(Dix
heures deux minutes)
Le
Président (M. Bachand) : Bonjour, tout le monde. Ayant constaté
le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte.
Avant de débuter les travaux de la commission, je vous rappelle que le port du masque de procédure est obligatoire en tout temps, hormis lors du moment de prendre la parole dans le cadre
de nos travaux.
La commission est
réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection
des renseignements personnels.
Avant de débuter, Mme
la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Barrette (La Pinière); M. Zanetti
(Jean-Lesage), par M. Nadeau-Dubois (Gouin); Mme Hivon (Joliette),
par M. Ouellet (René-Lévesque).
Étude détaillée (suite)
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Je vous rappelle qu'il avait été convenu de suspendre l'étude de l'amendement
visant à introduire l'article 36.1 proposé par le ministre. Nous avons également
suspendu les articles 78 à 85, 93, 96 et 100 du projet de loi. Lors de
l'ajournement de nos travaux le jeudi 27 mai, l'article 112 du projet
de loi venait d'être adopté.
Donc, M. le ministre,
je vous invite à lire l'article 113. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Caire :
Oui, merci, M. le Président.
Donc, l'article 113
se lit comme suit :
L'article 28 de
cette loi est remplacé par les suivants :
«28. Outre les droits
prévus au premier alinéa de l'article 40 du Code civil, toute personne
peut, si le renseignement personnel le concernant est inexact, incomplet ou
équivoque, ou si sa collecte, sa communication ou sa conservation ne sont pas
autorisées par la loi, exiger qu'il soit rectifié.
«28.1. La personne
concernée par un renseignement personnel peut exiger d'une personne qui
exploite une entreprise qu'elle cesse la diffusion de ce renseignement ou que
soit désindexé tout hyperlien rattaché à son nom permettant d'accéder à ce renseignement
par un moyen technologique, lorsque la diffusion de ce renseignement
contrevient à la loi ou à une ordonnance judiciaire.
«Elle peut [...] de
même, ou encore exiger que l'hyperlien permettant d'accéder à ce renseignement
soit réindexé, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
«1° la diffusion de
ce renseignement lui cause un préjudice grave relatif au droit au respect de sa
réputation ou de sa vie privée;
«2° ce préjudice est
manifestement supérieur à l'intérêt du public de connaître ce renseignement ou
à l'intérêt de toute personne de s'exprimer librement;
«3° la cessation de
la diffusion, la réindexation ou la désindexation demandée n'excède pas ce qui
est nécessaire pour éviter la perpétuation du préjudice.
«Dans l'évaluation
des critères du deuxième alinéa, il est tenu compte, notamment :
«1° du fait que la
personne concernée est une personnalité publique;
«2° du fait que la
personne concernée est mineure;
«3° du fait que le
renseignement est à jour et exact;
«4° de la sensibilité
du renseignement;
«5° du contexte dans
lequel s'effectue la diffusion du renseignement;
«6° du délai écoulé
entre la diffusion du renseignement et la demande faite en vertu du présent
article;
«7° si le
renseignement concerne une procédure criminelle ou pénale, de l'obtention d'un
pardon ou de l'application d'une restriction à l'accessibilité des registres
des tribunaux judiciaires.
«Les
articles 30, 32 et 34 s'appliquent à une demande faite en vertu du présent
article, avec les adaptations nécessaires.»
Donc, M. le
Président, cet article remplace l'article 28 de la Loi sur la protection
des renseignements personnels dans le secteur privé par le nouvel
article 28 et 28.1 de cette loi.
L'article 28 de
la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé...
Le terme «rectifier» comprend la suppression.
L'article 28.1
est introduit à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le
secteur privé afin d'octroyer à une personne concernée par un renseignement
personnel le droit d'exiger que cesse la diffusion d'un tel renseignement ou
que soit désindexé ou réindexé un hyperlien rattaché à son nom permettant
d'accéder à son renseignement par un moyen technologique.
M. le Président, c'est essentiellement le droit
à l'effacement dont on parle, ici.
Le Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup. Je sais que vous avez un amendement, peut-être, plus tard, hein?
M. Caire : Je le
lis maintenant, M. le Président?
Alors,
l'amendement : Remplacer le paragraphe 2° du troisième alinéa de
l'article 28.1 de la Loi sur la
protection des renseignements personnels dans le secteur privé, proposé par l'article 113
du projet de loi, par le paragraphe
suivant :
«2° du fait que le renseignement concerne la
personne alors qu'elle est mineure;».
Ce remplacement vise à préciser que, dans le
contexte d'une demande de cessation de diffusion ou de déréférencement — désindexation
ou réindexation d'un hyperlien rattaché au nom d'une personne — s'effectuant
dans le cadre du deuxième alinéa de l'article 28.1 de la Loi sur la
protection des renseignements personnels dans le secteur privé, l'entreprise
devrait tenir compte non pas de l'âge de la personne concernée au moment de la
demande mais plutôt du fait que la demande vise les renseignements personnels
d'une personne alors qu'elle était mineure.
Donc, ici, il s'agit de recontextualiser l'âge
par rapport au préjudice par rapport au moment où les demandes sont faites.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y aurait
interventions sur l'amendement, s'il vous plaît? M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : ...juste
pour bien saisir. Ça, ça devient, donc, un autre des critères qui sera utilisé
par l'entreprise pour évaluer le préjudice, dans le fond?
M. Caire : Oui,
bien, c'est ça, oui.
M. Nadeau-Dubois : Ça vient
s'ajouter dans la deuxième section de l'article?
M. Caire : C'est
ça, c'est «dans l'évaluation des critères du deuxième alinéa, il est tenu
compte de», donc «du fait que la personne concernée est mineure».
Ici, on veut s'assurer que ce qui est pris en compte, c'est que la
personne était mineure au moment des faits,
pas nécessairement au moment où elle fait sa demande. Donc, elle
peut faire sa demande plus tard, mais, au moment où les faits ont été
avérés, elle était mineure, et c'est ça qui doit être pris en compte.
M. Nadeau-Dubois : Merci
beaucoup.
M. Barrette : ...en lien avec l'amendement. La personne
mineure, elle-même, là, quand on viendra à... il n'y a pas de
contradiction, la personne mineure peut demander un déréférencement pour la question...
M. Caire : Elle
le peut. Là, je ne sais pas si c'est... Je vais demander à
Me Miville-Deschênes de préciser si c'est à partir de 14 ans ou plus
ou si à tout moment la personne mineure peut faire cette demande-là.
Le
Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y aurait consentement pour donner la parole à
Me Miville-Deschênes? Consentement. Me Miville-Deschênes, s'il
vous plaît.
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) :
La personne mineure peut faire une demande de suppression, là.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de La Pinière, oui.
M. Barrette : Les mots ayant
une importance, là, je vais me servir de l'amendement pour poser les questions
que j'aurais posées s'il n'y avait pas eu d'amendement, puis ça va revenir au
même, là.
M. Caire : Ces questions-là
devant être posées, qu'elles le soient.
M. Barrette : C'est ça. Alors,
quand on parle de cessation de diffusion ou de déréférencement... Bon,
déréférencement, c'est un concept qui est propre aux réseaux sociaux, on va
dire.
M. Caire :
...technologie, oui.
M. Barrette :
Oui, mais disons que c'est... le coeur du concept du déréférencement, c'est...
ou du référencement, là, c'est les réseaux sociaux.
M. Caire : Oui,
oui, oui.
M. Barrette : Bien, réseaux
sociaux incluant...
M. Caire : Sites
Web, etc.
M. Barrette : On va dire que
Google, c'est un réseau social, O.K.?
M. Caire :
Oui.
M. Barrette :
Maintenant, «diffusion», là, ça englobe quoi sur le plan légal? Quelles sont
les ramifications de la diffusion?
• (10 h 10) •
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...diffusion, c'est le fait de rendre public, de
diffuser au public. C'est une publication à tous, en quelque sorte.
M. Barrette : Ce n'est sûrement pas le fait de rendre public.
C'est ça que je veux vraiment creuser, là. Pour être bien clair, là, rendre public et diffuser quelque
chose, ce n'est pas la même chose, légalement, à moins que je ne me
trompe.
M.
Caire : Bien,
c'est-à-dire que diffuser fait partie de la notion de rendre public. Rendre
public ne se limite pas à la
diffusion, vous avez raison, mais la diffusion elle-même, c'est... implique
nécessairement de le rendre public. Mettons, voyez ça comme l'ensemble
très large, c'est rendre public. Je peux rendre public en disant, je veux
dire... Je prends mon téléphone, je montre une vidéo à tout le monde, je le
rends public, dans les faits. Mais, quand on parle, ici, de moyens
technologiques, ça veut dire qu'à travers, vous l'avez dit, une page Facebook,
un Twitter, un Instagram, un site Web, je diffuse, donc je rends public, là. Je
le rends accessible à tous ceux qui ont accès à ces sites-là.
M. Barrette :
O.K. Et là est-ce qu'il y a des limites à ça? J'essaie de préciser, là, parce
que j'aurais posé la question, là. Si on
adopte l'amendement, je viens de clore le débat sur la diffusion, ça fait que
j'aimerais ça le faire aussi.
M. Caire :
Je ne comprends pas, M. le député.
M. Barrette :
Bien là, c'est... là, c'est parce que, si je vote pour l'amendement, je vote
pour la diffusion sans l'avoir débattue.
M. Caire :
Bien, en fait, non...
M. Barrette :
Bien, je peux revenir quand même, mais je le fais quand même ici, là.
M. Caire :
En fait, non, M. le député, parce que tout ce que l'amendement fait, c'est de
préciser que l'âge dont on doit tenir compte, c'est l'âge au moment des faits.
Donc, la diffusion... vous n'avez pas nécessairement à être d'accord avec la
diffusion ou non. La question que l'amendement vous pose, c'est :
Êtes-vous d'accord pour dire qu'on ne devrait pas tenir compte de l'âge du plaignant
au moment où il fait sa demande, on devrait tenir compte de l'âge du plaignant
au moment où les faits se sont produits? C'est ça que l'amendement dit.
M. Barrette :
Ça, j'avais compris ça.
M. Caire :
O.K. Non, mais c'est pour ça, parce que vous dites : Si je vote pour
l'amendement, je vote pour la diffusion. Pas nécessairement.
M. Barrette :
Oui, mais il faut que je comprenne c'est quoi, la diffusion, pareil.
M.
Caire :
Oui, puis ça, c'est... Mais, ceci étant dit, on peut en discuter maintenant, M.
le député, moi, je n'ai pas d'enjeu.
M. Barrette : Oui. Alors donc, la diffusion, elle n'est pas
techniquement définie. Je vais prendre un exemple, là, une diffusion non
publicitaire dans des réseaux... la diffusion de quelque chose dans le
semainier paroissial. Là, vraiment, je fais exprès, là.
M. Caire :
Oui, oui. Non, non, mais c'est correct.
M. Barrette :
Là, ça fait partie de la diffusion?
M. Caire :
Oui.
M. Barrette :
La diffusion, ce n'est pas juste lié aux moyens technologiques?
M. Caire :
Sauf si on parle de déréférencement ou de désindexation, là, c'est sûr qu'on ne
peut pas déréférencer un journal...
M. Barrette :
Quelque chose qui n'est pas référencé au départ, bon.
M.
Caire :
...c'est ça, quelque chose qui n'est pas référencé. On ne peut pas désindexer
quelque chose qui n'a pas d'index. Donc, c'est sûr que, quand on fait référence
à ces notions-là, on fait référence exclusivement aux moyens
technologiques. C'est pour ça, tantôt, je disais : Diffuser, donc, dans le
sens où Me Miville-Deschênes le disait, rendre public, ce n'est pas nécessairement
une diffusion par un moyen technologique, mais utiliser un moyen technologique
pour diffuser, c'est nécessairement rendre public.
M. Barrette :
Bien, oui, ça, c'est clair, c'est clair. C'est que, pour vivre, il faut
respirer, puis, quand on respire, on est vivant. C'est correct, ça, ça va. Mais
là, la diffusion, là, ici, là, c'est n'importe quoi qui est multiplié, on va le
dire comme ça, mettons, dans l'espace public.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, en fait, c'est rendre accessible au public,
rendre disponible au public. C'est ça, diffuser. Puis il y a... la Loi sur l'accès,
il y a un règlement sur... d'application de la loi sur l'accès qui oblige la
diffusion de certains renseignements, puis elle précise de quelle façon,
c'est-à-dire sur un site Internet. Donc,
c'est un terme qu'on retrouve notamment dans le Règlement de la diffusion, qui exige, là,
dans le cas du règlement, de rendre accessible sur le site Internet de
l'organisme certains renseignements, certains documents, là.
M. Barrette : O.K. Alors, le «tenir compte», lui, on va le voir,
juste la signification, dans l'esprit du ministre, du «tenir compte»,
l'implication dans 28.1, après, quand qu'il sera amendé.
M. Caire :
Bien, ça veut dire qu'au moment où vous évaluez la demande, les critères... le
prisme à travers lequel la demande doit passer, là, c'est des critères qu'on
fixe, là, parce qu'on ne veut pas non plus que ça soit complètement aléatoire puis arbitraire. Il y a quand même des éléments
là-dedans qui vont... qui vont parler en faveur d'accéder à la demande,
là, puis ces éléments-là en font partie.
Ceci étant, il ne
faut pas oublier que... puis là je vais... je vais demander à
Me Miville-Deschênes de compléter, mais
ça n'enlève en rien les recours judiciaires possibles, là. Donc, ce qu'on veut,
c'est... Dans un premier temps, l'entreprise va recevoir et traiter la
demande. Ceci étant, le plaignant peut toujours passer par les tribunaux, mais
cette voie-là étant une voie plus rapide, puis, dans ces contextes-là, on
comprend que quelquefois la célérité a bon goût, il y a des critères qui
vont... qui vont plaider en faveur de la demande, puis, bien, on établit ces
critères-là dont les entreprises doivent tenir compte pour dire : Regarde,
si on rencontre ces critères-là, là, ça serait une bonne idée que tu accèdes à
la demande.
M. Barrette :
O.K. Dans l'amendement, là, pourquoi vous écrivez «devrait»? Là, vous allez me
dire que «doit», c'est le... «devrait»,
c'est le verbe «devoir», là, mais ce n'est pas «devra», là. C'est comme si
c'était conditionnel : «...devrait tenir compte non pas de
l'âge[...], mais plutôt du fait que la demande vise [des] renseignements...»
M. Caire : Vous êtes où, M. le député? Parce que moi, j'ai «du fait que le renseignement concerne la personne alors
qu'elle est mineure».
M. Barrette :
Est-ce que, quand vous dites «devrait», c'est un conditionnel ou...
M.
Caire :
Mais où vous voyez... où vous...
M. Barrette :
«L'entreprise devrait tenir compte non pas de l'âge...»
M. Caire :
Ah! O.K., excusez-moi. Parce que, là, vous me parliez de l'amendement. Je
m'excuse.
M. Barrette :
Bien, c'est parce qu'on est dans l'amendement.
Le
Président (M. Bachand) : Dans les commentaires, M. le ministre.
M. Barrette :
On est dans les... pardon, dans les commentaires. C'est vrai, oui, pardon. Vous
avez raison.
M.
Caire :
Une entreprise de... Je le cherche, là, je m'excuse.
M. Barrette :
C'est la troisième ligne avant... la quatrième ligne avant la dernière.
M. Caire :
À 28.1.
M. Barrette :
Dans les commentaires, oui, dans l'amendement.
M. Caire :
Ah! dans les commentaires.
M. Barrette :
Oui.
M. Caire :
Ah! O.K. Excusez-moi, là, c'est parce que, là, je le cherchais dans l'article,
là.
M. Barrette :
Non, non, je comprends, c'est moi qui s'est mal exprimé. Vous me pardonnerez,
M. le ministre.
M. Caire :
O.K., dans les commentaires de l'amendement, bon, na, na, na. Pourquoi, dans
les commentaires, on a écrit «devrait tenir
compte [et] non pas»? Bien, je ne sais pas, honnêtement. Parce que la vérité,
c'est que... ce que l'amendement dit,
c'est que l'entreprise doit considérer l'âge de la personne au moment des
faits. C'est ça que ça dit, là.
M. Barrette : C'est ça, là?
M. Caire : Oui,
oui, c'est ça que ça dit.
M. Barrette : Ce n'est pas un
conditionnel, là?
M. Caire :
Non, non, non, il n'y a pas de conditionnel. Pourquoi la rédaction du
commentaire... Je ne sais pas. Puis je m'excuse si ça a semé de la...
M. Barrette : Ce n'est pas
grave, c'est dans le commentaire.
M. Caire : Je
vous présente mes excuses, parce que je ne peux pas m'excuser moi-même. Alors, je
peux, mais c'est moins délicat un peu, mais non, c'est un critère qui dit que
tu dois tenir compte de l'âge de la personne au moment des faits et non pas au
moment où elle fait sa demande.
M. Barrette : O.K.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce que ça va pour l'amendement?
M. Barrette : Ça va pour
l'amendement.
Le
Président (M. Bachand) :
Parfait. Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la
mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.
La Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Caire (La Peltrie)?
M. Caire : Pour.
La
Secrétaire : Pour les
membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Pour.
La Secrétaire : Pour les
membres de l'opposition officielle, M. Barrette (La Pinière)?
M. Barrette : Pour.
La Secrétaire :
M. Nadeau-Dubois (Gouin)?
M. Nadeau-Dubois : Pour.
La Secrétaire :
M. Bachand (Richmond)?
Le Président (M.
Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté.
Et, si vous êtes d'accord, on reviendrait à des
études par blocs, donc on serait à 28. Est-ce qu'il y aurait des interventions
sur 28? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Bien, en fait,
c'est sur l'économie générale, là, de 113, là, je pourrais faire le commentaire
n'importe où. Le droit à l'oubli, ce dont il est question, c'est un concept qui
est intéressant puis c'est un concept qui
est important. Puis je sais notamment que, dans plusieurs circonstances,
c'est souhaité par des gens qui sont victimes
d'injustices graves, là, causées par la circulation sur le Web de toutes sortes
d'affaires. Je sais notamment que, dans le cadre de la Commission
spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs, ça faisait partie des
recommandations.
Et donc je pense qu'on a tous un fort préjugé
favorable à cette idée, surtout quand on le pense pour ces circonstances-là. Tu sais, on se dit :
C'est... Puis, bon, il y a des phénomènes, tu sais, il y a toutes sortes de
phénomènes sur les médias sociaux,
aujourd'hui, qui pourraient être atténués par des dispositions comme celles-là.
Ça fait que je veux juste prendre le temps de commencer par dire que,
sur le fond, là, on est tous dans la même équipe là-dessus, puis c'est super
important.
Ceci étant
dit, il y a quand même, lors de la... lors de la commission parlementaire, des
groupes qui sont venus nous parler du
revers de la médaille, parce qu'il y a toujours deux côtés à une médaille, et
il y avait une inquiétude, notamment du côté de la Ligue des droits et
libertés, qu'en voulant faire quelque chose de bien on ouvre également des
portes à d'autres pratiques. Puis je veux juste... je veux voir si le ministre
y a réfléchi, c'est-à-dire comment ne pas s'assurer que... en fait, comment s'assurer que le droit à
l'oubli ne soit pas utilisé par certains individus ou certaines
organisations pour faire disparaître de l'espace public des informations qui,
par ailleurs, sont d'intérêt public même si elles les embarrassent? Puis
évidemment, là, je ne parle pas de situations d'exploitation sexuelle, je ne
parle pas, bon, de scènes dégradantes ou de trucs qui seraient invasifs dans la
vie privée. Mais, quand même, je n'ai pas trouvé bête du tout l'avertissement de certains groupes qui sont
venus nous dire : Attention que ça ne puisse pas être utilisé, par
exemple, par une grande entreprise qui est
particulièrement — puis je
vais faire un cas hypothétique, là — particulièrement dérangée par un reportage d'un petit journal local ou d'un
petit... d'un blogueur indépendant qui fait un article particulièrement
dur. Puis, bon, on peut être d'accord ou pas d'accord, mais ça fait partie de
la liberté d'expression. Puis, même si c'est très, très critique, puis même si
c'est hautement litigieux, bon, on est dans une société libérale où même des
opinions extrêmes, si elles ne sont pas haineuses ou elles n'appellent pas à la
violence, il faut les tolérer.
Donc, comment on fait pour que, par exemple,
c'est ça, une grande entreprise ne puisse pas dire : Bien là, ça, ça me
dérange vraiment, j'ai une batterie d'avocats, et donc je m'adresse à, disons,
Google ou un média social, et cette grande
entreprise là voit arriver une batterie d'avocats de l'autre grande entreprise
et se dit : Ouf! On va s'économiser du trouble, on va accéder à la
demande, on va déréférencer? Et là la grande entreprise... la grande entreprise
en question est bien contente, mais, du point de vue de l'intérêt public, on
vient peut-être de commettre une erreur. Une personnalité
publique, dans le domaine politique ou dans le domaine du show-business, qui est...
ou dans le domaine des affaires, qui
a beaucoup d'argent, beaucoup d'influence, il y a
des trucs qui se mettent à circuler sur les médias sociaux à son égard, ça lui déplaît. Comment on fait pour
que ces dispositions-là ne puissent pas être instrumentalisées par
des gens comme ça qui, en fait... ou,
donc, des gens, ou des organisations qui viendraient utiliser cette disposition-là pour nettoyer l'espace public d'informations qui leur
déplaisent? Comment on pare à ce risque-là?
• (10 h 20) •
Le Président (M.
Bachand) : M. le ministre.
M.
Caire : Bien, en
fait, c'est l'objet de 28.1, parce que, si vous regardez... Puis ça va un peu
dans le sens de la question
que le député de La Pinière posait sur les critères, donc... Alors, on
dit : «Elle peut faire de même, ou encore exiger que l'hyperlien
permettant d'accéder à ces renseignements soit réindexé, lorsque les conditions
suivantes sont réunies...» Alors là, on dit : Tu peux demander, tu peux te
prévaloir de ton droit à l'effacement, mais il y a quand même des conditions
qui doivent être réunies pour que l'entreprise accède à ta demande.
Donc, prenons le cas qui est soulevé par mon collègue
de Gouin, qui est un très bon cas. Puis effectivement on ne veut pas avoir...
on veut avoir les effets positifs, mais on veut s'éviter les effets pervers,
puis on ne voudrait pas qu'il y ait une possibilité de censure. Ce n'est pas le
droit... La censure n'est pas le droit à l'effacement, donc il faut tracer la
frontière entre les deux.
Or, ici on dit : «La diffusion de ce renseignement
lui cause un préjudice grave relatif au droit au respect de sa réputation ou de
sa vie privée.» Donc, il y a un préjudice, il y a une notion de préjudice
grave. «Ce préjudice est manifestement supérieur», donc même s'il y a un
préjudice, le préjudice doit être manifestement supérieur à l'intérêt du public de connaître ce renseignement ou à l'intérêt de toute personne de s'exprimer librement. Donc,
on le précise, là.
Tu sais, je
veux dire, ça n'est en rien une négation de la liberté d'expression. Puis, oui,
on peut tenir des propos qui dérangent et, oui, on peut tenir des propos
qui bousculent. Ça n'implique pas un droit à l'effacement. Par contre, on ne
peut pas causer un préjudice à la réputation, on ne peut pas s'immiscer dans la
vie privée des gens au-delà de ce qui est d'intérêt public. Donc, je pense que
ces articles-là viennent balancer cette possibilité-là.
Et on rajoute à ces critères-là, qui doivent
être réunis, des éléments dont on doit tenir compte. On comprend qu'une
personne mineure est particulièrement vulnérable. Je pense que mon collègue et
les collègues vont être d'accord pour dire que des personnalités publiques
peuvent aussi être plus vulnérables, quelquefois, à des abus. Puis là je parle
vraiment d'abus, je ne parle pas d'une opinion tout à fait légitime dans une
société...
Une voix : ...
M. Caire : Bien,
oui, c'est ça. Je veux dire, les citoyens ont le droit de critiquer mon
travail, le travail de mon gouvernement, le travail des oppositions. On n'aime
pas toujours ce qui se lit dans les journaux, vraiment pas toujours, mais, dans
une société libre et démocratique, c'est tout à fait sain et c'est tout à fait
correct de le faire. Et donc on ne devrait pas... Le droit à l'effacement, ce
n'est pas la censure, je le répète, mais je pense que 28.1 trouve cet
équilibre-là entre les deux.
Ceci étant
dit, M. le député, par la pratique de la loi, je pense qu'on aura peut-être à
se questionner périodiquement à savoir est-ce qu'on a atteint nos
objectifs. Est-ce que je peux vous jurer mes grands dieux, aujourd'hui, là,
qu'on a la solution parfaite? Non. Je pense... mais je pense qu'on a trouvé
vraiment les... en tout cas, moi, je pense que cette solution-là, elle est...
elle est viable, elle atteint l'objectif. Puis je vous dirais que, via la CAI
et les rapports annuels que la CAI déposera,
bien, on pourra voir s'il y a des cas qui viennent... qui viennent attester de
cette hypothèse ou non.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois :
Je soumets au ministre une difficulté qui est... Parce qu'en effet les
critères, à l'article, ils sont bons,
c'est des bons critères, c'est des bonnes balises. Le problème, c'est que ce
seront les entreprises qui vont devoir les appliquer au mieux de leur jugement. C'est l'entreprise, disons, par
exemple Google, ou Facebook, ou Twitter, qui va devoir juger elle-même de est-ce que la demande est légitime ou est-ce
qu'elle est abusive, puis on peut se poser la question.
Puis c'est pour ça que
c'est le cas de figure que je prenais un peu plus tôt, une entreprise comme
Google qui voit arriver, disons, on va prendre un exemple, Monsanto qui
débarque puis qui dit : Là, là, il y a un petit journal, là, local, rural,
là, qui commence à m'énerver, pouvez-vous déréférencer? Je me mets dans la peau
de Google, pas le goût de me pogner avec Monsanto, pas envie de me pogner
devant les tribunaux. Il y a comme une difficulté dans le fait que c'est les
entreprises qui vont devoir juger de l'application des critères. Et elles vont
le faire en fonction de leur lecture de la loi mais en fonction aussi de leurs
intérêts, puis des fois elles vont se dire : Ça ne vaut pas la peine.
Entre deux acteurs qui leur font des représentations, une grande entreprise
puis, disons, un petit groupe de défense de droits ou un petit journal, le
rapport de force n'est pas le même.
Et d'ailleurs
c'est pour des considérations comme celle-là que le Barreau
lui-même était arrivé à une position... était atterri, le Barreau, sur
une position plus restrictive en disant : Permettons le droit à l'oubli,
mais seulement pour les enfants. C'était la conclusion du groupe du travail du Barreau
sur cette question-là. Bon, eux autres étaient donc très prudents puis
préféraient aller dans le sens d'un peu plus d'ouverture que moins. Je ne sais
pas ce que le ministre pense de cette conclusion-là du Barreau, eux voulaient
restreindre ça aux enfants. Je ne sais pas, moi, pour être bien honnête, je ne
suis pas fixé, je ne sais pas si c'est ma position, mais les craintes que j'ai,
elles étaient donc partagées par le groupe du travail du Barreau.
Et est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de donner...
Parce que la conclusion du Barreau, c'est : Laissons les tribunaux
trancher plutôt que de donner aux entreprises le pouvoir de faire ces
arbitrages-là, alors qu'elles sont parfois juges et parties. Il y a-tu moyen de
trouver un terrain d'atterrissage entre les deux, notamment en donnant
peut-être un rôle plus important à la CAI sur ces enjeux-là?
Qu'est-ce qu'on fait si une entreprise
déréférence de manière un peu, disons, abusive, fait une interprétation très,
très stricte de ces critères-là, il y a une personne qui se sent lésée en
disant : Aïe! Un instant, là, moi, je pense que ce renseignement-là a droit de citer dans l'espace public puis je
suis en désaccord avec la décision de l'entreprise? Il n'y aurait pas
moyen de donner un recours à la CAI dans ces situations-là, par exemple, pour
qu'on trouve un juste milieu entre ce régime-là, qui est vraiment l'entreprise
décide, puis je le répète, elle peut être juge et partie par moments, et
peut-être la position du Barreau qui est celle de laisser seulement les
tribunaux trancher? Il n'y a pas moyen de trouver quelque chose entre les deux?
• (10 h 30) •
M. Caire : Puis
je trouve la discussion vraiment très intéressante. Je vais y aller élément par
élément, si mon collègue me le permet.
Premièrement, est-ce qu'on devrait limiter ça
aux seuls enfants? Personnellement, je ne le crois pas. Je pense que, si on a,
effectivement, de façon naturelle, une sensibilité particulière pour les
enfants qui sont victimes des affres du numérique, il n'empêche pas moins que
d'autres groupes d'âge peuvent en subir les mêmes contrecoups, et, à mon sens,
ce n'est pas acceptable. Je veux dire, le droit à sa réputation, le droit à sa
vie privée sont des droits qu'on doit aussi protéger. Puis je vous dirais que,
nous tous, comme personnalités publiques, je pense qu'on devrait avoir une
sensibilité à ça.
