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(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît! Bonjour. En ce beau vendredi 13 mai, un vendredi
ensoleillé, nous nous réunissons pour discuter de
l'environnement. C'est la commission permanente de la protection de
l'environnement qui se réunit pour discuter de la question avec
débat du député de Beauce-Sud au ministre de
l'Environnement: La protection de l'environnement en milieu agricole.
Au tout début, j'aimerais vous rappeler que c'est l'article 162a
de notre règlement qui régit cette commission: le
député qui a convoqué le ministre a 20 minutes pour
commencer le débat et le ministre a 20 minutes de réplique. Par
la suite, tant le député de Beauce-Sud que le ministre pourront
prendre la parole aussi souvent qu'ils le voudront pendant 20 minutes chaque
fois. Les députés qui vous accompagnent ont aussi une enveloppe
totale de 20 minutes qu'on pourra utiliser autant de fois qu'on le voudra, mais
toujours à l'intérieur de l'enveloppe totale de 20 minutes.
Je donne immédiatement la parole au député de
Beauce-Sud. Je voudrais aussi vous rappeler que les 20 dernières
minutes, c'est-à-dire à partir de 12 h 40, seront
réservées à la réplique, c'est-à-dire dix
minutes pour le député de Beauce-Sud et les dix dernières
minutes pour le ministre de l'Environnement.
M. le député de Beauce-Sud.
Exposé du sujet M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Nous nous
réunissons un vendredi 13. J'espère que le ministre n'est pas
superstitieux. Les Beaucerons n'ont pas l'habitude de l'être, quoi qu'il
en soit. C'est un sujet qui est extrêmement important, un sujet qui
traîne depuis 1977, on pourrait même dire avant, mais surtout
depuis ce temps à cause des nouvelles techniques qui sont apparues.
Maintenant, le but, ce matin, évidemment, c'est d'obtenir des
éclaircissements et de faire le point sur la situation, de tâcher
de presser le gouvernement à annoncer ses couleurs, à annoncer
ses modifications. En effet, nous savons que l'année passée le
1er avril 1982, principalement à l'occasion d'une manifestation
agricole, la colère verte s'est manifestée et qu'une des
revendications majeures des 8000 agriculteurs, qui étaient venus au
petit Colisée et qui étaient venus également devant
l'Assemblée nationale, était justement d'obtenir un
règlement sur les normes environnementales pour qu'elles soient mieux
équilibrées, qu'elles répondent mieux aux besoins que
celles du règlement que nous connaissions jusqu'à ce moment.
Je voudrais vous dire, au tout début, qu'il n'est pas question
pour nous de prétendre qu'il ne faut rien faire et qu'il faut laisser
l'environnement se détériorer. Au contraire, nous sommes capables
de prendre nos responsabilités et de reconnaître qu'il ne faut pas
inciter à un laisser-aller général dans ce domaine. Les
agriculteurs eux-mêmes reconnaissent leur responsabilité dans la
question de la protection de l'environnement. Je ne voudrais pas que l'on
interprète notre initiative de ce matin comme étant une
invitation à la licence, une invitation au laisser-aller et au
non-respect des normes environnementales, c'est-à-dire de
l'environnement en milieu agricole.
Le règlement imposé par le ministère de
l'Environnement a un impact économique très important si l'on
considère que, pour répondre à ces normes, il faut des
investissements de l'ordre de 25 000 $ à 30 000 $, seulement en termes
de construction de fosses, d'achat de béton et de tout ce que vous
voulez. Cela ne comprend pas, généralement, l'équipement
nécessaire pour emplir cette nouvelle excavation et, également,
l'équipement nécessaire pour faire l'épandage de ce purin.
Or, dans le moment, à cause de la récession économique,
l'agriculture, comme les autres secteurs de l'économie, est fortement
ébranlée. Lorsque vous imposez des investissements de l'ordre de
50 000 $ ou 75 000 $ et que la ferme ou l'entreprise a atteint la ligne de
flottaison en ce qui concerne l'endettement - et ce sont des investissements
qui n'engendrent pas de revenus, contrairement à un investissement pour
l'achat d'animaux, à un investissement pour l'achat de quotas, etc., qui
engendrent des revenus - que se passe-t-il quand votre bateau dépasse la
ligne de flottaison? Cela ne va pas bien. Vous n'avez qu'à prendre les
journaux agricoles, la Terre de chez nous, les revues et à regarder les
nombres de ventes qu'il y a actuellement depuis trois semaines ou un mois; il y
a deux ou trois pages par semaine de ventes de fermes et là, ce sont
toutes des entreprises qui disparaissent; il
sera impossible dans l'avenir de ramener ces fermes à
l'agriculture.
M. le Président, le débat que nous avons ce matin est
très important pour les milieux agricoles, bien sûr, mais
également pour l'ensemble des citoyens. L'environnement, je le
reconnais, est une responsabilité collective. Les agriculteurs en sont
conscients. Ils font plus que leur part. On peut affirmer sans crainte qu'ils
sont ceux qui, individuellement, ont le plus investi pour la protection de
l'environnement qu'ils connaissent et respectent, d'autant plus qu'ils vivent
dans la nature.
Comme je le disais tantôt, notre parti est favorable à la
protection de l'environnement, mais il faut que nous prenions les mesures
nécessaires pour ne pas avoir d'impacts économiques qui soient
très négatifs.
M. le Président, vous savez que le gouvernement a l'habitude de
parler beaucoup et surtout d'écrire: Nourrir le Québec, Le virage
technologique et toutes ces choses. C'est formidable. Qu'est-ce qu'on dit en
rapport avec l'environnement dans Nourrir le Québec? On y dit, à
la page 184: "La protection de l'environnement constitue déjà
l'un des problèmes majeurs des sociétés industrielles au
sens qu'elle entraîne une exploitation intensive du milieu naturel. Le
développement de l'agriculture n'échappe pas à cette
évolution." C'est un constat que nous admettons. Plus loin, à la
page 185, on dit ceci: "Les difficultés proviennent surtout du fumier de
porc et de bovin. Il s'agit de trouver des techniques qui évitent de le
mettre en contact avec les cours d'eau. L'emploi de plates-formes à
fumier le permet, de même que des méthodes d'épandage
respectueuses de l'équilibre naturel. Toutefois, la véritable
solution réside dans l'utilisation industrielle de ces fumiers à
des fins de fabrication d'engrais, de compost et comme source d'énergie.
En ce qui concerne le porc, où une autre source de pollution provient de
l'odeur, bien que de moindre importance, son impact n'en est pas moins
réel dans les milieux ruraux plus densément peuplés."
Or, M. le Président, en ce qui concerne, justement, l'utilisation
industrielle des fumiers, lors d'un débat en commission parlementaire
sur l'environnement, le 17 octobre 1978, le ministre de l'époque, M.
Léger, parlait de l'or brun. Il y avait, semble-t-il, des revenus
extraordinaires à tirer de cela. On pouvait inciter à des
investissements considérables compte tenu de l'utilisation que l'on
pouvait en faire. Le ministre de l'époque disait alors: "Plutôt
que de le perdre, dis-je, d'en faire un engrais, il faut le transformer en un
engrais naturel qui redonnerait aux agriculteurs une possibilité, selon
les chiffres actuels, de revenus additionnels de près de 100 000 000 $
par année." Il y a une possibilité de 100 000 000 $ de revenus
pour les agriculteurs; donc, c'est intéressant. C'était en 1978.
J'aimerais bien savoir où en sont rendues les études relativement
à cette déclaration du ministre de l'Environnement de
l'époque, concernant l'utilisation des fumiers qui devait rapporter 100
000 000 $ par année. Le ministre appelait cela de l'or brun.
Dans Le virage technologique, vous connaissez bien cela, Bâtir le
Québec, phase II, programme d'action économique, comme il se
doit, le gouvernement nous parle, à la page 56, de la coordination des
actions gouvernementales. "Compte tenu de l'ampleur des besoins à
combler, la coordination des interventions gouvernementales s'avère
nécessaire, d'abord, au sein même du gouvernement
québécois". Nous constatons, face aux problèmes
soulevés ce matin, que les ministères n'ont pas l'air de se
parler. Le ministère de l'Agriculture tient un langage, le
ministère de l'Environnement, lui, tient un langage différent.
Ceci, depuis l'avènement au pouvoir du gouvernement actuel. Si, dans Le
virage technologique, on parle de l'importance d'une coordination des
interventions gouvernementales, je pense que c'est bien là qu'elle doit
se faire sentir. Pendant que les ministères se disputent, se lancent la
balle, se chicanent, ce sont les agriculteurs qui en font les frais.
Quant à la recherche, dans Le virage technologique, on parlait de
l'importance de l'innovation qui n'est plus à démontrer. On
disait: "Le Québec, comme le Canada, consacre relativement deux à
trois fois moins d'efforts au développement technologique que les autres
pays industrialisés". Je voudrais bien que le ministre nous fasse
état de la recherche. On reconnaissait, ici dans Le virage
technologique, que le gouvernement ne faisait pas sa part et c'est un domaine
dans lequel le gouvernement doit faire sa part. Pour la gestion des fumiers,
cela prend une intervention des budgets gouvernementaux pour en venir à
trouver une solution. (10 h 15)
À la page 124 du virage technologique, on parlait de recherche
agro-alimentaire: "Ce n'est qu'en collant de près à
l'évolution des marchés et à l'innovation technologique
que l'industrie agro-alimentaire québécoise pourra assurer son
développement." De beaux voeux pieux, on connaît tout ça.
Plus loin: "La spécialisation des fermes et de certaines régions
dans les productions animales et l'intensification des élevages sans sol
ont causé des problèmes relatifs à la disposition des
fumiers. L'utilisation industrielle des fumiers à des fins de
fabrication d'engrais, de compost, peut-être, éventuellement,
à des fins énergétiques ou comme composants de
l'alimentation des ruminants constitue une voie à explorer. Le
ministère de l'Agriculture
a commencé des recherches en vue de trouver une utilisation plus
économique des fumiers et de mieux protéger l'environnement."
Or, ces voeux pieux que l'on retrouve dans Bâtir le Québec,
dans Nourrir le Québec, on s'aperçoit que ça ne passe pas
dans la réalité. Le gouvernement est un gouvernement
d'écriveux, de scribouilleurs, mais ça ne passe jamais dans la
réalité.
Il me reste combien de temps, M. le Président, sur mes 20
minutes?
Le Président (M. Gagnon): II vous reste neuf minutes.
M. Mathieu: Bon, il me reste neuf minutes. Merci, M. le
Président.
Ce matin, nous devons admettre -j'espère que le ministre va
l'admettre tout à l'heure - que les normes environnementales sont
inutilement trop sévères. Elles menacent l'agriculture dans sa
subsistance même. Les agriculteurs sont frustrés, se sentent
lésés dans leurs droits les plus fondamentaux. Après avoir
utilisé tous les moyens dont ils disposaient pour raisonner le
gouvernement, ils songent maintenant à recourir à l'arme ultime:
la désobéissance civile, le boycottage pur et simple des
directives du ministère de l'Environnement ou, si l'on veut s'exprimer
autrement, la désobéissance civile.
Qu'il me soit permis de mentionner que, dans un article de la Terre de
chez nous du 28 avril 1983, il est dit, sous la plume de M. Gérard Gras,
vice-président de l'UPA: "Agriculteurs, contestez les exigences de
l'Environnement." On dit ensuite que le conseil général a
adopté la résolution suivante: "L'UPA recommande aux agriculteurs
de ne plus se conformer aux exigences du ministère de l'Environnement en
ce qui concerne l'entreposage des fumiers, mais plutôt de se conformer
aux exigences reconnues valables par l'UPA et par le ministère de
l'Agriculture, et qui correspondent aux normes appliquées chez notre
voisin et principal concurrent sur le marché, c'est-à-dire
l'Ontario. L'UPA entend défendre techniquement et légalement des
agriculteurs qui feront l'objet de poursuites et qui se conforment aux
politiques d'entreposage préconisées par l'UPA. L'UPA demande au
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de donner
instruction à l'Office du crédit agricole de cesser d'exiger des
permis du ministère de l'Environnement avant d'accorder les prêts.
"Pourquoi en venir à une décision aussi radicale? Parce que,
après plusieurs années de revendications et de pressions
répétées et constantes sur le ministère de
l'Environnement, les agriculteurs se rendent compte qu'ils n'ont jamais pu
obtenir de ce ministère une politique vraiment réaliste et
équitable d'entreposage des fumiers. Les agriculteurs ont
été et continuent d'être forcés à se
soumettre à des exigences qui sont excessives et inutiles dans beaucoup
de cas et inéquitables par rapport à l'effort exigé des
autres groupes de la société." Je vous ferai remarquer, M. le
Président, que ce n'est pas le Parti libéral du Québec qui
parle. C'est l'Union des producteurs agricoles.
Or, je ne citerai pas tout le texte, bien sûr. Je suis convaincu
que le ministre en a pris connaissance. Mais force nous est de
reconnaître, M. le Président, que, quand un mouvement aussi
responsable que l'UPA en vient à une solution aussi extrême, on ne
peut pas fermer les yeux. Je pense que ce serait purement irresponsable de
notre part de ne pas tenir compte de ce qui se présente. Lorsque l'UPA
se réfère aux normes qui existent en Ontario, si ces normes sont
appliquées avec sécurité et sont plus réalistes, je
me demande pourquoi, au Québec, on serait tellement plus
évolués qu'on aurait besoin de normes spéciales.
Je remarque que le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation n'est pas représenté
à ce débat. Sans doute le ministre va-t-il me dire que nous
n'avons pas convoqué le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation. C'est vrai qu'on ne l'a pas convoqué. Seulement,
c'est une absence qui m'étonne énormément, étant
donné la responsabilité du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation dans la question débattue ce matin.
Je déplore grandement cette absence parce que nous aurions eu des
questions à poser aux deux ministres. Je croyais que le problème
était suffisamment important pour que le ministre vienne de sa propre
initiative, mais il a préféré ne pas venir. C'est sa
responsabilité, c'est son choix.
Je me permettrai de citer les conclusions du comité tripartite
sur l'environnement, comité qui fut formé, si ma mémoire
est bonne, à l'occasion de la colère verte du 1er avril 1982, la
marche des agriculteurs sur Québec. C'était peut-être avant
cela, le ministre pourra nous le spécifier tout à l'heure. J'ai
ici un document qui fait état des conclusions du comité
tripartite sur l'environnement, selon l'UPA. On nous dit, par exemple, que la
définition d'étanchéité serait, et je cite: "un
minimum de rejet qui n'aura pas d'impact majeur sur l'environnement,
c'est-à-dire un rejet acceptable pour que la nature soit en mesure de
s'auto-épurer". On doit reconnaître que c'est tout à fait
normal.
Ce document mentionne que les producteurs sont convaincus qu'en pratique
les débordements et déversements de toutes sortes de liquides
provenant des plates-formes en ciment avec muret causent plus de
problèmes que les écoulements provenant d'amas directement sur le
sol. J'aimerais que
le ministre nous dise tout à l'heure s'il est au courant de ce
qui se passe à Joliette. Selon nos informations, il y a eu des pluies
diluviennes, les fosses sont pleines et renversent. Cela s'écoule dans
la rivière et cela cause beaucoup plus de problèmes que s'il n'y
avait pas eu de fosses du tout. Je ne parle pas, évidemment, du fumier
de porc; cela prend une précaution spéciale. Il y a aussi le cas
du craquement de ces fosses. Il y a des fosses qui craquent l'hiver;
l'agriculteur n'en a pas connaissance à cause du gel et cela cause des
problèmes considérables.
J'aimerais que vous m'avertissiez, M. le Président, cinq minutes
avant que mon temps soit écoulé.
Le Président (M. Gagnon): II vous reste une minute.
M. Mathieu: II me reste une minute seulement? Bon. Je reviendrai
sur le rapport du comité tripartite. Je voudrais juste citer une ligne:
"Devant les faits précédents, les spécialistes les plus
impliqués dans la question en Ontario viennent aujourd'hui à la
conclusion que, tout considéré, l'utilisation des lieux
d'entreposage en sol constitue un progrès du point de vue de la
protection de l'environnement par rapport à l'entreposage dans les
réservoirs en ciment."
Je conclus en posant quelques questions au ministre. Je voudrais savoir
où en est rendue l'étude du comité tripartite UPA, MAPAQ,
ministère de l'Environnement du Québec. Où en est rendu ce
comité? M. le ministre, reconnaissez-vous que votre règlement est
trop sévère et qu'il va provoquer la fermeture de plus de la
moitié des exploitations agricoles? Y a-t-il une entente entre votre
ministère et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation ou si vos positions sont diamétralement
opposées? M. le ministre, êtes-vous prêt à assumer le
fardeau de la preuve en ce qui concerne la norme à savoir si telle
installation agricole est polluante ou non? Normalement, ce serait au
ministère de prouver que telle entreprise pollue et, dans le moment, le
règlement met le fardeau de la preuve sur les épaules de
l'entreprise elle-même. Je voudrais que le ministre nous dise s'il est
prêt à accepter de renverser ce fardeau de la preuve. M. le
ministre, reconnaissez-vous que le béton, dans bien des cas, est plus
dangereux que les lagunes en terre? Reconnaissez-vous qu'il n'est pas normal
que l'Office du crédit agricole du Québec, qui dépend du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
soit l'instrument qui applique vos normes? Face à la
désobéissance civile appréhendée et annoncée
par l'UPA, qu'allez-vous faire? Avez-vous des assouplissements de vos normes
à nous annoncer? J'espère que oui.
Je voudrais dire, en concluant, que le ministre impose aux agriculteurs
un règlement Cadillac. Alors, pour ceux qui peuvent se le payer, c'est
parfait. Nous sommes d'accord pour que ceux qui peuvent se payer un
règlement Cadillac se le paient. C'est leur affaire. Mais nous croyons
que, dans bien des cas, un règlement Volkswagen pourrait
également faire l'affaire tout en étant aussi sécuritaire
pour l'environnement. Je laisse donc la parole au ministre et j'espère
qu'il aura de bonnes nouvelles à nous apporter.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Beauce-Sud. M. le ministre de l'Environnement.
Réponse du ministre
M. Adrien Ouellette
M. Ouellette: Merci, M. le Président. Je voudrais, dans un
premier temps, vous présenter les personnes qui m'accompagnent. J'ai,
à ma droite, le député d'Arthabaska, qui est un producteur
agricole lui-même, un producteur laitier, si j'ai bien compris son
installation agricole, M. Jacques Baril. J'ai, à ma gauche, le
député de Saint-Hyacinthe, donc, un député de la
plus belle région agricole qui soit au Québec, M. Maurice
Dupré. Derrière moi, le sous-ministre adjoint, responsable de
l'assainissement en général, ce qui inclut l'assainissement
agricole, bien sûr, M. Lamontagne. Il y a aussi un haut fonctionnaire
responsable de l'assainissement également, M. Gosselin, de même
que M. Boisvert, de mon cabinet politique.
