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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Tuesday, February 16, 2021 - Vol. 45 N° 119

Clause-by-clause consideration on Bill 84, An Act to assist persons who are victims of criminal offences and to facilitate their recovery


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. André Bachand, président

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

Mme Christine Labrie

Mme Kathleen Weil

M. Mathieu Lévesque

Mme Véronique Hivon

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président, M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est remplacé par Mme Labrie (Sherbrooke).

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Cela dit, je vous rappelle que le port du masque de procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de prendre la parole, tel que prévu à l'ordre de l'Assemblée du 2 février qui encadre la reprise des travaux parlementaires.

Étude détaillée (suite)

 Lors de la suspension de nos travaux jeudi dernier, il avait été convenu de suspendre l'étude des articles 3 à 9 inclusivement du projet de loi, et les discussions portaient sur l'article 10 du projet de loi. Interventions? M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Suite à nos discussions, que nous avons eues la semaine dernière en lien avec la scène intacte, les équipes ont travaillé le week-end, la fin de semaine dernière, et je tiens à les remercier, et on pourra proposer un amendement à l'article 10 plutôt qu'à l'article 13. Donc, ce que nous allons faire, nous allons ramener la notion de scène intacte à l'article 10, en lien avec ce dont nous avions discuté avec les collègues des oppositions. Donc, je vais vous lire l'amendement, M. le Président.

D'entrée de jeu, préciser qu'il y a les deux conditions qu'on avait discutées l'autre fois, le fait que la personne victime se retrouve toujours sur les lieux et qu'il y a un premier répondant qui est toujours présent sur les lieux, mais on a ajouté, et j'ai ajouté une troisième condition rattachée au fait qu'il faut que ça soit une des personnes prévues à l'article... aux paragraphes 2° à 6°. Donc, la personne constitue le conjoint, constitue un proche, constitue le frère, la soeur ou... avec le noyau familial, dans le fond, de la personne, pour faire en sorte que le témoin qui va être couvert après l'arrivée du premier répondant et quand la victime est toujours sur les lieux, ça va être une personne qui va avoir un lien avec l'individu, parce qu'on souhaite faire en sorte que ce ne soit pas n'importe quel témoin qui arrive après la scène qui puisse être indemnisé. On avait eu cette discussion-là lors de la dernière séance, c'est ce que j'exposais à mes collègues, du fait que les passants seraient indemnisés, sinon... tant que la personne est présente puis qu'il y a un premier répondant qui arrive.

Donc, on fait un rattachement aux critères des personnes qui sont visées par les articles 2° à 6°, et ça amène le fait que le cas qui été notamment médiatisé beaucoup, de M. Boudreault notamment, et qu'on a entendu aussi, serait couvert désormais par cette exception-là. Donc, la personne qui arrive sur les lieux, il y a un lien avec la personne parce que ça constitue un membre de sa famille, donc il serait couvert. Donc, on va déposer l'amendement, je vais en faire la lecture.

Le Président (M. Bachand) : Alors, l'amendement est déjà sur Greffier. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, article 10 : Remplacer le deuxième alinéa de l'article 10 du projet de loi par les suivants :

«Le témoin visé au paragraphe 7° du premier alinéa inclut :

«1° toute personne visée à l'un des paragraphes 2° à 6° de cet alinéa qui est témoin de l'endroit physique où l'infraction criminelle a été perpétrée contre la personne mentionnée à ces paragraphes qui est décédée ou qui subit l'atteinte alors que s'y trouvent encore cette personne et un policier, un agent de la paix, un pompier, un technicien ambulancier d'un service préhospitalier d'urgence ou tout autre premier répondant;

«2° un témoin qui n'est pas présent sur le lieu au moment de la perpétration de l'infraction, mais qui en est malgré tout témoin parce qu'il est en communication avec la personne victime visée au paragraphe 1° du premier alinéa ou avec l'auteur de l'infraction. Cette communication doit remplir les conditions suivantes :

«a) elle se fait par l'intermédiaire d'un moyen technologique;

«b) elle implique un échange actif entre le témoin et la personne victime ou l'auteur de l'infraction;

«c) elle se fait sans autre interruption que le temps requis pour préparer et transmettre ou recevoir l'élément suivant de l'échange;

«d) elle permet au témoin de constater visuellement, auditivement ou en lisant l'infraction au moment de sa perpétration.

«La scène intacte correspond à l'endroit physique où une infraction criminelle a été perpétrée avant que ne s'y trouve un premier répondant mentionné au paragraphe 1° du deuxième alinéa.»

Commentaires : L'amendement à cet article vise d'abord à déplacer ici la définition de la scène intacte qui se trouve actuellement à l'article 13. Ce déplacement faciliterait la compréhension de l'article 10 en rapprochant la définition du concept.

Donc, peut-être, M. le Président et Mme la secrétaire, si on peut descendre à la deuxième page de l'amendement où on va voir la version consolidée, donc, avec le soulignement, oui. Donc, voyez-vous, l'article 10 se lit en intégralité ainsi :

«10. Aux fins du présent titre, les personnes victimes suivantes ont droit à une aide financière, selon les modalités qui y sont prescrites :

«1° la personne qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle à son égard;

«2° le parent d'un enfant qui est décédé ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cet enfant ou la personne qui, à l'égard de cet enfant, est titulaire de l'autorité parentale;

«3° l'enfant d'un parent qui est décédé ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre ce parent ou l'enfant à l'égard de qui une personne qui est décédée ou qui subit une même atteinte est titulaire de l'autorité parentale;

«4° le conjoint d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cette personne;

«5° la personne qui est à la charge d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cette dernière personne;

«6° le proche d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cette personne;

«7° le témoin de la perpétration d'une infraction criminelle ou de la scène intacte de cette infraction.

«Le témoin visé au paragraphe 7° du premier alinéa inclut — et c'est là la modification qu'on apporte, si on peut juste descendre le visuel, là, un petit peu :

«1° toute personne visée à l'un des paragraphes 2° à 6° de cet alinéa qui est témoin de l'endroit physique où l'infraction criminelle a été perpétrée contre la personne mentionnée à ces paragraphes qui est décédée ou qui subit l'atteinte alors que s'y trouvent encore cette personne et un policier, un agent de la paix, un pompier, un technicien ambulancier d'un service préhospitalier d'urgence ou tout autre premier répondant;

«2° un témoin qui n'est pas présent sur le lieu au moment de la perpétration de l'infraction, mais qui en est malgré tout témoin parce qu'il est en communication avec la personne victime visée au paragraphe 1° du premier alinéa ou avec l'auteur de l'infraction. Cette communication doit remplir les conditions suivantes :

«a) elle se fait par l'intermédiaire d'un moyen technologique;

«b) elle implique un échange actif entre le témoin et la personne victime ou l'auteur de l'infraction;

«c) elle se fait sans autre interruption que le temps requis pour préparer et transmettre ou recevoir l'élément suivant de l'échange;

«d) elle permet au témoin de constater visuellement, auditivement ou en lisant l'infraction au moment de sa perpétration.

«La scène intacte correspond à l'endroit physique où une infraction criminelle a été perpétrée avant que ne s'y trouve un premier répondant mentionné au paragraphe 1° du deuxième alinéa.»

Donc, essentiellement, ça reprend les discussions que nous avons eues lors de la précédente séance, le tout sous réserve du critère que j'ai ajouté, relativement au fait que le facteur de rattachement doit être une des personnes visées de 2° à 6° pour que ça ne soit pas uniquement, dans le fond, le citoyen qui passe sur la rue et qui s'approche de la scène. On veut avoir un facteur de rattachement. Donc, on élargit la notion de scène intacte, mais en lien avec une personne significative par rapport à la personne qui subit l'homicide ou qui subit l'atteinte à son intégrité physique par une autre infraction criminelle.

• (9 h 40) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Avant l'amendement, M. le Président, 7° ajoutait le tiers, le tiers, lorsqu'on le compare à 1°, 2°, 3°, 4°, 5°, 6°. Là, avec l'amendement, on vient d'éliminer — donc, on vient de fermer une porte — le tiers parce que le témoin doit être 2° à 6°.

M. Jolin-Barrette : Non, M. le Président. Dans le fond, le tiers est un témoin... ou on apporte une modification, parce que la notion de la scène intacte, là, elle était rattachée à toute personne qui arrivait avant l'arrivée du premier répondant. Donc, si vous arriviez avant le premier répondant, vous étiez couvert. Les collègues des oppositions m'ont dit : Bien là! Le cas, supposons, de M. Boudreault qui arrive après l'arrivée des policiers, c'est terminé, vous ne pouvez pas être indemnisé à titre de témoin. Là, ce qu'on vient faire, on vient dire : Si vous arrivez après les premiers répondants, et que la victime est toujours présente, vous allez être couvert si vous rentrez dans la catégorie 2° à 6° parce que vous avez un lien avec la victime. Ça, c'est pour l'aspect : on arrive après le premier répondant.

Par contre, si vous êtes un témoin de l'infraction, donc avant l'arrivée des policiers, avant l'arrivée des répondants, ça, ça ne change pas, vous allez être indemnisé comme un témoin. Donc, exemple, prenons l'événement à Québec qui est survenu sur la rue des Fortifications, les témoins qui ont vu, qui ont porté secours avant l'arrivée des policiers, qui ont vu les gestes qui ont été commis sont considérés comme des témoins et seront indemnisés comme des témoins. Par contre, à partir du moment où le premier répondant est arrivé, pour devenir... être indemnisé suite à la scène intacte, il va falloir que vous soyez dans les personnes visées de 2° à 6°. Ça signifie, là... Je vais vous donner un autre exemple concret, là, pour qu'on se comprenne bien, là, le drame qui est survenu à Wendake, dans les médias, on a beaucoup vu le grand-père des victimes qui est arrivé sur les lieux après la tragédie. Bon, avec la version originale que nous avions, le grand-père n'aurait pas été indemnisé comme un témoin de la scène, il aurait été indemnisé comme un proche à titre de grand-parent. Là, avec la modification qu'on apporte, puisqu'il rentre dans les catégories 2° à 6°, il va être considéré comme un témoin de la scène parce qu'il arrive... un coup que, la victime, elle est présente, il arrive après l'arrivée des premiers répondants, mais il va être considéré comme un témoin de l'événement. Donc, on remplit ce à quoi les collègues des oppositions souhaitaient, mais, par contre, un coup que le premier répondant est là, toute autre personne éloignée de la victime ne sera pas considérée comme un témoin de la scène, et c'est motivé notamment parce que... ce que j'ai expliqué à la séance précédente, du fait que, bien, ça n'arrive qu'à partir du moment où il y a un événement, il y a une voiture de police, il y a des gyrophares, bien, il y a des gens qui se dirigent, qui convergent vers la scène, beaucoup. Et c'est d'autant plus normal, l'élargissement que nous faisons en lien avec les personnes significatives, parce qu'il arrive un événement à votre domicile ou il arrive un événement que vous reconnaissez l'adresse, que c'est un proche à vous, bien, vous allez nécessairement vous diriger vers la maison. Qu'est-ce qui vous arrive? Qu'est-ce qui est arrivé chez moi? Donc, ça évite que le conjoint, la conjointe, les enfants, les proches, les grands-parents ne soient pas considérés comme des témoins.

M. Tanguay : Là, j'ai beaucoup de questions de compréhension, j'en suis sur la compréhension, je n'en suis pas sur le jugement de la chose, puis j'ai plusieurs questions de compréhension pour m'assurer de comprendre ce qu'on fait ici. Alors, je vais... Puis avec mes questions, le ministre va savoir : O.K., il est rendu là, là. Puis il va savoir que je ne suis pas rendu loin dans la compréhension.

L'article 10 nous dit la liste... nous donne la liste des personnes qui sont reconnues comme victimes afin d'obtenir une aide financière. On commence, 1°, évidemment, la personne qui subit une atteinte à son intégrité à cause d'une infraction criminelle. 1°, c'est très clair. Puis là on poursuit la liste, 2°, le parent, puis là d'un enfant décédé, intégrité. Ça, c'est une autre catégorie de gens qui sont reconnus comme victimes au sens de l'article 10 puis qui aurait droit, le cas échéant, à une aide financière : l'enfant d'un parent, 3°, le conjoint, 5°, la personne qui est à la charge, 6°, le proche d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité, 7°, le témoin de la perpétration d'une infraction criminelle, ajoutait une catégorie, indépendamment de ce qui précède. La première mouture, avant l'amendement de 7°, disait : Bien, la personne qui arrive alors que la scène est intacte, qui arrive puis qui voit la scène de crime et qu'il n'y a pas encore d'intervenant, de premier répondant, bien, elle, indépendamment du fait qu'elle ne cadre pas dans 2° à 6°, elle était déclarée comme victime. Voilà.

M. Jolin-Barrette : Elle est toujours couverte. Quand vous prenez l'amendement 10, paragraphe 7°, donc : «Aux fins du présent titre, les personnes victimes suivantes ont droit à une aide financière, selon les modalités qui y sont prescrites». Donc, ça, c'est le premier alinéa de 10. Si on descend au paragraphe 7°, on arrive... «le témoin de la perpétration d'une infraction criminelle», donc, ça, c'est le témoin direct, le témoin, là, qui voit un homicide, qui voit une agression sexuelle, qui est présent sur les lieux ou qui est en contact par moyen technologique avec la victime. Donc, ils sont dans deux salles différentes, dans deux endroits différents, il y a une interaction entre les deux, c'est de façon contemporaine, ce témoin-là, il est couvert.

M. Tanguay : D'accord. Aussi, puis on continue, 7°, ce témoin-là tiers qui arrive, oups, ça se fait, il est victime, voilà, où, la deuxième portion de 7°, là, on garde la scène intacte pour lui.

M. Jolin-Barrette : On garde la scène intacte pour lui. Donc...

M. Tanguay : Puis nous, on voulait désintacter la scène...

M. Jolin-Barrette : Non, non, mais on rejoint l'objectif, on rejoint l'objectif suivi. La personne qui arrive, le tiers qui arrive sur les lieux, s'il arrive avant le premier répondant...

M. Tanguay : C'est toujours le même cas, ça, vous n'avez pas bougé là-dessus.

M. Jolin-Barrette : C'est le tiers.

• (9 h 50) •

M. Tanguay : Notre point était de dire... notre compréhension de ce qu'on avait convenu, c'était tout simplement de définir «scène intacte» pour le tiers de la manière suivante... puis, la dernière fois, M. le Président, on va préciser, là, la personne... l'acte criminel a eu lieu au temps zéro, la personne n'est pas là, donc elle ne se qualifie pas en vertu de la première partie de 7°, le témoin n'a pas été témoin au temps zéro de l'acte criminel, mais de la scène intacte, la personne arrive, il n'y a aucun répondant, premier répondant, la personne arrive, ça s'est fait il y a une minute, elle voit la victime par terre, elle, elle est couverte par 7°, scène intacte.

Ce qu'on se disait, bien, «scène intacte», on peut-tu s'assurer que la personne qui arrive, ça vient de se faire, il y a la victime qui est toujours là, si la victime a quitté, bien, il n'y a pas de scène intacte, mais la victime est toujours là et le ou les premiers répondants sont là, si c'est une patrouille de deux policiers, deux policières qui arrivent. Ça, on voulait élargir le tiers, puis indépendamment de 2° à 6°, là, qui arrive, ça s'est fait il y a une minute, les policiers sont arrivés après deux minutes, moi, j'arrive, j'ai concomitance de la présence de la victime puis des deux premiers répondants. Et, tant que ces deux conditions-là sont réunies, c'est sûr que les personnes qui arrivent après cinq minutes, 10 minutes, ça fonctionne. Là, on pourrait peut-être ajouter un ingrédient, là, je veux dire, c'est la scène, c'est la scène de crime, et on voulait permettre à une personne qui dit «bien, moi, j'en ai été traumatisé» de pouvoir déposer une demande qui va être évaluée, hein, il faut toujours garder ça en tête, ce n'est pas... vous ne gagnez pas, là, vous ne gagnez pas un montant d'argent qui n'est pas dû puis qui n'est pas justifiable. Après ça, vous devez faire la demande... moi, j'ai été bouleversé... Alors, juste sur ce bout-là, je suis un petit peu déçu, puis je le dis en tout respect, là, que la scène intacte n'a pas été élargie pour le tiers. Cette porte-là reste fermée.

