas encore été défini par les tribunaux,
ça ajoute de l'incertitude parce que, premièrement, la collaboration régulière, c'est justement quand il y a
de l'offre de financement sur place. Ça, c'est clair. Maintenant, la collaboration, c'est autre chose, donc ça pourrait être :
je suis en caisse, puis là j'ai besoin d'une information sur le bien qui
est financé, donc j'appelle le commerçant, on a une conversation de cinq
minutes. Peut-être que ça pourrait engendrer une forme de collaboration. Donc, dans le contexte où l'article est élargi dans ce sens-là, c'est
sûr que c'est aussi une préoccupation qu'on a.
M.
Lamontagne : Excellent. Dans
le cas des dépassements de crédit, je vous ai entendus dire que... Non, mais,
naturellement, ce n'est pas permanent, vous dites : Ça ne
devrait pas excéder 5 % de la
marge. Je pense que c'est ça, là, le critère que vous avez mentionné.
M.
St-Aubin (Philippe) : En ce
moment, sur certaines de nos cartes, là, la majorité des détenteurs, c'est effectivement 5 %, je vous dirais, pas toutes
nos cartes, pour rejoindre un esprit de dépassement qui est temporaire, si vous
voulez. Parce que, des fois, il y a des
pratiques dans l'industrie où ça va beaucoup plus loin que ça, et ça commence à
être moins temporaire dans ce cas-là.
Donc, pour nous, on le voit vraiment comme un dépassement temporaire pour accommoder
une dépense. Ça peut être assez frustrant
être au restaurant puis dire : Pour 1 $, la transaction ne passe pas.
Je pense qu'on va se retrouver avec d'autres problèmes, c'est certain.
M.
Lamontagne : O.K. Puis dites-moi, dans un contexte comme ça, quand il
y a un dépôt qui est pris, mettons, exemple,
on va à la station d'essence, on veut mettre de l'essence, ils prennent un
dépôt de 100 $ pour une transaction de 60 $, ça, est-ce que ça
vient entrer dans le calcul, là, de...
M.
St-Aubin (Philippe) : Oui.
Oui, parce que c'est une autorisation temporaire qui a été prise. Le 100 $
comme tel va disparaître assez rapidement, mais...
M. Lamontagne : Rapidement...
combien rapidement?
M.
St-Aubin (Philippe) : Ça
peut se mesurer en quelques jours, là, tu sais, ce n'est pas... Ça peut aller
jusqu'à quelques jours, mais,
normalement, là, en une journée, c'est terminé. Par contre, bien, c'est sûr que
le 100 $, il ampute la limite de crédit, donc le consommateur ne le
sait pas nécessairement, ne pense pas que ça affecte la limite, mais, effectivement, parce que c'est du crédit qui a été
avancé, nous, la demande d'autorisation qui vient du marchand nous
indique que c'est 100 $.
M.
Lamontagne : Oui. Puis il n'y aurait pas lieu de... Est-ce que c'est
possible d'accélérer ce rajustement-là?
M.
St-Aubin (Philippe) : Je
vous dirais, là, on rentre dans des technicalités que Desjardins, comme
émetteur de cartes, ne contrôle pas,
c'est tout l'écosystème des paiements avec les Visa et MasterCard qui... entre
marchands et émetteurs de cartes, qui
fait en sorte que ça fonctionne comme ça. On souhaiterait effectivement, mais
on... il faut attendre d'avoir le montant final pour confirmer que ça
n'excède pas, et ça peut prendre quelques jours, ça peut.
M. Lamontagne : O.K. Combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Picard) : 30
secondes, question et réponse, M. le député.
M.
Lamontagne : Question et réponse. Dans le cas des agents de recouvrement,
les associations de consommateurs demanderaient
à ce que chaque agent de recouvrement ait un certificat émis par le président
de l'office. Vous, vous faites affaire avec toute la question de
recouvrement. À un moment donné, là, qu'est-ce que vous pensez de ça?
M.
Talbot-Lachance (Guillaume) : Nous, on pense que la mesure est bonne
dans la mesure où on a la clarification qu'on a précisée à notre mémoire, parce que je pense que ça vient d'une
préoccupation de l'office où il y avait certains représentants qui
étaient problématiques mais qui demeuraient à l'emploi de certaines agences.
Donc, ça permettra à l'office, à ce
moment-là, d'avoir un meilleur contrôle. Puis je vous dirais que nous, on ne
veut pas faire affaire avec des agences
qui ont des mauvaises pratiques, donc on a tout intérêt à ce que ce secteur-là
soit le plus clean — excusez-moi
l'expression anglaise — possible, parce que ce n'est pas une
expérience intéressante pour personne, évidemment, de se faire appeler
par une agence de recouvrement à la base.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Merci. Je vous remercie pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Et je suspends quelques instants afin de
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 49)
(Reprise à 15 h 52)
Le Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux en recevant la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante. Nous recevons Mme Martine
Hébert, vice-présidente principale et porte-parole nationale. Vous connaissez
les règles : 10 minutes, après ça, des échanges avec les parlementaires.
La parole est à vous, Mme Hébert.
Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante (FCEI)
Mme Hébert
(Martine) : Merci beaucoup,
M. le Président. D'abord, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, merci beaucoup de nous
recevoir aujourd'hui pour discuter du projet de loi n° 134, un projet
de loi important, quand même, pour les PME
québécoises. Je tiens aussi, un petit peu à l'instar, là, de nos prédécesseurs,
à souligner la collaboration de l'office de
protection des consommateurs, là, tout au long des discussions, et de leur
ouverture aussi à la discussion. Je pense que c'est apprécié, là, par le
milieu et je tiens à le souligner, M. le Président.
Donc,
comme vous le savez, les PME s'intéressent de près à la question du
surendettement des consommateurs qui sont leurs clients. Donc, les
commerçants partagent la volonté d'assurer la pérennité de la santé financière
des consommateurs québécois.
Le crédit à
la consommation, évidemment, est une courroie de transmission fondamentale de
l'économie. Il assure la fluidité des
affaires et le dynamisme des affaires. Donc, les PME du Québec ont tout aussi
intérêt à ce que cette fluidité et ce
dynamisme soient maintenus et protégés. C'est donc dans cette perspective-là
que nous avons examiné avec attention, M. le Président, les dispositions
du projet de loi n° 134 qui correspondent évidemment aux intérêts de nos
membres.
Alors, on
estime d'abord que la pierre angulaire de l'action gouvernementale en matière
de crédit à la consommation devrait
reposer sur une approche éducative bien davantage que sur une approche
coercitive ou trop restrictive. Cette opinion semble également guider les actions de moult instances à
l'international. D'ailleurs, M. le Président, lorsqu'on analyse la question de la protection des consommateurs
contre le surendettement, il est utile de référer aux principes de protection
financière des consommateurs qui ont été
développés par le G20, à la suite, là, de la crise de 2008. Bien qu'ils aient
été conçus sous l'angle du secteur
financier, ces principes peuvent inspirer la réflexion sur l'endettement des
consommateurs.
À titre
d'exemple, le principe n° 5 est particulièrement d'intérêt au regard de la
question du surendettement des consommateurs, et en voici donc un
extrait : «Des mécanismes appropriés devraient être développés pour aider
les consommateurs actuels et futurs à développer les connaissances, les
compétences et la confiance nécessaires à une compréhension
adéquate des risques, en incluant les risques financiers et les opportunités,
faire des choix informés, savoir où accéder à de l'aide et entreprendre
des actions efficaces afin d'améliorer leur propre situation financière.»
Il faut aussi
savoir que l'OCDE, qui a piloté la conception de ces principes, édicte dans un
rapport qu'il est essentiel de
protéger les droits de... s'il est essentiel, c'est-à-dire, de protéger les
droits des consommateurs, il l'est tout autant de reconnaître que ces
droits s'accompagnent de responsabilités qui incombent aux consommateurs
eux-mêmes.
Alors, M.
le Président, on était préoccupés,
donc, par le fait que le projet de
loi n° 134 semble davantage
vouloir conférer des obligations aux commerçants et aux prêteurs que de
miser sur l'éducation et la responsabilisation des consommateurs. La FCEI estime donc que le législateur a la
responsabilité d'outiller le consommateur pour qu'il soit en mesure de
comprendre et d'évaluer concrètement la réalité du crédit à la consommation
ainsi que ses impacts.
Nous recommandons donc, M. le Président, que,
dans sa sagesse, la commission, lorsqu'elle étudiera article par article le projet de loi, qu'elle le fasse à
travers ce prisme-là de responsabilisation et d'éducation du consommateur
par rapport à la littératie financière de même qu'à la consommation de crédit.
Quelques
dispositions spécifiques, M. le Président : les contrats conclus à
distance. Ce qu'on comprend, c'est que le
législateur souhaite palier des problématiques où le consommateur, là, qui
les... en fait, le consommateur est susceptible de rencontrer lorsqu'il se procure des biens ou des services dans le
cadre d'un contrat qui est conclu à distance par l'intermédiaire
d'Internet, par exemple, ou encore par téléphone.
On comprend également que c'est pour régler ce
type de situation que l'article 5 du projet de loi propose d'introduire, là, un nouveau paragraphe. On
comprend, à la lecture de cette disposition-là, qu'elle occulte totalement la
dimension de sensibilisation du consommateur à exiger et à prendre le temps de
bien comprendre les modalités d'un contrat qu'il conclut avec un
commerçant.
On se demande
donc, M. le Président, si une telle approche n'est pas de nature à provoquer
ultimement ou à terme dans le temps une baisse de vigilance de la part
des consommateurs lorsqu'ils concluent des contrats à distance.
Nous recommandons donc que le législateur amende
l'article 5 du projet de loi pour y ajouter l'idée que le consommateur a la responsabilité de prendre les
mesures raisonnables pour s'enquérir des engagements et des modalités complètes liées au contrat qu'il conclut à
distance avec le commerçant. Autrement dit, si on donne trop d'obligations du
côté du commerçant puis qu'on dit :
Bien, on enlève... on se trouve, dans le fond, à déresponsabiliser le
consommateur. Et on ne voudrait pas
qu'on induise ainsi un effet pervers où, les consommateurs, ce sera tellement
facile de pouvoir contester, qu'ils
ne prendront plus le temps ultimement de regarder les modalités contractuelles
qui les unissent lorsqu'ils signent des contrats.
Par ailleurs,
l'article 5 du projet de loi dispose que le délai de résolution va courir
à compter de la réception de l'état
de compte de l'émetteur de carte de crédit et au moment où le consommateur va
constater que le commerçant n'a pas respecté
l'article 54.4 de la loi. Ainsi, est-ce qu'on peut penser que, si le
consommateur, par exemple, a reçu son état de compte en retard, ou qu'il
l'a reçu puis qu'il ne l'a pas ouvert, ou qu'il n'a pas lu, ou qu'il n'a pas
encore constaté qu'il y avait une infraction
à l'article 54.4, est-ce qu'à ce moment-là on n'est pas en train d'offrir
au consommateur, si vous voulez, un délai, là, de... un délai perpétuel, si
vous voulez, pour... et sans limite, là, de résoudre son contrat lorsqu'il
conclut un contrat à distance?