Je remercie le député de Beauce-Sud qui a choisi de
soulever la question qui fait l'objet du débat ce matin, puisque c'est
mon voisin de comté. Je suis de Beauce-Nord, il est de Beauce-Sud. Tous
les deux, nous vivons donc dans une région où effectivement des
problèmes se posent quant à l'application du règlement
régissant l'environnement dans le domaine agricole. Nous sommes donc,
tous les deux, sensibilisés au problème. Nous savons, d'abord,
qu'il existe. Il se peut, cependant, que nous ayons des solutions
différentes quant à l'application de ce règlement,
même si je crois comprendre que nous sommes parfaitement d'accord, comme
c'est le cas avec l'UPA, sur les objectifs qu'on doit viser et atteindre parce
qu'en environnement on ne peut pas manquer nos objectifs; sinon, nous nous
retrouvons dans des situations détériorées qui seraient
fort dispendieuses à rattraper.
Il me demandait si j'étais superstitieux, au début de son
intervention, puisque nous sommes un vendredi 13. Non, je ne suis pas
superstitieux. Je trouve même très intéressant, pour faire
un jeu de mots, qu'on
puisse parler d'environnement agricole ce matin. Il mentionnait
également que le problème qui fait l'objet du débat est un
vieux problème qui remonte à 1977 et là, il a fait preuve
de beaucoup de générosité en admettant que ce
problème pouvait remonter à une date antérieure à
1977, ce qui veut dire qu'au moment de l'existence des Services de la
protection de l'environnement, sous le gouvernement libéral, le
même problème existait. C'est donc dire que c'est un vieux
problème auquel, j'imagine, le Parti libéral, alors qu'il
était au pouvoir, s'est attaqué. Il n'a pas réussi
à le régler complètement.
Nous nous y sommes attaqués également. Nous n'avons pas
tout solutionné, cela va de soi. Je m'y suis attaqué
personnellement depuis ma venue au ministère de l'Environnement, au
début de septembre dernier. Je l'ai fait dans un esprit d'ouverture
puisque, comme député depuis 1976 dans une circonscription
où l'agriculture est très importante, j'avais été
mis au courant du problème. Plusieurs électeurs étaient
venus m'en parler à mon bureau. L'UPA avait fait des démarches.
C'est donc dire que, lorsque j'ai pris le poste que j'occupe actuellement,
j'étais déjà très sensible à ce
problème. J'étais sensible également aux impacts que cela
pouvait créer chez certains producteurs agricoles.
C'est donc avec une grande ouverture d'esprit que je me suis
attaqué au problème. C'est pourquoi, d'ailleurs, dès le
début du mois de novembre - donc, à peine un mois et demi
après ma nomination - j'ai rencontré l'UPA en présence du
ministère de l'Agriculture à Montréal pour qu'on discute
de l'ensemble des problèmes d'application de ce règlement. C'est
là qu'est né le comité tripartite, à ma suggestion,
formé de fonctionnaires du ministère de l'Agriculture -cela va de
soi que le ministère de l'Agriculture soit impliqué, je pense,
jusqu'à un certain point - de l'UPA et de fonctionnaires du
ministère de l'Environnement. (10 h 30)
L'objectif que je visais à ce moment-là était d'en
venir à une entente, c'est-à-dire qu'après avoir remis en
discussion certains points du règlement - parce qu'il ne faut pas
prétendre que tout le règlement méritait
reconsidération, mais certains points, à tout le moins, devaient
être discutés - il m'était apparu que mettre en
présence les fonctionnaires des trois organismes
intéressés pouvait constituer un élément de
réponse intéressant. Ce comité a siégé
durant quelques mois. On avait prévu un délai de trois mois.
Finalement, on a étalé les discussions sur six mois et les
résultats n'ont pas été aussi probants que ceux que nous
souhaitions au départ.
À la suite de cela, j'ai donc mandaté mon sous-ministre
adjoint, responsable à l'assainissement, afin qu'il reprenne les
discussions là où elles étaient rendues pour qu'on avance
dans ce dossier, ce qui fut fait. Une entente est intervenue entre les
fonctionnaires du ministère de l'Environnement et ceux du
ministère de l'Agriculture sur les grandes lignes. Hier soir, j'ai
rencontré, avec ces mêmes fonctionnaires de l'Agriculture et de
l'Environnement, les responsables de l'UPA et, je pense, nous avons fait,
encore une fois, un pas en avant très important.
Où en sommes-nous? Je n'entrerai pas dans le détail
immédiatement. Je préférerais plutôt répondre
à des questions précises puisque je constate que le
député de Beauce-Sud a en main la documentation qui
découle des rencontres du comité tripartite. Il me semble
absolument important de faire le point au début de cette discussion sur
le problème comme tel pour bien le cerner. Je disais tout à
l'heure que les difficultés ne se retrouvaient pas dans l'application de
l'ensemble du règlement, mais dans une partie de ce règlement et
c'est sur cette partie spécifique qu'ont porté les discussions du
comité tripartite et les discussions qui ont suivi la tenue des
réunions de ce comité, y inclus celles que nous avons eues
ensemble, l'Agriculture, l'Environnement et l'UPA, hier soir. Pour bien
comprendre, il faut cerner le problème, à mon sens, de la
façon la plus concrète possible. Dans ce règlement, il y a
un chapitre et plusieurs articles qui traitent des fumiers. Dans l'ancien
règlement, celui qui est encore en vigueur actuellement, ce
problème se retrouve dans la définition même de ces
fumiers. On retrouve des fumiers solides, des fumiers liquides et, entre les
deux, des semi-solides ou semi-liquides, selon le goût de chacun. Dans un
premier temps, il nous est apparu absolument essentiel de préciser la
définition parce que, quand on se réfère au vieux
règlement, on s'aperçoit que, lorsqu'on parle de semi-liquide ou
de semi-solide, on fait référence à des normes qui me
paraissent beaucoup plus philosophiques que réalistes, en ce sens qu'on
fait appel à des angles. Si tel amas de fumier présente tel
angle, on le considère comme semi-solide; sinon, on le considère
comme liquide. Cela devient absolument impossible, en tout cas, très
difficile d'application.
Dans un premier temps, nous nous sommes mis d'accord pour
redéfinir cela et ne faire que deux classifications, c'est-à-dire
les liquides et les solides, à partir de la manipulation qu'on peut en
faire. Là-dessus, et l'Agriculture et l'UPA et l'Environnement se sont
mis rapidement d'accord. Désormais, nous ne parlerons que de liquide et
de solide à partir du fait qu'on les pompe lorsqu'ils sont liquides et
qu'on les transporte au moyen de bennes ou de chargeurs lorsqu'ils
sont solides. Je pense que c'était absolument important qu'on
fasse le point là-dessus puisque de cette définition
découleront tous les moyens d'entreposage, puisque c'est vraiment
l'entreposage qui pose le problème le plus sérieux.
Le ministère de l'Environnement et le ministre de l'Environnement
sont absolument conscients de la gravité de la situation. Nous sommes
conscients que nous nous devons, comme gouvernement et comme ministère
de l'Environnement, de protéger l'eau. Tout le monde est d'accord
là-dessus. C'est l'eau dont on vise la protection dans ce
règlement. Là encore, il faut faire attention. On peut parler
d'eau de surface ou d'eau de ruissellement ou d'eau qu'on retrouve dans les
cours d'eau, les ruisseaux, les rivières, etc. Cela va assez bien. Je
pense qu'il y a un accord total entre l'UPA et le ministère de
l'Environnement en ce qui concerne la protection des eaux de surface. Cela se
passe en surface, comme le nom l'indique. C'est visible, c'est concret, c'est
palpable. Il n'y a pas de cachette. Ou bien on pollue un cours d'eau en
surface, ou bien on ne le pollue pas. Dès qu'il y a un
déversement dans un cours d'eau, tout le monde se met d'accord
rapidement pour dire qu'il y a pollution. Ce n'est donc pas là qu'est le
problème.
Le problème le plus fondamental, c'est l'eau souterraine, les
nappes d'eau phréatiques. C'est un peu plus délicat, parce que
personne n'a la capacité de voir à travers le sol, mais tout le
monde sait qu'il y a sous le sol des nappes d'eau phréatiques qui jouent
un rôle extrêmement important, non seulement dans la nature comme
telle, mais en termes d'alimentation en eau potable dans bien des cas. Je
rappellerai à mon collègue de Beauce-Sud que, dans la
vallée de la Chaudière que nous habitons tous les deux, plus de
80% des citoyens s'alimentent en eau potable à partir de cette nappe
d'eau phréatique.
En fait, il y a à peine quelques municipalités qui
utilisent des eaux de surface pour alimenter leurs usines de filtration. C'est
donc dire que si, par négligence ou par manque d'un souci précis
de protection de ces nappes d'eau phréatiques dans la région de
la Beauce notamment - ce n'est pas que chez nous qu'il en est ainsi - on
faisait en sorte que ces nappes d'eau se polluent, nous aurions sur les bras un
problème énorme, aussi bien du point de vue technique que de
celui de l'argent à être dépensé.
Je donne un point de référence au député de
Beauce-Sud, à partir d'une expérience que j'ai vécue il y
a quelques mois à peine. Nous avons, dans la ville de Mercier, en
banlieue sud de Montréal, une nappe d'eau phréatique qui a
été contaminée, non par des éléments
agricoles, mais par des éléments chimiques. J'ai dû
m'adresser au Conseil du trésor, il y a à peine un mois et demi
ou deux mois, pour obtenir la jolie somme de 5 200 000 $, si ma mémoire
est bonne, afin d'installer sur place une usine de pompage et une usine de
traitement de ces eaux contaminées de façon à
récupérer la nappe d'eau phréatique. Entre-temps, le
gouvernement a dû dépenser des sommes d'argent remarquablement
élevées pour assurer aux résidents de la région de
la ville de Mercier une alimentation en eau potable qui remplaçait
l'usage des puits qu'on en faisait.
Donc, à partir de cet exemple, on s'aperçoit que, si le
gouvernement ou le ministère de l'Environnement se montre
négligent ou trop permissif, on risque de devoir payer
éventuellement des factures dont les montants seraient rapidement
faramineux. Nous avons donc là une mission environnementale et aussi une
mission économique, c'est-à-dire protéger ces nappes d'eau
souterraines. Je pense que le député de Beauce-Sud est d'accord
avec moi sur ce fait.
Il me demandait également ce qu'on faisait en termes de recherche
au Québec pour en venir à transformer ou à régler
le problème des fumiers. Évidemment, ce matin, on va parler
surtout de l'entreposage des fumiers, parce que, quelle que soit la solution
qu'on trouvera à la suite de ces recherches, il y aura toujours une
étape indispensable, qui est celle de l'entreposage. À moins de
créer, je ne sais pas, une usine de transformation par ferme, il faudra
toujours que le producteur agricole entrepose durant un certain temps ses
fumiers, qu'ils soient liquides ou solides.
Alors, de la recherche, nous en faisons. Au cours des trois prochaines
années, nous allons investir 225 000 $ par année dans
différents projets. Je peux les énumérer pour la
satisfaction du député de Beauce-Sud. Nous avons d'abord un
projet sur le traitement du lisier de porc par filtration, vacuum continu et
osmose inverse. Nous avons une deuxième étude sur la
déshydratation industrielle du lisier de porc. Nous avons
également en marche une étude sur l'entreposage du lisier de
bovin laitier, entreposage en lagune étanche. Nous avons aussi une
étude sur un projet de construction d'une structure de rétention
en terrain perméabilisé avec une membrane pour le fumier de
bovin, etc. Enfin, il y a toute une série d'études qui ont cours
et cela totalise 225 000 $ par année, pendant trois ans. Donc,
au-delà de 750 000 $. De son côté, le ministère de
l'Agriculture effectue également certaines études.
Il y a plusieurs techniques qui existent déjà, qui ont
fait l'objet d'études et qui ont été mises en pratique.
Ces techniques se sont avérées valables en termes de
transformation des fumiers. Sauf que, lorsqu'on les a utilisées,
qu'on les a mises en pratique, si on veut, on s'est vite rendu compte que leur
utilisation comportait des coûts nettement plus élevés que
la gestion traditionnelle des fumiers, c'est-à-dire l'épandage
dans les champs. Alors, le député de Beauce-Sud comprendra
facilement que, même si nous disposons déjà de
méthodes sophistiquées pour transformer ces purins, il se trouve
que leur application aurait pour effet de dérentabiliser ou
déstabiliser l'opération économique de nos fermes. Ce
n'est donc pas une solution économiquement valable. Nous devrons donc
poursuivre plus profondément ces études pour en arriver à
trouver des techniques qui soient à la fois efficaces sur le plan
scientifique ou sur le plan technique, mais aussi sur le plan
économique.
Il est clair, pour moi et pour tous ceux qui ont regardé ce
dossier de près, que la méthode la plus économique
à tous points de vue, aussi bien sur le plan agricole comme tel que sur
le plan technique et sur le plan économique en termes de gestion, donc,
la méthode la plus souhaitable, c'est encore l'épandage.
Là aussi, il faut être prudent car, si nous abusons de
l'épandage, nous risquons d'avoir les mêmes inconvénients
que constitueraient des déversements purs et simples. Autrement dit, le
député de Beauce-Sud comprendra très bien qu'un sol peut
recevoir une certaine quantité de ce type d'engrais. Si on abuse dans
les déversements, nous risquons de nous retrouver avec des
déversements aux cours d'eau à la suite d'un dégel, de
neige ou de pluie et nous ne serions pas plus avancés.
Nous risquons également une contamination de la nappe d'eau
phréatique et, en plus des considérations purement agricoles,
nous risquerions de nous retrouver avec des sols littéralement
brûlés par l'abus des engrais. C'est donc dire qu'il faut mener en
parallèle une saine gestion des épandages et faire la recherche
scientifique nécessaire pour nous assurer que l'utilisation de ce purin
puisse déboucher sur sa transformation, donc sur sa rentabilisation, en
termes d'engrais chimiques ou autres. On sait que, parmi les recherches, il y
en a qui portent sur la transformation en énergie, par exemple. Ce sont
autant de choses qui ne nous laissent pas indifférents, ce sont des
secteurs dans lesquels nous investissons une certaine somme annuellement et
l'agriculture en fait autant.
Le député de Beauce-Sud, à la fin de son
intervention, faisait référence à une déclaration
de l'UPA qui, selon ce que j'ai pu en comprendre, en tout cas, m'est apparue
littéralement comme un appel à l'insubordination, voire à
l'anarchie pure et simple. J'ose espérer que mon collègue de
Beauce-Sud, qui est un homme de formation juridique puisqu'il est notaire,
n'endosse pas ce geste ou cette invitation à peine camouflée qui
a été faite par l'UPA de voir à ne pas respecter un
règlement qui découle d'une loi provinciale.
M. Mathieu: Non.
M. Ouellette: Je sais très bien que ce n'était pas
l'intention de l'UPA. Si je savais le contraire, je serais très
désolé puisqu'il ne faut pas prétendre qu'on va vivre
convenablement en société en choisissant les lois qui font notre
affaire et en rejetant celles qui ne font pas notre affaire.
Il se peut fort bien que les agriculteurs en général
trouvent que le règlement actuel est trop sévère, qu'il
entraîne des dépenses trop élevées,
injustifiées dans certains cas. Je dirais que, si l'Opposition, l'UPA et
le ministère de l'Agriculture partagent ce point de vue, ils doivent
savoir qu'ils ont devant eux un ministre de l'Environnement qui est, comme je
le disais tout à l'heure, déjà sensibilisé au
problème, qui a montré une grande ouverture d'esprit par la mise
en place du comité tripartite, qui s'est montré très
intéressé à rediscuter l'ensemble du règlement et
qui est réceptif à la modification de ce règlement, tout
en étant conscient qu'il est essentiel que nous continuions à
protéger nos eaux de surface et nos eaux souterraines.
Nous en arrivons donc à une discussion qui a trait à
l'entreposage et aux méthodes qu'on peut utiliser pour réduire
les coûts à la ferme, tout en assurant la protection de nos eaux
souterraines et de surface. C'est l'objet des discussions que nous avons eues.
Nous avons eu des points d'accord importants, il reste certains
éléments qui vont être discutés au cours des dix
prochains jours et j'espère que, dans onze ou douze jours, à la
suite d'une rencontre Environnement-UPA, nous serons en mesure d'annoncer que
nous nous sommes entendus sur toute la ligne.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne reviens pas
immédiatement sur le contenu, je préfère laisser le
député de Beauce-Sud entrer dans le détail et
répondre à ses questions précises. Il me demandait s'il y
avait désaccord complet entre l'Environnement et l'Agriculture, en
termes de ministère. La réponse, c'est non; il n'y a pas
désaccord complet. D'abord, on s'entend tous,
UPA-Agriculture-Environnement, sur les principes généraux. Le
ministère de l'Agriculture est d'accord avec nous qu'il faut utiliser
des moyens moins dispendieux, mais efficaces en termes de protection de
l'environnement. Le ministère de l'Agriculture est prêt à
collaborer avec nous et avec l'UPA, pour qu'on en vienne à un accord.
Ceci ne signifie pas que nous sommes d'accord sur toute la ligne; bien
sûr,
il peut y avoir des divergences, mais je pense que c'est le propre de
l'homme et de la femme de ne pas toujours être d'accord, et on retrouve
cette situation dans le dossier qui nous intéresse. (10 h 45)
Le député de Beauce-Sud me demande si le béton
n'est pas plus dangereux que l'entreposage en sol. Dans certains cas, oui, j'en
conviens. Il est clair et net que, lorsqu'on construit une citerne en
béton, par exemple, pour contenir du purin, à l'usage, nous
savons maintenant que ces citernes en béton peuvent très bien se
fendiller, voire fendre littéralement et provoquer des
déversements complets. On l'a vécu chez nous et cela a
été vécu un peu partout au Québec.
Nous ne prétendons pas que le béton soit la solution
idéale et peu coûteuse, loin de là. Nous sommes conscients
que c'est coûteux et que ce n'est pas infaillible. C'est pourquoi je n'ai
pas rejeté l'idée de l'entreposage en sol. Là où il
faudra s'entendre, notamment avec l'UPA, c'est sur la norme
d'étanchéité qu'on devra appliquer à cet
entreposage en sol. Sur ce point, nous sommes en désaccord actuellement
puisque nous faisions appel à la norme d'étanchéité
très savante qu'on qualifie de dix à la moins sept,
c'est-à-dire l'équivalent du béton, alors que l'UPA
proclamait qu'il faudrait se limiter à une norme qui équivaudrait
à dix à la moins quatre. Nous sommes en désaccord.
Personnellement, je suis en désaccord, parce que, même si je
reconnais qu'à la moins sept, c'est peut-être trop exiger, nous
sommes prêts à aller à la moins six, et c'est la
proposition que nous avons faite. Mais de là aller à la moins
quatre, qui est littéralement du sable, je n'ai pas la conviction qu'un
mètre ou deux de sable puisse être suffisamment étanche
pour contenir, par exemple, du purin liquide de porc, puisque le colmatage dans
ce cas-là ne s'est pas révélé, selon les
expériences qui sont en cours actuellement dans la région de
Québec, suffisamment élevé pour assurer une
éventuelle étanchéité, donc une protection de la
nappe d'eau phréatique.
Le député de Beauce-Sud a fait une affirmation, qui a
été relevée d'ailleurs hier soir, à la rencontre
avec l'UPA, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation et le ministère de l'Environnement - je termine
là-dessus, M. le Président, pour ma première étape
- à savoir que l'Office du crédit agricole appliquait le
règlement du ministère de l'Environnement. Ce n'est pas exact.
