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Etude du programme de redressement industriel
de Marine Industrie Ltée
(Onze heures cinquante minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
La commission élue permanente de l'industrie et du commerce est
réunie, ce matin, pour faire l'étude du programme de redressement
industriel de Marine Industrie Ltée.
Les membres de la commission sont: MM. Dubois (Huntingdon), Gosselin
(Sherbrooke), Grégoire (Frontenac), Martel (Richelieu) remplace Mme
Leblanc-Bantey (Iles-de-la-Madeleine), Lefebvre (Viau), Ouellette
(Beauce-Nord), Raynauld (Outremont), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Shaw
(Pointe-Claire), Tremblay (Gouin).
Les intervenants sont: MM. Gagnon (Champlain), Godin (Mercier), Biron
(Lotbinière) remplace Goulet (Bellechasse), Landry (Fabre), Marchand
(Laurier), Michaud (Laprairie), Perron (Duplessis), Samson (Rouyn-Noranda),
Saint-Germain (Jacques-Cartier).
Dans l'ordre, les personnes convoquées sont M. Jean-Roch Brisson,
président-directeur général de Marine Industrie, M. John
Dinsrnore, vice-président du conseil d'administration de Marine
Industrie, M. Richard Gagné, président de l'Union des
employés de chantiers de Marine Industrie, M. Pierre DeCarufel,
président du syndicat des employés de bureau de Marine Industrie,
M. Guy Coulombe, président et chef de la direction de la SGF, M. Jacques
Paquin, vice-président à l'exploitation et trésorier de la
SGF, et Michel Plessis-Bélair, vice-président au
développement de l'entreprise de la SGF. Est-ce que tous ces messieurs
que je viens d'énumérer sont présents ce matin? Si vous
voulez prendre place à la table centrale.
Nous allons commencer, M. le ministre, pour les... Est-ce qu'il y a une
proposition pour le rapporteur de la commission? M. le député de
Richelieu? M. Martel, rapporteur. Est-ce qu'il y a consentement?
M. Scowen: Consentement.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Scowen: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je veux poser seulement une question au ministre,
avant qu'il commence. Dans son préambule, je me demande si le ministre
pourrait nous dire où ce rapport est rendu. Si je me rappelle bien,
c'est un rapport qui a été demandé lors des débats
sur le projet de loi, l'an passé, concernant la SGF. La compagnie avait
accepté de faire ce plan de redressement et de le rendre public avant le
mois de juin. Je veux simplement savoir s'il s'agit d'un rapport qui a
été approuvé et par le "conseil des ministres" de Marine
Industrie, et par le "conseil des ministres" de la SGF, et par le Conseil des
ministres du gouvernement. A quel stade ce rapport en est-il actuellement,
simplement pour nous renseigner?
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre.
M. Tremblay: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais
tout d'abord souhaiter la bienvenue aux dirigeants de la Société
générale de financement, de même qu'à ceux de Marine
Industrie, tout en souhaitant, en même temps, la plus cordiale bienvenue
au président des employés horaires de Marine Industrie, M.
Gagné, et au président du syndicat des employés de bureau,
M. Pierre DeCarufel.
M. le Président, la raison pour laquelle la commission de
l'industrie et du commerce se réunit ce matin, c'est afin de poursuivre,
jusqu'à un certain point, les interrogations que nous avions entreprises
au mois de décembre dernier, lorsque, à la suite du
dépôt et de l'adoption d'un projet de loi, le projet de loi 108
qui modifiait la charte de la Société générale de
financement, il a été nécessaire d'intervenir massivement
au plan financier pour sauver Marine Industrie d'une faillite qui était
imminente à l'époque, à cause principalement d'un
désastre financier découlant de la non-vente d'une production de
six bateaux que nous appelions bateaux panaméens.
L'article 6 de la loi 108 qui a été adoptée
prévoyait, en plus de tous les montants votés par
l'Assemblée nationale, que la Société
générale de financement, en collaboration avec la
société Marine Industrie, devait préparer un plan de
conversion, un plan de redressement industriel et que ce plan devait être
approuvé par le gouvernement et déposé à
l'Assemblée nationale au plus tard le 1er juin 1979.
M. le Président, je voudrais manifester ma reconnaissance
à l'endroit de la direction des deux sociétés, de
même qu'au syndicat, qui ont contribué à la
réflexion intérieure de ces entreprises pour avoir produit
à temps un plan de relance de Marine Industrie qui est, à mon
avis, extrêmement bien fait.
Nous sommes donc ici pour connaître, d'une part du moins
les membres de la commission et le public en général, parce que
le document a été déposé à
l'Assemblée nationale le 1er juin plus en détail les
grandes lignes de ce plan et quelles sont les répercussions de
l'adoption et de l'application de ce plan de redressement au cours des cinq
prochaines années, à l'intérieur de la
société Marine Industrie. Si vous me permettez, j'aimerais
m'adresser au président de la Société
générale de financement, lui demander, compte tenu de la
complexité de ce plan, d'en faire un résumé et de situer
les grands paramètres du plan de redressement de Marine Industrie.
M. Scowen: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): Le député de
Notre-Dame-de-G race.
M. Scowen:... simplement pour confirmation, est-ce que je peux
comprendre que le plan, comme écrit, a déjà
été adopté par le Conseil des ministres?
M. Tremblay: M. le Président, j'ai mentionné que la
loi prévoyait ceci: "Une fois approuvé par le gouvernement, le
plan de conversion doit être déposé à
l'Assemblée nationale au plus tard le 1er juin 1979." Ceci a
été fait. La loi ne prévoyait pas de commission
parlementaire, mais nous avons cru qu'il était d'intérêt
public d'avoir cette commission parlementaire. C'est la raison pour laquelle
nous sommes ici ce matin. C'est une commission parlementaire sur le plan de
redressement de Marine Industrie, tel que prévu dans la loi.
M. Scowen: C'est approuvé?
M. Tremblay: Est-ce que je dois le répéter six ou
sept fois? Il est évident que c'est un plan qui a été
approuvé par le gouvernement et déposé à
l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. Coulombe, je vous
cède la parole.
Résumé du plan de redressement
industriel de Marine
M. Coulombe (Guy): Merci, M. le Président. En ce qui
concerne le plan de redressement, il a été approuvé,
présenté aux deux conseils d'administration de la SGF et de
Marine Industrie, formellement approuvé et formellement
recommandé au gouvernement.
Je crois que la meilleure façon de le résumer, ce serait
peut-être le document...
Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, M. Coulombe.
Pourriez-vous approcher votre micro, s'il vous plaît?
M. Coulombe: Oui. Je crois que le meilleur moyen de
résumer le plan de redressement, c'est de se situer, dans le texte qui a
été déposé, aux alentours de la page 36, où
on voit que les cinq volets principaux du plan de redressement supposent une
expansion importante des activités hydro-électriques, une
modernisation des installations de production de wagons, le maintien des
activités de construction navale, la prospection de nouvelles
séries de produits ainsi que la réorganisation de
l'entreprise.
Il s'agit donc des cinq volets principaux du plan de redressement. Ce
plan se divise essentiellement en deux phases: La première phase,
s'é-tendant d'aujourd'hui jusqu'à la fin de 1980, suppose des
investissements assez importants, de l'ordre de $5 millions à $7
millions, dans les divisions hydro-électriques et la division
wagons.
La deuxième phase prévoit des investissements beaucoup
plus considérables qui peuvent varier. Cette variation va
dépendre essentiellement de ce qui va se passer au niveau de la
construction navale durant la première phase. Est-ce qu'on va assister
à une reprise du marché? Est-ce que l'activité va
reprendre normalement, à un niveau souhaité? Selon cette
orientation, les investissements pourront se faire dans la deuxième
phase. C'est pour cela qu'on a mis des investissements qui peuvent varier. Cela
va dépendre de ce qui va se passer dans la première phase.
Il y a aussi l'établissement par la SGF d'un budget
spécial de recherche de nouveaux produits de $2 millions, qui va
être mis à la disposition de Marine Industrie. (12 heures)
Ce plan de redressement suppose aussi qu'en ce qui concerne la
main-d'oeuvre, il va y avoir certaines mises à pied qui devront
être faites entre septembre 1979 et septembre 1980, ces mises à
pied pouvant varier de 600 à 1000, selon les contrats dans la division
wagons qui sont actuellement en négociation. Essentiellement, l'objectif
fondamental de ce plan, c'est d'assurer la rentabilité et
l'efficacité de Marine Industrie. Notre postulat de base, c'est que ce
plan de redressement devra produire ses fruits de telle sorte que les
investissements qui sont prévus puissent être produits par
l'entreprise ou du moins dans le cadre du groupe SGF. C'est pour cette raison
que les investissements qui sont prévus sont donc dépendants de
certains facteurs qui restent à régler en 1979. Un des principaux
facteurs, c'est évidemment la vente ou la disposition d'une façon
ou de l'autre des six bateaux dont trois sont actuellement en contrat de
gestion et trois autres pour lesquels on poursuit des négociations avec
l'armateur avec qui on est lié par un contrat.
C'est absolument essentiel de comprendre que, si cette condition ne se
réalise pas, le plan de redressement devra un peu glisser dans le temps,
c'est-à-dire la réalisation du plan devra être remise en
cause, si la situation financière à cause de l'existence de ces
six bateaux ne se résorbe pas.
M. le Président, en résumé, c'est l'essentiel du
plan. Je voudrais souligner aussi que ce plan a été fait avec la
collaboration des cadres de la SGF et ceux de Marine. C'est le produit de
plusieurs mois de travaux assez intenses. De plus, on a eu la collaboration des
syndicats. Un comité consultatif a été mis sur pied depuis
le mois de janvier. Il s'est réuni régulièrement et les
syndicats ont été mis au courant des travaux de base qui sont
quand même assez considérables et dont vous retrouvez la liste en
annexe du document qu'on vous a soumis. Ces travaux-là sont
essentiellement le fruit du travail interne à Marine Industrie.
Evidemment, il y a eu quelques consultants extérieurs qui ont
été engagés, mais, fondamentalement, c'est le travail des
cadres de Marine Industrie qui a conduit à ce plan que nous
déposons et à préciser son contenu.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre. Merci, M.
Coulombe.
M. Tremblay: M. le Président, j'aimerais demander au
président de la SGF d'entrer un peu plus dans le détail sur les
deux phases de mise en application du plan de redressement. Il y a deux phases.
Il y a une phase à court terme qui va jusqu'à la fin de 1980 et
une autre qui va jusqu'en 1984. J'aimerais qu'il nous dise combien de fonds
Marine Industrie va investir à chacune de ces étapes et quelle
sera l'impact sur chacune des divisions de Marine Industrie en termes de
croissance et en termes d'emplois. Parce qu'il s'agit de paramètres
qu'il nous faudrait, je pense, avoir en tête pour discuter intelligemment
de toute la question.
M. Coulombe: Dans la première phase, si on s'en tient
à la première phase, les investissements sont de l'ordre de $5
500 000 pour la division hydro-électrique et cela, essentiellement pour
respecter les contrats en main à Marine Industrie. Il faut mentionner
que Marine a au-delà de $325 millions ou $350 millions de contrats en
carnet dans la section division hydro-électrique. Il y a des
investissements qui sont absolument nécessaires pour respecter ces
contrats. Ce sont des investissements à court terme.
Pour la division des wagons, il s'agit d'investissements d'environ $1
500 000 dans la première phase. Nous sommes actuellement on
pourra peut-être en discuter plus à fond tantôt dans,
je ne dirais pas un boom, mais dans une phase extrêmement
intéressante concernant le marché des wagons. Marine doit
moderniser son équipement pour faire face à ces commandes qui
sont extrêmement intéressantes à l'heure actuelle. Marine
entend bien profiter au maximum de cette demande énorme, qui est surtout
une demande américaine, d'ailleurs. Pour le moment, elle entend
moderniser son équipement pour vraiment profiter de cette phase
extrêmement intéressante dans la construction de wagons.
En ce qui concerne la division navale, Marine a actuellement six bateaux
en construction, quatre cargos polonais dont le premier doit être
livré dans quelques semaines, à la fin d'août, et le
dernier doit être livré vers le mois de juin 1980. En plus, il y a
deux traversiers pour la Société des traversiers du
Québec, qui doivent être terminés en février et
mars. A part ces six bateaux, Marine n'a pas actuellement de contrat de
construction de bateaux. Son carnet de commandes est vide, pour des raisons qui
sont longuement expliquées dans le document qui a été
déposé.
Premièrement, le marché international je pense que
c'est reconnu par tout le monde s'est affaissé de façon
tragique. Quant au marché national, il y a actuellement un semblant de
reprise, parce que le gouvernement fédéral vient de demander des
soumissions pour quelques bateaux, mais là, on travaille à moyen
terme, c'est-à-dire que même si Marine soumissionne et même
s'il y a des contrats, cela n'aura pas d'impact en termes de main-d'oeuvre
à très court terme. Avant que les soumissions soient
examinées, le contrat donné, les plans et devis faits, on se
reporte, à moins d'un miracle, au milieu de 1980, en ce qui concerne le
carnet de commandes de la construction navale, si jamais cela aboutit.
Donc, pour la première phase, des investissements de $5 500 000
plus $1 million pour la recherche sur des nouveaux produits et des recherches
très précises sur des nouveaux produits dont on pourra dire
quelques mots tantôt.
M. Tremblay: $5 millions d'investissement dans la première
phase?
M. Coulombe: C'est ça. Il y a des investissements de $5
500 000, plus $1 500 000 et l'autre, en termes d'investissements de machinerie
ou ainsi de suite, c'est un budget de recherche...
M. Tremblay: Recherche et développement...
M. Coulombe: ... de nouveaux produits. Cela pourrait même
aller jusqu'à la mise en marche de certains prototypes ou ainsi de
suite. C'est pour la première phase.
Pour la deuxième, les investissements peuvent varier de $40
millions à $45 millions. Si on reprend cela division par division, on
prévoit, encore là, à la division hydro-électrique
et industrielle, que les investissements pourraient être de l'ordre de
$25 millions et, dans la division des wagons, de $9 millions à $15
millions. On dit de $9 millions à $15 millions tout simplement parce
que, selon ce qui va se passer dans la construction navale dans la
première phase, ça va déterminer l'utilisation de certains
équipements qui sont actuellement à Marine, qui pourraient
être utilisés pour des wagons ou qui devront rester à la
construction navale, si le marché reprend. C'est ce qui explique la
variation.
Il va y avoir aussi un deuxième million qui va être mis
dans la recherche de nouveaux produits, à partir de 1981, et, si on
regarde un peu plus loin, j'ai dit tantôt qu'il y avait $325 millions
à $350 millions de commandes dans la division hydroélectrique, on
a actuellement, dans le carnet de commandes aussi, dans la division des wagons,
$110 millions de carnets de commandes dans cette division. Comme je vous l'ai
dit tantôt, dans cette perspective, pour les prochaines années,
quoiqu'on ne se fait pas d'illusion que ça va durer des
décennies, on croit que le marché des wagons, pour quelques
années, le marché américain et, dans deux ans, le
marché canadien, va permettre à Marine de profiter à fond
de ce marché.
M. Tremblay: Si je comprends bien, le plan de redressement est
essentiellement un plan de spécialisation et de diversification des
activités de Marine en capitalisant sur les secteurs forts et rentables
de la société, la division des wagons et la division
hydro-électrique, et en consolidant la section des chantiers maritimes
pour deux raisons, une question de rentabilité, mais une question aussi
de pénurie de commandes internationales.
Maintenant, est-ce que les deux autres divisions sauf la division navale
sont rentables? L'an
passé, quelles ont été les pertes de Marine et
à quelle division doit-on attribuer ces pertes, avec des chiffres
précis?
M. Coulombe: Pendant qu'on va sortir les chiffres précis,
les pertes de Marine, en 1978, étaient de l'ordre de $34 millions. Ces
pertes ont été...
M. Tremblay: Sur des ventes de combien?
M. Coulombe: Sur un chiffre d'affaires de $75 millions, mais il
faut se méfier, parce que ces $75 millions, en fait, signifient $160
millions d'activités réelles. C'est qu'au point de vue de la
comptabilisation des revenus, tant que le matériel n'est pas
livré, tant que les bateaux ne sont pas livrés...
M. Tremblay: Comme des bateaux en construction qui ne sont pas
vendus?
M. Coulombe:... ils ne sont pas comptabilisés. M.
Tremblay: D'accord.
M. Coulombe: Donc, il faut comparer cette perte à un
niveau d'activités d'environ $160 millions de chiffre d'affaires.
Cette perte a été assumée en partie par la loi 108,
c'est-à-dire $10 millions, ce qui a baissé le déficit
à $24 millions. Une partie de ce déficit de $24 millions est
causée par la construction des bateaux polonais, qui sont actuellement
en chantier, pour une somme d'entre $17 800 000 et $18 millions, le reste
étant les séquelles de ce qui a été longuement
discuté ici, au mois de novembre, c'est-à-dire de l'aventure
grecque, des questions de change étranger, etc.
Les deux autres divisions...
M. Tremblay: Un instant, s'il vous plaît, M. le
Président!
M. Coulombe: Oui.
M. Tremblay: Pour bien se comprendre; les pertes de la division
navale ont été de $34 millions. Maintenant, les gains nets des
deux autres divisions ont été de combien?
M. Coulombe: M. Brisson.
M. Brisson (Jean-Rock): Pour en arriver aux $24 millions de
pertes de Marine, la division navale a fait une perte de $28 millions; la
division industrielle et hydro-électrique a fait un profit de $3 400
000; la division des wagons, un profit de $600 000 et diverses activités
qui entrent dans l'une ou dans l'autre, $400 000 de profit, pour en arriver
à un total de perte de $24 millions.
M. Tremblay: Donc, les investissements de $40 millions ou de $45
millions vont aller en priorité vers les secteurs dans lesquels il y a
des carnets de commandes bien remplis. Vous avez dit, dans
l'hydro-électrique, $325 millions.
M. Brisson: C'est ça et $110 millions dans les wagons.
M. Tremblay: $110 millions dans les wagons, sans compter ceux que
vous anticipez solliciter?
M. Coulombe: Oui, ce sont les carnets de commandes en main, les
contrats en main.
M. Tremblay: C'est ferme?
M. Coulombe: On ne comprend pas, dans ces chiffres, les contrats
qui sont actuellement en négociation, surtout concernant les wagons.
M. Tremblay: Quels sont les carnets de commandes dans la division
navale?
M. Coulombe: Les six bateaux, $120 millions, plus les deux
traversiers.
M. Brisson: Mais, net, c'est $65 millions de travaux qu'il reste
à faire.
M. Coulombe: C'est ça, les contrats totaux
représentent $120 millions, mais il reste $65 millions de travaux
à faire sur ces bateaux.
M. Tremblay: Maintenant, en termes d'emplois?
M. Biron: C'est pour un éclaircissement sur la question du
ministre. Je vous remercie, on a eu la réponse sur le revenu net ou
déficitaire dans chaque division. Avez-vous aussi les activités
économiques réelles ou les ventes réelles de chaque
division, que vous pouvez nous donner en même temps, pour comparer aux
chiffres que vous avez donnés au ministre?
M. Brisson: Les ventes totales de Marine Industrie sont de $74
millions, à la division navale, nous avons $17 millions de vente;
à la division industrielle de l'hydro-électrique, $31 millions;
à la division des wagons, $21 millions et à notre filiale qui est
incluse, environ $3 millions, à Foresteel.
Maintenant, je voudrais expliquer les $17 millions à la division
navale, répéter ce que M. Coulombe a dit. Ce n'est pas le niveau
d'activité de la division, mais bien la livraison de vaisseau, il n'y a
eu qu'une livraison de bateau en 1978.
M. Tremblay: Est-ce que vous avez des chiffres sur le niveau
d'activité? Vous avez dit $120 millions, tout à l'heure?
M. Brisson: Le niveau d'activité était de l'ordre
de $175 millions en 1978.
M. Tremblay: $175 millions. Donc, les pertes de $28
millions...
M. Brisson: Les pertes totales de la compagnie de $24 millions
sont sur un niveau d'activité de $175 millions.
M. Plessis-Bélair (Michel): Si vous permettez, M. le
ministre, la différence se trouve essentiellement dans le bilan de la
compagnie où on a mis
en inventaire les bateaux panaméens invendus. Au lieu de les voir
dans l'état des pertes et profits, on les retrouve dans le bilan comme
étant des contrats terminés. Tant que l'on n'en disposera pas,
ils demeureront là.
M. Tremblay: Je reviendrai tout à l'heure sur la question
de la rentabilité des projets d'investissement, mais j'aimerais avoir,
pour le bénéfice des membres de la commission, des renseignements
plus précis sur les répercussions d'emploi de l'application de
chacune des phases du plan de redressement. (12 h 15)
Si je comprends bien, la division navale, qui est une division fortement
intensive en main-d'oeuvre, avec des travailleurs spécialisés,
d'ailleurs, a toujours eu des fluctuations dans le nombre d'employés.
Historiquement, la crise internationale pose un problème de
consolidation de cette division, la demande très forte pour les produits
des deux autres divisions va amener un accroissement substantiel de la
production, mais, si je comprends bien, l'intensité travail ou
l'intensité main-d'oeuvre de ses activités est plus basse. Quel
sera l'impact au niveau des effectifs que Marine va devoir garder à son
emploi? Quels sont les effectifs aujourd'hui, quels seront-ils en 1980 et quels
seront-ils en 1984?
M. Brisson: M. le Président, à Marine, il y a
à peu près un mois, nous avions 3500 employés. De ces 3500
employés, il y en avait environ 1800 qui étaient affectés
à la division navale. Avec la fin des contrats de la division navale en
juin 1980, nous devions attendre une mise à pied des 1800
employés qui étaient à l'emploi de cette division s'il n'y
avait pas eu d'autres activités. Cependant, il y a eu un changement dans
l'orientation de certaines des divisions à cause de l'augmentation de
travail et à la suite de la réaffection à d'autres
contrats, les mises à pied seront diminuées à environ
1000.
De plus, nous sommes couramment à la recherche de contrats, il y
a des contrats qui s'annoncent et nous aurons peut-être la
possibilité de garder à l'emploi environ 400 autres personnes si
nous avons un succès dans les recherches que nous faisons. Ce qui
voudrait dire que la réduction de personnel, l'an prochain, pourrait
n'être que de 600 personnes. Tout de même, avec les contrats en
main actuellement, nous disons 1000 personnes.
Par la suite, l'augmentation des activités à la division
des wagons et l'augmentation d'activités à la division
hydro-électrique, la reprise, peut-être après 1980, avec
certains contrats navals, nous prévoyons qu'en 1984, la
société serait revenue à un niveau de 3000 ou 3100
employés. J'ai le détail ici par division et ça montre
qu'après la baisse de 1980, il y a une remontée graduelle,
à mesure que les autres activités entrent en place, de 200
à 300 employés par année, pour en venir en 1984 à
3100 et, par la suite, continuer à croître à la suite des
investissements qui auront eu lieu à Marine.
M. Tremblay: Nous allons revenir davantage à ces points,
je suis sûr que les membres de la commission vont avoir des questions
à poser sur cela. J'aimerais quand même poursuivre et poser
quelques questions avant de donner la parole à quelqu'un d'autre.
Dans votre programme de redressement, vous avez fait plusieurs
scénarios d'investissement, en fonction de différentes
hypothèses et de différents taux de rendement. Comment allez-vous
procéder et quels ont été les critères qui vous ont
guidés pour choisir le scénario définitif qui a
été soumis au gouvernement?
M. Plessis-Bélair: On peut prendre deux minutes pour
expliquer la façon, la procédure qu'on a suivie pour arriver
à ce cheminement qui a duré au moins six mois. On a formé
cinq groupes de travail, essentiellement; chaque groupe de travail avait un
rôle bien précis, bien défini. Tout d'abord, il y avait
trois groupes de travail qui s'intéressaient aux perspectives d'avenir
quant au marché, quant aux occasions, quant aux opportunités pour
chacune des divisions, soit la division navale, la division
hydro-électrique et la division des wagons.
Ces groupes de travail ont été aidés à
différents points par des gens de l'extérieur, lorsque
l'expertise n'était pas disponible chez Marine Industrie. On a donc fait
des prévisions dans la division des wagons, dans la division navale et,
également, dans la division hydro-électrique, à partir de
la gamme de produits qu'on a déjà, à partir des occasions
qu'on est en mesure de déceler sur différents marchés. On
est arrivé à projeter un certain niveau d'activité pour
chacune des divisions.
A partir de ça, il y a un quatrième groupe de travail qui
s'est intéressé à voir, à partir de l'agencement
des ateliers qu'on a et à partir de l'équipement disponible,
quelles étaient les possibilités et les choix qui s'offrent
à Marine Industrie pour utiliser son équipement de la
façon la plus efficace et la meilleure possible. Ce groupe s'est
intéressé à regarder, à développer huit
scénarios de réaménagement du chantier, qui comprenaient
des changements de vocation de certaines usines qui sont utilisées, par
exemple, pour le naval, à d'autres fins, soit la construction de
nouvelles usines pour le naval dans une perspective d'un certain niveau
d'activité dans le naval. Ce travail a été fait en
collaboration avec les ingénieurs-conseils qui nous ont aidé
à préciser les montants requis pour investir, soit dans
l'équipement ou dans les usines, à partir des normes qui
étaient fixées par l'expérience des gens de Marine
Industrie.
Donc, on est arrivé à développer, d'une part, des
marchés, des possibilités d'activités économiques,
d'autre part, des coûts d'investissements pour réaliser cela.
C'est comme cela que nous sommes arrivés à huit scénarios,
huit chiffres d'affaires, si on veut, huit possibilités de
rentabilité, en tenant compte des investissements.
C'est bien beau cela, mais la compagnie a quand même des
contraintes. Et ces contraintes,
on les reprend brièvement dans le texte. Pour être en
mesure de réaliser un programme d'investissements, pour être en
mesure de réaliser ces scénarios, il faut être en mesure de
voir quels sont les outils qu'on a en main et quelles sont les
difficultés auxquelles on fait face.
Il y a différentes contraintes qu'on voit dans le plan de
redressement, à la page 31, si ma mémoire est bonne. Ces
contraintes sont tout d'abord la situation financière plus que difficile
de Marine Industrie, je dirais même encore précaire malgré
la loi 10,8. Marine Industrie ayant réalisé des pertes de $24 600
000 l'an dernier, après une subvention de $10 millions, et une perte, en
1977, de $3 millions, se retrouve avec un avoir des actionnaires qui a fondu au
cours des deux dernières années, qui est maintenant à $16
millions, et également un fonds de roulement qui est déficitaire,
de l'ordre de $11 millions.
Donc, c'est une situation financière très serrée et
les gens qui sont familiers avec les entreprises industrielles savent que c'est
très difficile de fonctionner avec un fonds de roulement bas, mais avec
un fonds de roulement déficitaire, c'est encore plus difficile. C'est
une première contrainte à laquelle on avait à faire face,
et qui ne pouvait pas se résorber ou disparaître
automatiquement.
Il y a un avantage, sur le plan financier, qu'il faut mentionner. Marine
Industrie, présentement, pour des raisons historiques, n'a pas de dette
à long terme. N'ayant pas de dette à long terme, si on peut
augmenter le degré de certitude quant à l'avenir de Marine
Industrie, il y a des capacités d'emprunt. Autrement dit, les actifs
sont relativement libres pour que viennent des prêteurs à long
terme, si on peut assurer une certitude quant à la rentabilité au
cours des prochaines années. Il y a de la place pour emprunter des
sommes assez importantes pour aider à financer des projets
d'investissements. Donc, c'est un côté positif dans cette
analyse.
M. Tremblay: J'allais justement le demander au président,
puisqu'il a fait allusion tout à l'heure à la provenance des
fonds, comme vous venez de le confirmer vous-même. La loi 108
prévoyait évidemment des dispositions pour couvrir certaines
pertes rattachées au désastre des bateaux panaméens, mais
ne prévoyait pas les pertes futures de Marine Industrie et ne
prévoyait pas non plus les pertes rattachées au contrat des
bateaux polonais.
Compte tenu du fait que, sur les bateaux polonais, il y aura des pertes
substantielles et que votre plan d'investissements peut monter jusqu'à
$45 millions, d'où vont venir les fonds pour cet investissement? Est-ce
que cela va venir uniquement de l'emprunt ou des profits que vous
prévoyez réaliser au cours des années à venir?
M. Plessis-Bélair: Une des contraintes qu'on s'est
fixées, c'est qu'on veut que Marine Industrie puisse s'autofinancer.
Cela ne veut pas dire générer de par ses propres moyens la
totalité des sommes. Cela ne veut pas dire que cela. Cela veut dire
également avoir des capacités d'emprunt. Une des contraintes
qu'on s'est fixées dans le plan de redressement, c'est d'être en
mesure de pouvoir assurer un autofinancement de la compagnie, cela veut donc
dire d'assurer une rentabilité financière de la compagnie, dans
un premier temps.
Comment peut-on faire cela? On peut faire cela et c'est une des
constatations qu'on fait à l'analyse des contraintes c'est qu'il
faut absolument que les déficits, qui sont essentiellement des
déficits financiers présentement, qui sont causés par le
fait que les bateaux panaméens sont encore la propriété de
Marine Industrie, soient ramenés à des niveaux qui ne
pèsent plus comme un boulet au pied de Marine Industrie et qu'ils ne
créent plus l'incertitude que cette situation-là crée
présentement, pour être en mesure d'attirer des capitaux de
l'extérieur.
Une des façons d'en arriver à susciter des fonds, c'est de
diminuer le niveau d'incertitude relié aux bateaux panaméens.
Dans le plan de redressement, on fait l'hypothèse qu'à la fin de
1979, on aura trouvé une façon, soit que le marché... Le
marché, présentement on pourra en parler plus longuement
plus tard des taux d'affrètement semble à la hausse. Il
aura tendance à diminuer les pertes que Marine Industrie devra
supporter, mais, de toute façon, pour que le plan de redressement puisse
devenir effectif, puisse être réalisable, il faut absolument qu'au
niveau des bateaux panaméens, on puisse trouver une solution qui ne
pèse plus comme un boulet et qui entraîne Marine Industrie vers
une situation où elle aura beaucoup de difficulté à
susciter des fonds et à attirer des fonds d'emprunteurs.
M. Coulombe: En fait, l'hypothèse de base, c'est que
l'entreprise, avec un carnet de commandes d'au-delà de $450 millions...
L'élimination de l'hypothèque des bateaux panaméens et une
réorganisation nécessaire devraient être capables de
produire des profits à court terme; deuxièmement, aller sur les
marchés pour emprunter à long terme et, troisièmement,
dans le cadre des disponibilités financières actuelles de la SGF,
il y aura peut-être lieu de discuter, à un moment donné de
la possibilité que la SGF investisse aussi. Mais ce sont les deux
premières sources qui sont valorisées à l'heure actuelle.
Notre hypothèse, c'est que Marine Industrie doit se sortir du
pétrin dans lequel elle est à l'heure actuelle.
M. Tremblay: Vous dites qu'il y a des possibilités de
rendre l'entreprise profitable à court terme. Qu'est-ce que cela veut
dire?
M. Coulombe: Je n'oserais pas me prononcer sur le niveau de
profit de 1979, parce qu'il y a certaines variables qui ne sont pas encore tout
à fait contrôlées. On espère avoir du profit en
1979. Les probabilités sont très fortes qu'en 1980, il y ait un
profit respectable. 1979 est encore en balance à l'heure actuelle, mais
certainement qu'en 1980, nos prévisions sont pour des profits à
Marine Industrie, à partir de 1980, sur une base continue
avec les carnets de commandes qu'on a en main actuellement.
M. Tremblay: Les dispositions de la loi 108 autorisent le
gouvernement à verser à la SGF $10 millions annuellement pendant
cinq ans pour de nouveaux projets, de nouveaux investissements. Avez-vous
envisagé de vous servir d'une partie de ce capital-actions que le
gouvernement va mettre à votre disposition pour investir dans les $45
millions ou est-ce que, dans votre plan, ce sont deux choses
séparées?
M. Coulombe: Ce sont deux choses séparées. Nous
pensons que, si 1979 et 1980 se passent bien, parce que ce sont des
investissements qui sont quand même graduels, Marine Industrie va pouvoir
s'en tirer. Ce n'est pas exclu à tout jamais que ce capital de la SGF,
en partie, parce qu'on a quand même d'autres projets à
l'étude à l'heure actuelle, ce n'est pas exclu
définitivement qu'une partie de ce capital-actions puisse être
investie dans Marine Industrie, mais, actuellement, on pense que, de
façon interne, Marine Industrie doit avoir l'objectif de ne pas trop se
fier là-dessus. S'il y a lieu, la SGF... Le conseil d'administration
verra dans le temps, mais, à l'heure actuelle, on pense que Marine
Industrie doit susciter elle-même les fonds.
M. Tremblay: J'aimerais revenir rapidement sur la question de
l'avenir du chantier maritime ou de la division navale. En termes d'effectifs
et en termes d'heures-homme, est-ce qu'à la fin du programme de
redressement, en 1984, le chantier maritime va avoir autant d'importance
absolue qu'il en a présentement ou moins?
M. Coulombe: Notre hypothèse actuelle, c'est que la
réponse définitive à votre question, on pourra la fournir
à la fin de 1980, à la fin de la première phase. On pense
que, d'ici ce temps-là il y a un scénario qui peut
être négatif et il y a un scénario qui est positif
d'ici la fin de 1980, si l'environnement concernant les chantiers maritimes au
Québec et au Canada, si les politiques gouvernementales restent ce
qu'elles sont à l'heure actuelle et ce n'est pas dans les
pouvoirs de la SGF d'influencer ou de modifier cet environnement-là
deuxièmement, si le marché international reste ce qu'il
est, c'est évident que l'avenir n'est pas rose pour la division navale.
(12 h 30)
Si le marché, au niveau national, se comporte à peu
près comme prévu, il va quand même rester une place pour la
construction maritime, mais à quel niveau? C'est vers la fin de 1980
qu'on va pouvoir répondre à cette question précise. Les
options actuellement restent ouvertes pendant cette année et demie.
Marine va travailler à fond pour avoir des contrats de construction de
bateaux, mais si les conditions que je viens d'énu-mérer ne se
réalisent pas, Marine ne pourra pas faire de miracle
là-dedans.
M. Plessls-Bélair: Peut-être que je pourrais ajouter
ce que cela veut dire au point de vue physique de l'utilisation des ateliers.
Les ateliers et les équipements qui sont présentement
utilisés par la division navale vont garder encore pour un an leur
vocation navale. Cela ne veut pas dire qu'on ne les utilisera pas
temporairement pour essayer d'en tirer un bénéfice, mais il n'y
aura pas de modification irrémédiable et complète de ces
ateliers pour d'autres fins que les fins pour lesquelles elles sont
utilisées historiquement, c'est-à-dire la construction de
bateaux.
M. Coulombe: Dans cet environnement, d'une façon beaucoup
plus précise en termes d'heures, si l'environnement reste ce qu'il est
à l'heure actuelle, on prévoit qu'en 1984, il pourrait, si nos
prévisions sont exactes, y avoir un niveau d'activités de l'ordre
de deux millions d'heures dans la construction navale.
M. Tremblay: Présentement, vous en avez combien?
M. Plessls-Bélair: 2 600 000 heures cette année, et
3 500 000 heures l'an dernier.
M. Tremblay: Maintenant, je pose une question peut-être
élémentaire. Etant donné que Marine a deux divisions qui
ont le vent dans les voiles, qui sont rentables, qui sont en pleine croissance
et qu'il y a une division qui fait face à une crise internationale la
plus grande que nous ayons connue depuis un demi-siècle, est-ce que vous
avez étudié la possibilité de scinder Marine entre la
division maritime et les autres divisions et de mettre sur pied une
société purement de chantier maritime?
M. Coulombe: Cette hypothèse a été
examinée sérieusement. On l'a mise de côté pour le
moment pour les raisons suivantes: Premièrement, pour ceux qui ont
visité le chantier, on peut se rendre compte assez facilement que les
installations physiques ne se prêtent pas à très court
terme à une séparation claire et précise entre les trois
divisions. Il y a beaucoup de services communs aux trois divisions, beaucoup
d'édifices qui servent aux trois divisions, je pense au chauffage et
ainsi de suite. Donc, sur le plan physique, des difficultés très
considérables d'agir rapidement.
Deuxièmement, il y a des problèmes dans cette perspective,
au niveau des relations humaines et de la convention collective. C'est une
tâche extrêmement complexe que d'en arriver à ce type
d'hypothèse. Cette hypothèse n'est pas rejetée, mais elle
est mise de côté tout simplement pour le moment. A moyen terme,
selon l'orientation, selon ce qui va se passer d'ici la fin de 1980, cette
hypothèse pourrait être reprise, mais actuellement, elle a
été mise de côté pour la raison que je viens de
donner.
M. Tremblay: J'aimerais revenir rapidement sur les perspectives,
parce que c'est quand même
la base de nos scénarios. Les perspectives sont positives du
côté des wagons et du côté hydroélectrique,
mais du côté naval, vous dites deux choses, si je comprends bien.
Sur le plan international, les prix de fret, etc., laissent entendre que le
creux de la vague est passé, mais que les nouvelles commandes de bateaux
n'apparaîtront pas avant plusieurs années et que le marché
international est un marché, comme on dit en anglais "cut-throat". Je
pense que cela a été souligné par des articles de journaux
récemment. La France a accepté de la Pologne des contrats avec
des pertes de 50%. C'était décidé d'avance. L'avenir du
chantier maritime pour les navires de grande dimension, comme Marine en
fabriquait, sur le plan international, cela ne résout pas le
problème à court terme. Il n'y a pas d'espoir tellement grand de
ce côté.
Maintenant, du côté intérieur, au Canada, comment se
présentent les perspectives de commandes? Quelle serait la participation
de Marine dans ces commandes à venir, compte tenu de la
spécialisation pour laquelle elle est connue et la spécialisation
que vous pourriez lui donner dans les mois et les années à
venir?
M. Brisson: Alors, du côté domestique, nous faisons
face à un marché qui est relativement bien connu. Nos
études ont révélé ce à quoi nous pourrions
nous attendre dans les prochaines cinq années, au Canada, comme demandes
de navires. Nous savons aussi quelles sont les capacités des chantiers
maritimes canadiens qui vont, évidemment, concurrencer pour ce niveau.
Nous savons aussi qu'un grand nombre de chantiers sont alliés à
des compagnies de navigation et, à ce moment-là, il y a un
marché captif qui fait que les demandes de ces compagnies ne seraient
pas disponibles à Marine. Alors, lorsqu'on a étudié tous
ces niveaux, il reste peu de commandes de navires probables du
côté commercial et puis, il y a aussi le marché des
gouvernements à travers le Canada.
C'est devant ce marché que Marine s'est efforcée de
déterminer quelle part elle pourrait obtenir durant les prochains quatre
ou cinq ans. Le marché, tout de même, reste assez limité.
Les gouvernements ont des commandes annoncées de traversiers dans
certains cas. Il y a des commandes pour des bateaux de guerre. Il y a des
commandes pour des réparations, ou ce qu'on appelle "refit" de bateaux
de guerre et aussi certaines commandes pour les compagnies maritimes qui ne
sont pas, elles, liées à des chantiers maritimes et qui seraient,
à ce moment-là, offertes en général.
M. Plessis-Bélair: Ce qu'on a fait aussi, si vous
permettez, c'est une analyse et on a identifié 23 occasions de contrats
dans le marché canadien. Chacune de ces occasions a été
analysée pour voir si c'était un bateau pour l'Ouest, pour l'Est,
pour les Maritimes. On a regardé qui seraient les concurrents les plus
forts et on a essayé de déterminer quelles seraient nos chances
de succès sur chacun de ces contrats. A partir de là, on est
arrivé à déterminer quelle serait l'activité qu'on
pourrait obtenir dans le chantier maritime et de là en arriver à
un chiffre d'affaires.
Donc, ça s'est fait de façon aussi systématique
qu'on pouvait le faire en prenant tout ce qui était connu sur les
projets annoncés ou discutés au niveau de la construction de
navires. Ce seront des traversiers Ro-Ro en tenant compte de ce qui se passe
dans l'Arctique et de ce qu'on peut faire, etc., et cela a été
fait, je pense, de la façon la plus systématique possible dans
cette optique.
M. Tremblay: M. le Président, je reviendrai plus tard sur
des points plus détaillés. Je vais céder la parole
à d'autres membres de la commission.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Commentaires et questions de l'Opposition
M. Reed Scowen
M. Scowen: Merci, M. le Président. D'abord, je veux
remercier sincèrement M. Coulombe et les autres membres de la compagnie
de leur présence et, en plus, de leur invitation, la semaine
passée, à visiter les chantiers. Pour moi, et je pense aussi pour
mon collègue, c'était une excellente idée. On a beaucoup
profité de cette occasion de voir vraiment la ville, les installations,
les personnes qui y travaillent, les rencontrer. Je pense que c'était
une initiative à laquelle vous devez donner suite, M. Coulombe, des
visites régulières, et les autres sociétés d'Etat
peuvent certainement nous aider à mieux comprendre les problèmes
et les possibilités.
La situation des députés, en ce qui concerne ces
commissions parlementaires et leurs droits et leurs responsabilités,
vous savez, n'est pas encore parfaitement précisée et on se
demandait un peu l'attitude qu'on devait prendre à ces commissions. Pour
ma part au moins, je veux simplement agir aujourd'hui comme administrateur, si
vous voulez, sur un conseil d'administration devant la direction d'une
compagnie qui veut faire des choses, des changements importants et faire des
investissements, tout en sachant qu'on n'a pas de pouvoirs. Il y a
déjà deux ou trois conseils d'administration auxquels vous
êtes obligés de répondre. Mais, pour ma part, c'est dans
cet esprit que je vais vous parler.
De plus, je ne vais pas parler du tout d'une façon partisane,
dans le sens politique; on est tous conscients qu'il y a certains de vos
problèmes qui ont été créés à
l'époque d'une administration libérale, d'autres qui sont
survenus depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, et c'est
même possible que la dernière partie de votre programme de
redressement se réalise avec un gouvernement libéral. Il y a
toutes sortes de possibilités qui peuvent arriver.
M. Perron: II me semblait que vous ne vouliez pas faire de
politique!
M. Scowen: Je préfère, aujourd'hui, parler comme
quelqu'un qui fait partie d'un groupe, avec le ministre et les autres
députés, qui s'intéresse vraiment à parler
d'affaires.
J'ai parcouru votre rapport, je dois dire que, pour moi, c'est un
rapport sérieux, bien pondéré, organisé et
structuré d'une façon qui n'est pas trop difficile à
comprendre.
Il me semble qu'il y a quatre éléments clés dans
cette affaire, quatre parties qu'on doit regarder d'un peu plus près, et
il me semble que si, dans ces quatre éléments, vos objectifs se
réalisent, vous n'aurez pas de problème. Je ne les prends pas
nécessairement par ordre d'importance. Premièrement, il y a la
question de votre avenir dans le domaine hydro-électrique. Je pense que
je n'exagère pas quand je dis que, pour l'avenir, cette partie de la
compagnie est l'élément clef; c'est là qu'on est le plus
certain, le plus optimiste, en ce qui concerne
l'hydro-électricité.
