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L'ASSURANCE-MALADIE
(Dix heures et trente de l'avant-midi)
M. BONIN (secrétaire des comités de l'Assemblée
législative): A titre de secrétaire des comités de
l'Assemblée législative, je demanderais au comité de
l'assurance-maladie de bien vouloir élire un Président, un
Président conjoint et un secrétaire.
M. HARVEY: Je propose que l'honorable George Marler, conseiller pour la
région d'Inkerman au Conseil législatif, et le
député de Lévis, M. Roger Roy, agissent comme
présidents conjoints du comité de l'assurance-maladie.
M. BONIN: Vous n'avez pas d'objection, messieurs?
M. ASSELIN: Messieurs il me fait plaisir de seconder cette
proposition.
M. ROY (Président du comité de l'assurance-maladie):
Messieurs, je vous remercie de m'avoir choisi comme Président pour les
représentants de l'Assemblée législative et soyez
assurés que j'ai été des plus surpris lorsque le
député de Jonquière m'a proposé à cette
fonction.
Je crois que, d'abord, nous devrions nous choisir un secrétaire
pour ce comité. Je suggérerais, si vous n'avez pas d'objections,
M. Jacques Morency qui est conseiller juridique au ministère de la
Santé et qui est membre du comité de recherches pour
l'assurance-santé et qui, j'en suis sûr, serait un aide
précieux pour le comité conjoint des deux Chambres.
Messieurs, je demanderais au secrétaire de distribuer les
rapports du comité de recherches si des membres n'en ont pas en leur
possession. De plus, je suggérerais aussi que les mémoires qui
sont présentement déposés chez le greffier des
comités, les mémoires des associations ou d'individus, soient
distribués à chacun des membres, afin qu'ils puissent en prendre
connaissance avant de contacter ou de demander à ces personnes de venir
se faire entendre devant le comité conjoint.
M. MARLER: M. le Président, je me demande si je ne peux pas faire
quelques suggestions quant aux travaux du comité. J'ai eu l'avantage,
hier après-midi, de rencontrer M. Castonguay qui a été le
Président du comité de recherches que le cabinet a nommé
le 9 avril 1965. Nous avons passé presque tout l'après-midi
ensemble afin de discuter des travaux du comité. Evidemment, je dois
vous avouer que je suis dans la même situation que les membres du
comité, en ce sens que je n'en sais pas plus que vous autres. J'ai
parcouru assez rapidement le rapport de onze volumes qui a été
déposé il y a quelques semaines. Je ne prétendrai pas que
je le comprends parfaitement, mais, depuis que je l'ai lu en fin de semaine, je
me suis posé plusieurs questions à savoir de quelle façon
le comité doit procéder afin d'accomplir son travail aussi
rapidement que possible et, deuxièmement, de le faire de la façon
la plus efficace.
Je me disais, après avoir causé avec M. Castonguay hier,
que probablement la meilleure chose à faire, comme point de
départ, serait de consacrer nos séances, la semaine prochaine,
à l'examen du rapport du comité de recherches. Je pense qu'au
lieu d'en faire la lecture, volume par volume, au comité, ce qui sera un
travail extrêmement fastidieux, il vaudrait mieux que les membres du
comité de recherches nous donnent un résumé des
explications de chacun des volumes, de façon à ce que, à
la fin de nos séances de la semaine prochaine, nous possédions
assez bien le contenu des onze volumes qui ont été
déposés en Chambre.
En même temps, il faudrait songer aux délégations,
aux corps publics qui veulent présenter des mémoires. M. Roy
vient d'en parler et M. Castonguay me faisait la suggestion hier,
premièrement, que le comité adopte une espèce de formule
de convocation et des règlements en ce qui concerne la
présentation des mémoires; deuxièmement, que le
comité de recherche nous fasse parvenir un résumé et une
copie de chaque mémoire déjà présenté, et
que nous fixions des séances avec un certain ordre. Je pense que nous
pourrons peut-être demander à M. Boudreau, dans quelques instants
parce que M. Castonguay n'a pas pu venir ce matin de nous donner
une espèce d'aperçu des noms des corps publics qui ont
déjà présenté des mémoires. Il y en a
plusieurs qui s'intéressent à l'aspect assurance, d'autres qui
s'intéressent à la partie des soins médicaux, des soins
dentaires: les pharmaciens, les maisons qui vendent des produits
pharmaceutiques. Je pense qu'il y a nécessairement une division à
faire dans les représentations de façon à ce que le
comité consacre peut-être plusieurs séances à
l'étude de la partie des médicaments, d'autres séances aux
dentistes etc. de façon à procéder de la façon la
plus ordonnée possible.
Cela m'amène à faire la suggestion suivante aux
séances du comité, je vous assure que c'est une suggestion tout
simplement. Je pense que nous pouvons siéger deux fois par jour, mardi,
mercredi et jeudi, et ne pas siéger le soir. Non pas parce que nous ne
sommes pas capables de
siéger trois fois par jour, mais il ne faut pas oublier qu'il y a
une tâche qui incombe en même temps au comité de recherches
et M. Castonguay m'a exprimé l'avis que ce serait extrêmement
difficile pour le comité de tenir tête aux travaux qui vont
s'abattre avec trois séances par jour le mardi, le mercredi et le
jeudi.
Alors, évidemment je ne pense pas que c'est logique d'adopter une
règle définitive et inflexible, mais je pense que de principe
nous devons tenir deux séances mardi, deux séances mercredi, deux
séances jeudi de façon à ce que tout le monde soit au
courant. Et qu'on tâche d'éviter ce que je pourrais appeler des
séances surprises, en disant: « Eh bien! on va siéger le
vendredi aussi! » Je sais, ayant été député,
combien c'est malcommode de ne pas savoir exactement de ce que nous allons
faire d'une semaine à l'autre. Alors, si le comité peut accepter
cette suggestion, je pense que nous pourrons inviter M. Boudreau à nous
exposer brièvement les mémoires que nous avons reçus et
nous expliquer en somme l'idée du comité en ce qui concerne la
marche des affaires devant ce comité.
M. LE PRESIDENT: Avant que M. Boudreau prenne la parole, je lui
demanderais de présenter les membres du comité de recherches sur
l'assurance-santé.
M. MARLER: Oui, c'est bien.
M. LE PRESIDENT: ... et ainsi que les collaborateurs dans ce
travail.
M. HARVEY: Auparavant il faut s'entendre sur deux séances par
jour, mardi, mercredi et jeudi.
M. HARDY: M. le Président, est-ce que cela signifie que nous
siégons le mardi matin?
M. HARVEY: Je pense que, pour la plupart des députés,
c'est assez difficile de prévoir une séance, pour le mardi
matin.
M. MARLER: C'est difficile pour tout ie monde. C'est évident.
M. HARVEY: On serait mieux de siéger le mardi soir.
M. LE PRESIDENT: Pour la journée du mardi, qu'il y ait une
séance le mardi après-midi et le mardi soir.
M. MARLER: Parce que, évidemment, la Chambre siège mardi
après-midi...
M. HARVEY: A trois heures.
M. LE PRESIDENT: Alors, disons mardi après-midi et mardi soir,
mercredi et jeudi matin et après-midi.
M. HARVEY: Cependant pour les séances de l'après-midi, je
crois que nous devrons commencer peut-être une demi-heure ou trois quarts
d'heure après l'ouverture de la Chambre afin qu'on puisse assister comme
députés à l'ordre du jour.
M. VAILLANCOURT: Après l'ordre du jour.
M. MARLER: Cependant cela serait beaucoup plus commode de siéger
l'après-midi et le soir, n'est-ce pas, que le matin et
l'après-midi.
M. HARVEY: Alors on peut commencer pro forma à trois heures.
M. MARLER: On peut siéger jusqu' à six heures n'est-ce pas
et de huit à dix...
M. HARVEY: Pour le mardi.
M. VAILLANCOURT: Le mardi, ce serait trois heures et demie parce que
l'on commence à trois généralement. Trois heures et demie
à six heures et le soir...
M. MARLER: Le jeudi soir, c'est extrêmement malcommode,
évidemment, parce que cela veut dire...
M. HARVEY: Le mercredi soir, la Chambre ne siège même pas.
Alors, je crois qu'on devrait s'en tenir à ça, à
l'exception du mardi, pour permettre aux députés de
l'extérieur de s'en revenir de leur comté, le mardi matin. Les
gens de Montréal arrivent vers une heure et demie. On devrait
siéger, d'après moi, mardi, dans l'après-midi et dans la
soirée, et mercredi et jeudi, en matinée, et
l'après-midi.
M. ASSELIN: Le mardi, ce serait à 3 heures trente?
M. CLOUTIER: Le mardi, ce serait à 3 heures trente, et les autres
journées, à 3 heures.
M. MARLER: Je n'aime pas beaucoup l'idée de siéger le
jeudi soir.
M. VAILLANCOURT: Mardi, 3 heures trente de l'après-midi, huit
heures le soir; mercredi, 10 heures trente et 3 heures, le soir, on aurait
congé comme la Chambre; jeudi, 3 heures, le soir à 8
heures; vendredi, 11 heures...
M. CLOUTIER: Non, pas le vendredi.
M. MARLER: Je pense qu'il ne faut pas oublier qu'il y a du travail
à accomplir entretemps, je pense qu'on doit supprimer le jeudi soir.
M. VAILLANCOURT: Mais si on passe une motion, on peut laisser la porte
ouverte, quitte à ne pas siéger toujours après
ça.
M. MARLER: J'aimerais mieux siéger au besoin, mais non pas
fixer...
M. ASSELIN: J'aimerais mieux siéger le jour. Jeudi, on devrait
siéger dans la matinée et l'après-midi plutôt que le
soir.
M. MARLER: N'y aurait-il pas moyen de siéger jeudi matin?
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. VAILLANCOURT: Jeudi matin, oui, et jeudi après-midi...
M. MARLER: Et jeudi après-midi, oui, mais pas jeudi soir. Non,
pas jeudi soir?
M. VAILLANCOURT: Moi, j'ai mis les heures comme la Chambre.
M. RENAUD: Mardi après-midi et mardi soir, ça siège
en Chambre.
UNE VOIX: Pour ma part, j'aimerais mieux siéger jeudi soir que
jeudi avant-midi.
UNE VOIX: C'est embêtant pour beaucoup de gens, vous allez voir
des absences assez nombreuses, j'ai peur.
M. MARLER: M. le Président, je ne sais si je puis faire une
motion, afin que nous ayons peut-être quelques sujets de discussion quant
aux heures de séances, mais je pense que siéger le jeudi soir
comporte presque nécessairement des absences parce que, je parle quant
à moi, je sais que, si j'étais obligé de passer le jeudi
soir à Québec, cela veut dire que je ne pourrais pas revenir chez
moi, ça veut dire, vendredi complètement perdu. Maintenant, je
comprends que, dans d'autres cas, surtout pour les députés qui
sont obligés d'être en Chambre vendredi, ça les
dérange beaucoup moins. Mais je me demande si nous pourrions
peut-être, comme point de départ, proposer des séances
mardi après-midi, disons à trois heures,...
UNE VOIX: Trois heures et trente.
M. MARLER: Disons à trois heures et trente, le mardi soir
à huit heures, mercredi à dix heures et demie, à trois
heures, jeudi à dix heures et demie et trois heures.
M. HARVEY & DES VOIX: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, je demanderais à M. Thomas Boudreau
de présenter les membres de son comité, du comité de
recherches ainsi que les collaborateurs de ce comité et de nous faire un
bref exposé du rapport. M. Boudreau.
M. THOMAS BOUDREAU: Merci, M. le Président, M. Castonguay me prie
de l'excuser. Il aurait bien aimé être ici ce matin,
malheureusement des engagements qu'il avait pris il y a très longtemps
l'ont empêché d'être parmi nous. Je vous présente
d'abord M. Morency, que vous connaissez bien, le secrétaire de notre
comité, M. Jacques Casgrain, membre de notre comité,
assistant-surintendant des assurances, M. Jacques de la Chevrotière,
directeur général aux Services de santé du Québec,
membre de notre comité, Mlle Francine Beaudoin, économiste,
membre de l'équipe de recherches, M. Guy Demers, sociologue, membre de
l'équipe de recherches et M. René Dussault, conseiller juridique
auprès du comité.
D'autres membres de l'équipe de recherches n'ont malheureusement
pas pu être ici ce matin, il s'agit de M. Lucien Tessier, de Mlle
Micheline Nadeau ainsi que de M. Gilles Paquet, professeur à
l'université Carleton qui était conseiller économique
auprès de notre comité, ainsi que du Dr Pierre Jobin, conseiller
médical.
Pour ce qui est du calendrier de travail, je pense que les suggestions
suivantes mériteraient peut-être d'être envisagées
étant donné les délais qui doivent être
observés dans la préparation du rapport final. Il avait
été envisagé que d'ici le 15 mars, le comité
conjoint pourrait étudier le rapport que le comité de recherches
a préparé. Il est édivent qu'à cette occasion, les
membres du comité de recherches sont à votre entière
disposition pour répondre à toutes les questions que vous
pourriez avoir concernant chacun des volumes de ce rapport. Lorsque vous
étudierez chacun des rapports en particulier, les collaborateurs qui
auront contribué à chacun des volumes seront parmi vous, si vous
le souhaitez,
pour répondre à vos questions. Les audiences publiques
pourraient avoir lieu du 15 mars au 30 avril. Je pense qu'il faudra envisager
le 30 avril comme la limite maximum pour les audiences. Si elles se
prolongeaient plus longtemps, il serait peut-être difficile de
procéder à temps à la rédaction du rapport. Ceci
donne un mois et demi. Mais il faut considérer que pendant ce mois et
demi, du 15 mars au 30 avril, il y aura la relâche pour le congé
de Pâques. Ceci laisse la période allant du 1er mal jusqu'à
une période encore indéterminée. On pourrait
peut-être envisager le 1er juin pour la rédaction du rapport
final, devant contenir les recommandations relatives au futur régime
d'assurance-maladie. Pendant tout le déroulement des travaux du
comité conjoint, le comité de recherches offre évidemment
sa collaboration et nous faisons les suggestions suivantes sur la forme que
pourrait prendre cette collaboration: Nous avons songé à
préparer, pour chacun des organismes qui comparaîtraient devant
vous, un dossier qui vous sera remis quelques jours avant que l'organisme soit
convoqué, dossier qui comporterait les documents suivants: d'abord une
liste des membres de la délégation qui comparaîtra,
ensuite, certains renseignements relatifs à l'organisme, par exemple,
l'âge de l'organisme, quels sont ses buts, quels éléments
de la population, de la société il représente, ensuite
certaines notes ou un très court résumé du mémoire
que ces organismes vous soumettent, et enfin, une liste de questions que la
lecture des mémoires a pu soulever ou des questions que vous aimeriez
poser à ces délégations. Par ailleurs, au comité de
recherches, nous avons organisé une équipe de travail qui
procèdera le plus rapidement possible à l'analyse des
mémoires afin justement de préparer ces questions et de codifier
ces mémoires sous une forme qui pous permettra de les utiliser plus
facilement, au moment de la rédaction du rapport.
Enfin, si vous le jugez opportun, le comité de recherches est
à votre disposition pour préparer un projet de rapport qui vous
sera soumis et à partir duquel vous pourrez retrancher, ajouter,
modifier et qui pourra constituer éventuellement avec le travail que
vous y ferez, le rapport du comité conjoint.
Pour ce qui est du calendrier des audiences, nous avons
déjà, grâce aux lettres qui ont été
envoyées par les organismes qui ont exprimé le désir
d'être entendus, nous avons pu regrouper tous ces organismes en un
certain nombre de catégories de telle sorte qu'il soit possible de les
convoquer dans un ordre qui sera assez logique et qui permettra de recevoir en
même temps les organismes qui ont des intérêts com- muns, ce
qui permettra de moins disperser l'attention.
Voici, en premier lieu, la façon dont nous avons cru possible de
regrouper ces organismes. Ils sont regroupés en huit catégories.
D'abord, les consommateurs de soins et les contribuables. Du côté
des contribuables, jusqu'ici, seulement la Chambre de commerce a exprimé
le désir d'être entendue. Le premier groupe, consommateur de soins
contribuables regroupera les syndicats ouvriers, par exemple, et la Chambre de
commerce. Ensuite, les assureurs. Deux organismes ont exprimé le
désir d'être entendus, ceux que j'ai mentionnés; C.Il.LA.,
Canadian Health Insurance Association, et la Croix-Bleue; ensuite les
institutions hospitalières, ensuite les professions de la santé
que nous avons mises en deux groupes; le premier: médecins, dentistes et
pharmaciens et le second groupe: les para-médicaux, les para-dentaires
et extra-médicaux, par exemple, les techniciens, les thérapeutes,
chiropraticiens, etc.,
Cinquième groupe; les producteurs et détaillants de
produits pharmaceutiques.
Sixième groupe; les organismes bénévoles.
Septième groupe; les individus.
Et enfin, divers; ceux que nous n'avons pu classer dans un des groupes
précédents.
Comme, calendrier d'audience, maintenant, une suggestion. Ce serait de
rencontrer d'abord, le groupe des assureurs. Je pense que c'est une occasion
d'obtenir une vue assez générale de l'ensemble du problème
et de ses complexités administratives. Dans ce groupe, deux organismes
ont exprimé le désir d'être entendus. Ils pourraient
être les premiers, soit la Croix-Bleue et la Canadian Health Insurance
Association.
Ensuite pourraient venir les consommateurs de soins et les contribuables
dont la Chambre de commerce qui comme j'ai mentionné, a exprimé
le désir d'être entendue et j'imagine qu'on peut s'attendre
à des mémoires de syndicats, comme la CSN ou la FTQ.
En troisième lieu, pourraient venir ensuite les gens qui
apporteront des problèmes un peu plus techniques, un peu plus
précis; les professions de la santé. A ce jour nous avons un bon
nombre de mémoires de ces groupes. Par exemple, l'assocaition
médicale de la province de Québec a soumis son mémoire de
même que la société dentaire de Québec,
l'association des pharmaciens d'hôpitaux, et le collège des
pharmaciens et aussi un certain nombre de professions
para-médicales.
Par la suite, pourraient venir dans l'ordre, les institutions
hospitalières, les producteurs
et détaillants de produits pharmaceutiques, les organismes
bénévoles, les individus et les groupes divers.
M. VAILLANCOURT: Combien y a-t-il d'organismes qui ont soumis leur
mémoire?
M. THOMAS BOUDREAU: Actuellement, nous avons reçu vingt-deux
mémoires. Au total, une trentaine d'organismes ont exprimé le
désir d'en soumettre. Je pense qu'on peut s'attendre à un maximum
de cinquante. Je serais surpris que cela dépasse cinquante. Et en
général, pour vous rassurer, ils sont assez courts.
M. BERTRAND: Est-ce qu'il y a une date limite?
M. THOMAS BOUDREAU: Voici, comme je le mentionnais tout à
l'heure, pour ce qui est des audiences d'une part, je pense que ce serait
difficile que ça dépasse le 30 avril. Mais maintenant, pour
pouvoir établir le calendrier le plus rapidement possible, je pense que
les gens devraient être avisés d'une façon ou d'une autre
que ceux qui désirent soumettre un mémoire devraient en exprimer
l'intention, au plus tard, d'ici le 11 du mois courant, et le faire parvenir,
au plus tard, le 18 du mois de mars. Enfin, je pense que ce n'est pas un
délai trop court. Depuis l'automne dernier, des déclarations dans
les journaux ont paru, disant que la date limite serait vers la fin de janvier.
Je pense maintenant que les gens qui avaient l'intention d'en préparer,
doivent être à peu près prêts. Il s'agit, maintenant,
je pense de fermer l'échéance à ce sujet-là et je
pense bien que le 11 mars, pour exprimer le désir de soumettre un
mémoire, et le 18 pour les faire parvenir, cela devrait être
suffisant. Ce qui permettrait d'établir, dès la semaine
prochaine, le calendrier.
M. BERTRAND: Est-ce que ces mémoires sont longs?
M. THOMAS BOUDREAU: En général, ils sont assez courts.
M. BERTRAND: Assez courts.
M. THOMAS BOUDREAU: Assez courts, oui, deux que l'on a reçus
jusqu'ici du moins.
Maintenant, un dernier détail. Nous avons pris contact avec les
gens qui ont accompli un rôle un peu semblable au nôtre
auprès de certaines commissions, en particulier la commission
Laurendeau-Dunton. Ils nous ont affirmé que le dé- roulement des
audiences est une chose assez importante et ils ont suggéré, par
exemple, de dire aux organismes qui viennent de ne pas lire le mémoire
devant le comité, ce qui est une perte de temps qui peut être
assez longue, puisque les mémoires ont déjà
été distribués, et que les membres les ont à leur
disposition. Les audiences doivent surtout servir à poser des questions
et à échanger des opinions. Nous avons donc préparé
un projet de lettre de convocation qui vous sera soumis et dans laquelle on
mentionne que les organismes invités auront quelques minutes au
début pour exposer rapidement leur point de vue, le but de leur visite
et qu'ensuite, il y aura une période de questions. Je pense que ceci
fait le tour de la question.
M. COITEUX (Duplessis): Combien de temps à l'avance ces
mémoires seront-ils distribués?
M. THOMAS BOUDREAU: Je pense qu'étant donné que plusieurs
mémoires sont arrivés, il y aurait peut-être lieu de les
remettre à mesure qu'ils arrivent. Donc dès maintenant pour ceux
qui sont arrivés.
M. MARLER: De façon à ce qu'on les ait avant la
séance.
M. THOMAS BOUDREAU: Oui, et là, comme je vous le disais
tantôt, pour les dossiers d'information sur chaque organisme, il est
difficile de vous les remettre dès maintenant parce qu'ils ne sont pas
prêts. Mais on commence à les monter et j'espère qu'au
moins deux ou trois jours avant la convocation, pour chacun de ces
organismes-là, nous pourrons vous les remettre. Mais ce sont des
dossiers très courts de deux, trois ou au maximum quatre pages, juste
pour donner l'information minimale sur l'organisme qui se présentera
devant vous.
M. HARVEY: C'est bien ça.
M. MARLER: M. Boudreau, voulez-vous nous donner lecture du projet de
lettre que vous devez envoyer aux différents organismes parce que je
pense que le comité doit se prononcer sur la forme de la lettre de
façon à ce que l'on s'entende sur la réglementation qu'on
semble y suggérer.
M. THOMAS BOUDREAU: Alors, voici la lettre: « Le comité
conjoint sur l'assurance-maladie serait heureux de recevoir des
représentants de votre organisme le 15 mars, ou à une date
appropriée, à 2 h p.m. dans la salle du comité des bills
privés, édifice A, Hotel du gouvernement,
Québec. A cette occasion, une seule personne sera
autorisée à agir comme porte-parole pour votre groupe et elle
pourra évidemment faire appel à d'autres personnes, si elle le
juge nécessaire. Une période de dix minutes est prévue au
début de la séance pour la présentation de votre
mémoire. Il ne sera pas nécessaire d'en faire la lecture car les
membres du comité auront déjà eu l'occasion d'en prendre
connaissance. Cette présentation, de même que la discussion qui
suivra, pourront se faire en français ou en anglais. Veuillez donc nous
faire parvenir le plus rapidement possible le nom des personnes qui vous
représenteront, leur titre au sein de votre organisme et le nom de celle
que vous désignerez comme porte-parole officiel. Si la date et l'heure
que nous vous proposons ne vous conviennent pas, veuillez nous en aviser
immédiatementpar téléphone, au numéro suivant:
693-6300 ».
M. LE PRESIDENT: Adopté. Est-ce que les dates limites sont
acceptées pour la présentation des mémoires?
M. VAILLANCOURT: Vous avez dit le 18 mars?
M. LE PRESIDENT: Le 11 mars pour aviser de leur intention de
présenter un mémoire et le 18 mars pour présenter le
mémoire. Est-ce adopté?
M. MARLER: La seule question que je me pose, c'est de savoir si le
délai jusqu'à la fin de la semaine prochaine n'est pas un peu
court. Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux dire le 15 mars et, disons, le
21 mars. Effectivement, il n'y a pas de différence, sauf que le
délai semble très court. Il faut que vous décidiez d'ici
à la fin de la semaine prochaine si vous allez venir et deux ou trois
jours...
M. ASSELIN: Il faudrait leur donner quinze jours.
M. MARLER: Je pense que le comité ne doit pas s'exposer à
la critique et fermer la porte très brusquement et avec très peu
d'avis.
M. BERTRAND (conseiller législatif): Mais est-ce que pendant
cette période-là, on va demander à ceux qui ont
déjà présenté des mémoires de venir?
M. MARLER: Oui. Le temps ne sera pas perdu.
M. COITEUX (Duplessis): Maintenant pour ce qui est de la façon
d'aviser les intéressés, est-ce que vous allez publier un avis
général dans tous les journaux de la province? Dans les endroits
reculés, allez-vous publier un avis dans les journaux locaux?
M. MORENCY: Voici, messieurs. On a déjà publié deux
annonces dans les journaux, il y en a eu une au mois d'octobre pour demander
aux gens de préparer des mémoires; j'ai les texte ici. il y en a
eu une autre en janvier qui disait en substance ceci: Déclaration du
premier ministre...
Alors, c'était une déclaration que le premier ministre a
faite le 25 novembre concernant les mémoires et dans laquelle il disait
justement que les gens pourraient venir présenter un mémoire,
etc. Puis les dates d'audition seront sans doute fixées par le
comité conjoint de l'Assemblée législative et s'adressent
au comité et des autres intéressés. Alors il y a eu deux
annonces dans tous les quotidiens de la province. Déjà il a
été dit aux gens de se préparer, à la
télévision et à la radio.
M. BERTRAND: Dans les quotidiens.
M. MORENCY: Oui, dans les quotidiens. J'ai la liste des quotidiens qui
les ont publiées.
M. BERTRAND: Ils ne sont pas tellement nombreux.
M. MORENCY: Non, il n'y en a pas tellement. Cela, c'est jusqu'au mois de
janvier et au mois d'octobre.
M. THOMAS BOUDREAU: Pas de pression spéciale sur les hebdos?
M. MARLER: Je pense qu'il serait utile, comme précaution, de
publier des avis semblables. Proposez-vous que ce soit publié dans tous
les hebdos du monde?
M. LE PRESIDENT: Je trouve que la proposition que vous faites donnera
plus de sens...
M. RENAUD: Plus de latitude.
M. LE PRESIDENT: ... M. Boudreau est-ce que le 19 mars...?
M. RENAUD: Si on s'entendait sur le principe de quinze jours de
délai pour manifester l'intention...
M. LE PRESIDENT: Quinze jours cela veut
dire le 17, ou le 25. Cela fait trois semaines pour présenter le
mémoire. Cela serait suffisant. Entre le 18 et le 25.
M. LE PRESIDENT: Cependant messieurs, il serait bon de savoir de quelle
manière nous allons aviser les associations, d'une date limite pour leur
intention de soumettre un mémoire et d'une date limite pour
l'entrée du mémoire. Est-ce par annonce?
M. MARLER: M. le secrétaire attire mon attention sur un fait
brutal: c'est que le comité n'a pas d'argent à sa
disposition.
M. VAILLANCOURT: Je croyais que les journaux publieraient cela
gratuitement.
M. BERTRAND: Je pense que le comité pourrait demander aujourd'hui
dans son rapport de bien mentionner que les journaux couvrent la séance
de ce matin. Je crois que ce serait suffisant.
M. MARLER: On a besoin de la collaboration gratuite des journaux.
M. CLOUTIER: Des quotidiens.
M. MARLER: Je pense que si les journaux voulaient publier cette
décision... on en parlera en Chambre peut-être. Il y a un rapport
préliminaire du comité, qui sera présenté en
Chambre surtout pour faire rapport de l'élection des Prési- dent
et secrétaire et on pourrait peut-être saisir cette occasion pour
mentionner les dates limites.
M. LE PRESIDENT: Oui, présenter cela à la Chambre.
M. BERTRAND: D'ailleurs tous les journaux vont accepter là.
M. MARLER: Et tous les hebdos évidemment aussi.
M. LE PRESIDENT: Cependant vous remarquez que ce matin, il y a
enregistrement de l'organisation du comité.
Il y aura aussi, je pense bien, enregistrement lorsque nous entendrons
chacun des représentants des associations qui présentent des
mémoires ainsi que, si nous avons besoin de les faire paraître,
les représentations des officiers supérieurs de certains
ministères.
M. BERTRAND: M. le Président, est-ce que je pourrais vous
interrompre? C'est que les journalistes, en arrière de moi, voudraient
savoir exactement ce qui a été décidé au point de
vue des dates, il semble y avoir de la confusion.
M. MARLER: Oui. C'est très compréhensible.
M. LE PRESIDENT: La date limite pour les associations qui ont
l'intention de présenter un mémoire; le 18 mars, et la date
d'entrée du mémoire: le 25 mars, date limite pour l'entrée
des mémoires. Et ces mémoires doivent être
présentés en cinquante copies, je crois, tel que mentionné
dans la déclaration du premier ministre, lorsqu'il a
décidé de former un comité conjoint.
Au sujet de l'enregistrement des discussions, tel que je viens de vous
le mentionner, ça se fera lorsqu'il y aura présentation de
mémoires,ou lorsque nous demanderons à un officier
supérieur d'un ministère de venir répondre à des
questions que nous aimerions lui poser pour compléter notre information.
Cependant, si l'occation se présente, lorsque nous siégerons in
camera, si nous avons, peut-être, des informations confidentielles
à demander à certaines personnes, par exemple à un membre
du comité de recherche, je demanderais que le secrétaire nous
soumette des minutes pour ces séances-là, et ces minutes seront
distribuées à chacun des membres du comité afin que nous
ayons un dossier complet des séances qui sont tenues in camera et en
audience publique, lorsqu'il y a enregistrement.
J'ai eu un entretien avec M. Massicotte qui s'occupe de
l'enregistrement, et il m'a informé qu'à chaque journée
nous pourrons avoir le brouillon des débats. Cependant, quant à
l'impression de ces débats, je crois que cela pourrait retarder un peu,
à cause de l'immense travail que cela occasionne à tout ce
personnel qui doit enregistrer à la Chambre en même temps qu'ici,
lorsque nous siégerons dans l'après-midi. Mais il offre la
collaboration de ses employés, et il m'a assuré que cela donnera
satisfaction aux membres du comité conjoint.
M. MARLER: Cela nous donnera en même temps l'occasion de repasser
le compte rendu de tout ce que nous avons dit.
M. LE PRESIDENT: Sûrement.
M. MARLER: Alors, M. le Président, si je comprends bien la
situation, le travail d'organisation est plus ou moins accompli et, à la
prochaine séance, mardi après-midi, je suppose que
nous devons attendre, de la part des membres du comité de
recherche, non pas tout simplement un exposé très sommaire, mais
une exposition qui pourrait peut-être remplacer la lecture de chacun des
volumes et c'est à ce moment-là, n'est-ce pas, que les membres du
comité pourront poser aux experts des questions qui ressortent presque
nécessairement de l'exposé du document. Je pense bien que c'est
ça que M. Boudreau... M. Morency m'a dit qu'il espère que le
sommaire qui doit être donné au comité ne doit pas
remplacer la lecture des onze volumes par chacun des membres du comité,
surtout le volume onze.
Alors on va proposer l'ajournement. Je pense que nous allons convoquer
les gens pour la semaine du 15.
M. LE PRESIDENT: Cependant, j' aimerais aussi vous faire remarquer que
le secrétaire m'a dit qu'il aurait besoin d'une secrétaire afin
qu'elle puisse prendre les notes nécessaires, lors de nos discussions.
Actuellement, nous n'avons personne. Je pense que je pourrais me charger de
demander au Président de la Chambre de nous fournir les fonds
nécessaires pour l'engagement de cette personne. Avez-vous d'autres
questions concernant l'organisation du comité?
M. CLOUTIER: Il serait peut-être bon, à la fin de chaque
séance, de prévoir l'ordre du jour de la séance
suivante...
M. LE PRESIDENT: Oui, oui.
M. CLOUTIER: ... pour savoir un peu à quoi s'en tenir, pour
planifier un peu notre travail et savoir si on a du travail spécial
à préparer en vue de la séance suivante. Ainsi on
s'attachera plus particulièrement à ce point-là.
M. LE PRESIDENT: Lorsque nous convoquerons les associations devant le
comité, je crois qu'il va falloir tracer le programme une semaine
à l'avance, afin de les diviser et puis de constater si ces gens peuvent
venir se faire entendre.
M. CLOUTIER: Même avant les séances. M. LE PRESIDENT: Ah
oui!
M. MARLER: Et je suppose que fatalement on va se tromper, on va
s'attendre à ce que quelqu'un prenne toute la soirée, puis il va
peut-être prendre la moitié seulement,
M. LE PRESIDENT: C'est ça.
M. MARLER: En d'autres cas, au lieu de prendre seulement un
après-midi, ça va aller à deux ou trois...
M. CLOUTIER: Oui, oui, ça peut être assez flexible. Mais
tout de même, d'une manière générale, il
faudrait...
M. BERTRAND: C'est possible que les gens ici, à un moment
donné, s'il reste deux associations, et, si ça représente
trois quarts d'heure, que ça continue un peu plus tard.
M. VAILLANCOURT: Il faut laisser guider l'organisation...
M. MARLER: Je pense qu'on devrait commencer, n'est-ce-pas, avec la
Croix-Bleue et ensuite le Canadian Health Insurance Association. Est-ce qu'on
peut, peut-être, compter que nous pouvons prendre la Croix-Bleue, la
Canadian Health Insurance Association et la Chambre de Commerce: trois
séances sur les journées des 15, 16 et 17.
M. THOMAS BOUDREAU: Plus que ça, je pense.
M. MARLER: On pourra peut-être laisser ça au
secrétariat, parce qu'il pourrait s'arranger avec les organisations pour
savoir combien de temps elles vont prendre. Et il y a peut-être des gens
qui pourraient parler sans long avis et ils pourraient boucher des trous si
nous en avons.
M. MORENCY: Monsieur, est-ce que vous voulez les avoir? Disons qu'on les
aurait le 15 ou le 16, et non le 17 ou en avoir...
M. THOMAS BOUDREAU: Je pense que l'on pourrait en avoir deux mardi
après-midi, peut-être autant le mercredi et puis le jeudi en avoir
peut-être trois, un le matin et deux l'après-midi. Ou le mardi, au
début de l'après-midi, il pourrait y en avoir un et ensuite le
soir; nous pourrions en avoir mercredi et en avoir jeudi.
M. MARLER: Moi, je pense que ce serait préférable le
mercredi parce que si...
M. MORENCY: Mardi, mercredi, le 15 est disparu... c'est toujours plus
long qu'on ne le pense, parce que les questions amènent d'autres
questions, alors le 15 ou le 16. On doit peut-être avoir une
séance additionnelle avec le comité des recherches, n'est-ce pas,
pour discuter...
M. LE PRESIDENT: Je suggère que le 15 et le 16, nous convoquions
les premières associations et je demanderais à M. Boudreau de
déterminer quels seraient les organismes qui pourraient venir se faire
entendre durant ces journées et garder le jeudi comme soupape en cas
d'un besoin de temps plus grand pour la présentation des
mémoires. Est-ce que vous croyez que le travail pour la semaine du 15
vous conviendrait?
M. HARVEY: Quels seraient les organismes qui viendraient le 15?
M. LE PRESIDENT: Je demanderai à M. Boudreau de nous donner une
idée des organismes qu'il pourrait convoquer dans cette semaine, du
15.
M. THOMAS BOUDREAU: Dans la semaine du 15, ce sera la première
semaine qu'on siégera.
UNE VOIX: Mardi en 15.
M. THOMAS BOUDREAU: Disons qu'en gros, il me semble possible
peut-être de recevoir quatre, au maximum cinq, mais probablement environ
quatre organismes cette semaine-là. Alors il y aurait d'abord
Croix-Bleue et Canadian Health Insurance Association et ensuite viendrait la
Chambre de commerce qui, elle aussi, a un point de vue assez
général sur la question. Et par la suite, s'il y a du temps,
alors là dans l'ordre de ceux que l'on connaît maintenant:
l'Association médicale de la province de Québec, qui est la
branche provinciale de l'Association médicale canadienne, la
Société dentaire de Québec, et je pense bien que ce sera
la limite. S'il y avait encore du temps, ensuite viennent l'Association des
pharmaciens d'hôpitaux, le Collège des pharmaciens. Mais je pense
que ce sont les organismes, les premiers surtout, qui pourraient être
entendus.
M. VAILLANCOURT: Mais la semaine prochaine...
M. MARLER: Quatre ou cinq...
M. THOMAS BOUDREAU: Le 15... Je pense bien que ça va être i
peu près quatre. Je vais regarder de nouveau les mémoires, le
temps qu'on imagine que ça prend, quels sont les mémoires
très importants. S'ils ont beaucoup de choses à ajouter, il
faudrait prévoir peut-être toute une demi-journée, de trois
heures à six heures, sinon, eh bien! peut-être qu'on peut en
mettre deux si c'est plus court, alors c'est pour ça que
j'hésiterais à dire si c'est quatre ou cinq.
M. HARVEY: Ce serait quatre pour la prochaine.
M. THOMAS BOUDREAU: Alors quatre peut-être
M. HARVEY: Alors ce seraient la Croix-Bleue, Le Canadian Health
Association, la Chambre de commerce de la province...
M. THOMAS BOUDREAU: Et ensuite l'Association médicale de la
province de Québec.
M. VAILLANCOURT: A quelle date, ça? MM. HARVEY et BOUCHARD: Le 15
et le 16.
M. RENAUD: Est-ce que vous avez les mémoires?
M. HARVEY: Alors, la Société dentaire de Québec ne
sera pas convoquée pour le 15.
M. THOMAS BOUDREAU: Non. Il se peut que l'ont ait le temps, mais s'il
était possible là, ce serait la cinquième qui pourrait
être là dans cette semaine.
M. MARLER: Je pense que l'on pourra recommencer la semaine prochaine,
n'est-ce pas, avec toute l'affaire...
M. LE PRESIDENT; Cependant, pour terminer notre réunion de ce
matin, je demanderais à M. Boudreau de nous faire un exposé
sommaire du rapport qui a été préparé par les
experts et si vous avez des questions à lui poser, je suis sûr
qu'il se fera un plaisir de vous donner les réponses appropriées.
M. Boudreau.
M. THOMAS BOUDREAU: Merci, M. le Président. Ainsi qu'on l'a
déjà mentionné, la semaine prochaine nous serons à
votre disposition et étant donné le nombre de séances
prévu, six environ, l'on peut compter qu'à ce moment-là
une moyenne de deux volumes par séance pourrait être
discutée et, évidemment, nous serons à votre disposition
pour en discuter avec vous. Maintenant je pense, ainsi que le mentionnait M.
Morency qu'il y aurait grand profit à faire précéder ces
réunions-là de la lecture des mémoires, en d'autres mots,
à en faire au moins une lecture rapide. C'est pour ça que je
pense qu'il serait peut-être intêres-
sant, non pas d'en faire maintenant un résumé, mais
d'essayer d'exposer de quelle façon nous avons conçu l'ensemble
parce que, même si c'est dix pièces séparées, il
existe un certain lien dans tout ce travail-là.
Le problème que nous nous sommes posé, étant
donné que nous n'avions pas de recommandation à faire, mais que
nous devions essayer au départ de déblayer le terrain,
c'était d'essayer d'apporter des éléments de solution aux
problèmes suivants; premièrement, quelle quantité de
ressources doivent être mises dans le domaine de la santé, par les
individus et par le gouvernement, et deuxièmement, comment les services
doivent être organisés pour être le plus efficaces
possible.
Je pense que dans cette optique-là, le volume crucial et
peut-être le plus important, ce serait le volume No 7. Malheureusement,
peut-être le trouverez-vous un peu aride; il est peut-être
écrit dans un langage un peu compliqué, mais je pense que
malgré tout, surtout vers la fin, vous allez voir qu'il débouche
sur des conclusions passablement concrètes. Le problème qu'on
essaie de résoudre dans ce volume-là, c'est justement de fixer
quels sont les critères en vertu desquels on peut choisir tel type ou
tel autre type d'intervention du gouvernement; quels sont les critères
en vertu desquels on peut choisir de mettre telle quantité de ressources
plutôt que telle autre dans la santé; quels sont les
critères en vertu desquels on peut choisir si on doit assurer tel soin
plutôt que tel autre; jusqu'où on doit aller et comment tout le
système doit être organisé.
Evidemment, ces critères-là ne peuvent pas fonctionner
à vide, mais s'insèrent dans un contexte socio-économique
très défini et c'est pour ça que tout l'ensemble des
autres volumes a pour but d'examiner ce contexte-là. Alors les premiers
volumes, je saute le 1, j'y reviendrai tout à l'heure, les volumes 2, 3,
4 et 5 sont descriptifs et donnent un aperçu du contexte qui existe
maintenant. Comme par exemple le volume 2 qui décrit ce qui existe
maintenant dans les domaines public et privé pour ce qui est de
l'assurance-maladie et des régimes de soins et le volume 3 qui donne un
aperçu des aspects constitutionnels, enfin certains problèmes
relatifs aux relations fédérales-provinciales.
Le volume 4 nous donne certaines perspectives grâce à
l'étude qui y est faite de régimes de pays étrangers, ce
qui donne des points de repère assez intéressants et enfin le
volume 5, lui, étudie les régimes d'autres provinces du Canada,
régimes qui fonctionnent en des milieux qui ressemblent au
nôtre.
Voici donc, les éléments descriptifs du con- texte dans
lequel s'insère tout ceci, ou des exemples de contextes qui peuvent nous
servir. Les autres volumes qui accompagnent le volume 7, que j'ai décrit
comme étant un volume crucial, sont, enfin les volumes 8, 9 et 10; eux
décrivent ce que j'appellerais des contraintes dont devra tenir compte
le futur régime.
Une contrainte dont vous estimez certainement l'importance est le
coût et mode de financement, c'est le volume 8 qui essaie d'estimer
justement ce que coûterait aux individus et ce que coûterait
à la province l'instauration de diverses formes d'assurance-maladie. Je
pense évidemment, après avoir fixé les critères de
choix, que c'est un point de vue qui se doit d'être
considéré.
Ensuite le volume 9, qui parle de l'organisation, suggère
certaines formules d'organisation des services et essaie de tenir compte de ces
suggestions-là, des différents éléments qui doivent
participer à l'administration, à la distribution et à
l'organisation des services, quels rôles peuvent être
envisagés pour ces divers éléments-là. Je pense,
par exemple, aux divers ministères; je pense aux professions, aux corps
intermédiaires et le reste, quel rôle ils peuvent jouer, quel
accueil ils peuvent faire à divers types de solution.
Et enfin, le volume 10, qui traite des effectifs médicaux, essaie
de répondre à la question: Est-ce que oui ou non nous avons assez
de médecins à l'heure actuelle pour réaliser les
différents régimes auxquels nous pouvons songer?
A travers tout ça, il y a un autre volume dont je n'ai pas
parlé qui est un volume de référence surtout, c'est le
volume 6 qui est un résumé du rapport d'une commission royale que
vous connaissez certainement, une commission royale du gouvernement
fédéral, la Commission Hall, qui a fait un rapport
extrêmement considérable et volumineux sur la question. Nous avons
cru utile de le résumer dans une quarantaine de pages.
Maintenant, évidemment, il y a le volume 1, qui, lui, est un
volume de présentation qui fournit à un moment donné un
résumé de ce que sont les autres volumes. Et aussi un
deuxième chapitre essaie d'apporter une explication, ou si l'on veut une
justification du rôle de l'Etat dans le domaine de la santé. Je
pense que c'est au départ une question qui est valable. Est-ce que la
distribution des soins médicaux aux gens doit relever exclusivement de
l'initiative individuelle et de l'initiative privée? Ou est-ce qu'il y a
une certaine justification à ce que le gouvernement intervienne? Et la
réponse à cette question-là, évidement, nous donne
dé jà des indications quant à la limite ou jusqu'à
quel point le gouvernement
devrait s'occuper de cette question-là.
Enfin, je pense que ceci explique un peu la logique selon laquelle on a
essayé de concevoir l'ensemble de ces travaux-là. Cela demeure
malheureusement fragmentaire. Il y a autre chose qui reste à être
exploré, mais je pense que c'est un déblayage qui a une certaine
utilité.
M. Morency mentionne que nous avons fait préparer, que nous
serons en mesure de vous remettre dès la semaine prochaine une
photocopie de quelque trois cents recommandations que le rapport Hall a
soumises à la fin de son étude. C'est assez intéressant de
voir tous les domaines dans lesquels on peut faire des recommandations.
Maintenant, il est à noter que la commission Hall avait un mandat
extrêmement vaste. Elle devait explorer non seulement le problème
de l'assurance-maladie, de la distribution immédiate des soins, mais de
toute l'organisation du domaine de la santé. Elle a examiné le
domaine hospitalier, le domaine des soins psychiatriques dans les
hôpitaux et à domicile, le domaine de l'enseignement et de la
recherche dans la santé, celui de l'hygiène, enfin tout ce qui de
près ou de loin se rapporte au domaine de la santé, ce qui
évidemment était une tâche extrêmement large et
considérable.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, auriez-vous des questions à poser
à M. Boudreau?
UNE VOIX: Des félicitations à lui adresser pour son bel
exposé.
M. LE PRESIDENT: C'est tout. Est-ce que nous pourrions ajourner au mardi
8 mars à 3 heures 30?
M. MARLER; Je propose qu'on fasse rapport à la Chambre de cette
séance.
M. LE PRESIDENT: Oui, il faudrait faire rapport aujourd'hui.
La séance est ajournée au 8 mars, à 3 heures
30.
Séance du 8 mars
(Trois heures et trente-cinq de l'après-midi)
M. MARLER (Président du comité de l'assurance-maladie):
Messieurs, je demanderais d'abord au secrétaire de donner communication
au comité d'une lettre reçue de l'Association médicale de
la province de Québec par les présidents conjoints.
M. MORENCY: M. le Président, voici, c'est daté du 4 mars.
« Monsieur le Président, messieurs les membres du comité
parlementaire,
Le 14 février dernier, notre secrétaire honoraire, le
docteur De Guise Vaillancourt, avait l'honneur de vous faire parvenir un
mémoire expliquant le point de vue de notre association sur
l'assurance-maladie. Un comité conjoint, formé des
délégués du collège des médecins et
chirurgiens, de l'association médicale du Québec, de
l'association des bureaux médicaux, et de l'association des
médecins de langue française, se réunissait pendant ce
temps dans le but de préparer un document qui ferait valoir l'opinion de
toute la profession sur cette mesure de sécurité sociale.
Ce document a maintenant été rédigé. Il
contient non seulement le point de vue de notre association, mais celui de tous
les groupes médicaux les plus importants de la province qui font
l'unanimité sur cette question. Puisque ce mémoire conjoint
représente nos idées aussi bien que celles des autres
associations, la nôtre n'a plus sa raison d'être. En
conséquence, je vous demanderais de ne tenir compte dans vos
délibérations que du mémoire que vous recevrez
incessamment du comité conjoint.
Avec mes remerciements anticipés, je vous prie de croire,
Messieurs, à l'expression de mes sentiments dévoués.
Le Président,
Normand-J. Béliveau, m.d., Association médicale de la
province de Québec »
M. LE PRESIDENT: En effet, messieurs, laissez-moi vous dire qu'il y a
une espèce de consolidation de plusieurs mémoires qui, à
mon sens, doivent raccourcir un peu le travail du comité. Je pense que
ce serait logique si on demandait au secrétaire de s'entendre avec le
collège des médecins et chirurgiens quant à la date
à laquelle le collège doit présenter son mémoire au
comité de façon à organiser le programme aussi
efficacement que possible.
Si c'est bien la volonté du comité, je demanderais au
secrétaire de procéder de cette façon.
Avant de faire l'examen pour procéder à l'étude des
rapports individuels, je crois qu'il serait utile que M. Morency fasse part au
comité des démarches concernant la présentation par les
différents organismes de leurs mémoires, parce que depuis la
dernière réunion, il s'est
mis en communication avec plusieurs corps publics, et je pense qu'il
serait utile que le comité soit informé du résultat de ces
entretiens.
M. MORENCY: Tout d'abord, nous avions envoyé une lettre de
convocation à la Canadian Health Insurance Association pour mardi,
à l'Association d'hospitalisation du Québec pour mardi aussi,
dans l'après-midi, à la Chambre de Commerce de la province de
Québec pour mercredi matin, à l'Association médicale de la
province de Québec pour mercredi après-midi, et au collège
des pharmaciens du Québec pour jeudi matin de la semaine prochaine.
Alors, j'ai eu un appel de la Canadian Health hier, me demandant s'il
était possible de remettre à plus tard. J'ai dit
évidemment que je ne pouvais pas prendre de décision, qu'il y
avait une réunion du comité aujourd'hui, qu'une décision
serait prise, mais qu'il y avait probablement possibilité de remettre
leur audition à plus tard.
Quelques minutes après, la Croix Bleue, l'Association
d'hospitalisation du Québec m'a appelé pour demander la
même chose, une remise à plus tard. Alors, j'ai fait la même
réponse. Et aujourd'hui, nous avons une lettre de l'Association
médicale, celle que je viens de lire, qui demande évidemment de
ne pas considérer son mémoire.
Cela veut dire que pour la semaine prochaine, nous n'avons que deux
organismes qui sont dûment convoqués, c'est-à-dire la
Chambre de Commerce de la province de Québec, pour mercredi matin, et le
Collège des pharmaciens du Québec pour jeudi matin. Nous avions
prévu deux séances mardi et les deux se sont
défilées devant une remise, et une autre pour mercredi
après-midi, mais c'est la même situation. Alors, pour la semaine
prochaine, nous avons seulement deux organismes.
Par ailleurs, j'ai préparé rapidement ce matin au bureau
un horaire d'audition pour tous les organismes qui ont présenté
un mémoire jusqu'à maintenant. Et cet horaire, en tenant compte
de la vacance du 31 mars au 19 avril, et il s'agit là d'une question
à régler dans quelques minutes peut-être, mais en tenant
compte de cela, nous avons des audiences actuellement jusqu'au 20 avril, j'en
ai une le 20 avril; évidemment, il reste encore un peu d'espace
là, mais nous en avions 22, nous en avons 21, cela nous porte au 20
avril.
Alors maintenant, si vous le désirez, nous pouvons convoquer tous
ces gens-là dans l'ordre prévu, et enfin s'il y avait d'autres
choses que vous désirez, je ne sais pas...
M. LE PRESIDENT: M. Morency, combien d'audiences avez-vous
fixées?
M. MORENCY: Le 19 avril, mardi, il y en a une l'après-midi et il
y en a deux le soir. Le 20, j'en ai une l'après-midi. Maintenant, il
faut prévoir d'autres mémoires. Nous savons que le collège
des médecins doit nous faire parvenir un mémoire, et il y aura
sûrement d'autres organismes qui vont nous en faire parvenir aussi. Il va
sans dire que nous avons essayé de préparer ce calendrier en
gardant des périodes suffisamment longues; il aurait été
possible évidemment de comprimer un peu plus, mais je ne crois pas que
cela aurait été juste et raisonnable de le faire, à cause
des jours de séance, les mardi, mercredi et jeudi.
M. LE PRESIDENT: Dans les circonstances, il paraît que vous
préférez qu'il n'y ait pas de travail mardi prochain, ce que je
trouve très regrettable parce que je pense que de façon
générale le comité aimerait terminer ses séances
aussi rapidement que possible, en donnant justice aux intéressés
qui veulent paraître devant le comité. Mais de manquer
complètement une ou deux séances mardi prochain serait
très regrettable à mon avis.
Serait-il possible, M. Morency, de boucher ce trou-là? Je ne
songe pas à boucher des trous en faisant des discours inutiles, je ne
pense pas à cela. Evidemment, ceux qui sont députés savent
que cela joue un rôle très important dans la politique, mais pas
dans les séances de ce comité. Pensez-vous qu'il serait possible
d'en trouver d'autres qui pourraient venir mardi prochain?
M. MORENCY: Bien, voici le problème, c'est que c'est aujourd'hui
mardi, ça nous laisse une semaine. Maintenant, l'idée de
convoquer des organismes tels que la Canadian Health et la
Société d'hospitalisation, c'est que nous voulions commencer avec
des organismes importants; nous ne voulions pas commencer avec des individus
qui ont tout de même un intérêt moindre, enfin,
c'était la raison. Mais si le comité le désire, on peut
essayer de convoquer des individus; maintenant, je ne sais pas si c'est
possible. Actuellement, le premier groupe qui se présenterait, c'est la
Chambre de Commerce de la province de Québec.
M. RENAUD: Cela m'irait.
M. MORENCY: Ce serait excellent. Pour ce qui est de mardi, c'est
peut-être un peu tôt. Peut-être que demain on verra comment
l'étude du rapport du comité des recherches progresse.
Peut-être qu'on va réaliser qu'il serait bon de ne pas terminer
jeudi et d'en reporter une partie à mardi, je ne sais pas. Nous allons
voir
cela beaucoup mieux demain qu'aujourd'hui, je crois. A ce
moment-là, il y aura peut-être lieu de prendre une décision
pour mardi.
M. LE PRESIDENT: A première vue, je suis d'avis personnellement
qu'il serait tout-a-fait logique que le secrétaire informe les deux
associations, la Canadian Health Insurance et la Croix Bleue, qu'en fixant la
séance à mardi prochain pour leurs représentations, le
comité a bien l'intention que ces deux associations qui avaient
déjà produit des mémoires viennent nous les expliquer. Et
je pense que sans prendre une attitude trop radicale, je serais tenté de
demander au secrétaire de dire à ces associations qu'il ne semble
pas que le comité sera disposé à accorder un délai,
pour voir ce que cela peut donner. Justement, je ne sais pas si c'est bien
l'idée des membres du comité, mais j'ai bien peur que si nous
accordons des remises continuellement cela va aller jusqu'à
Noël.
UNE VOIX: Quelles raisons ont-ils données? Ils n'étaient
pas prêts, quoi?
M. MORENCY: Non, dans le cas de la Canadian Health, on nous dit que le
vice-Président de la compagnie est dans l'Ouest. Il ne doit pas revenir
avant une certaine période. Et dans le cas de l'autre, c'est le
Président qui est en dehors et qui ne reviendra pas avant le
début d'avril.
Maintenant, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier de mentionner,
c'est que ces deux organismes venaient la première journée et
qu'ils le savaient que c'était la première journée. Il a
été dit qu'on commencerait à recevoir des
délégations le 15, alors, il faut commencer à quelque
part.