D'ailleurs, hier soir, nous avions là un représentant de l'Office
du crédit agricole. Élargissons cela: II n'y a pas que l'Office
du crédit agricole qui se préoccupe de ce sujet. Toutes les
institutions financières prêteuses exigent des agriculteurs, qui
vont emprunter chez elles, qu'ils soient conformes aux normes
environnementales. Ce n'est pas dire que ces institutions appliquent le
règlement environnemental, pas du tout. L'Office du crédit
agricole exige tout simplement que les investissements soient faits
conformément aux normes de l'environnement, mais c'est le
ministère de l'Environnement qui applique son règlement.
Je pense avoir répondu à l'essentiel des questions qui
m'ont été posées jusqu'à présent et je
redonne la parole au président.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. De toute
façon, vous aurez l'occasion d'y revenir. M. le député
d'Orford.
Argumentation M. Georges Vaillancourt
M. Vaillancourt (Orford): Merci, M. le Président. Je suis
heureux ce matin de joindre ma voix à celles du député de
Beauce-Sud et du député de Beauce-Nord, car les deux intervenants
qui ont pris la parole avant moi représentent la région de la
Beauce, qui est une très belle région.
Une voix: La plus belle.
M. Vaillancourt (Orford): Mais je dois vous dire que moi, qui
représente la région des Cantons de l'Est... Ceux qui ne l'ont
pas vue ne peuvent pas le constater comme moi, mais je peux vous dire que c'est
une région qui est belle et qui mérite de ma part que je
défende ses droits en ce qui concerne le sujet que nous discutons ce
matin.
M. le Président, cette question vitale pour l'ensemble des
citoyens a tellement soulevé de débats, de protestations, de
manifestations de la part de la classe agricole, en particulier, qui a si
souvent montré son indignation et son mécontentement unanime
devant l'attitude déplorable du gouvernement, que j'ai du mal à
croire que nous soyons encore obligés, après six ans de
récriminations continuelles, d'essayer de sensibiliser nos amis d'en
face à la gravité de la situation pénible qu'a
décrite tout à l'heure le député de Beauce-Sud.
Si, parfois, M. le Président, comme le dit l'adage, le temps
arrange bien les choses, il n'en va certes pas de même pour le dossier
que nous traitons aujourd'hui. À la passivité néfaste qui
a caractérisé ce gouvernement dans ses premières
années d'expérience a succédé l'élaboration
maladroite d'une réglementation et de considérations aberrantes,
d'autant plus lorsque l'on songe aux moyens dont disposait l'appareil
législatif pour en arriver à un tout autre résultat. Comme
dans bien des cas, en 1978, les ministériels péquistes qui
affirmaient avoir plus de solutions que de problèmes, avaient
coulé dans le ciment - et
c'est vraiment le cas de le dire - un projet de règlement qu'ils
étaient obligés de soumettre au public par voie de commission
parlementaire. Peut-être voulait-on faire oublier que c'est ce projet de
règlement, sans légitimité populaire, qu'on utilisait pour
refuser ou non un permis arbitraire aux producteurs agricoles pour qui cela
constituait une condition obligatoire pour l'obtention d'un prêt de
l'Office du crédit agricole.
Qu'a fait le ministère de l'Environnement des recommandations qui
lui avaient été présentées lors de cette commission
parlementaire cruciale? Que sont devenus les dizaines de mémoires,
conçus au prix d'efforts parfois gigantesques par des individus venant
de tous les milieux agricoles et par tous les organismes reliés de
près à ce projet de règlement déterminant?
Où sont allés leurs connaissances, leurs expertises, leurs
efforts destinés à forger un règlement de qualité,
un règlement moins onéreux, après ces études?
Nous serions bien tentés, après l'examen du projet de
règlement et du règlement final, de dire que tout s'est
retrouvé avec le fumier dans le dépotoir. On a
méprisé des gens et, avec eux, notre Parlement
démocratique. On a approuvé ce projet en l'estampillant
péquiste. On n'a pas tenu compte de leur expérience de vie. On a
battu en brèche leurs conseils, leurs avertissements. Résultat?
Ces gens continuent de faire la navette à nos bureaux de comté
pour se plaindre du sort injuste que leur gouvernement s'acharne à leur
faire subir encore aujourd'hui.
À la différence des ministres concernés, qui se
renvoient le dossier, un peu comme ils renvoient les promesses ou les
manifestants, nous écoutons les griefs de ces personnes
lésées parfois dans leurs droits les plus
élémentaires. Puisqu'on semble faire la sourde oreille à
ces représentations justifiées, j'aimerais que le ministre
entende les arguments de ces gens qui, plus que tous les autres, je crois, ne
prisent guère les barrières ou tracasseries bureaucratiques des
ministères québécois, éloignés qu'ils sont
des instances décisionnelles.
Les agriculteurs voudraient bien que vous leur expliquiez comment il se
fait qu'en s'entretenant parfaitement avec le ministère de l'Agriculture
au sujet de nouvelles normes que devrait contenir un nouveau règlement,
après plus de six ans de consultations et de bavardages plus ou moins
continus et harmonieux, après tous les comités d'études,
comme le ministre l'a mentionné tout à l'heure dans son
exposé... Où sont les résultats? C'est ce que
l'agriculteur attend. J'espère que le ministre, lui qui est nouveau dans
ce domaine, va prendre les dispositions nécessaires pour que les
résultats soient plus rapides afin de permettre à nos
cultivateurs, à nos agriculteurs, de profiter de ces études qu'on
a déjà trop attendues.
Comment se fait-il que la solution soit encore si lointaine? Comment se
fait-il que ce qui est bon pour l'Ontario soit si mauvais pour le
Québec? Votre prédécesseur, dès le 30 novembre
1978, disait en Chambre qu'il devra y avoir un programme d'aide quelconque du
gouvernement pour que ces agriculteurs puissent se conformer au
règlement. Comment est-il pensable que vous déclariez, cinq ans
après, en conférence de presse, que vous en êtes toujours
au stade des discussions en vue de soumettre un projet de programme au Conseil
des ministres? Si ce projet obtient autant de succès que le
règlement, le pire est à craindre. Tout en reconnaissant que
certains abus flagrants devraient être corrigés, les agriculteurs
ont toujours dénoncé et critiqué les aspects
extrêmes, inutiles et inéquitables du règlement concernant
les exploitations animales. Au cours des années, le texte du
règlement a subi des dizaines de modifications, mais ces modifications
ont toujours été mineures. Sur l'essentiel, le ministère
de l'Environnement impose toujours les mêmes exigences qu'en 1974. Les
points majeurs de la politique de l'environnement sont les suivants: les
fumiers liquides doivent être entreposés dans des
réservoirs, théoriquement, complètement étanches et
d'une capacité de 200 jours. Le ciment, le fer et les membranes sont les
matériaux répondant aux critères
d'étanchéité. Les réservoirs en terre ne sont
acceptés que dans des situations très exceptionnelles.
Heureusement que le ministre nous dit ce matin qu'il reconnaît que les
matériaux comme le ciment et le fer sont dangereux car il peut se
produire des fissures dans le ciment qui peuvent permettre au liquide de se
répandre. Les réservoirs en terre ne sont pas acceptés.
J'espère qu'ils le seront dans la nouvelle réglementation.
Pour les fumiers solides, le ministère de l'Environnement - je
cite toujours le règlement - force progressivement les producteurs ayant
plus de 50 unités animales à se doter de structures
étanches conçues pour retenir tous les liquides comme, par
exemple, les plates-formes en ciment avec murets en ciment ou les citernes en
ciment. Les producteurs sont forcés un par un, au moment où ils
font un agrandissement, à s'engager à construire une telle
structure. Dans trois bassins, les rivières L'Assomption, Yamaska et
Chaudière dans la région du ministre, la pression est plus forte.
Tous les producteurs sont visités et doivent s'engager à se
construire une telle structure au cours des prochaines années. Au moment
des manifestations du printemps dernier, il était évident que les
politiques du ministère de l'Environnement constituaient une des sources
les plus grandes d'insatisfaction des
agriculteurs dans le texte actuel.
Le ministre du temps, M. Léger, s'est engagé, à la
suite des manifestations, à rechercher avec les agriculteurs des
solutions moins coûteuses d'entreposage des fumiers. Les mois qui
suivirent l'engagement du ministre ont permis de prendre conscience qu'il n'y
avait pas moyen de réduire le coût sans modifier la philosophie de
base du règlement. Dans la mesure où le règlement continue
à exiger une norme très élevée
d'étanchéité théorique pour l'entreposage des
fumiers, norme qui correspond au béton, il n'y a aucune évolution
possible. Pour diminuer le coût de la pollution de l'environnement, il
faut absolument remplacer l'imposition à tous d'une
étanchéité théorique et parfaire l'objectif des
méthodes d'entreposage dont le but est simplement de ne pas polluer.
Avec de telles philosophies, comme il est évident que beaucoup d'amas de
fumier solide sont situés dans des endroits où ils ne
présentent aucun risque de contamination significative des cours d'eau
ou des puits, alors, on n'exigerait pas de structures coûteuses dans ces
cas qui sont extrêmement nombreux. (11 heures)
Concrètement, en appliquant la philosophie que je viens
d'énoncer, comme le disait mon collègue, l'UPA a demandé
au ministère de l'Environnement que les règles suivantes soient
appliquées en matière d'entreposage: Que les fumiers solides
puissent être entreposés directement sur le sol, si des mesures
sont prises pour éviter que les écoulements n'atteignent les
fossés et les cours d'eau. Évidemment, s'il est prouvé
qu'un amas de fumier solide contamine un puits, des mesures additionnelles
pourront être exigées. Que, pour l'entreposage des fumiers
liquides, les réservoirs en terre soient acceptés s'ils
répondent à des exigences équivalentes à celles qui
sont actuellement appliquées en Ontario. Ces normes de l'Ontario sont
fondées sur l'idée que le fumier colmate le sol et lui donne un
haut niveau d'étanchéité. Jusqu'à aujourd'hui, le
Québec n'a jamais accepté cette notion de colmatage par les
fumiers. Pourtant, l'Ontario a fait de la recherche sur ce sujet. Le
Québec n'en a jamais fait. Il en fait actuellement, d'après ce
que le ministre nous a dit tout à l'heure.
Le problème a été clairement posé en
novembre au ministre actuel de l'Environnement, M. Adrien Ouellette, qui s'est
engagé à modifier le règlement avant l'été
qui vient. J'espère qu'il va le faire, comme il l'a dit l'automne
dernier. Ces changements de règlements seront-ils, encore une fois, des
changements mineurs et insignifiants comme à peu près tout ce qui
a été fait au cours des neuf dernières années?
Assisterons-nous plutôt, M. le Président, à la
réorientation en profondeur de l'action du ministère de
l'Environnement que les agriculteurs réclament depuis plusieurs
années? La réponse est entre les mains du nouveau ministre de
l'Environnement.
Mais, M. le Président, je pourrais donner d'autres exemples.
À Saint-Isidore, notamment, les gens n'ont même plus la
possibilité d'épandre le fumier sur leurs terres, car les
règlements les obligent à respecter des distances
déraisonnables pour ne pas incommoder les voisins par une mauvaise odeur
fictive. Autre cas pathétique: un père qui est incapable de
vendre sa terre à son fils parce que ce dernier, en allant à
l'Office du crédit agricole pour un prêt, hériterait de
l'obligation de se faire construire une fosse à purin de l'ordre de 15
000 $ ou 20 000 $, peut-être 40 000 $. Je crois que c'est un bel
héritage pour le fils. On voudrait paralyser ou faire
dépérir la ferme familiale que l'on ne s'y prendrait pas
autrement. Le ministre de l'Agriculture, lui qui se proclame le
défenseur des intérêts des agriculteurs, laisse l'Office du
crédit agricole être complice - et toutes les associations
prêteuses - de la décadence de l'agriculture
québécoise. Il devrait avoir le courage de dire à son
collègue qu'il est dans l'erreur plutôt que de se cacher
derrière son irresponsabilité. Aurait-il moins de talent que son
collègue de l'Énergie et des Ressources qui a pu passer
par-dessus le ministre de l'Environnement dans le dossier de la tordeuse des
bourgeons?
Je termine en soulignant que les travaux de recherche à
l'Université de Guelph en Ontario et à l'Université McGill
à Montréal ont démontré, hors de tout doute, qu'il
y avait d'autres solutions que le béton pour protéger
l'environnement en milieu agricole. Que le ministre s'inspire de ces
études s'il ne veut pas ou ne peut pas faire exécuter des
études par son propre ministère. Je parle d'études
sérieuses. Je ne parle pas des deux dixièmes d'étude qui
ont été entrepris, si l'on se fie à l'ancien ministre,
études dont on n'a jamais entendu parler. La nature des sols peut
permettre l'entreposage du fumier sur le sol, au Québec comme en
Ontario; reconnaissez-le, M. le ministre, et la moitié des
problèmes environnementaux et financiers des agriculteurs du
Québec sera réglée et bien réglée.
Pour mieux les régler encore, je crois que le ministre ou le
gouvernement devrait subventionner les agriculteurs au même titre qu'on
subventionne la pose d'égouts et d'aqueducs dans les installations
communautaires. Je crois qu'ils sont subventionnés à environ 90%.
Afin d'aider nos agriculteurs à installer des fosses septiques, afin de
leur permettre d'acquérir des équipements de qualité et de
les aider à ne pas dépenser ou à ne pas s'endetter pour
des années à venir, je crois que le ministre devrait prendre
cette initiative de les
subventionner. C'est une suggestion que je lui fais. J'espère
qu'au cours de sa deuxième intervention, lorsqu'il aura à
répondre à toutes les interventions qui ont été
faites, il pourra nous répondre sur ce sujet. Merci.
Le Président (M. Gagnon): M. le député
d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril (Arthabaska): Oui, M. le Président. Je ne pourrai
pas répondre à la place du ministre aux questions précises
que le député d'Orford a posées, mais j'aimerais, quand
même, relever certains faits que le député d'Orford a
émis. Quand il nous dit qu'il trouve regrettable qu'après six ans
on soit encore obligés de se réunir, ici, en cette Chambre, pour
que le Parti libéral sensibilise le Parti québécois sur
les problèmes de l'environnement, il me semble que c'est un peu
forcé, c'est un peu tirer la corde par les deux bouts. Si on fait une
rétrospective de ce qui s'est fait ou de ce que le Parti libéral
a fait, parce qu'il a déjà été au pouvoir.
Une voix: Cela fait sept ans.
M. Baril (Arthabaska): Cela fait sept ans, oui, mais il faut
regarder ce que vous avez fait pendant que vous avez été au
pouvoir. D'abord, quand nous sommes arrivés en 1976, il existait sur la
table une vieille loi qui datait de 1944. Si ma mémoire est bonne, entre
1944 et 1976, le Parti libéral a été au pouvoir une
douzaine d'années. On n'a pas osé toucher à cette loi qui
datait de 1944 - chapitre 15 - qui était la Loi sur l'hygiène
publique, administrée par le ministère des Affaires sociales et
surveillée en région par les bureaux de l'unité sanitaire.
Imaginez-vous, on remonte un peu loin. Cela a pris du temps. Tout le temps que
vous avez été au pouvoir, vous n'avez pas touché à
cela, non plus.
En 1972, vous avez créé les Services de protection de
l'environnement qui relevaient du ministère des Affaires municipales.
Encore là, il n'y avait aucun règlement. C'étaient
seulement des normes qui n'étaient, je dirais, même pas
appliquées. C'étaient seulement des normes qui disaient à
peu près ceci, selon une loi qui ne comportait pas de règlement:
Nul n'a le droit de nuire à la santé de l'être humain.
Imaginez-vous aller dans les champs, aller dans les campagnes, aller partout et
essayer de faire appliquer une loi comme cela. C'est tellement vague que c'est
impossible à faire appliquer.
En 1978, un an et quelques mois après l'arrivée au pouvoir
du Parti québécois, il y a eu l'élaboration de normes
véritables de protection de l'environnement. En 1981, il y a eu
effectivement des règlements qui ont été écrits et
appliqués sur la protection de l'environnement lui-même.
Évidemment, nous sommes conscients de ce côté
également que, depuis déjà plusieurs mois, depuis un bon
bout de temps ces règlements qui furent appliqués pendant un
certain temps ne sont certainement pas tous réalistes. Ils ne s'adaptent
certainement pas à la réalité de l'agriculture qu'on vit
présentement. C'est la raison pour laquelle il y a eu des comités
formés du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, de l'Union des producteurs agricoles et du ministère de
l'Environnement pour améliorer ce règlement, pour qu'il soit plus
facile d'application et qu'il soit également le plus économique
possible pour la classe agricole. Si tout avait été fait
parfaitement au début, c'est évident que nous n'aurions pas
à nous réunir ici aujourd'hui. C'est souvent dans l'application
de règlements qu'on voit ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne
pas.
Tant la classe agricole que l'Union des producteurs agricoles, depuis
quelques années, ont évolué de façon extraordinaire
pour protéger l'environnement. Il faudrait faire attention à ne
pas, non plus, considérer les agriculteurs comme des pollueurs à
l'extrême et les seuls pollueurs de ce beau pays. Malheureusement, il y a
beaucoup d'autres secteurs de pollution au Québec et c'est ensemble, je
pense, qu'on va régler ces problèmes. Il y a une mentalité
qui change et qui évolue beaucoup. Cette mentalité est due,
d'abord, à une sensibilisation de toute la population à la
protection de notre environnement. La classe agricole, comme d'autres, a
évolué et est prête à respecter l'environnement.
Évidemment, il faut lui en donner les moyens. Je pense que le
ministère de l'Environnement est d'accord que ces normes ou ces
règlements dans le passé ont peut-être été
appliqués d'une façon trop rigide, mais on n'avait à peu
près jamais préservé notre environnement. On croyait,
maintenant que nous avions les pouvoirs de le protéger, que tout nous
était permis. Effectivement, je pense qu'il y a peut-être eu des
erreurs d'application, des erreurs d'interprétation, dans le milieu
agricole, de certaines normes d'environnement.
Je peux vous dire que je suis personnellement le dossier de
l'environnement agricole depuis déjà plusieurs années que
je suis ici et que c'est la première fois, en tout cas depuis quelques
semaines que les députés sont impliqués un peu dans le
processus d'amélioration, de perfectionnement. Et je peux vous dire,
bien honnêtement, que je suis agréablement surpris de l'ouverture
d'esprit, d'abord, du ministre de l'Environnement et, également, des
fonctionnaires du ministère de l'Environnement. J'ai déjà
eu maille à partir avec eux et je trouvais, dans le passé, que
leur ouverture d'esprit était passablement
étroite. Mais, comme je le dis, depuis un certain temps, je suis
étonné de voir comment les fonctionnaires du ministère de
l'Environnement veulent réellement régler le problème,
veulent avoir de nouveaux règlements ou de nouvelles normes qui puissent
convenir à toutes les parties pour qu'on puisse arriver à une
entente et que les agriculteurs puissent faire des investissements pas
aveuglément, mais qui respectent toutes les normes de
l'environnement.
Je voudrais expliquer un peu aux gens qui nous écoutent ce que
cela peut impliquer pour un agriculteur de protéger l'environnement.
