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Etude du livre blanc
sur la consultation populaire
au Québec
(Dix heures quarante et une minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, messieurs! M. le ministre.
M. Burns: M. le Président, je constate que, d'une part,
nous n'avons pas quorum pour une bonne raison, c'est qu'on m'informe qu'il y a
un certain nombre de députés qui sont pris dans l'embouteillage
qui est causé par un très gros accident qui a eu lieu sur le pont
Pierre-Laporte et apparemment, il y en a un deuxième maintenant sur le
pont Québec-Lévis. En plus de cela, on m'informe que notre
invité de ce matin, la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal, n'a pas tout son personnel. Je vous ferais donc la suggestion,
M. le Président, si la commission était d'accord, de suspendre
nos travaux jusqu'à onze heures, on pourrait peut-être se
retrouver ici à onze heures et on pourrait même dire à onze
heures et quart, pour donner la chance à tous ceux qui ne sont pas
encore arrivés de se joindre à nous. Je comprends que ce sont des
"bonguiennes" de bonnes raisons. On ne peut pas les blâmer de ne pas
être ici. Si c'était le désir de la commission, au lieu
d'attendre inutilement ici, on pourrait faire des travaux plus utiles à
nos bureaux jusqu'à peut-être onze heures et quart.
M. Goulet: D'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, quant à nous, nous
n'avons pas d'objection. Notre éloignement de la ville de Québec
nous force à recourir aux services d'Air Canada et de Québecair,
ce qui nous a empêchés de passer sur le pont ce matin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont donc suspendus jusqu'à 11 h 15.
(Suspension de la séance à 10 h 43)
Reprise de la séance à 11 h 20
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission pour la présente séance sont:
M. Bertrand (Vanier), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond), M.
Burns (Maisonneuve), M. Gratton (Gatineau), M. Goulet (Bellechasse) remplace M.
Grenier
(Mégantic-Compton); M. Johnson (Anjou), M. Laberge (Jeanne-Mance)
remplacé par M. Charbon-neau (Verchères); M. Lamontagne
(Roberval) remplacé par M. Garneau (Jean-Talon); M. Lavoie (Laval), M.
Lévesque (Taillon) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M.
Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce) remplacé par M. Ciaccia
(Mont-Royal); M. Martel (Richelieu), M. Morin (Louis-Hébert)
remplacé par M. Gosselin (Sherbrooke); M. Morin (Sauvé)
remplacé par M. Mercier (Berthier); M. Paquette (Rosemont)
remplacé par M. Guay (Taschereau); M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson
(Rouyn-Noranda) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).
J'inviterais le seul organisme convoqué pour aujourd'hui, la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et ses
porte-parole, à bien vouloir venir présenter son
mémoire.
Le porte-parole pourrait-il se présenter et présenter ceux
qui l'accompagnent, s'il vous plaît?
Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal
M. Champagne (Jean-Paul): Bonjour M. le Président et MM.
les membres de la commission. Je n'ai pas toute ma délégation, il
semble qu'il y en ait encore plusieurs pris sur le pont. Je suis Jean-Paul
Champagne et je suis le président de la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal. A ma gauche, Me Yvon Groulx, conseiller
général de la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal, et à ma droite, M. Marcel Henry qui est conseiller
général de la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal.
La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, la
société mère de toutes les sociétés
nationales francophones d'Amérique, a été fondée en
1834 par Ludger Duvernay, ce qui fait d'elle la plus ancienne institution
québécoise qui soit encore debout et vivante. La
société a été constituée en corporation en
vertu de la loi 12 Victoria, chapitre 149, 30 mai 1849. La charte actuelle date
d'une loi de 1912, chapitre 93 des Statuts III, George V.
La société a pour devise: Rendre le peuple meilleur. Son
siège social est à la maison Ludger-Duvernay, 82 ouest, rue
Sherbrooke, Montréal. Elle comprend environ 15 000 membres
répartis en 28 sections. Elle est administrée par un conseil
général de 15 membres. La Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal a toujours participé, et
participe activement à l'évolution du Québec. Son action
et son rayonnement s'accomplissent par d'innombrables oeuvres et
réalisations dans tous les domaines de l'activité nationale:
culturel, économique et social.
Préambule. Depuis plus de douze ans, la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal préconise l'accession du
Québec à la souveraineté politique totale et ce, par la
voie des processus démocratiques. Le référendum constitue
sans conteste l'élément essentiel et primordial de l'expression
de la volonté populaire. Aussi, la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal s'intéresse-t-elle tout
particulièrement au livre blanc du gouvernement
sur la consultation populaire au Québec et aux projets de loi qui
émaneront de ce livre blanc.
Référendum sur l'indépendance. Nous tenons à
souligner immédiatement que le livre blanc, tout en affirmant s'inspirer
largement du type de référendum tenu en 1975 en Grande-Bretagne,
dont soit dit en passant on louange à l'excès le "fair play", sur
la question spécifique du maintien de l'affiliation de ce pays à
la Communauté économique européenne, s'en écarte
dès le départ puisqu'il ne concerne pas exclusivement le
référendum promis sur l'indépendance du Québec,
mais vise à institutionnaliser une formule de consultation du peuple
québécois dont on n'a pas encore fait l'essai. Nous croyons qu'il
serait plus sage de ne statuer pour le moment que sur le type particulier de
référendum à adopter pour la consultation
spécifique sur l'avenir constitutionnel du Québec, quitte
à inscrire, plus tard, dans la future constitution du Québec
indépendant, compte tenu de l'expérience vécue, une loi
générale sur la consultation populaire.
En effet, certaines des règles régissant la consultation
populaire doivent être totalement différentes selon qu'il s'agit
d'un référendum sur l'avenir de la nation ou d'un
référendum sur l'adoption de mesures législatives ou
administratives particulières. Il ressort d'ailleurs de tous les
commentaires entendus ou lus depuis le 15 novembre, et même avant, et
surtout depuis la publication du livre blanc, qu'on associe
référendum directement et uniquement à consultation sur
l'indépendance du Québec et non à une loi de portée
générale comme celle préconisée par le livre
blanc.
C'est pourquoi la plupart des travaux présentés en marge
du livre blanc traitent du référendum en relation avec le
processus d'accession du Québec à la souveraineté
politique.
En conséquence même de cette distinction que nous faisons
entre le référendum à caractère déterminant
pour la nation et les référendums d'ordre législatif ou
administratif, le projet de loi qui émanera du livre blanc devra
édicter que la constitution du Québec indépendant sera
soumise par référendum à l'approbation du peuple
québécois, à l'inverse de la Constitution canadienne de
1867 qui n'a jamais été adoptée ou ratifiée par
consultation populaire. Les considérations et recommandations qui
suivent traiteront donc uniquement du référendum sur
l'indépendance du Québec pour lequel les Québécois
exerceront leur droit de disposer librement d'eux-mêmes.
M. Groulx (Yvon): Le livre blanc affirme que le projet de loi
doit "d'abord assurer la plus grande égalité des chances
possibles entre les positions en présence."
Compte tenu du contexte canadien et nord-américain, les normes de
financement édictées par le livre blanc mettront au départ
en position d'infériorité les tenants de l'indépendance du
Québec en regard des protagonistes du statu quo ou de quelque nouveau
fédéralisme canadien.
En effet, la propagande fédéraliste émarge
dès maintenant au budget fédéral, soit directement, soit
sous forme d'organismes publics constitués par le gouvernement d'Ottawa
aux frais de l'Etat pour faire échec au projet d'indépendance du
Québec.
Selon une évaluation sommaire, Ottawa aurait engagé, cette
année seulement, environ $11 millions à cette fin et sa
contribution s'élèverait peut-être à $15 millions ou
à $20 millions l'an prochain.
L'offensive fédérale, dont les frais sont acquittés
en partie par les contribuables québécois, prend plus
particulièrement la forme d'organismes de propagande quotidienne en
faveur du panca-nadianisme, tels la commission Pépin-Robarts, dont le
budget atteint cette année $3 millions; le groupe Tellier,
attaché au bureau des relations fédérales-provinciales du
nouveau ministère de M. Marc Lalonde, qui dispose cette année
d'un budget de $1 million, et le Centre d'information sur l'unité
canadienne, constitué de fonctionnaires du Secrétariat d'Etat,
qui a un budget d'environ $1,5 million pour la présente
année.
A ces organismes clefs, il faut ajouter la multitude de programmes
culturels du Secrétariat d'Etat et la participation de l'Office national
du film, de Radio-Canada, du Conseil des Arts et de diverses autres
institutions subventionnées par l'Etat fédéral visant
à susciter un sentiment national canadien, sans oublier les initiatives
de nombreuses sociétés commerciales et financières
pancanadiennes ou multinationales du gouvernement de l'Ontario et de diverses
autres provinces.
Que fait le Québec pour contrebalancer et contrecarrer ce lavage
de cerveaux quotidien? Il est impérieux et urgent que l'Etat
québécois mette sur pied, sans délai, des organismes
publics parallèles à ceux d'Ottawa, appelés à
étudier et à faire connaître les aspects positifs de la
souveraineté politique du Québec.
M. Claude Ryan ne le suggérait-il pas lui-même, dès
le 21 mars 1977, dans un éditorial du Devoir: "Plus importante que
l'organisation, écrivait-il, il y a enfin la préparation
intellectuelle qui doit précéder le référendum dans
chaque milieu. Or, autant Ottawa et Québec disposeront à cette
fin de tous les instruments et moyens voulus, autant il importe que soient
envisagées des structures de travail indépendantes des partis
politiques pour l'étude froide et impartiale de dossiers appelés
à exercer une influence décisive sur le choix que feront les
électeurs à l'occasion du référendum. C'est
maintenant qu'il faut commencer à agir sur ces choses. L'absence de
dialogue fondamental entre Québec et Ottawa rend plus impérieux
et plus urgent ce genre de démarche. Rien ne serait plus néfaste
à l'heure présente que l'immobilisme."
Pourquoi le gouvernement québécois ne mettrait-il pas sur
pied une commission d'enquête sur la souveraineté du Québec
parallèle à la commission Pépin-Robarts sur l'unité
canadienne? Pourquoi le ministère des Affaires intergouvernementales
n'aurait-il pas une équipe de recherche analogue au groupe de Paul
Tellier, à
Ottawa? Pourquoi, enfin, ne constituerait-il pas un centre d'information
sur la souveraineté du Québec du type du Centre d'information sur
l'unité canadienne? De tels organismes favoriseraient "la plus grande
égalité de chances possible entre les positions en
présence".
Enfin, nous sommes d'accord avec les propos de M. Marcel Chaput dans la
revue Ici Québec du mois de septembre 1977: "Quoi qu'en disent les
pancanadianistes, le gouvernement de M. Lévesque a été
élu à cause de son option souveraineté-association. Il a
donc moralement le droit et le devoir de défrayer la propagande
souverainiste à même le trésor public."
Pour "assurer la plus grande égalité de chance possible
entre les positions en présence" et contrebalancer les subventions du
gouvernement fédéral et des milieux financiers à toutes
sortes d'organismes favorables au fédéralisme canadien, le
gouvernement doit, de son côté, mettre à la disposition des
organismes favorables à la souveraineté du Québec, sous
forme de subventions, des sommes équivalant à celles
consacrées à la défense de l'unité canadienne.
Comme le gouvernement québécois ne peut pas compter sur
l'appui des media d'information pour éclairer la population sur les
avantages de la souveraineté-association, il doit aider les groupes
souverainistes à promouvoir les intérêts du Québec.
Sans ces points essentiels, les groupes souverainistes sont réduits
à l'impuissance et au silence, ce qui est extrêmement grave dans
le contexte québécois actuel et devant le défi du
référendum sur l'avenir du Québec. Sans les fonds
nécessaires, les associations souverainistes du Québec ne
pourront pas jouer leur rôle démocratique et le
référendum risque d'être un pari perdu pour de nombreuses
années à venir. En outre, c'est une absurdité de croire
que les fonds limités du Parti québécois seront suffisants
pour accomplir adéquatement l'importante tâche de renseigner toute
la population québécoise sur la nécessité de la
souveraineté-association.
