(Neuf heures trente-cinq minutes)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie afin de tenir des consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait -- Vers un deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Charette (Deux-Montagnes) sera remplacé par M. Traversy (Terrebonne); Mme Lapointe (Crémazie), par Mme Beaudoin (Rosemont); et M. Marsan (Robert-Baldwin), par Mme Charbonneau (Mille-Îles).
Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, nos travaux sont, comme vous pourrez le constater à l'ordre du jour, très chargés. Pour aujourd'hui, nous aurons l'occasion d'entendre, dans un premier temps, les remarques préliminaires de Mme la ministre et de Mme la députée de Rosemont. Et, par la suite, nous entendrons le Conseil du statut de la femme, la Fédération des femmes du Québec, le Réseau des tables régionales des groupes de femmes du Québec, l'Association féminine d'éducation et d'action sociale et, en suspension pour le dîner, nous reprenons à 14 heures avec le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail et Comité consultatif femmes, le Comité national à la condition féminine de la Confédération des syndicats nationaux, l'Association des secondes épouses et conjoints, la Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec et, enfin, pour terminer cette journée, le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.
Donc, comme vous pouvez le constater, ce sont des horaires très, très chargés. Je vais donc être assez rigoureux au niveau du respect des temps qui sont accordés si nous désirons pouvoir rencontrer nos horaires.
Dans un premier temps, Mme la ministre a une période d'environ sept minutes pour ses remarques préliminaires, par la suite Mme la députée de Rosemont aura également 7 min 30 s. 15 minutes seront accordées aux groupes pour faire leur présentation, et 15 minutes seront accordées à chacun des groupes parlementaires pour les questions. Est-ce que ça vous va? Merci. Donc, sans plus tarder, je vous souhaite une bonne commission à tous. Mme la ministre, la parole est à vous.
Remarques préliminaires
Mme Christine St-Pierre
Mme St-Pierre: Alors, merci, M. le Président. Tout d'abord, je veux vous souhaiter une bonne année 2011, et je veux aussi souhaiter une bonne année à mes collègues députés de l'Assemblée nationale qui sont ici, avec nous, ce matin et également saluer Mme la présidente du Conseil du statut de la femme et son équipe. Alors, bon matin. Merci d'être avec nous. Vous êtes nos premières, alors ça part bien la commission parlementaire.
Je suis accompagnée, M. le Président, à ma gauche, de Mme Thérèse Mailloux, qui est sous-ministre adjointe, à ma droite, Me Hélène Chouinard, qui est ma conseillère politique dans le dossier de la condition féminine, également mon adjoint parlementaire, le député de Lévis, le député de Chomedey et la députée de Jeanne-Mance qui sont avec moi, ce matin, pour m'accompagner dans cette démarche. Donc, bienvenue à tout le monde.
Je vois aussi que la Fédération des femmes du Québec est déjà présente, alors les gens sont arrivés tôt ce matin pour entendre, évidemment, tous les débats. Donc, la contribution des personnes et des groupes qui vont venir devant cette commission viendra éclairer les travaux devant mener à l'élaboration du deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes.
Le Québec est reconnu comme l'un des chefs de file en matière d'égalité entre les femmes et les hommes sur la scène internationale. Il prend le parti de développer le plein potentiel d'une société dans laquelle l'épanouissement de chacune et de chacun passe par une véritable égalité de fait. Et je dois dire que notre expertise, elle est non seulement reconnue, mais nous sommes vraiment un modèle, je pense, sur la scène internationale. La semaine dernière, à New-York, j'ai eu l'occasion de rencontrer Mme Michelle Bachelet, qui va être la nouvelle secrétaire générale adjointe pour ONU Femmes qui est un organisme qui a été créé l'année dernière et qui s'est... ce sera la première, et elle me disait à quel point, au Québec, nous avons vraiment une attitude par rapport à l'égalité entre les hommes et les femmes qui est exemplaire et qui fait en sorte qu'on est vraiment vus comme un modèle.
**(9 h 40)** Donc, c'est cette motivation profonde qui doit nous accompagner durant l'exercice démocratique que constitue cette consultation. Je crois fondamentalement qu'il faut élever l'égalité entre les femmes et les hommes au rang de valeur fondamentale qui forge l'identité du Québec pour léguer aux générations futures une société où l'égalité sera exemplaire. Et c'est vraiment à la suite d'un avis du Conseil du statut de la femme, en 2007, que nous nous sommes engagés encore plus dans cette valeur d'égalité entre les hommes et les femmes, et nous avons inscrit, il faut le rappeler, à la Charte des droits et libertés du Québec cette valeur fondamentale. Et je veux remercier le Conseil du statut de la femme pour nous avoir guidés dans cette démarche. Et je suis très fière que cette motion ait été adoptée à l'unanimité par les membres de l'Assemblée nationale.
Donc, pour bien situer le contexte, permettez-moi, M. le Président, d'effectuer un bref retour en arrière. En 2005 s'est tenue une consultation générale publique portant sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Cette consultation, une première dans l'histoire du Québec, a mené à l'adoption, en 2006, de la politique gouvernementale intitulée Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait. Cette politique visait à rallier tous les partenaires sociaux pour faire avancer l'égalité entre les sexes.
Alors, toute l'équipe du secrétariat et toute l'équipe qui a travaillé à cette politique, incluant évidemment ma prédécesseure, Mme Carole Théberge, que je veux saluer... je veux saluer aujourd'hui pour avoir vraiment piloté ce projet de politique et l'avoir mis en place avec le premier plan d'action, 2007-2010, qui a prévu un cadre financier de 24 millions de dollars sur trois ans pour la réalisation de 63 actions.
Comme vous le savez, M. le Président, ce plan a été reconduit, l'année dernière, jusqu'au 31 mars 2011 avec une enveloppe supplémentaire de 10 millions de dollars. C'est donc 34 millions de dollars qui ont été consacrés au plan d'action.
Depuis, un bilan des actions menées a été réalisé, et les travaux amorcés conduiront à l'élaboration du prochain plan d'action, qui sera lancé au cours de l'année 2011. Donc, c'est pour cette raison que nous sommes ici aujourd'hui. Pour ce qui est du bilan, bien, je vais m'attarder à ce bilan des réalisations de ce premier plan d'action dont les résultats sont plus que probants et ont eu un effet bien concret. Il faut souligner que la presque totalité, soit 96 %, des engagements de ce plan sont réalisés ou en voie de l'être. Ce sont 180 millions de dollars que 15 ministères et organismes ont consacrés au cours des trois dernières années.
Parmi les mesures, les mesures-phares du plan, je retiens la volonté d'agir régionalement en fonction des besoins spécifiques identifiés dans chacun des milieux. Pour ce faire, le ministère que je dirige a signé des ententes avec plusieurs partenaires, notamment avec 21 conférences régionales des élus. Il en est résulté la mise sur pied de près de 200 projets financés par le ministère à hauteur de 3 millions de dollars sur trois ans. La contribution des partenaires est venue tripler ces efforts.
Je voudrais également signaler la tenue de campagnes de sensibilisation à la violence conjugale et aux agressions sexuelles, qui ont eu un impact positif... bien, «positif» dans le bon sens du terme, évidemment. Pendant la période du plan d'action, sept phases de ces campagnes ont été réalisées, ce qui représente un investissement de plus de 7 millions de dollars. Mes collègues et partenaires engagés ont été aussi... ont aussi été pris... ont aussi pris, dis-je, des mesures concernant l'insertion des femmes plus vulnérables au marché du travail. 1 200 femmes de 11 régions du Québec ont été soutenues et conseillées dans la réalisation de leurs projets d'affaires grâce au développement du réseau des organismes Femmessor. Des organismes spécialisés ont été financés pour favoriser l'insertion des femmes vulnérables en emploi et ainsi lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. L'autonomie économique, évidemment, est fort importante dans l'atteinte de l'égalité entre les hommes et les femmes.
Plusieurs actions ont été menées en matière de conciliation travail-famille, notamment l'élaboration d'une norme consensuelle pour les entreprises, dont le lancement est prévu en 2011, et la mise sur pied de programmes de soutien aux milieux de travail et aux collectivités. Il s'agit d'initiatives importantes pour repenser les pratiques dans les milieux de travail et l'organisation de la vie de tous les jours au bénéfice des femmes, mais aussi de l'ensemble de la société.
D'autres réalisations sont nées pendant la période 2007-2010. Mentionnons la création de la Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée qui rallie, maintenant, à ce jour, 18 000 signataires. Je ne peux évidemment faire ici toute la nomenclature des mesures réalisées, mais on aura le temps pendant, évidemment, la consultation d'en parler davantage. Mais sachez qu'elles visent toutes le même but: celui de rendre notre société plus égalitaire, plus équitable et, conséquemment, évidemment, plus démocratique. Nous pouvons être fiers de notre bilan.
Maintenant, M. le Président, constatons ensemble la progression de l'égalité au Québec. À cet égard, le gouvernement s'est engagé à déposer, tous les trois ans, une étude statistique qui illustre l'évolution de la situation. Ce document, intitulé L'égalité entre les femmes et les hommes: Faits saillants, a été...
Le Président (M. Bernier): ...30 secondes, Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Il reste 30 secondes?
Le Président (M. Bernier): Oui.
Mme St-Pierre: Alors, on pourra en parler plus profondément pendant la consultation. Donc, il y a des indicateurs et des faits. On a des chiffres fort intéressants sur comment l'égalité entre les hommes et les femmes a progressé.
Et je veux saluer nos téléspectateurs qui nous écoutent ce matin, tous ceux et celles qui s'intéressent à la question d'égalité entre les hommes et les femmes. Alors, je vous salue et je vous dis que nous avons des travaux qui s'annoncent qui sont très, très... fort intéressants, et c'est avec beaucoup d'enthousiasme que je me présente devant vous, ce matin.
Le Président (M. Bernier): Je vous remercie. Vos propos sont très intéressants, comme ceux de la députée de Rosemont. Cependant, à cause du temps, comme je vous ai dit, on a un horaire très serré, je vais être assez sévère au niveau des temps alloués. Donc, Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous pour un bloc de 7 min 30 s pour vos remarques.
Mme Louise Beaudoin
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Merci, M. le Président. Moi aussi, je veux saluer tous les collègues, leur souhaiter une bonne année, ce que j'ai pu faire avec la ministre dès hier puisque nous étions toutes les deux dans une commission parlementaire différente et qu'on s'est croisées.
Alors, je suis très heureuse d'être ici, ce matin, parce que, pour moi, c'est une première. En effet, je suis porte-parole en matière de condition féminine depuis peu de temps, et je vais donc être très attentive, et je suis sûre que je vais beaucoup, beaucoup apprendre de nos débats et que donc c'est... Moi aussi, c'est avec enthousiasme que je suis là ce matin pour entreprendre cette consultation.
Moi, la première chose que je me suis dite quand Mme Marois m'a demandé de prendre ce dossier dans l'opposition officielle, c'est que l'impression qu'on peut avoir dans la population, d'une façon générale, chez les jeunes femmes aussi, souvent, c'est que l'égalité, dans le fond, elle est atteinte et que donc il n'y a plus grand-chose à dire ou à faire sur ce sujet-là qui ne serait plus un sujet d'actualité. Mais je crois que ce n'est pas le cas. Et, quand on regarde la réalité, en effet, des chiffres que le secrétariat nous a fournis, mais surtout aussi beaucoup, pas seulement mais dans les avis du conseil, on voit bien qu'au niveau salarial, donc au niveau économique, qui est fondamental, les femmes gagnent toujours moins que les hommes, qu'elles occupent plus souvent des emplois précaires et au salaire minimum.
En matière de choix professionnel, les stéréotypes sexuels sont aussi encore très présents. Le tiers des emplois choisis par les femmes est concentré dans une dizaine de professions dites féminines: dans le domaine des services, des soins à la personne, à l'éducation, etc. Les femmes, bien évidemment, représentent la majorité des victimes d'agression sexuelle et de violence conjugale, sans compter toutes celles qui sont exploitées sexuellement et captives de réseaux criminels. Bien sûr qu'il y a eu des progrès, les femmes s'acquittent malgré tout encore largement des soins aux enfants et aux personnes aînées, aux malades ainsi que des tâches domestiques. Et sans compter que les femmes, on le sait, ici, dans cette Assemblée, sont encore loin de la parité dans les organisations décisionnelles. Nous ne sommes pas tout à fait 30 %, je crois, de femmes députées ici, à l'Assemblée nationale, et ça stagne, ce n'est pas une montée fulgurante. Si on attend sans rien faire, ça va être long, long, long avant qu'on y arrive.
Alors, je sais que... Alors que nous entreprenons donc aujourd'hui les consultations, nous, du côté de l'opposition, on remet en doute -- je sais que ce n'est pas nécessairement l'endroit, ça se fera dans une autre commission, mais je veux le souligner -- la décision du gouvernement d'abolir la Commission de l'équité salariale. Je pense que ça a été très structurant quand même, cette commission pour l'équité salariale, pour mener de plus en plus... nous mener vers cette égalité hommes-femmes. Et puis il y a seulement justement 55 % des entreprises privées qui ont réalisé un premier exercice d'équité salariale. Alors, ça, ça nous interpelle beaucoup. Et je veux aussi souligner qu'il y a toujours des dangers du recul des droits des femmes; je pense à la question de l'avortement qui est liée à la politique étrangère de santé maternelle du gouvernement Harper.
Et je serais... Donc, je vais terminer, M. le Président, rapidement en souhaitant que les compressions et le retour à l'équilibre budgétaire, je le dis le plus fermement possible, ne doit pas se faire au détriment de l'avancée des droits des femmes, et nous serons très vigilants à cet égard, parce qu'il y a un article qui nous a inquiétés hier, dans Le Devoir, concernant les sages-femmes qui, justement, disaient qu'elles ne seraient pas épargnées par les compressions imposées au ministère de la Santé.
Alors, je le répète, et je remercie mes collègues, d'Hochelaga-Maisonneuve, qui a été pendant longtemps responsable du dossier de la condition féminine, et notre jeune collègue de Terrebonne, qui sont avec moi aujourd'hui. Donc, c'est, je le répète, dans un esprit d'ouverture. J'ai beaucoup à apprendre, je serai attentive, et c'est ma première expérience d'immersion en condition féminine, M. le Président, et donc c'est avec joie que je m'y prépare.
**(9 h 50)**Le Président (M. Bernier): Je suis certain que vous avez tous les talents pour réussir.
Mme Beaudoin (Rosemont): Pardon?
Le Président (M. Bernier): Je suis certain que vous avez tous les talents pour réussir.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci.
Auditions
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la députée de Rosemont. Merci de votre présentation. Nous allons donc débuter nos échanges avec le Conseil du statut de la femme. Permettez-moi de souhaiter la bienvenue à Mme Pelchat, la présidente, Mme Nathalie Roy, Mme Lise Julien et Mme Béatrice Farand. Donc, vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, chacun des groupes parlementaires aura 15 minutes d'échange avec vous. Allez-y, la parole est à vous.
Conseil du statut de la femme (CSF)
Mme Pelchat (Christiane): Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés. J'aimerais saluer aussi les travailleuses du ministère de la Condition féminine qui, comme les travailleuses du Conseil du statut de la femme, se consacrent presque 24 heures par jour, pour dire le moins, à la cause des femmes, et ce qui fait que le gouvernement peut présenter un bilan aussi intéressant, c'est que nous avons des femmes sur le terrain qui travaillent fort. Et j'aimerais particulièrement souligner la présence de Nathalie Roy, notre chercheuse, qui... Bon, vous savez, les chercheurs travaillent dans l'ombre souvent, et on n'a pas l'occasion de les présenter, mais Nathalie est responsable de l'écriture, en grande partie, de cet avis. C'est elle qui a écrit aussi l'avis sur Femmes et pouvoir, qui a été présenté au premier ministre tout dernièrement, et je la remercie. Nathalie, c'est une de nos excellentes chercheuses au Conseil du statut de la femme, et je tiens à souligner son travail; Lise Julien, qui est une responsable d'une région, en fait d'un territoire -- maintenant, on n'a plus de région -- d'un grand territoire, mais qui a rédigé aussi toute la partie développement durable de notre avis, qui est un élément assez nouveau de prise de position du Conseil du statut de la femme; et Béatrice Farand, qui est l'attachée de presse du conseil et l'adjointe exécutive, et qui est un peu la chienne de garde de la présidente.
Alors, M. le Président, je ne pourrai pas présenter, dans les 15 minutes qui me sont allouées, tout cet avis. J'aurai l'occasion... Mais laissez-moi vous dire que le conseil endosse tout à fait les propos de la ministre quant aux succès qu'ont connus les femmes du Québec au cours non seulement des quatre dernières années du plan d'action et de la politique d'égalité, mais aussi, je dirais, depuis les années soixante-quinze. Les femmes au Québec... Et effectivement nous sommes un modèle d'avancement dans les sociétés internationales mais aussi au Canada. Nous faisons partie du groupe coalition des conseils -- ceux qui restent, parce que plusieurs ont été abolis -- du statut de la femme au Canada, et elles sont toujours surprises de voir à quel point les gains qu'on a au Québec. Et c'est important de le souligner, et je le dis vraiment de façon très sincère: quand un premier ministre du Québec insiste pour renouveler un Conseil des ministres paritaire contre vents et marées et contre ses propres collègues du caucus -- parce que j'en ai entendu parler, ah oui, oui, oui, avouons-le -- je pense que, ça, ce sont des gestes qui méritent d'être soulignés, et c'est ce qui fait que les structures peuvent changer et permettre à avoir d'autres modèles que le blanc francophone, catholique de souche, qui a une épouse à la maison, hein, pour faire d'autres activités qui ne sont pas nécessairement permises à ces personnes qui ne rentrent pas dans ce modèle-là. Donc, je pense que c'est important de le souligner.
Le conseil, dans l'avis, dans le volumineux avis qu'on a déposé à la demande de Mme St-Pierre... de la ministre de la Condition féminine, fait le tour, en cinq chapitres, de questions fort importantes. Je vais limiter -- et j'attire l'attention particulièrement des personnes qui rédigent, dans tous les ministères, les politiques publiques -- au chapitre I, où on met l'accent sur deux approches auxquelles on tient, c'est-à-dire l'approche spécifique et l'approche transversale qui, au Québec, peut être traduite par l'analyse différenciée entre les sexes pour la rédaction des politiques publiques.
Le chapitre II, je vais m'y attarder plus longuement.
Le chapitre III traite de la santé des femmes. Nous sommes effectivement, Mme la ministre, très inquiètes de comment... toute la gestion de cette périnatalité par le ministère de la Santé. Nous l'avons dit, nous le redisons, la santé des femmes globalement est importante. Mais, quand on voit que les femmes au Québec ont décidé d'avoir plus d'enfants parce qu'on leur donne... parce que le gouvernement a mis sur pied des garderies à 7 $ et a maintenu ces garderies à 7 $, donc les femmes font le choix d'avoir des enfants mais aussi de travailler. Il y a une augmentation de cette natalité, il faut que les ressources suivent.
J'ai eu l'occasion de discuter avec le Dr Saba lundi. J'étais inquiète suite... le Dr Saba, qui est le président de l'Association des obstétriciens-gynécologues, il m'a inquiétée. Et, au-delà de la publicité entourant cette question, il faut que le ministère de la Santé utilise systématiquement l'analyse différenciée entre les sexes et il ne le fait pas. Malheureusement, j'ai avec moi le document du Commissaire à la santé, le dernier document, il n'a pas utilisé de données sexuées, c'est-à-dire comment le ministère de la Santé se défend-il dans tel dossier, tel dossier par rapport aux femmes, par rapport aux hommes. Et on sait qu'en santé, s'il n'y a pas de donnée sexuée, on ne peut pas faire d'analyse différenciée entre les sexes, ça, c'est une chose sur laquelle on aimerait attirer votre attention.
Les obstétriciens-gynécologues en ce moment ne peuvent pas soigner les cancers de l'utérus des femmes parce qu'ils sont trop occupés à accoucher les femmes. Dans la région de la Gaspésie, il n'y a plus de gynécologue. Les femmes sont obligées de se déplacer vers la région de Matane pour avoir des soins, des suivis de grossesse. Alors que le gouvernement a investi 80 millions de dollars par année pour la procréation assistée -- le conseil a émis de fortes réserves sur cet investissement -- on multiplie la facilité pour que les femmes aient des enfants mais, en même temps, les ressources ne suivent pas. On achète des grosses machines à Québec pour le cancer de la prostate, alors que des salles d'accouchement sont vétustes à Montréal, ne serait-ce qu'à Sacré-Coeur.
Volet santé, je me limite à ça, mais l'analyse différenciée entre les sexes, on l'a vu avec le projet de loi n° 34, quand les fonctionnaires du ministère de la Santé ont décidé d'inclure les cliniques d'avortement dans les cliniques spécialisées, on a dit au ministre: Ne faites pas ça, vous allez réduire l'accès à l'avortement. Et qui se fait avorter? Comme les femmes accouchent toujours, ce sont des femmes qui se sont... avortées, donc... Et ça, le ministère de la Santé, Mme la ministre, comme ministre, vous avez un oeil féministe à regarder, regardez. Et, encore une fois, ce n'est pas la volonté politique qui manque, mais il y a des mauvaises habitudes qui sont prises à ce ministère, et il faut bien le regarder.
Si j'avais un seul paragraphe à vous lire de notre avis pour résumer notre avis, ce serait: «Par ailleurs, l'analyse féministe a démontré que l'inégalité érigée en système se rattache aux rapports sociaux de sexe, qu'elle est partie intégrante de la culture et des institutions et qu'elle s'immisce sur tous les terrains de l'action sociale. Afin d'éradiquer les inégalités de genre, c'est-à-dire de s'attaquer à leurs causes et de les déraciner, il faut donc déconstruire le système pour en revoir les prémisses et les règles de fonctionnement.» Cet avis... essentiellement, Mme la ministre, vous l'avez dit, on a des progrès, on a fait des choses spécifiques et vous allez continuer à en faire, et je suis tout à fait d'accord avec ça.
On a essayé, nous, puisqu'on est votre conseil, d'aller un peu plus loin et vous suggérer des modifications qui peuvent amener, je dirais, des changements transversaux. En économie, on voit que les femmes travaillent plus qu'avant grâce à la politique familiale du gouvernement du Québec, parce que ça n'inclut pas seulement les services de garde mais ça inclut aussi tout le soutien à l'emploi des femmes depuis 2003. 30 % de plus, c'est quand même intéressant de le noter dans la politique familiale. Les femmes travaillent plus, elles sont... on a un taux d'emploi assez exceptionnel au Québec. On a un taux d'emploi des femmes, mamans d'enfants de moins de six ans, plus élevé au Québec qu'en Ontario. Le Québec a vu son niveau de vie augmenter parce que les femmes sont au travail, et ça, on ne... c'est la politique familiale du gouvernement du Québec et on... Vraiment, on fait beaucoup de jalouses et de jaloux au Canada là-dessus et ailleurs, aux États-Unis aussi. Des économistes américains nous ont dit que tout le service, toute la politique familiale du gouvernement du Québec est étudiée par les économistes américains pour être copiée; tant mieux.
**(10 heures)** Cependant, les femmes, quand elles travaillent à plein temps, gagnent encore 76 % du salaire des hommes, alors qu'en 2000 elles gagnaient 79 % du salaire des hommes. On a diminué; on a une perte nette, là, malgré la Loi sur l'équité salariale. C'est inquiétant. Les femmes ont vu une augmentation de salaire de 1 % à 1,5 % depuis ces années, alors que les hommes ont vu des augmentations allant jusqu'à 5 % au cours de ces années. Ça, c'est inquiétant. Le revenu disponible, c'est-à-dire non seulement le revenu d'emploi, mais tout ce qui est transfert, etc., est aussi à 76 %. Ça, c'est un gain depuis 2001, puisqu'il était à 69 %.
Les femmes travaillent plus, elles gagnent moins. Comment se fait-il? Les femmes travaillent plus, mais elles travaillent plus à temps partiel: 25 % des femmes qui sont sur le marché du travail sont à temps partiel; 85 % des emplois à temps partiel sont payés à salaire minimum.
Nous, ce qu'on aimerait, c'est que le gouvernement adopte une grande politique, avec vos collègues du Travail et de Solidarité sociale, Emploi, une grande politique d'intégration des femmes à l'emploi non traditionnel, hein? Je l'ai démontré déjà ici, en commission parlementaire, lorsqu'une femme éducatrice en garderie, qui a trois ans de cégep, elle gagne en moyenne 28 000 $ après la Loi sur l'équité salariale, après le règlement du gouvernement sur l'équité salariale; son conjoint est un conducteur de machinerie lourde, qui a un D.E.P., secondaire V, hein, plus secondaire V -- encore une fois, je ne dénigre pas, je me suis fait accuser par la FTQ-Construction de dénigrer les chauffeurs; ce n'est pas ça du tout, mais comparons des choses qui se comparent -- gagne 44 000 $. Quand il faut prendre un congé pour s'occuper des enfants, quand il faut prendre un congé pour s'occuper de la belle-mère et du beau-père, c'est la femme qui prend ce congé. Donc, malheureusement, elle ne contribue pas à sa Régie des rentes, elle vit plus vieille que les hommes, donc elle est toujours plus pénalisée, que ce soit avec la Régie des rentes ou ailleurs. Donc, c'est pour ça qu'elle gagne toujours moins cher. Le poids de la domesticité, le poids des enfants est encore trop important chez les femmes.
Si on veut diversifier notre main-d'oeuvre puis avoir plus de femmes en main-d'oeuvre, il faut aussi attirer... aller au-delà de la politique familiale qui est déjà très bien, demander aux collègues du Travail et d'Emploi de faire une vaste campagne avec les entreprises pour intégrer les femmes dans les métiers non traditionnels. En ce moment, il y a seulement 1 % de femmes dans les métiers de construction. Alors, qu'on ne nous serve pas l'idée que, bon, c'est trop difficile être peintre en bâtiment ou en menuiserie, sauf que, quand les femmes arrivent sur les chantiers, elles sont beaucoup harcelées sexuellement, il faut le dire; elles sont dénigrées parce qu'il n'y a pas de politique d'intégration des femmes. On a Chapeau, les filles! qui fait en sorte que les filles vont de plus en plus vers les métiers non traditionnels; malheureusement, elles n'y restent pas. Alors, on a un faible taux d'intégration, puis on n'a pas de taux de rétention. Donc, c'est inquiétant.
Nous voudrions aussi, encore, quand on parle de structure, que la politique macroéconomique du Québec soit modifiée afin d'inclure dans les principes... Vous savez, notre politique macroéconomique, la politique fiscale du gouvernement, a quelques principes, des objectifs: l'objectif d'équité horizontale, équité verticale, redistribution de la richesse, équité sociale. Nous voudrions que, dans ces objectifs, nous ayons l'équité entre les sexes, c'est-à-dire que, quand le gouvernement pense des politiques budgétaires, quand le gouvernement pense des politiques fiscales, il se pose la question: Est-ce que cette politique va favoriser l'inégalité ou favoriser l'égalité? Et ça, c'est ça, l'analyse différenciée entre les sexes appliquée au budget. En plus d'avoir un budget sexospécifique, comme nous l'avions déjà évoqué dans la politique d'égalité -- il est déjà évoqué dans la politique d'égalité, j'ai déjà entendu Mme la ministre en parler aussi -- avoir un budget sexospécifique, c'est aussi se poser la question: Est-ce que les sommes qui sont engrangées par l'État et les sommes qui sont dépensées par l'État favorisent la diminution des inégalités?
Un exemple qui démontre le contraire... Et l'ADS, l'analyse différenciée entre les sexes, devrait être appliquée partout au gouvernement. Nous aimerions qu'il y ait une clause dans les mémoires au Conseil des ministres... Je ne me souviens pas comment ça s'appelle, mais je pense que c'est une... en tout cas, c'est un indicateur que les ministres doivent faire: Est-ce qu'on a vérifié si la politique que l'on propose a intégré l'analyse différenciée entre les sexes? Et, si oui, est-ce que cette analyse démontre que la présente politique va augmenter l'égalité ou diminuer l'égalité entre les sexes? Si on avait fait l'analyse différenciée entre les sexes, le ticket modérateur n'aurait probablement pas été adopté par le gouvernement parce qu'on aurait vu, à la lumière... Et ce que je voulais dire, c'est que l'ADS est à la politique sociale ce que sont les tests de discrimination systémique en droit humain. C'est l'équivalent, si on veut. Alors, on se serait dit: Une mesure, donc, en apparence neutre, un ticket modérateur, on a l'impression que ça touche tout le monde; quand on l'analyse, on voit qu'il a un fardeau démesuré sur un groupe de la population. Et là, en droit, on appelle ça une discrimination indirecte, c'est-à-dire une discrimination non voulue par le gouvernement. Mais c'est son effet qui est discriminatoire, ce n'est pas la loi ou la politique budgétaire comme telle. Mais, quand on fait l'ADS, on se pose la question: Qui consomme les soins de santé? Ce sont des femmes en majorité. Qui s'occupe des... proches aidants, pas les aidants naturels, mais les proches aidants? 80 % des proches aidants sont des femmes.
Donc, cette mesure neutre, à première vue, on s'aperçoit qu'elle n'est pas neutre, donc on ne l'aurait pas adoptée. Ou, si on l'adopte, on dit: Bien, on fait fi de l'égalité entre les sexes, puis on donne un fardeau plus grand aux femmes, aux femmes.
Même chose pour la contribution santé. La contribution santé, telle qu'elle est élaborée par le gouvernement en ce moment, elle l'est de façon égale pour tout le monde. Ça veut dire que c'est une... ce qu'on appelle une taxe régressive. Nous sommes dans un système financier, au Québec...
Le Président (M. Bernier): 30 secondes, Mme Pelchat, pour conclure.
Mme Pelchat (Christiane): Pardon?
Le Président (M. Bernier): Vous avez 30 secondes pour conclure.
Mme Pelchat (Christiane): 30 secondes pour conclure. Nous sommes dans un système d'impôt progressif, et il faut le rester; c'est-à-dire, plus on gagne d'argent, plus on paie d'impôt. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, merci de votre présentation, Mme Pelchat.
Nous allons donc débuter immédiatement nos échanges avec les groupes parlementaires pour une période de 15 minutes. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je vais apporter quelques correctifs à des commentaires qui ont été faits, tout d'abord, par ma vis-à-vis en condition féminine, qui a parlé d'abolition de la Commission de l'équité salariale. C'est faux de dire qu'il y a eu une abolition de la Commission de l'équité salariale. La Commission de l'équité salariale n'a pas été abolie. Elle était intégrée à la Commission des normes du travail. D'ailleurs, la Commission des normes du travail va changer de nom, et elle va s'appeler la Commission des normes du travail et de l'équité. Donc, elle acquiert, la Commission des normes du travail, toutes les responsabilités de la Commission de l'équité salariale. Donc, je pense que c'est de la saine gestion.
Le Président (M. Bernier): ...mentionner de ne pas mettre en doute la parole d'un député au moment...
Mme St-Pierre: Bien, je ne mets pas en doute. Je dis juste que ce n'était pas ça.
Le Président (M. Bernier): D'apporter des précisions, ça va.
Mme St-Pierre: J'apporte des précisions. Autre précision. Mme la présidente du Conseil du statut de la femme, merci, merci beaucoup pour votre présentation. Mais, à la fin, vous dites qu'il y a une chose qui est faite, c'est-à-dire le ticket modérateur, alors qu'il n'y a pas de ticket modérateur qui a été imposé. Dans le budget de M. Bachand, on a parlé d'une proposition qui allait être débattue, et évidemment, la contribution, elle est là. Ça, c'est... Vous avez raison, c'est là, mais, l'autre partie, ça ne... En fait, vous induisez le public en erreur, parce que ce n'est pas chose faite. En disant que c'est chose faite... Ce n'est pas chose faite. Donc, je voulais juste établir ces éléments-là pour faire en sorte que la population soit bien informée.
Vous avez un mémoire qui est vraiment costaud. Je veux vous féliciter parce que, vraiment, vous tournez toutes les pierres, vous allez très loin. Et on l'a reçu il y a quelques jours. Mais soyez assurée qu'il sera vraiment une pièce maîtresse, comme tous vos avis, une pièce maîtresse dans notre plan... Il sera pris en considération dans notre plan d'action.
Lorsque vous parlez, dans votre présentation, des emplois non traditionnels, moi, je trouve ça très, très important, parce que, oui, si on veut atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes et une meilleure compréhension de l'égalité entre les hommes et les femmes, il faut investir certains lieux; il faut que, dans les métiers non traditionnels, les femmes aient leur place et qu'elles ne soient pas étiquetées si elles décident d'embrasser, d'épouser une profession dans le domaine de la construction, par exemple, ou dans le domaine du camionnage, ou dans d'autres domaines qui sont... On a vu des progrès dans certains secteurs, la médecine, le droit, où, il y a 30 ans, on ne trouvait pas... on ne voyait pas autant de femmes aller vers ces professions. Maintenant, il y a plus de femmes que d'hommes dans ces professions. Donc, il y a d'autres professions où il faut... vers lesquelles il faut travailler.
Mais, à l'inverse, il y a d'autres métiers traditionnellement féminins où des hommes essaient de s'intégrer et, là aussi, ils subissent une certaine -- entre guillemets -- discrimination. Je pense aux emplois dans le domaine de l'enseignement primaire, infirmier et... Est-ce qu'il y aurait, dans notre prochain plan d'action... Quel serait... Comment on pourrait articuler l'action, de façon très concrète, pour aller vers ces professions-là des deux côtés, pour que, l'égalité, elle se retrouve vraiment partout?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Pelchat.
**(10 h 10)**Mme Pelchat (Christiane): Mme la ministre, l'ambition des féministes et l'ambition du Conseil du statut de la femme, ce n'est pas que les hommes aillent dans les emplois traditionnellement féminins, absolument pas. Nous voudrions que les femmes aillent dans des emplois traditionnellement masculins parce que ce sont des emplois payants. Aux États-Unis, on ne parle même plus d'emplois traditionnellement masculins, on parle d'emplois payants et d'emplois non payants. Alors, il n'est pas question de mettre une cenne, comme malheureusement le secrétariat a fait... La dernière politique a mis 75 000 $ pour amener les garçons à aller je ne me souviens plus dans trop quelle profession... C'est de l'argent qui est, à notre sens, gaspillé, qui ne sert pas l'analyse différenciée entre les sexes, qui ne sert pas la discrimination systémique. Mettez le même 75 000 $ pour vous assurer qu'il y ait des femmes qui gagnent plus que 28 000 $ par année. L'idée, ce n'est pas que les gars gagnent 28 000 $ par année, on ne veut pas que les gars gagnent moins. On veut que les femmes aillent dans les métiers traditionnellement masculins pour gagner plus. Et, quand il y aura une pénurie de main-d'oeuvre dans les métiers traditionnellement féminins, si jamais ça existe, si jamais ça arrive, bien là, il y aura une augmentation de salaire. Mais il ne faut pas encourager... C'est de prendre à contresens la façon de déconstruire et de défaire. Les hommes ne vivent aucune discrimination systémique dans aucun des... En ce moment, les femmes sont dans les 10 métiers traditionnellement féminins. Depuis 1996, on a dans nos indicateurs...
Une voix: 1991.
Mme Pelchat (Christiane): ...1991, on a... Dans nos indicateurs d'égalité, on montre que... Attendez un petit peu, là. Le premier choix des femmes, en 2001, secrétaire; 2006, secrétaire; 2001, vendeuse et commis; 2006, vendeuse et commis; 2001, caissière; 2006, caissière. Les femmes, elles sont plus éduquées qu'avant; elles choisissent toujours les métiers pas payants. Ce n'est pas en mettant de l'argent pour que les gars aillent dans les métiers payants qu'on va changer la situation. Il faut mettre de l'argent pour mettre les gars... les femmes dans les métiers payants.
Je vous donne un exemple: sur la Côte-Nord, en ce moment, il y a une pénurie de main-d'oeuvre de conducteurs en machinerie lourde. La Côte-Nord du Québec, c'est l'endroit où il y a le plus haut taux de chômage chez les femmes. Il y a un organisme qui essaie d'amener l'entreprise à avoir plus de femmes, mais les stéréotypes: Bien, c'est des jobs de gars, ça... Mais ce n'est plus comme avant, hein, conducteur de machinerie lourde.
Alors, dans votre plan d'action, Mme la ministre, concentrez-vous, s'il vous plaît, à avoir plus de femmes dans les métiers traditionnellement payants, les métiers de gars. Mettez pas une cenne pour que les gars aillent dans les métiers payants, ça ne donne rien. Quand il va y avoir une pénurie de main-d'oeuvre dans les métiers traditionnellement féminins... Vous parlez des infirmières; savez-vous, quand on regarde les salaires moyens des hommes infirmiers et les femmes infirmières, qui gagne le plus? Les hommes. 80 % de la main-d'oeuvre infirmière sont des femmes; salaire moyen, par semaine, d'un homme infirmier par rapport à une femme infirmière: plus élevé. Il y a un os dans le boudin, comme dirait mon mari, parce qu'ils ont toutes les jobs de cadre. Vous regardez...
Alors, la discrimination systémique chez les hommes, ça n'existe pas. Ça, c'est une lubie, là, de certains alpinistes du pont Jacques-Cartier.
Le Président (M. Bernier): Oui.
Mme St-Pierre: Alors, M. le Président, vous dites de ne pas avoir... de ne pas prêter des intentions, je pense qu'il ne faut pas me prêter des intentions d'avoir des lubies non plus, mais c'est... Je ne le voyais pas sur le plan salarial, je le voyais sur le plan des modèles, c'est-à-dire sur les... dans les métiers traditionnellement masculins. S'il y a plus de femmes qui intègrent ces métiers-là, évidemment il va y avoir probablement, fort probablement des changements de comportement chez les hommes qui sont dans ces métiers-là, parce qu'il va y avoir plus de femmes qui vont intégrer, il va y avoir plus de communication, ils vont discuter de ces choses-là.
À l'inverse, ce n'est pas une question... Je ne le voyais pas en termes: ils gagnent moins cher dans les métiers traditionnellement féminins, mais, si vous allez dans certains métiers traditionnellement féminins, dans certains... il y a aussi peut-être une possibilité également d'atteindre sur le plan de la mentalité d'égalité entre les hommes et les femmes... C'est plus de cette manière-là que je le pensais, et ce n'est pas...
Et, moi, dans notre plan d'action, il va y avoir des actions qui vont avoir des...Il va y avoir des signes de piastres accolés à certaines actions, mais, moi, je veux des actions aussi qui... Il ne faut pas toujours penser à des actions en termes d'argent, il faut penser aussi à des actions en termes de changement de mentalité, changement d'attitude, changement de discours, modernisation peut-être du discours. C'est plus dans cet esprit-là que je vois qu'on pourrait avoir, dans ce plan d'action là, des actions... Oui, il va y avoir des actions qui vont amener des coûts, c'est normal puis il faut le faire, puis...
Mme Pelchat (Christiane): Mme la ministre, tant qu'il va y avoir de la discrimination systémique...
Le Président (M. Bernier): Mme Pelchat... Excusez, Mme Pelchat. c'est moi qui donne le droit de parole. Donc, si vous voulez terminer, Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Non, c'est plus vers ça, de cette manière-là...
Donc, dans votre mémoire, pour parler de la question de la paternité et la maternité, vous invitez les autorités publiques à participer à un vaste programme de promotion du rôle paternel qui s'adresserait au père, mais aussi aux entreprises. Quand une entreprise... La conciliation travail-famille doit aussi passer par aussi le rôle du père, parce que la conciliation travail-famille, c'est aussi de dire: Une femme, puis c'est normal, si elle a des enfants, bon... La journée de travail se termine puis il y a une autre journée de travail qui commence. On sait tous et toutes cela. Est-ce qu'il y a des mesures? Vous invitez, en tous cas, les autorités publiques, à participer à un vaste programme de promotion. Pouvez-vous nous en parler, de l'importance de ce programme-là? Puis qu'est-ce que ce serait également?
Mme Pelchat (Christiane): Ce qu'on suggère aussi...
Le Président (M. Bernier): Mme Pelchat, oui, allez-y.
Mme Pelchat (Christiane): Merci.
Le Président (M. Bernier): Pourquoi je fais ça? Je vais vous expliquer pourquoi je fais ça: de façon à ce que les enregistrements puissent être faits, je dois, à ce moment-là, annoncer la personne pour qu'on puisse suivre les débats. Si les paroles... les prises de parole sont prises comme ça, immédiatement, bien, ça devient difficile de pouvoir bien enregistrer ces débats, et vous avez tout avantage à ce que ces débats-là soient bien enregistrés.
Mme Pelchat (Christiane): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Pelchat (Christiane): D'abord, Mme la ministre, il faut choisir nos batailles. Les femmes gagnent encore seulement, à temps plein, 76 % du salaire des hommes. Il faut... Et le gouvernement cherche des moyens financiers. Les femmes, il faut qu'elles soient riches tout au long de leur vie. Si elles ne gagnent pas plus, c'est sûr qu'un ticket modérateur ça va toujours leur faire mal; c'est sûr qu'un 200 $ santé, en bout de ligne, ça va toujours leur faire mal. Alors, c'est pour ça que, nous, ce qu'on dit, c'est qu'avant d'envoyer les garçons dans les métiers traditionnellement féminins, réglons la question des filles dans les métiers traditionnellement masculins, dans les jobs payantes; puis, après ça, on pourra investir là-dedans.
En ce qui a trait aux pères, nous suggérons aussi d'augmenter le congé parental chez les pères, comme ça se fait ailleurs dans les autres pays, dont la Suède. Ce que l'on suggère, c'est aussi que les... Puis je pense que, là, on en a déjà discuté, de l'approche sociétale avec l'approche féministe. Parce que pourquoi on veut aider les pères à devenir de meilleurs pères et à prendre plus de responsabilités familiales? C'est pour que les femmes aient plus accès aussi à du temps de qualité pour travailler, et gagner de l'argent, et donc être indépendantes. Alors, il y a la Suède, par exemple, qui donne un très grand congé de paternité non transférable au père. Et ça, pour ça, on pense que ce serait important de revoir cet élément-là. Quand les pères -- c'est démontré -- ont ces congés de paternité, ils développent un lien d'attachement plus important avec leur enfant, ce qui fait qu'ils acceptent d'aller chez le médecin plus rapidement avec leur enfant, etc., c'est-à-dire plus souvent, donc les femmes sont moins pénalisées, et le poids de la domesticité n'est encore pas seulement que sur les épaules des femmes.
Mais, aujourd'hui, au Québec, en 2007... en 2005, pardon, les femmes consacraient quatre heures aux activités domestiques par jour et les hommes, 2,6 heures. Alors, c'est pour ça que, dans tout ce qui est conciliation travail-famille, plutôt que sur les métiers non traditionnellement masculins, mettez de l'argent là-dedans. Oui, effectivement, c'est une excellente idée pour que les pères soient plus responsables de leur parentalité, si je peux m'exprimer ainsi.
Le Président (M. Bernier): ...Mme Pelchat. M. le député de Lévis.
Des voix: C'est ce que j'ai demandé, moi...
Le Président (M. Bernier): Oui, M. le député de Lévis. M. le député de Lévis, allez-y.
M. Lehouillier: Oui. Moi, j'avais une...
Le Président (M. Bernier): Vous avez trois minutes.
M. Lehouillier: Oui, trois minutes. Alors, d'abord, je voudrais vous féliciter pour la qualité exceptionnelle de votre mémoire. Il y a de belles idées dans ce mémoire-là, et j'aurais eu plusieurs questions, mais je vais m'en tenir peut-être à la question qui touche la santé. J'ai eu l'occasion de recevoir des groupes de femmes lors de la marche des femmes, à mon bureau de comté, et on a discuté beaucoup de la santé par rapport à l'accès, et tout ça. Parce que vous avez fini votre présentation, tout à l'heure, là-dessus, puis j'aurais aimé avoir des explications. Vous savez qu'on a la contribution santé maintenant, et qu'au niveau de la contribution santé, moi, ce que j'expliquais aux gens, c'est que le gouvernement avait deux choix: ou on maintient à 3,5 % l'augmentation du budget santé, comme les autres ministères, ou on va un petit peu plus loin puis on essaie de trouver des formules. Parce qu'en bout de piste on sait que, par rapport aux soins de santé, les aînés utilisent plus les soins de santé, et c'est normal: vieillissement, etc. Et en majeure partie, c'est des femmes. Il y a beaucoup de femmes, etc. Donc, pour garder l'accès, moi, je... en commission parlementaire, on a défendu notre contribution santé, d'autant plus qu'il y avait 1,4 million de contribuables qui sont totalement exemptés en fonction... On a pris, en fait, le même régime que le régime d'assurance médicaments.
Alors, moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que, moi, je suis plus de tendance un peu sociale-démocrate et, moi, je suis pour une intervention de l'État, et faire en sorte que, par exemple, si on n'avait pas fait cette contribution santé là, je me demande, pour les personnes à faibles revenus, quel serait leur accès aux services hospitaliers maintenant. Alors, j'aimerais ça vous entendre un petit peu plus là-dessus par rapport à cette mesure gouvernementale là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Vous avez 1 min 30 s pour répondre, Mme Pelchat.
**(10 h 20)**Mme Pelchat (Christiane): La contribution santé, ce que l'on reproche, nous, à la contribution santé, c'est qu'elle soit faite de manière égale à tout le monde, c'est-à-dire peu importe votre revenu. Quand vous... Par exemple, je donnais l'exemple de ma mère -- elle n'aime pas ça que je le dise, il est trop tard, je l'ai déjà dit -- ma mère gagne 17 000 $ par année, son revenu; elle va payer, cette année, le 25 $; et même, avec la subvention, éventuellement, le crédit d'impôt, elle paiera 115 $ du crédit à la fin, à la troisième année. C'est trop. C'est trop pour une femme de 78 ans qui doit, en plus, avoir les autres frais.
Donc, la seule chose qu'on reproche, c'est de ne pas l'avoir modulé selon les revenus, c'est-à-dire en fonction de notre impôt progressif. C'est le meilleur système... Pour respecter le droit des femmes, c'est l'impôt progressif.
L'impôt régressif... Et, au Canada, malheureusement, nous sommes devenus dans un système d'impôt régressif depuis les cinq dernières années; c'est une atteinte à l'égalité des femmes. C'est la seule chose, mais je suis d'accord avec... Mais il ne fallait pas copier le système de l'assurance maladie, c'était une très mauvaise idée de le faire.
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Pelchat (Christiane): D'assurance médicaments, pardon.
Le Président (M. Bernier): Donc, le temps alloué à la partie gouvernementale est maintenant terminé. Nous allons donc passer à... du côté de l'opposition. Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous pour un bloc de 15 minutes.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Alors, Mme Pelchat, mesdames, bonjour. Je pense que c'était normal de commencer par vous ce matin, étant donné donc tous ces avis importants que vous donnez au gouvernement. Les gouvernements ne sont pas toujours heureux d'avoir des avis de leurs conseils, mais c'est important quand même que cet espace-là existe. Et puis... Je le sais, j'ai été au gouvernement pendant huit ans et demi, et c'est certain que, des fois... Je me souviens, Claire Bonenfant, qui vous a précédée, ne faisait pas toujours plaisir à M. Lévesque quand Mme Bonenfant s'exprimait et qu'elle nous envoyait des avis concernant la condition féminine. Mais, moi, j'ai toujours pensé, en effet, que cet espace-là, en effet, cette distance entre le gouvernement et les conseils était extrêmement importante pour permettre ce débat démocratique que nous avons aujourd'hui.
Je voudrais juste revenir, que vous m'expliquiez un peu mieux quand vous parlez de cette grande politique que vous souhaitez concernant justement les emplois non traditionnels pour les femmes. Moi, je vous l'ai dit, j'arrive dans le dossier, alors je n'ai pas trop de prétentions, je suis ici avec beaucoup d'humilité, mais je comprends bien que ça s'est structuré dans notre société comme ça, là. Je veux dire, bon, des emplois puis... C'est sûr que, l'équité salariale, ça voulait justement répondre aussi à ça en disant: Il y a des emplois qui sont féminisés, puis il y a des emplois qui ne le sont pas, puis ça s'adonne en effet que ces emplois féminisés, très souvent, sont des emplois, comme vous le dites, moins payants et plus... Tout ce que vous avez dit aussi concernant les femmes qui s'occupent, bon, davantage, vous avez dit, de la domesticité -- j'aime beaucoup ce mot-là, de la domesticité -- et qui font en sorte que... Toutes ces contraintes font en sorte aussi que les femmes se retrouvent souvent dans des situations plus précaires, bon, leur vie durant.
Mais cette grande politique là, comment vous la voyez, mais... J'ose à peine poser la question, mais je la pose quand même: Qu'est-ce qui fait que les jeunes femmes d'aujourd'hui à qui le... Je ne sais pas, le monde leur appartient. Qu'est-ce qui les retient, en quelque sorte, d'aller dans ces métiers non traditionnels? Parce que... C'est sûr que les gens de ma génération, là, je ne sais pas, le premier ministère, c'était en 1979, je pense, qu'il a été créé, le ministère de la Condition féminine. Ça doit être Mme Payette qui en a assumé, la première... En tout cas, disons que c'est assez récent, bon, il y a eu des féministes, des femmes...
Mme Pelchat (Christiane): ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui?
Mme Pelchat (Christiane): ...avant le ministère d'État.