Lorsque le ministère est passé pour demander que ses normes
soient appliquées et qu'on ait des réservoirs, des bassins ou des
lagunes - appelons cela comme on voudra - d'après ce qui sera
décidé le plus adéquatement possible, cela ne finit pas
là pour l'agriculteur. Je dirais même que le pire commence,
puisque, après que tout cela a été construit et qu'il y a
une belle piscine construite à l'extrémité de
l'étable, il faut aussi des instruments pour se débarrasser de ce
liquide ou de ce fumier. C'est là que les problèmes et les
investissements majeurs commencent. Il y a également le marché de
l'équipement agricole, qui n'a peut-être pas évolué
assez vite pour savoir comment se débarrasser - je ne peux pas dire des
déchets - de ces surplus et les épandre dans le champ. On n'a pas
eu et, d'ailleurs, on n'a pas encore un équipement agricole
adéquat. Les agriculteurs ont du faire eux-mêmes des
expériences pour les compagnies en investissant. Prenez seulement une
pompe pour pomper le purin, qui est semi-liquide selon l'élevage que
vous faites, elle va coûter facilement 10 000 $ et, après deux ou
trois ans, souvent, cet équipement est désuet parce qu'il n'est
pas encore assez perfectionné et qu'il n'est pas adapté aux
matières qu'on a à pomper.
Également, vous avez les épandeurs pour épandre
cela dans le champ. Encore aujourd'hui, c'est un investissement de 15 000 $
à 20 000 $, si vous voulez avoir un épandeur convenable pour ne
pas avoir à vous promener pour rien, comme on dit. Donc, si je calcule
rapidement, je suis rendu à peu près à 35 000 $. Mais
là, je n'ai pas encore le tracteur assez puissant pour faire brasser
cela. Un tracteur de plus de 100 forces aujourd'hui coûte au-dessus de 50
000 $. Donc, je compte environ 85 000 $ et je n'ai encore rien sorti du trou.
Je ne suis pas encore rendu dans le champ. On est obligé de tenir compte
de la température et de bien d'autres inconvénients. (11 h
15)
M. le Président, je sais que vous êtes un connaisseur
également, mais j'ai voulu quand même en faire mention pour que
tous ceux qui nous écoutent ou tous ceux qui auront la patience de nous
lire puissent comprendre un peu que l'agriculteur, quand il conteste certains
règlements de l'environnement, ce n'est pas parce qu'il ne veut pas
protéger l'environnement; souvent, c'est parce qu'il se retrouve devant
l'incapacité de faire l'investissement nécessaire pour
répondre à ces normes.
Le député d'Orford a mentionné également les
subventions qu'on aurait dû ou qu'on devrait accorder aux agriculteurs.
J'ai été assez prudent sur les annonces qui ont été
faites par le Parti québécois concernant la subvention pour les
équipements ou les moyens d'entreposage parce que je considère on
est en train de se le prouver aujourd'hui, je pense - que, quand nous avons
parlé de ces subventions, il y avait seulement une façon
d'entreposer les fumiers; c'était dans des plates-formes de ciment, des
plates-formes étanches qui coûtent, selon l'élevage, entre
15 000 $ et 40 000 $ ou 50 000 $. Cela s'ajoute à ce que je vous ai dit
tout à l'heure.
Je pense que le gouvernement a subventionné une chose un peu
aveuglément, sans savoir exactement si on subventionnait le bon
équipement. Je pense que c'est sain de la part du gouvernement d'avoir
retardé un peu ce moyen d'aide pour que, lorsqu'on dira: Oui, on
embarque, on soit certain de ne pas faire faire des investissements trop
onéreux à l'agriculteur et pour que le gouvernement ne
dépense pas les deniers publics d'une façon qui ne serait pas
adéquate.
M. Mathieu: Cela ne vous coûtera pas cher s'il n'y a plus
d'agriculteurs.
M. Baril (Arthabaska): J'entends le député de
Beauce-Sud dire qu'il ne reste plus d'agriculteurs. J'ai déjà dit
en cette Chambre à plusieurs reprises que je n'aime pas l'entendre dire
ça. Souvent, les agriculteurs eux-mêmes en font le reproche.
Lui-même, qui rencontre souvent la classe agricole, je suis certain qu'il
se l'est déjà fait dire. C'est évident que le nombre
d'agriculteurs diminue. Si on retourne 25 ans en arrière, il y avait
beaucoup plus d'agriculteurs au Québec, mais ce n'étaient pas des
agriculteurs à temps plein pour la plupart et les fermes
d'élevage étaient beaucoup plus petites qu'elles ne le sont
aujourd'hui. L'agriculture s'est beaucoup modernisée au Québec,
comme ailleurs, d'ailleurs, et les agriculteurs ont fait des investissements
parce qu'ils veulent vivre de leur ferme. Aujourd'hui, on ne peut plus vivre
avec quatre ou cinq vaches, trois ou quatre poules, quelques cochons et en
allant bûcher dans le bois l'hiver. C'était ça
l'agriculture il y a 25 ans.
Aujourd'hui, ça ne marche plus. Quand on regarde les
statistiques, si on se fie aux chiffres - je ne les ai pas en
mémoire;
mettons qu'il y a 25 ans il y avait 75 000 agriculteurs au
Québec, alors qu'aujourd'hui on en a 38 000 - c'est évident que
cela a diminué en nombre. Regardez, par exemple, comme cela a
augmenté en superficie. Regardez le rendement en agriculture qu'on a
aujourd'hui contrairement à ce qu'il y avait avant. Si je retourne
seulement dix ans en arrière, dans la production laitière - c'est
une production que je connais plus que les autres, puisque c'est la mienne - la
moyenne de production au Québec était de quelque 5800 livres de
lait par vache. Aujourd'hui, c'est une moyenne de plus de 11 000 livres par
vache. Cela a plus que doublé en l'espace de dix ans seulement. C'est
pour ça que je n'aime pas entendre le député de Beauce-Sud
dire: S'il reste des agriculteurs -c'est ce qu'il a dit tout à l'heure -
on les subventionnera. Je suis convaincu qu'avec l'énergie, la force et
la volonté que les agriculteurs ont aujourd'hui ils vont continuer et
que l'agriculture deviendra de plus en plus prospère.
Je m'arrêterai ici en espérant que le député
d'Orford a, quand même, compris que nous avons dérangé des
choses, c'est évident, en élaborant des règlements pour
protéger notre environnement. Mais, encore une fois, en douze ans de
pouvoir, le Parti libéral n'a même pas su corriger une vieille loi
qui datait de 1944 et qui était appliquée par l'unité
sanitaire dans les régions. Je trouve un peu extraordinaire qu'on vienne
aujourd'hui nous reprocher de nous être modernisés, d'avoir suivi,
d'ailleurs, la modernisation de l'agriculture et la protection de
l'environnement en général.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
d'intervenir ce matin, en ce vendredi 13, sur la question de mon
collègue, le député de Beauce-Sud: la protection de
l'environnement en milieu agricole. Le député de Beauce-Sud est
déjà intervenu, ainsi que le député d'Orford. Du
côté ministériel, on est intervenu. Je vais tenter - je
m'excuse pour les répétitions, parce que j'ai dû m'absenter
pour assister à la commission parlementaire relativement au saccage de
la Baie-James - de dresser un bilan et d'adresser quelques questions
très précises à l'honorable ministre qui nous honore de sa
présence ici, ce matin.
Pour les gens qui nous écoutent, on a souvent entendu dire, au
cours des dernières années, que les producteurs agricoles
étaient les principaux pollueurs. Je ne dis pas que c'est l'honorable
ministre qui a étendu cette traînée de poudre au cours des
dernières années, mais on se rappelle que, depuis 1976, beaucoup
de communications du gouvernement ont fait en sorte qu'une telle image s'est
développée. Plus particulièrement, on s'est
attaqué, au ministère de l'Environnement, aux producteurs de
porc, sans négliger les producteurs de bovin, les producteurs laitiers;
on a stigmatisé un peu ces producteurs.
Comme mise au point, je dirais tout simplement ceci: Comme dans tous les
autres métiers ou professions, les plombiers, les dentistes, les
avocats, il y a d'excellents agriculteurs, il y a de très bons
agriculteurs et il y a des agriculteurs moyens; chaque groupe de citoyens a
à supporter des minorités qui, quelquefois, ternissent l'image de
l'ensemble. Je pense que c'est peut-être ce qui s'est produit chez la
classe agricole et particulièrement chez les producteurs de porc. Mais,
je veux que ce soit bien clair et qu'on se comprenne bien: la grande
majorité des producteurs agricoles sont les citoyens du Québec
qui ont le plus investi en argent, sur une base individuelle, pour la
protection de notre environnement. Je voudrais qu'on leur soit reconnaissant.
Que le ministère continue, envers ceux qui sont les pollueurs, à
exercer un métier de police, d'accord, mais, encore une fois, c'est une
minorité. Ce n'est pas la très grande majorité de la
classe agricole.
Si on veut que l'image qui s'est créée à tort soit
changée, il faut également aider ces agriculteurs -
j'écoutais le député d'Arthabaska en parler - et ce n'est
pas autrement qu'en leur donnant les moyens, par la recherche, qu'on va les
aider. On a entendu ce gouvernement nous parler de virage technologique. Il y
en a un virage technologique à effectuer au Québec dans la
recherche en environnement.
Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
pour sa part, chaque année, à l'occasion de l'étude des
crédits de son ministère, nous arrive avec une pile de paperasse,
de projets pour l'amélioration de l'environnement, de projets de
recherche. Lorsqu'on étudie en détail ces projets, on
s'aperçoit qu'il s'agit d'un projet de recherche de 5000 $ à tel
endroit, d'un projet de recherche de 8000 $ à tel autre endroit, dans
les sujets les plus variés possible. Mais on s'aperçoit que ces
sommes d'argent pour la recherche sont presque totalement inutiles au
producteur agricole, sur sa ferme, lorsqu'il a à construire une fosse.
On ne parle pas de recherche; on parle de moyens traditionnels. On retarde le
problème, on entrepose le purin. Quand la fosse est pleine, on est pris
avec ce qu'il y a dedans. Cela a juste déplacé le
problème, mais cela coûte 25 000 $, 30 000 $ et 35 000 $. Ce ne
sont pas les petites subventions du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation qui ont fait avancer la recherche dans ce
domaine.
Je ne sais pas si le ministre de l'Environnement dispose des
crédits suffisants pour lancer des projets sérieux de recherche
pour la transformation du purin ou des fumiers. C'est une richesse naturelle
et, par la technologie, on peut transformer - je n'ose pas utiliser
l'expression en Chambre, M. le Président - du purin, qui est
considéré traditionnellement comme une nuisance, en richesse. On
peut même en extraire des sources énergétiques comme le
gaz, le méthane. On peut faire cela, mais il faut qu'on ait une
volonté politique d'agir dans ce sens-là et il faut que les
projets de recherche qui sont lancés, soit par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, soit par le
ministère de l'Environnement, soit par les deux ministères en
collaboration, soient des projets sérieux et je vais même ajouter
d'envergure, pour avoir une chance quelconque de succès.
Au moment où le ministère aura accompli cette fonction et
aura donné aux agriculteurs la technologie, ces derniers vont
l'appliquer, mais il n'y a pas un agriculteur, pris individuellement, qui
possède les moyens financiers d'effectuer lui-même, à son
compte, cette recherche et de l'appliquer. C'est le rôle de l'État
de faire cette recherche et de les assister dans ce domaine.
Sur ce sujet, je profite de l'occasion -ce sera ma première
question - pour demander au ministre s'il a suivi attentivement un projet de
recherche d'une certaine envergure, qui s'effectue dans mon comté,
à Pike River, Saint-Pierre-de-Véronne, dans l'industrie
laitière, sur la ferme Gasser, avec l'aide du gouvernement
fédéral. Là, je sais que ça va sursauter de l'autre
côté; je sais que le gouvernement fédéral ne fait
pas encore suffisamment de recherche au Québec, mais, dans ce cas, c'est
avec l'aide du gouvernement fédéral. Le ministre dit que c'est
vrai qu'il n'en fait pas suffisamment; on est d'accord là-dessus. Dans
ce cas, il n'en faisait peut-être pas suffisamment, mais le Québec
ne faisait rien et il en fait un peu; c'est déjà ça.
M. Ouellette: Ce n'est pas vrai.
M. Paradis: Donc, sur la ferme Gasser, à Pike River, une
expérience a été faite au niveau du fumier de vache. On en
a, des vaches, au Québec, Dieu le sait! Au niveau du fumier de vache,
une expérience de digesteur est en cours depuis plus de deux ans. Le
ministre, même s'il n'a pas financé les installations, comme son
homologue fédéral l'a fait, même s'il n'a pas
financé le suivi de la recherche, s'est-il, au moins, enquis des
résultats probants ou non - à ce qu'on nous dit, ils seraient
probants - de cette recherche de façon à la vulgariser, de
façon à la rendre disponible à tous les autres
agriculteurs producteurs de troupeaux laitiers au Québec? Le ministre
l'a-t-il fait? Il n'y a pas longtemps qu'il a été nommé,
mais peut-être que ses fonctionnaires peuvent le renseigner. A-t-il pris
la peine d'aller sur les lieux pour vérifier si ça fonctionnait
de façon à pouvoir rendre cette technologie accessible à
l'ensemble des producteurs laitiers du Québec? Si c'est une
expérience valable, ça ne nous coûterait pas tellement cher
et ce serait vraiment prendre un virage technologique important.
C'est ma première question: Avez-vous des projets de recherche
importants et suivez-vous ceux qui sont effectués chez les agriculteurs
québécois aidés par d'autres niveaux de gouvernement, dans
les circonstances, par le gouvernement fédéral? Avant que vous y
répondiez, j'ai une deuxième question. Cela vous permettra de
répondre aux deux en même temps, M. le ministre.
Il y a un autre problème auquel on doit faire face comme
députés ruraux chaque semaine à nos bureaux de
comté, c'est un problème de coordination des programmes de votre
ministère avec ceux du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Là-dessus, je
m'explique. Je parle surtout de financement. Lorsqu'un agriculteur est dans une
production qui connaît une baisse momentanée - et c'est à
peu près toutes les productions - il peut arriver qu'il se retrouve en
difficultés financières. C'est arrivé à plusieurs
producteurs de porc, c'est arrivé à plusieurs producteurs de
bovins, ça arrive à plusieurs producteurs laitiers, ça
arrive même à plusieurs producteurs d'oeufs, ça arrive
même à plusieurs producteurs de volailles.
Est-ce à la demande du ministère de l'Environnement que
l'Office du crédit agricole exige, avant d'accepter que ce producteur
consolide ses dettes, refinance son entreprise à la suite d'une crise ou
en plein milieu d'une crise, qu'il détient tous les certificats de votre
ministère, c'est-à-dire qu'il ait une fosse de 25 000 $, 30 000 $
ou 35 000 $ dans sa cour en arrière ou deux fosses de ce prix-là
et cela, dans des cas où il n'y a absolument pas de pollution, dans les
cas où l'agriculteur s'est toujours conformé à la loi et
aux règlements, alors qu'il détenait des droits acquis non pas
à polluer, mais à produire? Est-ce à votre demande que
c'est fait?
Je vous soumets très respectueusement que c'est néfaste
pour l'agriculteur qui est en refinancement d'ajouter, en pleine période
de crise, 25 000 $ pour une fosse lorsqu'il ne pollue pas, lorsqu'il n'y a
aucune plainte. C'est également néfaste aux jeunes agriculteurs,
lors de la transaction, lors de la passation - lorsque cela réussit
à se faire -du père au fils. Le fils a besoin du financement de
l'Office du crédit agricole et le père s'est toujours
conformé aux normes
de l'environnement. Il n'a jamais pollué son entourage, il jouit
d'une excellente réputation et là, parce que le fils
achète, ça lui prend absolument, tout de suite, non pas de la
technologie, mais une fosse d'entreposage avec des normes sur papier. Lorsque
vous êtes devenu ministre, vous avez dû voir combien il y en avait
- les producteurs agricoles le savent - avec des normes épaisses comme
ça, dessinées dans les bureaux à Québec. Des fois,
ces gens sont situés loin des cours d'eau. Ils ne polluent pas. On exige
quand même cela. Est-ce que c'est à la demande du ministère
de l'Environnement que l'Office du crédit agricole oblige que tous ces
certificats soient faits avant de consolider les dettes, avant de financer le
jeune agriculteur, avant même d'autoriser un agrandissement d'une
exploitation agricole? Des fois, les capacités sont suffisantes. Les
chiffres, les papiers préparés par les fonctionnaires, ce n'est
pas conforme, cela n'arrive pas, ça n'additionne pas. Il y a assez
d'entreposage pour le purin. Il n'y en a pas assez pour les papiers du
fonctionnaire. C'est cela, le problème.
Cela affecte la rentabilité de nos fermes, mais, encore
là, j'insiste pour vous dire que les producteurs agricoles, lorsqu'ils
sentent qu'ils peuvent, à cause de leur agrandissement, constituer un
risque pour l'environnement, sont les premiers à dire: Oui, nous allons
prendre les moyens, nous allons prendre les mesures, nous allons mettre
l'argent. Mais, lorsqu'ils sentent et qu'ils sont convaincus qu'ils ne mettent
absolument pas leur environnement en danger, ils se demandent ce que vous
faites dans leurs dossiers de financement agricole. Ce n'est pas plus
compliqué que cela. J'ai une dernière remarque, pour l'avoir
vécu comme député et pour l'avoir vécu
également lorsque je pratiquais le droit en représentant des
producteurs agricoles, comme représentant de ces producteurs dans les
dossiers d'environnement: On s'est rendu compte qu'à la face même
du dossier, on dit, dans notre jargon juridique, prima facie, on s'est rendu
compte que prima facie le ministère de l'Environnement consacrait ou
donnait l'apparence - et j'espère que le ministre me corrigera si ce
n'est pas exact -d'être un ministère beaucop plus près,
beaucoup plus apparenté, beaucoup plus proche, beaucoup plus ressemblant
à une succursale de la Sûreté du Québec, la police
de l'environnement, plutôt que d'être un ministère qui
aidait les agriculteurs à améliorer leur environnement. L'image
du début, je suis convaincu qu'elle était fausse. J'espère
que vous saurez me convaincre, M. le ministre, que celle que j'ai, celle qui
est partagée par la très grande majorité de producteurs
agricoles du Québec est également fausse.
Je ne vous demanderai pas simplement de me le dire, ce matin.
J'apprécierais que vous nous disiez que c'est surtout un
ministère de police, mais j'apprécierais qu'on constate, dans six
mois, le plus rapidement possible, dans un an, un an et demi, que c'est devenu
vraiment un ministère de protection de l'environnement pour aider les
gens à protéger leur environnement, non pas une succursale de la
Sûreté du Québec, comme c'est perçu
présentement. C'était là l'essentiel de mes brèves
remarques. J'attends avec impatience les propos du ministre.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Brome-Missisquoi. M. le ministre.
M. Adrien Ouellette
M. Ouellette: Merci, M. le Président. Avant de
répondre aux quatre questions du député de
Brome-Missisquoi, je voudrais revenir sur deux points qui ont été
mentionnés ici par le député de Beauce-Sud, je crois, et
son collègue. Le premier porte sur le fait que, dans la mesure où
le ministère de l'Environnement...