M. Jolin-Barrette : Bien, l'enjeu qu'il y a avec la position, la proposition des collègues, c'est que le facteur de rattachement, il est sans limites pour un tiers, il est sans limites.

M. Tanguay : On en mettait une limite, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, la limite, elle est là pour la personne... les alinéas 2° à 6°, dans le fond, il faut que la présence de la personne soit présente... la victime soit toujours présente et que le premier répondant soit présent aussi parce que, par rapport à ce que j'ai exposé lors de la dernière séance, parfois le corps reste là plusieurs heures ou... si c'est un homicide. Après ça, si c'est une agression autre qui n'est pas un homicide, la victime... Imaginez que c'est à la maison, ou que c'est dans un lieu où la personne elle fréquente... ou sur le lieu de travail, la personne va y être... Le député de LaFontaine, il en a du stock pour passer à travers la pandémie.

M. Tanguay : Ah non! la boîte n'est pas pleine, là, il y en a trois.

M. Jolin-Barrette : La boîte n'est pas pleine? O.K. Donc, la personne qui subit une infraction criminelle, elle, sera présente et avec le premier répondant, mais, à partir du moment où le premier répondant peut être là durant un bon bout de temps aussi, il faut délimiter le tout. Et lorsqu'il y a des masses de population qui sont là, le critère pour être admissible parce que, dans le fond, l'IVAC, c'est un régime général, ce n'est pas... Dans le fond, l'analyse du préjudice, c'est une analyse individualisée, mais toutes les autres aides, et c'est ce qu'on fait dès le départ, en termes de soutien psychologique, les différentes autres aides financières peuvent s'enclencher dès le départ.

Donc, moi, je pense que la proposition qu'on vous fait ce matin, de dire : Bien, écoutez, le père d'un enfant majeur qui n'est plus à charge arrive sur les lieux de l'événement, il sera indemnisé, il va être considéré comme un témoin, le grand-père qui arrive sur les lieux, il sera indemnisé, la personne significative pour la victime qui arrive sur les lieux, supposons, là, que la personne significative qui est identifiée par la victime qui est agressée sexuellement, c'est sa voisine, supposons, de palier, puis que c'est elle qui est sa confidente ou...

M. Tanguay : Une amie proche.

M. Jolin-Barrette : ...une amie proche, bien, elle pourra être indemnisée avec l'amendement qu'on met en place. Par contre, on n'ouvre pas à tout tiers après l'arrivée des policiers.

M. Tanguay : Deux niveaux de compréhension. Je pense que le ministre va régler, pas mal assez rapidement, le premier, premier réflexe que j'ai, puis qui participe du deuxième, mais, si vous ajoutez... On essaie d'enfoncer, je pense, une porte déjà ouverte. Si vous dites : Je l'accorde, le statut de victime, dans le contexte de 7°, témoin, à 2° à 6°, qu'est-ce qu'on vient d'ajouter? Rien, parce que 2° à 6° sont déjà reconnus comme victimes, à moins que le ministre me dise : Non, non, non, parce que vous allez voir plus tard, on va faire écho de cela, si vous vous qualifiez comme, par exemple, 6°, proche d'une personne qui est décédée, vous avez droit à une certaine catégorie d'indemnisation, mais si en plus vous avez le malheur de vous qualifier dans le contexte de 7°, donc vous êtes une personne à 6°, mais vous avez été témoin à 7°, ça, cet amendement-là, on va y faire écho plus tard pour donner, d'abondant, d'autres types d'indemnisations financières. Est-ce que c'est ça qu'il faut comprendre?

M. Jolin-Barrette : Oui, la réflexion du député de LaFontaine est bonne, parce que les personnes qui sont victimes de 2° à 6°... bien, 2° à 7° même, n'ont pas nécessairement les mêmes aides financières. On va le voir un petit peu plus loin, ce qu'il est possible de faire, et aussi par voie réglementaire.

Je donne un exemple : La personne qui est victime de l'infraction elle-même va avoir beaucoup plus d'aide financière, au sens large, là, que, supposons, le grand-parent. Donc, le grand-parent obtiendra du soutien psychologique, supposons, parce que c'est un proche, il fait partie de la cellule familiale, mais, si la personne arrive sur les lieux à titre de témoin, est considérée comme témoin, les aides financières associées sont plus larges que celles si vous étiez uniquement un proche.

M. Tanguay : O.K., mais... Parce que, là, on a compris un autre niveau de... parce que...

M. Jolin-Barrette : Parce que la première étape, là, c'est de qualifier, puis c'est ce que fait l'article 10, c'est de qualifier. Contrairement à l'ancienne loi, où vous étiez victime directe ou rien pantoute, à peu près, là, la nouvelle loi, ce qu'elle fait, elle dit : On élargit la notion de personne victime. Donc, il y a la personne qui subit l'infraction et il y a tout son entourage aussi qui peuvent être considérés comme personnes victimes, c'est ça qu'on fait à l'article 10, c'est pour ça qu'on vient qualifier le parent d'un enfant décédé, l'enfant d'un parent décédé. Donc, le bassin de personnes victimes est plus large, et ces personnes victimes là vont avoir droit à différentes aides en fonction de la catégorie dans laquelle elles se trouvent. Et donc le témoin et la personne qui va être considérée comme le témoin se retrouvent à avoir des aides qu'il n'y aurait pas nécessairement dans une autre catégorie de 2° à 6°.

M. Tanguay : Première des choses, au niveau de la compréhension, on s'est rendu compte que, quand on parle de soutien, titre II, à savoir 2 à 9, à cela, on ne faisait pas écho à de l'aide psychologique qui serait remboursée et qui est considérée comme une aide financière. Donc, quand on dit «aide psychologique» par rapport au témoin, c'est dans la catégorie de l'article 10, même si on parle, article 10, aide financière, le premier réflexe du lecteur, c'est de dire : Ah! bien, il va y avoir une somme d'argent. Non, «aide financière» doit être aussi interprétée comme étant le remboursement d'une aide psychologique.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : Ça, c'est un élément qui a été établi, à notre surprise, quant au sens bien premier de ce que nous pourrions déduire de ça, aide financière, c'est de l'argent, non, aide financière, c'est de l'aide psychologique, on va te rembourser tout ou partie — espérons que ce sera tout, mais ça, ce sera un autre débat — de l'aide psychologique.

Mon point, considérant cela puis considérant que l'État, à un moment donné, il faut qu'elle resserre le robinet, là, si... Comment le ministre peut-il nous assurer ou pas qu'il dise : Non, non, ça va arriver que la personne qui se qualifie en vertu de 2° à 6° et qui, en plus, avec cet amendement-là, se qualifierait, aurait un deuxième qualificatif, donc proche à 6° puis témoin en plus, cette personne-là risque bien de se voir aidée financièrement par le remboursement d'aide psychologique, puis que ça ne lui donnera pas plus de quoi que ce soit à la fin de la journée, autrement dit, l'aide psychologique, vous allez l'avoir à 6°, mais vous allez l'avoir à 7°, peut-être vous allez passer de cinq à sept séances remboursées, mais j'essaie de comprendre, là, le...

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, là, le régime de la loi que nous proposons est fait de manière à ce que, si vous cadrez dans plus d'une catégorie, vous allez bénéficier du meilleur régime possible, de la meilleure catégorie qui vous est offerte. C'est...

M. Tanguay : Est-ce que... Question au ministre...

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, là, si, supposons, vous avez une indemnité de remplacement de revenus dans la catégorie que vous avez, bien, vous allez en bénéficier, et du soutien psychologique, s'il y a des aides qui sont offertes. Vous êtes catégorisé comme un proche et un témoin, vous allez bénéficier à la fois des aides qui sont offertes pour le témoin et des aides qui vous seraient offertes comme proche, ce n'est pas un ou l'autre, là.

M. Tanguay : Non, c'est cumulatif.

M. Jolin-Barrette : Exemple, le témoin, là, qui fait face à l'infraction criminelle, il aura de l'indemnité de remplacement de revenu, O.K., lui, puis il serait un proche, là, il serait le parent d'un enfant majeur, O.K., donc, lui, il arrive sur la scène, il va bénéficier d'une indemnité de remplacement de revenus qu'il n'aurait pas bénéficié s'il avait été uniquement un proche puis il n'avait pas vu la scène.

M. Tanguay : O.K. Là, c'est important, le changement — puis je le reconnais, M. le Président — qui est fait, parce qu'avant l'amendement c'était un ou l'autre, c'était vous étiez 1° à 7°, avant l'amendement.

M. Jolin-Barrette : Non, ça a... Dans le fond, là, ça a toujours été cumulatif... O.K., dans le fond, juste pour le député de LaFontaine...

M. Tanguay : Par contre, 1° à 6°, avant l'amendement, 1° à 6°, c'était un ou l'autre, 7° pouvait s'additionner.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait...

M. Tanguay : Parce que vous ne pouvez pas être un parent puis un proche en même temps, là.

• (10 heures ) •

M. Jolin-Barrette : Oui... bien, non, le parent, la catégorie, elle est supérieure, mais vous pouviez déjà être parent et témoin. Tu sais, dans le fond, là, si le parent arrivait avant les policiers, dans l'ancien article, là, donc il arrivait alors que la scène, elle était intacte, donc le parent qui trouvait son enfant victime d'une infraction criminelle, lui qui arrivait avant les policiers, avant les premiers répondants, était considéré à la fois comme parent mais à la fois également comme témoin. Là, ce qu'on vient faire, c'est qu'on vient élargir, on vient dire : Si vous êtes dans la catégorie 2° à 6°, O.K., puis que vous arrivez après les policiers, puisque vous êtes dans les catégories 2° à 6°, vous allez pouvoir bénéficier de ce que le témoin aurait pu bénéficier, le témoin auditif, visuel ou... bien, c'est ça, visuel.

M. Tanguay : Dans la communication, là, contemporaine, et ça, M. le Président, on aura l'occasion... parce que le projet de loi fait 190 articles, on est au troisième article analysé ou quatre, le ministre dit : Ça va être prévu par règlement. C'est excessivement important ça, qu'est-ce qui sera possible d'obtenir si vous vous qualifiez en vertu de 1°, 2°, 3°, 4° et, le cas échéant, 7°. Est-ce que le ministre peut nous dire que ça, ça va faire partie de nos débats? Parce que, si on délègue ça, réglementairement parlant, c'est excessivement important. La personne, est-ce qu'elle va juste avoir... «juste», entre guillemets, c'est important, là, mais des séances remboursées de psychothérapie ou va pouvoir obtenir... avoir accès à de l'argent, le choix à une indemnisation financière, là, le choix de 7°, de le mettre ou pas? Est-ce que ça va paraître dans la loi?

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, actuellement, dans la loi, à l'article 17, là, ça indique, là : «Une personne victime qui se qualifie comme telle en vertu de plus d'un paragraphe du premier alinéa de l'article 10 ou de l'article 11 a droit à toutes les aides financières prévues au présent titre à l'égard de chaque catégorie de personne victime visée à ces paragraphes, sous réserve que, lorsque la même aide est offerte à l'égard de plus d'une catégorie, il n'y a pas de cumul de cette aide.» Donc, exemple, si vous étiez dans deux catégories où il y a du remplacement de revenu, vous ne pouvez pas avoir du remplacement de revenu fois deux, il n'y a pas du «double-dipping», tu sais, exemple.

M. Tanguay : Non, non, c'est sûr. Je comprends.

M. Jolin-Barrette : Ça fait que c'est déjà prévu à l'article 17.

M. Tanguay : Et quel article nous dit : Telle catégorie, vous avez accès à telle, telle aide, telle autre catégorie, telle aide? J'espère que ce n'est pas un article qui nous dit que ça va être revu par règlement.

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est prévu par règlement, oui.

M. Tanguay : C'est là où ça fait mal parce que c'est là qui est le «core» comme on dit.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais ça on aura les discussions, puis je vais pouvoir exposer quelle est l'intention du gouvernement relativement à chacune des catégories.

M. Tanguay : Est-ce qu'on pourra le mettre dans la loi? Est-ce que le ministre pourrait faire des amendements?

M. Jolin-Barrette : On ne pourra pas le mettre dans la loi, on va le mettre par voie réglementaire, parce que vous comprendrez qu'en fonction... si, dans les prochaines années, je réussis à aller chercher, supposons, plus d'argent, puis qu'on bonifierait, bien là, à ce moment-là, ça prend une certaine souplesse pour l'avoir par voie réglementaire.

M. Tanguay : Puis là on s'entend, puis le ministre est intelligent, M. le Président, on s'entend que c'est là le gros robinet, là. Puis je comprends, là, le ministre ne va pas dépenser l'argent qui n'aura pas été donné par le président du Conseil du trésor puis le ministre des Finances. Mais la loi-cadre... mais le robinet, là, puis je ne veux pas être réducteur de l'aide qui est donnée, mais ça, ça se change très facilement, un règlement, là. Oui, il y a un processus, là, ça se change à tous les ans, il s'en change pas mal, de règlements. Mais c'est là, M. le Président, où, si on pouvait mettre l'ingrédient dans la loi que, notamment, parce qu'on peut très, très bien mettre les grandes balises, notamment une victime déclarée en vertu du paragraphe 7° ou 5° a le droit à ci, à ça, le financier, il va falloir faire ce débat-là, puis je le mettrais dans la loi. Mais on n'est pas rendus à cet article-là, mais c'est là où, au bon plaisir, entre guillemets, ou au bon déplaisir, le ministre sera forcé... ou pourra fermer, ouvrir le robinet, puis ça, bien, en bout de piste, c'est des victimes qui auront ou pas de l'aide.

M. Jolin-Barrette : Non, c'est... Dans le fond, là, il y a toutes les méthodes de calcul aussi qui sont par voie réglementaire, relativement à l'indemnité, supposons, du montant forfaitaire. Je vous donne un exemple, là, le régime de la Société de l'assurance automobile du Québec, le régime de la CNESST aussi se retrouvent par voie réglementaire. Puis c'est la chose à faire aussi.

Puis, à juste titre, il y aura prépublication, ensuite ça va être entériné. Et le député de LaFontaine, je suis convaincu, si jamais un gouvernement changeait les indemnités pour les réduire par voie réglementaire, je suis convaincu que le député de LaFontaine se lèverait et, en Chambre, il dirait : Vous êtes en train de réduire ce qui est offert aux victimes. Alors, là-dessus...

M. Tanguay : Ça changerait quoi? Rien.

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, la preuve, c'est...

M. Tanguay : Vous allez me dire : C'est la démocratie. Oui, mais...

M. Jolin-Barrette : Non, non, mais c'est que moi, en tant que ministre de la Justice, je suis extrêmement sensible aux arguments du député de LaFontaine. La preuve, c'est...

M. Tanguay : C'est la réponse qu'il me donnerait, M. le Président : Je suis très sensible, «mais».

M. Jolin-Barrette : Je commence avec... Bien, la preuve, M. le Président, c'est qu'on a un amendement ce matin suite aux représentations des collègues des oppositions. Alors, quand j'ai entamé l'étude détaillée, j'ai dit que j'allais écouter les oppositions, j'allais cheminer dans leur direction, alors c'est ce que je fais. Il ne faut pas voir le pouvoir de persuasion des oppositions comme étant limitatif, il faut le voir avec une approche extensive.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, puis après ça je vais avoir la députée de Sherbrooke.

M. Tanguay : Oui, je vous en prie, mais plus extensif que ça, M. le Président, là, je veux dire, ça serait dur à battre, mais effectivement on reviendra.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Sur ces belles paroles, le ministre a répondu à la question que j'avais tout à l'heure, mais dans les exemples qu'il a donnés, il a parlé d'exemples d'événements passés, je me demandais si on devait interpréter ça comme une ouverture de sa part à la rétroactivité de ces éléments-là dans le projet de loi.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, je ne peux pas rétroagir sur les événements passés qui sont en lien avec les catégorisations de victimes parce que c'est un tout nouveau régime. Dans le fond, le régime associé à ces aides-là qui vont être données par rapport au témoin, c'est par rapport à une modification du régime. Donc, ça, ça va s'appliquer à partir du moment où la personne va... bien, dans le fond, que le projet de loi va être sanctionné, puis la personne va être témoin. Mais je vous rappellerais qu'en matière d'infraction à caractère sexuel, de violence subie pendant l'enfance puis de violence conjugale il n'y a pas de... ce n'est pas prescriptible, là. Donc, la personne victime va pouvoir en bénéficier.