En toute justice, le gouvernement fédéral ne devrait-il
pas accorder aux initiatives souverainistes des fonds égaux à
ceux qu'il dispense largement aux protagonistes du fédéralisme?
Même s'il prévoit un refus, il appartient au gouvernement du
Québec d'exiger que les fonds fédéraux distribués
au Québec, qui proviennent en bonne partie des contribuables
québécois, soient versés tout aussi bien aux organismes
souverainistes qu'aux organismes fédéralistes. Cependant, devant
le refus du fédéral, l'Etat québécois doit puiser
lui-même dans les fonds publics pour subventionner les organisations
vouées à la promotion de la souveraineté politique du
Québec. Nous croyons que ces subventions pourraient s'élever,
pour tout le Québec, à une somme globale équivalant
à $2 par électeur, soit environ $8 millions, distribuées
entre les promoteurs reconnus de la souveraineté politique du
Québec à des fins déterminées, selon les
critères et les normes que le gouvernement fixera.
M. Champagne: Droit de vote. Le livre blanc propose que le droit
de vote au référendum soit accordé à toute personne
habilitée à voter lors des élections, même avec
certains élargissements. Il s'ensuit que tout citoyen canadien majeur,
domicilié au Québec depuis au moins un an, aurait droit de
vote.
Nous soulignons cependant qu'un référendum sur
l'indépendance est un geste primordial de libre disposition du peuple
québécois. Dans l'exercice du droit d'un peuple à disposer
de lui-même, selon les normes du droit international, seuls les membres
de la nation concernée sont admis à s'exprimer, afin
d'éviter qu'une submersion de nouveaux venus n'en vienne fausser le
résultat.
De nombreux référendums tenus au XXe siècle, par
lesquels les peuples de divers pays ont disposé d'eux-mêmes, n'ont
pas reconnu le droit de vote aux nouveaux venus.
Ainsi, "celui qui voulait participer au plébi-ciste du Schleswig,
après la première guerre mondiale, devait être
établi là depuis le 1er janvier 1900". citation de
Théodor Veiter, Le droit de libre disposition du peuple jurassien, page
209 .
De même, "en Catalogne, le 2 août 1931, au pays basque en
1932 ces deux scrutins portaient sur une autonomie complète
en Islande en mai 1944, à propos d'une séparation
complète d'avec le Danemark, du reste approuvée", les
immigrés n'avaient pas le droit de vote, même s'ils étaient
dans le pays depuis trois générations. Même
référence.
L'ouvrage auquel nous référons cite nombre d'autres
exemples. Ces prescriptions ont pour but d'assurer que le peuple qui veut
disposer de lui-même ne soit pas submergé par des étrangers
qui ont élu domicile sur le territoire de ce peuple sans en faire leur
patrie.
Accorder le droit cie vote au référendum, en
matière d'autodétermination, à tous les citoyens sans
distinction, équivaut à refuser son identité au peuple
québécois, à accepter la théorie du "melting pot"
américain et à exposer la nation, soit à la privation de
sa souveraineté à cause du poids trop lourd de nouveaux venus non
intégrés au Québec, soit au morcellement de son sol par la
décision majoritaire de ces nouveaux venus dans certaines
régions. Subordonner l'autodétermination du Québec ou
l'intégrité de son sol au vote de ces nouveaux venus, c'est
contredire l'attitude fière du ministre Camille Laurin qui
déclarait à l'Assemblée nationale dans son discours
précédant l'adoption de la Charte de la langue française:
"Ce peuple que nous représentons, il a tellement travaillé et
peiné sur ce coin de terre qu'il a bien mérité de se
sentir enfin pleinement chez lui et d'y vivre comme il l'entend, ll a acquis le
droit de se reconnaître dans le paysage de son pays". C'est contrecarrer
cette même charte qui, selon M. Laurin, "marque et assure son
identité (du peuple québécois), éloigne les dangers
qui le menaçaient, lui procure fierté, dignité et
bien-être... renverse le cours de notre histoire des deux derniers
siècles...", c'est nier au Québec le statut d'Etat national des
Canadiens
français et le réduire au rang de simple région
où vivent des citoyens canadiens sans enracinement particulier.
Quant à nous, nous suggérons une solution mitoyenne pour
assurer que les nouveaux venus qui n'ont pas fait du Québec leur patrie
ne fassent pas échec à la volonté
d'autodétermination des Québécois de souche: accorder au
référendum sur l'indépendance droit de vote à tous
les citoyens canadiens domiciliés au Québec le jour de la
votation, nés au Québec et âgés d'au moins 18 ans ou
ayant conservé un domicile continu au Québec depuis au moins
je fais ici une correction trois ans. Je veux qu'on annote cette
correction: trois ans. Ce délai de trois ans devrait avoir
été suffisant pour intégrer un immigrant à la
communauté québécoise.
Autres recommandations. Formulation de la question. Nous
suggérons que la question soumise aux citoyens lors du
référendum sur la souveraineté soit rédigée
sous forme de plusieurs propositions entre lesquelles l'électeur
exprimera son choix en inscrivant un "X" en regard de la proposition qu'il
favorise.
Procédures diverses. Nous suggérons que, pour respecter
davantage le processus démocratique: 1)La durée maximale du
débat à l'Assemblée nationale sur la question soumise au
référendum soit portée de 25 heures à 60 heures;
2)Le scrutin ne puisse avoir lieu plus tôt que 60 jours après
l'émission du bref indiquant la date du référendum et le
texte de la question. 3)Les résultats des bureaux de scrutin, lors du
décompte des suffrages soient regroupés et rendus publics au
niveau de tout le Québec.
Conclusion. Le référendum sur l'autodétermination
donnera aux Québécois, pour la première fois dans leur
histoire, l'occasion unique d'entrer définitivement dans la famille des
nations souveraines. C'est un défi de taille qu'ils n'ont pas le droit
de rater et le gouvernement du Québec a la responsabilité lourde
et exaltante d'en assurer le succès.
La Charte du français constituait déjà une
étape essentielle dans le processus d'autodétermination. La
souveraineté politique en sera l'étape finale. M. Camille Laurin
l'affirmait sans ambages lors de l'adoption de la loi 101: "Dans un
Québec désormais et pour toujours français, il est logique
de prévoir d'autres reprises en main, d'autres appropriations et
d'autres bonds en avant: gestion et aménagement du territoire,
développement culturel, organisation sociale, stratégies
économiques et, enfin, souveraineté politique".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci
beaucoup. M. le ministre.
M. Burns: M. le Président, je tiens à remercier M.
Champagne, M. Henry et Me Groulx de l'exposé qu'ils viennent de nous
faire. Dans le but de vous permettre de pouvoir passer toutes les remarques que
vous jugez nécessaires et que les membres de la commission jugent
nécessaires pour expliciter votre mémoire, je vais me limiter
à quelques questions très brèves, en cédant,
même si, normalement, je pourrais, selon la règle que nous nous
sommes donnée la semaine dernière vous interroger pendant environ
30 minutes, mais je vais m'abstenir de ça non pas je tiens
à le dire que je considère votre mémoire comme
d'importance secondaire, loin de là, mais simplement parce que je veux
avec les membres de la commission vous permettre d'être entendus
complètement aujourd'hui, à l'intérieur du temps qui nous
est alloué, c'est-à-dire jusqu'à 1 heure.
Il y a une question qui m'a frappé, M. Champagne. J'adresse la
question à M. Champagne, si c'est M. Henry ou M. Groulx qui doivent
répondre, libre à vous, il n'y a pas de difficulté
là-dessus.
Ma première question porte sur votre approche relativement
à la loi générale, comme telle, une loi
générale par opposition à une loi spécifique.
Evidemment, dans le livre blanc, vous le notez, nous suggérons
une loi générale d'application générale en
matière de consultation populaire. Je tiens à le dire à
nouveau tout en sachant que tout le monde, comme vous le dites d'ailleurs, est
axé ou envisage plus particulièrement un référendum
en particulier, celui sur l'avenir politique constitutionnel du Québec,
nous avons choisi une loi générale, justement parce que nous
croyons qu'il est nécessaire de se donner cet instrument, cet outil, de
façon constante, même si on sait que l'utilisation la plus
spectaculaire de cet outil sera celle sur l'avenir constitutionnel du
Québec.
Mais, ne croyez-vous pas, M. Champagne, que le gouvernement actuel
connaissant son point de vue relativement à la
souveraineté du Québec pourrait être jugé
comme posant un geste très partial s'il posait les règles
relativement au référendum sur la souveraineté du
Québec et d'autres règles relativement à n'importe quelle
consultation populaire? Le but qui nous animait au départ,
c'était de démontrer qu'un élément du programme du
Parti québécois qui forme le parti au pouvoir actuellement
qui dit, entre autres, que, dès que ce gouvernement sera au
pouvoir, il mettra en marche un système de consultation populaire...
Durant la dernière campagne électorale, il y a eu un
engagement formel qui a été pris par l'actuel gouvernement de
recourir à cette forme de consultation populaire pour savoir si les
Québécois sont d'accord pour éventuellement refaire, ou
faire, une forme de souveraineté-association. Alors, ne croyez-vous pas
qu'avec cet arrière-plan on n'apparaîtrait pas comme des gens qui
veulent piper les dés, qui veulent essayer de faire des règles un
peu spéciales pour un référendum, celui sur l'avenir
constitutionnel du Québec et d'autres règles pour d'autres
référendums ou d'autres consultations populaires, un peu comme on
pourrait se faire taxer comme je le disais la semaine dernière
à d'autres groupes qui nous ont fait cette suggestion d'essayer
de monter un coup si on changeait constamment, d'élections en
élections,
les règles de la Loi électorale? C'est un peu le
parallèle que je fais entre les deux. L'aspect de la consultation
référendaire est un aspect qui est très proche, même
si cela n'est pas exactement de la même nature, de la consultation
électorale.
Est-ce que, d'après vous, on n'aurait pas l'air, purement et
simplement, d'être en train de monter un coup aux Québécois
plutôt que de leur dire clairement et carrément: Ecoutez, on veut
avoir votre point de vue, on veut avoir votre réaction face à une
proposition qui a été suggérée par le gouvernement
et qui a été discutée pendant un certain nombre d'heures
vous suggérez 60 heures, nous on parle de 25 heures
à l'Assemblée nationale?
M. Champagne: Je ne crois pas, M. le Président, que le
parti au pouvoir ou que le gouvernement veuille monter un coup, pour prendre
l'expression de M. le ministre. Ce n'est pas monter un coup, le Parti
québécois a été élu démocratiquement,
ayant dans son programme électoral le désir de réaliser
l'indépendance par le moyen du référendum. C'était
une priorité et tous les Québécois l'ont compris comme
cela. C'est pour cela que pour nous, considérant l'importance de ce
geste, du moins le référendum sur l'avenir du pays, il est
primordial qu'on attache toute l'importance voulue, simplement sur cette
consultation. C'est dans ce sens que l'on veut que le livre blanc attaque ce
point là. J'ai peur qu'à un moment donné ce même
livre blanc soit difficilement applicable à une éventuelle
consultation populaire, par exemple, sur l'avortement, sur la peine de mort, ou
sur quelque chose comme cela.
C'est pour cette raison que nous pensons qu'on devrait tout canaliser,
mettre tout l'éclairage nécessaire là-dessus et je ne
pense pas que ce soit un coup monté. Je ne sais pas si Me Yvon Groulx
aurait quelque chose à ajouter, ou mon autre collègue.
M. Groulx: Permettez-moi simplement, pour compléter... Un
référendum sur l'avenir politique du Québec est unique en
son genre. Il n'a aucune commune mesure avec le référendum sur
des législations particulières. Alors, les modalités
peuvent en être bien différentes, tant les modalités de
financement que les modalités de la période du débat et
les modalités du droit de vote pour savoir qui va se prononcer sur les
dispositions du peuple québécois. C'est pour cela que nous
croyons qu'une loi spéciale doit régir cette consultation. Une
autre raison que nous avons invoquée, c'est que ce
référendum sera, à toutes fins pratiques,
préconstitutionnel. La constitution future du Québec, quel que
soit d'ailleurs le résultat du référendum, pourrait
inclure des normes quant au référendum dont vous parlez de
façon générale, mais le référendum
lui-même sur l'avenir politique du Québec a un caractère
particulier. Il a un objectif unique.
