Journal des débats (Hansard) of the Committee on Institutions
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, April 5, 2023
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Vol. 47 N° 10
Special consultations and public hearings on Bill14, an Act to amend various provisions relating to public security and to enact the Act to assist in locating missing persons
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11 h (version non révisée)
(Onze heures vingt-trois minutes)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Bon
matin à tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance la
Commission des institutions disant ouverte.
Je vous souhaite encore une fois la bienvenue.
La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et
les auditions publiques du projet de loi numéro 14, Loi modifiant diverses
dispositions relatives à la sécurité publique et édictant la loi visant à aider
et à retrouver des personnes disparues.
Avant de débuter, Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président, Monsieur Lemieux (Saint-Jean) est remplacé par M. Lamonthe (Ungava);
Monsieur Zanetti (Jean-Lesage) par M. Fontecilla (Laurier-Dorion).
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Ce matin, nous
débuterons les auditions avec les représentantes de l'Association des familles
de personnes assassinées ou disparues. Mesdames, merci beaucoup d'être avec
nous ce matin. Alors, je vous invite d'abord à vous présenter, puis faire votre
exposé. Après ça, on aura une période d'échange avec les membres de la
commission. Merci beaucoup d'être ici.
Mme Carretta (Christine) : Merci.
Alors. Bonjour, mon nom est Christine Carretta. Je suis la sœur d'une victime d'homicide,
Cathy Carretta, qui a été victime d'un féminicide en 1998. Et je suis aussi P.D.G.
de l'AFPAD.
Mme Béchard (Andrée) : Bonjour,
mon nom, c'est Andrée Béchard. Je suis la mère de Marilyn Bergeron qui est
portée disparue depuis 15 ans. Je ne fais pas partie de l'administration
de l'AFPAD, mais je suis membre à l'AFPAD.
Mme Carretta (Christine) : Alors,
je vais pouvoir vous présenter l'Association des familles de victimes...
pardon, l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues de l'AFPAD.
Donc, l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues AFPAD
est un organisme à but non lucratif qui intervient à travers le Québec et dont
la mission principale est de soutenir et accompagner les familles ayant vécu l'assassinat
ou la disparition d'un proche. Depuis 2005, l'AFPAD reconnaît que les proches
de victimes d'homicides ou de disparitions vivent des souffrances sans nom qui
doivent être impérativement reconnues au même titre que leurs droits. Nous
sommes témoins au quotidien des ravages dévastateurs et des traumatismes
profonds que vivent les proches de victimes d'actes criminels. De toute
évidence, au nom de notre mission, notre mandat vise à déployer les efforts
nécessaires dans le but de soutenir professionnellement cette partie de la
population affligée qui reste trop souvent sans réponse et qui se sent parfois
oubliée.
L'AFPAD offre à plus de 1300 familles
au Québec, membres, une ouverture de dossier, des rencontres, de l'écoute
active, diverses ressources et publications adaptées à leur besoin, du soutien
lors d'un procès ou de libérations conditionnelles, de l'aide à la rédaction et
à la déclaration de la victime, de la documentation adaptée et constructive,
des ateliers, des conférences et de l'accompagnement auprès des corps
policiers. Nos interventions sont nécessaires du fait que plusieurs de nos
familles sont à risque de se retrouver en situation d'isolement social et de
solitude. Pour éviter des répercussions sur leur santé, une de nos priorités
est donc de briser l'isolement pour qu'ils ne se sentent plus seuls dans cette
épreuve de vie difficile.
Dans un premier temps, l'AFPAD souhaite
remercier la famille Bergeron et Béchard...
Mme Carretta (Christine) : ...de
Marilyn Bergeron, disparue en 2008, de nous avoir recommandé à la Sécurité
publique en tant qu'organisme intervenant en matière de disparitions d'adultes
au Québec. Il est aussi important pour nous de souligner la participation et la
collaboration de cette famille ainsi que tant d'autres ayant vécu une
disparition, pour leurs recommandations au processus d'élaboration de cette
loi. Dans le même ordre d'idées, l'AFPAD remercie la Sécurité publique de nous
faire participer aux présentes réflexions collectives et au développement des
meilleures pratiques en matière de disparitions. Votre geste est
considérablement apprécié. De par la reconnaissance et le soutien crucial que
nous offrent la Sécurité publique et le ministère de la Justice, il est de
notre devoir de respecter les valeurs qui nous guident au quotidien, à savoir
l'intégrité, l'équité, l'honnêteté, la transparence, le respect et l'entraide.
Un de nos objectifs principaux est la
prévention. En raison de ce fait, il est important pour nous de développer un
vaste réseau de soutien auprès d'organismes et corps policiers avec lesquels
nous avons tissé des liens. Par conséquent, il est de notre rôle, en matière de
disparition, de contribuer à la sensibilisation, à la prévention et l'éducation
auprès des divers partenaires et grand public.
Pour faire suite aux documents présentés
concernant le projet de loi n° 14 dans l'axe de la Sécurité publique, nous
saluons la diligence du ministre d'avoir effectué des changements de procédure.
Nous reconnaissons la volonté du gouvernement d'améliorer les moyens pour
retrouver les personnes disparues. De ce fait, l'AFPAD a pris connaissance du
projet de loi n° 14 et des amendements que le ministre a déposés à l'Assemblée
nationale. C'est à la lumière des recommandations de la déposition de l'article
17, faisant référence aux personnes disparues, que nous observons une
démocratisation de la loi, c'est-à-dire un avancement prometteur qui se traduit
par un véritable espoir pour l'avenir. À cette fin, les éléments techniques
apportés à l'article 117 serviront à de meilleures pratiques, qui seront de
toute évidence plus efficaces en matière de communication, de renseignements,
permission, recherche, collaboration, attentes et visibilité.
L'importance de l'ajout de l'article 117
est majeure, et il représente pour l'AFPAD et ses familles une avancée. Nous
pensons, après plusieurs lectures, que les recommandations apportées font
preuve d'une réflexion rigoureuse dans le but de faciliter le travail de
recherche des enquêtes dans les cas de disparition. Chacun des points de
l'article 117 fait preuve d'une percée inédite que nous appuyons. L'AFPAD est
donc en accord avec les changements proposés.
Par conséquent, nous soutenons les
interventions élargies des corps policiers. Puisqu'ils sont au cœur de
l'action, l'article 117 leur permettra dès lors de progresser de manière
efficace et stratégique sur le terrain. De plus, ils seront en mesure de
développer des collaborations et des relations transversales. Le partage
d'informations, de connaissances et d'expertises est crucial au sein des
différents corps policiers. Dans un cas de disparition, l'échange et le travail
conjoint dès le début du signalement entre les corps municipaux et provinciaux
sont essentiels. Il devient par conséquent impératif de réduire les délais de
communication et d'intervention en matière de recherche. L'équipe de recherche
terrain doit être composée de personnes ayant reçu une formation
professionnelle reconnue pour protéger, le cas échéant, les indices et les
scènes de crime. Les corps policiers doivent être connectés avec différents
intervenants, tels que travailleurs sociaux, travailleurs de rue, maisons
d'hébergement ou refuges pour femmes battues, centres pour les itinérants,
intervenants en santé mentale, DPJ, hôpitaux, Enfants Retour et autres. De là
l'importance de soutenir les différents organismes en matière de disparition et
aussi de matières récurrentes.
• (11 h 30) •
Aussi, le fait de recevoir des suivis de
la part des corps policiers diminue les craintes que peuvent éprouver les
familles. Celles-ci ressentent le besoin de rester informées dans la
progression de l'enquête. Le tout reste dans l'objectif de minimiser un
éventail d'émotions négatives et parfois même dévastatrices.
Selon l'AFPAD, l'article 117 contribue à
l'émergence d'un souhait de société en matière de disparitions. De toute
évidence, l'accroissement des procédures déployées concrétise le fait d'offrir
le meilleur service auprès de la population. Ce virage nous montre l'engagement
du gouvernement ainsi que sa capacité d'adaptation et d'action. Les données et
les structures spécifiques présentées définissent...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Carretta (Christine) : ...bien
les attentes de l'AFPAD et de ses membres familles.
Je ne sais pas s'il me reste encore un peu
de temps. Deux minutes? Alors, j'aimerais juste peut-être souligner rapidement
les recommandations. L'AFPAD invite les personnes concernées à l'étude et à la
rédaction de l'article 117 à prendre en considération nos recommandations,
telles que, donc, le chapitre I, Dispositions des interprétatives. Nous
approuvons chacun des points mentionnés. Cependant, le point 2, «et fort
raisonnable», peut-être que la clarification du terme «raisonnable» serait
nécessaire. Ce terme laisse libre choix à la police de le définir eux-mêmes
lors que les premières heures sont critiques. L'article 2, nous l'approuvons
dans sa totalité, nous l'appuyons. Chapitres II, Ordonnances de
communication visant les tiers et autorisation de pénétrer dans un lieu, à l'article 3,
nous apprécions que l'ordonnance, en vertu de cet article, offre une
énumération exhaustive et précise. Elle semble couvrir l'ensemble des
informations pertinentes aux recherches. Aussi, au quatrième paragraphe, nous
appuyons et accordons un nouveau délai. L'article 4, au point 1, nous
pensons que le mot «statut» pourrait être rajouté. Au point 4, nous
pensons que «et des écrits» pourrait être rajouté aussi. Au point 8, nous
pensons que le mot «stage» pourrait être ajouté. Au point 10, nous pensons
que les mots «renseignements testamentaires» pourraient être aussi rajoutés. Au
point 11, nous pensons rajouter un s à «autre» et un s à «renseignement»
parce qu'il y en a, donc, plusieurs. Articles 5 et 6, nous les appuyons.
Chapitre III, Communication publique, articles 8 et 9, nous les appuyons
également. Chapitre IV, pour Dispositions modificatives et finales, l'article 10,
11, 12, nous sommes favorables aux mesures de concordance. Nous appuyons le
tout. De plus, à la page 9, l'article 4, nous l'appuyons dans sa
totalité.
Pour l'AFPAD, une de nos préoccupations,
au-delà de tout ce qui précède, serait l'affichage unique. Nous aurions aimé qu'il
soit réalisable et qu'il y ait une base de données d'affichage des personnes
disparues. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci infiniment. Peut-être
rappeler aux membres de la commission que le mémoire de l'association vient d'être
déposé sur Greffier. M. le Ministre, s'il vous plaît.
M. Bonnardel : Merci, M. le
Président. Mme Béchard, Mme Carretta, c'est un honneur de vous recevoir ce
matin. Merci d'être là encore une fois. Vous savez, je reste convaincu qu'avec
l'adoption de cette loi, l'édiction de cette loi pour les personnes disparues
dans la loi 15, si un jour on réussit à retrouver une personne ou à sauver
une vie, ce sera une réussite, cette loi. Est-ce qu'elle est parfaite?
Peut-être pas. Vous amenez certains petits points, là, qui méritent une
attention particulière.
Ma première question, je voulais juste que
vous clarifiiez un peu plus, là, à l'article 4, là, où vous dites... au
point 1, au point 4, vous dites : Nous pensons que le mot
«statut» pourrait être rajouté et «des écrits», on pourrait ajouter.
Pouvez-vous élaborer sur ces deux mots que vous souhaitez... Je vous laisse...
Mme Carretta (Christine) : Attendez,
je le cherche, article quatre, dans le chapitre deux... L'article quatre, c'est
ça, un... c'est le point quatre, c'est ça, monsieur?
M. Bonnardel : Bien, vous
avez indiqué dans l'article 4.1 et 4.4.
Mme Carretta (Christine) : Oui.
M. Bonnardel : Vous nous
dites : Il faudrait ajouter "statut" et "des écrits".
Mme Carretta (Christine) : Alors,
au point un, oui, des renseignements relatifs à l'identité, son statut. Moi, je
parlais au niveau du statut, le statut de la personne. Est-ce qu'elle est par
exemple un immigrant? Est-ce que c'est quelqu'un qui... son statut, pas dans le
sens, est-il marié ou divorcé, célibataire, mais le statut au niveau de... C'est
ça, est-ce que la personne est déjà... Peut-être que je n'ai pas utilisé le bon
terme, mais est-ce que la personne, c'est ça, elle vient d'un autre pays?
Est-ce que c'est un immigrant? Est-ce que c'est quelqu'un qui est recherché? On
voudrait juste savoir au niveau du statut, que ça soit peut-être un peu petit
plus clair de ce côté-là.
Pour ce qui est du point quatre, des
écrits. Alors, des photos et des vidéos, y compris des images de télévision en
circuit fermé. Des écrits. Oui, parce que peut être qu'il pourrait y avoir des
écrits qui ont été laissés aussi. Donc, on pensait que ça pouvait être
important.
M. Bonnardel : O.K., j'ai
bien reçu votre...
Mme Carretta (Christine) : Des
écrits, lorsque je parle d'écrits...
Mme Carretta (Christine) : ...peut
être un journal que quelqu'un aurait écrit, ça peut être des papiers, un
mémoire, peu importe.
M. Bonnardel : Bien reçu.
Quel est votre avis aussi sur l'ajout... On a souvent l'impression, une
personne disparue, on veut géolocaliser, on veut avoir ses renseignements, mais
la personne qui... qui accompagne une personne disparue, votre avis sur ce
concept additionnel qu'on... qu'on a ajouté dans la loi, là, donc sur l'ajout
du concept de personne qui accompagne une personne disparue. Croyez-vous que
c'est un... c'est un élément important pour être capable d'aller chercher de
l'information? Exemple, quelqu'un qui enlève un enfant, cet ajout, comme tel,
pour moi... pour vous, j'imagine que c'est un point positif.
Mme Carretta (Christine) : Je
suis désolé, ce n'est pas clair pour moi, ce que vous êtes en train de...
Mme Béchard (Andrée) : Je
peux y répondre.
Mme Carretta (Christine) : Oui,
allez-y.
Mme Béchard (Andrée) : Là,
vous voulez dire que, s'il y a quelqu'un qui accompagne la personne disparue,
dans n'importe quelles circonstances, c'est un ajout essentiel parce qu'on ne
sait pas à qui on a affaire exactement. Et je pense que ça peut donner vraiment
des pistes aussi aux enquêteurs. Alors, c'est essentiel de l'avoir, ça. Parce
qu'il y a souvent, surtout au niveau des enfants, une personne qui accompagne,
ça, c'est certain. Dans le cas d'adultes, ça peut être quelqu'un du milieu
criminalisé aussi, alors il y a beaucoup de choses qui peuvent ressortir sur ce
point de vue là. Je trouve que vous avez fait une bonne chose de l'ajouter.
Parce que nous, on s'est posé la question aussi à savoir si notre fille était
accompagnée de quelqu'un. Et ça, ça joue énormément. Ça peut être aussi
quelqu'un qui va prendre sa place dans un guichet automatique, qui va sortir de
l'argent à sa place. Alors, il y a toutes sortes d'exemples qui peuvent
arriver, alors je trouve que c'est essentiel de l'inscrire.
M. Bonnardel : Comment vous
trouvez la mesure... l'ajout de la communication du renseignement... du
renseignement au public? Comment tout ça serait... Bien, j'imagine que vous
allez me dire que c'est bénéfique de donner tous les renseignements possibles
au public pour être capable de retrouver, mais cet aspect-là, est-ce qu'on
devrait l'améliorer encore plus ou vous trouvez que c'est... ça touche
précisément, là, les informations que le public devrait recevoir quand on...
Mme Béchard (Andrée) : Bon,
le public... et c'est un atout essentiel. D'abord, le public, là, qu'est-ce qui
arrive? Quand les policiers donnent des renseignements, il faut qu'ils soient
précis. Il faut que la photo paraisse. Il faut que ce soit clair pour le
public, pour identifier d'abord la personne. Les renseignements qui sont à
donner, c'est si on peut craindre pour sa sécurité. Ça, c'est important de le
dire, parce qu'une disparition c'est souvent une question de vie ou de mort et
de délais. Alors, es délais sont extrêmement importants aussi au moment où
c'est diffusé au niveau de l'information, parce que c'est prouvé que même un
enfant, après 3 heures, il peut être décédé. Et un adulte, bon, on ne le sait
pas, dans sa vulnérabilité, etc. Alors je pense que les policiers au public
doivent donner des renseignements qui ne peuvent pas nuire à l'enquête. Pas
trop en dire, mais dire vraiment ce qu'il faut pour faire en sorte que le
public soit ouvert et ouvert à ce drame-là d'une disparition et qu'il faut la
retrouver, la personne. Alors les mots choisis par les policiers... il y a un
langage pour les disparitions. Alors les mots choisis par les policiers sont
essentiels, mais de garder certaines choses pour l'enquête. Mais il y a comme
une nuance à faire entre les deux. Alors moi, c'est...
• (11 h 40) •
M. Bonnardel : Dernière
question avant de laisser les questions à mes collègues. Votre opinion sur le
fait de lever le secret professionnel pour obtenir certaines informations
précises, précises sur la capacité d'établir une piste x sur une recherche x
qui serait importante. Parce que, bon, c'est quand même... le secret
professionnel, vous le savez, là, c'est quand même protégé, important, là.
Mme Béchard (Andrée) : Bon,
là, écoutez, moi, ce que je pense, c'est que les personnes disparues, c'est des
cas d'exception. Vous n'avez pas de scène de crime, vous n'avez pas la
personne, ce n'est pas palpable. La personne disparue peut se retrouver
n'importe où. La famille qui arrive puis qui signale une disparition, c'est une
famille qui est angoissée parce que la personne, ce n'est pas son comportement
normal. Ce n'est pas quelque chose qui est dans sa routine de vie. Donc le
secret professionnel... Il y a un équilibre à avoir. Je pense que cet
équilibre-là, il n'est pas nécessairement... il n'est pas là. Vous avez les
droits de la personne que c'est comme ça. Il y a une définition et vous avez
par la suite le drame de la disparition, jusqu'où on va. C'est qu'il y a un...
Il y a quand même un équilibre parce qu'on parle d'une question de vie ou de
mort. Alors, je pense qu'en ce qui concerne le secret professionnel, si...
Mme Béchard (Andrée) : ...qui
alors peut permettre de sauver une vie, il y a des choses qui doivent être
dites. À ce moment-là, ce que je dirais, que si la personne est retrouvée vivante,
ces informations-là doivent être détruites par la suite, mais si la personne
est décédée ou quoi que ce soit, bien, le but, c'est de retrouver la personne.
Alors, je pense qu'il y a un équilibre à
avoir pour les cas de disparition. Ce sont des cas d'exception parce qu'on ne
sait rien. C'est comme je vous ai dit, ce n'est pas palpable, on cherche. Et le
temps compte aussi. Alors, je pense que le secret professionnel, s'il peut
sauver une vie, alors, pourquoi pas? Je pense qu'il y a des limites aussi. On
est rendu en 2023, là. Alors, je pense que ce qu'on avait comme comme
recherche, je pense qu'on a besoin d'actualiser le traitement des disparitions
parce qu'il faut oublier les années 70. Là, on est rendus plus loin que
ça. Alors, je pense que c'est une question d'équilibre, d'aller chercher de
l'information.
Le Président
(M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le
député d'Ungava, s'il vous plaît.
M. Lamothe : Bien, tout
d'abord, félicitations pour être ici. Alors, vous avez vécu, là, ce que vous
dites, dans le sens que vous avez vécu des expériences que je n'aimerais pas
vivre, puis de vous engager comme vous le faites dans l'organisme, je tiens à
vous féliciter. Vous avez parlé, vous êtes pas mal affairé au niveau policier.
Vous nous avez parlé de faciliter les recherches d'enquêtes. La collaboration
et le partage d'informations avec les corps policiers est crucial. Dans le
projet de loi, il y a différents intervenants qui sont venus ici, puis qui
ont... On a une place à un certain moment dans le projet de loi pour les
interpellations policières, les contrôles de routine. Il y en a qui sont contre
ça. Moi, ce que je dis, c'est qu'à un certain point, c'est nécessaire.
Lorsqu'on pense qu'il y a quelque chose de pas normal qui se passe, il faut faire
des vérifications. Vous pensez quoi de ça, vous?
Mme Carretta (Christine) : Bien,
moi, je suis tout à fait d'accord avec vous. J'ai eu à plusieurs reprises
l'occasion, donc, d'être en communication avec les corps policiers, et c'est
sûr que les corps policiers ont besoin d'avoir... d'avoir cette... cette
amplitude-là, de pouvoir aller chercher des renseignements. Le pouvoir... Pour
eux, ça... ça les guide, ça leur permet de... ça leur donne une ouverture dans
leur travail. Et j'ai l'impression que ça rend aussi le travail beaucoup plus
satisfaisant pour eux, mais aussi lorsqu'ils rencontrent après ça les familles
pour pouvoir les guider un petit peu, pour pouvoir leur donner certaines
informations. Ces familles-là ont besoin d'avoir des informations. Ils se
sentent complètement oubliés, tellement oubliés que leur vie prend une autre
dimension.
Ce n'est pas du tout comme un homicide.
Ces gens-là sont continuellement dans l'attente et, pour pouvoir fonctionner,
ils font semblant. Presque des fois, ça n'existe pas, donc on continue de...
Vous comprenez ce que je veux dire? Et ce qu'on reproche beaucoup aux corps
policiers, nos membres, ce qu'ils leur reprochent, c'est ce manque d'ouverture
là, ce manque de communication, d'information. Donc, pour nous, c'est très
important. Et les corps policiers, lorsqu'ils font appel à l'AFPAD, ils nous
donnent de l'information qui est précieuse. Et nous, on peut aussi faire un peu
l'intermédiaire entre les corps policiers et le membre, ce qui rassure les gens
beaucoup.
Alors, nous aussi, des fois, on a de
l'information qu'on peut... qu'on peut donner aussi aux corps policiers qui
leur viennent en aide aussi. Je me souviens, entre autres, d'un cas en
particulier, là où est-ce qu'on les a mis sur une piste, en particulier, pour
un cas de disparition, qui était vraiment pertinente. Donc, oui, c'était
important qu'il y ait une collaboration. Oui, c'est important que les policiers
puissent avoir cette ouverture-là sur le terrain, de pouvoir aller chercher de
l'information qu'ils ont besoin en tout temps.
M. Lamothe : Juste
vite... les réponses.
Mme Carretta (Christine) : Mme Béchard
voulait répondre aussi quelque chose.
Mme Béchard (Andrée) : ...ajouter
quelque chose, monsieur. La formation d'agents communautaires, je trouve que
c'est essentiel parce que ce sont des gens qui sont capables de bien
communiquer. Comme je vous dis, il y a un langage pour les familles de
personnes disparues. Ce sont des agents qui peuvent aussi faire le lien entre
la famille et le corps policier. Ces gens... Ces personnes là, sont vraiment,
sont vraiment capables et formées pour une bonne approche dans ce cas là. Alors
c'est ce que je suggère, moi.
M. Lamothe : ...que
l'idéal, c'est que tous les policiers pourraient faire cette job-là, tu sais,
au niveau communautaire.
Mme Béchard (Andrée) : C'est
sûr, mais...
M. Lamothe : Mais
souvent... Je suis d'accord avec ce que vous dites, c'est juste une réflexion,
j'ai fait ce métier-là, mais souvent, on tague trop des gens. Ah! Toi, tu vas
t'occuper de ça. Ah! Toi, tu vas t'occuper de ça. Tandis qu'un policier devrait
faire plusieurs tâches connexes, entre autres prendre le temps de communiquer,
mais je comprends ce que vous dites. Peut-être juste un dernier point, vite
fait. Quand vous... Juste à titre informatif. Collaboration, il y a le partage.
Vous parlez de la collaboration des corps policiers sur le partage
d'informations. Vous avez sûrement vécu des expériences négatives. J'aimerais
vous entendre là-dessus.
Mme Béchard (Andrée) : Ce
qui arrive, c'est que c'est nous-mêmes qui a été chercher un lien...
Mme Béchard (Andrée) : ...une
personne lien entre le corps de police qui s'occupait de l'enquête et le...
Bon, je ne sais pas si je dois nommer les corps de police, là, mais ce qui
arrive, c'est que notre fille demeurait dans un autre endroit que celui où...
que Québec. Puis, ce qui est arrivé, c'est que nous, on voulait vraiment
transférer... faire transférer le dossier parce que sa vie était ailleurs et
elle a été 24 heures à la maison seulement. Alors on trouvait qu'il y avait
quand même une enquête qui aurait pu se faire directement dans son milieu et
c'est... Notre difficulté, elle a été là. Alors on a amené le corps de police
de la ville en question à faire un lien et de s'unir les deux corps policiers
ensemble. Et ça a pris quelques années. Ça nous a pris... Ça a été très, très
ardu. Et, bon, souvent, on nous répondait : Bien, c'est à nous autres
cette enquête-là, là. Alors nous, ce qu'on disait, c'est qu'une personne
disparue peut se retrouver n'importe où. Alors, on a été partout, on a été en
Ontario, on a... On a donné des... On a rencontré beaucoup de corps de police,
alors c'est pour ça que je vous dis que... C'est la communication entre corps
de police, là, il faut vraiment qu'elle soit présente parce qu'il faut qu'ils
fassent confiance aussi en leur profession, en leurs collègues qui sont
d'ailleurs. Alors, moi, je trouve que c'est faire confiance en la profession.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Vimont, s'il vous plaît. Il reste moins de trois minutes.
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci. M. le Président. Bonjour, Mesdames, bonjour, madame Carretta. Je
voulais... En fait, on a répondu déjà un petit peu à ma question... pardon,
c'est que j'aurais aimé connaître justement le rôle d'intermédiaire que vous
jouez entre vos membres, le corps policier. Parce que je pense que l'échange
d'information, c'est important. Je... de ce que j'ai cru comprendre, là, par
par le fait que vous pouvez souvent apporter aussi de l'information aux corps
policiers, rassurer aussi à la fois vos membres. Et puis j'aurais aimé un petit
peu que vous détaillez ce rôle-là, mais on a un petit peu répondu quand même
là-dessus. Je ne sais pas s'il y avait quelque chose d'autre que vous auriez
aimé ajouter.
Mme Carretta (Christine) : Bien,
écoutez, c'est sûr que la relation entre les corps policiers et les membres,
c'est quand même une relation qui est excessivement importante. C'est ce qui
fait que les membres qui se sentent complètement démunis et dévastés peuvent
aussi se raccrocher en fin de compte, hein, au corps policier. Je pourrais vous
citer un exemple comme ça qui me vient à brûle-pourpoint à l'esprit. J'avais eu
un cas justement de disparition, où on a eu une personne qui nous a... le
conjoint de la personne qui nous avait demandé, donc, d'enlever de sur notre
site le nom de cette personne-là en tant que personne disparue. Il y avait
tellement d'insistance que j'ai trouvé ça quand même particulier, et donc j'ai
communiqué tout de suite avec un des corps de police au niveau des crimes
majeurs, avant ça aussi les corps de police, et on m'a dit : Bien,
écoutez, madame Carretta, vous venez de lever justement un flag, là, parce
qu'on avait un doute, et là on va pouvoir faire des vérifications et en fin de
compte, ça a débouché sur autre chose que les corps de police soupçonnaient,
mais que nous on a pu valider avec eux.
Mme Schmaltz : Les corps
police vous appellent souvent, ils vous reconnaissent, ils savent qui vous
êtes?
Mme Carretta (Christine) : Ah!
oui, oui, c'est sûr, c'est sûr, c'est sûr, on travaille en partenariat,
d'accord? Des fois, par exemple, si un corps de police... je vais vous donner
un autre exemple, si par exemple, j'ai des membres qui n'en peuvent plus d'être
dans l'attente, dans l'attente, dans l'attente, qu'ils vont aller aux corps de
police. Puis, à un moment donné, les corps de police vont nous appeler, me
dites : Pouvez-vous, madame Carretta, s'il vous plaît, à l'AFPAD, vous
occupez de cette personne-là parce qu'on est envahis. Puis je leur dis :
Oui, mais c'est compréhensible, si vous ne leur donnez pas d'information, ces
gens-là sont à la recherche de la personne chère et ils veulent avoir des
réponses. Alors, automatiquement, nous, on les prend. Et si on juge
qu'effectivement on a besoin de rentrer en communication, c'est plus facile des
fois de communiquer avec... à travers l'AFPAD que directement avec le membre
qui lui, est excessivement émotionnel et qui a aussi des exigences auxquelles,
des fois, le corps de police ne peut pas toujours répondre. Donc, on est un peu
comme l'effet tampon en fin de compte.
• (11 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Westmount–Saint-Louis, s'il vous plaît.
Mme Maccarone : Oui, merci
beaucoup. Bonjour, madame Carretta, Madame Béchard, merci beaucoup pour les
deux mémoires, dans le fond que nous avons reçus, c'est grandement apprécié et
je veux d'emblée partager mes sincères condoléances et beaucoup de compassion
pour ce que vous avez vécu.
Mme Béchard (Andrée) : ...
Mme Maccarone : Bien,
condoléances, peu-être pour madame Carretta. Oui, tout à fait, puis, pour vous,
madame Béchard, sache que je pense qu'on a tous des pensées pour vous et votre
famille en espérant que c'est un cas qui sera résolu. Puis je veux vous
remercier aussi pour ce que vous faites parce que votre témoignage ici, les
informations que vous partagez avec nous, c'est sûr, ça va faire avancer les
cas pour plusieurs autres familles qu'on espère qu'on a...