J'ai quelques questions à vous poser pour vérifier
dans mon esprit au moins que les possibilités et que votre
optimisme sont réalisables.
Le deuxième élément que je trouve important, c'est
la question de la division navale. Je sais qu'il existe une incertitude dans le
domaine naval; c'est le domaine où vous avez le plus
d'expérience, c'est le domaine où vous avez le plus
d'investissements, c'est un peu la question de savoir comment sortir de cette
affaire d'une façon honorable, d'une façon aussi rentable que
possible, tenant compte du fait que nous avons de vastes investissements et, ce
qui est plus important encore, nous avons de grandes ressources humaines qui
dépendent de ce domaine.
Un troisième élément que je veux aborder avec vous,
c'est le domaine de la recherche pour les nouveaux produits. C'est vague dans
votre rapport; vous proposez d'investir $1 million ou $2 millions dans la
recherche et le développement. Quant à moi, je pense que c'est
excellent comme principe, mais je pense qu'il faut être réaliste
dans ces choses et il faut aussi se poser la question, se demander s'il est
possible que, dans la recherche de nouveaux produits, nous nous trouvions, dans
un an, deux ans ou trois ans, avec une société d'Etat dans un
domaine qui n'est peut-être pas un domaine naturel, un domaine pratique
pour une société d'Etat.
De l'autre côté de la médaille, comment allez-vous
agir dans le domaine du développement de nouveaux produits?
Le quatrième élément je pense qu'on est
justifié de poser des questions ce sont toutes les questions que
vous avez soulevées dans un paragraphe, à la page 32,
l'organisation: "Marine n'a pas actuellement toutes les ressources de gestion
nécessaires et l'organisation interne requise pour être en mesure
d'entreprendre, à court terme, un programme majeur de diversification et
d'expansion de ses opérations." (12 h 45)
Ayant vécu une expérience industrielle pendant 17 ans,
quand je lis ce paragraphe, je réalise combien c'est difficile de
développer une équipe, de trouver les cadres, de les motiver, de
développer des contrôles internes et je suis très
conscient, tout comme vous, que, sans la réalisation, sans que cette
question soit réglée, les trois autres seront ou difficiles ou
impossibles.
Je pense qu'on n'a qu'à lire la triste histoire des bateaux
polonais pour voir combien les problèmes de gestion et de
contrôle, que vous avez admis avec une honnêteté qui
dépasse l'honnêteté même... Je pense que nous sommes
tous conscients que cette quatrième question est très
importante.
Je suis aussi très conscient des contraintes du temps qui nous
est alloué et du fait que d'autres députés veulent vous
parler. Finalement, avant de partir, j'aimerais aussi poser quelques questions
aux représentants des syndicats. J'ai lu le document qu'ils ont soumis
sur les chantiers maritimes et cela soulève plusieurs questions, mais je
pense que je vais mettre cela de côté pour plus tard. Je vais
poser seulement une ou deux questions sur chacun des quatre sujets que j'ai
mentionnés et peut-être que je reviendrai sur les autres
après.
Prenons d'abord la question hydro-électrique. Vous êtes
dans la fabrication de grosses turbines, il y a la partie "hydro" et la partie
électrique, et surtout pour un client de chez nous, la
Société de la baie James. Vous avez, pour le moment, un seul
concurrent au Québec, si je comprends bien. J'entends des rumeurs selon
lesquelles il y a de fortes possibilités que nous ayons une
troisième industrie qui s'installe ici dans un proche avenir; je ne sais
pas si c'est vrai, je n'ai pas tous les faits. J'imagine qu'il faut
prévoir la concurrence.
Je veux vous poser deux ou trois questions. Premièrement, il y a
la question du prix. Je vais poser les trois questions ensemble et,
après, vous pourrez répondre. Les prix qu'on reçoit de la
Société de la baie James ou de l'Hydro, j'imagine que ce sont des
prix un peu plus élevés que ceux que ces compagnies pourraient
obtenir si elles achetaient de l'extérieur, tenant compte de la
politique d'achat, etc.
Je voudrais que vous précisiez cette politique d'achat, les prix
que vous réalisez ici au Québec, parce que ce serait
intéressant dans le sens où ça peut nous aider à
voir jusqu'à quel point vous serez en mesure d'être rentable
à l'extérieur du Québec. Je pense qu'on peut tenir pour
acquis que si les Québécois sont prêts à payer un
peu plus cher pour les turbines fabriquées au Québec, c'est
probablement la même chose dans les autres provinces et les autres pays,
c'est assez politisé ces choses-là, normalement.
L'Hydro-Québec donne-t-elle une préférence à
Marine comme société d'Etat par rapport à Dominion
Engineering qui est installée au Québec, mais qui n'est pas une
société d'Etat? Quelle est votre politique, est-ce que c'est
quelque chose de défini et est-ce quelque chose qui peut changer?
Une troisième question, les dessins; je vais en choisir une
dernière dans le domaine de l'hydro. Si je comprends bien, vous
fabriquez vos turbines
sur la base d'une licence, je pense que la partie de l'hydro, c'est une
licence française et la partie électrique, suisse ou, le
contraire, je ne me rappelle pas exactement. Il me semble que cette question du
bon dessin est très importante, j'imagine que c'est un évolution
continuelle, tout le monde essaie d'améliorer les dessins. J'imagine
aussi que pour les turbines qui sont plus petites, qui seront probablement les
turbines pour les installations, parce que la plupart des installations dans le
monde ne sont pas aussi grandes que celles de la baie James, il y a des dessins
qui sont différents, à cause des demandes qui sont
différentes.
La première partie de la question, c'est le prix; la
deuxième, dans le domaine du dessin, est-ce que vous êtes confiant
que votre source de technologie, pour les grandes turbines que nous fabriquons
maintenant et les petites ou les autres qui sont nécessaires à
l'avenir pour le développement de nouveaux marchés à
l'extérieur, ne sera pas dépassée par les autres? Donc, le
prix et la technologie, j'aimerais que vous abordiez ces deux questions.
Le Président (M. Boucher): M. Brisson.
M. Brisson: Au point de vue de la compétition sur les
turbines, nous avons ici au Canada deux manufacturiers de turbines de la
grosseur de celles que nous fabriquons présentement. Il reste tout de
même qu'à certains moments, ces deux compagnies ont
été en compétition devant l'Hydro-Québec. A ce
moment-là, la question de prix en a été une de
compétition et la décision en a été une sur les
prix et sur les avancés techniques. Ce n'est que le prix à ce
moment-là. Du côté des alternateurs, nous avons aussi une
compétition au Canada, il y a Canadian General Electric qui fabrique en
Ontario des alternateurs du même type que ceux que nous fabriquons. A ce
moment-là, nous avons été en compétition avec cette
société. Par contre, devant l'immensité des programmes de
la Société d'énergie de la baie James, il a fallu
s'associer avec ces sociétés pour pouvoir livrer en temps les
biens que la Société d'énergie de la baie James
demandait.
A ce moment-là, nous sommes en consortium avec Dominion
Engineering, qui est le concurrent dans les turbines, et General Electric, qui
est l'autre concurrent, dans les alternateurs. Soit dit en passant, General
Electric et Dominion Engineering sont affiliées. A certains moments, il
a fallu travailler en consortium. A ce moment-là, la
Société d'énergie de la baie James, elle, employait des
méthodes différentes pour contrôler les prix avancés
par ce consortium, pour juger de la validité des prix proposés et
des valeurs proposées.
C'est donc dire que, lorsque nous ne sommes pas en concurrence, ce qui
est normal pour que les prix se maintiennent, lorsque nous sommes en
consortium, la société doit vérifier par d'autres moyens
les niveaux de prix.
Si on se compare à l'international, cela devient excessivement
difficile. Nous avons...
M. Scowen: Avant d'en venir à l'international, est-ce que
je peux vous demander si la société énergétique
donne une préférence, à ce moment-ci, à Marine
Industrie, comme société d'Etat, par rapport à un autre
fabricant québécois?
M. Brisson: Non.
M. Scowen: Non. Si une troisième compagnie s'installait au
Québec et était dans la fabrication de ces mêmes produits,
il est probable que cette troisième compagnie pourrait donner les
mêmes avantages et désavantages qu'une autre.
M. Brisson: Je ne peux présumer de la politique de cette
société, mais je prévois que oui.
M. Scowen: Est-ce que la société
énergétique donne une préférence à Marine
Industrie ou à Dominion Engineering, qui est aussi au Québec, par
rapport aux autres fournisseurs étrangers?
M. Brisson: Dans ce cas-là, oui.
M. Scowen: Ils sont, à toutes fins utiles, exclus.
M. Brisson: Oui.
M. Scowen: Et en ce qui concerne votre partie, concernant les
alternateurs qui sont fabriqués au Québec, et celle de General
Electric, qui est installée à Peterborough, si je comprends bien,
il n'y a aucune préférence donnée à vous autres,
même si les alternateurs de General Electric sont fabriqués
à l'extérieur du Québec?
M. Brisson: Je ne le crois pas, c'est le même prix.
Evidemment, la décision a été plus technique très
souvent, que monétaire.
M. Scowen: Si je comprends la politique de la
Société d'énergie de la baie James, elle donne une
préférence, même une exclusivité, aux fabricants
canadiens, mais à l'intérieur du Canada; il n'y a aucune
préférence donnée à une société
d'Etat par rapport à une société privée, ou
à une société québécoise par rapport
à une société d'une autre province du Canada, en gros?
M. Brisson: Non. Ce sont les deux seuls manufacturiers.
M. Scowen: Ah bon!
M. Laplante: Me permettriez-vous une question additionnelle sur
le même sujet, M. le Président?
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, est-ce que vous permettez une question?
M. Scowen: Oui.
M. Laplante: Ce n'est pas à vous ou au monsieur, cela
reste toujours au président. C'est que
vous aviez parlé de fabrication de turbines. Vous avez
parlé de la fabrication de turbines. Vous fabriquez la turbine
traditionnelle à la verticale. Vous fabriquez aussi... Je ne sais pas
jusqu'où vous fabriquez le type complet, le groupe bulbe. On emploie
justement ces turbines en eau peu profonde à partir de peut-être
un mégawatt à aller jusqu'à 120, je crois. Dans le
marché que vous avez actuellement, qu'est-ce que vous faites dans ces
groupes bulbes actuellement comme pièces, parce qu'on me dit que vous ne
fabriquez pas complètement le bulbe?
M. Brlsson: Nous n'avons pas jusqu'à maintenant à
Marine Industrie fabriqué de groupe bulbe. Cependant, nos
ingénieurs surveillent la chose de très près. Notre
bailleur de licences a la technologie. Nous avons d'ailleurs obtenu d'eux la
technologie nécessaire pour fabriquer ces turbines. C'est un domaine que
nous surveillons de très près et dans lequel nous voulons nous
développer pour être prêts dès que le marché
demandera ce genre de turbine dans notre région.
M. Laplante: Cela voudrait dire que vous n'avez jamais
fabriqué de ce qui s'est fait sur les bulbes sur la Rance, en France,
mais vous connaissez la technologie et vous seriez capables de le faire.
Pensez-vous que cela peut être le marché de l'avenir
actuellement?
M. Brlsson: Oui, il faudra encore quelques années, mais
c'est un marché qui va suivre de très près la
complétion des grosses turbines de type Francis qui sont
présentement fabriquées.
M. Laplante: S'il se développait un marché ici au
Québec ou un marché nord-américain, quand on sait qu'il y
a environ 10 000 mégawatts à aller chercher justement par ce
groupe bulbe et 135 000 mégawatts américains qui seraient un
marché, sans compter les autres provinces du Canada, croyez-vous que
Marine Industrie pourrait changer à ce moment son orientation, si elle
pouvait percer ce marché?
M. Brlsson: Oui, assurément, cela fait partie de nos plans
de poursuivre les développements...
M. Laplante: C'est dans le plan?
M. Brlsson:... et se soumissionner sur les turbines bulbes.
M. Laplante: Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Bourassa. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. Il y a une question additionnelle. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, est-ce que vous permettez?
C'est vous qui avez le droit de parole. M. le député de
Richelieu.
M. Martel: Etant donné qu'on est dans... M. Scowen:
Si c'est sur le même sujet.
Le Président (M. Boucher): Sur le même sujet.
M. Scowen: Je pense qu'on parle de la question du prix des
turbines à l'intérieur du Canada. Si c'est sur ce sujet, allez-y.
Sinon, peut-être que le président peut...
M. Martel: C'est sur ce point. Vous parliez tout à l'heure
de rentabilité et de projection future s'il y avait un concurrent, pour
voir si Marine serait toujours concurrentiel sur le marché des turbines.
Dans le même sens, je voudrais demander aux dirigeants de la compagnie:
Quelle est la proportion de wagons actuellement vendus en dehors du
Québec et du Canada, pour voir si on est concurrentiel?
M. Scowen: Pour le moment, je pense que nous sommes dans
l'hydro-électrique. Si vous me permettez, on peut revenir aux wagons
après. En ce qui me concerne, c'est un autre sujet.
M. Martel: D'accord. Allez-y et on y reviendra après.
M. Coulombe: Je voudrais mentionner que, pour la question de
l'hydro-électrique, sur le plan international, à l'heure
actuelle, les études démontrent qu'il y a une surcapacité
de production au niveau mondial dans ce domaine. La guerre se fait, non pas au
niveau des technologies, mais la guerre se fait au niveau des financements.
C'est là qu'est le problème de base, lorsque certains pays
offrent des conditions extrêmement avantageuses de financement. C'est
à ce niveau que les contrats se décident. Ce n'est pas tellement
au niveau de la technologie, parce que la technologie est partagée par
plusieurs grands groupes industriels au monde. C'est au niveau du financement
que cela se joue. D'où l'intérêt immense que Marine doit
avoir vis-à-vis de l'orientation de l'Hydro-Québec avec l'Hydro
International; dans le cadre d'un contrat clé en main, il serait
possible, grâce à un financement local ou national ou canadien,
d'aller chercher des marchés qui autrement sont inaccessibles pour
Marine. Ce serait la seule possibilité pour Marine, au niveau
international, de faire partie d'un groupe qui offrirait un ensemble, un
"package deal" à des pays, avec des financements intéressants. On
est actuellement dans un tel groupe en Amérique centrale, au Guatemala
pour être plus précis; on fait partie d'un consortium qui se
partage le financement, 50% français et 50% canadien. On est en train de
pouvoir se qualifier. On ne sait pas ce que cela va donner au bout, mais,
actuellement, c'est exactement la technique qu'on a prise. (13 heures)
M. Scowen: C'est intéressant, M. Coulombe. Si je comprends
bien, j'ai peut-être exagéré l'importance du dessin et de
la technologie dans ces affaires. Ce n'est pas une évolution très
rapide. Les distinctions entre les dessins d'une compagnie et ceux d'une autre
ne sont pas une question normalement critique dans le choix d'une turbine.
M. Coulombe: Je vais laisser parler de meilleurs
spécialistes que moi à ce niveau. J'ai insisté surtout sur
l'importance de la variable clé qui était la variable financement
dans les grands projets internationaux. Maintenant, au point de vue de la
technologie, je ne sais pas si M. Perreault ou...
M. Scowen: Oui, je pense que M. Brisson était en train de
commencer à parler un peu de la question des ventes sur le marché
international et des prix internationaux. Est-ce que cette exclusion qu'on voit
de la part de la société énergétique et des
compagnies étrangères, c'est quelque chose qui se
répète aux Etats-Unis ou dans les autres pays qui ont leurs
propres installations? Quelles sont les possibilités par rapport
à des prix profitables pour nous dans les autres pays?
Le Président (M. Boucher): Je m'excuse. Etant donné
qu'il est 13 heures, est-ce qu'on pourrait permettre à M. Brisson de
répondre à la question pour revenir à 15 heures, par la
suite? Vous pouvez répondre tout de suite, si les membres
désirent une réponse à cette dernière question du
député de Notre-Dame-de-Grâce?
M. Brisson: Il y a deux points en question ici, la question de
concurrence au point de vue de la technologie et au point de vue de prix du
côté international. Comme mentionné, évidemment, je
ne veux pas abaisser le niveau de technologie requis pour faire la conception
de turbines et d'alternateurs, mais il reste tout de même que la
technologie, pour avoir des turbines et des alternateurs qui donnent un
rendement efficace est connue de plusieurs, est développée par
plusieurs compagnies et par plusieurs pays. La technologie devient donc
disponible et c'est le rendement final qui est le critère de
jugement.
Au point de vue international, la grosse difficulté vient
justement des types de financement et, très souvent, nous nous
apercevons que le problème, c'est que le prix final et le financement
final n'ont pas beaucoup de relations avec les coûts et nous avons
même de la difficulté à déterminer quels sont les
coûts que nous devons concurrencer. La plupart du temps,
l'élément principal, c'est le financement. Nous avons même
vu ici, au Canada, des turbines et des alternateurs de pays étrangers
entrer au Canada à des prix tellement bas qu'ils ont donné
évidemment effet à des enquêtes antidumping parce que
justement on avait cette situation où il était impossible de
relier le prix qui avait été soumissionné à un
coût réel de cet équipement.
Sur le marché international, c'est beaucoup plus une question de
projet global offert avec un financement par une société ou un
consortium qui va contrôler notre possibilité d'aller à
l'international que nos coûts ou notre compétitivité
spécifique à Marine.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Brisson. Alors, la
commission...
M. Biron: M. le Président, juste avant d'ajourner...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Lotbinière, oui.
M. Biron: ... je voudrais vous dire qu'à moins qu'on
s'entende pendant l'ajournement sur le droit de parole, je soulèverai
une question de règlement à cet égard, parce qu'il y a des
gens autour de la table qui veulent parler et je pense bien qu'on devrait
suivre la procédure normale de 20 minutes par député.
Le Président (M. Boucher): D'accord, de 20 minutes par
intervenant. Evidemment, à venir jusqu'à maintenant, le temps a
été partagé, depuis midi, entre deux intervenants, disons
30 minutes chacun.
M. Biron: 11 h 30.
Le Président (M. Boucher): Disons que je tiens compte
quand même de la durée des interventions de chaque parti et je
vais essayer de donner le même temps à chacun des partis.
M. Biron: Je ne veux pas qu'on attende à la fin de
l'après-midi ou la fin de la soirée pour donner le droit de
parole aux députés autour de la table. Je pense qu'on a
l'habitude, à une commission parlementaire, de donner 20 minutes par
intervenant, et, ensuite, on fait un deuxième tour et un
troisième tour, afin qu'un intervenant ne prenne pas deux heures et que
les autres n'aient pas le droit de parole finalement.
Le Président (M. Boucher): Alors, je tiendrai compte de
votre intervention, M. le député de Lotbinière.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
Suspension de la séance à 13 h 5
Reprise de la séance à 15 h 15
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
Lors de la suspension, à 13 heures, nous en étions
toujours à l'étude du programme de redressement industriel de
Marine Industrie Ltée. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, vous aviez la parole.
Maintenant, je dois prévenir les membres de la commission que M.
le ministre de l'Industrie et du Commerce m'informe qu'il devra s'absenter
à 16h 30, pour entendre le mémoire de la Chambre de commerce,
n'est-ce pas?
M. Tremblay: Oui.
Le Président (M. Boucher): Alors, de 16 h 30 à 17
heures, M. le ministre s'excuse à l'avance, mais il devra
s'absenter.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, compte tenu de
l'intervention de M. le député de Lotbinière et chef de
l'Union Nationale, ce matin, concernant la distribution du temps et compte tenu
du temps que vous aviez déjà pris ce matin, je crois que vous
pourriez terminer votre question concernant l'hydro-électrique et, par
la suite, je donnerai la parole au chef de l'Union Nationale.
M. Scowen: Parfait, merci, M. le Président. Comme vous le
savez, j'avais quatre sujets généraux que je voulais aborder:
l'hydro-électrique, le naval, les nouveaux produits et
l'administration.
Je veux simplement terminer les questions qui touchent le premier,
l'hydro-électrique, et on va faire le tour. Les autres questions seront
probablement soulevées par les autres députés, sinon, je
vais revenir plus tard.
Si je comprends bien j'adresse la question à M. Brisson
pour terminer la concurrence, pour le marché
québécois, sera faite parmi les compagnies canadiennes et vous
êtes persuadés, pour le présent et pour l'avenir, que vos
prix et vos coûts seront concurrentiels avec ceux des autres compagnies
qui se trouvent à l'intérieur de la fédération
canadienne.
Si je comprends bien, pour le marché à l'extérieur
du Québec, les chiffres que vous nous donnez en page 6 indiquent
qu'ailleurs au Canada, il pourrait être possible d'obtenir 10% des
contrats qui ne seront cependant pas réalisés avant 1985, donc un
volume de 10% de $300 millions. Les chiffres que vous prévoyez sur le
marché international, soit $4 millions par année, sont des
chiffres de ventes que vous prévoyez, basés sur une analyse de la
compétitivité et de la concurrence qui existeront à
l'intérieur de ces produits pour ces marchés? Vous êtes
persuadés que vos précisions dans les deux cas, qui sont quand
même importants, seront réalisables, tenant compte de la
concurrence à laquelle vous serez obligés de faire face. C'est
d'accord?
M. Brisson: Oui, c'est d'accord. Si vous remarquez, nous ne
prévoyons pas des pourcentages exorbitants tant sur le marché
canadien que sur l'autre. Il y a une chose à remarquer, c'est que les
montants qui sont là ne veulent pas dire que nous aurons tous les ans $4
millions sur le marché international, mais le contrat que nous sommes
à considérer, auquel nous participons présentement, peut
représenter peut-être un projet de $30 millions et ensuite un
autre projet dans trois ans, dans quatre ans ou dans cinq ans. Il ne faut donc
pas prendre les $4 millions comme un montant annuel et régulier.
M. Scowen: Est-ce que vous avez entendu parler de la
possibilité d'avoir un troisième concurrent ici au Québec
ou au Canada?
M. Brisson: Un instant.
M. Scowen: C'est important...
M. Brisson: M. Perreault, de la division hydroélectrique,
me dit que Brown-Boveri, dans les alternateurs, aurait manifesté un
intérêt à venir s'installer ici.
M. Scowen: Bon! Avez-vous tenu compte de cette possibilité
dans vos prévisions de ventes, dans la mesure du possible?
M. Brisson: Oui.
M. Scowen: Une dernière question sur l'hydraulique. Je
parlais ce matin de dessin. Si je comprends bien, j'aurais dû parler de
conception, parce que je parlais surtout de la technologie et de la conception
générale. Si je comprends ce que M. Coulombe nous a dit, vous
êtes satisfaits de vos propres connaissances dans le domaine de la
technologie, ajoutées à celles des compagnies avec lesquelles
vous avez des licences, soit dans l'électrique, soit dans l'hydraulique,
qui sont assez solides et qui ont assez de potentiel pour vous permettre de
réaliser les chiffres prévus ici, non seulement dans les turbines
pour la SEBJ, mais aussi, pour les contrats qui seront peut-être
donnés pour des turbines d'une grandeur ou d'un standard un peu
différents. En effet, la base technologique, pour vous-mêmes et
vos bailleurs de licences, est parfaitement adéquate d'après
vous?
M. Brisson: Une légère correction. Nous croyons
évidemment que nos bailleurs de licences ont la technologie voulue pour
entrer en concurrence sur le marché national et international, mais, de
notre côté, nous sommes à bâtir une équipe,
à construire une équipe d'ingénierie, de jeunes
techniciens ingénieurs que nous entraînons actuellement afin de
nous rendre plus autonomes, à mesure que nous avancerons dans les
années. Nous ne sommes pas totalement satisfaits de l'équipe que
nous avons présentement; nous sommes satisfaits des gens qui sont
là, quant à leur nombre et à leur expérience, mais
nous avons un programme pour accroître dans ces deux domaines.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député
de Lotbinière et chef de l'Union Nationale.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: Merci, M. le Président. Je commencerai pas
quelques remarques, en particulier. Je retournerai à décembre
1978, alors qu'on a adopté le projet de loi 108, avec beaucoup de
difficulté, mais on a réussi à l'adopter. Je veux
simplement lire l'article 3 du projet de loi qui dit: "La société
a pour objet d'assumer la gestion d'un groupe industriel dans le but
d'exploiter des entreprises de taille significative dans certains secteurs
jugés prioritaires pour le développement économique du
Québec, d'assurer la planification et la coordina-
tion des entreprises qu'elle contrôle et de favoriser, seule ou de
préférence avec des partenaires, leur exploitation et leur
développement, conformément à des conditions de
rentabilité normale."
Rentabilité normale, on avait dit aussi à la
Société de développement industriel, à Marine,
qu'on voulait avoir un plan de redressement pour l'entreprise Marine. C'est
essentiel, et je tiens à dire en passant que j'ai apprécié
la lecture et les informations que j'ai reçues de la part des
différents officiers de Marine et de la Société
générale de financement, à propos de ce plan de
redressement. On s'aperçoit qu'il y a une volonté ferme, de la
part des dirigeants de cette société d'Etat, pour qu'on ait une
entreprise qui soit gérée avec des conditions de
rentabilité normale.
Je tiens à leur dire mon appréciation de cette
décision, de cette volonté de la part de l'entreprise.
Finalement, on s'aperçoit que les gens qui sont ici devant nous
aujourd'hui réalisent qu'une entreprise d'Etat, ce n'est pas une
Saint-Vincent-de-Paul ou ce n'est pas l'assistance sociale, le ministre des
Affaires sociales; cette entreprise doit être gérée
normalement pour avoir une rentabilité comme toute autre entreprise.
Là-dessus, je pense que le plan de reconversion industrielle nous
amène à quelques remarques spécifiques du
côté de la rentabilité de l'entreprise. On a eu des
questions tout à l'heure du côté de la rentabilité
du secteur hydro-électrique. Moi aussi, je suis confiant qu'on pourrait
faire des suggestions, qu'on pourrait l'améliorer davantage.
On peut dire qu'il y a peut-être quelque chose de dangereux: on a
un seul gros client qui est l'Hydro-Québec pour la Société
de développement de la baie James. On pourrait trouver des clients
à l'extérieur du Québec; le président nous a dit
que c'était difficile, que c'était un marché où on
a une surproduction à l'heure actuelle, une surcapacité de
production, mais on a besoin de financement à long terme pour faire
affaires avec les entreprises internationales. On a l'Hydro-Québec
International qui peut nous aider. Alors, on ne peut qu'encourager les
dirigeants de cette société et essayer de trouver de nouveaux
marchés à l'extérieur du Québec parce que au
Québec il me semble qu'on a atteint à peu près le maximum
de nos possibilités.
C'est la même chose dans le domaine des wagons. Je pense que
là aussi, on peut être satisfait de ce qui s'est fait au cours des
dernières années. Il semble que les deux divisions, les wagons et
l'hydro-électricité, cela peut devenir véritablement
rentable pour cette entreprise et pour les travailleurs, de même que pour
les dirigeants. Ils seront fiers d'appartenir à une entreprise qui peut
s'autofinancer et devenir une des entreprises les plus rentables au
Québec. Spécialement dans le domaine hydro-électrique,
lorsque je vois qu'on fait 11% de profit sur nos ventes je pense qu'il n'y a
pas beaucoup d'entreprises qui peuvent se vanter de cela. Dans le domaine des
wagons, c'est plus compétitif un peu. On s'aperçoit qu'on fait 3%
ou 4%. Mais, c'est dans la normale des entreprises manufacturières.
Mais là où le problème commence, je l'ai vu aussi
à la lecture du projet présenté par les dirigeants de
Marine Industrie, c'est dans le domaine de la construction navale. Encore
là, il faut se poser des questions sérieuses, peu importe les
scénarios employés à travers tous vos moyens, même
si c'est louable, avec les efforts que vous voulez faire de ce
côté-là. Je me pose de sérieuses questions.
Est-ce que la Société Marine Industrie, est-ce que la SGF,
ont l'obligation du gouvernement de faire en sorte d'agir comme le
ministère des Affaires sociales, et dire: On va garder 500, 1000 ou 2000
travailleurs, même si ce n'est pas rentable, pendant un an, deux ans,
cinq ans ou huit ans, on ne sait pas jusqu'où cela peut aller? Ou est-ce
qu'il ne devrait pas y avoir une volonté du gouvernement de dire: Oui,
il faut secourir des travailleurs et pour cela, il faut avoir un autre budget
quelque part, qui va venir d'un autre ministère et on va comptabiliser
cela à part?
C'est une question que je me pose, parce que, peu importent les efforts
que vous allez faire du côté des wagons, du côté de
l'hydro-électricité, si on ne réussit pas à rendre
rentable le plus rapidement possible la division navale, je me demande si on ne
se casse pas la tête tout le monde et si on ne se cogne pas la tête
sur un mur en se disant: on ne va pas nulle part. Et finalement, tout le monde
va critiquer toute la Société Marine Industrie et probablement
aussi la Société générale de financement, parce
qu'on a un département à l'intérieur d'une des
sociétés filiales, la SGF, qui fonctionne mal, et qui mange les
profits. En particulier, il y a le problème que vous avez noté ce
matin, concernant les bateaux panaméens et des bateaux grecs. Je vais
poser quelques questions sur ce que cela coûte. On a réussi
à faire une entente avec une société hollandaise. Il y en
a trois qui vont coûter un peu meilleur marché. Mais les trois
autres, j'ai compté rapidement les frais d'entretien et
d'intérêts, avec la meilleure volonté du monde, cela va
vous coûter $5 millions ou $6 millions par année, et
peut-être jusqu'à $8 millions par année, selon ce qu'on va
pouvoir entrer là-dessus.
Vous allez faire cela à peu près $8 millions par
année, en fonctionnant très bien du côté de
l'hydro-électricité et celui des wagons. Et finalement, parce que
vous fonctionnez très bien dans ces deux départements, on va
prendre $8 millions que vous faites de profit et on va payer de
l'intérêt et de l'entretien sur d'autres navires.
Est-ce que ce n'est pas mieux plutôt de crever l'abcès tout
de suite et de dire, comme vous avez étudié d'ailleurs la
possibilité de former une autre société à
l'extérieur: On sort cela de là. C'est de valeur, on s'est fait
fourrer de $30 millions ou de $50 millions, je ne le sais pas, sur les bateaux
grecs, on prend notre pilule et c'est fini, on n'en reparle plus.
C'était hier. C'est arrivé. C'est de valeur, on va pleurer tout
le monde. Finalement, on ne devrait pas empêcher l'entreprise d'avoir un
peu d'oxygène économique en coupant son profit, parce qu'elle va
prendre soin d'erreurs du passé. C'est unequestion.
Je voudrais avoir des chiffres précis là-dessus. Qu'est-ce
qu'on va perdre sur les trois navires de par l'entente qu'on a faite ou quel
profit va-t-on faire sur les trois navires avec la société
hollandaise? Qu'est-ce que cela va coûter de garder àquai les
trois autres navires? Si vous me dites: On va les garder pendant trois mois ou
six mois et, après cela, je pense bien qu'on aura une solution, cela va
se régler, ce n'est pas encore si mal, mais ces six mois vont
coûter encore $3 millions ou quelque chose comme cela. Vous allez devoir
faire passablement de profit ailleurs pour pouvoir arriver. C'est une question
que je voudrais poser au président.
En plus, je veux aussi poser une question, toujours dans le domaine
naval, parce qu'il me semble que les deux autres domaines, les deux autres
services fonctionnent bien. On pourrait questionner davantage, passer la
journée à s'informer. Je pense que vous êtes très
compétents dans ce domaine-là et les preuves sont faites,
d'ailleurs, avec les chiffres que vous nous avez fournis. Bien sûr, on
peut vous aider et on peut s'informer davantage, mais le cancer chez Marine
Industrie, cela a été la division navale, c'est encore la
division navale et si on n'opère pas carrément, je me demande si
ce cancer-là ne nous atteindra pas et s'il ne tuera pas toute
l'entreprise et même la société mère.
Il y a une question aussi que je veux poser à propos des bateaux
polonais. Lorsqu'on s'est vu ici au mois de décembre, si je me souviens
bien, il avait été question d'une perte possible de $5 millions.
Le président nous a dit: Cela va dépasser $8 millions. Même
si c'était $5 millions sur le rapport à l'époque, cela a
dépassé $8 millions. Là, on est rendu à $18
millions. Ma question c'est: Est-ce que les $18 millions, c'est le maximum
qu'on va perdre ou est-ce qu'il y a encore possibilité qu'on perde
$2millions, $3 millions, $4 millions ou $5 millions additionnels, parce que
cela a augmenté d'une façon considérable du mois de
septembre jusqu'à aujourd'hui?
Or, je voudrais que le président de la SGF ou le président
de Marine Industrie nous parle un peu justement du secteur naval, des bateaux
polonais, de la perte qu'on a ou qu'on aura sur les bateaux grecs ou
panaméens qui nous restent. Est-ce que ce n'est pas en vous faisant
tordre les bras un peu, dans le fond, que vous avez consenti à garder le
secteur naval ou est-cequ'au point de vue administratif, vous n'auriez pas
suggéré qu'on coupe carrément là-dedans et c'est
fini? C'est de valeur, on perd ces emplois-là, mais au moins à
partirde là, on sauve tout le restant. (15 h 30)
M. Coulombe: II y a plusieurs points. Prenons d'abord la question
des six bateaux panaméens ou grecs. Avant de passer la parole à
M. Paquin ou à M. Dinsmore, concernant le contrat de gestion
donné à Nedlloyd pour trois de ces bateaux, il ne faut pas
oublier que, pour les trois autres, on est lié contractuellement avec M.
Karageorgis, ce qui nous porte à croire qu'on respectera ce contrat.
D'ailleurs, on a l'intention de faire respecter dans toute la mesure du
possible ce contrat qui est signé avec lui. Le 6 septembre, M.
Karageorgis doit prendre possession de ces bateaux, à un prix
déterminé contractuellement. Si vous me demandez si cela va
arriver, je répondrai que je souhaite que cela arrive et on va tout
faire pour que le contrat soit respecté. C'est tout ce qu'on peut dire
à l'heure actuelle. Les négociations sont commencées. Il y
a eu des rencontres avec M. Karageorgis dernièrement. Ses inspecteurs
viennent la semaine prochaine regarder de plus près les trois bateaux et
cela se déroule selon les ententes contractuelles.
On va tout faire pour qu'en dépit du fait qu'il y a certains
éléments du contrat qui peuvent permettre à M. Karageorgis
de laisser traîner cela passablement, cela se règle. Il y a aussi
la position de la SEE là-dedans, dans quelle mesure elle va vouloir
financer M. Karageorgis. Il y a plusieurs questions qui restent à
régler, mais le dossier est en marche, il fonctionne et il faut tenir
pour acquis que le contrat va être respecté.
M. Blron: Vous avez dit à un prix contractuel, mais
à quel prix?
M. Coulombe: C'est l'équivalent du prix qu'il y a dans la
loi 108.
M. Blron: C'était $17 millions dans la loi 108. M.
Coulombe: C'est cela.
M. Plessls-Bélair: Les contrats sont faits en dollars US.
Les contrats varient entre $14 500 000 et $15 millions, ce qui donne...
M. Blron: Cela veut dire le prix de la loi. M.
Plessls-Bélalr: A peu près.
M. Coulombe: Théoriquement, si ce contrat est
respecté, au mois de septembre, ces trois bateaux voguent vers la
Grèce ou je ne sais pas où, mais ils s'en vont.
M. Plessls-Bélalr: Le taux de change qu'on verra au mois
de septembre va être important, à ce moment.
M. Coulombe: Maintenant, seulement pour préciser aussi
certains chiffres, ces bateaux coûtent
actuellementàMarine$18millionsparannée de frais
d'intérêt, de gardiennage et ainsi de suite.
M. Blron: Les six bateaux?
M.Coulombe: Les six. Si on n'en a que trois, c'est $9 millions
par année, au taux actuel. Cela tient compte des trois premiers, ce qui
ne nous empêche pas, parallèlement aux discussions contractuelles
avec M. Karageorgis, de continuer les efforts pour vendre ces bateaux, pour les
vendre ailleurs, pour trouver d'autres clients, pour trouver des solutions de
rechange, si jamais cela ne fonctionnait pas avec le contrat qu'on a en main.
M. Paquin et M. Dinsmore, qui sont dans le dossier jusqu'au cou, pourront
donner des détails là-dessus. Je vais leur laisser la parole au
sujet des trois autres de Nedlloyd et de la structure du contrat qui nous lie
avec Nedlloyd.
M. Plessis-Bélair: Je voudrais peut-être, juste
avant, préciser quelques chiffres. Au début de l'année,
quand on a fait le budget, on a pris certaines hypothèses de taux
d'intérêt qui étaient les taux qu'on connaissait à
ce moment-là. On a fait certaines hypothèses de gardiennage,
d'assurance et de maintien au quai de ces bateaux et l'ensemble de ces
coûts était de $18 millions.
Par la suite, il y a eu la renégociation avec Nedlloyd qui a fait
que trois des navires sont maintenant sous contrat de gestion. Il y a eu une
baisse des taux d'intérêt avec lesquels on vivait qui a eu un
impact favorable. On en arrive à une situation où les coûts
projetés à la fin de l'année, si rien ne change vont
être de $14 millions. Comme on a $8 millions de subventions qui ont
été accordés dans la loi 108, le coût net à
Marine devrait se situer parce qu'il y a des fluctuations possibles
aux alentours de $6 millions à $6 500 000 pour cette
année. Donc, Marine devra supporter, à même les profits des
autres divisions, $6 500 000 pour ces bateaux.
Maintenant, pour l'année qui s'en vient, pour l'année
1980, si rien n'était fait et si on fait l'hypothèse qu'on peut
avoir un financement à long terme à 9%... Ce ne sont pas des taux
utopiques. La SEE fait des financements à long terme à des taux
variant entre 8 1/2%, 9%, 9 1/4%. Si on fait l'hypothèse qu'on peut
avoir un taux d'intérêt de 9%, pendant une période de douze
ans, avec un congé de repaiement sur la dette à long terme, et en
faisant l'hypothèse, à ce moment-là, que les six navires
seraient soumis à des contrats de gestion et nous rapporteraient les
montants qu'on obtient aujourd'hui donc, on ne fait pas une
hypothèse utopique ou euphorique du marché le coût
pour Marine serait de l'ordre de $4 500 000 à $5 000 000, ce qui est
encore un poids considérable qu'elle devrait supporter.
C'est pour ça que, dans le plan de redressement, on mentionnait
qu'il faut faire en sorte d'alléger ce poids le plus possible pour que
les bénéfices créés ou faits par les autres
divisions ne servent pas qu'à supporter les coûts de financement
et les coûts de ces navires.
M. Biron: Vous avez dit $4 millions à $5 millions. Ce sera
pour les six navires si on fait des ententes comme on en a fait avec
Nedlloyd.
M. Coulombe: C'est ça, au taux actuel
d'affrètement.
M. Biron: Non, c'est pour les six navires. Cela veut dire $1
million par navire en chiffres ronds.
M. Plessis-Bélair: A peu près. Cela ne tient pas
compte du repaiement... C'est le coût... Ce seraient les
déboursés nets. Cela ne tient pas compte du repaiement de la
dette qui devrait avoir lieu, la raison étant que le gouvernement nous a
garanti un prix de vente de $17 350 000. Ce sont les coûts de charge, de
support des navires.
M. Paquin (Jacques): Je pense que pour situer tout le
problème du marché pour ces navires, il y a lieu de
récapituler ce qui a été fait depuis la dernière
commission parlementaire.
Je crois qu'il faut bien mentionner que, jusqu'à l'adoption de la
loi 108, Marine avait très peu de moyens pour pouvoir disposer de ces
navires, parce qu'elle n'avait pas les ressources financières pour
pouvoir les offrir à un prix qui se rapprochait du prix du marché
et encourir la perte sans faire faillite. Alors, on a juste à se
rappeler que la valeur aux livres, après les subventions pour ces
navires, était d'environ $21 millions par navire et qu'on les a
abaissées, avec l'aide qui nous a été fournie, à
environ $17 millions, ce qui signifiait une perte de $4 millions par navire; $4
millions multipliés par six, ça fait $24 millions. C'était
à peu près l'avoir des actionnaires; Marine ne pouvait pas
vraiment poursuivre des efforts de vente pour offrir les navires à un
prix qui corresponde à la demande qui existait.
A la suite de l'adoption de la loi 108, les efforts ont
été intensifiés pour essayer d'offrir les navires à
un prix plus bas. Ces efforts se sont avérés quand même
futiles pour la principale raison qu'actuellement encore, les taux
d'affrètement pour exploiter un navire se situaient, au début de
l'année, à environ $4500 ou $5000 par jour, alors que les frais
d'exploitation, quand on s'en tient uniquement aux frais d'équipage,
d'assurance, d'entretien, etc., étaient d'environ $3500 par jour. Ce qui
laissait entre $3500 et $4500 ou $5000, une marge de $1000 à $1500 par
jour.
C'est le "cash flow" qu'un opérateur est capable de gagner pour
pouvoir justifier un achat. Or, on dit que pour amortir un prix de $15
millions, à 9% ou 9,25% sur une période d'environ douze ans,
ça prend environ $6000 par jour.
Alors, il n'y a personne qui puisse exploiter les navires sans avoir la
capacité financière de pouvoir subir un déficit de caisse,
pour l'instant. Ce qui fait qu'il n'y a pas de demande qui provienne
d'entreprises privées, il n'y a aucune entreprise privée,
même la société Nedlloyd, qui se dit fort
intéressée à administrer nos navires, a examiné et
on a tenté de l'inciter à nous faire une offre d'achat. Son
conseil d'administration a refusé parce que le niveau d'endettement
qu'elle a actuellement est déjà suffisamment élevé.
Augmenter ce niveau d'endettement sans pouvoir avoir suffisamment de revenus
pour satisfaire le service de la dette, elle ne peut pas le faire.
Alors, dans le contexte présent, chez les armateurs du secteur
privé, on ne peut pas avoir de demande, tant et aussi longtemps que les
taux d'affrètement ou les taux de fret n'ont pas atteint un niveau qui
est suffisant pour justifier le prix qu'on croit raisonnable pour la vente d'un
navire.
S'il fallait les vendre, on n'a jamais vraiment eu de proposition
sérieuse, jusqu'à maintenant, qui aurait offert un montant qu'on
croit raisonnable, même passablement en dessous du prix garanti par le
ministre des Finances, soit $17 750 000, ce qui est à peu près
l'équivalent de $15 millions US.
M. Biron: C'est justement le but de ma question au
Président tout à l'heure; avec la loi 108, on garantissait un
montant de vente de $17 350 000.
M. Paquin: Oui.
M. Biron: Théoriquement, le lendemain matin, Marine
Industrie aurait pu se tourner de bord, vendre les bateaux $5 millions chacun
et dire au ministre des Finances: Donne-moi le reste et bonjour.