M. LE PRESIDENT: Le secrétaire pourra peut-être en parler
d'ici à la séance de demain matin, et nous faire rapport, disons
à l'ouverture de la séance à dix heures et demie. Et
là, nous déciderons à nouveau de ce que nous devons
faire.
M. MORENCY: D'accord. Voici, pour faire suite à la demande du
comité concernant les délais de présentation, vous avez
dû voir, en tout cas si vous ne l'avez pas vu, c'est publié
aujourd'hui dans les journaux, une annonce qui a été
publiée dans les quotidiens de langue française et de langue
anglaise de la province, qui dit évidemment ce que le comité
avait décidé l'autre jour, à savoir, délai de
présentation jusqu'au 25 mars, et que les gens ont jusqu'au 18 mars pour
signifier leur intention de présenter un mémoire. Cela a
été fait aujourd'hui.
M. Marler me demandait où on avant trouvé l'argent, alors
j'ai dit: « On l'a trouvé ».
M. LE PRESIDENT: Cela montre que le système budgétaire a
été complètement saboté par les gens qui veulent
faire du bien!
Alors, messieurs, si c'est bien le plaisir du comité,
j'inviterais M. Castonguay, à qui nous voulons souhaiter la bienvenue,
à commencer en nous donnant des explications plus ou moins sommaires;
n'est-ce pas que vous avez l'intention de parler du premier volume?
M. CASTONGUAY: Si c'était possible. Merci. Vous permettez que je
reste assis?
M. LE PRESIDENT: Sûrement, à moins que le comité ne
s'y objecte, et c'est peu probable.
M. CASTONGUAY: Alors voici. J'aimerais vous faire une brève
présentation du premier volume, et ce soir, nous pensions pouvoir vous
faire une présentation des volumes 2 et 3.
Dans le premier volume, nous décrivons au tout début, dans
une introduction générale, le mandat du comité; sans
vouloir parler longtemps de cette question, je voudrais simplement faire
remarquer que nous n'avions pas évidemment comme mandat de faire des
recommandations. Alors si à quelques endroits, nous avons tiré
des conclusions dans nos exposés, où nous avons semblé
pencher en faveur d'une solution plutôt qu'une autre, cela a
été uniquement pour le déroulement de l'argument en
question, d'unepré-sentation qui se tenait, d'un exposé. Ce
n'était pas dans le but de vouloir influencer les membres du
comité.
Une question que nous avons eu à décider, et qui
était assez délicate, fut de délimiter le travail que nous
faisions, qu'est-ce que nous devions couvrir, qu'est-ce que nous ne devions pas
couvrir. Une première chose que nous avons laissé tomber, qui ne
nous semblait pas réellement appartenir à cette
étude-là, c'était celle de la question de la protection du
salaire en cas de maladie; nous avons pensé que c'était beaucoup
plus de la nature des lois du type assurance-chômage, accidents du
travail et régime de rentes que de la nature de l'assurance-maladie, tel
que nous le comprenons, protection contre les frais des soins médicaux,
les médicaments, etc. Alors, c'était la première des
choses que nous avons dû faire.
Une deuxième chose, c'est que n'étant pas appelés
à faire des recommandations, nous n'avons pas pu non plus aborder la
question des changements dans les politiques gouvernementales qui
pourront devenir nécessaires, par exemple, les politiques du
ministère de la Santé vis-à-vis la formation de nouveaux
médecins. Nous avons plutôt abordé l'étude des
effectifs médicaux, et nous avons donné un portrait de la
question, mais nous n'avons pas dit: «Voici. Il serait bon
peut-être de réenvisager le programme des bourses accordées
aux étudiants qui veulent se spécialiser, etc. » Il n'y
aurait pas eu de limites au genre d'études de ce genre-là que
nous aurions été obligés de faire, et elles auraient
été plus ou moins pratiques, étant donné que nous
ne pouvions pas recevoir de représentations; nous aurions
effectué en quelque sorte le travail que le comité conjoint doit
faire.
Ce sont les deux premières qualifications de nature
générale à la présentation de notre rapport.
Dans les travaux du comité, encore là sur le
problème plus particulier de l'assurance maladie, le temps qui nous a
été accordé a été suffisant, je crois, pour
que nous fassions notre travail. Malgré tout, nous avons
été obligés de faire diligence; nous avons eu en outre
à traiter d'une question particulière au cours de nos travaux,
c'est-à-dire préparer à l'intention du gouvernement un
rapport sur l'assistance médicale, ce qui a pris passablement de notre
temps. Nous avons donc dû faire certaines options; c'est qu'au lieu
d'étudier dans tous les domaines des soins tout ce qui pouvait
être étudié, par exemple, les effectifs de toutes les
professions, nous nous en sommes tenus à la question des effectifs,
disons à l'étude des effectifs chez les médecins. Nous
avons laissé de côté pour l'instant dans ce rapport les
effectifs chez les pharmaciens, chez les dentistes, chez les ophtalmologistes,
etc., mais nous avons plutôt accumulé une documentation sur ces
sujets-là, et si vous désirez que nous produisions certaines
pièces ou encore que nous en poussions l'étude, nous le ferons
avec grand plaisir. Nous avons plutôt centré notre travail sur la
question des soins médicaux qui sont, pour plusieurs raisons, les plus
importants, d'abord par le montant des frais qu'ils représentent pour
les personnes qui sont malades, au point de vue médecine
préventive, etc., et le genre de modèle d'études que nous
avons faites, toujours pour les soins médicaux, pourrait être
utilisée si nous devions pousser les études plus loin du
côté des soins dentaires, des soins pour les yeux, etc.
Alors, encore là, nous n'avons pas voulu indiquer une
préférence et dire que le régime devrait contenir
uniquement la protection des soins médicaux, à l'exclusion des
autres soins; nous avons plutôt voulu présenter un modèle
d'études et après cela, si le régime devait couvrir autre
chose que les soins médicaux, nous ferons les études que vous
nous demanderez de faire.
Nous avons aussi à l'occasion de nos travaux participé aux
conférences fédérales-provinciales qui ont eu lieu depuis
le mois de juillet dernier et aussi à une conférence
interprovinciale des ministres de la Santé en novembre dernier, Nous
avons pu également suivre sur ce plan-là le déroulement
des événements jusqu'à présent, et d'ailleurs nous
faisons rapport sur cette question dans le volume 3.
Nous avons aussi étudié, en prenant comme point de
départ, les différentes questions couvertes par la documentation
qui était disponible, mais nous avons, dans le cas de l'étude des
régimes d'assurance-maladie, effectué une tournée dans
quatre pays d'Europe et dans trois provinces canadiennes. A ce sujet-là,
nous avons présenté, comme vous l'avez vu, deux volumes et les
renseignements que nous avons rapportés de ces voyages en plus
d'être consignés ici, le sont dans des dossiers que nous avons au
local du comité, et qui sont d'une nature peut-être un peuplus
confidentielle, mais qui sont naturellement à votre disposition. Il y a
bien des gens qui nous ont parlé en toute liberté, sachant fort
bien, parce que nous le leur avions dit, que leurs opinions
n'apparaîtraient pas dans les rapports rendus publics: si elles avaient
été rendues publiques, ces gens-là auraient
préféré ne pas exprimer d'opinion, par suite de leurs
fonctions, par suite de différentes circonstances. Nous avons, en plus
des rapports qui sont publiés, une série de dossiers sur toutes
les entrevues que nous avons eues dans les organismes que nous avons
visités en Europe et dans les provinces canadiennes.
Si vous voulez les consulter, ils sont à votre disposition.
Quant au contenu lui-même du rapport ou des différents
volumes, M. Boudreau vous en a donné une description à votre
première séance, alors, je ne crois pas qu'il soit tellement
utile de revenir sur cela, et à moins qu'il n'y ait des questions
à ce stade-ci, je passerais au contenu du volume 1.
Dans le premier chapitre du volume 1, nous avons premièrement
voulu situer l'assurance-maladie par rapport à la sécurité
sociale. Je pense que c'est une question qui est assez primordiale.
Est-ce que l'assurance-maladie entre dans la sécurité
sociale comme une des mesures qui doivent en faire partie ou est-ce quelque
chose qui relève purement et simplement de l'entreprise privée
où l'Etat n'a aucune raison de jouer un rôle?
Deuxièmement, après avoir fini de situer
d'une façon très générale
l'assurance-maladie, par rapport à la sécurité sociale et
pour fixer encore davantage cette question-là, en plus de la prendre sur
le plan des principes, nous avons étudié, d'une façon
assez brève, le développement de la sécurité
sociale en Europe et en Amérique du Nord et après, plus
particulièrement, au Canada et au Québec, pour essayer de
déceler pour quelles raisons ce développement-là a
été différent et aussi si cela indique, pour l'avenir de
l'assurance-maladie, une orientation qui devrait être différente
ici au Québec et au Canada.
Après cela, une fois cette chose-là fixée, nous
sommes passés à la question de la profession médicale et
l'effort social dans le domaine de la santé toujours par rapport
à la plus grande question de l'assurance-maladie et de la
sécurité sociale. Et finalement, nous avons pour fixer les
esprits le plus rapidement possible sur ce en quoi consiste les régimes
d'assurance-maladie, essayé de dégager les
caractéristiques que l'on retrouve dans la majorité des
régimes d'assurance-maladie.
Pour ces quatre questions-là, si vous me permettez, j'ai
souligné, ce qui à mon avis dans le rapport, constitue les
parties les plus importantes et je pourrais vous en faire une lecture assez
rapide. Il y a énormément de matière étudiée
et faire cet exposé-là verbalement, j'ai l'impression que sur
certains points, je ne rendrais peut-être pas l'idée exactement,
ou je pourrais oublier des détails et affecter le processus normal de
l'exposé.
En ce qui a trait à l'assurance-maladie et la
sécurité sociale, on est parti du principe, que le but de la
sécurité sociale était de garantir à chaque homme
ou chaque personne qu'en toute circonstance il sera mis à même
d'assurer dans des conditions convenables, sa subsistance et celle des
personnes à sa charge. C'est le but ultime de la sécurité
sociale. Nous disions après...
M. LE PRESIDENT: A quelle page êtes-vous, monsieur?
M. CASTONGUAY: Je suis à la page 17. Alors, ça, ça
serait notre définition de la sécurité sociale. C'est le
principe abstrait, disons. Comment, maintenant, réaliser la
sécurité sociale? Or, nous disons, au-haut de la page 18, que la
sécurité sociale pouvait être considérée
comme étant l'addition, la conjonction de trois politiques
différentes. La première était une politique
économique commandée par le souci du plein emploi, la seconde,
une politique d'équipement sanitaire d'orgainisation médicale
permettant de lutter contre la maladie en la prévenant d'abord, en la
soignant ensuite dans les meilleures conditions possibles, politique qui trouve
son complément naturel dans une politique d'équipement technique
permettant de prévenir les accidents du travail et les maladies
professionnelles. Troisièmement, une politique de répartition des
revenus tendant à modifier la répartition qui résulte du
jeu aveugle des mécanismes économiques pour adapter les
ressources de chaque individu et de chaque famille aux besoins de cet individu
et de cette famille, compte tenu de toutes les circonstances qui peuvent
affecter l'évolution de ces ressources.
Et après, nous soulignons que pour chacune de ces politiques il y
a déjà dans la législation au Québec des lois ou
des législations qui touchent à chacune. Alors, c'est une
définition qui nous paraissait raisonnable en regard du contexte
québécois, et d'ailleurs dans chacune de ces trois
politiques-là, il y eu des efforts faits pour en arriver à
atteindre les buts indiqués.
Alors, nous pouvions énoncer à la fin de cette
première partie-là, que l'intégration de l'action
collective en matière de santé à une politique
générale de sécurité sociale est largement admise
dans la majorité des sociétés modernes, incluant le
Québec, à l'exception toutefois des Etats-Unis. Aussi,
croyons-nous utile pour expliquer une telle différence de conception,
étant donné toujours cette exception des Etats-Unis, de tracer
brièvement un parallèle entre le développement de la
sécurité sociale en Europe et en Amérique du Nord. Et
c'est ce que nous faisons, à la seconde partie. Nous établissons
premièrement, et avec maintes références qui sont
données dans la bibliographie, qu'en Europe le développement de
la sécurité sociale a précédé de beaucoup
celui en Amérique du Nord, dû au fait, premièrement, que
les phénomènes de l'industrialisation, de l'urbanisation se sont
produits énormément plus vite en Europe qu'ici; ils ont
commencé en Europe vers le début du XIX siècle. Ici, par
exemple, au Québec, le mouvement des populations, l'éxode des
campagnards vers les villes est quelque chose qui est encore en voie de se
réaliser.
Alors, cela c'est une des premières constatations qui expliquent
cette différence-là. Une deuxième, c'est qu'en Europe, les
chambardements amenés par l'industrialisation et l'urbanisation, se sont
faits dans des conditions excessivement laborieuses avec
énormément de misère pour les populations, ce qui a
amené un développement beaucoup plus rapide de la
sécurité sociale dans ces pays-là, par rapport
à
l'Amérique du Nord.
Il n'y a pas à notre avis de raisons fondamentales entre la
conception de la sécurité sociale, disons en Amérique du
Nord, et en Europe, c'est plutôt un phénomène de
décalage dans le temps qui s'est produit, dû à
l'urbanisation, l'industrialisation qui sont arrivés beaucoup plus tard
ici qu'en Europe, et dans des conditions beaucoup moins laborieuses.
La deuxième série d'aspects particuliers du
développement de la sécurité sociale que nous avons voulu
faire ressortir est plus particulière au Québec et au Canada. Et
à ce sujet-là, nous disons au bas de la page 20, « il ne
faudrait pas conclure toutefois que le décalage dans le temps, entre
l'industrialisation et l'urbanisation en Europe occidentale et en
Amérique du Nord, constitue la seule explication d'un dé calage
analogue dans le développement de la sécurité sociale.
Certains aspects particuliers de ce développement au Canada et au
Québec doivent nécessairement être mentionnés. Les
problèmes que l'on reconnaît aujourd'hui comme des
problèmes sociaux étaient considérés en 1867, comme
des problèmes individuels ne requérant aucune intervention
publique, sauf sur le plan local.
Ceci s'explique en partie, par la très grande dispersion
géographique de la population à cette époque. Ainsi, en
vertu de l'acte de 1867, « ici si vous me permettez une pause, toutes ces
affirmations-là que nous faisons, sont toutes appuyées sur des
textes d'auteurs sérieux et les sources sont données dans les
bibliographies à la fin de chacun des chapitres ou à la fin des
volumes. «Le gouvernement fédéral fut investi des
responsabilités que l'on jugeait, alors, importantes et le domaine du
bien-être social devait être laissé aux provinces, sans
même que des obligations leur soit imposées à ce sujet.
« Et ici, on dit: « The Fathers of the Confederation, clearly
thought, they were assigning the provinces the unimportant and inexpensive
functions of government, among which education, hospitals, charities, and
municipal institutions were then reasonably numbered. »
Alors ici, on retrouve quelque chose de particulier qu'on ne retrouve
pas dans les pays d'Europe, soit la juridication sur la sécurité
sociale au plan des provinces au lieu de la retrouver au plan du gouvernement
central. Ceci a aidé à affecter nécessairement le
développement de la sécurité sociale surtout si l'on
considère les moyens financiers que les provinces avaient et que
certaines ont encore pour faire face au problème posé par le
développement d'une politique de sécurité sociale. Et
c'est pour cela, qu'à la page 22, au haut, nous disons: «Aucune
politique générale de sécurité sociale n'a pu ainsi
se con- crétiser de telle sorte que chaque nouvelle étape devait
nécessiter de longs débats sur les principes en cause. De
même, et ceci est significatif, chaque nouvelle mesure ne pouvait
toujours s'intégrer harmonieusement aux mesures existantes comme partie
d'un ensemble bien équilibré. Et, alors que
l'assurance-hospitalisation universelle vient à peine d'être
instaurer au Québec, il demeure donc en quelque sorte nécessaire
de reprendre l'examen de l'ensemble de la question, quant aux aspects
complémentaires de l'assurance-maladie ».
Alors, ça c'est notre opinion, disons, sur cette
question-là, que nous ne pouvons pas trouver dans le
développement de notre sécurité sociale, sauf en ce qui a
trait à la juridiction, des lignes directrices, disons, qui nous
permettraient de bien tracer dans quel cadre s'insèrent les mesures
complémentaires de l'assurance-maladie en plus de celles de
l'assurance-hospitalisation.
Alors, ça c'est la dernière partie de l'exposé, en
fait le problème était étudié dans son ensemble. On
ne peut donc procéder dans le cadre d'une continuation bien
facilement.
Nous passons, après ça, à la question que nous
avons intitulée: la profession médicale etl'effort social dans le
domaine de la santé.
En premier lieu, nous établissons, disons que la maladie c'est un
problème social, que ce n'est pas uniquement un problème
individuel, que c'est un problème qui dépasse l'individu pour
plusieurs raisons; et nous citons à cet effet-là, diverses
déclarations. Il y en a un grand nombre de déclaration ou de
chartes. Nous avons pensé que les plus intéressantes
étaient peut-être la déclaration de Philadelphie, qui a
été faite à l'occasion d'un congrès sous
l'égide de l'Organisation Internationale du Travail. La partie que nous
avons fait ressortir, qui apporte plus de précision, est à la
page 23, le paragraphe g. La déclaration affirme qu'une protection
adéquate de la vie et de la santé des travailleurs dans toutes
les occupations est essentielle.
Nous prenons après ça la Déclaration universelle
des droits de l'homme qui a été acceptée par
l'Assemblée générale des Nations-Unies, en décembre
1948 et on dit que toute personne a droit à un niveau de vie suffisant
pour assurer sa santé, son bien-être et celui de sa famille,
notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins
médicaux ainsi que les services sociaux nécessaires. Elles a
droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie,
d'invalidité, de veuvage, de vieillesse, etc. Et nous reprenons
après, une dernière charte, celle des pays membres du conseil de
l'Europe. Mais avant de le faire, nous citons par quelques commentaires, nous
mentionnons qu'à notre avis, le
droit à la santé est un droit aussi fondamental que le
droit à l'éducation, au travail. Nous mentionnons, naturellement,
un peu plus tard que ces droits sont, jusqu'à un certain point, relatifs
étant donné que l'exercice de ces droits dépend des moyens
et des disponibilités.
Nous situons après, à la page 24, encore pour mieux
préciser que l'assurance-maladie fait partie de la
sécurité sociale ou que la maladie est un problème social,
en affirmant que l'influence de l'état de santé des divers
groupes de la population, sur l'ensemble de la vie et du développement
des sociétés, tant du point de vue social et culturel que du
point de vue économique, est un fait reconnu. On dit : « Qu'une
élévation sensible du niveau de vie d'une population ne saurait
d'ailleurs éliminer un tel problème, celui de
l'élévation du niveau de santé ». Et à ce
sujet-là, nous avons cité la charte sociale des pays membres du
conseil de l'Europe, signée en 1961, qui représente à
notre avis, la codification la plus récente en matière de
sécurité sociale. Et en dépit de la hausse
considérable du niveau de vie en Europe occidentale, au cours des
dernières années, les pays membres ont voulu en proclamant dans
cette charte, les droits fondamentaux de leurs citoyens et inclure le droit
à la protection de la santé. On dit qu'une telle proclamation
constitue un refus d'accepter la thèse selon laquelle le droit à
la protection à la santé pourrait cessé d'être une
préoccupation de l'Etat lorsque le niveau de vie suffisamment
élevé.
Alors, l'assurance-maladie par rapport à la
sécurité sociale, puis la maladie un problème social, et
ensuite, en premier lieu, les droits et les devoirs des médecins dans le
domaine de la santé étant donné qu'il est toujours de plus
en plus question, je crois bien dans le bon sens du mot, de la socialisation de
la médecine ou plutôt de donner un aspect social plus
développé à l'exercice de la médecine. Et nous
disons; l'effort social dans le domaine de la santé suppose une
mobilisation de toutes les forces vives de la société. Les
professionnels de la santé ont une responsabilité
considérable dans ce domaine. Aussi nous semble-t-il essentiel
d'expliciter brièvement ce que peuvent être les droits et les
devoirs de la profession médicale, en cette matière.
Et sur cette question-là qui, naturellement, touche
d'excessivement près la profession médicale, comme elle touchera,
selon les modalités du régime, les autres professions, telles que
les pharmaciens, les dentistes, etc., nous n'avons pas voulu ici, exprimer
d'opinions sur la question. Nous nous sommes contentés de reproduire des
travaux qui ont été faits à l'occa- sion d'un
congrès, le congrès des Affaires québécoises tenu
à l'Université Laval en octobre 1965, congrès auquel
participaient un grand nombre de médecins, congrès qui avait
été organisé par les étudiants de la faculté
de médecine, en collaboration avec les autorités de
l'université.
Alors, nous publions ce qui constituait selon les données ou les
résultats des travaux de ce congrès, les droits des
médecins dans un régime d'assurance-maladie. Ensuite, nous
donnons ce qui constitue les devoirs généraux des médecins
envers les malades et les devoirs des médecins les uns envers les
autres. Ceci pour situer le plus rapidement possible quel genre de
problème l'établissement d'un régime d'assurance-maladie
pourrait créer vis-à-vis la profession médicale et les
autres professions, si un tel régime était élaboré
de telle sorte qu'on ne tiendrait pas suffisamment compte de ces
professions-là. M. le Président, croyez-vous que ces extraits
devraient être lus au complet?
M. LE PRESIDENT: Quelle est la volonté du comité? Est-ce
que tout le monde a lu cette partie du rapport. Je pense que dans les
circonstances l'on peut se dispenser de la lecture.
M. CASTONGUAY: Très bien.
Maintenant, nous passons, à la suite de cet exposé
où nous avons situé brièvement l'assurance-maladie par
rapport à la sécurité sociale, le fait que la maladie
n'était pas un problème individuel mais revêtait aussi un
aspect social et avant d'aller plus loin, nous avons bien voulu établir
quels étaient les droits et les devoirs d'une profession, comme la
profession médicale. Puis nous ressortons les principales
caractéristiques des régimes d'assurance-maladie.
Je crois que c'est peut-être la partie la plus importante pour
bien vous situer. Si vous me permettez, je vais lire les deux pages ou les
trois pages qui suivent et s'il y avait des questions, ça me ferait
plaisir d'y répondre à mesure que j'avance, si c'est votre
désir. « L'énoncé de ces divers droits et devoirs
soulèvent nécessairement de nombreuses questions relativement
à l'élaboration d'un régime d'assurance-maladie. Un tel
régime doit aussi s'intégrer harmonieusement à la
politique socio-économique de l'Etat, ce qui nécessite donc un
examen de l'ensemble de la question sur un plan plus concret.
L'expérience des autres pays et provinces dans le domaine des
régimes de soins, constitue une source précieuse de
données et de leçons qui ne sauraient être ignorées
dans cet examen. C'est pourquoi le comité a cru nécessaire de
dégager les principales caractéris-
tiques des régimes dont les analyses descriptives sont
présentées dans les volumes 4 et 5. Cette analyse des
caractéristiques pourrait, en outre, tenir lieu, jusqu'à un
certain point, de définitions de l'assurance-maladie tout en permettant
de faire le point sur l'évolution que connaissent tous les
régimes. L'étude sur l'utilité de l'assurance-maladie,
présentée au chapitre suivant, complètera cet examen
pratique. »
Alors, les types de régimes en premier lieu, et ça c'est
assez important, il y a trois options possibles à faire sur les types de
régimes. « Il est essentiel au départ de souligner qu'un
grand nombre de facteurs entourant l'établissement des divers
régimes nationaux dans chaque pays a fortement influencé leur
conception. Avec le temps, la conception de ces régimes a
évolué de manière plus ou moins marquée selon les
pays de façon qu'ils s'adaptent à l'ensemble des nouveaux
facteurs socio-économiques environnants. « C'est ainsi que l'on
peut maintenant distinguer en Europe occidentale et en Amérique du Nord,
trois types génétiques de régime. «
Premièrement le régime de soins, dont l'objectif est d'accorder
à l'ensemble de la population, sans égard aux moyens financiers,
à l'age, au sexe et à l'occupation, les meilleurs soins et
services disponibles. Ce type de régime peut être
considéré comme le plus audacieux au point de vue social
».
M. COITEUX (Duplessis): Auriez-vous l'obligeance, M. Castonguay, de nous
dire ce que vous entendez par audacieux? Est-ce que c'est seulement question de
finance ou s'il y a d'autres idées...?
M. CASTONGUAY: C'est celui qui veut résoudre le plus de
problèmes. C'est-à-dire qu'on essaie de mettre à la
disposition de la population tous les soins possibles sans qu'il soit question,
en aucune façon, des moyens financiers des individus. Tout le monde est
assuré pour tous les soins possibles. Ce n'est pas de l'assurance en
fait, on met des services à la disponibilité de toute la
population.
M. RENAUD: M. Castonguay...
M. CASTONGUAY: C'est pour cela que nous avons évité de
dire régime d'assurance-maladie, nous l'avons appelé
régime de soins.
M. RENAUD: Un tel régime se trouve en Grande-Bretagne, est-ce
qu'il y a d'autres pays qu'en Angleterre?
M. CASTONGUAY: Dans les pays occidentaux, disons à notre
connaissance, non. Dans les pays plutôt socialistes, comme les pays
autour de la Russie, là il y a des formules qui se rapprochent du
régime de soins.
M. RENAUD: Dans les pays occidentaux, il n'y a que la Grande-Bretagne
qui a un tel régime comme celui que vous venez de mentionner?
M. CASTONGUAY: A notre connaissance oui.
M. ASSELIN: Quand vous dites « le plus audacieux », je
reviens à la question qui a été posée tout à
l'heure, voulez-vous dire audacieux au point de vue finances publiques ou
audacieux comme principe?
M. CASTONGUAY: Disons que...
M. ASSELIN: Comme principe de sociologie.
M. CASTONGUAY: Selon les chiffres qu'on vous donne dans le volume 4,
c'est audacieux au point de vue conception, c'est aussi audacieux au point de
vue finances publiques parce qu'il semble bien, et on l'indique avec
références à l'appui, que l'on a voulu trop faire et que
les dépenses qui ont été consacrées à la
consommation ont retardé ou ont diminué de façon
défavorable les dépenses d'investissement dans le domaine de la
santé. Par exemple, la construction des hôpitaux semble avoir
retardé passablement, le développement des effectifs
médicaux semble aussi avoir retardé. A un moment donné,
même la rémunération des médecins, leurs conditions
de travail au point de vue de leur cabinet, au point de vue des recherches,
etc. semble en avoir même souffert à tel point qu'il y a eu un
exode vers les autres pays. On a eu un exemple concret ici en Saskatchewan, il
y a quelques années, lorsqu'il y a eu des difficultés avec les
médecins; il y a un bon nombre de médecins qui, pratiquement sans
avis, sont venus s'établir en Saskatchewan. Quant à leurs
conditions de pratique, l'on peut peut-être conclure qu'elles
n'étaient pas tellement bonnes, s'ils ont décidé comme
ça, sans avis de déménager.
Alors, cela a été audacieux au point de vue de la
conception, et possiblement aussi un peu trop audacieux au point de vue des
ressources disponibles.
M. LUSSIER: Ce régime-là a été
instauré au cours de la seconde grande guerre. Est-ce que depuis ce
temps-là, ils ont eu la possibilité de corriger ces
lacunes-là...?
M. CASTONGUAY: Il a été conçu au cours de la guerre
et c'est peut-être une raison pour laquelle il a été
conçu de façon aussi audacieuse pour donner, semble-t-il,
d'après les textes que nous avons, un espoir à la population. Le
rapport Beveridge, sur lequel il est basé, a été rendu
public au cours de la guerre. Le gouvernement, qui était un gouvernement
de coalition, s'est engagé à donner suite à ce
rapport-là, et ce fut une sorte d'encouragement à la population
qui était privée de toutes sortes de façons, et dont
l'état de santé s'était détérioré
passablement. Le régime a été établi en 1948 dans
un climat bien particulier. Par la suite, diverses modifications y ont
été apportées. On a été obligé, par
exemple, à certains moments d'imposer des charges, lors de l'achat des
médicaments. Selon les changements de gouvernement, on a
éliminé ces charges-là, on les a imposées, on les a
augmentées. Il n'y a pas eu de modifications fondamentales dans la
conception du régime.
Est-ce qu'il y a eu des occasions d'effectuer des changements? Bien,
là, ça devient je pense, une question plutôt à
caractère politique et je ne suis pas en mesure de juger.
M. COITEUX (Duplessis): Cette première option-là, est-ce
que ça veut dire que c'est la seule...
M. CASTONGUAY: Disons que ça se rapproche davantage d'une
fonctionnarisation de la médecine. Je pense qu'aujourd'hui, la maladie
étant un problème social, les médecins admettent
eux-mêmes que dans l'exercice de leur profession, il y a un aspect
social. Alors, disons qu'un tel régime rapproche plus la profession
médicale du fonctionnarisme, ce qui est quelque chose de passablement
différent et possiblement beaucoup moins désirable.
M. COITEUX (Duplessis): Merci beaucoup.
M. ASSELIN: A votre avis, est-il possible, pour un état comme le
Québec par exemple, de commencer par un régime moins
avancé, moins audacieux, si vous voulez, disons le régime B, le
régime d'assurance-sociale, et lui faire subir une évolution ou
des transformations qui l'acheminent vers le type A des soins, ou bien s'ils
sont tous tellement différents qu'il faut qu'ils restent dans ce type de
régime? Est-ce que vous comprenez ma question? Je ne sais pas si je
l'exprime bien.
M. CASTONGUAY: Oui, je comprends, M. Asselin, disons que je crois bien
qu'il n'y a pas une formule qui ne permette pas d'évolution. Chaque
genre de régime peut évoluer dans le temps, à mon
avis.
M. ASSELIN: Alors, il serait possible de commencer par faire quelque
chose de moins audacieux, moins onéreux, disons, pour les finances
publiques, qui pourrait au fur et à mesure des ressources du
gouvernement ou de la collectivité évoluer vers un type plus
avancé, plus audacieux, si vous voulez une expression, afin de lui faire
subir une évolution qui serait un perfectionnement, qui donnerait des
services plus considérables à la population. Est-ce qu'il serait
possible d'évoluer dans ce sens-là?
M. CASTONGUAY: Bien, disons que c'est l'expérience de la plupart
des trois autres pays que nous avons visités et dont nous avons
étudié les régimes. Il y a eu une évolution
continuelle en France, en Belgique, en Suède, une évolution
marquée.
M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, voulez-vous, peut-être, nous
donner des exemples de la façon où on va pouvoir commencer sur
une échelle moins considérable.
M. CASTONGUAY: Bien, il y a divers modes d'étapes qui peuvent
être envisagés. Sur le plan du champ d'application, par exemple,
je peux vous donner l'exemple de la France. Ici, j'essaie un peu d'être
prudent en prenant des exemples à l'extérieur parce que les
organismes qui vont venir peuvent, à un moment donné, je ne sais
pas, penser que ce que je dis ici, ce serait tenter d'influencer trop dans une
direction ou dans une autre. Alors, si vous n'avez pas d'objection sur ce genre
de question-là, j'aimerais mieux vous répondre par les
parallèles, sur ce qui existe ou ce que j'ai vu à
l'extérieur...
M. RENAUD: On ne vous en demandera pas davantage.
M. CASTONGUAY: Je vous remercie. Alors, en France, par exemple, il y a
un premier régime qui a été établi pour les
salariés. Alors on a couvert les salariés et leurs
dépendants, première des choses. Par la suite, on a étendu
la couverture aux travailleurs agricoles. Par la suite on a étendu le
champ d'application du régime à certaines catégories de
pensionnés, pensionnés de guerre, etc. Alors, on sent que ce
qu'ils ont voulu faire, en premier, c'était de couvrir leur population
active, la population qui produit et leurs dépendants.
Deuxièmement, on a pris celle qui était dans la meilleure
condition au point de vue revenu, celle qui pouvait financer un tel
régime. On est ensuite passé aux tra-
vailleurs agricoles avec un régime, qui, si ma mémoire est
bonne, comporte une couverture un peu moins grande. Après cela, on a
couvert chez les pensionnés de guerre qui, pour diver ses raisons,
méritaient une considération des plus particulières du
pays pour des raisons assez évidentes, alors ça c'était un
genre d'étapes sur le plan du champ d'application. Après
ça sur le plan des soins couverts, bien on a commencé par les
soins médicaux, par des médicaments, des soins dentaires, mais
chaque fois qu'une personne devait faire appel au régime, on a
imposé des charges assez élevées que l'assuré
devait payer à ce moment-là. A mesure que les années ont
passé, on a réduit sensiblement le montant de ces charges. Cela
est un autre genre d'étape.
Après ça, par exemple, dans certaines catégories de
soins ou de services, on peut faire un choix. On a fait par exemple un choix
dans les médicaments. Au lieu de couvrir tous les médicaments
prescrits, on a pu dire, voici pour une certaine série de
médicaments, à l'avenir, il n'y aura plus de frais. Alors, des
médicaments qui peuvent être utilisés pendant de
très longues périodes, l'exemple classique c'est l'insuline dans
les cas des diabétiques ou encore des médicaments qui sont
très dispendieux et qui sont absolument nécessaires pour sauver
la vie du patient au moment où il en a besoin, comme par exemple dans
les cas d'affections cardiaques.
Alors, au début une charge pour tous les médicaments
prescrits, et plus tard on a tendu à éliminer ces charges pour
certains genres de médicaments ou certaines maladies. C'est un
troisième type d'étapes qui peuvent être envisagées
si on ne veut pas faire tout à la fois. Mais ça, c'est possible,
à mon avis, dans les trois genres de régime, dans les trois types
de régime.
Est-ce que ceci répond à la question?
M. CADIEUX: Je pense que ce n'est pas plus lucratif, mais je pense qu'il
est toujours plus facile d'ajouter que d'en retrancher.
M. CASTONGUAY: Je n'exprime pas d'opinion, je mentionne...
M. LE PRESIDENT: Je pense que le conseiller est assez intelligent pour
comprendre que c'est plus facile de donner que de reprendre.
M. FORTIER: Donnez moins et ajoutez plus. Parce qu'au moins en
Grande-Bretagne, ils ont restreint les privilèges après quelques
temps...
UNE VOIX: Après l'établissement...
M. FORTIER: Ils ont restreint les privilèges.
M. RAYMOND: En partie.
M. CASTONGUAY: Le second genre de régime ou le second type,
disons le régime d'assurance-sociale dont l'objectif est de
protéger la population assurée, c'est là le
mot-clé, la population assurée contre les frais résultant
de la maladie. Ce type de régime qui constitue essentiellement une
mesure d'assurance-sociale comporte le paiement de primes ou de cotisations de
la part des assurés et, pour la plupart des soins, certains paiements de
la part des bénéficiaires lors de la réception des soins
ou de l'utilisation des services. Alors là on se rapproche beaucoup plus
de l'assurance que de services.
M. RENAUD: Est-ce que le deuxième régime est uniquement
payé sur la base de primes ou s'il y a une participation dans certains
pays de l'aide gouvernementale, en plus des primes?
M. CASTONGUAY: Dans les trois pays que nous avons visités, que
nous avons étudiés, à l'exclusion de l'Angleterre, en
France, ce régime est financé uniquement à même les
cotisations des assurés. D'un autre côté, les cotisations
des assurés, depuis un certain nombre d'années ne suffisent plus
à couvrir les coûts du régime, alors l'Etat fait des
avances à la sécurité sociale qui est un organisme
pratiquement gouvernemental, et ces avances-là, si elles ne sont jamais
remboursées, éventuellement deviendraient la part de financement
du gouverne ment.
En Belgique et en Suède, depuis longtemps le principe du
financement avec participation de l'Etat, des employeurs et des travailleurs
est reconnu et établi directement dans la législation.
Même, on y fixe une part bien précise de ce qui doit être
supporté par chacune des trois parties.
M. RENAUD: Une contribution qui participe, en Suède,
dites-vous?
M. CASTONGUAY: En Suède et en Belgique.
M. RENAUD: En Suède aussi?
M. CASTONGUAY: En Suède aussi, oui. Et
la part que doit supporter l'Etat est fixée ainsi que la part de
la population, des travailleurs et des employeurs. Alors, si les travailleurs
et les employeurs désirent une protection plus grande, le coût
augmente automatiquement; si le coût des services augmente, les primes
augmentent automatiquement; si l'utilisation des services augmente,
augmentation automatique des primes. Alors, les finances du régime sont
rendues beaucoup plus claires au point de vue de la population.
M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, est-ce que je dois comprendre qu'aux
endroits où ces plans d'assurance-sociale existent que presque la
totalité de la population profite de l'assurance-maladie?
M. CASTONGUAY: C'est une des grandes caractéristiques ça
encore que nous mentionnons ici au haut de la page 31. On dit: « Dans les
régimes d'assurance-sociale, la tendance consiste à
étendre le champ d'application constamment afin d'atteindre
éventuellement l'ensemble de la population ». Par
définition, le régime de soins, lui, s'applique à
l'ensemble de la population en Angleterre. Mais, dans les autres
régimes, que ce soit du type 2 ou du type 3, c'est la tendance que nous
avons constatée partout, soit dans les provinces canadiennes ou dans les
pays d'Europe de vouloir étendre le champ d'application à
l'ensemble de la population.
M. LE PRESIDENT: Mais cela, il me semble, implique n'est-ce-pas qu'il y
a un pourcentage peut-être plus ou moins important de gens qui ne sont
pas couverts par le système d'assurance?
M. CASTONGUAY: Nous donnons les pourcentages dans les études des
régimes que nous présentons. De mémoire, je ne me souviens
plus exactement des chiffres, mais en Belgique on approche d'une couverture
assez universelle. En Saskatchewan, c'est atteint, c'est la pleine couverture.
En Alberta, ils ont dépassé... ça varie entre 80% et 85%
de la population qui est assurée. En Suède, si ma mémoire
est bonne, c'est à peu près l'ensemble de la population qui est
assurée. Alors, dans tous ces pays ou provinces la partie non
assurée de la population est, soit très faible ou si elle n'est
pas tellement faible, si c'est quelque chose comme 15%, 20% et le pourcentage a
tendance à diminuer graduellement, assez rapidement.
M. RENAUD: M. Castonguay, en Suède et en Belgique,
considérez-vous que le rôle de l'Etat demeure, par sa
contribution, un rôle supplétif?
M. CASTONGUAY: Non.
M. RENAUD: Alors, comment le définiriez-vous?
M. CASTONGUAY: C'est une question qui est assez longue à
répondre, mais si vous le permettiez, sur celle-là, lorsque nous
passerons à l'étude de ces régimes-là, je pense que
la réponse pourrait ressortir plus clairement. Je ne voudrais pas juste
l'affirmer comme cela, avec quelques explications sommaires qui pourraient
plutôt indiquer une impression de ma part de quelque chose
réellement basé sur les faits. Je crois que ça ressort
assez clairement dans la description de ces régimes-là, de quelle
façon le tout s'intègre avec la politique sanitaire de ces
gouvernements-la.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais poser juste une autre question au sujet de
ceux qui ne profitent pas de l'assurance-maladie. Vous avez, cité le cas
de l'Alberta, vous avez dit en effet qu'il y avait 85% de la population qui est
assurée, laissant évidemment 15% qui ne l'est pas. Est-ce qu'on
peut identifier une catégorie de la population disant, d'une
façon générale, ces gens-là ne sont pas couverts
par l'assurance-maladie? Prenons les gens qui nous viennent à la
pensée. Ceux qui profitent de l'assistance publique, disons, sont-ils
couverts par le plan dans l'Alberta?
M. CASTONGUAY: En Alberta, il y a un régime qui couvre depuis un
bon nombre d'anné'es les personnes qui reçoivent de l'assistance
publique, assistance aux invalides, assistance aux mères
nécessiteuses; ces formes d'assistance-là, ça existe
depuis un bon nombre d'années en Alberta.
Maintenant, pour savoir qui n'est pas couvert dans le résidu, qui
sont ces personnes-là, il faut d'abord voir quelle est la nature du
régime en Alberta. C'est un régime facultatif.
M. LE PRESIDENT: Alors, c'est-à-dire que ceux qui n'ont pas
besoin d'assurance ne s'assurent pas.
M. CASTONGUAY: Pas nécessairement. UNE VOIX: Ceux qui n'en
veulent pas. M. CASTONGUAY: Pas nécessairement. On
a établi... Si vous voulez, je peux vous lire la description du
régime facultatif, en premier, lieu...
M. LE PRESIDENT: Je comprends, parce que là c'est marié un
peu avec l'assurance-sociale.
M. CASTONGUAY: Au bas de la page 29...
M. KENNEDY: M. Castonguay, j'aurais une question, au cours de vos
entrevues que vous avez eues, est-ce que vous avez pu extraire le principe qui
a amené les pays, comme la Belgique et la Suède, je crois,
à établir un plan avec participation des contribuables, sous
forme de primes, tandis que dans le cas de la Grande-Bretagne, c'est un cas
où tout est couvert pas l'Etat, excepté depuis quelques
années, il y a eu des changements.
M. CASTONGUAY: En Grande-Bretagne, il y a aussi paiement de primes de la
part des employés, de la part de leurs employeurs...
M. KENNEDY: Ce n'était pas tout à fait semblable.
M. CASTONGUAY: ...tout le monde est couvert, la protection n'est pas
rattachée au paiement des primes, en Angleterre. Que vous payiez des
primes ou non, vous êtes couverts, mais si vous êtes un
travailleur, vous devez payer une prime. Dans tous ces pays-là, le
raisonnement est le suivant, c'est qu'il y a une partie de la population qui
est active et il y a une partie de la population qui est inactive. La partie de
la population active finance tous les biens et services qui sont mis à
la disposition de l'ensemble de la population, qu'elle soit la population
active ou inactive. Et on répartit les coûts d'une façon
qui semble la plus équitable possible en faisant porter une partie de
ces coûts par les salariés et une partie par leurs employeurs qui
ont aussi une responsabilité. Ils reçoivent les services de leurs
employés, alors ils doivent donc assumer une certaine
responsabilité vis-à-vis leur santé. Et cette partie
assumée par chacun peut varier selon les genres de soins. Il y a des
soins qui sont des soins d'une nature un peu plus publique et d'autres qui sont
d'une nature un peu plus privée, comme la vaccination. Cela c'est un
soin disons purement public. Si une personne ne se fait pas vacciner, elle met
en danger tout le monde, alors là il n'est pas question de savoir si la
personne désire ou non se faire vacciner, elle doit l'être. Je
pense que c'est accepté aujourd'hui et il n'est pas question de dire
à l'individu, vous allez payer votre vaccination directement comme si
elle veut obtenir un meilleur appareil auditif, par exemple, ou des lunettes
plus élégantes, là, on se rapproche de plus en plus de
choses qui sont privées.
Selon les catégories de soins, on voit que la participation de
chacun varie. Par exemple, les médicaments prescrits, bien, il y a
certainement plus de raisons pour que, disons on demande à d'autres que
l'individu de participer dans les coûts. Si, par exemple, on entre dans
des médicaments non prescrits, du genre médicaments pour
éliminer le mal de tête, les aspirines, bien là je pense
que ce n'est pas tout à fait de la même nature. Alors, on retrouve
des répartitions des coûts qui varient selon la nature des soins,
et généralement pour les grandes maladies où il y a
hospitalisation, disons il n'y a pas de frais dissuasifs, hospitalisation
prolongée.
M. KENNEDY: Alors on peut dire à ce moment-là que comme
principe de base, tous les pays ont reconnu que l'individu avait d'abord et
premièrement envers lui-même une responsabilité pour ses
soins médicaux.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. KENNEDY: Que la première responsabilité du moins est
une responsabilité indéniable.
M. CASTONGUAY: Juste l'instinct de survie et je pense, le
bien-être de l'individu sont assez forts pour cela.
M. KENNEDY: Non, mais c'est parce que je veux simplement dire ceci, il y
a une tendance, certaines personnes disent: Tout le monde va payer pour nous
autres! C'est assez courant, actuellement.
M. BRISSON: M. Castonguay, l'employé paie mais le rentier
paie-t-il? S'il absorbe simplement la part de l'Etat, il absorbe simplement une
part, tandis que l'employeur et l'employé absorbent deux parts.
M. CASTONGUAY: Dans les pays que nous avons visités, les rentiers
ne paient pas sur leurs rentes. S'ils sont rentiers, aujourd'hui, un jour ils
ont été dans la population active et ils ont payé à
leur tour. Ils ont payé de différentes façons. S'ils
n'avaient pas de sécurité sociale, de régime
d'assurance-maladie, à ce moment-là, ils ont payé leurs
primes directement. Ils ont payé aussi de toutes sortes d'autres
façons par les investissements qui ont
permis à leurs descendants ou générations suivantes
de bénéficier de tout l'équipement qui existe, les
hôpitaux, etc. Alors, généralement, sur les rentes, les
pensions, iln'yapas de contribution. Par exemple, par contre sur les revenus de
placement, bien là, par l'impôt en fait, eux sont appelés
à payer indirectement, c'est-à-dire dans la part supportée
par l'Etat.
M. BRISSON: Seulement dans la part supportée par l'Etat.
M. CASTONGUAY: Dans la plupart des cas, oui.
M. BRISSON: Mais comme l'individu, par contre, il ne paie pas comme
l'employé et l'employeur, comme l'employé, surtout.
M. CASTONGUAY: C'est généralement juste les
employés, les employeurs, sur le revenu du travail, et l'autre partie de
l'Etat, bien on considère que cela couvre ce qui provient de revenus de
placements, etc.
M. BRISSON: Dès l'instant qu'un groupe social est couvert, disons
comme en France où on a procédé graduellement, est-ce que
la cotisation devient obligatoire? Est-ce que cette catégorie-là
se doit d'être...
M. CASTONGUAY: Bien ça, c'est la distinction entre le
régime d'assurance-sociale et le suivant. Si vous voulez, je vais vous
donner la description suivante.
Le régime facultatif dont l'objectif est de rendre
l'assurance-maladie accessible à l'ensemble de la population et ou
l'Etat joue un rôle supplétif, c'est dans ce genre de
régime-là que l'Etat joue le rôle supplétif. Les
deux principales caractéristiques de ce type de régime,
fondé sur une extension de l'assurance-maladie privée, consistent
dans le paiement total ou partiel des primes par l'Etat pour les personnes
à faibles revenus et dans l'obligation imposée aux assureurs
reconnus d'accepter tous les risques. Le premier régime de ce type a
été établi en Alberta à la fin de 1963. Deux autres
provinces, la Colombie Britannique et l'Ontario possèdent maintenant des
régimes analogues. Il est intéressant de souligner que ces trois
provinces jouissent des niveaux de vie les plus élevés au Canada
et qu'une proportion assez élevée de leur population était
déjà assurée contre la maladie avant
l'établissement de ces régimes. Un régime de même
nature dont la couverture et le champ d'application sont limités,
entrera en vigueur aux Etats-Unis, le 1er juillet 1966.
Alors, pour revenir à la question je crois de M. Marler, à
savoir, s'il y a possibilité d'identifier les 15 ou 25% en Alberta qui
ne sont pas assurés aujourd'hui, c'est assez difficile, mais par
déduction, il y a moyen de savoir à peu près qui ils sont,
je crois. Lorsque ce régime-là a été établi,
il y a deux ans et demi, trois ans, il y avait environ 65% de la population de
1'Alberta qui était déjà assurée. Ces gens
assumaient le paiement de leurs propres primes. Depuis ce temps-là, le
pourcentage a passé de 65% à environ entre 80 et 85%. Il y a un
certain nombre de personnes qui ont demandé de recevoir un subside du
gouvernement, tel qu'expliqué ici, un subside partiel contre le paiement
de leurs primes. Les sondages faits par le gouvernement ont
démontré que la plupart des personnes qui ont demandé des
subsides étaient déjà assurées avant
l'établissement du régime.
Donc, tout comme avant l'établissement du régime le 15
à 20% qui reste est constitué en apparence de personnes dont les
revenus sont très élevés et qui disent, on peut supporter
ces frais-là peut importe ce qui arrive et de personnes dont les revenus
sont très bas mais qui ne sont pas des assistés sociaux.
M. RENAUD: C'est parce que l'on est dans un régime
facultatif.
M. CASTONGUAY: Oui. Ceux qui ont des revenus très
élevés, pour eux, leurs habitudes n'ont pas changé. Pour
ceux dont le revenu était très bas, mais qui n'étaient pas
des assistés sociaux, l'offre du gouvernement de payer 50% de leurs
primes n'était pas encore suffisante pour eux, pour qu'ils s'assurent.
Alors, il semble que cela s'est stabilisé jusqu'à un certain
point pour ces deux groupes-là.
Et c'est pourquoi le gouvernement a annoncé en Alberta son
intention d'augmenter les subsides au cours de la présente session de
leur législature, de telle sorte que pour les personnes à
très faibles revenus, le gouvernement paiera de 80 à 90% de leur
prime pour essayer de couvrir toute la population sauf la partie de la
population dont les revenus sont suffisants etpour qui l'assurance ne signifie
rien.
M. FORTIER: il y a toujours un modérateur. M. CASTONGUAY: En
Alberta?
M. FORTIER: Toutes les personnes peuvent pouvoir faire quelque
chose.
M. CASTONGUAY: En Alberta, telle que la loi est présentement, les
personnes qui sont
des assistés sociaux ne paient rien. Tous les autres qui sont
assurés paient soit 50% de la prime, s'ils n'ont aucun revenu imposable,
25% de la prime s'ils ont un revenu imposable qui n'excède pas $500 et
la pleine prime si le revenu imposable excède $500.
M. RENAUD: M. Castonguay, en Alberta, vu que c'est facultatif ceux qui
ne veulent pas contribuer, est-ce qu'ils ne seront pas imposés
même dans leur impôt sur le revenu pour tout ce qu'ils paient?
M. CASTONGUAY: Bien la façon dont ils sont imposés est une
façon indirecte. C'est qu'ils doivent naturellement par les
différentes sources de revenus du gouvernement contribuer à payer
les subsides.
M. ASSELIN: Ils paient des taxes générales. il n'y a pas
de taxe spécifique pour cela, ce sont des taxes
générales.
M. CASTONGUAY: Exactement.
M. ASSELIN: Est-ce qu'ils doit y avoir une enquête sur les moyens
de chaque individu, pour les fins des subsides?
M. CASTONGUAY: C'est basé sur la déclaration d'impôt
de l'année précédente. La personne déclare ce
qu'elle a rapporté comme revenu imposable et le gouvernement accepte
ça comme étant une déclaration valide sans faire
d'enquête étant donné qu'ils n'ont pas de perception
d'impôt directe en Alberta.
M. VAILLANCOURT: Il se trouve à y avoir un maximum, comme je peux
voir.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. VAILLANCOURT: Si c'est basé sur les rapports d'impôts,
il y a un maximum de prime.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. VAILLANCOURT: Admettons qu'un type qui fait $5,000 va payer moins
qu'un autre qui gagne $10,000.
M. CASTONGUAY: La prime n'est pas rattachée au revenu, c'est
celle chargée par les assureurs parce qu'en Alberta les gens s'assurent
auprès de compagnies d'assurances ou auprès d'une
société qui a été établie par les
médecins, Alberta Medical Services Ltd. Alors ce sont ces
sociétés-là qui fixent leurs propres primes mais dans la
loi sur les services médicaux, il y a un maximum qui est fixé sur
la prime que les sociétés privées peuvent charger.
M. RENAUD: Est-ce que la prime est uniforme, en Alberta?
M. CASTONGUAY: Elle varie selon que la personne est soit un individu
célibataire, soit une personne mariée avec une seule personne
à charge, soit une personne mariée avec plus d'une personne
à charge. Elle peut varier aussi selon l'assureur et aussi elle peut
varier s'il s'agit d'un groupe, d'une assurance collective.
M. RENAUD: Merci.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, ce serait peut-être une bonne chose de
suspendre la séance jusqu'à cinq heures moins cinq pour donner un
peu de repos à M. Castonguay? Alors, nous allons suspendre
jusqu'à cinq heures moins cinq.
M. LE PRESIDENT: Le quorum est rétabli. Alors voulez-vous
continuer, M. Castonguay?
M. CASTONGUAY: Certainement.
M. THEBERGE: M. Castonguay pourriez-vous résumer en quelques mots
les trois articles avec les différences essentielles de chacun, comme
prime, question de soins, question d'adaptation.
M. CASTONGUAY: Certainement. Me permetteriez-vous juste de finir...
M. , THEBERGE: Oui.
M. CASTONGUAY: ... sur la couverture, le champs d'application,...
M. THEBERGE: Très bien.
M. CASTONGUAY: ... les structures, le financement et là on va
pouvoir revenir, et là je crois que les caractéristiques vont
peut-être ressortir plus clairement.
M. THEBERGE: Très bien.
M. CASTONGUAY: Alors sur la couverture, on dit que la règle
générale est celle de la couverture de tous les soins et services
soit les soins du médecin ou du spécialiste à domicile, au
bureau ou à l'hôpital b) les soins hospitaliers
et de convalescence c) les médicaments d) les soins dentaires e)
les soins oculaires f) les prothèses, les soins infirmiers, les services
ambulanciers et g) les soins de réadaptation. Le régime
d'assurance sociale comporte en général des frais
modérateurs dont les montants diffèrent, selon les divers soins,
d'un régime à l'autre.
Ces frais modérateurs sont généralement
réduits ou éliminés dans le cas des affections graves ou
prolongées. Alors la règle générale c'est de tout
couvrir éventuellement ou immédiatement et de charger certains
montants lorsque la personne reçoit les soins ou les services. Dans le
régime britannique de soins qui, en principe ne devait point en
comporter, c'est-à-dire des frais modérateurs, les frais
modérateurs ont été imposés pour divers soins
depuis son établissement, étant donné la hausse
considérable des coûts.
Quant au champ d'application dans les régimes d'assurance
sociale, la tendance consiste à étendre le champ d'application
afin d'atteindre éventuellement l'ensemble de la population. Par
définition, le régime de soins s'applique à l'ensemble de
la population, tel est le cas en Grande-Bretagne et en Saskatchewan. Les
personnes assujetties au régime demeurent toujours libres, toutefois, de
se faire soigner à titre privé. Les frais que doit alors assumer
le malade varient selon les catégories de soins et d'un régime
à l'autre. Alors même s'il est question de régime
obligatoire, l'obligation à ce moment-là est posée sur le
paiement des primes ou des taxes ou des contributions. Mais il n'y a pas
obligation à la fois pour l'individu de prendre les soins donnés
dans le cadre du régime, il peut toujours se faire traiter à
titre privé, mais là il paie deux fois.