Mme Beaudoin (Rosemont): Mais Mme Payette, donc, a été, donc ,comme d'autres... Là, on pense à Thérèse Casgrain puis à d'autres féministes qui nous ont montré la voie, en tout cas aux gens de ma génération. Mais on se dit, justement, ces jeunes femmes... Alors, c'est quoi, les... Qu'est-ce qui les retient de foncer là-dedans puis de dire: Voilà... C'est quoi, le problème?
Le Président (M. Bernier): Mme Pelchat.
Mme Pelchat (Christiane): Merci. Très important, un élément. Les femmes consacrent plus de temps à la domesticité, donc: 54 % du temps d'une femme, dans une journée, 54 % de son temps est consacré dans la maison: les enfants, la maison, le ménage, le beau-père, la belle-mère. Je dis «le beau-père, la belle-mère», parce que ce sont les femmes qui s'occupent de leurs beaux-parents. C'est quand même assez exceptionnel: 54 % de leur temps! Donc, le temps productif, sur 16 heures de temps productif, elles en passent la moitié à s'occuper des enfants, de ménage, et tout ça. Donc, elles ne gagnent pas d'argent.
Les femmes, au Québec, grâce à la politique familiale du gouvernement du Québec, ont choisi de travailler et d'avoir des enfants. Mais, une fois qu'elles ont fait ce choix-là, elles arrêtent le choix aux emplois qui leur permettent de concilier le travail et la famille. Et ces emplois-là sont des emplois traditionnellement féminins, hein, l'enseignement et les emplois du gouvernement, parce que ces emplois sont syndiqués, ces emplois sont... Il y a une sécurité d'emploi quand on quitte pour un congé de maternité ou un congé parental. Il y a des mesures de conciliation travail-famille extraordinaires qui font que les femmes se sentent beaucoup plus accueillies dans leur féminitude avec des enfants quand elles travaillent dans ces emplois-là. Donc, c'est pour ça qu'elles ne choisissent pas d'aller dans les métiers de construction où les emplois... Et même, on a une diminution des inscriptions dans les postes d'ingénieur, dans les facultés d'ingénierie, dans nos facultés, parce que la conciliation travail-famille n'est pas encore intégrée dans nos politiques, des entreprises particulièrement et dans la mentalité des hommes. C'est pour ça qu'on veut effectivement que les hommes soient beaucoup plus ouverts à la domesticité et prendre leur rôle domestique plus intensément. C'est la principale raison.
Vous savez, Mme la ministre, quand... Mme Beaudoin, pardon, quand on regarde la Société de transport de Montréal, qui a un des plus hauts taux de femmes chauffeurs d'autobus, ou de femmes mécaniciennes, et tout ça, c'est parce qu'il y a des politiques de conciliation travail-famille exceptionnelles. La police de Montréal, qui a aussi un des plus hauts taux de femmes dans son corps policier, c'est parce qu'ils ont été en mesure de mettre des politiques de conciliation travail-famille. Les femmes veulent travailler, mais elles veulent avoir des enfants.
Ma génération, cohorte 50 ans, 51 ans, est la génération qui a eu le moins d'enfants au Québec -- de femmes. Pourquoi? Parce qu'à ce moment-là il n'y avait pas de politique familiale. Alors, on choisissait soit de travailler ou soit d'avoir des enfants. Alors, tant que les métiers traditionnellement masculins vont être faits pour des hommes qui ont des épouses à la maison, qui repassent les chemises, qui s'occupent des enfants, les femmes, elles n'iront pas parce qu'elles n'ont pas d'épouse à la maison.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Pelchat (Christiane): Ça existe encore.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Pardon? Ça existe encore, ça?
Mme Pelchat (Christiane): Oh oui, que oui!
Mme Beaudoin (Rosemont): Bien là, ça fait longtemps que je n'ai pas vu ça.
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. En tout cas, c'est... Bon, c'est très intéressant, je pense, que toute cette conciliation famille-travail, comme vous venez de le dire, là où il y en a, là, les femmes vont avoir spontanément tendance à se retrouver, et ça s'adonne, là aussi, comme vous dites, que c'est beaucoup des métiers qui ne sont peut-être pas les plus payants, même s'il y a, comme vous l'avez dit, dans certains de ces cas que vous avez évoqués, la permanence d'emploi, la sécurité au travail, ce qui est, dans nos sociétés d'aujourd'hui, extrêmement important et un avantage qui est considérable.
Vous avez dit une chose aussi concernant les revenus. Bon, moi, je suis très, très sensible à ça. Je suis très, très sensible à ça. J'aimerais que vous me réexpliquiez: revenu disponible versus revenu tout court. Et vous avez dit: Dans le cas du revenu disponible, ça a augmenté; depuis je ne sais pas quand, il y a eu une augmentation donc du revenu disponible, donc là on peut dire qu'il y a du progrès. Mais, quand on regarde l'écart de revenu entre les femmes et les hommes, là, il n'y a pas eu de progrès. Alors, ça, j'aimerais juste que vous précisiez ça pour moi.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Pelchat.
Mme Pelchat (Christiane): Le revenu disponible, c'est le revenu qui inclut l'impôt sur le revenu et les transferts. Alors, c'est aussi, par exemple, toutes les mesures de soutien à l'emploi que le gouvernement du Québec donne aux femmes. Donc, leur revenu disponible, ça inclut: le revenu d'emploi, le revenu des transferts, c'est-à-dire les subventions, l'aide... le soutien à l'emploi, etc. Donc, celui-là, il est aussi à 76 % comparativement à en 2001 où il était à 69 %. Donc, c'est directement dû à la politique familiale du gouvernement, il n'y a pas d'autre raison de... et aussi... mais ce n'est pas dû aux augmentations normales du salaire.
Tandis que le revenu d'un travailleur à... d'une femme à temps plein par rapport à un homme à temps plein, nous sommes à 76 %, alors qu'en 2000 nous étions à 79 %, parce que les métiers traditionnellement masculins, les salaires ont augmenté plus que les métiers traditionnellement féminins. Les métiers traditionnellement féminins, c'est les métiers... En anglais, on appelle ça le «care industry», l'industrie de soins; c'est un peu plus large que l'industrie de soins. Et ces métiers-là n'augmentent pas aussi rapidement que les métiers scientifiques où il y a plus d'hommes, les métiers en construction, par exemple, qui augmentent ou tout ce qui est manufacturier, et tout ça. Il y a des augmentations plus importantes. C'est pour ça que le métier de...
Si le gouvernement du Québec n'aide pas les femmes avec ces transferts, les femmes vont être encore plus pauvres. Alors, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on voudrait plus que les femmes ne soient pas aidées... on aimerait mieux qu'il n'y en ait pas de transfert du gouvernement aux femmes. On n'en veut pas. On veut que les femmes aient des jobs payantes pour avoir le même statut que les hommes et avoir la même indépendance aussi dans la domesticité.
**(10 h 30)**Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Juste un petit commentaire avant, M. le Président, de passer la parole à mes collègues. Dans le fond, quand j'avais 12 ans, que j'étais au collège Jésus-Marie, ici, à Québec, j'ai lu Simone de Beauvoir, et j'ai retenu une chose: l'autonomie financière. Et je me suis organisée pour me l'appliquer à moi-même, d'ailleurs, et, pour moi, le féministe, c'était beaucoup ça. Et je vois qu'aujourd'hui en tout cas, disons que c'est encore une problématique extrêmement présente dans les débats que l'on a sur l'égalité hommes-femmes, toute cette dimension d'autonomie financière des femmes du début jusqu'à la fin de leur vie.
Mais, c'est sûr, vous l'avez dit au début aussi, le Québec n'est pas quand même à la queue puis à la traîne dans toute cette question-là. Mais je crois qu'il y a, en effet, certains reculs ou une certaine stagnation et qu'il faut prendre le taureau par les cornes. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, mesdames. Écoutez, c'est votre recommandation 23, moi, qui m'attire justement sur les métiers non traditionnels. Beaucoup de documents et beaucoup d'études ont été faites à l'effet de documenter le fait que, lorsque les filles quittent la formation professionnelle, elles sont diplômées, elles y arrivent, à se diplômer de façon... Et on a augmenté le nombre de diplomations des filles. Par contre, c'est lorsqu'elles arrivent sur le marché du travail où elles finissent par se décourager parce que le marché du travail ne les accueille pas.
Quelles solutions vous voyez pour que le marché du travail traditionnellement masculin dans des métiers non traditionnels féminins... Comment on peut faire pour modifier les comportements? Parce qu'il est là, le problème. Elles se scolarisent, elles arrivent à avoir leurs diplômes, que ce soient d'électriciennes, mécaniciennes, etc. Et effectivement la Société de transport de Montréal est un exemple parfait d'intégration des filles parce que maintenant elles sont tellement en bon nombre que le milieu est fait. Et, par contre, si on va dans d'autres métiers plus traditionnels, effectivement, sur les chantiers de construction par exemple, elles ne sont pas en assez grand nombre pour avoir fait une place.
Alors, comment vous voyez cette transformation-là de ces métiers non traditionnels pour arriver à faire une place aux femmes dans ces métiers qui sont payants? Il faut se le dire, là, c'est des métiers... La comparaison que vous donniez, 44 000 $ versus 28 000 $ pour les éducatrices, c'en est un, mais, si on va dans des métiers encore plus rémunérateurs comme les électriciens, là les écarts sont encore plus grands pour des formations équivalentes.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Pelchat.
Mme Pelchat (Christiane): Nous avons déjà, au Québec, des outils intéressants. On propose, dans notre avis, de renforcer ces outils, par exemple l'obligation contractuelle. Depuis 1987, le gouvernement du Québec a adopté un décret qui a été intégré, si on veut, dans la loi d'accès à l'égalité en 2000 disant que les entreprises qui font affaire avec le gouvernement du Québec, les entreprises qui ont une subvention du gouvernement du Québec de plus de 100 000 $ doivent présenter un plan d'accès à l'égalité. C'est-à-dire, par exemple, que, si j'ai une compagnie de construction et je fais affaire avec le gouvernement du Québec, du ministère des Transports, et j'ai un contrat de route, de réfection de route pour, je ne sais pas, moi, l'autoroute 30, pour 475 milliards de dollars, je dois déposer au gouvernement du Québec, à la commission des droits, un plan d'accès à l'égalité. Comment je vais faire pour, sur mes 1 000 employés, avoir au moins... l'idée, c'est d'avoir 50 %, mais disons d'avoir 10 % de femmes? Je dois déposer ou je suis incitée à le faire. Sauf que, depuis 1987, il y a seulement 11 % des entreprises qui se sont soumises à l'obligation contractuelle.
On demande, dans notre avis... Déjà, ce serait... Les entreprises, prenons les entreprises qui font affaire avec le gouvernement, dire: Tu as 1 000 employés, tu as un contrat de route au Québec, il faut que tu me déposes un plan d'accès à l'égalité. C'est dans nos lois. On n'a pas à inventer des lois, c'est déjà là. On a rencontré déjà le Conseil du trésor pour leur demander comment ils peuvent faire pour renforcer. On nous dit oui, mais, après ça, c'est les ministères, chacun des ministères qui doivent le faire. On s'est dit que, peut-être avec le secrétariat, à la fin, on pourra regarder comment. Et ça, ça ne demande pas d'argent, ça ne demande pas de modification législative, et ça permettrait à la ministre du Travail et à la ministre de la Solidarité sociale, avec Mme la ministre de la Condition féminine, de faire un... de dire: Écoutez, on a tout ce qu'il nous faut pour avoir ne serait-ce que 1 % de plus de filles dans les entreprises qui font affaire avec le gouvernement. Pas 2 %, pas 3 %, 1 %. Juste 1 %. On aurait déjà un volume de femmes qui gagneraient beaucoup plus, Ça, c'est un élément.
L'autre élément, il faut travailler avec les entreprises, que ce soit avec les chambres de commerce, avec... et leur dire... Et on a suggéré une norme ISO-Égalité dans les entreprises qui sont capables d'avoir des plans d'accès à l'égalité. Si on prend, par exemple, la Société de transport de Montréal, une norme égalité, dire: Bien, vous êtes ISO-Égalité. Vous savez qu'en ce moment, aux États-Unis, le gouvernement du...
Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure.
Mme Pelchat (Christiane): ...fédéral américain donne des contrats, réserve ses contrats de 5 %... 5 % de ses contrats pour les entreprises qui ont plus que 30 % de femmes et pour les entreprises qui ont 50 % de femmes sur leur C.A. Alors, ce ISO-Égalité pourrait être une façon de faire.
Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, je désire, le temps étant écoulé, remercier les représentantes du Conseil du statut de la femme: Mme Pelchat, Mme Roy, Mme Farand, Mme Julien. Merci de votre présentation, merci de votre participation très importante.
Je vais suspendre quelques minutes afin de permettre au groupe suivant de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 36)
(Reprise à 10 h 38)
Le Président (M. Bernier): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Alors, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à la Fédération des femmes du Québec. Mme Vézina, Mme Conradi, Mme Leduc, bienvenue à cette commission parlementaire.
Donc, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation et, par la suite, les échanges avec les parlementaires seront de 15 minutes pour chacun des groupes. Donc, sans plus tarder, la parole est à vous.
Fédération des femmes
du Québec (FFQ)
Mme Conradi (Alexa): Bonjour.
Le Président (M. Bernier): Donc, Mme Conradi. Bonjour.
**(10 h 40)**Mme Conradi (Alexa): Bonjour. Merci d'avoir organisé cette commission. Donc, je suis avec mes deux collègues. Moi, je vais faire la présentation, mais, si elles ont des ajouts à faire, elle vont le signifier.
Alors, aussi, je tiens à souligner que la Fédération des femmes du Québec a travaillé avec le Groupe des 13, qui est une sorte de regroupement non officiel des groupes nationaux, des groupes de femmes du Québec, et nous avons plusieurs points ensemble que nous portons chacune de la même manière à travers l'ensemble de nos mémoires. Donc, je vais tenter de souligner notamment ces préoccupations-là. Donc, on est plusieurs organisations à aller dans le même sens.
Le plan d'action 2007-2010 du gouvernement inclut plusieurs mesures très importantes. Le fait que, par exemple, les conseils d'administration des sociétés d'État doivent maintenant arriver à atteindre la parité, le fait, en fait qui n'est pas inclus dans le plan d'action, mais que le gouvernement a décidé d'avoir... le premier ministre a décidé de nommer un Conseil des ministres paritaire, la politique familiale du Québec sur, plus particulièrement, la question des centres de la petite enfance et aussi le Régime québécois d'assurance parentale, c'est des avancées bien importantes pour les femmes du Québec; également la campagne de sensibilisation sur la violence faite aux femmes. On pourrait avoir plus et encore, mais c'est une contribution importante que le gouvernement a faite pour l'égalité des femmes.
Aussi, la question de la Stratégie d'intervention à l'égard de la main-d'oeuvre féminine, il y a des éléments de cette stratégie-là qui sont appuyés, soutenus par les groupes de femmes du Québec. Donc, il y a plusieurs lieux où le gouvernement a fait du travail très important et apprécié pour le travail d'atteindre l'égalité pour les femmes au Québec.
Toutefois, et vous pouvez l'imaginer, on a plusieurs moments où on sent qu'on n'est pas tout à fait en phase avec le gouvernement quant à l'ampleur des défis que nous avons devant nous puis le niveau d'écoute qu'on peut espérer. Je cite en exemple l'accueil relativement froid des revendications de la Marche mondiale des femmes de la part du gouvernement qui a répondu favorablement à l'idée d'implanter des sessions d'éducation sexuelle à l'école et aussi faire une étude sur les publicités sexistes mais qui, sur le reste, n'a pas nécessairement tenu compte des priorités identifiées par Le Mouvement des femmes, Mouvement des femmes regroupé au sein de la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes, donc, qui représente une cinquantaine d'organisations implantées et enracinées dans toutes les régions du Québec et dans quasiment tous les secteurs du mouvement féministe.
Et ça témoigne peut-être d'un défi qui devrait être nommé et qu'on a voulu nommer dans le mémoire qu'on a déposé, c'est-à-dire que c'est très important d'avoir des mesures précises qui vont venir soutenir l'accès des femmes à l'égalité, et le plan d'action actuel en comprend plusieurs. Mais, par ailleurs, la politique globale du gouvernement doit avoir une approche égalitaire dans son ensemble, et c'est à cet égard-là qu'on a l'impression parfois que l'action gouvernementale et l'action que souhaite le mouvement des femmes ne sont pas au même diapason.
Ce que je veux dire par là, c'est que, d'une part, de ne pas intervenir sur la précarité accrue des conditions de travail et de l'emploi chez les femmes est une façon de ne pas soutenir l'accès à l'égalité. Et on pense qu'il faut s'attaquer aux normes du travail pour pouvoir s'attaquer à la question de l'égalité. Sur la privatisation actuelle du système de santé, sur l'introduction de la tarification, c'est des mesures qui viennent rendre la vie des femmes beaucoup plus difficile. Donc, c'est comme si on a une vision de l'égalité parfois où on veut agir à un égard, mais, lorsqu'il s'agit de la politique globale du gouvernement, on oublie d'y penser.
Je vais m'attarder sur plusieurs exemples. Alors, bon, la question de l'abolition de la Commission d'équité salariale et son transfert à la Commission des normes du travail. Le moment pour faire ça, c'est un moment extrêmement mal choisi et qui nous donne l'impression que le gouvernement, d'une part, cherche à renforcer la loi, en 2009, puis, en 2010, vient fragiliser la capacité, là, du travail de la commission. Il y a eu plusieurs départs au sein de la commission, une expertise qui a été acquise, et là, dans la même année où les entreprises sont appelées à se conformer à la loi... donc c'est comme une contradiction qui nous paraît comme une recherche d'économie de bouts de chandelles.
Sur la question du travail précaire, justement, je veux souligner à quel point les femmes sont les championnes du travail précaire, à temps partiel, atypique, et les normes du travail peuvent être changées. Les groupes de femmes demandent, depuis plus de 10 ans, à ce que les normes du travail soient changées pour encadrer les pratiques et limiter l'expansion du travail précaire -- les agences de placement et autres -- et ce serait l'heure d'intervenir là-dessus, et, en ne le faisant pas, on permet des reculs.
Le taux de chômage des femmes immigrantes et racisées a augmenté légèrement, alors que le taux de chômage des femmes en général a légèrement baissé. Et donc l'écart se grandit entre les femmes québécoises de toutes origines et les femmes immigrantes. Et on sait que les femmes maghrébines sont particulièrement touchées, les femmes noires également. Donc, à ce niveau-là, on ne voit pas encore le travail qui amène un progrès pour les femmes à ce niveau-là.
Au niveau de la maternité, on a souligné déjà les difficultés d'accès pour les femmes qui sont enceintes au système de santé ou à des sages-femmes. Ça, c'est un problème réel, et qui devait être abordé de façon beaucoup plus à l'avance par le gouvernement, et qui fait en sorte que... Moi, j'ai connu des femmes qui vivaient à Montréal et qui ont dû aller à Québec pour trouver un médecin, et donc, pour leurs traitements, faisaient aller-retour Montréal-Québec. Il me semble qu'on devrait être en mesure d'offrir aux femmes, de toutes les régions du Québec, qui veulent avoir une maison des naissances et accès à une sage-femme... En plus, ça aiderait sur les pressions financières sur le système de santé.
Le gouvernement s'est engagé à mettre sur pied 15 000 nouvelles places en garderie. Cet engagement ne s'est toujours pas réalisé. C'est un engagement, au moment des élections, alors qu'il y a 30 000 places qui manquent actuellement dans les services de garde.
Au niveau de la retraite. Alors, on sait qu'on est un peu en attente, en ce moment, sur la réforme de Régime des rentes du Québec. Il y a eu une première série de consultations, des mesures introduites ou proposées qui inquiétaient énormément le mouvement féministe quant à la condition des femmes retraitées, mais on est en attente sur la suite. Aujourd'hui, on pense plutôt qu'il faut doubler le Régime des rentes du Québec et les montants prévus pour les femmes.
Ensuite, toute la question des services publics. On a nommé les défis. On est tout à fait d'accord avec l'avis du Conseil du statut de la femme qui dit qu'il y a... de ne pas étudier les effets des mesures peut avoir un effet discriminatoire indirect. On ne dit pas que c'est volontaire de la part du gouvernement de créer une discrimination chez les femmes, mais une contribution santé est un problème dans l'équité entre les femmes de différents revenus et entre les hommes et les femmes. Et, plus encore, le fait de privatiser, de plus en plus, différents aspects du système de santé fait une privatisation à deux échelles. C'est-à-dire que les emplois, qui étaient dans le système de santé public, complet, c'est souvent des emplois syndiqués, protégés, alors que, quand on fait les transferts dans le milieu de la santé plus privé, bien, c'est des emplois qui sont un peu plus précaires, les salaires peuvent être moins élevés. Mais aussi, on transfère à la sphère familiale un certain nombre de responsabilités, puis on voit la pression sur les proches aidantes qui est très importante. Cette pression sur les proches aidantes fait en sorte que les femmes vont se retirer du travail à temps plein, elles vont perdre un salaire, ce qui a un impact au moment de leur retraite. Et ce sont des conditions donc qu'on contribue à créer lorsqu'on adopte certaines politiques.
On parle moins de la question de l'éducation. On sait que les filles ont très bien compris que, si elles veulent atteindre l'égalité dans la société, elles vont devoir étudier. On sait que c'est... Les filles, pour la plupart, ont intégré cette idée-là et sont sur le banc d'école. Le problème, c'est qu'on commence à avoir un taux d'endettement de plus en plus important. Et là ce que ça fait, c'est que, puisqu'elles ne gagnent pas les mêmes salaires que les garçons au sortir de l'université ou du collégial, la proportion qu'elles paient en termes de... pour rembourser les prêts est plus élevée que les garçons. Et donc c'est aussi une façon de créer une sorte de discrimination systémique, sans le vouloir, en augmentant les frais de scolarité.
Ensuite, comme je disais, c'est que, lorsque l'État décide d'être... de se rétrécir dans son action et de faire appel aux individus pour assumer les responsabilités, tout ce qui est dans le domaine des soins et de l'éducation, bien ça... c'est plus présent sur les épaules des filles et des femmes. Et là, encore une fois, lorsqu'on augmente la pression sur le temps et l'énergie disponible chez les femmes, d'une part, ça peut augmenter les cas d'épuisement, mais aussi un sentiment de détresse, d'une part, mais, par ailleurs, elles sont moins disponibles pour s'engager dans la sphère politique, et on voit qu'au Québec on stagne à beaucoup de niveaux en ce qui concerne la représentation des femmes en politique, et là on perd à deux niveaux, c'est-à-dire qu'il me semble que c'est des modèles, les femmes, pour toutes les femmes du Québec, mais aussi il y a un savoir-faire qu'on perd à ce niveau-là.
**(10 h 50)** Donc, on a plusieurs propositions, on en a beaucoup, on ne peut pas résumer l'ensemble. Mais, au plan de l'économie, on pense que c'est important qu'on vise les résultats et pas juste les possibilités pour les femmes. Donc, on ne peut pas juste créer des conditions pour que les femmes puissent jouir de droits, mais que, dans les résultats, on aille un petit peu plus loin. On aimerait voir que le gouvernement, dans toute sa politique économique et des finances publiques, pense à comment ces politiques-là vont contribuer ou nuire à l'accès et l'atteinte de l'égalité et ajuster les politiques en conséquence.
Évidemment, on vous souhaite... Ce n'est pas trop tard, la Commission sur l'équité salariale est encore en fonction pour le moment: on souhaite absolument que le gouvernement revienne sur sa décision, parce qu'on n'a pas encore vu un argument pour justifier le transfert à la Commission des normes du travail, ni au plan des économies ni au plan de la connaissance du dossier.
Ensuite, on voudrait voir une réforme des normes du travail pour limiter l'expansion du travail précaire, les agences de placement. Les programmes d'accès à l'égalité doivent être appliqués. Et, même, on appuie aussi l'idée du Conseil du statut de la femme pour que ce soit vraiment au niveau des programmes d'obligation contractuelle.
Vous avez peut-être vu, dans notre mémoire, on parle peu des femmes autochtones. On a voulu parler avec Femmes autochtones du Québec avant de déposer, puis, le moment où on s'en est parlé, c'était après le moment du dépôt, mais elles insistent sur l'importance des programmes d'accès à l'égalité pour les femmes autochtones. Et donc, c'est un des éléments qu'elles soulèvent.
Alors, bon, la... Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier): Il vous reste environ 2 min 30 s, madame.
Mme Conradi (Alexa): D'accord, merci. Donc, on aimerait voir le gouvernement respecter l'engagement d'ouvrir les 15 000 places en centres de la petite enfance, d'ouvrir les maisons de naissance. Et ce qu'on sait, les maisons de naissance, là, c'est des dossiers qui sont montés déjà et qu'il y a... Il semble y avoir un conflit entre les agences de santé et le ministère. Ça prend un financement 50-50 pour cent. Les agences de la santé sont dans une période où elles doivent prévoir des coupes et donc ne peuvent pas aller de l'avant. On pense que le gouvernement, au plan du ministère, doit fournir l'argent pour que les maisons de naissance puissent s'ouvrir.
On a besoin, je pense, d'une réflexion que le CSF pourrait faire, un avis sur: La maternité, aujourd'hui, se vit comment par les femmes? Parce qu'il semble y avoir une pression de plus en plus grande de voir les femmes comme étant des porteuses d'enfants et des incubateurs au plan des valeurs sociales en termes de santé, de biologie, de nourriture, et tout ça, qui fait une pression accrue sur les femmes de répondre aux exigences de la société pour le droit du foetus plutôt que de voir aussi les femmes comme ayant des droits pendant leur période de grossesse et pendant la maternité. Donc, c'est quelque chose qui nous inquiète à ce niveau-là.
Je vais sauter un certain nombre d'éléments pour aller tout de suite au Conseil du statut de la femme. On est inquiètes, c'est des rumeurs -- les rumeurs, on ne sait pas si elles sont véritables, donc, peut-être, ce serait l'occasion pour la ministre de clarifier ses intentions -- mais on est inquiètes sur le maintien du Conseil du statut de la femme et de son mandat. Puis on souhaite absolument que le conseil puisse maintenir son autonomie dans l'émission des avis. Les avis, comme a souligné Mme Beaudoin, ça ne fait pas toujours l'affaire du gouvernement de les recevoir, mais on a vu, au Canada, par exemple, avec la quasi-disparition des conseils, que la situation des femmes au Canada ne cesse de dégrader, et on pense que c'est un des enjeux.
Le Président (M. Bernier): En conclusion.
Mme Conradi (Alexa): Et, en conclusion, il y a aussi une condition de conservatisme social, politique qui a lieu au Canada, en ce moment. Et on pense que le gouvernement du Québec peut aussi jouer un rôle pour éviter les reculs qui sont proposés à ce niveau-là. Donc, je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Conradi. Nous allons donc débuter nos échanges avec les groupes parlementaires. Donc, dans un premier temps, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci beaucoup. Alors, vous avez mentionné, c'est sûr, c'est... vous avez quand même touché à plusieurs champs d'activité. J'aimerais qu'on parle des femmes, des femmes immigrantes qui, bon, on sait, vivent une certaine réalité, arrivent ici... Souvent, c'est le mari, finalement, qui vient ici pour le travail, et elles n'ont pas nécessairement tout de suite accès au marché du travail. Il y a un travail, je pense, à faire là.
Est-ce que vous avez des recommandations à nous faire, pointues, précises? Comment entrer plus en contact avec les femmes immigrantes? Comment les intégrer davantage sur le marché du travail, leur faire comprendre que leur autonomie financière, dans leur nouveau cadre, leur nouveau pays, leur nouvelle société d'accueil, va leur permettre aussi d'évoluer? Comment voyez-vous... Quelles seraient les mesures, là, très concrètes que vous pourriez nous proposer?
Le Président (M. Bernier): Mme Conradi.
Mme Conradi (Alexa): Les femmes que nous avons rencontrées, pour la plupart, sont des femmes qui sont scolarisées, qui sont arrivées déjà, ici, avec un bagage d'expériences professionnelles dans leur propre pays et s'attendent à pouvoir l'exercer, en arrivant ici, par le biais des... avec les critères de sélection du Québec, à ce niveau-là. Et donc, en fait, on n'a pas à les convaincre d'entrer sur le marché du travail; on a à donner les accès aux emplois, et donc faire une lutte contre les discriminations qui sont existantes puis de mieux appliquer les programmes d'accès à l'égalité, d'une part.
On voit aussi que, dans les études, les femmes sans enfant ont plus de facilité d'accès au marché du travail que les femmes sans enfant, et, pour les femmes immigrantes, les problèmes d'accès aux centres de la petite enfance sont réels. C'est-à-dire que, n'ayant pas le même système de réseau en arrivant, ayant le défi des listes d'attente, bien, ça crée un obstacle supplémentaire pour elles. Donc, là, ouvrir les espaces de garderie, ça pourrait jouer un rôle pour les libérer.
L'autre chose, c'est que, plus que souvent, le demandeur principal, c'est le conjoint. Toutes les informations qu'on souhaite donner sur le travail, sur la situation au Québec, sur l'égalité et tout, c'est des affaires qui vont être reçues par monsieur et pas nécessairement par madame. Donc, ça, c'est un des éléments où il y a du travail à faire.
Alors, sur la question des diplômes, la reconnaissance des diplômes et des acquis, on sait qu'il y a un défi dans à la fois les corporations professionnelles qui ont leur autonomie pour reconnaître un certain nombre d'affaires, mais c'est des lois du Québec qui balisent les corporations professionnelles. Donc, il y a lieu aussi, je pense, à un moment donné, de demander des comptes aux corporations de façon beaucoup plus engagée puis de... S'ils ne se conforment pas... On a vu, avec les avis de la Commission des droits de la personne, par exemple, que, sur les médecins, il y a des discriminations. Je pense que c'est... À un moment donné, il y a des comptes à rendre, ces corporations professionnelles là. Et la seule entité dans la société qui a les pouvoirs vraiment de les encadrer, c'est le gouvernement et l'Assemblée nationale. Donc, je pense, à cet égard-là, ça serait important.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci. Est-ce que vous êtes en mesure, d'après le travail que vous faites sur le terrain, les observations que vous faites, vos contacts, là, dans les milieux, d'évaluer... Et là, vraiment, je rentre dans un dossier, là, qui me préoccupe, parce que, je me dis, on voit des exemples, puis c'est quoi... Est-ce que le phénomène est grand, la question des crimes d'honneur -- je n'aime pas le mot «honneur», là? Mais j'aimerais savoir si vous vous êtes penchées sur cette question-là, si c'est quelque chose qui vous interpelle? Est-ce que vous en entendez parler sur le terrain, dans le milieu? Je sais que vous êtes très connectées, là. Est-ce que c'est quelque chose qui vous préoccupe ou c'est quelque chose sur lequel vous ne vous êtes pas penchées?
Le Président (M. Bernier): Mme Conradi.
Mme Conradi (Alexa): Merci. Les moments où on en a parlé, chez nous, ce qu'on a le plus vu, c'est que... On ne fait pas le constat d'une augmentation de crimes d'honneur, ce n'est pas par là que ça vient. On sait que c'est une réalité qui existe, mais, surtout, ce qui est nommé par les personnes avec qui nous travaillons, c'est que les lois du Québec existantes nous permettent déjà d'intervenir dans les situations plutôt que de créer des lois particulières ou spéciales. Donc, le message que nous avons des femmes sur le terrain, qui sont probablement les plus près des enjeux dont il s'agit, bien, elles disent qu'on a les dispositions actuelles dans la loi pour agir, et on n'a pas besoin de créer une sorte de chapitre «crime d'honneur» pour pouvoir intervenir et prévenir.
Une des préoccupations que nous avons, c'est que les femmes, quelles que soient leurs origines ou leurs religions, qui font face à une communauté religieuse qui est assez conservatrice dans ses pratiques, quels outils ont-elles pour pouvoir créer un espace d'autonomie pour elles face aux pressions qu'elles peuvent vivre soit de la part... à l'intérieur de la maison? Mais ce n'est pas toujours juste la maison, c'est une communauté, c'est une pensée religieuse qui est là pour elle. On pense que, hein, les femmes du Québec, qui ont été, à beaucoup d'égards, sous le joug de l'Église catholique pendant de très nombreuses années, ont eu à faire une démarche aussi pour se libérer des pressions exercées par l'Église. Les groupes de femmes qui existent n'ont pas besoin de groupes particuliers qui existent pour ça. On existe déjà. C'est-à-dire les centres de femmes, les maisons d'hébergement, les centres pour les femmes qui ont vécu des agressions sexuelles, les femmes immigrantes qui se rassemblent, tous ces groupes-là peuvent faire un travail d'accueil de femmes qui sont à la quête de liberté. Et certaines... On n'est pas, par contre, en mesure de leur dire c'est quoi, les moyens légaux et étatiques qui sont mis en place pour qu'elles puissent aller... avoir recours à de l'aide particulière au niveau de l'État lorsqu'elles subissent des pressions indues.
**(11 heures)**Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Dans votre mémoire, vous parlez de la prostitution et de la marchandisation du corps des femmes, et, bon, vous déplorez le phénomène évidemment de la sexualisation de l'espace public, la marchandisation du corps des femmes, le processus par lequel la sexualité des femmes et des filles devient un produit que l'on peut vendre et acheter.
Pourtant, lorsque vous abordez le sujet de la prostitution, vous ne vous rangez pas vraiment, on dirait, du côté du courant féministe qui perçoit la prostitution comme une exploitation. On dirait que vous n'allez pas jusque-là. Comment... Pouvez-vous nous expliquer un peu votre...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Conradi.
Mme Conradi (Alexa): La Fédération des femmes du Québec, étant une fédération, est composée de toutes sortes de tendances. Et, sur cette question-là, il y a eu des grands, grands débats dans le mouvement des femmes, et toutes ces tendances-là cohabitent au sein de la FFQ. Donc, la FFQ est très représentative du mouvement féministe à cet égard-là dans la mesure où on a certaines ententes, c'est-à-dire qu'il faut lutter contre toutes les violences que vivent les femmes qui sont dans l'industrie du sexe, ces violences-là ne sont jamais justifiables, par exemple, par les clients, là. Il n'y a aucune violence qui est acceptable à l'égard de ces femmes-là. Même s'il y en a qui disent que ça fait partie du métier pour... ou de la chose, on n'est pas de cet avis-là.
Toutefois, on n'a pas pris position, à la FFQ, sur la question de: Est-ce qu'il faut travailler plus pour l'abolition de la prostitution ou pour la reconnaissance du travail? Ce n'est pas notre domaine. Nos groupes membres ont des avis là-dessus, c'est des avis partagés. Alors, nous sommes plus dans la perspective de lutter contre les stéréotypes sexuels, on est dans la sexualisation de l'espace public, et il faut lutter contre les publicités sexistes. Sur la question de la violence puis l'accès à un système judiciaire, il faut s'assurer que les femmes qui sont dans l'industrie du sexe puissent être protégées, que celles qui veulent en sortir soient soutenues et qu'on lutte contre le trafic des femmes. C'est, pour le moment, là où on pense qu'il faut mettre l'énergie.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Jeanne-Mance--Viger.
Mme Rotiroti: M. le Président, bonjour. Moi, j'ai lu votre mémoire, et qu'est-ce qui m'a attiré un petit peu, c'est votre... quand vous parlez des femmes en politique, les femmes élues. Et vous recommandez... vos recommandations pour la Loi électorale sont assez claires dans votre mémoire. Vous dites, vous recommandez: «Que le ministère des Affaires municipales, [...] avec la Table des partenaires de femmes et politique municipale, mettent de l'avant une stratégie contraignante afin d'atteindre la parité des conseils municipaux d'ici 10 ans.» Moi, je t'avoue que la stratégie contraignante, ça me... je me questionne par rapport à qu'est-ce que vous voulez dire avec ça. Moi, je pense que, quand une femme décide de se lancer en politique, c'est parce que... bien, je vais parler pour moi-même, en tant que jeune femme, c'est parce qu'on a des conditions... on veut aller, puis on veut changer les chose, et il me semble que mettre... Je pense que la plupart des femmes... mettre un quota en politique ou avoir des contraignants, en soi, ça va à l'encontre de nos valeurs, ce n'est pas exactement la raison pourquoi qu'on fait de la politique. Et je me demandais: Comment vous voyez mettre en place cette politique, cette stratégie? Et vous ne pensez pas que ça peut dévaloriser une candidature féminine?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Conradi.
Mme Conradi (Alexa): Alors, c'est une des questions classiques du mouvement féministe, c'est-à-dire: est-ce qu'il faut laisser les femmes elles-mêmes à faire une place, se tailler une place ou est-ce qu'à un moment donné il faut agir pour obliger la place d'ouvrir pour que les femmes puissent y rentrer? Le gouvernement, en quelque sorte, a donné une indication en ayant obligé les sociétés d'État d'avoir une parité sur les conseils d'administration. C'est une sorte de message qui dit: Le laisser-aller là-dedans n'est pas assez. On ne peut pas uniquement soutenir les femmes individuellement à s'outiller pour faire face à un métier non traditionnel, il va falloir faire des choses pour que le métier s'ouvre et crée de la place pour les femmes.
Donc, je laisserai ma collègue, plus tard, qui vient du réseau des tables, qui va aller plus loin certainement sur les méthodes précises d'une telle politique. Mais nous sommes plutôt de l'avis qu'il y a des façons d'encourager les candidatures féminines pour les différents partis politiques -- et là on parlerait à la fois au niveau du Québec et municipal -- et il y a aussi des messages à donner.
Donc, mettons, si on introduisait une réforme du mode de scrutin au Québec -- chose que le gouvernement a promis de faire mais qui tarde toujours -- on pourrait s'assurer que, s'il y a un élément de proportionnalité, les listes qui viennent avec ce système proportionnel là, que des femmes... les partis politiques soient tenus à présenter un nombre égal de candidates. Il y a aussi des façons de s'assurer que des partis politiques soient obligés de rendre des comptes sur les mesures qu'ils vont mettre en place pour soutenir les candidates.
Il y a un ensemble de façons, et puis il n'y a pas une façon parfaite. Dans certains endroits, comme en France, on a visé la parité au sens absolu. Je pense, le groupe Femmes et politique ici, au Québec, dans la ville de Québec, parle des mesures 40-60 pour comme s'assurer qu'il y a une marge. Nous, on n'est pas fixés sur les moyens de façon absolue, mais il faut aller plus loin parce qu'on stagne vraiment. Au niveau de l'Assemblée nationale, c'est 30 % à peu près; au niveau des municipalités, malgré tous les efforts mis puis les programmes d'accès à l'égalité, qui sont très importants, le programme À égalité pour décider, c'est des programmes qui soutiennent les femmes...
Maintenant, qu'est-ce qu'on va faire avec les conseils municipaux et lorsqu'il y a des partis politiques pour s'assurer qu'il y a une candidature égale et qu'on ait envie de présenter des femmes dans tous les comtés qui peuvent être gagnants aussi? Donc, il y a une démarche à faire peut-être. On a besoin d'y revenir de façon plus précise pour voir les moyens, parce qu'il y en a plusieurs de développés dans différents endroits dans le monde.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Jeanne-Mance--Viger, ça va? Vous avez encore deux minutes. Oui, M. le député de Lévis.
M. Lehouillier: Très, très rapidement, j'aurais juste une petite question sur l'approche sociétale. Un petit peu comme le Conseil du statut de la femme, vous dites, au fond, que c'est une approche qui prévoit la participation des hommes dans l'atteinte de l'égalité des sexes. Mais vous dites: Bon, attention, prudence, etc., alors qu'en réalité on sait que les défis à relever pour l'avenir, c'est les rôles sociaux selon le sexe, les choix professionnels, les instances de pouvoir... Mais c'est surtout au niveau des rôles sociaux que, moi, je veux intervenir parce que c'est un gros bout de chemin qu'il reste à parcourir actuellement dans notre société. Alors, finalement, comment vous voyez la participation des hommes dans tout ça? C'est ça, ma question.
Le Président (M. Bernier): Mme Conradi, il vous reste une minute.
Mme Conradi (Alexa): D'accord. Alors, il y a une distinction à faire. Une politique en matière d'égalité, avec les maigres ressources disponibles, ne doit pas s'attarder à introduire, par exemple, les hommes dans les métiers traditionnellement féminins. Mais le gouvernement, dans son ensemble, doit faire la promotion des comportements égalitaires, doit travailler à lutter contre les stéréotypes sexuels et sexistes, alors que, dès le jeune âge, on voit des jouets très sexués, des modèles sociaux sexués. On voit ça notamment dans les publicités, et c'est à ce niveau-là qu'on pense qu'il y a un travail à faire de façon urgente pour qu'on déconstruise les modèles très traditionnels, très cantonnés dans lesquels malheureusement on baigne aujourd'hui.
On penserait qu'on serait rendus ailleurs, mais, si on relevait juste qu'est-ce qu'on voit dans les publicités, on aurait l'impression qu'on vit dans une autre époque. Et donc il faut comme travailler sur ces aspects-là, mais pas identifier de la discrimination à l'endroit des hommes là où il n'y en a pas non plus.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous.
**(11 h 10)**Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, merci, M. le Président. Bonjour, toutes les trois, et bienvenue, donc, à notre commission. Un commentaire d'abord sur la Commission sur l'équité salariale -- j'étais contente, en effet, de vous entendre -- et sur la commission du statut de la femme, eh bien, j'espère en effet que ces rumeurs ne se concrétiseront pas. Vous l'indiquez, là, dans votre document: «Maintenir le Conseil du statut de la femme et son mandat.» Alors, souhaitons que, l'année prochaine, il n'y aura pas une autre charrette, là, d'annonces d'abolition d'organismes. Je pense que c'est important, ces deux organismes-là, en particulier concernant les femmes.
Je voudrais tout simplement quand même vous poser une question très large, mais qui m'est venue à l'esprit, là, en lisant puis en entendant ce que vous avez dit, ce n'est pas rien: Est-ce que je me trompe ou vous remettez en cause le système économique, c'est-à-dire le capitalisme -- mais est-ce que j'ai bien lu ou est-ce que ce n'est pas le cas? -- le capitalisme, bon, tel qu'il se pratique ici ou le capitalisme en soi? Pour le remplacer par quoi? C'est extrêmement important parce que, bon, vous parlez, bien sûr, des services publics pour qu'on mette fin à la privatisation et puis à des choses comme ça, des choses très concrètes, mais, plus globalement, il me semble avoir lu en quelque part en effet que vous dites: le patriarcat, le racisme, le capitalisme... Puis ça, il me semble que c'est dans votre introduction peut-être...
Mme Conradi (Alexa): ...page 21.
Le Président (M. Bernier): Mme Conradi.
Mme Beaudoin (Rosemont): 21? J'aimerais ça que vous m'en parliez un peu parce que... Comment on peut... Moi, en tout cas, c'est bien sûr que je suis favorable à une mondialisation qui soit maîtrisée, hein? C'est bien évident, là, et je ne veux pas de la mondialisation néolibérale, bon, que l'on voudrait bien nous imposer. Moi, quand... Et je me pose une question fondamentale aussi. Quand on voit comment la crise financière qu'on a connue, donc, en 2008, qui s'est transformée en crise économique... Quels sont ceux qui l'ont provoquée, cette crise mondiale, et quels sont ceux qui ont payé pour? Bien, ce n'est pas les mêmes, hein? Effectivement, on peut dire que ceux qui l'ont provoquée aux États-Unis, en particulier dans les banques, avec ces produits dérivés qui n'avaient aucun sens, dans cette bulle qu'ils ont stimulée et puis qu'à un moment donné tout ça a éclaté... Qui a payé pour? Ce sont les contribuables américains, les contribuables européens. Ici, beaucoup moins, parce que le système bancaire canadien, entre autres...
Mais, bien sûr, la crise économique, elle, a frappé de plein fouet, en fait, la planète entière, puisqu'on vit dans un monde sans frontière. Alors, toutes ces banques qui sont allées spontanément voir leurs États nationaux, toutes ces multinationales qui se sont précipitées vers leurs États nationaux... parce qu'il fallait que quelqu'un paie pour renflouer ce système-là, bien, ça a été les contribuables. Puis ceux qui, aujourd'hui, sont victimes de cette crise économique, de cette montée du chômage -- que ce soit aux États-Unis, que ce soit en Europe et, d'une façon moindre, ici -- eh bien, ce sont les citoyens, c'est la population.
Alors, moi, de ce système-là, je n'en veux pas. Je vois bien qu'on est incapables de le réformer. Que ce soit le G8, le G20, ils ont eu quelques tentations, je pense, en 2009, pour dire: Oui, il faudrait faire quelque chose, mais là, c'est reparti comme avant, là. C'est reparti comme avant avec les mêmes bonus, les mêmes «stock options», les mêmes bulles qui se reforment. Alors, je ne sais pas quand est-ce que ça va rééclater, mais c'est sûr que je me pose ces mêmes questions là.
Mais je suis quand même pragmatique et réaliste et je me dis: Bon, bien, vous autres, là, vous pensez à quoi par rapport à ça? Parce que vous le dites, là, le capitalisme... Vous me dites que c'est page 21, mais j'ai vu ça à quelque part, oui.
Le Président (M. Bernier): Alors, Mme Conradi, allez-y.
Mme Conradi (Alexa): Alors, nous aussi, on est pragmatiques mais on pense que, parfois, le pragmatisme absolu ne nous amène pas à réfléchir plus loin, alors il faut être en mesure de regarder plus loin. Et vous avez évoqué bon nombre des éléments qui nous amènent à avoir beaucoup de questions. Alors, on n'est peut-être pas encore en mesure de dire par quoi exactement on remplace mais on est certainement très critiques de ces éléments-là, parce que, du capitalisme qui... mettons, au niveau du libre-échange, ça veut dire que ça place des entreprises transnationales quasiment par-dessus les États -- ça, c'est un problème fondamental -- et que les États devraient être en mesure plus de déterminer quelles sont les finalités de l'économie selon les besoins de la population et non en fonction des besoins et des intérêts des compagnies transnationales. Et on a l'impression que plusieurs États, dont l'État québécois et l'État canadien, ont abandonné la possibilité de travailler à changer cette situation et veulent de plus en plus un renforcement de cela, notamment en faisant l'entente de libre-échange avec l'Europe. Donc, c'est les finalités de l'économie que nous questionnons.
L'autre chose, c'est que l'économie telle qu'elle est construite, là, se base notamment sur un travail invisible des femmes. Elle se fait sur la base d'un travail souvent gratuit, sous-payé, et c'est ça que nous questionnons. Et on n'est pas certaines que, simplement en l'encadrant un petit peu mieux ici et là, on va réussir à changer les finalités d'un système. Mais il y a tellement de composantes différentes dans un système, puis les systèmes sont complexes, puis ils prennent des formes différentes dans un endroit ou dans un autre.
Donc, au Québec, c'est clair qu'on a encore à certains égards des politiques étatiques qui minimisons les effets les plus néfastes. Mais, avec le néolibéralisme dans lequel l'État québécois est -- en fait, il l'utilise depuis plusieurs, plusieurs années -- on voit qu'on est dans des politiques de dérèglement du marché du travail, on voit qu'on est dans les privatisations des services publics, et ce que ça a pour effet, c'est qu'on individualise de plus en plus le risque des aléas de la vie et on les assume de moins en moins collectivement avec les grandes ressources de l'État. Et souvent ce sont les femmes qui sont les plus pénalisées.
L'autre chose, c'est que le marché de la mondialisation au niveau du travail tend à augmenter la stratification entre les femmes et les hommes. Donc, les femmes se retrouvent de plus en plus cantonnées dans des sphères traditionnelles de travail avec la mondialisation économique. Donc, à ce niveau-là, on a lieu de questionner non seulement les politiques ici, à l'intérieur du Québec, mais comment les États contribuent ou laissent aller un marché mondial qui fait grandir les écarts.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Mais vous êtes consciente sans aucun doute que ces changements-là fondamentaux dans le monde ne viendront pas que du Québec -- en d'autres termes, c'est une politique internationale, une politique mondiale -- que le Québec va devoir chercher des appuis à travers le monde si on veut justement changer quoi que ce soit. Le Québec n'est pas une île, là, on vit, je veux dire, dans... On est insérés dans les Amériques. Je préfère dire «les Amériques» que «l'Amérique du Nord», d'ailleurs c'est déjà plus intéressant, c'est déjà plus stimulant à bien des égards quand on regarde l'Amérique latine puis comment l'Amérique latine évolue. Mais je comprends bien, là, ce que vous dites, mais je sais que c'est une oeuvre de longue haleine. Si on veut changer, il faut commencer par aller au Forum social mondial qui se tient bientôt à Dakar. Mais... Bon.
Mais vous dites aussi, pour changer un peu de sujet, mais qui rejoint quand même celui-là, quelque chose qui m'a intéressée pages 16, 17. Vous parlez de la montée des fondamentalismes religieux. Je suis contente de vous en entendre parler parce que je me suis vraiment posé la question si la FFQ en était consciente à certains moments. Vous le savez, qu'on a une divergence là-dessus. Mais vous dites quelque chose qui m'a un peu... à la page 17, là, et vous citez d'ailleurs un texte: «...le Canada ne se compare plus favorablement aux autres pays dans les évaluations d'égalité des sexes [...] de l'écart entre les hommes et les femmes. Par exemple, en 2004, le Canada se classait au septième rang selon l'indice d'inégalité entre les sexes établi par le Forum économique mondial [, celui-là]. En 2009, il se classait au 25e rang selon cet indice. La même année, il se classait au 73e rang selon l'indice de disparité entre les sexes de l'ONU.» Mais qu'est-ce qui se passe au Canada, là? Puis, c'est nous autres, ça nous inclut, ça? On n'est pas...