M. Paradis: Avec votre permission, M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Je vous préviens, M. le ministre, que je suis
obligé de m'absenter pour retourner à la commission sur le
saccage de la Baie-James. Je vais faire venir la cassette dès la fin de
la commission, dès la fin de la journée et vérifier vos
réponses. Ce n'est pas parce que je ne suis pas intéressé
à vos réponses, je suis drôlement intéressé
à vos réponses, mais j'ai des obligations parlementaires de
l'autre côté. Tenez pour acquis que je les écoute
attentivement.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Ouellette: On va travailler à la cassette et par
personne interposée, alors. Je reviens sur mon propos. Tout à
l'heure, quelqu'un a dit que - je crois que c'est le député de
Beauce-Sud; je m'excuse, c'est peut-être le député d'Orford
- par ses interventions en termes d'application du règlement, le
ministère de l'Environnement risquait de faire faire faillite
littéralement à 50% des producteurs agricoles au Québec.
Je pense qu'il faut relever cela parce que c'est grave comme affirmation. C'est
extrêmement grave. On est conscient que l'agriculture au Québec,
c'est le secteur économique ou un des secteurs économiques les
plus importants en termes de création d'emplois, en termes
de circulation d'argent, etc. Donc, s'il fallait qu'on mette en
péril 50% des agriculteurs au Québec, moi, j'irais me cacher.
J'aurais honte. Voici la vérité là-dessus.
Je pense qu'il faut mentionner ces chiffres pour éteindre cette
fausse nouvelle qui est catastrophique, à mon sens. D'abord, il y a au
Québec 38 000 producteurs agricoles de toutes sortes. Je vous donne le
détail. Vous pourrez le contester. Il y a 7000 agriculteurs qui sont en
production porcine. Il y en a 23 000 en production laitière. Il y en a
6500 qui sont des éleveurs de boeuf de boucherie et il y en a 1500 dans
les autres secteurs tels le poulet, le vison, etc.
Donc, le chiffre que j'ai ici est de 38 000 producteurs agricoles;
production animale, évidemment. Les autres producteurs agricoles ne
créent aucun problème à l'environnement, du moins pas dans
ce règlement. Le nombre de producteurs agricoles qui
bénéficient des exceptions prévues à l'article 25
du règlement, c'est-à-dire ceux qui ont moins de 35 unités
animales à plus de 30 mètres des fossés et ceux de moins
de 50 unités animales à plus de 150 mètres de ces
mêmes fossés, il y en a très exactement 19 000. Ce qui veut
dire que déjà, au départ, la moitié des producteurs
agricoles en production animale sont exemptés du règlement. Si le
raisonnement qu'on me livrait tout à l'heure était vrai, cela
voudrait dire que tous les autres, c'est-à-dire tous ceux qui sont
soumis au règlement, risquent la faillite; puisque la moitié n'y
est pas soumise, l'autre moitié ferait faillite. Allons voir le
détail de cela.
Nombre de producteurs assujettis aux normes d'entreposage des fumiers
liquides: il y a 7000 producteurs de porc; bovins, pondeuses et autres, 1000,
pour un total de 8000. Nombre d'exploitations sur fumier solide et n'ayant pas
besoin de système d'entreposage étanche, il y en a 1000. Ce sont
les poulets à griller, les visonnières - le vison - les
renardières, etc. Il y en a 1000. Elles ne sont pas soumises au
règlement elles non plus. Donc, on est rendu à 18 000 qui peuvent
y être soumis, soit beaucoup moins que 50%.
Nombre d'exploitations ayant besoin d'un système d'entreposage
étanche: productions bovines et porcines liquides, 8000; productions
bovines solides, 10 000. On ne peut pas les exclure, elles sont soumises au
règlement. Nombre d'exploitations conformes à la
réglementation - donc, on ne les fera pas fermer, elles s'y conforment
-travaux trouvés conformes lors des inventaires, 4000; correctifs
effectués - ils n'étaient pas conformes, ceux-là, mais ils
s'y sont conformés, donc, on ne les achale plus -1000.
On est donc rendu à 13 000 producteurs qui sont soumis au
règlement et qui ne s'y conforment pas tous, ce qui veut dire 30%. Donc,
comment fermer la moitié de l'agriculture si à peine 30% des gens
doivent se conformer au règlement? Veut-on dire 50% de ces 13 000? Je ne
le sais pas. Cela veut dire 15% de l'agriculture. Ce n'est plus 50%. Il faut
faire très attention aux chiffres qu'on lance dans le décor,
parce que cela peut fausser pas mal d'opinions et faire en sorte que les gens
ne s'y retrouvent plus. En fait, je voulais relever cela, parce que c'est un
chiffre nettement exagéré. Et j'ajouterais à cela que 2800
de ces 13 000 producteurs vont être exemptés lorsqu'on aura
adopté le nouveau règlement, selon les propositions que j'ai
faites à l'UPA hier soir. C'est donc dire que ce n'est plus 30%,
puisqu'on vient d'éliminer 2800 producteurs de l'application du
règlement. Donc, je pense que le premier drame est
réglé.
La deuxième affirmation qui est faite et qui risque de revenir
jusqu'à la fin de la discussion est la suivante: l'Ontario n'est pas
sévère et le Québec est sévère. Parce que le
Québec est plus sévère que l'Ontario, il risque de
dérentabiliser ou de briser la concurrence que souhaitent les
producteurs québécois par rapport à ceux de l'Ontario. Il
faut s'entendre. L'Ontario n'est pas sévère. Il est vrai qu'en
Ontario, semble-t-il, on tolère une norme
d'étanchéité des fosses en sol de dix à la moins
quatre, mais ce qu'il faut savoir, c'est que, depuis quelque temps, l'Ontario a
entendu parler des revendications de l'UPA au Québec. L'Ontario sait que
le ministère de l'Environnement a écouté ces
revendications et, depuis ce temps, les hauts fonctionnaires ontariens sont en
communication avec les hauts fonctionnaires de l'Environnement
québécois et ont dit à plusieurs reprises leur
inquiétude sur ce qui se passait chez eux. Autrement dit, ils ont
toléré, dans certains cas, dix à la moins quatre, mais ils
commencent à se poser de sérieuses questions sur les risques de
contamination des nappes d'eau phréatique ontariennes compte tenu de
leur réglementation qui - ils commencent à le croire - serait
trop large. Nous aurions tort au Québec d'aller dans ce sens et de
risquer, comme je le disais tout à l'heure, de compromettre la
qualité de nos eaux souterraines sous prétexte qu'en Ontario on a
pris ce risque. Peut-être que, demain matin, en Ontario, on
découvrira des nappes d'eau phréatique contaminées et je
ne souhaite pas que cela se fasse au Québec de toute façon. Nous
en avons déjà suffisamment pour être prudents au point de
ne pas les multiplier indûment.
Le député de Brome-Missisquoi m'a posé quatre
questions. Il a dit trois, mais j'en ai décelé une dès le
début de son intervention. Il m'a demandé: Est-ce que le ministre
de l'Environnement croit que les producteurs agricoles sont les principaux
pollueurs au Québec? Je l'ai dit au début de
mon intervention tout à l'heure. Je viens d'une région
très agricole - mon collègue de Beauce-Sud le sait - et,
personnellement, je n'ai jamais eu l'impression que les agriculteurs
étaient perçus comme étant les principaux pollueurs au
Québec. C'est faux, de toute façon, sauf qu'il se trouve que,
dans certains cas, dans certaines municipalités où il y a de
fortes concentrations, en particulier dans l'élevage du porc, c'est bien
sûr que les principaux pollueurs risquent d'être les producteurs de
porcs. C'est peut-être à partir de cette image que les gens ont eu
tendance à généraliser. C'est bien certain que l'industrie
au Québec pollue énormément. Il est clair également
que les municipalités polluent. Ce n'est pas pour rien que le
gouvernement du Québec a mis en place le programme d'assainissement des
eaux et qu'il m'a confié en plus la responsabilité de
l'accélérer, parce que nous étions conscients qu'il y a
à peine deux ans, le Québec ne traitait que 6% de ses eaux
usées, alors qu'en Ontario, on les traitait à plus de 85%. Il y a
donc un rattrapage énorme à faire dans ce secteur. Nous sommes en
train de le réaliser. Donc, je n'ai affirmé nulle part que les
producteurs agricoles étaient les principaux pollueurs au Québec.
Je sais que l'industrie pollue énormément. Je pense à
l'industrie papetière, c'est connu de tout le monde. Je pense à
la compagnie minière Noranda qui est responsable, paraît-il, selon
les données qu'on a, de 50% des émissions de SO2
à l'origine des pluies acides au Québec. Je sais que le monde
municipal pollue énormément. C'est pourquoi nous avons mis en
place un programme d'assainissement des eaux pour contrer cette situation.
N'exagérons pas. Je n'ai jamais prétendu que les producteurs
agricoles étaient les principaux pollueurs au Québec, loin de
là. Comme le disait d'ailleurs le député de
Brome-Missisquoi, c'est certain qu'il y a certains agriculteurs qui ont
abusé. Est-ce 0,5%, un sur 1000, un sur 10 000? Je ne sais pas, mais on
n'a jamais accusé l'ensemble de la classe agricole de se comporter de
façon incorrecte, en général, devant l'environnement.
Deuxièmement, le député de Brome-Missisquoi
reprochait à mon collègue de l'Agriculture de verser des petites
sommes d'argent pour des programmes de recherche qui s'effectuent au
Québec. Il souhaitait qu'on concentre ces montants d'argent pour nous
assurer que des projets sérieux de recherche se réalisent. Je
peux lui dire qu'à l'Environnement - je ne peux pas répondre pour
mon collègue de l'Agriculture, je ne connais pas ses crédits -
nous versons des sommes d'argent beaucoup plus importantes à
l'intérieur d'un nombre réduit de recherches qui
intéressent directement l'environnement. Par exemple ici, avec le CRIQ,
nous avons une entente pour 22 000 $, avec une participation possible du MAPAQ.
Dans certains cas, l'Agriculture également collabore avec nous pour
subventionner un projet de recherche. Il y a aussi à l'IAF, 51 000 $ en
1983-1984, 48 000 $ en 1984-1985. Ce ne sont pas des petits montants. Ce sont
quand même des montants assez intéressants. À Hydrotec, 10
000 $ et 17 000 $; cela fait 27 000 $. Il se peut que, dans ce cas
également, l'Agriculture y apporte certains fonds, etc.
Nous subventionnons des projets très précis. Nous le
faisons de façon substantielle par rapport, évidemment, au
coût entraîné par ces études. Nous n'avons pas
l'intention de changer de politique puisque nous visons des objectifs
très précis qu'il nous faudra atteindre. C'est par la recherche
qu'on atteindra ces objectifs.
Le député de Brome-Missisquoi me demandait s'il y a
coordination des programmes entre le ministère de l'Agriculture et le
ministère de l'Environnement. Il glissait dans sa question les mots
"crédit agricole". Il me demandait si c'était l'Environnement qui
avait exigé que l'Office du crédit agricole demande au producteur
qui va emprunter l'émission d'un certificat. La réponse, c'est
non. Il faut comprendre qu'une institution financière comme l'est le
crédit agricole... Il n'y a pas que le crédit agricole qui pose
cette condition. Toutes les institutions prêteuses exigent la même
chose. Cette décision vient d'elle-même. Le crédit agricole
ou la banque X, Y ou Z ne sont pas intéressés à
prêter de l'argent à un investisseur sans s'assurer que ces
investissements vont être rentables. Ces institutions financières
sont tout à fait conscientes que, si M. X investit 300 000 $ dans une
ferme et que, 15 jours après, il doit, après avoir assuré
son financement et sa rentabilité, dépenser 100 000 $ ou 125 000
$ additionnels, que ce soit une exigence de l'Environnement ou d'un autre
ministère et que, ce faisant, il déstabilise ses investissements,
l'institution financière n'est pas intéressée à lui
prêter. C'est pourquoi elle s'assure, en exigeant un certificat de
l'Environnement, que, dès que l'entreprise commencera ses
activités, elle ne soit pas surprise par des exigences additionnelles
qui la déstabiliseraient financièrement. Je pense que c'est une
précaution strictement financière. (11 h 45)
En quatrième point, le député de Brome-Missisquoi
demandait: Est-ce que le ministère de l'Environnement est une police de
l'environnement et n'est que cela? Il est certain que, au ministère de
l'Environnement, il y a ce petit caractère ou ce trait, style policier,
pour ceux qui veulent faire un lien avec la police. Il est bien sûr que
nous protégeons l'environnement. Il est bien sûr
que nos fonctionnaires doivent intervenir auprès de ceux qui ne
respectent pas les règlements. Si c'est à ce niveau qu'il fait le
trait d'union entre le ministère de l'Environnement et la police, il a
raison. Nous devons intervenir pour faire cesser certaines pratiques non
conformes à nos lois et à nos règlements, c'est vrai. Mais
nous ne faisons pas que cela.
Par la régionalisation du ministère, nous avons dix
régions et, dans chacune d'elles, il y a un directeur régional
qui pilote une équipe polyvalente qui peut fournir de l'aide technique,
de l'information, des conseils et faire des inspections. Ce n'est pas du tout
le style policier, au contraire. Nous allons vers les gens et nous leur offrons
des solutions pour les amener à avoir un comportement parfaitement
conforme au respect des lois de l'environnement de même que des
règlements qui en découlent. Tout cet aspect du ministère
de l'Environnement est en voie de développement. Il est bien sûr
que, au moment de sa création et au moment des SPE, une bonne partie des
activités du ministère de l'Environnement allaient dans le sens
de corriger des choses, d'en interdire d'autres. Peut-être que, à
ce moment-là, il avait l'air un peu policier. Mais, au fur et à
mesure que les correctifs sont apportés, que les lois sont
précisées, que les esprits ont évolué, eh bien, le
ministère de l'Environnement devient un ministère
extrêmement positif, conseiller en région, apte à informer
convenablement les gens et à les amener à trouver des solutions
aux problèmes environnementaux.
J'espère que ces réponses satisferont mon collègue
de Brome-Missisquoi, qui les lira ou les entendra sur cassette. Dans le cas
contraire, je suis disponible pour ajouter des réponses ou les
préciser davantage, selon son goût. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. M. le
député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Tout à l'heure,
le ministre faisait état qu'il y avait 38 000 agriculteurs au
Québec. J'imagine que ce sont 38 000 agriculteurs qui ont affaire, de
par la nature de leur installation, au ministère de l'Environnement.
Car, d'après la liste de l'UPA et du ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation, il y en a 48 900. Quand on parle de
38 000, je ne voudrais pas non plus que l'on minimise...
M. Baril (Arthabaska): Le ministre parlait des agriculteurs en
production animale, M. le député de Beauce-Sud. Il est sûr
que les céréaliculteurs, les horticulteurs sont reconnus, au
MAPAQ, comme des agriculteurs, mais ce ne sont pas eux qui ont besoin de fosses
ou de choses semblables.
M. Mathieu: D'accord. Mais je ne voulais pas laisser
l'ambiguïté prévaloir. C'est pourquoi je voulais rectifier
immédiatement. Il est vrai que, tout à l'heure, j'ai
mentionné que la moitié des exploitations agricoles est en
danger. Je le maintiens, M. le Président. Par exemple, si je prends des
paroisses rurales de mon comté, dont la mienne, il y a actuellement 85
entreprises agricoles. Si les normes sévères - je dirais
même abusives - que nous connaissons actuellement sont appliquées,
dans dix ans, il va en rester à peu près huit ou neuf. Vous allez
me dire que, dans les grandes concentrations, à Saint-Hyacinthe, dans la
plaine de Montréal, il n'y aura pas de disparition, je suis d'accord.
Mais je crois justement que cela démontre le caractère un peu
abusif des règles de l'universalité où on ne tient pas
compte de la région habitée par l'agriculteur, de la nature des
sols, du genre de production, de l'étendue de l'établissement,
etc.
Même si le ministre de l'Environnement veut être rassurant
et nous dire qu'il n'y a pas de problème, qu'il n'y a que 7000
agriculteurs de production animale en danger, etc., je maintiens que, dans la
région que je représente, pour avoir visité, l'an
passé, quelque 800 établissements, j'ai vu un problème
très grave. Je maintiens que la plupart des agriculteurs à qui on
va demander de se conformer... Il y a plusieurs avis d'infraction dans mon
comté et un grand nombre de personnes m'ont dit: On ne fait plus de
travaux d'amélioration et d'investissement, car on va se faire fermer
d'un mois à l'autre par le ministère de l'Environnement et, quand
il va arriver avec son règlement, on ne sera pas capables,
financièrement parlant, de s'y conformer.
Je répète mon exemple de tout à l'heure. Quand
votre bateau a atteint sa ligne de flottaison, en termes d'endettement, et que
vous lui imposez 25 000 $, 30 000 $, 40 000 $ ou 50 000 $
supplémentaires, vous savez ce qui arrive. Il y a juste ceux qui sont
soutenus par l'État qui peuvent résister, SIDBEC, la raffinerie
de sucre, ces histoires-là. Si nos agriculteurs administraient comme le
gouvernement, je pense que tout le monde ferait faillite.
M. le Président, tout à l'heure, mon collègue
d'Arthabaska a parlé du Parti libéral de 1944 qui n'avait rien
fait; j'ai trouvé qu'il était un peu loin du problème. Il
nous a dit tout ce qu'eux ont fait depuis 1976. On ne veut pas savoir ce que le
PQ a fait depuis 1976, on le sait, on veut savoir ce qu'il va faire face
à l'ultimatum de l'UPA. Est-ce qu'il va assouplir ses normes? C'est
ça qu'on veut savoir. Toutes les pieuses intentions, les
déclarations et tout ce que vous voudrez, ça
ne nous intéresse pas pour les fins du débat de ce matin.
Ce que je déplore, c'est que maintenant, dans ce débat, on n'est
pas plus avancés parce qu'on n'a pas eu de nouvelles annonces. Tout ce
que le gouvernement fait, c'est que ses représentants se
réfugient derrière leurs normes et, à les entendre, tout
est parfait et on se plaint pour rien.
Je voudrais féliciter le député d'Arthabaska qui a
démontré les coûts considérables... Il n'a pas
abusé; des auditeurs pourraient nous dire qu'il en a trop mis, mais je
suis persuadé qu'il n'a pas abusé. Je ne connais pas ce domaine
autant que lui, mais je le connais bien et je sais qu'il est très
raisonnable, si un péquiste peut l'être, comme ça semble
être le cas dans le moment présent.
En ce qui concerne les déclarations du ministre de
l'Environnement, je dois bien constater que l'environnement agricole n'est pas
une priorité de son ministère. Si je tire une conclusion de ce
que j'ai entendu ce matin, je vous informe que, lorsque le ministre de
l'Environnement a été nommé, le nouveau ministre, le
député de Beauce-Nord, les agriculteurs étaient contents.
Ils disaient: Enfin, voici un ministre d'un comté rural, il va nous
comprendre. Ils étaient rassurés. Ils nous disaient: En
région, ce dont on a besoin, ce n'est pas d'un ministre léger,
c'est d'un ministre pesant au Conseil des ministres pour défendre
l'intérêt de l'agriculture en environnement. J'espère que
le ministre nous réserve de bonnes nouvelles dans son intervention, tout
à l'heure, parce qu'on constate que l'environnement agricole n'a pas
été une priorité du gouvernement jusqu'à
maintenant.