M. Paquin: Oui.
M. Biron: II y aurait eu une perte, tout le monde aurait
critiqué la perte, mais Marine Industrie aurait au moins
arrêté de perdre $4 millions, $5 millions, $9 millions ou $18
millions par année en entretenant des bateaux et en payant de
l'intérêt dessus. Je voudrais savoir si et cela a
été le but de ma question sur la division navale une fois
qu'on aura freiné ce cancer-là des bateaux grecs ou
panaméens, une fois qu'on s'en sera débarrassé et qu'on
pourra dire: Cela ne coûte plus un cent à Marine Industrie, cette
histoire-là, on s'en est débarrassé, on a perdu $50
millions, on a tout perdu, on recommence à zéro.
Est-ce que c'est rentable de garder la division navale? Dans votre
rapport, j'ai vu qu'il y avait encore des probabilités là-dessus.
Est-ce avec gaieté de coeur que vous l'avez gardée? Est-ce que
vous êtes confiants qu'au cours des cinq prochaines années ou dans
cinq ans d'ici, cela pourrait devenir rentable ou si on n'est pas mieux de
couper ça tout de suite?
M. Coulombe: La question que vous posez, c'est la question qui a
angoissé toute l'équipe depuis un an, à toutes fins
utiles. Il faut prendre la question sous deux angles. Le premier, c'est que le
marché n'attendra pas qu'on se fasse une idée nous-mêmes,
c'est-à-dire que le marché a déjà pris une partie
des décisions, en ce sens qu'on n'a pas de contrat à l'heure
actuelle, après les six bateaux qui doivent être terminés.
Donc, l'évolution du marché, les gens sont unanimes à
dire: 1982-1983, donc, d'ici ce temps-là, c'est définitif que ce
sera extrêmement difficile.
Deuxièmement, nous ne sommes pas convaincus, et je pense que cela
a été assez fouillé, qu'on a toutes les données en
main actuellement pour pouvoir dire de façon péremptoire qu'il
n'y a rien à faire là-dedans, il faut fermer ça. Je fais
abstraction des politiques gouvernementales, mais évidemment, s'il y
avait des changements dans les politiques gouvernementales, le contexte
général changerait. On n'aurait plus le même environnement
et là, ce serait... Encore faudra-t-il les faire de façon
rentable les bateaux. C'est beau d'avoir des contrats, mais encore faut-il les
exécuter de la façon la plus efficace et la plus rentable
possible.
On n'a pas encore abandonné l'idée et c'est
l'esprit de la première phase du rapport que par des recherches
un peu plus systématiques, il n'y aurait pas possibilité d'avoir
certains types spécialisés de bateaux qui pourraient assurer une
certaine rentabilité. En d'autres mots, on n'a pas assez de
données pour pouvoir dire qu'on abandonne cette idée-là.
C'est pour ça qu'on veut mettre un peu d'argent, en termes de recherche
de produits un peu plus spécialisés, et si on pouvait ce
qui n'est pas impensable développer un tel produit au niveau
naval, on pense que ça pourrait donner un certain avantage comparatif
à Marine Industrie et cela pourrait être intéressant. En
d'autres mots, on n'a pas assez de données actuellement pour dire que
l'on abandonne cette hypothèse-là. On veut continuer et on pense
que si jamais ça produisait quelque chose, il pourrait y avoir des
lueurs d'espoir.
Il y a aussi le contexte de la réparation navale qui demeure
quand même une activité payante pour Marine Industrie et ceci
conditionne certains équipements à Marine Industrie, certaines
organisations, le maintien d'un certain niveau d'activité. Actuellement,
on est à $5 millions de réparations navales, c'est une
activité payante. Donc, cela entretient quand même de façon
rentable une activité navale.
Ce matin, strictement en regardant le carnet de commandes potentielles,
non pas à partir de projections théoriques mais à partir
de projets annoncés, connus, pour la plupart, d'ailleurs, publics, on a
identifié entre 20 et 25 projets précis sur lesquels Marine
Industrie pourrait soumissionner de façon intéressante. On va
avoir la confirmation ou la négation de cette hypothèse dans
l'année qui vient, parce qu'on va avoir des soumissions à
remettre et mêmes certaines prochainement. En d'autres mots, d'ici un an
et demi et c'est l'esprit du rapport on s'est dit qu'on allait
tout faire, dans le contexte des politiques actuelles, pour trouver une place
à Marine Industrie dans ce domaine-là. Si le marché
lui-même se conduit de telle sorte que la décision est prise
quasiment en dehors de notre contrôle, les décisions seront
différentes à la fin de 1980, mais on n'a pas abandonné
l'idée. C'est le fond du rapport; on pense qu'on n'a. pas toutes les
données encore pour nous permettre d'avoir une position aussi
draconienne que de dire: Actuellement, on perd de l'argent, donc, il faut
fermer. On pense qu'il y a beaucoup d'efforts qui devront être mis
là-dessus, quitte, à la fin de 1980, à faire un
réexamen de la situation à la lumière de ce qui se sera
passé, des soumissions sur lesquelles on a coté, des contrats
qu'on aura obtenus ou non, etc. (15 h 45)
M. Biron: Je voudrais poser ma dernière question avant de
passer à un autre intervenant. J'ai posé des questions tout
à l'heure sur les bateaux polonais en disant qu'on est rendu à
$18 millions de pertes. Est-ce qu'il y aura des pertes additionnelles? C'est
peut-être un contrat de $80 millions pour les quatre bateaux ou quelque
chose comme ça, $90 millions: ça veut dire qu'on a 20% de pertes
en partant. C'est peut-être une indication que c'est difficile, que ce
sera difficile, à moins que vous me donniez les raisons pour dire qu'il
y a telle et telle raison technique ou humaine qui est arrivée
entre-temps. Je sais que tous ces chambardements à Marine ont dû
causer beaucoup de casse-tête aux travailleurs et aux dirigeants de
l'entreprise.
Est-ce que c'est possible de produire rentable-ment et est-ce qu'on va
avoir d'autres pertes avec les navires polonais? Les pertes sur les navires
polonais et grecs ne s'expliqueraient-elles pas, par hasard, par le graphique
que vous avez donné dans votre présentation sur la comparaison
entre le nombre de travailleurs et le nombre de cadres dans l'entreprise? On
s'aperçoit que c'est peut-être un peu mieux, mais au milieu de
1978, il y avait autant de cadres que de travailleurs syndiqués ou
à peu près. Est-ce que ce n'est pas une explication? Pas autant,
40 pour 2000, quelque chose comme ça. En tout cas, c'était
beaucoup plus près qu'en temps normal.
Est-ce que cela ne serait pas une raison pour que ça coûte
plus cher ou vous avez peut-être une autre raison? Mais je voudrais
savoir pourquoi on a perdu $18 millions sur les navires polonais et si on va
continuer d'en perdre encore.
M. Coulombe: Sur la question des bateaux polonais, je pense qu'on
a distribué le rapport ce matin. Comme disait M. Scowen, on a
été d'une honnêteté quasiment dangereuse, on a
exposé clairement le problème des bateaux polonais; les causes
réelles, les coûts réels sont expliqués dans ce
document. Sur la question que vous nous posez, est-ce que les pertes sur les
bateaux polonais vont se limiter aux chiffres qu'on mentionne à l'heure
actuelle? En toute honnêteté, je ne prendrais pas la position de
dire: Oui, ça va se limiter à ça. On fait tout en ce sens,
à l'heure actuelle, les cadres, les gens font tout pour que ça se
limite et même que ce soit moindre que ça. Il ne faut pas oublier
que ce ne sont pas toutes des pertes encourues à l'heure actuelle. C'est
une prévision de pertes jusqu'à la fin du contrat,
c'est-à-dire jusqu'au milieu de 1980, juin ou juillet 1980. Donc, il
peut se produire beaucoup d'événements d'ici ce moment-là,
il peut arriver des perturbations quelconques qui vont modifier cette
prévision.
Evidemment, les pertes encourues au moment où on se parle, on ne
pourra pas les récupérer. Quant à la partie des pertes qui
est prévue d'ici à la fin du contrat, trop
d'événements peuvent se produire pour qu'on puisse affirmer de
façon catégorique que ça va se limiter à ça.
On le souhaite, on fait tout notre possible pour que ce soit ça, mais il
y a des événements qui peuvent survenir, de tout ordre, qui n'ont
rien à voir avec la construction des bateaux, qui peuvent modifier cette
prévision.
On espère que non seulement ça va se limiter à
ça, mais on espère même pouvoir la diminuer. Cela se peut
que certains événements se produisent qui modifient ces
chiffres.
M. Blron: Mais les...
Questions générales
M. Tremblay: Si le chef de l'Union Nationale le permet,
j'aimerais poser une sous-question. Quand vous mentionnez les pertes qui
pourraient être plus grandes, premièrement, c'est après la
subvention de 20% du gouvernement fédéral, donc 20% de pertes,
20% de subvention, on est déjà rendu à 40%, cela se
rapproche de la subvention de 50% du gouvernement français.
Dans le cas des navires polonais, vous avez les mêmes clauses de
pénalité dans les retards de construction que vous aviez avec les
bateaux grecs. Pouvez-vous nous donner les chiffres de pénalité
que vous vous attendez de payer au moment où on se parle, à cause
des délais?
M. Coulombe: $1 800 000 de pénalité.
M. Tremblay: Pour les quatre navires, vous avez $1 800 000 parce
que vous êtes certain des délais. S'il y avait des délais
additionnels, cela coûterait combien, en termes de
pénalité?
M. Coulombe: C'est tant par jour. M. Tremblay: Combien
payez-vous?
M. Brlsson: C'est $3500 par navire par jour de délai.
M. Tremblay: De délai.
M. Brlsson: Cependant, selon les causes du délai, il y a
certaines des clauses de ce contrat qui font état de causes de force
majeure. A ce moment-là, tout dépend de la cause du délai.
Si la cause du délai n'est pas une cause acceptable, la
pénalité est de $3500 par jour.
M. Coulombe: II y a non seulement la question de la
pénalité par jour, mais aussi la question des conséquences
sur le financement. Si la période de financement est plus longue, c'est
évident que les coûts sont plus élevés.
M. Tremblay: Un autre coût qui s'ajoute. Vous dites que
vous avez emprunté pour financer la construction des bateaux polonais et
ces intérêts courent. Vous avez emprunté combien pour les
bateaux polonais?
M. Plessls-Bélalr: On a une marge de crédit qui est
ouverte jusqu'à $40 millions et qui varie selon les livraisons ou le
niveau d'avancement des différents navires. Cela fonctionne par
étapes. Mais cette marge de crédit a un plafond de $40 millions.
A un certain moment, il est prévu qu'on se rende jusqu'à un
emprunt de $40 millions, dans le programme de construction.
M. Tremblay: Est-ce qu'il est indiscret de vous demander quel
taux d'intérêt vous payez? C'est le "prime"?
M. Brlason: Présentement, c'est 11 3/8%.
M. Scowen: Dans le contrat, est-ce qu'il y a une clause qui
permettra à la compagnie polonaise de mettre fin au contrat, à
cause des délais? Ils sont tenus de prendre le bateau, même si le
délai n'est pas respecté.
M. Coulombe: II faut mentionner deux choses. Les Polonais,
actuellement, sont parfaitement au courant de l'état du dossier. Les
gens de Marine Industrie sont allés les rencontrer, ils ont
accepté les choses, ils sont en négociation avec la SEE qui a
accepte de prolonger le financernent. Il reste un point en suspens...
M. Plessis-Bélair: C'est le début des
remboursements des emprunts de la Pologne au gouvernement canadien, ou à
la SEE. La SEE a accepté de reporter la date ultime où elle va
continuer à faire des prêts, mais la Pologne a également
demandé que la date du premier remboursement de la Pologne à la
SEE soit également reportée d'une période correspondante.
Nous sommes dans l'attente de la décision finale de la SEE.
Ce qu'on nous dit, c'est que, comme le crédit a été
consenti par le Conseil des ministres fédéral, dans la
période qu'on vient de vivre, le Conseil des ministres ne s'est pas
réuni pour approuver ou ratifier cette prolongation du début de
la période de remboursement. Nous sommes en attente. Les gens de la SEE
nous disent que ce n'est rien d'exceptionnel ou d'anormal. Mais il faut que le
ministre fédéral de l'Industrie et du Commerce signe un document
quelconque pour que ce soit présenté au Consei I des
ministres.
M. Biron: Ce retard dans la livraison des navires polonais et
l'amende qu'on aura à payer, cela ne peut pas être pire que
l'amende. Est-ce que cela peut devenir comme les navires grecs, où les
gens annulent leurs navires et nous sommes "poignés" avec quatre bateaux
de plus?
M. Brisson : Dans le contrat polonais, il n'y a pas de clause qui
permette à l'armateur d'annuler le contrat après un certain
nombre de jours, tel que stipulé dans les autres contrats. Cette clause
n'existe pas.
M. Plessis-Bélair: Pour les bateaux panaméens, si
vous vous souvenez, la date ultime était de 180 jours après la
date contractuelle. Dans le cas des contrats polonais, il n'y a pas de limite
ultime.
M. Biron: D'accord.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Richelieu.
M. Martel: M. le Président, je tiens à relever une
affirmation qu'a faite le chef de l'Union Nationale tout à l'heure, en
parlant de sociétés d'Etat, que ce ne doit être une
Saint-Vincent-de-Paul. Je conçois qu'une société d'Etat,
comme l'entreprise privée, doit être rentable
financièrement. Je pense et c'est une question que je vais poser
tout à l'heurequ'on doit, à ce moment-là, essayer de
demander aux gens de la Société générale de
financement quels moyens de conciliation ils font entre la notion de
rentabilité financière de l'entreprise et la rentabilité
sociale.
Marine Industrie, depuis dix ans, avec un chiffre d'affaire de $970
millions, a fait, je pense, des profits de six millièmes pour cent. Et
cela a coûté à l'Etat, au point de vue des subventions par
employé, par année, environ $1115, d'après les calculs que
j'ai faits. Si ces mêmes gens-là, on les retourne à
l'assurance-chômage ou au bien-être social, cela va coûter
entre $4000 et $5000. Il faut aussi tenir compte de cette rentabilité
sociale, dans des entreprises d'Etat; sinon, qu'est-ce qu'elles font là,
les sociétés d'Etat?
Après avoir lu ce rapport...
M. Biron: Je ne veux pas commencer un débat, mais, sur ce
point particulier, j'ai dit que, si l'Etat décide, de quelque
façon que ce soit, d'intervenir pour l'aide sociale, on devrait le faire
avec un budget spécial et l'oublier, et non pas pénaliser les
administrateurs de nos sociétés d'Etat, parce qu'on leur demande
d'agir comme le ministère des Affaires sociales. C'est juste cela.
M. Martel: Je pense que c'est important de concilier les deux
notions, celle de rentabilité financière et celle de
rentabilité sociale, dans le cas d'une société d'Etat.
Jusqu'à maintenant, les chiffres que je vous ai donnés prouvent
qu'à ce moment-là, cela coûte moins cher de subventionner
que de payer des mesures sociales.
Après avoir lu ce document, comme député du
comté de Richelieu, je constate que et vous savez que
l'économie de Richelieu, dans une proportion de 50%, repose sur Marine
Industrie nous ne sommes pas allés assez en profondeur dans ce
plan de redressement industriel de Marine Industrie. Par exemple, dans le
domaine naval, j'aurais beaucoup de questions à poser sur la division
hydro-électrique, de même que celle des wagons. Mais, tout
d'abord, je constate que l'on tient pour acquis que, dans le domaine de
l'hydro-électricité, cela va bien ; à la suite de la baie
James, on a des contrats de $350 millions jusqu'en 1985. Et on semble se
limiter à cela, dans le rapport.. On ne pense pas à un
marché plus grand, un marché international. On ne pense pas, par
exemple, à développer ce qui peut être une
réalité bientôt, ce qui va se passer à la baie de
Fundy, c'est-à-dire cet investissement de plusieurs milliards de dollars
qui va sans doute se concrétiser, qui va demander des machines
marémotrices. A ce moment-là, si cela se réalise, est-ce
qu'on a fait des prévisions, à Marine Industrie, dans le domaine
hydro-électrique, pour essayer d'accaparer ce marché potentiel
qui s'en vient?
Par exemple, dans le domaine naval, on dit que cela va mal à
travers le monde, mais dans ce cahier-là, je n'ai pas trouvé ce
qu'on cherche. On parle, à la page 17, d'une réduction. Comme
relance de la construction navale, on parle de réduction de personnel. A
ce moment-là, je pense qu'on devrait parler plutôt de
diversification dans le domaine de la construction navale. Il n'y a pas de mot,
il n'y a pas une page où j'ai vu qu'on parlait de possibilités
d'exploiter un marché qui, en Europe, semble très rentable, du
moins en Angleterre et en Union soviétique, celui des
aéroglisseurs. Par exemple, il n'est pas question d'aller exploiter ces
marchés-là. Il n'est pas question non plus dans le domaine des
wagons de voir à de l'expansion,
comme par exemple le fait une entreprise privée. Bombardier
fabriquait uniquement de la motoneige. A un moment donné le
marché de la motoneige est devenu saturé. On afait une
association avec MLWet on a envahi le marché du transport en commun.
Par exemple, dans le domaine du wagon, au lieu de se limiter à
Marine Industrie que la situation, la conjoncture économique actuelle
nord américaine fait que nous avons une proportion assez
considérable de wagons à construire parce que le dollar canadien
est inférieur au dollar américain cela sera temporaire
on se limite dans des perspectives de redressement de Marine Industrie
à cette conjoncture-là. On ne songe pas à faire une
entreprise mixte dans le domaine de la navigation navale, par exemple, avec la
Davie Shipbuilding Lauzon, on ne pense pas, dans le domaine des wagons, pour
accaparer le marché du transport en commun, de s'associer à
uneentreprise privée aussi ou bien àen faire un genre de "joint
venture".
Les questions que j'aimerais poser, sont les suivantes. Quelle est la
politique de Marine Industrie en termes de marketing, de recherche et de
planification? Parce que je ne l'ai pas trouvée dans ce cahier d'une
cinquantaine de pages. Ce serait une des premières questions.
Ensuite, j'aimerais, par exemple, demander quant à la
construction navale, si on envisage justement d'autres marchés comme
celui des aéroglisseurs, si on a tenu compte également, tout le
monde le sait, de ce changement de gouvernement qu'on a eu à Ottawa, des
changements de politiques de la part du gouvernement fédéral dans
le sens de se donner une véritable politique maritime, de donner des
dents à la politique de la loi du cabotage qui n'aurait pas une
influencedirecte et immédiate sur le marché de la construction
navale.
Voilà des questions auxquelles j'aimerais avoir des
réponses. C'est pour cette raison que je trouve que, dans
l'immédiat, même si ce rapport est bien fait, on ne va pas assez
loin pour trouver des solutions. On ne se creuse pas suffisamment le cerveau
pour trouver véritablement des solutions à court terme, mais
aussi à long terme. Ce serait important de connaître justement
cette politique qu'il est censé y avoir dans toute entreprise, quelle
soit publique ou privée, de marketing, de recherche, de planification.
Avez-vous fait également des représentations auprès du
Conseil national des recherches à Ottawa qui est rendu à
subventionner des entreprises américaines pour faire de la recherche
dans le but de trouver de nouveaux produits? Avez-vous eu recours à
cela?
Evidemment, je reviendrai tout à l'heure à d'autres
questions dans le domaine des wagons, mais je pense que je vais me limiter
à cela pour le moment en attendant des réponses.
M. Coulombe: Avant de prendre chacun des points que vous avez
soulignés, je voudrais quand même vous mentionner qu'il y a un
point que vous avez affirmé sur lequel personnellement je ne suis pas
d'accord, c'est que dans le domaine du... D'abord, il faut bien
spécifier qu'il s'agit d'un plan de redressement qui a un horizon
précis dans le temps, c'est-à-dire on s'est arrêté
en 1984.
Deuxièmement, dans le domaine de
l'hydroélectricité, si on les prend un par un, tout ce que vous
avez mentionné a fait l'objet d'études et de rapports
précis tant sur le plan international que pour le problème des
nouveaux produits. On a parlé, ce matin, des turbines bulbes, des
stations pompées, etc. On les a mentionnées brièvement
dans le rapport, mais on a des études précises là-dessus
qui ont indiqué le marché potentiel et l'intérêt
très précis que Marine Industrie va avoir là-dedans.
Lorsqu'on parle dans la deuxième phase d'investissements dans
l'hydro-électricité de l'ordre de $20 millions ou $25 millions,
ce n'est pas strictement pour exécuter les contrats qu'on a en main.
C'est dans la perspective... Ce que vous avez mentionné, c'est
là-dessus qu'on travaille et qu'on va continuer à travailler. (16
heures)
M. Martel:Travaillez-vous en collaboration avec
Hydro-Québec international, par exemple, pour avoir des marchés
européens?
M. Coulombe: Les communications avec l'Hy-dro sont excellentes,
dans ce domaine, non seulement avec l'Hydro-Québec, mais aussi avec nos
partenaires français, avec la compagnie générale
d'électricité de France. On a des contacts très
étroits avec eux non seulement au point de vue technologique, mais aussi
on l'a mentionné ce matin il y a la possibilité de
consortium. On est actuellement partenaire dans un consortium international
pour un contrat en Amérique centrale. C'est dans cette perspective. Sur
l'hydro-électri-que, les points que vous avez mentionnés ne sont
pas explicites dans la petite synthèse de 50 pages, mais dans les
annexes dont vous avez la liste à la fin, vous allez voir, seulement en
jetant un coup d'oeil sur ces annexes, que ces choses ont été
traitées et on en tient compte.
Sur la question des wagons et des autres... On peut peut-être
continuer là-dessus.
M. Brisson: J'aimerais mentionner tout de même que les
investissements que vous avez notés dans l'hydro-électrique, qui
vont aller jusqu'à $25 millions, ne peuvent avoir été
justifiés sur une période de cinq ans. Or, ces investissements
sont justifiés justement dans les études que nous avons faites
des marchés futurs pour les prochains dix et quinze ans. Ces
marchés comprennent tous les nouveaux types, ce ne sont pas des nouveaux
types, mais des types qui vont devenir en demande après 1985, soit les
types hélice, capelan et bulbe. En plus de cela, dans la progression que
vous avez vous avez simplement les premiers quatre ans de montrés
dans la division industrielle, on voit la croissance qui va de $1
million à $18 millions dans la période de quatre ans, au point de
vue des nouveaux produits. Si on l'avait extrapolé pour dix ans
plutôt que quatre, cela aurait démontré les
résultats de cette étude de marché qui a été
faite.
M. Martel: Est-ce que vous avez fait des études dans des
marchés potentiels utilisant d'autres sortes d'énergie? Par
exemple, j'ai mentionné tout à l'heure l'énergie
marémotrice, parce que la
baie de Fundy, si cela arrive, cela va être un boom un peu comme
la baie James.
M. Brisson: Dans les marémotrices, c'est le type bulbe qui
est employé.
M. Martel: Est-ce qu'on est capable de faire cela à
Marine?
M. Brisson: Oui.
M. Martel: Est-ce qu'on a étudié la
possibilité d'accaparer ce marché?
M. Brisson: Oui. Actuellement, nous sommes...
M. Martel: Est-ce qu'on a étudié, par exemple, la
possibilité d'autres formes d'énergie, l'énergie
éolienne, par exemple?
M. Brisson: Nous avons déjà travaillé avec
l'énergie éolienne avec l'IREQ, je crois. En ce qui concerne
l'énergie nucléaire, il y a des éléments que nous
avons dans nos projets d'avenir; nous voulons nous préparer pour faire
certains éléments des centrales nucléaires. Nous projetons
aussi des études sur les générateurs à haute
vitesse, qui seront motorisés par autre chose que de l'eau, soit la
vapeur, le gaz et ces choses.
Toutes ces formes de génération d'énergie ont
été considérées.
M. Martel: D'accord. Dans le domaine hydro-électrique,
jusqu'en 1985, cela va assez bien. Si vous avez des études de
marché pour les nouvelles formes d'énergie pas les
nouvelles formes, parce que les machines marémotrices, cela existe
depuis longtemps et l'énergie éolienne, évidemment, depuis
encore plus longtemps. Dans le domaine qui va mal, c'est-à-dire celui de
la navigation navale, je trouve et, malheureusement, on a
souligné tout à l'heure... En effet, quand on compare à
Saint-Vincent-de-Paul, je n'aime pas bien cela, parce que quand on parle,
à la page 17, de relance de l'industrie de la construction navale, et
qu'on trouve un mot et que c'est réduction de personnel, je n'aime pas
bien cela de voir 600, peut-être 1000 personnes mises à pied. Je
vous ai posé la question tout à l'heure, à savoir si on
avait envisagé d'autres possibilités de marché. On sait
que dans le domaine de la construction navale, en général, il y a
une saturation. Entre parenthèses, je pourrais vous poser une question
sur le tonnage que vous mentionnez dans un paragraphe: Combien y a-t-il de
bateaux de 20 000 tonnes et plus et combien y en a-t-il de 20 000 tonnes et
moins, parce que c'est ce qu'on fabrique chez nous?
L'autre question: Est-ce qu'on a envisagé sérieusement la
possibilité de pénétrer le marché des
aéroglisseurs, sous brevet avec l'Angleterre peut-être, parce que
c'est elle qui le détient actuellement? C'est très populaire en
Angleterre, c'est très populaire dans les pays Scandinaves, en Russie.
C'est un marché qui se développe énor- mément. En
Amérique du Nord, on n'a pas développé ce marché.
Est-ce que Marine a envisagé, pour maintenir justement ses "jobs" dans
la division navale, explorer ce marché qui, éventuellement, va
finir par se développer en Amérique du Nord? Est-ce qu'on a fait
des études dans ce sens?
M. Brisson: Pour répondre, M. le Président,
à la première question, au sujet de nouveaux produits ou de
produits spécialisés pour la division navale, nous avons fait des
recherches et nous avons déterminé certaines lignes de produits
ou certaines modifications aux produits, parce que, dans la division navale, ce
sont des bateaux, nous avons recherché certaines sections où nous
pourrions peut-être obtenir, par voie de recherche et de
développement, un avantage sur le marché.
A la page 20 de notre plan, on en mentionne quelques-uns, mais vous nous
saurez gré de ne pas trop les publier, parce que nous sommes dans un
marché très concurrentiel et qu'il est évident que le
premier qui met la main sur le produit a l'avantage compétitif. Nous
avons là certains termes très génériques de
produits que nous recherchons et que nous voulons développer et
développer justement à même l'argent que la
Société générale de financement, dans un budget de
recherche, veut mettre à la disposition de ses filiales.
Il y a quelques produits là où nous voulons
développer une spécialité ou un avantage technologique
spécial qui nous permettra de prendre avantage du marché.
M. Martel: Mais vous n'avez pas utilisé la
possibilité d'exploiter les aéroglisseurs et de développer
ce secteur dans la division navale?
M. Brisson: A la deuxième question, dans le cas des
aéroglisseurs, nous avons regardé légèrement la
question des aéroglisseurs. Nous ne l'avons pas rejetée a priori,
mais dans le cas des aéroglisseurs, il y a une question de marché
et il y a aussi une question de genre de technologie. Les aéroglisseurs,
c'est presque de l'aérodynamique, plus que du naval. Il y a là le
problème de faire une étude très approfondie de la
possibilité de modifier nos installations et nos méthodes de
travail pour y arriver. On l'a déjà fait. On a fait le
"hydrofoil", il y a sept ou huit ans. On est encore capable de le faire, mais
cette étude n'est pas à point et nous ne sommes pas à
point là-dedans.
M. Martel: Est-ce que vous êtes en mesure d'affirmer que
les ateliers qui servent actuellement à la construction navale, dans une
période de temps immédiate et à moyen terme, ne seront pas
fermés? Je me situe à la fin des contrats, du carnet de commandes
qu'on possède, qui se termine avec les deux traversiers du Québec
en mars 1980.
M. Coulombe: Ce qu'on peut vous garantir et vous affirmer, c'est
que l'utilisation des équipe-
ments physiques de Marine va être faite dans la perspective de la
meilleure rentabilité et de la plus grande efficacité
possible.
M. Martel: A ce moment-là, vous ne répondez pas
à ma question; vous la contournez. Autrement dit, Sorel, s'est fait une
réputation grâce à sa main-d'oeuvre locale à travers
le monde. Le marché est stagnant actuellement, à travers le
monde, on sait ça. Par contre, on sait qu'il va reprendre. Est-ce que
vous, qui êtes responsables de ce redressement industriel, faites
spécialement à la division navale les efforts nécessaires
pour être en mesure de soutenir la concurrence lorsque le marché
reprendra probablement en 1981, 1982?
M. Coulombe: C'est affirmé clairement... C'est
l'hypothèse de base du plan de redressement et durant l'année et
demie qui s'en vient devant nous, la fin de 1980, le début de 1981, on
va avoir des réponses beaucoup plus précises à fournir
dans cette perspective, mais l'hypothèse du plan, c'est ce que vous
venez d'affirmer, c'est-à-dire de tout faire pour redresser la
situation. Je vous ai parlé de recherche tantôt. On va avoir un
budget spécial de $2 millions, chose qui ne s'est jamais faite dans ce
domaine. On va mettre un budget spécial non pas strictement pour la
division navale, mais qui va être utilisé aussi par la division
navale pour de nouveaux produits.
Quand on parle de recherche, on ne parle pas de recherche fondamentale.
On parle de la recherche vraiment appliquée sur des choses qui existent
ou qui peuvent, avec ces ingénieurs-conseils, être
modifiées pour trouver de nouveaux types de produits. On va faire cela
dès cet été. Les dépenses vont commencer à
se faire dans ce domaine.
M. Martel: D'accord. Toujours dans ce domaine, il y a une chose
que je vois très clairement dans ce cahier, c'est la répartition,
par exemple, que vous faites entre la construction navale et la
réparation navale.
J'aimerais savoir, par exemple, le chiffre d'affaires dé la
construction navale et de la réparation navale, par exemple, les
coûts, les profits, les pertes et les emplois, parce que ce n'est pas
clairement établi dans votre cahier, de 1967 à 1969, pour les
deux années d'exploitation.
M. Brlsson: Dans la réparation, M. le Président,
est-ce que...
M. Martel: Oui, j'ai demandé de faire une distinction
très nette, chose qui n'apparaît pas dans le rapport, entre la
construction navale... On veut savoir, en quelque sorte... On accuse de lourdes
pertes dans le domaine de la construction navale. Est-ce que la
réparation navale est payante? Est-ce que la réparation navale va
se maintenir?
M. Brisson: Oui, nos projections sont que la réparation
navale va même croître durant cette période, pour passer
d'environ $5 millions, cequ'elle est présentement, à environ $8
500 000 en 1984. Donc, une croissance réelle de 10% à 12% par
année.
M. Martel: Si on tenait compte qu'Ottawa se décide
à faire une véritable loi de cabotage, où on peut exiger
que les bateaux qui viennent chercher nos matières premières
soient des bateaux canadiens, qui soient réparés au Canada et au
Québec, évidemment, ça pourrait augmenter l'ouvrage de nos
chantiers, si on avait une politique maritime vraiment établie.
M. Brlsson: Ces chiffres sont tous basés sur les
politiques existantes.
M. Martel: Avez-vous les chiffres d'affaires de la division
navale, de la division construction et réparation?
M. Brlsson: Pour la division navale, au point de vue de la
construction, les projections que nous avons, basées sur les
données que vous avez dans votre brochure, vont de...
M. Martel: Non, moi, je parle des années
antérieures pour voir la rentabilité des deux, la
réparation et la construction.
M. Brlsson: Nous savons, historiquement, que la réparation
a toujous été rentable et d'une bonne rentabilité,
au-delà de 10%.
M. Martel: Combien de personnes sont employées à la
réparation?
M. Brisson: Cela varie, évidemment, mais, en moyenne, nous
comptons environ 150 personnes; ça peut aller jusqu'à 200, mais
c'est le niveau moyen d'emplois à l'année.
M. Martel: Une question que j'ai posée tout à
l'heure: C'est sûr qu'avec un profit de 0,006% sur un chiffre d'affaires
de $970 millions, ce n'est pas le diable. Une société
privée aurait peut-être des comptes plus sévères
à rendre. Envisagez-vous, pour avoir un plus grand marché, de
faire ce genre de "joint venture" avec une entreprise privée qui, je
pense, contrairement à ce que peut affirmer un membre de
l'Assemblée nationale, n'est pas en concurrence directe entre Marine et
Lauzon? Je pense qu'on ne construit pas nécessairement le même
tonnage de bateaux et que, à ce moment, il y aurait peut-être
avantage, pouravoirun marché, d'envisager de faire un genre de "joint
venture" entreprise privée, entreprise mixte dans le but
justement de rentabiliser plus rapidement cette société d'Etat.
Je reviendrai tout à l'heure avec la même idée concernant,
par exemple, le domaine des wagons où, je pense, on est dans une
situation assez stagnante.
M. Coulombe: Pour la possibilité d'entente avec d'autres
compagnies, non seulement on ne l'élimine pas, mais on pense que ce
serait une excellente chose. Selon les opportunités, c'est
certainement
une direction et c'est d'ailleurs carrément inscrit dans la loi,
dans la définition des objectifs de la SGF, de travailler, dans la
mesure du possible, avec des partenaires. D'ailleurs, dans plusieurs filiales
de la SGF, CEGELEC Industrie, CEGELEC Entreprise, on a des partenaires avec
lesquels nous collaborons, tant au niveau du capital-actions que des
activités réelles.
M. Martel: Mais vous n'excluez pas cette
possibilité...
M. Coulombe: Non seulement on ne l'exclut pas, mais c'est une
dimension qui nous intéresse énormément.
M. Martel: D'accord, mais vous n'avez pas répondu à
ma première question, une question d'ordre général en
termes de marketing, recherche, planification; qu'entendez-vous faire?
M. Brlsson: Du côté du marketing, nous devons avouer
que cette activité n'était pas extrêmement
développée au cours des dernières années. Il faut
bien penser au cadre général, du côté
hydroélectrique, le marketing était limité pratiquement au
client que nous avions; on a remarqué que nous avions à peu
près un seul client. L'activité au naval était tellement
élevée que la fonction marketing proprement dite n 'avait pas sa
place et enfin, du côté des wagons, nous étions
plutôt limités au marché canadien et encore, c'était
une activité limitée.
Cependant, dans ce que nous avons ici, ce plan nécessite la mise
en place d'activités de marketing très bien orientées et
bien pensées. Tous les plans d'action qui vont découler de la
mise en oeuvre de ce plan n'ont pas été définis dans le
document qu'on vous a remis, mais la nécessité d'organiser, dans
chaque division, une force de marketing est reconnue et va être mise en
place dès que nous passerons à l'action... (16 h 15)
M. Martel: II y a un petit point... Vous avez parlé tout
à l'heure de cadres. Cela m'amène à parler de
l'administration, des frais généraux, du personnel cadre. Je
constate encore là il n'y a que quelques lignes, c'est un
résumé, vous allez me dire à la gestion d'une
entreprise, c'est tout de même capital, que cela se résume
à peu près à cinq lignes dans le document. Il reste une
chose, on parlait de cadres tout à l'heure. Sur 3500 employés de
Marine Industrie, il y a 380 cadres pour 3120 employés non cadres.
Est-ce une proportion que l'on retrouve dans une entreprise privée
semblable? Par exemple, à Lauzon, l'entreprise privée, est-ce
qu'on retrouve autant de chefs que d'Indiens?
M. Brlsson: De façon générale,
évidemment là on parle d'un ratio de un à dix, ces
chiffres sont difficiles à établir. Nous avons regardé
dans plusieurs autres compagnies et il y a plusieurs compagnies où, par
exemple, le rapport cadre à employé est même de un à
quatre. On a relevé combien... A un moment donné on est
arrivé à...
M. Martel: Est-ce que vous pourriez me donner des exemples de
compagnies privées qui sont dans le même domaine de la
construction navale, avec des ratios...
Une Voix: Je regrette, dans la construction navale, je ne peux
pas donner de comparaison, je n'en ai pas.
M. Martel: Est-ce que vous connaissez le ratio de Lauzon?
Une Voix: Non, je ne connais pas. M. Martel: Pourtant ce
n'est pas loin.
Une Voix: Oui, ce n'est pas loin, mais il y a des
informations...
M. Coulombe: On ne lit pas leurs états financiers à
tous les mois.
M. Martel: Non? Toujours dans le même domaine, les frais
généraux, par exemple, c'est drôlement important, on
constate qu'il y a 12,8% des frais généraux qui sont de 36...
Vous avez une réponse au ratio?
M. Brlsaon: M. le Président, M. Bourdon, le directeur
général de la division me parle d'un chantier naval aux
Etats-Unis qui a de grands succès, Newport News et il me dit que le
rapport est le même. C'est-à-dire que c'est un ratio de 1 à
10 cadres à employés.
M. Plessls-Bélalr: II y a quelqu'un qui me dit, M. Martel,
qu'à Davie Shipbuilding il y a 380 cadres pour 1700 employés,
alors... Ah bon, je m'excuse. C'est le président du syndicat.
M. Martel: D'accord. La même question...
M. Brlsson: Je voudrais mentionner aussi que si on veut obtenir
les effets des programmes que nous mettons en place, il reste tout de
même que nous avons besoin de cadres très bien placés et
très bien expérimentés et bien entraînés pour
pouvoir faire les recherches, mettre sur place les bases nécessaires
pour faire l'expansion. Tous les nouveaux produits que nous recherchons sont
des produits à plus haute technologie, qui demandent justement des
techniciens et des ingénieurs additionnels et c'est une tendance qu'on
devra même remarquer, à mesure qu'on veut augmenter le niveau de
technologie de toute industrie, ce ratio va avoir tendance à diminuer si
on dit que ça va passer de un à dix, de un à huit, et
à ce moment-là, il y a des précautions à prendre,
parce que les frais généraux sont dispendieux, mais tout de
même, les nécessités d'avancer dans le domaine
technologique sont telles que ce ratio va changer.
M. Martel: Ce qui arrive, chaque fois qu'il y a des
réductions de personnel, on voit rarement les cadres mis à pied,
ce sont surtout évidemment les
employés non cadres qui sont remerciés. Cela se fait de
façon régulière.
M. Coulombe: Là-dessus, il faut dire que depuis un an
à Marine Industrie il y a eu un effort réel fait exactement dans
le sens de la question que vous posez. En août 1978, il y avait 425
postes de cadres à Marine Industrie. Au moment où l'on se parle,
il y en a 381. Donc, le nombre de postes de cadres est passé de 425
à 381 au cours de l'année qui s'est écoulée. Je
pense que c'est un effort réel pour couper vraiment dans les frais
généraux. Cela n'a pas été facile, parce que cela a
touché aussi des individus personnellement, non seulement des postes.
C'était là l'effort de Marine Industrie pour assainir ses frais
généraux. C'est un effort réel, c'est quand même 10%
de coupure dans les frais généraux au niveau des cadres.
M. Martel: Une autre question, si mes collègues me le
permettent encore, dans les frais généraux. Souvent je lis les
rapports financiers de compagnies privées et je regarde les chiffres que
vous avez omis de mettre, je pense, à la page 32, mais que j'ai
calculés moi-même. Dans les frais généraux qui sont
de $36,7 millions, vous avez un montant de $4 700 000 qui représente
12,8% consacré à la direction. Je trouve ça un peu
élevé comparé à des entreprises privées dont
je peux vérifier les bilans, à l'occasion.
M. Plessis-Bélair: La question porte sur les frais
généraux corporatifs de $4 700 000?
M. Martel: C'est ça. Dans les frais
généraux,il est question du naval, de l'hydro-électrique,
des wagons divers, direction, ce qui donne $36 700 000, les frais de direction
représentent 12,8% de ces $36 700 000, donc $4 700 000. Je trouve
ça élevé pour une entreprise.
M. Plessis-Bélair: Ce sont les frais de financement, les
frais pour les services de comptabilité, d'informatique, ce sont les
frais de siège social ou du bureau de la direction, les frais du service
du personnel, service de main-d'oeuvre. Il y a 150 centres de coût qui
sont impliqués dans ce poste. C'est l'organisation corporative de la
compagnie.
M. Martel: Vous ne trouvez pas que c'est élevé,
12,8%, alors qu'on voit des entreprises qui fonctionnent à 6% ou 7%?
M. Plessis-Bélair: Par rapport au chiffre d'affaires ou
par rapport au total?
M. Martel: Oui, par rapport aux frais généraux.
M. Plessis-Bélair: Oui, mais vous me dites que c'est 12,7%
des frais généraux.
M. Martel: Non, 12,7% du total de $36 700 000 qui
représente les frais généraux.
M. Plessis-Bélair: C'est ça, c'est par rapport aux
frais généraux. Je pense que les pourcentages auxquels vous
faites référence, ce sont surtout des pourcentages qu'on voit en
termes du chiffre d'affaires.
M. Martel: Non, non, qui se rattachent également aux frais
généraux d'une entreprise privée.
M. Plessis-Bélair: Je ne trouve pas cela exorbitant.
M. Martel: Moi, je trouve ça un peu fort, ces
chiffres.
M. Plessis-Bélair: Basé sur quoi, M. Martel?
M. Martel: Je ne sais pas, je me demande s'il n'y a pas un
laisser-aller dans ce domaine, s'il n'y a pas un redressement à faire;
vous avez diminué le nombre de cadres, je me demande s'il n'y aurait pas
possibilité de faire la même chose au niveau de la direction.
M. Plessis-Bélair: II y a toujours moyen, la direction a
changé quatre fois en cinq ans.
M. Martel: On fait du redressement ou on n'en fait pas.
Vous avez parlé aussi du siège social tout à
l'heure, pourquoi le siège social est-il à Montréal au
lieu d'être à Sorel ou Tracy?
M. Plessis-Bélair: Le siège social est à
Sorel, le siège juridique est à Sorel.
M. Martel: Non, il est à Montréal.
M. Plessis-Bélair: II y a un bureau à
Montréal. Le siège social est à Montréal.
M. Martel: Pourquoi est-il à Montréal au lieu
d'être à Sorel ou Tracy?
M. Plessis-Bélair: II faudrait demander aux anciens
présidents de Marine Industrie, M. Martel.
M. Martel: Je vous le demande à vous, vous êtes
là, c'est à vous à redresser ces choses.
M. Plessis-Bélair: Présentement, la direction de
Marine Industrie a ses bureaux à Sorel.
M. Coulombe: II faut vous dire que dans la dernière
année, il y a une transformation, qui s'est faite là-dedans, on
n'a pas cru bon d'entrer dans ces détails. Mais, d'une façon
très claire, le bureau de Montréal, il y a une entente avec la
SGF et il y a deux personnes de Marine dans les bureaux de Marine à
Montréal.
M. Tremblay: II n'y a personne de Marine à la SGF?
M. Coulombe: Non, au bureau de Marine à
Montréal.
M. Tremblay: Au bureau de Marine.
M. Coulombe: M. Martel parle des bureaux de Marine à
Montréal.
M. Martel: Ce sont des bureaux qui coûtent tout de
même assez cher d'entretien, avoir ce siège social à
Montréal alors que l'action se passe à Sorel.