Mme Maccarone : ...en plus des
cas de disparition, mais merci beaucoup pour ce que vous faites. Dans le
mémoire que vous avez partagé avec nous, Mme Béchard, vous avez parlé de
la proposition d'un fichier unique, pourriez-vous élaborer là-dessus parce que
ça n'a pas fait partie de la présentation que nous avons eue? Puis je pense que
la proposition est assez intéressante, puis ça peut amener des amendements à ce
projet de loi.
Mme Béchard (Andrée) : Bon,
j'ai présenté un travail à la Sécurité publique pour démontrer de quelle façon
les disparitions étaient... les personnes disparues étaient affichées. Vous
avez 31 corps de police, vous en avez à peu près huit qui affichent
correctement les personnes disparues, vous en avez à peu près cinq qui sont
vraiment par des liens, et vous avez 18 corps de police qui ne les
affichent pas, peut-être qu'ils n'en ont pas non plus. Bon. Moi, j'ai
répertorié 408 personnes portées disparues au Québec, mais, en réalité, il
y a 1 200 personnes de portées disparues au Québec. Alors, nous, ce
qu'on a besoin, c'est des yeux. Les yeux, c'est le public, et le public, il ne
sait pas où aller. Moi, à chaque fois que je rencontre des gens, ils me disent :
Bien, comment ça se fait que Marilyn n'est pas affichée à la Sûreté du Québec?
Parce que c'est un corps municipal qui s'occupe de la disparition, ce n'est pas
la Sûreté du Québec qui s'occupe de toutes les disparitions au Québec, ça va
avec les... chacun des corps policiers. Alors, c'est là que vous voyez que
c'est à la discrétion des corps policiers de faire des affichages. Et toutes
nos personnes disparues au Québec qui sont 1 200, je pense qu'au Québec,
maintenant, en 2023, il est temps qu'on les affiche et que les Québécois
puissent avoir accès à un seul affichage, quitte à mettre le lien qui va avec
le corps de police qui s'occupe de l'enquête. Alors, les gens, s'ils ont des
informations à donner, pourront, à ce moment-là, communiquer avec le corps de
police en question. Il me semble que ça ne doit pas être si compliqué que ça à
faire parce que ça, c'est du respect pour les familles de personnes disparues
que d'afficher leur personne qui est disparue parce que c'est des drames au
quotidien, c'est des vies bouleversées et ce n'est plus... notre vie n'est plus
la même. Alors, le public, comme je vous dis, c'est un atout essentiel pour les
retrouver parce qu'une personne disparue, je le répète, peut être n'importe où.
Puis entre nous, est-ce que c'est normal de disparaître? Alors, c'est ce que
j'ai à vous dire là-dessus, ça en prend un disparu. Disparus-Canada, ça en est
un, mais Disparus-Canada, je sais que la Sûreté du Québec travaille
actuellement pour pouvoir afficher toutes les personnes disparues du Québec
là-dessus, mais sauf que ça nous en prend un quand même au Québec, pour notre
province, parce que vous avez des provinces qui sont sur Disparus-Canada et
vous avez des provinces qui ont leur affichage unique aussi au Québec.
Mme Maccarone : Puis, selon
vous, Disparus-Canada, c'en est un outil que... dont nous pouvons s'en inspirer
ici. On peut tirer des leçons de ceci.
Mme Béchard (Andrée) : Oui,
absolument. Oui, oui, oui.
Mme Maccarone : Oui. Hier,
j'ai posé, il y a... Merci. C'est... dans le fond, je ne comprends pas pourquoi
que ce n'est pas déjà le cas, ça fait que c'est la question qu'on se pose parce
que je trouve que c'est... c'est logique, c'est logique puis c'est une
recommandation que, je présume, on va pouvoir poursuivre avec.
Hier, j'avais posé une question à la
Sûreté du Québec pour voir s'ils pensaient que nous devrons ajouter quelque
chose dans la loi pour aider les policiers en ce qui concerne la recherche des
personnes disparues, puis eux ils trouvaient que c'était complet. J'ai posé la
même question à SPVM, puis eux ils ont dit que nous devons permettre l'accès
aux applications comme Facebook Messenger, Instagram. Votre avis là-dessus?
Mme Béchard (Andrée) : Oui,
c'est une collaboration, c'est certain. C'est... ce sont des réseaux sociaux.
Pour les personnes disparues, plus on les voit, mieux c'est. Alors, c'est un
réseau... ce sont des réseaux qui s'étendent un peu partout dans le monde parce
que, vous savez, une jeune fille, par exemple, qui a fugué et qui... je ne le
sais pas moi, qui est pris par le crime... les gangs de rue, ou n'importe quoi,
au bout de 24 heures, elle peut être complètement rendue dans l'Ouest
canadien, et je pense que les réseaux sociaux peuvent vraiment aider, là...
Mme Carretta (Christine) : ...
Mme Béchard (Andrée) : Oh,
oui, oui, ça facilite, ça... ça facilite, il faut s'en servir, mais s'en servir
à bon escient, c'est ça qui compte, c'est dans le respect puis à bon escient.
Je pense qu'il y a comme toute une définition à refaire des personnes
disparues. De quelle façon on doit les chercher? Qu'est-ce qui peut être
efficace? C'est un travail de partenariat, on a besoin...
Mme Béchard (Andrée) : ...organismes.
On a besoin du public. On a besoin des policiers, les policiers sont les
piliers. Au départ, les familles vont vraiment se concentrer sur les policiers
parce qu'eux ont nécessairement l'expertise pour retrouver les personnes
disparues. Alors, ce sont les piliers au départ, et ça, il faut que les
familles aient confiance tout de suite. Vous savez, quand vous entrez dans un
hôtel puis vous êtes mal reçu, on ne veut plus y retourner, hein?
Une voix : Non.
Mme Béchard (Andrée) : Bien,
c'est la même chose, la façon qu'on est reçu par le corps policier, la façon
qu'ils prennent en enquête, tout ça, c'est des piliers. Alors par la suite, ça
s'étend, comme je vous le dis, avec du partenariat un peu partout.
Mme Maccarone : Et en basant
sur le partenariat, je vous ai entendu dans vos derniers échanges. Est-ce que,
selon vous, nous devrons aussi apporter des modifications à cette loi pour
avoir des suivis obligatoires d'une base régulière avec la famille? Parce que
si... à moins que je n'ai pas bien saisi vos points, mais il y a un manque
d'informations reçues par les membres de la famille, c'est très important.
Alors, si on mettait ça dans la loi pour s'assurer que ça devient un fait,
est-ce que, ça, ça serait bienvenu?
Mme Béchard (Andrée) : Moi,
je pense que oui. C'est sûr que nous les suivis, je peux dire que peut être
qu'on est gâtés parce qu'on en a vraiment... on a vraiment appuyé là-dessus. On
est une famille qui s'est beaucoup débattue pour avoir des suivis et on les a,
et le corps de police nous respecte beaucoup là-dedans. Bon. Mais ce n'est pas
le cas de toutes les familles qui ont de la difficulté au niveau des
communications. Je pense que vous pouvez apporter quelque chose.
Mme Carretta (Christine) : Je
vous dirais qu'on a des familles qui sont vraiment exceptionnelles dans le sens
où on a des gens qui sont instruits, on a des gens qui sont bien soutenus par
des amis, par le restant de leur famille aussi, et qu'ils arrivent à développer
en fin de compte des moyens de pouvoir aller chercher l'information comme ils
peuvent. Mais ce n'est pas la grande majorité, ce qu'il faut.... ce qu'il faut
comprendre aussi, c'est que la majorité, nous de nos membres, nos familles,
sont des gens qui sont démunis, qui ont perdu leur emploi du fait du choc
post-traumatique qui engendré par la suite et cause... Donc, il y a un manque
financier, il y a un manque technologique. Il y a... Et on a beaucoup de gens
qui n'ont même pas encore Internet. On est obligé de leur donner toute la
documentation...
Mme Béchard (Andrée) : Un
très bon point.
Mme Carretta (Christine) : D'accord.
Par la poste. Ça nous coûte une fortune de frais de poste. On n'a pas le choix,
il faut répondre à ces gens-là. Donc, est-ce que toutes les familles sont
habilitées à? Je ne crois pas et ce n'est pas de la mauvaise volonté, c'est
juste qu'ils sont tellement anéantis et éprouvés, et pour eux, ils n'ont
tellement pas... ils n'ont pas de statut, ils n'ont pas eu de reconnaissance,
ils n'ont pas de soutien, c'est difficile. De là l'importance des organismes
comme l'AFPAD ou comme Enfant-Retour. Et ça, je voudrais juste les mentionner,
c'est la deuxième année, là, qu'on est vraiment subventionné en partie par la
Sécurité publique et c'est vraiment grandement apprécié parce qu'on a été
capable d'aller chercher, nous, tous nos membres et de leur offrir toute la
documentation nécessaire : des guides, des dépliants qu'on a fait exprès
pour les cas de disparition. Ils sont soutenus, ils ont des groupes de soutien.
Alors nous, avec ces groupes-là, on est capable aussi de les inciter à aller
faire des démarches auprès des policiers. On est capable, nous, de s'ils n'ont
pas de courriel, s'ils n'ont pas... de faire ça pour eux et d'écrire aussi à
leur employeur et à leur médecin. Vous comprenez?
Mme Maccarone : Oui.
Mme Carretta (Christine) : Donc,
c'est important.
Le Président (M.
Bachand) :...
Mme Maccarone : Ah! bien,
peut-être votre définition de «raisonnable», vous l'avez soulevée, on a besoin
d'avoir une clarification, sur le mot «raisonnable», dans le chapitre 1.2.
Quelle est votre définition de «raisonnable»?
Le Président (M.
Bachand) :Très, très, très rapidement,
s'il vous plaît.
Le Président (M.
Bachand) :Attendez, il faut juste que je
le trouve. Alors, vous me dites c'est quel chapitre?
Mme Maccarone : C'est...
Bien, moi, je l'ai ici, là, les dispositions interprétatives :
«raisonnable de craindre pour sa sécurité».
Le Président (M.
Bachand) :Je ne le vois pas. Je ne le
vois pas. Je ne le vois pas.
Mme Maccarone : Puis vous
nous demandez de clarifier, alors je voulais savoir c'était quoi votre
définition.
• (12 heures) •
Mme Carretta (Christine) : «Raisonnable»,
je m'excuse. Est-ce que vous pouvez juste me dire c'est dans quel chapitre?.
Le Président (M.
Bachand) :Pas de souci. Je vais passer la
parole à la députée de Laurier-Dorion? Oui? Alors, la parole est à vous, donc
allez-y.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président, on va continuer sur cette question-là. Mais avant, je voulais vous
saluer, vous remercier de collaborer à cette commission et vous remercier de
tout le travail que vous faites, là, depuis des années. Je suis étonné
d'apprendre que ça fait juste seulement deux ans que vous êtes financés, et
vous avez fonctionné pendant plusieurs années. Je vous connais parce que des
membres de ma famille, ma mère en particulier, étaient très intéressés à votre
travail, donc, voilà, je vous ai suivi un peu depuis de longues années, donc je
vous félicite et je vous remercie pour tout le travail que vous avez fait,là.
Et vous avez acquis en plus un très haut niveau d'expertise dans cette
matière-là. Donc, c'est très intéressant, là...
12 h (version non révisée)
M. Fontecilla : ...justement,
pour continuer sur la même la même veine, la question du raisonnable. Donc, c'est
au chapitre un, paragraphe deux, qui est... une personne disparue, s'entend d'une
personne à la fois qui est introuvable malgré les efforts raisonnables ayant
été faits par un corps de police. Et tantôt vous avez dit aussi, là, que les
familles ont des fois des attentes démesurées, là, par rapport au travail des
corps policiers, des choses que les corps policiers ne sont pas en mesure de
faire. Donc, il y a comme une... Le raisonnable est au cœur de cette... de ces
dossiers-là, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on peut faire pour retrouver les
personnes disparues. Et vous dites : Il faudrait le clarifier davantage.
Donc, le terme "raisonnable". Est-ce que vous pourriez nous donner
des éléments supplémentaires, là, pour clarifier qu'est-ce qui pourrait être
raisonnable?
Mme Carretta (Christine) : Bien,
parce que, selon nous, le terme raisonnable, c'est une question aussi de
perception pour chacun. Qu'est-ce qui est raisonnable pour vous n'est peut-être
pas raisonnable pour moi. Ce qui est raisonnable pour un policier n'est
peut-être pas raisonnable pour une proche de victime. Donc, c'est le point, c'est
comment on pourrait clarifier ce mot-là pour qu'il soit compris de tous au même
niveau et non interprété. Je ne sais pas si je réponds à votre question, mais
je trouve que c'est un mot qui est tellement vague. Et, comme je vous dis, c'est
une question de perception, le raisonnable.
M. Fontecilla : Vous avez
fait aussi mention, là, de la question des... mais tout l'enjeu de la
coordination, la collaboration entre corps policiers, là, vous avez mentionné
qu'une personne disparue, rapidement, peut se retrouver à des centaines, voire
des milliers de kilomètres. Est-ce que vous pensez que le projet de loi 14
répond à cet enjeu-là de meilleure coordination des corps policiers?
Mme Carretta (Christine) : Bien,
en fait, moi, je pense que oui., hein?
Mme Béchard (Andrée) : Bien,
je vais vous dire oui, oui, parce que, si on veut vérifier, par exemple chez un
transporteur, peu importe, si on veut vérifier des choses qui peuvent amener la
personne à aller à l'extérieur, qui pourrait se rendre à l'extérieur, oui,
parce que ça donne le pouvoir aux policiers de pouvoir vérifier et avec des
hauts niveaux de... je ne sais pas, moi, d'un aéroport, ou de vérifier au
niveau d'une gare ou de niveau ou de... ça amène les policiers à vérifier si la
personne est sortie à l'extérieur du territoire. Alors, je pense que c'est
essentiel. Ce qui est dans cette loi-là, ça touche en fait tout ce qui peut
arriver à une personne disparue, toutes les circonstances. Elle peut se
retrouver à l'hôpital, elle peut se retrouver ailleurs. Elle peut se retrouver
prise avec un groupe organisé. Elle peut... je veux dire, c'est une loi qui
donne vraiment une flexibilité, si je pourrais dire, aux policiers de vérifier
des zones où ça a été impossible. Écoutez, moi, ça fait 15 ans. Je ne sais même
pas si ma fille est passée dans un hôpital du Québec.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Je dois céder
la parole à la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Merci. Bien,
merci d'être parmi nous pour partager votre expérience. Ce n'est pas évident,
là, ce que vous avez vécu et ce que vous vivez encore. J'ai deux petites
questions. Ma première, tantôt on parlait des réseaux sociaux, les ordinateurs,
ces choses-là. Moi, je ne voulais pas savoir... En fait, ma question, c'est à
savoir si... pas à permettre à la police, là, de diffuser sur les réseaux
sociaux parce que plus qu'on voit l'image, plus ça aide, pas cette partie-là,
mais est-ce que les parents, ou des personnes recherchées ou les proches,
est-ce qu'elles seraient d'accord pour que... donner accès à l'appareil... de
la personne disparue pour aller voir sur Internet, aller voir l'historique de
navigation sur Internet, allez voir les messages textes, les messages entrants,
sortants. Plus cette partie-là, est-ce qu'il y aurait... est-ce que vous voyez ça
comme une entrave un peu trop loin, ou vous dites : Non, c'est correct?
Mme Carretta (Christine) : Bien,
moi, écoutez, je vais parler par expérience, là. Ce que je peux vous dire, c'est
que moi, je pense qu'une personne qui a perdu un être cher est prête à tout
mettre sur table, ce qui pourrait aider en fin de compte les policiers à
pouvoir retrouver cette personne-là. Parce qu'on n'est pas dans le jugement. On
est vraiment en mode solution, on est en mode proactif et il faut que les
choses bougent vite. Donc, téléphone cellulaire, écrits, comme j'ai dit,
manuscrit, peu importe, agenda, tout ce que c'est qu'on pourrait avoir à
déployer, réseaux sociaux, à mon avis, c'est nécessaire et ça serait même
fortement apprécié.
Mme Nichols : Parfait. Donc,
de donner accès, pour vous, c'est...
Mme Carretta (Christine) : Donner
accès totalement.
Mme Béchard (Andrée) : Je
peux ajouter même : Donner un délai. Un délai dans...
Mme Béchard (Andrée) : ...la
loi aussi, un délai, c'est-à-dire 72 heures, pour avoir officiellement un
document d'une institution ou quoi que ce soit. Parce qu'une disparition, ça
presse, hein, parce que ce n'est pas dans... Il n'y a pas de délai d'inscrit
dans la loi, mais moi, je pense qu'un délai devrait être inscrit dans la loi
aussi.
Mais vous avez raison, particulièrement,
là, je pense qu'une famille est prête même... C'est tellement dangereux que
ça... on peut se mettre en situation de dangerosité aussi lorsqu'on cherche une
personne disparue parce que les polices n'ont pas accès à certains endroits. Et
nous, on l'a fait. Et puis c'est parce qu'on veut vraiment trouver la personne,
alors on est sur l'adrénaline à ce moment-là.
Mme Carretta (Christine) : Juste
pour ajouter aussi. Le fait que... le fait qu'on puisse, justement, déployer
tout ça, tous ces outils-là, je pense que ça fait preuve aussi d'une grande
collaboration de part et d'autre. Donc, de là aussi l'importance qu'il y ait
une collaboration en pouvant divulguer toute l'information.
Mme Nichols : Merci. Merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Sur ce, Mme
Carretta, Mme Béchard, merci infiniment d'avoir été avec nous aujourd'hui,
c'est très apprécié.
Sur ce, je suspends les travaux quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 07)
(Reprise à 12 h 11)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Alors, il nous fait plaisir d'accueillir la
Commissaire à la déontologie policière. Merci beaucoup d'être avec nous. Comme
vous savez, vous avez 10 minutes de présentation, après ça on aura un
échange avec les membres. Alors, la parole est à vous, s'il vous plaît. Merci.
Mme Hillinger (Mélanie) : Merci
beaucoup. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, M. le Président. Bonjour, membres
de la commission...
Mme Hillinger (Mélanie) : ...il
me fait plaisir aujourd'hui d'être présente à cette consultation particulière
et je vous en remercie, de cette invitation. Mon allocution portera sur les
modifications législatives proposées au régime de déontologie policière,
particulièrement au regard de celles qui relèvent de notre compétence. Mais
permettez-moi, dans un premier temps, de vous présenter brièvement mon
organisation. Le Commissaire à la déontologie policière est une organisation
gouvernementale indépendante composée de civils dont la mission est d'assurer
la surveillance des agents de la paix sur le plan déontologique. Nous avons le
mandat de recevoir, d'examiner et de traiter les plaintes déposées à l'endroit
des policiers, des agents de protection de la faune, des constables spéciaux,
des contrôleurs routiers, des dirigeants et enquêteurs de l'Unité
anticorruption permanente, l'UPAC, de même que les dirigeants et enquêteurs du
Bureau des enquêtes indépendantes qui n'auraient pas respecté le Code de
déontologie des policiers du Québec.
Par notre action, nous nous assurons que
les agents de la paix adoptent une conduite professionnelle dans le respect des
droits des citoyens en vue de maintenir, voire renforcer le lien de confiance
entre eux et la population qu'ils desservent. L'analyse du projet de loi
no 14 s'est réalisée à travers le spectre de trois postulats : offrir
à la population et aux agents de la paix un mécanisme de surveillance civil
indépendant qui soit juste, impartial, accessible, efficient et transparent;
veiller à une utilisation judicieuse des ressources dans un contexte où ces
ressources ne sont pas illimitées; et concourir par notre action à une saine
administration de la justice.
Sur la base de ces formes-là, nous
accueillons favorablement les intentions du projet de loi no 14. Tout
d'abord, l'ajout de nouvelles responsabilités en matière de prévention et
d'éducation en matière de déontologie policière suscite particulièrement notre
intérêt. En plus de s'inscrire en parfaite adéquation avec les orientations de
notre plan stratégique 2021-2025, nous croyons à l'importance de prévenir
les manquements déontologiques avant que ceux-ci ne surviennent et à la
nécessité de mieux informer les citoyens de leurs droits et de leurs recours
lorsqu'ils interagissent avec les agents de la paix.
Plus concrètement, il nous apparaît
fondamental de sensibiliser les agents de la paix sur les comportements à
risque des manquements déontologiques et de les soutenir par le renforcement de
bonnes pratiques. En corollaire, les citoyens doivent être au fait des pouvoirs
et des devoirs dévolus aux agents de la paix afin de pouvoir adopter un
comportement sécuritaire et réagir promptement aux comportements s'écartant des
pratiques établies. Dans la mesure où le projet de loi était adopté sur cet
aspect, la commissaire entend offrir une offre de services adaptée pour mieux
répondre aux besoins diversifiés de sa clientèle, mettre en place un programme
de prévention comportant des outils de sensibilisation et d'information
destinés au public et aux agents de la paix, et accompagner son personnel dans
le développement de ses compétences sur des enjeux d'importance tels que le
profilage racial et social.
De plus, la commissaire souscrit à la
volonté d'accroître l'accessibilité aux recours déontologiques, mais juge
essentiel que des balises soient définies et permettent d'assurer le traitement
des plaintes avec plus d'efficience et donc plus rapidement. En ce sens, nous saluons
l'introduction d'un deuxième mode de dénonciation d'un événement, en
l'occurrence le signalement qui nous apparaît le véhicule le plus adapté au
degré d'implication de la personne par rapport à l'événement dénoncé et le plus
respectueux de la préservation des renseignements personnels des personnes
impliquées.
Cette proposition nous apparaît également
la plus optimale au regard d'une utilisation judicieuse des ressources et d'une
saine administration de la justice, particulièrement dans le contexte où nous
sommes conscients que les délais de traitement des plaintes sont présentement
une source d'irritants. Sur cet enjeu de taille, je tiens à mentionner que nous
sommes en action et que les différentes mesures qui sont proposées par le
projet de loi pourraient soutenir l'atteinte de cet objectif.
Enfin, cette mesure est complémentaire à
la possibilité qui serait désormais accordée à la commissaire d'analyser des
événements qui n'auraient peut-être pas été soumis à son examen autrement, lui
permettant ainsi d'assurer une meilleure protection du public.
Nous désirons également porter à
l'attention des membres de la commission quelques aspects sur lesquels une
vigilance est de mise. Alors...
Mme Hillinger (Mélanie) : ...que
la conciliation s'avère le premier mode de règlement des plaintes en
déontologie policière, le projet de loi suggère d'introduire la conciliation
sur une base facultative au plaignant alléguant la conduite discriminatoire
d'un agent de la paix. Consciente que la conciliation puisse s'avérer une
démarche exigeante pour certains plaignants, nous sommes néanmoins convaincus
qu'il s'agit d'une étape essentielle au rétablissement du lien de confiance et
une occasion unique de s'exprimer sur les événements, de rapprocher les parties
et d'en tirer des apprentissages pour le futur. La conciliation doit être vue
comme une mesure de prévention en ce qu'elle vise à faire évoluer les
comportements et les pratiques en vigueur. Bien au-delà de la situation pour
laquelle les parties sont réunies, elle a comme objectif d'amener le citoyen et
l'agent de la paix à prendre du recul sur les événements et à identifier la
façon d'intervenir dans le futur pour éviter qu'une situation ne s'envenime. Il
s'agit d'une démarche dont les bénéfices surpassent, plus souvent qu'autrement,
les appréhensions exprimées au départ, et nous en sommes conscients.
De plus, l'introduction d'un parcours
différencié pour une partie de notre clientèle n'est pas sans risque et
pourrait avoir pour effet de discréditer, pour l'autre partie, ce véhicule
d'échange qui a pourtant fait ses preuves au cours des années. Partant du fait
que l'enquête déontologique ne puisse systématiquement conduire à la citation
d'un policier devant le comité en raison des règles de droit applicables, il
apparaît opportun de laisser le soin à la commissaire de déterminer, parmi la
conciliation ou l'enquête, lequel des deux modes s'avère le plus approprié dans
les circonstances. Le maintien de l'exercice de cette discrétion permettrait de
préserver l'équilibre entre les attentes du citoyen et les réelles chances
d'obtenir une sanction au terme d'une audience devant le comité. Ce précepte
est également en adéquation avec la tendance observée dans d'autres systèmes de
justice qui prônent les modes alternatifs de règlement des différends à la
judiciarisation des litiges. De surcroît, il est important de retenir que la
commissaire n'exerce pas une discrétion arbitraire en favorisant la
conciliation dans certaines situations. Sa décision repose plutôt sur sa conviction
de pouvoir ou non faire la preuve prépondérante d'un manquement déontologique
devant le comité.
• (12 h 20) •
Persuadés des retombées positives de la
conciliation, nous recommandons son maintien comme premier mode de règlement
des plaintes dans les situations, bien évidemment, qui le requièrent. De plus,
advenant une indécision du plaignant, nous suggérons de maintenir la
conciliation comme première étape du processus déontologique. Le projet de loi
n° 14 ouvre la porte à la tenue de conciliation adaptée aux nouvelles
technologies. En sus des conciliations virtuelles, nous estimons essentiel de
pouvoir tenir des conciliations par voie de conférences téléphoniques dans les
cas où les plaignants n'auraient pas accès à des outils technologiques. Bien que
les conciliations en présentiel, et je tiens à le mentionner, doivent demeurer
le mode privilégié, ces nouvelles modalités permettraient la souplesse
nécessaire pour répondre à des besoins particuliers en plus d'assurer une
conciliation contemporaire aux événements et de répondre aux besoins de
certains plaignants souhaitant une conclusion rapide de leur dossier.
Enfin, s'il advenait que le législateur
confère au comité le pouvoir d'établir une mesure de réparation au chapitre des
sanctions possibles, nous suggérons que la mesure de réparation préconisée
fasse l'objet d'une recommandation conjointe entre la commissaire et la partie
policière à la suite de représentations faites au préalable par les parties.
En terminant, je tiens à souligner
l'engagement exceptionnel et le dévouement de chacun des membres de mon équipe.
Durant la pandémie, un travail colossal a été réalisé pour mettre en place de
nouveaux processus et maintenir notre offre de services. De plus, je tiens à
remercier mes partenaires que sont les organisations représentant les citoyens,
les organisations policières, de même que les organisations représentant les
agents de la paix, mes partenaires du ministère, le ministre, qui travaillent
chaque jour avec nous pour faciliter la conduite du processus déontologique
dans le respect, bien évidemment, de nos rôles et de nos juridictions
respectives. Toutes ces actions combinées aux intentions du projet de loi
n° 14 constituent, à notre avis, la voie à suivre pour...
Mme Hillinger (Mélanie) : ...pour
améliorer, voire moderniser la déontologie policière. Néanmoins, il m'importe
d'insister sur le fait que des ressources additionnelles seront nécessaires au
commissaire pour assurer l'implantation des nouveautés qui découleront des
travaux législatifs et afin de préserver la confiance de nos parties prenantes
qui sont en droit de s'attendre à un traitement des plaintes qui soit
efficient, diligent et bienveillant. La mobilisation de tous les acteurs
intéressés s'avère un incontournable dans la réussite de ce projet de
modernisation. Et je tiens à souligner que mon organisation sera au rendez-vous
pour répondre aux orientations législatives que les parlementaires
détermineront.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Mme la
Commissaire. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Bonnardel : Merci, M. le
Président. Mme Hillinger, merci d'être là aujourd'hui. Vous avez un
mémoire, un exercice qui est important pour... qui est partie prenante de
notre... bon, de notre projet de loi qui a été déposé. Puis mon premier point,
puis j'en ai plusieurs, mais je sais que mes collègues vont vouloir imposer
aussi, mais on va essayer de faire ça de façon succincte, là : Êtes-vous
capable de nous exposer, pour la gouverne de tous, la distinction ou les distinctions
entre le signalement et les plaintes? Certains nous ont dit hier que ça
pourrait être une perte en termes de droits pour les citoyens. Est-ce que, pour
vous, c'est un gain en efficience d'aller là? Donc, rapidement sur ce premier
point, qu'est-ce que vous pouvez nous exposer et nous expliquer entre un
signalement, une plainte et des changements qu'on a apportés dans la loi, là?
Mme Hillinger (Mélanie) : Peut-être
mentionner tout d'abord qu'il s'agit effectivement de deux véhicules distincts
mais qui ont le même objectif, à savoir porter à la connaissance du commissaire
une situation qui pourrait s'avérer un manquement déontologique. Donc,
premièrement, l'objectif est le même. Deuxièmement, l'analyse qui sera faite du
signalement et de la plainte seront au même effet, ils auront la même
considération, le même égard. Nous allons effectivement nous baser sur les
mêmes critères et les mêmes règles de droit pour juger ou non de
l'admissibilité. À titre d'exemple : Est-ce qu'il s'agit d'une situation qui
relève de la compétence du commissaire? Est-ce qu'il s'agit effectivement d'une
situation où un policier était dans l'exercice de ses fonctions? Est-ce qu'il
s'agit d'une situation où le policier était dans le cadre d'une intervention
avec le public? Est-ce que la force utilisée dans les circonstances était
raisonnable ou non? Est-ce qu'il y a un droit d'un citoyen qui a pu être
compromis? Donc, toute l'analyse de l'admissibilité de départ sera au même
effet.