D'ailleurs, quand nous considérons ce qui se passe dans divers
pays du monde, par exemple, les pays comme le Portugal, qui récemment,
à la suite d'une révolution pacifique, a tenu un
référendum sur la constitution et ensuite a fait élire une
Assemblée nationale et une Assemblée constitutionnelle. La
même chose s'est passée dans la plupart des pays qui se prennent
ou se reprennent en main. C'est la raison pour laquelle nous préconisons
des lois différentes, parce que les normes, à notre avis, peuvent
être différentes. Par exemple, nous parlons du droit de vote de
trois ans pour le référendum sur la peine de mort, pourquoi
est-ce qu'on exigerait trois ans de domicile au Québec? Je donne cela
comme exemple.
M. Burns: C'était justement ma deuxième question.
Quel genre de modalités verriez-vous différemment
appliquées dans les référendums en général
et qui ne seraient peut-être pas utiles d'appliquer? Vous m'en citez une,
par exemple, la durée de résidence. Est-ce qu'il y en a d'autres,
dans votre esprit?
M. Groulx: Dans notre esprit, il y en a surtout trois, si nous
nous référons au mémoire. Le financement peut être
bien différent; c'est-à-dire que nous croyons que l'Etat
québécois est engagé à financer la propagande de
l'option souverainiste que le peuple lui a donné mandat de faire, alors
que dans le cas d'un référendum sur des sujets plus particuliers,
comme ceux que nous avons invoqués tout à l'heure, le mode de
financement pourrait être bien différent; la période du
débat, nous n'avons pas à nous prononcer, mais des débats
sur des sujets particuliers comme ceux que nous avons évoqués
tout à l'heure pourraient se faire de façon soit plus courte,
soit plus longue, je ne le sais pas, cela pourrait dépendre un peu des
modalités ou des questions particulières qui pourraient
être posées; le droit de vote également, nous l'avons
mentionné. Les modalités, à notre avis, sont
différentes dans un cas comme dans l'autre.
M. Champagne: Nous pensons bien aussi que pour la formulation de
la question, dans la consultation populaire, dans le référendum
sur la souveraineté politique du Québec, la formulation de la
question peut prendre plusieurs heures, et dans un prochain
référendum, je pense qu'un consensus peut se faire rapidement.
L'élément temps aussi, je ne pense pas qu'il soit indispensable
pour planifier tous les référendums.
M. Burns: Justement, M. Champagne, et Me Groulx, j'ai
été, la semaine dernière, très sérieusement
frappé par un argument qui va exactement dans le sens contraire du
vôtre. Il nous a été soumis en commission parlementaire par
le Barreau du Québec qui nous a dit: Vous avez raison de penser en
termes d'une loi générale pour établir les
mécanismes eux-mêmes, passez-moi l'expression, la plomberie, si
vous voulez, la tuyauterie d'un référendum pour vous permettre
justement, au moment où un référendum qui soulève
une émotivité particulière... On le sent
déjà, je le sens, en tout cas, quand je participe à des
lignes ouver-
tes, tant les tenants d'une position que les tenants de l'autre sont
très émotifs et, à ce moment-là, le Barreau nous
dit: Si vous avez déjà posé la fondation, les
mécanismes eux-mêmes d'une loi référendaire, d'une
consultation populaire, vous allez pouvoir vous permettre de discuter en toute
liberté sans mêler l'aspect technique, qui est l'aspect mise en
place du référendum, et l'aspect émotionnel.
Je ne sais pas ce que vous pensez d'un argument comme celui-là,
mais je peux vous dire qu'il m'a touché sérieusement.
M. Groulx: C'est-à-dire que c'est un argument qui a du
poids, mais, encore une fois, nous revenons à la question des
modalités. Comment voulez-vous qu'une loi... Si une loi
générale, par exemple, affirme que toute personne qui a droit de
vote au Québec peut voter lors d'un référendum, ça
veut dire qu'une personne qui est née à Vancouver, qui y est
demeurée pendant trente ans et qui demeure maintenant à
Montréal je n'ai rien contre les gens de Vancouver tout
spécialement, c'est un exemple qui est donc citoyen canadien,
mais qui demeure au Québec depuis un an, pourra voter pour disposer
librement de la nation québécoise, du peuple du Québec.
Elle pourra voter sur la peine de mort, je n'y ai pas d'objection.
M. Burns: Me Groulx, je vous signale que ces mêmes
personnes qui, selon nos lois actuellement, selon la Loi électorale,
demeurent au Québec depuis au moins un an peuvent aussi disposer de
quelque chose d'encore plus grave, c'est-à-dire du choix du
gouvernement, de participer à ce choix. C'est grave. Evidemment,
l'avenir...
M. Groulx: Ce n'est pas plus grave que de disposer de l'avenir du
peuple du Québec.
M. Burns: Oui, mais écoutez, ces gens en disposent, c'est
bien sûr, d'une façon consultative dans le cas d'un
référendum, alors que, dans le cas d'une élection
c'est pour ça que je dis que c'est plus grave ils en disposent
d'une façon définitive. Il n'y a pas de revenez-y dans le cas
d'une élection. Ces mêmes gens ont droit de vote et on se demande
très sérieusement comment on pourrait arriver à dire
logiquement à des gens qui ont droit de vote pour élire un
gouvernement qui va disposer de leur avenir immédiat de tous les jours,
de leur administration: Oui, vous êtes aptes à choisir un
gouvernement, à participer à ce choix, mais vous n'êtes pas
aptes à décider de l'avenir constitutionnel du Québec.
Je ne le sais pas, mais je me sentirais mal à l'aise de
défendre une telle position, en tout cas comme ministre responsable de
cette éventuelle consultation populaire.
M. Henry (Marcel): Je pense que c'est moins grave, quand
même, le choix d'un gouvernement. Je ne veux pas diminuer l'importance du
choix d'un gouvernement, mais cela engage le peuple, au maximum, pour cinq ans.
Le référendum dont on parle, ce qui ne sera pas le cas de tous
les autres référendums qui vont être faits, va engager
l'avenir du Québec à jamais.
M. Burns: Peut-être pas à jamais. C'est ça
qui est tout l'aspect consultatif d'un référendum. Je pense que
vous ne vous êtes peut-être pas suffisamment attachés
à l'élément que nous mettons dans notre
référendum, qui est l'aspect consultatif.
Dans mon esprit à moi, M. Henry, il n'est pas impossible de
penser qu'il y ait plus d'un référendum. Je pense que le premier
ministre, là-dessus, a été très clair. Je pense
qu'à partir du moment où on considère l'aspect consultatif
du référendum donc qui ne lie pas, comme tel, le
gouvernement évidemment, il faut savoir que la situation peut
changer d'année en année. Non pas qu'un référendum
n'ait pas de valeur morale très forte sur un gouvernement. Je pense
qu'un gouvernement qui recevrait une réponse claire et nette de la
population contraire à sa politique serait très mal venu de
tenter de mettre en application cette politique. C'est bien sûr, de sorte
que c'est pour ça que je vous dis qu'il y a une valeur morale. Par
contre, il y a aussi une souplesse dans la consultation populaire, en ce sens
qu'il est possible que, d'année en année, les points de vue
puissent changer.
Vous me reprochiez, dans le livre blanc, bien gentiment, d'ailleurs, de
souligner un peu trop le sens du fair play de nos amis britanniques, justement
dans le cas du référendum de 1975, un an avant le
référendum, le résultat des sondages démontrait
exactement le contraire de ce qui est arrivé au référendum
lui-même. C'est parce que la population a évolué dans sa
façon d'apprécier la situation. C'est-à-dire qu'on donnait
deux contre un, deux contre le maintien de l'adhésion au Marché
commun, contre un qui y était favorable. Et le résultat a
été exactement le contraire, à savoir deux contre un.
Quant au mécanisme de la consultation populaire, son grand
avantage, c'est sa souplesse. C'est le fait que, comme tel, juridiquement
liée, l'autorité gouvernementale permet quand même de
savoir comment, et autrement que par un sondage qui souvent, peut être
contesté à certains égards, à quelques occasions,
contesté de façon très sérieuse... On en a vu au
cours des années, possiblement des mois antérieurs.
Je prends note de votre recommandation. M. Henry voulait ajouter quelque
chose?
M. Henry: C'est évident que le vote
référendum est consultatif. Ce que je veux dire par le fait que
c'est une décision qui va être définitive, c'est qu'une
fois que le peuple du Québec aura voté pour la
souveraineté, le gouvernement, moralement, sera obligé d'orienter
ses politiques vers cela...
M. Burns: Oui.
M. Henry: ... et je pense que cela va être
irréversible. Une fois que le peuple du Québec se sera
prononcé, qu'il sera devenu souverain, on ne retournera pas en
arrière. C'est dans ce sens-là que c'est une décision qui
a un caractère définitif, contrairement aux autres
référendums. On peut faire un référendum sur la
peine de mort et décider que la peine de mort s'applique et, cinq ans
après, les esprits ont évolué, on peut revenir et dire que
maintenant, il n'y en a plus de peine de mort.
Mais je ne pense pas qu'on puisse, cinq après
l'indépendance, dire: On va revenir et on va faire un autre
référendum. S'il y a des exemples à cet égard dans
l'histoire du monde, il y en a très peu. C'est dans ce sens-là
que je disais que c'est plus grave que l'élection d'un gouvernement qui,
lui, est, par définition, élu pour un mandat limité.
M. Burns: C'est rare que quelqu'un qui devient adulte veut
redevenir mineur. C'est cela que vous voulez dire?
M. Henry: Oui.
M. Burns: Je vous remercie. Là-dessus, je pense que j'ai
votre opinion. Dans votre mémoire, cependant, vous ne touchez pas
tellement la mécanique elle-même que nous proposons, du moins, je
n'ai pas senti que vous y touchiez, sauf pour des cas comme le droit de vote ou
des choses semblables.
Mais est-ce que le modèle britannique dont nous nous inspirons
dans le mémoire largement, pas totalement, je l'admets
vous déplaît comme approche? Je ne parle pas du fait qu'on
s'inspire des Britanniques, mais je veux dire la structure elle-même.
Est-ce que vous trouvez qu'elle comporte des difficultés, outre les cas
bien spécifiques que vous mentionnez, par exemple, quant au droit de
vote, etc., entre autres, le système des organisations de
comités? Est-ce que cela vous contrarie au départ?
M. Champagne: On accepte les recommandations du livre blanc dans
son ensemble à ce sujet. Et on ne sentait peut-être pas le besoin
de faire des suggestions parce qu'on l'acceptait.
M. Burns: D'accord.
M. Champagne: Peut-être que M. Groulx voudrait ajouter un
mot.
M. Groulx: Sauf quant à la formulation de la question,
nous proposons que ce soit un choix entre plusieurs propositions et non pas un
oui ou un non.
M. Burns: J'ai cru comprendre que sur la question, vous
préfériez un éventail d'options à être
soumises. Je sais qu'il y a certains de mes collègues qui vont
probablement vous poser des questions là-dessus, alors, je n'insisterai
pas sur cet aspect.
La dernière question que j'aimerais vous poser est relative aux
résultats que vous voyez re- groupés, même s'ils sont
décomptés je ne sais pas si cela se dit si on en
fait le décompte, au niveau des circonscriptions, au niveau du bureau
électoral selon votre suggestion, qu'il soit rendu public au niveau
national, si je comprends bien.
Avez-vous une raison particulière là-dessus? Votre
recommandation est brève, je pense qu'elle comporte trois lignes, mais
je n'ai pas senti que vous vouliez la détailler
énormément.
M. Champagne: On veut consulter la population
québécoise en règle générale et c'est pour
cela qu'on demande le résultat au niveau global du Québec. Il y a
un autre point aussi qu'on voudrait apporter. Il se pourrait qu'un
député, que ce soit de n'importe quelle tendance, dans son
comté, fasse la campagne en vue de telle option et qu'à un moment
donné, ce même député se trouve en contradiction
avec le résultat de son propre comté. Quelqu'un peut quand
même défendre la thèse du statu quo. Il a quand même
été élu député, peut-être de
façon libérale et, à un moment donné...
