(Neuf heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît!
Des voix: ...
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes de la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires -- ce que je m'apprête à faire, d'ailleurs.
La commission est réunie, aujourd'hui, afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait -- Vers un deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ouimet (Marquette) sera remplacé par M. Huot (Vanier); M. Charette (Deux-Montagnes), par M. Traversy (Terrebonne); et Mme Lapointe (Crémazie), par Mme Beaudoin (Rosemont).
Auditions (suite)
Le Président (M. Huot): Merci, Mme la secrétaire. Ce matin, nous recevons quatre groupes. Le premier groupe est déjà en place. Nous recevons, premièrement, le Centre de développement Femmes et Gouvernance et Groupe Femmes, Politique et Démocratie.
Ce sera sans doute Mme Lapointe qui fera la présentation. Donc, vous connaissez les procédures de nos commissions. Donc, je vous demande de vous présenter et de présenter les personnes qui vous accompagnent. Je vous informe par la suite que... que, pour la suite, vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Il y aura un échange avec les parlementaires, de 30 minutes, ensuite. Donc, je vous cède la parole pour 15 minutes.
Centre de développement Femmes et
Gouvernance (CDFG) et Groupe Femmes,
Politique et Démocratie (GFPD)
Mme Lapointe (Esther): Merci, M. le Président. Je m'appelle Esther Lapointe. Je suis la directrice générale du Groupe Femmes, Politique et Démocratie, codirectrice du Centre de développement Femmes et Gouvernance. Je vous présente, à ma droite, Mme Madeleine Moreau, directrice des services aux collectivités, de l'École nationale d'administration publique, et codirectrice du Centre de développement Femmes et Gouvernance; et, à ma gauche, Mme Gaëtane Corriveau, chargée de projets des écoles Femmes et Démocratie, au Groupe Femmes Politique et Démocratie, et rédactrice principale du mémoire. J'aimerais souligner la présence de deux membres de notre conseil d'administration: Mme Natalie Rinfret, professeure à l'ENAP, et M. Michel Gervais.
Je tiens d'abord, en commençant, à remercier le Secrétariat à la condition féminine du Québec de nous avoir invitées à participer à cette commission.
Nous nous apprêtons à répondre à la question n° 6: «Comment accélérer la progression des femmes dans les postes de décision et de pouvoir politique ou économique à tous les paliers, tant dans le secteur public que dans le secteur privé?» C'est une question que nous nous sommes posée, nous-mêmes, il y a plus de 10 ans, et à laquelle nous avons déjà trouvé des pistes de solution et pour laquelle nous travaillons.
Le Groupe Femmes, Politique et Démocratie, qui est récipiendaire des prix Claire-Bonenfant et Condorcet-Aron, a été créé en 1998. C'est un organisme citoyen d'éducation populaire, à but non lucratif, indépendant et non partisan. Sa mission est d'éduquer la population à l'action citoyenne et démocratique, mais en particulier promouvoir et soutenir, par la formation et l'accompagnement, une plus grande participation des femmes à la vie politique.
Dès son départ, le groupe s'est associé à l'École nationale d'administration publique pour la tenue d'un premier colloque où les participantes y exprimeront leur besoin de développer leurs compétences et leur confiance en elles.
Après un certain nombre d'années, on s'est rendu compte que les écoles Femmes et Démocratie, qui avaient vu le jour en 2004, étaient très populaires et, compte tenu qu'elles ne pouvaient accueillir que 25 participantes par année, il y avait un besoin pour en multiplier le nombre.
C'est ainsi qu'en 2007 a été créé le Centre de développement Femmes et Gouvernance, qui est une initiative conjointe du Groupe Femmes, Politique et Démocratie et de l'École nationale d'administration publique, initiative qui a permis de multiplier par quatre le nombre d'écoles dans une année et qui a aussi permis d'offrir des formations à la carte dans le volet Leadership et Participation, ainsi que tout un volet Mentorat et réseautage.
Le centre a formé et soutenu, depuis trois ans, plus de 866 femmes. 33 % d'entre elles se sont présentées à une élection et la moitié ont été élues. Nous y reviendrons un petit peu plus tard.
Dans la partie de l'analyse de notre mémoire, nous tenons à souligner la pertinence de la question: Comment accélérer la progression des femmes dans les instances décisionnelles?, et vous parler un peu de la lenteur du rythme de progression des femmes dans l'accession des lieux de pouvoir. C'est connu et documenté. Malheureusement, la proportion de femmes dans les instances n'évolue pas de façon progressive, linéaire et constante. C'est quelque chose qu'on aurait souhaité, mais ce n'est pas la réalité. Ainsi, si on regarde seulement ce qui se passe au Canada et au Québec, on constate que, pendant la période des années 1993 à 2006, il y a eu une période de stagnation où la représentation des femmes au fédéral se situe à environ 20 %. En 2010, nous n'en sommes qu'à 22,1 %, ce qui place le Canada en 51e place au palmarès de l'Union interparlementaire. Je souligne, en passant, que l'Irak est au 39e rang et les Émirats arabes unis, qui ne sont pourtant pas des modèles, au 49e -- donc, avant le Canada.
Au Québec, le Québec n'est pas répertorié, bien sûr, parce qu'il n'est pas un pays, mais, si on regarde le pourcentage de représentation de femmes ici, à l'Assemblée nationale, le Québec se situe au 26e rang. La décision du premier ministre Jean Charest de nommer un Conseil des ministres paritaire est une décision politique courageuse que l'on salue, tout en... aussi, soulignant l'importance des résultats probants qui découlent de la Loi sur la gouvernance en 2006. Quand on regarde ce qui s'est passé en l'espace de quatre ans, les femmes sont passées de 31 % au conseil d'administration des sociétés d'État à 46 % à la fin de 2010. Je pense que c'est très parlant, ces résultats-là. Et donc réelle volonté des institutions pour faire de la place aux femmes; volonté des femmes de prendre leur place aussi et de s'y préparer.
Au Québec, je dois quand même souligner, on parlait tout à l'heure de la lente progression et qu'il n'y a pas de linéarité, qu'il n'y a pas de continuité, on en a un bel exemple dans la dernière décennie: c'est qu'entre les élections de 2003 et les élections de 2007 il y a eu un recul de 5 % en termes de représentation. En effet, on retrouvait 30 % de femmes à l'Assemblée nationale en 2003, et on est tombées à 25 % aux élections de 2007. Maintenant, ça se situe à 28,8 %, mais on est encore même... du 30 % et du fameux plafond de verre.
**(9 h 40)** Autre chose qui peut nous éclairer quand on pense à la progression des femmes dans un processus dit sans mesures exceptionnelles, processus qu'on s'attendrait normal, processus d'évolution normal, on remarque qu'il s'est passé 20 ans entre le droit de vote des femmes et l'entrée d'une première femme à l'Assemblée nationale et qu'il s'est passé 15 autres années entre la première femme et une seconde... et deuxième et troisième femme. Donc, je pense que l'histoire nous démontre la... l'histoire récente de la démocratie et de la représentation des femmes au Québec nous démontre que la progression est vraiment très lente quand on laisse aller les choses par elles-mêmes.
Au niveau municipal, c'est encore pire que ça. À l'élection de 2009, on se retrouve présentement avec un taux de mairesses de seulement 17 %, ce qui est par contre une augmentation de 3 % par rapport aux élections de 2005. Donc, là, il y a eu quelque chose d'encourageant dans cette augmentation de pourcentage là. Et, en rapport avec les femmes conseillères municipales, l'augmentation se situe à 2 %, ce qui nous a amenées à 28 % de conseillères municipales.
Au Groupe Femmes, Politique et Démocratie, j'aimerais vous dire qu'on pense avoir une petite contribution à l'augmentation des mairesses... en tout cas, puis même des conseillères municipales, parce que je dois vous dire que, depuis 2004... Je vous ai expliqué qu'on a fait une école par année et, depuis la création du centre, plus de une école, donc environ une dizaine d'écoles Femmes et Démocratie. Toutes ne portaient pas, bien sûr, sur le palier municipal, certaines d'entre elles s'adressaient à tous les paliers de gouvernement, que ce soit scolaire, municipal, fédéral et provincial. Il reste que les écoles qui ont été particulières au niveau municipal, de ces écoles-là, 71 participantes se sont présentées aux élections municipales en 2009: 16 d'entre elles à la mairie, 12 ont été élues; 55 d'entre elles à un poste de conseillère municipale, 27 ont été élues. Ce sont des résultats positifs qui nous encouragent à poursuivre notre travail, de concert avec tous nos partenaires et alliés précieux.
On ne peut passer sous silence aussi la sous-représentation des femmes dans les conseils d'administration des entreprises, au Québec comme au Canada. Je veux juste rappeler que, le 19 janvier, le Conseil du statut de la femme justement a rappelé que, sur les 100 plus grandes sociétés commerciales au Québec, il y a seulement 15,8 % de femmes que l'on retrouve aux conseils d'administration. Donc, là aussi, il y a du travail à faire. Pour y parvenir, ça prend une réelle volonté politique, et, nous, ce qu'on vous propose, dans le fond, c'est deux types d'interventions: des interventions pour ajuster les institutions politiques de façon à garantir une démocratie représentative de la composition fondamentale hommes-femmes; et des interventions auprès des femmes pour les soutenir et les accompagner dans leur désir de carrière politique.
Ce qui m'amène aux deux chantiers qu'on vous a présentés dans notre mémoire: un chantier, donc, pour ajuster les institutions politiques qui, comme je le disais, relèvent du gouvernement. Quand on regarde la démocratie à l'Assemblée nationale, on se rend compte que le mode de scrutin uninominal à un tour n'offre aucune garantie quant à une représentation égalitaire. Donc, ce qu'on recommande... notre première recommandation, c'est d'inscrire dans la Loi électorale un principe de zone de mixité égalitaire 40-60 qui impose que toutes les instances démocratiques soient composées de représentants des deux sexes, minimalement à 40 % et ne dépassant pas 60 %. Pour y arriver, ça prend aussi, inscrits dans la Loi électorale, des quotas comme mesure temporaire de rattrapage. Je viens de vous décrire un peu la lente progression que ça prend. Bien, selon des experts, là, pour avoir la parité, si on laisse aller les choses, ça n'irait pas avant 2040. C'est un peu trop long à notre goût.
Il y aurait aussi comme troisième représentation d'obliger les partis, dès les prochaines élections, à présenter autant de femmes que d'hommes, en lien avec le principe de la zone de mixité. La parité: des fois, quand on parle de parité, les gens pensent 50 %. Puis 50 %, c'est vrai que c'est difficile à atteindre et à maintenir, mais une zone de parité de 40-60 nous apparaît vraiment plus acceptable et plus facile d'application, surtout.
Je voulais vous dire que les pays qui ont adopté des quotas... parmi les pays qui ont adopté des quotas, je pense, au cours des 10 dernières années, vous avez l'Argentine, qui se situe au 12e rang dans la liste, là, des pays dont je vous ai parlé tout à l'heure, le Burundi, qui est au 21e rang, la Guyane, au 24e, et le Népal, au 17e. Ce sont tous des pays qui sont en avant même du Québec qui, je vous rappelle, se situe au 26e rang.
Concernant la démocratie municipale, les données sur la parité vraiment indiquent l'existence d'un grand nombre de conseils municipaux exclusivement masculins et, comme les chiffres que je vous ai cités tout à l'heure, 17 % de mairesses, 28 % de conseillères. Vous voyez qu'on est loin de la parité. Donc, encore là, nous avons des propositions, des recommandations très claires à vous faire pour accélérer la progression des femmes au plan municipal.
D'une part, sensibilisation en rendant publique une politique régionale qui reconnaît l'urgence que les femmes soient partie prenante de la démocratie municipale et du développement local et régional; assortir cette politique d'une stratégie incluant des mesures incitatives et contraignantes afin d'atteindre la parité dans les conseils municipaux d'ici 10 ans; limiter à deux les mandats électoraux successifs à un même poste au palier municipal pour accélérer l'élection de femmes et favoriser le renouvellement des ressources démocratiques; maintenir le programme À égalité pour décider; reconduire le mandat de la Table des partenaires femmes et politique municipale.
Comme le temps s'écoule, je vais passer au deuxième chantier, qui est celui des organismes de terrain. Premier chantier: le gouvernement, donc, fait de la place aux femmes. Dans le deuxième chantier, nous, on dit: Les organismes de terrain, dont le Groupe Femmes, Politique et Démocratie, le Centre de développement Femmes et Gouvernance, nous allons nous occuper d'accompagner et de soutenir les femmes désireuses de les occuper, ces postes-là qui se libéreraient. Comment? En les formant, en les accompagnant, ce que nous faisons depuis maintenant une dizaine d'années.
Je vous rappelle, en terminant: 284 femmes ont participé aux écoles Femmes et démocratie. Donc, oui, les femmes sont intéressées par la politique et, quand elles découvrent la politique, elles en sont passionnées. Je pense que les représentantes ici, nos élues ici, autour de la table, pourraient en témoigner.
Ensuite, je vous ai dit que, de ces femmes-là, 33 % se sont présentées à une élection. Et je vous rappelle les chiffres de tout à l'heure: 71 participantes pour l'élection municipale, 16 aux postes de mairesses, 12 élues; 55 aux postes de conseillères municipales, 27 élues.
Donc, l'importance, dans le fond, si on veut accélérer les choses, la première chose, c'est la volonté politique de prendre les mesures qui s'imposent, et, la deuxième chose, c'est de continuer à soutenir les actions des groupes de terrain et des organismes par un financement approprié.
Donc, oui, nous avons écrit, dans notre mémoire, l'importance du deuxième plan d'action. Je vous remercie.
Le Président (M. Huot): Merci. Merci beaucoup, Mme Lapointe. Je reconnais maintenant la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine pour un bloc de 15 minutes.
Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Alors, je veux saluer, ce matin, mes collègues d'en face. Bon matin, bonne journée. On a encore une belle journée, devant nous, à entendre parler de condition féminine et d'égalité entre les hommes et les femmes.
Je me réjouis de voir, ce matin, que nous sommes huit élus puis nous avons la parité autour de la table. Nous avons la parité, alors c'est déjà... Ce matin, c'est un bon signe. Mais vous avez raison: c'est un sujet, moi, enfin, qui me passionne, là, l'implication des femmes dans les sphères... dans les sphères décisionnelles et où il y a des élections, mais aussi les conseils d'administration des entreprises privées. Ça aussi, je trouve que c'est bien important. Et c'est un sujet que je trouve fort important, et je pense qu'il y a plusieurs explications évidemment pour faire en sorte qu'on puisse voir pourquoi les femmes s'impliquent moins en politique que les hommes puis pourquoi c'est si lent. Vous avez une école qui est formidable. Moi, les femmes que je connais qui ont fait l'école disent que c'est une expérience extraordinaire. Elles en ressortent avec quelque chose de fantastique qui va leur servir pendant toute leur vie. Même si elles ne se présentent pas dans des instances décisionnelles, ça va leur servir, cette formation-là. Alors, bravo pour ce que vous faites, puis je pense qu'on a prouvé récemment que nous vous faisions confiance pour la suite des choses.
Vous faites un travail, aussi, dans les communautés autochtones. Vous êtes allées dans le Grand Nord, chez les Inuits, et... Il y a un article -- d'ailleurs, j'en ai parlé hier -- dans le dernier magazine Vita, qui est écrit par Pascale Navarro, qui est vraiment intéressant puis très beau, très intéressant à lire.
**(9 h 50)** Moi, je pense que, parmi les explications, il y a aussi le fait que, dans la place des... dans les médias, la joute politique est décrite souvent comme un match de hockey ou un match de football. Et ce n'est pas... C'est comme s'il fallait que ça soit de la bataille tout le temps puis que... et je pense que ça, ça peut être rébarbatif pour les femmes, parce que ce n'est peut-être pas dans la nature nécessairement d'être toujours en mode... avec un vocabulaire de joueur de hockey, là. Enfin.
Puis aussi je vais peut-être me faire tirer des tomates, mais je pense aussi que les journalistes qui s'intéressent aux questions politiques sont encore majoritairement des hommes. Si vous regardez ici, la Tribune de la presse, ils n'ont pas la parité puis je ne pense pas qu'ils vont l'atteindre bientôt, puis c'est... Alors, encore là, il y a un travail à faire. Donc, quand la... Je pense qu'il y a comme un... c'est comme un cercle, là, comment ça peut... Tu sais, s'il y a une couverture qui est aussi faite par plus de femmes, bien, ça va peut-être intéresser davantage de femmes, et tout ça.
Et, dans le passé, dans mon ancienne vie, à Radio-Canada, il y a 15 ans, il y avait un poste de reporter pour la condition féminine. On ne voit plus ça, aujourd'hui. Mais ce n'était pas un... ce n'était pas faire de... parler de sujets de mode, là, c'était vraiment un reporter qui faisait des dossiers de condition féminine. Alors, vous pouviez avoir, au moins une fois ou deux fois par semaine, au Téléjournal, un reportage qui touchait la condition féminine. On ne voit plus cela. Alors, on délaisse aussi ces questions-là, je pense, dans les médias, puis que ce sont des questions fort importantes. Bon, ça, c'est mon éditorial.
Maintenant, pour atteindre cette... amener plus de femmes dans les... à s'intéresser mais aussi à poser le geste, à faire le saut, qui est un saut très difficile à faire, c'est une décision qui est vraiment difficile, vous avez l'école, mais quel serait... même si vous arrivez avec des mesures incitatives où vous parlez, là, de comment les partis devraient... mais ça ne va pas nécessairement intéresser plus de femmes. Comprenez-vous ce que je veux dire? Même si la Loi électorale dit ça, comment on peut encore dire: Bien, il faut aussi... il faut que ça vienne aussi du fond, là.
Le Président (M. Huot): Mme Lapointe. Oui, la parole est à vous.
Mme Lapointe (Esther): Écoutez, premièrement, vous l'avez dit, je pense que, culturellement, ici même, au Québec, on -- et au Canada -- on s'intéresse peut-être moins que dans d'autres pays à la politique, d'une part. Et puis, dès le secondaire, les jeunes... il y a une certaine formation mais que, nous, nous jugeons insuffisante. Donc, il y aurait vraiment, vraiment des mesures à prendre là pour éduquer les jeunes dès le départ, là, garçons et filles. Déjà là, c'est important.
Et, par la suite, des modèles de femmes. Plus il va y avoir de femmes dans les instances décisionnelles, plus on va les voir... Comme vous disiez tout à l'heure, Mme St-Pierre, la tribune parlementaire, s'il y a peu de journalistes ou qu'il n'y a pas la parité, bien, éventuellement, ça pourrait... s'il y en avait plus, peut-être qu'il y a plus de femmes qui s'intéresseraient au sujet de la politique.
Par expérience, nous, ce qu'on remarque, c'est qu'à partir du moment où les femmes comprennent l'importance de la politique qui, de toute façon, gère tous les aspects de notre vie, elles s'y intéressent, et elles commencent à trouver ça passionnant, de la minute qu'elles s'y engagent le moindrement. Et l'expérience que, nous, on a, c'est que, plus elles en entendent parler, et plus elles sont présentes, et plus elles viennent à nous. Nous, les écoles, là, on ne fait pas de publicité, c'est du bouche à oreille, puis on ne répond pas à la demande.
De toute façon, il ne faut pas s'attendre à ce que la majorité ou 50 % des filles s'intéressent nécessairement à la politique. Ce n'est pas le cas en médecine, ce n'est pas le cas pour le droit, ce n'est pas le cas pour d'autres professions, non plus. Mais je peux vous assurer qu'on ne peut pas s'intéresser à quelque chose qu'on ne connaît pas. Ça fait que, plus on va entendre parler de la politique puis plus on va donner la chance aux jeunes de s'approcher des institutions et de... même d'avoir, jusqu'à un certain point, des simulations... L'importance des simulations fait en sorte que tu comprends mieux ce qui se passe, tu comprends mieux comment ça se vit. Et, pour ma part, je peux vous dire que l'intérêt est là.
Moi, en tout cas, j'ai milité pendant plusieurs années et, dans mes activités, je ne faisais que... On organisait des brunchs et on invitait des politiciennes à venir parler justement à nos amies, à nos mères, à nos voisines, et, je veux dire, ça changeait complètement la perception que les femmes avaient de la politique. Ça fait que ça, là, c'est un aspect important aussi.
Mme St-Pierre: Est-ce qu'on sait si les femmes votent plus que les hommes ou si... Le taux de participation dans une élection pour aller voter, est-ce que c'est sensiblement la même chose? Est-ce qu'il y a une différence entre les femmes et les hommes?
Mme Lapointe (Esther): Écoutez, on n'a pas... on ne s'est pas préparées à cette question-là, mais, de mémoire, pour avoir vu déjà, il me semble, des rapports du DGEQ, là, il me semble que c'est assez semblable. Là où le bât blesse, c'est chez les jeunes. Mais là, garçons ou filles, là, ça ne vote pas fort, là.
Mme St-Pierre: Mais il y a quand même, là aussi, effectivement une question...
Mme Lapointe (Esther): ...dire par contre que les études démontrent, notamment Manon Tremblay en a parlé -- c'est une chercheure de l'Université d'Ottawa qui a fait beaucoup de recherches entre autres sur la place des femmes en politique -- les études démontrent cependant que la population n'est pas sexiste et qu'à partir du moment où il y a des candidates elles ont autant de chances que les hommes d'être élues.
Mme St-Pierre: Je reviens à la question: Est-ce que... Vous proposez des changements à la Loi électorale. En quoi ça changerait... Même si c'est écrit dans une loi, en quoi ça changerait cette volonté de s'impliquer en politique?
Mme Lapointe (Esther): Bien, regardez, la plus belle démonstration, c'est la loi sur les sociétés d'État. Ça a changé. Moi, ce que je vous dis, c'est: Faites-en, de la place, aux femmes, vous allez voir, elles vont les occuper. Et ce que je vous dis, c'est que, nous, les groupes de terrain, les universités... Regardez, les universités sont pleines de femmes dans le moment. Il y a plus de femmes qui... qui... -- voyons! -- obtiennent un baccalauréat à l'heure actuelle, je pense... Puis d'ailleurs c'est le rapport du Secrétariat à la condition féminine: si je me rappelle bien, c'est 18 % de femmes pour 17 % d'hommes qui obtiennent un bac universitaire. Donc, les femmes, elles y vont, là. Elles prennent leur place. Mais il faut leur en faire. Puis, tout à l'heure, Mme St-Pierre, justement vous parliez du facteur hockey, hockey, bataille, et tout. Oui, c'est vrai que les femmes n'aiment pas avoir à se battre pour prendre leur place. À partir du moment où elles en ont, de la place, elles vont y aller.
Mme St-Pierre: Alors, moi, je pense que mes collègues ont des questions à poser qui vont certainement être fort intéressantes.
Le Président (M. Huot): Oui. M. le député de Lévis.
M. Lehouillier: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, d'abord, je voudrais vous remercier pour votre mémoire et surtout pour les prix que vous avez gagnés, qui sont mérités. Parce que j'ai eu l'occasion de faire de la politique municipale pendant une vingtaine d'années, et donc je suis à même... comme chef d'une équipe, je suis à même de vous dire qu'il y a eu beaucoup... il y a actuellement, sur le terrain, beaucoup de tentatives, dans les partis politiques municipaux, pour essayer d'aller chercher une parité au niveau des représentations. Nous, on l'a tenté, on a presque réussi, mais il nous manquait encore quelques points sur les 10 personnes qu'on avait à recruter.
C'est loin d'être facile, sauf que la question que je me pose... Parce que je sais qu'il se fait beaucoup d'actions sur le terrain, vous avez raison là-dessus. Et surtout, dans le cadre des campagnes électorales, j'ai participé à des rencontres avec vos groupes, et c'est vraiment très intéressant parce que là on fait une présentation, les candidats sont là, les candidats à la mairie sont là, font une présentation, c'est très intéressant. Et on a pu recruter deux personnes justement dans ce cadre-là.
Mais ça reste excessivement difficile, dans le sens, souvent, c'est qu'on sait, quand on s'embarque dans une campagne électorale, qu'il y a beaucoup de porte-à-porte à faire; c'est presque, pour les candidats à des postes d'échevins ou de conseillers municipaux, la seule stratégie parce qu'ils ne sont pas couverts par les médias locaux, c'est uniquement les candidats à la mairie. Donc, ça veut dire quatre soirs par semaine, ça veut dire le samedi, le dimanche, et là tu fais du porte-à-porte. Alors donc, c'est donc dire que, nous, on a eu beaucoup de désistements à cause de ça, parce qu'il faut dire quand même aux gens, quand ils s'embarquent dans une campagne électorale, à quoi il faut s'attendre, tu sais? Alors là, je parle d'une grosse municipalité, bien sûr, où il peut y avoir 10 000, 12 000 personnes par quartier. Alors donc, ça vous donne une idée quand même de ce que ça exige.
Cela étant dit, ma question est la suivante. C'est que, malgré tout ça, hier puis dans les rencontres qu'on a jusqu'à maintenant, on dit qu'au fond, au-delà des lois et de ces éléments-là, tant et aussi longtemps que l'égalité de fait ne sera pas présente, ça va rester difficile, je pense que la ministre en parlait tantôt, alors... et que ça devient excessivement difficile dans le sens suivant, c'est que c'est les rôles sociaux qui sont le problème. Parce que, nous, les principaux désistements, quand les femmes nous disaient: Bien, finalement, je n'embarquerai pas, c'est à cause des rôles sociaux: il faut que je m'occupe des enfants à la maison, il faut que je m'occupe de ceci, de cela. Et donc ça devient extrêmement difficile.
Alors, ma question est la suivante: Avons-nous vraiment fait le plein par rapport à ça? Et ne devrait-on pas aller davantage dans un deuxième plan d'action? D'ailleurs, c'est la problématique principale du deuxième plan d'action qui a été soulevée. Un des grands défis à relever, c'est de modifier ces rôles sociaux là. Alors, ne devrait-on pas jouer davantage là? Et en même temps ne devrait-on pas appuyer davantage vos organisations justement sur le terrain pour changer ces attitudes? Parce que vous dites que, lorsque vous agissez, il y a un certain résultat. Alors, c'est un peu ça, ma question par rapport à vos recommandations. Voilà.
**(10 heures)**Mme Lapointe (Esther): M. Lehouillier, vous avez bien raison. En fait, ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile, la politique municipale. Ce n'est pas facile pour les hommes non plus. Ça l'est d'autant plus, difficile, pour les femmes, parce que... justement en raison des rôles sociaux.
Mais je vais me permettre quand même de vous souligner les résultats de l'élection 2009. Nous avons eu la chance d'avoir accès à l'analyse des résultats que le ministère des Affaires municipales a réalisée en novembre dernier, et la bonne nouvelle dans ça, c'est que c'est dans le groupe des 18-34 ans qu'il y a la plus forte augmentation de candidatures chez les filles. Et l'autre bonne nouvelle, c'est que les filles, elles ne se présentent pas à un poste de conseillère, elles vont tout de suite à la mairie. Elles visent la mairie.
Donc, vous voyez, il y a des changements. Il y a des changements de mentalité. Vous savez, vous parlez de la politique municipale puis du porte-à-porte, mais aujourd'hui, avec Twitter puis Facebook, j'ai l'impression que ça va changer aussi, là. Il faut regarder par en avant puis, vous savez, il faut trouver... il faut être inventif, il faut être créatif. Vous nous demandez à nous, aux groupes, comment est-ce qu'on peut l'être; bien, on vous dit vers quoi aller. Puis il y a des mesures qui fonctionnent. Mais, s'il n'y a pas de réelle volonté politique, ces mesures-là, c'est sûr que personne ne va les adopter puis, dans 25 ans, on va encore parler, vous allez nous réinviter pour... peut-être pas moi mais d'autres pour parler encore de la question. Je pense qu'on les a. On le sait, qu'est-ce qu'il faut faire.
Puis, nous, on se contente de vous parler de la question 6, mais j'ai assisté -- et nous allons assister aujourd'hui aussi -- aux présentations d'autres groupes. C'est certain qu'il faut changer la... en fait, les modèles sociaux. La socialisation des filles et des garçons est différente. Les filles sont éduquées pour s'occuper de la sphère privée, tandis que les garçons le sont plus pour la sphère publique. Mais ça aussi, c'est en train de changer. Donc, tout ça se fait de pair et ça avance tranquillement de pair. Mais, à un moment donné, si on veut faire un bond en avant puis qu'on veut aller plus vite, il faut prendre les mesures.
M. Lehouillier: ...il y a quand même des avancées intéressantes qui se font, là, sur... C'est ça.
Mme Lapointe (Esther): Bien, il y a des... oui, c'est ce que je vous dis, là. Il y a eu une avancée. La roue a commencé...
M. Lehouillier: À tourner. O.K.
Mme Lapointe (Esther): ...à tourner un petit peu. Ce n'est pas le temps de lâcher.
M. Lehouillier: Super! Merci.
Le Président (M. Huot): Merci. Ça complète l'échange avec la partie ministérielle. Je reconnais maintenant la députée de Rosemont, porte-parole en matière... de l'opposition officielle en matière de laïcité et de condition féminine. La parole est à vous pour un bloc de 15 minutes.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Mesdames, bonjour. Moi, ma première question porterait sur ces comparaisons internationales que vous avez faites. Vous avez parlé de l'Argentine, du Burundi, du Népal, mais qu'en est-il des pays nordiques? J'avais toujours cru et pensé que les pays nordiques avaient atteint vraiment en tout cas une certaine parité, plus tôt que d'autres pays d'ailleurs, plus rapidement et plus tôt que d'autres pays. Je pense à la Norvège, bien sûr, avec Mme Brundtland, mais aussi, là, dans le moment est-ce que ce n'est pas en Islande, en Finlande? Bon. Mais... Et vous n'en avez pas parlé. Alors, pourquoi? Et comment ces pays-là... En fait, bon, est-ce que l'Argentine, ceux que vous avez nommés, est-ce qu'ils ont inscrit dans leurs lois ce que vous proposez? Et puis est-ce que les pays nordiques avaient procédé aussi de la même façon, ou est-ce que tout ça s'est fait naturellement ailleurs, ou est-ce qu'il a fallu aider justement la nature pour que cette parité, en tout cas, on s'en rapproche ailleurs?
Mme Lapointe (Esther): Vous avez raison, Mme Beaudoin, tous les pays scandinaves sont avant le Québec: la Suède est en deuxième -- je vais vous donner ça; l'Islande est en cinquième, au cinquième rang; la Finlande, au septième; la Norvège, au huitième; et le Danemark, au 13e rang. Curieusement, ils n'ont pas de quota, mais ils n'en ont pas parce que, dans leurs cultures, les filles sont associées aux garçons, à la vie publique dès leur jeune âge. Donc, on parle d'une situation complètement différente de celle d'ici.
Là, écoutez, je ne suis pas une spécialiste, je ne pourrais pas vous en parler abondamment, mais je peux vous dire, si ça vous intéresse, que Manon Tremblay, dans son livre 100 questions sur les femmes et la politique, y répond, à ces questions-là. Avec le temps qui nous était accordé, de toute façon, je ne pouvais pas étoffer davantage ça. Mais ce que M. Lehouillier soulignait tout à l'heure... c'est-à-dire les rôles sociaux ont une importance fondamentale dans ça.
Quant aux pays qui ont adopté des quotas, justement l'Argentine, bien, écoutez, on peut s'entendre que c'est assez machiste, n'est-ce pas, mais ça a donné des résultats. Et je vous rappelle que l'Argentine est au -- voyons, je l'avais tantôt -- 12e rang. Donc, c'est certain qu'ils ont eu une volonté de corriger une situation. Puis ils ont tenu compte, eux autres aussi, de leur culture, puis ils se sont dit: Si on laisse aller les choses, bien, peut-être que ça va être dans 100 ans, dans leur cas.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, merci, M. le Président. Ma deuxième question, c'est que je suis un peu étonnée que vous n'ayez pas parlé du mode de scrutin du tout. Est-ce parce que vous pensez que le mode de scrutin -- bien, vous l'avez dit, je pense, dans votre présentation -- ne favorise pas quand même les choses? Mais est-ce que vous pensez qu'il faut changer de mode de scrutin en même temps que l'on inclut des quotas?
Mme Lapointe (Esther): Le mode de scrutin uninominal à un tour, c'est certain que ça a fait la preuve que ça ne fonctionne pas. Bon, nous, on ne s'est pas prononcés sur le mode de scrutin proportionnel, tout simplement parce que, écoutez, ce n'est pas notre champ d'action. De toute manière, nous, on travaille à envoyer des femmes dans les instances décisionnelles. Dans les circonstances actuelles, on fait le plus qu'on peut. Ce qu'on vous dit, c'est qu'on essaie de vous faire des recommandations pour nous aider dans ce sens-là.
Et, le mode de scrutin proportionnel, je pense qu'il y a eu... vous en avez entendu parler à de nombreuses reprises ici. Autant le gouvernement du Parti québécois que le gouvernement libéral s'est penché sur la question, il y a eu des tournées du Québec, et on sait, là aussi, vers où on devrait aller. Et on sait aussi que ça demande la volonté politique.
Bon, écoutez, on ne peut pas vous en dire plus, mais effectivement que le scrutin proportionnel, ça donne une chance. Puis ça aussi, c'est fort bien documenté.
**(10 h 10)**Mme Beaudoin (Rosemont): Parce qu'effectivement, quand on présente des candidates dans les circonscriptions telles qu'on les connaît, disons les 125 aujourd'hui, on peut dire: On va présenter autant de femmes que d'hommes, mais vous savez que les bonnes circonscriptions sont souvent très contestées par des conventions, par... Bon. Il y a toute une façon de procéder dans les différents partis. Alors donc, c'est évident que, à moins de la proportionnelle intégrale, où on dit: Il y a une femme, un homme, une femme, un homme, etc., là, on est à peu près certain de qui sera élu. Mais, dans le système d'aujourd'hui... Et c'est une des difficultés, parce que, dans les bonnes circonscriptions, il peut y avoir des grosses batailles. Et puis là est-ce que les femmes ont envie justement, deux ans avant les élections, de se mettre à l'ouvrage et puis de faire tout ce que ça nécessite pour gagner ces fameuses conventions, à moins d'être désigné par le chef du parti, ce qui n'est pas toujours évident, comme vous imaginez bien, et non seulement qui n'est pas toujours évident, mais qui est vraiment exceptionnel dans un sens, sinon en tout cas au Parti québécois. Rarement fait, rarement réalisé. Alors, c'est sûr que c'est un vrai problème.
Moi, ce que j'aime beaucoup en tout cas dans votre mémoire, c'est cette idée d'inscrire dans la Loi électorale le principe de cette zone de mixité égalitaire. C'est un concept qui est certainement très intéressant, parce que justement ce n'est pas 50-50 mais c'est une zone. Et on sait que, comme vous le dites, il y a un plafond de verre. Le 30 %, on a beaucoup de difficultés à l'atteindre, même au Québec. C'est quand même incroyable dans un pays où on entend depuis quelques jours tous ces groupes qui nous disent: Il reste beaucoup, beaucoup de choses à faire, mais qui commencent toujours en nous disant quand même: Le Québec, sur le plan international, en général, a une excellente réputation en ce qui concerne, disons, la condition féminine ou l'égalité hommes-femmes. Malgré tout, là, ça peut stagner, ça peut reculer. Il n'y a jamais rien d'acquis. Il y a même le droit à l'avortement qu'on pensait, je veux dire, réglé; on voit qu'à Ottawa il y a des tentations, sinon des tentatives pour remettre ça en cause. Alors... Mais quand même, quand on se promène à l'étranger... Sauf effectivement, là, sur cette question-là, où, là, on n'a pas vraiment de quoi pavoiser. Au 26e rang, ce n'est pas génial. Alors, je pense qu'il y a, dans votre proposition, quelque chose de très intéressant sur lequel on devra en effet se pencher.
Moi, personnellement, je l'ai déjà dit ici, mais je suis minoritaire dans mon parti, dissidente, en ce qui me concerne, au Parti québécois, mais, moi, je crois aussi qu'il faut, ne serait-ce que temporairement, des quotas, parce qu'on n'y arrivera pas. C'est aussi simple que ça, là, je veux dire, on le voit. Et puis, quand ça a reculé en 2007, bien là, je veux dire, on a été comme saisis, en se disant: Mais mon Dieu, on peut... non seulement il n'y a pas de progression linéaire, comme vous dites, mais on peut, à certains moments, reculer.
Alors, est-ce que... Et là je vais poser une question qui est terrible et puis je m'en rends compte, mais je la pose quand même: Est-ce que vous pensez que les partis plus à droite, disons, je pense au Parti conservateur, bien sûr, à Ottawa, parce que ça... On voit, là, les politiques de droite, qu'est-ce que c'est, là. Si on se posait la question, là, on a juste à regarder à Ottawa puis on comprend c'est quoi, des politiques de droite. Et ici, en 2007, bon, l'ADQ avait fait quand même une percée importante. Est-ce que vous pensez qu'il y a une relation ou qu'il n'y en a pas, que, dans le fond, malgré ce que je viens de dire là, il n'y a pas de corrélation entre la présentation donc d'un certain nombre de femmes ou d'une représentation féminine dans les partis qui sont plus à droite et qui s'assument comme tels, là? Ce n'est pas... Tu sais, c'est la démocratie, il faut effectivement... Nous, avec nos amis d'en face, on a quand même certaines différences qui sont très assumées de part et d'autre, et puis c'est la même chose, bien sûr, à Ottawa. Mais est-ce que... Là, là-dessus, y a-t-il une relation ou il n'y en a pas?
Mme Lapointe (Esther): Je ne comprends pas bien votre question, Mme Beaudoin, je m'excuse. Est-ce que vous dites...
Mme Beaudoin (Rosemont): ...quand on est un parti de gauche, est-ce qu'on va avoir plus tendance... Regardez, regardez Québec solidaire, ils ont même... ils ont dit: On est un parti féministe, on est un parti de gauche et puis on est tellement féministes qu'on a deux chefs. Alors donc, on a un homme et une femme, parce que la parité, ça va jusque-là. Puis la gauche, elle s'assume puis elle dit: Ça va jusqu'à avoir des cochefs, un homme et une femme, et puis bon, etc. Bon. Et puis par ailleurs, des partis de droite, que ce soit le Parti conservateur -- je n'ai pas fait les calculs -- et l'ADQ, etc., est-ce qu'il y a une relation entre vouloir justement, être déterminé... Parce que, vous l'avez dit, c'est la volonté politique qui compte beaucoup dans les partis politiques. À part le fait du travail remarquable que vous faites pour intéresser les femmes, eh bien, il faut à un moment donné qu'elles fassent... qu'elles passent à l'acte, quoi, qu'elles fassent le geste, qu'elles posent le geste de se présenter une fois que vous les avez bien convaincues et fait découvert les beautés, les vertus et le plaisir aussi de faire de la politique. Alors, dans le fond, je me pose un peu cette question-là parce que je me dis: Bon, bien, ça n'avance pas comme on voudrait et ça a même eu... on a même connu certains reculs et à Ottawa et à Québec.
Mme Lapointe (Esther): Nous, notre organisme est non partisan, donc on ne fait pas ce genre de comparaison là. Mais je peux vous dire que, si on a fait des recommandations touchant les partis politiques, c'est qu'on pense qu'ils sont responsables en grande partie de la situation au moment, entre autres, justement du choix des candidates et des candidats.
Et là je vais... je me rappelle juste d'un résultat de l'élection, de la dernière élection fédérale, où j'avais vu dans... je pense que c'était dans le Globe and Mail où l'analyste avait remarqué que le Bloc québécois avait présenté moins de femmes que d'autres partis mais des femmes dans des comtés gagnants. Et, en termes de proportion, il avait fait élire plus de femmes, parce que les femmes étaient dans des circonscriptions gagnantes. Et vous en avez... vous l'avez souligné tout à l'heure, Mme Beaudoin. Ça, c'est sûr que c'est très important.
Mais, à partir du moment où il y aura volonté dans tous les partis d'avoir autant de femmes que d'hommes et de peut-être aussi répartir les comtés gagnants entre les femmes et les hommes, là... En tout cas, je sais que ce n'est pas tout le temps comme ça, parce que les candidats ne sont pas toujours... ne sont pas seulement désignés, ils peuvent être élus. Mais ça, côté élection, je peux vous garantir que, nous, on accueille à nos écoles des femmes qui sont prêtes à mettre deux ans pour se préparer à leurs élections.
Ça aussi, un facteur très intéressant: des élections à date fixe. Les élections à date fixe, ça permet aux femmes de se préparer. Les femmes ont besoin de temps. Elles ont besoin de temps pour s'assurer que leurs familles, tout le monde est bien autour d'elles malgré leur désir de s'engager en politique. Et les élections municipales, nous-mêmes, les groupes de terrain, c'est beaucoup plus facile pour nous de travailler à accompagner et soutenir les femmes, parce qu'on sait justement à quel moment est l'élection. Ça aussi, on ne l'a pas mis dans notre mémoire, mais, moi, personnellement, ça fait des années que j'y pense, et c'est vraiment une mesure qui aurait sûrement un impact sur la participation des femmes, parce que les femmes sont prêtes à prendre le temps qu'il faut pour le faire, le combat électoral.
Le Président (M. Huot): Mme Corriveau, vous vouliez compléter, je pense.
Mme Corriveau (Gaëtane): Très simplement, pour répondre à votre question, Mme Beaudoin, sur l'idéologie de droite par rapport à celle de gauche, que c'est une question qui commence à être étudiée. C'est une hypothèse de travail qui tend à être confirmée. Et Manon Tremblay a fait l'étude, par exemple, du gouvernement ontarien de Mike Harris et a également regardé ce qui s'est passé ici, au Québec. Donc, les études sont en place, et, dans le temps, on arrivera sûrement vers une conclusion, une confirmation ou une infirmation de votre hypothèse.
Le Président (M. Huot): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, il reste 1 min 30 s.
Mme Poirier: Merci. Écoutez, ça va être très court, juste une petite question. Vous parlez d'arriver à une allocation dédiée au recrutement, à l'accueil, l'accompagnement. Durant la période électorale, les femmes ont des dépenses supplémentaires à assumer. Est-ce que vous auriez des recommandations à faire pour peut-être modifier la Loi électorale pour que, je ne sais pas, moi, les frais de garde, par exemple, puissent être une dépense électorale ou d'autres dépenses mais qui sont reliées, qui sont reliées plus au côté féminin, dans le fond, et qui favoriserait justement? Parce que la situation économique des femmes fait... est aussi un frein à leur candidature. Alors, j'aimerais... on n'a pas beaucoup de temps, donc j'aimerais vous entendre rapidement.
Mme Lapointe (Esther): Bien, écoutez, je pense que, lors de la première journée d'auditions, à laquelle j'ai assisté, il a été beaucoup question d'analyse différenciée selon les sexes. Si cette... Si l'ADS était appliquée à la Loi électorale, je pense que ça... on apporterait certains correctifs, dont ce que vous proposez peut-être.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Ça complète l'échange. Donc, Mme Esther Lapointe, Mme Madeleine Moreau, Mme Gaëtane Corriveau du Centre de développement Femmes et Gouvernance et Groupe Femmes, Politique et Démocratie, merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
J'invite les représentants du Comité de la condition féminine de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec à prendre place. Je suspends quelques instants les travaux de la commission.
(Suspension de la séance à 10 h 18)
(Reprise à 10 h 22)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons les travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous recevons le Comité de la condition féminine de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Ce sera sans doute M. Boyer qui fera la présentation.
Donc, vous connaissez bien le fonctionnement de nos commissions parlementaires: vous disposez de 15 minutes pour faire la présentation. Évidemment, en commençant, je vous demande de bien vous identifier et de présenter les personnes qui vous accompagnent. La parole est à vous pour 15 minutes.
Comité de la condition féminine
de la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (CCF-FTQ)
M. Boyer (Daniel): Alors, bonjour. Merci. Merci de nous accueillir aujourd'hui. Je suis accompagné à ma droite de Louise Mercier, qui est vice-présidente à la FTQ dans le dossier des femmes, et j'ai à ma gauche Carole Gingras, qui est conseillère à la FTQ, attitrée au dossier des femmes.
La FTQ représente le plus grand nombre de travailleuses syndiquées au Québec, soit quelque 200 000 femmes, partage les constats décrits dans la politique gouvernementale sur l'égalité entre les femmes et les hommes et dans le bilan du premier plan d'action de cette dernière. Cette politique vient supporter les engagements du gouvernement en matière d'égalité, tant au niveau international que national.
Rappelons que le plan d'action de cette politique était assorti d'un budget de 24 millions de dollars et a été prolongé pour couvrir les années 2010-2011 avec une enveloppe additionnelle de 10 millions. C'est donc 34 millions sur cinq ans ou 6,8 millions par année pour redresser les inégalités et discriminations systémiques des femmes, soit plus de la moitié de la population du Québec et près de la moitié de sa main-d'oeuvre.
Dans son mémoire, la FTQ a décidé d'évaluer les performances de la politique selon les propres critères de reddition de comptes de celle-ci, c'est-à-dire en cohérence avec la Loi sur l'administration publique, qui instaure la gestion axée sur les résultats, et avec la Loi sur le ministère de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine, qui confie à la ministre la responsabilité de veiller à la progression effective de l'égalité. Par ailleurs, nous avons choisi de circonscrire nos observations et recommandations sur la gouvernance, l'égalité économique, la conciliation travail-famille et la santé. À certains égards, nous vous... nous proposons de compléter certains pans de la politique pour la bonifier, toujours dans l'esprit du droit des femmes à l'égalité.
On a à se poser la question: Est-ce que la situation des femmes a progressé au Québec depuis 2006? L'évaluation que nous faisons du bilan à ce sujet est assez mitigée. Au nombre des points positifs, signalons des enveloppes budgétaires spécifiques pour plusieurs actions ou mesures proégalité proposées par le gouvernement, le succès du Régime québécois d'assurance parentale mis sur pied avant l'adoption de la politique et qui facilite l'accès au travail pour les nouvelles mamans et favorise une plus grande implication des pères auprès de leurs nouveau-nés, le maintien des services de garde à contribution réduite à 7 $ par jour, la reconnaissance explicite du principe de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la charte québécoise, l'adoption de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, des efforts pour atteindre la parité au Conseil des ministres, diverses mesures pour lutter contre la violence faite aux femmes, l'élaboration d'une norme, bien que volontaire, pour favoriser la conciliation travail-famille dans les milieux de travail et l'adoption d'une charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée. Et on pourrait poursuivre.
Ces mesures, il faut le souligner, contribuent à divers degrés à l'atteinte de l'objectif ultime: l'égalité. En revanche, selon nous, un bilan doit s'inscrire dans le contexte plus global de l'ensemble des interventions gouvernementales au cours de la période donnée. Or, dans celui soumis par le gouvernement, nulle mention des reculs que les femmes ont essuyés ces dernières années. Pourtant, ils ont été importants et ont limité leur droit à l'égalité.
Mesurons maintenant la situation depuis décembre 2006, un peu plus récemment. Donc, sur l'égalité économique, parce que les emplois des femmes continuent de se précariser, que les femmes demeurent cantonnées dans un nombre encore restreint de professions et métiers, qu'elles subissent toujours de la discrimination systémique sur le marché du travail, que leurs bonnes performances en éducation ne sont pas toujours traduites positivement sur le marché du travail, que leurs revenus à la retraite demeurent insuffisants, la FTQ recommande au gouvernement de: premièrement, respecter et faire respecter pleinement le droit à l'égalité salariale; supprimer tous les articles du projet de loi n° 130 qui concernent la Commission de l'équité salariale et ses pouvoirs afin de la sauvegarder et la consolider; soutenir Chapeau, les filles! et Excelle Science pour une plus grande diversification professionnelle chez les femmes; sensibiliser davantage les entreprises aux préjugés tenaces à l'endroit des femmes dans les emplois traditionnellement masculins; intensifier les efforts pour la reconnaissance des diplômes, acquis et compétences, notamment chez les immigrantes; favoriser davantage l'accès à la formation continue pour l'ensemble des travailleuses, y compris celles en milieu traditionnellement masculin; remettre des programmes d'accès à l'égalité à l'ordre du jour; s'assurer du respect du Programme d'obligation contractuelle; soutenir les recherches sur les conditions de travail des femmes et la santé et sécurité au travail; hausser substantiellement le salaire minimum; interdire formellement les disparités de traitement fondées sur la statut d'emploi; respecter et faire respecter les droits fondamentaux liés au travail -- syndicalisation, négociation collective, grève, etc.; favoriser la syndicalisation pour les femmes; et améliorer la situation des femmes à la retraite en vertu du Régime de rentes du Québec et augmenter à 62 500 $ le revenu sur lequel on peut cotiser.