Je répète, par contre, je veux être très clair,
là, ce n'est pas de la censure. Le déréférencement, ce n'est pas de la censure.
Et jamais je ne cautionnerai... Parce qu'il n'existe pas de droit à la censure,
on s'entend, puis je pense que 64 n'amène pas de droit à la censure non plus.
Donc, non, je ne limiterais pas aux enfants
parce que je pense que le préjudice peut être causé à toutes sortes de
personnes dans toutes sortes de groupes d'âge, même si cette sensibilité-là,
naturelle, on l'a, je pense, de façon plus grande quand il s'agit des enfants.
Sur la question du Barreau, c'est parce que ce
n'est pas mutuellement exclusif, dans le sens où on n'est pas devant un dilemme
qui nous oblige à choisir entre est-ce qu'on laisse l'entreprise décider ou
est-ce qu'on laisse les tribunaux décider. Il faut bien comprendre que ce
régime-là ne se substitue en rien aux recours judiciaires qui existent devant
les tribunaux. Toute personne peut décider d'aller plaider sa cause devant un
tribunal. Ils peuvent même décider d'aller devant le tribunal directement et de
ne pas faire de demande à l'entreprise.
L'avantage de ce régime-là, c'est qu'on a une
capacité, à mon avis... Parce que, bon, la justice étant ce qu'elle est,
M. le député, vous savez comme moi que quelquefois, si elle est aveugle,
elle peut aussi prendre son temps, et dans certains cas le temps agrandit le
préjudice. Donc, on se donne une possibilité d'en appeler directement à
l'entreprise, de dire : Écoute, là, en fonction des critères qui ont été
établis par la loi, je te demande de déréférencer ou désindexer cette
information-là en fonction des critères qui sont là. Puis, oui, je pourrais
aller devant les tribunaux puis, oui, potentiellement, j'obtiendrais gain de
cause, mais le temps que je dépose ma requête, que je fasse valoir mes
arguments, que la cour m'entende, que la cour prenne la cause en délibéré, que
la cour rende une décision, que le jugement
soit exécuté, écoute, il va se passer un an, deux ans, trois ans, alors que, si
je vais directement à l'entreprise, bien, ça peut peut-être se régler à
l'intérieur d'une même semaine. Donc, c'était un peu ça, l'idée de dire :
On peut aller plus rapidement et on est
capable, peut-être, d'obtenir gain de cause beaucoup plus rapidement
de cette façon-là. Mais ce n'est pas mutuellement exclusif, le recours
devant les tribunaux existe toujours.
Bien, sur les pouvoirs de la CAI... puis, vous
savez, moi, je crois à la CAI, je crois à l'action de la CAI, je crois au
travail de la CAI, mais je pense quand même qu'on a, au Québec, cet équilibre-là
de dire : Bon, bien, cette application-là de la loi se fait via les
entreprises, puis l'entreprise aura toujours la possibilité de se ranger à la
demande en fonction des critères qu'on a établis. Et, comme je vous le dis,
après ça, si le citoyen n'est pas satisfait ou s'il le souhaite, il peut aller
devant les tribunaux. Donc, je pense que cet équilibre-là, il existe déjà. Puis
le pouvoir de surveillance et le pouvoir de
directive de la CAI existent toujours. Donc, à la limite, la CAI, dans le
respect de la loi, pourrait décider d'intervenir. Donc, elle aurait... elle a
ce pouvoir-là déjà.
Il restait un dernier que
vous avez amené, M. le député, auquel je n'ai pas répondu, il me semble,
mais je pense qu'on a les... Ah oui! c'est
ça, c'était : Qu'arrivera-t-il si une entreprise se faisait
«bullyer» judiciairement? Écoutez, je pense que, de toute façon, dans le
contexte actuel, on ne pourrait pas empêcher une batterie d'avocats de
débarquer dans une entreprise en leur disant : Bien, si tu ne fais pas ça,
je vais te poursuivre. Je ne pense pas que la loi amène cette notion-là, dans
le sens où, comme je vous dis, il y a toujours les tribunaux. Donc, Monsanto
qui n'aime pas le fait que Google référence un article de La Terre de chez
nous sur les OGM, même si ça est adopté, pourrait quand même débarquer chez
Google et puis dire : Bien... Oups! Je suis-tu en train de dire des
niaiseries?
Une voix : ...
M. Caire : O.K.
Mais oui, oui, absolument. Bien, je vais juste finir. Donc, il pourrait le
faire.
Ceci étant, je pars du principe qu'une entreprise
comme Google, qui fait ce type de référencement là, a quand même pris des
dispositions pour s'assurer que, légalement, elle pouvait le faire, là, qu'il
n'y avait pas d'atteinte à la réputation, il n'y avait pas de préjudice. Et
donc... Puis savez-vous quoi? Je pense que Google a un contentieux qui est
capable de faire face à Monsanto. Mais je vais laisser
Me Miville-Deschênes compléter la réponse.
Le Président
(M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, oui.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Juste pour clarifier un peu la portée de 28.1, dans
le fond, c'est une loi qui permet à la personne concernée de faire désindexer
les hyperliens qui vont apparaître suite à, comment dire, une recherche fondée sur son nom. Donc, ça ne
s'applique pas à une entreprise. Une entreprise ne pourra pas demander, en vertu de cet article-là,
que l'article soit désindexé parce que ce n'est pas un renseignement personnel.
Il faut que ça soit une personne physique qui dit, exemple : L'article qui
porte sur Jean-Philippe Miville doit être désindexé. Mais l'article qui porte
sur une personne morale, bien, il n'a pas de droit de désindexation, c'est
vraiment les renseignements personnels.
Une voix : ...
M. Caire :
J'allais le dire.
M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est
déjà une précision quand même importante, là. Dans le fond, c'est pour ça que
vous l'avez fait, j'imagine, Me Miville-Deschênes.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui.
M. Nadeau-Dubois : Parce que,
depuis tantôt, on donne, donc, des exemples qui sont à côté de la portée de
l'article. Il faut que ça soit une personne physique. Donc, une entreprise n'a
pas droit à l'oubli, en partant.
Une voix : ...
M. Nadeau-Dubois :
O.K., bon, bien, déjà, on peut exclure tous ces cas-là. Néanmoins, la source de
mon malaise vient du fait que, quand on saisit les tribunaux d'une
affaire comme celle-là, là, on le fait de manière publique en vertu de lois qui
sont publiques puis de jugements qui sont publics, alors que, là, ce qu'on
crée, dans le fond, c'est un raccourci, puis c'est comme ça que le ministre
lui-même l'a décrit, là, temporellement, un raccourci pour qu'un acteur privé,
une personne privée, demande à un autre acteur privé, une autre personne privée,
de faire quelque chose, de retirer une information de la circulation de
l'espace public, et la personne qui juge de si j'accepte ou pas, c'est un acteur privé, c'est une personne privée. Dans ce cas-là, une... Dans ce cas-là, ce sera
surtout des entreprises, en fait, qui
opèrent ces sites-là. Donc, on donne à des acteurs privés, à des entreprises un
pouvoir quand même pas banal de venir trancher sur qu'est-ce
qui va circuler ou pas dans l'espace public, pouvoir qui était avant réservé
aux tribunaux, comme une... pour prendre un
gros mot, une forme de privatisation d'un pouvoir qui était avant détenu par
les tribunaux, où là une entreprise privée va pouvoir le faire.
Là où le ministre a raison, s'il me dit :
Oui, mais ça... La voie des tribunaux existe encore. Elle est plus longue, elle est plus douloureuse, souvent, y
compris financièrement, donc il y a des enjeux, aussi, d'accès à la
justice, là, mais... Et moi, je ne suis pas en train d'argumenter, ici, pour
qu'on ne crée pas ce raccourci, le petit drapeau que je lève, c'est : Comment fait-on pour que ce raccourci ne donne pas
lieu à des abus? Et pourquoi, par
exemple, ne pourrait-on pas
dire, si une personne, si un tiers, par exemple, est... juge que 28.1, là, a
mal été appliqué par l'entreprise, là, que l'entreprise
a accédé à une demande qui était frivole ou qui était injustifiée de désindexer
un renseignement personnel ou une information, pourquoi ne pas créer un recours
à la CAI, une espèce de... ce n'est pas un appel, parce que
l'entreprise, ce n'est pas un tribunal, là, mais de permettre au moins que,
s'il y a abus, bien, qu'il y ait un recours à la CAI pour que la CAI, elle, se penche sur le dossier et
dise : Bien là, je suis désolée, là, le préjudice, là, il est... mettons,
le critère n° 2, là, vous l'avez mal appliqué,
entreprise X ou Y, puis je vous demande de réindexer le renseignement. Pourquoi
ne pas...
Parce qu'évidemment l'autre option... l'autre
option serait que ça soit toujours la CAI qui tranche chaque demande de
déréférencement. L'autre recours, ce serait que la CAI traite chaque demande,
que chaque demande de droit à l'oubli, là, de déréférencement, ce soit toujours
la CAI qui le traite. Je pourrais faire cette proposition, mais ça fait plusieurs heures qu'on discute avec le ministre, puis
je ne suis pas sûr qu'il voudrait aller là. Ce serait sans doute une charge de
travail importante pour la commission. Ça fait que, sans dire que c'est un
passage obligé, pourquoi ne pas en faire une possibilité pour les gens qui
jugeraient que 28.1 a été mal appliqué?
M. Caire : Bien,
en fait... Bien, deux réponses. Non, effectivement, je n'irais pas sur le fait
que la CAI doit être le passage obligé parce que l'objectif de ça, c'est de
donner une autre possibilité aux gens de s'entendre. Voyez ça comme un
règlement hors cour. Puis là je n'aime peut-être pas l'expression parce qu'on
n'est pas dans une procédure où je poursuis l'entreprise, là j'adresse une
demande à l'entreprise. Nous fixons... le législateur fixe des critères et l'entreprise
en fonction des critères, décide si, oui ou non, elle accède à la demande.
Ceci étant, le recours dont vous parlez, il
existe à la CAI, comme on peut avoir n'importe quel recours qui est en lien
avec l'application de la loi d'accès à l'information et à la protection des renseignements
personnels. Ce recours-là, il existe à la CAI. Puis n'oubliez pas que la CAI
est quand même un tribunal administratif en matière d'accès à l'information.
Donc, il existe, ce recours-là, au niveau de la CAI et ensuite avec les
différents tribunaux, là, selon la séquence qu'on connaît de recours
judiciaires. Donc, ce recours-là, il existe pour la CAI, et en plus, comme je
vous le dis, la CAI dépose annuellement un rapport, donc il est possible pour
nous de demander à la CAI de porter une attention particulière à l'application
de cet article-là et de nous faire rapport et recommandations dans son rapport
annuel et dans son rapport quinquennal, son rapport d'application.
Donc, la CAI a quand même plusieurs moyens à sa
disposition de guider le législateur sur l'atteinte des objectifs ou non de
l'article. Mais je réitère que moi, je... puis je crois beaucoup que, dans
plusieurs cas, cet article-là va permettre de régler des situations
litigieuses, épineuses très rapidement. Puis je suis à la même place que mon
collègue, à savoir qu'on ne doit pas non plus menotter nos tribunaux, notamment
la CAI, dans les recours qui existent déjà et qui sont normalement appliqués
par la loi.
• (10 h 40) •
M. Nadeau-Dubois : Donc, juste pour
être clair, si un individu demande le retrait d'un hyperlien parce que ça l'embarrasse, cette personne-là, personnalité publique,
par exemple, dispose d'un certain capital social, puis pas juste social, là, des avocats aguerris interpellent un
réseau social, une entreprise, dit : J'aimerais que tu retires cet
hyperlien parce que, franchement, moi, je juge que ça me crée un préjudice,
l'entreprise dit : Ah! pourquoi pas, tu sais, parfait, monsieur, on va le
retirer, l'hyperlien, en ce moment un tiers pourrait, en ce moment, dans l'état
actuel de la loi, saisir la CAI et
dire : Je juge que cette information-là a été désindexée et que ça
n'aurita pas dû être le cas en vertu de 28.1, et la CAI pourrait trancher puis ordonner le reréférencement de
l'hyperlien en question. Est-ce que je comprends bien?
M. Caire : Oui.
Bien, en fait, c'est-à-dire que non, mais pas parce que la CAI n'en a pas le
pouvoir, mais parce que la loi ne le prévoit
pas. Si vous regardez l'article 28 tel qu'il est écrit actuellement, ça
dit : «Outre les droits prévus au premier alinéa de
l'article 40 du Code civil — donc là, on fait référence au Code civil — la
personne concernée peut faire supprimer un
renseignement personnel la concernant si sa collecte n'est pas autorisée par la
loi.»
Donc, la limite de la loi, c'est de dire :
Bien, tu as collecté une information, tu n'avais pas le droit de le faire, ça
ne répondait pas aux critères de la loi actuelle, donc là tu dois supprimer
cette information-là. Mais ce n'est pas de ça dont on parle, on parle
vraiment... Bon, cas récent, des ados ont filmé de façon indue et à son insu
une jeune fille, ils ont diffusé l'information, c'est sur les réseaux sociaux,
c'est sur les sites publics. La jeune fille en question pourrait, selon
l'article, le nouvel article 28 et 28.1, demander aux médias en question
de retirer le référencement à cette vidéo-là. La loi actuelle ne le prévoit
pas.
Donc, dans ce sens-là, la CAI ne pourrait pas
intervenir parce qu'elle doit intervenir. Elle a le pouvoir, mais la loi ne lui
donne pas les poignées législatives pour le faire.
M. Nadeau-Dubois : L'exemple
que donne le ministre, tu sais, c'est celui qu'on a tous en tête puis c'est
celui pour lequel on veut tous qu'il y ait 28.1 dans la loi, là, qu'on me
comprenne bien. Moi, je parle de cas qui sont différents,
puis là moi, je cherchais à... en tout cas, j'invitais peut-être le ministre à
ce qu'on réfléchisse à une forme de garde-fou
pour ne pas que ça soit utilisé pour... dans d'autres situations, puis il m'a
répondu : Il y a déjà un recours à la CAI.
M. Caire : Oui.
M. Nadeau-Dubois :
J'essaie juste de comprendre c'est quoi, la nature de ce recours-là. Peut-être
que Me Miville-Deschênes peut répondre. C'est quoi, exactement, la
nature de ce recours-là? Et la crainte que j'ai, puis, je le répète, qui est celle aussi du Barreau puis de la
Ligue des droits et libertés, je ne suis pas le seul à avoir cette crainte-là,
comment on s'assure... Est-ce que la CAI... Bien, je vais le poser directement.
Est-ce que la CAI a le pouvoir d'ordonner le reréférencement — j'imagine,
ça se dit — d'un
hyperlien qui aurait été retiré de manière un peu frivole par une entreprise?
Le Président
(M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, en fait, la réponse simple, c'est : Elle
va avoir ce pouvoir-là. Puis
l'explication... en fait, présentement, la loi se limite aux demandes d'accès
ou de rectification directement à l'entreprise qui a collecté puis qui détient le renseignement. Donc, si je fais une
demande d'accès puis j'ai un refus ou de rectification puis un refus,
j'ai un recours auprès de la section juridictionnelle de la commission, puis
ils appellent ça un examen des mésententes, où là la
commission va étudier les arguments des deux parties puis ordonner... dans le
fond, comme tout autre tribunal
administratif, va ordonner... va prendre une décision, là, qui est une
ordonnance. Donc, l'article 123 du projet de loi ajoute
l'article 28.1, c'est-à-dire que... donne à la commission le pouvoir. La
section juridictionnelle de la commission va
avoir le pouvoir de rendre une décision sur l'application de 28.1. Donc,
effectivement, si une personne intéressée dit que ça a été déréférencé,
alors que moi, je juge que ça devrait rester là, là, qu'il va avoir le droit de
recours, qui existe déjà, mais qui ne s'applique pas à ces dispositions-là
actuellement, auprès de la commission qui va pouvoir décider, comme tout
tribunal administratif, de reréférencer ou peu importe le mot qui s'applique,
là.
M. Nadeau-Dubois : Et, inversement,
une entreprise qui aurait décidé : Non, moi, je juge que le préjudice n'est pas vraiment significatif, donc je ne
déréférence pas. Une personne intéressée pourrait demander à la CAI de
trancher, puis la CAI pourrait ordonner
de... Non, non, en effet, ça cause... Les critères de 28.1 sont remplis, vous
devez déréférencer. Je comprends bien?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, effectivement.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Donc, on
peut se rassurer en se disant que, malgré le raccourci qu'on crée, qui servira,
on le souhaite, surtout pour des situations... pour des bonnes raisons, si
jamais ce raccourci-là était emprunté par des acteurs qui sont habités par
d'autres motivations, genre juste protéger mon image dans l'espace public,
bien, qu'il y aurait un garde-fou, qui est la CAI, pour venir s'assurer que
28.1 est bien appliqué. Je comprends bien?
M. Caire : Vous
comprenez très bien.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le
Président.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de La Pinière,
s'il vous plaît.
M. Barrette : Il y a deux
manières de voir ça : il y a la manière de mon collègue, il y a l'autre
manière, je pense, puis j'aimerais ça en discuter, là. Le ministre y a bien
fait référence, là. Moi, je comprends, là, que 28.1 va s'appliquer quand les renseignements collectés ont été collectés contrairement à ce
qui est permis à 40. C'est-tu correct, ça?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Non, en fait...
M.
Caire :
...contrairement, là, mais je vais laisser... Non, mais je vais laisser...
M. Barrette : Bien, c'est parce
qu'on fait référence à ce qui est permis, pas permis par la loi.
M. Caire : Je
vais laisser Me Miville-Deschênes...
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : En fait, 28, c'est un peu le recours classique qui
permet de faire rectifier ou supprimer un renseignement s'il est collecté
contrairement à la loi ou communiqué contrairement à la loi. Donc, s'il n'y a pas de consentement ou s'il y a
une communication qui n'est pas permise. 28.1, c'est un autre
recours, c'est un nouveau recours.
M. Barrette : Je comprends,
mais... Je fais exprès, là, je recommence au départ. 28, là, on fait référence
à des renseignements collectés, entre guillemets, illégalement.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, notamment.
M. Barrette : C'est un «notamment»?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Notamment, parce qu'il y a aussi le droit de
rectification s'ils sont inexacts, s'ils sont incomplets, s'il y a une erreur.
Donc, 28, ça peut être des renseignements collectés illégalement, ça peut être des renseignements qui ont été
collectés légalement mais qui sont
conservés illégalement parce qu'ils auraient dû être détruits, ça peut être des renseignements qui sont... dont...
dans lesquels il y a des erreurs puis que la personne désire faire
rectifier.
M. Barrette : O.K. Restons là, là,
juste là, là, dans ce qui vient d'être dit, là. Là, je comprends, là, que,
lorsqu'une personne se considère factuellement lésée, on va dire ça comme ça,
pour une ou toutes les raisons qui viennent d'être évoquées, il fait sa demande
à l'entreprise, et là l'entreprise décide d'aller de l'avant ou non. Est-ce
qu'elle est obligée, en vertu de la loi, d'aller de l'avant ou non?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : On est
dans le cas de l'article 28, là, une demande de suppression, là?
M. Barrette : Oui, de 28, avant
28.1, là.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui. Bien, est-ce qu'elle est obligée? Tout
dépendant. La personne va... Disons qu'on parle d'une collecte illégale, bien
là, l'entreprise va juger, elle va dire : Non, moi, je juge que j'avais le
droit de les collecter, que le consentement était valide, peu importe, puis
donc elle décide si elle refuse ou donne suite à la demande de la personne concernée,
puis suite à ça la personne concernée peut aller à la Commission d'accès à
l'information à titre de tribunal administratif.
M. Barrette :
O.K. Donc, le chemin après, c'est la Commission d'accès?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui.
M. Barrette : O.K. Et la Commission d'accès, c'est un pouvoir
exécutoire ou c'est un pouvoir de recommandation?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Non, c'est exécutoire. C'est un tribunal
administratif, c'est le même pouvoir qu'avec les organismes publics qui ont
fait une demande d'accès, là.
M. Barrette :
Très bien. C'est juste pour le préciser, là.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, oui.
M. Barrette :
O.K. Parfait. Dans le cas de l'exemple que le ministre a donné, là, la jeune
fille qui s'est fait filmer, ça,
c'est illégal. Donc, en partant, l'organisation n'aurait pas le droit... en
tout cas elle serait passible d'une sanction si elle refusait de l'enlever.
M. Caire :
Sanction?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Ce n'est pas commercial, en fait.
• (10 h 50) •
M. Barrette :
Ce n'est pas commercial.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Tu sais, ce n'est pas... Tu sais, la personne,
généralement, qui va rendre accessible ce type de vidéo là, ce n'est pas une
entreprise. Donc, elle ne serait pas soumise à ces lois-là qui s'appliquent aux
entreprises. C'est un particulier, généralement, qui va diffuser. L'avantage
des nouveaux recours, c'est que, là, on vise l'entreprise qui sert de moteur de
recherche pour accéder à ces vidéos-là.
M. Barrette :
O.K. Puis c'est ça, mon point. C'est quoi, la différence entre...
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, c'est que la loi s'applique aux entreprises,
la loi...
M. Barrette :
Actuelle.
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : ...sur la protection dans le secteur privé. Donc,
si moi, Jean-Philippe Miville, à titre de particulier, je rends accessible
des renseignements, je diffuse, je contreviens peut-être au Code civil, il peut
y avoir de la diffamation, mais la loi ne s'applique pas à moi, c'est vraiment
une loi qui s'applique juste aux activités commerciales.
M. Barrette :
Ah! d'accord. Et là ça va s'appliquer aux moteurs de recherche?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, parce que ces moteurs de recherche sont des
entreprises.
M. Barrette :
O.K. Et ça va s'appliquer en fonction de 28.1 ou de 28?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : C'est 28.1, davantage le 28.1, c'est que ça va
chercher ces cas-là, là, directement.
M. Barrette :
O.K. Parfait. La question qui a été évoquée, que je n'ai pas comprise, de la possibilité
de reréférencement, ça va se gérer comment, ça?
M.
Caire :
...la demande de...
M. Barrette :
Qui? Ça veut dire que...
M. Caire :
L'individu, l'individu peut faire une demande de reréférencement à l'entreprise.
M. Barrette : L'individu qui
aurait demandé un déréférencement pourrait redemander un référencement, mais est-ce
qu'une autre partie pourrait faire ça? Je ne vois pas les...
M. Caire :
Non, c'est l'individu qui est concerné par le renseignement personnel qui est
diffusé qui peut faire la demande.
M. Barrette :
O.K.
Le
Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, vous voulez
rajouter quelque chose?
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui, bien, juste pour être sûr qu'on se comprenne
bien, dans le fond, la demande de déréférencer, c'est la personne
physique concernée.
M. Barrette :
Oui.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Mais la demande de mettre en... comment dire...
M. Barrette :
Reréférencer.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...de reréférencer, c'est toute personne intéressée.
M. Barrette :
Toute personne intéressée.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Toute personne intéressée peut faire une demande...
M.
Caire :
C'est ça je dis, là, «toute personne intéressée». C'est juste un lapsus.
M. Barrette :
O.K. Donc, une tierce partie, là, «intéressée», c'est n'importe qui?
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien là, la commission juge au cas par cas, là.
C'est sûr qu'«intéressée», on peut penser que ça serait la... Dans un
cas comme ça, ça va être un droit nouveau comme recours, là, donc on peut
penser que ça ne se limitera pas à l'entreprise qui a déréférencé et à la
personne concernée qui a demandé le déréférencement parce qu'entre les deux il
y a quand même l'intérêt public à l'information, la liberté d'expression. Ça
fait qu'on peut penser qu'il y a des groupes de défense, là, des journalistes,
ou quoi que ce soit, qui pourraient être intéressés à ce type de demande là,
là.
M. Barrette :
À reréférencer.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui.
M. Barrette :
Et là, à ce moment-là, ça s'en va à la CAI. Ça fait que la CAI, dans ce cas-là,
va agir comme un tribunal.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Exact.
M. Caire :
Bien, elle est un tribunal.
M. Barrette :
Elle est un tribunal, mais c'est pour... au sens conceptuel du terme, elle est
un tribunal, donc... parce que, la question qui vient après, donc, il y a un
appel possible.
M. Caire :
Oui.
M. Barrette :
L'appel à la CAI, je ne le sais pas, ça, il va où?
M.
Caire :
Cour d'appel?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : L'appel? Ah! bien, Cour du Québec.
M. Barrette :
C'est la Cour du Québec.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Là, il y a une section, dans la loi, «Cour du
Québec».
M. Barrette :
O.K. Et les paramètres qui sont énumérés à la suite, ce sont des paramètres
qui, eux, sont ceux sur lesquels on doit se baser pour déréférencer ou
reréférencer?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Exact.
M. Barrette :
Et, au bout du compte, là, au bout du compte, à part la... en fait, pas à part,
pas du tout, c'est la même chose. Au bout du compte, ça va être
l'intérêt public versus l'intérêt de l'individu?
M. Caire : Entre
autres. Bien, c'est... les critères doivent être réunis, donc ce n'est pas...
M. Barrette : Ils doivent être
quoi, pardon?
M. Caire : Parce
que ce qu'on dit, là, c'est «lorsque les conditions suivantes sont réunies»,
donc les trois conditions indiquées doivent être réunies.
M. Barrette : Elles doivent être
ensemble réunies, ou une des trois, ou deux des trois?
M. Caire : Non.
«Réunies», par définition, ça veut dire que les trois doivent être
considérées... non, bien, pas considérées, doivent être présentes. Donc, il
faut que la diffusion de ce renseignement lui cause un préjudice grave relatif
au droit, il faut que ce préjudice soit manifestement supérieur... il faut que
la cessation de la diffusion, de la réindexation ou la désindexation demandée
n'excède pas ce qui est nécessaire... C'est les trois conditions.
M. Barrette : Sauf que ça, ce
sont tous des termes qui, dans l'oeil de la personne qui se considère lésée et
dans la personne qui décide, sont subjectifs.
M. Caire : Tout à
fait.
M. Barrette : Très subjectifs.
M. Caire : Dans
un premier temps. Mais, une fois que la première décision est prise, donc, que l'entreprise
dit : Oui, j'accède, ou : Non, je n'accède pas à la demande, la
personne, à partir de là, qui n'est pas satisfaite de la décision peut
décider : Bon, bien, je vais le judiciariser, et là je vais me présenter
devant le tribunal de la CAI puis faire valoir mes arguments, comme on le fait
dans les demandes d'accès à l'information ou les autres causes qui peuvent être
portées devant la CAI.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Oui, M. le
Président. Dans un exercice comme celui-là, là, il y a une démarche qui est
faite par un individu, parce que, là, on parle d'individus, là, on ne parle pas
d'entreprises.
M. Caire : Oui,
oui, oui.
M. Barrette : Dans une démarche
comme celle-là, là, est-ce qu'il est prévu, de façon absolue, qu'il y a une
décision écrite?
M. Caire : Ce
n'est pas prévu. Dans le cas de la première, ce n'est pas écrit dans la loi que
la décision doit être écrite.
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) :
Oui, c'est écrit.
M. Caire : Bon,
bien, coudon, ce n'est pas ma journée. Ce n'est pas ma journée aujourd'hui.
M. Barrette : Bien, j'aimerais
bien ça, parce que, si ce n'est pas écrit, je vais en faire un amendement.
M. Caire :
Continue donc.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, je cherche l'article, là, en ce moment. Mais,
lorsqu'il y a une demande, que ce soit une demande de référencement ou une
autre demande, on avait prévu que la réponse était écrite. On m'écrit que c'est
l'article 54 de...
M. Barrette : De 64?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...54 de la Loi sur la protection des... Bien, ça
dépend. Là, on parle de la décision de l'entreprise, qui est écrite. Tu sais,
la question, ce n'est pas la... Oui...
M. Barrette : Oui, ça veut dire
que moi, par exemple, je vais voir Google puis je dis : Voici les raisons
pour lesquelles je voudrais que vous
déréférenciez telle chose, est-ce qu'il y a une décision qui est écrite qui
m'est fournie?
M.
Caire : Parce que
54, c'est la commission qui rend une décision écrite.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...non, ce n'est pas 54...
M. Caire : Ce
n'est pas l'entreprise, là. Je vais peut-être gagner mon
premier point de la journée.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Peut-être, mais c'est dans, quoi, l'article...
M. Caire : Je
vais peut-être gagner mon premier point de la journée.
M. Barrette : Pourquoi? Il va y
avoir un amendement d'accepté, c'est ça?
M.