Où la distinction se trouve, c'est lorsqu'il
s'agit, pour le commissaire, d'en effectuer son suivi. La plainte est un
véhicule qui vise une personne qui est plus directement visée par l'événement,
donc qui a subi l'intervention ou qui en a été témoin, tandis que le
signalement serait davantage réservé à une personne tierce à l'événement, qui
n'était pas présente sur les lieux et qui ne peut pas en attester, qui ne peut
pas, malheureusement, contribuer à l'analyse du commissaire en apportant des
faits qui pourraient effectivement venir amener un éclairage qui est nécessaire
au traitement et à la conduite.
M. Bonnardel : Donc,
rapidement, un signalement peut amener une... ou des signalements sur un cas x
peut amener, de votre côté, une plainte.
Mme Hillinger (Mélanie) : Le
signalement pourrait déboucher effectivement sur une enquête.
M. Bonnardel : Une enquête,
c'est ça.
Mme Hillinger (Mélanie) : Une
enquête, effectivement, puisque la conciliation ne serait pas le véhicule
opportun étant donné que la personne n'était pas partie ou témoin de cet
événement-là. Puis je pense que ce qui est important aussi de mentionner...
C'est qu'hier j'ai entendu le fait que le signalement pourrait amener une perte
de droits de la personne qui le formule. Dans les faits, ce qu'il faut
comprendre, c'est encore une fois le droit de révision à la suite de la
décision qui pourrait être portée sur le signalement de l'accepter ou de le
rejeter, c'est acquis sur la base de faits ou d'éléments nouveaux. Donc,
lorsque le commissaire exerce sa discrétion en révision d'une décision
initiale, c'est pour des éléments nouveaux. Le signalant qui n'a pas été partie
à l'événement ne serait probablement pas en mesure d'amener ces faits et
éléments nouveaux puisqu'il n'a pas été partie à l'événement, puisqu'il n'a pas
été témoin de cet événement-là. Donc, à toutes fins pratiques, ce recours-là de
révision serait, bon an mal an, plus théorique qu'autre chose.
M. Bonnardel : J'aimerais
aussi vous entendre davantage sur le fait de remplacer l'appel de plein droit
par un appel de permission. Certains nous ont dit que c'était un recul.
Mme Hillinger (Mélanie) : Je
pense que...
Mme Hillinger (Mélanie) : ...c'est
une question d'opportunité, qui relève de vous, les législateurs. Mais, pour
vous apporter un éclairage, je vous soulèverais certains éléments. Il faut
comprendre que l'appel de plein droit est ouvert tant au commissaire qu'à la
partie policière. Donc, s'il y avait des changements à ce niveau-là, autant le
commissaire que la partie policière en seraient, effectivement, là, les gens
qui, je vous dirais, devraient s'adapter à la nouvelle situation.
Il ne s'agit pas de retirer, encore une
fois, le droit d'appel, il s'agit de l'encadrer et de l'assujettir à,
effectivement, une permission. Ce qu'on disait tout à l'heure, c'est dans un
contexte de ressources limitées, dans un contexte où on souhaite la saine
administration de la justice. Il faut comprendre que l'appel de plein droit
peut amener, encore une fois, une forme de systématisme, où, chaque fois qu'on
n'est pas nécessairement, je vous dirais, en accord avec la décision on
pourrait décider d'aller, effectivement, au niveau de la Cour d'appel et lui
demander une nouvelle appréciation des faits. Ce que l'appel sur permission
viendrait apporter, c'est d'amener une forme de filtre, permettant, encore une
fois, à la Cour d'appel d'apprécier, à sa face même, si le dossier comporte une
erreur manifeste et déterminante qui justifie son action. Donc, si,
effectivement, à sa face même, il y a cette erreur-là, ces motifs sérieux là
sont mis en évidence, à ce moment-là, la Cour d'appel se saisirait de la
situation.
Ce qu'il faut aussi comprendre, c'est
qu'actuellement on peut assister à un certain débalancement dans l'exercice du
droit d'appel. Bon an mal an, je vous dirais que la partie policière peut
exercer son droit d'appel de plein droit à peu près dans 65 % des dossiers
pour lesquels le policier a un manquement déontologique reconnu, alors que le
commissaire, c'est plutôt dans 10 % des situations où le policier voit le comportement
non dérogatoire reconnu par le comité. Actuellement, au niveau des tribunaux
spécialisés en matière administrative, je vous dirais que le droit sur
permission est davantage la norme. Il y a un seul... en tout cas, selon
l'évaluation qu'on en a faite, un seul tribunal administratif, qui est le
Tribunal des marchés financiers, qui aurait, effectivement... ou dont ses
décisions seraient assujetties à l'appel de plein droit, alors que tous les
autres tribunaux administratifs sont assujettis à un appel sous permission ou,
encore, ne sont assujettis à aucun droit d'appel, donc seulement un pourvoi en
contrôle judiciaire, du côté de la Cour supérieure.
• (12 h 30) •
Donc, encore une fois, l'idée n'est pas
d'empêcher le recours à la Cour d'appel, mais plutôt de circonscrire sur des
motifs sérieux, pour éviter qu'il y ait une forme d'automatisme, qui pourrait
avoir pour effet d'engendrer des coûts, d'engendrer la mobilisation des
ressources, d'engendrer des délais, aussi, supplémentaires. Combien de fois les
parties nous disent que les processus déontologiques sont longs et amènent une
charge émotive importante sur les parties? Bien, il faut comprendre que,
lorsqu'on exerce un droit d'appel, bien c'est sûr que la situation s'allonge et
a pour effet de perdurer dans le temps. Alors, le fait de peut-être mettre un
filtre et de s'assurer que les motifs, à sa face même, sont sérieux pourrait
amener, encore une fois, un usage, là, qui pourrait, encore une fois, s'avérer
davantage, là, équilibré dans une société de droit.
Certains experts pourraient peut-être même
vous dire que ce débalancement entre l'exercice du droit d'appel du côté de la
partie policière et du côté du commissaire pourrait avoir une incidence sur
l'évolution du droit, sur l'évolution de la jurisprudence. Je m'explique. On
arrive dans un contexte où, pour tel manquement déontologique, on a une
fourchette de sanctions qui est de l'ordre de cinq jours à 10 jours, à titre
d'exemple. Le commissaire souhaite, effectivement, faire évoluer la fourchette
de sanctions à la hausse. Du côté de la partie policière, bien, ce serait
peut-être l'inverse, de vouloir, encore une fois, à la baisse... diminuer cette
fourchette-là, jugeant les manquements trop sévères. Bien, c'est sûr que, si
une des parties va tout le temps en appel, elle demande, effectivement, à ce
que la fourchette aille vers le bas, bien, c'est sûr qu'à un moment donné on
peut se retrouver dans une situation où, à long terme, l'équilibre s'en trouve
rompu. Alors, c'est la raison pour laquelle l'exercice doit demeurer, mais
l'exercice pourrait avoir un avantage, et être mieux encadré, et mieux
circonscrit.
M. Bonnardel : On souhaite...
Vous souhaitez, on souhaite...
12 h 30 (version non révisée)
M. Bonnardel : ...d'accompagner
les plaignants. On s'est fait dire plus d'une fois que les plaignants se
sentaient bien seuls face aux policiers et à ceux qui les accompagnent. Vous
souhaitez former et accompagner, donc, ces plaignants. On s'est fait dire aussi
que... comment on va s'assurer de la neutralité ou de l'indépendance de ceux
qui accompagnent le plaignant, c'est un peu une inquiétude que certains avaient
hier. Pouvez-Vous nous exposer rapidement ce que vous pensez faire?
Mme Hillinger (Mélanie) : Oui.
La personne qui pourrait accompagner, effectivement, les personnes issues de la
minorité visible serait éminemment une personne qui assumerait un rôle neutre.
Elle n'aurait pas le rôle de prendre fait et cause sur le plaignant. Son rôle
serait davantage d'assurer une sécurisation sur le plan culturel, d'être quelqu'un
qui vient l'appuyer dans la conduite du processus et qui est bien au fait de ce
qu'elle vit, de ses impacts, des conséquences qui peuvent, effectivement,
découler de la situation qu'elle a vécue.
On a déjà une expérience similaire au
Commissaire à la déontologie policière lorsqu'il est question de notre
clientèle autochtone. Nous avons, depuis deux ans, un agent de liaison
autochtone qui a, effectivement, la possibilité d'accompagner la clientèle
autochtone dans le processus, mais, encore une fois, non pas dans la
perspective de prendre fait et cause, mais plutôt dans la perspective de
démystifier le processus, de l'accompagner, encore une fois, dans le parcours
et de la sécuriser à chacune des étapes, effectivement, du processus.
Donc, oui, ce serait une personne du
commissaire, mais une personne qui, dans un contexte de conciliation, est
neutre et tente de rapprocher les parties en vue de la conclusion d'une
entente.
M. Bonnardel : Rapidement, comment
vous allez vous assurer... Vous en avez parlé dans votre préambule, la
conciliation à distance, c'est un exercice que vous souhaitez faire pour
maximiser le temps, et tout. Mais on nous signalait aussi, hier, comment on va
s'assurer de la confidentialité, que personne ne pourra enregistrer cette
conciliation à distance, avez-vous déjà pensé à ça?
Mme Hillinger (Mélanie) : Oui.
Actuellement, nous avons une entente de confidentialité qui est signée,
systématiquement, par tous les plaignants et les policiers qui participent à la
conciliation. C'est, effectivement, une entente, je vous dirais, là, qui est
relativement étoffée et qui fait état, encore une fois, de toutes les
conditions qui gouvernent la conciliation et l'étanchéité parfaite qu'il doit y
avoir entre les propos qui y sont tenus et la suite des choses. Donc, pas de
possibilité de visionnement, pas de possibilité de mettre ça sur les médias
sociaux, pas de possibilité d'amener ça devant des cours de justice. Il y a
vraiment, encore une fois, une très grande préoccupation qui est mise de l'avant-plan
pour s'assurer du respect de cette confidentialité-là. Et les plaignants ont la
responsabilité aussi d'en informer leur personne accompagnatrice, qui,
elle-même, devient assujettie à cet engagement-là.
Et, ce que je pourrais vous dire, c'est
que, même dans le contexte de conciliation en «préventiel», en vertu maintenant
des nouvelles technologies, des téléphones intelligents, il pourrait y avoir
malgré nous un enregistrement, effectivement, de conversations. Mais, après
vérification, depuis la création du commissaire, aucune telle situation n'aurait
été portée à notre connaissance. Et, s'il y avait, effectivement, bris de
confidentialité, il pourrait y avoir des recours, là, qui soient pris pour,
encore une fois, là, demander réparation.
M. Bonnardel : Une dernière
question avant de... que le député d'Ungava vous en pose une. Vous signalez,
dans votre... dans vos sommaires des conclusions, à la page cinq, le dernier
picot, que la mesure de réparation fasse l'objet d'une recommandation conjointe
des parties au comité. C'est un ajout, ça, que vous souhaiteriez voir
apparaître?
Mme Hillinger (Mélanie) : Oui,
oui. On a entendu, hier, des intervenants. Je souscris, effectivement, aux
préoccupations qui ont pu être témoignées. Les mesures de réparation, ce sont
des mesures qui sont relativement très personnelles et qui appellent au
caractère propre de la personne dans une situation donnée. Je suis d'avis que
ces mesures-là devraient normalement relever au premier chef de l'employeur,
qui a, effectivement, un lien plus étroit et privilégié avec les personnes en
cause, qui connaissent leur situation, leur état d'esprit, leurs besoins. Donc,
pour moi, ce devrait être au premier chef un rôle qui est dévolu à l'employeur.
Par contre, s'il y avait éventuellement de
telles mesures, ma recommandation, la recommandation de mon organisation serait
qu'il y ait d'abord et avant tout une recommandation entre les parties, donc entre
la partie policière et le commissaire, en vue d'en faire la présentation au
comité, le cas échéant.
Le Président (M.
Bachand) :M. le député d'Ungava, 2 minutes,
questions et réponses, 2 minutes, maximum.
M. Lamothe : Il y a des
représentants syndicaux qui se sont présentés hier, trois, puis ils sont tous
unanimes à dire que les nouvelles règles déontologiques...
M. Lamothe : ...augmenter le
désintéressement du policier face au travail qu'il a à faire. Vous en pensez
quoi?
Mme Hillinger (Mélanie) : C'est
une préoccupation, effectivement, qu'on doit tous savoir. Ce que je vous dirais
par rapport à ça, c'est que le volet prévention qui serait ajouté,
effectivement, la mission du commissaire, va, à mon avis, changer la donne. Ce
qu'on veut travailler en prévention, c'est éviter justement qu'il y ait des
manquements déontologiques et qu'il y ait des plaintes qui soient déposées.
Comment le faire? À partir de l'expérience, de l'expertise qu'on a développées
au cours des années par le traitement de milliers de plaintes au fil du temps,
donc identifier les comportements à risque de manquements déontologiques et
renforcer les bonnes pratiques par des exemples, effectivement, qui sont
heureux et dont les dénouements sont, effectivement, salutaires. Donc, prévenir
en amont et venir sensibiliser le policier en l'accompagnant et en le soutenant
serait, encore une fois, à notre avis, une porte positive, là, pour qu'ils se
sentent, encore une fois, là, soutenus dans la réalisation de leur travail.
Et le Commissaire en déontologie a un
rôle, effectivement, d'assurer la protection du public. Et c'est sûr qu'on est
conscients de l'insatisfaction qu'on peut générer. Lorsqu'on refuse une plainte
pour une preuve insuffisante, à titre d'exemple, c'est sûr qu'on crée,
effectivement, des insatisfactions. Il faut les expliquer, il faut communiquer,
il faut que les gens comprennent le rôle. Du côté des policiers, c'est la même
chose. Quand on parle d'une plainte au niveau de la société, chaque plainte est
une plainte de trop. C'est à nous, comme société, de mettre en place toutes les
conditions gagnantes pour faire en sorte que les manquements soient le plus
limités possible et qu'au global toute la sécurité du public soit assurée.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Désolé, je vais
passer la parole à la députée de Westmount — Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup. Merci beaucoup pour votre témoignage ainsi que votre mémoire. Je
pense que ça va nous aider à élaborer la prochaine étape dans cette loi. Nous
avons entendu en commission hier la Ligue des droits et libertés et eux, ils
nous proposent... Quand même des craintes, ils disent qu'il y a beaucoup,
beaucoup de discrétion laissée au commissaire. Que répondez-vous à eux? Comment
pouvons-nous rejoindre leurs préoccupations ainsi que... Comme le collègue
vient de dire, on a aussi l'accord des policiers qui disent que les mesures
déontologiques qui sont comprises dans cette loi sont des pénalités qui sont très
sévères, les plus sévères que nous n'avons jamais vues. Comment voyez-vous
votre rôle de gérer les deux, les deux considérations? Les deux côtés disent
qu'ils sont préoccupés.
Mme Hillinger (Mélanie) : Vous
avez effectivement soulevé un bon point, et ce que nos partenaires nous disent,
nous le considérons au premier chef. Nous avons un rôle d'éducation, nous avons
un rôle de formation, nous avons un rôle d'accompagnement. Dans notre
planification stratégique, c'est un élément qu'on a mis en exergue, il faut
mieux communiquer et avoir une force de frappe plus importante. Donc, c'est
important, encore une fois, que les gens comprennent l'exercice de notre rôle
et sur quels paramètres ce rôle-là est établi. Nous ne jugeons pas en équité
selon ce qu'on a envie de faire dans la journée, nous sommes assujettis à un
cadre strict, à des règles, à des principes qui sont dégagés par la
jurisprudence, et c'est sur la base de cet encadrement-là que nous nous
gouvernons, à partir d'aide... d'outils d'aide à la tâche, de critères, de
grilles qui nous permettent d'assurer un traitement uniforme, un traitement
juste, un traitement équitable.
• (12 h 40) •
Mais maintenant c'est de rendre la
décision et d'expliquer correctement, dans un langage clair, dans un langage
accessible et digestible, les raisons qui ont motivé nos choix. Et ça, on a du
travail à faire, on est conscients et c'est la raison pour laquelle nous
essayons de mettre sur notre site Internet notre intégration sur les médias
sociaux, la participation dans des salons, dans des événements qui permettent
aux citoyens de communiquer avec nous et des événements qui nous permettent de
former aussi des policiers recrus, des agents de la paix.
Donc, plus les gens vont comprendre notre
rôle, plus les gens vont comprendre notre action, mieux on sera capables de
rendre ce que l'on fait. Nous croyons que ça va aider à la transparence, à
légitimer l'exercice de notre juridiction et à apaiser, possiblement, certaines
personnes qui peuvent se questionner, à juste titre, sur nos façons de faire et
les décisions que nous prenons.
Mme Maccarone : Merci. Alors,
vous avez beaucoup parlé de la conciliation, vous êtes d'avis que la
conciliation devrait être obligatoire. On a aussi entendu la Ligue des droits
et libertés qui nous disent que ça devrait être facultatif, parce que, dans
certains cas, ça se peut qu'on ait des plaignants qui ne voudront pas
poursuivre avec de la...
Mme Maccarone : ...et on a
aussi entendu la même préoccupation des policiers qui ont passé en commission
hier. Que répondez-vous à eux? Puis pourquoi ça doit être obligatoire et non
facultatif? Il y a quand même des cas, peut-être, qui devront être pris comme
exceptionnels.
Mme Hillinger (Mélanie) : Merci
de la question. La conciliation est un véhicule, effectivement, qui est
engageant, qui est exigeant. Moi, je parle souvent de la conciliation comme
premier mode ou comme première étape du processus déontologique, parce qu'elle
n'est pas systématiquement obligatoire, tu sais, dans tous les cas, il peut y
avoir une enquête qui soit décrétée au terme de l'analyse préliminaire d'une
plainte. Donc, il faut comprendre qu'il y a certaines situations d'intérêt
public, de blessures graves, il peut y avoir effectivement des cas de récidive,
des considérations de droits fondamentaux qui auraient été effectivement
compromis qui vont justifier le décret d'une enquête.
Par contre, ce qu'il faut comprendre,
c'est qu'encore une fois, tous les dossiers ne peuvent pas se rendre en
enquête, parce qu'encore une fois c'est une question de preuve, nous ne
pourrions pas faire la preuve devant le comité de déontologie des éléments
constitutifs d'un manquement déontologique. Donc, le véhicule qui demeure à ce
moment-là pour permettre à un citoyen de se faire entendre - il a vécu quelque
chose de difficile, il veut l'exprimer, il veut faire valoir sa voix - bien, la
conciliation est la bonne étape pour lui permettre de le faire. Et, si j'avais
des conciliatrices et des conciliateurs aujourd'hui de mon équipe qui étaient
devant vous, ils vous diraient que, malgré les appréhensions de départ, au
terme des conciliations, les gens sont tellement contents.
Je regardais les derniers chiffres :
79 % de taux de succès. Les gens ne rentrent pas en conciliation
nécessairement bien, apaisés, paisibles et heureux, mais il y a de belles
histoires qui se terminent. Et, encore une fois, comme je le mentionnais,
au-delà de la conciliation pour l'événement pour lequel les parties sont
réunies, le citoyen va devoir continuer de cohabiter avec les forces de
l'ordre, il va devoir composer au fait que, dans la société, il y a des agents
de la paix qui assurent la sécurité publique. Donc, il est important de leur
donner un véhicule d'échange dans un cadre respectueux, balisé avec le concours
d'un conciliateur neutre, équitable et impartial pour les faire grandir dans la
situation, pour les informer, les sensibiliser.
Et même les représentants syndicaux nous
disent, au commissaire, que c'est bon, effectivement, pour les policiers, c'est
un rafraîchissement. Hier, on parlait du consensus sur la formation, la
formation continue. Bien, la conciliation, c'en est une forme de formation
continue. Quand le policier est dans la pratique, dans le feu de l'action,
bien, il y a bien des choses qui se passent, mais parfois, de venir en
conciliation et de se faire rappeler certaines choses, ça peut l'aider dans sa
pratique, ça peut l'aider sur ses prochaines interventions. Donc, on voit les
bénéfices réels de ce véhicule-là.
Mme Maccarone : Merci. J'ai
vu dans votre mémoire que vous êtes contente avec la modification législative
proposée qui va permettre à votre organisation d'accompagner... encore plus
personnalisée les plaignants. Vous avez eu un échange préliminaire avec le
ministre. Mais, quand je lis votre mémoire, je vois aussi que le nombre de
plaintes reçues par vous sont en croissance : si on parle de 2017-2018,
1818, puis là, en 2021-2022, ça augmente à 2493. Comment allez-vous rejoindre
ce nouveau critère? Malgré que je le salue puis je trouve que c'est une bonne
idée, comment allez-vous rejoindre maintenant ce nouvel indice, qui me semble
très nécessaire puis très utile? Mais, si vous êtes en manque d'effectifs, comment
allez-vous réaliser?
Mme Hillinger (Mélanie) : Au
cours des cinq dernières années, nous avons vu le nombre de plaintes augmenter
de 37 %. À l'instar des autres organisations, c'est vrai qu'il y a des
enjeux de ressources, on a effectivement une rareté d'expertise. Quand on a un
joueur qui quitte l'organisation, ça fait mal. Dans une organisation comme la
mienne, où on est environ 39 personnes, c'est un concentré d'une expertise très
spécialisée.
Alors, c'est sûr que durant la pandémie,
on a eu, encore une fois, des plaintes, je vous dirais, qui se sont ajoutées
par rapport à ce qu'on a connu dans les années précédentes, et ça a créé une
pression. Donc, je ne vous cache pas, et je l'ai dit dans mon mot d'ouverture
et je l'ai écrit dans le mémoire, on a fait de l'optimisation à l'interne, on a
révisé nos processus, on a regardé chacun des endroits où on pouvait gagner en
efficience. Mais j'ai été très claire, et je pense avoir reçu une belle écoute
de M. le ministre quand je lui ai dit que, là, je ne pouvais plus aller plus
loin dans la situation actuelle, que mon équipe avait impérativement besoin de
ressources pour que je puisse préserver la confiance de mes...
Mme Hillinger (Mélanie) : ...et
que je puisse décharger les plaignants et les policiers de cette charge-là qui
fait que mon processus, quand il est long, amène sur leurs épaules une charge
émotive qui, à un moment donné, n'est plus saine dans les circonstances, donc
un processus déontologique. Il faut, pour que la force de frappe arrive, que le
dénouement soit le plus contemporain possible à l'événement qui a donné lieu,
effectivement, à cette rencontre-là. Donc, oui, ça n'en prend, des ressources.
Ce n'est pas que des ressources, il y a une multitude, effectivement, de
mesures qui doivent être mises en place. Mais chaque petit élément de
souplesse... On parlait tantôt des conciliations virtuelles. Bien, encore une
fois, je l'ai dit, c'est un mode privilégié, le présentiel. Mais, si, à un
moment donné, on se retrouve à avoir des conciliations en région que l'on doit
regrouper pour effectivement tenter d'utiliser judicieusement les ressources,
bien, ça peut faire en sorte que je vais allonger mon délai, alors que, dans
d'autres circonstances, par une conciliation virtuelle ou téléphonique, je peux
rapprocher le moment d'échanges entre les parties.
Donc, il faut humaniser le processus de
déontologie et mettre nos parties prenantes au cœur de ce processus-là et que
nous soyons des facilitateurs pour qu'il y ait un début, une fin, mais que ça se
fasse selon les plus hauts standards et selon les règles de l'art, parce qu'il
n'y aura pas de justice à rabais au Commissaire à la déontologie policière,
c'est sûr.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup... J'aurais
besoin d'un petit cinq minutes, d'un consentement pour rajouter un petit cinq
minutes à la séance. Consentement? Merci. M. le député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Bonjour, madame Hillinger. Merci beaucoup d'être ici avec nous, là.
Très intéressant ce que vous nous apportez. Écoutez, j'aimerais soulever
quelques préoccupations, là, qu'on a entendues, là. Ici, concernant les
processus de signalement, on nous rapporte qu'il y a eu une étude en 2002,
toute récente, là, comme quoi, les signalements... pas les signalements, les
plaintes d'un... les plaintes provenant d'une personne tierce qui n'a pas
assisté aux événements, c'est tout de même très minoritaire dans l'ensemble des
plaintes, 3,2 %, là. On est loin des... comment dire, d'une vague de plaintes
qui pourraient être frivoles. Mais pourtant, là, ces plaintes-là provenant d'un
plaignant tiers aboutiraient à 22,6 des dossiers amenés devant le Comité de
déontologie policière et constituent 20, 27, presque 28 % des plaintes qui
donnent lieu à une sanction par ces comités. Donc, une petite minorité des
plaintes qui amène quand même un grand... à une prise en considération très
importante. Est-ce que vous ne croyez pas que ça pourrait... l'élimination de
cette possibilité-là pourrait vous priver de rendre justice?
• (12 h 50) •
Mme Hillinger (Mélanie) : C'est
un très bon point. Les plaignants tiers ont un rôle fondamental à jouer au
niveau du commissaire et nous sommes très reconnaissants de toutes les
situations qu'ils ont portées à notre connaissance parce que nous n'avons pas
actuellement, dans le cadre de la loi actuelle, la possibilité de nous saisir
de nous-mêmes d'une intervention. Donc, toutes les plaintes qui ont été
formulées par des plaignants tiers, effectivement, ont reçu la considération.
Et, vous l'avez dit, on conduit dans bon nombre de dossiers à des stations. Le
signalement va conférer la même possibilité pour le plaignant tiers de porter
ces situations-là à notre connaissance. Le seul élément qui va effectivement
changer, c'est la façon dont nous allons effectuer le suivi auprès de ce
plaignant-là en termes de confidentialité des informations qui entourent un
événement pour lequel ils ne sont pas parties.
Donc, le principe va demeurer entièrement
le même, ils vont continuer d'avoir une tribune pour sensibiliser le
commissaire, le dossier va être analysé de la même façon qu'actuellement, selon
les mêmes critères, avec les mêmes paramètres, les mêmes règles de droit. Mais,
au moment où on aura pris la décision, ce que l'on demande, c'est d'avoir une
souplesse additionnelle pour être, peut-être, un peu moins éloquent dans les
motifs qui pourraient générer telle ou telle décision afin de préserver la
confidentialité d'informations sensibles qui concernent des personnes à
l'événement et pour lequel cette personne-là n'était pas partie.
Donc, c'est vraiment dans une perspective
d'assurer la protection de la vie privée des gens qui étaient parties à
l'événement, mais ce n'est d'aucune façon une façon détournée de les empêcher
d'exercer la légitimité, encore une fois, de l'apport qu'ils faisaient au
commissaire. Mais c'est vraiment, peut-être, de prévoir une façon d'y répondre
qui est différente. On parlait de ressources, on parlait de délais, on parlait
de saine administration...
Mme Hillinger (Mélanie) : ...De
la justice, mais c'est une façon de livrer, encore une fois, le suivi.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Oui. Merci, M.
le Président. Bonjour.
Avec les différentes modifications
législatives, ça ferait beaucoup de chapeaux, on parle, entre autres, de
l'accompagnement, de la prévention, du tribunal. Vous avez sûrement entendu les
différents groupes, là, qui sont passés. On se disait : est qu'il n'y a
pas un conflit d'intérêts ou est- ce qu'on ne devrait pas plutôt confier la
prévention à une autre entité ou... Moi, j'aimerais vous entendre, là, sur
l'ensemble des chapeaux. Puis on en a parlé, là, il y a des collègues qui en
ont parlé, les effectifs, c'est sûr que ça va prendre plus d'effectifs, mais il
y a des... Il y a l'argent aussi, là, en arrière de tout ça, le financement.
Mme Hillinger (Mélanie) : Vous
avez une très bonne question. Pour nous, et ça, on l'a mentionné, notre équipe
de prévention serait vraiment étanche de l'équipe qui traite les plaintes. Il y
aurait vraiment deux secteurs distincts du côté du commissaire, qui auraient,
effectivement, des fonctions et des rôles propres qui leur seraient dévolus,
parce qu'on n'est pas à l'intérieur du même environnement. Donc, la prévention,
on est plus en amont des plaintes ou des signalements, alors que, lorsqu'on
arrive au niveau de la plainte, on est en aval. Donc, à ce moment-là, il faut
vraiment qu'il y ait une étanchéité. Mais, par contre, il y aura nécessaire
communication entre ces deux entités-là parce que c'est le traitement des
plaintes, c'est la mine d'informations qu'on va aller rechercher.
Mme Nichols : Puis comment
vous allez faire, comment vous allez faire ce mur-là? Comment vous allez...
C'est avec des équipes séparées? Comment vous allez y arriver?
Mme Hillinger (Mélanie) : Ça
va être des équipes séparées mais qui vont avoir, effectivement, quand même le
rôle de communiquer de manière à aller chercher la matière première pour
identifier les manquements déontologiques potentiels. Le traitement des
plaintes nous amène à voir certains comportements à risque, ça va être
important en fonction du traitement des plaintes, d'aller communiquer avec
l'équipe de prévention pour dire : on voit beaucoup de plaintes,
actuellement, de tel ordre, qui amènent tel risque dans le comportement, donc
il serait bien de travailler des outils, une information, une formation qui
portent sur ces éléments-là. Donc, c'est sûr que ce sont des équipes
distinctes, comme on voit souvent dans les organisations, mais qui doivent se
parler pour assurer la cohérence, encore une fois, du livrable qui va en
résulter.