M. Coulombe: II y a une entente financière entre la SGF et
Marine pour l'utilisation de ces bureaux.
M. Brlsson: C'est effectif cette année, alors cela ne
paraît pas dans les chiffres de l'an passé que vous avez devant
vous.
M. Martel: Je laisse la chance à mes collègues, je
reviendrai tout à l'heure, sur une autre division.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
Relations entre Marine et le gouvernement
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je voudrais poser
quelques questions sur les aspects financiers qui impliquent les relations
entre Marine et le gouvernement. Vous me corrigerez si je fais erreur, au mois
de décembre, le gouvernement a fourni une garantie de $104 millions,
garantie qui sera effective possiblement plus tard, lorsqu'on saura quel va
être le prix que Marine obtiendra pour les bateaux panaméens. En
plus, il y a eu $10 millions en subvention, c'est pour 1979, je pense, ou pour
1978?
M. Plessis-Bélair: Pour 1978.
M. Raynauld: $10 millions en subvention pour réduire le
coût des bateaux panaméens, pour réduire cette dette
à $104 miIIions. Ensuite, en vertu du même projet de loi, vous me
préciserez ça, la SGF a reçu du capital-actions de $10
millions pour cinq ans; c'est la SGF, ce n'est pas Marine, c'est ça?
Et, en plus, il y a eu un prêt de $8 millions à Marine
Industrie, pour compenser les intérêts à payer sur les
pertes. Cela veut dire que, pour Marine Industrie en tant que telle, $122
millions, si je comprends bien la garantie ont été donnés
à Marine Industrie, pour le problème des bateaux
panaméens.
M. Coulombe: Vous supposez que les bateaux ne sont pas vendus,
mais qu'ils sont donnés?
M. Raynauld: Oui, comme je l'ai dit tout à l'heure, je dis
que ces $104 millions sont dans une catégorie à part.
Je veux clarifier ces choses pour ne pas faire d'erreur
d'interprétation. L'objet de mes questions, ce n'est pas cela. L'objet
de mes questions, ce sont les fonds supplémentaires qui seraient
nécessaires à Marine Industrie. C'est cela qui m'intéresse
à l'heure actuelle. Je veux savoir, dans quelle mesure, lorsque vous
nous dites qu'il faut, dans un certains sens, effacer le problème des
dettes relatives aux bateaux, il faudra des subventions ou des paiements
supplémentaires, de la part du gouvernement. Je veux en arriver à
cela, parce que là, on tourne un peu autour du pot. On dit: II faut que
les finances se clarifient, il faut que Marine Industrie se débarrasse
de ce poids qu'elle traîne à l'heure actuelle.
Si je comprends bien, de ce côté-là, il y a un fonds
de roulement négatif, de $11 700 000, à la fin de 1978. C'est
évidemment relié aussi aux bateaux. Mais il va falloir un
financement de ces $11 700 000. Ensuite, vous vous attendez à avoir une
perte supplémentaire d'environ $17 millions, à l'heure actuelle,
pour les bateaux polonais.
A ce moment-ci, si on vous suit et qu'on essaie de tirer les
conséquences de ce que vous avez dit jusqu'à maintenant, si vous
voulez que le plan de redressement fonctionne, sans ce boulet, est-ce exact de
penser qu'il faudrait $25 millions supplémentaires de la part du
gouvernement? Oui ou non?
M. Plessis-Bélair: Le montant de $17 millions que vous
mentionnez pour les bateaux polonais a déjà été
pris en considération à la fin de l'année. Il ne doit pas
être pris une seconde fois en considération. A la fin de 1978, on
a pris les réserves et les provisions requises pour tenir compte des
pertes, non seulement des pertes encourues à la fin de 1978, mais des
pertes qu'on estime devoir encourir au cours des années 1979 et 1980.
Donc, les bateaux polonais, dans la mesure où les pertes finales seront
de $17 800 000, n'auront plus de conséquence financière ou
comptable sur les états financiers de Marine Industrie.
M. Tremblay: J'aimerais demander la permission du
président de m'absenter quelques minutes pour aller rencontrer la
chambre de commerce et je reviens à l'instant même, après
avoir rencontré cette délégation.
Le Président (M. Lefebvre): Vous êtes
excusé.
M. Raynauld: Vous nous avez dit aussi qu'à ce
moment-là, au mois de décembre, au mois de novembre, quand on
parlait de cela, vos estimations n'étaient pas de $17 millions. Elles
étaient bien inférieures à cela. Dans quelle mesure
dites-vous que cela n'affecterait pas le montant que vous devriez recevoir pour
assainir la situation financière de Marine Industrie? Si vous voulez, je
peux bien poser la question plus générale: Combien faut-il pour
que vous puissiez dire que le gouvernement a fait en sorte qu'il a
effectivement éliminé le problème des bateaux, sur le plan
financier?
M. Plessis-Bélair: II y a différentes façons
d'aborder le problème. On a fait, à un moment donné, une
analyse de projection pour être en mesure de savoir s'il serait plus
rentable pour le gouvernement de vendre les bateaux $10 millions U.S.
aujourd'hui, d'absorber la perte immédiatement, ou d'attendre, dans
l'hypothèse d'une augmentation éventuelle des prix de vente des
bateaux. (16 h 30)
La conclusion à laquelle on est arrivé, lorsqu'on a fait
cette analyse, c'est que les chances indiquaient ou les projections indiquaient
qu'à cause de l'augmentation des taux d'affrètement, il semblait
préférable d'attendre et de supporter les charges
financières présentement plutôt que de vendre au prix qu'on
aurait pu obtenir il y a trois mois et demi ou quatre mois lorsqu'on a fait
cette analyse.
Pour essayer de répondre le plus précisément
possible à votre question, cette année, cela va coûter
à Marine Industrie de $6 000 000 à $6 500 000 de ses propres
ressources financières, de ses propres profits, pour supporter les
navires panaméens. Si les conditions qu'on a décrites pour 1980
se réalisent, c'est-à-dire qu'on reste pris avec les six bateaux,
qu'on a un financement de douze ans à 9% et qu'on obtient les
mêmes résultats des contrats de gestion qu'on a en vigueur
présentement, l'an prochain, pour ces six navires-là, le
coût sera de l'ordre de $4 500 000 à $5 000 000. Là, la
décision qui est à prendre par le bailleur de fonds, c'est de
dire: Si on veut régler le problème de Marine Industrie, est-ce
que c'est mieux d'essayer d'avoir un prix de vente aujourd'hui pour que Marine
Industrie n'ait pas à encourir ces frais-là, parce que, si Marine
Industrie ob-bient les $17 350 000 et qu'il n'y a plus de poids financier pour
Marine Industrie... ou est-ce que c'est mieux d'attendre une conjoncture
meilleure pour obtenir un meilleur prix de vente des navires? C'est la question
qu'on pose. Malheureusement, je ne peux pas vous chiffrer la réponse
mathématiquement, cela dépend de facteurs qui sont externes
à Marine Industrie comme l'allure du marché, les taux
d'affrètement, les taux d'intérêt, etc.
M. Raynauld: Je suis tout à fait disposé à
vous laisser prendre cette décision-là. Je ne vous ferai pas de
sermon. Vous êtes plus compétents que nous pour en décider.
Je suppose que vous prendrez la meilleure décision. Il reste que, si
vous posez le problème de cette manière-là, en 1979, cela
va coûter de $6 millions à $6 500 000, suivant votre estimation
actuelle. Elle est sujette à toutes les hypothèses habituelles.
Cela va vous coûter $6 millions à $6 500 000. Est-ce qu'il faut,
oui ou non, ajouter à ce montant-là les $11 700 000 de fonds de
roulement qui est négatif pour vous permettre d'assainir votre situation
financière?
M. Plessis-Bélair: Si on fait un "break even "... Disons
que les dépenses de $6 500 000 sont couvertes par des
bénéfices provenant d'autres sources et qu'on a une
rentabilité zéro à la fin de l'année, on aurait
donc un bilan qui ressemblerait à celui qu'on avait l'an dernier. Si on
fait cette hypothèse et si on enlève l'incertitude des bateaux,
on estime que Marine Industrie devra avoir $15 millions d'emprunts à
long terme pour rétablir sa situation financière et fonctionner
de façon raisonnable. Je pense que cela vous donne un ordre de grandeur.
Nous autres, nous disons: Si l'incertitude quant aux bateaux panaméens
peut être enle- vée, il y a de la place dans le bilan de Marine
Industrie pour être en mesure de justifier cet emprunt de $15 millions,
ce qui aurait pour effet de régler ou de passer d'un déficit de
fonds de roulement de $11 millions à un surplus de fonds de roulement de
$4 millions, ce qui est loin d'être une panacée, mais c'est
certainement un point de départ qui permettrait plus de
flexibilité que présentement.
M. Raynauld: Oui, mais cet emprunt de $15 millions, ce serait
simplement pour rétablir la situation?
M. Plessis-Bélair: C'est cela.
M. Raynauld: Vous avez dit aussi que, pour commencer votre plan
de redressement, il vous fallait des investissements à court
terme...
M. Plessis-Bélair: C'est cela. M. Raynauld: ... de
$7 millions. M. Plessis-Bélair: Oui.
M. Raynauld: C'est ce que vous nous avez dit tout à
l'heure, plus un autre million pour la recherche et le développement.
Cela fait donc $8 millions. Vous avez besoin de financer ce montant-là
aussi. Ce seraient des emprunts, finalement, qui seraient plus
élevés que $15 millions?
M. Plessis-Bélair: Oui, ou cela pourrait être aussi
une rentabilité.
M. Raynauld: Accrue.
M. Plessis-Bélair: Si on enlève l'hypothèse
qu'on a faite dans le plan de redressement, c'est qu'en 1980, il y a une
rentabilité qui est à l'horizon, dans la mesure où il n'y
a pas de bateaux panaméens qui nous pendent au bout du pied. Par cette
rentabilité-là, on peut s'autofinancer par les profits qu'on va
susciter et obtenir un financement additionnel. Les montants dont on parle de
$7 000 000 à $8 000 000, sont des montants qui ne sont pas impossibles,
selon notre évaluation.
M. Raynauld: Quand vous estimez regardez votre bilan
que les bateaux panaméens vous posent des problèmes
considérables, est-ce que c'est parce que les emprunteurs
éventuels peuvent penser que $104 millions de la part du gouvernement,
ce n'est pas suffisant?
M. Plessis-Bélair: Non, ce n'est pas cela. La raison pour
laquelle il y a...
M. Raynauld: II y a une garantie que vous avez reçue de
$104 millions. Il n'y a pas beaucoup d'entreprises qui pourraient se
féliciter d'avoir une garantie sur des pertes de ce genre.
M. Plessis-Bélair: En effet.
M. Raynauld: Pourquoi est-ce si lourd à porter?
M. Plessis-Bélair: Le problème, c'est que c'est
beau d'avoir une garantie, mais il va falloir qu'à un moment
donné, cette garantie vienne à jouer. Si elle joue dans cinq ans,
pendant ce temps, Marine aura dû payer les Intérêts sur ces
$104 millions, ce qu'elle fait présentement et ce qui lui cause des
problèmes. L'incertitude ne vient pas du fait qu'il y a une garantie.
Elle vient du fait qu'au moment où cette garantie va permettre à
Marine de régler la question panaméenne, cela pose une
incertitude. Dans cette période, il y a des coûts qui sont une
certitude, c'est-à-dire qu'il y a des coûts
d'intérêts qui doivent être supportés.
M. Raynauld: Les coûts d'intérêts, vous nous
en avez parlé tout à l'heure. Ils sont inclus dans les $6
millions.
M. Plessls-Bélair: C'est cela.
M. Raynauld: Les $6 500 000 pour le coût, pour supporter le
poids des bateaux, sont déjà inclus là-dedans. A ce
moment, on ne parle plus de $100 millions, on parle de $6 millions. Ces $6
millions, vous...
M. Plessls-Bélair: Oui, mais si cela dure cinq ans et que
le prêteur se dit: Les bénéfices anticipés dans les
autres divisions vont servir, non pas à faire des investissements et
à être plus rentables, non pas à remettre la division
navale sur pied, mais à payer des intérêts ou un manque
à gagner à cause des six bateaux, il va être assez
hésitant à avancer les fonds, parce qu'il va se dire: Je ne suis
pas sûr d'être remboursé de mon capital. Il va
peut-être y avoir $30 millions qui vont servir à supporter un
déficit relatif aux bateaux panaméens.
M. Raynauld: Est-ce que vous avez déjà
approché des prêteurs éventuels pour connaître leurs
réactions, suivant le bilan, comme celui que vous avez?
M. Plessis-Bélair: L'an dernier...
M. Raynauld: Ce n'est pas un bilan qui est si mauvais que cela,
une fois qu'on enlève les bateaux panaméens. Il y a encore les
bateaux polonais qui me posent des problèmes, mais les autres...
M. Plessis-Bélair: Oui. On a approché effectivement
des prêteurs à long terme. Ils sont en train d'analyser. On leur a
fait une présentation. Le 12 juin, on va connaître les conditions
qu'ils poseraient pour nous donner un financement de $15 millions, notre
demande étant d'avoir un emprunt de ce montant à terme sur dix
ans. Je ne peux pas vous dire exactement aujourd'hui quelles sont ces
conditions, mais je suis sûr qu'il va y en avoir.
M. Raynauld: Oui. Quelqu'un d'entre vous a fait allusion à
la possibilité que la SGF ait des placements ou vienne en aide à
Marine. Je voudrais explorer cette possibilité. Le président de
la SGF est là. Cela m'étonne un peu, parce que compte tenu des
pertes que Marine a faites cette année la SGF n'a pas beaucoup de
ressources additionnelles à disposer si je comprends bien, puisqu'au
total, la SGF a également fait des pertes de $14 millions. Evidemment,
on additionne les choses. Il y a quand même One perte nette globale de
$14 millions pour la SGF. Comment la SGF pourrait-elle... Sous quelle forme la
SGF pourrait envisager...
M. Coulombe: II ne faut pas oublier que la loi 108 a quand
même donné $65 millions de capital à la SGF.
M. Raynauld: Oui, sur cinq ans. C'est cela, les $10 millions par
année?
M. Coulombe: Oui, c'est cela. Vous avez raison de...
M. Plessis-Bélair: II reste que la question que vous posez est
valable, parce que si vous regardez également les états
financiers, la SGF a déjà Investi $33 millions,
c'est-à-dire $31 335 000 plus $2 820 000 dans Marine Industrie. Comme il
a été mentionné, le rendement financier a
été inexistant au cours des dix dernières années.
Avant de mettre des fonds additionnels, il y a des questions à se poser,
comme tout investisseur prudent.
M. Coulombe: II faut ajouter aussi que ces investissements vont
être en concurrence avec d'autres projets auxquels la SGF travaille
à l'heure actuelle, où les rendements...
M. Raynauld: II y aurait des grosses chances qu'ils soient...
M. Coulombe: II va y avoir des...
M. Raynauld:... supérieurs à ceux qu'on pourrait
anticiper dans Marine. C'est un peu cela que je voulais vous faire dire, parce
qu'il me semblait qu'il n'y avait pas tellement d'espoir à fonder sur la
SGF, dans les circonstances actuelles, pour trouver une solution au
problème de financement de Marine.
Je voudrais mentionner aussi en passant l'intention de mon
collègue de Richelieu qu'une subvention de $10 millions, comme celle qui
a été versée en 1978, compte tenu des 1800 emplois qui
existent dans la section navale, ça représente $5500 par
employé. C'est un petit peu plus, je pense, que ce qu'il nous
adonné comme impression tout à l'heure.
M. Martel: Le calcul que j'ai donné, j'ai diminué
les pertes évidemment. C'est un calcul qui ne tenait pas compte des
pertes de Marine et cela arrivait justement à des subventions de $1150
par employé, si on ne tient pas compte des pertes.
M. Raynauld: Evidemment, quand on élimine les pertes,
ça paraît toujours mieux.
M. Martel: Mais, tout de même, on peut dire qu'en 1978, les
chiffres ne sont pas de $5000 si on calcule tout, mais de $37 714 par
employé, si on calcule les pertes avec les subventions du gouvernement.
Lorsqu'on parle des subventions, de l'aide apportée à la
Société générale de financement, je parle des
subventions de $10 millions, des prêts de $18 millions, des garanties sur
les bateaux de $17 350 000 pour les six navires panaméens, ce qui donne
un total de $132 100 000. C'est là que je parle de subventions globales,
compte tenu de quelque $37 000 par employé que ces subventions donnent.
Mais si on enlève les pertes, ça arrive à un montant de
$1115. C'est moins cher que de payer $5000 ou $6000 de bien-être social
ou d'assurance-chômage.
M. Raynauld: Mais, ce que j'essaie de vous suggérer, c'est
que vous ne pouvez pas enlever les pertes de l'entreprise pour calculer combien
ça coûte pour maintenir les emplois. C'est justement à
cause des pertes que ça coûte quelque chose pour maintenir les
emplois. Quand il n'y a pas de pertes, ça ne coûte rien à
la société pour maintenir les emplois, bien au contraire.
M. Martel: Vous, qui êtes économiste... M.
Raynauld: C'est une bonne chose.
M. Martel: ...vous savez qu'on peut calculer avec pertes et sans
pertes.
M. Raynauld: Ah, bien oui, je comprends bien et vous pouvez faire
dire n'importe quoi aussi aux chiffres.
M. Martel: Cela ne vous arrive pas parfois de dire n'importe
quoi?
M. Raynauld: Non, j'essaie de dire les choses aussi exactement
que possible. Parfois, on peut se tromper, mais...
Une Voix: Dieu merci!
M. Raynauld: Pour revenir donc à ma question de base, si
je puis me permettre d'essayer de résumer ce que vous nous dites, le
poids des bateaux, finalement, ça se résume à $6 000 000,
$6 500 000.
M. Plessls-Bélair: Cette année.
M. Raynauld: Cette année, 1979. L'année prochaine,
on n'en sait rien, ça va dépendre des solutions qui seront
apportées, c'est ça? Mais là, sur la base de ce qu 'on
sait, c'est à peu près $6 000 000?
M. Plessis-Bélair: $6 000 000 à $6500 000.
M. Raynauld: C'est ça qu'est le poids. M.
Plessis-Bélair: C'est ça...
M. Raynauld: Bon!
M. Plessis-Bélair:... après une subvention de $8
millions.
M. Raynauld: Après une subvention de $8 millions, mais une
subvention dont le renouvellement n'est pas promis à l'heure
actuelle?
M. Plessis-Bélair: Non.
M. Raynauld: Bon! Cela clarifie, je pense, les choses pas mal. On
parle là d'une somme d'environ $6 millions, compte tenu
évidemment des subventions qui ont déjà été
faites, qui ont déjà été versées, mais
ça, c'est du passé. Je n'ai pas à tenir compte des pertes
à venir sur les bateaux polonais quand je dis une chose comme ça,
$6 millions.
M. Plessis-Bélair: Ce que je vous ai dit, c'est que dans
la mesure où les pertes demeurent à $17 800 000, vous n'avez pas
à tenir compte de ces pertes.
M. Raynauld: On n'a pas à tenir compte de ça.
M. Plessis-Bélair: Elles ont été
"provisionnées" à la fin de l'année 1978. S'il
s'avérait que les pertes étaient de $19 millions, il y aurait
$1200 000 additionnels à ajouter.
M. Raynauld: Maintenant, sur un plan d'affaires, est-ce que c'est
une bonne chose d'emprunter, par exemple, $15 millions à long terme pour
reconstituer votre fonds de roulement?
M. Plessis-Bélair: Cela dépend des taux
d'intérêt. Présentement le "prime" est à 12% et on
peut emprunter à long terme à un taux inférieur à
12%.
M. Raynauld: Oui.
M. Plessis-Bélair: Je pense que vous avez certainement
plus de raisons... Vous êtes capable d'expliquer ça certainement
mieux que moi. Mais je pense que la compagnie n'a pas le choix, de toute
façon...
M. Coulombe: Et, deuxièmement..
M. Plessis-Bélair:... elle doit se reconstituer un fonds
de roulement.
M. Coulombe:... les investissements qui ont été
faits à Marine depuis quelques années ont été faits
à même le fonds de roulement. Alors, c'est de rétablir une
situation saine. (16 h 45)
M. Raynauld: Parce que vous comprenez pourquoi je vous pose cette
question. Pour ma part, ce que je veux savoir comme parlementaire, c'est si,
dans six mois, vous allez revenir ici et dire: Ecoutez, il n'y a pas de
solution. Pour lancer notre plan de redressement dont vous sembliez très
fiers et très
satisfaits, pour le lancer, il faut que le gouvernement nous donne une
subvention supplémentaire de $10 rnillions ou un prêt de $15
millions, etc. C'est ce que je veux savoir de vous, parce que, nous, nous
sommes des parlementaires ici et c'est ce qui nous intéresse. Moi, les
décisions administratives, je suis prêt à vous les laisser,
parce que c'est vous qui êtes compétents pour en parler, mais
j'essaie de regarder quelles sont les implications pour le gouvernement
éventuellement.
M. Coulombe: Notre position, c'est qu'on veut tout faire pour ne
pas en arriver à cette étape. Toutes nos hypothèses sont
basées sur le fait qu'on ne reviendra pas pour demander ça. On
admettra que c'est toujours dangereux de dire "jamais", mais tous nos efforts,
toutes nos hypothèses de travail vont dans le sens qu'il faut que Marine
se sorte de ce bourbier par ses propres moyens. On pense que les
investissements qui ont été faits là-dedans, surtout avec
la loi 108, donnent la base, une base fragile, mais, après avoir dit
ça, je ne peux pas dire que jamais il n'y aura de demande. Mais toutes
nos hypothèses vont dans le sens qu'il n'y en ait pas.
M. Martel: En passant, si le Parti libéral s'était
vraiment occupé de la Société générale de
financement, de 1970 à 1976, on ne serait peut-être pas ici en
train de faire adopter des lois. S'il s'était occupé de
l'administration de Marine et de la Société
générale.
M. Raynauld: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Raynauld: ... quand le député dit ça, la
seule solution à laquelle j'aurais pu penser, c'est qu'il soit
nommé président de la SGF. Il avait les solutions tout à
l'heure...
M. Martel: J'aurais certainement fait mieux que ceux qui sont
passés là en 1972 et 1973...
M. Raynauld: Sûrement. Je n'en ai aucun doute!
M. Martel: Alors qu'on ne savait même pas où
étaient les présidents.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs, on s'éloigne!
M. Gagné (Richard): M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Oui, monsieur?
M. Gagné: Pouvez-vous me dire à quelle heure les
syndicats vont pouvoir intervenir? On remarque que M. Rodrigue Tremblay a
quitté la salle. Sera-t-il de retour?
Le Président (M. Boucher): A 17 heures, m'a-t-on dit.
M. Gagné: A 17 heures?
Le Président (M. Boucher): Oui, je l'avais annoncé
au début de la réunion, parce que...
M. Gagné: Peut-on tenir pour acquis qu'à 17 heures,
quand M. Tremblay reviendra, nous aurons le droit de parole?
Le Président (M. Boucher): Vous pouvez l'avoir tout de
suite, s'il y a des questions qui vous concernent, monsieur.
M. Gagné: On va attendre que M. Tremblay soit là
et, à 17 heures, on interviendra.
Le Président (M. Boucher): D'accord.
M. Raynauld: M. le Président, j'avais terminé cette
série de questions, je pense que je vais repasser la parole à mon
collègue, qui voulait précisément poser des questions aux
syndicats.
Le Président (M. Boucher): II y avait les
députés de Huntingdon et de Duplessis qui avaient demandé
la parole. Je vous ferai remarquer que je fais la rotation. M. le
député de Huntindgon.
M. Dubois: Merci, M. le Président. J'ai bien l'impression
qu'on tourne un peu en rond depuis le début de la commission, même
si j'ai manqué quelques minutes. Je crois bien que le but ultime de
cette commission est de trouver une solution à moyen et à long
terme pour la survie de Marine. A court terme, on sait qu'il y a un
problème majeur, qui implique peut-être pour le gouvernement
d'investir des fonds immédiatement, afin que Marine puisse vivre dans un
contexte financier plus viable.
M. Coulombe: Si je puis me permettre, M. le député,
l'objectif précis, c'est que la loi 108 dit à Marine: Vous allez
présenter, avant le 1er juin, un plan de redressement. Le plan est sur
la table; ce plan ne demande, pour le moment, rien au gouvernement.
M. Dubois: D'accord.
M. Coulombe: II n'y a pas d'investissements qui sont
demandés au gouvernement dans ce plan.
M. Dubois: II n'assure quand même pas la survie de Marine
en ce qui a trait à la construction navale. J'enlève les autres
secteurs, qui sont rentables, mais si je touche strictement à la
construction navale, il n'y a pas de solution à moyen et à long
terme, on ne peut pas s'assurer présentement, nous basant sur le
document que vous avez présenté, que, dans cinq ans, on sera
encore dans le marché de production de navires, ici, au
Québec.
Si on regarde les interventions qui ont été faites par
d'autres pays, comme exemple, la France où on supporte
financièrement l'inflation,
on supporte aussi les coûts de production à 50% si
on considère qu'un contrat qui prendrait environ deux ans, pourrait
être supporté à presque 70% du coût du navire, est-ce
que le Québec ou le Canada ou les deux ensemble peuvent se permettre
d'intervenir jusqu'à ce point dans la construction navale, dans le
contexte actuel? Je ne sais pas quel va être le contexte dans dix ans.
Est-ce que le dumping va continuer? Parce qu'un c'est un vrai dumping à
ce moment. Un armateur canadien peut acheter un bateau produit en France et il
va lui coûter 30% du coût réel finalement, si on regarde le
portrait?
M. Coulombe: Vous admettrez que, la réponse à votre
question, seuls les gouvernements peuvent la donner.
M. Dubois: Oui, mais la réponse aux problèmes de
construction navale, à moyen et long terme, n'est-ce pas une
intervention gouvernementale ferme et précise, ou si on fait une
intervention annuelle et qu'on dit: Peut-être va-t-on vous donner 5%
d'aide, peut-être va-t-on vous donner une subvention additionnelle?
Est-ce qu'on assure une survie de Marine par des interventions annuelles ou un
programme...
Je comprends que la loi 108, c'est un programme sur cinq ans, mais
ça n'assure pas la survie de Marine Industrie en ce qui a trait à
la construction navale. Est-ce qu'il y a lieu de l'abandonner ou non? Le
député de Richelieu a fait état tout à l'heure des
problèmes sociaux qu'entraînerait la fermeture des chantiers de la
construction navale plus particulièrement. Si, pour l'Etat, c'est
primordial qu'on garde 100% des employés qu'on a présentement, il
va falloir que bientôt le gouvernement prenne une décision avec le
gouvernement canadien parce que je pense que les deux gouvernements
devraient intervenir là-dedans, ils sont en cause tous les deux
pour qu'on supporte cette industrie à 50% ou à 60% ou à
70%, si on veut être concurrentiel sur les marchés, ou qu'on
lâche complètement. Je pense qu'il n'y a pas bien des options, il
y en a deux. On lâche ou on met le paquet dedans, en ce qui a trait
à la construction navale. Il ne semble pas quand même qu'à
courte échéance, on puisse dire: Ce sera rentable dans cinq ans
ou dans dix ans. Les perspectives d'avenir ne semblent pas plus brillantes
qu'il ne le faut. Si on regarde le Brésil, qui a quand même
augmenté de beaucoup sa participation dans la construction navale, la
main-d'oeuvre est de beaucoup inférieure, ces gens ont les
matériaux, l'acier nécessaire. Je ne pense pas que ce soit
très brillant pour le Québec présentement. C'est une
intervention gouvernementale massive qui peut régler le
problème.
Il s'agit maintenant que le gouvernement actuel, comme c'était le
cas pour le gouvernement précédent je pense, sans accuser
de formation politique prenne une décision bientôt sur
l'avenir de notre industrie navale au Québec. Si on met le paquet, il
faut le mettre jusqu'au bout pour rendre Marine Industrie concurrentielle sur
le marché mondial, ou on arrête toute la production.
Je voulais vous poser une autre question en ce qui a trait aux deux
traversiers dont le contrat vous fut alloué dernièrement, il y a
trois ou quatre mois, deux ou trois mois, je ne sais trop. Est-ce que cette
construction sera rentable? Prétendez-vous faire des profits sur la
construction de ces deux traversiers? Entrevoyez-vous...
M. Brlsson: Oui, sur les deux traversiers; oui, ils doivent
être rentables.
M. Dubois: Quand vous dites "rentable", dans cette
industrie-là, qu'est-ce que c'est? 5%, 10%?
M. Brlsson: Je vais expliquer. Durant l'année 1980,
où une bonne partie des travaux vont se faire, le contrat lui-même
et les coûts associés à ce contrat seront tels qu'ils
seront moindres que le prix que nous allons en recevoir. Donc, le contrat
lui-même est profitable. Cependant, l'activité à la
division navale sera tellement réduite cette année-là
qu'il n'y aura pas assez d'activités pour payer tous les frais de la
division. Or, durant l'année 1980, nous prévoyons encore une
perte à la division navale, une perte de fonctionnement, même si
le contrat lui-même, qui se termine au mois de mars 1980, en soit, aura
été un contrat qui aura été produit à un
coût moins élevé que les coûts estimés.
M. Dubois: Je comprends très bien que ce n'est pas avec
deux traversiers qu'on peut régler tous les problèmes financiers,
mais, en ce qui a trait strictement à cette production-là, c'est
rentable. C'est la question que je me posais. Etant donné qu'il y a eu
d'autres soumissionnaires, d'autres constructeurs de navires ou de traversiers
qui pouvaient quand même offrir les mêmes services que ceux de
Marine Industrie, cela m'intriguait un peu de savoir s'il y aurait des profits
réalisés dans cette construction.
Je reviendrai tout à l'heure, je n'ai pas d'autres questions pour
le moment.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Huntingdon. M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais, en premier
lieu, remercier Marine Industrie ainsi que les travailleurs de Marine Industrie
qui nous ont permis, vendredi dernier, de regarder combien étaient
efficaces les techniques de Marine Industrie. Premièrement, on sait
qu'il y a des problèmes financiers, c'est sûr et certain. Je pense
que c'est surtout à cause des contrats, on a regardé ça
ensemble et on est tous d'accord sur cette question-là. Je remercie
aussi la direction de Marine Industrie pour avoir présenté son
plan de redressement. On a eu l'occasion d'en discuter quelque peu vendredi
passé et, antérieurement à ça, le syndicat
que je remercie aussi avait présenté certaines
recommandations dans son document "Chantier maritime". A l'intérieur de
ça, je pense qu'il y a lieu de penser que tout le monde fait son effort
pour régler le problème dans les plus brefs délais et pour
que ce problème soit réglé, sinon à long terme, du
moins à moyen terme.
Mises à pied éventuelles
En rapport avec les questions que j'ai posées vendredi,
considérant le fait que le syndicat n'était pas présent,
dû à la réunion à Québec, je voudrais de
nouveau poser une couple de questions que j'avais posées à la
Société générale de financement, soit à M.
Coulombe ou à M. Brisson. Le tout se rapporte aux mises à pied
qui auraient eu lieu dans le plan de redressement, en rapport avec les
personnes qui ont un certain nombre d'années de service, soit à
la page 28 de votre plan de redressement, où on parle de 25 ans à
29 ans de service, de 30 ans et plus. On remarque qu'il y a un total de 353
travailleurs et 269 travailleurs dans le dernier cas, soit celui de 30 ans.
Compte tenu du fait que je vous avais posé la question, à
savoir s'il y aurait possibilité à cause du nombre
d'années, donc, ceux qui ont peut-être 55 ans et plus d'âge,
est-ce que vous avez étudié, conjointement avec le syndicat ou
tout seul, la question de mises à pied en regardant la
possibilité de pension prématurée? C'est la
première question que je vous avais posée, je pense que vous vous
rappelez que je vous l'avais posée à la rencontre de vendredi
dernier.
M. Brisson: Oui, M. le député, nous avons
évidemment considéré la situation, cependant, je dois dire
que les plans de pension de Marine sont très jeunes, c'est-à-dire
qu'ils n'existent que depuis quelques années et à cause de
ça, il y a très peu de personnes qui se sont bâti une
pension suffisante pour réellement prendre une pension
prématurée. Nous avons regardé quels pourraient être
les coûts pour compléter cette pension pour en faire une rente
raisonnable pour quelqu'un qui va à sa pension; ces coûts
deviennent exorbitants.
L'autre point, les règlements que nous suivons, qui sont les
conventions que nous avons signées avec le syndicat, respectent aussi
les lois d'ancienneté. Le privilège d'ancienneté va
s'appliquer totalement sur les mises à pied. Les gens qui sont
là, la plupart de ceux qui ont de longs états de service, dans
les plus hautes séries d'âge, vont vouloir, à cause de
cette situation, demeurer à leur emploi et c'est leur droit selon la
convention.
Nous avons cette difficulté qui rend les coûts
exorbitants.
M. Perron: Merci. Est-ce qu'on me permettrait de poser la
même question au syndicat? Quelle est son impression?
M. Gagné (Richard): Si j'ai bien compris la question, il
s'agit de préretraite. M. Brisson vous mentionne que l'ancienneté
existe à Marine et l'ancienneté prime, c'est exact. Concernant
les préretraites, c'est lancé en l'air, on en a entendu parler il
y a peut-être quatre ou cinq mois, par le premier ministre,
d'après une déclaration qu'il aurait faite qu'à Marine
Industrie, il y aurait possibilité d'avoir des préretraites. Cela
a paru dans les journaux, je ne pourrais pas dire lesquels, mais le syndicat
comme tel sera en mesure de regarder ça.
Comme M. Brisson vous a mentionné, c'est sûr que nos
bonshommes s'en iraient à la retraite, avec un régime de pension
qui a débuté en 1965, les gars y mettaient $0.60 par semaine,
dans le temps, un paquet de cigarettes, aujourd'hui on met $6 par semaine, je
pense que le gars s'en irait avec une maigre pension. Si on peut envisager avec
la compagnie de regarder ça, à tête reposée, une
pension assez valable pour que nos gars s'en aillent à la retraite, on
embarquerait peut-être dans un programme de ce genre.
M. Perron: En rapport avec le document que vous avez remis
à tous les députés, probablement ailleurs aussi, je
présume que ce document, vous l'avez remis à la direction de
Marine.
M. Gagné: Ce document a été
déposé, comme M. Coulombe l'a mentionné, ce matin. On
faisait partie du comité de redressement. On a déposé le
document au comité de redressement et même à
l'intérieur de la brique présentée par Marine, je crois
qu'il y a une note qui en fait mention, je ne pourrais pas dire à quelle
page exactement. Il y a une note...
Une Voix: Page 18. ( 17 heures)
M. Gagné: Je ne voudrais pas dire que vous n'avez pas lu
le document au complet, mais ils en font mention dedans.
M. Perron: Effectivement, je l'ai lu, peut-être un peu en
diagonale à certains endroits.
M. Gagné: Je ne voudrais pas vous mettre en boîte
sur cela, mais ils en font mention.
M. Perron: D'accord. Merci. J'ai d'autres questions, mais,
auparavant, il y a une couple de questions que je voudrais poser au ministre.
Etant donné qu'il n'est pas ici, j'aimerais les poser plus tard, si on
me le permettait.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Duplessis. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. Gagné, qu'est-ce que vous pensez du plan de
redressement?
M. Gagné: Si l'occasion nous est donnée, on aurait
un mémoire à présenter concernant le plan de redressement;
ce mémoire va être commenté, si la commission en dispose,
par André L'Heureux, vice-président de la CSN.
M. Scowen: Voulez-vous attendre l'arrivée du ministre?
M. Gagné: Peut-être que j'attendrais M. Biron. C'est
de cela qu'on avait convenu tantôt. Pas M. Biron, excusez, mais bien M.
Tremblay. Une chan-
ce qu'il n'est pas ici, cela n'aurait pas bien été,
là!
Pour répondre à votre question, sur le plan de
redressement comme tel, on est en partie d'accord. Je peux répondre un
peu. Nous sommes en partie d'accord. Dans le plan de redressement comme tel,
Marine Industrie ou la Société générale de
financement, si vous le préférez, met l'accent sur les wagons et
les turbines. On est en partie d'accord avec cela. Cela va maintenir le statut
des emplois.
Par contre, en ce qui concerne le naval, je pense qu'ils l'ont
laissé aux oubliettes et cela nous fait un peu peur que, dans un avenir
assez rapproché, ce soit un naufrage, si la Société
générale de financement ne fait pas des pressions autant que les
syndicats peuvent en faire à tous les paliers de gouvernement.
Présentement, nous sommes au provincial; dans un avenir assez
rapproché, on va aller au fédéral et on va faire les
pressions possibles. Vous savez ce qu'on recherche, c'est la marine marchande.
Mais il s'agirait que la compagnie, la Société
générale de financement, fasse des pressions plus fortes.
Quand M. Coulombe mentionne qu'il n'y a pas de politique
gouvernementale, c'est bien beau. Mais, depuis 30 ans, 40 ans je ne suis
pas tellement vieux que je sache, à la CSN, ils ont toujours
préconisé une marine marchande. Vers les années
quarante-cinq, on avait une marine marchande canadienne qui a été
abandonnée. Pourquoi? M. L'Heureux va compléter, il est un peu
plus informé que moi à ce sujet. Je ne sais pas si cela
répond à votre question?
M. Scowen: Je vais poser une question à votre grand
penseur, à votre gauche.
M. Gagné: Le terme que vous employez, grand penseur, il ne
faut pas mentionner cela. C'est un vice-président de la CSN.
M. Scowen: Je le dis avec beaucoup de respect, parce que je pense
que le document est important.
M. Gagné: II ne faudrait peut-être pas faire de
personnalités, parce qu'on ne s'entendra pas.
M. Scowen: Non, non. Je le dis avez sincérité
à M. L'Heureux.
M. Gagné: Vous pouvez poser votre question, il va vous
répondre.
M. Scowen: M. L'Heureux, j'ai été frappé, en
lisant le document ici de voir jusqu'à quel point le marché
naval, c'est un marché qui dépend des initiatives et des
décisions canadiennes et internationales. C'est partout dans ce
document. Je ne veux pas entrer dans la question de savoir si le Québec
doit être un pays ou non. Mais il me semble que, dans un cas ou l'autre,
une société d'Etat dans le domaine des chantiers navals, tenant
compte de toutes les contraintes et toutes les contingences qui existent
aujourd'hui dans cette industrie, doit finalement avoir le droit de faire des
affaires sur la scène internationale.
A chaque page, je me disais: Si le Québec était
indépendant, bien sûr, ce serait quelque chose qui devrait relever
de l'Etat du Québec. Mais, si on reste à l'intérieur d'une
fédération, à long terme, c'est très difficile,
d'après moi. Je demande votre opinion: Pensez-vous que c'est une bonne
idée, pour un Etat qui est une province dans une
fédération, de s'occuper, à long terme, de cette affaire?
Ce que je vois, idéalement, c'est que nous prenions notre industrie
hydro-électrique et nos wagons et que nous construisions, dans les
banlieues de Sorel, une nouvelle usine pour ces deux choses et qu'on laisse le
fédéral s'occuper, avec une politique canadienne, de tous les
chantiers navals.
Pour moi, c'est implicite dans le document que vous nous avez
soumis.
M. L'Heureux (André): M. le Président, je m'excuse,
je ne suis pas un penseur aussi brillant que vous peut-être.
M. Scowen: C'est mon opinion.
M. L'Heureux: Je n'ai peut-être pas trop compris le sens de
la question, à savoir si, dans un Québec indépendant, il
serait possible de transiger sur le plan international ou pas ou s'il s'agit
d'une responsabilité exclusivement fédérale ou pas. Je
préférerais que vous me donniez certaines précisions, si
vous le permettez.
M. Scowen: C'est simplement, M. L'Heureux, que, dans le document,
il me semblait que c'était inévitable, que la plupart des
données, que la plupart des décisions qui étaient à
prendre dans les chantiers navals relèvent des problèmes
internationaux et des situations internationales, de la concurrence
internationale, des subventions pour le cabotage, des politiques de cabotage,
des politiques de marine marchande, des navires, de toutes ces choses qui sont
plutôt de nature nationale dans un sens large. Est-ce possible? Est-ce
que vous vous êtes penchés sur cette question, parce que je
trouvais que c'était implicite, non pas explicite, dans ce document? Je
ne veux pas aller trop loin là-dedans, je voulais simplement savoir si
vous aviez une opinion à ce sujet.
M. L'Heureux: Oui, on en a une sûrement. Comme Richard
Gagné, le président du syndicat de Marine Industrie l'a
indiqué, cela fait une trentaine d'années au moins qu'on parle de
cette question. Je devrais dire, au départ, qu'en fait, on est
très heureux de constater qu'une commission parlementaire avec les
partis de l'Opposition consacre des heures à ce problème, parce
qu'on a eu l'impression, dans la longue campagne qu'on a menée sur la
vocation maritime du Canada, parce que nous sommes encore au Canada, qui baigne
autour de trois océans, au Québec, avec un des plus grands
fleuves au monde, on a fortement l'impression... Comme Québécois,
j'ajouterais ceci:
C'est qu'on a oublié dans notre histoire, je pense, que c'est un
peuple effectivement... Si on avait une carte géographique qui
indiquerait la densité de population... C'est remarquable. Moi, le
premier, étant né à quelques pieds du fleuve, je ne me
suis pas rendu compte, avant de travailler avec les travailleurs des chantiers
maritimes, de l'importance de l'aspect fluvial, de l'eau, en fait, dans notre
pays.
D'ailleurs, quand on regarde l'histoire industrielle du Québec
il faudrait peut-être la retracer et la regarder davantage
on constate qu'au XIXe siècle, par exemple, le long du fleuve et
jusqu'en Gaspésie, il y avait des douzaines de chantiers qui longeaient
en fait le fleuve. Cela a toujours eu une importance fondamentale dans
l'économie du Québec.
Or, ce qu'on constate, par rapport à votre première
question, à savoir que la concurrence internationale est primordiale, je
dirais d'abord que le problème est le suivant ou que la question que
l'on pose est la suivante: C'est que tout pays industrialisé ou en voie
d'industrialisation, tout pays industrialisé en fait dans le monde a
toujours estimé que les chantiers navals, la construction navale et le
transport maritime étaient des éléments
stratégiques dans toute politique économique. Le Brésil,
par exemple, est moins avancé que nous, sauf qu'il va sûrement
devenir très puissant. De même pour le Japon. Même la
Suisse, qui n'a pas de mer autour d'elle, a une flotte plus importante que
celle du Canada. Un pays comme les Etats-Unis, auquel on est très bien
intégré, comme vous le savez, reconnaît, par exemple, par
son Jones' Act, que tout le cabotage, puisqu'on a parlé de cabotage, que
toute la navigation intérieure doit se faire sur des navires construits
aux Etats-Unis et maniés par des équipages américains.
Or, au Canada, depuis les accords de Westminster de 1931, on a
malheureusement abandonné le transport fluvial, la construction navale,
notre construction maritime, en fait, à toutes sortes
d'intérêts autres que ceux des Canadiens ou des
Québécois.