M. Burns: Prenons le cas du député de Mont-Royal,
par exemple.
M. Gratton: Ne prêtez pas d'intention, de ce
côté.
M. Champagne: Disons un parti politique et, à ce
moment-là, la population va peut-être voter contre l'option que
lui-même défendait. Il arriverait peut-être en contradiction
avec ses électeurs.
M. Burns: Si je vous faisais l'objection suivante, M. Champagne.
Est-ce que, dans le cas... Je me pose la question.
M. Ciaccia: Cela a plus de chances d'arriver dans votre
comté que dans le mien.
M. Burns: Je pense qu'on est passablement égal
là-dessus. Je pense que le député de Mont-Royal et le
député de Maisonneuve partent sur un point
d'égalité là-dessus.
M. Ciaccia: Est-ce qu'on s'essaiera prochainement?
M. Burns: Je vous donne un exemple. Comme vous le voyez, le livre
blanc, là-dessus, n'a pas arrêté une situation.
M. Groulx: On veut vous demander vos suggestions d'ailleurs.
M. Burns: Pas seulement là-dessus, mais sur des cas qu'on
a laissés complètement ouverts. Cela veut dire que le
gouvernement n'avait pas arrêté de décision
définitive. C'est là que je recherche davantage les suggestions
des gens, bien que je ne bloque pas de suggestions très constructives
comme vous en faites sur d'autres sujets où on a déjà une
opinion arrêtée.
On parlait du député de Mont-Royal un peu à la
blague, mais prenons le cas du député de Mont-Royal qui est
élu sous la bannière profédéraliste, il n'y a pas
de doute, et qui, à un moment donné, tout à fait par
impossible peut-être, se fait dire par sa population que c'est le
contraire. Le résultat...
M. Champagne: II doit démissionner.
M. Burns: Non, je ne pense pas, je pense que...
M. Ciaccia: Si je suis prêt à accepter cela, il peut
l'accepter lui aussi.
M. Burns: Je pense que le député de Mont-Royal
devrait, à ce moment-là, continuer et terminer son mandat. La
population nous dira s'il a eu tort d'appuyer, lors de l'élection
suivante...
M. Champagne: Oui, suivante.
M. Burns: ... telle ou telle position, mais, si j'inverse le
problème, le député de Mont-Royal, dans un cas comme
celui-là, sentant qu'il n'est pas, comme tel, impliqué,
n'aurait-il pas un peu moins d'enthousiasme à travailler en faveur de la
position qu'il veut défendre? Ne se sentirait-il pas un peu
protégé par un bouclier? C'est une question qu'on s'est
posée. Transférons-le dans le comté de Maisonneuve. Est-ce
que, moi-même qui suis élu député depuis 1970 dans
Maisonneuve, le fait que je n'aie pas à affronter, à un moment
donné, un revers sur une consultation référendaire, ne me
permettrait pas tout simplement d'être beaucoup plus détendu
à l'endroit du résultat obtenu et ne m'inciterait pas, dans le
cadre d'une saine démocratie d'ailleurs, à travailler davantage
en faveur d'une telle position? C'est ce que je vous pose comme question. On se
la pose, en tout cas, nous autres.
Une Voix: Cela n'arrivera pas.
M. Burns: Je n'ai pas de crainte de ce
côté-là dans Maisonneuve. C'est pour cela que je prenais
les deux antipodes.
M. Groulx: M. le ministre, je crois qu'il y a même une
raison de fond là-dessus, c'est que, lors d'une élection
générale, les électeurs sont appelés à
élire un député, un représentant pour telle
circonscription. Dans le cas de la consultation, ce sont tous les
électeurs du Québec qui sont appelés à se
prononcer. Il n'y a pas de raison pour délimiter les résultats
par circonscription électorale.
M. Burns: D'accord, je prends également bonne note de
cette suggestion que vous nous faites.
M. Groulx: Même si, en fait, on saura que, dans le bureau
de votation tel numéro et tel numéro, on a voté et que,
dans tant de bureaux de votation dans telle circonscription, on a voté
de telle façon... En fait, ce ne sera pas une présentation
officielle, ce sera le résultat du Québec qui sera
présenté, parce que ce sont les électeurs du
Québec, en général, qui sont appelés à se
prononcer.
M. Burns: Me Groulx, je vous le signale, il y a tout l'aspect
mécanique qui pose des problèmes.
M. Groulx: D'accord. Cela ne cache rien, cela.
M. Burns: Oui. Il y a tout cet aspect de savoir comment on
arrive... Parce que toute structure électorale est actuellement
basée sur un système de comté par comté ou de
circonscription électorale par circonscription électorale, ce qui
pose un certain nombre de problèmes à caractère purement
et simplement mécanique au point de vue du fonctionnement même du
décompte. Evidemment, il faudrait réviser nos positions et,
là-dessus, avant de faire une suggestion définitive au Conseil
des ministres, je devrai prendre l'opinion du président
général, qui s'appelle maintenant le directeur
général des élections, qui a justement l'expérience
relative à cette possibilité d'adaptation à un autre
système. Je m'en tiens à ces deux brèves questions. Je
vous remercie de votre mémoire. Soyez certain que j'aurais de nombreuses
autres questions, mais c'est uniquement pour permettre d'intervenir aux autres
collègues de la commission que je me restreins à ces deux
questions. Elles m'apparaissent actuellement comme les préoccupations
peut-être les plus importantes à mon esprit, mais j'imagine qu'il
y a d'autres membres de la commission qui vont vous poser des questions sur
d'autres aspects de votre mémoire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition
officielle, je désire remercier les représentants de la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, non seulement
pour le contenu du mémoire, mais également de fournir l'occasion
à cette commission de situer les directives qu'avait émises le
président au début de nos travaux la semaine dernière. On
sait que c'est le cas pour la Société Saint-Jean-Baptiste comme
pour la plupart des 25 ou 26 organismes qui ont présenté un
mémoire à cette commission; tout en voulant respecter le
désir du gouvernement de s'adresser à la population sur la
question de la consultation en général, en présentant le
livre blanc sur la consultation populaire, effectivement, quand on parle de
référendum au Québec, pour 99,9% de la population, on
parle, en particulier, d'un référendum, celui sur l'avenir
constitutionnel du Québec.
M. le Président, je suppose que l'absence d'objection de la part
du ministre, aussi bien que du président à la présentation
du mémoire de la société, ce matin, indique bien qu'on
laissera toute latitude à nos invités, pour les prochains jours,
de couvrir la question comme bon leur semble.
M. Burns: M. le député, je ne veux pas parler au
nom du président, mais je ne suis pas intervenu, parce que je pense que
si les gens qui ont pris la peine de faire un mémoire, tout au moins,
lorsqu'ils présentent ce mémoire, ont décidé de
l'axer dans ce sens, et on ne doit pas leur dire: Ce n'est pas comme cela que
vous deviez le faire. Cela doit nous donner à nous, cependant et
là-dessus, je pense que j'ai respecté dans mes questions la
directive de la présidence alors qu'on donne cette souplesse aux
invités, cela doit nous imposer dis-je, une espèce de discipline
et nous empêcher de nous lancer dans une direction contraire à ce
que la directive de la présidence nous avait indiqué, et de
recourir à des procédés que le président a
déjà jugés comme étant à rencontre du
règlement. Je n'ai pas d'objection, et c'est pour cela que je ne suis
pas intervenu et que je n'ai pas du tout l'intention d'intervenir, même
s'il y a des gens qui viennent nous dire: La question, cela devrait être:
Etes-vous pour ou contre la confédération actuelle ou des choses
comme cela? Ceci à mon avis, est absolument en dehors du mandat de notre
commission, selon la directive de la présidence. Personnellement, je ne
m'opposerai pas à ce que les gens viennent nous dire cela, mais je vais
me restreindre, cependant, à ne pas entreprendre un débat qui
soit totalement étranger à celui qui nous concerne
actuellement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pour
résumer la situation, il est vrai que la présidence a fait preuve
de souplesse envers nos intervenants, comme d'ailleurs, la semaine
dernière, à l'égard d'autres intervenants. Je me dis
toujours que les membres de la commission vont respecter le principe de fond,
qui est de ne pas axer la conversation sur une question de fond, soit
l'indépendance.
Je suis pour l'indépendance pour telle et telle raison; je suis
contre pour telle et telle raison, et il est bien évident, compte tenu
du contexte de nos travaux, qu'il devient impensable et impossible de ne pas
parler de ce référendum, du moment qu'on ne prend pas position
sur le fond de la question.
M. Gratton: D'ailleurs, je vous remercie, M. le Président,
parce que c'était un peu ce que j'avais fait valoir lors de nos travaux
la semaine dernière. On ne pouvait effectivement pas restreindre nos
discussions à la portée générale du livre blanc. Ce
à quoi je me référais tantôt, c'est le long
débat de procédure qui avait duré presque une heure et
demie, qui a nécessité la suspension des travaux de la commission
la semaine dernière, parce que les représentants du Barreau du
Québec s'étaient servis, à titre d'exemple, du
référendum... Je ne veux pas pousser la discussion...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais on
s'est recyclé depuis ce temps-là. Il y a eu une directive qui
avait été émise à 9 h 45 et nous sommes partis sur
une nouvelle politique qui tendait vers une plus grande souplesse. Disons qu'on
permettait des exemples.
M. Gratton: Bon! ...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...
à l'endroit des intervenants.
M. Burns: Si j'ai bien compris, M. le Président...
M. Gratton: Oui, j'ai très bien compris, M. le
Président. Je suis très heureux de savoir qu'il y a une nouvelle
directive, plus souple, qui a été émise en mon absence.
J'en suis fort aise, et je vous assure d'avance, M. le Président, que,
du côté de l'Opposition, nous n'aborderons pas le fond du
débat constitutionnel, nous nous limiterons aux modalités du
livre blanc.
M. Burns: Je serais très mal venu, M. le
député de Gatineau, de parler de l'affiche que vous portez
à votre veston actuellement. Je pense que je serais...
M. Gratton: Laquelle des deux? J'en ai deux.
M. Burns: Celle qui concerne une certaine élection
municipale...
Une Voix: Voulez-vous les identifier pour le journal des
Débats?
M. Gratton: Ah bon!
M. Burns: Je serais très mal venu de commencer à
discuter de la raison pour laquelle vous portez ça aujourd'hui.
M. Gratton: C'est sûr.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'ailleurs, M. le député de Gatineau, vous me donnez
peut-être l'occasion de lire cette directive que j'émettais au
début du mémoire de chaque intervenant je pense que vous
étiez absent à ce moment-là c'est que la
commission, parce que ce n'est pas son mandat, ne doit pas devenir, ni pour les
membres, ni pour les témoins, un forum pour les tenants ou les opposants
de la thèse devant éventuellement faire l'objet d'un
référendum au Québec. Nonobstant ce principe fondamental
qui devra être respecté, il est évident qu'il serait
contraire aux règles élémentaires du parlementarisme de
tenter d'interdire toute intervention qui s'appuierait sur des exemples
concrets pour illustrer une opinion sur les consultations populaires. En cas de
doute, comme je l'ai déjà dit, il faut pencher pour une plus
grande liberté, plutôt que pour la contrainte. Je me
réserve néanmoins le droit d'interrompre tout opinant cherchant
à faire de la présente commission une tribune pour faire valoir
une thèse plutôt qu'une autre ayant trait à une question
qui ne relève pas directement du mandat de la commission.
Je pense qu'on se comprend.
M. Gratton: Bon! Oui, d'ailleurs, M. le Président, vous me
permettrez de vous féliciter d'avoir
précisé votre pensée dans cette nouvelle directive
et de l'avoir rendue, à mon avis, plus souple.
M. le Président, cela étant dit, j'aimerais m'adresser
à nos invités surtout en ce qui concerne l'aspect de leur
mémoire qui traite d'une loi-cadre sur la consultation populaire. Ce
n'était sûrement pas le but de la Société
Saint-Jean-Baptiste, mais je vous dirai que vous rejoignez là la
position de l'Opposition officielle qui réclame un projet de loi
spécifique sur le référendum spécifique de l'avenir
constitutionnel du Québec.