Le Président (M.
Bachand) :dernier commentaire, Mme la
députée de Vaudreuil?
Mme Nichols : En deux
secondes, j'imagine?
Le Président (M.
Bachand) :Ah! une Minute.
Mme Nichols : Ah! quand même,
quand même, quand même. O.K. Oui, je vais y aller. Les recommandations qui pourraient
s'appliquer... En fait, là, suite aux dossiers, le tribunal pourrait faire des
recommandations qui seraient appliquées par une organisation différente. Et,
ça, ça serait, quoi, via la formation?
Le Président (M.
Bachand) :En 30 secondes.
Mme Hillinger (Mélanie) : Je
ne suis pas sûre de saisir. Quand vous dites : par une organisation
différente, vous voulez dire quoi? Je ne suis pas sûre de saisir votre
question.
Mme Nichols : Bien, en fait,
c'est vous qui allez offrir aussi ce service-là?
Mme Hillinger (Mélanie) : Oui,
c'est l'équipe de prévention. Donc, il pourrait y avoir de la formation,
effectivement, qui est donnée par l'équipe, effectivement, qui est dédiée à ce
secteur d'activité.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la
commissaire, merci beaucoup d'avoir été avec nous, sincèrement.
Mme Hillinger (Mélanie) : Merci
à vous.
Le Président (M.
Bachand) :Alors, la commission suspend
ses travaux jusqu'à 15 h. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 4)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Bonjour, tout le monde, en ce magnifique après-midi du 5 avril à Québec.
Alors, la Commission des institutions reprend ses travaux.
Nous poursuivons les consultations particulières
et auditions publiques sur le projet de loi n° 14, Loi modifiant diverses
dispositions relatives à la sécurité publique et édictant la Loi visant à aider
à retrouver des personnes disparues.
Alors, on débute, cet après-midi, avec l'Association
des directeurs de police du Québec. Merci beaucoup d'être avec nous, grand
plaisir. Alors, je vous invite d'abord à vous présenter et à débuter votre
exposé. Merci beaucoup, encore.
M. Brochet (Pierre) : Très
bien. Donc, Pierre Brochet, président de l'Association des directeurs de police
du Québec et directeur de la police de Laval.
M. Deramond (Didier) :Didier Deramond, directeur général de l'Association des
directeurs de police du Québec.
M. Brochet (Pierre) : On y
va?
Le Président (M.
Bachand) :Oui, allez-y.
M. Brochet (Pierre) : Alors,
M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les commissaires, l'ADPQ remercie
la Commission des institutions de lui donner l'occasion de se prononcer sur le
projet de loi n° 14. Pour notre présentation, bien, évidemment, je suis
accompagné de M. Didier Deramond.
M. le Président, l'ADPQ salue les efforts
du gouvernement afin de faire évoluer la loi de police et reconnaît certains
ajouts à la loi actuelle, qui sont des plus pertinents. Toutefois, l'ADPQ tient
à émettre certaines réserves et doit avouer qu'elle est préoccupée en ce qui
concerne le rôle de gestion élargi que le gouvernement veut donner au Tribunal
administratif, qui, selon elle, remet en question le rôle de gestionnaire des
directeurs de police du Québec. De plus, notre association tient à préciser qu'elle
est préoccupée en lien avec la gestion par lignes directrices et par règlement.
Mais avant d'aller plus loin et de vous
faire part de nos observations, réserves et inquiétudes, voici la mission de l'association.
La mission première de l'ADPQ est de représenter les dirigeants policiers et
leurs partenaires afin de contribuer à l'amélioration de la sécurité publique
du Québec.
Comme je vous l'ai mentionné précédemment,
notre compréhension du projet de loi n° 14 est qu'il offre des pistes de
solutions innovantes et efficaces en sécurité publique. Toutefois, notre
association remarque que ce projet de loi propose également des modifications
qui, selon notre humble avis, nécessitent non seulement des précisions, mais
également des ajustements...
M. Brochet (Pierre) : ...afin
que les changements proposés ne nuisent pas au rôle de gestion des directeurs
de police et que la sécurité publique et l'indépendance des corps de police ne
soient en aucun temps compromises par quoi que ce soit ou par qui que ce soit.
Comme vous l'avez sûrement constaté, nous
avons structuré notre mémoire en deux catégories, soit les réserves qui
regroupent les changements proposés dont l'ADPQ éprouve un malaise et une
inquiétude au niveau du projet de loi et les observations qui font état des
préoccupations, d'ajustements souhaités ou encore d'appuis au projet de loi.
Pour les besoins de cette présentation et
compte tenu du temps qui nous est alloué, nous allons nous concentrer sur,
évidemment, les réserves. À ce sujet, nous avons soulevé quatre éléments :
l'absence de reconnaissance des fonctions du rôle de directeur de police; la
gestion par règlement et lignes directrices qui ouvrent la voie à des règlements
plus politisés ou de l'ingérence potentielle; la gouvernance, sujet qui n'a pas
été abordé dans le projet de loi; et la reddition de comptes demandée, qui peut
devenir une surcharge de travail et représenter des coûts additionnels. Je
présenterai donc les deux premiers enjeux et laisserai Monsieur Deramond vous
expliquer les deux derniers points avant de faire la conclusion.
Débutons avec l'absence de reconnaissance
des fonctions du rôle du directeur de police. Il s'agit d'un enjeu majeur.
L'ADPQ a un malaise en ce qui concerne le rôle de gestion élargie que le
gouvernement veut attribuer au Tribunal administratif au point 65,
article 234, en lui confiant, par exemple, la possibilité d'évaluer...
d'imposer une évaluation médicale ou une thérapie à des policiers. En faisant
de la sorte, le gouvernement remet en question le rôle de gestionnaire du
directeur de police et le travail quotidien qui est fait par ce dernier pour
former, encadrer et assurer la pertinence de leurs actions.
L'ADPQ tient donc à rappeler au
gouvernement que les policiers sont déjà encadrés non seulement par des lois et
des normes professionnelles, mais qui y sont également d'avis... ils sont
également suivis, évalués par leur propre organisation, dont le directeur en
est le haut responsable.
Je dois vous avouer que l'association se
questionne quant aux objectifs de ces insertions. Pourquoi le gouvernement
désire-t-il que le Tribunal administratif fasse la... fasse de la gestion des
ressources humaines au détriment du rôle de directeur de police? Ne serait-il
pas mieux d'assurer une saine gestion de la sécurité publique, que le rôle du
Tribunal administratif n'entre pas en conflit avec le rôle de gestion des
directeurs de police?
L'association enjoint donc le gouvernement
de réviser le mandat qu'il veut attribuer à son nouveau Tribunal administratif
et lui demande de faire confiance aux directeurs de police en laissant les
compétences en gestion des ressources humaines, dont la formation et
l'encadrement à ceux-ci.
Toujours en lien avec la reconnaissance
des fonctions du rôle de directeur de police. L'association est surprise et
perplexe sur le rôle élargi que le gouvernement veut attribuer au commissaire.
En effet, au point 47, à l'article 187, le projet de loi semble à
nouveau faire fi des responsabilités qui incombent aux directeurs de police
quant à la gestion du personnel. Comment pourrait-on expliquer autrement le
fait que le commissaire, lorsqu'une plainte est rejetée, pourrait communiquer
directement, par sa propre initiative, à la demande du ministre, avec un
policier ses observations sur la nature des conduites à améliorer?
D'ailleurs, l'ADPQ se demande comment un
ministre pourrait être au courant d'une plainte rejetée par le commissaire et
lui demander de partager ses observations avec un policier. Est-ce que
l'association doit comprendre que le commissaire se devra de partager
l'information qu'il possède au niveau du ministre?
L'ADPQ est en désaccord avec l'idée de
permettre au ministre de communiquer avec le commissaire concernant le dossier
des policiers, alors qu'il se doit de garder une distance afin d'éviter toute
ingérence politique potentielle.
L'APPQ propose donc un nouveau texte de
loi à l'article 187 qui oblige le commissaire à communiquer directement et
uniquement aux directeurs de police ses observations.
• (15 h 10) •
Enfin, l'association est d'avis d'éviter
toute ingérence potentielle, qu'il est nécessaire de retirer du texte de loi
«ou à la demande du ministre».
Passons maintenant à la gestion ou par
lignes directrices qui ouvrent la voie, selon nous, à de la réglementation plus
politisée ou à de l'ingérence potentielle. Nul besoin de vous dire que nous
sommes inconfortables avec cette approche. Par exemple, la gestion par
règlement proposé au point 14, à l'article 116 préoccupe
l'association, car il est impossible d'entrevoir les changements qui seront
éventuellement souhaités lors de la formation continue des policiers.
Il est primordial, selon nous, de
s'assurer que ce genre de formations ne deviennent pas plus politisées ou
dépendantes d'événements médiatisés, et ce, au détriment des coûts et de la
capacité organisationnelle du service et des citoyens.
L'ADPQ souhaite donc qu'il soit précisé,
dans l'article de loi, que ledit règlement devra, en tout temps, être rédigé
en...
M. Brochet (Pierre) : ...avec
les parties prenantes, soit l'ADPQ et l'École nationale de police.
Enfin, bien que l'ADPQ accueille
favorablement les ajouts proposés au point 86, à l'article 263.4,
l'association tient à rappeler que plus souvent qu'autrement il est facile de
tomber dans les opérations lorsqu'on détermine des priorités d'action ou des
directives. Donc, il est risqué de tomber rapidement dans la gestion des
opérations, ce qui doit être, à notre avis, évité à tout prix. De même, il
arrive trop souvent que les réalités terrain qui sont différentes d'une région
à l'autre ne soient pas prises en compte lors de l'élaboration de lignes
directrices. À nouveau, ceci doit être évité à tout prix.
L'Association recommande d'ajouter à
l'article 263.4 que le gouvernement doit assurer que, dans
l'élaboration de ses priorités d'action et de ses directives, ces dernières
n'aient pas d'influence directe sur les opérations, qu'elles tiennent compte
des réalités terrain de chaque région et qu'elles soient faites en concertation
avec l'ADPQ.
L'ADPQ ne peut également que réitérer son
malaise envers la proposition de lignes directrices que le gouvernement propose
au point 96, article 307, qui ouvre la voie, selon nous, à une
ingérence potentielle et à l'élaboration de lignes directrices potentiellement
politisées. L'ADPQ recommande donc de ne pas changer l'article 307.
Toutefois, si le gouvernement décidait de ne pas suivre cette recommandation,
il est essentiel que ces lignes directrices soient élaborées avec la
collaboration de l'Association des directeurs de police du Québec.
M. Deramond
(Didier) :Alors, M. le Président, M. le
ministre, mesdames et Messieurs les Commissaires, bonjour.
Alors, l'ADPQ est préoccupée par la
présence de certains vides juridiques dans le projet de loi, et ce, bien
qu'elle ait émis des pistes de solution dans son mémoire qu'on a déposé au
Comité consultatif sur la réalité policière en 2020. Cela fait maintenant plus
de cinq ans que l'association réclame que la gouvernance soit traitée dans la
loi sur la police.
Cela étant dit, bien que l'association
soit en accord avec l'insertion, au point 100, à l'article 354.1,
elle recommande d'inclure des éléments de gouvernance afin que ces règles communes
à l'ensemble des services de police soient mises en place pour la nomination,
la suspension ou la destitution des directeurs de police. Il va de soi que ces
règles devraient être élaborées en concertation avec notre association.
En ce qui concerne la reddition de
comptes, l'association se doit de mentionner son inconfort avec certains
ajouts. Alors, L'Association croit que la modification apportée au
point 89, à l'article 267, au premier paragraphe, est louable.
Toutefois, l'ADPQ est inconfortable avec l'ajout du deuxième et troisième
éléments, qui se lisent ainsi, là : des états, des données statistiques et
d'autres renseignements nécessaires afin d'évaluer l'état de la criminalité et
l'efficacité de l'action policière et des renseignements et des documents
nécessaires à l'exercice de ses fonctions ou de sa charge, là. Alors, l'ADPQ se
demande pourquoi le gouvernement désire évaluer l'efficacité des actions
policières, alors que ces dernières relèvent dans la majorité des cas des
municipalités.
De plus, permettez-moi de mentionner que
cette nouvelle demande de reddition de comptes créera une pression
supplémentaire sur les services policiers. Les organisations policières ont des
ressources limitées, le gouvernement se doit d'être conscient que pour être en
mesure d'effectuer ce genre de reddition de comptes, de nouvelles ressources
seront nécessaires. Et, à quel prix? L'ADPQ craint fortement que, si les
paragraphes trois et quatre ne sont pas retirés, cette reddition de comptes
alourdira les responsabilités des directeurs et des organisations policières.
L'ADPQ recommande donc de retirer les ajouts des paragraphes trois et quatre de
l'article 267.
En terminant, M. le Président, M. le
ministre et Mesdames et Messieurs les Commissaires, le respect des citoyens et
la confiance mutuelle qui doit exister entre les policiers et la population
sont le fondement de la légitimité du travail policier. C'est pourquoi l'ADPQ
soutient les efforts du ministre visant à contrer la discrimination dans les
activités policières et la reddition de comptes qui y est associée.
Toutefois, comme les directeurs de police
doivent maintenir le juste équilibre entre l'encadrement du travail policier et
la marge de manœuvre nécessaire pour assurer la sécurité des citoyens, nous
croyons qu'il est important de rappeler au gouvernement que c'est dans un
contexte d'augmentation de la violence et d'enjeux en santé mentale de plus en
plus présents que les directeurs de police doivent en tout temps s'assurer de
la mobilisation des policiers au Québec. À ce sujet, l'ADPQ tient à être
claire, les directeurs de police de la province ont le leadership nécessaire
pour relever ces défis, et le gouvernement doit leur faire confiance.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. On est rendus à
la période d'échange. Désolé, 10 minutes en bonne compagnie, ça passe tellement
rapidement. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Bonnardel : Merci, M.
le Président. Merci, monsieur Deramond, M. Brochet, d'être là cet
après-midi. Votre apport et votre mémoire sont importants pour la suite des
choses. Puis je tiens compte puis que je vais aller sur différents... deux,
trop petits points, là, qui...
M. Bonnardel : ...qui me
reviennent en tête sur ce que vous avez dit.
Bon, les lignes directrices, vous n'êtes
pas sans savoir... Un des points les plus importants que j'ai mentionné lors du
dépôt de ce projet de loi, c'est de répondre aux situations de profilage que
l'actualité a amenées de l'avant, que les situations ont amené de l'avant, que
vous êtes bien au fait, aussi... Vous travaillez avec... Vous êtes en contact
avec vos collègues aussi, puis les différents corps de police, pour être
capables de... Quand il y a une interpellation ou une interception, il y a
trois quarts des corps de police, présentement, là, qui remplissent une fiche,
comme telle, là, que je souhaite toujours assez succincte, pour ne pas, non
plus... On a souvent parlé de désengagement, puis, pour moi, ce n'est pas
d'alourdir le travail des policiers, mais c'est de leur rendre ça le plus
simple possible, puis que ça prenne une ou deux minutes à cocher les
informations, pour que, par la suite, pour la première fois, où un ministère
soit capable, dans une reddition de comptes... vous n'aimez peut-être pas le
mot, mais reddition de comptes annuelle, pour qu'on soit capables d'avoir et de
colliger des infos, pour la première fois, au ministère, qui vont nous
donner... qu'on puisse connaître un peu nos façons de faire, nos façons de
travailler et d'avoir des informations qui, je crois, vont être importantes.
Donc, est-ce que vous y voyez un enjeu,
comme tel, d'être capables de nous fournir ça? Même si le travail se fait déjà,
où vous vous situez là-dessus? Parce que, veux veux pas, c'est un point pour
nous, pas juste pour moi, je pense, pour l'ensemble de la société civile,
surtout ceux qui, malheureusement, ont subi certains cas, là. Puis je ne veux
pas nommer personne ni aucun corps de police, mais ça a été d'actualité, puis,
pour nous, il fallait trouver un équilibre, qui n'est pas simple non plus, là,
dans tout ça. Puis je pense que ça, c'est un outil, un outil qui va être
important pour autant votre travail à vous, que pour vos policiers, policières,
que pour nous.
M. Brochet (Pierre) : Non,
bien, en réponse à ça, M. le ministre, les directeurs de police sont
sensibilisés comme jamais, au cours des dernières années, à la notion de
racisme, de discrimination, de profilage racial, et on a beaucoup évolué, au
cours des dernières années, à mettre en place, par exemple, des pratiques
policières et des nouvelles politiques d'intervention. Par exemple,
présentement, pour faire une intervention sur un piéton, une interpellation, ça
prend des motifs et des soupçons, donc on ne peut pas y aller de façon
aléatoire. Donc, nous...
Et d'ailleurs, nous, on est très, très à
l'aise avec la reddition de comptes, M. le ministre, ça fait partie de nos
fonctions. Comme directeurs de police, comme service public, un des éléments
importants dans la gouvernance, c'est d'être capables de rendre compte de nos
actions de façon transparente. Et ça, on n'a pas aucun problème avec ça.
Notre préoccupation, c'est dans l'ampleur
que pourrait prendre la notion de lignes directrices, et là certaines lignes
directrices... En fonction, par exemple, de pressions médiatiques ou de crises
médiatiques, certains gouvernements pourraient être tentés de mettre en place
rapidement des actions en fonction des lignes directrices. Il faut bien
comprendre que... puis, tu sais, ça fait 38 ans que je suis policier... c'est
quand même un changement qu'il ne faut pas négliger. Donc, pour la première
fois, on étend les pouvoirs du ministère de la Sécurité publique à donner des
lignes directrices, alors la préoccupation que j'ai, c'est qu'on rentrerait
soit dans les enquêtes ou les opérations policières en dictant aux directeurs
et aux services policiers québécois... en dictant la façon de faire les choses,
donc. Mais avec la reddition de comptes, parfaitement à l'aise avec ça.
• (15 h 20) •
M. Bonnardel : À l'article 86
du projet de loi, on modifie l'article 263.5 de la Loi sur la police puis on
dit : «Prévoir que le directeur ou un membre d'un corps de police doit
refuser de communiquer ou de confirmer l'existence d'un renseignement dont la
divulgation pourrait avoir des incidences sur l'administration de la justice et
de la sécurité publique, notamment lorsqu'il serait susceptible de nuire à une
enquête ou une intervention policière, de révéler une méthode d'enquête ou de
mettre en danger la vie ou la sécurité d'une personne». D'accord avec ça?
M. Brochet (Pierre) : Ah!
tout à fait d'accord. Bien, je pense que c'est un élément positif du projet de
loi. C'est de régir, si on veut, les relations, au niveau municipal, entre les
directeurs de police, et les élus, et l'administration municipale. Donc, ça a
été une recommandation dans le livre vert, et on est très, très à l'aise avec
ça. À ce niveau-là, pas de problème.
M. Bonnardel : Du côté des...
Il y avait certaines inquiétudes, hier, là, de certains policiers, je pense que
c'était la Fraternité des policiers provinciaux, l'embauche de policiers, là,
enquêteurs qui viennent du milieu civil, donc une entrée parallèle pour les
enquêteurs, là, qui ont une expertise très nichée, là, très nichée. Puis le but
de cet article, encore une fois, ce n'était pas d'empêcher les policiers, là,
qui ont de l'ambition, là, d'aller, un jour... Puis vous en avez eu, puis
bravo, bravo, bravo pour votre travail puis l'expérience que vous avez aujourd'hui.
Mais est-ce que vous êtes d'accord avec cette entrée parallèle, je vais
l'appeler ainsi, là, qu'on souhaite mettre en place pour aller chercher... Puis
on va... je le disais hier au... je pense que c'était à M. Painchaud... on va
travailler avec vous là-dedans, là, pour qu'on dicte de façon...
M. Bonnardel : ...les postes
ou les... l'expertise, je veux dire, l'expertise précise qu'on souhaite avoir
dans ce dans ce contexte, là?
M. Brochet (Pierre) : En
fait, oui, on est à l'aise avec ça. Ça va être dans les paramètres qu'on va
identifier. Et je... Et vous l'avez bien dit, hein, autant les policiers à
travers le Québec, c'est un cheminement de carrière qui est reconnu. Tu passes
cinq, 10, 15 années sur la patrouille, là, tu deviens enquêteur, et là, tu
profites de toute ton expérience terrain pour être un meilleur enquêteur. C'est
pour ça que, nous, malgré cela, on est ouverts pour certaines fonctions
spécialisées, on n'a qu'à penser à la cybercriminalité et aux fraudes où c'est
de plus en plus complexe. Et ce n'est pas tous les policiers qui veulent faire
ce type d'enquête là, pour être bien honnête, donc, si on pouvait aller
chercher une expertise dans ces domaines-là, par exemple, on aurait des
enquêteurs, même avec des entrées parallèles, qui seraient probablement
beaucoup plus motivés et mieux équipés, mieux formés pour faire ce type
d'enquête là.
M. Deramond
(Didier) :Au niveau des articles de loi,
par contre, là, il y a peut-être des éléments à regarder, à rephraser, quand on
parle de poste spécifique ou poste particulier, là, parce que c'est vraiment
ouvert, très largement, dans la loi, présentement. C'est autant au niveau des
enquêtes que des enquêtes spécifiques, là, alors il y aurait peut-être des
choses à travailler là-dedans, justement, pour s'assurer d'avoir vraiment
l'intention qu'on souhaite, là. Mais on était pour les entrées parallèles,
justement, là, pour les corps de police spécialisés et les postes spécialisés,
là.
M. Bonnardel : Ça peut être
un besoin, je pense, vous en convenez, là?
M. Deramond
(Didier) : Tout à fait, tout à fait.
M. Bonnardel : Que, pour une
spécialisation très nichée, là, cybercriminalité ou x, y, là, je pense qu'on
peut répondre à ça.
À l'article 14, qui modifie
l'article 116 de la loi sur la police, on dit : «prévoir que le
gouvernement peut, par règlements, déterminer les qualités minimales requises,
dont la formation, pour exercer dans un corps de police autre qu'un corps de
police spécialisé les fonctions d'enquête, de gestion ou toute autre fonction
qu'il détermine.» Vous vous situez où dans cette...
M. Deramond
(Didier) :Bien, c'est de la gestion par
règlements. Encore une fois, là, comme on le dit, là, il faut vraiment qu'on
soit partie prenante là-dedans, justement, pour regarder les normes minimales,
qu'elles ne soient pas abaissées, ces normes minimales là, parce qu'on est
quand même la province avec la meilleure formation canadienne et, je pense,
nord-américaine, là, au grand complet, là, au niveau de l'Amérique, donc il faut
garder ça, c'est très important. Puis monsieur St-Antoine est ici, il pourra
vous le dire, là, tout à fait, les normes que l'on a mises en place. Donc, il
faut vraiment qu'on soit partie prenante, encore une fois, dans le cadre des
règlements. Quand on parle des inconforts qu'on a par la gestion par un
règlement, il faut juste s'assurer qu'on soit assis, que les parties prenantes
soient assises alentour de la table, qu'on puisse élaborer ça ensemble.
M. Bonnardel : Deux dernières
questions rapides avant que mon collègue d'Ungava puisse en poser une. La
formation continue, ça a été un sujet, depuis hier, êtes-vous à la même place
que nous, qu'on doit mieux accompagner nos policiers? Puis là, au-delà de la
requalification, là, de la vraie formation continue, là, dans leur rôle, dans
leur travail. J'ai souvent dit : le policier d'aujourd'hui versus celui de
voilà 25 ans versus celui dans 25 ans, le rôle évolue, change, le
policier doit toujours s'améliorer, je crois, comme dans n'importe quelle
profession. Êtes-vous à la même place que nous pour...
M. Brochet (Pierre) : Bien,
soyez assurés que nous sommes tout à fait conscients qu'une fois que tu es
rentré comme policier au cours des années, tu devrais avoir une formation
minimum, un maintien des compétences. L'enjeu qu'on vit à travers ça, bien,
premièrement, ça va être de définir ensemble ce que sera ce maintien des
compétences là. Mais, vous savez, les... avec à peu près toutes les
recommandations du coroner, les commissions d'enquête, on nous... On recommande
de former les policiers. Et je vous dirais que ça met une pression énorme sur
le système. Les jours de formation s'accumulent, s'accumulent, donc il va
falloir réfléchir à l'impact économique, l'impact financier, parce que, quand
tu formes des policiers, bien, tu les sors des opérations, la plupart du temps,
il faut que tu les remplaces, ça fait qu'il y a des impacts. Dès que tu décides
de donner tant de jours de formation par année pour un maintien des
compétences, il y a des coûts puis il y a des impacts, mais, en même temps, ce
n'est pas pour rien qu'il y a... Dans chaque rapport d'étude, qu'on revient à
la formation, c'est essentiel, de bien former.
M. Bonnardel : Bien, si je
vous en pose une un petit peu plus précise, là... Excuse, Denis, je...
Une voix : ...
M. Bonnardel : Vous
représentez les corps de police comme tels. Hormis la requalification dans la
majorité de vos corps, vous diriez que, quoi, il y a-tu un 3 h, 4 h,
5 h, annuellement, là, qui est une moyenne pour vos policiers, là, qui
sont... qui reçoivent une formation ou c'est aléatoire, ça varie selon...
M. Brochet (Pierre) : Bien,
ça varie, oui. Ça varie beaucoup d'un corps de police à l'autre. Je vous
dirais, par exemple, le Service de police de Laval, c'est cinq jours par année.
M. Bonnardel : O.K., cinq
jours.
M. Brochet (Pierre) : Cinq
jours, oui, c'est cinq jours, et c'est dans la convention collective, donc...
Et c'est exigeant, là, ça nous prend toute une équipe. Puis c'est... Ce qui est
exigeant, les requalifications parce qu'on a implanté une arme longue, entre
autres, une arme, qui, qu'on appelle le 223. Donc, ça, c'est très exigeant,
c'est cinq jours par année, à part les formations. Par exemple, quand qu'on a
reformé tout le monde sur le profilage racial, la discrimination, on a reformé
tout le monde, donc ça a été...
M. Brochet (Pierre) : ...en
dessus des cinq jours. Mais ça varie beaucoup d'un service de police à l'autre.
M. Deramond
(Didier) :Mais on est en mouvement, M. le
ministre. D'une façon ou d'une autre, on est avec le DPCP, aussi, on est en
train de revoir notre partenariat avec le DPCP, ne serait-ce qu'on puisse
participer aussi à des journées de formation sur toutes les jurisprudences à
partir de l'École des poursuivants, etc., avec avec les procureurs de la
Couronne. Donc, on est vraiment en mouvement là-dedans puis c'est... Le
«one-size-fits-all» est difficile pour toutes les organisations policières
parce que les besoins sont différents, les réalités... La réalité policière et
la carte policière au Québec, mais on ne l'a pas adressée encore, là, mais
on... ça viendra un jour, là, mais ça nous amène certaines disparités à gauche
et à droite.
M. Bonnardel : Oui. Personnes
disparues, avec votre expérience, là, on oublie-tu quelque chose ou c'est...
M. Brochet (Pierre) : On est
très... tu compléteras, Didier, mais on est très, très heureux de tout ça,
évidemment. Les personnes disparues, c'est des drames pour les familles, pour
les personnes disparues, pour les proches, donc de nous donner des moyens
supplémentaires parce que ce n'est pas un événement criminel, ça nous manquait.
Donc, on apprécie énormément cette initiative-là.
M. Deramond
(Didier) :Tout à fait. Et puis le fait
d'avoir des outils aussi lorsqu'il n'y a pas nécessairement des enquêtes
criminelles, bien sûr, avec tous les outils que les enquêtes criminelles nous
donnent, là... Donc, d'avoir ces outils-là aussi en matière de disparitions,
c'est vraiment apprécié. Bon, l'élément, je pense qu'on en a fait mention dans
les mémoires, l'élément urgence serait peut-être à regarder, mais je ne suis
pas sûr qu'on doit le regarder dans le cadre de ce projet de loi ou de
l'adresser beaucoup plus, peut-être, au niveau des modifications de la loi
d'accès à l'information, là, et permettant justement le transfert
d'informations lorsqu'il y a urgence.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, M. le ministre.
M. le député d'Ungava.
M. Lamothe : ...
Le Président (M.
Bachand) :Quatre minutes...
M. Lamothe : Ma collègue a
une question, je vais aller vite. Bon, j'ai fait votre métier pendant
30 ans. Au niveau des lignes directrices, je comprends très bien que le
politique ne se mêle pas aux enquêtes, que le politique ne fait pas en sorte des
opérations. Mais je trouve fortement, par exemple, que la politique peut
arriver à un certain... à un moment donné dire : Voici la ligne directrice
concernant les communications des corps policiers, voici une ligne directrice
concernant les informations que les corps policiers doivent transmettre sur
différents corps. On a eu un exemple à matin, là, d'une madame qui est venue,
puis deux corps de quatre policiers qui ne se parlaient pas sur une
disparition.