Alors, à
défaut d'abroger cette disposition-là, M. le Président, je pense qu'on
recommanderait d'y inclure un délai qui est plus clairement défini, par exemple
en nombre de jours où le déclenchement du délai de résolution du contrat se produit, et ce, de manière à ce que le consommateur
ne puisse indûment le prolonger. Par exemple, on pourrait préciser que le délai de résolution est échu dans les
10 jours de la date d'émission de l'état de compte. À ce moment-là, on est
dans une pratique beaucoup plus
objective et très claire pour l'ensemble des parties, parce que la date de
l'état de compte... d'émission de l'état de compte est sur l'état de compte.
Donc, ils ont... ni l'une ni l'autre des parties qui ne peuvent le contester.
On a regardé
aussi certaines dispositions où on avait peut-être certaines préoccupations à
l'effet qu'on ne s'en irait pas vers
une contraction indue du crédit à la consommation. Je pense que les gens de
Desjardins qui nous ont précédés, là,
en ont parlé un peu par rapport à certains mécanismes. Je vous dirais que je
pense qu'il est impératif que, dans le cadre de l'adoption de ce projet de loi là, parce qu'on a beaucoup parlé du
surendettement, là, des consommateurs et des problématiques liées au
crédit à la consommation, mais il ne faudrait quand même pas perdre de vue que
le crédit à la consommation ne rime pas automatiquement avec surendettement des consommateurs. Je
pense que, si tous conviennent que le surendettement de certains
consommateurs n'est pas souhaitable, il faut demeurer quand même vigilant de ne
pas contraindre indûment le crédit chez les consommateurs qui l'utilisent de
façon responsable.
• (16 heures) •
Je
rappellerais d'ailleurs à cet égard-là qu'à l'occasion d'une série d'analyses
la Banque du Canada décrivait en ces
termes la contribution bienfaitrice du crédit à la consommation à la fois pour
l'économie et pour les citoyens — et je cite, M. le Président : «Le recours prudent au crédit peut
améliorer le bien-être économique global des ménages en leur permettant
d'étaler leur consommation plus harmonieusement aux différentes étapes de leur
vie. [...]Le crédit peut en outre contribuer
à maintenir un niveau de consommation relativement stable en amortissant
l'effet d'une baisse temporaire de
revenu consécutive, par exemple, à une à mise à pied ou à une longue maladie.
Le maintien de la consommation ainsi apporté par le crédit peut
contribuer à dynamiser l'économie dans son ensemble en période de conjoncture
difficile.»
Le
législateur doit donc s'assurer, M. le Président, à notre avis, de ne pas jeter
le bébé avec l'eau du bain lorsqu'il cherche
à lutter contre le surendettement de certains consommateurs, et j'insiste sur
le mot «certains». À cet égard, on s'inquiète
plus particulièrement de l'impact de l'article 19 du projet de loi
n° 134 et de son effet potentiel de contraction du crédit à la
consommation, qui pourrait aussi, d'ailleurs, davantage se faire sentir chez
les plus petits commerçants.
Ce qu'il faut comprendre ici, c'est que, sous le
vernis d'une protection supplémentaire du consommateur, on s'apprête à mettre
en place une mesure qui pourrait contracter l'offre de crédit pour le
consommateur, en donnant, par exemple, un
recours au consommateur contre le prêteur directement. On craint que le prêteur
ne pourrait être tenté de revoir son
analyse de risques préalable à l'octroi du crédit en y intégrant le risque que
représente le commerçant qui va vendre
le produit ou le service au consommateur. Ainsi, dans un tel scénario, aux yeux
du prêteur, le niveau de risque
associé à un petit commerçant ne serait pas, évidemment, le même que celui
d'une multinationale.
Alors, c'est pourquoi
on recommande donc qu'on examine
attentivement les possibilités que ce risque-là s'avère et on recommande que, si le législateur maintient
cette disposition-là, qu'elle soit révisée pour qu'elle n'induise pas de
déséquilibre, ou de biais défavorable envers
les commerces de plus petite taille, ou les petits commerces indépendants
aux yeux des prêteurs, puisque dorénavant le
recours d'un bien acheté chez un commerçant, si le commerçant fait défaut,
par exemple, en matière de garantie ou
autres, le consommateur aura un recours contre le prêteur. Et, à ce moment-là,
bien, le prêteur va évaluer justement la
capacité du commerçant de remplir ses obligations. Et c'est là où le bât
pourrait blesser pour les petits commerçants.
Je vous
dirais aussi, M. le Président, que l'un des points fondamentaux qu'on a
regardés... Puis je ne suis pas juriste, là, je ne veux pas me prétendre juriste, je suis juste économiste, mais,
en lisant le projet de loi, le terme «commerçant» est utilisé, alors
que, dans bien des cas, le crédit est accordé par un tiers et non pas par le
commerçant. Le crédit est accordé soit par un prêteur, que ce soit un émetteur
de carte de crédit ou autres.
Et on est
fortement préoccupés par le fait qu'on ne semble pas distinguer les obligations
de ces deux... en tout cas, de ces
deux acteurs-là, qui sont très distincts, puisque le commerçant n'a aucun
pouvoir, par exemple, sur le contenu de l'état de compte émis par un
émetteur de carte de crédit. Le projet de loi édicte des obligations, à savoir
ce qu'il devrait y avoir sur l'état de
compte... et en désignant le commerçant. Le commerçant, il ne le sait pas, lui,
il n'a pas de pouvoir sur l'état de compte qui est émis par le prêteur.
Alors, vous
voyez, ça amène de la confusion quand on lit le projet de loi et quand on
regarde les dispositions du projet de
loi. Je pense qu'il faudrait que le projet de loi, les dispositions, ça serait
souhaitable qu'on permette de distinguer les situations où c'est le
prêteur ou l'émetteur du crédit qui est visé et non pas le commerçant. Alors...
Le Président (M. Picard) :
En terminant, s'il vous plaît.
Mme Hébert
(Martine) : Oui. En
terminant, M. le Président, je vous dirais que, pour nous en tout cas, ce qui
est important, à travers ce projet de
loi là... Je pense qu'on appuie le principe du projet de loi. On l'a dit qu'on
appuyait les objectifs du projet de
loi. Ce qu'on souhaiterait, par contre, c'est que, dans son actualisation, on
ne perde pas de vue que, si les
commerçants ont la responsabilité d'agir de façon... avec probité envers les
consommateurs, les consommateurs ont aussi une responsabilité.
Et il ne
faudrait pas s'en aller dans une direction où on déresponsabiliserait le
consommateur, parce que, comme société,
je pense qu'on a davantage intérêt à avoir des consommateurs qui sont bien
avisés, qui sont bien informés, et qui ont
un niveau de littératie financière qui est assez grand, là, pour éviter les
situations d'abus, davantage que d'avoir une société où le crédit à la
consommation serait tellement restreint que ça nuirait à l'ensemble de
l'économie. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci, Mme Hébert. Je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Thériault
(Anjou
—
Louis-Riel) : Merci, M. le Président. Tout
d'abord, merci, Mme Hébert, d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer en commission parlementaire.
Évidemment, c'est un plaisir pour moi de vous retrouver, parce que j'ai
travaillé avec vous à l'allègement réglementaire dans mes fonctions
précédentes.
Il est
évident qu'en sortant une nouvelle loi ou en faisant une mise à jour de la loi
de la protection du consommateur, j'ai
eu des remarques tout à l'heure qui me parlaient de ne pas alourdir indûment la
paperasse. Je veux vous rassurer, vous aussi,
avant que vous me posiez la question, que c'est sûr que la règle du un-pour-un
qui a été adoptée par le Conseil des ministres,
nous allons veiller à ce que l'Office de la protection du consommateur continue
de répondre présent, comme ils ont
répondu présent depuis le début des différentes actions qui ont été entreprises
pour faire en sorte que l'allègement réglementaire se
poursuive.
L'OPC a atteint les cibles et les objectifs
qui lui avaient été fixés, mais il est évident que, dans la législation que
nous nous apprêtons à faire ainsi qu'à
celles qui suivront, là, on va faire bien attention à ce que la règle du
un-pour-un, dans nos formalités administratives, soit respectée. Évidemment, je
pense que le législateur ne parle pas pour ne rien dire, et on va s'assurer d'être conséquents. Donc, je
veux vous rassurer que j'ai ce souci en tête évidemment, parce que j'ai eu
le plaisir de travailler le dossier avec vous.
Mme
la présidente me faisait remarquer qu'effectivement la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante est un des
partenaires aussi de l'Office de la protection du consommateur, que les
discussions vont quand même bon train, que
vous avez des échanges qui sont intéressants. Je pense que c'est l'objet
également d'une commission parlementaire, parce que, des fois, bon, la
perception et la réalité peuvent être deux, et j'en conviens.
Vous êtes économiste,
vous n'êtes pas avocate. Je ne suis pas avocate non plus. Par contre, je fais
partie des législateurs, donc j'essaie,
autant que faire se peut, de bien comprendre les juristes qui m'accompagnent
lorsqu'ils me font des propositions.
Mais, je suis comme vous, très souvent, je vais lire un article et je vais me
dire : Bien, on gagnerait à préciser, dans la loi, ce qu'on veut
dire par là, parce que le législateur ne parle pas pour rien dire.
Évidemment,
vous n'êtes pas sans savoir que, oui, il y a, dans la loi... Mais il y a
également les règlements dans lesquels
on va apporter des précisions pour éviter justement de rouvrir à tout bout de
champ les lois parce qu'il y a des choses
qui n'ont pas été précisées dans la loi mais qui seront clarifiées dans le
règlement. Je pense que l'important, c'est d'être capable de faire en sorte qu'on entende les arguments que vous
faites valoir pour ne pas abuser indûment, je dirais, de nos règles de
protection.
Je
vais revenir avec vous sur l'article 19, où vous avez des craintes que les
commerçants soient tenus d'évaluer la
capacité avant que le consommateur procède à un achat qui soit financé par
crédit. J'aimerais vous rassurer, parce que je comprends que ça prend la clarification, définitivement. Je pense que
c'est important de dire que c'est le commerçant qui va conclure le contrat de crédit qui va avoir l'obligation. Mais
j'entends bien que vous aimeriez avoir une précision pour faire une différence entre le commerçant,
commerçant entre guillemets, et celui qui offre le crédit. Donc, je pense
que c'est important d'entendre que la
clarification sera faite pour ne pas laisser de zone floue. Et, par contre, je
me suis posé la question si vous aviez beaucoup de vos membres
commerçants qui font eux-mêmes du prêt d'argent...
Mme Hébert
(Martine) : Qui font quoi?
Mme Thériault
(Anjou
—
Louis-Riel) : ...qui font du prêt d'argent, qui
entrent dans la catégorie de commerçant prêteur, entre guillemets.
Mme Hébert (Martine) : Bien, oui, Mme la ministre, effectivement. Mais
ça dépend de ce qu'on entend par faire du
prêt d'argent. Parce que, s'il y a des mécanismes qui existent, comme vous le
savez, dans le commerce de détail, par exemple,
comme AccèsD, des programmes comme AccèsD qui permettent au consommateur
justement d'acquérir un bien, mais de
devoir... de le voir... d'obtenir du financement, là, via un tiers, dans le
fond, mais pour l'acquisition du bien... Dans le fond, ce qu'on souhaite, c'est qu'on voudrait que ce soit clair
que le commerçant qui vend le bien, ce n'est pas la même affaire que le
commerçant qui finance l'achat du bien.
Et
ça, c'est pareil dans le secteur de l'automobile, par exemple. Le
concessionnaire, il vend la voiture, mais le prêteur, c'est, tantôt, je ne sais pas, moi, Volkswagen Canada, ou peu
importe, ce n'est pas le concessionnaire lui-même. Donc, c'est dans le cas de l'automobile, mais on
le voit aussi beaucoup dans le commerce de détail. C'est pour ça qu'on
pense que c'est important de distinguer, en tout cas, les deux.