Caire : Non, non,
mais c'est parce que... En tout cas, à 28, 28.1, ça ne dit pas que l'entreprise
doit rendre une décision par écrit. Puis la CAI, 54, la CAI doit rendre ses
décisions, mais ça, un tribunal rend ses décisions par écrit, là. Mais
l'entreprise... Bien, peut-être, peut-être que Me Miville-Deschênes a
raison.
M. Barrette : Bien, je vais
laisser... Je ne veux pas mettre de pression sur Me Miville-Deschênes,
mais là, ici, on est...
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...
M. Barrette : Oui, il l'a
trouvé?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Là, c'est l'article 34, je vais juste vérifier,
il dit que la personne qui refuse d'acquiescer à une demande d'accès ou de
rectification d'une personne concernée doit lui notifier par écrit son refus en
le motivant et en l'informant de ses recours. Puis là je lis la loi, mais
est-ce qu'on l'a modifié, cet article-là, dans le projet de loi? Oui,
article 34, qu'on modifie avec 118 du projet de loi : «Le
responsable de la protection [...] doit motiver tout refus d'acquiescer à une
demande et indiquer la disposition de la loi sur laquelle ce refus s'appuie,
les recours qui s'offrent au requérant en vertu de la présente loi et le délai
dans lequel ils peuvent être exercés.»
M. Barrette : Ça,
c'est 118?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, 118. Dans le fond, c'est l'exigence de répondre
par écrit, notamment.
M. Barrette : Attendez une
minute. À ce moment-là, c'est tellement important que je vais aller le lire moi
aussi, là.
M. Caire : Puis
30, 32 et 34 s'appliquent à une demande faite, en vertu du présent article.
Donc, à mon grand regret, Me Miville-Deschênes a raison.
Une voix : ...
M. Caire : Bien, oui, mais ce n'est pas grave. À un moment
donné, tu sais, il y a des journées de même, hein?
Le Président
(M. Bachand) : Donc, M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Oui, M. le
Président, c'est juste que, là, c'est la partie ministérielle qui me renvoie un
autre article, laissez-moi le temps de le lire, alors.
Le Président
(M. Bachand) : Oui, oui.
M. Barrette : O.K. Là, on parle du responsable de la protection
des renseignements personnels et... C'est parce que 34, là, est-ce
que c'est clair là qu'on fait référence aux diffuseurs Internet, aux moteurs de
recherche?
Le Président
(M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) :
Oui. Bien, en fait...
M. Caire : Oui,
oui, oui.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : On le dit. Bien, comme le ministre l'a souligné...
M. Barrette : C'est parce que,
là, 34, c'est la loi sur les entreprises.
M. Caire : C'est
parce que le responsable, c'est une obligation que l'organisme se dote d'un
responsable, là.
M. Barrette :
Non, je comprends, mais pour une entreprise privée, là.
M. Caire : Oui.
M. Barrette : Mais, pour les
moteurs de recherche, ça s'applique-tu à eux autres, tel quel?
M. Caire : C'est
une entreprise privée, ça s'applique.
M. Barrette : O.K. Alors, il
faut qu'il indique l'élément de la loi, puis là les délais... O.K.
M. Caire : Les
recours qui s'offrent au requérant, les délais qui peuvent être exercés.
M. Barrette : «Prêter
assistance», ça va jusqu'où?
M.
Caire : «Prêter
assistance»? Bien, ça, c'est le débat qu'on a eu dans les articles précédents,
là.
M. Barrette : Oui, je sais.
M. Caire : C'est
dans ce qui reste du domaine du raisonnable.
M.
Barrette : O.K. Est-ce qu'il
doit prêter assistance... Bien, «domaine du raisonnable»... On peut
imaginer... on peut imaginer une iniquité qui viendrait du fait que, pour
entreprendre des démarches comme ça, ça nécessite de faire affaire avec des
conseillers, des avocats, qu'il y ait des coûts afférents à une telle démarche.
M. Caire : Bien,
pas au niveau de la CAI, au niveau de l'appel, peut-être.
M. Barrette : Mais au niveau de
l'entreprise, dans la première phase, là.
• (11 heures) •
M. Caire : Mais
au niveau... Bien, en fait, au niveau de la demande à l'entreprise, là, c'est
de signifier sa demande à l'entreprise. Si l'entreprise refuse, elle indique
pourquoi, elle indique en vertu de quel article, elle indique quels sont les recours qui peuvent être exercés
par la personne. Puis elle peut donner, je pense, les conseils pour
dire : Bien, voici, tu peux t'adresser à la CAI, tu as tant de temps, tu
fais une demande écrite. Mais les recours à la CAI ne nécessitent pas d'être
représenté par des procureurs.
M. Barrette : Non, mais,
parfois, une personne moins bien informée pourrait avoir besoin d'une telle
aide.
M.
Caire : Oui, sauf
que la CAI, dans son rôle, a généralement... Puis, pour avoir piloté quelques
dossiers dans ce sens-là, là, la CAI, dans
son rôle, tient compte du fait que ceux qui sont devant elle ne sont pas des
procureurs aguerris. Puis il y a vraiment un volet aussi, là... bien, pas
introspectif, là, ce n'est pas ça du tout, un volet d'avoir l'ensemble des éléments, puis la CAI, avec son
volet surveillance, peut aller chercher des informations, aussi, qui
auraient une capacité de compenser pour... ce qu'un tribunal ne fera pas. Dans
les cours, la CAI a quand même différentes ramifications
qui permet d'aller chercher l'ensemble des éléments puis de baser son jugement
là-dessus, indépendamment des lacunes juridiques que pourrait avoir un citoyen
qui se représente lui-même, là.
M. Barrette : Je pose la question
au cas où on se retrouve devant une situation de David contre Goliath.
M. Caire : Oui,
oui. Non, mais j'avais bien compris le contexte de la question. Puis c'est pour
ça que la CAI amène un volet qui est quand même particulier. N'oublions pas
qu'elle a un volet surveillance en plus de son volet juridictionnel. Donc, souventefois, même dans des cas où moi, je suis
allé jusqu'au tribunal de la CAI, elle va faire des investigations, elle
va aller chercher de l'information, elle va pouvoir substituer au fait que la
personne n'est pas nécessairement représentée par un procureur. Il y a même des
cas où la CAI ne souhaite pas qu'on soit représenté par un procureur.
M. Barrette : Pourquoi?
M. Caire : Je ne
me souviens plus. On avait dit ça, à un moment donné. On avait fait une
demande, comme groupe d'opposition, puis ce n'était pas clair que l'avocat
pouvait être là, là. Vous l'essaierez, là...
Des voix :
...
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Le ministre est
sûrement... va sûrement être d'accord avec le fait
qu'il y a des gens qui pourraient être dans des situations où leurs
informations personnelles sont diffusées de façon critiquable et qu'une personne n'ait pas les ressources physiques, même, dans certains
cas, éducationnelles, pour faire une telle démarche. Pensons à des personnes qui sont analphabètes fonctionnelles qui sont
filmées à leur insu, leurs images sont utilisées, ça vient à leurs oreilles, et là ils se rendent
compte de ça, puis ils veulent faire arrêter la diffusion, ils font comment, ce
monde-là?
M. Caire :
Bien, ils ont toujours la possibilité de prendre les informations via la CAI.
Je veux dire, la CAI a quand même cette... offre cette possibilité-là
aux citoyens. Puis là on ne parle pas non plus d'une démarche juridiquement
très, très, très pointue, là.
Je veux dire, il y a un site x, je vois des
photos de moi, j'appelle le propriétaire du site x en question, je dis : Hé! il y a des photos de moi là-dessus, enlève-moi
ça de là. Alors, à partir de là, le site en question va dire : Bien oui,
je les enlève, parfait, ou : Non, je ne les enlève pas. Mais, si on ne les
enlève pas, le site en question va dire au citoyen : Bien, je ne les enlève pas parce que la loi
d'accès à l'information et la protection des renseignements personnels, à
l'article untel, untel, untel, dit que je dois faire ça, cet article-là, c'est
correct, en vertu de cet article-là, je suis correct. Si tu n'es pas d'accord
avec moi, avec ma décision, bien, tu peux aller à la CAI pour faire valoir tes
droits, puis, bien, la CAI... voici comment tu peux contacter la CAI, voici
qui, à la CAI, s'occupe de ça, tu peux téléphoner du lundi au vendredi, de
telle heure à telle heure. Là, vous comprendrez que je caricature, là.
M. Barrette : Oui, moi aussi.
M.
Caire : Il y a un
minimum d'assistance à donner à la personne, donc la personne va quand même...
ne sera pas laissée à elle-même.
M. Barrette : Mais là on est
dans l'assistance après le refus. Moi, je parle de l'assistance à la demande.
M. Caire : Mais
la demande, là... Bon, prenons un cas, je vois quelque chose sur Facebook,
bien, je contacte Facebook puis je dis à Facebook : Tu enlèves ça de là.
Bon, bien là, j'exerce mon droit à l'effacement. Alors, Facebook, à partir de
là, tombe sous le coup des articles de la loi. Mais la demande, elle n'est pas
complexe, là. La demande, ça n'a pas besoin
d'être un mémoire rédigé par un avocat. Je veux dire, moi, je le signifie à
Facebook : Il y a des photos de
moi sur un site x de telle personne, puis je veux qu'on enlève ça de là. C'est
une demande en bonne et due forme. À partir de là, Facebook doit agir en
fonction de la loi, et là le citoyen va quand même avoir les informations dont
je vous parle.
Donc, si Facebook dit : J'enlève les photos
en question, bien, les photos sont enlevées, puis, si
Facebook dit non, bien, Facebook doit dire
pourquoi, en vertu de quoi il dit non. Puis, à partir de là, qu'est-ce que tu
peux faire pour... si tu n'es pas d'accord avec ma décision, qu'est-ce
qui sont tes recours qui sont permis, puis à qui tu peux t'adresser, puis
comment tu peux adresser cette demande-là, de quelle façon, il y a un minimum.
Comme je vous dis, il y a un minimum. Puis ça, on a eu cette discussion-là
précédemment, là, sur l'assistance raisonnable, là, il y a un minimum. Je veux
dire, Facebook ne peut pas dire non, puis ça s'arrête là, là. Ce n'est pas
comme ça que ça marche, ce n'est pas ça que la loi dit.
M. Barrette : Je vais me faire
l'avocat du diable juste pour ce matin, là. Le ministre peut-tu m'indiquer aujourd'hui,
juste de même, là, s'il devait faire ça chez Facebook, à quelle porte il irait
frapper?
M. Caire :
N'étant pas un utilisateur de Facebook très assidu... Mais, à mon avis, si je
vois un site de Facebook, il doit y avoir un «contactez-nous» quelque part.
M. Barrette : Alors, y a-tu quelqu'un
dans la pièce qui peut nous dire où frapper? Je fais exprès, là. Là, si c'est
si simple que ça, là, j'imagine que, du côté du législateur, on a regardé ça. Est-ce
qu'actuellement il y a une obligation dans la loi, pour ces entreprises-là de
moteur de recherche et compagnie, clairement indiquée : Vous voulez des
référencements, protection personnelle, «whatever», vous allez à telle place?
M. Caire : Oui,
oui, oui. C'est les articles précédents qu'on a étudiés, où il faut nommer un
responsable, que, ce responsable-là, il faut qu'on indique qui il est, comment
le rejoindre, comment le contacter. C'est les articles où on a discuté de toute
la politique de gouvernance, qu'on devait rendre accessible par un site Web...
M. Barrette : Ça, je me
souviens de ces articles-là, là, j'y étais pour un bout.
M. Caire : Alors,
la réponse à votre question, c'est oui.
M. Barrette : Mais, pour la
question de 28, 28.1, là, est-ce que c'est nominatif, ça, dans les indications
qui doivent apparaître?
M. Caire : Je ne
comprends pas la question.
M. Barrette :
Moi, là, je ne connais pas ça, je suis une personne, là, qui est plus ou moins
fonctionnelle, ça m'arrive. Mon garçon me fait me rendre compte de ça, je ne
suis pas content. Je ne connais rien de Facebook parce que
je ne suis pas là-dessus. Est-ce que, grâce à mon garçon, qui est habitué à
Facebook... il va facilement, lui, m'indiquer à quelle porte frapper?
M. Caire :
Oui, oui.
M. Barrette :
C'est écrit où?
M. Caire :
C'est écrit dans les articles précédents sur le responsable de la protection
des renseignements personnels.
M. Barrette :
Oui, je me souviens de ça, mais je ne me souviens pas d'avoir vu quoi que ce
soit de spécifique à 28 et 28.1.
M. Caire :
Non, mais ce n'est pas spécifique à 28, 28.1, c'est spécifique à toute plainte
que je pourrais vouloir déposer. Or, ici, on parle d'une plainte au sens très
large du terme, évidemment, là, mais...
M. Barrette :
Large, oui.
M. Caire :
Oui, mais ça reste... Tu sais, mettons, là, intuitivement, là, j'ai un
responsable des plaintes, je veux qu'il enlève ça de son site, intuitivement,
je pense qu'on peut raisonnablement penser que le responsable des plaintes est
la bonne personne à contacter, à tout le moins que, si ce n'est pas la bonne
personne à contacter, le responsable des plaintes devrait être capable de me dire qui est la
personne dans son organisation à qui je dois m'adresser.
Donc,
la réponse à votre question, c'est, pour moi, clairement, oui. C'est simple,
et c'est l'objectif, justement,
d'avoir un responsable de la protection des
renseignements personnels.
M. Barrette :
Ça, c'est correct. Ceci dit, de mémoire, il n'y avait pas de délai qui était
imparti à l'entreprise pour donner une réponse à ça.
M. Caire :
Bien, il va y avoir des articles de mise en application.
M. Barrette :
On... Lesquels? Est-ce qu'on les connaît?
M. Caire :
On est à la fin, là.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...les délais de...
Le
Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Excusez.
M. Caire :
On est à la fin, là.
• (11 h 10) •
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : À l'article 32, qui est modifié par
l'article 116 du projet de loi, on prévoit, comme dans le secteur public,
grosso modo, là, un délai de 30 jours pour répondre à la demande, sinon
elle est réputée refusée.
M. Caire :
Vous parliez de mettre en place le responsable de la protection, puis tout ça?
M. Barrette :
Non, je parlais de ça.
M. Caire :
Le délai de plainte... de traitement de la plainte?
M. Barrette :
Non, pas la... la réponse. Puis là, à 116, je le vois, là, on le verra tantôt,
c'est l'exécution de la décision ou c'est juste la réponse?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Ça, c'est pour répondre à la demande.
M. Barrette :
Donc, pas l'exécution de la chose. On y verra à 116, quand on y arrivera, là.
O.K.
Je vais revenir à 28,
là. Ça, ça veut dire que, potentiellement, là, on va avoir plein de débats de
Charte de droits et libertés, là, pour l'intérêt public.
M. Caire :
C'est possible.
M. Barrette : Bien, moi, quand
je regarde les critères, là, il y a les trois éléments qui doivent être
retenus. Déjà, en partant, là... Bien, peut-être que le ministre pourra me
donner des indications, on va les passer.
«La
diffusion de ce renseignement lui cause un préjudice grave relatif au droit et
au respect de sa réputation ou de sa vie privée.» Les cours sont pleines de jugements
à propos... sur des causes pour lesquelles le lésé considérait que sa
réputation avait été ternie de façon significative. Les cours ont dit non.
Alors, dans l'esprit du ministre, là, c'est quoi, «grave»? Ça va être quoi, le
critère pour l'entreprise? Comment...
M.
Caire : Ah! bien,
c'est en fonction de la jurisprudence que... Puis, je veux dire, le député
vient de le dire, à juste titre, là, les tribunaux ont statué là-dessus rien
qu'en masse, là, c'est en fonction de la jurisprudence qu'on va statuer, là.
M. Barrette : Mais c'est on ne
peut plus relatif.
M. Caire : Bien,
ça le devient de moins en moins, dans le sens où la jurisprudence établit le
cadre de ce qui est d'abord un manque de respect à la vie privée. On a même
parlé d'attentes... d'expectatives, je ne me souviens plus de la formulation
exacte, là, relatives à la vie privée, là... raisonnables, expectatives
raisonnables...
Une voix : ...
M. Caire :
Attentes raisonnables de la vie privée.
M. Barrette : Bien,
raisonnables...
M. Caire : Bien,
c'est des concepts qui ont été définis par les tribunaux, M. le député, puis la
loi telle que nous l'avons écrite s'assoit justement sur ces concepts-là qui
sont entendus par les tribunaux, parce qu'ils sont entendus par les tribunaux
et donc pourront s'interpréter facilement par les tribunaux.
M. Barrette : Bien, moi, je
vais m'inscrire en faux là-dessus, là, parce que, s'il y a une chose qui
m'apparaît très aléatoire, c'est le jugement du... Il n'y a pas de check-list
au tribunal pour déterminer ce qui est un «préjudice grave relatif au droit au
respect de sa réputation», parce que ce n'est pas «et de la vie privée», c'est
«ou de la vie privée». Ça fait que, du côté réputationnel, là, j'ai hâte de voir
comment une entreprise va juger de ça. Est-ce que le ministre, aujourd'hui, a,
à sa connaissance, une grille d'analyse qui permet de faire ça, qui permet à
une tierce partie de dire : O.K., là, les tribunaux, là, ont déterminé ce
qui était grave sur le plan réputationnel sur la base d'a, b, c, d? Moi, je peux dire une chose, l'ayant expérimenté
personnellement, réputationnel, par exemple, pour un politicien, O.K.,
que c'est bar ouvert, là. Le politicien, lui, techniquement, on peut lui faire
n'importe quoi.
M. Caire : Absolument, mais c'est une des raisons pour lesquelles on
amène 28.1. Puis c'est ce que je répondais à mon collègue de Gouin.
Est-ce qu'on devrait le limiter aux enfants? La réponse à cette question-là, de
mon point de vue à moi, là... puis, je veux dire, j'écoute les collègues, là,
mais c'est non, justement, parce que vous avez raison, je veux dire, on est
dans un contexte où...
M. Barrette : Mais là...
M. Caire : ...je
vous dirais, non seulement ce n'est pas interdit, mais c'est pratiquement...
M. Barrette : Le quotidien.
M. Caire : ...pratiquement
le quotidien, et c'est même bien vu, là. Alors, à un moment donné, oui, je
pense qu'on fixe des limites.
M. Barrette : Ici, on ne va pas
dire que ces articles-là sont là juste pour les enfants, là, c'est l'amendement
pour les enfants.
M. Caire : Non, mais c'est... Non, non, c'est ça que je dis.
C'est parce que le collègue de Gouin, tout à l'heure, dans l'échange qu'on
a eu, disait : Est-ce qu'on ne devrait pas limiter? Parce que le Barreau...
je pense que c'est le Barreau, M. le député de Gouin, qui disait : On
devrait limiter ça aux seuls enfants, parce que le reste, ça amène un
risque de censure qui, selon le Barreau, était trop grand. Bon, moi, je ne
partage pas ce point de vue là.
M. Barrette : Moi,
personnellement, non plus. Je ne vois pas... Moi, je ne vois pas la censure
potentielle.
M. Caire :
Bien... Bon, sans dire que c'est inexistant, je pense que ce n'est pas le
risque principal. Puis moi, je pense effectivement qu'il y a des préjudices qui
peuvent être causés à d'autres groupes que des enfants. Puis je comprends que
nous avons une sensibilité particulière, et je la comprends et je la partage,
pour les enfants. Ceci étant dit, ça ne rend pas le préjudice qui est causé aux
autres groupes plus acceptable. Pour moi, ce n'est pas acceptable.
M. Barrette : Non, non,
là-dessus... là-dessus, on s'entend.
M. Caire :
Non, non, mais je sais. Je sais qu'on est d'accord, avec le député de La
Pinière, là, mais... Et donc la loi et les concepts qui sont véhiculés, qui
sont repris par la loi... C'est parce que, si on prend ces concepts-là, puis
là-dessus je fais un acte de foi envers les juristes de l'État, c'est parce que
c'est des concepts qui ont été définis au fil du temps par les tribunaux.
M. Barrette : Oui, mais ma
question, ce n'est pas ça, parce que les trois conditions, là, elles sont
exercées par l'entreprise.
M. Caire : Oui,
en première instance.
M. Barrette : Non, non, non, l'entreprise,
là, ce n'est pas... À 28.1, ce n'est pas la cour qui décide ça.
M. Caire : Pas en
première instance, mais éventuellement... Là, attendez un peu, là.
M. Barrette : Éventuellement.
M.
Caire : Parce que
l'idée... puis c'est ce que je disais tantôt, l'idée, c'est d'offrir une voie
rapide, de dire : Je peux m'adresser... qui que je sois, je peux
m'adresser à l'entreprise...
M. Barrette : Bien, c'est ça,
mon point.
M. Caire :
...parce que ce sera toujours la façon la plus simple et la plus rapide d'y
arriver. Si l'entreprise dit : Bien,
moi, j'évalue les critères, je juge que ces critères-là ne sont pas rencontrés
par la situation que vous me proposez et donc je n'accède pas à votre
demande, bien, les critères, ils ne s'évaporent pas, là, parce qu'on s'en va à
la CAI. La CAI, elle, elle regarde la loi, ce que la loi dit. Donc, ces
critères-là sont quand même existants, sont quand même prescrits par la loi. Puis
la CAI comprend quelle est l'intention du législateur. Et donc, dans son
évaluation, bien, les critères, ils vont être là pareil, là, elle ne fera pas
abstraction de 28.1 parce qu'on est rendu à la CAI, là.
M. Barrette : Mais ce n'est pas
ça, mon angle.
M. Caire : Je ne
comprends pas.
M. Barrette :
Mon angle, là, c'est que... puis je vais le... à la lueur de... à la lumière de
la conversation qu'on a, c'est qu'essentiellement, là, les
critères 1°, 2°, 3°, qui doivent être exercés par l'entreprise...
essentiellement, on demande à l'entreprise de faire du mieux qu'ils peuvent
pour faire la même chose que la CAI ferait ou fera si l'individu n'est pas
satisfait de la décision de l'entreprise.
M. Caire : Exact.
M. Barrette : Bon. Mais j'ai de
la difficulté, là, en termes opérationnels, à voir ça s'exercer quand on ne
donne aucun, entre guillemets, guide de référence à l'entreprise. Je reprends
l'exemple du premier, là...
M. Caire : Bien,
je ne suis pas d'accord. Là, je ne suis pas d'accord.
M. Barrette : Bien, c'est
parfait, c'est pour ça que je pose la question. Parce que je reprends le
premier critère. On dit que les trois doivent être réunis. Donc, il y a trois
tests. Pour l'entreprise, il y a trois tests. 1°, y a-t-il un préjudice
grave — je
vais le limiter, là — à
la réputation? Parce que c'est celui-là qui est le plus flou. Puis là il faut
qu'il y ait ça, là, ce n'est pas... Il faut qu'il y ait ce test-là. Est-ce
qu'il y a un préjudice supérieur à l'intérêt public de connaître le
renseignement ou l'intérêt de toute personne de s'exprimer là-dessus? La
cessation de la diffusion, ta, ta, ta, est-elle nécessaire pour éviter la
perpétuation du préjudice? Bien, 3°, ça m'apparaît être plus facile, ce n'est
peut-être pas plus facile, on pourrait trouver des angles pour dire que non.
Mais c'est des questions pas simples, là, 1° et 2°, qui sont peut-être plus
simples pour des gens expérimentés que seraient la CAI et la Cour supérieure du
Québec, mais, pour l'entreprise, on ne leur donne pas... Moi, il me semble qu'on
leur donne peu d'outils pour faire cette job-là.
M. Caire : Je ne
suis pas d'accord, et je vous explique...
M. Barrette : Alors,
explication.
M. Caire :
Explication fort simple, parce que le député de La Pinière l'aborde sous
l'angle de l'expertise juridique, moi, je
dis : Ça, à cette étape-là, on l'aborde sous l'angle du gros bon sens citoyen.
Puis je donne un exemple bien simple,
bien simple, puis tout le monde va faire : Ah oui! Bien là, c'est sûr, bien
oui. Alors, cette jeune fille filmée...
• (11 h 20) •
M. Barrette : Bien oui, bien
là, c'est sûr.
M. Caire :
Eh voilà! Cette jeune fille filmée à son insu pour laquelle on diffuse une
vidéo sur Internet, je demande de désindexer... Puis là je ne suis pas sûr que
j'aie besoin d'expliquer très longtemps. Est-ce que la diffusion de ce renseignement
cause un préjudice grave relatif au droit? La petite fille, là, ça lui fait-tu
du tort, ce que tu fais là? Bien, je pense que oui.
Ça fait que, tu sais, M. le Président, là, je
réitère, l'objectif de l'article 28.1 n'est pas de se substituer aux
tribunaux et à l'expertise du tribunal. L'objectif de 28.1 est de permettre une
discussion de gros bon sens entre quelqu'un qui subit un préjudice et quelqu'un
qui contribue, probablement involontairement, à ce préjudice-là — je dis «probablement» parce
que je ne veux pas présumer des
intentions des uns et des autres — et
de permettre de dire : Écoute, ça, là, j'aimerais ça que tu enlèves
ça de là, s'il vous plaît, là, ça me cause du tort. Alors, on met des critères.
Est-ce que, de ce fait, on s'attend à ce que les
entreprises deviennent des spécialistes du droit constitutionnel de... Bien
non. Mais est-ce qu'on s'attend à ce qu'ils exercent cette capacité-là à
prendre une décision avec du gros bon sens? Puis là je vous parle de petites
entreprises parce que, comprenons-nous bien, M. le Président, quand on fait
référence aux Google de ce monde, là, ils ont des contentieux probablement
aussi importants, sinon plus, que le gouvernement du Québec. Des avocats qui
sont capables de lire des jurisprudences puis des jugements, ils en ont un puis
un autre. Ça fait qu'on ne s'adresse pas... Puis je ne pense même pas à ces
organisations-là, je pense à des organisations de plus petite taille qui,
elles, n'auraient peut-être pas le contentieux pour faire ces analyses-là,
savantes. Mais je pense qu'à un moment donné il y a une notion de gros bon sens
qui rentre en ligne de compte.
Là, le député de La Pinière va me
dire : Oui, mais, tu sais, le gros bon sens, ça a ses limites. Exact.
C'est la raison pour laquelle les recours devant les tribunaux ne sont pas
exclus. C'est une possibilité qu'on a d'agir rapidement pour mettre fin à un
préjudice rapidement. À la limite, là, le citoyen pourrait décider de ne même
pas contacter l'entreprise. Le citoyen, il pourrait décider, là, de s'en aller
directement devant le tribunal puis dire : Bien, moi, je porte plainte
devant le tribunal. Il pourrait faire ça. Il n'y a pas une obligation de passer
par l'entreprise, là, ce n'est pas... Il n'y a rien là-dedans qui dit :
Vous devez d'abord, préalablement faire une demande à l'entreprise. C'est une
possibilité qui est offerte à la personne qui se sent lésée.
M. Barrette : Je vais poser une
question qui ne m'était pas venue à l'esprit à date, mais là elle me vient à
l'esprit : Est-ce que, moi, comme tierce partie non intéressée, on va dire
ça comme ça, je suis non intéressé... est-ce que je peux demander un
déréférencement quand je constate une fausseté? Non, hein?
M. Caire : Bien,
si vous n'êtes pas intéressé, ce que je comprends, c'est que la réponse, c'est
non.
M. Barrette : C'est non. Bon,
là, je vais prendre un exemple... C'est une question qui me vient à l'esprit,
qui est en lien avec la question que j'allais poser, qui, elle, était déjà
présente dans mon esprit. En réponse au ministre, là, la grosse compagnie, la
petite compagnie, là... Je vais prendre un cas qui mélange bien des affaires,
bien des grosseurs de compagnies, O.K.? Puis je ne pense pas que ça va le vexer
si je le nomme parce que lui-même a pris une position publiquement, récemment.
Alain Vadeboncoeur, dont la réputation est impeccable, à un moment donné, est
sorti sur les réseaux sociaux parce qu'une compagnie l'avait pris, puis, je
pense, frauduleusement — pas
je pense, clairement frauduleusement — en mettant sa face associée à
un produit qui, disons... que je ne qualifierai pas. Est-ce que j'ai l'immunité
parlementaire au salon rouge?
M. Caire :
Absolument. En commission parlementaire, M. le député, vous pouvez dire ce que
vous voulez.
M. Barrette : Alors, une scrap
totale, O.K., mais totale.
M. Caire : C'est
quoi, le nom du produit?
M. Barrette : Je ne m'en
souviens plus.
M. Caire :
Envoye, «chicken»!
M. Barrette : Une patente de
régime, là, que je ne le sais plus trop quoi, là, ça n'avait pas une minute de
bon sens, mais ils ont pris la face à Vadeboncoeur puis ils l'ont associée au
produit. Ça, c'est une petite compagnie, mais qui se promène dans la diffusion
de grosses compagnies. Alors, admettons qu'Alain Vadeboncoeur, lui, là, là...