Structures administratives et consultatives
Les structures administratives et consultatives diffèrent
passablement entre les divers régimes car dans tous les pays on a voulu
autant que possible élaborer à partir des structures qui
existaient avant l'établissement des régimes. Toutefois, ces
structures possèdent plusieurs caractéristiques en commun. A
l'échelon supérieur, on retrouve soit un ministère, soit
une commission à caractère représentatif chargé de
la tutelle et du contrôle général du fonctionnement du
régime. Aux échelons inférieurs, des réseaux de
caisses régionales et locales chargées de la gestion proprement
dite du régime.
La Grande-Bretange est quelque peu différente à ce sujet,
car il existe trois grands services dont la gestion est confiée à
des conseils à caractère représentatif. Dans tous les
régimes il existe des organismes consultatifs nationaux et dans la
plupart des cas, ils sont assistés par des organismes consultatifs
régionaux. La composition de ces organismes à caractère
représentatif varie selon leur but respectif.
Nous avons une étude, je crois que c'est le volume huit,
où il y a des analyses de structures administratives et consultatives
qui sont données. Finalement afin de coordonner l'action des divers
organismes de sécurité sociale, il existe en France une
inspection générale de la sécurité sociale dont le
rôle est d'exercer un contrôle supérieur sur les organismes
et services de l'ensemble du système de sécurité sociale.
Ici c'est un organisme tout à fait particulier qui joue non pas le
rôle, disons, de l'auditeur de la province, c'est-à-dire une
simple vérification comptable auprès des divers organismes des
ministères et une vérification pour déterminer si la loi a
réellement été appliquée.
L'inspection générale va plus loin que cela, elle examine,
elle inspecte les organismes pour voir aussi si la législation, pas
uniquement dans le domaine de l'assurance-maladie, dans toute la
législation sociale, correspond encore aux besoins, pour essayer
d'éviter que des lois qui, à un moment donné ont pu
être très désirables ou encore efficaces, par le passage du
temps, deviennent moins efficaces ou même à certains moments
peuvent avoir un mauvais effet. Cet organisme-là inspecte constamment
sur ce plan-là. C'est un plan supérieur à celui de
l'auditeur, disons-nous ici. Aussi cet organisme inspecte pour voir si certains
organismes pourraient avoir des politiques contradictoires. Ce qui est fort
possible.
On peut avoir un ministère qui recherche un but d'une
façon et un autre ministère recherche le même but mais en
s'y prenant d'une autre façon. Il peut y avoir réellement
annulation des efforts. Il peut y avoir aussi multiplications des tâches.
Si vous avez trois ministères qui doivent, par exemple, attribuer
différents genres de prestations. Si une personne est invalide, au lieu
d'avoir trois équipes d'inspecteurs, ce qui peut fort bien exister,
cette inspection-là regarde s'il n'y aurait pas moyen d'unifier cela en
une seule équipe d'inspecteurs. Si on définit par exemple
l'invalidité de trois façons différentes, l'inspection va
regarder pour déterminer si réellement il y a raison de
définir l'invalidité de trois façons différentes.
Nous avons donc mentionné l'Inspection générale ici,
même si elle n'est pas dans le cadre de l'assurance-maladie directement.
Etant donné que ce genre d'organisme nous a paru excessivement
intéressant et un peu unique et possiblement désirable ici au
Québec. Alors on a voulu le mentionner au passage.
Financement
L'assurance-maladie est financée par des contributions de la part
des assurés, des employeurs et de l'Etat, sauf en France où
l'Etat ne contribue pas. Bien que les formules utilisées
diffèrent beaucoup, elles tendent généralement à
fixer la répartition à long terme du coût entre les
parties. C'est-à-dire bien fixer précisément à
l'avance quelle est la part supportée par chacune des parties. Les
contributions des travailleurs sont toujours prélevées sur la
tranche de leur revenu du travail qui n'excède pas un certain plafond.
En fait le même principe que pour le régime de rentes ici,
c'est-à-dire, les travailleurs ne paient pas un pourcentage sur leur
revenu sans limite; lorsqu'ils ont atteint un certain montant de revenu, ils ne
paient pas sur l'excédent.
Même s'il ne s'agit pas d'une caractéristique proprement
dite des régimes, on doit noter que l'augmentation rapide de leur
coût constitue un des problèmes majeurs que présentent ces
régimes.
Vous allez voir dans les études des régimes des pays
européens que l'augmentation rapide des coûts constitue dans
chacun des cas, sauf possiblement en Suède pour des raisons
particulières, constitue un problème excessivement
sérieux.
M. RENAUD: M. Castonguay, est-ce que dans ces cas-là cela veut
dire une participation plus grande du gouvernement?
M. CASTONGUAY: Bien prenez, par exemple, en France où l'Etat ne
doit pas enprincipe contribuer, aujourd'hui par le truchement des avances pour
combler les déficits de la sécurité sociale, l'état
contribue et là forcément, il va falloir que quelque chose se
fasse. Il y a une commission qui étudie le financement de la
sécurité sociale en France parce qu'ils en sont rendus au point
où une nouvelle politique devra être élaborée.
En Belgique, vous avez probablement vu dans les journaux au cours des
dernières semaines, qu'il y a eu un malaise assez prononcé avec
les médecins. Ce malaise ou ces difficultés ajoutées
à d'autres difficultés ont fait qu'il y a eu un changement de
gouvernement. On notera dans le volume quatre, lorsque nous décrivons le
régime de la Belgique, que nous disons que lorsque le nouveau
système de financement du régime belge qui a été
adopté il y a deux ou trois ans sera réellement mis à
l'épreuve, cela va constituer une épreuve du régime qui va
être assez difficile à traverser. On ne pensait jamais d'avoir dit
si juste lorsque l'on a étudié ce régime-là.
En fait cela n'a pas dépassé nos espérances, mais
cela a dépassé ce qu'on aurait pu pouvoir prédire comme
problème.
Maintenant laparticipation et la rémunération des
praticiens. En aucun cas les praticiens sont-ils tenus de participer
obligatoirement au régime de soins ou d'assurance-maladie. Dans tous les
cas leur adhésion se fait au moyen de la signature d'une entente ou
convention.
La convention fixe le mode de rémunération du praticien et
généralement contient les dispositions nécessaires au
respect de la liberté d'exercice du praticien. Sauf en Grande-Bretagne
où les médecins sont salariés ou
rémunérés selon le système de la capitation. Les
médecins sont généralement rémunérés
à l'acte médical. La conciliation des impératifs
contradictoires que posent d'une part la nécessité du
contrôle finan-cier et le maintien de la qualité des soins, et
d'autre part, le respect de la liberté d'exercice des praticiens et la
protection de la population, constitue les problèmes les plus
épineux du régime de soins et d'assurance-maladie. Il y a deux
impératifs qui sont jusqu'à un certain point contradictoires, le
désir de donner des soins de grande qualité et le contrôle
financier et d'un autre côté, après cela, le respect de la
liberté d'exercice des praticiens et après cela protection de la
population.
M. ASSELIN: M. Castonguay, un médecin qui n'aurait pas
signé une entente, une convention, pourra-t-il traiter un assuré
qui bénéficie d'une assurance d'Etat?
M. CASTONGUAY: Dans tous les pays que nous avons visités, c'est
le cas. Il a la liberté de traiter toute personne, qu'elle soit
assurée ou qu'elle ne le soit pas. Cependant, selon les pays, il est
plus ou moins facile pour une personne de faire un choix selon les coûts
additionnels qu'elle doit supporter lorsqu'elle décide de se faire
soigner par un médecin qui n'est pas conventionné. La personne
est obligée de payer la prime de l'assurance-maladie et, si elle se fait
soigner privé ment, en Angleterre par exemple, elle doit assumer tout
les coûts incluant le coût de l'hospitalisation à partir du
premier sou.
Ici, au Québec, par exemple, dans un régime du type de
l'Angleterre ou de la France, la personne qui ne veut pas se faire traiter par
un médecin conventionné, qui va chez un médecin
privé, serait obligée de payer non pas seulement le
supplément pour sa chambre, si elle prend une chambre privée,
mais aussi le per diem qui est payé à l'hôpital.
M. ASSELIN: Directement cela mettrait le médecin qui n'a pas
signé de convention dans une situation d'infériorité par
rapport à l'autre au point de vue de traiter les assurés.
M. CASTONGUAY: Alors, c'est pour cela que vous retrouvez uniquement en
dehors des médecins conventionnés, pas uniquement mais disons, de
façon plus générale, soit les médecins de
très grande renommée...
M. ASSELIN: Les grands spécialistes.
M. CASTONGUAY: ... les grands spécialistes ou, encore, vous les
retrouvez dans certains pays comme, disons en France, concentrés dans
une région excessivement prospère où les gens se disent:
Bien, payer deux fois pour nous, on est prêt à faire cela.
M. KENNEDY: Est-ce qu'il y a des risques pour les médecins qui
viennent de signer une convention?
M. CASTONGUAY: Disons que c'est une question que j'aimerais mieux que
vous posiez aux médecins qu'à moi. Non c'est une question, je
pense qui s'adresse mieux à eux. On a vu qu'un problème social
dans la maladie...
M. KENNEDY: Ça va dépendre...
M. CASTONGUAY: Maintenant pour revenir à votre question de
tantôt, si vous voulez ce qui distingue, comme caractéristiques
les trois grandes catégories de régimes, je crois que l'on peut
dire que le régime de soins, lui, couvre indistinctement la population
sans rattacher la couverture au paiement des primes. Le paiement de primes
n'est pas rattaché à la couverture. La personne est couverte,
qu'elle paie ses primes ou non.
M. THEBERGE: Pas pour chaque acte médical, autrement dit il n'y a
pas de frais modérateurs.
M. CASTONGUAY: Normalement il ne devrait pas y avoir de frais
modérateurs dans le régime de soins. Tous les soins devraient
être couverts d'après la conception du régime de soins.
Dans l'assurance, le régime d'assurance sociale, seules les personnes
qui sont assurées ou leurs personnes à charge, normalement
devraient être assurées. Et là, participation de
l'assuré lorsqu'il reçoit des soins, paiement de frais
modérateurs. Cela je pense que c'est la distinction entre ces deux
régimes-là. Le régime facultatif comporte les mêmes
caractéristiques que le régime d'assurance sociale, sauf que la
personne n'est pas tenue de s'assurer, elle décide de s'assurer si elle
le désire. Et pour les personnes à faible revenu, l'Etat
intervient en payant un subside. Je pense que ce sont les trois distinctions
qu'on peut faire.
Sur les autres points, structures administratives, financement,
participation, rémunération des praticiens etc. on retrouve les
mêmes caractéristiques, peu importe le genre.
M. THEBERGE: Dans le deuxième groupe c'est plutôt des
groupes dans les cas d'assurances sociales, des groupes qui sont compris. Parce
que dans le troisième groupe ce sont les individus qui décident
par eux-mêmes.
M. CASTONGUAY: Dans le deuxième groupe en fait, l'assurance
sociale est dans la plupart des pays le prolongement des formes de protection
mutuelle du passé. Soit mutuelle sur le plan des localité ou des
métiers ou des professions et à un moment donné à
mesure que ces mutuelles ont pris de l'ampleur, et à mesure que leurs
problèmes de financement sont devenus plus complexes, à mesure
que les problèmes des professions se sont rapprochés de plus en
plus, l'on a réalisé en plus que la maladie, la santé
devenaient un problème auquel l'état devait s'intéresser.
Ces mutuelles se sont transformées graduellement pour former aujourd'hui
des organismes de sécurité sociale. Alors tout cela,
c'était plutôt basé au début sur les groupes.
M. TREPANIER: Qu'est-ce qui détermine le secteur de ceux qui ne
sont pas couverts par le régime d'assurance sociale?
M. CASTONGUAY: Là on tombe dans une question qui est
excessivement difficile, en fait c'est une des question fondamentales, à
laquelle vous devrez donner la réponse. Je peux vous donner les
indications.
M. TREPANIER: Mais en France par exemple, ils ont un régime
d'assurance sociale.
M. CASTONGUAY: En France, voyez ils ont pris une approche,
d'après ce que nous pouvons voir, qui est la suivante: ils ont pris des
mutuelles et les ont graduellement englobées dans la
sécurité sociale.
M. TREPANIER: Il y a quand même un facteur obligatoire au
régime de l'assurance sociale.
M. CASTONGUAY: Aujourd'hui, oui, oui. Alors pour elles, les personnes
qui s'étaient déjà groupées, c'étaient en
premier lieu des salariés, ceux qui avaient des revenus. Alors, leur
ordre d'entrée, disons, dans le régime a été un peu
différent de ce qu'il pourrait être ici.
Ici, cela devient pratiquement un problème qui peut être
envisagé de deux façons, soit un problème de justice
sociale ou un problème en fait, qui a des implications
économiques. On peut dire: Il serait plus important de couvrir les
enfants pour les soins dentaires étant donné que si une personne
rendue à un certain âge, ses dents sont mauvaises, il n'est plus
temps d'essayer de la récupérer. Alors on va essayer de couvrir
en premier lieu les enfants ». Alors ici, de la façon dont je vois
cela, de la façon dont le problème semble se présenter,
l'ordre de priorité ou la façon que les gens ont
été couverts en Europe, ne pourrait pas nous servir de
modèle ici. Ici il s'agira plutôt de déterminer si l'Etat a
raison d'investir dans tel domaine ou de laisser les individus libres de
s'assurer eux-mêmes et si l'Etat a une responsabilité dans tel
domaine. Les ressources étant limitées, à quel endroit
est-ce que le rendement est le meilleur, est-ce que l'on doit essayer de tout
assurer tout de suite quel est l'ordre de priorité?
M. MARTIN: Est-ce que dans les pays que vous avez visités, en
plus de l'étude que vous avez faite des régimes, il vous a
été donné d'entendre la critique que l'on pouvait y
faire7
M. CASTONGUAY: Dans tous les pays que nous avons visités, nous
avons rencontré des organismes du même type dans chacun des pays.
Nous avons premièrement visité des organismes administratifs de
l'assurance-maladie dans chacun des pays. Nous avons rencontré des
représentants des syndicats et des organismes groupant les
médecins. Nous avons rencontré des représentants des
employeurs et nous avons rencontré des représentants des
employés. Et nous nous étions dressé avant notre
départ une série de questions et nous avons, à chacun des
endroits, naturellement la conversation a pu dévier, mais nous avons
fait un effort pour toujours poser cette même série de
questions-là, de la même façon dans chacun des endroits
visités, pour pouvoir après cela comparer les réponses.
Dans un certain nombre de cas, si l'on constate que les réponses des
quatre secteurs sont identiques, bien là sans avoir fait une
étude excessivement approfondie, on n'a pas pu faire de sondages, mais
par ces quatre réponses-là, si elles sont identiques, qu'on peut
imaginer que c'est assez exact comme commentaires.
Alors on a pu constater après avoir rencontré une couple
d'organismes, on pouvait pratiquement pressentir à l'avance à
l'intérieur d'un pays quelles seraient les réponses des autres.
Nous en avons visité en tout et partout une cinquantaine. Alors
même des fois en allant voir un organisme, après en avoir
visité trois, quatre dans un pays, on pouvait pratiquement deviner les
réponses qu'on aurait. Ces réponses-là venaient comme une
confirmation de ce que nous pouvions penser à ce moment-là;
M. CLOUTIER: M. Castonguay, dans ces pays que vous avez visités
et dans les régimes étrangers que vous avez
étudiés, est-ce que vous avez constaté qu'on a tenu
compte, dans une proportion assez appréciable des
caractéristiques locales, ou de certaines traditions ou de certaines
structures qui existaient déjà, ou si on a réellement
innové?
M. CASTONGUAY: Beaucoup en fait. On a essayé d'en tenir compte
beaucoup et même à certaine endroits un peu trop. Par exemple, il
y a certaines choses qui ont été conservées qui, à
prime abord, seraient difficilement acceptables par la population ici. Vous
voyez, par le système des mutuelles, auxquelles je faisais allusion,
anciennement les gens s'assuraient auprès de leur mutuelle qui
était une mutuelle locale, et s'ils avaient un paiement à
recevoir ils allaient au bureau de la mutuelle, à la caisse, et ils se
faisaient rembourser. Ces mutuelles-là étaient constituées
naturellement d'après les formes régulières des mutuelles,
elles avaient un conseil, des représentants des mutuallistes, et il y
avait l'administration.
Alors, lorsque la sécurité sociale a été
établie, on n'a pas défait les mutuelles locales, les caisses,
aujourd'hui on les appelle les caisses, et ces conseils d'administration. Vous
avez en France des centaines de caisses locales qui ont chacune leur conseil
d'administration et, aujourd'hui, il est à peu près impensable
d'imaginer que l'administration pourrait être centralisée pour
faire utilisation d'équipement un peu plus moderne, un peu plus
adéquat; alors les gens sont encore obligés de se soumettre
à des choses comme la suivante; ils vont faire une visite chez le
médecin qui leur coûte, disons $5, la sécurité
sociale leur en paie $3; alors là ils paient le $5 à leur
médecin, prennent leur facture acquittée, vont se faire
rembourser $3 à la sécurité sociale, vont faire la ligne
et attendent de recevoir leurs $3. C'est bon de garder les institutions
existantes, de ne pas tout chambarder, mais des fois, ça peut devenir
lourd. Et dans ce cas-là on a vu certaines lourdeurs, à certains
endroits. En Angleterre un autre type
de difficulté qui semble exister, et ceci nous fut
mentionné pratiquement partout, c'est que les hôpitaux
anciennement étaient un secteur du domaine de la santé, qui
étaient administrés par des conseils autonomes; vous aviez
après ça les praticiens et vous aviez les autorités
locales, disons ce qui pourrait se comparer peut-être aux unités
sanitaires ici, mais un peu plus élaboré que ça. Cela
existait sans trop de cohésion dans le passé et même des
fois en opposition. On a perpétué ces secteurs dans le
régime aujourd'hui de telle sorte que les trois secteurs du
régime, au lieu de collaborer, semblent bien souvent être beaucoup
plus intéressés à surveiller leur empire respectif que
d'améliorer la qualité des services qui sont donnés. Il ne
s'agit pas d'une opinion personnelle, c'est même indiqué dans une
des brochures officielles du gouvernement anglais que nous citons dans notre
rapport. C'est donc un genre de maintien des anciennes structures qui n'a pas
été réellement au bénéfice de la
population.
M. FORTIER: Alors, M. Castonguay, ça m'intéresse moi parce
que d'ailleurs les médecins vont vous en parler. Les médecins
sont-ils satisfaits des lois établies au point de vue assurance-maladie,
et est-ce que les patients sont satisfaits des soins qu'ils reçoivent
des médecins?
M. CASTONGUAY: Là vous posez une question difficile. Si vous
voulez on va procéder par étapes. On va prendre en premier lieu,
en Angleterre, et là ce sont des opinions que je ne vous donne pas comme
étant la vérité absolue. On n'a pas été
là tellement longtemps, ce n'est pas possible je pense dans un voyage
comme celui-là ou même dans l'étude des textes de se faire
une opinion définitive qui peut viser juste. A part cela, si de
façon générale on pense avoir obtenu une réponse
assez exacte aux questions que vous posez, c'était celles-là qui
nous préoccupaient naturellement, nous avons pu faire totalement erreur.
Mais voici. En Angleterre, d'après ce que nous avons pu voir, chez les
médecins premièrement, les spécialistes semblent
être raisonnablement satisfaits de leur sort et les spécialistes
semblent opérer à l'hôpital, pratiquer à
l'hôpital. Les omnipraticiens semblent assez malheureux de leur sort, ils
se disent surchargés, mal rémunérés, obligés
de pratiquer dans des conditions plus ou moins bonnes et aussi
surchargés de formules administratives qu'ils doivent compléter,
non pas nécessairement pour l'assurance-maladie, mais en vertu de toute
sorte d'autres lois. On leur demande des certificats, on demande aux
employés des certificats lorsqu'ils sont malades, on demande des
certificats si la personne demande un genre de pension etc... Du
côté de la population, il n'y a aucun doute que les campagnes ou
les régions ou la population n'est pas trop forte en nombre, il y a eu
une grande amélioration. Anciennement, il y avait une grande
disparité dans les effectifs, or le régime a corrigé
ça, jusqu'à un certain point. Dans les grandes villes, je pense
bien qu'encore là, la réaction de la population varie selon le
niveau de revenu des individus. Dans les quartiers disons plus populeux
à revenus moins élevés, j'ai l'impression que les gens,
même s'il peuvent critiquer le régime à certains moments ne
le rejetteraient pas et désirent le garder. Les personnes à
revenus plus élevés, à mesure qu'on monte dans
l'échelle de revenus, je pense que là on trouve une plus grande
proportion de gens qui sont plus ou moins satisfaits, et la preuve est qu'il
semble y avoir déjà plus de 1 million de personnes qui se sont
assurées, en plus de la sécurité sociale, pour pouvoir se
faire traiter à titre privé. C'est très onéreux en
Angleterre, parce que vous assumez deux fois le coût au complet.
En France, la question se pose différemment, je crois. En France,
le régime fonctionne passablement de façon différente.
Chez les médecins premièrement, il y a des conventions pour
chacun des départements. Alors il y a à peu près 5 ans,
dans un bon nombre de départements le nombre requis de médecins
qui avaient adhéré au régime n'était pas suffisant
pour que le régime s'applique dans le département. Alors,
à ce moment-là la sécurité sociale effectuait des
paiements beaucoup plus bas que ceux effectués dans les
départements où la majorité des médecins
étaient conventionnés. Il s'agissait d'une pression mise par la
sécurité sociale pour forcer les médecins par le
truchement de l'opinion publique à se conventionner, à entrer
dans le régime. Il y a eu des modifications au régime il y a 4
ans, et aujourd'hui, dans la plupart des départements, sauf dans les
départements où le niveau de vie est le plus élevé,
comme celui autour de Paris, le département de la Loire je crois, en
tous les cas quelques départements, cinq, six, la majorité des
médecins est conventionnée.
Alors c'est donc signe que les médecins acceptent mieux le
régime qu'ils l'acceptaient il y a 5 ou 6 ans. Maintenant, à
l'intérieur de la profession il y a une scission qui n'est pas, comme en
Angleterre, entre les spécialistes et les omnipraticiens; elle est
plutôt sur le plan géographique. Il y a une
fédération qui couvre sur le plan géographique toute la
France mais qui ne groupe pas tous les médecins.
C'est la fédération qui accepte le régime; il y a
l'autre fédération qui groupe des médecins situés
dans ces régions-là où la majorité n'est pas
conventionnée et qui combat le régime. Eux ne sont pas
conventionnés, et à ce moment-là, pour la population dans
ces régions plus riches, ça donne un grand nombre de
médecins pour la population qui peuvent être consultés
à titre privé. Les pénalités sont moindres qu'en
Angleterre lorsque vous voulez être consulté à titre
privé. Alors, disons qu'il y a une soupape plus grande en France, et du
côté des médecins et du côté de la population.
On croit aussi qu'on entend moins parler des difficultés
apportées par l'assurance-maladie en France qu'on en a entendu parler en
Angleterre. Je pense que ça, à notre avis, c'est à peu
près le portrait tel qu'on l'a vu là.
M. FORTIER: Oui bon! Maintenant une question qui m'intéresse
énormément et aussi d'actualité, est-ce que vous croyez
actuellement, je vais mettre ça aussi simple que possible, dans
certaines de nos régions éloignées on manque de
médecins, d'omnipraticiens, est-ce que vous croyez qu'un régime
d'assurance-maladie va favoriser la pratique médicale dans les centres
ruraux?
M. CASTONGUAY: Bien là, c'est une opinion purement personnelle,
mol je dirais que oui.
M. FORTIER; Vous croyez que oui.
M. ASSELIN: M. Castonguay, sur le même sujet, quelles ont
été vos constatations en Alberta au sujet de la satisfaction de
la population, des médecins etc.. sur les mêmes sujets que vous
venez de parler de l'Angleterre et de la France?
M. CASTONGUAY: Voici: En Alberta, les médecins se sont
groupés il y a un bon nombre d'années. Ils ont formé ce
qu'ils appellent le Alberta Medical Services Plan, le nom de la
société c'est Alberta Medical Services Limited, qui est une
société composée de médecins, sans but lucratif, et
qui offre à la population la protection contre les frais des soins
médicaux complète, moyennant paiement d'une prime. Alors ils ont
couvert par cette société-là aller jusqu'en 1962 je crois
à peu près 60% de la population qui était
déjà assurée, alors tout cela a été fait
volontairement et par l'initiative des médecins sans aucune pression ou
sans aucun stimulant de la part du gouvernement.
C'était donc une bonne indication, ce système-là
fonctionnait à la satisfaction de la population et des médecins.
La loi qui a été passée en Al- berta, le but de cette
loi-là, a été d'étendre l'application de ce
régime à commandite médicale et aussi de ne pas exclure
les sociétés privées d'assurance. Cela n'est pas un
régime du même type que les autres. Les médecins en fait
avaient pris l'initiative de rendre l'assurance disponible à la
population. Il semble qu'en Alberta, la population et les médecins sont
très satisfaits des arrangements qui existent.
M. RENAUD: Qu'elle est la situation actuellement dans notre province, en
autant qu'il s'agit des membres assurés etc...
M. CASTONGUAY: Ici nous avons une...
M. RENAUD: Je sais que c'est dans un volume.
M. CASTONGUAY: Cela va venir ce soir, disons en très bref
résumé, la situation telle qu'on l'a vue par les chiffres c'est
qu'il y a à peu près 43% de la population qui est assurée,
Ces personnes-là sont assurées par deux ou trois genres de
sociétés; les compagnies d'assurances à capital-actions
d'une part, les compagnies d'assurances mutuelles, l'Alliance mutuelle,
l'Assurance-vie Desjardins etc,... et deux sociétés d'un
caractère plus particulier, celle qui est appelée la Croix-bleue,
l'Association d'hospitalisation du Québec, et la Mutuelle des Services
de santé du Québec. Ces deux dernières
sociétés-là ayant été formées, ce
sont des mutuelles, principalement par des médecins, mais elles
n'offrent pas le genre de protection qui est offerte dans le régime du
type de l'Alberta, sauf dans quelques régions très
limitées. Ils offrent plutôt le genre de protection que les autres
assureurs offrent qui est de deux types, un paiement selon le genre d'acte
médical, sans référence à une échelle
d'honoraires, une société va payer $2 pour une visite, une autre
va payer $3.
M. RENAUD: Je comprends. M. CASTONGUAY: Une autre $4. M. RENAUD:
Merci.
M. LE PRESIDENT: Nous continuons avec le rapport de M. Castonguay.
M. CASTONGUAY: Dans le deuxième chapitre nous avons donné
certains éléments pour déterminer la justification qui
peut exister pour l'intervention de l'Etat dans le domaine de la santé,
de façon générale, et aussi dans le domaine de
l'assurance-maladie de façon plus parti-
culière, sans tirer de conclusions. Nous donnons plutôt des
éléments qui permettent de juger ou d'apprécier
jusqu'où va cette responsabilité. Alors, à la page 34,
nous avons trois types. Le premier c'est que, de toute évidence, il
semble que la maladie est réellement une des causes de la
pauvreté. A ce sujet-là j'ai souligné certaines des
parties qui peuvent être les plus intéressantes. On dit au haut de
la page 35, « ainsi qu'on le fait remarquer dans un des documents
préparés pour la conférence
fédérale-provinciale sur la pauvreté, tenue à
Ottawa en décembre 1965, les maladies de longue durée peuvent
réduire le revenu familial, et même diminuer ou annihiler de
façon permanente la capacité de gain du soutien de famille.
Alors, une des premières causes de pauvreté est due
à la maladie. Il semble donc évident que les maladies ou
incapacités chroniques soient des causes potentielles de pauvreté
en particulier lorsqu'elles affectent la population mâle comprise dans
les groupes d'âges formant la population active ». Un peu plus loin
on dit: « On y mentionne en effet que les personnes de sexe masculin
recevant un faible revenu, et comprises dans le groupe d'âge de 25
à 44 ans représentaient 14% des individus de ce groupe
d'âge mais devaient supporter 30% des jours d'incapacité ».
Dans ce deuxième extrait, ce qui est prouvé dans ce
deuxième document, c'est que plus on baisse dans les revenus des
travailleurs, plus on voit que les personnes sont invalides ou absentes pour
cause de maladie, plus leur nombre augmente. Il y a une relation encore
là.
Plus bas nous ajoutons, au bas de la page: « Par ailleurs,
l'expérience plus que proportionnelle en termes de jours
d'incapacité, supportée par les récipiendaires de bas
revenus dans les groupes d'âge où se recrute la population active
laisse entrevoir la possibilité que leur bas revenu puisse avoir
été causé du moins en partie par leur mauvais état
de santé ». Alors il y a un lien réel. D'après
toutes ces statistiques on n'en a cité que quelques-unes, il y en a des
masses de ce genre, de ce type qui ont été compilées
où on relie réellement la maladie comme cause de la
pauvreté et dans l'autre sens aussi, la pauvreté comme cause de
maladie, avec l'effet de perpétuation d'une génération
à l'autre.
On dit à la page 36 justement, au miliieu de la page: « Or,
une des formes les plus anciennes et les plus acceptables de
sécurité sociale est l'assistance financière aux
indigents. Mais apparemment le concensus semble maintenant se faire autour de
l'idée qu'il n'est plus suffisant d'identifier les indigents et de les
assis- ter financièrement, mais qu'il faut essayer de déceler les
raisons de leur indigence et s'efforcer d'éliminer les causes de la
pauvreté. Par conséquent, dans la mesure où l'on peut
établir que la maladie est une cause de pauvreté et que les
personnes à faibles revenus ne peuvent efficacement se procurer les
moyens d'améliorer leur santé, il semble qu'une action publique
ou collective dans le domaine de la santé est justifiée
».
Et nous citons un extrait du mémoire de la province de
Québec ici, à la conférence sur la pauvreté; dans
ce mémoire il était dit: « Une telle politique d'assistance
sociale implique que des ressources importantes soient consacrées
à identifier les facteurs qui ont contribué à l'apparition
de cas individuels ou collectifs d'assistance. Cette identification des causes
permet alors de recourir à ceux des services gouvernementaux qui peuvent
corriger la situation ».
Maintenant, l'aspect complémentaire, la santé ou les
dépenses dans le domaine de la santé peuvent être
considérés, non pas uniquement comme des dépenses de
consommation, mais aussi contenir une composante d'investissement. Alors on
dit: « Dans le passé, les soins avaient été surtout
considérés comme des biens de consommation, depuis quelques
années cependant on en est venu à réaliser que les
dépenses dans le domaine de la santé pouvaient être
considérées comme un investissement en capital humain et que
comme tel, le rendement social qu'on pouvait en escompter était
relativement élevé ». Et à la page 37, après
avoir élaboré un peu plus que ça, à partir du
mémoire soumis par le Collège des médecins au gouvernement
de la Province en septembre 1964, il y a la question fondamentale à
laquelle il faut répondre: « Jusqu'à quel point
l'amélioration du capital humain dans une société
favorise-t-il le progrès économique ? ».
C'est un investissement et jusqu'où est-ce que ça peut
favoriser? Nous avons certaines données que nous avons ressorties,
toujours à la page 37. Irving J. Goffman, c'est un économiste qui
a étudié la question ici au Canada, mentionne que le taux brut de
mortalité est tombé de 10.2 par 1,000 habitants en 1931, à
7.8 en 1960. Ce résultat serait attrlbuable en majeure partie à
la baisse de la mortalité infantile et de la mortalité chez les
adolescents dû à l'élimination presque complète des
maladies contagieuses et infectieuses.
A la suite de ces progrès médicaux, l'âge moyen au
décès est passé de 44 ans en 1931, à 61 ans en
1960. A l'heure actuelle l'espérance de vie à la naissance, est
de 67 ans pour les
hommes et de 73 pour les femmes pour l'ensemble du pays. Cette hausse de
l'espérance de vie en plus de prolonger la période
d'activité des travailleurs et, par conséquent, d'augmenter le
rendement des investissements en capital humain signifie qu'une proportion
considérable de la main-d'oeuvre actuelle, possiblement 10%, a
survécu jusqu'à maintenant à cause de la baisse de la
mortalité depuis 1930. Pour l'année 1960 seulement, cette
main-d'oeuvre supplémentaire a probablement, ajouté entre $1
milliard et $2 millards au revenu national du Canada. Alors c'est une
façon de mesurer approximativement l'investissement.
On dit maintenant ici, c'est très intéressant pour ce que
est de la maladie, Goffman estime qu'au Canada elle cause en moyenne une
absence du travail d'au moins cinq jours par an. Pour 1962, ceci aurait
signifié 27 millions d'hommes-jours, soit plus que la perte
occasionnée par toutes les grèves et « lock-out » qui
ont eu lieu au Canada depuis 1947. Alors ce que nous avons voulu montrer ici
c'est qu'il y a beaucoup d'efforts consacrés pour régler les
conflits ouvriers. Il y a peut-être aussi un aspect investissement pour
réduire les pertes occasionnées par la maladie.
Finalement la troisième justification qui peut être
considérée comme étant réelle, c'est...
M. KENNEDY: Le paragraphe que vous venez de citer, l'histoire
d'hommes-jours, est-ce que vous avez la source de cette
affirmation-là?
M. CASTONGUAY: Oui, si vous regardez à la page 61, on a
cité un peu plus haut, nous avons cette
référence-là, à la page 34, « Some Fiscal
Aspects of Public Welfare in Canada ». On a cette
référence-là si vous voulez...
M. KENNEDY: parce qu'actuellement il y a énormément de
gens qui prennent des jours de maladie seulement par convention; ils leur sont
attribués, ça s'ajoute à leurs vacances...
M. CASTONGUAY: Mais là, il n'estime lui que celles causées
par la maladie, il fait abstraction de toutes ces choses-là...
M. KENNEDY: ... c'est ça que je voudrais savoir si ces jours sont
authentiquement des jours de maladies ou si ça comprend les
vacances...
M. CASTONGUAY: Il essaie d'estimer à partir des jours d'absence
quels sont ceux qui sont réellement dus à la maladie...
M. KENNEDY: Il y en a qui ont des jours d'absence de maladie et puis qui
ne sont pas malades.
M. CASTONGUAY: Même en supposant que son estimation n'aurait pas
été réaliste, il reste que la perte est tellement forte,
27 millions d'hommes-jours, même si on coupait ce chiffre de
moitié, c'est encore quelque chose de significatif.
M. KENNEDY: Je voulais vous demander la question parce que je sais, par
exemple, que dans une certaine catégorie de fonctionnaires civils, ils
peuvent s'accumuler à peu près cinq semaines de vacances dans
l'année en tenant compte des jours de maladie et puis de tous les autres
facteurs...
M. CADIEUX: C'est ce qui explique pourquoi il y a plus d'absences parmis
les plus jeunes parce qu'ils sont plus intéressés à aller
à la chasse.
M. KENNEDY: Peut-être, oui. c'est fort possible. C'est pour
ça que je veux savoir s'il faisait abstraction de ce facteur.
M. CASTONGUAY: Il dit qu'il estime, alors il a tenu compte.
Maintenant, la caractéristique du marché des soins, c'est
peut-être un peu plus aride, mais c'est assez intéressant
malgré tout comme troisième justification. On dit à la
page 38, au premier paragraphe: Dans le cadre d'une allocation optimum,
Il faut vous dire qu'il y avait des économistes dans notre comité
dans le cadre d'une allocation optimum des ressources disponibles dans
la société, il existe un niveau donné de consommation de
soins qui correspond à une satisfaction maximum des besoins de la
collectivité. Pour des raisons dont nous essaierons de donner plus bas
un aperçu sommaire nous ne pouvons compter sur les mécanismes
normaux des marchés pour réaliser cette allocation optimum des
ressources et ce niveau souhaitable dans la consommation médicale...
C'est cette défaillance partielle des mécanismes des
marchés dans le cas des soins qui constitue, à notre avis, le
principal argument en faveur d'une intervention publique dans le domaine de la
santé.
En fait, tout cela pour dire que la nourriture ça va bien,une
personne est capable de déterminer si elle a faim ou si elle n'a pas
faim; pour l'habillement elle est capable de déterminer si elle veut
s'habiller plus ou moins bien; pour l'automobile, elle est capable de
déterminer si
ses moyens lui permettent d'acheter une plus grosse ou une plus petite
automobile. Dans le domaine des soins la personne n'est pas en mesure
d'apprécier de la même façon si elle a besoin de soins, si
elle reçoit des bons soins, même si parfois elle n'exagère
pas dans l'utilisation qu'elle peut faire des médicaments, etc. Alors
les mécanismes réels de marché ne jouent pas en plus du
fait que la maladie est quelque chose d'imprévisible, et personne ne
sait à quel moment la maladie le frappera, encore moins chez sa femme et
ses enfants, s'il s'agit d'une personne mariée. Il y a donc un aspect
différent dans le cas de la maladie qui fait que les mécanismes
réguliers du marché ne peuvent pas jouer.
M. KENNEDY: M. Castonguay, vous dites qu'une personne ne peut savoir
déterminer par elle-même la totalité des soins
médicaux dont elle a besoin. Je ne vois pas ce que cela vient faire dans
l'assurance-maladie. Est-ce qu'il va y avoir un mécanisme qui
déterminera qu'une personne ne veut voir le médecin quatre fois
par année ou trois fois par année?
M. CASTONGUAY: C'est que, il n'agit pas de la même façon
tout à fait, mais le mécanisme va marcher.
M. KENNEDY: Bien moi je parle d'une personne qui se sent malade
évidemment.
M. CASTONGUAY: Autrement dit la question c'est que l'Etat
remarquez que je n'essaie pas de donner la réponse est-ce que
l'Etat joue un rôle supplétif ou est-ce que l'Etat a un rôle
plus que supplétif. Si on accepte le fait que les mécanismes
réguliers de marché jouent, on peut dire toutes les personnes qui
gagnent un revenu vont s'assurer selon leurs besoins parce qu'une
des premières allocations qu'elles vont faire, elles diront: Il faut que
je me nourrisse, que je me loge, que je me soigne. Mais si les
mécanismes de marché réguliers ne jouent pas et que les
gens qui passent à ce qui leur est le plus évident, ou qui leur
donne le plus de satisfaction immédiate, ils remettent les soins
médicaux plus loin dans leur ordre de priorité. Ils se disent,
bien ça, j'y ferai face à ce problème lorsqu'il se
présentera. Parce fait-là vous avez une population qui est en
moins bon état de santé, une population qui s'absente plus
souvent de son travail, qui donne lieu à des problèmes sociaux
parce qu'avec la pauvreté il y a généralement d'autres
problèmes sociaux qui s'y rattachent. La question se pose donc: Est-ce
qu'il y a une justification pour une intervention de l'Etat dans ce domaine ou
est-ce que l'Etat doit jouer un rôle purement supplétif?
M. CLOUTIER: Il y aurait moins de médecine préventive.
M. RENAUD: Il y auraplus de médecine préventive.
M. KENNEDY: Cela se rattache à l'aspect préventif de la
sécurité sociale.
M. CASTONGUAY: La balance du raisonnement, c'est à peu
près ça en fait qui ressort. Ce n'est pas nécessaire, je
crois, de lire les autres parties, il y a un autre élément
additionnel, c'est ce qui est appelé en termes d'économistes, les
économies extermes. C'est un autre point de vue qui est assez
intéressant, qui n'est peut-être pas convaincant pour un non
initié, et moi je m'inclus dans cette catégorie, celui des
économies externes; vous pouvez le voir de façon assez
évidente du côté de la vaccination. Par exemple, si la
vaccination n'était pas obligatoire une personne qui a une maladie
contagieuse, à un moment donné, peut occasionner une
épidémie et comme perte, ça peut être
désastreux. Alors, c'est peut-être un cas extrême, les
maladies contagieuses, mais de la même façon une personne qui se
maintient soit par ignorance ou soitpar manque de revenu, en mauvais
état de santé, crée en fait des charges pour la balance de
la société en ce sens qu'elle ne donne pas son plein rendement.
Alors si les soins médicaux et divers autres genres de soins lui sont
accessibles et qu'elle peut se maintenir en un meilleur état de
santé, d'ailleurs il y a plus de bien-être pour elle, il y a une
économie indirecte pour le reste de la population.
Alors c'est une question de degré cette histoire-là, il
s'agit de l'évaluer, ce n'est pas quelque chose d'absolu, je n'essaie
pas de faire une thèse ici, mais il y a certains éléments
de réponses aux questions que vous vous posez et, qui sont
là.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que c'est tout M. Castonguay?
M. RENAUD: Je pense bien que c'est un exposé de principes
d'ailleurs excessivement intéressant.
M. LE PRESIDENT: C'était extrêmement intéressant.
Alors le comité est ajourné à ce soir, 8 heures et si j'ai
bien compris vos intentions, M. Castonguay, vous allez tâcher de nous
donner le sommaire des volumes 2 et 3, n'est-cepas...
M. CASTONGUAY: Exactement ça.
M. LE PRESIDENT: ... premièrement le volume 2, qui a trait au
régime public au Québec, le régime privé au
Québec et ensuite dans le volume 3, les aspects constitutionnels des
relations fédérales-provinciales, et ensuite un sommaire de la
législation dans le domaine de la santé.
M. CASTONGUAY: Exactement ça.
M. LE PRESIDENT: Alors le comité est ajourné à 8
heures.
Reprise de la séance à 8 h p. m.
M. ROY (Président du comité de l'assurance-maladie): Je
demanderais à M. Jacques Morency et à M. Jacques de la
Chevrotiêre de nous donner des explications au sujet du volume n,
régimes publics et régimes privés au Québec.
M. de la CHEVROTIERE: M. le Président, avec votre permission, je
peux rester assis?
M. LE PRESIDENT: Sûrement.
M. de la CHEVROTIERE: M. le Président, le volume no il traite des
régimes privés et des régimes publics de même que de
certains régimes bénévoles dans la province de
Québec Pour ma part, je vous parlerai des régimes privés
qui font l'objet du chapitre premier de ce volume.
Ce chapitre premier se divise en deux parties et la première
partie est relativement courte quant au texte et j'ai pensé que, si
c'était l'assentiment des membres du comité conjoint, je pourrais
en faire la lecture. Je pense que ça sera peut-être plus court que
de donner des explications sur les tableaux parce qu'en somme le texte est
très bref et correspond aux données statistiques.
Il y a un court historique au début, où l'on dit ceci:
« Avant 1940, dans la province de Québec l'activité des
assureurs dans le domaine des frais médicaux était à peu
près nulle. Lorsque ces frais étaient couverts, c'était le
plus souvent, en vertu de clauses secondaires de police d'assurance
générale ayant trait aux accidents d'automobiles, à la
responsabilité civile, etc. C'est au cours des années 1940 que
commença vraiment l'assurance-maladie. La Quebec Hospital Service
Association, Croix-Bleue fut fondée en 1942 et offrait alors une
protection contre les frais d'hospitalisation seulement. « En 1946, une
autre société québécoise, le Service de
santé du Québec, fut mis sur pied et offrait dès le
départ une protection contre les frais d'hospitalisation et aussi contre
les frais médicaux encourus à l'hôpital, au cabinet du
médecin ou à domicile. « Un bon nombre de compagnies
d'assurance-vie commençait à cet effet à offrir des
contrats surtout collectifs, mais aussi individuels d'assurance-maladie.
Jusqu'à nos jours le volume d'affaires, en ce domaine, s'est accru
constamment d'année en année. « Les statistiques à
notre disposition concernant les primes et les prestations ne nous permettent
pas d'établir une distinction entre, d'une part, les frais
médicaux et d'autre part, les autres risques qui rendent à la
maladie ou aux accidents, comme la perte de revenu, la perte de membres, le
décès accidentel, l'invalidité temporaire ou permanente,
les frais hospitaliers. Pour cette raison, il est difficile de mesurer
isolément l'expansion de l'assurance contre les frais médicaux.
Néanmoins, le tableau 1, qui nous fait constater l'essor rapide et
considérable qu'a connu l'assurance-accident-maladie dans la province,
nous permet de supposer que l'assurance contre les frais médicaux, a
suivi la même tendance. Nous savons, toutefois qu'en 1964 le montant des
primes d'assurance contre les frais médicaux s'élevait à
$56,800,000 soit plus de la moitié de toutes les primes
d'assurance-accident-maladie qui ont été payées dans la
province ». « D'après le tableau 1, on peut voir qu'en 25
ans, le volume des primes souscrites pour l'assurance-accident-maladie se
serait multiplié 40 fois. Vous voyez, dans le tableau 1, qu'en 1940,
dans toute la province de Québec et par tous les assureurs
privés, il a été perçu $2,600,000 de primes pour de
l'assurance-accident-maladie, alors qu'en 1964, il y a eu $105 millions de
payé par les citoyens de la province ».
Je rappelle ici que ces primes englobent non seulement les frais
médicaux proprement dits, mais certains frais ou certains risques
connexes à la maladie ou aux accidents. « Champ d'application. Le
nombre de personnes assurées contre les frais médicaux dans la
province de Québec, s'est accru constamment d'année en
année depuis vingt ans. En 1964 on estimait à 2,393,550 le nombre
de personnes assurées par des régimes privés,
comparativement à 1,500,000 en 1955, à 1,780,000 en 1958 et
2,100,000 en 1961. De 1955 à 1964, la population assurée a
augmenté de 52.4%. De 1961
à 1964, cette augmentation a été de 13.4%. C'est
une augmentation considérable mais une vue plus réaliste de la
situation exige que nous considérions la proportion de la population qui
est protégée par des régimes privés. Il est alors
possible de connaître globalement le degré de protection contre la
maladie dont le résident de la province de Québec
bénéficie et de voir comment ces derniers se comparent à
ce point de vue avec les autres canadiens. « En 1955, 34.8% de la
population était protégé en vertu d'un régime
privé et en 1964 ce pourcentage atteignait 43.1%. Au tableau 2, qui est
à la page suivante, nous constatons qu'en 1955, la province de
Québec en ce qui concerne la population assurée par des
régimes privés, était au troisième rang avec 34.8%,
comme nous l'avons vu et en 1964, cette proportion était passée
à 43.1%. Il est à remarquer, cependant que la province de
Québec a reculé par rapport aux autres provinces, elle se trouve
au sixième rang. Elle a fait du progrès mais moins que les autres
provinces ».
Je pense que c'est surtout...
M. MARLER: ... vous expliquez ce ralentissement, de cette
façon-là, par le fait qu'on a institué le système
d'assurance-hospitalisation.
M. de la CHEVROTIERE: Je ne crois pas, M. Marler, je pense que de fait,
l'instauration du régime d'assurance-hospitalisation a plutôt
été un stimulant à l'assurance-maladie. Plusieurs
personnes qui bénéficiaient d'assurance-hospitalisation
privée et qui ont été libérées de
l'obligation de s'assurer privément, à cause de l'instauration du
régime public d'hospitalisation, se sont à ce moment-là
assurées contre la maladie. Je pense que la raison principale qui a fait
que, dans la province de Québec, les régimes privés
d'assurance-maladie ont fait moins de progrès que dans les autres
provinces, c'est le fait qu'ici, on y revient d'ailleurs un peu plus loin dans
le texte, c'est que nous n'avons pas dans la province de Québec, ce
qu'on appelle communément les régimes conventionnels, qui
existent dans toutes les autres provinces du pays.
Les régimes conventionnels sont des régimes qui ont
été mis sur pied par des sociétés provinciales
d'assurance-maladie qui elles-mêmes, dans la plupart des cas tout au
moins, on été mises sur pied par la profession médicale de
chaque province. L'association médicale canadienne qui a des divisions
dans chaque province a organisé, il y a déjà plusieurs
années, dans toutes les provinces du Canada, sauf au
Québec, des sociétés d'assurance à but non
lucratif spécialisées dans le domaine des frais médicaux
proprement dits. Ces sociétés ne s'occupaient pas
d'assurance-hospitalisation, mais uniquement des soins médicaux
proprement dits.
Le noeud de ce genre d'assurance, le point important qu'il faut retenir,
c'est que les médecins de ces provinces ont convenu avec ces
organisations d'accepter en paiement final de leurs services, un certain tarif
d'honoraires. Ce qui faisait que dans les autres provinces du pays les citoyens
pouvaient, sur une base collective et même individuelle, obtenir un
contrat d'assurance de ces sociétés et avoir la garantie, en
somme, que leurs soins médicaux seraient couverts entièrement par
leur contrat d'assurance. Ici dans la province de Québec, de tels
régimes conventionnels n'existent pas ou du moins existent très
peu et à titre quasiment expérimental. De toute façon,
ça n'a pas exercé d'influence et je pense que c'est une des
raisons qui font que les régimes privés se sont moins
développés ici que dans d'autres provinces.
M. KENNEDY: M. de la Chevrotière, je voudrais m'assurer d'une
chose. Votre $105,500,000 de primes au tableau 1, se rattache aux 43.1% de
la...?
M. de la CHEVROTIERE: Pas du tout. Je dois d'abord dire, j'aurais
peut-être dû commencer par ça que les statistiques, surtout
de ces années-là, nous manquent terriblement. Nous n'avons aucune
donnée sur les soins médicaux proprement dits. Nous en avons pour
les toutes dernières années, peu d'ailleurs pas autant que nous
aurions voulu, et nous avons dû nous contenter des statistiques qui
englobent l'assurance-accident-maladie et non pas seulement les soins
médicaux.
M. KENNEDY: Cela comprend la perte de salaire?
M. de la CHEVROTIERE: Oui, c'est ça, la perte de salaire,
même le décès accidentel et des choses comme cela.
C'étaient tout simplement les statistiques du début, pour
indiquer d'une façon générale la tendance, la croissance,
de l'assurance-accidemt-maladie, mais nous pouvons conclure, je pense, à
peu près à coup sûr, que l'assurance-soins-médicaux,
proprement dite a suivi à peu près la même courbe.
M. KENNEDY: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Les prestations comprennent aussi l'hospitalisation,
pour l'année 1964?
M. delaCHEVROTIERE: Oui. Les prestations comprennent tout ce que les
assureurs qui font des affaires dans la province de Québec, ont
payé en 1964 pour toute réclamation touchant de près ou de
loin la maladie, que ce soit de la perte de salaire, de l'hospitalisation, des
soins médicaux, enfin toute la gamme des risques.
A la page 6, si vous permettez, nous allons continuer la lecture:
« Même si au cours des dernières années la proportion
de la population assurée a augmenté de façon significative
elle demeure que moins de la moitié de la population est
protégée en vertu d'un régime privé. Si nous
comparons le champ d'application du Québec avec celui des autres
provinces, nous constatons que la province de Québec en 1964, se trouve
au sixième rang », ce que nous avons vu tout à l'heure,
« précédée de l'Ontario et de toutes les provinces
de l'ouest ainsi que du Nouveau-Brunswick. Seule la Nouvelle-Ecosse et
l'Ile-du-Prince-Edouard et Terre-Neuve passent après Québec
».
M. KENNEDY: Vous avez pu établir les raisons qui font que la
province de Québec était en retard par rapport aux autres
provinces.
M. de la CHEVROTIERE: La raison principale que nous avons vue nous, je
pense que c'est celle que je viens d'expliquer au sujet des régimes
conventionnels qu'on trouve ailleurs et on va voir plus loin d'ailleurs que
dans les autres provinces, une importante partie de la population qui est
assurée en vertu d'un régime privé, a
préféré ce genre de régime parce qu'il lui
accordait justement une sécurité quasi totale, a peu près
absolue. Alors que dans la province de Québec certains se plaignent que
les contrats d'assurance émis par les assureurs ne couvent pas
entièrement, soit que les prestations prévues sont
inadéquates, soit même si elles sont jugées
adéquates, que rien n'empêche ceux qui rendent des services de
demander une somme supérieure. C'est sûrement une des raisons
principales, mais il y en a sûrement d'autres aussi d'ordre
économique. L'industrialisation dans la province de Québec n'est
pas aussi poussée qu'en Ontario ou en Colombie-Britannique et comme on
sait que l'assurance-maladie se vend principalement sur une base de groupe dans
l'industrie, avec contribution de l'employeur, il peut se faire, si l'on
compare à des provinces comme l'Ontario ou la Colombie, que ce soit une
explication.
Mais cela n'en est sûrement pas une, vis-a-vis la Nouvelle-Ecosse
ou le Nouveau-Brunswick.
M. DUPRE: Est-ce qu'il y aurait plus de groupes d'assurance-groupe dans
le Québec, qu'ailleurs?
M. de la CHEVROTIERE: Vous voulez dire plus de groupes d'assurés
ou plus de groupes d'assureurs?
M. DUPRE: Non, d'assurance en groupe par industrie, comme la Croix-Bleue
par exemple?
M. de la CHEVROTIERE: Il y en a beaucoup ici d'assureurs, mais je dirais
que la majorité sont des sociétés ou des compagnies qui
font un très faible volume d'assurance-maladie. Dans la province de
Québec, il y a 277 assureurs, mais il faut dire sur ce nombre, il y en a
à peine plus d'une vingtaine dont le chiffre d'affaire de primes en
assurance-accident-maladie dépasse $1 million de dollars par
année. Tous les autres, soit que ce soient de toutes petites
sociétés ou des compagnies d'assurance-vie qui n'ont à peu
près pas développé ce secteur-là, ont un chiffre
d'affaires assez limité en assurance-maladie.
A la page 6, au dernier paragraphe, un aspect qu'il est important de
souligner, c'est la portion du marché que les assureurs dans le domaine
de l'assurance privée contre les frais médicaux ont réussi
à s'approprier. Dans chaque province le nombre de personnes
protégées par des régimes publics varie de sorte que
lorsque nous comparons dans chaque province le nombre de personnes
assurées en vertu de régimes privés par rapport à
la population totale, la comparaison est quelque peu boiteuse. En d'autres
termes, si dans les provinces il y a des régimes publics gouvernementaux
qui assurent une plus ou moins grande proportion de la population,
évidemment ce qui reste à assurer est peut-être plus ou
moins grand et c'est là-dessus, pour avoir une idée plus juste,
qu'il faut se baser pour déterminer la clientèle possible des
assureurs privés.
Et si l'on fait ce relevé-là, on constate que la situation
de la province de Québec est peut-être encore moins
intéressante que celle des autres provinces.