Mme Labrie : Donc, dans les deux exemples que le ministre a donnés pour illustrer les nouvelles modalités de témoins, l'exemple du grand-père à Wendake, l'exemple de la tuerie dans le Vieux-Québec, ce sont des exemples, finalement, qui ne seront pas applicables, parce qu'ils se sont produits avant l'adoption du projet de loi.

M. Jolin-Barrette : Bien, effectivement, dans le fond, on change le régime pour le futur, effectivement.

Mme Labrie : Bien, comme le ministre vient de tenir de très sages paroles sur son ouverture envers les représentations de l'opposition, je l'invite à réfléchir à ce que ce soit rétroactif. Dans une certaine mesure, on pourrait prévoir un certain nombre d'années de rétroactivité pour l'élargissement de la notion de victime.

M. Jolin-Barrette : Mais l'enjeu, là, avec la rétroactivité, là... Moi, je voudrais bien rendre tout rétroactif. Je suis extrêmement sensible aux arguments qui sont soulevés par les oppositions. L'enjeu que nous avons, c'est de dire... Et j'entends la députée de Sherbrooke dire : Bien, quelques années, O.K., pourquoi deux ans? Pourquoi pas cinq ans? Pourquoi cinq ans? Pourquoi pas sept ans? Pourquoi sept ans? Pourquoi pas 10 ans? Pourquoi pas 20 ans? Donc, ça, c'est une question, et il faut comprendre aussi qu'il y a des coûts importants générés associés à ça. Moi, quand je présente le projet de loi... Puis le travail que les équipes ont effectué et que nous avons effectué pour aller chercher de l'argent supplémentaire, supposons en matière d'abolition du délai de prescription en matière d'agression sexuelle, violence subie pendant l'enfance, violence conjugale, ce sont des sommes considérables.

Le fait d'abolir la liste des infractions, ce sont des sommes considérables aussi, que l'État, collectivement, on met ensemble. Mais je ne peux pas ramener tout à 1972, d'une façon rétroactive. Un, il y a un enjeu de coûts, mais il y a un enjeu aussi de dire : Comment est-ce qu'on... Pourquoi ces choix-là plutôt que d'autres choix? Je vous donne un exemple : lorsqu'on a entendu la dame, Lau Ga, en commission parlementaire, bien entendu, c'est à briser le coeur, sa situation par rapport à l'exploitation sexuelle. Moi, je me retrouve dans une situation, comme ministre, où je fais le choix de le rendre admissible, cette infraction-là, O.K.?

Je pense que tout le monde ici va convenir que ça aurait dû être fait il y a très, très, très longtemps, très longtemps. Est-ce que j'étais dans le siège du ministre de la Justice en 2014, en 2005? Non. Est-ce que les gens qui m'ont précédé auraient dû le faire? Je pense que oui. Est-ce que les gouvernements précédents auraient dû le faire? Je pense que oui. L'idée, ce n'est pas de refaire le procès de tout le monde puis de dire : Vous ne l'avez pas fait. Mais, la réalité, c'est qu'il n'y a personne qui est allé chercher l'argent pour abolir le délai de prescription puis pour abolir la liste, ce que j'ai fait aussi.

Alors, il y a des enjeux qui touchent tous les gouvernements successifs. Moi, je me retrouve à pouvoir répondre aux besoins des victimes, là, toutes les victimes futures sur la notion d'agression sexuelle, on le rentre dedans, puis ça a été mon plus gros combat, pour m'assurer que, quand les victimes sont prêtes à dénoncer, elles vont pouvoir le faire. Puis, même, ce qu'on oublie de dire aussi, une victime qui se serait fait dire en 1999 : Vous avez déposé votre demande deux mois trop tard — parce que le délai à l'époque, c'était un an — puis vous l'avez déposé après 14 mois, bien, cette victime-là, si elle s'est fait refuser pour ça, on lui donne trois ans à partir du moment de la sanction de la loi pour redéposer sa demande et être indemnisée.

Donc, je voudrais bien que tout soit rétroactif, mais, matériellement, ce n'est pas quelque chose qui est possible aussi. Puis, lorsque je dis que je ne peux pas refaire le passé, c'est en ce sens-là aussi. Si on avait eu des gouvernements successifs qui avaient dit : Aïe! la traite de personnes est arrivée en 2005 dans le Code criminel, on va le rentrer sur la liste. Aïe! en 2014, l'exploitation sexuelle est rentrée sur la liste, peut-être que ça devrait sonner des cloches à du monde qui sont au gouvernement pour l'inclure sur la liste. Là-dessus, je suis 100 % d'accord avec la députée de Sherbrooke, mais, dans la situation dans laquelle on est présentement, par rapport à l'élargissement qu'on amène, au nombre de personnes, il y a des enjeux, puis c'est à mon grand...

• (10 h 10) •

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : ...oui, c'est ça, le député de Chapleau le dit bien, à mon grand désarroi, que je ne peux pas tout faire.

Mme Labrie : Donc, une des difficultés du ministre, c'est de choisir, arbitrairement, un moment à partir duquel ça pourrait être rétroactif. Moi, j'entends qu'il nous a donné des excellents exemples. Il y a des crimes pour lesquels on connaît la date à partir de laquelle ça fait partie du Code criminel. Il me semble que ça serait une avenue intéressante de considérer cette date-là, puis la rétroactivité pourrait s'appliquer à partir du moment où ça a été reconnu comme une infraction au Code criminel pour chacune des infractions qui n'étaient pas sur la liste.

M. Jolin-Barrette : Bien, l'intervention de la députée de Sherbrooke est intéressante. Par contre, je lui reposerais une question par rapport à ça. Là, on parle d'exploitation sexuelle, qu'est-ce que la députée de Sherbrooke, M. le Président, fait avec les homicides qui sont survenus hors Québec? Parce qu'on a eu le témoignage de Mme St-Onge, dont la soeur a été assassinée à l'étranger. Qu'est-ce qu'on fait avec ça?

Mme Labrie : Bien, déjà, s'il y a l'ouverture du ministre pour considérer la date d'inclusion dans le Code criminel pour les infractions qui n'étaient pas sur la liste auparavant, moi, je trouve que c'est déjà un bon pas. Pour les choses pour lesquelles on n'a pas de date aussi objectivement claire, moi, je pense qu'on peut en discuter ensemble, là. Puis, du moment qu'on convient, ici, tous les députés, tous les partis politiques, d'une forme de rétroactivité, on peut s'entendre.

M. Jolin-Barrette : Non, mais ce que la députée de Sherbrooke nous dit, c'est qu'elle est prête à faire un choix d'une infraction criminelle versus une autre. Puis c'est là-dedans aussi... il y a des mesures d'équité aussi. Est-ce qu'un homicide qui est survenu est moins grave qu'une victime d'exploitation sexuelle? Je ne le crois pas. Je ne crois pas à l'inverse non plus, là. Je ne veux pas hiérarchiser. Est-ce qu'une agression sexuelle survenue à l'étranger ou l'exploitation sexuelle survenue à l'étranger est moins grave qu'une exploitation sexuelle survenue au Québec? Je ne le crois pas non plus.

Donc, c'est tout ça que ça amène dans le cadre. Puis ça a fait partie de nos réflexions aussi. Alors, quand je disais que c'est des choix difficiles à faire... Mais ce qu'on fait, c'est qu'on élargit vraiment beaucoup le régime. On élargit vraiment beaucoup le régime. Et, sur cet aspect-là notamment, relativement à l'exploitation sexuelle, il y a aussi des qualifications qui ont été faites dans le passé relativement à d'autres infractions criminelles qui étaient sur la liste aussi, et les CAVAC nous l'ont dit aussi, de la façon dont les victimes devenaient indemnisables en utilisant certaines infractions criminelles qui étaient sur la liste. Donc, il y a tout ça, mais c'est une bonne discussion.

Mais voyez-vous la situation dans laquelle nous nous trouvons? Elle a été causée notamment par une situation passée, et là on vient la corriger. Mais c'est tout ça à prendre en considération, sachant aussi que le régime, il est le plus généreux au Canada, plus généreux que toutes les autres provinces réunies ensemble aussi, puis qu'on rajoute de l'argent, beaucoup d'argent. Puis je peux vous dire que j'ai mis tout mon poids pour obtenir cet argent-là aussi.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke. Ça va?

Mme Labrie : Je pense que le ministre a encore plus de poids qu'il peut le penser. On aura l'occasion d'en reparler. Moi, sur l'amendement qui a été déposé, je pense que ça répond à mes préoccupations pour l'instant.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

Mme Weil : Oui. Alors, j'ai bien compris les explications du ministre, mais, j'imagine, ça pourrait être utile parce que, peut-être, de temps en temps, dans l'étude du reste du projet de loi, il va falloir se référer à ce schéma. Souvent, dans les ministères, quand on a des propositions complexes comme ça, on fait un genre de schéma, tableau, même pour aider lorsqu'on est en processus d'adoption, d'analyser. Et c'est très complexe. Et, si moi... Moi, la manière que je comprends ça, la modification qu'a amenée le ministre suite aux interventions de jeudi dernier, c'était justement un membre de la famille, un proche. Le fait que l'ambulance soit là, ça ne change rien à l'horreur et le traumatisme que cette personne ressent. Et il y a une différence avec quelqu'un qui n'est pas proche de la personne, qui arrive et l'ambulance est là. Bien, c'est comme ça que je le vois, traumatisme, et parce qu'on est profondément affecté. Mais est-ce que le ministre pourrait voir, avec le ministère, s'il serait capable de faire un genre de schéma pour dire : Oui, vous aurez droit à ceci, cela, etc., dépendant... avec les conditions ou dans des bulles, et etc.? Et ça pourrait nous aider peut-être tout le long de l'étude du projet de loi.

M. Jolin-Barrette : O.K. Oui, je vais vérifier, puis on va construire un tableau.

Mme Weil : Très bien. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. J'essaie maintenant de comprendre l'amendement du ministre. Le premier paragraphe amendé, là, le 7° : «Toute personne visée à l'un des paragraphes 2° à 6° [...] qui est témoin de l'endroit physique où l'infraction criminelle a été perpétrée contre la personne [...] qui est décédée ou qui subit l'atteinte alors que [se] trouvent encore cette personne et un policier...» O.K., donc, c'est la catégorie de personnes de 2° à 6° qui arrivent à la nouvelle définition de scène intacte. Autrement dit, évidemment, il y a la victime et il peut y avoir les premiers répondants. Premier niveau de compréhension, quand on avait la discussion «tout autre premier répondant», de la fin de ce paragraphe-là, vient nécessairement qualifier le policier — je prends l'exemple du policier — qui agit à titre de premier répondant. Donc, ça, le ministre a eu les confirmations à l'effet que le premier policier, ou la première policière, ou le duo de policier, policière qui arrivent les premiers sont de facto juridiquement les premiers répondants.

M. Jolin-Barrette : Ce sont des premiers répondants.

M. Tanguay : O.K. La scène intacte correspond à l'endroit physique... a été perpétrée avant que ne s'y trouve un premier répondant. Ça, on y reviendra.

Le ministre fait-il l'économie, entre guillemets, là, dans le sens noble du terme, du fait qu'une personne qui, par ailleurs, se qualifie en vertu de 2° à 6° et qui est témoin de la perpétration d'une infraction... Ça, on l'a à 7°, O.K. Ça, j'imagine que ce sera aussi une sous-catégorie. Est-ce que le ministre, oui ou non, a l'intention... ou est-ce que ça a été discuté, qu'une personne qui se qualifie en vertu de 2° à 6° et qui est témoin du crime aura accès de façon théorique, là, à plus d'aide qu'une personne de 2° à 6° qui arrive alors que c'est fait puis qu'il y a déjà des répondants, là, toujours scène intacte? Est-ce que le ministre va faire cette distinction-là?

M. Jolin-Barrette : Le proche... la personne qui est dans 2° à 6°, qui arrive avant les policiers ou qui arrive après les premiers répondants, pour autant que la victime soit là puis que le premier répondant soit là, qui est déjà arrivé, c'est la même chose, là, il va être considéré comme un témoin.

M. Tanguay : Ça fait que... est-ce que c'est la même chose, la personne est sur les lieux, elle se qualifie? Mettons que c'est le parent qui voit son enfant se faire tuer versus le parent qui arrive 10 minutes après les faits. Donc, il a été témoin de la scène d'horreur versus il se qualifie toujours en vertu de 7°, 5°, mais qu'il arrive après. Est-ce que...

M. Jolin-Barrette : C'est la même chose.

M. Tanguay : Donc, il n'aura pas de distinction là-dessus.

M. Jolin-Barrette : Il n'y a pas de distinction. Si vous êtes une personne entre 2° et 6°, que la victime a déjà subi l'infraction, que le premier répondant est déjà là, mais que vous êtes une personne 2° à 6°, ça va être la même chose que si vous aviez été là au moment de la commission de l'infraction.

M. Tanguay : Ça, je le comprends juridiquement, mais est-ce que, socialement, on veut pouvoir aider plus ceux qui voient le crime, qui sont témoins du crime? Parce que, prime abord, il y a un choc qui est... des images qui demeurent, et ainsi de suite, là. Est-ce qu'on veut faire cette distinction-là en en donnant plus, le cas échéant, à ceux qui ont été témoins?

M. Jolin-Barrette : Le régime du témoin va être le même pour les deux, mais c'est un régime qui sera généreux, notamment au niveau de l'indemnité de remplacement de revenu.

M. Tanguay : Autrement dit, la réponse du ministre est un peu de dire : Ça va être... in concreto, ça va être évalué. Vous êtes témoin, vous avez vu l'horreur se dérouler sous vos yeux alors que vous étiez impuissants à faire quoi que ce soit, vous avez des images qui vous restent ou que vous arrivez 10 minutes après, la victime est par terre, les premiers policiers sont là, vous avez un choc, évidemment, la distinction ne se fera pas législativement, de dire : Bien là, la victime, de visu... Parce qu'on aurait pu faire 7°, 8°, on aurait pu faire le témoin de la perpétration d'une infraction puis on aurait pu faire 8°, la scène intacte, le témoin de la scène intacte. Parce que le ministre comprend, il y a une distinction entre voir la scène, c'est une vision d'horreur, voir la scène, mais d'avoir vu le crime en direct, être impuissant, c'est une horreur plus, là.

• (10 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Oui, sauf que le régime du témoin est déjà généreux. Donc, la personne qui va bénéficier du... La personne, là, qui va arriver, là, sur la scène après que la personne, elle ait été agressée ou assassinée, là, bien, cette personne-là va avoir les mêmes aides que le témoin visuel direct. Donc, ça ne désavantage pas...

La personne qui arrive cinq minutes après l'arrivée des policiers, là, le parent, là, le parent que sa fille a été assassinée, là, qui arrive cinq minutes après l'arrivée du véhicule de police, là, puis qui arrive, que la victime est là, qui voit que la victime a été assassinée, cette personne-là aura la même aide que la personne qui a vu la commission de l'acte.

Je comprends la question du député de LaFontaine : Tu sais, pourquoi ne pas hiérarchiser? Mais, déjà, le régime associé au témoin, il va être généreux : séances de psychothérapie, indemnité de remplacement de revenu, montant forfaitaire s'il s'agit d'un proche rattaché au décès d'un individu.

M. Tanguay : Et puis, ça, on revient à ce que prévoira le règlement, on le fera, le débat là-dessus, mais... Puis le ministre, je veux dire, à la fin de la journée, ils vont voter, ils sont majoritaires, puis c'est bien correct, c'est la démocratie, mais tout ce qu'on pourra avoir comme assurance, représentation, au-delà du processus réglementaire de ce qui va être inclus... parce que c'est là, encore une fois, où la générosité ou pas du système va se traduire, là, dans le règlement. Alors, tout ce qu'on pourra avoir dans ce débat parlementaire là, ce sera le bienvenu, là.

M. Jolin-Barrette : Oui. Puis on va faire l'exercice avec les collègues. Mais je peux leur assurer que le fait qu'on injecte plus d'argent va faire en sorte qu'on vient couvrir plus largement, en termes d'aide financière, là. Au sens large, là, on ajoute.

