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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, March 24, 2021 - Vol. 45 N° 129

Clause-by-clause consideration of Bill 64, An Act to modernize legislative provisions as regards the protection of personal information


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. André Bachand, président

M. Éric Caire

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Marc Tanguay

M. Mathieu Lévesque

*          M. Jean-Philippe Miville-Deschênes, Secrétariat à l'accès à l'information
et à la réforme des institutions démocratiques

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt minutes)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour à tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Avant de débuter les travaux de la commission, je vous rappelle que le port du masque de procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de prendre la parole dans le cadre de nos travaux.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels.

Avant de débuter, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par M. Nadeau-Dubois (Gouin), et Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Ouellet (René-Lévesque).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je vous rappelle qu'il a été convenu de suspendre l'étude de l'amendement visant à introduire l'article 12.1 et celui visant à introduire l'article 13.1, qui ont tous deux été proposés par le député de René-Lévesque. Lors de l'ajournement de nos travaux, le jeudi 17 mars dernier, M. le ministre venait de présenter l'article 23 et il venait y proposer un amendement. Interventions? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, d'abord, peut-être nous rappeler... nous rafraîchir la mémoire. Je crois comprendre que nous étions sur un amendement déposé par le ministre. Je ne sais pas si le ministre peut le relire pour qu'on se replace les pieds dans nos bottines, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre, s'il vous plaît, oui.

M. Caire : Avec grand plaisir, M. le Président. Donc, l'amendement se lit comme suit :

Remplacer le paragraphe 2° de l'article 67.2.2 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels pour... personnels, pardon, proposé par l'article 23 du projet de loi, par le paragraphe suivant :

«2° joindre à sa demande une présentation détaillée des activités de recherche».

Donc, M. le Président, ce que j'avais expliqué brièvement, c'est que ce libellé-là convient mieux à la réalité des chercheurs parce que joindre... le paragraphe, tel qu'il se lirait dans l'article, «joindre à sa demande son protocole de recherche», le secteur de la recherche nous dit : Le protocole de recherche, c'est trop restrictif. Le libellé de projet de recherche est plus large et donc va inclure, là, plus de situations probantes pour les chercheurs.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Oui, M. le Président. Est-ce que ça inclut, ces documentations-là... parce que moi, je comprends qu'il y a une volonté de la part du ministre, dans son amendement, de venir élargir pour que ce ne soit pas trop restrictif puis qu'une terminologie comme «protocole de recherche», fasse en sorte qu'il y a comme de la documentation qui devrait être fournie, qui ne l'est pas, là. Est-ce que ça inclut, ces documentations-là, l'identification des tiers ou des partenaires de la recherche? Est-ce que ça inclut les sources de financement des projets de recherche? Qu'est-ce qu'on cherche à aller chercher comme information quand on parle de présentation détaillée des activités de recherche? C'est quoi, l'intention du ministre en termes de contenu? Qu'est-ce qu'on veut aller chercher comme information avec cette présentation détaillée des activités de recherche?

M. Caire : Bien, ce qu'on veut, dans le fond, c'est, puisqu'il s'agit évidemment de travailler avec des renseignements personnels, bien, c'est de savoir exactement à quelles fins, comment on va les traiter, quel est le cycle de vie de ces données-là dans le cadre du projet de recherche, là. Je m'excuse, M. le député, là, je veux utiliser le terme de l'amendement dans les faits, donc l'activité de recherche. Dans le cadre de l'activité de recherche, quels sont les renseignements, quelle portion de renseignement, quel profil de renseignement, qu'est-ce qu'on veut faire avec ça, c'est quoi, les finalités, c'est quoi, la nécessité de travailler avec ces renseignements personnels là?

Donc, il faut vraiment s'assurer que les renseignements sont absolument nécessaires à l'activité de recherche et que ces renseignements-là, dans le cadre de cette activité de recherche là et aux seules fins de cette activité de recherche là, seront utilisés dans un contexte où on ne pourra pas en faire une utilisation qui est autre que ce pour quoi ces renseignements-là ont été demandés.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Est-ce que ça implique la question des tiers à qui pourraient être transmis les renseignements en question? On sait que, de plus en plus, les universités, parce qu'on peut présumer que cet article-là va s'appliquer notamment dans le cas des universités, on sait que les universités font de plus en plus de recherche dans des partenariats avec... ça peut être des organismes sans but lucratif, ça peut être des organismes publics puis ça peut être aussi des entreprises privées. On pourrait ouvrir ce débat-là sur est-ce que c'est souhaitable ou pas qu'il y ait des partenariats de recherche entre des universités publiques puis l'entreprise privée, mais ouvrons-le pas, là. Ça existe, ça existe. La question, maintenant, c'est comment on s'assure, dans le cadre du débat qui est le nôtre aujourd'hui, de bien baliser ça.

Est-ce que, par exemple... Je vais poser une question bien concrète. Une chaire de recherche fait une demande à un organisme public d'utiliser certaines données pour faire avancer ses travaux. Puis ça peut être dans bien des domaines, là, la démographie, tu sais, la sociologie, les études, c'est ça, électorales. Ce n'est pas seulement dans les domaines plus sensibles comme la santé et tout ça, hein?

Ça peut être dans plein, plein, plein de domaines, même des sciences sociales. Est-ce que dans les... Est-ce que la chaire de recherche devrait fournir, en vertu de 67.2.2, fournir des informations sur ses partenaires de recherche? Par exemple, si c'est une recherche qui est effectuée en partenariat avec une entreprise privée puis qu'il y a, dans la chaire, des employés de l'entreprise privée qui ont accès aux données de recherche parce qu'ils travaillent dans le projet de recherche, ça, c'est des pratiques qui existent dans nos universités, est-ce que, c'est un exemple, dans le cadre de cet amendement-là puis de cet article-là, la chaire de recherche devrait préciser que ses activités de recherche incluent du personnel provenant du privé et que, donc, il va y avoir du personnel d'une entreprise privée qui va avoir accès aux données personnelles en question?

M. Caire : Bien, en fait, la réponse, c'est... L'amendement, ce qu'il vient faire, c'est de modifier un peu la portée de l'article, au sens où on ne parle pas simplement du protocole de recherche. Donc, la question du député, elle est pertinente dans le sens où, dans un contexte de protocole, peut-être, et je dis bien peut-être, là, il faudrait... Bien, peut-être que la réponse à sa question serait non, alors que, quand on parle d'une activité de recherche, comme on englobe plus large, je dis : La réponse à sa question est oui, dans le sens où je dois vous faire une présentation détaillée des activités de recherche, activités de recherche au sens où avec qui... Quels sont les gens qui sont impliqués dans cette recherche-là? Quelles sont les mesures de protection que j'ai mises en place pour assurer, justement, la protection adéquate des renseignements personnels? Le député de Gouin a raison, effectivement, il n'est pas exclu qu'un OBNL... qu'il y ait partenariat entre différentes universités dans un protocole de recherche, qu'une entreprise privée soit incluse dans le protocole, c'est-à-dire dans l'activité de recherche.

Ceci étant dit, il faut comprendre que, quand c'est le cas, le statut de celui ou celle qui est impliqué ne diffère pas les mesures qui doivent être prises pour protéger les renseignements personnels. Ce que je veux dire par là, c'est que, puis on le voit dans les contrats informatiques, M. le député, lorsqu'une entreprise privée, consultant, on s'entend, est impliquée dans un développement, que ce développement-là peut amener cette entreprise-là à avoir accès à des informations, genre renseignements personnels, les ententes contractuelles lui donnent exactement les mêmes obligations, les mêmes responsabilités que nos organismes publics.

Donc, contractuellement, déjà, il y a la loi, mais en plus, contractuellement, on amène ces obligations-là, ce qui fait qu'au final l'équipe qui va développer le projet peut être constituée d'employés de l'administration publique, de consultants, mais que les deux, indépendamment de leur statut, ont les mêmes responsabilités, les mêmes obligations à l'égard des outils et des informations, de ce qu'on met à leur disposition pour réaliser le projet.

Dans le cas qui nous préoccupe, c'est la même chose, au sens où ce qui va faire qu'on va accepter l'utilisation de renseignements personnels ou non ne sera pas conditionné par le statut de ceux qui sont dans l'activité de recherche, mais bien par l'activité de recherche elle-même et des mesures de protection qui devront être prises et qui devront être respectées par tous, indifféremment qu'ils soient d'un organisme public, d'une université, d'un OBNL ou d'une entreprise privée.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Oui, M. le Président, je suis dans une situation un peu fâcheuse. Je vais devoir quitter pour une rencontre que j'ai, transpartisane, sur le sujet de l'aide médicale à mourir, ça fait que je veux... je vais devoir concilier les deux débats. Je vais laisser mon collègue de LaFontaine s'installer, poursuivre la discussion avec le ministre. Je serai de retour dans, au maximum, une trentaine de minutes, puis j'aurai un amendement à déposer sur l'article 23 de manière générale. Je me demandais si c'était possible de collaborer ensemble pour qu'advenant le fait que la discussion aille promptement entre les collègues, on puisse suspendre 23 très temporairement, le temps que je revienne.

M. Caire : M. le Président, bien, j'allais proposer au député de suspendre l'étude de l'article 23. Je ne sais pas s'il y a un enjeu à l'article 24, parce que je voudrais quand même...

M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est parce que je ne veux pas non plus que tout s'arrête pour moi, là, ça fait que...

• (11 h 30) •

M. Caire : Bien, je pense que dans... on peut trouver... Si le collègue considère que l'article 24 ne lui pose pas d'enjeu, on pourra passer à l'article 24 puis l'attendre pour... compte tenu du fait qu'il a un amendement, l'attendre pour compléter l'article 23. Moi, je n'ai pas...

M. Nadeau-Dubois : Ça me convient.

M. Caire : En autant qu'on n'arrête pas complètement les travaux, moi, je suis bien disposé à répondre à cette demande-là qui m'apparaît tout à fait raisonnable.

M. Nadeau-Dubois : Parfait. Oui, ça me convient. Ça me convient, M. le Président. Je n'avais pas de question particulière pour l'article 24. Donc, merci de la collaboration du ministre, puis je ne serai pas parti très longtemps.

M. Caire : Pas de problème. Parfait. Bien, de toute façon, on va vous attendre, M. le député, là.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Donc, si je comprends, on va d'abord suspendre. Consentement pour suspendre l'étude de l'amendement? Est-ce qu'il y a consentement?

M. Caire : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Et consentement pour suspendre l'étude de l'article 23. Consentement?

M. Caire : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui. Alors, donnez-moi le temps, M. le Président, de me rendre à l'article 24, parce que c'est le fun, cette petite technologie là, mais, des fois, ça ne va pas aussi vite qu'on le voudrait. Et cet article-là, on va s'entendre qu'il est... l'article 23, il est...

Donc, M. le Président, l'article 24 se lit comme suit :

L'article 67.3 de cette loi est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, de «68 et 68.1» par «62»... pardon, «67.2.1 et 68».

M. le Président, l'article 67.3 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels est modifié pour des raisons de concordance. Le nouvel article 67.2.1 de cette loi y est introduit par l'article précédent du projet de loi, tandis que l'article 68.1 de cette loi est abrogé par le projet de loi. Donc, M. le Président, il s'agit ici de concordance.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le député de LaFontaine?

M. Tanguay : Non.

Le Président (M. Bachand) : Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 24? Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 24 est adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui, M. le Président, avant de lire l'article, juste m'assurer qu'au niveau de l'article 25, il n'y a pas d'enjeu. Est-ce qu'on peut suspendre quelques instants?

Le Président (M. Bachand) : Alors, on va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

(Reprise à 11 h 36)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, on reprend les travaux. M. le ministre.

M. Caire : Oui. M. le Président, donc, je demande le consentement pour que nous passions à l'article 27, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Consentement pour qu'on passe à l'article 27?

M. Tanguay : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement. Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Donc, l'article 27, M. le Président, se lit comme suit :

L'article 70.1 de cette loi est remplacé par ce qui suit :

«70.1. Avant de communiquer à l'extérieur du Québec un renseignement personnel, un organisme public doit procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Il doit notamment tenir compte des éléments suivants :

«1° la sensibilité du renseignement;

«2° la finalité de son utilisation;

«3° les mesures de protection dont le renseignement bénéficierait;

«4° le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué, notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec.

«La communication peut s'effectuer si l'évaluation démontre que le renseignement bénéficierait d'une protection équivalant à celle prévue à la présente loi. Elle doit faire l'objet d'une entente écrite qui tient compte notamment des résultats de l'évaluation et, le cas échéant, des modalités convenues dans le but d'atténuer les risques identifiés dans le cadre de cette évaluation.

«Il en est de même lorsque l'organisme public confie à une personne ou à un organisme à l'extérieur du Québec la tâche de recueillir, d'utiliser, de communiquer ou de conserver pour son compte un tel renseignement.

«Le présent article ne s'applique pas à une communication prévue au paragraphe 4° du deuxième alinéa de l'article 59 ou au paragraphe 1.1° du premier alinéa de l'article 68. Il ne s'applique pas non plus à une communication faite dans le cadre d'un engagement international visé au chapitre III de la Loi sur le ministère des Relations internationales (chapitre M-25.1.1), à une communication faite dans le cadre d'une entente visée au chapitre III.1 ou III.2 de cette loi ou à une communication prévue à l'article 133 de la Loi sur la santé publique (chapitre S-2.2).»

Article... pardon, «70.2. Le ministre publie à la Gazette officielle du Québec une liste d'États dont le régime juridique encadrant les renseignements personnels équivaut aux principes de protection des renseignements personnels applicable au Québec.»

M. le Président, section II.1, donc... Ah non! Excusez, là, on n'est plus à l'article 27. Oui? On est à...

Le Président (M. Bachand) : ...27.

M. Caire : C'est à l'article 27 aussi?

Le Président (M. Bachand) : Oui.

M. Caire : M. le Président, est-ce qu'on peut suspendre quelques instants, s'il vous plaît? J'ai besoin de petites précisions.

Le Président (M. Bachand) : Oui. On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 38)

(Reprise à 11 h 39)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci beaucoup. La commission reprend ses travaux. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui. Merci, M. le Président. Donc, avec le consentement des collègues, je suspendrais, de l'article 27, la section II.1 sur le gestionnaire des renseignements personnels. M. le Président, il pourrait y avoir un enjeu de concordance, que j'expliquerai aux collègues le cas échéant, là, parce que je ne veux pas non plus commettre un outrage à l'Assemblée nationale en discutant de travaux qui n'ont pas encore été présentés à l'Assemblée nationale, mais il pourrait y avoir un enjeu de concordance. Donc, avec le... puis je vais expliquer aux collègues le pourquoi de cette demande-là, mais je demanderais de suspendre la section II.1 sur le gestionnaire des renseignements personnels, M. le Président, pour se concentrer sur les portions de l'article que je viens de lire.

M. Tanguay : Est-ce qu'il ne serait pas plus intéressant de déposer un amendement pour le retirer? Puis, après ça, vous pourrez le réintroduire par un amendement.

• (11 h 40) •

M. Caire : C'est-à-dire que ce n'est pas impossible qu'on en arrive à cette conclusion-là, mais je préférerais peut-être... parce qu'il y a des dénouements de dernière, dernière minute que j'aimerais discuter avec les collègues. Donc, on pourrait simplement le suspendre et éventuellement poser le geste que...

Le Président (M. Bachand) : Juste, ma compréhension, M. le ministre, c'est qu'il est difficile de suspendre une section d'un article qu'on étudie globalement. Cela dit, ce qu'on peut faire, d'un commun accord, c'est d'étudier 70.1, 70.2 et, après ça, suspendre l'article 27.

M. Caire : Oui, parfait.

Le Président (M. Bachand) : Parce que suspendre une portion d'un article...

M. Caire : Oui, je comprends. Je comprends.

Le Président (M. Bachand) : Alors donc, si vous êtes d'accord, on pourrait d'abord débuter en étudiant les nouveaux articles, donc 70.1, puis rendus à la nouvelle section, bien, on pourra, à ce moment-là, demander consentement.

M. Caire : Parfait, M. le Président, qu'il en soit ainsi. M. le Président, j'ai par contre un amendement à proposer, qui concerne 70.1, et, en fait, j'en ai un autre qui concerne 70.2. Donc, avec votre permission, je vous lirais l'amendement à l'article 70.1.

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît.

M. Caire : Donc : Article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 27 du projet de loi :

1° dans le premier alinéa :

a) insérer, dans le paragraphe 3°, après «protection», «, y compris celles qui sont contractuelles,»;

b) supprimer, dans le paragraphe 4°, «, notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec»;

2° remplacer, dans le deuxième alinéa, «équivalant à celle prévue à la présente loi» par «adéquate».

M. le Président, l'article 70.1 de la Loi de sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels est modifié afin de retirer la notion d'équivalence aux lois. L'objectif de cette disposition est de s'assurer que les renseignements personnels bénéficieront d'une protection adéquate lorsqu'ils sont communiqués à l'extérieur du Québec. Par ailleurs, l'amendement vise à clarifier le fait que des mesures contractuelles peuvent assurer la protection des renseignements personnels dans un contexte de communication à l'extérieur du Québec.

M. le Président, ce que je souhaite dire aux collègues, c'est que nous sommes ici en train de pérenniser une solution qui a été appliquée par le courtier en infonuagique, à savoir que, par contrat, on peut garantir une protection des renseignements personnels qui va nous donner une équivalence à ce qu'on retrouve ici.

Le problème avec l'article initial, tel que libellé, c'est que, pour des entreprises du Québec qui font affaire avec des entreprises de l'Ontario, des États-Unis ou d'autres pays, cet article-là venait hypothéquer lourdement leur capacité à honorer les contrats et à faire de ce genre d'entente là. Donc, la solution qui a été trouvée pour permettre ça, c'est de s'assurer, par contrat, qu'on était capable de donner un régime de protection qui était équivalent, parce que, sinon, ça faisait en sorte que, si l'État avec lequel l'entreprise québécoise faisait affaire n'avait pas un régime de protection, donc une loi équivalente à celle du Québec, ça devenait, à toutes fins utiles, impossible de faire des affaires qui impliquaient ces échanges d'information là. Et, pour beaucoup d'entreprises, ça veut dire beaucoup de contrats qui sont touchés par ça.

Considérant que le Québec, avec le projet de loi n° 64, est en train de se donner un régime de protection qui est très avant-gardiste, je vais le dire comme ça, il aura peu d'équivalences en Amérique du Nord, en fait en Amérique, et même en Europe, parce que, même s'il y a le Règlement général de protection des données européen, il faut comprendre que tous les États européens ne l'ont pas encore appliqué. Il n'est pas appliqué partout, de façon uniforme, en Europe, ce régime de protection là. Donc, même dans certains cas, nonobstant ce régime de protection des données personnelles qui est une inspiration, il y a des États européens avec lesquels il aurait été difficile de faire des affaires.

Donc, c'est une solution qui a été mise en place à Infrastructures technologiques Québec, qui a été présentée à la Commission d'accès à l'information pour recevoir son aval. Donc, c'est la solution qu'on veut pérenniser ici, au niveau de 64.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le député.

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Infrastructures technologiques Québec, donc, ça, c'est un organisme qui relève de votre ministère?

M. Caire : Oui. C'est un organisme qu'on a créé lors du projet de loi n° 37, avec le CAG et Infrastructures technologiques Québec.

M. Tanguay : Est-ce que... puis on va analyser et appliquer dans le cas des organismes publics, est-ce que c'est l'intention du ministre aussi de faire miroir à l'article plus loin, je pense que c'est le 90 quelque, là, au privé? Est-ce que le ministre va faire les mêmes amendements pour le privé?

M. Caire : Oui, je pense que oui. Je pense qu'on... on me fait signe qu'effectivement... Bien, en fait, c'est qu'on le fait déjà, comme je dis, mais ce n'est pas des dispositions qui sont prévues par la loi. C'est une mesure qu'on a mise en place pour être capable, au niveau, notamment, là, de tout le programme en infonuagique, pour être capable de s'assurer d'avoir des régimes de protection qui sont équivalents à ce qu'on fait au Québec. Et donc, par contrat, on vient mettre les mêmes obligations que la loi du Québec prévoit, et ce, indépendamment d'où est-ce que l'entreprise avec qui on signe les contrats agit. Et donc, indépendamment du régime légal de l'État, nous, c'est cette façon-là qu'on a d'imposer notre régime de protection à nous.

M. Tanguay : Plusieurs petites questions. Première des choses, je sais qu'on est sur l'amendement, mais, quand même, il faut voir l'article 70.1 comme un tout. Dans le quatrième paragraphe du premier alinéa, le premier débat qu'on peut avoir, là, des précisions, «le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué»... L'État, est-ce qu'on doit considérer que la province de l'Ontario est un État?

M. Caire : C'est-à-dire qu'au sens où on l'entend, oui.

M. Tanguay : O.K. Donc, revirons ça de bord, tout ce qui est à l'extérieur du Québec...

M. Caire : C'est ça. Vous avez parfaitement résumé ça, M. le député.

M. Tanguay : O.K. Alors... parce que le Barreau parlait de la nécessaire distinction entre État et juridiction, mais là, s'il est entendu, puis dans le corpus législatif, c'est entendu qu'État... je sais que ce n'est pas un État souverain, l'Ontario, le mouvement souverainiste là-bas, la dernière fois que j'ai regardé...

M. Caire : Tranquille, tranquille. C'est latent, c'est latent.

M. Tanguay : ...il est assez tranquille. Ils préparent leur...

M. Caire : Ils préparent le XXIIe siècle, en fait, actuellement.

M. Tanguay : C'est ça, ils vont être prêts. Mais ça tient la route de dire «État» pour «autre province», oui?

M. Caire : Bien, moi... puis je vais laisser Me Miville-Deschênes compléter avec ses nouveaux cheveux.

M. Tanguay : C'est parce qu'on s'est posé la question.

M. Caire : Mais, oui, parce que c'est ce que nous, on fait. Comme je vous dis, là, on est en train de pérenniser la solution de l'ITQ. Puis je vais laisser Me Miville-Deschênes vous donner l'explication juridique.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement pour que Me Miville-Deschênes prenne la parole?

M. Tanguay : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, s'il vous plaît.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui, en fait, le terme «État» est souvent utilisé dans le corpus québécois, là, incluant dans la Loi sur l'accès, pour faire référence à l'État québécois. Puis il y a des décisions... Dans le cas de procédures civiles aussi, il y a des décisions, là, qui l'ont reconnu, là. J'en ai une, ici, là, qui reconnaît que l'expression «État», telle qu'utilisée dans le Code civil, 31, 35, inclut chacune des unités territoriales du pays à des compétences législatives distinctes. Donc, l'Ontario est considérée comme un autre État au Québec. Il y a certaines définitions légales, là, qui semblent indiquer qu'un État est un... doit être un pays, mais, généralement, le corpus législatif québécois, là, il est utilisé pour désigner d'autres provinces ou des États américains, là.

M. Tanguay : Parfait. Alors, on n'aura pas d'enjeu, ceci dit, avec L'Anse-Saint-Jean?

M. Caire : Non, ça devrait être assez tranquille.

M. Tanguay : Vous vous rappelez, il y avait un roi...

M. Caire : Mais on ne sait jamais, soyons vigilants.

M. Tanguay : Oui. Il y avait un roi, à L'Anse-Saint-Jean, à l'époque... Je pense, c'est les gens de la région de Québec qui se rappellent de ça, là. On y avait été, mais je ne pense pas... La dernière fois que je l'ai vu, il n'a pas besoin du projet de loi n° 86.

«Avant de communiquer à l'extérieur du Québec un renseignement personnel, un organisme doit procéder...» Donc, on a beaucoup vu, puis je pense qu'on a beaucoup bien travaillé sur les renseignements personnels qui sont collectés par les organismes publics, quand c'est par des moyens technologiques, d'autres renseignements qui peuvent être colligés, puis, après ça, on peut faire du profilage, et que ça peut être donné à des sous-traitants et tout ça. Dans quel contexte, un organisme public sortirait à l'extérieur du Québec? Est-ce que ce serait... Est-ce qu'il faut l'envisager uniquement pour, par exemple, je ne sais pas moi, une gestion de masse des données, ou quoi que se soit, mais dans quel contexte? Tu sais, je comprends que le ministère de la Santé peut travailler avec Services sociaux, puis Justice, puis Hydro-Québec, tout ça, mais dans quel contexte, ça sortirait du Québec?

• (11 h 50) •

M. Caire : Bien, il peut arriver qu'on ait des ententes contractuelles. Je vais vous donner un exemple très précis. Dans le programme de consolidation pour les centres de traitement de l'information, les entreprises qui se qualifient le font en vertu des ententes internationales que nous avons signées. Et donc, à partir de là, il serait loisible pour un organisme public de signer une entente de stockage en infonuagique avec une entreprise sise hors Québec. Et, à partir de là... Puis c'est pour ça que je vous dis que l'ITQ a vraiment balisé la route là-dessus, parce que, dès le départ, c'était notre préoccupation de nous assurer que nos données devaient toujours être protégées par un régime de protection équivalent à ce qu'on retrouvait au Québec. On s'entend qu'avec le p.l. n° 64 le régime de protection du Québec, là, est vraiment très en avance par rapport à ce qui se fait ailleurs au Canada, puis même partout en Amérique, et même dans certains pays européens. Comme je le dis, là, il y a une subtile nuance entre dire : L'Union européenne a adopté le RGPD, mais, à partir de là, il revient à chaque État de l'adopter et de l'appliquer dans son État particulier, et ça, ce n'est pas tous les États européens qui ont mis ça en place. Donc, il y a encore des États européens qui, nonobstant le fait que l'Union européenne ait adopté ce régime-là, ne sont pas, eux, balisés par le régime. Donc, l'idée de... et c'est la Direction des affaires juridiques qui a concocté cette solution-là, de dire : Bien, par contrat, on va être capable de venir mettre ces régimes de protection là.

Donc, ça, c'est un exemple. Il y a d'autres exemples, j'imagine, où le gouvernement du Québec fait affaire avec des entreprises qui sont sises à l'extérieur du Québec. Dans des contrats informatiques, là, il y a des firmes dont le siège social peut être ailleurs qu'au Québec, et donc on pourrait considérer qu'elles sont des entreprises hors Québec, mais il y en a moins dans le cas des firmes de consultants. Là, je vous dis ça, mais vite de même, je n'ai pas beaucoup d'exemples.

M. Tanguay : Est-ce que...

M. Caire : Ah! il pourrait y avoir, par exemple... Là, on est en train de faire la refonte du système de télécoms du gouvernement du Québec, le RITM, que vous connaissez, M. le député. On va mettre en place le RGT, le Réseau gouvernemental de télécommunication. Bien, c'est sûr qu'on fait affaire avec des Telus, on fait affaire avec les Bell du milieu des télécommunications. Donc, c'est peut-être un exemple, là, où on pourrait avoir des contrats avec ces firmes-là qui ne sont pas nécessairement, en termes de siège social, sises au Québec.

M. Tanguay : O.K. Ici, M. le Président, on est au salon rouge, on n'est pas au salon bleu, alors je suis en mode, réellement, là, collecte d'information. Ça cadre bien avec le projet de loi n° 64, puis on fera notre ritournelle partisane plus au salon bleu. Mais donc j'ai des questions pour connaître un peu ce qu'est l'intention du gouvernement, quelle est la vision du ministre pour la suite des choses.

Parce que vous savez qu'on a souvent l'épiderme très sensible, de dire : Ah! nos données vont quitter Québec, c'est épouvantable, puis il y a le Patriot Act aux États-Unis, papi, papa. Et là je le sais qu'il y a eu beaucoup de passes d'armes, entre autres avec ma collègue de Saint-Laurent, notamment, puis j'y ai participé aussi, j'ai apporté mon petit grain de sel, puis je pense, puis que le ministre me corrige, que la réponse du ministre a toujours été : Écoutez, ça ne se fera pas, ça n'arrivera pas, on ne va pas envoyer 80 % de nos données aux États-Unis. C'est quoi, la vision? Qu'est-ce qui s'en vient, là? Puis je suis en mode compréhension, là.

M. Caire : O.K. Bien, je vais digresser un peu de... parce que la question du collègue... puis sérieusement j'apprécie la question parce que ça me permet de préciser certaines informations. Premièrement, il faut comprendre que, dans le cas de la consolidation des... ce qu'on a dit, c'est que le 20 % de données qu'on gardait en infonuagique gouvernementale, c'étaient les données qui étaient sensibles. Donc, les données sensibles seront conservées par le gouvernement du Québec, par le service d'infonuagique que le gouvernement du Québec est en train de déplacer.

M. Tanguay : 25 %?

M. Caire : ...bien, je dis 20 %, mais je vous demande votre indulgence, M. le député, parce que c'est des estimés qu'on fait. Parce qu'au fur et à mesure qu'on réalise le programme, on est en train aussi de faire la cartographie de nos données, et la cartographie de nos données sous-entend qu'on est aussi en train de les catégoriser. Donc, au fur et à mesure qu'on va transférer les données des ministères et organismes en infonuagique, on a deux choses à faire essentiellement. D'une part... bien, plus que ça, mais par rapport aux données. On a d'abord à en faire la catégorisation et à en faire l'inventaire. Qu'est-ce que...