Puis
comme, dans le projet de loi, souvent, on fait référence au prêteur, dans le
fond, davantage qu'au commerçant, on
utilise le terme «commerçant» pour définir les obligations du prêteur, alors
que, dans le fond... Puis, au début de la loi, je suis allée fouiller dans la loi originale, il n'y a pas de définition
de c'est quoi, un commerçant, un prêteur, etc. Donc, il y aurait
peut-être lieu... En tout cas, il me semble que c'est important, là, de
préciser ça.
Sur
votre remarque, Mme la ministre, à l'effet qu'on va préciser des choses par
règlement, là, c'est très, très bien. Puis
c'est bien, parce qu'une nouvelle obligation dans le règlement, on est obligés
d'en enlever une autre, ça fait que ça va être parfait, effectivement. Je tiens encore à saluer les efforts et le
leadership dont vous avez fait preuve en matière d'allègement réglementaire. Je disais que les consommateurs étaient
choyés de vous avoir récupérée comme ministre. Vous êtes une ardente
défenderesse des causes que vous portez.
Alors,
je vous dirais que, là-dessus, il faudrait quand même que la législation... On
a toujours avantage, tout le monde, à
ce que la loi soit quand même le plus précis possible au niveau des grandes
lignes directrices, au niveau des grands principes, et c'est dans ce
sens-là qu'on vous formulait ces recommandations-là.
• (16 h 10) •
Mme Thériault
(Anjou
—
Louis-Riel) :
J'entends bien. Je veux préciser qu'il y a d'autres groupes aussi qui demandent des précisions par rapport aux termes, la
terminologie employée pour définir, avec toutes les nouvelles notions de commerce, commerce électronique, etc. Donc,
c'est sûr que le choix avait été fait de retenir une certaine partie de
l'ancien projet de loi no 24 qui a été déposé. Mais,
comme j'ai dit aux autres groupes qui sont venus nous voir, il est évident qu'il y aura une phase II, et qu'on aura
l'occasion de venir préciser différents thèmes. Pour la précision que vous
demandez, étant donné qu'on touche
principalement l'endettement, le crédit, ici, je crois que nous allons donner
suite... pas je crois : nous allons donner suite à votre demande
lors de la suite de l'étude du projet de loi. Merci. J'ai des collègues...
Mme Hébert
(Martine) : Je vous remercie.
Le Président (M. Picard) :
...intervenants? Mme la députée de Richmond.
Mme
Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme
Hébert, de votre présence. C'est toujours un plaisir de vous rencontrer.
Deux
petites questions, en fait, puisque mes collègues m'ont mentionné avoir aussi
quelques questions. Vous parlez... Bien,
en fait, je trouve que vous mettez un peu en contradiction le terme de
«commerçant» versus les consommateurs, comme
si l'un et l'autre étaient à des opposés. Je pense qu'il faut faire attention.
Le but, c'est vraiment la protection du consommateur. Mais le commerçant
est aussi, éventuellement, un consommateur également.
Première des choses que je voulais regarder,
quand vous proposez qu'à l'article 224 il puisse y avoir des frais minimaux pour des paiements plus onéreux, est-ce
que vous pouvez m'expliquer votre point de vue là-dessus? Comment, puisque le principe même du projet de loi, c'est
la protection du consommateur... pourquoi une augmentation de certains
frais pourrait aider à protéger le consommateur?
Mme Hébert
(Martine) : En fait, ce
qu'on propose, c'est qu'actuellement, là, ce qu'on comprend de la loi, c'est
que, lorsqu'un consommateur, par exemple, s'acquitte d'un paiement dans un
commerce avec une carte privilège, une carte,
là, de crédit qui est associée à des privilèges, ça coûte beaucoup plus cher au
commerçant pour processer — pour processer, là,
excusez-moi l'anglicisme, mais, en tout cas, c'est ça — pour processer cette... pour traiter ce
paiement-là. Ça va coûter, mettons,
avec une carte privilège, jusqu'à 3 %, à peu près, alors qu'une carte où
il n'y a pas de privilège, pas de voyage et de tout ça, là, de rattaché
à ça, ça peut coûter à peu près 1 %.
Alors,
l'ensemble de ces frais-là... les commerçants, évidemment, ils doivent les
payer et... sont refilés ultimement, évidemment,
dans une pression à la hausse sur le prix qui est chargé, à l'ensemble des
consommateurs. Ça fait qu'autrement dit,
parce que le commerçant, lui, il ne peut pas dire au consommateur : Toi,
tu as un mode de paiement qui est plus onéreux que l'autre, donc je vais t'imposer une légère surcharge pour tenir
compte de ces frais-là supplémentaires que moi, je vais avoir à payer, bien, à ce moment-là, on se
retrouve dans un système où c'est tous les consommateurs qui se retrouvent
à payer les privilèges de certains.
Et c'est pour
ça qu'on dit que ce n'est pas une question d'opposition du commerçant versus le
consommateur. Au contraire, c'est de
dire : Est-ce qu'on pourrait, comme dans d'autres provinces canadiennes...
d'ailleurs, ça se fait, et, comme
vous savez, je crois que c'est Visa, dernièrement, Visa et MasterCard qui ont
permis, justement, dernièrement, aux marchands canadiens, dans les
contrats qui les unissent aux marchands canadiens, de pouvoir imposer une
légère surcharge lorsque le client règle
avec un mode de paiement qui est plus onéreux à traiter pour le marchand, de
façon à ce que le système soit plus équitable pour tout le monde.
Et cette
question-là, Mme la députée, je suis contente que vous en parliez, parce
qu'elle va être de plus en plus importante
avec la multiplicité maintenant des modes de paiement qui s'en viennent. Donc,
les modes de paiement, là, automatiques,
avec le téléphone cellulaire, etc., tous ces modes de paiement là ont des frais
de rattachés pour procéder à la transaction, là, qui sont rattachés, qui
sont payés par le commerçant.
Alors, c'est pour ça qu'on demandait à ce que la
loi soit modifiée pour qu'à l'instar de ce qui est permis dans d'autres provinces canadiennes le marchand puisse
imposer une légère surcharge et dont les montants pourront être définis ultérieurement, là, par règlement. Mais, lorsqu'un
consommateur paie, règle ses transactions avec un mode de paiement plus
onéreux...
Puis je vais
vous donner un exemple, là : une transaction par carte de crédit
privilège, là, à peu près, je vous ai dit autour d'entre 2,5 % et 3 %. Si vous payez avec votre carte de
débit, là, ça va coûter 0,05 $ au commerçant, peu importe le
montant de la transaction. Alors, voyez-vous le déséquilibre sur un achat de
100 $, là? Vous voyez le déséquilibre qu'il
y a entre les deux. Et ces frais-là de traitement des cartes de crédit, je vous
signalerais que le Bureau de la concurrence a bien dit qu'au Canada on avait les frais parmi les plus élevés au
monde. Donc, ce sont des... si vous voulez, une inéquité pour les
consommateurs, là, qui utilisent, dans le fond, des modes de paiement qui sont beaucoup
moins onéreux.
Mme
Vallières : Merci. Et vous donnez une place vraiment
prépondérante à l'éducation dans les recommandations que vous faites. Vous parlez d'une série
d'initiatives qui pourraient être mises en place. Est-ce que vous avez déjà des
choses en tête que vos membres ont peut-être
suggérées que vous pourriez porter à la connaissance des membres de la commission?
Mme Hébert
(Martine) : Bien, évidemment,
c'est d'avoir des initiatives qui renforcent la littératie financière, je veux dire, dans la société
québécoise. D'ailleurs, il y a des études qui ont démontré qu'il y a plusieurs
personnes qui surestiment leur niveau de connaissance en matière de littératie
financière.
Je pense que
les cours... Ça fait longtemps qu'on clame, d'ailleurs, que ça prend des cours
d'économie et de notions économiques
dès l'école primaire et l'école secondaire, que les cursus permettent justement
aux jeunes de pouvoir acquérir des
notions qui vont, plus tard, les amener vers, si vous voulez... à une meilleure
compréhension et à un meilleur niveau de littératie financière. Je pense
qu'on est tous gagnants dans quelque chose comme ça.
L'autre
avenue, je vous dirais, Mme la députée, à laquelle on a pensé, c'est évidemment
de dire, bien, mettre des campagnes de sensibilisation auprès des
consommateurs pour justement prévenir le surendettement.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Fournier : Oui, bonjour. Merci
d'être présente aujourd'hui avec nous en commission parlementaire.
Je vous
amènerais d'abord sur la responsabilité du consommateur, à la page 4 de votre
mémoire. Vous dites : «Nous recommandons
[...] que le législateur[, donc,] amende l'article 5 du projet de loi pour y
ajouter l'idée que le consommateur a la responsabilité de prendre les mesures
raisonnables pour s'enquérir des engagements et des modalités complètes liés
au contrat qu'il conclut [à l'avance] avec
le commerçant.» Je pense qu'au cours de la présentation que vous nous avez
faite vous avez beaucoup parlé de responsabilité du consommateur.
Je
me demandais quand même ce que vous pensiez par rapport à ça, compte tenu qu'il
y a eu un jugement de la Cour suprême, en 2012, qui a statué, là... le
modèle abstrait du consommateur, et qu'il fallait utiliser dans le cadre de l'interprétation de loi de la protection des
consommateurs, qui est celle du consommateur crédule et inexpérimenté. Quand
on sait qu'il y a quand même une bonne partie des Québécois qui sont
analphabètes fonctionnels, donc qui ont de la difficulté
à comprendre le sens d'un texte, somme toute, simple, il va sans dire que la
littératie financière, c'est encore plus
complexe, puis je pense qu'il y a encore une plus petite partie de la
population qui est à l'aise, justement, avec la lecture des contrats, et
tout ça.
Donc,
j'aimerais vous entendre un peu sur votre perspective par rapport à ça. Est-ce
que vous pensez que les gens ont vraiment tous les moyens pour
comprendre les différents contrats de crédit?
Mme Hébert (Martine) : C'est justement pourquoi je vous dis qu'il faut
faire des efforts pour renforcer la littératie financière. Et ça, ça commence dès l'école primaire. Je pense qu'il faut
que ce genre de législation là s'accompagne, dans le fond, d'initiatives
gouvernementales qui vont nous permettre de pouvoir renforcer la littératie.
Maintenant,
vous comprenez, ce que vous me dites, c'est que, bon... et je comprends, et
j'ai beaucoup d'empathie, là, de
sympathie pour les personnes, par exemple, qui ont des difficultés en matière
d'alphabétisme et des choses comme ça, mais vous comprenez qu'on ne peut
pas bâtir tout un système basé sur... Je pense que, là, ce qu'il faut faire,
c'est justement essayer de trouver des
moyens d'aider ces personnes-là à acquérir, là, les connaissances minimales,
dont les connaissances minimales en matière de lecture, et tout ça,
donc.