M. Tanguay : O.K. «Alors que s'y trouvent encore cette personne et un policier». Alors, la manière... Juste pour clore le débat sur cet article-là, il y a trois choses, il y a le lieu, il y a la présence de la victime puis il y a le premier répondant. Alors, le lieu, la victime se fait assassiner sous les yeux du premier parent, il est couvert à 7°. Le lieu, la victime, le premier parent qui a vu ça, malfaiteur qui s'est sauvé, les premiers répondants arrivent, ils sont seuls premiers répondants pendant cinq minutes, 10 minutes, 15 minutes, 20 minutes. Il y a le lieu, la victime, le premier parent, les premiers répondants, les premiers répondants, les deux policiers, policières restent là pendant 20 minutes avant que qui que ce soit d'autres policiers, autres agents de la paix, pompiers, arrivent, la scène est intacte, donc avant qu'autres répondants qui ne sont pas premiers arrivent, le deuxième parent arrive, il est couvert aussi par 7°.

M. Jolin-Barrette : Oui, si le premier répondant et la victime sont toujours présents.

M. Tanguay : C'est ça. Et les ambulanciers arrivent, la scène n'est plus intacte ou, si, d'aventure, les premiers répondants étaient les ambulanciers, ce qui est peu probable, et décident de se saisir du corps... bien, je dis «peu probable», probablement que, oui, s'il y a encore... s'il y a urgence puis il faut l'amener à l'hôpital, bien évidemment, si le corps quitte ou la victime encore en vie quitte, là, il n'y a plus de scène intacte, il n'y a plus de scène intacte parce que la victime n'est plus là, le témoin de la scène intacte de cette infraction, mais...

Il faut toujours la concomitance, que la victime soit là. Il n'y avait pas un cas d'espèce où la scène... la victime avait pu quitter les lieux, par exemple, et que les premiers répondants sont là, là... Je veux savoir tous les cas d'espèce, là. La victime a été agressée, quitte les lieux, les premiers répondants arrivent et un témoin arrive, de la scène. Ça, cette personne-là ne sera pas couverte.

M. Jolin-Barrette : Bien, il faut que la personne, la victime soit présente avec les premiers répondants.

M. Tanguay : Donc, dans la définition de scène intacte, dans tous les cas d'espèce, il faut que la victime soit là.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : O.K. À la fin, à la fin complètement de l'article 10 : «La scène intacte correspond à l'endroit physique où une infraction a été perpétrée avant que ne s'y trouve un premier répondant mentionné au paragraphe 1°...». Une fois qu'on a défini ça au paragraphe précédent, quelle est l'utilité de ce paragraphe-là? Il y en a sûrement une, là, puis je ne veux pas qu'on l'enlève, là, je veux juste comprendre.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, on vient dire : «La scène intacte correspond à l'endroit physique où une infraction criminelle a été perpétrée avant que ne s'y trouve un premier répondant mentionné au paragraphe 1°.» C'est pour venir dire qu'est-ce que constitue la «scène intacte». À partir du moment où vous avez un premier répondant qui arrive sur les lieux, la scène n'est plus intacte.

M. Tanguay : C'est parce qu'à 1°, le premier paragraphe qu'on a vu, puis je dis... il y en a deux là. On dit : «L'endroit physique où l'infraction criminelle a été perpétrée contre la personne». Là, en bas, on dit : «La scène intacte correspond à l'endroit physique où une infraction criminelle a été perpétrée avant que ne s'y trouve un premier répondant».

M. Jolin-Barrette : Mais c'est parce que c'est pour le témoin autre. Dans le fond, quand on est à 1°, là, quand on est à «Le témoin visé au paragraphe 7° du premier alinéa inclut :

«1° toute personne visée aux paragraphes 2° à 6°...», c'est pour dire : Il y a un régime particulier qui s'applique aux proches, aux personnes 2° à 6°, O.K.? Quand on est à la fin complètement de l'amendement, «la scène intacte correspond à l'endroit physique», ça, ça couvre qu'est-ce qui a constitué la scène intacte pour les autres individus, pour le tiers.

M. Tanguay : Qui ne sont pas 2° à 6°.

M. Jolin-Barrette : Qui ne sont pas dans 2° à 6°. Donc, on vient dire : La scène intacte, c'est là, c'est l'endroit physique où une infraction a été perpétrée avant que ne s'y trouve le premier répondant. Donc, vous arrivez dans un lieu, la victime est là, vous êtes la première personne à arriver sur place, vous allez être un témoin. Le premier répondant n'est pas arrivé, vous êtes monsieur X, là, vous n'êtes pas dans 2° à 6°, là, donc vous allez être considéré comme témoin. L'événement est arrivé ici, là, entre le député de LaFontaine et moi, la première personne qui rentre dans l'endroit, qui trouve la victime, cette personne-là va être couverte.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de LaFontaine, il vous reste trois minutes.

M. Tanguay : Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais, s'il vous plaît, que vous suspendiez quelques instants, rapidement, le temps de rédiger un sous-amendement.

Le Président (M. Bachand) : Parfait, alors, on va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 28)

(Reprise à 10 h 38)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Merci, M. le Président. Alors, le sous-amendement se lit comme suit : L'amendement à l'article 10 est modifié par :

1° Le retrait, dans le premier alinéa de l'amendement, des mots «visée à l'un des paragraphes 2° à 6° de cet alinéa»; et

2° Le retrait du dernier alinéa.

Alors, pour expliquer le sous-amendement, M. le Président, ici, ce que l'on ferait... ce que l'on fait, ça participe de notre compréhension et de la discussion que nous avions eue la semaine passée, vers la fin de nos débats. Au-delà du fait... Parce que le ministre se rappellera que l'addition que nous avions, c'est que le ministre, quand il disait : Bien, à 7°, c'est le témoin du crime ou le témoin de la scène qui doit être intacte. Le ministre disait : Mais n'oubliez pas une chose, n'oubliez pas une chose, la personne va se qualifier aussi en vertu de 2° à 6°. Là, on dit : Oui, on le sait, ça. Mais ici on parle de la personne qui est témoin, puis, l'amendement, témoin de la scène intacte.

Alors, on disait : Oui, on le sait, par ailleurs, la personne peut avoir deux chapeaux, peut-être parent puis va être couverte, puis va être indemnisée, mais on parle du témoin qui arrive sur la scène intacte. On ne peut pas croire que la personne qui arrive, que ça vient de se faire, et elle est admissible, mais que la personne qui arrive, ça vient de se faire, elle n'a pas été témoin, mais ça vient de se faire, et là il y a un premier répondant qui arrive. Ça, c'est mon premier cas, elle est couverte, mais qu'elle arrive une minute, 30 secondes après le premier répondant, ça vient toujours de se faire, mais, parce qu'elle est après le premier répondant, on ne peut pas dire qu'elle passe du tout à rien, de l'admissibilité à l'inadmissibilité.

Ce que l'on disait : Bien, ne pourrions-nous pas élargir, pour les personnes témoins qui arrivent? Ça vient de se faire, la victime est encore là. Puis, pendant qu'elle arrive, il y a déjà un premier répondant, et que toute personne qui arrive durant la concomitance du premier répondant, bien, qu'elle puisse être admissible.

• (10 h 40) •

Puis ce qu'on disait toujours, c'est que cette personne-là pourra faire une demande ou pourra ne pas en faire, si elle n'a pas de séquelles ou si elle est capable de s'en sortir sans faire de demande. Et toute personne qui dit : Bien, moi, j'ai eu des séquelles, je suis arrivé, et je veux faire une demande qui, par ailleurs, va être évaluée : Bien, écoutez, on trouve... oui, c'est malheureux, vous avez vu des choses épouvantables, mais vous êtes techniquement admissible. On évalue vos besoins. C'est trois séances de psycho ou c'est telle indemnité financière ou pas. On vous évalue in concreto, mais, au moins, on vous permet de déposer une demande.

Ce qu'on se disait, c'est que la scène... le crime a eu lieu. Il y a un premier policier qui arrive puis qui fait les manoeuvres de réanimation, par exemple. Moi, j'arrive, je vois ça, bien, qu'on ne me dise pas : Malheureux que tu sois arrivé une minute après que le policier soit arrivé, tu n'as droit à rien. Tu es inadmissible. Et là on se disait : Bien, où on va mettre la barre? Puis là on avait une discussion sur, bon, on pourrait-tu faire en sorte que ce n'est pas parce qu'il y a un premier répondant que la personne de facto devient inadmissible. Parce que, durant les auditions, ce qu'on nous disait, c'est que ce n'est pas une minute de plus ou de moins qui fait en sorte que vous êtes admissible ou vous n'êtes pas... vous êtes inadmissible. Ce qu'on disait : Bien, il faut mettre une barre temps. Puis là c'est sûr que la barre, on pourrait se faire... Bien, c'est ça. Dans certains cas, il y a eu un premier répondant qui est arrivé au moment x. Vous, vous arrivez au moment x plus une minute, vous êtes couvert. Puis là il y a un deuxième répondant qui arrive, mais qui n'est pas le premier, puis là ça élimine la scène intacte.

Oui, à un moment donné, il faut mettre une limite, puis la limite, on la met là. Mais, par ce sous-amendement-là, ce que l'on ferait, c'est qu'on laisserait les catégories. 1°, évidemment, c'est la victime elle-même. Alors, la victime a le droit à une indemnisation, elle est victime d'un acte criminel. Mais de 2° à 6°, c'est le parent, l'enfant du parent, ils se qualifient déjà, parfait.

7° avait pour vocation de dire : Bien, il y a un témoin qui est témoin justement de la scène de crime, cette personne-là, elle est couverte. C'est une victime, elle était là au moment où c'est arrivé. Elle a vu le crime. Elle est déjà couverte au début de 7°. Mais la personne qui arrive une fois le crime commis, la victime est toujours sur les lieux. Le fait de dire : Bien, il y a un policier qui est arrivé 10 secondes après, ça ne la rend pas inadmissible, on permet qu'il y ait eu un premier répondant. Puis là c'est très large, le premier répondant, c'est policier, pompier, ambulancier ou toute autre personne qui sera catégorisée premier répondant. Alors, c'est très large, là. Une personne pourrait être infirmière, arriver sur les lieux puis dire : Bien, moi, je travaille à l'hôpital X, mais je suis sur les lieux. Je suis infirmière puis je l'aide, puis je suis première répondante, puis j'exerce ma profession, puis j'essaie d'aider la personne.

Alors, ce faisant, le grief que nous avions à «scène intacte»... Il y a un policier, il n'y a pas de policier. Vous êtes admissible, vous ne l'êtes pas. On voulait... on désirait un atermoiement, une ouverture, un élargissement un petit peu, pour que... Ce n'est pas parce qu'il y a un premier répondant... Puis, dans une scène de crime, Dieu sait que ça va vite. Après le premier répondant, si c'est un policier, pompier, ambulancier... Donc, beaucoup de personnes se qualifient, de un, de deux, après le premier, rapidement, il va y avoir du deuxième, du troisième, du quatrième répondant. Et, dès le deuxième répondant, vous n'êtes plus dans une scène dite «intacte», par fiction de la loi. Ça, on est capables de vivre avec ça.

Alors, le ministre comprend, je pense, très, très bien ce que nous proposons, et on voudrait donc cet élargissement-là pour des tiers qui... Soit dit en passant, a fortiori, si vous revirez ça de bord, le tiers qui, par ailleurs, ne se qualifie pas en vertu de 2° à 6° , qui n'a pas été témoin de l'acte criminel, mais qui arrive sur la scène, force est de constater que l'argument fonctionne des deux côtés. S'il n'a pas le bénéfice du petit élargissement de la scène intacte, il n'aura rien, parce que, justement, il ne se qualifie pas en vertu de 2° à 6°, ce que d'autres vont se qualifier.

Alors, voilà, c'est ce que nous aimerions, que l'élargissement soit... ou évidemment, a fortiori, au bénéfice de 2° à 6°, mais on me dit que c'était déjà le cas, mais que l'amendement atteigne sa cible et permette un peu plus d'élargir... C'est le premier répondant. Tant qu'il y a juste le premier répondant, vous arrivez, vous êtes couvert. Puis là, bien, c'est malheureux, mais on va mettre la ligne là, comme législateurs. Après l'arrivée d'une autre voiture de police avec deux policiers dedans, après l'arrivée d'un pompier, après l'arrivée d'ambulanciers ou autres, tout premier répondant, bien là, ça s'arrête là, malheureusement. Mais la ligne, là, on l'élargit un peu plus, parce que — puis je termine là-dessus, M. le Président — je ne me qualifie pas, en vertu de 2° à 6°. J'arrive, ça vient de se faire, j'en suis bouleversé. Je n'ai pas d'autre régime, je n'ai pas d'autre régime que si vous êtes capable de tasser un petit peu la barre pour me donner de quoi si, pendant que j'arrive, ça vient de se faire. Le premier répondant, là, il court partout. Il essaie peut-être de sauver la victime, mais qu'est-ce qui se passe? J'aimerais ça qu'on puisse l'inclure, parce que force est de constater qu'il ne se qualifie pas, par ailleurs, en haut. Alors, voilà.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Je pense...

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Merci. Moi, pour me faire une idée là-dessus, j'aurais besoin que le ministre m'éclaire sur l'ordre de grandeur de l'aide psychologique d'urgence qui va être donnée aux personnes avant qu'elles aient à déposer une demande, parce que j'entends les arguments du député de LaFontaine, mais, en même temps, je pense à plein d'autres situations qui sont quand même traumatisantes, là, notamment des accidents de la route qui peuvent être graves. Je sais que, pour les accidents de la route, quelqu'un qui serait témoin de ça n'est pas indemnisé, même si ça peut être traumatisant.

Là, moi, j'entends quand même, dans ce qu'on a dit dans les derniers jours, qu'une personne qui serait troublée et traumatisée par ce qu'elle a vu ne serait pas admissible, de cet article-là, mais pourrait quand même demander du soutien psychologique d'urgence simplement à titre de témoin, même si elle ne sera pas, plus tard, reconnue comme témoin parce que la définition est restrictive. J'avais compris que cette personne-là pourrait quand même demander du soutien psychologique immédiat, sans avoir besoin d'éventuellement rembourser si, au final, elle n'est pas reconnue.

Alors, j'aimerais savoir c'est de quel type de soutien, de combien de temps on parle, combien de séances.

M. Jolin-Barrette : Mais la personne peut toujours aller au CAVAC, hein, ou... Là, dans la loi — ça, c'est dans la partie dans la loi sur l'aide qu'on vient fusionner — la personne va pouvoir avoir du soutien psychologique, être envoyée dans... à travers le réseau, notamment, de l'aide de l'État pour dire : Bien, il y a des intervenantes dans le système de santé notamment. Au CAVAC aussi, d'entrée de jeu, il y a du soutien aussi. Mais là il faut comprendre qu'on est vraiment dans le régime, là, d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Puis je comprends ce que le député de LaFontaine nous dit, mais la personne victime, c'est elle qui subit l'infraction, ou son noyau proche, ou le témoin même.

Dans les faits, là, si on est au sens strict, là, un témoin, ça devrait être un témoin qui voit la perpétration de l'infraction. Un témoin, c'est ça. Nous, on l'élargit plus par rapport au fait que la première personne qui arrive sur les lieux, et même pour un proche, elle, elle bénéficie du régime. Je pense que c'est quelque chose qui est raisonnable, puis c'est... Honnêtement, on a fait l'exercice, la fin de semaine dernière, pour faire en sorte de faire suite aux discussions qu'on a eues, puis je pense que la proposition que je fais, elle est très raisonnable et elle est pleine de sens.

Pour ce qui est du soutien psychologique, dans le fond, la personne peut aller au CAVAC puis obtenir du soutien psychologique, parce qu'elle reçoit du soutien, mais comprenez-moi bien aussi, tu sais, dans le fond, toutes les personnes qui voient la scène, sinon, si on retient la proposition du député de LaFontaine, seraient sujettes à être indemnisables aussi.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Ça va.

Le Président (M. Bachand) : Ça va...

M. Jolin-Barrette : Tous les cas de figure, M. le Président, sont pertinents. On ne parle pas, nécessairement, de tous les cas qui sont au centre-ville de Montréal, où il y a 15 autopatrouilles dans le rayon d'un kilomètre, là, tu sais, la loi s'applique sur l'ensemble du territoire québécois aussi. Donc, ça signifie que le premier répondant peut être là longtemps aussi sur la scène.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui, je pense que la collègue de Notre-Dame-de-Grâce aussi...