Ça fait que ce que je dis, à certain
moment donné, administrativement parlant, je pense que le gouvernement peut
arriver pour uniformiser la formation. Bon, il y a-tu moyen que les
formations... au détriment des coupures budgétaires, au détriment, tu sais, des
formateurs. Mais, au niveau administratif, moi, je crois fortement à ce que le
gouvernement du Québec puisse arriver avec des lignes directrices parce que...
Vous-même, vous l'avez mentionné tantôt, c'est une question de sécurité
publique, c'est une question des gens qui sont sur le terrain, qu'ils ont le
droit d'avoir un service uniforme sur certains points. Mais, par contre, au
niveau des enquêtes, puis des opérations spéciales, puis les médias, comme je
vous disais, je comprends très bien. Vous en pensez quoi?
M. Brochet (Pierre) : Ah!
bien, écoutez, c'est là, je pense qu'il aurait lieu... Je comprends ce que vous
dites, je suis d'accord avec vous et... Il y a une énorme différence entre les
activités, les opérations et l'administration. Et notre préoccupation avec le
libellé de la loi, c'est que ce n'est pas précis comme ça, ça ouvre la porte à
des réactions, si on veut, à certains événements, et là on serait facilement
portés à émettre une directive pour calmer le jeu. Et ça, ça nous préoccupe
grandement parce que, tu sais, ça peut nous faire... puis, tu sais... Ça va
dans les deux sens, hein, c'est important de le dire. Mais les services de
police, là, ça fait partie d'une démocratie. Puis l'indépendance, ce n'est pas
parce qu'on veut être indépendants, hein, c'est la crédibilité d'un système de
justice puis de système de police. Et, si tu ne réussis pas à garder ça en vie,
bien, c'est... on est à risque au niveau de la crédibilité. Ça fait que c'est
extrêmement important pour nous, là. Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Mme la députée de Vimont, s'il
vous plaît.
Mme Schmaltz : Merci, M. le
Président. Bonjour...
• (15 h 30) •
M. Brochet (Pierre) : Bonjour.
Mme Schmaltz : Vous avez
soulevé à plusieurs reprises le mot «ingérence», à l'ingérence politique dans
votre mémoire.
M. Brochet (Pierre) : Oui.
Mme Schmaltz : Ma question
est la suivante : Est-ce que vous ne pensez pas que, dans le rôle d'un
ministre, il y a quand même une part de responsabilité, il y a une part
d'intervention qui doit être faite et que, peut-être, le mot «ingérence» n'est
peut-être pas nécessairement approprié?
M. Brochet (Pierre) : Bien,
écoutez, j'ai mis «ingérence potentielle», parce qu'on est toujours, là...
Présentement, on a un gouvernement x, la situation est calme, ça va bien, mais
regardez à... Et on l'oublie souvent, puis l'indépendance des services de
police, ça ressort souvent dans des grandes commissions d'enquête. Par exemple,
la tuerie de masse qu'il y a eu à Portapique. Je ne sais pas si vous avez pris
connaissance du rapport, mais il y a une grande section, celle sur
l'indépendance des services de police. On a eu la commission Chamberland il n'y
a pas si longtemps ici, au Québec. Donc, je ne dis pas qu'il y a des gens en
place ici, ou dans le gouvernement actuel, ou quoi que ce soit, qui serait
porté à le faire, mais il reste que ça va des deux côtés. Il pourrait y avoir
des décisions... qu'un gouvernement dise : Écoutez, ça, telle action, on
ne veut plus que vous le fassiez sur le terrain parce que ça crée des impacts
négatifs puis on subit une certaine pression ou le contraire, ou le
contraire... Pour donner un autre exemple...
15 h 30 (version non révisée)
M. Brochet (Pierre) : ...exemple,
on a eu une série de manifestations en 2008... bien, le... 2012, le printemps
érable, par exemple. Alors, j'ai eu à gérer ça au niveau du Service de police
de Montréal, j'étais directeur des opérations. Donc, il y avait une énorme
pression sur le gouvernement. Donc, est-ce qu'un gouvernement, à ce moment-là,
aurait pu être tenté d'émettre des lignes directrices pour calmer le jeu en
termes de manifestations? Donc, c'est une... tu auras une vision globale, puis
d'encadrer ce qu'un gouvernement peut donner comme lignes directrices ou non à
un service de police. Ça peut s'appliquer à l'usage de la force, par exemple.
Il pourrait y avoir un événement dramatique où on a utilisé une technique d'usage
de la force, et un gouvernement pourrait dire : Là, cessez d'utiliser
cette technique-là immédiatement, alors qu'on doit consulter les comités d'experts,
la formation, etc. Donc, c'est des exemples que je veux vous donner pour
illustrer le risque, puis je pense que c'est notre responsabilité de vous
montrer ce portrait-là de risque potentiel.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Westmount-Saint-Louis, s'il vous plaît.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. Brochet...
M. Brochet (Pierre) : Bonjour.
Mme Maccarone : ...un plaisir
de vous revoir. Bonjour, M. Deramond, à vous également. Merci beaucoup pour
votre présentation. Je vais prendre la balle au bond en ce qui concerne les
lignes directrices, parce qu'on comprend que c'est quand même un outil, comme
aussi de la gestion par règlement. Je suis d'avis comme vous qu'on cherche une
transparence puis on cherche évidemment une concertation puis le travail avec
vous en ce qui concerne les lois que nous allons adopter ici.
Dans cette loi, le ministre a dit qu'il
avait besoin d'avoir cette ligne... les lignes directrices, parce que dans le
fond, il faut combattre le profilage racial, le profilage discriminatoire.
Selon vous, est-ce que les lignes directrices qui sont incluses dans cette loi
vont avoir un effet positif pour combattre le profilage racial?
M. Brochet (Pierre) : Bien,
clairement, oui, parce qu'on parlait de reddition de comptes tout à l'heure. Ça
amène l'obligation, puis c'est un grand pas en avant, il ne faut pas l'oublier,
là. Ça veut dire que, moi, comme directeur de police, et l'ensemble des
directeurs de police au Québec devons mettre en place un système et dire à
chacun des policiers qui font une interception aléatoire en fonction de 636 de
colliger de l'information dans un système, et là il va y avoir une série d'informations,
il va y avoir des données.
Vous savez, quand c'est sorti, le jugement
Yergeau, on a fait une sortie le lendemain pour dire qu'on est préoccupés par
ça, et on avait malheureusement peu de données sur l'article 636. Depuis ce
temps-là, on a fait sortir des données. Vous savez, dans certaines régions du
Québec, on atteint le 40 %... il y a 40 %, 50 %, 60 % des arrestations
pour facultés affaiblies qui sont initiées grâce à un 636. On n'avait pas ce
type de données là. Donc, on doit... C'est l'équilibre, hein, on doit préserver
certains outils pour... et, en même temps, on doit éviter le profilage racial.
Mais je peux vous dire qu'il y a une très
grande, je le répète, une très grande prise de conscience de tous les policiers
au Québec, des directeurs de police. On a des énoncés de direction dans la
plupart des services de police où... tolérance zéro à la discrimination, des
contrôles, il y a des dossiers qui vont en déontologie à la Commission des
droits de la personne. Donc, je pense qu'il y a une prise en charge
actuellement, là.
Mme Maccarone : Serez-vous à
l'aise de partager ces informations avec les membres du comité, parce que... de
la commission? Parce que je pense que ça serait utile. Une des choses qu'on
entend souvent, c'est qu'on a très peu de données en ce qui concerne l'article
636. Alors, si vous serez à l'aise, je pense que ce serait une information qui
serait bienvenue.
M. Brochet (Pierre) : Avec
plaisir. Oui, on les a au niveau de l'association...
Mme Maccarone : Parfait.
Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Alors, je comprends qu'officiellement,
vous allez faire parvenir tout ça au secrétariat de la commission?
M. Brochet (Pierre) : Oui.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée.
Mme Maccarone : Merci. Puis,
si les lignes directrices faisaient partie d'une consultation, vous serez plus
à l'aise?
M. Brochet (Pierre) : Oui.
Bien, c'est ce qu'on dit, si on va de l'avant, parce qu'il y a l'élément lignes
directrices pour le profilage racial, mais il ne faut pas oublier qu'il y a un
article qui dit, de façon très large, des lignes directrices dans les activités
policières. C'est là que la porte est ouverte très large. Ça fait que, nous, on
dit : Ça nous inquiète. En même temps, si le gouvernement décide d'aller
de l'avant, il faut absolument que les directeurs de police soient consultés,
et que ce soit intégré dans la loi pour protéger cette indépendance-là.
Mme Maccarone : Merci. Je
veux revenir à votre témoignage ainsi que votre mémoire. Quand vous parlez du
rôle élargi du BEI puis le rôle du commissaire, vous utilisez à deux
reprises... vous êtes surpris et vous êtes perplexes. Pourriez-vous nous guider
d'abord de la façon que, vous, vous voyez, mettons, un amendement à la loi pour
rejoindre vos préoccupations puis aussi de rejoindre ce que le ministre
souhaite accomplir en ce qui concerne la réforme pour la police?
M. Brochet (Pierre) : Dans l'allocution
que j'ai faite, j'ai parlé de ce qui a vraiment un impact négatif actuellement.
Bien, premièrement, déjà, on change le nom, on parle d'un comité de
déontologie, un tribunal administratif. Alors, déjà, c'est un message qui est
passé aux policiers du Québec, mais, en plus, quand on ajoute des sentences
qui... je dois dire, des sanctions qu'on intègre dans le projet de loi qui s'apparentent
beaucoup plus à des sanctions qui sont données dans des procès criminels. Je ne
sais pas si... Ça fait que, là, moi, écoutez... Puis, quand je dis qu'il faut
garder les policiers engagés, mobilisés, c'est un enjeu. Il faut vraiment s'assurer
que les gestes qu'on fait soient réfléchis, qu'on aille dans la bonne
direction, et, quand je vous dis ça, ce n'est pas pour seulement...
M. Brochet (Pierre) : ...protéger
les policiers pour faire en sorte que... Puis je peux en parler, je peux en
témoigner, à Laval, le nombre de fusillades est en augmentation, etc. Donc, il
faut toujours que l'on contrôle les gestes des policiers et qu'en même temps on
s'assure qu'il y ait une liberté puis une confiance d'agir sur le terrain.
C'est vraiment avec ça qu'on doit évoluer comme services de police. Ça fait que
c'est vraiment au niveau des sanctions que ça nous préoccupe, on pense que ça
va trop loin puis on pense que c'est notre responsabilité. Si on pense qu'un
employé a des problèmes psychologiques, on doit prendre des mesures
d'encadrement, bien, c'est notre responsabilité, c'est, on doit prendre et on
les prend, ces responsabilités-là.
Mme Maccarone : Surtout quand
on parle du dossier médical par exemple.
M. Brochet (Pierre) : Oui,
surtout. Bien, il y a travaux communautaires, dossiers médicaux, ça, c'est... À
la limite, tu sais, souvent, c'est presque, comme, humilier le policier, tu
sais, c'est comme... Là, ce n'est pas un criminel, hein, il a été en
déontologie puis... Tu sais, c'est ce qu'on dit, puis c'est important... puis
j'ai une grande confiance à la commission, au comité de déontologie, c'est important
parce que, si on a confiance à ces institutions-là, puis on... ça donne
confiance à la population. Puis, si le policier a fait des erreurs, il a mal
agi, bien, il y a des conséquences. Puis des journées de suspension, c'est ce
qu'il y a actuellement puis je pense que ça devrait demeurer.
Mme Maccarone : Parfait.
M. Deramond
(Didier) :C'est une très belle
orientation aussi que la commissaire a prise... la nouvelle commissaire a prise
en matière de prévention des comportements des policiers sujets à y avoir des
plaintes, là. Bref, c'est vraiment... Et il faut vraiment continuer dans ce
sens-là, à mon humble avis, là, de continuer à faire de la prévention. Alors,
on voit mal comment... en matière de prévention, en rajoutant des mesures,
comme Monsieur Brochet le dit très bien, là, comment ça viendrait... Ça
viendrait aider peut-être les orientations qu'on souhaite prendre, le
changement qu'on souhaite amorcer en matière de déontologie policière au
Québec, pour le BEI.
Pour le rôle élargi du BEI aussi, Pierre
en a parlé, effectivement, il y avait la transmission de documents de façon
systématique aussi à différents organismes qu'on trouvait un peu particulier,
là, la façon de faire, de transmettre des documents, là, à partir du BEI, que
ce soit la déontologie, que ce soit un peu partout, de donner l'opportunité, du
moins, dans un article de loi, de le faire. Alors, il y a des éléments
confidentiels là-dedans, il y a plein de choses, là, qui nous préoccupent
là-dedans.
Puis le rôle élargi du commissaire, bien,
Pierre en a parlé, effectivement, c'est préoccupant par rapport aux mesures
additionnelles et vraiment l'apport aussi de donner de l'information au
ministre, qu'on puisse passer directement aux policiers, alors qu'on esquive un
peu le directeur de police dans son rôle de gestion des ressources humaines.
Mme Maccarone : Et le vide
juridique, les éléments de gouvernance que vous faites référence.
M. Deramond
(Didier) :Oui, bien, c'est parce qu'il
n'y a rien au niveau de la loi qui donne un processus uniforme dans les
municipalités, notamment, là, quant aux allégations, aux suspensions, aux
nominations des directeurs de police au Québec.
Mme Maccarone : Oui, parlez-nous
un peu de la sélection de directeurs de police de la SQ. Vous avez souligné vos
préoccupations dans votre mémoire.
M. Brochet (Pierre) : Bien,
écoutez, c'est que ce que ça disait dans le projet de loi, c'est qu'en
l'absence d'un sous-ministre, il pouvait être remplacé, mais nous, on pense que
c'est une sélection extrêmement importante pour la province de Québec,
évidemment, pour les citoyens, ça fait que ça devrait être précisé dans la loi,
au moins que ce soit un niveau équivalent à un sous-ministre qui puisse
remplacer le sous-ministre qui est absent, c'est... C'est tout aussi simple que
ça.
M. Deramond
(Didier) :Parce qu'on parle de personne
désignée mais «désignée», ça peut vouloir dire plein de gens.
Mme Maccarone : Ça peut être
large. Oui, oui, tout à fait. O.K. Puis, s'il me reste juste un tout petit peu
de... un deux minutes, j'aimerais vous entendre parler en ce qui concerne
l'éducation, sensibilisation de la population. Parce que, quand on parle de
profilage racial, on a aussi entendu, par exemple, la Ligue des droits et
libertés qui dit que la grande partie de la population ne sont pas au courant
de leurs droits. Comment voyez-vous cet élément? Comment devons-nous le traiter
aussi dans la lutte contre le racisme?
• (15 h 40) •
M. Brochet (Pierre) : Bien,
écoutez, c'est un bon point et je pense que c'est vrai. Moi, j'ai lancé une
démarche sondage. On a fait une démarche, je pourrais donner mon exemple, là,
Nouveau regard, ce qu'on appelle un sondage avec une firme spécialisée au
niveau de la perception des citoyens lavallois en lien avec la discrimination,
puis effectivement on s'apercevait, à l'intérieur des démarches puis les «focus
groups», qu'ils connaissaient très peu les moyens pour porter plainte. Ça fait
qu'on avait des comités consultatifs qui nous disaient : Vous devriez
illustrer davantage. Entre autres, on l'a fait. Sur notre site internet, on dit
comment aller porter plainte. Ça fait que c'est vrai.
Puis là on parle de plus en plus de
multiethnique. Puis là, des fois, on prend pour acquis que les gens des
différentes communautés écoutent les mêmes stations de télévision que nous
autres, mais ce n'est pas ça du tout, là, ils ont leur réseau à eux. Ça fait
que c'est un défi de communication. Puis je dirais, pour un directeur de police
dans un milieu multiethnique, c'est un défi de communication de rejoindre tout
le monde quand tu veux vraiment te rapprocher des gens, te rapprocher des
minorités. Ça fait que c'est... Le défi va demeurer constant.
M. Deramond
(Didier) :Je siège aussi sur le comité de
liaison avec la Commissaire à la déontologie. Donc, on a un plan d'action qui a
été élaboré suite à l'arrivée de la nouvelle commissaire et puis on traite des
communications...
M. Deramond
(Didier) :...Justement, quand on parle de
prévention, quand on parle de communication publique, c'est un point saillant
du plan d'action.
Mme Maccarone : Parfait.
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Laurier-Dorion, s'il vous plaît.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Bonjour, Monsieur Brochet, Monsieur Deramond. Merci beaucoup d'être
ici avec nous.
Écoutez, je vous entends, je vous
entends....
(Interruption)
M. Fontecilla : ce projet de
loi, un des principes qui président ce projet de loi, c'est d'accentuer
l'indépendance des corps policiers. Et, vous, dans votre mémoire, vous ouvrez,
vous affirmez que certains articles ouvrent la porte à l'ingérence politique.
C'est un peu paradoxal. Et vous précisez que, si, en particulier
l'article 307, qui est un des articles centraux du projet de loi visant à
enrayer le phénomène du profilage racial, que... vous recommandez le retrait,
s'il est appliqué, qu'il soit élaboré et... les lignes directrices en collaboration
avec vous, là. Quelle forme ça pourrait être, cette collaboration? Est-ce que
vous pensez que ça devrait être inscrit dans le texte de loi ou ça pourrait
être fait par règlements? Expliquez-nous.
M. Brochet (Pierre) : La
première partie de votre question, effectivement, ça peut sembler ambigu, mais
ce que je constate dans le projet de loi, c'est qu'effectivement au niveau
municipal, on a fait des grands pas en avant. Tu sais, là, il y a les relations
entre les maires, le D.G., le directeur de police, puis ça avait été un enjeu
direct de la commission Chamberland, on s'en souvient, ça fait que c'est un pas
en avant. Mais, en même temps, de l'autre côté, on a... Puis c'est écrit
textuellement dans l'article, là, on élargit le pouvoir du ministère de la
Sécurité publique. Et là, ce n'est pas en raison des individus qui sont en
place ou quoi que ce soit, mais il reste qu'on donne plus de pouvoirs à un
autre niveau. Ça fait que, là, les directeurs de police, on va se retrouver,
parce que, nos patrons immédiats, hein, c'est les villes aussi, comme, moi,
c'est le maire, le D.G., là, c'est... Puis là, en même temps, bien, on va
recevoir des priorités aussi du ministère de la Sécurité publique, selon la
nouvelle loi, on peut recevoir des priorités, des directives, ça fait qu'il y a
comme même un peu une ambiguïté à ce niveau-là.
Puis, écoute, je pense qu'on devrait être
prudents, tu sais, je le répète, c'est pour ça qu'on... je pense qu'on devrait
être prudents sur... Puis, je l'ai dit d'entrée de jeu, ça fait 38 ans que
je suis policier, c'est quand même un changement majeur qu'on est en train de
faire. Donc, on donne beaucoup, beaucoup de marge de manœuvre à un... Au
gouvernement en fonction de cet article-là. Et, à moins qu'on, vraiment, qu'on
le... mette des paramètres précis pour pas que ce soit dans les activités
policières, si c'est au niveau administratif, je comprends mieux, mais ça peut
facilement rentrer dans les activités policières, dans les opérations.
M. Fontecilla : Et comment éviter
cela?
M. Brochet (Pierre) : Bien,
on a parlé, si le gouvernement va de l'avant, bien, évidemment, c'est de le
faire en consultation, en consensus avec l'Association des directeurs de police
du Québec. Puis on le dit sans prétention : veux, veux pas, on est les
experts en sécurité publique, tu sais, c'est notre métier, ça fait des années
qu'on fait ça, puis en... Quand qu'on se regroupe, on a un conseil
d'administration, on échange, on se challenge sur différents enjeux, on
développe une expertise. C'est pour ça qu'on dit que cette... ces directives-là
devraient être faites avec nous et que ça devrait être dans la loi.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Merci beaucoup.
Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Oui. Merci, M.
le Président. Merci d'être parmi nous aujourd'hui avec la belle météo.
M. Brochet (Pierre) : Oui.
Mme Nichols : Petite
question. Vous parlez, là, au niveau de la gouvernance, dans votre mémoire,
qu'il y a des pistes de solutions, que vous avez des pistes de solutions, dans
le mémoire, au Comité consultatif sur la réalité policière. Vous mentionnez que
ça fait cinq ans, entre autres, là, que vous demandez que la gouvernance soit
traitée par la loi sur la police. Dans le rapport final du comité, est-ce que
c'est vos recommandations qui ont été retenues?
M. Deramond
(Didier) :Tout à fait, au niveau du CCRP,
oui, il y a plusieurs de nos recommandations qui ont été retenues dans les
recommandations du CCRP, oui, tout à fait.
Mme Nichols : Parfait. Puis
est-ce qu'il y en a une plus qu'une autre, là, que vous voudriez porter à notre
attention puis qu'on devrait retenir?
M. Brochet (Pierre) : Bien,
écoutez, l'enjeu, c'est qu'actuellement il y a des... puis c'est directement
relié à l'indépendance, hein? Il y a des sélections, actuellement, de
directeurs de police au Québec, au niveau municipal, qui se font sans processus
connus à tout le moins, donc, d'un coup, on apprend que c'est untel qui est
nommé directeur. Et, même s'il y a un processus, bien, il n'y a pas
d'uniformité et une apparence d'impartialité dans le processus. C'est pour ça
qu'il faut vraiment s'asseoir sur... dire : comment on sélectionne les
directeurs de police au Québec pour aller accentuer l'indépendance, et
qu'est-ce qui fait qu'on suspend, qu'est-ce qui fait qu'un maire ou un D.G.
pourrait suspendre un directeur de police au Québec? Et, ça, ce n'est pas
encadré non plus. Donc, est-ce qu'on mettrait des pares-feux ou des paramètres
qui disent : c'est tellement important comme décision, si vous voulez
aller de l'avant, suspendre votre directeur de police, il doit y avoir, par
exemple, un comité de travail ou différentes mesures qui font en sorte que ça
ne peut pas se faire de façon unilatérale par exemple.
M. Deramond
(Didier) :Vous savez, une fois qu'un
directeur est suspendu, le mal est fait, hein? La légitimité est attaquée...
M. Deramond
(Didier) :...fortement, alors il est très
difficile... Par la suite, on ne peut pas remettre le dentifrice dans le tube,
c'est impossible, là. Alors, c'est pour ça qu'on dit... Tout à fait. Notamment,
dans l'autre législature, là, qu'on a adressée, dans l'autre assemblée
auparavant, le projet de loi n° 1 faisait état de la nomination du
directeur de la Sûreté du Québec, de l'UPAC, et on s'est inclus dans ce projet
de loi là. Donc, dans tout le processus de nomination, ça prend un directeur de
police ou ancien directeur de police, dépendamment, là, de la nomination,
l'endroit où on a un processus de sélection. Donc, on est inclus dans la loi
pour s'assurer vraiment d'une transparence, avec des objectifs qui sont clairs,
qui sont clairs, qui sont donnés lors de l'affichage de poste. Alors, on est
capables, en toute transparence...
Puis on ne veut pas se substituer au choix
final. Ce n'était pas là notre intention. C'est vraiment de s'assurer que les
gens ont la compétence, ont la légitimité, que le processus est transparent,
parce qu'on sait très bien... Comme Pierre le disait tantôt, quand ça va bien,
tout est correct, mais c'est quand il commence à y avoir de l'orage, quand il
commence à y avoir du mauvais temps, là, entre parenthèses, là. C'est là que la
légitimité est remise en question, puis c'est là que l'absence de processus
fait mal.
Mme Nichols : Je comprends
très bien votre position. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. À moi de vous remercier
infiniment d'avoir été avec nous aujourd'hui. Très constructif, merci
infiniment.
Sur ce, je suspends les travaux quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 48)
(Reprise à 15 h 51)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission continue ses travaux...
Le Président (M.
Bachand) :...Alors, il nous fait plaisir
de recevoir les représentants de l'École nationale de police du Québec, quand
on parle de formation, formation, formation, alors donc, on a déjà avec nous...
Donc, Mme Deschênes et M. St-Antoine, merci beaucoup d'être ici. Alors, comme
vous le savez, la parole est à vous pour 10 minutes, après ça, on aura une
période d'échange. Merci beaucoup d'être ici, encore une fois.
M. St-Antoine (Pierre) : Merci,
M. le Président. Je me présente, Pierre St-Antoine, directeur général de
l'École nationale de police du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui...
Mme Deschênes (Andréanne) : ...d'Andréanne
Deschênes, directrice de l'innovation, des affaires académiques et
institutionnelles.
M. St-Antoine (Pierre) : Alors,
en quelques minutes, pour résumer notre mémoire de l'École nationale de police
du Québec, lorsque le législateur a créé l'École nationale de police du Québec
en 2000, trois mots clés qu'on a à se rappeler, pertinence, qualité, cohérence,
et je pense que c'est ce qu'on veut encore par le dépôt de ce projet de loi là,
c'est ce que je note. C'est qu'on veut, entre autres, en formation continue,
assurer qu'il y ait pertinence, qualité et cohérence.
L'École nationale de police du Québec,
c'est de la formation initiale de tous les policiers québécois. C'est également
du perfectionnement professionnel. C'est un centre de recherche, c'est des
expertises, mais c'est également de la formation dans le domaine de la sécurité
publique. L'école nationale joue un rôle clé en matière de perfectionnement
professionnel au Québec, et sa grande particularité, en plus de ses
partenariats avec le réseau collégial et universitaire et les corps de police,
c'est clairement son approche expérientielle. Donc, on ramène le policier,
l'apprenant dans l'action, et c'est ce qui fait la grande différence ENPQ.
L'école déploie ses formations de
différentes façons. Naturellement, on a beaucoup développé de nouvelles
approches au cours des dernières années, que l'on pense au présentiel, en
ligne, hybride, en campus, à Nicolet, hors campus bientôt, à Montréal, par une
antenne, qu'on déploie à compter de janvier 2024. Mais tout ça se fait,
naturellement, comme je le mentionnais, en concertation avec les acteurs du
milieu.
Rappelons quelques éléments, si vous me le
permettez, que le législateur avait intégrés dans la Loi sur la police en 2000,
qui influencent un peu les règlements qui seront à venir au cours des prochains
mois, là, si le projet de loi est adopté. Entre autres, l'aspect
qu'annuellement, un plan de formation et un bilan de formation sont remis à
l'École nationale de police du Québec, annuellement, par les corps de police
québécois. Donc, ça, c'est un élément important, où l'école dispose déjà des
données en matière de plans et de bilans de formation des organisations
policières québécoises.
Rappelons qu'en 2000 la formation
policière québécoise était classée en trois grandes catégories : la
formation en patrouille gendarmerie, l'enquête et la gestion policière.
Rappelons également que l'école peut confier à des établissements d'enseignement
de niveau collégial et universitaire, des partenariats ou à des corps de
police... donc, peut établir des ententes pour avoir des partenariats et de la
collaboration, puis elle peut également homologuer des programmes de formation
qui proviennent d'autres instances universitaires ou collégiales au Québec, ce
qui, donc, la place dans un lieu central pour favoriser la concertation et la
collaboration. Également, nous avons, dans notre institution, une commission de
formation de recherche, qui lui permet de suivre le bilan du perfectionnement
professionnel et d'en faire des constats.
Je souligne... Et l'école appuie cette
démarche réglementaire là, tout particulièrement dans le domaine de la
formation continue. Nous croyons, comme École nationale de police du Québec,
que c'est un gain important que la réglementation, entre autres, en formation
continue, qui est une nouveauté proposée... et qui va faire de l'école une...
qui va faire du système québécois une amélioration par rapport à ce qu'on avait
déjà.
Encore, la semaine passée, vous l'avez
noté, le fédéral a sorti un rapport sur les pertes... en lien avec les pertes
massives à Portapique, puis un des éléments... J'avais hâte de voir les grands
constats, et, rapidement, en lisant ces constats-là, il y a une grande
recommandation non seulement pour la GRC, mais pour l'ensemble des corps de
police canadiens et des écoles de police canadiennes, qui disait :
Rehaussez les programmes de formation, allez plus loin, on a besoin, au Canada,
de rehausser les systèmes, à l'exception du Québec. Et quand j'ai vu le «à
l'exception du Québec», j'avais une grande fierté, mais, en même temps, une
humilité, parce qu'on a encore des choses à améliorer. Puis je suis très
heureux de constater que l'élément qu'on a amélioré, c'est la formation
continue, parce que, là-dedans, nos partenaires canadiens sont, effectivement,
plus en avance que nous. Et là c'est un constat que l'on a, et que vous avez
noté dans le mémoire de l'école.
Quelques points à considérer, sur la
formation continue, qu'on désire faire noter. On pense, naturellement, que
l'école peut jouer un rôle clé dans l'offre de formation, en collaboration avec
ses partenaires collégiaux et universitaires, ainsi que les corps de police.
L'école ne veut pas faire seule, veut faire avec. Le futur règlement devra
également définir clairement la différence entre la...
M. St-Antoine (Pierre) : ...Formation
continue et la requalification. Je pourrai vous en... aborder ces éléments-là,
si vous voulez bien, tantôt.
Nous pensons qu'il devrait y avoir
assurément une commission de formation continue qui devrait questionner les
thématiques à couvrir en formation continue, le nombre d'heures et la
périodicité des spécificités associées à cela avec les parties prenantes importantes
pour que ces lignes-là, directrices, soient données en concertation.