Je vais céder la parole à ma consoeur Louise Mercier.
Mme Mercier (Louise): En matière de conciliation travail-famille, parce que les exigences du travail se font toujours plus vives, que les horaires de travail et les technologies de communication maintiennent la main-d'oeuvre dans un état de disponibilité constante, que les entreprises sont peu enclines à offrir des mesures de conciliation travail-famille adéquates pour l'ensemble de leurs personnes salariées et que les principaux problèmes liés à la conciliation demeurent le manque de temps et d'argent, la FTQ recommande donc que le gouvernement maintienne et bonifie le Régime québécois d'assurance parentale et y contribue financièrement pour en assurer la pérennité; maintienne et consolide les services de garde actuels, surtout en CPE, pour répondre à l'ensemble des besoins -- nombre, besoins liés aux horaires de travail atypiques, les régions, etc. -- et qu'il reconnaisse le travail du personnel de ces services, y compris en milieu scolaire; adopte une loi-cadre en matière de conciliation travail-famille visant notamment les milieux de travail; fasse mieux connaître les droits en matière de conciliation travail-famille; améliore la Loi sur les normes du travail sur les congés liés à la famille, la durée des vacances annuelles, le contrôle des employeurs dans la gestion des congés et du travail en heures supplémentaires.
Sur la santé, à ce chapitre la FTQ réitère que les récents choix budgétaires du gouvernement vont directement à l'encontre du droit des femmes à l'égalité et de ses propres engagements. La FTQ salue la décision de ne plus imposer de ticket modérateur en santé, mais il faut davantage. Le gouvernement doit prendre le temps nécessaire pour effectuer un retour à l'équilibre budgétaire et reporter l'échéance afin d'éviter de mettre une pression indue sur nos programmes et services publics, abolir la contribution santé, tenir des états généraux sur la santé et les services sociaux, éliminer la très onéreuse sous-traitance et la règle de non-remplacement dans la fonction publique, mettre fin à la privatisation des soins de services sociaux. Du côté de la santé dans le milieu de travail, il doit élargir l'application des mesures de prévention de la loi en santé et sécurité à l'ensemble des groupes prioritaires, garantir le maintien intégral du programme de prévention Pour une maternité sans danger -- retrait préventif pour la travailleuse enceinte ou qui allaite -- mieux protéger les aides familiales, travailleuses domestiques en vertu du régime de santé et de sécurité du travail.
**(10 h 30)** Sur la gouvernance et le rôle de l'État, le rôle de l'État demeure capital pour assurer le respect des droits, dont celui des femmes à l'égalité. Il a pris des engagements sérieux qui doivent constamment lui rappeler ses devoirs, notamment d'éliminer les diverses discriminations et leurs effets préjudiciables sur les femmes. À cet égard, nous aurions souhaité que la ministre responsable intervienne davantage pour défendre énergiquement le droit des femmes à l'égalité à des moments critiques, par exemple dans le cadre du budget Bachand, ainsi de suite. Un ministère du droit des femmes à l'égalité, en bonne et due forme, devrait être créé pour mettre fin au ballottement et à la secondarisation du dossier de la condition féminine au sein même du gouvernement.
Quoi qu'il en soit, le gouvernement doit pouvoir compter sur des bases solides et éclairées. À cet effet, la FTQ recommande que: le gouvernement maintienne et renforce les organismes gouvernementaux voués à la défense et à la promotion du droit des femmes à l'égalité, soit le Secrétariat à la condition féminine, le Conseil du statut de la femme; maintienne les trois approches -- spécifique, transversale et sociétale -- présentées dans la politique en priorisant les deux premières afin de mieux identifier les discriminations systémiques et les inégalités et de les corriger; implanter l'analyse différenciée selon le sexe partout dans l'appareil d'État, l'appliquer rigoureusement et accorder la priorité aux pratiques gouvernementales majeures, comme les budgets et autres grandes orientations politiques, réformes du gouvernement.
M. Boyer (Daniel): Je conclurais peut-être en mentionnant que la FTQ reconnaît les efforts consentis mais considère que la persistance des discriminations systématiques puis des inégalités que vivent les femmes depuis toujours nécessite que le gouvernement y consacre plus d'efforts et surtout des ressources adéquates. Les responsabilités, devoirs et engagements de l'État sont tels qu'il doit démontrer plus de volonté politique et de leadership pour faire réellement progresser les femmes, toutes les femmes dans tous les domaines. Merci.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Donc, je cède la parole maintenant à la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine.
Mme St-Pierre: Merci. Alors, merci d'être parmi nous ce matin. Je prends bonne note de certains éléments que vous nous avez présentés, je pense à la loi-cadre, création d'un ministère, vous parlez de notions de spécificité, transversalité et sociétale. Hier, on a entendu la CSD, puis j'ai l'impression que vous avez présenté... Vous êtes-vous parlé avant de venir en commission parlementaire ou si... Avez-vous fait une petite rencontre téléphonique? Parce que vraiment, là, vous êtes... puis il y en a d'autres aussi, mais il y en a trois, là, c'est vraiment copie conforme.
M. Boyer (Daniel): Non. On ne s'est pas du tout parlé, je vous avouerais, non, pas du tout.
Mme St-Pierre: O.K. Bon.
M. Boyer (Daniel): On nous a peut-être scoopés, on nous a peut-être volé des documents, on ne sait pas, là.
Mme St-Pierre: Ou c'est peut-être la même personne qui a écrit le mémoire.
M. Boyer (Daniel): Mais on est fiers qu'il y a d'autres organisations qui pensent comme nous, par exemple.
Mme St-Pierre: Oui, oui. Il y a certaines notions que vous venez nous dire ce matin qu'on a entendues dans les médias, vous avez fait plusieurs représentations, puis...
Moi, je voudrais vous entendre sur les métiers non traditionnels et comment on peut amener les femmes à vraiment épouser ces professions-là, les ghettos, là, ce qu'on appelle les ghettos, autant d'un côté comme de l'autre. Les métiers non traditionnels qui sont des métiers traditionnellement... c'est-à-dire les métiers qui sont traditionnellement masculins, les métiers qui sont traditionnellement féminins. Le Conseil du statut de la femme nous dit d'investir, de mettre beaucoup d'énergies sur les métiers qui sont traditionnellement masculins parce que, bon, c'est mieux payé, c'est mieux rémunéré, puis il faut mettre l'énergie là puis ne pas dépenser d'énergies de l'autre côté, autrement dit, amener, par exemple, des garçons, des hommes à s'intéresser à l'enseignement primaire ou... parce que ce n'est pas des métiers ou des professions où on nous dit... L'argument, c'est d'amener les femmes vers des métiers où c'est mieux rémunéré.
Comment... Quelles seraient vraiment les propositions concrètes que vous nous feriez pour vraiment améliorer la situation dans ces professions-là, dans ces métiers-là?
M. Boyer (Daniel): Je vous dirais qu'il faut travailler sur les deux tableaux. Premièrement, effectivement, les femmes sont surtout concentrées dans une douzaine de corps d'emploi, et on pense qu'on doit améliorer le statut précaire de ces emplois-là. Il faut travailler, à notre avis, pour améliorer... Il y a une tonne d'horaires atypiques. Il y a des femmes... il y a beaucoup de femmes qui travaillent à temps partiel dans ces secteurs d'emploi là. Donc, il faut améliorer les conditions de travail, augmenter le salaire minimum dans le but d'améliorer justement les conditions de travail de ces emplois... les conditions de travail relatives à ces emplois-là.
Concernant les emplois non traditionnels, on pense qu'il faut élargir davantage le spectre et ne pas juste focusser sur les métiers de la construction, mais également l'ensemble des emplois non traditionnels. Il y a eu beaucoup d'efforts qui ont été faits pour inciter les femmes à aller vers des emplois non traditionnels. C'est soit qu'elles ont été incitées, soit qu'elles ont choisi d'y aller. Là où le bât blesse, c'est au niveau du maintien puis de l'intégration, là c'est plus difficile en emploi. Et je pense... on pense que c'est à ce niveau-là qu'il faut travailler. Lorsque les femmes intègrent un emploi non traditionnel, il y a de la difficulté dans le milieu de travail, puis il faut travailler à aplanir ces difficultés-là dans le but de favoriser le maintien puis l'intégration des femmes dans les métiers non traditionnels. Et il faut, bien sûr, continuer nos efforts pour inciter les femmes à occuper des emplois non traditionnels, mettre des programmes en place, faire connaître ces emplois-là également.
Mme St-Pierre: Vous pensez à quoi? Avez-vous des exemples précis? Est-ce que c'est parce que l'employeur ne veut pas aménager une toilette pour les femmes ou enfin... Parce que je l'ai entendu, ça, sur le terrain, là. C'est quoi? Qu'est-ce qui se passe? Est-ce qu'elles subissent des remarques désobligeantes de la part de leurs confrères? Comment ça se passe encore aujourd'hui?
Le Président (M. Huot): Mme Gingras.
Mme Gingras (Carole): Merci. Alors, peut-être signaler qu'à la FTQ on a initié et fait des recherches pour documenter cette question qu'on trouve très importante pour les travailleuses, on a documenté l'accès à ces emplois-là mais aussi la phase du maintien. Et, dans les recherches qu'on a faites avec une équipe de chercheurs de l'UQAM, de L'invisible qui fait mal, on a vu qu'il y avait plusieurs problèmes qui étaient liés à tout l'aspect d'organisation du travail. Par exemple, un accueil très déficient, on leur fait sentir, à ces femmes, que ce n'est pas leur place, qu'elles devraient peut-être aller travailler ailleurs. Souvent, il y a un manque de formation au niveau des outils de travail, on n'a pas nécessairement eu le réflexe soit d'adapter les outils de travail, mais comment on travaille avec ça. Et aussi tout l'aspect du travail de collaboration avec les collègues de travail, qui fait référence entre autres à la culture du milieu de travail. Si on est en situation où... par exemple, dans le cas où on est quelques personnes, et il y a une femme, et que... soit qu'on est en situation de danger, pour toutes sortes de raisons, s'il n'y a pas, au niveau de la culture, un travail qui a été fait pour permettre à ces femmes d'être à l'aise dans ce qu'elles font non seulement au niveau des outils de travail, mais au niveau aussi du soutien au niveau du milieu de travail, ça pose vraiment des problèmes.
Et ça nous amène à cette culture masculine: oui, elle existe. Et, si, dans les entreprises, il n'y a pas un coup de barre de donné pour changer ces mentalités qui font, entre autres, que... Pour que ces femmes-là aillent dans ces emplois, on est encore avec l'esprit que ça prend une force physique considérable. Les femmes qui sont dans ces emplois-là disent: Maintenant, avec la technologie, il doit bien y avoir moyen d'adapter ces postes de travail là. Par exemple, on a documenté, dans un secteur en télécommunications, la question des échelles de travail, et on avait des immenses échelles de travail, on avait une ceinture que les femmes portaient qui n'était du tout adaptée et qui créait des risques d'accident de travail, par exemple. Donc, cette culture de valoriser souvent la force physique, c'est à revoir, il y a des adaptations à faire.
Toute la question de... Justement le lien avec le groupe. Les femmes, on a vu, dans les stratégies qu'elles ont utilisées, dans les recherches qu'on a faites avec l'UQAM, elles ont fait toutes sortes de stratégies individuelles: soit essayer de s'associer à un collègue; soit essayer de se confondre, le déni, de se cacher derrière pour essayer de survivre; elles ont fait... Et on a vu, dans les stratégies, il n'y en a pas... Il faut avoir des stratégies collectives.
Donc, on revient entre autres à toute la question des programmes d'accès à l'égalité. Il y a des programmes d'accès à l'égalité, au Québec, qui existent dans la charte, et ces programmes-là, je dirais qu'ils ont perdu un petit peu de leur saveur. Dans le mémoire de la FTQ, on dit: Il faut revenir pour essayer de faire un bilan, voir qu'est-ce qui n'a pas été. Parce que, dans les programmes d'accès à l'égalité, ce n'est pas juste d'embaucher des femmes, il faut avoir des mesures d'égalité puis des mesures de soutien. Et, si on n'a pas les trois, quand même qu'on aurait une femme quelque part dans un département, il faut aussi avoir une espèce d'objectif numérique pour qu'elles soient plusieurs pour qu'elles ne se sentent pas isolées. Alors, programmes d'accès à l'égalité et obligations contractuelles, entre autres, aussi.
Mme St-Pierre: Alors, M. le Président, mes collègues m'ont signalé qu'ils avaient aussi des questions à poser, alors je vais leur céder la parole.
Le Président (M. Huot): Très bien. Je reconnais maintenant M. le député de Chomedey.
**(10 h 40)**M. Ouellette: Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois. Je pense que vous êtes notre premier gars au cours de notre commission, et, je veux dire, c'est bien de vous recevoir aussi ce matin. Je veux faire du pouce sur ce que vous venez de nous dire relativement au bilan pour les actions globales et structurantes, là, pour renouveler... Parce que vous en parlez à la page 15 de votre mémoire, où vous nous dites que «le bilan n'affiche aucune action globale et structurante pour renouveler la vision des rôles de [père, mère, puis] pour un partage équitable des tâches entre les conjoints». Vous voyez ça comment? Vous avez commencé à en parler un petit peu puis... Ça serait quoi, les actions globales et structurantes qu'on pourrait inclure dans le deuxième plan d'action, là? J'aimerais ça peut-être que vous précisiez un petit peu plus ou que... connaître un peu la réflexion que vous avez faite là-dessus.
Le Président (M. Huot): Mme Mercier.
Mme Mercier (Louise): Bien, je vais vous faire juste une petite remarque qui m'a, tout à l'heure, un petit peu... je ne dirais pas indisposée, mais qui convenait très bien à ce débat. Il y a quelqu'un qui a dit, avec le groupe qui nous précédait: Peut-être qu'on pourrait faire... améliorer les choses pour les femmes qui veulent se présenter en politique, peut-être qu'on pourrait regarder les services de garde, les aider, apporter des améliorations là-dessus, etc. Bien, voilà, ç'en est un, problème majeur. Est-ce qu'on penserait dire ça si un homme se présente en politique? C'est une culture qu'il faut quand même changer.
Les femmes sont toujours... Quand on a une pensée pour les femmes, quel que soit le métier qu'on exerce, la profession qu'on exerce, on va souvent penser au fait qu'elles sont directement liées à la famille, directement liées aux enfants. Donc, c'est une culture, de l'éducation qu'on doit faire auprès d'abord des femmes, effectivement, pour changer cette espèce de mentalité là et faire en sorte que le problème de service de garde ne doit pas seulement se faire pour les femmes, mais aussi pour les hommes. Donc, ça, ça m'a frappée tout à l'heure. Et c'est les propos qui sont à la base à peu près de tous les problèmes qu'on peut rencontrer quand on parle de droit à l'égalité.
M. Boyer (Daniel): Puis, écoutez, dans ça, je vous dirais qu'il faut... il faut assurer la pérennité entre autres du Régime québécois d'assurance parentale. Il faut améliorer les services... les services de garde pour favoriser l'intégration des femmes et, plus que ça, il faut améliorer les conditions de travail des femmes. Parce que c'est sûr que c'est elles qui vont rester à la maison si elles ont un moins grand salaire. La situation familiale fait en sorte qu'on va se priver, si c'est un congé non rémunéré, on va se priver du plus petit salaire. Puis, dans la majorité des cas, c'est les salaires des femmes qui sont les plus bas. Donc, il faut tenter de remédier à ça.
Puis salaire plus bas pour emploi équivalent, bien souvent. Même que les femmes détiennent des emplois dans des statuts plus précaires, souvent à temps partiel, et on constate dans bon nombre d'entreprises que des salariés à temps complet, qui sont généralement des salariés masculins, ont un salaire supérieur, pour la même job, à des employés à temps partiel et qui sont occupés... des emplois qui sont occupés par des femmes. C'est exactement la même job, mais étant donné que le statut est différent, elles ont des salaires différents. Il y a du travail à faire là, là.
Le Président (M. Huot): Oui, Mme Gingras.
Mme Gingras (Carole): Merci. Peut-être que je pourrais ajouter aussi tout le défi lié justement aux conditions de travail, le défi de toute la question du temps de travail, les aménagements du temps de travail, les horaires de travail.
À la FTQ, on a documenté énormément cette question de la conciliation travail-vie personnelle. On a eu un grand colloque, l'année dernière, là-dessus, avec des hommes et des femmes. On vient de sortir du congrès, en décembre dernier, on a adopté une deuxième politique syndicale en matière de conciliation travail-vie personnelle, et on est en train de finaliser une étude qui a été financée par le gouvernement du Québec, Secrétariat à la condition féminine, ministère de l'Enfance, pour documenter, avec des employeurs, des entreprises, les solutions gagnantes, mais en même temps essayer de voir si on ne pourrait pas... si on ne pouvait pas développer un outil de gestion qui vienne tenir compte des responsabilités familiales et parentales quand on regarde les horaires de travail. Parce qu'un des défis, c'est vraiment, bon, entre autres, les gens qui sont à statut précaire, les horaires qui changent constamment. On travaille de jour, après ça on switche de nuit. On a un horaire des fois qu'on connaît le dimanche, puis la semaine commence le lundi; il faut se virer de bord, comme on dit, sur un dix sous.
Et, juste faire une parenthèse, la conciliation travail-vie personnelle, ce n'est pas juste à l'égard des jeunes enfants, c'est à l'égard de tous les membres de la famille. On a une population vieillissante, au Québec, et on a des conjoints malades souvent qu'il faut accompagner, nos pères, nos mères, etc. Alors, en milieu de travail, nos membres... les femmes continuent... ce qu'on voit dans les études, les femmes continuent de porter le poids de... la responsabilité première de la conciliation. Ça ne change pas.
Évidemment, il y a... on voit maintenant, avec justement le congé de paternité, les gars prendre les congés de paternité. Ça, c'est nouveau. Mais les mesures dans les milieux de travail, elles sont éparpillées ici et là et elles sont souvent pour des types d'employés, souvent pour des cadres, elles ne sont pas nécessairement accessibles à l'ensemble du personnel, et c'est un défi. Et les gens disent: On ne peut plus continuer comme ça, on a tout fait. Écoutez, si vous voulez des exemples, on va vous en donner, là, mais les gens sont vraiment rendus à bout, et il va falloir, au Québec, que ça bouge en matière de conciliation, qu'on arrête de dire: Oui, on est d'accord avec ça. Il faut aller vers des mesures coercitives, il faut qu'il y ait un cadre pour qu'on puisse aller plus loin et multiplier les mesures.
Et, par rapport à votre question sur les rôles sociaux, moi, je pense qu'à partir du moment où il y a des mesures dans les milieux de travail essentiellement féminins et masculins, en quelque part il y a des choses qui vont changer, et le coeur de ça, c'est les aménagements de temps de travail, les horaires de travail.
Le Président (M. Huot): M. le député de Chomedey, il vous reste une minute.
M. Ouellette: Dans une minute, pour une petite question et réponse, on va parler d'équité salariale. Vous me dites que vous faites beaucoup de travail de réflexion sur différents domaines, etc. Vous savez qu'il y a au-dessus de 500 000 personnes déjà qui ont touché un ajustement. Il en reste peut-être 400 000 à venir, là. Vous êtes-vous penchés? Comment faites-vous l'information, au niveau de la fédération, chez vous, pour ceux qui restent, pour les informer de leurs droits, etc., là? Je veux vous entendre là-dessus.
M. Boyer (Daniel): Bien, écoutez, c'est ça, l'équité salariale... Premièrement, l'équité salariale relève de chacun des affiliés de la FTQ. Chaque affilié a ses personnes responsables en matière d'équité salariale, mais on a aussi un plan de match FTQ. Et je vous dirais que ce n'est pas dans nos rangs que l'équité salariale... Ce n'est pas surtout dans nos rangs que l'équité salariale n'est pas faite, hein? L'équité salariale, effectivement, elle n'est pas complétée, et ça, on le déplore. Là où elle n'est pas faite, dans nos rangs, on poursuit la lutte et... mais il faudrait regarder aussi tout le milieu des non-syndiqués, là, où l'équité salariale n'a pas été faite.
Le Président (M. Huot): Merci. Ça complète l'échange. Je reconnais maintenant la députée de Rosemont et porte-parole de l'opposition officielle en matière de laïcité et de condition féminine.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue à la commission. Alors, toujours sur cette question d'équité salariale, vous dites, à la page 11, dans votre document: «Nous réclamons que tous les articles concernant la Commission de l'équité salariale et ses pouvoirs soient purement et simplement supprimés du projet de loi [donc] n° 130.» Vous le mettez quand même dans ce mémoire-ci, aussi, puisque c'est au coeur même des discussions sur l'égalité hommes-femmes que l'on peut avoir. Donc, vous n'êtes pas complètement rassurés par la décision. Parce que j'étais dans cette commission hier matin, et ça semble une décision gouvernementale assez claire et nette, au moment où l'on se parle, plutôt de suspendre l'application pour un temps en effet indéterminé de ces articles-là. Alors, j'imagine que c'est pour les raisons que vous avez expliquées. Il reste quand même beaucoup, beaucoup de choses à faire, tout le monde le reconnaît. Il y a eu un énorme travail mais ça a été long. Ça a pris quand même 15 ans pour se rendre là où on est rendus actuellement. Et puis c'est en 2019 qu'on devrait faire le bilan réel et, espérons-le, final et achevé de cette loi et de son application. Mais, pour vous, donc, actuellement, c'est un enjeu, ça, fondamental, capital?
M. Boyer (Daniel): On aura l'occasion, lundi prochain, en commission parlementaire, de se faire entendre à ce sujet. Mais, écoutez, c'est fondamental, là. Ce n'est pas... La ministre a beau nous dire: On n'abolit pas la loi, on abolit l'organisme, mais l'organisme est important, l'organisme, c'est un organisme indépendant qui gère la loi, et ça a toute son importance, ça a toute son... Si on l'a créé au moment où il n'y avait pas d'équité salariale de faite au Québec, on pense que ce n'est pas le temps de l'abolir là parce qu'il y a encore beaucoup de job à faire. On l'a mentionné tantôt, là, il y a la moitié du travail qui n'est pas fait encore, donc ce n'est pas le temps d'abolir l'organisme. On y verra lorsque la job sera complètement faite, là. Peut-être que ce sera le temps de l'abolir, mais pas là, pas à ce moment-ci, il faut poursuivre. Puis on ne vous dit pas là... On a critiqué à quelques reprises la Commission de l'équité salariale et ses décisions, on ne vous dit pas que c'est l'organisme parfait, mais on pense qu'il doit demeurer là, un organisme indépendant dans le but d'assurer l'équité salariale.
**(10 h 50)**Mme Beaudoin (Rosemont): Bien. Merci, M. le Président. Je voudrais revenir, Mme Gingras, à ce que vous disiez, qui est vraiment important dans la vie quotidienne des Québécois et des Québécoises, toute cette question de la conciliation. Vous avez même dit, à un moment donné, à moins que je ne me trompe: Vraiment, il y en a qui sont à bout, là, hein? Et j'aimerais ça que vous m'expliquiez encore mieux et davantage.
Moi, quand j'étais députée d'une circonscription comme Chambly, donc, qui est un peu en dehors de Montréal, et que je voyais ces jeunes femmes apporter leurs poupons à la garderie à la première heure du jour, tu sais, le jour à peine levé, pour ensuite s'en venir souvent donc à Montréal, sur l'île, pour travailler, et ensuite retourner en courant justement malgré les ponts, la circulation, les bouchons, enfin, etc., ça me semblait que c'étaient des vies qui ne devaient pas être faciles. Bien sûr, il y a le choix de vivre en banlieue. Maintenant, je fais la promotion de l'île de Montréal et je crois que... Mais je sais que c'est... il y a des problèmes, hein, de logement puis de coût de logement aussi pour les jeunes familles sur l'île, mais il faut y travailler. La qualité de vie -- oui, c'est ça -- est peut-être quand même plus facile quand on travaille le plus près possible de son milieu de vie ou de là où on réside. Mais, en tout cas, la vie quand même, pour l'instant, c'est beaucoup la banlieue, puis on va sur l'île, puis on travaille, puis... bon, on est contents les week-ends parce qu'on est au calme, on est au frais, puis on est bien chez soi.
Mais quand même ce que vous disiez là m'a beaucoup touchée parce que, même dans le temps... ça fait quand même plusieurs années, là, que j'étais en banlieue comme ça. Mais c'est pour tout le monde, là, j'imagine. Mais, quand vous dites ça, là, c'est un peu un cri du coeur puis une urgence, là, que vous manifestez. J'aimerais ça vous entendre davantage là-dessus.
Le Président (M. Huot): Mme Gingras.
Mme Gingras (Carole): Merci. Alors, comme je le signalais tantôt, on a eu un colloque à la FTQ qui... où il y avait beaucoup de femmes -- je vous dirais qu'il y avait à peu près 80 % de femmes et 20 % d'hommes -- qui venaient de différents secteurs et qui sont venus nous dire: Voici comment ça se passe. Alors, ce qu'on voit, c'est que le... ce qu'on disait dans le temps, là, l'horaire de 9 à 5, là, ça, c'est comme en voie de disparition. Ce qu'on voit...
Une voix: Chez les femmes, entre autres.
Mme Gingras (Carole): Chez les femmes particulièrement, effectivement. Chez les gars, ce qu'on voit: de plus en plus de temps supplémentaire dans plusieurs secteurs. Et ce qu'on voit aussi, il y a beaucoup de précarité: temps partiel, occasionnel, les fins de semaine, etc. Dans ces cas-là particulièrement, donc, des horaires qui changent constamment d'une semaine à l'autre, d'une journée à l'autre selon... Et, les gens, souvent, on va les voir à la dernière minute, dans leurs cas: Peux-tu rentrer demain matin? Est-ce que tu pourrais échanger tes journées? Bon, ce sont des exemples. Puis c'est vrai que la question du transport s'ajoute aux heures de travail. Pour les gens qui travaillent à plein temps, ce qu'on voit, c'est que les journées sont de plus en plus longues. Les heures sont de plus en plus longues dans certains cas, et le temps de transport s'ajoute.
Alors, tout ça fait que, en plus d'aller travailler, c'est lourd, c'est difficile, puis il faut s'organiser. Les gens disent: On ne peut plus laisser notre vie au vestiaire quand on rentre au travail. On ne peut plus faire ça. On est des travailleurs, des travailleuses. On a des familles, on a des enfants, etc. Et il faut en quelque part que l'État nous donne un coup de main. Je ne vous dis pas qu'il y a de la mauvaise intention. Tout le monde est pris, écoutez, avec mille et une choses, et, dans les milieux de travail, pour convaincre des employeurs à s'associer avec nous pour faire une recherche, ça a pris, je dirais, quasiment des années. Puis pourtant ce sont des secteurs -- on est dans le secteur des services -- où il y a un roulement de personnel très élevé. Et pourtant il y a une difficulté qui est évidente, non seulement chez les femmes, il y a les étudiants et étudiantes aussi. Malgré tout ça, ça a pris, écoutez, des grands débats. C'est allé jusqu'en... quasiment au président d'entreprise, à Toronto, pour finalement avoir une entente, et on est dedans.
Alors, ça illustre un petit peu à quel point, un, au niveau des entreprises, ce n'est pas évident, puis au niveau des hommes et des femmes, ça ne l'est pas. Et ce genre d'impact là, de toujours courir, de toujours avoir la tête qui est en train de planifier, que ce soient les repas, que ce soient les arrangements... Ce n'est pas parce qu'on a des services de garde que tout est réglé: souvent, il y a des congés pédagogiques ou ça peut être une gardienne à la maison, à un moment donné, elle tombe malade, il y a... tout est chamboulé, là, cette journée-là. Et ce qu'on voit dans l'étude en cours: les travailleuses ne connaissent pas beaucoup leurs droits en matière de congés familiaux et parentaux. N'allons pas nous imaginer... Ce n'est pas parce qu'on a le RQAP, que c'est si bien connu que ça, et les normes du travail... Non. N'allons pas nous imaginer que... Par exemple, dans le cas du temps supplémentaire, on peut refuser de le faire, mais il y a une disposition dans la Loi sur les normes qui dit: Il faut que tu aies pris tous les moyens pour démontrer que tu ne peux vraiment pas accepter de faire du temps supplémentaire. Et c'est la même chose pour les 10 jours non rémunérés au niveau des normes du travail. Il faut que tu aies pris tous les moyens.
Alors, cette espèce de contrôle de l'employeur, il est là. Et les gens, je vais vous dire, ce qu'ils font, ils contournent le système. Alors, au lieu de dire les vraies affaires, on se le disait hier, on va dire... les gars vont dire: J'ai un problème -- excusez -- de char. On va le dire en bon québécois. Ils ne le diront pas. Les femmes vont dire qu'elles sont malades, on s'en va sur la maladie. Et ce qu'on voit dans l'étude, donc, qui est en cours, c'est qu'on fait porter le poids, par exemple, de... à pied levé de remplacer quelqu'un parce qu'il y a une urgence sur l'équipe de travail. Les gens, au début, ils l'acceptent mais, à un moment donné, il y a comme un rejet. Dans l'équipe de travail, dans le milieu de travail, là, on dit: Écoute, là, coudon, tu vas-tu t'absenter encore souvent de même, là, à tout bout de champ? L'école -- parce que l'école souvent va appeler la mère plus que le père, en tout cas -- c'est un autre exemple.
Et ça m'amène peut-être à parler... Je pense que le rôle du ministère de l'Éducation est très important. Quand je dis ça, là, au niveau des rôles sociaux, je trouve qu'il y a encore un travail à faire au niveau non seulement Chapeau, les filles! puis Excelle Science, mais en termes de travail auprès des enseignants et enseignantes, les conseillers pédagogiques, au niveau, en tout cas, d'une formation quelconque sur peut-être les relations hommes-femmes, etc. Il y a encore du travail, il faut l'intensifier, ce travail-là, pour que, dans les écoles, au niveau des modèles, puis aussi dans les milieux de travail, etc., on mette à profit tous les ministères: ministère du Travail, ministère de l'Emploi, ministère de l'Éducation, etc. Il faut qu'on travaille ensemble. Donnez-nous une place pour le faire. Imaginons un projet de loi-cadre et essayons de travailler ensemble pour qu'au bout du compte, au Québec, on puisse avoir un coup de barre pour que les mesures se multiplient.
Et ce n'est pas pour, je veux dire, faire une espèce d'entorse, là, aux gestionnaires. Ce n'est pas ça. Ce n'est pas ça tout. C'est... Essayons d'avoir des obligations pour qu'on puisse avoir un exercice dans chacun des milieux de travail où on associe les hommes et les femmes, les syndicats, quand... selon le cas, et qu'on puisse identifier les besoins puis essayer de trouver, avec les entreprises, qu'est-ce qu'on peut faire. Moi, je pense qu'on est rendus là au Québec et j'espère tellement qu'on puisse faire la différence parce que, dans les enjeux des rôles sociaux, au niveau aussi des milieux de travail, il faut qu'on puisse avoir ça à court délai. Voilà.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Bonjour. Écoutez, moi, j'ai une préoccupation sur les retraits préventifs. Et je lis dans votre mémoire qu'encore aujourd'hui avoir un retrait préventif peut être difficile mais est aussi encore menacé, entre autres par le Conseil du patronat. On a vu les sorties à l'effet que le droit au retrait préventif était trop facile à avoir de la part des femmes enceintes.
Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur comment on peut dire que le retrait préventif est trop facile à avoir -- quand j'entends... et on se rappellera la déclaration du Conseil du patronat -- et comment on peut améliorer justement ce retrait préventif là pour s'assurer que... Et on sait qu'encore aujourd'hui les femmes, dans les entreprises à charte fédérale, ne sont pas protégées par la CSST là-dessus. Et ça, c'est désolant, c'est incroyable encore qu'au Québec les entreprises à charte fédérale ne bénéficient pas du retrait préventif. Alors, j'aimerais vous entendre, là, sur comment on pourrait améliorer, là, parce que c'est un droit fondamental des femmes, là, de pouvoir quitter leur milieu de travail lorsque c'est dangereux pour elles ou pour leur enfant.
Le Président (M. Huot): M. Boyer.
**(11 heures)**M. Boyer (Daniel): Ce que je comprends de la revendication du Conseil du patronat, c'est que ça devrait être un congé social assumé par l'État et non pas par les employeurs. Mais je pense que ça mériterait un exercice un peu plus sérieux de la part des employeurs, parce qu'on se parle du retrait préventif, là, ce n'est pas de s'en aller chez nous en congé, là. C'est tout d'abord une réaffectation à un travail qui ne comportera pas de danger pour la mère et l'enfant. Et dans bons lieux... dans plein de milieux de travail, il y a moyen de faire un exercice. On se parlait, là, de la... On parlait de la conciliation travail-famille, mais on peut se parler aussi de l'aménagement du travail dans le cadre du retrait préventif, de la réaffectation. Je pense qu'il y a un exercice sérieux qui doit se faire avec les employeurs à ce niveau-là. Et il n'y a pas assez de réaffectations à notre avis. C'est sûr que, si l'employeur ne fait pas l'effort de regarder une réaffectation et que la personne s'en va chez elle parce qu'il n'y a pas possibilité de la réaffecter, c'est sûr qu'il y a des coûts énormes pour l'employeur, mais on pense que la solution, c'est avant tout la réaffectation à un travail qui n'est pas dangereux pour la mère ni pour l'enfant.
Mme Mercier (Louise): Si vous permettez.
Le Président (M. Huot): Oui, Mme Mercier, allez-y.
Mme Mercier (Louise): J'ajouterais peut-être aussi que, souvent, le retrait préventif, l'employeur, ça l'incommode, hein, on ne peut pas... on ne le cache pas. Ça l'incommode. Et aussi souvent les femmes vont se retrouver à faire un travail qui est presque punitif parce qu'elles sont en retrait préventif, parce que l'employeur va lui dire: Bien, écoute, je n'ai pas trouvé autre chose, c'est ça que tu vas faire, alors que c'est extrêmement dévalorisant, le travail qu'on leur fait faire sous prétexte qu'il n'y a pas autre chose dans la compagnie que celui-là pour pouvoir assumer cette obligation-là.
Le Président (M. Huot): Mme la députée.
Mme Poirier: Au niveau de cette reconnaissance-là au niveau fédéral, j'aimerais ça vous entendre sur les démarches qui ont été entreprises pour ça.
M. Boyer (Daniel): On y travaille depuis quelques millions d'années. On poursuit notre travail. Je vous avouerais, au niveau fédéral, on travaille de concert avec le CTC, bien sûr, auquel on est affiliés. Le congrès du CTC s'en vient. Il y aura un grand débat également encore une fois. On se parle du retrait préventif, là, mais il y a plusieurs dispositions de nos lois du travail où... puis qui touchent les femmes aussi, qu'on se parle d'équité salariale aussi, là. Donc, on a de grandes revendications. Je ne suis pas sûr qu'on a le gouvernement qui a une bonne oreille au moment où on se parle à Ottawa, mais on poursuit nos démarches, entre autres auprès des partis politiques qui ont une oreille plus attentive à nos revendications. Et, si le gouvernement veut nous entendre, ça va nous faire plaisir de lui faire part de nos revendications.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Daniel Boyer, Mme Louise Mercier et Mme Carole Gingras, du Comité de la condition féminine de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
Je suspends les travaux quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 2)
(Reprise à 11 h 21)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons les travaux. Je souhaite la bienvenue au groupe, à l'Intersyndicale des femmes. J'informe les membres de la commission que nous avons inversé les groupes. Nous recevons présentement le groupe qui était prévu à 11 h 45. Je vous remercie, mesdames, d'avoir accepté de devancer votre témoignage devant la commission.
Donc, je vous informe que vous avez... Il y a une période de 45 minutes qui est réservée pour votre groupe. Vous avez une période de 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire, et il y aura par la suite un échange de 30 minutes avec les membres de la commission. Ce sera, je présume, Mme Verreault, comme présidente de l'Intersyndicale, qui fera la présentation peut-être... ou je demande à tout le moins à la porte-parole de bien s'identifier, de présenter les personnes qui l'accompagnent. Et vous avez la parole pour 15 minutes.
Intersyndicale des femmes
Mme Verreault (Dominique): Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, les députés, messieurs mesdames. Alors, je ne suis pas la présidente de l'Intersyndicale, mais je serai une des porte-parole, en compagnie de Mme Lucie Grandmont, du SFPQ, et Mme Michèle Boisclair, de la FIQ. Alors, il nous fait plaisir de présenter, au nom de l'Intersyndicale des femmes, le mémoire que ce regroupement de travailleuses syndiquées a préparé dans le cadre de la consultation publique ayant pour objet de faire connaître au gouvernement les pistes d'intervention privilégiées par les groupes interpellés en matière d'égalité entre les hommes et les femmes.
L'Intersyndicale des femmes est un lieu d'échange et de réflexion sur les enjeux qui touchent les travailleuses syndiquées avec une approche résolument féministe. Elle regroupe les responsables et conseillères à la condition des femmes de six organisations syndicales: l'APTS, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux; la Centrale des syndicats démocratiques, la CSD; la Centrale des syndicats du Québec, la CSQ; la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, la FIQ; le Syndicat de la fonction publique du Québec, SFPQ; et le SPGQ, qui est le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec. Alors, c'est donc plus de 200 000 travailleuses syndiquées qui sont représentées et qui travaillent, pour la très grande majorité, dans les services publics et parapublics.
Nous souhaitons, dans un premier temps, souligner que la présente consultation en vue d'établir les prochains plans d'action s'inscrit dans une conjoncture particulièrement inquiétante pour les femmes. Nous entendons fréquemment que la valeur d'égalité entre les femmes et les hommes fait l'objet d'un très large consensus au Québec. Le bilan que dresse le gouvernement de son action est toujours fort positif. Il souligne régulièrement à grands traits plusieurs avancées qui ne sont pas toujours attribuables à son gouvernement.
Le mouvement des femmes ainsi que les syndicats ont, depuis 30 ans, travaillé sans relâche pour que s'opèrent des changements sociaux et législatifs qui permettent aux femmes de prendre leur place dans la société. Si des grands changements se sont opérés, si plusieurs nous envient à juste titre nos acquis, le risque est grand d'en conclure que l'égalité est réalisée. L'égalité n'est pas atteinte, les faits saillants publiés dans le cadre de cette consultation le démontrent clairement. De même, les femmes ne sont certes pas égales entre elles dans cette quête d'égalité. Le mythe de l'égalité déjà là est sans doute notre plus grande menace comme société. Elle pave le chemin aux attaques antiféministes et à la symétrisation.
Le gouvernement doit être un exemple dans la promotion de comportements et d'attitudes égalitaires. Il doit aussi faire preuve de leadership et de cohérence en condamnant publiquement les attaques véhiculées dans les médias, notamment dans les médias-poubelles. Les femmes, les personnes de communautés culturelles, les personnes bénéficiant de l'aide sociale et les personnes homosexuelles sont trop souvent la cible de propos injurieux, dégradants et discriminatoires. De telles attaques ne peuvent être tolérées, et le gouvernement se doit d'agir, parce que la liberté d'expression ne donne pas le droit au sexisme, au racisme, à la violence et à l'homophobie.
Pour espérer de réels changements de mentalité et éviter des reculs, le gouvernement doit agir sur les causes et les conséquences de l'inégalité des femmes qui est érigée en système. Pour ce faire, l'approche spécifique doit donc être privilégiée pour enrayer la discrimination systémique et ainsi éviter de tomber dans le pièce de la symétrisation des conditions de vie des femmes et des hommes. Les difficultés vécues par les femmes n'ont pas les mêmes racines que celles vécues par les hommes. Sans nier les problèmes réels que vivent certains hommes, ils ne découlent pas d'une discrimination systémique et ils ne sont en aucun cas la conséquence des avancées et des acquis obtenus par les femmes. Pour cette raison, si des fonds sont requis pour résoudre les problèmes vécus par les hommes, il doit s'agir d'un financement supplémentaire qui n'est pas pris à même les fonds déjà insuffisants dédiés à la condition des femmes. Nous reconnaissons la nécessité des approches transversales et sociétales mais dans la mesure où elles sont utilisées en appui à l'approche spécifique et en gardant comme prémisse de base que la discrimination vécue par les femmes est systémique.
Je cède la parole à Mme Lucie Grandmont, du SFPQ.
Mme Grandmont (Lucie): Bonjour. Alors, le gouvernement, dans son bilan, s'engage à maintenir des structures de gouvernance permettant l'atteinte de l'égalité entre les femmes et les hommes. Toutefois, cela passe obligatoirement par le financement adéquat et le maintien du mandat de ces organismes. Le gèle de financement du Conseil du statut de la femme depuis une dizaine d'années, la fermeture de bureaux en région et le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux sont des mesures contraires aux engagements gouvernementaux de support aux organismes. Dans le cadre de l'actualisation du plan gouvernemental pour l'égalité, l'Intersyndicale des femmes réclame un financement adéquat du Conseil du statut de la femme et des groupes spécialisés dans la défense des droits des femmes, dont la Fédération des femmes du Québec.
Quant à l'application de l'analyse différenciées selon les sexes, bien que votre bilan mentionne plusieurs projets pilotes dans certains ministères et organismes, les grandes orientations gouvernementales telles que les politiques budgétaires, celles-là mêmes qui ont un impact majeur sur le quotidien des femmes, échappent encore à toute analyse différenciée selon les sexes. L'Intersyndicale des femmes déplore que la mesure d'équivalent temps complet ne soit pas ventilée par sexe, car nous sommes convaincues que, si le gouvernement avait fait une telle analyse, il aurait été à même de constater toute la charge de ses politiques sur le dos des femmes. L'Intersyndicale des femmes réclame donc l'application de l'ADS à toutes les politiques gouvernementales.
Pour l'Intersyndicale des femmes, l'autonomie économique des femmes passe par la sauvegarde, la sauvegarde et le développement des services publics, parce que, dans les faits, les femmes sont doublement touchées par la transformation du rôle de l'État et l'application de politiques budgétaires qui mettent en péril la redistribution équitable de la richesse collective. Ces choix politiques freinent l'accès à l'égalité pour les femmes, qui sont à la fois utilisatrices de services et travailleuses dans les secteurs publics.
En effet, les emplois dans les services publics sont majoritairement occupés par des femmes, particulièrement dans les secteurs de la santé, de l'éducation et de la fonction publique, pour ce dernier groupe les femmes étant plus nombreuses dans les postes de soutien administratif. De plus, elles utilisent davantage les services publics de santé que les hommes, et ce, entre autres en raison de leur cycle de vie biologique et de leurs obligations familiales. Ainsi, lorsque le gouvernement choisit, pour 2011, de réduire les coûts de l'administration publique de 2,5 milliards, les femmes en souffrent davantage. Également, le fait que le gouvernement élargisse sa politique de non-remplacement d'un départ sur deux à la retraite en éducation et en santé en plus de la fonction publique, cela aura un impact négatif sur les travailleuses de ces secteurs. Il ne faut surtout pas oublier que les services publics ont, entre autres, permis aux femmes d'accéder au marché du travail, et toute coupure dans les services est un recul pour l'atteinte de l'égalité.
Un autre pas vers l'atteinte de l'autonomie économique pour les femmes est l'accès aux métiers non traditionnels. Les femmes sont encore aujourd'hui cantonnées dans un nombre restreint de professions. La diversification des choix de carrière est nécessaire si on veut atteindre l'égalité des chances en emploi. Pour y arriver, le Programme d'accès à l'égalité en emploi pour les femmes doit être relancé. On doit y prévoir des mesures concrètes facilitant la conciliation famille-travail. Le Programme d'accès à l'égalité en emploi est un outil d'égalité pour toutes les femmes, particulièrement celles qui subissent de multiples discriminations. Il faut donc reconnaître à leur juste valeur les emplois occupés majoritairement par les femmes, les rémunérer adéquatement et ainsi les rendre aussi plus attrayants pour les hommes.
La reconnaissance d'un emploi passe souvent par la reconnaissance salariale, d'où l'importance de l'application de la Loi de l'équité salariale. En ce sens, nous saluons l'engagement récent de la ministre Courchesne à maintenir la Commission de l'équité salariale tant que ses travaux ne seront pas terminés. Cependant, puisque la ministre ne fait que remettre à plus tard cette décision, sans établir d'échéancier, nous réaffirmons que la Commission de l'équité salariale doit subsister dans son intégrité pour en assurer l'application de la Loi sur l'équité salariale.
En terminant, suite au désengagement de l'État, les personnes proches aidantes, majoritairement des femmes, s'appauvrissent et s'épuisent pour aider les membres de leurs familles dans le besoin. Le gouvernement a la responsabilité de leur venir en aide en augmentant l'offre de services publics, notamment les services à domicile. De plus, le gouvernement doit reconnaître financièrement le travail des proches aidantes pour qu'elles ne soient pas pénalisées à la retraite, et ce, en modifiant le Régime des rentes du Québec.
Je cède la parole à Mme Michèle Boisclair.
**(11 h 30)**Mme Boisclair (Michèle): Alors, bonjour. Je vais poursuivre sur la question de la sous-traitance.
Le recours accru du gouvernement comme employeur à la sous-traitance et à la main-d'oeuvre indépendante pour effectuer des tâches normalement confiées à son personnel a de nombreux impacts. Le recours à la main-d'oeuvre indépendante en santé par ces entreprises privées de placement en soins a atteint des sommets quand on sait que près de 60 % des établissements publics de santé ont fait appel à des entreprises privées et, dans certains cas, ont eu recours à la main-d'oeuvre indépendante pour effectuer jusqu'à 40 % des heures travaillées.
En plus de réduire la disponibilité de postes avec des avantages sociaux, la sous-traitance coûte cher à la population. Selon le ministère de la Santé lui-même, le coût, le coût horaire moyen pour le recours à la main-d'oeuvre indépendante pour les infirmières, infirmières auxiliaires et inhalothérapeutes dépasse d'environ 18 % celui des professionnels en soins employés du bureau. Ainsi, en 2008-2009, c'est plus de 29 millions qui ont été payés en main-d'oeuvre indépendante pour ces professionnels.
Ainsi, pour ces raisons de coût mais aussi de qualité de service, l'Intersyndicale des femmes demande que le gouvernement mette fin à la sous-traitance, y compris la main-d'oeuvre indépendante.
Je veux rappeler que l'accès à l'égalité pour les femmes passe par l'autonomie économique et que, pour les femmes qui... pour que les femmes atteignent cette autonomie, nous avons besoin de mesures qui valorisent la conciliation famille-travail. À ce chapitre, malgré les avancées, des améliorations sont encore nécessaires. En matière de services de garde, l'offre actuelle est loin de répondre aux besoins. Il faut absolument augmenter le nombre de places à 7 $ par jour, s'assurer que toutes les régions soient équitablement desservies et voir au développement des services adaptés aux horaires des personnes ayant un horaire atypique. Le gouvernement doit aussi clairement s'engager à ne pas hausser le coût des places en service de garde. De plus, la Loi sur les normes du travail doit être ajustée pour bonifier la banque de congés pour obligation familiale.
Pour le moment, les femmes cumulent en moyenne quatre fois plus d'absences pour obligation familiale que les hommes, ce qui équivaut au total à effectuer 19 % d'heures de travail rémunérées de moins que les hommes. Nous calculons donc qu'il est nécessaire d'ajouter une banque de 10 congés rémunérés pour obligation familiale. Tant que le gouvernement n'agira pas à cet égard, les femmes vont continuer à avoir des revenus d'emplois moins élevés que les hommes, ce qui affectera leur sécurité économique pendant leur vie professionnelle et à l'heure de la retraite.
Nous savons aussi que les femmes prennent encore davantage en charge les différentes responsabilités familiales et que les changements de mentalité s'effectuent trop lentement. L'Intersyndicale des femmes demande l'adoption d'une loi-cadre sur la conciliation des obligations familiales et professionnelles qui obligerait les employeurs à trouver des solutions adaptées à leurs milieux et mettre en place des mesures concrètes.