Mais
je pense que... je demeure persuadée qu'il faut faire davantage d'efforts de
sensibilisation. Et il faut faire attention
de ne pas glisser, de ne pas avoir, finalement, des dispositions où c'est
tellement facile pour le consommateur de
briser un contrat que ça ne vaudra même plus la peine... de toute façon,
regarde, si je ne suis pas contente, «anyway», je vais pouvoir briser le contrat comme ça. Donc, je
n'ai pas besoin de m'enquérir et de demander ce qu'il en est. Je ne pense pas
qu'on serait gagnant, comme société, de glisser vers une situation où la
législation serait tellement, si vous voulez, déséquilibrée qu'on s'en irait vers des situations comme ça. Et c'est
pour ça qu'on dit : Bien, nous, on pense qu'il faudrait peut-être
rétablir un certain équilibre, là, par rapport à ça, dans les actions
gouvernementales.
• (16 h 20) •
Mme
Fournier : Ça serait intéressant, dans ce cas-là, de vous entendre sur
la sollicitation que peuvent faire, justement...
qui peut avoir cours quand on laisse entendre, quand on laisse miroiter des
belles choses derrière le crédit. Vous ne croyez pas plutôt que,
justement, les consommateurs devraient avoir toute l'information puis être
capables justement de pouvoir juger de ces situations-là?
Mme Hébert
(Martine) : Absolument, je suis tout à fait d'accord avec vous que le
consommateur doit avoir l'information
nécessaire. Mais ce n'est pas... Il a quand même une responsabilité de s'en
enquérir aussi, là, je veux dire, c'est
comme... Sinon, on va vivre dans un monde où tout le monde va être complètement
crédule et personne ne va jamais rien critiquer ou questionner. Je veux
dire, je ne pense pas que c'est le but ici, là.
Le but, c'est de
dire : Je pense qu'on a intérêt à continuer de renforcer, justement, et de
faire en sorte que les consommateurs sont aguerris et sont, justement, à
questionner, poser les questions nécessaires, et non pas juste peser, rentrer le numéro de carte de crédit, peser sur
«send», sur «enter» et recevoir, puis avoir dépensé quelque chose, puis se
ramasser avec quelque chose qu'on n'avait
pas commandé, ou qu'on ne voulait pas, ou qu'on n'avait pas compris. Je pense
qu'on a intérêt, au contraire, à pousser le
consommateur à se renseigner au maximum et justement à pousser pour obtenir
toutes les réponses aux questions dont il a besoin. C'est ce qu'on appelle
avoir le sens critique, hein, il faudrait peut-être ressusciter
Aristote.
Mme
Fournier : Je comprends tout à fait, mais, par contre, il y a
quand même des situations qui peuvent s'avérer tendancieuses pour les consommateurs. Par exemple, lorsqu'on leur
propose de hausser leur limite de crédit, bien souvent, les consommateurs vont
penser que c'est parce que les émetteurs, les prêteurs ont jugé qu'ils avaient
une situation financière assez
adéquate pour augmenter cette limite-là. Donc, c'est pour ça qu'il y a quand
même un envers à la médaille. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Hébert
(Martine) : Bien, écoutez, je suis tout à fait d'accord avec vous, là.
Mais ce n'était pas ça... l'article 5,
ce n'est pas de ça qu'il traite, là. Là, vous me parlez de situations
particulières, de consommateurs qui sont peut-être moins... qui ont un niveau de littératie financière peut-être
moins élevé que les autres, etc., là. Je veux dire, on peut philosopher comme ça longtemps, mais c'est
comme... Moi, ce que je vous dis, cependant, c'est que je pense qu'il ne
faut pas non plus, dans le projet de loi...
il faut faire attention de ne pas complètement déresponsabiliser le
consommateur. Je pense qu'on a
intérêt, que le législateur aurait intérêt aussi à dire : Une fois que le
consommateur... tu sais, de dire, bien, qu'il a la responsabilité quand même de s'enquérir de ce qu'il est en
train de faire puis de ce qu'il est en train de signer comme contrat,
là.
Je
veux dire, nos mères nous ont toujours... nos parents nous ont toujours dit ça,
hein : Ne signe rien avant de l'avoir lu. Je veux dire, c'est... je pense
qu'il faut continuer de renforcer ça. Et je pense que les mécanismes
législatifs et les actions gouvernementales devraient favoriser ça.
Mme Fournier :
Parfait, merci. Vous avez parlé beaucoup aussi de situations que vous craignez
qui puissent restreindre le crédit des consommateurs responsables. Bon, vous
parlez, par exemple, de la disposition... le nouvel article 126.1 à l'article 31. Donc, ça, c'est une disposition.
Est-ce que vous trouvez que, dans le projet de loi n° 134, il y a
d'autres dispositions aussi qui peuvent restreindre l'accès au crédit des
consommateurs responsables?
Mme Hébert
(Martine) : Bien, écoutez,
je vous dirais qu'on l'a vu aussi avec les gens de Desjardins, je pense, un
peu avant. Le fait de hausser, là, le
paiement minimal de 2 % à 5 %, je crois, c'est quand même... oui, ça
peut poser des problèmes. Puis ça
peut poser des problèmes aussi... on joue avec les liquidités des gens, là, je
veux dire, c'est comme... ce n'est
pas sans conséquence. En tout cas, moi, je pense qu'il faudrait évaluer
correctement l'impact de cette mesure-là, ne serait-ce que, sinon, au moins, de l'étaler dans le temps, là.
N'arrivez pas demain matin en disant : Bang! Ça passe de 2 % à 5 %, là, parce que vous allez
mettre beaucoup, beaucoup de gens en difficulté importante, là, au niveau de la
gestion de leurs liquidités.
Mme
Fournier : O.K. Parce que, bon, de ma perspective, je me dis, oui,
c'est sûr que les entreprises vont être plus frileuses, là, à accorder des prêts dans ce contexte-là. Mais, en
même temps, si, par exemple, les individus ont un crédit qui s'est avéré responsable par le passé,
je me dis que, dans le futur, c'est moins risqué pour les entreprises, puis
que ces gens-là, de toute façon, puisqu'ils
ont eu un crédit responsable, bien, ils n'auront pas de problème, même avec
les dispositions du projet de loi n° 134.
Mme Hébert
(Martine) : Ça dépend,
madame, parce que, si vous faites... Mme la députée, parce que, si vous faites passer de 2 % à 5 %, comme je
vous dis, ça a un impact sur les liquidités des ménages, là. Tu as beau être
responsable, mais ça a quand même un impact sur tes liquidités. Donc, il
faut faire attention.
Mme
Fournier : Je comprends. J'amène maintenant... Vous dites aussi que
vous voudriez inclure une définition claire, là, de ce qui est considéré
comme un commerçant. Je me demandais comment vous verriez ça, vraiment dans
l'application, ce qui serait la définition claire.
Mme Hébert
(Martine) : Comme j'ai dit
tantôt à la ministre, dans
le fond, notre objectif,
c'est de dire : Est-ce
qu'on peut distinguer la définition de c'est quoi, un commerçant? Pour bien
distinguer le commerçant qui vend le bien et le commerçant ou le prêteur qui finance l'achat du bien. Là, dans la
loi, partout, là, on ne fait pas de distinction entre les deux, ça fait qu'on en perd un petit peu notre
latin par bouts à savoir c'est qui, le commerçant. Puis ultimement ça peut
donner lieu à des litiges ou à des
difficultés d'interprétation, de dire : Bien là, dans ce temps-là, c'est
qui, le commerçant? Surtout avec tous les nouveaux mécanismes, il faut toujours
penser au futur, hein, dans un projet
de loi aussi, donc avec tous les nouveaux mécanismes. AccèsD, ça n'existait
pas, il y a 10 ans, ça existe maintenant. Donc, ce genre de programmes là, tous les
nouveaux mécanismes comme ça qui se mettent en branle dans les marchés, je
pense qu'on a intérêt à clarifier les choses. Et ce n'est vraiment pas clair,
là, de la façon dont plusieurs dispositions sont libellées, lorsqu'on utilise le mot «commerçant». Et le terme
«commerçant» n'est même pas défini, d'ailleurs, dans les premiers
articles de la loi. Je pense qu'on aurait intérêt à clarifier tout ça.
Le Président (M. Picard) : 30
secondes.
Mme Fournier : Donc, très
rapidement...
Le Président (M. Picard) : 30
secondes, Mme la députée.
Mme
Fournier : ...j'ai une dernière question sur les restaurateurs.
Je trouve ça intéressant que vous l'ameniez dans votre mémoire. Je me demandais comment vous voyez ça, le fait que
les restaurateurs pourraient être dédommagés. Est-ce que les gens
devraient réserver avec une carte de crédit comme c'est le cas pour les hôtels?
Mme Hébert
(Martine) : C'est exactement
ce à quoi on pensait. Pourquoi les restaurateurs, là... Ce qu'on appelle
le «no-show», on sait que beaucoup de gens
vont réserver une table dans un restaurant, puis il y en a qui ne se présentent
pas, puis le restaurateur, lui, pendant ce
temps-là, bien, il a perdu... il a peut-être refusé trois, quatre, cinq, 10
clients à la porte. Alors, ça s'applique dans le domaine de
l'hôtellerie.
Pourtant,
quand on veut réserver notre réservation, là, de façon claire, on donne un
numéro de carte de crédit. C'est comme
ça dans des institutions gouvernementales, à la SEPAQ, d'ailleurs, c'est une
pratique. Donc, pourquoi est-ce que nos
restaurateurs, là, ne pourraient pas avoir ça? Et on sait que c'est une
demande, en tout cas, que nos membres restaurateurs,
là, nous formulent très souvent. Je pense qu'on devrait profiter de
l'opportunité du projet de loi pour ouvrir ça, au même titre que c'est le cas dans d'autres secteurs d'activité. Ce
serait très facile et ce n'est pas plus compliqué que dans le domaine de
l'hôtellerie ou que pour la SEPAQ.
Le Président (M. Picard) :
Merci, Mme Hébert. Je cède la parole à M. le député de Johnson.
M.
Lamontagne : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Hébert. Juste pour
faire du pouce un petit peu sur la question
de la députée de Marie-Victorin. Je vois ça... Bien, je comprends très bien le
bien-fondé de vouloir supporter les restaurateurs, là, pour prévoir les gens qui
ne se présentent pas. Je vois ça un petit peu différent, par contre, des
nuitées d'hôtel. Moi, je verrais peut-être que d'avoir une obligation,
quasiment, à quelqu'un de s'engager quasiment à payer d'avance, au cas où, que
ça pourrait avoir un impact négatif sur le chiffre d'affaires des gens.
Mme Hébert (Martine) : Bien, écoutez, je ne vous dirais pas... Ce n'est
pas nécessairement de payer leur repas, mais c'est d'avoir un frais minimal, par exemple. Il pourrait très bien
dire, bien : Bien, il y a un frais minimal, on prend votre numéro
de carte de crédit pour garantir votre réservation. Puis un petit peu comme
dans les hôtels, hein? Il y a certains
hôtels, par exemple, où ils vous disent : Vous pouvez annuler jusqu'à
16 heures, le jour même, là, sans frais. Mais le restaurateur, au moins, il aurait la
possibilité de dire : Bien, écoutez, là, c'est sûr que c'est une période
achalandée, par exemple, je veux
m'assurer de ne pas perdre de clients. Bien, nous, chez nous, la politique,
c'est des frais de 10 $, par exemple, ou quelque chose comme ça,
là, qui seront retenus si jamais vous ne vous présentez pas.
M.
Lamontagne : ...on donne au client, mettons : Vous avez jusqu'à
16 heures pour annuler.
Mme Hébert
(Martine) : C'est ça, exactement.
M.
Lamontagne : Si, passé 16 heures, vous n'avez pas annulé, on vous
charge 10 $, ou...