Et on pense, également, il faut toujours
penser... On m'a toujours dit : dans la vie, quand on pose une question,
il faut être prêt à... Il faut connaître déjà la réponse ou il faut savoir
comment gérer la réponse. Et, quand je vois le règlement qui s'en vient, est-ce
que l'École nationale de police du Québec est en mesure d'assurer le suivi de
cette reddition-là? Parce que, l'ensemble des corps de police, s'ils ont à
faire de la formation continue obligatoire, bien, l'école est déjà un système
de gestion des dossiers scolaires, a les outils, qu'on va devoir adapter, mais
qui vont nous permettre de dresser le portrait et de mettre à jour ce
portrait-là, de formation continue, québécois de ce qui se fait.
Parlons maintenant un peu de
réglementation en gestion. Encore une fois, toutes les recherches, les rapports
d'enquête du coroner, etc., des 20, 25 dernières années, pour les avoir
lus dans mes 33 dernières années à l'École nationale de police du Québec,
parlent de formation initiale en gestion. Et, déjà, c'est une capacité de
réglementation qui se faisait. Et il n'y avait pas encore de consensus
québécois, je pense, pour qu'il y ait une réglementation dans le domaine de la
gestion. Et là, effectivement, je sens, comme directeur général de l'école, que
le fruit est mûr au Québec, également, au-delà de la formation continue, pour
qu'il y ait des réglementations en gestion au niveau du superviseur de premier
niveau, du cadre intermédiaire et du cadre supérieur, et que ça peut vraiment
faire une différence, ce qui a été, entre autres, noté dans le dernier rapport,
de la semaine passée, du fédéral, en lien avec les événements de Portapique
mais dans de multiples rapports québécois, là, et commissions, dont le Comité
sur les réalités policières d'il y a quelques années au Québec.
Sur le plan de la gestion, encore une
fois, la loi dit que l'école a l'exclusivité en matière de gestion, en
formation initiale en gestion. Donc, on pense qu'on pourra y jouer, en
partenariat, un rôle central. On pense que, cette formation-là, on ne veut pas
la faire seule, je le réitère. Il y a des expertises-écoles, par exemple pour
un superviseur de premier niveau, que l'École nationale de police du Québec a
en gestion critique des événements, par exemple, mais, par la suite, il y a des
ajouts en matière de formation universitaire qui pourraient se faire dans plein
de domaines comme la gestion de conflits, les relations de travail, la gestion
des ressources humaines, etc., et, entre autres, des formations d'intégration,
à la fin d'un programme de gestion, qui pourront permettre d'allier toutes les
expertises universitaires, collégiales et écoles pour que le nouveau
gestionnaire puisse gérer adéquatement ces ressources. Encore une fois, tout ne
doit pas se faire à Nicolet, hors Campus. Nicolet, antenne de Montréal, à
compter de 2024, en ligne, et cetera.
Et, pour permettre d'implanter de façon
réaliste un programme de formation qui viserait les trois niveaux, bien,
clairement, le niveau de superviseur auprès de nos patrouilleurs et enquêteurs
est clairement un niveau à prioriser, selon l'École nationale de police du
Québec parce que ça permet tellement une belle intégration des recrues dans le
métier de policier et de policière. Et ce désengagement-là, qu'on entend
beaucoup parler et que vous avez, dans les derniers jours, entendu parler à la
commission, également, bien, le superviseur de premier niveau peut y faire
toute une différence dans l'intégration d'une recrue dans le cadre de son
emploi.
Alors, globalement, c'étaient nos propos
et notre introduction, École nationale de police du Québec.
Le Président (M.
Bachand) :Merci infiniment,
M. St-Antoine. M. le ministre, s'il vous plaît.
• (16 heures) •
M. Bonnardel : M. le
Président, M. St-Antoine, Mme Deschênes, merci d'être là... (panne de
son) ...merci pour le travail que vous faites et de bien former. Vous l'avez
dit, humblement, mais vous l'avez dit, puis je vous le... je ne suis pas gêné
de le dire devant tout le monde pour le travail que vous faites depuis
d'innombrables années pour former de très bons, très, très bons policières et
policiers au Québec. Donc, là-dessus, un énorme merci. Et je sais que vous êtes
entourés de très, très bonnes personnes...
Le Président (M.
Bachand) :...
Des voix : ...
M. Bonnardel : Alors...
Oui, c'est ça, alors, merci, encore une fois.
Mais vous avez évoqué, tantôt, dans le
rapport sur Portapique, bon, oui, la reconnaissance du Québec est là, là, avec
son école, mais j'ai retenu quelque chose. Vous avez dit : nos partenaires
canadiens sont plus avancés que nous pour ce qui est de la formation continue.
Puis C'est un point névralgique, je pense que tout le monde en convient, la
formation continue, on l'a entendu assez souvent depuis hier, là. Pourquoi on
est en retard, sur quelle base nous sommes en retard, et comment on peut aller
chercher ce retard, d'ici les deux, trois prochaines années, on le souhaite,
là?
M. St-Antoine (Pierre) : Effectivement,
qu'on pense aux provinces de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, par
exemple, et également le fédéral, avec la GRC, qui ont déjà plus de normes et
d'obligations...
16 h (version non révisée)
M. St-Antoine (Pierre) : ...réglementaires
ou législatives en matière soit de requalification, ou de formation continue,
ou de perfectionnement des policiers une fois qu'ils ont leur formation
initiale, puis peut-être que les autres instances provinciales, je vous dirais,
sont plus avancées que nous là-dedans, puis mon interprétation, mon analyse de
cela, c'est qu'ils sont peut-être un petit peu moins concentrés sur les
formations initiales au cours des dernières décennies, et, étant donné que leur
formation initiale est un peu plus courte, puis eux n'ont pas le privilège et
la chance d'avoir un système collégial qui prépare les futurs policiers,
policières, bien, ils se sont concentrés, pour regagner en compétence
rapidement, dans leur système de perfectionnement policier et de maintien des
compétences, de requalification et de formation continue.
Ils sont donc plus avancés parce qu'ils
ont, au fédéral, par exemple, ce qu'ils appellent des entraînements en bloc où,
annuellement ou aux deux ans, il y a des obligations pour des agents de la GRC
d'avoir un certain nombre d'heures avec des thématiques qui sont décidées. C'est
la même chose en Colombie-Britannique, c'est la même chose en Ontario. Il y en
a au Québec, que l'on pense par exemple à l'obligation annuelle, en vertu du
Guide des pratiques policières, d'être requalifié en tir ou sur une arme
longue, sur l'arme électrique également. Mais c'est quand même assez succinct,
comme obligation québécoise, que ce que l'on a, quand on se compare à nos
collègues d'à travers le Canada.
M. Bonnardel : Comment, selon
vous, on devrait articuler cette formation continue? Parce qu'on a entendu M.
Brochet tantôt, il disait : À Laval, nous... Puis tantôt je vous poserai
la question sur la requalification versus la formation, là, parce que c'est
deux choses qu'il faut départager complètement, là. Mais de quelle façon, selon
vous, on devait articuler ça, à savoir... Bon. Si Laval me dit : Moi, je
fais cinq jours, la Sûreté du Québec fait x nombres d'heures, Laval... Montréal
me dit : Moi, je fais un nombre d'heures x, donc, est-ce qu'on y va avec
un mur-à-mur ou on laisse une certaine autonomie puis on prend vous, là, l'École
nationale, puis on dit : Bien, c'est ça, là, qu'il faut être capable d'aller,
minimalement, minimalement, chercher comme formation, selon l'évolution du
travail des policiers dans le temps? Parce que je l'ai souvent dit, là, entre
le policier d'aujourd'hui puis l'exercice qu'il aura, son travail qu'il aura
dans 15 ans, versus celui qui est là depuis 15, 20 ans, vous le savez mieux que
moi, ça a évolué, ça a changé, là.
Donc, comment vous pensez articuler cette
formation, de quelle façon on devrait l'articuler?
M. St-Antoine (Pierre) : La
première étape, dans toute étape de formation, M. le ministre, c'est d'établir
les besoins. Puis on pense que la création, appelons-le, d'une commission de
formation continue où il y a, naturellement, le ministère de présent, l'École
nationale de police du Québec, l'ADPQ, l'Association des acteurs de police du
Québec, SQ, SPVM sont les grands acteurs, les syndicats pourraient être
présents également. Et cette commission-là pourrait permettre d'évaluer le
besoin. Donc, si on y va avec une périodicité que, pour les deux prochaines
années, voici le x heures de formation continue requise, établissons,
premièrement, le quoi, quelle est cette catégorie de formation là.
Maintenant, dans le développement de l'offre,
pour répondre à cela dans les deux prochaines années, c'est de dire qu'est-ce
que l'école a déjà en stock, comme formation, qui répond à ces thématiques-là
qui ont été sélectionnées, déterminées, un; deux, qu'est-ce qu'on peut
développer, comme école de police, pour répondre à ces nouveaux besoins de la
société, deux; appel à communication et à formation de la part de nos
partenaires collégiaux, universitaires pour dire qu'est-ce que vous pouvez
remplir dans cette offre-là de x heures, au cours des deux prochaines années,
pour répondre aux besoins des policiers, policières au Québec; trois, appels
aux services de formation, les corps de police également, parce qu'ils font
également d'excellentes formations.
Une fois qu'on a tout ce bloc de
formation, là, disponible, bien là, on offre aux corps de police la possibilité
de remplir le x heures en allant avec certaines formations en ligne, certaines
formations à distance, hors campus, mais également des formations avec des
nouveaux modèles. Un modèle qui était présent à Montréal, au SPVM il y a
quelques années, on appelle ça, le modèle des appels simulés, M. le ministre, c'est-à-dire
que l'enjeu que les corps de police ont, c'est l'investissement qu'ils ont à
faire en formation.
On peut également, dans certaines
formations, permettre que le policier, dans une journée de travail de
patrouille, on le retire de sa patrouille lors d'un appel de l'après-midi, on
lui enlève son arme, on lui met une arme bleue. On dit : Dans la prochaine
heure et 30, tu t'en vas faire une mise en situation avec un comédien sous la
responsabilité d'un formateur ENPQ de ton corps de police qui était accrédité
par l'école. Et là ça va être une mise en situation en matière d'interception,
de profilage racial, d'interpellation, de pouvoir et devoir. Il va vivre cette
mise en situation là, un débriefing de 15, 20 minutes avec un formateur
accrédité. On lui remet son arme réelle, il s'en retourne sur le terrain.
Donc, il y a moyen de trouver autrement
des façons de faire pour permettre que l'intégration des heures de formation
requises en formation continue ne soit pas seulement un déplacement du
policier, de la policière vers Nicolet, mais qui se fasse de différentes façons
au cours des deux années, par exemple, qu'il aurait à remplir l'ensemble de son
expertise. Ça...
M. Bonnardel : M. St-Antoine,
c'est des pratiques qui se font déjà ailleurs?
M. St-Antoine (Pierre) : À
Montréal...
M. St-Antoine (Pierre) : ...on
faisait ça il y a quelques années et je sais qu'il recommence à intégrer ces
éléments-là. Je vous dirais que c'est assez novateur au Québec, là, de... par
l'expertise, puis nos équipes, justement, préparent des éléments comme ceux-là
pour qu'on puisse déployer des activités de formation comme ça, pour que ça se
fasse en cours d'emploi. Je donne un autre exemple de pratique novatrice en
profilage racial, nous pourrons lancer bientôt des nouvelles capsules de
formation d'une durée de 15, 20 minutes à compter... juste avant l'été, et ces
capsules-là pourront être diffusées sur un briefing du matin, le rassemblement
des patrouilleurs, des patrouilleuses, durent 15, 20 minutes, un répondant
formé par l'école va faire une rétroaction pour faire un suivi de la capsule,
30 minutes avant qu'ils partent sur leur journée de patrouille, ils ont reçu
une sensibilisation puis une formation en matière de profilage racial qui n'a
pas exigé un déplacement, une connexion Internet, etc., etc. Donc, c'est...
naturellement, il y a aussi des formations complètes, parfois, ça demande la
présence, ça prend les mises en situation, mais il y a... Il faut avoir cette
diversité-là et que ce ne soit pas juste de l'école, mais également de nos
partenaires collégiaux, universitaires et du corps de police lui-même parce que
si, SPVM, par exemple, ou SQ ont déjà une formation du même niveau homologué
par l'école, mais pourquoi est-ce que ça ne serait pas possible qu'elle soit
créditée dans ce programme de formation continue là mais homologuée par
l'école, d'où la présence du rôle-clé et neutre de l'école et indépendant pour
nous assurer d'une qualité, pertinence, cohérence, les trois mots que je vous
ai parlé tantôt au début dans le projet de loi. Au... à la fin, il y a le
déploiement de tout ça, donc de se laisser une périodicité suffisante pour que
ça fasse sur deux ans ou sur trois ans, ne pas mettre un nombre d'heures sur un
an, il y a des corps de police qui ont moins de flexibilité puis d'agilité dans
le déploiement des programmes de formation, je pense que ça prend un certain
temps. Et naturellement la reddition, et c'est là que l'école aussi peut jouer
un rôle parce que, naturellement, vous allez nous demander des suivis, M. le
ministre, et c'est tout à fait normal, mais nous, il faut avoir le suivi qui
est global Québec et nous... nous comme institution centrale, bien, on va être
en mesure, en s'outillant puis en adaptant nos systèmes, d'intégrer l'ensemble
des acquis de formation en lien avec la formation continue et le «redditer»
adéquatement sur le plan québécois. Ça fait que, globalement, c'est comment on
voit que ça pourrait être articulé sur le plan québécois.
M. Bonnardel : Oui... l'école
a la capacité de répondre à cette demande, à cette l'obligation qu'on...
qu'on... qu'on va se donner tous ensemble?
M. St-Antoine (Pierre) : Naturellement,
on va se donner, M. le ministre, des délais réalistes et on a... Tout est en
place comme système à la base, il va falloir adapter des choses, mais il y a
10 ans, comme école de police, je vous aurais répondu : M. le
ministre, nous allons tout faire et faire seuls. Aujourd'hui, en 2023, on va
tout faire, mais en partenariat. Les trois éléments que je vous ai parlé, les
éléments école, des éléments collégiaux et universitaires, des éléments des
corps de police eux-mêmes, et c'est ce qui va faire qu'on... nous avons
ensemble la capacité de répondre à ce... à cette réglementation.
M. Bonnardel : Dernière, une
dernière, requalification, formation continue, rapidement.
M. St-Antoine (Pierre) : Et
pour avoir lu vos travaux, je pense que c'est important d'en faire une
différente, puis je vais laisser Mme Deschênes aborder ces... cette
différence-là entre requalification et formation continue, si vous le voulez
bien, M. le ministre.
Mme Deschênes (Andréanne) : En
fait, nous, à l'école, on parle de requalification lorsqu'on est dans un
domaine spécifique où on va vraiment établir des obligations de formation avec
une périodicité obligatoire, puis ça... ça nous permet de maintenir un titre,
une fonction, par exemple, en tir, on doit faire une requalification à chaque
année pour pouvoir être en mesure d'utiliser son arme de service, même chose en
sécurité routière, lorsqu'on parle des techniciens qualifiés en alcootest,
bien, pour exercer, pour être en... reconnus, reconnus à la cour, ils doivent
se faire requalifier pour maintenir cette certification-là. Donc, au niveau de
la certification, c'est la requalification, c'est vraiment sous cet angle-là.
• (16 h 10) •
La formation continue, elle est plus...
beaucoup plus large, c'est-à-dire qu'elle est... elle est différente, c'est-à-dire
que ça peut être... elle pourrait devenir de la requalification, mais pas
nécessairement, c'est-à-dire que là, vraiment, on va enrichir les compétences
professionnelles avec différentes thématiques, donc ça peut être du légal, ça
peut être des thématiques sociales, santé mentale, violence conjugale. Donc, on
va être un petit peu plus large. Donc, on peut avoir une périodicité de
formation et on n'est pas obligé d'aller dans de la requalification,
c'est-à-dire que je ne suis pas obligé de mettre une obligation de dire :
Je suis requalifié à chaque... à chaque trois ans sur la santé mentale. Ce
n'est pas ça l'idée. L'enrichissement, c'est de se maintenir à jour, rester
contemporain dans les nouvelles réalités qu'on doit vivre. Donc, c'est un peu
la distinction qu'on fait, formation continue, beaucoup plus englobante, même à
la limite pourrait englober la partie de requalification. Requalification
beaucoup plus restrictive, je dirais. Je ne sais pas si ça... ça... ça vous
éclaire un peu, là.
M. Bonnardel : Oui
M. St-Antoine (Pierre) : Puis
si on prend un exemple, en ce moment en conduite d'urgence au Québec, il n'y a
pas d'obligation d'être requalifié après la formation initiale en patrouille
gendarmerie sur le... la conduite d'un véhicule d'urgence, donc par une ligne
directrice, par un guide des pratiques policières, par une directive, on
pourrait obliger un policier à tous les cinq ans d'être... d'avoir une
formation de requalification en conduite d'urgence qui ne devrait pas, à notre
avis, faire partie du bloc de formation continue, c'est vraiment un...
M. St-Antoine (Pierre) : ...une
autre façon de voir les choses. En formation continue, par exemple, si on veut
améliorer les interpellations, les pouvoirs et devoirs, bien, clairement, c'est
en formation continue qu'on pense que ça pourrait être abordé. Mais après deux
cycles de formation continue, ça pourrait devenir une requalification à refaire
aux trois ans, aux quatre ans, si on le juge à propos.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. J'aurais le député d'Ungava, puis après ça,
j'aurais le député de Vanier-Les Rivières.
M. Lamothe : Bonjour. Vite
fait. Bon. Formation continue à distance, décentralisation, quant à moi, c'est
le secret, c'est le secret. Que ce soit d'embaucher des formateurs régionaux,
locaux, peu importe, avec une base, ça évite les déplacements, ça réduit les
coûts. Il n'y a pas d'excuse pour les corps de police, les villes, ou qui que
ce soit, dire : Bien là, les budgets achèvent, on ne peut pas former. La
formation des policiers, en 2023, elle est importante, puis il faut qu'elle
soit uniforme, hein, on dit le mot "uniforme". J'ai-tu encore une
minute... je ne veux pas prendre le temps de la collègue, là. C'est de l'innovation,
puis ça, c'est... on est là, on est vraiment là. Si on parle d'innovation, moi,
ce que je parle au niveau formation des corps policiers autochtones en anglais.
Je pense qu'à un moment donné il faut que l'École nationale de police se penche
là-dessus. C'est la réalité. Je comprends tout ce qu'il en est de la loi 96, je
comprends ce qu'il en est du français. Mais il y a des places chez nous en
trop, les corps policiers cris. Il y a des Cris qui peuvent devenir policiers,
mais quand il arrive, à un moment donné, de la formation, que ce soit...
terminé... cégep ou peu importe, il y a un bogue. Je pense qu'un moment
donné... les PQ, dans le temps que j'étais là, c'était les PQ. Mais je pense
que l'École nationale devrait avoir une flexibilité autant qu'au niveau de la
formation décentralisée.
Puis, en terminant, les normes
d'acceptabilité à Nicolet, je reviens encore avec des autochtones, ce n'est pas
nécessairement d'être avec les normes provinciales partout. Je comprends que
c'est important, la condition physique puis rencontrer ces normes-là, mais chez
les Cris, c'est un problème ça aussi, parce que tu as des Cris qui ne
rencontrent pas ces normes-là, qui feraient de très bons policiers. Puis, moi,
je crois aux corps policiers autochtones dans leur milieu. Ils ont la
sensibilité, ils ont l'écoute, puis c'est plus facile pour tout le monde, que
ce soit les résidents, pour eux-mêmes. Je pense qu'il y a une flexibilité qu'il
devrait y avoir là. Mais au niveau formation, décentralisation régionale,
félicitations parce que ça va être accessible à tous, puis je pense que c'est
le but de tout le monde qu'il y ait la même vision, la même façon de faire.
Le Président (M.
Bachand) :M. St-Antoine, peut-être
rapidement, parce que j'ai un autre député qui veut poser une question.
Allez-y.
M. St-Antoine (Pierre) : Vous
dire, M. le député, que, depuis 2012, les corps de police autochtones nous ont
tous demandé d'avoir la même formation que tous les policiers québécois. On
peut vous assurer qu'ils l'ont depuis 2012. On n'a plus de programme de
constable spécial, ils peuvent juste travailler en communauté. La formation qui
est donnée par l'école en anglais et en français leur donne l'accessibilité à
tous, à toutes les communautés. Lorsqu'on n'est pas capable en anglais de
répondre en formation initiale, on a des partenariats avec l'Ontario Police
College en Ontario, qui nous permet de collaborer avec eux, et en formation en
enquête également.
Et une forte partie de notre
perfectionnement professionnel est également offerte par des policiers
formateurs autochtones en anglais et en français dans les communautés
policières. Mais il y a des enjeux, effectivement, en lien avec le recrutement,
et on travaille fort pour améliorer cela, je vous le confirme. Merci de votre
propos.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Rapidement, M.
le député de Vanier-Les Rivières.
M. Asselin : Oui, rapidement.
Monsieur St-Antoine, madame Deschênes, merci beaucoup pour votre intervention.
Je voudrais vous entendre sur le pourquoi est-ce que la formation l'École de
police neutre, en quoi le caractère neutre de votre institution fait que vous
avez duré dans le temps et que vous êtes devenus... disons que vous avez une
expertise particulière à ce niveau-là, parce que l'École de police est renommée
au Québec?
M. St-Antoine (Pierre) : Je
pense que c'est par nos partenariats, par le fait que la particularité, c'est
que le futur policier québécois y est formé et par les collèges, dans des
milieux ouverts sous le ministère de l'Éducation, et par l'école sous le
ministère de la Sécurité publique, avec des partenariats avec les universités,
ont été les premiers à faire un bac en sécurité publique, en partenariat avec
l'Université du Québec à Trois-Rivières. C'est assez exceptionnel, depuis les
années 70, quand mes partenaires canadiens me regardent, ils nous envient bien
sincèrement. Ils regardent le Québec pour... D'ailleurs, j'avais des appels,
depuis la semaine passée, suite à Portapique, pour me dire : Donne-nous
ton modèle québécois, parce qu'on veut l'importer puis on veut voir comment ça
fonctionne. Dis-nous quel est ce partenariat-là.
Ça fait que je pense que c'est le
partenariat qui fait cette différence-là, mais humblement c'est parce qu'aussi
il faut se laisser influencer, grandir, puis changer, puis modifier notre
programme de formation pour suivre la société. Et c'est ce qu'on tente de faire
avec le maximum de flexibilité, mais ce n'est pas toujours facile, parce qu'on
veut grandir de l'intérieur dans le même temps de formation, d'où l'importance
de faire autrement, puis c'est ce qu'on fait en ce moment.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup.
M. St-Antoine (Pierre) : Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Mme la députée de
Westmount-Saint-Louis...
Le Président (M.
Bachand) :...s'il vous plaît.
Mme Maccarone : Bonjour,
M. St-Antoine.
M. St-Antoine (Pierre) : Bonjour,
Mme Maccarone : Bonjour,
Mme Deschênes. Un plaisir de vous avoir avec nous. Vous êtes tellement
passionnés, j'ai envie de suivre des cours. J'aime ça. Je trouve ça bien.
Qu'est-ce que vous offrez présentement comme formation pour combattre le
profilage racial?
M. St-Antoine (Pierre) : Alors,
naturellement, dans tout le programme collégial en techniques policières, il y
a 1 800 heures de formation, dont autour de 150 heures, dans les
collèges, qui touchent plus spécifiquement tout ce qui est l'ouverture à la
diversité, dont le profilage racial.
Quand on parle de profilage racial et
d'interpellations, il ne faut pas oublier tous les pouvoirs et devoirs, toutes
les formations en matière de juridique qui donnent la confiance aux policiers,
et la connaissance, et la compétence aux policiers de savoir quand agir,
comment agir et avec quels droits et quels pouvoirs il peut agir. Ça, ça fait
une extrême grande différence. À l'école, il y a des rappels là-dessus, des
mises en situation, des scénarios qui sont accordés pendant le 500 heures,
École nationale de police du Québec. Puis, sur le plan du perfectionnement,
suite à une collaboration entre la CDPDJ, le ministère, l'École nationale de
police du Québec et les corps de police, à compter de l'été prochain, nous
avons un nouveau programme de perfectionnement que je parlais tantôt qui va
être offert sur les lieux de formation sur l'ensemble du Québec - de cinq ou
six capsules, Mme Deschênes?
Mme Deschênes (Andréanne) : Cinq
capsules.
M. St-Antoine (Pierre) : Cinq
capsules qui vont traiter, sur un an et demi ,de profilage racial pour que ça
puisse être maintenu comme élément de compétence dans les corps de police, mais
avec des rappels sur le plan des pouvoirs, devoirs, des interpellations avec
des notions de qu'est-ce que le racisme, les biais, l'ouverture à diversité.
C'est couvert de différentes façons et ça va être couvert. Donc, en gros, là...
Et naturellement on a des partenariats avec les universités. Dans le bac en
sécurité publique, il y a des formations que les policiers peuvent s'inscrire
en matière d'ouverture à la diversité dans différents domaines. Il y a des
formations ouverture autochtone, et sur le site de l'école même, le
rapprochement de nos formations initiales autochtones avec nos formations
allochtones fait une grande différence. Quand j'accueille nos aspirants
autochtones et que je vois qu'ils sont entremêlés beaucoup avec nos formations
régulières, ce rapprochement là des dernières années fait toute la différence
dans l'ouverture vers l'autre. Quand tu as un ami autochtone puis tu as un
collègue autochtone et allochtone, à partir de tes débuts de formation, tu vois
plus l'autre de la même manière jamais, et puis je pense que ça, ça peut faire
une grande différence.
Mme Maccarone : Les rappels
vont être obligatoires?
M. St-Antoine (Pierre) : En
ce moment, non. En perfectionnement, non. C'est-à-dire que nous, on offre la
formation à l'ensemble des corps de police québécois, d'où l'importance d'un
programme de formation continue avec des thématiques réglementées. Si vous
lancez ça dans l'univers, Mme la députée, bien, il n'y aura pas de réponse,
nécessairement.
Mme Maccarone : Même
question, sauf que je change pour l'état mental perturbé, quelle formation
offrez-vous?
M. St-Antoine (Pierre) : Alors,
encore une fois, sur le plan collégial, la santé mentale, encore il y a
quelques années, le ministère de l'Enseignement supérieur a rehaussé d'une
trentaine d'heures le programme de formation collégiale. À l'école. On est en
train de réviser notre programme parce que vous savez qu'on passe de
650 aspirants policiers annuellement à 1 000 grâce à un financement
gouvernemental qu'on vient de recevoir dans le dernier budget. Et en plus, on
fait une révision où on ajoute des plateaux, des mises en situation en matière
de santé mentale. Donc, le futur policier est clairement bien préparé.
• (16 h 20) •
En perfectionnement maintenant, depuis
déjà quelques années, on a une formation en communication, en désescalade, en
l'intervention auprès d'un individu qui a des problématiques de santé mentale.
On a eu une nouvelle offre de services en collaboration avec la SQ. La SQ nous
a offert son programme qui s'appelle Réponse état mental perturbé, REMP appelé
dans le milieu. Nous avons des formateurs NPQ qui sont en finalisation d'être
formés. Ça va être déployé sur l'ensemble du territoire, non seulement pour
former d'autres corps de police municipaux, mais également pour aider la SQ
dans son déploiement auprès de ses propres unités à travers le territoire
québécois.Mais on a également, de notre côté, une formation en ligne sur la
communication, désescalade, intervention en santé mentale et des formations
pratiques qui sont associées. Mais, encore une fois, elles sont offertes, ça ne
veut pas dire qu'il y a des inscriptions, et nous, l'offre est prête. La
question c'est : Y a-t-il des inscriptions? Et cette formation-là continue
et la réglementation peut faire une différence.
Mme Maccarone : Bien, tout à
fait, puis on a entendu hier avec l'APPQ qui nous ont dit je pense que c'est à
peu près un tiers des policiers qui ont cette formation de REMP. Alors, est-ce
qu'il y a un moyen d'offrir cette formation pour que ça soit plus facilement
accessible pour eux aussi? Je vous ai entendu, pas nécessaire de toujours se
déplacer à Nicolet, on peut faire des choses en ligne. Mais, étant donné que
c'est tellement particulier, est-ce que ça, on a un moyen d'offrir aussi cette
formation au sein de notre réseau de santé et services sociaux? Parce qu'on
comprend qu'eux, ils font partie de la problématique.
Vous savez probablement que j'ai déposé un
mandat d'initiative. Je souhaite sincèrement étudier ce phénomène et cette
cause, car on voit une augmentation assez importante en ce qui concerne la
violence à travers la province, depuis 2005, de 21 %. Puis quand on parle
de l'état mental perturbé, les fameuses portes tournantes, ça varie, les
interpellations en neuf...
Mme Maccarone : ...et
127 %. Alors, est-ce qu'on a moyen d'encapsuler ça pour que ça soit plus
facile pour nos policiers ainsi que le réseau de santé de recevoir la formation
de vous aussi?