D'ailleurs, le ministre tantôt, dans ses questions, faisait
allusion à la présentation du Barreau du Québec, ce n'est
pas mon but d'y revenir très longuement. Toutefois, j'aimerais contester
l'interprétation qu'il a faite du contenu du mémoire du Barreau.
En citant strictement les deux premiers paragraphes du mémoire du
Barreau, on situera le sens de ma question pour nos invités de ce
matin.
M. Burns: Je ne me référais pas au...
M. Gratton: Je cite le mémoire du Barreau:
"L'utilité d'avoir recours, plus ou moins fréquemment, à
la consultation populaire ou référendum dans l'exercice de la
fonction gouvernementale est évidemment une question importante qui
mérite d'être discutée et analysée en profondeur.
Elle est cependant d'appréciation largement politique et, à ce
titre, le Barreau ne croit pas devoir prendre position à ce sujet".
Je pense que c'est clair, le Barreau se dit ne pas devoir prendre
position quant à l'utilité d'avoir recours, plus ou moins
fréquemment, au référendum. Je continue la citation: "Cela
dit, si l'on souhaite, comme il se peut bien qu'il soit souhaitable, recourir,
dans certains cas, à la démocratie directe, le Barreau estime que
cela doit se faire dans les meilleures conditions possible et dans un contexte
où les règles du jeu soient claires et connues de tous". Nous
souscrivons tous à cette affirmation.
C'est donc dire que...
M. Guay: Un instant, M. le Président. Si le
député de Gatineau me permet, je l'inviterais à lire la
première phrase du troisième paragraphe...
M. Gratton: Avec plaisir! "C'est pourquoi le Barreau se
réjouit de l'intention du gouvernement de procéder à
l'adoption d'une loi-cadre sur la consultation populaire". On pourrait bien
lire tout le mémoire...
M. Guay: Non, mais je dis ça simplement parce que vous
disiez que l'interprétation du ministre sur les intentions du Barreau
n'étaient pas exactes. Alors, cette phrase m'apparaît pourtant
extrêmement claire.
M. Gratton: Ce que je voudrais souligner, M. le Président,
c'est que, d'une part, on a ceux qui veulent, comme le gouvernement, une
loi-cadre sur les référendums et tenir le
référendum sur l'in- dépendance, à partir d'une
loi-cadre, avec seulement la formulation de la question à être
débattue par la présentation d'une motion en Chambre, et, d'autre
part, on a ceux qui, comme nous, prétendent qu'il doit y avoir une loi
spécifique sur le référendum sur l'indépendance,
laquelle inclurait la question et que le tout serait sujet aux règles
normales de l'adoption d'un projet de loi, quel qu'il soit. On a, entre les
deux, la position du Barreau qui dit: Si vous décidez au Parlement, pour
des raisons politiques, qu'il doit y avoir une loi-cadre, nous en fait,
c'est ce qu'il suggère dans son mémoire
préférerions vous voir adopter, à chaque
référendum, une loi spécifique qui dicterait non seulement
la question, mais qui également pourrait faire état des
considérations quant à la participation financière du
gouvernement pour les options, quant à préciser un peu plus le
caractère délibératif de la consultation populaire en
opposition au caractère consultatif que veut lui donner le
gouvernement.
Alors, dans ce contexte, je dis tout de suite que nous sommes d'accord,
il doit y avoir une loi spécifique. En fait, je devrais vous demander,
M. Champagne, si, d'abord, compte tenu de votre allégation selon
laquelle il s'agit là d'un référendum type, unique en son
genre, qui engagera l'avenir du Québec à jamais, a dit quelqu'un
et le ministre l'a repris, peut-être pas, vous ne croyez pas, vous de la
Société Saint-Jean-Baptiste, afin de s'assurer de
l'équité pour tout le monde, que, effectivement, une loi
spécifique sur le référendum sur l'indépendance
répondrait mieux au désir du gouvernement de tenir ce
référendum qu'il a promis.
M. Champagne: M. le Président, je suis très
flatté de voir que les membres de l'Opposition se sont inspirés
du mémoire de la société, nous l'avons
rédigé avant le 30 septembre, mais nous ne savions quand
même pas la position du parti de l'Opposition. J'espère bien que
ces derniers vont prendre aussi les autres recommandations de la
société.
Il est entendu que notre position est assez claire. Le parti au pouvoir
a été nommé pour faire l'indépendance par le
processus du référendum. Considérant l'importance de la
question, je pense qu'on devrait mettre toutes les lumières sur cette
loi et en faire une loi très spécifique, simplement pour le
référendum sur l'indépendance et ensuite peut-être
lorsqu'il y aura la constitution de l'Etat du Québec
éventuellement, modifier cette loi ou en faire une autre pour des
questions très spécifiques, comme on en a parlé tout
à l'heure, l'avortement, la peine de mort, etc.
M. Burns: Si l'Opposition officielle est d'accord avec cette
partie du mémoire, je suis bien prêt à tout adopter cela,
pas de problème.
M. Gratton: Ici, le ministre recommence à faire ce qu'il a
fait la semaine passée, il va nous intercaler ses commentaires à
chaque question qu'on va poser. J'essaie d'être objectif, mais je peux
bien être partisan, si vous le voulez.
M. Ciaccia: Non, mais pour être clair, on n'est pas
d'accord. Pour qu'il n'y ait pas de malentendu, on n'est pas d'accord.
M. Gratton: M. le Président, suite à la
réponse que nous fournit M. Champagne, serait-il d'avis qu'au moment
où on parle de la formulation de la question, là aussi on est
d'accord qu'il doit y avoir le plus large consensus possible sur la formulation
de la question, parce que, bien entendu, si on veut exiger de la population
qu'elle se prononce sur une chose aussi importante que son avenir
constitutionnel, il est normal de penser qu'elle ne pourra le faire de
façon honnête, juste et claire que si on s'accorde sur le fait que
la formulation de la question va nous mener à ce résultat,
plutôt que de limiter le débat sur l'adoption de la formulation de
la question à 25 heures, comme le suggère le livre blanc ou
à 60 heures, comme vous semblez le suggérer dans votre
mémoire, puisqu'on dit: Oui, il devrait y avoir une loi
spécifique pour ce référendum en particulier; qu'on
inclue, dans le projet de loi, la formulation de la question et qu'on n'ait pas
à limiter le débat là-dessus, mais qu'on puisse le faire
comme pour l'adoption de quelque projet de loi que ce soit, avec toutes les
règles dont dispose le gouvernement pour faire adopter la loi, si par
hasard, l'Opposition faisait une obstruction systématique?
Est-ce que ce ne serait pas là une façon de
répondre à votre désir de faire en sorte que la question
soit bel et bien débattue à l'Assemblée nationale et
obtienne surtout un consensus assez large de la part des élus?
M. Champagne: Premièrement, de toute façon nous
sommes en faveur plutôt de plusieurs propositions. A ce moment-là,
que ce soit peut-être des options différentes qu'on offre à
la population; pas une question, mais des options. Cela peut être trois
ou quatre options différentes et on met un X au bout. Ce n'est pas une
question de formulation de la question; à ce moment-là, qu'on
débatte cette formulation-là durant 25 heures, 60 heures, j'en
suis. Je pense que le livre blanc le dit dans ce sens.
M. Gratton: Mais spécifiquement, vous opposez-vous
à ce que les questions ou la question...
M. Champagne: Ou les propositions.
M. Gratton: ... la ou les propositions soient incluses dans le
projet de loi et qu'elles soient débattues selon les règles
normales de l'Assemblée nationale pour l'adoption d'un projet de
loi?
M. Groulx: Oui, nous nous opposons, parce que nous voulons que la
loi soit une loi qui établisse les règles de la consultation. La
question, ce sera une autre chose dont l'Assemblée nationale
décidera.
M. Gratton: Si vous nous parlez des règles d'un
référendum donné, spécifiquement celui sur l'avenir
constitutionnel du Québec, à ce moment-là, les questions
ou les propositions devront nécessairement ne traiter que de cela.
Effectivement, cela devient peut-être la règle la plus importante,
soit la formulation des ou de la question. Ce que je voudrais savoir de vous,
c'est si vous avez une objection majeure à ce que cela se fasse à
l'intérieur du projet de loi plutôt que par présentation
d'une motion comme le prévoit le livre blanc? Je n'essaie pas de vous
embarquer dans quelque débat que ce soit, je veux connaître votre
opinion.
M. Groulx: C'est-à-dire que la façon dont nous
l'avons considéré jusqu'ici c'est, est-ce qu'il s'agissait que la
loi du référendum établisse les règles d'un
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec de telle
sorte que le débat sur cette loi ne se fasse que sur les
modalités du référendum? Quant à la formulation de
la question, toutes les thèses vont s'y affronter; alors il faudrait que
ce soit par une décision différente, prévue d'ailleurs
dans le livre blanc actuel.
M. Gratton: Alors, vous insistez pour que ce soit une motion
séparée du projet de loi.
M. Groulx: Distincte.
M. Gratton: Deuxième question, M. le Président, il
s'agit du financement des options. A la page 7 du mémoire de la
société, on note peut-être que je devrais citer le
texte le deuxième paragraphe: "Compte tenu du contexte canadien
et nord-américain, les normes de financement édictées par
le livre blanc mettront au départ en position
d'infériorité, les tenants de l'indépendance du
Québec en regard des protagonistes du statu quo ou de quelque nouveau
fédéralisme canadien". Plus loin, dans le même chapitre,
vous suggérez ou recommandez que le gouvernement se fasse l'instrument
ou finance et subventionne même les organismes qui appuient la
thèse souverainiste ou indépendantiste. Ce que je voudrais
savoir, c'est s'il y a une possibilité, selon vous, soit par le livre
blanc... Parce qu'en fin de compte, les normes édictées par le
livre blanc telles que vous les citez, ne touchent que le moment de la campagne
référendaire elle-même, elles ne touchent pas à la
campagne préréférendaire. La recommandation que vous
faites par contre au gouvernement d'implanter et de subventionner des
organismes ou d'implanter des comités semblables à ceux qu'Ottawa
s'est donné impliquerait effectivement des décisions qui ne
portent pas sur la consultation populaire comme telle. Alors, de quelle
façon voyez-vous, par quels mécanismes parce que ce n'est
pas dans le livre blanc verriez-vous cette loi que devra déposer
le gouvernement, soit sur la consultation populaire en général,
soit sur le référendum sur l'indépendance en particulier,
est-ce que vous concevez que la loi devrait édicter la façon,
pour le gouvernement, de subventionner les organismes souverainistes?
M. Champagne: Non. De toute façon, je pense qu'on accepte
le financement, à travers le livre
blanc, pour la période référendaire, et nous, dans
cette observation de la page 7, égalité des chances, on traite de
la période préréférendaire. Actuellement, le
débat est commencé, la loi n'est même pas votée et
le débat est commencé. Actuellement, on le cite, il y a $11
millions pour faire la promotion de l'unité canadienne. A ce moment-ci,
il faut se donner l'égalité de chance; pourquoi le gouvernement
qui est au pouvoir, qui a eu le mandat démocratique de faire
l'indépendance du Québec, ne...
M. Gratton: De toute façon, on...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gratton: On n'argumentera sûrement pas, entre vous et
moi, M. Champagne, du mandat du gouvernement. On n'est pas d'accord
là-dessus et on ne le sera probablement jamais. Mais ce que je voudrais
que vous précisiez, c'est que, selon vous, il n'y a pas de
mécanisme, soit par le biais d'une loi, soit par le biais du livre
blanc, qui permette au gouvernement d'intervenir comme vous le recommandez.
M. Champagne: Oui, il pourrait certainement le faire. Pour donner
le plus d'information possible à tous les Québécois, de
toutes tendances, pourquoi pas une commission itinérante à
travers les villes de la province de Québec à laquelle tous les
Québécois de toutes tendances pourraient se présenter pour
parler de l'avenir du Québec, de toute façon? Nous
considérons que ce serait acceptable.