Lui, il va aller frapper à quelle porte pour arrêter ça? Parce que, lui, la
seule chose qu'il a réussi à faire à date, là, c'est
d'aller publiquement puis dire : Écoutez, là, cette affaire-là, je
n'ai aucun lien, c'est de la fraude. Ce qu'on vous dit dans cette publicité-là,
c'est... de toute façon, là, c'était médical... médicalement ridicule.
M. Caire : O.K.
Bien, dans le cas qui nous préoccupe, non seulement le Dr Vadeboncoeur
pourrait effectivement sortir publiquement puis dire...
M. Barrette : Il l'a fait.
M. Caire :
Mais il pourrait le faire encore. Mais, dans l'expectative où l'Assemblée
nationale adopte 64 dans sa forme actuelle,
28.1 dirait : Vous allez au responsable de la protection des renseignements personnels de l'entreprise qui possède le moteur qui diffuse l'information, vous faites une demande de déréférencement, parce que, visiblement — puis
là c'est mon opinion à moi, donc je vais me
lancer, moi aussi, encore une fois, dans la pratique illégale du droit — visiblement,
cette entreprise-là se sert de l'image et de la réputation, et donc des renseignements
personnels, du Dr Vadeboncoeur à des fins pour lesquelles non seulement
il n'y a pas eu de consentement, donc la collecte n'a pas été autorisée,
la communication, encore moins... et donc pourrait dire : Bien, écoutez,
en plus de peut-être aller voir du côté de la CAI s'il n'y a pas quelque chose
à faire de ce côté-là...
Parce qu'il y a des
articles, soit dit en passant, dans 64, qui prévoient qu'une utilisation
malveillante... là, je n'ai plus les termes exacts, là, mais, si vous utilisez
des renseignements personnels à des fins pour lesquelles il y a des sanctions qui sont potentiellement...
qui peuvent être encourues... Donc, il y aurait ce volet-là. Et en plus il
pourrait dire au propriétaire du moteur de recherche, à son responsable de la protection
des renseignements personnels : S'il vous plaît, désindexez-moi ça. Puis
là, bien là, il y aurait la décision qui serait rendue, et soit la désindexation est faite, soit ce n'est pas fait,
puis, à ce moment-là, bien, il
y a les recours devant la CAI pour
cet autre aspect-là. Mais, quant à moi, là, la loi, il y a deux éléments
pour lesquels il y aurait des recours, donc une utilisation non prévue de renseignements
personnels pour lesquels aucun consentement n'a été demandé ni octroyé, encore
moins, et une possibilité de désindexation.
M. Barrette :
Dans la vraie...
M. Caire :
Je regarde Me Miville-Deschênes, puis il n'a pas de spasme, donc j'imagine
que la réponse... Je me replace, là.
M. Barrette : Non, je le vois du coin de l'oeil, puis, M. le ministre, quand vous dites des choses dangereusement douteuses, il fronce
les sourcils. Il n'a pas froncé les sourcils.
M. Caire :
Mais c'est juste qu'aujourd'hui il me semble qu'il a froncé à quelques
reprises.
M. Barrette :
Oui, oui, puis d'ailleurs, quand c'est sérieux, il se penche vers son
ordinateur.
M. Caire :
Oui, oui, oui, c'est...
Une voix :
...
M. Caire :
Mais c'est le fun d'être en cage comme ça parce qu'on peut s'observer les uns
les autres dans notre habitat naturel.
M. Barrette :
Je pourrais faire une imitation, mais je pense que, manifestement, le ministre
peut lire le non-verbal de son équipe.
M. Caire :
Oui, j'ai toujours un oeil sur le «side». Ce n'est
pas un bon matin pour moi.
M. Barrette :
Une question purement technique. Dans le cas... Parce que, là, les moteurs de
recherche, ça se parle entre eux autres, à un moment donné, ça circule, là.
Est-ce que l'individu, l'individu qui se sent lésé... Est-ce que le ministre a
pensé... Peut-être que c'est déjà compris dans la loi, mais je ne l'ai pas vu
et/ou compris. Est-ce qu'il doit y aller par moteur de recherche, entreprise
par entreprise, ou il peut faire comme dans le bon vieux temps? Tu sais, dans
l'ancien temps, dans le temps qu'il y avait des journaux, par exemple, le gouvernement,
il mettait un avis dans le journal, puis c'était considéré comme vu...
M. Caire :
Oui, non, non. Non, je pense que la demande doit être adressée entreprise par entreprise.
C'est moteur de recherche par moteur de recherche.
M. Barrette :
O.K. Et le fait que le moteur de recherche n'est pas hébergé officiellement au
Canada, ça ne fait pas de problème parce qu'ils sont obligés de se plier à la
loi du Québec?
M. Caire :
Me Miville-Deschênes.
M. Barrette :
Il n'a pas eu de froncement. Ça fait que la réponse doit être simple.
M. Caire :
Bien là, je n'ai pas pris de chance. Je lui ai passé la puck tout de suite.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : En fait, en matière de droit international,
l'application de la loi va dépendre de certains facteurs de rattachement, donc
ce n'est pas si simple que ça. Mais, dans un cas de moteur de recherche qui
vend de la publicité à des entreprises québécoises, bien, il a été reconnu par
différents tribunaux que c'était une entreprise assujettie aux lois du Québec,
là.
M. Barrette :
Dans le cas d'Alain Vadeboncoeur, là, pour lequel c'est une compagnie... c'est
commercial, elle vend un produit, utilise erronément son visage, il peut quand
même, lui, demander l'arrêt du référencement?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oh! oui, oui, oui.
M. Barrette : Ça, ce n'est pas
un... même s'il y a un contrat avec la... s'il y avait un contrat. Je ne suis
pas sûr qu'il y ait un contrat, là, parce que...
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : S'il y avait un contrat entre qui?
M. Barrette : Bien, s'il y
avait une publicité payante qui était sur le... Parce que, là, il y a ça
aujourd'hui, on peut payer pour ça, là. Même s'il y avait ça, il n'y aurait pas
de problème de ce côté-là?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, il peut toujours demander le déréférencement
des renseignements, là, à partir de son nom et prénom, qui sortent sur le
moteur de recherche, oui.
M. Barrette : Oui, mais le
problème, c'est que lui, il n'est pas référencé, lui, il est utilisé.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, bien, le droit de déréférencement aura ses
limites dans cette situation-là, là, parce
qu'il y a des gens qui tombent sur la publicité probablement sans chercher
Alain Vadeboncoeur, ils tombent sur la publicité parce que... par tout
plein de moyens, puis son visage est sur la publicité, là. Donc, le droit au
déréférencement, c'est vraiment juste suite à une recherche effectuée avec le
nom et le prénom.
M.
Caire : Mais, dans
son cas, il y a quand même une utilisation illicite de ses renseignements
personnels, là, ça fait qu'il peut, à la
limite... puis c'est là où les sanctions pécuniaires administratives, sanctions
pénales pourraient s'appliquer.
M. Barrette : O.K. Là, je veux
juste les passer, si le ministre pouvait élaborer un petit peu, juste pour que
je comprenne bien, là, pour ce qui est de l'évaluation des critères du deuxième
alinéa, là.
M.
Caire : O.K. Là, on
est sur le...
M. Barrette : La suite, après
les trois critères dits réunis, là.
M. Caire : O.K.,
dans l'évaluation des critères, oui.
• (11 h 30) •
M. Barrette : Alors, que
voulait dire le ministre quand il a inscrit «du fait que la personne concernée
est une personnalité publique»? Moi, ça me touche personnellement, ayant été
l'objet de diverses manoeuvres politiques de d'autres partis politiques assez
répréhensibles en ce qui me concerne, là.
M.
Caire : Oui,
bien... puis je peux vous dire que je vous comprends parce que moi-même... je
veux dire, je pense qu'on peut tous... bon, je comprends qu'il y en a qui sont
plus taxés que d'autres, là. Mais de façon... Bien, en fait, c'est que... puis
je pense que le député de La Pinière a répondu à sa propre question en
disant que, quand on est une personnalité publique, je pense qu'on est plus
vulnérable à ce genre de situation là, et le préjudice, pour moi, il est exacerbé.
Je veux dire, par exemple, que quelqu'un qui aurait un métier qui ne l'amène
pas dans l'espace public pourrait peut-être, oui, avoir un moment difficile,
mais, quelqu'un qui est une personnalité publique, ça pourrait mettre fin à sa
carrière, là. Donc, le préjudice n'est peut-être pas au même niveau. Donc,
c'est pour ça que je dis... puis je dis «peut-être», puis je le mets au
conditionnel, je vois mon collègue de Gouin qui fronce les sourcils, mais je le
mets au conditionnel, mais le fait est que le préjudice peut être exacerbé par
le fait que la personne en question est une personnalité publique.
M. Barrette : Mais on demande
quand même à l'entreprise de porter ce jugement-là.
M. Caire : D'en
tenir compte, oui, oui, oui.
M. Barrette : Bien, en tenir compte, ça veut dire qu'il porte
un jugement sur l'ampleur du préjudice en fonction du statut de la
personne.
M. Caire : Oui.
M. Barrette : Encore là, c'est
quoi, son critère de référence?
M. Caire :
Bien, je nous ramène à la discussion qu'on a eue précédemment. On est
exactement dans la même situation, au sens où on ne demande pas à
l'entreprise de devenir des spécialistes du droit, de son interprétation et de la compréhension de la jurisprudence, mais le... Puis je
reviens avec ma notion de gros bon sens, puis je pense que mon collègue s'est
cité en exemple, donc il ne m'en voudra pas de poursuivre dans cette veine-là.
S'il arrivait... parce qu'on parle aussi de faire corriger des informations
inexactes. On parle du droit à l'effacement beaucoup, mais, tu sais, c'est
aussi le droit de faire corriger des propos ou des éléments qui seraient faux.
Bon, dans une perspective de désinformation,
le collègue pourrait faire une demande en disant : Écoutez, ça, ça atteint
ma réputation, là, tu sais, je ne suis pas un agresseur d'enfants. Bon,
allons-y avec l'exemple matraque, là. On m'accuse d'être un agresseur d'enfants, vous comprendrez que c'est sûr que ça
met fin à ma carrière, là. C'est immédiat, instantané, là, c'est
rédhibitoire.
Bien,
oui, je pense qu'il faut tenir compte du fait que la personnalité publique se
voit pénaliser à un autre niveau par
une désinformation de cette nature-là que quelqu'un d'autre qui pourrait juste
faire corriger la situation puis rentrer au travail lundi. Bien,
quoique, dans ce cas-là, j'imagine que personne ne peut vraiment survivre à ça,
là, mais...
M. Barrette :
Oui, mais on peut prendre un exemple encore plus simple, parce qu'il est arrivé
à quelques reprises — heureusement
pas trop nombreuses — le
professeur du secondaire qui est accusé d'agression sexuelle ou de relations
inappropriées avec une mineure et que c'est faux, lui — et
c'est de démontrer à la cour, là, que c'est faux, parce qu'en général ça finit
à la cour ces affaires-là — il
peut exiger un déréférencement.
M. Caire :
Clairement, clairement.
M. Barrette :
Parce que ça, c'est un bel exemple, je pense.
M. Caire :
Clairement, oui.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
Me Miville-Deschênes, d'abord, oui.
M.
Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : ...dans le fond, les critères qui
sont là pour déterminer... pour balancer un peu l'intérêt... la vie privée de
la personne et l'intérêt du public à l'information, la liberté d'expression,
c'est des critères qui ont été extraits, en grande partie, là, des décisions
des tribunaux. Puis, bien, dans le cas de la personnalité publique, les
tribunaux ont reconnu qu'une personnalité publique a une expectative un peu
moins élevée de la vie privée que le
quidam... ou plutôt le citoyen lambda, je vais le dire comme ça. Donc, c'est un
peu pour refléter cette position des tribunaux que ça a été ajouté dans
cet article-là.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin, excusez-moi.
M. Nadeau-Dubois :
Bien, c'était l'objet de ma question, parce que moi aussi, j'étais surpris de
ce que j'entendais de la part du ministre. Moi, ma compréhension, c'est qu'ici
le critère du fait que c'est une personnalité publique, c'est un critère qui va
jouer en faveur de plus... comment dire, d'une plus grande tolérance à l'égard
du fait que certaines informations circulent plutôt que le contraire.
M.
Caire :
Oui, mais, si je peux...
M. Nadeau-Dubois :
Parce que, moi, ma...
M.
Caire :
...mais je peux me permettre, moi, comme personnalité publique, puis
Me Miville-Deschênes le dit bien, je
m'attends... puis c'est la discussion qu'on avait eue tout à l'heure, M. le député, je m'attends à ce qu'il y ait sur moi de
l'information qui circule. Cette information-là ne fera pas nécessairement mon
affaire et je dois vivre avec. Je ne peux pas faire une demande de
référencement parce qu'un article est particulièrement dur à mon endroit.
Par contre, quand on
interprète, mettons, les critères où on dit «la diffusion de ce renseignement
lui cause un préjudice grave relatif au»,
bien, moi, je pense que le fait d'être une personnalité publique nous rend plus
vulnérables à ça, puis il faut qu'il y
ait aussi cette sensibilité-là quand on évalue le préjudice, du fait qu'il y a
une personnalité publique.
M. Nadeau-Dubois :
Bien, c'est justement, c'est parce que, là, c'est important, là, c'est important
qu'on comprenne bien le critère n° 1,
là, celui de la personnalité publique, de quel côté de la balance il pèse. Est-ce que le fait...
M. Caire :
Bien, ce n'est pas mutuellement exclusif.
M. Nadeau-Dubois :
Bien, c'est-à-dire que, moi, ma compréhension de la jurisprudence, puis je le
sais parce que j'ai déjà été dans cette situation-là, c'est qu'en fait quand on
est une personnalité publique, c'est beaucoup plus difficile de faire
condamner, par exemple, quelqu'un pour diffamation, c'est beaucoup plus
difficile de faire valoir son droit à la vie
privée. Pourquoi? Parce qu'on a fait le choix de devenir une personnalité
publique, puis nos expectatives de vie privée, pour prendre les mots de
Me Miville-Deschênes, doivent être plus basses, non pas plus élevées.
M. Caire :
Tout à fait, tout à fait.
M. Nadeau-Dubois : Donc là,
c'est bien important, ici, qu'on s'entende sur qu'est-ce qu'on est en train de
voter. Est-ce que le critère n° 1, il vient dire : Les personnalités
publiques doivent être davantage... est-ce que la vie privée
des personnalités publiques doit être davantage protégée que celles des
citoyens lambda, règle générale, ou est-ce qu'au contraire on ne doit pas
s'attendre à ce qu'elle le soit un peu moins, dans la mesure où ces gens-là ont
fait le choix de devenir des personnalités publiques? Ma compréhension, c'était
la seconde. Est-ce que je me trompe?
M. Caire : Non,
vous ne vous trompez pas.
M. Nadeau-Dubois : O.K. Parce
que, depuis tantôt, le ministre parle plutôt de, oui, mais c'est plus de dommages,
donc il faut plus protéger. En fait...
M.
Caire : Mais une
fois qu'on obtient la... qu'on a une notion... puis je trouve que l'exemple du
député de La Pinière est très intéressant, dans le sens où on parle de
déréférencement, alors on n'est pas dans la... C'est parce que mon collègue
fait référence à la diffamation ou... Vous avez raison, il faut s'attendre à
ça, ça vient avec, ça fait partie de la job. Puis effectivement la vie privée
d'une personnalité publique, par définition, elle est restreinte. Mais ça je
l'ai dit tantôt, là, c'est sûr que notre vie publique... notre vie privée
rétrécie. Ceci étant dit, la notion du fait qu'un... lorsqu'on outrepasse cette
ligne-là, que le préjudice peut être plus grand, donc l'idée de dire :
Écoute, là, moi, le déférencement, là, si tu m'accuses à tort d'un crime sexuel
que je n'ai jamais commis, là, puis que c'est démontré que je ne l'ai pas
commis, bien là, enlève ça de là, puis ça presse, là.
M. Nadeau-Dubois : O.K., bien, je
pense... moi, j'ai juste envie d'avoir une... j'ai besoin d'entendre une
interprétation claire du premier critère, là. Est-ce que, donc... Est-ce que
c'est bel et bien ça? Il y a donc... ou peut être interprété de deux manières
différentes, soit pour diminuer, soit pour que ce soit clair. En fait, voilà,
quel message on envoie aux entreprises qui vont devoir appliquer cette loi-là?
Parce que c'est les entreprises qui vont devoir l'appliquer. Est-ce que le
message qu'on leur envoie, c'est : Quand c'est une personnalité publique,
soyez plus ouverts, c'est-à-dire retirez moins d'informations, parce que ces
gens-là... par exemple, si je prends une photo d'un politicien sur la rue en
train de contrevenir à une règle sanitaire, c'est sans doute plus d'intérêt
public...
M. Caire : Absolument.
M. Nadeau-Dubois : ...que si je
prends une photo d'une personne lambda en train de contrevenir aux règles
sanitaires ou contrevenir au Code de la route, par exemple, dans un cas
purement hypothétique où quelqu'un aurait son téléphone dans ses mains. C'est
une personnalité publique, c'est une personnalité politique, c'est plus
d'intérêt public que de prendre une photo d'une personne lambda.
M. Caire :
Clairement, clairement.
M. Nadeau-Dubois : Bon. Donc,
ça peut jouer dans ce sens-là. Mais là je comprends que ça peut jouer aussi
dans l'autre sens quand il est question d'évaluer le préjudice. Donc, ça peut
jouer dans un sens inverse pour dire : Si le préjudice est plus fort, vu
que c'est une personnalité publique, donc retirez... Donc, c'est-tu un truc qui
invite les entreprises à être plus ouvertes ou à être plus restrictives?
M. Caire : Je
vais laisser Me Miville-Deschênes répondre. Il devrait faire ça plus souvent, d'ailleurs.
• (11 h 40) •
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) :
Bien, effectivement, ça a été ajouté en fonction d'interventions de la
jurisprudence, qui était le premier exemple que vous donnez, le premier volet, c'est-à-dire
qu'on est... ça va être plus difficile de faire déréférencer un élément si la
personne est considérée une personnalité publique.
M. Nadeau-Dubois : Donc, le
message qu'on envoie aux entreprises, c'est : Quand c'est une personnalité
publique, la barre est plus élevée pour faire retirer quelque chose, parce que
c'est une personne qui a fait ce choix d'être une personnalité publique, et
donc ses attentes en matière de vie privée sont plus basses.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : C'est ça, c'est la position des tribunaux, puis le
but, c'était de la codifier dans cette disposition-là.
M. Nadeau-Dubois : Je pense
que, c'est ça, c'est important d'envoyer un message clair, parce que les
entreprises vont avoir à interpréter ça, puis moi, je serais mal à l'aise qu'on
dise : Ah! c'est une personnalité publique, ça doit être plus difficile
pour elle, ça fait qu'on va être plus prompt à retirer les informations. Je
pense que c'est très, très dur, la vie publique, là, j'en ai moi-même payé en
masse, là, tu sais, ça va, mais du point de vue de la société, tu sais, puis de
l'intérêt public, je pense que ça fait partie du prix à payer pour une société
où l'information circule, ça fait que je suis content d'entendre
l'interprétation de Me Miville-Deschênes.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Moi, il n'y a pas
de question là, c'est ce à quoi je m'attendais implicitement lorsque j'ai
entamé cette conversation-là. La question pour moi n'était pas plus de laxité,
mais bien où ça arrête. Puis là, quand j'entends Me
Miville-Deschênes, ça m'interpelle toujours parce qu'il vient de nous
dire : On a mis cela en fonction... les items qui sont là sont mis là en
fonction de la jurisprudence. Donc, à quelque part, il y a comme un guide
sommaire, peut-être, là, qui peut être utilisé par les entreprises. Par
définition, là, ce qui est dit, puis je m'attends à ça, c'était ça le sens de... c'est bien sûr qu'une personnalité publique
va se faire varloper plus que d'autres. Par définition, c'est ça. Oui,
mais il y a varlopé puis varlopé.
Alors là, le ministre... pas le ministre, mais
Me Miville-Deschênes nous dit : Ça, là, 1°, là, on l'a mis là puis il
y a une jurisprudence, puis il y en a une pour 2°, pour 3°, pour 4°, puis il y
en a une jusqu'à 7°. Alors, il y a comme un guide. Puis ça, c'est ça, mon
point, depuis le début, là, ça aurait été le fun d'avoir une espèce de guide,
là — ce
n'est peut-être pas le bon mot, là... non, c'est correct, c'est un gros mot,
là — qui
rassemble tout ça. La limite d'un critère
n'est pas la même limite que l'autre. Elle est claire, cette limite-là, dans
l'esprit du législateur. Elle n'est peut-être pas aussi claire chez
Google, certainement pas chez un plus petit diffuseur.
M. Caire : Mais
là-dessus je vais revenir à ce que je disais.
M. Barrette : Oui, le gros bon
sens, c'est parce que...
M.
Caire : Bien, c'est
parce qu'on...
M. Barrette : ...le gros bon
sens de Gérard, ce n'est le même pas le gros bon sens que Germaine, là.
M. Caire : Mais
il n'y aura jamais de guide suffisamment précis...
M. Barrette : Ce n'est pas ça,
mon point.
M.
Caire : ... — mais
non, mais là je vais juste finir ma réponse — qui va permettre de s'assurer
une application absolument uniforme, égale, pareille partout dans la société
civile. Ça, ça n'existe pas, là, c'est une vue de l'esprit. Donc, il faut...
Puis le collègue, le député de La Pinière parle de guide, mais, je veux dire,
c'est ça, les critères de 1° à 7° sont des
guides dans l'interprétation. Non,
mais c'est parce que sinon on va écrire un guide qui explique le guide,
puis là le guide qui explique le guide ne sera pas assez clair, donc ça va
prendre un guide pour...
Ce que je veux dire, c'est qu'à un moment donné,
là, il y a des situations, on se réfère à la loi, on interprète la loi du mieux qu'on peut, on rend une décision.
Cette décision-là fait l'affaire des parties, tant mieux. Cette décision-là
ne fait pas l'affaire de la personne qui a fait la demande, elle entame une
procédure judiciaire en bonne et due forme dans un tribunal qui a les
expertises, qui a la capacité de faire les interprétations nécessaires.
Je réitère, c'est une porte d'entrée à une
procédure plus allégée, donc plus rapide, plus simple. C'est ça, l'objectif.
Alors, la personne ne perd pas ses recours à un tribunal et la personne n'est
même pas obligée de se servir de cette procédure-là, elle peut aller
directement au tribunal, si elle le veut, si elle le souhaite, et là il y aura
cette expertise-là, oui, mais les complexités
qui viennent avec, parce qu'évidemment ce n'est pas simple, quand on
s'adresse... même quand on parle d'un tribunal administratif, c'est sûr que ce
n'est pas aussi simple que d'appeler chez Google, dire: Il y a des photos, je
voudrais que tu les retires, oui ou non?
M. Barrette : O.K. Mais je ne
conteste pas ça, là, M. le Président, là, mais pas... d'aucune manière, je ne
conteste pas ça. C'est juste une question d'application des choses, c'est juste
ça. Il y a, à la lecture de tout ça puis à la discussion qu'on a, disons qu'il
y a... La fourchette dans laquelle on peut prendre la décision dite de gros bon
sens, là, ce n'est pas ça, là. C'est plus ça, là, et plus... Je n'ai pas les
bras assez longs, même, je pense, pour le dire.
Je vais aborder un autre élément, là, avant
d'aller au point suivant, là, puis je ne sais pas si vous y avez pensé, là. En
Europe, eux autres, ils ont la notion de l'oubli après un certain temps. Est-ce
qu'on va avoir cette notion-là, nous autres?
M. Caire : Je ne
suis pas sûr que je comprends la...
M. Barrette : Est-ce que les
données peuvent être déréférencées après un certain temps pour x, y raison?
Des voix : ...
Le Président (M.
Bachand) : Me Miville-Deschênes.
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) :
Oui, bien, en fait, le critère n° 6 vise à prendre en
considération le délai écoulé, effectivement, là.
M. Barrette : Oui, mais c'est
quoi, le délai? Y a-tu une règle? Je vais prendre un exemple, là, qui va vous
apparaître peut-être grossier, puis ce n'est pas ça que je veux faire, puis je
vais le nommer parce qu'il est public. Moi, là, on peut porter le jugement
qu'on voudra sur sa situation actuelle puis où il est rendu, mais admettons
qu'il était arrêté dans son évolution un peu plus tôt, est-ce qu'à un moment
donné quelqu'un comme Jérémy Gabriel aurait pu avoir le droit au
non-référencement? Il est allé à la Cour suprême lui, là, là. Mais, à un moment
donné, au début, là,
c'était désagréable pour lui. Moi, je trouvais que ça dépassait toutes les
bornes morales et éthiques, «whatever», là, ça dépassait tout. Je comprends que ça a été une cause de l'humour, là,
mais, à un moment donné, cet individu-là, là, qui, lui, a été largement
référencé quand il était jeune, là il est rendu adulte, il est encore, je
pense, largement référencé pour des mauvaises raisons, à mon sens, sauf le
procès, à un moment donné, c'est quoi, la notion du délai écoulé?
Moi, là, je prends ça, là, sa situation à lui,
là, là, on n'est pas pantoute, là, dans l'agression sexuelle puis la diffusion
de photographies indécentes, là, on n'est pas là. On est dans quelque chose de
plus méchant. Pas que l'autre n'est pas méchant, là, mais on était, à un moment
donné, dans la méchanceté. Moi, je fais Google... je ne le ferai pas là, mais je suis sûr que tout sort. Lui, il arrive, là, puis il dit : Je suis
écoeuré, là, puis je veux mettre une croix là-dessus, c'est comment qu'on fait? C'est quoi, la règle? Et ça,
là, je ne pense pas qu'il y ait bien, bien de jurisprudence, là.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, c'est une bonne question. Je pense qu'en plus
M. Gabriel était mineur à l'époque, donc ça serait un critère
supplémentaire qui serait pris en considération, mais je... bien, tu sais, il n'y a pas de règle absolue. J'ai en tête
une décision dans laquelle une personne avait été une victime d'un drame
conjugal, dans le fond, là, puis, 10 plus tard, Échos ou Allô
Police avait sorti un article, puis il avait poursuivi, puis là il avait
dit : Non, non, là, ce n'est plus d'intérêt public, ça fait 10 ans,
etc. Donc, c'est un cas où il y avait un délai qui avait été... le délai,
notamment, avait été reconnu comme un critère pour dire : Là, la balance
penche du côté de la vie privée, la protection de la vie privée. Mais
effectivement, là, il n'y a pas de... c'est au cas par cas, là, il n'y a pas de
règle absolue sur les délais écoulés, là.
M. Barrette : Puis, moi, à ma
connaissance, il n'y a pas de jurisprudence non plus. Très peu, en tout cas...
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, ce n'est pas... il n'y en a pas beaucoup, ça,
c'est certain, là. J'en ai une en tête, là, mais je ne pourrais pas vous en
sortir cinq, là. Il y en a peut-être cinq, mais je ne pourrais pas vous les
sortir aujourd'hui.
• (11 h 50) •
M. Barrette : Non, je
comprends, je comprends, mais c'est un concept qui va probablement devenir de
plus en plus pertinent, compte tenu de la quantité d'information sur chacun des
individus qui circule.
À un moment donné, là... Comment vous voyez ça?
Moi, je veux voir comment vous ou le législateur voit ça. À un moment donné,
là... Je vais prendre un exemple peut-être plus... Jérémy Gabriel, c'est un bel
exemple, puis c'est peut-être l'exemple parfait, là, parce qu'il n'est pas lié
à un... lui, là, il n'est pas lié un crime, il n'est pas lié à de la... il
n'est lié à rien. J'allais prendre l'exemple, je ne sais pas, moi, d'une personnalité
publique qui, à 18 ans, a commis un méfait, commis un méfait, là, quelque
chose de mineur, là, est-ce que ça doit...
Puis ça, ça m'amène... L'autre question, je vais
la poser de cette manière-là : Une personne politique... puis là ce n'est
pas moi, M. le Président, ne cherchez pas, ce n'est pas moi, une personne
politique a commis un méfait à 19 ans, elle était majeure, donc il y a un
crime mineur, est-ce que... et là vous allez sur l'Internet, puis vous mettez son nom, puis il sort ça tout le temps, puis tout
le temps, puis tout le temps. En fait, le référencement de cette
personne-là, là, c'est ça. Il peut avoir
fait, là... il peut avoir gagné un prix Nobel, au plus loin dans les pages, là,
ça va être la troisième référence. Y
a-tu un levier à ça? C'est-tu à ce point-là d'intérêt public? Est-ce que
c'est... vous avez fait une réflexion sur ce sujet-là?
M.