M. Tanguay : Quelles seront les catégories? Il y en a trois?

M. Caire : Bien, c'est des données qui ne sont pas sensibles, peu sensibles ou très sensibles. «Roughment», c'est le modèle qui a été élaboré un peu partout puis qui est notamment utilisé par le gouvernement fédéral. Donc, les critères qui nous amènent à catégoriser ces données-là ont été élaborés, utilisés par le gouvernement fédéral. Donc, le modèle, il a été testé. Et donc, du moment où une donnée est considérée comme sensible, elle s'en va en infonuagique gouvernementale.

M. Tanguay : Elle ne sortira pas.

M. Caire : Elle ne sortira pas.

M. Tanguay : Ça serait quoi, à ce moment-là, exemple?

M. Caire : Bien, en fait, on a donné, je pense, une belle définition des renseignements sensibles dans le projet de loi n° 64, tout ce qui vous concerne du point de vue de la biométrie, les empreintes digitales, l'ADN, la reconnaissance faciale, la reconnaissance vocale.

M. Tanguay : On avait adopté l'amendement, hein, qui donnait ces exemples-là?

M. Caire : Oui, on a adopté l'amendement. Oui, c'est ça, puis cet amendement-là, il a quand même un impact, parce qu'au niveau de la catégorisation des données, à partir de là, nous, ça vient donner des balises, là.

M. Tanguay : Est-ce qu'on doit aussi, dans cette définition-là, ajouter l'expectative de protection que j'ai comme personne raisonnable par rapport à une information?

M. Caire : Relatif à la vie privée.

M. Tanguay : Oui.

M. Caire : Oui, on le fait. Ça fait partie des critères...

M. Tanguay : De la sensibilité, l'expectative...

M. Caire : C'est ça, mais, en même temps, je vous dirais que ce n'est peut-être pas le critère majeur, parce que, comme expliquait Me Miville-Deschênes, l'expectative de vie privée n'est pas la même pour vous que pour moi. Et, dans ce cas-là, il faut quand même avoir des critères qui sont vraiment très objectifs, qui sont assez neutres. Mais ça en fait partie.

M. Tanguay : Juste pour marcher dans les pas du ministre, alors, hautement sensibles ou sensibles, biométrie, blablabla, on va revenir à la définition qu'on avait travaillée ensemble sur le 64. C'est la troisième catégorie, à peu près 20 %, 25 %, elles, resteraient dans... sous possession, sous contrôle du gouvernement. Ça veut donc dire qu'elles ne sortiraient pas de l'État du Québec, en gros.

M. Caire : Exact, mais je vais aller plus loin que ça, là, parce que toutes les données, quel que soit le lieu de stockage, restent possession du gouvernement du Québec. Ça, c'est très important de le préciser, M. le Président, que je le précise au député de LaFontaine. Même si je signe une entente avec une entreprise en infonuagique, qui fait du stockage en infonuagique, cette entreprise-là ne devient pas propriétaire de la donnée. Elle me loue un espace de stockage, et c'est moi qui gère mes données, c'est moi qui gère mes accès, c'est moi qui contrôle l'information. Donc, c'est vraiment un espace de stockage qu'on loue. Il faut le voir comme ça, là.

M. Tanguay : Mais, puis c'est un peu le paradoxe, elle est physiquement, carrément physiquement, à cause du serveur, à l'extérieur du Québec.

M. Caire : Il est possible. Oui, c'est possible que, physiquement, elle soit à l'extérieur du Québec. Il faut quand même admettre que la totalité... puis là je digresse encore de l'article 27...

M. Tanguay : Non, mais on comprend, là.

M. Caire : Mais oui, mais la totalité des entreprises qualifiées au Courtier en infonuagique ont des lieux de stockage au Québec. Et, dans l'entente contractuelle, les entreprises ont l'obligation de nous dire où sont leurs lieux de stockage, et, contractuellement, je peux choisir un des lieux de stockage offert par l'entreprise.

M. Tanguay : Est-ce qu'on pourrait... Est-ce que les éventuels fournisseurs de ce stockage-là, de ces espaces de stockage là, on pourrait leur obliger à avoir des lieux exclusivement québécois puis dire : On ne signera pas de contrat à l'extérieur du Québec? Est-ce que l'écosystème des fournisseurs de stockage est assez développé?

M. Caire : C'est-à-dire qu'on ne peut pas les y obliger parce que l'entente que nous avons signée, Canada—États-Unis—Mexique, l'interdit nommément. C'est l'article 19, il me semble...

M. Tanguay : L'ALENA.

M. Caire : ... de l'entente entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Il est stipulé à l'article 19, puis j'ai eu l'occasion de le lire aux collègues en commission parlementaire, qu'on ne peut pas interdire un mouvement transfrontalier des données numériques, puis c'est écrit noir sur blanc. Donc là, on serait en contradiction directe avec cette entente-là dont nous sommes signataires.

M. Tanguay : C'est spécial. C'est spécial, pareil.

M. Caire : Bien, c'est dans les deux sens quand même, hein? Je veux dire, CGI est quand même content d'avoir ses contrats avec le Pentagone, là. Tu sais, il faut voir que... puis c'est ça, pour moi, c'est un sujet de fierté, là, de savoir que cette firme-là, québécoise, a obtenu des...

Alors, bon, mais ceci étant, quand on regarde les 21 entreprises qualifiées dans le Courtier en infonuagique, les 21 ont des places de stockage au Québec. Et ce que, là, on peut faire, une fois que... on ne peut pas les y obliger, mais une fois qu'elles nous déclarent en avoir au Québec, on peut demander à ce que nos données soient stockées dans ces centres-là spécifiquement.

M. Tanguay : Donc, ça, toujours...

M. Caire : Si on n'est pas en contradiction de nos ententes internationales.

• (12 heures) •

M. Tanguay : Oui, puis il faut rajouter, à l'exclusion... tout ce qu'on dit là, c'est à l'exclusion de ce qui est sensible. Puis ça, ça ne sortira pas. Ça fait que...

M. Caire : Ça, c'est exclu, totalement.

M. Tanguay : Alors, c'est : pas sensible ou peu sensible.

M. Caire : Exact.

M. Tanguay : Parfait. Dans ces contextes-là, donc, ce qui fait en sorte qu'un 75 %, 80 % pourrait rester au Québec ou pourrait, le cas échéant, se retrouver ailleurs. La fameuse... Si ça se retrouve, ce n'est pas tellement... même si c'est à l'extérieur du Québec, à l'intérieur du Canada, mais c'est aux États-Unis, avec toutes les possibilités de fuite, même de saisie, légalement, par l'État fédéral ou les États, surtout l'État fédéral, avec le Patriot Act. Quelle est la réflexion du gouvernement par rapport à ça, là?

M. Caire : Bien, en fait, de deux ordres. D'une part, comme je vous expliquais, l'entente contractuelle fait obligation à l'entreprise de respecter les normes de protection des renseignements personnels que nous avons au Québec. Donc, c'est la façon que nous avons d'exporter, dans le fond, nos lois et nos régimes de protection dans des États autres que le Québec, puis c'est vrai aux États-Unis, c'est vrai pour le reste du Canada, c'est vrai pour les pays européens qui n'ont pas encore déployé le RGPD.

Maintenant, sur le... Bien, en fait, le Patriot Act, on parle plus du Cloud Act, qui découle du fait que le Patriot Act n'est plus appliqué. Le Cloud Act, dans le fond, ce qu'il dit, c'est que le gouvernement américain, pour des raisons de sécurité, d'enquête criminelle, bon, il y a un certain nombre de spécificités, peut demander à avoir accès à des informations concernant un individu qui ferait l'objet d'une telle enquête. Il faut...

M. Tanguay : Puis ça ne lui sera pas refusé. Il va l'avoir.

M. Caire : C'est-à-dire qu'il y a quand même des démarches à faire, il y a des démarches judiciaires à faire parce que...

M. Tanguay : Il doit être autorisé.

M. Caire : C'est ça, c'est... Il faut qu'il aille chercher un mandat en bonne et due forme et il est stipulé que le juge, avant de donner un mandat, doit quand même vérifier la législation du pays pour lequel le mandat est demandé. Et, à ce jour, là, de ce qu'on en sait, il n'y a pas de telles demandes qui ont été faites parce que, souvent, les ententes vont être entre les États eux-mêmes, entre les services de sécurité des États eux-mêmes, et les États-Unis vont juger plus simple ou le Canada va juger plus simple de faire affaire avec les services de sécurité du pays.

Parce qu'il faut comprendre, M. le député, que, dans un cas comme celui-là, le fait de demander un mandat fait en sorte que l'entreprise XY, à qui on demande d'exécuter le mandat, pourrait s'y opposer. Pour s'y opposer, ça veut dire qu'on va devant les tribunaux. On va devant les tribunaux, ça devient public. C'est rarement la volonté des corps policiers que des enquêtes fassent le débat dans l'espace public, en cour ou ailleurs. Donc, c'est plus simple de passer par les services de sécurité du pays visé et de collaborer à ce qu'eux puissent, par les procédures et les pouvoirs dont ils sont investis, faire ce travail-là en collaboration avec les services de sécurité.

M. Tanguay : O.K. Est-ce que... Puis vous avez donné des exemples de stockage. Vous avez parlé aussi de la possibilité avec des entreprises privées pour... Ça, c'était dans le contexte du stockage, quand vous avez parlé des entreprises privées. Est-ce qu'il pourrait y avoir aussi... pour des recherches conduites à l'extérieur du Québec, des recherches scientifiques, recherches, papi papa, interuniversitaires, peu importe?

M. Caire : Oui, dans le cadre d'une activité de recherche qui serait un partenariat... Par exemple, on peut penser que le Québec est membre du Partenariat mondial pour l'intelligence artificielle. On sait que Montréal a certaines fonctions dans ce partenariat-là, qui ont été dévolues à Montréal, d'autres l'ont été à Paris. Et il y a évidemment des projets communs au niveau de la recherche et du développement de l'intelligence artificielle entre la métropole et la capitale française.

Donc, nécessairement... Puis je vous dirais, M. le député, c'est une excellente question, je vous dirais que ça faisait même... d'avoir le projet de loi n° 64 devenait un facilitateur pour ce genre de partenariat là, parce que, dans le cas que je vous mentionne, c'est nous qui avions un régime de protection qui était moindre que celui de la France, parce que la France a appliqué le RGPD, et donc on s'était fait dire que ce serait une bonne idée d'améliorer notre régime de protection pour faciliter, justement, ces échanges-là de renseignements entre nos deux États.

M. Tanguay : Et, une fois qu'on a dit ça aussi, il va falloir, par rapport aux autres dispositions, effectivement, du 64, qu'un tel projet passe à travers le tamis du processus d'autorisation ici, au Québec. On envoie-tu les données? Parfait. Mais qui fait la recherche? C'est-tu sérieux? Pourquoi? Combien de temps? Puis la vie de l'information va être incluse dans le protocole également, là.

M. Caire : Absolument. Bien, c'est là où l'article 23 entre en scène, justement, sur les protocoles... c'est-à-dire sur les activités de recherche.

M. Tanguay : Article 23 qu'on a adopté tantôt.

M. Caire : Que nous avons suspendu il y a...

Une voix : ...

M. Caire : Qu'on a adopté, oui. Excusez, là. Mon hamster ne fonctionnait pas très...

M. Tanguay : Article 23 qu'on a adopté tantôt.

M. Caire : Alors, l'article 23, que nous avons adopté il y a quelques instants, effectivement, fait ça.

M. Tanguay : Non, on badine, mais...

M. Caire : Ça n'a pas fonctionné.

M. Tanguay : Il est calme.

M. Caire : Non, c'est... Bien, il y avait un «stool», là, qui n'a pas embarqué pantoute. En tout cas...

M. Tanguay : Il aurait pu paniquer un peu.

M. Caire : En tout cas, on sait qu'au 1er avril ce n'est pas lui qu'on met dans le coup, là.

M. Tanguay : Non, c'est ça. Parfait... Puis là je veux permettre au ministre... Parce qu'encore une fois on est au salon rouge, toujours dans cette même... Je ne sais pas s'il me voit venir. Je vais lui référer une expression anglophone : Ça, c'est «winner». Qu'en est-il de cela?

Bon, on sait que la réponse avait été donnée par le ministre de l'Économie et de l'Innovation par rapport à l'éventualité où le Québec... Puis je veux dire, le Québec est une société qui se distingue entre autres par le... On a un filet social tellement développé et unique en Amérique du Nord que nous avons accès, ne serait-ce que par le réseau de la santé, à une quantité d'informations qu'on n'a pas aux États-Unis puis qu'on a moins, même, ailleurs au Canada, je vous dirais, probablement, sous certains aspects. Le ministre avait dit ça. Est-ce qu'il traduisait une vision du gouvernement? J'aimerais entendre le ministre.

Encore une fois, je ne suis pas dans la partisanerie, je veux juste savoir où loge le gouvernement par rapport à sa déclaration où, oui, il faut regarder ça, ça serait «winner». Puis je suis d'accord avec le ministre du Développement économique et de l'Innovation que, pour les pharmaceutiques, ça ferait une manne d'informations qui vaudrait énormément, mais nous, comme collectivité, comment... Quelle est la vision du ministre par rapport à ça?

M. Caire : Bien, moi, je vous dirais, ça dépend comment c'est fait. J'ai parlé aux collègues, il y a quelques jours, de ce que la CNIL faisait, la CNIL, qui est l'équivalent français de la Commission d'accès à l'information, de ce qu'elle faisait avec les renseignements personnels, parce qu'un de ses mandats, c'est vraiment d'avoir cet environnement fermé, cloisonné et non connecté, où on peut déverser un certain nombre d'informations, sensibles et moins sensibles, à des fins de recherche, disponibles autant pour des organismes publics que des organismes privés.

Moi, je pense qu'on peut parfaitement... Moi, je pense que la donnée, là, puis le député de La Pinière nous a fait une envolée, il y a quelques semaines, à laquelle je souscris entièrement, c'est une ressource collective qui peut être exploitée, dépendamment comment on le fait, dépendamment à quelles fins on le fait, dépendamment au bénéfice de qui on le fait. Et là je vous donne mon opinion toute personnelle, parce que comprenons que le projet de loi n° 64 n'a en aucun temps cette finalité-là. Puis ça, je veux être bien clair là-dessus, là, 64 n'est pas une porte ouverte à cette vision-là de ce que nous pourrions faire collectivement.

Je pense que c'est un débat que nous devrions faire. Il y a une possibilité de le faire, comme n'importe quelle autre ressource naturelle, en autant que ça se fasse au bénéfice des Québécois. Moi, je n'ai pas d'hypothèque à ce qu'on puisse s'en servir à des fins de développement économique. Il y a une façon de le faire pour assurer la protection des renseignements personnels, pour s'assurer qu'il y a des bénéfices et pas de dégâts. Il y a une façon d'organiser ça physiquement, mais on n'en est pas là. On n'en est pas là au Québec, on n'a pas cette vision-là, on n'a pas les institutions mises en place pour gérer ça au moment où on se parle, mais c'est certainement une question qui est pertinente puis pour laquelle un débat public serait très intéressant. Mais, encore une fois, le projet de loi n° 64... Il n'y a aucune disposition du projet de loi n° 64 qui a cette finalité-là.

• (12 h 10) •

M. Tanguay : O.K. Dans ce qu'on fait, là, aujourd'hui... Je comprends que le projet de loi n° 64, je reprends cette analogie-là, c'est un tamis qui permet de classer puis d'avoir des processus en place pour que les questions, les bonnes questions soient posées, puis on gère la vie des renseignements personnels, mais le projet de loi n° 64 pourrait aussi être un projet de loi à l'intérieur duquel, collectivement, l'Assemblée nationale voterait des dispositions qui encadreraient, justement, toutes ces initiatives-là en disant, par exemple... Puis le ministre pourrait peut-être me dire : Oui, oui, oui, de ça... parce que ce n'est pas juste une carte routière, le projet de loi n° 64, de ça, il y a des principes... puis il pourra me dire lequel article, mais un principe qui dit que, lorsqu'il y a partage à l'extérieur des murs de l'État québécois, je parle des organisations publiques, des organismes publics, lorsqu'il y a partage d'informations, de renseignements personnels, c'est toujours dans une optique de rechercher les bienfaits pour la communauté, et l'encadrement se fait ainsi, de même...

Parce que le ministre pourrait me dire : Bien, la carte routière du régime actuel puis la carte routière du 64... je dirais, le classeur du régime actuel puis le classeur du 64, qui n'est pas péjoratif, mais qui dit : Vous ferez ça, ça, ça, s'il ne contient pas de tels principes, tant au régime actuel que sur le 64, le gouvernement pourrait décider : Bien, nous, on trouve ça «winner», puis on embarque, puis on y va. Il ne serait pas... puis à moins que le ministre me détrompe, y aurait-il lieu de mettre, puis je pense que oui, des grands principes qui nous guideraient dans les outils? On n'utilisera pas le coffre d'outils pour telle, telle, telle initiative, uniquement pour le bénéfice collectif, ce qui veut dire qu'on devrait y regarder à deux fois avant de permettre un protocole de recherche qui inclut une entreprise privée et qui, semble-t-il, ne serait pas suffisamment bien balisé quant aux usages autres de l'information ou, si d'aventure, le partenaire devient un peu de mauvaise foi, il faut s'en prémunir. Parce que moi, là, de me faire dire : Bien, la loi disait qu'il ne pouvait pas faire ça avec... Bien, s'il le fait avec, il faut se donner, en amont, des outils pour s'assurer qu'il ne pourra pas le faire.

M. Caire : Bien, je ne suis pas loin du député de LaFontaine sur ce qu'il vient de dire, peut-être, sur certains éléments. Pour moi, le projet de loi n° 64, il doit mettre sur la table les règles quand on joue sur cette patinoire, quelles sont les règles pour jouer sur notre patinoire, il ne doit pas se poser la question : Quelle est l'équipe qui vient jouer sur ma patinoire?

Puis là je fais une notable exception, M. le Président, qui sont les amendements que je propose, parce que les amendements que je propose, dans le fond, c'est les gens d'affaires, c'est les organismes publics, c'est toute la société québécoise qui dit : Si vous adoptez 27 tel quel, on vient de se couper du reste du monde.

M. Tanguay : Oui, ça, on est d'accord.

M. Caire : Bon. Mais c'est dans ma réflexion, M. le député, que je vous dis ça. Alors, c'est pour ça qu'on apporte l'amendement. On ne veut pas se couper du reste du monde, ce n'est pas ça l'objectif.

Mais, sinon, l'objectif, pour moi, de 64 n'est pas et ne devrait pas être de dire : Quelles sont les différentes fins auxquelles j'utilise les données, sinon dans une perspective de service public? Et, un jour, je pense que nous devrons avoir le débat dont le député de LaFontaine parle et pour lequel le député de La Pinière a fait un commentaire éditorial auquel je souscris, mais, pour moi, ce n'est pas la finalité de 64. Ça, c'est un débat qu'on aura à un autre moment donné.

Il y a des États qui se sont dotés d'un officier dont c'est le rôle, un peu comme on s'est doté du Forestier en chef, au Québec, pour voir à l'exploitation correcte et durable de la forêt. Puis on peut avoir des avis divergents sur le succès de ça ou non, mais le rôle était là quand même. Peut-être qu'on aura ce débat-là. Moi, ce n'est pas mon intention, puis ce n'est certainement pas l'intention de 64, puis je ne pense pas que 64 doit nous amener là.

Je pense que 64 doit s'assurer... puis c'est un petit peu le commentaire que je faisais au collègue. Moi, je pense que 64 doit s'assurer qu'on trouve cet équilibre subtil entre bien protéger les renseignements personnels, arrêter l'espèce de collecte sauvage qui se fait puis d'utilisation effrénée qui se fait dans le dos des concitoyens, ça, ça me pue au nez, mais, en même temps, ne pas mettre ça dans des coffres-forts tellement fermés qu'on ne peut plus rien faire. Moi, c'est ça, la préoccupation que j'ai avec le projet de loi n° 64. Et éventuellement je pense qu'il faut le faire de sorte à ce que, s'il y avait un autre usage qu'on voulait faire des renseignements personnels, bien, dans la mesure où il respecte le projet de loi n° 64, donc parce que nous aurons trouvé cet équilibre-là, les législateurs, bien, à ce moment-là, il pourra y avoir un usage autre. Mais 64 doit être une espèce de base de ciment sur laquelle on s'accote pour dire : Bien, voici comment vous pouvez utiliser des renseignements personnels au Québec, et c'est comme ça, et, quelle que soit la finalité, c'est comme ça puis ce n'est pas autrement.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine. Après ça, j'aurais le député de Gouin.

M. Tanguay : Oui, un dernier commentaire général. J'ai l'impression... puis je ne sais pas si le ministre partage cette, je vais le dire de même, inquiétude, c'est peut-être un peu fort, mais j'ai une préoccupation, ça, c'est le mot exact, j'ai une préoccupation, puis je pense que le ministre la partage, puis il pourra me détromper, j'ai une préoccupation qui découle d'une quasi-certitude chez moi, puis probablement chez bien du monde, que notre vie privée, là, avec tous les systèmes informatiques, là, ça va être de moins en moins possible, puis il faut protéger ça.

Quand on va sur un site Internet, qu'on se fasse donner de la publicité par rapport au site Internet qu'on vient de visiter, sur Facebook, et ainsi de suite... Ce que le gouvernement détient, c'est toutes nos vies, tous les aspects de notre vie. Vous pourriez écrire l'histoire du député de LaFontaine si vous mettiez bout à bout depuis le certificat de naissance jusqu'à là, imaginez-vous, encore... raison de plus avec les transcriptions, puis vous sauriez probablement tout sur le député de LaFontaine, ce qu'il faut savoir, en tout cas, et il faut protéger ça.

Et j'ai l'impression que le 64 est un rendez-vous qu'on a avec l'histoire pour... qu'on ne peut pas manquer. Et il faudrait, je pense, notamment, que, pour les organismes publics au premier titre, après on verra les privés, mais, pour les organismes publics, qu'il y ait ce principe de clairement dit dans la loi, que... en une seule phrase pourrait faire l'affaire, qu'en tout état de cause, les décisions quant à... les décisions touchant les renseignements personnels doivent se faire dans une perspective de protection de la vie privée, d'atteindre l'objectif de la relation citoyen-État, mais dans une perspective de protection et dans une perspective d'intérêt pour la collectivité. Une fois qu'on a dit ça, il me semble que ça serait un maître... une phrase clé à laquelle nos décideurs devraient toujours se poser la question.

Moi, ce que je dis à moi-même, ma phrase clé, là... Je vous donne un exemple. Ma phrase clé au bureau de comté, M. le Président, là, c'est le test du Journal de Montréal. Quand ils me disent : On fait-tu ça ou on ne fait pas ça?, bien, je dis : Si, demain matin, c'est dans le «front page» du Journal de Montréal, tu es-tu à l'aise? Non, pas bien, bien. Bien, on ne fera pas ça de même, on va faire ça de même, tu sais. Ou, si elle me dit : Oui, non, je suis à l'aise, je suis capable... Parfait, on y va.

Alors, ça pourrait être notre phrase test, dans tous les cas d'espèce, de dire : Avez-vous la certitude qu'on va bien servir le citoyen, qu'on va tout mettre en oeuvre pour protéger sa vie privée et que cette décision-là que l'on prend est dans l'intérêt collectif? Et, une fois qu'on a cette phrase clé là, je pense qu'on pourrait le mettre, parce qu'il faut... Oui, je suis pour, M. le Président, la libéralisation, puis c'est des avancées qui vont nous permettre d'être plus performants, notamment, comme État, pour mieux servir le citoyen, mais ça prend des balises de principe aussi, que je mettrais là, que je crois qu'il vaille plus clairement exprimer que de dire : Bien, ça, c'est un renseignement sensible, puis ça, c'est un... hautement sensible. Oui, mais qu'est-ce qu'on en fait? C'est ça, mon point.

M. Caire : Oui, bien, je suis d'accord avec mon collègue, puis c'est... puis je pense que ce n'est pas peu dire. Quand le député de LaFontaine dit que c'est un rendez-vous historique, moi, je suis d'accord avec lui. On a un mandat qui est très, très, très important, parce que c'est tout l'équilibre entre une société moderne qui se transforme numériquement, qui est capable de faciliter la vie de ses concitoyens, ce qu'on ne fait pas actuellement, ce qu'on échoue à faire collectivement, mais cette même société moderne là, qui est aux prises avec des comportements pour le moins litigieux dans la collecte et l'utilisation des renseignements personnels des citoyens, qui sert à des fins qui ne sont pas certainement pas au bénéfice des citoyens...

Donc, de ramener ça dans le droit chemin, on a aussi cette obligation-là. Donc, trouver l'équilibre entre ces deux obligations-là, très importantes l'une comme l'autre, ce n'est pas simple, mais je pense qu'on a tous la volonté d'y arriver. Puis moi, je pense qu'on va y arriver.

M. Tanguay : Est-ce qu'on pourrait le mettre dans la loi, une phase principe comme ça, à quelque part... réfléchir là-dessus. J'en soumettrai une au ministre, peu importe où on sera rendus, M. le Président, à quel article. Moi, j'aimerais ça qu'on le mette dans un article... pas le maître mot, la maître phrase, là. Je vais vous en soumettre une.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

• (12 h 20) •

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. C'est un enjeu important ici parce que le ministre vient amender un article qu'il avait lui-même rédigé, là, en tout cas, que son gouvernement avait rédigé, puis cet article-là affirmait, je pense, au-delà du langage, un principe important, principe selon lequel... Là, on vient, avec le projet de loi n° 64, de plusieurs manières, s'assurer du respect du droit à la vie privée des Québécois et des Québécoises. Puis, dans le libellé initial du projet de loi n° 27... du projet de loi n° 64, à l'article 27, le principe qui était inscrit était que, si les données personnelles des Québécois, des Québécoises détenues par un organisme public sont communiquées à l'extérieur du Québec, bien, il faut... il y a une responsabilité pour les organismes publics de s'assurer qu'ils sont protégés lorsqu'ils sont exportés ainsi.

Puis le principe qui était inscrit plus spécifiquement, c'était qu'il faut qu'ils soient aussi bien protégés... en tout cas, au moins aussi bien protégés qu'au Québec. Parce que, sinon, c'est comme de dire : Nous, on tisse un filet pour protéger la vie privée, qu'on étend à la grandeur du Québec, mais, dès que le renseignement personnel sort du Québec, là, le filet, tout d'un coup, a des plus grosses mailles ou, en tout cas, il peut avoir des plus grosses mailles. Puis le libellé initial de l'article 27 venait affirmer quelque chose d'important, c'est que, si un organisme public exporte le renseignement personnel, bien, il faut qu'il soit aussi bien protégé ailleurs qu'ici, sinon on défait d'une main ce qu'on veut faire de l'autre. Donc, il me semble que, là, ce qu'on vient faire avec l'amendement, c'est vraiment... c'est de baisser la barre pour ce qui est de l'extérieur.

Puis là le ministre dit : Oui, mais c'est parce que, vu qu'on va avoir une loi vraiment ambitieuse puis vraiment excellente, les autres ne seront pas rendus là, donc il faut comme diminuer les exigences de protection des renseignements personnels des Québécois dès qu'ils sortent du territoire québécois parce que les autres sont moins bons que nous.

Qu'est-ce qui a fait cheminer le ministre du libellé initial au libellé actuel? Est-ce que c'est des témoignages qu'on a entendus en commission parlementaire? Est-ce que c'est des représentations qui ont été faites? Parce que c'était une des dispositions du projet de loi qui étaient applaudies par les groupes de défense de droits, par les groupes de défense de droits et libertés, par les organismes qui sont préoccupés par la vie privée. Ils étaient venus en commission applaudir cette disposition-là en disant : C'est vraiment important. Puis là le ministre décide de ne pas donner suite à leur recommandation. Ça fait que je me demande c'est quoi, les avis qui ont été fournis au ministre, qui l'ont fait évoluer là-dessus.

Parce que moi, c'était l'article où j'étais censé dire : C'est vraiment une bonne idée puis c'est vraiment bien, puis finalement je me retrouve dans une position bien différente.

M. Caire : Bien, je veux rassurer le collègue. D'abord, quand il dit qu'on vient amoindrir l'article, là-dessus je ne suis pas d'accord, et je lui explique.

On a beaucoup d'entreprises québécoises qui font affaire à l'extérieur du Québec. Cette disposition-là de la loi, pour une majorité d'entre elles, voulait dire mettre fin à des contrats, ou ne pas signer de nouveaux contrats, ou ne pas faire affaire à l'extérieur du Québec. Donc, économiquement, ça devenait extrêmement difficile pour elles d'appliquer cette loi-là et de continuer leurs opérations. L'impact économique était majeur, était extrêmement hypothéquant pour le Québec. Donc, il fallait trouver une façon d'avoir la même protection.