Au chapitre de la santé des femmes, il y aurait beaucoup à dire, notamment l'importance d'une approche globale et féministe en santé des femmes. Toutefois, je vais me limiter à trois aspects de la santé sexuelle et reproductive des femmes, soit le droit au retrait préventif, l'accès aux services d'interruption de grossesse et l'accès aux services de sage-femme.
En ce qui a trait au retrait préventif, l'Intersyndicale des femmes demande au gouvernement de s'engager à conserver le droit au retrait préventif dans son intégralité. Les femmes enceintes ne doivent pas avoir à choisir entre leur sécurité physique, leur santé et celle de l'enfant à naître ou leur maintien en emploi et leur sécurité économique.
Concernant les interruptions de grossesse, une recherche récente nous apprend que les femmes sont encore confrontées à de nombreuses difficultés lorsqu'elles tentent d'avoir accès à des services d'avortement: délais d'attente prohibitifs, difficulté à avoir accès aux ressources, informations erronées. Est-ce que le gouvernement va s'engager à financer adéquatement les maisons de naissance quand on sait qu'aujourd'hui... que des sages-femmes sont finissantes et n'ont pas encore accès à des emplois?
Au chapitre de la violence faite aux femmes, il faut reconnaître l'ampleur de la problématique de ce phénomène dans tous les milieux de vie et refuser toute symétrisation de la violence vécue par les hommes et les femmes. Nous ne nions pas que les hommes puissent être victimes de violence, mais la violence à l'égard des hommes n'est pas systémique. Un homme n'a pas peur d'être une victime de violence en rentrant chez lui le soir parce qu'il est un homme, mais toute femme a peur à un moment ou un autre de sa vie d'être victime de violence simplement parce qu'elle est une femme.
Nous déplorons d'ailleurs que rien dans le bilan de l'action du gouvernement ne fasse référence au harcèlement psychologique et sexuel ainsi qu'à la violence en milieu de travail. À notre avis, dans son application actuelle, la Loi sur les normes du travail occulte le caractère systémique de la discrimination vécue par les femmes en amalgamant le harcèlement sexuel au harcèlement psychologique.
Finalement, le gouvernement doit reconnaître que des mesures fiscales progressives et équitables et bien sûr pour le maintien et le développement des services publics accessibles et de qualité pour toutes et pour tous sont des conditions sine qua non de l'accès à l'égalité entre les femmes et les hommes. Merci de votre attention.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine. Vous avez 15 minutes.
Mme St-Pierre: Merci beaucoup. Merci pour cette présentation. Merci d'avoir bravé la tempête. Vous avez, au tout début de votre présentation, parlé du bilan. Je pense qu'effectivement peut-être que tout n'est pas parfait, mais je pense que le bilan n'est pas aussi sombre que ce que vous venez de... ce que vous venez de dire devant nos téléspectateurs, et j'aimerais, moi, faire certaines remarques là-dessus.
Tout d'abord, dans le bilan -- d'ailleurs on en a une copie ici, si jamais ça vous intéresse -- on parle d'une augmentation des femmes sur le marché du travail. C'est sept points de pourcentage du taux d'activité des femmes de 15 ans et plus, alors c'est 61 % en 2008 par rapport à 50 % en 1996. Chez les hommes, ce taux est demeuré à 70 %. Donc, les femmes ont... en fait, se sont... sont de plus en plus sur le marché du travail.
Il y a une réduction de l'écart du revenu entre les femmes et les hommes. C'est un gain de 13 points. Je pense que c'est important de le noter, il y a quand même un gain. Il y a encore du travail à faire, mais il y a des choses qui se font, puis je pense que c'est grâce aux mesures que... collectivement nous avons prises pour arriver à ces résultats.
Il y a une diminution de près de 20 points de pourcentage du taux de faibles revenus des familles monoparentales ayant un chef de famille féminin.
Il y a une augmentation du niveau de scolarité des femmes... de scolarisation, pardon, des femmes. En 2006, le revenu des femmes titulaires d'un certificat universitaire travaillant à temps complet atteint un ratio de 92 % de celui des hommes. Évidemment, on veut atteindre le 100 %, mais à 92 % on est loin de la situation qu'on a connue il y a plusieurs années, enfin quand, moi, je suis sortie de l'université. Donc, ce sont des conséquences directes, ce sont des effets positifs de la scolarisation élevée.
On peut faire aussi une comparaison avec l'Ontario. En Ontario, le taux d'activité... En fait, le taux d'activité des Québécoises de 25 à 44 ans dépasse celui de l'Ontario et du Canada. Les mères québécoises âgées de 25 à 44 ans sont plus actives que les Ontariennes ou les Canadiennes sur le marché du travail. Les mères québécoises occupent moins souvent un emploi à temps partiel que les Ontariennes et les Canadiennes. L'écart entre le revenu total des femmes et celui des hommes est moindre au Québec que dans l'ensemble du Canada. Le taux de faibles revenus des femmes chefs de famille monoparentale est inférieur à celui de l'Ontario et du Canada.
Donc, il y a quand même des avancées qui sont considérables, qui sont très importantes. Puis, moi, je suis très fière de voir les actions que le gouvernement a prises depuis plusieurs années pour faire avancer l'égalité entre les hommes et les femmes au Québec et je pense que c'est important de le souligner.
Quand vous nous parlez du travail, de l'accueil qui est fait à des agences indépendantes, dans le domaine de la santé entre autres, c'est sûr qu'il y a peut-être... il y a sûrement du chemin à faire pour améliorer cela. Mais, quand même, si on fait appel à des agences, ce sont quand même des femmes qui y travaillent. Ce n'est pas... Ils ne font pas appel à des hommes en majorité, il y a certainement des... c'est des femmes qui font ce travail-là. Alors, là aussi, je pense qu'il y a quand même certaines choses qu'il faut remettre en perspective. Mais je suis d'accord avec vous, il y a encore de l'amélioration à y avoir, et c'est pour cette raison que nous allons avoir un nouveau plan d'action dans le cadre de la politique, qui est une politique qui est sur 10 ans.
**(11 h 40)** J'aimerais vous poser des questions sur la question de l'affichage et les pratiques publicitaires, parce que vous en parlez dans votre mémoire, et on a eu plusieurs commentaires là-dessus. Nous sommes à notre troisième journée de consultations. Ça revient. Il y a bien, d'ailleurs, des éléments qui reviennent continuellement dans chacune des présentations. C'est normal. Moi, je me pose des questions. Oui, il y a quelque chose certainement à faire en termes de sensibilisation. Je pense que ça, il faut le faire. Puis, si on regarde les publicités qui se font en France par rapport aux publicités qui se font ici, on est vraiment... la France, elle est à des années-lumière en arrière, je devrais dire.
Mais comment on pourrait déterminer et quels seraient les gestes concrets pour déterminer et essayer de vraiment faire quelque chose par rapport à cette situation-là? Comme je le disais devant les groupes précédents, ce qui est peut-être inacceptable pour moi l'est peut-être pour quelqu'un d'autre qui est d'une autre génération. Où est-ce qu'on trace cette ligne? Et comment on la détermine, cette barrière?
Et encore hier je faisais référence à un spectacle, très beau spectacle de danse que j'ai vu à Montréal, qui est une chorégraphie de Dave St-Pierre. Bien, les gens sont... pendant 90 % du spectacle, ils sont tout nus sur la scène, là, et c'est très beau, mais peut-être qu'une autre personne qui n'a pas la même ouverture que moi ou enfin la même sensibilité que moi ou de la plupart des gens qui étaient dans la salle pour le ballet contemporain arriverait en disant: Bien, écoutez, là, des madames toutes nues, là, avec des talons hauts, je ne pense que ce soit très... alors qu'on parle de l'esthétisme, puis de la danse, puis des arts, et tout ça. Et j'essaie de voir, j'essaie de voir quelle pourrait être une vraie mesure, là, concrète ou des mesures qui feraient en sorte qu'on pourrait vraiment améliorer cette situation-là.
Mme Verreault (Dominique): Bien, peut-être -- et mes collègues pourront rajouter -- écoutez, c'est sûr que tout ne se tranche pas, là, en ligne droite, et il y a des zones grises et il y a des... Mais je pense qu'il y a quand même, d'entrée de jeu, je dirais, là, des grilles d'analyse qui peuvent être utilisées. Et ça, je pense qu'il y a des outils qui existent qui permettent, à un moment donné, de trouver des consensus en ce qui concerne l'affichage et le dénigrement, là, du corps des femmes ou l'utilisation du corps des femmes à mauvais escient.
Et on n'est pas, là, je dirais, là... je pense que, bon, la culture étant un domaine aussi, là, où il y a beaucoup de liberté, de créativité. Mais il reste quand même que, quand on parle du publicité pour vendre des voitures ou de la bière... Et, bon, c'est des choses qu'on parlait il y a 30 ans, là, et qui sont encore... qui existent encore, qu'on voit encore au Québec, là. Alors, je pense qu'on est rendus, comme population et comme société, à se dire que ce n'est pas les outils qu'on devrait utiliser pour vendre des produits, qu'il y a une limite à ce qu'on peut faire de l'utilisation du corps des femmes et de l'hypersexualisation qu'on voit chez les jeunes également, là.
Je pense qu'il y a beaucoup d'outils qui peuvent être mis en place, de la sensibilisation auprès du public évidemment, de l'éducation. Ça commence à l'école aussi. On pense que, très jeunes, d'éduquer et les jeunes filles et les jeunes hommes à l'histoire des femmes, l'histoire du féminisme, l'histoire des luttes sociales également et féminines font en sorte qu'on peut être plus sensibilisés, comme société, au respect du corps des autres et, oui, aux limites qu'il faut mettre à un moment donné et on pense que le gouvernement a un rôle important à jouer évidemment comme leader dans ça.
Mme St-Pierre: Je suis d'accord avec vous sur la sensibilisation. Ça, c'est... Il y a des gestes qui peuvent être posés, bien sûr. Mais c'est quand on parle d'une législation, c'est là que je me demande comment, dans une législation, on pourrait vraiment, là, tracer cette ligne-là. C'est un questionnement parce que ça revient, c'est récurrent, puis on en parle beaucoup dans la société, on en parle chez nous, à la maison, tout le monde. Bien des gens parlent de ça. Puis le Québec a fait beaucoup, beaucoup de chemin par rapport à ce qu'on voit ailleurs dans le monde. On est vraiment... On est très sensibles à ça. Puis des fois on voit des publicités, puis là il y a des mouvements de dire, ce magasin-là, de... Il y a des magasins qui retirent certaines publicités, entre autres des publicités sur la... des catalogues sur la maigreur. Il y en a qui l'ont fait.
Alors, c'est pour ça que j'essayais de voir comment on pourrait, dans une... Des mesures de sensibilisation, je comprends très bien ça, mais c'est l'autre aspect.
J'ai une question sur... Ici, vous parlez, concernant l'égalité économique des femmes, vous parlez que la période de travail comme personne aidante soit prise en compte dans le calcul de la Régie des rentes. Moi, je trouve ça bien, bien, bien intéressant, mais je me demande combien... Est-ce que vous avez évalué en termes de coûts combien ça pourrait coûter, une telle mesure?
Mme Grandmont (Lucie): Oui, c'est...
Le Président (M. Huot): Mme Grandmont.
Mme Grandmont (Lucie): Oui. Je n'ai pas l'évaluation au niveau du coût. Cependant, il y a quand même des coûts à ce qu'une personne... Puis souvent ce sont les femmes qui quittent le travail, il y a un manque à gagner au niveau du salaire pour ces personnes-là, de toute façon. Alors, l'évaluation, je ne l'ai pas, à moins que mes collègues l'aient. Marie-Ève, est-ce que tu l'as, toi?
Mme Quirion (Marie-Ève): On a le...
Le Président (M. Huot): Mme Quirion, oui.
Mme Quirion (Marie-Ève): On a le 130 millions, le nombre d'heures par année effectuées par les proches aidantes. Alors, ça, c'est un coût qui coûterait jusqu'à 5 millions... 5 milliards de dollars s'ils étaient... c'est des services qui coûteraient jusqu'à 5 milliards de dollars s'ils étaient offerts par le réseau public de la santé selon vos chiffres, qu'on a utilisés, bien sûr. Alors, ce 5 milliards de dollars là est perdu à ce niveau-là.
Mme St-Pierre: ...ça, ma question. Ce que vous dites, c'est que la période de travail comme personne aidante soit prise en compte dans le calcul de la Régie des rentes. Bien, c'est parce qu'il faut mettre l'argent dans la banque de la Régie des rentes, là. Ça serait le gouvernement qui compenserait la perte de la rente. C'est ça, là? Alors...
Le Président (M. Huot): Mme Boisclair.
Mme Boisclair (Michèle): Bien... Oui. Alors, si vous êtes une aidante à la maison et qu'on ne veut pas qu'il y ait d'impact en termes d'accessibilité à une retraite, oui, le gouvernement doit investir. C'est normal. Il y a des dames qui sont, comme ma collègue le disait, sur le marché du travail, qui quittent. Donc, elles devraient pouvoir poursuivre leur participation.
Mme St-Pierre: Ça, je comprends ça. J'ai très bien compris.
Mme Boisclair (Michèle): Et la personne qui est à la maison, qui n'est pas sur le marché du travail, devrait, elle aussi, être considérée pour avoir accès à la Régie des rentes. Donc...
Mme St-Pierre: Mais ma question, c'est... Ça, ça va. Je comprends l'idée puis je trouve que c'est bien intéressant. Mais combien ça coûterait au trésor public? Parce que l'argent, là, il ne vient pas des arbres. L'argent, il vient de vos poches, puis il vient de mes poches, puis il vient des poches de tous les Québécois, là, qui nous entendent, qui trouvent qu'ils paient beaucoup trop d'impôts, d'ailleurs. Alors, cet argent-là, là, on le prend où? Est-ce qu'on augmente les impôts? Est-ce qu'on impose une taxe? Est-ce que... Où est-ce qu'on va le chercher, cet argent-là?
Mme Boisclair (Michèle): Bien, moi, je suggérerais profondément au...
Mme St-Pierre: ...faudrait aller en chercher?
Mme Boisclair (Michèle): Écoutez, vous économisez présentement 5 milliards avec ce qui est fait gratuitement par les femmes qui donnent des services, aux aidantes naturelles. Alors, vous comprendrez que, déjà en partant, vous faites une économie de marché sur le dos des femmes, parce que c'est elles majoritairement qui prennent soin, les femmes.
Alors, si vous voulez mettre de l'argent, il y a des mesures progressistes au niveau de l'impôt qui devraient être établies. Il y a certains impôts qui ont toujours diminué au niveau des industries, au niveau des grosses compagnies; ça devrait être rétabli à un niveau plus acceptable. Avant, on payait beaucoup moins d'impôt que les industries, et aujourd'hui c'est la classe moyenne qui en paie plus. Parce qu'on a donné des congés d'impôt, on a réduit les impôts, bien, c'est à la population directement qu'on a nui, et c'est majoritairement les femmes qui paient.
Avec l'économie qu'on fait présentement, moi, je pense que les compagnies pourraient participer plus en termes d'impôt pour payer ça, parce qu'à quelque part les gens veulent prendre soin de leur famille, veulent être auprès d'elle, mais c'est d'une exigence inhumaine, ce qu'on fait présentement auprès... Et je vais vous dire, moi: Le mot «aidante naturelle» me fait défriser. Ce n'est pas naturel d'être une aidante. Une femme a le droit à une carrière, a le droit d'avoir d'autres choix que d'être obligée de prendre en compte sa famille. On n'est plus en 1800 où on avait 13 enfants, là.
Des voix: ...
Mme Boisclair (Michèle): Je ne le sais pas, mais ce n'est pas nous autres.
Le Président (M. Huot): Je pense que Mme Grandmont voulait compléter aussi.
Mme Grandmont (Lucie): Oui. Bien, j'ajouterais juste que le temps que les femmes consacrent, si on peut... oui, on peut le monnayer, on peut le quantifier. Mais le temps que les femmes consacrent à être des proches aidantes auprès de leur famille proche, comme ça le dit, bien, pendant ce temps-là, le gouvernement économise en soins à domicile, économise en soins de santé, économise ailleurs. Alors, l'argent, en fait, ça pourrait être un transfert aussi, parce que l'argent qui est économisé parce que ce sont les travailleuses qui prennent des congés à même leurs banques, et tout ça, bien, cet argent-là, un, des fois il n'est même pas versé sur le salaire. Et, si les femmes ne faisaient pas ça, bien, les citoyens et citoyennes se retourneraient vers les centres de services sociaux, vers tous les endroits, vers les ministères et organismes qui pourraient les aider. Alors, il y aurait quand même une charge.
Mme St-Pierre: Bien, je vous remercie beaucoup. Mais je vous rappelle que, quand on parle du gouvernement, on parle aussi de l'argent de...
Mme Grandmont (Lucie): Oui, oui.
Mme St-Pierre: ...de tous les contribuables québécois. On parle de nous tous.
M. le Président, je n'ai pas d'autre question. Peut-être que mes collègues en ont.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Lévis pour deux minutes.
**(11 h 50)**M. Lehouillier: Merci beaucoup, M. le Président. Donc, d'abord, je voudrais vous féliciter pour votre... la présentation de votre mémoire. Malgré la température, en tout cas, vous avez pu être ici aujourd'hui.
Moi, ma question, et je vais faire un peu la suite de ce que la ministre a évoqué tout à l'heure, c'est où on place la ligne dans les pratiques d'affichage, là, dans tout ce qu'on voit dans les médias d'information, où on est inondés à ce point-là où on se demande s'il n'y a pas un recul face à ça. Alors, moi, ma question est la suivante: Vous autres, par rapport à ce qui est... ce que vous considérez comme de la publicité sexiste, au niveau des syndicats puis au niveau des intersyndicats -- je profite de l'occasion pour poser cette question-là -- vous êtes-vous donné des espèces de critères quand vous regardez... Puis regardez dans la téléréalité. Vous avez parlé des annonces de bière tout à l'heure, mais, dans les annonces de bière, on ne présente plus seulement que le corps de la fille, on présente aussi le corps de l'homme très... qui est toujours bien fait, bien moulé, alors que c'est loin, c'est loin de la réalité des buveurs de bière, on s'entend là-dessus.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lehouillier: ...alors donc... à moins de prendre beaucoup de bière et de faire énormément de conditionnement. Mais, tu sais, ce que je veux dire, c'est qu'on est loin du buveur de bière traditionnel.
Donc, ce que je voulais vous poser comme question, c'est la suivante, c'est: J'ai l'impression, moi, quand je vois tout ça à la télévision, je me dis... puis je regarde des fois les décisions des tribunaux par rapport aux chartes, je me dis: Coudon, y a-tu... Ça doit être moi qui n'ai pas évolué. Il y a une tolérance ou quoi? Et en même temps -- et là vous me direz si je me trompe -- il me semble que je n'entends pas beaucoup de représentations des groupes où ils disent: Cette annonce-là, on la dénonce de façon systématique puis là on s'entend que tous les groupes, on va... Je vous dis ça comme ça parce que c'est l'impression que j'ai. Peut-être que c'est parce que vous êtes inondés dans cette masse d'information. Alors, voilà. Ma question est simple, mais c'est une idée qui m'est venue dans... à la tête comme ça.
Le Président (M. Huot): Malheureusement, je vous informe que vous... il n'y a plus de temps pour répondre à la question. Peut-être que vous trouverez le moyen de répondre à la question avec l'échange avec l'opposition officielle. Et je reconnais maintenant la députée de Rosemont et porte-parole de l'opposition officielle en matière de laïcité et de condition féminine.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Oui, si vous voulez prendre quelques instants pour répondre au député de Lévis, il n'y a pas de problème.
Moi, ce que je retiens de notre début d'échange de ce matin mais en tout cas en lisant votre document aussi, c'est votre approche très globale, hein, très globale, qui est intéressante, et puis qui a une logique, et puis qui a une cohérence, effectivement. Et je vous en félicite.
Puis je dois vous dire aussi que, quand vous dites que l'Intersyndicale développe «une analyse féministe et des positions communes sur l'ensemble des conditions de vie et de travail des femmes», là aussi, je vous en félicite, parce que d'être des féministes militantes... parce que, vous le savez comme moi, ce n'est pas seulement dans les radios-poubelles, même chez... plusieurs jeunes femme ne se sentent pas interpellées. Et même le mot «féminisme» est dévalué dans notre société. Non seulement ce que vous dites est vrai, c'est-à-dire qu'on pense que l'égalité est déjà là, puis c'est une des raisons pour lesquelles on dit: Le féminisme est inutile maintenant, mais donc ce terme-là... Moi aussi, je me considère comme une féministe canal historique, disons, tu sais, compte tenu de mon âge.
Une voix: Historique?
Mme Beaudoin (Rosemont): Canal historique. Mais vous dites quelque chose justement sur l'antiféminisme, hein, au tout début de votre document, à partir d'ailleurs d'une étude de Francine Descarries, dans Recherches féministes, qui s'intitule L'antiféminisme «ordinaire». Mais là vous dites quelque chose qui m'étonne dans à peu près le dernier paragraphe de la page 4: «De par le caractère populiste de leurs propos, les tenants de l'antiféminisme trouvent de nombreuses tribunes et ils réussissent à influencer et même à infiltrer les sphères médiatiques...» Ça, on sait de qui vous parlez, parce que vous nommez spécifiquement, là, des radios, certaines radios. Mais vous dites «et gouvernementales». Là, j'étais plus étonnée.
Est-ce qu'il y a des propos antiféministes, où l'antiféminisme ordinaire réussit à infiltrer des sphères gouvernementales? J'aimerais juste que vous me disiez de quoi vous parlez, parce que ça, ça m'inquiète. Ça m'inquiète davantage. À quoi vous pensez quand vous dites ça?
Le Président (M. Huot): Mme Verreault.
Mme Verreault (Dominique): Permettez-moi de faire un petit bout, mais je vais céder la parole à Marie-Ève après, parce que votre question est très précise et réfère, là, à un document dont elle possède mieux le contenu. Et je vais en profiter pour peut-être faire un petit bout sur l'affichage.
Écoutez, pour nous, là, c'est clair que l'utilisation du corps des hommes n'est pas plus acceptable que l'utilisation du corps des femmes et donne des messages aux jeunes. Et ça commence très tôt dans la vie des enfants que de se faire des stéréotypes et de vouloir être associé ou de vouloir représenter ces stéréotypes-là. Alors, écoutez, pour nous, là, ce n'est pas... le débat, là, ce n'est pas de dire: Bien, parce qu'il y a des hommes, c'est acceptable qu'il y ait des femmes, ou vice versa.
Ceci étant dit, évidemment, là, il y a des questions qui sont très personnelles dans ça, mais il y a des choses qui sont toujours aussi inacceptables. Et, pour moi, d'utiliser le... et pour nous, je dirais, là, d'utiliser le corps des femmes pour vendre une voiture, de la dénuder pour vendre une voiture, est-ce que c'est acceptable? Est-ce que c'est nécessaire pour vendre des voitures? On peut comprendre que la beauté est... l'esthétisme et les critères de beauté sont différents puis que de voir des belles choses, que ce soit un beau spectacle, une belle femme ou un beau cadre, c'est beau, une belle statue, mais, ceci étant dit, est-ce nécessaire pour vendre un produit? Et c'est là où, je dirais, on fait en sorte que le corps des femmes devient un objet.
Écoutez, moi, je pense que, s'il y a une volonté politique de s'attaquer à ce problème, on va trouver les façons, dans une loi-cadre, dans un règlement, dans une loi, de venir restreindre l'utilisation de la femme dans... comme objet ou dans des situations qui la mettent... qui la dénigrent ou, bon, qui discriminent.
Ceci étant dit, je vais, parce qu'on a peu de temps, laisser la parole à Marie-Ève pour répondre précisément à votre question sur ce qui touche le gouvernement.
Le Président (M. Huot): Mme Quirion.
Mme Quirion (Marie-Ève): Juste pour donner un exemple très concret, il y a deux ou trois ans, dans le palier municipal, puisque les sphères gouvernementales, évidemment, c'est plus large, il y a eu une tentative d'instaurer une journée de l'homme en égalité à la Journée de la femme, avec un discours clairement antiféministe disant que le féminisme était dépassé, désormais il fallait s'attaquer surtout aux problèmes des hommes.
Mme Grandmont (Lucie): Je peux?
Le Président (M. Huot): Oui. Allez-y, Mme Grandmont, oui.
Mme Grandmont (Lucie): Oui, bien, si je peux rajouter, en étant responsable de la condition féminine au Syndicat de la fonction publique, nous avons dû également, l'année dernière ou l'année d'avant, interpeller la ministre de la Condition féminine parce qu'il y a un ministère ou un organisme qui n'a pas voulu faire d'activité pour le 8 mars, en disant que le 8 mars, ce n'était pas juste la Journée des femmes, que tous les employés et employées pouvaient participer à ce genre de journée. Et ça, c'est dans un ministère près de chez nous.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci. Merci beaucoup. Il y a une chose dont vous ne parlez pas, mais je m'adresse particulièrement à Mme Grandmont puis d'ailleurs pour féliciter le Syndicat de la fonction publique du Québec, c'est de regarder la liberté, disons, vous savez, les différentes libertés les unes par rapport aux autres et la liberté religieuse par rapport donc à l'égalité hommes-femmes. Bon, est-ce que cette liberté religieuse doit avoir préséance? Parce que c'est ça. À un moment donné, c'est que les droits qui sont inscrits dans la charte, bien, quand il y a un jugement, bien, c'est qu'on choisit de donner préséance à un droit sur un autre. Bon. Le syndicat... je ne parle pas des autres syndicats à présent, pour l'instant en tout cas, j'espère que l'Intersyndicale se penchera éventuellement là-dessus cependant, mais le Syndicat de la fonction publique, qui est venu donc devant nous lorsqu'on étudie le projet... -- il y avait des auditions sur le projet de loi n° 94 -- a été très, très clair en disant que l'égalité hommes-femmes devait toujours avoir préséance sur l'invocation, disons, de la liberté religieuse concernant les accommodements religieux dans la fonction publique.
Alors, moi, j'interpelle l'Intersyndicale, qui se penche d'une manière féministe, d'un point de vue féministe sur toutes les questions qui donc agitent notre société et notre démocratie, pour qu'éventuellement donc l'Intersyndicale prenne position là-dessus. Il y a un syndicat donc qui l'a fait, qui l'a bien fait, en tout cas, bien sûr, de mon point de vue. Mais est-ce que vous avez, à l'Intersyndicale, où il y a quand même 200 000, justement, femmes qui sont membres de l'ensemble de cette Intersyndicale... est-ce que vous vous êtes penchés là-dessus ou il n'y a que le Syndicat de la fonction publique du Québec qui s'est prononcé?
Mme Grandmont (Lucie): Je dirais...
Le Président (M. Huot): Oui, Mme Grandmont.
**(12 heures)**Mme Grandmont (Lucie): Je dirais tout d'abord que, bon, nous, vous connaissez, on a une position définie qui est très claire. En tout cas, quant à nous, elle est très claire. Elle est identifiée. Elle est strictement au niveau des services publics dans la fonction publique. Elle ne va pas altérer les droits des gens sur la rue, dans leur vie privée. C'est uniquement au niveau de dispenser les services publics, notre position est très claire. Il y a des discussions qui se font en intersyndicale, il y a des discussions qui restent à poursuivre. Les réalités dans les milieux de travail ne sont peut-être pas nécessairement les mêmes pour chacun des syndicats membres de l'Intersyndicale, mais effectivement il y aurait des discussions à poursuivre. Et je vous dirais qu'en matière de laïcité, et sur laquelle, nous, on s'est prononcés, c'était justement pour avoir une égalité autant au niveau du service donné qu'au niveau du traitement des employés dans un même ministère et organisme. Mais la discussion reste à faire... elle est entamée, elle reste à faire au niveau de l'Intersyndicale.
Mme Beaudoin (Rosemont): M. le Président, oui, une toute petite précision en ce qui concerne donc notre position à nous, de l'opposition officielle -- elle est la même que la vôtre sur cette question-là: il n'est pas question de l'espace public, c'est-à-dire de la rue, du marché, des parcs, enfin, etc. La laïcité, pour nous, c'est celle des institutions publiques et des agents de... de ces institutions publiques qui incarnent et représentent ces institutions. Alors, je pense que cette précision était nécessaire aussi et que cette laïcité, donc, elle s'applique aux institutions, donc, publiques. Voilà. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Huot): Je reconnais maintenant la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Dans votre mémoire, la conciliation famille-travail prend une place importante et particulièrement auprès des femmes des familles monoparentales, qui, comme vous le dites, sont à 80 % menées par des femmes. Vous soutenez le fait de dire qu'il faut renforcer l'obligation des employeurs en matière de conciliation travail-famille mais particulièrement pour le volet monoparental. J'aimerais ça vous entendre là-dessus et quels types de solutions devraient être envisagés mais particulièrement pour familles monoparentales. Pas nécessairement de la famille... complète, qu'on pourrait dire, mais des mesures spécifiques que vous voyez qu'on pourrait identifier pour soutenir justement les familles monoparentales à avoir premièrement des... plutôt des... du travail à temps complet, mais aussi avoir une garantie, là, de revenus, là. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Huot): Mme Boisclair.
Mme Boisclair (Michèle): Écoutez, c'est très préoccupant, parce que, dans notre organisation, qui représentons 92 % de femmes majoritairement, il y en a aussi 30 % d'entre elles qui sont en situation de monoparentalité, vous comprendrez, c'est quelque chose qui nous préoccupe beaucoup. Ce qu'on aimerait, c'est qu'il y ait une meilleure disponibilité, en termes de services de garde, pour ces femmes-là qui sont en situation de monoparentalité. Souvent, elles se voient prises à accepter des petits postes, justement à cause de ces difficultés-là.
On fait aussi référence aux horaires atypiques, ce qui nous touche beaucoup. Moi, j'ai des jeunes qui ont des enfants et qui me disent: Bien, elle ouvre sa garderie à 6 heures pour la fermer à 4 heures; mais, moi, je ne travaille pas... je ne finis pas à 4 heures -- parce qu'elle a un nombre d'heures à répondre et c'est en milieu familial -- et je n'arrive pas à être capable de faire ça. Alors, elle est obligée de prendre du temps partiel; donc, diminution de revenus, beaucoup de précarité.
Alors, je crois que les employeurs pourraient regarder à instaurer un service de garde... Il y en a certains qui en ont, mais ils sont de 8 à 4 ou de 8 à 6, puis c'est fini. Alors, les gens qui sont de soir, dans notre genre de travail qu'on fait, nous, comme professionnelles en soins, de nuit, n'ont pas accès à des services. Et c'est une réalité: les hôpitaux vont toujours continuer à fonctionner 24 heures sur 24, sept jours sur sept; ça va toujours être le plus gros employeur dans un CSSS, si je compare avec les CHSLD ou les CLSC. Alors, vous comprendrez qu'il y a des mesures très précises à faire.
Et, moi, je pense que le gouvernement doit avoir un leadership là-dedans pour être en mesure de dire aux employeurs: Vous vous devez de trouver des solutions, en services de garde, pour accommoder ces gens-là. Ce n'est pas normal que, parce que je suis une femme, que j'ai des enfants, je sois obligée d'être à temps partiel, à cause du manque de services qui me seraient accessibles. Et c'est malheureusement cette réalité-là qu'on y voit.
Le Président (M. Huot): Oui. Mme Verreault, allez-y.
Mme Verreault (Dominique): Bien, peut-être aussi... peut-être en complément, je pense qu'il peut y avoir des solutions du genre de services d'aide aux devoirs à domicile, bon, un support à la personne, à la femme monoparentale pour le ménage, l'entretien de la maison. Bref, un support qui vient, là, par des... des services publics instaurés par le gouvernement et qui permettent à ces femmes-là d'être en mesure d'occuper des emplois à temps complet.
Parce que la pauvreté, c'est, je pense, au coeur des problèmes que vivent les femmes, qu'elles soient en situation monoparentale ou autre. Mais évidemment, en situation monoparentale, c'est le nerf de la guerre; on le sait, c'est d'être capable de vivre décemment, d'avoir l'argent qu'il faut pour vivre décemment. Alors, je pense qu'il faut trouver des façons de les soutenir, ces femmes-là, puis ça commence par la lutte à la pauvreté et l'éducation évidemment, là, et des soins de santé, là, adéquats.
Mme Boisclair (Michèle): ...
Le Président (M. Huot): Oui. Allez-y, Mme Boisclair.
Mme Boisclair (Michèle): Tout à l'heure, Mme la ministre a soulevé la question de la main-d'oeuvre indépendante, que c'étaient des femmes. C'est vrai. Cependant, elles se mettent en situation où présentement elles peuvent obtenir 18 % de plus au niveau du taux horaire, ce qui est, pour nous, d'une certaine façon, très inéquitable pour les professionnelles en soins qui sont fidèles au secteur de la santé, mais aussi elles se placent en situation de ne pas avoir nécessairement une retraite qui soit très compensée. Parce que, dans les faits, même si on leur dit qu'elles ont un régime de retraite, il n'est jamais à la hauteur de ce que, nous, les employées de l'État, on a été capables de négocier, on a été capables d'obtenir.
Alors, vous comprendrez qu'on ne peut pas soutenir le fait que, parce que ce sont des femmes en main-d'oeuvre indépendante, on accepterait ça. Elles le choisissent souvent à cause de la conciliation famille-travail. On a obtenu des gains dans notre dernière négociation qui, on espère, va faire changement. Parce que, d'ici trois ans, c'est 26 000 d'entre nous qui allons prendre la retraite, et ce sera 26 000 jeunes à attirer dans le réseau de la santé, ce qui sera un très gros défi et un très gros défi pour la conciliation famille-travail. Parce qu'elles ont des exigences, et je vous dis, moi, même si je suis à la retraite, je serai là pour faire toutes les batailles qu'elles voudront pour obtenir plus que ce qu'on a présentement.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, Mmes Dominique Verreault, Lucie Grandmont, Michèle Boisclair, Marie-Ève Quirion. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
J'invite les représentantes de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec à prendre place.
Je suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 6)
(Reprise à 12 h 8)
Le Président (M. Huot): Alors, À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais de fermer la porte derrière, s'il vous plaît. À l'ordre!
Donc, nous recevons les représentantes de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec. Merci d'être là malgré les petits problèmes de circulation. Donc, nous avons procédé à quelques ajustements. On vient de vous informer qu'on va y aller, et ce, pour une période de 30 minutes, compte tenu, là, de l'heure. Donc, ce sera un 10 minutes pour votre présentation, un échange de 10 minutes avec la partie ministérielle et de 10 minutes avec l'opposition officielle.
Donc, je demanderais à la représentante du groupe de bien s'identifier et d'identifier la personne qui l'accompagne, et vous avez la parole pour les 10 prochaines minutes.
Fédération des associations
de familles monoparentales et
recomposées du Québec (FAFMRQ)
Mme Lévesque (Sylvie): Bonjour. Merci. Sylvie Lévesque, directrice générale de la fédération -- que vous avez nommée. Je ne la renommerai pas, comme ça, je vais m'épargner quelques minutes de temps, comme on n'en a déjà pas beaucoup. Et ma collègue, Lorraine Desjardins, qui est agente de recherche et de communication à la fédération, qui va aussi faire... en tout cas, on va faire cinq minutes, finalement, chacune. On avait quatre pages, alors on va réduire ça.
Donc, effectivement, désolée... on tient à s'excuser pour le délai, mais c'est... je vous avertis, c'est très laid dehors. Je suis partie ce matin, à 7 h 30, de Montréal, et pourtant je suis une automobiliste assez chevronnée, et je vous dirais que ce n'était vraiment pas beau du tout, du tout. Alors, c'est pour ça que, quand vous dites: C'est un petit problème, là, disons que... je pense que la météo, ils se sont trompés, là, comme d'habitude. Donc, comme ce n'est pas une science exacte, la météo, évidemment, ils se trompent souvent.
Alors, ceci étant dit, donc rapidement, alors, merci beaucoup, effectivement, de nous avoir permis de présenter notre mémoire à la commission. Ce n'est pas notre première, on était aussi, lors de la commission en... en 2004 ou 2005, je ne me souviens plus, là. Déjà...
Mme Desjardins (Lorraine): 2004.
**(12 h 10)**Mme Lévesque (Sylvie): 2004. Et donc la fédération, évidemment, c'est important pour nous parce que... bien sûr, comme vous l'avez entendu aussi tantôt puis d'autres collègues de d'autres groupes l'ont sûrement souligné, malgré les avancées qu'il y a eu notamment pour les familles monoparentales au Québec, par l'instauration du soutien aux enfants et, bon, d'autres mesures pour la famille... a favorisé évidemment une augmentation importante de leurs revenus, heureusement. Elles partaient de loin, donc on avait beaucoup de travail à faire. Malgré ces avancées-là, il reste qu'il y a encore beaucoup, majoritairement, des familles monoparentales qui sont dirigées par des femmes, au Québec, et qui vivent dans la pauvreté. Donc, pour nous, c'était important et de pouvoir venir présenter une partie... Évidemment, notre angle est beaucoup au niveau de la lutte à la pauvreté puisque, comme je disais tantôt, malgré les avancées, il y a encore... ça concerne évidemment les familles monoparentales, l'égalité entre les hommes et les femmes.
Donc, pour nous, à la fédération, la pauvreté est le premier obstacle de l'atteinte à l'égalité, particulièrement pour les femmes chefs de familles monoparentales, et il est inadmissible qu'au sein d'une société riche comme la nôtre les personnes et les familles vivent encore dans la pauvreté et l'exclusion. Si, par le ciblage des populations dites à risque, notamment les enfants qui vivent au sein d'une famille monoparentale en situation de pauvreté, on cherche à endiguer les coûts économiques et sociaux de la pauvreté, ne serait-il pas plus simple de leur permettre l'accès à des aliments de qualité et à des logements salubres et bien chauffés par des revenus suffisants? Quand on sait que le premier déterminant de la santé est la situation économique des personnes, on comprend mal la logique du gouvernement de vouloir renflouer les coffres de l'État en instaurant des mesures qui créeront encore plus de pauvres.
Les différentes questions soulevées dans notre document réalisé en vue des présentes consultations appellent des réponses spécifiques à la situation des familles monoparentales. Par exemple, en ce qui concerne la promotion de modèles et de comportements égalitaires, notamment en ce qui a trait au partage des responsabilités parentales, nous croyons que les enjeux dépassent la seule division traditionnelle des rôles selon le sexe. D'autres obstacles freinent également la possibilité pour les parents de jouer adéquatement leur rôle. Il serait grand temps, par exemple, de questionner les modèles qui font en sorte que l'organisation du travail serve davantage les profits plutôt que les besoins des personnes et des familles. C'est le cas, par exemple, des commerces qui sont maintenant ouverts sept jours sur sept. Ce sont d'ailleurs majoritairement des femmes qui occupent ce type d'emploi, le plus souvent mal rémunéré et non syndiqué, donc, par le fait même, souvent des femmes monoparentales et qui doivent composer au quotidien avec toutes les complications qu'impliquent les horaires atypiques.
Dans les faits, de plus en plus d'efforts sont exigés, de la part des familles, pour mieux s'adapter aux besoins du marché de l'emploi, toujours plus exigeants en termes de temps et d'énergie. C'est d'ailleurs le cas des familles monoparentales aussi à l'aide sociale qui, pour le moment, bénéficient de la mesure de contrainte temporaire à l'emploi. Cette mesure permet aux mères d'enfants de moins de cinq ans de recevoir un montant de prestations additionnel. Or, récemment, des rumeurs ont circulées à l'effet que les critères de cette catégorie seraient modifiés et que seules les mères ayant des enfants de moins de deux ans seraient considérées comme ayant des contraintes temporaires. On doit d'abord s'assurer qu'il existe des mesures d'insertion en quantité suffisante et que les emplois vers lesquels ces mesures sont censées mener sont des emplois de qualité.
Rappelons que les femmes monoparentales sont les championnes en termes de participation aux mesures d'insertion. Dans tous les travaux qui ont été faits ou toutes les recherches qui ont été faites même par le ministère de l'Emploi et... Solidarité sociale -- j'essaie de faire vite -- les femmes monoparentales, notamment, sont celles qui participent le plus à des mesures d'employabilité et c'est celles qui veulent s'en sortir le plus. Donc, elles essaient le plus possible de sortir de ce cercle de la pauvreté.
D'ailleurs, avec l'avènement de la perception automatique des pensions alimentaires pour enfants et les tables de fixation, qui ont été très positives pour ces familles-là, il est désormais admis que chacun des deux parents doit assumer les coûts relatifs aux soins de son enfant. Pourtant, des milliers d'enfants sont encore privés d'une partie de ces montants, parce que l'un de leurs parents est prestataire d'aide sociale, bénéficiaire du programme de prêts et bourses, permettant ainsi à l'État de réaliser des économies sur le dos des familles les plus pauvres. Parce qu'on sait que maintenant, depuis 1997, les pensions alimentaires pour enfants ne sont plus reconnues comme un revenu pour des parents qui ne sont pas à l'aide sociale, les prêts et bourses, l'aide au logement, et tout ça; donc, on parle évidemment des familles qui sont les plus pauvres. Il y a eu des mesures qui ont été proposées en juin dernier, suite au plan d'action de M. Hamad, de donner 100 $ par enfant, alors qu'on sait que majoritairement des familles, surtout celles qui sont jeunes... bon, on sait qu'actuellement, au Québec, il y en a qui ont plus que deux enfants, mais majoritairement les familles se retrouvent avec un enfant, donc un 100 $ par enfant, ce n'est quand même pas énorme, et, nous, on réclame évidemment que l'ensemble des pensions alimentaires pour enfants, quand on reçoit des programmes sociaux, ne soient plus déduites de leurs prestations. Lorraine?
Mme Desjardins (Lorraine): Merci. En ce qui concerne l'atteinte de l'égalité économique pour un bon nombre de mères monoparentales, notamment celles qui ont des jeunes enfants, les possibilités réelles d'insertion en emploi sont difficiles. Vu leur faible niveau de scolarité, souvent elles sont... elles occupent des emplois au bas de l'échelle, avec de moins bonnes conditions de travail. C'est le cas particulièrement des femmes qui ont dû interrompre leurs études ou se retirer du marché du travail à la venue d'un enfant. Évidemment, il y a aussi toutes les problématiques qui s'ajoutent à la rupture... qui sont liées à la rupture: violence conjugale, problèmes de santé physique et mentale, qui vont influer aussi sur le parcours professionnel.
Alors, comme recommandation, la fédération, pour favoriser l'égalité économique pour les femmes monoparentales, entre autres, on recommande le développement de services d'insertion à l'emploi spécifiques et adaptés aux besoins particuliers des femmes responsables de familles monoparentales, c'est-à-dire qui tiennent compte de leur histoire de vie et de leur réalité en termes de responsabilité parentale. Ce qui existe présentement comme mesures d'Emploi-Québec, par exemple, souvent ne sont pas du tout adaptées ni en termes d'horaire ni en termes de... Souvent, il y a plusieurs femmes monoparentales qui vont avoir besoin d'une étape préalable qui s'appelle la préemployabilité avant de s'en aller en employabilité. Et les mesures d'Emploi-Québec souvent ne sont pas... sont mal adaptées.
On a parlé un peu, tantôt, de la conciliation famille-travail qui n'était vraiment pas évidente. C'est difficile pour les familles à deux parents; vous imaginez un peu ce que c'est pour des familles monoparentales. Évidemment, le Québec est un chef de file encore aujourd'hui en termes de politique familiale puis de conciliation famille-travail. On a un beau réseau de CPE, de garde à contribution réduite. Évidemment, il faut encore... il manque encore de place. Tout le monde le sait, là, on vous rappelle... on ne vous apprendra rien là-dessus. Sauf que c'est un acquis qu'on aimerait conserver puis qu'on croit important, d'autant plus que l'accès à des services de garde à contribution réduite, ça a été prouvé dans des tonnes d'études que ça favorise la participation au marché du travail des mères et des mères monoparentales, bien sûr.
Il y a aussi le Régime québécois d'assurance parentale qui est une belle réussite, qui est, en fait, le résultat de longues luttes de la part du mouvement des femmes. Le seul hic, c'est que présentement sa pérennité est peut-être menacée parce qu'on a un financement qui est seulement... qui vient seulement des travailleurs et des travailleuses et des employeurs. Nous, ce qu'on propose, c'est un financement mixte et qui permettrait aussi d'inclure des exclues: parce qu'il y a présentement 20 000 femmes qui sont exclues du Régime québécois d'assurance parentale, c'est-à-dire les étudiantes, les femmes qui sont déjà à la maison, les jeunes mères, et tout ça, qui n'ont pas encore travaillé pendant l'année.
Alors, il y a évidemment des liens étroits entre les conditions économiques et les conditions de santé. Ce n'est pas du tout une surprise quand on entend que dans les quartiers défavorisés, l'espérance de vie est beaucoup plus basse que dans les quartiers plus riches. Il y a une étude qui a été faite il y a un... Dans le plan d'action 2010-2013 sur la santé des femmes, du ministère de la Santé et Services sociaux, on dit que près du quart des mères monoparentales se retrouvent dans une situation d'insécurité alimentaire. La proportion de femmes indiquant avoir plus d'un problème de santé et présentant un indice de détresse psychologique est plus élevé chez ces dernières que chez les mères de familles biparentales.
Or, au lieu d'augmenter les revenus de ces familles-là ou de leur assurer des situations... des conditions économiques, on multiplie les programmes, ce qu'on appelle, d'intervention précoce, qui ciblent les familles à faibles revenus, particulièrement les jeunes enfants qui vivent au sein d'une famille monoparentale en situation de pauvreté. On voit de plus en plus ces choses-là, notamment avec les partenariats... les PPP sociaux qui sont financés à coups de centaines de millions en partenariat avec la fondation Chagnon.
Je termine. Je vais conclure... ma dernière petite phrase. Alors, en terminant, on voudrait... on croit que le deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes devrait impérativement contenir des mesures visant la réduction des inégalités économiques, et il s'agit là d'un choix politique devant lequel l'État québécois ne saurait se défiler plus longtemps, parce que travailler à l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est travailler à plus de justice sociale...
Le Président (M. Huot): Merci...
Mme Desjardins (Lorraine): ...avec ça, quand même.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Avant de procéder à la période d'échange, j'ai besoin du consentement de tout le monde. Étant donné qu'on avait prévu terminer pour 12 h 30, on va terminer une dizaine de minutes plus tard. Je présume que j'ai le consentement de part et d'autre?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Huot): Donc, je reconnais maintenant la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine pour une période de 10 minutes.
**(12 h 20)**Mme St-Pierre: Merci. Merci de votre présentation. Je pense que la question des familles monoparentales est une question qui est vraiment importante. Parce que, on le voit, selon les statistiques qu'on a en 2008, le revenu moyen des mères seules est à 22 807 $, et il est inférieur à celui de la population des femmes de 16 ans et plus, qui est à 26 275 $. C'est largement inférieur à celui des hommes, qui est, lui, à 32 154 $. Alors, les chiffres parlent. Même si le taux d'employabilité des femmes monoparentales a augmenté considérablement, là, au cours des... Mais vous avez parlé d'emplois précaires puis c'est souvent quelques heures puis... Alors, il y a vraiment beaucoup de travail à faire de ce côté-là, puis il faut encourager les femmes, les familles monoparentales -- puis on sait que c'est souvent les femmes qui sont les chefs des familles monoparentales -- à pouvoir avoir plus pour... Enfin, c'est les enfants qui vont en bénéficier, là, on le sait, là, tu sais.
J'ai deux questions: une sur est-ce que, avec les nouvelles technologies puis tout ce qu'on voit avec l'avancement des médias, et tout ça, puis, bon, puis on... évidemment, on veut travailler sur l'Internet partout au Québec, là, est-ce que la formation en ligne... si on avait une meilleure... si on améliorait ou si on donnait plus d'incitatifs sur une formation qui pourrait se faire, est-ce qu'il y aurait des choses à améliorer là? Est-ce qu'il pourrait y avoir des actions qui feraient en sorte que, peut-être pas à court, court terme, mais à moyen, à long terme, on verrait comme une amélioration de l'autonomie économique des familles monoparentales?
Mme Desjardins (Lorraine): Le principal défaut qu'on voit à cette chose-là, c'est que... Bon, d'une part, encore faut-il avoir la technologie qui nous permette d'y accéder, ce qui n'est pas nécessairement le cas pour toutes les familles, mais c'est aussi que les femmes monoparentales, les familles monoparentales vivent de l'isolement beaucoup.