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Conradi (Alexa): C'est-à-dire que...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Conradi.
Mme Conradi (Alexa): Oui. Juste pour revenir sur le travail à longue haleine, en effet, c'est un travail à longue haleine, mais il faut le travailler. Alors ça, on ne semble pas le voir, on ne semble pas le travailler, donc ça, c'est... Un gouvernement progressiste pour l'égalité devrait s'y attarder.
Par ailleurs, pourquoi on recule au Canada? Alors là, le Québec fait mieux que le reste du Canada à ce niveau-là, mais il y a encore, au niveau global, des problèmes sérieux au Canada. Et là c'est sur toute la question des services de garde, sur le droit à l'équité salariale, sur l'abolition des... Condition féminine Canada, plusieurs bureaux, sur les changements du financement pour les groupes de femmes, sur l'absence de logement social, sur les droits sociaux et économiques. Il y a plusieurs niveaux où le gouvernement canadien, sous un régime conservateur, s'attaque aux infrastructures de base qui permettaient jusqu'alors au Canada d'être des leaders internationaux.
Et, en même temps, comme je disais, il y a quand même des indicateurs qui viennent du Québec qui viennent aussi nous inquiéter, et c'est notamment, en matière du travail, les programmes d'accès à l'égalité; c'est lorsqu'on regarde la question du chômage chez les femmes immigrantes, les femmes handicapées, les femmes, donc, de groupes minoritaires; lorsqu'on regarde la question des services publics, et la privatisation, et l'accès à ces services-là de plus en plus difficile, et le poids des femmes dans l'espace politique. Tous ces éléments-là font en sorte qu'en effet on recule.
**(11 h 20)**Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Juste une dernière petite remarque aussi ou question concernant les femmes et la politique. Moi, je suis de celles qui dit depuis longtemps -- je suis minoritaire dans mon propre parti là-dessus, ça m'arrive souvent -- ...mais de dire qu'il faut des mesures contraignantes pour les partis politiques. Moi, je crois ça profondément depuis si longtemps, en me disant... et puis il me semble que la réalité me donne raison. Mais on a plutôt tendance à réagir comme vous en disant: Bien, c'est un choix individuel et puis, bon.
Mais il y a des contraintes, il en faut. Et puis, moi, j'ai remarqué -- ce n'est pas toujours vrai, mais... -- que, quand on a cette parité... Si on regarde les pays les plus progressistes en matière justement d'égalité hommes-femmes puis en matière, disons, socioéconomique, globalement, ce sont souvent les pays nordiques, même si, là, on a vu l'extrême droite rentrer au Parlement de la Suède -- là, on est catastrophés -- les Pays-Bas aussi, il y a 10 %, 12 % maintenant d'extrême droite extrêmement dangereuse qui est présente. Mais, quand même, il n'en demeure pas moins, quand on regarde globalement les résultats finalement, les résultats justement, puis ce n'est pas seulement les discours, mais de la réalité de ces pays-là en ce qui concerne l'égalité hommes-femmes puis en ce qui concerne les politiques sociales, eh bien, ce sont des pays où les femmes sont très, très présentes et quasiment à 50-50. «Quasiment» parce que la Norvège, si je ne me trompe pas, là, l'a été si elle ne l'est plus, à 50-50 dans son Parlement avec un scrutin proportionnel.
Alors donc, je pense qu'il y a une relation, là. C'est sûr que j'ai vu qu'il y a une femme qui a été élue à Téhéran puis qui était favorable à la lapidation des femmes, je veux dire... Bon. Alors tout est possible, mais...
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Non, mais ce que je veux dire... Non, mais, quand on regarde les pays nordiques, il y a quand même une corrélation, une corrélation.
Moi, j'ai souvent remarqué puis, je le dis, là, aussi au Québec, dans mon propre parti, et tout, il y a des femmes qui sont plus à droite puis des femmes qui sont plus à gauche. Peut-être que... C'est sûr. Mais, malgré tout, je le dis, et je l'ai vécu, que les garderies, puis la députée d'Hochelaga-Maisonneuve le sait parce qu'elle travaillait à ce moment-là avec Louise Harel, donc c'est les femmes du Conseil des ministres du Parti québécois qui ont réussi à convaincre le Conseil des ministres dans son ensemble. Et toutes les mesures les plus, je dirais, progressistes, ça a souvent été ça, les femmes qui s'entendaient -- avant le Conseil des ministres d'ailleurs, hein, parce que, pendant, il est trop tard, donc avant -- et puis faisaient des stratégies puis elles y arrivaient.
Mais je crois qu'il faut un nombre, en effet. Là, vous êtes en effet en parité hommes-femmes au Conseil des ministres. Alors, j'espère que ça fait, à l'occasion, la différence. Vous l'écrirez dans vos mémoires. Moi aussi, j'attends le moment pour me raconter, mais c'est vrai. Alors, conclusion, je pense qu'il faut des contraintes.
Le Président (M. Bernier): Vous avez 30 secondes pour conclure, madame...
Mme Conradi (Alexa): Pour conclure... Pour la journée ou pour conclure...
Le Président (M. Bernier): Oui, conclure votre présentation, et conclure les questions, et...
Mme Conradi (Alexa): Alors, c'est bien, c'est un bon résumé. L'idée d'avoir davantage de contraintes dans les prochaines politiques semblerait, pour nous, beaucoup plus efficace pour la suite des choses pour les femmes en politique, sur la situation économique des femmes et sur la question des services publics. Donc, je vous remercie pour votre temps.
Le Président (M. Bernier): C'est moi qui vous remercie de votre présentation. Donc, la Fédération des femmes du Québec, merci. Mme Conradi, Mme Leduc, Mme Vézina, merci de votre participation.
Je suspends quelques instants pour permettre au groupe suivant de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 24)
(Reprise à 11 h 29)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais aux groupes qui ont terminé leur présentation, s'il y a des discussions qui doivent être faites, de les faire à l'extérieur. Nous allons donc reprendre nos travaux.
Alors, sans plus tarder, nous allons recevoir le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec, représenté par Mme Joanne Blais et Mme Blanche Paradis. Bienvenue, mesdames. Ça me fait grand plaisir de vous recevoir cet avant-midi. Vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, des échanges de chaque côté avec les groupes parlementaires. Donc, allez-y.
Réseau des tables régionales de
groupes de femmes du Québec
Mme Paradis (Blanche): Bonjour.
Le Président (M. Bernier): Bonjour.
**(11 h 30)**Mme Paradis (Blanche): Alors, je vais prendre quelques instants pour présenter notre regroupement, qui est un regroupement féministe de défense collective des droits. Et on représente 17 tables régionales de groupes de femmes du Québec, réparties dans les 17 régions administratives du Québec. En tout, on représente... les tables régionales regroupent 425 groupes membres puis 228 membres individuels. On travaille en collaboration avec l'ensemble des groupes et regroupements nationaux du mouvement des femmes et du mouvement communautaire. On est membre de la Fédération des femmes du Québec.
Aujourd'hui, on va vous présenter ce qu'on a évalué comme étant les principaux éléments positifs du bilan du premier plan d'action et les principaux facteurs qui, selon nous, nuisent encore à l'égalité... à l'atteinte de l'égalité pour les femmes. On va s'attacher à deux des orientations du bilan, celle qui porte sur la santé des femmes et celle qui porte sur la présence des femmes dans les lieux de pouvoir. On va intervenir aussi sur les instruments de la gouvernance et la régionalisation de l'action gouvernementale en matière d'égalité, hein? C'est un petit peu l'élément qui nous intéresse particulièrement.
Alors, les principaux éléments positifs du premier bilan... du premier plan d'action. D'abord, on voudrait souligner l'existence d'un plan d'action précis, accompagné d'un budget, qui, à notre avis, était minimal mais qui était là, et d'une... Alors, ça, ça nous semble être une formule gagnante: plan d'action avec un budget.
Éléments positifs. La représentation politique des femmes dans le monde municipal: elle a légèrement augmenté, mais elle a augmenté. C'est déjà... c'est bien. Le travail de la Table des partenaires femmes et politique municipale a été intéressant à cet effet.
Autre élément, la place des femmes dans les instances décisionnelles toujours: bien, ce qu'on soulignait, hein, les conseils d'administration des 24 sociétés et organismes du gouvernement qui ont atteint un taux de représentation féminine de 45 %, alors qu'ils sont partis en 2006 à 27 %, c'est excellent. 20 conférences régionales des élus qui ont conclu des ententes en matière d'égalité entre les femmes et les hommes, fort intéressant également: il y a 3 millions qui ont été investis par le MCCCF dans ces ententes, et ça a généré environ 9 millions d'investissements dans plusieurs projets. Donc, élément concluant du plan d'action.
On a soutenu le Réseau des tables régionales -- il y a les tables régionales, c'est aussi un élément important -- et ça a permis aux tables régionales justement d'intervenir au niveau de ces ententes en condition féminine dans les régions.
Le soutien aussi aux groupes en employabilité pour femmes, c'est un élément positif de ce plan d'action.
Le soutien à l'entrepreneuriat féminin, les ORSEF, hein, qui ont été consolidés, puis il y en a qui ont été créés. Cinq ont été créés.
Et finalement on voudrait souligner de façon particulière le travail du Secrétariat à la condition féminine. Le secrétariat a été très actif pour la mise en oeuvre du plan d'action gouvernemental, dont il a coordonné la réalisation. Il a joué son rôle auprès de différents ministères concernés puis il a favorisé aussi la régionalisation de la politique.
Il existe encore malheureusement plusieurs facteurs qui nuisent à l'atteinte de l'égalité pour les femmes. Tout le monde va le souligner, j'en suis convaincue, c'est l'écart important qui persiste encore entre le revenu total des femmes et celui des hommes.
Également, nous, on trouve qu'il y a une fragilisation de l'espace démocratique actuellement. La sous-représentation des femmes dans les lieux de pouvoir est encore criante, évidemment, puis on assiste à une perte de crédibilité aussi des élus et des mécanismes démocratiques. On donne très peu d'espace à des mécanismes de démocratie participative, puis la voix des femmes est peu entendue, de même que celle des personnes progressistes.
Et, évidemment, l'égalité est un chemin plus ardu pour certaines femmes qui font face à des formes d'oppression comme le racisme, la lesbophobie, le handicapisme, l'âgisme. Alors, ça nous semble important de souligner ça.
On a pu observer aussi un biais inquiétant qui nous est apparu. C'est qu'il y a une certaine tendance actuellement qui existe à nier la discrimination systémique qui existe envers les femmes, et on pourra y revenir un peu plus tard dans notre exposé, mais ça nous semble être un élément important à souligner.
Et, finalement, on voudrait aussi parler des interventions gouvernementales. Il y a plusieurs politiques gouvernementales qui nuisent au droit à l'égalité pour les femmes. On va noter particulièrement la privatisation, la tarification des services sociaux et de santé. Les femmes étant plus pauvres que les hommes, ces mesures les atteignent d'autant plus et nuisent au droit à l'égalité.
Le premier plan d'action, on a souligné son financement, que c'était important qu'il soit financé, mais il ne l'était pas suffisamment, à notre avis, et on pense que le financement aussi des groupes en défense collective des droits a été complètement ignoré par ce premier plan d'action, et il nous semble important que ça, ce soit corrigé dans un futur plan d'action. Alors, un financement largement bonifié du plan d'action, un soutien financier aux groupes de femmes, les groupes en défense collective des droits, seraient essentiels dans le prochain plan d'action. Et je passe la parole à ma collègue, qui va continuer.
Mme Blais (Joanne): Alors, bonjour.
Le Président (M. Bernier): Mme Paradis.
Mme Blais (Joanne): Oui. Joanne Blais, de la région de la Mauricie.
Le Président (M. Bernier): Mme Blais. Excusez.
Mme Blais (Joanne): Oui. Donc, en fait, je vais intervenir sur deux orientations plus spécifiquement: la question de la santé des femmes et la place des femmes dans les instances de décision.
Pour ce qui est de la santé des femmes, Blanche a relevé des éléments qui nous préoccupaient. Entre autres, je rajouterais à cet égard-là que le deuxième plan d'action, qui vient juste, tout juste d'être déposé, juste avant les fêtes, on a pu le regarder en diagonale, et, pour nous, il présente quelques lacunes. Par exemple, pour nous, il manque toujours une approche globale en matière de santé des femmes avec une véritable stratégie transversale.
Et il y a aussi toute la question qu'il n'y a pas de référence à l'accessibilité, l'universalité, la gratuité des services en santé et services sociaux. Ça ne semble pas être une des priorités de ce plan d'action là.
Pas de reconnaissance de la discrimination systémique envers les femmes dans ce plan d'action là -- donc, quand on dit qu'on a parfois tendance à nier qu'elle est là, ça, c'est un endroit où est-ce qu'on le ressent plus en matière de santé des femmes.
Et il y a aussi toute la question de la privatisation qu'on sent qui est grandissante, en ce moment, des services.
Et on sent aussi qu'il y a très peu d'actions en ce moment au niveau gouvernemental pour tenir compte des réalités régionales, et à cet égard-là ça pourrait aussi expliquer que les relations entre les tables régionales de groupes de femmes et les agences de santé en services sociaux soient presque absentes dans la plupart des régions, ce qui fait que le travail de partenariat avec les agences de santé et les groupes de femmes à ce moment-ci est très difficile.
Donc, à cet égard-là, c'est sûr que, nous, ce qu'on espère, c'est qu'on continue de favoriser un accès universel et gratuit aux services de santé, et sans discrimination. On souhaite aussi qu'on fasse des représentations nécessaires au MSSS pour démontrer que cette privatisation et cette tarification-là des services de santé nuisent à l'égalité des femmes pour plusieurs raisons que vous avez déjà entendues. On croit aussi que les programmes, les mesures doivent être adaptées aux réalités des régions, plus particulièrement en matière de santé des femmes et en tenant compte, en fait, des dimensions rurale et urbaine, parce qu'il semble y avoir des écarts importants pour la prestation de services à cet égard-là, qu'on soit en milieu rural ou urbain, et, pour travailler sur cette question-là, les tables régionales de femmes sont prêtes, veulent s'investir, veulent créer des partenariats avec les agences de santé, mais manquent de ressources pour le faire. Et à cet égard-là on souhaiterait qu'un nouvel accord de collaboration puisse être inscrit dans le nouveau plan d'action pour qu'il y ait une collaboration, un partenariat plus grand entre les régions et le ministère de la Santé.
Il y a aussi toute la question de l'approche globale, comme je nommais tantôt, qu'on trouve qu'il manque toujours en matière de santé des femmes, et on pense que, pour combler ce vide-là, s'il y avait un comité de travail interministériel et intersectoriel sur l'accessibilité, l'universalité, la gratuité des services pour réfléchir à des façons d'intervenir en matière de santé des femmes d'une manière plus globale avec ces préoccupations-là, ça serait important et que... en fait qu'on arrive plutôt à une politique gouvernementale en matière de santé des femmes plutôt que d'un simple plan d'action, qui, à notre sens, n'est pas assez fort pour vraiment faire avancer cette question-là, en région plus particulièrement.
Donc, pour la santé des femmes, c'était ce qu'on avait à vous présenter.
**(11 h 40)** Maintenant, pour la participation des femmes dans les instances de décision, toute la question de la parité de représentation des femmes dans les lieux de pouvoir nous est chère, on travaille dessus depuis plusieurs années, l'ensemble des régions avec les tables de groupes de femmes, et on remarque qu'une réforme de mode de scrutin pourrait favoriser, en fait, cette participation plus paritaire et égalitaire des femmes dans les lieux de pouvoir. On sait qu'à l'Assemblée nationale les femmes ne sont présentes encore qu'à 30 %, dans le monde municipal encore qu'à 27 %, et on pense que ça prendrait une réforme de mode de scrutin avec des mesures incitatives et coercitives pour accroître cette représentativité-là des femmes dans les lieux de pouvoir. Et on trouve que la loi qui a incité les conseils d'administration publics à devenir paritaires est une loi qui devrait être maintenue.
Évidemment, il y a toute la question au niveau municipal, qui est importante pour nous aussi, où est-ce qu'on pense que des mesures incitatives et coercitives sont aussi nécessaires pour atteindre une parité d'ici 10 ans dans le milieu municipal, parce que, selon un calcul fort scientifique, si la tendance se maintient, on n'aurait une parité dans le monde municipal qu'en 2057 si on ne fait aucune mesure à cet égard-là.
Il y a aussi le programme À égalité pour décider, qui est un programme qu'on trouve qui est important et nécessaire, et qu'on le maintienne, et que son financement soit maintenu, voire même accru -- c'est une demande qu'on formule depuis plusieurs années -- que le financement des projets soit... qu'on y aille de moins en moins avec du financement par projet et de plus en plus par du financement récurrent aux organismes qui travaillent sur le terrain dans les régions et qu'on s'assure aussi que l'ensemble des régions du Québec puissent bénéficier de ce financement-là, qui, évidemment, peut augmenter la participation des femmes dans les instances de pouvoir. La Table des partenaires femmes et politique municipale est une instance qui a été créée qu'on considère qui a un impact important et intéressant dans ce travail-là. Les rencontres nationales, les deux rencontres nationales qui ont eu lieu dans les deux dernières années ont eu des impacts intéressants, et on croit aussi que ces rencontres-là doivent être maintenues et financées et on pense que ça pourrait être intéressant de considérer l'éventualité de créer un programme qui permettrait de financer les réseaux d'élues municipales qui ont été mis en place dans plusieurs régions du Québec et qui sont soutenus à bout de bras en ce moment par différents organismes, dont les tables régionales de groupes de femmes. Pour cette question-là aussi, toute la question de la participation du ministère des Affaires municipales et des Régions et de l'Occupation du territoire, le MAMROT a une contribution financière très modeste dans les régions en ce moment, et pourtant c'est un de ses objectifs prioritaires d'accroître la participation des femmes au niveau des postes électifs dans le monde municipal, et on pense que son soutien financier à cet égard-là pourrait aussi être accru.
Quand on parle d'égalité entre les femmes et les hommes dans la gouvernance locale et régionale, dans les sociétés d'État, évidemment, on souhaite que la parité soit atteinte éventuellement et on pense que ce qui a été appliqué dans les organismes d'État pourrait aussi être appliqué au niveau des différentes instances de développement local et régional. Les politiques pour l'égalité et de parité dans les femmes, il y en a huit en ce moment qui ont été adoptées. On pense qu'on pourrait continuer à favoriser et encourager l'ensemble des CRE du Québec à adopter de telles politiques. Et, pour ce qui est des ententes spécifiques en matière d'égalité, c'est la même chose, il y en a 20 qui ont été signées, et on croit que c'est intéressant de poursuivre le soutien à ces ententes spécifiques là, peut-être même d'augmenter leur échéance sur une signature d'ententes plutôt quinquennales pour vraiment avoir des résultats et une... pas une récurrence, là, mais, en tout cas, une stabilité dans les actions et...
Le Président (M. Bernier): Je vous invite... 30 secondes pour conclure, Mme Blais.
Mme Blais (Joanne): Oui. Alors, c'est ça pour ce qui est de cette partie-là, puis Blanche, elle, va conclure avec la question de la régionalisation.
Mme Paradis (Blanche): Il me reste combien de temps?
Le Président (M. Bernier): ...vous avez environ une quinzaine de secondes. Si vous aimez mieux, vous pourrez...
Mme Paradis (Blanche): Oups!
Le Président (M. Bernier): ...répondre aux questions qui vous seront posées tout à l'heure.
Mme Paradis (Blanche): Ah bien! Oui. Alors, bien, on va...
Le Président (M. Bernier): Bon, bien, écoutez...
Mme Paradis (Blanche): ...on va répondre aux questions.
Le Président (M. Bernier): Je vous remercie. Merci de votre présentation, Mme Paradis, Mme Blais. Nous allons maintenant passer aux échanges avec les groupes parlementaires. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci. Une présentation fort intéressante et qui amène évidemment sur des pistes qui nous interpellent, bien sûr. Toute la question de la représentation des femmes dans les lieux de pouvoir, évidemment, il faut agir sur cette question-là. On a l'école des femmes qui fait un excellent travail. Je pense qu'il faut féliciter ce travail-là. Mais, évidemment, encourager les femmes à faire ce saut, qui n'est pas facile à faire... Il faut poursuivre. Puis ça interpelle aussi toute la question de la conciliation travail-famille, parce qu'être mairesse puis à la fois, en même temps, avoir une famille, c'est quelque chose à concilier. Donc, il y a un travail à faire là, puis je pense que le premier ministre pourrait le dire, et il le dit souvent, il pourrait le dire ici, il a dit souvent que ça fait la différence d'avoir un conseil des ministres paritaire. Nos sociétés d'État, on arrive, là, à la parité, on avait fixé un objectif, et évidemment on va maintenir cela. On peut parler de zones de parité. Il y a certaines théories qui disent: Bon, on peut parler zones de parité, 40-60, pour, à un moment donné, peut-être être capable d'augmenter, passer le 50 % du nombre de femmes. Alors, il y a des choses sur lesquelles travailler. Le Conseil du statut de la femme a fait une étude extraordinaire sur les conseils d'administration des sociétés privées où on dit qu'il y a seulement 16 % des conseils d'administration qui ont des femmes. Alors, là aussi, il faut vraiment qu'on travaille sur cette question-là et il faut aussi qu'on travaille à faire en sorte que...
Et là ce n'est pas une critique des médias, mais il y a quand même un certain cynisme qui est entretenu par rapport à la fonction de député ou de la fonction d'élu. Vendredi dernier, il y avait un reportage sur les salaires, les pensions. Je peux vous dire que ce n'est pas facile quand on voit ça puis qu'on a... Puis c'est un courage qu'il faut avoir pour se lancer en politique, les hommes, les femmes, tout le monde le sait, là, et ce n'est pas facile, et, quand on voit qu'on entretient ce genre de cynisme là, ça fait mal. Moi, personnellement, puis mon collègue de l'autre côté, Bernard Drainville, on a été tous les deux congédiés pour avoir décidé de faire le saut en politique. Alors, vous savez... Alors, il y a des choses sur lesquelles il faut travailler. Il faut voir les bons côtés de l'intervention sur la scène politique qui nous montreraient à quel point ça peut être enrichissant dans une vie personnelle de s'impliquer à ce niveau-là. Donc, là-dessus, vous pouvez être assurées qu'on va essayer d'avoir les mesures les plus efficaces possible pour vraiment atteindre un plus grand nombre de femmes dans les lieux de pouvoir.
Vous parlez de la différence, sur la question des régions, par rapport à la santé. J'aimerais savoir ce... Est-ce que vous auriez des exemples concrets? Qu'est-ce qui, dans une région, sur la question des services de santé, qui, il me semble, se sont bien développés au cours des dernières années, les services d'avortement, les services dans tous les ordres de... tous les secteurs de la santé... qu'est-ce qui fait la différence entre les centres, les grands centres puis les centres régionaux? Auriez-vous... Parlez-moi... J'aimerais avoir des exemples concrets et que... En fait, là, vous me parlez de... vous avez dit des choses plus générales. Mais, concrètement, quelles seraient les actions que nous devrions prendre?
Le Président (M. Bernier): Mme Paradis? Mme Blais? Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Bien, je peux...
Le Président (M. Bernier): Allez-y.
Mme Paradis (Blanche): ...y aller, puis peut-être que tu pourras compléter, Joanne. Nous, quand on parle de développement régional, on parle de balises nationales claires, mais souples, O.K. Alors, je vais vous donner un exemple: je pense à la pratique sage-femme et à l'instauration de maisons de naissance à travers tout le Québec, O.K.? Ça, c'est une demande et ça devrait normalement se développer davantage. Mais j'entends ma collègue de la Gaspésie et des Îles qui dit: Bien, une maison des naissances en Gaspésie, où est-ce qu'on la place? O.K.? Parce que c'est... Donc, si on dit: On va implanter la pratique sage-femme, bien, il va falloir voir de quelle façon en Gaspésie on peut l'implanter, c'est quoi, la meilleure façon de le faire. Puis à Montréal c'est une autre réalité, à Québec aussi une autre réalité. Alors donc, nous, on pense que, dans toute la question de l'implantation de services dans les régions, en santé ou dans d'autres éléments, on a besoin de balises nationales claires. La balise nationale, dans ce cas-ci, ce serait l'implantation des services sage-femme à travers tout le Québec, et la façon... la balise devrait être souple dans ce sens qu'elle permet d'adapter à la réalité de chacune des régions cette implantation. Alors...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
**(11 h 50)**Mme St-Pierre: J'aimerais aussi vous entendre sur un autre aspect. On parle d'autonomie financière pour atteindre l'égalité pour... L'autonomie financière, c'est vraiment, c'est vraiment important, là. On a vu, au cours des ans, bon, une progression, une diminution de l'écart entre les hommes et les femmes sur ces questions-là, mais il faut travailler davantage, il faut sortir de la précarité puis des emplois précaires.
L'entreprenariat féminin. Vous avez vu l'instauration d'ORSEF, là, et, moi, pour avoir été sur le terrain, j'ai eu d'excellents commentaires par rapport à ces ORSEF, des histoires vraiment intéressantes et touchantes de femmes qui sont venues dire: Bien, si je n'avais pas eu l'ORSEF pour m'aider à démarrer ma petite entreprise, bien, je ne serais pas ce que je suis aujourd'hui. Et c'est du petit, du miniminicrédit; ce n'est pas du gros crédit, du miniminicrédit. Une autre femme qui avait une entreprise de camionnage, les banques ne voulaient plus... elle était en difficulté financière, plus personne ne voulait lui prêter. Elle a eu encore un petit minicrédit, elle a pu relancer sa compagnie. Des femmes sont venues me raconter que, pour ouvrir un salon de coiffure, par exemple, ce genre de services là... Et, je l'ai appris, tu ne peux pas obtenir de crédit dans une institution financière pour avoir un salon d'esthétique, un salon de coiffure ou un... Je suis restée vraiment... Il y a des réalités qu'on ne connaît pas encore, puis c'est en allant sur le terrain qu'on va les chercher, ces choses-là.
Est-ce que vous avez des... Est-ce que, pour vous, l'expérience des ORSEF, tout d'abord... Et ce que j'ai constaté, moi, sur le terrain, est-ce que vous avez ces mêmes constats? Est-ce que vous voudriez que ça soit encore plus fort ou... Et je vais avoir des collègues qui vont avoir des questions, alors je vais vous demander de faire une réponse assez courte pour permettre à mes collègues de poser leurs questions, parce que c'est un sujet fort intéressant.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Oui. Bien, c'est sûr, oui, on trouve qu'effectivement on a eu le même type de commentaires et d'expériences, on a connu les expériences dont vous parlez, et on pense que ça devrait être reconduit, tout ce programme qui permet le soutien à l'entrepreneuriat féminin, à travers toutes les régions du Québec aussi. Il y a encore des régions qui n'ont pas leur organisme régional de soutien à l'entrepreneuriat féminin.
Autre chose: moi, je dis que, quand on parle d'autonomie économique des femmes, je trouve que ce serait... Encore aujourd'hui, 70 %, au Québec, là, des métiers d'avenir, c'est des métiers traditionnellement masculins, puis ce qu'on appelle un métier d'avenir, c'est un métier qui permet d'avoir des bonnes conditions de travail avec des bons salaires puis où il y a de l'emploi. Alors... Mais c'est encore ça, c'est 70 % de ces emplois-là qui sont... de ces métiers-là qui sont traditionnellement masculins. Donc, tout l'accès des femmes à des métiers traditionnellement masculins, la diversification des choix de carrière des filles et des femmes, c'est un élément important, d'une part; et, d'autre part, bien, il ne faudrait pas que les emplois qui sont traditionnellement masculins, bien, soient sous-financés. Alors, il y a ces deux éléments-là dont il faut tenir compte, puis je pense qu'on a un travail énorme à faire dans des mesures sur ces questions-là.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Paradis. Oui, allez-y, Mme la ministre.
Mme St-Pierre: ...une question avant que mes collègues... Les femmes en agriculture -- excusez-moi -- les femmes en agriculture, vous n'en parlez pas, à moins que j'aie mal vu. Est-ce que vous avez quelque chose à dire?
Mme Paradis (Blanche): Pourtant, il y a une des tables régionales, Lanaudière, qui a fait un travail intéressant avec des agricultrices, mais on n'est pas entrées dans ce détail ici.
Mme St-Pierre: Si vous pouviez nous envoyer des recommandations, des réflexions là-dessus, ça nous ferait plaisir.
Mme Paradis (Blanche): Oui, sur les femmes, oui, on peut le noter.
Le Président (M. Bernier): Alors donc, à l'invitation de la ministre, si vous avez des documents additionnels à nous faire parvenir au niveau du secrétariat, simplement, vous envoyez ça au secrétariat, ici à l'Assemblée nationale. Nous allons faire paraître, au niveau des services d'Internet, cette information sur notre site et donner également copie à chacun des membres de cette commission. Donc, merci. Je vous invite à le faire le plus tôt possible, considérant que cette information serait certainement intéressante pour l'ensemble des gens.
M. le député de Chomedey, maintenant, la parole est à vous.
M. Ouellette: Merci, M. le Président. Mme Paradis, bonjour, Mme Blais. Je suis heureux de constater que la coordination de votre réseau est rendue à Saint-Jérôme. Je ne vous dis pas qu'elle n'était pas bien en Mauricie, mais je n'haïs pas, personnellement, qu'elle soit rendue à Saint-Jérôme, étant Jérômien d'adoption.
Vous avez beaucoup, dans votre mémoire, parlé des résultats du premier plan d'action et parlé des ententes qu'il y avait eues justement en matière d'égalité avec les conférences régionales des élus, et vous soulignez à juste titre que c'est une avancée majeure que plusieurs réclamaient depuis des années, particulièrement les gens en région, et je pense que le gouvernement se préoccupe abondamment, régulièrement et constamment de ce qui se passe en région, et d'économie des régions, et de tout ce qui peut faire avancer le Québec au niveau des régions. Ces 3 millions, vous avez mentionné dans votre mémoire que ça a généré 9 millions en investissements, et ces 9 millions d'investissements là, c'est sûr, c'était dans différents secteurs, sur différents thèmes, etc.
Le gouvernement, présentement, planche sur un deuxième plan d'action pour le futur. Comment voyez-vous ou comment définiriez-vous les... ou quel genre, ou sur quels thèmes est-ce que l'action gouvernementale devrait porter dans le deuxième plan d'action, justement ce qui devrait être priorisé en région, là, pour le deuxième plan, pour l'avenir? Il y a eu des choses qui ont été faites dans le premier plan d'action, il y a eu plusieurs domaines qui ont été explorés, puis vous en parlez dans votre mémoire. Je veux savoir: On va où? Le futur, là, ce qui s'en vient avec le deuxième plan d'action, vous voyez ça comment? Est-ce qu'on reprend les thèmes du premier plan? Est-ce que ce qui a été fait... Vous en avez donné quelques exemples, là: l'égalité économique, l'accès des femmes aux métiers traditionnellement masculins, l'hypersexualisation. Est-ce qu'on garde les même thèmes pour le deuxième plan d'action ou est-ce que vous avez des idées novatrices qui devraient être... sur lesquelles on devrait focusser pour le deuxième plan d'action?
Le Président (M. Bernier): Merci. Madame...
M. Ouellette: La réponse va venir de la Mauricie?
Mme Blais (Joanne): Oui.
M. Ouellette: O.K.
Le Président (M. Bernier): Mme Paradis, Mme Blais? Mme Blais?
Mme Blais (Joanne): Oui, Mme Blais. Bien oui, parce qu'en fait on est davantage sur le terrain. Je pense que je suis bien placée pour répondre. En fait, vous savez que les inégalités sont persistantes. On travaille sur plusieurs choses depuis plusieurs années avec des thèmes précis, comme vous l'avez mentionné, dans les trois, quatre dernières années, entre autres par le biais des ententes spécifiques, mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Donc, évidemment, pour nous, ça serait la continuité de ce qui a été commencé.
On travaille, de façon générale, surtout sur une question de changement de mentalités: créer de l'espace, de la place pour les femmes dans les instances de décision; travailler sur l'égalité économique des femmes entre autres beaucoup par l'entrepreneuriat et la diversification des choix professionnels. Encore aujourd'hui, les choix professionnels des femmes sont toujours majoritairement concentrés dans des secteurs dits féminins. Donc, on n'a pas atteint les objectifs encore souhaités, exemple, de parité dans les instances de décision, que les femmes aient diversifié davantage leurs choix de carrière. L'entrepreneuriat féminin, c'est encore quelque... L'entrepreneuriat, c'est encore quelque chose qui est majoritairement masculin. Donc, on a encore du travail à faire là-dessus et on considère que la continuité dans les mêmes thèmes, si on peut dire, ou dans les mêmes champs d'action est nécessaire pour atteindre des résultats. On a une politique qui était sur 10 ans, prévue sur 10 ans et on pense que le plan d'action doit suivre cette politique-là sur 10 ans avec les ententes sur le terrain qui permettent de régionaliser cette politique-là.
Et je dirais aussi que la question de la conciliation travail-famille n'avait pas pu être régionalisée de la même manière. Le MFA avait choisi de mettre en place un programme avec l'appel de projets annuels plutôt que de signer des ententes spécifiques. Je pense que, si on n'a pas beaucoup avancé sur cette question-là, moi, à mon sens, étant sur le terrain, je pense que ça, c'est une des problématiques ou une des failles. Je pense que le MFA devrait s'investir davantage dans des ententes triennales au même titre que les autres partenaires du milieu si on veut vraiment avoir des résultats à long terme, puis les régions sont prêtes à travailler sur la question de la conciliation travail-famille, parce qu'on sait que c'est un obstacle majeur des femmes sur l'ensemble des questions qu'on travaille déjà.
Le Président (M. Bernier): Merci. 30 secondes. Conclusion.
M. Ouellette: Il reste 30 secondes. Une conclusion. Mme Paradis, je pense, vous vouliez rajouter. Je vous laisse mon 30 secondes pour que vous rajoutiez...
Mme Paradis (Blanche): Parfait.
Le Président (M. Bernier): ...Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Bien, je voulais tout simplement dire que c'est particulièrement important que l'on puisse, dans... Le plan d'action prévoit trois approches, dont l'approche spécifique. Bien, dans le travail en région, toute cette approche spécifique doit beaucoup se développer... bien, est fondamentale, nécessaire, et c'est là-dedans justement que l'on retrouve des programmes comme À égalité pour décider où on s'adresse spécifiquement à la place des femmes en politique.
Les ORSEF en sont un autre exemple, les groupes d'employabilité femmes qu'on soutient puis qu'on devrait continuer à soutenir. En passant, il n'y a pas de groupes employabilité femmes dans toutes les régions du Québec. C'est un problème, il y a des régions qui sont très bien garnies, mais il y en a qui n'auraient absolument rien. Et puis aussi tous les groupes qui travaillent à la présence des femmes en politique municipale ou dans les instances décisionnelles, c'est très important également.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Paradis. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous.
**(12 heures)**Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Mesdames, bonjour, bienvenue. Moi, j'aimerais que vous m'expliquiez un peu la page... C'est page 11 dans votre mémoire, vous dites: «Nous recommandons:
«Que soit maintenue la parité au Conseil des ministres -- deux:
«Que le gouvernement entreprenne une véritable réforme du mode de scrutin qui favorisera l'émergence d'un pluralisme politique et l'équité de représentation des femmes et des hommes de même que d'autres groupes sociaux discriminés sur la scène politique -- et puis sur le dernier picot:
«Instaure des mesures coercitives obligeant notamment les partis politiques à se doter d'une liste nationale comportant un nombre égal de femmes et d'hommes inscrits en alternance en commençant par une femme.» Bon, je veux savoir un peu, là. Vous parlez du scrutin proportionnel, j'imagine, mais un peu plus: Comment vous voyez cette relation, je dirais, entre l'instauration d'un scrutin proportionnel et la présence accrue de femmes, disons, à l'Assemblée nationale ou dans d'autres instances? Est-ce que c'est automatique? Vous dites oui parce que... J'imagine que vous dites oui parce que, justement, il y aura une liste, et puis ça va être obligatoire. Mais, à ce moment-là, il n'y a plus de circonscriptions électorales, là. Si je comprends bien, vous, c'est le scrutin proportionnel total, là.
Mme Paradis (Blanche): Non.
Mme Beaudoin (Rosemont): Non. Bon. Alors, je vais vous laisser vous... s'il vous plaît, vous exprimer là-dessus.
Le Président (M. Bernier): Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Sans aller à fond dans le... Puis d'ailleurs on a produit un mémoire il y a quelques années, au moment où il y a eu une commission parlementaire sur le sujet, mais, essentiellement, on conserve... Il y aurait une liste effectivement... il y aurait une liste nationale, mais il y a une liste... il y a des députés élus par circonscription et puis il y en a d'autres qui sont élus sur une liste... des députés de liste, O.K.? Alors, on aurait les deux types de député, et ceux qui seraient placés sur la liste des partis seraient aussi choisis dans les régions, O.K.? Parce que ça nous semble important aussi pour que ce ne soit pas une liste nationale comme ça. Alors, il y aurait une répartition régionale également de la liste des députés qui seraient... de la liste des députés nommés par les partis.
Mais ce qui nous semble important, c'est que... évidemment, sur ces listes-là, ce sont toujours les personnes en tête de liste qui ont le plus de chances... qui vont être élues. Alors donc, c'est important pour nous que ce soit une femme qui soit placée en tête de cette liste-là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Là-dessus, c'est sûr que ça pose d'autres problèmes dans un sens parce que... Comment sont choisies, dans votre esprit, les femmes qui vont être -- ou les hommes d'ailleurs... Mais, si vous avez une liste, une partie en tout cas de scrutin proportionnel, parce que, vous dites, il y aura un certain nombre... Disons qu'il y a 125 députés, il y en a je ne sais pas combien qui sont élus dans des circonscriptions qui sont beaucoup plus larges...
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): ...oui, et qui sont beaucoup plus larges que celles qu'on connaît actuellement. À Montréal, ça ne pose peut-être pas trop de problèmes entre Hochelaga-Maisonneuve puis Rosemont, c'est assez bien délimité, puis ça peut être plus grand, mais je dis que ce n'est pas simple, j'imagine, dans certaines circonscriptions, là, on l'a vu dans le débat qu'il y a eu. S'il y a moins de circonscriptions, ça devient des circonscriptions énormes et très difficilement couvertes par le député de circonscription.
Le Président (M. Bernier): Au niveau de territoire.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, au niveau du territoire.
Le Président (M. Bernier): C'est ça.
Mme Beaudoin (Rosemont): Mais ma question, c'est quand même plutôt sur le choix des hommes et des femmes qui seraient sur cette liste-là. Parce que, nous, on sait comment ça marche dans les circonscriptions. On se présente, il y a une convention ou le chef décide. Ça arrive, pas souvent chez nous, mais ça arrive, et puis... Mais, normalement, on se présente puis on se fait élire par les militants, les membres de cette circonscription-là. Mais, sur votre liste, là, de scrutin, comment ça fonctionne? Parce que je comprends que c'est une façon de s'assurer, à partir du moment où on dit: une femme, un homme, une femme, un homme, qu'il va y avoir des femmes. Ça, je comprends ça, qu'il y a une relation très étroite. Mais c'est sur le choix qui serait régionalisé, si je vous entends bien aussi. Là, vous laissez ça aux partis, ça, ce bout-là?
Le Président (M. Bernier): Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Oui. Oui, ce serait aux partis. Mais, moi, je voudrais revenir... sans aller dans la technicalité que vous... Parce que c'est une question assez complexe, la question, puis je la relie à la question que madame posait, là, la question des mesures coercitives, et tout ça. Est-ce qu'on veut, oui ou non, une parité de représentation hommes-femmes? Ça, c'est une première question. Y a-t-il une volonté politique? Quand la volonté politique est là, on trouve les moyens, O.K.?
Alors, pour nous autres, ce qui est important, c'est qu'il y ait cette volonté politique d'atteindre la parité de représentation dans les instances électives, autant dans les conseils municipaux qu'à l'Assemblée nationale, O.K.? Les partis ont un grand rôle à jouer, effectivement; les parlementaires en ont un également. Il peut y avoir des lois qui soient votées pour favoriser cette représentation paritaire des femmes et des hommes, mais il y a cette volonté politique qui doit s'exprimer.
Quand on parlait d'un... On suggère aussi qu'il y ait des mesures qui soient mises de l'avant pour atteindre la parité dans les conseils municipaux, O.K.? Bien, c'est la même chose. La volonté politique doit être là. Nous, on interpelle l'UMQ puis la FQM puis on interpelle le ministère des Affaires municipales pour que tout le monde se mette ensemble, les partenaires autour de la Table femmes et politique municipale, pour qu'on trouve... Quand la volonté politique est là, on trouve les façons de faire, et ça, c'est ça qu'il faut... qui doit être là et qui fait foi de tout, là. Les technicalités, par la suite, on s'organise.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Je vais laisser. Ça va.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Sur un autre ordre d'idées, je reviendrais plus sur qu'est-ce qu'on prévoit pour le prochain plan en tant que tel. Vous faites des recommandations à l'effet de dire que vous favorisez la signature d'ententes quinquennales pour justement permettre d'avoir une meilleure planification, d'avoir... Et, entre autres, vous dénoncez le fait de la disparition des ententes régionales du Conseil du statut de la femme. J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce qu'effectivement la disparition des bureaux régionaux du Conseil du statut de la femme, ça a eu un impact. Ça a eu un impact aussi sur ce que vous dites, la connaissance terrain, mais aussi sur les données qui vont émaner dorénavant pour justement nous alimenter sur la situation réelle. Alors, j'aimerais ça... Est-ce que, pour vous, la signature de ces ententes quinquennales, la disparition aussi des bureaux régionaux du Conseil du statut de la femme, entre autres, ça, c'est un recul au niveau de... c'est une perte de pouvoir régional en tant que tel? Mais qu'est-ce qu'apporterait de plus la signature des ententes quinquennales, de façon réelle?
Le Président (M. Bernier): Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Oui. Bien, en fait, ce que ça... Je vais réagir aux deux éléments. La première, pour la question des ententes quinquennales, ce qu'on réalise actuellement, dans la façon dont ça se déroule concrètement sur le terrain, c'est que les ententes en question sont signées à peu près un an après qu'elles aient commencé, O.K.? Alors donc, déjà... Et on travaille avec un échéancier qui est toujours un an en retard d'abord, d'une part. Puis, d'autre part, on se rend compte que, trois ans, c'est très court, hein, quand on veut établir des choses. Donc, on se dit: Bien, au moins, sur cinq ans, on aura le temps de voir venir. On va peut-être pouvoir rattraper aussi le temps. Et ça prend autant de temps à signer une entente sur trois ans que sur cinq ans. Ça fait que pourquoi ne pas y aller sur une période plus longue et, à ce moment-là, on peut travailler... C'est assez intéressant de pouvoir travailler sur une plus longue période de temps. En tout cas, notre expérience, c'est que ce type d'entente sur cinq ans est fort... serait fort pertinent.
Pour ce qui est des antennes du Conseil du statut de la femme, c'est sûr que, nous, on considère que la consolidation des structures puis des organismes qui oeuvrent pour l'égalité en région, bien, ça permet la régionalisation de la politique gouvernementale. Donc, on a mal réagi à la restructuration du conseil parce qu'il va être beaucoup moins possible pour le conseil d'intervenir en région. Puis on trouve que ce choix-là va à l'encontre de régionaliser, justement, l'action gouvernementale en matière d'égalité. C'est important qu'il y ait du monde du Conseil du statut de la femme, du Secrétariat à la condition féminine, des groupes de femmes puis que tout ce monde-là travaille ensemble puis en concertation pour atteindre l'égalité dans chacune des régions du Québec. Alors donc, c'est pour ça qu'on était déçues de cette restructuration. Mais on sait que le conseil n'a pas eu d'augmentation de financement depuis 1996, ça fait que le conseil a fait ce qu'il a pu avec ce qu'il avait. Oui, Joanne...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Dans le mémoire, vous dénoncez le sous-financement du premier plan d'action. Dans le fond, vous mettez la table pour dire: Bien, pour le prochain plan, il faudra plus d'argent. Entre autres, vous dites que le financement des groupes de défense collective des droits des femmes a été complètement ignoré. J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce que ce n'est le portrait que l'on nous donne entre autres sur un sous-financement des groupes de femmes. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
**(12 h 10)**Le Président (M. Bernier): Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Les groupes en défense collective des droits sont... de femmes, les groupes de femmes en défense collective des droits -- il n'y a pas que des groupes de femmes, mais il y a ceux-là -- sont financés actuellement par le Secrétariat à l'action communautaire autonome. C'est là qu'elles reçoivent leur financement de base. Ce financement de base a à peine augmenté, des pourcentages minimes, là, depuis une dizaine d'années.
Donc, c'est problématique pour tous les groupes de femmes qui sont financés à travers le Secrétariat à l'action communautaire autonome. Ça semble être un ghetto de financement où il n'y a pas d'augmentation possible pour les groupes de femmes qui sont là. Alors, c'est le problème, et cette question-là n'a pas été, disons, abordée dans le premier plan d'action. Le premier plan d'action était muet sur cette question-là. Ça serait souhaitable qu'il y ait des représentations qui soient faites en tout cas auprès du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, hein, qui chapeaute le secrétariat pour que ce financement des groupes en santé et services... pas en santé et services sociaux mais en défense collective des droits soit augmenté.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Blais, vous voulez ajouter?
Mme Blais (Joanne): Bien, je... en disant qu'en fait, quand on parle d'égalité économique, par exemple quand on pense aux travailleuses dans les groupes de femmes, particulièrement dans les groupes en défense collective des droits comme les tables de concertation de groupes de femmes, si on veut vraiment améliorer les conditions de vie de toutes les femmes, il faut le faire aussi pour cette catégorie de travailleuses là qui, souvent, doivent composer avec un... des revenus annuels qui viennent du SACAIS, qui ne sont pas suffisants pour assurer le fonctionnement de leurs groupes, assurer un salaire décent. Donc là, ça demande un travail incroyable aux travailleuses de ces groupes-là pour aller chercher du financement par projet pour que le financement annuel permette à ces travailleuses-là d'avoir quelque chose de potentiellement intéressant.
Puis ça, ça contribue, en fait, aussi à un roulement important des travailleuses dans ce secteur-là parce que, finalement, ils se dirigent vers d'autres groupes. Ça fait que c'est un éternel recommencement. On doit toujours reformer du personnel, encadrer de nouvelles travailleuses, on ne peut pas leur donner les conditions quelles souhaiteraient, bon. Ça fait que ça entraîne aussi une question d'épuisement. Ça fait que, toute la situation des travailleuses dans le domaine communautaire, elle est présente, mais je dirais plus particulièrement pour les groupes en défense collective des droits qui ne bénéficient pas d'un financement de base suffisant, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée, deux minutes.
Mme Poirier: Une petite question toute, toute petite. Vous n'en parlez pas nécessairement dans votre mémoire, mais j'aimerais vous entendre sur tout le volet de l'aide domestique, tout le volet, dans le fond, de la protection des femmes qui sont dans le volet aide domestique. Est-ce que les tables régionales se sont penchées sur ce volet-là de ce travail qui est, bon... On sait que les modalités qui font que les femmes en aide domestique viennent au Québec et au Canada particulièrement... des lois, entre autres, une loi canadienne... Est-ce que les tables régionales se sont penchées... Est-ce que vous avez un portrait, en tant que table régionale, sur ce volet-là?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Paradis.
Mme Paradis (Blanche): Non, on n'a pas ce portrait-là. Il existe un organisme ou deux qui travaillent plus spécifiquement sur ce dossier-là. Je sais qu'on est allés en appui quand ces groupes-là ont demandé de l'appui dans différents dossiers, on les a appuyés, mais on n'a pas de données plus spécifiques.
Le Président (M. Bernier): Ça va? Donc, je vous remercie de votre participation, Mme Blais, Mme Paradis. Donc je vais suspendre quelques instants pour permettre au groupe suivant de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 14)
(Reprise à 12 h 16)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, avant de procéder avec le groupe suivant, je demanderais le consentement des parlementaires pour terminer nos travaux à 13 heures, puisque nous devons reprendre à 14 heures par la suite. Donc, est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Merci.
Nous accueillons maintenant l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, représentée par Mme Céline Duval, présidente, et Mme Madeleine Bourget. Bienvenue, mesdames. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation et, par la suite, échanger avec les parlementaires. Allez-y.
Association féminine d'éducation
et d'action sociale (AFEAS)
Mme Duval (Céline): Bonjour. Organisme sans but lucratif fondé en 1966, l'AFEAS regroupe 12 000 Québécoises qui travaillent bénévolement au sein de 300 groupes locaux répartis dans 12 régions. L'AFEAS a pour mission de défendre les droits des femmes et de travailler à l'amélioration de leurs conditions de vie et de travail. Une forte proportion de ses membres a plus de 45 ans et vit en dehors des grands centres urbains.