Et c'est là où je ne partage pas le point de vue de mon collègue de Gouin, parce que l'idée n'est pas d'amoindrir la protection, l'idée est de dire : O.K. Comment peut-on, sinon par des lois équivalentes, comment peut-on s'assurer qu'on continue nos opérations, notre capacité à faire affaire à l'extérieur du Québec, et vice versa, et d'offrir un régime de protection des renseignements personnels qui va être équivalent à ce que nous, on fait ici, au Québec, en matière législative?

Ce que nous avons... La solution qui a été développée par la direction des affaires juridiques, notamment à l'ITQ, c'est dire : Bien, voici, par entente contractuelle, on peut avoir ces clauses contractuelles là qui viennent, dans le fond, obliger l'entreprise avec qui on fait affaire à mettre en place des mesures de protection qui sont équivalentes à ce que vous allez retrouver ici, au Québec. Et donc on le fait... Ce que nous ne pouvons imposer par législation, on peut l'imposer par contrat.

Donc, c'est pour ça que, quand le collègue dit : On vient diminuer les... On ne vient pas les diminuer. On vient trouver une voie de passage qui nous permet... qui permet à nos entreprises de continuer à faire... à avoir des ententes à l'extérieur du Québec, et le Québec fait beaucoup d'affaires à l'extérieur du Québec, mais sans, justement, avoir à diminuer nos exigences en matière de protection des renseignements personnels.

M. Nadeau-Dubois : Je comprends la réponse du ministre, mais là il me parle d'entreprises, mais on...

M. Caire : Bien, c'est... Je m'excuse, M. le député, c'est la même chose pour les organismes publics. On va retrouver l'équivalent au niveau des entreprises, mais c'est la même chose au niveau des organismes publics.

M. Nadeau-Dubois : Oui, oui, mais c'est parce que le ministre utilise un argument de nature économique en disant : Il y a des entreprises qui auraient des opportunités d'affaires, puis là on va les brimer dans leur capacité de faire des affaires, mais là ce n'est pas de ça dont... On aura ce débat-là mais qu'il sera question du secteur privé, mais là on parle des organismes publics, donc qui font partie du périmètre de l'État québécois. Les citoyens et citoyennes confient énormément de données à l'État québécois et ses organismes. Ils le font parce qu'ils se disent : C'est l'État québécois. Et là l'article 70.1, modifié par 27, porte sur la capacité de l'État à exporter les données personnelles des Québécois. Donc, il ne s'agit pas des opportunités d'affaires, là, il s'agit de l'État québécois puis ses organismes publics, et là on vient donner à l'État québécois la possibilité...

En fait, initialement, le libellé initial visait à s'assurer que, quand l'État québécois ou une de ses composantes exporte des données personnelles, il doit s'assurer qu'elles sont aussi bien protégées là-bas qu'ici. Là, le ministre nous dit : Oui, mais ça va être par disposition contractuelle. Je veux bien, mais rien ne dit que, dans ces dispositions contractuelles là, les protections vont être équivalentes à ici, sinon le ministre n'amenderait pas le projet de loi. C'est bien parce que ça fait une différence sur le fond que le ministre présente un amendement. Si c'était du pareil au même, il n'y aurait pas d'amendement.

M. Caire : Non, c'est parce que ce que la loi initiale dit, c'est qu'«avant de communiquer à l'extérieur du Québec un renseignement personnel un organisme public doit procéder à une évaluation», ta, ta, ta. Donc là, il faut qu'il s'assure... Paragraphe 4° : «le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué, notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec».

Donc, ce qu'on vient dire là-dedans, c'est que tu vas communiquer, comme organisme public, des renseignements personnels... avec une entité x, y avec qui tu fais affaire, des renseignements personnels, si et seulement si le régime de l'État en question est équivalent à ce qu'on retrouve au Québec. C'est là où le bât blesse, parce qu'on s'est dit : Bien, ça, ça veut dire qu'il faut que chaque État en Amérique du Nord, donc dans le reste du Canada, aux États-UnisT, au Mexique, en Amérique du Sud... S'il n'y a pas un régime applicable dans l'État qui est équivalent à ce qu'on retrouve au Québec, il n'y a pas moyen de communiquer ces renseignements-là. Et c'est là où on dit : Bien, on va le faire, mais on va le faire... au lieu de le faire... d'avoir une exigence législative, on va avoir une exigence contractuelle.

• (12 h 30) •

M. Nadeau-Dubois : Respectueusement, là, le ministre confond les deux parties de son propre amendement, là, respectueusement, là. Le bout qu'il vient de me citer, ça porte sur ce que doit comporter l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Et là ce que l'article dit, c'est : Dans cette évaluation-là, un des éléments qui doit apparaître, c'est le degré d'équivalence. Donc, ça, ce n'est pas une exigence que ce soit équivalent, c'est une exigence que ce soit écrit sur le papier, si c'est équivalent ou pas.

La deuxième partie de l'amendement du ministre, qui vient intervenir à l'alinéa suivant, où là il vient remplacer «équivalent à la présente loi» par le mot «adéquate», ça, ça vient faire sauter, entre guillemets, la nécessité d'équivalence, mais le petit b de l'amendement du ministre, ça, ça vient changer juste ce qui doit apparaître dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. C'est, quant à moi, deux débats différents.

On pourrait demander aux organismes publics de tenir compte, dans son évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, du degré d'équivalence entre les régimes juridiques. On pourrait demander aux organismes publics : Quand vous faites votre évaluation, tenez donc compte de ça. Ça, c'est une chose. Puis ensuite, au deuxième alinéa, on pourrait quand même adopter... on pourrait aller dans le sens de l'amendement du ministre puis dire : Ça n'est pas obligé d'être équivalent pour que la communication se fasse. Il m'apparaît que ce sont deux choses différentes. On pourrait exiger que les organismes publics en tiennent compte sans exiger que les protections juridiques soient équivalentes.

M. Caire : Bien, M. le Président, ce qu'on fait, c'est qu'on vient modifier le paragraphe 3° pour inclure les protections qui sont contractuelles. Parce que c'est exactement ce que je dis, là, je ne suis pas en contradiction avec... Ce que je dis, c'est qu'il ne faut pas tenir compte du régime légal de l'État avec lequel on va signer l'entente. Ce qu'on doit évaluer, c'est : Par ententes contractuelles, est-ce qu'on est capable d'aller chercher des équivalences à ce qui se fait comme régime de protection au Québec avec un régime adéquat? Donc...

M. Nadeau-Dubois : Mais le premier alinéa, là, porte seulement sur les facteurs qui doivent être tenus en compte dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Ce n'est pas des conditions à la communication des renseignements personnels à ce stade-ci de l'article.

M. Caire : Le premier alinéa dit : «Avant de communiquer à l'extérieur du Québec un renseignement personnel, un organisme public doit procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Il doit notamment tenir compte des éléments suivants : la sensibilité du renseignement; la finalité de son utilisation — tel qu'amendé — les mesures de protection, y compris celles qui sont contractuelles, dont le renseignement bénéficierait», on supprime le paragraphe 4°, puis après ça...

M. Nadeau-Dubois : Seulement une portion du paragraphe 4°, en fait.

M. Caire : Oui, portion du paragraphe 4°. Donc, vous faites la suppression de «notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec». Donc, ce bout-là, il est supprimé. Donc, c'est : «le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué», ça, ça reste dans l'évaluation, mais vous enlevez la notion d'équivalence.

M. Nadeau-Dubois : Oui, mais le ministre conviendra avec moi que les quatre affaires qu'on vient de lister, ce n'est pas des conditions à la communication des renseignements personnels. Ce n'est pas des conditions que l'organisme public doit remplir pour avoir le droit de communiquer les renseignements personnels.

M. Caire : Bien, ça fait partie des facteurs... d'évaluation de facteurs relatifs à la vie privée.

M. Nadeau-Dubois : C'est les facteurs... Écoute, à moins que je ne sache pas lire, là, ce que ça dit, ça, c'est : Voici les facteurs qui doivent être tenus en compte dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée.

M. Caire : Oui. Après ça, vous lisez le deuxième alinéa.

M. Nadeau-Dubois : Oui, mais voilà... Bien, c'est ce que j'essaie de dire depuis tantôt.

M. Caire : «La communication peut s'effectuer si l'évaluation démontre que le renseignement bénéficierait d'une protection équivalant à celle prévue à la présente loi.»

M. Nadeau-Dubois : Voilà, mais ce sont... c'est ce que je dis depuis tantôt, là, ce sont deux enjeux distincts.

M. Caire : Je m'excuse, j'essaie... Je ne comprends pas, là.

M. Nadeau-Dubois : O.K. Le premier alinéa porte sur un objet. L'objet du premier alinéa, c'est : voici ce qui doit être tenu en compte dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée que fait l'organisme public. C'est tout ce que ça dit. On s'entend là-dessus, ça dit juste : Quand l'organisme public veut communiquer un renseignement personnel, il doit faire une évaluation, et voici ce qui doit être tenu en compte dans l'évaluation. C'est tout. Voilà. Donc...

Et ce que vient faire le ministre avec les deux premiers éléments de son amendement, c'est modifier ça, ce que doit tenir en compte l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Ça ne vient pas permettre plus ou moins de communication des renseignements personnels. Ça fait juste dire : Quand vous faites l'évaluation, tenez compte des facteurs suivants. Ça, c'est la première portion de l'amendement du ministre. La deuxième portion de l'amendement du ministre, qui intervient au second alinéa, là, on vient changer dans quelles circonstances la communication peut s'effectuer.

C'est parce que, si j'ai tort, c'est que je comprends l'article tout croche. Ça fait que je veux juste être sûr de bien comprendre l'article.

M. Caire : Oui, mais... En fait, ce que ça vient faire, c'est deux choses. Vous dites, puis je veux qu'on s'entende là-dessus, ce que la première partie de l'amendement ou les deux premiers, là, a et b, viennent faire, c'est simplement changer les conditions d'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, ce qui est vrai, mais pour tenir compte du fait que des ententes contractuelles peuvent nous amener à un niveau... pour un niveau de protection équivalent à ce qu'on va retrouver au Québec contrairement à une exigence législative.

M. Nadeau-Dubois : Mais c'est ça, c'est là...

M. Caire : Mais je vais juste compléter ma réponse, M. le Président. Ce que le deuxième amendement fait, c'est effectivement changer la notion d'«équivalant prévue à la présente loi» par une protection qui est adéquate.

M. Nadeau-Dubois : C'est ça, mais donc le b, le petit b, dans l'amendement du ministre, là, il ne vient pas changer les conditions qui rendent possible ou impossible la communication des renseignements personnels par les organismes publics. Il vient seulement préciser qu'est-ce qui doit être tenu en compte dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Est-ce que je comprends bien l'article?

M. Caire : Bien, en même temps, ça vient changer les conditions. Ça a un impact sur les conditions, inévitablement, M. le Président.

M. Nadeau-Dubois : Bien, non, parce que...

M. Caire : Parce que, si, dans l'évaluation, vous devez tenir compte de, mettons, «mesures de protection dont le renseignement bénéficierait», puis vous dites, vous ajoutez à ça, «y compris contractuelles», bien, c'est sûr que vous venez de changer les conditions dans lesquelles l'évaluation va se faire, parce que vous dites qu'est-ce que le contrat prévoit. Donc, dans l'évaluation, il faut en tenir compte. Puis, après ça, vous dites...

M. Nadeau-Dubois : Il y a les conditions de l'évaluation puis il y a les conditions de la communication des renseignements personnels. J'essaie juste, depuis tantôt, de faire la distinction entre les deux.

M. Caire : Oui, oui, oui, sauf que la communication est conditionnelle à l'évaluation. Donc, si, après l'évaluation, vous en arrivez à la conclusion que le régime est adéquat, vous pouvez communiquer. Si vous arrivez à la conclusion que le régime, y compris les contrats qui sont proposés, sont inadéquats, vous ne pouvez pas communiquer.

M. Nadeau-Dubois : Je comprends. Ce que j'essaie de dire au ministre, c'est qu'on pourrait très bien laisser le quatrième paragraphe du premier alinéa intact, c'est-à-dire demander aux organismes publics de vérifier, de vérifier, juste vérifier, le degré d'équivalence et quand même, au deuxième alinéa, venir dire ce qui est exigé pour permettre la communication des renseignements personnels. C'est une protection adéquate.

On pourrait demander aux organismes publics : Quand vous voulez transférer des données à l'extérieur, regardez c'est quoi, le degré d'équivalence entre les régimes juridiques. En fait, regarde... puis on pourrait dire : Regardez les dispositions contractuelles, parce que c'est pertinent. Puis on pourrait dire aussi : Regardez le niveau d'équivalence des régimes juridiques. C'est-tu plus protégé, moins protégé, égal protégé? On pourrait faire ça pour au moins donner la responsabilité aux organismes publics de faire... d'étudier, on pourrait dire, d'étudier la question, de vérifier ça, puis on pourrait quand même dire ensuite : C'est seulement une protection adéquate qui est nécessaire pour communiquer les renseignements.

M. Caire : Bien, je ne suis pas d'accord avec le collègue, là.

M. Nadeau-Dubois : L'un n'engage pas l'autre.

M. Caire : Bien oui, bien oui, bien oui. Oui, parce que, là, vous dites : Vous devez évaluer les mesures de protection, y compris les mesures contractuelles. Donc, à partir de là, vous faites obligation de dire : Moi, ce que je veux évaluer, là, c'est : Par rapport à mon régime de protection, est-ce que le contrat va me donner des garanties satisfaisantes que les protections sont adéquates? Là, vous rajoutez à ça, vous dites : Non seulement je vais regarder le contrat, mais, en plus, je vais regarder le régime...

M. Nadeau-Dubois : Non, non, mais ce n'est pas moi qui le rajoute, c'est déjà écrit.

M. Caire : Vous allez dire : Je vais regarder notamment son degré d'équivalence par rapport au principe de protection. Donc, vous allez demander à l'organisme d'évaluer le régime juridique applicable, de faire une comparaison avec votre régime de protection, de voir quels sont les corollaires pour, au final, dire : Bien, moi, de toute façon, c'est les clauses contractuelles qui sont importantes, parce que c'est ce que je mets dans le contrat qui va déterminer si ce que tu fais est adéquat ou non.

• (12 h 40) •

M. Nadeau-Dubois : Bien, respectueusement, là, le deuxième alinéa, là, ce n'est pas ça qu'il dit. Il dit : La communication peut s'effectuer si... Donc là, ça, c'est la phrase clé, là, ça, c'est la phrasé clé, dans l'article, qui vient dire : Voici, chers organismes publics, l'endroit où nous vous disons, dans la loi, si c'est «thumbs up» ou pas «thumbs up», lumière rouge ou lumière verte pour communiquer les renseignements. C'est là que ça se joue. Ce n'est pas à l'alinéa d'avant, c'est là.

Puis là ça ne dit pas... Ce que ça dit, c'est : «...peut s'effectuer si l'évaluation démontre que le renseignement bénéficierait d'une protection équivalant à celle prévue à la présente loi.» Le ministre amende, il vient nous dire : C'est trop exigeant, ça, ça va trop restreindre les organismes publics dans leur capacité à communiquer des renseignements personnels à l'extérieur du Québec. Je peux être en accord ou pas avec cet argument, mais c'est l'argument que le ministre présente, et il dit : Je vais changer ça pour «adéquat». Ça, c'est un débat, puis on l'aura en temps et lieu.

Moi, là, ce que j'essaie de dire, c'est qu'on pourrait tout à fait procéder à cette modification-là au deuxième alinéa sans venir également diminuer l'exigence sur le plan de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. On pourrait dire aux organismes publics : Vérifiez le niveau d'équivalence entre les régimes juridiques et communiquez les renseignements seulement si la protection est adéquate. Ce serait cohérent, mais ça nous permettrait au moins d'avoir une information supplémentaire.

Moi, ce que je trouve problématique dans l'amendement du ministre, un des éléments qui m'apparaît problématique, c'est qu'on vient dire : Non seulement vous pouvez communiquer plus facilement, ça n'a pas besoin d'être équivalent, il faut juste que ce soit adéquat, mais en plus on vient dire : Sur le plan de votre évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, vous n'avez même plus besoin de regarder le degré d'équivalence, ce qu'on vient de biffer de la loi, vous pouvez... alors qu'il m'apparaît que, dans la logique même des choses, c'est central, ça, de s'assurer que les lois qui régissent la protection des renseignements personnels... là où on exporte les renseignements personnels, c'est pertinent de connaître leur niveau d'équivalence avec la loi ici.

M. Caire : Bien, je ne peux pas être d'accord avec... puis là oublions le deuxième alinéa. Je suis...

M. Nadeau-Dubois : Bien, pourquoi il y a un article dans la loi, si ce n'est pas pertinent?

M. Caire : Je vais juste... Bien, je vais vous répondre. Oublions le deuxième alinéa 30 secondes. Le député dit : On fera le débat au moment opportun. Parfait, on fera le débat au moment opportun. Regardons les quatre paragraphes qui définissent ce qui doit être dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée.

Nous ajoutons la notion de «les mesures de protection, y compris celles qui sont contractuelles». Je lis tel qu'il serait amendé, donc «les mesures de protection, y compris celles qui sont contractuelles, dont le renseignement bénéficierait». Donc, à partir de là, vous dites : Ce qui va être le point central... si vous n'amendez pas le paragraphe 3°, là, votre paragraphe 4° donne l'étalon de mesure. Si vous amendez, si nous amendons le paragraphe 3° en disant : Tenez compte des mesures de protection dont le renseignement va bénéficier dans les ententes contractuelles, c'est quoi, là? Le contrat, il prévoit quoi, comme mesures de protection? À partir de là, c'est ça qui devient votre étalon de mesure, parce que, là, après ça, vous dites en plus : Regarde ce que la loi prévoit mais que la loi...

Puis la loi... les chances sont excellentes que la loi amène des mesures moindres que ce que nous avons prévu ici, au Québec. Bien, quand bien même que je ferais une étude comparative des deux lois, ce qui va faire foi de tout, c'est ce que je vais mettre dans le contrat. C'est pour ça que je vous dis... Vous me dites : Oui, mais ce n'est pas là que ça se passe, la communication. Bien, c'est là que... c'est sur ça que je m'appuie pour prendre la décision si c'est adéquat ou non. C'est sur ça...

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, si c'était ça, le ministre retirerait au complet le paragraphe 4°. Il dirait : Tout ce qu'on a besoin de savoir, c'est ce qu'il y a dans le contrat. Or, il maintient le paragraphe 4°. Pourquoi? Parce que c'est pertinent de connaître le régime juridique en question. C'est pertinent de connaître le régime juridique pour savoir c'est quoi, le niveau de protection que vont avoir les renseignements personnels. Sinon, on ne le considérerait même pas. Là, on le conserve parce que c'est pertinent.

M. Caire : Bien, si on lit le deuxième alinéa...

M. Nadeau-Dubois : Si c'était impertinent, ce ne serait pas écrit.

M. Caire : Le deuxième alinéa, on ne peut pas le biffer, là. «La communication peut s'effectuer si l'évaluation démontre que le renseignement...»

M. Nadeau-Dubois : Je ne parle pas du deuxième alinéa, je parle du paragraphe 4° du premier alinéa.

M. Caire : Oui, oui, c'est ça, mais le paragraphe 4°, non, parce que «le régime juridique applicable dans l'État où le renseignement est communiqué...» Alors, moi, je... ce que le député me dit, c'est que son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels... Ce qu'on veut savoir, c'est... Ce que ça dit, là, c'est que le régime... Je fais affaire avec l'Ontario. Bon, je vais regarder c'est quoi, la législation ontarienne, admettons. Bien, c'est pertinent, là, parce que ce dont on parle, c'est... quand on parle d'à l'extérieur du Québec, ça veut dire l'Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse.

M. Nadeau-Dubois : Tout à fait, tout à fait, tout à fait.

M. Caire : Bon, ce n'est pas... Et là je dis : Bon, bien, je vais regarder la sensibilité du renseignement. Est-ce qu'il est sensible ou non? Est-ce que... À quelles fins on prévoit utiliser ça? Quelles sont les mesures de protection dont il va bénéficier équivalant... et y compris celles qu'on va mettre dans le contrat? Qu'est-ce qu'il y a comme régime juridique dans l'État où le renseignement va être communiqué?

Mais là ce qu'on demande, là, c'est un coche de plus, c'est dire : Bien, jusqu'à quel point il est équivalent au nôtre? Et c'est là où je vous dis : Bien non, parce que, si vous exigez un régime de protection qui est équivalent au nôtre, allez-vous le juger inadéquat? Parce que vous allez systématiquement en arriver à la conclusion, sauf pour quelques États, qu'il n'est pas équivalent au nôtre.

M. Nadeau-Dubois : Oui, mais l'article n'exige pas que ce... cette portion-là de l'article n'exige pas que ce soit équivalent pour communiquer les renseignements personnels. Ça, ça vient au deuxième alinéa. Au premier alinéa, tout ce que ça dit, c'est : Tenez-en compte dans l'évaluation des facteurs à la vie privée. Ça ne dit pas...

M. Caire : Vous allez le faire avec le régime juridique applicable de l'État, vous allez en tenir compte, mais pourquoi, à ce moment-là, si on n'a pas... Bien, je vais renvoyer la question. Pourquoi le mettre dans la loi si, de toute façon, vous n'avez pas à en tenir compte?

M. Nadeau-Dubois : Bien, M. le Président, ce n'est pas moi qui ai écrit la loi, c'est le gouvernement qui a écrit ça dans son premier libellé. Moi, je trouve que c'est pertinent de l'écrire, parce que ça vient dire aux organismes publics : L'Ontario... vous voulez envoyer les données en Ontario, je ne sais trop, pour une raison qui peut être par ailleurs excellente, vérifiez donc, en Ontario, c'est quoi, leur cadre juridique.

Pas juste le régime juridique général, regardez en matière de renseignements personnels, pas juste le régime juridique ontarien. Ce n'est pas pour la protection du bien-être animal, là. Regardez, en Ontario, le régime juridique applicable puis regardez son niveau d'équivalence avec les lois québécoises. Faites juste intégrer ça dans votre analyse. C'est tout ce que ça dit. Ça ne dit pas : Exigez que ce soit équivalent pour communiquer les renseignements personnels. Ça, c'est dit seulement au deuxième alinéa : La communication peut s'effectuer si...

M. Caire : Oui, mais c'est pour ça que l'amendement, paragraphe 3°, vient préciser que, l'équivalence par rapport au principe de protection, on l'enlève et on y substitue les protections contractuelles. C'est ça qu'on est en train de faire avec l'amendement, là. C'est qu'au lieu de dire : Bien, tu as notamment son degré d'équivalence par rapport au principe de protection des renseignements personnels applicable. On vient dire ici : y compris celles qui sont contractuelles. Donc, les mesures de protection qui sont contractuelles, c'est de ça dont vous allez tenir compte.

M. Nadeau-Dubois : Oui, c'est de ça dont vous allez tenir compte. Bien, ce n'est pas ça qui va déterminer si vous pouvez ou pas communiquer les renseignements personnels.

M. Caire : Non, mais ce que je veux dire, c'est que vous avez une substitution...

M. Nadeau-Dubois : Ce qui va déterminer, dans le libellé actuel, c'est si ça bénéficie d'une protection équivalente à celle prévue à la présente loi. En ce moment, dans le libellé, c'est... elle est là, l'exigence. C'est parce que moi, je ne pourrai pas faire un amendement, je ne pourrai pas discuter si on n'a même pas la même compréhension de la structure de l'article, là. C'est là-dessus qu'on bloque, là.

Moi, ma lecture, c'est que le premier alinéa vient dire : Voici ce que vous devez regarder, vous devez regarder la sensibilité, la finalité, les mesures de protection, notamment contractuelles, y compris contractuelles, puis vous devez regarder le régime juridique applicable, notamment sur le guide d'équivalence. Vous devez regarder ça dans vos... Vous devez mettre... Vous devez le tenir en compte dans votre évaluation des risques. Premier morceau.

Deuxième morceau, au deuxième alinéa, la communication peut s'effectuer si... Et là il y a une condition qui est... que le ministre juge trop exigeante, c'est-à-dire il faut... C'est là qu'on dit : Il faut que ce soit d'un degré de protection équivalent. Si le ministre juge que ce degré de protection là est... que la barre... que c'est trop exigeant, que ça va nuire à la mobilité des données, bien, on peut, en effet, amender ça, mais on pourrait conserver l'exigence du paragraphe 4° du premier alinéa pour dire : Quand même, regardez au moins le degré d'équivalence.

• (12 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Nadeau-Dubois : Il me semble que ce serait conciliable.

M. Caire : Bien...

Le Président (M. Bachand) : Juste pour informer le député de Gouin qu'il lui reste cinq minutes sur l'étude de l'amendement. M. le ministre.

M. Caire : Oui, M. le Président. Puis, de toute façon, peut-être qu'on pourrait suspendre pour le dîner. Je comprends ce que le député demande, mais écoutez, là, justement, c'est une notion qu'on vient changer, donc que le renseignement soit communiqué lorsqu'il y a équivalence. Donc, d'en juger l'équivalence, sachant qu'il n'y aura pas d'équivalence, c'est pour ça qu'on met la notion de «y compris celles qui sont contractuelles».

Donc, je comprends ce que le député dit, puis il me dit : Bien, ce n'est pas grave si vous le mettez, mais c'est parce que je suis quand même obligé, dans mon évaluation des régimes juridiques, de vérifier l'équivalence, alors que... Puis ce que j'essaie d'expliquer, c'est qu'au final, le déterminant, c'est les mesures de protection, notamment celles qui sont contractuelles.

M. Nadeau-Dubois : Non, mais il y a une interaction entre les... Le ministre conviendra qu'il peut y avoir une interaction entre les deux, là. Le régime juridique applicable dans l'État où on exporte les données personnelles, là, il va être... Les dispositions contractuelles que l'organisme... L'organisme public signe un contrat avec un organisme ontarien. Le régime applicable en Ontario sur la protection des renseignements personnels va influer... il va y avoir une interaction entre ce régime juridique là et les dispositions contractuelles.

M. Caire : Oui.

M. Nadeau-Dubois : Donc, moi, là, ça m'apparaît deux débats complètement... c'est-à-dire, pour moi, l'un n'emporte pas nécessairement l'autre. On pourrait inscrire, comme exigence de la part des organismes publics, qu'ils tiennent en compte les dispositions contractuelles et conserver qu'il faut aussi tenir en compte le degré d'équivalence du régime juridique avec le régime juridique québécois. On pourrait faire les deux.

Le ministre a l'air de... Quand il me donne des explications, c'est comme s'il dit que c'est un ou l'autre. On pourrait... À cette étape-ci de l'évaluation des risques relatifs à la vie privée, à cette étape-ci, et je précise, à cette étape-ci, on pourrait dire : Vous devez considérer les deux.

M. Caire : Mais c'est parce que, M. le Président, ce que j'essaie d'expliquer à mon collègue, c'est que c'est justement cette notion-là d'équivalence que nous souhaitons retirer du projet de loi pour y aller avec des modèles qu'on mettrait en place, qui vont permettre une... qui vont trouver ce fil conducteur entre notre volonté de protéger les renseignements personnels et le fait que nous savons très bien qu'avec l'adoption du p.l. n° 64 nous aurons la législation la plus sévère en Amérique du... en Amérique tout court, M. le Président, et probablement une des plus sévères au monde.

Donc, d'en arriver à dire : «notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec», nous savons que tous les États en Amérique auront un régime qui va être moindre au niveau de la protection des renseignements personnels. On le sait. C'est ça, la conclusion. Nous avons, avec le p.l. n° 64, un des régimes les plus contraignants au monde.

Alors, la voie de passage que nous avons trouvée pour assurer ce fil conducteur là, de se doter d'une loi dont, oui, effectivement, j'espère, nous serons fiers et que nous adopterons, mais, en même temps, qui ne devient pas une hypothèque pour nos organismes publics et/ou éventuellement, nous en discuterons, nos entreprises de faire affaire ou de traiter, devrais-je dire, de façon plus large avec des entreprises et/ou des entreprises à l'extérieur du Québec... Bien, M. le Président, cette entente-là contractuelle vient faire cette voie de passage là. Et je le réitère, la notion d'équivalence, on cherche effectivement à la retirer, parce qu'il n'y en a pas, d'équivalence. On le sait. Ça fait que quand bien même que...

Alors, oui, je veux regarder c'est quoi, le régime juridique applicable, bien sûr, parce qu'il y a quand même des enjeux juridiques qu'il faut valider, parce qu'un contrat, c'est très certainement contraignant, mais une loi, ce l'est encore plus. Donc, il faut s'assurer que les contrats seront respectés. Il faut s'assurer que les ententes qui sont prévues dans le contrat seront respectées, qu'on ne va pas en contradiction, par exemple, avec un régime juridique de l'État avec qui on va signer lesdits contrats.