Caire : Bien, en
fait, la réponse à la question du député de La Pinière, c'est : Non,
il n'y a pas de... Puis, honnêtement, je veux dire, comment on peut établir un
critère? Moi aussi, j'ai un exemple en tête de quelqu'un qui a vu une histoire ressortir, alors qu'il venait
d'avoir à peine 18 ans, puis
presque deux décennies plus tard se voit confronté à cette information-là qui a comme eu des répercussions
assez majeures non seulement sur lui, mais sur l'organisation avec
laquelle il était à ce moment-là, au point de mettre fin à sa carrière, en tout
cas, dans ce domaine-là. Mais, tu sais, entre vous et moi, M. le député...
M. Barrette : Il n'y a rien de
parfait, on se comprend.
M. Caire : Non,
mais entre vous et moi, là, comment on peut fixer un critère? Je veux dire,
hein, on va nécessairement tomber dans l'arbitraire, là, c'est incontournable.
Tout critère qu'on pourrait fixer va nous amener dans l'arbitraire, c'est sûr.
M. Barrette : Bien, moi, je
veux aller plus loin, M. le Président. Tous les critères qui sont là nous
amènent à l'arbitraire, par définition, il n'y en a pas un qui est objectif.
M.
Caire : Bien, il y
a une différence notable, c'est-à-dire que, comme l'expliquait
Me Miville-Deschênes, les critères qui sont là, ils ont été ajoutés en
fonction de décisions qui ont été prises par des tribunaux qui ont eu à juger
du cas par cas puis qui sont capables, à travers ça, de... à travers ça, nous
sommes capables de trouver une règle générale. Donc, il y a quand même une
assise, là-dessus, qui... Là, je ne suis pas d'accord avec mon collègue quand
il dit que c'est arbitraire. Mettons qu'on dit «dans un délai de 10 ans», pourquoi
pas 15, pourquoi pas cinq?
Bon, quand on parle... Puis là en réponse au
député de Gouin, Me Miville-Deschênes l'a dit : Bien, le critère, là,
de personnalité publique, bien, c'est un critère qui a été établi par la cour
sur le fait que... Alors, c'est là où... Puis je comprends, là, la
préoccupation de mon collègue puis, je veux dire, je ne dis pas que son point
n'est pas bon, là, au contraire. Mais, même si on voulait
en fixer un, critère, on le fixerait à partir de quoi, sur la base de quoi?
Puis, dans... Est-ce que ce critère-là est valable dans un cas x et tout aussi
valable dans un cas y, ou dans un cas x, il a du bon sens, puis dans le cas... On parle de M. Gabriel dans ce
cas-ci, puis c'est quoi qui serait le bon critère? Puis est-ce que ce critère-là aurait eu la même
valeur dans le cas que moi, j'ai en tête? Je ne suis pas sûr, là.
M. Barrette : Bien, c'est pour
ça que je pose la question. Puis, encore une fois, M. le Président, j'insiste,
là, je ne dis pas que c'est mauvais, là, au contraire, là. Quand le ministre et
Me Miville-Deschênes nous disent : Les critères qui ont été mis là,
là, ils sont liés à une jurisprudence, donc, on n'a pas la connaissance parce
qu'on n'a pas l'expertise légale, à moins qu'autour, ici, il y ait des avocats,
là. Moi, je ne le suis pas, je suis juste... comme je dis toujours, je le
pratique illégalement.
M. Caire :
Illégalement, voilà.
M. Barrette : Ça veut dire que,
comme tous les illégaux, je n'ai pas une connaissance suffisamment fine de la
chose. On ne la connaît pas, la jurisprudence. Il y a eu des jurisprudences,
alors le spectre d'application, là, du critère est assez large. Il doit y avoir
une portée, là, au critère n° 6. «Le délai écoulé», moi, je suis content
de voir ça, s'il veut dire ce que je pense
qu'il veut dire. S'il veut dire : À un moment donné, là, ça fait assez
longtemps que ça dure...
M. Caire : C'est
assez, oui.
M. Barrette : ...puis
probablement que la phrase, ça doit être du genre : Ça fait assez
longtemps que ça dure puis ce n'était pas si grave que ça, ce n'est pas comme
arriver puis dire : Il a tué sa femme à 23 ans ainsi que ses
deux enfants, puis on va l'oublier. Ça, je pense qu'on ne l'oubliera pas.
M. Caire : Non.
M. Barrette : Alors, par
contre, il doit y avoir des choses que, oui... Puis c'est quoi, la
jurisprudence? Moi, je m'interroge sur la portée du délai.
Maintenant, ma question est : Est-ce qu'au
moins je suis correct si je dis... légalement parlant, là, si je dis : À
un moment donné, là, ça revient tout le temps, puis c'est quelque chose de
marginal, ça peut-tu arrêter? Parce que, de la bouche même du ministre, ça peut
vraiment nuire à la personne. Tu sais, c'est la balance, là, des avantages et
des inconvénients juridiques, là.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, oui, effectivement. Puis, comment dire,
l'arrivée du droit à l'oubli en Europe, là, c'était notamment et principalement
à cause de la permanence des informations sur Internet. C'était une réponse au
fait que les informations sur Internet sont permanentes puis ça peut causer un
préjudice longtemps. Donc, c'est un critère
qui est important puis qui est dans la loi, au numéro 6°, pour refléter
qu'effectivement 28.1 vise notamment à
permettre un certain... là, j'utilise le mot «oubli», c'est plus un
déréférencement, mais il doit être pris en considération dans la
décision de dire : Là, ça doit être déférencé parce que 10, 12,
15 ans plus tard, ce n'est plus d'intérêt public, puis ça cause un
préjudice important. Ça fait qu'effectivement, là, c'est un critère important
qui est au paragraphe 6°.
M. Barrette : Alors, oui, c'est
parfait. Mais quelle est l'intention du législateur dans son application? C'est
ça que j'aimerais qui soit dit et même qu'on me le dise pour que je le
comprenne. Moi, je comprends ce que je dis, puis j'y vois même, moi-même, des
problèmes, là. C'est jusqu'où ça va et comment qu'on gère ça?
La gifle, là, du party de Noël, puis l'autre,
dans le party de Noël, porte plainte pour voie de fait, il y a eu voie de fait,
oui, mais c'était la gifle dans... disons qu'on peut imaginer des circonstances
atténuantes. Mais ça sort, ça sort, ça sort et ça nuit. On peut prendre plein
d'exemples, là.
Alors, je comprends qu'on se comprend que ça a
été mis là pour ça, mais c'est quoi, notre jurisprudence, là? Comment qu'on
gère ça, là? Moi, je trouve que c'est une bonne affaire, il n'y a pas de
problème, le numéro 1°, le politicien, c'est sûr que c'est
un «punching bag», on peut en faire plus, mais il y a une limite. Il y en a qui
pensent qu'il n'y en a pas, mais il y en a une, et puis on les prend un après
l'autre, et puis c'est la même chose.
Là, 6°, je suis content que ce soit là, mais
comment qu'on le gère? Qu'est-ce qu'elle dit, notre jurisprudence? On a-tu un exemple sur lequel... Parce que vous
dites, vous, de votre bord, que c'est là parce qu'il y a une
jurisprudence. Éclairez-moi.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Je vais essayer, mais je réitère que le droit au
déréférencement vise notamment à faire en
sorte qu'après un certain délai des renseignements qui n'allaient pas tomber
dans l'oubli — c'est comme ça en Europe, un peu, qu'ils le
présentent — puis
que c'est normal qu'après un certain délai il y a certains renseignements qui
puissent être déréférencés. Mais par contre tous les critères ont un impact, c'est-à-dire
quel... ce renseignement porte sur quoi, est-ce qu'il est exact et il concerne
qui. Donc, c'est un mélange de tous ces critères-là, donc c'est dur de mettre
un délai.
M. Barrette : Bien, je ne
demande...
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Ça fait que... mais le délai est un des critères
pris en considération, là.
M. Barrette :
Ce qui serait intéressant, c'est un exemple pratique de jurisprudence
nord-américaine, si ça s'est déjà fait, là.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, écoutez, je vais vous donner la jurisprudence
dont je me souviens, mais là je me répète, là, mais je ne donnerai pas de nom,
de toute façon, parce que je ne m'en souviens pas, mais... Puis, tu sais, il
n'y avait pas de droit à l'oubli, donc, tu sais, c'est un autre contexte, mais
c'est une personne, un père de famille dont les enfants ont été assassinés par
sa conjointe, puis là il y a des articles dans le journal, etc., puis là,
10 ans plus tard, Allô Police fait... ou je ne me souviens plus lequel,
peu importe, il y a le mot «police» dedans, fait un article, mais lui, il
dit : Là, il y a une atteinte à la vie privée.
M. Barrette :
Pour les plus vieux, il y avait le Allô Police et le Photo Police.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : C'était un des deux. Donc, la personne est
poursuivie.
M. Caire :
Photo Police avait un angle différent.
M. Barrette :
Exactement, il y avait une page... mais ça, c'est une autre affaire.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Compte tenu de
l'heure, je suspends les travaux à ce soir.
(Suspension de la séance à 11
h 59)
(Reprise à 19 h 34)
Le Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Bonne
soirée. La Commission des
institutions reprend ses travaux.
Nous poursuivons l'étude
détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des
dispositions législatives en matière de protection des renseignements
personnels.
Lors de la suspension
de nos travaux ce matin, nous étions rendus à l'article 13 amendé.
Interventions? M. le député de La Pinière, s'il vous plaît.
M. Barrette :
...vous nous prenez de court. Si vous auriez la gentillesse de nous suspendre
ça quelques instants, qu'on ouvre tout. Vous savez, on fait un projet de loi...
on vient d'adopter un projet... adopter le principe... la prise en
considération d'un projet de loi technologique, mais la technologie ne va
jamais aussi vite qu'on pense. Ça fait que, si vous me permettez,
M. le Président, juste nous laisser quelques instants pour se...
Une voix :
...
M. Barrette :
Comment? Tu veux y aller? Ah! bien, vas-y.
Le
Président (M. Bachand) : Alors, M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
...M. le Président. Alors, je vais faire envers moi-même ce qu'on ne peut pas
faire envers un collègue, soit souligner mon absence ce matin. Puis je ne vois
aucun rappel au règlement, alors je vois la solidarité entre élus, mais parce
qu'on est ainsi faits, certains pourraient dire, nos conjoints, conjointes,
qu'on est mal faits. Dans l'auto, je vous écoutais, alors je n'ai pas tout
perdu. C'est pour ça que je vous prie de m'excuser à l'avance, n'hésitez pas,
puis je pense que vous n'allez pas hésiter à me ramasser si c'est de la
redite — «vous
aviez juste à être là ce matin» — mais j'aimerais savoir si vous avez abordé
l'applicabilité quant à l'extraterritorialité de cette disposition-là.
La réponse courte, là, exécutive, là.
M. Caire :
Oui, en fait, la réponse que Me Miville-Deschênes avait donnée,
c'est : Dans la mesure où une entreprise fait des affaires, notamment des
contrats de publicité, au Québec, il est reconnu que la loi s'appliquait.
M. Tanguay :
Donc, elle pourrait, le cas échéant... Parce qu'on va voir, plus loin, les
pénalités. Elle n'est pas insaisissable, autrement dit, au Québec.
M. Caire :
Bien, je vais laisser Me Miville-Deschênes répondre plus précisément à
cette question-là. Voyant le regard qu'il me fait, je...
M. Tanguay :
J'entendais des criquets.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : J'ai manqué la...
M. Tanguay :
O.K. On était, les deux, pas là ce matin? Non, il était là, je l'ai entendu.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : C'est ce soir que je ne suis pas là.
M. Caire :
...là-dessus, M. le député de LaFontaine, vous me permettrez un court aparté,
je dois dire que Me Miville-Deschênes a
sauvé mon avant-midi, parce que moi, je n'étais pas là, là, sur plusieurs
explications. Mon corps était là, mais, de toute évidence, mon cerveau
vagabondait dans le... dans les méandres du 95. Donc, Me Miville-Deschênes
pourra peut-être vous éclairer là-dessus.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, j'ai juste manqué la fin de la question, c'est
ce bout-là que je n'étais pas là.
M. Tanguay : C'est... Autrement
dit, l'extraterritorialité, c'est que, si l'entreprise... On pense à Google, par
exemple, là. Ici, on vise... Moi, je pense qu'on vise Google. Là, je veux dire,
si on fait mon nom puis qu'il est arrivé de quoi... parce que je vous ai écouté
ce matin, il est arrivé de quoi il y a 10 ans, puis là, finalement...
C'est l'article... On peut... on peut-tu en revenir, là, toutes proportions
gardées? Si Google a des activités ici... Parce qu'une compagnie qui n'est
aucunement présente au Québec, vous avez beau avoir la meilleure loi, vous
n'aurez pas la capacité de lui imposer. Donc, il faudrait s'assurer...
C'est-à-dire, il faut dire, ici, que, si
l'entreprise a des biens au Québec, elle peut avoir une condamnation si elle n'obtempère pas, si elle ne respecte pas la
loi québécoise. Puis la façon de la faire... Il peut y avoir des
dommages et intérêts et/ou des pénalités. Bien, si elle est saisissable, si
elle a des biens, c'est là où ça va faire mal puis c'est là où elle va se
dire : Bien, peut-être, ça serait intéressant de respecter la loi
québécoise. C'est un peu ça, la logique?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, oui. Bien, la loi québécoise s'applique à
Google, il n'y a pas de doute, dans la mesure où, dans son cas, elle a des
employés, des locaux, des clients au Québec. Puis même, dans une situation
similaire en Colombie-Britannique, où elle n'avait pas d'employés et de locaux,
à l'époque, la loi qui avait des critères similaires a été... la Cour suprême
de la Colombie-Britannique a déterminé que la loi s'appliquait parce qu'elle
vendait de la publicité à des entreprises britanno-colombiennes. Donc, la loi
s'applique, il n'y a pas... il n'y a pas de doute là-dessus.
Mais effectivement la deuxième étape,
c'est : une fois qu'on dit que la loi s'applique, de quelle façon on peut s'assurer de son effectivité? Bien là, puisque
c'est une entreprise qui a des biens, etc., bien, tu sais, en cas de
sanction, il va y avoir toutes les mesures, là, possibles.
M. Tanguay : Dans une
autre vie, quand j'étais avocat, j'ai fait quelques requêtes, puis ça, c'était
assez stimulant, intellectuellement, de forum non conveniens. Est-ce que vous
avez testé... Puis je vois notre collègue de Chapleau... c'est ça, c'est de Chapleau,
c'est ça, oui, c'est bon, oui, qui fait signe de oui de la tête. Est-ce que...
Puis le ministre, c'étaient des plus grands oui. Et... Bien, veut-il
enchaîner sur forum non conveniens?
M. Caire : Bien,
en fait, je vais laisser Me Deschênes quand même...
M. Tanguay : Pour se
reprendre.
M. Caire : Oui,
c'est ça, parce qu'il a eu un mauvais départ, là, je vais lui laisser une
chance.
M. Tanguay : Oui, c'est
ça. Mais est-ce que c'est... est-ce que ça va tenir la route par rapport aux
différents critères jurisprudentiels qui fait en sorte que l'acte reproché doit
avoir été mis notamment... l'acte fautif doit avoir été commis au Québec? Alors, si le référencement est demandé par des
résidents québécois, au Québec, le fait de voir non effacé ce qui aurait
dû être effacé des recherches, ça a eu lieu au Québec, donc on est à l'aise que
ça va être l'un des critères que l'acte reproché a eu lieu au Québec, puis là
on pourra aller chercher Google dans nos cours québécoises.
M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) :
Oui, oui, oui, parce qu'en plus le droit à la vie privée qui est mis en oeuvre
là-dedans, c'est un droit personnel. Donc, dans les règles du droit
international privé, on prévoit que le droit... la législation qui s'applique,
les tribunaux, ça va être lui de la personne... où est-ce que la personne
réside. Là, je ne vous dis pas que Google, ils l'ont déjà fait avec la Cour
suprême du Canada, ils vont... ce n'est pas impossible qu'ils prétendent que ça
soit la loi californienne qui s'applique, là, c'est arrivé, là, mais je dirais
qu'on a les arguments juridiques pour soutenir que c'est la loi québécoise qui
s'applique quand c'est le temps de déréférencer un résident du Québec... les
renseignements d'un résident du Québec.
• (19 h 40) •
M. Tanguay : O.K. Est-ce
que c'est vrai? Vous pouvez peut-être me le... Puis c'est toujours resté
dans... L'ALENA a été renouvelé récemment, là, il y a peut-être, quoi, un an,
un an et demi, là, on ne fait pas de politique fédérale, je ne me rappelle pas
de la date, mais il y a au moins un an et demi à peu près, et semble-t-il qu'il
y avait une disposition qui épargnait les GAFAM de tout recours en justice,
justement, pour de tels motifs d'atteinte à la réputation, de ne pas avoir agi
pour s'assurer que la réputation de la personne ne puisse pas être davantage
endommagée, ainsi de suite. Est-ce que c'est vrai ou c'est une légende urbaine,
ça?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien là, là, je sors un petit peu de mon champ de
compétence, mais je sais qu'en Californie puis aux États-Unis en général, là,
il y a des lois qui font en sorte qu'ils ne peuvent pas être responsables, les
moteurs de recherche et les entreprises similaires, sur le contenu qui est
référencé par eux et qui a été déposé par d'autres personnes. Donc,
effectivement qu'il y a une protection. Puis est-ce qu'elle est dans l'ALENA?
Je ne pourrais pas vous le garantir, il me semble que oui, là, mais je n'en
suis pas certain, là, mais il y a une protection juridique aux États-Unis puis
possiblement au Québec, là. J'y vais sous toutes réserves, mais la loi sur le
cadre juridique technologies de l'information prévoyait un élément par rapport
à ça, mais, aux États-Unis, il y a une protection contre les Google pour...
qu'ils ne peuvent pas être poursuivis s'il y a une information préjudiciable ou
diffamatoire qui a été référencée sur leurs moteurs de recherche.
M. Tanguay :
Et est-ce que... puis là on va aller dans la discussion qui se poursuivait ce
matin au niveau des critères puis qu'est-ce qui mérite d'être retiré ou pas,
est-ce qu'ici... Je veux juste savoir, rapidement, là, est-ce qu'ici... Le droit à l'oubli, est-ce qu'on parle
de droit à l'oubli, carrément, que ça ne se retrouve pas même en
page 15 de la recherche, ou
l'information est là... Excusez-moi, je revire de bord. Droit à l'oubli, ça
n'existe plus, puis vous descendez, il y a 176 pages, je n'ai
jamais rien vu, ou droit à l'oubli pourrait être de rajouter une certaine
proportionnalité : Bien, quand tu vas faire son nom, ça va arrêter de
«poper», puis... mais c'est quand même une information qui était jadis
publique, se retrouve en page 4, 5?
M. Caire :
Bien, c'est parce qu'on parle de désindexer, de déréférencer, ce qui veut dire
que, quand vous allez faire une recherche, le moteur de recherche ne trouvera
pas d'information pertinente en lien avec votre requête. Donc, ça, c'est un
effacement complet, là. Parce que ce que vous suggérez pourrait se faire, mais à
ce moment-là c'est une limitation dans le nombre de recherches. Ça, c'est autre
chose. La désindexion ou le déréférencement, c'est vraiment au niveau du moteur
de recherche qui ne trouve pas de réponse, de mot-clé, d'hyperdata quelque part
qui est en lien avec la recherche que vous faites.
M. Tanguay : Une entreprise... Si d'aventure, 113 était adopté, une entreprise
devrait, évidemment, respecter
ces obligations-là si la demande lui est faite. Si le justiciable, l'entreprise
ne coopère pas, que ça soit Google, ou peu importe,
le recours, est-ce que la CAI aura un mot à dire ou si c'est un recours
devant les tribunaux de droit commun?
M. Caire :
C'est un premier recours avec la CAI, le tribunal de la CAI. Et, si le jugement
de la CAI ne convient pas, là c'est un appel à la Cour du Québec.
M. Tanguay : O.K. Et la CAI pourrait — on va voir les pénalités — aussi imposer des pénalités, j'imagine,
si...
M. Caire :
Sur la désindexation, non, parce que, là, on ne parle pas d'une infraction, à
savoir que vous faites une requête, l'entreprise juge que, la requête, il n'a
pas à y accéder, vous n'avez pas été brimé. Dans le sens où, comme on l'a dit
ce matin, ce qu'on donne, c'est une voie d'accès rapide, c'est une possibilité
de s'entendre avec l'entreprise, mais ça veut dire que peut-être qu'il n'y a
pas de possibilité de s'entendre avec l'entreprise, mais l'entreprise n'est pas
en infraction. Elle serait en infraction si elle avait l'obligation de faire
ceci, cela. Elle n'a pas l'obligation de le faire.
M. Tanguay :
Elle va l'être si la CAI émet une injonction, je pense qu'on...
M. Caire :
Non, mais là ce n'est pas pareil.
M. Tanguay :
Là, la CAI pourrait mettre une injonction. Vous rayez ça, puis ça dit...
M. Caire :
Oui, oui, oui, elle peut remettre des ordonnances, puis là c'est une ordonnance
d'un tribunal, puis c'est exécutoire.
M. Tanguay :
Puis on a eu ce débat-là, je me rappelle, les ordonnances de la CAI peuvent
être... sont appelables devant les tribunaux de droit commun.
M. Caire :
Oui, Cour du Québec.
M. Tanguay : Cour du Québec, ah oui? Cour du Québec pourrait casser une
ordonnance d'injonction de la CAI?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...ça va avec le volet tribunal administratif de la
CAI, juridictionnel qui va prendre la décision, donc il y a un droit d'appel à
la Cour du Québec qui est prévu dans la loi.
M. Tanguay : À la Cour du Québec. Et là ça va être des
critères de droit administratif, ce ne sera pas... Est-ce que ça va être des critères de droit administratif,
ou la Cour du Québec va rendre la décision qui aurait dû être
rendue, ou la Cour du Québec va la casser et va demander à la CAI de, elle,
rendre la décision qui aurait dû être rendue?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien,
c'est une excellente question, parce qu'il y a eu un changement,
dernièrement, par rapport à ça, là. Avant, la Cour du Québec, comment dire,
elle ne rendait pas la décision, elle faisait la norme de contrôle de la
décision correcte, là
M. Tanguay :
C'est ça, norme de contrôle.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Mais là, maintenant, elle va rendre la... depuis,
des changements qui ont eu lieu... qui ont
été apportés dans tous les tribunaux administratifs, là, elle va rendre une
décision de nouveau, là, elle va revoir le dossier au complet.
M. Tanguay :
Parce que seule la Cour supérieure peut émettre des injonctions, hein? Là,
est-ce que la Cour du Québec aurait le pouvoir d'émettre des injonctions?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, des injonctions... C'est que la décision...
C'est la décision de la Cour du Québec qui est exécutoire, là, c'est... donc,
c'est... Elle ordonne, à la fin de sa décision, là, une... Ça fait que ce n'est
pas vraiment... je ne dirais pas que c'est une injonction.
M. Tanguay :
Parce que c'est une injonction... On est dans la notion de mandatoire.
Autrement dit : Je vous ordonne de rayer cette information-là de vos
registres.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, oui, c'est... effectivement.
M. Tanguay :
Ça fait qu'elle pourrait le faire, la Cour du Québec?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, oui. Bien, les décisions qu'elle rend déjà,
dans le cas d'une suppression, ou d'une rectification, ou d'un accès, dans le
cas de la Loi sur l'accès, bien, c'est déjà : J'ordonne de communiquer...
M. Tanguay :
La CAI, mais la Cour du Québec aussi?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, oui, oui, la Cour du Québec, en appel, oui.
M. Tanguay :
O.K. Puis dernière question... Oui?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, je m'excuse, je voulais faire une petite
précision, parce que la désindexation, c'est effectivement faire disparaître le
résultat de recherche, là, je suis désolé, mais le deuxième alinéa prévoit
aussi qu'il y a une possibilité de réindexer, donc, effectivement, de...
M. Caire :
...on peut réindexer, mais c'est parce que la question que le député me posait,
c'était : Est-ce que l'objectif, c'est
de limiter le nombre d'informations qui sont encore disponibles? Bien, le
déférencement ou la désindexation, tu ne limites pas l'information, tu
fais juste... le moteur de recherche ne trouve rien, mais, oui, on peut
permettre, effectivement, de réindexer, auquel cas l'information va
redevenir... mais ça n'a pas pour effet de limiter le nombre de pages que je
vais trouver.
M. Tanguay :
Non, c'est binaire. Autrement dit, c'est là ou ce n'est pas là. Puis ce n'est
pas : ça va être là, mais un petit peu plus loin, non, non.
M. Caire :
C'est ça, c'est ça.
M. Tanguay :
Dernière question de compréhension, puis ça peut se répondre très rapidement.
Google, c'est l'exemple facile, mais les entreprises typiquement québécoises,
on parle de qui, là? Je veux dire, des entreprises qui donnent accès à
Internet, notamment?
M. Caire :
Les moteurs de recherche.
M. Tanguay :
Avec des moteurs de recherche. Est-ce que ça, ça peut trouver application... On
parle de tout hyperlien, ça fait que, nécessairement, on parle d'Internet,
toute entreprise qui gravite autour d'Internet, là. Cet article-là a pour
vocation d'être appliqué dans d'autres contextes qu'un contexte des Internet,
là?
M. Caire :
Non.
M. Tanguay :
O.K.
M. Caire :
Non, parce que le déférencement, la désindexation ou le reréférencement, c'est
en lien avec le numérique, là.
Le Président (M. Bachand) : M. le
député de La Pinière, s'il vous plaît.
M. Barrette :
...en lien avec ce que mon collègue a dit et en lien avec certains commentaires
qu'on m'a... qui m'ont été faits ici, là, tout tourne autour de l'indexation et
du référencement. Tout tourne autour de ça parce que tout tourne autour d'un
moteur de recherche, bon. Le moteur de recherche, lui, là, il va interroger
l'Internet pour voir si telle donnée personnelle existe, ou peu importe, une
donnée personnelle, peu importe la nature.
Et là nous, on est
dans un article qui nous permet de faire une démarche de désindexer,
déréférencer. Est-ce qu'il y a lieu ou est-ce qu'il y a déjà — que
je ne sais pas ou pas compris, c'est pareil — des circonstances prévues à
la loi qui permettent de faire en sorte que, le site source, lui, ça disparaît
là aussi? Je comprends qu'on ne puisse pas enlever un jugement d'une cour de
justice, du ministère de la Justice. Ça, c'est une espèce de donnée source, là,
probablement inviolable... non, pas un bon mot, «inviolable»... immodifiable, à
moins que la loi le... La raison pour laquelle je pose cette question-là, là...
M. Caire :
...je comprends parfaitement votre question, puis...
M. Barrette :
Oui. Quand on regarde 28.1, là...
• (19 h 50) •
M. Caire :
Donc, est-ce que ça implique l'effacement du fichier source? C'est ça, votre
question.
M. Barrette :
Oui, parce que, quand on regarde numéro 7°... Je reviendrai au numéro 6°,
tantôt, là, dans 28.1, dans
l'évaluation des critères du deuxième alinéa, là. À 7°, et on le comprend, la
personne devra prendre en considération des situations pénales,
criminelles, et ainsi de suite, et là on fait référence à un élément très
spécifique qui est le pardon. Par
définition, le pardon, là, ça veut dire que, même dans la banque de données de
la Justice, ça n'apparaît pas. La personne a le pardon, ça devient
invisible à l'univers. Ce n'est pas effacé, un pardon n'efface pas le dossier,
mais le dossier n'est plus visible à qui veut le voir.
Maintenant,
ça, quand je lis ça, c'est comme... pas que c'est comme, ça veut dire que,
fonctionnellement, il y a une loi, là, qui prévoit qu'on peut sortir de
l'Internet une donnée. Puis, dans le cas de numéro 7°, c'est en plein ça que... c'est ça qu'on veut. À quoi ça sert d'avoir
un pardon si la personne reste impactée par un passé pour lequel il y a
eu un pardon? Puis on sait, évidemment, que ce n'est pas parce que tu es
pardonné que tu es pardonné. Si l'information peut circuler encore, ça induit
quelque chose, bon, sans commenter.
C'est une... ce n'est
pas une métaphore, c'est un parallèle que je fais avec 7°. Est-ce qu'on peut,
dans la loi, s'assurer qu'un site Web source montrant cette donnée-là soit
effacé? Parce que, là, le moteur de recherche, c'est une affaire, le moteur de
recherche, il va regarder là, là, là, ramène ça, puis on peut payer pour puis
on dit : O.K., là, moi, tu vas me mettre en haut, bon. Quelqu'un qui a
quelque chose qu'il ne veut pas... il ne payera pas pour ça, là, on s'entend, mais... Vous comprenez le sens de ma
question? Alors, ça, est-ce qu'on a prévu ça? C'est le fun, parce
qu'à 7° c'est intrinsèque parce que la loi prévoit déjà ça, mais, dans
l'esprit, là, de vouloir avoir accès à un oubli, est-ce qu'on a prévu de faire
oublier un site Web source?