Vous avez ces statistiques-là à la page 8 au tableau 3.
Vous avez d'une part, pour chaque province la population totale et ensuite le
nombre de personnes assurées, d'abord dans les régimes
privés et ensuite dans les régimes publics. Et la
quatrième colonne indique juste-
ment le nombre de clients possibles pour les assureurs
privés.
M. TREPANIER: Mais par régimes publics dont il est fait mention
ici, vous entendez ce qui est mentionné à la page 16, le
système des Anciens combattants...
M. de la CHEVROTIERE: C'est ça.
M. TREPANIER: ... exception faite de la Saskatchewan...
M. de la CHEVROTIERE: Oui, d'accord.
La Saskatchewan est hors de cause et c'est pour ça
évidemment qu'elle n'apparaît pas dans le tableau en question.
Alors vous voyez dans ce tableau 3 que dans la province de Québec
il n'y a que 43.4% du marché possible qui est effectivement
assuré. En fait, la province de Québec est au huitième
rang à ce moment-là, suivie par l'Ile-du-Prince-Edouard.
Dans le tableau 4, vous avez les personnes assurées selon le type
de protection qu'elles ont par leur contrat d'assurance, il n'a pas
été très facile de faire ces chiffres et l'on ne peut pas
d'ailleurs dire que la question est absolument tranchée.
Quand on dit protection limitée, on réfère
généralement à des contrats d'assurance qui couvrent, par
exemple, uniquement les soins médicaux alors que ceux-ci sont rendus,
disons, en cours d'hospitalisation ou, dans les cas d'accidents, à
domicile ou au bureau, mais, d'une façon générale qui ne
couvrent pas les services médicaux courants qui sont rendus au cabinet
du médecin ou au domicile de l'assuré. Alors que sous le titre de
protection complète on désigne davantage les contrats qui
couvrent les soins de médecins, qu'ils soient rendus à domicile,
au cabinet du médecin ou à l'hôpital.
Et on constate ici, n'est-ce pas, que dans la province de Québec,
sur le nombre total de personnes protégées, il y en a 40% qui ont
une protection qu'on peut qualifier de complète, d'une façon
générale, et la différence 59.2% qui ont une protection
limitée.
Si vous comparez aux autres provinces, vous voyez que partout ailleurs
la majorité des assurés bénéficient d'une
protection complète et ce, pour la raison que j'ai expliquée
tantôt et que je peux bien répéter brièvement: c'est
que les sociétés à commandite médicale mises sur
pied ou suscitées par les divisions de chaque province de l'Association
médicale canadienne offrent à leurs assurés, un contrat
complet qui couvre tous les types de soins médicaux, de quelque nature
qu'ils soient, en autant qu'ils sont rendus par des médecins ayant
accepté d'avance le tarif de ces sociétés. Ce qui fait que
les assurés bénéficient d'une protection totale quand ils
vont chez le médecin; ils n'ont pas même à se
préoccuper de voir à leur compte: le médecin envoie ses
comptes directement à l'assureur, celui-ci les paie et l'assuré
n'a jamais d'excédent à payer. C'est sûrement une des
raisons qui fait que dans la province de Québec, étant
donné l'absence de régime conventionnel, on a moins
d'assurés d'une façon générale et moins
d'assurés qui ont une protection complète.
M. COITEUX (Duplessis): Dans le régime conventionnel, monsieur de
la Chevrotière, doit-on tirer comme conclusion que le régime
conventionnel ptut offrir plus de protection à un prix moindre?
M. de la CHEVROTIERE: Ce n'est pas nécessairement une question de
prix quant à la prime, par exemple. La prime peut être assez
élevée. De fait d'ailleurs, en Ontario ou dans d'autres
provinces, les sociétés auxquelles je faisais allusion
tantôt, vendent leurs contrats d'assurances à des taux de primes
relativement élevés, dans certains cas sûrement plus
élevés qu'une compagnie d'assurances qui offre un plan à
couverture étendue qu'on appelle communément un « major
medical plan », mais la protection n'est pas la même.
En réalité, le régime conventionnel peut
coûter assez cher, mais au moins il a cet énorme avantage que
l'assuré est entièrement couvert, alors qu'avec les plans de type
« major medical », l'assuré doit lui-même au
départ payer, c'est un peu comme l'assurance-automobile, une franchise
qui est habituellement de $25 ou $50, c'est à lui à payer cela
d'abord. Ensuite, l'assureur paie, disons 80% de l'excédent, ce qui veut
dire que l'assuré, à ce moment-là, est obligé de
payer la première tranche, plus 20%du solde. Alors, un régime de
ce genre est sûrement meilleur marché que les régimes
conventionnels; mais d'autre part, il coûte plus cher à l'individu
parce que lorsqu'il est malade, il faut qu'il débourse la franchise et
qu'il débourse une partie ou proportion des frais encourus.
M. MARLER: Et on nous a dit cet après-midi que dans le cas de
l'Alberta, c'est une société sans but lucratif. Dans la plupart
des cas, ce sont des compagnies qui désirent faire un profit avec ce
plan d'assurance, n'est-ce pas?
M. de la CHEVROTIERE: Les sociétés des autres provinces
qui offrent des plans conven-
tionnels sont toutes des sociétés à but non
lucratif.
M. MARLER: Ce qui veut dire que l'élément « profit
»,...
M. de la CHEVROTIERE: Il n'y en a pas. Pas du tout.
Je ne veux pas y revenir, M. le Président, mais à la page
10, au dernier paragraphe, on explique ce que je viens de dire, c'est
peut-être mieux dit ou expliqué ce phénomène du plan
conventionnel des autres provinces.
La page 11 porte sur le même sujet, mais avec peut-être un
peu plus d'explications que je ne vous ai données.
M. MARLER: M. le la Chevrotière, je vois dans le paragraphe que
vous venez de nous citer, que le fait que les médecins sont
groupés a eu une amélioration considérable sur le genre de
régime, etc., qu'il a été facile de s'entendre sur les
tarifs.
Mais quelle est la situation avec les assureurs dans le Québec?
Est-ce qu'ils ont tous établi une espèce de tarif ou est-ce que
cela varie d'un assureur à l'autre?
M. de la CHEVROTIERE: C'est très variable, M. le
Président. Chaque assureur, à toutes fins pratiques,
établit ses propres tarifs, et j'imagine évidemment qu'il essaie
de les baser sur la pratique courante ou se tenir assez près du tarif
officiel, mais je dirais que d'une façon générale, ce qui
a primé dans bien des cas dans la province de Québec, cela a
été une question de coût ou de prime. Et lorsqu'un assureur
a affaire à un client, que ce soit un individu ou un groupe, je pense
surtout à un groupe, et que ce client veut un plan d'assurance qui ne
lui coûte pas plus que tant de dollars de prime par mois, à ce
moment-là, l'assureur peut être appelé ou forcé
indirectement à offrir un contrat dont les honoraires ou les prestations
ne sont pas très élevées.
Il y a beaucoup d'assureurs, la plupart peut-être, qui ont
plusieurs genres de tarifs chirurgicaux. Alors, ils offrent à leurs
clients le tarif numéro 1, qui prévoit d'excellents honoraires ou
des prestations relativement élevées pour chaque acte chirurgical
posé; si le client ne veut pas parce que cela suppose une prime trop
élevée, il va lui offrir le tarif numéro 2,
proportionnellement...
M. MARLER: Le tarif est en fonction de la prime, alors?
M. de la CHEVROTIERE: Dans bien des cas, sûrement.
M. FORTIER: Ils n'ont jamais demandé par exemple au
Collège des médecins et chirurgiens d'établir des tarifs
généraux?
M. de la CHEVROTIERE: Je ne sais pas s'il y a eu des demandes
officielles faites au collège des médecins, mais je peux vous
dire que les assureurs auraient été bien heureux s'il y en avait
eu. Pas de doute! Il y avait un tarif général, mais je pense que
c'était un tarif minimum. C'est un tarif qui ne lie pas le
praticien.
Le tableau 5, M. le Président, à la page 12, fait
peut-être ressortir encore ce que nous avons dit il y a quelques instants
au sujet des régimes conventionnels. Evidemment, la province de
Québec n'est pas citée dans ces chiffres, puisque, comme je l'ai
dit tout àl'heure,il n'y avait pas de régime conventionnel dans
la province. Et on constate que dans les autres provinces, la proportion des
assurés qui sont protégés par des régimes
conventionnels est relativement forte, surtout si l'on considère que ces
sociétés sont peu nombreuses. En général, c'est
variable, mais il n'y en a jamais plus de deux dans une même province. En
Ontario, par exemple, il y a le P.S.L, qui est le Physicians' Services
Incorporated, qui est la plus importante, il y en a une seconde, la Windsor
Medical Association, qui, elle, fait des affaires uniquement dans deux
comtés dans la région de Windsor; P.S.I, couvre le reste de la
province. Il n'y a que deux sociétés qui offrent des
régimes conventionnels en Ontario, et qui ont à faire face
à une concurrence de tous les grands assureurs du pays,
c'est-à-dire au moins vingt-cinq ou trente très importants
assureurs. Malgré tout, on voit qu'en Ontario, ils ont couvert et
couvrent en 1964 43% des assurés. Et la raison de cela, encore une fois,
c'est parce qu'ils offrent des régimes conventionnels à
protection totale, chose que nous n'avons pas connue dans la province de
Québec.
A partir de la page 13, M. le Président, si vous voulez qu'on
continue, nous donnons des renseignements complémentaires que nous
n'estimons peut-être pas aussi importants que ceux que nous avons
déjà regardés brièvement, mais qui peuvent quand
même être, avons-nous cru, d'un certain intérêt pour
les membres du comité conjoint.
On voit au tableau 6, à la page 14, le nombre des personnes
protégées dans la province de Québec par tous les genres
de régimes, régimes qu'on appelle à but non lucratif et
les autres
qu'on appelle les régimes commerciaux. Je pourrais
peut-être ici ouvrir une parenthèse, M. le Président, pour
dire que cette distinction entre régimes commerciaux et régimes
à but non lucratif remonte à plusieurs années en
arrière et que c'est la terminologie qu'on emploie à la division
de la recherche et de la statistique du ministère de la Santé
fédéral, mais que certains assureurs dits commerciaux s'objectent
en soi à être catalogués comme assureurs commerciaux, en
particulier les compagnies mutuelles, par exemple, qui prétendent... je
ne juge pas du tout de la question, mais je signale simplement que c'est
peut-être un départage qui peut être jugé un peu
arbitraire. Quoi qu'il en soit, c'est comme cela que les statistiques sont
fournies, nous les avons présentées de la même
façon.
Vous voyez que dans la province de Québec, en tout et partout, il
y a un million de personnes qui sont protégées par des
régimes à but non lucratif, et un million et demi par des
régimes commerciaux.
Au tableau 7 de la page suivante, nous donnons des primes perçues
par des régimes à but non lucratif et des régimes
commerciaux. Malheureusement, vous l'avez sans doute constaté, pour les
années 1955, 1958 et 1961, il n'a pas été possible
d'obtenir des chiffres des primes perçues par les régimes
commerciaux. Mais nous en avons eu tout de même pour l'année 1964,
c'est peut-être la plus intéressante parce que la plus
récente, et on constate alors qu'en 1964, les régimes à
but non lucratif ont perçu $21 millions de primes et les régimes
commerciaux, $35 millions, pour un grand total de $56 millions. Et les
prestations versées se sont établies dans le premier cas à
$20 millions pour les régimes à but non lucratif et dans le cas
des régimes commerciaux, à $28 millions. Donc, en 1964, il a
été perçu en primes pour des soins médicaux, cette
fois-ci cela s'applique uniquement à des soins médicaux et non
pas à tous les autres genres de risques inhérents à la
maladie, $56,800,000 au total et il s'est payé à ces
assurés $48,700,000.
A la page suivante, au tableau 8, vous avez le nombre de personnes
assurées dans la province de Québec par des régimes
privés. D'abord et aussi selon le genre de protection accordée
par leur contrat, dans le cas des sociétés à but non
lucratif à commandite médicale. Il faudrait bien que j'explique
ici ce terme, dans la province de Québec, il y a deux
sociétés qui bénéficient de la commandite
médicale, ou en d'autres termes, qui sont reconnues par la profession
médicale, l'association médicale du Québec; dans les
autres provinces, les sociétés reconnues par les
sociétés médicales, on les appelle les « doctor
sponsored plan ». La meilleure traduction que l'on a trouvée,
c'est société à commandite médicale, et il y a deux
sociétés dans la province de Québec à but non
lucratif qui sont reconnues par la profession médicale, du moins
l'association médicale du Québec, mais pour les raisons que je
vous ai expliquées tantôt, elles n'offrent quand même pas de
régime conventionnel. Et ces deux sociétés assurent un peu
plus d'un million de personnes, dont 821,000 par un régime à
protection limitée et 189,000 par un régime à protection
complète. Les sociétés à but non lucratif
protègent donc 18.2% de la population de la province de Québec.
Les assureurs commerciaux protègent, 27.4% de la population du
Québec, et les régimes publics qui s'adressent aux anciens
combattants, aux indiens, etc., protègent 1% de la population. Ce qui
fait en chiffre brut 2,586,000 personnes ou 46.5%. Mais il a fallu
déduire de ce nombre pour raison de double compte, un certain nombre de
personnes qui ont plus d'un contrat d'assurance, soit 139,000 personnes, pour
arriver en fin de compte au chiffre dont on a parlé au début, un
chiffre total net d'assurés à travers le Québec, quel que
soit le genre de protection ou le genre d'assureurs de 2,446,000 personnes ou
44%, incluant les personnes protégées par un régime public
qui sont en tout petit nombre, 1%.
Le tableau de la page 19, le tableau 9, donne le nombre de toutes les
compagnies qui font des affaires d'assurances accident-maladie dans la province
de Québec. En 1964, elles étaient 217, et de ce nombre, il y en
avait 30 qui étaient des compagnies qui avaient leur siège social
dans la province de Québec. Vous avez un tableau correspondant à
la page suivante. Dans le cas des sociétés de secours mutuel,
dans la province, il y avait en 1964 soixante assureurs, soixante
sociétés de secours mutuel, dont quarante-sept avaient leur
siège social dans la province de Québec. Il faut dire ici, je
pense, que la très grande majorité de ces sociétés
de secours mutuels sont de toutes petites associations, dont les
activités s'exercent à l'intérieur d'un groupe particulier
ou à l'intérieur d'une entreprise; cela peut être une
association des employés de Steinberg's, par exemple. En fait, il y a
seulement trois sociétés sur les soixante qui ont une
activité vraiment provinciale.
Dans le tableau de la page suivante, on donne une information qui peut
être d'un certain intérêt.
C'est la liste des assureurs, de quelque nature qu'ils soient, dont le
chiffre d'affaires au point de vue primes perçues en accident-maladie
dans la province de Québec en 1964 a
été de $1 million et plus. Et on a ajouté, à
titre d'information encore, le chiffre d'affaires total que ces entreprises
font dans la province de Québec. Le premier chiffre est le chiffre total
des primes qu'elles ont recueillies dans la province de Québec, le
deuxième est le chiffre des primes qu'elles ont recueillies pour fins
d'assurance accident-maladie.
Le dernier tableau donne encore à titre d'information purement et
simplement, le partage des assureurs selon trois catégories; les
compagnies à fonds social, les compagnies mutuelles et les
sociétés de secours mutuels, en indiquant les noms de celles qui
ont fait des affaires pour au moins $200,000. Mon dernier mot, M. le
Président, sera pour attirer votre attention sur le fait que nous avons
essayé de savoir quelle pouvait être la contribution des
employeurs dans la province de Québec, au coût de ces
régimes privés d'assurance-maladie? D'après les sondages
que nous avons faits auprès de quelques compagnies d'assurances, nous en
sommes venus à la conclusion que en moyenne, ou de façon
gênérale, à une très petite marge d'erreur
près, les employeurs paient environ 50% de la prime de leurs
employés, de la prime d'assurance accident-maladie. Peut-être pas
tout à fait, mais presque, ce qui voudrait dire que dans la province de
Québec, en 1964, les employeurs dans l'ensemble, auraient
contribué environ $25 millions, pour défrayer le coût
partiel, évidemment, de l'assurance-maladie privée.
M. MARLER: Est-ce que cela comprend seulement les soins médicaux
ou est-ce que ça comprend en outre la perte du salaire par le
malade?
M. de la CHEVROTIERE: Ceci porte sur les frais médicaux
seulement.
M. MARLER: Seulement.
M. de la CHEVROTIERE: Seulement. Mais évidemment, les employeurs
paient sûrement, dans un bon nombre de cas, dans les mêmes
proportions pour l'assurance-salaire et certains autres bénéfices
marginaux. Mais ce $25 millions c'est uniquement en ce qui concerne les soins
médicaux proprement dits.
M. FORTIER: Combien de personnes ça peut couvrir $25
millions?
M. de la CHEVROTIERE: On a dit qu'il y avait 2,400,000 personnes
assurées et le nombre de personnes assurées par des contrats de
groupe est à peu près de 90% de ce nombre. Ce qui voudrait dire,
à peu près, en chiffre rond, 250,000 personnes. Mais il s'agit
là d'une moyenne. Il y a des employeurs qui ne paient aucune
contribution au coût de la prime de leurs employés; il y en a
d'autres qui paient tout. Le plus souvent ce qu'on rencontre c'est à peu
près 50%.
M. MARLER: Et cela couvre aussi les membres de la famille de l'ouvrier?
N'est-ce pas?
M. de la CHEVROTIERE: Oui, absolument. Dans le cas des pères de
famille, l'assurance couvre la femme et les enfants jusqu'à un certain
âge qui est variable mais le plus souvent c'est jusqu'à 21
ans.
M. LE PRESIDENT (Roy): Aussi pour le soutien de famille?
M. de la CHEVROTIERE: Vous voulez dire par exemple...
M. LE PRESIDENT: ... un célibataire qui est soutien de
famille?
M. de la CHEVROTIERE: Non, normalement non.
M. RENAUD: En somme il y a 43.1% de la population qui est assurée
ainsi?
M. de la CHEVROTIERE: C'est ça. M. RENAUD: Pour des soins
partiels?
M. de la CHEVROTIERE: C'est-à-dire qu'ici il faut faire une
distinction, je pense. Une partie d'entre eux ont une couverture partielle, une
autre partie ont une couverture, je dirais complète quant à
l'étendue mais pas quant à la hauteur, si je peux dire. Je vais
essayer de m'expliquer autrement. L'étendue est peut-être à
peu près totale dans le sens que tous les genres de services
médicaux sont couverts, mais ils ne sont pas nécessairement
couverts à 100%. Ainsi dans un cas la visite médicale à
domicile est payée mais selon un tarif qui n'est pas
nécessairement celui qui sera demandé par le médecin.
M. RENAUD: Et quelle est la proportion entre les services étendus
et les services partiels?
M. de la CHEVROTIERE: C'est à peu près
45%, 55%, ou plutôt 40/60, 40 étant les régimes
complets et 60 les régimes partiels, à peu près.
M. RENAUD: Merci.
M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions à poser à M.
de la Chevrotière sur les régimes privés?
M. RENAUD: Pas quant à moi.
M. LE PRESIDENT: M. de la Chevrotière, je vous remercie pour
l'exposé que vous venez de faire et je demanderais à M. Jacques
Morency de nous parler des régimes publics.
M. MORENCY: Alors voici M. le Président. Le chapitre suivant est
consacré aux régimes publics, il y en a de deux sortes dans la
province: Il y a d'abord des régimes fournis par le gouvernement
Provincial et ceux fournis par le gouvernement Fédéral. Sur ceux
fournis par le gouvernement Provincial, il y en a évidemment un, qui est
universel, et les autres sont des régimes particuliers. Le régime
universel, tout le monde le connaît, c'est l'assurance-hospitalisation
qui a été instaurée le 1er janvier 1961. Alors nous avons
ici, dans les quelques pages qui suivent, fait une courte étude de la
loi de l'assurance-hospitalisation. Si vous le désirez, on peut la
passer ou...
M. LE PRESIDENT: Je pense qu'on peut passer cette partie.
M. MORENCY: D'accord.
M. MARLER: Peut-être le seul point que M. Morency pourrait
peut-être nous faire ressortir c'est en somme la quantité de
services d'hospitalisation qui sont donnés dans les cliniques externes.
Parce que si je comprends bien la situation actuelle, il y a une partie
n'est-ce pas, qui est présentement gratuite?
M. MORENCY: Oui, c'est exact.
M. MARLER: Pouvez-vous peut-être nous décrire sommairement
la partie qui est, si vous voulez, exclue du plan actuel.
M. MORENCY: Bien voici. C'est comme vous le savez; les services
externes, on part d'une liste là. Il y a la chirurgie mineure et les
soins d'urgence. Les soins d'urgence évidemment sont couverts pour tout
le monde pourvu qu'ils soient fournis dans les 24 heu- res. Par exemple,
quelqu'un qui a un accident et qui se présente à l'hôpital
dans les 24 heures de l'accident sera traité. Evidemment on parle
toujours de patients externes; de quelqu'un qui se casse un bras ou enfin qui a
une coupure quelconque etc. va être traité gratuitement. Quand je
dis gratuitement, cela comprend tous les services fournis à
l'hôpital mais ça ne comprend pas les honoraires du médecin
qui doivent toujours être payés par le client. Maintenant la
deuxième partie, c'est ce qu'on appelle la chirurgie mineure.
Evidemmentc'est un terme générique qui comprend toute sorte
d'opérations et de traitements. Il y a une liste qui est fournie aux
hôpitaux. On constate une chose c'est que depuis que c'est
commencé la liste n'a pas diminué mais elle a allongé
continuellement. On y ajoute des opérations ou des traitements
continuellement. Maintenant, donner cette liste-là ce serait fastidieux;
le plus souvent ce sont des termes techniques, je pense bien qu'on doit s'en
passer, mais on peut dire que le principe à la base de tout cela c'est
que tout ce qui touche au diagnostic n'est pas payé par
l'assurance-hospitalisation. Par exemple, si quelqu'un veut aller tout
simplement, ne se sent pas trop bien et décide d'aller à
l'hôpital et qu'il dit: « Docteur je voudrais bien savoir qu'est-ce
que j'ai? » même si c'est en clinique externe, le gouvernement ne
paiera pas. C'est la partie traitement, lorsque le diagnostic est posé,
la partie traitement, et là encore évidemment c'est limité
pour toute sorte de raisons. Par exemple vous avez la question des examens
radiologiques. On sait très bien que tous les examens radiologiques ne
sont pas encore assurés en clinique externe. Cela fait longtemps qu'on
en parle, mais je pense qu'il y a une raison qui est évidente pour tout
le monde, c'est que déjà les services de radiologie dans les
hôpitaux sont surchargés et que si on les assure, cela va
créer des problèmes. Il y en a qui ont dit, oui c'est très
bien, si vous ne voulez pas le faire dans les hôpitaux, faites-le
ailleurs. Alors, ce genre de problème-là ce sont les raisons pour
lesquelles ces choses-là ne sont pas assurées. Mais, en
général, c'est la partie traitement et c'est défini,
là encore, comme je vous dis, je ne voudrais pas... d'ailleurs je ne
l'ai pas ici, la liste des traitements, mais ça couvre pas mal la partie
externe actuellement. Mais toujours les honoraires des médecins doivent
être payés, quand je parle du médecin, je parle du
médecin qui traite la personne, comme pour le patient interne, par
exemple, si ont est obligé de prendre un examen ra-diographique, le
radiologiste est payé par l'hôpital, alors à ce
moment-là il n'y aura pas de
charge, même pour un patient externe. Le médecin par
exemple de laboratoire, s'il a besoin par exemple d'un examen de laboratoire
à l'hôpital bien ceux-là sont payés par
l'hôpital mais le médecin traitant lui doit être payé
par le patient. Ce n'est pas couvert par l'assurance-hospitalisation.
M. MARLER: Qu'est-ce qui arriverait, M. Morency, si le plan
d'assurance-maladie était instauré? Est-ce que cela va avoir un
effet considérable sur les cliniques externes?
M. MORENCY: Considérable, vous voulez dire dans...
M. MARLER: S'il y a plus de gens qui vont fréquenter la
clinique.
M. MORENCY: Bien probablement. Mais, je pense qu'il est difficile
d'évaluer ça parce que par contre, si tous les honoraires de
médecins sont payés à l'hôpital et au bureau du
médecin, alors est-ce que les gens iront nécessairement à
l'hôpital, est-ce qu'ils ne préféreront pas plutôt
aller voir le médecin à son bureau, à son cabinet? C'est
probablement ce qui va arriver, alors c'est difficile d'établir je
pense, de donner un chiffre.
M. FORTIER: Il y a des patients qui vont se faire examiner au bureau du
médecin et le médecin pourra comme en médecine
générale par exemple, s'il y a quelques examens il pourra envoyer
le patient à la clinique externe pour avoir un examen de sang ou
peut-être certains examens qui vont être absolument indispensables.
Et d'ailleurs ceci empêchera un jour d'être obligé
d'hospitaliser un patient pour trois ou quatre jours pour subir des examens
alors que ça pourra se faire facilement à la clinique externe et
éviter qu'il y ait trois ou quatre jours d'hospitalisation. On pourrait
avoir un seul examen de laboratoire...
M. MORENCY: C'est ça.
M. FORTIER: ... qui va être suffisant, alors que si vous
hospitalisez un patient pendant quatre jours, là il rentre dans toute la
gamme d'examens habituels.
M. MARLER: Je soulève la question tout simplement parce que je
sais qu'il y a des cliniques externes aux hôpitaux de Montréal qui
sont déjà débordées et en dépit du fait
qu'il y a un petit honoraire à payer, et je me demande si, en effet, on
instaure un système d'assuran- ce-maladie si l'inondation ne sera pas
encore plus complète qu'elle l'est actuellement. Evidemment, c'est une
question d'opinion de savoir quel sera l'effet du plan mais c'est un facteur
dont il faudra tenir compte.
M. MORENCY: D'ailleurs il est difficile à déterminer
l'augmentation que ça pourrait produire immédiatement, il y en
aura une immédiate mais je pense qu'à la longue, ça va
probablement s'atténuer et ça aura pour effet, comme le disait le
Dr. Fortier, de diminuer le nombre d'hospitalisations. Est-ce qu'il y a
d'autres questions sur l'assurance-hospitalisation?
M. VAILLANCOURT: Ce qui veut dire que ça diminuerait
l'assurance-hospitalisation, ça réduirait les montants que
ça coûte à l'assurance-hospitalisation.
M. MORENCY: Bien voici, il faut faire attention. Tous les coûts
augmentent alors ça va probablement augmenter quand même le
coût de l'assurance-hospitalisation comme tous les autres, va
probablement augmenter le coût des salaires, le coût du
matériel et tout! Mais ce qu'on veut dire c'est que probablement les
gens iront peut-être moins à l'hôpital, ou tout au moins,
ils resteront moins longtemps. Et à ce moment-là, je pense, c'est
extrêmement profitable que si au lieu d'avoir disons une moyenne de
séjour de douze jours, vous baissez votre moyenne à dix jours,
ça veut dire à ce moment-là que vous allez pouvoir
hospitaliser plus de gens, plus de gens qui ont besoin de services qui vont
pouvoir les avoir et à ce moment-là ça veut dire que dans
certains cas, par exemple, où vous avez des demandes d'agrandissement,
bien vous pourrez peut-être retarder les agrandissements, retarder les
investissements considérables parce que vous aurez des plus grandes
disponibilités de lits. Parce qu'en somme le problème de
l'hôpital c'est ça, c'est d'avoir une rotation, évidemment
en prenant soin le plus possible des patients, c'est de prévenir, je
pense,la santé publique, mais après ça, on doit se placer
sur un aspect pratique, c'est d'avoir le plus grand nombre possible de patients
dans un lit, c'est ça, en définitive, alors c'est ça qu'on
atteindrait d'une façon indirecte, si vous voulez, mais je pense que
c'est un moyen sûr de l'atteindre.
M. FORTIER: D'ailleurs, il y a beaucoup de gens qu'on soigne
actuellement dans les hôpitaux qui pourraient peut-être, avec un
ser-
vice semblable, être traités à domicile!
UNE VOIX: Il y en a beaucoup qui n'auraient pas besoin de soins!
M. MARLER: Mais Je pense qu'il y a une tentation tout à fait
naturelle à un médecin qui est très sympathique de mettre
son patient dans un lit d'hôpital pour faire payer ainsi par la province
tous les frais pour les radiographies plutôt que de l'envoyer à la
clinique où il est obligé de les payer entièrement.
M. MORENCY: C'est ça. Maintenant, dans la loi évidemment
on dit qu'il doit y avoir...
M. MARLER: C'est naturel!
M. MORENCY: La question il doit y avoir nécessité
médicale pour une hospitalisation. Alors ça veut dire, en fait,
que par exemple une personne désirait un check-up ne devrait pas
être hospitalisé aux frais de la province, mais on sait
très bien...
M. MARLER: Ce n'est pas nécessairement un « check-up
» mais c'est la question du médecin qui est un peu...
M. MORENCY: Je le donne à titre d'exemple, mais on sait qu'il y
en a beaucoup.
M. FORTIER: On pourrait en faire un principe.
M. MORENCY: C'est ça.
M. VAILLANCOURT: Mais actuellement est-ce que
l'assurance-hospitalisation paie pour un « check-up »?
M. MORENCY: Bien voici, théoriquement non, mais en fait, oui,
parce que ce qui arrive c'est que le médecin admet son patient sous un
diagnostic quelconque et on sait très bien qu'une personne qui va
à l'hôpital, bien ils finissent toujours par lui trouver quelque
chose, même si c'est pas grand chose, ils lui trouvent toujours quelque
chose.
M. FORTIER: Mais à la fin de tout ça, parce qu'il faut
tout de même envisager la question d'une façon très
sérieuse. Personnellement, je suis convaincu, je pratique dans un centre
rural, que le jour où, mettons que les soins médicaux seront
payés, les autres médecins vont probablement dire la même
chose, je suis convaincu qu'il y aura moins de patients qui seront
hospitalisés et si on a quelques services externes, à la clinique
externe, qui sont donnés on sauvera certainement
énormément de jours d'hospitalisation.
M. MORENCY: D'accord.
M. RENAUD: C'est normal, je crois.
M. VAILLANCOURT: Oui parce qu'actuellement j'ai remarqué que
plusieurs allaient à l'hôpital pour un check-up et ils le
rentraient sur un diagnostic quelconque puis ça passait et
c'était payé par l'assurance-hospitalisation.
M. BERTRAND: Pourquoi être accepté sans le consentement,
sans le médecin!
M. FORTIER: Oui mais seulement voici. Il ne faut pas non plus penser que
les médecins les admettent seulement pour un check-up parce que bien des
fois par exemple, vous allez avoir quelqu'un qui a des douleurs à
l'estomac, on va l'admettre et on va trouver quelque chose aussi. On a
peut-être raison aussi.
M. BERTRAND: Pour des douleurs intestinales il fait des ulcères
probablement que l'hôpital...
M. VAILLANCOURT: S'ils admettent un gars qui se décide d'aller
passer un check-up, bien c'est parce qu'il a un bobo en quelque part!
M. LE PRESIDENT: Est-ce tout pour les questions sur
l'assurance-hospitalisation?
M. RENAUD: Il pourrait avoir son check-up sans aller à
l'hôpital.
M. LE PRESIDENT: M. Morency.
M. MORENCY: Alors, nous avons évidemment aussi
énuméré d'autres régimes qui ont un
caractère tout à fait fragmentaire. Vous avez par exemple les
Accidents du travail, tout le monde connaît la Commission des accidents
du travail, alors là encore je me demande si c'est nécessaire de
lire le texte, je ne crois pas que ce soit nécessaire. La Commission des
accidents du travail et puis vous avez évidemment l'Assistance publique,
et nous aurons sous peu le régime pour les assistés sociaux. Et
enfin vous avez le gouvernement fédéral qui lui, par certaines
mesures protège, moins de 1% de la population. Vous avez les Indiens,
les Esquimaux, vous avez les membres des Forces armées, la Gendarmerie
royale et les Anciens combattants,
et cela constitue ce qui existe dans la province actuellement au point
de vue régimes publics de soins.
M. MARLER: M. Morency, je sais que c'est le gouvernement qui s'occupe en
grande partie, de la tuberculose et aussi des maladies mentales. Mais, quelle
est la situation dans les autres provinces où on a instauré un
système d'assurance-maladie? Est-ce que la tuberculose est comprise
comme maladie assurée, si vous voulez!
M. MORENCY: Oui.
M. MARLER: Et pour la maladie mentale aussi.
M. MORENCY: Oui, pour la maladie mentale aussi.
M. MARLER: On peut toujours tenir compte de la dépense faite par
le gouvernement dans ces domaines-là, n'est-ce pas?
M. MORENCY: Evidemment, pour ces deux maladies-là vous pensez
probablement à l'assurance-hospitalisation mais c'est pas encore
réglé.
M. RENAUD: Comme la maladie mentale c'est payé à 100% par
le gouvernement.
M. MORENCY: Non, il n'est pas exact de dire que c'est payé
à 100%, le gouvernement paie la totalité du coût des soins
de santé nécessaires aux personnes indigentes. Les personnes qui
ne sont pas indigentes ne paient peut-être pas la totalité mais
paient au moins une partie du coût de l'hospitalisation. Il y en a qui
paient la totalité, il y en a d'autres qui paient une partie et les
personnes indigentes, évidemment, le gouvernement paie la
totalité.
M. RENAUD: C'est la même chose pour les tuberculeux, n'est-ce
pas?
M. COITEUX: Je pense que c'est à 100% ça. M. BERTRAND: Le
sanatorium à 100%.
M. MORENCY: Mais lorsqu'on parle des tuberculeux, ce sont les gens
hospitalisés, les tuberculeux et les malades mentaux.
M. RENAUD: Lorsqu'on parle de gens hospitalisés qui sont
entrés dans un sanatorium, est-ce que le prix n'est pas payé par
le gouvernement?
M. MORENCY: Sur la partie sanatorium, je ne voudrais pas faire
d'affirmation, je pourrai vérifier et vous le laisser savoir, mais sur
la partie des malades mentaux, je suis certain que ce sont seulement les
malades indigents pour qui le gouvernement paie en totalité. Les autres
évidemment pourraient payer seulement une partie, c'est possible, parce
qu'il y a différentes catégories, mais il y en a qui paient.
M. MARLER: Les comptes publics démontrent qu'il y a une
espèce de contribution faite par les patients privés qui se
chiffre si je me rappelle bien autour de $2 millions où $2 1/2 millions
sur un total qui est beaucoup plus considérable.
M. RENAUD: Est-ce qu'il serait possible de connaître la proportion
qui est payée par le gouvernement, pour les malades mentaux et pour les
tuberculeux, si vous pouviez nous fournir...
M. LE PRESIDENT: Et M. Morency, si je comprends bien la situation, c'est
plutôt l'hospitalisation qui est visée dans les deux
budgets...
M. MORENCY: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: ... il ne s'agit pas des centres médicaux?
M. MORENCY: Bien voici, il y en a un certain nombre, par exemple, pour
les malades mentaux, les psychiatres, par exemple, qui travaillent dans les
hôpitaux mentaux sont rémunérés par l'hôpital
alors à ce moment-là évidemment ça comprend une
partie de soins.
Alors s'il n'y a pas d'autres questions, on peut terminer les deux
volumes au chapitre 3 à Organismes bénévoles.
Comme vous le savez, il y a de très nombreux organismes
bénévoles au Canada et, en particulier, dans la province.
Maintenant à la page 34 au deuxième paragraphe, on parle des
quelques initiatives qui seront toujours nécessaires et il ne faudrait
pas croire que l'avènement d'un régime de soins si complet
soit-il puisse en éliminer la nécessité. En fait ces
organismes on parle des organismes bénévoles
évidemment continueront à rendre des services essentiels;
et un peu plus bas, si l'on s'en rapporte à l'expérience qu'ont
connue d'autres pays, on s'aperçoit que la création d'un
régime public d'assurés ne diminue pas le rôle de
l'initiative bénévole bien qu'elle puisse le modifier. La
variété et la faculté d'adaption de ces organismes leur
donnent une souplesse et
constituent une de leurs caractéristiques importantes.
Je pense qu'il ne faut pas oublier que tout de même les organismes
très nombreux, à caractère bénévole, qui
rendent de très grands services, je pense bien que même s'il y a
un régime, il ne faut pas s'imaginer que le besoin va disparaître
au complet.
M. RENAUD: Il faudrait les conserver.
M. MORENCY: Absolument.
M. RENAUD: ... sur une base de charité.
M. MORENCY: Alors messieurs, il n'y a pas d'autres questions? Cela
termine le volume no 2. On pourrait peut-être passer au volume no 3.
M. LE PRESIDENT: Avez-vous des questions à poser pour le volume
no 2?
Je demanderais à M. Jacques Casgrain de donner un sommaire du
volume no 3: Aspects constitutionnels, Relations
fédérales-provinciales.
M. CASGRAIN: M. le Président, il serait quand même
prétentieux de la part du comité de vouloir donner un cours de
droit constitutionnel à un comité qui compte des experts en droit
constitutionnel parmi ses membres. Mais nous avons cru, en saine logique,
après avoir comme vous l'avez entendu cet après-midi
proposé une définition de la sécurité sociale et
démontré, avec succès je crois, que l'assurance-maladie
constituait une forme particulière bien déterminée de la
sécurité sociale, nous avons cru, pour persister dans notre
logique, qu'il convenait de situer, très sommairement évidemment
et puis surtout brièvement, la sécurité sociale et
l'aspect assurance-maladie, la sécurité sociale dans son cadre
constitutionnel. Alors inutile de dire, je pense bien, qu'en 1867 quand L'Acte
de l'Amérique du Nord britannique a été adopté, les
Pères de la Confédération n'entrevoyaient sûrement
pas les dimensions gigantesques que prendrait la sécurité sociale
au pays, dans les provinces et surtout les proportions considérables des
budgets des provinces et du gouvernement fédéral que la
sécurité sociale requerrait.
On ne trouve donc aucune mention de la sécurité sociale
comme thème dans l'Acte de 1867. On trouve une vague allusion à
l'hospitalisation, si je puis dire, au paragraphe 11, en effet, on constate
qu'il est question d'asiles, d'hospices, d'hôpitaux et de refuges dans
les limites de la province. Evidemment à l'époque où la
Constitution fut adoptée, la sécurité sociale prenait
plutôt une forme personnelle et communautaire et c'était les
communautés religieuses qui s'occupaient du soin des indigents, des
malades, des vieillards et c'était aussi la famille qui assumait une
responsabilité à aller voir des membres de cette
famille-là qui pouvait être éprouvée par les choses
que j'ai dites.
On trouve, évidemment, à l'article 92, paragraphe 13, qui
est bien formel et puis on voit bien que la propriété et les
droits civils relèvent de la juridiction provinciale. A venir
jusqu'à l'après-première guerre, si je peux dire, les
mesures de sécurité sociale, dans la province et au pays en
général, étaient pour le moins clairsemées. On a vu
après la première guerre l'avènement des pensions de
vieillesse vers 1927 mais ce qui s'est produit, c'est plutôt qu'en 1935
le Parlement fédéral a adopté 4 grandes mesures sociales:
la Loi de la limitation des heures de travail, la Loi du repos hebdomadaire, la
Loi du salaire minimum et la Loi de l'assurance-chômage. Les trois
premières de ces lois ont été
référées à la cour Suprême et les juges de la
cour Suprême se sont partagés également sur leur
constitutionnalité et le Conseil privé, appelé à se
prononcer, a déclaré que ces trois lois-là étaient
inconstitutionnelles. Alors en ce qui concerne la Loi de
l'assurance-chômage, là également, référence
à la cour Suprême mais la majorité de la cour Suprême
a déclaré cette loi-là inconstitutionnelle et le Conseil
privé a confirmé la décision de la cour Suprême.
Par la suite s'est présenté, au début de la
deuxième guerre, un projet de loi d'assurance-chômage et à
cette occasion, la Constitution a été amendée dans des
circonstances assez particulières pour prévoir à
l'article, au paragraphe 2 bis de l'article 91, la juridiction
fédérale en matière d'assurance-chômage. Alors pour
ce qui concerne les pensions de vieillesse jusqu'à 1951, à partir
de 1936 jusqu'à 1951, on avait des pensions de vieillesse contributoires
pour les vieillards de 70 ans et plus, mais plus j'avance en âge moins je
trouve que l'on est vieillard à 70 ans, à tout
événement en 1951 une nouvelle loi des pensions de vieillesse a
été adoptée par la Législature de Québec et
à cette occasion-là, dans cette loi-là de 1951, on a
introduit un article, autorisant un amendement à la Constitution. C'est
devenu l'article 94-A de la Constitution reconnaissant la juridiction
fédérale en matière de pensions de vieillesse mais en
ayant bien soin de souligner que toute législation
fédérale relative aux pensions de vieillesse ne devait pas porter
atteinte aux lé-
gislations présentes et futures des provinces dans ce domaine.
Alors je pense bien quand on sait que de ce moment-là il a
été pas mal accepté, reconnu et admis, que la
sécurité sociale, sous toutes ses formes, constituait une
juridiction provinciale. D'ailleurs si on se rapporte au rapport de la
commission Réal Sirois, on voit en toutes lettres dans ce rapport qu'en
matière de sécurité sociale, la juridiction provinciale
est la règle et la juridiction fédérale, l'exception. La
commission Tremblay, évidemment, a souligné également
qu'en matière de sécurité sociale l'initiative de l'avenir
des provinces et puis la commission Hall, quand elle a étudié
l'assurance-maladie a eu bien soin de mentionner que la compétence
première en matière d'assurance-maladie relevait des provinces.
Le problème qui s'est toujours posé, qui est en voie de solution
graduelle d'une manière satisfaisante, c'est que les revenus se trouvant
à Ottawa et puis les responsabilités se trouvaient à
Québec en matière de sécurité sociale. On a pu
constater au cours des récentes conférences
fédérales-provinciales, particulièrement la
conférence de juillet 1965, que dans les propositions
fédérales concernant l'assurance-maladie, il y a une clause
spécifique qui exclut le précédent que l'assurance-maladie
est la responsabilité entière des provinces. On a
déjà remarqué que dans le domaine de
l'assurance-hospitalisation, le Québec se prévalant de son droit
d'option, a signifié son intention de se retirer de ce
programme-là à frais partagés et également à
la conférence de juillet 1965, il a été dit assez
clairement par le porte-parole de la province, l'honorable premier ministre,
que si l'assurance-maladie, si un régime public d'assurance maladie
devait être installé dans Québec, que là encore
Québec se proposait par la formule du recours à des voies de
crédit non seulement d'impôt sur le revenu mais possiblement sur
les profits des compagnies d'obtenir une compensation fiscale inconditionnelle
de façon à ce que dans le domaine de la sécurité
sociale, Québec, selon l'expression classique actuelle, soit
Maître chez nous.
M. LE PRESIDENT: Avez-vous des questions, messieurs?
Je demanderais à M. Castonguay de nous parler des relations
fédérales-provinciales dans le domaine de la santé.
M. CASTONGUAY: Dans la question des relations
fédérales-provinciales, nous n'avons pas voulu faire un
historique de cette question, étant donné que
l'intérêt aurait été plutôt académique.
Alors nous sommes partis uniquement de la question d'assurance-hospitalisation
pour indiquer, tel que M. Casgrain l'a indiqué, qu'en 1965 la province a
invoqué son droit d'option et que c'était la première
étape d'une évolution qui doit aboutir, en ce qui a trait
à ce régime, en 1970 à la substitution d'une compensation
fiscale définitive à l'aide financière
fédérale en vertu des dispositions du programme conjoint en
question. Nous n'avons pas cru que pour ce qui précédait,
l'assurance-hospitalisation ou la formule d'option en ce qui a trait à
l'assurance-hospitalisation, qu'il y aurait eu tellement intérêt
à relater les différents chapitres des relations
fédérales ou provinciales dans ce domaine.
En ce qui a trait maintenant à un aspect un peu plus particulier
des relations fédérales-provinciales, nous avons pensé
qu'il était utile de souligner que le comité d'étude sur
l'assistance publique, qui a présenté un rapport au gouvernement
du Québec, le rapport Boucher en 1963, mentionnait que l'analyse de
l'état de santé de la population avait amené ce
comité à recommander au gouvernement de conclure avec la
profession médicale des ententes en vue d'assurer aux personnes dans le
besoin les soins médicaux nécessaires. Alors on peut, je crois,
tracer entre la recommandation de ce comité-là et l'annonce par
le gouvernement il y a quelques mois d'une loi sur l'assistance
médicale, on peut faire le lien entre les deux; et où ça
se relie cette question-là aux relations
fédérales-provinciales, c'est qu'en 1965, le gouvernement
fédéral a annoncé son intention d'élargir son aide
financière dans le cadre des lois d'assistance pour inclure les divers
soins médicaux, médicaments, soins dentaires, etc., dont les
frais pourraient être payés en ce qui a trait aux assistés
sociaux. Cet élargissement des lois du fédéral peut
possiblement être relié à une recommandation d'un
comité du Québec et le gouvernement a annoncé son
intention de donner suite à cette recommandation du Comité
d'étude sur l'assistance publique.
Maintenant, en 1961, lorsque l'assurance-hospitalisation a couvert
l'ensemble des provinces, le gouvernement fédéral a formé
la Commission royale d'enquête sur les services de santé, la
commission Hall, qui a présenté son rapport, trois ans plus tard,
en 1964 et qui affirme dans la Charte de santé des canadiens qui est
proposée par la commission, l'article 4 de cette charte, la
compétence première des gouvernements provinciaux en
matière de santé. Alors les propositions du gouvernement
fédéral, en ce qui a trait à l'assurance-maladie, prennent
leur origine dans le rapport de la Commission royale d'enquête sur les
services de santé et, tel que déjà mentionné, la
commis-
sion recommandait que l'administration des régimes et les
modalités des régimes soient confiées aux provinces. A
partir de cette décision du gouvernement, qui a été
annoncée à la conférence
fédérale-provinciale des premiers ministres de juillet 1965, la
conférence qui a suivi en septembre, conférence
fédérale-provinciale des ministres de la Santé, une en
novembre, conférence interprovinciale des ministres de la Santé
uniquement, et finalement conférence fédérale-provinciale
en janvier 1966, ce sont toutes des conférences qui ont
été une suite de cette conférence de juillet 1965.
Nous avons reproduit ici, étant donné l'importance de la
conférence fédérale-provinciale de juillet 1965, la
déclaration intégrale du premier ministre de la province en ce
qui a trait à l'assurance-santé. Nous n'avons pas voulu la
commenter, ce n'était pas notre rôle, nous n'avons pas non plus
voulu l'analyser, ce n'était pas non plus notre rôle. Alors est-ce
que vous croyez, M. le Président, qu'il y a lieu de lire cette
déclaration du premier ministre de la province?
Maintenant le communiqué de presse. Le communiqué de
presse qui a été lu à l'issue de la conférence du
premier ministre, cette conférence de juillet 1965, donne les grandes
lignes des propositions fédérales relatives à
l'assurance-maladie. Si vous le permettez, je vais lire la partie du
communiqué qui est laplus intéressante et qui définit en
fait les propositions. Tout ce qui a suivi par la suite n'a servi qu'à
clarifier les propositions du fédéral.
Le premier ministre du Canada a souligné à la
conférence les principes de base dont le gouvernement
fédéral entend s'inspirer pour collaborer avec les gouvernements
provinciaux en vue de mettre tous les canadiens en mesure de
bénéficier de l'assurance-santé. Le régime
prévu comprendrait au départ tous les services assurés par
les médecins et s'appliquerait universellement. Les gouvernements
provinciaux en assumeraient la gestion et les services seraient assurés
à tous les bénéficiaires se déplaçant d'une
province à l'autre. Si les provinces acceptaient cette proposition, le
gouvernement fédéral consentirait à assumer 50% du
coût national desprogrammes d'assurance-santé. On a aussi
étudié la possibilité de créer une caisse
fédérale d'aide à la santé quipermettrait
d'intensifier les travaux de recherches et de formation essentiels au
régime de l'assurance-santé de la plus haute qualité. Il a
été décidé que les ministres de la Santé se
réuniraient au début du mois de septembre en vue de
définir plus précisément la forme à donner à
ce projet d'assurance-santé. Les provinces ont proposé que les
dispositions soient prises relativement aux soins hospitaliers à donner
aux malades mentaux et aux tuberculeux dans les mêmes conditions
financières que celles qui valent pour les autres services hospitaliers.
Le gouvernement fédéral a convenu de prendre cette proposition en
considération en même temps que d'autres questions d'ordre
financier. La conférence a examiné le régime d'assistance
publique du Canada en vertu duquel le gouvernement fédéral devra
partager le coût d'un programme complet d'assistance publique
fondé sur les besoins des citoyens y compris des dispositions
provisoires quant aux soins médicaux à assurer aux
bénéficiaires des prestations de bien-être. Alors, en
résumé, le gouvernement fédéral posait quatre
conditions ou quatre critères à la subvention de son aide
financière. Premièrement, que le régime établi
couvre tous les soins médicaux et chirurgicaux; deuxièmement, que
son application soit universelle; troisièmement, qu'il soit
administré par les provinces; quatrièmement, que la protection ou
encore que les avantages soient transférables. Et, en plus, le
gouvernement fédéral proposait la formation d'une caisse d'aide
à la santé. A la conférence de septembre 1965,
conférence fédérale-provinciale, les quatre
critères proposés par le gouvernement fédéral ont
été discutés afin de pouvroir apporter des
précisions et je crois que la principale des précisions qui a
été apportée est indiquée au milieu de la page 14
où il est dit d'après les discussions qui ont eu lieu entre les
fonctionnaires et les autres, là, c'est le ministre de la santé
nationale qui parle: Il semble exister un malentendu voulant que notre offre se
limite à $14, rien de plus. A la vérité le montant de $14
représentait la meilleure estimation que nous avons eue à notre
disposition lors de la réunion de juillet. Ceux d'entre vous qui
étaient présents à la réunion se souviendront que
même ce chiffre a été mis en doute. Je tiens à
préciser que nous avons l'intention de contribuer la moitié du
coût national par tête des régimes
d'assurance-médicale sur la base des meilleures estimations disponibles
lors de leur mise en vigueur. Si vous avez encore quelques craintes à ce
sujet, permettez-moi d'ajouter que s'il devient évident que ces
premières estimations ont besoin d'être revisées, nous les
modifierons de façon rétroactive au besoin.
M. CASTONGUAY: Alors, il est précisé clairement que le
gouvernement fédéral s'engageait à verser la moitié
de la moyenne du coût national per capita à une province qui
établissait un régime rencontrant les normes données. Il a
été aussi, de plus, établi au cours de cette
conférence,
et cela n'apparaît pas dans la déclaration officielle
d'ouverture du ministre national, ni dans le communiqué qui a
été émis au terme de la conférence que, par
application universelle, le gouvernement fédéral serait satisfait
d'un régime qui couvrirait, au départ, environ 90% de la
population. Il y a eu une petite marge de latitude accordée sur cette
deuxième condition et, finalement, malgré que ce n'est jamais
ressorti bien clairement, de façon définitive, il semblerait que
les régimes a commandite médicale, sans but lucratif, pourraient
être considérés comme étant des régimes
administrés par les provinces, en autant que les provinces seraient
représentées dans l'administration de ces régimes et
possiblement aussi soumises à l'audition de l'auditeur des provinces.
Les provinces comme l'Alberta, par exemple, l'Ontario, le Manitoba, etc., ont
exprimé beaucoup de réserves sur l'obligation imposée par
le gouvernement fédéral à l'effet que l'administration
devait être publique dans son sens le plus strict. On a fait valoir
auprès du gouvernement fédéral, dans ces provinces, qu'un
régime établi par les médecins, sans but lucratif, si le
gouvernement y était représenté dans l'administration, que
l'auditeur était représenté, que ce serait possiblement
beaucoup plus satisfaisant pour les citoyens de ces provinces qui y avaient
adhéré volontairement, plutôt que de tout défaire et
recommencer à neuf. Alors, il semblerait que le gouvernement
fédéral accepte cette demande des provinces, mais cela n'a jamais
été établi clairement, à notre connaissance.
M. MARLER: Mais, le « sans but lucratif », c'est
l'essentiel, si j'ai bien compris?
M. CASTONGUAY: Oui.
M. TREPANIER: M. Castonguay, la proposition fédérale
n'exige pas la contribution de la population.
M. CASTONGUAY: Sur la question du mode de financement de la partie
à la charge d'une province, le gouvernement fédéral n'a
pas posé de condition. En fait, ce que le gouvernement
fédéral a voulu faire, c'est d'établir quatre grandes
normes, il n'est pas entré dans les modalités. La
première, l'universalité. Et leur but est évident, c'est
d'établir des standards dans un domaine comme celui-là, pour
avoir une certaine uniformité à travers les provinces. Alors,
l'universalité, la couverture complète des soins médicaux
et chirurgicaux, la transférabilité, si un citoyen
déménage d'une province à l'autre et l'administration,
étant donné la présence de fonds publics, avec certaines
garanties quant à ces fonds.
M. VAILLANCOURT: Est-ce que cela inclut les médicaments
aussi?
M. CASTONGUAY: Le gouvernement fédéral ne s'est pas
engagé à couvrir autre chose que la moitié du coût,
la moyenne nationale du coût des soins médicaux, mais il a dit que
selon l'expérience et lorsque le désir deviendrait évident
à travers le pays que tel service soit couvert, que là, sa
contribution pourrait éventuellement être augmentée pour
couvrir une part du coût des médicaments et des autres soins.
M. VAILLANCOURT: Maintenant, la caisse de dépôt; si le
gouvernement fédéral paie 50% des frais de
l'assurance-santé, à quoi va servir la caisse de
dépôt? Je crois que c'est un montant de $500 millions?
M. CASTONGUAY: Ah! là, je m'excuse, la deuxième partie de
la proposition était la caisse d'aide à la santé.
Justement, à la conférence de juillet, le gouvernement
fédéral a fait cette proposition d'établir une caisse
d'aide à la santé. A la conférence de septembre, le
premier ministre a fait une déclaration et il y a peut-être lieu
que j'en lise certains extraits qui apparaissent à la page 15,
étant donné que ça précise le rôle de cette
caisse de la santé, et après cela on verra, par une
conférence subséquente, ce qu'il en est advenu.