Mais, sur le degré d'équivalence, il n'y en a pas, d'équivalence. Alors, on peut bien le laisser dans le projet de loi, mais on a déjà... on pose une question pour laquelle on connaît déjà la réponse.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, je ne sais plus combien de fois... Je pensais qu'on s'entendait, le ministre et moi, sur le fait qu'on ne fait pas cette loi-là pour juste les trois prochaines semaines, on la fait sans doute pour les trois prochaines décennies. Il n'y a pas d'équivalence en ce moment, mais on n'est pas la première ni la dernière législation en Amérique du Nord à moderniser son cadre juridique, là. Donc, il y a fort à parier que, d'une manière ou d'une autre, d'autres juridictions nord-américaines ou mondiales vont, elles aussi, progresser, faire progresser leur cadre juridique.

Donc, cette partie-là de l'argumentaire du ministre, l'argument où il dit : On ne peut pas parler d'équivalence, l'équivalence n'existe pas, en tout respect, c'est un argument qui m'apparaît faible dans la mesure où ça va changer dans le temps, puis il pourrait y avoir des régimes juridiques équivalents éventuellement.

Ceci étant dit, M. le Président, je vais déposer un sous-amendement à l'amendement du ministre. On peut peut-être suspendre, le temps qu'on le fasse parvenir.

Le Président (M. Bachand) : Merci. On va suspendre quelques instants. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 57)

(Reprise à 13 heures)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît. La commission reprend ses travaux.

Cela dit, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 14 h 30. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 13 h 01)

(Reprise à 14 h 33)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi. La Commission des institutions reprend ses travaux.

Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Lors de la suspension de nos travaux, cet avant-midi, nous étions rendus à l'étude de l'amendement du ministre à l'article 27. Interventions? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Oui, merci, M. le Président. Donc, je dépose un sous-amendement à l'article 27, qui se lit comme suit : L'amendement à l'article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 27 du projet de loi, est sous-amendé par la suppression du sous-paragraphe b.

Donc, bien, on a eu l'occasion d'avoir une discussion, le ministre et moi, avant la suspension. Peut-être quelques ajouts, mais pas trop longs parce qu'on a quand même... on a eu le temps d'en parler déjà, là.

L'idée est de dire : À ce stade-ci de l'article, là, où on vient faire la liste de ce qui doit être tenu en compte dans les facteurs... dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée par les organismes publics qui souhaitent transmettre des renseignements personnels à l'extérieur du Québec, mon amendement vise à... mon sous-amendement modifie l'amendement du ministre pour que reste, dans l'article amendé, le fait que le degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec, bien, que ça soit considéré dans les facteurs quand on fait l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Je pense que c'est pertinent de tenir... de prendre ça en considération quand vient le temps, pour les organismes publics, de faire un portrait de la situation juridique de l'endroit où ils veulent exporter, entre guillemets, des données personnelles. Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Bien, brièvement, M. le Président, parce que je comprends ce que le collègue veut faire. Puis d'ailleurs je lui présente mes excuses parce que je sais que, dans mon argumentaire précédent, j'ai pu semer un peu la confusion en utilisant l'idée de l'équivalence, alors que c'était l'idée d'un environnement adéquat.

Mais, pour résumer l'objectif des amendements, on est vraiment à retirer la notion d'équivalence de l'article pour, d'une part, le remplacer par la notion de ce qui peut être prescrit par contrat et, deuxièmement, dans le deuxième alinéa, pour ce qui est une protection adéquate. Donc, pour cette raison-là, évidemment, je ne peux pas cautionner l'amendement du collègue parce que c'est justement cette notion-là qu'on veut enlever.

Et le collègue avait suggéré, peut-être, de retirer le quatrième paragraphe, mais non, parce que l'idée qu'il faut évaluer le régime juridique applicable, c'est de s'assurer que le contrat... justement, on peut appliquer le contrat, que le contrat sera exécutoire. Donc, il faut s'assurer... Dans le fond, ce qu'on veut, c'est s'assurer que le cadre juridique n'empêche pas ou n'est pas un frein à l'exécution du contrat, mais, à partir de là, c'est l'exécution du contrat, c'est les clauses du contrat qui vont nous permettre de déterminer si, oui ou non, il y a un régime de protection adéquat. Donc, c'est vraiment dans cet esprit-là que les amendements sont amenés, pour que ça soit ça que l'article dise.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Si mon sous-amendement est battu... Faisons cette hypothèse, on ne sait pas. Moi, je suis un garçon candide. Je crois à la délibération puis je ne désespère jamais que, de la délibération, émergent des nouvelles propositions, mais, si mon sous-amendement, d'aventure, était battu...

Concrètement, un organisme public décide d'envoyer certaines données personnelles dans une juridiction autre, ça peut être pour tellement de bonnes raisons, fait une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée pour s'assurer, ça a-tu de l'allure, là où on veut envoyer ça, et on s'assure notamment que, dans le contrat qu'on signe avec le tiers, il y ait certaines garanties, et tout ça, parfait. En vertu, quand même, du paragraphe 4°, amendé mais pas sous-amendé, l'organisme public devrait quand même prendre en considération «le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué». Dans l'esprit du ministre, cette vérification-là, ça n'inclut pas de vérification sur la législation en matière de renseignements personnels.

En fait, c'est ça, ma question. Est-ce que ça inclut, oui ou non, de facto une évaluation de quelles sont les lois encadrant les renseignements personnels dans cette législation-là?

M. Caire : Bien, en fait, l'idée initiale de garder cet élément-là, comme je l'ai expliqué, c'est de dire : Bon, bien, c'est bien beau, je signe un contrat avec l'entreprise Y qui a son lieu d'affaires à l'extérieur du Québec. Est-ce que le régime juridique de l'État où opère cette entreprise-là ferait en sorte que, la protection des renseignements personnels, même prévue dans un contrat, le contrat ne serait pas exécutoire, et donc auquel cas, mon contrat, je peux mettre ce que je veux dedans, mais c'est caduc, et là ça vient fausser l'évaluation? Parce que, si je dis : Bon, bien, je veux avoir... je veux savoir s'il va y avoir un environnement de protection adéquat, que je me base sur le contrat, mais que le contrat ne peut pas être exécuté parce qu'en contradiction avec les lois de l'État, là, je suis fait, ce n'est pas une bonne idée, là. Donc, il faut que je sois sûr que mon contrat peut être exécuté, qu'il n'y a rien dans la législation de l'État qui fait en sorte que le contrat, tel que je l'ai libéré... libellé, pardon, avec les clauses que je viens intégrer, que ça va être exécutoire.

M. Nadeau-Dubois : On va prendre un exemple pour se faciliter la vie, puis là je vais en prendre un qui est un peu intense, là, peut-être un peu extrême. Je ne veux pas que le ministre me dise : Bien, voyons, Gabriel, on ne ferait jamais ça. Mais on ne sait pas, dans 30 ans, qui sera le gouvernement puis quelles seront leurs intentions.

Il y a des États dans lesquels, prenons la Chine, entre les entreprises privées et l'État, c'est plutôt perméable.

• (14 h 40) •

M. Caire : Plutôt.

M. Nadeau-Dubois : Puis je pense que c'est même un euphémisme que de dire ça. Si un organisme public au Québec, et là, pour une raison ou une autre, peut-être excellente, souhaitait confier certaines données personnelles à une entreprise chinoise qui offre des services, peut-être, d'hébergement de données, je ne sais pas, peu importe, il serait légitime pour les citoyens, citoyennes de se dire : Oh! une entreprise chinoise... On connaît les habitudes du régime chinois en matière d'intrusion dans la vie privée. Ce n'est pas exactement un régime très respectueux de la vie privée et des droits de la personne. Et on connaît les proximités entre le régime autoritaire et certaines grandes entreprises, là. L'actualité fourmille d'exemples de ça, là. On connaît ses pratiques d'espionnage industriel, notamment. Bon, tout le monde connaît le portrait que j'essaie de dresser.

L'organisme public devrait, en vertu de cet article-là de la loi, faire une série de vérifications, notamment regarder «la sensibilité du renseignement» pour «la finalité de son utilisation». À ces deux premiers critères là, on pourrait se dire : Ah! bien, le renseignement... Bien, c'est des renseignements collectés sur un site Internet. Les finalités de l'utilisation, bien, c'est juste pour de l'hébergement de données, par exemple, ça fait que c'est bon. «Les mesures de protection dont le renseignement bénéficierait» avec les dispositions contractuelles... Puis quatrièmement, on avait «examiner le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué», puis on ajoutait avant «notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels».

En vertu de quel de ces quatre critères-là, il y a une lumière rouge qui allumerait pour dire : Un instant, vous êtes en train de contracter avec un acteur corporatif qui a des liens étroits avec un régime autoritaire, ce n'est peut-être pas la meilleure idée?

M. Caire : Bien, non seulement je trouve que l'exemple n'est pas extrême, mais, au contraire, je trouve que c'est un excellent exemple. Et continuons dans l'exemple fictif de mon collègue de Gouin.

Je signe une entente pour l'utilisation d'une plateforme de collaboration, que nous appellerons, pour l'occasion, Zim, mettons, et qu'il s'avère que cette application de collaboration là utilise des serveurs en Chine. On le sait, une application de collaboration, il y a une possibilité, effectivement, de fuite de renseignements personnels. Parce qu'admettons que cette plateforme de collaboration là serve à un comité de gouvernance d'un organisme public, voire le Conseil des ministres, tiens, exemple totalement au hasard, évidemment, et qu'on se dise : Diantre! Peste! Palsambleu! Il se peut que des informations de cette plateforme de collaboration là soient stockées sur un serveur qui est en Chine... Donc, avant de signer ces ententes avec la plateforme de collaboration en question, le paragraphe 3°, qui dit : «des mesures de protection, y compris contractuelles, dont le renseignement bénéficierait...» Donc, je fais cette évaluation-là et là je dis : Bon, bien... Voilà que je dois faire cette évaluation-là, je signe les contrats, et là j'arrive au paragraphe 4°, et je me dis : «le régime juridique applicable dans l'État où le renseignement serait communiqué».

Dans le cas qui nous concerne, on pourrait être consternés par le fait que le contrat sera exécuté tel que libellé et signé par les parties, compte tenu du régime juridique applicable de l'État dont nous parlons. Et là on se pose la question : Avant de communiquer ces renseignements-là, est-ce que je bénéficie d'une protection adéquate? Il m'apparaît que la réponse à ça serait non. Et donc, en vertu de l'évaluation faite, dans le premier alinéa, selon les termes que j'ai exposés au député de Gouin, le deuxième alinéa ferait en sorte que l'évaluation serait plutôt négative, à savoir, si le régime de protection est adéquat pour les motifs que le député de Gouin a exposés, et qui sont, à mon avis, tout à fait conformes à la réalité, et qui ne relèvent absolument pas de la fiction.

M. Nadeau-Dubois : Ce que je perçois dans les propos du ministre, puis en réponse à l'exemple que j'ai donné, c'est... il y a une volonté de sa part, en tout cas c'est ce que je sens, que les législations où on envoie les données aient un régime juridique respectable, sérieux, notamment sur la question de la protection des renseignements personnels.

Moi, j'ai comme l'impression... puis c'est parce que je ne veux pas lui prêter d'intention, mais mon impression, c'est que c'est implicite. Quand on parle d'aller vérifier «le régime juridique applicable», c'est le régime juridique applicable. Donc, «applicable»... je ne sais pas trop, peut-être que les juristes pourraient me répondre, mais moi, j'ai l'impression que ça réfère à «applicable à la situation dont il est question». Donc, ce n'est pas le régime juridique applicable au zonage des terres agricoles, là, c'est le régime juridique applicable en la matière dont on discute dans cet article. En tout cas, je n'ai aucune compétence juridique, mais j'imagine qu'on ne parle pas de... qu'implicitement on parle du régime juridique qui est en lien avec la situation dont il est question ici.

Donc, si ce qui dérange le ministre, c'est la notion d'équivalence, parce que c'est là-dessus qu'il revient souvent, puis moi, c'est ce que je comprends de son intention, pourquoi ne pas, par exemple, sous-amender pour dire : «le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué, notamment les lois régissant la protection des renseignements personnels»? Là, on fait de la rédaction de coin de table, là, on pourrait trouver quelque chose de plus sérieux. Mais pourquoi ne pas venir préciser que l'intention du législateur, ici... le préciser pour que ce soit bien clair qu'on s'attend que, les organismes publics, quand ils examinent le régime juridique dans lequel ils envoient des données, on veut qu'ils portent attention à, là-bas, quelles sont les lois en matière de renseignements personnels? Et faisons sauter la notion d'équivalence, si c'est ça qui titille le ministre. Parce que j'ai l'impression que c'est un peu implicite dans notre discussion. Ça fait que moi, je me dis : Pourquoi ne pas l'écrire? Par ailleurs, le gouvernement lui-même l'avait écrit dans sa première version.

M. Caire : Bien, en fait, deux choses... bien, peut-être même trois. Dans le premier alinéa... parce que, là, la notion d'équivalence, on l'a dans le premier et dans le deuxième alinéa. Dans le premier alinéa, on parle d'équivalence. La raison pour laquelle on souhaite le retirer, c'est une question que, quand on va élaborer les contrats, il est clair que les contrats vont viser la protection des renseignements personnels, les clauses contractuelles vont viser la protection des renseignements personnels, et que ces clauses-là, évidemment contractuelles, vont s'adapter au régime juridique ou avec l'entreprise avec laquelle on fait affaire.

Je donne un exemple à mon collègue. Si actuellement je fais... je prends une entente, dans le cadre du Partenariat mondial sur l'intelligence artificielle, avec la France, la France applique le régime de protection générale des données, on s'entend que le contrat que je vais signer avec la France va tenir compte de ça. Et c'est ça, l'idée. Et c'est ça, la souplesse que le contrat amène, que j'essayais, de façon un peu malhabile, j'en confesse, d'expliquer. C'est que, là, il y a une notion de souplesse que le contrat amène. Cette notion de souplesse là, elle est commandée par le contexte que la prémisse de base, c'est qu'avec le projet de loi n° 64 nous aurons un des régimes de protection les plus sévères au monde et, très certainement, le plus sévère dans les Amériques.

Donc, il y avait un drapeau rouge qui se levait et de la part de nos organismes publics et de la part de nos organismes privés. Les deux étaient unanimes à dire : Attention! Parce que, là, pour faire affaire à l'extérieur du Québec, ça va devenir compliqué, voire impossible. Parfait, qu'à cela ne tienne, trouvons une voie de passage.

La notion contractuelle est cette voie de passage là. Donc, de ce fait, la notion d'équivalence, dans le premier alinéa, c'est tout simplement qu'elle amène une obligation redondante, à savoir : lorsque je vais discuter du contrat avec l'entreprise, c'est clair que le contrat va refléter l'état des lieux de l'État avec... de l'entreprise avec qui je fais affaire.

Donc, à partir de là, d'en faire une obligation légale de rajouter ça, donc je le fais pour la signature du contrat et je le fais en plus... Puis là il n'y a plus de finalité à le faire dans ce cas-là, parce que, techniquement, mon contrat est déjà fait, parce que c'est sur la base du contrat que je vais faire mon évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Donc, il faut que le contrat en question ait été minimalement rédigé.

Dans le deuxième alinéa, bien là, c'est carrément la notion d'équivalence, où je ne trouverai pas d'équivalent. Donc, encore là, je me ramène au contrat, puis c'est pour ça qu'on... oui, effectivement, on amène un peu plus de souplesse en disant «qui représente une protection adéquate». Donc, c'est dans cette perspective-là qu'on a amené les amendements en question.

• (14 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Je vais prendre un autre exemple, peut-être encore plus plausible. Un organisme public décide de faire affaire avec une entreprise américaine, peu importe pourquoi. Ça implique le transfert de données personnelles aux États-Unis. L'organisme public signe un contrat avec l'entreprise américaine, qui précise, par exemple, que l'entreprise n'a pas le droit de partager les données à aucun tiers, de quelconque nature que ce soit.

Aux États-Unis, il y a maintenant des dispositions législatives qui permettent aux organismes de surveillance, à la NSC, par exemple... Là, je ne veux pas avoir... Tu sais, c'est de notoriété publique que, notamment, dans la foulée du 11 septembre 2001, le gouvernement américain a adopté des lois assez intrusives sur le plan des données personnelles puis de la vie privée. Je ne les connais pas dans le fin détail, mais je sais que ces lois-là donnent des pouvoirs extensifs en matière d'accès aux renseignements personnels. Ça a été tristement révélé, notamment dans l'affaire Snowden, que plusieurs... de grandes entreprises américaines ont été tout à fait complaisantes et ont permis à des institutions relevant du gouvernement américain de puiser dans leurs données personnelles pas mal comme bon leur semblait.

Ça ne me semble donc pas relever du conte de fées, ça ne me semble pas relever de craintes injustifiées que de se dire... puis c'est peut-être une question juridique à laquelle les juristes peuvent répondre, là : Si, dans le contrat, c'est écrit que l'entreprise américaine, par exemple Google ou Amazon, disons Google, ne doit pas communiquer à personne les renseignements et que, par ailleurs, le gouvernement du Québec se rend compte que, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, par exemple, bien, Google a permis l'accès à ses serveurs pour le bien de la défense américaine, puis je le répète, c'est des choses qui sont arrivées, là, je n'écris pas des contes de fées, le gouvernement du Québec pourrait dire : Bien là, moi, je suis lésé, là, j'avais un contrat qui disait qu'aucun tiers ne devait avoir accès à mes renseignements. Dans une situation juridique comme celle-là, quels sont les recours du gouvernement du Québec?

M. Caire : O.K. En fait, là, on a deux situations tout à fait réelles l'une et l'autre mais qui sont distinctes l'une de l'autre. Je m'explique. Si je signe une entente avec une entreprise, l'entreprise va être tenue de respecter, évidemment, son contrat, sans quoi elle s'expose à des poursuites, à des recours judiciaires. Donc, ça, le Cloud Act, auquel fait référence le député de Gouin, n'interfère pas là-dedans, dans le sens où l'entreprise va respecter son contrat jusqu'à ce que le contrat soit réalisé. Le Cloud Act... Effectivement, il y a eu des jugements à savoir que le Cloud Act pouvait avoir une portée extraterritoriale.

Ceci étant dit, le Cloud Act est venu préciser ce que le Patriot Act faisait. Le Patriot Act était très large, et c'est justement ce que le Congrès américain a dit : Écoutez, c'est large, c'est trop large, là, il faut circonscrire ça à des événements très précis. Donc, le Cloud Act a été adopté, et, dans certaines circonstances que j'expliquais tantôt au député de LaFontaine, notamment des mesures sur la sécurité nationale, des enquêtes criminelles, etc., il peut y avoir demande à un tiers de fournir... des entreprises, un tiers, évidemment, qui est un citoyen corporatif américain, on s'entend, parce qu'on ne peut pas appliquer la loi américaine à un citoyen corporatif canadien, européen ou d'une autre nationalité qu'américain. Par contre, si le citoyen corporatif est américain, même si ses opérations sont en dehors des États-Unis, il est tenu de respecter cette loi-là.

Ceci étant dit, cette loi-là ne souscrit pas... c'est-à-dire ne dédouane pas... ne souscrit pas... excusez-moi, ne dédouane pas l'organisme de sécurité de passer par un mandat, donc d'aller chercher cette autorisation-là via un tribunal, ce qui n'empêche pas, effectivement, les entreprises visées de contester judiciairement cette procédure-là, donc, avant de s'exécuter, de la contester judiciairement, ce qui amène des délais, des désagréments et une hypothèque.

Ce que les organismes de sécurité en question vont faire, notamment entre le Canada et les États-Unis, qui sont signataires d'ententes, c'est que les services de sécurité américains vont recourir aux services de sécurité canadiens, les services de sécurité canadiens vont exercer les pouvoirs que la loi leur confère pour aller chercher les informations dont ils ont besoin en vertu des enquêtes qui sont les leurs, parce que c'est un recours qui est, un, plus discret et, deux, plus rapide. Mais, dans tous les cas de figure, l'application du Cloud Act ne vient pas limiter la capacité de signer des ententes contractuelles. Puis je vous dirais qu'à l'inverse un contrat ne peut pas interdire l'application d'une loi, quelle qu'elle soit.

M. Nadeau-Dubois : On arrive, je pense, au coeur de la question ici, là. Le projet de loi, initialement, prévoyait que la référence, pour les organismes publics, c'était le régime juridique des États, des juridictions, puis ce que le ministre fait avec son amendement, ce n'est pas banal. On peut être pour, on peut être contre, mais ce n'est pas banal, c'est de dire : Le cadre de référence, ça ne sera plus le cadre juridique, ça va être des dispositions contractuelles, donc du droit contractuel entre deux parties.

Le fond de ma question, c'est la chose suivante : Si, en vertu de dispositions contractuelles, négociées de bonne foi, quelque chose est interdit, les deux parties conviennent qu'une utilisation donnée x, y de données personnelles ne devrait pas se produire, mais que le régime juridique, le droit public de l'État en question permet que ça se produise, l'entreprise dans cette juridiction-là pourrait être amenée, dans certaines circonstances, à briser son contrat avec le gouvernement du Québec pour... cette entreprise-là pourrait briser son contrat avec l'organisme public québécois puis respecter complètement son cadre juridique maison, de sa législation.

Quel est le recours d'un organisme public québécois si, en vertu des lois, par exemple, américaines, une entreprise américaine décide de donner accès à certaines données ou est contrainte par un tribunal de donner accès à certaines données?

M. Caire : Oui. Bien, M. le Président, en fait, l'exemple que le député de Gouin amène, c'est un peu ce qu'on dit, c'est-à-dire que, lorsque le contrat est élaboré, il est la base sur laquelle on va pouvoir s'assurer qu'il y a un régime de protection... en fait, c'est un des éléments, un élément important, mais un des éléments qui va permettre de vérifier que les renseignements ont un régime de protection adéquat. Et, quand on dit, au paragraphe 4°, qu'il faut évaluer «le régime juridique applicable dans l'État où le renseignement sera communiqué», c'est exactement ce que je disais, c'est : Est-ce que le régime législatif, dans l'État où ça va être appliqué... est-ce qu'il va empêcher l'exécution du contrat, à savoir... Puis l'exemple, tantôt, que le député de Gouin prenait, c'est de dire : Bon, bien, moi, j'échange des renseignements avec toi, mais tu as une interdiction formelle, contractuelle, d'échanger, partager, communiquer ces informations-là à qui que ce soit, pour quelque raison que ce soit. Je mets ça dans le contrat puis là je dis : Est-ce que ça, ça me donne une protection adéquate, satisfaisante? Oui.

Maintenant, si je regarde la législation de l'État puis ça dit : Bien, cette disposition-là, pour x, y raison, n'est pas applicable, bien là, ça fait partie de l'évaluation, à dire : O.K. Est-ce que, sachant que mon contrat n'est pas exécutoire ou que, cette clause-là, il y a une loi qui permet de briser cette clause-là, est-ce que je maintiens mon évaluation à savoir qu'il y a un régime de protection adéquat? Bien, la réponse, c'est non.

Maintenant, je veux faire une distinction, parce que le Cloud Act n'empêche pas l'exécution d'un contrat dans une relation d'affaires normale. Il faut bien comprendre que le Cloud Act, ce sont des dispositions particulières qui permet à des... un peu comme on le fait... soit dit en passant, M. le Président, exactement comme on le fait dans le projet de loi n° 64, quand on dit qu'un renseignement personnel peut être communiqué, sans le consentement de la personne, à une personne ou un organisme qui fait des enquêtes, bon, qui a des... aux procureurs de la couronne. Donc, ces dispositions-là, on les a nous-mêmes dans notre loi, de dire : Écoutez, si c'est pour des enquêtes criminelles, si c'est pour l'usage du DPCP, si c'est pour l'usage d'une enquête d'une entité, par exemple, la CAI, qui fait des enquêtes, là, vous pouvez communiquer ces renseignements-là sans le consentement de la personne.

Donc, le Cloud Act, il dit essentiellement ça. Donc, c'est... puis ce n'est pas... Ça se fait sous mandat selon un régime juridique. La seule distinction, c'est qu'elle a une portée extraterritoriale lorsque le citoyen corporatif américain fait des affaires à l'extérieur du pays.

• (15 heures) •

M. Nadeau-Dubois : Oui, mais, M. le Président, là-dessus, là, il y a quand même une différence. Si je suis un citoyen québécois, que l'État dans lequel j'ai des droits, en vertu de sa loi sur la protection des renseignements personnels, rende possible la communication aux forces policières, c'est une chose, c'est l'État dont je suis citoyen. Ce n'est pas la même chose que si c'est le gouvernement américain.

Parce que le ministre a fait un parallèle, il a dit : C'est déjà possible, en vertu de la loi québécoise, que, pour des raisons d'enquête, puis il m'a donné l'exemple du DPCP ou des forces policières, on puisse communiquer des renseignements personnels. Oui, bien, je veux bien, mais là on est à l'intérieur du Québec. Moi, l'exemple que je lui donne, ce n'est pas à l'intérieur du Québec. C'est : moi, je suis un citoyen québécois, l'État québécois exporte certaines de mes données aux États-Unis pour des fins de surveillance, il y a un bris de contrat, les données sont communiquées. On n'est pas dans la même situation que si c'est au Québec, là. Moi, comme citoyen québécois, c'est quoi, mes recours envers le gouvernement américain?

M. Caire : Oui, oui, oui. Non, mais ce que je disais... Mais, ceci étant, le Cloud Act s'applique aux citoyens américains, là, ne s'applique pas aux citoyens québécois.

M. Nadeau-Dubois : Oui, mais moi, l'exemple que je donne depuis tantôt, tu sais, je me demande, s'il y a une disposition contractuelle qui interdit une chose mais que le droit public d'un État le permet, le contrat qu'on signe avec une entreprise privée américaine dit : Vous n'avez pas le droit de partager les renseignements personnels à quiconque, quiconque, quiconque pour toute raison, puis qu'il y a une loi dans cet État-là qui permet... une loi publique qui permet la communication de renseignements personnels...

M. Caire : La loi va avoir préséance sur le contrat.

M. Nadeau-Dubois : C'est justement mon argument. Dans cette situation-là, quels sont les recours du gouvernement du Québec pour dire : Wo, wo, wo! Un instant, on avait signé un contrat que ça n'allait pas se passer. Puis, en vertu exactement de ce que le ministre vient de dire, la loi a préséance sur le contrat. Donc, comment on protège les... Comment on fait pour que ça ne se produise pas?

M. Caire : Bien, je vous dirais, M. le Président, que c'est ce qu'on dit quand on parle qu'il faut évaluer le régime juridique applicable. Donc, si on pense que la juridiction de l'État en question est déraisonnable, bien, ça donne un avis défavorable à la signature d'une entente avec cette entreprise-là. Donc, on se dit : Je n'ai pas une protection adéquate. Si on pense que la juridiction est suffisamment circonscrite et offre des protections qui sont raisonnables, parce que... Puis je sais que ce n'est pas le cas, là, mais on s'entend que, si un officier de justice, avec un mandat émis par un juge en bonne et due forme, veut avoir accès à des renseignements personnels pour des fins d'enquête criminelle, bien, je pense qu'on est tous d'accord pour dire qu'on souhaite que cet officier de justice là, qui aura passé par une procédure qui, quand même, s'assure, là, que ce n'est pas fait en cowboy, là, pour des fins criminelles, puisse faire son enquête.

Mais ça fait partie, effectivement, le député lève un bon point, ça fait partie du pourquoi il faut garder la phrase «le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement sera communiqué», parce qu'à partir du contrat, tel qu'il sera rédigé, je devrai évaluer si le contrat va être exécutoire. Si je pense que le contrat n'est pas exécutoire, tel qu'il est rédigé, parce que la loi va faire en sorte d'invalider les articles du contrat et qu'elle a préséance, bien, lorsque je fais l'évaluation qui est prévue au deuxième alinéa, j'en arriverais à la conclusion que ce n'est pas une protection adéquate et donc je ne peux pas signer cette entente-là.

M. Nadeau-Dubois : Sauf que là on est sur mon sous-amendement qui porte sur ce que doit vérifier l'organisme public. On reviendra sur la question d'adéquat versus équivalence au deuxième alinéa, mais là on était toujours, techniquement, au premier alinéa, sur ce que doit vérifier l'organisme public.

Moi, ce que mon échange avec le ministre me fait comprendre, puis je me trompe peut-être, c'est qu'au fond, quand je donne des exemples puis que je lui demande : Qu'est-ce que l'organisme public doit vérifier dans son évaluation des facteurs relatifs à la vie privée?, l'exemple qu'il me donne, tu sais, il faut qu'il regarde si, là-bas, les lois qui protègent les renseignements personnels, c'est-tu sérieux, minimalement. Si c'est n'importe quoi, ça va entrer dans l'évaluation. Si on se rend compte que l'État dans lequel est l'entreprise avec qui on signe un contrat... que ses lois de protection de renseignements personnels... Le contrat a beau être supersérieux, on se rend compte que les régimes... que les lois sur les renseignements personnels dans cet État-là sont complètement cowboys puis ne vont pas permettre... tu sais, vont permettre beaucoup trop facilement à l'organisme public de ne pas respecter son contrat, le ministre est d'accord avec moi que ce qui l'emporte, c'est le droit public. Par conséquent, il a raison de s'inquiéter.