M. Caire :
Bien, je vais laisser Me Miville-Deschênes répondre sur l'aspect légal.
Sur l'aspect technologique... Puis
ça, c'est comme... Puis là je veux faire attention parce que j'ai besoin de
réfléchir à... ce que... le fichier source, comment on le trouve, combien de fois a-t-il répliqué, il
a été stocké où, c'est un... Mais je vais laisser Me Miville-Deschênes...
M. Barrette :
Ma question...
M. Caire :
...parce que, sur 28.1, c'est sûr qu'on parle de désindexation, de
déréférencement, donc on ne parle pas de suppression du fichier source.
M. Barrette :
Je le sais. Moi...
M.
Caire :
Il y a-tu d'autres articles quelque part qui nous permettraient de faire
supprimer l'information? Je pense que oui. Je pense qu'effectivement, compte
tenu du fait qu'on a collecté des renseignements personnels, qu'on l'a fait de façon illicite et illégale, oui, on
pourrait obtenir le fait qu'ils soient... qu'ils soient supprimés, mais ça,
c'est des articles subséquents qu'on
a adoptés. Parce que c'est sûr que, si on se confine à 28.1, non, mais entre
autres, sur... Parce qu'on a un
article qui parle... Lequel qui parlait de : tu ne peux pas faire ça, tu
ne peux pas faire ça, tu ne peux pas faire ça?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...qui prévoit la possibilité de...
M. Caire :
Avec le Code civil? Oui, par le Code civil.
M. Barrette :
Juste un commentaire, M. le Président, là, pour qu'on soit bien sur la même
page, là.
M. Caire :
Oui, oui, oui, pas de problème.
M. Barrette :
Quand le ministre me dit : Oui, le fichier source, je ne sais pas combien
il a été de fois dupliqué, et ainsi de suite. Moi, je parle
essentiellement du fichier source visible sur le Web. Il est visible, on peut
tomber dessus par hasard. On peut peut-être trouver des
moyens d'une... Puis là je ne le vois... Parce que les moteurs de recherche, là, à la limite, on pourrait dire : Il y en a
combien, de moteurs de recherche, là, actuellement, au Québec, là? Puis je
vais avoir une autre question à poser, après, là-dessus. Clarifions ça, mais ça
a un intérêt, là, cette question-là.
M. Caire :
Avez-vous fini, M. le député?
M. Barrette : Oui, j'ai fini.
M. Caire : O.K.
Bon...
M. Barrette : Mais je voulais
juste... Mon point ici, c'était simplement de dire : Je ne recherche pas
la duplication d'un fichier, parce que, là, on est dans l'univers Web.
M. Caire : La
réponse à votre question sur l'aspect de 28, 28.1, c'est oui. C'est sûr que... La
désindexation, le déréférencement, c'est sûr que ça a pour effet de rendre
invisible le fichier sur le Web. Maintenant... Oui, oui.
M. Barrette : ...invisible aux
moteurs de recherche.
M. Caire : Non,
c'est parce que, je veux dire, si vous allez sur un site, le site prend sa
source quelque part. Ce qui est affiché sur le site prend sa source quelque
part, bon, ça fait qu'il y a toujours un... le lien, il a toujours un
référencement, il a toujours une indexation tout le temps, bon.
Mais, ceci étant dit, je comprends que ça ne
supprime pas l'information de la base de données, et ça, ce que je comprends,
c'est qu'on a adopté... bien, ce que je comprends... On a adopté des articles
où, si vous avez une information, un renseignement personnel que vous avez
collectés pour lesquels il n'y a pas de consentement, vous ne pouvez pas faire
ça. Ça fait que, dans ces circonstances-là, oui, vous pourriez être obligé de
supprimer ledit fichier.
Puis là, bien, je vais laisser
Me Miville-Deschênes compléter la réponse parce que ce que je comprends,
c'est que 28 lui-même amène d'autres obligations. Je ne sais pas si c'est lié
avec le Code civil, là...
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Non, non. Bien, en fait, l'article 28...
l'article 28 est l'article qui permet justement de s'adresser directement
à une entreprise pour demander la rectification ou la suppression. Donc, effectivement,
le droit de suppression existe dans la loi déjà et est reconduit dans le projet
de loi n° 64. Donc, la désindexation, c'est un autre outil qui est offert,
en quelque part, aux citoyens si le droit à la suppression ne permet pas
d'atteindre l'objectif, là, je dirais.
M. Barrette : O.K. Je vais
prendre... Parce que, là, je ne connais pas la réponse à ça, peut-être que vous
autres, vous avez la réponse. Je vais prendre l'exemple d'un professionnel. Ce
matin... Oui, c'était ce matin, là, oui, ce matin. Ce matin, j'avais pris
l'exemple du professeur accusé erronément d'avoir eu...
M. Caire : ...des
comportements envers...
M. Barrette : Envers ses
élèves.
M. Caire : Oui, tout
à fait, oui, je me souviens.
M. Barrette : Bon. Ce
professeur-là, là, je ne le sais pas, quelle est la règle dans... Ils n'ont pas
d'ordre professionnel. Je le sais pour mon ordre professionnel, mais, pour eux
autres, je ne le sais pas. S'il advenait, là, que, maintenant, un centre de
services vive ça, le professeur, lui, demande une désindexation,
déréférencement, mais le centre de services, pour des raisons discutables,
laisse l'information mais précise : A été mis en cause, il y a eu une
enquête, un procès, il a été absous hors de tout doute, et ainsi de suite. Le
centre de services, c'est hypothétique, là, le laisse sur son site Web. Est-ce
que ça, ça peut... on peut exiger que ça... Même si l'information qui est là
est exacte, là : A été soupçonné de, investigué pour, a été l'objet d'un
procès, a été acquitté hors de tout doute, puis là pour une raison bizarre, là,
il le laisse là, j'ai-tu le droit de demander à ce que ça disparaisse?
M.
Caire : Vous avez
très certainement le droit de le demander, ça, il n'y a aucun doute.
Maintenant, dans l'exemple que le député
amène, M. le Président, on comprend que l'organisation... Ici, c'est
un organisme public, mais c'est la
même chose. L'organisme dit... c'est parce qu'il faut comprendre que ça, ça
s'adresse à l'entreprise privée, mais mettons...
Une voix : ...
M.
Caire : ...mais
mettons... mais transposons l'information dans une entreprise privée. Là, je
veux dire, je comprends que le contexte
est... bon, dit : Bien non, moi, je pense que c'est correct de le laisser
sur le site Web. C'est clair que
l'individu en question pourrait s'adresser à la CAI. La CAI aurait à apprécier
la demande à travers les conditions et les critères qui sont fixés par
28.1, rendrait une décision. Cette décision-là donnerait... dans la mesure où
la CAI donne raison à l'individu, donnerait lieu à une ordonnance. Puis, à ce
moment-là, l'organisation serait obligée de retirer la référence, donc d'éliminer ça du site,
puis, à la limite, pourrait demander à ce que l'information soit
supprimée, là, quoique, dans ce cas-là, on ne parle pas d'une possession ou
d'une collecte illégale, là. J'imagine que, dans l'exemple du député...
M. Barrette : ...l'exemple que
je donne, c'est légal, là.
M. Caire : Mais,
très certainement, il pourrait obtenir qu'il n'y ait pas de référencement qui
soit fait, puis qu'à partir de là ça ne soit plus visible à partir de son site
Web.
M. Barrette : ...le
référencement, lui... J'en reviens à la donnée source. La donnée source, si
elle n'est pas référencée, bon, Google ne le voit plus, un paquet de moteurs,
tous les moteurs...
M. Caire : Même
votre site Web ne le verra plus, M. le député. Parce que la page Web, là,
c'est une application qui roule puis qui fait une connexion, là, ça lui
prend... L'information, il faut qu'elle aille la chercher quelque part. Ce
n'est pas... en bon... puis je sais que c'est un langage que vous... ce n'est
pas codé dur dans la page Web, là, c'est
pour ça qu'il y a une référence. À un moment donné, il y a un lien, là, il y a
un tag HTLM, puis il y a un lien,
puis on va chercher l'information. Donc, ça, c'est une référence, c'est une
indexation, c'est sûr, ça doit être retiré.
• (20 heures) •
M. Barrette : O.K. Les
Européens, eux autres, avaient fait référence, pour le droit à l'oubli, à la
durée de l'utilité de la donnée collectée.
On collecte ça pour une fin, puis là ça dure un certain temps, puis ça peut
être quasiment automatique qu'à un
moment donné ça s'efface. Nous, on ne va pas là, par exemple, on ne souhaite pas aller là. Pourquoi?
M.
Caire : Bien, il
n'y a pas... en fait...
M. Barrette : ...M. le
Président, c'est à cause de 95. Puisque c'est un sujet opportun pour la
journée, là, dans 95, là, le ministre, puis ce n'est pas sa responsabilité dans
ce cas-là d'aucune manière, mais même les gens qui étaient venus nous voir nous
avaient dit que, dans les gouvernements, des fois, quand on fait... d'ailleurs,
c'est une des raisons pour lesquelles dans
95 on fait des inventaires. Le ministre devrait compter, ainsi que les experts, que,
dans leur expérience, souvent on trouvait des bases de données anciennes qui
n'ont plus aucune utilité, qui sont là, elles sont là. Là, je comprends qu'on
est dans l'entreprise privée, mais ça peut se transposer, ça aussi, là.
M. Caire : Je
réalise que je pense que je n'avais pas bien compris votre question. Le cycle
de vie de la donnée, ça, on en a parlé dans
les articles précédents. Donc, effectivement, lorsque les fins pour lesquelles une information
a été collectée ont été accomplies, cette donnée-là doit être supprimée. Puis
là on a vu des cas d'exception où on pouvait
les utiliser en les désanonymisant, puis on a... bon, on a fait... Ensuite,
moi, je pensais que vous faisiez référence au critère 6°, je pense,
dont on a discuté ce matin, là, qui parlait du délai écoulé entre la diffusion
du renseignement, la demande faite en vertu du présent article. Donc, à partir
de quel moment on devrait désindexer systématiquement une information? Non, on
ne met pas de... Bien, honnêtement, je vous avoue que je ne saurais pas comment
établir de critères... tu sais, je ne sais pas, je ne saurais pas comment
faire. À partir de quel moment on dit : Une information doit être
désindexée de façon automatique?
M. Barrette : Quand le citoyen
n'est plus client de la compagnie.
M. Caire : Oui, mais l'information n'est pas nécessairement
reliée à un lien d'emploi. Je vous donne l'exemple que vous donniez vous-même,
c'est une information sur monsieur X qui a été accusé de comportements sexuels
litigieux. À partir de quel moment ce n'est
plus d'intérêt public? À partir de quel moment... Tu sais, sous quels critères
on devrait dire : Bon, bien, ça, on va le désindexer, on va le
déréférencer de façon dramatique, là, sur un critère de temps? Donc, il n'y a
pas d'autre critère que le temps, là, dans le sens où on va dire : Bon,
bien là, ça fait 10 ans, c'est assez.
M. Barrette : Non, cet
exemple-là, pour moi, c'est un exemple assez clair, il n'est pas désindexé,
mais il est désindexé s'il a eu son pardon.
M. Caire : Bien, à
ce moment-là, il pourrait faire la demande. Moi, je pense que c'est plus simple
de permettre à l'individu de faire sa demande puis de dire : J'ai eu un
pardon, on désindexe. Puis ça va rencontrer les trois critères qu'on a établis,
là, compte tenu de cet élément-là dont on doit tenir compte, évidemment.
M. Barrette : Là, bien, je
poserais une question tout à fait... Là, je vais à la pêche, là, vraiment,
vraiment, là : Est-ce que des situations comme le pardon, dans le corpus législatif,
ça existe? Il y en a-tu d'autres?
M. Caire : Là, on
n'est plus... Là, vous ne me parlez plus de...
M. Barrette : Non, mais c'est-à-dire
que, oui, on y est, dans une certaine manière, là.
M. Caire : Mais, tu sais, mettons, le pardon pour une
offense criminelle, là, mettons, j'ai commis un crime x...
M. Barrette :
...et puis il y a eu un pardon, puis la donnée disparaît, est-ce que ça existe?
C'est une question que je pose, je n'ai pas la réponse du tout, du tout, c'est
vous autres qui avez plus l'expérience. Est-ce qu'il y a d'autres circonstances
où une donnée, parce qu'il y a eu soit une durée dans le temps soit parce
qu'une situation a changé — le
pardon, c'est un changement de situation, là — que cette donnée-là disparaît ailleurs, là,
dans l'État, dans ci, dans ça. Le
pardon, c'est la situation... c'est la seule que je connais, puis c'est la plus
forte, mais il y en a-tu d'autres?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, en
fait, il y a... puis c'est le septième paragraphe, là, de
l'article 28, là, qui parle des restrictions à l'accessibilité des
registres des tribunaux judiciaires, il y a une directive du ministère de la
Justice qui fait que certaines personnes peuvent demander que des
renseignements à leur sujet soient... je ne sais pas, je pense qu'ils ne seront
plus accessibles, un peu comme les renseignements dans le cas d'un pardon, puis
je vais vous donner des exemples, là. Si, la personne, il y a eu un arrêt de
procédure, si elle a été acquittée, il y a certaines situations — puis
c'est la directive, là, que je pourrais vous transmettre au besoin, D-21 — où il
y a une directive qui permet à la personne de faire une demande au ministère de
la Justice pour que des renseignements relatifs à une procédure pénale ou
criminelle ne soient pas accessibles à tous.
M. Barrette : Il y a une
procédure.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Oui, il y a une... oui, effectivement.
M. Barrette : O.K. Alors là, je
vais aller toujours à la pêche, là. Dans des situations parfois délicates de
droit familial, séparation et compagnie, là, est-ce qu'on a le droit de
déférencer, désindexer?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : De
déférencer... Parce que, là, souvent, dans les histoires de droit
familial, il va souvent y avoir des... je
pense que c'est automatique, sauf exception, qu'il y a des ordonnances de non-diffusion,
non-publication.
M. Barrette : Une ordonnance.
Mais s'il n'y en a pas?
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : C'est une bonne question, là, je ne pourrais pas
vous répondre. Je dirais... Écoutez, vous me prenez de court un peu, là. Est-ce
que... Tu sais, il n'y a rien qui empêche de faire une demande de
déréférencement, ça fait que la personne pourrait effectivement faire une
demande, mais en même temps le jugement... les décisions des tribunaux ne sont
pas référencées sur Google, actuellement, généralement, là.
M. Barrette : C'est vous qui le
savez. Là, actuellement, là, puis là je vais faire vraiment l'avocat du diable,
puisque la cause est connue, Lola, là, il y avait une ordonnance de
non-publication, bon, même si tout le monde sait c'est qui ou à peu près, là.
Mais Lola, là, s'il n'y avait pas eu d'ordonnance de non-publication, ça aurait
fait brûler l'Internet, là. Est-ce que, ça, il y a... Ça va s'articuler comment
là-dedans, là?
M. Caire : Bien,
dans le cas d'une ordonnance de non-publication, ça, c'est très clair, c'est un
interdit de publier, là, ça veut dire que ça n'embarque même pas sur votre site
Web, sinon c'est un outrage au tribunal.
M. Barrette : Quand il n'y a
pas d'ordonnance de non-publication.
M. Caire : S'il
n'y a pas d'ordonnance de publication, on rentre sur les critères de 28.1.
M. Barrette : Et là, ça va être
la fameuse jurisprudence.
M. Caire :
Oui. S'il n'y a pas une ordonnance de non-publication, il n'y a pas une
interdit... un interdit... — pardon,
«une», excusez-moi — il
n'y a pas un interdit de le publier. À partir de là, c'est la personne qui, en
fonction des trois critères de 28.1, peut demander à ce que ça soit désindexé,
avec toute la procédure...
M. Barrette : Non, je pose ces
questions-là, je fais exprès, M. le Président, parce que, je pense
qu'on l'a entendu dans nos travaux, il y a des gens qui sont très heureux de
voir que tout soit étalé sur la place publique. J'ai senti ça dans nos travaux,
puis je ne parle pas du ministre. Il y en a qui y trouvent un certain intérêt,
personnel, ou politique, ou mélangé, peu importe, là. Il y en a qui sont pour
la transparence absolue, il y en a qui le sont moins.
M. Caire :
...méfie-toi de ce que tu veux, ça pourrait t'arriver.
M. Barrette :
Oui, en effet, en effet, en effet. Moi, ça revient toujours à la même affaire,
là, je comprends, là, la portée de 28 puis 28.1. Je comprends, là, que,
dans l'espèce de boîte, là, qui est une machine, là, c'est l'ordinateur dans lequel rentrent des informations puis une
demande, là. Et ça, ce sont les critères qui sont pris en considération
en fonction d'une jurisprudence, puis ce n'est pas sûr que tout le monde va
pouvoir l'appliquer avec sagesse, on va dire.
Puis en plus, à la fin, des groupes de médias
pourraient arriver puis faire la même demande contraire à la CAI puis dire : Vous avez accepté de
déférencer, de désindexer, vous devez renverser ça. Parce que c'est ça, la
situation, là. À la fin, le reréférencement et la
réindexation va passer par un groupe d'intérêts qui va aller devant la CAI puis
qui va dire : La décision que vous avez prise est inappropriée, poliment.
M. Caire : C'est
possible.
M. Barrette : Bien, pas c'est
possible, c'est possible que ça se passe comme ça, mais c'est ça, le chemin. Le
chemin va être celui-là, là.
• (20 h 10) •
M. Caire : Oui,
oui, c'est possible, effectivement, vous avez raison.
M. Barrette : Non, non, non,
mais, je veux dire, je le sais...
M. Caire : Mais,
je veux dire, sur le fait...
M. Barrette : Le chemin, c'est
celui-là.
M. Caire : C'est
ça, oui, le chemin, c'est celui-là. Maintenant, est-ce que quelqu'un va vouloir
emprunter ce chemin-là? C'est possible, effectivement, effectivement.
M. Barrette : Ah! ça... C'était
quoi, la cause au fédéral, là, avec Daniel Leblanc, puis la madame qui s'était
faite... la lanceuse d'alerte, là.
M. Caire : Eh
boy! Oui, oui, oui.
M. Barrette : À l'assurance
chômage, on oublie tous le nom, là, mais ça, c'est un cas où c'est clair que,
s'il y avait eu demande de désindexation, il y aurait eu une demande de
réindexation, là.
M. Caire : Oui,
je pense que oui, moi.
M. Barrette : Et c'est le milieu médiatique qui l'aurait
demandé, là. On n'a pas à porter de jugement là-dessus, là, ce n'est pas
ça, la question. La question, c'est le chemin, c'est ça.
M. Caire : Non,
non, non. Oui.
M. Barrette : Moi, peut-être
une des dernières questions que j'ai à poser, puis on en a parlé ce matin, puis
je n'ai pas trouvé que j'avais eu une réponse très satisfaisante, là, mais
on...
M. Caire : On va
essayer de faire mieux.
M. Barrette : Hein?
M. Caire : On va
essayer de faire mieux.
M. Barrette : Mais, quand une personne, dans son esprit, se
considère légitime de demander un déréférencement, là, O.K., on ne met
pas de délai pour avoir une réponse, on ne met même pas...
M. Caire : On a
un délai pour avoir une réponse, c'est 30 jours.
M. Barrette : Oui, c'est
30 jours, mais on n'a pas un délai pour l'exercer, cette décision-là. Moi,
là, je suis Google, là, puis je dis : Oui, O.K., vous avez raison, on va
le faire, je le fais six mois plus tard.
M.
Caire : Il y
a-tu...
M. Barrette : On a un délai de
réponse, mais on n'a pas un délai d'exécution.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : ...
M. Barrette : Oui, moi, c'est
ça qui m'importe. Je peux comprendre une organisation de prendre un mois pour
réfléchir à un cas de figure. Surtout les premiers cas de figure qui vont
arriver, ils vont se dire... toutes ces grandes organisations et petites, ils
vont dire : On va y penser par deux fois, là, pour faire la bonne affaire,
parce qu'on va faire un précédent, et ils vont tous s'énerver avec ça, puis
c'est normal, c'est même la bonne chose à faire.
Maintenant, un coup que la décision est prise,
là, on a vu, parce que j'avais posé la question, que la décision devait être
motivée, c'est ça que j'ai compris ce matin, là, et là la personne fera ce
qu'elle veut avec cette décision-là. Mais l'exécution?
M. Caire :
Bien, dans le cas où l'organisation accepte, je veux dire, elle va le faire. Si
l'organisation dit oui, mais ne le fait pas, on comprend qu'elle a dit non,
dans les faits. Puis, à ce moment-là, la personne... puis... mais juste pour
compléter ma réponse, là, puis, dans les faits, je veux dire, la personne qui a
fait la demande, elle n'a pas non plus l'obligation d'attendre six mois,
12 mois, 18 mois, je veux dire, avant de se tourner vers la CAI, là.
Tu sais, dans les faits, c'est vrai dans un
sens, c'est vrai dans l'autre aussi, là, dans le sens où moi, je peux faire une
demande, Google dit : Oui...
puis on dit «Google», mais, bon, le moteur de recherche X,
Y dit : Oui, vous avez raison, on va désindexer, effectivement, cette information-là. Le citoyen,
deux jours plus tard, il dit : Bien, ce n'est toujours pas fait, il est
légitime d'aller devant la CAI, puis la CAI ne peut pas dire : Bien non,
il y a un délai, puis ils n'ont pas... Bon, j'y vais, là.
M. Barrette : Bien là, je vais
me faire l'avocat du diable, M. le Président. Aller à la CAI, compte
tenu des ressources qu'elles ont ou qu'elle a, ça se peut que la CAI soit un
frein, on va dire, avant d'être entendu. Je vais faire un... Le ministre n'est pas obligé de répondre à ça. Je sens que sa
langue est étourdie à force de tourner dans sa bouche.
M. Caire : Elle a
mal au coeur.
M. Barrette : Elle a mal au
coeur. M. le Président, je vais faire un parallèle, O.K., puis ça, c'est
un bien bon parallèle, parce que c'est des données personnelles. Dans mon
univers à moi, précédent, puis sentimentalement je le considère encore le mien,
sur-le-champ, sur-le-champ, vous avez le droit de regarder votre dossier. Vous
êtes couché dans un lit d'hôpital, vous êtes bien conscient, là, vous dites...
vous avez le droit de dire à l'infirmière : Je veux mon dossier, je veux
le voir. La réponse va être : Oui, mais. Il va y avoir une hésitation
parce qu'il y a toujours une hésitation dans le personnel : Il est-tu
capable de prendre ce qui est écrit là?, tu sais, mettons que le docteur ne lui
a pas dit qu'il avait six mois à vivre, puis il va le voir dans le texte, là.
Mais vous avez le droit, vous avez le droit. Et vous débarquez dans un hôpital,
aux archives, là, parce que vous avez besoin d'une copie de votre dossier, là,
le seul frein qu'il peut y avoir, c'est : O.K., votre dossier a
700 pages, laissez-nous le temps de le photocopier, parce qu'il n'est pas
électronique parce qu'on est au Québec.
En passant, j'ai beaucoup... j'ai trouvé ça très
drôle, la sortie du ministre de la Santé, aujourd'hui, qui considère que, pour
lui, ce qu'il fait avec ses tableaux de bord, c'était ça, la donnée numérique.
J'ai beaucoup ri. Il faudrait que vous transfériez ces commentaires-là. J'ai
vraiment beaucoup ri. Je le dis puis je ris encore. Voulez-vous voir mes
32 dents?
Mais la réalité, M. le Président, c'est que
c'est une donnée personnelle. Il n'y a pas plus personnel que son propre
dossier médical, là. Je reprends mon exemple du dossier de 700 pages, ça
existe, hein, ce n'est pas une lubie, là. Un dossier de 700 pages, là, on
va vous dire, là, parce qu'on n'est pas numérique : On va le scanner,
revenez demain, pas dans une semaine, vous allez voir. Puis, si vous êtes prêt
à attendre, probablement qu'ils vont le faire sur-le-champ, j'ai déjà vu ça.
Puis, si le dossier est éparpillé partout, bien là, ça va prendre... bon.
C'est dans ce sens-là que je pose la question.
Si, dans certains domaines, on peut avoir accès sur-le-champ, pourquoi on doit
avoir un délai? Bien, je pense que c'est correct qu'il y ait un délai, parce
que, là, on est dans les lignes de code. Il faut que, quand même, quelqu'un
soit devant un ordinateur puis qu'il fasse un changement dans la programmation...
bien, minimal, là, mais il en faut un pareil. Alors, pourquoi on n'a pas un
délai?
M. Caire : Bien,
ce n'est pas... Mais c'est comme je dis au collègue, est-ce qu'on pourrait
dire, tu sais : Une fois que la demande a été acceptée, l'entreprise a
tant de jours pour s'exécuter? On pourrait, mais, tu sais, à l'inverse, ça veut
dire que le citoyen, lui, ne peut pas prendre d'autres procédures, il faut
qu'il attende 30 jours, parce que, tu sais, le délai, il est dans les deux
sens, c'est ça que je veux dire, alors que, là, on peut se dire... Puis moi, je
suis d'accord, je suis d'accord avec le collègue.
M. Barrette : Mais c'est le
délai de décision, ce dont le ministre parle, là.
M.
Caire : Non, non,
non, je dis : Mettons qu'on ajoutait un délai d'exécution, parce que, là,
il y a un délai pour rendre la décision, 30 jours, il y a 30 jours,
puis là on peut dire : Du moment où la décision est rendue, on lui donne
un autre 30 jours, 60 jours pour exécuter, 90 jours... bien, ça
devient aussi, en même temps, une période d'attente pour le citoyen, qui se
dit : Bon, bien, je vais attendre les 30 jours, puis au bout de
30 jours, ce n'est pas fait, ça, ça veut dire que moi, j'ai au moins
30 jours avant de me... alors que, là, le citoyen, lui, il peut décider,
bien, après quatre jours, là : Aïe! Écoute, ça ne prend pas quatre jours,
là, pour aller dans ton code HTML, là, puis enlever ton tag qu'il y a là, là.
Ça ne prend pas quatre jours, là, ça prend quatre minutes. Ça fait que ce n'est
pas fait? Ça fait que, c'est parfait, moi, je m'en vais à la CAI. Là, on dit,
30 jours, bien là, c'est 30 jours, ça fait que c'est 30 jours
pour attendre la décision puis c'est un autre 30 jours pour attendre que
ça soit exécuté, le citoyen va attendre 60 jours, puis au bout de
60 jours...
Alors que, là, dans
le fond, l'esprit de 28.1, c'est de dire : J'ai une voie rapide pour
discuter avec l'entreprise pour faire valoir mon point. On part du principe que
l'entreprise, elle prend le temps de regarder ça, on lui donne un temps pour
regarder ça, rendre sa décision. La décision, elle est positive... Bien, je
veux dire, je ne pense pas qu'on prenne un gros risque en disant : C'est
correct, tu sais, si la décision est positive, ils vont agir, puis ils vont le
faire, puis le citoyen sera toujours
à l'affût. Puis n'ayant pas de délai, bien, il n'y a pas de délai ni dans un
sens, mais il n'y a pas de délai ni dans l'autre. Donc, si le citoyen,
lui, après x nombre de jours qu'il juge suffisants, il dit : Bien,
regarde, moi, je m'en vais faire une démarche à la CAI, là, puis tant mieux si
pendant ma démarche tu me donnes raison, bien, je
n'attendrai pas un autre 30 jours avant de faire ma démarche. Moi, je te
donne trois jours. Tes trois jours sont passés, je m'en vais à la CAI. Ça fait
que, dans le fond, le délai, il existe, mais c'est le citoyen qui va le fixer,
là.
M. Barrette :
Bien non, je veux dire, le citoyen n'a pas le pouvoir d'ordonner ça puis de
décider. Mais par contre il pourrait y avoir dans la loi une mention à l'effet
que, dans le cas d'une décision favorable, l'exécution de la chose soit faite
dans les plus brefs délais, au moins ça.
M. Caire :
Bien...
M. Barrette :
C'est parce que le citoyen, quand il va à la CAI, là... D'abord, il n'y a pas
grand citoyens qui vont aller à la CAI, la plupart des citoyens, là, s'ils sont
face à ça, ils vont dire : Ah! le système, ça ne marche pas puis c'est David contre Goliath, puis là il y a
toutes sortes de mots que je pourrais utiliser qui sont non
parlementaires dans les deux langues. Alors, il n'y aurait pas lieu d'avoir une
provision qui dit que... juste ça, «dans les plus brefs délais»? Au moins, s'il
va à la CAI, il va pouvoir argumenter sur le plus bref délai, là. Le plus bref
délai, pour le législateur, ça veut dire «au plus sacrant».
M. Caire : Bien, honnêtement, là, je pense qu'on défonce une porte ouverte.
Puis je m'explique, M. le
Président, je répète : on est dans une
procédure, excusez l'anglicisme, là, mais de gentleman's agreement, parce que,
comprenons-nous bien, là, comme j'ai dit, il n'y a pas de substitution,
28.1 n'est pas une substitution aux procédures judiciaires, en aucune
circonstance.