Mme Hébert
(Martine) : Exactement. Tout à fait, ou 20 $, ou peu importe...
M.
Lamontagne : Puis le client vous laisse son numéro de carte de crédit
quand il fait sa réservation au restaurant.
Mme Hébert (Martine) : C'est ça. Exactement. Je pense qu'il y a moyen de travailler sur le
comment, les modalités, mais, vu que
ça se fait dans d'autres secteurs, là, je veux dire, je ne vois pas pourquoi ça
ne se ferait pas dans la restauration.
M.
Lamontagne : O.K., bon. Au niveau de la fin des paiements
préautorisés, c'est certain que moi, je ne voyais pas la fin des paiements préautorisés comme la fin
de l'obligation du consommateur envers le commerçant. Je me dis : Si c'est ça, l'objectif de l'office, là, je pense
qu'on fait fausse route. Mais, dans un cas où ce n'est pas ça, c'est-à-dire
qu'il faut trouver une autre façon... Parce qu'on ne veut pas nécessairement
que le consommateur ait à payer la totalité du contrat ou quelque chose comme ça. Mais, pour trouver une autre façon
pour le financement, bien, il y a une troisième partie. Là, il y a l'émetteur de la carte de crédit. Là,
on veut dire à l'émetteur : Si tu reçois la demande d'arrêter de faire
les paiements, il faut que tu arrêtes de
faire les paiements. Mais on va essayer de protéger le commerçant. Ça fait que
vous, vous suggérez... il faudrait qu'il y ait une méthode alternative qui ait
été conclue avant. Ça veut dire que ça finit que ça serait le commerçant qui donnerait l'autorisation
à l'émetteur, finalement : O.K., je me suis entendu avec la personne,
O.K., go, tu peux...
Mme Hébert (Martine) : Bien, c'est-à-dire que, moi, ce que je crains,
là... Parce que, dans le projet de loi, là, ce n'est pas marqué que, si le consommateur met fin au paiement préautorisé,
qu'il est tenu quand même à payer ce qu'il lui reste à payer sur le
contrat.
M.
Lamontagne : Ça ne relève pas de ses obligations. Il faudrait que ça
soit écrit dans le projet de loi.
• (16 h 30) •
Mme Hébert (Martine) : Bien, il faudrait que ce soit dans le projet de
loi, il faudrait que ce soit écrit qu'il peut choisir d'arrêter ce mode de paiement là, mais qu'il est quand même tenu
à payer le solde du contrat auquel il s'est engagé avec le commerçant, là, parce que, sinon, ça n'a
pas de bon sens. Il y a un risque
beaucoup trop grand qui pèse sur les épaules du commerçant.
Deuxièmement,
il faudrait aussi dire, bien, que, s'il décide de changer de mode de paiement,
qu'il puisse le faire, sauf qu'il
s'entende... il faut que ce soit convenu avec le commerçant au préalable. Parce
que, là, sinon, le consommateur, il
va dire : Bah! Moi, regarde, finalement, là, je veux que vous arrêtiez les
paiements sur ma carte de crédit. Il me reste 500 $ à payer sur le contrat, mais, pff! hein, je m'en balance
puisque de toute façon les paiements vont arrêter tout seul. Alors, ce n'est pas ça, là. Il faut que ce soit
clair que le consommateur sera tenu de continuer à payer le solde du contrat
auquel il s'est engagé, de un, et, de deux,
qu'il convienne aussi avec le commerçant d'un mode de paiement pour ledit
solde du contrat.
M.
Lamontagne : O.K., ça
fait que, un, pas seulement que le fait de s'assurer que le consommateur est
toujours responsable de ce qu'il a
contracté, vous voulez que, dans la loi aussi, c'est que, s'il veut changer, il
faut vraiment qu'il s'entende, sinon il ne peut pas changer son mode.
Mme Hébert
(Martine) : Bien oui.
M.
Lamontagne : Il faut que ce soit inscrit dans la loi.
Mme Hébert
(Martine) : Bien oui. Parce que,
sinon, vous comprenez que c'est une disposition qui risque d'affecter beaucoup les plus petits commerçants. Parce que
vous imaginez-vous les procédures, dans
le fond, le coût des procédures
que ça prendrait pour
récupérer le solde du contrat s'il n'y a pas eu au moins une entente, là, de
dire : Bien, regarde, prends-le dans
mon compte de banque ou prenez-le... je vais vous faire un chèque ou je vais
vous payer le solde en argent comptant, là. Sinon, on met... c'est un fardeau beaucoup trop grand sur les
épaules justement du commerçant et qui va justement affecter aussi beaucoup plus les petits
commerçants, là, qui n'ont pas nécessairement les moyens de courir après les
clients comme ça, qui vont faire faux bond.
M.
Lamontagne : Parfait. Combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Picard) : ...
M.
Lamontagne : C'est bon. Pour
la question du 2 % à 5 %, vous avez laissé sous-entendre, là, que ça
arriverait, bang, comme ça, hein? Je
veux dire, dans la loi, il n'est pas prévu que ça arrivait, bang! comme ça.
Même, il y a des demandes qui sont faites pour qu'il y ait de la flexibilité qui soit laissée pour
être capable vraiment d'étendre ça dans le temps. Vous semblez dire que, pour vous, ça pourrait avoir un
impact ultimement sur le crédit, ça pourrait avoir un impact sur ultimement
les ventes de vos membres. Vous faites
référence... ça s'adresse... en réalité, il y a juste certains
consommateurs qui peuvent avoir des
problèmes. Moi, des consommateurs responsables, je me dis, si on leur donne un
certain nombre d'années pour faire un
petit ajustement par rapport au solde minimum, s'ils ne sont pas en situation
de précarité, ils n'ont pas de difficulté, je ne pense pas que ça cause un grand, grand préjudice au
point de vue de leurs habitudes qui, ultimement, se traduiraient par des
pertes de ventes pour vos membres, là.
Mme Hébert (Martine) : Bien, écoutez, c'est sûr que moi, je pense
qu'à terme, en tout cas, ça peut avoir un effet de contraction sur le crédit dans... parce que,
si vous augmentez... puis les règles du jeu vont être différentes, là. Les gens
de Desjardins vous l'ont dit tantôt, là, ça va être différent au Québec,
d'ailleurs...
M.
Lamontagne : Oui, mais il ne faudrait pas.
Mme Hébert (Martine) : ...avec les autres émetteurs, et tout ça. C'est
comme... Bien, c'est ça. Et donc c'est là où je vous dis : Bien, faisons attention parce qu'il y a peut-être des impacts insoupçonnés
de ce qu'on est en train de mettre en
branle. Et je répète qu'il faut toujours être prudent, il faut toujours... En
tout cas, moi, j'ai toujours beaucoup de misère à dire : On va y aller avec des solutions mur à mur, alors que le
problème du surendettement, ce n'est pas un problème qui est généralisé
chez les utilisateurs de cartes de crédit ou chez les consommateurs, puis c'est
un problème auquel il faut s'attarder chez
ceux pour qui c'est un problème. Mais il faut faire attention de ne pas avoir
des mesures mur à mur qui vont aussi
pénaliser dans la gestion de leurs liquidités les consommateurs qui ont une
gestion responsable de leur crédit.
M.
Lamontagne : O.K. C'est bon.
Le Président (M.
Picard) : Merci, Mme Hébert. Ça termine la période d'échange.
M.
Lamontagne : C'est tout?
Le Président (M. Picard) :
Oui, M. le député. Ça passe rapidement lorsque c'est intéressant.
Des voix :
...
M.
Lamontagne : M. le Président... à mon égard.
Le Président (M.
Picard) : C'est le chronomètre qui parle, M. le député. Je vous
remercie, Mme Hébert.
Et je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place.
(Suspension de la séance à
16 h 33)
(Reprise à 16 h 37)
Le
Président (M. Picard) : Nous
reprenons nos travaux en recevant les représentants
et la représentante du Conseil canadien
du commerce de détail. Vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire
votre exposé, va s'ensuivre les échanges
avec les parlementaires. Dans un premier temps, je vous demanderais de vous
identifier pour les fins d'enregistrement. Merci. Allez-y.
Conseil
canadien du commerce de détail (CCCD)
M. Benoît (Jean-Luc) : Jean-Luc Benoît. Je suis directeur des relations
gouvernementales pour le Québec au Conseil canadien du commerce de
détail.
Mme
Héroux (Johanne) : Johanne
Héroux, directrice principale des affaires corporatives et des communications
pour Les Compagnies Loblaw limitée au Québec.
M. Lopez (Thierry) : Thierry Lopez,
directeur, Marketing et Affaires corporatives de Best Buy au Québec.
M. Benoît
(Jean-Luc) : Merci, M. le
Président. Mmes et MM. les membres de la commission, nous tenons d'abord
à remercier la Commission des relations avec
les citoyens de nous donner cette occasion de présenter le point de vue de nos
membres sur le projet de loi n° 134.
Nous sommes toujours disponibles pour échanger avec les membres de l'Assemblée
nationale sur les enjeux touchant les détaillants québécois.
Le Conseil canadien du commerce de détail
constitue la principale organisation oeuvrant à la défense et à la promotion des intérêts des détaillants. Fondé en
1963, le conseil a pour mission d'être la voix des détaillants au Québec
et au Canada en offrant un large éventail de
services de représentation, de recherche, d'éducation, ainsi que d'autres
services destinés à favoriser la
réussite des détaillants et à mieux faire connaître leur contribution auprès
des collectivités et des consommateurs.
Le conseil
regroupe près de 45 000 établissements au Canada, dont près du tiers sont
au Québec. De plus, il est la voix des distributeurs alimentaires du
Québec et du Canada. Il s'agit de l'une des plus grandes associations sans but lucratif financées par l'industrie regroupant tous
les types de détaillants, tels que les grands magasins, les magasins grand
public, les chaînes spécialisées, les
magasins indépendants et les commerces en ligne. Au Québec, le commerce de
détail emploie plus de 475 000
personnes, soit 11 % de la population active. Le commerce de détail génère
des ventes annuelles estimées à 109 milliards de dollars et
représente une activité économique de 5 % du PIB québécois.
Le Conseil
canadien du commerce de détail partage l'objectif gouvernemental de mieux
protéger les consommateurs en
modernisant la Loi sur la protection du consommateur. C'est d'ailleurs dans un
esprit de collaboration que le CCCD participe
activement aux travaux du comité consultatif sur le commerce de détail mis sur
pied par l'Office de la protection du consommateur et a participé aux
consultations qui ont mené au projet de loi n° 134. La Loi sur la
protection du consommateur couvre les
activités d'un ensemble de secteurs qui vont bien au-delà du commerce de
détail. Compte tenu des secteurs d'activité des détaillants que nous
représentons, nos commentaires sur le projet de loi n° 134 porteront principalement sur les articles touchant les
programmes de fidélisation. Cela étant dit, nous tenons d'abord à exprimer
certains principes fondamentaux pour notre industrie.
• (16 h 40) •
D'abord, les
règles doivent être équitables. Le commerce de détail est un secteur hautement
concurrentiel de notre économie, et
chaque fraction de part de marché peut être très importante. On y retrouve
souvent des entreprises offrant les
mêmes types de produits aux mêmes consommateurs mais ayant des modèles
d'affaires différents. La réglementation doit donc éviter de donner un avantage indu à une entreprise ou un
modèle d'affaires particulier. Il est primordial que les entreprises de notre secteur puissent prendre
leurs décisions d'affaires en fonction des règles qui sont connues, équitables
et qui sont les mêmes pour tous. L'expression anglaise «level playing field»
illustre très bien ce principe.