A la page 15, le premier ministre du Canada a fait la déclaration
suivante: « Lors de la conférence
fédérale-provinciale de juillet dernier, j'ai annoncé que
le gouvernement se proposait de créer une caisse d'aide à la
santé qui supplémenterait ces propositions
d'assurance-médicale. Cette caisse aiderait à la construction et
à l'aménagement d'installation de recherches et à la
formation sanitaire. Le gouvernement fédéral aiderait ainsi les
provinces à améliorer la qualité des soins médicaux
dont disposent les Canadiens. Après avoir écouté les
points de vue des provinces a la conférence de juillet, le gouvernement
fédéral a songé à fixer l'importance de la caisse
». « Puisque le ministre de la Santé nationale et du
Bien-Etre social rencontre aujourd'hui et demain les ministres provinciaux de
la Santé, afin d'élucider ces questions, j'ai le plaisir de vous
annoncer que le gouvernement a décidé d'affecter $500 millions
à cette caisse. Nous proposons que la caisse en question entre en
vigueur le 1er janvier prochain, puisqu'il faudra de longs préparatifs
pour le genre de
projets qu'elle aidera à financer. Les ressources de la caisse
seront disponibles pendant quinze ans. C'est dire qu'environ $33 millions, en
moyenne, seront disponibles chaque année aux fins du régime. Le
but fondamental de cette caisse est d'aider à former le personnel
spécialisé plus nombreux qu'exigeront les services prévus
par l'assurance médicale. Grâce à elle des subventions
fédérales importantes seront disponibles pour la construction, la
rénovation et l'aménagement d'établissements de recherche,
d'hôpitaux d'enseignement, d'écoles de médecine et
d'instituts de formation pour le nouveau personnel sanitaire. » «
Les subventions provenant de la caisse ne pourront pas servir à
défrayer le coût d'administration de ces établissements
». Alors je crois que c'est l'essenteil...
M. VAILLANCOURT: Cela répond aux questions.
M. CASTONGUAY: ... de ce qui a été annoncé en
septembre. Maintenant en septembre, la conférence des ministres de la
Santé a formé un comité, dont on donne le mandat et la
composition aux pages 16 et 17, pour étudier justement les
modalités de la Caisse d'aide à la santé. Il y a une note
au bas de la page 17; « à la demande du Québec, il fut
convenu que ce comité ferait rapport, non pas au ministre
fédéral de la Santé comme tel, mais bien plutôt
à ce dernier en sa qualité de Président de la
conférence des ministres de la Santé. Il s'agissait là
d'une distinction importante indiquant clairement que les ministres provinciaux
de la Santé ne reconnaissaient pas l'autorité du ministre
fédéral de la Santé pour recevoir un rapport de ses
collègues provinciaux. »
Alors ce comité s'est réuni les 21 et 22 octobre 1965 et
ils ont fait rapport. Ce rapport, au moment où notre rapport a
été écrit, n'avait pas encore été remis
à la conférence plénière. Cela s'est fait à
la fin de janvier et j'ai ici le communiqué final de cette
conférence dont je puis vous donner lecture des extraits les plus
importants et aussi vous faire tirer des photocopies. Je l'ai eu cet
après-midi. Maintenant, en novembre 1965, toutefois, il y a eu une
conférence des ministres de la Santé sur la question de la
transférabilité. Cette conférence a été
tenue à Winnipeg et, en résumé, ce qui est indiqué
à la page 18: on dit que les ministres ont accepté le principe de
la transférabilité entre les provinces et ont défini
à cette fin une protection de base qui constituerait en quelque sorte un
dénominateur commun aux fins de la transférabilité. Alors,
pour la transférabilité, à cette conférence de
Winnipeg, il a été convenu que la première des choses
à faire dans un régime, soit un régime facultatif ou un
régime du type d'assurance sociale, pour ne pas priver les citoyens qui
déménagent d'une province à l'autre de leur protection,
qu'il y avait lieu au moins d'établir une certaine protection minimum,
de telle sorte que la protection puisse se marier d'une province à
l'autre raisonnablement bien. Toutes les provinces ont accepté le
principe de la transférabilité à ce moment-là.
En plus d'adopter une résolution recommandant au gouvernement
fédéral d'inclure les hôpitaux pour malades mentaux et pour
tuberculeux dans le régime d'hospitalisation, tout comme en juillet la
demande avait été faite au gouvernement fédéral
d'inclure ces deux services dans l'assurance hospitalisation, cela a
été refait de nouveau en novembre. Les ministres présents
à la conférence ont noté que leurs discussions
n'engageaient pas leurs gouvernements respectifs à participer au
régime fédéral. C'était un engagement de principe
sur la transférabilité.
M. CLOUTIER: ... le seul principe de la transférabilité
qu'il y a eu accord jusqu'à maintenant.
M. CASTONGUAY: A ce jour il semble bien que oui. Maintenant en janvier
1966, il y a eu une nouvelle conférence
fédérale-provinciale tenue à Ottawa, le 31 janvier, le 1er
février 1966 et au terme de cette conférence, le
communiqué suivant a été émis. Il y a une
introduction de nature générale et après cela on dit ce
qui suit, et si vous me le permettez, je vais lire le texte; il est assez bref.
« In reviewing the report, the ministers accepted the principle of
special assistance... là on parle de la Caisse d'aide à la
santé... to the four Atlantic provinces, in the amount of $25 million
dollars. » Alors pour la Caisse d'aide à la santé, sur le
$500 millions, il a été décidé en premier lieu de
prendre une première tranche de $25 millions et de l'accorder au cours
des années aux provinces de l'Atlantique. Quant aux $375 millions qui
restaient, on dit que la conférence « also accepted the principle
of per capita allocation of a major portion of the fund. » Alors sur le
$375 millions il y a... sur le $475 millions, je m'excuse, il y en a une partie
importante qui n'a pas encore, qui n'avait pas encore été
déterminée. Certaines provinces disaient que cela devait
être plus, d'autres, moins, qui devrait être alloué aux
provinces sur une base per capita. Et on dit « the matter of allocating
the remainder of the fund was left for further study ». La raison de la
balance qui pourra être allouée sur une base
autre que per capita, c'est pour tenir compte de certaines installations
hospitalières, par exemple, l'Institut neurologique de Montréal
qui, à toutes fins pratiques, est là pour l'utilité
pratiquement de la moitié du pays.
Si dans certains endroits où il y a une concentration de
médecins de haute compétence, où il se fait de la
recherche sur une plus grande échelle et que tout le pays en
bénéficie, il ne serait pas juste dans l'allocation d'une telle
caisse qu'elle soit allouée entièrement sur une base per capita
étant donné que les provinces en question où ces
institutions très particulières, très
spécialisées sont localisées, ces provinces-là
devraient supporter des coûts qui sont très élevés
alors que l'ensemble ou une grande partie du pays en
bénéficie.
Très bientôt, le gouvernement fédéral qui
devra naturellement légiférer sur cette caisse, annoncera sa
décision quant à la partie qu'il croit qui devrait être
allouée per capita et l'autre partie sur une autre base. Maintenant pour
l'allocation de ces fonds, il a été décidé qu'un
comité, un conseil consultatif serait formé, et voici ce qu'il en
est dit; « in considering the position of the advisory commitee, the
ministers decided that a body of this kind should consist of representatives of
federal and provincial ministers of Health. The advisory committee would be
empowered to call upon professional bodies for advice on technical matters.
» Différentes associations comme l'Association médicale
canadienne, avaient demandé d'être représentées au
conseil consultatif. La conférence, à l'unanimité a
décidé que le conseil consultatif a décidé de
recommander au gouvernement fédéral que le conseil consultatif
soit composé uniquement de représentants des ministres de la
Santé étant donné qu'il n'était question que de
fonds publics et, par contre, de donner le pouvoir au conseil consultatif de
former des comités pour étudier certains aspects plus
particuliers, par exemple la recherche, la formation, etc... « The
ministers aggreed with the recommendations of the ad hoc technical committee on
the terms of reference of the fund and the functions of the advisory committee.
» Et là le point important « as previously aggreed, it was
confirmed that request for assistance would come from the provincial
governments. » Personne ne pourra s'adresser directement à la
Caisse d'aide à la santé. Les demandes devront passer en premier
lieu par les gouvernements des provinces et être approuvées
premièrement par les gouvernements des provinces; deuxièmement
« these requests would then be dealt with, according to the principles
recommended by the ad hoc committee. »
Alors en ce qui a trait à la Caisse d'aide à la
Santé, très bientôt, normalement en fonction de ces
décisions de principe ou de ces recommandations de la conférence
fédérale-provinciale, la législation devrait être
déposée à Ottawa. Il semblait bien que la date du 1er
janvier serait maintenue, c'est-à-dire les projets dont l'étude a
commencé au 1er janvier, par la suite pourront bénéficier
de l'aide de la caisse s'ils sont acceptés par le conseil consultatif et
par les gouvernements provinciaux respectifs.
UNE VOIX: M. Castonguay, cette caisse-là, est-ce que cela va
être un supplément que le gouvernement fédéral
accorde actuellement à la construction d'hôpitaux, je crois qu'il
donne $1,000 par lit...
M. CASTONGUAY: Voici, ce programme arrive pratiquement à
échéance, je crois que c'est en 1967. Il en a donc
été question et voici ce qui est dit: « the Minister of
National Health and Welfare announced the federal government's readiness to
extend the existing hospital construction grants program for an additional
period of two years beyond March 31st 1968 ». Alors le programme est
prolongé du 31 mars 1968 au 31 mars 1970. « The minister of Health
of the province of Quebec indicated that in the case of such extension, his
province may have to consider an alternative fiscal arrangement which would be
defined in the tax structure committee » En définitive, en
conclusion, la fonction de la politique du gouvernement qui a été
annoncée à plusieurs reprises, à ma connaissance du moins,
sur les retraits inconditionnels des programmes de cette nature, le ministre de
la Santé lors de la conférence, s'est objecté à ce
qu'on prolonge un tel programme qui obligeait d'une certaine façon, le
gouvernement à dépenser exactement en fonction des
priorités établies par ces programmes, en dehors de ses propres
décisions.
Alors quelle va être la décision?...
M. RENAUD: En somme c'était de la recherche...
M. CASTONGUAY: ... sur la construction, non des frais d'administration
d'établissement pour la recherche, la formation des effectifs dans les
divers domaines de la santé.
M. LE PRESIDENT: Vous n'avez pas d'autres questions?
M. CASTONGUAY: Il y a le tout dernier paragraphe qu'il est
peut-être bon de lire étant donné qu'entre la
conférence de septembre et
celle de janvier, il y a eu une élection. Alors il est dit ce qui
suit au sujet de l'assurance-santé: « In discussing medical care
insurance, several provinces accepted the federal proposals and indicated their
readiness to commence programs by July 1st 1967.
Certain provinces however were unprepared to make definite commitments
at this time. The Minister of National Health and Welfare again expressed the
adherance of the Federal government to the four principles and its objective to
commence Federal contributions of Provincial Medical Welfare plans on a
nationwide basis by July 1st, 1967. » Alors, dans les provinces qui ont
accepté en principe la proposition du gouvernement
fédéral, il semblerait qu'il y a premièrement la
Saskatchewan qui ne peut que bénéficier de cette aide, le
Nouveau-Brunswick et apparemment l'Ile-du-Prince-Edouard. De toute façon
il y en a six, dont l'Ontario, 1'Alberta, La Colombie-Britannique, la province
de Québec n'avaient pas donné de réponse
définitive, qui n'avaient pas signifié leur intention du
gouvernement fédéral quant à sa proposition pour le 1er
juillet 1967.
M. MARLER: Monsieur Castonguay, vous avez parlé tout à
l'heure des indigents n'est-ce pas, et si j'ai bien compris l'offre du
fédéral, c'est de participer jusqu'à 50% pour les soins
médicaux, les médicaments et les soins dentaires.
M. CASTONGUAY: Tous les soins en fait pour les indigents. Même,
ça pourrait couvrir les soins infirmiers et les soins oculaires.
M. MARLER: Evidemment, cela va plus loin n'est-ce-pas que l'offre
à quatre conditions dont nous venons de parler.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions, messieurs?
M. VAILLANCOURT: Si je comprends bien que le 50% que le gouvernement est
prêt à donner, la balance, l'autre 50% serait
défrayé une partie par la province et une partie par celui qui
veut s'assurer.
M. CASTONGUAY: C'est une décision que vous devrez prendre.
M. VAILLANCOURT: Selon la décision qui sera prise, je crois,
à 100% par la province.
M. CASTONGUAY: Exactement.
M. VAILLANCOURT: Les indemnités seront déterminées
en temps et lieu.
M. CASTONGUAY: Exactement.
M. VAILLANCOURT: Non, mais ce que je veux préciser, moi, c'est
que le fédéral paie 50%, alors il nous reste à
déterminer l'autre 50%.
M. CASTONGUAY: Il faut faire attention, ici, c'est 50% de la moyenne
nationale, alors, il est évident qu'en Ontario, par exemple, les
coûts sont plus élevés et au Québec aussi, que les
coûts de certaines provinces, comme à Terre-Neuve, au
Nouveau-Brunswick...
M. VAILLANCOURT: C'est la moyenne nationale.
M. CASTONGUAY: Dans une province à coût
élevé, la contribution fédérale peut être
inférieure au 50% du coût de cette province. Ici, d'après
les études que nous avons faites, on arriverait approximativement
à peu près au niveau de la moyenne du coût national. C'est
une question qui, advenant l'établissement d'un régime, devrait
être négociée avec les médecins. Le coût exact
sera, jusqu'à un certain point, fonction des résultats de telle
négociation.
M. BLANK: Sur la question que M. Vaillancourt a posée, en
calculant ce 50% on va déduire du coût des primes qui
peut-être seraient versées par des particuliers ou ce 50% vient-il
du montant « gross cost »? C'est ça que je demandais.
M. BRISSON: Autrement dit, supposons qu'on a une prime, mettons pour le
Régime des rentes, si on charge à tant de la personne, est-ce que
le $14 va être versé, déduction faite des primes que nous
recevrons ou sur le coût total?
M. CASTONGUAY: Ah! Sur le coût total. En fait, il va y avoir
nécessairement une comptabilité du coût de tous les
régimes en opération dans les diverses provinces, pour voir le
coût réel des déboursés en prestations, la moyenne
va être faite et après cela sera évaluée sur une
base per capita pour chacune des provinces.
M. RENAUD: Maintenant, est-ce qu'il y aune formule de « opting out
», comme on dit, par laquelle la province paierait directement, par
une compensation dans la taxe actuelle? C'est cela, si je comprends
bien?
M. MARLER: Excepté que la formule d'option ne changerait pas la
convention fédérale. Il s'agirait de l'établir sur une
moyenne nationale et la compensation fiscale serait ajustée en
conséquence, si je comprends bien.
M. CASTONGUAY: Et il n'a pas été dit, sur cette
question-là non plus que « 1'opting out » pour obtenir des
points d'impôt, si l'option était accordée, signifirait
d'autre part l'abandon des quatre conditions.
M. COITEUX (Duplessis): M. Castonguay voudrait que la moyenne
approximative soit d'environ $15 par tête. Disons théoriquement,
ce n'est pas tout à fait cela, mais disons théoriquement
qu'actuellement la population du Québec est de 6 millions, ce qui ferait
dans les environs de $90 millions. Les premiers chiffres qui ont
été publiés dans les journaux dépassaient cela
trois fois.
M. CASTONGUAY: Les $14 dont on a fait mention ici, c'était la
moitié, c'était la contribution du fédéral,...
M. COITEUX (Duplessis): Ah bon!
M. CASTONGUAY: ... alors le coût, en fait, d'après leurs
estimations a dû être de $28. Mais ils ont revisé ces
estimations et ils s'aperçoivent que c'est beaucoup plus près de
$35 maintenant...
M. COITEUX (Duplessis): Ah bon!
M. CASTONGUAY: ... et nous, indépendamment de leurs estimations,
nous étions arrivés à peu près de $35 tel
qu'indiqué à ce moment-là.
M. VAILLANCOURT: Par tête totale.
M. FORTIER: Maintenant pour me renseigner, est-ce que cela comprend tout
les soins médicaux?
M. CASTONGUAY: Seulement.
M. FORTIER: Dentistes, médecins, chirurgiens,
spécialistes, mais pas les médicaments.
M. CASTONGUAY: Ah non! Dans les soins médicaux et chirurgicaux,
c'est-à-dire ceux définis à l'article 44 de la Loi
médicale...
M. FORTIER: Médecins et chirurgiens.
M. CASTONGUAY: Exactement. Cela ne comprend pas les soins dentaires, les
soins oculaires...
M. FORTIER: Ah bon!
M. RENAUD: Si la formule « opting out » peut être
exercée, cela deviendrait un régime strictement provincial pas
nécessairement subordonné aux conditions, aux quatre conditions
que fixe le régime fédéral. Cela ne veut pas dire que cela
ne pourrait pas le comporter quand même, mais cela serait
indépendant, est-ce cela?
M. CASTONGUAY: Il n'a jamais été dit, par le gouvernement
fédéral dans les déclarations que je vous ai lues dans les
communiqués, qu'une équivalence fiscale accordée par le
gouvernement fédéral signifierait qu'à la fois le
gouvernement fédéral n'insisterait plus sur ces quatre
conditions. Je crois qu'à ce jour c'est l'intention du gouvernement
fédéral de continuer d'insister sur ces quatre conditions
même s'il y a équivalence fiscale.
M. RENAUD: Je comprends. Merci.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il des questions messieurs?
M. BRISSON: Tout cela compris, les médicaments, tous les frais
compris, combien cela pourrait-il coûter par tête?
M. CASTONGUAY: Bien, il y a une étude sur cela, je pense que
c'est une question difficile de donner juste le chiffre, vous allez voir, il y
a tellement de qualifications à faire à tout cela. Je peux vous
dire que pour les médicaments et les soins médicaux, nous avons
évalué le coût à $308 millions. Mais encore
là, il faut qualifier ce coût. Tout cela est décrit dans
une des études.
M. VAILLANCOURT: Cela, on va passer là-dessus,
probablement...
M. CASTONGUAY: Demain ou après-demain probablement, je crois.
M. LE PRESIDENT: Est-ce tout?
M. TREPANIER: M. Castonguay, j'insiste et je reviens sur ce qui vient
d'être dit mais dans la proposition fédérale, on mentionne
que
premièrement un régime doit offrir tous les services
offerts par les médecins, ce qui ne comprend pas nécessairement
dentistes et autres.
M. CASTONGUAY: Non.
M. MARLER: ... et, est-ce que je dois comprendre que cela ne comprend
pas les soins oculaires?
M. CASTONGUAY: Exactement. Excusez, sauf ceux donnés par un
ophtalmologiste. L'ophtalmologiste en fait est un médecin au sens...
M. MARLER: Oui c'est cela, à condition qu'il soit un
médecin qui donne des soins.
M. CASTONGUAY: Oui. Mais lorsque vous passez de l'ophtalmologiste
à l'optométriste ou à l'opticien là cela ne serait
plus couvert.
M. VAILLANCOURT: Est-ce que cela couvre les services du chiro?
M. LE PRESIDENT: Messieurs, il resterait la législation dans le
domaine de la santé qui pourrait être exposée par M.
Jacques Morency. Croyez-vous que nous pouvons procéder?
M. MORENCY: M. le Président, ce fut très très
court.
M. LE PRESIDENT: Même en fait, je me demande, je pense qu'il y
aurait probablement, que les membres peuvent le lire. Je ne sais pas s'il y a
des questions. Est-ce que vous voulez peut-être... Selon la loi des
hôpitaux et la loi des trois principales professions, les dentistes, les
médecins et les pharmaciens et quelques lois du ministère de la
Santé. Maintenant je pense bien que cela peut être lu. Ce sont de
très courts résumés. Ceux qui veulent le lire ou s'il y a
des questions, cela évidemment, je laisse cela à votre
discrétion.
M. MARLER: Je crois qu'on peut dispenser M. Morency d'expliquer les lois
que certaines personnes présentes ont dû voter, à un moment
donné.
M. MORENCY: De toute façon, M. le Président, si les
membres les lisent et s'il survient des questions à leur esprit, je
pense que je vais être encore avec le comité quelque temps. Cela
me fera plaisir de tenter d'y répondre à leur convenance.
M. MARLER: Sans préjudice à notre droit de vous interroger
à une autre séance.
M. CLOUTIER: M. le Président, j'aurais une question très
sérieuse à poser. C'est le seul volume où on ne donne pas
la liste des membres du comité de recherche. Est-ce qu'on a voulu garder
l'anonymat, parce qu'il s'agissait des relations
fédérales-provinciales?
M. CASTONGUAY: C'est le premier volume qui a été
envoyé à l'impression, et lorsqu'il est revenu, on s'est dit
qu'il serait bien utile de mettre la liste des membres du groupe de recherche,
alors si quelqu'un veut demander des renseignements, il saura quels sont les
membres de ce groupe. Dans les autres volumes on a donc apporté cette
modification.
M. MARLER: M. le Président, il y a juste une question que je veux
soumettre au comité. D'après la motion qui a été
adoptée à l'Assemblée législative, le quorum des
membres de l'assemblée est fixé à neuf. Le conseil qui a
nommé six membres du comité a fixé le quorum de ses
membres à trois et je me suis aperçu par la suite que ces neuf
membres plus trois, évidemment, ça fait douze, mais la
difficulté que je vois dans les deux motions c'est qu'au cas où,
par malheur, quatre conseillers s'absentent d'une séance, nous n'aurons
pas le quorum nécessaire. Donc, je voudrais proposer, j'en ai
déjà causé avec M. Asselin, le leader de l'Opposition au
conseil et je voudrais proposer que le comité accepte l'idée que
le quorum soit fixé à douze membres, sans exiger qu'il y ait
nécessairement trois membres du conseil législatif. Et si la
proposition est acceptée, je pense que M. Roy, mon co-Président,
doit présenter un rapport, on présentera chacun un rapport
à notre propre Chambre et on adoptera l'amendement nécessaire de
façon à éviter la possibilité de siéger sans
avoir le quorum.
M. RENAUD: Merci bien monsieur. UNE VOIX: Personne n'a d'objection.
M. MARLER: Cela va vous permettre de vous absenter.
M. VAILLANCOURT: Cela peut arriver. Nous avons les conseillers
législatifs, nous avons six députés.
M. RENAUD: En tout cas, ça va marcher!
M. LE PRESIDENT: Messieurs, y a-t-il d'autres questions?
M. RENAUD: Non, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'assemblée est ajournée à demain
matin, à dix heures trente.
Séance du 9 mars
(Dix heures et demie de l'avant-midi)
M. MARLER (Président du comité): A l'ordre, messieurs!
Alors messieurs, si vous voulez bien, je voudrais demander d'abord à M.
Morency de nous faire rapport de sa discussion avec la Canadian Health
Association et la Croix-Bleue.
M. MORENCY: M. le Président, j'ai appelé ce matin M.
Foster de la Canadian Health à Toronto. Il était
évidemment désappointé et il m'a dit qu'il serait ici, tel
que prévu, mardi prochain. Par après, j'ai appelé la
Croix-Bleue, la Société d'hospitalisation du Québec et
elles étaient très heureuses. Mais enfin, celui à qui j'ai
parlé, qui est le vice-Président, m'a dit qu'il rejoindrait le
Président aujourd'hui, qui est en vacances, je ne sais pas trop
où en dehors de la province, probablement dans le sud et qu'il
communiquerait de nouveau avec moi cet après-midi. Je leur ai dit
évidemment, suivant les instructions que vous m'avez données
hier, qu'à cause de la cédule très courte, il n'avait pas
le choix, il fallait qu'il soit ici mardi. De toute façon Canadian
Health va y être et probablement la Croix-Bleue et, de toute
façon, elles vont me rappeler dans le courant de la journée.
M. LE PRESIDENT: Alors, nous aurons une séance mardi
après-midi à trois heures et demie.
M. MORENCY: De toute façon, nous vous aviserons lorsque ce sera
confirmé. Maintenant, si vous permettez, il y a un petit
problème. C'est que sur la présentation des mémoires, il
avait été prévu, lors d'une déclaration du premier
ministre, que tous les mémoires devaient être
présentés en cinquante copies. Alors il arrive que nous en
recevons deux en une seule copie. Evidemment, ce sont des individus qui ne sont
probablement pas trop fortunés. Je ne les connais pas, mais f imagine
que c'est le cas. J'aimerais que le comité nous donne une directive
à savoir si nous devons les refuser tout simplement ou si nous devons
les accepter. Enfin, quel est votre point de vue?
DES VOIX: On devrait les accepter.
M. LE PRESIDENT: La seule difficulté que je vois personnellement,
c'est que si un individu envoie un mémoire sur une page, j'admets que ce
n'est pas difficile de faire des copies. Mais supposons qu'on arrive avec dix
pages, quinze pages et vingt pages, qu'est-ce que nous allons faire?
Allons-nous demander au comité de faire tout ce travail-là?
M. KENNEDY: Il y a des machines à polycopier. Ce n'est pas un
problème.
M. LE PRESIDENT: Je comprends que le gouvernement est organisé
pour faire des copies de n'importe quoi mais, par contre, le comité
s'est déjà prononcé sur cette question-là et je me
demande si nous devons revenir sur cet aspect de notre décision. Je pose
la question au comité.
M. MARTIN: Il faudrait inviter les autres aussi à faire la
même chose, ceux qui pourraient présenter des mémoires. Il
faudrait leur dire de n'en envoyer qu'une copie et nous ferons les copies.
M. MORENCY: Voici. Les directives ont été données
de faire parvenir cinquante copies et encore hier, j'ai écrit à
des gens qui m'ont demandé des informations pour leur dire que les
mémoires devaient être envoyés en cinquante copies selon
les directives qui avaient déjà été
données.
M. BRISSON: Ecrivez-leur et demandez leur d'envoyer leur mémoire
en cinquante copies.
M. LE PRESIDENT: Je pense que c'est une décision sensée de
dire: « Le règlement, si on peut l'appeler ainsi, s'applique
à tout le monde ». C'est évident que cela n'empêche
pas l'individu qui a une bonne idée d'en transmettre une copie à
un membre du comité qui lui-même pourra peut-être faire
valoir l'opinion devant ce comité. Mais d'accepter une lettre, disons de
n'importe qui comme un mémoire à ce comité, je trouve que
ce n'est pas conforme au bon sens.
M. MORENCY: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il autre chose, M. Morency?
M. MORENCY: Non.
M. LE PRESIDENT: Alors nous allons reprendre l'étude des rapports
et il s'agit ce matin du volume 6, des conclusions du rapport. Alors, M.
Boudreau, voulez-vous commencer?
M. BOUDREAU: M. le Président, nous parlerons d'abord du volume 6
qui s'intitule: Résumé du rapport de la commission royale
d'enquête sur le service de Santé. Il s'agit d'une commission
royale qui a été formée en 1961 par le gouvernement
fédéral et dont le mandat était très
considérable. En fait ce mandat se reflète dans le rapport de la
commission, rapport en deux volumes dans lequel on traite d'une foule de
problèmes relatifs à la santé et que
j'énumère rapidement, quitte à revenir, dans un moment sur
les aspects plus particulièrement reliés à
l'assurance-maladie.
Je mentionne rapidement ce dont on parle dans le rapport de la
commission Hall. D'abord on y parle du personnel de santé, des
installations sanitaires, par exemple les hôpitaux, les cabinets de
médecins et le reste; on y parle de la recherche, on y parle de toutes
ies sources de fonds pour la recherche et l'enseignement ainsi que pour la
distribution des soins; on y parle du recrutement et de la formation dans les
diverses professions sanitaires; on y parle du financement des divers secteurs
de la santé, de l'état de santé de la population,
évidemment de l'assurance-maladie, de l'industrie pharmaceutique; on y
fait aussi des projections relatives au produit national brut, relatives aux
dépenses publiques et relatives aux dépenses dans le domaine de
la santé. On y parle du problème des statistiques dans le domaine
de la santé, du problème des organismes bénévoles,
de l'administration des services de santé ainsi que des services de
santé dans le Grand-Nord.
Mais je pense que ce qui nous intéresse plus
particulièrement et ce que nous avons davantage essayé de faire
ressortir dans le volume 6, ce sont les aspects plus directement reliés
aux problèmes de l'assurance-maladie. Nous avons regroupé ces
problèmes dans le volume 6 de la façon suivante. D'abord au
chapitre I, nous parIons des facteurs qui ont influencé
l'évolution de la distribution des soins dans le passé, facteurs
qui continuent à jouer encore à l'heure actuelle. Il s'agit
d'abord de facteurs démographiques, comme par exemple la densité
de la population, son vieillissement graduel, en d'autres mots, la structure
changeante des divers groupes d'âge, ensuite la technologie du monde de
la santé qui évolue de façon extrêmement rapide et
qui influence énormément la façon dont les soins sont
dispensés et évidemment le coût de ces soins. En
troisième lieu, il y a l'augmentation de la demande de soins due
à l'augmentation du niveau de vie, due à l'augmentation du niveau
de l'éducation des gens également et enfin le rôle
grandissant du gouvernement dans le domaine de la santé.
Il serait peut-être intéressant de lire ce que le rapport
Hall appelle la charte de la santé, qui est un document très
court et qui contient en définitive les principes sur lesquels ont
insisté les commissaires de la commission Hall. Vous retrouvez cette
charte à la page 5. Elle affirme que la réalisation des normes de
santé les plus élevées au bénéfice de notre
population devrait devenir un objectif de la politique nationale. Le mieux
à faire pour réaliser cet objectif est d'établir un
régime de santé complet et universel pour la population
canadienne, régime mis en oeuvre en conformité avec
l'évolution du régime constitutionnel du Canada, fondé sur
le libre choix et sur les professions et institutions libres et autonomes;
financé par des régimes de paiements anticipés
c'est-à-dire des régimes d'assurance réalisés avec
la collaboration entière du public, des professions médicales,
des organismes privés, de tous les partis politiques et des
gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux; orienté
vers l'utilisation la plus efficace des ressources de santé de la nation
pour atteindre les plus hauts niveaux de bien-être physique et mental,
c'est en somme l'esprit dans lequel le rapport Hall est constitué.
Maintenant dans notre deuxième chapitre du volume 6, soit le
résumé du rapport, nous avons parlé du problème des
effectifs. Nous avons résumé ce que dit le rapport Hall sur la
question des effectifs dans le domaine de la santé.
Le rapport mentionne que la proportion médecins-population s'est
améliorée au cours des dernières décennies au
Canada mais souligne, par ailleurs, qu'il existe une forte disparité
dans la répartition géographique de ces effectifs. C'est un
problème qui se reproduit d'ailleurs à l'intérieur de la
province de Québec où les effectifs médicaux sont
répartis selon une très grande disparité.
Par ailleurs, du côté des effectifs médicaux, le
rapport Hall ne conclut pas à un déficit où à un
manque de médecins pour l'ensemble du pays mais suggère
plutôt que les investissements du côté éducationnel
pour la formation des médecins soient haussés afin de maintenir
tout au moins le rapport médecins-population au niveau où il est
présentement.
Du côté des dentistes le rapport est moins optimiste. Il
souligne une pénurie de dentistes et suggère aussi des
investissements pour haus-
ser le rapport dentistes-population.
Du côté des infirmières, le rapport souligne
également une pénurie d'infirmières.
Le rapport parle aussi, évidemment, des autres groupes: personnel
médical et para-médical.
Au troisième chapitre, nous avons...
M. COITEUX (Duplessis): Pardon, M. Boudreau, avant que vous alliez plus
loin, est-ce que vous avez des chiffres qui seraient la formule idéale
au point de vue population, disons par médecin, en tenant compte du
système médical actuel? Je ne parle pas de prévoir pour
l'avenir. Quel serait le nombre idéal d'habitants par médecin,
dans les normes qu'on connaît actuellement par l'exercice de la
médecine et les soins qu'on donne ?
M. BOUDREAU: Non pas dans l'hypothèse d'un régime
d'assurance-maladie mais dans le contexte de pratiques libérales qui
existent maintenant. Est-ce que c'est ce que vous voulez dire?
M. COITEUX (Duplessis): Oui, c'est ça!
M. BOUDREAU: C'est assez difficile de suggérer un nombre
idéal parce que ça varie selon le niveau de revenus des diverses
régions, et selon les habitudes de consommation des gens. En fait,
même l'organisation mondiale de la santé ne s'est jamais
risquée à suggérer un nombre idéal de façon
absolue. Je pense qu'il faut s'adapter à divers contextes.
De toute façon, mentionnons qu'une étude faite par le
Collège des médecins il y a environ un an et qui s'appliquait au
contexte de la pratique médicale telle qu'elle se fait maintenant,
mentionnait qu'il existe actuellement au Québec une certaine
pénurie de médecins et le Collège des médecins
évaluait cette pénurie à environ, 1,000 médecins,
ce qui, en fait, aurait permis, si on avait pu augmenter la population
médicale d'environ 1,000 médecins, de porter le rapport
médecins-population à 140 médecins par 100,000 habitants.
Il semblait que ceci était suggéré par le Collège
des médecins comme une proportion optimum: 140 médecins par
100,000 habitants.
M. KENNEDY: Par 100,000 habitants?
M. TREPANIER: Un par moins de 1,000 de population?
M. BOUDREAU: C'est ça, oui! C'est la façon dont le
collège avait cité ces chiffres. Nous, dans notre rapport, on
parle de 840 habitants par médecin. On fait le rapport inverse. On peut
toujours calculer la réciproque. Je pense que 140 médecins par
100,000 habitants correspondraient à peu près à 725
habitants par médecin.
M. ROY: M. Boudreau, par rapport médecins-population, est-ce que
vous comprenez les spécialistes et les chirurgiens?
M. BOUDREAU: Nous comptons tous les médecins dans ce rapport. Je
mentionne, par exemple, que, pour les dentistes, le rapport Hall mentionne
qu'au Canada il existe un dentiste pour 3,108 habitants alors que la commission
Hall croit que le rapport idéal serait de 1 pour 2,450.
Maintenant, pour reprendre la question qui m'était posée
tout à l'heure relativement au nombre idéal de médecins
actuellement au Canada, il existe environ un médecin pour 840 habitants
et la commission Hall n'a pas suggéré que ce rapport-là,
que cette proportion-là soit modifiée. Donc on peut conclure que
dans l'esprit du rapport, il représente un certain optimum. Les
recommandations du rapport Hall visent à investir suffisamment dans des
facultés de médecine pour maintenir cette proportion. Donc, je
pense, en visant dans le contexte actuel à environ 800 personnes par
médecin, qu'on a un chiffre qui semble à peu près
satisfaisant.
M. VAILLANCOURT: Combien y a t-il de médecins dans la province de
Québec?
M. BOUDREAU: Actuellement au Québec, le nombre total de
médecins est d'environ 7,000.
M. FORTIER: Avez-vous, juste pour une information, une proportion entre
ceux qui font la pratique générale, les omnipracticiens, les
autres classes de médecins?
M. BOUDREAU: Pour l'ensemble de la profession médicale du
Québec, il y a environ 29% de médecins qui font de la pratique
générale, il y en a 45% qui font de la pratique
spécialisée, environ 20% qui sont des résidents dans les
hôpitaux et le reste, environ 5 ou 6%, des administrateurs, des
professeurs, des chercheurs, des gens qui font de la médecine
industrielle.
M. MARLER: Tout cela fait l'objet du rapport numéro 10, n'est-ce
pas, M. Boudreau?
M. BOUDREAU: Exactement, tout ceci est reproduit dans le volume
numéro 10. Maintenant, au chapitre 3, pour ce qui est du régime
de soins, la commission Hall a recommandé en premier lieu, un
régime universel, c'est-à-dire s'appli-
quant à toute la population; en deuxième lieu,on a
recommandé que la couverture inclue tous les soins médicaux, tous
les soins dentaires des enfants (et ceci de façon progressive en
élargissant peu à peu le groupe des enfants) des femmes enceintes
et des indigents; que le régime inclue ensuite tous les
médicaments prescrits, qu'il inclue les lunettes pour enfants et
assistés sociaux; qu'il inclue les prothèses, les soins de
réadaptation, les jambes artificielles, les bras artificiels, ces
choses-là; qu'il inclue également les soins d'infirmiers
àdomicile, et évidemment qu'il intègre les soins
hospitaliers déjà dispensés en vertu d'un autre
régime. Donc, c'était un régime très ambitieux, et
dont on recommandait la mise sur pied pour 1966.
Les coûts de ce régime, vous les retrouvez aux pages 22 et
23. Je pense que je ne vous enterrerai pas avec trop de chiffres. Tous les
chiffres tels qu'ils avaient été estimés par la commission
sont reproduits dans ces deux pages-là. Et dans la page 23, nous avons
isolé ce qui pourrait se rapporter tout particulièrement à
la province de Québec. Maintenant, il faut mentionner que ces
estimations datent déjà de quelques années, le premier
volume de la commission étant sorti en 1964, et qu'en fait de nombreuses
revisions ont été faites depuis, et à Québec et
à Ottawa, par rapport à ces chiffres-là, et qu'il est
assez évident qu'ils sont sous-évalués. A ce point de vue
là, le volume numéro 8 de notre rapport qui s'intitule «
Coût et financement » vous suggère les rajustements qu'il
faut faire pour arriver à des chiffres un peu plus réalistes.
Pour ce qui est du financement, qui est traité au chapitre 4, la
commission Hall a suggéré qu'il n'y ait pas de frais
modérateurs, c'est-à-dire pas de montant à payer par le
patient au moment où il reçoit des soins et elle suggérait
que 50% du coût du régime soient financés par le
gouvernement fédéral à même ses revenus
généraux et que les autres 50% soient financés par les
provinces selon une formule laissée à la discrétion des
provinces. Mais le rapport Hall favorisait évidemment, pour ce qui est
du financement au niveau provincial, la formule des paiements anticipés,
c'est-à-dire la formule de l'assurance sociale.
La commission a fait des études assez intéressantes
relativement à la capacité de l'économie de supporter un
tel régime et à ce point de vue-là elle est, je pense,
assez optimiste. La commission Hall a évalué qu'en 1961, 5.4% du
produit national brut étaient dépensés dans le domaine de
la santé, y compris les investissements et aussi l'achat des soins
proprement dits. Selon la commission, si les régimes tels qu'ils
existaient en 1964, avaient été maintenus jusqu'en 1971, sans
l'introduction d'un régime général tel qu'elle le
préconisait, cette proportion du produit national brut qui était
de 5.4% en 1961 serait passée à un pourcentage se situant entre
5.5 et 5.8% environ en 1971. Maintenant, dans l'hypothèse où le
régime qu'elle recommandait était introduit, alors à ce
moment-là la proportion du produit national brut dépensée
dans le domaine de la santé serait passée de 5.4% à un
pourcentage se situant entre 6 et 6.3%.
M. TREPANIER: 5.8% si ça continue comme c'est actuellement?
M. BOUDREAU: C'est ça.
M. TREPANIER: Et 6.4%, si le régime proposé est
accepté.
M. BOUDREAU: C'est ça. Je pense que vous allez retrouver ces
données-là, je n'ai pas la page ici, mais...
M. LE PRESIDENT: Page 27.
M. BOUDREAU: Page 27, merci. C'est sur de telles données que la
commission Hall s'est basée pour estimer que le Canada pouvait se
permettre un tel régime sans hausser les taxes, et elle avait fait les
estimations sur l'augmentation du produit de la taxe à Ottawa, compte
tenu de l'augmentation des revenus. Etant donné la façon
progressive dont les taxes sont recueillies, c'est-à-dire que plus les
revenus sont élevés, plus le pourcentage est élevé,
une augmentation d'un pour cent dans le revenu national signifie une
augmentation de plus d'un pour cent dans le produit de la taxation. Se basant
sur ces calculs-là, elle avait estimé que selon les modes de
financement proposés, il serait possible d'introduire le régime
préconisé sans augmentation de taxes. Mais il y avait
évidemment, sous-jacentes àça, des hypothèses
peut-être un peu irréalistes quant à l'évolution des
dépenses dans les autres secteurs, par exemple l'éducation, la
voirie, etc. Et évidemment aussi, il faut se rappeler qu'au niveau de
chaque province, les priorités à établir, à un
moment donné, peuvent varier aussi. Il se peut que dans une province le
système éducationnel, le système de voirie étant
dans un stade plus avancé que dans une autre province, il y ait plus de
choses disponibles que dans cette autre province pour le domaine de la
santé. Enfin les chiffres de la commission Hall sont des chiffres ou des
agrégats au niveau national et qui doivent évidemment être
rajustés lorsqu'on veut tenir compte du contexte particulier à la
province de Québec.
Enfin, pour ce qui est de la formule administrative
suggérée par la commission Hall je résume
rapidement c'est ce que vous trouvez au chapitre 5 de notre
résumé. La commission Hall recommande d'abord une administration
au niveau provincial qui se ferait par ce qu'on appelle une commission
provinciale sanitaire, pour administrer l'assurance-maladie. Cette commission
serait représentative des diverses parties intéressées,
soit le gouvernement, les professionnels de la santé et le public. Elle
serait en définitive responsable au ministre de la Santé.
Parallèlement à ceci existeraient les autres services du
ministère de la Santé qui, eux, s'occuperaient plus
particulièrement de l'hygiène publique et des subventions.
Voilà, M. le Président, le résumé du
résumé du rapport Hall.
M. LE PRESIDENT: M. Boudreau, nous avons touché très
sommairement à la recommandation de la commission, au rapport concernant
les frais modérateurs, et si j'ai bien compris ce que vous avez dit tout
à l'heure, la commission Hall semble recommander qu'il n'y ait pas de
frais modérateurs. Depuis que j'ai lu ce volume-là, je me pose la
question suivante: inviter un médecin à venir chez le patient,
c'est-à-dire à son domicile ça coûte ordinairement
plus cher que lorsque vous allez directement au médecin, n'est-ce pas,
à son bureau. Mais si l'Etat doit payer les honoraires du
médecin, n'y aura-t-il pas nécessairement l'encouragement pour le
patient de dire: « Ce n'est pas moi qui dois payer le surplus, alors
j'invite le médecin à venir chez moi »? Et si je ne me
trompe pas, le médecin aura énormément de
difficultés à l'autre bout du téléphone de savoir
si réellement il doit venir ou non. Alors si nous acceptions cette
thèse qu'il n'y a pas de frais modérateurs pour les visites
à domicile, je me demande, si cela, en somme, ne serait pas mortel pour
les médecins, dans le sens que les patients voudraient toujours que le
médecin passe chez eux et s'il n'y a aucun découragement, s'il
n'y a aucun ticket modérateur. Je me demande s'il faut réellement
concevoir un plan d'assurance-maladie où il n'y a pas ce
découragement qui, à mon sens, est de nature à noyer la
profession médicale avec des demandes que les médecins viennent
à domicile. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. BOUDREAU: Voici, M. le Président. Je pense que d'abord on peut
envisager les frais modérateurs comme étant un mécanisme
grâce auquel on peut atteindre trois buts différents. On peut
songer à utiliser les frais modérateurs premièrement comme
étant un certain complément au financement du régime. Je
pense qu'à cet égard, si on examine la situation d'assez
près, on s'aperçoit que, compte tenu des coûts
d'administration supplémentaires qui seraient impliqués,
ça ne pourrait pas représenter un mécanisme de financement
extrêmement important. Peut-être qu'on pourrait
réaliser...
M. LE PRESIDENT: Je pense que nous devons être d'accord sur ce
point-là.
M. BOUDREAU: En deuxième lieu, ça peut être
envisagé comme un mécanisme visant à diminuer la
consommation dans son ensemble afin de ne pas exercer trop de pression sur les
disponibilités en effectif et en installation physique. A ce point de
vue-là aussi, je pense qu'il y a un certain nombre de remarques qu'on
doit faire. Premièrement, du côté de la chirurgie, il est
assez difficile de songer à des abus, enfin ce n'est pas tellement
flagrant; du côté de l'obstétrique également, c'est
comme vous dites du côté des visites qu'il faut le plus craindre
de tels abus. Mais dans leur ensemble, il est assez difficile de
déterminer ce que sont les abus, et ce qui n'est pas des abus. C'est
pour ça que, dans l'ensemble, je pense qu'il faut être assez
prudent avant d'envisager l'adoption de tickets modérateurs pour
l'ensemble des visites tout au moins.
Maintenant le problème que vous avez soulevé là
rejoint le troisième objectif qui peut être envisagé dans
l'utilisation des tickets modérateurs: c'est celui de l'orientation de
la consommation, non pas dans le but de la diminuer mais de l'orienter
peut-être de telle sorte qu'elle soit un peu moins coûteuse et
qu'elle permette au médecin de travailler de façon un peu plus
efficace, c'est-à-dire de voir plus de malades dans une journée.
Et je pense que c'est une chose qui doit être regardée de
très près. Je vous avoue que personnellement je n'ai pas
d'idée arrêtée là-dessus, mais je pense qu'à
la lumière surtout du fait qu'au Québec la structure de
consommation est un peu différente des autres provinces en ce sens qu'il
est exact qu'ici la proportion des visites effectuées à domicile
est plus élevée qu'ailleurs, ce qui peut impliquer un prix plus
élevé, il y aurait peut-être lieu d'envisager certains
mécanismes pour corriger cette chose-là. Et possiblement, comme
vous le dites, le ticket modérateur appliqué exclusivement aux
visites à domicile pourrait être un mécanisme à
envisager. Maintenant, il s'agit à ce moment-là de
considérer quel serait le coût d'administration de cette
chose-là et s'il y a des personnes qui doivent en être
dispensées, étant donné leur faible revenu et quel
devrait être le niveau de ce ticket pour qu'il ait l'efficacité
voulue.
M. LE PRESIDENT: Je me suis posé la question, en effet je me suis
dit: « Est-ce que ça peut être le médecin, en somme,
qui se prononcerait sur la responsabilité du patient au moment de la
visite ? » Si, par exemple, j'ai tout simplement un mal de tête et
que je demande au médecin de venir me voir, je pense qu'il doit
être un peu scandalisé de mon attitude et qu'il doit, en effet, je
ne dis pas me punir, c'est un mot facile dans ce cas-là il
doit dire: « Moi, pour ce qui est de mes honoraires je vais vous les
charger personnellement ».
Par contre, s'il se rend compte au domicile que le patient
réellement ne pouvait pas venir chez lui, là il dira: «
Certainement. D'accord. »
Je suis d'accord, M. Boudreau, que nous ne devons pas envisager de frais
modérateurs dans ces circonstances comme étant un revenu. Ce
serait insignifiant. C'est plutôt pour empêcher que les services du
médecin soient accaparés par des gens paresseux qui ne veulent
pas se donner la peine d'aller chez lui.
M. DALLAIRE: Je suis d'accord, M. le Président, parce
qu'automatiquement bien des fois nous sommes dérangés soit dans
le jour, à l'heure des consultations au bureau ou la nuit, non pas par
des gens qui auraient les moyens financiers de payer eux-mêmes la visite
du médecin, mais bien des fois par des gens qui n'ont pas les moyens de
payer le médecin. Ce sont ces gens-là qui, assez souvent, vont
exiger que nous passions à domicile au lieu de venir, eux, consulter au
bureau, alors qu'ils pourraient venir facilement nous consulter pour une
maladie quelconque. A ce moment-là ils exigent que le médecin se
dérange, sachant qu'ils ne paieront pas plus au bureau qu'à
domicile; ils font marquer les comptes, alors ils ne paient pas plus. Ce sont
ces gens-là qui assez souvent sont les plus exigeants au point de vue
soins médicaux.
Comme je vous dis, ce n'est pas l'individu moyen qui a les moyens
financiers de payer $5 pour une visite ou consultation qui va exiger que le
médecin se rende à domicile, mais bien souvent celui qui n'a pas
les moyens financiers et sachant, qu'il aille au bureau ou qu'il fasse venir le
médecin, qu'il ne paiera jamais. Alors lui exige, il
téléphone et retéléphone pour dire au docteur:
« Bien, tu ne viens pas? Il faut que tu viennes ». Alors on a beau
poser un tas de questions au téléphone, on ne réussit pas
à délimiter si c'est oui ou si c'est non. On lui donne le
bénéfice du doute et bien des fois on arrive à domicile
pour constater que le monsieur ou la madame aurait pu venir facilement au
bureau. Deuxièmement, je pense que nous serons à ce
moment-là peut-être débordés de visites à
domicile et que nous ne pourrons pas répondre à toutes les
demandes parce que souvent nous ferons à ce moment-là des visites
plus ou moins utiles ou nécessaires à domicile, alors que ces
gens auraient pu venir nous consulter au bureau.
M. LE PRESIDENT: Même le temps que vous consacrez à vos
voyages vous empêche de servir des clients pendant cette
période-là.
M. TARDIF: Suggérez-vous que ce soit le médecin qui
décide si oui ou non il y a abus?
M. DALLAIRE: Je pense que même à ce moment-là il
faut tout de même donner le bénéfice du doute au
téléphone.
M. TARDIF: Le médecin aurait peur d'être mal vu si,
à un moment donné, un client ou une cliente s'aperçoit
qu'il est obligé de verser un certain montant d'argent parce que le
médecin a décidé ça. Il va faire la grimace puis il
va dire: « Tu n'avais qu'à décider autrement et c'est
l'Etat qui aurait payé. Ils vont voir le médecin plutôt
comme un collecteur.
M. DALLAIRE: Ou bien encore ils nous disent: « Je n'ai pas de
voiture, s'il faut payer un taxi, je vais vous payer, je vais payer votre
voyage ».
M. THEBERGE: Je ne pense pas qu'on puisse laisser au médecin le
choix de décider si oui ou non il doit charger, si oui ou non on a
raison de le faire venir. Cela met le médecin dans une position
très désagréable et je suis convaincu que les
médecins n'aimeraient pas à prendre cette
décision-là.
M. LE PRESIDENT: Je ne pensais pas pour un seul instant, ayant
réfléchi moi-même aux difficultés, que le
comité soit appelé à trouver une solution séance
tenante. Mais je pense que c'est un aspect de la question que l'équipe
des spécialistes, le comité de recherche doit discuter parce
qu'il me semble que fatalement c'est un point qu'il faudrait trancher lorsqu'il
s'agira de dresser le rapport...
M. DALLAIRE: Alors, M. le Président, je pense que le
médecin sera très mal placé pour dire à l'individu:
« Toi, pour ta maladie pour ta visite, c'est toi qui paies ». Et
puis au voisin: « Bien non! ». Parce que Baptiste va ren-
contrer Arthur et il va lui dire; « Moi, ça ne m'a rien
coûté ». Alors l'autre individu va dire: «
J'étais malade moi aussi, il m'a fait payer $5 alors que toi... »
Non, je pense que la profession médicale acceptera très
facilement la décision prise par les autorités à ce
moment-là et je pense qu'on ne peut pas juger nous autres non plus
à domicile du mode de paiement du patient. Je pense qu'à ce
moment-là, on ne peut pas demander cela aux médecins.
M. RENAUD: On ne peut pas demander ça aux médecins. Ce
n'est pas leur rôle.
M. DALLAIRE: Non, ce n'est pas leur rôle. M. LE PRESIDENT: Docteur
Raymond.
M. RAYMOND: M. le Président, les gens du comité ont fait
un excellent travail. Quelle est votre expérience dans d'autres pays que
vous avez visités relativement à cette question au point de vue
achalandage du médecin qui est demandé en dehors de son bureau?
Quelle est votre expérience?
M. CASTONGUAY: C'est une question dans laquelle on pourra donner plus de
détails dans l'étude des régimes des divers pays.
M. LE PRESIDENT: Lorsqu'on sera rendu là. Alors, si c'est bien le
sentiment du comité, nous allons peut-être laisser tomber cette
question-là pour le moment, laissant aux spécialistes le soin de
trouver une solution intelligente, ingénieuse et pratique.
M. CASTONGUAY: Dans l'étude des rapports sur les régimes
des divers pays, nous avons toujours une section attachée justement au
mode de contrôle sur les abus possibles, la consommation
médicale.
M. LE PRESIDENT: La question diffère.
M. BOUDREAU: C'est certainement un problème qui doit être
fort important parce que non seulement dans le volume sur les régimes
des divers pays mais même dans le volume sur les coût et
financement, nous y revenons et nous mentionnons, comme vous l'avez fait, pour
ce qui est des visites à domicile, que c'est certainement un point qui
mériterait d'être scruté de façon très
attentive.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que je conclus, M. Boudreau, que c'est là
le résumé du volume 6?
M. BOUDREAU: Oui.
M. LE PRESIDENT: Alors nous allons continuer maintenant avec le volume
7, à moins qu'il n'y ait des membres du comité qui
désirent poser des questions sur le résumé de la
commission Hall. Sinon, M. Boudreau, voulez-vous poursuivre avec le volume
7?
M. BOUDREAU: Le volume 7, qui s'intitule « Critères de
choix », représente, à mon avis, le document central de
toute notre étude. C'est peut-être malheureusement le document le
plus complexe aussi et ceux qui s'y sont attaqués l'ont peut-être
trouvé un peu aride. Je vais essayer de dire à la fois rapidement
et simplement ce que nous avons essayé de faire, de démontrer et
de trouver dans ce volume No 7.
En bref, le but que nous nous étions fixé au début
était de trouver des critères sur lesquels nous puissions fonder
des décisions relatives au degré d'intervention de l'Etat et
relatives au type d'intervention qui était souhaitable. L'approche que
nous avons utilisée pour répondre à ces problèmes,
pour réaliser ce but, est basée sur deux éléments
principaux. En premier lieu, nous avons essayé de découvrir ce
qu'étaient les préférences des Québécois, ce
que les Québécois désiraient, voulaient en matière
de santé. Nous avons essayé de découvrir quelles
étaient ces préférences-là en analysant un certain
nombre d'indices, selon lesquels les Québécois avaient
révélé leurs préférences: des discours, des
mémoires, des causeries et le reste. La conclusion à laquelle
nous en sommes arrivés, pour ce qui est de ces
préférences-là, nous l'avons exprimée dans ce que
nous appelons un consensus, c'est-à-dire que nous avons cru percevoir
que tout le monde s'entendait au moins sur un minimum de ce que devrait
être l'action de l'Etat dans le domaine de la santé. Ce
consensus-là est reproduit à la page 34 du rapport et si vous
voulez bien, je peux vous le lire, c'est très court. Il se rapporte
à l'action de l'Etat. Alors on lit: a) « que le gouvernement
supplémente le marché lorsque celui-ci est
déficient.» Ceci veut dire que lorsque...