Ce qu'il faut, c'est qu'il y ait... Quand je parlais, au départ,
de la sorte de mur d'indifférence que... Ici, on a un comité
exécutif du syndicat de Lévis-Lauzon avec nous, c'est celui de
Marine... Entre nous, quand on se rencontre... Avant que j'en parle, il y a dix
ans, c'était Ted Payne, qui est décédé maintenant,
un vieux routier des chantiers maritimes de Vickers, parce que la CSN
représente tous les principaux chantiers maritimes au Québec.
Je vous le dis très sincèrement, on a toujours senti un
manque de conscience de l'importance de ce secteur sur le plan
économique. Je ne veux pas me lancer, vous le savez... M. Scowen s'en
doute autant que moi, quand on dit qu'un emploi dans les chantiers maritimes en
crée au moins trois autres dans d'autres secteurs industriels. Il s'agit
d'un secteur de l'industrie lourde où le Québec, entre autres,
est très faible. C'est donc très important de le
développer. Je ne veux pas me lancer tout de suite... Est-ce qu'on doit
se lancer dans l'analyse du plan de redressement? Nos chantiers maritimes, si
on les analysait, et on n'a sûrement pas le temps de le faire
maintenant...
L'autre aspect que j'ai pu constater et qui m'a toujours
renversé, c'est que ce sont des usines d'assemblage de pièces,
surtout de fer, et parfois d'acier qu'on importe même parfois. Dans le
cas des Polonais, cela m'a renversé de savoir que, dans le contrat, on
importait l'acier utilisé. Quant au plan technologique, on est d'une
faiblesse, on est dépendant d'un tas d'autres entreprises, surtout
américaines ou d'ailleurs, pour alimenter nos chantiers. Je ne sais pas
si je réponds à votre question.
Pour être concurrentiel sur le plan international, il faudrait
d'abord... Je pense que cela a été mentionné par plusieurs
députés ici, celui de Huntingdon, M. Martel et d'autres. Je sais
que M. Coulombe et M. Brisson, parce qu'on a discuté franchement
là-dessus... C'est pour cela que je vous dis qu'à la CSN,
parfois, on est très brutal, très agressif, parce qu'on ne
partage évidemment pas le point de vue de la direction sur bien des
aspects, quand on met des gens à pied. Sur le plan plus
général, ce qu'on espère et ce que je constate je
vous dis que je suis heureux de cela... Il n'y a pas eu seulement la loi 108.
Aujourd'hui, vous êtes là. Le ministère de l'Industrie et
du Commerce a produit un rapport que j'ai commencé à feuilleter
on ne partage sûrement pas... et j'attends de l'analyser avant de
donner mon point de vue... On sent une prise de conscience inédite
depuis très longtemps au pays. C'est heureux. Tant que des hommes
politiques comme vous et d'autres ne seront pas convaincus... On a fortement
l'impression les faits sont là et les autres syndicats
canadiens des autres provinces partagent notre point de vue, y compris les
syndicats de marins qu'on rencontre, c'est-à-dire que le Canada, depuis
la fin de la guerre, a vraiment ignoré, négligé
systématiquement ce secteur industriel. Je m'excuse de la longue
réponse, mais...
M. Scowen: Non. Vous avez bien répondu. Je comprends bien
le sens de votre intervention. En effet, vous reprochez au gouvernement
fédéral, au gouvernement canadien, de ne pas avoir
préparé une politique cohérente de développement de
tous les aspects d'une politique navale et maritime. Le fait que cela n'existe
pas aujourd'hui est en partie la cause de nos problèmes, si je comprends
bien. Est-ce que vous n'avez jamais lu ou étudié les documents
qui ont été écrits par le fédéral, par le
ministre de l'Industrie et du Commerce fédéral à ce
sujet?
M. L'Heureux: Oui. Non seulement cela, on a des contacts...
M. Scowen: La marine marchande, par exemple?
M. L'Heureux: Oui. Vous savez qu'il y a un comité
d'étude qui a été formé il y a déjà
quelque
temps au niveau fédéral. D'ailleurs, même à
l'Association des constructeurs canadiens, on s'entend sur certains aspects des
politiques élaborées. D'ailleurs, le président du syndicat
de Davie, Clément Fleury, a participé à plusieurs sessions
de ce comité. (17 h 15)
Cependant, je pourrais vous citer des passages d'un ex-ministre, qui ne
voyait pas, par exemple, la nécessité... qui trouvait,
plutôt, que les services de transport commerciaux, maritimes, disponibles
présentement étaient adéquats pour l'économie
canadienne. Là-dessus, on est en total désaccord, quand on sait
que nos exportations et nos importations représentent un peu
au-delà de $2 700 000 000 et qu'à peine 1% de ce qu'on importe et
de ce qu'on exporte est transporté sur des navires construits au Canada
avec des équipages canadiens. Je ne parlerai pas de la flotte du
Canadien Pacifique. On mentionnera tantôt d'autres bateaux aussi
utilisés sur le fleuve ici, par diverses compagnies, diverses
entreprises qui sont installées au Québec et qui battent pavillon
étranger avec des équipages étrangers. Il y a donc un
effort extraordinaire et quand on analyse le plan de redressement qui veut
répondre à un problème immédiat... Il fallait qu'il
y ait une réponse et on est très heureux qu'il y en ait eu une
aussi. Je comprends le dilemme aussi de la direction de Marine comme de la SGF
quant aux politiques générales qui doivent venir de vous et
d'Ottawa. Cependant, on aura à le dire tantôt peut-être, il
va falloir une volongé exceptionnelle, à partir d'une prise de
conscience nouvelle pour tous les Canadiens d'amorcer, de développer ce
secteur. Ce sera très important sur le plan économique,
technologique et stratégique.
Questions générales (suite)
M. Scowen: Merci, M. L'Heureux. En attendant le retour du
ministre, peut-être me permettriez-vous de poser une ou deux questions,
M. Gagné, aux dirigeants de l'entreprise ici. On va attendre
l'arrivée du ministre. Est-ce qu'il me reste quelques minutes? Boni
Je voulais revenir sur la question de l'administration. Dans votre
document, vous avez élaboré huit scénarios, surtout les
scénarios d'aménagement de l'équipement et des
bâtiments, et si je comprends bien, pour le moment, vous n'avez pas
choisi l'un ou l'autre. Ils existent, ces huit et vous allez continuer de les
étudier cette année et l'année prochaine.
Je voulais vous demander... C'est sûr que l'avenir est axé,
à court terme, à moyen terme, au moins, sur la partie la plus
certaine au moins, soit l'hydraulique, l'hydro-électrique et les wagons.
Si on décidait d'abandonner la construction navale, est-ce que les
bâtiments que vous avez et les facilités en général
sont convenables? Est-ce qu'ils sont assez modernes pour que vous puissiez
installer, sur les lieux, une ligne de production moderne et efficace et pour
les wagons et pour les turbines ou s'il serait quand même
nécessaire, à cause de la nature des bâtiments et
l'organisation physique du chantier, afin d'être concurrentiel et moderne
dans le meilleur sens du mot, de construire quelque chose à part et
spécial pour ces deux parties de...
M. Brisson: On a préparé plusieurs
scénarios, M. le député, et, dans ces scénarios, on
fait différentes hypothèses. Les installations couramment
employées par le naval, par exemple, quelques-uns de ces édifices
sont polyvalents, ils pourraient servir à autre chose. D'autres sont
plus difficilement aménageables. Par exemple, lorsqu'on a fait
état, dans la division des wagons, d'investissements de capital pouvant
aller de $9 millions à $13 millions, la différence n'est pas tout
simplement un manque de précision dans l'estimation, mais c'est bien que
selon la situation qui se développera à un moment donné,
si les ateliers du naval sont disponibles parce que le marché n'existe
pas et que nous n'avons pas eu de contrat, à ce moment-là, ces
ateliers pourraient être transformés pour faire des wagons, ou
être transformés pour prendre de l'industriel, ce qui diminuerait
l'investissement nécessaire pour l'industriel ou les wagons. La
décision concernant la façon de procéder est basée
sur l'étude de rentabilité du projet lui-même,
c'est-à-dire que c'est bien beau d'employer une usine, mais si en
l'employant on devient tellement peu efficace que la rentabilité baisse,
ce n'est pas la bonne décision à prendre.
La réponse n'est pas absolument claire. Dans nos
scénarios, nous avons étudié différentes
hypothèses d'emploi de différents ateliers par différentes
divisions à différents temps, selon la disponibilité.
Toujours là, la décision est basée sur la
rentabilité même de l'opération vis-à-vis de
l'investissement capital nécessaire ou non, selon cette
disponibilité.
M. Scowen: Mais, pour le moment, la réponse est que vous
ne savez pas, ça reste à étudier.
M. Brlsson: Je donne un exemple précis: si, en 1980, nous
n'avons pas de construction navale, parce qu'il n'y a pas de contrats qui sont
entrés, il y a un atelier où nous pourrons fabriquer des wagons.
Si, par contre, nous sommes...
M. Scowen: Sur une base concurrentielle, efficace?
M. Brlsson: Peut-être pas aussi concurrentielle que si nous
avions un atelier neuf conçu spécifiquement pour les wagons, mais
certainement, au point de vue financier, plus rentable du fait que nous
n'aurons pas investi une autre somme de $8 millions dans un édifice.
Par contre, si en 1980, nous sommes heureux dans une soumission pour
construire un navire et que cette bâtisse est requise, la division des
wagons aura besoin d'un investissement plus grand pour lui fournir les
facilités pour prendre avantage du marché qu'elle a devant
elle.
M. Scowen: Merci. Au début, dans une partie du rapport qui
touche ces scénarios, vous dites que vous avez développé
un bilan, un profit, un "cash flow" etc., pour chacun. Avez-vous les documents
normaux "cash flow", etc., pour vos activités
prévues pour 1979/80?
M. Brisson: Oui.
M. Scowen: Est-ce que ce sont des documents qu'on pourrait voir?
Pour moi, dans ce programme de redressement, c'est la première chose que
je cherchais dans le document, parce que c'est à partir de là
qu'on développe, qu'on contrôle et qu'on surveille le
développement. Est-il permis, pour les membres de la commission
parlementaire, d'avoir... Il y a le désir de vérifier ce que vous
ferez à l'avenir, mais, de plus, c'est une façon très
efficace de comprendre les questions qui ont été posées
par le député d'Outremont tantôt, à savoir quand et
d'où viendront les fonds nécessaires, comment ils vont
sortir?
M. Coulombe: Le problème que vous posez est très
sérieux, parce que, au conseil d'administration de la
Société générale de financement, ce problème
a été discuté. Les administrateurs de la SGF je
partageais entièrement cette opinion ont refusé justement
que, dans le document synthèse, des chiffres au point de vue des bilans,
au point de vue des marges de profits et au niveau des coûts
réels, au niveau de la position concurrentielle de Marine, soient mis
sur la table pour consommation générale. Cela semblait un
exercice incompatible avec le domaine concurrentiel dans lequel on est, parce
que, sans ça, la réaction du conseil d'administration serait de
dire: Si c'est ça, le conseil d'administration, que la commission
parlementaire devienne le conseil d'administration et elle verra tous les
chiffres. Si un conseil a un rôle à jouer, c'est carrément
de prendre des décisions qui soient jugées au résultat; je
suis totalement d'accord avec ça, mais toute l'infrastructure des
coûts, position concurrentielle, est-ce que nos wagons nous coûtent
moins cher que ceux de la Hawker Siddeley ou est-ce que le bateau untel
coûte moins cher à la Davie ou à la Marine, ce sont des
décisions de nature interne. Je pense que ce serait fausser tout le sens
d'un conseil d'administration que de commencer à distribuer ce genre de
document, sauf dans un domaine où c'est vraiment un monopole absolu. Si
on était dans une situation de monopole absolu, ces chiffres seraient de
notoriété publique, mais dans le domaine concurrentiel, où
vraiment je pense que ça a été mentionné par
M. Biron les marges de profits sont souvent assez minces, commencer
à donner tous ces documents ne nous semble pas compatible avec le statut
de corporation de la SGF.
M. Scowen: Je n'insiste pas, c'est votre droit, mais il vous faut
admettre que, pour nous, recevoir un tel document, c'est un peu un puzzle. Vous
avez un chiffre de ventes ici, une marge de profit là, une
prévision ici, un besoin de fonds là... Il y a tous les
morceaux...
M. Coulombe: Je comprends parfaitement le dilemme. Il faut aussi
mentionner que la loi nous demandait de déposer le plan au gouvernement
pour approbation, ce qui a été fait. Le conseil d'administration
a remis au gouvernement tous les documents dont je fais mention,
c'est-à-dire que, pour la prise de décision, parce qu'il y a eu
une prise de décision de la part du gouvernement concernant ce plan,
tous les éléments y étaient, toutes les annexes que nous
avons ici y étaient. Mais comme la décision était prise
à ce niveau-là et non pas prise au niveau de la commission
parlementaire, ça nous a semblé une autre problématique
d'apporter toutes ces choses-là de façon publique.
M. Scowen: Une dernière question à propos de
l'administration, de cette question de faiblesse que vous avez constatée
dans les contrôles, surtout dans le contrôle des estimations et des
soumissions, et, peut-être, dépassant cette question, les lacunes
qui existent au sein de l'administration même, j'aimerais vous demander
de nous dire plus en détail vos impressions un peu spécifiques
là-dedans. Je vous demande surtout s'il n'existe pas un moyen de vous
informer auprès des autres compagnies qui sont dans le même genre
d'industries, qui sont obligées de faire les soumissions sur des projets
à long terme, avec beaucoup d'immobilisations, en effet "capital goods"
si vous voulez, comment on peut avoir un meilleur système de
contrôle des estimations et du développement des soumissions. Pour
moi, il est essentiel que l'expérience qu'on a vécue ne se
reproduise pas.
M. Coulombe: Avant de demander à M. Bris-son de
détailler un peu plus, je voudrais faire deux remarques
générales. La première, c'est qu'il faut distinguer,
à l'intérieur de Marine Industrie, les divisions. C'est
évident que la construction navale, depuis quelques années, avec
les chocs répétés qu'il y a eu à subir, à
cause de ce que j'appelle les aventures internationales, les contrats
internationaux, qui, pour la plupart, se sont soldés par des
déficits, cet état de fait, dû à la crise plus
profonde causée par les bateaux panaméens, avec les inspecteurs
qui faisaient recommencer le travail à gauche et à droite, cela a
eu un effet de démobilisation réel. Je ne mentionnerai pas aussi
le fait que, pour beaucoup de cadres je ne sais pas si les syndicats
partagent cette opinion à l'intérieur de cette division,
de voir continuellement Marine Industrie aux prises avec des difficultés
semblables, aux prises avec des lois spéciales, aux prises avec des
commissions parlementaires répétées, cela a
créé à un moment donné un climat qui n'est pas
propice à du travail de réorganisation en profondeur.
Nous pensons que même si la crise n'est pas
répétée, au moins l'aspect plus critique de la crise est
passé, mais on doit vous avouer qu'au point de vue
réorganisation, au point de vue du recrutement de nouveaux cadres
à Marine Industrie, on a énormément de difficulté
actuellement parce que les gens se disent simplement: Où est-ce que
ça
va? On a de sérieux problèmes de recrutement qui sont
causés tout simplement par l'état d'esprit qui règne
autour de cette question.
On pense que, durant la prochaine année, on va s'en sortir, on
pense qu'un aspect plus dynamique va se mettre là-dedans. Cela explique
un peu le contexte des problèmes d'organisation qu'on peut vivre
à Marine Industrie. Il y a là une infrastructure humaine qui est
de qualité remarquable, mais, à un moment donné, se battre
sur trop de fronts à la fois devient un peu insupportable pour
plusieurs. C'est le problème du climat en général. (17 h
30)
Quant au problème plus particulier d'organisation, c'est
évident qu'une de nos intentions, c'est de raffermir encore plus
l'organisation interne en termes de centres de coûts et de centres de
profits, pour que les divisions aient vraiment toute l'organisation interne
leur permettant d'avoir leur propre organisation et leur propre système
de contrôle, leur propre système de marketing, leur propre
système d'organisation interne. C'est de cela que M. Brisson parlait
tantôt, du plan d'action qui suivrait ce plan général
d'orientation. On a l'intention de commencer à mettre en marche ces
plans d'action dès cet été, sous cet angle.
Peut-être que...
M. Brisson: Je pense qu'il est difficile de répondre mieux
que M. Coulombe l'a fait.
M. Martel: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Huntingdon, est-ce que vous avez des questions? Vous attendez le ministre. M.
le député de Richelieu.
M. Martel: Je reviens à la division des wagons. Le
marché canadien, depuis les dix dernières années, a
commandé 5600 wagons. J'aimerais savoir, sur ces 5600, combien Marine
Industrie en a obtenu, en moyenne, chaque année.
M. Coulombe: La part du marché de Marine, dans les wagons,
est traditionnellement de 22%.
M. Martel: 22%. M. Coulombe: Oui.
M. Martel: Du marché canadien. Vous vendez aux Etats-Unis
dans quelle proportion?
M. Coulombe: II faut distinguer; dans les années qu'on vit
à l'heure actuelle, plus particulièrement 1979 et 1980, 80% de la
production de wagons est pour le marché américain, au moment
où on se parle.
M. Martel: Je ne vous apprends rien en vous disant qu'il y a un
organisme fédéral qui s'appelle l'ACDI, qui est censé
être un organisme qui permet l'exportation de tels wagons pour les pays
sous-développés.
M. Coulombe: On a d'ailleurs des contrats qui nous sont fournis
par l'ACDI.
M. Martel: J'aimerais justement savoir quelle est la
répartition de l'ACDI entre Marine Industrie et les concurrents.
M. Coulombe: Oh, les concurrents.
M. Martel: Hawker Siddeley et, par exemple, le Steel...
M. Brisson: National Steel Car...
M. Coulombe: ... et Marine, la répartition.
M. Martel: Est-ce que vous avez les proportions?
M. Coulombe: M. Guèvremont, qui est vice-président
aux wagons...
M. Guèvremont (Donald): Je n'ai pas les proportions
exactes, mais je crois que...
Le Président (M. Boucher): M. Guèvremont, si vous
voulez vous approcher du micro, étant donné que c'est retranscrit
au journal des Débats.
M. Guèvremont: Je n'ai pas exactement les données,
mais je crois qu'avec les deux commandes pour le Cameroun que nous avons eues
il y a quelques mois, grâce à l'effort de l'ACDI, notre
marché doit être aux alentours de 25% à 30%, comparé
à nos concurrents canadiens. Par contre, il faut dire que, dans les
autres sortes de wagons qui ont été donnés à nos
concurrents, nous n'étions pas intéressés. Il y a beaucoup
de quantités de 15, 20, 30 unités de wagons qui ne nous
intéressent pas, non pas parce qu'on est indépendant, mais
simplement parce que nous avons actuellement seulement une chaîne de
production. Nos concurrents, qui ont deux ou trois chaînes, peuvent se
permettre de prendre ces wagons et de les faire quand ils ont le temps.
M. Martel: Donc, avec une population de près de 28% du
Québec par rapport au Canada, on a seulement 22%, d'un
côté, du marché canadien et, d'un autre côté,
avec l'ACDI, une aide d'environ 25%. D'accord. Un peu plus loin, à la
page 10, il est question, toujours dans la section des wagons, "contrairement
à Marine Industrie, ses concurrents fabriquent des pièces de
fonte et ont des capacités d'usinage et de sous-assemblage. Marine doit
même s'approvisionner auprès de ses concurrents dans certains
cas." C'est à la page 10, à la fin.
Je ne comprends pas très bien. Etant donné que nous avons
une société d'Etat à peu près à 15 milles de
Sorel qui s'appelle SIDBEC, étant donné qu'à environ 300
ou 400 pieds de Marine, il y avait, et j'espère qu'il y aura encore
parce que ça doit repartir, une industrie qui s'appelle les Fonderies de
Sorel, qui se spécialise dans la fonte, je ne suis pas un expert, je ne
suis pas un économiste, mais
j'ai fait un petit calcul. Avec les wagons qu'on construit à
Sorel, avec la moyenne qu'on a, on pourrait donner aux Fonderies de Sorel, qui
vont se trouver, j'espère, un acheteur et vont repartir, de l'ouvrage
pour environ deux mois à 250 gars, annuellement. Je ne peux pas
concevoir que vous n'ayez pas, dans le passé, songé d'abord
à cette société d'Etat et aux Fonderies de Sorel qui ont
l'outillage nécessaire actuellement, avec la nouvelle machinerie, pour
faire ces roues que vous allez chercher chez des concurrents.
M. Plessis-Bélair: Là-dessus, il y a plusieurs
points. Pour ce qui est des pièces de fonte, la fonderie de Sorel a
effectivement une machine, qu'on appelle une machine "Herman", qui a une
certaine capacité de moulage. La capacité du moulage de cette
machine est malheureusement petite et elle peut faire certaines pièces
qui pourraient être utilisées...
M. Martel: ... des roues. Des employés m'ont assuré
qu'ils pouvaient sortir les roues avec facilité.
M. Plessis-Bélair: Non, pas de roues. Elle ferait ce qu'on
appelle des "outlers"...
M. Martel: Pourtant, ce n'est pas loin. Cela ne demanderait pas
de grandes recherches. C'est à peu près à 300 pieds, les
fonderies de Sorel. Cela vaudrait la peine d'aller voir, parce que les ouvriers
que j'ai rencontrés hier m'ont dit qu'ils pouvaient les sortir, les
roues.
M. Plessis-Bélair: Je peux vous dire qu'on a même
fait plus que cela. Comme on est conscient du problème et de notre
dépendance, on a essayé d'intéresser une entreprise
américaine qui est le plus gros fabricant de pièces de fonte aux
Etats-Unis, qui s'appelle National Foundry, et qui est une division de Midland
Ross, une compagnie qui fait à peu près $750 millions de chiffre
d'affaires. De notre propre chef, du propre chef des gens de Marine Industrie,
on a approché cette compagnie pour l'intéresser à venir
regarder sur place et à investir dans la Fonderie de Sorel, pour que
cette compagnie qui a l'expertise devienne une source d'approvisionnement
privilégiée pour les chantiers et pour la division wagons de
Marine Industrie et qu'elle nous empêche de continuer à être
dépendants de nos concurrents qui, eux, ont l'avantage d'être
intégrés depuis maintes années.
Cette fonderie a fait une analyse qui a duré un an. D'ailleurs,
cette compagnie a obtenu, du syndic qui s'occupe de la liquidation, un
délai dans sa décision pour lui permettre de faire son analyse.
Malheureusement, l'analyse qu'elle a faite l'amène à conclure
qu'elle n'est pas prête à investir dans les fonderies de Sorel
pour en faire une fonderie spécialisée dans le domaine des
wagons.
Traditionnellement, les fonderies de Sorel appartenaient à un
holding d'une entreprise privée qui faisait des pièces
principalement pour le domaine minier, mais ne s'est jamais
intéressée au domaine des wagons parce que les pièces, la
pièce importante, les "side frames", les fonderies de Sorel n'avaient
pas la capacité de produire cette pièce et n'étaient pas
prêtes à consentir les investissements requis pour transformer ses
capacités de production.
M. Martel: On m'a assuré cela vaudrait la peine de
vérifier que cette nouvelle machinerie, aux fonderies de Sorel,
est capable de sortir ces roues que vous achetez présentement en dehors
de la région. Il y a aussi Sidbec qui fait des pièces. Je pense
qu'il y a toutes sortes d'autres pièces, à part des roues, qui
peuvent être achetées dans la région.
Je termine, parce que le ministre est arrivé et qu'on va passer
au syndicat. J'aimerais connaître, de la part du président de la
Société générale...
M. Coulombe: Juste un petit détail. Sidbec ce n'est
pas compliqué à répondre ne fait pas le type
d'acier nécessaire pour faire des wagons.
M. Martel: D'accord. Mais les fonderies de Sorel ont
déjà vendu à Marine Industrie des petites pièces et
là, elles sont capables d'en vendre des grosses, si cela reprend.
M. Coulombe: Des "couplers" et des "yokes". Il faudrait qu'ils
investissent $8 millions de pièces.
M. Martel: Ce que je voudrais vous demander, en terminant, c'est
tout simplement les termes de l'entente qui est intervenue entre cette
entreprise hollandaise et Marine Industrie, concernant les trois bateaux.
M. Paquin: II s'agit d'un contrat de gestion de trois ans, en
fonction duquel la compagnie Nedloyd, qui est une entreprise hollandaise, va
s'occuper de fournir l'équipage, défrayer toutes les
dépenses, relativement à l'exploitation du navire, et voir
à trouver des occupations pour le navire. Les revenus qui en
découlent nous appartiennent et les dépenses également. A
la compagnie Nedloyd, le gérant des navires est
rémunéré en fonction d'un taux quotidien pour les frais
d'administration que cela comporte ainsi qu'une rémunération qui
est basée sur le bénéfice net qui peut être
réalisé à même l'exploitation des navires.
Il existe, dans cette entente, des dispositions selon lesquelles on peut
mettre fin au contrat, advenant que les navires puissent être vendus,
ainsi que d'autres dispositions qui nous permettent d'y mettre fin, advenant
que les résultats ne soient pas satisfaisants ou que la compagnie ne
s'acquitte pas de ses droits à notre satisfaction.
M. Martel: Dans vos prévisions, est-ce que vous
prévoyez des pertes ou des gains, à la suite de cette entente? Et
de quel ordre, qu'il s'agisse de pertes ou de gains?
M. Gagné: Actuellement, je pense qu'on peut dire que les
frais d'exploitation, en tenant compte
des coûts de l'équipage, les frais d'assurance, les frais
d'entretien, enfin toute la nourriture, etc., on estime que les frais
quotidiens sont de $350 000 en dollars américains par navire, par
jour.
L'utilisation des navires. Nous avions estimé, au début de
l'année, selon les taux d'affrètement qui étaient en
vigueur pour ce type de navire, qu'ils devraient se situer autour de $4500 par
jour, $4500 à $5000, par jour.
Or, les trois premiers contrats d'affrètement qui ont
été négociés pour les trois premiers navires qui
ont été mis en service, vont procurer un revenu global
d'affrètement de l'ordre d'un peu plus que $6000 par jour, ce qui nous
laisse à toutes fins utiles une marge d'environ $2000 par jour,
peut-être légèrement plus que de $2000 par jour. $2000 par
jour, je crois qu'on a mentionné plus tôt, ce matin, que, si on
tenait compte que la valeur du navire peut être de l'ordre de $15
millions en dollars américains et qu'il fallait amortir ce
montant-là sur une période d'une douzaine d'années avec un
taux d'intérêt de l'ordre de 9%, 9,25%, cela entraîne des
déboursés de l'ordre de $6000 par jour. Il y a donc un
déficit actuellement, un déficit de caisse.
M. Martel: Vous dites $6000 par jour, à la suite de cette
entente?
M. Gagné: Oui, un revenu. Il y a un revenu de l'ordre de
$6000 par jour, et des frais d'exploitation de l'ordre de $3600 ou quelque
chose comme tel, de sorte que la marge est légèrement plus que
$2000 par jour.
M. Martel: De profit?
M. Gagné: De profit, avant amortissement et
intérêt.
M. Martel: Revenu brut de $2000 par jour pour les trois
bateaux?
M. Gagné: Oui.
M. Coulombe: M. Martel, plutôt que de faire des calculs
compliqués par jour, le résultat net de l'opération, si
les taux restent ce qu'ils sont aujourd'hui, cela va diminuer la perte qui
était prévue pour ces bateaux-là.
M. Martel: Compte tenu des intérêts et de tout ce
que vous payez.
M. Coulombe: Cela ne fera pas de bénéfices, cela va
diminuer la perte. En d'autres mots, les laisser au quai, cela coûte $9
millions. Cette opération-là va permettre de baisser ces $9
millions-là. C'est cela, en fait.
M. Martel: Très bien, je vous remercie. Pour ce qui est
des syndicats, je constate, par exemple, à la page d'introduction, et
cela m'a fait plaisir, parce qu'à ma connaissance, cela fait tout de
même quelques années que je vis avec Marine
Industrie, et c'est la première fois que les membres de
l'exécutif des deux syndicats de l'entreprise ont pu suivre
l'évolution de ces travaux au sein d'un comité consultatif
spécifiquement mis sur pied à cette fin, en février 1979.
Je vous remercie de cette initiative, parce que la consultation avec les
syndicats n'était pas fréquente à Marine Industrie
auparavant. J'aimerais demander par la même occasion si les deux
syndicats concernés, soit ceux des employés de bureau et de
chantiers, sont satisfaits de cette première expérience de
consultation.
M. Gagné: Comme réponse concernant le syndicat
à l'heure... Je ne sais pas si le syndicat de bureau... En tout cas,
Pierre en discutera. C'est sûr que c'est une très bonne initiative
de la part d'une industrie de donner des renseignements sur ce qu'elle veut
faire, mais, par contre, au départ, ce comité, M. Coulombe l'a
mentionne ce matin, est un comité consultatif. C'est sûr que les
syndicats ont pris une petite part à cela, mais on n'a pas eu de marge
de décision. Je pense qu'on n'a rien décidé dans cela. On
agissait simplement comme consultants.
Comme dans le mémoire qu'on va vous présenter
tantôt, c'est sûr qu'avec le comité que Marine
présente aujourd'hui, on est en partie en désaccord. Il y a un
petit bout sur lequel on est d'accord, mais il y a un autre bout sur lequel on
n'est pas d'accord. On ne vous fera pas de cachette, c'est dans le domaine du
naval. On est en train de sombrer avec le naval présentement. Justement,
si j'ai la parole sur cela, je vais la passer à Pierre. (17 h 45)
II y a une autre petite mise au point que j'aimerais faire.
Tantôt, il y a une question qui a été posée, je ne
sais pas par quel ministre, à M. Coulombe, concernant le climat chez
Marine Industrie. Je pense que vous n'êtes pas sans savoir qu'on est
présentement en négociation. La négociation est
présentement rendue au point final. On a eu les offres finales de la
compagnie. En fin de semaine, on s'en va voir nos membres. J'ai bien
l'impression je me prononce peut-être à titre personnel
quitte à faire des erreurs, que les offres n'ont pas
été volumineuses cette année. On était conscients
qu'il y avait des problèmes à Marine Industrie, les syndicats
étaient conscients qu'il y avait des problèmes. On a fait des
demandes qui étaient raisonnables. Je pense que la compagnie n'a pas
tenu compte de tout. Je ne sais pas si c'est un message que je passe ici, mais
il faut le dire. Vas-y, Pierre, si tu veux répondre, sur le
comité de redressement.
M. De Carufel (Pierre): M. le Président, pour ce qui est
des employés de bureau, c'est comme M. Martel nous l'a dit tantôt.
C'est une des premières fois dans l'histoire des syndicats, en tout cas,
du chantier maritime, qu'on peut participer à des rencontres, même
si elles ne sont pas formelles, entre la compagnie et les syndicats. C'est
sûr que les documents sur lesquels
on a eu à se prononcer étaient déjà tout
cuits quand ils nous arrivaient. Le comité en était vraiment un
de consultation. C'est un bon départ pour le futur. Pour ce qui est de
la négociation, c'est pas mal dans le même style que Richard vient
de le dire. On n'a pas encore eu, nous, du syndicat des employés de
bureau, les offres finales de la compagnie, mais elles devaient sans doute
être dans le même style que celles faites aux employés
à l'heure. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. A ce stade, sachant
qu'il y a un mémoire qui doit être présenté, et
compte tenu de l'heure aussi, j'aimerais que les membres se prononcent à
savoir si on entend immédiatement le mémoire. Par la suite, au
retour à 20 heures, on pourra en discuter. Est-ce qu'il y a accord pour
que le mémoire de la CSN soit présenté
immédiatement?
M. Perron: Au complet, s'il vous plaît, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. Gagné.
M. Gagné: Si vous n'avez pas objection, je vais le faire
commenter par le vice-président de la CSN, qui est André
L'Heureux et Kémal Wassef, du service de la recherche de la CSN.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous voulez le lire
d'abord?
M. Gagné: D'accord. Je vais le faire lire par André
L'Heureux.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. L'Heureux.
Mémoire des syndicats de Marine (CSN)
M. L'Heureux: Merci, M. le Président. Je pense que j'ai eu
l'occasion de faire l'introduction tantôt sur l'aspect
général du problème. Les syndicats de Davie sont ici
aussi, parce que, quant à nous, les problèmes des chantiers
maritimes dépassent ceux d'un seul chantier. On le verra tantôt.
Les syndicats des chantiers navals CSN se sont présentés devant
cette commission parlementaire le 8 décembre 1978 pour réclamer
des mesures énergiques face à la dégradation
marqués à Lauzon et à Vickers ou
appréhendées à Sorel du niveau d'emploi dans les chantiers
du Québec. A cette époque, les déclarations
ministérielles québécoises ont souligné
l'intérêt profond que portait le gouvernement à l'ensemble
du dossier, et particulièrement celui de Marine Industrie, de Sorel, qui
faisait face à une situation devenue nettement critique par la
mévente de six cargos grecs. Nous nous retrouvons aujourd'hui pour
étudier en commission le plan de redressement déposé par
Marine Industrie, filiale de la SGF.
Les syndicats ont pris connaissance du plan de redressement
déposé par Marine et la SGF depuis le 15 mai 1979. La
réaction globale des membres du secteur des chantiers navals (CSN) est
la suivante... Je veux quand même aussi souligner l'ouverture, le
caractère très franc des échanges qu'il y a eu entre la
SGF et la direction de Marine, à tout moment, depuis la formation du
comité de Marine et l'essentiel de ce rapport, on a eu l'occasion,
à notre point de vue, de l'exprimer verbalement il y a
déjà quelques semaines.
Premièrement, le plan de redressement projeté par Marine
et la SGF se situe dans le prolongement traditionnel de la politique
industrielle poursuivie dans le secteur.
Deuxièmement, la conversion des activités de Marine vers
les équipements reliés à l'hydroélectricité
et les wagons de chemin de fer n'offre qu'une faible garantie d'emploi et une
pauvre capacité d'engendrer des revenus adéquats pour les
travailleurs engagés dans les chantiers navals.
Troisièmement, le secteur des chantiers navals (CSN) est d'avis
qu'en entérinant le plan projeté par Marine Industrie et la SGF,
c'est tout l'avenir des chantiers navals du Québec que le gouvernement
québécois condamne. A ce moment-là, on n'avait pas lu
on n'a pas fini sa lecture non plus le rapport du comité
du MIC et des divers ministères économiques qui semble
très intéressant à certains égards.
La loi 108 exigeait de la SGF et de sa filiale, Marine, de
présenter au gouvernement, avant le 1er juin, un plan de redressement du
chantier. Pareil exercice, quoique de nature à approfondir et à
préciser les orientations des deux entreprises, confirme aujourd'hui les
appréhensions déjà soulevées par les syndicats en
décembre passé.
Le plan élaboré par la SGF et sa filiale a pour objet
d'amorcer un mouvement qui pourrait aller, en fait, en pratique, advenant la
disparition de la section navale, en maintenant la réparation, à
environ 1600 mises à pied dans la section navale et justifie des
investissements dits rentables dans les sections des équipements
liés à l'hydroélectricité et des wagons de chemin
de fer qui jouissent d'un conjoncture plus favorable.
En décembre dernier, le président de la SGF, M. Guy
Coulombe, et le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Rodrigue Tremblay,
en étaient déjà arrivés à ces conclusions.
La CSN s'était opposée à de telles mesures, puisqu'elles
ne suffisaient pas pour contrer la montée du chômage dans la
section navale et qu'elles ne prévoyaient pas un plan de stabilisation
de l'activité principale du chantier: la construction de navires neufs.
Parce qu'il ne faut pas oublier la vocation essentielle; les deux tiers des
activités, c'est un chantier maritime. C'est un chantier de construction
navale que celui de Marine à Sorel.
C'est pour les mêmes raisons que les syndicats s'opposent
aujourd'hui à l'entérinement du plan de redressement
projeté par Marine et la SGF et recommandent au gouvernement de recevoir
le programme tel que soumis, mais exigent un effort
additionnel de toutes les directions impliquées, gouvernement et
sociétés d'Etat, pour la formulation d'un véritable
programme de maintien et de relance de l'activité du chantier naval
d'ici le mois de septembre 1979.
Pour les syndicats des chantiers navals (CSN), aucune mise à pied
pour une période indéterminée ne devrait survenir dans la
section navale de Marine sans qu'un véritable programme de redressement
agréé de toutes les parties soit mis en vigueur. Le programme
déposé par la SGF et sa filiale témoigne
particulièrement bien de la conscience qu'ont les directions de ces
entreprises des pertes financières encourues par la section navale, des
difficultés financières présentes et de leur souci de
rentabiliser leurs activités ou minimiser les pertes.
Toutefois, le plan projeté se place dans la continuation
naturelle des expériences vécues par les travailleurs des
chantiers. Le plan ne contient aucun détail sur les moyens de
règlement de la crise que traverse le chantier, de même qu'il
n'indique aucune voie dans l'orientation prochaine du chantier pour
préparer l'après-crise on en a parlé; en 1982, on
prévoit une reprise et les investissements nécessaires
pour maintenir la capacité de production actuelle. Evidemment, quand on
parle d'investissements, il s'agit du gouvernement aussi.
Significativement, le plan souligne et documente abondamment
l'instabilité de l'emploi dans cette industrie, comme si une telle
instabilité était une façon de vivre acceptable et
acceptée par les travailleurs.
Evidemment, il ne saurait être question que Marine et que la SGF
seules formulent les conditions pour le maintien et l'expansion de l'industrie
navale du Québec, puisque la vie d'une telle industrie dépend
nécessairement de l'activité maritime, des perspectives maritimes
du Québec et du Canada et des politiques fédérales et
provinciales en regard de cette activité.
C'est donc un programme dominé par l'instabilité des
emplois et rentable à court terme que les dirigeants de Marine et de la
SGF ont déposé au gouvernement. Le programme de conversion repose
sur des commandes fermes et des possibilités réelles de commandes
à court terme dans les sections de la production d'équipement
liée à l'hydroélectricité et la production de
wagons de chemin de fer.
L'orientation des activités à moyen et long terme de
Marine est à peine effleurée et les véritables enjeux
économiques et sociaux oubliés. Le plan projeté est un
exercice de rentabilisation à court terme, sans aucune garantie pour
l'après-court terme. En effet, la production d'équipement
hydraulique est directement attribuable au vaste programme d'équipement
de l'Hydro-Québec et de sa filiale qui, pour la période de 1980
à 1985, entreprennent la construction des centrales de la baie James.
Après 1985, la stabilité des opérations et de l'emploi de
cette section sera remise en cause, à moins que la division
internationale de l'Hydro-Québec ne décroche des contrats
associés à l'hydroélectricité et assure la
production des équipements nécessaires au Québec.
La production de ces équipements se fait actuellement à
Marine sous licence française, donc sujette à certaines limites
à l'exportation et les experts soutiennent qu'il existe une situation de
surcapacité de production mondiale pour ces équipements.
En ce qui concerne les wagons de chemin de fer, une telle ligne de
production offre peu d'intérêt, en termes de développement
industriel et se caractérise également par une forte
instabilité puisque les commandes de transporteurs ferroviaires sont
cycliques et dépendent des politiques de tarifs qu'ils poursuivent.
A l'heure actuelle, les perspectives pour cette section sont à la
hausse.
Finalement, en termes de recherche et de développement pour des
produits nouveaux, en raclant les fonds de tiroirs, le plan soumis par la SGF
et sa filiale envisage d'investir $2 millions, d'ici 1982, pour assurer
l'avenir de Marine à Sorel. La décision se passe de commentaire,
surtout lorsqu'on n'ignore pas que toute la région sorel-loise
dépend largement de Marine et de son niveau d'emploi pour engendrer les
revenus nécessaires à l'épanouissement de cette
communauté. Annuellement, Marine verse au-delà de $50 millions en
salaires directement dans la région.
Si l'exercice imposé par le gouvernement, à la SGF et
Marine, en était un de rentabiliser les opérations
financières à n'importe quel prix, il est particulièrement
bien réussi et le mandat est respecté à n'importe quel
prix.
La Davie Shipbuilding, tristement célèbre par son
expérience passée à Marine Industrie, le gang Rochette et
compagnie, dirige aujourd'hui le chantier de Lauzon. Pour ces éperviers
de la sous-traitance, pour ces rois de la marge de profit, il n'existe aucun
plan de redressement.
Pour qualifier la situation de la Davie Shipbuilding, il faut quitter
l'industrie et entrer de plein pied dans le domaine du lobbying, des contrats
glanés à coup de millions aux intermédiaires, des contrats
fumants rendus possibles par le montant des subventions versées, par
l'exploitation des travailleurs et à partir des droits que
confère la propriété du chantier naval de Lauzon: une
transaction rapide entre Power Corporation et le gang illustre dont personne ne
connaît bien les dessous. Sous la direction de Rochette et compagnie, les
syndicats n'hésitent pas à affirmer qu'elle affaiblit la vocation
industrielle du chantier naval et l'éloigne sûrement des
possibilités maritimes sérieuses que possède le
Québec d'entrer de plein pied dans la construction navale.
Déjà, le niveau d'emploi a connu une dégringolade
marquée. Aujourd'hui, 1200 hommes travaillent au chantier, alors qu'ils
étaient 3200 en 1976 et les possibilités de créer des
emplois nouveaux sont attachées directement à la faculté
des dirigeants d'attirer et de réaliser des contrats qui exigent
très peu du chantier, à part les bras des travailleurs qui y
oeuvrent et à la condition
que les salaires y soient particulièrement propices pour leur
fin.
Le gang célèbre, les syndicats affirment qu'il n'a ni
l'intention ni les possibilités de moderniser le chantier, ni les
garanties suffisantes pour assurer la vie industrielle du chantier. Aussi, pour
le secteur des chantiers navals (CSN), tout plan de redressement
véritable de l'industrie passe également par l'examen du cas de
la Davie Shipbuilding et l'établissement de nouveaux liens industriels
entre Sorel et Lauzon.
Afin de faire le point sur la relance de l'industrie de la construction
navale du Québec, les syndicats des chantiers réclament du
gouvernement la constitution d'un groupe de travail je note à
nouveau que je suis très heureux d'avoir constaté le
résultat d'un travail assez rapide de la part d'un certain nombre de
fonctionnaires sous la responsabilité du ministre de l'Industrie
et du Commerce qui dégage, avec les principaux intéressés,
les orientations futures de cette industrie et les investissements requis pour
assurer véritablement sa stabilisation.
Le groupe de travail aurait pour mandat d'explorer l'ensemble des
perspectives de l'industrie navale du Québec et formuler des
recommandations non seulement en regard du fonctionnement des chantiers
actuels, mais aussi et surtout en fonction de politiques gouvernementales
inappropriées dans ce secteur, qui ont contribué à faire
des chantiers navals une industrie désinves-tie qui sous-utilise une
main-d'oeuvre hautement qualifiée et lui procure des emplois instables.
Et le comité, si vous voulez noter, remarque tout ça.