Ensuite, la
réglementation doit être claire et prévisible. Les détaillants planifient la
croissance de leur entreprise, établissent
leur plan de développement et investissent dans une perspective à long terme.
Il est donc crucial qu'ils puissent prendre
leurs décisions d'affaires en fonction d'une réglementation claire,
raisonnablement prévisible à moyen et à long terme.
Finalement,
et je sais que ça tient à coeur à la ministre, on doit protéger les entreprises
d'ici en harmonisant notre réglementation.
Nous l'avons dit plus tôt, le commerce de détail est un secteur hautement
compétitif de notre économie. Or, aux
concurrents qui sont aussi présents sur le territoire québécois s'ajoutent
maintenant des entreprises de partout via le commerce en ligne. Afin que les détaillants d'ici puissent continuer
à concurrencer les détaillants venus d'ailleurs, les lois et les règlements ne doivent pas devenir un boulet
pour eux et rendre l'achat hors Québec plus avantageux. Une plus grande
harmonisation des lois et règlements devient essentielle afin que les
détaillants québécois demeurent compétitifs.
Dans un
secteur comme le commerce de détail, il n'existe pas de modèle d'affaires
unique. Les détaillants offrent des
produits similaires, se démarquent souvent en offrant une expérience différente
et en s'adaptant aux besoins de leur clientèle. Par exemple, les consommateurs ont accès à des produits de
quincaillerie autant chez les petits détaillants de quartier, qui sont spécialisés dans ce domaine,
que dans les grandes surfaces spécialisées ou dans les grandes surfaces
de marchandise générale. Les vêtements ou les chaussures sont souvent offerts
autant par des boutiques appartenant aux marques que par les boutiques
spécialisées ou par les grandes surfaces.
Il en va de
même pour les programmes de fidélisation. Ceux-ci sont souvent adaptés à la
clientèle, aux types de produits offerts et font partie de l'expérience
client. Certains programmes offrent des points qui peuvent être ensuite échangés contre des récompenses. D'autres offrent
des remises en argent en fonction d'un montant d'achat ou d'un nombre de points obtenus. Dans d'autres cas, les primes
sont des produits déterminés qui sont octroyés selon les achats effectués
sur une période donnée.
Les détaillants ont donc besoin d'une marge de
manoeuvre pour offrir des programmes qui répondent aux besoins de leur clientèle. Pour cela, il est nécessaire d'établir un
équilibre entre la réglementation et la souplesse nécessaires dans l'administration de ces programmes. C'est
pourquoi nous vous soumettons aujourd'hui les recommandations suivantes.
Première recommandation : amender le projet
de loi n° 134 plutôt que procéder à des ajustements ou à des précisions dans le règlement. Une révision de la
Loi sur la protection du consommateur constitue une opportunité de préciser
autant que possible l'intention du
législateur. Pour les détaillants, la réglementation doit être claire et
prévisible, car les programmes de fidélisation sont offerts à la
clientèle dans une perspective à long terme. Certains éléments du projet de loi n° 134, notamment ceux ajoutant les
articles 187.6, 187.8 et 187.9, nous apparaissent assez importants pour
nécessiter une clarification permanente dans le texte de loi plutôt que
d'éventuelles précisions dans la réglementation.
Deuxième
recommandation : clarifier la notion d'unité d'échange. L'alinéa b de
l'article 187.6 définit une «unité d'échange» comme «toute forme
d'avantage accordé au consommateur et ayant une valeur d'échange au sens d'un programme de fidélisation». Nous croyons que cette
définition doit être clarifiée afin d'éviter toute confusion. Par
exemple : Est-ce que l'unité
d'échange se limite aux unités ou aux points accumulés dans le cadre d'un
programme ou s'étend-elle aussi à l'avantage ou à la récompense que ces
points permettent de se procurer?
Troisième
recommandation : harmoniser avec la loi ontarienne. L'Ontario a adopté, en
décembre 2016, la Loi modifiant la
Loi de 2002 sur la protection du consommateur en ce qui a trait aux points de
récompense. Cette loi prévoit que, je
vais citer : «...nul fournisseur ne [peut] conclure ni modifier une
convention de consommation aux termes de laquelle sont offerts des points de récompense afin de
prévoir l'expiration de ces points en raison du seul passage du temps.» Fin de
la citation.
La notion de «seul passage du temps» nous
apparaît, ici, très importante. Nous comprenons que l'objectif du changement législatif proposé dans le projet de
loi n° 134 n'est pas de figer, dans le temps, les points accumulés par un
consommateur, mais plutôt d'empêcher que les
acquis d'un participant à un programme puissent disparaître en vertu d'une
date d'expiration. Nous croyons donc
pertinent de modifier le texte du projet de loi et de préciser que les unités
d'échange ou de points reçus dans le
cadre d'un programme ne peuvent expirer exclusivement en fonction du temps. Par
exemple, il serait logique qu'un compte abandonné puisse être fermé.
Dans ce cas-ci, temps et inactivité.
Le
gouvernement a maintes fois répété sa volonté de réduire le fardeau
réglementaire des entreprises québécoises et d'harmoniser sa
réglementation avec celle des autres provinces canadiennes. Un amendement dans
le sens de notre recommandation permettrait de limiter le fardeau administratif pour les
entreprises ayant des programmes de fidélisation qui s'étendent au-delà du
Québec.
Quatrième recommandation : assouplir la
notion d'avis préalable. L'alinéa a de l'article 187.9 prévoit qu'un commerçant peut modifier unilatéralement un programme
à condition d'avoir divulgué, dans le contrat original, les éléments pouvant faire l'objet d'une telle modification. En
d'autres termes, le commerçant doit prévoir les éventuelles modifications
qu'il pourrait apporter à son programme.
Or, le commerce de détail est une industrie qui évolue très rapidement et dans
laquelle il est souvent impossible
d'anticiper les changements qui pourraient, par exemple, être amenés par
l'évolution de la technologie. Non
seulement le projet de loi, tel que rédigé, risque d'obliger les détaillants
à inclure l'ensemble des éléments du contrat dans la liste des éléments
pouvant éventuellement faire l'objet d'une modification, mais celui-ci
n'accorderait aucune souplesse pour s'ajuster à l'évolution du marché, des
tendances et de la technologie.
Cinquième
recommandation : préciser le délai pour transmettre au consommateur un
avis de modification. Le projet de
loi n° 134 exige aussi du
commerçant désirant modifier son programme qu'il transmette au consommateur un avis contenant la nouvelle clause ou la clause
modifiée ainsi que la version antérieure et la date d'entrée en vigueur de la
modification. Nous croyons qu'il est
pertinent de préciser, dans le texte de loi, le délai minimum pour transmettre
un tel avis et, s'il y a lieu, le délai minimum avant qu'une
modification n'entre en vigueur.
Nous concluons en remerciant à nouveau la
commission de son invitation. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos
questions.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) :
Merci, M. le Président. Messieurs madame, merci d'être avec nous aujourd'hui pour pouvoir regarder le projet de loi
n° 134, nous apporter des précisions. Je vois que presque l'entièreté
de votre mémoire parle des programmes de
fidélisation, qui est un des secteurs qui est touché par le projet de loi
n° 134. Donc, je ne vais certainement aller que sur le programme de
fidélisation, ce que mes collègues vont faire aussi.
Mais, avant
d'aller sur les programmes de fidélisation, vous demandez que nous précisions,
dans la loi, certaines choses, et le
choix que nous faisons, c'est de préciser dans le règlement plutôt que dans la
loi pour se donner beaucoup plus de latitude. Et il y a une raison fort
simple pour ça, c'est que nous ne voulons pas rouvrir des lois de manière répétitive — je vais le dire comme ça — pour pouvoir régler des problèmes
sporadiques ou des nouvelles problématiques qui pourraient arriver. Puis
je vais vous donner un exemple fort simple. La dernière fois que la loi qui
touche l'office de la protection des
consommateurs a été ouverte et qu'il y a eu des modifications, c'est en 2010.
On est en 2017. Donc, vous comprenez
qu'en sept ans beaucoup d'eau a coulé sous les ponts, beaucoup de phénomènes
nouveaux sont survenus, dont les programmes de fidélisation qui ont
toujours existé mais sous des manières différentes, évidemment.
Donc, il
est évident qu'il faut se donner les outils pour être capables de se réenligner
ou d'être en mesure de s'adapter aux
nouvelles réalités qui s'offrent devant nous, notamment avec toute la notion du
commerce électronique qu'on n'avait pas
à l'époque. Moi, quand je suis arrivée ici, Facebook, Twitter, ça n'existait
pas, ça a été inventé après. Nous sommes presque tous, les députés, sur Facebook et sur Twitter. Nos
petits-enfants, avec les doigts, ont tous ces appareils-là et sont en mesure d'aller eux-mêmes jouer dans différents
logiciels. Donc, c'est sûr qu'il faut prendre le temps de se donner la marge
de manoeuvre qu'on a de besoin.
Je sais que,
dans les rencontres et les nombreuses discussions que vous avez eues avec
l'Office de la protection du
consommateur, Mme la présidente et les gens qui travaillent à l'office vous ont
aussi précisé que le but d'encadrer les points de fidélisation, c'était pour
éviter le débat qu'il y a eu l'an passé, au mois de décembre, pour éviter que
quelqu'un subitement ou une
organisation quelconque vienne doubler la quantité de points nécessaires pour pouvoir
effectuer un achat, parce que, là, on vient de changer les règles du jeu
d'une manière drastique.
• (16 h 50) •
Je tiens à
préciser, pour les gens qui écoutent et qui se posent la question, qu'il est
évident que ce qu'on vise à encadrer,
ce n'est pas la carte de fidélité qu'on peut avoir lorsque nous allons aller
chez une compagnie de café quelconque ou peu
importe, au bout de cinq, 10, 12, 15 achats, on va avoir une consommation
gratuite, ce n'est pas ça qui pose problème.
Ce n'est pas non plus les différentes promotions qui sont faites par différents
détaillants ou des épiciers, où on va
cumuler sur une période x, du début jusqu'à la fin, avec des règles qui sont
très claires, ramasser un certain nombre de timbres pour pouvoir se
procurer un article qui, en temps normal, a une valeur x, et on va l'avoir pour
une valeur beaucoup moindre parce qu'on est un client fidèle et nous avons
ramassé certains timbres — je
vais le dire comme ça — ou
encore des chèques qui nous sont envoyés par d'autres détaillants.
Donc, pour
ceux qui se posent des questions... C'est parce que j'essaie de ne pas faire de
promotion pour un type de commerce
plutôt qu'un autre. J'ai moi-même plusieurs cartes de fidélisation, évidemment,
je ne les sortirai pas. Mais il est évident que le but du législateur,
lorsqu'on a introduit la notion, c'était vraiment pour faire en sorte que les
unités d'échange, on va les appeler comme ça plutôt que les points, puissent
avoir une valeur qui est réaliste.