En décembre dernier, à l'occasion du congrès de
l'UPA, je me souviens que nous avions posé une question au ministre de
l'Environnement sur ce point précis de l'environnement agricole, lors
d'une séance à l'Assemblée nationale. Le ministre nous
avait répondu que le comité tripartite, UPA, ministère de
l'Agricultre et ministère de l'Environnement, avait un ordre du jour de
douze points à régler, douze problèmes à
élucider. Si ma mémoire est bonne, il y en avait onze de
réglés et il en restait un, je pense que c'était justement
sur l'étanchéité. Peut-être que le ministre pourra
tout à l'heure nous reconfirmer cela et expliciter un peu sa
pensée là-dessus.
Je voudrais parler de la recherche. C'est sûr que la solution
repose dans la recherche. Tout à l'heure, si je ne me trompe pas, le
ministre a parlé de 285 000 $.
M. OueUette: 250 000 $ par année, durant trois ans.
M. Mathieu: 250 000 $ par année, durant trois ans. Ce
n'est pas suffisant, M. le Président. Où voulez-vous aller avec
250 000 $? Je ne blâme pas le ministre, mais je veux l'aider à
aller chercher des sommes supplémentaires au Conseil du trésor et
à sensibiliser le ministre des Finances.
Quant au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, quand on lui parle de recherche, cela va bien. J'ai ici un
article, paru dans le Richelieu agricole: 38 projets de recherche. Garon est
préoccupé par l'environnement. Je m'excuse de citer le nom du
ministre, parce que notre règlement l'interdit, mais je cite un article.
Savez-vous ce que sont ces projets de recherche, M. le Président? Je
voudrais démystifier cela un peu, parce que le gouvernement, par le
ministère de l'Agriculture et par le ministère de
l'Environnement, nous parle d'efforts considérables. Quand on lit 38
projets de recherche, cela impressionne, M. le Président. Je vais vous
en citer quelques-uns.
Proposition visant à promouvoir l'entreposage et l'utilisation du
fumier de porc sur des fermes participantes. Alors, on pose la
problématique. Coût au ministère de l'Agriculture: il n'y a
aucun coût pour ce ministère. Alors, l'effort financier n'est pas
considérable.
J'en ai un autre: compostage de surface. Coût: il n'y a aucun
coût, seul le temps impliqué pour la surveillance technique est
requis. Vous voyez que ce n'est pas avec des recherches comme celle-là
qu'on va régler le problème de l'environnement en milieu
agricole.
J'en ai un autre: essai de produits Aviromat pour réduire les
odeurs du fumier. Coût au ministère: 85,50 $. Je trouve que c'est
rire du monde que d'annoncer des choses semblables.
Étanchement des fosses en blocs de béton. Je ne dirai pas
le nom des responsables. Coût au ministère de l'Agriculture: 225
$. Ne pensez-vous pas que c'est rire du monde, M. le Président?
Essai d'un toit amovible sur une fosse à fumier liquide.
Coût: 265 $. En voici cinq d'énumérés et les budgets
n'ont pas été tellement grevés jusqu'à maintenant,
M. le Président.
Essai du séparateur de lisier Consolidator et de la grille
tangentielle. Coût au ministère: 407,48 $.
Je n'en énumérerai pas d'autres. J'en ai un grand nombre
d'autres, ce sont toutes des choses semblables, pour impressionner la galerie,
prouvant que le gouvernement est expert dans ce genre de demandes. Quand le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation nous parle
de ses 38 projets de recherche et que le ministre de l'Environnement nous parle
également de ses 250 000 $ par année, j'espère que ce sont
des choses plus significatives et plus importantes.
J'en cite un autre: agitation des
citernes à lisier avec de l'air comprimé. Coût au
ministère de l'Agriculture: 135 $. Je m'élève contre cette
propagande tout à fait fausse qui démontre, à
première vue, que le gouvernement fait un effort considérable
alors que c'est parfaitement insignifiant.
En termes d'aide aux agriculteurs, tout à l'heure, mon
collègue d'Arthabaska a dit qu'il fallait être prudent, si j'ai
bien compris, pour que les agriculteurs n'investissent pas
prématurément au cas où la technologie changerait. Est-ce
qu'ils ont toujours dit cela? J'ai ici un dépliant d'un candidat du
Parti québécois dans ma région ainsi que le programme en
agriculture: Oui, aux plates-formes, mais avec une aide gouvernementale. Les
agriculteurs oeuvrant dans le domaine des bovins devront prochainement se doter
de plates-formes à fumier et de réservoirs à purin dans le
but de protéger l'environnement. Le candidat estime qu'ils ont des
droits acquis et il se battra pour que le gouvernement défraie une
partie du coût des plates-formes et réservoirs.
M. Ouellette: Il a été battu.
M. Mathieu: M. le Président, le ministre...
M. Ouellette: C'est à vous de vous battre. (12 heures)
M. Mathieu: ...de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, que disait-il? Le 10 mars 1981 - si je ne me trompe pas,
c'était en précampagne électorale - il nous disait:
Conférence préélectorale; source: discours,
communiqués et conférences d'hommes politiques. Je cite: "On
s'entend pas mal sur ce que devrait être le règlement dans ce
cas-là, on a ajouté pas mal de choses, et, quand ils m'ont dit:
"Allez-vous aider pour les plates-formes à fumier?", je leur ai dit:
"Vous regarderez dans le budget et, si vous ne trouvez pas ça dans le
budget, vous attendrez les engagements électoraux. Là, vous
verrez s'il y a quelque chose ou non." M. le Président, on ne les a vus
ni dans le budget ni dans les engagements électoraux.
J'ai ici un autre journal, La Feuille d'érable, du 25 mars 1981.
Il y a une photo ici du ministre de l'Environnement, M. Léger, du
député d'Arthabaska et du ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Un engagement du Parti
québécois: programme d'aide aux éleveurs pour la
protection de l'environnement. Je cite: "Le Parti québécois
s'engage, dans ce second mandat, à aider financièrement les
éleveurs du Québec pour l'installation, sur leur ferme, de
l'équipement nécessaire pour prévenir la pollution des
cours d'eau créée par les productions animales. C'est ce qu'ont
déclaré samedi dernier M. Marcel Léger et M. Jean Garon,
respectivement ministre de l'Environnement et ministre de l'Agriculture." Je
n'irai pas plus loin dans ma citation.
Ne pensez-vous pas que c'est abuser de la crédibilité des
gens? Ce que je déplore, c'est que vous n'ayez pas le même
langage, messieurs du gouvernement, en temps de campagne électorale et
en temps de travaux parlementaires, une fois les élections
passées. Ayez donc un peu de cohérence. Si, en parlant de ce
sujet d'aide à la dépollution agricole, le gouvernement
reconnaît qu'il doit aider les municipalités - les programmes
varient de 75% à 90% de subvention - s'il reconnaît qu'il doit
aider la grande entreprise, les usines de papier, etc., par des programmes
généreux de dépollution, quand arrive le temps de la
dépollution en agriculture ou quand il est question de la protection de
l'environnement, alors qu'avant les élections, on a fait miroiter mer et
monde, pourquoi, après les élections, n'en entend-on plus
parler?
Il faut être prudent, il faut faire attention, il ne faut pas
faire des investissements prématurés chez les agriculteurs. Le
ministre de l'Environnement, comme je l'ai cité au début, parlait
de l'or brun. On devait faire plus d'argent avec le purin qu'avec le porc.
Où sont rendus tous ces voeux pieux? Où sont les
réalisations? Quand on arrive devant la réalité, elle est
dure. Les agriculteurs vous ont écoutés, ils ont
été impressionnés par vos propos parce que vous avez
été des beaux parleurs; ils ont été
impressionnés par votre documentation, vous êtes des
spécialistes de la publicité et de la propagande. Quand arrive un
problème concret et qu'on est acculé au problème, il n'y a
plus rien.
Je pense que l'État a son rôle à jouer, que
l'agriculteur a son rôle à jouer - je l'ai toujours dit et je le
répéterai toujours -mais pas seul, parce qu'il n'en est pas
capable, surtout si on lui impose, comme je le disais tantôt, un
règlement Cadillac, alors qu'on pourrait très bien faire la
même chose avec un règlement moins onéreux tout en
étant aussi sécuritaire pour la protection de
l'environnement.
Je voudrais vous parler également de la
désobéissance civile. Tout à l'heure, au début de
son allocution, le ministre disait: J'espère que le député
de Beauce-Sud n'incitera pas ou, en tout cas, ne sera pas d'accord avec la
désobéissance civile. J'ai toujours demandé qu'on respecte
les lois et les règlements. Quand est arrivée la loi 111, que
nous trouvions trop dure, trop sévère, nous avons voté
contre, nous l'avons dénoncée, mais, une fois qu'elle a
été adoptée par l'institution parlementaire
légitime, nous avons dit aux enseignants, aux fonctionnaires: Nous vous
demandons de la respecter. Notre parti n'a jamais encouragé la
désobéissance civile.
Mais regardez donc ce que faisaient les députés du Parti
québécois dans l'Opposition quand il y avait des grévistes
illégaux à la porte du parlement. Ils se lançaient dans
leurs bras en disant: Ne lâchez pas, les gars, tenez, vous allez gagner
et on va vous appuyer. C'était de l'incitation à la
désobéissance civile.
Nous, nous allons prendre nos responsabilités, mais je crois que
c'est mon devoir, par exemple, d'attirer l'attention du ministre parce que,
écoutez, je pense qu'il s'engage dans un processus de durcissement. Je
ne peux pas croire qu'il n'y a pas moyen de négocier, qu'il n'y a pas
moyen de trouver une solution. Je remarque une chose. Les ministres de
l'Environnement, tant l'ancien ministre que le ministre actuel, ont toujours
semblé d'une imperméabilité parfaite, d'une
étanchéité dix à la moins vingt, j'imagine, plus
que dix à la moins sept, en tout cas. Plus cela change, plus c'est
pareil. Et les agriculteurs, eux, devant cette violence qu'on leur inflige...
La violence, vous savez, ce n'est pas juste la lapidation ou le fouet. C'est
également la violence intellectuelle, la violence morale qui fait
souvent plus mal que la violence physique. Votre règlement, votre
attitude d'imperméabilité, c'est un appel à la
violence.
L'année passée, je vous dis, j'ai rencontré 800
agriculteurs et c'était le sujet partout: l'Environnement, on a
l'Environnement sur le dos. Quelqu'un disait: On a eu une lettre, les
inspecteurs vont venir. D'autres disaient: Ils sont venus la semaine
passée. Franchement, je n'aurais pas été
étonné - et je ne le souhaite pas, je le déplore
grandement - s'il était arrivé des actes de violence physique. Je
demande aux agriculteurs de ne pas se livrer à la violence physique.
Mais, vous savez, à un moment donné, ces gens sont rendus
à bout. Il va falloir que le ministre de l'Environnement -un rural qui
connaît bien les problèmes et qui, dans son comté, a
beaucoup d'agriculteurs - soit plus perméable. Je me demande si ce n'est
pas justement l'environnement du ministre qui serait le problème. Quand
je parle de l'environnement du ministre, je pense qu'il y a des inconditionnels
du béton.
Je voudrais dire un mot sur la procédure, M. le Président.
Vous savez, il y a des choses qui ne vont pas bien. Probablement que le
ministre n'est pas au courant de tout. En tout cas, je vais lui donner quelques
exemples pratiques. Supposons qu'un agriculteur décide de refaire son
étable, non pas la refaire complètement, mais faire des
réparations pour ajouter quelques places. Il téléphone au
bureau régional de l'Environnement. On lui dit: Tu peux faire cela. J'ai
eu un cas pratique. Tu peux le faire, pas besoin de permis. Tu ne changes pas
les dimensions de ta bâtisse, pas de problème. L'individu fait les
travaux et demande un prêt agricole pour le financement de ces travaux.
Une fois que tout est fini, le déboursé du prêt ne peut pas
se faire parce que là arrive un avis de l'Environnement disant:
Monsieur, vous n'avez pas respecté nos normes. Les gens
prétendent que, quand ils font un appel téléphonique aux
services gouvernementaux et qu'on leur dit: Vous pouvez commencer vos travaux,
pas de problème, c'est la vérité. Je ne dis pas que le
fonctionnaire qui a répondu était mal intentionné, cela ne
serait pas ma pensée du tout.
Des fois, quand une personne se fait répondre: Vous pouvez faire
vos travaux, il n'y a pas de problème, après que les travaux sont
faits, le déboursé du prêt agricole ne peut pas se
réaliser parce qu'elle n'a pas son certificat de l'Environnement.
L'Environnement dit: Vous n'avez pas respecté nos normes. Voyez-vous les
problèmes considérables que cela représente?
Également, M. le Président, supposons qu'il arrive un incendie
dans une grange, une étable, comme cela arrive souvent. Vous savez, nos
traditions de corvée dans le Québec, cela existe encore. Il ne
faudrait pas finir par les tuer complètement. Et si cela n'existait pas,
nous aurions des agriculteurs qui, après un sinistre, ne pourraient pas
se rebâtir. Depuis un an, j'ai eu l'occasion à deux reprises de
voir des corvées qui ne pouvaient pas se faire parce que l'individu ne
savait pas s'il pouvait rebâtir ou non. L'Environnement ne voulait pas
lui dire... C'était à l'étude. Et vous savez qu'une
corvée, c'est spontané, c'est immédiatement. Supposons que
la grange brûle le mardi, normalement, le mercredi et le jeudi, on
déblaie les lieux, on nettoie cela. Vendredi, on recommence et, le
dimanche ou le lundi, la grange est levée. Chacun va couper du bois,
fait scier cela et l'amène sur place. Vous pouvez avoir 100 ou 150
ouvriers bénévoles sur le chantier. Je l'ai encore vécu
dans ma région le 29 décembre. Mais quand vous êtes
acculé au pied du mur - l'agriculteur ne sait pas, il n'a pas son
autorisation de l'Environnement - le temps passe, la ferveur diminue et,
finalement, on empêche l'aide considérable dont pourrait
bénéficier cet agriculteur. C'est très important, au moins
dans notre région, et je sais qu'ailleurs, au Québec, c'est
important également.
Le grief que je ferais, je le fais bien amicalement. Je n'ai pas de
blâmes à distribuer à gauche et à droite, mais je
voudrais que la procédure à ce ministère soit assouplie ou
accélérée. Il y a un inspecteur dans ma région, pas
directement dans mon comté, mais dans un comté voisin. Pour tout
le comté, on m'a dit qu'il y avait un inspecteur et il n'a pas de
secrétaire. Pauvre
inspecteur! Que voulez-vous qu'il fasse? On téléphone
à son bureau. Cela ne répond pas. Il n'est pas là et il
n'a pas de secrétaire. Il est sur le terrain. Quand voulez-vous le
rejoindre? Il n'y a pas de services qui soient satisfaisants. Probablement que
le ministre n'est pas au courant de ces détails. Je ne lui en fais pas
grief. C'est très possible, mais je dis qu'il va falloir que des mesures
soient prises pour accélérer les choses et, également,
diminuer la procédurite.
Lorsqu'un individu a besoin d'un certificat de l'Environnement, surtout
pour des choses plutôt secondaires - prenons le cas d'un incendie,
j'imagine qu'il y a des droits acquis, on peut plus facilement agir dans ce
temps-là - je conçois mal que l'on retarde indûment, pour
toutes sortes de raisons d'ordre administratif... J'imagine qu'il devrait y
avoir une équipe ou quelques individus à qui, dans les cas
faciles où il n'y a pas de problème majeur qui
s'élève, on peut s'adresser, une personne au cabinet du ministre
ou des services administratifs, pour obtenir un permis ou un certificat
d'autorisation dans les 24 heures ou les 48 heures.
En région, c'est bien beau de dire: On décentralise, on
régionalise; c'est très louable, c'est même
nécessaire, M. le Président, mais il faudrait encore que ces
pauvres inspecteurs ou fonctionnaires en région soient un peu
équipés, qu'ils aient au moins quelqu'un pour répondre au
téléphone ou un répondeur automatique afin que
l'agriculteur, lorsqu'il a affaire à un individu, sache quand il peut
être reçu. Je voudrais vous dire que c'est une chose très
importante dans la procédure administrative du ministère et c'est
une chose qui, à mon sens, d'après ma connaissance personnelle,
fait défaut dans le moment.
Ce qui transpire de tout cela, c'est un peu la vision autoritaire du
gouvernement, un gouvernement qui se prend pour une providence, qui fait tout
pour nous, qui ne parle que par décret et par subtilité,
décret pour les fonctionnaires, décret pour les MR.C. On ne vous
dira pas comment cela marche dans votre région. Je ne le sais pas. Dans
la mienne, en tout cas, les gens de Saint-Prosper et de Saint-Zacharie
voulaient adhérer à la MRC Beauce-Sartigan. On
décrète: Vous allez, malgré votre voeu, adhérer
à Lac-Etchemin. Des décrets dans le domaine du zonage agricole...
Je n'en ferai pas la nomenclature, parce que ce n'est pas le but de l'exercice
et il y en aurait trop.
Ce que je déplore, c'est cette mentalité d'autoritarisme
du gouvernement qui est le seul à avoir le pas, qui est le seul à
avoir raison. Il me semble qu'on vit dans une société de
consensus. Il faudrait que le gouvernement soit plus perméable, pas
seulement dans ses discours et sa documentation. Dans les discours, dans les
promesses électorales, dans la documentation, Nourrir le Québec,
Bâtir le Québec et tous les communiqués de presse
possibles, on n'a pas un mot à dire et ils l'ont, l'affaire. Mais quand
on arrive dans la vie de tous les jours... (12 h 15)
Tout à l'heure, le ministre semblait un peu étonné
quand je disais qu'il y avait à peu près la moitié des
fermes qui étaient, non pas sur le bord de la faillite, mais sur le
point de fermer. Il y a une différence entre les deux. L'individu, si on
lui impose des investissements de 40 000 $, va fermer son entreprise au lieu de
faire faillite.
Savez-vous ce qui a inquiété les Beaucerons? C'est
justement le premier discours du ministre de l'Environnement après son
assermentation. Il disait, je cite Beauce nouvelle du 26 octobre 1982:
"Prononçant officiellement son premier discours sur l'environnement, le
nouveau ministre, M. Adrien Ouellette, a déclaré que son
ministère interviendrait sous peu auprès des cas très
graves et graves de pollution agricole." Qu'il y ait une intervention, je n'ai
rien contre, quand c'est grave et très grave. "M. Ouellette a
souligné que, sur 1881 cas de producteurs agricoles inventoriés
par son ministère dans le bassin de la Chaudière, 215 sont
considérés comme très graves, 144 comme graves, 472 comme
moyens et 1000 comme mineurs. Seulement 50 ne présentent aucun
problème." S'il y en a 50 sur 1881 qui ne présentent aucun
problème, cela veut dire qu'il n'y en a pas beaucoup.
M. le Président, vous me faites signe que mon temps
achève. Je voudrais demander, en concluant, au ministre s'il pourrait
nous dire - tout à l'heure, on a parlé des normes de l'Ontario,
le ministre dit qu'elles ne sont pas assez sévères, l'UPA dit
qu'elles sont correctes et, d'après nos renseignements, le ministre de
l'Agriculture les trouverait acceptables - s'il y a un consensus
là-dessus entre son ministère et le ministère de
l'Agriculture. Est-ce que le ministre de l'Agriculture accepte les mêmes
points que ceux que le ministre de l'Environnement vient de nous servir ce
matin? Autrement dit, que pense le ministre de l'Agriculture des normes de
l'Ontario? D'après nos renseignements, le ministre de l'Agriculture les
accepterait.