Donc, ce qui est important quand... On les voit... Quand elles participent à des mesures d'insertion, elles créent un réseau, elles tissent des liens avec d'autres personnes. Donc, c'est important pour elles, cette activité-là de sortir, de créer des solidarités avec d'autres personnes, de rencontrer d'autres personnes qui vivent les mêmes situations, la même problématique. C'est le cas, par exemple, dans nos associations, les associations de familles monoparentales: quand elles accueillent des femmes monoparentales, bien, elles peuvent, ces femmes-là, créer des liens, sortir de leur isolement.
Donc, le principal défaut que je verrais... Je trouve que c'est quand même une bonne idée, je pense que c'est quelque chose qui est en voie de se développer, évidemment, les formations par technologies, sauf qu'il ne faut quand même pas faire en sorte que ce ne soit que ça, que ce ne soit qu'une seule mesure.
Mme St-Pierre: Je comprends très bien. Sur la question du congé parental, vous avez parlé de 20 000 femmes exclues du congé parental. Alors, je voudrais comprendre, donc, que, si... Je pense, c'est 80 000 naissances qu'on a...
Mme Desjardins (Lorraine): Ce n'est pas que monoparentales, les 20 000 exclues, là.
Mme St-Pierre: Non, non, c'est ça, c'est 20 000 femmes. Mais, je pense, c'est 80 000 naissances... au-dessus de 80 000 naissances qu'on a eues l'année dernière. Donc, il y aurait une femme sur quatre, à peu près, qui met un enfant au monde, qui n'a pas accès à ce congé parental-là. C'est à peu près ça?
Mme Desjardins (Lorraine): En fait, les...
Mme St-Pierre: Quand vous dites 20 000, c'est 20 000 par année, là? C'est...
Mme Lévesque (Sylvie): Bien, c'est parce que... Comme on disait tantôt, puis, je pense, tout le monde le sait, c'est que, majoritairement, les femmes monoparentales se retrouvent dans des jobs qui ne sont pas syndiqués pour la plupart des cas. Donc, c'est sûr que les travailleuses autonomes ou les travailleurs... les travailleuses autonomes ont accès au régime d'assurance parentale. Sauf que, vous savez comme moi que, quand tu cotises à 2 000 $, donc 2 000 $ de... ou 75 % de pas grand-chose, ça ne donne pas grand-chose, hein? Vous avez... Bon, c'est intéressant, ce régime-là, quand tu es un... comment... à un salaire substantiel, hein, vous êtes d'accord avec moi? C'est comme quand on tombe sur le chômage. Si on reçoit... Si on a un salaire pas cher, bien, c'est sûr qu'on aura des résultats pas chers.
Donc, tout ça, ça veut dire qu'à ce moment-là les femmes ont... peuvent avoir accès, oui, sauf que, si, par exemple, tu travailles dans un salon de coiffure puis que tu as un enfant, bien, vous savez comme moi que tu n'as pas de régime de retraite. Tu peux cotiser, oui, sauf que tu vas perdre ta clientèle dans trois mois si tu ne retournes pas au travail puis, bon.
Donc, la plupart des femmes monoparentales se retrouvent dans des situations de jobs qui ne peuvent pas permettre justement de pouvoir... Ou les étudiantes. Parce qu'on sait qu'il y a un bon pourcentage d'étudiantes monoparentales aussi qui sont soit sur les prêts et bourses... Donc, déjà, l'ensemble des revenus qu'elles ont sont pour les prêts et bourses. Quand tu as d'autres revenus, c'est considéré dans tes revenus, donc on te coupe, de toute façon, un peu partout. Donc, ces personnes-là ne vivent pas, en général, richement. Donc, tu as beau avoir accès à... Alors que les personnes qui sont assistées sociales aussi, elles n'ont pas accès non plus au régime d'assurance parentale. Donc, il faut que ça... c'est un régime de cotisation. Donc, il faut que ton employeur puis ton... toi, tu cotises. Donc, c'est ça, le principe.
Donc, c'est pour ça que, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il y a un certain nombre de femmes, par exemple... C'est pour ça qu'on l'appelle un régime mixte: que ce ne soit pas juste un régime d'assurance, mais que le gouvernement aussi investisse une partie... le gouvernement, c'est-à-dire, nous tous, là, finalement, par nos impôts, pour pouvoir justement contribuer davantage à ce que ces femmes-là puissent avoir des meilleures conditions.
Parce que, si tu retournes avec tes enfants, bon, tu es monoparentale... ou même si tu ne l'es pas, un mois ou deux après, vous savez comme moi que ce n'est pas évident. Premièrement, il faut que tu te trouves un service de garde -- Lorraine en a parlé, puis je pense qu'on en parle longuement au Québec; il faut que tu en trouves un de disponible. Puis, à 7 $, même... pour les familles monoparentales, quand on a augmenté le prix, bien, pour elles, c'est déjà beaucoup d'argent.
Mme St-Pierre: M. le Président, je vais laisser la chance à mes collègues de poser des questions.
Le Président (M. Huot): Je reconnais maintenant le député de Chomedey.
M. Ouellette: ...ça dans combien de minutes, là?
Le Président (M. Huot): Bien, un peu plus de quatre minutes.
M. Ouellette: Hé! Bien, c'est bon. Je suis comblé d'avoir quatre minutes. Merci, mesdames. Merci d'avoir bravé notre hiver qui tardait à arriver, mais ça a adonné que c'était à matin, effectivement.
Mme Desjardins (Lorraine): Demain, il va faire très beau.
M. Ouellette: Bon. Ça fait qu'on va suggérer aux gens qui devaient retourner aujourd'hui de retourner juste demain?
Dans un autre créneau, là, je lisais votre mémoire puis je veux vous parler de médiation familiale: parce que, d'un côté, vous êtes en faveur; d'un autre côté, vous êtes inquiets. Je lisais, à la page 27 de votre mémoire, là, que, suite au dépôt du troisième rapport, vous avez des inquiétudes particulièrement quand on parle de violence conjugale, et je pense que c'est important que je vous donne l'opportunité de nous mentionner pourquoi vous êtes inquiètes, particulièrement dans le cas de violence conjugale, pour tous ceux qui nous écoutent. Parce que, je veux dire, c'est une tribune privilégiée, là, et je veux vous entendre là-dessus parce que c'est quelque chose qu'on entend parler régulièrement, de médiation, de violence conjugale, puis je veux faire le lien, là, avec vous.
Mme Desjardins (Lorraine): Bien, écoutez, il y a un troisième rapport, qui est sorti, du Comité de suivi sur la médiation familiale. Et, dans ce troisième rapport là, on était membres du comité de suivi puis finalement on s'est retirées.
Ce troisième rapport là est un peu inquiétant, parce que, nous, on avait recommandé, de concert avec les groupes qui s'occupent des femmes victimes de violence, qu'aussitôt qu'il y a de la violence conjugale dans un couple... dans un ex-couple, la médiation familiale soit totalement exclue.
Là, on semble, dans ce troisième rapport là, être un peu plus tièdes, d'autant... Puis, en plus, c'est qu'on se dit: Bien là, il n'y en aura pas, de problème, on veut bien gérer ça, on va donner des formations aux médiateurs; il va y avoir des formations, et tout ça. Nous, on pense que le... ce n'est pas quelques heures de formation à des médiateurs, dont ce n'est pas la job dans la vie de détecter de la violence conjugale, qui vont nécessairement nous rassurer.
Donc, il faudrait comme recommandation, entre autres... On veut que ce soit clairement établi, dans toutes les campagnes de promotion et de publicité qu'il y a sur la médiation, qu'il y ait... que ce soit clairement établi qu'aussitôt qu'il y a eu présence de violence familiale la médiation familiale soit exclue. Parce que ça ne se peut pas, il y a toutes sortes de formes de violence, vous le savez: il y a la violence physique, mais il y a aussi la violence psychologique, il y a la manipulation, et tout ça. Donc, on est devant des femmes qui, pour acheter la paix, vont plier dans des situations de médiation. Même s'il y a un médiateur dans le portrait, on ne sait pas ce qui se passe en dehors des séances de médiation. Donc, on recommande fortement la grande, grande prudence, et enfin on pourra peut-être se rasseoir avec le ministre de la Justice là-dessus, mais on recommande également toute la partie, là, qui était...
La médiation, c'est merveilleux parce que c'était un service gratuit, puis là on se rend compte que la gratuité de ce service-là est menacée, c'est-à-dire qu'on commence à parler, dans le troisième rapport, d'avoir une tarification. Écoutez, même le Barreau... même les membres du Barreau disaient que... reconnaissaient puis les associations de médiateurs reconnaissaient que la raison pour laquelle les gens utilisent le service, c'est parce que c'est gratuit. Donc, si on va tarifer, bien là, regardez, on vient de changer... de dénaturer le service. Et, croyez-moi, quand il y a des enfants dans un couple, c'est vraiment très important d'avoir accès à des séances de médiation, là.
Mme Lévesque (Sylvie): Si je veux juste compléter: c'est que la médiation, c'est un processus de communication et c'est aussi fait sur une base volontaire. Donc, quand on est dans un contexte de violence, bien, je pense qu'on n'est pas dans des contextes de... volontaires. C'est une base de gens où est-ce qu'ils vont aller... C'est sûr qu'on ne parle pas de conflit, on parle de violence, donc c'est autre chose. Parce que, dans une rupture, il y a nécessairement des conflits, bon, à différents degrés, heureusement, là, tout le monde ne se ramasse pas en cour. Mais il reste qu'à ce moment-là ce n'est pas sur une base volontaire, donc tu es en présence de ton agresseur, entre guillemets.
Donc, à ce niveau-là, on ne parle plus de médiation, on parle d'intervention. Donc, c'est pour ça que, nous, on dit: Il existe des intervenants sociaux, il existe différentes façons de faire. Donc, ne passons pas par la médiation familiale pour tenter de...
**(12 h 30)**Le Président (M. Huot): Merci.
Mme Lévesque (Sylvie): Bon, voilà. C'est ça.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Bonjour. Écoutez, je suis contente de la question de mon collègue sur la médiation familiale; c'était ma première. Et vous êtes un des premiers groupes à nous parler de cette question-là. Et je trouve ça absolument important, parce qu'effectivement, en ce qui concerne l'universalité du programme, s'il devient tarifé -- entre autres, on vient de parler des femmes qui sont économiquement plus pauvres -- bien, ça veut dire qu'on vient de faire... on vient de les exclure. Et, dans le fond, ce qu'on... Donner un tarif, ça veut dire qu'on n'y croit pas, à ce processus-là qui, pourtant, donne des résultats intéressants.
Mais, qui plus est, en matière de violence conjugale, je ne sais pas qui a pensé à ça, là, mais...
M. Lévesque (Sylvie): Les médiateurs.
Mme Poirier: Les médiateurs. Mais... Parce que...
Mme Lévesque (Sylvie): Pour avoir des clients. C'est plate à dire, mais...
Mme Poirier: Pour avoir plus de clients.
M. Lévesque (Sylvie): Bien...
Mme Poirier: Je vais vous dire que, juste... il me semble, juste de l'énoncer, ça y répond, là, à l'effet que, en situation de violence conjugale, on ne peut pas demander... quand il y a un abuseur et une personne victime... de demander à ces gens-là de négocier de bonne foi. Il me semble que... En tout cas, je suis très heureuse que vous ayez abordé cette question-là dans votre mémoire.
Vous dire aussi qu'il y a une lecture que je fais régulièrement, qui est votre bulletin de liaison, et on y traite entre autres, dans la dernière mouture, du revenu familial. Et j'ai trouvé ça très intéressant, cette dynamique-là, et, dans le cadre justement de l'égalité hommes-femmes, cette notion de revenu familial, qui est toujours cette notion, dans le fond, de deux revenus... Le revenu familial, dans l'entendement de tout le monde, c'est qu'il y a deux revenus, mais est-ce que ces deux revenus-là sont vraiment mis à la disposition de la famille? L'étude qui est faite par Mme Belleau est vraiment, vraiment intéressante.
Concernant tout le volet que vous introduisez sur, entre autres, le fait que les pensions alimentaires sont calculées dans le revenu, le Parti québécois a déposé, depuis plusieurs années, à plusieurs reprises, un projet de loi. Il y a même eu un débat dans la... pas la dernière session, la précédente, avec le ministre Hamad. Et le constat qui en a été fait, dans le fond, c'est que le calcul des pensions alimentaires... et je veux vous entendre là-dessus, sur les impacts que ça a vraiment dans la vie des gens. Oui, sur l'aide sociale, on le calcule, mais on le calcule aussi sur les prêts et bourses, on le calcule aussi... lorsqu'on a un HLM, il est calculé dans le coût du logement du HLM, et aussi à l'aide juridique. Pour avoir accès à l'aide juridique, le coût de pension alimentaire est calculé. Et encore... on vient de parler de médiation familiale.
Il me semble qu'il y a là quelque chose, là, d'incohérent. Est-ce que la pension alimentaire est vraiment pour les enfants? Moi, je pose vraiment la question. Puis je vous demanderais de répondre à ça, là: Comment on peut continuer, là, à percevoir la pension alimentaire, dans l'ensemble de ces programmes-là, comme un revenu?
Mme Desjardins (Lorraine): Bien, dans les faits, hein, selon la loi, il y a un juge qui a décidé... ou un jugement qui a décidé que cet argent-là était supposé servir aux besoins d'un enfant. Puis, dans les faits, effectivement, comme vous le mentionnez, Mme la députée, bien, étant donné que c'est calculé comme un revenu familial et non pas un revenu pour l'enfant, bien, ça sert à payer le loyer puis la commande, hein? C'est ça qui se passe, dans le fond. Parce que, sur l'aide sociale, aux prêts et bourses, entre autres, bon, il y a eu une bonification qui a été annoncée quand même dans le dernier plan d'action, c'est-à-dire qu'au lieu de 100 $ d'exemption par enfant à l'aide sociale et aux prêts et bourses, là -- parce que présentement il y a 100 $ d'exemption qui ne sont pas calculés comme un revenu -- là, ça va être 100 $ par enfant.
Cependant, on se doute bien que les femmes étudiantes monoparentales, elles n'en ont pas quatre, cinq, des enfants, là, elles en ont... Elles sont jeunes, ça fait qu'elles en ont peut-être juste un. Donc, elles, elles ne verront pas leur situation changer. Puis les femmes assistées sociales, il n'y en a pas non plus des tonnes qui ont plusieurs enfants, donc ce n'est pas... C'est sûr que c'est un pas en avant, là, c'est une bonification, mais ça ne tient pas debout effectivement que de l'argent qui est versé au nom d'un enfant serve à payer le loyer puis serve à payer les dépenses familiales. C'est ça qui se passe dans les faits présentement.
Donc, nous, ça fait très longtemps qu'on dénonce ça et qu'on... C'est une mesure qui est discriminatoire, vraiment. Il y a d'ailleurs le Front commun des personnes assistées sociales qui est allé au Tribunal administratif du Québec là-dessus pour faire reconnaître ça comme une mesure discriminatoire. On continue les batailles d'un côté et de l'autre, là. On a aussi déposé un recours collectif contre le ministère de l'Éducation pour que les pensions alimentaires cessent d'être considérées comme un revenu au ministère du... pas au ministère du Revenu, mais à l'Éducation. Donc, on continue les batailles et politiques et juridiques, et on a très hâte d'avoir des bonnes nouvelles là-dessus. Alors, quand vous en aurez, dites-nous-le très vite.
Mme Lévesque (Sylvie): La session s'en vient, alors peut-être que M. Charest, dans son discours, pourrait annoncer ça, ça serait une superbonne nouvelle pour les familles parentales du Québec.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Merci, M. le Président. On reconnaît là des messages à peine subtils, effectivement, qui vont être reçus, j'en suis sûr.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: ...
M. Traversy: Bien, tout à fait, alors je vais en profiter. Tout d'abord, bravo pour votre mémoire, pour vos 33 recommandations qui sont assez claires et qui sont concises. J'aime bien la façon dont ça a été présenté.
J'aimerais profiter de l'occasion qui m'est allouée pour vous parler afin de discuter avec vous d'un point qu'on n'a pas entendu souvent jusqu'à présent avec les groupes féministes qu'on a pu rencontrer ou impliqués dans le milieu du travail.
Vous parlez beaucoup de la question de l'aide financière aux études et des droits de scolarité. Donc, à ce moment-là, j'aimerais ça vous entendre d'une façon un petit peu plus claire. Vous avez commencé à en parler. Votre quinzième recommandation prête sur des modifications au Programme de prêts et bourses pour mieux satisfaire les besoins des parents étudiants.
J'aimerais ça que vous puissiez peut-être encore un peu élaborer la proposition suivante: c'est de demander le gel des frais de scolarité. J'aimerais ça aussi que vous puissiez me faire le lien, là, dans un plan d'action d'atteinte de l'égalité hommes-femmes, un peu, là, quelle est la corrélation directe, là, que vous voyez entre le gel des frais de scolarité puis une meilleure atteinte, là, d'égalité de fait entre les hommes et les femmes.
Mme Desjardins (Lorraine): Bien, écoutez, le gel des frais de scolarité, c'est parce que les femmes monoparentales reçoivent plus de prêts et bourses, cependant, ça ne couvre pas leurs besoins. Parce que, vous savez, quand on est monoparental puis on est aux études, bien, on ne peut pas partager son logement avec une gang de chums -- parce qu'on a des enfants, hein? Donc, on a un loyer plus cher à payer, on a plus de besoins de base... on a besoin de plus de revenus. Donc, en bout de ligne, ces femmes-là se ramassent avec plus de dettes puisqu'elles ont reçu plus de prêts.
Donc, c'est sûr que, si on augmente les frais de scolarité, bien... c'est sûr que le gouvernement nous dit dans ce temps-là: Bien, on va augmenter aussi les prêts et bourses. Mais on va se ramasser, à la fin de nos études, en tant que familles monoparentales, que mères monoparentales, avec des dettes à n'en plus finir. Donc, c'est sûr qu'il y a un lien direct entre les deux, là. Moi, la relation, je la vois très clairement.
Bon, pour les autres besoins, bien, c'est sûr que... on parlait tantôt de la pension alimentaire qui est considérée comme un revenu; c'est une aberration, selon nous. Mais il y a aussi le fait que les frais de garde aux prêts et bourses, sont couverts, mais les frais de garde typique, c'est-à-dire de huit à cinq, la semaine... Mais, quand on est aux études, là, on en a besoin la fin de semaine, on a besoin le soir aussi, des frais de garde, là. Mais ça, ce n'est pas couvert, donc ça sort de notre poche... ou de maman, ou de la voisine, ou... Il faut se dépatouiller, parce qu'on a des travaux d'équipe à faire, des travaux de recherche à la bibliothèque, et tout ça.
Donc, oui, c'est sûr que l'accès aux études, c'est vraiment une voie d'or vers des emplois de qualité, là. Si on favorise ça, bien, on favorise l'accès à l'égalité, bien sûr, pour les femmes monoparentales.
Mme Lévesque (Sylvie): Si je peux compléter, c'est un peu la même affaire, comme je disais tantôt: à chaque fois qu'on augmente aussi les frais de garde de 5 $ à 7 $, bien, pour cette population-là, familles monoparentales, à chaque fois qu'on augmente ça, bien, elles, leurs revenus n'augmentent jamais. Donc, elles peuvent recevoir par ailleurs un soutien aux enfants, mais, à ce moment-là, il sert à quoi? Bon, O.K., on peut dire: Au moins, ça sert à payer les frais de garde. Mais souvent c'est insuffisant parce que, comme elles n'ont pas accès, parce que la plupart des CPE... Puis on est d'accord avec les CPE, là, on n'est pas là pour être en opposition. Mais, comme la plupart n'offrent pas des services pour répondre à leurs besoins en dehors des heures qu'eux autres peuvent offrir, bien, elles se retrouvent à payer des frais de garde plus chers que d'autres.
Donc, tout ça mis ensemble, à chaque fois que... Ça découle. Donc, à chaque fois qu'on augmente en quelque part, donc, il y a toujours, pour elles, comme un... Comment dire? À chaque fois, elles essaient de sortir de la pauvreté, puis à chaque fois on rajoute sur le... par dessus. Donc, c'est un peu ça.
Le Président (M. Huot): Je peux vous laisser un dernier commentaire pour 30 secondes, M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: ...merci beaucoup de vos explications. Je comprends, là, maintenant, un peu plus le lien, là, avec...
Mme Desjardins (Lorraine): ...le gel des frais de scolarité, c'est bon pour tout le monde aussi, pour tous les étudiants, même ceux qui ne sont pas monoparentaux, là.
Mme Lévesque (Sylvie): Parce que ce n'est pas... Pour la majorité d'entre eux, ils sont pauvres aussi, là, les étudiants, là.
Le Président (M. Huot): Donc, Mme Sylvie Lévesque, Mme Lorraine Desjardins, de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec, merci de votre contribution aux travaux de cette commission. Soyez prudentes pour le retour.
Et je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 40)
(Reprise à 14 h 3)
Le Président (M. Bernier): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Cet après-midi... Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait -- Vers un deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Cet après-midi, nous aurons l'occasion d'entendre L'Action des nouvelles conjointes et nouveaux conjoints du Québec, le Barreau du Québec, la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec, la Conférence régionale des élus, CRE, de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent et le Conseil de la famille et de l'enfance.
Donc, je vous souhaite un bon après-midi à tous. Je souhaite bien sûr la bienvenue aux représentants de L'Action des nouvelles conjointes et nouveaux conjoints du Québec. Vous avez 15 minutes pour votre présentation, par la suite nous procéderons aux échanges, en vous demandant de vous identifier et d'identifier la personne qui vous accompagne. Merci.
L'Action des nouvelles conjointes et
nouveaux conjoints du Québec (ANCO)
Mme Bilodeau (Lise): Alors, mon nom, c'est Lise Bilodeau. Je suis la présidente fondatrice de L'Action des nouvelles conjointes du Québec, et je vous présente mon vice-président, M. Alain Roy.
Je tiens particulièrement à remercier tous ces gens qui sont ici aujourd'hui, qui m'accueillent et qui nous accueillent, entre autres, vous, M. le Président, Mme la ministre, évidemment, bien sûr madame la porte-parole officielle, mesdames et messieurs les députés.
L'association milite depuis déjà 12 ans, et notre créneau tout simplement, c'est une kyrielle de services où tout simplement on va rejoindre les gens en les écoutant, en les aidant, en les guidant. Et on a aussi cette ligne 1 800 qui permet à tous les gens de la province de Québec, dans des situations difficiles, lors de ruptures, de nous rejoindre.
On a également la possibilité d'avoir ce deuxième palier où je dis souvent qu'on s'occupe énormément de la politique. Si on veut faire changer les lois, améliorer bien sûr la situation de ces gens dans notre société, l'association s'y prête. Nous avons, dans ces 12 années, desservi au moins... dans la comptabilité que nous avons faite, nous avons au moins desservi 5 312 personnes. Donc, ça vous montre tout simplement que l'association est très active.
Tout simplement, concernant... je vais y aller directement avec les conclusions et les recommandations. Alors, concernant l'orientation n° 1, vous dites: «Comment travailler à des changements effectifs et en profondeur les rôles différenciés[...]?» Alors, ma petite note personnelle, que j'ai jointe, se lit comme ceci: «Vouloir 50 % de femmes dans tous les secteurs masculins est purement utopique.» Si je vous donne un exemple: monteur de ligne. J'ai entendu parler de ça dernièrement, une dame était monteur de ligne, n'a fait qu'une demi-journée. Vous savez qu'être monteur de ligne, on a un harnais à porter, on a les fils, etc. Donc, c'est des conditions extrêmes. On poursuit. Opérer une tronçonneuse en foresterie, bien sûr, aux confins de l'Abitibi, à des heures absolument incroyables, je trouve que ce n'est pas encore nécessairement là la place d'une femme.
Alors, qui peut se targuer de pouvoir travailler dans la construction et dans tous les métiers? Chez les pompiers, les policiers, les soldats, on a réduit les critères d'embauche pour permettre aux femmes d'y accéder. Cependant, qu'arrive-t-il lorsqu'une pompière doit sortir en toute urgence son collègue quand il pèse un certain poids et qu'elle doit le sortir sur ses épaules? La question se pose. Pourtant, dans les critères, il est souvent stipulé qu'on doit avoir nécessairement les mêmes capacités. Mais vous savez qu'à l'engagement et lorsqu'on prend ces cours-là on a modifié certains critères.
Quand vous me parlez également d'égalité, la question, je me la pose également quand il s'agit des soldates. Nous en avons eu, je pense, une ou deux qui malheureusement nous est revenue décédée. Et on peut peut-être se poser la question également: Que se passe-t-il? Pourtant, on en a pas mal plus au niveau des hommes qui nous reviennent malheureusement dans leurs cercueils. Nous avons travaillé fort et, dans nos recherches, nous avons aussi dénombré que nous avons, au ministère de la Justice, 75 % de femmes qui y travaillent; à l'Emploi et Solidarité sociale, 73 %. Et j'ai dénombré au-delà de neuf ministères, bien sûr, qui ont plus de 60 % de femmes à leur emploi.
On parle également de la fonction publique, bien sûr, et on parle des cadres. Alors, on a un 39 % actuellement de cadres féminins qui travaillent pour la fonction publique. Et la question que j'aurais envie de vous poser: Pourquoi maintient-on la discrimination positive à ce moment-là?
Lorsqu'on lit une description de tâches, et Dieu seul sait que j'en ai lu quelques-unes, et qu'on retrouve «adhérer aux principes de l'intervention féministe», je me demande, si je trouvais l'inverse, «adhérer aux principes de l'intervention masculiniste», si je n'inconfortabiliserais pas certaines gens. Alors, quand on parle d'égalité, je me pose vraiment la question: Où est-elle?
Pourtant, aussi, dans un formulaire de demande d'emploi, j'ai trouvé: «Critère: femme.» Bien, je vous assure que j'aurais sûrement fait hérisser les poils de certaines femmes si j'avais trouvé: «Critère: homme.» Pourtant, on ne retrouve pas l'inverse. Il n'y a pas d'ouverture nécessairement, et on encourage peu les hommes à retourner dans l'enseignement, dans les CPS, les soins infirmiers, pour ne nommer que ceux-là.
Dans l'orientation n° 2, vous parlez: «Comment briser les inégalités économiques que vivent les femmes[...]?» Alors, tout simplement, je vous dis ceci: À cet égard, on est certainement justifié de remettre encore en question l'application des mesures de discrimination positive en faveur des femmes. Le véritable objectif, quant à nous, à atteindre est celui-ci: pour un même travail avec une même formation, une même expérience, le salaire horaire doit être le même pour une femme et pour un homme. Et on devrait normalement exiger bien sûr les mêmes critères d'engagement, qu'on soit, là, une femme ou un homme.
**(14 h 10)** Dans votre orientation n° 3, puisqu'il s'agit ici de «comment favoriser une meilleure articulation des responsabilités professionnelles et familiales», puisque plus d'un couple sur deux vit une séparation, il est plus que temps d'aller de l'avant avec le projet de loi C-422 sur la présomption de garde partagée. Une semaine, l'un, une semaine, l'autre. Ainsi, cela donnerait une chance à la maman de travailler et ça favoriserait aussi le papa. Il serait très heureux bien sûr d'être un parent à part entière et non pas seulement qu'un parent une semaine sur deux. Il y a un excellent rapport -- je vous donne les coordonnées -- sur ce sujet qui s'appelle Bien-fondé de la résidence alternée pour les enfants dont les parents sont séparés, et le titre de ce bouquin bien sûr... c'est un dénommé Bruno Raschetti, qui est un défenseur des droits des enfants, et vous avez là des témoignages de pédopsychiatres français.
Mais il n'y a pas qu'Ottawa qui peut faire sa part pour la Loi sur le divorce, il y a le Québec. Le Québec pourrait changer son Code civil, c'est-à-dire un article qui s'appelle 587. Dans cet article-là, il est bien mentionné qu'on doit allouer un temps au créancier pour devenir autonome. Par les temps qui courent, tout le monde sait que la situation financière des gens est très difficile. Il serait temps de modifier cet article-là et de dire que le créancier, après un certain temps, se doit de devenir autonome. Malheureusement, l'article 587 n'en fait absolument pas question, donc on devient autonome dans 10 ans ou dans 15 ans.
Concernant l'orientation 4: «Comment mieux adapter les soins de santé et les services sociaux aux besoins et spécificités des femmes?» Bien, tout simplement, nous nous posons la question. Il est prouvé que les femmes généralement, nous, on s'occupe plus de notre corps, de notre santé et des soins; on consulte plus. Et la question que je pose aujourd'hui: Mais qu'est-ce qu'on attend aussi pour mettre en place les mêmes publicités incitatives pour les hommes à l'effet de prendre soin d'eux? En 1998, nous avons de l'ISQ des chiffres qui parlent par eux-mêmes: 28 214 personnes ont vécu de l'itinérance et 12 666 étaient sans domicile depuis 12 mois. Et, en 2003, au congrès de l'ACFAS, on dénonçait que huit hommes sur... c'est-à-dire que huit hommes pour une femme se suicidaient.
Je vous pose la question inverse: Et, si j'avais malheureusement huit femmes pour un homme? Je vous assure que le gouvernement aurait vraiment réagi. La tristesse là-dedans, c'est qu'on parle du suicide une semaine sur 52 puis, après, on n'en parle plus. Cependant, dans l'itinérance, je dois vous dire que j'ai été fort surprise d'apprendre que Mme Lise Watier avait mis sur pied à Rosemont, à Montréal, une maison et un gîte pour femmes itinérantes et elle l'a fait à partir de ses propres deniers. En 2001, nous assistions à un congrès sur la santé à Montréal et malheureusement -- j'ai été là avec les membres de mon association -- et, à notre grand dam, tenez-vous bien, c'était un congrès sur la santé mais on n'y a trouvé aucun dépliant pour la santé des hommes.
Concernant l'orientation 5, afin de continuer à contrer les différentes formes de violence faite aux femmes, je crois sincèrement et de tout mon coeur que la violence sous toutes ses formes est à bannir. Et je crois sincèrement que, que ce soit une femme, que ce soit un homme qui soit victime de violence, nous devons intervenir. Alors, ce que je trouve difficile dans ma société, c'est que, si une femme est violente, elle aura sans aucun doute des difficultés à trouver une association pour l'aider à sortir de ce schème de pensées. Cependant, je remarque qu'au gouvernement, lorsqu'il y a subvention, des subventions sont accordées, bien sûr, pour les hommes qui décident de mettre sur pied des organismes pour hommes violents, des hommes qui ont des addictions, des hommes qui ont des problèmes d'alcool, mais je n'ai pas encore la maison pour hommes en difficulté tout simplement. Au Québec, elle n'existe pas.
Alors, une chose aussi qui me heurte beaucoup, c'est ces bandes-annonces que l'on fait circuler et qu'on démontre à travers la planète qui sont nos hommes québécois, ces êtres si violents, ces êtres potentiellement violents. Et, une autre chose, je suis une femme, ce qui me heurte, c'est que je voudrais sortir de l'image et du schème de la victime. Et, j'insiste, je ne suis pas contre le fait d'aider quelqu'un qui vit la violence, mais je voudrais qu'on regarde de nouveau, qu'on fasse miroiter autre chose au sujet de l'aide qu'on peut apporter concernant, bien sûr, cette violence qui se traduit dans les foyers. J'écoutais un documentaire, et, dans ce documentaire-là concernant la violence, on disait que, lorsqu'il y a de la violence dans un foyer, on devrait traiter tout le monde. Ce serait merveilleux si on pouvait faire quelque chose de cette façon-là ici, au Québec.
Concernant l'orientation n° 6: «Comment accélérer la progression des femmes dans les postes de décision et de pouvoir politique[...]?» La présence des femmes dans les postes de décision et de pouvoir et dans la politique? Vous êtes-vous seulement posé la question? Vous êtes... Veut-elle véritablement faire de la politique, être présidente de conseil d'administration? Voulons-nous l'égalité dans toutes les sphères? Est-ce à dire que nous devons tous être des Guy Lafleur ou des Bill Gates ou bien encore être une Céline Dion ou une Martha Stewart? Et souvent, ce que je reproche dans tout ce que j'ai entendu dans les commissions, nous, on ne parle jamais des femmes qui ont réussi, si je cite, au Québec, Mme Boucher, si je cite, aux États-Unis, Oprah Winfrey, et si je cite Mme Clinton, et on pourrait bien en nommer d'autres.
Mais, cependant, nous naissons dans un pays libre, dans un Québec libre, responsables de notre développement. Nous possédons toutes les capacités, toutes... Nous avons tous des capacités et des habiletés différentes les uns des autres. Est-ce que l'égalité veut dire que toutes les femmes de notre société doivent se mériter des oscars, des Jutra, des Grammy? J'ai des doutes. Et aussi, en métamorphosant les sexes et en les rendant égaux, nous modifions ainsi notre nature. C'est par nos différences que nous devenons complémentaires, et c'est de la complémentarité que nous obtiendrons l'équilibre.
Je termine en mentionnant qu'il est plus que temps que cette égalité, lorsqu'il s'agit du Conseil du statut de la femme ou de la condition féminine, bien, j'aimerais donc qu'on y trouve le pendant. On pourrait-u avoir un conseil qui contient autant d'hommes que de femmes? Moi, je pense que, si on vise l'égalité, ça serait vraiment un geste tout simplement à faire.
En terminant, je voudrais, mesdames en particulier, vous demander d'avoir une pensée extrêmement démocratique en ce qui concerne surtout mon association. Je sais que je ne m'exprime pas et je ne pense pas comme vous. Et malheureusement on est souvent... oui, on nous fait porter la croix, on est catégorisés «anti». Je voudrais vous dire que je suis une femme à part entière, que je suis une amoureuse de la vie, que je ne suis pas anti les gens et que, comment dirais-je, je ne suis pas en guerre contre personne. Mais il faudrait peut-être aussi laisser de la place, dans ce beau Québec démocratique, à des gens qui, comme moi et bien d'autres, pensent différemment. Je pense qu'en démocratie j'ai le droit de vous présenter mes différences, et, vous, de votre bord, vous êtes démocratiques, vous avez le droit aussi d'accepter que j'aie un langage qui est différent du vôtre, mais qui est acceptable quand même. Je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Bilodeau. Effectivement, si vous êtes ici, c'est parce que la démocratie s'applique.
Nous allons maintenant procéder aux échanges avec les parlementaires. Donc, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci. Merci, Mme Bilodeau. Oui, si vous êtes ici aujourd'hui, effectivement, c'est parce que c'est la démocratie qui s'exprime, puis aussi on entend le... on est ouverts à entendre tous les points de vue au sein de notre commission parlementaire.
J'aimerais vous amener à l'orientation 6, et vous dites: «Ce n'est pas en imposant un quota de représentation égalitaire, au Conseil des ministres par exemple, alors que la présence des femmes est nettement minoritaire à l'Assemblée nationale, que l'on contribue à une plus forte participation des femmes à la vie publique et politique, dans les lieux de pouvoir et de décision.» On sait qu'on... bien, je pense que ça fait consensus qu'on aimerait qu'il y ait de plus en plus de femmes qui s'impliquent dans la vie politique au plan municipal, au plan des commissions scolaires, au plan de la vie politique à l'État du Québec, au niveau du Québec, fédéral, etc. Sans parler de quota, comment... quelles seraient les mesures que vous pourriez nous proposer pour faire en sorte qu'on ait une plus grande égalité entre les hommes et les femmes? Parce que la philosophie derrière ça, ce n'est pas des hommes contre les femmes, puis les femmes contre les hommes, c'est atteindre une certaine égalité entre les hommes et les femmes. Et on trouve que c'est très lent, le nombre de femmes qui sont élues à l'Assemblée nationale et dans les instances, là, décisionnelles. Quelles seraient les mesures que vous pourriez nous proposer? Vous appelez ça une recommandation, mais ce n'est pas une recommandation, c'est comme si vous faisiez à l'inverse, c'est-à-dire, ce n'est pas en imposant un quota... Bon, d'accord, mais est-ce que vous auriez une recommandation de mesures qu'on pourrait mettre en place dans notre plan d'action pour faire en sorte qu'on atteigne cette égalité entre les hommes et les femmes dans les instances décisionnelles?
Le Président (M. Bernier): Mme Bilodeau.
Mme Bilodeau (Lise): Je sais que mon vice-président, M. Roy, aurait quelque chose à vous dire. À mon point de vue, c'est que je fais partie de la politique, moi aussi, je suis dans mon conseil de quartier depuis cinq ans, et ce que j'ai constaté, c'est que c'est difficile d'aller chercher les femmes, et pourtant vous n'avez pas idée de tout ce que la ville de Québec met sur pied pour inciter les femmes à faire partie des conseils de quartier, conseils d'arrondissement. C'est pour ça que je vous ai écrit ça, c'est que je me demande si vraiment les femmes, elles veulent en faire, de la politique. Parce que, nous, à chaque année, on a le même problème, c'est qu'on a les élections, oui, on élit les gens, et puis, oups, pour toutes sortes de raisons, on les perd. Ça fait cinq ans que je suis là. Alors, la question que je me pose... La ville de Québec a fait des pas de géant en ce qui concerne la motivation pour amener les femmes à faire de la politique municipale, mais on a toujours le même problème, nous ne complétons pas les postes. Alors, c'est pour ça que je me demande: Est-ce que vraiment... est-ce qu'on va y arriver et est-ce que c'est possible d'y arriver, si les femmes ne s'y intéressent pas? C'est ça que je voulais vous montrer par ma démonstration.
**(14 h 20)**Mme St-Pierre: Bien, en fait, oui, peut-être que les femmes ne s'y intéressent pas, mais je vais vous raconter une expérience que j'ai vécue la semaine dernière. Je suis allée à Dorval, j'étais invitée par l'école primaire à aller parler à des élèves qui avaient fait des élections. Et ils avaient fait un Conseil des ministres, alors il y avait... et il avait été... le Conseil des ministres était composé de 10 personnes, 10 enfants, et il y avait quatre ministères... en fait, ils étaient deux par ministère, puis une première ministre, puis vice-premier ministre. Alors, ce qui m'a frappée, c'est qu'il y avait... sur les 10 élèves, il y avait huit filles et deux garçons. Alors, je me suis dite: Bon, oui, je veux bien, ça me réjouit, mais en même temps... on veut bien atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes, mais il ne faut pas qu'on s'en aille complètement de l'autre côté, mais je ne pense pas qu'on va... que ça va arriver très bientôt. Mais il reste que les jeunes filles, elles ont été quand même élues, puis elles se sont présentées, il a fallu qu'elles fassent un discours pour que les autres élèves... puis les garçons aussi l'ont fait. Alors, je pense que, s'il y a une éducation très jeune dans les... au niveau primaire, au niveau secondaire, puis que, nous, les élus, nous allions leur parler de la carrière, puis qu'on aime ça, puis c'est formidable, bien, ça va peut-être les attirer davantage.
Et l'autre point de vue aussi, moi, je pense qu'on parle toujours en... quand on voit les gens, les acteurs politiques, les commentateurs en parlent toujours en termes de hockey, de sport et... Alors, il y a le vocabulaire aussi, personnellement, je pense, qu'il faut changer.
Alors, je ne pense pas qu'il n'y a pas d'intérêt, je pense qu'il faut... il faut stimuler cet intérêt-là pour que nous ayons une meilleure société, pour que... Les femmes représentent 50 % de la société, et je pense que, dans les instances décisionnelles, on devrait l'atteindre... peut-être une zone de parité, mais enfin on devrait stimuler, stimuler davantage.
Donc, je reviens à ma question. Vous parlez de l'exemple de la ville de Québec. Alors, quelles seraient les mesures positives et concrètes qu'on pourrait mettre dans notre plan d'action pour faire en sorte qu'on atteigne cette égalité entre les hommes et les femmes, dans l'orientation n° 6?
Mme Bilodeau (Lise): C'est que, vous savez...
Le Président (M. Bernier): Mme Bilodeau.
Mme Bilodeau (Lise): ...j'aime ce que vous dites, c'est qu'en même temps, oui, on a 50 % de femmes, puis, bon, il faudrait avoir 50 % d'hommes, mais là, avec vos élèves, vous avez... Oups! Il n'y a plus de jeunes hommes, vous aviez juste des jeunes filles, c'est le danger qui nous guette, hein? Puis vous l'avez si bien dit: Il faut garder -- moi, j'aime le terme que vous avez dit -- un équilibre. Et puisque j'ai mon expérience au niveau du conseil de quartier, je me les pose, Mme St-Pierre, les mêmes questions que vous, parce que, moi, je sais que la ville fait des choses absolument extraordinaires pour inciter les femmes à faire partie de son milieu, hein, c'est ça, le conseil de quartier, mais on n'y arrive pas, et pourtant les publicités sont là. J'ai pris des cours à l'ENAP pour faire partie de mon conseil de quartier, payés par la ville, et la ville nous donne des cours aussi pour qu'on comprenne, bien sûr, ce langage-là. Je n'ai peut-être pas de solution miracle. Je ne sais pas si vous me permettez, mais peut-être que M. Roy en aurait.
Le Président (M. Bernier): M. Roy.
M. Roy (Alain): Oui. Bonjour. Moi, ce que je vois là-dedans, c'est que... Ce que je constate, par exemple lorsqu'on regarde les admissions dans les facultés de médecine à l'université, il y a beaucoup de filles qui sont inscrites et qui... On dénombre au-dessus de 60 % là-dedans. Donc, ce que je me dis, c'est que les femmes sont plus intéressées par des sphères qui touchent la proximité physique de leur environnement propre, tandis que l'économie, tout ça, c'est quelque chose qui les touche peut-être moins de près. Donc, elles ne sont pas vraiment intéressées à aller voir du côté de ces sciences-là.
Moi, je suis en informatique, et on a le ratio inverse. On est 65-35. C'est des hommes majoritairement qui sont là-dedans. Oui, il y a des filles. On travaille avec elles, puis c'est parfait, c'est merveilleux. Mais c'est question de rendre la question publique, la question politique, la question sociale globale plus intéressante au niveau des femmes. Je pense que c'est là où il faudrait travailler, à mon sens.
Mme St-Pierre: Alors, vous touchez le point. L'autre point sur lequel je voulais vous amener, c'est les métiers non traditionnels. On souhaite, on voudrait que les femmes s'intéressent davantage à des métiers non traditionnels parce qu'on pense que ça pourrait être bon pour ces corps professionnels là d'avoir plus de femmes, puis qu'il y aurait peut-être moins de remarques sexistes, puis ça changerait peut-être les attitudes. Et, à l'inverse, je pense aussi qu'il faut travailler sur le fait que nous devons amener des jeunes garçons à épouser des professions traditionnellement féminines. Je pense à l'enseignement au primaire, par exemple, ou... Donc, là aussi, on cherche à atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes parce qu'au niveau primaire les enfants ont besoin d'avoir des modèles masculins et féminins, et on aimerait améliorer la situation de ce côté-là. Est-ce que vous auriez des idées à nous soumettre sur comment on pourrait stimuler davantage le fait que des jeunes garçons s'intéressent à ces professions-là puis, inversement, que des jeunes femmes s'intéressent aux professions plutôt masculines?
Le Président (M. Bernier): M. Roy.
M. Roy (Alain): Peut-être y aller sur cette question. On a eu tout d'abord une loi n° 143 qui favorisait l'égalité en emploi pour les femmes à un certain moment donné. Et, là-dedans, je voyais que, dans les corps d'emploi à prédominance masculine, on encourageait beaucoup les femmes à postuler pour ces emplois-là puis à devenir partenaires finalement du monde du travail là-dessus. Mais je n'ai jamais vu, moi, le pendant de cette loi pour inciter les hommes, par exemple, à aller étudier en enseignement préscolaire, en enseignement scolaire primaire ou encore soins infirmiers, quelque chose du genre. Il n'y a pas... Je jasais avec un des professeurs de mon fils qui, en cinquième année, avait un homme comme enseignant -- il en a eu un en troisième puis en cinquième année. Il me disait: On est sortis 300 de notre promotion, à l'Université Laval, et, sur les 300, il y avait trois hommes.
Une voix: ...
M. Roy (Alain): C'est énorme. C'est énorme. Mais ça, c'est toute une génération de jeunes, à l'école, qui n'auront pas ou presque pas de modèles masculins à avoir sous les yeux. Lui, il a été chanceux, il en a eu deux sur six, c'est bon. Mais je crois qu'il faudrait vraiment avoir des incitatifs pour les hommes, là-dessus, à épouser des carrières plus près des gens, là, en soins...
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Et qui seraient de quel genre? Vous parlez d'incitatifs, est-ce que vous avez en tête quelque chose de financier ou si vous avez des incitatifs dans le sens sensibilisation, éducation?
M. Roy (Alain): Bien, on a imposé, à un moment donné, à des employeurs -- je pense que c'est à la fonction publique -- un quota d'embauches de personnel traditionnellement féminin dans des emplois non traditionnels. Pourquoi n'aurions-nous pas la même chose au niveau... pour les hommes, favoriser l'embauche des hommes en enseignement primaire ou encore aux soins infirmiers, en CPE, en garderie, quelque chose comme ça? Ça pourrait être quelque chose qui serait intéressant. On l'a fait par voie législative pour aider les femmes, pourquoi ne le ferions-nous pas par la même voie pour aider les hommes?
Mme St-Pierre: On a des programmes d'accès à l'égalité mais je ne pense pas qu'on ait de loi, là, qui... Enfin, il me semble que non.
M. Roy (Alain): ...fait pour les femmes peut être fait pour les hommes, je suis sûr de ça.
Mme St-Pierre: Oui. O.K. Alors, M. le Président, je vais laisser mes collègues poser des questions, de leur côté. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la ministre. Donc, M. le député de Lévis, la parole est à vous.
M. Lehouillier: Merci beaucoup. Donc, moi, j'aurais peut-être une question à vous poser, mais en même temps elle m'amène une réflexion par rapport à votre mémoire, qui est la suivante. Moi, j'ai été conseiller municipal, dans une autre vie, et je me souviens, en 1986, quand, à Lauzon, on avait nommé la première femme policière, sur la Rive-Sud, à Lévis, et je me souviens de ça, et il y avait eu, là... c'était épouvantable, c'était la fin du monde, et elle ne serait jamais capable d'intervenir en cas d'urgence, bon, etc. Cela étant dit, aujourd'hui, il n'y a plus personne qui en parle.
Ce que je veux juste vous dire, c'est qu'on est maintenant dans une société où plus on va atteindre l'égalité de fait et plus... Puis actuellement c'est justement parce qu'on tend à atteindre cette égalité-là qu'on a un PIB aussi élevé, parce que les femmes participent très activement de plus en plus à la vitalité économique, etc.
Alors, moi, je me dis, par rapport à ça, au niveau des stéréotypes, c'est... Les idées que vous soutenez, est-ce qu'au fond ce ne sont pas des idées qui n'ont plus cours dans le sens suivant: c'est qu'aujourd'hui on est dans une évolution telle qu'on a besoin de toutes nos ressources? Vous avez donné l'exemple des filles qui étudient en médecine, etc., on a besoin énormément de médecins, alors, moi, je trouve ça extraordinaire et je trouve ça fantastique. Alors, dites-moi en quoi... au détriment de quoi vous estimez que le monde du travail est stéréotypé au détriment des hommes. Et j'aimerais ça vous entendre un peu plus là-dessus parce que, de ce côté-là, en même temps vous dites: Oui, mais, si les femmes ne font pas de politique, c'est parce qu'elles choisissent de ne pas en faire. Bien, je vous dis la même chose: Si les hommes ne vont pas en éducation, c'est parce qu'ils ne veulent pas enseigner, tu sais. Peut-être que c'est ça, finalement. Alors, je me dis: Finalement, c'est quoi, le problème?
Le Président (M. Bernier): M. Roy.
M. Roy (Alain): Oui. Moi, ce que je pourrais vous...
Le Président (M. Bernier): ...en réponse aux questions de...