M. Gratton: Si j'ai bien compris, votre recommandation n'est pas
d'aider ou de subventionner les Québécois de toutes les
appartenances, c'est de faire ce que vous appelez l'égalité des
chances en subventionnant seulement ceux des Québécois qui
partagent l'objectif du gouvernement, la souveraineté.
M. Champagne: On pourrait quand même aller plus loin que
ça pour avoir l'égalité des chances. On dit que le
fédéral, dans un geste démocratique, devrait même
aider les mouvements indépendantistes du Québec pour que les
chances soient égales. Cela va jusque là. On demande même
cette chose.
M. Gratton: Vous admettrez que ce n'est pas ce que vous dites
dans votre mémoire, comme tel. Je vous dirai de toute façon
qu'ayant participé moi-même à l'organisation d'un certain
groupe fédéraliste, jusqu'à maintenant, les subventions du
fédéral tardent de beaucoup à venir.
Une dernière question, M. le Président, et très
courte celle-là.
M. Guay: ... faire la demande.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gratton: Cela viendra peut-être éventuellement,
selon la décision que le gouvernement prendra face à la
recommandation de la Société Saint-Jean-Baptiste.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gratton: M. Champagne, pourriez-vous nous dire les raisons qui
vous ont motivé à modifier la question du droit de vote? Vous
parliez dans le mémoire de 18 ans de résidence continue, à
peu près ça, et vous nous avez demandé de modifier cela
à trois. Est-ce qu'il s'agissait seulement d'une erreur de frappe ou
aviez-vous, effectivement, l'intention de proposer que les
Québécois aient 18 ans de résidence continue pour avoir le
droit de vote?
M. Champagne: On ne voulait pas le proposer, c'était une
erreur.
M. Gratton: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. D'abord, au nom de
l'Union Nationale, je tiens à féliciter les membres de la
Société Saint-Jean-Baptiste pour leur mémoire. Quelques
commentaires, si vous me le permettez, M. le Président. On sait que le
livre blanc préconise une loi-cadre visant toutes les consultations
populaires qui pourraient avoir lieu, afin de consulter objectivement tous les
Québécois à l'aide d'un outil en lequel ils auraient
confiance, qu'ils soient pour ou contre une option. Tel que le mentionnait le
ministre en titre, il s'agit d'un genre de système de plomberie. Je
pense qu'on est plutôt ici pour discuter du système de la
plomberie que de ce qui va circuler à l'intérieur.
Le projet de loi existe surtout en regard du contenant et sauf erreur,
dans votre mémoire, vous semblez vouloir discuter du contenu
plutôt que du contenant. Je ne sais pas...
M. Champagne: Vous avez droit à votre
interprétation.
M. Goulet: Bon. Je vous pose la question, est-ce que vous
discutez plutôt du contenu que du contenant? Vous me dites qu'il s'agit
de la façon d'interpréter, mais je suis la deuxième
personne à vous poser cette question, la première a
été le ministre. Qu'est-ce que vous répondez
là-dessus?
M. Champagne: De toute façon, je pense qu'on parle de ce
que vous appelez la plomberie. On traite aussi de la plomberie, tout en parlant
du fond de la question.
M. Goulet: Vous avez beaucoup d'arguments, je dirais même
que 75% concernent ce qui devrait circuler dans cette plomberie. Autrement dit,
c'est le contenu. Vous dites même que le gouvernement devrait mettre de
l'argent pour contrecarrer les
plans d'Ottawa concernant ce projet. Suite à ce qu'a
demandé le président ce matin, on devrait plutôt discuter
de cette façon de consulter objectivement les gens. Ensuite, on verra
quelle doit être la question qu'on devra poser, toujours au sujet du
référendum pour ou contre l'indépendance et la
souveraineté du Québec. Je pense que le projet de loi que nous
avons devant nous concerne surtout ce genre de contenant je
m'arrêterai à ce mot-là, je le trouve important
plutôt que le contenu.
Egalement, il y a bien des choses, je vous dis que l'objectivité
de votre mémoire n'est pas tout à fait l'objectivité
visée par le livre blanc. Il en est même loin.
A un moment donné, le monsieur qui est à votre droite a
dit: "Si le peuple se prononce, c'est irréversible". J'imagine qu'il
voulait dire: Si le peuple se prononçait affirmativement à une
question. Mais est-ce que cela serait la même chose si le peuple se
prononçait négativement? Est-ce que vous auriez exactement les
mêmes arguments? D'après vous est-ce que c'est également
irréversible?
M. Henry: Si vous permettez, je vais répondre à
votre première question, au sujet du contenant. C'est évident que
lorsqu'on cherche un contenant, le contenant doit s'adapter au contenu qu'il va
y avoir dedans. Etant donné que nous, on pense au
référendum sur l'indépendance du Québec, sur la
souveraineté du Québec, il nous semble que la façon de
faire ce référendum doit être différente d'un
référendum sur la construction d'une autoroute.
M. Goulet: Pourquoi?
M. Henry: Parce qu'on décide de l'avenir du pays. On ne
décide pas simplement d'une question temporaire. On décide de
l'avenir du pays.
Pour votre deuxième question, vous dites...
M. Goulet: Est-ce que je peux vous interrompre, sur la
première question. Vous dites: On décide de l'avenir du pays.
J'imagine que le gouvernement n'irait pas poser une question qui n'engagerait
pas l'avenir d'un peuple. Cela peut être sur l'assurance automobile,
où tout le monde est impliqué, cela peut être sur un
projet...
J'imagine que si on décide de faire une consultation populaire,
c'est parce que cela engage pas mal tout le monde, dans l'avenir.
M. Henry: Mais cela peut être quelque chose de temporaire.
Pour prendre un autre exemple, on peut décider, par un
référendum, de ne pas bâtir de centrale nucléaire.
Mais, dans deux ans, on peut décider le contraire, par un autre
référendum. Ce sont des choses qui sont en évolution.
M. Goulet: Je ne veux pas faire un contre-interrogatoire, mais si
nous consultons les gens sur le contenu pour le référendum pour
ou contre l'indépendance du Québec, d'après vous, cela ne
peut pas être temporaire? Si les gens se prononcent pour ou contre, cela
ne peut pas être temporaire, comme pour le nucléaire, comme pour
tout autre projet. Pourquoi cela ne peut-il pas être temporaire?
M. Henry: On n'a jamais vu d'exemple d'un pays qui soit revenu en
arrière. Les pays qui se sont affranchis, qui sont devenus
indépendants ne reviennent pas en arrière.
Cela répond à votre deuxième question. Il se peut,
il pourrait arriver qu'un premier référendum décide qu'on
n'est pas prêt pour la souveraineté, autrement dit, comme M. le
ministre le disait tout à l'heure, une fois qu'on est majeur, on ne
redevient pas mineur. Mais on peut essayer de devenir majeur et rater son coup.
Et on peut se reprendre.
M. Goulet: Cela fait voir votre tendance. Si vous le permettez,
M. le Président, j'aurais deux autres questions.
M. Henry: Elle n'était pas cachée.
M. Goulet: Vous préconisez un éventail de
questions. D'après moi, plus il y aura de questions, plus on va se
perdre pour connaître les tendances ou les forts courants. J'imagine que
s'il y avait seulement une question, on pourrait voir les courants ou les
tendances. S'il y avait cinq ou six questions, j'imagine qu'on ne pourrait pas
voir les tendances à 90%. Cela va être dilué dans toutes
les questions.
Pourquoi favorisez-vous plusieurs questions?
M. Champagne: Je pense qu'il y a un pluralisme politique dans la
province, et je pense qu'il ne faudrait peut-être pas canaliser tout le
monde sur une question. Il faudrait quand même que les
Québécois aient la chance de se prononcer sur quelques
propositions qui seront débattues à l'Assemblée nationale.
Cela sera certainement beaucoup plus clair, beaucoup plus logique d'avoir
quelques questions, quelques propositions.
M. Goulet: M. le Président, une dernière question.
Je m'en tiens au mot bien spécifique de référendum ou de
consultation populaire. Si moi, comme député ou comme ministre,
par exemple, je veux savoir ce que la population ou ce que ma population pense,
pourquoi devrais-je l'influencer, d'un côté ou de l'autre? Je sais
que cela se passe comme cela dans tous les référendums. Mais
pourquoi devrais-je l'influencer? Mon véritable devoir ne serait-il pas
plutôt et ce n'est pas parce que je veux m'enlever un fardeau, je
vous pose la question de m'assurer que toute la population, que tous mes
électeurs soient bien renseignés, soient renseignés
objectivement, pour ou contre une option, et ensuite, qu'ils puissent se
prononcer démocratiquement?
Au lieu de l'influencer pour ou contre un projet, est-ce que cela ne
serait pas mon devoir, comme homme public, de m'assurer que la population que
je veux consulter soit bien renseignée
pour ou contre sans devoir nécessairement l'influencer?
Si c'est moi qui l'influence, si, dans mon comté, j'influence la
population, quelle que soit la question que nous posons, il me semble que cela
peut manquer d'objectivité. Je vous pose la question: Est-ce que c'est
une question qu'on devrait poser aux gens ou est-ce que c'est une
proposition?
Dans votre mémoire, vous semblez dire qu'on devrait faire une
proposition aux gens avec des arguments pour ou contre. Je vous dis: Pourquoi
ne poserait-on pas une question à la population, le ministre ou
n'importe quel homme d'Etat ne devrait-il pas s'assurer que la population soit
renseignée objectivement de façon qu'elle nous dise si elle est
pour ou contre? Il y a une très grosse différence entre la
question et la proposition.
Dans votre mémoire, vous semblez vouloir faire une proposition
aux gens et argumenter pour ou contre la proposition. Je dis: Pourquoi ne
poserait-on pas une question en s'assurant que la population soit
renseignée bien objectivement? Voyez-vous une différence à
cela?
M. Henry: M. le Président, c'est évident que le
gouvernement va poser une question qui peut comporter plusieurs options et que
ce sera le devoir du gouvernement de bien renseigner les gens sur cette
question. Je ne vois pas pourquoi un député, comme n'importe quel
autre citoyen, ne pourrait pas travailler à influencer les gens dans un
sens ou dans l'autre. D'ailleurs, même si on voulait le faire, c'est
impossible. Tout le monde va vouloir dire son mot là-dedans. Tous ceux
qui sont intéressés à la politique cela comprend
les députés plus que n'importe qui vont faire campagne
pour l'une ou l'autre option, mais il est évident que le gouvernement
devra s'assurer que la question soit bien comprise, qu'elle soit claire et
qu'elle ne comporte pas d'ambiguïté.
M. Champagne: C'est sûr, parce que, M. le
député, je pense qu'à ce moment-là, c'est jouer un
peu à l'angélisme que de dire: Vous allez avoir quand même
une information objective. Je pense que la bataille du référendum
est déjà commencée. On sait de quel côté elle
penche ou les tendances. Les influences sont déjà en cours. Je
pense que c'est demander l'impossible que de dire, froidement, objectivement:
Tout le monde va avoir la même information venant peut-être des
mêmes personnes. C'est pour cela que je pense qu'on a le droit
d'influencer la population que vous représentez et de donner
l'information le plus objectivement possible. On va l'espérer.
M. Goulet: Une dernière question, M. le Président.
Ne croyez-vous pas que ce que vous reprochez à Ottawa ou au
profédéralisme dans votre mémoire, vous versez dans
l'extrême ce que vous reprochez, d'essayer d'influencer, etc.,
vous demandez au gouvernement du Québec de faire le contraire ici?
M. Groulx: Nous demandons de contrebalan- cer pour que
l'information soit objective, pour que les gens soient informés.
M. Goulet: Pourquoi, d'après vous, le gouvernement du
Québec ne devrait-il pas s'occuper des autres gouvernements et dire:
Nous, nous posons une question, nous voulons nous assurer que la population
soit bien renseignée sur le pour et le contre, sans s'occuper de ce qui
vient de l'extérieur? Le devoir du gouvernement du Québec ne
serait-il pas plutôt de poser une question et de s'assurer que les gens
soient bien renseignés, objectivement?