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pardon.

• (10 h 50) •

Mme Weil : Écoutez, ça... Je pense que c'est important d'essayer de réfléchir un peu à la scène aussi, la scène intacte. Donc, c'est même avant que le corps est recouvert. J'essaie de penser un peu comme la députée de Sherbrooke, le traumatisme que, même s'il n'y a pas de relation personnelle avec la victime, je pense que c'est important de comprendre quelle est la... Que le ministre explique cette logique — je la comprends, évidemment, quand c'est un proche — et qu'est-ce qui serait couvert par un régime ou l'autre. Là, on parle de qu'est-ce qui est une victime, le ministre l'a bien dit, comment qualifie-t-on victime.

Donc, il y a le témoin, on a décidé que le témoin est une victime. Donc, on élargit. Là, c'est important de bien comprendre le rationnel derrière l'élargissement, et on a utilisé le concept de scène intacte, c'est-à-dire... Il y a une raison pour cette explication, et mon collègue de LaFontaine, il dit : Bien, c'est intact dans le sens que j'arrive sur les faits, là, j'arrive, et ça peut être extrêmement traumatisant, c'est sûr, dépendant de ce qu'on voit, là, et cette personne arrive en même temps que la police.

Je pense que tout est dans la définition et le concept, une fois qu'on a élargi, et qu'on dit qu'on est victime parce qu'on a été témoin. Donc, on fait le lien de témoignage, donc on devient victime. Et cette personne est victime, elle arrive au même moment que le policier, et je comprends le ministre quand il dit : Il y a un risque d'élargissement. Mais c'est la nature même de l'amendement, des modifications qui sont apportées par le ministre. On a décidé qu'on allait inclure les témoins, certains témoins, dans cette catégorie. Donc, c'est important de bien comprendre qu'est-ce qu'il y avait derrière ce concept, un concept de traumatisme, un concept de... ou est-ce que... si c'était le premier qui arrivait sur la scène avant les autres, c'est que la personne se sentait non seulement traumatisée, mais interpellée : Qu'est-ce que je fais? Je suis tout seul. Je vois ça. C'est de mieux comprendre qu'est-ce qu'il y avait derrière... bon, le ministre, mais ceux qui ont préparé cette modification, parce que c'est vraiment un changement, on élargit le concept de victime, hein, dans ce sens-là.

Alors, la question de mon collègue m'a fait réfléchir, oui, en effet. Je comprends qu'on a voulu limiter en mettant la notion de «scène intacte», mais qu'est-ce qu'il y a derrière la réflexion de «scène intacte» par rapport à l'impact sur la personne qui est témoin et qui soit toute seule. Il faut mieux expliquer cette différence ou qu'est-ce qu'il y avait derrière cette idée, parce que le premier qui arrive en même temps que la police, c'est à peu près la même chose.

Alors, j'aimerais entendre le ministre, expliquer la réflexion derrière l'arrivée de cette première personne qui exclut l'autre qui arrive en même temps que la police. Est-ce que c'est le fardeau qui est sur ses épaules, parce qu'il l'a vu et il a été le premier, personne d'autre n'était là, il sentait une certaine responsabilité? Qu'est-ce qui fait que cette personne devient victime et qu'on ne l'envoie pas dans d'autres ressources comme les CAVAC?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Mais, M. le Président, là, si on fait un peu d'historique, là, il faut revenir, hein? L'ancienne loi, là, bien, la loi actuelle, là, qu'on est en train d'abroger, là, dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, là, il n'y a aucune référence à «témoin». Le législateur, là, en 1971, quand il a adopté la loi, puis le législateur, jusqu'à 2021, donc jusqu'au 11 décembre 2020, dans le fond, la notion de témoin n'est pas dans la loi, pas pantoute. Dans le fond, c'est des gens qui sont allés, justement, souvent c'était des proches, qui sont arrivés sur les lieux, avant même que la police, elle arrive, avant même que les répondants arrivent, qui, eux, ont dit : Aïe! moi aussi, je suis une personne victime. Même au-delà de ça, la personne qui voyait de visu l'infraction criminelle n'était pas couverte par l'ancienne loi. Dans le fond, là, la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, il n'y a pas de référence à «témoin». On parle de... la victime d'un crime, aux fins de la présente loi, est une personne qui, au Québec, est tuée ou blessée.

L'objectif du régime de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, c'est de viser la personne qui était victime. Là, par des décisions jurisprudentielles, on a dit : Bon, O.K., le témoin qui constate de visu, bien, on va le considérer maintenant comme une victime. Après ça, bien : Je suis arrivé sur la scène, je n'ai pas vu l'infraction, je suis arrivé, par la suite, sur la scène, je demande à être considéré comme victime aussi. Là ce qu'on fait, nous, c'est qu'on vient, très clairement, dire : Le témoin, maintenant, est considéré comme une personne victime. Alors, on va beaucoup plus loin de ce qu'il y avait dans l'ancienne loi. À partir de ce moment-là, quand vous êtes un témoin d'un événement, c'est un témoin, généralement, de visu. Là, on fait une exception, on dit : On ajoute également la personne qui arrive sur les lieux, qui trouve la personne blessée ou assassinée. Mais, à partir du moment où le premier répondant est là, là vous n'êtes plus témoin de la scène. On fait une exception, suite à notre discussion de la semaine dernière, parce que, souvent, ça va être des proches qui sont liés, qui ont une douleur, aussi, affective avec la personne. Alors, c'est pour ça qu'on l'ajoute et on fait l'exception.

Mais le témoin, le témoin, il est couvert, là, le témoin qui constate l'infraction, qui est témoin de la scène avant l'arrivée des policiers, avant l'arrivée des premiers répondants, il est couvert. Je comprends ce que le député de LaFontaine nous dit. Il nous dit : Bien, écoutez, s'il y a une personne qui arrive après l'arrivée du premier répondant, lui, il n'est pas couvert. Effectivement, il n'est pas couvert, mais pensez à une scène qui peut être longue avant que d'autres répondants arrivent sur les lieux aussi. Il y a une question de cohérence aussi, puis il y a une question de dire : Le véritable témoin, c'est la personne qui constate l'infraction.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée.

Mme Weil : Oui, juste une question : Est-ce que le ministre pourrait répéter le précédent ou la jurisprudence? Qu'est-ce que la jurisprudence a décidé si on voit l'acte?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, là, l'article 3 de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, la loi actuelle, elle ne prévoit pas le témoin.

Mme Weil : Non, c'est ça.

M. Jolin-Barrette : Donc, c'est une construction jurisprudentielle de dire : Bien, le témoin est considéré désormais comme une personne victime.

Mme Weil : Mais témoin du crime ou témoin de la scène dans la jurisprudence?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans la jurisprudence, ils ont reconnu le témoin de la scène, et le témoin du geste, et éventuellement le témoin de la scène. C'est ce que je comprends.

Mme Weil : Mais est-ce que — excusez-moi, M. le Président — dans la jurisprudence, ils ont éclairé un peu... ou est-ce que les éléments de la scène ont été... font partie du jugement? C'est-à-dire, le traumatisme que cette personne a vécu, est-ce qu'il y a des... ou c'est vraiment...

M. Jolin-Barrette : Bien, il n'y a pas de critère précis. C'est une appréciation au cas par cas.

Mme Weil : C'est ça.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, la problématique. Puis la définition de scène intacte non plus n'est pas définie dans la jurisprudence. Donc, c'est ça, la problématique à laquelle on fait face, puis c'est pour ça qu'on vient le définir dans la loi. Désormais, là, les critères vont être clairs, puis des cas comme le cas de M. Boudreault, bien, dans le fond, il serait indemnisé comme témoin.

Mme Weil : Mais, comme mon collègue l'a dit, est-ce qu'on pourrait trouver une façon... Disons que c'est vraiment l'horreur, ce qu'on voit, là, c'est exceptionnellement brutal et affreux, et que la personne n'est pas capable de travailler, puis c'est une victime... C'est une personne témoin qui est arrivée à peu près en même temps. Puis personne... Les premiers répondants n'ont pas eu le temps de cacher leur... puis ils n'ont pas protégé la scène, et tout ça. Sûrement, il y a des cas comme ça qui ont eu lieu, et la personne ne peut pas travailler, est comme paralysée, là, pendant un certain temps, des cauchemars, etc. Vous, vous dites que cette personne-là peut avoir de l'aide des CAVAC? Même genre d'aide...

M. Jolin-Barrette : Pourra obtenir du soutien des CAVAC, du soutien psychologique puis du réseau.

Mme Weil : ...comparable? L'aide comparable à ce que ce projet de loi fournit comme aide?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est sûr que ce n'est pas, le détail, les mêmes aides que le témoin qui est victime, parce que le témoin aura du soutien de l'indemnité de remplacement de revenu, aura de l'aide à la réinsertion, tout ça. Mais, encore une fois, je comprends l'intention, mais je trouve que c'est une avancée significative qu'on fait, ce matin, avec l'amendement.

Mme Labrie : Bien, moi, à la lumière de ce que j'ai entendu, je vais voter contre le sous-amendement, mais je tenais à expliquer pourquoi quand même, parce que j'entends... Puis je suis sensible aux arguments de mes collègues, là, de LaFontaine puis de Notre-Dame-de-Grâce, sauf qu'effectivement je pense que l'objectif du régime, c'est d'indemniser au mieux les victimes directes, au sens de la définition de l'article 10, là, des six premiers points. Donc, je pense qu'il est préférable de consacrer les ressources à bonifier l'aide qui va être offerte à ces personnes-là, puis peut-être même faire un retour dans le temps pour le faire de manière rétroactive, que de chercher à élargir cette aide-là à la notion de témoin qui n'a aucun lien avec la victime. C'est la raison pour laquelle je vais voter contre le sous-amendement même si, sur le principe, je suis aussi convaincue qu'il y a des témoins, sans lien avec la victime, qui pourraient avoir besoin de soutien. Mais, dans la mesure où ce soutien-là est accessible dans les CAVAC, ça me convient.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

• (11 heures) •

M. Tanguay : Oui. Merci, M. le Président. Bien, contrairement à la députée de Sherbrooke, moi, je pense qu'il faut les soutenir. Alors, moi, je vais... évidemment, c'est notre amendement, on va voter pour, mais on va continuer le combat puis on va se battre, parce qu'on pense qu'une personne, aussi tierce soit-elle, arrive sur une scène de crime ignoble, et qu'il y a un premier répondant, qu'il y a un premier répondant, M. le Président, qui fait déjà des manoeuvres, des tentatives de réanimation... Parce que c'est un cas d'espèce, je veux dire, on est législateurs, mais on n'est pas en théorie, là. Puis que vous arrivez là, tout tiers que vous êtes, vous en êtes bouleversé, bien, on ne les abandonne pas, nous autres, l'opposition officielle, puis on va voter pour le sous-amendement, ça, c'est très clair.

Ceci étant dit, qui plus est, ça découle, la discussion que l'on a eue la semaine passée... Puis c'était la compréhension que j'avais, il n'avait jamais été dit... Parce que le ministre servait ça comme argument pour ne pas faire l'amendement, puis je le comprends son argument, il disait : N'oubliez pas que, par ailleurs, les personnes peuvent se qualifier en vertu de 2° à 6°. Puis là on disait : Oui, mais là on parle des témoins qui arrivent, des témoins qui ne se qualifient pas en vertu de 2° à 6°. C'est pour ça qu'on faisait le combat puis qu'on continue de faire le combat.

L'amendement du ministre dit que «scène intacte» sera élargi, y incluant la présence contemporaine de la victime et du premier répondant. S'il y a un deuxième répondant... Puis on était prêts à accepter cette modification-là, mais il ne l'applique uniquement pour les 2° à 6°, ceux qui se qualifient déjà, par ailleurs. Bon, déjà là, pour le point de vue philosophique, le ministre reconnaît qu'il y a distinctement un tort, un dommage, un impact distinct parce que vous êtes témoin de la scène intacte. Sinon, il ne le ferait pas. Vous êtes parent, vous avez un tort, vous avez un dommage. En plus, il y a un autre contexte : vous avez vu la scène intacte de crime. Ça, c'est un dommage distinct. Donc, le ministre reconnaît cela.

Je pense qu'il y a lieu de le reconnaître aussi, pour un tiers, «scène intacte», puisque l'on dit qu'il y aura un impact qui ne sera pas nul pour bien des gens. Le crime vient d'avoir lieu, il y a du sang partout, c'est sordide. Il y a un policier qui fait des réanimations, il attend du renfort. Moi, je vois ça, j'essaie d'aider, j'essaie de faire quoi que ce soit, tant bien que mal. J'ai un impact distinct, indépendamment du fait que je ne me qualifie pas en vertu de 2° à 6°.

Je pourrais même philosophiquement aller plus vite... aller plus loin dans l'analyse. Je serais même prêt à reconnaître que, si vous êtes parent et que c'est votre enfant avec le... dont le premier répondant fait les manoeuvres de réanimation, je comprends que 2° à 6° plus 7°, 7° probablement aura un impact plus lourd que si c'est juste 7°. Comprenez-vous? Si vous êtes un parent, le premier répondant fait des manoeuvres, vous êtes le parent, impact, vous voyez cela, autre impact distinct. Puis cet autre impact distinct là est, je pense, philosophiquement plus fort que si vous êtes un tiers, vous ne connaissez pas la personne, mais que vous en êtes impacté.

Alors, je comprends ce que fait le ministre, c'est qu'il vient élargir la possibilité temporelle de l'application de son article 17. Parce que le ministre nous a dit plus tôt qu'en vertu de 17 il y avait déjà cumul possible. Il y avait déjà cumul possible si vous étiez, 2° à 6°, un parent et que vous étiez témoin de la scène intacte. Là, il dit : Bien, ça va être la même chose, il y a cumul, mais «scène intacte» pour les 2° à 6°, je vais l'élargir en y incluant jusqu'à ce soit uniquement le premier répondant qui soit là. S'il y a d'autres personnes qui arrivent ou le corps de la victime quitte, à ce moment-là, 2° à 6° sort, et la scène n'est plus intacte. On dit : Bravo! Mais on dit : Pour le tiers aussi, pour le tiers aussi parce que c'est un dommage distinct qui mérite d'être compensé, indemnisé.

Et, je reviens toujours là-dessus, le débat va se faire in concreto, vous devrez remplir des formulaires, vous devrez être évalué, vous devrez faire la preuve du niveau d'indemnisation qui, en vertu du régime, comme tiers vous est attribuable ou pas, puis vous pourrez contester ou pas. Mais, de le rendre inadmissible, M. le Président, ce qui est bon pour 2° à 6°, sur un impact distinct, d'avoir vu la scène, est aussi bon pour un tiers qui ne se qualifie pas en vertu de 2° à 6°, mais d'avoir vu la scène. Alors, c'est ça, le sous-amendement, M. le Président, puis c'était réellement notre compréhension de ce vers quoi le ministre allait parce qu'il n'était pas question d'élargir à inclure pour le premier répondant uniquement pour les 2° à 6° puisqu'on disait : N'oubliez pas que vous vous qualifiez déjà en vertu de 2° à 6°. Alors, je pense que le ministre aura compris très clairement notre position là-dessus, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. Interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Oui. Est-ce qu'il y aurait moyen de limiter ça? Parce que le ministre a donné l'exemple, des fois, il pourrait y avoir toute une foule qui est témoin. Donc, évidemment, on n'est pas dans cette situation-là.

Le premier témoin, donc la première personne qui arrive en même temps, là, que le premier répondant, dans le sens que... parce que c'est vrai que le projet de loi, le concept a été élargi, il y a une raison derrière cet élargissement, et c'est en partie la jurisprudence et les observations par rapport à l'impact que peut avoir, sur certaines personnes, de témoigner de ça. Est-ce qu'il y aurait moyen que cette personne ait la capacité de se faire évaluer par le régime comme une victime? Et il y a le premier répondant qui est là, mais ça a été le premier, pas s'il y a une foule, c'est vraiment le premier. Je pose la question pour répondre aux préoccupations de mon collègue, qui l'exprime bien, de LaFontaine. Et, tout ça, on a ce débat parce que, justement, le ministre a voulu ouvrir très justement. Et je comprends tout à fait la préoccupation du ministre de ne pas élargir pour une foule qui serait témoin. Mais j'essaie de trouver une façon de reconnaître que, dans certains cas, la personne pourrait vivre un vrai traumatisme aussi.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions?