M. Roy (Alain): Oui, je vais être très bref. Moi, je questionnerais l'évaluation des candidatures à ces postes-là, autant en médecine qu'en éducation ou quoi que ce soit. La majorité des universités et des maisons d'enseignement supérieur vont se baser sur le rendement académique. Or, on sait déjà au départ que l'école favorise énormément les filles à avoir de meilleurs résultats scolaires; l'école est plus adaptée pour elles. Les hommes... les garçons là-dedans ont toujours besoin de bouger, et on ne retrouve peut-être pas assez ces dispositions-là dans notre système d'enseignement scolaire. Donc, si on favorise la réussite académique, il est évident que les filles vont avoir de meilleurs scores académiques que les hommes, donc les hommes vont être laissés de côté pour prendre les meilleures notes pour remplir nos facultés de médecine, nos facultés d'éducation.
**(14 h 30)**M. Lehouillier: J'aurais une autre question, M. le Président, si vous le permettez, sur les pensions alimentaires. Quand on regarde l'évolution des pensions alimentaires, est-ce que vos données sont actualisées aux pensions alimentaires d'aujourd'hui ou si... parce que c'est sûr que, si on remonte à il y a 25, 30 ans ou à 20 ans, c'est sûr, à un moment donné, on n'avait pas l'égalité de fait, on était loin de l'avoir, donc ce qui fait que les femmes n'avaient aucun revenu, souvent aucune instruction, aucune formation. Alors donc, à partir de ce moment-là, c'est clair que les pensions alimentaires pour la conjointe... il fallait que quelqu'un essaie de les aider, de les appuyer un peu. Mais aujourd'hui, d'après ce qu'on voit au niveau des tribunaux, ce n'est qu'occasionnellement, maintenant, que les femmes obtiennent une pension alimentaire pour elles. Et les statistiques le démontrent, c'est en chute libre. Et, plus on va atteindre l'égalité de fait, moins les pensions alimentaires aux conjointes vont être versées, c'est peut-être l'inverse qui va arriver bientôt, donc, dans certains cas. Alors, je vous pose la question: Est-ce que vous êtes sûrs que vous avez des données actualisées par rapport à la situation d'aujourd'hui?
Le Président (M. Bernier): Mme Bilodeau.
Mme Bilodeau (Lise): Oui. Les données que j'ai, je les ai reçues d'une personne -- sans nommer son nom, bien sûr -- du ministère de la Justice. On dit que 35 % des pensions alimentaires sont payées à l'ex, et le reste est payé, bien sûr, pour les enfants. Quand...
Vous n'êtes pas le seul qui me posez cette question-là, j'ai eu à y répondre. N'allez pas penser que les pensions à l'ex, les juges ne les octroient qu'une fois de temps en temps et au compte-gouttes. Pourquoi que je vous dis ça? C'est parce que l'association est là. J'en reçois, des lettres, et je reçois les jugements des gens. Donc, je ne peux pas vous mentir, j'ai les jugements entre les mains. Donc, on octroie facilement, encore de nos jours, la pension à l'ex, et c'est pour ça qu'on se débat tant.
Qui aujourd'hui peut faire vivre quelqu'un jusqu'après sa retraite et jusqu'à sa tombe? Vous savez, recevoir une pension alimentaire dépassé 65 ans... Si le type, lui, décide de prendre sa retraite, on donne la double indemnité, parce que tout le monde sait que, lors d'un divorce, tout est séparé en deux, les REER, et tout. Donc, dans les pensions alimentaires, il ne faut pas se leurrer, ça existe puisqu'on demande à Ottawa de modifier sa loi et à Québec d'y mettre un terme.
Les pensions à vie, c'est un drame. Qu'on soit professeur, ingénieur, quand on a à assumer son ex-conjointe, même si tout a été divisé, c'est un problème énorme. La personne se ramasse dans un un et demi. Et ça existe, ce n'est pas juste au compte-gouttes, les pensions alimentaires à l'ex, ça se donne encore.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, Mme Bilodeau. Nous allons maintenant passer du côté de l'opposition officielle, avec Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue à notre commission. En effet, c'est un point de vue qu'on n'a pas beaucoup entendu depuis le début des auditions. Alors, c'est très intéressant, en ce début d'après-midi, et c'est très... très original à certains égards aussi.
Alors, sur les pensions à vie d'ailleurs, vous êtes le deuxième groupe à venir nous dire que... hein, les pensions à vie, c'est vrai que c'est une question, en effet, qu'on peut se poser. C'est une vraie question, en tout cas, et, avec le groupe... C'était, je pense, la semaine dernière... enfin, il y a deux semaines, les secondes... C'étaient, c'est ça, les secondes épouses, c'est ça. Et c'est quoi, d'ailleurs... Ma première question: C'est quoi, d'ailleurs, la différence -- on se demandait -- entre les nouveaux conjoints et conjointes puis les secondes épouses, juste pour savoir pourquoi c'est deux groupes différents, mais...
Mme Bilodeau (Lise): Les secondes épouses, Mme Beaudoin, c'est... Cela le dit, hein? Je veux dire, elles se sont mariées, voilà. Et, nous, L'Action des nouvelles conjointes, nouveaux conjoints, nous, on représente évidemment les gens qui sont en relation de fait, tout simplement. Alors... Et puis l'Action des nouvelles conjointes et nouveaux conjoints, nous avons tout simplement un tableau, de A jusqu'à Z, de tout ce qui se passe lorsqu'il y a une rupture. On aide les gens dans tous les secteurs, que ce soient l'aliénation parentale, les problèmes avec les enfants, problèmes avec l'ex, on a vraiment de l'aide pour toute cette catégorie de gens, tandis que mes collègues, eux, c'est la pension alimentaire à vie. Et puis je les appuie. Elles aussi, elles débattent la même chose que moi, je les appuie fortement. Pension alimentaire à vie, qui peut payer ça aujourd'hui? Alors, c'est ça qu'il faut... Puis on demande... les deux groupes demandent l'autonomie de ces femmes-là. Et, nous, on demande tout simplement que l'article du Code civil du Québec... mettez un terme de cinq ans pour donner la chance de se reprendre, avec tous les beaux programmes que vous offrez. Une femme qui veut peut, là, inquiétez-vous pas, dans ma société, Mme Beaudoin. J'y crois, moi, en tout cas.
Mme Beaudoin (Rosemont): Disons que c'est... C'est sûr que... Moi, en tout cas, je crois...
Le Président (M. Bernier): Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Excusez. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Le président peut vous le confirmer, ça a été... C'est le 19 en après-midi, l'Association des secondes épouses et conjoints qu'on a entendue.
Mme Beaudoin (Rosemont): ...c'est ça, donc, qui a donc amené cette préoccupation-là aussi devant la commission.
C'est clair que... Je comprends, d'après votre mémoire, que, vous, dans le fond, ce à quoi vous ne croyez pas, c'est à la discrimination systémique. C'est ça, dans le fond, hein, que vous ne croyez pas? Alors, on en a beaucoup entendu parler. C'est sûr que c'est là où votre point de vue est assez, en effet, original, de dire: Non, bon, ce n'est pas le cas.
Moi, je voudrais juste revenir, par exemple, sur une chose. Dans les Faits saillants, que le ministère nous a fait... nous a envoyés, dans le fond, qui est public, là, le chapitre 7, c'est sur les agressions sexuelles et la violence conjugale. Et, bien sûr, on affirme que les femmes sont plus souvent que les hommes victimes de violence conjugale déclarée. En 2008, selon le ministère de la Sécurité publique, les corps policiers ont enregistré 17 321 infractions contre la personne commises dans un contexte conjugal, dont 82 % contre les femmes et 18 % contre les hommes.
Or, vous... Est-ce que je me trompe? Parce que vous dites, page, quoi, de votre mémoire, là: «Sur les 17 321 infractions[...] -- donc, c'est la même chose dont vous parlez -- processus judiciaire -- dans le fond, vous, vous ne retenez que le processus judiciaire -- n'aboutit à un verdict de culpabilité que dans le tiers environ du total des infractions enregistrées.» Et là vous dites: Ça démontre, tout ça, que la violence conjugale est également partagée entre les femmes et les hommes.
Est-ce que vous voulez vraiment dire sérieusement, contrairement donc aux chiffres, enfin, du ministère et du gouvernement, qu'il y a autant de femmes qui agressent, dans un cadre de violence conjugale, leur conjoint que d'hommes qui agressent des femmes, alors que les statistiques que je viens de vous lire, c'est 82-18? Mais, vous, vous prétendez le contraire, c'est ça?
Mme Bilodeau (Lise): Je vais y aller avec M. Roy.
Le Président (M. Bernier): M. Roy.
Mme Bilodeau (Lise): Au niveau des statistiques, il est plus confortable que moi.
M. Roy (Alain): Bon, lorsqu'on parle...
Le Président (M. Bernier): M. Roy.
M. Roy (Alain): Bonjour. Lorsqu'on parle de ces chiffres-là, sur le 17 000, 18 000 plaintes, il y a eu... évidemment, nous, on dit qu'il y a à peu près le tiers qui a pu occasionner des condamnations à l'autre bout. Mais, lorsqu'on regarde les plaintes déclarées, vous dites qu'il y a une proportion de 82-18, c'est juste dans le cas de ces 18 000 là, on ne connaît pas ce qui s'est passé du reste.
Par ailleurs, il y a le gouvernement canadien, avec Statistique Canada, qui, à chaque cinq ans, fait une enquête sociale générale. Il y en a une qui a été publiée en 2004... en 1999. Il y en a une autre en 2005, si je me souviens bien... 2004, et là-dedans on faisait état de problématiques de violence conjugale dans les couples qui sont en formation, qui... des gens qui ont des conjoints. Et on parlait de 29 cas sur 1 000 où il y avait des femmes victimes de violence et on avait 39 cas sur 1 000 d'hommes victimes de violence. Et on parlait uniquement des couples hétérosexuels. Ça, c'est dans le... Je pourrai vous envoyer la référence à cet effet-là.
Mais, encore là, il y eu un autre rapport, récemment, qui a été publié et on dénote encore qu'il y a, je dirais, une proportion plus grande, une prévalence plus grande du côté de violence féminine que de violence masculine, et la violence en total a tendance à baisser. On a eu ce rapport-là, ça fait... je pense, ça fait deux, trois jours, que Statistique Canada a publié l'avis.
**(14 h 40)**Mme Beaudoin (Rosemont): Bien, écoutez, c'est sûr qu'on va regarder ça, là, mais disons que là... Vous me dites, dans le fond: Les femmes sont plus violentes que les hommes, là, et c'est... Moi, ça dépasse, je dois vous dire franchement, mon entendement, là, vraiment, mon entendement. Moi, je croyais que les statistiques que... Je n'ai pas été étonnée par les statistiques que le ministère, dans ses Faits saillants, nous a distribuées. Qu'il y ait 18 % justement de violence conjugale contre les hommes, bon, 18 %, 20 %, bon, ça me semblait, de ce que je pouvais moi-même constater ou de ce que je pouvais connaître dans... Ne serait-ce que dans nos entourages, personne n'est à l'abri de la violence, qu'elle soit verbale, d'ailleurs, ou qu'elle soit physique et qu'elle soit de toute nature. Mais là vous me dites... Et ça, je dois très franchement dire que, personnellement, je le conteste, là. Tu sais, je ne peux pas croire ça, qu'il y a... que les femmes sont devenues plus violentes que les hommes par rapport à ce qui est communément, disons, connu et reconnu. Je veux dire, je n'invente pas ça, là, ça fait partie des Faits saillants du ministère. Alors... Mais je vois que ce que... ce que vous me dites, là... Mais disons qu'on va prendre ça sous considération, les uns et les autres, et puis qu'on pourra effectivement, donc, y revenir. Et donc j'ai terminé, moi, là-dessus.
Si c'est ça, par exemple l'équité salariale, pour vous, j'imagine, là, toute cette loi de l'équité salariale, tout cet exercice qui a été fait, qu'il y ait des métiers qui soient, en effet, traditionnellement féminins et qui... donc, les salaires ne sont pas égaux à travail, disons, équivalent, ce qui n'est pas l'équité, de l'égalité... Déjà, l'égalité, elle n'est pas là puisque tous les chiffres, encore une fois, nous le disent, tous les chiffres, qu'il y a 76 % à peu près... c'est ça, à peu près le salaire, là, il y a encore un écart entre ce que gagnent une femme et un homme. Mais là, en plus de l'égalité, il y a toute la question de l'équité salariale qui a été adoptée à l'unanimité, je pense, à l'époque, puis qui l'a été à nouveau, en 2006, quand la Loi sur l'équité salariale...
Alors, moi, ce que je vous propose, si vous voulez vraiment changer les choses, c'est de fonder un parti politique puis venir défendre vos positions comme... de législateurs à votre tour. Parce qu'il y a des partis de gauche, de droite, de centre, ici, et puis tout le monde peut, vous le dites, se présenter, il s'agit de venir. Mais, quand on est législateurs... en tout cas, à l'unanimité, de Québec solidaire à l'ADQ finalement, en passant par le Parti libéral puis le Parti québécois, on est tous d'accord là-dessus. Alors, si vous voulez vraiment que les choses changent, eh bien, venez nous rejoindre dans cette enceinte de l'Assemblée nationale, parce que, sinon, il y a une belle unanimité sur la question de l'équité salariale.
Le Président (M. Bernier): Merci. Est-ce que vous avez un commentaire, M. Roy?
M. Roy (Alain): S'il vous plaît.
Mme Bilodeau (Lise): Mme Beaudoin, juste une chose sur laquelle je reviens. Quand on parle de violence, c'est que j'ai lu énormément et je me suis informée, et sachez qu'on ne parlait pas de la violence... Et, n'oubliez pas, là, je ne suis pas en guerre contre les femmes -- on ne parlait pas de la violence des femmes il y a trois ou quatre ans. Et, depuis quelques années, bien sûr, là, on en tient compte.
Il y a aussi le phénomène, je pense que je n'ai pas à vous le décrire... Quand on est en relation, que ce soit là un homme ou une femme, ou vice et versa, bien, dites-vous, quand on se chicane, on se chicane solide, et, nous, on ne peut pas nier que la femme a aussi, bien sûr, ses moments de violence. Mais on ne le calculait pas, Mme Beaudoin, il y a un certain temps. Là, maintenant, on est plus attentifs et, bien sûr, on va.. les gens vont le dire plus facilement.
Mme Beaudoin, quand j'ai parti l'association il y a 12 ans, les gens ne venaient pas ou n'osaient pas dire ce qu'ils vivaient, tellement ça les gênait. Là, maintenant, on est plus ouverts et on peut facilement, lorsqu'on est interviewés, dire que, oui, bien sûr, moi... Moi, j'en ai, des gens, qui me l'ont dit: Oui, je l'ai tapé, mon chum, puis, oui, je l'ai brassé, puis, oui, je lui ai tiré des choses. Oui, maintenant, on l'admet, qu'il peut y avoir cette violence-là chez les femmes. Et, moi, je vais beaucoup plus loin: quand il y a violence, homme ou femme, il faudrait traiter l'ensemble de la famille dans les circonstances, c'est aussi simple que ça.
Mme Beaudoin (Rosemont): Juste un...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci. Oui, juste un petit mot là-dessus. Je ne sais pas... Je serais curieuse de savoir combien il y a de meurtres par année, disons, sur le territoire québécois, qui concernent... que ça peut aller jusqu'au meurtre, ça peut aller jusqu'à l'assassinat, on tue... bon.
M. Roy (Alain): 17 l'année passée.
Mme Beaudoin (Rosemont): 17 l'année passée. Et combien de femmes ont tué à ce moment-là?
M. Roy (Alain): ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Bon.
M. Roy (Alain): À peu près la moitié.
Mme Beaudoin (Rosemont): La moitié.
M. Roy (Alain): À peu près la moitié. Le tiers des meurtres conjugaux, c'est des femmes qui les commettent. Les deux tiers, ce sont les hommes qui les commettent.
Mme Beaudoin (Rosemont): Bon. Alors, on va regarder ça attentivement. Vous me dites que, sur les 17 meurtres, donc, conjugaux, il y en a combien?
M. Roy (Alain): Le tiers à peu près sont des femmes qui... oui.
Mme Beaudoin (Rosemont): Le tiers de femmes qui ont tué leur conjoint...
M. Roy (Alain): Oui. On parle de cinq ou six, là.
Mme Beaudoin (Rosemont): Le tiers...
M. Roy (Alain): Oui.
Mme Beaudoin (Rosemont): On n'est pas à la moitié quand même, mais vous dites: Le tiers. Il y en a quand même les deux tiers, quoi, qui sont des hommes qui ont tué leur femme. Oui?
M. Roy (Alain): Oui.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui.
M. Roy (Alain): Mais, quand même, il y en a...
Mme Beaudoin (Rosemont): Bien là, déjà, on va regarder ça, là.
M. Roy (Alain): La violence féminine existe, il y a eu cinq meurtres. Si on parle de tiers, il y a cinq meurtres, des femmes qui ont assassiné leur mari, leur conjoint. Donc, il y a une violence féminine.
Mme Beaudoin (Rosemont): Bien, tu sais, je ne nie pas, là, je le disais tantôt, je ne nie pas la violence féminine. Je veux dire, cette espèce d'équilibre, de symétrie que vous semblez vouloir établir, c'est là que, moi, je n'embarque pas, très franchement. Vous me dites un tiers, deux tiers, ce n'est déjà pas 50-50, mais, même ça, vous me permettrez de vérifier tout ça, là, ça doit être assez facile de... de trouver, en tout cas, éventuellement, ces choses-là, puis on recommuniquera ensemble, parce que disons que je demeure sceptique.
M. Roy (Alain): ...on ne retrouvera pas une similitude... une parfaite symétrie au niveau des effets de la violence et du nombre et des éclats que ça peut avoir, et tout ça, mais il y a quand même une symétrie qui existe des deux côtés. Il y a quand même... Il y en a, de la violence féminine, il ne faut pas le nier, et, si on n'offre pas d'aide aux femmes qui sont... qui peuvent perpétrer de la violence, je pense qu'on n'a pas... on résout mal le problème.
Le Président (M. Bernier): Merci...
M. Roy (Alain): L'égalité des salaires, et tout ça, c'est sûr que, si on compare le total sur le relevé 1 à la fin de l'année, on arrive à des différences. Mais, lorsqu'on prend en compte le temps... le temps passé au travail, et tout ça, je pense qu'on arrive à un salaire horaire qui est quand même assez... hein, assez équitable.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Roy. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve?
M. Lehouillier: On a un chiffre.
Mme Beaudoin (Rosemont): Vous avez le chiffre?
Le Président (M. Bernier): Mais, regardez...
Mme Poirier: Ils ont le chiffre.
Le Président (M. Bernier): Vous avez les chiffres?
Mme Poirier: ...leur permettre...
Mme Beaudoin (Rosemont): Ah oui? Bien, j'aimerais ça que vous nous le donniez.
M. Lehouillier: Voulez-vous qu'on le donne?
Le Président (M. Bernier): Bon. Oui, mais, regardez, on terminer puis après ça on va revenir. Voulez-vous l'avoir avant que vous posiez la question? Oui.
Mme Poirier: ...ça l'avoir, le chiffre, oui.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. le député de Lévis.
M. Lehouillier: Alors donc, ce qu'on dit, c'est qu'en 2008, lors de l'année 2008, 11 homicides ont été commis dans un contexte conjugal, soit neuf femmes et deux hommes; 27 personnes ont été victimes de tentative de meurtre dans un contexte conjugal, soit 23 femmes et quatre hommes.
Mme Beaudoin (Rosemont): Bon. O.K. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. le député de Lévis. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Et je ne sais pas si ces chiffres incluent aussi les hommes qui ont emmené dans la mort leurs enfants avec eux dans des drames conjugal, qui s'ajoutent, en tant que tels, à cela, qui est aussi de la violence contre des femmes parce qu'on vient de leur enlever leur enfant.
Il y a eu le rapport Rondeau qui a été publié, il y a plusieurs années, et qui faisait effectivement la démonstration des besoins d'hommes en détresse particulièrement, justement dans des contextes de séparation ou des contextes de difficulté et de violence conjugales, et j'apporterais une petite correction à ce que vous avez dit tout à l'heure: la Maison Oxygène, elle est dans Hochelaga-Maisonneuve, dans mon comté, et cette Maison Oxygène, qui accueille des hommes avec leur enfant -- et c'est la seule qui accueille, elle est la première, depuis 20 ans, qui le fait et elle n'est pas subventionnée, en passant, je vous le dis -- ... se sont donné comme projet d'ouvrir d'autres maisons, et il y en aura bientôt cinq: il y en a une à Drummondville, une à Baie-Comeau, il y en a deux autres en projet. Et tout ça découle justement de cette réflexion. Il y aura le groupe qui va venir, je pense, demain, là, de valorisation du rôle des pères, qui va venir nous parler de cela. Et, entre autres, cette Maison Oxygène là, qui reçoit ces pères en difficulté, malheureusement ne reçoit pas de subvention, comme le font les maisons d'hébergement pour femmes. Et ça, c'est une réflexion qu'il va falloir avoir, effectivement.
Concernant...
Le Président (M. Bernier): Le temps est écoulé, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Je ne sais pas si vous avez une brève question, je vais la permettre pour qu'ils puissent répondre, mais allez-y rapidement.
Mme Poirier: Alors, brève question. Vous avez parlé des métiers non traditionnels; moi, je vois beaucoup, beaucoup de femmes qui sont très heureuses dans des métiers très non traditionnels, dont... J'ai un portrait ici d'une femme qui est boutefeue-foreuse, à La Romaine, pour Hydro-Québec. Donc, elle est dans un métier totalement différent et elle est très heureuse. Et je ne comprends pas votre point de vue, je vous l'avoue, je ne le comprends pas du tout, de limiter les femmes dans certains métiers. Ça, j'ai beaucoup de difficultés à ça.
Le Président (M. Bernier): Voulez-vous réagir? 30 secondes.
Mme Bilodeau (Lise): Bien, écoute, ce n'est pas limiter. Tout simplement, j'ai l'impression que, quand... On est toutes des femmes ici, enfin, et, moi, je pense qu'il y a des endroits où le côté féminin... est-ce que, vraiment, c'est notre place? Maintenant, je ne dis pas que certaines ont tout ce qu'il faut pour y aller. Vous savez, j'ai des exemples, les premières femmes, comme disait monsieur, qui sont rentrées dans la police, ces femmes-là avaient le potentiel, avaient la capacité... et puis il y en a encore, des femmes, qui auront la capacité et le potentiel de faire ces métiers masculins. Mais je voudrais qu'on ouvre tout autant le pendant, c'est-à-dire qu'on ouvre la place, bien sûr, dans les métiers féminins, aux hommes.
Et je ne crois pas, chère madame, que, si on faisait une enquête, toutes les femmes seraient heureuses d'aller tout simplement se planter devant une souffleuse et de diriger la circulation. Ce n'est pas toutes les femmes qui veulent ça. Puis, pour toutes les femmes qui veulent rester au foyer puis vouloir aimer leurs enfants et encore faire une famille, tenir une famille au Québec... Je pousse encore plus loin, moi: moi, je suis celle qui dirait qu'on devrait offrir à celui ou celle qui décide de rester à la maison une allocation. On devrait les aider, mais on n'a aucune allocation pour ces gens-là.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Bilodeau, merci, M. Roy, de votre présentation de L'Action des nouvelles conjointes et nouveaux conjoints du Québec.
Et je vais suspendre quelques instants afin de permettre au Barreau du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 14 h 49)
(Reprise à 14 h 51)
Le Président (M. Bernier): Alors, nous allons reprendre nos travaux. À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous recevons les représentants du Barreau du Québec. Bienvenue. Vous aurez une période de 15 minutes pour votre présentation; par la suite, 15 minutes d'échange avec les représentants du gouvernement et 15 minutes avec les représentants de l'opposition. En vous priant de vous identifier et identifier les personnes qui vous accompagnent. Allez-y.
Barreau du Québec
M. Ouimet (Gilles): Alors, merci bien, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, mon nom est Gilles Ouimet. Je suis le bâtonnier du Québec, et je suis accompagné de Me Lucie Lamarche, qui a participé aux travaux des comités qui ont élaboré le mémoire du Barreau du Québec.
Vous me permettrez quelques brèves remarques introductives au départ, et je céderai la parole à Me Lamarche, qui fera la présentation formelle du mémoire du Barreau du Québec.
Dans un premier temps, je tiens à offrir des excuses, au nom du Barreau du Québec: la délégation du Barreau devait être plus importante. Malheureusement, j'ai été le seul qui a réussi à passer avant que la 20 soit fermée à la hauteur de Sainte-Julie, alors... Et je suis arrivé, malgré mon départ à 10 heures ce matin, tout juste à 14 h 15. Alors, nous sommes désolés de ne pas vous offrir la délégation qu'on avait prévue parce que, pour le Barreau, cette participation... Et on vous remercie de nous inviter, il y a là une question fort importante et nous souhaitions avoir une délégation qui témoigne de l'importance de la question de l'égalité entre les hommes et les femmes. Et, bien que le Barreau n'ait pas l'habitude de se présenter devant la Commission des relations avec les citoyens, nous tenions à souligner l'importance du lien du fondement juridique à la question de l'égalité et au plan d'action et le lien entre ce plan d'action et la relation avec les citoyens.
J'ai mentionné au départ que Me Lamarche, qui m'accompagne, participait aux travaux des comités. Nous avons mis trois comités du Barreau du Québec à l'oeuvre pour la préparation de notre mémoire: le Comité des femmes dans la profession, le Comité des droits de la personne, ainsi que le Comité sur les communautés ethnoculturelles et la diversité.
Pour le Barreau, le droit à l'égalité, c'est plus qu'une notion, qu'un principe fondamental dans notre société, c'est un aspect important de notre mission de protection du public puisque, je tiens à le souligner et le rappeler, la mission première du Barreau du Québec est la protection du public, mais c'est aussi une réalité qu'on tente d'atteindre, au sein du Barreau, par différents moyens, entre autres... Et Me Fanie Pelletier, qui occupe le poste de conseillère à l'équité, devait être ici avec nous... Nous avons créé, il y a quelques années, un poste de conseillère à l'équité pour être en mesure d'agir concrètement et atteindre cet objectif d'égalité entre les hommes et les femmes dans notre société.
Il y a aussi, et je tiens, ça aussi, à le souligner, la promotion... L'importance que nous accordons à la conciliation travail-famille est un des volets de cette question de l'égalité entre les hommes et les femmes. L'an dernier, nous avons procédé à la signature... à la resignature de la convention... de l'entente qui avait été signée, en 1995, entre le ministère de la Justice, les juges en chef et le Barreau, pour souligner l'importance de faire la promotion de la conciliation travail-famille, dans le contexte de l'administration de la justice.
Et enfin une dernière mesure sur laquelle le Barreau travaille ardemment, et on a fait des représentations, dans le cadre de la commission sur le processus de nomination... de sélection et de nomination des juges, entre autres, c'est d'assurer une juste représentation des femmes dans les postes décisionnels, et, dans le cadre de la commission, évidemment ça visait plus particulièrement les nominations à la magistrature.
Alors, sur ces brèves, que je ne voulais pas trop longues, remarques introductives pour souligner l'intérêt du Barreau du Québec à cette question, je passerais maintenant la parole... je céderais la parole à Me Lamarche pour aborder le mémoire du Barreau.
Le Président (M. Bernier): Me Lamarche, la parole est à vous.
Mme Lamarche (Lucie): Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM. Mmes les députés, messieurs mesdames. Comme le disait le bâtonnier du Québec, le Barreau croit toujours que des mesures adaptées aux besoins des femmes sont nécessaires pour s'assurer que celles-ci puissent jouir de tous leurs droits dans l'égalité. Ces mesures doivent prendre en compte les conséquences négatives des discriminations subies par les femmes, toutes les femmes de différents horizons. Et, de plus, constate-t-on, très souvent les causes de ces discriminations sont, dit-on, multiples et croisées. On parlera alors de l'intersectorialité des motifs de discrimination. C'est de cette égalité-là dont il s'agit ici et que le Barreau a défendue et soutenue devant plusieurs commissions, dans différents contextes.
Pour les fins du mémoire, quelques orientations en jeu, questions soulevées dans le document de consultation ont retenu l'attention du Barreau, et notamment l'orientation n° 2 portant sur l'égalité économique, la 3, sur la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles et la 6, sur la participation des femmes aux instances décisionnelles.
Tout d'abord, quelques commentaires généraux. Il s'agit ici de parler d'un plan d'action gouvernemental qui, évidemment, ne constitue pas un texte normatif, il est plutôt de nature administrative ou politique. Mais un tel plan d'action gouverne l'action publique et celui-ci a ceci de particulier qu'il est dominé par une norme fondamentale qu'est la norme d'égalité entre les hommes et les femmes. Considérant ce principe directeur, qui est un droit fondamental, et le droit des femmes à l'égalité substantive, le Barreau jugerait souhaitable que l'énoncé introductif de cet éventuel plan d'action cadre bien la question et rappelle avec force et clarté que l'arrimage du plan d'action, ce sont tant les chartes canadienne que québécoise que la convention internationale des Nations unies pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, que l'on appelle en français la CEDEF -- mais trop souvent on entend parler de CEDAW.
Il ne serait en conséquence pas superflu, estime le Barreau, de préciser, dans ce même énoncé introductif, le standard d'égalité entre les sexes qui gouverne l'action publique au Québec, car ce plan d'action en dépend d'une certaine façon. Certes, on utilise souvent et à juste titre l'expression «égalité entre les hommes et les femmes», mais le droit des femmes à l'égalité emporte la nécessité de dessiner des lois, des politiques, des stratégies qui, en tout état de cause, tiennent compte des désavantages dont les femmes sont encore victimes. Donc, il faudrait, nous semble-t-il, bien mettre en évidence que l'expression «égalité entre les hommes et les femmes» ne signifie pas qu'on néglige ou que l'on diminue l'importance que l'on doit accorder à l'identification et à la correction des désavantages dont les femmes sont victimes.
**(15 heures)** Les chiffres rendus publics par le Secrétariat à la condition féminine, dans le document Faits saillants, premièrement, sont forts révélateurs et forts intéressants et ils révèlent des données qui parlent. Le quotidien de plusieurs Québécoises, notamment les plus vulnérables, côtoie de près, hein... parfois le domine, mais côtoie de près la pauvreté, la précarité, l'insécurité et la violence, y compris au travail. Il nous apparaît que, découlant de la charte québécoise, ce plan d'action doit réfléchir des actions concrètes destinées au renforcement de l'égalité. Et le Barreau, à cet égard, rappelle le bilan des 25 années de la charte québécoise, rendue publique déjà, en 2003, par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, car, on n'en sort pas, il est très clair que les droits économiques et sociaux des femmes sont au coeur de l'exercice effectif de leur droit à l'égalité, lequel mène vers cette égalité de fait qui est ardemment souhaitée par l'actuel gouvernement et, à vrai dire, imposé tant par les chartes que par le droit international des droits de la personne.
Peut-être, donc, pourrait-on envisager un certain élargissement du champ d'action de la première orientation, car, s'il est juste d'affirmer que notre société est à l'évidence héritière de malheureux stéréotypes entre les hommes et les femmes, les engagements internationaux du Québec ne se limitent pas à la lutte contre les stéréotypes mais exigent aussi la promotion d'un standard d'égalité de tous les droits des femmes et de toutes les Québécoises. Pourquoi ne pas imaginer le recours à un mécanisme comme celui de la clause d'impact? La clause d'impact est un mécanisme qui semble faire ses preuves dans le cas, par exemple, de la loi contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Elle est connue lorsqu'il s'agit de bonne gouvernance et d'attribution d'allocations budgétaires. Pourquoi ne pas demander au Conseil des ministres d'imaginer un mémorandum qui, celui-ci, par contre, pourrait ne pas être protégé par une clause de confidentialité et qui exigerait que, dans toutes les décisions acheminées au Conseil des ministres, on ait à l'esprit l'impact d'une décision ou d'une autre, qu'il s'agisse de femmes ou d'autre chose, et notamment de budget, qu'on ait donc à l'esprit l'exigence d'égalité?
La CEDEF, cette convention internationale, elle revêt une importance particulière dans le cas de l'orientation 2, portant sur l'égalité économique, parce qu'elle met en évidence qu'on ne peut pas isoler le revenu des femmes de l'exercice de l'ensemble de leurs autres droits. Alors, il y a quelque chose, dans l'orientation 2, qui, encore une fois, pourrait, dans sa déclinaison, faire appel à des mesures pour mettre en relation les discriminations, les vulnérabilités, l'exigence de sécurité économique mais aussi les allers-retours entre tous les droits et cette recherche d'égalité de revenus.
On parle ici de moyens concrets. On pourrait parler de transversalité, par exemple. Mais peut-être le plan d'action pourrait-il envisager ne pas isoler des problématiques, mais plutôt ouvrir les problématiques à la façon dont il raisonne dans la recherche de tous les droits des femmes au nom de ce principe de l'égalité de fait. Parce qu'encore une fois, rappelons-le, les discriminations sont multiples, elles sont croisées, elles sont intersectorielles. Il ne s'agit pas simplement de problèmes, et un plan d'action ne peut pas simplement énumérer, encore que ce soit requis, des stratégies en réponse à des problèmes. Ces problèmes doivent être guidés par la compréhension que l'on a de leurs impacts sur tous et chacun des droits des Québécoises.
Quelques commentaires spécifiques concernant d'abord l'égalité économique entre les hommes et les femmes. La Loi sur l'équité salariale, le Barreau du Québec a déjà salué les modifications apportées à la Loi sur l'équité salariale en 2009. Mais, voilà, cette loi a besoin d'institutions. Il est de l'avis du Barreau que la Commission sur l'équité salariale doit être sauvegardée. Il est aussi de l'avis du Barreau que l'équité salariale ne répond pas à tous les enjeux de parité sur le marché du travail. Certaines femmes ne peuvent pas encore bénéficier du cadre d'entreprise, soit-il comparatif, qui est celui de la Loi sur l'équité salariale. Or, le Barreau aimerait que soient articulés en fonction du principe d'égalité non seulement la recherche de l'autonomisation des femmes, mais aussi ce lien entre l'autonomisation et la parité, qui est un concept peut-être moins technique, moins d'entreprise, mais plus aspirationnel, en fonction de la richesse globale de la société québécoise entre les hommes et les femmes.
Sur la question des responsabilités familiales, encore une fois, le document Faits saillants est très utile et révèle des choses que l'on sait ou que l'on sent. Il y a encore des écarts importants sur le partage des tâches domestiques. Il y a des chiffres assez importants aussi qui révèlent que les femmes recourent de manière très soutenue au congé parental et que les hommes y sont mais n'y sont pas tout à fait encore. Toutefois, il y a un arrimage, dans la législation québécoise, qui pourrait mériter considération, c'est celui entre le motif de statut familial, qui n'est pas prévu à l'article 10 de la charte québécoise, et son corollaire, qui serait la notion d'accommodement, obligation faite à l'employeur en fonction des obligations parentales. Cet arrimage est difficile dans le contexte législatif québécois parce que n'est pas nommé, dans l'article 10 de la charte québécoise, le statut parental à titre de motif de discrimination.
M. le bâtonnier a déjà parlé de la question de l'orientation 6, donc les instances décisionnelles. La présentation écrite du Barreau du Québec fait état des efforts consentis par le Barreau à titre d'employeur, d'une part, mais aussi de ses inquiétudes. La question a été posée tantôt: Oui, mais comment peut-on faire le pont entre ce que les jeunes filles disent espérer et ce que l'on constate sur le marché du travail? Je crois que, dans le mémoire que le Barreau a déjà déposé dans le contexte de la commission Bastarache, il y a un principe qui n'est pas nommé, comme tel, mais qui est présent, c'est celui de la traçabilité, hein, du fait d'être prête au marché du travail, d'y entrer et qu'advient-il ensuite. Il pourrait exister des outils de traçabilité dans des contextes particuliers. La magistrature est un très bon exemple parce que c'est un contexte plus facile à tracer, mais...
Le Président (M. Bernier): Je vous inviterais à conclure, Me Lamarche, s'il vous plaît.
Mme Lamarche (Lucie): D'accord. On pourrait raconter cette histoire de vie, finalement, qui laisse parfois perplexe devant les chiffres et les écarts que représente la présence des femmes dans certains métiers et certainement dans les métiers traditionnels.
Bref, deux mots. Oui, le Barreau croit que ce débat sur le plan d'action révèle l'importance de revenir à la charte québécoise, voire d'envisager une révision globale. Deuxièmement, le Barreau croit aussi que l'égalité de fait, ce n'est pas la même chose pour les hommes et les femmes, c'est une égalité adaptée aux besoins des femmes. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci, Me Lamarche. Nous allons donc passer aux échanges. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci. Merci d'avoir bravé la tempête. Enfin, vous avez été chanceux, avant... comme vous avez dit, avant que la route ferme.
La notion de traçabilité, moi, dans mon esprit, ça s'adresse aux aliments. Je trouve que c'est intéressant que ça s'adresse aux personnes, mais je... La notion de traçabilité, je vois ça dans les aliments, les viandes, et tout ça, comment on trace... En fait, on retrace d'où vient la bête. Mais là, c'est intéressant, peut-être que... Le faire dans les cas... dans les professions, ça peut être intéressant aussi.
Tout d'abord, je voudrais vous parler de... Vous nous dites, à la page 3, sous vos commentaires généraux: «Le Barreau juge donc souhaitable que l'énoncé introductif de l'éventuel plan d'action en matière d'égalité entre les hommes et les femmes [...] situe d'entrée de jeu, en énoncé introductif, les documents constitutionnels, quasi constitutionnels et internationaux d'où il prend sa source: les chartes canadienne et québécoise des droits de la personne, ainsi que la Convention -- bien, ce qu'on appelle CEDEF -- sur l'élimination de toutes les formes de discrimination...» Je voudrais que vous m'expliquiez... Parce que vous savez fort probablement que c'est dans la politique et c'est dans les fondements de la politique, les assises légales, 1.1... C'est à la page 21 du document, mais c'est écrit clairement, on parle des chartes, on parle de la convention internationale. En quoi est-ce que ça viendrait donner plus de poids à notre plan d'action, puisque c'est déjà... Autrement dit, est-ce que juridiquement ça voudrait... ça changerait quelque chose ou ça ajouterait quelque chose, puisque c'est déjà dans la politique?
Le Président (M. Bernier): Me Lamarche.
**(15 h 10)**Mme Lamarche (Lucie): Merci, Mme la ministre. Alors, ce que dit le mémoire, c'est, d'une part, qu'un plan d'action n'est pas une loi, donc il n'a pas de portée normative, mais qu'un plan d'action dûment assis, dirais-je, sur les fondements constitutionnels peut aider à interpréter des lois. Alors, c'est le chemin inverse. Si on dit: J'adopte le plan d'action parce que ma compréhension de l'égalité est celle-ci, et tel est le fondement constitutionnel, une loi pourrait donc être enrichie, d'une certaine façon, par l'inspiration du plan d'action. Donc, c'est la circularité, hein? L'idée, c'est d'éviter les ruptures entre le domaine législatif et le domaine de l'action publique ou de l'action administrative.
Je pense qu'il y a aussi une deuxième raison, c'est celle qui consiste à expliciter ce que ça signifie, dans le contexte constitutionnel et quasi constitutionnel québécois, que l'égalité entre les hommes et les femmes. Le Barreau croit, pour avoir suivi de près le chemin depuis quelques années, que peut-être que tout le Québec n'est pas parfaitement convaincu ou ne comprend pas clairement que l'expression, qui est celle de la CEDEF d'ailleurs, «égalité entre les hommes et les femmes» ne signifie absolument pas les mêmes ressources, les mêmes réponses, les mêmes stratégies, tant pour les hommes que pour les femmes. J'irais plus loin, ça ne signifie pas non plus les mêmes ressources, les mêmes stratégies, les mêmes réponses législatives pour toutes les femmes aveuglément.
Donc, cette façon de décliner l'égalité de fait, c'est le langage de la politique que le droit international décrit comme une égalité substantive -- la Cour suprême du Canada aussi d'ailleurs -- c'est une déclinaison qui, du point de vue du Barreau, mériterait d'être sortie de son emballage, d'une certaine façon, non pas que le Barreau prétende que le gouvernement a des intentions cachées, mais répéter, dans le contexte actuel, pourrait être une stratégie utile non seulement pour que la politique soit bien comprise, mais aussi pour qu'elle ait plus de chances... ou plus d'impacts sur la compréhension de l'action législative.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: ...la ceinture et les bretelles, c'est ça?
Mme Lamarche (Lucie): J'aime mieux, avec votre permission, Mme la ministre, l'idée de la circularité. Mais c'est peut-être parce que, depuis que je fais dans la traçabilité, je...
Mme St-Pierre: Votre suggestion... Enfin, quand vous parlez de l'absence, à l'article 10 dans la charte, du motif de statut parental ou de statut de parent, à titre de motif de discrimination explicitement interdit... Vous avez parlé aussi des droits économiques et sociaux. Je me souviens, lorsqu'on a fait les changements à la Charte des droits et libertés sur l'égalité entre les hommes et les femmes, on a eu, bon, une commission parlementaire. Ça a été un travail assez en profondeur. Vous aviez fait état... Le Barreau, je crois, mais certainement la Commission des droits de la personne avait fait état des droits économiques et sociaux, parce que c'est une demande qui était... qui est vraiment récurrente. Pourquoi, à ce moment-là, vous n'aviez pas... Puisqu'on était dans un exercice d'ouvrir la charte, puis on ne fait pas ça tous les jours, là, pourquoi ça arrive maintenant et que ça n'est pas arrivé à ce moment-là? Est-ce qu'il est arrivé quelque chose dans vos recherches, dans l'actualité, ce qui... dans vos réflexions pour nous parler de ça aujourd'hui?
Le Président (M. Bernier): Me Lamarche.
Mme Lamarche (Lucie): Je m'en remets, pour validation, à M. le bâtonnier, mais je pense que d'abord il faut dire les choses telles qu'elles sont. La réponse à votre question est d'ordre chronologique. Plus le Barreau s'est approché de sa propre politique en matière conciliation famille... plus le débat s'est engagé concrètement, empiriquement, tantôt avec le milieu judiciaire et le milieu juridique, plus il a constaté que, dans... j'allais dire, dans l'imaginaire des employeurs, parce que d'aucune façon je n'insinue qu'il y ait mauvaise foi, le lien ne se fait pas automatiquement entre l'exigence d'égalité et les pratiques de conciliation travail-famille. Donc, c'est un travail de maturation ou chronologique, mais le Barreau serait malheureux si vous y voyiez une opposition ou un changement de cap, parce que la toute dernière ligne de ce mémoire dit: On en a besoin, de cette révision générale de la charte québécoise.
Alors, ça, c'est la ligne de fond, mais spécifiquement l'expérience du Barreau, comme employeur et comme corporation professionnelle, semble révéler que, ce passage de l'exigence d'égalité à -- et on utilise l'expression avec une extrême prudence -- l'accommodement, dans le domaine de la conciliation travail-famille, il y a du chemin à faire, et il n'est pas exclu, à titre de stratégie, que l'ajout d'un motif de discrimination puisse contribuer à ce chemin.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Mais il faudrait que ça soit écrit, dans votre esprit, noir sur blanc, parce que la discrimination n'inclut pas automatiquement cette notion de statut parental. Ce que je vous...
Mme Lamarche (Lucie): Nous en sommes...
Le Président (M. Bernier): Me Lamarche.
Mme Lamarche (Lucie): Pardon.
Mme St-Pierre: C'est ça, c'est...
Mme Lamarche (Lucie): Nous en sommes à... Nous posons la question. Le Barreau ne dit pas que c'est la seule solution et la bonne solution. Le Barreau, je crois, est au point de constater qu'une étude sérieuse de cette seule question pourrait être appropriée.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme St-Pierre: Moi, j'en rencontre quelquefois, des femmes qui sont avocates. Puis, à un moment donné, j'étais allée à un de vos congrès puis j'avais discuté avec des femmes qui étaient, bon, à l'âge, là, où on arrive sur l'autoroute, là, c'est-à-dire de... entre 35 et 45 ans. Il y a des enfants, puis ça va vite, la profession va bien, puis la conciliation travail-famille devient difficile. Et les femmes me disaient que, parmi les professions, la profession d'avocate est une profession où les femmes subissent beaucoup de discrimination parce qu'elles ne peuvent pas consacrer les heures de travail que les grands bureaux, si on parle des grands bureaux d'avocats, demandent, parce qu'elles sont... il y en a qui sont payés au volume, là, puis à ce qu'on rentre comme volume d'argent dans la compagnie. Alors, c'est quoi, la situation des femmes avocates?
Le Président (M. Bernier): Oui. Me Ouimet.
Une voix: M. le bâtonnier.
Le Président (M. Bernier): ...bâtonnier.
M. Ouimet (Gilles): Oui. En fait, si je peux me permettre, en tant qu'homme, donc, il y a un projet... C'est un... Le constat qu'on a fait... qui a été fait par les différents comités des femmes dans la profession a souligné cette réalité où il y a peu de femmes qui réussissent à devenir associées dans les structures des grands bureaux, là, parce que c'est surtout là qu'on peut faire ce constat-là. Et il y a un projet qui est en développement, un projet de mentorat, qui vise spécifiquement à appuyer les avocates qui atteignent cet âge. Donc, on ne parle pas de mentorat pour des jeunes qui débutent la pratique, mais plutôt les avocates d'expérience qui sont confrontées à cette réalité entre la conciliation travail-famille, et les choix professionnels, et l'espoir d'atteindre... d'être reconnues et admises à titre d'associées. Alors, ce projet, qui est sur le point d'être lancé -- il y a eu des rencontres à Québec au mois de décembre, il y en a une à Montréal avec les grands bureaux justement pour faire la promotion de ce programme-là -- ça, c'est une mesure concrète qui vise à s'attaquer à ce problème qui est très concret, qui a été constaté, là, et ce, malgré le fait qu'en 1995 on a signé la convention... l'entente sur la conciliation travail-famille. Je pense que ça prend du temps avant de faire son chemin, et là on est rendu à faire ces constats-là.
Mme St-Pierre: Mais, puisque, comme vous dites, la loi canadienne libelle le motif de discrimination lié au statut parental, est-ce que ces femmes-là n'ont pas déjà le recours dans la Charte canadienne? Et pourquoi il faudrait l'inclure dans la charte québécoise si ça existe déjà dans la Charte canadienne?
Le Président (M. Bernier): Me Lamarche.
Mme Lamarche (Lucie): Oui. D'une part, Mme la ministre, on parle d'une énumération de motifs interdits de discrimination dans la Loi canadienne sur les droits de la personne -- oh là là! pardon, le mobilier -- et non pas dans la Charte canadienne. Donc, c'est le secteur fédéral, hein, les employeurs fédéraux.
D'autre part, la littérature n'est pas unanime, d'où cette position: Peut-on porter attention à l'hypothèse spécifiquement, hein, qui est une... qui est vraiment une hypothèse précise, là? Mais je crois même qu'il serait parfois difficile de comparer les employeurs fédéraux soumis à la Loi canadienne sur les droits de la personne... C'est une question qu'on connaît bien. Québec, terre de PME et de toutes petites entreprises. Les comparaisons seraient... devraient être bien réfléchies, d'où la prudence. Mais néanmoins le Barreau est convaincu que la question mérite d'être posée.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme St-Pierre: M. le Président, je n'ai pas d'autre question. Je ne sais pas s'il reste du temps pour mes collègues.
Le Président (M. Bernier): Oui, il reste environ 3 min 30 s au député de Chomedey.
M. Ouellette: Pour une petite question, M. le Président.
n(15 h 20)**Le Président (M. Bernier): Une petite question avec une petite réponse.
M. Ouellette: Ça va être une petite réponse parce qu'on a même les chiffres. Merci d'être là et d'avoir bravé notre cher climat. Je pense que le vent est pire que la neige aujourd'hui, là, un peu partout.
Je veux vous parler des femmes dans la magistrature, parce que dans votre mémoire vous faites état de 30 % de juges féminins à la Cour supérieure. Je présume que c'est le chiffre québécois, qu'il doit y avoir un meilleur chiffre à l'échelle canadienne, parce que c'est nommé par le fédéral, donc ils doivent tenir compte d'une représentativité canadienne dans les nominations. Mais je n'insisterai pas sur les juges à la Cour supérieure, là. 33 % à la Cour du Québec. Il y a un chiffre qu'il vous manque, du ministère de la Justice, qui sont les juges de paix magistrats, et là c'est 50 %. Bon, je ne vous parlerai pas des 16 % de la cour municipale, parce qu'il y a peut-être un travail qu'il faut qu'il soit fait au niveau des deux fédérations, puis au niveau des unions des municipalités, puis... à ce niveau-là.