M. St-Antoine (Pierre) : Bien,
déjà, REMP, ou notre formation sur la santé mentale, est déjà partiellement en
ligne. Mais je vous rappelle, l'expertise ENPQ, c'est aussi de l'approche
expérientielle. Il vient un moment, comme futur policier, ou policier actif, ou
policière active, vous devez avoir des pratiques, des scénarios, des mises en
situation qui amènent de la communication. L'interaction avec un comédien
professionnel de l'école... Vous savez, quand je vois une scène de violence
conjugale à l'école, je vous rassure, c'est simulé, ça fait 30 ans que je les
vois, j'ai encore les émotions, parce que nos comédiens sont exceptionnels.
Puis ça, il n'y a pas une vidéo qui va remplacer ça. Et je tiens à le rappeler.
Ça coûte cher, la formation policière. Il faut avoir un juste équilibre entre
le «en ligne», le «hors campus» et le «en présence», mais il y a des moments où
ça prend quelqu'un qui va interagir avec notre policier et qui va faire la
différence dans l'acquisition de sa compétence.
Mme Maccarone : Une dernière
question que je pourrais vous poser. Je souhaite vous entendre... Je sais que
vous faites, quand même, des études en ce qui concerne le désengagement policier,
puis vous êtes... à la troisième phase, si je ne m'abuse. Je souhaite vous
entendre là-dessus, surtout en ce qui concerne les nouvelles mesures
déontologiques qui font partie de cette loi. Est-ce que... Parce que là vous
êtes en train de former des nouveaux policiers qui n'ont pas d'expérience,
nécessairement, sur le terrain. Ça fait que ce n'est pas un changement de
procédure pour eux. Ça va être une insertion dans une position où ça va être
une première expérience. Est-ce que ça, ça va engendrer plus de désengagement
ou est-ce qu'il va y avoir un effet plutôt positif en ce qui concerne le
contrôle puis... de comportement?
M. St-Antoine (Pierre) : La
troisième phase de l'étude sur le désengagement que l'école a faite était une
phase qui suivait une rencontre de 21 policiers, policières québécois pour
évaluer : c'est quoi, pour vous, le désengagement, comment vous le voyez,
est-ce que vous voyez des actes, des actions de désengagement dans votre
environnement policier au quotidien, et cetera. De ça, on a fait un
questionnaire qu'on a envoyé dans le milieu policier par les médias sociaux, on
a validé la gestion de qui répondait à ce sondage-là, et 3 000 policiers,
policières au Québec nous ont répondu.
Là, en ce moment, on est dans l'analyse de
ces 3 000 policiers là. Déjà, on sait que... Par le 3 000, sur 15 000 policiers
québécois, on voit qu'il y a un intérêt d'entendre parler de cette
thématique-là. Dans l'échantillonnage, de façon préliminaire, ce qu'on sait en
ce moment, c'est qu'il y a clairement un mouvement de désengagement au Québec,
mais, en ce qui a trait la hauteur et la spécificité, bien, notre chercheur va
revenir de son congé de maternité bientôt, puis on va pouvoir finir les
éléments d'étude et analyser les 8 000 commentaires qu'on a eus des 3 000
policiers dans l'ensemble des éléments de réponse pour justement évaluer
comment... quel est l'état de situation sur le désengagement, mais surtout
comment est-ce qu'on doit l'adresser, comment est-ce qu'on peut ramener
l'engagement policier. C'est ça, le rôle de l'école, c'est de faire le point
sur une problématique qu'on vit puis dire : En formation, en action, en
intervention, qu'est-ce qu'on peut faire de mieux?
Clairement, ce qui se dégage, c'est le
soutien de la part de l'organisation elle-même ou ou politiquement qui est
extrêmement important de la part du policier sur le terrain, de sentir qu'il
est soutenu dans ses interventions policières. Sur le plan de la formation,
clairement, la gestion du stress au quotidien, d'avoir un climat de travail
harmonieux avec ses collègues de travail, de sentir qu'il a une écoute de ses
collègues de travail et fait vraiment une grande... une grande différence. Un
problème associé au désengagement, c'est souvent l'impact médiatique, les
caméras qui les... qui filment tout, la crainte d'être sur les médias sociaux
pour une petite bourde qu'ils viennent de commettre. Ça, ça crée vraiment des
actions de désengagement. C'est ce qu'on constate en ce moment. Mais
clairement, on peut se trouver... trouver grâce à cette étude-là, qu'on va
avoir les conclusions dans les prochains mois, des nouvelles pratiques puis des
façons de faire pour ramener un meilleur engagement policier. Donc, il vaut
mieux agir en prévention tout de suite avant que cette problématique-là s'aggrave.
Mme Maccarone : ...avec les
mesures déontologiques qui sont comprises dans cette loi, est-ce que ça, ça va
engendrer plus de désengagement, moins...
M. St-Antoine (Pierre) : Bien,
un peu comme mes collègues l'ont abordé, de l'ADPQ et des corps de police, ce
n'est pas évident, là, le fragile équilibre entre responsabiliser le policier
et le suivre sur le plan déontologique versus lui laisser sa capacité d'action
sur le terrain. Alors, il est clair, selon ma perception de l'étude que j'ai
devant... avec les travaux préliminaires que j'ai devant moi, que l'ajout de
certains éléments de... punitifs ou de sanctions pourrait amener un impact sur
le désengagement policier au Québec, oui.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Avant de passer
la parole... Laurier-Dorion, donc, on parle d'une étude qui va être partagée
publiquement, M. St-Antoine?
M. St-Antoine (Pierre) : Vers
le premier trimestre de 2024, absolument, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Laurier-Dorion, s'il vous plaît.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. M. St-Antoine, Mme Deschênes, merci beaucoup d'être ici avec nous,
là. Votre expertise est essentielle à nos travaux.
Écoutez, vous parliez tantôt de, comment
dire, la présence...
M. Fontecilla : ...de vos
élèves d'origine autochtone avec des élèves blancs, là- on va les appeler comme
ça- et c'était très prolifique, ça. Ça m'a amené à vouloir aborder avec vous un
sujet, là, qui a été... qui n'a pas été mentionné, là, c'est la question du
recrutement. Certains disent, là, et affirment que nos services de police sont
trop blancs. Il n'y a pas assez de diversité. Et certains disent qu'il est très
difficile de recruter dans les communautés racisées, communautés noires, arabes
et latinos, etc. Et quels sont vos... quelles sont votre réflexion sur ce...
Est-ce que c'est vrai qu'on a de la difficulté à recruter? Est-ce qu'il y a des
efforts? Est-ce qu'il y a des choses qui peuvent être faites?
M. St-Antoine (Pierre) : Alors,
déjà pour avoir 1 000 aspirants policiers en formation à compter de
septembre dernier, le ministre a autorisé 240 attestations d'études
collégiales. C'est-à-dire qu'il y a deux moyens de devenir policier au
Québec : trois ans de techniques policières, 15 semaines à l'École de
police, diplôme, accès à la profession; deuxième moyen, attestation d'études
collégiales après un autre DEC dans un autre domaine, avec une promesse
d'embauche d'un corps de police. Donc, l'option d'aller chercher des gens, par
exemple de la diversité et par la suite, 15 semaines à l'école et
embauche. Habituellement, les attestations d'études collégiales étaient au
nombre d'environ une trentaine par année, et là, grâce au fait... aux besoins
importants de sécurité publique au Québec, il y a une hausse à 240 à compter de
septembre prochain. Donc ça, ce sera une belle occasion d'aller accéder à la
diversité.
Naturellement, les collèges sont
pleinement sensibilisés à faire du recrutement des admissions en ouvrant la
diversité, que ce soit beaucoup à Montréal. Maisonneuve, Ahuntsic, John-Abbott
sont des collèges qui travaillent, entre autres, eux, là, très, très fort à
ouvrir à cette diversité-là. Les corps de police, par leurs services de
recrutement, vont dans les petites... c'est au niveau des écoles secondaires
qu'il faut aller chercher cette diversité-là. Nous, l'école, on est au bout de
la machine à saucisses puis on n'est pas au début.
Il ne manque pas d'intérêt à devenir
policier, policière au Québec. Je vous le dis, là, clairement, mais clairement,
quand vous venez d'un milieu racisé, ce n'était peut-être pas historiquement
valorisé comme métier, d'où l'importance... On peut prendre l'exemple de M.
Fady Dagher, directeur du Service de police de Montréal, d'origine libanaise,
et qui a vécu en Côte d'Ivoire, qui a eu la piqûre de la police lorsqu'il est
arrivé au Québec à 17 ans puis que, là, il a décidé de s'en aller comme
futur policier. Mais cette piqûre-là, il faut la donner. Puis, l'école accueille
des gens annuellement des institutions primaires et secondaires de Montréal qui
viennent nous visiter, puis parfois on voit dans les yeux, l'étincelle, puis on
les revoit trois ans après, quatre ans, après arriver à l'école. Ça fait que
c'est des petits gestes, mais qui vont faire la différence pour avoir cette
diversité-là dans notre communauté policière au Québec.
M. Fontecilla : Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Allez-y, M. le député, en
terminant.
M. Fontecilla : En ce moment,
est-ce que vous arrivez à atteindre les objectifs? Est-ce que vous vous placez
des objectifs?
M. St-Antoine (Pierre) : Nous
n'avons pas d'objectif à l'ENPQ, mais bien clairement, en ce moment, il y a des
difficultés à atteindre les objectifs. Nous espérons entre autres par le 240 de
cette année que le Service de police de la Ville de Montréal, qui a
130 aspirants policiers dans ce groupe de... là, sur les 24, auront toute
la liberté d'aller recruter des gens de la diversité puis d'être dans l'action
pour justement hausser ce pourcentage de diversité, bien entendu, à Montréal.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols : Merci, M. le
Président. Merci d'être parmi nous. Félicitations! C'est vrai que l'école de
police a une belle réputation puis ça rayonne, ça rayonne partout. Donc, je
pense qu'on est bien fier, bien fier de ça au Québec aussi.
J'avais une petite question. Il y avait
plusieurs commentaires là, parce qu'on parlait, là, que des civils pourraient
devenir enquêteurs. On le sait, là, vous êtes une institution qui croyez
beaucoup en la formation, qui sort des policiers, là, avec une formation
extraordinaire de votre école. Qu'est-ce que vous pensez de tout ça? Vous avez
sûrement un avis à nous donner.
M. St-Antoine (Pierre) : Mme
Deschênes.
Mme Deschênes (Andréanne) : Bien,
nous, on pense... en fait, on se positionne un peu comme comme nos partenaires
policiers, c'est-à-dire qu'on pense que c'est pertinent ,dans des domaines très
nichés de formation, en cyberenquête entre autres. Donc, on pense..., on croit
à ça, ce mariage-là, entre les civils et l'expertise policière, puis
d'ailleurs, c'est ce qui fait notre force à l'école, c'est ce mariage entre nos
civils et nos policiers. Donc nous, de permettre cet accès-là à des civils dans
des fonctions très nichées, particulières, on y croit, on pense que c'est
pertinent, puis on le vit, là, avec d'autres, avec l'UPAC, avec le BEI. Entre
autres, on voit que ça amène une valeur ajoutée, là.
Mme Nichols : Mais un civil
qui ne va pas peut-être à devoir faire des opérations typiquement policières,
est-ce qu'on ne devrait pas lui demander justement de bifurquer puis d'aller
faire un peu de formation à l'École nationale police?
• (16 h 30) •
Mme Deschênes (Andréanne) : Oui,
tout à fait.
Mme Nichols : Est-ce que ça
ne pourrait pas être une suggestion?
Mme Deschênes (Andréanne) : Bien,
présentement, c'est un peu ce qu'on vit avec les enquêteurs de l'UPAC, entre
autres, là, qui viennent vraiment faire une formation complète, formation
initiale avec nos partenaires, un bout au collégial et, par la suite, ils
viennent à l'École nationale de police, donc une formation initiale qui est
vraiment complète, qui s'inscrit dans un corpus similaire. Donc, ils vont
chercher un bagage, là, de base puis, par la suite, ils vont s'inscrire dans le
même cheminement des policiers...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Deschênes (Andréanne) : ...donc,
oui, c'est tout à fait... c'est essentiel, je pense, là, de pouvoir aller...
M. St-Antoine (Pierre) : Et,
si vous me permettez, c'est extrêmement important, parce que ce n'est pas parce
que vous avez un bac en droit, en informatique, en technologie, ou peu importe
quel autre domaine, que vous avez cette expertise-là d'enquête, par exemple. Et
cette formation-là préparatoire en enquête ramène, en 15 semaines, tout ce qu'il
n'a pas fait pendant son trois ans de techniques policières, 15 semaines à l'École
nationale du Québec, et sept, huit ans de patrouille. Rapidement. Donc, on
réinvestit ses expertises universitaires comme futur employé, et par la suite
il rentre dans le même créneau de formation initiale en l'enquête que tous les
policiers québécois.
C'est ce qu'on fait, en ce moment, pour l'UPAC
et le BEI. On pense que ça pourrait être un itinéraire qui pourrait être
extrêmement identique ou similaire, là, pour les futurs enquêteurs spécialisés
des corps de police réguliers.
Mme Nichols : C'est parce que
ce sera une formation moins longue ou...
M. St-Antoine (Pierre) : Tout
à fait. Absolument.
Le Président (M.
Bachand) :Rapidement.
Mme Nichols : Oui,
rapidement. Vous ajustez votre cursus, là, vous ajustez votre formation aux
réalités policières sur le terrain. J'ai vu, là, qu'il y a des sondages qui
sont faits. Vous l'adaptez aussi en fonction des sondages et des experts que
vous consultez. Est-ce qu'il y a d'autres... Tu sais, le pouls vient d'où, pour
ajuster, mettons, votre plan de cours, ajuster les formations que vous donnez?
Est-ce que ça vient des différents corps policiers, de l'Association des
directeurs? Ça vient d'où, en gros?
M. St-Antoine (Pierre) : L'école
fait partie... On a fait un décompte, il n'a pas longtemps, Mme la députée, de
53 comités différents, nationaux, internationaux. On fait partie d'un réseau
international qui s'appelle Francopol, qu'on a fondé que la Sûreté du Québec en
2008, qui est le réseau international francophone de formation policière. On
fait des appels à collaboration pour demander des thématiques particulières,
voir qu'est-ce qui se fait de mieux dans ces pratiques-là. C'est les comités, c'est
les rapports du coroner, les rapports d'enquête, tout est analysé. Nos experts
vont eux-mêmes témoigner dans des rapports d'enquête et du coroner.
Naturellement, les rapports, comme le
CCRP, nous amènent beaucoup d'apports aussi, la réalité policière, les nouveaux
outils, tout ce qui existe dans le milieu policier, on était... vraiment d'être
en vigie, en veille. On a un centre de recherche qui va chercher de meilleures
pratiques également. On est en collaboration avec les réseaux policiers
québécois nationaux. On essaie vraiment...
Mme Nichols : ...de vous
mettre...
M. St-Antoine (Pierre) : Effectivement,
puis d'où l'importance d'être flexible, d'être agile. Ce n'est pas toujours
facile, mais on le fait avec les autres.
Le Président (M.
Bachand) :Sur ce, madame Deschênes, monsieur
St-Antoine, de notre École nationale de police du Québec, merci infiniment d'avoir
été avec nous cet après-midi. Je suspends les travaux quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 34)
(Reprise à 16 h 38)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Alors, il nous fait plaisir de recevoir les
représentants du Bureau des enquêtes indépendantes du Québec. Alors, merci
beaucoup d'être avec nous cet après-midi, alors, monsieur Goulet, madame
Plourde. Alors, vous connaissez les règles de la commission, une petite
présentation de 10 minutes, après ça on échange avec les membres. Merci
encore, et la parole est à vous.
M. Goulet (Pierre) : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, je me présente, Pierre Goulet, directeur du
Bureau des enquêtes indépendantes depuis 2020, avocat de formation depuis 1989.
Je suis accompagné par Maître Amélie... Mélissa Amélie Plourde, excuse-moi...
Mme Plourde (Mélissa Amélie) : Bonjour.
M. Goulet (Pierre) : ...qui
est avocate depuis 2003. Elle est au bureau depuis 2018 et elle garde son
statut d'avocat... d'avocate, mais elle est superviseure aux enquêtes au
bureau. C'est la première civile à occuper une fonction du genre.
Alors, je remercie la commission d'avoir
invité le BEI à partager ses réflexions sur le projet de loi. Comme vous l'avez
vu dans notre mémoire, on s'est attardé surtout aux points qui avaient un
impact particulier sur notre travail. Si vous me permettez, je vais suivre le
mémoire en vous indiquant à quelle page je me trouve présentement. Je vais vous
inviter à vous trouver en page 5. Je voudrais juste rappeler quelques
faits pour présenter le BEI pour ceux qui ne le connaîtraient pas.
Alors, le BEI a été fondé, créé et institué
en vertu de la Loi sur la police en 2013 et a débuté les opérations en juin
2016. Nous sommes un corps de police spécialisé, comme l'UPAC, et les membres
du BEI sont des agents de la paix et détiennent des pouvoirs et des devoirs,
évidemment, qui découlent de leur statut. Quand on dit corps de police
spécialisé, ça veut dire que les cas où le BEI peut enquêter doivent être
définis par la loi. C'est ainsi qu'en page 5 vous allez voir notre
mission, qui est décrite de façon plus précise.
• (16 h 40) •
Mais laissez-moi juste vous dire qu'au
départ le BEI enquête surtout sur ce qu'on appelle les enquêtes indépendantes,
des événements où une personne décède, a subi des blessures graves lors
d'interventions policières. Ce n'est pas une enquête sur une infraction
criminelle commise par un individu, mais sur un événement. Par contre, nous
avons deux autres mandats qui nous ont été confiés au fil du temps, dont un qui
été ajouté à la Loi sur la police, qui nous permet d'enquêter sur toute
allégation relative à une infraction à caractère sexuel commise par un policier
en fonction. Et, plus récemment, en 2018, suite aux événements de Val-d'Or, la
commission Viens, on a confié au BEI la mission d'enquêter toute allégation
relative à une infraction criminelle commise par un policier, en fonction ou
pas, lorsque le plaignant ou la victime est autochtone. Une précision
importante, le BEI ne dépose pas d'accusations criminelles. Tous ses dossiers
sont soumis au Directeur des poursuites criminelles et pénales, à qui il revient
de décider ou pas si des accusations criminelles doivent être portées.
Au niveau de la composition de notre
bureau, on parle de 52 ressources présentement, huit personnes dans
l'équipe d'administration, mais au niveau des enquêtes, ce qui est intéressant,
qui a été remarqué par certains groupes dans leur représentation à la
commission, c'est le fait que l'équipe d'enquête est composée d'ex-policiers et
je vais les appeler des ex-civils. D'ailleurs, Monsieur Saint-Antoine vient de
vous parler de la formation poursuite avec l'UPAC... on est engagés dans cette
voie-là. Et nous avons au total 41 enquêteurs et superviseurs. Puis, parmi
ceux-ci, 18 sont des ex-policiers et 23 sont des civils. Il faut comprendre que
le règlement qui gouverne le BEI oblige le directeur à favoriser la parité,
donc à 23, 18, c'est...
M. Goulet (Pierre) : ...à
l'équipe qui s'occupe des enquêtes et de la supervision des enquêtes. Vous
allez remarquer, en page 6, la diversité de formation et de provenance des
membres du bureau. Ça vous démontre la richesse dans notre équipe en expérience
civile et aussi en expérience policière provenant de divers corps de police.
Statistiquement, je voulais en parler
très, très brièvement, le BEI a fait l'objet de critiques dans le passé sur le
délai de traitement de ses dossiers d'enquête, autant les enquêtes allégations
criminelles, mais surtout les enquêtes indépendantes. Et je vais... Pour vous
démontrer l'amélioration, vous avez, en page 7 et 8, les statistiques, là,
que je veux souligner très rapidement. En allégations criminelles, en 2019, on
avait traité 68 dossiers avec un délai moyen de transmission au DPCP de
6,2 mois. En 2022, le même nombre de dossiers, 68, mais dans un délai de
2,4 mois. Et, en enquêtes indépendantes, la progression est importante. En
2017, 49 dossiers, 13,7 mois. En 2022, 56 dossiers traités,
soumis au DPCP en 3,7 mois.
À la page suivante, depuis le... en
décembre 2020, le BEI doit préciser le nombre et la durée moyenne des enquêtes
qui impliquent un membre d'une communauté. Donc, vous allez constater que les
délais sont sensiblement les mêmes pour les deux, les deux types de
statistiques. On parle, en 2022, pour quatre enquêtes indépendantes, de
3,5 mois. Et les enquêtes criminelles, la plus grande majorité de nos
enquêtes proviennent du... autochtone, on a 45 dossiers qui ont été
traités par... en 2,5 mois.
Maintenant, en page 9 de notre
document, on vous parle de la formation. Je suis content que M. St-Antoine ait
été là avant nous parce qu'il connaît ça beaucoup mieux que nous tous. Mais on
est embarqués, comme je le disais, dans le même type de programme. Il faut
comprendre que le Bureau des enquêtes indépendantes, la formation est régie par
un règlement sur la sélection, de la formation des enquêteurs et on doit suivre
le programme de formation des enquêteurs du BEI qui est donné par l'École
nationale de police. Mais nous avons décidé, avec l'UPAC, de nous engager dans
la voie de la formation de 15 semaines, formation collégiale à l'École
nationale de police, et, je pense, au mois d'août, nous aurons cinq ou six
enquêteurs qui vont débuter, des civils, qui vont débuter cette formation-là,
ce qui va nous permettre par la suite d'avoir accès à la formation
professionnelle en enquêtes et en perfectionnement.
En page 10, je vais sauter les autres
points pour vous parler essentiellement de la modification qui est prévue à
l'article 289.1, qui est la nature de l'enquête à indépendante. Il faut
comprendre que cette modification-là ne change absolument rien à la mission du
BEI lorsqu'il mène une enquête indépendante et elle précise la vraie nature de
l'enquête qui porte sur un événement qui implique des policiers. Donc,
puisque... En principe, à ce moment-là, il n'y a pas d'infraction criminelle
sous enquête par le bureau. Le statut des policiers que nous allons rencontrer
va être déterminé par le règlement sur le déroulement des enquêtes
indépendantes. Donc, il va avoir le statut de policier témoin, qui est un
policier qui est présent lors de l'événement, et un policier impliqué, qui est
un policier dont les actions ou les décisions pourraient avoir contribué au
décès ou aux blessures graves. Comme vous le constatez, les décisions
pourraient avoir... et donc c'est un critère qui est quand même assez large. Et
le BEI espère, si jamais cette modification-là est adoptée par l'Assemblée
nationale, de permettre aux personnes concernées dans une enquête indépendante
de mieux comprendre le rôle du BEI lors de nos enquêtes.
Ensuite, en page 11. Évidemment, il y
a une modification importante pour la mission du bureau. Cette modification-là
est proposée par le projet de loi n° 14 qui s'inspire de la recommandation
numéro 9 de Me Giauque, qui est une ancienne première directrice du BEI,
qui avait publié en 2019 des recommandations à cet effet-là, et aussi à la
recommandation 113 du comité consultatif, la réalité policière.
Actuellement, le BEI ne peut pas mettre fin à une enquête. Lorsqu'une enquête
indépendante est déclenchée, on doit la compléter, donc faire une enquête complète,
tous les témoins, la scène, rédiger un rapport et le soumettre au DPCP. Et ça,
ça arrive assez souvent que le BEI fait face à des situations...
M. Goulet (Pierre) : ...même
si ça présente les caractéristiques d'une enquête indépendante, c'est-à-dire un
décès dû à cette grave intervention policière, il apparaît évident au début ou
en cours d'enquête que l'intervention policière n'a pas contribué au décès aux
blessures graves du citoyen, le tout évidemment basé sur une preuve crédible et
indépendante.
Nous avons sorti des exemples, mais juste
peut être pour fin de discussion, pour dire que, dans la majorité des cas, on
se retrouve dans ces situations dans des cas de suicide ou tentatives de
suicide, d'abus de substances, de surdoses, parfois des conditions médicales
préexistantes, des cas de perte de conscience qui sont prévus dans un guide et
qui caractérisent la perte de conscience comme étant une blessure grave, donc
qui impliquent des interventions policières pour lesquelles le BEI doit faire enquête.
À titre indicatif, en 2022, sur
56 enquêtes, les superviseurs ont identifié neuf dossiers potentiels qui
auraient pu faire l'objet d'une telle mesure. Et disons qu'on considère que
cette mesure-là va permettre de conclure plus rapidement sur les événements au
bénéfice des personnes concernées, que ce soit les citoyens ou les familles en
cas de décès, ainsi que pour les policiers impliqués et témoins et, évidemment,
en cas de décès, nous sommes les yeux et...
Mme Plourde (Mélissa
Amélie) : ...les bras aussi.
M. Goulet (Pierre) : Et
les bras, excusez-moi, du coroner. Donc, on va quand même aviser le coroner que
l'enquête indépendante est terminée, mais on va poursuivre quand même notre
collaboration avec ce dernier, ce qui va permettre au coroner, ici, évidemment,
de pouvoir conclure son enquête et son rapport plus rapidement. Et évidemment,
dans un cas de semblable, comme dans d'autres, là, juridictions, quand le
directeur prend une décision qui met fin à une enquête qui n'est pas cautionnée
par une décision du DPCP ou autres, alors, dans ce cas-là, il y aura une
communication publique qui sera exigée du directeur pour expliquer les motifs
de la décision de mettre un terme à l'enquête.
4bacEn terminant, peut-être, Me Goulet.
M. Goulet (Pierre) : Oui,
oui... Je voulais juste rajouter qu'en page 12 on parle de la
communication de dossier... entendu tantôt. En ce qui concerne le Protecteur du
citoyen, je veux juste préciser que les dossiers d'enquête indépendante ne sont
pas transmis au Protecteur du citoyen lorsque ça vise des policiers. C'est dans
les situations où un constable spécial serait impliqué dans un événement...
lors d'un événement dans un milieu correctionnel. Donc, dans ces cas-là, vu que
ces gens-là ne sont pas visés par l'enquête indépendante, ne sont pas non plus
gouvernés par le commissaire à la déontologie, c'est la raison pour laquelle on
aurait la permission de... au Protecteur du citoyen.
Le Président
(M. Bachand) :Merci beaucoup. On va
débuter la période d'échange. M. le ministre, s'il vous plaît.
• (16 h 50) •
M. Caire : Merci, M. le
Président, M. Goulet et Mme Plourde, merci d'être là. Puis c'est
important de vous entendre. Puis je vais sur le point que vous venez juste de
terminer, là, sur l'article 91 et l'article 94, là, le pouvoir de
mettre fin à une enquête indépendante, là. Vous en avez parlé assez rapidement,
là. Donnez-nous... Donnez-nous des exemples concrets, là, des cas de figure.
Là, vous dites, tantôt, en 2022 il y avait 56 enquêtes. Si ce pouvoir avait
été disponible pour vous, de mettre fin à une enquête, il y aurait eu neuf
enquêtes de... Vous auriez mis fin à neuf enquêtes. Juste pour notre gouverne à
nous tous, qu'on comprenne bien, là, concrètement, là, quand le policier
arrive, il constate ceci ou cela, donnez-nous des exemples concrets pour qu'on
puisse bien comprendre votre... ce point-là.
M. Goulet (Pierre) : Je
vais vous donner, évidemment, le plus anonymisé possible, là, pour éviter que
les personnes se reconnaissent. Bien souvent, dans un cas, ici, on a un appel
au 911 dans un cadre de rassemblement de COVID, une personne agressée avait été
arrêtée et transportée au poste. La personne était désorganisée, se frappait la
tête. À la sortie du véhicule, elle a perdu conscience et a été transportée à
l'hôpital. À l'arrivée du BEI, la personne avait reçu son congé de l'hôpital et
son état était causé, selon les autorités de l'hôpital, par une intoxication au
GHB. Donc, c'était un cas qui fait que par le temps qu'on réagisse puis qu'on
intervienne dans l'événement, on constate qu'à ce moment-là, la blessure grave
est difficilement en lien avec l'intervention policière. J'ai un autre cas,
ici, encore une fois un appel 911 pour un cas de violence conjugale. La
plaignante informe les policiers que son conjoint est armé d'un couteau. Il est
aperçu par les policiers à l'intérieur de la maison avec une blessure au cou et
il continue de s'infliger des blessures au cou avec le couteau. Les policiers
interviennent. Le sujet est transporté par ambulance. Le citoyen est rencontré
et indique... qu'il s'est blessé avant l'intervention policière. Et on a un
enregistrement vidéo dans la cuisine qui confirme cet état de fait là. Donc
c'est un cas où, encore une fois...
M. Goulet (Pierre) : ...l'intervention
policière n'est pas en lien avec la blessure grave, donc c'est des cas où on
aurait pu mettre fin à l'enquête, dans les deux cas, à des moments différents.
J'ai d'autres... On pourrait...
Le Président (M.
Bachand) :...juste faire attention sur
les... aussi, là.
M. Bonnardel : Oui, oui. Non,
non, c'est ça, c'est... Merci, là, on n'ira pas plus loin. Je pense qu'on a
compris, on a compris... Mais, dites-moi, là, la confiance du public peut être
affectée, vous l'avez mentionné un petit peu tantôt, là, quand vous décidez de
mettre fin à une enquête, de quelle façon vous croyez être capables d'exposer
ou de donner l'information, puis des motifs, surtout, qui amènent votre
décision, là, de mettre fin à cette enquête? Quel sera le modus operandi ou vos
façons de faire?