Deuxièmement, quel est le consensus qui s'établit entre le
ministre de l'Environnement et le ministre de l'Agriculture?
Troisièmement, tout à l'heure, le ministre, parlant du
nouveau règlement, nous a dit qu'hier, il y a eu une rencontre avec les
gens de l'UPA - je conclus - et il a fait allusion au nouveau règlement.
Ce nouveau règlement, j'aimerais le connaître, j'aimerais savoir
ce que c'est. Je voudrais savoir si l'UPA y adhère totalement ou s'il y
a des
points en litige avec l'UPA et lesquels, sur ce nouveau règlement
auquel il a fait allusion tout à l'heure. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Beauce-Sud. M. le ministre, avant de vous laisser la
parole, je voudrais juste vous dire que vous avez du temps à
récupérer. Il y a deux de vos collègues qui ont aussi
demandé la parole. Il est 12 h 19. Vous pourrez vous partager les vingt
minutes jusqu'à 12 h 40, parce que, actuellement, vous avez pris 87
minutes et le parti ministériel a pris 50 minutes. Donc, à 12 h
40, nous entamerons la réplique avec le député de
Beauce-Sud, mais, d'ici 12 h 40, si vous voulez vous partager le temps, M. le
député de Saint-Hyacinthe et M. le député
d'Arthabaska...
M. le ministre.
M. Mathieu: M. le Président... Le Président (M.
Gagnon): Oui?
M. Mathieu: ...si vous le permettez, les dix minutes qui me
restent pour tout à l'heure, je voudrais les partager avec mon
collègue d'Orford, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le ministre.
M. Adrien OueUette
M. Ouellette: Je vous remercie, M. le Président. Ce que
vous venez de dire démontre clairement que l'Opposition a tort
lorsqu'elle dit que le gouvernement parle trop, écrit trop et n'agit pas
assez, puisqu'on a 55 minutes et elle, 87 minutes, si j'ai bien compris. Donc,
ici, c'est l'Opposition qui parle.
Je veux relever, avant d'entreprendre le contenu des propositions dans
les négociations du règlement, un certain nombre de choses.
Premièrement, je suis heureux que le député de Beauce-Sud
ait cité des extraits du journal de son comté quant à mon
premier discours en Beauce, parce que je n'avais pas sous les yeux les chiffres
que j'avais mentionnés, chiffres qui découlent de l'inventaire de
tout le monde agricole dans la vallée de la Chaudière, dans le
cadre du programme d'assainissement des eaux. Quand il dit que 50% des
agriculteurs sont menacés de faillite, si on applique le
règlement, regardez ce que cela donne dans la vallée de la
Chaudière, qui est une vallée très agricole, très
importante au niveau agricole. Il y a 1881 agriculteurs, dont 215 cas
très graves. Ce sont des déversements directs au cours d'eau. Il
y a 144 cas graves. Ce sont des déversements à certaines
périodes de l'année, faute de quantité suffisante de lieux
d'entreposage. Pour les 400, je n'ai pas très bien saisi. Il y a 1000
cas mineurs. Quand on parle de cas mineurs, cela n'entraîne pas des
dépenses de 40 000 $. Ce sont des cas mineurs; donc, il n'y a pas de
quoi faire fermer une ferme pour corriger des cas mineurs. Il y a 50 cas
excellents. Donc, déjà, on a 1050 cas, au minimum, sur 1881 cas;
il reste donc moins de la moitié où il y a des interventions
importantes à faire. En fait, il y a peut-être 300 cas où
il faudra intervenir. C'est loin de 50% par rapport à 1881 agriculteurs.
Donc, premier point, je pense que cela confirme ce que je disais tout à
l'heure, à toutes fins utiles, c'est qu'il y avait 15% de cas graves
dans la région de la Chaudière. C'est loin des 50%.
Promesses électorales. Mon collègue de Beauce-Sud a
rappelé que, durant la campagne électorale de 1981, le
gouvernement ou le Parti québécois avait mis dans son programme
une promesse de mise en place d'un programme d'aide aux agriculteurs pour la
construction de plates-formes de béton. Nous ne l'avons jamais
nié. Je l'ai même répété à plusieurs
reprises, depuis que je suis ministre de l'Environnement, pour inciter les
agriculteurs à faire des pressions sur mon collègue de
l'Agriculture afin qu'il ait l'appui nécessaire pour obtenir la mise en
place de ce programme. Ce ne sont pas que des promesses électorales. Il
faut bien se rappeler que, lorsqu'on fait une campagne électorale en vue
d'obtenir un mandat pour quatre ans, les promesses qu'on fait ou les
engagements qu'on prend ne vont pas se réaliser dans le premier mois
après la réélection. Nous avons quatre ans pour
réaliser cela.
Une voix: Cela été annoncé en 1978.
M. Ouellette: II y en a deux qui sont acceptés dont un qui
ne doit pas compter. Je vais vous dire pourquoi il ne doit pas compter. Nous
aurions eu tort, il y a dix mois, de mettre en place un programme de
subventions pour les plates-formes à fumier, sachant que nous allions
revoir le règlement qui exigeait ces plates-formes. Autrement dit,
comment aurions-nous pu subventionner un agriculteur pour qu'il respecte le
règlement, sachant que ce règlement allait être
changé? Il faut être un peu cohérent dans tout cela.
Lorsque notre règlement sera en vigueur, nous pourrons penser - et je
prie mon collègue de l'Agriculture d'aller de l'avant avec cela, il aura
mon appui au Conseil des ministres et je suis sûr qu'il aura celui du
député de Beauce-Sud et celui de l'UPA - à réaliser
cet engagement électoral dans le cadre de l'application du nouveau
règlement. Deux points très importants que je devais relever.
Troisième point important. Mon collègue de Beauce-Sud
disait: En cas d'incendie - il faisait référence aux
corvées; je connais cela, les corvées - il se trouve qu'on n'a
pratiquement plus le droit de reconstruire sur les fondations. Non, ce n'est
pas vrai. Si un bâtiment agricole brûle, on a des droits acquis,
comme il le disait tout à l'heure, et on peut reconstruire sur les lieux
mêmes, que ce soit par corvée ou par d'autres moyens, sans aucune
exigence additionnelle...
M. Mathieu: ...
M. Ouellette: ...dans la mesure où le producteur s'engage
à continuer le type de production qu'il avait. Il peut même
augmenter de 25 le nombre d'unités animales sans avoir besoin du permis
de l'Environnement. Donc, c'était un peu charrié puisque le
règlement, même l'ancien, n'allait pas jusque-là.
Évidemment, si le producteur dont les bâtiments ont
été incendiés en profite pour doubler ses investissements
ou changer de production, là, il devient, aux yeux du gouvernement, un
nouveau producteur. Il doit se soumettre au règlement,
c'est-à-dire obtenir les autorisations.
M. Mathieu: M. le Président, je m'excuse...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Beauce-Sud, sur une question...
M. Mathieu: ...d'interrompre le ministre, mais je voudrais
élucider ce point. L'agriculteur, après que sa grange est
incendiée, communique avec vos services. Là, on lui dit qu'il ne
faut rien faire pour le moment, tant que le ministère n'aura pas
donné son accord.
Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le
député de Beauce-Sud, vous aurez votre droit de réplique.
Il vous reste encore dix minutes. On va permettre au ministre de continuer son
exposé.
M. Mathieu: En tout cas, ce sont les expériences que j'ai
eues.
M. Ouellette: Oui, mais c'est une incompréhension qui est
survenue quelque part. Je répète que, si le bâtiment est
incendié et si l'agriculteur veut reconstruire la même superficie
de plancher dans le but d'avoir la même production avec le même
nombre d'unités animales - il peut même les augmenter de 25 - il
n'a pas besoin de l'autorisation du ministère.
Le député de Beauce-Sud me demande de lui livrer
l'essentiel des modifications qui seront apportées au règlement.
Je dois vous dire - et cela répond à une de ses questions - qu'il
n'y a pas accord sur tous les points, à ce stade-ci. J'ai
mentionné tout à l'heure que nous nous étions
accordé une période de dix jours additionnelle au cours de
laquelle le ministre de l'Environnement va discuter avec l'UPA pour en arriver
à un consensus sur l'ensemble des points. Je voudrais quand même
lui donner l'essentiel des ententes intervenues de même que du point en
litige qui porte essentiellement sur l'entreposage des fumiers liquide et
solide.
Je vous donne ce que contenait l'ancien règlement et les
améliorations que nous proposons. En ce qui a trait au fumier liquide,
il faut se rappeler qu'il y en a deux types; celui du porc, on doit le traiter
différemment du fumier liquide de bovin, compte tenu de la nature
même du purin qui est un produit extrêmement dangereux - il faut
s'entendre - c'est un produit plus dangereux que le fumier liquide de bovin.
L'ancien règlement exigeait un réservoir étanche ayant
comme norme dix à la moins sept, ce qui équivalait à des
fosses en béton. C'était l'ancien règlement. Donc, on n'en
sortait pas, on arrivait toujours à la notion du béton. On
exigeait aussi de l'expertise pour s'assurer que les travaux étaient
faits convenablement.
À la demande de l'UPA, qui nous dit que ça coûte
trop cher et que ce n'est pas nécessairement parfaitement efficace,
ça peut toujours fendre, une fosse en béton, selon le drainage,
le gel et les nappes d'eau phréatiques environnantes, nous proposons un
réservoir en sol - c'est une des façons - un réservoir en
acier, si on le désire, ou un réservoir avec membrane. On se
souvient que, selon la nouvelle définition, il s'agit là de
pompage. Il n'est pas question que des tracteurs s'aventurent dans ce genre de
fosse en sol; donc, par pompage, on pourrait accepter qu'une membrane serve de
couche imperméable. On propose aussi tout autre emmagasinement
démontrant une étanchéité suffisante. On a ouvert
beaucoup la machine. Le coefficient de perméabilité ne doit pas
être inférieur à dix à la moins six. C'est là
un des points d'accrochage parce que l'UPA souhaiterait que ce soit dix
à la moins quatre. On a dix jours pour discuter de tout ça et en
arriver à un consensus. Sinon, forcément, nous devrons prendre
des décisions.
La discussion porte en particulier sur le colmatage. Nous sommes
conscients que le fumier de purin liquide comporte suffisamment
d'ingrédients solides pour assurer un colmatage rapide. Dans le cas du
purin de porc, ce n'est pas le même phénomène.
L'expérience qui est en cours actuellement dans la région de
Québec démontre qu'après dix jours, le purin traverse
littéralement, sans ambages, 30 centimètres de sable
naturellement compacté, non pas du sable qui vient d'être
déplacé. Nous avons la
conviction à ce stade-ci que ce ne serait pas là une
garantie suffisante de protection de la nappe d'eau phréatique. C'est
pourquoi nous maintenons dix à la moins six.
En ce qui regarde le fumier liquide de bovin, dans l'ancien
règlement, c'était exactement la même chose que le fumier
liquide de porc, c'est-à-dire le purin. Nous avons apporté des
modifications à cela. On n'exige plus un coefficient de
perméabilité de dix à la moins six, comme c'est le cas
pour le porc. On accepte des lagunes dans le terrain sablonneux, mais avec un
minimum de sol argileux. Nous allons jusqu'à offrir 90% de sable, 8%
d'argile et 2% de limon. C'est loin d'être une couche de glaise comme on
en parlait il y a quelque temps. Étant donné que c'est du purin
de bovin, donc liquide, mais qu'il peut colmater avec cette proportion de
sable, d'argile et de limon, nous avons la conviction que l'environnement
serait protégé.
M. Mathieu: Le coefficient?
M. Ouellette: C'est dix à la moins six.
M. Mathieu: Aussi.
M. Ouellette: C'est donc par rapport à la moins sept. On
m'indique que ce n'est même pas dix à la moins six, on abandonne
l'idée du coefficient pour passer à la composition du sol,
c'est-à-dire sable, argile et limon. On est conscients que les
conditions de terrain exigées se retrouvent à peu près
partout au Québec. En somme, de l'argile, il y en a un peu partout et,
ce que nous exigeons, on peut le retrouver dans la nature.
Nous demandons un système de drainage de conception simple pour
nous assurer que les conditions de colmatage ne nous font pas défaut. En
d'autres termes, nous demandons qu'un système de drainage soit
placé en dessous du fond de cette fosse en sol, ce qui permettrait au
producteur agricole de vérifier si les eaux traversent, d'abord, et dans
quel état elles sont après être traversées, de telle
sorte que, s'il y a pollution, il faudra apporter des corrections. Cela nous
paraît absolument essentiel d'avoir cet élément de
vérification pour nous assurer qu'il n'y a pas d'infiltration de la
nappe d'eau phréatique. Étant donné que ça se passe
sous le sol, on n'est pas toujours en mesure de vérifier. Nous exigeons
une expertise minimale. Nous sommes prêts à offrir des plans,
peut-être dix ou quinze modèles différents, en demandant
à l'agriculteur de faire son choix. Mais nous voulons que des gens
surveillent les travaux pour s'assurer que les plans ont été
respectés. (12 h 30)
Alors, on est moins exigeant sur la perméabilité, tout en
s'assurant d'un système sécuritaire efficace, et je fais mention
ici des drains. Les agriculteurs peuvent facilement construire eux-mêmes
ces fosses avec un minimum d'expertise acceptable. C'est une
sécurité pour les investissements et on n'aura pas besoin de
recommencer les travaux dans cinq ans. Autrement dit, on pourrait leur dire:
Faites cela à votre goût et revenir un an après pour leur
dire: Ce que vous avez fait l'an dernier, ce n'est plus bon, il faut
recommencer. C'est pourquoi on veut avoir une certaine surveillance pour
s'assurer que c'est bien fait dès la première fois.
Concernant la localisation, dans le cas des établissements
existants, on maintient que le type peut rester là où il est sans
lui poser de conditions additionnelles. Dans le cas des nouveaux
établissements, on exige 100 mètres des points d'eau; c'est
là un certain pas qu'on a fait dans le sens de la demande de l'UPA.
Pour ce qui regarde les fumiers solides, selon le règlement
actuel, cela doit être entreposé sur une surface étanche
qui retient le purin. Autrement dit, on exige une surface parfaitement
étanche et on arrivait presque invariablement à la mise en place
de plates-formes de béton. Alors, on disait: Ne s'applique pas pour
moins de 35 unités animales - ce qui me faisait dire, tout à
l'heure, que la moitié des producteurs agricoles au Québec
n'étaient pas soumis au règlement parce qu'ils avaient moins de
35 unités animales - situées à 30 mètres et plus
d'un cours d'eau drainant plus de deux exploitations, et à moins de 50
unités animales situées à 300 mètres et plus du
cours d'eau drainant plus de deux exploitations.
Dans ces nomenclatures, j'ai changé des choses. Le
règlement ne s'appliquera pas à moins de 35 unités
animales situées à 30 mètres - il n'y a pas eu de
changement - et plus d'un cours d'eau drainant plus de trois exploitations.
Alors, on augmente de un exploitant le cours d'eau visé. Cela
représente passablement de cours d'eau au Québec. Cela va
soulager beaucoup de producteurs. Au paragraphe b: moins de 50 unités
animales situées à 150 mètres et plus d'un cours d'eau.
Tout à l'heure, c'était 300 mètres. On a réduit de
moitié l'exigence quant à la distance. On la réduit donc
à 150 mètres et plus d'un cours d'eau drainant plus de trois
exploitants. On en a ajouté un. Là encore, cela a beaucoup de
répercussions par rapport à la réalité
géographique au Québec.
Pour les exploitations existantes qui ne peuvent pas respecter ces
conditions d'entreposage, on peut reproduire tout cela, si vous voulez,
à la même place. Autrement dit, on ne permettra pas à
quelqu'un de s'approcher des cours d'eau, mais on lui permettrait de se
réinstaller au même
endroit. Il n'y a pas d'exigence de recul, mais il n'y a pas, non plus,
de permission d'avancement en direction des cours d'eau.
Nous acceptons maintenant l'amas au champ, toujours à
l'intérieur de certaines normes. Pour les exploitations de plus de 50
unités animales, le ministère pourra aussi, dans certaines
conditions favorables, accepter l'amas au champ. Autrement dit, il y avait une
limite; moins de 35 unités animales, on l'acceptait; moins de 50
unités animales, on l'acceptait; et on pourra donner un peu plus de
permissivité, cas par cas, avec une autorisation spéciale lorsque
les conditions du terrain se prêteront à l'entreposage de ces
fumiers dans le respect, bien sûr, de l'environnement comme tel.
En ce qui a trait au lieu d'entreposage, on est d'accord que le fumier
solide cause moins de problèmes que le fumier liquide. Tout le monde est
d'accord là-dessus; c'est tellement évident, de toute
façon. Il faut, cependant, être prudent avec les eaux
contaminées et le purin qui s'en échappe. Une surface
étanche est nécessaire, mais le béton ne sera pas
obligatoire. Autrement dit, on revient à ce que je mentionnais tout
à l'heure. Il y a moyen de remplacer le béton par d'autres moyens
moins dispendieux et nous sommes ouverts à cet égard.
Un muret de terre doit nous permettre de capter les eaux
contaminées que l'on devra canaliser dans un réservoir
sécuritaire, qui pourrait être en terre lui aussi, avec les
mêmes conditions de sol que les fumiers liquides de bovin. Autrement dit,
il y a des eaux qui proviennent de ces amas et nous voulons traiter ces
eaux-là au même titre que nous traitons le fumier liquide de
bovin. Cela nous paraît être absolument logique, de toute
façon. Il faut éviter des systèmes trop
sophistiqués exigeant une trop grande expertise. Nous sommes d'accord
avec l'UPA sur ce point.
Nous proposons des installations satisfaisantes, faciles à
construire, peu dispendieuses. Ce travail sera exécuté d'ici
quelques jours en collaboration avec le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et l'UPA. Autrement dit, il y a des choses
à détailler dans cela et nous avons dix jours pour nous entendre.
Mais les modifications ont pu porter aussi sur d'autres points du
règlement. Il y avait la question du moratoire, qu'on retrouve dans les
vallées de la Chaudière, Yamaska et L'Assomption, en ce qui a
trait aux productions sur fumier liquide. Le moratoire sera levé pour un
producteur sur fumier liquide qui est propriétaire des surfaces requises
d'épandage. Donc, quelqu'un qui dispose du sol apte à recevoir
l'épandage ne sera plus limité par les 50% qu'on retrouvait dans
l'ancien règlement et pourra, lui, échapper au moratoire et
augmenter sa production sur fumier liquide.
La définition des fumiers liquides et solides ne prête plus
à interprétation. Je l'ai expliqué tout à l'heure,
le fumier liquide se ramasse par pompage; le fumier solide se ramasse par
benne. Donc, il n'y a plus de question, à savoir: Est-ce c'est
moitié un, moitié l'autre? C'est liquide ou c'est solide. Cela va
clarifier les choses. Toute l'application du règlement va s'en trouver
améliorée.
Les normes d'épandage seront établies en fonction des
besoins de culture. Donc, c'est plus réaliste que la vieille norme qui
disait: Vous pouvez épandre jusqu'à trois dixièmes
d'hectare par unité animale. C'était assez rigide comme norme.