M. VAILLANCOURT: Quel volume?
M. BOUDREAU: Il s'agit du volume 7. C'est dire que lorsque les individus
laissés à eux-mêmes pour l'achat de leurs soins
médicaux ou autres ne peuvent obtenir un niveau satisfaisant de soins,
alors là l'Etat doit certainement intervenir pour que la consommation
atteigne un niveau satisfaisant. En deuxième lieu: « qu'il agisse
de façon à tirer parti des externalités
présentes
dans le secteur des services sanitaires.» Ceci veut dire que, dans
certains secteurs de la santé, je prends comme exemple la vaccination,
il existe de très grands avantages pour toute la société
à ce que chaque individu en consomme.
En d'autres mots, les avantages ne sont pas seulement recueillis par
l'individu qui consomme le soin mais par les autres. Et ceci fait que de tels
biens, comme la vaccination, sont vraiment un bien social ou un bien public et,
dans de telles circonstances, il est évident que pour que de tels soins
soient consommés, au niveau satisfaisant, il faut que le gouvernement
intervienne parce qu'il s'agit là d'un problème social, ceci a
d'ailleurs déjà été réalisé dans le
domaine de la vaccination.
En troisième lieu, « qu'il corrige à l'occasion des
structures de consommation périmée». J'ai mentionné
tout à l'heure, M. le Président, que peut-être au
Québec, les gens faisaient trop venir le médecin à
domicile, ce qui est peut-être quelque chose que nous avons
hérité du passé, alors que les moyens de communication
étaient moins faciles et que les cliniques médicales
étaient moins organisées. Si maintenant la pratique moderne de la
médecine est plus efficace, si les gens vont davantage à la
clinique ou au cabinet du médecin, eh bien il s'agit peut-être
d'établir le mécanisme pour corriger peu à peu ces
choses-là.
Quatrièmement, « qu'il rappelle constamment à la
population ce que ces demandes veulent dire en termes de ressources pour la
société ». Ceci veut dire que lorsque la
société met à la disposition de ses membres des soins
supplémentaires, je pense qu'elle doit en même temps s'efforcer de
faire réaliser aux gens que s'ils obtiennent ces soins-là, il y a
un coût, coût qui s'exprime évidemment en termes financiers,
mais coût aussi qui s'exprime en termes d'autres choses que la
société n'aura pas. Si vous mettez, cette année, $300
millions dans la santé, ce sont $300 millions qui n'iront pas à
l'éducation, ni aux routes ni à d'autres secteurs. Et je pense
qu'il est important que tout ceci soit bien réalisé pour que les
soins faits soient le plus judicieux possible et rendent les gens le plus
satisfaits possible.
Et enfin, « qu'il utilise la contrainte aussi peu que possible
mais autant que nécessaire afin que, dans l'intérêt
général, une allocation optimale des ressources entre les
secteurs de la santé et les autres secteurs et à
l'intérieur du secteur de la santé soit réalisée au
moindre coût en argent et en personnel ».
En d'autres mots, une fois qu'on a décidé quelle
quantité de ressources, quels sont les soins qu'on veut fournir, il
s'agit de l'organiser pour que tout ceci fonctionne le plus efficacement
possible, compte tenu du fait qu'étant en démocratie ou enfin
vivant avec des êtres humains ce ne sont pas des machines
et qu'il faut, je pense, envisager les évolutions de la façon la
plus graduelle et la plus souple possible.
Donc ceci est le premier élément sur lequel nous avons
fondé ce volume qui avait pour but d'établir certains
critères de choix. Le deuxième élément est
peut-être un peu plus technique et se fonde sur la distinction entre ce
que nous appelons des biens publics, des biens privés et, entre les
deux, des biens non privés.
Et ici je donne les exemples qui vont aider à comprendre. Un bien
public c'est un bien qui est fait de telle sorte que si une personne s'en sert
ou le consomme, elle n'enlève rien aux autres en général.
Aussi c'est un bien dont la consommation par un individu est très
favorable aux autres. Je prends comme exemple un phare de navigation. Si un
individu consomme les services du phare, ça n'enlève rien aux
autres. Et aussi en général, par exemple, dans la vaccination que
je mentionnais tout à l'heure, si un individu se fait vacciner, c'est
aussi favorable aux autres. On réalise assez facilement que pour de tels
biens ou pour de tels services, il est assez essentiel que l'Etat se
préoccupe d'y investir et de les fournir aux gens, sinon ils ne seront
pas fournis en quantité suffisante.
La Défense nationale, les routes sont aussi des exemples de ce
type de biens-là qu'on appelle des biens publics, ou des biens sociaux.
A l'autre extrême, il y a ce qu'on appelle des biens purement
privés qui sont caractérisés à l'inverse des biens
publics par le fait que ce qu'un individu consomme est automatiquement
enlevé aux autres individus et aussi caractérisé par le
fait que ce qu'un individu consomme de ces biens-là n'est pas
nécessairement favorable aux autres.
L'exemple typique, c'est celui de la nourriture. La quantité
consommée par un individu est enlevée aux autres et le fait qu'un
individu consomme de la nourriture n'est pas nécessairement favorable
aux autres. Et disons là, pour simplifier à l'extrême,
parce qu'il y a beaucoup de choses dont il faut tenir compte, qu'on peut
entrevoir que dans la mesure où un bien est privé, sa
consommation, sa production, son financement doivent être davantage
laissés à l'initiative privée. Dans la mesure où un
bien est un bien public ou social sa production, son financement, sa
consommation doivent être laissés en plus grande partie à
l'initiative collective ou publique.
Entre les deux types extrêmes que j'ai mentionnés, bien
publics et bien privés, il y a ce
que l'on appelle les biens non-privés qui sont un mélange
des deux et un mélange plus ou moins différent ou à
composantes publiques plus ou moins importantes. Là on ne peut faire le
raisonnement que dans la mesure où la composante publique ou sociale est
importante, alors dans cette mesure-là, l'intervention de l'Etat doit
être plus importante. Nous avons situé en général la
santé dans ce secteur de biens non-privés qui sont un
mélange de biens publics et nous nous sommes servis de cette
catégorisation des biens pour établir les priorités. En
d'autres mots, la première approche basée sur les
préférences des Québécois servait à
définir un consensus sur lequel tout le monde s'entendait. Mais le
deuxième élément, la définition de ce que
c'était le bien de la santé, nous a servi davantage à
établir les priorités, quelles étaient les choses les plus
urgentes à fournir et ainsi de suite allant aux choses qui nous
apparaissaient peut-être selon ce raisonnement-là, les moins
urgentes et les moins nécessaires.
En terminant, pour compléter tout ce raisonnement, nous avons
divisé vis-à-vis chaque bien ou vis-à-vis la production du
bien santé ou la production de la santé, nous avons divisé
ce secteur-là en trois parties, soit la partie consommation, la partie
production et la partie financement. Et par conséquent, nous avons
estimé qu'il était possible, théoriquement du moins,
d'envisager une action des individus et une action de l'Etat à ces trois
niveaux-là; financement, production et consommation. Il nous est apparu
et ceci est mentionné aussi dans ce volume que
c'était probablement du côté du financement, dans les
circonstances actuelles, compte tenu des contraintes en effectif, compte tenu
aussi des résistances qu'on peut rencontrer dans le milieu, que
c'était probablement au départ du côté du
financement que l'intervention du gouvernement serait la plus facile et la plus
souhaitable alors qu'elle serait peut-être plus difficile à ce
stade-ci au niveau de la consommation et de la production. Au niveau de la
production, par exemple, rendre tous les médecins automatiquement des
fonctionnaires, pourrait poser des problèmes assez
considérables.
UNE VOIX: Je pense que oui!
M. BOUDREAU: Et aussi du côté de la consommation, forcer
les gens à consommer en telle quantité, à aller chez tel
individu plutôt que chez tel autre, à avoir un rendez-vous annuel
à telle heure, etc. pourrait aussi, dans le contexte sociologique
actuel, poser des problèmes. C'est donc par conséquent du
côté du financement que nous avons appliqué nos
critères davantage.
Cela, je pense, M. le Président, résume le volume
numéro 7.
M. BERTRAND: Très bonne synthèse.
M. MARLER: Y a-t-il des questions que le comité désire
poser à M. Boudreau sur les critères de choix? Seriez-vous
prêts à présenter le volume suivant? C'est le numéro
4, n'est-ce pas?
M. CASTONGUAY: Oui.
M. MARLER: Le volume 4, c'est le régime d'assurance-maladie de
certains pays.
M. CASTONGUAY: M. le Président, le volume 4 contient la
description que nous avons faite des régimes des cinq pays ainsi que
quelque analyses brèves sur des questions telles que le financement, la
demande des soins, les contrôles exercés.
Maintenant, une des premières difficultés que nous avons
rencontrées dans la préparation de cette étude-là,
c'est celle de l'analyse des textes.
Il est excessivement difficile de se faire une idée exacte de ce
qui existe réellement à certains endroits, parce que les textes,
même semblant venir de sources assez officielles sont assez souvent
contradictoires. Ce qui démontre davantage que toute la question de
l'assurance-maladie est un sujet assez chargé d'émotions et de
passions, non seulement ici au Canada comme on a pu le voir en
Saskatchewan il y a trois ou quatre ans mais aussi en Europe.
Alors, c'est pour cette raison, tel que nous l'indiquons dans le
début du volume, que nous nous en sommes tenus plutôt à des
études descriptives, que nous n'avons pas voulu exprimer, dans ce
volume-là, trop d'opinions nous-mêmes. Comme je le mentionnais,
nos opinions sont consignées dans les rapports que nous avons faits sur
chacune des visites aux différents organismes que nous avons
visités. Maintenant, dans le choix des pays étudiés
d'abord il était inutile d'essayer d'en étudier un nombre
à n'en plus finir ce que nous voulions surtout dégager,
c'étaient les principales caractéristiques des régimes
d'assurance-maladie et notre choix s'est arrêté sur les pays
suivants. Premièrement, l'Angleterre. Etant donné que c'est un
régime d'une nature assez particulière, il a été
l'objet de beaucoup de controverses; on en entend parler constamment dans les
journaux, dans différentes revues; il a été
étudié et critiqué peut-être plus que n'importe quel
autre régime, en tous les cas, en autant que nous
sommes concernés ici au Canada.
Nous avons ensuite étudié le régime
général de la France. Etant donné qu'il s'agit là
d'un régime d'assurance sociale par opposition au régime anglais
qui est un régime de soins, tel que nous avons fait la distinction hier.
Dans les deux cas, pour la France et l'Angleterre, nous avons pensé
qu'il y avait une raison additionnelle qui pouvait être
intéressante dans l'étude de ces deux régimes. C'est que
nombre de médecins, ici, de pharmaciens, de professeurs, etc. ont fait
des stages en France, en Angleterre et ont acquis une certaine connaissance des
régimes de ces pays. En plus de cela, en plus des professionnels, un
certain nombre aussi de personnes, qui ont émigré de ces pays au
Canada ou encore des Canadiens qui sont allés vivre pour d'autres
raisons en France, ont été en mesure d'apprécier
jusqu'à un certain point le fonctionnement de ces systèmes de ces
deux régions.
Maintenant, nous avons aussi étudié ce qui se passait en
Belgique. Etant donné que c'est un pays voisin de la France, pour une
bonne partie de la population, une certaine partie, l'usage de la même
langue, alors, il y a certainement eu une influence de la France sur la
Belgique. Et malgré qu'en France il semble y avoir un certain
équilibre au sujet de l'assurance-maladie, ce n'est pas tout à
fait le cas en Belgique. Alors, nous avons voulu essayer de déterminer
pourquoi cette différence entre la Belgique et la France, où il
s'agit de deux régimes de conception à peu près analogue.
Finalement, nous avons étudié le régime de la
Suède. La Suède, pour différentes raisons, est dans toutes
les questions de sécurité sociale, un pays qui présente
beaucoup d'intérêt, un pays dont la sécurité sociale
est très développée et où malgré tout, il y
a l'existence d'une entreprise privée très forte. Nous avons
étudié le régime de la Suède aussi pour d'autres
raisons qui sont les suivantes: c'est qu'il y a certaines
caractéristiques assez intéressantes entre le Québec et la
Suède. Les deux ont des territoires très grands, le même
genre de climat, une population qui ne diffère pas tellement en
Suède 7 millions et demi et ici 5,600,000 dispersée sur
deux grands territoires aussi bien en Suède que dans la province de
Québec, un niveau de vie assez semblable. Par exemple, on a noté
que le produit national brut per capita en 1962 était de $2,080 en
Suède alors qu'il était de $1,974 dans la province de
Québec.
Il y a un certain nombre d'analogies encore là ou de
caractéristiques qui se ressemblent.
Chaque régime en Europe ou dans les provinces de l'Ouest colle,
si vous me permettez l'expression, aux conditions locales d'une façon
assez surprenante.
M. MARLER: En effet, les conditions que je pourrais appeler les
conditions pré-existantes, n'est-ce pas, il fallait que le plan se cadre
avec les traditions et les moeurs du pays en question.
M. CASTONGUAY: Et les habitudes, etc.
Alors, nous avons présenté les études dans notre
volume dans l'ordre que nous avons suivi lorsque nous avons fait le voyage.
Mais pour l'étude ici, je proposerais un ordre un peu différent.
En premier lieu, je proposerais que nous passions au régime de la
Suède. Ce régime est beaucoup plus simple à décrire
et beaucoup moins complexe en apparence, du moins. Vous en avez la description
à compter de la page 69. Le régime d'assurance-maladie
suédois a été établi dans sa forme actuelle en
janvier 1955, alors, c'est quelque chose d'assez récent encore
et il a comme objectif de neutraliser les conséquences
financières qu'entraîne la maladie. Ce qui est intéressant,
c'est que les dispositions du régime et aussi sa structure
administrative s'intègrent très bien dans les autres dispositions
de sécurité sociale existantes en Suède et, aussi, au
point de vue administratif, aux autres organismes administratifs, tel qu'on le
verra plus loin. C'est un point ça aussi assez important. On en a
parlé brièvement hier mais il ne semble pas y avoir conflit entre
l'administration du régime et les structures qui existent pour le
domaine complémentaire de la santé, ce qui est un point assez
important. Au point de vue de la couverture, si on prend en premier lieu les
soins médicaux, d'une façon générale tous les soins
donnés par les médecins sont couverts, y compris la
physiothérapie.
Le remboursement à l'assuré est effectué à
raison de 75% du tarif d'honoraires. On utilise en Suède le
système de remboursement, c'est-à-dire l'assuré paie le
médecin, reçoit une facture acquittée et se
présente à la caisse de sécurité sociale pour se
faire rembourser 75% des honoraires.
Maintenant, il est indiqué au sujet du remboursement qu'il n'est
pas tenu compte des dépassements d'honoraires. Il y a une raison
particulière; c'est que l'organisation de la profession médicale
en Suède est un peu différente d'ici, on le voit à page
75. Les médecins peuvent être divisés, en Suède, en
trois catégories:
Il y a les médecins en pratique privée,
deuxièmement, il y a les officiers médicaux régio-
naux et, finalement, il y a les médecins d'hôpitaux. Si on
prend les médecins d'hôpitaux, en grande partie ce sont des
spécialistes; quant aux médecins en pratique privée, vous
avez principalement des omnipraticiens et un certain nombre de
spécialistes; les officiers médicaux régionaux sont en
grande partie encore une fois des omnipraticiens mais eux, pratiquent dans des
endroits où il y avait un manque de médecine. Alors les officiers
médicaux régionaux existent en très grande partie pour
atténuer ou essayer de solutionner le problème de la mauvaise
distribution géographique des médecins qui existait avant
l'établissement du régime; ils sont environ au compte de 800 et
ils sont rémunérés en partie à salaire et en partie
à honoraire. Vous les retrouverez principalement à
l'extérieur des grandes villes.
M. FORTIER: J'aurais juste une question qui m'intéresse
énormément.
M. CASTONGUAY: Oui, docteur.
M. FORTIER: Est-ce qu'il y a une méthode, par exemple, en
Suède, ici il faudra dire par un médecin: « Vous allez
être prescrit à telle place où il manque un médecin
». Est-ce qu'ils ont des avantages spéciaux pour ça?
M. CASTONGUAY: Bien voici...
M. FORTIER: Si je demande ça, par exemple nous autres on sait
qu'on manque de médecins dans les centres ruraux, alors est-ce qu'il y a
ici une méthode pour que ces centres-là aient des
médecins? Est-ce qu'on favorise le médecin spécialement ou
est-ce qu'il n'a pas d'obligation là-bas au médecin d'y
aller?
M. CASTONGUAY: Bien, disons que ce n'est pas du dirigisme complet qui
consisterait à dire à tel médecin vous allez à tel
endroit ou à tel endroit. Nous disons qu'il y a un certain
contrôle et tout médecin peut aller en pratique privée s'il
le désire mais à ce moment-là, s'il y a déjà
saturation, il n'aura aucune aide de l'Etat pour s'établir. Par contre,
s'il y a un manque, l'Etat va aider de différentes façons en
payant un salaire, etc. Deuxièmement, le médecin qui pratique
à titre d'officier médical régional, lui ne peut pas
charger de dépassements d'honoraires lorsqu'il traite un patient. En
plus de ça, il est obligé de donner un certain nombre d'heures de
travail pour son salaire et peut consacrer le reste à la pratique
privée. Il ne peut pas charger de dépassements d'honoraires
tandis que les médecins en pratique privé peuvent en charger.
Alors les assurés, et toute la population est assurée
à toutes fins pratiques, tentent plutôt d'aller voir les
médecins d'nôpitaux qui eux non plus ne peuvent pas charger de
dépassements d'honoraires et les officiers médicaux
régionaux. Mais il n'y a pas de dirigisme complet. On voit qu'en
Angleterre, par contre, c'est peut-être un petit peu plus
contrôlé sur cet aspect-là, quant à l'endroit
où les médecins peuvent s'établir.
M. BLANK: Maintenant, les cours médicaux sont payés par
les étudiants ou si c'est la gratuité scolaire? Les
médecins, les étudiants qui prennent les cours
médicaux...
M. CASTONGUAY: Oui.
M. BLANK: ... ce sont des cours gratuits ou qu'ils sont obligés
de payer eux-mêmes?
M. CASTONGUAY: franchement, sur cette question-là, M. Blank, il
faudrait que je m'informe...
M. BLANK: Peut-être que le gouvernement va donner des subventions
spéciales à des gens pour faire un contrat pour telle ou telle
année qu'il va pratiquer en dehors de la ville.
M. CASTONGUAY: Je ne croirais pas. De toute façon, ça ne
nous a pas été mentionné. Il y a cinq universités
en Suède...
M. BLANK: Parce qu'ici, au Canada, on nous donne l'armée
canadienne qui va payer les cours aux étudiants médicaux pour
passer cinq ans dans l'armée.
M. CASTONGUAY: En Suède, on n'en a pas entendu parler et pourtant
on a rencontré un certain nombre de personnes. S'il y avait eu quelque
chose de ce côté-là je crois que ça nous aurait
été mentionné ou qu'on l'aurait vu. Il y a cinq
universités en Suède et il y a aussi une certaine immigration
vers la Suède de médecins des pays Scandinaves. Alors même
s'il y a un petit problème de distribution géographique, il ne
semble pas y avoir un gros problème au point de vue effectif.
M. COITEUX (Duplessis): M. Castonguay, vous avez mentionné
tantôt que le remboursement était fait au patient directement sur
une base de 75%, qu'est-ce qui se produit en Suède lorsque quelqu'un n'a
pas les moyens d'acquitter? Par exemple, au point de départ, il sait
qu'il va être remboursé. S'il reçoit un compte de $300
d'un médecin, alors il faut tout de même qu'il l'ait, le
$300 avant d'avoir le reçu pour être remboursé.
M. CASTONGUAY: Cela c'est un des problèmes. On en traite
brièvement dans la question du financement. Nous allons y revenir
après avoir vu les autres soins, vous allez voir que cette
possibilité là n'est pas tellement forte malgré tout.
M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, j'ai à l'esprit une question tout
à fait semblable, je me disais, même si le patient a les moyens de
payer le 75%, qu'est-ce qu'il arrive dans le cas d'un indigent qui n'a pas le
25%? Est-ce qu'il a une dette sur le dos jusqu'à la fin de ses
jours?
M. CASTONGUAY: Je pense que la réponse va ressortir
graduellement. Si nous prenons, premièrement, les soins hospitaliers,
nous voyons que l'hospitalisation est gratuite dans tous les hôpitaux
publics. Quels que soient la nature et la durée de la maladie et les
médecins des hôpitaux étant salariés, la personne,
l'assuré ne reçoit pas de note d'honoraires pour les soins par
exemple, qui impliquent des frais assez élevés. On dit, la
couverture du régime comprend l'hospitalisation dans une salle publique,
les soins médicaux et chirurgicaux, les examens de dépistage de
la maladie, les transfusions de sang, les examens radioscopiques et les
médicaments. Alors ce qui reste en fait, ce sont plutôt des
honoraires, de façon générale, pour les visites à
domicile, au bureau et à la clinique externe; il y a alors juste le 25%
du tarif régulier d'honoraires.
Alors, déjà là, vous voyez que les notes
très élevées sont moins fréquentes. Si ça
créait un problème, l'administration de l'assurance-maladie est
très décentralisée en Suède et confiée,
ainsi que l'administration des autres organismes dans le domaine de la
santé, aux autorités municipales et régionales qui, elles,
sont aussi responsables des problèmes des indigents, des
problèmes d'assistance. Alors si une personne, étant un indigent,
n'est pas en mesure de payer cette partie-là qui, comme on le voit, ne
peut pas être très élevée, à ce moment
l'autorité locale va l'aider à payer cette part qui reste.
M. LE PRESIDENT: Ce que je n'aime pas à première vue dans
le système, lorsque le patient consulte le médecin, c'est qu'il
ne veut pas à la suite contracter aucune obligation quelconque envers le
médecin. Personnellement, j'espère que si le comité vient
à une décision, on trouvera une façon d'avoir un plan
d'assurance-ma- ladie de façon à nettoyer complètement les
relations financières entre patient et médecin une fois, disons,
la guérison complète.
M. CASTONGUAY: Sur ce point-là, il y a déjà une
différence appréciable entre les habitudes, par exemple, dans les
pays comme la Suède, la France et le Canada. Ici, les compagnies
d'assurance transigent de plus en plus directement avec le médecin.
Essayer de faire machine arrière, ce qui n'est pas tellement
désirable dans le sens que vous mentionnez, irait aussi à
l'encontre des habitudes qui sont pas mal établies, habitudes prises de
transiger...
M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, je n'ai pas d'objection personnellement
quant au paiement directement par le fonds d'assurance, si on peut parler ainsi
ou par le patient lui-même. Ce que je peux déclarer, c'est qu'il y
a un règlement définitif et que la maladie ne soit pas suivie
d'une longue relation financière de débiteur et créancier
entre le fonds ou le médecin et le pauvre patient.
M. CASTONGUAY: Oui, oui.
M. LE PRESIDENT: Qu'il soit riche ou non, je pense qu'il est essentiel
que le règlement soit définitif.
M. TREPANIER: M. Castonguay, j'ai cru comprendre tantôt que les
services donnés dans les cliniques externes n'étaient pas
couverts par l'assurance-hospitalisation, est-ce exact?
M. CASTONGUAY: Voici, si c'est un traitement ou une consultation qui
pourrait être faite à domicile ou au cabinet du médecin, on
encourage les gens à aller à la clinique externe justement dans
le sens du problème qui était mentionné plus tôt
afin d'éviter aux médecins de se déplacer constamment.
Là, le médecin traite en clinique externe tout comme il le
ferait au bureau ou au domicile. La différence est sur le plan des
honoraires du médecin» Il n'y a pas hospitalisation du patient. Le
patient, l'assuré, sait qu'il n'y aura pas de dépassement
d'honoraires tandis que, s'il va au bureau de médecin ou si le
médecin va à son domicile, le médecin peut charger plus
que le tarif officiel, enfin il est libre de charger ce qu'il désire.
L'assuré présente sa note et reçoit 75% de remboursement
du tarif officiel. Si le médecin est un médecin de grande
réputation, il peut lui charger le double du tarif officiel.
L'assuré ne reçoit donc que la moitié en fait de la note
d'honoraires comme remboursement et peut-être
moins que la moitié. Tandis que s'il va à la clinique
externe, il est assuré qu'il n'aura qu'à payer 25% du tarif
officiel. Il sait exactement à l'avance ce qu'il sera appelé
à payer.
M. TREPANIER: Ce que je veux dire, c'est plutôt ceci: Est-ce que
les services que reçoit le patient à la clinique externe sont
couverts par l'assurance-hospitalisation contrairement à ce qu'il y a
ici?
M. CASTONGUAY: S'il y a chirurgie mineure et qu'il n'y a pas
hospitalisation, ce genre de traitement-là est couvert tout comme s'il y
avait hospitalisation; et ceci dans le but de ne pas surcharger inutilement
l'occupation des lits.
M. FORTIER: Le patient est obligé, par exemple, il n'y a
pas de restriction dans la loi il est obligé de payer ce que lui
demande le médecin à son bureau privé. Tandis que le
médecin qui va à la clinique externe de l'Hôpital il y a un
tarif, il se doit d'accepter ce tarif-là.
M. CASTONGUAY: Exactement. Est-ce que ça répond à
votre question, M. Trépanier?
M. TREPANIER: Pas tout à fait. Ici actuellement, dans la province
de Québec, lorsqu'un patient va en clinique externe pour un examen
radiologique, il doit payer lui-même les frais de cet examen, si c'est
pour fins de diagnostic. Il y a une situation analogue en Suède?
M. CASTONGUAY: Pas à notre connaissance.
M. TREPANIER: Les services en clinique externe, les services
dispensés par l'hôpital et non par le médecin, à la
clinique externe, ils sont payés par l'assurance-hospitalisation.
M. CASTONGUAY: A notre connaissance, oui. M. RENAUD: Dans la proportion
de 75%.
M. CASTONGUAY: Non, 75% des honoraires du médecin. Les autres
frais...
M. CLOUTIER: Est-ce qu'en Suède, il n'existe pas d'autres
mécanismes qui relèvent de la sécurité sociale qui
paient la partie de 25% qui reste pour les indigents qui ne peuvent pas
rencontrer cette partie-là.
M. CASTONGUAY: La, ce sont les municipalités, les conseils
régionaux ou les conseils de comté, qui ont beaucoup plus de
responsabilités qu'ici au point de vue des indigents, qui paient ces
montants-là, qui remboursent ces montants-là.
M. BERTRAND: C'est une espèce d'assistance publique.
M. CASTONGUAY: Exactement. Au lieu d'être administré par le
gouvernement, ça ne fait pas partie disons des grandes lois sociales, ce
sont plutôt des législations au niveau des villes.
M. CLOUTIER: C'est dans ce sens-là que vous disiez que le
régime est intégré à ce qui existe actuellement, la
collaboration entre les structures actuelles et le plan lors de
l'instauration.
M. CASTONGUAY: Exactement.
M. CLOUTIER: C'est une caractéristique dont notre régime
devra tenir compte.
M. CASTONGUAY: C'est très important. Maintenant, pour les soins
couverts dans les hôpitaux par la sécurité sociale, ils
sont donnés dans les hôpitaux publics par les médecins
attachés à ces hôpitaux. Le malade qui désire
être traité par un médecin privé, doit s'adresser
à un hôpital privé et à ce moment-là, il paie
la totalité des frais. Les statistiques indiquent que le secteur
privé dans l'hospitalisation ne représente que 2.7% du nombre des
lits dans les établissements hospitaliers et 3.3% dans les
établissements pour malades mentaux. Les hôpitaux sont publics et
ce ne sont pas nécessairement des propriétés du
gouvernement central mais plutôt des propriétés des
autorités régionales, municipales.
Les médicaments sont divisés en deux catégories; on
a touché à cette question-là brièvement hier. Vous
voyez, à la page 70, l'on dit que les médicaments prescrits pour
le traitement des maladies chroniques, tel que l'insuline pour le
diabète, cette première catégorie de médicaments
fait l'objet d'abord d'une liste qui est remise à tous les pharmaciens.
Et ces médicaments-là sont entièrement gratuits en autant
que l'assuré social est concerné. Les autre médicaments
prescrits par un médecin, eux, ne sont pas tout à fait gratuits.
En effet, on dit que le malade doit payer les premiers $0.60 pour chaque
ordonnance, et 50% du solde. Vous voyez que c'est un frais dissuasif ou un
frais modérateur qui est relativement élevé, 50% du solde
du coût des médicaments.
Maintenant, il est indiqué que tout comme l'industrie
pharmaceutique, les pharmacies relè-
vent de l'initiative privée. Elles sont la
propriété de pharmaciens tout comme ici. Simplement, un
pharmacien n'a le droit d'être propriétaire que d'une pharmacie et
les médecins n'ont pas le droit, sauf dans certaines régions
éloignées, d'être propriétaires de pharmacies.
M. RENAUD: Ils ont droit à trois dans la province de
Québec?
M. CASTONGUAY: Les soins dentaires. Certains soins dentaires, sont
couverts en cas de maladie s'ils sont donnés par un dentiste dans une
polyclinique du service dentaire publique, dans une école de dentistrie
ou dans un hôpital général. Ici, je crois qu'il est
important de noter que c'est en cas de maladie. En outre, ces soins sont aussi
couverts au cours d'une grossesse, dans les deux cent soixante-dix jours qui
suivent la maternité. On nous a mentionné qu'il y avait une
pénurie de dentistes. Alors on donne les soins dentaires aux
catégories de personnes qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire
à l'occasion d'une maladie et aussi dans les cas de grossesse pour les
femmes. Comme pour les soins médicaux, l'assuré reçoit un
remboursement égal à 75% du tarif d'honoraires officiel. Et on
nous a dit, au moment où nous étions là, que
l'étude de la question d'étendre possiblement les soins dentaires
à plus de personnes se poursuivait à ce moment-là.
Maintenant pour les soins de maternité, les règles
générales de l'assurance-maladie s'appliquent; l'hospitalisation
est gratuite et vous avez le remboursement partiel des soins médicaux et
des médicaments avant et après la grossesse. Si la mère
n'est pas hospitalisée, ce qui libère possiblement un lit, alors
là il y a une allocation qui est versée pour l'aider à
rencontrer les dépenses que ça occasionne, les dépenses
additionnelles. En plus il y a des soins de maternité qui sont
donnés gratuitement dans un réseau de cliniques publiques pour
mères et enfants. Ces cliniques vont conseiller des femmes qui sont
enceintes et, après la naissance, vont aussi contribuer et traiter les
mères et les enfants.
Il y a les frais de déplacement qui sont aussi couverts. Les
frais de déplacement du malade jusqu'à l'hôpital public le
plus rapproché sont remboursés, les frais de déplacement
de l'hôpital au domicile ainsi que pour les consultations auprès
d'un médecin sont remboursés partiellement, soit
l'excédent de $0.80. Ici encore, on tend à vouloir attirer les
personnes vers les hôpitaux plutôt que de laisser les
médecins se promener d'un bord et de l'autre et perdre passablement de
temps. En plus d'être un économie de temps pour les
médecins, ceci permet souvent l'élimination de deux ou trois
consultations étant donné que l'équipement
nécessaire pour les examens, les analyses etc. est disponible.
M. CLOUTIER: Est-ce qu'il existe une décentralisation des
hôpitaux dans le domaine de la maternité, des cliniques de
maternité des petits hôpitaux tels qu'on les conçoit
ici?
M. CASTONGUAY: En Suède, il y a tout un plan d'organisation des
établissements hospitaliers. Ils sont obligés d'investir
beaucoup. Les problèmes ne sont pas tous réglés, mais le
pays a été divisé en un certain nombre de régions
et à l'exception de quelques grands services tout à fait
particuliers, par exemple, qui correspondraient à l'Institut de
neurologie à Montréal, chaque région a une organisation
assez balancée.
Vous retrouverez des hôpitaux généraux possiblement
dans chaque partie de la région de telle sorte que les personnes n'ont
pas à couvrir des distances épouvantables. Vous retrouvez,
après ça, comme services plus spécialisés
rattachés à ces hôpitaux-là ou comme unité
séparée les différents autres services hospitaliers qui
doivent exister. Alors il y a un plan d'ensemble. Tout ne semple pas
complété mais il y a certainement eu énormément de
fait dans ce domaine-là. La même chose pour les cliniques. On
semble encourager énormément la formation, l'établissement
de cliniques permettant aux médecins de se grouper, de se consulter
entre eux, de se tenir plus facilement au courant des développements de
la science médicale et aussi d'établir, à
l'intérieur de leurs cliniques, des laboratoires pour les analyses qui
peuvent être faites là, l'équipement nécessaire pour
les examens.
M. CLOUTIERs Avez-vous fait une étude spéciale des
dépenses d'investissement qui ont été amenées
à être faites par l'instauration d'un régime
d'assurance-maladie dans ces pays-là?
M. CASTONGUAY: Nous ne l'avons pas fait, M. Cloutier. D'un autre
côté, je crois qu'on peut déceler ici, d'après la
façon dont le régime est constitué qu'on n'a pas voulu
tout couvrir. « D'abord dans la catégorie des soins couverts, il y
en a qui ne le sont pas du tout. Par exemple, vous remarquez que les soins
infirmiers à domicile ne semblent pas couverts. Vous avez les soins
oculaires qui ne sont pas couverts. Il n'est pas question de prothèse.
On a voulu couvrir une gamme de soins assez complète et aussi
répartir les dépenses de consommation là où elles
semblaient les plus utiles comme pour les médicaments, par exemple,
pour les maladies chroniques, les soins dentaires, les personnes
enceintes. Alors on a essayé d'utiliser de la meilleure façon
possible les dépenses allant à la consommation alors que dans
d'autres pays, comme en Angleterre, on avoulu tout couvrir. D'un autre
côté, on a réalisé en allant en Angleterre, par
comparaison avec la Suède, qu'il semble y avoir un problème
épouvantable au point de vue équipement. On nous a dit qu'il y
avait encore des hôpitaux qui avaient été construits comme
logement temporaire pour les soldats au cours de la première guerre et
qui sont encore utilisés en 1966, comme hôpitaux. Vous pouvez voir
quel genre de conditions existent. Tandis qu'en Suède, le
problème des hôpitaux ne semble pas du tout présenter ce
genre de situation. Il semble y avoir un équipement hospitalier
adéquat et qui se remplace, c'est-à-dire les plus vieux
établissements sont démolis et remplacés par de nouveaux
et il semble y avoir une distribution à travers le pays beaucoup plus
adéquate. Il y a des foyers pour convalescents, pour personnes
âgées. C'est beaucoup plus balancé. On n'utilise pas dans
les hôpitaux pour traitements actifs des lits pour des convalescents ou
des personnes âgées.
M. FORTIER: Est-ce que les gens en Suède sont très
satisfaits de ce régime-là?
M. CASTONGUAY: Encore là, les opinions que nous avons recueillies
à ce sujet-là viennent des quatre catégories d'organismes
que nous avons visités, le gouvernement ou les organismes de
sécurité sociale, les médecins, les syndicats ouvriers et
les organisations d'employeurs.
A chaque endroit on nous a dit, et c'est consigné dans nos
rapports « qu'il y a des améliorations à faire, mais compte
tenu de nos rescources, compte tenu des disponibilités le système
est probablement le meilleur que nous pouvons nous payer à ce stade-ci.
» Et ça, aussi bien chez les syndicats ouvriers, que chez les
médecins, que chez les employeurs et le gouvernement.
M. MARLER: La question que M. Cloutier a posée me semble
certainement un aspect qui nous intéressera plus tard n'est-ce pas,
parce que fatalement le comité doit se poser la question suivante: Si
nous recommandons un plan d'assurance-maladie, avons-nous l'équipement
suffisant pour répondre à la demande peut-être croissante,
la demande plus grande qui existerait par la suite de la mise en vigueur d'un
tel plan.
Evidemment, ce n'est pas le temps d'en parler. Mais il faudra en parler
éventuellement.
M. CASTONGUAY: Et aussi de la question complémentaire, si vous me
permettez, est-ce que nous engageons dans les dépenses de consommation
une partie telle de nos ressources que pour les dépenses
d'investissements, il n'en restera pas suffisamment dans l'avenir?
M. ROY: Absolument.
M. COITEUX (Duplessis): Est-ce que les soins de maternité
couvrent la fille-mère?
M. CASTONGUAY: Oui. Et les allocations qui sont versées à
la naissance pour le linge qui est nécessaire, la diète
particulière qu'un bébé nécessite, sont
payés aussi bien à la femme mariée qu'à la
fille.
M. ROY: M. Castonguay, est-ce que les soins donnés dans les
cliniques sont semblables à ceux donnés dans les unités
sanitaires?
M. CASTONGUAY: Ici au Québec? M. ROY: Ici au Québec.
M. CASTONGUAY: Savez-vous ça peut vous paraître
étrange, mais je ne suis pas tellement tellement familier avec les soins
qui sont donnés dans nos unités sanitaires. M. Morency
étant du ministère de la Santé, étant au courant de
cette question, il y a eu tellement d'autres choses à couvrir que je
n'ai pas tellement étudié cet aspect-là. Peut être
M. Morency pourrait nous donner certains renseignements.
M. MORENCY: A ma connaissance les unités sanitaires ne donnent
pas de soins tel quel. Il se fait beaucoup de prévention, on va visiter
les familles; à l'occasion il va se donner peut-être certaines
injections, par exemple, certains vaccins et c'est à peu près
tout ce qui se donne. Il ne se donne pas de véritables soins comme ceux
qui peuvent se donner dans une clinique. C'est surtout un travail de
prévention qui se fait par les unités sanitaires.
M. TREPANIER: Les soins dentaires.
M. MORENCY: Cela ne se donne pas à l'unité sanitaire
elle-même. Le principal travail des unités sanitaires en est un de
prévention.
Il y a un bureau où est logée l'unité sanitaire et
les gens, à l'occasion, peuvent amener leurs enfants pour un examen,
etc., mais ausi-sitôt qu'il est question de donner des soins autres qu'un
vaccin, on les réfère soit au médecin, ou à
l'hôpital. On ne donnera pas de soins à l'unité
sanitaire.
M. ROY: M. Castonguay, ma question était de savoir si les soins
donnés dans les cliniques, en Suède, dans les cliniques publiques
sont semblables à ceux donnés dans les unités
sanitaires.
M. CASTONGUAY: Disons que ça serait plutôt les soins
donnés dans nos cliniques externes ici qui correspondraient à ces
soins-là.
Quant au champ d'application, en 1955, environ 70% de la population
était couverte volontairement pas des sociétés
d'assurances auxquelles l'Etat versait des subsides. C'était des
sociétés, dans la majeure partie des cas, du type mutuelle. C'est
à partir de ces mutuelles qu'on a élaboré le régime
couvrant l'ensemble de la population et c'est ce qui explique, comme nous le
verrons un petit peu plus loin, la présence, l'existence de caisses un
peu partout à travers le pays. L'assujettissement au régime est
obligatoire pour tout citoyen suédois ou étranger
domicilié en Suède, à compter du mois où il atteint
seize ans. L'assurance des parents couvre les enfants qui n'ont pas seize ans,
alors c'est la couverture de l'ensemble de la population. Les assurés
doivent s'inscrire à la caisse d'assurance locale ou régionale du
territoire où ils résident. Maintenant, dans les structures
administratives et consultatives, avant de passer au réseau des caisses,
il y a une chose qui est assez intéressante à souligner, c'est le
système un peu particulier de gouvernement en Suède.
Naturellement c'est un régime de mode démocratique, il y aun
parti au pouvoir, il y a un parti d'opposition mais il est noté, et
à ce sujet nous avons référé à un texte
officiel pour ne pas donner des impressions mais essayer de donner le portrait
le plus exact.
A la page 72, on note à la fin du premier paragraphe, qu'il est
important de se rappeler que les administrations gouvernementales locales
jouent un rôle significatif et, de façon particulière,
elles se sont vues confier les tâches essentielles dans le domaine de la
santé nationale. Cela c'est une première chose, les gouvernements
locaux jouent un rôle important dans le domaine de la santé.
Maintenant au niveau, disons, du gouvernement central, les
ministères suédois sont responsables au point de vue politique,
ils établissent les grandes lignes des politiques qui orientent
l'activité gouvernementale, mais leur activité principale,
l'activité principale des ministères est reliée au domaine
de la législation et des estimations budgétaires.
Maintenant, si on passe plus loin, au dernier paragraphe, et c'est
là que ça ressort plus clai- rement, on dit: le gouvernement
national suédois a ceci de particulier que la majeure partie de
l'administration n'est pas confiée aux ministères eux-mêmes
mais plutôt à des organismes autonomes, centralisés, soit
les commissions nationales. Ces commissions contrôlent et dirigent
l'activité gouvernementale et les diverses institutions publiques,
conformément aux directives émanant de la législation et
des décisions du Cabinet. Les commissions ne relèvent pas d'un
ministre mais de la Couronne. Le ministre des Affaires sociales n'est pas, par
conséquent, dans une position d'autorité relativement au
directeur général de la commission nationale de la santé.
Ce dernier relève en effet du roi en conseil. Les commissions nationales
possèdent ainsi une large mesure d'autonomie. Alors c'est une chose qui,
je crois, dans l'étude d'un régime comme celui-ci doit être
mentionnée. Et là, il y a deux commissions qui se partagent le
domaine de la santé, la commission nationale de la santé, la
commission nationale de l'assurance sociale. La commission nationale de la
santé contrôle les services nationaux sanitaires et
pharmaceutiques et a comme fonction première de contrôler le
traitement des malades dans les hôpitaux privés et publics. En
outre, cette commission, a la juridiction complète sur le personnel
médical, les hôpitaux et pharmacies et sur les autres
institutions. Il n'y a pas d'organisme qui correspond aux collèges en
Suède, les collèges des médecins, des pharmaciens, c'est
cette commission qui joue le rôle du collège.
M. MARLER: Il faut discipliner un médecin qui...
M. CASTONGUAY: Contrôler l'admission à la pratique,
etc.
M. FORTIER: Est-ce qu'il y a des médecins dans cette
commission-là?
M. CASTONGUAY: Oui, le directeur général est un
médecin de grande réputation. Maintenant, la commission nationale
de l'assurance sociale est chargée de l'administration du régime
d'assurance-maladie. Alors, vous voyez, les tâches sont réparties
bien précisément entre les deux commissions, l'une qui s'occupe
de planification, de mettre en application la législation, le
contrôle de l'exercice, etc. L'autre remplit la fonction de l'assureur,
la commission nationale d'assurance-maladie.
M. MARLER: Est-ce que je dois comprendre, M. Castonguay, que dans ces
domaines-là la commission qui administre le régime d'as-
surance-maladie est autonome dans le sens qu'elle décide elle
seule si les primes doivent être augmentées ou non?
M. CASTONGUAY: Au point de vue de l'augmentation...
M. MARLER: En effet, la commission n'est pas autonome dans le sens
qu'elle envoie son compte au gouvernement lui disant: j'ai besoin de $20
millions ou $100 millions, je ne sais pas quoi, et ainsi peut être
défoncer le budget du gouvernement.
M. CASTONGUAY: Elle n'a pas pleine autonomie financière,
justement. Ceci en plus de la législation et des contrôles
budgétaires, est réservé aux ministères et au
gouvernement. Ce sont les deux principales fonctions réservées
aux ministères et au gouvernement, celle de la législation,
l'application des règlements nécessaires à l'application
de la législation et les contrôles budgétaires.
Après ça, en-dessous de cette préoccupation-là,
ça tombe dans les commissions.
L'administration du régime même est
décentralisée, étant donné que l'on a
continué les caisses telles qu'elles existaient, d'une part, par suite
de la nécessité d'avoir des bureaux régionaux,
étant donné le système de remboursement des assurés
et aussi pour établir le lien avec les autorités locales qui
s'occupent plus particulièrement des indigents.
Il y a donc trois raisons qui existent et pour lesquelles il y a
décentralisation. Alors on n'a pas perpétué, comme il
semble être le cas en France jusqu'à un certain degré, le
réseau des caisses pour la simple raison de conserver ce qui existait.
En Suède, il semble y avoir une raison bien particulière pour
cette situation-là.
Il y a des caisses régionales en premier lieu et il y a des
caisses locales. On indique qu'il y a 28 caisses régionales, 630 locales
et que chaque caisse a un conseil d'administration, ce qui intéresse
plus particulièrement les gens au niveau local à la bonne
administration du régime d'autant plus, comme nous le verrons plus loin,
que les taux peuvent varier d'une région à l'autre selon
l'efficacité de l'administration.
M. ROY: M. Castonguay, est-ce que les frais d'administration de cette
caisse régionale et locale sont élevés?
M. CASTONGUAY: Pas tellement, non. Ici, je ne crois pas que ce soit
indiqué clairement, nous n'avons pas eu tellement de chiffres, mais si
ma mémoire est bonne, dans nos rapports nous indiquons 6% des
prestations versées, ce qui n'est pas tellement élevé.
Maintenant, on indique justement la composition de la caisse nationale
d'assurance à la page 74, on dit qu'elle a un caractère
représentatif. Il en est de même des caisses régionales et
locales. Alors il y a un effort de fait pour permettre à toutes les
parties intéressées de participer en autant que c'est
possible.
Quant au financement, l'assurance-maladie est financée, comme on
l'indiquait hier, ça c'est la règle générale, par
les assurés, les employeurs et par l'Etat. On voit que
l'évaluation des coûts est effectuée par la commission
nationale de l'assurance sociale pour chaque caisse régionale. Le taux
de contribution de l'assuré varie selon la caisse à laquelle il
appartient. Si dans une région les taux sont plus élevés,
bien les assurés auront tendance à demander de l'administration
de la caisse quelles en sont les raisons. Il peut s'agir d'inefficacité
au point de vue administratif; ça peut, par contre, être aussi
dû à d'autres raisons: par exemple dans les régions
à l'extérieur des villes, où il y a eu un exode vers les
villes, il peut y avoir une plus grande concentration de personnes
âgées qui nécessitent plus de soins médicaux. A 1
'intérieur des villes, dans un quartier moins à l'aise, il peut y
avoir peut-être un état de santé un peu moins
élevé. Ceci peut avoir une certaine influence sur les taux.
M. COITEUX (Duplessis): Est-ce que ces fonctionnaires-là qui sont
payés par l'Etat, est-ce qu'ils ont un entraînement
spécifique en pré-vision que ça devienne une profession,
un genre de profession? Est-ce que c'est une option qu'un jeune
étudiant, par exemple, peut se diriger vers l'administration
supérieure au conseil?
M. CASTONGUAY: Bien, dans l'administration des caisses nous avons
visité par exemple la caisse qui couvre la ville de Stockholm. Au lieu
d'avoir un grand nombre de petites caisses, il y a juste une grande caisse
régionale. Cette caisse semble être administrée d'une
façon aussi efficace que n'importe quelle entreprise privée. Il y
a toutes les taches, il y a des comptables, il y a des avocats, il y a des
médecins-conseil pour faire la vérification des demandes de
paiements, il y a des officiers de personnel, il y a un personnel complet comme
on pourrait en retrouver dans une société d'assurance, par
exemple. Le tout semble très efficace comme administration.
La contribution pour l'assurance-maladie est payée par toutes les
personnes qui sont inscrites auprès d'une caisse mais il y a deux
distinc-
tions: les personnes qui ont atteint 67 ans ou qui reçoivent une
pension en vertu du régime général de rentes ne
contribuent pas et elles demeurent assurées. Il en est de même
pour les personnes dont le revenu imposable au cours d'une année est
inférieur à $480. Cette disposition inclut en même temps
les chômeurs ou les personnes qui ne sont que des travailleurs
occasionnels. Alors le montant de la contribution est fixé par la
commission d'assurance sociale pour chaque caisse après consultation et
la...
M. LE PRESIDENT: Cela veut dire que les rentiers sont obligés de
payer.
M. CASTONGUAY: S'ils ont un revenu imposable qui dépasse $480 et
s'ils reçoivent par contre une pension en vertu du régime
général de rentes, ce qui signifie qu'ils ont été
des travailleurs à un moment donné, là ils ne paient pas,
ils sont exemptés.
M. KENNEDY: Même s'ils sont bien fortunés, même s'ils
sont des gros... ils sont exempts du fait qu'ils reçoivent une pension
du régime de rentes.
M. CASTONGUAY: Ils paient indirectement en ce sens que l'Etat contribue.
On voit, à la page 75, que la contribution de l'Etat
s'élève à 50% du coût de l'assurance-maladie,
exemption faite de l'hospitalisation. Mais dans l'hospitalisation, on a vu que
les assurés étaient traités gratuitement lorsqu'ils se
présentent à l'hôpital. L'Etat verse des subsides distincts
aux autorités régionales et locales pour les hôpitaux et en
plus de ça, les hôpitaux étant la propriété
de ces autorités locales et régionales, ces autorités ont
un pouvoir de taxation qui est beaucoup plus fort à ma connaissance, que
le pouvoir de taxation des municipalités, par exemple, ici, étant
donné qu'elles ont une plus forte responsabilité dans le domaine
de la santé. Alors, les personnes fortunées naturellement sont
appelées à payer à deux ou trois endroits, de façon
indirecte peut-être, mais à deux ou trois endroits. Et s'ils ont
été des travailleurs à un moment donné, on
considère qu'ils ont apporté leur contribution à
l'économie de l'Etat, du pays et que, rendus à 67 ans, s'ils ont
droit à une rente, au lieu de hausser le montant de la rente pour leur
permettre de payer les primes à l'assurance-maladie, on tient compte
dans le montant de la rente qui leur est versée du fait qu'ils n'ont pas
de paiement à faire pour l'assurance-maladie.
M. CLOUTIER: Est-ce qu'il y a une relation entre ce $480 et leur loi de
l'impôt sur le revenu ou le régime de rentes?
M. CASTONGUAY: Régime de rentes. En fait, ici dans le
régime de rentes, il y a un montant de $600 qui correspond à ce
$480, alors c'est la même relation.
M. KENNEDY: M. Castonguay, quand vous parlez du $480 imposable, c'est
imposable en vertu du régime de rentes, non pas imposable en vertu de la
loi de l'impôt sur le revenu?
M. CASTONGUAY: Non, imposable en vertu du régime de rentes, ou de
la sécurité sociale. On a toujours la même tranche de
revenu en Suède qui est sujette à des contributions pour les
assurances sociales de diverses sortes, que ce soit pour les allocations
familiales, que ce soit pour les accidents du travail, que ce soit pour
l'assurance-chômage, l'assurance-maladie, les rentes. Les
employés, les employeurs, l'Etat contribuent à toutes ces
assurances sociales et toujours en ce qui a trait aux employés et aux
employeurs, sur la même tranche de revenu, le premier $480 étant
exempt. Entre $480 et $6,000 contribution, et au-dessous exemption de
contribution.
M. LE PRESIDENT: Quand vous parlez de revenu imposable, est-ce qu'il y a
déduction par exemple pour les enfants?
M. CASTONGUAY: C'est le revenu brut du travail. Nous avons d'ailleurs le
texte de la loi suédoise, leur loi d'assurance sociale nationale
traduite en anglais. Sur ces questions-là, s'il était
nécessaire à un moment donné de préciser plus
exactement, c'est une excellente traduction, la loi est excessivement
claire.
Maintenant les employeurs eux aussi contribuent et au lieu de contribuer
pour l'assurance-maladie un montant qui est identifié pour chacun de
leurs employés, ils contribuent 1.5% du total des salaires versés
à leurs employés, sauf que la partie du salaire de
l'employé excédant $4,500 n'est pas comprise dans le calcul.
Alors, l'employeur prend sa liste de salaire et exclut tous les montants
au-dessus de $4,500 et, chaque mois, il envoie 1.5% de ce total comme
contribution pour l'assurance-maladie. Et la contribution de l'employeur est
répartie entre l'assurance-maladie proprement dite et les allocations de
maladie, parce qu'il y a des allocations en Suède en cas de maladie. La
sécurité sociale prend tous ces revenus-là, provenant
des trois sources, et les alloue entre les diverses caisses.
Nous avons dit quelques mots de la profession médicale au sujet
de leur statut. La question des effectifs maintenant est assez
intéressante.
A la page 76, l'on indique que les effectifs sont jusqu'à un
certain point insuffisants. D'ailleurs la présence des 800 officiers
médicaux régionaux en est un indice, puisqu'on nous a dit que ce
n'était pas une partie intégrante du système. On
préfère que les médecins s'établissent librement et
on n'aime pas être obligé de les encourager à
s'établir dans une région donnée et de travailler à
salaire, mais c'est un mal nécessaire. Il y a environ 400 nouveaux
médecins qui graduent chaque année dans leurs cinq
facultés de médecine. Selon les estimations officielles, le
nombre annuel de nouveaux médecins devra doubler entre 1970 et 1980. On
voit donc qu'il y a aussi, en prévision de l'avenir, certains
problèmes quant aux effectifs médicaux et il faut remarquer aussi
qu'en Suède, leur population est beaucoup plus stationnaire qu'ici.
Enfin, la population est restée à 7 l/2 millions depuis une
cinquantaine d'années.
M. ASSELIN: Les officiers médicaux régionaux, quelle
formation professionnelle ont-ils?
M. CASTONGUAY: De façon générale, ce sont des
omnipraticiens qui, au début de leur carrière, au lieu d'aller
s'établir dans les grands centres et d'être, jusqu'à un
certain point en concurrence avec les médecins de plus grande
renommée qui ont une pratique établie, pourront accepter d'aller
faire un stage pour un certain temps comme officier médical
régional. Mais ce sont des médecins au même titre que les
autres.
M. FORTIER: Est-ce qu'ils sont payés à salaires fixes?
M. CASTONGUAY: Ils ont un salaire mais, pour ce salaire-là, ils
s'engagent à travailler un certain nombre d'heures. Une fois ces heures
effectuées, ils sont libres de pratiquer à honoraires.
M. BERTRAND: Est-ce qu'il y a une raison particulière que la
population soit stationnaire?
M. CASTONGUAY: Disons que là, franchement, là il serait
assez difficile de répondre à cette question, M. Bertrand. Je
pense qu'il y a une foule de raisons qui entrent dans une telle question. Je
dirais que le pays encourage l'aug- mentation des naissances, et malgré
tout, il ne semble pas que l'on ait beaucoup de succès, il y a les
moeurs qui sont différentes, c'est peut-être une cause, ce n'est
certainement pas à cause de la pauvreté dans le pays parce qu'il
semble y avoir un niveau de vie assez élevé partout, ça ne
semble pas être disproportionné,...