M. Barrette :
Je n'ai jamais dit ça.
M.
Caire : Non, je le
sais, je le sais, mais c'est juste pour dire que, donc, le processus formel qui
conduit à des ordonnances, des délais
d'exécution, des délais d'appel, etc., tout ça, là, ça existe présentement,
puis ça existe, et ça va être codifié par 28.8, notamment sur les
conditions. Ce que 28.1 — j'ai
dit «28.8», là, excusez-moi — amène, c'est une possibilité de s'entendre à l'amiable avec l'entreprise,
de faire valoir son point, puis que l'entreprise dise : Aïe! Tu as raison, tu as raison, on va enlever ça de là. Donc là, de
lui dire : Bien là, tu as un délai, maintenant, pour le faire puis... je
veux dire, l'entreprise a reconnu que
c'était légitime de le faire. L'entreprise, on doit présumer qu'elle va le faire, puis, de
toute façon, le citoyen peut conduire
une démarche plus formelle parallèlement à ça, parce qu'en plus, là, rien
n'empêche, là, que j'appelle l'entreprise, mais qu'en même temps je fasse une
démarche à la CAI. Ce n'est pas interdit, ce n'est pas interdit. Et donc...
• (20 h 20) •
M. Barrette :
Mais ça, on s'entend là-dessus, là.
M.
Caire :
Non, mais c'est pour ça que, je veux dire, moi, je pense qu'on défonce une
porte ouverte, là. Le législateur défonce une porte ouverte parce qu'on est
dans une procédure d'entente où l'entreprise... puis là on amène le cas
spécifique parce que... on n'amène pas le cas spécifique où l'entreprise refuse
la demande, parce que, là, à partir de là, on sait que, si l'entreprise refuse
la demande, le citoyen a des recours. Donc, on est dans une procédure de bonne
entente où l'entreprise accepte de donner suite. Sérieusement, là, de mettre un
délai d'exécution, c'est de présumer... Tu sais, on doit... dans ce cas-là, là,
on doit présumer la bonne foi, puis moi je pense que ce n'est pas nécessaire de
mettre un délai, là, même si c'est «dans les plus brefs délais». Je veux dire,
à partir de là, si le citoyen pense que la compagnie n'agit pas avec toute la
célérité requise, bien, de toute façon, le citoyen pourra se dire : Bien,
moi, je trouve que tu prends trop de temps à agir puis je m'en vais à la CAI.
Ça fait que, quand bien même qu'on mettrait «plus brefs délais», tu sais, le citoyen,
là, c'est son... je vous dirais que c'est le seuil de tolérance du citoyen qui
va déterminer c'est quoi, le délai, là.
M. Barrette : Oui, mais, je veux dire, les lois, on ne met pas
ça... on n'écrit pas ça en fonction de la tolérance du citoyen puis on
ne laisse pas cette latitude-là, là.
M.
Caire :
Bien, pas... mais, dans un cas comme celui-là, où on permet une procédure de
bonne entente, c'est dans ces circonstances-là. Je vous donnerais raison, M. le
député, si on parlait d'une procédure judiciaire formelle où le tribunal
n'aurait pas d'obligation de... c'est-à-dire où l'ordonnance du tribunal ne
serait pas exécutée, il ne se passe rien. Un instant, là, tu sais, il faut
que... ça, il faut que ce soit codifié, il faut que ce soit encadré. Mais là on
est vraiment dans une situation où la loi dit : Bien, écoute, avant de
faire ça, là, contacte donc l'entreprise puis vois donc avec l'entreprise si l'entreprise
serait d'accord pour désindexer ou déréférencer. Si l'entreprise... En fonction
de ce qu'on écrit là dans la loi, il y a quand même des critères, il y a des
conditions à réunir, il y a des critères à prendre en considération, là. L'entreprise
fait cette analyse-là, elle a ses 30 jours pour répondre. Tu sais, la
réponse, là, elle ne peut pas... elle n'est pas garrochée dans l'univers, puis
ce n'est pas : Tu nous répondras quand ça t'adonnera, là. On donne
30 jours pour répondre. Ça fait que, ça, là-dessus, je suis d'accord, il
faut que le citoyen, il ait une réponse. Mais une fois qu'il a sa réponse, là,
comment lui veut conduire la suite des choses? Il peut décider ou... en ayant
la réponse, il peut décider d'aller devant la CAI, s'il veut, là.
M. Barrette :
M. le Président, si le ministre a la réponse à la prochaine question que je
vais poser, c'est parce qu'il l'a vécu, alors je vais postuler qu'il ne l'a pas
vécu, mais je n'ai pas posé ma question encore, mais Me Miville-Deschênes,
lui, par exemple, va savoir ça. Moi, j'ai vu...
M. Caire :
Bon, bon, bon.
M. Barrette : Ce n'est pas
méchant.
M. Caire : Bon,
c'est ça, Me Miville-Deschênes, il le sait, puis moi, je ne le sais pas,
correct, O.K.
M. Barrette : C'est ça. Bien
non, le ministre va le savoir s'il l'a vécu.
M. Caire : O.K.,
d'accord.
M. Barrette : S'il l'a vécu,
c'est parce qu'il a perdu. Alors, moi, j'ai déjà vu ça à la cour. Ce n'était
pas moi, là, mais je l'ai déjà vu,
par exemple. Il y a un jugement, puis le jugement dit : O.K.,
vous avez à payer telle affaire, telle compensation
à l'autre partie, une amende, «whatever». En général... Moi, les deux fois où
j'ai vu ça, c'est sur-le-champ, ou le lendemain, ou je ne sais pas trop
quoi, là, mais ce n'est pas six mois après, là. Est-ce que je me trompe,
Me Miville-Deschênes ou M. le ministre?
M. Caire : En
fait, vous ne vous trompez pas.
M. Barrette : Pour ce qui est
de ne pas l'avoir vécu ou l'avoir vécu?
M. Caire : Je
l'ai vécu, mais...
M. Barrette : Ah, regarde donc
ça! On ne demandera pas c'est quoi, la cause.
M. Caire : ...mais
du bon côté de la clôture. Et, ceci étant, vous avez raison...
M. Barrette : J'ai reçu le
chèque.
M. Caire : ...les jugements de la cour, il y a
un délai d'exécution, il y a un délai pour exécuter le jugement, bon.
Puis là je ne voudrais pas faire la pratique illégale du droit, mais, à ma connaissance...
M. Tanguay : ...
M. Barrette : Puis on aime ça.
Mais Me Miville...
M. Caire : Oui,
mais...
M. Tanguay : Ça sert à
quoi de payer nos cotisations, nous autres, si vous le faites?
M.
Caire : Bien, ça
donne quoi d'avoir l'immunité parlementaire si on ne peut pas se payer...
M. Tanguay : Oui, si on
ne peut pas dire n'importe quoi, c'est ça.
M. Caire : Bien
oui, s'il vous plaît!
M. Barrette : C'est ça, la...
M. Tanguay : Allons-y.
M. Barrette : Mais là... mais
je veux juste faire remarquer à mon collègue, parce qu'il n'était pas là, maintenant
il y a un nouveau code...
M. Caire : Ah! M.
le Président, question de règlement.
M. Barrette : ...il y a un
nouveau code.
M. Caire : On ne
peut pas souligner l'absence d'un collègue.
M. Tanguay : Donnez-y
droit.
M. Barrette : Oui. Il y a un
code... Parce que Me Miville-Deschênes n'a pas froncé les sourcils.
M. Caire : Ah! il
y a un code, il y a un code. Oui, oui, oui. Quand je dis n'importe quoi, là, il
vient comme dans l'annonce, là.
M. Barrette :
Donc, revenons...
M. Caire : ...donc, quand un tribunal rend un jugement, il y a toujours
un délai. Et là j'espère que vous avez... je gagne en confiance et j'ai
dit «toujours un délai». Parce qu'au départ, je disais «il y a un délai», là je
dis «toujours un délai», donc je suis de plus en plus en confiance dans mes
réponses. Donc, il y a toujours un délai d'exécution.
M. Tanguay :
...puis on fait... Nous autres, on a fait notre code, on a fait ça de même, les
deux en même temps.
M.
Caire : ...
M. Tanguay : Bien,
parlez-vous, ça va bien.
M. Caire :
...puis ça va super bien.
M. Tanguay :
...15 minutes. Continuez, c'est sans conséquence.
M.
Caire : ...M. le
député. Alors, dans le cas qui nous préoccupe, puis j'insiste là-dessus parce
que je pense que c'est une addition qui est
importante puis qui est intéressante, 28.1 amène une possibilité d'avoir cette entente-là avec une
entreprise, et là on est dans le cas où l'entreprise donne raison ou acquiesce à la demande. Ça fait que la
nécessité de dire à l'entreprise : Bien, à partir de là, tu as quand
même un délai d'exécution... Tu sais,
on n'est pas dans le jugement du tribunal, on est ailleurs, on est vraiment
entre deux personnes qui se sont entendues puis qui disent : Tu as bien
raison, je vais le faire. Laissez-moi un peu de temps, puis je vais le faire.
Donc, à
partir de là, oui, moi, je pense que c'est correct de dire : Bien, la
tolérance du citoyen peut faire office de délai. Puis, si le citoyen, après cinq jours, il dit : Non, non,
moi, je trouve que ça ne va pas assez vite, je me revire vers la CAI,
bien, moi, je pense que c'est correct. Puis, si le citoyen, lui, il se
dit : Bien, écoute, je vais lui laisser 30 jours, bien, il lui
laissera 30 jours.
M. Barrette : Oui, mais ce n'est
pas ça qui arrive. Moi, M. le Président, je vais vous avouer, là,
que, depuis le début de 64, je pense que le ministre a provoqué... pas
provoqué, mais prononcé la phrase qui m'a rendu le plus inconfortable de tout
le projet de loi, parce que c'est rare que les lois nous amènent à un
gentleman's agreement. Là, 28 puis 28.1, là, pour moi, là, ce n'est pas un
gentleman's agreement, c'est deux bons articles qui permettent au citoyen qui
se considère lésé d'aller voir une organisation puis dire : Tu me lèses.
Puis l'organisation ne peut pas l'envoyer promener pour quelque raison que ce
soit, puis elle doit prendre une décision basée sur les critères qui sont là,
et puis elle doit rendre la décision par écrit en dedans de 30 jours.
Puis, moi, tout ce que je dis, là, c'est qu'à
partir du moment où on donne la possibilité au citoyen de pouvoir entreprendre
cette démarche-là on n'est pas du tout dans le gentleman's agreement, là, on
est dans une démarche qui est imprécise, dans le bon sens du terme, parce que
tout ne peut pas se codifier, qui doit être exercée à un niveau juridique qui
est en bas de l'échelle, puis, si ça ne fait pas l'affaire des parties, on peut
monter, à quelque part, en haut de l'échelle, puis après ça on monte en haut de
la maison, qui est la cour. Mais ce n'est pas du gentleman's agreement, ça, c'est une démarche qui, maintenant,
est permise par la loi, qui est souhaitable, qui est justifiée, qui,
dans ses conditions de mise en exercice... Je pense que c'est bien correct, là,
avec le débat qu'on a eu. Moi, je trouve qu'il manque un ingrédient, parce
que l'ingrédient, c'est un ingrédient
antiprocrastination pour une situation où la personne se sent lésée, la
procrastination venant non pas du demandeur, mais de celui qui est demandé, à
qui on fait la demande.
M. le Président, j'aurais... je vais déposer un amendement.
Il sera voté contre, là, mais je vais le déposer quand même.
M. Caire : ...une
procrastination assistée.
M. Barrette : Oui, absolument,
puis elle permet d'être autonome, et la personne peut s'autoassister. Et voilà.
Là, je... toutes sortes de métaphores, mais je vais attendre que la caméra soit
éteinte.
Le Président (M.
Bachand) : Donc, vous allez préparer un amendement? Donc, on
peut continuer à d'autres interventions en attendant?
M. Barrette : Bien non, on va
suspendre...
Le Président (M.
Bachand) : Bien, on peut faire les deux en même temps.
M. Barrette : ...suspendre en
attendant...
Des voix :
...
Le Président (M.
Bachand) : On est toujours en ligne. Alors donc, est-ce qu'il y
a consentement? On va suspendre, oui?
Une
voix : Consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Mais non, on peut faire les deux en
même temps, si c'est déjà fait, là.
Une voix :
Oui?
Le
Président (M. Bachand) : Bien oui, bien oui, bien oui.
Une voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : Bien, tant mieux, tant mieux.
Des voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : Suspendu.
(Suspension de la séance à 20
h 30)
(Reprise à 20 h 46)
Le Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La commission
reprend ses travaux. Donc, M. le
député de La Pinière, s'il vous plaît.
M. Barrette : M. le
Président, là, dès que je vais le
voir... «Amendements et motions en cours et à venir», c'est ça?
Une voix :
...
M. Barrette :
Ah! O.K., «en cours» vient d'apparaître, il n'était pas là tantôt. Très bien.
Alors, M. le
Président, je propose donc l'amendement suivant, qui n'est pas
Word 365 :
L'article 28.1
de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé
proposé par l'article 113 du projet de
loi est modifié par l'insertion, dans le premier alinéa, après les mots
«d'accéder à ce renseignement par un moyen technologique», des mots
«sans délai, suivant la réponse transmise en vertu de l'article 32».
Est-ce que... Il n'y
a pas de coquille, là?
Une voix :
Non.
M. Barrette :
O.K. M. le Président, je pense que je n'ai pas vraiment besoin de donner des
explications. Si vous le souhaitez,
je peux disserter encore, mais je ne pense pas que ça soit nécessaire, à moins
que le ministre me le demande.
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Caire :
Non, je ne le demande pas.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, oui.
M. Tanguay :
Est-ce qu'on va voter pour? Le ministre va voter pour?
M. Caire :
Non.
M. Tanguay :
Non? Ah! ça, c'est quasi une invitation à disserter, parce qu'il laissait
entendre que, mais là...
Le
Président (M. Bachand) : Donc, M. le député de
La Pinière, oui.
M. Barrette :
Je pensais que la période pendant laquelle nous avons pris un temps raisonnable
pour rédiger et réfléchir, j'eusse cru que le ministre aurait utilisé à bon
escient son temps pour voir la lumière. Mais apparemment nous allons voir, dans
quelques instants, s'il l'a vue ou non. M. le Président, je n'ai rien
à rajouter, sauf, évidemment, que j'ai raison, là, mais...
Une voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Autres interventions?
M. le député de LaFontaine, oui.
M. Tanguay : Juste, M.
le Président, on s'est posé la question, puis je ne veux pas faire de
sémantique, là, «meilleur délai» ou «sans
délai», mais juste pour vous dire, là, dans notre corpus législatif, «sans
délai»... puis je prends ce qui est un des piliers
de notre État de droit, le Code civil du Québec, le «sans délai» revient... de
toute façon, LégisQuébec revient... le «sans délai» revient peut-être huit,
10 fois plus souvent que le «meilleur délai». Mais le «sans délai», on pourrait dire : Bien, «sans
délai», voyons donc, c'est tiré par
les cheveux, il y a toujours, par définition, des délais, mais,
juridiquement, «sans délai», ça veut dire : tu le fais tout de suite, tu
le fais sans perdre aucun temps lorsque c'est raisonnablement... tu n'as pas
rien qui ne t'en empêche, tu le fais sans délai.
Alors, on parle : «Le notaire qui reçoit
une déclaration commune de dissolution de l'union civile la notifie sans délai», «lorsque la personne désignée [d'un]
parent refuse la tutelle, elle [en avise], sans délai, son remplaçant»
et ainsi de suite, «le greffier du tribunal donne, sans délai, avis au conseil
de tutelle». Et ça, M. le Président, l'analogie est d'autant plus intéressante
que c'est souvent le suivi de documents, la communication d'informations. Ici,
on en est dans la gestion de l'information. Exemple : «243. Le tuteur doit,
sans délai, justifier de la sûreté au conseil de tutelle», «le majeur doit,
dans la mesure — plus
loin — du
possible et sans délai, en être informé», etc.
M.
Caire : ...
M. Tanguay : Pardon?
M.
Caire :
L'auriculaire, lui?
M. Tanguay :
L'auriculaire?
• (20 h 50) •
M. Caire : Oui,
vous avez dit «le majeur doit». Et l'auriculaire, il fait quoi?
M. Tanguay :
...sous-amendé, mais : «326. Lorsque l'administrateur de la personne
morale omet de dénoncer correctement et sans délai une acquisition ou un
contrat», et etc.
Mon point, puis sur l'amendement, M. le
Président... Puis j'écoutais parler mes collègues, tantôt, on a dit que la
personne... Bon, gentleman's agreement... en droit, c'est gentleman's agreement
tant que ça va bien. C'est comme un contrat de mariage, jour 1, ça va
bien, tout le monde... hein, jour 1, ça va bien, tout le monde est content
puis...
M. Caire :
Expérience personnelle.
M. Tanguay : ...c'est ad
vitam aeternam.
Ceci dit, je suis en train de perdre mon idée,
si on le demande à l'entreprise, elle le fait, ça va bien. On le demande à
l'entreprise, elle ne le fait pas, je sais qu'on a un recours, le «sans délai»
est là, on a recours à la CAI. J'ai revérifié, pendant qu'il y avait
discussion, aux articles 150, 151, effectivement la CAI n'a pas de
poignée. La CAI ne peut pas dire : Moi,
j'ai refait l'analyse — puis on me corrige si j'ai tort — et je pense que... je pense
qu'effectivement elle est justifiée, ça doit être déréférencé et ça doit être
fait immédiatement, sans délai. La CAI ne peut pas imposer des pénalités. Quelle est... autrement dit, je vais le
dire de même, quelle est l'utilité du recours à la CAI? La CAI va vous
émettre une ordonnance, mais là «qu'ossa donne», comme disait l'autre,
l'ordonnance, si l'entreprise ne s'exécute pas?
M. Caire : C'est-à-dire que, dans la démarche initiale
envers l'entreprise, c'est ce qu'on expliquait, l'entreprise peut effectivement... L'entreprise n'a pas une
obligation de le faire. L'entreprise, puis là-dessus le député de La Pinière a une bonne lecture, a l'obligation de prendre la demande, d'analyser la
demande et de répondre à la demande. Elle peut, l'entreprise, y répondre
positivement, négativement. Dans la mesure où elle répond... même dans les deux
cas, ceci étant, là, mais disons que le cas
le plus probable, c'est le cas où l'entreprise répondrait négativement, à ce
moment-là le demandeur peut
judiciariser la demande, parce que jusqu'à date ce n'est pas judiciarisé, c'est
une demande que je fais de façon administrative en fonction des
conditions qui sont prévues par la loi et selon les critères qui sont édictés.
Bon, et là
arrive le cas où la... le cas qui devient plus probable, où... c'est-à-dire,
pas le cas probable, mais le cas où l'entreprise
refuse, c'est dans ces cas-là où la probabilité de se tourner vers la CAI
existe, à mon avis, plutôt que dans les cas où elle accepte. Mais, malgré ce que j'ai dit, c'est sûr que, si elle
accepte, la possibilité n'est pas retirée. C'est juste que, tu sais, si
l'entreprise dit : Oui, je vais le faire, le premier réflexe ne sera
vraisemblablement pas d'aller à la CAI. Bon.
Donc, va à la CAI, la CAI analyse le dossier, la
demande, comme elle le fait, en fonction des critères établis par la loi, rend
un jugement. Ce jugement-là amène une ordonnance. Cette ordonnance-là, comme on
l'a dit, c'est comme un jugement de la cour, il y a un délai d'exécution, et
là-dessus il peut y avoir des sanctions, c'est prévu dans le cas où vous
refusez de vous conformer à...
M. Tanguay : ...à la
CAI.
M. Caire : Oui.
M. Tanguay : Et...
Une voix : ...
M. Tanguay : Oui, puis
je... petite étoile, une petite étoile.
M. Caire :
J'ai eu un avant-midi difficile, mais je pense que ma soirée est nettement
meilleure.
Une voix :
...
M. Caire :
Me Miville-Deschênes? Merci.
M. Tanguay :
Ceci dit, la compagnie pourrait... Parce que vous l'avez dit, il y a quelqu'un
qui l'a dit plus tôt, là, il va y avoir des cas d'espèce, là, il va y avoir des
cas types, parce que la compagnie va dire : À un moment donné, il faut
mettre notre pied à terre, puis on va prendre le cas de madame X, puis on
va le contester pour s'établir. Il y aura une jurisprudence, autrement dit, qui
va se faire avec des cas...
M. Caire :
Assurément.
M. Tanguay :
Assurément. Dans les premiers... Alors, la compagnie, ils disent : O.K.,
on va faire un cas type avec ça, on met nos avocates et avocats là-dessus.
L'injonction de la CAI, après que je l'ai refusée, la personne, le citoyen
demande à la CAI de statuer. La CAI dit : Effectivement, vous avez bien
raison, injonction. La CAI va mettre un délai. Le délai, j'imagine, ça peut
être en quelques jours, là, ou immédiatement, ou sans délai, ou... tu sais, ça
ne sera pas 10 jours, là, ça ne sera pas 10 jours, là. La compagnie,
tout de suite, va déposer un recours pour contester devant les tribunaux, et
ainsi de suite.
Une voix :
...aller en appel...
M. Tanguay :
En appel. C'est là où c'est lourd, et la compagnie... le seul désavantage pour
la compagnie, c'est de se le faire dire par la CAI.
M.
Caire : Oui, mais
il y a quand même... Quand elle se fait le... Quand elle se le fait
dire par la CAI, là, il y a des obligations légales...
M. Tanguay :
Oui, mais mon point...
M. Caire :
...avec des sanctions potentielles.
M. Tanguay : Mais vous comprenez mon point. Mettons que vous
êtes la compagnie, vous recevez... cette année, vous avez reçu
1 000 demandes puis, dans le doute, vous protégez votre entreprise.
Votre... l'expression anglaise, votre «core business», c'est le référencement.
Alors, on ne commencera pas à dire oui à tout parce que...
M. Caire :
...non...
M. Tanguay :
...ou tu dis non, mais, dans le doute, on dit non.
M. Caire :
Oui.
M. Tanguay :
Puis, si là-dessus... Parce que, si... Parce que, s'il n'y a pas d'autre chose
que de se le faire dire à la CAI, au pire aller, je me le ferai dire dans six
mois, huit mois, un an — je
ne sais pas quels seront les délais — je me le ferai dire par la
CAI, vous comprenez? S'il n'y a pas de poignée pour ça, la compagnie peut
s'amuser à... Ah! j'en ai... mettons, j'ai reçu 1 000 demandes, puis
je conclus là-dessus, j'ai reçu 1 000 demandes, j'en ai accordé, oui,
quand même, il y avait 15 %, là, où il fallait, hein? Les autres, il y en
a... Des farfelues, j'en avais 10 %. Les autres, oui, j'aurais
peut-être... Je dis non, je m'assois. Il y en a probablement la moitié, les
personnes, ça va arrêter là, parce que les gens ne sont pas prêts à prendre le
sentier de la guerre, puis d'aller à la CAI, puis de payer un avocat, puis
de... Vous savez, là, je veux dire, ce n'est pas évident. Puis les autres qui
vont contester, la compagnie... je me le ferai dire par la CAI, puis je vais
dire : Ah! O.K., parfait. Sur les autres 50 % qui se sont rendus là,
je me le fais dire par la CAI, je l'enlève, ça finit là. Si je n'ai pas...
Pensons, peut-être, avoir une pénalité ou... je ne le sais pas, ou quelque
chose...
M.
Caire :
Bien, on ne peut pas avoir une pénalité, M. le député, parce que cette étape-là
n'enjoint pas d'obligation autre que de
considérer, de traiter la demande et d'y répondre. Alors, rien dans la loi,
rien dans l'article 28.1 ne dit : Vous avez l'obligation de
dire oui aux demandes. Puis, tu sais, je ne sais pas si vous comprenez ce que
je...
M. Tanguay :
...mais la CAI pourrait voir un abus de droit.
Une voix :
...
M. Caire :
Parce que l'amendement du député de La Pinière s'applique dans le cas
exprès où l'entreprise dit oui. Ça s'applique dans le cas où l'entreprise dit
oui. Donc là, le député de La Pinière dit : Quand l'entreprise dit
oui, il faudrait que ça soit oui avec un délai d'exécution.
M. Tanguay :
Mais je prends ce chemin-là pour arriver au cas d'espèce où l'entreprise a dit
oui, mais que ça fait un mois qu'elle ne l'a pas fait. Je vais avoir un
recours... moi, je pense que je vais avoir un recours auprès de la CAI pour
dire...
M. Caire :
...de toute façon, sans l'amendement, vous en avez un. Ce que... Puis c'est ça,
l'argument que j'avais avec le député de La Pinière, c'est qu'actuellement
le délai, il existe, mais c'est le demandeur qui le fixe. Le demandeur, lui,
peut décider que... Parce qu'advenant le cas où c'est un non, on s'est entendu,
je pense, que la démarche était claire. Je m'en vais à la CAI ou je laisse
tomber puis je passe à d'autre chose, bon, c'est un choix. Dans le cas où c'est
oui, bien là, on présume que l'entreprise va le faire. Mais effectivement le citoyen
peut être attentif puis dire : Aïe! Moi, dans ma tête, là, c'est
24 heures, que tu as, puis si tu ne le fais pas, puis après
24 heures, je suis allé, j'ai fait ma recherche, puis les éléments d'information
que je veux faire désindexer sont encore là, donc je m'en vais à la CAI. Alors,
la CAI va prendre la plainte de la personne, parce que la CAI n'a pas à tenir
compte du fait que le citoyen a fait une démarche auprès de l'entreprise, justement
parce qu'il n'y a pas de délai. Puis, à la limite, la loi n'interdirait pas le citoyen
de faire ça en parallèle.
• (21 heures) •
M. Tanguay :
Bien, mon point, là, il est... je suis toujours sur l'amendement du collègue,
parce que je trouve ça intéressant, le... mon point, il est... Je vais le dire
de même, là, j'aimerais tester la possibilité d'ajouter à la CAI, pour elle, la
possibilité de dire : Bien, voyons donc, la compagnie A, là, qui a refusé,
cette année, là, ça fait 15 fois qu'ils passent devant nous autres, cette
compagnie-là, puis ils avaient refusé. Puis, à sa face même, là, ils ont
refusé, mais ils ont été de mauvaise foi, je vais dire les gros mots, ils ont
été de mauvaise foi, il aurait fallu qu'ils... Mais la CAI ne pourra pas donner
une tape, la CAI, tout ce qu'elle va pouvoir faire, ça va être une injonction,
dire : Faites-le tout de suite, dans les 48 heures. Mon point,
c'est : lorsque la mauvaise foi ou le traînage de pieds, la mauvaise
foi... la CAI n'aura pas, puis j'aimerais peut-être ça qu'elle l'ait, la possibilité
de dire, par exemple : C'est épouvantable, j'ai devant moi une demande,
là... tu as dit oui, ça fait trois semaines, puis j'ai une demande d'un citoyen
qui dit : Peux-tu t'exécuter?, puis vous ne l'avez pas fait.
Ce que la CAI... Ce
que vous me dites, c'est que, la CAI, tout ce qu'elle va pouvoir faire, à ce
moment-là, c'est de dire : Bien là, «chummy», c'est ta décision, tu ne
l'as pas fait, ça fait trois semaines que tu ne le fais pas. Là, tu as une
injonction, puis je te donne 48 heures, puis, si tu n'obtempères pas, tu
peux te rendre jusqu'en Cour suprême pour contester l'injonction, mais, si tu
ne le fais pas, bien là, il va y avoir des pénalités. Mais, avant de se rendre
là, la CAI pourrait, puis j'aimerais ça lui donner... Vous comprenez? Vous êtes
commissaire à la Commission d'accès à l'information puis vous voyez souvent l'entreprise
A passer devant vous, puis, câline! dans le doute, eux autres, ils refusent,
ils refusent. Il y a une sorte de mauvaise foi là-dedans. Ça, ça pourra se
voir. Ou de ne pas accorder les ressources — puis ça, c'est une autre question
que j'avais là-dessus, plus loin — de ne pas accorder les ressources
suffisantes pour traiter, pour analyser les demandes. C'est comme si, eux
autres, dans le doute, ils tirent au hasard ou, dans le doute, ils refusent.
L'entreprise a une obligation proactive d'avoir les ressources pour faire de
bonnes décisions puis ne pas, dans le doute, me pelleter ça à moi, puis je
termine là-dessus, puis tout simplement de se faire dire : Ah! moi, je
suis l'entreprise A, je suis plus ou moins de bonne foi, j'ai une personne,
elle a des dossiers ça d'épais de même. À un moment donné, là, le vendredi,
4 heures, elle baisse sa pile, elle les refuse, puis moi... de ne pas être
capable de constater la mauvaise foi. Puis là, là-dessus, je termine là-dessus,
j'y vais sur le délai de mon collègue. Tu sais, si ça fait trois semaines, puis
tu ne l'as pas fait, tu es de mauvaise de foi. Quel est l'outil, quelle est la
poignée pour la CAI si on ne l'a pas à 150 puis 151?