Bon, si on est d'accord là-dessus, M. le Président, je vais retirer mon sous-amendement puis je vais en déposer un nouveau pour exprimer mieux ma pensée, parce que je pense qu'on est d'accord, le ministre puis moi, puis qu'on est capables de s'entendre.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement. Alors, l'amendement est retiré. Est-ce que votre nouvel amendement est dans le système?

M. Nadeau-Dubois : C'est envoyé. C'est dans l'oléoduc.

Le Président (M. Bachand) : Oh! O.K., oléoduc. Parfait.

M. Caire : Un instant, là. Est-ce que l'évaluation du BAPE a été faite?

M. Nadeau-Dubois : Et je ne parle pas de GNL Québec, parce que ça, ça ne verra jamais le jour.

M. Caire : Non.

M. Nadeau-Dubois : C'est maintenant officiel avec le rapport du BAPE aujourd'hui. Je parle d'un oléoduc procédural entre mon équipe et la présidence de la commission.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Alors, on va suspendre quelques instants. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 15 h 08)

(Reprise à 15 h 22)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Merci beaucoup. M. le député de Gouin, s'il vous plaît. On va déposer... Oui.

M. Nadeau-Dubois : Oui, merci, M. le Président. Alors, je vais déposer un... Donc, il y a eu consentement déjà pour le retrait du précédent sous-amendement, si je ne me trompe pas.

Le Président (M. Bachand) : Oui.

M. Nadeau-Dubois : Donc, je vais déposer un nouveau sous-amendement qui se lit ainsi. Donc, c'est un sous-amendement à l'article 27 :

L'amendement à l'article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 27 du projet de loi, est sous-amendé par le remplacement du sous-paragraphe b par le sous-paragraphe suivant :

b) remplacer, dans le paragraphe 4°, «, notamment son degré d'équivalence par rapport aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec» par «, notamment les principes de protection des renseignements personnels qui y sont applicables.»

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Caire : ...M. le Président, je pense que nous sommes tout à fait en accord avec... je ne veux pas parler au nom de mon collègue de Chapleau, là, mais nous sommes tout à fait en accord avec le sous-amendement, et donc nous y consentons.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Sinon, nous allons procéder à la mise... M. le député de Gouin, ça va? Oui.

M. Nadeau-Dubois : Est-ce qu'on pourrait me... Juste pour être sûr, là. Si le sous-amendement est adopté, comment se lirait l'amendement?

M. Caire : En fait, l'amendement se lirait tel qu'il est, sauf le paragraphe b qui devient le paragraphe que vous suggérez dans votre sous-amendement.

M. Nadeau-Dubois : Voilà! Exactement. Excusez-moi, c'est remplacement du remplacement, qui est déjà un remplacement...

M. Caire : C'est ça, ça vient écraser le... Votre paragraphe b vient écraser celui qui est là.

M. Nadeau-Dubois : Parfait. Bien, voilà, c'est bel et bien mon intention. On est raccords.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Donc, on est prêts pour la mise aux voix? Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, le sous-amendement est adopté. Nous sommes maintenant rendus à l'amendement. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Je vais vous... On va déposer un autre sous-amendement, M. le Président. Je vais vous demander de suspendre un instant.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Donc, il y aura un autre sous-amendement.

On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 24)

(Reprise à 15 h 29)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il te plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Alors, je dépose un sous-amendement pour parler... pour avoir le temps de discuter de l'autre enjeu soulevé par l'amendement du ministre, c'est-à-dire la question de la protection équivalente ou adéquate. Donc, ça se lirait comme suit :

L'amendement à l'article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 27 du projet de loi, est sous-amendé par le remplacement du paragraphe 2° par le paragraphe suivant :

2° remplacer, dans le deuxième alinéa, «équivalant à celle prévue dans la présente loi» par «qui est conforme aux meilleures pratiques».

Donc, j'ai entendu le ministre puis je n'ai pas capté toute la discussion, mais ce que j'ai cru comprendre de la réticence du ministre avec la notion d'équivalence, c'est qu'il trouve que c'est trop fort, que ça va empêcher les organismes publics de contracter avec des organismes à l'extérieur.

Si ce n'était que de moi, que de nous, nous, on juge que, si on pense qu'au Québec un niveau donné de protection est ce qui respecte le droit à la vie privée, on devrait exiger que ce même niveau soit garanti dans les États où on exporte les données, mais, bon, c'est le ministre qui a la majorité autour de cette table, donc je tente un amendement pour trouver quelque chose comme un compromis entre la notion d'équivalence, que le ministre juge trop forte, trop exigeante, trop rigide, et l'idée de simplement s'assurer d'une protection adéquate.

• (15 h 30) •

Il m'apparaît que de parler de protection adéquate, là, on était peut-être à l'autre bout du spectre, c'est-à-dire c'est très général, comme formulation, c'est très flou, c'est même un peu subjectif. Qu'est-ce qui est adéquat? Qui est juge de ce qui est adéquat? Donc, je tente une première formulation de compromis ici en parlant de meilleures pratiques. Je suis ouvert aux recommandations du ministre ou des juristes, si ce n'est pas le meilleur libellé.

L'idée est de dire : Si «équivalent», c'est trop rigide pour le ministre, moi, «adéquat», ça m'apparaît un peu flou, un peu large. Est-ce qu'on ne peut pas faire quelque chose comme un compromis puis s'entendre sur une formulation où on exige quand même des organismes publics qui contractent avec des partenaires où la... disons, des partenaires qui évoluent dans des environnements juridiques où c'est raisonnable puis où c'est assez sérieux, le niveau de protection des renseignements personnels? D'où la référence aux meilleures pratiques qui est une référence qu'il y a ailleurs dans la loi.

Puis ce qui est intéressant avec les meilleures pratiques, c'est que ça évolue dans le temps. Donc, ce n'est pas une référence fixe, c'est une référence qui peut évoluer dans le temps. Puis ça veut dire, bien, plus les meilleures pratiques vont s'améliorer, c'est ce qu'on souhaite, qu'avec l'avancement des technologies les cadres juridiques qui protègent les renseignements personnels se modernisent, s'améliorent, se raffinent, bien, l'idée de mon sous-amendement est de dire : Bien, les organismes publics devraient s'attendre à ce que le niveau de protection des renseignements personnels garanti par la partie contractante avec qui ils contractent, bien, ça corresponde aux meilleures pratiques, que ce ne soit pas fait n'importe comment. C'est aussi simple que ça.

J'aimerais savoir ce que le ministre en pense. Puis ma volonté ici, je le dis explicitement, c'est d'essayer de trouver quelque chose comme un juste milieu entre la formulation initiale, que moi, j'appuyais, que le ministre maintenant souhaite modifier, et l'amendement, où je trouve sincèrement, là, qu'on va très... qu'on va peut-être aller au bout du spectre où on est peut-être trop flous.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Oui. Bien, j'entends l'argumentaire du collègue de Gouin puis je veux peut-être expliquer un peu la démarche qui nous amène où est-ce qu'on est aujourd'hui.

Je le dis sans fausse modestie, je pense que le Québec va se doter d'un des régimes les plus contraignants en matière de protection des renseignements personnels au monde. C'est à dessein qu'on le fait. Je ne cache pas au député de Gouin qu'il y a des vents contraires, et pas exclusivement dans la société civile, là, parce que ça fait du Québec, évidemment, un endroit où, comme je le dis, les contraintes vont être importantes.

La situation et la prise de conscience que nous devons faire, c'est que, ce faisant, il y a des avantages pour nos concitoyens, je pense, qui vont bénéficier d'un régime de protection de leurs renseignements personnels qui va être de nature à les sécuriser. Mon appel à la mobilité de la donnée a été entendu par les collègues. Je sens, de la part des collègues, cette conscience-là qu'il faut, en même temps, que ces renseignements-là puissent circuler à l'intérieur de l'appareil public pour qu'on puisse offrir des services de qualité à nos concitoyens. Donc, je pense qu'on est en train de trouver un fil conducteur intéressant entre ces deux obligations-là qui, quelquefois, peuvent sembler s'opposer mais pour lesquelles on trouve un équilibre.

Là où il faut faire le même exercice, c'est de comprendre que nos entreprises gouvernementales, nos sociétés publiques, nos entreprises privées — on le verra plus tard dans le privé, mais il va quand même y avoir un effet miroir, donc c'est pour ça que je me permets d'en parler — n'oeuvrent pas en autarcie. Évidemment, ils font affaire avec le reste de la planète. Et, en ayant le régime que nous allons adopter, je pense que c'est intéressant pour les Québécois, mais, en même temps, ça peut créer une hypothèque importante pour nos entreprises gouvernementales, nos organismes publics et nos entreprises privées. Il faut être conscient de ça. Donc, l'espèce de voie de passage que nous trouvons, c'est effectivement de retirer cette notion-là d'équivalence, d'essayer de l'amener dans une notion contractuelle et que cette notion-là nous amène à une protection adéquate.

J'entends mon collègue, j'entends ce qu'il dit. Deux choses sur l'amendement. Premièrement, si on parle des meilleures pratiques, bien, les meilleures pratiques, c'est ce que nous allons faire. Puis là je pourrai valider avec Me Miville-Deschênes et les juristes, mais ma compréhension de l'amendement, c'est que de dire que ça doit se faire avec un facteur d'équivalence, c'est ce que nous, on fait, ou selon les meilleures pratiques, ça reviendrait au même, dans le sens où nous incarnons... le RGPD incarne les meilleures pratiques, et donc ça nous amène à dire à l'ensemble des États de la planète que nous sommes la référence et qu'ils devraient nous copier, ce qui est souhaitable, je n'ai pas honte de le dire, mais ce qui est loin d'être fait.

Et, en attendant, c'est la raison pour laquelle cet amendement-là est apporté, c'est qu'en attendant que... Puis le député de Gouin disait : Bien, tu sais, probablement que les États vont suivre le mouvement. Je le souhaite, je n'en ai évidemment aucune garantie. On parlait de la Chine tantôt... ne m'apparaît pas être un État qui est sur le bord d'adopter de telles législations, même si ça serait extrêmement souhaitable. On peut entretenir des doutes, mais on peut penser que, dans les grandes démocraties, ce mouvement-là qui s'est orchestré en Europe va faire boule de neige.

Mais, en attendant, il faut trouver une autre formulation pour permettre à nos entreprises d'État, na, na, na, de continuer à oeuvrer avec le reste de la planète qui n'a pas mis ses régimes de protection à l'équivalent de ce que les Européens font ou nous faisons au Québec. Donc, pour ces raisons-là, l'amendement... je pense que d'adopter cet amendement-là nous amène à un statu quo par rapport à l'article tel qu'il est libellé et non pas tel qu'il serait amendé.

Maintenant, sur la notion d'adéquat, ce n'est pas une notion, M. le Président, là, que... On l'a utilisée, cette notion-là, notamment dans le projet de loi n° 14, où effectivement on a amené des notions comme les évaluations relatives aux facteurs de la vie privée et toute cette protection-là des renseignements personnels, où effectivement on va parler des pratiques et des niveaux adéquats de services. Donc, le terme, compte tenu qu'il se retrouve ailleurs dans les lois du Québec, m'apparaissait être, passez-moi le jeu de mots, adéquat.

Est-ce qu'il n'est pas assez fort? Je ne crois pas, mais peut-être, là-dessus, là, je le dis très candidement, s'il y a une autre expression, un autre mot, qui nous amène quand même, là... Puis il ne faut pas oublier que l'objectif, c'est de dire... ou c'est d'éviter de dire aux autres États : Bien, vous devez vous conformer au régime de protection des renseignements personnels du Québec. C'est là où je dis : Bien, non, tu sais, on va adopter la loi. Puis ça, je le dis, là, j'ai une volonté très ferme de faire adopter cette loi-là. Je sais que les collègues sont d'accord. Je peux vous dire qu'il y a énormément de pédagogie à faire un peu partout, parce que cette loi-là fait extrêmement peur, mais moi, je suis convaincu que le Québec doit se doter de ce régime de protection là. J'y crois fortement.

Maintenant, comme législateurs, il faut aussi comprendre les impacts, puis je ne veux pas faire de leçon à mon collègue de Gouin, là, loin de moi cette idée, j'espère qu'il ne l'entend pas comme ça, mais il faut comprendre ces craintes-là, il faut comprendre ces hypothèques-là que ça peut apporter. Puis, dans notre désir d'être... je ne dirais pas vertueux, parce que le terme est peut-être un peu fort, là, mais d'être très conscients de la valeur des renseignements personnels puis de la protection qu'on doit y accorder, dans cette volonté-là que nous avons comme législateurs, il ne faut pas oublier que le reste du monde n'est peut-être pas à la même page que nous autres. Donc, c'est important, je pense, ces amendements-là sont vraiment importants pour plusieurs tranches de notre société.

Alors, est-ce qu'«adéquat» est inadéquat? Moi, je pense que non, mais je ne suis pas fermé à trouver une autre expression, mais c'est sûr que, si on parle des meilleures pratiques, bien là, on parle du RGPD, on parle de ce que l'on fait ici, puis là on revient un peu dans le même moule duquel on essayait de se sortir pour le bénéfice, je le répète, de nos entreprises d'État, de nos organismes publics et de nos entreprises québécoises.

• (15 h 40) •

M. Nadeau-Dubois : Je vais m'exprimer de manière très familière pour que le ministre comprenne bien mes intentions, mais je vois... je perçois la position du ministre, je la comprends. La notion... Est-ce que c'est adéquat? Je ne sais pas, peut-être que les juristes peuvent me répondre, mais comment les organismes publics vont-ils juger de ce qui est adéquat ou pas. Parce que l'objectif, c'est que les organismes publics, une fois que la loi est adoptée, si elle est adoptée, sachent comment se conduire, sachent quelles décisions prendre, quelles décisions ne pas prendre. Là, on leur dit : Faites une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée puis, en fonction des résultats de l'évaluation, déterminez si c'est adéquat. Ça m'apparaît très général, très flou. Je ne sais pas ce que les juristes peuvent me dire. Comment cette notion d'adéquation là va être interprétée par les organismes publics?

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, s'il vous plaît.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui. Bien, c'est sûr que l'adéquation va être évaluée en fonction des critères, là, dont on a parlé précédemment, là, donc la sensibilité, la finalité d'utilisation, les mesures de protection notamment contractuelles puis les régimes juridiques. Donc, c'est sur la base de ces critères-là qu'on va déterminer... que l'entreprise ou l'organisme public va déterminer s'il juge que la protection est adéquate.

La différence avec l'équivalence, c'est que c'est une protection qui est proportionnée, là. Quand on parle d'adéquat, c'est une protection qui va être proportionnée vraiment à l'objectif, là, qui va être adaptée. Donc, on essaie, évidemment, de s'écarter de l'équivalence qui exigeait un peu une égalité de la protection avec des lois qui, comme le ministre l'a dit, là, qui est un peu différente. Donc, c'est vraiment en se basant sur les critères, là, de l'article 70.1.

C'est aussi un terme qui est utilisé en Europe, là. Bon, en toile de fond, quand l'Europe juge si un pays a une protection puis si un pays... si des renseignements personnels peuvent être communiqués dans un autre État, un autre pays, bien, il regarde l'adéquation de la protection. Donc, c'est également, là, un terme qui est utilisé en Europe pour juger de la protection, mais c'est vraiment en s'appuyant sur les critères de 70.1 qu'ils vont pouvoir déterminer, là, si c'est proportionné, la protection, compte tenu de la sensibilité et des autres critères qui y sont énumérés.

M. Nadeau-Dubois : Ce qui m'agace dans la notion d'adéquation, c'est... elle ne me semble pas, et je suis une personne humble qui va accepter d'être corrigée, si c'est nécessaire, elle ne me semble pas se référer à un... Il ne me semble pas y avoir de référent objectif à ce qui est adéquat ou pas. L'équivalence, puis, dans l'explication de Me Miville-Deschênes, c'était très clair, ça veut dire égalité, mais égalité avec un référent objectif, la loi québécoise. Meilleures pratiques, il y a un référent objectif. Être adéquat ou pas, j'ai l'impression qu'il n'y a pas de référent objectif à cette notion-là pour la fixer, la notion d'adéquat, savoir c'est adéquat par rapport à quoi. Si ce n'est pas par rapport à la loi... bien, parce qu'on pourrait fixer un référent objectif sans que ce soit l'égalité, tu sais.

Parce que moi, je l'entends bien, là, le ministre ne veut pas aller là, c'est correct, mais... Bien, c'est correct, pas je suis d'accord, mais je l'entends. Il me semble, c'est ça, l'enjeu, ici, il n'y a pas de référent objectif. Est-ce que je me trompe ou c'est purement relatif, puis on ne sait pas... On ne sait pas c'est relatif à quoi, adéquat par rapport à quoi.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, oui.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, c'est certain que, si on compare avec l'équivalence, là, le référent est peut-être moins clair, mais c'est adéquat par rapport au... comment dire, à l'évaluation aux facteurs relatifs à la vie privée. Tu sais, l'évaluation va prendre en compte des critères, puis, suite à ces critères-là, on va dire : O.K., est-ce que cette protection-là est adéquate par rapport à la sensibilité des renseignements? Ça fait que, là, on considère que les renseignements sont plus sensibles parce qu'on juge que c'est une protection adéquate, mais est-ce que le comparatif est moins clair que la loi québécoise? C'est sûr que ça l'est un peu moins, comme comparatif, là, quand on parle d'équivalence, là.

M. Nadeau-Dubois : C'est que j'ai comme l'impression que, là, on a un faux dilemme entre l'égalité... puis ça, le référent objectif est clair puis il est très simple, là, c'est le même niveau de protection, pareil, référent objectif clair, égalité claire. Quand on est sur «adéquat», là, il y a comme une indétermination, là, c'est très indéterminé. Ça m'apparaît très indéterminé, c'est adéquat, c'est...

Puis là, tu sais, dans la réponse, on me dit : Ah! bien, par rapport aux différents... à la liste de principes qui est à l'alinéa plus haut, mais, encore une fois, le niveau de sensibilité par rapport à quelle grille? Par rapport à quelle échelle? La finalité de son utilisation, il y a plusieurs finalités possibles. Lesquelles sont adéquates? Lesquelles sont inadéquates? Je trouve que c'est ça, je trouve que c'est très, très subjectif, comme évaluation, alors que l'idée ici, c'est de donner un barème clair aux organismes publics pour leur dire : Voici les standards auxquels on s'attend de vous.

Puis là, moi, le ministre me dit : Je ne veux pas ériger en standard notre propre cadre juridique parce que c'est un standard trop exigeant, trop rigide, puis on va être tellement en avant de la parade qu'on va dire à toute la parade en arrière : Rattrapez-nous, sinon, on ne peut pas contracter avec vous autres. Puis là le ministre me dit : Bien là, c'est un peu raide, mettons. Je ne suis pas d'accord, mais j'entends l'argument, je le comprends puis j'essaie de l'intégrer dans mon raisonnement.

Mais il me semble qu'il y a une marge entre ça et une notion d'adéquat, où là il n'y a plus... bien, il y a comme un standard mais qui flotte. Est-ce qu'on ne pourrait pas venir l'accrocher à un référent objectif? Puis ce n'est pas obligé d'être la loi québécoise, je comprends que le ministre ne veut pas aller là. Il n'y aurait pas un autre référent objectif auquel on pourrait venir l'accrocher pour qu'il y ait un standard clair pour les organismes publics?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Oui, si je peux me permettre, M. le Président, je comprends ce que le député de Gouin dit, puis c'est vrai, c'est sûr que le terme «adéquat» versus «équivalent» laisse une plus grande marge de manoeuvre à l'interprétation.

Ceci étant dit, cette interprétation-là, elle ne se fait pas sans critère, par contre. Puis c'est un peu ce que Me Miville-Deschênes disait, c'est qu'on a quand même des critères qui sont la sensibilité, la finalité de l'utilisation, les mesures de protection, y compris celles prises contractuellement, le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement est communiqué selon les principes de protection des renseignements personnels. Donc, on met une série de critères sur lesquels on va juger si c'est adéquat ou non.

Alors, oui, est-ce que la notion d'adéquation versus la notion d'équivalence laisse plus de marge de manoeuvre à l'interprétation? La réponse à ça est certainement oui. Est-ce que le critère d'adéquation est totalement objectif? Puis je sais que ce n'est pas ça que le député de Gouin a dit, là, mais il y a quand même ces critères-là qui permettent aux signataires du contrat de dire : Bien, écoute, là, compte tenu de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée que j'ai faite sur la base des critères minimums qui me sont fournis par la loi, sur la base de l'entente contractuelle que nous avons rédigée, est-ce que cela me semble adéquat? Je pense qu'on n'est quand même pas... Il y a des ancrages, quand même, à la notion d'adéquation, là.

• (15 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Le ministre a raison de dire que ce n'est pas adéquat par rapport aux critères du jour, là. C'est adéquat, puis le ministre a raison de le dire, là, par rapport aux critères qui viennent d'être listés, là. Puis ça, j'en conviens, ce n'est pas complètement flottant dans l'hyperespace, là, je... il a raison de le souligner puis de me rappeler à l'ordre là-dessus.

Mais il m'apparaît néanmoins que, si on veut garder le niveau d'ambition qui caractérise le projet de loi, là, tu sais, on essaie d'envoyer le signal que le Québec va être un champion en matière de protection des renseignements personnels, va être à l'avant-garde, je... Si ce n'est pas l'égalité à la loi québécoise, est-ce qu'il n'y a pas un autre référent objectif qui pourrait être utilisé ici? Si ce n'est pas...

Puis là j'ai fait une première proposition, celle des meilleures pratiques. Le ministre me dit : Oui, mais là c'est un peu du pareil au même. On verra si le projet de loi, au moment de son adoption, sera conforme aux meilleures pratiques. C'est ce que je souhaite, mais le ministre me dit : C'est un peu la même chose. O.K., je l'entends. N'y a-t-il pas d'autres avenues?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, honnêtement, M. le Président, pendant qu'on se parle, j'en cherche, j'essaie de voir quelque chose. Les quelques pistes de solution qui me sont venues à l'esprit sont moindres que ce que le terme de l'adéquation nous offre, qui nous amène quand même... puis après avoir consulté les juristes, qui nous amène quand même une certaine obligation, une certaine force, une certaine contrainte, là, qui est peut-être un peu plus grande que ce que le député de Gouin semble croire.

J'ai essayé différentes hypothèses, mais l'adéquation reste encore la meilleure, M. le Président, là. Donc, ce n'est pas faute d'essayer de voir s'il n'y a pas effectivement une voie de passage, mais l'adéquation est quand même... Puis de l'avis même des juristes... puis je vais laisser Me Miville-Deschênes compléter la réponse, mais de l'avis des juristes, l'adéquation, dans la mesure où ce n'est pas l'équivalence, là, on s'entend, l'adéquation demeure un argument qui est quand même assez fort, là. Compte tenu des critères qu'on a élaborés, ça prend une adéquation avec les critères qu'on élabore, là. Donc, on n'est pas dans l'équivalence, là, mais on n'est pas si loin que ça, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Est-ce que le ministre me permettrait une petite suspension de quelques instants?

Le Président (M. Bachand) : On est d'accord?

Suspension pour quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 53)

(Reprise à 15 h 58)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Est-ce que j'interprète bien les intentions du ministre, si je comprends qu'il n'a pas l'intention de voter en faveur de mon sous-amendement tel que libellé?

M. Caire : À mon grand regret, le député de Gouin interprète bien mes intentions.

M. Nadeau-Dubois : On vient de m'expliquer, il y a quelques instants, qu'il y a des principes généralement reconnus en matière de protection des renseignements personnels consignés dans des accords de libre-échange. L'OCDE a fait des recommandations en ce sens-là. Puisque ce que je cherche à faire avec mon amendement, c'est de trouver un référent objectif, est-ce qu'il n'y a pas là quelque chose à explorer? Est-ce qu'on ne pourrait pas qualifier l'adéquation dont il est question ici en utilisant ces principes-là?

• (16 heures) •

M. Caire : Bien, si je ne m'abuse, M. le Président, c'est ce que nous faisons avec le sous-amendement qui a amendé l'amendement, donc, qui a remplacé le paragraphe b. Effectivement, l'amendement a été fait, là, je n'ai plus le libellé en tête, vous m'excuserez, mais justement sur les principes de protection des renseignements personnels.

Donc, ce que le sous-amendement du député de Gouin a pour effet, si nous adoptons l'amendement tel qu'amendé, c'est de faire en sorte que les évaluations de facteurs relatifs à la vie privée tiendront compte de ces principes-là et donc seront effectivement basées sur ces principes-là. Et donc les résultats de cette évaluation-là vont tenir compte des principes, et donc l'adéquation qui va se faire va se faire sur la base de cette évaluation-là, évaluation qui va être faite sur la base des principes dont le député de Gouin parle. Donc, c'est ce que nous faisons avec le sous-amendement qu'on a accepté de la part du député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Encore une fois, ça m'apparaît être deux choses différentes, dans la mesure où, dans le libellé initial de l'article proposé par le projet de loi, il y avait double référence, hein? Il y avait d'abord, au paragraphe 4° du premier alinéa, une référence au fait qu'on devait considérer, quand on fait l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée... On disait au paragraphe 4° avant... En fait, on ne l'a pas encore amendé, mais, si on l'amende, on disait, avant, qu'on devait prendre en considération le degré d'équivalence par rapport aux principes québécois, puis on venait réinscrire une deuxième fois au deuxième alinéa : «La communication peut s'effectuer si le renseignement va bénéficier d'une protection équivalant à celle de la loi.»

Donc, on l'avait deux fois, la référence à l'équivalence. Et, dans ma lecture du libellé initial, ce n'était pas redondant que de le dire deux fois. C'est parce qu'on le dit à deux moments différents de l'article. On dit d'abord : Il faut que, dans la foulée de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, on s'assure que le régime juridique soit équivalent ou, en tout cas... Non, en fait, ce n'était pas ça, c'était qu'on considère le degré d'équivalence avec le régime québécois. On le disait une première fois. Moi, j'aimais bien ça, mais le ministre a amendé son projet de loi. Et on le disait une seconde fois en disant globalement : prise globalement, l'évaluation doit faire la démonstration que le renseignement va être protégé, puis je vais le mettre dans mes mots, comme s'il était au Québec. Dans le fond, c'est un peu ça.

Bon, le ministre est venu amoindrir dans le premier alinéa en disant : Ce n'est pas... Ce qu'on veut venir vérifier, ce n'est pas le degré d'équivalence, c'est, suite à l'adoption de mon sous-amendement, le niveau de conformité avec les principes de protection des renseignements personnels. Est-ce qu'on... puisque c'est ça, notre nouvelle barre, là, pourquoi ne pas venir la remettre ici à nouveau? Puis là je ne fais pas juste un argument de copier-coller, là, je fais un argument de dire : Si le critère avec lequel le ministre est à l'aise en termes d'équilibre entre la rigidité puis la mobilité, c'est cette référence plus générale au principe de protection des renseignements personnels, il me semble que ce n'est pas farfelu de ma part de dire : Bien là, on pourrait le faire réapparaître ici. Puis c'est peut-être ça qui pourrait qualifier l'adéquation. On pourrait dire, par exemple : adéquat... Bien, adéquate puisque c'est l'évaluation qui doit démontrer que le renseignement bénéficierait d'une protection adéquate. Pourquoi ne pas venir qualifier ici en disant : adéquate en regard des principes de protection des renseignements personnels?

C'est une perche que je lance, et le vocabulaire, comme d'habitude, peut être remanié, mais il me semble que, puisqu'on avait deux fois la notion d'équivalence, ce n'est pas farfelu de ma part de vouloir venir mettre deux fois cette idée de principe de protection des renseignements personnels.

M. Caire : Sauf que, dans ce cas-ci, l'impact est différent, dans le sens où je fais une évaluation sur l'équivalence et je demande carrément qu'avant de communiquer il y ait respect de ce principe-là de l'équivalence. Donc, effectivement, il y avait un renforcement, mais il n'y avait pas de contradiction.

Là, ce qu'on vient faire avec le sous-amendement du député de Gouin, c'est de dire que le paragraphe 4°, donc le quatrième critère à considérer dans l'évaluation relative aux facteurs à la vie privée, devra tenir compte du régime juridique applicable dans l'État où le renseignement est communiqué, donc s'assurer que cette juridiction-là n'empêche pas le contrat d'être exécuté, notamment, selon les principes de protection des renseignements personnels.

Donc, quand on va faire l'évaluation, on va évaluer l'état de la législation dans l'État où le contrat se signe, par rapport à ces principes-là qui sont ceux qui ont été nommés par Me Miville-Deschênes. Et à partir de là, de cette évaluation-là, on va en arriver à une conclusion. Or, l'adéquation se fait... Donc, quand on dit : communiquer peut s'effectuer, si l'évaluation démontre que les renseignements bénéficient d'une protection adéquate, donc, ça veut dire que ce n'est pas une obligation de respecter intégralement ces principes-là, mais c'est de tenir compte de ces principes-là pour savoir si on pense que les renseignements vont avoir une protection qui est adéquate. Dépendamment de... Puis là je veux être sûr que j'ai bien compris ce que le député de Gouin disait, mais si je viens mettre que «la communication peut s'effectuer, si l'évaluation démontre que les renseignements bénéficient d'une protection adéquate en conformité avec les principes de protection des renseignements personnels», bien, je vais le laisser...