M. BERTRAND: Je pense que c'est la même chose au Danemark,
d'ailleurs, que j'ai visité et où il semble y avoir de l'aisance
partout. Même aux entrées de Copenhague, les taudis ça
n'existe pas, c'est l'Etat qui a réparé les vieilles maisons, les
vieilles masures et c'est loué à des prix excessivement bas. Moi,
j'ai été épaté de ces petits logements-là.
Maintenant la population n'a pas beaucoup augmenté au Danemark quand
même, c'est presque stationnaire.
M. CASTONGUAY: Le Danemark est très petit comme territoire. En
Suède, M. Morency mentionne quelque chose, c'est qu'il y a une crise du
logement qui est assez forte pour différentes raisons. On a
affecté beaucoup plus d'investissements dans le développement de
la production et dans certains autres secteurs et il semble que le secteur du
logement a souffert, il y a réellement une crise du logement en
Suède. On nous a dit qu'un couple qui se marie, pour avoir un logement
de deux ou trois pièces, attend assez longtemps avant de l'obtenir, il y
a peut-être un autre facteur à additionner.
M. BERTRAND: Nécessairement dans la préparation de leur
budget c'est plus facile que dans un pays où la population augmente
graduellement et se multiplie avec les années.
M. CASTONGUAY: Oui. Pour eux.
M. BERTRAND: C'est plus facilement applicable et prévisible.
M. CASTONGUAY: Il y a un problème pour eux, c'est que la partie
de la population inactive est plus élevée qu'ici au Canada et que
dans la province de Québec. L'immigration, par exemple, se fait
généralement à partir de 35 ans en descendant. Les
immigrants arrivent avec leurs enfants. Il ne semble pas y en avoir tellement
au-delà de 45 ans, d'après les statistiques du ministère.
Alors c'est un apport considérable à la population active, que la
Suède n'a pas.
En plus de la question des effectifs médicaux, il est
mentionné qu'au point de vue de l'équipement hospitalier, bien
qu'il soit excellent qu'il n'est pas tout à fait suffisant.
En ce qui a trait aux dentistes, aux autres
professions de la santé, on nous a dit qu'il y avait certainement
un manque de dentistes au moment où le régime a été
établi. La question est étudiée de nouveau.
Maintenant, on souligne le fait qu'il n'y a pas d'Ordre ou de
Collège des médecins. Il ne semble pas que ceci crée de
difficultés. Il y a une seule association qui groupe tous les
médecins et c'est un facteur qui, je crois, ajoute
énormément à la stabilité des relations entre la
sécurité sociale et les médecins.
On va voir qu'en Belgique, plus tard, une des cause probables des
difficultés c'est la multiplicité des organisations qui groupent
les médecins. Et jusqu'à un certain point on retrouve une
situation un peu analogue ici, dans la province de Québec.
M. FORTIER: Avant déterminer, M. Castonguay, je remarque un
chiffre qui est marqué ici qu'il existe quinze lits d'hôpitaux par
1,000 habitants. C'est beaucoup ça?
M. CASTONGUAY: Bien là, il faut remarquer là...
M. FORTIER: Juste pour l'information là?
M. CASTONGUAY: ...ce que ça comprend. Si on inclut les lits pour
convalescents, si on inclut les lits pour malades chroniques etc. ce n'est
peut-être pas si élevé.
M. FORTIER: Ah bon! M. ROY: M. Castonguay... M. CASTONGUAY: Oui.
M. ROY: ...est-ce que l'assurance-hospitalisation est financée,
en Suède, par les contribuables, les employeurs et l'Etat comme
l'assurance-maladie?
M. CASTONGUAY: Partout, dans tous les pays que nous avons visités
l'assurance-hospitalisation en fait n'est pas séparée. C'est une
partie intégrante de l'assurance-maladie. En fait, à mon avis, si
on fait ici une distinction entre l'assurance hospitalisation et la balance,
c'est que dans le temps elle a été établie en premier
lieu. Mais, à mon avis, c'est une partie intégrante de
l'assurance-maladie. Et si elle n'en était pas une partie
intégrante, il y a un grand danger que la même situation qui
existe en Angleterre se reproduise, c'est-à-dire le fractionnement et
les conflits. Le tout doit, à mon avis, être élaboré
de telle sorte qu'aussi bien en ce qui a trait à la planification,
à l'administration des services hospitaliers,, des unités
sanitaires, la planification et l'élaboration de l'équipement
hospitalier ça relève disons du ministère, mais le tout ne
peut pas être conçu séparément de la planification
que le ministère va faire en ce qui a trait aux besoins d'effectifs en
médecins etc. De la même façon, quant au fonctionnement de
l'assurance-maladie, distinguer entre l'assurance-hospitalisation et les autres
parties de l'assurance, serait une cause de difficultés futures
sérieuses parce que l'on établirait des cloisonnements
artificiels, à mon avis.
Le médecin ne pratique pas à l'extérieur de
l'hôpital. En fait, le médecin peut pratiquer aussi bien à
l'intérieur qu'à l'extérieur et tout ça doit
être tenu en ligne de compte. On ne peut pas sectionner. En Europe c'est
la constatation générale et du côté du financement
il n'y a donc pas de distinction, l'employé, l'employeur, l'état
contribuent au même titre à l'assurance-hospitalisation qu'aux
autres secteurs de l'assurance-maladie.
M. MARLER: Vu ce qu'il existe actuellement dans le Québec, M.
Castonguay, ce serait difficile n'est-ce pas de fusionner le tout, si nous
envisageons une contrubution de l'individu?
M. CASTONGUAY: Au point de vue du financement, il serait peut être
difficile d'imposer une contribution pour l'assurance-hospitalisation, d'autant
plus qu'ici l'équipement hospitalier diffère de celui de la
Suède. En Suède, il semble y avoir excessivement peu de chambres
privées. Ici il y a beaucoup de chambres privées, il y a un
certain nombre de salles communes. Tous les gens, en ce qui à trait
à l'assurance-hospitalisation sont traités exactement sur le
même pied. Donc, que ce soit financé à même les
revenus généraux du gouvernement, il n'y a pas tellement
objection, à mon avis. Si le patient veut avoir des soins meilleurs, ou
une meilleure chambre, là il doit payer la différence. Alors, du
côté du financement, que la formule soit différente,
ça ne devrait pas empêcher l'intégration de
l'assurance-hospitalisation à l'assurance-maladie. Même si le mode
de financement était différent.
M. MARLER: La difficulté que je vois évidemment, je n'ai
pas pensé très sérieusement aux conséquences, mais
actuellement on peut dire que l'hospitalisation, les frais se partagent entre
le provincial et le fédéral. Je sais que nous avons exercé
la formule d'option, mais disons à toutes fins pratiques que les frais
sont
partagés entre deux gouvernements. D'après les
conversations qu'on a eues jusqu'à date, on envisage contribution de
l'employeur, contribution de l'employé, contribution possible des
personnes qui ne sont ni employeurs ni employés et aussi du gouvernement
provincial, et comme on l'a dit hier soir, du gouvernement
fédéral. Donc, si le financement se fait par d'autres goupes,
dans les deux cas, je vois difficilement en pratique, comment vous pourrez
fusionner les deux services. Parce que nous sommes souvent en face du
problème: Est-ce que ce coût-là ou, ces frais-là
s'appliquent à l'hospitalisation? Est-ce que ça s'applique aux
soins médicaux?
Je pense qu'il y a fatalement une difficulté, évidemement,
je n'ai pas eu l'avantage d'avoir pensé à cette
question-là bien profondément, mais à première vue
il y a une difficulté de comptabilité qui sera assez difficile en
pratique.
M. CASTONGUAY: Cela peut naturellement donner une certaine lourdeur
administrative, la nécessité d'une comptabilité distincte,
mais même si l'assurance-hospitalisation était maintenue
séparément de l'assurance-maladie, il faudrait des
comptabilités distinctes. Si c'était intégré
à tout point de vue, au point de vue administratif, mais que les
comptabilités demeurent distinctes, est-ce qu'il ne pourrait pas y
avoir...
M. MARLER: Mais prenons donc la radiographie comme un exemple. On en
parlait hier soir. Si le médecin envoie son patient pour occuper un lit
dans l'hôpital, c'est l'hospitalisation qui le paie, actuellement. Si par
contre la radiographie se fait en dehors de l'hôpital, un service qui est
assez bien organisé dans les grands centres, là ça
passerait sur le dos des soins médicaux, et donc il y aura toujours une
espèce de complication entre les deux systèmes.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. MARLER: Evidemment, ce ne sont pas les gros problèmes, ce sont
les petits problèmes d'administration qui viendront nous embêter
continuellement.
M. CASTONGUAY: D'un autre côté, on a déjà
dans les deux jours, la journée d'hier et celle d'aujourd'hui,
décelé certaines choses ou certains gestes possibles qui peuvent
compliquer énormément la vie et l'efficacité. Alors, il
s'agit de peser, à mon avis, les difficultés possibles qui
pourraient résulter si les deux adminis- trations étaient
séparées par rapport aux difficultés administratives qui
pourraient résulter d'une administration conjointe.
M. MARLER: Et évidemment, je pense qu'il y a une distinction
à faire entre l'administration commune et une comptabilité. Il ya
beaucoup d'autres facteurs aussi à tenir en ligne de compte par exemple
sur le contrôle, le contrôle disons, des soins donnes, assez
souvent si les deux administrations sont séparées, vous allez
voir si un médecin abuse disons, en autant qu'il traite son patient
à l'extérieur de l'hôpital et là, si le patient est
hospitalisé, et sous une administration différente, vous n'aurez
pas l'histoire antérieure. Alors, au point de vue seulement des
contrôles, ça pourrait être excessivement difficile. Si une
personne est hospitalisée et que c'est une administration distincte,
vous ne pouvez pas référer au diagnostic antérieur qui
avait été fait, par contre c'est une continuité et vous
pouvez peut-être exercer un contrôle financier un peu plus
efficace, et il y a une nécessité de contrôle, il y a
certains contrôles, il y en a des formes élégantes, il y en
a des formes qui ne touchent pas à la liberté d'exercer du
médecin, et étant donné les sommes... il n'y a pas moyen
d'éviter ces formes de contrôle-là. Sectionner
l'administration, c'est réduire à mon avis, l'efficacité
de ces contrôles-là de la moitié.
M. RENAUD: Vous dites que ça pourrait se faire, malgré un
programme de comptabilité différente.
M. CASTONGUAY: A ce sujet-là si c'est une suggestion que je
pouvais faire au comité je crois qu'il serait intéressant pour le
comité de convoquer à un moment donné le directeur de
l'assurance-hospitalisation pour voir quelles sont ses vues. C'est lui qui doit
faire face à tous ces problèmes quotidiens, ces problèmes
pratiques, et je n'aimerais pas me prononcer et insister trop sur un point
alors que lui peut avoir des vues bien différentes des miennes, ayant
vécu tous ces problèmes-là.
M. CLOUTIER: Et en Suède et dans ces pays que vous avez
visités il n'y a pas eu coïncidence entre l'instauration des deux
régimes, l'assurance hospitalisation et l'assurance-santé.
M. CASTONGUAY: Les mutuelles couvraient les divers soins hospitaliers,
médicaux etc... et on a continué le tout dans le régime.
On n'a pas dit au moment où le régime fut établi: On prend
uniquement l'hospitalisation. On a pris toute la
gamme des soins déjà couverts, les soins oculaires ne sont
pas couverts. On a fait bien attention d'établir des tickets
modérateurs, des frais dissuasifs, où c'était possible et
on a fait attention aussi, par exemple, de ne pas payer tout le coût des
médicaments. On a préféré donner un éventail
plus complet de soins que de passer par tranches et tout couvrir lorsqu'une
tranche est englobée. C'est une approche différente.
M. LE PRESIDENT; Est-ce qu'il y a autre chose à ajouter sur la
Suède, messieurs?
M. CASTONGUAY: Sur la Suède, il y a la question de la demande et
du contrôle des soins. Si vous le permettez je peux vous en dire quelques
mots rapidement. Cela apparaît à la page 77. On voit que la
moitié des consultations médicales sont données dans les
services externes des hôpitaux et cette proportion ne cesse d'augmenter,
et ils y tiennent énormément.
M. LE PRESIDENT: A cause de la gratuité peut-être.
M. CASTONGUAY: D'une part et aussi pour une plus grande
efficacité.
M. LE PRESIDENT: Les deux peut-être.
M. CASTONGUAY: Naturellement les gens ont tendance à se faire
traiter en clinique externe étant donné qu'ils sont
assurés quant aux honoraires, c'est 25% du tarif officiel, et c'est
voulu comme ça. Le gouvernement, s'il avait intérêt
à repousser les gens des cliniques externes, dirait; « Les
personnes devront payer, tout comme s'ils vont au bureau du patient, le
dépassement d'honoraires que le médecin jugera approprié
». On sent qu'il y a réellement ici le jeu des frais dissuasifs et
il y a relation entre les soins médicaux et l'hospitalisation. On voit
la nécessité de coordonner les deux, une tentative d'orienter la
population vers les cliniques externes.
C'est un exemple de coordination des services pour une plus grande
efficacité.
On mentionne aussi que la pratique en groupe tend à se
développer par suite de l'existence du ticket modérateur pour les
soins médicaux courants, la liberté tarifaire des médecins
en pratique privée et une certaine pénurie de médecins et
d'hôpitaux. Les autres formes de contrôle sur la demande des soins
sont très limitées. Il ne semble pas y avoir de contrôle,
d'examen de la pratique des médecins, qui soit excessivement
poussé. Il semble y avoir une très bonne compréhension de
la part des médecins et de la population aussi. Les contrôles ne
sont pas tellement poussés, malgré tout les médecins ne
semblent pas se plaindre d'être appelés à donner des soins
qui ne sont pas nécessaires. Du côté des
médicaments, là c'est un peu plus difficile et on a vu que les
frais modérateurs étaient très élevés. On
dit: « Le contrôle de l'augmentation du coût des
médicaments en vertu du régime d'assurance-maladie semble
constituer un des seuls problèmes majeurs auquel la Commission nationale
d'assurance-sociale doit faire face », un des seuls problèmes
majeurs. Il ne semble pas en effet que le contrôle au moyen des tickets
modérateurs soit suffisant. Les différentes possibilités
visant à solutionner ce problème sont présentement
à l'étude. Il y avait une commission au moment où nous
sommes allés qui étudiait cette question.
M. LE PRESIDENT: Alors en somme pour ce qui est, il y a la
liberté de l'assuré de choisir son propre médecin, d'aller
chez le médecin que je pourrais appeler conventionné ou le
spécialiste ou celui qui va lui charger des honoraires supérieurs
au tarif habituel et la liberté pour le médecin de s'installer
n'importe où. Evidemment s'il s'installe dans un endroit où il y
a déjà, disons trop de médecins, il le fait à ses
propres risques. Peut-il devenir médecin conventionné s'il veut
se placer à un endroit où il y a déjà assez de
médecins?
M. CASTONGUAY: Bien, il semble qu'on ne ferme pas à ce
moment-là les régions directement comme on le fait en Angleterre,
mais, étant donné que le médecin va être
obligé de survivre en concurrence avec ses compères, il y a un
équilibre qui s'établit jusqu'à un certain point.
M. LE PRESIDENT: Il y a une loi économique...
M. CASTONGUAY: Exactement.
M. TREPANIER: Dans une région où il y a beaucoup de
médecins, où il y a un nombre plus que suffisant, est-ce qu'il
peut y avoir des officiers médicaux régionaux?
M. CASTONGUAY: Non. Les officiers médicaux régionaux,
d'après ce qu'ils nous ont dit, c'est une formule qu'ils sont
obligés d'accepter comme un moindre mal pour solutionner le pro-
blème des régions où il n'y a pas suffisamment de
médecins.
M. FORTIER: Dans une région désignée?
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions qu'on veut poser à
M. Castonguay concernant le système en Suède? Sinon, je pense que
nous devons nous réjouir du progrès que nous avons
réalisé ce matin et remettre à cet après-midi
à trois heures la suite de ce volume. Donc, s'il n'y a pas d'objection,
nous allons dire que la séance du comité est ajournée
à trois heures.
Reprise de la séance à 3 h 42 p.m.
M. LE PRESIDENT (Roger Roy): A l'ordre, messieurs. Je demanderais
à M. Castonguay de continuer les renseignements sur les régimes
d'assurance maladie en certains pays.
M. CASTONGUAY: Ce matin nous avons passé la description du
régime de la Suède. Il semblerait que pour éviter la
confusion, que le mieux serait maintenant d'aller à ladescription du
régime de la France qui est du même type, il est peut-être
un peu plus complexe dans son organisation. La description en est donnée
à la page 33 du volume.
Maintenant, si vous me permettez ici, il y a une certaine série
de choses qui sont analogues aux dispositions que nous retrouvions dans le
régime de la Suède. Je pense qu'il n'est pas tellement
intéressant de savoir si le pourcentage des frais dissuasifs est 80% en
France, alors qu'il est de 75% en Suède. Ce genre de
détail-là, si vous voulez, je peux les passer et puis souligner,
en ce qui a trait à la France, les caractéristiques qui sont plus
intéressantes et qui diffèrent de ce qu'il y a en
Suède.
Alors en France, une des premières caractéristiques, on
l'a mentionné hier, c'est qu'il y a des régimes distincts selon
les catégories de travailleurs. Vous avez donc un régime par
exemple pour les travailleurs salariés, vous avez un régime pour
les travailleurs agricoles, vous avez un régime, par exemple, pour les
travailleurs des mines et vous avez en outre une certaine série de
régimes. Je crois qu'il y en a sept ou huit à ma connaissance.
Ici, ce que nous faisons, c'est l'étude du régime
général qui couvre les salariés, c'est-à-dire la
plus grande partie, c'est le régime le plus important au point de vue du
nombre de personnes assurées.
Ce régime a origine en 1928 et il a été
modifié à deux reprises. Ceci indique le besoin d'adaptation, le
besoin d'évolution. Il y a eu une refonte assez sérieuse en 1945
et, on indique à la page 34, que l'on a abondonné
définitivement le principe du remboursement intégral au profit du
principe d'imposer des frais de dissuatifs. Malgré cette refonte qui, en
1945, devait permettre l'élargissement du régime pour couvrir
éventuellement toute la population et aussi permettre, disons, que la
profession médicale participe plus complètement au régime,
elle eut un succès limité. En mai 1960, il y a eu une nouvelle
refonte du régime d'assurance-maladie et là il y a de nouveaux
éléments qui ont été introduits dans le
régime ou de nouveaux principes qui ont été
consacrés plus clairement. On va les voir graduellement à mesure
qu'on va en prendre la description.
Dans le régime d'assurance-maladie français, il y a deux
parties: prestations en nature et paiement de salaire en cas de maladie. Les
prestations en espèce ou plutôt c'est l'inverse, prestations en
nature, soit remboursement des frais en cas de maladie, et prestations en
espèce, soit paiement d'un salaire en cas de maladie. Notre étude
a porté toujours, pour être logique avec la présentation,
sur les remboursements effectués en cas de maladie.
Alors de façon générale, l'assurance-maladie
comporte la couverture des frais de médecine générale et
spéciale, des frais des omnipraticiens, des spécialistes, des
soins et des prothèses dentaires, des frais pharmaceutiques, des
appareils de diverses sortes, des frais d'analyse, des examens de laboratoire,
des frais d'hospitalisation et de traitements dans des établissements de
cure, des frais de transport et des frais d'intervention chirurgicale pour
l'assuré et les membres de sa famille. En fait, c'est la couverture de
tous les soins possibles, mais avec frais dissuasifs ou frais
modérateurs.
Les règles générales ou fondamentales, disons,
permettant le respect de l'exercice libre de la médecine sont
consacrées, l'assuré choisit librement le médecin, le
patient peut choisir son médecin. Le médecin est libre de
prescrire, etc.
Il y a une particularité, une chose que l'on ne retrouve pas en
Suède dans ce que nous avons discuté, c'est que la France est
divisée en territoires aux fins des conventions avec les
médecins. On a dit un mot à ce sujet hier. Dans certains
territoires et dans certains départements les médecins ont
refusé, ou il n'y en a pas tellement un grand nombre qui ont
décidé d'adhérer au régime. Dans ces cas, il y a
des tarifs dits d'autorité qui sont imposés, c'est-à-dire
que les assurés sociaux sont remboursés à un tarif moindre
que dans un département où les médecins se sont
conventionnés
en majorité. Naturellement la population, dans un tel
département, impose une certaine pression auprès des
médecins pour qu'ils se conventionnent. Il y a un jeu de ce
côté-là. On permet aussi dans un département la
convention individuelle. Alors, même si les médecins, comme bloc,
refusent de signer la convention, le médecin peut signer
individuellement une convention et les personnes qui se font traiter par lui
sont remboursées au tarif régulier.
Vous avez donc un jeu pour forcer la profession d'une certaine
façon, en ce sens que même si les dirigeants d'un syndicat
départemental sont contre la signature des conventions, les
médecins peuvent individuellement par suite de ces pressions-là,
signer éventuellement. La sécurité sociale peut obtenir un
nombre suffisant de médecins conventionnés. Naturellement, ce
sont des genres d'outils que la profession médicale, disons, n'aime pas
trop, et ce sont des outils qui, je pense bien, doivent être
utilisés uniquement s'il n'y a pas moyen d'en arriver à des
solutions autrement.
En ce qui a trait à l'hospitalisation, il y a des frais
modérateurs en France qui sont fixés à 20% du coût
de journée ou du per diem et la caisse à laquelle l'assuré
appartient, paie la différence de 80% à l'hôpital. Parce
qu'on a encore en France, tout comme en Suède, un réseau de
caisses primaires, de caisses régionales. L'assuré social peut se
faire hospitaliser dans une clinique privée, mais là, il doit
obtenir l'approbation de la caisse avant de le faire. Alors disons que c'est
peut-être un petit peu moins sévère qu'en Suède
à ce sujet-là, il y a un plus grand nombre d'hôpitaux
privés.
Quant aux frais pharmaceutiques, il y a encore là des frais
modérateurs mais qui ne sont pas tout à fait de la même
forme qu'en Suède. En Suède on a vu qu'il y avait un paiement de
$0.60 par prescription plus 50% de l'excédent. En France il y a des
frais de 20% sauf que dans certaines maladies, telles que celles que nous avons
déjà mentionnées, les frais modérateurs peuvent
être soit réduits ou même éliminés. Les soins
dentaires, même chose, il y a encore des frais, le patient doit payer 20%
des frais, il y a des soins additionnels qui sont couverts, tels les cures
thermales qui sont une particularité des régimes de la France et
de la Belgique. Les caisses détiennent, dans certains cas, certains
établissements et ça leur donne un certain attrait au point de
vue de leurs assurés, c'est une façon de recruter ces
établissements dont ils sont propriétaires.
Quant au champ d'application c'est réellement contraire à
la Suède où toute la population est assurée. Ici, c'est
réellement l'assu- rance sociale. Uniquement les personnes qui sont
affiliées à une caisse sont assurées et même si le
régime est obligatoire, si une personne ne paie pas sa contribution
à la caisse, elle est privée de la protection de
l'assurance-maladie alors qu'en Suède la couverture, ou
l'adhésion au régime, est obligatoire mais si la personne ne paie
pas ses primes on lui impose une pénalité mais elle n'est pas
privée de la protection du régime d'assurance-maladie. Alors
qu'ici, c'est beaucoup plus collé sur le principe de l'assurance. Une
personne qui ne paie pas n'est pas assurée.
M. MARLER: Cela doit simplifier l'administration
énormément.
M. CASTONGUAY: En Suède, exactement, parce que lorsqu'une
personne présente une demande de paiement, il n'est pas question d'aller
voir si elle a payé ses contributions.
Dans les structures administratives encore, c'est un peu le même
système. Il y a une caisse nationale, il y a des caisses
régionales, il y a des caisses primaires. En théorie, les caisses
primaires sont autonomes, ce sont les anciennes mutuelles; en pratique leur
autonomie aujourd'hui ne touche qu'à certaines particularités de
l'administration, elles sont obligées de suivre les règlements de
la sécurité sociale quant à leur mode d'administration. Au
point de vue autonomie financière, il n'y a aucune autonomie
financière parce que lorsqu'une caisse ne boucle pas au cours d'une
année, elle reçoit une compensation de la sécurité
sociale. Par contre, une caisse qui fait un surplus est obligée de le
verser à l'organisme central. Les caisses reçoivent un certain
montant pour leur administration et les économies qui peuvent être
faites sur l'administration servent, il y a une certaine part qui reste la
propriété de la caisse. Les caisses utilisent ces surplus
à l'établissement de différentes maisons de convalescence,
etc. Ils ont certains camps de vacances et c'est une façon pour elles
d'attirer des assurés à leur propre caisse alors que ces
assurés iraient possiblement à une autre caisse.
Il y a, en plus, dans les structures administratives, en plus de la
caisse nationale, les caisses régionales, les caisses locales une couple
d'organismes qui doivent être mentionnés. D'abord il y a les
unions de recouvrement; ces organismes ne s'occupent que d'encaisser les
cotisations. Vous avez donc toute une structure d'encaissement des cotisations,
vous avez toute une structure de paiement des prestations.
M. MARLER: Dans le système en France, a-t-on la perception
à la source ou non?
M. CASTONGUAY: Excusez-moi, oui c'est le système de perception
à la source, et les sommes sont déduites par les employeurs et
envoyées aux unions de recouvrement qui elles sous les directives de la
caisse nationale de sécurité sociale, attribuent les montants aux
caisses régionales et aux caisses locales. C'est un système assez
lourd.
La caisse nationale de sécurité sociale a un
caractère assez représentatif. Elle coordonne sur le plan
national aussi l'action sanitaire et sociale des organismes. Elle assure le
contrôle des opérations mobilières et immobilières
des caisses. Alors en plus de s'occuper de la répartition entre les
caisses primaires, combler les déficits, attribuer les surplus entre les
caisses qui ont fait des déficits, elle contrôle aussi les
opérations mobilières et immobilières et aussi l'action
sanitaire et sociale des caisses, parce que les caisses primaires ne jouent pas
uniquement le rôle d'assureurs, elles jouent un certain rôle au
point de vue action sanitaire, médecine préventive, accidents,
etc.
Les caisses sont groupées dans une fédération
nationale, la fédération nationale des organismes de
sécurité sociale. C'est donc leur façon, en plus de la
structure, de se faire entendre auprès des autorités
gouvernementales. En fait c'est un vestige, jusqu'à un certain point,
à mon avis, du temps où elles avaient un plus grand degré
d'autonomie. Bien que les caisses aient conservé un certain degré
d'autonomie et qu'elles constituent une structure à l'extérieur
des ministères, le ministère du Travail a le rôle de
tutelle et de contrôle sur la sécurité sociale.
Graduellement, tout ce qui touche à la sécurité sociale en
France, s'en va donc graduellement sous l'autorité de plus en plus
complète du gouvernement, aussi bien au point de vue administratif qu'au
point de vue financier.
Il y a des services administratifs centraux et régionaux, les
directions à l'intérieur du ministère du Travail. On voit
que la planification dans le domaine de la sécurité sociale ne se
fait plus à l'extérieur du ministère mais à
l'intérieur et vous avez, comme on le mentionnait hier, l'inspection
générale de la sécurité sociale qui est un
organisme tout à fait particulier à la France.
Il est indiqué ici que l'inspection générale exerce
un contrôle supérieur sur les organismes et services de l'ensemble
du système. Le contrôle et la vérification d'organismes
donnent lieu à l'établissement de rapports contradictoires, les
conseils d'administration des caisses répondent aux observations
présentées dans ces rapports et les contrôles
ultérieurs permettent de vérifier s'il a été tenu
compte des remarques formulées. Alors l'inspection essaie toujours de
voir à ce que les caisses aient une administration aussi efficace que
possible. On dit aussi que l'inspection générale effectue en
outre des études générales dans le cadre d'un programme
annuel défini par le ministre du Travail qui est à la fois
Président du comité de coordination de la sécurité
sociale.
C'est probablement ce rôle-là de l'inspection
générale qui est le plus intéressant et qui pourrait
donner comme résultat que la législation dans le domaine de la
sécurité sociale évolue passablement mieux que dans le
passé en fonction des développements ou des besoins
d'évolution.
Vous avez aussi, depuis 1962, c'est-à-dire depuis la
dernière refonte, le Conseil supérieur de la
sécurité sociale et le Haut Comité médical. Il a
comme fonction d'établir les modes de contrôle qui peuvent
être jugés possibles sans qu'il en résulte atteinte
à la liberté d'exercice des différentes professions. Alors
pour donner une idée, car c'est un problème qui existe dans tous
les régimes, peu importe le genre de régime, nous avons
donné à la fin, à l'appendice 1, un extrait du premier
rapport de ce Haut Comité médical sur le fonctionnement et
l'organisation du contrôle médical. Je pense bien que pour
l'instant ce n'est pas l'idée de lire ici ou de discuter ce rapport,
mais je l'indique au passage étant donné que forcément
c'est une des questions qui devra être abordée et je crois que le
problème est posé de façon assez claire et assez
complète. Les difficultés que toute forme de contrôle peut
présenter, les problèmes qui peuvent résulter des
contrôles trop serrés y sont abordés.
Dans le financement, c'est le même principe: employés et
employeurs et ceci sur une tranche des revenus ne dépassant pas un
certain maximum. On voit qu'en France, comme en Suède, il y a un taux de
contribution qui couvre les différentes législations
sociales.
Il est indiqué à la page 45, au milieu de la page, que
l'ensemble des risques couverts par les assurances sociales ou de maladie,
maternité, invalidité, décès, vieillesse donnent
lieu à une cotisation unique de 20.25% du salaire ci-dessus
défini, c'est-à-dire le salaire qui va jusqu'à environ
$2,700, dont 14.25% à la charge de l'employeur et 6% à la charge
de l'assuré.
Alors, il y a un taux global pour toutes les assurances sociales. Et
vous voyez que le taux est passablement élevé.
Pour les travailleurs âgés de plus de 65ans, le taux est
réduit. Et pour les personnes seules âgées de plus de 70
ans, si elles doivent en-
gager quelqu'un, par exemple un infirmier ou quelqu'un pour vivre avec
elles étant donné leur âge, elles ne sont pas
appelées à contribuer sur le salaire qu'elles doivent payer pour
ces personnes-là.
On indique que l'employeur est obligé de prélever les
contributions sur le salaire: aussi on traite, aux pages 45 et 46, du
système de répartition des revenus de contributions parmi les
caisses.
Maintenant, il est assez intéressant de voir l'évolution
des coûts du régime qui sont indiqués à la page 47.
En premier lieu, nous avons donné la progression des coûts, de
1957 à 1963, en unité par rapport à un indice de 100 en
1957. On voit que l'indice a passé de 100 à 260.04% alors que le
nombre d'assurés n'a augmenté que de 18%, que les salaires n'ont
augmenté que de 61% pendant cette période et que le prix de
détail ou l'indice des prix de détail n'a augmenté que de
45%. On voit donc que l'augmentation des coûts du régime est de
beaucoup plus élevée que n'importe quel autre indice qui pourrait
permettre de déterminer un accroissement, disons normal, des coûts
du régime.
Vous voyez aussi, par rapport au revenu national, que les prestations
payées ou servies en vertu du régime d'assurance-maladie prennent
une partie de plus en plus grande du revenu national. Le pourcentage est
passé de 1957 à 1963 de 1.89% à 2.78%. Il est
évident qu'il y a un problème de contrôle des coûts.
Et c'est pour ça qu'à la page 48 on constate tel qu'il est
indiqué, que la Commission des prestations sociales a été
formée. Cette commission qui a été présidée
par l'inspecteur général des finances, a essayé de tracer,
de donner les perspectives des dépenses de la sécurité
sociale jusqu'en 1970. Cela, je pense que c'est en fonction du plan. Et une
seconde commission étudie les moyens de freiner les dépenses de
l'assurance-maladie. Alors il y a un problème sérieux.
M. MARLER: M. Castonguay, si le principe de ce plan-là
était de répartir le coût des soins parmi les
assurés, j'aurais pensé qu'à la fin d'une année,
lorsqu'on a constaté que les dépenses dépassaient les
recettes qu'on aurait augmenté les prix, la base des contributions. Mais
je suppose, par ce que vous l'avez dit hier, que ce n'est pas ça qui est
arrivé.
M. CASTONGUAY: Exactement!
M. MARLER: Ils ont maintenant les prix au même niveau en
dépit d'une augmentation très marquée des
dépenses.
M. CASTONGUAY: Vous voyez, il y a peut-être un
phénomène qui explique ça aussi. D'abord il y a la hausse
considérable des coûts. Deuxièmement, les caisses sont
divisées dans leurs opérations; celle qui fait un profit
d'opération est obligée de céder son profit et celui-ci
sert à la caisse qui fait une perte. Alors il n'y a rien qui encourage
l'efficacité administrative. D'autant plus que les conseils
d'administration des caisses locales sont élus et que les membres des
caisses reçoivent certains honoraires, alors ils ont donc
intérêt à être élus. Et en plus de ça,
les syndicats ouvriers, comme le Congrès général du
travail, semblent avoir un très grand nombre de ses représentants
qui siègent sur les conseils d'administration des caisses primaires ce
qui donne un certain pouvoir politique.
Vous avez donc deux ou trois éléments qui font qu'au
niveau de l'administration des prestations, du contact avec le public, tout
semble porter les administrateurs à payer le plus largement possible et
à fermer les yeux sur les abus. Alors cette décentralisation qui
subsiste n'est certainement pas le type de décentralisation qui semble
ajouter à l'efficacité du régime, au contraire.
M. MARLER: C'est l'encouragement à la dépense locale,
c'est ça?
M. CASTONGUAY: Quant à la profession médicale, on dit que
dans l'ensemble elle demeure pour l'essentiel, une profession libérale.
Les médecins peuvent s'établir librement, sous réserve
naturellement d'avoir leur diplôme ils peuvent s'établir où
ils veulent et aucune directive ne leur est donnée. Il n'y a même
pas de programme, à notre connaissance, comme en Suède tendant
à favoriser l'établissement de médecins dans les
régions où il n'y en a pas suffisamment. C'est l'assurance,
encore là, qui semble primer alors que d'autres considérations,
tel que vouloir rendre les soins accessibles à toute la population,
semblent passer au second plan.
Les médecins sont groupés dans des syndicats
professionnels et, comme je vous l'indiquais hier, il semble y avoir une
scission qui existe depuis le décret du mois de mai 1960. Cette scission
entre les médecins n'est pas tellement entre les omnipraticiens par
exemple les spécialistes, mais plutôt sur le plan
régional,c'est-à-dire entre les médecins des
régions les plus riches et les médecins des régions moins
riches.
Nous comparons, à la page 50, les effectifs médicaux et
les effectifs en pharmaciens, le
nombre de lits d'hôpitaux en France avec certains autres pays. On
voit, par exemple, et ceci est donné par 100,000 habitants, qu'il semble
y avoir contrairement à ce que l'on peut penser, moins de
médecins par 100,000 habitants en France qu'en Angleterre. Par contre,
on n'a pas semblé dire que les médecins étaient aussi
surchargés en France qu'en Angleterre. Ces choses sont assez difficiles
à réconcilier.
Vous voyez, par exemple, qu'en Russie il semble y avoir un nombre
extraordinaire de médecins par 100,000 habitants. Bien, là, il y
a un genre spécial de médecins qui, ici, ne seraient pas
considérés comme des médecins au même titre. Ce sont
plutôt des infirmiers de calibre supérieur.
Alors c'est assez difficile de faire ce genre de
comparaison-là.
Maintenant, étant donné les difficultés de faire
ces comparaisons nous avons donné les conclusions d'une analyse sur les
effectifs médicaux, elles sont indiquées au milieu de la page 50.
On dit: « La France est en position d'infériorité, sa
densité médicale étant en position de retrait par rapport
à la communauté européenne ». On indique; moins 25%.
L'étude des dix dernières années dénote une
détérioration. Troisièmement, les perspectives
basées sur les données acquises, en dehors de toute
extrapolation, sont pessimistes. On souligne le fait qu'il existe une mauvaise
répartition géographique des médecins.
M. MARLER: Ce sont les conséquences du plan, n'est-ce pas, parce
que les médecin est libre d'en faire partie ou non.
M. CASTONGUAY: Exactement. Et on ne nous a pas parlé d'exode des
médecins vers l'extérieur de la France. Il n'a pas
été question de ça. Alors, il ne semble pas que les
médecins soient tellement malheureux, au contraire.
Maintenant, dans le secteur hospitalier, encore là il semble y
avoir certains problèmes. On semble dire, dans une étude que nous
citons, et ça correspond passablement à ce que nous avons
entendu, que depuis vingt ans, il n'y a pas eu suffisamment d'investissements
dans ce secteur et qu'il y a eu possiblement des dépenses de
consommation trop élevées dans le domaine de la santé par
rapport aux investissements. Malgré tout il semble bien que ce
problème soit beaucoup moins aigu qu'il ne l'est en Angleterre.
Quant à la demande et au contrôle des soins, ce qu'on
constate au point de vue des coûts se reflète jusqu'à un
certain point ici et fait partie du problème. Encore là, il
semble que c'est le problème des médicaments qui est le plus
aigu. Justement, à ce sujet-la, à la page 52, nous avons
pensé que ça pourrait vous intéresser de voir ce que le
directeur général de la sécurité sociale disait au
point de vue du problème de contrôle des médicaments.
« Le malade aime sortir de chez son médecin avec une longue
ordonnance. Il évalue la qualité du médecin au coût
de l'ordonnance et le médecin sait trop bien que s'il ne prescrit pas
certains médicaments, certains de ses collègues le feront. Cet
abus de prescription, nous en avons vu le chiffre tout à l'heure, dans
le coût de la pharmacie. Mais ce n'est peut-être pas le seul
côté préoccupant. Un certain nombre de professeurs de
médecine commencent à considérer, en effet, que l'abus de
pharmacie joue un rôle non négligeable dans la pathologie
française actuelle et qu'il en est probablement de même dans
d'autres pays. Sans doute, la législation de la sécurité
sociale n'est-elle pas seule responsable de cela, il y a aussi
l'évolution psychologique, l'anxiété des classes
dirigeantes et bien d'autres éléments. « Mais il existe
là un sérieux problème.
C'est donc une chose que l'on n'a pu s'empêcher de constater. Dans
tous les pays que nous avons visités, le problème de la
prescription des médicaments semble être le plus difficile. Et en
plus du problème des coûts, il y a un problème additionnel
qui est mentionné ici, c'est que si les médicaments sont rendus
trop facilement disponibles à la population, ce n'est pas
nécessairement toujours un service qui est rendu. Cela peut avoir,
à un moment donné de mauvais effets.
Nous indiquons ensuite les formes de contrôle. Il y a des
commissions paritaires qui reçoivent les plaintes ou étudient les
cas où il semble y avoir abus. Donc, toujours la commission paritaire
pour que ce ne soit pas uniquement des fonctionnaires de la
sécurité sociale qui exercent les divers contrôle.
Finalement, l'assurance privée continue de subsister
jusqu'à un certain point, malgré la présence de la
sécurité sociale, pour assurer les personnes qui désirent
des soins privés et assurer la partie de la population qui n'est pas
couverte par les régimes.
Ceci complète dans les grandes lignes ce que nous avons
donné de la description du régime français de
sécurité sociale dans l'assurance-maladie.
M. FORTIER: M. Castonguay, en Suède et en France, est-ce qu'il y
a un contrôle de renouvellement des prescriptions médicales?
M. CASTONGUAY: Dans la plupart des endroits, de mémoire, les
prescriptions sont données pour une période de temps
limitée. On ne permet pas... une prescription ne serait pas
remboursée si elle était donnée, disons, pour une
quantité qui couvrait deux ans. Il y a généralement une
période limitée. La prescription ne peut être
renouvelée plus d'une fois dans certains endroits sans qu'il y ait une
nouvelle ordonnance, c'est-à-dire sans que le médecin ne donne
une nouvelle prescription. La personne ne peut donc pas, au bout de trois mois,
se présenter librement à nouveau et faire compléter sa
prescription de trois mois en trois mois. Il y a une limitation sur les
quantités et aussi dans le temps pour empêcher que la personne ne
répète indéfiniment.
Ceci ne semble pas exister partout. En Saskatchewan et en Alberta, en ce
qui a trait aux assistés sociaux, par exemple, ces modes de
contrôle existent. Et d'ailleurs les pharmaciens et les médecins
demandent justement ce genre de contrôle qui, à leur point de vue,
est nécessaire à la protection de la population.
M. FORTIER: parce que dans un hôpital par exemple, on a fait
l'expérience chez nous. On a établi un contrôle très
sévère sur les prescriptions. Il faut maintenant délimiter
exactement le nombre de tablettes et le nombre de jours et on a diminué
le nombre de médicaments d'au moins 50%.
M. MARLER: Tout en limitant la période...
M. FORTIER: Ou l'avalanche pour le renouvellement de la
prescription.
M. CASTONGUAY: Vous voyez, ceci est aussi bien important. En Angleterre,
par exemple, les gens devaient payer deux shillings, soit à peu
près une trentaine de cents, pour une prescription. Alors les
médecins prescrivaient en plus grande quantité de sorte que les
patients n'avaient pas à payer de nouveau les frais dissuasifs. Des
prescriptions étaient données dont les quantités
étalent beaucoup trop abondantes, et par conséquent, il y avait
pertes de médicaments.
M. FORTIER: La nomination des médecins dans les hôpitaux
relève-t-elle du bureau médical de l'hôpital ou de
l'administration générale des caisses nationales?
M. CASTONGUAY: La sécurité sociale n'a pas à voir
à la nomination des médecins dans les hôpitaux. Il semble
qu'en France le système hospitalier repose davantage sur les
hôpitaux privés que dans les autres pays. Disons même que la
situation se compare beaucoup avec ce que nous avons ici au Canada, dans la
province de Québec
M. ROY: Quelle est l'importance de la contribution de la part de l'Etat
français.
M. CASTONGUAY: Vous voyez, l'Etat ne contribue pas directement. En
principe la sécurité sociale est encore à la charge totale
des travailleurs et des employeurs. La seule façon que l'Etat a
été appelé à contribuer jusqu'à maintenant
c'est en comblant les déficits de la sécurité sociale. Si
la sécurité sociale n'est jamais en mesure de combler ces
déficits, il s'agira d'une contribution permanente. C'est la raison pour
laquelle l'Etat, s'étant aperçu qu'il est appelé à
contribuer d'une façon indirecte à la sécurité
sociale, il veut bien savoir maintenant de quelle façon il contribuera
à l'avenir et quelle sorte de contrôle additionnel pourrait
s'avérer nécessaire. C'est la raison de la formation de cette
commission que nous mentionnons.
M. MARLER: Alors on est porté à penser que ce que je
pourrais appeler la part résiduai-re pourrait nécessairement
retomber sur les assurés n'est-ce pas, en principe?
M. CASTONGUAY: En principe, oui.
M. MARLER: Parce qu'autrement il me semble que cela veut dire qu'on est
en train de créer des surprises très désagréables
pour le gouvernement qui à un moment donné constaterait qu'il y a
un déficit de je ne sais pas quoi dans le fonds et nous savons combien
ce serait difficile pour le gouvernement, non pas seulement de trouver une
somme, disons, de $20 millions, mais d'être obligé, après
le fait, d'imposer une taxe spécialement pour combler un déficit
qui probablement se répétera d'année en année du
moment que vous acceptez le principe d'un déficit.
Personnellement, peut-être que je suis un peu conservateur dans ce
domaine-là, je reconnaîtrais le devoir de l'Etat de combler une
insuffisance temporaire, une insuffisance qui pourrait se produire au cours de
l'année ou même après une année et sur une base
temporaire, exclusivement avec l'idée que les assurés, dont les
patrons et les employeurs et les employés, devraient par une
augmentation du prix combler le déficit de la première
année ou de la deuxième année et ainsi de suite, de
façon à ce que la population qui va bénéficier des
avantages du plan le paie, de façon à éviter ce qui,
à mon sens,
serait malheureux, c'est-à-dire la demande des soins additionnels
payés toujours par l'Etat, payés toujours par d'autres.
Je pense que c'est logique de dire, si nous allons avoir des soins plus
étendus, des avantages considérables, que les assurés
eux-mêmes doivent supporter une bonne partie du surcroît
additionnel, ce qui pourrait peut-être freiner dans une certaine mesure
les appétits démesurés.
M. CASTONGUÀY: Exactement. Je crois que c'est peut-être, si
vous me permettez cette remarque, le meilleur endroit pour une personne comme
vous, de faire preuve de conservatisme.
M. MARLER: Etant donné que j'ai vécu assez longuement,
je... Evidemment, je ne suis pas conservateur dans d'autres choses, mais...
M. CLOUTIER: M. Castonguay, si j'ai bien compris votre exposé, le
coût de la partie administrative en France est beaucoup plus
onéreux qu'en Suède.
M. CASTONGUAY: Il est assez difficile de déterminer le vrai
coût de l'administration. Il semble que la structure administrative soit
assez lourde, pour savoir le coût exact de l'administration, il faudrait
additionner les coûts des caisses primaires, des caisses
régionales, des caisses centrales, des unions de recouvrement. A quoi
s'élève une telle addition? C'est assez difficile. Je ne crois
pas qu'on ait pu trouver de statistiques exactes. Mais le tout doit être
assez dispendieux.
M. CLOUTIER: Tout de même, il ressort de cette étude que
l'augmentation de la demande de soins en France est réellement le
problème majeur auquel on doit s'attaquer.
M. CASTONGUAY: Il y a un problème d'augmentation de demandes de
soins. Le système semble même encourager dans une certaine mesure
les abus au niveau des caisses; l'administration des caisses primaires n'a
aucun intérêt, en fait, à refuser des paiements de
prestations. Il y a le fait que les conseils des caisses primaires soient
élus. Et il y a des honoraires qui sont payés aux membres des
conseils et il semble, d'après ce que nous avons pu voir, que les
membres des conseils se recrutent en grande partie dans les syndicats ouvriers
ou dans une bonne part parmi les membres du congrès
général du travail. Ceci leur donne une influence assez forte. Et
il y a une relation assez évidente entre le Congrès
général du travail et un des partis politiques. C'est donc un
outil qui est très fort pour eux et, contrairement à ce qu'on
avait pu penser, le Congrès général du travail a l'air de
bien voir le système de sécurité sociale dans sa forme
actuelle. Je ne sais pas s'il est possible de faire le lien, c'est assez
délicat d'analyser des attitudes comme celles-là, mais ça
n'ajoute certainement pas à l'efficacité du régime. Mais
l'augmentation des coûts ne correspond peut-être pas
nécessairement à une augmentation réelle des besoins de
soins de la population.
Quelle est la part exacte de l'abus et quelle est la part exacte due
à une augmentation réelle, je ne suis pas en mesure de
répondre.
M. MARLER: J'ai juste une question que je voudrais poser à M.
Castonguay. Il semble avoir été dit au début qu'il peut y
avoir plusieurs catégories d'assurés, dans le sens, je pense que
M. Castonguay a parlé de la classe agricole et les mineurs etc., est-ce
qu'il est possible que chaque classe paye une prime différente ou est-ce
que c'est toujours le même prix?
M. CASTONGUAY: Il y a des primes différentes selon les
régimes parce que les avantages ne sont pas les mêmes dans tous
les régimes.
M. MARLER: Alors cela veut dire que vous ajoutez inutilement aux
complications, aux frais d'administration, je crois que c'est
évident.
Si par exemple les mineurs profitent de tels ou tels avantages, mais la
classe agricole est limitée, il faudra toujours savoir à quelle
classe appartient le patient en question, puis qu'est-ce qu'on peut lui donner
gratuitement etc. Je ne trouve que des complications tout à fait
inutiles.
UNE VOIX: Cela complique le système évidemment.
M. ROY: M. Castonguay, croyez-vous que dans l'ensemble la population
semble satisfaite de ce régime de l'assurance-santé?
M. CASTONGUAY: Je tenterai de répondre différemment. Je
pense bien que la population n'accepterait pas qu'on cesse ou qu'on mette terme
au régime d'assurance-maladie en France. C'est assez difficile de
savoir. Disons qu'en Suède il semblait que réellement les gens
avaient l'air relativement satisfaits. En France, les gens ont certainement
l'air plus satisfaits qu'en Belgique, d'après ce que l'on a pu voir. En
Angleterre, c'est un peu le même genre de réponse. Je pense bien
que la population n'accepterait
pas que le régime soit discontinué, mais je pense que les
gens sont plus inquiets en Angleterre quant à ce qui va se produire dans
l'avenir qu'en France. C'est une question de degré qui est assez
difficile à percevoir et je pense que ça s'établit mieux
par comparaison comme cela.
M. TREPANIER: M. Castonguay si j'ai bien compris, les différentes
catégories de bénéficiaires de l'assurance proviennent de
l'établissement progressif de l'assurance-santé en France, qui
d'abord a été appliquée aux salariés, ensuite
à la classe agricole et ainsi de suite. Maintenant à l'article
c), vous mentionnez des régimes complémentaires...
M. CASTONGUAY: Oui.
M. TREPANIER: Est-ce que, à ce moment-là ça couvre
d'autres personnes parce qu'il me semble que tout le monde est pas mal couvert
par a) premièrement, deuxièmement, troisièmement et
b).
M. CASTONGUAY: Les régimes complémentaires, disons ici
qu'on parle plutôt de la sécurité sociale dans son sens le
plus général et non uniquement de l'assurance-maladie. Sur le
plan des rentes, des pensions, il y a le régime général
pour les salariés et dans diverses entreprises pour complimenter les
pensions il y a des régimes complémentaires. Par régimes
complémentaires, on veut donc plutôt dire des régimes qui
couvrent les pensions, pensions d'invalidité, pensions de vieillesse,
possiblement des allocations de salaire en cas de maladie. De façon
générale, du côté de l'assurance-maladie, il ne
semble pas y avoir tellement de régimes complémentaires
organisés par les employeurs, ce sont plutôt les individus, au
moyen de contrats auprès de sociétés privées
d'assurances, qui s'assurent pour se faire traiter sur une base
privée.
Maintenant, et c'est un simple détail, pour vous montrer la
complexité de cette histoire-là, je pense qu'on nous a dit qu'il
y avait même un régime particulier pour les clercs, des greffes de
notaires de Paris.
M. MARLER: C'est épouvantable.
M. CASTONGUAY: C'est pour ça que je voudrais mentionner que sur
certains détails nos connaissances sont un peu vagues, il n'y a pas
moyen de faire un inventaire complet, je pense, à moins d'étudier
le tout très longuement.
M. TREPANIER: Alors c'est peu souhaitable que cette situation...
M. TARDIF: Et, M. Casgonguay, j'imagine qu'on a jugé à
propos de classifier les régimes comme ça, où il devait y
avoir des avantages quelconques. Quels étaient les avantages?
M. CASTONGUAY: La raison est historique. Ces groupements se sont
formés en mutuelles, dans le passé. Les mineurs, par exemple, ont
senti le besoin de se protéger collectivement, alors
éventuellement les mutuelles ont donné naissance aux
régimes de sécurité sociale protégeant les mineurs,
les salariés, les agriculteurs, et chacun ayant des problèmes
différents au point de vue des âges de retraite, des moyens
financiers et chacun étant un petit peu plus individualiste qu'ailleurs,
ils ont voulu établir chacun leur régime bien particulier. Au
point de vue des avantages, il ne semble pas y en avoir tellement parce qu'on
sent qu'un effort énorme est fait pour essayer d'unifier, de
centraliser, jusqu'à un certain point.
M. RENAUD: En d'autres termes ça continue à se
développer dans les mimes structures, c'est ça?
M. CASTONGUAY: Oui. Tout le système que nous décrivons par
exemple au point de vue recouvrement des prestations, des contributions et
distributions des revenus de contributions parmi les caisses, c'est
excessivement lourd et finalement ça ne rime pas à grand chose,
parce que les caisses n'ont pas d'autonomie financière. Celle qui a un
surplus le donne au profit de celles qui ont des déficits. Tout donne
donc sur papier l'apparence d'une certaine autonomie alors qu'en fait il n'y en
a pas.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions? M. Castonguay, amenez-nous,
à votre choix, dans un autre pays.
M. CASTONGUAY: Je pense que le plus logique serait celui de la Belgique
où disons, l'on retrouve beaucoup d'analogie avec le régime
d'assurance-maladie français. C'est un régime qui tire ses
sources encore des sociétés mutuelles et, là, les
sociétés mutuelles ont encore un plus grand degré
d'autonomie.
Elles ont réellement l'autonomie financière. Au lieu de
repasser sur tous les points, ici, je crois que ce qui est plutôt
important de mentionner, c'est qu'il y a cinq réseaux de caisses
mutuelles. Il y a les mutualités chrétiennes, il
y a les mutualités des travailleurs professionnels, les
mutualités neutres, les mutualités des salariés, et je
pense qu'il y en a une pour les non chrétiens, les protestants. Tout le
système prend donc des couleurs politiques, raciales, religieuses qui
créent, en apparence en tous les cas, des conflits assez
prononcés. Si on ne nous l'avait pas tellement
répété à divers endroits, ce n'est pas le genre de
commentaire que j'avais fait verbalement, j'aurais préféré
laisser cela consigné dans les dossiers ici, quitte à ce que vous
en preniez connaissance autrement. Il y a donc des caisses autonomes, et cinq
réseaux complets. Chaque réseau couvre par des caisses
régionales et primaires le territoire de la Belgique qui n'est pas
tellement grand. Les caisses reçoivent pour s'administrer un montant
fixe, un pourcentage fixe de prestations. Alors plus elles paient de
prestations, plus naturellement la part qu'elles reçoivent pour
s'administrer est élevée. Donc, encore là, le
système est définitivement conçu à l'encontre de
l'efficacité. Ceci ressort très évidemment dans
l'expérience au point de vue du coût. Le régime a
été conçu en 1944 avant même que la guerre soit
finie et, en 1963, on a essayé de corriger la situation par une nouvelle
loi. Le gouvernement a voulu établir des contrôles et c'est ce qui
a donné lieu évidemment à la grève qui a eu lieu en
1964. Cette grève a laissé des marques assez profondes, en autant
qu'on a pu voir et chez les médecins et dans la population. C'est le
genre de chose qui doit certainement être évité si l'on
peut en juger par ce qui s'est passé en Belgique.