Ce qui est important, je pense, ce sont les investissements. Comme je le
disais au tout début, avant d'amorcer la lecture de ce texte-là,
à la suite d'une question de M. Scowen, il va falloir prendre conscience
je sais qu'il y a des investissements importants qui ont
été faits avec la loi 108, mais ce sont des investissements
très importants que tant le fédéral et le provincial
devront faire pour relancer vraiment l'industrie navale ici.
En septembre 1979, le groupe de travail publierait le résultat de
ses travaux et les diverses parties intéressées feraient
connaître leur point de vue respectif avant que le gouvernement du
Québec ne décide des orientations et des moyens d'intervention
propices dans le cas de Marine. Les Syndicats des chantiers navals CSN
dénoncent l'absence et le laisser-faire des politiques gouvernementales
vis-à-vis des industries de la construction et du transport maritime.
Evidemment, c'est surtout fédéral.
Le 11 avril 1979, les syndicats ont lancé une campagne
d'information et de sensibilisation aux problèmes et aux solutions pour
ces industries.
Nous entendons poursuivre cet effort parce qu'il représente pour
beaucoup de travailleurs l'occasion de maintenir un emploi et aussi de
créer des emplois additionnels pour des chômeurs dans des secteurs
d'activité économique intéressants. Le
développement et la stabilisation des chantiers navals du Québec
passent par l'élaboration d'une politique maritime qui encourage le
transport maritime national et qui, en termes de construction de navires neufs,
réparations et conversion, peut stabiliser l'activité des
chantiers navals et accroître le contenu québécois dans la
construction, et c'est drôlement important.
Par leurs commandes de navires neufs en propre, par le niveau des
subventions, par leur pouvoir de réglementation sur les eaux, les
installations portuaires, par leur pouvoir de financement, les gouvernements
peuvent assurer rapidement un rôle important aux industries de la
construction navale et du transport maritime. Le rôle est assuré,
en grande partie, par des navires battant pavillon de complaisance
enregistré dans des pays comme le Libéria, le Panama, les
Bermudes, et armés d'équipages africains ou asiatiques
surexploités. De plus, l'ensemble des transporteurs maritimes du Canada
oeuvrent par l'intermédiaire de succursales et filiales
étrangères, une imposante flotte de complaisance, de l'ordre de
6,8 millions de tonneaux.
Canadian Pacific, Papachristides, un ancien collectionneur de timbres,
qui a fait une fortune en vendant des bateaux de guerre aux Canadiens, Federal
Commerce & Navigation, Alcan, Reynold Metals exploitent à eux seuls
une flotte de complaisance de 82 navires, construits au Japon principalement,
et armés d'équipages surexploités, construits entre 1970
et 1978. (18 heures)
Depuis l'été dernier, le gouvernement
fédéral a fait savoir qu'il consacrerait $1 500 000 000 pour la
production de six frégates attachées à la défense
navale. Ce contrat a été annoncé à grand renfort de
publicité pour calmer la fureur des travailleurs des chantiers de tout
le Canada, dont les emplois sont menacés, mais qu'en est-il
réellement? Le montant de $1 500 000 000 est un coût global qui
comprend la conception, la construction du navire, l'armement, la construction
de quartiers-généraux, l'entretien pendant une période de
dix ans des six frégates en commande. En réalité, le
contrat de $1 500 000 000 ne représente que $200 millions pour les
chantiers navals. Le reste est consacré particulièrement à
des équipements électroniques et de l'armement sophistiqué
que seules quelques grandes multinationales américains sont aujourd'hui
capables de fabriquer.
Ainsi, ce contrat sera exécuté dans le respect complet des
modes traditionnels d'allocation de contrats gouvernementaux. Il fera appel
à la technologie, à la conception étrangère,
américaine évidemment, et aux bras candiens. Il y a des
travailleurs qui ont été choqués de cette phrase, parce
qu'on est tannés de voir qu'on se sert strictement de nos bras et
surtout de nos bras.
Il n'y aura pas de retombées sur le génie naval local ou
très peu. Et cela n'a pas de bon sens, et je trouve cela insultant pour
les dirigeants des chantiers maritimes on le leur a dit, à ce
moment-là que ce soit une compagnie américaine,
spécialisée en électronique, qui obtienne le principal
contrat de construction de bateaux.
Que retireront les deux principaux chantiers navals du Québec et
du Canada de ces contrats?
La politique maritime préconisée par le secteur des
chantiers navals de la CSN est la suivante:
A court terme, accélérer, premièrement, les
commandes de navires et surveiller ensuite l'extension de la zone de
souveraineté nationale jusqu'à 200 milles des côtes.
Deuxièmement, moderniser et agrandir les cales sèches de
la Davie et de Vickers.
Troisièmement, aménager une cale sèche à
Sorel.
Quatrièmement, accélérer la construction d'une
flotte de pêche hauturière pour profiter de l'extension de la
zone. Je crois que le ministre a déjà annoncé des projets
dans ce sens-là.
Cinquièmement, accélérer la reconversion et la mise
à la ferraille de bâtiments enregistrés au Canada qui
constituent une source de pollution non négligeable des eaux et qui ne
répondent plus aux exigences de vie décente des
équipages.
Sixièmement, imposer des quotas aux importations de navires neufs
construits à l'étranger et alourdir les taxes d'importation
frappant de tels navires.
Septièmement, interdire l'achat de navires usagés par les
transporteurs locaux.
Huitièmement, restreindre le cabotage (incluant l'Arctique) aux
seuls navires construits et enregistrés au Canada.
Neuvièmement, créer un fonds de développement des
chantiers navals et du transport maritime.
A moyen terme: premièrement, interdire l'accès de nos
ports et de nos eaux aux navires battant pavillon de complaisance.
Deuxièmement, négocier avec tous les partenaires
commerciaux du Canada en vue de régir le trafic maritime de la
même façon que le trafic aérien.
Troisièmement, constituer une société d'Etat
à l'image d'Air Canada pour ce qui est du transport maritime de
marchandises et de passagers. J'ai mentionné tantôt qu'on
exportait et qu'on importait pour $2 700 000 000 de marchandises et que 1%
à peine de ces marchandises étaient transportées sur des
navires canadiens.
Quatrièmement, élaborer un plan de restructuration de
l'ensemble de l'industrie à partir de regroupements de chantiers et de
la spécialisation de la production navale. Un tel plan pourrait
regrouper les deux principaux chantiers du Québec sous une seule
administration. Mais je ne pense pas que ce soit l'entreprise mixte qui puisse
faire l'affaire dans ce cas.
Cinquièmement, doter les chantiers du Québec
d'investissements nécessaires pour la construction, la réparation
et l'entretien des méthaniers et pétroliers
nécessités par l'exploitation des ressources du pétrole et
du gaz naturel de l'Arctique.
Sixièmement, le regroupement des services de génie et de
conception navale des chantiers du Québec.
L'appel du secteur des chantiers navals (CSN) est sérieux. Il
vise à relancer et développer des industries qui, depuis trente
ans, ont été sabordées et que l'on a entretenues à
coups de bonbons, parce que les travailleurs des chantiers navals et les marins
se sont fortement opposés à leur disparition.
La relance et le développement des industries de la construction
navale et du transport maritime visent le développement des ressources
naturelles et humaines du Québec. C'est une activité complexe et
industrielle qui requiert une immense détermination. Nos "businessmen"
ont fait leur option loin du champ industriel et proche des gros sous faciles
et des retombées que les développeurs étrangers
éparpillent dans leur sillage ou que les gouvernements enduisent sur
leurs contrats.
Voilà le point de vue des syndicats de la CSN des chantiers
maritimes sur le plan de redressement. M. Clément Fleury, le
président du syndicat de Lévis aimerait dire quelques mots...
Le Président (M. Boucher): M. L'Heureux, à ce
moment-ci, je dois demander aux membres de la commission s'ils veulent
prolonger après 18 heures ou si on peut revenir à 20 heures.
M. Scowen: M. le Président, malheureusement, je suis
obligé de me rendre au caucus à 18 heures. C'était
convenu.
Le Président (M. Boucher): On reprendra les travaux
à 20 heures.
M. L'Heureux: Merci.
Le Président (M. Boucher): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 20 heures.
Suspension de la séance à 18 h 5
Reprise de la séance à 20 h 26
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
A la suspension de 18 heures, nous avions pris connaissance du
mémoire de la CSN, par l'intermédiaire de M. L'Heureux. Je crois
que M. L'Heureux voulait faire intervenir quelqu'un.
M. L'Heureux: II n'est plus là. C'est Clément
Fleury, le président du syndicat de Davie qui m'a demandé
simplement de vous transmettre qu'il était lui aussi très heureux
de constater qu'au Québec, même si ce n'est pas de
responsabilité proprement québécoise, le transport
maritime et la construction navale, il y avait une préoccupation et un
intérêt de plus en plus grand pour ce secteur, avec tous les
rapports qui sortent un peu partout sur cette question.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. L'Heureux. Je vais
donner la parole à M. le ministre immédiatement pour les
commentaires sur le mémoire. M. le ministre.
Commentaires sur le mémoire
M. Rodrigue
Tremblay
M. Tremblay: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai
écouté attentivement la lecture du mémoire de M.
L'Heureux, mémoire de la CSN, qui, dans ses grandes lignes, est
très constructif, je crois, parce que ce dont il faut se rendre compte,
c'est que la SGF est régie par une charte approuvée par
l'Assemblée nationale avec un mandat bien précis, un mandat qui a
été renouvelé en décembre dernier, qui lui donne
une responsabilité de rationaliser et de rentabiliser ses
activités.
La SGF possède des filiales, dont Marine qui était, de
facto, en faillite au mois de décembre dernier et qui été
sauvée in extremis par une intervention gouvernementale. Elle devait,
selon le mandat de la loi, le mandat de l'Assemblée nationale, proposer
un plan de redressement dans le cadre de son mandat. Il est évident que
la solution des chantiers maritimes en général, ceux de Marine,
ceux de Davie et ceux de Vickers je laisse de côté les
quelque 23 petits chantiers maritimes que nous avons en Gaspésie et tout
au long du fleuve qui, eux, auront des contrats au cours des cinq prochaines
années en abondance, à cause de la politique du gouvernement du
Québec concernant le plan quinquennal de renouvellement de la flotte de
pêche, mais comme ces bateaux de bois ne sont pas construits par les
grands chantiers maritimes, il ne s'agit pas d'une solution.
Une solution pour les problèmes des chantiers maritimes ne peut
donc pas être demandée à une entreprise comme la SGF ou
à sa filiale, qui est Marine. Je pense que la SGF a fait son devoir, a
rempli son mandat et je crois que nous ne pouvions pas demander davantage
à cette société.
Ceci ne veut pas dire que les remarques, les observations et les
recommandations que le mémoire de la CSN reprend ne sont pas justes.
Nous sommes ici en face d'un secteur qui ressemble étrangement à
nos autres secteurs mous au plan industriel. C'est un secteur et, à
juste titre, la CSN le souligne, qui n'a pas reçu, de la part des
gouvernements, et les gouvernements ont des responsabilités qui sont
autres que celles d'une entreprise, d'un holding comme la SGF ou d'une
entreprise comme Marine, ce secteur, dis-je, n'a pas reçu, de la part
des gouvernements une orientation articulée comme on aurait dû s'y
attendre des gouvernements.
C'est pour cela qu'en décembre dernier, lorsque la CSN avait
proposé son premier mémoire, je l'avais reçu avec
énormément de sympathie, et c'est pour ça qu'aujourd'hui,
je crois que le mémoire qu'a présenté M. L'Heureux doit
être reçu avec énormément de sympathie, en vertu du
principe que les gouvernements ne peuvent pas se laver les mains d'une
détérioration conjoncturelle dans un secteur industriel en
laissant le libre cours aux forces économiques de rationaliser ces
secteurs.
Dans notre cas, évidemment, si nous nous étions
lavé les mains, Marine serait présentement en faillite et les
quelque 3000 employés seraient en chômage au moment où on
se parle. Le gouvernement du Québec a donc décidé
d'intervenir, parce que nous croyons que les difficultés conjoncturelles
qui existaient dans une des divisions de Marine ne justifiaient pas, au plan
industriel, ce sacrifice d'un demi-siècle, en quelque sorte, d'efforts
dans la région de Sorel.
Je pense que la famille des Simard a rempli un rôle industriel
important dans la région de Sorel. Evidemment, on peut toujours discuter
de la justesse des choix du gouvernement libéral en 1965, lorsqu'on a
décidé d'acheter une participation majoritaire dans Marine,
surtout de la part d'un gouvernement provincial qui, n'ayant pas de prise sur
les décisions d'armements, n'ayant pas de prise sur les commandes de
grands bateaux, allait dans un secteur qui, pour un gouvernement provincial,
est très vulnérable par définition.
Les faits sont que, quand même, nous avons ce secteur, qui est un
secteur d'industrie lourde très touché par une conjoncture
internationale des marchés qui, comme je l'ai dit, au cours du dernier
demi-siècle a été le plus sérieux.
Je ne reprocherai pas à la SGF et certainement pas à
Marine d'essayer de rationaliser leurs secteurs, de diversifier leur production
de manière à préserver le plus grand nombre d'emplois tout
en gardant leur autonomie et leur survie financière.
Mais la CSN touche juste lorsqu'elle dit que les gouvernements doivent
élargir leurs perspectives et regarder ce problème, qui est celui
de Marine, dans une perspective plus grande.
Au Québec, nous avons trois chantiers maritimes de grande
envergure, celui de Vickers, qui maintenant se spécialise dans la
réparation, évidemment, celui de Marine, qui est
déjà passablement diversifié avec l'hydroélectrique
et les wagons, mais il y a aussi Davie, comme le mémoire de la CSN le
souligne justement, qui est passé de quelque 3000 employés
à 1200 présentement et qui a dû se diversifier devant la
pénurie de contrats de bateaux de grande dimension vers les
plates-formes de forage de pétrole, qui lui permettent de maintenir sa
rentabilité et une activité industrielle raisonnable que j'ai
encouragé moi-même, comme ministre de l'Industrie, en accordant
une subvention de $5 millions pour faire la promotion de l'exportation de ses
produits.
Je pense que nous ne devons pas considérer le plan de
reconversion de Marine comme un plan qui doive rester définitif en ce
qui concerne les gouvernements. C'est pour cela que, comme l'a souligné
M. L'Heureux, hier, j'ai déposé à l'Assemblée
nationale une étude que je considère, même si elle n'est
pas tellement volumineuse, très à point sur le diagnostic qu'il
faut porter sur la crise qui sévit présentement dans les
chantiers maritimes du Québec et du Canada, mais particulièrement
dans le cas du Québec.
Il est évident que si les représentants des travailleurs
et j'en déduis par le mémoire de la CSN que ceci est une approche
positive, s'il y a cette volonté de créer premièrement un
bureau
des chantiers maritimes pour le Québec, que nous pouvons faire un
certain rnillage dans la rationalisation de nos opérations dans ce
secteur entre les chantiers maritimes, au-delà donc, des
responsabilités de Marine Industrie et de la SGF qui, comme je le
répète, s'inscrivent dans le cadre d'un mandat confié par
l'Assemblée nationale et il n'est pas question que nous révisions
ce mandat aujourd'hui, mais dans un mandat de rationalisation entre les
chantiers existants, je pense qu'il y a des opérations à
réaliser.
De sorte que je ferai appel aux chantiers maritimes du Québec,
aux associations des travailleurs, des syndicats de travailleurs, de même
qu'aux autres propriétaires de chantiers maritimes, même s'ils
sont de plus petite taille, comme l'Association des petits chantiers maritimes,
pour former un bureau de construction navale au Québec, afin que les
gouvernements puissent être saisis de recommandations faisant l'objet
d'un front commun de la part des intérêts des agences
économiques qui oeuvrent à l'intérieur de ce secteur
industriel très important. Au cours des prochaines semaines, je vais
donc désigner un fonctionnaire du ministère de l'Industrie et du
Commerce afin de mettre sur pied un tel bureau de construction navale qui
pourra analyser une partie des suggestions faites par la CSN et aller
même plus loin. Je pense que même s'il y a des chantiers qui
relèvent de l'entreprise privée et d'autres qui relèvent
de la propriété publique, il y a place pour une rationalisation
des activités, une consolidation des achats, par exemple, au niveau des
chantiers maritimes afin d'accroître la productivité et la
compétitivité et de coordonner les efforts d'exportation en vertu
du principe que l'union fait la force.
Lorsqu'on est dans un état de crise, il est de la
responsabilité de tous ceux qui peuvent contribuer à la solution,
de s'unir pour trouver les solutions qui sont les moins coûteuses ou qui
sont les plus productives. Je félicite les représentants des
syndicats d'avoir fait leur cette suggestion.
En ce qui concerne le gouvernement du Québec, un gouvernement
provincial, qui, jusqu'à un certain titre est une grosse
municipalité dans le domaine maritime, n'ayant aucun contrôle sur
les armements maritimes, n'ayant aucun contrôle sur la zone de 200 milles
pour les pêches en ce qui concerne la réglementation, il y a quand
même une approche positive qui peut être
développée.
Au moment où nous nous parlons, j'ai demandé à tous
les ministères du gouvernement du Québec qui peuvent avoir des
contrats impliquant une construction navale d'accélérer ces
contrats. Il y a le ministère des Transports, en ce qui concerne les
traversiers, le ministère de l'Industrie et du Commerce, en ce qui
concerne les navires de recherche, les chalutiers pour la pêche, dans le
cadre du plan quinquennal des pêches, les $110 millions que nous avons
annoncés, des sociétés d'Etat comme SOQUEM qui doivent
faire construire des bateaux ou des barges pour transporter le sel des
Iles-de-la-Madeleine, SOQUIP qui doit participer à des recherches
pétrolières au large de la côte est du Labrador, du
Canada.
Donc, au niveau du gouvernement du Québec, tous les efforts vont
être déployés au cours des mois qui viennent, avant
même le mois de septembre 1979, comme on le soulignait tout à
l'heure, afin de hâter la construction de navires, considérant que
le creux de la vague se trouve au moment où nous nous parlons et qu'il
irait de l'intérêt de l'économie du Québec et du
secteur des chantiers maritimes que nous hâtions ces commandes. Par
contre, il est évident, comme le rapport interministériel des
fonctionnaires le souligne, que nous devrons peut-être faire front
commun, ici à l'Assemblée nationale, les représentants de
la population du Québec de même que les représentants de
l'industrie et les représentants du monde syndical, pour que nous
puissions trouver des solutions plus permanentes à la crise que
traversent les chantiers maritimes.
Dans tous les pays qui font face au même problème, les
gouvernements nationaux ont pris une part de leadership, ont rempli un
rôle de leadership dans la prise de décision fondamentale pour
revaloriser ce secteur en péril. Dans le cas du Canada, nous devons
constater que, malgré les recommandations du groupe de consultation,
dans le cadre des études poursuivies par le ministère de
l'Industrie et du Commerce au cours de l'an passé, il y a quand
même eu relativement peu de choses.
Je pense que la CSN a parfaitement raison de souligner que dans le plan
de construction de cales sèches et de réparation de chantiers
maritimes annoncé par le gouvernement fédéral il y a deux
mois, au montant de $35 millions, on avait par hasard oublié les plus
grands chantiers maritimes du Canada qui se trouvent au Québec en
l'occurrence Marine Industrie et Davie Shipbuilding, et Vickers étant
relativement important.
Nous avons l'exemple, aux Etats-Unis, du Jones' Act. Le Jones' Act a
permis aux Etats-Unis de traverser la crise mondiale qui sévit dans le
domaine maritime, dans le domaine des chantiers maritimes, sans trop de
perturbation. On a réservé aux chantiers maritimes
américains un achalandage au niveau de la réparation des navires
et de la construction de navires de cabotage, qui était garanti.
Il y a présentement devant la Chambre canadienne des communes,
devant le Parlement canadien, une Loi du cabotage qui est extrêmement
pusillanime, qui ne s'adresse pas du tout aux problèmes objectifs que
traversent les chantiers maritimes, qui n'est pas du tout à la hauteur
de la crise que nous traversons.
En ce qui nous concerne, la réflexion qui a été
faite à l'intérieur du gouvernement, c'est que nous devrions nous
servir du fleuve Saint-Laurent non seulement comme une voie navigable qui
permet d'amener des marchandises jusqu'à Chicago par la Voie maritime du
Saint-Laurent, en court-circuitant les ports de mer et en court-circuitant les
chantiers maritimes du Québec, mais que nous devrions imiter les
Américains pour une fois et appliquer une Loi du cabotage qui ait autant
de retombées économiques que la loi américaine.
Si le bureau des chantiers maritimes que nous voulons créer et
qui semble s'imposer arrivait à la même conclusion, nous pourrions
créer une force cohérente de pression sur le gouvernement
fédéral pour obtenir, premièrement, que les navires qui
ont des permis de cabotage, non pas seulement à partir de Sept-lles,
comme on a pensé le faire, mais à partir de Halifax jusqu'aux
Grands Lacs, soient non seulement réparés dans les chantiers
maritimes canadiens, mais y soient aussi construits, en ce qui concerne les
nouveaux navires. Il ne s'agit pas de revenir en arrière, mais, pour les
nouveaux navires, nous pourrions réserver un certain pourcentage,
à déterminer, de construction dans les chantiers maritimes.
En ce qui concerne la porte ouverte qui est faite aux navires construits
dans les pays du Commonwealth, qui ne sont pas assujettis à la taxe de
25% à l'importation lorsqu'ils sont importés au Canada, il s'agit
vraiment d'une loi de l'inertie qui ne tient pas compte que la Grande-Bretagne
a déjà joint le Marché commun européen, que nous
avons perdu les préférences tarifaires pour nos produits dans
leur accès en Grande-Bretagne et que, par conséquent, nous avons
une démonstration que nous continuons à accorder des
préférences à des pays du Commonwealth au détriment
de nos chantiers maritimes et que ceci devrait être corrigé dans
les plus brefs délais. (20 h 45)
Ceci serait de nature, si cette loi du cabotage était
adoptée dans les meilleurs délais je pense à
l'automne, par exemple à peut-être diminuer
considérablement les prévisions qu'ont faites la SGF et Marine
Industrie. Les prévisions de Marine Industrie et de la SGF vont de 1000
à 600 pertes d'emplois. Elles sont établies dans le cadre d'une
rationalité purement interne de l'entreprise, mais, si les gouvernements
font leur travail, il est possible que ceci soit complètement
enrayé et que nous puissions avoir des chantiers maritimes qui soient
prospères. Il est absolument illogique que des chantiers maritimes
situés sur la plus grande voie navigable au monde, le Saint-Laurent,
soient en difficultés. Je pense que ceci est absolument inacceptable et
est simplement le reflet de l'absence de politique dans le domaine des
chantiers maritimes.
Evidemment, le cas des chantiers maritimes du Québec est encore
plus patent, parce que nous sommes un peu entre deux tenailles. Je pense que
ceci est extrêmement bien étayé par le document qui a
été rédigé par le comité
interministériel des fonctionnaires qui s'appelle "Rapport du
comité d'étude sur l'avenir des grands chantiers maritimes du
Québec." D'une part, avec la voie maritime du Saint-Laurent, nous nous
rendons compte que le port de Québec et le port de Montréal, qui
étaient quand même des ports terminaux pour le cabotage, ont
considérablement diminué dans leur importance, de sorte qu'une
compagnie comme Canada Steamsphip Lines, possédée par Power
Corporation, qui était le propriétaire de la Davie Shipbuilding,
s'est maintenant désengagée de son chantier maritime privé
qui était la Davie Shipbuilding pour aller développer le chantier
de Collingwood en Ontario, parce que, maintenant, avec la voie maritime, il
s'agit de faire réparer les navires tout près de la tête
des Grands Lacs, tout près de Port Arthur et de cette région.
D'autre part et ceci est un fait qu'il nous faut souligner
avec la loi fédérale du Maritime Freight Act, il en coûte
moins pour expédier par chemin de fer des produits en provenance de
Halifax jusqu'à Toronto que de Montréal jusqu'à Toronto,
de sorte qu'on a diminué l'importance stratégique qu'occupaient
les ports du Saint-Laurent et, par ricochet, on a diminué,
évidemment l'achalandage que recevaient naturellement les chantiers
maritimes qui réparaient les navires ou qui en construisaient. Donc, il
s'agit ici d'une position fondamentale.
Si jamais le gouvernement fédéral refusait d'agir sur ce
plan, je reprendrais la phrase de la CSN, c'est qu'il y a ici une
volonté de laisser les chantiers maritimes du Québec aller
à la dérive, ce qui n'est pas la volonté du gouvernement
du Québec. Là, il faut reconnaître que le gouvernement du
Québec ne peut pas à la fois être un gouvernement
provincial et un gouvernement national, et qu'il va falloir que ceux qui ont
les responsabilités, prennent les responsabilités que leur
accordent les pouvoirs qu'ils détiennent. Cela doit être
très clair. La position du gouvernement du Québec est très
claire. Les ports du Saint-Laurent doivent être des ports
prospères à cause de l'importance de cette voie navigable. Les
chantiers maritimes qui y sont rattachés ne devraient pas être des
secteurs mous, mais devraient être des secteurs prospères. C'est
parce qu'on les laisse dépérir qu'ils sont en difficulté,
évidemment, dans le grand contexte qu'en ce qui concerne les
marchés internationaux, les chantiers maritimes du Canada font face aux
mêmes problèmes que tous les chantiers maritimes du monde. Ce qui
est inacceptable, c'est que la crise soit plus forte ici pour un pays maritime
comme le Canada.
D'autre part, cette approche à court terme au niveau du cabotage
qui peut se faire assez rapidement, à mon avis, et qui pourrait pallier
ces difficultés qui sont annoncées, pourrait s'additionner d'une
politique à moyen terme qui serait de nature à encourager
l'industrie lourde des chantiers maritimes et l'industrie de l'acier qui lui
est évidemment tributaire. La création d'une marine marchande
canadienne, non pas dans l'orientation définitive que souligne la CSN,
c'est-à-dire une société d'Etat canadienne, mais dans le
cadre d'une politique fiscale et de subventions, de manière à
rendre l'établissement d'une pareille flotte marchande possible, serait
évidemment la solution définitive aux chantiers maritimes du
Québec, comme à ceux du Canada.
Dans le document du gouvernement du Québec, nous soulignons le
fait qu'en attendant cette décision cruciale qui nous apparaît
logique, il y a la possibilité de faire pour les chantiers maritimes du
Québec, de la part du gouvernement fédéral, ce qui a
été fait pour les chantiers maritimes des
provinces maritimes, à savoir de négocier avec les flottes
internationales de pêche, notamment les flottes russes et d'autres
flottes d'autres pays qui ont accès à la zone de 200 milles en
contrepartie de conditions posées par le gouvernement canadien, que ces
conditions s'appliquent pour le fleuve Saint-Laurent, que certaines
négociations exigeant des permis pour les flottes
étrangères dans le golfe Saint-Laurent soient imposées
à ces flottes pour qu'elles soient séparées, pour qu'elles
soient attachées à des ports de mer et à des chantiers
maritimes qui ne soient pas uniquement concentrés dans les Maritimes, de
sorte que nous serions prêts nous-mêmes à encourager ce
genre de solution. Donc, nous pourrions revenir sur cette perspective plus
positive et plus définitive à ce problème.
Il n'en demeure pas moins qu'il y a une situation inéluctable
à Marine, indépendamment de ce que pourront faire les
gouvernements. Je répète que la responsabilité des
gouvernements n'est pas celle de la SGF et de Marine. Il ne faudrait pas
mélanger ici les responsabilités.
Mais il y a une réalité inéluctable, c'est que le
chantier maritime de Marine, est assez diversifié par rapport à
celui de Davie, parce qu'il faut reconnaître que Marine est passablement
diversifiée du côté de l'hydro-électrique et du
côté des wagons. Ce n'est donc pas l'ancienne
société de chantiers maritimes qui existait du temps où le
gouvernement fédéral lui-même possédait ce chantier
en 1937.
La réalité inéluctable, c'est que, après les
contrats polonais et les deux traversiers que le gouvernement du Québec
a demandé de construire, il n'y a pas de commande internationale.
N'ayant pas de commande, il est difficile de demander à la
société de maintenir les milliers de travailleurs occupés
à la construction de navires qui ne seront pas vendus. Je ne crois pas
avoir compris, dans le mémoire de la CSN, qu'on suggérait que
Marine construise d'autres navires semblables à ceux qui ont
été vendus aux Grecs et qui n'ont pas été
livrés, finalement, pour que nous ayons dans la rade de Sorel une
série de navires invendus.
Le problème de Marine, c'est qu'elle n'a pas de navire à
construire. Nous pourrions nous enfouir la tête sous le sable et dire
qu'il n'y a pas de problèmes, mais c'est un problème auquel il
faut faire face. Je ne crois pas que la solution soit de construire des navires
s'il n'y a pas de commande. Je crois qu'une partie de la solution, c'est de
créer des commandes et que les gouvernements et tous les agents qui sont
impliqués fassent en sorte qu'il y ait une amélioration dans le
carnet de commandes. S'il n'y a pas de commandes au plan international, nous ne
pouvons pas demander à Marine de construire des navires qui ne seront
pas vendus uniquement pour maintenir l'emploi et accumuler les déficits
afin d'éviter un chômage dans la division navale qui, sans trop
charrier, a toujours eu une fluctuation cyclique dans le passé.
Marine n'est pas un ministère, n'est pas une division d'un
ministère qui peut se permettre de garder, assurer la permanence
d'emploi. C'est en fonction de la production réalisée qu'elle
peut justifier son emploi, de sorte qu'on se trouve ici avec les sujets
très intéressants et les suggestions très positives qui
ont été soulevées dans le mémoire de la CSN pour
élargir considérablement le débat, comme il faut le
faire.
Je ne crois pas, par contre, que nous puissions demander à Marine
ou à la SGF de prendre sous sa responsabilité ces
décisions de politique industrielle. Je pense que Marine doit faire ce
que nous attendons d'elle, c'est-à-dire produire les navires qu'elle a
en commande avec le minimum de pertes et on sait que les pertes vont devenir
importantes, celles que nous considérons, et il ne serait pas dans
l'intérêt des organisations syndicales d'augmenter ces pertes par
des ralentissements additionnels. Je ne crois pas qu'il soit, dans la
conjoncture actuelle, dans l'intérêt de quiconque de contribuer
aux problèmes de Marine au moment où nous nous parlons. Je pense
qu'il est dans l'intérêt de tout le monde de contribuer à
la relance de Marine, pourvu que tous les autres intervenants amènent la
même contribution que la SGF et Marine ont eu le courage d'amener dans le
cadre de ce programme de redressement.
Je conclurais mes remarques, à la suite du mémoire de la
CSN, en disant premièrement que je suis d'accord avec son orientation
générale; deuxièmement, qu'il ne faudrait pas croire que
le gouvernement du Québec va injecter de nouveaux fonds dans Marine, il
n'y a pas de nouvelle loi prévue au cours des mois à venir ou
dans la saison à venir, en ce qui concerne de nouvelles injections de
fonds dans Marine; ce serait aller injecter des fonds dans un tonneau des
Danaïdes si nous allions dans cette direction. Il faut qu'il y ait une
rationalisation de ce secteur, mais il faut en même temps que les
gouvernements renforcent l'importance économique de ces secteurs et
débloquent des commandes, soit par réglementation, soit par
décision politique, en ce qui concerne les frégates
fédérales et en ce qui concerne des traversiers ou d'autres
commandes découlant du gouvernement du Québec.
De sorte que je pense que le problème est bien posé, mais
il ne faudrait pas que quiconque s'illusionne sur les façons de
résoudre ce problème sans coût. Aussi longtemps que Marine
n'aura pas de commandes, elle ne pourra pas garder la totalité des
employés dans la division navale. Aussi longtemps qu'on ne fera pas face
à ce problème, je pense qu'on passera à côté
des solutions qui sont nécessaires.
M. le Président, je dirai que, dans les semaines qui vont venir,
le gouvernement du Québec, en collaboration avec les syndicats et avec
les dirigeants des deux ou trois chantiers maritimes du Québec, sera
prêt à aborder la question d'une façon plus
compréhensive et sur une base de front commun, mais je ne crois pas que
nous puissions ce soir arriver à des consensus définitifs sur ces
questions.
La raison pour laquelle la commission parlementaire a été
convoquée aujourd'hui, ce n'est
pas de résoudre tous les problèmes, parce que nous avons
des responsabilités qui sont diverses, mais je répète que
la responsabilité de la SGF et la responsabilité de Marine
s'inscrivent dans le cadre d'une loi, mais que nous pourrons, au cours des
jours qui viennent, établir des coordonnées d'action face au
gouvernement du Québec et face au gouvernement fédéral,
qui pourront nous permettre de refaire, dans ce secteur mou, ce qui a
été fait dans d'autres secteurs mous. Parce qu'on avait
déjà condamné d'autres secteurs mous de l'économie,
dans le passé, et cette cohésion entre les intérêts
de tous les participants nous a permis de faire que le secteur de la chaussure,
le secteur des meubles, le secteur du vêtement, le secteur du textile
aujourd'hui, sont des secteurs qui ont passé à travers leur crise
et qui sont en pleine relance. En ce qui me concerne, je crois que, dans un an
ou deux, s'il y a de la bonne volonté de toutes parts, nous serons, au
plan international quand même, au Québec, une puissance dans les
chantiers maritimes.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M.
L'Heureux.
M. L'Heureux: Merci, M. le Président. Le ministre
était absent, à cause d'autres occupations pressantes qu'on
connaît, au moment où on a parlé... Je vous
répète, au départ, ce que j'avais dit à ce moment,
c'est que j'ai participé aux premières sessions de la commission,
lors du dépôt de la loi 108 et avant, et j'estime que l'attitude
générale ou la prise de conscience générale au
niveau des membres du gouvernement, comme des membres de l'Opposition, est fort
différente, et nous réjouit beaucoup.
Je voudrais, au départ, faire un commentaire sur certains aspects
que vous avez analysés. Je ne dirais pas, M. le Président, que la
décision, en 1965, d'acquérir le chantier de Marine, par le
gouvernement du Québec, ait été une erreur. Je sais fort
bien dans quel contexte ou dans quel esprit vous le faites, à savoir la
sorte de critique, parfois négative, qui provient de certains milieux,
quant à la marche ou aux opérations d'une société
d'Etat. Je ne m'étendrai pas là-dessus, mais je pense, j'estime
que la décision du gouvernement du Québec, en 1965,
d'acquérir Marine Industrie, quelles que soient les modalités
qu'on pourrait analyser, est une excellente décision, comme celle de
SIDBEC, etc. (21 heures)
Ce n'est pas parce qu'il y a des problèmes aujourd'hui qu'on doit
regretter cette décision qui s'inscrit, quant à nous, si on
regarde ce qui se passe dans la plupart des pays occidentaux, dans un grand
nombre pour être plus juste de pays occidentaux
capitalistes, dans une tendance à nationaliser les chantiers maritimes.
Il en reste un en Suède un chantier privé qui est en
faillite qui va être acheté par le gouvernement
suédois qui n'est pas socialiste ou social-démocrate, mais qui
est libéral.
M. Tremblay: Ce chantier n'est pas acheté par une province
de la Suède.
M. L'Heureux: Non, sauf que je... Oui... Que ce soit une province
ou une autre, un gouvernement du Québec; celui-ci, j'imagine, va prendre
d'autres décisions très positives comme celles-là...
M. Tremblay: M. L'Heureux, on a parlé de $1 500 000 000 de
frégates; si le gouvernement du Québec avait $300 millions ou
$400 millions de frégates à commander, s'il avait tant de
millions de dollars de méthaniers à commander, s'il avait toutes
sortes de contrats semblables à commander, le plan de redressement de
Marine Industrie aurait été résolu au départ. Nous
nous trouvons ici dans une situation où, comme on l'a souligné
justement, les gouvernements ont énormément d'importance dans la
survie de ces chantiers maritimes puisque les commandes internationales
étant à terre, ce sont les commandes intérieures qui
peuvent amener la solution temporaire, à court et à moyen terme,
aux chantiers maritimes.
Or, un gouvernement provincial ne peut pas commander des chaloupes
Verchères. Il faut qu'il commande des bateaux d'acier, etc. Dans le
domaine de la pêche maritime qui relève du gouvernement du
Québec, nous avons mis $90 millions pour construire 232 navires de bois
de 60 pieds et de 45 pieds. Donc, nos petits chantiers maritimes à nous
vont fonctionner à plein, mais, pour les grands chantiers maritimes, il
faudra avoir des commandes d'armement, des commandes comme des brise-glace, des
commandes de cet ordre et c'est pour ça que je dis qu'un gouvernement
provincial qui nationalise tous les chantiers maritimes sans avoir les
commandes à leur passer, à mon avis, n'a pas la bonne approche.
Un gouvernement national, je suis d'accord avec vous. Ou il subventionne
fortement ou il passe des commandes.
M. L'Heureux: Tout ce que je voulais souligner, M. le
Président, c'est que la décision du gouvernement du
Québec, même si c'était une province libérale
à l'époque, d'acheter un chantier naval collectivement
était une bonne décision. Deuxièmement, j'estime... Je
pense à l'aspect négatif; au départ, on fait toujours
ça; parfois, on passe à l'inverse et on dit: ceci dit, et on se
met à attaquer, mais j'inverse la méthode. Par ailleurs, je ne
pense pas que, dans le même esprit et avec ce que j'ai dit tantôt
de la tendance aux nationalisations dans certains pays occidentaux
libéraux, les subventions et les exemptions fiscales soient vraiment,
comme le ministre l'a dit, la solution. Au contraire, je pense que les
éléments de nos analyses le démontrent. Quant à
nous, il faut regrouper les chantiers et on ne peut pas, on ne pourrait pas
imposer, j'imagine, à la direction actuelle de Marine Industrie,
société d'Etat, de s'accointer je m'excuse de dire
ça avec les ex-membres de la direction qui sont à la Davie
Shipbuilding. Je passe là-dessus...
D'autre part, je voudrais corriger. Malgré la déclaration
qui a été faite par le président du syndicat et qui
correspond à la réalité, il n'y a pas de ralentissement
additionnel parce qu'il n'y a pas de ralentissement comme tel. Il a pu y avoir
hier des réunions de certains membres au chantier, mais on ne peut pas
parler de ralentissement additionnel dans le chantier.
Quant à l'analyse générale que le ministre a faite,
je pense que c'est le temps de la faire. D'ailleurs, le gouvernement l'a faite
aussi, on le reconnaît, il l'a faite au niveau de la loi 108, il l'a
faite par le ministère au niveau du comité qui a pondu un rapport
que je n'ai pas lu encore, mais dont j'ai vu des éléments et qui
nous réjouit beaucoup, quant à certaines grandes lignes qu'on a
vues... L'attitude et j'espère qu'elle est partagée, et je
pense qu'elle l'est parce que j'ai entendu des représentants de l'Union
Nationale et du Parti libéral dans ses grandes lignes, quant aux
transformations à apporter aux lois régissant le transport
maritime, lois qui sont fondamentales si on veut transformer tout le secteur de
la construction navale, je crois qu'il y a et c'est étrange qu'on
ait à dire ça, mais c'est la réalité une
unité de point de vue quant aux solutions générales et
particulières à apporter au problème de la construction
navale et du transport maritime au Québec et au Canada. Au
Québec, notamment, puisque nous y sommes.
Cependant, vous nous avez posé une question
c'est-à-dire que nous vous avons demandé la création d'un
comité pour suspendre jusqu'en septembre, quant aux aspects
concrets, l'application du plan de redressement, surtout quant à la
section navale. Notre demande est quand même raisonnable, nous sommes
déjà à la mi-juin, il s'agit de suspendre toute
décision quant à ce projet. Vous nous demandez de participer
à un bureau de la construction navale, des chantiers maritimes. Cette
décision ne pourra être prise, quant à nous, que par les
syndicats concernés. Cependant, à ce stade, est-ce qu'il serait
possible, M. le Président, que le ministre envisage des rencontres dans
le sens où nous l'avons fait dans notre mémoire, avec les
sociétés d'Etat concernées, la SGF, Marine, le
ministère et les auteurs du rapport ministériel publié
hier, afin qu'on précise certains aspects qui sont très
complexes, qu'on ne peut pas élaborer ici à la fois du
rapport du ministère et des sociétés concernées,
des attitudes aussi des syndicats intéressés.
Mais semble-t-il, dans un premier temps, ce serait important qu'on
définisse, à partir de tous ces rapports et des
sociétés concernées, certains aspects des politiques
à envisager avant qu'une décision, parce que l'impression que
j'ai, c'est que le plan de redressement comme tel serait adopté, en
principe, je crois qu'il l'a été, au fond, par le Conseil des
ministres peut-être ou par un groupe de ministres... On vous demande de
suspendre la décision, si possible, jusqu'au 1er septembre ou au 15
septembre environ. Il me semble que c'est une demande assez raisonnable.
Il est vrai, quand vous nous dites: Qu'est-ce qu'on fait devant Marine?
Qu'on ne s'attende pas qu'on construise des bateaux pour les laisser en rade
à Sorel. M. le Président, je pourrais vous dire à ce
moment-là, je pourrais citer des exemples d'autres pays qui ont
stocké les bateaux. Je ne demande pas ça pour l'instant, ce n'est
pas ce qui est en cause. Ce qu'on demande, avant tout, c'est d'avoir une
assurance et on se l'est dit dès le départ, dès la
première commission parlementaire qu'il y a eu, on ne l'a pas
présentement, on l'a dit clairement, je comprends que ce n'est pas
surtout le gouvernement du Québec qui est responsable là-dedans,
sauf qu'à notre niveau et au moment où on se parle
présentement, il me semble qu'on ne peut pas accepter le projet
intitulé "Projet de redressement du chantier maritime de Sorel";
chantier maritime, il n'en serait plus, dans les conditions actuelles.
Je vais m'avancer un peu, mes camarades me regardent. Si nous avions
l'assurance que certaines positions, certaines orientations qui vont dans le
sens de celles qui sont contenues dans notre brochure bleue et dans le
mémoire d'aujourd'hui, allaient être sérieusement
épousées et adoptées par le gouvernement, nous serions
prêts à envisager d'autres formules. Mais il faut cette
volonté au départ.
C'est la question qu'à ce stade-ci on veut poser au ministre,
parce qu'il ne s'agit pas seulement, quand il dit: II n'est pas question
Ah oui, ça aussi, ça m'a énervé, à la fin
d'ajouter des fonds à Marine.
M. le Président, si telle est l'intention du ministre, je ne sais
pas s'il représente le point de vue du gouvernement, je crois que nous
ne nous sommes pas fait comprendre suffisamment. L'analyse que l'on fait des
problèmes de la construction navale, de la vocation maritime du
Québec et du Canada signifie qu'il va falloir, et je n'ai pas de base
pour chiffrer, mais j'estime, compte tenu du passé, compte tenu de ce
qu'on sait qui s'est fait annuellement et depuis vingt ans en Suède ou
ailleurs dans le monde, là où on a développé,
malgré les problèmes qu'ils subissent maintenant, des centaines
de millions de dollars pour transformer les chantiers maritimes du
Québec, pour qu'ils deviennent de véritables chantiers maritimes,
avec laboratoires de recherche, des cales sèches adéquates, de
l'outillage adéquat.