L'UPA tient à ce qu'on maintienne cet élément, mais nous
voulons l'accompagner d'une autre donnée qui me paraît, sur le
plan agricole, beaucoup plus intéressante, et c'est le plan agronomique.
Il est toujours possible qu'un producteur de porc, par exemple, qui dispose
d'une grande superficie, mais insuffisante pour le nombre de ses porcs,
exagère dans l'épandage de son purin sur sa terre. Pour
éviter cela, nous les invitons à se faire faire un plan
agronomique qui tiendra compte de la culture et de la nature du sol de
façon qu'on n'abuse pas et qu'on ne risque pas de contaminer les eaux
avoisinantes et qu'on ne vienne pas, non plus, brûler le sol. Nous avons
donc ajouté cette dimension du respect des plans agronomiques.
On assure maintenant que les permis du ministère pourront
être valables jusqu'à 36 mois après l'interruption.
Autrefois, c'était 18 mois. Si la terre, qui avait été
temporairement abandonnée pour une raison ou pour une autre,
était reprise au bout de 18 mois, il fallait obtenir un permis de
l'Environnement. Nous avons étendu ces 18 mois à 36 mois; on a
donc doublé le délai, ce qui va régler passablement de
cas.
Les fossés de chemin ne sont plus une contrainte si la
topographie du terrain ne favorise pas un écoulement en cette direction.
Autrement dit, dans l'ancien règlement, un fossé était
considéré comme un cours d'eau et c'était une limite qu'il
fallait respecter aveuglément. Maintenant, on dit que, si le chemin,
étant plus haut que la terre cultivable, fait en sorte que l'eau
contaminée ne peut aller vers ce ruisseau, on ne considère plus
du tout ce ruisseau comme étant une contrainte applicable au
règlement. Cela aussi, ça devrait régler passablement de
problèmes.
L'amas de fumier au champ peut maintenant être pratiqué
même si l'élevage n'est pas fait sur litière, contrairement
à l'ancien règlement. Même pour 50 unités animales
et plus, cette pratique pourra être acceptée à certaines
conditions. Donc, au-delà de 50, on se réserve le droit de
regarder cela cas par cas et de donner des autorisations dans la mesure
où nous aurons
l'assurance que l'environnement ne sera pas mis en danger.
Au niveau de l'épandage près des cours d'eau
protégés, l'ancienne limite était de 10 mètres;
nous l'avons rétrécie à 5 mètres, étant
conscients que les agriculteurs peuvent le faire de façon suffisamment
précise sans mettre en péril les cours d'eau par les
épandages de fumier.
C'est donc l'essentiel - une partie reste à discuter, l'autre
partie a fait l'objet d'une entente - des modifications qui ont
été apportées au règlement.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre.
Avant de vous laisser la parole, M. le député d'Orford, je
vous demanderais de respecter le temps accordé d'une façon
très précise pour qu'à une heure moins quelques secondes
on puisse mettre fin au débat.
M. le député d'Orford.
Conclusion M. Georges Vaillancourt
M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, je n'utiliserai
que deux ou trois minutes étant donné que la majorité des
questions que j'avais à poser au ministre l'ont été par
mon collègue de Beauce-Sud et que le ministre y a répondu assez
clairement. J'ai constaté que le débat que nous avons tenu ce
matin n'est pas perdu. Je crois que cela a permis d'accélérer
l'étude du dossier en vue d'apporter des amendements au règlement
de l'Environnement. Ce que je déplore, c'est que certaines anomalies
vont certainement demeurer encore à l'intérieur du
règlement. Lorsqu'un père de famille vend sa ferme à son
fils, je crois que, si la ferme qui est vendue au fils ne répond pas au
règlement de l'Environnement, on va exiger du fils des dépenses
onéreuses pour organiser son exploitation conformément au
règlement de l'Environnement. Je pense que, lorsqu'un père vend
sa ferme à un fils, on ne devrait pas exiger des dépenses
additionnelles. On devrait le laisser se tourner de bord afin qu'il puisse se
ramasser quelques dollars pour arriver à faire les dépenses qu'on
exige de lui dès l'acquisition de la ferme de son père.
Maintenant que le ministre nous a annoncé plusieurs amendements
qui semblent amoindrir de beaucoup la réglementation qui existait
auparavant, j'aimerais savoir du ministre, dans son intervention, quand il
s'attend à pouvoir déposer ce règlement pour qu'il soit
mis en application. Je reviens encore à ce qui a trait aux subventions
concernant les exigences faites à nos agriculteurs. Je pense que le
ministre devrait essayer d'avoir les crédits nécessaires et de
mettre un programme de subventions à la disposition des agriculteurs.
Sur 49 000 agriculteurs, on compte 24 000 producteurs de lait, 6000 producteurs
de porc, 3000 producteurs de veau et de boeuf de boucherie, 100 producteurs de
divers types de volaille, 350 producteurs d'oeufs. Sur les 49 000 agriculteurs,
environ 39 500 exploitations ont besoin de se prévaloir du
règlement de l'Environnement. Sur ces 35 500 agriculteurs, il y en a
certainement plusieurs milliers qui n'auront pas besoin de subvention,
étant donné que leur ferme est déjà
organisée selon les normes de l'Environnement.
Je demande donc au ministre, s'il a fait faire une étude du
coût des installations, combien il reste d'installations non
équipées de fosses septiques, tel que les normes l'exigent, et
quel en serait le coût total. Il disait tout à l'heure que, les
deux premières années à la suite d'une campagne
électorale, il était impossible d'avoir un système de
subventions. Maintenant que cela fait déjà deux ans, je demande
au ministre quand il va mettre en application la nouvelle réglementation
et les subventions qu'il va accorder à nos agriculteurs.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député d'Orford. M. le député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Oui, M. le Président, tout en respectant mon
temps. Les modifications que le ministre a annoncées tout à
l'heure ressemblent à une étude qui avait été faite
par le Dr Suzel Barrington, de l'Université McGill, concernant la
pénétration du purin. Pourrait-il nous dire s'il s'est
inspiré en grande partie de cette étude ou de cette recherche du
Dr Barrington? Maintenant, M. le Président, j'ai quelques petites
questions, vu que le temps me presse. Je voudrais demander au ministre si
toutes les modifications qu'il a annoncées tout à l'heure ont
reçu l'accord de l'UPA.
M. Ouellette: Je vous dirai tout de suite qu'en ce qui concerne
le Dr Suzel Barrington c'est exactement son projet qui a été
retenu par le ministère de l'Environnement, appuyé par le
ministère de l'Agriculture. Nous sommes même prêts à
faire des modifications à la baisse au projet du Dr Barrington et c'est
ce qui fera l'objet des discussions des dix prochains jours.
Quant à la deuxième question...
Le Président (M. Gagnon): Vous pourrez y répondre
tantôt, si vous me le permettez.
M. Ouellette: Non, j'aimerais y répondre tout de suite,
étant donné que je veux donner la parole à mes
collègues après.
M. Mathieu: Je préférerais cela, moi aussi, M. le
Président.
Le Président (M. Gagnon): D'accord.
M. Mathieu: Les modifications que vous avez annoncées
ont-elles toutes reçu l'accord de l'UPA?
M. Ouellette: Sauf celle qui concerne la norme
d'étanchéité et d'entreposage en sol. Donc, c'est
relié à Suzel Barrington.
M. Mathieu: Si je comprends bien, M. le Président, pour
continuer - je préférerais ce dialogue pour quelques instants,
même si c'est sur mon temps, parce qu'on a des réponses plus
précises - la seule norme qui demeure contentieuse, c'est la norme
d'étanchéité? (12 h 45)
M. Ouellette: C'est cela, dix à la moins six par rapport
à dix à la moins quatre et surtout applicable au purin de
porc.
M. Mathieu: Pour les lagunes en sol.
M. Ouellette: C'est cela, pour les lagunes.
M. Mathieu: Quand le ministre prévoit-il que son
règlement sera en vigueur?
M. Ouellette: Dès que les discussions seront
terminées, c'est-à-dire au maximum dans une dizaine de jours,
j'ai l'intention de le faire publier.
M. Mathieu: En ce qui concerne le fardeau de la preuve, je
voudrais savoir du ministre s'il a l'intention de renverser cela,
c'est-à-dire quand le ministère de l'Environnement arrive chez un
agriculteur, que le ministère fasse la preuve de la
non-conformité de la part du producteur et non pas que le producteur
fasse la preuve qu'il est conforme au règlement.
M. Ouellette: C'est une question très vaste. Il faut
être conscient que, si le gouvernement décide d'assumer le fardeau
de la preuve en tenant compte qu'il y a 38 000 producteurs, cela devient une
tâche absolument inhumaine. Je pense qu'il est possible d'appliquer le
règlement de façon intelligente. On l'a assoupli. On a ouvert des
portes pour permettre aux inspecteurs et au ministère comme tel de
porter des jugements cas par cas. Notre intention n'est pas de l'appliquer
aveuglément dans le but de harceler inutilement les agriculteurs. Je
pense qu'il y a moyen, avec un règlement suffisamment souple et
suffisamment précis à la fois, de faire en sorte qu'on puisse,
cas par cas, dans les cas pénibles, en venir à une entente sans
qu'on ait à faire un fardeau de la preuve qui pourrait nous
entraîner devant les tribunaux. Ce n'est absolument pas notre
objectif.
M. Mathieu: M. le Président, en concluant, je voudrais
vous dire, tout comme mon collègue d'Orford - je tiens, en passant,
à le remercier de son intérêt pour cette chose et pour le
soutien qu'il m'a toujours accordé, de même que mon
collègue de l'autre côté, le député de
Brome-Missisquoi - que je crois que ce débat a été utile,
parce que j'ai l'impression que le débat a provoqué un dialogue
avec l'UPA. Dans le moment, je crois que ce qu'il faut, c'est que les gens se
parlent. Il faut qu'il y ait un dialogue. Tout à l'heure, le ministre a
dit qu'il voulait qu'il y ait des gens qui surveillent les travaux. Cela veut
dire que cela va prendre une expertise et une surveillance. Il a dit: Les
agriculteurs peuvent faire eux-mêmes les travaux, mais sous surveillance.
Dois-je comprendre par là que cela va exiger un certificat de
conformité, de toute manière, signé par un
ingénieur, j'imagine?
M. Ouellette: Cela fait partie des discussions qui auront cours
dans les dix prochains jours, mais il m'apparaît que, idéalement,
on doive responsabiliser un professionnel qui doit émettre un certificat
de conformité, ce qui fera en sorte que le ministère de
l'Environnement aura un peu moins l'air d'un ministère policier, parce
que nous n'avons pas les ressources qui nous permettraient d'examiner
nous-mêmes chacun des travaux. On a demandé au ministère de
l'Agriculture de nous aider avec ses services régionaux. Nous sommes
prêts à faire une partie du chemin, mais nous souhaitons que les
travaux soient sous surveillance professionnnelle quitte à ce que,
éventuellement, un programme d'aide vienne appuyer les agriculteurs et
compenser pour les dépenses qu'on exige d'eux à ce sujet.
M. Mathieu: M. le Président, j'aurais une autre question,
mais peut-être que le ministre ne pourra y répondre aujourd'hui.
Elle concerne la nappe d'eau phréatique à laquelle il a fait
allusion tout à l'heure. Lors de la commission parlementaire du 18
octobre 1978 - cela fait quelques années déjà - le
comité contre la pollution de la rivière des Hurons avait dit
ceci: La nappe d'eau phréatique a tendance à baisser à
cause de la technique du drainage agricole. Il prétendait que, dans 30
ans, on était pour manquer d'eau ici au Québec justement à
cause du drainage qui amène une productivité trop
immédiate. Probablement qu'il ne sera pas en mesure de répondre
ce matin, mais j'aimerais que le ministre fasse les recherches qui s'imposent
pour voir les avantages du drainage - nous les connaissons
tous - et voir s'il n'y aurait pas des inconvénients à
long terme.
Je conclus en disant que je remercie le ministre de sa
disponibilité ce matin, ainsi que l'équipe qui l'entoure. Je
m'aperçois qu'il a bien compris dans quel esprit j'avais engagé
ce débat. Ce n'était pas seulement un débat stérile
que je voulais engager pour qu'il y ait débat, mais je voyais là
un problème majeur, un problème important. Je demande au ministre
d'accorder le soutien technique et les conseils de son ministère aux
agriculteurs dans cette transformation qui s'en vient face à la
protection de l'environnement. Je fais un appel aux agriculteurs de respecter
la loi, afin qu'il n'y ait pas de désobéissance civile, avec
toutes les implications fort néfastes que cela peut comporter, parce
que, quand on s'embarque dans un engrenage, parfois on ne sait pas
jusqu'où cela va aller. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Beauce-Sud.
M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Maurice Dupré
M. Dupré: Merci, M. le Président. Si je suis ici ce
matin, ce n'est certainement pas par hasard, quand on sait que Saint-Hyacinthe
est située dans le bassin de la Yamaska, la rivière la plus
polluée du Québec. Il va sans dire que j'étais d'accord
avec le moratoire que M. Léger avait tenu à cette époque.
La Yamaska est tellement polluée que marcher sur les eaux à
Saint-Hyacinthe, ce n'est même pas un miracle. Il faut être un peu
plus cohérent. On a en même temps une difficulté
d'approvisionnement. Cet après-midi, à Saint-Hyacinthe, nous
allons inaugurer l'usine de filtration qui a coûté 10 000 000 $.
On admet le coût considérable que subissent souvent les
éleveurs pour se dépolluer afin de protéger
l'environnement, on est très conscient de cela. Quand on est en retard
de plus de quinze ans sur les États-Unis et de presque dix ans sur
l'Ontario... Pendant qu'il y avait des ententes
fédérales-provinciales pour se dépolluer, l'Ontario en
profitait. Quand on est dans le purin jusqu'au cou, il est sûr que cela
prend des mesures plus coercitives. Mais, pendant que l'Ontario se
dépolluait, le Parti libéral bâtissait un stade de 1 000
000 000 $. Cela dépend des choix qu'on fait. Nous, nous avons des choix
qui deviennent un peu plus difficiles parce qu'on est en retard et qu'il y a du
rattrapage à faire.
Naturellement, je suis très heureux des nouvelles ententes qui se
dessinent ou, en tout cas, qui viendront dans quelques jours. Je suis
persuadé, pour avoir participé à la rencontre d'hier soir
et avec l'ouverture d'esprit des membres de l'équipe du ministre de
l'Environnement, qu'il va y avoir une solution très rapide. Parfois, ce
sont quelques agriculteurs, comme on l'a dit tantôt, qui ont terni
l'image, parce que c'est une des sources de la pollution de la rivière
Yamaska - il est sûr que ce n'est pas la seule - mais, quand il y a des
productions sans sol comme dans notre coin et des concentrations
d'élevage de cette sorte, il est sûr qu'on est un peu plus
touché.
Enfin, le souhait que je fais est qu'il y ait entente dans les
délais requis, pour la fin de septembre.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Saint-Hyacinthe. M. le ministre, je vous laisse
exactement cinq minutes.
M. Adrien Ouellette
M. Ouellette: Alors, en cinq minutes, M. le Président, je
veux remercier les députés de l'Opposition, qui ont
soulevé cette question avec débat, ce matin. Je vois là
leur intérêt pour le sujet. C'est effectivement, comme ils l'ont
dit, très important puisque, de ce règlement, dépend
véritablement la protection de l'environnement en milieu agricole.
Je pense que l'esprit dans lequel ils l'ont fait est également
remarquable puisque cela n'a pas été une "guerrette"
politico-partisane. Au contraire. On a pu parler abondamment du sujet sans pour
autant avoir l'air de politiciens en débat contradictoire, comme on en
connaissait dans la Beauce, il y a 25 ans, par exemple. Je me réjouis
que ce laps de temps ait pu être mis à notre disposition pour
approfondir le sujet. Je remercie évidemment mes deux collègues
de l'Assemblée nationale de même que mes fonctionnaires qui m'ont
accompagné.
En terminant, je voudrais rappeler que tous les Québécois,
aussi bien les agriculteurs que les industriels, les citadins et les gens qui
habitent dans des villages desservis par des réseaux d'égout, par
exemple, doivent être conscients que la responsabilité du ministre
et du ministère de l'Environnement est très importante, puisque,
si nous ne prenions pas nos responsabilités, nous encourrions des
coûts catastrophiques dans les années qui viennent. Je m'appuie
sur l'expérience passée pour affirmer une telle chose. Donc, nous
devons tous être conscients, comme Québécois, de la
nécessité de faire attention à notre environnement et
d'effectuer le rattrapage qu'il faut faire dans certains cas, puisqu'il y a eu
un certain laisser-aller depuis au moins le dernier siècle.
Je voudrais rappeler qu'en ce qui concerne le règlement et tout
le problème de la gestion des fumiers, nous faisons de la recherche. Aux
yeux de l'Opposition, nous
n'en faisons peut-être pas suffisamment; elle a peut-être
raison en partie. Nous allons accélérer en ce sens, mais nous
faisons quand même passablement de recherche en vue d'en venir à
transformer les surplus de fumier et de purin pour les rendre utiles à
l'agriculture et à l'économie en général.
Je pense avoir fait preuve d'ouverture d'esprit dans les modifications
que j'ai annoncées tout à l'heure en ce qui a trait, par exemple,
à la définition des fumiers, ce qui va permettre de clarifier la
situation, l'entreposage en sol qui nous était demandé, les
distances qui ont été modifiées à la baisse pour
répondre à certaines exigences d'agriculteurs qui avaient des
problèmes, des contraintes à cause des cours d'eau, notamment, le
moratoire qui peut être levé à certaines conditions et qui
était là depuis quelques années, les normes
d'épandage aussi, qui sont rattachées désormais au plan
agronomique. Cela me paraît être la vertu même que d'aller
dans ce sens.
Les délais qui étaient attribués à la
cessation et à la reprise d'activités sur une ferme ont
été doublés; cela devrait également permettre
à certains agriculteurs d'avoir accès à leur gagne-pain
beaucoup plus facilement qu'avant. L'amas de fumier au champ qui va même,
dans certains cas, au-delà de l'ancienne norme de 50 unités
animales devrait aussi, dans plusieurs cas, être utile aux producteurs
agricoles. De même, la marge qui était requise par l'ancien
règlement, soit de dix mètres des cours d'eau, est réduite
à cinq mètres. En nous appuyant sur la responsabilité
personnelle des agriculteurs, nous sommes convaincus que cette façon de
réduire la marge en question va régler aussi un certain nombre de
problèmes tout en assurant la protection de l'environnement.
En terminant, je répète que nous avons une mission
très précise, non seulement le ministre de l'Environnement, mais
tous les citoyens, c'est d'agir de façon responsable devant les gestes
que nous posons face à notre environnement. Je profite de ce mois de mai
pour rappeler aux Québécois que c'est l'occasion que nous avons
tous de prendre conscience du rôle que nous avons comme individus face
à la protection, à la sauvegarde et à
l'amélioration de notre environnement. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Gagnon): Je remercie le
député de Beauce-Sud, je remercie aussi le ministre de
l'Environnement ainsi que leurs collaborateurs pour cet excellent débat.
La commission de la protection de l'environnement ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 12 h 58)