En janvier 2005, l'AFEAS soulignait que, peu reconnues mais combien essentielles aux familles et à la société, les responsabilités et les tâches de mère et d'aidante entraînent d'importantes inégalités entre les femmes et les hommes. Malgré quelques avancées, ce constat demeure toujours d'actualité en 2011. L'égalité doit devenir un véritable projet de société. Jusqu'à présent, la lutte pour l'égalité a été menée par les femmes. Tout le travail terrain reste à faire pour convaincre toutes les Québécoises et tous les Québécois que le concept de l'égalité en est un de gagnante-gagnant: personne n'y perd, ni les hommes ni les femmes. L'AFEAS souhaite que ce concept gagnante-gagnant soit omniprésent dans le prochain plan d'action en matière d'égalité.
Par ailleurs, tout en admettant que certains hommes éprouvent présentement des difficultés, nous insistons pour réaffirmer qu'il s'agit là d'une problématique liée à la transformation des rôles sociaux et non pas à une discrimination basée sur le sexe. Nous ne sommes pas des spécialistes dans les techniques de développement d'un plan d'action en matière d'égalité, c'est pourquoi nous reprenons simplement chacune des orientations proposées, sauf la septième, en tentant d'y insérer les revendications de nos membres. Pour que l'égalité de fait progresse au Québec, l'AFEAS croit qu'il faut maintenant utiliser davantage une approche positive dans nos communications concernant l'égalité, c'est-à-dire de faire ressortir les avantages, autant pour les hommes que pour les femmes, de vivre dans une société égalitaire.
Le Québec, par l'intensité de son immigration, doit faire face à un nouveau défi, celui de la diversité religieuse et culturelle. L'AFEAS croit que rendre visible l'égalité entre les femmes et les hommes dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne concrétiserait les engagements du Québec dans ce dossier. Une telle disposition devrait être insérée dans la Charte des droits et libertés par le biais d'un article précis affirmant que l'égalité entre les hommes et les femmes ne peut être compromise au nom de la liberté de religion et de culture.
Au Québec, la laïcité est une valeur à laquelle adhère une majorité de personnes, tant celles nées ici que celles nées ailleurs. Les membres AFEAS pensent que le plan d'action à un tiers d'égalité devrait donc inclure l'adoption d'une charte de la laïcité qui en définisse les principes fondamentaux, notamment l'égalité entre les femmes et les hommes, de même qu'une loi et des règlements applicables à l'État et à l'ensemble de la société afin d'y enchâsser la laïcité de fait du Québec, et ce, sans renier notre propre culture. Pour éviter la remise en question des acquis des femmes, le Québec devrait, avant d'accorder le statut d'immigrante ou d'immigrant à une personne, s'assurer qu'elle et ses proches connaissent et s'engagent à respecter les lois et règlements ainsi que la spécificité et les valeurs du Québec.
La publicité sexiste est une machine à fabriquer des normes et des repères dans notre société. Elle est foncièrement discriminatoire et ignore l'égalité des sexes. La dérive la plus inquiétante de la femme-objet est celle de l'érotisation de l'enfance. Même si plusieurs lois sont édictées par le gouvernement canadien, le Québec pourrait lui aussi agir, notamment en édictant ses propres lignes directrices contre le sexisme et la violence, en offrant de la formation sur des rapports sociaux égalitaires à différents intervenants, en promouvant la Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée et en rendant publics les noms des entreprises qui adhèrent à cette charte, en confiant au Conseil du statut de la femme le mandat d'analyser les communications et publicités des entreprises. Madeleine continue pour la deuxième orientation.
**(12 h 20)**Mme Bourget (Madeleine): Bonjour.
Le Président (M. Bernier): Bienvenue.
Mme Bourget (Madeleine): Les femmes demeurent les premières responsables de la famille. Le partage inégal du travail invisible entre les conjoints contraint les femmes à accepter des emplois à temps partiel, à statut précaire et à bas salaire. De plus, elles hypothèquent leur retraite parce qu'elles doivent se retirer du marché du travail pour mettre des enfants au monde et en prendre soin. S'il est encourageant de constater une amélioration sensible de la situation économique des plus jeunes femmes, il est désolant de voir celle des femmes plus âgées continuer de se détériorer. Lorsque, dans un couple, vient le temps de décider lequel des deux quittera temporairement le marché du travail pour effectuer du travail invisible, c'est celui ou celle qui a le revenu le plus élevé qui va prendre le rôle de pourvoyeur ou de pourvoyeuse.
Cet été, le gouvernement canadien retirait l'obligation de compléter le questionnaire long du recensement, qui contenait des questions précises quant au travail invisible. En l'absence de telles mesures, comment peut-on établir des plans d'intervention pour un rééquilibrage? L'Institut de la statistique du Québec peut-il pallier à cette nouvelle lacune? Toute la question de la mesure du travail invisible et de son partage reste problématique. Pour favoriser un meilleur partage du travail invisible, il faut que les personnes qui s'y consacrent se sentent utiles et revalorisées. Quel avenir a une société qui ne prend pas soin de ses enfants et des personnes plus vulnérables?
Aujourd'hui, les femmes sont plus diplômées et plus nombreuses à travailler mais elles choisissent encore des métiers typiquement féminins et moins payants pour une foule de raisons. Les filles, pour bien gagner leur vie et se préparer une retraite décente, doivent maintenant se déployer partout et dans tous les domaines. Elles doivent prendre la place qui leur revient. D'autre part, en même temps qu'on encourage les filles à aller vers les métiers et professions non traditionnels, il faudrait en faire autant du côté des garçons. Les filles envahissent massivement certains types d'emploi autrefois occupés par des hommes, mais les garçons semblent moins intéressés aux emplois traditionnellement occupés par des filles. Est-ce que ces secteurs seraient trop dévalorisés économiquement et socialement pour que les garçons s'y intéressent?
En mai 2009, la Loi sur l'équité salariale a été modifiée et la commission a vu son mandat ajusté. D'autre part, en janvier 2011, une étude révélait qu'en 2009 les 100 chefs de direction les mieux payés au Canada avaient gagné 155 fois le salaire moyen de leurs employés et probablement au-delà de 200 fois le salaire moyen des employées -- des employées au féminin, évidemment. Il est évident que l'équité salariale entre les hommes et les femmes passe aussi par une meilleure répartition des revenus entre les individus. Faut-il imposer davantage les revenus élevés? Faut-il limiter la rémunération des hauts dirigeants? Une chose est certaine, il faut que des moyens soient pris pour qu'une telle situation se résorbe.
Au Québec, le salaire minimum est de 9,50 $. En Ontario, le salaire minimum est actuellement à 10,25 $. Le salaire minimum du Québec pourrait donc être augmenté de 7 % ou 8 % tout en demeurant compétitif avec celui de la province voisine. En 2008, les membres de l'AFEAS réclamaient un salaire minimum qui permette à une personne qui travaille 40 heures par semaine d'avoir un revenu annuel au-dessus du seuil de faible revenu établi par Statistique Canada, et ce, avant impôt.
Dans un mémoire intitulé Les conjoints de fait au Québec: perspective féministe pour un encadrement légal, Me Jocelyne Jarry affirmait que les femmes québécoises non mariées ne connaissent pas leurs droits, bien qu'elles soient instruites, libres et intelligentes. Cette confusion vient souvent du fait que plusieurs programmes gouvernementaux reconnaissent des droits aux conjoints de fait. L'AFEAS a d'ailleurs débuté, en septembre 2010, une série d'ateliers intitulés Vivre en union de fait sans s'appauvrir!. Les premiers résultats confirment le manque d'information, laissant place à de fausses croyances concernant les unions de fait. Le Québec est la seule province au Canada où les unions de fait ne sont pas encadrées par la loi, et lors des ruptures, les femmes sont souvent économiquement désavantagées.
Mme Duval (Céline): Le nouveau Régime québécois d'assurance parentale contribue beaucoup au changement de mentalité en termes de congés parentaux. L'AFEAS croit cependant que le Régime québécois d'assurance parentale peut contribuer davantage à l'évolution des mentalités en matière de travail invisible. Par exemple, le RQAP pourrait devenir le RQAF, régime québécois d'assurance familiale, pour que toute personne qui se retire temporairement du marché du travail pour prendre soin de ses enfants ou d'un proche en perte d'autonomie y ait accès. Toutes les Québécoises et tous les Québécois qui deviennent parents ou qui doivent prendre soin d'un proche devraient y avoir accès. Actuellement, il y a des exclus.
D'autre part, le Québec devrait revoir les normes minimales du travail afin d'y intégrer davantage d'éléments pour faciliter la conciliation famille-travail-études. Le nouveau plan d'action pour l'égalité devrait aussi favoriser, dans les villes et les municipalités de même que dans les entreprises, la mise en place de politiques de conciliation famille-travail-études.
Le cahier de consultations en santé rappelle certains constats; l'AFEAS ajoute un autre constat important: les femmes sont celles qui, le plus souvent, prennent en charge l'organisation des soins de leurs proches. Les femmes sont donc souvent celles qui constatent les lacunes du système de santé québécois et tentent de faire des propositions pour l'améliorer.
En août 2010, les membres AFEAS adoptaient une série de propositions dont certains éléments pourraient être intégrés dans le prochain plan d'action pour l'égalité entre les femmes et les hommes: la protection, par une loi, de l'avenir de notre système de santé universel, accessible et gratuit. Cette loi devrait restreindre l'ouverture de cliniques privées au Québec et prévoir des sanctions sévères pour les contrevenants. La tenue d'états généraux sur la santé dans les plus brefs délais. Si on considère qu'actuellement 70 % à 85 % des soins personnels et des services donnés aux personnes âgées le sont par les familles, généralement par les femmes, on peut comprendre que 20 % à 40 % des aidantes se retrouvent en situation de détresse et d'épuisement.
L'État devrait augmenter considérablement ses ressources en services à domicile et en hébergement. Pour l'AFEAS, dans la situation actuelle où le vieillissement est un enjeu de taille pour la société québécoise, il est essentiel de soutenir les besoins des personnes aînées et le travail des aidantes. L'apport de ces dernières permet au système de santé d'éviter l'institutionnalisation d'un grand nombre de personnes. Il ne faudrait pas que cet avantage pour le système se traduise par un lourd désavantage pour les femmes. Présentement, la population en région veut trouver des formules nouvelles pour avoir accès à de meilleurs services de santé. Certaines de ces initiatives sont controversées parce qu'elles s'orientent vers la surfacturation des services. Il faudrait toutefois prendre le temps de bien évaluer de telles alternatives -- coopératives de santé, mise en réseau de cliniques de santé -- afin de les adapter aux besoins de la population. Il faut trouver une solution au problème récurrent du manque d'effectifs dans les régions à faible densité de population.
Mme Bourget (Madeleine): La violence et ses conséquences dramatiques pour les personnes qui en sont victimes attaquent l'intégrité des personnes et mettent en danger leur santé physique et mentale.
Bien qu'au cours des dernières années plusieurs changements ont permis de mieux répondre aux besoins des femmes victimes de violence, cette violence est loin d'être éradiquée. La violence, particulièrement celle faite aux femmes, demeure un sujet tabou dans notre société. Il y a deux ans, l'AFEAS a initié un projet d'atelier intitulé La violence, ça nous regarde! Osons agir!.La principale difficulté rencontrée fut celle de convaincre les éventuelles participantes d'aborder le sujet. Elles se sentent mal à l'aise, ne serait-ce que d'en discuter. Au moins 1 500 femmes ont finalement participé à ces ateliers d'une durée d'environ trois heures. La majorité des participantes ont souligné être maintenant en mesure de mieux réagir dans ces différentes situations.
D'autre part, le démantèlement amorcé par le gouvernement canadien du registre des armes à feu reste un dossier d'actualité. Malgré les pressions de toute la société québécoise, ce gouvernement persiste et signe. Le prochain plan d'action pour l'égalité devrait, à notre avis, intégrer plusieurs éléments, entre autres, la poursuite des campagnes contre la violence, l'intégration dans les campagnes contre la violence d'une approche positive, la poursuite des pressions auprès du gouvernement canadien pour le maintien intégral du registre des armes à feu.
Pour l'AFEAS, reconnaître la prostitution comme un travail équivaut à marchandiser les corps humains, surtout celui des femmes. Les femmes se prostituent la plupart du temps à cause de contraintes économiques. Admettre que des femmes puissent décider de façon sereine et volontaire de se prostituer équivaut à nier l'existence d'éléments sociaux, politiques et économiques qui conduisent à la prostitution.
**(12 h 30)**Le Président (M. Bernier): Conclusion, s'il vous plaît, madame...
Mme Bourget (Madeleine): Pardon?
Le Président (M. Bernier): Si vous voulez conclure en quelques secondes, vous avez une vingtaine de secondes pour conclure.
Mme Bourget (Madeleine): O.K. Au cours des dernières années, les luttes des féministes ont porté sur la place publique des phénomènes sociaux collectivement inacceptables: l'inceste, le viol, les violences conjugales. Alors, la prostitution doit elle aussi sortir de la sphère privée et secrète entre un homme et une femme.
Le Président (M. Bernier): Merci. Alors, merci de votre présentation. Nous allons maintenant passer aux échanges avec les groupes parlementaires. Donc, Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci beaucoup. Merci. C'est une présentation qui est très bien. Et, je dois dire, je ne veux pas rendre personne jaloux dans les autres groupes qui vont venir ou qui sont venus auparavant, mais j'ai beaucoup d'affection pour l'AFEAS. Je trouve, c'est un organisme qui a un ton qui est toujours... c'est avec des aspects positifs dans votre discours mais ensuite vous nous engagez sur des voies où nous devons se poser des questions, nous devons faire en sorte qu'on travaille davantage, mais vous le faites avec énormément de délicatesse, et c'est beaucoup apprécié.
J'ai quelque... Je voudrais vous sensibiliser à cette recherche-là qui a été préparée par des chercheurs de l'université, du Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la violence faite aux femmes. C'est Mme Maryse Rinfret-Raynor, M. Normand Brodeur, Élisabeth Lesieux, et je pense que c'est disponible sur Internet. Alors, ça s'intitule Services d'aide en matière de violence conjugale: état de la situation et besoins prioritaires.
Bien sûr, il y a encore du travail à faire, ça, on en sera toujours conscients, on le sera toujours, mais on a des données très encourageantes par rapport aux interventions qui ont été faites par le gouvernement dans le dossier des maisons d'hébergement. Alors, ça dit: «Le financement supplémentaire aura permis aux maisons d'offrir la même gamme de services, qu'elles soient situées en zone rurale ou urbaine. Cela constitue un des effets majeurs de ce financement et rend compte de la pertinence de la méthode des répartitions financières privilégiées, c'est-à-dire basées sur une estimation d'un budget plancher par maison [, bon,] de 12 places;
«Le financement supplémentaire aura également permis le développement et l'harmonisation des services externes posthébergement.» Et on continue. Il y a plusieurs exemples des bienfaits qu'a apportés l'augmentation du financement dans les maisons d'hébergement. Et ça dit même que le Québec est en avance par rapport aux pays européens, tant par la reconnaissance des organismes que par l'octroi d'un financement récurrent.
Alors, je voulais quand même vous sensibiliser à cette recherche parce que c'est tout frais. On vient de... On a fait une conférence de presse à Montréal pour la rendre publique. Mais je vous invite à en prendre connaissance, ça pourrait vous aider dans vos... quand vous faites vos... dans vos instances.
Dans votre mémoire, vous parlez d'une «approche positive dans [les] communications concernant l'égalité [fait] ressortir les avantages [...] de vivre dans une société égalitaire». Est-ce que, dans le terme... Dans le vocabulaire utilisé, est-ce qu'on devrait, en 2011, axer davantage le discours sur toujours amener la notion «égalité entre les hommes et les femmes» ou si le terme... Puis là je ne veux pas que personne interprète ce que je vais dire, mal, là, mais je vous pose la question parce que vous êtes sur le terrain. Vous, vous entendez ce que les gens disent: Est-ce que le terme «condition féminine» a toujours sa place? Est-ce qu'on devrait aller plus vers un vocabulaire d'égalité entre les hommes et les femmes?
Et je dirais même, est-ce que... Parce que le Conseil du statut de la femme mentionne peut-être qu'on pourrait changer le nom, parler plus d'égalité entre les hommes et les femmes. Est-ce que vous seriez de cet avis-là? Dans le terme du message, est-ce que ça aiderait ou si vous considérez que c'est juste... en fait, il y a une question de communication là-dedans?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Duval.
Mme Duval (Céline): Ça dépend du sens qu'on donne à «condition féminine». Si on dit que «condition féminine», c'est comme un portrait qu'on fait de ce que vivent les femmes à un moment précis de l'histoire dans un lieu précis, c'est comme une photo qu'on prend de ce qui se passe pour les femmes, ça a évolué au Québec, mais ça a encore à évoluer, et on pense que ça devrait évoluer vers une plus grande égalité entre les hommes et les femmes. Donc, le terme «condition féminine» en prise de photo, c'est valable, mais, en désir d'action, c'est aller vers une plus grande concertation entre les femmes et les hommes pour que tout soit plus égalitaire.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Je vous entendais aussi sur la question d'encourager les garçons à aller vers des métiers non traditionnels. Ce matin, on a parlé d'encourager les femmes à aller vers des métiers non traditionnels parce que, souvent, ils sont plus payants, là... plus payant d'aller dans ces métiers ou ces professions-là. Puis on nous disait ce matin que ce serait peut-être de perdre... ça serait peut-être de l'argent gaspillé d'encourager des garçons à épouser des professions traditionnellement féminines parce que c'est moins bien payé, donc c'est les encourager à aller vers des... alors que le débat que j'essayais d'amener, ce n'était pas sur une question de salaire, c'est une question de message dans ces professions-là, dans ces...
Mais vous semblez, vous, puis on le... Même, ce matin, vous disiez: Bien, ce serait peut-être... C'est peut-être des lubies... Mais vous semblez quand même dire... vous dites: Encouragez autant les filles que les garçons à aller vers des métiers non traditionnels. Les métiers des soins, c'est souvent les métiers que les femmes occupent et c'est les métiers... Comment on pourrait arriver à encourager les garçons à aller vers ces métiers-là? Peut-être que leur réponse, ça va être de nous dire: Bien, ce n'est pas assez payant. Bon, ça, c'est une chose. Mais qu'est-ce qui pourrait être davantage fait pour amener cette... Et quels seraient les avantages de le faire?
Le Président (M. Bernier): Mme Duval.
Mme Duval (Céline): C'est ça, il faut que les gars voient un avantage à faire ces métiers-là. Mais quels sont ces avantages-là? Ce sont les mêmes que pour les filles, c'est-à-dire, souvent, ce sont des métiers de service: il y a des gars qui aiment ça, rendre service, aussi. Puis il faut que ce soit valorisé comme étant quelque chose qui est bien dans la société, de faire un travail de service. Les gars qui enseignent au primaire sont recherchés parce que ça fait un modèle d'homme dans une culture où souvent les enfants vivent seuls avec une mère. Il faudrait valoriser ce rôle que les garçons peuvent avoir et valoriser aussi le fait que tu peux être un garçon et avoir le goût de faire des métiers ou des professions plus traditionnellement féminins puis que tu es bien correct pareil.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Je vais vous poser une courte question parce que mes collègues ont des questions aussi. Une courte réponse. Votre projet, là, d'un régime pour les familles, là, un régime de congé familial, avez-vous évalué en termes d'argent combien ça pourrait coûter?
Mme Duval (Céline): Pardon?
Mme St-Pierre: En termes financiers, combien ça pourrait coûter un tel régime?
Mme Duval (Céline): Je ne le sais pas.
Mme St-Pierre: O.K.
Mme Duval (Céline): Mais là où je veux vous amener par exemple, c'est une petite nuance, c'est qu'il y a les gens qui ont cotisé au régime d'assurance parental, et qui ne l'ont jamais utilisé parce qu'ils n'ont pas eu d'enfants, et qui pourraient peut-être à un moment donné désirer l'utiliser pour prendre soin d'une personne en perte d'autonomie. Ce serait peut-être une chose à considérer: Puisqu'ils y ont cotisé, pourquoi n'y auraient-ils pas droit?
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Chomedey, vous vous sentiez visé tout à l'heure, allez-y.
M. Ouellette: Merci, M. le Président. C'est très rafraîchissant de vous écouter.
Mme Duval (Céline): Merci.
M. Ouellette: J'avais l'impression, quand j'étais beaucoup plus jeune, d'écouter parler ma mère. Donc, parce qu'étant l'aîné d'une famille de sept garçons et d'une fille... Pour elle, c'était très important que les sept garçons aient cette autonomie-là et: Ce que tu as reçu, tu essaies de le donner. Donc... Ça a été plus dur avec mes garçons, et ma fille a appris ça toute seule, elle. Mais ça ne fait rien, il ne faut pas se décourager.
Quand vous avez présenté votre mémoire tantôt, vous en étiez rendue à tout l'aspect de la prostitution, qui m'intéresse peut-être un petit peu plus professionnellement, là, il faut... on s'entend. Et, dans votre mémoire, à la page 33, vous mentionnez qu'il faut que le Québec fasse «pression auprès du gouvernement canadien pour qu'une nouvelle législation soit adoptée, une législation fondée sur l'égalité entre les femmes et les hommes et sur la dignité de l'être humain». Dites-moi ce que vous pensez par ça. Et c'est quoi, là, ce vers quoi votre réflexion a porté là-dedans.
Le Président (M. Bernier): Mme Duval.
**(12 h 40)**Mme Duval (Céline): Ça a porté en lien beaucoup avec la modification de la loi que Mme Maria Mourani... le projet de loi de Mme Mourani. C'est elle qui nous a, entre autres, conscientisés à la problématique qu'il y avait dans l'application actuelle du projet de loi fédéral. La loi est là, mais elle est très difficilement applicable Les gens ont trouvé toutes sortes de moyens de la contourner. Alors, elle a mis un projet de loi...
Mais ça n'empêcherait pas que le Québec pousse sur le fédéral en disant: Bien là, il y a une nouvelle loi qui est mise, qui est proposée, appuyez-la, faites-la appliquer pour que, finalement, ça soit vrai. Parce qu'elle date de 1984, la loi, mais il y a très peu de gens qui ont été, finalement, jugés parce qu'elle était trop facilement contournable. Alors, c'est dans ce sens-là.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Chomedey, ça va? M. le député de Lévis?
M. Lehouillier: Oui. Alors, d'abord, moi aussi, tel que l'a signalé la ministre, j'ai trouvé aussi votre mémoire fort intéressant. Et il y a un aspect en particulier qui m'a frappé. Parce que vous avez parlé beaucoup du travail invisible, donc le soin aux enfants et les proches, et sur la nécessité d'un meilleur partage. Et, à mon point de vue, moi -- en tous cas dans les témoignages que j'entends, dans mon milieu, dans mon comté -- je pense que c'est le nerf de la guerre des prochaines années, ce travail invisible là, qui fait en sorte qu'on a un peu de difficulté à passer à une autre étape, à mon avis, là, parce qu'il y a eu quand même des gains intéressants.
Et là vous êtes... vous semblez, par rapport aux autres organismes qu'on a entendus jusqu'à maintenant, plus ouverts au concept d'égalité avec la formule que, finalement, il faut démontrer à la population que c'est gagnant-gagnant. Ça, vous l'avez fait. Et vous dites que, bien qu'il faut maintenir une approche spécifique, c'est-à-dire à un moment donné par rapport, par exemple, à la violence conjugale -- et je partage votre point de vue là-dessus -- vous dites: Il faut avoir aussi cette ouverture-là par rapport à une approche qui privilégie davantage autre chose qu'une approche spécifique, là. Donc, vous, vous croyez beaucoup à la participation des hommes dans certains... pour permettre l'avancée des femmes. Et pouvez-vous m'expliquer comment?
Le Président (M. Bernier): Mme Duval.
Mme Duval (Céline): Bien, si on parle nous-mêmes entre nous, on ne convaincra pas grand monde, on va se convaincre, nous. Si on veut convaincre les hommes de gagner, eux aussi, dans ce partage, il faut leur en parler. Il faut qu'il y ait des communications ouvertes, il faut qu'il y ait des échanges, puis il faut qu'on ait... Comme on l'a souligné, ce n'est pas une question de bataille de sexes, c'est une question d'apprendre à vivre ensemble dans des conditions qui ont changées. C'est simple.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Lévis.
M. Lehouillier: O.K. Oui. Alors, j'aurais une autre question. D'abord, je vous remercie de cette approche-là à laquelle, moi, je crois beaucoup également parce que je pense que, du côté du travail invisible, on ne pourra pas y arriver si on n'assoit pas les hommes et les femmes ensemble, les femmes et les hommes ensemble pour essayer de sensibiliser davantage et de faire en sorte qu'au niveau du marché du travail on ait cette équité-là tant recherchée.
Cela étant dit, j'avais une deuxième question qui touche les métiers non traditionnels. Les métiers non traditionnels, donc les mythes aux emplois non traditionnels, «le travail est trop dur physiquement», moi, j'ai vu ça au début des années quatre-vingt, lorsque j'étais conseiller municipal, puis qu'on a engagé la première femme policière à Lauzon. Ça a été assez problématique, merci.
Alors, je voudrais savoir: Est-ce que votre organisation, vous êtes en contact avec les milieux syndicaux? Je sais qu'on va avoir l'occasion d'entendre certains syndicats également ici, mais, moi, c'est une question qui me préoccupe: Est-ce qu'il y a beaucoup d'interconnections, justement, avec les instances syndicales? Parce qu'on sait que, règle générale, ces métiers-là sont fortement syndiqués, notamment dans la machinerie lourde. Et est-ce que vous voyez une meilleure concertation de ce côté-là? Comment vous voyez l'avenir, justement, pour permettre de franchir, disons, cette frontière-là, parce qu'il y a quand même des défis à relever, là?
Le Président (M. Bernier): Vous avez une minute, Mme Duval, pour répondre à cette question.
Mme Duval (Céline): On n'a pas de contact vraiment direct avec les syndicats, là, pour négocier ou voir avec les syndicats. On sait que ça accroche parce qu'effectivement, souvent, ils vont reprocher à une femme, entre autres, de s'absenter trop souvent ou... Et ça, ce sont les employeurs aussi qui vont le dire. Mais non, on n'a pas de contact dans ce sens-là.
Le Président (M. Bernier): Merci.
M. Lehouillier: Donc, il y aurait un travail à faire là?
Mme Duval (Céline): ...
M. Lehouillier: O.K. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle avec la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. C'est à vous la parole, Mme la députée.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, Mme Duval, Mme Bourget. Il me fait plaisir de vous revoir. Écoutez, je suis tout à fait d'accord avec la ministre pour dire que vous avez toujours le bon ton et, en général, vous avez toujours une ligne qui mène vos débats qui est toujours vraiment au centre. Mais vous prenez des positions assez courageuses, je vais vous le dire. Et, moi, j'ai toujours aussi beaucoup de plaisir à discuter avec les gens de l'AFEAS parce que vous n'avez pas peur de prendre des positions, et ça vous caractérise particulièrement.
Moi, je veux vous parler... je vais faire... je vais poursuivre sur le sujet du député de Chomedey sur la prostitution parce que vous en tenez beaucoup compte. Et une phrase entre autres que vous dites: «La prostitution reste un système d'exploitation sexuelle dont les victimes sont les femmes et les hommes.»Une voix: ...
Mme Poirier:«...les femmes et les enfants», excusez.
Une voix: Et quelques hommes...
Mme Poirier: Je vous laisse le préciser, M. le député. J'aimerais ça vous entendre sur: Pour vous, quelles sont les solutions? Parce que, bon, on sait bien que c'est le Code criminel, là, qui gère ce dossier-là. Mais ici, au Québec, s'il y avait des moyens qu'on pouvait prendre dans un prochain plan que la ministre présentera, quels sont les moyens et quelles sont les actions? Parce que ce que l'on voit actuellement de l'application du Code criminel, c'est qu'on criminalise les prostituées. Il n'y a pas de solution en bout de ligne pour elles: on les met en prison, on les ressort puis elles retournent dans la rue, on les recriminalise, etc.
Les moyens mis autour de ces femmes-là ne sont pas présents. Et il y a des groupes qui dénoncent... On va avoir la concertation des luttes pour l'égalité qui dénonce la prostitution. On va avoir... Il y a des groupes qui ne sont pas là, exemple, Stella, qui est un groupe qui valorise l'industrie du sexe. Alors, on a vraiment des tendances, dans notre société, diverses.
Mais j'aimerais entendre l'AFEAS sur comment vous lisez actuellement le phénomène de la prostitution? Mais quels moyens vous aimeriez qu'un gouvernement prenne pour venir en aide à ces femmes-là et aux enfants qui sont victimes de ce phénomène-là?
Mme Bourget (Madeleine): Je pense que...
Le Président (M. Bernier): Mme Bourget.
Mme Bourget (Madeleine): Oui. On a parlé tantôt de Maria Mourani; elle a quand même déposé un projet de loi là-dessus. Je pense, en gros, que le moyen qu'elle veut suggérer, c'est qu'il y ait des peines consécutives. Autrement dit, il va se passer... Si on arrête les proxénètes vraiment, pas juste le côté prostituées, mais les proxénètes, qu'ils aient des peines cumulatives aussi et qu'on puisse aller saisir les biens, les profits qu'ils ont eus grâce aux sous qu'ils ont gagnés sur le dos des prostituées finalement et prendre ces sous-là -- c'est ce qu'on pensait -- prendre cet argent-là pour justement placer ça pour aider les gens, aider les personnes qui ont à se prostituer, ça, je pense que ce serait un très bon moyen pour...
Mme Poirier: Mais plus...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Poirier: Excusez. Mais, plus concrètement... Actuellement, le Code criminel fait en sorte que le seul moyen pour un policier, c'est de faire l'arrestation d'une prostituée si elle dérange sur la voie publique, si elle cause des incivilités, etc. Ce n'est pas nécessairement le fait de faire de la prostitution, ce n'est pas criminel; c'est vraiment de déranger, c'est ce qui est criminalisé présentement.
Et, pour vous, qu'est-ce qui devrait être fait? Parce que, moi, je suis d'accord, là, qu'on augmente les peines pour les proxénètes. Ça, c'est une chose. Mais la personne, la femme qui est dans la rue, qui se prostitue pour vivre, pour... On a un phénomène de narcoprostitution qui est omniprésent à Montréal. Moi, dans mon comté, c'est vraiment quelque chose qui est vraiment un phénomène important et qui est vraiment quelque chose qui est dommageable pas nécessairement juste pour ces filles-là mais pour l'ensemble des citoyens parce que ça cause des incivilités.
Qu'est-ce qu'on peut faire pour venir en aide à ces filles-là qui... dans le modèle où elles vivent, elles n'ont pas d'autre choix que de faire de la prostitution?
Le Président (M. Bernier): Mme Duval.
**(12 h 50)**Mme Duval (Céline): Effectivement, ce qu'on disait, c'est que la prostitution, ce n'est pas une décision sereine et volontaire, là; il y a des choses autour. Il faut donc améliorer les éléments sociaux et économiques autour de ces femmes-là parce que, si elles arrivent à la prostitution, c'est fort probablement parce qu'économiquement ou socialement elles sont dépourvues, elles n'ont pas autour d'elles un réseau pour les aider, elles n'ont pas de finances, elles n'ont pas de moyens et ce qu'elles ont pour s'en sortir, c'est ça. Et souvent elles sont prises dans un réseau justement dont elles ne peuvent pas sortir.
C'est pour ça qu'il faut trouver aussi le moyen de leur permettre de mieux vivre. On sait qu'à Québec il y a La Maison de Marthe qui fait ça, mais il y a très peu de centres qui permettent à des femmes d'avoir une écoute et puis d'avoir les possibilités de s'en sortir. Il n'y a pas de fonds. Les personnes qui sont formées pour travailler dans les centres de victimes de violence n'ont pas la formation pour travailler non plus avec ce genre de personnes. C'est autre chose. Ça prendrait d'autres structures pour les aider parce que la problématique n'est pas du tout la même.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Duval (Céline): Donc, si on pouvait établir des centres ou des lieux, donner une formation à des gens capables d'aider ces personnes-là, je pense que ce serait déjà un début.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée.
Mme Poirier: Alors, j'espère que la ministre va retenir cette recommandation de l'AFEAS, sage, qui est justement de favoriser le travail auprès des femmes prostituées et d'instaurer, parce que ça n'existe pas effectivement, des... Il y a des maisons d'hébergement pour femmes, mais, dès qu'elles sont en état d'intoxication, on ne les accepte pas, sauf dans un ou deux cas à Montréal. Et, si, en particulier, elles sont des femmes prostituées, elles sont encore plus exclues de ces maisons d'hébergement là. Alors, il faut vraiment réfléchir à un modèle d'hébergement pour femmes qui sont dans la rue et qui n'ont pas d'autres moyens. Alors, moi, je retiens cette recommandation-là et je souhaite que la ministre la retienne dans son plan d'action futur.
J'aimerais maintenant vous parler... Puis ça, ça a un lien avec la publicité sexiste. La ministre a fait l'annonce d'une charte québécoise, c'est une charte volontaire, que, nous, on dénonçait. Elle n'avait pas assez de poignée dessus, mais elle existe, cette charte-là. Vous recommandez de rendre public le nom des entreprises et de confier un mandat au Conseil du statut d'analyser les communications et, dans le fond, d'identifier les stéréotypes qui y sont véhiculés.
Je trouve ça très intéressant parce qu'actuellement c'est la coalition pour les publicités sexistes qui fait un peu cette dénonciation-là et qui alarme tout un réseau des groupes de femmes, et qui, dans le fond, vient dénoncer lorsqu'il y a une publicité que l'on dit sexiste, et qui fait comme une espèce de ligne de lettres pour que l'ensemble des groupes de femmes écrivent à l'entreprise, à l'industrie qui fait une publicité sexiste.
J'aimerais voir comment, vous, vous articulez ça. Quand vous dites que la charte devrait rendre public le nom des entreprises, est-ce qu'on voudrait faire... à ce moment-là, est-ce qu'on pense qu'on pourrait faire une corrélation entre le fait que certaines entreprises se donnent une bonne image en signant la charte, mais que, de l'autre côté, elles véhiculent justement des messages sexistes?
Le Président (M. Bernier): Mme Duval.
Mme Duval (Céline): Il faudrait voir parce que, si une entreprise s'est inscrite, en principe, elle voulait respecter les lignes de la charte, mais le fait-elle? Ça, il n'y a personne pour le vérifier.
Mme Poirier: Est-ce que vous pensez qu'il pourrait... parce qu'on ne l'a pas dans le bilan en tant que tel. Mais il n'y a pas de bilan de la charte en tant que tel. Elle est jeune, la charte. Elle a deux ans seulement. Est-ce que, dans le bilan, il aurait pu justement y avoir un bilan justement des signataires, à savoir ceux qui ont signé cette charte-là, est-ce qu'ils ont eu des comportements irréprochables, dans le fond?
Mme Duval (Céline): Bien, en fait, si on connaît les signataires, on peut soi-même s'en rendre compte aussi.
Mme Poirier: Et est-ce que vous avez des doutes?
Mme Duval (Céline): Non.
Mme Poirier: D'accord. C'est au moins ça.
Le Président (M. Bernier): C'est clair.
Mme Poirier: Parce que, si vous le mentionnez, je me suis dit: Elle a peut-être un doute sur un ou des signataires qui auraient peut-être signé la charte et qui malheureusement ont eu des comportements pas adéquats en ligne avec les données de la charte.
Mme Duval (Céline): C'est parce qu'habituellement, quand on émet un règlement, on s'arrange pour être capable de le vérifier.
Mme Poirier: Donc, pour vous, dans le futur plan d'action, il devrait y avoir une validation en suivi aux signataires de la charte, à savoir s'ils suivent le mandat de cette charte-là.
Mme Duval (Céline): ...
Mme Poirier: D'accord. Et le mandat au Conseil du statut de la femme, comment vous le voyez, ce mandat-là?
Le Président (M. Bernier): Mme Duval.
Mme Duval (Céline): Vous vous rappelez, il y a déjà eu des concours, là, avec les meilleures publicités, les moins bonnes ou les prix citron, oui, tout ça. Bien, ça pourrait être quelque chose du genre aussi qui fait que c'est à la fois incitant pour les gens en général de s'inscrire puis de dire: J'aime ou je n'aime pas pour telle ou telle raison. Et ça n'a pas besoin d'être scientifique et, bon, ça peut être les gens qui se rendent compte, qui voient très bien que ça n'a pas d'allure puis qu'ils puissent le dénoncer.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Duval. On vous nommera peut-être présidente de ce concours. M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Merci, M. le Président. Mme Duval, Mme Bourget, c'est toujours un plaisir de discuter avec les gens de l'AFEAS. Tout d'abord, vous féliciter pour votre mémoire, en particulier pour l'annexe qui, elle, est jointe à la fin avec l'explication exhaustive, là, de chacune des recommandations que vous voulez exprimer dans chacun des points.
Écoutez, j'aimerais ça pouvoir profiter de votre expertise aujourd'hui de terrain parce que votre association puis votre organisation est partout à travers les régions du Québec et dans plusieurs municipalités. J'aimerais voir avec vous si, dans l'ensemble des points qui ont été mentionnés puis qui ont été aussi repris par les autres organisations avant vous à l'intérieur de cette commission, il y a, par vos associations, une d'entre elles qui ressort de façon plus criante ou de façon plus urgente. Et est-ce que l'AFEAS a remarqué, dans le cadre, là, d'un prochain plan d'action, un des points en particulier sur lequel le gouvernement du Québec devrait mettre l'emphase plus particulièrement dans l'ensemble de ce qui est recommandé?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Bourget? Mme Duval?
Mme Duval (Céline): Nous, c'est toujours la reconnaissance du travail invisible, donc aider les aidantes, revenir pour aider les parents. C'est notre gros dossier, le travail invisible, alors... Et surtout, dans les régions éloignées, où il n'y a pas beaucoup de services, où les services de santé sont pauvres puis qu'il n'y a pas toujours des CLSC, ce sont vraiment les femmes qui, en grande partie, s'occupent des soins de santé des personnes en perte d'autonomie ou malades. Alors, c'est vraiment notre gros dossier, le travail invisible, puis aider les aidantes.
Mme Bourget (Madeleine): Oui, c'est ça, on le mentionne d'ailleurs. On le mentionne dans l'annexe, si vous regardez, là. Essayez de dépanner aussi les aidantes, parce qu'accompagner des gens en perte d'autonomie, tout ça... la personne qui accompagne, bien, physiquement, moralement, à un moment donné, elle a besoin d'aide. Alors, on aimerait ça, là, qu'il y ait des services de dépannage et de remplacement pour ces gens-là. Ça serait important.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Terrebonne, il vous reste environ une minute.
M. Traversy: Je vous remercie, M. le Président. C'était ma seule question.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Il y a une des recommandations à la fin -- je reste un peu dans les mêmes sujets, là -- «refus d'immigration aux familles polygames au Québec et au Canada». C'est quand même une recommandation forte, là, en tant que telle. Il y a un débat actuellement, un débat devant la cour en Colombie-Britannique. On sait que ça existe, là, au Québec, des familles polygames, là, on le sait, tout le monde le sait. On n'a pas état véritablement du nombre, en tant que tel.
Pour vous, comment vous voyez, là, ce phénomène-là de la polygamie au Québec, là? On n'a pas beaucoup de temps, mais juste vous entendre sur... Pour l'AFEAS, ça veut dire quoi?
Le Président (M. Bernier): 30 secondes.
Mme Duval (Céline): On n'en a pas discuté suffisamment pour que je puisse vous donner l'avis des membres. Parce que, là, je vous donnerais mon avis, puis ça ne marche pas, là: il faut que je vous donne l'avis des membres. Alors, ça, je ne peux pas vous en parler.
Le Président (M. Bernier): C'est beau. Donc, moi, je veux vous remercier, Mme Duval, Mme Bourget, de l'Association féminine d'éducation et d'action sociale. Merci de votre participation fort enrichissante.
Écoutez, compte tenu de l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures. Et j'inviterais les membres de la commission à être ponctuels parce que nous avons un après-midi également très, très chargé. Donc, je suspends nos travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 14 h 6)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux.
Donc, la commission est réunie afin de tenir des consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait -- Vers un deuxième plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Donc, nous allons poursuivre nos travaux. Cet après-midi, nous débutons nos travaux avec le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail et le Comité consultatif Femmes.
Pour les députés participant à cette commission, les mémoires sont sur la cote 009M et 013M. Donc, ce sont deux mémoires, deux organismes. Et les organismes vont se partager le temps de présentation. Donc, sans plus tarder, j'inviterais la porte-parole à s'identifier et à présenter les personnes qui l'accompagnent. À vous la parole pour 15 minutes.
Conseil d'intervention pour l'accès des
femmes au travail (CIAFT) et Comité
consultatif Femmes en développement
de la main-d'oeuvre (CCF)
Mme Goulet (Nathalie): Bonjour à toutes et à tous les membres de la Commission des relations avec les citoyens. M. le Président, Mme la ministre, bonjour. Je vous remercie de l'invitation à venir déposer un mémoire sur notre bilan du plan d'action de la politique gouvernementale d'égalité qui se termine, ainsi que notre analyse et nos recommandations pour l'élaboration du prochain plan d'action.
Mon nom est Nathalie Goulet. Je suis directrice du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, le CIAFT. Je vais présenter le mémoire du CIAFT pendant cinq minutes et, ensuite, je laisserai la parole à Mélanie Martin, à ma gauche, qui est une participante actuellement au service d'un organisme spécialisé en intégration des femmes à l'emploi de la région de Québec, le Centre-Étape. Elle a accepté de venir témoigner de son parcours personnel et de sa réorientation professionnelle avec beaucoup de générosité, et nous la remercions chaleureusement.
Par la suite, c'est ma collègue Christiane Carle, à ma droite, qui présentera, à titre de présidente, le mémoire du Comité consultatif Femmes en développement de la main-d'oeuvre, qui relève de la commission des partenaires du marché du travail. Christiane est également directrice de l'organisme CIME, le Centre d'intégration au marché de l'emploi, qui accompagne les femmes de l'Estrie dans leur cheminement vers le marché du travail et qui est aussi un organisme porteur d'une multitude de projets fort intéressants, notamment dans le dossier des métiers majoritairement masculins dans sa région.
À sa droite, il y a Mme Hélène Cornellier, ma collègue, coordonnatrice du Comité consultatif Femmes, qui se joindra à nous pour répondre à vos questions par la suite.
Alors, le CIAFT est un organisme de défense collective des droits des femmes au travail qui existe depuis 1982 et qui, à ce titre, a été témoin et acteur des changements qui ont touché les Québécoises au travail depuis les 30 dernières années. Nous avons été de tous les dossiers: les programmes d'accès à l'égalité; l'équité salariale, surtout au nom des travailleuses non syndiquées; le développement de la main-d'oeuvre féminine, entre autres comme mandataire du comité consultatif Femmes depuis 1996; la conciliation famille-travail et la place des femmes dans le développement régional.
Nous avons intitulé notre mémoire Entre plafond de verre et plancher collant: vers un marché du travail inclusif et égalitaire pour les femmes du Québec pour faire image -- c'est sûr -- mais surtout parce que c'est exactement là où nous en sommes, et c'est là où le prochain plan d'action devrait nous mener: vers un marché du travail plus inclusif et égalitaire, et ce, notamment pour les femmes éloignées du marché du travail.
Avant d'aborder les cinq grands volets pour lesquels nous avons dressé un bilan, une analyse et des recommandations, nous voulons spécifier que nous partageons avec le Groupe des 13, qui est la grande table de concertation des regroupements nationaux des groupes de femmes au Québec, un ensemble de recommandations préalables concernant les approches en condition féminine, les instruments de gouvernance et l'analyse différenciée selon les sexes. Vous les trouverez dans le premier chapitre de notre mémoire.
**(14 h 10)** J'attire votre attention particulièrement sur l'approche spécifique qui mérite d'être poursuivie et financée adéquatement, surtout, surtout à l'heure où les groupes de défense des droits des femmes au Québec subissent des coupes sombres dans leurs budgets causées par le gouvernement Harper et Condition féminine Canada. Vous verrez plus loin combien cette approche spécifique donne des résultats pour aider les femmes dans leur intégration ou leur réintégration en emploi.
Sur le développement de la main-d'oeuvre féminine et l'amélioration de l'employabilité des femmes, la CIAFT partage les recommandations du comité consultatif que ma collègue Christiane va présenter. La réactualisation dans le dernier plan de la stratégie d'intervention à l'égard de la main-d'oeuvre féminine est une belle réalisation portée par le comité consultatif, Emploi-Québec et la CPMT. Mais la plus belle stratégie n'est rien s'il n'y a pas, sur le terrain, des mesures de longue durée qui aident véritablement les femmes à risque de sous-emploi.
Par exemple, seulement 50 % des mères monoparentales ayant un enfant de moins de trois ans sont en emploi comparativement à 73 % des mères dans une famille biparentale; seulement 31 % des femmes handicapées occupent un emploi, 55 % des femmes issues des minorités visibles, 46 % des immigrantes récentes et 54 % des femmes autochtones.
On croit à tort que toutes les femmes aujourd'hui ont diplômées et s'en sortent bien dans les professions libérales: c'est faux. 25 % de la population n'a aucun diplôme, autant des femmes que des hommes. Même pourcentage. On a l'impression que les campagnes gouvernementales... à voir les campagnes en place, que le décrochage est un phénomène uniquement masculin. Par ailleurs, seulement 25 % des femmes sans diplôme d'études secondaires ont un emploi comparativement à 43 % des hommes dans la même situation. Presque 20 points d'écart. À elle seule, cette statistique plaide pour le renforcissement majeur de l'aide spécifique apportée aux femmes dans leur retour vers l'emploi.
Nous attirons aussi votre attention sur la fin prochaine du Pacte pour l'emploi qui a été mis en oeuvre, en 2008, pour contrer les effets de la crise économique. Le pacte constituait le premier investissement majeur dans les programmes d'emploi depuis la création d'Emploi-Québec, et l'annonce de sa non-reconduction limiterait considérablement les moyens d'action des organismes en employabilité auprès des femmes les plus vulnérables. Mais l'employabilité, c'est une chose, et on ne peut pas non plus faire l'économie d'actions visant aussi des changements structurels sur le marché du travail: hausse du salaire minimum, réforme de la Loi des normes du travail entre autres pour encadrer le travail atypique et favoriser la conciliation famille-travail. La dernière réforme des normes remonte à 2002, et il y en a à peu près une tous les 10 ans environ au Québec.
Le deuxième volet de notre mémoire porte sur l'équité salariale, qui est actuellement un dossier chaud. Nous allons participer d'ailleurs, le 1er février prochain, à la commission parlementaire sur le projet de loi n° 130 visant, entre autres, l'abolition de la Commission de l'équité salariale.
Après avoir adopté, en 2009, une loi donnant un nouveau souffle à l'équité salariale, le gouvernement annonce, moins d'un an plus tard, l'abolition de son principal instrument d'application. Cette décision prise dans la foulée du dernier budget représente à nos yeux un recul inacceptable pour les travailleuses et est absolument illogique dans le contexte où un important consensus social entoure la Loi sur l'équité salariale au Québec.
L'autre dossier majeur, à notre avis, que nous devons prioriser dans le prochain plan d'action concerne l'accès des femmes aux métiers majoritairement masculins. C'est une lutte parallèle à l'équité salariale, mais tout aussi importante et qui est restée dans l'ombre ces dernières années, parce que le marché du travail au Québec est encore profondément divisé selon le sexe. Sur les 520 professions répertoriées par la Classification nationale des professions -- il y en a 500, 520 chaque année -- on remarque que la moitié des femmes se retrouve dans 20 professions seulement. Et, parmi les 50 programmes professionnels et techniques dits d'avenir par Emploi-Québec, 43 sur 50 sont majoritairement masculins.
Alors, sur cette question, nous avons mis en annexe de notre mémoire une série de tableaux statistiques qui sont très parlants de même qu'un encadré spécifique sur la situation des femmes travaillant dans l'industrie de la construction qui est un exemple, on pourrait dire, ultime où sévissent la discrimination et le harcèlement.
Selon nous, les actions dans ce dossier devraient toucher en priorité les femmes diplômées de secondaire V et moins qui occupent toujours un petit nombre d'emplois de services peu payants et peu qualifiés, alors que les hommes d'un même niveau de scolarité occupent des emplois plus variés, mieux payés et davantage qualifiés. Je donne un seul exemple: avec un D.E.P. une préposée aux bénéficiaires gagne en moyenne 28 000 $ par année et un électromécanicien, 45 000 $. Vous trouverez, dans la section 4 de notre mémoire, un ensemble de recommandations à ce sujet.
Finalement, nous estimons que le financement spécifique des 16 organismes spécialisés en développement de la main-d'oeuvre féminine est, à nos yeux, l'une des grandes réalisations du dernier plan d'action et elle mérite d'être poursuivie. 1,2 million de dollars annuellement ont été investis depuis quatre ans et ont permis aux organismes d'employabilité pour femmes d'agir à la fois sur l'employabilité des femmes mais aussi sur leurs conditions de vie.
Le témoignage de Mélanie, à qui je donne la parole maintenant, va vous montrer très clairement que ces organismes, présents dans 11 régions du Québec, font un travail qui doit être reconnu et valorisé. Des possibilités de développement doivent aussi être étudiées dans les régions qui ne sont pas actuellement desservies -- six sur 17 -- ce à quoi nous espérons pouvoir travailler comme partenaire dans le prochain plan d'action. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Martin.