Cette réponse du ministre, à ce stade-ci, ne nous
satisfait pas, évidemment. J'espérerais donc et ce n'est
pas ici qu'on peut décider cela de la part du gouvernement que
notre proposition de rencontre vous la souhaitez souvent, notre
collaboration. On vous l'offre à ces conditions, ce ne sont pas de
grosses conditions. Que les sociétés d'Etat concernées,
les ministères concernés, ceux qui ont fait des études
tentent ensemble d'élaborer, de préciser certains aspects qui ne
l'ont pas été encore, entre nous, avant de procéder au
bureau que vous souhaitez. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. L'Heureux. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre, voulez-vous
répondre immédiatement?
M. Tremblay: M faut se rendre compte que nous sommes aujourd'hui
le 6 juin et que nous avons discuté de la faillite imminente de Marine
Industrie en décembre 1978. Il ne s'agit donc pas d'un problème
récent.
En décembre, nous avons fait une intervention pour Marine
Industrie que nous n'aurions peut-être pas faite, en tant que
gouvernement provincial, pour Davie Shipbuilding ou pour Vickers. C'est
à ce titre que je dis que la décision de 1965, pour un
gouvernement provincial, de se lancer dans les chantiers maritimes, n'ayant pas
de demandes, de commandes à donner à ces chantiers maritimes,
créait une distorsion. Quand on donne des exemples de la Suède et
de la France, il s'agit de gouvernements nationaux, qui ont des marines
militaires et qui ont toutes les demandes qu'un gouvernement national a. Donc,
il ne s'agit pas de rêver en couleur. Je ne suis pas moi-même
habitué à rêver en couleur.
Il serait donc absolument irréaliste de croire qu'un gouvernement
provincial puisse prendre le contrôle des chantiers maritimes avec un
statut de gouvernement provincial, à moins qu'on ne soit prêt
à demander aux contribuables de verser des fonds sans production,
uniquement pour maintenir de l'aide sociale. Et même l'aide sociale,
c'est payé à 50% par le fédéral et 50% par le
provincial.
En vertu de quels principes demanderait-on aux contribuables du
Québec de maintenir de l'emploi artificiel dans des chantiers maritimes,
alors que le gouvernement provincial n'a pas de contrat à donner
à ces chantiers maritimes? Il y a un illogisme évident!
Par la loi 108, on a un gouvernement provincial qui a quand même
injecté $10 millions de subventions, $18 millions de prêts et une
garantie de $17 500 000 pour six navires. Il s'agit, je pense, d'une
intervention substantielle. J'aurais aimé voir un gouvernement de la
Nouvelle-Ecosse ou de la Colombie-Britannique faire la même chose. Je
suis bien prêt à croire que le gouvernement du Québec a un
statut particulier, mais les contribuables, après un certain temps, en
ont marre du statut particulier. Il va falloir que ceux qui ont les
responsabilités et qui reçoivent les impôts s'occupent
aussi de se servir de ces impôts pour assumer leurs
responsabilités. Il n'est pas du tout dans l'intention du gouvernement
du Québec de se substituer au gouvernement fédéral dans
toutes ces responsabilités face aux chantiers maritimes. Que ceci soit
très clair. C'est la position du gouvernement.
Ceci doit être très clair, parce qu'on a parfois cette
tentation de dire que les impôts vont à Ottawa, mais que les
problèmes sont solutionnés par le gouvernement du Québec.
Tant que le référendum n'aura pas solutionné ce
problème fondamental, je n'ai pas l'intention, comme ministre de
l'Industrie et du Commerce et comme membre du gouvernement, de prendre sur mes
épaules tous les problèmes économiques, surtout dans un
domaine comme celui-là. Il y a certains domaines qui relèvent de
nous, mais il y a certains autres domaines qui, par définition, comme la
commande de frégates de guerre, ne relèvent pas de nous. Il est
évident que les commandes de frégates, ce serait utile,
présentement, pour Marine Industrie ou pour Davie Shipbuilding. On ne
peut pas créer à partir de rien. (21 h 15)
II y a un dicton qui dit: Chacun son métier et les vaches seront
bien gardées. L'Assemblée nationale a donné un mandat
à la SGF, ce n'est pas le gouvernement tout seul, c'est
l'Assemblée nationale. Il y a une Loi de la SGF et la SGF a un mandat de
rationaliser ses opérations. Elle a un mandat de faire en sorte que ses
filiales soient rationalisées. La SGF a rempli son mandat. Il n'est pas
du tout question que nous retardions l'application de ce mandat. La SGF a
proposé un plan de redressement. Ce plan a été
adopté par le gouvernement et ce plan est en marche au moment où
nous nous parlons. Nous regardons maintenant l'avenir. Nous pourrons noyer le
poisson et essayer de retarder l'inéluctable, cela ne résoudra
pas du tout le problème.
Je pense qu'au niveau de l'entreprise, les décisions ont
été prises et elles sont entérinées par
l'actionnaire, comme elles doivent être, en fonction du mandat de
l'Assemblée nationale.
Maintenant, que peut faire le gouvernement du Québec, d'une part,
dans la contribution qu'il peut apporter à ce secteur industriel? Le
gouvernement du Québec peut apporter une contribution objective et une
contribution de leadership. Le simple fait que nous soyons ici pour en discuter
témoigne du leadership que le gouvernement du Québec prend dans
ce dossier, parce que nous pourrions être à une commission
parlementaire, à la Chambre des communes, à Ottawa, au moment
où nous nous parlons, dans un domaine qui traite de chantiers maritimes,
le domaine des ports, où Transports Canada a une très grande
autorité. Nous parlons de la zone de 200 milles. Nous parlons de
frégates militaires. Il est évident qu'en ce qui concerne le
mémoire de la CSN du mois de décembre, vos six recommandations
s'adressaient toutes au gouvernement fédéral. Le gouvernement du
Québec use ici d'une prérogative de leadership, d'une
prérogative de subventions dans la loi 108 et d'une prérogative
de solutions à venir comme nous le mentionnons dans le document qui a
été déposé à l'Assemblée nationale.
La contribution du gouvernement du Québec, nous ne la limitons pas du
tout, à l'exception de camoufler le problème. Je n'accepterai
jamais que nous camouflions le problème, que nous nous mettions la
tête dans le sable. Ce ne serait pas un service à rendre à
l'industrie, ce ne serait pas un service à rendre aux travailleurs et ce
ne serait certainement pas un service à rendre à la population du
Québec.
Quelle est la contribution du gouvernement fédéral? Je
pense qu'elle est de plus en plus étayée, cette contribution.
Comme nous avons dans Marine Industrie, dans la Davie Shipbuilding et dans
Vickers presque 50%, selon les années, un peu plus, de l'activité
des chantiers maritimes, il est évident que nos représentants
au
Parlement fédéral ont une responsabilité. Le
nouveau gouvernement aura aussi une responsabilité face à nos
chantiers maritimes. Le Bureau des chantiers maritimes que nous proposons, s'il
est établi dans les jours ou dans les semaines qui viennent et
nous sommes prêts à bouger très rapidement sur cela
pourra proposer des recommandations fermes. Le gouvernement du Québec
peut le faire tout seul, mais je pense qu'il serait dans l'ordre que tous le
fassent.
Quelle est la contribution des entreprises, pour ce qui concerne Marine
Industrie et la SGF? Je pense que nous sommes ici pour entendre leur
contribution. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu de remarques dans
le sens qu'elles n'ont pas fait leur travail, je pense qu'elles l'ont fait de
façon extrêmement compétente et courageuse.
Quelle est la contribution des syndicats aux problèmes qui
existent dans ces secteurs? Je pense que le député Martel a
soulevé le fait qu'il y a eu des comités de consultation. Il est
évident que ce ne sont pas des comités décisionnels, parce
que ne peut décider à la toute fin que celui qui paie. Mais il
est évident que, dans un problème semblable, il doit y avoir une
contribution aux solutions plutôt qu'une contribution aux
problèmes et que la situation qu'affronte Marine Industrie est une
situation qui est sérieuse, du moins à court terme, une fois que
les contrats polonais auront été complétés.
Je pense que la situation est claire. Il n'y a pas de solution facile
autre que de mettre des millions, et des millions et des millions, mais mettre
des millions et des millions, ce n'est pas une solution, ce ne serait que
camoufler le problème.
Il y a des indications que nous pouvons relancer ces opérations
sur une base plus solide. Il est normal que Marine Industrie veuille
développer ses secteurs forts et minimiser ses secteurs faibles.
D'ailleurs, toute société doit le faire, toute économie
doit le faire. Ce problème que nous avons dans le secteur maritime,
c'est un peu ce que nous avons dans les secteurs mous. Quand vous avez tous les
pays en voie de développement, la Corée, le Brésil,
Singapour qui se lancent dans la construction maritime, alors que les salaires
ici sont dix fois, vingt fois plus élevés, il est évident
qu'il ne faut pas croire que ces secteurs vont être des secteurs en
très forte croissance dans les prochaines années. Il est
évident que ce ne seront pas des secteurs en forte croissance. Ce sont
des secteurs en consolidation. Nous devons faire en sorte que la
spécialisation qui se produit permette de sauvegarder les salaires et
les emplois.
Dans le cas de Davie, on a soulevé je le
répète encore qu'il y a eu une diminution de l'emploi de
3200 à 1200. Malgré la reconversion, il n'y a pas eu de
commission parlementaire, parce qu'elle n'était pas
propriété d'Etat. Devant des faits inéluctables, il y a
des ajustements qui sont aussi inévitables, quel que soit le pays. Au
Japon, il y a eu des douzaines de chantiers maritimes qui ont fermé. En
France, la moitié de l'industrie sidérurgique est fermée.
Une grande partie des chantiers maritimes sont fermés. En Suède,
une bonne partie des chantiers maritimes sont fermés, parce qu'on ne
construit pas de navires qui ne sont demandés par personne. C'est un
fait inéluctable.
S'il y a d'autres membres de la commission qui ont des questions
à poser, je pense que nous pourrions continuer l'interrogatoire.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont a quelques questions à poser.
Les chantiers navals
M. Raynauld: M. le Président, je pense que les gens de la
Société générale de financement et surtout de
Marine sont quand même des professionnels qui travaillent dans ce
domaine. Je voudrais leur demander leur propre estimation, leur demander en
même temps s'il y a eu des études de faites chez eux pour savoir
quel serait l'impact, sur l'entreprise ou sur l'industrie dans son ensemble des
chantiers navals, s'il y avait des changements dans les politiques. Par
exemple, créer une marine marchande, pour des gens qui sont dans le
milieu et qui connaissent ce domaine, est-ce que cela a un gros impact? Est-ce
que c'est quelque chose, compte tenu des besoins de construction, compte tenu
du fait qu'il existe déjà une certaine construction de navires
canadiens pour les Grands Lacs, compte tenu, en tout cas, des facteurs
pertinents, quelle serait l'estimation des impacts de changements de
politiques? Après cela, je voudrais vous demander: Parmi les changements
de politiques qu'on peut envisager, en particulier au niveau
fédéral, quels sont les changements de politiques qui seraient
les plus productifs, si je peux dire, en termes d'emplois ou en termes de
production, dans le domaine des chantiers navals ou dans le domaine de la
construction de bateaux? Il me semble qu'on devrait profiter de votre
présence pour que vous nous disiez un peu ce que vous pensez qui
pourrait être fait ou qui serait susceptible d'être fait et qui
pourrait avoir un impact positif pour le développement de Marine dans le
domaine des chantiers navals.
M. Brisson: J'ai participé moi-même au groupe de
travail du ministère de l'Industrie du fédéral dans le
secteur de la construction maritime. Les remarques que je vais faire viennent
évidemment de travaux qui ont été faits à ce
moment, parce que Marine en soi n'a pas fait une étude de marché
pour déterminer quel impact cela pourrait avoir si certaines politiques
maritimes changeaient.
Dans ces travaux qui ont été faits
évidemment, ils n'ont pas été aussi justes, aussi profonds
que M. le député le propose il y a eu tout de même
certaines remarques de faites suivant lesquelles un changement de politique
n'aurait pas un effet à très court terme. Par exemple, un
changement de politique qui changerait les conditions présentes de la
flotte hauturière aurait pour effet de rapatrier les flottes
déjà existantes, parce qu'on sait que plusieurs compa-
gnies canadiennes ont des flottes qui sont déjà
enregistrées sous des drapeaux qu'on dit de "convenience".
A ce moment-là, il faudrait faire une étude de ces flottes
quant à leur âge, le taux de remplacement et le taux de
croissance. On a estimé, a ce moment-là, que ça prendrait
déjà peut-être trois à quatre ans avant que l'effet
s'en fasse sentir. Or, à court terme, ça ne résout pas
notre problème immédiat. La nécessité de transport
au Canada n'augmentera pas du fait d'un changement de politique. Alors, il faut
penser à une évolution, tout de même dans toute loi qui
sera mise. Alors, ce que je voulais faire remarquer, n'ayant pas... Oui?
M. Tremblay: Là, vous parlez toujours de construction de
nouveaux bateaux pour les flottes de Canadien Pacifique ou d'autres qui sont
enregistrées aux Bermudes.
M. Brlsson: Oui.
M. Tremblay: Mais pour la réparation de navires?
M. Brlsson: Dans le cas de la réparation de navires, oui,
cela aurait un impact immédiat. Mais la réparation de navires
représente chez nous environ 10% de la capacité du chantier
à l'heure actuelle. Tout de même, si on doublait la
capacité, ça ne remplacerait pas l'activité de
construction présente. C'est pour cette raison que je m'attaquais
à tel autre problème.
Ce que je voulais faire remarquer, c'est que je ne peux pas vous donner
de quantité à l'heure actuelle, mais seulement, ça ne
solutionnait pas le problème à court terme. Les autres
politiques, par exemple, la question de l'Arctique, est aussi quelque chose qui
va, si la politique était en faveur des chantiers maritimes canadiens,
favoriser substantiellement, mais, encore là, ce seraient des politiques
qui nous permettraient de faire de la planification à long terme, mais
qui ne solutionnerait pas le problème de 1979/80. C'est la remarque que
je voulais faire, M. le Président.
M. Martel: Avec l'association... et la Loi du cabotage?
M. Brlsson: Même dans ce cas...
M. Martel: Si on oblige que ce soit, comme aux Etats-Unis, 50%
des bateaux construits au Canada qui sillonnent nos eaux, il me semble que cela
aurait des répercussions assez immédiates.
M. Brlsson: Oui, c'est susceptible d'affecter cette loi. Il faut
tout de même qu'on... L'impression générale, c'est qu'il
fallait tout de même avoir une période de transition entre une loi
qui, présentement permet le cabotage et celle qui ne le permettrait pas.
Cela pourrait avoir un effet, mais, tout de même, pas pour 1979 et
très peu pour 1980, parce qu'avant que la loi soit adoptée et
avant que les commandes prennent place, il faut bien penser que même
entre la commande d'un bateau et le début des travaux, il y a au moins
une période de six mois. C'est une question de temps que je voulais
mentionner surtout.
Le Président (M. Lefebvre): M. L'Heureux, vous avez
quelque chose à ajouter sur ce point?
M. L'Heureux: M. le Président, il est évident que
c'est vrai, on le sait fort bien, que, compte tenu de la situation objective
actuelle et la situation est très difficile, qu'il est impossible de
prévoir des solutions magiques il n'y en a pas dans les
mois qui viennent.
C'est un ensemble de mesures qui sont nécessaires. Certaines
touchent les lois fédérales, certaines touchent les politiques
générales de construction navale, d'autres, formelles, et c'est
un peu dans ce sens-là que le plan de redressement et la réponse
que j'ai eue tantôt du ministre sont insatisfaisants. D'accord, on est
dans un cul-de-sac, au moment où on se parle. Les spécialistes
nous disent qu'il va y avoir une reprise en 1982. Nous, dans notre
mémoire, notre analyse de base, avons démontré que
justement il fallait un ensemble de transformations des politiques canadiennes
et qu'il fallait se tourner vers le marché intérieur canadien,
selon les divers ordres de besoins, tant militaires qu'autres.
C'est sûr, donc, qu'il n'y a pas de solution magique pour les
prochains mois. Cependant, nous disons: Compte tenu de la faiblesse relative de
nos chantiers maritimes quant à leur capacité comme chantiers
intégrés de compléter, de A à Z ce qui est requis
pour construire un navire et le type de navire dont on aura besoin dans les
années qui viennent, l'absence d'investissements massifs suis-je
clair? pour corriger ce qui fait que nos chantiers ont toujours
été à la merci d'un contrat et du chômage cyclique.
(21 h 30)
Tant qu'il n'y aura pas d'investissements pour corriger cette situation,
on va être constamment dans un cercle vicieux. En 1982, s'il y a à
peine $2 millions d'investissements dans la section navale, pendant qu'on coupe
un pourcentage de son aire de production pour la transformer pour la production
de wagons, par exemple, et qu'on n'investit pas massivement et qu'on ne
regroupe pas nos chantiers, où nous trouverons-nous, en tant que
capacité de construction navale, quels que soient les changements
apportés par des lois? Disons que le gouvernement fédéral
décide finalement de canadianiser davantage les lois sur le transport
maritime et la construction navale, où seront-ils, nos chantiers du
Québec, s'il n'y a pas les investissements nécessaires
maintenant, en sachant que ces investissements ne répondront pas
nécessairement au problème de chômage qu'on subit
présentement et qu'on aura peut-être à subir pour un an ou
deux?
Vous comprenez évidemment, M. le Président, que c'est une
situation héritée du passé et dont personne, ici, n'est
responsable; c'est hérité de dizaines d'années d'incurie,
mais pour sortir du
cercle vicieux, il y a des décisions qui doivent être
prises maintenant. C'est dans ce sens qu'on dit que le plan de redressement
abandonne effectivement en fonction des politiques traditionnelles. Je sais
bien que ce ne sont pas M. Coulombe ou M. Brisson et les autres qui sont
responsables, ils attendent des décisions politiques, une volonté
politique. Il n'y a pas seulement le fédéral qui en soit
responsable non plus. Je suis bien prêt à reconnaître que,
au provincial, au Québec, malheureusement, le provincial ne s'est pas
préoccupé de ça non plus, sauf en 1965
peut-être.
Ce qu'on dit, c'est que pour que Marine et Davie, les chantiers du
Québec, soient concurrentiels, combien de temps cela va-t-il prendre? On
le sait fort bien dans les chantiers maritimes. Avant de construire un nouveau
bateau, il y a des dessins, ça prend beaucoup de temps. Avant de
transformer un chantier naval, compte tenu de l'état dans lequel ils
sont, leur capacité réelle de satisfaire tous les besoins de
construction d'un navire, il va falloir aussi plusieurs années, donc
beaucoup d'argent. C'est ce qu'on dit.
M. le Président, je regrette que le ministre ait repris le
raisonnement du chef d'un autre parti cet après-midi, en
réduisant ce qu'on fait dans les chantiers maritimes à de l'aide
sociale. C'est malheureux! Peut-être était-ce un lapsus, parce
que, économiste comme il est, il doit reconnaître, s'il partage un
peu nos points de vue je sais que la direction de Marine, de la SGF et
bien des gens le font; les constructeurs maritimes aussi que contribuer
à bâtir ou à rebâtir une industrie de construction
navale, ce n'est pas de l'aide sociale, c'est contribuer au
développement économique du pays.
M. Tremblay: M. le Président, je pense que ce que
soulève M. L'Heureux est fondamental et il faudrait peut-être
l'éclairer.
Selon le postulat qui est établi, Marine aurait dû
consacrer, dans son plan de redressement, les sommes qu'elle pouvait investir
et, si possible, en ajouter, à moderniser ses installations de
production maritime et à accroître sa capacité de
production. J'ai demandé au président de la SGF si on aurait
sauvegardé davantage d'emplois si on était allé dans cette
direction.
Je vous avoue franchement que la perception que j'ai du problème,
ce n'est pas que Marine ou Davie manque de capacité de production. Au
contraire, les capacités de production sont modernes et bien
établies, mais elles n'ont pas de bateau à construire; ce n'est
pas plus compliqué que ça.
Si vous avez des sommes à investir, $45 millions à
investir, allez-vous les investir dans des équipements et dans des
activités maritimes, alors que vous n'avez pas de contrats? Est-ce qu'il
y aura beaucoup d'emplois de créés de ce côté? Ne
devriez-vous pas investir dans des secteurs où vous avez des demandes et
des commandes en abondance, créant de l'emploi? Est-ce que
c'était un de vos scénarios je pose la question au
président de la SGF de mettre les $40 millions ou $45 millions
davantage dans la section maritime, plutôt que dans la division des
wagons ou la division hydro-électrique? Et, si c'était un des
scénarios, quels auraient été les effets sur l'emploi?
M. Coulombe: Je pense que le problème posé de cette
façon-là, la réponse est évidente et claire, c'est
dans le cadre de notre mandat et de nos responsabilités. Avoir
proposé une chose semblable, cela aurait été, à
notre avis, complètement illogique, parce que les investissements faits
dans la section des wagons sont fondamentaux pour éviter que cette
section, en quelques années, ne devienne non compétitive avec les
concurrents. Il faut absolument organiser cela sur une base un peu plus
efficace pour pouvoir profiter au maximun du haut du cycle, mais
indépendamment des cycles, d'être concurrentiels. Quant aux
investissements qui sont faits dans l'hydro-électrique, une grande
partie de ces investissements est fondamentalement nécessaire pour
remplir les commandes. Si ce n'est pas fait, les commandes ne seront pas
remplies et si elles ne le sont pas, on va avoir du chômage de plus, et
d'autres corporations ou d'autres compagnies feront ces
commandes-là.
Il y a deux points que j'ai cru percevoir dans les propositions de la
CSN exprimées par M. L'Heureux: Que les gouvernements, dans une
stratégie de développement des chantiers maritimes, investissent,
c'est une décision de développement économique qui est
à la portée des gouvernements, mais en termes d'entreprises, je
pense que j'ai donné la réponse sur les investissements qui
étaient possibles pour Marine Industrie.
Il y a une deuxième chose aussi extrêmement importante dans
ce débat-là, c'est le degré de compétitivité
de Marine Industrie. Même si les lois étaient changées,
même si, comme M. Brisson disait tantôt, les effets se faisaient
sentir dans quelques années, encore faut-il que les soumissions que fait
Marine Industrie soient compétitives. Encore faut-il que le rythme de
croissance des coûts de Marine Industrie, tant au point de vue des
salaires qu'au point de vue de l'utilisation des "assets" physiques, soit
compétitif, parce que s'il y a beaucoup de commandes et si on a des
soumissions, on gagne des soumissions mais on perd de l'argent en faisant
ça, on n'est pas plus avancés au bout de la ligne. Donc, c'est un
aspect qui est aussi fondamental que le reste, c'est-à-dire la
croissance des coûts à Marine Industrie. C'est un problème
qui inquiète grandement les autorités de Marine Industrie et,
évidemment, aussi les autorités de la SGF.
Je distinguerais bien le problème. Si on parle de politiques
gouvernementales je pense que c'est surtout à ce niveau-là
que se situe M. L'Heureux que le gouvernement concerné ou les
gouvernements décident que ce secteur-là est un secteur plus
prioritaire qu'il l'a été dans le passé, décide
qu'il faut investir massivement pour telle ou telle raison d'économie
globale, c'est un problème de gouvernement. En tant que gestionnaire des
fonds à toutes fins utiles publics qui sont
mis à la disposition de la SGF, notre raisonnement n'est pas
celui-là et notre mandat n'est pas celui-là. C'est pour ça
que le plan de redressement favorise les secteurs forts à l'heure
actuelle, tout en ne négligeant pas l'aspect naval, et cela n'a
peut-être pas été souligné suffisamment. Les
nouveaux produits dont on parlait aujourd'hui, il y a des recherches
précises qui vont se faire là-dedans, on va tout essayer,
à notre niveau, pour que cela se règle. Mais lorsqu'on discute de
stratégie générale de gouvernement, c'est à ces
niveaux qu'il faut en discuter, pas au niveau d'une entreprise qui a un mandat
beaucoup plus précis.
M. L'Heureux: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. L'Heureux.
M. L'Heureux: Merci. Quand le ministre dit: Oui, mais est-ce
qu'on a des contrats pour construire des navires? Je parle d'investissement
massif, d'équiper, en fait, nos chantiers maritimes, je me suis
peut-être mal expliqué. Il faut se rendre compte... Ecoutez, ils
sont ici, ils le savent plus que nous, plus que moi peut-être, quoique
nos gars le savent. A l'heure actuelle, une seule des frégates
prévues pour la marine militaire du Canada... Il n'y a aucun chantier
maritime canadien... Ecoutez, quand on dit qu'un chantier maritime construit
des bateaux, on s'imagine qu'il construit des bateaux. Ce que je veux dire,
c'est qu'il n'y a aucun des chantiers qui est en mesure de construire une
frégate canadienne. Je pose la question. Au contraire, c'est une faible
partie qui peut construire même un gouvernail de bateau. Un gouvernail de
bateau, je pensais que c'était construit dans nos chantiers, que
c'était fondu quelque part dans un des ateliers du chantier.
Cela ne l'est pas. Peut-être que je me trompe, M. le
Président, mais demandez-le. Demandez-le aux dirigeants de Marine,
demandez le pourcentage. Parmi tous les produits requis pour construire un
bateau, demandez combien on en importe, combien viennent de l'extérieur,
sans tenir compte de certaines stipulations de contrats avec certains pays,
selon certains accords. Mais, en général, c'est combien? C'est
ça qu'on veut dire, nous autres, c'est ça qu'on dit depuis des
années. Equiper, regrouper, organiser nos chantiers pour qu'ils puissent
les construire, qu'ils soient organisés pour le faire.
Quand on parle d'investissement massif, c'est évidemment pour
ça. Vous imaginez l'impact énorme que cela aura sur le plan
économique, dans tous les secteurs. Demandez-leur ce qu'on a... C'est
énorme ce que représente le chiffre d'affaires de Marine, par
exemple, ou des chantiers maritimes. On parlait du transport maritime qui
représente près de $3 milliards par année. Qu'est-ce qu'on
a comme centre de recherche véritable ici? Evidemment, on se place sur
une période plus longue. C'est dans ce sens-là, M. le
Président, qu'est notre position. Pour nos bateaux, nous sommes des
assembleurs de pièces, des soudeurs de morceaux de métal et
l'essentiel est importé.
On est dépendant. Imaginez dans quelle position ça place
la direction de nos chantiers, y compris celle de Marine, que d'être
dépendant de tous ces sous-traitants partout, souvent des concurrents
à part ça.
On ne pourrait pas tenter d'avoir une politique? Pas tout de suite, pas
demain, pas en 1981 nécessairement, mais qu'on commence maintenant pour
qu'en 1981, 1982, 1983, on ait vraiment un véritable chantier maritime
au Québec.
M. Tremblay: Dans la foulée de ce que dit M. L'Heureux,
j'aimerais poser une question aux gens de Marine. Est-ce que les deux plus
grands chantiers maritimes du Canada, Davie et Marine dans le cas de
Marine, vous pourrez répondre à la question ne sont pas
mieux placés que les autres chantiers maritimes pour recevoir les
commandes fédérales de frégates qui vont se monter
à $1 500 000 000? Si vous étiez mieux placés et s'il y
avait des investissements d'infrastructure pour élargir la cale
sèche, pour accueillir ce genre de grandes constructions, est-ce qu'il
ne serait pas logique que ce soit un de ces chantiers ou les deux qui
reçoivent ces investissements d'infrastructure ou qui entreprennent ces
investissements d'infrastructure?
M. Brisson: A l'heure actuelle, oui, les chantiers de Marine et
de Davie sont très bien placés pour les contrats de
frégate. Il y aurait évidemment des investissements
d'infrastructure qui amélioreraient la situation, quoique les deux
chantiers aient déjà construit des navires de guerre avec les
installations qu'ils ont en main présentement. Ils pourraient encore le
faire. De ce point de vue, je dois dire qu'il y a aussi un troisième
chantier, Saint-John's Drydocks, en Nouvelle-Ecosse, qui est aussi en
état de construire, avec les installations qu'il a en main
présentement, les frégates de guerre.
M. Tremblay: Est-ce que ce dernier chantier n'a pas reçu
récemment une subvention du gouvernement fédéral pour
élargir sa cale sèche?
M. Brisson: Oui.
M. Tremblay: Combien? (21 h 45)
M. Brisson: J'ignore le montant exact, mais c'est une cale
sèche qu'on va agrandir substantiellement. Il y a plusieurs millions de
dollars. Cela ne leur donne pas un avantage accru dans le cas des
frégates, parce qu'ils ont déjà toutes les
facilités requises pour les frégates. De toute façon, nos
chantiers sont des mieux placés pour recevoir les frégates et
enfin, Marine Industrie est probablement le mieux placé de tous les
chantiers, par sa configuration.
M. Tremblay: Donc, si je vous prends au mot, Marine Industrie
serait bien placée pour obtenir ces contrats. Quelles démarches
devraient être entreprises, et par qui, pour que vos avantages
comparatifs, si je comprends bien, donnent des résultats?
M. Brlsson: C'est à nous à faire ces
démarches et ces démarches sont déjà en cours. Nous
sommes en contact, régulièrement, avec le bureau de projets des
frégates canadiennes à Ottawa, pour maintenir avec lui les
relations, se tenir au courant des développements et être
présents, et pour que ce dernier suive de très près nos
propres développements.
Nous avons déjà déposé, au bureau des
projets de frégates, à Ottawa, un document faisant état
des compétences de Marine Industrie, tant dans ses installations
physiques que dans ses ressources humaines et ses systèmes. Nous avons
déposé ce document de compétence pour
considération.
M. Tremblay: Une dernière sous-question, pour être
bien clair. Quand vous parlez d'une possibilité de mise à pied de
600 à 1000 employés, parce que cela peut être 600 si vous
ouvrez une deuxième chaîne de construction de wagons, et 1000 si
vous n'en ouvrez pas, avez-vous tenu compte de la possibilité
sérieuse dans laquelle vous vous trouveriez, d'avoir ces contrats de
frégates?
M. Brlsson: Oui, nous en avons tenu compte et le scénario
que nous avons en main prévoit que dès 1982, et surtout en 1983,
il y ait de l'espace, des installations, et tout l'équipement pour la
construction de frégates.
M. Tremblay: Donc, dans vos 3000 employés en 1984, cela
suppose que vous ayez certains contrats de frégates?
M. Brlsson: Oui.
M. Tremblay: Donc, les contrats de frégates ne sont pas
une façon d'empêcher les mises à pied prévues?
M. Brlsson: Non. Quant aux contrats de frégates si
on me permet, je fais souvent cette mise au point le montant de $1 500
000 000 1978, que représente le contrat de frégates, de ce
montant, il n'y a qu'environ $500 millions à $600 millions qui sont
réellement des valeurs qui sont données au chantier maritime.
Quant au reste, ce sont des compagnies d'électronique, des compagnies
d'armement, qui reçoivent cette partie, de même que les fabricants
des turbines motrices.
M. Martel: Vous rejoignez la déclaration que M. L'Heureux
a faite lorsqu'il a épluché le montant de $1 500 000 000. Vous
arrivez pratiquement aux mêmes chiffres, ce qui reste, en
véritable construction navale.
M. Brlsson: Oui.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Cela va, M: le Président.
Le Président (M. Boucher): Cela va. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je vais faire quelques commentaires sur votre document
et sur les commentaires du ministre. Je suis en effet pas mal d'accord avec
certaines mises au point qui ont été faites et par vous et par le
ministre.
En ce qui concerne le premier point, je pense qu'il faut rappeler que
l'objectif de notre rencontre d'aujourd'hui n'était pas tout à
fait de régler les problèmes à long terme des chantiers
maritimes du Canada. En effet, les problèmes de Marine Industrie
n'étaient pas liés au manque de commandes ou à la
faiblesse du marché des navires. Ils sont liés au fait qu'il y a
des commandes et qu'à cause de nous tous, probablement, la gestion, les
gouvernements, même peut-être les travailleurs, on a subi des
pertes dans la construction de ces bateaux, ce qui a rendu la compagnie en
faillite.
Le plan de redressement je pense que le ministre a eu raison de
le dire ce n'est pas un plan de redressement des chantiers maritimes du
Canada, mais un plan de redressement d'une société qui est en
faillite.
Tenant compte de ce point, je pense que le sujet a été
élargi par votre mémoire, et avec une certaine justice, parce
qu'on parle maintenant de l'avenir de cette industrie. Je suis loin
d'être de ceux qui croient que tous les secteurs de l'économie
canadienne doivent être planifiés. Je me méfie un peu de la
possibilité de le faire et je pense qu'il y en a d'autres qui sont
d'accord, mais s'il existe un secteur, selon moi, où on peut justifier
une planification de la part du gouvernement dans une certaine mesure, c'est
certainement celui qui concerne la question de la construction de navires. Il
est clair que dans presque tous les pays du monde, comme vous l'avez dit, que
les chantiers maritimes soient des sociétés d'Etat ou qu'ils ne
le soient pas, ils sont subventionnés. Les politiques du gouvernement,
pour ce qui concerne le cabotage, les politiques de marine marchande et surtout
toute la question des bateaux de guerre, lient nettement ce secteur au
gouvernement. Je suis d'accord que c'est un secteur, comme celui de
l'énergie, où c'est essentiel que le gouvernement
développe une politique intelligente pour la construction et l'usage de
ces bateaux.
Je pense que les démarches que le ministre nous a dit vouloir
faire ce soir, en disant qu'il voulait établir un bureau, cela m'est
égal si c'est un bureau, une maison ou je ne sais trop quoi,
l'important, c'est que les gens commencent à faire cette planification.
Je suis persuadé que c'est une planification qui doit être
entreprise en premier lieu par le gouvernement fédéral, pour
toutes les raisons qu'il n'est pas nécessaire de répéter
ici ce soir. Le gouvernement du Québec a une responsabilité de
faire des pressions intelligentes auprès du fédéral. Le
gouvernement du Québec a aussi la responsabilité de
coopérer avec le gouvernement fédéral. C'est une
combinaison. Je ne suis pas
assez naïf pour penser qu'une coopération avec Ottawa peut
donner des résultats positifs sans certaines pressions, mais je suis
persuadé que les pressions ne peuvent pas déboucher sur des
gestes concrets et positifs sans que nous acceptions de coopérer d'une
façon très positive.
Je ne sais pas si c'est possible dans le cadre de ce projet. Vous avez
suggéré un comité dans votre mémoire. Le ministre a
répondu en suggérant un bureau. Je préfère
l'idée d'un comité, parce que, pour moi, un bureau c'est quelque
chose qui est en soi un peu symbolique, mais ce n'est pas le bureau ou
l'affiche sur la porte qui va nous donner des résultats. J'espère
que le fédéral pourra être présent dès le
début dans cette étude qui doit être faite par le
gouvernement du Québec avec ces compagnies-ci et qu'une
coopération pourra commencer tout de suite. J'espère aussi, entre
parenthèses, que le ministre des Transports du Québec, le
ministère au moins, pourra être impliqué là-dedans,
parce que, semble-t-il, ce ministère a fait ses propres études et
en est rendu à la conclusion qu'il n'y a place que pour un seul chantier
maritime ici au Québec. C'est essentiel qu'à l'intérieur
du gouvernement...
M. Martel: II n'y a pas eu des affirmations comme cela du
ministère des Transports, ni du ministre d'ailleurs.
M. Scowen: Je m'excuse, je pensais que...
M. Raynauld: C'est qu'il y a eu une conférence du ministre
qui a été rapportée dans le journal et qui n'a pas
été démentie par le ministre.
M. Martel: II se posait des interrogations et il ne faisait pas
d'affirmation là-dessus.
M. Scowen: II y a une différence. Ce sont des
interrogations, des suggestions. Le point que je veux soulever, c'est
simplement que j'espère que les ministères du gouvernement du
Québec ont un intérêt dans l'affaire, à part le
ministère de l'Industrie et du Commerce, et seront
intégrés aussi dans ce comité pour que le gouvernement
puisse développer une politique sûre.
Je pense que, finalement, ce que la politique sera, je ne sais pas. Vous
avez soulevé ce soir plusieurs affirmations assez passionnées et
assez convaincantes dans une certaine mesure pour une industrie navale forte
ici au Québec. Je pense que c'est probable, mais ce n'est pas certain.
Une chose que je sais déjà, c'est que c'est un marché
mondial. Même si on accepte de pourvoir à tous nos propres besoins
domestiques dans nos propres chantiers navals, il faut que nous acceptions que
nous aurons toujours l'offre des autres chantiers pour nos besoins et que si
nous acceptons de les construire ici au Canada, au Québec, à des
prix plus élevés qu'on peut les acheter ailleurs, ce sera
très bon pour les compagnies et pour ceux qui travaillent dans les
chantiers. Le prix sera payé par les autres contribuables du
Québec, qui sont souvent des syndiqués dans d'autres industries
ou de simples citoyens. Il y a toujours pour ces choses un prix à
payer.
Nous avons les compétences pour faire n'importe quoi ici. Nous
pouvons envoyer quelqu'un à la lune, j'en suis certain, mais, pour
réaliser toutes ces choses, il y a un prix à payer. C'est souvent
là une question de coûts et de bénéfices dans chacun
des achats, chaque décision de sous-traitance qu'on fait. Je pense que
vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il faut du jugement chaque fois,
surtout quand on joue avec les impôts et les fonds publics, parce que, en
fin de compte, quelqu'un est obligé de payer le prix.
Ce sont mes commentaires généraux. Le point que je veux
discuter avec vous, le plus important de mes commentaires, c'est que, de mon
côté, je suis complètement d'accord qu'on doit poursuivre
une planification dans ce secteur. Cela doit se faire, non seulement ici avec
les éléments suggérés par le ministre, mais avec
une étroite collaboration, la coopération, et, bien sûr,
une pression sur le fédéral.
Il y a quand même, M. L'Heureux, quelques questions que je veux
vous poser sur votre mémoire et qui ne touchent pas du tout le naval.
C'est quelque chose qui m'a inquiété un peu. Je ne suis pas
certain si ce que vous avez dit, vous l'avez dit d'une façon
approfondie, mais, au début de votre document, vous parlez du plan de
redressement de la compagnie en ce qui concerne l'hydro-électrique et
les wagons. Vous mettez de côté ces deux projets très vite,
et, d'une façon assez négative; je ne me rappelle pas la page
exacte, c'est la page 6, je crois. Je pense que c'est un point très
important, vous avez décidé dans votre document de mettre
l'effort sur les questions navales. Vous n'avez pas consacré beaucoup de
temps et d'efforts à une étude des possibilités des deux
autres secteurs, où vous êtes en contradiction fondamentale avec
l'opinion des dirigeants de cette entreprise en ce qui concerne les
possibilités, l'avenir des deux autres secteurs. Je vous cite, parce
que, pour moi, c'est très important, car c'est dans ces deux domaines
que nous avons décidé, en principe, si vous voulez, de faire la
concentration de la recherche et des investissements. Si les deux ou trois
premiers paragraphes de la page 6 sont le résultat d'études qui
sont bien réfléchies et pondérées, cela doit nous
donner matière à réflexion. Vous dites, en ce qui concerne
l'hydro-électricité, que la production de ces équipements
se fait sous licence française et est donc assujettie à certaines
limites à l'exportation et que les experts soutiennent qu'il existe une
situation de surcapacité de la production mondiale pour ces
équipements. (22 heures)
Pour moi, ces objections ne vont pas directement à l'encontre du
plan de Marine parce que, dans ce domaine, c'est bien clair, ces gens ont
décidé de faire la concentration sur le marché domestique
et ils croient que ce marché québécois, si vous voulez, et
canadien va exister longtemps.
En ce qui concerne les wagons, vous dites que cette production a peu
d'intérêt en termes de développement industriel, faute de
stabilité. Vous êtes assez négatifs envers le
deuxième volet de leur plan et, finalement... Là, je ne suis pas
complètement d'accord avec vous c'est une question d'opinion
au sujet de leur décision d'investir, comme ils ont dit, $2
millions dans la recherche. Vous avez dit: La décision se passe de
commentaires. Je pense que vous n'avez pas surtout parlé du principe de
la recherche, mais vous trouvez que les $2 millions n'étaient pas assez.
Quant à moi, j'ai l'impression que, dans la recherche, à moins
que vous n'ayez une vaste expérience là-dedans, ce n'est pas
mauvais de commencer avec un programme responsable et limité, parce que
c'est possible de verser des sommes énormes dans la recherche et le
développement sans résultat. Mon opinion était d'abord que
cette démarche en vue de faire quelque chose et de le faire d'une
façon modeste... $2 millions sur une période de deux ans, c'est
substantiel quand même.
J'avais une attitude assez positive envers cette démarche de la
société et vous avez dit: La décision se passe de
commentaires. Alors, je veux vous demander de parler un peu de ces trois
aspects, l'hydro-électrique, les wagons et la recherche. Vous n'avez pas
développé ces idées énormément. Vous avez
consacré seulement un paragraphe à chacun de ces points, ce qui
m'avait porté à croire que vous avez peut-être passé
très vite là-dessus par rapport au naval. Mais, si vous pensez
vraiment qu'ils sont dans une mauvaise direction dans ces trois
éléments, j'aimerais que vous explicitiez vos opinions un
peu.
Le Président (M. Boucher): M. L'Heureux.
M. L'Heureux: Merci, M. le Président. Si vous permettez,
je vais aussi demander l'aide de Kémal Wassef, le directeur de la
recherche, sur certains aspects et ça va apporter des
éléments nouveaux, peut-être plus intéressants
à certains égards.
Je voulais juste faire un commentaire au départ. Quand vous
parlez du prix à payer à cause des investissements dans les
chantiers maritimes, moi, j'estime que les travailleurs des chantiers maritimes
ont payé très chèrement l'absence d'investissements, d'une
part, et, deuxièmement, l'économie du Québec et du Canada,
en Colombie comme partout ailleurs, l'économie canadienne a payé
chèrement la pénurie, la pauvreté des investissements dans
ce secteur.
M. Scowen: Excusez-moi, il y a eu, dans ce domaine... A moins que
je ne me trompe, le naval, c'est la construction. Ce n'est pas la construction
d'un bâtiment, dans le concept économique, c'est le domaine de la
construction. C'est une chose qui est, en soi, un peu cyclique, qui est
très difficile à stabiliser, qui est, en soi, quelque chose qui
est très difficile à développer d'une façon
régulière; c'est très difficile de justifier des
investissements fixes d'une nature importante, parce que la nature du projet et
le nombre de projets sont continuellement en train de changer. Cela fait partie
du domaine de la construction. Est-ce que je me trompe?
M. L'Heureux: Pas au sens de la construction non
planifiée, immobilière, dont vous parlez, non. Je pense aux
expériences de plusieurs pays qui démontrent qu'au contraire, il
y a eu une stabilité d'emploi malgré les secousses,
surtout celle qu'on traverse présentement non seulement
ça, une croissance d'emploi à un développement dans divers
secteurs industriels connexes à partir d'une politique de planification,
dont vous avez si bien parlé, au niveau maritime.