M. Nadeau-Dubois : On va parler sur...

M. Caire : Là, à ce moment-là, ce qu'on... puis ce qu'il faut... Puis ce que je ne voudrais pas, puis je ne suis pas hostile à modifier le libellé, là, ceci étant, ce que je ne voudrais pas, c'est qu'il y ait une obligation de dire : Il y a 10 principes, vous devez les respecter intégralement. Parce qu'on veut cette souplesse-là. Puis j'ai beaucoup aimé l'exemple que le député de Gouin a utilisé tout à l'heure, en disant, et je pense que c'est vrai : Le Québec va être largement en avant de la parade en matière de protection des renseignements personnels, côte à côte avec certains États européens qui auront appliqué le RGPD. Et plusieurs autres États avec qui on fait des affaires vont être en arrière, certains plus en arrière que d'autres. Et donc c'est là où il faut se donner une marge de manoeuvre pour nos entreprises d'État, pour nos organismes publics et pour nos entreprises privées, parce que j'aimais beaucoup l'expression qu'il a utilisée, il disait : Bien, courez jusqu'à nous rattraper ou on ne fera pas affaire avec vous autres. Je ne suis pas sûr que c'est les autres États qui en souffriraient le plus, comme l'État québécois, dans toutes ses composantes.

Donc, c'est pour ça que... Puis je ne suis pas hostile, là. Est-ce qu'on peut reprendre cette notion-là dans le deuxième alinéa? Probablement, potentiellement, ça dépend du libellé, ça dépend de : Est-ce qu'il énonce un principe souhaitable ou est-ce qu'il en fait une obligation juridique? C'est là-dessus, là, qu'on aura des discussions.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, par respect pour les procédures qui nous gouvernent et pour éviter de parler de choses qui n'existent pas, je vais arrêter mes commentaires ici pour qu'on puisse voter sur le sous-amendement que j'ai déposé. Et je déposerai un sous-amendement en bonne et due forme pour qu'on en parle en bonne et due forme, le ministre et moi.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Caire : Suspension?

Le Président (M. Bachand) : Non. Le député de Gouin n'a pas d'autre intervention sur son sous-amendement. Est-ce que vous avez d'autres interventions?

M. Caire : Non, non, non. O.K.

Le Président (M. Bachand) : Donc, pour la mise aux voix... Alors, on va procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, c'est rejeté. Merci. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Oui, M. le Président, je vais... Maintenant que la question des meilleures pratiques est derrière nous, on va aborder la question qu'on était déjà en train déjà d'aborder. Je vais déposer un autre sous-amendement, mais je vais demander une petite suspension, le temps qu'on vous le fasse parvenir.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Merci beaucoup. On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 09)

(Reprise à 16 h 13)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Donc, je dépose un nouveau sous-amendement : L'amendement à l'article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 27 du projet de loi, est sous-amendé par l'ajout, après «adéquate» dans le paragraphe 2°, de «en regard des principes de protection des renseignements personnels».

Donc, l'idée, ici, n'est pas... Bien, l'idée, ici, est de venir qualifier de quelle adéquation on parle, adéquation en regard des principes de protection des renseignements personnels. Ce que les collaborateurs du ministre m'ont dit plus tôt, c'est que ces principes-là sont objectifs, reconnus. Et donc j'essaie ici de venir qualifier l'adéquation dont il est question pour que ce soit bien clair, de quoi on parle.

C'est, à mon avis... Moi, je le dis, moi, je trouve que le ministre avait d'abord fait une rédaction magnifique. Là, il a évolué dans un sens qui ne nous plaît pas. Bon, je le constate. J'ai proposé un premier sous-amendement pour parler des meilleures pratiques. Il a battu le sous-amendement en présentant l'argument que c'était, au fond, la même chose. Donc là, je fais ici une nouvelle tentative en tentant de trouver le point d'équilibre entre lui et moi sur cette question-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Caire : On s'approche. On n'y est pas encore, mais on s'approche, parce qu'«en regard des principes», l'interprétation qui pourrait en être faite, c'est que les principes que nous avons énoncés devraient être intégralement respectés, ce qui nous ramène à la notion des meilleures pratiques, ce qui nous... Donc, pour être... Mais je pense qu'on n'est pas loin. J'aurais préféré, M. le Président, une expression comme «considérant les principes de protection des renseignements personnels». J'aurais probablement eu plus tendance à être d'accord, parce qu'«en regard»... Ce que l'on ne souhaite pas, c'est tout ce qui nous ramène à l'état où on se doit de... Les meilleures pratiques, les plus hauts standards, tout ce qui est une obligation de respecter ça, comme je le dis, M. le Président, ce n'est pas que je n'y crois pas, mais il faut avoir un petit côté pragmatique.

On sait qu'il y a... L'immense majorité des États dans le monde ne sont pas encore à cette étape-là. Ça cause une hypothèque qui est importante, qu'on doit considérer. Comme je disais tout à l'heure, c'est l'espèce de fil conducteur qu'on se doit d'avoir. Je comprends ce que le député de Gouin dit sur le libellé initial puis je vous avoue très sincèrement que j'aurais souhaité qu'il y ait un état du droit à travers le monde qui nous permette de le rédiger comme ça sans que ça cause un aussi important préjudice à notre propre société. Quelquefois, en voulant faire le bien, on fait le contraire.

Et donc, pour ces raisons-là, dans le libellé actuel, je ne suis pas confortable avec la notion de «en regard», qui nous amène à un respect intégral ou, en tout cas, qui permet une interprétation qui se voudrait un respect intégral des principes qui ont été énoncés. J'aurais peut-être souhaité quelque chose d'un peu plus souple, mais qui indique quand même la volonté du législateur de considérer les principes de protection des renseignements personnels dans l'évaluation ou dans ce qui est adéquat ou non. Je ne sais pas, je discute avec le député de Gouin, là, je ne sais pas jusqu'à quel point il a cette ouverture-là, peut-être, à aller vers un libellé comme celui-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Je vais demander le consentement pour qu'on suspende quelques instants. Je vais fournir une nouvelle version de mon sous-amendement.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Alors, on va suspendre quelques instants. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 18)

(Reprise à 16 h 28)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Donc, je dépose...

Le Président (M. Bachand) : Vous devez... On ne peut pas déposer un autre sous-amendement parce qu'il faut retirer votre premier sous-amendement.

M. Nadeau-Dubois : Oui, oui, oui. Désolé. Donc, je retire. Désolé.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Nadeau-Dubois : Je retire mon sous-amendement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Et je le remplace par un nouveau sous-amendement qui se lirait comme suit : L'amendement à l'article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 27 du projet de loi, est sous-amendé par l'ajout, après «adéquate» dans le paragraphe 2°, de «, notamment au regard des principes de protection des renseignements personnels généralement reconnus».

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Bien, «for the record», comme ils disent en anglais, l'objectif, ici, c'est de venir qualifier «adéquat» au regard de quoi, et je fais allusion aux principes de renseignements personnels qui sont généralement reconnus dans les législations à travers le monde, dans les traités internationaux. Ça m'apparaît venir préciser les directives que doivent suivre les organismes publics. Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

• (16 h 30) •

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Merci. Nous sommes maintenant de retour à l'amendement à l'article 27 tel qu'amendé. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : J'avais... puis on pourra me dire, M. le Président, si j'ai manqué de quoi. C'est parce que, si je vous ai manqués, ça, je le prends pour acquis, mais, si j'ai manqué de quoi, vous pourrez m'en informer.

«Les mesures de protection, y compris celles qui sont contractuelles», si on n'a pas abordé de façon plus spécifique, puis on me dira s'il y a de la redite, ce que je comprends ici, c'est qu'on fait écho... Entre autres, lors des auditions, on avait reçu, entre autres, le Conseil du patronat, dans un contexte privé mais quand même... qui faisait en sorte qu'on élargissait la possibilité de se déclarer satisfait si on envoie des renseignements à l'extérieur du Québec, dans la mesure où on disait : Oui, mais, dans le doute, il y aura une clause, regardez, on a prévu dans le contrat qu'ils vont mettre la ceinture, les bretelles, puis on pourrait même, à ce moment-là, mettre des clauses pénales.

Clauses pénales, là, ça veut dire : Si vous ne faites pas ça, on a déjà déterminé les dommages, ça va être 100 000 $, ça va être 1 million, puis là on pourrait même aller dans des zones où on va aller avec les amendements sur les pénalités, là. Des clauses pénales en droit civil, ça existe, ça s'appelle de même, des clauses pénales.

Donc, j'aimerais juste avoir la conception du ministre quant à ça, ce qui est derrière ça, et s'il trouve raisonnable qu'on puisse faire référence à des droits et obligations de la partie qui reçoit l'information — tu vas marcher de même, de même puis tu vas t'assurer ça, ça, ça — et que l'on puisse y joindre des clauses pénales. Des clauses pénales, ça veut dire que, si tu as commis une faute, je n'ai pas à aller courir devant un juge, tu me dois cet argent-là, la clause pénale est déjà exécutoire.

M. Caire : Bien, tout à fait, M. le Président. D'ailleurs, on le fait déjà. Le gouvernement du Québec le fait déjà dans les ententes contractuelles, de prévoir des pénalités en cas de non-respect d'une disposition contractuelle. Donc, tout à fait, et l'idée, en fait, c'est, plutôt que d'exiger une équivalence juridique dans l'État où le contrat se signe, de dire : Bien, on peut le faire par contrat. Donc, ça permet au Québec de faire des affaires avec n'importe quel État dans le monde et de s'assurer quand même d'avoir une protection des renseignements personnels qui est adéquate. Et effectivement les contrats pourraient prévoir des sanctions en cas de non-respect de l'une ou plusieurs des clauses du contrat.

M. Tanguay : Parce que ce qui est intéressant avec les clauses pénales, M. le Président, vous n'avez pas besoin...

Le Président (M. Bachand) : Excusez-moi. M. le député de Gouin doit quitter pour aller voter. Donc, nous allons suspendre quelques instants. Merci.

M. Caire : Bien, M. le Président, compte tenu du fait que c'est une discussion sur un sujet, peut-être qu'on pourrait...

Le Président (M. Bachand) : Non, c'est l'entente du 9 mars...

M. Caire : Arrêtez donc, vous.

Le Président (M. Bachand) : ...eh oui, qu'on doit respecter.

Alors, on suspend quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 33)

(Reprise à 16 h 40)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. M. le Président, on s'est permis d'avoir une conversation hors micro, le ministre et moi, sur les obligations que devront rencontrer les organismes publics. On prend le cas appliqué ici, on vient d'en parler, le troisième paragraphe du premier alinéa : «les mesures de protection — l'amendement — y compris celles qui sont contractuelles, dont le renseignement bénéficierait».

Autrement dit, on vient avaliser une possibilité de le faire par contrat, de dire : Bien, le sous-traitant qui est hors l'État québécois, qui est hors du territoire québécois, devra... dans le contrat, il faut le mettre, devra faire... prendre tous les moyens selon les meilleures pratiques en vigueur, devra s'assurer qu'une équipe très limitée, ci-après définie, ait accès à la donnée... Ça dirait tout comment il va gérer, marcher, et utiliser, et stocker, et ainsi de suite, la donnée, et même le cycle de vie, pour lui, de la donnée qui lui est confiée. Et, avec des clauses pénales, si, des fois, il y a un écart de conduite, il y a un problème, il y a une fuite, puis on démontre qu'il n'a pas respecté scrupuleusement le contrat, bien là, il n'y a pas de débat, vous devez payer la clause pénale, qui sont des dommages prédéterminés entre les parties. Il n'y aura pas de débat sur le dommage réel. Ça, c'est intéressant.

Maintenant, on en était aussi, pour les organismes publics, à avoir une conversation sur comment la Commission d'accès à l'information pourrait être proactive. Elle pourrait très certainement rendre publiques sur son site Internet, de façon toute transparente, des clauses types contractuelles, devrait évidemment rendre disponibles, au premier titre, toutes les obligations légales, au niveau des lois, au niveau des règlements, qui sont imposées aux organismes publics.

Maintenant, la discussion était que... Est-ce que la Commission d'accès à l'information devrait avoir une fonction de conseil assimilable à un conseil juridique? Là, c'est deux choses l'une, soit qu'elle est uniquement d'information pour les organismes publics... Autrement dit, dans votre cas, sachez que l'article 27 existe, vous devez faire une analyse, vous devez vous assurer que, tel article qui prévoit tel impératif, vous les rencontriez tous, puis prenez vos décisions. On sait que, dans le cas des municipalités, en vertu de l'article 172, puis d'autres, ils peuvent faire en sorte d'aller chercher des conseils de d'autres municipalités, de d'autres MRC, aller ailleurs.

Maintenant, est-ce que l'on veut que, pour les organismes publics, la Commission d'accès à l'information ait une fonction de conseil juridique? Évidemment, là, il y a des drapeaux jaunes. On pourra en faire le débat lorsqu'on sera rendus là, mais on est toujours mieux, je pense...

Il y a deux choses, là, qui se rencontrent, là, c'est la fonction de la Commission d'accès à l'information, qui est là aussi pour sanctionner des comportements puis qui ne doit pas être prise juge et partie en ayant donné un mauvais conseil ou en ayant... se faire dire : Bien, ce n'est pas de même, que tu as mal expliqué le conseil, je l'ai mal compris. Puis toi, la CAI, c'est un peu toi. Bien, voyons donc, ce n'est pas moi. Puis que c'est elle qui dit, à la fin de la journée : Je te condamne, puis tu dois payer telle amende. Il y aurait peut-être un double chapeau, qui pourrait être un peu difficilement réconciliable avec sa fonction de surveillance et sanction. Mais, d'un autre côté, pour les organismes puis pour l'objectif de la loi, on veut, en amont... on ne veut pas pogner pour le plaisir de pogner les organismes publics, mais on veut qu'en amont les organismes sachent où est le nord puis se gouvernent en conséquence.

Alors, on aura le débat là-dessus, mais je trouvais ça intéressant que, contractuellement, on puisse, à tout le moins par des directives... Ça, ça va exister, des directives de la Commission d'accès à l'information. Elle va en émettre, des clauses types de contrat, des : Avez-vous pensé à ça? Tu sais, avez-vous pensé à ça?, tati tata, des pense-bêtes. C'est l'objectif qu'on veut que tous les organismes honorent, qui est de préserver, dans tous les cycles de la vie, des renseignements personnels, la protection de la vie privée.

Je ne sais pas si le ministre veut réagir à ça. Sinon, sur l'amendement comme tel, M. le Président, moi, l'amendement me va.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre? D'autres interventions sur l'amendement tel qu'amendé? Sinon, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Abstention.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement, tel qu'amendé, est adopté. Merci. Donc, on revient à l'article 27, plus précisément au nouvel article 70.2 tel qu'amendé. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Juste pour me remettre dans le bain de la procédure, alors là, l'amendement touchait 70.1. On a voté l'amendement, donc là on reviendrait à 70.2?

Le Président (M. Bachand) : S'il y a des interventions. Puis, s'il n'y a pas d'intervention, on pourra procéder à 70.2, par exemple.

M. Tanguay : O.K. À 70.2, donc, il n'y avait pas d'amendement, hein?

M. Caire : J'ai un amendement à 70.2.

M. Tanguay : O.K. Et il était à quel effet? L'avez-vous présenté? Oui?

M. Caire : Pas encore, puisqu'on est encore à 70.1.

M. Tanguay : Ah! O.K. Juste 70.1, je lance ça dans l'univers, j'avais parlé, avant la pause de 13 heures, de la possibilité de déposer un amendement qui se voudrait un ajout de principe général à ce qu'on fait là. Ça pourrait prendre la forme... puis je lance ça, je ne le dépose pas formellement, mais, dans le contexte de 70.1, je pense que ça pourrait être intéressant, une sorte d'énoncé de principe, c'est l'idée, là, où il serait dit à quelque part... un article indépendant, dans la loi, à quelque part, qui dirait le message suivant aux organismes publics : En toute circonstance, un organisme public doit s'assurer de remplir son mandat tout en protégeant les renseignements personnels, la vie privée des personnes, et ce, en respect de l'intérêt public. Alors, c'est l'idée. Je lance dans l'univers. Je vais peut-être revenir.

Je ne sais pas s'il y a des commentaires à chaud, parce que ça s'inscrit dans ce contexte-là aussi, cette réflexion-là que ça soit dit dans la loi, parce que la loi, là, je ne veux pas juste que ça soit une loi. Je ne pense pas qu'on veuille, autour de la table, M. le Président, que ça soit juste une loi où on passe les plats, que ça soit mécanique, ah, papi, papa, mais que, de façon substantive, qu'il soit dit aux organismes, en plus de ce qu'on a dit aux hauts dirigeants à l'article 8 : En toute circonstance, vous devez vous assurer de remplir votre mandat envers le citoyen, de protéger les renseignements personnels, la vie privée des personnes et d'agir dans l'intérêt collectif ou l'intérêt public.

Autrement dit, à un moment donné, un organisme, qui pourrait, par ailleurs, remplir toutes les cases puis les impératifs de la loi puis qui enverrait des données à l'extérieur de son organisme à une entreprise privée, pourrait peut-être se poser la question : Mais, dans le fond, c'est-tu plus pour l'intérêt privé ou l'intérêt collectif? C'est plus pour l'intérêt privé? Drapeau rouge, on ne le fait pas. En ce sens-là, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Alors, comme vous voyez, on y va quand même, là... c'est une façon quand même assez libérale, pour prendre le terme global. Alors donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, on passerait à 70...

M. Tanguay : Tu as-tu des commentaires? Je ne sais pas s'il a des commentaires, le ministre, là-dessus.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, oui.

M. Caire : À brûle-pourpoint, je veux dire, moi, si le député de LaFontaine veut peut-être qu'on ait cette discussion-là, faire parvenir le texte dont il... Ça va nous permettre d'abord de consulter les juristes... parce que vous comprendrez, M. le Président, que c'est un geste législatif important. Donc, on veut mesurer l'impact, l'ampleur de ça, qu'est-ce que ça a comme conséquences.

Donc, si le député de LaFontaine avait la gentillesse de nous partager sa proposition de libellé, compte tenu qu'il sera toujours temps d'amender quelques sections du projet de loi, je le ferais... je le soumettrais aux juristes, j'irais chercher, peut-être, l'opinion des légistes du gouvernement. Puis, après ça, je pourrais partager cette opinion-là avec les collègues pour voir si on va de l'avant ou non avec... Mais je ne suis pas hostile à l'idée, là, d'une déclaration de principes, là. Juste voir c'est quoi, l'impact, puis ça a quoi comme conséquences.

M. Tanguay : Parfait. Merci. On fera faire ça.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, intervention, M. le ministre, sur l'article 27, le 70?

M. Caire : Bien, sur l'article 70.1, moi, ça me va, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Donc, on peut continuer sur 70.2.

M. Caire : Alors : «70.2. Le ministre publie à la Gazette officielle du Québec une liste d'États dont le régime juridique encadrant les renseignements personnels équivaut aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec.»

M. le Président, j'ai un amendement, qui est assez simple et qui se lit comme suit : Supprimer l'article 70.2 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels proposé par l'article 27 du projet de loi.

Alors, M. le Président, les amendements à l'article 70.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels proposés par l'article 27 du projet de loi, notamment, retirent la notion d'équivalence lors d'une communication de renseignements personnels à l'extérieur du Québec. L'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée devra démontrer que les renseignements bénéficient d'une protection adéquate plutôt qu'une protection équivalente à cette... celle prévue, pardon, à la Loi sur l'accès.

Ainsi, il n'est plus nécessaire que le ministre publie à la Gazette officielle du Québec la liste d'États dont les régimes juridiques encadrant les renseignements personnels équivaut aux principes de protection des renseignements personnels applicables au Québec.

Donc, ça vient dire, dans le fond, que les amendements enlèvent la pertinence de 70.2.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. C'est vrai que la notion d'équivalence a été retirée du projet de loi, malheureusement, mais c'est ce qui s'est produit. Et donc je comprends que l'utilité de 70.2 est amoindrie.

Peut-être, d'abord, une question pour le ministre. Pourquoi le supprimer carrément? Est-ce qu'il n'y a pas quand même quelque chose d'intéressant à ce qu'on suive l'évolution des différents cadres juridiques en matière de protection des renseignements personnels pour que les organismes publics, qui vont quand même devoir examiner les régimes juridiques en question en vertu du quatrième paragraphe du premier alinéa de 70.1, puissent s'y référer? Pourquoi choisit-il de carrément supprimer 70.2 plutôt que, par exemple, de l'amender?

M. Caire : Bien, en fait, c'est parce qu'il n'y en a plus, de nécessité. On ne recherche plus un facteur d'équivalence. Donc, on va demander aux équipes de faire des évaluations d'équivalence dans le monde, de faire une liste des États qui ont une équivalence. C'est un travail qui est quand même colossal, qui va nécessiter beaucoup en termes de ressources humaines, en termes de ressources financières, puis qui perd son utilité du fait que, cette notion d'équivalence là, on ne l'exige plus.

Avec les amendements que le collègue a proposés, on a ramené ça aux facteurs d'équivalence, bonifiés, mais aux facteurs d'équivalence. Et donc, à ce moment-là, comme il n'y a plus cette nécessité-là d'égalité, bien, il n'y a plus cette nécessité-là de faire ce travail de collecte d'information et d'analyse qui est fastidieux, M. le Président. C'est pour cette raison-là, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Je comprends la réponse du ministre.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Pas d'autres interventions? M. le ministre, je vous reviens parce que vous aviez parlé de la suite des choses sur l'article 27 ce matin.

M. Caire : Absolument, M. le Président. Je vous demanderais une courte suspension.

M. Tanguay : ...voté l'amendement qui abrogeait 70.2?

Le Président (M. Bachand) : Non, pas encore. Excusez. Bien, c'est parce que je veux juste voir où est-ce que le ministre...

M. Tanguay : Ah! O.K. C'est bon, excusez-moi.

M. Caire : Bien, mon collègue a raison, on va voter l'amendement, puis après ça, M. le Président, avec votre consentement, je demanderais une courte suspension. Je souhaite donner quelques explications aux parlementaires et ensuite revenir avec les explications publiques.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Alors, on va procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Contre.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : M. le Président, si on pouvait... avec une courte suspension, j'aimerais m'entretenir avec mes collègues.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Alors, on va suspendre quelques instants. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 54)

(Reprise à 17 h 05)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Merci, M. le Président. Donc, suite aux discussions que j'ai eues avec les collègues, j'aimerais suspendre l'étude des articles 70.3 à 70.7, M. le Président, et, de ce fait, suspendre l'article 27. Et je suggère que nous revenions à l'article 23, de ce fait, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Donc, on va y aller par étape. Donc, est-ce qu'il y a consentement pour suspendre l'étude de l'article 27?

M. Caire : Consentement.

M. Tanguay : Oui, mais, M. le Président, juste pour précision, quand on reviendra à l'article 27, on ne sera pas forclos, peut-être, de retoucher à 70.1, si, si, si, moi, je pense que...

Le Président (M. Bachand) : Non, exactement.

M. Tanguay : Mais il va falloir l'adopter.

Le Président (M. Bachand) : Oui, oui, il n'y a pas...

M. Tanguay : Alors, consentement pour notre part.

Le Président (M. Bachand) : Consentement. Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a consentement pour revenir à l'étude de l'article 23?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement pour revenir à l'amendement à l'article 23 qui était suspendu?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Donc, on revient à l'amendement de l'article 23. Interventions?

M. Tanguay : On va essayer de rafraîchir. Donc, l'amendement, M. le Président, je ne sais pas si M. le ministre peut nous dire, l'amendement, il était où?

M. Caire : Oui, M. le Président. Dans le fond, l'amendement, ça visait à changer la notion de «protocole de recherche» pour «activités de recherche». «Activités de recherche» s'entend d'être plus large, parce que les chercheurs nous ont dit : Ce n'est pas nécessairement des protocoles de recherche qu'on a, ça peut être... ça peut prendre d'autres formes, donc c'est trop contraignant, c'est trop restreint, on aimerait quelque chose, un libellé peut-être un peu plus large. Puis «activités de recherche» semblait faire consensus.

M. Tanguay : Donc, «joindre à sa demande une présentation détaillée des activités de recherche», activités de recherche, c'est... Moi, je ne suis pas spécialiste dans le domaine, mais c'est sûr que «protocole», ça semble plus encadrant, et encadré, et strict qu'«activités de recherche». Je voudrais juste m'assurer qu'avec «activités» on a... on ne vient pas introduire trop de lousse dans... Bien, c'est une activité de recherche... Je veux dire, un protocole, c'est a plus b égale c, tu marches à gauche, tu vires à droite, puis ainsi de suite, versus activités...

M. Caire : Oui, bien, le protocole, c'est la démarche qui va être suivie par le chercheur, alors que l'activité de recherche, oui, ça couvre plus large, mais, en fait, M. le Président, je pense que c'est souhaitable, parce que, si on limite l'application de l'article au seul protocole de recherche, bien, peut-être, effectivement, qu'on échappe différentes activités de recherche qui n'ont pas... qui ne suivent pas nécessairement un protocole.

M. Tanguay : O.K. Tant qu'on ne vient pas, ce faisant, diminuer le sérieux dont doit faire preuve le chercheur pour avoir accès de... accès à, devrais-je dire, mais je comprends que le but de 67.2.2 vient élargir l'engagement, pas juste à son protocole, du chercheur.

M. Caire : Le champ d'application de l'article est élargi.

M. Tanguay : Champ d'application. O.K. Ça me va, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'amendement? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : J'ai raté certains moments des échanges ce matin, donc on me pardonnera si je reviens sur des éléments qui ont été discutés. Si j'ai la bonne version sous les yeux, il y a une portion de l'amendement qui porte également sur le texte anglais du projet de loi? Est-ce que...

Le Président (M. Bachand) : C'est un autre amendement.

M. Caire : C'est un autre... Bien, oui, le député a raison, mais c'est un amendement distinct.

M. Nadeau-Dubois : O.K. Qu'on va traiter par la suite.

M. Caire : Qu'on va traiter distinctement.

M. Nadeau-Dubois : Ce n'est pas fait déjà, c'est ça?

Le Président (M. Bachand) : Non, c'est à venir.

M. Nadeau-Dubois : C'est à venir. Dans ce cas-là, tout va bien.

Le Président (M. Bachand) : Merci. D'autres interventions? Donc, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Merci beaucoup. M. le ministre.

• (17 h 10) •

M. Caire : Bien, je ne sais pas s'il y avait des commentaires sur l'article 67.2.1, parce que notre prochain amendement, M. le Président, était à 67.2.3. J'imagine qu'on va disposer de 67.2.1 et 67.2.2 avant d'en arriver à ce prochain amendement.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. C'est parce que 67.2.2, quand on dit «personne ou organisme», souvent, on parle, dans les lois, personne morale, personne physique ou personnes qui incluent les morales et les physiques. Quand on dit «personne ou organisme», on couvre les entreprises privées ici? Pourquoi on n'a pas tout simplement dit : Les personnes qui souhaitent ou la personne morale ou physique qui souhaite? C'est la notion d'organisme, on inclut... Donc, première question, il y en a deux. Première question : On inclut les entreprises privées? Et pourquoi utiliser ici, dans ce contexte-là, «organisme»?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, oui, effectivement, on inclut les entreprises privées puis on inclut tout autre organisme qui aurait ou pas la personnalité juridique. Donc, ça pourrait être une organisation, un groupe de recherche, ou des choses comme ça, au sein d'un établissement d'enseignement, ou...

M. Tanguay : O.K. Qui n'aurait pas de personnalité juridique, là, qui n'aurait pas d'existence juridique. Ça pourrait être un regroupement de trois chercheurs qui font une demande commune, ce serait l'organisme au sens de la loi?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, en fait, dans la Loi sur l'accès, souvent, on utilise le terme organisme pour parler à la fois des organismes publics et des organismes qui ne sont pas publics, là. Donc, c'est, je dirais, une formulation qui revient assez souvent dans la loi, là, dans laquelle on permet la communication... exemple, à 67, on permet la communication de renseignements à toute personne ou organisme. Donc, c'est aussi pour être cohérent avec le reste de la loi où on parle d'organisme de façon générale, là.

Le Président (M. Bachand) : ...député de Gouin. Merci.

M. Nadeau-Dubois : D'abord, une question plus générale, et on me pardonnera si elle est candide, mais, quand on travaille un projet de loi comme ça, on le modifie au fur et à mesure, donc, des fois, l'économie générale des dispositions du projet de loi se met à se confondre dans notre tête. À 67.2.1, on vient permettre aux organismes publics de communiquer des renseignements personnels sans le consentement des personnes, à des fins d'étude, de recherche ou de production de statistiques, et on le fait à certaines conditions.