Mme Martin (Mélanie): Oui. Pardon. Alors, bonjour à tous et à toutes. Moi, je suis ici aujourd'hui pour vous parler de mon cheminement personnel, puis comment le Centre-Étape m'a aidée dans mon cheminement.
Alors, pendant huit ans, moi, j'étais travailleuse autonome, j'étais joaillière à Montréal, puis, suite à une séparation, je suis devenue monoparentale et j'ai déménagé à Québec. J'ai un garçon de quatre ans, bon, ce qui veut dire que je travaille moins, donc moins de revenus. J'ai persisté dans mon travail et je me suis bien vite rendu compte que ce n'était plus possible d'être travailleuse autonome. Je n'avais pas d'assurance emploi, alors j'ai eu de l'aide sociale. Puis, un jour, en me rendant à mon centre local d'emploi, j'ai rencontré une dame qui m'a donné un dépliant du Centre-Étape. Alors, je leur ai téléphoné, j'ai pris connaissance avec eux, j'ai pris rendez-vous puis, ensemble, on a évalué mes besoins, puis je me suis inscrite à une session d'orientation de trois semaines en mars 2010.
Bon, on a fait le tour de mes aptitudes, mes champs d'intérêt, mes valeurs, le bilan de mes expériences passées. J'ai exploré des professions, j'ai eu beaucoup d'information sur le marché du travail, j'ai rencontré des gens, fait des visites. C'était très complet, là. Puis mon choix s'est arrêté sur technicienne en orthèse et prothèse. Bon, pourquoi ce choix-là par rapport à mon métier? Ça rejoignait ma créativité, mon autonomie, la minutie, mon sens des relations interpersonnelles puis, en plus, c'est un métier qui est très aidant.
Alors, ça faisait très longtemps que je n'étais pas retournée aux études. Je me suis inscrite en juillet 2010 pour mettre toutes les chances de mon côté. C'est une petite formation de quatre jours. Ça s'appelle: Apprivoiser les études. Ils m'ont donné vraiment des bons trucs pratiques dans la vie de tous les jours pour réussir mes études, bien étudier, que je ne connaissais pas, que je mets en pratique et qui marchent très bien. Bon, puis c'était pour me préparer à mon travail d'étudiante.
Puis, c'est ça, j'ai commencé mes études à Mérici en août dernier. Je suis sur les prêts-bourses. Bien, je ne vous cacherai rien en vous disant que j'ai un budget très serré. Puis, tout au long de mon école, j'ai un suivi, avec le Centre-Étape, téléphonique avec mon orienteur pour lui dire qu'est-ce qu'il en est. Elle me donne des trucs, puis, si j'ai un pépin, je peux l'appeler n'importe quand, elle va me donner des trucs. Bon, la vie d'étudiante, c'est exigeant puis surtout que je suis seule avec mon enfant. Ce que je trouve très difficile, c'est concilier l'horaire de la garderie et l'école, parce que la garderie ferme à 5 h 30, mais mon école finit à 6 heures. Tu sais, ce n'est pas évident.
Bon, après les études, qu'est-ce qui est intéressant, c'est que le Centre-Étape peut aussi me donner un coup de pouce pour ma recherche d'emploi. Dans mon domaine que j'ai choisi, il y a un gros taux de placement, là, je pense que ça va être correct, mais je sais qu'ils sont là pour... si j'ai de besoin.
Bon, pour conclure, bien, moi, je suis bien contente que mon chemin ait croisé le Centre-Étape. Je me sens sur la bonne voie. Bien, je me sens sur le bon chemin, la bonne voie, puis je voudrais les remercier. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, Mme Carle, il vous reste environ deux minutes.
**(14 h 20)**Mme Carle (Christiane): Oui. Alors, bonjour et merci de nous entendre. Moi, j'ai bien confiance que tu vas réussir ta trajectoire professionnelle.
Le Comité consultatif Femmes en développement de la main-d'oeuvre relève de la Commission des partenaires du marché du travail. Le comité a pour mandat de promouvoir et d'appuyer l'intégration des femmes sur le marché du travail ainsi que leur maintien en emploi. Le comité formule des analyses et des recommandations à la Commission des partenaires, au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale ainsi qu'à l'agence Emploi-Québec.
Notre comité regroupe des délégués des 17 conseils régionaux des partenaires du marché du travail, des responsables de la condition féminine des diverses centrales syndicales et des représentantes de divers organismes dédiés à l'employabilité des femmes. Au cours des deux dernières années, nous avons collaboré notamment à la mise à jour de la stratégie d'intervention d'Emploi-Québec à l'égard de la main-d'oeuvre féminine.
Ce que nous sommes venus vous dire aujourd'hui, c'est que l'égalité économique entre les sexes est une obligation sociale, et nous allons vous signifier les actions que nous jugeons prioritaires pour ce faire. Il faut d'emblée souligner que le gouvernement et ses partenaires disposent actuellement d'un outil extraordinaire pour évaluer et améliorer la situation économique des femmes. Cet outil, c'est la stratégie d'intervention d'Emploi-Québec à l'égard de la main-d'oeuvre féminine. Mais voilà, cependant, il faut encore s'assurer que les principes et les orientations de cette stratégie s'articulent concrètement dans chacune des régions et sous-régions du Québec, qu'elles s'articulent à l'échelle des MRC. Et, à ce chapitre, il reste encore beaucoup à faire. Souvent, les villes centres sont mieux desservies que les municipalités périphériques. Voilà pourquoi nous recommandons que soient mis en place des moyens pour aider les régions à intégrer la stratégie dans leur plan d'action annuel, et ce, de façon équitable entre les régions.
Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure, s'il vous plaît, madame.
Mme Carle (Christiane): Pardon?
Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure, à terminer.
Mme Carle (Christiane): Déjà?
Le Président (M. Bernier): Déjà, oui, malheureusement.
Mme Carle (Christiane): Alors, nous souhaitons donc que la stratégie soit connue des acteurs du milieu et qu'il y ait un financement adéquat qui en découle. Enfin, nous reprenons les revendications du CIAFT concernant l'accès des femmes aux métiers traditionnellement masculins. C'est très important que les femmes puissent diversifier leurs choix professionnels. C'est un enjeu pour faire face au marché du travail. Et autant on parle de l'importance de la parité dans les lieux décisionnels, on souhaite aussi que cette parité s'articule au Conseil des partenaires du marché du travail et dans ses conseils régionaux.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Merci pour votre présentation. Mme la ministre, pour un bloc d'environ 20 minutes, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Merci d'être parmi nous aujourd'hui et félicitations d'avoir eu cette idée de nous amener quelqu'un qui pouvait nous parler de son expérience personnelle. Je pense que c'est toujours intéressant de voir comment les gens cheminent dans certains programmes et de connaître les expériences personnelles avec les choses qui marchent bien, les choses qui marchent moins bien, la beauté de l'expérience, puis ça, je trouve ça... et je vous souhaite de poursuivre et je pense que vous avez la détermination pour y arriver. Alors, félicitations!
Donc, j'aimerais tout simplement... j'aimerais aussi, avant de poursuivre, faire une... corriger un peu ce que vous avez dit sur la question de la Commission de l'équité salariale. La Commission de l'équité salariale n'a pas été abolie. La Commission de l'équité salariale a été intégrée à la Commission des normes du travail, et la Commission des normes du travail va se nommer la Commission des normes du travail et de l'équité. Alors, la commission acquiert tous les droits qui... et assume toutes les responsabilités de la Commission de l'équité salariale, et le personnel également. Donc, je pense que, là-dessus, vous pouvez être rassurés. Le travail en équité salariale qui a été amorcé il y a plusieurs années va se poursuivre. On n'est pas... On arrive à un moment très important, crucial, et il faut poursuivre, poursuivre ces efforts-là, et il y a la détermination du gouvernement de poursuivre ces efforts-là. Je sais qu'on véhicule beaucoup que ça a été une abolition, mais je réitère -- je l'ai fait ce matin et je vais le faire à toutes les fois qu'on va nous arriver avec cette affirmation-là qui est erronée: la Commission de l'équité salariale n'est pas abolie.
Sur la question des... Évidemment, l'autonomie financière, on le sait... Je pense que c'est bien, bien clair, avoir une autonomie financière, c'est aussi l'autonomie dans ses choix de vie et dans sa façon, aussi, de poursuivre sur le plan professionnel, et ça peut permettre, l'autonomie financière... Bien sûr, à un certain moment donné, il y a peut-être des décisions qui ne se prennent pas parce qu'on va se dire: Bien, est-ce que j'ai les moyens de le faire? Est-ce que j'ai... Qu'est-ce que ça va... Qu'est-ce que ça veut dire sur le plan financier, pour moi, si je prends telle voie ou telle autre? Alors, c'est vraiment important d'axer là-dessus. Vous avez dit aussi, à juste titre, que la question du décrochage scolaire, on parle beaucoup des garçons, c'est vrai, les garçons sont très touchés par le décrochage scolaire, il faut vraiment travailler sur cette notion-là, mais il y a aussi des jeunes filles. Puis, moi, ça me fait toujours de la peine quand je vois ça, une jeune fille qui décide que... elle abandonne ses études, alors qu'elle a plein de talents, plein de potentiel, il y a plein de choses qui s'offriraient si ses études se poursuivaient, et elle ne poursuit pas les études. Il faut vraiment travailler là-dessus pour insister sur la scolarisation, même s'il y a des gains importants qui ont été faits.
Il faut aussi améliorer la situation des femmes dans des emplois non traditionnels, tout comme la situation des hommes aussi dans des emplois non traditionnels. Il y a des hommes qui voudraient aller vers des emplois non traditionnels et qui se sentent freinés parce que, bon, il va y avoir la moquerie puis ça coûte... les salaires sont moins élevés. Puis c'est la même chose pour les femmes vers des emplois non traditionnels. Il y a encore des préjugés, puis elles sont encore... elles se font encore... On prétend, si une femme travaille dans le milieu de la construction, qu'elle n'est pas vraiment une femme, alors que les métiers de la construction devraient être ouverts encore plus, puis on devrait avoir des mesures incitatives.
J'aimerais que vous nous parliez des constats préliminaires de cette étude sur... Vous faites une étude sur les 15 dernières années dans le domaine de l'évolution justement des gains dans... et j'aimerais que vous me donniez certains éléments. Est-ce que vous êtes capable d'en parler, d'en parler davantage devant cette commission?
Mme Goulet (Nathalie): Je peux répondre.
Le Président (M. Bernier): Mme Goulet.
Mme Goulet (Nathalie): Oui. Actuellement, on a reçu le mandat, le CIAFT, dans le dernier plan d'action d'ailleurs, par Emploi-Québec, le mandat de mener une étude sur l'état de la concertation et des services en non-traditionnel au Québec. Et ce qu'on voit... Enfin, il y a plusieurs problèmes, puis on en parle, je pense, en détail dans notre mémoire. Mais on en a contre un peu l'approche par projet du non-traditionnel au Québec. Il y a deux choses qui manquent, là, c'est les actions structurantes de longue durée en non-traditionnel. Actuellement, on ne finance que des projets novateurs. Alors, il se crée de beaux projets en région, un peu partout. Souvent, la roue se recrée, en Gaspésie, ailleurs, et les... c'est ponctuel, ça dure un an, et il n'y a pas de financement après, pour travailler structurellement, pour faire des liens avec les entreprises, etc. Donc, beaucoup d'initiatives intéressantes depuis 15 ans, et on en a, là, mais rien qui perdure dans le temps. Le non-traditionnel, il va falloir, puis on le sait, travailler d'arrache-pied et année après année.
Écoutez, je peux rien que vous donner une anecdote à ce sujet-là. Je ne me souviens plus quel groupe d'employabilité disait qu'en région ils avaient appelé, à un moment donné -- ils ont une expertise en non-traditionnel, parce qu'il n'y en a pas partout, c'est une expertise très pointue, très précieuse -- ils avaient appelé leur centre de formation professionnelle pour venir faire une présentation sur la mixité dans les milieux de travail, en emploi, et le responsable du centre de formation professionnelle leur avait répondu: Écoutez, vous êtes venus l'année dernière, hein?
Alors, c'est comme ça, là. Il ne faut plus voir le non-traditionnel comme des projets à durée limitée parce qu'on ne changera jamais rien. D'ailleurs, les chiffres le montrent, hein? Quand on regarde les grandes statistiques des femmes sur le marché du travail, là, on sent qu'il y a des évolutions à beaucoup d'endroits. Mais là où ça stagne, mais les deux pieds dans le béton, là, et où ça recule même dans certains secteurs, l'informatique, le génie, c'est dans les métiers non traditionnels. C'est un enjeu pour nous. On ne voulait pas dire que c'était un enjeu prioritaire, on ne voulait pas dire ça, parce que l'équité salariale, c'est l'autre enjeu, là, valoriser les métiers traditionnellement féminins, mais il va falloir un sérieux coup de barre, notamment dans l'approche de financement par projet.
Il y a aussi un sérieux manque de concertation régional, et là, je pourrais passer la parole à ma collègue qui connaît bien sa région, l'Estrie, en non-traditionnel.
Mme St-Pierre: C'est une réponse trop longue. On a beaucoup de questions à vous poser.
Mme Goulet (Nathalie): Je laisse la parole à Christiane.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre, est-ce que vous avez des éléments à ajouter?
Mme St-Pierre: Je voulais juste dire: On a beaucoup de questions, mes collègues ont des questions à vous poser. Alors, si on pouvait échanger pour qu'on puisse poser aussi des questions.
Le Président (M. Bernier): D'avoir des réponses un peu plus courtes pour qu'on puisse avoir...
Mme St-Pierre: Oui, c'est ça.
Le Président (M. Bernier): ...un plus grand nombre d'échanges. Donc, Mme Carle.
**(14 h 30)**Mme Carle (Christiane): Oui. Concernant justement le besoin de concertation pour soutenir des initiatives dans le non-traditionnel, je vais donner un exemple positif: grâce aux ententes spécifiques qui ont eu cours dans les régions, dans le cadre de l'accès à l'égalité, du plan d'action pour l'égalité, en Estrie, par exemple, on a mené, pendant trois ans, une modélisation du parcours d'une femme à partir du moment où elle entre en formation professionnelle non traditionnelle, à son passage en stage, à son intégration en emploi, et on a modélisé cette approche-là. Alors, il a fallu pour ça, évidemment, que le partenariat, la collaboration entre l'organisme spécifique en main-d'oeuvre féminine, l'organisme communautaire, que la CRE, que le MELS, qu'Emploi-Québec travaillent dans le même sens.
Parce que, quand Nathalie disait: Dans certaines régions, les commissions scolaires disaient: Pourquoi il faudrait répéter plus qu'une fois par cinq ans?, justement, nous, par cette concertation-là, on a amené notre collaboration qui va durer, puisqu'une fois le projet pilote terminé maintenant c'est un acquis que l'organisme va aller animer des ateliers dans les centres de formation professionnelle avec les élèves et aussi avec les enseignants.
Parce qu'on ne peut pas juste travailler avec la femme, il faut travailler avec les acteurs du milieu, avec les entreprises. Et là il faut faire de la gestion de pratique, la gestion de changement de mentalité, et il faut travailler sur les modifications des pratiques organisationnelles. On est dans des ressources humaines, là.
Le Président (M. Bernier): Merci, madame. Donc, M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: Merci, M. le Président. Mme Martin, toutes nos félicitations, franchement, c'est une très belle prestation de votre part, et vous en êtes... vous avez fait ça avec brio et avec classe.
Je sais que, Mme Carle, vous avez eu très peu de temps pour nous livrer le contenu de votre mémoire. Nous aurons l'opportunité cet après-midi d'entendre la représentante de la fédération des syndicats nationaux. Et je veux vous parler des métiers de la construction un peu parce que c'est un secteur pour les hommes qui est très bien rémunéré. J'entends, depuis ce matin, qu'on veut aller dans du non- traditionnel, dans du payant ou du non-payant, là, et ça, il semblerait que, pour les hommes, c'est un secteur qui est payant.
Quelles stratégies, selon vous, il faudrait mettre de l'avant pour que les programmes d'accès à l'égalité dans le secteur de la construction, là, ça puisse être couronné de succès et qu'il faudrait peut-être penser, quitte à ce qu'ils soient dans le deuxième plan d'action? Je veux vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier): Mme Carle.
Mme Carle (Christiane): Ça tombe bien puisqu'en Estrie on organise, on pilote un projet assez novateur sur l'accès des femmes aux métiers de la construction. Et là on travaille avec les acteurs terrain et avec les instances régionales de la CCQ comme de l'APCHQ, les syndicats. C'est clair qu'actuellement on a tracé le diagnostic, et les employeurs nous disent qu'ils sont très peu outillés pour favoriser l'accès et le maintien des femmes dans le secteur. Les conseillers syndicaux nous disent la même chose. Et, quand on se parle autant en privé qu'on est en train de se parler là, tout le monde reconnaît qu'il y a de la grosse résistance et qu'on est dans le domaine des stéréotypes, et les gens admettent une culture macho.
Moi, ce que je dirais, c'est que les instances sont tout à fait conscientes qu'il faut un coup de barre parce que, de toute façon, on va y arriver, on va arriver dans une société... ou on veut travailler dans une société égalitaire. Et il y a peut-être moins de pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur de la construction que dans d'autres secteurs, mais, dans certains métiers de la construction, il commence à y avoir une rareté.
Donc, oui, ça prend sans doute une relance du plan d'action à l'égalité qui avait été fait à la CCQ, mais il va falloir accompagner les syndicats et les entrepreneurs pour les aider à mettre en place des pratiques de gestion plus inclusives. Ce sont des entrepreneurs, des développeurs; ce ne sont pas des gestionnaires de ressources humaines. Alors, ils nous disent: Je n'ai aucune idée par quel bout prendre ça. Mais ils sont intéressés à être accompagnés, encore faut-il aussi que ça devienne une priorité.
Nous, notre projet a été freiné avec toute la séquence de négociation dans le secteur de la construction. On s'est aperçus tout à coup que l'égalité hommes-femmes tombait un petit peu plus bas dans la liste des priorités. Alors, il va falloir garder une constance, il va falloir que les messages soient cohérents, que, oui, l'instance qu'est la CCQ descende son message -- ce qu'ils sont venus faire en Estrie au mois de novembre dernier -- que les associations paritaires et patronales relaient le message jusqu'aux entreprises, jusqu'aux entreprises en construction, mais aussi que le message gouvernemental soit cohérent. Sans redondance du message, je pense qu'on n'y arrivera pas.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Carle. M. le député de Chomedey?
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): M. le député de Lévis? Allez-y.
M. Lehouillier: Oui. Alors, moi, je voudrais... D'abord, félicitations pour votre mémoire, c'est fort intéressant, puis c'est fort intéressant de vous entendre également.
Moi, je suis sur les grands défis qui ont été identifiés dans le document L'égalité entre les femmes et les hommes. Donc, il y a les grands défis -- et je reviens souvent là-dessus, parce que, pour moi, c'est une question importante -- sur la division des rôles sociaux selon le sexe, surtout avec la venue d'enfants. On parle des métiers non traditionnels, puis on sait que, dans les métiers non traditionnels, que ce soit à la machinerie lourde ou autre, ça se passe souvent l'été, à partir du mois de mai jusqu'à septembre, octobre, novembre. Il y en a de plus en plus l'hiver, mais, règle générale, il y a un pic dans la saison. Et là c'est le nombre d'heures maximum. Donc, les gens font beaucoup, beaucoup, beaucoup d'heures. Et on voit que, lorsqu'il y a des enfants qui s'ajoutent, le taux d'emploi des mères baisse de façon assez importante. On parle de 77 %, même. Donc, c'est quand même assez important.
Alors, ma question est la suivante, c'est le gros défi à relever, mais souvent on a l'impression, même quand on parle... Moi, je suis déjà grand-père puis, des fois, je regarde d'une génération à l'autre, puis on se rend compte des fois que plus ça change, plus c'est pareil.
Alors, j'aimerais ça vous entendre sur comment on ferait, et dans un plan d'action, là, futur plan d'action, pour susciter cette plus grande implication des pères dans la sphère familiale, ce qui aurait, en même temps, pour effet justement peut-être de donner plus de disponibilité aux femmes pour avoir accès aux métiers non traditionnels, etc. Là, tu sais, il y a comme un enchaînement autour de ça. Et ça m'apparaît être peut-être l'une des questions les plus importantes dans les défis à relever. Alors voilà, j'aimerais ça vous entendre.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci. Mme Carle ou Mme Goulet? Mme Goulet.
Mme Goulet (Nathalie): On a beaucoup réfléchi à ça au CIAFT ces dernières années. On a même mis en... On a réfléchi avec la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec et on est préoccupés par la conciliation famille-travail, surtout chez les travailleurs et travailleuses précaires. Sincèrement, plus on a de moyens, souvent, c'est plus facile de concilier famille-travail. Et on a vraiment regardé le problème par tous les bouts et on en est arrivés à des recommandations dans une plateforme que vous trouvez sur notre site, plateforme féministe, en conciliation famille-travail. Et on l'a intitulé Personne ne doit choisir entre la famille et le travail.
Alors, pour ce faire, il faut que les travailleurs et les travailleuses aient plus de contrôle sur leur temps de travail. Actuellement, il y a la flexibilité des entreprises qui rejoint la flexibilité qui... qui confronte la flexibilité exigée par les travailleurs et travailleuses pour concilier la famille et le travail. Ça ne marche pas, c'est extrêmement tendu, et notamment dans les secteurs au bas de l'échelle, les emplois de service.
Il y avait une statistique intéressante que j'ai lue, à un moment... puis je la mets, je pense, dans le mémoire: dans la moitié des ménages au Québec, il y a au moins une personne, un parent, qui travaille le soir, la fin de semaine ou la nuit. Alors, c'est un temps que beaucoup de sociologues appellent le temps asocial, ça ne marche pas quand une famille... travailler le soir, là. Alors, ça tire de partout.
Et, pour ce faire, on en est arrivés à la conclusion qu'il fallait une réforme des normes du travail. Il faut aider les travailleurs et travailleuses au bas de l'échelle à avoir un meilleur contrôle sur leur temps. On a une série de recommandations dans notre mémoire: les congés familiaux qui sont présents... Il y a 10 congés familiaux dans la loi des normes, mais ils ne sont pas rémunérés. Alors, pour les gens, les prendre, c'est s'appauvrir davantage, et notamment pour les femmes. C'est vraiment ce à quoi on est arrivés, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Lévis.
M. Lehouillier: Est-ce que vous croyez...
Une voix: ...
M. Lehouillier: Ah, vous aviez quelque chose à ajouter, oui?
Le Président (M. Bernier): Allez-y, Mme Carle.
**(14 h 40)**Mme Carle (Christiane): Et ça fait aussi le lien avec les métiers non traditionnels. Parce que, dans les entreprises... Il y a des entreprises qui donnent d'excellentes conditions salariales, qui sont dans les secteurs de pointe, dans les créneaux ACCORD, mais la main-d'oeuvre dans ces secteurs-là est presque exclusivement masculine. Et on constate que, dans les secteurs très largement masculins, les entreprises vont être moins portées à mettre en place des politiques de conciliation travail-famille parce qu'on est encore dans la croyance limitative que, la conciliation, ça regarde les mères, et, comme c'est des hommes qui travaillent là, bien... Et les hommes vont être moins proactifs à demander des politiques de conciliation travail-famille.
Pourtant, il y a des incitatifs pour les entreprises à mettre en place des mesures et des politiques de conciliation. Quand ils sont soutenus ou accompagnés par un consultant dans les mises en oeuvre de politiques, ils peuvent recevoir une contribution allant jusqu'à 50 % des coûts de consultation. Mais même ça ne semble pas tellement suffire. Alors, moi, je pense que, là aussi, il faut indiquer, d'un point de vue gouvernemental, par où s'en va la société. Parce que souvent les entreprises -- on a l'exemple avec l'équité salariale -- vont y aller quand il y a des dates butoirs parce que, là, les incitatifs existent. Peut-être qu'il pourrait y en d'avoir d'autres; il semble que ça ne suffit pas. Alors, c'est sûr que plus on va avoir un marché du travail où aura une pleine mixité hommes-femmes, plus ça va faire des pressions à ce que la société permette cet équilibre-là entre la vie familiale et la vie professionnelle.
M. Lehouillier: Au-delà des...
Le Président (M. Bernier): M. le député de Lévis, une courte question, une courte réponse. Allez-y.
M. Lehouillier: O.K. Au-delà des normes du travail -- si vous proposez un changement des normes du travail -- moi, des fois, ce que j'ai comme impression, c'est: Est-ce que notre système de valeurs change tant que ça, tu sais, par rapport à ça? Et est-ce qu'un gouvernement à lui seul peut réussir ça? Alors ça, c'est la question qui m'apparaît fondamentale parce qu'il m'arrive souvent même... Parce que souvent on donnait comme facteur que c'est le gagne-pain qui ramène le plus de salaire qui... règle générale, lui, va travailler puis l'autre personne reste à la maison. Mais souvent... J'ai vu encore récemment des cas où la femme gagne plus cher et, malgré tout, c'est l'homme qui travaille à plein temps puis, elle, elle est obligée de faire des concessions sur son travail.
Alors, je voulais vous entendre là-dessus parce que c'est très profond, le défi qu'il y a à relever et, à mon avis, il n'est pas que monétaire. Donc, je me dis -- puis, tantôt, j'ai posé la question -- est-ce que, les mouvements de femmes, vous êtes en contact avec les instances syndicales, etc.? Bon, on posera la question tout à l'heure, mais, pour moi, ça m'apparaît fondamental. Est-ce qu'il y a quelque chose qui se passe actuellement de ce côté-là? Ou qu'est-ce que vous verriez dans le plan d'action?
Le Président (M. Bernier): Vous avez une minute, Mme Goulet.
Mme Goulet (Nathalie): Je répondrais juste que c'est vrai que, dans les couples, quand il y a une équité salariale ou, en tout cas, les deux conjoints gagnent sensiblement le même salaire, la négociation se passe différemment aussi. Sincèrement, je crois que c'est un calcul normal, là, qui est fait dans les ménages, que la femme se retire plus facilement. Et c'était la variable d'ajustement, là, quand il y a des problèmes. Mais -- mon Dieu, je perds le fil, là...
M. Lehouillier: Les changements de valeurs, là.
Une voix: Les changements de mentalité dans le couple.
Mme Goulet (Nathalie): C'est lié, hein? Quand on parle de discrimination systémique, ce n'est pas pour rien, là, en ce qui concerne la place des femmes dans le marché du travail. Tant qu'elles ne seront pas présentes dans les métiers où elles sont minoritaires... Actuellement, on estime que ça prend entre 15 % et 35 % de femmes, là, pour qu'un milieu de travail change, là. Il faut des programmes d'accès à l'égalité, c'est ça...
Le Président (M. Bernier): Merci. Nous allons maintenant aller du côté du groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Mesdames, bonjour, bienvenue à la commission. Je remarque, depuis ce matin, en effet, que tous les mémoires sont intéressants et que c'est vraiment de très, très bon niveau, de très bonne qualité. Alors, je vous en félicite. Et, moi aussi, j'ai écouté attentivement le témoignage de Mme Martin, là, et je vois les résultats, dans le fond, concrets de certaines de vos activités et de vos actions, et c'est extrêmement important.
Je suis assez fascinée, là, par ce dossier-là de métiers non traditionnels, là, qui est revenu à plusieurs reprises dans les discussions depuis ce matin. Et je vois qu'on parle aussi beaucoup, quand on parle de métiers non traditionnels -- vous allez me dire pourquoi -- de la construction.
Moi, je pensais à autre chose, vous allez me dire si c'est vrai, mais autre chose de très, très différent. Il y a, à Montréal, sur l'île de Montréal puis ici même aussi à Québec, beaucoup d'entreprises du multimédia puis qui sont venues s'installer au Québec à cause de bonnes politiques gouvernementales. Je pense particulièrement à celles de Bernard Landry, en tout cas à l'époque où moi-même j'étais au gouvernement. Et que ce soit Ubisoft, ou Electronic Arts, ou tous ces organismes-là, il me semble que c'est des jobs extraordinaires, ça, puis c'est payant, justement, puis que ça... c'est des emplois d'avenir, hein, des emplois d'avenir. Et puis je me demandais si les femmes comme programmeurs, comme, tu sais, dans tous ces secteurs-là de l'informatique mais très pointue, dans un sens, est-ce qu'elles sont vraiment présentes?
Et je vous pose la question d'autant plus que j'ai -- je vous le dis franchement, là -- j'ai eu un choc en fin de semaine, j'ai regardé en DVD le film Social Network, qui est l'histoire, vraie ou non, là, je n'en sais rien -- il paraît que, lui, il n'a pas été content quand il a vu ce film-là, là -- mais du fondateur de Facebook, un tout jeune homme, là, qui est milliardaire actuellement. Donc, un tout jeune homme. Il est dans la plus prestigieuse université du monde, qui est Harvard. Je vous le dis, regardez ça pour voir le rôle des femmes dans la vie de ces jeunes hommes là: c'est le vide sidéral, et c'est terrifiant.
Et là je me disais: Mais, coudon, il y a quelque chose qui ne va pas dans ce film-là, que ça soit vrai ou non, là -- je ne le sais pas si c'est une fiction ou la réalité -- mais, en tout cas, qu'on dépeigne ce milieu-là, de Napster, de Facebook, enfin, de tout ça, de la manière dont on le décrit, avec le rôle qu'on donne aux femmes. On est en 2011, puis ces jeunes femmes là ont 20... dans la vingtaine, comme ces jeunes hommes. Eh bien, je me disais justement: Je ne sais pas où elles sont, les femmes, là-dedans. D'abord, celles qui acceptent de jouer ce rôle-là, là, en 2011, là, c'est un peu particulier, mais on a des gros problèmes. On aura des gros problèmes dans l'avenir si les femmes se considèrent comme celles qui sont dans ce film-là, là. Puis ça on est à la fine pointe, finalement, de la modernité, à quelque part.
Alors, ça, c'est vraiment ma première question: Dans tout ce milieu, cet environnement du multimédia, où c'est très, très bien payé, puis c'est des... ça doit être des jobs intéressants, là -- je ne connais pas ça très bien -- est-ce que les femmes sont là ou est-ce qu'elles sont très absentes?
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Goulet (Nathalie): Je peux répondre pour commencer...
Le Président (M. Bernier): Mme Goulet.
Mme Goulet (Nathalie): Excusez-moi, M. le Président. Ma collègue, elle pourra poursuivre. Effectivement, vous avez raison: le non-traditionnel, c'est partout où il y a moins de 33 % de femmes. Alors, j'ai donné la stat tout à l'heure, là, mais c'est une grande vastitude, multitude d'emplois sur le marché du travail. L'exemple ultime, c'est la construction, qui a des problèmes systémiques, pas seulement de... par rapport à la présence des femmes, mais c'est autre chose, d'ailleurs qui est encadré par une loi tout à fait différente du travail... des règles du travail.
On a reculé, dans ce secteur-là, de l'informatique, du multimédia. Au début des années quatre-vingt-dix, il y avait eu des campagnes de promotion. Il y avait à peu près le tiers de la main-d'oeuvre. C'était presque un métier qui était plus devenu non traditionnel pour les femmes: 30 % de femmes. Et on a reculé. Je n'ai pas la statistique avec moi, mais je pense que ça a reculé d'au moins 10 points de pourcentage, là, certainement. C'est les pratiques organisationnelles aussi, de ce milieu-là, qui n'aident pas.
Et ce que ça révèle, dans le fond, l'exemple que vous nous donnez, c'est que, dès qu'il y a un investissement, que ça soit le programme d'infrastructure, investissement gouvernemental, les créneaux encore en région, là, les créneaux d'excellence -- les régions se dotent de créneaux économiques à valoriser avec la concertation et des moyens -- il faut qu'il y ait des programmes d'accès à l'égalité pour les femmes, assortis: accès à l'égalité pour les femmes mais aussi pour les personnes immigrantes, pour les jeunes. Ça va aider beaucoup de monde que les programmes d'accès à l'égalité... qui ne sont pas des mesures incitatives; il faut des résultats.
Le gouvernement a un rôle extrêmement important à faire pour donner le fameux coup de barre dont on parlait tout à l'heure. Et il le faudrait, il le faudrait, qu'on fasse des diagnostics sectoriels quand on investit de l'argent dans un secteur. Sinon, ça va n'aider que des hommes qui ont déjà une situation privilégiée, et notamment ceux qui ont des D.E.P., D.E.C. et qui forment la majorité de la main-d'oeuvre actuellement.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Carle, vous voulez ajouter?
**(14 h 50)**Mme Carle (Christiane): Nous, ce qu'on constate, c'est qu'effectivement les femmes ne sont actuellement pas bien positionnées pour faire face aux enjeux du marché du travail qui s'en vient, où on parle de main-d'oeuvre qualifiée, où on parle d'une grande partie des emplois qui vont demander une formation professionnelle et technique.
On a parlé de stéréotypes sociaux. Dans le bilan du plan d'action, on le dit souvent: On a encore à faire face à des stéréotypes sociaux. Donc, les femmes et les hommes ont intériorisé des comportements et des choix professionnels qui vont avec la façon dont historiquement et encore aujourd'hui on élève les garçons et les filles. Les femmes vont plutôt se diriger vers la relation avec les personnes et être moins portées vers tout ce qui concerne la machinerie. Plus on va travailler sur les stéréotypes sociaux, plus il y aura... les hommes et les femmes vont se promener dans ces deux sphères-là.
Cependant, ce qu'on peut constater, c'est: Oui, il y a des gars qui ont peur des préjugés s'ils s'en vont travailler dans certains domaines, mais les hommes se retrouvent dans presque tous les types d'emploi. Il n'y a pas 40 %, 50 % des types d'emploi dans lesquels les hommes ne sont pas présents, mais c'est le cas actuellement... En Estrie, 40 % des métiers considérés d'avenir sont non traditionnels pour les femmes, et on a calculé qu'elles forment moins de 10 % dans la plupart de ces emplois-là. Et, dans le cas des garçons, là, c'est deux ou trois métiers où ils ne sont pas plus du tiers. Alors, c'est vraiment un enjeu féminin.
C'est un enjeu, de travailler sur les stéréotypes sociaux. Et ça, ça passe par l'éducation. Dans le mémoire du CIAFT... et le comité consultatif, on le dit aussi: les programmes qui forment les conseillers en orientation, les conseillères d'orientation, on ne parle plus, dans ces programmes-là, de la réalité, de la socialisation qui est faite différemment des gars et des filles et qui amène effectivement une situation économique défavorable pour les femmes; on ne traite plus de ces questions-là dans les programmes d'orientation. Alors, il y a beaucoup de travail à faire.
Quand on dit que la stratégie, elle est transversale, c'est ce qu'on veut dire: ça ne peut pas être traité en silo d'un ministère à l'autre. Il faut que les ministères se parlent, il faut que, dans les régions, les instances qui doivent avoir des plans stratégiques... Les CRE ont des plans stratégiques, Emploi-Québec a un plan stratégique, le ministère des Affaires sociales, l'Éducation, tout ce qui bouge a des plans stratégiques, mais ces plans-là ne convergent pas vers une stratégie commune pour s'attaquer aux stéréotypes sociaux et mettre en place des vraies actions qui vont amener une égalité économique. L'autre étape du plan d'action, là, c'est ça.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Je vous écoutais, là, puis je me disais... Dans le fond, ce matin, spontanément, j'ai dit, dans mes remarques préliminaires: On a, ou dans la société, ou quand on lit dans les médias, ou quand on écoute ses amis -- ou, enfin, c'est les filles surtout de ses amis, puisqu'à l'âge que j'ai là, c'est donc des femmes qui ont 30 ans aujourd'hui -- ...de dire: Bien, dans le fond, c'est réglé, cette question-là, là, puis que la société elle-même a comme conclu que... Puis, tu sais, être féministe aujourd'hui, là, tu sais, je vous entends, là, puis vous avez une plateforme féministe puis, moi, je me définis comme féministe mais... Bon. Quand tu arrives à quelque part puis tu dis: Ah! Ha! Moi, je suis féministe, je veux dire, bon, bien là, tout le monde a un mouvement de recul en disant: C'est qui, cette chipie?
Alors, c'est sûr qu'il y a un problème, là, de société, comme si on avait, en effet, laissé tomber à quelque part ce... alors que, dans les années quatre-vingt ou dans les années soixante-dix puis... Bon, il y avait là le vent en poupe du mouvement féministe qui disait: Oui, on va changer le monde, d'ailleurs. Mais là ce que vous me dites, dans le fond, c'est que, de ce que moi, en tout cas, j'avais pu percevoir, il y a encore beaucoup, beaucoup... Je lis là justement vos métiers, là, traditionnels, bon, de part et d'autre, etc. Il y a encore énormément, sur ce plan-là...
Puis vous dites: C'est les stéréotypes, ça commence, tu sais, au berceau. Élever donc les garçons et les filles d'une certaine façon pour que justement ces rôles-là soient... puis qu'on soit dans une vraie mixité. Enfin, je trouve ça très important, mais c'est ça que ça me fait venir à l'esprit comme commentaire: Peut-être que trop rapidement on a conclu... ou, en tout cas, on a donné l'impression que c'est, disons, la perception qu'il y a dans la société.
Je vais juste terminer une dernière question en ce qui me concerne. Concernant la Commission de l'équité salariale justement, là, je voudrais juste vous faire préciser... Tout ce que vous écrivez est bien écrit, c'est... Bon, alors, j'imagine que vous connaissez le sens des mots que vous avez choisis. Page 15, là, vous dites: «Le gouvernement a déposé -- c'est le dernier paragraphe de la page 15 -- à la dernière session le projet de loi n° 130, [bon,] dans lequel il annonce -- et là vous dites -- l'abolition de la Commission de l'équité salariale et son transfert à la Commission des normes du travail.» Tantôt, la ministre vous a posé une question là-dessus, c'est-à-dire qu'elle a dit, elle a réaffirmé sa position à elle et celle du gouvernement.
Mais, vous, quand vous dites l'abolition, ça veut dire quoi dans votre esprit? Le fait... c'est un transfert mais qui abolit quoi? Et puis, donc, comment vous voyez ça? Alors, j'aimerais ça vous entendre.
Le Président (M. Bernier): Mme Goulet.
Mme Goulet (Nathalie): Oui. Depuis le mois de mars cette année, ça a causé beaucoup d'inquiétude, ça, avant que le projet de loi n° 130 soit déposé. On estime à peu près que la commission a déjà... Parce que, d'abord, il avait été prévu qu'elle soit transférée à la commission des droits. Ça impliquait des conséquences pour le personnel de la commission, qui perdait son ancienneté, etc. On estime qu'elle a perdu entre 15 % et 20 % de ses effectifs déjà, notamment dans une grande partie de son équipe d'enquête et de vérification. Donc, il y a eu... Le projet de loi est à l'étude, nous allons, le CIAFT et aussi la Coalition en faveur de l'équité salariale, qui est une très, très large coalition des expertes, des syndicats et du mouvement des femmes au Québec qu'on a cru bon de remettre sur pied, elle datait des années 80, parce qu'on voyait une urgence à cette question-là... Et donc le CIAFT et la coalition vont déposer un mémoire extrêmement détaillé le 1er février prochain à la commission qui étudie le projet de loi n° 130.
Évidemment, il y aurait un transfert. Ça va avoir des implications, c'est certain, si la Commission de l'équité salariale est transférée à la Commission des normes du travail. À la page 16, je décris ça. Il y aura des pertes, effectivement. La CES, tel que le projet de loi est formulé actuellement, perdrait son rôle de conseil au ministre, perdrait son pouvoir réglementaire également. On se rappelle qu'elle a émis des règlements dans les dernières années concernant, par exemple, les sans comparateur masculin, etc., pour favoriser les démarches.
Elle a également beaucoup de travail, de pain sur la planche, la commission. Il y a de nouvelles échéances qui sont données aux entreprises pour les prochaines années, pour les entreprises nouvellement assujetties qui ont 10 personnes salariées. C'est complexe, là, mais elle en a, du travail, au moins jusqu'en 2016 certainement. On arrive à cette conclusion-là. Et, en 2016, il y aura... il devrait y avoir un rapport de fait et on pourrait, suite à des consultations, voir s'il y aurait matière à faire quelque changement que ce soit.
On décrit vraiment les pertes, là, dans le mémoire que je n'ai pas amené avec moi, là, vu qu'il n'est pas public actuellement, mais qu'on va présenter très, très bientôt. Et il y a la moitié des entreprises... le verre à moitié vide, là, ou à moitié plein. Mais il y a encore énormément de travail à faire. Le maintien de l'équité, notamment dans les entreprises... les petites entreprises, les 10-49 salariés, est un enjeu majeur. On a très peu de données sur la question. Il faut que la Commission de l'équité salariale remette en force son programme de vérification dans les entreprises, qu'elle a délaissé depuis quelques années.
Il y a énormément d'enjeux en équité salariale, alors ce n'est vraiment pas le temps d'abolir et/ou de transférer la commission, avec toutes les inquiétudes, et les bouleversements, et les coûts également, parce que l'objectif est quand même d'économiser sur la question. Nous, on croit qu'il y aurait des coûts également financiers, budgétaires à un transfert, éventuellement.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Carle (Christiane): J'aurais un complément.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, un bloc d'environ...
Mme Carle (Christiane): ...un complément.
Mme Poirier: Je pense que Mme Carle avait un complément.
Mme Goulet (Nathalie): Madame... Ma collègue a un complément.
Le Président (M. Bernier): Vous voulez... Vous avez un complément? Allez-y, madame...
Mme Carle (Christiane): On parlait tout à l'heure de donner l'impression que tout est réglé. Vous savez à quel point c'est important, les perceptions, puis défaire des messages, c'est compliqué. Le fait d'annoncer que la commission serait transférée, ça a pu être entendu par des employeurs comme: Ouf! On va avoir la paix, on va avoir un répit, ça va être aboli, cette affaire-là, puis on n'aura pas besoin de faire nos plans d'égalité. Et ça renforce... ça pourrait renforcer aussi encore l'idée de: Bien, tout est réglé, c'est réglé, l'équité salariale, c'est parce que c'est réglé qu'on n'a plus besoin de maintenir la commission.
Alors, moi, je ne veux pas critiquer la position qui a été prise, je voulais simplement amener le fait que, là-dedans aussi, il va y avoir des perceptions... Et on sait qu'il y a plusieurs entreprises qui ne sont pas embarquées dans le processus de gaieté de coeur, et, tout d'un coup, cet automne, ça a comme donné l'impression -- et cet hiver: Ouf! On va peut-être avoir un répit, on ne sera peut-être pas obligés, puis... Ils se sont aperçu que c'est une affaire bien trop... puis c'est: On est en train de rajouter trop d'affaires pour les femmes. Alors, moi, je dis: Faites attention aux contremessages.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour environ trois minutes.
**(15 heures)**Mme Poirier: Merci, M. le Président. L'exemple significatif des femmes dans l'industrie de la construction que vous citez à la page 22, entre autres avec le plan qui avait été institué en 1996 et qui prévoyait 2 % de femmes parmi la main-d'oeuvre active, est que le résultat, finalement, est 1,2 %, donc très, très, très décevant.
J'aimerais ça que vous puissiez nous expliquer, puis je sais que Mme Carle travaille activement là-dessus dans son milieu, mais de façon plus globale, des réelles actions qui pourraient être entreprises à court terme. Bon, vous nous dites: On refait la roue parce qu'on est toujours en projet pilote, en tant que tel, mais, s'il y avait deux, trois actions à mettre sur pied rapidement pour s'assurer qu'il y a de la pérennité et du maintien... Parce que ce qui est inquiétant, c'est qu'on montre que 70 % des femmes quittent dans les cinq premières années, comparativement à 36 %. Ça, c'est inquiétant. Ça veut dire qu'on les forme mais qu'elles quittent du double du nombre d'hommes ces métiers-là. Alors, j'aimerais ça vous entendre sur des actions concrètes qu'un plan d'action pourrait reprendre et dire: Nous, on s'enligne sur ces deux, trois actions là, parce qu'on veut des résultats tangibles rapidement.
Le Président (M. Bernier): Vous avez environ deux minutes pour conclure sur ce sujet.
Mme Carle (Christiane): Je peux y aller. Il y a deux éléments. Je pense que la relance du plan d'action à l'égalité dans le secteur de la construction m'apparaît un geste à poser. Deuxièmement, de regarder l'avenue d'avoir des incitatifs pour les employeurs qui vont embaucher des femmes dans le secteur de la construction. Est-ce que c'est un crédit d'impôt? Alors, à ce moment-là, ça peut aider à l'augmentation du nombre de femmes et, bien sûr, soutenir les pratiques de gestion des employeurs, mais aussi faire connaître ces métiers-là, parce que les filles les méconnaissent. Quand on dit 1,2 %, puis le nombre de filles qui étudient dans les métiers de la construction... Actuellement, 2010-2009, dans toute l'Estrie, il y a huit filles qui étudient dans les métiers de la construction. Alors, c'est sûr qu'on ne peut pas demander, du jour au lendemain, 200 femmes de plus en Estrie. Pourtant, les filles réussissent très bien. On a eu des témoignages de formateurs, d'enseignants qui disent: Les filles réussissent très bien. Elles vont avoir beaucoup plus de difficultés à se placer et, compte tenu de la culture qui se passe actuellement, elles ne restent... intimidation, ce n'est pas un contexte, actuellement, qui favorise qui que ce soit comme nouveau travailleur. Ce n'est pas attirant pour un nouveau travailleur ou une nouvelle travailleuse d'aller dans ce secteur-là, dans le contexte actuel. Mais, si on ne parlait pas de ce contexte-là, moi, je pense qu'un plan d'action à l'égalité et des incitatifs pour lancer la roue seraient déjà des actions, là, immédiates à faire.
Le Président (M. Bernier): Oui, une courte...
Mme Goulet (Nathalie): Très court.
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y.
Mme Goulet (Nathalie): Je voudrais juste attirer votre attention que nous avons un mémoire aussi. On a un comité spécial de travailleuses avec des membres individuelles qui sont des travailleuses de la construction et une collègue à moi qui coordonne le comité. Nous avons un mémoire d'écrit, je devais... C'est une erreur, à la page 22, je devais l'annexer ce mémoire au présent document. Mais on a appris -- une heureuse nouvelle -- qu'elles sont invitées, c'est les dernières à passer en commission parlementaire ici, le 4 février prochain. Vous allez rencontrer donc la coordonnatrice du comité, qui est une opératrice de machinerie lourde qui connaît très, très bien les chantiers et qui connaît aussi la santé et sécurité, qui est une mentor aussi, donc qui a sa propre expérience, mais l'expérience de beaucoup de femmes à travers le Québec et qui, actuellement, mène une étude sur des... de témoignages également, là, qu'elle va recueillir auprès des travailleuses de la construction.
Le Président (M. Bernier): Et, merci, Mme Goulet. Et effectivement ces gens-là... ce groupe-là va être convoqué pour le 4 de février. Donc, je vous remercie Mme Goulet, Mme Carle, Mme Martin, Mme Cornellier, de votre présentation au nom du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail et le Comité consultatif des femmes. Je vais suspendre quelques instants pour permettre au groupe suivant de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 4)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Bernier): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous allons poursuivre ceux-ci avec le Comité national de la condition féminine de la Confédération des syndicats nationaux. Donc, je souhaite la bienvenue à Mme Carbonneau. Bienvenue. Je souhaite la bienvenue également à Mme Marie-France Benoît qui vous accompagne.
La façon de procéder: vous avez un 15 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, chaque groupe parlementaire a 15 minutes d'échange avec vous. Donc, merci beaucoup. Je vous donne la parole immédiatement.
Comité national de la condition
féminine de la Confédération
des syndicats nationaux (CSN)
Mme Carbonneau (Claudette): Ah, merci, M. le Président. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés. Alors, merci de nous recevoir sur une question de société importante et une question sur laquelle la CSN, depuis nombre d'années, non seulement démontre de grandes préoccupations, mais tente de faire sa part et d'agir aussi pour atteindre une véritable égalité entre les femmes et les hommes.
Alors, avant d'aborder le coeur du mémoire, à savoir les six orientations, vous me permettrez quelques remarques préliminaires, d'abord, pour dire que nous apprécions beaucoup le fondement des deux politiques, autant celle qui se termine que celle qui se dessine. Et je pense particulièrement à la définition qui est retenue pour définir les orientations, à savoir une orientation très ciblée autour des questions d'égalité de droit, de responsabilité et de possibilité. Je pense qu'il s'agit là d'une définition qui est tout à fait ambitieuse, qui a le mérite de ne pas gommer les différences entre les sexes et qui demeure bien ancrée dans le réel, qui va jusqu'à la vie quotidienne et qui aborde la question du nécessaire changement des mentalités.
Vous me permettrez aussi d'apporter quelques remarques concernant la gouvernance dont on s'est dotée sur les questions d'égalité pour les femmes ici, au Québec, le ministère, le Secrétariat à la condition féminine, le Conseil du statut de la femme. Je pense qu'il s'agit là d'institutions tout à fait pertinentes, adéquates, utiles, pour lesquelles on se contenterait de faire une seule recommandation: plus de ressources si on veut leur permettre, effectivement, de jouer adéquatement leur rôle.