M. Goulet (Pierre) : Bien,
évidemment, le fait que présentement nos dossiers sont soumis au DPCP puis on a
une décision du DPCP, ça donne une double garantie d'indépendance. Donc, dans
la mesure où le DPCP n'aura pas été consulté, ou il pourrait avoir été
consulté, mais la décision est prise par le directeur du BEI de mettre fin à
l'enquête, bien, évidemment, ça va prendre une communication qui soit très
transparente pour permettre de justifier cet événement-là. Là, on ne pourra pas
partir avec la situation originale dans laquelle on a eu un déclenchement,
comme on le fait présentement. Et ensuite, à l'aide d'éléments d'enquête, comme
je l'ai dit tantôt, ça va prendre des éléments crédibles, indépendants de la
police qui vont nous permettre d'expliquer aux citoyens pourquoi l'enquête
indépendante a été terminée, parce qu'il n'y avait pas de lien avec
l'intervention policière. Alors, on pense être en mesure de le faire. Il y a
d'autres juridictions qui le font, on parle de la Colombie-Britannique, entre
autres, souvent, leurs communications qui sont assez extensives... Évidemment,
il faut faire attention à la protection des renseignements personnels dans la
situation des personnes. Mais je pense qu'on est en mesure de faire un travail
qui va être assez convaincant pour la population dans ces cas-là.
M. Bonnardel : Autre
question, à la page 10, là, de votre mémoire, à l'article 90 qui modifie
l'article 289 de la Loi sur la police : Pourquoi c'est important de
préciser la nature de l'enquête indépendante du BEI dans la loi?
M. Goulet (Pierre) : Bien, il
y a des gens qui... des organismes, des organisations qui considèrent que
l'intervention au sein du BEI devrait systématiquement permettre, obliger le
BEI à aviser les gens de leurs droits constitutionnels comme un prévenu ou un
détenu. Ça s'est discuté beaucoup lors d'un recours devant les tribunaux de la
Cour supérieure. Je ne veux pas aller plus loin que ça, on est en appel, mais
on a pensé qu'autant pour la population que pour d'autres ça serait important
de préciser la situation. Parce que, souvent, on va critiquer le BEI en
disant : Ils enquêtent, mais il n'y a jamais d'accusations criminelles qui
sont portées. Bien, c'est normal parce que ce n'est pas une enquête à partir de
motifs raisonnables et probables de croire qu'une infraction criminelle est
commise, c'est parce que la loi nous dit d'enquêter lorsque les circonstances
d'enquête indépendante sont réunies, donc blessures, graves, décès,
interventions policières. Alors, c'est pour ça qu'on pense que c'est important
de démystifier, dans la Loi sur la police, quelle est la vraie nature de cette
enquête.
M. Bonnardel : Bien reçu.
Dernière question. Formation des enquêteurs, page 9, vous... Bon, j'ai la
réponse, mais je vous la pose quand même, là, la réponse... pas la réponse, la
question sur l'École nationale de police qui supporte dans la formation. Est-ce
qu'on est à la bonne place présentement ou on peut encore faire mieux pour
répondre aux besoins des enquêteurs civils, là, qui souhaitent être recrutés
par vous puis qui vont être formés nécessairement par la suite? J'ai vu, là,
les différents corps de métier. Là, je me réjouis de voir, là, qu'il y a
différents corps de métier, là, de personnes qui ont... qu'on pense aux... des
gens dans la psychologie, enquêteur civil, coroner, travailleur social,
directrice d'une école secondaire, journaliste, agent de relations humaines en
toxicologie. Donc, c'est intéressant de voir la diversité de ces gens, là.
M. Goulet (Pierre) : C'est
une grande richesse pour le bureau que ces gens-là apportent. Mais
effectivement ils n'ont pas d'expérience en enquêtes criminelles ou policières.
Donc, avant ça, avec le règlement, la formation qu'on avait était bien
spécifique au bureau, puis ça pouvait être difficile aussi de créer des
cohortes assez grandes pour pouvoir justifier une formation à des coûts
importants. Puis aussi mon constat quand je suis arrivé, c'est que nos
enquêteurs civils, même nos enquêteurs policiers qui suivaient des formations,
étaient isolés des autres policiers. Nous... Moi, mon souhait, c'est que mes
gens soient formés comme tous les enquêteurs au Québec. Et je pense qu'ils
gagnent... Les enquêteurs civils gagnent à être connus par la fréquentation
avec d'autres policiers qui sont formés à l'École nationale de police.
Donc, c'est la raison pour laquelle on est
un peu des pionners puis on embarque avec l'UPAC, avec l'École nationale de
police pour que des gens, des...
M. Goulet (Pierre) : ...de
milieux civils puissent suivre une formation professionnelle collégiale assez
importante pour pouvoir par la suite s'investir dans les programmes en enquêtes
criminelles, en spécialisation.
Donc, on pense que c'est très important.
Je dois dire que c'est quand même assez lourd au niveau des horaires de se
priver de cinq, six personnes pendant 15 semaines, mais je pense que ça
vaut le coup pour faire du BEI une équipe qui va être, premièrement, crédible
auprès de la population et aussi crédible auprès des policiers qu'on a à enquêter.
M. Bonnardel : ...une
dernière question. Vous avez dit tantôt, là, que votre possibilité... la
possibilité pour le BEI de mettre fin à une enquête, là. Il y aurait eu neuf
enquêtes de moins sur les 56 de 2022. Avez-vous fait le même exercice pour les
années avant 2022 ou vous n'avez pas eu...
M. Goulet (Pierre) : Je veux
juste préciser, potentielles, potentielles.
M. Bonnardel : Oui, oui,
potentielles.
M. Goulet (Pierre) : ...va me
le dire. Attendez-moi une seconde. C'était un peu plus nombreux. Je m'excuse de
ne pas l'avoir...
M. Bonnardel : Vous nous le
donnerez plus tard si vous ne l'avez pas là. Ce n'est pas grave, là.
M. Goulet (Pierre) : ...
M. Bonnardel : Ce n'est pas
grave.
Le Président (M.
Bachand) :C'est beau. Merci beaucoup. M.
le député d'Ungava.
M. Lamothe : ...
Le Président (M.
Bachand) :Huit.
M. Lamothe : Huit. Bonjour.
Vous avez amené beaucoup de statistiques tantôt, ça fait que je vais poser des
questions sur les statistiques. Vous avez 18 ex-policiers, 23 civils.
De ces 18 ex-policiers-là, combien de la Sûreté du Québec et combien des
corps policiers municipaux?
M. Goulet (Pierre) : Je
l'ai... j'ai réponse à cette question-là. On a trois enquêteurs qui proviennent
de la Sûreté du Québec; du SPVM, trois superviseurs, pas d'enquêteur; de la
GRC, on a un membre... un enquêteur du... plus un de la GRC, puis il nous en
manque un de Longueuil... on a aussi un superviseur de Longueuil.
M. Lamothe : La dynamique est
bonne entre les policiers, oui?
M. Goulet (Pierre) : La
dynamique... très bonne.
M. Lamothe : La dynamique est
très bonne, oui?
M. Goulet (Pierre) : Bien,
selon selon moi...
M. Lamothe : Pardon?
M. Goulet (Pierre) : Selon
moi, oui, entre les policiers, la dynamique est bonne, mais elle est bonne
aussi avec les civils. Vous seriez surpris de voir à quel point des enquêteurs
d'expérience de crimes majeurs peuvent trouver une vertu des avantages à
côtoyer des enquêteurs civils lorsqu'on aborde une enquête.
M. Lamothe : Vous avez trois
équipes d'enquêteurs, de ce que je sais.
M. Goulet (Pierre) : Oui
M. Lamothe : C'est trois
équipes... vous avez trois équipes de...
M. Goulet (Pierre) : Deux
équipes divisées en deux pour avoir des périodes de garde où on peut... Il faut
toujours prévoir avoir deux déclenchements dans la même journée,
malheureusement, ça arrive. Donc, on a une première équipe qui est en première
garde. Lorsque celle-ci est déployée, la deuxième équipe tombe en première
garde.
M. Lamothe : O.K. Puis les
responsables d'équipe, c'est des ex-policiers ou il y a des civils là-dedans?
M. Goulet (Pierre) : J'ai
présenté tantôt Me Mélissa Amélie Plourde, qui est à côté de moi, qui est
avocate. Elle n'a jamais été agente de la paix et elle a été promue
superviseure aux enquêtes, là, au début de l'année.
M. Lamothe : Félicitations.
Puis un une autre question, a dernière : Le nombre d'enquêtes 52, 56 pour
2022?
Mme Plourde (Mélissa Amélie) : C'est
56.
M. Lamothe : 56, hein?
M. Goulet (Pierre) : ...
M. Lamothe : Je m'excuse.
C'est 56?
M. Goulet (Pierre) : Oui.
M. Lamothe : Combien de mises
en accusation sur les 56 enquêtes?
• (17 heures) •
M. Goulet (Pierre) : Il y a
eu une seule mise en accusation dans toute l'histoire du BEI pour un événement
qui était survenu sur l'autoroute à Drummondville, et c'est un policier de la
Sûreté du Québec. Il a été acquitté cette année.
M. Lamothe : Il y a eu
56 dossiers d'ouverts, mais une mise en accusation, pas... personne
reconnu coupable, là, mis en accusation.
M. Goulet (Pierre) : Mise en
accusation par le directeur des poursuites criminelles et pénales.
M. Lamothe : J'ai entendu
aussi que les dossiers autochtones vous tiennent occupés pas mal.
M. Goulet (Pierre) : Bien, en
fait, c'est une grosse partie de notre mandat parce que l'autre volet
d'allégations criminelles qu'on a, ce sont les infractions à caractère sexuel
commises par un policier en fonction, donc c'est moins fréquent. Tous les
événements qui impliquent un plaignant, une victime autochtone en lien avec un
policier, une infraction criminelle, tous les corps de police de la province
nous les réfèrent. On reçoit aussi des plaintes de la part des citoyens, des
membres des communautés autochtones.
Donc, oui, effectivement, ça nous tient
occupés, pas parce qu'il y a plus de criminalité, c'est parce que le mandat est
beaucoup plus large que l'autre. Les autres situations où on fait des enquêtes
en allégation criminelle, c'est lorsque le ministre nous confie une enquête
particulière qui ne rentre pas dans le cadre de notre mandat prévu par la....
17 h (version non révisée)
M. Goulet (Pierre) : ...donc
le ministre a le pouvoir de nous confier de ces enquêtes-là qu'on fait avec
diligence, évidemment.
M. Lamothe : Vous avez des
policiers autochtones dans le groupe, dans...
M. Goulet (Pierre) : Je n'ai
pas... autochtones, mais... ni d'enquêteur autochtone, mais on a procédé cette
année à un recrutement pour un agent de liaison autochtone et aussi pour un
policier autochtone. Le concours vient à échéance bientôt. J'ai été
agréablement surpris de voir qu'au niveau de la liaison autochtone, j'ai sept
membres des communautés autochtones qui sont appliqués sur le poste. Donc, on
va procéder aux entrevues la semaine prochaine. Et je sais qu'il y a des
personnes qui ont signifié leur intérêt d'être enquêteur autochtone. Ça fait
que, si on pouvait avoir un ou deux enquêteurs ou même... qu'un agent de
liaison autochtone, au sein de notre équipe, ce serait vraiment une très grande
plus-value pour notre organisation puis aussi une plus grande transparence
auprès des communautés qu'on dessert.
M. Lamothe : Peut-être que je
me trompe, mais vous aviez une agente de liaison autochtone antérieurement?
M. Goulet (Pierre) : Oui. On
avait une excellente agente de liaison autochtone, de la nation innue, mais qui
nous a quittés pour l'Université du Québec au Témiscamingue. D'ailleurs, c'est
une personne avec qui on est encore en contact pour nous suggérer de nouvelles
formations pour continuer d'alimenter nos enquêteurs sur la réalité autochtone.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée de Westmount–Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup pour votre témoignage et votre mémoire. J'aurais quelques questions
pour vous. Alors, vous avez sans doute suivi la commission puis aussi les
autres groupes qui ont passé avant vous. Alors, vous avez sans doute remarqué
qu'il y a plusieurs regroupements des policiers, incluant l'Association des
directeurs de police de Québec qui vient tout juste de passer avant vous, qui
disent qu'ils sont surpris de constater que le gouvernement souhaite rendre
responsable le BEI de signaler à des tierces parties des renseignements qui
peuvent être confidentiels avec l'insertion de la proposée... article 289.3.1
qui stipule qu'une fois une enquête terminée, "le directeur du BEI doive
transmettre le dossier au Directeur des poursuites criminelles et pénales et, s'il
y a lieu, au coroner, au commissaire de la déontologie policière, aux affaires
internes du corps de police dont est membre le policier impliqué ou au protecteur
du citoyen pour... ceux-ci en fassent le traitement.".
Vous savez sans doute que ce serait le
seul ordre... ordre ou regroupement des professionnels qui seront assujettis à
un tel règlement. Alors, même pas le Collège des médecins, puis vous, vous êtes
des avocats, même pas au Barreau que nous sommes assujettis à des telles
mesures déontologiques. Alors, comment voyez-vous ça? Puis c'est quoi, votre
réponse envers ces organisations qui s'inquiètent sincèrement de cette nouvelle
mesure qui est proposée dans le projet de loi 14?
M. Goulet (Pierre) : Oui. C'est
une préoccupation importante, mais la grande distinction entre la façon dont j'interprète
l'article et l'Association des directeurs de police du Québec, c'est qu'on
sous-tendait que c'était une transmission systématique, alors que moi, je l'interprète
comme étant discrétionnaire par le Bureau des enquêtes indépendantes. Parce qu'on
dit, bon, transmettre au DPCP, on voit clairement que, oui, on doit le faire.
Et, s'il y a lieu, au coroner, au commissaire déontologie, aux affaires
internes du corps de police et au protecteur du citoyen. J'ai expliqué tantôt
dans quelles circonstances. Donc, nous, ce n'est pas de façon systématique qu'on
transmettrait le dossier. Ça sera simplement dans les cas où on pense qu'il y
aurait lieu pour le commissaire ou les affaires internes de se pencher sur ce
qui s'est passé dans un événement particulier.
Ce qu'il faut comprendre dans la
mécanique, si je peux me permettre de l'expliquer, c'est que, quand on complète
un dossier, le DPCP dit : Bon, il n'y a pas d'accusation contre... dans
telle enquête indépendante. On ne reçoit pas systématiquement, mais très
souvent des demandes en accès de l'information par le commissaire déontologie
qui nous demande de lui transmettre le dossier afin d'exercer ses fonctions. Et
ça, c'est causé par le fait que dans toute et chacune de nos enquêtes qu'on
fait, on a l'obligation de faire l'avis au citoyen du fait qu'il peut porter
plainte au commissaire en déonto. Donc, dans les faits, c'est la même chose
pour les cas des affaires internes. Quand il y a une allégation criminelle,
entre autres, puis il n'y a pas d'accusation, on avise le directeur de police
de la situation puis pratiquement systématiquement on va nous demander de
transmettre, par l'accès à l'information, ce dossier-là aux affaires internes
du corps de police consulté pour qu'ils puissent prendre position s'il y a des
sanctions à prendre ou pas. Donc, dans les faits, ça se passe de façon... je ne
veux pas dire : Systématique, je n'ai pas de chiffres pour justifier ça,
mais...
M. Goulet (Pierre) : ...la
mécanique est celle-ci. Là, on aurait une mécanique différente où ce serait le
directeur qui dirait : Bien, ce cas-là, on pense que, même s'il n'y a pas
eu d'accusation par le Directeur des poursuites criminelles et pénales, il y
aurait lieu que les affaires internes de son corps de police ou du commissaire
de déontologie se penchent sur la conduite du policier. C'est comme ça que je
verrais.
Mme Maccarone : Ça fait que,
d'abord, selon vous, nous aurons besoin d'avoir un amendement à la loi pour
dire que... C'est parce que, selon vous, ce n'est pas à chaque fois, c'est
selon la discrétion, alors, ça prend probablement une précision. Parce que,
moi, ma la lecture de la loi, c'est chaque cas.
M. Goulet (Pierre) : Bien, je
suis... Peut-être qu'une précision serait la bienvenue puisqu'il semble de
toute évidence qu'il y a deux personnes qui ne pensent pas comme moi, mais
c'est correct. Puis je pense qu'effectivement, peut-être, il y aurait lieu de
préciser dans quels cas il y a lieu de faire une transmission. Donc... Pour
dissiper la confusion, je pense que oui.
Mme Maccarone : Parfait.
Merci. Puis en ce qui concerne le BEI... Puis merci de faire l'explication de
qui vous êtes, votre mission ou comment les groupes sont formés puis comment
vous fonctionnez, vos valeurs. Parce qu'on a quand même entendu plusieurs
groupes, puis on lit la revue de presse, puis... Exemple, celle en 2021, puis
vous allez m'excuser que... je veux être transparente avec vous, on comprend
que la Cour supérieure du Québec a rendu une décision renforçant les constats
de dire que le BEI n'a pas été indépendant et impartial dans les communications
avec le public. Vous connaissez sans doute Fannie Lafontaine, qui est une
observatrice civile indépendante, puis elle, elle vous critique férocement en
termes du manque d'opacité et transparence, même qu'elle vous qualifie de
cancres au Canada en matière de transparence dans un rapport rendu public en
octobre 2020. Ce qui est inclus dans le projet de loi n° 14, est-ce que vous
pensez que ça va vous aider à améliorer le niveau de transparence puis la
réputation envers la société civile et les gens qui suivent vos travaux, hein,
pour assurer que... Dans le fond, il y a un manque de confiance. Alors, que
répondez-vous à ça? Puis est-ce que la loi répond à un besoin d'avoir plus de
transparence et plus d'opacité en ce qui concerne le BEI, vos travaux puis vos
enquêtes?
• (17 h 10) •
M. Goulet (Pierre) : Bon, la
première des choses que j'aimerais préciser, la cause à laquelle vous faite
référence, cette cause-là est présentement en appel, donc je ne la commenterai
pas malheureusement. Quand vous parlez de Me Fannie Lafontaine qui parle de
cancres en matière d'opacité puis de transparence, on pourrait en discuter
longuement. Ce que je dois dire, premièrement, c'est que Maître Lafontaine,
quand elle a fait l'étude des dossiers qui concernaient des plaignants victimes
autochtones, elle n'a étudié aucun dossier du BEI, c'étaient des dossiers du
SPVM qui avaient été faits avant. J'ai eu des discussions avec elle à mon
arrivée en fonction et je ne crois pas qu'on puisse nous traiter de cancres, on
fait des communications publiques qui nous sont permises par la loi. Donc,
quand on déclenche l'enquête indépendante, on dit ce qui s'est passé, pourquoi
on le fait, puis, quand le dossier est terminé, le DPCP produit un résumé des
faits, une explication juridique, pourquoi il porte accusation ou pas, et nous,
on fait un bilan des mesures qu'on a entreprises dans ce dossier-là en
particulier. Le fait que vous nous soulignez l'événement judiciaire de 2021
démontre un peu à quel point c'est sensible le fait de communiquer des
informations sans démontrer une apparence de parti pris par rapport soit aux
policiers ou par rapport aux familles des victimes. Donc, c'est une situation
qui est très délicate. Je pense qu'il faut y aller tranquillement.
Ce que je pourrais dire par rapport au
fait qu'on serait des cancres au Canada, il faut comprendre quelque chose,
c'est que les... Premièrement, on ne l'est pas, je peux vous le dire. Mais les
organismes qui communiquent plus que nous ont souvent un statut juridique
différent. Par exemple, là, à la... Independent Investigations Office de la
Colombie-Britannique va à chaque enquête produire un rapport assez exhaustif.
Mais il faut comprendre qu'eux, ils ne déposent pas systématiquement au DPCP,
donc il n'y a pas une justification du réseau de poursuite de la
Colombie-Britannique qui va venir combler ce qu'on vit nous autres ici, au
Québec. Donc, dans ce cas-là, le directeur vient dire à la population : Je
n'ai pas soumis le dossier au DPCP parce que je ne crois pas avoir des motifs
raisonnables et probables qu'il y ait une infraction du... Et c'est la même
chose en Ontario.
Mme Maccarone : Mais de ça,
c'est...
Mme Maccarone : ...vous
demande de fournir des rapports détaillés... fait à l'anonyminat. Quand on
parle des enquêtes, lorsque le DCP... je comprends que le... le DCPI,
excusez-moi, DPCP ne porte pas accusation. Il n'y a pas un moyen d'avoir un
mi-chemin, là-dedans, pour s'assurer qu'il y a quand même une transparence au
niveau des travaux qui sont entamés?
M. Goulet (Pierre) : Oui,
certainement, mais tout ça demande des ressources, compte tenu des obligations
légales auxquelles on est... Ça prend des ressources juridiques puis des
ressources de communication pour pouvoir éplucher, entre guillemets, les
rapports d'enquête puis voir qu'est-ce qui peut être transmis au public. Ça
fait qu'on n'est pas contre ça, on n'est pas contre ça, mais ça prend des
ressources, puis que ça aille dans un cadre plus global d'enquête criminelle.
Donc, c'est un petit peu ça, la situation dans laquelle on se trouve. Ce n'est
pas parce qu'on ne veut pas communiquer.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Laurier-Dorion, s'il vous plaît.
M. Fontecilla : Oui, merci,
M. le Président. Bonjour, Messieurs, dames, merci beaucoup d'être ici avec
nous, là, je vais continuer sur la même veine, je veux bien comprendre par
rapport à la demande de rendre public le rapport détaillé, exhaustif et
anonymisé des enquêtes indépendantes lorsque le DPCP décide de ne pas porter d'accusation.
Je veux bien comprendre ce que vous nous dites. Est-ce qu'il y a un
empêchement, comment dire, légal, là, à procéder de cette façon-là, donc de
publier des rapports détaillés, exhaustifs anonymisés, ou il y a une question
de ressources qui est impliquée, là, dans cette façon de faire?
M. Goulet (Pierre) : Bien,
premièrement, si vous me permettez. nous, sur notre site web, on va publier un
communiqué de déclenchement d'enquête indépendant au conditionnel, pour que la
population sache qu'on va scruter un événement, on va faire la lumière sur un
événement qui implique une intervention policière parce qu'une personne est
décédée ou il y a eu des blessures graves ou un événement qui est survenu en
détention. Après ça, le DPCP, on va émettre un communiqué comme quoi on a
soumis notre dossier et par la suite, le DPCP va émettre un communiqué dans
lequel il va expliquer son résumé des faits tels que lui les perçoit à partir
de la preuve qui était présentée, puis des justifications légales de l'accusé ou
pas, en analysant le droit en lien avec les faits qui sont là. Cette
décision-là se retrouve sur notre site web lorsqu'elle est publiée par le DPCP
et par la suite, le BEI produit ce qu'on appelle le bilan. Donc, le bilan va
mentionner essentiellement qu'on a rencontré, mettons, trois, quatre témoins
civils, cinq témoins policiers. On a procédé à des expertises, on a saisi des
caméras de surveillance. Donc, ça va être un résumé sommaire des démarches
d'enquête qui ont été faites.
Donc, si on prend les deux communications,
elles sont quand même bonnes. Est-ce que ça peut être plus que ça? Bien, je
suis bien d'accord avec vous, mais avec la limite de protection des
renseignements personnels, puis éviter, par la description qu'on fait,
d'identifier les acteurs de l'événement, ça, c'est très important aussi. Donc,
oui, on peut toujours être plus transparents, mais il y a toujours une limite
de protection des renseignements personnels qui doit être respectée dans ces
cas-là. Donc, c'est un... ce n'est pas un enjeu de mauvaise foi, c'est un enjeu
d'avoir les moyens de pouvoir s'assurer que ce qu'on va faire ne résultera pas
en une poursuite par une des parties qui va se sentir lésée par notre compte
rendu, voyez-vous?
M. Fontecilla : Combien de
temps il me reste?
Le Président (M.
Bachand) :Une trentaine de secondes.
M. Fontecilla : Une trentaine
de secondes. Est-ce que... Seriez-vous d'accord avec le fait que n'importe
quelle personne puisse informer le bureau d'enquête indépendante sur une
blessure grave, ou vous pensez que ça doit continuer à être comme c'est le cas
actuellement, seulement le directeur du service de police impliqué?
M. Goulet (Pierre) : Bien, on
n'aurait pas de difficultés avec ça. Sauf qu'avant de faire un déclenchement,
on a besoin d'avoir des informations. Donc, à ce moment-là, je ne pense pas
qu'un citoyen soit aussi bien outillé qu'un corps de police pour produire des
cartes d'appels, des appels audios, des horaires de policiers, avant qu'on
détermine de déclencher ou pas, puis il y a la nature des décès, quelle est
l'identité de la personne qui a été blessée. Des fois, ça peut-être le
plaignant, ça peut-être quelqu'un qui se plaint d'un événement... qui n'est pas
le plaignant... j'ai perdu mon fil. Donc, à ce moment-là, on va avoir une
enquête en validation importante à faire. Ça va demander énormément de
ressources. On n'aura pas des chiffres... enquête indépendante, on va... bien
avoir quand même encore juste 70, 71, puis on va peut-être en avoir validé 20, 30,
sans...
M. Goulet (Pierre) : ...Comprenez-vous?
Ça fait que...
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup.
M. Goulet (Pierre) : ...les
ressources.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Mme la députée de
Vaudreuil.
Mme Nichols : Oui. Merci, M.
le Président. Bonjour à vous deux. Il y en a plusieurs, là, qui doutent de
l'indépendance du BEI, parce que souvent on dit que c'est des policiers qui
enquêtent sur des policiers puis qui sont soumis à la même loi puis qui
relèvent du même ministre. C'est comme ça, hein, on est portés à se dire :
Bien... ou il peut y avoir un conflit d'intérêts. Ou où est l'indépendance dans
tout ça? Mais, quand vous enquêtez, vous présentez vos dossiers aux procureurs,
puis c'est souvent aussi les mêmes procureurs qui travaillent probablement avec
les mêmes enquêteurs que vous enquêtez. Ça fait que ça fait... Encore là, on
arrive avec un autre aspect où on se dit : oui, mais là, ça ne fonctionne
pas plus. Selon vous, est-ce que ça ne serait pas plus approprié que les
avocats qui travaillent avec vous soient retirés du DPCP puis qu'ils soient
dédiés à vous le temps de l'enquête? Ou une autre suggestion que vous pouvez
peut-être...
M. Goulet (Pierre) : Je
voulais juste... Avant de vous répondre, je voulais juste valider quelque
chose.
Bon, premièrement, évidemment, ça sera au
Directeur des poursuites criminelles et pénales de juger dans quel cas ses
procureurs sont en conflit d'intérêts avec des policiers. Dont on soumet un
rapport. Ça, c'est le premier point.
Donc, je ne veux pas m'immiscer là-dedans,
mais je dois vous dire que nos rapports sont transmis au bureau du
service-conseil du DPCP. Donc, ce n'est pas nécessairement des procureurs en
région qui travaillent avec ce policier-là. C'est des procureurs, qui sont
basés à Québec ou à Montréal qui ne font que du service-conseil, qui font
l'analyse de nos dossiers. Ça fait que la situation que vous proposez risque
peu d'arriver. Mais moi, ayant passé ma carrière... si une telle situation
arrivait, c'est sûr que je dénoncerais le conflit d'intérêts potentiel.
Quant à l'autre question que vous
soumettez, là, il y a deux volets importants. Le premier, c'est législatif. La
loi oblige... empêche le directeur de nommer un policier enquêteur principal
pour son ancien corps de police, donc il ne peut pas être enquêteur principal.
L'autre volet, c'est dans le règlement sur
le déroulement des enquêtes indépendantes. Le policier ou même le civil se doit
de dénoncer un conflit d'intérêts potentiel lorsqu'il est assigné à une
enquête, donc on est informés de ces situations-là. On garde un registre de ça.
Puis vous avez le volet aussi de la parité
dans laquelle vous avez des civils qui sont en mixité avec des enquêteurs, qui
fait que, selon nous, ça représente une garantie d'indépendance dans la
conduite de nos enquêtes. Donc ça crée un climat, un contexte différent.
Puis il ne faut pas oublier non plus que
les enquêteurs, chez nous, policiers, sont là depuis cinq, six ans. Je ne vous
dis pas... que ça ne va pas faire un an, mais il y a quand même un certain
détachement puis, on va appeler ça, un «commitment» aux valeurs du Bureau des
enquêtes indépendantes qui, selon nous, garantit une indépendance.
Et je peux aller plus loin si vous voulez
comparer avec les autres BEI, entre guillemets, au Canada. Il y en a qui
embauchent des policiers actuels, en fonction. En Ontario, c'est plus de
policiers que de civils. Donc, on n'est pas si mal quand même. ...garanties,
selon moi.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup.
Mme Nichols : ...
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Me Plourde, Me
Goulet. Merci infiniment d'avoir été avec nous.
Cela dit, la Commission ajourne ses
travaux au jeudi 6 avril 2023 après les avis touchant les travaux des
commissions. Belle soirée dans la tempête. Merci. À demain.
(Fin de la séance à 17 h 20)