M. Caire : Exact.

M. Nadeau-Dubois : Est-ce que ça comprend les renseignements personnels sensibles?

M. Caire : Oui.

M. Nadeau-Dubois : Donc, dans le cadre de 67.2.1... Donc, en fait, 67.2.1 s'applique indistinctement aux renseignements personnels et aux renseignements personnels sensibles.

M. Caire : Exact.

M. Nadeau-Dubois : Pourquoi?

M. Caire : Bien, parce qu'à des fins de recherche... d'abord, parce que, dans ce cas-ci, ça pourrait représenter un fardeau extrêmement lourd, d'aller chercher le consentement de chaque personne. Si, par exemple, je ne sais pas, moi, on faisait des études sur, j'essaie de voir, là, des protocoles de recherche où on pourrait... des applications x d'intelligence artificielle pour des fins de cybersécurité, puis où on aurait besoin de données massives pour tester une application de détection de fraude, par exemple, là, j'invente au fur et à mesure, M. le député, que je vous réponds, et où là on se dit : Bon, bien, j'ai besoin de x millions de renseignements ou de cas de figure qui me permettent de tester la vélocité, la précision, l'acuité de mon application, puis là ça signifie, compte tenu du fait que j'ai des renseignements fiscaux pour tester mon application, que j'appelle le x millions d'individus pour demander un consentement express, ça deviendrait à peu près impossible.

Puis là mettre un protocole... mettons, un protocole de recherche de Revenu Québec sur une application de détection de fraude, puis là Revenu Québec dit : Bon, bien, O.K., là, il faut que j'appelle chaque individu dont je vais me servir des informations pour mon protocole de recherche pour demander un consentement express, oubliez ça, impossible.

M. Nadeau-Dubois : Je comprends. En même temps, on s'entend qu'une des applications potentielles de cet article-là... renseignements de santé.

M. Caire : Ça pourrait.

M. Nadeau-Dubois : On va en reparler plus tard, à l'article 91, mais déjà, ici, ma compréhension... Puis le ministre, là, quand j'ai demandé si ça couvrait les renseignements sensibles, il m'a dit oui. Donc, les renseignements de santé pourraient être concernés dans... Bien, d'abord, question : Est-ce que je me trompe? Est-ce que les renseignements personnels en matière de santé tombent sous le...

M. Caire : Oui, vous avez raison.

M. Nadeau-Dubois : Oui, voilà, tombent sous l'article. O.K. Bon, tu sais, les débats éthiques sur l'utilisation des données de santé, c'est des débats qui sont importants, qui font rage... bien, font rage, qui ont cours partout à travers le monde, notamment au Québec. Il y a des projets, au Québec, qui ont suscité certaines controverses. Le Collège des médecins, qui n'est pas exactement, comment dire, un allié naturel de ma formation politique sur bien des enjeux...

M. Caire : Si ça peut vous rassurer, M. le député, je pense qu'ils ne sont pas l'allié naturel de personne.

M. Nadeau-Dubois : Sauf eux-mêmes.

M. Caire : Oui. Puis encore!

M. Nadeau-Dubois : Non, mais, plus sérieusement, ils ont émis des préoccupations sur l'importance du consentement quand vient le temps d'utiliser les données de santé. Ils ont émis des recommandations dans le cadre du projet de loi. Et toutes les recherches ne sont pas équivalentes, il y a des recherches qui se font dans des universités publiques, il y a des recherches qui peuvent se faire dans des entreprises, dans des instituts de recherche universitaires, par exemple, affiliés aux centres hospitaliers, il y a des projets de recherche qui peuvent se faire dans le privé.

À la réponse... À la question du député de LaFontaine, j'ai cru entendre qu'ici, par organisme, on pouvait désigner des entreprises privées. Et là l'article 67.2.1 vient dire : Il y a des critères à remplir pour communiquer les renseignements personnels des Québécois à des fins d'étude, de recherche ou de statistiques. Et l'article ne me semble pas distinguer les différents types de recherche. Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable de venir préciser ces choses-là?

M. Caire : Bien, en fait, sur le type de recherche, je pense que... Puis c'est un petit peu l'argument qu'on a eu préalablement. D'abord, je tiens à signaler qu'il y a quand même des spécifications très, très précises sur le moment où on peut effectivement communiquer de tels renseignements sans le consentement. Donc, le paragraphe 1°, 2°, 3° et 4°, là, sont quand même assez clairs et, je dirais, dans une certaine mesure, assez contraignants, d'une part.

D'autre part, les obligations ne sont pas modulées en fonction du statut de la personne ou de l'organisme qui communique et/ou utilise lesdits renseignements. Donc, si une entreprise privée collaborait à une recherche, une activité de recherche avec un organisme public, les deux organismes, indépendamment de leur statut public, privé, seraient tenus aux mêmes obligations et aux mêmes responsabilités.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, je suis désolé, là, je vais faire le malheur du leader adjoint mais le bonheur leader du gouvernement, je vais devoir aller procéder à un autre vote au salon bleu.

Le Président (M. Bachand) : ...suspendre pour permettre au député de Gouin d'aller voter à l'Assemblée. On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 19)

(Reprise à 17 h 24)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Interventions? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Oui. Je me demande si le ministre a réfléchi à la question des objectifs des recherches en question. Là, on parle de recherche, d'étude... pardon, de fins d'étude, de recherche ou de production de statistiques. Tout n'est pas égal dans ce domaine. Est-ce qu'il a pensé à faire ces distinctions-là?

M. Caire : C'est-à-dire qu'il y a quand même... Bon, l'objectif de l'étude, de la recherche ou de la production de statistiques ne peut atteindre que si les renseignements sont communiqués, permettant d'identifier la personne. Il est déraisonnable d'exiger que la personne ou l'organisme obtienne le consentement des personnes concernées. L'objectif de l'étude, de la recherche ou de la production de statistiques l'emporte sur l'impact de la communication et de l'utilisation des renseignements sur la vie privée des personnes concernées.

Donc, on comprend, là, que ça, ici, il y a une notion, là... Ça ne peut pas être une étude qui est frivole, ça ne peut pas être une étude... Tu sais, c'est vraiment une étude dont l'impact est majeur, est important, que... Je vous dirais... Je prendrais peut-être l'exemple de la situation actuelle des protocoles de recherche ou d'étude de recherche pour trouver un vaccin contre la COVID. Moi, je vois, dans le paragraphe 3°, le fait qu'une étude dont l'objectif ne serait pas d'intérêt public, parce que je pense comprendre ce que le député veut amener comme notion, là, qui serait d'intérêt privé ou qui serait peut-être un peu plus légère ne passerait pas le test du paragraphe 3°.

M. Nadeau-Dubois : O.K. Intéressant. On y reviendra au paragraphe 3°, mais je vais déposer d'abord un amendement après le premier alinéa. On va procéder dans l'ordre, on peut peut-être suspendre un instant, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Merci beaucoup.

On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 26)

(Reprise à 17 h 30)

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. À l'ordre! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, voici l'amendement que je présente. Donc, c'est à l'article 27, c'est un amendement : Modifier l'article 67.2.1 proposé par l'article 23 du projet de loi par l'insertion, après le premier alinéa, de l'alinéa suivant :

«Les renseignements de santé ne peuvent être communiqués à une personne ou à un organisme qui souhaite utiliser ces renseignements à des fins commerciales.»

L'objectif de cet amendement, M. le Président, est de créer une barrière étanche entre les données de santé des Québécois, des Québécoises et les projets de recherche à but lucratif. Il m'apparaît incontestable que l'avancement de la connaissance et de la science peut bénéficier d'un plus grand partage des données de santé. Un de nos projets, à Québec solidaire, depuis de nombreuses années, on peut être pour, on peut être contre, c'est la création de Pharma-Québec, une société d'État qui serait chargée de mener le Québec vers l'autosuffisance médicale. Puis un des pôles de ce projet, ce serait un pôle de recherche public en matière pharmaceutique, de production de médicaments et de vaccins. Donc, je serais bien mal placé pour argumenter, aujourd'hui, dans le sens d'une interdiction totale du partage des données de santé des Québécois et des Québécoises à des fins de recherche, d'étude ou de production de statistiques. Ce n'est pas ce que je fais.

Ce que je viens faire, c'est tracer une ligne entre des recherches d'intérêt public, des recherches qui visent l'avancement de la science, de la connaissance, avec de la recherche qui se fait dans le secteur privé, recherche qui a bien le droit de se faire par ailleurs, là, je ne porte pas un jugement de valeur sur l'importance sociale de ces efforts de recherche là, mais de la recherche qui poursuit des fins différentes, c'est-à-dire le développement de produits, le développement de médicaments, de technologies dans le secteur privé pour le secteur privé.

C'était il y a, quoi, un an et demi, le ministre de l'Économie avait lancé une petite bombe ici, à l'Assemblée nationale, en affirmant qu'il était dans son intention et dans l'intention du gouvernement d'attirer au Québec des entreprises pharmaceutiques en rendant disponibles les données médicales dont dispose la Régie de l'assurance maladie du Québec. Ça avait généré tout un tollé.

Et je pense qu'on a l'occasion, avec le projet de loi ici, de venir rassurer bien des gens puis de venir faire les distinctions qui s'imposent entre, oui, faire avancer la science, la connaissance en tablant sur les données de santé qu'on a, mais le faire... s'assurer de mettre des balises pour que ce soit dans la poursuite de l'intérêt public et non pas dans la poursuite du profit privé.

C'est correct que l'entreprise privée fasse de la recherche et développement, c'est tout à leur honneur, mais il m'apparaît que, quand les Québécois, les Québécoises utilisent le système de santé public puis partagent des données médicales, on ne peut pas d'aucune manière penser que ça implique le début du tiers, d'un demi, d'un dixième de pourcent de consentement à ce que leurs données de santé, même anonymisées, soient transmises à des acteurs privés pour faire de la recherche privée.

Est-ce que l'amendement a la meilleure formulation possible? Peut-être que non. Je suis toujours ouvert à réviser les libellés et les formulations, mais là, ici, je pense qu'il faut avoir la discussion, il faut avoir le débat. Est-ce que les données de santé des Québécois, Québécoises devraient pouvoir être utilisées à des fins commerciales? C'est la question que je pose au ministre.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, M. le Président, c'est une discussion intéressante. Et puis je dirais, peut-être pour la première fois depuis l'étude détaillée, le député de Gouin et moi avons un désaccord sur la forme et sur le fond. Je m'explique.

Comme j'ai dit, le projet de loi n° 64, projet de loi sur la protection des renseignements personnels, a pour objet de déterminer de quelle façon on doit s'y prendre pour protéger les renseignements personnels, à qui et dans quelles circonstances on peut les utiliser, les communiquer, les transmettre, les stocker, les détruire, et donc, bon, toutes sortes de dispositions.

Le débat que le député de Gouin soulève est un débat qui est extrêmement intéressant, à savoir... puis, à mon avis, qui est beaucoup plus large que les données de santé, parce qu'on pourrait faire le même débat sur les données fiscales. En quoi sont-elles moins névralgiques que les données de santé? Puis on pourrait se donner des exemples où les données fiscales ont même probablement un niveau d'attraction plus important que les données de santé.

Alors, pour moi, d'abord, ce débat-là, il doit être fait plus largement. Et je pense qu'en mon âme et conscience un amendement au projet de loi n° 64 est un peu restreint comme débat sur cette question-là. Je rassure le député de Gouin à savoir que le projet de loi n° 64 n'a pas pour objectif de favoriser l'utilisation des données, qu'elles soient de santé ou autres, à des fins commerciales. Ce n'est pas la finalité du projet de loi n° 64. C'est un débat qu'on devra avoir.

Et, sans présumer de ce qu'il dirait, j'imagine que si le député de La Pinière était des nôtres, il serait le premier à s'opposer à cet amendement-là parce qu'il a eu, sur cette question-là, un éditorial qui était assez clair et qui était plutôt favorable à l'opinion contraire. Puis sans présumer des opinions des uns et des autres, puis sans dire que l'opinion du député de Gouin ne mérite pas d'être défendue, ce n'est absolument pas mon propos, ce que je dis, c'est que ce n'est pas la bonne tribune pour cet excellent débat. Et une chose est sûre, c'est que je ne pense pas qu'il faille prendre prétexte du projet de loi n° 64 pour, au bénéfice d'un amendement, clore le débat. Ça, je ne souscris pas à ça.

Éventuellement, il faudra se poser la question : Peut-on traiter les informations que le gouvernement du Québec possède comme une ressource que l'on peut utiliser au bénéfice de la collectivité? Est-ce que ça peut ou non impliquer des entreprises privées? Ce sont toutes des questions qui sont extrêmement pertinentes et qui valent très certainement la peine qu'on ait des discussions dans l'espace public, mais, ceci étant dit, ce n'est pas la finalité du projet de loi n° 64, de tenir ce débat, et ce n'est certainement pas la finalité du projet de loi n° 64, de clore ce débat au bénéfice d'un amendement.

Moi, là-dessus, je pense qu'on ferait l'économie de discussions qui sont pertinentes, pour lesquelles il y a des opinions contraires qui méritent toutes d'être défendues et qui, de toute façon, mériteraient très certainement qu'on structure de façon plus détaillée l'utilisation... une telle utilisation, si tant est que collectivement on se donnait la permission de le faire, et qui mériterait très certainement une structure plus détaillée si, collectivement, on s'interdisait de le faire.

Donc, pour toutes ces raisons, M. le Président, je ne peux pas donner suite à l'amendement qui a été proposé par le député de Gouin, ce qui ne veut pas dire que je veux faire l'économie de ce débat-là mais simplement que, si, un jour, le Québec décide de se doter, comme d'autres administrations l'ont fait, de ce que l'on appelle en anglais le «chief data officer», dont c'est l'objectif, de traiter la donnée comme une ressource collective et de la valoriser, voire l'exploiter en conséquence, si, un jour, on décide de faire ce débat-là, bien, je serai du débat, mais, pour l'instant, ce n'est pas de ça dont il est question. Et, comme je vous dis, pour toutes ces raisons-là, sur la forme et sur le fond, je ne peux pas être d'accord avec mon collègue de Gouin.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.

• (17 h 40) •

M. Nadeau-Dubois : Bien, commençons par la forme. Quand le ministre de l'Économie a laissé échapper cette déclaration-là en août 2020, ça a généré beaucoup de débats. Puis, à ce moment-là, à Québec solidaire, on a fait la proposition d'avoir une commission parlementaire pour aller au fond de ce débat-là en détail en disant : Le ministre de l'Économie, qui est un ministre important au sein du gouvernement, nous dit : C'est l'intention du gouvernement. O.K., les gens ont réagi. C'est ce qu'a dit le ministre.

À ce moment-là, on a proposé une commission parlementaire. Cette commission parlementaire là a été refusée par le gouvernement. Je peux retrouver la date exacte où ça a été refusé, là, c'était il n'y a pas si longtemps que ça, si je ne me trompe pas. 23 septembre 2020, la CAQ refuse la commission parlementaire.

Puis, à ce moment-là, on a posé une question au leader du gouvernement en disant : Là, votre ministre vient de lancer une petite bombe, ça génère énormément de débats dans la société québécoise... Mon collègue député de Jean-Lesage, Sol Zanetti, qui était, à l'époque, porte-parole en matière de santé, a posé une question, à la période de questions, au leader du gouvernement en lui demandant pourquoi il avait refusé la commission parlementaire puis en lui demandant, je cite : «Le ministre de la Santé peut-il au moins s'engager à interdire le partage de nos données à des intérêts privés tant qu'on n'a pas eu une commission parlementaire sur le sujet?»

Le leader du gouvernement répond : «Oui, M. le Président. Les commissions parlementaires sont souveraines, et les membres de la commission ont décidé de ne pas se saisir de la demande qui a été faite par le deuxième groupe d'opposition.

«M. le Président, ce qu'il faut dire, en matière d'informations personnelles et confidentielles, présentement on est en train de tenir des consultations particulières sur le projet de loi n° 64, qui vise, justement, à réformer la Loi sur l'accès dans le secteur public mais également la Loi sur l'accès dans le domaine privé. Alors, il y a un forum tout à fait approprié pour soulever les questions qui sont soulevées par le député de Jean-Lesage, présentement.

«Et, pour nous, c'est non négociable, la protection des renseignements personnels, et il faut s'assurer de faire en sorte que, dans le cadre des travaux que nous aurons, dans le cadre du projet de loi n° 64, où nous pourrons échanger et nous pourrons entendre le député de Gouin faire les représentations qui s'imposent... Mais une chose est sûre, il faut faire en sorte de protéger les données personnelles des Québécois.

«Ceci étant dit, il faut s'assurer aussi de pouvoir développer les créneaux que nous avons, au Québec, en matière d'intelligence artificielle, notamment en matière de recherche, pour avoir de la recherche de pointe au Québec. Donc, il faut arriver à un équilibre, M. le Président. Je pense que c'est fondamental.

«Alors, nous serons intéressés à avoir cette discussion-là dans le cadre du projet de loi n° 64...» Fin de la citation.

Donc, à l'époque, on a demandé une commission, on s'est fait dire : Non, les commissions sont souveraines. Moi, je ramène aujourd'hui la discussion, puis là le ministre me répond : Ce n'est pas le bon forum. Le leader du gouvernement nous avait indiqué, en Chambre, que ce serait ça, le forum. Là, c'est quoi, le forum pour parler de ça? Je ne comprends plus.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, ce que je dis, M. le Président, c'est que, si on veut se donner un modèle qui est... puis j'en ai discuté, j'en ai parlé avec les collègues, qui est équivalent à celui, par exemple, que la France s'est donné, bien, je suis désolé, mais l'entreprise privée a accès à ces données-là, paie un montant puis a accès aux données mais dans des conditions qui sont strictes. Et de ce fait, de toute façon, si on va vers ce modèle-là, l'amendement du collègue nous empêche de faire ça.

Si le collègue me demande mon opinion, personnellement, moi, c'est un modèle qui me plaît. Moi, je ne vois pas pourquoi, dans un cadre sécuritaire comme celui qui a été mis en place par la France, où, dans un lieu clos et non connecté, des organisations peuvent... Puis je reprends l'expression du député de La Pinière parce que je l'ai beaucoup aimée : On y entre avec des questions et on en sort avec des réponses, mais c'est tout, rien d'autre. Bien, M. le Président, dans ce contexte-là et dans ce paramètre-là très précis qui se fait au bénéfice de la collectivité, bénéfice qui permet de payer ensuite les services publics de soins de santé, d'éducation, etc., pourquoi on s'opposerait à ça?

Maintenant, je répète que, dans sa structure actuelle, le projet de loi n° 64 ne prévoit pas ça, ne prévoit pas de mettre en place un officier gouvernemental ou de mandater une organisation qui aurait la mission prévue par la loi de créer cet environnement sécuritaire, non connecté, qui prévoirait de quelle façon les données sont stockées, quelles sortes de données sont stockées, comment on donne accès aux données, à qui on donne accès aux données, sous quelles conditions on donne accès aux données, dans quelle période de temps, elles sont renouvelées à tous les combien de temps, quelle est l'interaction qu'on fait avec les ministères et organismes pour aller chercher ces données-là.

Puis j'entends ce que le collègue a dit par rapport à la réponse qui a été donnée par mon collègue leader du gouvernement. Je l'entends, mais il faut comprendre que le modèle dont on parle, c'est un modèle qui nécessite quand même une certaine réflexion puis qui nécessite de mettre en place une certaine structure. Or, ce n'est pas de ça dont on discute. On n'est même pas... Non seulement on ne discute pas de ce modèle-là, mais on n'est même pas en train de discuter d'un modèle, on discute de quelles sont les obligations en matière de protection des renseignements personnels.

Donc, quel est le bon forum? M. le Président, moi, je... C'est une bonne question, mais ce que moi, je sais, puis l'expérience que j'en ai, c'est que, si cette discussion-là, on veut la faire puis si on veut faire des propositions sur ces discussions-là, j'en suis, mais l'amendement du collègue de Gouin a plutôt tendance à clore le débat qu'à l'alimenter.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Le ministre dit qu'il ne veut pas avoir le débat sur le fond, mais il vient de passer 98 % de sa réponse à parler sur le fond, alors que ma question portait sur la forme.

Le ministre de l'Économie a lancé une idée, puis ce n'est pas juste une idée, il a dit que c'était une intention du gouvernement. Le ministre vient de me confirmer qu'il est d'accord avec ça, que lui aussi, il y réfléchit puis que lui, il a même des modèles dont il souhaite s'inspirer pour permettre à des entreprises privées d'avoir accès, dans certaines circonstances, aux données privées des Québécois, des Québécoises. Donc, il dit... Donc, le ministre a lancé l'idée, le ministre de l'Économie a lancé l'idée. Le ministre face à moi me dit : Je suis d'accord, on veut aller dans ce sens-là, puis j'ai même des idées de comment fonctionner.

Le leader du gouvernement nous a indiqué que c'était dans le cadre du projet de loi n° 64 qu'on parlerait de ça. Là, il nous dit : Non, non, non, ce n'est pas de ça dont il est question. Je suis désolé, mais, quand j'ai posé la question tantôt à savoir : Est-ce qu'en vertu de 67.2.1 on pourrait transférer des données d'organismes publics vers des organismes privés qui font de la recherche?, la réponse que j'ai obtenue, c'est oui. Donc là, le projet de loi n° 64 va le permettre.

Donc, si le projet de loi n° 64 le permet, ça me semble être une conversation incontournable, parce que le projet de loi va ouvrir la porte à ça. Moi, je propose un amendement pour venir refermer la porte, mais le ministre ne peut pas dire : Ce n'est pas ça, le débat, mais je veux le permettre par mon projet de loi. Si ce n'est pas ça, le débat, assurons-nous au moins que le projet de loi nous laisse, en cette matière, sur le statu quo. Le statu quo, ma compréhension du statu quo, c'est qu'à ce stade-ci une entreprise privée pharmaceutique, par exemple, qui souhaiterait avoir accès aux données de la RAMQ pour faire de la recherche, ma compréhension de la législation actuelle, c'est qu'à l'heure actuelle ce n'est pas possible. D'ailleurs, à l'époque, c'était une des réponses qui avaient été fournies par le ministre de l'Économie : En ce moment, on ne peut pas, il faudrait changer la loi pour le rendre possible. La loi en question, c'est celle qu'on est en train d'étudier.

J'ai posé la question, j'a dit : Est-ce qu'une entreprise privée qui fait de la recherche, en vertu de l'article qu'on étudie actuellement, pourrait avoir accès aux données? Le ministre m'a dit oui. Bon, donc, ce n'est pas le statu quo. Si le ministre me dit : Ce n'est pas le moment d'avoir le débat, je suis prêt à l'entendre, mais, dans ce cas-là, il va falloir qu'on s'assure qu'on n'est pas en train d'ouvrir une porte que le ministre, par ailleurs, me dit qu'il ne veut pas ouvrir. S'il ne veut pas l'ouvrir, qu'on ne l'ouvre pas, qu'on trouve un amendement qui va venir la refermer. C'est ma proposition.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Caire : Bien, M. le Président, si mon collègue de Gouin regarde l'article 67.2.1, l'article 67.2.2 et l'article 67.2.3 dans leur ensemble, il va voir qu'il y a des contraintes qui sont extrêmement importantes. Il y a toutes sortes d'obligations, notamment un comité, une décision d'un comité éthique, notamment de mentionner quelles sont les finalités, notamment le fait, comme je le disais, que les bénéfices de la recherche doivent être... puis je vais utiliser l'expression qui est dans l'article, le paragraphe 3°, «l'objectif de l'étude, de la recherche ou la production de statistiques l'emporte sur l'impact de la communication et de l'utilisation des renseignements sur la vie privée des personnes concernées.»

Je comprends ce qu'il me dit, mais on est loin d'articles dont l'objectif est de dire que ces renseignements-là sont ouverts et au bénéfice de tout le monde puis que tout le monde peut se servir un peu à la va-comme-je-te-pousse, là, au contraire. Ceci étant dit, des organismes publics qui signent des protocoles de recherche avec des entreprises privées dans le cadre actuel, il y en a, là.

M. Nadeau-Dubois : Tous les jours, dans les universités, ça se produit.

M. Caire : Il y en a, bien oui, bien, c'est ça, M. le Président. Donc, ce n'est pas... Je comprends ce que le collègue dit, là, mais, quand il me dit que la RAMQ ne peut pas, c'est vrai, mais, tu sais, il y a d'autres organismes publics. Puis cette loi-là s'adresse même à un plus grand nombre d'organismes publics maintenant que jamais, là, parce que la loi actuelle s'applique au gouvernement. Maintenant, on passe à 3 000 organismes publics. Donc, la portée de cette loi-là et les contraintes qui s'y appliquent sont beaucoup plus larges, beaucoup plus étendues que la loi actuelle.

Je pense que Me Miville-Deschênes a envie d'intervenir.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : ...une précision, en fait, là, puisque j'ai l'autorisation. En fait, il y a certaines dispositions réglementaires qu'on a mises dans la loi. Ces dispositions-là vont s'appliquer à 3 000 organismes, mais la loi comme telle s'applique au même nombre d'organismes.

M. Caire : Merci de la précision.

M. Nadeau-Dubois : L'enjeu ici, là, c'est qu'on vient donner la permission aux organismes publics de communiquer des renseignements personnels à des tiers, à des personnes ou à des organismes sans le consentement. Il est là, là, parce que moi, si je décide d'aller me prêter à une étude clinique, par exemple, dans une entreprise privée, je le fais de mon plein gré. Puis, dans une société libérale, personne qui ne peut m'empêcher de dire : Prenez mon groupe sanguin, prenez mon profil génétique, je vous consens, je vous consens, je consens, je consens. Il n'y a rien qui l'empêche.

Mais là on n'est pas là-dedans, on est dans des organismes publics auxquels les Québécois, Québécoises ont confié des données personnelles pour d'autres fins. Ils ont consenti pour, dans le cas de la RAMQ, avoir une prescription de quelque chose, avoir un diagnostic médical, dans le cas des données fiscales parce qu'ils sont obligés de payer leurs impôts, ils n'ont pas bien le choix.

Et là on vient dire : Sans le consentement des gens, ça peut être transféré pour des objectifs d'étude, de recherche ou de production de statistiques. Je ne dis pas que ça, en soi, c'est mal. J'ai fait une longue introduction au début pour dire : Pour plein de circonstances, c'est même souhaitable du point de vue de la poursuite du bien commun puis de l'intérêt public, mais moi, ce que je cherche justement à faire ici, c'est à m'assurer que, si on est pour communiquer, sans le consentement des gens, des renseignements personnels, bien, qu'on le fasse... justement, puisque c'est des données qui appartiennent à l'état québécois dans son acception la plus large, bien, que ce soit pour l'intérêt public.

Quand les gens consentent à donner leurs données à un organisme public, le consentement qui est donné explicitement puis implicitement, c'est pour la poursuite des finalités de l'organisme public en question. Et là on vient dire : Sans le consentement, on peut le donner à des fins de recherche. Je veux bien, je ne suis pas contre ce principe-là, mais il me semble qu'il y a une pertinence à faire une distinction entre des recherches d'intérêt public puis des recherches d'intérêt privé. Ce n'est pas impertinent, comme distinction.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Bien là, je ne partage pas le point de vue du collègue au sens où les critères qui sont mentionnés... D'abord, on peut transmettre ces informations-là sans le consentement lorsqu'il est déraisonnable d'exiger que la personne ou l'organisme obtienne le consentement. Donc, ça, c'est un premier critère. Deuxième critère : lorsque l'objectif de l'étude, de la recherche ou de la production statistique l'emporte sur l'impact de la communication et de l'utilisation des renseignements sur la vie privée des personnes concernées, que les renseignements personnels sont utilisés de manière à en assurer la confidentialité, que seuls les renseignements nécessaires sont communiqués.

Puis là, ça, c'est juste 67.2.1, parce qu'on pourrait parler... puis éventuellement on va le faire, là, mais 67.2.2 ramène d'autres obligations, donc : faire une demande par écrit, joindre à sa demande son protocole de recherche, exposer les motifs pouvant soutenir que les critères mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du deuxième alinéa, na, na, na, sont remplis, mentionner toutes les personnes, tous les organismes à qui une demande est faite, similaire aux fins de la même étude, décrire les différentes technologies qui sont utilisées pour effectuer le traitement. M. le Président, puis là, ça, c'est 67.2.2, puis, après ça, il y a 67.2.3.

Je veux dire, M. le Président, là, ce n'est pas une balade dans le parc, là, qui est proposée, je veux qu'on soit clair. Puis je comprends les craintes qui sont exposées par le député de Gouin, mais je ne voudrais pas qu'on puisse penser que l'article 23 va permettre à des entreprises privées d'obtenir des renseignements personnels sans le consentement des gens avec une totale légèreté, et parce qu'eux ont un beau projet de recherche, et que, voilà, on va faire des sous avec ça.

Je veux dire, quand je dis à mon collègue que 64, le projet de loi n° 64, n'a pas cette finalité-là, ce que je veux dire, c'est que les balises qu'on met en place sont quand même nombreuses, sérieuses et contraignantes, justement, parce qu'on est conscients que de transmettre des renseignements personnels sans le consentement des gens concernés, ça doit être une exception, ça ne doit pas être la norme et ça doit être balisé de façon extrêmement rigoureuse.