Ma dernière remarque d'ordre préliminaire, c'est de souligner effectivement que l'approche en condition féminine se résume à trois approches: une approche dite spécifique, une approche transversale, une approche sociétale. Je pense que c'est l'idéal et qu'il faut vraiment garder ces trois approches-là comme étant un tout. C'est pertinent. S'il y a quelque chose à renforcer, c'est peut-être un recours plus systématique à l'analyse différenciée selon les sexes.
**(15 h 10)** Pour ce qui est des six grandes orientations, je vous dirais que, globalement, la CSN souscrit à ces orientations. Et je me permettrai de les passer une à une en ajoutant un certain nombre de suggestions à chacune d'entre elles pour tenter de les bonifier. Mais, avant d'aborder chacune des orientations... Je pense que tout ne tient pas à la justesse de ces orientations. S'il y a un message sur lequel on veut insister devant cette commission, c'est bien la nécessité de nous doter des moyens, des ressources nécessaires pour atteindre les objectifs qu'on poursuit, d'être très attentifs à la cohérence des gestes posés par le gouvernement. Il n'y a rien de pire que de sentir qu'on s'en va dans la bonne direction mais qu'à cause d'autres gestes on arrive à être en pleine contradiction, et, loin d'avancer, on peut même provoquer un certain nombre de reculs. Et je dis aussi que nous sommes particulièrement inquiets, à la CSN, sur les mesures qui se dessinent pour accompagner la sortie de crise. Il nous apparaît que plusieurs des mesures, notamment détenues dans le dernier budget, frappent particulièrement lourdement le groupe des femmes.
Pour ce qui est de la question des ressources, O.K., ce qu'on constate, c'est que pour l'année 2010-2011, c'est 10 millions de dollars. C'est beaucoup moins que 1 % de l'ensemble du budget. On peut se dire -- et je l'entends: On est en crise, on tente de rationaliser nos dépenses, mais force est de constater que, même durant les périodes plus fastes au plan économique, les ressources étaient souvent bien minces.
Au plan de la cohérence, je voudrais attirer l'attention du gouvernement sur les nécessaires investissements dans les soins, dans les services à domicile, sur la faiblesse du plan d'action de lutte à la pauvreté et à l'exclusion, sur la loi n° 130 et ce transfert que l'autre groupe a évoqué de la Commission de l'équité salariale vers la Commission des normes, et sur les places manquantes, promises par le gouvernement, dans les services de garde. Je pense qu'il y a là, là, vraiment, des points qui, à mon sens, sont parfaitement incohérents avec plusieurs des orientations mises de l'avant dans la politique.
Pour ce qui est de la sortie de crise, nous nous déclarons particulièrement inquiets de la contribution santé, hein, que ce soit un même montant imposé à tout le monde, que tu gagnes 14 000 $ ou un demi-million de dollars. On sait que ça frappe particulièrement les femmes, compte tenu, toujours, de leur retard au plan de la rémunération.
Aussi, dans le dernier budget, tout le plan de compression budgétaire, alors, ça attaque, bien sûr, beaucoup les femmes dans les services publics comme travailleuses, mais aussi comme usagères. Les services publics permettent une égalité des chances, permettent de redistribuer, si on veut, l'accès à l'égalité, et faire des compressions dans ce secteur-là risque de faire reculer particulièrement les femmes.
Je voudrais aussi, bien sûr, dénoncer les velléités de privatisation à l'égard des services publics, cette idée de remonter les droits de scolarité, et les approches, aussi, en termes de financement, où on se rabat de plus en plus vers des sources régressives de revenus. On demandera aussi, à cet égard-là, malgré les restrictions apportées au budget, qu'un appui financier aux organismes de défense des droits des femmes et de promotion de l'égalité soit maintenu.
Maintenant, je vais passer en revue rapidement la question de chacune des orientations. La première, qui concerne les modèles, les comportements égalitaires, il s'agit là d'une intervention tout à fait juste, tout à fait pertinente. C'est des sujets difficiles, mais essentiels: on s'attaque aux mentalités, on s'attaque à la culture. Il faut le faire. Les stratégies visées dans la politique nous apparaissent utiles, mais peut-être pas suffisantes, et on souhaite, à cet égard-là, vous faire un certain nombre de suggestions à l'effet de les compléter. Alors, je pense, entre autres, à une nécessaire concertation avec le ministère de l'Éducation, des Loisirs et des Sports en vue d'inscrire dans les programmes scolaires des cours d'éducation à la sexualité dans une perspective de rapports égalitaires, non sexistes et non hétérosexistes, et une demande aussi, que l'on réitère, à l'effet que le gouvernement légifère pour contrer la publicité sexiste. Je pense qu'en cette matière-là on ne peut pas s'en remettre à l'autorégulation. Des fois, on est un petit peu horrifié de voir revenir ce qu'on pensait réglé à l'intérieur de la société.
Pour ce qui est de la deuxième orientation, celle sur l'égalité économique entre les femmes et les hommes, encore là, nous constatons qu'il y a eu des progrès indéniables dans la société québécoise mais qu'il reste du chemin à parcourir. Nous partageons pleinement les trois objectifs énoncés à l'intérieur de la politique, à savoir l'intégration en emploi, les efforts à maintenir, les femmes en emploi et la nécessité de sécuriser le parcours de celles-ci tout au long de leur vie.
Nos remarques vont porter sur un certain nombre de politiques passées sur lesquelles nous appelons une fois de plus à la cohérence. Et là je pense à toute la nécessité de la formation de la main-d'oeuvre. Je reviens sur une vieille mesure qui avait été imposée autour de 2003, qui a été de déassujettir la petite entreprise de son obligation d'investir le 1 % dans la formation professionnelle des femmes, et je pense qu'il faut corriger le tir. Il y a énormément de femmes dans les petites entreprises; il y a beaucoup de femmes immigrantes là-dedans. On ne peut pas vivre avec ce type de politique. Je pense que, s'il y a un effort de redressement à faire, c'est bien celui-là.
Au niveau aussi de l'éducation, on table beaucoup sur des programmes importants. Je pense à Excelle Science, je pense à Chapeau, les filles!. C'est très bien, mais n'ajoutons pas la bévue d'augmenter les droits de scolarité. Je pense que ça ferait reculer tout le monde.
Pour des politiques en matière de groupes particuliers, bien, on veut saluer les efforts qui ont été faits par le gouvernement du Québec autour des ORSEF, hein, pour favoriser l'entrepreneuriat au féminin. Nous souhaitons vraiment le maintien de ce programme-là et nous insistons, un peu comme les collègues qui nous ont précédées, sur l'importance d'agir avec beaucoup de fermeté sur l'inclusion des femmes dans les métiers majoritairement occupés par des hommes. C'est beaucoup une question non seulement d'accès à ces emplois, mais de maintien en emploi. Et nous appelons aussi à un renforcement de l'encadrement et du soutien apporté aux travailleuses immigrantes.
Nous croyons qu'en termes de régulation du marché du travail il y a des sujets qui sont bien de notre temps qui doivent attirer notre attention, et j'en cible deux, je vous dirais, en particulier. D'une part, il me semble que la Loi des normes du travail doit interdire la discrimination fondée sur les statuts différents à l'intérieur d'un même milieu de travail. On va se dire, là, ce n'est pas normal que tu aies des salaires, un accès différent à des assurances, à des régimes de retraite, à d'autres protections simplement parce que tu fais le même emploi, mais une à temps partiel, l'autre à temps complet. C'est une faiblesse de notre loi. On a tenté de régler ces problèmes-là à travers les clauses orphelins, mais voilà qu'à travers les différences de statuts d'emploi on voit réapparaître des discriminations qui n'ont pas leur place.
J'attire aussi votre attention sur un autre domaine où une réglementation, une approche législative s'imposent: c'est toute la question des agences de placement. On en a beaucoup entendu parler dans le débat public, à la lumière du débat des infirmières. C'est une chose: ça prive le secteur public d'un certain nombre de ressources, mais disons qu'au plan des conditions de travail qui leur sont consenties, ce n'est pas le sous-développement, là. Il y a, par ailleurs, 80 % de l'action des agences de placement qui sont dans tout autre secteur, particulièrement chez des femmes immigrantes, dans des métiers très, très humbles, avec des conditions de travail qui sont carrément inacceptables.
Je vous réfère au reportage qui avait été fait par Enjeu et, à cet égard-là, je souligne que le gouvernement vient de donner au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre un mandat pour se pencher sur cette réalité-là. On est à pied d'oeuvre avec les associations patronales, mais, s'il y a un rapport, quand il va sortir, qui va mériter toute l'attention du gouvernement et pour lequel on souhaite un prolongement législatif, c'est bien celui-là.
Je reviens sur une recommandation qu'on a faite souvent à l'occasion d'autres mémoires. Je pense qu'il serait grand temps que toute la section de la Charte des droits et libertés concernant les droits économiques et sociaux ait maintenant le même statut que la première partie de la charte.
Et j'insiste aussi sur deux autres recommandations pour ce qui est de l'égalité en emploi. La question du salaire minimum, évidement, là-dessus, on vise toujours un salaire à 10,69 $ de l'heure. Et, malheureusement, on constate qu'il y avait eu quand même quelques efforts faits ces dernières années avec une trajectoire d'augmentation qui ne nous apparaissait pas suffisante mais qui était à hauteur de 0,50 $; et voilà que, la dernière année, on revient au 0,15 $, là. Ça n'a pas de bon sens. Il faut se ressaisir sur ces questions-là.
**(15 h 20)** Et le dernier élément concernant l'égalité économique, c'est la question de l'aide sociale. Il y avait eu un rapport du groupe sur la pauvreté qui était tout à fait intéressant et qui disait: L'heure est venue de faire disparaître les différences de prestations entre les personnes jugées aptes et inaptes au travail. Il faut être conscients, là, c'est des seuils minimals de vie... des seuils minimaux. Alors, à partir de ça, je pense qu'il faut vraiment revoir cette politique-là.
J'insiste sur un élément aussi: l'Organisation internationale du travail va accomplir sa deuxième année de travaux sur les travailleuses domestiques. Il va sortir de là une convention de l'OIT, une convention majeure. Or, je souhaite ardemment que le gouvernement du Québec donne son aval à cette commission et insiste pour que le gouvernement canadien en soit signataire.
Orientation III, conciliation famille-travail. Écoutez, on partage ça à 200 %. Ça, ça m'apparaît clair. Il nous semble par ailleurs qu'il faille aller plus loin. On ne peut pas... Bon, il y a des choses à faire évidemment sur les CPE: développer les places, les consolider. Il y a des choses à faire sur l'assurance parentale. Pour rien au monde, il ne faut remettre en question ce programme-là et ses bénéfices. Je sais que la tentation peut être grande, là, hein, quand que les politiques de restriction sont là. Mais, de grâce, ne touchons pas à ce qui nous a permis de faire des avancées importantes.
Sur la conciliation famille-travail, évidemment, il faut que ça atterrisse dans les milieux de travail. Et, de ce côté-là, disons, c'est lent. Il me semble que les moyens dessinés dans la politique, le prix Reconnaissance, la question de la norme à laquelle on a participée, le soutien accordé aux associations et aux entreprises, sont d'excellents moyens, on y souscrit, là, mais nous pensons que ce n'est pas suffisant. Il faut dépasser les politiques incitatives. Et là je reviens sur une vieille recommandation qu'on faisait: c'est tout simplement d'adopter une loi cadre sur la conciliation famille-travail.
Puis là je vais être claire. Ce n'est pas une loi, là, qui va dire: Tel moyen, c'est bon pour tout le monde, et on ne tient pas compte des différences dans les différents milieux. Mais on est-u capables d'avoir une approche originale où on dit: Chacun des milieux est différent, mais on peut-u se donner un horizon dans le temps où chacune des entreprises s'engage à faire, avec la participation des personnels, une enquête sur les principaux besoins, et se donne un échéancier d'échange et de négociation, et atterrisse dans chacun des milieux sur un certain nombre de mesures...
Le Président (M. Bernier): ...conclure, madame...
Mme Carbonneau (Claudette): ...qui apparaissent plus appropriées pour chacun des milieux?
Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure, Mme Carbonneau, pour permettre les échanges avec les parlementaires.
Mme Carbonneau (Claudette): Il me semble que ça bonifierait la politique. Oui, j'ai dépassé le temps. Bien, alors, vous avez quand même le document. Je réitère tout simplement, en conclusion, que, sur le reste des orientations, nous les endossons. Nous y allons d'un certain nombre de suggestions visant à bonifier ces orientations-là.
Et je conclus tout simplement en rappelant que l'essentiel de notre message: des ressources, attention aux politiques que l'on prend pour la sortie de crise et, surtout, il faut, à l'intérieur du gouvernement, que la main gauche sache ce que la main droite fait pour qu'on n'aille pas en contradiction.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, Mme Carbonneau. Nous allons donc débuter nos échanges avec le groupe parlementaire du gouvernement. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci. Merci, Mme la présidente. À ce qu'on voit, à ce que je peux voir, vous êtes en forme et bien reposée des vacances... des vacances du temps des fêtes. Et c'était très intéressant de vous entendre, parce que vous avez toujours votre franc-parler. Vous arrivez avec des idées qui sont intéressantes, des constats aussi qui sont fort pertinents.
Alors, évidemment, il y a beaucoup de questions qui se bousculent. Depuis ce matin, on parle beaucoup des métiers et on a beaucoup parlé des métiers non... on a parlé de plusieurs aspects, mais les métiers traditionnels... non traditionnels pour les femmes, c'est revenu à plusieurs reprises. On parlait du secteur de la construction. Et il y a une nécessité d'amener ces femmes, les femmes vers ces métiers non traditionnels, tout comme, je pense, certains nous l'ont dit, peut-être une nécessité aussi d'amener des hommes vers des métiers non traditionnels aussi.
Alors, pour ce qui est des métiers non traditionnels pour les femmes, ce serait quoi, les meilleurs moyens d'y arriver? Est-ce que, par exemple, ça serait de dire... Par exemple, des compagnies qui ont des contrats du gouvernement, est-ce qu'on pourrait exiger de ces compagnies-là d'avoir... je ne parle pas... je ne pense pas nécessairement en termes de quota, mais avoir une politique d'égalité entre les hommes et les femmes, une politique de sensibilisation à l'embauche des femmes ou... Est-ce que ça, ça serait des... ça pourrait être des idées intéressantes? Ou est-ce que vous avez, vous, d'autres idées qui stimuleraient le fait que les femmes puissent intégrer davantage ces métiers non traditionnels?
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Bien, écoutez, je pense qu'il y a plusieurs leviers. Il y en a certainement autour de l'éducation, autour de la profession d'orienteur, les campagnes de promotion. Ça, ça m'apparaît clair, hein, parce que c'est d'abord dans les mentalités que... c'est là-dessus qu'il faut agir pour amener une diversification des parcours professionnels des uns et des autres.
Oui, la question, par exemple, des obligations contractuelles, quand le gouvernement offre des contrats, des subventions. Bien sûr, on l'a éprouvé dans un certain nombre de secteurs, ça donne des résultats qui sont mitigés, mais, pour progresser, je ne renierai pas la nécessité d'employer tous les moyens, y compris celui-là. Celui-là peut donner un certain nombre de résultats quant à l'accès des femmes à ces métiers-là, mais, je vous dis, la difficulté, elle va plus loin. Il n'y a rien de pire que de les voir réussir à l'école, au cégep, d'être performantes à leur entrée au travail mais de ne pas résister un an, deux ans, trois ans à l'intérieur du milieu parce que la culture est trop difficile, et ça, je pense qu'on ne peut pas concentrer les actions que sur l'accès à ces professions. Il faut quelque part avoir des programmes, ne serait-ce que des projets pilotes, pour accompagner dans un certain nombre de milieux, pour essayer de soutenir la présence des femmes.
Écoutez, nous, on essaie de faire des efforts. On connaît des milieux où il y a des femmes, O.K., et on propose d'accompagner un certain nombre de milieux, de faire de la sensibilisation avec les syndicats. Alors, peut-être qu'il y a moyen d'unir des efforts et de penser à un certain nombre de projets concrets. Parce que, oui, sur la question de la promotion, sur les valeurs, sur l'accès, sur ce qui peut être fait en milieu scolaire pour briser les stéréotypes, j'en suis, pour favoriser l'accès aussi, mais le problème du maintien est un problème important.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Est-ce qu'avec les autres centrales syndicales, je pense... Dans votre centrale, vous avez des corps de métier qui sont des métiers non traditionnels. Alors, vous êtes présidente de la centrale, alors vous êtes en mesure de passer des messages, mais je pense au secteur, mettons, par exemple, la FTQ, j'imagine que le nombre de membres à la FTQ, c'est comme en grande, grande, grande majorité des hommes. Est-ce que les grandes centrales syndicales comme ça, les grandes centrales... je ne veux pas vous faire parler non plus à la place de l'autre, mais est-ce qu'il y a une certaine sensibilisation dans ces grands mouvements ouvriers là?
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Bien, écoutez, honnêtement, honnêtement, je pense que c'est clair qu'on a toutes nos différences, et il y a des réalités objectives qui font une différence, hein? À la FTQ, je pense que c'est 30 % de femmes, mais, quand même, sur un nombre très considérable de travailleurs, ce n'est pas une quantité négligeable. Et il y a depuis longtemps un comité de condition féminine là-bas, il y a des sensibilités, dans cette organisation-là, sur lesquelles on peut compter. À la CSN, c'est 53 %. Il y a d'autres organisations, c'est clair, si tu es un syndicat d'infirmières, bien là, tu vas être du 90 %.
C'est évidemment dans les milieux où c'est soit minoritaire ou juste sur le bord de la majorité que les travaux les plus importants restent à faire, mais disons que, dans ces organisations-là, il y a quand même une approche bien intégrée de condition féminine depuis au moins les années soixante-dix. Et, quand on compare par rapport à l'organisation patronale, le peu de présence féminine dans ces secteurs-là, bien, je pense qu'on a quand même un avantage, là, relatif par rapport à ça et je suis convaincue que les organisations syndicales qui ont du membership dans des milieux où il serait utile d'accueillir davantage de femmes seraient probablement très ouvertes à essayer de définir avec vous un certain nombre de programmes de soutien là-dedans, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
**(15 h 30)**Mme St-Pierre: Pour ce qui est, encore toujours dans cette même logique, là, d'amener les entreprises à se sensibiliser à la question de la main-d'oeuvre féminine, est-ce que, si on parle des contrats qui sont octroyés par le gouvernement... Mais il pourrait y avoir aussi, peut-être, des formules pour les subventions. Une grande compagnie, par exemple, qui décide de venir s'installer dans une région, il y a peut-être... sans que ça coûte toujours... sans qu'une mesure coûte toujours des sous... Oui, il va y avoir des mesures, puis il faut des mesures avec lesquelles il va falloir évidemment avoir des déboursés, mais est-ce qu'il y a des mesures qui seraient comme, finalement, simples et qui feraient en sorte qu'on pourrait faire progresser les femmes vers ces marchés du travail là ou vers ces grandes entreprises là?
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Écoutez, je pense que votre question tombe à point, dans le sens où, parce que je participe aussi à d'autres forums, notamment avec votre collègue Clément Gignac, on est parfaitement informés que tout ce qui est soutien aux entreprises est en révision actuellement, O.K. et, moi, je pense qu'il y a là-dedans une révision à faire, mais l'heure est probablement venue d'établir une liste de critères à privilégier pour maintenir des aides particulières. Alors, c'est clair pour la CSN, on l'a souvent exprimé, tu sais: emploi, modernisation des équipements, promotion de la productivité, soutien à la formation professionnelle. Mais pourquoi pas aussi des objectifs de société comme, effectivement, la présence de femmes dans des métiers majoritairement masculins? Moi, je pense que ce seraient de belles assises. Quant à réviser les programmes de soutien par toutes sortes d'aides fiscales, bien oui, c'est une belle occasion à saisir que de tenter d'introduire un certain nombre de critères.
En même temps, je pense qu'il est important de faire un certain nombre de liens entre les différentes orientations. Quand je parlais du maintien en emploi, O.K., y compris dans les métiers occupés majoritairement par des hommes, il y a une problématique qui rejoint et les hommes et les femmes, mais beaucoup les femmes à cause du partage des rôles, c'est toute la dimension de la conciliation famille-travail. Alors, là-dedans, il y a déjà des aides gouvernementales données à des entreprises, à des associations. Bien, peut-être qu'on peut essayer de privilégier aussi l'introduction de ces mesures-là dans les lieux où il y a peu de femmes. Alors, ce serait sûrement un coup de main assez important en termes de maintien, et, évidemment, s'il faut qu'elles attendent d'être majoritaires là-dedans pour faire progresser ces mesures-là, là, je pense qu'un soutien serait particulièrement bienvenu. Alors, c'est peut-être le genre de réflexion, là, auquel il faut s'ouvrir, et, quant à penser où orienter ces aides-là qui sont disponibles, bien, moi, je pense que faire une réflexion spécifique sur les milieux occupés majoritairement par des hommes, ce serait quelque chose d'intéressant.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Dans un autre secteur, sur la question de la santé, la contribution santé, vous n'êtes pas la première à venir nous dire que ça désavantage les femmes, que ça ne devrait pas être la même contribution pour tout le monde, il devrait peut-être y avoir une modulation. Mais quelle différence vous faites entre cette contribution-là et la... L'assurance médicaments est quand même comme... est comme ça, et l'assurance médicaments, c'est... Et, je me souviens, quand l'assurance médicaments est entrée en fonction -- c'était M. Rochon qui était ministre à ce moment-là -- il n'y a personne, à ma... Enfin, peut-être que je n'ai pas de mémoire. Il me semble qu'à mon souvenir il n'y avait pas eu beaucoup de... Ces arguments-là n'avaient pas été amenés.
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Écoutez, là-dessus, ça vaut la peine de refaire l'histoire, puis je suis bien contente de votre question. Quand l'assurance... Au fond, dans les années soixante-dix, quand les assurances santé ont été mises en place -- par des gouvernements libéraux, d'ailleurs -- à l'époque, 80 % des dépenses de santé étaient assumées publiquement. Le médicament ne l'avait jamais été. Aujourd'hui, on a régressé, je pense qu'on est autour de 71 %. Ce qui s'est produit ces dernières années, ça a été des baisses d'impôt -- et les baisses d'impôt, c'est ça, l'approche modulée, hein? Disons-nous-le, là, c'est différent de la contribution fixe -- et, au fond, parce qu'on a baissé les impôts, aujourd'hui, pour financer le même panier de services qui était financé publiquement dans les années soixante-dix, on se rabat sur une mesure qui est beaucoup plus régressive, qui est la contribution santé. Quand ça a été le cas de l'assurance médicaments, ça n'avait jamais été couvert publiquement. Alors, tout ce que tu pouvais avoir là-dedans de contribution publique, c'était un plus, O.K. Tandis que, dans un cas, on remplace une mesure de financement qui était davantage égalitaire parce qu'elle tenait en compte le niveau de revenu des gens pour financer une protection publique, dans l'autre cas, on tente d'élargir la protection publique. Alors, je trouve que ça fait quand même une différence.
Et l'heure est peut-être venue aussi de réévaluer le programme d'assurance médicaments. Ça, je vais, dans les prochains jours, en parler, là, avec votre collègue à l'occasion des représentations prébudgétaires. Je ne dis pas: Tout est parfait, mais, quand on questionne l'accueil et qu'on vise à élargir un programme public qui ne l'a jamais été et puis qu'on fait des substitutions vers moins de progressivité pour maintenir le même panier de services, ça explique qu'il y ait des réactions différentes, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre...
Mme St-Pierre: Oui. Mais, en même...
Le Président (M. Bernier): ...il reste environ deux minutes.
Mme St-Pierre: Ah bon! Bien, dans ce cas-là, je vais laisser mes... s'il y a des collègues qui auraient des questions à poser... Ils ont toujours des questions superpertinentes.
Une voix: ...
Mme St-Pierre: O.K. Non?
Le Président (M. Bernier): On vous laisse la préséance. Allez-y, Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Je veux... Tu sais, je voulais juste... Mais c'est que, dans ce cas-là, dans le cas de l'assurance médicaments, c'est quand même une contribution fixe.
Mme Carbonneau (Claudette): Bien oui, c'est une...
Mme St-Pierre: Je comprends qu'on... C'était peut-être une bonne... Bien, en fait, c'était sûrement une bonne nouvelle pour des parents qui avaient à acheter des médicaments ou des gens qui avaient à acheter des médicaments qui étaient hors de prix puis que, même, ils pouvaient ne pas acheter les médicaments parce que c'était trop cher, ils ne pouvaient pas se les payer. Mais la personne qui gagne 25 000 $ puis la personne qui gagne 300 000 $ paient les mêmes montants.
Mme Carbonneau (Claudette): C'est tout à fait vrai. Mais, alors, écoutez, moi, je n'ai rien contre le mieux. Réglez-nous les deux problèmes.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci. Un doublé. Oui, M. le député de Lévis, vous avez environ 1 min 30 s.
M. Lehouillier: Bien, moi, d'abord, je voudrais vous féliciter pour la qualité de votre mémoire, parce que votre mémoire a une qualité principale, et je pense que c'est toujours comme ça lorsque vous présentez vos mémoires: c'est précis, les demandes sont précises, et je voudrais en même temps profiter de l'occasion pour vous féliciter dans tout le travail que vous avez fait dans la conciliation travail-famille. J'étais en commission parlementaire lorsque vous avez déposé votre plateforme, qui est vraiment un document exceptionnel. Ça, je voulais... Puis également votre ouverture par rapport aux services de garde, parce que je sais que, malgré tout, vous acceptez comme mesure transitoire l'octroi des crédits d'impôt pour les frais de garde. Parce qu'on sait que, depuis 2003, on a doublé les budgets pour les services de garde, ils sont passés à 2 milliards de dollars, de 1 milliard à 2 milliards de dollars, et le budget famille a augmenté de 60 %. Ce que je voulais simplement vous dire, Mme la présidente, c'est que, si ça a été fait -- donc, on parle aujourd'hui de quelque chose qui oscille autour du 6 milliards de dollars pour la famille -- c'est parce que les syndicats, ils ont collaboré de façon très, très intensive, et on a un plus.
Et là on voit que, dans les défis futurs -- puis, moi, je reviens beaucoup sur cette question-là -- on parle de plus en plus de la division des rôles sociaux. Et, ce matin, je questionnais les groupes de femmes qui disaient: On n'a pas beaucoup d'interrelations au niveau... avec les syndicats. Là, je vous dis ce qu'on a entendu un peu quand je posais la question, parce que, moi, je pense que, du côté des rôles sociaux... Parce qu'il y a une grosse étape aussi à franchir là: comment on fait pour modifier les valeurs au sein des familles? Parce que, s'il y a un travail qui reste à faire encore au niveau de la famille, ça, on en... Vous en parlez d'ailleurs, vous proposez même une politique de conciliation travail-famille. Alors, dans cette politique-là, est-ce...
Le Président (M. Bernier): ...il reste 30 secondes pour donner la parole à Mme Carbonneau, pour vous répondre.
M. Lehouillier: Est-ce que vous verriez d'un bon oeil aussi qu'on touche cette nécessaire concertation pour essayer de modifier les valeurs au niveau des familles, le rôle parental, etc., là? Voyez-vous?
Le Président (M. Bernier): Allez-y, Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Bien, ma réponse, c'est clairement oui. Je vous dirais qu'un des espoirs qu'on portait au moment de la mise en place des CPE, c'est que ça devienne aussi autre chose qu'un lieu de services de garde, mais vraiment un lieu de proximité, dans les quartiers, de soutien parental, et on pourrait très bien inclure cette dimension-là, hein, la question des rôles, la question des stéréotypes. Alors, oui, il y a de l'avenir là-dessus.
Vous évoquiez la question des crédits d'impôt. C'est vrai qu'on vit avec, comme mesure transitoire. En même temps, je suis consciente qu'en termes de dépenses fiscales c'est beaucoup d'argent. Mais j'ai très hâte qu'on abandonne cette politique-là. On est au bord de la dérive. Vous lisez comme moi les journaux, hein: tous ces problèmes de garderies illégales, etc. Et, quant à investir en termes de dépenses fiscales, de grâce, mettons l'argent pour créer des places à contribution réduite, où on a de plus grandes assurances sur la qualité des services offerts à nos enfants.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Carbonneau. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. Donc, Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous.
**(15 h 40)**Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, et bienvenue à notre commission. En effet, moi aussi, j'ai toujours remarqué -- en fait, ça fait deux ans que je suis revenue à l'Assemblée nationale -- que vos mémoires sont toujours pertinents. On était... Je vous avais entendues avec beaucoup de plaisir et d'intérêt sur le projet de loi n° 94 et les accommodements religieux. Très intéressant, parce que, pour moi, votre mémoire demeure un document de référence. Vous y aviez beaucoup réfléchi, et puis vos instances s'étaient même prononcées sur la question. Alors, vous aviez fait une démarche que très, très peu de groupes... Parce qu'on a terminé les auditions hier, et, après tous ces mois... Je pense que ça faisait huit mois, là, qu'il y avait des auditions une fois de temps en temps. Mais, en tout cas, là, on a conclu hier, et je pense qu'il y a 64 groupes qui sont venus devant nous, et, honnêtement, moi, en tout cas, quand je discute de cette question, je me réfère très souvent à votre mémoire.
J'aimerais... Moi, je l'ai dit, là, ce matin, j'arrive dans le dossier de la condition féminine, là, ce n'est pas encore un dossier que je connais parfaitement bien. Mais il y a une question, justement, qui me vient à l'esprit, puis peut-être que vous en avez discuté ailleurs puis que je vais vous poser une question qui est un peu élémentaire, mais je voudrais revenir sur la conciliation famille-travail, parce qu'on a entendu, ce matin, en effet, que c'est au coeur, là, de toute cette question d'égalité hommes-femmes puis d'accès des femmes à l'égalité, qu'elle soit économique ou qu'elle soit personnelle, si je puis dire.
Alors, vous le dites en pages 18 et 19, vous l'expliquez assez bien, bon, vous dites: «Nous comprenons [...] que le gouvernement table encore une fois sur des approches incitatives», parce que, bon, vous dites: Il y a un certain nombre de mesures qui sont intéressantes: la remise du Prix Reconnaissance, un soutien financier aux entreprises et associations qui souhaitent implanter des mesures de conciliation, la diffusion d'une norme -- vous en avez parlé aussi -- qui a été émise par le Bureau de normalisation du Québec, alors, bon, ces approches incitatives.
Ils disent... Vous dites, là: «Le risque est grand que s'accentue un monde du travail à deux vitesses avec, d'un côté, des travailleuses et travailleurs dont les qualifications sont recherchées ou qui oeuvrent en milieu syndiqué -- justement -- bénéficiant d'une variété de mesures accommodantes, et, de l'autre, tous ceux et [...] celles qui devront s'en remettre à la Loi sur les normes [du] travail ou à des mesures informelles et arbitraires.» Et c'est là que vous arrivez à votre proposition, donc, d'une loi-cadre sur la conciliation famille-travail. Vous en avez parlé, mais rapidement. Alors, moi, pour mon information et pour mon éducation, j'aimerais vous entendre un peu plus précisément là-dessus, parce qu'il me semble me rappeler, puis je m'en rappelle même assez bien... En 2003, quand le Parti québécois, au moment de la campagne électorale, avait fait un certain nombre de propositions, est-ce que ça allait dans ce sens-là? C'est ça dont...
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): C'est-à-dire que le Parti québécois a fait des propositions ciblant quelque chose qui est important pour beaucoup de travailleurs et de travailleuses: la nécessité d'aménager le travail. Cependant, il avait été beaucoup question d'une mesure qui était le quatre jours, et le fameux quatre jours avait été jugé un peu irréaliste à partir du moment où tu en fais une mesure universelle. Et ça a été à la base de notre réflexion, en disant: Plutôt que de partir avec l'a priori... Et, je le dis, là, l'aménagement du temps de travail, il faut trouver des solutions. Ça, c'est clair comme de l'eau de roche. Mais, entre le tout et le rien, il y a tout un monde de différence, et on se disait: Pourquoi ne pas mettre de l'avant une approche proactive? On vote une loi où on se dit: On se donne un délai de deux ans à l'intérieur duquel toutes les entreprises doivent soit contacter le syndicat, soit créer un comité de salariés, faire une enquête conjointe -- qui peut être une enquête simple, là, hein, si tu as 50 salariés, là, ce n'est pas mer et monde -- et recenser un peu les besoins, et après quoi ouvrir un espace de discussion en se donnant un échéancier pour tirer un certain nombre de conclusions. Alors, ce n'est pas de forcer une mesure, mais c'est de forcer une dynamique, c'est de forcer un processus.
Et ça, je vous avoue qu'on a écrit un mémoire, en 2004, qui n'a pas été déposé en commission parlementaire parce qu'il n'a pas fait l'objet d'une commission parlementaire. C'était M. Béchard qui était là, à la Famille, à l'époque, et c'étaient des audiences privées. Mais ça me fera plaisir de vous en envoyer une copie. Et, honnêtement, je peux comprendre que ce soit difficile d'envisager une mesure, là, mur à mur, unisexe qui traverse tous les types d'entreprises au Québec, mais une démarche m'apparaît absolument nécessaire.
Et, quand je parle d'un monde à deux vitesses, c'est clair qu'il y a beaucoup le raisonnement de dire: Oui, bien, là, l'avantage va être pour les salariés. On s'oriente vers des périodes de pénurie de main-d'oeuvre, alors les entreprises vont comprendre que, si tu veux avoir du monde, il faut que tu t'ouvres un peu. Il faut aller au-delà de ce raisonnement-là.
Je vais vous donner un exemple très concret, puis c'est en milieu syndiqué, alors, imaginez, quand il n'y a pas de syndicat, de quoi ça peut avoir l'air. Puis ce n'est pas parmi les milieux les plus fermés et les moins évolués sur la question des femmes, c'est dans un hôpital que ça se passe, O.K., où effectivement l'administration est un peu sensible, fait appel à un groupe externe, O.K., qui offre des services de soutien aux familles. Alors, ça peut être -- je ne sais pas -- accompagner un parent malade, assurer une garde ponctuelle pour un enfant qui se déclare malade ce matin-là, enfin, toutes sortes de services, puis c'est un système de points, je n'ai pas besoin de rentrer dans les détails. Et là l'hôpital dit: Aïe! J'ai assez de misère avec mes infirmières, je vais l'offrir aux infirmières. Bien heureuse pour elles, là, mais il y a plein de femmes qui travaillent aussi dans d'autres catégories, il y a quelques hommes qui ont des responsabilités familiales, hein, parce que, bon, la cellule familiale a aussi changé, et toutes ces catégories de main-d'oeuvre là ne se voient offrir aucun soutien. Alors, ça, si ça se passe dans un milieu syndiqué, c'est la démonstration parfaite que tu ne peux pas juste te fier à l'idée que les pénuries vont faire évoluer les choses.
Et, moi, je pense que l'heure est venue de dire: On est-u capables, là, de faire une grande corvée? Et Dieu sait qu'on en a faites, des innovations au Québec. Tu sais, monsieur, vous souligniez tantôt la politique de garde, hein, qui est vraiment une politique non seulement intéressante pour les femmes, pour les enfants au plan social, mais qui a été... Oui, on y met beaucoup d'argent, mais ça a été un gain énorme pour le Québec. Dans les statistiques de main-d'oeuvre, moi, là, je suis juste assez vieille pour avoir assisté au Sommet de 1996, où un des objectifs qu'on s'était donnés, c'était de rattraper le taux d'activité, toutes catégories -- hommes et femmes -- confondues, de l'Ontario. Aujourd'hui, c'est fait. Savez-vous comment ça s'est fait? Par une remontée fulgurante du taux de présence des femmes sur le marché du travail parce qu'on a été capables de se donner cette politique-là. Oui, elle a un coût, mais, en même temps, je vais vous dire, c'est un coup d'accélération sur la prospérité du Québec, et la présence d'un beaucoup plus grand nombre de femmes sur le marché du travail. C'est aussi des rentrées d'argent dans les coffres de l'État et c'est tout à fait correct qu'il en soit ainsi.
Alors, je pense honnêtement que, sur la question de la conciliation famille-travail, une politique qui serait orientée sur un processus -- on se donne des obligations de résultats, on responsabilise les parties dans chacun des milieux de travail et go!, on essaie de faire quelque chose -- il me semble qu'on est rendus à cette heure-là.
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau, le document que vous avez mentionné en 2004, si vous désirez le déposer en annexe à votre mémoire, vous n'avez simplement qu'à le faire parvenir ici, au secrétariat de la Commission des relations avec les citoyens.
Mme Carbonneau (Claudette): Alors, on va le faire avec plaisir.
Le Président (M. Bernier): À ce moment-là, il sera accessible à l'ensemble des parlementaires et il sera accessible au public également.
Mme Carbonneau (Claudette): Oui.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Une dernière question et un commentaire avant. Alors, moi aussi, moi, je garde un excellent souvenir de ce fameux sommet de 1996, parce que j'étais ministre de la Culture, et c'est là qu'avec Simon Brault et d'autres on a...
Mme Carbonneau (Claudette): ...première partie.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Beaudoin (Rosemont): Moi, j'ai un bon souvenir comme ministre de la Culture, parce que c'est là qu'on a inventé les Journées de la culture, c'est à ce sommet-là qu'on a décidé qu'on ferait des journées de la culture, et je pense que ça marche encore formidablement bien puis que ça s'exporte même ailleurs maintenant, alors...
Oui. Alors, vous, vous n'en gardez pas un si bon souvenir, mais parce qu'il y a eu un certain nombre de...
Mme Carbonneau (Claudette): Le meilleur et le pire.
**(15 h 50)**Mme Beaudoin (Rosemont): Le meilleur et le pire, oui. Le pire a suivi, oui. Alors, écoutez, je voulais juste vous dire: Vous parlez beaucoup de ressources aussi, là. Vous avez dit: Bon, bien, ça, c'est formidable, les orientations sont là, et, en effet, bon, elles sont tout à fait pertinentes, et vous dites: Bon, bien, ça dépend aussi des ressources. Vous savez très bien dans quelle situation sont théoriquement les finances publiques. Alors, comment vous pensez convaincre le gouvernement, dans le fond, d'ajouter des ressources à ce secteur-là, alors qu'on est plutôt dans une dynamique inverse, étant donné... Bon.
J'ai vu que vous aviez dit -- puis je sais qu'il y a des consultations prébudgétaires, là, auxquelles vous allez sûrement participer: Bon, bien, une des façons, c'est de reporter le règlement du déficit à quelques années plus tard plutôt que de maintenir... Bon. Bon. C'est peut-être une solution, une partie en tout cas de la solution. Mais comment vous voyez ça? Parce que vous sentez très, très bien quand même sûrement, là, que... et -- je ne sais pas, là -- au Conseil des ministres, ça doit être intéressant. Moi, je me souviens en tout cas que le ministre de la Santé, là... C'est un ministère qui coûte cher, ça, là, c'est rendu, je pense, à 45 % à peu près du budget de l'État, et, quand on est dans un petit ministère, en tout cas, non pas... En termes d'importance et puis d'intérêt, le plus beau ministère, c'est celui de la culture, c'est sûr, mais ce sont des petits ministères budgétairement parlant. Alors, la Condition féminine y est rattachée, et tout. Mais je vous pose la question sincèrement et sérieusement: Comment vous voyez ça?
Le Président (M. Bernier): Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Écoutez, d'abord, la question de l'échéancier est quelque chose de tout à fait central, et, de ce côté-là, là, honnêtement, on n'a pas l'impression d'arriver avec une recommandation où on est des extraterrestres. Regardons l'Ontario, ils se donnent un horizon infiniment plus long; le Canada de Stephen Harper se donne un horizon infiniment plus long; l'Europe au complet se projette sur des horizons un peu plus longs. Tout ne peut pas être une question de calendrier. C'est évident que, si on fait juste repousser dans le temps, et puis notre réflexion s'arrête là, ce n'est pas loin du pelletage par en avant. On est-u capables entre-temps de nous donner une politique de développement, O.K.?
Alors, ça, et à la CSN, et avec l'Alliance sociale, on a mis beaucoup de réflexion sur le développement économique, sur le virage vert. On est dans une société qui est très riche en termes de ressources, particulièrement de ressources vertes. L'indépendance énergétique, etc., il y a là un potentiel de développement, de création d'emplois qui pourrait être intéressant: l'électrification de nos transports publics... Tu sais, il y a moyen de jouxter plein, plein, plein d'éléments, et ça, je pense que ça répond à une bonne partie du problème.
En même temps, je dis: Attention! Méfions-nous de ce qui a l'air d'une économie de bouts de chandelle. Je vais vous donner des exemples. La politique du non-remplacement d'un sur deux, là, dans la fonction publique, écoutez, je pense qu'on a dû, depuis le début de l'application de cette politique-là, il y a bon nombre d'années, économiser 500 millions. Bon, c'est 500 millions, mais je pense que ça a coûté 2,5 milliards en contrats de sous-traitance. Alors, tu sais, à un moment donné, là, il faut faire un certain nombre de calculs.
Je disais, au niveau de la santé, la population vieillit, les soins à domicile... Si les femmes quittent le marché du travail pour devenir proches aidantes, on n'avance ni socialement, ni au plan de l'égalité, ni au plan de la justice, ni même au plan économique. Quand on me dit: Le ministère de la Santé, c'est 45 % du budget, c'est vrai, mais le budget, ça comprend aussi les revenus. On a agi à la baisse sur un certain nombre de revenus, alors ça, évidemment, ça joue sur le pourcentage. Quand j'essaie de comparer les performances du Québec en matière de santé, je regarde ailleurs, là, puis là je ne vais pas aller vous chercher les pays nordiques, là, je vais aller vous chercher les autres provinces canadiennes: Est-ce qu'on sait que c'est le Québec qui contrôle le mieux ses dépenses en santé? Est-ce qu'on sait que c'est le Québec qui dépense per capita le moins dans les soins de santé?
À la faveur de la question de Mme la ministre, qui questionnait sur l'assurance médicaments, toute la question... tu sais, la loi canadienne, ses zones grises, les personnes en perte d'autonomie, etc., peut-être que l'heure est venue de nous donner un nouveau programme, d'élargir cette politique-là, quitte à ce qu'il y ait une contribution du citoyen, mais nous doter d'une véritable protection à cet égard-là. C'est des choses qu'on a déjà recommandées, ça, par le passé, mais je pense que c'est ce genre de sujets là qu'il faut aussi remettre à l'ordre du jour.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Carbonneau.
Mme Carbonneau (Claudette): Et, de ce côté-là, là, un petit peu plus de temps pour y penser, puis en étant proactifs sur deux, trois affaires, ça aiderait.
Le Président (M. Bernier): Merci infiniment de votre participation. Donc, je remercie Mme Carbonneau, Mme Benoît, du Comité national de la condition féminine de la Confédération des syndicats nationaux. Je suspends pour quelques instants pour permettre au groupe suivant de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 55)
(Reprise à 16 heures)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous recevons l'Association des secondes épouses et conjoints. Bienvenue, mesdames. Donc, pour fins d'enregistrement, si vous voulez vous identifier et présenter la personne qui vous accompagne.
Association des secondes épouses
et conjoints inc. (ASEC)
Mme Bélec (Monique): Merci. Bonjour, Mme la ministre, M. le Président, mesdames et messieurs. Mon nom est Monique Bélec, et je vous parle aujourd'hui en tant que vice-présidente de l'Association des secondes épouses et conjoints du Québec. Je suis accompagnée de Mme Rollande Gosselin, secrétaire-trésorière.
Le Président (M. Bernier): Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation.
Mme Bélec (Monique): Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Bélec (Monique): Nous sommes reconnaissantes et nous apprécions l'opportunité qui nous est donnée de présenter les préoccupations des secondes épouses et conjoints. L'association est un groupe d'action et d'entraide à but non lucratif fondé en 1994. Il regroupe des débiteurs, débitrices qui sont appelés à verser une pension alimentaire à un ou une ex-épouse pour leur propre bénéfice. Actuellement, la majorité des payeurs de pensions alimentaires sont des hommes. Notre association a vu le jour pour contrer les injustices vécues par ces débiteurs de pensions alimentaires et leur seconde famille. Actuellement, la majorité des payeurs de pensions alimentaires sont des hommes. Notre association a vu le jour pour contrer ces injustices-là, et nous ne voulons pas du tout revendiquer les pensions alimentaires qui sont données pour les enfants.
L'association compte actuellement près d'un millier de membres sympathisants. Notre site Web a été visité plus de 33 700 fois depuis 10 ans, ce qui prouve l'intérêt à des personnes... aux personnes aux prises avec cette problématique.
Nous avons pris connaissance de votre cahier de consultation et nous aimerions nous prononcer sur les questions 2 et 3. Nous vous ferons part de la problématique que nous avons constatée dans notre entourage et nous proposons quelques pistes de solution. Mais avant, j'aimerais prendre quelques minutes de votre temps pour vous faire part de mon expérience personnelle.
En tant que femme, mère de deux jeunes femmes et grand-mère de trois petits-enfants de moins de cinq ans, je crois qu'il est primordial d'inculquer à nos jeunes femmes l'importance d'acquérir leur autonomie financière. Ma grand-mère, qui a immigré ici et qui ne connaissait pas notre langue, a su aider à assurer la survie de sa famille durant la crise économique. J'ai également vu ma mère, veuve à 37 ans, avec cinq enfants, dont la plus jeune avait à peine quatre ans, retourner sur le marché du travail pour faire vivre notre famille. Quant à moi, j'ai divorcé à l'âge de 42 ans et, moins de deux ans plus tard, sans soutien de la part du père, j'ai fait vivre mes enfants.
Depuis 16 ans, je suis la conjointe d'un homme qui a divorcé après 15 ans de mariage et qui paie encore une pension alimentaire représentant le tiers de son salaire, et ce, depuis plus de 21 ans. Nous ne savons pas ce qu'il adviendra lors de sa prise de retraite, cette année, puisqu'il devra retourner à la cour pour un autre jugement, car chaque fois que les conditions de l'un ou de l'autre des ex-conjoints change, cela entraîne une raison valable pour demander une modification de la pension alimentaire. Il a payé, à date, plus de 35 000 $ en frais d'avocat, et ce n'est pas terminé. Est-ce normal qu'à 65 ans il doit encore payer plus de 20 000 $ en honoraires d'avocat pour essayer d'annuler une pension alimentaire? En plus d'avoir donné plus que la moitié du patrimoine familial au moment du divorce, il a, au fil des ans, payé une somme considérable en pension alimentaire, seulement pour le bénéfice de cette ex-épouse. Et ce montant ne comprend pas la pension alimentaire qu'il a payée pour son fils qui a maintenant 33 ans.
Nous vous demandons: Où est l'incitatif du retour au travail quand on reçoit plus que le salaire minimum en pension alimentaire, sans compter que ces pensions alimentaires sont indexées à chaque année? Et, surtout, ne croyez pas que mon histoire est unique.
Nous allons répondre à la question 2 de votre cahier de consultation: Comment briser les inégalités économiques que vivent les femmes, en particulier celles qui sont liées à leur rôle maternel, et comment soutenir plusieurs catégories de femmes qui vivent des problématiques particulières par rapport à leur autonomisation? Nous pourrions également nous questionner à savoir comment mieux rémunérer les postes généralement occupés par les femmes. Nous croyons que la force des femmes réside dans leur autonomie financière. Comme dit le vieux proverbe chinois: Donne à l'homme un poisson et tu le nourris pour un jour. Montre-lui à pêcher et tu le nourris pour toujours.
En 16 ans d'existence, notre association a reçu, de façon périodique, plusieurs témoignages de conjoints, conjointes, de familles recomposées avec des problèmes financiers sérieux en raison de paiement de pension alimentaire à une ex-épouse, laquelle, après le divorce, a soit quitté volontairement son emploi, n'a fait aucune démarche pour redevenir autonome financièrement, a un nouveau conjoint ou n'a pas su conserver sa part du patrimoine familial.
Cette situation appauvrit considérablement le patrimoine de la nouvelle famille. Et nous voulons encore préciser qu'on ne conteste nullement les pensions alimentaires payées pour les enfants. Ces ex-épouses peuvent percevoir des pensions alimentaires à très long terme, et même à vie, malgré un partage égal du patrimoine familial. La loi et l'application qui en est faite remettent même en question le droit du conjoint à prendre sa retraite, puisqu'il ne bénéficie... de ce seul revenu qui a déjà été amputé de 50 % lors du partage du patrimoine; lui et sa nouvelle famille doivent parfois continuer à payer une pension alimentaire à l'ex-épouse.
Nous sommes peut-être la minorité mais, advenant un jugement favorable dans la cause Lola-Éric présentement à la Cour suprême, nous deviendrons la majorité, car plus du tiers des couples du Québec vivent en union de fait et, possiblement, un jour, une pension alimentaire sera octroyée à un ou une ex-conjointe de fait. Il faudra donc tôt ou tard encadrer le paiement de pensions alimentaires et statuer sur une période temporaire et un incitatif pour un retour sur le marché du travail, au même titre que l'aide accordée par Emploi-Québec ou l'aide financière de dernier recours, de façon à équilibrer le partage des responsabilités.