Mais vous n'êtes pas sans savoir que le Conseil du statut de la femme a déposé un mémoire dans le cadre de la commission Bastarache et qui déplorait qu'on mettait surtout l'accent sur l'expérience comme critère de sélection des juges. Vous en avez fait état un peu, de l'expérience, dans votre mémoire, à la page 9. Je voulais juste vous entendre, là, dans la minute et demie qu'il reste, là, peut-être de façon succincte -- puis je sais que, les avocats, vous êtes capables, quand vous voulez... -- je veux vous entendre élaborer sur les critères de représentation. Puis vous pensez quoi du mémoire du Conseil du statut de la femme, qui disait que... peut-être pas juste privilégier l'expérience ou que ça soit un critère majeur là-dessus?
Le Président (M. Bernier): Me Ouimet.
M. Ouimet (Gilles): Évidemment, c'est un peu difficile pour moi de faire une démonstration ou répondre de façon convaincante à la question, puisque, bon, on a fait ce travail-là dans le contexte de la commission Bastarache. Le point important, pour nous, c'est de noter, d'ailleurs... et à chaque occasion que j'ai de participer à des cérémonies de présentation ou d'assermentation de juge, je le souligne, il faut qu'il y ait des efforts qui soient faits pour augmenter la représentation féminine. Peu importent les chiffres des... d'où on part, on n'a pas atteint cet équilibre-là, souhaitable. Il y a, et je l'ai souligné, cinq des sept dernières nominations à la Cour du Québec sont des femmes, dans les dernières semaines, derniers mois. Alors, ça, c'est un pas dans la bonne direction.
Au niveau des critères de nomination, c'est difficile de ramener ça à une question. Ce n'est pas uniquement dire «l'expérience». Ce n'est pas vrai de dire que les personnes doivent être déclarées aptes à occuper la fonction judiciaire sur la base uniquement de l'expérience. Ce que le Barreau souligne, c'est que des efforts doivent être faits dans l'évaluation des candidatures pour compenser les biais conscients ou inconscients qu'on peut avoir dans l'évaluation d'un profil qui nous prépare à la magistrature. Et c'est là qu'il est important qu'il y ait de la formation et qu'on parle de cette réalité où malheureusement moins de femmes sont juges qu'on devrait en avoir si on vise une égalité...
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Nous allons passer maintenant du côté de l'opposition officielle avec Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Dans votre mémoire... Et je reprends le sujet que la ministre a introduit, qui était le statut de parent à la charte. Je trouve ça intéressant comme concept. Et particulièrement j'ai lu, la semaine passée, plusieurs jugements sur, entre autres, des causes d'allaitement en public et qui finissent toujours par être gagnées par les femmes, quand elles se sont fait expulser de milieux publics. Et on finit toujours par les indemniser mais sur la base de la discrimination des genres et non pas d'un statut de parent, et qui... Dans leur cas, il est bien sûr qu'il y a seulement les femmes qui peuvent allaiter, là, ça, c'est bien sûr. Et il y a une pétition qui circule actuellement en ligne, sur le site de l'Assemblée nationale, et qui demande justement qu'on modifie la charte, comme l'a fait la Colombie-Britannique, l'Ontario, la Nouvelle-Écosse, en introduisant l'allaitement en public comme un droit, tout simplement, un droit d'être nourri comme enfant. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, en lien avec ce statut de parent là.
Le Président (M. Bernier): Me Lamarche.
Mme Lamarche (Lucie): Merci, Mme la députée. Je sais, M. le Président, qu'il faut aller vite. Voilà bien... Mais votre question révèle combien l'enjeu est complexe et combien la compréhension est complexe.
Premièrement, une travailleuse n'est jamais qu'une mère, un parent, une travailleuse ou un sexe. Elle est tout ça en même temps. Deuxièmement, la curiosité ou l'intérêt du Barreau, c'est un lien précis entre peut-être l'ajout d'un motif de discrimination à l'égard d'une conséquence précise, qui est de lier l'obligation de l'employeur d'accommoder au chef de la conciliation travail-famille... Quelles sont les questions qui se posent? Les questions qui se posent, c'est évidemment: Créerions-nous une situation où l'on pourrait opposer le statut de mère à d'autres critères d'identité des femmes? Les Québécoises, actuellement, je dirais, ont reçu indemnité... ont été indemnisées lorsque leur droit d'allaiter en public a été bafoué parce qu'elles sont des femmes. Le droit d'allaiter, c'est autre chose, hein? Je ne pense pas que les Québécoises aient besoin de revendiquer le droit d'allaiter. De pouvoir le faire en public, c'est un acquis de la charte dans son état actuel.
Alors, je répète que la préoccupation du Barreau est à la fois petite et grande. Elle est petite parce qu'elle concerne un problème spécifique, celui de la multiplication, dans le milieu de travail, professionnel et autre, de politiques ou de meilleures pratiques au titre de la conciliation travail-famille. Elle est grande parce qu'il y a toujours de multiples enjeux à soulever l'opportunité d'ajouter un motif de discrimination dans une liste de motifs de discrimination prohibés. Et l'un de ces enjeux, c'est de... -- je vais le dire dans mes termes et je précise que ce ne sont pas les termes du Barreau -- on ne veut pas changer les femmes en mères. On veut rappeler aux employeurs que les femmes sont aussi parfois des mères qui ont... qui peinent à sensibiliser leurs employeurs à ce que signifie la conciliation travail-famille. C'est pour ça que la question est complexe et que vous devez bien sentir que la question du Barreau, elle est posée prudemment et respectueusement. Ce n'est pas une injonction. Je ne crois pas que le mémoire ait utilisé le ton de «il faut absolument». Je ne pense pas que ce soit écrit comme ça.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Poirier: Écoutez, je vous amène sur un autre sujet. On a eu des représentations en lien avec la prostitution hier. Et on a devant nous... j'ai appelé ça hier le vent du jugement Himel, en tant que tel, et j'aimerais vous entendre sur les impacts au Québec de ce jugement, éventuellement.
Le Président (M. Bernier): Mme Lamarche ou maître... M. le bâtonnier? Me Lamarche.
Mme Lamarche (Lucie): Premièrement, je suis ici accompagnée du bâtonnier du Québec. Il s'agit du mémoire du Barreau et, à ma connaissance, M. le bâtonnier, le Barreau n'a pas pris position sur le jugement Bedford. Mais toutefois le Barreau a souvent pris position sur la pauvreté, la précarité et l'exclusion sociale des femmes. Et il me semble légitime de proposer à cette distinguée commission un lien entre les conditions de précarité de vie des femmes et l'enjeu ou, je devrais dire, le fait, hein, la réalité de la prostitution, quelle que soit la forme dans laquelle elle se pratique. Mais je répète qu'à ma connaissance, et je regarde d'un oeil inquiet mon bâtonnier, le Barreau n'a pas pris position sur la décision Bedford.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Poirier: Je reviendrais sur le sujet que mon collègue a introduit en lien avec les nominations à titre de juge dans les différentes instances. Je vous dirais à la blague que, les femmes étant économiquement moins riches, elles donnent moins aux partis politiques et elles se retrouvent avec moins de post-it. Mais c'est à la blague.
Le Président (M. Bernier): ...ça comme une blague.
Mme Poirier: Oui, oui, tout à fait. Écoutez, je ne suis pas surprise des statistiques, mais je suis surprise, dans le fond, de... Je voudrais connaître, dans le fond... Est-ce que les femmes... Parce qu'on l'a vu, au niveau du positionnement politique des femmes, elles sont moins candidates. Est-ce que, dans votre lecture... Est-ce qu'elles sont aussi nombreuses candidates aux instances de... aux postes de juge? Est-ce qu'il y a autant de candidatures femmes? Est-ce qu'elles sont sensibilisées à déposer une candidature, en tant que tel, puisque leur nombre est inférieur? Ou c'est tout simplement qu'il y a effectivement un plafond de verre et que, l'expérience étant un des critères, ça devient... cette discrimination-là se fait par là? Alors, je voudrais juste savoir: Est-ce que les femmes sont... est-ce qu'il y a de l'encouragement à déposer? Est-ce qu'elles le sont? Et qu'est-ce que ça donne, en tant que tel?
Le Président (M. Bernier): Me Ouimet? Me Lamarche?
Une voix: Me Lamarche.
Une voix: ...votre dernière.
**(15 h 30)**Mme Lamarche (Lucie): Rapidement, Mme la députée, vos questions, ce sont des phares dans la discussion parce que c'est exactement ce à quoi fait référence cet appel à la traçabilité. Peut-on se donner des outils pour répondre à vos questions? Donc, il faut amorcer... il faut être sensible du début, hein, du processus. Pour reprendre l'exemple de la magistrature, dès lors que les femmes sont membres du Barreau, juste de l'intrant à l'extrant, c'est, j'en conviens, Mme la ministre, un vocable pour le moins alimentaire, mais il faut tracer ce... Et les systèmes fermés, là, je ne le dis pas péjorativement, les corporations professionnelles, ce sont des microcosmes parfaits pour tester cette idée de l'histoire, quelle est l'histoire, comment la retrace-t-on.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Poirier: Donc, si je comprends... Oui, allez-y.
Le Président (M. Bernier): Me Ouimet.
M. Ouimet (Gilles): Bien, en fait, je ne sais pas, parce qu'il y aurait beaucoup à dire pour... Mais je ne sais pas si vous voulez poser une autre question, ça va me faire plaisir de vous laisser...
Mme Poirier: Ce que je comprends, c'est qu'il n'y a pas... On n'a pas documenté le secteur nomination juges au féminin, si je comprends bien.
Mme Lamarche (Lucie): Mme la députée, le mémoire utilise deux mots. Il parle de transparence, hein? Ce sont les mots empruntés au mémoire soumis à la commission Bastarache. Et il propose en amont aussi, c'est-à-dire que, dès lors que sont constitués des pools, des... sont mis en ordre des noms aux fins du cheminement éventuel, peut-on, dès lors, porter attention et assurer, dit le mémoire -- c'est une position très pragmatique, hein, on a vu ça dans d'autres domaines -- que des femmes soient présentes dès lors que sont constitués des pools aux fins du parcours vers la magistrature.
Et peut-être, dit le mémoire soumis à la commission Bastarache, qu'un petit peu plus de transparence, dans le cas de la magistrature -- dans d'autres microcosmes professionnels, ce sera d'autres enjeux -- pourrait être utile pour qu'on puisse comprendre et raconter l'histoire. On ne connaît pas d'expérience professionnelle... On n'a pas de repère, là. Il faut créer les meilleures pratiques. Habituellement, ce que les corporations et les grandes boîtes font, c'est l'entrevue de sortie: Pourquoi vous ne l'avez pas fait? Pourquoi vous avez quitté? Pourquoi vous abandonnez? Chez les ingénieurs, notamment, les grandes boîtes font des entrevues de sortie. Ceci dit en toute solidarité pour nos collègues ingénieurs, c'est peut-être un petit peu tard.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Poirier: Est-ce que vous iriez jusqu'à proposer des quotas?
Mme Lamarche (Lucie): Ce n'est pas la position du mémoire du Barreau qui vous est aujourd'hui soumise.
Mme Poirier: Mais est-ce que vous y avez réfléchi?
Mme Lamarche (Lucie): Vous savez, j'ai posé cette question-là à M. le bâtonnier. Il y a 18 000 membres dans cette corporation...
Une voix: 23.
Mme Lamarche (Lucie): ...j'espère que certains... 23. J'espère que certains y ont réfléchi.
M. Ouimet (Gilles): Oui, si je peux me permettre. C'est un sujet... Il y a beaucoup à dire sur la question des statistiques. Vous savez, c'est un... Le processus de nomination était... de sélection est très confidentiel, d'un point de vue d'individu, les gens qui décident de se poser comme candidat, poser leur candidature, il y a un secret qui est plutôt respecté dans... -- que, personnellement, je ne comprends pas, mais ça, c'est une autre question -- ce qui peut expliquer pourquoi on ne s'est jamais vraiment intéressés à obtenir des statistiques. Un des mérites, à mon point de vue, de la commission Bastarache aura été, à tout le moins, de mettre l'emphase sur tout ce processus et nous amener collectivement à envisager des façons de l'améliorer. C'est un très bon système, mais on peut l'améliorer. Et particulièrement, puisqu'on parle d'égalité entre hommes et femmes, cette question-là est très pertinente.
Quant à la question des quotas, je pense... Et le Barreau n'a pas pris position spécifiquement sur cette question-là, on était plutôt la... Ce qu'on a préconisé, ce sont des mesures pour favoriser, encourager des mesures qui, spécifiquement, encourageraient les avocates à se porter candidates. Dans les faits... Et là il faut voir aussi en fonction des chambres. Mais il y a une réalité -- je suis un criminaliste, je pratique en droit criminel -- il y a beaucoup de femmes qui se retrouvent particulièrement au niveau du bureau des poursuites criminelles, le bureau du DPCP, et des femmes d'expérience. Alors, je pense, moi, qu'au niveau des statistiques, si on obtenait ces statistiques-là, il y aurait peut-être, effectivement, des candidatures en nombre suffisant.
Il y a un élément, par contre, et c'est peut-être là que l'élément de biais entre en ligne de compte, c'est que les avocates, dans cet environnement-là, se consacrent à leurs familles et à leur travail et n'ont pas d'implication autre, ce qui, dans une évaluation plus traditionnelle d'une implication, ou d'un C.V., ou d'une expérience professionnelle, peut désavantager, et je le dis, là, sous toutes réserves, mais c'est... quand on parle de biais, ça peut être une façon de le manifester.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Poirier: Sur un autre... Je reviendrais sur la conciliation famille-travail. Vous mentionnez, dans votre mémoire, que la ministre de la Justice, les juges en chef et les représentants du Barreau ont convenu de renouveler une déclaration de principe sur la conciliation famille-travail. J'aimerais ça que vous m'expliquiez cette déclaration de principe là, ça veut dire quoi, en tant que tel, en faits concrets?
Le Président (M. Bernier): Me Ouimet.
M. Ouimet (Gilles): En faits concrets, ça vise... Le mérite de cette déclaration de principe, c'était de rappeler l'importance de cette conciliation-là et d'articuler en deux... de faire la promotion, auprès des avocates et des avocats, à rechercher un milieu de travail qui leur permet d'accommoder leur situation familiale, d'une part, et, d'autre part, que l'administration de la justice et ses intervenants, les juges, et le ministère de la Justice, et le Barreau, soient conscients de cette réalité-là dans la pratique quotidienne.
On a des cas... C'est drôle parce qu'au même moment où on signait, on renouvelait la signature de cette déclaration de principe, on avait une avocate, au Conseil général, qui mentionnait qu'il y a quelque... quelque temps auparavant, elle avait été en cour jusqu'à 11 heures le soir, au Tribunal de la jeunesse, je pense. Et c'est un peu... c'est presque... En fait, c'est dur à croire, là, mais, bon. Et c'est une mère qui est seule, donc... Ce n'est pas inutile que cette déclaration de principe soit resignée, et qu'on en reparle, et qu'on agisse. C'est ça, dans le fond, au bout du compte, on veut qu'il y ait des actions concrètes qui soient posées. Merci.
Le Président (M. Bernier): Il vous reste une minute.
Mme Poirier: Bien, écoutez, vous parlez du cas de cette jeune mère là, mais est-ce qu'il y a eu des actions qui ont été posées suite à cette déclaration? Parce que c'est le fun, une déclaration de principe, mais est-ce qu'il y a des actions concrètes, là, qui démarreront bientôt ou qui sont démarrées, en tant que tel, à part que de déplorer qu'il y a des situations surprenantes?
Le Président (M. Bernier): Me Ouimet.
M. Ouimet (Gilles): En fait, je pense que le simple fait d'en parler fait beaucoup pour... Parce que, souvent, les gens, c'est par... peut-être, ils n'y ont pas pensé, ils n'y ont tout simplement pas pensé. Parce qu'il ne faut pas perdre de vue que le juge placé dans cette situation-là avait à coeur de mener à terme le dossier, pour éviter d'autres contraintes, d'autres difficultés. Je ne fais pas de reproche, mais au moins, et c'est l'objectif, d'en parler et d'en reparler... Et, moi, j'en ai parlé dans tous les discours à la rentrée pour que les gens y pensent. Et c'est quand on est en situation d'agir qu'il faut avoir ça à l'esprit.
Alors, comme moyen concret, à part d'afficher la déclaration dans tous les palais de justice et que tous les bâtonniers en parlent et en reparlent, ça se limite à ça pour l'instant.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci aux représentants du Barreau: Me Lucie Lamarche, Me Gilles Ouimet, bâtonnier. Merci d'avoir participé à cette commission parlementaire et de nous avoir apporté votre éclairage.
Je vais suspendre quelques instants pour permettre à la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 38)
(Reprise à 15 h 44)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous recevons les représentants de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec. Merci de votre présence. Je vous demande de vous identifier et d'identifier les personnes qui vous accompagnent. Et vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous allons échanger avec les parlementaires. Allez-y, la parole est à vous.
Table de concertation des
forums jeunesse régionaux
du Québec (TCFJRQ)
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Merci, M. le Président. Merci, Mme la ministre, pour l'invitation, ainsi que Mme la sous-ministre. Je salue également Mmes, MM. les députés présents et aussi les employés du Secrétariat à la condition féminine qui sont présents ici et en ligne, et tout particulièrement Mme Michèle Grenier, Mme Catherine Lamarche, avec qui nous avons collaboré plus étroitement.
Alors, permettez-moi de nous présenter. Moi, c'est Élise-Ariane Cabirol. Je suis vice-présidente de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec, également vice-présidente du Forum jeunesse de l'Abitibi-Témiscamingue. À mes côtés, François Talbot, directeur général de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec.
Vous avez reçu un rapport qui a été produit conjointement avec les forums jeunesse du Québec, les membres du Comité Égalité, que je tiens à remercier et saluer, et également Audrey Tardif, qui ne pouvait pas être présente aujourd'hui mais qui a contribué à la rédaction du rapport.
Alors, d'entrée de jeu, j'aimerais vous présenter, ou peut-être rappeler à votre mémoire, pour ceux qui les connaissent, qu'est-ce que sont les forums jeunesse régionaux du Québec. Issus de la stratégie d'action jeunesse du gouvernement du Québec et travaillant en étroite collaboration avec les conférences régionales des élus, les forums jeunesse sont présents dans toutes les régions administratives du Québec. Les mandats qui leur sont confiés sont: de susciter la participation citoyenne chez les jeunes, d'assurer une concertation sur les enjeux jeunesse, d'exercer un rôle-conseil à l'échelle régionale en matière de jeunesse, de favoriser la représentation des jeunes au sein de leur collectivité et, enfin, de travailler au développement régional en finançant des ententes ou des projets. La particularité des forums jeunesse, c'est leur gestion régionalisée qui leur permet de se doter de priorités, de modes de fonctionnement différents selon les besoins et la volonté des jeunes de chaque région. C'est ce qu'on appelle communément, dans notre univers des forums jeunesse, le par et pour les jeunes.
Pour ceux qui aiment un peu plus les statistiques, sachez que les forums jeunesse, ce sont plus de 300 jeunes engagés bénévolement, près de 800 projets financés entre 2006 et 2009, une soixantaine de mémoires qui ont été rédigés au cours de la même période et plusieurs millier de jeunes rejoints par des activités visant le développement et la participation citoyenne. Regroupés au sein d'une instance régionale, la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec... donc les forums jeunesse sont regroupés au sein de cette instance-là qui leur permet de se rencontrer et de se concerter. Les forums ainsi que la Table de concertation sont soutenus financièrement par le Secrétariat à la jeunesse.
Donc, alors, ceci dit, la Table de concertation des forums jeunesse est ici, devant vous, aujourd'hui, et c'est une première de l'histoire des dernières années de la table, d'être... de participer à une commission parlementaire comme ça.
Le Président (M. Bernier): On en est fort heureux.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Merci. Et ça a pris... Ça a tiré son origine -- pour la petite histoire -- de Mme Michèle Grenier, qui est une employée du Secrétariat à la condition féminine, qui travaille à la régionalisation, entre, donc, Mme Grenier et un membre de la Commission jeunesse du Bas-Saint-Laurent -- donc l'appellation du forum jeunesse dans cette région-là, c'est commission jeunesse -- qui ont discuté, qui se sont rendu compte qu'il y avait des enjeux intéressants à partager entre le secrétariat et les forums jeunesse. Ça a mené à des discussions entre la table de concertation et le secrétariat et, finalement, un travail de recension des actions des forums jeunesse en matière d'égalité dans les différentes régions du Québec, qui a donné le rapport qui vous a été déposé et qu'on vient vous présenter aujourd'hui.
Alors, avant de débuter, simplement deux petites considérations que j'aimerais amener. Donc, deux considérations que j'aimerais amener. La première, c'est que sachez qu'on est ici... Bon, je vous ai dit que c'était une première pour la table de concertation, mais on est ici en toute modestie, en ce sens qu'on n'est pas, les forums jeunesse, des théoriciens, on n'est pas là pour vous amener des positions bien campées, on est des praticiens. Le rapport qu'on vous soumet, c'est un mémoire... ce n'est pas un mémoire, c'est un rapport, donc ce n'est pas des... On n'est pas là pour défendre des positions formelles mais bien pour être les porteurs des actions qui ont été entreprises, qui ont cours, qui se font présentement dans les différentes régions du Québec par les forums jeunesse.
Et la deuxième considération est que c'est pour nous un début de dialogue, c'est ce qu'on voit surtout qui ressort de cette participation-là, c'est d'entamer un dialogue entre le Secrétariat à la condition féminine et les forums jeunesse, un dialogue qu'on trouve très intéressant. On le débute et on a le souhait que ça se poursuive et que ça se poursuive avec chacun des forums jeunesse régionaux du Québec, qui ont chacun leurs façons de faire et leurs visions spécifiques.
Alors, ce qu'on va faire, mon collègue et moi, c'est qu'on va amener à votre attention certains éléments issus... certaines pistes de réflexion qui sont issues du rapport qu'on vous amène. On ne reviendra pas sur l'ensemble des questions et orientations. On en a choisi quatre qui nous interpellaient plus spécifiquement, sur lesquelles on va élaborer. Donc, je débuterai, puis ensuite je céderai la parole à François Talbot.
**(15 h 50)** Au niveau de la question 1, qui traite des rôles différenciés entre les hommes et les femmes et des modèles offerts, on parle ici de changements qui sont de nature culturelle, et donc on croit que la solution à y apporter doit être pensée dans une optique de long terme. On pourrait penser... parler de promotion de modèles sains au cours de l'éducation des jeunes, le plus tôt possible dans leur parcours. Toutefois, la pratique, sur le terrain, d'actions visant la promotion des différents modèles a montré que souvent les initiatives sont très intéressantes mais, par contre, ne sont pas nécessairement accessibles à tous.
Il faudrait donc s'assurer de permettre que les programmes qui sont déjà développés soient accessibles à tous les milieux, notamment dans les milieux scolaires, afin d'éviter que la sensibilisation soit réservée à certains. C'est certain qu'à ce moment là, pour certaines régions qui sont peut-être plus étendues, on parle d'équité intrarégionale qui peut impliquer des coûts supplémentaires pour s'assurer que chaque école, par exemple, d'une région reçoive le programme de sensibilisation dont il est question.
Une autre avenue à considérer dans la promotion de modèles sains est l'alliance avec des partenaires privés. Au cours des dernières années, la notion de citoyen corporatif a fait de grandes avancées. Et on peut penser ici, en exemple, la campagne qui a été menée par Dove pour favoriser une image corporelle diversifiée. On peut penser aussi... Si on sort du champ d'expertise de l'égalité, à titre d'exemple, on peut s'inspirer de la lutte sur le cancer du sein, à laquelle de nombreuses entreprises privées se sont associées. Nous croyons que la valorisation de telles initiatives issues du privé, dans le domaine de l'égalité, serait à considérer.
Enfin, des considérations d'ordre plus général. Pour changer les modèles, il faut changer la culture, je l'ai mentionné au début. Et, pour ça, il faut que ça se parle. Il faut qu'il y ait des échanges. Il faut que l'enjeu soit mis en lumière dans les échanges dans la société. En ce sens, il nous semble important de renforcer la concertation entre les acteurs des différents milieux qui peuvent agir sur l'enjeu de l'égalité.
La mise en place de mécanismes de concertation visant à faire connaître et partager les initiatives existantes dans le domaine va nécessairement permettre de fortifier les actions entreprises, un peu à la façon dont le rapprochement entre le Secrétariat à la condition féminine et les forums jeunesse régionaux a permis de mettre en lumière la multitude d'initiatives qui est prise par les forums jeunesse dans les régions et qui était parfois, peut-être, sous-estimée. On ne croyait pas que les forums jeunesse agissaient tant que ça dans ce domaine. De collaborer a permis de mettre de l'avant cet enjeu-là et d'échanger beaucoup. Donc, la présence de lieux de concertation va nécessairement contribuer à faire avancer cet enjeu-là.
Au niveau de la question 6, de la progression des femmes dans les postes de décision et de pouvoir politique, c'est un enjeu qui touche beaucoup les forums jeunesse, qui ont développé beaucoup de pistes d'action pour favoriser la place des jeunes dans les instances décisionnelles. Et souvent les actions entreprises pour aider les jeunes à participer à titre de citoyens peuvent servir également à faire de la place aux femmes dans ces instances-là. On peut penser, par exemple, à tout ce qui touche à la conciliation travail-famille, que François vous parlera davantage mais au niveau de la logistique des rencontres, qui peut faciliter la présence des femmes. On peut penser également aux façons de faire dans certains forums jeunesse qui accordent une importance certaine à la vie démocratique de leur organisation et à faire vivre des valeurs plus humanistes, ce qui souvent va inciter des femmes et des jeunes également, par le fait même, à participer. À ce titre, je tiens à souligner que, les forums jeunesse régionaux du Québec, leurs conseils d'administration sont constitués à 60 % de jeunes femmes, partout à travers le Québec.
De plus, il ne faut pas négliger que la participation des femmes aux postes de pouvoir est bien souvent tributaire de leur sentiment de compétence, ou parfois leur manque de sentiment de compétence. Donc, selon nous, c'est une piste d'action qui est à ne pas négliger. On pourrait donc penser à des programmes de formation pour transmettre les connaissances liées à la participation citoyenne, à mettre en lumière des modèles de femmes qui participent et qui peuvent donner l'impression aux femmes que ce n'est pas si compliqué que ça, finalement. Les forums jeunesse ont d'ailleurs certaines initiatives qui visent le regroupement, le réseautage des femmes qui occupent des postes décisionnels ou désirant le faire.
Et il ressort également de la recension que la mise en place de mécanismes de mentorat adaptés à la réalité des femmes est également une option intéressante. Je cède la parole à François.
M. Talbot (François): Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier): M. Talbot, il vous reste environ cinq minutes.
M. Talbot (François): C'est bon, on va les prendre. Dans un premier temps, sur l'orientation... Moi, je voulais aborder l'orientation qui était la 3, donc la notion de la conciliation. D'entrée de jeu, je vous dirais, là, qu'on va y aller, comme l'a dit Ariane, bien modestement, là, puisque vous sera présentée, je crois, là, plus spécifiquement, une étude qui vient de sortir, en avril dernier, là, faite par le Comité consultatif Jeunes, en collaboration avec la FEUQ, le Conseil national des cycles supérieurs de la FEUQ, et qui concernait la conciliation familiale chez les jeunes, qui est très intéressante, là, qu'on vous invite à parcourir, bien entendu.
Ce qui est ressorti un peu de la collection d'information qu'on a faite: bon, les places en garderie sont revenues, je crois que ça a été mentionné assez fréquemment pour ne pas que je m'avance davantage là-dessus, mais qui est un enjeu crucial, là, dans cet enjeu de la conciliation.
Ensuite, les politiques... les politiques familiales, pardon, des municipalités, donc peut-être, là, un effort là-dessus de recension. On notait, là... Il y a un forum jeunesse qui nous mentionnait avoir fait, dans la Mauricie, une recension des politiques familiales afin d'aider à inspirer d'autres municipalités qui souhaiteraient en développer en mettant de l'avant un peu quels étaient les éléments qui composaient ces politiques pour qu'on puisse voir une multiplication de celles-ci dans les régions du Québec.
Enfin, on nous a mentionné également, en regard de la conciliation, l'importance de l'émergence de modèles égalitaires chez les travailleurs, en nous mentionnant que le RQAP a évolué dans les dernières années. On assiste de plus en plus à des... des hommes qui vont prendre des congés parentaux, une partie du parental, une fois le cinq semaines de paternité passé, et il semblerait qu'il y ait encore une certaine forme de sensibilisation à faire dans les milieux, par rapport au fait de dire... Un homme qui va quitter le milieu de travail durant une période prolongée, il semblerait qu'il y ait encore certaines... je ne sais pas si je dois appeler ça des discriminations, mais certaines réactions qui sont non souhaitables, là. Alors, on a mis ça sur la table comme un enjeu.
Si, ensuite, je vais du côté de l'action de l'État par rapport à l'égalité dans les différentes régions, qui était la question 7, que vous nous posiez dans votre document, bien entendu, la logique de décentralisation, de régionalisation qui a été mise de l'avant dans le dernier plan d'action est de la musique aux oreilles des forums jeunesse, dans le sens où, comme le disait Ariane, les forums travaillent une logique de par et pour, c'est-à-dire que ce qu'ils font envers la jeunesse, ils tentent de le faire pour la jeunesse mais en y incluant le plus possible les jeunes, donc, qui sont directement visés. En pratiquant une logique de décentralisation, de régionalisation, ce qu'on permet, c'est que les différents milieux soient au coeur de la construction des solutions qui les concernent.
Alors ça, à travers les ententes en égalité, entre autres, là, ce principe de régionalisation là a été très parlant, et on nous mentionnait, entre autres, dans les forums, qu'il y a un gain qu'on n'aurait peut-être pas pu voir au départ par rapport à ça. Puis nos collègues de la CRE vont sûrement vous en parler également, mais c'est qu'en amenant cet enjeu-là autour des tables des CRE ainsi qu'autour des tables des forums jeunesse, là, à l'initiative du Secrétariat à la condition féminine, on s'est rendu compte qu'il existait encore des préjugés. Et le simple fait de travailler à voir comment on va faire l'entente, quelles actions on va mettre de l'avant, le simple fait d'en parler, ça a eu des conséquences qui peut-être n'étaient pas... ne faisaient pas partie des objectifs, au départ, du plan d'action, mais on a assisté à des discussions qui ont permis de faire progresser l'égalité dans les différentes régions, et ça, possiblement grâce à cette décentralisation-là.
Et je passe, bien entendu, sous silence le fait que ces milieux-là connaissent encore davantage, là, la différence entre le rural et l'urbain, la culture associée aux différentes régions, ils connaissent vraiment plein d'éléments qui leur permettent de faire les projets les plus adaptés possible. Il me reste environ une minute, si je ne m'abuse?
Le Président (M. Bernier): Environ.
M. Talbot (François): Merci. De sorte qu'en conclusion, avant vos questions, ce qu'on souhaitait vous ramener, c'était... Bon, je l'ai dit, là, pour le réseau des forums jeunesse, c'est un tout petit premier pas que ce document-là qui vous a été remis hier -- d'ailleurs, nos excuses -- mais néanmoins ça a été un... dans les forums, ça a eu des conséquences très positives quant aux questionnements qui ont eu lieu. Puis je vous inviterais, en conclusion, à peut-être voir comment maintenir ce dialogue-là et le susciter.
On a découvert, à travers les travaux, je vous dirais, là, certains membres du comité, l'étude du Conseil du statut de la femme qui avait été faite, Regards de jeunes sur l'égalité, en 2009, puis, tu sais, on se disait à un moment donné: Ah! bien, à quand la prochaine version pour voir un peu cette perception-là et comment elle évolue dans le temps? Mais, chose certaine, il faut en parler. Puisqu'on parle de changement de culture, c'est quelque chose dont il faut parler.
Ensuite, je terminerais en vous disant, là -- un peu un appel à vous, députés, de peut-être être des acteurs de ce dialogue-là -- que je crois que les forums jeunesse, en tout cas ceux avec qui on a collaboré, seraient très intéressés s'ils recevaient un appel de leurs députés qui leur demandaient: Qu'est-ce qu'il y a dans leurs comtés en matière d'égalité? On a fait le travail pour quelques-uns d'entre vous, mais, si vous le demandez, si, vous, vous posez des questions, souvent ça suscite les discussions qui font progresser le dossier. Alors, voilà. À nouveau merci de l'invitation. Et merci au Secrétariat à la condition féminine.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci de votre présentation. Nous allons poursuivre immédiatement avec les échanges. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci. La température est exécrable dehors, mais, vous, nous amenez un vent de fraîcheur. À quel âge on arrête d'être jeune?
Mme Cabirol (Élise-Ariane): ...selon les modèles des forums jeunesse.
Mme St-Pierre: 35 ans.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Oui.
**(16 heures)**M. Talbot (François): Tout à fait. Mais il y a des jeunes à vie, là, on décerne des certificats là-dessus.
Mme St-Pierre: O.K. C'est fort intéressant. Puis je pense que vous avez une action qui est vraiment, vraiment... c'est dynamique. Puis j'aime bien votre discours. Et vous y allez évidemment en... il n'y a pas de partisanerie. C'est tout le monde, vous êtes très inclusifs. Tout le monde est bienvenu, c'est ce que je comprends, dans l'organisation des forums jeunesse. Puis je pense que ça, c'est très sain pour une société, qu'il y ait un débat d'idées puis que les idées... qu'il y ait un choc d'idées puis que ça fasse son chemin puis ça fasse évoluer.
Sur la question des générations, puisque vous êtes vraiment, là, proches de ce qui se passe du côté de la jeunesse québécoise et... Et là, la question, vous parlez en matière d'égalité. Vous avez utilisé beaucoup, beaucoup le terme «égalité» et peu le terme «condition féminine». Quand vous parlez de condition féminine, vous faites référence au Secrétariat à la condition féminine, mais, dans votre discours, c'est l'égalité, l'égalité entre les hommes et les femmes. C'est l'égalité.
Est-ce qu'il y aurait un besoin de mettre notre discours... de le mettre à jour, hein, dans le sens de le mettre en 2011, là? Je ne veux pas... Évidemment, toutes les luttes qui ont été faites, j'en ai fait partie, puis je trouve que c'est bien important puis il faut les continuer, puis c'est... Comme disait un de mes amis, c'est comme de la mauvaise herbe qui pousse: ça pousse tout le temps, donc il faut toujours travailler le jardin. Mais ce que je voudrais savoir: Est-ce que, dans les contacts que vous avez auprès des jeunes, si vous dites le mot «condition féminine», c'est un terme qui est plus du passé puis que c'est plus maintenant d'égalité entre les hommes et les femmes qu'il faut parler?
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Bien, moi, je pense...
Le Président (M. Bernier): Mme Cabirol, la parole est à vous.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Excusez-moi. Oui. Si on est ici aujourd'hui, je pense que c'est parce que les jeunes, ils accordent encore de l'attention à cette question-là et n'ont pas évacué totalement les luttes passées, sinon on ne se serait pas déplacés ici pour... et les forums jeunesse n'auraient pas tant d'actions en matière d'égalité dans leurs régions.
Pour ce qui est de la terminologie, on en discutait justement tantôt, François et moi, puis, à la réflexion, on réalise que ce qu'on... ce qui ressort des actions qui sont faites, c'est qu'il y a peut-être deux types d'action différents qu'on peut distinguer: ceux qui touchent spécifiquement à la condition féminine, quand on parle d'actions en matière de... en lien avec la prostitution, lutte à la prostitution juvénile, ou d'actions pour assurer la sécurité des femmes, la violence conjugale, on a le sentiment qu'on parle peut-être là de condition féminine, mais que, dans l'ensemble des autres actions, si on parle de conciliation travail-famille, si on parle de participation à des postes décisionnels, on rentrerait plus dans ce qui... la question de l'égalité.
Puis même, au niveau de l'égalité, on va un peu plus loin. Certains forums jeunesse soulignent l'importance de parler maintenant d'égalité entre les individus et non plus seulement d'égalité entre les hommes et les femmes. Quand on touche à la question des modèles, de l'image, de l'égalité au sein du couple, si on parle d'égalité entre les individus, on devient plus inclusif au niveau des différentes orientations sexuelles pour penser qu'un couple n'est plus seulement un homme et une femme et qu'il peut se vivre de l'inégalité et de la violence dans un couple, même si ce n'est pas un homme et une femme, si c'est un homme et un homme ou une femme et une femme.
Donc, dans ce champ d'action là, nous croyons qu'il faudrait élargir un peu la vision et parler de l'égalité entre les individus. Par contre, cela... ça ne nous permet pas d'évacuer complètement toute la notion de condition féminine.
Mme St-Pierre: Tout à fait.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): François, je ne sais pas si tu allais compléter.
M. Talbot (François): Bien, en fait, on nous mentionnait, ça a été un commentaire de... Oui, pardon.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. Talbot.
M. Talbot (François): Merci. Ça a été un commentaire de certains de dire que la notion d'égalité entre les hommes et les femmes comprenait le terme «homme» et que donc certains, quoique certains hommes se disent féministes dans ce qu'on a entendu... Il y avait cette interpellation-là de dire: L'égalité hommes-femmes comprend ce que je suis. Donc, certains hommes nous disaient ça, mais, moi, je ne pourrais que remarteler les paroles d'Élise-Ariane. Il y a certaines problématiques identifiées dans la politique qui touchent la condition féminine comme on pourrait parler de la condition masculine, lorsqu'on parle, là... Cette semaine de la prévention du suicide, les hommes sont plus touchés par le suicide. Il faut donc s'attaquer à quelque chose qui concerne la condition de l'homme. Il y a des choses qui concernent la condition de la femme, et ça, je ne crois pas, là, que ce terme-là soit, pas dans ce qu'on a entendu, à évacuer du tout.
Mme St-Pierre: Qu'est-ce que...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Oui, sans l'évacuer, mais des fois il y a peut-être un ajustement. Qu'est-ce qui ferait en sorte... Quelles seraient les mesures qu'on pourrait mettre en oeuvre pour valoriser le rôle du père dans la société puis favoriser l'implication, l'implication des garçons dans la conciliation travail-famille, dans les tâches? Est-ce qu'il y a des actions particulières que vous avez en tête ou qui émergent de vos discussions?
Le Président (M. Bernier): M. Talbot, Mme Cabirol? M. Talbot.
M. Talbot (François): Cette fois-ci, je vais attendre que vous me nommiez. En fait, de ce qu'on a aperçu dans les actions des forums, je vous dirais qu'il y a... ce qui ressortirait peut-être concerne les modèles, donc d'essayer à nouveau de mettre de l'avant des modèles masculins. On nous parlait entre autres, là -- et c'est plutôt anecdotique, mais vous me permettrez de le rapporter -- que, face à des hommes qui aujourd'hui prennent un congé de paternité, là, et j'en suis -- ce sera la petite tranche de vie de la rencontre -- tu sais, à l'idée de prendre une partie du congé parental, certains hommes se font dire: Ah! tu as pris une partie du congé de ta blonde. Ah! tu as volé une partie du congé de paternité... de maternité. Et donc... Mais c'est correct. Ça ne fait pas très longtemps qu'on est entrés dans ce système-là, et c'est correct qu'on réagisse comme ça. Mais il y a vraiment une notion de vol du congé de maternité. Et je m'excuse à ma conjointe, mais, tu sais... Et donc ça, c'est peut-être à travailler dans la façon, dans certains préjugés qu'on a à déconstruire.
Et on nous mentionnait, là, la sensibilisation des employeurs beaucoup quant à leur réaction par rapport aux travailleurs. Je crois que déjà que des femmes quittent, ça les mettait en rogne, là, et je suis aussi gestionnaire, donc c'est sûr que ce n'est pas facile, il n'y a rien de plaisant, mais de les sensibiliser à dire: Là, maintenant, ça va t'arriver plus juste avec des femmes, ça va aussi t'arriver avec des hommes, tu es aussi bien de t'y faire tout de suite puis de commencer à sourire. Donc, il y a quelque chose dans cette sensibilisation-là qui serait peut-être à mettre au menu, là.
Mme St-Pierre: Bien, vous avez raison qu'il y a une sensibilisation auprès des employeurs, parce qu'à ma grande... à un moment donné, à mon grand étonnement, il y a un employeur qui m'a dit dans une rencontre informelle, là, que: Ah! Le congé pour les pères, ce n'est pas bon, parce que les hommes, ce qu'ils font finalement, c'est du travail au noir, c'est-à-dire... Puis il disait: Sous le prétexte de prendre le congé pour garder le petit, ils vont faire du... Lui, c'était son préjugé, là, les hommes allaient faire du travail au noir, mais ce n'était pas le cas des... Alors, il y avait comme un... il n'était pas content de devoir accorder des congés à des hommes qui travaillaient pour lui. Et ça, il faut faire du travail là-dessus. C'est la même chose pour les femmes, il faut faire du travail parce que c'est nouveau. Puis la notion comme vous dites: Ah tiens, il a pris le congé de sa femme, ça peut aussi, avec les collègues de travail, paraître un peu bizarre.
Vous avez parlé de l'image corporelle. Vous avez fait référence à la campagne Dove. Je ne sais pas si vous êtes au courant des travaux qu'on a faits sur la charte pour...
Une voix: ...
Mme St-Pierre: Oui, vous êtes au courant? Parce que j'allais vous donner notre plan d'action puis notre charte. Donc, vous êtes au courant. Alors, vous l'avez signée, je présume.
M. Talbot (François): Je dirais que les forums...
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Oui.
Mme St-Pierre: C'est important de... À certains aspects, on nous parle d'hypersexualisation. Il y a des... Puis on nous en a parlé pendant les rencontres. On nous demande d'agir. On nous demande même d'adopter une loi sur les publicités sexistes. Et, moi, ce que je dis: Bon, sensibilisation bien sûr, mais où est-ce qu'on trace cette ligne-là dans la... dans cette question de publicité sexiste et d'hypersexualisation? Est-ce que, de votre côté, avec votre regard, vous avez des choses à nous suggérer?
Le Président (M. Bernier): Mme Cabirol.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Spontanément, ce que je pourrais vous répondre, c'est ce qu'on se fait le porteur des actions des forums jeunesse. Comme on vous dit, les forums jeunesse agissent beaucoup au niveau de la sensibilisation dans les écoles pour contrer l'hypersexualisation. C'est une question qui clairement les préoccupe, préoccupe les jeunes d'aujourd'hui. Et leurs pistes d'action jusqu'à maintenant touchent surtout la sensibilisation en laissant l'intervention directe peut-être à d'autres acteurs plus proches de la réalité des jeunes, possiblement.
J'ajouterais à ça que, un peu en lien avec ce qu'on a discuté plus tôt, dans la piste de solution, il faut réfléchir à la place des gars dans ce débat-là puis il faut réfléchir à quel endroit on peut les insérer. Si on parle d'égalité entre les hommes et les femmes, François le disait, ça inclut l'homme dans la relation. Donc, il faut essayer de réfléchir. Des fois, ce n'est peut-être pas évident, mais la place des gars est importante, je pense, pour arriver à quelque chose de réaliste qui va réellement rejoindre la réalité des jeunes qui vivent aujourd'hui. Puis finalement c'est un type d'enjeu qui pourrait également... De la même façon qu'on disait que les échanges sur l'égalité ont permis de lever certains... mettre à jour certains préjugés, que le simple fait d'échanger a fait avancer la question, c'est aussi le type de question que, par... d'amener l'enjeu sur la table auprès des jeunes directement pour leur permettre d'échanger là-dessus, je crois que c'est une piste de solution qui est intéressante.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. Chabot, vous voulez ajouter?
M. Talbot (François): Talbot. Merci.
Le Président (M. Bernier): Est-ce que vous désirez ajouter sur la question?
M. Talbot (François): Oui, oui, oui, tout à fait. Tout simplement, là, pour mettre sur le... à votre attention, porter à votre attention, là, le Forum jeunesse de l'île de Montréal qui avait financé, là, Outiller les jeunes face à l'hypersexualisation -- vous l'aurez dans les annexes pour l'orientation 1 -- qui est un projet, là, dont les promoteurs étaient le Y des femmes et le Service à la collectivité de l'UQAM, qui a servi, là, à faire de la sensibilisation. Mais ce n'est pas le seul, là, mais on nous mentionnait que souvent les projets vont dans les milieux scolaires et mettent sur la table ces questions-là, comme le disait Ariane, là, tout simplement. Mais un petit projet, là, que je porte à votre attention.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Quand vous montez des projets comme ça, vous allez chercher différents partenaires pour le financement, pour être capables d'aboutir avec le projet?
**(16 h 10)**Mme Cabirol (Élise-Ariane): Oui. Il y a deux façons de faire, je dirais, dans les forums jeunesse: soit que c'est un projet qui est issu d'un conseil d'administration qui s'est réuni... bien, d'un conseil d'administration de jeunes qui souhaite aborder une problématique, qui réfléchit aux façons, qui va aller solliciter des partenaires sur le terrain; parfois, c'est les partenaires directement qui nous interpellent pour qu'on puisse investir dans un projet qu'ils avaient déjà organisé.
Donc, dans un cas comme dans l'autre, il y a nécessairement plusieurs partenaires. Il y a différents types, là, je pourrais entrer dans les technicalités, là, mais effectivement c'est à la fois du financement et souvent de la collaboration à l'orientation du projet en tant que tel.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Je vais laisser la chance à mes collègues de poser des questions...
Le Président (M. Bernier): Lequel des deux plus jeunes qui prend la parole? Le député de Lévis? Allez-y, M. le député de Lévis. Vous avez environ 3 min 30 s.
M. Lehouillier: Merci. Merci beaucoup. D'abord, moi aussi, à l'instar des propos de la ministre, je dois vous dire que j'ai bien aimé votre mémoire. Je trouve ça fort intéressant. Et on amène quand même des éléments nouveaux. Notamment, vous parlez davantage de rapports sains et égalitaires entre individus et non seulement entre les hommes et les femmes pour inclure les minorités sexuelles, ce que je trouve quand même intéressant au niveau de la réflexion.
Mais, moi, ce qui m'intéresse davantage, c'est le côté régional, parce que je sais effectivement que vos forums font un travail extraordinaire dans chacune des régions. En passant, je voulais vous le dire: Nous, ça a amené la Chambre de commerce de Lévis à avoir un volet jeune chambre de commerce, et ça, je trouve ça fort intéressant. Et, moi, ce qui m'intéresse beaucoup, c'est le «par et pour» les clientèles ciblées. Et, à cet égard-là, dans votre «par et pour» les clientèles ciblées, je sens que vous interpellez beaucoup moins l'État que ce qu'on a vu dans les autres mémoires, où, là, c'est omniprésent, l'interpellation de l'État. Et vous dites qu'il faut maintenir une approche régionalisée des interventions en matière d'égalité, que la mise en commun des projets et initiatives à l'échelle nationale enrichit les pratiques mais que, quand on regarde la manière dont se déclinent les enjeux de l'égalité dans chacun des milieux de vie, que, là, on est capable d'agir vraiment. Alors, pouvez-vous nous donner... Avez-vous des exemples de projets au niveau des forums jeunesse qui démontrent ce «par et pour» les jeunes au niveau de l'égalité, par exemple? Avez-vous des exemples ou avez-vous des... Dans la façon d'être, qu'est-ce que ça veut dire, finalement, au niveau des régions?
Le Président (M. Bernier): M. Talbot.