C'est parce qu'ici, au Canada, il n'y a pas eu de planification
là-dessus. On a abandonné complètement les chantiers
maritimes à leur sort. Nous sommes d'accord avec les deux premiers
aspects du projet de Marine et de la SGF. Cependant, c'est sous-jacent
vous l'avez souligné vous-même dans la trame de notre
analyse. Cela découle de quoi? Cela découle du fait que, à
cause du dollar canadien, du problème qu'on a avec le transport du
blé au Canada, du problème qu'il y a aussi aux Etats-Unis, il y a
une demande très forte, de telle sorte que, à l'heure actuelle,
en fait toutes les capacités de production sont utilisées au
maximum de ce point de vue.
Mais, même là, quand on parle des wagons; construire des
wagons, du point de vue de l'emploi, c'est intéressant; mais par rapport
à ce qu'il y ait un chantier maritime, ce que ça signifie? Ce
n'est pas grand-chose, assembler des boîtes. Demandez au président
de Marine; les aspects les plus techniques, la roue...
M. Raynauld: C'est mieux que rien.
M. L'Heureux: Oui, mais on n'a même pas la fonderie pour
les faire.
M. Raynauld: Si on a les commandes.
M. L'Heureux: Non, mais si on n'a pas la fonderie pour les
faire.
M. Raynauld: On ne va quand même pas se mettre à
fabriquer des éviers, parce qu'il en faut dix dans un bateau.
M. L'Heureux: Pourquoi pas? On ne commencera pas par les
éviers, si vous voulez.
M. Raynauld: Non, mais je prends cet exemple.
M. L'Heureux: On va commencer par des choses plus importantes.
Alors, à court terme, on est d'accord avec le premier projet et on voit
et on en sent le souci d'ailleurs, il y a eu des efforts très
sérieux de la part de la direction de Marine pour tenter, à
partir de ce que le marché offre, donc les wagons, les turbines,
d'augmenter l'emploi. Cela a été très positif de leur
part.
M. Scowen: Excusez-moi, mais la question que je vous posais
n'était pas une question à court terme. Ces trois
démarches, hydro-électricité, wagons et recherche de
nouveaux produits, sont trois démarches qui sont annoncées ici,
qu'on est en train de faire à long terme. Voici la question que je vous
pose, parce que ça n'est pas clair dans votre mémoire. Est-ce que
vous croyez que ces trois démarches, à long terme, sont des
démarches positives, oui ou non?
M. L'Heureux: Comme je ne suis pas assez clair à ce
stade-ci de la journée, si vous le permettez, je demande à M.
Wassef de me remplacer.
M. Scowen: Vous avez fait votre part ce soir, certainement.
M. Wassef (Kémal): En ce qui concerne
l'hydro-électricité ou l'hydraulique en général il
faut se référer à l'énergie. Lorsqu'on parle d'un
plan qui s'étend jusqu'en 1985, il faut donc se souvenir quels seront
les prix de l'énergie à ce moment-là. Quels seront les
possibilités de bâtir des turbines, des alternateurs, de
l'hydraulique à ce moment? Cela n'apparaît nulle part, pour le
moment, dans les textes que nous avons.
On peut dire une chose, c'est que l'hydraulique n'est plus une
technologie de pointe, il y en a d'autres qui ont pris la relève. Alors
on peut mettre des délais; disons que je ne me hasarderai pas à
dire: C'est 1984,1983,1986 ou 1987, mais c'est sûr qu'il va y avoir, de
plus en plus de producteurs d'hydraulique ou de turbines qui vont
présenter une situation de surcapacité. Ce n'est plus de pointe,
alors faire des investissements là-dedans, je sais que pour ce qui
concerne le Québec, il y a encore de l'avenir, il y a encore des choses
à faire mais quand on pense au domaine international, là, il y a
des limites très rapides.
En ce qui concerne les wagons, je n'ai pas besoin de reprendre le sujet,
M. L'Heureux a été très explicite là-dessus. Par
exemple, comme les méthaniers, comme les pétroliers, comme tout
le développement des transports de l'Arctique, on trouve que c'est
échanger un domaine très spécialisé, qui pourrait
être un domaine de pointe, contre un secteur qui, étrangement, ne
constitue que de la fonte et de l'assemblage.
Pour l'instant, pour les syndicats, ça a l'air d'être, en
tout cas à court terme, Ja solution. Mais est-ce que, à long
terme, c'est la solution qu'on voudrait donner à Marine? On peut se
poser des questions là-dessus.
Quant aux $2 millions consacrés à la recherche et au
développement, quand on a un chiffre d'affaires de l'ordre de $200
millions ou plus, comme celui de Marine Industrie, 1%, c'est relativement peu.
Il y a peut-être des efforts à faire de plus.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je pense que j'ai fini. Je ne sais pas s'il y a
d'autres intervenants... Oui, j'ai une autre question à poser à
la fin au ministre.
Le Président (M. Boucher): Vous pouvez la poser tout de
suite.
M. Scowen: Je sais très bien, M. le ministre, que c'est
une commission parlementaire sur Marine Industrie, mais ce sujet plus large a
été abordé et j'ai l'impression que votre décision
je pense que cela a été annoncé ce soir, c'est la
première fois que j'entendais parler de créer un bureau des
chantiers navals ici était qualifiée au moins par le
syndicat comme étant insuffisante. Ils ont certainement abordé
d'autres possibilités plus larges et je pense que maintenant, ou
à la fin de la soirée, je vais vous poser la question: Est-ce que
vous êtes satisfait de cette décision, cette démarche que
vous avez entreprise concernant le bureau? Pouvez-vous démontrer
à M. L'Heureux et à ses collègues, et peut-être
à moi-même, comment ce bureau pourrait répondre aux
objections, aux problèmes et aux faiblesses qui ont été
soulevés par le syndicat? C'est quelque chose qui peut se faire à
la fin, si vous voulez, mais c'est la dernière question que je voulais
poser.
M. Tremblay: Avant de passer la parole au député de
Huntingdon, M. le Président, je devrais dire tout d'abord que cette
suggestion de la création d'un bureau de constructions navales, qui est
reprise dans le mémoire de la CSN, n'est pas une décision. Ce
genre de bureau ne peut fonctionner que si toutes les parties en cause
acceptent d'y participer. C'est une des suggestions dans le rapport du
comité d'étude que je fais mienne, parce que c'est une
démarche dans la bonne direction. Donc, il ne s'agit pas d'une
décision, je le répète, il s'agit d'une proposition, et si
elle reçoit l'assentiment des parties, comme elle semble le recevoir,
cela pourra devenir un point de ralliement des agents économiques pour
promouvoir une meilleure rationalisation dans le secteur de la construction
navale et servir de pression, à la fois sur le gouvernement du
Québec et sur le gouvernement fédéral, pour renforcer ce
secteur, Dans les jours à venir, cet aspect du rapport, comme je l'ai
dit, peut être mis en place très rapidement.
Maintenant, il y a d'autres aspects du rapport qui touchent aussi
certains sujets soulevés ce soir, où on parle de plus grandes
politiques plus définies, plus définitives pour renforcer les
chantiers maritimes et, là encore, nous avons le diagnostic bien
posé. Je pense qu'au cours des mois d'été, nous allons
faire des progrès si tout le monde se donne la main pour collaborer.
M. Scowen: Est-ce que je peux vous demander une dernière
question? Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'idée d'essayer
d'engager le fédéral là-dedans dès le début.
Deuxièmement, que pensez-vous d'engager les autres
ministères,
dont surtout celui des Transports qui semble avoir un
intérêt dans ce problème, du moins d'après ce qu'on
a lu dans les journaux.
M. Tremblay: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je dois vous répondre sur cette
dernière partie de votre question, que c'est déjà fait,
puisque le comité d'étude était composé de
représentants du ministère de l'Industrie et du Commerce, mais,
aussi, de représentants du ministère des Transports, de l'Office
de planification du Québec et du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre. Donc, ceci est déjà en marche. (22 h 15)
En ce qui concerne la nécessité de mettre le
fédéral dans le coup, il va de soi que, comme les principales
grandes politiques, comme la loi sur la cabotage, qui ressemblerait au Jones'
Act des Etats-Unis, comme une politique de marine marchande pour le Canada, ces
politiques relèvent au premier titre du gouvernement
fédéral et que, par conséquent, il est directement
impliqué, au moment où nous parlons. Mais nous allons, au cours
de l'été et dans les quelques semaines qui vont venir, le lui
rappeler et ce sera sans doute une conclusion de notre rencontre
d'aujourd'hui.
Nous allons lui rappeler que le diagnostic est compris de tous, et la
CSN l'avait bien posé, ce diagnostic, au mois de décembre
dernier. Dans le fond, le comité de travail est allé dans la
même direction. Il va falloir qu'il y ait une vraie politique pour les
chantiers maritimes et qui implique une politique des transports au Canada.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Huntingdon.
M. Dubois: Merci, M. le Président, M. L'Heureux, tout
à l'heure, a mentionné qu'il serait heureux de ne pas voir le
plan de redressement proposé par Marine entériné d'ici au
mois de septembre. J'aimerais connaître les raisons précises qui
le poussent à demander un retard pour entériner ce plan de
redressement puisque, d'ici septembre, je me demande bien ce qui peut arriver
de concret au niveau du développement de Marine qui pourrait amener un
amendement au plan proposé. Est-ce que vous entrevoyez quelque chose de
neuf d'ici trois ou quatre mois, puisque vous demandez de retarder jusqu'en
septembre le fait d'entériner ce plan?
M. L'Heureux: C'est parce que, comme on l'a indiqué avec
assez de force, il y a certains aspects du programme de redressement qui, quant
à nous, menacent sérieusement le chantier, la vocation navale de
Marine, à moyen et long terme. Compte tenu du souci du gouvernement et
de tout le monde, en fait, d'assurer la participation des syndicats, je pense
que c'est important, ce sont eux qui fabriquent et qui montent ces bateaux,
compte tenu d'un nouveau rapport soumis hier, qui semble très
élaboré, par des ministères dont un sous la direction du
ministre, il me semblait assez important, parce qu'il y a encore certaines
questions, compte tenu de notre position fondamentale quant à la
vocation navale de Marine. On ne demande donc que quelques mois pour avoir
l'occasion de discuter avec la SGF, Marine, les ministères
concernés de ces divers rapports et des diverses orientations
prévues à ce moment-là. C'est tout ce qu'on demande.
M. Dubois: D'accord. Vous avez indiqué le besoin pour le
Québec de se doter d'un chantier naval intégré,
sophistiqué, au point de pouvoir créer de toutes pièces
ici, d'avancer dans la technologie au niveau de la construction navale.
Supposons qu'on accepte cette demande, cette suggestion, disons que le
gouvernement du Québec accède à ça, face aux
problèmes mondiaux dans la construction de navires, supposons qu'on
aurait un tel complexe ici, la situation mondiale existante serait la
même. A présent, on s'aperçoit que la France subventionne
je l'ai mentionné cet après-midi jusqu'à 50%
de la construction navale chez elle et assure l'inflation aux constructeurs de
navires, ce qui peut s'évaluer jusqu'à 70% de support financier
par la France pour la construction navale. Est-ce que, chez nous, ici, le
gouvernement canadien devrait accorder ce support, d'après vous, au
même titre que la France le fait? Parce que, si on vit la même
situation dans deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans, et c'est possible,
parce que chacun tire la couverture de son bord, c'est une jungle
présentement dans ce domaine, comment pourrait-on s'en sortir ici au
Québec avec un complexe qui coûterait plusieurs centaines de
millions, face à la situation mondiale, face à la
compétitivité de ce secteur et face aux pays
sous-développés qui s'en viennent dans le domaine?
Comment peut-on s'en sortir pour les années prévisibles,
même si on a ici un complexe intégré et sophistiqué
de construction navale? Je me pose la question, vous avez ouvert la porte sur
des questions à ce sujet, je la pose directement. Cela va-t-il nous
amener des contrats favorables, intéressants financièrement, sans
être supportés majoritairement par l'Etat?
M. L'Heureux: Votre question est hypothétique, dans le
sens que, dans un premier aspect, vous dites que, si on avait un complexe
vraiment intégré de chantier maritime, capable de construire des
bateaux adéquatement, tel qu'on le souhaite... Vous nous dites demandez,
dans le contexte de la crise mondiale actuelle, qu'est-ce qu'on pourrait
faire.
Evidemment, ma réponse est hypothétique aussi. Elle est
aléatoire un peu, mais c'est ce qu'on a indiqué dans notre
mémoire. Par exemple, il va falloir construire des méthaniers
pour l'Arctique. Si on avait un complexe aujourd'hui ce sont des besoins
canadiens on serait en mesure, et on serait sans doute concurrentiel, de
construire ces bateaux. A l'heure actuelle, on ne l'est pas. La marine
canadienne doit être transformée, rénovée. Il y a
six frégates à construire. On serait en mesure vraiment d'assumer
la construction de ces
bateaux. Comme c'est hypothétique, cela voudrait dire qu'on
serait aussi en mesure de satisfaire aux besoins découlant de
l'extension de la zone des eaux à 200 milles, etc. Mais c'est
hypothétique. Je sais que ma réponse est aussi faible que la
question.
Le second volet de notre question: Est-ce qu'on ne sera pas
obligé, éventuellement, comme les pays qui ont
développé des chantiers maritimes, de faire comme la France fait
présentement? Je pense que ce que la France fait présentement,
comme l'Allemagne de l'Ouest, par exemple, qui ne subventionnait pas,
jusqu'à il y a quelques années, la construction des navires,
comme la Suède a fait cette année, en mettant $500 millions pour
colmater un déficit d'un de ses chantiers... Ce sont des réponses
à la crise actuelle. Ce sont des réponses d'un gouvernement face
au chômage massif qui découle de la crise, de la
surcapacité mondiale dans la construction navale. Ce sont donc des
mesures temporaires. Ce qu'on dit dans ce mémoire, c'est bien clair; on
dit: Les autres pays, c'est vrai qu'ils ont des problèmes, mais ils s'en
occupent par des mesures comme celles-là. Je suis convaincu que cela ne
durera pas indéfiniment.
Ce qu'on dit essentiellement je me répète
peut-être c'est que, si on investit dans l'esprit où
vous le dites, très clairement à part cela et qu'on se
donne un complexe de construction navale adéquat, quand la reprise va
venir, en 1982 ou 1983, on sera en mesure de concurrencer les autres pays.
Le Président (M. Boucher): M. Coulombe.
M. Dubois: II faudrait peut-être avoir, à long
terme, des prévisions assez précises pour pouvoir justifier des
investissements massifs. Il n'y a pas seulement le secteur naval qui peut
être privilégié de la part d'un gouvernement, afin de
pallier les problèmes du chômage. Il peut y avoir d'autres
secteurs d'activité, d'autres secteurs de production industrielle que la
construction navale. C'est peut-être un point de vue du syndicat, parce
que vous touchez particulièrement aux employés de Sorel
présentement, ici aujourd'hui, de Sorel ou de Lauzon, mais il reste
quand même que, dans les grandes vues d'un gouvernement, il y a des
secteurs à privilégier et il y en a d'autres à moins
privilégier.
Il s'agit quand même qu'un gouvernement dise: Je privilégie
ce secteur en particulier. Le cas échéant, ce n'est
peut-être pas au Québec de privilégier, c'est
peut-être plus au Canada, au gouvernement fédéral de le
faire. Les commandes reçues par cette entreprise viendront
majoritairement du gouvernement fédéral. Je pense que cela
devrait être une décision gouvernementale fédérale
et non provinciale, jusqu'à un certain point.
Le Président (M. Boucher): M. Coulombe a demandé la
parole.
M. Coulombe: Je voudrais juste faire une remarque. Je ne voudrais
surtout pas que la commission parlementaire se termine sur la... Je ne voudrais
pas que les membres de la commission parlementaire puissent accepter l'analyse
un peu rapide qui a été faite tantôt des deux secteurs,
surtout l'hydraulique et les wagons. Je dois vous dire que nous sommes en
désaccord total là-dessus. Cela nous fera plaisir d'avoir des
rencontres avec vous autres pour vous montrer les documents ou ceux qui
auraient pu vous échapper dans le comité consultatif; on
éclairera sa lanterne mutuellement là-dessus.
Je pense qu'il est important de noter quelques éléments,
sans entrer dans la discussion de base, que l'hydro-électrique... Je
demanderais peut-être à M. Brisson de citer quelques chiffres
très précis et surtout le concept de la technologie de pointe qui
a été apporté tantôt. On est en désaccord
complet là-dessus.
M. Brisson: Pour ne citer que quelques chiffres, le projet de
redressement que nous avons fourni n'a été que jusqu'en 1984. Il
ne faudrait pas penser qu'après cela on fermerait. Dans
l'hydroélectrique qui est un domaine noble et où la technologie
continue de se développer, nous avons présentement des chiffres,
des projets qui sont assez avancés, que nous appelons ici avant-projets
pour avoir été chiffrés jusqu'en 1990.
Or, une société, par exemple, comme la
société d'énergie et toutes les sociétés qui
s'occupent d'énergie doivent prévoir au moins dix ans à
l'avance. C'est normal, parce que c'est le temps que cela prend pour concevoir
un projet, le préparer l'ingénierie et le
réaliser. Dans ces projets-là, on dit souvent qu'avec la
Société d'énergie de la baie James, c'est le dernier gros
projet. En fait, c'est loin d'être le dernier gros projet. Il y a,
à la suite de ce projet-là, plusieurs autres projets qui
s'alignent avec des technologies différentes dans lesquelles Marine
Industrie peut fonctionner et dans lesquelles Marine Industrie est en train de
développer ses ressources humaines, ses contacts et aussi ses contacts
avec des bailleurs de licences avec des gens qui ont déjà la
technologie pour le faire.
On sait fort bien que les nouvelles générations
jusqu'à 1990, par exemple, après les turbines Francis qui sont
celles employées présentement, il va y avoir les turbines
hélice, capan, il y aura les groupes bulbes et il y a toute une
série de développements pour prendre en main tous les
développements hydro-électriques qu'on peut faire et qui sont
l'énergie du futur. Etant donné la crise du pétrole, les
augmentations de coûts, les objections au nucléaire, ici au
Québec surtout et nous sommes bien placés pour le savoir
et pour en profiter nous avons énormément encore de
développement hydraulique à faire, mais avec des technologies
différentes et des technologies de pointe. Des stations pompées,
il n'en existe pas au Canada présentement et nous avons
participé, nous avons fait des démonstrations techniques, par
exemple, à l'Hydro-Québec sur la façon de procéder
et nous sommes à étudier des projets avec elle.
II ne faut pas dire que nous sommes en dehors de la technologie et que
cette histoire dort. Ou côté de l'hydro-électrique, nous
sommes à la pointe de la technologie et nous sommes à
développer des ressources humaines, des groupes d'ingénierie qui
se forment. Nous avons de jeunes ingénieurs qui poussent avec nous qui
sont à la fine pointe de la technologie de ce
côté-là.
M. Coulombe: Pour ce qui concerne les wagons, là on est un
peu plus d'accord que ce n'est pas le même secteur que l'hydraulique ou
que l'électromécanique, mais une chose est certaine, c'est que si
dans les cinq prochaines années, on assiste à la montée du
cycle des wagons dans une compagnie qui a perdu $30 millions ou $40 millions
dans les deux ou trois dernières années, et si on peut faire du
profit avec 10 000 ou 15 000 wagons, peu importe la façon dont la
technologie sera qualifiée, on sera extrêmement heureux de faire
des profits et de créer des emplois avec cette
possibilité-là.
M. Brisson: Je voudrais...
Le Président (M. Boucher): Vous avez quelque chose
à ajouter?
M. Brisson: J'aurais voulu ajouter aussi une remarque. Il est
très rare que des industriels vont s'opposer à des suggestions de
faire des investissements massifs. C'est toujours très
intéressant, mais, par contre, il faut regarder aussi la
rentabilité à long terme. Je pense au chantier Hyundai', en
Corée, qui est à peu près le chantier le plus moderne qui
a les dernières techniques, enfin qui a été
complété vers 1974 et qui a accaparé une grande part du
marché de construction maritime et qui, à l'heure actuelle, est
aussi en difficulté. C'est un chantier qui fonctionne à moins de
50% de sa capacité. Voici qu'on y a investi des centaines de millions...
Même si on les a investis, à l'heure actuelle, il n'y a pas
d'utilisation.
M. Coulombe: Un dernier chiffre aussi sur les investissements
pour ce qui concerne Marine Industrie: Dans les dix dernières
années, il y a eu $25 millions d'immobilisation ou d'investissement et
il y a eu $17 millions dans la division navale. Le manque d'investissement dans
les wagons nous conduit aujourd'hui à être dans une situation
qu'il faut redresser, si on veut profiter des bonnes années qui s'en
viennent. $17 millions sur $25 millions ont été dans la
construction navale, en termes d'investissement.
Le Président (M. Boucher): Merci.
M. Dubois: Est-ce qu'à courte échéance vous
prévoyez des mises à pied chez Marine Industrie?
M. Coulombe: Elles commenceront en septembre.
M. Dubois: En septembre. A présent, vous êtes en
train de produire des bateaux pour la
Pologne. Quel pourcentage au niveau des matériaux est
fabriqué ici au Québec ou chez vous à l'usine? Est-ce que
vous avez des indications de cela? (22 h 30)
M. Brisson: Oui. Je parle de très gros bateaux, des
bateaux de la grosseur que nous produisons présentement. Environ 50% du
coût du navire est du matériel ou de l'équipement et 75% de
cette quantité est importée ici au Canada. C'est un fait que dans
le type de navires que nous construisons d'ailleurs, je crois que c'est
assez général dans les navires de cette grosseur 75% du
matériel vient de l'étranger, est importé. C'est une des
remarques, évidemment, que la centrale de la CSN faisait. C'est un fait
que c'est une situation qui existe et qui n'aide évidemment pas à
notre compétivité au point de vue international.
M. Dubois: Ce qui veut dire que sur un bateau, incluant la
main-d'oeuvre, il y aurait 12,5% de la valeur du navire qui comprendrait des
matériaux produits au Québec. Vous en avez 75% des 50%. Cela ne
fait quand même pas un gros pourcentage. Est-ce qu'il y a...
M. Coulombe: C'est cela. C'est exact. Il faut bien penser que
dans des contrats internationaux ou dans certains types de contrats, comme par
exemple, en Pologne, les cargos polonais, si je ne me trompe, la fourniture
d'acier était, sinon une condition... Est-ce que c'était une
condition contractuelle? Si ce n'était pas dans le contrat,
c'était un élément extrêmement important de la
discussion.
M. Dubois: Est-ce que c'est fréquent d'avoir des
conditions contractuelles, à savoir de prendre des matériaux dans
le pays acheteur?
M. Coulombe: Chaque armateur veut avoir son type de moteur qui
est fabriqué à telle place, parce qu'il aime mieux cela. Il est
plus lent, il est plus...
M. Dubois: D'accord, je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Si j'ai bien compris
l'exposé du ministre, il y a un certain moment, il faisait allusion au
fait que Marine Industrie ou la SGF, je pense que c'est plutôt Marine,
doive aller chercher les commandes à l'extérieur, soit au Canada
ou au Québec ou sur le marché international. C'est de la
juridiction de Marine. En ce qui a trait au leadership du gouvernement
lui-même ma question s'adresse au ministre est-ce que le
ministre pourrait effectivement intervenir dans des cas précis, soit
celui des commandes du fédéral, au moment où on se parle,
à la suite de l'élection du nouveau gouvernement? Est-ce qu'il
pourrait intervenir à ce niveau? C'est la première partie.
En ce qui a trait à la fameuse loi du cabotage, il semble qu'il
serait possible de corriger la situation aberrante dans laquelle on vit
actuellement, où on aurait une loi fédérale,
effectivement, jusqu'à nouvel ordre, qui ressemblerait, dans son
ensemble, à la Jones Act. Est-ce qu'il y a des pressions qui peuvent
être faites à ce niveau auprès du gouvernement
fédéral, concernant les deux aspects que je viens de
mentionner?
M. Tremblay: En ce qui concerne la première interrogation
du député de Duplessis, on se rappellera que j'ai
déposé à l'Assemblée nationale copie des lettres
qui avaient été envoyées au ministre Andras, au ministre
Horner et au ministre Abbott, à la suite de l'annonce d'un programme de
$35 millions d'aide aux chantiers maritimes pour la Nouvelle-Ecosse, le
Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique, demandant qu'il y ait une
préférence accordée aux chantiers maritimes de Davie et de
Marine pour ce qui concerne la construction de brise-glace et de navires. Le
déclenchement des élections a fait que je n'ai pas reçu de
réponse du gouvernement fédéral. Donc, il y a
déjà eu ce genre de démarche.
D'autre part, en ce qui concerne les pressions qu'un gouvernement peut
faire concernant la législation d'un autre Parlement, il y va de
l'autonomie de chacun des Parlements. Tout comme dans notre cas nous
n'accepterions pas, comme cela s'est produit pour la taxe de vente, qu'un autre
gouvernement veuille nous dicter les mesures législatives que nous
devrions prendre, je présume que le gouvernement fédéral
n'accepterait pas que nous nous immiscions dans son processus législatif
pour faire des amendements à une loi qui est déjà devant
le Parlement fédéral. La loi du cabotage fédérale
est déjà déposée. Evidemment, elle est
déposée depuis longtemps. Elle a suscité des
recommandations.
Plusieurs des recommandations avaient pour objet de diminuer son
importance, par exemple, d'introduire une mesure d'urgence pour que les
armateurs puissent faire appel à des bateaux étrangers et
d'autres mesures semblables. Donc, de là l'idée de créer
un Bureau de construction navale regroupant tous les agents économiques
dans le secteur et non pas uniquement le gouvernement du Québec pour
formuler ce genre de pression. Je pense que ceci serait plus normal et sera de
nature à donner de meilleurs résultats.
M. Perron: Bon! Ma question s'adresse à M. Coulombe ou
à M. Brisson et, bien entendu, j'émets ici l'hypothèse du
cas où les contrats du fédéral seraient émis en
faveur de Marine Industrie et où il y aurait effectivement modification
dans la division des wagons, surtout celle-là, et la division
hydro-électrique. Est-ce que vous pensez qu'à ce
moment-là, il y aurait des mises à pied vers l'année 1980
ou vers la fin de 1980, si on obtenait ces contrats?
M. Brisson: M. le Président, évidemment, les mises
à pied que nous prévoyons pour septembre de cette année,
jusqu'au milieu de 1980, à la fin de la construction des bateaux
polonais, ceci va descendre le niveau de la construction navale à peu
près à son minimum; on va garder des gens à la
réparation navale et le minimum que nous pouvons garder à ce
moment-là. Toute commande qui arriverait à ce moment-là
remonte le niveau d'emploi, et c'est cette remontée de niveau d'emploi
que nous avons prévue lorsque nous disons que nous remonterons à
3100 vers 1984. Ceci présume que nous recevons, de la part du
gouvernement fédéral, de toute façon, soit un traversier
et certainement trois des frégates.
Cela prévoit que nous recevrons cette part des programmes du
fédéral. A votre question, je dis que ça va créer
justement cette relance de l'emploi dans le naval que nous avons prévue
et qui remontera le niveau de l'emploi à 3100.
M. Perron: On a parlé tout à l'heure d'industries
secondaires en rapport, par exemple, avec les roues qui étaient
importées de l'extérieur du Québec, si ma mémoire
est bonne, qui provenaient de l'extérieur du Québec.
M. Brisson: Pardon! Les roues sont fabriquées au
Québec. Elles sont fabriquées tout près de chez nous.
M. Perron: Donc, certains matériaux sont faits à
l'extérieur du Québec, mais pourraient éventuellement
être faits au Québec. Est-ce que vous pourriez nous donner le
pourcentage, dans le domaine de l'hydro-électrique, de matériaux
qui sont compris et demandés par la Société
d'énergie de la baie James et qui sont des matériaux provenant du
Québec? Je voudrais avoir la même chose pour les wagons. Dans le
naval, on l'a eu tout à l'heure.
M. Brisson: Je regrette, M. le Président. Je n'ai pas les
chiffres exacts. L'acier qui entre dans ces équipements n'est pas
disponible au Québec présentement. Pour ce qui est des autres
équipements, il y en a de plus en plus qui sont fabriqués ici au
Québec et il n'y a présentement, je crois, que les pivots qui
sont importés à 50% de l'étranger. Du côté
des turbines et des alternateurs, une plus grande partie de valeur
ajoutée et de valeur d'équipements achetés est faite ici
au Québec que pour les navires, mais je n'ai pas les chiffres exacts. Je
regrette, mais l'acier, tout de même, on sait qu'il vient de
l'extérieur du Québec.
M. Perron: Merci, M. le Président. D'ailleurs, c'est la
raison pour laquelle j'ai posé les questions qui viennent d'être
posées. Ma question s'adresse au ministre. N'est-il pas question, au
moment où on se parle, dans le cadre des études qui sont faites
quant au complexe intégré de SIDBEC-Normine
qu'éventuellement on en vienne à l'industrie secondaire dans le
sens des besoins de Marine Industrie ou d'autres industries au Québec
qui fonctionnent au moment où on se parle?
M. Tremblay: Evidemment, la troisième phase du
développement de SIDBEC portera avant tout sur les projets de
développement en aval, qui touchent à la transformation de
l'acier. On n'est évidemment pas en mesure de dévoiler les
projets, puisqu'ils ne sont pas encore adoptés par le gouvernement,
mais, en ce qui concerne les aciers d'un pouce d'épaisseur, ce qui est
utilisé dans les bateaux ou dans les turbines, à ma connaissance,
ce n'est pas dans les plans de SIDBEC, parce que la demande, au Québec,
n'est pas assez importante pour justifier de gros investissements. A moins que
les gens de Marine n'aient des indications contraires? C'est plutôt dans
la tôle galvanisée, dans ce genre de petite tôle qui est
utilisée partout au Québec, dans les PME, plutôt que dans
quelques chantiers qui ne créent pas une demande suffisante pour avoir
des installations de production à longueur d'année pour ce genre
d'acier qui est quand même très spécialisé, si je
comprends bien.
M. Brlsson: Si je peux ajouter, M. le ministre, même en
Europe, on dit que, parmi les usines d'acier, aucune, même dans les plus
grandes, ne peut fournir tout l'acier qui est nécessaire pour un bateau.
On se fie à trois ou quatre usines différentes qui se sont
spécialisées. Alors, malgré le volume qui existe
là, on n'a pas pu avoir une usine ou une compagnie d'acier qui fasse
tout; alors, ici, ce serait illusoire de penser qu'au Québec, on puisse
tout faire.
M. Perron: Une dernière question, M. le Président
elle s'adresse toujours au ministre en rapport avec la loi 108,
qui fut adoptée en décembre 1978, on sait que le gouvernement du
Québec a donné des garanties de $104 millions en rapport avec les
six fameux bateaux de Karageor-gis. On sait aussi que Marine Industrie peut,
n'importe quand, vendre les bateaux en question au prix le plus abordable et la
différence serait payée par le gouvernement du Québec.
Ma question est celle-ci: Est-ce que, dans l'hypothèse où
Marine vendrait un ou plusieurs de ces bateaux, le tout doit être
sanctionné par le ministre des Finances ou vous-même? Je
présume que Marine va discuter...
M. Tremblay: Exactement, une garantie de cet ordre,
accordée par le ministre des Finances, entre dans les états
financiers du gouvernement et il est évident que la position
financière du gouvernement même si ce n'est pas un gros
montant pour le gouvernement est mise en cause. De sorte que Marine doit
avertir le ministre des Finances de ses intentions dans ce domaine. Il est
évident que le ministre des Finances opposerait un veto si Marine
décidait de vendre ses bateaux pour $1 et autres considérations
et se retournait et demandait $17 499 000 au ministre des Finances.
M. Coulombe: Six fois! M. Tremblay: Pardon?
M. Coulombe: Multiplié par six, en plus!
M. Tremblay: Donc, il y a une présomption que Marine
obtienne un prix raisonnable pour ses bateaux et que la perte soit
minimisée.
M. Perron: Merci. Maintenant, ma question s'adresse au syndicat.
Elle vise les emplois qui seraient perdus dans le cadre du plan de
redressement. On sait qu'il y a des métiers qui sont difficilement
recyclables, à court terme en tout cas, soit dans la division des wagons
ou soit dans la division électrique, puisqu'on parle
d'ébénistes et on parle de ferblantiers, on parle aussi
d'électriciens qui perdraient leur emploi à la suite de ce
remaniement, de l'application de ce plan de redressement par Marine Industrie.
Peut-on savoir quel nombre représente ces employés qui, à
court terme, ne seraient pas recyclables à cause de l'ancienneté
ou à cause du manque de travail pour eux?
M. Gagné: M. le Président, on peut peut-être
répondre approximativement. Si le plan de redressement était
comme tel et s'il n'y avait plus de naval, ou du naval à court terme, ce
vers quoi on se dirige présentement, pour la fin de l'année,
c'est sûr qu'il y a des ferblantiers, des plombiers, des
ébénistes, dans ce genre; ça pourrait représenter
entre 250 et 300 travailleurs. Je ne sais pas si la compagnie peut confirmer
exactement le même chiffre concernant les métiers de finition; ce
serait entre 250 et 300.
M. Coulombe: Oui.
M. Gagné: C'est pas mal exact, n'est-ce pas? (22 h 45)
Si vous me le permettez, M. le Président, une petite allocution
de rien, suite à tous ces débats. Je pense que les travailleurs
des chantiers maritimes sont tannés qu'il n'y ait pas de politique. A ce
stade-ci je vais demander au ministre Tremblay si ce serait possible de sa part
d'organiser des rencontres avec le syndicat, la direction de Marine Industrie
pour aller à Ottawa rencontrer les fameux responsables qui n'appliquent
pas ces politiques et qui ne veulent rien entendre. Qu'à ce stade-ci, je
demanderais une réponse du ministre si c'est possible.
M. Tremblay: Comme je l'ai dit tout à l'heure, s'il y a de
la bonne volonté de la part des intervenants et je crois qu'il y
en a la mise sur pied d'un bureau de construction navale, parce qu'il ne
faut pas dissocier le problème de Marine Industrie de celui de Davie
Shipbuilding et de celui de Vickers, peut se faire au cours des prochaines
semaines. Il y aura une participation du ministère de l'Industrie et du
Commerce, du ministère des Transports, des chantiers maritimes, des
petits chantiers qui sont quand même intéressés par tout ce
qui se passe dans les grands, il y aura certainement une participation de la
direction de Marine Industrie, je présume, de la direc-
tion de Davie Shipbuilding et de la part des syndicats de ces deux
chantiers, de sorte qu'il pourra y avoir une position commune sur quelques
grands axes de politique au cours des prochaines semaines ou des prochains
mois.
M. Gagné: Je vous remercie.
M. Scowen: Une dernière question, M. le ministre.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: On a vécu une expérience
intéressante aujourd'hui, mais quand vous étiez absent j'ai
demandé à M. Coulombe si c'était possible dans une telle
commission parlementaire, d'avoir comme documentation au début d'un tel
rapport une projection du "cash flow", un bilan pro forma pour l'année
en cours 1979-1980. J'ai été obligé en étudiant
cette affaire, et mon collègue avait le même problème, de
remarquer qu'il y avait des chiffres un peu partout, mais c'était
impossible de les mettre ensemble de façon cohérente. Il y avait
un chiffre de vente de 1979 ici, un autre pour une moyenne de dix ans là
et M. Coulombe a répondu que ce n'était pas possible, mais il
parlait surtout de la question de ventilation par produit, mais je pense que
tenant compte du fait que vous produisez pour le public à la fin de
l'année un bilan complet, que ce ne doit pas être exclu pour
rendre beaucoup plus utile ces rencontres et j'espère qu'on en aura une
autre d'ici un an pour suivre vos résultats, le succès qu'on vous
souhaite énormément, qu'on obtienne cette documentation. Les
prévisions du "cash flow", "profit and loss" et bilan pour les
années prochaines pour deux ans au moins. Est-ce possible d'avoir
ça, sans qu'on dévoile les détails par produits qui
pourraient être utiles aux concurrents?
M. Tremblay: En ce qui concerne le dévoilement de
renseignements financiers, j'ai déjà exprimé la position
du gouvernement, nous souhaitons que toutes les sociétés d'Etat
publient des états financiers trimestriels.
M. Scowen: Je parle des prévisions, des plans.
M. Tremblay: En ce qui concerne les plans, je pense que ceci doit
découler de la discrétion du conseil d'administration de chacune
des sociétés, mais pas de chacune des sociétés. Si
la société estime qu'elle peut distribuer des bilans pro forma ou
des prévisions de vente, etc., et que cela ne constitue pas un handicap
dans ses opérations commerciales ou industrielles normales, je n'ai pas
d'objection à mon niveau.
Si, au contraire, elle juge que ceci met en péril sa position par
rapport à des concurrents ou d'autres, elle a pleine juridiction pour
refuser ce genre de dévoilement. Je n'étais pas ici quand vous
avez formulé votre demande. Je me demande quelle a été la
réponse de la direction de la SGF?
M. Coulombe: M. le Président, là-dessus je pense
qu'il faut être extrêmement clair. Je ne vois pas beaucoup de
compagnies publiques qui ont des actionnaires et qui dévoilent à
leurs actionnaires au début de l'année les prévisions
financières, les bilans pro forma, et ceci et cela. Le rôle des
actionnaires c'est de juger au résultat. S'il y a un conseil
d'administration à une société d'Etat qui doit jouer un
rôle, c'est bien le rôle justement de surveiller, d'étudier
ces bilans pro forma, d'étudier les prévisions et de voir,
à la fin de l'année, si ça se respecte ou non. Pour
l'actionnaire, c'est de juger aux résultats. Sans ça, le conseil
d'administration, enlevez-le, il est parfaitement inutile.
M. Scowen: Je ne suis pas du tout en désaccord avec vous
que ce n'est pas habituel. Mais je pose la question. C'est quoi le rôle
de ces commissions parlementaires? Surveiller vos plans, votre programme de
redressement, qui est un programme de redressement rentable, sans que nous
ayons les chiffres pour comprendre ce que cela veut dire, que c'est rentable,
quand et comment? C'est plutôt une question...
M. Coulombe: Vous comprendrez que ce n'est pas à nous
à définir à quoi sert la commission parlementaire. Ce que
je veux dire, c'est que l'actionnaire a eu en main les documents de base pour
prendre les décisions.
M. Scowen: Ce n'est pas une question à régler ce
soir, mais je la pose au ministre, parce que je pense que ça met en
cause ces commissions parlementaires et je sais très bien que nous
sommes en train d'évaluer cette question de contrôle sur les
sociétés d'Etat.
En terminant, je voudrais simplement vous remercier et vous souhaiter
bonne chance dans votre projet.
Le Président (M. Boucher): Comme il n'y a plus
d'intervenant, au nom... M. le ministre, vous voulez ajouter quelque chose?
M. Tremblay: Merci, M. le Président. Je voulais remercier
les membres de cette commission qui ont accompli un travail sérieux et
quelque peu aride sur un sujet très complexe comme celui d'un plan de
redressement, dans une perspective de rentabilité d'une entreprise. Il
est évident qu'une commission parlementaire comme la nôtre n'a pas
pour fonction de diriger ou d'administrer une entreprise; ce n'est pas la
fonction des parlementaires, pour répondre indirectement à la
question que soulevait le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Notre rôle est de vérifier si, dans le cadre d'une loi, certaines
orientations prévues par l'Assemblée nationale ont
été réalisées.
Il s'agissait ici d'un article d'un projet de loi adopté par
l'Assemblée nationale, qui prévoyait que la Société
générale de financement, avec Marine, devait mettre sur pied un
plan de redressement et le soumettre au gouvernement qui
devait le déposer avant le 1er juin. Présumément,
nous devions en débattre et l'éclairer en commission
parlementaire. Ce travail a été fait, je pense, et il va de soi
que ceci ne clôt pas le débat, puisque, comme on l'a dit tout
à l'heure, il ne s'agissait pas de résoudre tous les
problèmes qui sont rattachés à la crise qui sévit
dans les chantiers maritimes, tout particulièrement la crise que
traverse Marine.
Je voudrais remercier les représentants des syndicats qui, encore
une fois, ont apporté une contribution extraordinairement positive
à la discussion, avec un mémoire bien structuré. Je les
remercie pour la contribution apportée quant à des organismes et
à des positions communes qui pourront se dégager des rencontres
qui se poursuivront dans les semaines qui vont venir. Il est évident
qu'il faut reconnaître que la direction de Marine,
particulièrement la direction de la SGF, a fait diligence pour se
conformer au délai que leur enjoignait la loi pour procéder
à cette opération de redressement.
Il n'est pas facile de diriger une entreprise sous les
réflecteurs et nous devons tous en être conscients, nous qui
sommes du gouvernement ou de l'Assemblée nationale. Je pense que les
dirigeants ont fait leur devoir, comme je l'ai dit tout à l'heure, il
ont fait face à la situation, ils ont su prendre le taureau par les
cornes et ils ont abouti à un plan qui, même s'il soulève
des points d'interrogation, reçoit l'adhésion au niveau de son
sérieux et de sa rationalité. Comme le disait le président
de la SGF, à venir témoigner devant la commission parlementaire,
on est amené à être d'une honnêteté quasi
dangereuse. On sait que, dans un domaine compétitif, concurrentiel,
dévoiler des plans, même si c'est utile pour la cohésion
des actions, ceci complique la position de l'entreprise, au niveau de ses
contrats, par rapport à des concurrents.
Je pense qu'en ce faisant, les dirigeants de Marine Industrie et de la
SGF ont fait preuve d'un courage et d'une patience exceptionnels, à la
fois par le travail qu'ils ont accompli mais aussi, aujourd'hui, en se
prêtant de si bonne grâce à toutes nos questions. Souvent,
comme nous ne sommes pas des experts, et ce n'est pas la fonction des
parlementaires d'être des experts dans tous les domaines, il nous arrive
de poser des questions qui peuvent paraître naïves et qui peuvent
paraître incomplètes, jusqu'à un certain point nous
devons nous en excuser à cause justement des circonstances.
Je remercie tous ceux qui ont participé à cette commission
et je les encourage à continuer une ouverture quant à des
cohésions et des concertations pour aboutir à des solutions qui
soient au bénéfice de tous, principalement au
bénéfice de ceux qui oeuvrent à l'intérieur des
entreprises que sont les chantiers maritimes, et tout particulièrement
à l'intérieur de Marine Industrie, pour le bien de la
région de Sorel et pour le bien de l'ensemble du Québec. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Je crois
que nous avons bien travaillé, compte tenu de l'heure.
En mon nom personnel et au nom de tous les membres de la commission, je
remercie les représentants de la SGF, de Marine Industrie et des
syndicats concernés, pour leur participation à cette commission.
Je crois que vous m'avez facilité le travail avec votre collaboration et
celle de tous les membres de cette assemblée et je vous en remercie.
La commission ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 22 h 57