M. Jolin-Barrette : Et je n'ai pas d'autre commentaire, M. le Président, je pense que j'ai expliqué vraiment puis je pense que c'est de la volonté du gouvernement de faire un pas vers les oppositions. Je pense que c'est une avancée acceptable que nous présentons. Je remercie les oppositions pour leur amendement, mais je pense qu'on atteint l'objectif recherché.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Contre.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, le sous-amendement est rejeté. On revient à l'amendement du ministre. Interventions?

M. Jolin-Barrette : On est prêts à voter, je pense, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? Alors, s'il n'y a pas...

M. Tanguay : Une intervention?

Le Président (M. Bachand) : Oui.

M. Tanguay : Juste pour réitérer, effectivement, M. le Président, qu'on comprend ce que fait le ministre. Il y a élargissement pour les personnes qui se qualifient, par ailleurs, en vertu de 2° à 6°, qui avaient déjà un cumul. Mais je pense que ce qui aurait été bon... ce qui est bon pour les 2° à 6° est bon également pour les tiers puisque, deux choses, on reconnaît le statut d'un tiers qui peut avoir des dommages, donc, de un, vous reconnaissez qu'un tiers peut avoir des dommages d'un acte criminel et, de deux, vous reconnaissez l'opportunité d'élargir à la présence du premier intervenant pour certaines catégories de victimes, mais pas pour une autre. Alors, c'est là où on voit l'incohérence, en tout respect. Et c'était l'objectif de notre sous-amendement. Donc, on salue cette avancée-là, mais on s'arrête en bon chemin. Puis ce n'est pas ce à quoi on se serait attendu ce matin, tout simplement.

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Abstention.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Donc, on retourne à l'article 10 tel qu'amendé. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui, M. le Président. Lors de notre dernière séance de jeudi passé, on était à avoir une discussion sur le fait que, par exemple, à l'article 10 : «2° le parent d'un enfant qui est décédé ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle...» Ici, là, on dit qu'à ce niveau-là de la loi ça inclut le parent d'un enfant mineur et d'un majeur, à ce niveau-là de la loi.

M. Jolin-Barrette : Le parent d'un enfant mineur, le parent d'un enfant majeur à charge et le parent d'un enfant majeur non à charge.

M. Tanguay : O.K. Et que, dans la facture de la loi, plus tard, seront introduites des distinctions lorsqu'on définira certains types d'aide, des dispositions à : Bon, bien, ça, ce sera admissible pour le parent d'un enfant mineur ou à charge ou le parent d'un enfant, y incluant donc, à lire, les parents d'enfant majeur. Donc, c'est plus tard dans la loi qu'il y aura des distinctions qui seront faites, là.

M. Jolin-Barrette : Oui, il y a des distinctions qui seront faites, dans le fond, un peu plus tard, aux articles 30 et suivant, donc par rapport à qui est admissible aux aides, et aussi par voie réglementaire, également.

M. Tanguay : O.K. Quand on dit, M. le Président, à 2° — je prends toujours cet exemple-là parce que c'est repris dans d'autres cas d'espèce : «Le parent d'un enfant qui est décédé», donc on comprend, enfant décédé, homicide, acte criminel, homicide, «ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction». Ici, «intégrité», on doit le lire comme étant une atteinte d'ordre physique ou psychique. C'est ça?

• (11 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Oui, comme on l'a dit lors des séances précédentes, «intégrité», c'est les deux.

M. Tanguay : O.K. Et comme on prend l'entièreté du Code criminel, on prend tous les actes criminels comme étant... comme donnant ouverture à une indemnisation... Pardon?

M. Jolin-Barrette : Non, tous les actes criminels...

M. Tanguay : Sur la personne.

M. Jolin-Barrette : Sur la personne.

M. Tanguay : Contre la personne. Contre la personne, c'est ça. Contre la personne. Dans tous les cas d'espèce de ces actes criminels, prévus dans le Code criminel, contre la personne, dans tous les cas d'espèce... Puis on est sûr qu'on n'échappe rien? Puis je pose la question. Je suis convaincu de la réponse, mais je veux juste l'entendre dire par le ministre. Il y aura nécessairement soit le décès, évidemment, soit une atteinte à l'intégrité physique, soit une atteinte à l'intégrité psychique. Si vous n'avez pas l'un de ces trois dommages-là, on va... il y aura peut-être eu un acte criminel, mais il n'y aura pas eu l'un de ces trois dommages là. Ça prend l'un de ces trois dommages là.

M. Jolin-Barrette : Mais la personne qui est victime d'une infraction criminelle, effectivement, il faut qu'elle subisse une intégrité en raison de la perpétration d'infraction criminelle. Mais, après ça, la personne, là, supposons, qui... ça se peut, là, que, dans le cas, là, d'une agression, là, envers la personne victime, bon, la personne victime, elle est victime, elle subit une atteinte à son intégrité, ensuite la personne, elle a deux parents, supposons un enfant d'âge mineur, ça se peut qu'il y ait un parent qui subisse une atteinte à son intégrité physique, mais que l'autre ne la subisse pas. Donc, c'est analysé, tout ça, là. Mais la personne qui a besoin, qui est considérée comme une personne victime, elle, elle va pouvoir s'adresser à l'IVAC pour être indemnisée, avoir ces aides financières.

M. Tanguay : C'est précisément là où je veux aller. Est-ce à dire que la victime de l'acte criminel, si... Puis j'en suis. Prenons l'exemple, là, d'intégrité psychique. Elle est passée à tabac, elle se fait battre, là, mais, pour x raisons, elle ne fait pas de demande d'indemnisation, elle ne s'en déclare pas, de dommage, elle ne s'en déclare, à tort ou à raison, pas, de demande. Est-ce qu'on pourrait quand même permettre à un parent qui en est bouleversé, là, de voir son enfant se faire tabasser, là... Est-ce qu'on pourrait le rendre admissible?

M. Jolin-Barrette : Il est déjà admissible. La personne victime... la personne qui a subi l'infraction criminelle n'est pas obligée de faire une demande à l'IVAC pour que le proche, le parent soit indemnisé.

M. Tanguay : O.K. Ça, c'est une distinction importante, M. le Président. Puis il pourrait même, à la limite, l'enfant du parent qui se fait battre, là, sauvagement, il pourrait même, à la limite : Non seulement je ne fais pas de demande, mais moi, regardez, des dommages physiques, je déclare que je n'en ai pas. Je vous le déclare, là, je n'en ai pas, puis je vais m'en sortir. Puis, dommages psychiques, je n'en ai pas, je suis habitué, peu importe, je n'en ai pas. Le parent pourrait déposer une demande puis dire : Indépendamment de ce que mon fils plaide, puis dit, puis affirme... Est-ce que l'IVAC pourrait dire : La porte est fermée puisque lui, il déclare qu'il n'a pas de dommage ou va dire : Bien, on constate un fait, c'est qu'il a été agressé? Il ne déclare pas de dommage physique ni psychique, mais vous, parent, ça vous a bouleversé parce que, semble-t-il, vous n'évoluez pas dans le même monde, évidemment, ça arrivera... Est-ce que le parent pourra, indépendamment du fait qu'il n'y a pas de demande puis qu'il n'y a même pas de dommage allégué par la victime même, pourra, elle, se voir... et plaider qu'elle est le parent d'un enfant qui a subi une atteinte à son intégrité?

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Dans le fond, une autre des avancées significatives qu'on fait avec le projet de loi que le gouvernement dépose, le projet de loi n° 84, est à l'effet que, dans l'ancien régime, dans le régime actuel de l'IVAC, là, pour pouvoir ouvrir, supposons, le soutien psychologique aux proches, il faut que la personne qui a subi l'infraction criminelle fasse la demande à l'IVAC pour enclencher le processus donnant ouverture à du soutien psychologique, supposons, pour les proches.

Nous, avec la nouvelle loi, la personne victime de l'infraction criminelle n'a pas à faire un geste positif envers l'IVAC pour dire : Moi, j'ai... Elle n'a pas besoin d'ouvrir son dossier, O.K.? Elle n'a pas besoin de dire : Moi, j'ai été tabassée, moi, j'ai été agressée sexuellement, pour que le proche puisse obtenir les aides associées au projet de loi.

Donc, je vous donne un exemple. Quelqu'un qui est agressé sexuellement, O.K., puis que son parent le sait, puis que la personne victime, là, elle n'est pas prête à y aller, là, elle n'est pas prête à dénoncer, elle n'est pas prête à faire le chemin, puis tout ça, à demander de l'aide, mais son parent, qui, lui, voit bien les conséquences qu'il y a sur son enfant, sur son conjoint ou n'importe quoi, lui peut s'adresser directement à l'IVAC puis dire : Écoutez, moi, j'ai un proche qui a été victime d'une infraction criminelle, je demande les aides qui sont offertes. Et ça pourra lui être offert.

M. Tanguay : Puis je conçois... Puis c'est important, ce qu'on dit là, parce qu'il en va de la compréhension du texte. Je reviens toujours avec le 2° : «Le parent d'un enfant — puis, je pense, c'est bien écrit, là — qui est décédé ou qui — on parle du parent — subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cet enfant», donc, le sujet de ce bout de phrase là, parce qu'une phrase, c'est toujours sujet, verbe, complément, c'est le parent dont... le parent qui, lui, sujet, subit un dommage à son intégrité à cause de l'infraction criminelle de son enfant. Donc, c'est indépendamment de la déclaration ou pas de l'enfant.

Par contre, dans les faits — puis là j'ai en tête, là, l'article 7, là, le devoir de coopération, et tout ça — comment pouvons-nous nous assurer qu'à l'IVAC... Parce que ça va être assez spécial de passer par-dessus la victime, qui, à quelque part, ne va pas collaborer pour étoffer le dossier. Parce que la personne... Moi, je suis parent. Il faut quand même que je fasse la preuve qu'il y a eu une infraction criminelle, et tout ça. Alors, oui, c'est une avancée, mais comment on va s'assurer que le parent, dans les faits, n'aura pas de recours parce qu'il n'y aura pas de témoin, l'enfant lui-même victime de l'acte ne va pas témoigner, ne va pas participer, il n'a même pas porté plainte. Je ne sais pas comment le ministre aborde ça. Je ne sais pas comment ça va se vivre sur le terrain, mais ça va être excessivement dur.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, l'article 7 n'est pas une condition pour l'obtention des aides. De toute façon, on aura un débat à l'article 7 aussi, là, puis on apportera des modifications, là, j'ai entendu les groupes, mais... c'est ça. Mais il n'y a pas d'enjeu. Dans le fond, la personne... Puis c'est ça, la notion, là. La différence qu'on a avec le passé, là, avec l'ancienne loi, là, c'est que nous, en faisant en sorte de créer... d'élargir la notion de personne victime, ça fait en sorte que ce n'est plus juste la personne qui subit l'infraction qui est considérée comme la personne victime, mais c'est tout son noyau, son noyau familial qui sont considérés. C'est pour ça que 2° à 6° est là. On dit : Vous, là, le proche, le parent de l'enfant agressé, l'enfant du parent agressé, vous êtes considéré comme une personne victime. Et, à ce titre-là, vous faites la demande à l'IVAC, donc... Et les agents de l'IVAC écoutent la demandent, et la qualifient, et procèdent.

M. Tanguay : Mais mon point, M. le Président... Puis je suis d'accord avec le ministre, c'est juste que je crains que ce soit théorique, cette opportunité-là, si la victime, au premier titre, tu sais, ne collabore pas, n'a pas déposé de plainte, la pente va être haute pour... Parce que j'imagine que nos bonnes personnes à l'IVAC vont vouloir avoir... Il y a-tu eu une infraction criminelle? Bien, écoutez, la personne n'a pas porté plainte, et ainsi de suite.

Je me demande jusqu'à quel point ce sera théorique et comment on va être capables de dire : O.K. Inquiétez-vous pas, je n'ai pas besoin de plainte, je n'ai pas besoin de dossier, puis cassez-vous pas la tête sur la preuve de l'infraction criminelle, parce qu'on n'a rien au dossier. Il me semble, en toute honnêteté, que, pour un décideur à l'IVAC — je ne voudrais pas être à sa place — tu sais, ça ne sera pas évident de dire : O.K. Je vous crois sur parole. Est-ce que ça va être ça?

M. Jolin-Barrette : La personne... en fait, la preuve de la survenance de l'infraction, là, elle peut être établie par témoignage de la personne. Donc, la personne qui est une personne victime, qui n'est pas la victime qui a subi l'infraction criminelle, elle relate la situation, et c'est les agents de l'IVAC qui établissent sa demande.

Et, là-dessus, ce n'est pas différent, hein, et ça, il faut le répéter et le répéter, le régime de l'IVAC ne nécessite pas de plainte ou de dénonciation en matière criminelle. On a voulu faire ça notamment pour les victimes d'agression sexuelle qui désirent ne pas passer à travers le système criminel et pénal, ce à quoi je tiens à dire que toutes les ressources sont mises en place pour bien accompagner les personnes victimes lorsqu'elles sont prêtes à dénoncer une infraction criminelle, parce que les gens qui commettent ce genre d'infractions là doivent être poursuivis.

Cela étant, les victimes s'adressent, au moment où elles le souhaitent, à l'IVAC, et elles n'ont pas de dénonciation à la police à faire pour leur dossier, tout est analysé. Mais la démonstration de ça, c'est qu'il y a près de 80 % des crimes qui sont indemnisables à l'IVAC qui sont des infractions de nature sexuelle, et il n'y a pas autant de dénonciations qui sont faites à la police.

Donc, l'IVAC est vraiment là pour... et surtout avec la réforme qu'on fait, est surtout là pour aider les personnes victimes à se réhabiliter, à retrouver le cours de leur vie, et c'est la même chose pourquoi est-ce qu'on inclut toute la cellule familiale, le noyau, puis chacune des ces personnes-là est considérée comme des personnes victimes qui vont pouvoir avoir du soutien de l'État. C'est un changement de philosophie, justement parce que, si le proche est soutenu puis passe à travers la démarche... parce que c'est une victime collatérale, si on peut dire, si la victime, elle est aidée, nécessairement, elle, elle offre du soutien à la victime qui a subi l'infraction, et ça va l'outiller aussi dans le cheminement pour soutenir la victime, parce que, quand il y a quelqu'un qui est victime d'infraction criminelle, c'est l'ensemble de son noyau familial qui le subit.

• (11 h 20) •

M. Tanguay : D'où... tout à fait, elle peut lui montrer le chemin.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Tanguay : Tu sais que ça existe, puis c'est possible, puis ah! O.K., puis on aura l'occasion de faire le débat, j'en suis persuadé, sur deux autres aspects que n'abordent pas l'article 10, mais sur l'aspect justement de ce qui sera exigé et ce qui sera l'encadrement de l'analyse large et libérale des interprétations de la loi, d'avoir une approche humaine, là, le rapport de la Protectrice du citoyen, en 2016, approche humaine, ouverte. Je vais le dire un peu croche, là, mais que, dans le doute, on indemnise, là, d'où l'importance, de... Puis je sais qu'il y a des articles dans la loi, on y arrivera, qui va prévoir ça, de un, de deux, et on fera le débat aussi par rapport à ces victimes dans un contexte où l'acte criminel reproché s'est fait à l'étranger. On aura l'occasion de faire le débat par rapport à l'arrimage de ça, également. Parce que ça couvre.

M. Jolin-Barrette : Oui, certainement. Mais, comme je vous dis, le fait qu'on rapatrie aussi la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, bien, en fait, sous le ministère de la Justice, que maintenant ça va être le ministère de la Justice qui est responsable, ça va de pair avec un IVAC plus humain, puis on veut changer la façon de fonctionner, notamment au niveau du service à la clientèle, notamment d'offrir dès le départ le soutien psychologique, même si le dossier n'est pas autorisé.

M. Tanguay : Puis est-ce qu'il y a un article, M. le Président, qui prévoit ça, le transfert? Est-ce que c'est dit ou ça va être administratif dans la loi, qu'il y aura un transfert?