Certains diront que nous voulons nuire à ces ex-épouses; ce n'est pas le cas. N'oubliez pas que la majorité d'entre nous sommes des ex-épouses. Nous savons très bien que ces femmes ont besoin d'aide et nous sommes d'accord au paiement d'une pension alimentaire. C'est pourquoi nous croyons que le gouvernement possède déjà toutes les structures et tous les programmes pour venir en aide et guider ces personnes à acquérir leur autonomie financière.
Nous recommandons... Premièrement, le gouvernement pourrait se doter de règles en matière de fixation de pensions alimentaires aux ex-conjoints, conjointes comme celles qui existent déjà pour les pensions alimentaires pour enfants.
Deuxièmement, le gouvernement pourrait amender la législation en vue de prévoir, dans tout jugement rendu par les tribunaux, que les pensions alimentaires doivent être versées pour une période temporaire et inclure dans celui-ci un programme de réintégration sur le marché du travail. Ceci aura pour effet de favoriser l'épanouissement postdivorce de tous les membres d'une cellule familiale.
Troisièmement, le gouvernement pourrait utiliser le service de la direction des perceptions de pensions alimentaires pour informer, lors du premier paiement, à l'aide d'un document, les démarches à entreprendre pour respecter le jugement et amener ces femmes à s'inscrire au programme de formation disponible. À la fin de la période prévue, la personne aura alors tous les outils pour se prendre en main, libérant ainsi le débiteur de la pension alimentaire. Le gouvernement pourra continuer à les aider seulement si elles sont dans l'incapacité de le faire.
En résumé, nous tenons à vous souligner que l'égalité entre les femmes et les hommes passe par l'égalité entre tous et que chacun et chacune doit acquérir son autonomie financière.
Pour la question 3 du cahier de consultation, en tenant compte de la politique familiale actuelle: Comment favoriser une meilleure articulation des responsabilités professionnelles et familiales des femmes et des hommes?, étant donné que les femmes doivent retourner au travail à la fin du congé parental et qu'il y a un manque de places en garderie, la conciliation travail-famille est donc plus difficile pour les femmes que pour les hommes. Nos jeunes mères sont à bout de souffle.
**(16 h 10)** Nous recommandons... Bien que la politique familiale gouvernementale soit généreuse, elle mérite quelques ajustements. Par exemple, le congé parental, surtout lors de la venue d'un ou de plusieurs enfants, pourrait être prolongé d'une année tout en étant financé par le service de garderie. En effet, les sommes accordées aux garderies pourraient être remises aux mères qui veulent s'occuper plus longtemps de leurs enfants.
Deuxièmement, les conditions d'acceptation des parents aux services de garderie pourraient être plus restrictives, et ces services seraient réservés aux parents qui occupent un emploi ou qui sont aux études. Cela aura pour effet de libérer des places et d'encourager le retour au travail. D'autres pistes de solution: un temps de garderie partagé entre deux parents; on pourrait donner un crédit d'impôt... pourrait être accordé à certains membres de la famille, excluant le conjoint, qui s'occupent de la garde des enfants sans rémunération.
M. le Président, mesdames et messieurs, pour le bien-être de tous, nous vous prions ardemment de bien vouloir considérer nos recommandations. Nous ne croyons pas qu'elles vont à l'encontre de vos principes de base mais qu'au contraire elles viennent encadrer efficacement ces derniers tout en éliminant les situations possibles de litiges. Nous avons à coeur l'égalité entre les femmes et les hommes, mais nous voulons surtout une justice à moindre coût pour tous les citoyens et toutes les citoyennes du Québec. Soyez assurés que c'est avec plaisir que nous nous rendrons disponibles pour toute discussion ultérieure et nous comptons sur votre appui pour que notre cause fasse un pas majeur vers la justice et l'équité. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Bélec. Donc, sans plus tarder, nous allons débuter nos échanges avec le groupe parlementaire représentant le gouvernement. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci. Est-ce que j'ai bien compris? Vous avez reçu... Bon, vous parlez de votre site Internet, les interventions des internautes sur votre site Internet, mais est-ce que vous avez un chiffre précis de femmes ou d'hommes, possiblement que des hommes... qui reçoivent...
Mme Bélec (Monique): ...pourcentage.
Mme St-Pierre: ...qui sont dans votre situation.
Mme Bélec (Monique): Vous demandez combien d'hommes paient des pensions alimentaires?
Mme St-Pierre: Comment... Dans votre situation, une situation comme la... Parce que vous parlez de votre situation aussi, là...
Mme Bélec (Monique): Oui.
Mme St-Pierre: C'est-à-dire que...
Mme Bélec (Monique): Environ 9 % à 10 % d'hommes paient des pensions alimentaires pour une ex-conjointe, pour son propre bénéfice.
Mme St-Pierre: O.K.
Mme Bélec (Monique): Nous sommes une minorité.
Mme St-Pierre: Ce qui veut dire à peu près... 9 % à 10 %, ça veut dire combien de personnes à peu près? Est-ce que...
Mme Bélec (Monique): Sur des gens... Parlez-vous des gens qui ont visité notre site...
Mme St-Pierre: Non.
Mme Bélec (Monique): ...ou combien d'hommes paient...
Mme St-Pierre: Moi, je parle des gens, des personnes qui sont dans la situation qu'elles reçoivent... la situation que vous vous trouvez...
Mme Bélec (Monique): 9 % à 10 % dans les divorces, un homme paie une pension alimentaire à une ex-conjointe pour son propre bénéfice. Dans 90 % des cas, il y a seulement une pension alimentaire payée pour les enfants.
Mme St-Pierre: O.K., donc, il...
Mme Bélec (Monique): C'est généralement des femmes qui ne retournent jamais sur le marché du travail.
Mme St-Pierre: O.K. Mais, je pense que le juge, il doit tenir compte de ces critères de capacité de l'épouse... l'ex-épouse, de retourner sur le marché du travail, non?
Mme Bélec (Monique): Il y a des jeux qui se jouent continuellement quand ils vont à la cour. On reçoit des appels continuellement. La dame dit... Quand on a 42 ans et qu'on divorce et qu'on a déjà travaillé dans une institution financière et que, tout à coup, on dit qu'on n'est plus capable de gagner sa vie ou qu'on travaille au noir pour justement ne pas faire réduire la pension alimentaire qu'on reçoit, alors, il y a toutes sortes... Il y a beaucoup de travail au noir qui se fait dans ce domaine-là parce que les femmes qui reçoivent des pensions alimentaires ne veulent pas perdre leurs pensions alimentaires parce qu'elles savent très bien que, si elles commencent à gagner, le mari va les ramener à la cour pour diminuer la pension alimentaire.
Mme St-Pierre: Est-ce que, dans le cas du calcul de cette pension alimentaire là, par exemple... C'est une question très technique que je vous pose là, là...
Mme Bélec (Monique): Non.
Mme St-Pierre: ...parce que je ne suis pas... je ne vis pas cette situation-là, puis je ne connais pas... Est-ce que la pension alimentaire est calculée... Si un homme est dans une autre relation, est-ce que la pension alimentaire est calculée sur le total du revenu du couple, du nouveau couple, ou juste...
Mme Bélec (Monique): Indirectement, voyez-vous? Indirectement, c'est calculé sur le revenu du nouveau couple, parce qu'ils vont prendre les dépenses de la famille et ils vont assumer que la nouvelle conjointe paie la moitié des dépenses, quand plusieurs d'entre nous, on gagne beaucoup moins que nos conjoints. Alors, nous, on ne peut pas augmenter notre patrimoine familial parce qu'on contribue à la moitié des dépenses de la maison. Alors, c'est par la porte d'en arrière que ça se fait.
Mme St-Pierre: Donc, qu'est-ce que vous proposez? Qu'il y ait des mesures transitoires? Que ce soit limité à un certain nombre d'années? Qu'il y ait des mesures d'accompagnement?
Mme Bélec (Monique): Qu'il y ait comme... Qu'on dise comme pour les enfants: après x années de mariage, si madame n'a jamais été sur le marché du travail, bien, on lui donne tant d'années. S'ils ont été très longtemps mariés et qu'elle a 45 ans, bien, peut-être qu'on lui donne cinq ans. À 45 ans, on a encore 20 années de vie de travail. Alors, si elle a cinq ans pour retourner aux études et pour avoir une carrière, bien, à ce moment-là... On ne statue pas de temps dans les jugements.
Mme St-Pierre: C'est parce que je suis... J'entends ce que vous me dites, votre situation, ça ne doit certainement pas être assez facile, mais je me demande comment l'État peut régler une situation... Il me semble qu'il y a du cas par cas, et comment l'État pourrait régler une telle situation? Il me semble que ça devrait être aux tribunaux, aux juges de regarder, à sa face même, la situation qu'il a devant lui, puis chaque situation est différente.
Moi, je connais des filles de ma génération qui n'ont pas fait d'études universitaires, puis elles étaient en couple, puis elles tapaient à la dactylo les travaux du mari qui allait devenir avocat, médecin, notaire, dentiste. Vous savez, il y a des situations où la femme n'est pas allée sur le... elle n'a pas poursuivi ses études pour permettre à son mari d'avoir une belle carrière, là. Ça, c'est dans le passé, plusieurs années, parce que je suis très vieille, là, mais...
Mme Bélec (Monique): Oui, mais on présume que ce sont des femmes...
Le Président (M. Bernier): Un instant, Mme Bélec, on va laisser la ministre terminer son idée, puis, après ça, on va revenir à vous.
Mme Bélec (Monique): Excusez. Excusez.
Mme St-Pierre: Mais ça a existé, ces situations, ces situations-là, et ça peut peut-être être un argument pour dire au juge: Écoutez, bien, moi, ce que j'ai fait, là, il y a plusieurs années, bien, j'ai permis à monsieur de devenir médecin.
Mme Bélec (Monique): Mais...
Le Président (M. Bernier): Mme Bélec.
Mme Bélec (Monique): Excusez. Si on pense comme ça, si un homme gagne bien sa vie et que sa première épouse a aidé au début de sa carrière, est-ce qu'elle devrait demeurer à sa charge à vie? Même pour un parent, habituellement, quand nos enfants ont 21 ans, notre responsabilité financière est terminée. Pourquoi, parce qu'on a été marié avec quelqu'un, notre responsabilité financière peut demeurer à vie? Ils ont, en Ontario et dans le reste du Canada, eu des lignes directrices au niveau des pensions alimentaires où ils combinaient s'il y a pension avec enfants, s'il n'y a pas pension avec enfants. C'est peu utilisé au Québec justement parce qu'il y a les pensions alimentaires pour enfants qui sont plus réglementées, mais pourquoi ce ne serait pas possible de le faire pareil comme les pensions alimentaires pour les enfants?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Alors, pour faire le lien avec notre plan d'action, on est... on travaille présentement... nous sommes en commission parlementaire pour travailler sur un nouveau plan d'action à partir de la politique sur la condition féminine Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait. Comment voyez-vous votre intervention dans la marche vers l'égalité entre les hommes et les femmes?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Bélec.
Mme Bélec (Monique): Bien, on pense que, si les femmes retournent sur le marché du travail, leurs chances d'être égales seront meilleures. Et, si on donne aux femmes divorcées l'opportunité de retourner aux études et de gagner leur vie, on pense qu'on va améliorer... d'abord améliorer leurs conditions parce qu'elles vont travailler, elles vont se retrouver dans un milieu de travail avec stimulation. Pour les enfants, les enfants sont souvent pris dans ce jeu-là: le père paie une pension ad vitam aeternam, les enfants pensent que c'est correct parce qu'il y a un juge qui a dit que c'est correct. Mais, chaque fois, les avocats nous disent: Quand vous allez devant un juge, c'est comme: lance des dés, puis peut-être que tu vas être chanceuse, et peut-être que tu ne seras pas chanceuse. Puis les...
Mme St-Pierre: Est-ce que vous avez fait...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Est-ce que vous avez fait des représentations auprès de la magistrature?
Mme Bélec (Monique): Oui. Il y a déjà un mémoire qui a été présenté en 2000, en l'an 2000. Il y a des lettres, et des lettres, et des lettres qui ont été envoyées à plusieurs ministres, mais, comme on est une minorité... Et on pense qu'on est une patate chaude aussi, hein, parce qu'on semble être une organisation contre les femmes. Mais, comme on dit dans notre texte, maintenant, avec le fait qu'ils vont possiblement donner des pensions alimentaires aux conjoints de fait, on va se ramasser une majorité. Les nombres vont augmenter beaucoup, et on pense vraiment que ce n'est pas parce qu'on a été mariés avec quelqu'un que c'est notre gagne-pain pour le reste de notre vie.
**(16 h 20)**Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Je reviens encore sur la question de notre... La raison pour laquelle nous sommes ici, c'est le plan d'action en condition féminine, bon. Outre votre situation, là, qui est bien particulière, bien pointue, est-ce que vous avez des recommandations à nous faire pour stimuler l'accès des femmes sur le marché du travail, stimuler le fait que les femmes, les jeunes femmes continuent, poursuivent leurs études, en fait, stimuler une meilleure autonomie financière?
Mme Bélec (Monique): Vous avez parlé beaucoup d'envoyer les femmes dans des milieux non traditionnels pour les femmes, mais ça ne s'appliquera pas pour toutes les femmes. Il va toujours y avoir un grand nombre de femmes qui vont quand même choisir des milieux qui sont généralement occupés maintenant... les postes traditionnels de femmes. Peut-être, comme je dis, peut-être qu'il faut repenser comment mieux rémunérer certains postes occupés par les femmes plutôt qu'essayer de les envoyer dans des postes qui sont généralement occupés par les hommes. Je ne pense pas qu'on arrivera jamais à avoir 50 % des femmes qui sont dans la construction. Il y a quand même des métiers qui demandent une force physique qu'on n'a pas. On n'est quand même pas égales, physiquement, à... Alors, on ne peut pas s'attendre à avoir, à un moment donné, 50-50 dans tous les domaines.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: M. le Président, je n'ai pas d'autres questions. Je ne sais pas si mon collègue a des questions.
Le Président (M. Bernier): Très bien. M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: Merci d'être là. Merci de venir partager avec nous une réalité que plusieurs... Il y a plusieurs couples, au Québec, il y a plusieurs familles reconstituées qui vivent ce genre de situation-là. Je veux vous ramener dans votre mémoire, là, parce que vous nous suggérez, vous recommandez, là, toute la dimension du congé parental et de la remise aux mères qui resteraient chez elles de la subvention qui s'en irait à la garderie. Dites-moi-z-en un petit peu plus, là, parce que je veux essayer de comprendre si on ne créera pas, à un moment donné, ou si ça ne sera pas un incitatif à ce que, d'un côté, les mères restent à la maison, ne sont pas plus pressées qu'il faut de retourner sur le marché du travail, et qu'on ne se ramassera pas, au niveau des garderies, là... la place va être libre, on va la remplir. Comment vous moduleriez ça, là?
Mme Bélec (Monique): Bien...
M. Ouellette: Vous avez pensé à quoi en suggérant ça?
Mme Bélec (Monique): Excusez. D'abord, j'ai parlé d'une année additionnelle, je n'ai pas parlé de plus que ça. Et deuxièmement, bien, habituellement, dans les garderies, on parle de poupons. Les poupons, c'est jusqu'à 18 mois, et je connais des gens en garderie qui disent que, dans plusieurs garderies, on prend seulement cinq poupons; dans certaines garderies, c'est juste 10. La majorité des femmes retournent sur le marché du travail à peu près... le bébé a à peu près 11 mois, puis il y en a plusieurs qui n'ont pas trouvé de place encore en garderie à ce moment-là. Alors, si on donnait la chance aux femmes de garder leurs enfants, ça libérerait des places, premièrement. Le gouvernement donne déjà, habituellement, environ 30 $ par jour par enfant dans les garderies. Alors, ce 30 $ là, donnez-le aux mères pour qu'elles puissent rester à la maison, puis, quand les enfants vont rentrer... Parce que, quand on peut prendre juste cinq poupons qui prennent une monitrice ou un professeur... Les enfants, quand ils arrivent à deux, trois ans, il y en a sept, ou huit, ou possiblement neuf enfants par classe. Alors, ça va ouvrir beaucoup, beaucoup les garderies.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Ouellette: J'ai une complémentaire si j'ai... Il me reste du temps?
Le Président (M. Bernier): Deux minutes.
M. Ouellette: Deux minutes? Vous avez aussi mentionné d'autres solutions qui pourraient être envisagées, là, le temps de garderie partagée, c'est-à-dire une place qui pourrait avoir plusieurs parents ou plusieurs enfants qui occuperaient cette place-là qui serait disponible, là. Ça prendrait un arrangement beaucoup plus au niveau de la garderie. Puis le crédit d'impôt pour garder des enfants et excluant le conjoint, là, dites-moi-z-en plus.
Mme Bélec (Monique): Vous n'avez pas de...
Le Président (M. Bernier): Mme Bélec.
Mme Bélec (Monique): Oui. Au niveau des garderies, les places partagées, ça existe déjà, mais c'est sûr que ça demande une meilleure planification au niveau des garderies, parce que deux enfants... Souvent, quand les mères veulent retourner au travail à temps partiel, elles aimeraient avoir l'enfant avec elles quelques jours par semaine, mais, si elles sortent l'enfant de la garderie, elles perdent leur place. La même chose quand elles ont un deuxième enfant: si elles désirent rester à la maison avec les deux enfants, elles perdent leur place, puis là elles n'ont pas une place à trouver, elles en ont deux à trouver. Alors, c'est pour ça qu'on dit: S'il y avait plus de places en temps partagé, bien, ça permettrait justement d'avoir plusieurs femmes qui ont accès à ces mêmes places là.
Pour ce qui est crédit d'impôt, bien, comme il n'y a pas beaucoup de places en garderie et que les enfants... J'ai une fille qui a un bébé de cinq mois. Elle me dit: C'est toi qui va m'aider si je n'ai pas de place en garderie. Moi, ça me fait plaisir de l'aider, mais ce n'est pas toutes les mères... Il y en a qui peut-être auraient besoin d'un crédit d'impôt pour s'occuper de leurs petits-enfants parce que tu ne veux pas demander à ta fille de te payer si tu gardes ton petit-fils, ta petite-fille.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup, Mme Bélec. Nous allons donc poursuivre maintenant du côté de l'opposition. Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Merci, M. le Président. Mesdames, bonjour. Moi aussi, je voudrais revenir sur le paiement de pension alimentaire, et «statuer sur une période temporaire et un incitatif», là. Et vous dites justement dans les recommandations: Le gouvernement, donc qu'est-ce le gouvernement peut faire par rapport à ça? Vous dites, c'est à peu près 10 % probablement des divorces qui finalement... des divorcés qui se retrouvent dans la situation que vous décrivez, 10 %, à peu près. Je ne sais pas moi non plus combien il y a de divorces, il y en a beaucoup, en tout cas, je pense, au Québec. Il y en a peut-être quasiment un mariage sur deux, je pense.
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Proche, proche du 50 %. 50 % moins un. Et donc ça doit faire pas mal de monde par année. Alors, 10 %, je ne sais pas ce que ça représente. Mais là, vous dites:
«[Le gouvernement pourrait] premièrement se doter des règles en matière de fixation de pensions alimentaires aux ex-conjoints», parce que ça n'existe pas, je comprends bien que ça n'existe pas.
«Deuxièmement, amender la législation -- vous me direz laquelle -- en vue de prévoir dans tout jugement rendu par les tribunaux que les pensions alimentaires doivent être versées pour une période temporaire -- dans le fond, c'est ça, l'idée principale, une période temporaire -- et inclure dans celui-ci un programme de réintégration sur le marché du travail», donc d'accompagnement de la personne en question. Et:
«Troisièmement, utiliser les services de la direction des perceptions des pensions alimentaires pour informer [donc] à l'aide d'un document, [des] démarches à entreprendre», etc.
Donc, c'est ça que vous recommandez au gouvernement et vous dites, en résumé: Nous tenons à vous souligner que l'égalité entre les femmes et les hommes passe par l'égalité entre tous et que chacun, chacune doit acquérir son autonomie financière. En effet, c'est un grand principe, c'est un grand principe. Comment l'appliquer? Bien, vous le dites un peu comme ça. Moi, la seule question que je me pose, en effet, est-ce que, quand même, vous reconnaissez qu'il y a un certain nombre de femmes, parmi ce pourcentage, là, dont vous parlez, pour qui ça va être impossible?
Vous dites: Bon, si on divorce à 40 ans et 45 ans, il reste 20 ans, mettons, de vie utile. Il faudrait que je prenne ma retraite cette année, par exemple, parce que j'en ai 65. Mettons qu'il y a un temps de vie utile professionnellement. Bon. Mais, bon, je ne sais pas, j'ai l'impression qu'il y a des gens qui divorcent de plus en plus tard, d'ailleurs, de plus en plus qui... parce qu'on vit de plus en plus vieux. Puis qui aurait pu imaginer, je ne sais pas, il y a 100 ans ou 200 ans, qu'on vivrait avec la même personne pendant 60 ans? C'est beaucoup. Alors, tu sais...
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Non, mais c'est vrai, les gens... L'espérance de vie était à l'époque de, je ne sais pas, 50 ans, et...
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Hein? Oui. Et donc là on vit jusqu'à, je ne sais pas, 82 pour les femmes -- on fait la moyenne -- 78 pour les hommes. Ça se rapproche, monsieur, ça se rapproche, là. Bientôt, vous allez... Lâchez pas, vous allez nous rattraper. Ou c'est les femmes qui vont mourir plus jeunes parce que, justement, travaillant maintenant beaucoup, puis autant que les hommes, c'est les femmes... C'est ça, le coeur va lâcher avant. Mais il y a quand même... C'est la seule chose, moi, qui me tracasse un peu. Est-ce que vous reconnaissez quand même que, pour un certain nombre de femmes, pour toutes sortes de raisons... Ou bien vous dites: Si elles sont inaptes au travail... Ça arrive, là. Il y a des gens sur l'aide sociale qui sont justement inaptes, il y en a des aptes et des inaptes. Donc, ça peut être le cas. Vous reconnaissez donc que ce n'est pas possible pour tout le monde?
**(16 h 30)**Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Bélec. Et je veux juste vous donner une statistique: en 2002, 50,4 % de divorce; 2003, 53,6 %; 2004, 52,4 %; 2005, 51,9 %, donc on a passé le cap du 50 %.
Mme Beaudoin (Rosemont): Ah oui!
Le Président (M. Bernier): Mme Bélec, la parole est à vous.
Mme Bélec (Monique): Je vais répondre à votre question de cette façon. Quand la loi du patrimoine familial est arrivée, elle est arrivée pour équilibrer les choses, parce que justement il y avait des femmes qui avaient été mariées longtemps, le mari avait accumulé des biens énormes, il avait une maison; ils se divorçaient, la femme était dans la rue, elle n'avait rien. Quand la loi du divorce... du patrimoine familial est arrivée, elle a équilibré les choses. Et admettons que vous avez quelqu'un qui a été marié, puis, à 60 ans, il décide de divorcer, on présume qu'à ce moment-là ils ont quand même amassé un patrimoine familial qui est assez considérable durant tout ces années, surtout si le mari travaillait à un travail qui était... Alors, la conjointe a déjà reçu la moitié du patrimoine familial au moment du divorce.
C'est sûr qu'on ne dit pas que cette femme-là n'a pas besoin d'aide jusqu'à temps qu'elle ait 65 ans. Mais, à 65 ans, les hommes généralement cessent de travailler; ils ont divisé le patrimoine familial. Pourquoi devraient-ils continuer à payer une pension alimentaire?
Mme Beaudoin (Rosemont): Non, c'est une question. Je...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Je reconnais que c'est une question qui se pose et effectivement qui a un sens, là, je vous le dis franchement. C'est tout simplement que, bon, justement, je n'étais pas... je ne suis pas certaine tout à fait, mais je vois bien que vous avez un certain nombre de réponses à ça. C'est parce que peut-être que je pense à mère, et je ne l'aurais pas vue retourner sur le marché du travail si elle avait dû donc divorcer, et tout. Alors, bon, mais vous me dites: Dans le fond, le patrimoine familial, il y a la Régie des rentes à partir de 65 ans. Pourquoi continuer à payer en plus, dans le fond, après le partage du patrimoine familial et puis donc l'éventualité de recevoir de la Régie de rentes à...
Une voix: La moitié de la Régie des rentes du conjoint.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui.
Mme Bélec (Monique): C'est déjà partagé, hein? On a déjà partagé.
Mme Beaudoin (Rosemont): C'est ça.
Mme Bélec (Monique): Madame est déjà partie avec 50 %. Dans plusieurs cas, madame est partie avec plus que 50 %. Et c'est comme si on ne peut jamais planifier nos vies, à nous, en pensant: On fait attention pour accumuler des biens, pour accumuler des argents, et on sait qu'on va probablement retourner à la cour encore, et tous les efforts qu'on va avoir faits pour avoir mis de l'argent de côté, c'est possiblement l'ex-conjointe qui va en bénéficier, parce qu'elle dit: Bien, monsieur a accumulé, parce qu'ils ont fait attention, j'ai droit d'en avoir encore.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci. Dans le fond, vous dites au gouvernement d'agir, là, sur les trois points que vous mentionnez, parce que vous considérez que les tribunaux ne le font pas spontanément, ne le font pas.
Mme Bélec (Monique): Absolument.
Mme Beaudoin (Rosemont): C'est ça. C'est que les tribunaux, à votre avis, ne jouent pas le rôle qu'ils devraient jouer. Donc, vous demandez au gouvernement d'intervenir.
Mme Gosselin (Rollande): Si je peux me permettre?
Le Président (M. Bernier): Oui. Mme Gosselin.
Mme Gosselin (Rollande): La loi dit que c'est «un délai raisonnable», mais... Quand on arrive à la cour, bien souvent, bon, bien, là, elle a été malade, elle ne peut pas travailler, elle va perdre sa pension alimentaire. Donc, nous, ce qu'on veut, c'est un incitatif, une façon d'avoir un suivi pour voir si la personne est toujours de bonne volonté, puis ne pas payer pendant 20 ans, 25 ans quelque chose... un mariage qui a duré 10-15 ans.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Gosselin (Rollande): C'est un incitatif qu'on veut, en fait, que le gouvernement se prononce.
Mme Bélec (Monique): Payer plus longtemps qu'on a été mariés, ça n'a pas de sens.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui.
Mme Bélec (Monique): On connaît des gens qui disent: Bien, allez travailler. Quelqu'un qui a divorcé à 40 ans, on lui dit: Bien, O.K., tu peux aller travailler. Bien non, je vais perdre ma pension. Bien oui, elle a plus cher de pension alimentaire qu'elle va avoir si elle va travailler à 9 $. Elle a peut-être 10 $ de l'heure à rester chez elle.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Tout à l'heure, la ministre vous a posé une question, vous avez répondu partiellement, et j'aimerais avoir quelque chose de plus précis pour vraiment qu'on soit éclairés, parce que je sens qu'on n'a pas tous la même information.
On est en couple et on divorce, on a un enfant. Le conjoint paie, naturellement. Je dis «naturellement», parce que c'est, je dirais, majoritairement l'homme qui paie une pension à madame pour les enfants, pas pour elle, pour les enfants. Monsieur refait sa vie et a une nouvelle conjointe dans sa vie. Madame demande une révision du montant de pension alimentaire. Comment on va recalculer ce montant-là? Est-ce qu'on va le calculer sur le revenu familial de monsieur ou seulement sur le revenu de monsieur?
Mme Bélec (Monique): On ne le calcule pas...
Le Président (M. Bernier): Mme Bélec.
Mme Bélec (Monique): On ne le calcule pas sur le revenu familial, mais on demande à la deuxième conjointe de payer la moitié des dépenses. On dit: Monsieur, les dépenses de la maison coûte 20 000 $, madame va en payer 10 000 $. Monsieur veut alors... Alors, monsieur a 10 000 $ de plus pour payer une pension alimentaire.
Mme Poirier: Et ça, c'est un détail qui m'apparaît important, là, dans la discussion qu'on a. C'est que, dans le fond, c'est le but de l'association, là. C'est cette revendication-là des secondes épouses à ce que leurs revenus personnels ne soient pas inclus dans le paiement de pension pour des enfants qui ne sont pas à eux, là, dans le fond, là. Et je pense que, dans le fond... Au début, l'association a vraiment été mise en place pour ces revendications, et je pense que ça, c'est une notion importante, là, qu'il y a une part qui va être attribuée justement à la seconde épouse, là, par la porte d'en arrière.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Bélec, avez-vous des points à ajouter sur ça? Non. Mme Gosselin? Non.
Mme Bélec (Monique): Est-ce que... Quand tu parles de crédit d'impôt, tu dis: On considère une conjointe...
Mme Gosselin (Rollande): C'est parce que... Bien là, on déborde un peu, mais les lois fiscales disent qu'après 12 mois consécutifs on est conjoints. À la Régie des rentes du Québec, on dit qu'un conjoint de fait a le droit à la rente de conjoint survivant. Donc, maintenant, on pourrait dire dans les règlements... les tribunaux, dire: Bien, on paie une pension alimentaire pendant trois ans, cinq ans, et, à ce moment-là, harmoniser les textes de loi aussi, qu'une personne... De toute façon, avec la cause qu'on a parlé tantôt, on va sûrement avoir, un jour, à s'en reparler, là. Mais non, c'est un peu ça, c'est: harmoniser toutes les lois pour que ça fasse...
Le Président (M. Bernier): Merci. Ça va? Donc, je vous remercie, madame...
M. Ouellette: M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Oui, M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: J'aurais une demande, M. le Président. Vous nous avez parlé qu'en 2000 vous aviez soumis un mémoire justement au ministère de la Justice relativement à ce point-là.
Mme Bélec (Monique): On l'a, oui, on l'a même avec nous.
M. Ouellette: Est-ce que vous pourriez le laisser au secrétariat de la commission pour le bénéfice de...
Le Président (M. Bernier): Si vous êtes d'accord pour nous le faire parvenir, on pourra l'annexer, comme on a fait tout à l'heure, à votre mémoire. Et, à ce moment-là, il sera disponible pour l'ensemble des membres de la commission et au niveau du public également.
Mme Bélec (Monique): O.K.
Le Président (M. Bernier): Ça vous va?
Mme Bélec (Monique): Parfait, oui.
Le Président (M. Bernier): Simplement le faire parvenir au secrétariat de la commission.
Donc, merci, Mme Bélec, merci, Mme Gosselin, de l'Association des secondes épouses et conjoints. Je vais suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 38)
(Reprise à 16 h 40)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux.
Donc, nous recevons maintenant la Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec. Sa représentante est Mme Manon Monastesse -- ça va? Donc, Mme Monastesse, la parole est à vous. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation et par la suite discuter avec les membres de la commission. Allez-y.
Fédération de ressources d'hébergement
pour femmes violentées et en
difficulté du Québec (FRHFVDQ)
Mme Monastesse (Manon): Alors, merci. Alors, bonjour, Mme la ministre, M. le Président, Mmes et MM. les députés. Alors, d'entrée de jeu, je dois dire que le bilan de l'action gouvernementale de cette politique et de ce plan d'action pour l'égalité des droits entre femmes et hommes arrive dans un contexte sociopolitique qui est défavorable à l'égalité justement entre les hommes et les femmes.
On peut voir, à travers le Canada, une poussée de la droite conservatrice des projets de loi qui mettent en péril les droits de femmes, bien sûr, à l'égalité, mais également à leur sécurité. On peut nommer le projet de loi C-391 concernant le registre des armes à feu, le projet de loi n° 422 qui veut apporter des modifications à la Loi du divorce qui proposerait, d'office, la garde partagée. Alors, vous comprendrez qu'en contexte de violence conjugale, c'est un enjeu majeur. Alors, c'est d'entrée de jeu.
Et aussi nous faisons face, et ça, on en a déjà parlé, à toutes... des attaques, à un «backlash», à un ressac contre les positions féministes. Alors, c'est un ressac antiféministe, et nos maisons d'hébergement sont directement touchées par ce courant. Et je dois... Je remercie la ministre qui a été proactive; elle nous a bien entendues, lors de nos représentations, pour la mise en place d'un comité sur la sécurité des femmes, puisque nous sommes de nombreux groupes féministes qui faisons face à des demandes répétées d'accès à la... de demandes d'accès à l'information devant la Commission d'accès à l'information. En 2003, certains groupes antiféministes ont demandé l'accès à des rapports financiers d'activité de 852 groupes de femmes et, bien sûr, des maisons d'hébergement. Et on doit souligner qu'on fait face, sur Internet et tous les supports électroniques, à de nombreuses attaques, dont mettre en ligne l'adresse civique, avec photo, d'une maison d'hébergement, quand on sait pertinemment que ça met en péril la sécurité et des femmes qui s'y trouvent et des intervenantes qui oeuvrent dans ce domaine-là. Alors, c'est ce contexte qu'on déplore.
Et, quand on regarde le Code criminel, au fédéral, malheureusement, nous n'avons pas de poignées au niveau de poursuite, puisque la propagande haineuse, le facteur, le critère... entendre de propagande haineuse, le critère selon le sexe n'est pas inscrit dans cet article de loi qui concerne la propagande haineuse.
Alors, en général... Alors, ça, c'est le contexte dans lequel nous travaillons actuellement. Les 38 maisons d'hébergement, qui sont regroupées par la fédération à travers 11 régions administratives, ont accueilli, pour l'année 2009-2010, 6 000 femmes et enfants et ont malheureusement refusé presque 8 000 demandes, faute de places. Nous soulignons aussi que le taux d'occupation national est de 96 %. C'est en hausse de 12 % par rapport à l'année dernière. La moyenne du séjour a également doublé entre 2008-2009 et 2009-2010, passant de 21 jours à 42 jours.
Alors, en ce qui concerne les conditions indispensables que nous proposons, là, pour le second plan d'action gouvernemental, c'est, premièrement, des décisions et des actions cohérentes dans les lois, les politiques et les programmes gouvernementaux; un engagement réel de l'État; un financement à la hauteur des actions exigées.
Au niveau des... en termes d'instruments de gouvernance, alors, un maintien des structures organisationnelles actuelles, puisque je vous... Je vous contextualisais, là, l'état sociopolitique dans lequel nous sommes présentement. Alors, pour nous, c'est sûr que c'est primordial que les structures organisationnelles soient maintenues. Ça veut dire: le Secrétariat à la condition féminine, le Conseil du statut de la femme. C'est, pour nous, une condition sine qua non pour justement atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes.
L'analyse différenciée selon les sexes et une nouvelle perspective intersectionnelle. Pour nous, c'est également un facteur qui est primordial, puisqu'on sait que la violence qui est faite aux femmes, c'est une problématique qui est transversale, qui touche tous les aspects de la vie, dans la sphère privée autant que dans la vie... dans la sphère publique. Et l'analyse différenciée selon les sexes, bien sûr, puisqu'on est souvent aussi... Les antiféministes vont beaucoup arguer sur le fameux concept de symétrisation, et on le voit, que c'est... En violence, c'est une cible qu'ils mettent en place en disant que, oui, la violence, elle est symétrique, selon certaines études qui ont été décriées depuis longtemps. Mais c'est remis constamment sur la table par ces groupes-là. Alors, effectivement, il faut avoir une mise en garde très précise contre la symétrisation, et, en violence, on le voit... Et pourtant, les statistiques du ministère de la Sécurité publique sont très claires, il n'y pas de symétrisation au niveau des infractions commises, et c'est très clair, que ce soit au niveau des homicides, ou des voies de fait, ou autre, au niveau du harcèlement également. Et, même, on peut le voir parce que le ministère produit des statistiques qui sont générées. On peut le voir aussi par région, et, en aucun cas, il n'y a une symétrisation.
En ce qui concerne toutes les orientations, la fédération est membre du G13. Alors, nous sommes solidaires des recommandations qui ont été faites par l'ensemble, là, des organismes que vous avez entendus. Moi, je vais y aller spécifiquement par rapport à l'orientation 5, qui est le respect de l'intégrité des femmes et leur sécurité.
Alors, en violence conjugale, je veux rappeler que le gouvernement du Québec reconnaît la violence envers les femmes comme étant un problème social d'envergure. Le Québec, par exemple, est la seule province canadienne à s'être dotée d'une politique interministérielle, en 1995. Rappelons également que, contrairement à la position qui était défendue dans la précédente Politique en santé et bien-être, qui confondait les courants féministes et familialistes, la politique de 1995 adopte la définition de la violence contre les femmes telle qu'elle est promulguée par l'Assemblée générale des Nations unies, en 1993, qui était que la «violence est la manifestation des rapports de force historiquement inégaux qui ont abouti à la domination des hommes sur les femmes».
Alors, c'est pourquoi que c'est si important d'arriver concrètement à une égalité entre les hommes et les femmes. Et c'est pourquoi c'est si important d'avoir un plan d'action en la matière, parce qu'au niveau de la violence, c'est une condition qui est sine qua non. S'il y avait une égalité, le fait qu'il y ait de la violence envers les femmes ne pourrait pas avoir... n'avoir de place. Et c'est aussi repris par les Nations unies, en 1995, lors de la Conférence mondiale sur les femmes, qui stipulait que «La violence à l'égard des femmes fait obstacle à la réalisation des objectifs d'égalité, de développement et de paix. Elle constitue une violation des droits fondamentaux et des libertés fondamentales des femmes et empêche partiellement ou totalement celles-ci de jouir de ces droits et libertés. Le fait que la protection et la promotion des droits et libertés fondamentaux ne soient pas assurées dans [les] cas de la violence à l'égard des femmes est[,] un problème ancien qui préoccupe tous les États et auquel il faut s'attaquer.»**(16 h 50)** Quant au plan d'action en violence conjugale 2004-2009, nous soulignons, de façon globale, l'actualisation des nombreuses mesures, entre autres, le respect de l'entente concernant le rehaussement du financement des maisons d'hébergement en termes de consolidation des développements des services, en accord avec l'engagement et les objectifs stipulés dans la mesure 19. D'ailleurs, juste à la fin novembre, il y a eu une recherche du CRI-VIFF qui est sortie, qui a fait état, bon, justement du développement que l'on a effectué avec les montants qui ont été accordés dans le développement par rapport aux maisons d'hébergement, surtout au niveau des... On voit que c'est majeur, principalement au niveau des services externes.
Cependant, je crois que, quand on regarde... Bon, dans le plan égalité... le plan d'action en violence conjugale -- c'est la mesure 51 -- ce qu'on... Pour nous, qu'est-ce qui est un enjeu majeur, c'est beaucoup en termes d'arrimage de toutes les actions. Alors, bien sûr, il y a des actions qui n'ont pas encore été actualisées, alors il faut les actualiser pleinement et tout ça aussi en termes d'arrimage entre les ministères, entre les actions, entre aussi les politiques. On a une politique en violence conjugale. On a une Loi de la protection de la jeunesse. Et, nous, on le voit sur le terrain, que ça pose problème au niveau de l'arrimage de tous ces éléments-là. Et ça, c'est... Je crois que c'est important, que c'est un des enjeux majeurs par rapport au prochain plan d'action.
Alors, on peut voir aussi qu'en matière de violence conjugale, bien que nous ayons remarqué des améliorations auprès... au plan du traitement judiciaire, au fil des ans, il y a des problèmes qui persistent, et les enjeux reliés à la sécurité des victimes tardent à être pris en compte. Ainsi, on constate des incohérences entre les décisions prises par la cour criminelle et celle des tribunaux de la famille ou de la jeunesse, qui est la mesure 44 du plan d'action en violence conjugale. Alors, beaucoup reste à faire en termes d'actualisation, comme du Guide des pratiques policières en matière de violence conjugale et de standardisation de l'intervention particulière, l'intervention policière, et ce, partout au Québec, qui est l'engagement 35.
Par ailleurs, la mise en pratique des directives en matière de violence conjugale s'adressant aux substituts du Procureur général reste un enjeu en termes de promotion de la sécurité des victimes et de leurs proches, et c'est ce qu'on constate sur le terrain.
Toutes les actions dans le plan d'action, les mesures, elles sont bien fondées, mais tout est dans l'arrimage de tous ces éléments-là ensemble. On arrive avec des jugements contradictoires où, à la cour criminelle, il va y avoir un interdit de contact, mais, là, on arrive avec un jugement de la DPJ qui permet des contacts entre le père et les enfants. Alors, dans tout ça, je crois qu'il faut revenir aussi à: que toute action soit prise en compte en fonction des principes directeurs de la politique, dont celui de la sécurité des femmes et des enfants.
Au niveau de la mesure...
Le Président (M. Bernier): En conclusion, Mme Monastesse. En conclusion, Mme Monastesse.
Mme Monastesse (Manon): Oui? Oh mon Dieu! Alors, écoutez, au niveau... Je pourrais dire, au niveau de la mesure 52, au niveau des services de supervision, ce qu'on demande, c'est que... c'est les... Vraiment, on demande que le... Attendez une minute, là. Ce qu'on demande... Parce qu'en ce moment c'est un peu des initiatives qui sont régionales, et il n'y a pas au niveau... il n'y a pas un chapeau qui est pris par le ministère de la Justice de pair avec le ministère Santé, Services sociaux, qui était... Nos recommandations, à l'époque, étaient de mettre sur pied un réseau provincial de services de supervision de droit d'accès standardisés à leur structure des services et formation du personnel, en actualisant également l'application du guide des normes en vigueur afin de s'assurer de l'accessibilité des services adaptés sécuritaire, au lieu que ça soient des initiatives qui soient régionales.
Et en en ce qui concerne la médiation familiale, pour nous, c'est une situation qui est impossible de par la nature même de la violence; c'est une situation qui est impossible en contexte de violence conjugale. Et ça, on l'a dit, on le redit; on a soumis notre mémoire à cet effet-là. Oui, on est en accord qu'il y ait une certaine formation des médiateurs, mais qui ne leur permettrait pas de poursuivre la médiation. Alors, on...
Le Président (M. Ouellette): Merci, Mme Monastesse. Sûrement que... Aux questions de la ministre ou des représentants de l'opposition officielle, on vous fera préciser les choses que vous n'auriez pas eu le temps de nous préciser dans votre présentation. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Merci. Merci, M. le Président. Merci d'être là avec nous. Évidemment, la question de la violence conjugale va être présente dans notre prochain plan d'action; elle l'était dans le dernier, puis ça va continuer. Il faut que ça continue. Vous avez certainement pris connaissance de l'étude, de la recherche qui a été faite sur les mesures qui ont été prises par le gouvernement et l'injection d'argent neuf dans les maisons d'hébergement. Alors, je pense que c'est une... ça a été une décision qui a été bonne, puis qui... On le voit dans cette recherche, on est quand même à l'avant-garde.
Dans votre mémoire, vous continuez... Vous n'avez pas eu le temps de parler de toutes vos mesures, mais j'aimerais vous entendre parler de la question des femmes immigrantes... des femmes itinérantes dans le cadre du programme AccèsLogis Québec. On en a parlé un peu au début, pendant la journée, de cette question. Mais, rapidement, là, la question des femmes itinérantes et des femmes aussi qui font de la prostitution ou qui sont intoxiquées, elles n'ont pas accès à certains centres d'hébergement parce qu'elles arrivent... puis elles arrivent intoxiquées, donc il faut...
Alors, vous dites réserver 50 unités de logement aux femmes itinérantes dans le cadre du programme AccèsLogis Québec. 50 unités de logement, ce n'est pas beaucoup. Est-ce que vous pensez que c'est... 50 unités de logement, ça comblerait... Êtes-vous capable de le mesurer en termes de pourcentage? Ça pourrait combler les besoins jusqu'à quel niveau?
Le Président (M. Ouellette): Mme Monastesse.
Mme Monastesse (Manon): Bien, je dirais que c'est très peu parce que... On le voit beaucoup, comme nos maisons qui reçoivent plus, justement, les femmes en difficulté, mais toutes les maisons de notre fédération reçoivent plus ou moins, là, un certain pourcentage de femmes en difficulté, Et ça comblerait... C'est très minime, là. C'est parce que, vraiment, on le voit, et c'est pour ça que notre taux... Le séjour augmente de plus en plus, parce que ce sont des femmes qui font face à de multiples problématiques, qui ont vécu de multiples formes de violence. Alors, leur réinsertion sociale, c'est une... Ça prend du temps, parce qu'on les prend vraiment au bout de la ligne. Et les ressources, comme ici, à Montréal, que ce soit La Rue des femmes, Le Chaînon, elles débordent. Elles refusent énormément de femmes. Alors, ça prend tout un processus. Le fait d'être en maison d'hébergement, c'est bien, mais tout le processus qui pourrait accompagner les femmes dans une réinsertion sociale effective, ça prend un soutien qui est continu. Donc, ça prend des logements sociaux avec une supervision, alors des maisons de ce qu'on appelle plus de «seconde étape», pour les accompagner progressivement vers une réinsertion sociale.
**(17 heures)**Mme St-Pierre: Je me demandais si vous aviez une idée du nombre... du chiffre de femmes qui vivent cette situation et qui auraient besoin de ce genre de logement. Je sais qu'il y a toutes sortes d'initiatives. J'ai vu, récemment, à la télé, un reportage qui parlait de Mme Lise Watier, qui offre un certain nombre d'appartements à des femmes comme ça, là, qui étaient des femmes itinérantes et qui leur donne une certaine dignité, puis elles étaient toutes fières d'avoir leur petit coin, leur petite place au soleil. Ça donne aussi... Ça encourage. Puis, la Y, il y a beaucoup d'initiatives qui se font, qui sont intéressantes et... C'est vrai que ce sont probablement les plus démunies.
Ça m'amène à la question de la traite. Dans les rencontres fédérales-provinciales de ministres de la Condition féminine, c'est une question qui est étudiée présentement. Lors de notre dernière rencontre, on a eu... on a discuté de cette question-là. On va en reparler dans la prochaine rencontre annuelle. La situation au Québec, je pense qu'on... il me semble qu'on ne la cerne pas vraiment, la situation des femmes, la question de la traite. Vous parlez des femmes autochtones. Dans nos rencontres, ça a été des femmes... les ministres de la Condition féminine des autres provinces où il y a des situations particulières par rapport aux femmes autochtones semblent plus au courant, là, semblent avoir plus d'informations. Et ici ce n'est pas, il me semble, quelque chose dont on parle beaucoup.
Mme Monastesse (Manon): Parce qu'on peut dire que la situation... comme ici, la structure, là, des maisons d'hébergement, il y en a 106 au Québec, mais il y en a seulement une... Il y en a à peu près une... 500 et quelques à travers le Canada. Alors, c'est pour ça que la situation de la traite ressort beaucoup plus, et, nous, on est aussi... On fait partie aussi d'un réseau pancanadien, alors on l'entend de nos consoeurs, parce que déjà, au niveau de l'hébergement, c'est beaucoup plus précaire qu'au Québec.
Moi, je peux vous dire qu'à date il y a eu 25 % du personnel de nos maisons qui ont été formés par une spécialiste de la GRC, ce qui a pu nous permettre d'identifier des femmes qui ont été dans nos maisons d'hébergement et pour lesquelles on n'avait pas évalué qu'elles étaient victimes de traite mais que, par la suite, on a pu les dépister. Puis je peux vous dire que, dans nos maisons, on en reçoit régulièrement. Bien sûr, ça pose... c'est un défi supplémentaire au niveau de l'adaptation de notre intervention, mais aussi parce que ça pose des enjeux majeurs au niveau de la sécurité, parce que là, à ce moment-là, on fait... Là, elles sont... On fait affaire avec des femmes qui ont été dans le crime organisé, qui ont été au niveau de la traite.
Alors, au niveau de nos maisons d'hébergement, c'est un questionnement qu'on a parce qu'on a besoin... À ce moment-là, on va avoir besoin du gouvernement, une aide supplémentaire pour peaufiner notre expertise et également s'assurer de la sécurité qui... les problématiques spécifiques par rapport à la sécurité de ces femmes-là, quand elles viennent dans nos maisons d'hébergement.
Mme St-Pierre: Bon. Avant de céder la parole à mes collègues qui ont aussi des questions, toujours sur la question de la traite, est-ce qu'on est capables de cerner cette question-là au Québec? Est-ce qu'on a une idée du phénomène? Est-ce qu'on est capables de dire: Ça se passe de telle manière, ce sont telles femmes qui sont touchées? Comment on est... Est-ce qu'il existe des informations?
Mme Monastesse (Manon): Nous, je peux vous dire les informations qu'on reçoit de nos maisons.
Mme St-Pierre: Oui.
Mme Monastesse (Manon): Bien sûr, c'est un portrait qui est partiel, mais deux choses que je peux vous dire, c'est que c'est en émergence, donc c'est de plus en plus régulièrement qu'on en voit, des femmes qui sont victimes de traite dans nos maisons, et c'est surtout de la traite interne, qui ont été promenées de province en province, dans des réseaux de prostitution, d'exploitation sexuelle. À cette heure, c'est beaucoup de ces femmes-là que l'on voit, mais aussi... aussi, au niveau international, pour de... particulièrement nos maisons qui se spécifient au niveau de l'intervention auprès des femmes migrantes, et immigrantes, et issues des communautés ethnoculturelles.
Mme St-Pierre: Décrivez-nous qu'est-ce que c'est, exactement. C'est quoi, la situation d'une femme victime de traite, et comment vous le détectez? Par rapport à une femme qui fait de la prostitution, une itinérante, vous détectez ça comment? Ce n'est pas écrit le mot «traite», là, dans le...
Mme Monastesse (Manon): Non, puis elle ne vont pas nous le dire non plus de prime abord.