M. Talbot (François): Merci. Alors, le «par et pour», moi, je vous dirais que là où il se matérialise le plus, c'est dans l'identification, si on veut, des priorités et des façons de faire. Lorsqu'on dit «par et pour», on va dire: Les projets vont viser les jeunes, et ce sont des jeunes qui vont ensemble les construire. Mais, à la limite, moi, je vous dirais que, lorsqu'on parle d'égalité comme on le fait aujourd'hui, les forums jeunesse ne vont pas s'improviser spécialistes de l'égalité. Alors, lorsqu'on va dire «par et pour», ce qu'on va demander, c'est s'il y a un organisme sur le territoire. Et il y en a des dizaines et des dizaines qui travaillent en égalité. On va aller chercher l'organisme. Et là ce qu'on va demander à l'organisme, c'est que, dans... Dans sa logique, dans la façon qu'il va construire son intervention, on va lui demander: Comment, vous, vous le faites, le «par et pour»? Alors, si on parle en égalité d'un «par et pour» et que, par exemple, on avait une problématique qui concernait, je vous dirais, là... on a parlé, là... Je sais que vous vous attardez à la problématique de la prostitution. Bien, ce serait de dire de quelle façon, si on veut faire du «par et pour»... comment on va aller rejoindre les femmes qui, dans ces milieux-là, sont aux prises avec ces problématiques-là pour qu'avant de mettre des solutions en place on leur demande, elles, ce qu'elles en pensent, donc, dans un extrême. Si on allait dans l'autre et qu'on voulait faire de la sensibilisation, avant de construire, on demanderait de s'assurer qu'il y ait des cibles visées. Si on vise des jeunes, on veut s'assurer qu'il y ait des jeunes qui construisent le projet. Je ne sais pas si ça éclaire.
M. Lehouillier: Bien, moi, je comprends très bien. Ce que...
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Lehouillier: Oui, si je peux encore. Ce que je comprends bien, c'est que vous nous dites que c'est davantage par des actions très ciblées qu'on va réussir, d'abord, à aller chercher les gens qui sont touchés par une problématique particulière. Et là, après, par la suite, si on encourage la dynamique du milieu, c'est plus facile de trouver des solutions. C'est ça que je comprends.
Le Président (M. Bernier): M. Talbot, oui, allez-y.
M. Talbot (François): Merci.
Le Président (M. Bernier): 30 secondes.
M. Talbot (François): O.K. Oui. Je reviendrais sur la notion de la relation avec l'État. Le fait d'encourager la régionalisation, pour moi, ne signifie pas un retrait de l'État sinon qu'une action différente de l'État, une décentralisation, dans le sens où certains forums nous ont mentionné, entre autres, qu'il serait intéressant de voir le Secrétariat à la condition féminine et le gouvernement devenir partenaires d'ententes spécifiques avec les forums jeunesse. Donc, pourquoi le secrétariat n'embarquerait pas avec certains forums pour construire des projets? Et donc c'est peut-être un rôle différent de l'État qui, lui, fixe ses balises, ses objectifs, ensuite embarque dans des projets, octroie des sommes et laisse aux régions le pouvoir de déterminer par quels axes ils vont aborder les problématiques.
Le Président (M. Bernier): Merci. Nous allons passer du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Merci beaucoup, M. le Président. M. Talbot, madame... oui, exactement, Cabirol, pardon. J'étais sur la mauvaise ligne. Bien, bienvenue à Québec, là, effectivement, là, pour la commission. C'est très intéressant de voir un forum jeunesse, là, venir donner son opinion sur une commission pour l'égalité hommes-femmes. Vous dire que, d'abord, là, qu'en tant que parlementaire qui peut encore, selon vos critères, correspondre à la jeunesse, il me fait plaisir, là, de vous poser quelques questions aujourd'hui. Alors, j'aimerais pouvoir abuser, si vous me permettez, de votre expertise, de votre expertise de terrain et de votre contact privilégié que vous avez avec les jeunes, notamment parce que vous êtes, c'est ça, souvent en contact avec eux et vous faites plusieurs projets, là, au sein de la collectivité.
Donc, vous demandez un peu, de ce que je comprends après les différentes discussions que vous avez eues avec Mme la ministre et les autres parlementaires, de comprendre que la philosophie ou du moins la vision de la condition féminine ou de l'égalité hommes-femmes a évolué beaucoup au niveau des jeunes... ou du moins on sent qu'il y a une vision qui est de plus en plus inclusive, qui est beaucoup plus globale, qui s'en va chercher beaucoup plus large que peut-être la vision plus traditionnelle à laquelle on est peut-être habitués. Vous parlez beaucoup de la participation des garçons à l'intérieur, justement, de l'égalité hommes-femmes.
Est-ce que vous pouvez encore juste un petit peu élaborer sur le pouls que vous avez senti au niveau de la population jeune puis cette espèce de vision un petit peu plus inclusive qui va chercher un peu l'ensemble des gens? Pouvez-vous nous la traduire d'une façon un peu plus concrète?
Le Président (M. Bernier): M. Talbot.
M. Talbot (François): Oui. Bien, écoutez, je vous dirais que, dans le cadre des travaux, dans le cadre des travaux qu'on a faits, la recension a vraiment touché les projets financés. Il serait un peu, je vous dirais, audacieux de se faire aujourd'hui le porte-parole de la jeunesse québécoise. Et, en ce sens-là, je crois que l'appui le plus solide que j'ai pour vous parler à ce moment-ci est vraiment l'étude du Secrétariat à la condition féminine de 2009, qui a une méthodologie digne davantage, là, d'être présentée en commission, là.
Cela étant dit, si je m'aventure sur ce chemin tortueux, ce serait pour vous dire que le contenu des discussions auxquelles on a assisté semblait refléter ce qu'on retrouvait dans le document de 2009, là. Donc, en un an, il n'aurait pas trop mal vieilli, là. Mais notre groupe est encore assez petit, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Traversy: Non, mais je tiens quand même à mentionner que, dans votre rapport, on trouve des approches ou on trouve des angles qui n'étaient pas présents nécessairement dans les présentations des groupes qui vous ont précédés. Ça, je trouve ça effectivement intéressant puis enrichissant pour les débats puis la discussion qu'on a aujourd'hui.
Vous êtes également signataires, donc, de la charte que la ministre vous a présentée tout à l'heure, qui effectivement est une belle initiative. J'aimerais vous poser la question concernant celle-ci, parce que, bon, vous êtes des signataires, c'est une bonne étape. Est-ce que vous pensez qu'on devrait aller plus loin par la suite? Parce qu'évidemment, là, il faut... on est en attente, là, d'un impact ou du moins d'une sensibilisation au niveau de la jeune population et de la population en général pour ce qui a trait à l'hypersexualisation et à l'image, et je veux savoir si un forum jeunesse comme vous, vous trouvez que c'est une belle initiative et si on pouvait aller plus loin comme gouvernement dans ce genre d'action.
Le Président (M. Bernier): Mme Cabirol, M. Talbot? Lequel?
M. Talbot (François): Je vais y aller.
Le Président (M. Bernier): Allez-y.
M. Talbot (François): Simplement pour vous dire que c'est une initiative qui a été soulignée comme étant très positive. À la limite, moi, je vous dirais peut-être qu'elle soit davantage... ou, en fait, elle est déjà diffusée quand même beaucoup. Je crois qu'elle a fait beaucoup de chemin. C'est peut-être de poursuivre dans ce sens-là. Ce qu'on a entendu puis quand on regarde les projets, je vous cite également, là, il y a des... il y a eu des magazines, il y a eu une pièce de théâtre visant à travailler avec les jeunes les notions de rôle et aussi de conception de l'homme et de la femme.
Alors, peut-être qu'à ce moment-là, moi, je vous dirais que c'est... Est-ce que c'est de la remettre sur la table pour la rediffuser? Souhaitez-vous... Il y a des agents de participation citoyenne dans les forums. Peut-être qu'à quelque part ça fait partie aussi de choses qui portent. Je vous dirais, je crois que les forums jeunesse, de par leur position en région, seraient tout à fait ouverts à une interpellation, là, par le gouvernement à cet effet-là et de poursuivre un peu plus loin peut-être les travaux qui ont eu lieu là-dessus, là.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
**(16 h 20)**M. Traversy: ...c'est intéressant. Puis on veut effectivement, là, au maximum, là, voir des résultats, en tout cas un impact et une continuité à cet effort qui est fort louable. Et, M. le Président, vous n'êtes sûrement pas sans savoir qu'au niveau de la jeunesse déjà on sent qu'il y a une volonté ou en tout cas qu'il y a une préoccupation assez claire, là, à cet effet-là d'hypersexualisation, d'utilisation des médias et de l'image. Et notamment un gouvernement libéral, celui-ci par contre... pas celui actuel qu'on a devant nous mais un autre, dans le cadre du Forum étudiant de cette année, a lui-même présenté, là, un projet de loi en cette Chambre, là, pour essayer de trouver des pistes de solution en vue justement, là, de protéger une image saine, là, au sein de la société. Donc, il y a quand même une volonté au niveau de la jeunesse, une préoccupation pour continuer à pousser dans ce sens-là. Évidemment, si les forums jeunesse peuvent amener également leur contribution à la chose, ce serait fortement apprécié.
Donc, de continuer à l'intérieur de votre document en allant à l'orientation 6, bon, évidemment, la participation des femmes aux instances décisionnelles, notamment, on parle, en politique municipale. Je voudrais juste que vous puissiez me rappeler... Je crois que, les forums jeunesse, vous aviez fait de la sensibilisation à cet égard-là. Est-ce que les Jeunes élus en cavale, c'était en partenariat avec vous? Est-ce que c'était votre initiative?
Mme Cabirol (Élise-Ariane): ...ce n'est pas...
Le Président (M. Bernier): Mme Cabirol.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Pardon, M. le Président. Ce n'était pas à notre initiative, c'était à l'initiative de l'union, de l'UMQ, l'Union des municipalités du Québec. Par contre, c'était en partenariat avec les forums jeunesse régionaux pour que ça puisse atterrir, si on veut, dans l'ensemble des régions.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. le député.
M. Traversy: Et le bilan de cette action en partenariat avec les forums jeunesse, est-ce qu'il était positif? Est-ce que vous avez eu des échos, là, positifs, dans le fond, de ce genre d'action de sensibilisation puis de collaboration?
Le Président (M. Bernier): Allez-y.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Je dirais que c'est variable selon les régions, selon toutes sortes de réalités. Si je pense à dans ma région, en Abitibi-Témiscamingue, ça s'est très bien passé. C'est une belle réussite. Il y avait une cinquantaine de jeunes. Ce qui n'est quand même pas si mal, là, intéresser une cinquantaine de jeunes un soir comme ça à la politique municipale, à une simulation de conseil municipal. Puis ça a eu des beaux échos.
Puis je tiens à souligner en fait que Jeunes élus en cavale, c'était une initiative effectivement intéressante à laquelle on a collaboré, mais la majorité des forums jeunesse réalisent régulièrement des actions pour favoriser la place des jeunes dans les instances décisionnelles, notamment au niveau municipal. Les élections municipales de 2009 ont été quand même un momentum pour la majeur partie des forums jeunesse, qui mettent de l'avant toutes sortes d'actions dans ce genre-là pour stimuler la participation des jeunes et aussi des femmes, bien souvent.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Traversy: Bien, c'est tout à votre honneur. Et je vous posais la question pour savoir si la collaboration avait bien fonctionné, parce que tout à l'heure vous nous parliez de régionalisation et vous nous disiez qu'effectivement l'idée d'aller amener peut-être des projets, là, en collaboration avec un ministère ou avec une instance, via les forums jeunesse, pourrait être une alternative qui pourrait justement favoriser la sensibilisation de certains messages auprès de la jeunesse. Si je comprends bien, il y a des situations dans lesquelles ça a bien fonctionné. Donc, si ça se répétait dans un autre cadre, ça pourrait donner aussi des bons résultats. Est-ce que je comprends bien?
Le Président (M. Bernier): Madame... M. Talbot.
M. Talbot (François): Je crois que, dans ces types de projet là, l'élément clé -- et là-dessus je souligne encore le travail du Secrétariat à la condition féminine -- l'élément clé, c'est de penser régionalisation dès le départ. Donc, qu'on fasse un projet que, nous, on appelle national à déclinaison régionale, c'est-à-dire on a un cadre, on descend dans les régions, on l'anime, il importe, de ce qu'on a entendu des forums, d'inclure les forums jeunesse dès le départ afin de prévoir, si on veut, là, la composante régionale de ces régions-là et de pouvoir s'y adapter. Alors, c'est vraiment... c'est l'élément que je mentionnerais: Si le gouvernement souhaite avoir à nouveau des initiatives qu'il veut voir déclinées dans les régions, qu'il implique les régions dès la conception, dès l'idéation de ces idées-là pour que la composante régionale ne soit pas vue comme on débarque dans les différentes régions, on fait... on rend un programme, mais bien comme il y a une pensée régionale derrière ça.
Et d'ailleurs, là, je voyais également, là, dans le rapport: vous pourrez voir qu'il y a, entre autres, parmi d'autres, le Bas-Saint-Laurent qui nous mentionnait sa collaboration avec la Table de concertation des groupes de femmes dans le Bas-Saint-Laurent aux dernières élections municipales, là. Donc, il y a eu également... Et ça, c'est une autre forme de régionalisation. C'est que vraiment ça a pris au sein de la région, là. Tu sais, il n'y a pas eu d'intervention du national. Nous, là-dedans, on n'a rien à voir. Il y a des groupes qui se parlent, et donc c'est d'avoir une confiance dans la capacité des régions à créer entre eux la synergie sans que le national y embarque, là, au fond.
M. Traversy: C'est donc une piste qui pourrait être envisagée, qui pourrait donc être intéressante. Bien, je vous remercie beaucoup. Je vais passer maintenant peut-être...
Le Président (M. Bernier): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Alors, bonjour. Je vous salue à mon tour. Vous avez parlé beaucoup de conciliation travail-famille-études-engagement. J'aimerais que vous nous donniez un peu plus d'informations, là, sur... S'il y avait une mesure à prioriser en matière de famille-travail-études-engagement, quelle serait-elle?
Le Président (M. Bernier): M. Talbot.
M. Talbot (François): C'est une réponse simple, là, vous en conviendrez avec moi: Les travaux du comité et la recension des initiatives des forums n'ont pas permis de répondre à cette question. Je vous dirais qu'elle serait peut-être intéressante pour le CCJ et le comité de la FEUQ qui passera devant votre commission demain.
Cela étant dit, je crois que ce qui a le plus ressorti chez nous, c'est cette notion-là de dire que le terme aujourd'hui est à un tournant, là. Alors, ce n'est plus la conciliation famille-travail, c'est famille-études-travail-implication. Certains vont jusqu'à parler d'harmonisation des temps sociaux. Alors, on est vraiment dans un éclatement de cette terminologie-là, et je crois qu'il faudra un peu peut-être se poser la question sur comment on l'aborde, mais il serait vraiment audacieux, là, à nouveau de vous avancer une réponse.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée.
Mme Poirier: Au niveau du Régime québécois d'assurance parentale, j'ai beaucoup aimé ce que vous avez dit tout à l'heure à l'effet que les gars se font taxer de voler du temps à leurs conjointes par le biais du congé parental, et non pas du congé maternel ou paternel, c'est beaucoup plus un congé familial en tant que tel.
Dans la réalité, on voit aussi que les étudiants demandent le congé parental, le Régime québécois d'assurance parentale, entre autres au niveau de la maîtrise et du doctorat. Moi, j'ai eu des représentations là-dessus et j'aimerais ça vous entendre. Est-ce que vous avez été sensibilisés à ça, à cette volonté là d'élargir le Régime québécois d'assurance parentale auprès des étudiants maîtrise et doctorat?
Le Président (M. Bernier): Merci. M. Talbot.
M. Talbot (François): Les fédérations étudiantes ont effectivement fait leur boulot de nous sensibiliser à cet effet-là. Je dirais que c'est une sensibilisation qui n'a pas fait l'objet de discussions assez approfondies dans les forums à l'heure où on se parle pour que je vous arrive avec une réponse.
Cependant, ces questions-là que vous posez, qui sont fort pertinentes, moi, j'ai le goût de vous dire: Peuvent-elles faire l'objet à un moment ou à un autre de consultations peut-être plus larges si on veut réellement avoir un pouls de la jeunesse à cet effet? Parce qu'effectivement il y a des... Les arguments qu'ils amenaient étaient fort intéressants et fort pertinents, là.
Le Président (M. Bernier): Environ 2 min 30 s.
Mme Poirier: On a beaucoup parlé de la place des femmes, entre autres dans les lieux décisionnels. Moi, j'aimerais vous entendre sur comment on pourrait faire pour... On a vu qu'au niveau du gouvernement une mesure... bien, même plus qu'une mesure, une loi qui a changé la donne et qui a fait en sorte qu'on en a trouvé, des femmes pour les postes dans les conseils d'administration. Mais, quand on parle des sociétés privées, là, on est dans un autre... Et d'ailleurs le rapport du Conseil du statut de la femme sur la gouvernance des entreprises fait un portrait qui, à mon avis, fait encore la démonstration que la condition féminine a encore un grand rôle à jouer.
J'aimerais vous entendre sur: Est-ce que vous croyez qu'il y aurait des mesures? Parce qu'on voit qu'il y a de plus en plus de filles dans les universités, donc de plus en plus de femmes qui sont scolarisées. Comment vous voyez la place des... Comment on pourrait favoriser la place des femmes dans les conseils d'administration privés, par exemple?
Le Président (M. Bernier): Mme Cabirol.
Mme Cabirol (Élise-Ariane): Je peux là-dessus vous répondre, entre autres, à titre de jeune bénévole de différents conseils d'administration, de jeune qui côtoie aussi des femmes engagées puis qui connaît leur parcours. Ça va un peu avec ce que je vous disais tantôt sur le fait que les filles ont souvent tendance à craindre de ne pas être assez compétentes, craindre la vision qui est parfois négative associée à... l'association entre une femme et le pouvoir qui est souvent moins bien perçue.
D'entrée de jeu, je vous dirais que les modèles peuvent faire une grande différence, les modèles qui montrent que le parcours n'est pas si compliqué que ça, que ça se peut, qu'une femme peut faire sa place. Je vous ramènerais ensuite à ce qui se fait, moi, dans mon forum jeunesse, que j'observe. Je vous disais plus tôt une attention importante qui est accordée à la vie démocratique de l'organisation et qui fait qu'à notre assemblée générale annuelle on a des jeunes qui veulent s'impliquer sur notre conseil d'administration, puis on a beaucoup de jeunes femmes parce qu'on donne l'image -- et c'est la réalité aussi -- que c'est agréable de s'impliquer, qu'on n'est pas dans la confrontation, et qu'on est soucieux de chaque personne, et qu'on travaille en démocratie. Donc, ça peut être une mesure facilitante pour donner le goût aux femmes de s'engager.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Voyez-vous, c'est une première. La glace est cassée. Il y a beaucoup d'autres enjeux dans notre société, donc on vous invite à revenir pour présenter vos mémoires. Donc, merci.
Je vais suspendre quelques instants pour permettre aux représentants de la Conférence régionale des élus de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 30)
(Reprise à 16 h 32)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Et nous avons le plaisir d'accueillir la Conférence régionale des élus de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent. Mesdames, bienvenue. Je vous prierais de vous identifier et de procéder à la présentation. Vous avez environ une quinzaine de minutes pour faire celle-ci. Allez-y, la parole est à vous.
Conférence régionale des élus de la
Vallée-du-Haut-Saint-Laurent (CRE
de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent)
Mme Beauchemin (Geneviève): Bonjour. Je suis très heureuse de venir présenter le mémoire de la CRE de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent. En premier lieu, j'aimerais vous présenter Mme Jacynthe Dubien, qui est coordonnatrice du Centre D'Main de femmes et représentante du comité aviseur en égalité. Et, moi, je suis Geneviève Beauchemin, je suis chargée de projet en Égalité et famille pour la CRE.
C'est notre première visite à l'Assemblée nationale, donc...
Le Président (M. Bernier): Bienvenue, vous êtes chez vous.
Mme Beauchemin (Geneviève): ...soyez un peu indulgents.
Le Président (M. Bernier): Vous êtes chez vous, bienvenue.
Mme Beauchemin (Geneviève): Merci. La CRE, par son champ d'expertise, s'est concentrée à répondre à la question n° 7 du questionnaire qui a été fourni par le secrétariat. En effet, la CRE n'est pas une experte des sujets tels que la violence faite aux femmes, par exemple, mais nos partenaires le sont. Donc, le rôle de la CRE est vraiment de créer un climat favorable pour réaliser des projets et, entre autres, par la signature d'ententes spécifiques. C'est pourquoi nous n'allons répondre seulement qu'à la question: «Comment mieux ajuster l'action de l'État aux réalités des femmes et des hommes, qui sont différentes selon les régions?» Et, par ailleurs, vu la nature de notre organisme, les CRE n'ont aucune association qui permette de s'exprimer en une seule voix, chaque région est unique puis elle se représente elle-même, donc je suis ici pour représenter la CRE de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent uniquement. Donc, ça n'engage pas les autres CRE.
Juste un petit cours de géographie 101. La Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, c'est la partie ouest de la Montérégie, ça représente cinq MRC, dont Beauharnois-Salaberry, les Jardins-de-Napierville, le Haut-Saint-Laurent, Roussillon et Vaudreuil-Soulanges et aussi les deux communautés autochtones, Kahnawake et Akwesasne. C'est environ 400 000 personnes. On a la barrière... les frontières sud, américaine, et à l'ouest, de l'Ontario.
Les deux tiers de notre territoire sont agricoles, et, en même temps, on a une MRC qui est... une MRC et deux autres en partie qui sont incluses dans la Communauté métropolitaine de Montréal, donc ce qui fait... ce qui définit notre région, c'est très certainement la dualité entre le rural et l'urbain.
Depuis le début des travaux en égalité à la CRE, nous avons signé deux ententes avec le Secrétariat à la condition féminine, une première entente en 2007-2008, qui est un montant de 82 000 $ pour un an, et une deuxième entente, qui était spécifique cette fois-ci, de 2008 à 2010, avec le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, le MAMROT et le forum jeunesse, pour un montant de 205 000 $ sur deux ans. Et cette entente-là n'est pas totalement terminée. Elle se termine le 31 mars 2011, et un addenda est sur le point d'être signé.
Donc, je laisse la parole à Mme Dubien pour la présentation des réalisations de la CRE en matière d'égalité.
Le Président (M. Bernier): Mme Dubien, la parole est à vous.
Mme Dubien (Jacynthe): Bonjour. Le mandat de la CRE au niveau de l'égalité se situe au niveau principalement de la concertation, de la planification et du soutien au développement. Donc, rapidement, au niveau de la consultation, quand on a débuté, on a fait une consultation auprès des groupes du territoire afin d'identifier... On a demandé aux groupes d'identifier selon eux c'étaient quoi, les enjeux prioritaires en lien avec les orientations qui étaient dans la politique d'égalité. Donc, notre consultation s'est bâtie à partir de la politique d'égalité.
Ensuite a eu lieu un forum régional qu'on a jumelé en même temps que la Journée égalité. Dans le cours... au cours de ce forum régional là, on a présenté un peu c'est quoi, les enjeux qui étaient ressortis au niveau des priorités, et le plan d'action 2010-2013 est sorti de ce forum-là. Également, au cours de cette journée, il y a une politique d'égalité et de parité qui a été lancée par la CRE. Et dernièrement on a le soutien à la Marche mondiale. La CRE a supporté la mobilisation des groupes terrain, qui a permis de renforcer la concertation des groupes de femmes du territoire, parce que c'est un nouveau territoire pour nous. Donc, les groupes devaient apprendre à mieux se connaître puis à mieux travailler ensemble. Donc, cette occasion-là a été bien marquée.
Au niveau de la planification, bien, le plan d'action 2010-2013 qui est ressorti des enjeux, les priorités, c'étaient l'égalité économique, l'amélioration de la situation socioéconomique et la parité dans les lieux de pouvoir. Tout ça a été travaillé en priorisant l'approche d'analyse différenciée selon les sexes. Donc, dans tous les travaux de la CRE, il y a une perspective d'ADS qui est implantée à différents niveaux, là, selon...
Le soutien au développement, bien, ça a permis de financer des projets dont... Il y a un colloque pour les femmes entrepreneures. Il y a des projets qui ont été bonifiés dans une perspective d'analyse différenciée selon les sexes, comme... projet Bonne Boîte Bonne Bouffe, école ouverte sur son milieu, où on favorise la connaissance des métiers non traditionnels, et le projet Le Club des leaders, pour favoriser la place des femmes et des jeunes dans les instances décisionnelles. C'est un groupe de femmes qui travaillent avec le forum jeunesse de la CRE pour qu'il y ait plus de femmes et de jeunes dans les instances décisionnelles.
Aussi, ce dont nous sommes très fiers, c'est les travaux qu'on fait en analyse différenciée selon les sexes. Dans tous les travaux de la CRE, il y a une analyse qui se fait. Il y a une intégration de l'ADS dans les formulaires de demande, dans les protocoles pour susciter un questionnement au niveau des promoteurs et des partenaires à ce niveau-là. On est en train de développer une façon d'aller plus loin un peu dans l'accompagnement pour l'intégration de l'ADS dans les projets pour faciliter l'intégration de l'analyse différenciée selon les sexes auprès de chacun des promoteurs.
Et il y a une formation. On prévoit faire des formations des personnes ressources. Les personnes qui représentent chacune des MRC qui sont membres du comité égalité seront formées en ADS pour avoir la capacité, les compétences, l'expertise pour accompagner les promoteurs dans chacune de leur MRC. Également, on travaille... On finance des projets très mobilisateurs au niveau de la connaissance des jeunes. Il y a un organisme de justice alternative sur le territoire, il y a des préoccupations qui sont sorties du fait qu'il y avait une augmentation des jeunes filles au niveau des contrevenants. Donc, on fait une analyse différenciée selon les sexes pour avoir un portrait des jeunes qui vont dans les organismes de justice alternative du territoire. Également, il y a un portrait qui se fait au niveau du veuvage pour voir comment le veuvage se vit différemment chez les hommes et chez les femmes. Donc, ce sont des projets qui sont financés. Voilà.
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
**(16 h 40)**Mme Beauchemin (Geneviève): Oui. Les recommandations sont... Donc, la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, c'est une région très jeune qui a été formée avec l'arrivée des CRE. Nous sommes encore en train de développer le sentiment d'appartenance dans une région qui n'existait pas il y a six, sept ans. Donc, le chemin parcouru de la région tant au niveau du développement social qu'en matière d'égalité a clairement démontré que ça valait la peine de travailler ensemble pour faire avancer les choses. Donc, régionaliser les politiques gouvernementales en permettant à une région d'aborder une situation selon sa propre réalité, avec les acteurs du milieu bien implantés sur le territoire, permet à un milieu de se prendre en charge puis de réaliser des projets constructifs auxquels il peut s'identifier.
Donc, puisque les problématiques sont différentes, les problématiques des femmes sont différentes d'une région à l'autre, la CRE reste convaincue que la signature d'ententes spécifiques est le meilleur moyen de prendre en compte ses spécificités régionales dans le déploiement de l'action gouvernementale en matière d'égalité. Donc, la CRE recommande au Secrétariat à la condition féminine qu'il reconduise la signature d'ententes spécifiques en égalité avec les CRE.
La CRE s'est engagée, à travers deux ententes dans sa politique d'égalité et de parité, à implanter l'ADS dans tous ses travaux, incluant ceux qui découlent des huit commissions de la CRE. Et, en tant que bailleur de fonds de multiples projets de différentes natures, la CRE est dans une excellente position pour publiciser, encourager l'utilisation de l'ADS sur le terrain comme outil d'analyse pour les promoteurs. Donc, la CRE considère que l'ADS est vraiment un moyen privilégié pour aborder la problématique en matière d'égalité et souhaite l'intégrer dans l'ensemble de ses plans stratégiques et de développement de la région.
Donc, la CRE recommande au Secrétariat à la condition féminine de prioriser l'implantation de l'ADS dans les travaux des CRE et plus spécifiquement dans le processus de financement de projets et dans la signature d'ententes spécifiques avec les CRE. Et la CRE recommande aussi au Secrétariat à la condition féminine d'encourager les CRE, à travers les ententes spécifiques, à nommer une personne-ressource dédiée à l'application de l'ADS dans leurs travaux respectifs.
C'est sûr que l'ADS nécessite en premier lieu une lecture de la situation pour déterminer s'il existe des inégalités entre les femmes et les hommes, et les statistiques sont un outil puissant lorsqu'il s'agit de faire un portrait de telle ou telle situation. Et actuellement il est toujours difficile d'obtenir des statistiques différenciées auprès de beaucoup de ministères et de directions régionales, alors la CRE recommande au Secrétariat à la condition féminine de poursuivre ses démarches auprès des ministères et organismes gouvernementaux afin de s'assurer que toutes les cueillettes d'informations et les statistiques disponibles qui en découlent soient différenciées selon les sexes.
Et l'ADS est un outil d'analyse qui permet d'identifier les disparités entre les femmes et les hommes au sujet d'une problématique, d'un projet ou d'une politique et, bien entendu, la plupart du temps, l'ADS nous démontre un manque à gagner du côté féminin, mais il existe aussi des inégalités en faveur... en défaveur du côté masculin. L'exemple courant utilisé, c'est le décrochage scolaire ou le suicide qui affectent en plus grande proportion les garçons que les filles. Donc, la CRE considère qu'il est de son devoir en tant qu'organisme de développement social, économique et culturel d'en tenir compte et d'agir sur ces disparités.
Donc, la CRE recommande que le Secrétariat à la condition féminine privilégie la lunette égalité, qui est plus inclusive, plutôt que celle de la condition féminine. De plus, cela permet de rallier un plus grand nombre de parties prenantes.
Et la CRE recommande que le Secrétariat à la condition féminine concentre la majorité de ses ressources dans les ententes spécifiques avec les CRE à des problématiques féminines, mais en permettant de s'attaquer à des problématiques masculines identifiées dans le cadre de l'ADS.
Et la dernière recommandation, c'est que l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est un enjeu transversal à tous les enjeux de la communauté et tant aux niveaux international, provincial, régional que municipal. La signature d'ententes spécifiques en égalité avec les CRE permet de travailler à réduire les inégalités souvent identifiées avec l'ADS. De plus, les ressources investies dans les ententes spécifiques sont limitées et les cibles doivent être choisies judicieusement afin d'avoir un impact réel, là, sur la vie des femmes et des hommes.
Par ailleurs, il est de la responsabilité des ministères et organismes publics d'adapter leurs pratiques en fonction de l'ADS afin de réduire ces inégalités.
Donc, certains enjeux dépassent largement la responsabilité d'une entente spécifique en égalité et doivent être traités de façon transversale à travers les différents ministères que cela concerne.
Donc, la CRE recommande au Secrétariat à la condition féminine de poursuivre ses démarches auprès de tous les ministères et organismes publics afin que ceux-ci intègrent l'ADS à tous leurs travaux et en tiennent compte lors des prises de décision qui en découlent. Voilà. C'est ce qui faisait le tour des recommandations.
Le Président (M. Bernier): Merci de votre présentation. Nous allons donc passer aux échanges. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci. Bien, ça s'est bien passé, en tout cas, pour la première partie, je pense que ça va aller tout aussi bien pour la dernière partie, qui est l'échange que nous avons avec vous. Félicitations pour votre présentation. Vous dites que vous parlez au nom de votre CRE, mais je pense que vous nous dressez pas mal un portrait... j'imagine que ce que vous nous dites, si on entendait toutes les CRE, on aurait à peu près le même portrait, à peut-être quelques petites différences près, mais...
Mme Beauchemin (Geneviève): Probablement.
Le Président (M. Bernier): Je dois spécifier que l'invitation avait été faite au niveau des CRE, et c'est la CRE de... celle-ci qui a accepté de participer et de déposer un mémoire. L'invitation a été faite à l'ensemble des CRE. Chaque CRE est indépendante l'une de l'autre par rapport à son fonctionnement.
Mme St-Pierre: Oui, oui. Mais, si vous aviez à apporter un commentaire par rapport à la situation des autres, sans parler au nom des autres CRE, est-ce que vous dites que... en fait, ce que vous nous faites comme constat, c'est pas mal ce que tout le monde un peu... Comme le renouvellement des ententes, ça, j'imagine que c'est l'unanimité.
Mme Beauchemin (Geneviève): Je ne sais pas, puisque j'ai vu que Québec venait de signer une nouvelle entente, c'est une entente avec beaucoup... avec un grand partenariat, avec... et une entente d'envergure. Nous, dans la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, on considère que les problématiques en égalité doivent être traitées à l'intérieur des dossiers qui sont... qui traitent de ce sujet-là. Si on parle du transport en commun, les problématiques hommes-femmes dans un dossier de transport en commun, bien, ces problématiques-là devraient être traitées dans le dossier de transport en commun. Donc, on souhaite quand même que ça reste... qu'on se concentre sur l'ADS pour ensuite amener à la réflexion, dans chacune des commissions, pour que les choses avancent de façon transversale.
Mme St-Pierre: Vous semblez très, très bien maîtriser cette notion d'ADS et d'être capables de l'appliquer dans différents secteurs de la vie. Vous considérez que c'est un outil de mesure qui est essentiel quand on veut parler d'égalité entre les hommes et les femmes?
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
Mme Beauchemin (Geneviève): Oui, moi, je pense que c'est l'outil à privilégier, étant donné que, bon, je crois qu'il y a quand même des bons bouts de chemin de faits et puis que ce n'est pas toujours évident de voir les problématiques. Je pense que tant qu'on se penche vraiment sur un projet et on s'aperçoit qu'il y a des différences, moi, je pense que c'est... Dans le milieu, je dis souvent que c'est une approche par clientèle, un petit peu comme les vendeurs d'autos aiment bien vendre des autos différemment aux femmes et aux hommes, et eux autres, ça fait longtemps qu'ils ont compris qu'on ne vendait pas les choses de la même façon. Alors, je pense que c'est la même chose, mais d'un côté plus social, pour être sûrs d'atteindre les bonnes cibles.
Mme St-Pierre: ...d'exprimer ce que ça veut dire exactement.
Mme Dubien (Jacynthe): Moi, je trouvais que c'était une approche qui était vraiment intéressante parce que ça permet de partager les réflexions, ça permet de poser l'égalité sous un regard différent et dans une perspective beaucoup plus inclusive et participative, puis ça permet aux hommes aussi de prendre du recul et de se questionner sur la socialisation, et tout ça, qu'on n'a pas, on ne fait pas avec d'autres approches.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Vous faites la recommandation 5 et 6: «La CRE recommande que le Secrétariat à la condition féminine privilégie la lunette égalité, qui est plus inclusive, plutôt que celle de la condition féminine. De plus, cela permet de rallier un plus grand nombre de parties prenantes. La CRE recommande que le Secrétariat à la condition féminine concentre la majorité de ses ressources dans les ententes spécifiques avec les CRE à des problématiques féminines, mais en permettant de s'attaquer à des problématiques masculines identifiées dans le cadre d'une analyse différenciée selon les sexes.» Est-ce que vous considérez que, dans ce prochain plan d'action, nous devons réfléchir, nous devons réfléchir sur cette question de lunette? Vous nous invitez à faire un virage qui est quand même important, là. C'est un changement de vocabulaire, d'attitude, de perspective, de... Pourriez-vous nous en parler davantage, de cette recommandation?
**(16 h 50)**Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
Mme Beauchemin (Geneviève): Je suis quand même un petit peu surprise que ce soit un si grand changement. Moi, j'avais compris qu'on allait... qu'on avait choisi le...
Mme St-Pierre: ...
Mme Beauchemin (Geneviève): Pardon?
Mme St-Pierre: Je vous provoquais un petit peu.
Mme Beauchemin (Geneviève): Ah! O.K. J'avais compris qu'on parlait déjà d'égalité, mais, dans la pratique, j'avoue que c'est un petit peu moins évident, tant qu'on arrive avec des projets... J'ai un groupe, des aînés, on avait un projet à faire avec les aînés, et on me parlait justement du veuvage, puis ils disaient que les hommes aînés en souffraient quand même beaucoup, comparativement aux femmes; c'était différent. Donc... Et on s'est vraiment posé la question: Si l'ADS nous démontre qu'il y a des disparités chez les hommes aînés qui vivent un deuil et qu'ils n'ont plus leur femme pour les aider dans la gestion de la maison, etc., est-ce qu'on peut s'attaquer à cette problématique-là? Et on s'est posé la question. On s'est dit, étant donné que c'était une problématique égalitaire, bien, que ça serait quelque chose d'intéressant.
L'ADS nous amène à ça. Si on regarde ça d'une façon différenciée, bien, c'est un petit peu gênant de dire aux garçons après ça: Bien, je suis désolée, mais ce n'est pas une entente en égalité, finalement, c'est juste les filles. Donc, dans la pratique, on s'est posé la question, là, pour la réalisation de projets, là.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme St-Pierre: M. le Président, mon collègue député a une question à poser dans cette même ligne de pensée, je pense.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: Merci, M. le Président. Ça va bien jusqu'à date pour votre première présence à Québec? Vous avez choisi votre journée, en plus. Ça aurait été probablement plus facile, passer par la 30.
Mme Beauchemin (Geneviève): On l'attend, notre 30.
M. Ouellette: Oui, mais elle s'en vient, elle s'en vient. Ne désespérez pas. Puis justement parce qu'on va aller dans votre région que je connais passablement bien, puis je me questionne assez particulièrement, parce que vous n'avez pas un territoire facile, vous avez des municipalités urbaines très urbaines, vous avez des municipalités rurales, vous avez des municipalités qui sont dans la CMM, il y en a d'autres qui sont juste à l'extérieur, vous avez deux territoires, deux communautés autochtones reconnues. Là, j'ai quasiment le goût de vous demander, parce que vous avez fait plein d'actions, vous avez signé deux ententes en matière d'égalité: Comment vous faites pour tout faire travailler ce monde-là ensemble ou comment vous faites pour avoir un portrait juste de la région? Vous allez être la seule CRE qu'on va entendre dans le cadre de ces consultations-là. J'aurais quasiment le goût de vous demander: Un, comment vous avez réussi à tout concilier ou à faire en sorte d'avoir... de poser des actions qui pouvaient être représentatives au niveau de votre CRE? S'il y avait un conseil que vous pourriez donner... Parce qu'ailleurs aussi il y a d'autres places où ça peut être aussi hétéroclite que chez vous, là. Et comment le gouvernement pourrait mieux vous accompagner? Si vous aviez un conseil à donner au gouvernement pour le deuxième plan d'action, là, comment on pourrait faire pour vous aider à être encore plus représentatives dans votre milieu, là?
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin...
Mme Dubien (Jacynthe): ...le budget.
Le Président (M. Bernier): ...ou Mme Dubien.
Mme Dubien (Jacynthe): J'ai dit: Ça serait-u le moment de parler de budget?
M. Ouellette: C'est en plein... Je pense que c'est en plein le moment.
Mme Dubien (Jacynthe): Parce que...
M. Ouellette: Vous n'êtes pas venues à Québec juste pour rien, là, puis ce n'est pas juste de nous parler de budget de façon très, très sèche, là. Vous avez des problématiques qui sont régionales, vous... Même si vous parlez au nom de votre CRE à vous autres, pour les gens qui connaissent le coin où vous êtes, ce n'est pas un coin facile. Comment on concilie tout ça? Ce n'est pas tout d'arriver puis de dire: On va mettre x montant d'argent de plus, ça ne réglera pas la dimension urbaine, rurale, communautés autochtones et différentes représentations. C'est pour ça que je veux avoir un petit peu plus d'explications sur votre -- et je prends le terme anglophone -- «success story», votre histoire à succès, là, si... Vous semblez avoir des résultats qui sont intéressants chez vous, là.
Le Président (M. Bernier): Mme Dubien.
Mme Dubien (Jacynthe): Je pense qu'on va être deux pour répondre à ça. Moi, comme groupe terrain, parce que je travaille dans un centre de femmes dans mon quotidien, je suis partenaire de la CRE, moi, je peux vous dire qu'au début la mobilisation, ça a été un peu plus ardu parce qu'on n'était pas habitués de travailler ensemble, puis tout ça, mais on avait beaucoup de volonté, on a travaillé fort, on y croyait, au niveau de la transversalité de l'ADS, donc on a usé de différentes stratégies pour partager ça avec des partenaires et des alliés.
Au niveau de la structure de la CRE, comment ça se passe, tout ça, à l'intérieur, pour que ça se passe bien, ça, je vais laisser Geneviève en parler plus.
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
Une voix: ...
Mme Dubien (Jacynthe): L'argent? Bien, l'argent fait le bonheur. Dans une région comme ça, c'est vrai qu'il y a beaucoup de disparités. Et, juste les frais de transport, des fois... Mais ça prend beaucoup d'ouverture et ça prend beaucoup de maturité, je dirais, pour faire... pour prendre le recul d'une région rurale puis d'une... Tu sais, être dans une municipalité plus urbaine, la réalité est différente, puis... Mais je crois qu'on est habitués de se côtoyer là-dedans, dans cette différence-là, ce qui peut favoriser peut-être plus le partenariat, mais...
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
Mme Beauchemin (Geneviève): La CRE de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent est séparée en huit commissions, donc huit sujets distincts, et je n'ai pas vraiment le temps de toutes vous les nommer, mais on va se concentrer sur la Commission de développement social, égalité et cohésion d'où le dossier égalité découle. Et cette commission en développement social, c'est vraiment représentatif du territoire, donc il y a une personne par territoire qui siège à cette commission-là et une personne par CSSS, parce qu'on a cinq MRC, six CLSC, mais quatre CSSS. Donc, on essaie de se retrouver, des représentants des ministères qui tournent autour du développement social, donc ça pourrait être autant l'agence de santé qu'Emploi-Québec, que le ministère de la Famille et des Aînés. Et on a aussi beaucoup d'employés de la CRE.
Mais chacun des représentants territoriaux représente un comité qui... un comité territorial donc dans chacune des MRC. Donc, on est en train de mettre sur pied à la CRE un modèle de gouvernance pour permettre que ce qui se passe au local remonte au régional et vice versa, donc d'avoir un contact direct avec les personnes terrain. Donc, c'est quelque chose... laquelle on est en train de développer. Et, tranquillement, c'est en train de se mettre sur... c'est en train de prendre, là, et tout ça. Et on est même en train de penser à avoir un soutien ou... oui, un soutien à la mobilisation, donc avoir un budget, là, pour pouvoir engager une personne dans chacune des MRC pour pouvoir soutenir tout ça, puisqu'on a tous des projets qui sont faits avec le fonds ATI, l'approche territoriale intégrée. Et tous les projets en réussite éducative et sociale vont passer par là. Donc, c'est vraiment l'idée d'un comité territorial qui travaille... qui est intersectoriel et qui, ensuite de ça, est représenté au régional.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Dubien, Mme Beauchemin, ça fait plaisir. Moi, je suis bien intéressée à vous entendre parler de l'ADS. Ce que je lis dans votre mémoire, c'est vraiment un objectif clair, là, d'appliquer l'ADS chez vous. Vous avez commencé à l'appliquer par le biais de questions dans des formulaires, là, sur différents projets. J'aimerais vous entendre sur quelle lecture ça vous donne et quels résultats déjà l'application vous a donnés de l'ADS dans vos méthodes de travail, par exemple.
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
**(17 heures)**Mme Beauchemin (Geneviève): Oui. Les résultats sont... C'est vraiment une première étape, hein? C'était un premier essai. On a intégré des questions, c'était dans les formulaires ATI, là, en développement social. Et là on l'a refait avec le forum jeunesse. La première fois qu'on l'avait fait, on avait laissé les promoteurs répondre aux questions sans aucun accompagnement. La deuxième fois qu'on l'avait fait, c'est quand on a été présenter le fonds aux promoteurs qui étaient intéressés, on a un petit peu parlé de l'ADS et leur présenté un peu plus ce que c'était. Et, pour l'instant, les résultats sont intéressants, mais ils ne vont pas plus loin. Il n'y a pas eu encore de transformation d'un projet avec une lunette ADS, tel qu'on le souhaiterait, ce qui nous a portés à dire que les promoteurs ne comprennent pas nécessairement qu'est-ce qu'on attend d'eux. On est à se positionner, au comité, sur ça, et la méthode qu'on a choisie, c'est de former des agents multiplicateurs dans chacune des régions pour pouvoir accompagner les promoteurs directement, pour leur faire voir c'est quoi, l'ADS, et comment ils peuvent l'appliquer. Des fois, ça prend un petit peu de pratique pour voir cette différenciation-là.
Et, entre autres, le projet que... Mme Dubien parlait, tout à l'heure, du projet avec Justice alternative du Suroît, c'est un projet que... On ne s'en cache pas, c'est un superbeau projet. Mais en même temps ça va nous aider, nous, à démontrer à quel point c'est des choses qui sont possibles, que ça prend... n'importe qui, ce n'est pas juste une affaire de centre de femmes, c'est une affaire de tout le monde, et puis qu'on va pouvoir travailler ensemble pour faire ça. On ne va pas tous faire des portraits, on ne va pas... mais on va pouvoir les accompagner.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Dubien.
Mme Dubien (Jacynthe): Oui. Pour compléter, le projet de Justice alternative, c'est un projet... D'abord, des intervenantes de l'organisme ont cru... avaient une intuition à l'effet qu'il y avait peut-être une augmentation des jeunes filles, puis eux-mêmes... dans les dossiers, là, de référence au niveau de la loi. Donc, eux autres mêmes, à l'intérieur de l'organisme, n'avaient pas des données sexuées, puis c'était une intuition. Donc là, on a dit: On va pousser un peu plus pour voir est-ce que c'est vrai ou ce n'est pas vrai. Donc, effectivement, il y a eu une augmentation des jeunes filles, là.
Le portrait qu'on va faire va nous permettre de comprendre qu'est-ce qui explique ça. Est-ce que les causes aux niveaux social, économique, tout ça, sont différentes? Est-ce que c'est au niveau de la socialisation? Est-ce que c'est au niveau de la prévention de la violence? Est-ce que c'est au niveau de l'intervention? Parce qu'on a l'intuition que peut-être les policiers auraient peut-être tendance à donner plus de chances aux jeunes filles. Donc, quand elles arrivent dans le système, elles arrivent plus loin dans leurs parcours, elles, c'est peut-être... Les problématiques sont peut-être plus lourdes à ce niveau-là. Donc là, c'est quelque chose qui va nous permettre de vérifier.
Après ça, les organismes qui travaillent avec cette clientèle-là auront un meilleur portrait et pourront, eux, déterminer s'il y a une volonté d'ajuster l'intervention au niveau des jeunes filles et des jeunes garçons, parce qu'on croit que l'intervention serait différente vu que les problématiques associées le seraient également. Donc, je crois que c'est vraiment une fois que le portrait va être fait qu'on va avoir compris. Ça va être dans l'ajustement des interventions qui seront faites plus tard qu'on va avoir des résultats, là. Donc, on parle de... bien, pas tout de suite, là, peut-être deux ans, deux, trois ans, là. Mais...
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Terrebonne...
Mme Dubien (Jacynthe): Donc, ça, c'est la même idée au niveau du veuvage, les difficultés rencontrées chez les hommes et chez les femmes se situent à différents niveaux. Donc, l'intervention et l'aide qui devrait être apportée par la suite seraient différenciées selon la situation. Ça fait que ça permet de comprendre, de mieux comprendre les causes qui amènent les difficultés, pour être capables d'intervenir mieux, à cet effet-là, après.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, vous voulez ajouter?
Mme Poirier: Justement, ce que vous venez de dire, l'ADS nous permet justement de différencier les causes en tant que telles, d'avoir une meilleure lecture, et justement... et c'est pour ça que tous les groupes réclament l'ADS, c'est pour avoir une meilleure lecture, pour mieux connaître les impacts, en tant que tel, des politiques ou des pratiques qui se passent.
Et, dans votre mémoire, vous venez nous dire que vous souhaitez que l'entente spécifique en condition féminine, signée avec le Secrétariat à la condition féminine, puisse venir s'attaquer à des problématiques masculines. Est-ce qu'il ne serait pas plus intéressant que l'entente spécifique puisse continuer à identifier, à partir de l'ADS, justement ces différences-là et que soient prises en charge par ceux à qui s'adressent ces problématiques-là les issues après? Je prends le dossier du veuvage dont vous venez de nous parler. Est-ce que c'est une problématique qui doit relever du Secrétariat de la condition féminine? Je ne crois pas. Moi, je pense qu'il y a comme... Il y a un lien là. Est-ce que le Secrétariat de la condition féminine ne doit pas justement vous aider à avoir tous les moyens pour faire l'ADS, mais que les résultats de l'ADS n'appartiennent pas nécessairement à des solutions qui appartiennent à la condition féminine?
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): Mme Dubien.
Mme Dubien (Jacynthe): Ah, excusez.
Le Président (M. Bernier): C'est beau. Allez-y.