M. Jolin-Barrette : Non, c'est prévu, dans le fond, que le ministère de la Justice, maintenant, est responsable. On va vous trouver l'article.

M. Tanguay : Dans la loi.

M. Jolin-Barrette : Dans la loi.

M. Tanguay : O.K. Au-delà du fait qu'à la fin le ministre de la Justice est responsable de la présente loi... C'était ça dans le cas, là, avant, là, mais, au-delà de ça, il y a un article qui dit : C'est sous...

M. Jolin-Barrette : Oui, je vais vous donner l'article.

M. Tanguay : O.K. Parfait. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'article 10 tel qu'amendé. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 10, tel qu'amendé, est adopté. Merci.

On avait... Les articles 3 à 9 sont suspendus. Est-ce qu'il y avait des discussions de revenir ou de continuer, M. le ministre?

M. Jolin-Barrette : On pourrait continuer sur l'article 11, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Donc, article 11. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, juste en termes de précision, là, pour le collègue de LaFontaine, là, donc c'est partout dans la loi, parce qu'on remplace la commission dans toutes les dispositions d'application de la loi au niveau de la Commission de la santé et de la sécurité. Donc, auparavant, on disait dans l'ancienne loi : C'est la... bien, la CNESST, avant, c'était la CSST, la direction, mais maintenant c'est le ministre de la Justice. On ne confie plus, dans le fond, la DIVAC à la CSST, à la CNESST, c'est maintenant le ministère de la Justice. Donc, par entente administrative, c'est nous qui allons déterminer. Donc, si on n'est pas satisfait de la DIVAC ou des correctifs apportés, on va pouvoir le rapatrier. Puis c'est l'article 189, aussi, de la loi qui fait l'économie générale que c'est sous la responsabilité du ministre de la Justice. Mais, dans l'ancienne Loi sur l'IVAC, vous aviez la CSST qui s'occupait de la DIVAC, maintenant, il ne l'a plus.

M. Tanguay : On aura l'occasion là-dessus, M. le Président, de faire le débat, justement, puis on aura des questions. Si c'est juste à 189, on le fera là, mais de justement... Comment le ministre perçoit et planifie le rapatriement de plusieurs personnes sous sa gouverne? J'imagine qu'il y aura un rapatriement physique avec des budgets de réorganisation, et ainsi de suite, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, pour l'instant, M. le Président, là on est en train d'évaluer ça, de quelle façon ça fonctionne. C'est possible qu'on le laisse à la DIVAC, par entente de service, mais avec une entente de service avec des critères précis à remplir, service clientèle, formation. C'est un changement de mentalité, mais ce que je veux dire, désormais, le ministère de la Justice va avoir — une expression qui est connue par le Parti libéral — les deux mains sur le volant, en lien avec la gestion à la DIVAC. Et, si ça ne satisfait pas, si les correctifs ne sont pas apportés, là, à ce moment-là, on pourrait avoir des transferts d'effectif.

M. Tanguay : Et je salue, M. le Président, les influences politiques du ministre.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, elles sont diverses, et je sais que c'est bien de s'inspirer. Vous savez, parfois, les chemins en politique sont sinueux, parlez-en au député de LaFontaine.

Le Président (M. Bachand) : Donc, l'article 11.

M. Tanguay : Vous voulez me partir là-dessus. Vous disposez de combien de temps?

M. Jolin-Barrette : Moi, M. le Président, j'attends toujours mon interpellation sur la Loi constitutionnelle de 1867, que le député de LaFontaine m'a promis, M. le Président.

M. Tanguay : M. le Président, telle fut ma déception de voir que le ministre n'a pas participé au débat sur le lieutenant-gouverneur la semaine passée, qui était une belle porte ouverte pour bifurquer sur l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. J'en ai parlé.

Le Président (M. Bachand) : Donc, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il faut ménager les susceptibilités, vous savez, je ne suis pas responsable du secrétariat québécois aux relations canadiennes, mais c'est sûr que, si le député de LaFontaine amène un aspect très juridique qui touche le ministère de la Justice, très certainement, je pourrais m'en saisir. Je l'invite à la réflexion.

Le Président (M. Bachand) : Donc, on va se saisir de l'article 11. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. «11. Les personnes suivantes sont, en raison d'une intervention civique, considérées comme des personnes victimes ayant droit à une aide financière, selon les modalités qui sont prescrites par le présent titre :

«1° l'intervenant qui subit une atteinte à son intégrité en procédant ou en tentant de procéder à l'arrestation d'un contrevenant ou d'un présumé contrevenant ou en prêtant assistance à un agent de la paix qui procède ou qui tente de procéder à une arrestation lorsque les circonstances de l'arrestation impliquent une infraction criminelle;

«2° l'intervenant qui subit une atteinte à son intégrité en prévenant ou en tentant de prévenir la perpétration d'une infraction criminelle ou de ce qu'il croit être une telle infraction ou en prêtant assistance à un agent de la paix qui prévient ou tente de prévenir la perpétration d'une [...] infraction ou de ce qu'il croit être une telle infraction;

«3° le parent d'un enfant qui est décédé ou qui subit une atteinte à son intégrité [lorsque] cet enfant est l'intervenant visé au paragraphe 1° ou 2° ou la personne qui, à l'égard de cet enfant, est titulaire de l'autorité parentale;

«4° l'enfant d'un intervenant visé au paragraphe 1° ou 2° qui est décédé ou qui subit une atteinte à son intégrité ou l'enfant à l'égard de qui un intervenant décédé ou qui subit une même atteinte est titulaire de l'autorité parentale;

«5° le conjoint d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité alors qu'elle est l'intervenant visé au paragraphe 1° ou 2°;

«6° une personne qui est à la charge d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité alors que cette dernière est l'intervenant visé au paragraphe 1° ou 2°;

«7° un proche d'une personne qui est décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité alors qu'elle est l'intervenant visé au paragraphe 1° ou 2°.»

Donc, l'article 11 établit que sont également des personnes victimes qui éventuellement bénéficieraient du régime d'aide financière celles qui subissent une atteinte à leur intégrité en raison d'une intervention de leur part. À l'instar de l'article 10, l'article 11 reconnaît également ces personnes comme victimes : le parent et l'enfant de l'intervenant, son conjoint, une personne à sa charge ou un proche.

Le projet de loi propose, pour les intervenants, les mêmes aides financières que pour les victimes qui subissent à l'atteinte à leur intégrité en raison de la perpétration de l'infraction criminelle contre leur propre personne. Il en prévoit de même pour les personnes qui sont les parents, les enfants, le conjoint, les personnes à charge ou leurs proches intervenants.

Et j'ai un amendement, M. le Président, à apporter à l'article 11, qui, je crois, est déjà...

Le Président (M. Bachand) : Oui. Il est déjà sur Greffier, oui.

M. Jolin-Barrette : Et qui sera déposé. Alors, ajouter, à la fin de l'article 11 du projet de loi, l'alinéa suivant :

«Aux fins des dispositions de la présente loi qui s'appliquent aux personnes visées au présent article, chaque fois que l'une de ces dispositions traite de la perpétration d'une infraction criminelle, l'intervention décrite au paragraphe 1° ou au paragraphe 2° du premier alinéa est réputée être cette perpétration.»

Donc, le projet de loi élabore plusieurs de ses normes en lien avec la perpétration d'une infraction criminelle. Or, dans le cas des intervenants, la perpétration n'a souvent pas lieu puisque l'intervention vise à la prévenir. Dans ce contexte, il y a lieu d'ajouter une disposition qui fera en sorte que l'intervention décrite à l'article 11 constitue la perpétration de l'infraction dans toutes les dispositions où norme est en lien avec cette perpétration.

Donc, pour vous expliquer ça en clair, M. le Président, là, il faut comprendre, là, que, dans la loi que nous faisons, là, on vient couvrir la victime d'une infraction criminelle. On vient couvrir aussi la personne qui s'interpose entre la personne qui commet l'infraction criminelle et la personne victime. Donc, tout le régime d'aide applicable à la personne victime, il est applicable aussi à la personne qui intervient à titre de... pas de sauveteur, mais de...

Une voix : D'intervenant.

• (11 h 30) •

M. Jolin-Barrette : ...à titre d'intervenant, à titre d'intervenant pour empêcher la commission de l'infraction criminelle. Donc, ce qu'on est venu faire avec l'amendement de l'article 11, c'est de dire, lorsqu'on parle, là, de quelqu'un... de la perpétration de l'infraction criminelle, on va assimiler perpétration de l'infraction criminelle pour l'intervention également. Donc, l'intervenant... Parce que, dans le fond, l'infraction criminelle, elle n'est pas commise parce que l'intervenant amène un bris dans la chaîne. Donc, pour lui, pour qu'il soit indemnisé également, pour qu'il puisse bénéficier des aides, on va dire : Bien, lorsqu'on parle de perpétration, quand on est dans un cas où c'est un intervenant, on va parler de l'intervention. Donc, perpétration équivaut à intervention pour venir couvrir le régime de l'intervenant.

Donc, dans le fond, il y a un régime propre qui est le même que celui de la personne victime pour l'intervenant, mais pour ne pas qu'il passe dans les mailles, pour qu'on dise : Bien, vous n'êtes pas indemnisable parce qu'il n'y a pas eu la perpétration de l'infraction, non parce qu'il y a eu une intervention de sa part, donc, quand il y a intervention, c'est équivalent de perpétration pour lui. Est-ce que je suis clair?

M. Tanguay : Oui, mais on a des questions, pareil.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : M. le Président, ce n'est pas parce que le ministre est clair qu'on n'a pas de question, mais...

M. Jolin-Barrette : Mais ça aide à en avoir moins.

M. Tanguay : Ça part bien, oui, effectivement. Donc, on aurait pu dire, sur un point de vue théorique, on aurait pu dire : Bien, si une personne est sur le point de commettre un acte criminel et qu'elle est empêchée par l'intervention d'une personne, l'intervention civique, on pourrait dire que... Puis cette personne-là qui intervient pour empêcher l'acte criminel se fait blesser, par exemple... Une personne voulait en battre une autre, j'interviens puis je me fais blesser, on aurait pu dire, d'un point de vue théorique : Bien, l'acte criminel qui a été prévenu, qui était de frapper l'individu b, est transformé en un acte criminel qui aura été, finalement, de frapper l'individu c, qui était l'intervenant. Par contre, je pense que le ministre veut aller plus large que ça. On pourrait dire ça : Il y a une bagarre, il veut frapper b, mais, finalement, je m'interpose, puis il me frappe, moi. Il y a un acte criminel, et là je me qualifie même en vertu de 10.1°. Il m'a frappé. Par contre, là où je suis le ministre, parce que ce n'est pas juste théorique, c'est que je vais inclure... je vois qu'il va y avoir une altercation, moi, je pars à la course pour intervenir, je tombe, je me blesse, il n'y a pas eu d'acte criminel, mais j'allais intervenir et là je suis couvert, j'imagine que je suis couvert là aussi, et c'est l'objectif premier de l'article.

M. Jolin-Barrette : Bien, le...

M. Tanguay : Donc, qu'il me rassure, je viens de tomber, je me suis enfargé, là, je suis tombé, je me suis fait mal, là, je vais avoir de quoi.

M. Jolin-Barrette : C'est pour empêcher l'infraction.

M. Tanguay : Oui. J'allais l'empêcher, l'infraction, mais, finalement, je n'ai pas été...

M. Jolin-Barrette : Bien, à l'article 11.1°, là : «Les personnes suivantes sont, en raison d'une intervention civique, considérées comme des personnes victimes ayant droit à une aide financière, selon les modalités qui sont prescrites par le présent titre :

«1° l'intervenant qui subit une atteinte à son intégrité en procédant ou en tentant de procéder à l'arrestation d'un contrevenant ou d'un présumé contrevenant ou en prêtant assistance à un agent de la paix qui procède ou qui tente de procéder à une arrestation lorsque les circonstances de l'arrestation impliquent une infraction criminelle.»

Bon, l'exemple du député de LaFontaine est plus éloigné de...

M. Tanguay : Je tentais. Vous allez dire : Il est bien maladroit, mais, je veux dire, je ne suis pas videur de boîtes, moi, ce n'est pas mon métier, mais j'ai tenté, je me suis enfargé, j'étais un héros, puis, finalement, ça a fini sur le plancher, je me suis blessé puis je n'ai rien empêché... Je tentais, moi, je pense que je me qualifie, là, je tentais. Puis je vois le ministre qui a un petit sourire, M. le Président, il compatit, là, je me suis fait mal au genou, là.

M. Jolin-Barrette : Je compatis. Oui, vous êtes admissible, on me confirme que, oui, vous êtes admissible.

M. Tanguay : Oui, parfait, c'est ça. Parce que je reviens à ma première distinction, c'est même... je dirais même, c'est l'objectif premier de l'article 11, parce que si j'interviens dans une bataille puis que je reçois un coup... puis je vois le ministre, M. le Président, qui a toujours un petit sourire, alors je reçois un coup, il y a un acte criminel distinct envers ma personne, je n'ai même pas besoin de me qualifier en vertu de 11, dans ce cas-là, je vais me qualifier en vertu de 10.1°.

M. Jolin-Barrette : Si le député de LaFontaine se blesse dans le cadre de sa tentative de venir porter secours, de venir intervenir, oui, il est couvert.

M. Tanguay : Et c'est surtout ces... Alors, quand on parle d'intervention civique... et l'intervenant, en termes clairs, là, autrement dit, c'est toute personne, quidam, tiers, on n'a pas à se qualifier d'intervenant, là, comme tantôt, premier intervenant, puis tout ça, non, non, c'est toute personne, elle n'a aucun statut, ce n'est pas son métier, c'est toute personne qui arrive, et intervention civique, ça veut dire que c'est le contraire de la force policière, la force ci, la force ça, constabulaire...

M. Jolin-Barrette : Ou je viens prêter assistance aussi à un agent de la paix pour mettre fin à une infraction criminelle.

M. Tanguay : Oui. Et, question de compréhension, personne ayant... et là que mon atteinte puisse être à mon intégrité, là aussi, intégrité physique et psychique, c'est couvert.

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est couvert, les deux.

M. Tanguay : O.K. On est sur le sous-amendement... l'amendement, pardon : «Aux fins des dispositions de la présente loi qui s'appliquent aux personnes visées [...] traite de la perpétration d'une infraction [...], l'intervention [...] est réputée être cette perpétration». Autrement dit, ce que le ministre dit, c'est que, pour 1° et 2°, l'enfant d'un intervenant visé qui a... O.K. 1° et 2° pourraient avoir des cas d'espèce où il y a une tentative, mais il n'y a pas eu, effectivement, de perpétration d'acte criminel, contrairement à 3°, 4°, 5°, 6°, 7° où, là, on dit : Bon, une personne décédée... on n'a pas besoin parce que, là, il y a un résultat, là, à 3°, à 7° que l'on n'aurait pas. Donc, même s'il y a eu une tentative puis il n'y a pas eu d'acte criminel, puis je reviens avec mon exemple, je suis tombé moi-même tout seul, bien, le fait qu'il y ait démonstration qu'il y avait... il était sur le point de se commettre un acte criminel, je suis couvert. C'est ça, l'objectif de l'amendement, n'est-ce pas?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, l'objectif, c'est de venir couvrir partout dans la loi où on parle de perpétration. Si le député de LaFontaine veut prendre l'article 20 de la loi, on va donner un exemple concret.

À l'article 20, on dit : «La demande de qualification doit être présentée dans les trois ans qui suivent la connaissance, par la personne victime, du préjudice qu'elle subit en raison de la perpétration de l'infraction criminelle», O.K., de la perpétration de l'infraction criminelle. Or, là, en raison de l'intervention, il n'y en a pas eu de perpétration d'infraction criminelle. Donc, quand on va lire «perpétration», puis qu'il y a un intervenant qui veut demander de l'aide de l'IVAC, il a trois ans de la survenance de l'événement pour demander de l'aide de l'IVAC, mais, à ce moment-là, on remplace «perpétration» par «intervention». Donc, le terme «perpétration», dans ce contexte-là, à l'article 20, ce n'est pas de la perpétration d'infraction criminelle parce qu'il n'y en a pas eu d'infraction criminelle due en raison de l'intervention de la personne. Donc, le dernier alinéa qu'on vient ajouter à l'article 11, par voie d'amendement, c'est pour dire : Dans un cas comme ça, pour la loi, en général, lorsqu'on faisait référence à «perpétration» d'infraction criminelle, on pourra y lire également «intervention» de l'infraction criminelle parce qu'on vient couvrir l'intervenant aussi.