Et je pense que ces trois articles-là imposent un nombre de contraintes quand même très importantes et très sérieuses, qui font en sorte qu'on est, ne l'oublions pas, dans le cadre où un organisme public va utiliser des renseignements personnels à des fins de recherche ou de production statistique et que c'est clairement l'intention du législateur que ça se fasse au bénéfice de la collectivité.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Deux choses. D'abord, le ministre a commencé par me dire que ce n'était pas l'objet du projet de loi, puis maintenant il est en train de m'expliquer à quelles conditions le projet de loi va baliser cette pratique-là. Donc, de toute évidence, c'est l'objet du projet de loi. C'est un des objets du projet de loi puisqu'il vient de passer un trois minutes bien serré à m'expliquer toutes les balises qu'on met en place pour que ça se fasse bien. Donc, je ne suis pas à côté du sujet, là, on est exactement sur le bon sujet.

M. Caire : ...M. le Président, parce que...

M. Nadeau-Dubois : Après ça, deuxième élément, le ministre dit...

M. Caire : Mais, si je peux me permettre, M. le Président, c'est parce que, là, on parle à des fins commerciales. Alors, oui, la communication de renseignements personnels est l'objet du projet de loi, mais ce n'est pas ça que je dis. Non, c'est parce que je veux juste être sûr que mes propos sont bien rapportés. «À des fins commerciales», parce que l'amendement du député de Gouin vise spécifiquement l'utilisation par l'entreprise privée à des fins commerciales. C'est de ça dont je parle. Je veux juste camper le commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

• (18 heures) •

M. Nadeau-Dubois : D'ailleurs, avant de déposer l'amendement, j'ai posé la question : Est-ce que ça s'applique à de la recherche à des fins commerciales? La réponse a été oui. Si la réponse avait été non, je n'aurais pas déposé d'amendement. Je dépose l'amendement parce qu'on m'a dit oui. Donc là, après, qu'on ne me dise pas que... J'ai demandé : Ça s'applique-tu à de la recherche commerciale? Réponse : oui. Réaction : je dépose un amendement pour baliser la question en me concentrant spécifiquement sur les données de santé, par ailleurs, hein?

Le ministre a dit : Je ne suis respectueusement pas d'accord avec mon collègue de Gouin. Je veux lui soumettre qu'il n'est aussi pas d'accord avec la Commission d'accès à l'information, parce qu'à la recommandation 46 de son mémoire, la Commission d'accès à l'information précise que la recherche... En fait, je vais citer : «que les renseignements et les bénéfices attendus de la recherche doivent être clairement dans l'intérêt public». Pourquoi ne pas venir le préciser dans le projet de loi, que la recherche doit être d'intérêt public?

Puis d'ailleurs le ministre l'a dit lui-même à quelques reprises en me répondant : C'est pour le bien de la collectivité, c'est pour l'intérêt public. Moi, c'est justement de ça dont je veux m'assurer. Pourquoi ne pas le préciser dans le projet de loi, que quand il y a des protocoles de recherche qui sont signés entre des organismes publics... bien, des protocoles... des ententes de communication de renseignements personnels, bon, dans la foulée d'un protocole de recherche, bien, que tout ça se fait dans l'intérêt public. Ça semble être déjà dans les intentions du ministre parce qu'il m'a dit lui-même : C'est dans l'intérêt public, c'est dans l'intérêt de la collectivité. Je soumets l'idée de l'inscrire dans le projet de loi.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, M. le Président, dans ce que j'ai dit au collègue, le paragraphe 3°, «l'objectif de l'étude, de la recherche ou de la production de statistiques l'emporte sur l'impact de la communication et de l'utilisation des renseignements sur la vie privée des personnes concernées», pour moi, ce que je dis au collègue de Gouin, c'est que cet article-là vient justement nous dire qu'on n'est pas dans une... On n'est pas dans une demande où je soumets un protocole de recherche, parce qu'il faut... puis ça, je vais le répéter, là, 67.2.1, 67.2.2 et 67.2.3, même si ce sont des articles distincts, il faut quand même les prendre en considération dans l'ensemble.

Et c'est là où je dis que ce paragraphe-là fait en sorte qu'on n'est pas dans des demandes qui sont frivoles, d'une entreprise privée qui va demander à avoir accès à des renseignements personnels sans le consentement des personnes concernées, parce qu'eux autres, ils veulent tester des hypothèses, là, puis ils ont besoin de ça. Ça ne marche pas comme ça, là. Ce n'est pas ça. Ce n'est pas ce que 67.2.1, paragraphe 3°, dit.

Donc, c'est pour ça, M. le Président, quand mon collègue dit : Bien, je veux éviter qu'on utilise des renseignements de santé à des fins commerciales, bien, d'abord, d'une part, je signale au collègue respectueusement qu'il y a déjà quatre lois qui ont des régimes de protection particuliers pour les renseignements de santé. Et ensuite je dis au collègue que, quand on regarde l'ensemble de ces trois articles-là, l'utilisation des renseignements personnels dans le contexte où le consentement n'est pas nécessaire, il est hautement balisé. Il est hautement balisé. Il ne nous amène pas dans un univers où tout le monde peut utiliser n'importe quelle information pour faire n'importe quoi avec. Ça n'a rien à voir. Ça n'a rien à voir.

Le Président (M. Bachand) : Interventions? M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Je le sais bien. D'ailleurs, je n'ai jamais dit ça. Personne n'a jamais dit ça ici. Je n'ai jamais entendu ça nulle part, moi, que le projet de loi n° 64 allait permettre l'utilisation inconsidérée, frivole et délirante de toutes les données personnelles par quiconque, là. Il n'y a personne qui dit ça, là. La seule personne qui fait ces exagérations-là, c'est le ministre, puis ce n'est pas moi. Moi, j'ai un propos très posé, très modéré, où j'essaie de placer des balises pour que ces choses-là soient dans l'intérêt public. Je ne suis jamais rentré dans le registre de n'importe qui va pouvoir faire n'importe quoi. Je n'ai jamais dit ça. Je n'ai jamais dit ça. J'ai commencé par une longue introduction pour dire...

M. Caire : Mais j'essaie de comprendre.

Le Président (M. Bachand) : Allez-y, M. le député.

M. Caire : J'essaie de comprendre l'objectif du député, d'abord, parce que je ne le comprends pas.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Je n'ai pas... Bien, l'objet de l'article 67.2.1, c'est de mettre des balises au partage, sans le consentement des Québécois et des Québécoises, de leurs données personnelles à des organismes ou à des personnes pour des fins de recherche. L'objectif de mon amendement est d'ajouter une balise à celles qui sont déjà listées. Cette balise que je souhaite ajouter, c'est dans le cas des renseignements de santé, de s'assurer que les fins de l'activité de recherche en question ne sont pas des fins commerciales.

M. Caire : Bien, j'ai envie de poser la question au député de Gouin : Pourquoi?

M. Nadeau-Dubois : Parce que j'ai commencé en posant la question de si ça permettait le partage de données à des fins commerciales. Et la réponse que le ministre m'a faite, c'est oui.

M. Caire : Mais je repose la question : Pourquoi? Qu'est-ce qui le dérange, là-dedans? Est-ce qu'il dit, inconsciemment, que si c'était le cas, je dis bien si c'était le cas, c'est incompatible avec l'intérêt public?

M. Nadeau-Dubois : Moi, je pense que, dans une société où on a fait le choix que la santé était publique, et c'est même un régime obligatoire, la santé publique au Québec, les gens n'ont pas le choix d'aller dans le réseau public. La plupart du temps, c'est la seule option qu'ils ont. Quand ils utilisent le réseau de santé publique et que, par le fait même, ils donnent des données personnelles hautement sensibles sur leur santé personnelle, je ne pense pas que, par le fait même, ils consentent à ce que ces données-là soient transmises à des entreprises privées pour faire de la recherche privée à des fins de générer des profits privés.

M. Caire : Pourquoi? Je... Mais ça ne répond pas à ma question. Est-ce que...

M. Nadeau-Dubois : Bien, vous me demandez pourquoi c'était un problème.

M. Caire : Est-ce que c'est incompatible de penser qu'une recherche... au regard de 67.2.1, 67.2.2 et 67.2.3... Soyons clairs. Alors, au regard de l'ensemble des contraintes qui sont là, est-ce que le collègue nous dit : Une entreprise privée ne peut pas être partie prenante de ce protocole de recherche là, respecter l'ensemble des critères qui sont prévus par ces trois articles-là et se faire dans l'intérêt public? Que ça serve l'intérêt public, c'est impossible? Moi, je ne suis pas d'accord avec ça.

M. Nadeau-Dubois : Moi non plus.

M. Caire : O.K. Mais je ne comprends pas, là.

M. Nadeau-Dubois : Je dis juste que ça... Je dis juste : Ça prend le consentement. Je dis juste : Ça prend...

M. Caire : M. le Président, on peut-tu avoir une courte suspension, juste...

M. Nadeau-Dubois : Non, mais le ministre me pose une question. Je vais y répondre.

M. Caire : O.K. Mais je ne comprends pas.

M. Nadeau-Dubois : Moi, je dis que ça prend le consentement. L'article, ce qu'il vient de dire, là, l'article 67.2.1, ce qu'il dit, c'est que, sans le consentement des gens, on peut transmettre leurs données à des tiers pour faire de la recherche. J'ai demandé : Est-ce que ça vaut pour les données sensibles? Première question tantôt. Oui.

M. Caire : Oui.

M. Nadeau-Dubois : Est-ce que ça vaut pour de la recherche privée? Oui.

M. Caire : Oui.

M. Nadeau-Dubois : Moi, je pense que des données aussi sensibles et intimes que les données de santé, que les gens donnent à l'État québécois quand ils vont dans notre réseau de santé publique, ça ne devrait pas, ces données-là, tellement sensibles, se retrouver entre les mains d'entreprises privées sans le consentement des gens.

Si le ministre pense que le commun des mortels au Québec, en allant chez son médecin de famille, consent implicitement à ce que ces données-là se ramassent indirectement, par la suite, entre les mains, par exemple, d'une grande entreprise pharmaceutique pour développer des nouvelles technologies ou des médicaments, là, je pense qu'il se méprend sur la relation qu'ont les gens envers leur professionnel de la santé, par exemple. Je pense que, quand les gens vont voir un médecin puis qu'ils se confient sur leur santé, là, ils partent avec l'attente d'une énorme confidentialité puis que, sans leur consentement, sans leur... et ce n'est pas un détail, ça, c'est le coeur de notre débat, que, sans leur consentement, on transmet ces données-là pour des fins de recherche à des entreprises privées, je pense qu'on vient enfreindre un principe, qu'il y a quelque chose de fondamental dans une société comme la notre. Je le pense vraiment.

M. Caire : Bien, M. le Président, je suis... Là, sérieusement, je suis farouchement en désaccord avec mon collègue, parce que, suivons le raisonnement, si c'est l'Agence du revenu du Québec, pas de problème puis ça va bien, on peut, sans le consentement, en suivant les prérogatives des trois articles, on peut. Si c'est l'Université Concordia, pas de problème, on peut. Mais, si c'est l'Université Laval, le ministère de la Santé et AstraZeneca, ah, non. Bien non, là, il y a AstraZeneca. Non, non, non. Là, les Québécois ne veulent plus.

Bien, moi, je ne suis pas d'accord, M. le Président. Ce que les Québécois ne veulent pas, puis où on s'entendait bien, le collègue de Gouin et moi, c'est de dire qu'il y avait des normes, des règles, des directives qui étaient suivies par tout le monde, qu'il n'y avait pas de distinction à faire sur le statut de ceux qui étaient les utilisateurs, qu'il n'y avait que des règles à suivre et qu'on devait se conformer aux règles. Là, la notion que le député de Gouin amène, c'est que, la règle, elle est différente en fonction du statut. Donc, si l'organisme est public ou parapublic, tout va bien. Si l'organisme est privé, ah, non, là, cette règle-là ne s'applique plus, il faut exclure parce que c'est une entreprise privée.

Et c'est la raison pour laquelle j'ai posé ma question au député de Gouin : Pourquoi? Pourquoi une entreprise qui participerait à un protocole de recherche, ça change la donne? Bien, parce qu'il y a une notion de recherche qui pourrait amener cette entreprise-là à faire des profits. Oui, mais, si ça se fait dans l'intérêt public, si ce n'est pas incompatible avec l'intérêt public, si toutes les règles que nous avons mises en place sont suivies... Ah! non, là, il y a la notion de profits d'entreprise privée, ça ne marche plus.

Donc là, il y a comme une distinction qui se fait en fonction du statut de qui accède, et c'est là où, le député de Gouin et moi, on ne s'entendra pas. Moi, je fais une règle qui est valable pour tout le monde. Cette règle-là, elle est valable pour les entreprises publiques, les entreprises parapubliques, elle est valable pour les entreprises privées. Et dans la mesure où on se conforme à la règle, ça me va, mais il faut se conformer à la règle. Et pour mon collègue de Gouin, ce n'est pas juste de se conformer à la règle. Si vous n'avez pas un statut public, là, c'est plus que se conformer à la règle, je dois d'emblée vous exclure. Bien, je suis désolé, M. le Président, mais là je ne peux pas être d'accord avec ça.

• (18 h 10) •

Le Président (M. Bachand) : Bon. Me Miville-Deschênes, là.

M. Nadeau-Dubois : M. le Président, je vais répondre d'abord au ministre.

Le Président (M. Bachand) : Il vous reste 20 secondes, M. le député.

M. Nadeau-Dubois : Si c'était impertinent de faire la distinction entre le public puis le privé, là, il n'y aurait pas deux lois, une pour le public puis une pour le privé. Il y en aurait une.

S'il y a deux lois, c'est parce que ces institutions-là ont des fonctions différentes dans la société, et, par définition, il est légitime d'établir des règles distinctes. Sinon, il n'y aurait pas deux lois sur la protection des renseignements personnels, il n'y en aurait qu'une.

M. Caire : Bien, je rappelle au député que nous avons cette discussion-là parce que ces articles-là s'adressent autant au public qu'au privé. Donc, dans le cas de l'article 23, il inclut le public et le privé. Donc, il n'y a pas... Il y a deux lois, mais cet article-là est valable pour tout le monde. C'est pour ça qu'on a eu cette discussion-là, parce que, s'il ne s'appliquait pas au privé aussi, nous n'aurions pas cette discussion-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement du député?

S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

M. Caire : Bien, M. le Président, je ne sais pas, est-ce que Me Miville-Deschênes voulait intervenir? Avec le consentement.

Le Président (M. Bachand) : Non, mais le consentement est bon pour la séance. Allez-y.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, je voulais juste mettre en perspective que présentement l'article 125 de la Loi sur l'accès autorise, là, une communication sans consentement à des fins de recherche. Le projet de loi a pour effet, en fait, de retirer l'autorisation préalable de la commission, là. Au lieu d'être l'organisme public qui détient les renseignements et la commission qui approuve, il y a comme deux approbations. Bien, c'est uniquement l'organisme public qui détient les renseignements puis il informe la commission, mais cette communication-là est déjà permise actuellement, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Abstention.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Merci. Interventions? M. le député de Gouin.

M. Caire : M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Oui.

M. Caire : J'ai une question, parce qu'avec les collègues on a quand même abordé l'article 67.2.2. Est-ce que je ne serais pas mieux, à ce moment-là... et 67.2.3. On peut continuer comme ça ou, sinon, je peux lire l'amendement qu'on a à 67.2.3.

M. Tanguay : ...on a encore... J'ai encore des choses. Moi, ce que j'ai réalisé, M. le Président... J'ai encore des choses à dire sur 67.2.1. Puis, si d'aventure, je l'avais débuté... Alors, je pense qu'on a sauté rapidement, après 23, à 67.2.2, mais on est en train de faire le débat à 67.2.1.

M. Caire : Pas de problème.

Le Président (M. Bachand) : Mais l'idée, là, c'est qu'on peut... Il y a quand même une flexibilité, là.

M. Nadeau-Dubois : ...67.2.1.

M. Tanguay : Tu en as un autre?

M. Nadeau-Dubois : J'ai d'autres choses à dire sur 67.2.1.

M. Caire : Oui, oui, oui. Non, non, c'est parce que...

M. Nadeau-Dubois : À moins que le ministre nous dise que son amendement à 67.2.3 modifie comment on va comprendre et lire le 67.2.1. Sinon, on peut y aller, on finit 1, on passe à 2 et on passe à 3.

M. Caire : Oui, oui, je n'ai pas de trouble. C'est juste que, comme on en parlait aussi, je me disais : Voulez-vous qu'on fasse tous les amendements puis, après ça, aller sur les trois articles?

M. Nadeau-Dubois : Moi, ça ne me dérange pas.

M. Caire : Si vous préférez qu'on reste sur 67.2.1, pas de problème avec ça.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Alors, sur 67.2.1, puis peut-être que le collègue de Gouin aura des choses à dire sur le paragraphe 2° du deuxième alinéa, mais je vais me risquer avec un amendement puis, je veux dire, tout est dans tout, surtout dans ce qu'on fait. Alors, il y a un amendement, qui était dans la zone «amendements à venir», que j'aimerais lire. Je vais juste rafraîchir puis, peut-être, vous aiguiller sur la bonne zone. Alors, «amendements à venir», c'est là que vous allez... Non, allez... Amendement... Je cherche l'amendement, là. En cours, oui, «amendements en cours». O.K. Je vais rafraîchir. Comme on dit, des fois, l'été : Je vais aller me rafraîchir. Alors, député de Rousseau...

Alors, article 23 : Dans le troisième paragraphe du deuxième alinéa de l'article 67.2.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, introduit par l'article 23 du projet de loi, ajouter, après «l'emporte», les mots «eu égard à l'intérêt public,».

Alors, ça, M. le Président, ça fait écho directement d'une recommandation du Protecteur du citoyen qui demandait de préciser. Puis honnêtement, ici, là, avec...

M. Caire : Puis c'est où, là?

M. Tanguay : ...avec Sophie... Deuxième alinéa, troisième paragraphe. Avec Sophie, j'avais une discussion de dire : Bien, voyons donc... Avant qu'elle me réfère à cette recommandation-là, j'ai dit... j'avais de la misère à le lire. L'objectif, si on... N'eut égard du... N'eut été de l'amendement, ça se lirait : «l'objectif de l'étude, de la recherche ou de la production — donc on ne qualifie pas l'objectif, l'objectif, ça peut être n'importe quoi — l'emporte sur l'impact de la communication et de l'utilisation des renseignements sur la vie privée des personnes concernées.»

Alors, si on n'a pas... Si on ne sait pas de quoi on parle, on ne peut pas en arriver à une conclusion. Alors, l'objectif l'emporte, mais l'objectif peut être — je ne veux pas rouvrir, là, des plaies fraîchement refermées — il peut être commercial, il peut être collectif, il peut être n'importe quoi, l'objectif, là. Mais en ajoutant, donc, Protecteur du citoyen, «eu égard à l'intérêt public»... Et, quand j'ai vu ça, ça m'a réconcilié avec l'article, de un. Et, de deux, ça revient aussi, juste pour terminer, ça revient un peu...

M. Caire : ...ça serait le paragraphe 3° : «l'objectif de l'étude, eu égard à l'intérêt public...» C'est parce que je n'ai pas le...

M. Tanguay : Non, après «l'emporte».

M. Caire : Il se lirait comment, là?

M. Tanguay : Ah! vous ne l'avez pas, l'amendement? Mais je peux vous le lire. Il se lirait...

M. Caire : Oui, mais c'est juste que je n'ai pas l'article.

M. Tanguay : Je vais vous le lire. Alors, il se lirait comme suit, je vais commencer au début : «La communication — deuxième alinéa — peut s'effectuer si une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée conclut que :

«3° l'objectif de l'étude, de la recherche ou de la production de statistiques l'emporte, eu égard à l'intérêt public, sur l'impact de la communication et de l'utilisation des renseignements sur la vie privée des personnes concernées.»

Autrement dit, si c'est dans l'intérêt public que l'objectif surpasse les risques ou les impacts de la communication puis l'utilisation, go. Et ça, ça me réconciliait. Avec ma lecture de 3°, là, c'était plus précis, de un, et, de deux, ça me rapproche un peu de l'idée que je vous ai envoyée — on s'est envoyé ça entre nous, là — sur la déclaration de principe dont j'avais parlé un peu plus tôt. Voilà. Ce n'est pas de mon cru. J'aurais aimé, mais ça ne l'est pas. Je n'ai aucun droit d'auteur, c'est le Protecteur du citoyen.

M. Caire : Bien, moi, je serais très favorable à ça. Je n'aurais pas de problème avec ça.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Bien, c'était... Le député de LaFontaine, là, a lu dans mes pensées. C'était le deuxième amendement que je souhaitais proposer. Donc, tant mieux. Tant mieux, c'est une excellente proposition. C'est une recommandation aussi de la Commission d'accès à l'information. J'y faisais allusion, il y a quelques instants, que l'usage des données qui sont transmises par des organismes publics à des fins de recherche, bien, que les objectifs de ces activités de recherche là soient l'intérêt public, ce qui me semble essentiel, parce qu'en effet je ne pense pas que les «big pharma» travaillent pour l'intérêt public, alors qu'une entreprise... alors que, par exemple, des projets de recherche dans nos universités, eux, menés pour des intérêts d'avancement de la connaissance dans ces institutions-là dont c'est l'objectif, ça, ça me semble remplir le critère de l'intérêt public.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : J'ai eu peur, pendant une certaine secousse, quand le collègue de Gouin a dit : J'avais le même amendement.

M. Nadeau-Dubois : Non, c'est positif.

• (18 h 20) •

M. Tanguay : À cette heure qu'il est présenté par le collègue de LaFontaine, je le relis puis je le trouve moins bon.

M. Caire : Ha, ha! Ce n'est plus bon.

M. Tanguay : C'est comme en droit, quand on allait en Cour d'appel puis qu'on disait : Très cher juge, on appelle d'une décision rendue par le juge X, mais ceci n'est pas notre seul motif d'appel.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Tanguay : Alors, ça va pour moi, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement?

M. Caire : Ça va.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Merci beaucoup. Interventions?

M. Nadeau-Dubois : Je vous demanderais une brève suspension, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Oui. Alors, on va suspendre quelques instants. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 18 h 21)

(Reprise à 18 h 24)

Le Président (M. Bachand) : Merci. À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît. M. le député de Gouin, oui.

M. Nadeau-Dubois : Non, je n'ai pas d'intervention spécifique à faire.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Parfait, ça va. Donc, interventions? M. le député...

M. Nadeau-Dubois : C'était pour faire l'amendement que le député de LaFontaine a fait.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Oui, M. le député de LaFontaine, oui.

M. Tanguay : O.K. 67.2.1, deuxième alinéa... Deuxième paragraphe, quand on dit : «La communication peut s'effectuer si une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée conclut qu'il est déraisonnable d'exiger que la personne ou l'organisme obtienne le consentement des personnes concernées», eu égard à quoi, il est déraisonnable? Eu égard à la lourdeur de ce que ça impliquerait?

M. Caire : Bien, on pourrait penser au volume. C'est l'exemple que je donnais au collègue de Gouin tantôt. On peut penser à l'Agence du revenu qui aurait un protocole de recherche sur une application d'intelligence artificielle qui fait de la détection de fraude et qui voudrait utiliser, à cette fin-là, quelques millions de dossiers fiscaux des Québécois, là, on comprend qu'on est dans le renseignement personnel comme pas à peu près, et qui voudrait tester la rapidité, l'acuité, la précision de cette application-là, mais, ce faisant, qui devrait contacter individuellement 8 ou 5 millions de contribuables en leur demandant s'ils acceptent que leur dossier fiscal serve à un protocole de recherche. On peut penser que ce serait considéré comme déraisonnable.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.

M. Tanguay : Quand on dit «une évaluation des facteurs relatifs», une évaluation des paragraphes 1° à 5° est faite. On lisait tantôt 67.2.2, où on disait : «La personne ou l'organisme qui souhaite utiliser». Dans tous les cas d'espèce de 67.2.1, il y aura 67.2.2. C'est ce que je comprends.

M. Caire : Oui.

M. Tanguay : Et 67.2.2 nous demande de constater cette évaluation-là par écrit, ou je ne dois pas lire 67.2.2 comme étant qu'à un moment donné il va nécessairement et systématiquement y avoir un écrit qui va statuer sur les cinq paragraphes de 67.2.1?

M. Caire : Bien, en fait, ce que ça dit, si vous regardez 67.2.2, paragraphe 3°, «exposer les motifs pouvant soutenir que les critères mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du deuxième alinéa de l'article 67 sont remplis». Donc, vous devez faire une démonstration. D'abord, quand on dit, paragraphe 1°, «faire sa demande par écrit», c'est faire la demande d'utilisation des renseignements personnels, «joindre son protocole de recherche», donc quelle est la séquence que vous allez utiliser. Et vous devez nous faire la démonstration que 1°, 2°, 3°, 4°, 5°, donc l'objectif de l'étude, de la recherche, ne peut être atteint que si les renseignements... Donc, vous me faites toute une démonstration, là, un justificatif que ces critères-là sont rencontrés, là.

C'est pour ça que je disais : C'est quand même un processus qui est assez contraignant, qu'il y a beaucoup de démonstrations à faire quant au fait que les démarches ont été faites sérieusement. Vous devez démontrer, notamment, qu'il serait déraisonnable... Donc, comme je vous dis, dire : Bon, bien, dans votre protocole de recherche, vous pourriez exposer le fait que vous avez besoin des dossiers fiscaux de 2, 3, 4 millions de Québécois pour avoir quand même des données probantes, donc, de les appeler un par un nécessiterait un effort inimaginable, que l'objectif de l'étude, de la recherche, de la production de statistiques l'emporte sur l'impact eu égard à l'intérêt public avec l'amendement que vous avez apporté, donc, que vous faites la démonstration que l'impact de la recherche est plus positif que l'impact sur la vie privée et que ça se fait dans l'intérêt public.

Donc, vous avez une série, là, de démonstrations à faire avant d'en arriver à avoir le consentement à l'utilisation des renseignements personnels sans le consentement des personnes concernées.

M. Tanguay : Quand on analyse tout ça, ce que le ministre dit, il faut l'avoir, il faut l'analyser en ayant, derrière la tête, l'impact de 24. On me détrompera si ma lecture n'est pas bonne, mais 24 vient abroger, remplacer par d'autres choses 68.1 et 70, notamment, qui faisaient en sorte que c'était la Commission d'accès à l'information qui, jadis, donnait la permission. Là, on sort ça de la Commission d'accès à l'information, et c'est l'organisme public visé qui, lui, va faire toutes les étapes. Donc, pourquoi avoir décidé d'enlever le grand frère au-dessus de notre épaule?

M. Caire : En fait, d'une part, c'est à la demande de la Commission d'accès à l'information, de faire ça. D'autre part, la Commission d'accès à l'information, elle est avisée. Le consentement... On n'a plus à aller chercher le consentement de la Commission d'accès à l'information, mais elle est avisée, si bien qu'elle peut intervenir si elle le juge à propos, contrairement à un consentement systématique où, dans tous les cas de figure, la Commission d'accès à l'information devait se pencher sur l'analyse du dossier, produire un rapport de cette analyse-là et, de ce fait, octroyer le consentement au protocole de recherche. Bon, sans vouloir répondre à la place de la Commission d'accès à l'information, j'imagine qu'ils ont jugé que c'était mieux d'en être avisé puis d'intervenir, le cas échéant, que d'avoir à faire toute cette analyse-là pour, systématiquement, dans x nombre de % des cas, de toute façon, en arriver à donner son consentement.

M. Tanguay : Donc, on responsabilise l'organisme public qui a des obligations, le haut dirigeant et tout ça, article 8, mais la commission va en être avisée. Mais on ne sait pas ce que va en faire la commission. Ça va être au bon plaisir de la commission.

M. Caire : Tout à fait.

M. Tanguay : Est-ce qu'on va dire, dans les responsabilités de la commission, «doit veiller à», papi, papa, les protocoles qui leur seront communiqués, là?

• (18 h 30) •

M. Caire : Oui. Bien, il y a déjà un certain nombre de responsabilités. Dans le fond, ce que je perçois de ça, c'est que la commission va vouloir être avisée puis dire... bon, bien, soit faire des analyses aléatoires, soit se pencher particulièrement sur certains... En fait, ce que je pense, c'est que la commission veut être dédouanée de la faire systématiquement parce que ça doit amener un certain volume de travail. Probablement que la commission en est arrivée à la conclusion que, dans x pourcentage des cas, de toute façon, elle donnait son consentement, donc, que c'est peut-être préférable pour elle d'y aller par échantillon ou, lorsqu'il y a quelque chose qui lui semble plus ou moins en accord avec la loi, bien là, d'avoir cette capacité-là d'intervenir. Donc, du fait qu'elle est avisée, elle a la capacité d'intervenir si elle le juge à propos.

Le Président (M. Bachand) : Merci, tout le monde. Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 18 h 31)

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