Puis là je
vais donner un exemple. C'est que c'est sûr que, exemple, la carte Inspire, il
n'y a pas de compétition dans ce
secteur-là. Bien, quand les courriels rentrent à toutes les semaines selon ce
que j'ai acheté, bien, si j'aime bien les cabernets sauvignons de telle région, bien, il est évident qu'on va
m'envoyer... Bien, si vous achetez tel type de cabernet sauvignon, plutôt que d'avoir 500 points, vous
allez avoir 1 250 ou un peu plus. Donc, ça, c'est évident que, quand tu
arrives à la Société des alcools, le prix du marché, c'est le prix du
marché. S'il y a une petite augmentation, il y a une petite augmentation; s'il y a une petite diminution, il y
a une diminution. On ne me dira pas que je n'ai pas le droit d'utiliser mes points pour acheter n'importe quoi d'autre. Ça
a une valeur x dans le temps, et c'est bien encadré. Ça, la problématique
n'est pas à ce niveau-là. Elle est vraiment
à ce qu'on appelle les coalisés, entre guillemets, donc avec les Aéroplan, les
Air Miles que nous avons.
Donc, c'est
pour ça que je pense que c'est important de faire une précision, parce qu'il y
a différentes cartes fidélité qui
existent. Le but du législateur, ce n'est pas d'empêcher ça. Au contraire, je
pense que c'est parfaitement légitime qu'un type de commerce x, qui veut fidéliser une clientèle, puisse pouvoir
mettre à sa disposition, d'un client fidèle, des bons clients réguliers, qu'ils puissent continuer à
bénéficier de certaines réductions ou d'avantages commerciaux puisque ce
sont des clients réguliers.
Donc, est-ce que mes propos vous rassurent?
M. Benoît
(Jean-Luc) : Vos propos sont
toujours rassurants, Mme la ministre. Sur la question de clarifier l'intention
du législateur versus la réglementation, si on prend un pas de recul, je vous
dirais que nous, comme organisation qui représente
les détaillants, on a trois préoccupations qui sont assez horizontales quant à
la réglementation : d'abord, qu'elle soit la même pour tous,
qu'elle soit relativement prévisible et stable — puis j'y reviendrai, à
ça — et
qu'on puisse harmoniser au maximum pour que le Québec puisse demeurer
compétitif.
Je veux
revenir sur la question de la prévisibilité. Le commerce de détail, c'est un
milieu extrêmement compétitif. Les
gens investissent, par exemple, dans des programmes de fidélisation et les
développent ou les mettent en place dans une perspective de relativement long terme. Je ne pense pas que personne
ne planifie un programme pour 100 ans mais pour une perspective de quelques années. Ils ont besoin de savoir, à ce
moment-là, que la réglementation, dans un avenir prévisible, va rester le plus clair possible et, si possible, ne pas
trop changer. On comprend, je suis d'accord avec vous, il y a des évolutions technologiques, donc, il y a
un équilibre à avoir dans ça. Par contre, le message qu'on vous passe aujourd'hui, c'est : si l'intention du
législateur, c'est d'aller dans la direction x, bien, écrivons-le dans la loi,
comme ça, tous les intervenants, tous
les joueurs dans l'industrie vont savoir, à ce moment-là, c'est dans cette
direction-là qu'on s'en va. Quelque chose à rajouter?
Le Président (M. Picard) :
Mme la ministre.
Mme
Thériault (Anjou
—
Louis-Riel) : Je vous entends. C'est sûr que,
lorsqu'on peut le mettre dans la loi, c'est parfait. Mais, de l'autre côté, si on est pris avec des petits
changements qu'on doit faire rapidement, ce n'est pas toujours évident
de rouvrir les lois au moment où on doit le faire. Par contre, avec la règle du
un pour un, par rapport à l'allégement
réglementaire, maintenant, il y a aussi l'obligation de consulter les
commerçants qui sont touchés, ou au moins les grands secteurs. Donc, je pense que ça peut répondre en partie à
votre demande de prévisibilité pour être capable de voir venir, et il est évident que ce n'est pas à
l'avantage du Québec de faire des législations qui vont aller à l'encontre ou
qui vont désavantager les gens du commerce ici comparativement à
d'autres provinces.
D'ailleurs,
dans l'allégement réglementaire, le Québec travaille en étroite collaboration
avec l'Ontario. Nous avons signé des
ententes de réciprocité, par rapport à justement tout ce qui s'appelle nos
projets de règlement, pour voir, quand on
fait quelque chose, qu'on puisse s'harmoniser puisque nous représentons quand
même plus que la moitié du Canada ou
pas loin. Donc, si je peux me permettre de vous rassurer, c'est vraiment
l'intention du législateur. Et, sur ce, juste parce que je voudrais profiter au maximum de votre
expérience et je sais que ma collègue a des questions à poser, je vais lui
passer la parole. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée de Richmond, c'est à vous.
Mme
Vallières :
Merci beaucoup, merci de votre participation. Effectivement, ma collègue le
mentionnait que c'est très, très axé
sur les programmes de fidélisation, mais j'aimerais quand même, à un niveau
peut-être un peu plus macro, profiter de votre expertise, justement,
puisque vous représentez un grand nombre de commerçants de détail.
Avant d'entrer dans les quelques questions que
j'ai pour les programmes de fidélisation, étant quelqu'un qui demeure en région, on sent cette érosion de
l'offre commerciale dans les plus petits milieux, il y a un exode vers les plus
grands centres. Est-ce
qu'il y a un impact? Parce que vous amenez beaucoup la notion d'équité et vous
parlez, là, de l'aspect du «level playing field» aussi. Est-ce qu'il y a un
aspect aussi par rapport aux plus petits commerçants qui mettent en place des programmes qui ne sont pas
l'équivalent des plus grands... on vient toucher où ils pourraient peut-être
avoir une incidence sur ces plus petits commerces?
M. Benoît (Jean-Luc) : Je ne suis pas sûr de voir comment l'impact d'un programme de
fidélisation... une entreprise
pourrait avoir un impact sur un plus petit. Il faut comprendre, puis, bon, Mme
la ministre l'a soulevé tantôt, puis
j'étais content qu'elle soulève, il y a plusieurs types de programmes de
fidélisation. Il n'y a pas un modèle unique. Il y a — on
l'a dit dans notre présentation, mais on peut y revenir rapidement si vous
voulez, Mme la députée — des
programmes plus traditionnels à points, on
va appeler ça comme ça, où, selon nos achats, on accumule un nombre de points,
puis, à un moment donné, on regarde notre
solde, on trouve qu'on en a assez, bien, on va voir sur le site Web, par
exemple, puis on dit : Moi, je voudrais avoir telle récompense ou
tel service ou tel produit en échange de ça.
Ces
programmes-là, il y a des entreprises qui ont leur propre programme de
fidélisation, puis il y en a d'autres, je
ne ferai pas la promotion d'un programme de fidélisation en particulier, mais
il y en a d'autres dont les entreprises sont partenaires ou sont clients. Puis je pense que vous les recevez la
semaine prochaine, hein, les deux grands, vous les recevez la semaine prochaine. Ceux-là, à ma connaissance,
souvent, font affaire aussi avec des plus petits. Il y a aussi des programmes
de fidélisation où on accumule un certain
nombre de points et, à une période donnée, c'est automatiquement converti en
bons d'achat ou en cartes-cadeaux.
D'autres programmes, selon un niveau d'achat dans une certaine période, là on a
droit à un produit en particulier
souvent en magasin. On se présente en magasin puis on va avoir droit au produit
x si on a atteint tel niveau.
Donc,
je pense qu'il y a plusieurs programmes de fidélisation. C'est sûr que le
commerce de détail, c'est un milieu qui
est très concurrentiel, mais je vois mal comment les programmes de fidélisation
de l'entreprise X pourraient concurrencer l'entreprise Y, dans la mesure où il y a toutes sortes de programmes qui
sont adaptés à chacun de ces modèles d'affaires là.
Mme
Vallières : Vous parlez justement du fait que les points
ramassés peuvent découler ou s'étendre aussi à des avantages autres, puis vous mentionnez, dans votre
mémoire, l'application de mesures de protection pour certains types de programmes. Quels types de programmes, pour les
règles proposées, sur lesquels ça ne devrait pas s'appliquer, par
rapport justement à l'étendue... le chèque qu'on peut avoir à la suite de
l'accumulation?
M. Benoît (Jean-Luc) : Pour bien vous répondre, je veux juste être sûr
de saisir à laquelle de nos recommandations vous faites référence.
Mme
Vallières :
Je suis à la recommandation sur les unités d'échange accumulées. Voilà.
M. Benoît
(Jean-Luc) : Voilà. Alors, pour nous, où il y a une zone grise,
c'est : Est-ce que le règlement va s'appliquer
aux points qui sont accumulés ou, par extension, à la récompense qui est
acquise en fonction des points qui sont accumulés? Je pense que, là, il
y aurait une clarification à faire à ce niveau-là.
Mme
Vallières : L'autre question : Vous parliez de aussi,
toujours dans les échanges, de pas seulement d'avoir la notion de temps mais aussi d'inactivité. Quel
est l'impact sur le commerçant de l'inactivité d'un compte? C'est le crédit
qui est en attente de quelque chose?
M. Benoît (Jean-Luc) : Il n'y a pas de crédit dans ça. Les points qui
sont accumulés sont... Bon, d'abord, c'est une question de gestion des
comptes. Mais, toi, as-tu des exemples à donner?
• (17 heures) •
Mme Héroux (Johanne) : Question de complexité. En tant que détaillants,
comme on l'a mentionné tantôt, c'est de
plus en plus concurrentiel. On se doit d'être de plus en plus efficaces pour
pouvoir maintenir le plus d'emplois possible. Vous voyez plein d'annonces ces jours-ci. Alors, c'est d'éviter la complexité. Et de maintenir des comptes
inactifs, ce n'est pas rentable pour
un détaillant, d'un point de vue efficacité. Mais ça, les points dans les
comptes, pour nous, ce n'est pas des dollars, c'est vraiment une
question d'être efficaces dans la façon de mener nos activités administratives.
Mme
Vallières : ...il y a
une chose. Juste vous mentionner, pour l'exercice d'un certain leadership qu'on
a là-dedans, qu'il y a
une réelle volonté de faire pour le mieux. Mais je suis très, très en accord
avec vous quant à la question de la clarté
et de l'aspect de prévision aussi pour les commerçants. Alors, je pense qu'on est au bout du temps, M. le
Président, ou presque. Fort
intéressant de pouvoir être allée un petit peu plus en profondeur
spécifiquement sur le programme de fidélisation aussi. Merci de l'avoir
apporté.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Fournier : Oui, merci, M. le Président. Merci d'être parmi
nous ce soir pour nous partager votre point de vue. C'est très intéressant,
justement, de pouvoir aller plus précisément dans les programmes de
fidélisation. Mais j'étais quand même curieuse, à l'extérieur de ça,
parce qu'il m'apparaissait quand même que la loi pouvait toucher d'autres aspects de votre industrie. Par exemple, le
recours du consommateur contre un commerçant de crédit qui collabore avec
un commerçant vendeur, est-ce que vous avez
une opinion, une position là-dessus particulièrement, ou ça vous convenait,
de la façon dont c'était actuellement dans le projet de loi?
M.
Benoît (Jean-Luc) : Comme
nous l'avons dit dans notre présentation, les détaillants que nous, on
représente sont particulièrement
touchés par la question des programmes de fidélisation. C'est vraiment le volet
du projet de loi qui touche le plus.
Le projet de loi affecte beaucoup de secteurs du commerce de détail qui ne
sont, dans bien des cas, pas membres chez nous. Alors, on a pris la
décision de se concentrer vraiment sur cette partie-là.