Ce que vous demandez au gouvernement du Québec, c'est de les
renseigner seulement dans une option, pour contrebalancer ce qui peut venir de
l'extérieur. C'est ce que vous demandez, en réalité, au
gouvernement du Québec. Pourquoi n'irait-il pas dans les deux sens?
M. Groulx: Pour s'assurer que les gens sont bien informés,
il faut qu'il tienne compte de ce qui vient de l'extérieur. Sinon, c'est
l'influence extérieure qui va dominer; c'est ce que nous disons,
d'ailleurs.
M. Goulet: D'accord, merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Comme il
serait souhaitable que nous puissions libérer nos invités pour 13
heures, j'ai quatre intervenants ici, je demanderais la collaboration des
quatre, afin que tous puissent prendre la parole très brièvement.
Dans l'ordre, MM. les députés de Mont-Royal, Terrebonne,
Verchères et Montmagny-L'Islet, avec le consentement unanime de la
commission. M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Pour continuer sur
l'aspect que vous avez souligné dans votre mémoire quant au
rôle du gouvernement d'informer la population et de prendre une position
sur la question de l'indépendance, ne voyez-vous pas une
différence entre le rôle du gouvernement qui représente
tous les Québécois, ceux qui sont pour ou ceux qui sont contre
une certaine position, et le rôle du Parti québécois qui a
une certaine thèse, un certain objectif politique? N'y a-t-il pas
confusion entre les deux dans votre mémoire?
M. Champagne: De toute façon, je pense que le gouvernement
fédéral n'a pas les mêmes scrupules.
M. Ciaccia: Question de différence, ne trouvez-vous pas
que le gouvernement fédéral a un mandat clair pour faire
l'unité canadienne, tandis que le mandat dont on parle ici,
évidemment, n'est pas clair, puisqu'il va y avoir un
référendum?
M. Champagne: Non, il est clair dans notre esprit.
M. Ciaccia: Dans le vôtre.
M. Champagne: Oui. Je pense que, lorsqu'il y a eu la campagne
électorale, il s'agissait de dire non au séparatisme, pour ceux
qui représentaient le Parti libéral.
M. Ciaccia: Oui, mais on ne refera pas la campagne
électorale, c'était censé être un bon gouvernement
aussi. On n'en parlait pas, mais...
M. Gratton: Ce n'est pas tellement un bon souvenir pour nous, de
toute façon.
M. Burns: II y a quelqu'un, d'ailleurs, qui a fait une campagne
électorale pour rechercher un mandat clair et qui a eu ce mandat
clair.
M. Gratton: Regardez le ministre!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Burns: C'est-à-dire de s'en aller chez lui. M.
Gratton: Que ce n'est donc pas gentil, cela!
M. Ciaccia: Vous représentez 40% de la population. C'est
encore seulement 40% de la population.
M. Burns: Cela m'insulte.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Ciaccia: Dans votre mémoire, pourquoi êtes-vous
contre une question, oui ou non? Est-ce que vous avez certaines craintes de
vous faire dire non?
M. Champagne: On opte pour des propositions. Je ne sais pas les
tendances des personnes à cette table. Il y en a peut-être qui
sont pour un fédéralisme genre statu quo, un
fédéralisme renouvelé. Il y en a peut-être qui sont
pour la séparation. Il y en a qui sont peut-être pour la
souveraineté-association. Alors, que les gens se prononcent
là-dessus, de toute façon.
M. Ciaccia: Ne craignez-vous pas que, si vous ajoutez toutes
sortes de questions, du genre de celles que vous venez de souligner, cela
créerait une confusion dans l'esprit de la population? Vous prônez
une certaine position. Pourquoi ne voulez-vous pas demander à la
population si, oui ou non, elle est contre cette position? Vous avez une
position dans votre mémoire. Est-ce que vous craignez de demander
à la population, oui ou non, d'approuver ou de rejeter cette
proposition?
M. Guay: M. le Président, je me vois, à regret,
dans l'obligation de faire appel au règlement pour interrompre notre
excellent ami, le député de Mont-Royal. J'ai l'impression, et
j'attire votre attention là-dessus, que, par le genre de questions qu'il
pose à l'heure actuelle, s'il n'a pas encore tout à fait atteint
le fond de la question, il le frôle singulièrement dangereusement,
puisqu'en évoquant l'option constitutionnelle de la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et la question du
référendum qui portera sur l'avenir du Québec, le
député de Mont-Royal me paraît s'engager dangereusement sur
la pente glissante du débat de fond sur l'avenir collectif des
Québécois.
M. Ciaccia: Sur la question de règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je suis
sûr que M. le député de Mont-Royal va s'éloigner de
l'abîme, autant que possible.
M. Ciaccia: M. le Président, je pose seulement des
questions sur des positions qui ont été soumises par les
invités. Je ne vais pas sur la question de fond, mais je vais
procéder à d'autres questions, si cela chatouille ou si cela
tracasse le député de Taschereau.
M. Guay: M. le Président, ce n'est pas que cela me
tracasse ou que cela chatouille, mais c'est simplement qu'il y a des directives
et j'aime bien qu'on s'en tienne...
M. Ciaccia: Chaque fois qu'on essaie d'en venir plus près
d'une vérité, on se fait interrompre par une question de
règlement, chaque fois qu'on arrive au noeud de la question.
M. Guay: M. le Président, j'ai l'impression que le
député de Mont-Royal connaît suffisamment les
règlements, il est député depuis assez longtemps pour
savoir que les règlements, c'est d'abord et avant tout aux
députés de les respecter.
M. Ciaccia: C'est parce que je les connais que je pose les
questions que je pose. Je n'apprécie pas de me faire interrompre durant
les questions que je pose. Je vais continuer, si vous me le permettez. Je
trouve intéressantes vos remarques sur ceux qui vont avoir le droit de
vote. Vous dites, dans votre mémoire: "Accorder le droit de vote au
référendum en matière d'autodétermination à
tous les citoyens sans distinction équivaut à refuser son
identité au peuple québécois, etc." Quelle est votre
définition d'un Québécois?
M. Champagne: Pour en arriver à cela, on a vu ce qui se
faisait ailleurs, de toute façon. Vous avez l'exemple d'une position:
simplement pour faire la séparation du Danemark, et cela a
été fait, on a demandé aux immigrés... Les
immigrés n'avaient pas le droit de vote, même s'ils étaient
dans le pays depuis trois générations. On a vu ce qui se faisait
ailleurs. C'est pour cela qu'on est arrivé à cette
conclusion.
M. Ciaccia: Je ne vous demande pas de me donner des exemples
d'autres pays, parce que je pourrais vous en donner moi aussi. Je ne vous
demande pas de me donner ce qui est arrivé au Schleswig-Holstein en
1900. Je ne vous demande
pas de me donner tous les exemples de l'Allemagne de 1933.
J'espère que vous allez pouvoir nous donner des exemples qui sont plus
relatifs à notre démocratie dans l'Amérique du Nord. Je
voudrais m'en tenir à nos moeurs démocratiques.
Vous avez fait référence au système parlementaire
britannique, au référendum britannique. Alors, quelle est votre
définition... Vous dites que vous voulez limiter ça aux
Québécois. Est-ce qu'une personne doit être née ici
pour être Québécoise? Quelle est votre définition
d'un Québécois? Pas votre définition d'un citoyen du
Danemark, une définition d'un Québécois.
M. Henry: II nous semble qu'un Québécois, c'est
quelqu'un qui vit au Québec et qui y est pour y demeurer. Alors, c'est
pour ça l'idée de trois ans de résidence, c'est pour
éviter quelqu'un qui est en transit au Québec. Un immigrant qui
vient d'arriver et qui va s'en aller l'année prochaine ou un
employé d'une entreprise multinationale qui est transféré
temporairement à Montréal, et qui va se prononcer sur l'avenir du
Québec. Alors, il nous semble qu'il faut un minimum de trois ans de
résidence au Québec. Cela nous semble quelque chose de... Le
strict minimum pour être vraiment intégré à la vie
québécoise, pour être un Québécois qui est
ici et qui a envie d'y rester.
M. Groulx: Si vous me permettez de compléter...
M. Ciaccia: Parce que l'impression que j'ai... Pardon?
M. Groulx: Me permettez-vous de compléter, M. le
ministre?
M. Ciaccia: Oui, certainement.
M. Groulx: C'est que, en vertu de la loi, actuellement, un
Québécois, c'est un citoyen canadien vivant au Québec.
M. Ciaccia: Est-ce que vous acceptez cette définition?
M. Groulx: Non, nous ne l'acceptons pas justement. C'est pour
ça que nous proposons une résidence plus prolongée, afin
que ce citoyen canadien non seulement vive au Québec, mais soit
intégré au Québec.
M. Ciaccia: Cela dépend de votre définition
d'intégré, parce qu'on...
M. Groulx: J'ai bien dit au Québec.
M. Ciaccia: Oui, on peut être intégré au
Québec sans partager votre point de vue politique.
M. Groulx: Evidemment.
M. Ciaccia: Parce que moi, la façon...
M. Groulx: C'est pour ça.
M. Ciaccia:... dont vous me décrivez ça, je me
demanderais pourquoi moi, j'aurais moins de droits que vous, parce que je ne
suis pas né au Québec; pourquoi aurais-je moins le droit que vous
de décider de mon avenir?
M. Groulx: Vous y avez droit.
M. Ciaccia: Au même niveau que vous-même?
M. Groulx: Oui.
M. Ciaccia: Alors, vous ne faites pas de distinction entre les
citoyens qui habitent au Québec.
M. Groulx: Depuis au moins trois ans, les citoyens
Québécois. C'est bien sûr que les citoyens Canadiens, qui
ont la citoyenneté canadienne tout de même, actuellement il faut
tenir compte de la citoyenneté canadienne.
M. Ciaccia: Mais pourquoi ces gens-là auraient le droit de
voter? Pourquoi ne pas créer deux différentes classes de
citoyens, comme vous le faites dans votre référendum?
M. Groulx: Non, permettez. Ce que nous voulons éviter,
c'est qu'un citoyen canadien, né au Canada ou ailleurs, peu importe,
mais devenu citoyen canadien, qui ne vit au Québec que depuis un an,
soit appelé à décider du sort du Québec.
M. Ciaccia: Je n'accepte pas cette distinction, parce que c'est
pas mal arbitraire. Vous faites deux règles de jeu. Vous en faites une
pour voter pour un gouvernement. Les règles du jeu, c'est qu'il soit
citoyen ici depuis un an...
M. Groulx: Nous n'avons pas d'objection à ce que la loi
électorale soit modifiée en conséquence...
M. Ciaccia: ... et que... Oui.
M. Groulx: D'ailleurs, pendant un certain temps, je pense qu'il
fallait au moins deux ans de résidence au Québec pour voter.
M. Ciaccia: Vous voulez modifier, naturellement... C'est une
distinction arbitraire...
M. Groulx: Deux ans......au Québec.
M. Ciaccia: ... qui semble...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Ciaccia: Mais, supposons que je continue dans votre ligne de
pensée; est-ce que la définition de votre
Québécois, qui est ici et qui, pour une raison ou pour une autre,
ne comprend pas la langue française aussi bien qu'il le devrait...
Est-ce que vous permettrez que la question du référendum soit
bilingue?
M. Champagne: Disons... De toute façon, il y a eu la
promulgation et l'adoption de la loi 101 ; la langue officielle, c'est le
français, et je pense que la question devrait être en
français. Je pense qu'il y aura assez de temps pour permettre à
tous les citoyens parce que le débat va durer assez longtemps
de comprendre la question, que ce soit peut-être dans n'importe
quelle langue; de toute façon, le nouvel immigrant, qui ne sait parler
ni anglais, ni français, je me demande si on ne devrait peut-être
pas traduire la question aussi en allemand.
M. Ciaccia: Non, je ne parle pas de celui qui ne sait parler ni
français, ni anglais. Mais nous avons un grand pourcentage de notre
population qui, pour une raison ou pour une autre, n'a pas autant de
connaissances de la langue française que vous-même. Ces
gens-là devraient avoir le même droit de vote que vous et
devraient avoir le même droit que vous de s'exprimer et de comprendre la
question; alors que par votre recommandation, par votre réponse, vous
semblez vouloir leur enlever ce droit de vote, parce qu'une personne qui ne
peut pas comprendre la question, c'est inutile; elle ne pourra pas voter.