Mme Dubien (Jacynthe): Je disais que c'était la transversalité. C'est l'idée qu'on veut développer, qu'on veut véhiculer plus avec l'ADS. Donc, effectivement, selon ce qui ressortirait de ces études-là, peut-être que ce serait un autre ministère qui devrait investir au niveau du veuvage. Et, pareil comme en emploi, pareil comme dans tout, là, ça serait transversal. Mais il faut que ce soit transversal. Ces préoccupations-là ne doivent pas être portées seulement par la Condition féminine. Ça doit être porté par l'ensemble de la société. Et tout le monde doit prendre sa part là-dedans. Mais ça permet de l'illustrer et de bien l'identifier.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Merci, M. le Président. Mme Dubien, Mme Beauchemin, merci de nous apporter, encore aujourd'hui, là, cette expertise qui vous est propre, là, à la CRE. Et de vous dire aussi que je vous trouve très articulées par rapport à vos interventions. Je sens que vous prenez votre aise, là, de plus en plus, et c'est excellent.
Alors, on va parler peut-être un petit peu de vous présentement, parce que, bon, vous représentez la CRE du Haut... du Haut-Saint-Laurent -- oui, c'est bien ça, la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent -- et 2009 a été une année importante pour vous au niveau de l'égalité hommes-femmes: vous avez entamé la politique d'égalité et de parité. Évidemment, les CRE sont toutes des instances qui sont autonomes à travers les régions du Québec. De ce que je comprends, c'est... Vous avez donc lancé votre politique et vous avez décidé d'engager, au sein de votre CRE, une personne-ressource pour faire la promotion justement de cette politique-là et d'essayer d'en arriver à des résultats.
Deux ans plus tard, est-ce que vous pouvez nous dire un petit peu, là, les constats forts que vous en faites? Est-ce qu'il y a des points en particulier qui ont bien fonctionné? Et est-ce que c'est le cas de ce que vous entendez dans les autres aussi, CRE, là, de... les autres CRE qui sont des partenaires, avec lesquelles vous avez sûrement des dialogues à travers la province de Québec?
Le Président (M. Bernier): Mme Beauchemin.
Mme Beauchemin (Geneviève): Le principal point fort, si vous parlez à l'intérieur de la CRE, c'est l'intérêt de mes collègues, qui s'occupent de tout autre sujet, à l'égalité. Ici, je pense à ma collègue qui s'occupe des dossiers en... aînés et immigration, qui a bien accepté, avec le dossier aînés, de... a participé a un projet avec nous. Le forum jeunesse, aussi, qui est un autre de mes collègues, qui est même impliqué dans l'entente et puis qui accepte de faire des projets, et ajouter des nouvelles clauses à ses formulaires pour les subventions, et à rajouter l'égalité dans les protocoles qu'elle signe avec les promoteurs.
Donc, on voit, là, qu'il y a des choses qui se passent. C'est d'ailleurs un début de travail aussi, avec la commission en économie, qui... avec l'entrepreneuriat, qui est à développer et qu'on est en train de travailler. En agroalimentaire aussi, on a des choses... Il y a des projets aussi qu'on veut faire. Donc, je crois que c'est réel, que l'égalité, c'est une valeur transversale à la CRE, qui va être inscrite dans les plans, les plans quinquennaux, les plans stratégiques de l'organisme. Donc, je pense que c'est... Dans la pratique, je crois qu'il y a des choses qui ont bougé depuis l'adoption de ce document-là.
Une voix: ...
Le Président (M. Ouellette): M. le député de Terrebonne.
**(17 h 10)**M. Traversy: Merci, M. le Président. Donc, à ce moment-ci -- juste, toujours, pour bien comprendre -- donc, je comprends que les conclusions sont positives. J'entrevois donc... Je sais que les CRE ont adopté, ont signé, là, bon, l'atteinte, là, de... de vouloir avoir l'égalité hommes-femmes, ont souligné leur support puis, c'est ça, d'emblée, leur volonté de vouloir aussi y parvenir ou d'y apporter du leur. Mais est-ce que ce sont toutes les CRE qui engagent des ressources comme vous le faites? Est-ce que c'est une politique qui est généralisée ou c'est vraiment seulement dans votre CRE, là, de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent qu'on retrouve une personne qui est rémunérée à cet effet-là?
Le Président (M. Ouellette): Mme Beauchemin.
Mme Beauchemin (Geneviève): Je ne peux pas répondre à la question. Je ne suis pas une experte de qu'est-ce qui se passe dans les autres CRE. Malheureusement, je ne suis pas en mesure de parler pour les autres.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: O.K. Donc, bien, effectivement, alors, on ira vérifier. Mais, si ça a donné des bons résultats, ce pourrait être une expérience à exporter ou du moins à faire connaître à l'ensemble des autres acteurs de la conférence régionale des élus. Je sais par contre que, dans certaines CRE, il y a souvent des postes bénévoles qui représentent, là, généralement les regroupements féministes qui viennent aussi donner leurs points de vue. Mettons qu'à cet effet-là j'irai regarder.
J'ai cru comprendre aussi que vous avez eu une bonne collaboration avec le forum jeunesse. C'est intéressant parce que, quelques minutes avant que vous ne preniez siège à cette place, il y avait effectivement le forum jeunesse... la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec qui était présente avec nous, et ils parlaient évidemment d'idée de collaboration pour essayer d'apporter leur contribution. Si je comprends bien, avec la CRE, avec la CRE que vous représentez, cette collaboration-là a bien fonctionné. Et ça pourrait être aussi une source, une alternative à exporter ou à envisager pour aider à promulguer davantage le message. Est-ce que je comprends bien?
Le Président (M. Ouellette): Mme Beauchemin.
Mme Beauchemin (Geneviève): Oui. Le forum jeunesse est un partenaire autant financier que... un allié très important, et d'ailleurs il y a plusieurs dossiers qu'on mène de front avec le forum jeunesse, entre autres notre projet sur les métiers non traditionnels, qui était une demande du forum jeunesse, et aussi les femmes et les jeunes dans les instances décisionnelles, qui travaille aussi avec les groupes de femmes. Donc, le forum jeunesse... Et ils ont accepté aussi de jouer le jeu, de rajouter une question et de voir comment les promoteurs allaient réagir. Donc, c'est un partenaire de premier ordre, là, chez nous, effectivement.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Bon, bien, simplement vous remercier pour ces réponses. Moi, je pense que c'est intéressant de voir ce qui fonctionne bien chez vous pour voir comment qu'on peut, dans le cadre d'un plan d'action, essayer d'en tirer l'efficacité ou du moins la réussite afin de l'exporter d'une manière un petit peu plus globale. Donc, c'est en ce sens-là que je posais mes questions, puis je vous remercie d'y avoir... de façon... d'y avoir répondu dans le sens large. Je vais passer la parole à mon autre collègue.
Le Président (M. Ouellette): Bien, c'est moi qui vais prendre la parole, M. le député de Terrebonne, et je vais continuer vos remerciements pour remercier Mme Dubien et Mme Beauchemin, représentant la Conférence régionale des élus de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, d'être venues plaider et surtout nous informer des belles réalisations qu'il y a chez vous. Merci beaucoup.
Nous suspendons quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 13)
(Reprise à 17 h 16)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Et nous avons le plaisir d'accueillir, en cette fin de journée, le Conseil de la famille et de l'enfance. Bienvenue, mesdames. Vous allez avoir une période de 15 minutes qui vous est accordée... Vous avez une période de 15 minutes qui vous est accordée pour faire votre présentation, par la suite, les échanges avec les parlementaires. Je vous prierais de vous identifier et d'identifier les personnes qui vous accompagnent. Allez-y.
Conseil de la famille et
de l'enfance (CFE)
Mme Rhéaume (Marie): Merci, M. le Président. Marie Rhéaume, présidente du Conseil de la famille et de l'enfance. À ma droite, Isabelle Bitaudeau, qui est secrétaire générale, et, à ma gauche, Jacinte Roberge, qui est analyste-conseil.
Alors, Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féministe... féminine, Mme la sous-ministre, Mmes, MM. les députés. J'aimerais d'abord remercier les membres de cette commission qui nous offre la possibilité d'exprimer notre point de vue, en regard des familles, sur l'action gouvernementale en matière d'égalité entre les femmes et les hommes.
En plus de 20 ans d'existence, le Conseil de la famille et de l'enfance s'est avéré un témoin privilégié de l'évolution des familles au Québec. Par son travail de réflexion en amont des politiques, il a su anticiper, documenter et analyser les tendances qui touchent la famille.
À ce titre, nous avons été à même de constater que l'institution familiale est probablement une de celles qui a subi les transformations les plus importantes à la suite de la Révolution tranquille et de la modernisation de la société québécoise. Certes, cette institution demeure toujours le fondement de la société, mais force est de constater que le modèle normatif de la famille n'existe plus, ce qui appelle à une plus grande souplesse des mesures sociales. Familles biparentales, monoparentales, homoparentales et pluriparentales, la famille actuelle connaît non seulement une diversité de structures, mais elle est également plurielle quant à ses façons de vivre.
À la transformation de la cellule familiale est venue s'ajouter une pression dommageable par ses effets sur ses membres, j'ai nommé le difficile casse-tête de la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles. Ce problème, considéré il n'y a pas si longtemps comme personnel ou, pire, comme une affaire de femme qui se jouait à l'échelle conjugale, s'avère désormais un défi commun qui exige une réponse collective, d'autant qu'on assiste au phénomène de la génération sandwich coincée entre les besoins des jeunes enfants et ceux de parents vieillissants, parfois en perte d'autonomie. Comme quoi, pour reprendre l'expression des féministes, le privé est public.
Le Conseil de la famille et de l'enfance a récemment mis en lumière un autre phénomène social émergent qui n'est pas sans changer la dynamique familiale, je veux parler ici de l'évolution tranquille du rôle des pères, illustrée par notre rapport 2007-2008 sur la situation et les besoins des familles et des enfants. Pourquoi ce rapport, fort médiatisé au demeurant, dédié à la question de l'engagement des pères? Parce que l'objectif d'égalité entre les femmes et les hommes ne pourra se réaliser que dans la mesure où les responsabilités liées aux enfants seront partagées au même titre que les responsabilités financières de la famille le sont.
D'entrée de jeu, il faut reconnaître l'avant-gardisme du Québec quant à ses politiques familiales en Amérique du Nord. Depuis le début du XXe siècle, un long chemin a été parcouru au regard de l'intervention de l'État québécois dans la sphère familiale. Le Soutien aux enfants, les services de garde éducatifs à contribution réduite et le Régime québécois d'assurance parentale sont le produit de cette évolution.
**(17 h 20)** Ces mesures offrent un soutien tout au long du cycle de vie de l'enfant. Ainsi, dans un premier temps, le Régime québécois d'assurance parentale procure un remplacement du revenu pour la période entourant l'arrivée de l'enfant. Ensuite, dans un deuxième temps, les services de garde éducatifs à contribution réduite sont offerts jusqu'à ce que celui-ci fasse son entrée à la maternelle. Puis, dans un troisième temps, le Soutien aux enfants procure une aide financière aux parents de la naissance à l'âge de 18 ans.
Pour le conseil, ces trois mesures structurantes, qui forment aujourd'hui l'assise de l'intervention gouvernementale en faveur des familles, représentent une valeur ajoutée aux plans social et économique. Leurs actions combinées contribuent à la création de la richesse, favorisent la sécurité financière des familles et facilitent le retour des mères sur le marché du travail.
Concrètement, ces mesures sociales ont, entre autres choses, permis une augmentation substantielle à la fois du taux d'activité et du taux d'emploi des parents, en plus de freiner le déclin démographique. Les chiffres sont éloquents. Au Québec, selon l'ISQ, le taux d'activité des parents avec enfants de 12 ans et moins est passé de 65 % en 1976 à 86,9 % en 2008.
Plus précisément, les femmes les plus nombreuses à avoir de jeunes enfants, en l'occurrence celles âgées de 25 à 44 ans, ont vu leur taux d'emploi passer de 70,3 % en 1998 à 79,3 % en 2007. Qui plus est, cette progression importante est plus de deux fois supérieure à la croissance du taux d'emploi des Ontariennes du même groupe d'âge, ce qui ne s'est jamais vu dans l'histoire canadienne et québécoise. Dans la foulée, on s'en doute, le décloisonnement des rôles parentaux a entraîné une prise de conscience de l'importance de l'engagement des pères dans la sphère privée.
Ces mesures jouent donc un rôle fondamental dans la conciliation des responsabilités parentales et professionnelles et s'avèrent une composante essentielle d'une politique familiale moderne et adaptée à son époque. Étant donné les enjeux en cause, à savoir le renouvellement de notre population et le maintien d'une force de travail dynamique, le conseil est d'avis que l'action gouvernementale à ce chapitre doit demeurer vigoureuse.
À un autre niveau, et c'est celui qui nous préoccupe particulièrement aujourd'hui, soit le respect du principe d'égalité, nous croyons que créer une société solidaire de la famille va de pair avec le fait d'encourager l'égalité dans l'exercice des responsabilités parentales.
Tel que nous le soulignons dans notre avis sur La politique familiale au Québec: visée, portée, durée et rayonnement, les trois principales mesures de la politique familiale sont très jeunes. Cela milite en faveur d'une grande prudence quant à toute modification prématurée, de crainte de court-circuiter les bénéfices en train de se concrétiser. Dans le contexte budgétaire actuel, il n'est pas superflu de rappeler que l'heure est à la stabilité.
Par exemple, l'un de ces bénéfices, induit par une modalité novatrice du Régime québécois d'assurance parentale, est très bien illustré dans notre rapport sur l'engagement des pères. Il s'agit du congé de paternité, non transférable à la mère, pouvant aller jusqu'à cinq semaines. Dès son entrée en vigueur, la grande popularité de cette mesure a traduit une progression du désir des pères de s'investir auprès de leurs jeunes enfants. C'est un revirement majeur, une modification significative de l'attitude paternelle chez les nouveaux pères qu'on ne pouvait observer il y a 10 ans.
Un coup d'oeil sur les statistiques suffit pour nous en convaincre. En 2009, les pères bénéficient de leur congé de paternité dans 76 % des naissances qui ont donné lieu à des prestations. Pour la majorité d'entre eux, la durée moyenne du congé a été de 4,8 semaines, soit presque le maximum prévu. Environ 60 % des pères débutent leur congé à l'intérieur des trois semaines suivant la naissance de l'enfant. Dans 13 % des cas, les pères ont partagé le congé parental avec la mère.
Les résultats obtenus depuis l'entrée en vigueur du RQAP confirment la pertinence d'un congé réservé aux pères. On voit clairement que le congé parental partageable entre les deux parents ne pourrait à lui seul permettre une aussi forte implication des pères.
Le conseil considère que peu de mesures peuvent avoir un impact positif aussi considérable. D'une part, elle encourage un meilleur partage des responsabilités familiales dans le couple. D'autre part, elle permet de contrer les réticences des milieux de travail face à l'exercice par les pères des responsabilités familiales. Bref, elle contribue à faire évoluer les mentalités, ce qui n'est pas une mince affaire du point de vue des politique sociales.
Aussi, l'État et les réseaux de services publics et communautaires ont un rôle à jouer dans la promotion de la paternité et des pères comme parents à part entière.
En matière de conciliation famille-travail, nous avons déjà eu l'occasion de l'affirmer, le gouvernement doit non seulement donner l'impulsion du changement, mais également en assumer le leadership. La politique d'égalité, en raison de son caractère horizontal, fournit une occasion unique de réaliser cet objectif. Ainsi, nous reconnaissons les efforts concrets posés par le gouvernement et plusieurs acteurs socioéconomiques pour amenuiser le conflit emploi-famille sous l'impulsion du premier plan d'action triennal en matière d'égalité.
Toutefois, plusieurs mesures pertinentes du volet conciliation famille-travail ont vu le jour trop récemment pour déjà porter leurs fruits. Nous pensons particulièrement aux mesures destinées aux petites et moyennes entreprises, qui jouent un rôle prépondérant dans l'économie québécoise. Puisqu'il s'agit essentiellement de mesures d'émulation, le facteur temps est très important. En conséquence, nous croyons que le deuxième plan d'action devrait prolonger et bonifier plusieurs mesures structurantes issues de la première mouture. Voici, à cet égard, quelques commentaires et réflexions.
La presse fait souvent état de difficultés pour certains pères à se prévaloir de leur congé de paternité. Il arrive aussi que des témoignages de notre entourage abondent dans le même sens. À l'heure actuelle, nous ne disposons pas de données fiables à ce chapitre. Il serait intéressant de mener une recherche, de concert avec la Commission des normes du travail, pour avoir une meilleure idée de la mise en application de ce nouveau droit. Combien de plaintes ont été réellement déposées à la commission depuis l'entrée en vigueur du régime d'assurance parentale? Sont-elles concentrées dans un secteur ou dans un type d'entreprise en particulier? De plus, il nous apparaît essentiel de poursuivre la sensibilisation et l'information auprès des travailleurs, des employeurs et des associations les représentant.
Nous avons également des interrogations quant à une mesure novatrice amorcée dans le premier plan d'action, soit la création d'une norme consensuelle encourageant les entreprises à implanter des mesures de conciliation famille-travail dans leur milieu. Le conseil a participé à la consultation pour l'élaboration de cette norme, et toutes les étapes impliquant le Bureau de normalisation du Québec sont terminées. Nous nous interrogeons sur les motifs qui retardent le lancement de cette norme et nous encourageons le gouvernement à procéder sans délai. En effet, lors du premier plan d'action en matière d'égalité, celui-ci a clairement opté pour des mesures incitatives en conciliation famille-travail, et c'est l'une des principales initiatives de ce volet.
De plus, en accord avec notre mémoire sur la consultation Vers une politique gouvernementale sur la conciliation famille-travail, le conseil tient à rappeler qu'il s'attend également à ce que l'État employeur donne l'exemple à ce chapitre. Dans le présent contexte de restructuration de l'appareil gouvernemental, avec son lot d'incertitudes au plan des ressources humaines, encourager les ministères et organismes à obtenir la certification conciliation famille-travail nous semble un geste plus qu'opportun.
Une autre mesure importante a été rendue publique au printemps 2009. Il s'agit du Programme de soutien financier aux milieux de travail en matière de conciliation travail-famille, destiné aux PME. Malheureusement, un grand nombre d'entre elles ne semblent pas au fait de l'existence de cette aide technique et financière disponible pour l'implantation de mesures de conciliation famille-travail. Il nous semble donc indiqué de reconduire ce programme dans le deuxième plan d'action. En outre, il serait intéressant de mettre à contribution des relayeurs d'information gouvernementaux et non gouvernementaux pour en faire la promotion. Nous pensons, par exemple, au réseau des conseillers d'Emploi-Québec, à l'Ordre des conseillers en relations industrielles.
Également, nous comprenons mal que la publication des résultats d'une recherche-action entreprise par le ministère de la Famille et des Aînés, portant sur l'expérimentation d'une démarche de conciliation famille-travail dans les PME, ait eu si peu de rayonnement. Notre intérêt vient du fait que le conseil avait proposé, toujours dans son mémoire sur une politique de conciliation famille-travail, que le gouvernement adopte une loi souple en la matière, laquelle aurait précisément consisté à demander à toute entreprise ou organisation de réaliser une démarche de ce type.
Les résultats et enseignements de cette recherche, qui ont sans doute servis à l'élaboration du programme de soutien, pourraient aussi être très utiles pour relancer le débat sur la conciliation famille-travail et la recherche de solutions concrètes. Ses principaux constats pourraient servir de base pour organiser, par exemple, un forum de discussion réunissant les principaux intéressés, issus des milieux publics et privés.
Enfin, on ne peut passer sous silence une préoccupation du conseil, celle de consentir un effort particulier auprès des secteurs économiques où les parents sont les plus exposés au conflit emploi-famille, à savoir le commerce de détail, la restauration et l'agroalimentaire.
Voilà très brièvement quelques pistes d'action qui mériteraient, selon nous, d'être explorées plus à fond à l'occasion de la préparation du deuxième plan d'action en matière d'égalité. Retenons que le Conseil de la famille et de l'enfance, en accord avec ses travaux antérieurs, a volontairement mis l'accent sur le volet conciliation famille-travail, et nous réitérons qu'une attention particulière devrait être accordée aux milieux de travail.
**(17 h 30)** J'aimerais, en conclusion, reprendre les lignes de force suivantes. Au Québec, la politique familiale s'avère un instrument clé de l'égalité entre les hommes et les femmes. Il est important d'encourager l'égalité dans l'exercice des responsabilités parentales et familiales par des mesures qui s'adressent autant aux hommes qu'aux femmes. À cet effet, le conseil désire mettre en lumière les retombées immédiates d'une mesure comme celle du congé de paternité pour encourager l'engagement des pères et leur implication auprès de leurs enfants dès la petite enfance.
On l'a vu, le Québec ne part pas de zéro en termes de mesures destinées aux familles. Le conseil réitère une recommandation maintes fois exprimée, soit d'asseoir la pérennité des mesures tout en concevant un espace d'expérimentation pour répondre à des besoins émergents et de plus en plus pressants, dont ceux de la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles.
Nos dernières consultations en vue du rapport sur la situation et les besoins des familles et des enfants nous ont démontré à quel point cette question est toujours brûlante d'actualité, surtout dans un Québec confronté tant au phénomène du vieillissement de la population qu'à l'amorce d'une période de croissance des naissances. Les conséquences des tendances à l'oeuvre ne peuvent rester sous l'unique responsabilité des familles elles-mêmes. Pour le gouvernement, l'immobilisme en cette matière est un risque, le risque qu'à long terme le fardeau de la conciliation incombe encore et toujours à la cellule familiale et, ultimement, aux seules femmes. Ce n'est certes pas là l'objectif de la politique gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes.
Je vous remercie de votre attention et je suis prête à accueillir vos questions. J'aimerais aussi préciser que notre rapport sur l'engagement des pères est toujours disponible. On peut vous le faire parvenir sur demande, et il est aussi sur le site, le site du conseil. On peut vous le déposer.
Le Président (M. Bernier): Si vous désirez, Mme Rhéaume, vous pouvez le déposer, l'annexer à votre mémoire, à votre présentation, et on va le rendre disponible sur le site de la commission. Vous avez simplement à nous le déposer.
Mme Rhéaume (Marie): Je vous le dépose.
Document déposé
Le Président (M. Bernier): Vous acceptez? Vous acceptez le dépôt?
Mme Rhéaume (Marie): Oui.
Le Président (M. Bernier): Déposez-le, nous allons nous en occuper. Merci. Merci de votre présentation, très bien minutée. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci. Merci beaucoup pour cette présentation. Évidemment, vous êtes le Conseil de la famille et de l'enfance, vous... vraiment vous mettez l'éclairage sur la question du congé parental, la conciliation travail-famille. Vous n'abordez pas les autres aspects des orientations, les femmes dans les instances institutionnelles, et tout ça. Vous en restez... En fait, vous restez collées sur votre mission.
Vous recommandez -- puis vous n'êtes pas les seuls à le faire -- que «le gouvernement adopte une loi souple en [...] matière [de conciliation travail-famille], laquelle aurait précisément consisté à demander à toute entreprise ou organisation de réaliser une démarche de ce type». C'est sûr que, vu comme ça c'est très beau, puis tout le monde voudrait que ça se passe comme ça dans les entreprises, mais j'imagine la petite entreprise qui a déjà bien de la difficulté à rejoindre les deux bouts, puis les heures sont longues et... puis il n'y en a pas beaucoup d'employés. Comment on pourrait arriver à leur faire avaler une loi qui leur imposerait la conciliation travail-famille? Puis, même si... Puis je ne dis pas ça parce que je n'y crois pas. J'y crois beaucoup, à la conciliation travail-famille. Mais j'ai donné l'exemple devant d'autres groupes d'un employeur que j'ai connu dans mon ancienne vie, pour qui la conciliation travail-famille, c'était de dire à Unetelle: Bien, tu peux partir à 4 heures pour aller t'occuper de tes enfants, puis l'autre, elle va continuer le travail que, toi, tu ne feras pas jusqu'à 6 heures ou 7 heures. C'était ça, la conception. Alors, ceux qui n'ont pas d'enfant dans une entreprise ou dans... Même, ça peut être une grande organisation. On pourrait peut-être se retrouver avec un effet pervers, là, c'est-à-dire qu'il y aurait comme une sorte de discrimination envers ceux... parce qu'il y en a qui n'ont pas d'enfant, là, qui pourraient se retrouver avec le fardeau du travail.
Alors, oui, on croit beaucoup à la famille, le fait que les parents doivent consacrer du temps pour l'éducation, la nourriture, l'alimentation, les loisirs, etc. Mais peut-être que, dans une grande entreprise, ce serait plus facile, mais, dans une petite entreprise, j'arrive mal comment ils... J'ai l'impression qu'on se retrouverait devant des entreprises qui auraient bien de la difficulté. Comment vous la contournez, la difficulté?
Le Président (M. Bernier): Madame... Mme Rhéaume? Mme Rhéaume.
Mme Rhéaume (Marie): Tout d'abord, on peut concevoir que ce n'est pas tous les gens qui ont des enfants, des jeunes enfants, mais presque tout le monde a des responsabilités familiales, que ça se retrouve d'un côté avec les parents qui vieillissent ou de l'autre avec des enfants qui peuvent demander du temps. Donc, à ce chapitre-là, ça doit finir par établir un certain équilibre entre les différents types d'employés qu'on peut retrouver dans un milieu de travail. On peut comprendre cet élément-là en même temps qu'une loi qui permettrait de... Une loi souple qui permettrait aux gens d'au moins commencer à faire une réflexion dans les entreprises pourrait permettre de réfléchir à la question puis d'essayer d'envisager des moyens qui pourraient être pris.
Je sens que ça bouge de chaque côté. Je pense que...
Le Président (M. Bernier): ...quelle madame bouge plus?
Mme Roberge (Jacinte): Peut-être pourrais-je ajouter...
Le Président (M. Bernier): Mme Bitaudeau ou madame...
Mme Roberge (Jacinte): Pardon? Roberge.
Le Président (M. Bernier): Roberge.
Mme Bitaudeau (Isabelle): Je vais... Mme Bitaudeau. Je vais y aller en démarrant.
En fait, à l'époque où le conseil avait proposé cette loi souple, effectivement, il était bien conscient que le tissu des entreprises du Québec était essentiellement constitué de PME et que, dans les PME, c'est effectivement plus compliqué que dans les grandes entreprises d'installer des mesures universelles ou, en tout cas, d'avoir une démarche un peu systématique. Ce que le conseil proposait, c'était au moins qu'il y ait une amorce de réflexion dans l'ensemble des entreprises, parce que c'est une difficulté qui va se poser, elle, de manière universelle, y compris dans les PME. On pensait qu'il y avait probablement des initiatives qu'il pourrait être très intéressant de connaître dans... Il y a des regroupements de PME, par exemple, qui se dotent ensemble de services facilitant la conciliation travail-famille.
Alors, c'était un peu le... c'est un peu pour ça qu'on rappelle que le ministère a fait une étude intéressante auprès de plusieurs entreprises. Jacinte pourrait préciser le nombre parce qu'elle a suivi l'étude de plus près que moi encore. Et on a eu l'impression que les résultats de cette étude n'avaient pas eu tout le rayonnement qu'ils auraient pu avoir. Ils ont certainement servi à élaborer le programme actuel, le programme de soutien aux PME, mais en même temps on a l'impression que, cette étude-là, ses résultats auraient pu aussi engendrer des débats, des... justement des questions comme celle que vous venez de poser: Comment les PME peuvent faire? Comment les PME qui sont isolées, bon, qui sont peut-être plus loin d'un regroupement, par exemple, peuvent faire pour entamer une réflexion sur la conciliation famille-travail? Parce qu'immanquablement elles y seront confrontées, même si elles ont peu de moyens pour y faire face, de la même manière que leurs employés y sont confrontés, même si eux aussi ont peu de moyens pour y faire face.
Et puis, bien, je rappellerais aussi -- on le fait, on l'a fait dans l'allocution -- que les... il y a certains secteurs qui sont particulièrement fragiles et dans lesquels la conciliation est encore plus difficile: le secteur de la restauration, celui du commerce de détail, à cause des amples heures d'ouverture, et puis celui de l'agroalimentaire. À l'époque, on avait travaillé sur un mémoire sur... directement sur le sujet de la conciliation famille-travail. Tout le secteur des agricultrices, par exemple, et des agriculteurs disait que c'était une des grosses difficultés, la conciliation de leurs activités professionnelles avec celles de leurs activités familiales et de leurs responsabilités familiales.
Le Président (M. Bernier): Mme Roberge, vous vouliez ajouter quelque chose?
Mme Bitaudeau (Isabelle): Sur l'étude elle-même.
**(17 h 40)**Mme Roberge (Jacinte): Oui. Oui, exactement. Ce qu'on vous propose en fait pour le prochain plan d'action, c'est une étape intermédiaire en termes de... c'est tout simplement de relancer le débat, parce qu'on sait que c'est un très grand débat: Légiférer ou ne pas légiférer? Mais, si on veut relancer le débat, il y a un très bel outil qui existe déjà, qui est sur la table, qui est cette belle recherche sur les PME et la conciliation famille-travail réalisée par le ministère de la Famille et des Aînés, qui a expérimenté une démarche dans 13 PME et avec un suivi. Alors, ça a duré deux ans avec un suivi.
Et un exemple des résultats de cette recherche, alors les gens ont jugé que la démarche était facile d'application. Cependant, ça nécessitait une année complète. Le travail en comité mixte, c'est-à-dire dans un... qu'il soit paritaire au sens... quand il y a une représentation syndicale mais où il y a des représentations du personnel et des employés, des travailleurs, des travailleuses en même temps que la gestion, ça, c'était jugé essentiel. L'accompagnement par une ressource externe qui était possible via le projet pilote est vu comme essentiel, et on demande qu'il soit externe à l'entreprise. L'accompagnement a permis d'apporter des solutions durables, par exemple développer une structure de remplacement, ce qui est vraiment important pour les PME et les très petites entreprises, améliorer la polyvalence des employés, rendre officiel ce qui ne l'était pas, c'est-à-dire les pratiques informelles, ce qui fait que l'ensemble des employés ont maintenant accès aux mêmes avantages, et une vision plus positive des employeurs par rapport à la conciliation famille-travail qui est celle que, même avec de très petits moyens, on peut mettre en place des solutions efficaces.
Alors, tout ça, je ne l'invente pas, ce sont les constats qui sont dans cette recherche. Ce qu'on vous propose, c'est un petit peu la façon de travailler que nous avons au conseil, c'est-à-dire que, bon, lorsqu'on fait une recherche dans... sur une problématique émergente, c'est facilement un an que peut durer tous les travaux. Lorsqu'on le fait en plus dans le cadre du rapport sur la situation et les besoins des familles, on va consulter, donc ça nous prend à peu près deux ans. Et, pour donner un rayonnement à ces travaux-là, on organise un événement public sur la base des constats en réunissant les personnes, les groupes intéressés, les... enfin, en ciblant bien, mais ça donne vraiment des choses intéressantes en termes de recherche de solutions, d'établissement des constats. Ils sont faits avec la recherche mais en termes de faire émerger des solutions. Alors, c'est un petit peu ce qu'on vous propose pour le plan d'action, et non pas légiférer tout de suite.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Mais la question que des entrepreneurs vont peut-être poser, c'est de dire, même si ce n'est pas nous encore, qu'on n'est pas à cette étape-là mais à l'étape de continuer le travail auprès de convictions, ils vont demander: Bien, un, combien ça me coûte? Vous parlez de coûts minimes. Deuxièmement, en quoi ça va améliorer la rentabilité de mon entreprise?
Le Président (M. Bernier): Mme Rhéaume.
Mme Rhéaume (Marie): Je pense que, dans notre allocution, on parle des milieux où, quand on dit, par exemple, la prise du congé parental, où il y a eu des... bien, il y a des problèmes dans certaines entreprises, dans certains corps de métier, d'emploi, de travail. Et ce qu'on propose, c'est de documenter un peu plus pour voir où ça se répète, où il y aurait lieu de le faire.
Pour en avoir entendu, ce qu'on comprend, c'est qu'il va y avoir des problèmes de main-d'oeuvre dans les années qui s'en viennent. Je pense que ça peut constituer un facteur de rétention de la main-d'oeuvre. Entre deux emplois, des fois, il y en a un qui peut être plus attrayant, mais, s'il n'y a pas de mesure de conciliation, de conciliation travail-famille, moi, je connais des gens qui ont clairement fait le choix d'aller dans une entreprise qui affichait des valeurs à ce niveau-là, parce que, quand on est en train à la fois de travailler sur son cheminement de carrière et d'élever sa famille, on sait que c'est exigeant. Donc, c'est un choix qu'on peut faire.
La décision est facile à prendre. C'est comme: Je ne me sens pas respecté dans ce que je vis, donc je me mets à chercher un emploi tout de suite, là. Il y a des gens pour qui ça pose peut-être moins de problèmes que d'autres, mais, au nombre de statistiques qu'on entend actuellement, je pense que, toute la question de la conciliation famille-travail, c'est gagnant à la fois pour les entreprises et pour les employés de développer des mesures de ce côté-là.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Alors, la pénurie de main-d'oeuvre pourrait même avoir des effets positifs en conviction, en matière de conviction.
Mme Rhéaume (Marie): Bien, c'est à prévoir. Si on a le choix entre une entreprise qui nous respecte dans ce qu'on doit concilier, je pense que le choix va être plus facile à faire que de dire: Bien là, j'entre dans quelque chose où je n'aurai pas de facilité, pas de possibilité, pas de... puis c'est toujours moi qui va assumer l'ensemble des contorsions qu'il y a à faire pour arriver.
Puis, comme on a dit, oui, ça concerne les parents qui ont des enfants, des enfants plus jeunes, et ça peut même parfois être des adolescents, là, ce n'est pas toujours des tout petits enfants qui sont concernés par les difficultés, et aussi ceux qui ont des parents qui vivent des difficultés, qui vivent... Puis, comme on le sait, les familles sont moins nombreuses, il y a eu moins d'enfants. Déjà dans nos générations, il y a moins d'enfants qu'il y en avait. Ce n'est pas rare d'avoir une personne pour s'occuper de deux personnes en perte d'autonomie qui sont divorcées. Je veux dire, les tensions ne vont pas en diminuant, là, actuellement. Donc, on peut avoir un enfant adolescent qui a un comportement un peu perturbé, avec deux parents, un qui est dans un centre d'accueil, l'autre qui a un problème de cancer. Je veux dire, ça ne va pas être rare de voir des situations comme celle-là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Sur le congé parental, avez-vous des propositions à faire, dans le sens: Est-ce que le congé du père devrait être... qui est réservé au père devrait être plus long? Est-ce que vous voyez une amélioration, un élargissement? Est-ce que vous avez des recommandations à nous faire dans ce dossier-là?
Mme Rhéaume (Marie): Ah! Certainement que le congé soit maintenu. On sent qu'il y a des pressions pour diminuer les prestations, la durée actuellement. Mais ce qu'on peut dire, c'est que la naissance d'un enfant, ça constitue vraiment une espèce de fenêtre d'opportunité dans la vie des parents en termes de changement de comportement, de changement... Ça crée une ouverture qu'on ne retrouvera pas nécessairement par la suite, et on voit qu'il y a des effets positifs. On le voit, c'est visible. Ce n'est pas juste visible par ce qu'on entend, c'est visible dans les garderies. On voit de plus de pères qui sont là le matin et le soir, qui se préoccupent. Donc, ça a un impact qu'il faut maintenir.
Maintenant, si vous nous demandez si on propose de le bonifier, bien, pourquoi pas, si vous pensez que c'est possible.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Je ne m'attendais pas à me faire dire non, mais je me disais: Est-ce qu'il y aurait des chiffres précis, un nombre de semaines, quelque chose? C'est ça que je vous demandais, si vous aviez fait comme des réflexions là-dessus.
Mme Bitaudeau (Isabelle): ...ce qu'on a recueilli comme information, c'est que c'est un congé qui est très apprécié, les statistiques le démontrent. Il contribue vraiment à faire changer les mentalités, y compris dans les milieux de travail. Et, bon, il permet cette proximité-là père-bébé dès le plus jeune âge, en fin de compte, ce que beaucoup de pères d'autres générations n'ont pas connu. Et en tout cas il est... il a surtout besoin d'être pérennisé.
Le Président (M. Bernier): Je vous remercie. On va passer maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Mme Rhéaume, Mme Bitaudeau, Mme Gagnon, bonjour. Bienvenue à notre commission. J'écoutais très attentivement, c'est très intéressant. Et je me faisais la remarque que la vie politique n'est pas exactement réputée pour être exemplaire en termes de conciliation de travail et vie personnelle ou vie familiale. On pourrait peut-être commencer par ça, faire un exercice, on est une PME... 125 personnes, c'est plus qu'une PME, en fait, c'est une grande entreprise, faire un effort de ce... à cet égard, parce que, dans le fond, quand on dit que ce n'est pas simple d'attirer des gens en politique de nos jours, particulièrement des femmes, des jeunes femmes, c'est évident que la vie qu'on mène n'est pas tout à fait inspirante à cet égard. Elle est inspirante à beaucoup d'autres égards mais pas nécessairement à celui-là. Et ça dérange beaucoup, hein, cette vie personnelle.
Mais ce que vous dites par rapport aux trois principales mesures de la politique familiale qui sont très jeunes, c'est très intéressant. Je pense qu'en effet, quand on additionne ces trois mesures-là, elles sont extrêmement structurantes puis en effet commencent à donner des résultats. Vous en avez un peu parlé avec la ministre, mais vous dites donc: «Cela milite en faveur d'une grande prudence quant à toute modification prématurée, de crainte de court-circuiter les bénéfices en train de se concrétiser.» C'est sûr que ça coûte cher, hein, ces mesures-là, certaines même au gouvernement, puisque le régime, entre autres, d'assurance parentale est déficitaire et que ce sont donc les contribuables qui paient ce prix-là. Moi, je crois que c'est le prix à payer en effet, mais, bon, je sais bien qu'il y a des gens qui remettent ça en cause et... Mais, vous, est-ce que vous avez senti de la part du gouvernement quelque hésitation que ce soit quant à maintenir en l'état ces mesures-là? Non? C'est parce que ça vient d'ailleurs, du Conseil du patronat ou de... Oui, c'est plutôt ça?
Mme Rhéaume (Marie): C'est...
Le Président (M. Bernier): Mme Rhéaume.
**(17 h 50)**Mme Rhéaume (Marie): Excusez-moi, M. le Président. C'est... Effectivement, c'est dans les courants où on dit: Il faut, tu sais, limiter le fardeau, et tout ça. Sauf que, par exemple, si on prend les services de garde, il y a une partie du coût des services de garde -- puis ça, on n'en parle pas souvent -- qui est compensée par le fait qu'il y a plus de femmes qui sont sur le marché du travail, qu'il y a moins de pauvreté chez les enfants, que...
Donc, souvent on a tendance à occulter ces autres aspects là. Je pense qu'il faut faire attention. Et c'était une position très ferme de la part des membres du conseil où il ne fallait vraiment pas commencer à jouer dans ce qui existe déjà. Jouer pour améliorer, il n'y a pas de problème, mais jouer pour réduire ou limiter, surtout des mesures qui sont aussi porteuses, où on voit que ça a comme donné... ça a comme vraiment encouragé les jeunes à avoir des enfants puis à... Ça donne de l'espoir, en fin de compte, au niveau de la vie sociale au Québec, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, merci. D'ailleurs, Pierre Fortin a fait des études dont Jean-François Lisée a fait état dans un blogue récent dans L'Actualité pour démontrer qu'au bout de la ligne, étant donné cette redistribution de la richesse au Québec et de tous ces merveilleux programmes, que par rapport aux Américains, alors qu'on pense toujours qu'il y a un écart épouvantable entre les familles, disons, québécoises, qui sont plus pauvres que les familles américaines, etc., quand on regarde l'ensemble de la situation... Puis Pierre Fortin n'est pas un révolutionnaire, là, je pense que c'était très clair dans son esprit puis dans les études qu'il a faites, mais il a quand même démontré que, quand on prend tout en compte, comme vous le dites, eh bien, non, les familles québécoises ne sont pas démunies par rapport à d'autres. C'est parce que, souvent, on est les seuls au Québec... si on regarde les États-Unis où il y a peu de filet social, finalement, peu de mesures progressistes du type de celles dont on discute ici. Et, même au Canada, bon, dans le restant du Canada, il y a peut-être en Colombie-Britannique ou en Ontario qu'il y a un certain nombre de mesures, mais toutes celles que l'on a au Québec globalement font en sorte qu'il faut prendre ça en effet en compte quand on fait toutes ces comparaisons, parce qu'on a l'impression des fois... Mon Dieu, on est les plus taxés! Oui, mais on est ceux qui ont le plus de services, qui se donnons collectivement plus de services, avec les résultats dont vous parlez dans votre mémoire. Et ça, je pense que c'est moins... c'est un discours qu'on entend moins sur la place publique, là. Celui qu'on entend actuellement et puis qui est plus... en tout cas, qui est plus majoritaire ou vocal, en tout cas, c'est celui de dire: Bien non, là, on paie trop d'impôts, il faut arrêter ça. On se donne trop de programmes sociaux, on n'a pas les moyens, on ne peut pas. Bien oui, mais on se les ai donnés collectivement, ces programmes sociaux là, puis ça, au bout de la ligne, ça nous rend plus riche collectivement et individuellement quand on regarde les résultats. Alors, moi, je suis bien d'accord avec vous là-dessus. Je voudrais juste revenir, moi aussi, avant de laisser la parole à mes collègues, sur la conciliation famille-travail. Moi, en tout cas, ça fait longtemps qu'on en parle en effet puis qu'on se dit: Mon Dieu... Il se fait des choses, là, visiblement. J'entends qu'il y a eu des expérimentations très concluantes en tout cas pour certaines PME, qu'on connaît mieux maintenant la façon dont on pourrait travailler avec le secteur privé puis même avec les petites et moyennes entreprises sur ces questions-là.
Donc, vous dites: On veut relancer le débat, même si vous écrivez... Quand même, on a l'impression, quand vous écrivez les choses... c'est de dire que c'est le temps quand même que le gouvernement adopte une loi souple. Mais là, si je vous entends bien, vous nous dites: Bien, préalablement, il faut quand même en rediscuter, faire un... avoir un forum général, global et se dire tous ensemble: C'est un des sujets, en effet, sans trop de... des programmes, des questions d'égalité entre les femmes et les hommes mais pour la société dans son ensemble aussi, cette conciliation famille-travail. Donc, ce que vous proposez, c'est que préalablement, oui, l'objectif, ce serait donc d'adopter éventuellement une loi-cadre -- bon, vous n'êtes pas les seuls à nous l'avoir dit -- qui pourrait être assez souple et qui consisterait à demander à toute entreprise ou organisation de réaliser une démarche de ce type. Mais, au moins, ce que vous nous demandez, c'est: Relançons de façon très concrète, très précise, avec éventuellement des échéanciers, ce débat conciliation famille-travail avec les employeurs, les travailleurs, le gouvernement, enfin, tous les intervenants. C'est bien ça?
Le Président (M. Bernier): Mme Rhéaume.
Mme Rhéaume (Marie): Je crois que, de toute manière, ça va finir par s'imposer avec l'évolution démographique, avec ce que les gens vont vivre, puis que ce soient les gens de tous les âges ou... Je pense que, comme société, on n'aura pas le choix même de la faire, cette réflexion-là. Ce n'est pas juste un enjeu au niveau de l'égalité... bien, c'est un gros enjeu au niveau de l'égalité hommes-femmes, mais c'est aussi un enjeu au niveau des générations, un enjeu... Ça va être un enjeu transversal, là, dans plusieurs domaines. Puis, en termes de progrès social, ça va faire partie de ce qu'on va avoir à... de ce qu'on va avoir à travailler.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, mesdames. Souhaitons que le projet de loi n° 130 puisse enlever les articles qui vouent le conseil à sa disparition et que vous puissiez perdurer dans le temps et continuer de nous alimenter de vos réflexions justement dans le cadre de différents travaux.
Vous nous amenez sur le Régime québécois d'assurance parentale mais dans son application concrète. Un groupe qui est venu préalablement, la Table de concertation des forums jeunesse, le jeune homme qui était là, M. Talbot, nous a dit que l'application effectivement du régime québécois était difficile pour les pères, qu'il y avait beaucoup de résistance de la part des employeurs. Et vous posez la question en lien avec la Commission des normes.
Est-ce que vous avez un écho en tant que tel ou des indications à l'effet de dire que l'application du régime québécois pour les pères particulièrement est une problématique réelle? Et, puisque vous souhaitez qu'il y ait vraiment une documentation, c'est que vous devez avoir une bonne idée là-dessus, là.
Le Président (M. Bernier): Mme Rhéaume.
Mme Rhéaume (Marie): Tout d'abord, c'est une thématique qui va ressortir dans les journaux de manière occasionnelle, mais je pense que tout le monde en a un peu entendu parler, et moi la première. J'étais comme... J'ai une fille qui a eu un bébé, et puis mon gendre, qui est comptable, travaillait dans une PME et puis il a signifié très longtemps à l'avance qu'il souhaitait prendre son congé de paternité. Alors, quand ça a été le temps, il s'est fait dire, il s'est fait dire par son patron: Bien, regarde, là, ta femme est payée un an, là; toi, tu restes ici. Alors, il dit: Oui, mais, moi, je vous ai signifié que je voulais prendre mon congé. C'était très important pour lui d'établir, là, la relation avec son bébé. C'était vraiment primordial. Il s'est fait faire des menaces. Alors là, on a dit: Bien, appelle à la Commission des normes, voit qu'est-ce qu'ils peuvent faire. Là, il s'est fait dire: Bien, il aurait fallu que vous écriviez un... que vous formuliez un avis par écrit trois semaines avant. Donc, vous ne l'avez pas fait, on ne peut rien faire. Là, on a dit: Bien, qu'est-ce qu'on peut faire? Est-ce qu'on peut dénoncer, puis tout ça?
Là, tu te retrouves... Tu es présidente du Conseil de la famille puis tu vois ça, là, je veux dire, dans ta propre famille, puis ce n'étaient pas des cousins éloignés, des choses comme ça, rapidement comme ça. C'est assez saisissant. Là, on a dit: Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on voit si on sort ça dans les journaux? Mais là, lui, il a dit: Bien, moi, je ne suis pas pour sortir avec ça dans les journaux, je vais me retrouver... Qui va vouloir de moi comme employé si on voit que je suis un peu rebelle? Donc, ils sont comme un peu... Mais c'est quelqu'un d'éduqué, c'est quelqu'un avec des moyens, c'est quelqu'un qui est dans un corps d'emploi où il n'y a pas de difficulté à se trouver d'emploi. Il avait même proposé de... parce que les comptables doivent... pour le système de paie, il avait proposé: Regarde, je vais venir une fois par semaine, mais je voudrais avoir mon congé. Alors, on s'entend que ça ampute, ça brûle un peu un congé quand tu te retrouves à... en bataille avec ça.
La décision n'a pas été longue. Finalement, parce qu'il pouvait se le permettre, il a décidé de cesser de travailler et de chercher un emploi dans une compagnie qui était plus ouverte face à ces choses-là. Donc, ce patron-là avait une attitude rétrograde, assez rétrograde. Pour qu'une femme aille dire: Moi, ce n'est pas moi qui vais le prendre, le congé de maternité, c'est mon mari. là, tu te dis: C'était comme un peu fort, là.
Alors, c'est pour ça qu'on dit: Ce ne serait pas inutile d'abord qu'on regarde du côté des normes à quoi ça peut ressembler en termes de plaintes. On sait qu'il y en a beaucoup qui ne font pas de plainte, mais il y aurait certainement lieu d'informer les nouveaux parents de tout ce qu'ils ont à faire, au moment où ils veulent prendre le congé, pour que ça soit correct, puis de ce qu'ils peuvent faire si... de leurs recours en cas... dans le cas où ça ne fonctionne pas.
**(18 heures)**Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Rhéaume. Merci aux représentantes qui vous accompagnent.
Compte tenu de l'heure, malheureusement, on doit abréger nos débats. Je veux remercier tous ceux qui ont participé à cette journée, parce que ce sont de longues journées de travail. Et merci aux gens... aux députés, également, qui y ont participé.
Donc, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au jeudi 3 février 2011, à 9 h 30, à la salle du Conseil législatif, afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait -- Vers un deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Bonne fin de soirée à tous.
(Fin de la séance à 18 h 1)