Mme
Fournier : O.K. Je
comprends, merci. Aussi, il y a beaucoup de groupes qui nous ont parlé, là, de
la définition de «commerçant», qui
pouvait peut-être poser problème dans la loi. Mais je me demandais ce que vous
en pensiez. La définition telle qu'elle est, est-ce que ça vous convient
en tant qu'association?
M. Benoît (Jean-Luc) : On parle de
quel article?
Mme Fournier : La définition de
«commerçant»...
Des voix : ...
M. Benoît
(Jean-Luc) : Il n'y a pas de
définition de «commerçant»? Bon, c'est clair qu'on ne peut pas être contre
une plus grande clarté dans la réglementation, dans la loi.
Mme
Fournier : O.K. Parfait. Justement, en parlant de clarté, tantôt, vous
disiez... dans votre mémoire, il est écrit : «Une révision de la
Loi sur la protection du consommateur constitue une opportunité de préciser
autant que possible l'intention du législateur.» Donc, pour vous, là, la
réglementation doit être claire et prévisible, car les programmes de fidélisation sont offerts à la clientèle dans une
perspective à long terme. Je me demandais si vous pouviez nous parler des
impacts que ça a pour vous qu'il y ait
autant de choses réservées dans la réglementation, et non pas dans la loi en
tant que telle, de quelle façon ça vous préoccupe plus spécifiquement.
M. Benoît
(Jean-Luc) : Bien, comme
c'est un milieu très compétitif, où les marges bénéficiaires ne sont pas très
élevées, c'est très, très compétitif, puis les détaillants doivent planifier et
prendre des décisions d'affaires en fonction d'un moyen et d'un long terme, alors connaître à
l'avance la réglementation, savoir le plus possible quelles seront les règles
du jeu dans trois ans, quatre ans, cinq ans,
six ans, sept ans, bon, et plus, c'est sûr que ça les aide à prendre leurs
décisions, à ce moment-là, et à développer un modèle d'affaires qui va
leur permettre de se démarquer.
Dans le cas
des programmes de fidélisation, comme je l'ai mentionné tantôt à la ministre,
c'est des programmes qui sont mis en place pour du long terme. Donc,
notre demande, aujourd'hui, c'est : Si vous identifiez clairement que l'intention du législateur, c'est d'aller dans la
direction x, bien, ça serait important de l'écrire dans le projet de loi pour
qu'à ce moment-là on puisse tous savoir où
la réglementation s'en va et que tout le monde puisse, à ce moment-là,
travailler à partir des mêmes règles et des mêmes paramètres.
Mme
Fournier : Très bien. Puis
est-ce que ça pourrait clarifier la situation que vous puissiez avoir les règlements
dès maintenant?
M. Benoît
(Jean-Luc) : Bien, pour
nous, puis, bon, la ministre l'a soulevé tantôt, la loi... Disons que je vais
utiliser le terme «a une plus longue
durée de vie» que le règlement. Le règlement peut changer plus souvent. Et, pour
nous, notre préférence va
définitivement à un éclaircissement. Si on nous dit que l'intention, c'est
d'aller, comme je l'ai dit tantôt, dans
une certaine direction, bien, c'est clair qu'on préférerait que ça soit inscrit
dans la loi, puis que ça soit prévisible, et qu'on puisse prendre des décisions d'affaires. Puis je comprends
qu'il pourra y avoir des révisions, il pourra y avoir des ajustements faits en cours de route, mais,
pour nous, il faut que le maximum soit précisé dans la loi, justement pour
que des décisions soient prises en fonction
d'une réglementation et des paramètres qui sont connus, et qui ne devraient
pas trop changer, pour ce qui est prévisible.
Mme
Fournier : Concernant, là, les points spécifiquement des programmes de
fidélisation, on a entendu, quand même, beaucoup de préoccupations de la
part des consommateurs concernant la possible perte de valeur des points, la dévaluation. Donc, maintenant, on comprend que
ça ne sera pas possible que les points expirent, suite à toute la saga,
aussi, Air Miles, qu'on a connue l'année dernière. Donc, je comprends bien que
les détaillants ont besoin d'avoir un certain
niveau de marge de manoeuvre pour encadrer, là, les différents programmes de
fidélisation. Puis, par exemple, tu sais, c'est bien normal que le
nombre de points, par exemple, que ça prend pour acheter un bien ou un service
peut différer dans le temps, compte tenu de
l'inflation puis de différents autres facteurs. Mais, vous, est-ce que vous
fermeriez totalement la porte à une possibilité que la valeur des points
puisse changer dans le temps ou vous considérez que les dispositions sont les
meilleures comme ça?
M. Lopez (Thierry) : Si je peux
intervenir là-dessus...
Mme Fournier : Oui.
M. Lopez
(Thierry) : Déjà, il faut
clarifier la différence entre les points et la valeur des unités d'usage, de
mesure. Le point en tant que tel,
c'est ce que vous collectez, et puis l'unité, c'est le bénéfice. Dans notre
cas, par exemple, vous faites des achats, chaque fois que vous dépensez un dollar chez Best
Buy, vous avez un point. Et, à un certain moment, vous pouvez convertir ces points-là, d'une part,
en rabais ou cartes-cadeaux, mais, d'autre part, en certains autres bénéfices.
Vous pouvez être invité à participer à un concours pour aller à
l'avant-première d'un film.
Donc, les points, le fait qu'ils n'expirent pas
ou le fait que ce qui est — et
je pense que c'est l'esprit de la loi — accumulé, qui a été dépensé, donc les points
accumulés, le fait de les garder, parfait. Et, si on parle peu, c'est parce
qu'on est dans le sens du consommateur, on
est pour le consommateur, on est pour sa satisfaction. Donc, vous gagnez
un point, vous avez dépensé de l'argent, ce point-là, vous le gardez, puis il
reste.
En revanche,
l'unité d'échange... elle, elle peut être plus volatile. Si c'est une
invitation à l'avant-première d'un film,
bien, comme c'est l'avant-première d'un film, c'est cette soirée-là. Mais ça ne
veut pas dire que Blade Runner, vous allez aller à l'avant-première, qui est jeudi, mais on ne va pas vous
donner... vous ne pouvez pas revenir dans deux semaines en disant : Bien, donnez-moi deux places pour
Blade Runner à tel cinéma. Non, c'était l'avant-première. Donc, c'est
ça, c'est la différence à faire. Et
je pense que c'est une différence importante, mais, absolument, pour les points
emmagasinés, c'est des points que... des dépenses que vous avez faites
et vous gardez ces points-là, aucun problème avec ça.
Mme
Fournier : Super, merci. Puis finalement, j'aimerais savoir un peu
votre opinion sur le fait... Il y a beaucoup de gens qui se demandent si ces points-là, ces unités d'échange ne
devraient pas être des actifs, par exemple, au moment du décès, s'ils ne pourraient pas transférer leurs
points à un conjoint ou, en tout cas, que ce soit disponible dans la loi.
Je me demandais si vous aviez une position à ce sujet-là.
M. Lopez
(Thierry) : Moi, ce que je
peux vous dire sur les points, c'est qu'en fait c'est un programme de... je
peux parler de notre programme, mais
c'est un programme où, quand vous accumulez un certain nombre de points, à
partir de 400 $ d'accumulé, bien
vous avez 400 points, et puis ce 400 points là, il devient une
carte-cadeau de 5 $ qu'on vous envoie directement, de manière
proactive. Donc, vous ne la demandez pas, on vous l'envoie.
Donc, à partir de là, il n'y a pas
d'accumulation supplémentaire qui se fait dans notre cas. Ce qu'il faut comprendre aussi, c'est que c'est un programme
qu'on appelle une carte de fidélité, un programme de fidélité, et les gens
vont, par eux-mêmes, s'abonner à ce
programme-là. Et donc ça veut dire qu'ils sont fidèles à l'ensemble du
programme et qu'ils vont l'utiliser.
Donc, on s'attend à ce que les gens viennent, comme... l'utilisent, ce
programme-là. Mais, dans notre cas,
il n'y a pas vraiment de, comme... on n'est pas Aéroplan, où vous allez comme
attendre cinq ans pour avoir 500 000 points puis faire le tour
du monde.
Mme Fournier : Merci.
• (17 h 10) •
Mme Héroux
(Johanne) : Si je peux
ajouter, Mme la députée, dans le commerce de détail, les comportements
du consommateur sont que, généralement, ils accumulent des points et les
dépensent assez rapidement. Il y a des cas d'exception,
on en a entendu parler, où quelqu'un avait vraiment amassé une somme importante
de points, mais ce sont des exceptions. Les gens les dépensent
généralement au fur et à mesure.
M.
Lopez (Thierry) : Tout à
fait. Et d'ailleurs, avant cette entrevue, j'ai appelé nos gestionnaires de
notre programme de fidélisation pour
avoir plus de détails, sachant que nous, on vend, d'une part, des packs de
batteries à 0,99 $, mais aussi
des télés à 5 000 $, et donc je me
demandais quelle était la proportion de personnes qui gardaient des points pour
des gros achats. Et il se trouve que,
dans l'ensemble, dans la majorité de nos consommateurs, les gens les utilisent
avec des petits montants et puis sur
une base régulière. La façon dont notre programme fonctionne, c'est d'ailleurs
très significatif, c'est des cartes-cadeaux de 5 $, 10 $,
20 $.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède la parole à M. le député de Johnson.
M.
Lamontagne : Merci, M. le Président. Merci. Bienvenue. Pour ce qui
touche le programme de fidélisation, je pense que mes collègues ont couvert le terrain. Moi, il y a un certain
nombre de dispositions dans le projet de loi... j'aurais pensé que ça
puisse vous interpeler; il semble que non, avec les commentaires que vous avez
faits tantôt.
Je vais
juste, quand même, revenir sur une couple de points, puis, si vous me dites
que, finalement, ce n'est pas à l'ordre du jour pour vous aujourd'hui,
il n'y a pas de problème avec ça, mais je veux juste le confirmer.
Tu sais, tout ce qu'on parle, le contrat qui est
conclu à distance, parce que je présume qu'avec vos membres il y a quand même beaucoup de transactions qui se
font par Internet ou... Alors, dans les dispositions de la loi, ce qui vient
toucher, ce qui vient amender le commerce à
distance, les contrats conclus à distance, est-ce qu'il y a des choses qui vous
interpellent là-dedans ou qui...
M. Benoît
(Jean-Luc) : Je vais revenir
à nos grands principes. La priorité, pour nous, c'est la même réglementation
pour tout le monde, la prévisibilité et la plus grande harmonisation possible
pour qu'on puisse demeurer compétitifs.
Vous soulevez
cette question-là, ça me fera plaisir, M. le député, de refaire quelques sons
de cloche chez nous, puis je pourrais vous revenir, si vous voulez, avec
des échos là-dessus, mais ça ne fait pas partie, à ce moment-ci, des éléments
qui ont été soulevés dans les discussions qu'on a eues.
M. Lamontagne : Oui, puis sentez...
Je ne vous mets pas au défi, sentez-vous bien à l'aise, là. C'est juste qu'il y a une opportunité qu'on a sur tout ce qui
touche la publicité, l'encadrement de la publicité. Ce n'est pas un sujet
à aborder... O.K.
C'est bon. O.K. Bien, écoutez, M. le Président, moi, je n'aurai pas d'autre
question, ça va se terminer là. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Picard) : Bon, bien, je remercie Mme Héroux,
M. Benoît et M. Lopez pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Et la
commission ajourne ses travaux au mardi 25 octobre 2017, à 10 heures,
où elle entreprendra un nouveau mandat.
(Fin de la séance à 17 h 13)