Mme St-Pierre: Elle ne vous le diront pas, c'est ça.
Mme Monastesse (Manon): Comment on le détecte, c'est quand on fait son histoire de vie, puis elle dit: Ah oui! Moi, j'ai été en Colombie-Britannique, après ça, je suis allée en Alberta, j'ai travaillé dans les bars, et, progressivement, c'est comme ça qu'on arrive à détecter, à mettre... à avoir un meilleur portrait de leur situation. C'est en parlant avec elles, c'est... Bien sûr qu'elles sont très réticentes parce qu'elles ont peur que, si elles dévoilent complètement leur histoire, elles soient obligées de porter plainte, donc de collaborer avec les services de police. Et à ce moment-là... C'est pour ça que c'est difficile, aussi: elles sont réticentes à en parler.
Mme St-Pierre: Mais soupçonnez-vous la présence d'un réseau au Canada ou au Québec?
Mme Monastesse (Manon): Oui, de plusieurs réseaux.
Mme St-Pierre: O.K.
Mme Monastesse (Manon): De plusieurs réseaux, parce que ce sont des problématiques différentes. Dépendamment des provinces, elles ont eu affaire avec plusieurs réseaux. Ici, au Québec, ça peut être des femmes qui ont été dans les réseaux de prostitution, elles ont été au Saguenay-- Lac-Saint-Jean, et tout ça, et elles ont été aussi victimes de toutes sortes de formes de violence. Mais ce ne sont pas les premières choses qu'elles vont nous dire. Elles vont nous dire qu'elles ont été victimes de leur petit ami, mais finalement on s'aperçoit que c'était son souteneur, qu'elle était dans un réseau, qu'il l'a amenée à danser partout au Québec ou des histoires semblables.
Le Président (M. Bernier): Merci. Nous allons aller du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, merci, M. le Président. Mme Monastesse, bonjour. Bienvenue à notre commission. Alors, je pense que chacun des députés ici doit avoir des maisons... On en a dans chacun de nos comtés et on les connaît bien, puis les problématiques que vous avez exposées concernant les pressions sur l'anonymat puis... Enfin, tout ce dont vous parliez tout à l'heure nous est assez familier, puis on est très solidaires de ces maisons d'hébergement dans nos circonscriptions. Je pense que c'est extrêmement important puis, si on... quand on regarde les chiffres, si on se demande encore s'il y a des questions particulières aux femmes, he bien, ça, ça en est une. Parce que la violence conjugale et la violence tout court faite aux femmes est quelque chose qui nous interpelle considérablement. On ne peut pas imaginer... même la violence verbale, tu sais. On a des débats ici, souvent musclés, mais enfin.
Non, mais c'est vrai. Moi, ça me... Je suis toujours très mal à l'aise d'entendre des mots violents, d'une part, et puis, bien sûr, quand on passe à l'acte, encore davantage, puis que ça existe dans notre société. Et, à ce que je sache, mais vous pourriez me le dire, est-ce que c'est en augmentation ou en diminution que cette violence faite aux femmes, la violence physique, là, faite aux femmes?
Mme Monastesse (Manon): La violence physique, on n'a pas de, mon Dieu, d'indicateurs, mais ce qu'on peut dire, c'est que, bien sûr, avec aussi les campagnes de sensibilisation, les campagnes de sensibilisation provinciales qui, pour nous, sont extrêmement importantes, avec le travail que l'on fait, alors il y a plus de dénonciations. Les femmes, elles vont appeler plus, il y a les pères qui vont appeler, les frères. Ça, on ne voyait pas ça autrefois, mais là il y a des hommes qui appellent et qui posent des questions: Bien, ma soeur vit dans une situation, est-ce que c'est de la violence? Est-ce que... Qu'est-ce que je dois faire?
Alors, il y a beaucoup... parce que les maisons d'hébergement, ce n'est pas que de l'hébergement. Elles peuvent venir en service externe, on peut les accompagner au niveau des structures, à la cour. Alors, oui, mais il y a plus de dénonciation. On voit aussi que les femmes, elles viennent plus jeune en maison d'hébergement puis elles vont dénoncer plus rapidement.
Alors c'est à ce niveau-là, c'est une avancée qui est majeure. Et c'est d'autant plus déplorable qu'on fasse face à un ressac de la part de groupes antiféministes qui sont en train de miner, dans l'opinion publique, le travail que l'on fait. Et ça mine aussi au niveau... Quand, dans des régions, des maisons d'hébergement mettent sur pied une activité et que ces groupes-là viennent et s'attaquent directement à une ex-hébergée qui raconte son histoire, qui vont l'interpeller directement, l'intimider, pour nous, c'est inacceptable. On demande de faire notre travail et de bien le faire et de le faire en paix.
Mme Beaudoin (Rosemont): Vous avez absolument raison, et on vous appuie à 100 % là-dessus. Dites-moi aussi, j'imagine -- et c'est ce qu'on entend en général -- que les policiers aussi sont mieux équipés, là, pour répondre. Est-ce que vous trouvez que les réponses sont suffisantes et que les ressources sont suffisantes, policières?
Mme Monastesse (Manon): Moi, je dirais...
Mme Beaudoin (Rosemont): Mais je pense qu'en effet les policiers sont mieux équipés, à tous égards, pour répondre à ces questions-là.
Mme Monastesse (Manon): Effectivement, ils sont mieux équipés. Mais, où le bât blesse, pour nous, c'est que c'est à géométrie variable. Alors, dépendamment des régions, la réponse des services de police va être différente, la position va être différente. Il y a des régions où c'est très difficile de travailler avec les services de police; c'est comme si la violence, la violence conjugale n'existe pas dans leur région. Il y a des régions, comme ici, à Montréal, où, dans tous les postes de quartier...
Une voix: ...
Mme Monastesse (Manon): Pardon?
Mme Beaudoin (Rosemont): On est à Québec.
**(17 h 10)**Mme Monastesse (Manon): Oui... Ah! Non. Il y a un petit peu... un petit décalage, pardon. Alors, à Montréal et à Québec, il y a quand même... il y a des escouades qui traitent plus... Dans les postes de police à Montréal, tous les postes de quartier ont une personne pivot, un responsable strictement pour le dossier violence conjugale. Mais il y a encore du travail à faire et beaucoup au niveau, comme je vous dis, de l'arrimage, de la coordination et de la formation continue des policiers. Parce que c'est un secteur, on sait, où il y a beaucoup de roulement, mais je crois que c'est six heures qu'ils reçoivent, de formation, à l'école de police. Alors, ça n'en fait pas des spécialistes.
On ne veut non plus que ça devienne des intervenants psychosociaux. Mais, quand même, ce sont des intervenants de première ligne, et leur intervention est déterminante pour les victimes, si elles vont porter plainte ou pas. Alors, il faut qu'ils aient une base. Et ils ont des directives qui sont très claires: en matière de violence conjugale, ils doivent... y avoir une plainte qui doit être formulée. Alors, il n'y a pas d'hésitation à avoir, mais, malheureusement, on le voit encore, mais... C'est ça. Alors, il faut qu'il y ait une certaine standardisation au niveau de la réponse policière à travers le Québec.
Le Président (M. Bernier): Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Très bien. Une dernière question en ce qui me concerne. Vous dites, page 25, dans les recommandations: «Réformer la Loi sur les normes du travail afin d'y prévoir notamment l'interdiction de disparités de traitement fondées sur le statut d'emploi.» Ça veut dire quoi exactement? Je veux juste avoir des éclaircissements sur ce que vous recommandez.
Le Président (M. Bernier): Mme Monastesse.
Mme Monastesse (Manon): Bien, écoutez. Ça, c'est parce que, on l'a indiqué, on est solidaire avec le mouvement, là, par rapport au G13, là, mais c'est pour ça qu'on le... On est solidaire avec les autres groupes, là.
Mme Beaudoin (Rosemont): Mais ça veut dire quoi? C'est parce que je ne comprends pas. Il n'y a pas d'interdiction, dans le moment, aux normes du travail concernant les disparités de traitement fondées sur le statut d'emploi?
Le Président (M. Bernier): Mme Monastesse.
Mme Monastesse (Manon): Page 25...
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. C'est juste dans les recommandations, avant l'orientation 3. «Réformer la Loi sur les normes du travail afin d'y prévoir notamment l'interdiction de disparités de traitement fondées sur le statut d'emploi.»Mme Monastesse (Manon): Bien, parce qu'elles considèrent qu'il y a des... il y a disparité au niveau d'un statut d'emploi, là. Je ne pourrais pas vous répondre, là, de façon particulière.
Mme Beaudoin (Rosemont): Ce n'est pas grave, ce n'est pas grave. On y reviendra sûrement. C'est parce que je ne comprends pas...
Mme Monastesse (Manon): Avec le CIAFT, là...
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Bien ils sont passés. J'aurais dû leur demander.
Mme Monastesse (Manon): ...vous allez avoir plus les spécialistes dans le domaine.
Mme Beaudoin (Rosemont): On reviendra certainement, au mois de février, sur ces questions-là. Merci.
Mme Monastesse (Manon): D'accord.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Terrebonne, la parole est à vous.
M. Traversy: Merci, M. le Président. Juste une petite question de précision puis de compréhension. Mme la ministre, tout à l'heure, vous a posé des questions par rapport au taux d'occupation, justement, des centres d'hébergement, bon, qui sont occupés à 96 %, en hausse de 12 %. Vous avez noté tantôt que, effectivement, le passage des gens à l'intérieur des centres avait doublé de 2008 à 2010. Vous avez dit que c'était parce qu'effectivement ça demandait plus de travail puis d'encadrement sur du moyen, long terme.
Je voudrais juste savoir: Qu'est-ce qui a fait en sorte que, de 2008 à 2010, les taux d'occupation ont doublé? Est-ce que c'est parce que, de plus en plus, on reçoit des cas beaucoup plus sérieux, beaucoup plus graves, beaucoup plus difficiles ou parce que c'est une volonté du regroupement de vouloir accompagner davantage les gens qui passent à l'intérieur des établissements?
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Monastesse (Manon): C'est toutes ces réponses.
M. Traversy: C'est toutes les réponses en soi?
Mme Monastesse (Manon): C'est toutes... C'est ça. C'est parce qu'on a la capacité, avec le rehaussement, d'accompagner plus les femmes, de plus les soutenir et de s'assurer... Notre but, c'est de s'assurer qu'elles sortent définitivement du contexte de violence dans lequel elles sont depuis, souvent, des années. Donc, ce n'est pas en trois semaines que le travail peut se faire. Et aussi parce qu'au niveau... quand elles ont des représentations à faire au niveau de la cour civile, tout ça, ce sont des démarches qui sont très longues, et, souvent, elles se sentent plus en sécurité de rester dans la maison d'hébergement pour amorcer toutes ces démarches-là. Et le fait aussi de se... Quand on vient en maison d'hébergement, qu'on a vécu de la violence, souvent, il faut repartir à zéro: alors, c'est se retrouver un logement, de s'assurer que le conjoint ne va pas les retrouver, de s'assurer de mettre en place plusieurs mécanismes sécuritaires, de changer les enfants d'école. Alors, ça demande beaucoup de démarches et c'est pour cela qu'on... Ça augmente aussi le taux d'occupation. Et on parle aussi de la problématique des femmes en difficulté qui vivent avec de multiples problématiques.
M. Traversy: Donc, un mélange un peu de toutes ces raisons. Et simplement, rapidement, pour terminer, une petite question de précision par rapport à la mesure 36. Vous faites référence, dans cette mesure-là, que... Vous déplorez un manque de communication avec les partenaires du comité du conseil quant à l'état de la situation puis des mesures à prendre avec... relevant du DGSQ puis du CQLC et du MSQ. Mais, quand vous dites «un manque de communication», est-ce que vous pouvez préciser? Est-ce que c'est un manque de bonne volonté ou... Juste pour bien comprendre.
Mme Monastesse (Manon): Alors, on parle... En ce moment, on vit une situation qui est assez problématique où... Là, on vous parle de la table qui a été mise sur pied, la table de concertation des organismes qui oeuvrent auprès des victimes d'actes criminels, et on a un manque de communication avec le ministère de la Justice qui préside la table. On a été mis devant des faits accomplis, dans le sens où il y a des projets pilotes qui ont été mis en place sans qu'on soit consultés et qui concernent directement nos maisons d'hébergement et d'autres regroupements également. Alors, on a fait des représentations et on est en pourparlers présentement avec le ministère de la Justice pour... On lui a présenté nos doléances et on a présenté également nos recommandations pour assurer une meilleure communication et une meilleure concertation. C'est toujours dans le but de s'assurer de donner les meilleurs services aux victimes d'actes criminels.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Monastesse. Merci de la... représentante de la Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec. Je vais suspendre quelques instants pour permettre au groupe suivant de se préparer.
(Suspension de la séance à 17 h 17)
(Reprise à 17 h 19)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Nous recevons le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. Donc, vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation. Donc, pour fins d'enregistrement, je vous prierais de vous identifier et identifier la personne qui vous accompagne. La parole est à vous.
Regroupement des maisons pour
femmes victimes de violence conjugale
Mme Riendeau (Louise): Je suis Louise Riendeau. Je suis coordonnatrice des dossiers politiques au regroupement et je suis accompagnée par notre présidente, Mme Nathalie Villeneuve, qui est la directrice de la Maison Hina, à Saint-Jean-sur-Richelieu.
Le Président (M. Bernier): Bienvenue. Allez-y.
**(17 h 20)**Mme Riendeau (Louise): Alors, brièvement, je pense que plusieurs nous connaissent, mais notre regroupement a été créé il y a 30 ans. Il regroupe 49 maisons réparties sur l'ensemble du territoire du Québec. Dans la dernière année, les statistiques de 38 de nos maisons nous indiquent qu'elles ont reçu à peu près 4 500 femmes et enfants, et ça, c'est sans compter les femmes et les enfants qui ont été aidés sans venir en hébergement.
La politique gouvernementale Pour que l'égalité de droits devienne une égalité de fait, son premier plan d'action et le deuxième qui s'en vient sont, pour nous, des instruments essentiels pour l'atteinte et l'exercice d'une pleine et entière égalité pour les femmes. Alors, pour nous, ce dont il s'agit, c'est vraiment de l'atteinte du droit, plein et entier, à l'égalité. Vous allez le voir, on va y revenir quelques fois. On n'aime pas beaucoup le titre qui parle de l'égalité entre les hommes et les femmes parce qu'on trouve que ça peut induire des glissements; ça peut nous éloigner de la raison pour laquelle on est vraiment là. Oui, des hommes handicapés sont vulnérables, oui, des hommes gais peuvent être discriminés, mais les femmes le sont de façon systématique. Et, pour nous, l'atteinte de l'égalité suppose l'élimination de toutes les discriminations systémiques dont sont victimes les femmes.
Évidemment, pour nous comme beaucoup d'autres, l'État québécois demeure le premier responsable du respect, de la protection, de la promotion et de la mise en oeuvre du droit à l'égalité pour les femmes, et, évidemment, ça veut dire du droit... de tous les droits, de façon égale. Notre mémoire aborde différents enjeux qui doivent être pris en compte par le plan, différents éléments sur l'orientation 1 et l'orientation 5. On parlera évidemment des instruments de gouvernance et on touchera aussi un mot sur divers droits économiques et sociaux qui ont une influence très importante, notre collègue en a parlé tantôt, pour permettre aux femmes de sortir de la violence.
Alors, quelques enjeux importants pour ce débat. Quand nous parlons de violence conjugale, nous référons à la définition de la violence faite aux femmes qu'a adoptée l'ONU. Donc, on parle de tout acte de violence fondé sur l'appartenance au sexe féminin et on parle également de la manifestation de rapports de force historiquement inégaux entre l'homme et le femme, qui ont abouti à la domination exercée par les hommes et les femmes et à la discrimination. On croit évidemment qu'il faut agir collectivement pour qu'on reconnaisse que la violence faite aux femmes, ce n'est pas une dynamique de couple exclusivement liée aux individus, mais ça découle d'une socialisation... ça découle d'une organisation sociale qui établit de la discrimination entre les hommes et les femmes, et on croit fermement qu'une société... notre société doit continuer à progresser vers des rapports égalitaires qui donnent droit à la dignité, à l'intégrité, à la justice.
Si on est mal à l'aise avec la question d'égalité hommes-femmes comme elle est présentée dans les documents, c'est qu'on a le sentiment que ça amène à symétriser les conditions de vie des hommes et des femmes et à nier justement la discrimination systémique. Quand on regarde la question de la violence, il n'y a pas de symétrie entre la violence faite aux femmes et les situations de violence que des hommes peuvent vivre. Bien sûr, des hommes peuvent être violentés, mais ce n'est pas parce qu'ils sont des hommes et ce n'est pas un problème systémique.
À l'heure actuelle, depuis plusieurs années, l'utilisation des statistiques de Statistique Canada nous amène à penser que les hommes sont autant victimes que les femmes, et ça induit vraiment un dérapage dans le discours. On se ramasse à parler de personnes violentes, de personnes violentées, on ne sait plus de quoi on parle, et, ce faisant, les décideurs sont amenés à prendre des décisions, des orientations qui ne sont pas toujours celles qui nous permettraient de cibler correctement les problèmes. On pense que la symétrisation détourne l'objectif d'égalité des femmes et s'éloigne grandement de l'analyse différenciée selon les sexes. Donc, on recommande, comme l'orientation qu'a déjà pris le ministère, d'utiliser de façon soutenue les statistiques de police que produit le ministère de la Sécurité publique et non pas Statistique Canada et on souhaite que l'ensemble de l'État québécois fasse cela. Par ailleurs, on pense que des représentations devraient être faites auprès de Statistique Canada pour qu'ils changent leur méthodologie et qu'on puisse avoir quelque chose de fiable qui nous permettrait justement d'estimer: Est-ce qu'il y en a plus? Est-ce qu'il y en a moins? Est-ce que ça progresse? Là, on n'a pas de statistiques fiables.
Par ailleurs, on ne peut pas parler d'égalité pour toutes les femmes sans parler d'une perspective intersectionnelle. Toutes les femmes ne peuvent pas exercer leurs doits de la même façon. Certaines ont plus d'obstacles, certaines vivent plus de discrimination, qu'on pense au racisme, à la lesbophobie, à l'handicapisme, à l'âgisme. Pour enrayer les discriminations, il faut vraiment prendre en compte l'interaction de l'ensemble de ces oppressions. Les femmes victimes de violence conjugale sont particulièrement concernées par cela. Pensons par exemple au défi auquel est confrontée une femme handicapée victime de violence dont le conjoint est le prodigueur de soins. Imaginez, c'est difficile pour n'importe quelle femme de quitter un conjoint, ces femmes-là ont beaucoup plus de difficultés. Et je pourrais parler des femmes immigrantes, etc. Nos membres ont commencé à prendre des mesures pour mieux accueillir ces femmes-là, mais ça reste tout un défi, et elles ont besoin de soutien là-dedans. Pensons à l'accès aux interprètes, à l'adaptation.
Alors, dans notre mémoire, on fait diverses recommandations pour soutenir les maisons dans leurs efforts d'inclusion, particulièrement pour les femmes qui ont des limitations fonctionnelles, on parle de formation, d'adaptation, de maillage avec des ressources spécialisées.
Quelques mots sur la question de l'intimidation et de la cybercriminalité. Vous le savez, nos groupes, d'autres groupes de femmes ont été la cible d'attaques antiféministes dans les dernières années. Le ministère de la Sécurité publique a mis sur pied un comité qui est en train de dresser un portrait et qui devrait, s'il y a lieu, dresser un plan de lutte à l'intimidation. On pense que ce travail-là doit absolument se poursuivre. Par ailleurs, des pressions doivent être faites sur le fédéral pour que le Code criminel considère que ces attaques-là sont de la propagande haineuse. À l'heure actuelle, le facteur de sexe ne peut pas être pris en compte quand on parle de propagande haineuse.
Je vais laisser la parole à notre présidente, qui va vous parler davantage de l'orientation 5 et de l'orientation 1.
Le Président (M. Bernier): Mme Villeneuve.
Mme Villeneuve (Nathalie): Bonjour.
Le Président (M. Bernier): Bienvenue, Mme Villeneuve.
Mme Villeneuve (Nathalie): Merci. Comme on l'a dit, encore aujourd'hui, les femmes jouissent moins de leur droit à l'intégrité et à la sécurité que les hommes. Il y a là d'importants enjeux de droit à l'égalité. Le premier plan d'action prévoyait la poursuite de la mise en oeuvre du plan d'action en matière de violence conjugale. Celui-ci est terminé depuis deux ans, mais aucun bilan n'a été rendu public. Il est nécessaire qu'un bilan approfondi soit fait.
Mais, sans attendre le nouveau plan en violence conjugale, des actions majeures doivent être mises en place dès maintenant afin de permettre à toutes les femmes d'exercer le droit à l'égalité. La sensibilisation de la population est toujours nécessaire, et les programmes, notamment au plan de la justice, doivent concourir à l'exercice des droits à l'égalité par les femmes.
D'abord, nous recommandons l'actualisation intégrale des mesures non concrétisées du plan d'action 2004-2009 en matière de violence conjugale. Concernant les campagnes de sensibilisation, trois campagnes de sensibilisation ont été faites dans les dernières années. C'est un pas dans la bonne direction mais malheureusement insuffisant pour atteindre tous les objectifs de sensibilisation et de prévention. Les campagnes doivent se poursuivre sur de plus longues périodes et rejoindre davantage les femmes discriminées: les femmes autochtones, âgées, immigrantes, les lesbiennes et, de façon prioritaire, les femmes ayant des limitations fonctionnelles. Les prochaines campagnes devraient aussi porter sur d'autres formes que la violence physique et responsabiliser de façon plus majoritaire... socialement les agresseurs.
Du côté de la médiation familiale, la médiation est porteuse d'inégalités pour les femmes victimes de violence conjugale. Le déséquilibre de pouvoir, l'impossibilité de négocier, le fait que la violence se poursuit et qu'elle ne soit pas toujours détectée par les médiateurs ou par les juges augmentent les risques pour les femmes, tant au niveau de leur sécurité qu'au niveau d'une entente équitable. Le deuxième plan d'action en matière d'égalité devrait affirmer que le recours de la médiation ne doit pas être promu dans les cas de violence conjugale.
D'autre part, lorsque la médiation a tout de même lieu, la sécurité des femmes et des enfants devrait être une priorité. Nous faisons plusieurs recommandations à ce chapitre pour le ministère de la Justice: affirmer clairement qu'en présence de violence conjugale, la médiation n'est pas une solution à privilégier ou à promouvoir; demander aux médiateurs d'effectuer systématiquement le dépistage de la violence conjugale avant le début de la médiation et poursuivre de façon continue afin de détecter les situations qui auraient échappé lors du dépistage de départ; encourager les médiateurs, les médiatrices qui dépistent la violence conjugale de mettre fin au processus, et ce, de façon sécuritaire.
La supervision des droits d'accès, visites supervisées et échange de garde. Le plan d'action visait à s'assurer que les services de supervision des droits d'accès aux enfants donnent priorité à la sécurité des enfants et du parent non violent dans les cas de violence conjugale, cependant sans prévoir de moyens précis pour y parvenir. Les ressources de supervision de droits d'accès reçoivent toujours un financement nettement insuffisant et sont trop peu nombreuses. Les sommes promises par le MESS n'ont pas été totalement allouées. Dans certaines ressources, la formation en violence conjugale et les moyens pour assurer la protection des enfants et des femmes sont presque inexistants. Le regroupement recommande que le ministère de la Justice et le MESS s'assurent de mettre sur pied un réseau provincial de services de supervision de droits d'accès standardisé, en actualisant l'application des guides... des normes en vigueur afin d'offrir des services accessibles, adaptés et sécuritaires, et ce, partout au Québec.
**(17 h 30)** En ce qui concerne les cohérences entre les tribunaux, pour se protéger et pour protéger leurs enfants, les femmes victimes de violence conjugale font appel à plusieurs tribunaux différents: plaintes au criminel, procédures de garde d'enfants, interventions du tribunal de la jeunesse. Or, il arrive régulièrement qu'un tribunal, celui de la famille ou de la jeunesse, ignore les autres ordonnances comme, par exemple, au criminel.
La violence vécue, les dangers persistants sont ainsi souvent minimisés. Le ministère de la Justice peut être proactif pour s'assurer de pratiques cohérentes. Il devrait notamment: sensibiliser les avocats en droit de la famille à la nécessité d'informer les juges de la présence de la violence conjugale et des ordonnances rendues par d'autres tribunaux; mettre en place un processus efficient de transfert d'information entre les divers tribunaux qui tiennent compte de la sécurité des personnes en cause; fournir des balises aux juges -- comme, par exemple, l'Ontario -- qui tiennent compte de la présence de la violence conjugale et familiale.
En ce qui a trait à l'éducation à la sexualité dans les écoles et la prévention de la violence, pour la promotion de modèles et de comportements égalitaires, il serait important de prévoir des choses à ce niveau-là parce qu'actuellement, dans notre société, la violence faite aux femmes est banalisée. Cette banalisation est préoccupante, la sexualisation de la société, la marchandisation du corps des femmes normalisent des comportements inégalitaires et dominants et légitiment l'exploitation sexuelle des femmes. Cette banalisation a aussi des répercussions sur l'estime de soi des jeunes filles, ce qui les rend plus vulnérables lors d'une relation amoureuse s'il y a de la violence. Pour contrer ce phénomène, des actions fortes doivent être ajoutées à ce qu'il a déjà été prévu au premier plan d'action.
Le regroupement recommande que le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, tel que promis, consulte les partenaires de l'éducation sur une proposition de remettre au programme les cours d'éducation à la sexualité et sur les conditions liées à leur mise en place, que ces cours incluent la prévention de la violence et encouragent les rapports égalitaires, et ce, dès le primaire; qu'on y alloue les ressources nécessaires et qu'on associe les groupes de femmes et les groupes de jeunes à l'élaboration de ses contenus; que, lors de l'évaluation de programme, on s'adjoigne des groupes ayant une expertise en violence conjugale comme, par exemple, le regroupement. Je recède la parole à Mme Riendeau.
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Il y a aussi d'autres facteurs qui contribuent à la sécurité des femmes et des enfants victimes de violence conjugale. En effet, on a maintenant un meilleur système de soutien depuis le rehaussement des budgets que les maisons ont reçus. On demande des améliorations au traitement judiciaire, mais ce n'est pas suffisant pour permettre aux femmes d'échapper à la violence.
Des femmes qui ont peur d'entraîner leurs enfants dans la pauvreté, des femmes qui n'ont pas accès à des logements sécuritaires et abordables, à l'aide juridique risquent de voir leurs efforts pour quitter un conjoint violent freinés et risquent de demeurer avec lui.
Par ailleurs, la violence conjugale a des impacts directs sur la santé des femmes et des enfants; c'est très bien documenté. Or, quand on parle tarification, privatisation des services de santé, on risque d'amener ces femmes à ne pas pouvoir consulter pour les besoins importants qu'elles ont au niveau de la santé.
Notre collègue de la fédération l'a dit aussi, au niveau de la DPJ, il y a des problèmes. On a une vision très stéréotypée des rôles parentaux et on va davantage demander aux femmes victimes de protéger leurs enfants qu'essayer de faire changer les agresseurs.
Donc, dans notre mémoire -- le temps me manque, alors je vais aller vite -- il y a une série de recommandations sur ces éléments-là qui permettraient vraiment aux femmes d'échapper plus facilement à la violence.
En ce qui concerne les instruments de gouvernance, le Québec dispose... on dit souvent qu'on est à l'avant de beaucoup de pays, on dispose effectivement de différents instruments: le ministère, le Secrétariat à la condition féminine, le Conseil du statut de la femme. Or, on considère que ces organismes-là n'ont ni les ressources financières, ni la structure optimale pour remplir l'immense mission qu'ils ont, c'est-à-dire de travailler à éliminer les discriminations que vit la moitié de la population du Québec. Pour nous, ces structures doivent non seulement être maintenues, mais elles doivent être renforcées.
Aussi, au niveau de la société civile, les groupes de défense des droits des femmes, particulièrement la Fédération des femmes du Québec, sont actuellement menacés par les décisions du fédéral. Alors, nous, on pense qu'il est très important d'abord de nommer une ministre en titre chargée de l'élimination des discriminations dont sont victimes les femmes pour que le ministère ne se promène pas d'un ministère à l'autre en fonction des remaniements ministériels.
Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure, Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Oui, je conclus. On pense que le secrétariat et le conseil doivent être renforcés. On vous propose même de changer l'appellation du plan d'action pour, vous l'aurez compris, parler du droit à l'égalité pour les femmes du Québec au lieu de l'égalité entre les femmes et les hommes. On pense qu'il faut rehausser le financement des groupes de défense des droits des femmes, faire des représentations sur le fédéral -- ça s'est fait mais il faut continuer pour qu'il continue de soutenir -- et évidemment allouer l'argent nécessaire pour la réalisation du plan d'action. Des actions, ça prend des moyens.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Merci, Mme Riendeau. Merci, Mme Villeneuve. Nous allons donc passer aux échanges avec les groupes parlementaires. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation, votre fougue aussi parce que c'est un dossier qui vous tient énormément à coeur puis c'est un dossier également qui nous tient à coeur. La violence faite aux femmes, c'est mondial. Puis, lors de ma rencontre avec Mme Bachelet, la semaine dernière, elle me disait que sa priorité numéro un, c'était la question de la violence faite aux femmes. Alors, c'est vraiment une préoccupation qui n'est pas unique au Québec.
Sur cette question de violence faite aux femmes et violence conjugale, moi, je m'interroge -- et je vous le dis avec beaucoup de candeur -- je m'interroge sur les campagnes de sensibilisation. Les campagnes de sensibilisation, elles sont très «punchées». Je pense qu'on a fait de belles campagnes de sensibilisation: les messages étaient clairs, nets et... Et cependant ce sont des campagnes qui durent un mois, qui coûtent quand même... on parle d'un million par campagne. La dernière campagne, on avait fait en sorte... je me souviens qu'un des messages passait pendant la coupe Vanier, alors on savait à qui on voulait parler, là, à ceux qui contrôlent le piton de la télévision pendant le football.
Cependant, je me dis: Est-ce qu'après le mois de la campagne de sensibilisation dont on est tous fiers parce qu'on la trouve très belle puis très... est-ce qu'après ça a fait une différence? Est-ce que, ces argents-là sur les campagnes de sensibilisation, on devrait les diriger ailleurs? Est-ce qu'on devrait faire nos campagnes de sensibilisation autrement ou est-ce qu'on devrait dire: Bien, cet argent-là, on va le distribuer autrement puis il va pouvoir agir sur le terrain?
Écoutez, je lance des idées comme ça, mais ça me trotte dans la tête, moi, parce qu'on a beau les trouver bien léchées, elles atteignent vraiment... le message est là, le message est clair, mais est-ce que la violence conjugale finalement diminue à la suite de ces campagnes-là?
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau? Les retombées.
Mme Riendeau (Louise): Oui. Écoutez, moi, je pense qu'on peut constater que les campagnes ont de l'effet; on voit, d'année en année, une augmentation des dénonciations. Pour moi, la question à poser, ce n'est pas: Est-ce qu'on doit abandonner les campagnes? Si on manque d'argent, peut-être qu'on peut les faire autrement, peut-être qu'on peut récupérer. Elles étaient excellentes, les dernières campagnes, pourquoi est-ce qu'elles ne repasseraient pas l'année d'après? Pourquoi est-ce qu'on est obligés de toujours faire nouveau? Ce qui est bon pourrait être récupéré et pourrait resservir, et c'est sur le long terme qu'on arrive à changer les mentalités.
Écoutez, en 1987, la première année où la police a tenu des statistiques, on avait 6 000 plaintes. On en a 18 000, c'est un progrès. Les femmes savent qu'elles peuvent demander de l'aide. Et, comme disait notre collègue de la fédération: «Maintenant, les proches s'adressent à nous pour dire: Qu'est-ce qu'on peut faire? Comment je peux aider?» Donc, oui, ça donne des effets.
Mme St-Pierre: C'est de dire qu'idéalement, dans un monde idéal, ça devrait être des campagnes de sensibilisation permanentes, c'est-à-dire que ça devrait être 52 semaines par année, sept jours par semaine, puis on devrait avoir des campagnes de sensibilisation, je dirais, permanentes et non pas un boum puis, après ça... Et, oui, le nombre de dénonciations a augmenté, puis on veut aussi aller vers des relations... Quand la relation de couple est... que ça ne soit pas des années après des années, et des années, et des années de silence puis que tout devient vraiment compliqué, là, puis que la personne brise son silence.
Mais est-ce qu'il y a d'autres moyens de communication que la télévision ou des campagnes, des spots publicitaires? Est-ce que, dans des réseaux Internet... ou est-ce que les médias sociaux... Est-ce qu'on devrait utiliser davantage... Et, plutôt que de le faire juste pendant une courte période de temps, que ça soit vraiment, là, pendant...
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau.
**(17 h 40)**Mme Riendeau (Louise): Oui. Mais effectivement, moi, je pense qu'on peut utiliser des moyens variés. Les premières campagnes d'information, c'étaient des feuillets entrés, je crois, dans les chèques d'allocations familiales, c'était des petits «flyers», excusez l'expression, que les femmes recevaient. C'était elles qui recevaient le chèque, donc elles ouvraient l'enveloppe, elles le voyaient.
Nous, on a lancé, hier... ça n'a rien à voir avec une campagne de... Bien, oui, ça va faire de la sensibilisation. On se rend compte qu'encore des femmes ne connaissent pas l'existence des ressources ou ont des préjugés. Elles pensent que c'est des dortoirs, qu'elles vont être obligées de se séparer si elles viennent.
Hier, on a lancé une campagne qu'on espère virale parce qu'on souhaite qu'elle se diffuse par Facebook. C'est un site Internet et une affiche. Ce n'est pas si compliqué, on n'a certainement pas les moyens que l'État a, mais on pense que ça peut faire son bout de chemin. Ça va être diffusé comme ça, ça va être diffusé par les différents partenaires qui pourront, par exemple...
Imaginons un policier qui a à inciter des femmes à aller en maison, qui ne sait pas comment, bien, il pourra regarder le vidéo. Il saura plus à quoi ça ressemble et il pourra conseiller une femme... La même chose, une travailleuse sociale, elle, elle pourrait le visionner avec une femme pour dire: Oui, ça va ressembler à ça, ce que tu peux trouver.
Donc, nous, on va utiliser une variété de moyens qui ne coûtent pas très chers et on espère que ça aura un impact, mais, effectivement, je pense qu'il faut être créatifs et il faut se donner des façons de faire qui vont rejoindre la population.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Sur le plan de la violence chez les jeunes dans les relations qui commencent, là, relations de jeunes couples, comment voyez-vous la situation? Est-ce que vous voyez que c'est une situation qui, en fait, s'améliore ou se détériore? Ou les rapports entre les garçons et les filles, avec évidemment ce qu'on voit à la télévision, et tout ça puis l'Internet, est-ce que vous sentez qu'on est en train comme de perdre un peu de terrain de ce côté-là?
Le Président (M. Bernier): Mme Villeneuve.
Mme Villeneuve (Nathalie): Oui. Je vous dirais qu'on essaie, on travaille très, très fort au niveau du regroupement pour faire beaucoup, beaucoup de sensibilisation dans les écoles sur les rapports amoureux chez les adolescents. Vous savez, la violence conjugale, on le dit, c'est à tout âge, donc ça existe aussi chez les adolescents, chez les jeunes. Mais, comme on le disait dans le mémoire, plus tôt... On va travailler avec les jeunes dès le primaire qu'est-ce que c'est que des rapports égalitaires, qu'est-ce que c'est que des jeux de pouvoir, comment on défait ça, comment on va prendre tout de suite en main la personne qui est... puis là je le mets entre guillemets, parce que ce sont des enfants, mais l'enfant qui aura agressé. Plus tôt on va travailler jeune à défaire ces cycles-là, plus rapidement ça va avoir une influence.
Mais c'est clair que... Je dirais qu'en général les femmes dénoncent beaucoup plus tôt qu'elles le faisaient avant, beaucoup plus jeunes. Moi, je suis en maison depuis 18 ans. Quand je suis arrivée en maison d'hébergement, c'étaient des femmes qui avaient 40 ans, 45 ans, que les enfants étaient grands, qui venaient en maison d'hébergement. Aujourd'hui, on voit de plus en plus de jeunes femmes qui mettent fin beaucoup plus rapidement aux relations qui sont malsaines, où elles vivent de la violence conjugale.
Donc, on a bon espoir qu'à force de travailler, justement en faisant beaucoup de sensibilisation... Le regroupement a un programme qu'on essaie d'implanter dans les écoles justement pour travailler au niveau primaire et au niveau secondaire pour sensibiliser puis pour prévenir cette violence-là.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme St-Pierre: Sur la question des femmes immigrantes, est-ce qu'il y a une façon de les rejoindre qui devrait être différente ou... Comment on devrait réussir à entrer dans l'intimité des femmes immigrantes qui, bon, arrivent ici et ne connaissent pas de réseau? Elles ne... C'est vraiment... Moi, je pense qu'on a une action à faire de ce côté-là, mais comment le faire pour que ce soit assez délicat puis en même temps qu'elles comprennent qu'il faut qu'elles sortent de ce cercle vicieux là?
Le Président (M. Bernier): Madame...
Mme Riendeau (Louise): Bien, il y a des petites choses, des détails des fois qui nous échappent, mais qui pourraient faire des différences. Bon, maintenant, le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles donne aux nouveaux arrivants un document sur les droits ici puis comment la société fonctionne. Mais ce document est donné aux demandeurs, qui n'est pas la femme, bien souvent. Donc, ce n'est pas sûr que le document va se rendre à la femme.
Alors, on se dit: Il faudrait s'assurer que les femmes en aient une copie. Et l'autre chose, je pense qu'il faut passer par tous les lieux où on va trouver ces femmes-là. Je sais qu'il y a eu des stratégies dans certains cas où on a travaillé avec les leaders de communautés, avec les Églises de ces communautés-là pour être capables de rejoindre les femmes là où elles sont. Donner accès à la francisation aux femmes, c'est les faire sortir de chez elles et leur donner des occasions d'être en contact avec la société québécoise et ses valeurs. Ça fait que c'est tout ça. Favoriser l'emploi, ça nous permet aussi que ces femmes-là aient accès à quels sont leurs droits ici.
Le Président (M. Bernier): Madame...
Mme St-Pierre: Alors, M. le Président, moi, je n'ai pas d'autres questions à poser. S'il y a encore du temps pour mes collègues...
Le Président (M. Bernier): Il y a encore... Vous avez encore 1 min 30 s, deux minutes. Est-ce que... M. le député de Lévis?
M. Lehouillier: Oui. Bien, moi... D'abord, je voudrais vous remercier pour votre mémoire, le dépôt de votre mémoire. Moi, j'aurais peut-être une question qui serait assez simple. D'abord, je vous félicite, parce que, les maisons pour femmes victimes de violence conjugale, on en a une... moi, j'en ai une dans mon comté, et la mobilisation derrière La Jonction pour elle, chez nous, est vraiment exceptionnelle. Et tout le milieu y collabore, tout le milieu y participe, les services de police, les organismes communautaires, la population, et c'est vraiment quelque chose de fantastique. Félicitations pour ce réseau.
Si vous aviez à prioriser... parce que vous avez fait un petit peu la même recommandation sur les mesures non concrétisées du plan d'action que l'autre regroupement qui est passé avant nous, qui représente 37 maisons; vous, vous en représentez une cinquantaine. Alors donc, si vous aviez à prioriser, là... Parce qu'on sait qu'au niveau gouvernemental l'aide aux maisons d'hébergement est passée de 32 à 73 millions, donc il y a quand même eu une hausse significative. Mais, si vous aviez à prioriser, là, parce qu'il y a beaucoup de recommandations, quels seraient les quatre, cinq éléments que vous vous dites: Ça, c'est incontournable?
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Bien, je vous dirais, toute la question des mesures de justice. Tu sais, on a parlé médiation, on a parlé d'incohérence avec les tribunaux, c'était déjà là.
De visites supervisées, de visites supervisées. Il y a des besoins épouvantables. Écoutez, les femmes sont obligées d'aller au McDonald pour être dans un lieu public pour échanger les enfants ou des choses comme ça. Ça n'a pas de sens, ce n'est pas accessible dans toutes les régions. Ça, c'est des éléments très, très importants. Écoutez, c'est difficile.
L'accès à du logement abordable, à du logement social. On a vu, dans les dernières années, que les femmes restent plus longtemps en maison parce qu'elles ont de la difficulté à se trouver un logement. Donc, ça prend plus de logements sociaux, ça prend aussi des mesures pour éviter que le logement privé leur devienne complètement inaccessible. Je vous dirais, c'est des choses assez importantes pour les femmes victimes de violence conjugale, et ça pourrait leur permettre effectivement de sortir beaucoup plus facilement de la violence s'il y avait des éléments à ce niveau-là.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup, Me Riendeau. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. Donc, Mme la députée de Rosemont, la parole est à vous.
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Alors, Mme Villeneuve, Mme Riendeau, bonjour et bienvenue. Ma première question va être vraiment celle de quelqu'un qui est très ignorant, parce que... vous excuserez mon ignorance, mais je voudrais comprendre la différence entre la Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec et votre Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. C'est deux regroupements différents?
Mme Riendeau (Louise): C'est deux regroupements différents.
Mme Beaudoin (Rosemont): Et qu'est-ce qui les différencient?
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): En fait, nous, l'ensemble de nos membres reçoivent, je ne dirais pas uniquement, mais principalement, très majoritairement des femmes victimes de violence conjugale, alors que, parmi les maisons membres de la fédération, certaines ressemblent beaucoup à nos membres mais d'autres reçoivent aussi des femmes en difficulté, des femmes itinérantes, toxicomanes qui ont des problèmes de santé mentale, etc. C'est la grande différence.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la députée.
Mme Beaudoin (Rosemont): Très bien. Merci beaucoup. Je voudrais revenir... J'ai vu, là, que ce que vous demandiez, puis c'est quelque chose qui a été accueilli favorablement par le gouvernement et par le Parti québécois aussi, c'est de revenir dans les écoles -- parce que, quand on parlait tout à l'heure de violence même, bon, chez les jeunes, bon, au secondaire ou même au primaire, il faut bien leur expliquer les choses -- donc de mettre en place des cours d'éducation à la sexualité, qui ont été abandonnés effectivement dans la compétence transversale, je ne sais laquelle, mais qui fait en sorte que, vous l'expliquez bien, c'est tout le monde et personne finalement qui est responsable de ça, et que c'est volontaire et aléatoire, alors qu'il faut revenir carrément à ces cours d'éducation à la sexualité portant notamment sur la prévention de la violence et encourageant des rapports égalitaires.
Alors, je pense que j'avais bien compris, quand plusieurs groupes l'ont demandé récemment, que le gouvernement a accueilli favorablement cette demande. On verra quand ce sera possible. Parce que c'est toujours la question, j'imagine, des horaires dans les écoles. Il y a tant d'heures, puis il y a des conventions collectives, puis enfin, il y a bien des choses dont il faut tenir compte.
Une voix: ...
Mme Beaudoin (Rosemont): Quoi?
Une voix: ...
**(17 h 50)**Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. C'est ça que je disais. Oui, c'est ça. Il y a tant d'heures, et puis il faut essayer de tout mettre et... Mais je pense qu'il faut le faire, en effet, que c'est une recommandation qui est très pertinente à ce moment-ci de l'évolution justement des choses et de nos écoles. Alors, je pense que vous pouvez compter sur notre appui là-dessus.
Moi aussi, j'avais cette question concernant les femmes immigrantes. Donc, vous y avez quand même répondu. C'est sûr et certain qu'il y a une préoccupation: on sait que, souvent, elles sont isolées, que souvent elles sont dans des situations précaires, et comment les rejoindre? Vous le disiez, normalement ce guide est remis, mais à celui qui en fait la demande ou enfin qui fait les demandes d'immigration, et par conséquent il faut trouver des manières de rejoindre ces femmes immigrantes.
Il y a des programmes d'ailleurs très intéressants en économie sociale, en tout cas chez moi, dans Rosemont, qui s'appellent... un organisme qui s'appelle Pro-Prêt et qui forme justement, pour toutes sortes d'emplois, des femmes immigrantes, et ils me disaient souvent même que certaines sont superspécialisées, celles-là ne vont pas spontanément voir Pro-Prêt, mais que certaines sont pas loin d'être analphabètes. Alors, c'est des pictogrammes puis il faut inventer un certain nombre de choses, hein, il faut être très créatif.
Mais ces femmes souvent, après justement une séparation, veulent aller sur le marché du travail, ne sont pas du tout outillées pour ça mais elles y arrivent. En tout cas, je trouve que c'est formidable qu'il y ait des entreprises d'économie sociale. Il ne faut jamais les oublier, ces entreprises-là. Alors donc, trouver des manières d'informer les femmes immigrantes de leurs droits, c'est extrêmement important et je pense que vous avez raison de le souligner.
Je vais juste vous poser une question: Quand vous dites «Légiférer -- il me semble que ça fait longtemps qu'on en parle -- sur les pratiques publicitaires pour y interdire les publicités sexistes», ça doit être un gros débat, mais ça fait longtemps, non, que c'est dans le décor?
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Oui, et ça a été une des demandes importantes de la marche mondiale cet automne. On pense qu'il faut... On ne peut pas... On s'est beaucoup fié sur les codes volontaires des publicitaires, des entreprises, mais on voit qu'au contraire ça n'a pas arrêté et on est face, ces années-ci, à une recrudescence de publicités beaucoup plus sexistes que ce qu'on pouvait voir à la fin des années quatre-vingt. Alors, il faut prendre les moyens. Si la volonté ne suffit pas, moi, je pense que l'État a des leviers qui pourraient nous aider à faire des pas là-dessus.
Puis on parlait de la violence dans les relations amoureuses au niveau des adolescentes, c'est sûr que toutes ces publicités-là ont un effet sur l'image que les jeunes femmes ont d'elles-mêmes et sur leur estime d'elles-mêmes. Et, quand l'estime n'est pas très haute, on va tolérer des choses qu'on ne tolérerait pas autrement. Quand on pense qu'on n'est pas assez belle pour avoir un chum, bien, on va tolérer des choses parce que la publicité nous a dit qu'on ne l'était pas assez. Donc, il faut faire de l'éducation mais il faut aussi envoyer des messages clairs et cohérents.
Mme Beaudoin (Rosemont): Et vous pensez donc que les mesures simplement incitatives ou le discours où on dit ces choses-là, où on les note et renote, que ce n'est pas suffisant, qu'il faut vraiment aller à une législation pour interdire ces publicités sexistes?
Le Président (M. Bernier): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): À sa face même, elles n'ont pas donné les résultats escomptés à venir jusqu'à maintenant, les mesures volontaires.
Mme Beaudoin (Rosemont): Est-ce que vous pensez qu'on est capables de définir c'est quoi, une publicité sexiste?
Mme Riendeau (Louise): Bien, j'imagine qu'à plusieurs têtes on peut arriver...
Mme Villeneuve (Nathalie): On a quelques exemples.
Mme Beaudoin (Rosemont): Vous avez quelques exemples en tête?
Mme Villeneuve (Nathalie): Oh oui!
Mme Beaudoin (Rosemont): On ne fera pas de publicité d'aucune marque. Eh bien, voilà, moi, M. le Président, ça va. Je ne sais pas si mon collègue de Terrebonne a une question.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la députée. M. le député de Terrebonne.
M. Traversy: Merci, M. le Président. Un très bref commentaire simplement pour vous féliciter. Vous êtes un des rares groupes, sinon peut-être le seul, aujourd'hui, là, qui a fait allusion à la cybercriminalité et toute la question qui tourne autour d'Internet de plus en plus puis des nouveaux moyens de technologies. Donc, un point, là, important à souligner pour le prochain plan d'action. Parce que je vous entendais parler de publicité... effectivement, aujourd'hui, on ne les retrouve pas juste à la télévision durant certaines émissions, ces publicités-là, les manipulations, intimidations -- il y a plusieurs termes que j'ai retenus. Et, comme porte-parole à la jeunesse, je tenais à vous féliciter parce que c'est effectivement, là, de plus en plus intéressant de se pencher là-dessus.
Le Président (M. Bernier): Très bonne remarque, M. le député. Effectivement, aujourd'hui, plus personne ne peut se cacher ou quoi que ce soit, tout est sur... rapidement sur Internet, tout est rapidement disponible. Donc, il faut en être conscients et il faut prendre des mesures également pour protéger les gens.
Écoutez, je tiens à vous remercier, Mme Riendeau, Mme Villeneuve, de votre participation comme représentantes du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. Merci infiniment. Donc, compte tenu de l'heure, je tiens à remercier également Mme la ministre, Mme la députée de Rosemont, les collègues de l'Assemblée nationale qui ont participé à cette séance, vous avez été très disciplinés et très attentifs à votre travail; remercier les gens de l'Assemblée nationale qui nous accompagnent, Mme Cameron, votre adjointe, les gens qui procèdent à l'enregistrement.
Donc, sans plus tarder, compte tenu qu'il est maintenant 18 heures, la commission ajourne ses travaux au mardi, 1er février 2011, à 19 h 30 à la salle...
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): ...à 9 heures... le mardi 1er février 2011, à 9 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 56)