C'est illusoire, le droit de vote pour une personne qui ne peut pas
comprendre ce que signifie la question, et surtout si, d'après la
position que vous prenez, il y a plusieurs questions. Vous ne voulez pas avoir
une seule question à laquelle on répondra oui ou non. Il me
semble donc que vous enlevez le droit de vote à une grande partie de la
population.
M. Champagne: Je ne pense pas du tout qu'on enlève le
droit de vote. On soutient quand même que la question devrait être
uniquement en français, sans enlever le droit de vote aux citoyens.
S'ils ne savent pas le français au Québec, en fin de compte, je
ne veux quand même pas condamner tous les anglophones qui ne savent pas
le français, mais ils devraient le savoir.
M. Ciaccia: Alors, ils ne peuvent pas être
Québécois si, pour une raison ou une autre, ils ne savent pas le
français suffisamment pour comprendre la question à fond.
M. Champagne: C'est votre opinion.
M. Ciaccia: Non, c'est votre réponse! Ce n'est pas ma
réponse.
M. Groulx: II est évident qu'un citoyen qui vit au
Québec et qui ne sait pas le français ne peut pas être
intégralement québécois, dans le sens de la
définition que vous demandiez tout à l'heure.
M. Ciaccia: C'est entendu d'après votre... Vous voulez
faire une loi punitive, vous voulez punir ces gens qui, dans le passé,
n'ont pas...
M. Champagne: Non. M. Groulx: Non, écoutez.
M. Ciaccia: C'est mon opinion, M. le Président. J'ai le
droit d'exprimer mon opinion. Comme de l'autre côté, ils ont le
droit de hurler, moi, j'ai le droit de parler.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! On ne hurle pas, ce matin. Cela va très
bien.
M. Gratton: Tout le monde n'a pas votre définition des
hurlements, M. le Président.
M. Ciaccia: Je n'ai plus de questions, M. le Président. Je
vais céder la parole à un de nos collègues.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Mont-Royal. M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Merci, M. le Président. M. Champagne, vous
proposez donc, comme mécanisme fondamental, une loi spécifique
sur un référendum suivie d'une motion en Chambre qui comporterait
le débat sur la question elle-même.
M. Champagne: Ou les questions, ou les propositions.
M. Fallu: Ou les questions... En l'occurrence. Oui.
M. Champagne: D'accord.
M. Fallu: A ce moment-là, votre proposition rejoint
sensiblement la démarche fondamentale du livre blanc, puisque le
gouvernement propose actuellement, pour sa part, une loi-cadre des
référendums plus la question posée par voie de motion en
Chambre. Qu'est-ce qui, entre les deux, loi-cadre et loi spécifique,
fait dans votre esprit, j'allais dire la spécificité d'une loi
spécifique pour un référendum, à savoir celui
auquel vous faites allusion dans votre mémoire? En quoi est-ce qu'une
loi spécifique, dans cet esprit, serait différente d'une
loi-cadre.
M. Champagne: II y a tellement de mécanique. A un certain
moment, dans une loi-cadre, vous allez parler dans la loi-cadre dont il est
question, de financement. Vous parlez de la question, vous parlez de diverses
sortes de choses. Dans un autre référendum, ce ne serait
peut-être pas nécessaire d'avoir un débat d'une telle
durée, supposons 60 heures pour arriver à la question, il ne
serait pas nécessaire de compter $0.50 à chacun des
électeurs pour chacune des tendances. C'est pour cette raison que nous
favorisons plutôt une loi spécifique, une loi pour le
référendum sur l'avenir politique du Québec.
M. Fallu: Pour vous, le financement doit donc être plus
important au moment d'un référendum plutôt que l'autre?
M. Champagne: Pour celui qui s'en vient, oui. Certainement.
M. Fallu: Et cela, de part et d'autre, c'est-à-dire dans
les deux groupements qui défendraient l'une ou l'autre thèse.
M. Champagne: Oui, pour égaliser les chances des
tendances.
M. Fallu: Mais l'égalité des chances...
M. Champagne: Pendant la période
référendaire. Je pense bien. Oui.
M. Fallu: Mais l'égalité des chances se fait autant
avec $2 de chaque côté, qu'avec $0.50 de chaque
côté.
M. Champagne: Oui.
M. Fallu: Donc, pourquoi une loi spécifique qui aurait une
dimension relative au financement?
M. Champagne: C'est le livre blanc qui le propose de toute
façon. Nous disons que cette loi-cadre ne devrait pas régir tous
les référendums. C'est ce que nous disons. Au point de vue du
financement et au point de vue de la question.
M. Fallu: Quant à la durée, il s'agit de la
durée du débat de la motion en Chambre, distincte de la
durée du débat référendaire comme tel après
l'émission des brefs. Il y a donc deux formes de durée. La
tradition parlementaire veut que, d'après le règlement qui nous
régit à l'Assemblée nationale, les débats de
motions, que ce soit motion du message inaugural, motion principale,
également motion de fond sur la présentation du budget, durent 25
heures.
C'est un peu dans cet esprit qu'on allait plutôt vers l'observance
des règles habituelles de procédure de l'Assemblée
nationale. Pourquoi, pour un cas spécifique, changer je le dis
entre guillemets des traditions parlementaires?
M. Champagne: Si vous voulez avoir un référendum,
une consultation populaire sur la construction d'une autoroute, est-il
nécessaire, à ce moment-là, d'avoir toutes ces formes,
à savoir prendre 60 heures ou 25 heures, avoir un débat qui va
durer 60 jours et le reste? Je ne pense pas que cela soit utile.
M. Fallu: Mais sur la formulation de la question, puisque tel est
le sujet qui serait débattu lors d'une motion en Chambre, il ne s'agit
pas de faire le débat de fond en Chambre pour le oui ou pour le non, ou
pour une multitude de questions, mais bien strictement de placer le cadre de la
question.
M. Champagne: Oui.
M. Fallu: Je ne vois pas beaucoup l'importance d'avoir un
débat de 60 heures en Chambre pour rédiger la motion qui comporte
strictement la question, alors que le débat de fond aura lieu pendant...
j'allais dire pendant la période électorale qui va suivre.
M. Groulx: Cette suggestion a été faite en vue de
permettre une plus grande liberté d'expression aux membres de
l'Assemblée nationale.
M. Fallu: D'accord. Quant à la durée de 60 jours,
déjà la loi électorale, dans le mouvement de laquelle
s'inscrit d'ailleurs le livre blanc, prévoit des mécanismes de
l'ordre de 28 jours. Vous proposez un débat de 60 jours. Vous savez
qu'à une époque récente on a justement restreint ces
débats compte tenu des media, de l'information qui circule beaucoup
mieux qu'au moment où ces lois électorales ont été
faites, c'est-à-dire, à toutes fins pratiques, au XVIIIe
siècle. On a donc restreint en fonction d'une société qui
s'est transformée. Pourquoi devrait-on revenir à un débat
aussi long qu'à l'époque ancienne, au moment où il
était long de circuler à travers "the country", puisqu'il s'agit
de loi britannique? Quelle nécessité y voit-on? N'y aurait-il pas
un phénomène d'écoeurement?
M. Groulx: Pour la même raison que tout à l'heure,
afin que personne ne puisse prétendre que le gouvernement veut faire un
coup de force et prendre les gens, je ne dirais pas par surprise, parce que 30
jours ce ne serait pas par surprise, mais raccourcir la période de
discussions. Afin qu'on ne prétende pas ensuite que les gens n'ont pas
été suffisamment éclairés pour voter, mieux vaut
une période plus longue que plus courte, dans ce cas.
M. Fallu: D'accord. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
Deux dernières questions très rapides. Une pour le
député de Verchères, une question et une réponse
rapides, et une pour le député de Montmagny-L'Islet, avec le
consentement de tous les membres de la commission puisqu'il n'est pas membre.
Une très rapide également. M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: J'aurais voulu avoir plusieurs minutes pour
détailler un peu, mais la question qui me préoccupe, c'est la
question du droit de vote. A priori, je suis assez sensible à vos
arguments. La question que je voudrais vous poser... Le président
m'indique que je n'aurai pas l'occasion de parler longtemps...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
président et l'horloge.
M. Charbonneau: ... et l'horloge. Ne croyez-vous pas, finalement,
malgré le bien-fondé théorique de votre thèse au
sujet du droit de vote, que cela créerait des problèmes
politiques plus graves que cela n'en crée actuellement, en termes de
politique nationale, le fait de limiter le droit de vote?
M. Champagne: De quelle façon pensez-vous qu'on le limite
si on recommande trois ans de résidence? Je ne comprends pas.
Excusez-moi, je ne comprends pas le sens...
M. Charbonneau: C'est-à-dire qu'il y a déjà
une limite de deux ans... Je vous dis bien sincèrement que je suis assez
sympathique à cette idée, mais comment pensez-vous que cela sera
accepté et accueilli par la population du Québec, compte tenu du
charriage émotif qu'on pourra faire pour essayer de discréditer
ce qu'on tente d'ailleurs déjà de faire avant terme
les résultats d'un référendum sur l'avenir constitutionnel
du Québec?
M. Groulx: II est sûr que certaines personnes pourraient
invoquer cet argument pour dire qu'un certain nombre d'électeurs
réguliers ont été privés de leurs droits de
vote.
Alors, il s'agit de trouver la solution la plus juste en même
temps que la plus propice, du point de vue que vous l'envisagez. C'est pour
cela que nous nous sommes limités à trois ans. D'ailleurs, dans
la Loi électorale actuelle, c'est un an, mais je comprends parfaitement
bien l'aspect sous lequel vous l'envisagez.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Excusez-moi, M. le député de Verchères. Une
dernière question très rapide.
M. Charbonneau: En espérant qu'un jour ces fameuses
commissions parlementaires permettront un meilleur partage du temps entre les
membres.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
le partage du temps a été respecté pour tout le monde. Je
pense que c'est à cause de l'horaire. On a commencé un peu tard
ce matin. C'est pour cela.
Une dernière question très rapide, M. le
député de Montmagny-L'Islet. Une réponse très
rapide également.
M. Giasson: Merci, M. le Président, et également
aux membres de la commission. J'avais deux questions, je me limite à
une.
M. Champagne, vous avez indiqué une tendance très
marquée à présenter, sur le bulletin ré-
férendaire, trois, quatre et même davantage d'options possibles.
Dans l'hypothèse où il n'y aurait aucune majorité absolue
à l'endroit de l'une ou l'autre de ces options, est-ce que vous seriez
d'accord ou accepteriez-vous le principe d'un deuxième tour ou d'un
troisième tour, si nécessaire, afin d'en arriver à un
choix clair, qui soit probant en pourcentage...
M. Champagne: Etant donné que, de toute façon,
c'est une consultation, cela demeure un indicatif. Je pense que le gouvernement
n'est pas nécessairement lié par un premier
référendum. Disons que c'est une consultation et qu'on pourrait
en arriver à d'autres référendums un peu plus tard,
à une autre consultation quelques années après, comme l'a
fait la province de Terre-Neuve pour entrer dans la
Confédération.
M. Giasson: ... indique tout de même que vous souhaitez
qu'au moins l'une des options atteigne les 50% de l'expression populaire.
M. Henry: On est convaincu que cela va l'être.
M. Giasson: Oui, mais au-delà de la conviction.
M. Groulx: II ne s'agira pas d'un deuxième tour, il
s'agira d'un référendum subséquent. Dans le
deuxième tour, c'est la majorité relative qui l'emporte,
là, c'est une majorité absolue qu'on demande.
M. Giasson: Oui, mais s'il ne reste que deux options, au
deuxième tour, sur lesquelles les Québécois se
prononceront, vous allez certainement en arriver à une majorité
absolue.
M. Henry: De cette façon...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci de
votre collaboration. Les travaux de la commission sont ajournés sine
die.
(Fin de la séance à 13 h 2)