M. Caire :
Bien, la CAI, l'outil qu'elle a, c'est son pouvoir de rendre des ordonnances.
Elle a le pouvoir. Puis la CAI peut parfaitement, dans sa décision, motiver sa
décision en fonction des arguments qui sont les siens, là. Je veux dire, si...
M. Tanguay :
...
M.
Caire :
Non, mais ce que je veux dire, c'est que, si dans sa décision la CAI constate
de la mauvaise foi, je veux dire, elle a l'autorité pour l'écrire dans la
décision : C'est de la mauvaise foi, je rends mon jugement sur le banc et
je vous ordonne de... et bang, bang, bang.
M. Tanguay :
Vous comprenez que c'est de valeur que la CAI arrête de parler là. C'est, à sa
face même, patent, c'est de la mauvaise foi. Là, là, je vous ordonne de le
faire dans les 48 heures. J'aurais aimé ça que la CAI... qu'on prenne le crayon
du législateur puis qu'on lui donne le pouvoir, vous comprenez, de donner une
pénalité. Moi, je l'ajouterais. Si la CAI... Parce que, si la CAI reconnaît que
c'est de mauvaise foi, ça choque le sens commun que l'entreprise va dire :
Parfait, on se reverra au prochain.
M. Caire :
Mais c'est parce que, là, on est à une étape administrative. Moi, à la limite,
là, mettons qu'on serait là, là, j'en serais même à me demander si le
législateur pourrait le faire. Je ne suis pas sûr que ça passerait le test constitutionnel de dire que, sur un article
qui offre la possibilité à deux parties de s'entendre, la CAI décide qu'il
y a une des deux parties qui est de mauvaise
foi puis elle lui impose une pénalité. Moi, je ne suis pas sûr que ça
passerait...
M. Tanguay : ...je
parle : la compagnie A a refusé, ça se ramasse devant la CAI, puis, la
compagnie A, dans le fond, là, on se rend compte, là, avec la preuve... ça
arrive, là, la compagnie A, la personne qui a étudié le dossier, elle ne l'a même pas étudié, elle a dit non, ou la compagnie
A avait des critères qu'elle n'a même pas considérés, elle a dit non, elle est de mauvaise foi. Je trouverais
qu'on aurait arrêté, comme législateurs, de parler trop tôt que la CAI...
Puis elle va le marquer, vous avez raison, elle va le marquer : La CAI
reconnaît que, dans ce cas-là, la compagnie A a fait preuve d'une mauvaise foi
flagrante, choquant le sens commun, papi, papa. En conséquence, faites-le dans
les 48 heures.
Moi, j'aimerais ça lui donner l'occasion de...
puis je pense que c'est un pouvoir constitutionnel, là, de donner, dans
certains cas, une pénalité, d'où l'intérêt — puis je vais dans le sens de
l'amendement de mon collègue de La Pinière — de dire : Bien,
si vous dites : Oui, oui, oui, correct, on va le faire, on va le faire,
puis vous vous traînez les pieds, la CAI pourrait récupérer ça puis pourrait
vous donner une tape plutôt que vous donner... Dans le pire des cas, pour la
compagnie qui est de mauvaise foi, elle va se le faire dire par la CAI, puis
c'est sans lendemain.
M. Caire : Non,
non, mais ce n'est pas sans lendemain, là, ce n'est pas sans lendemain.
M. Tanguay : ...
M. Caire : Non,
non, mais, c'est ça... Oui, bien, mais, je veux dire, la finalité est
rencontrée, l'entreprise va s'exécuter, mais, comme je dis,
M. le député de LaFontaine, c'est une possibilité qui est ajoutée par
la loi, de faire cette démarche-là. Cette démarche-là, là, en aucun temps, elle
n'est obligatoire, c'est-à-dire que ce n'est pas un passage obligé vers la CAI.
Le citoyen, à la limite, là, pourrait décider de s'en aller directement à la
CAI puis passer par la CAI. Il pourrait, ce n'est pas un passage obligé, là,
c'est une possibilité. Puis, si, à la limite, tout le monde sait que
l'entreprise Y, elle, elle dit non à toutes les fois, puis ça fait
14 jugements qu'elle se fait dire non, bien, O.K., je vais m'en aller à la
CAI direct, je ne prendrai même pas le temps de... Puis peut-être que la CAI
pourra décider de porter une attention particulière aux demandes qui seront
faites en relation avec cette entreprise-là, puis peut-être que cette pile-là,
elle ira plus vite. Je ne sais pas.
M. Tanguay : Mais vous
comprenez que cette entreprise-là, bel exemple, qui serait complètement mauvais
joueur, elle n'aurait aucune conséquence financière.
M.
Caire : Oui, mais en même temps, sur une possibilité
d'entente administrative, mettre une pénalité là-dessus, c'est là où je vous dis,
M. le député : Moi, je ne suis pas convaincu qu'on passerait le
test, là, parce qu'on est vraiment dans
une... on est dans une démarche de médiation — puis là je veux... là, je fais vraiment la pratique
illégale du droit, là — on est dans une possibilité pour deux
entités de discuter, puis on en arrive à la conclusion que celle-là, elle ne discute
peut-être pas de bonne foi, bien, parfait, on va aller devant les tribunaux.
C'est ça, le réflexe, dans notre société de droit, c'est-à-dire : Bien,
O.K., on avait la possibilité de s'entendre à l'amiable, cette possibilité-là...
visiblement, tu n'es pas de bonne foi, bien, moi, je ne pense pas qu'un
tribunal au Québec pourrait, en toutes circonstances, là... Parce qu'on
pourrait étirer ce concept-là, dire : Bien, écoutez, moi, j'ai suivi ça,
là, puis vous n'avez pas été de bonne foi, ça fait que je vous mets une
pénalité.
M. Tanguay : ...c'est
parce que c'est là où on diverge, M. le ministre, de vision. C'est
que 28 et 28.1 n'est pas une invitation à
deux personnes à discuter, c'est le droit de la personne concernée de faire une
demande officiellement, et, si d'aventure la réponse est non, vous avez
un recours pour que la CAI aille lui dire.
M. Caire : Ce
n'est pas un passage obligé.
M. Tanguay : ...oui.
M. Caire : Non.
M. Tanguay : Si moi...
O.K. Moi, je suis la personne concernée, vous êtes la compagnie A, je vous fais
la demande, article 32, vous avez un passage obligé, répondez-moi dans les
30 jours.
M. Caire : Oui,
non, ce n'est pas ça que je dis, c'est que vous n'êtes pas obligé de passer par
la compagnie pour faire votre demande, vous pouvez décider d'aller directement
à la CAI, dire : Aïe! Le moteur de recherche X,
là, je veux qu'il désindexe des informations qui datent de... sur moi qui
datent de ta, ta, ta, puis je fais ma demande à la CAI. Vous n'êtes pas
obligé. La loi ne dit pas : étape 1, 28.1; étape 2, la CAI; étape 3, la
procédure d'appel. Ce n'est pas ça, là. C'est une possibilité qui est offerte
en marge de la procédure judiciaire existante.
M. Tanguay : ...n'exclut
pas le cas où, quand je l'ai demandé de bonne foi puis que je me suis fait
envoyer, garrocher dans les roses... ça n'exclut pas le fait que, la CAI, peut-être
qu'on aimerait ça, en vertu de ses pouvoirs de...
le cas échéant, lorsqu'elle constate une utilisation ou une interprétation crasse des articles, des impératifs de la loi...
Exemple, ils n'ont pas pantoute analysé 28.1,
ils s'en sont foutu, ils ont dit non. J'aimerais ça que la CAI ait cette
dent-là de dire : Bien, j'ai constaté une désinvolture condamnable, crasse
et de mauvaise foi, j'impose une pénalité. Pourquoi? Parce que, là, on
enverrait le message à toutes les compagnies A, B, C, D, si un citoyen qui veut
aller sur le «fast track», qui ne veut pas payer une avocate pour aller devant
la CAI, puis qu'il est de bonne foi, que vous devez, de
façon très sérieuse, considérer ça. Puis, si vous êtes de bonne foi puis vous
avez rendu la mauvaise décision, il n'y a pas de problème, il n'y aura pas de
pénalité.
M. Caire : Je ne
pense pas qu'on passerait le test des tribunaux, M. le député.
M. Tanguay : ...c'est en
vertu de quel article, ça? La Charte canadienne?
M. Caire : Non,
mais ce n'est pas ça, mais c'est parce que, là, vous êtes en train de
pénaliser... C'est comme je dis, là, ça veut dire que toute procédure où il y a
une possibilité d'entente de médiation en dehors des tribunaux, où il y a une des deux parties qui fait preuve de
mauvaise foi... on est en train de dire que le tribunal pourrait
sanctionner la mauvaise foi. Dans le fond, la sanction, c'est de dire :
Parfait, tu ne veux pas jaser, c'est correct, je vais aller devant les
tribunaux. C'est ça, le réflexe, ce n'est pas... Tu sais, ce n'est pas... Le
réflexe, ce n'est pas de dire : Ah! bien là, le tribunal devrait
sanctionner le fait que vous n'avez pas discuté de bonne foi puis vous n'avez
pas été de bonne foi dans le traitement des informations, donc je vais vous
punir, c'est de dire : Bien, écoutez, s'il ne veut pas jaser, il ne veut
pas jaser, c'est correct, vous avez des recours judiciaires, utilisez-les.
M. Tanguay : Je
comprends, mais à la minute où le citoyen fait la demande en vertu de 32, donc
28, 28.1 puis 32, la compagnie doit s'exécuter et doit prendre 28.1 de façon
sérieuse et consciencieuse, tu sais, elle ne peut pas s'en foutre. Moi, je pensais que, dans les pénalités, les impératifs
imposés dans la loi... Donc, un citoyen de bonne foi introduit ce
recours-là. Les impératifs de la loi, si tu n'y répondais pas ou si tu les
appliquais de façon tout à fait désinvolte
et avec un je-m'en-foutisme, je pensais, moi, que la CAI, à quelque part, avait
toujours, lorsqu'elle le constatait, autorité et compétence pour imposer
une pénalité : Honnêtement, tu as fait fi de tes obligations, je t'impose
une pénalité. J'aurais cru cette discrétion
et cette juridiction-là de la CAI, de façon générale, pour imposer de telles
pénalités. Puis là la compagnie pourrait contester ça devant les tribunaux puis
dire : Bien, voyons donc, ça ne s'appliquait pas, puis elle n'aurait pas
dû me donner ça. Sinon, on s'en remet à la bonne foi. Puis je reviens sur le
commentaire de mon collègue, gentleman's...
M. Caire : C'est
le principe, c'est le principe de l'article. Le principe de l'article, c'est de
dire : À ce qui existe judiciairement, qui demeure, nous ajoutons cette
possibilité-là de dire : Bien, écoutez, on peut peut-être aussi s'adresser
directement à... Tu sais, avant d'aller aux tribunaux... L'idée, c'est de
dire : O.K., avant de passer par les tribunaux, là, demandez donc à la
compagnie voir s'ils ne seraient pas d'accord pour le faire. Puis, si la
compagnie dit : Bien oui, on va le faire, puis ça a bien de l'allure...
M. Tanguay : ...
M. Caire : ...ça
va bien. Mais c'est ça, l'esprit de l'article. À partir de là, si l'entreprise
dit : Bien non, O.K, puis... non, puis... non, c'est correct, on va aller
devant les tribunaux, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?
• (21 h 10) •
M. Tanguay : ...en
anglais, l'expression, là, ces articles-là, là, c'est dans la liste «nice to
have». Autrement dit, c'est le fun.
M.
Caire : ...
M. Tanguay : Autrement
dit, c'est «cute», c'est gentil, puis, si la compagnie dit non de façon
systématique, ce n'est pas grave, on l'aura essayé, puis la CAI va lui dire, la
CAI va lui dire.
M.
Caire : Je pense
que c'est plus que «cute», parce que le sentiment que j'ai, c'est que je pense
que les compagnies, de façon très large, sont de bonne foi, vont prendre cette
situation-là pour ce qu'elle est, c'est-à-dire au sérieux, vont faire des
analyses qui sont sérieuses, vont rendre les décisions qui sont sérieuses. Est-ce
qu'il y aura, à travers ça, quelques brebis galeuses? C'est possible, il y en a
partout. Ceci étant, est-ce que ça rend cet article-là un peu licorne? Non, je
ne pense pas, parce qu'à la fin de la journée je pense que... puis ce n'est pas
propre au tribunal de la CAI, c'est propre à tous les tribunaux, je pense qu'il
y a cette volonté-là de s'assurer qu'avant d'en arriver à des recours
judiciaires on a essayé la discussion de bonne foi. Ce n'est pas particulier à
l'accès à l'information et à la protection des renseignements personnels, il y
a plusieurs domaines du droit où on va essayer d'aller chercher l'entente de
bonne foi. Donc, de l'ajouter à la loi sur la protection des renseignements personnels,
c'est faire écho à ce qui se passe ailleurs dans le domaine judiciaire.
M. Tanguay :
...réconciliez-moi avec le monde des licornes, parce que, vous l'avez dit, la
brebis galeuse va continuer à galer. Et là, sur le «chat», je vois mon collègue
de La Pinière qui m'a texté et m'invite à... sans délai. La plus haute autorité au sein de l'entreprise privée pourrait en répondre, de ça,
d'une désinvolture face... d'une désinvolture systématique face à la
non-application des critères de 28.1. La CAI aurait-tu... J'essaie de me
réconcilier, là, parce qu'à un moment donné, coudon, 28.1, ça existe, puis...
Et je reprends le commentaire de... Me Éloïse Gratton, Me Elisa Henry, de Borden Ladner Gervais,
étaient venues nous dire : «...il apparaît déconcertant d'exiger des
entreprises privées qu'elles mettent en balance des droits et libertés...» Puis
elles parlaient des ressources : «...proposé énumère [la]
liste non exhaustive de critères[...]? Doivent-elles mener une enquête
approfondie sur les circonstances dans lesquelles les renseignements», papi,
papa.
Vous êtes chef d'entreprise. On nous dit :
Bien là, on reçoit des demandes, c'est notre «core business» — si
vous me pardonnez l'expression — on reçoit des demandes, ce n'est plus une
personne que ça nous prend, ça nous en prendrait huit. Là, je dirais : Wo!
Wo! Wo, là! Huit? Un avocat va lui remettre une opinion juridique puis, de
façon tout à fait conforme au Code de déontologie des avocats, membres du
Barreau, puis conforme à l'esprit de la loi, il va dire : Bien, écoutez,
dans le pire des cas, la CAI va vous le dire. O.K., je vais laisser juste une
personne, je n'en laisserai pas huit. J'aimerais ça que la plus haute autorité,
elle prenne ça au sérieux.
M. Caire : Bien,
moi, je pense que ça va être le cas. Je veux dire, il y a quand même... En
fait, deux choses. La première, c'est qu'il y a une obligation, dans les
30 jours, d'offrir une décision. Puis, une entreprise qui se verrait un
abonné mensuel au tribunal administratif de la CAI et qui verrait la CAI rendre
jugement par-dessus jugement lapidaire envers cette entreprise-là en
l'exhortant de donner suite aux demandes qui sont faites, bien, j'imagine qu'à
un moment donné ça pourrait causer un préjudice à l'entreprise en question, là.
M. Tanguay : ...puis la
CAI ne pourrait pas lui asséner ce préjudice-là par une pénalité?
M. Caire : Bien,
la CAI pourrait lui imposer une sanction si l'entreprise en question est en
dérogation de la loi aux articles qui prévoient des sanctions. Cet article-là,
donc cette possibilité-là qui est offerte d'avoir une demande traitée
positivement, n'encourt pas de sanction si l'entreprise dit : Bien non,
dans ce cas-ci, je pense que je ne vais pas donner suite à votre... Tu sais,
c'est aussi le droit de l'entreprise de ne pas se rendre aux arguments du
demandeur. Alors, il est possible que le demandeur ait tort aussi, il est
possible que la CAI donne raison à l'entreprise de ne pas donner suite à la
demande du demandeur.
Là, je
comprends, là, qu'on est... Parce qu'en même temps je pense que, là, on est
dans la gestion de l'exception de l'exception,
là, sans vouloir... Je veux dire, est-ce que des brebis galeuses, ça existe?
Oui. Est-ce qu'elles seront légion? Je ne pense pas. Donc, est-ce qu'on
mettrait à risque... Parce que, je vous le dis... puis vous avez posé la
question à Me Miville-Deschênes, puis je le laisserai répondre, mais,
d'après moi, à ce stade-ci, que la CAI puisse, de façon un peu arbitraire,
parce qu'elle juge que l'entreprise est trop souvent de mauvaise foi dans une
démarche qui se veut de conciliation, imposer des sanctions, à mon avis, c'est
un précédent. Je ne suis pas convaincu que ça passerait le test des tribunaux,
mais je vais laisser... Puis Me Miville-Deschênes ne fronce pas les
sourcils, ce qui, généralement, est un signe positif en ma faveur. Donc, je lui
dirai : Bas les masques, et répondez à cette question.
M. Miville-Deschênes
(Jean-Philippe) : Bien, l'article qui fait en sorte que ça ne serait
pas constitutionnel, je ne pourrais pas le nommer, mais je ne connais pas de
tribunaux administratifs... Parce que, là, avec 28.1, on emprunte... La
commission a deux sections : section surveillance, qui peut rendre
des ordonnances et imposer des pénalités lorsque la loi n'est pas respectée, et
section juridictionnelle, tribunal administratif, comme le Tribunal
administratif du travail, du logement, où là on tombe dans le quasi judiciaire,
donc une décision appelable en Cour du Québec. Donc, je ne connais pas de
tribunaux administratifs qui, en cours d'audition, peut rendre... peut imposer
une pénalité, là. C'est comme si le Tribunal administratif du logement, suite à
plusieurs demandes d'un même locateur, dirait : Ah! bien là, il y a de
l'abus, donc je vais vous sanctionner, tu sais. Donc, ce n'est pas quelque
chose que je connais. Puis, pour une raison que je devrais valider, je ne pense
pas que c'est quelque chose qu'on peut prévoir parce que, quand on est dans le
juridictionnel, il y a des protections constitutionnelles, entre autres, là, le
droit à être entendu, audi alteram partem,
etc., qui doivent être respectées. Donc, ce n'est pas... Du moins, je ne
connais pas de situation où un tribunal administratif comme ça, ou même
judiciaire, peut pénaliser, là, une des deux parties en cours de route, là,
avant la décision finale, finalement.
M. Tanguay : Je vais
faire comme si l'amendement était de mon collègue puis je vais lui laisser la
parole.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de La Pinière, s'il vous plaît.
M. Barrette : J'écoute
l'échange, M. le Président, et puis je suis encore plus étonné, là. Là, il me
semble que ma position est encore plus forte et... En tout cas, mon
incompréhension de la position du ministre est encore plus grande. Ça fait que
je vais revenir un petit peu à la case départ, qui est mon étonnement initial.
Il paraît que le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Moi, j'ai toujours
pensé que cette expression-là voulait dire que le législateur codifie des
règles en fonction de comportements visés ou, s'ils ne sont pas visés, qui sont
vécus, puis la codification d'une loi, là, vient faire le trafic : ce qui
est bon, ce qui est mauvais, ce qui est acceptable, ce qui n'est pas
acceptable, ce qui est nuancé, ce qui n'est pas nuancé. Et, comme tout n'est pas
codifiable, bien, on a inventé les cours de
justice, parce que des fois un texte de loi peut être sujet à interprétation. Puis là, là, ce que je viens de dire à date, je n'ai pas dit...
il n'y a pas d'hérésie là-dedans, là, je n'ai pas statué de grands principes,
là, dans le champ gauche, là. Le commun des mortels qui regarde la loi, là,
bien, il voit ça comme ça. À cet égard-là, je me vois pas mal synchrone avec le
commun des mortels, même si je regarde ça illégalement.
Ça fait que, là, je reviens à mon interpellation
initiale. On a un projet de loi, qui est 64. Il y aurait... Attendez une
minute, M. le Président, parce qu'il faut que j'aille revoir. Il y aurait donc,
M. le Président, dans ce projet de loi là, 165 articles qui prévoient des
choses spécifiques, parfois nuancées, mais clairement exprimées, sauf un article,
qui est essentiellement ouvert, qui n'est pas précis, qui est un gentleman's agreement, qui est
ouvert à des conversations sociales, puis, regardez, là, on vous donne l'opportunité
de vous entendre, puis, si vous ne vous entendez pas, bien, ce n'est pas grave.
Je veux dire, cet article-là, là, ce n'est pas
un article au sens de la loi, comme tel, là. Vous faites quelque chose, si vous
ne le faites pas, bien, vous êtes en contravention avec une loi, puis il y a
une conséquence. Non, non, cet article-là, là, serait un article de droit
nouveau, puis l'article de droit nouveau, c'est : Bien, regardez, là,
allez donc prendre une bière ensemble, puis entendez-vous, puis, si ça ne
marche pas, là, allez donc en prendre une à tous les jours pendant un mois,
puis, si ça ne marche pas, là, bien, appelez la CAI, pas pour manger une
caille, mais pour parler à la CAI, avec une bière, puis c'est ça. Tu sais,
c'est un peu étonnant, M. le Président, là.
• (21 h 20) •
Ça fait que c'est un article, là, qui est dans
un projet de loi qui a... qui édicte des choses claires. Il y a plein de choses
nouvelles, là-dedans, qui sont bonnes, qui sont claires, qui sont des
règles : voici ce que vous pouvez faire, voici ce que vous ne pouvez pas
faire. Vous devez nommer un officier à telle affaire,
vous devez avoir une structure de telle affaire. Mais là, là, quand on arrive à
113, là, woups! on a deux articles qui disent : Bien, écoutez, là, écoutez,
écoutez, franchement, là, on ne veut pas vous faire faire de la peine, là, puis
aimez-vous les uns et les autres, puis essayez, là, de vous entendre. M. le
Président, là, à quelque part, là, c'est spécial. Puis à la fin, là, bien, là,
là, les nerfs, parce que, s'il y a une décision qui est prise, là, ce n'est pas
vrai qu'on va vous obliger à l'exécuter dans un élément temporel flou, mais pas
éternel. «Bref délai», on comprend que ce n'est pas l'éternité, ce n'est probablement
pas un an. Mais «bref délai», là, ça n'a aucune utilité, M. le Président.
Ça fait que, là, moi, je regarde ça puis là je
comprends de moins en moins le ministre. Et, quand j'entends l'échange qu'il
vient d'avoir avec mon collègue de LaFontaine, là, je comprends encore moins,
là, parce que, là, il vient... on vient d'assister à un échange après avoir non
exécuté dans les meilleurs délais la chose que je recherche. Ça fait que, là,
là, moi, je ne comprends pas, là.
Ça fait que je vais récapituler, M. le
Président, là. Admettons, M. le Président, que l'article 113 a
été écrit dans le même esprit que les autres, non pas d'un gentleman's
agreement, mais bien de la détermination de la procédure à suivre, avec toutes
ses nuances et limitations qui sont clairement exprimées à 28.1, mais qui n'en
demeure pas moins une procédure à suivre par les parties. Il y a deux parties
ici, là. Il y a la partie du citoyen lambda. Il ne la danse pas, mais il va
bien rencontrer une entreprise pour lui dire : Monsieur, madame,
j'aimerais que vous procédiez au retrait de l'indexation et du référencement.
Ce qui est écrit dans l'article, c'est que l'organisation en question va
réfléchir. Elle a l'obligation de réfléchir. Et, mieux, M. le Président, elle a
l'obligation de donner une décision motivée par écrit en dedans de
30 jours. On n'est pas dans le gentleman's agreement, là, on est dans
l'établissement clair, net et précis d'une procédure à suivre, avec des nuances
permises, nécessaires, parce que tout ne se codifie pas dans une loi, et ces
nuances-là sont amenées légalement par 28.1.
Et moi, j'arrive, là, puis je dis, là,
simplement : M. le Président, je propose un amendement qui vient
simplement dire... Bon, O.K., on a touché à tout, là, dans 28, on l'a faite, la
procédure, on a mis les paramètres, on a mis les nuances, on a établi qu'il y a
un article précédent qui exige une décision motivée, qui amène à une décision
qui peut être exécutoire, parce que ne rien faire... ça n'a pas besoin de le
faire en dedans des meilleurs délais, tu peux le faire tout de suite, puis,
faire quelque chose, bien, je propose que ça soit écrit «dans les meilleurs
délais».
C'est du même flou et du même poids relatif que
les sept paramètres qu'il y a... en fait les 10 paramètres qu'il y a à 28.1.
C'est pareil, M. le Président, c'est du même ordre, du même niveau, du même
poids relatif, M. le Président. Et le ministre, il me dit que c'est inutile,
mais là je ne le suis pas, là. Comment quelque chose qui a le même esprit, le
même poids, qui est sensé peut ne pas bien s'intégrer à 28? Bien là, j'aimerais
ça que le ministre me redonne son explication, parce que, M. le Président, là,
à l'instant même, vous me voyez subjugué.
Le Président (M.
Bachand) : Je le constate. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Caire : En
tout cas, je suis un petit peu déçu, M. le Président.
M. Barrette : ...reprendre immédiatement,
mais j'aimerais mieux avoir la réponse avant pour m'inspirer pour la suite.
M. Caire : Bon,
puisque vous me laissez le mot de la fin, M. le Président...
M. Barrette : ...
M. Caire : Non,
non, mais, écoutez, M. le Président, à mon tour d'être étonné par l'étonnement
du député de La Pinière, parce qu'il dit, dans une même phrase, que
l'objet de 64 est de codifier les choses et qu'on ne peut pas tout codifier...
Une voix : ...
M.
Caire : ... — c'est
à mon tour, c'est à mon tour — qu'on ne peut pas tout codifier, et il a
bien raison, il a bien raison. Donc, l'idée, ici, n'est effectivement pas de
s'assurer que tous les demandeurs du Québec meublent les terrasses du Québec,
bien que ça soit fort probablement agréable, et qu'autour d'une boisson
rafraîchissante ils aient des discussions avec qui de
droit, mais plutôt de dire qu'avant d'entamer une procédure judiciaire dont
nous savons tous qu'elle peut être longue et lourde, je dis bien qu'elle «peut
être», bon, avant d'en arriver là et avant aussi d'en arriver à l'exemple qui
était donné par le collègue de LaFontaine, où les organisations pourraient être...
les tribunaux, c'est-à-dire la CAI, pourraient être submergés de demandes et de
dossiers...
Puis, ce principe-là, on ne l'invente pas, là.
Ce principe-là, il existe ailleurs. Puis le député de LaFontaine a pratiqué,
lui, de façon tout à fait légale, le droit, contrairement au député de La Pinière
et moi, et donc il sait très bien que des procédures pour régler des litiges
afin que ces litiges-là n'aient pas à passer par la voie judiciaire, ça existe.
Ce n'est pas... L'article... Le projet de loi n° 64 n'invente rien. Donc,
cette procédure-là a cette velléité-là de dire que, s'il est possible de...
Une voix : ...
M.
Caire : ... — oui,
absolument — s'il
est possible pour le demandeur de faire une requête à l'entreprise puis que
l'entreprise, selon les conditions, on fixe trois conditions, on demande de
considérer sept critères et... en arrive à la conclusion qu'elle peut accéder à
la demande, bien, parfait, voici, le citoyen est satisfait, sa demande a été entendue, elle a trouvé écho auprès de
l'entreprise, on n'a pas engorgé les tribunaux, c'est le bénéfice pour tout le
monde.
L'élément qu'on amène, qui est effectivement le
fameux 30 jours, sur lequel mon collègue de La Pinière base son
argument, l'élément de 30 jours vise justement à s'assurer que le citoyen,
le demandeur ne sera pas dans l'attente indéfiniment. À un moment donné, il
pose une question, il faut qu'il ait une réponse. Indépendamment de quelle est cette réponse-là, il faut qu'il y ait
une réponse. Puis c'est ça, l'idée, c'est de dire : Écoutez, posez la
question, vous allez avoir une réponse. Après ça, vous déciderez. Après ça,
vous déciderez.
Alors, c'est là où je ne suis pas à la même
enseigne que le collègue de La Pinière, parce que la décision pourrait
parfaitement être d'aller devant la CAI, indépendamment de la réponse. Même si
la réponse était positive, le citoyen, là, pour une raison qui lui appartient,
pourrait décider d'aller à la CAI, pourrait décider que lui, il saisit la CAI
de ce dossier-là. Bon.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, M. le ministre.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ses travaux sine die. Merci. À bientôt.
(Fin de la séance à 21 h 30)