Et justement, M. Marler, ce que vous disiez tantôt correspond
exactement ici au portrait, à la leçon qu'on peut tirer du
régime de la Belgique. Lors de la refonte, on a dit: En principe, l'Etat
paiera un certain pourcentage des coûts du régime, soit 95% tel
qu'indiqué à la page 61, 95% des dépenses
afférentes aux prestations visant les maladies sociales. Les maladies
sociales sont la tuberculose, le cancer, les longues affections. En outre, 27%
des prévisions budgétaires relatives aux soins gratuits
dispensés aux pensionnés, veuves, invalides, orphelins, plus le
montant requis pour couvrir les cotisations des chômeurs. Il est aussi
dit, et ceci est assez important, que malgré le principe selon lequel
l'Etat assume une partie fixe des coûts, l'Etat assumerait pour les deux
années suivantes tout écart qui ne serait pas comblé par
les contributions des employés, des employeurs et la partie fixe que
l'Etat devait assumer, au cours des deux premières années suivant
la nouvelle loi. L'on n'a pas fait réellement face aux problèmes,
on l'a reporté pour deux ans et lorsque le problème s'est
produit, c'est- à-dire en 1966, on a vu ce qui s'est produit
récemment. On a vu par les journaux, que le gouvernement essayait de
nouveau de contrôler certains des coûts, et demandait aux
médecins d'accepter certaines concessions au point de vue des montants
payés par la sécurité sociale pour les soins donnés
dans les hôpitaux. Les autres points particuliers du régime en
Belgique ne sont pas directement inhérents au régime. Un fait
à signaler, c'est qu'il y a un grand nombre d'associations qui ont
groupé les médecins dans le passé et, à un moment
donné, c'est-à-dire lors de l'adoption de cette loi, en 1963, les
médecins se sont fédérés dans une grande chambre
syndicale. Pas longtemps après, une scission à l'intérieur
de cette chambre s'est de nouveau produite et il y a une
fédération rivale des syndicats qui s'est
développée en parallèle. Il semble que c'est un
phénomène qui mérite d'être mentionné.
Où il y a plusieurs syndicats groupant les médecins, les
relations sont plus difficiles que lorsqu'il n'y a qu'un groupe
réellement représentatif des médecins. Et ici, dans la
province de Québec, disons qu'il y a plus d'une association. Il y a deux
fédérations de syndicats pour les omnipraticiens et les
spécialistes qui groupent un grand nombre de médecins dans
chacune d'elles. Si la multiplication des organismes groupant les
médecins devait devenir un phénomène dans la province de
Québec, ce serait regrettable. Je crois que c'est une leçon qui
devrait être retenue, car les relations deviennent alors excessivement
plus difficiles.
A la page 62 on indique justement la courbe depuis la nouvelle loi et
des dépenses de l'assurance-maladie. On voit que les coûts montent
en flèche, 11 milliards de francs belges en 1964, on voit que, pour
1966, deux ans plus tard, on en arrive à 21,800,000,000. Le franc belge
vaut deux sous, alors c'est assez élevé.
M. TREPANIER: Cela ne serait pas plutôt des millions?
M. CASTONGUAY: Oui, mais s'il y en a 11 millions, ça fait 11
milliards à ce moment-là. C'est 11 millions.
M. MARLER: Avez-vous une idée de ce que ça
représente par tête?
M. CASTONGUAY: Attendez un peu. 11 milliards, la population est
d'environ 9 millions...
M. MARLER: On peut dire en chiffre rond 2,000 francs par année
par tête. Evidemment les soins sont plus étendus que ceux dont
nous avons parlé.
M. CASTONGUAY: Mais toute la population n'est pas assurée,
ça c'est un problème qui doit être considéré
dans ce calcul. Ce n'est pas facile de sortir le coût par tête.
C'est indiqué je crois quelque part. De mémoire, il y a à
peu près 7 millions à 7,500,000 sur les 9 millions qui sont
assurés.
M. MARLER: Alors ça n'a pas beaucoup d'intérêt,
parce que ça ne prouve rien.
M. CASTONGUAY: Alors il y a possiblement la question des effectifs qui
pourraient être assez intéressants à étudier ici,
étant donné encore certaines analogies entre Québec et la
Belgique. Au point de vue de la population, il n'y a pas un écart
considérable. A la fin de 1962, on indique qu'il y avait 13,000
médecins dont 11,800 exerçaient effectivement la médecine.
On voit donc que le nombre des omnipraticiens est beaucoup plus
élevé que le nombre de spécialistes et il ne semble pas en
Belgique exister de pénurie sérieuse de médecins. Il y a
cependant le problème de la distribution géographique. On indique
certains chiffres, à la page 65. Pour indiquer la disparité, dans
une province, il y a 20.9 médecins par 10,000 habitants alors que dans
une autre province il n'y en a que 7.3.
M. FORTIER: Est-ce que le médecin se plaint d'avoir beaucoup de
formules à remplir?
M. CASTONGUAY: En France, en Angleterre, en Belgique où cette
plainte quant au nombre de formules à remplir est formulée, il ne
semble pas que ce soient les formules à remplir pour
l'assurance-maladie. Le patient paye le médecin qui donne simplement un
reçu et c'est le patient qui se fait rembourser. Ou les médecins
se plaignent qu'ils ont beaucoup de formules à remplir, ça ne
vient pas de l'assurance-maladie, ça vient plutôt de tous les
autres certificats qu'ils doivent donner pour toutes sortes d'autres
programmes.
M. MARLER: Par exemple en France on m'a dit que les médecins sont
beaucoup dérangés par les travailleurs, les ouvriers qui
s'adressent aux médecins disant j'ai mal à l'estomac et il va
chez le médecin pour avoir le certificat ce qui donne évidemment
aux médecins un honoraire quelconque, mais ça donne à
l'ouvrier 3 jours de congé payé. Alors, il y a un encouragement
à aller voir le médecin chaque fois qu'on a un mal de
tête.
M. CASTONGUAY: Ce phénomène, ou cette crainte, qui est
souvent exprimée à l'effet qu'un régime
d'assurance-maladie surchargerait de toute une paperasse comme on dit que c'est
le cas en Europe, ce n'est pas exact parce qu'ils sont surchargés, en
autant qu'on a pu voir non pas à cause du régime
d'assurance-maladie, mais pour d'autres raisons comme celles que vous
mentionnez.
M. MARLER: Est-ce que ces autres ministères par exemple qui ont
besoin de ces certificats ne pouraient pas être appelés à
en refuser?
M. CASTONGUAY: Il y a une plainte à l'effet que les
médecins sont dans une bien mauvaise situation avec ces fameux
certificats. S'ils les refusent, leur patient est plus ou moins de bonne
humeur, finalement il va voir un autre médecin, et il obtient son
certificat éventuellement. Les médecins se disent: On est aussi
bien de les donner, alors qu'est-ce que ça vaut? En outre, est-ce que
nous sommes capables nous, comme médecins, d'évaluer si telle
maladie ou tel dérangement empêche réellement la personne
de travailler? Surtout lorsqu'il s'agit disons des invalidités qui
donnent droit à un salaire pour une certaine période. Il faudrait
être en mesure de déterminer quel est réellement ce qu'on
demande à la personne à son travail, jusqu'à quel point
ses capacités physiques sont taxées. Beaucoup de certificats sont
donnés, ça prend énormément de temps et on se
demande quelle est leur valeur réelle. Même si on essaie de faire
honnêtement notre travail, nous ne pouvons le faire de façon
satisfaisante. Il semble que ce problème soit plus aigu en Angleterre
où les patients doivent s'inscrire sur la liste d'un médecin. Si
le médecin refuse de donner un certificat, la personne dit: «
Très bien, enlevez mon nom sur votre liste ». Elle fait ensuite
une campagne auprès de ses parents et amis pour que tous leurs noms
soient enlevés de la liste du médecin. Ce sont des moyens de
persuasion assez forts.
M. FORTIER: Du chantage. Est-ce que les médecins sont satisfaits
en général de leur revenu avec ces formules
d'assurance-là?
M. CASTONGUAY: Il semble y avoir un écart assez
considérable entre le revenu des médecins de la Belgique et ceux
de la France. C'est quelque chose qui nous a surpris, le revenu des
médecins est passablement plus faible en Belgique qu'il ne l'est en
France. Dans les pays comme en Suède, on essaie de part et d'autre de
donner aux médecins un revenu qui corresponde à
sa position par rapport aux autres professions et il semble qu'on est
capable de réaliser ça.
M. MARLER: Cela semble s'être réalisé passablement
dans la Saskatchewan.
M. CASTONGUAY: En Saskatchewan les revenus sont excellents. En France,
les médecins ont l'air satisfaits de leurs revenus étant
donné qu'ils ont droit aux dépassements d'honoraires pour
diverses raisons, s'ils acquièrent une certaine notoriété,
etc...
Il ne semble pas y avoir tellement de problèmes. Les
spécialistes dans les hôpitaux semblent satisfaits aussi. En
Angleterre, il y a une distinction à faire entre les spécialistes
qui travaillent dans les hôpitaux et les médecins de famille, les
omnipraticiens, à l'extérieur des hôpitaux. Là, il y
a un décalage entre les revenus.
En ce qui a trait à la Belgique, disons que c'est une description
assez sommaire, mais c'est un système tellement complexe, je crois que
d'essayer d'en prendre connaissance rapidement comme ça, pourrait
plutôt tendre à apporter de la confusion sur ce que nous savons de
la France et de la Suède et ne pas donner tellement plus de
clarification sur ce qui existe en Belgique. D'ailleurs, on dit au début
de notre rapport, et nous savions fort bien que ce rapport circulerait, essayer
de déterminer exactement à quoi correspond la
réalité du régime belge d'assurance-maladie est
très difficile. Alors qu'en écrivant la description nous
n'étions pas capables de le faire exactement, essayer de le dire
verbalement en quelques minutes, je pense que ce serait encore plus
difficile.
M. LE PRESIDENT: Il me semble qu'il serait utile qu'au cas où il
y a un point saillant du système belge que nous serions tentés
d'adopter ici au Québec parce que ça fait bien notre affaire,
ça se marie aux habitudes québécoises, mais tout
simplement pour connaître ce qui se passe en Belgique, je trouve que
c'est assez aride, à moins qu'il y ait quelque chose de tangible.
M. CASTONGUAY: Comme chose à éviter possiblement.
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. CASTONGUAY: Alors, si vous me permettez, je vais passer à la
description du régime de la Grande-Bretagne.
M. ROY: Peut-être avant de commencer, on pourrait peut-être
prendre un repos de dix mi- nutes jusqu'à cinq heures.
Alors, messieurs. M. Castonguay, vous avez la parole.
M. CASTONGUAY: M. le Président, le dernier régime qui est
décrit ici, je crois qu'il devrait être analysé, c'est
celui de la Grande-Bretagne. Une description sommaire du régime des
Etats-Unis est donnée à la fin. Etant donné que ce
régime ne couvre que l'hospitalisation, sur une base facultative pour
les personnes âgées, nous l'avons décrit à titre de
référence, puisqu'il est toujours intéressant de savoir ce
qui se fait aux Etats-Unis, mais je ne crois pas qu'il y ait tellement à
tirer de cette législation qui n'est pas d'ailleurs encore en vigueur.
Si vous me permettez, je vais passer à la description sommaire du
régime de la Grande-Bretagne qui est d'une conception tout à fait
différente, comme nous l'avons mentionné hier dans la
définition des types de régimes. C'est un régime de soins
qui a été conçu au cours d'une période un peu
spéciale.
Les objectifs du régime, nous les avons reproduits à la
page 10, mais je ne crois pas qu'il soit utile d'en donner la lecture, ce sont
ceux qui avaient été définis au début du
régime. C'était plutôt les objectifs qui étaient
audacieux dans ce régime. On voulait tout faire pratiquement à la
fois et en une seule étape. On voulait donner à la population
tous les soins sans qu'il n'en coûte rien directement, sauf quant aux
primes d'assurance sociale.
Quant à l'organisation, et pour comprendre le régime de
soins anglais, on doit faire abstraction de ce qu'on a vu dans les autres pays.
En fait, ce sont des services qui sont constitués et ce sont les
services qui donnent les soins à la population. Vous avez cinq grands
services dans le domaine de la santé: le service d'hygiène
public, le service national de santé, le service de santé
scolaire, le service de médecine du travail et le conseil de la
recherche médicale. Disons que ce que nous avons étudié en
plus de détails ici, c'est le service national de santé. On voit
à la page 13, l'organisation et on distingue trois grandes
catégories. Au centre, il y a les conseils exécutifs,
assistés par des comités professionnels; il y a à droite
les conseils régionaux d'hôpitaux et il y a, à gauche, les
autorités régionales et municipales de la santé.
Premièrement, à droite, c'est tout ce qui touche aux
hôpitaux incluant les spécialistes qui pratiquent presque
exclusivement à l'intérieur des hôpitaux. Vous avez tout
à fait à droite les hôpitaux d'enseignement qui constituent
une quatrième catégorie ou une quatrième branche.
Les conseils exécutifs, eux, touchent plus
particulièrement aux professions, à l'exception des
spécialistes, c'est-à-dire, les médecins, les dentistes,
et voient à l'administration de la distribution des médicaments,
les services pour les yeux. A gauche, vous avez les autres aspects de la
médecine qui sont la responsabilité des autorités
municipales et régionales de la santé: protection de la
mère et de l'enfant, infirmières visiteuses, les soins à
domicile, prévention des maladies, traitement et surveillance
médicale, vaccination, immunisation, ambulance, etc.
Ces trois grandes sections, nous avons voulu les montrer très
clairement, dès le début de la description du régime,
parce qu'en fait ce sont des unités particulièrement distinctes
même dans l'opération du régime de santé en
Angleterre, il y a des régions et il y a des conseils régionaux
pour les hôpitaux; chaque conseil a un certain groupe d'hôpitaux
sous sa juridiction et chaque hôpital a un conseil d'administration. Les
budgets, les directives, etc, les hôpitaux d'ailleurs sont la
propriété de l'Etat, tout ça émane du
ministère de la Santé où il y a un sous-ministre
associé en charge de cette section. Vous avez une autre section, les
conseils exécutifs. Il y a dans les différentes régions et
ce sont eux qui voient à l'organisation et à la distribution des
soins par les praticiens. Ces conseils exécutifs sont à
caractère représentatif mais, encore-là, ils
reçoivent leurs directives du ministère. Ce ne sont pas eux qui
fixent les échelles de salaire ou de rémunération des
médecins, c'est fixé par négociation entre le
ministère et les différents organismes groupant les
médecins. Il s'agit plutôt de fonctions administratives pour ces
conseils.
Quant aux autorités régionales, ça touche de moins
près à ce qui correspond à l'assurance-maladie. Donc, je
crois que l'on peut en faire abstraction. La plupart des médecins en
Angleterre font partie du service national de la santé. On indique que,
pour les omnipraticiens, 97%de la population fait appel à leurs
services. Les autres 3% comprennent les personnes qui font appel aux
médecins privés. Elles sont donc en très petit nombre.
Les personnes ont le libre choix du médecin. Le médecin a
le choix de refuser un patient. Ces libertés fondamentales sont
respectées mais le système fonctionne d'une façon tout
à fait particulière et ceci, spécialement pour les
omnipraticiens. Chaque omnipraticien a une liste de noms sur laquelle il peut
inscrire jusqu'à 3,500 noms s'il pratique seul. S'il pratique en groupe,
le nombre de personnes qu'ils peuvent avoir conjointement sur la liste peut
être un petit peu plus élevé étant donné
qu'entre eux deux méde- cins peuvent se diviser un peu mieux le travail.
De la même façon pour les dentistes. Il y a une organisation qui
est aussi sous l'autorité des conseils exécutifs. Les personnes
se font placer sur la liste du dentiste et se font traiter. Pour les
médecins, il n'y a aucun frais dissuasif. Ils vont voir le
médecin lorsqu'ils en ont besoin et le médecin est
rémunéré selon le nombre de noms sur sa liste.
M. MARLER: Indépendamment du nombre de visites, son salaire ou
son traitement est fixé en fonction exclusivement du nombre de gens qui
figure sur la liste.
M. CASTONGUAY: Exactement.
M. MARLER: Maintenant, s'il est chanceux, les gens ne viennent pas le
voir, il n'est pas trop dérangé.
M. CASTONGUAY: On encourage d'une certaine façon les listes pas
trop nombreuses en donnant un montant pour les 600 premières personnes
sur une liste. La rémunération du médecin par tête
est à un certain niveau. De 600 à 1,500, le montant par
tête est plus élevé et au-dessus de 1,500, le montant par
tête baisse de nouveau, pour encourager les médecins à ne
pas avoir un nombre excessif de noms sur leur liste. Une fois ceci
établi, peu importe le nombre de visites, l'omnipraticien reçoit
sa rémunération. Ce système a donné lieu à
certaines difficultés. Des raffinements continuels ont été
apportés au mode de rémunération pour essayer d'abord
d'encourager les médecins, les omnipraticiens à se grouper, il y
a des primes qui sont versées par exemple pour les médecins qui
s'établissent dans les milieux éloignés où il n'y a
pas beaucoup de médecins, il y a des primes qui sont données aux
médecins qui commencent dans leur pratique, pour les aider. Ces
primes-là au début vont en décroissant. Il y a
différents raffinements qui sont apportés à la formule de
rémunération mais le système à la base demeure
celui de la rémunération per capita.
M. TREPANIER: M. Castonguay, ne disiez-vous pas tantôt que le
patient avait la liberté de choisir son médecin?
M. CASTONGUAY: Oui.
M. TREPANIER: Comment conciliez-vous cet énoncé avec la
liste des patients que le médecin fait lui-même?
M. CASTONGUAY: S'il n'aime pas le médecin chez qui son nom est
inscrit, il le fait rayer, va chez un autre médecin et demande que son
nom soit inscrit sur la liste de l'autre médecin. Il y a une
procédure de changement de noms sur les listes. C'est assez lourd.
M. MARLER: Ce doit être désagréable parce qu'on est
obligé d'avertir le médecin qu'on en cherche un autre.
M. CASTONGUAY: Si vous êtes en voyage et que vous tombez malade,
que vous n'avez pas naturellement votre nom sur la liste d'un médecin
dans la ville ou dans la région où vous tombez malade, il y a une
procédure de traitement d'urgence et le médecin est
remboursé à ce moment à taux particulier, étant
donné qu'il a traité une personne qui n'était pas sur sa
liste. C'est assez lourd comme système.
M. TARDIF: Et qui peuvent avoir des contrôles où peut-il
s'assurer pour le nom d'un médecin...
M. CASTONGUAY: Disons qu'il y a moins de liberté qu'ici. On lui
fixe une certaine période de vacances par année, on lui fixe un
certain temps pour l'étude, on lui donne certains montants s'il va
étudier pour parfaire ses connaissances et se tenir à date.
Alors, il est beaucoup moins libre. Cela est pour l'omnipraticien. Pour le
spécialiste qui est à l'intérieur d'un hôpital, la
rémunération est beaucoup plus élevée et il y a
différentes formes d'encouragement au mérite. Il y a toute une
catégorie de façons de donner une certaine reconnaissance au
mérite dans la spécialisation. La rémunération des
médecins spécialistes peut être assez élevée.
Elle peut aller au-delà de $25,000 alors qu'ils n'ont absolument aucun
frais de perception de leurs honoraires. C'est un revenu garanti tandis que les
omnipraticiens, en autant que l'on peut voir, qui ont à défrayer
le coût de leurs bureaux, etc., et qui ont des heures beaucoup plus
difficiles font un traitement de l'ordre de $8,000 à $9,000. Il y a donc
une différence énorme.
Tous les genres de professions donnent des soins selon le même
système. Il y a les opthamologistes, les dentistes, c'est tout le temps
le même système. Pour les médicaments, il y a un
système un peu particulier. Les pharmaciens sont propriétaires de
leur pharmacie, de leur officine. La plupart des pharmaciens ont
adhéré au système et contrairement aux autres genres de
soins, il y a des frais dissuasifs, ou plutôt il y avait des frais
dissuasifs. Au début, il n'y en avait pas, on en a imposé et peu
de temps après le dernier changement de gouvernement, les frais
dissuasifs ont été éliminés. Ce changement a eu une
influence assez considérable sur le nombre de prescriptions
données et les quantités prescrites.
Anciennement, les frais dissuasifs pour les médicaments
étaient de deux shillings, environ $0.30 par prescription. Les
médecins avaient tendance à prescrire en grande quantité
et, en plus de ça, il y avait un certain nombre de prescriptions qui
n'étaient jamais complétées. Lorsque les frais ont
été éliminés, le nombre de prescriptions
complétées a augmenté énormément et la
quantité par prescription a baissé. Immédiatement
après l'élimination des frais dissuasifs, le coût des
médicaments ou la quantité des médicaments a
augmenté d'à peu près 25% si ma mémoire est
bonne.
M. TREPANIER: Donc actuellement il n'y a plus de frais dissuasifs pour
les médicaments, non plus que pour les soins donnés par les
médecins.
M. CASTONGUAY: Aucun frais. Les seuls frais qui restent, c'est pour les
choses comme les verres, et, encore là, sont-ils limités,
certaines protèses, la denture. La personne a le choix d'un certain
nombre de montures pour les lunettes standard. Si elle veut un certain genre de
monture un peu plus élaboré, elle doit payer. Mais le principe
est celui de l'élimination des frais dissuasifs sauf pour des articles
particuliers comme des protèses, les appareils et les dents.
M. TREPANIER: Ce que j'avais cru comprendre hier, c'est que le
régime avait commencé sans aucun frais modérateur mais
ensuite en avait vu... Alors, ce n'est pas ça.
M. CASTONGUAY: Ils en ont imposé et, par la suite, ils les ont
éliminés. L'on voit que malgré les objectifs visés,
il y a d'autres réalités dont ils ont été
obligés de tenir compte. On a tenu plus ou moins compte selon les
événements politiques. Aujourd'hui, il n'y en a plus de
façon générale, sauf pour les verres, les protèses,
évidemment.
Dans tout ce réseau de conseils pour les hôpitaux, pour les
médecins, qui ont un rôle de gestion et de consultation, tous les
membres des conseils agissent à titre gratuit, sans aucun honoraire. On
nous a dit qu'il y avait quelque chose comme 10,000 personnes, je crois, qui
siègent sur divers comités et divers conseils et qui jouent un
rôle nécessairement utile, sans aucune
rémunération.
M. MARLER: Tout ça suppose une espèce de
régionalisation du système. Est-ce que cela veut dire qu'un
médecin peut établir dans le nord de l'Angleterre dans le choix
pour sa liste de quelqu'un qui est à Londres.
M. CASTONGUAY: Voici, pour les spécialistes, il semble que les
échelles de salaires ne varient pas dans l'ensemble du pays, sauf que
possiblement il y a un boni de vie chère dans la région de
Londres. Pour les omnipraticiens, on ajoute pour le médecin qui est dans
une région éloignée, un boni d'isolement. On ajoute, pour
le médecin à ses débuts qui s'établit dans une
région éloignée, où il y a un manque de
médecins, une prime pour l'aider à s'établir. Le niveau de
rémunération peut différer d'une région à
l'autre pour ces raisons, mais, en dehors de ces bonis, la
rémunération per capita est uniforme pour l'ensemble du pays.
M. RENAUD: Vous dites que c'est une moyenne de $8,000 à $10,000
par année pour les omnipraticiens.
M. CASTONGUAY: Oui.
M. VAILLANCOURT: Quelle était la moyenne des salaires avant
l'assurance-santé.
M. CASTONGUAY: Cela date du temps de la guerre. Je ne le sais pas et le
coût de la vie a augmenté beaucoup depuis cette époque.
M. MARLER: Et d'ailleurs, c'était un des griefs. Ce ne sont pas
des revenus suffisants.
M. CASTONGUAY: Exactement. Les spécialistes toutefois ne semblent
pas se plaindre de façon générale.
M. MARLER: Ils sont établis principalement dans des milieux
urbains.
M. CASTONGUAY: Ils sont surtout à l'intérieur des
hôpitaux. L'omnipraticien n'est pratiquement pas admis dans
l'hôpital. C'est le spécialiste qui pratique à
l'intérieur de l'hôpital alors il a tout l'équipement qu'il
lui faut, il est beaucoup mieux rémunéré, il n'a pas de
frais à supporter personnellement. On n'a pas senti qu'il y avait le
même genre de problème du côté des
spécialistes.
M. TREPANIER: Est-ce qu'il y a des traitements ou des consultations
médicales donnés dans les cliniques externes comme en
Suède par exemple, en Grande-Bretagne?
M. CASTONGUAY: Dans les hôpitaux, il y a des cliniques externes,
mais il n'y a pas le même genre de distinction étant donné
que tout le système est unifié. Ce sont des services que le
gouvernement met à la disposition de la population. S'il y a des soins
que le médecin ne peut pas donner à son bureau et qui ne
nécessitent pas l'hospitalisation, ils sont donnés dans ce qui
correspond à la clinique externe. On a semblé constater
là-bas, et cela nous a été dit à plusieurs reprises
que les médecins, les omnipraticiens ne soignaient pas
réellement. Ils voient les gens et s'il y a le moindrement de
difficultés ou quelque chose qui ne peut pas être soigné
avec un médicament très simple, immédiatement on envoie le
malade à l'hôpital ou à la clinique externe.
L'omnipraticien ne soigne pratiquement pas, il visite une série de gens
et il les dirige plutôt. C'est une des plaintes de l'omnipraticien, ils
disent; Nous sommes surchargés, nous ne faisons pas tellement de
médecine, nous faisons une médecine très peu
intéressante et excessivement ingrate. Ce n'est pas nous qui faisons la
médecine.
M. DALLAIRE: En résumé, ce sont les individus ou les
patients qui les dirigent.
M. CASTONGUY: Oui.
M. FORTIER: D'ailleurs, est-ce que le patient a le droit d'aller voir un
spécialiste sans avoir un papier de l'omnipraticien?
M. CASTONGUAY: Normalement, l'hospitalisation doit être faite sur
prescription du médecin et comme le spécialiste pratique à
l'intérieur de l'hôpital, il semble bien que tous les patients
passent en premier lieu par l'omnipraticien.
M. VAILLANCOURT: Il a le droit en Suède et en Belgique.
M. CASTONGUAY: D'aller voir directement le spécialiste?
M. VAILLANCOURT: D'aller voir directement le spécialiste.
M. CASTONGUAY: Là ils ne sont pas tous concentrés dans les
hôpitaux.
M. MARLER: M. Castonguay, en vous écoutant et surtout en pensant
à la situation d'Angleterre où vous avez, si vous voulez, trois
méthodes de remboursement de traiter les médecins, vous avez le
gars qui reçoit une prime d'isolement, vous avez un autre qui
reçoit une
espèce... et vous avez l'autre disons celui du marié, mais
le médecin moyen qui semble toucher un salaire qui est basé sur
le nombre de personnes inscrites sur la liste. Est-ce que c'est concevable
pensant à la santé au Canada, de croire que nous pouvons peut
être avoir un système un peu semblable? Il est évident
qu'un médecin qui pratique à Montréal doit payer des
dépenses de bureau plus considérables que celui qui pratique en
campagne, n'est-ce pas? Cela veut dire que ça lui coûte plus cher
pour une consultation d'un quart d'heure ou d'une demi-heure que ça
coûterait en campagne. Par contre, envoyer les gens dans des
extrémités des comtés surtout dans les coins excentriques
de la province, me semble-t-il, semble condamner le médecin à
avoir un nombre probablement insuffisant de patients, et je songe
personnellement à la possibilité de lui donner non pas ce que
j'appellerais une prime d'isolement, mais plutôt un revenu garanti, un
revenu assuré, parce que depuis longtemps nous cherchons le moyen
d'encourager les médecins à se placer ailleurs que dans les
centres. Sauf, que d'après ce qu'on m'a dit, évidemment, je ne
suis plus du Cabinet, mais je me rappelle qu'à un moment donné
nous avons parlé de la question, et nous avons constaté des
difficultés énormes parce qu'il n'y avait pas moyen de
contrôler ce que touchait le médecin qui a été
établi sous cette formule-là. Avec le système
d'assurance-maladie tout serait payé effectivement par le gouvernement,
on saura combien on aurait versé aux médecins; alors, il serait
très facile avec un tel système de donner un supplément
pour porter le total de ses honoraires à un chiffre de x, et de cette
façon peut être encourager le médecin à
s'établir en campagne. La question que je pose, évidemment je ne
cherche pas à avoir une réponse immédiate, mais ne faut-il
pas penser, ne faut-il pas tenir compte du fait qu'il y a des
différences de coût pour les médecins, dans le sens que
celui qui travaille au milieu des grands centres a des dépenses beaucoup
plus considérables par heure que son collègue qui travaille dans
une petite ville de campagne. Ne faut-il pas envisager cette distinction dans
le tarif ou ce que le client paiera disons dans de telles circonstances?
M. CASTONGUAY: Sur ce point-là je réalise que vous ne
posez pas une question demandant une réponse immédiate...
M. MARLER: C'est exact.
M. CASTONGUAY: ... je crois qu'il y a une distinction importante avec
l'Angleterre. C'est que là-bas le niveau des revenus des omnipra-ticiens
est relativement bas, alors toutes ces considérations doivent être
réflétées de façon beaucoup plus évidente
dans la rénumération. Si avec l'établissement d'un
régime, ici, qui donnait un revenu aux médecins passablement
élevé, et ceci pourrait s'effectuer même assez souvent dans
les centres à l'extérieur des villes, étant donné
que pour chaque acte médical le médecin est assuré
d'être rémunéré, peut être
qu'immédiatement il y aura une certaine tendance naturelle à ce
que. cette différence dans la distribution des médecins entre les
villes et les campagnes s'élimine naturellement. Quelque chose
qui...
M. MARLER: Je ne veux pas en venir à un jugement
définitif, mais je ne puis pas m'empêcher de croire,
premièrement, que l'acte médical spécifique doit avoir la
même valeur, n'est-ce pas, que ce soit à Sherbrooke,
Montréal, Matane ou en campagne. Par contre nous savons, parce que c'est
un fait, que ça coûte beaucoup plus cher à Montréal
que ça coûte à Matane, par exemple. Et on songe peut
être au profit un peu plus tard, qui entre en ligne de compte. En effet,
faut-il avoir un tarif uniforme pour les actes médicaux ou faut-il avoir
certaines régionalisations dans le tarif de façon à tenir
compte des circonstances que j'appellerais des dépenses. Elles sont
différentes dans les petits centres que dans le cas de Montréal,
Québec, etc.
M. COITEUX (Duplessis): D'ailleurs actuellement on en a. Moi, dans mon
comté, j'ai deux cas d'espèce. Par exemple, le docteur à
l'Hôpital de Blanc-Sablon, qui est à l'extrémité est
de la province près de Terre-Neuve, retire du gouvernement un salaire je
crois qui se rapproche $14,000, plus les revenus qu' il a de ses actes
médicaux, mais qui d'après les statistiques lui ont donné
à date $2,300. Cela comprend les opérations... On l'appellait
à Havre-St-Pierre mais seulement dans un bureau beaucoup moindre parce
que là je pense qu'on donne un salaire de base $4,000, ou $5,000, et
là il peut compléter avec sa pratique privée étant
donné que les gens sont plus en mesure de le faire. Alors ça
s'applique déjà actuellement. Seulement que là,
étant donné que l'on n'avait pas le soutien que la nouvelle loi
veut nous donner... Mais on va avoir la nouvelle loi du service aux indigents,
les gens qui ne sont pas capables de payer, et alors là, ça va
aider, ça va encourager énormément ces médecins
à rester là; ça va en encourager d'autres à y
aller.
M. MARLER: Je pense que c'est presqu'un avantage évident qu'on
doit pourvoir dans un plan d'assurance-maladie, qu'il y aura certainement en
campagne des médecins qui vont faire des revenus très
considérables.
M. FORTIER: Si vous voulez par exemple que des jeunes médecins
aillent s'installer en campagne, il faut certainement leur procurer des
avantages assez importants.
M. MARLER: Certainement.
M. FORTIER: Parce que je ne vois ce qu'un jeune médecin qui sort
de l'université, qui s'en va en campagne alors qu'il peut avoir
maintenant des bourses pour se spécialiser et être assuré
déjà d'avoir un revenu très convenable dans un centre plus
grand, pourquoi irait-il s'installer loin? il va perdre un peu ses contacts
avec des confrères. Il faut leur donner les avantages assez importants.
Maintenant est-ce que ça peut plus être uniquement des
encouragements d'ordre monétaire? il y a autre chose possiblement.
Est-ce que l'encouragement, peut être le paiement des transports des
patients vers ces pratiques en groupe des médecins ne sont pas aussi des
formes d'allégement du fardeau du médecin de campagne? il n'est
pas obligé de faire tout le temps la tournée, on tend à
vouloir amener plutôt les patients vers lui, et l'on tend aussi à
le faire pratiquer en contact avec d'autres confrères où
là on peut se subdiviser les heures, établir un genre de service
de garde où on fait la rotation. Déjà, ça ce sont
des choses qui peuvent avoir plus d'importance pour le médecin qu'une
addition à son revenu.
M. MARLER: L'addition au revenu, c'est toujours un encouragement, c'est
surtout ça.
M. CASTONGUAY: Mais je peux vous dire aussi qu'ils quittent les
campagnes non pas parce que le revenu n'est pas suffisant, mais plutôt
parce qu'ils sont en train d'y laisser leur santé ou ne peuvent plus
suffire à la tâche.
M. FORTIER: Est-ce qu'il n'y a pas un système de rotation dans
certains pays, où par exemple on va pratiquer dans une campagne pendant
quatre ou cinq ans et reviennent à de plus grands centres
après?
M. CASTONGUAY: Il y a différents modes. Comme en Suède.
Disons en Angleterre, étant donné que nous sommes dans
l'étude de ce régime, on établit par région quel
est le nombre de médecins par mille de population, il y a des
barèmes établis et on divise les régions en quatre
catégories, il y a des régions qui sont déclarées
comme étant fermées, il y a suffisamment de médecins,
alors on ne permet pas à un nouveau médecin de s'établir
sauf si c'est le fils d'un médecin qui pratique déjà
là.
Après ça, il y a un autre type de région qui vient
immédiatement par la suite, où on ne permettra pas de
façon générale aux médecins de s'établir,
sauf dans des circonstances spéciales mais un peu moins spéciales
que dans la première catégorie, il y en a une autre
catégorie, une troisième où il y a définitivement
un manque de médecins. La dernière où il y a
réellement une pénurie, et là les encouragements à
l'établissement sont encore plus grands. Alors, ceci constitue un genre
d'approche.
M. FORTIER: D'ailleurs, le praticien général maintenant
qui va s'installer dans un centre rural, si on donnait les avantages
économiques il y a d'autres avantages aussi. C'est qu'il y a des cours
qui se donnent maintenant pour le garder au courant de la science
médicale et ensuite il aura le droit aussi d'avoir sa
spécialité en pratique générale, qui là le
rehausse, qui devient spécialiste comme tous les autres. Alors, si on
pouvait lui trouver une méthode peut être intéressante au
point de vue monétaire, je crois que ç a pourrait aider le
médecin de campagne.
M. MARLER: Lorsqu'on parle d'encouragement, évidemment c'est un
terme qui est assez global, je comprends que des additions monétaires
ça encourage, il y a peut-être d'autres façons de
l'encourager sans que ce soit nécessairement monétaire. La
diversité et la vie rurale peuvent être un encouragement.
M. CASTONGUAY: Il y a un autre phénomène. On demande ici
dans la province de Québec qu'une personne soit citoyen canadien pour
qu'elle puisse pratiquer. Cela tend à augmenter le nombre des
spécialistes. Pour devenir citoyen ça prend cinq ans, si vous
venez de l'extérieur. Les personnes qui viennent s'établir ici,
pendant les cinq ans où ils sont résidents, prennent une
spécialité. Possiblement que c'est un autre changement en vue
d'un régime d'assurance-maladie, qui mériterait d'être
étudié. La citoyenneté n'a pas rien à faire avec la
capacité d'un médecin d'exercer. On pourrait lui demander de
faire un stage sous la surveillance d'autres médecins de milieux
hospitaliers pour voir s'il est compétent, et après, lui
permettre de pratiquer avant cinq ans. On pourrait lui donner la permission de
pratiquer en certains milieux où il y a un manque de
médecins.
M. MARLER: Alors, ces conditions ne s'appliquent pas aux Etats-Unis par
exemple, la question de la nationalité?
M. CASTONGUAY: Vous voulez dire pour un médecin, par exemple qui
arriverait d'Europe aux Etats-Unis?
M. MARLER: Oui.
M. CASTONGUAY: A ma connaissance ils ont à se soumettre à
des examens qui sont assez sévères mais ça ne repose pas
sur la nationalité.
M. MARLER: Ce n'est pas nécessaire pour lui qu'il devienne
citoyen américain?
M. CASTONGUAY: Non, pas à ma connaissance, parce qu'il y a un bon
nombre de médecins canadiens qui vont justement aux Etats-Unis
pratiquer. Alors, il y a réellement plus d'un moyen d'essayer de
résoudre ce problème. Maintenant le champ d'application du
régime en Angleterre est universel, ce n'est pas rattaché au
paiement des primes. Toute personne née sur le sol britannique peut
être traitée et même les visiteurs en provenance de
l'étranger, à moins, qu'ils ne soient allés là
spécifiquement pour se faire soigner. Tout le monde est admis au
régime. Le financement, bien le paiement des primes par les personnes
n'est pas requis pour déterminer si une personne est admissible aux
soins ou non. C'est tout à fait détaché. Tout le monde est
admissible aux soins, mais il y a des primes qui doivent être
payées par les travailleurs, leurs employeurs, et le gouvernement,
à même les revenus généraux, paie le solde du
côut. On indique, à la page 24, au bas de la page les montants de
primes payés, des montants arbitraires excessivement faibles. Et on
indique après le coût du service national de santé au haut
de la page 24, et on voit que les coûts augmentent rapidement. Vous allez
voir dans certains des mémoires qui sont présentés qu'on
exagère beaucoup les erreurs dans les estimations de coûts qui ont
été faites au début du régime. Vous allez voir un
mémoire par exemple, où il est dit qu'en Angleterre le coût
initial a augmenté de 500% au bout d'une année. Il reste que
l'augmentation des coûts est assez rapide et crée un
problème en Angleterre. Il y a un système un peu particulier pour
les contributions, elles sont perçues hebdomadairement par l'achat de
timbres comme pour l'assurance-chômage ici.
M. MARLER: Est-ce que l'employeur fait cette contribution?
M. CASTONGUAY: L'employeur fait une contribution, oui. Une contribution
qui est plus faible que celle de l'employé dans le cas des
travailleurs-salariés.
On voit au bas de la page 24 que pour un homme, la contribution
hebdomadaire est de $0.38 alors qu'elle n'est que de $0.09 pour un employeur et
elle est fixe pour l'employeur, peu importe s'il s'agit d'un homme, d'une femme
ou d'une personne de moins de 18 ans.
Maintenant, quant aux effectifs médicaux en Angleterre, c'est
assez difficile d'analyser cette question étant donné qu'il ya eu
certainement beaucoup d'émigration de médecins anglais vers
l'extérieur et il y a eu immigration de médecins en provenance
par exemple du Pakistan et des Indes. Comme on l'indique à la page 31,
on voit qu'il y a eu une certaine augmentation en nombre pas tellement forte.
Il est difficile de dire si réellement la situation est aussi bonne
qu'elle pouvait l'être il y a 20 ans, ou moins bonne. Tout dépend
de la qualité des médecins qui sont partis et de la
qualité des médecins qui sont venus pour les remplacer. On voit
que l'augmentation des médecins d'hôpitaux est beaucoup plus
forte, ça indique justement que les spécialistes dans les
hôpitaux sont mieux traités, que leur profession a plus d'attrait
et qu'il y a un moins grand problème de ce côté. Les
pharmaciens sont assez stationnaires, les ophtalmologistes sont en
régression et il y a une légère augmentation de dentistes,
malgré que, là aussi, il semble y avoir une grande
pénurie.
Maintenant, les médecins sont groupés dans la «
British Medical Association ». En plus, il y a aussi les collèges,
mais disons que la « British Medical Association » correspond
à 1' «Ontario Medical Association» et que les
collèges jouent le même rôle que notre collège ici
dans la province de Québec. Cette association joue le même
rôle que 1» « Ontario Medical Association » joue en
Ontario, c'est-à-dire qu'elle voit principalement à la
défense des intérêts économiques des médecins
membres de cette association.
Il y a un autre point à mentionner, je crois, en Angleterre,
c'est que malgré le coût élevé pour se faire traiter
privément et le fait que les spécialistes dans les hôpitaux
ne peuvent consacrer qu'une partie limitée de leur temps à la
pratique privée, il y a un nombre grandissant de personnes qui
s'assurent pour pouvoir être traitées à titre privé.
On indique à la page 32 que le nombre d'assurés augmente
constamment et que c'est un signe de déséquilibre du
régime, étant donné que lorsque le régime a
été établi en 1948, on avait justement voulu faire
disparaître cette distinction qui existait dans
le passé entre les assistés sociaux et les assurés
auprès de compagnies privées, ce qui donnait lieu à deux
niveaux de qualité de soins. Graduellement, ce phénomène
se reproduit de nouveau. Il y a certainement, je pense bien, une leçon
à tirer de ceci.
M. MARLER: Est-ce que le nombre de médecins qui semble à
première vue, si je regarde à la page 31, est-ce que le nombre de
médecins est relativement plus considérable que dans le
Québec?
M. CASTONGUAY: 39,000.
M. MARLER: Pour une population de combien? 44 millions?
M. CASTONGUAY: Disons 44 millions et 39,000 médecins, alors
ça veut...
M. MARLER: Cela veut dire...
M. CASTONGUAY: Un petit peu moins, je crois. Ici, si on prenait..
M. MARLER: Cela veut dire en somme, 1,100, 1,200 patients par
médecin, tandis que, c'est-à-dire de population par
médecin, tandis que chez nous c'est 850...
M. CASTONGUAY: A peu près un par 850. C'est assez difficile, il
faut voir aussi la proportion des médecins qui sont dans des fonctions
administratives et le nombre de médecins qui pratiquent.
M. MARLER: Cela demande évidemment une étude approfondie
des statistiques pour se rendre compte des faits.
M. CASTONGUAY: Dans les nombres, il n'y a pas un écart
énorme entre les deux.
Mademoiselle Beaudoin dit que c'est un par 960 en Angleterre et ici
c'est à peu près un par 850 au Canada. Alors l'écart n'est
pas tellement élevé.
M. LE PRESIDENT: D'autres question, messieurs.
M. TREPANIER: M. Castonguay, nous avons parlé hier du danger
qu'il y aurait, par l'instauration d'un régime d'assurance-santé,
que les médecins soient accaparés par les nombreuses visites
à domicile. Vous voyez comme moyen de remédier à ce
danger-là le fait d'exiger des frais modérateurs. S'il n'y en
avait pas aux vi- sites de bureaux, d'en exiger dans les visites à
domicile, ou tout au moins de les augmenter. Est-ce qu'il n'y aurait pas un
autre moyen de parvenir à cette fin-là? Je ne sais pas si c'est
ce que veut dire ce que j'ai vu ici à la page 13: les infirmières
visiteuses. Est-ce que l'on entend par là des infirmières qui
auraient pour fonction de visiter à domicile les malades et en somme
dégager le médecin de cette obligation-là pour les cas
normaux?
M. CASTONGUAY: Eh bien, disons il y a déjà ici dans la
province de Québec des organismes d'infirmières visiteuses. Vous
en avez par exemple attachées à l'hôpital Ste-Justine, le
service social médical, et le but justement de ce centre est de
permettre aux patients d'une part de sortir le plus rapidement possible de
l'hôpital, lorsqu'il est suffisamment mieux. Les infirmières vont
le visiter à domicile pour voir à ce que les médicaments
soient bien donnés, pour refaire les pansements s'il y a lieu, etc... ce
qui soulage nécessairement le médecin qui n'est pas obligé
de faire ce travail. D'un autre côté, même si la formule
pouvait être intéressante, il y a une autre chose qu'il faut
mentionner, c'est qu'il semble y avoir une pénurie énorme
d'infirmières dans la province de Québec, et surtout
d'infirmières bien qualifiées. Elles sont déjà en
trop petit nombre pour suffire à la demande à l'intérieur
des hôpitaux, alors même si la solution, en théorie,
pourrait paraître intéressante, en pratique initialement du moins,
je crois qu'elle ne donne pas tellement de possibilités.
M. TREPANIER: Est-ce que vous voyez l'encouragement de cette formation
d'infirmières et une possibilité intéressante de
solutionner le problème?
M. CASTONGUAY: Franchement, à ce stade-ci, je ne suis pas assez
au courant, personnellement, des problèmes que pose le recrutement.
M. TREPANIER: Non, mais en principe.
M. CASTONGUAY: Ah, en principe, ça semble excessivement
intéressant comme idée, mais est-ce que la réalisation en
est possible? Il semble que c'est assez difficile d'intéresser les
jeunes filles à devenir infirmières, leur carrière aussi
est relativement courte, un bon nombre se marient, un bon nombre vont pour un
stage à l'extérieur voir du pays. Il semble y avoir un
problème assez chronique dans ce secteur quant à l'insuffisance
du nombre d'infirmières.
M. DUPRE: Cela existe à Montréal, ça. La
Métropolitain, chaque fois que ma femme a un bébé, la
Métropolitain avait une infirmière qui passait pendant un nombre
X de jours jusqu'à ce qu'elle ait des ordonnances du médecin pour
lui donner des conseils.
M. BRISSON: Mais ça fait longtemps. UNE VOIX: Elle est bonne!
M. FORTIER: M. Castonguay, en résumé, par exemple, les
visites de nuit, il faut tout de même se fier un peu aussi à
l'éthique des médecins. Je crois devoir dire que chez les
médecins il y en a encore qui sortent la nuit. Seulement, ce qui arrive,
c'est que moi je sais que ceux qui pratiquent dans mon bout, avec moi, on
connait assez bien nos malades, alors on sait que quand un me demande, lui, il
est malade. Alors vient un moment où on peut pas mal juger. Alors,
est-ce que vous ne croyez pas que l'on devrait se fier à
l'éthique professionnelle des médecins tout en ajoutant
peut-être un montant. On donnait l'exemple concret qu'en Gaspésie
on va voir un malade, mettons un voisin, et que l'on charge $5 et qu'on met
ça même à$8, il y aurait déjà un
intérêt suffisant et d'autant plus que le médecin,
après tout, a une responsabilité vis-à-vis de ses
confrères et vis-à-vis du Collège des médecins.
S'il sait qu'il y a un cas urgent, il va y aller.
M. CASTONGUAY: Définitivement docteur, d'ailleurs sur cette
question, disons que nous avons indiqué ceci à titre de guide, ou
pour indiquer notre façon de voir les choses. Les médecins, par
leurs organismes, vont se présenter devant le comité, vont
pouvoir vous en dire beaucoup plus long et beaucoup plus en connaissance de
cause sur cette question que nous pouvons en dire. Cela, nous l'admettons.
M. RENAUD: Je pense bien que les médecins vont se charger,
docteur, les médecins vont se charger de nous poser la question
lorsqu'ils vont venir devant nous. Je le crois.
M. FORTIER: Oui.
M. VAILLANCOURT: Ils vont certainement nous faire des suggestions.
M. MARLER: Quant à moi, je suis convaincu que d'une façon
générale nous n'aurons pas d'abus de la part des médecins.
J'admets qu'il y a probablement des cas où il y a des abus, de la part
des médecins, et je suppose qu'il sera tout à fait naturel que de
tels abus soient réprimés plutôt par le collège des
médecins qu'autrement. Par contre, ce que j'envisageais lorsque j'en
parlais plus tôt aujourd'hui, c'est l'abus par le patient qui a la
passion d'avoir des médecins chez lui et qui les amène à
toute occation possible. Si je ne me trompe, nous avons eu l'occasion d'en
causer privément M. Castonguay, et vous envisagez que si nous avons un
plan d'assurance-maladie, il y aura nécessairement des ordinateurs qui
vont, à un moment donné, ou à la fin de l'année,
nous dire quels sont les services rendus, non pas par le médecin mais
à chaque patient dans le Québec, et vous serez averti par la
machine, en passant les cas, de la personne qui aurait demandé 25 fois
des visites à la maison; et je suppose que la correction de l'abus, ce
sera de notifier le médecin qui a fait les visites que l'on pense que
les visites à domicile sont trop nombreuses, et peut-être que les
mécecins tâcheront de réprimer l'abus. Evidemment la
difficulté c'est que une fois qu'on commence, c'est difficile de faire
machine arrière, il est difficile d'apporter des frais dissuasifs
à un moment donné, alors c'est un problème que nous devons
envisager et étudier avant de faire la...
M. CASTONGUAY: Il est évident que la collaboration des
médecins est encore ce qui est le plus important. Vous avez par exemple
les régimes dont on a parlé en Ontario, en Alberta, les
régimes à commandite médicale. Ce sont alors les
médecins qui font face à tous ces problèmes-là
eux-mêmes, sans aucune intervention de l'extérieur, et on n'entend
pas dire que ces régimes donnent lieu à des abus même si le
patient est traité sans devoir payer un supplément au
médecin. La forme de contrôle la meilleure est donc encore celle
que les médecins s'imposent collectivement et individuellement, et leur
désir de collaborer avec le régime.
M. MARLER: Sauf, M. Castonguay, évidemment je ne puis pas dire
que c'est en Ontario, mais disons en Alberta, la compagnie d'assurance pourra
dire: c'est un gars qui est trop dispendieux comme risque, alors je ne l'assure
pas.
M. CASTONGUAY: Non, mais... M. MARLER: ... son contrat.
M. CASTONGUAY: Dans les régimes à commandite
médicale, ils ne semblent pas faire une sélection individuelle.
Les gens sont assurés moyennant paiement d'une prime qui est la
même pour l'ensemble de la province de l'Alberta.
Les sociétés privées d'assurance, elles, font une
sélection et peuvent aussi refuse les personnes. Mais avec
l'établissement des régimes facultatifs comme en Alberta, les
sociétés n'ont plus le privilège de refuser un
assuré.
M. MARLER: Même après une expérience
entrêmement malheureuse?
M. CASTONGUAY: Exactement.
Alors, ce qui est fait à ce moment-là, c'est qu'il y a
divers moyens de contrôle et d'éducation des médecins; il
peut y avoir des médecins-conseils qui vont voir les médecins
fautifs pour essayer de les remettre sur la bonne voie et...
M. TREPANIER: Mais en Angleterre, quel est, est-ce qu'il y a un
problème de ce genre-là, au sujet de ...
M. CASTONGUAY: Les omnipraticiens, se sont définitivement
plaints. On le voit dans la littérature et ce genre de remarques
à l'effet que l'omnipraticien est débordé de demandes de
toutes sortes qui sont très fréquentes.
M. TREPANIER: Une dernière question, M. Castonguay. Est-ce que le
système d'assurance-santé en Angleterre, selon vous, diffuse des
soins de santé suffisants à la population?
M. CASTONGUAY: Là, c'est une question... d'appréciation
relative. Le niveau de vie en Angleterre est définitivement moins
élevé qu'ici, par exemple. Alors toute proportion gardée
par rapport au Canada, peut-être que nous trouverions ce qui se passe en
Angleterre comme étant insuffisant. Par contre il semble que lorsqu'on
se reporte à leur point de départ, en Angleterre, au lendemain de
la guerre, il y a eu une amélioration pendant un bon nombre
d'années, mais aujourd'hui l'on semble perdre du terrain. C'est donc
assez relatif, je pense bien qu'il n'y a pas personne qui peut dire en
Angleterre qu'il n'est pas traité lorsqu'il y a réellement
nécessité médicale. Peut-être que ça prend un
peu plus de temps, peut-être qu'il y a moins d'attention individuelle,
mais est-ce que la santé de la population s'en ressent ou si c'est une
question de satisfaction ou d'agacement individuel, c'est assez difficile
à évaluer.
M. RENAUD: M. Castonguay, est-ce que vous avez examiné la
question du coût du système d'assurance-maladie en Angleterre,
comparativement au système de la Belgique, de la France.
M. CASTONGUAY: Les régimes couvrant des choses
différentes, les comparaisons sont excessivement difficiles. En
Angleterre, vous couvrez tout par le service national de la san- té; en
Suède vous ne couvrez que certains soins et il y a des frais
modérateurs, c'est excessivement difficile. Il reste que pour
l'économie de l'Angleterre leur service semble être joliment plus
difficile à supporter qu'il ne l'est en Suède. Je pense que c'est
à peu près la seule réponse que l'on peut donner.
M. RENAUD: En rapport du budget total en Angleterre avec le budget des
autres pays, avez-vous fait une comparaison du coût de ce service?
M. CASTONGUAY: Encore là, les montants affectés, la
proportion du produit national brut affecté ou du budget national
affecté à un service de ce genre, ne donne pas une réponse
complète. Il y a une étude publiée justement à ce
sujet à la fin du volume 8. C'est impossible en fait de tirer une
comparaison comme celle-là. Vous voyez, en Suède les employeurs
assument une bonne part des charges, alors ça se reflète dans les
structures des salaires, les coûts sont répartis
différemment. Aux Etats-Unis, il n'y a aucun régime
d'assurance-maladie, il n'en reste pas moins que l'on affecte aux
dépenses relatives à la santé peut-être plus
proportionnellement per capita qu'en Angleterre, même compte tenu du
niveau de vie. Naturellement il en reste moins pour d'autres services. C'est
simplement les mécanismes pour diriger l'argent, les ressources dans les
services de santé qui changent en fait. Le poids de ces services, sur
l'économie du pays, que ce soit par le truchement de régime
public ou purement par l'entreprise privée, peut être même
plus lourd dans un pays qui n'a pas de régime d'assurance-maladie.
Alors, c'est excessivement difficile d'essayer de faire des comparaisons entre
les pays.
Nous sommes allés par exemple au marché commun dans lequel
vous avez cinq pays qui sont groupés et où ce genre de questions
a été étudié. On nous a remis des études, et
encore là, il n'y a aucune conclusion qui peut être tirée
de ces études qui sont assez détaillées, quand à
savoir exactement quelle porportion de la richesse ou des ressources d'un pays
est affectée à ce secteur, ça prend des formes tellement
indirectes.
M. RENAUD: Je comprends. Merci.
M. LE PRESIDENT: D'autres question, messieurs? M. Castonguay, je vous
remercie au nom du comité pour les explications additionnelles que vous
venez de donner sur le régime d'assurance-maladie dans certains
pays.
Il est six heures, nous ajournons à demain matin, à dix
heures trente.
(à suivre)