M. Tanguay : Autrement dit, moi, il se passe ça dans le bar, ils vont se battre, je pars à la course, je tombe, je me blesse, il n'y a pas eu perpétration, je me suis blessé tout seul.

M. Jolin-Barrette : Non, non, là, c'est il y aurait eu perpétration de l'infraction criminelle. C'est dans le cas où, vous, vous intervenez, là, pour dire... pour empêcher la perpétration de l'infraction criminelle, il voulait tuer la personne, vous avez pris le poignard avant qu'il commette... mais là, il y aurait tentative, là, mais prenons ça plus macro, là, supposons que vous prenez le poignard, donc, il n'y a pas eu la perpétration de l'homicide, donc, il n'y a pas eu de perpétration d'infraction criminelle, mais, vous, vous avez fait une intervention, mais vous avez subi une atteinte à votre intégrité psychique ou physique dans le cadre de cette intervention-là, vous devez pouvoir être admissible au régime. Donc, au lieu que ce soit «perpétration», partout où on lira «perpétration», c'est également «intervention».

M. Tanguay : Pour l'application de 11 exclusivement.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Tanguay : Autrement dit, dans le contexte de 11, je pourrais, à la mise en vigueur de la loi, remonter trois ans en arrière pour faire ma demande.

M. Jolin-Barrette : Non, c'est trois ans... dans le fond, le délai, maintenant, là, dans la loi, là, dans l'IVAC, c'était... dans le fond, jusqu'au ministre St-Arnaud, c'était un an, le délai pour demander d'être indemnisé par le régime de l'IVAC. Le ministre St-Arnaud, il a amené ça à deux ans, et nous, on l'amène à trois ans pour présenter une demande à l'IVAC, sous réserve de ce qui est imprescriptible, des violences subies pendant l'enfance, des agressions à caractère sexuel et de la violence conjugale.

M. Tanguay : Puis l'article 20 sera à l'adoption de la loi... aura une mise en vigueur immédiate, l'article 20, j'imagine.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, l'entrée en vigueur de la loi arrive, je pense, maximum cinq mois après la sanction.

• (11 h 40) •

M. Tanguay : Pour tous les articles?

M. Jolin-Barrette : Pour tous les articles.

M. Tanguay : Et inclus 20? Parce que 20, vous comprenez que, malheureusement, dans certains cas, mon deux ans et demi pourrait me faire perdre des droits, là, est-ce qu'on ne pourrait pas dire : On en reparlera rendu là puis on va prendre une note pour l'article 20, que ce soit d'application à la sanction immédiate pour le trois ans?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce qu'il y a des enjeux de dispositions transitoires en lien avec ça, mais on pourra les expliquer au moment de... C'est assez complexe, là, parce qu'on ne veut pas faire perdre de droits aux gens, là.

M. Tanguay : Ça fait que c'est sur l'amendement, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : ...sur l'amendement. Merci.

Mme Labrie : Oui. Là, j'ai des questions sur la notion de civisme parce que c'est un peu de ça dont il est question ici, mais j'essaie de comprendre si on est en train de restreindre la notion de civisme, parce qu'à ma compréhension c'était l'IVAC qui indemnisait des personnes qui avaient posé un acte de civisme, et je vais donner un exemple concret parce qu'il y a une citoyenne qui m'a interpellée là-dessus, une personne qui avait fait un don d'organe et qui en subissait des préjudices corporels à la suite de ça, si elle faisait sa demande dans les temps appropriés, pouvait être indemnisée, mais là je ne vois pas ce type de situation là là-dedans, ça fait que... est-ce que c'est parce que c'est ailleurs? Les personnes qui font preuve de civisme pour éviter un préjudice corporel à quelqu'un d'autre, ça va être couvert quand même ailleurs ou...

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, la loi sur le civisme demeure. Ici, c'est vraiment le terme «intervenant» si... dans le cadre d'une intervention. Donc, on ne touche pas au régime sur le civisme.

Le Président (M. Bachand) : Voudriez-vous suspendre un peu, M. le ministre?

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, M. le Président, la loi sur le civisme, on va venir y apporter des modifications aussi, mais les modalités associées à ça seront plus généreuses que ce qu'on avait avant.

(Consultation)

M. Jolin-Barrette : O.K., bon, on maintient le même régime sauf qu'on vient appliquer des dispositions de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels au sauveteur. Donc, si je résume, dans le fond, dans certaines circonstances, les sauveteurs vont avoir droit, quand il y a des circonstances comme celles-ci, où il y a intervention, au régime de l'IVAC, mais le régime du civisme demeure toujours.

Mme Labrie : O.K. donc, une personne... parce qu'ici il est question, là, d'un contrevenant, là, quelqu'un qui a posé un acte de civisme dans lequel il n'y avait pas de contrevenant, dans la loi, là, ça va demeurer.

M. Jolin-Barrette : Non, ça, c'est l'autre régime, c'est ça, mais nous on vient incorporer quelqu'un qui est un intervenant dans le cadre d'une infraction criminelle, on vient l'assimiler à cela, mais, si c'est civisme, ça reste les dispositions sur le civisme.

Mme Labrie : Ça fait que la notion de sauveteur, elle n'est pas modifiée?

M. Jolin-Barrette : Non.

Mme Labrie : Parfait. Merci

Le Président (M. Bachand) : Merci. Autres interventions sur l'amendement du ministre? S'il n'y a pas d'autres interventions, nous allons procéder à la mise aux voix, Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Donc, on revient à l'article 11 tel qu'amendé. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui, M. le Président, j'aimerais voir le cas d'espèce. 11.1° : «L'intervenant qui subit une atteinte à son intégrité en procédant ou en tentant de procéder à l'arrestation d'un contrevenant ou d'un présumé contrevenant ou en prêtant assistance à un agent de la paix qui procède ou qui tente de procéder à une arrestation...» Le 2° : «L'intervenant qui subit une atteinte à son intégrité en prévenant ou en tentant de prévenir la perpétration...» Alors, 1°, c'est «il participe» ou «veut participer à l'arrestation,» mais 2°, il ne parle pas d'arrestation, il veut prévenir qu'un acte criminel ait lieu, donc c'est juste d'empêcher, là, je ne veux pas l'arrêter, là, je veux juste empêcher que ça ait lieu. Le ministre me dit que, oui, c'est ça, la compréhension première du texte. Est-ce que ça... c'était quoi... quel est le régime actuel de la loi actuelle par rapport à ça? Est-ce que... j'essayais de voir dans la loi sur l'aide, la loi sur l'indemnisation, on part d'où dans la jurisprudence?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, à l'article 3 de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, les intervenants étaient prévus aux paragraphes b et c, donc : «La victime d'un crime, aux fins de la présente loi, est une personne qui, au Québec, est tuée ou blessée.» Puis :

«b) en procédant ou en tentant de procéder, de façon légale, à l'arrestation d'un contrevenant ou d'un présumé contrevenant ou en prêtant assistance à un agent de la paix [ou en] procédant à une arrestation; puis

«c) en prévenant ou en tentant de prévenir, de façon légale, la perpétration d'une infraction ou de ce que cette personne croit être une infraction, ou en prêtant assistance à un agent de la paix qui prévient ou tente de prévenir la perpétration d'une infraction ou de ce qu'il croit [être] une infraction».

Donc, on reprend ce qui était prévu à 3b, 3c de l'IVAC en y apportant des modifications parce que là on vient élargir à la notion de «proche». Dans le fond, la personne victime... bien, la personne... l'intervenant, O.K., l'intervenant qui subit une atteinte, bien, ses proches, son fils, sa fille, son conjoint, eux peuvent aussi subir une atteinte du fait que lui a subi une atteinte. Tu sais, quand qu'on parlait du noyau familial tout à l'heure pour la personne victime, bien, dans le fond, l'intervenant qui subit une atteinte, bien, ses proches aussi, c'est possible qu'ils subissent une atteinte, donc ils vont être considérés eux autres aussi comme des personnes victimes. Donc, on applique le régime de la personne victime à l'intervenant et à ses proches.

M. Tanguay : Sauf pour le témoin.

M. Jolin-Barrette : Sauf pour le témoin.

M. Tanguay : Non, c'est ça, on fait... c'est un miroir, en quelque sorte, de ce qu'on a fait à 10, M. le Président, puis le lien est fait, là : «3° le parent d'un enfant qui est décédé ou qui subit une atteinte à son intégrité — intégrité physique ou psychique — alors que cet enfant est l'intervenant visé [à] 1° [ou] 2° ou la personne qui, à l'égard de cet enfant, est titulaire de l'autorité parentale.» Donc, on le lie à «proche», le témoin de la perpétration d'une infraction, le proche...

M. Jolin-Barrette : C'est miroir, à l'exception du témoin.

M. Tanguay : Oui. À l'exception, c'est ça, du témoin, là. On a mis la barre parce qu'on aurait pu inclure le témoin, mais là on a mis la barre à cela, parce qu'on aurait pu dire aussi que... aussi important avions-nous mis le contexte d'un témoin qui voit une infraction criminelle se commettre. La personne qui est témoin d'un intervenant, intervention civique, qui se fait assassiner, elle pourrait par contre se qualifier en vertu de 10.7°?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce que là il y a une infraction criminelle.

M. Tanguay : C'est ça.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, l'intervenant qui subirait un assassinat, là, ça devient une infraction criminelle. Donc, lui est une personne victime maintenant, il n'est plus un intervenant, il change de catégorie.

M. Tanguay : O.K., mais, à ce moment-là, ça, ça marche des deux bords. Pourquoi l'avoir prévu à 11 si, de toute façon, le parent de l'enfant décédé, tout intervenant qu'il soit ou pas, il serait couvert aussi, là, il aurait une double reconnaissance, là?

M. Jolin-Barrette : Mais c'est parce que, supposons qu'il n'y a pas d'infraction criminelle dans le cadre du décès de la personne, dans le fond, l'intervenant, là, décède, mais ce n'est pas à cause d'une infraction criminelle. Il y avait une infraction criminelle qui allait être perpétrée, mais dans... il y a un accident dans le cadre de l'intervention, puis ce n'est pas une infraction criminelle.

M. Tanguay : Je comprends.

Le Président (M. Bachand) : D'autres interventions sur l'article 11 tel qu'amendé? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 11 tel qu'amendé est adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, article 12, M. le Président, donc : «Outre les conditions prévues aux articles 10 et 11, pour que les personnes victimes qui y sont mentionnées puissent bénéficier de l'aide financière prévue au présent titre, l'atteinte à l'intégrité de la personne visée au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 10 ou au paragraphe 1° ou 2° de l'article 11 ou le décès de cette personne doit être survenu au Québec.»

Donc, dans ce cas-ci, le régime pour l'intervenant s'applique si l'infraction survient au Québec. Donc, cette disposition établit le principe que, pour avoir droit au régime d'aide financière, les personnes devraient avoir subi au Québec la perpétration de l'infraction dont elles sont les victimes. Un chapitre d'exception serait éventuellement proposé pour qu'un Québécois qui est victime d'une infraction criminelle dans un pays étranger, ou dans une autre province, ou un territoire canadien ait aussi droit au régime d'aide financière, sous réserve de certaines conditions.

Donc, nous, on vient dire : La victime, on élargit aux crimes hors Québec pour la personne qui en est victime, mais, pour l'intervenant, on n'indemnisera pas l'intervenant qui intervient à l'étranger, ça va être sur le territoire québécois.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Si on le décortique, le 12, puis le ministre pourra me dire quel est l'article où on prévoit l'indemnisation des victimes, parce que 10.1°, si on le décortique, 10.1°, c'est la personne qui subit une atteinte à son intégrité, on l'exclut spécifiquement à 12 si c'est survenu hors Québec parce qu'on le prévoit ailleurs. À quel article on le prévoit?

M. Jolin-Barrette : 62 et suivants.

M. Tanguay : 62 et suivants. Donc, 10.1°, on va en reparler à 62 et suivants parce qu'il y a des conditions. C'est... entre autres, il faut avoir porté plainte à l'autorité compétente, et ainsi de suite, on fera le débat là-dessus, mais on l'exclut, puis ça participe de... rassurez-moi, là, on l'exclut à 12 parce qu'on va avoir un régime particulier à 62, puis on verra si c'est bon ou pas bon là-dessus, ça, je le comprends, 10.1°. Maintenant, 11.1° à 11.2°, c'est l'intervenant, le bon Samaritain à l'étranger, tout Québécois soit-il, il n'est pas couvert ici.

M. Jolin-Barrette : Il n'est pas couvert.

M. Tanguay : Est-ce qu'il y a un autre 62 plus loin qui va lui offrir un régime ou, lui, la porte est fermée là?

M. Jolin-Barrette : Non, lui, il n'est pas couvert.

M. Tanguay : Pourquoi on ne ferait pas ça, le bon Samaritain québécois?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, il y a plusieurs raisons. La perpétration de l'infraction est à l'étranger, ça devient difficilement gérable tout ça, puis je vous donne un exemple, un contrevenant, par cybercriminalité, qui commettrait son infraction auprès d'un Français, par exemple, et qu'on doive indemniser le Français, donc, on pourrait avoir à indemniser des gens qui n'ont pas de lien avec le Québec.

M. Tanguay : O.K. Autrement dit, le bon Samaritain qui est sur le territoire du Québec, qui est un Français en visite deux semaines, va être couvert par l'IVAC?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : Oui?

M. Jolin-Barrette : Bien, parce qu'il est présent. C'est-tu ça?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça, parce qu'il est présent ici, il empêche une infraction, mais si c'est une infraction qui est survenue à l'étranger, on ne le couvre pas.

M. Tanguay : O.K. N'aurions-nous pas pu dire : On va couvrir la personne à l'étranger, dans la mesure où elle est citoyenne ou selon les différentes étapes de l'immigration, là, et résident permanent au Québec ou, ainsi de suite, n'aurions-nous pas pu dire que, pour l'étranger, le bon Samaritain québécois, qu'il soit citoyen canadien ou qu'il soit, selon les différentes catégories, là, d'immigration, là, résident permanent ou, ainsi de suite, bien, que, lui, on le couvre? Je comprends l'histoire du Français à l'étranger qui viendrait appliquer au Québec, il n'y a pas de facteur de rattachement, mais n'aurions-nous pas pu dire : On va couvrir les Québécois qui, à l'étranger, vont être des bons Samaritains?

M. Jolin-Barrette : Bien, on aurait pu, mais, à un moment donné, pour la réforme, il faut faire des choix, notamment, puis on veut se concentrer sur les personnes victimes. Pour l'intervention sur le territoire québécois, oui, mais, après ça, ça devient une question aussi d'appréciation des faits, et, lorsque ça survient au Québec, ça permet d'avoir un facteur de rattachement beaucoup plus grand. Et je comprends ce que nous dit le député de LaFontaine, mais déjà qu'on vient couvrir ce régime-là, qu'on assimile la personne à une personne victime, je pense que ça fait le travail.

M. Tanguay : Est-ce qu'il y a des précédents, sûrement, dans notre législation québécoise, justement, où, lorsque l'on veut... dans ce cas-là, c'est un cas d'application très pointu, puis il y en a sûrement d'autres, là, auxquels je n'ai pas d'idée... pour lesquels je n'ai pas d'idée, mais où on définit dans la loi québécoise : O.K., pour ce qui se passe à l'étranger, ce sera sur les résidents permanents, les citoyens? Est-ce qu'on a cette qualification ailleurs, dans d'autres pièces législatives québécoises, de dire : Bien, on va indemniser... La route, les accidents de la route, exemple.

M. Jolin-Barrette : Bien, exemple, là, si vous voulez bénéficier, supposons, du régime de l'assurance maladie, vous avez un facteur de rattachement d'avoir été ici 183 jours par année, d'avoir la notion de résidence.

M. Tanguay : C'est ça. Alors, ici, donc, le ministre — mon point — voit que, très facilement, on pourrait... Ça existe déjà, là, dans le corpus, là, il y a une couverture à l'étranger, parce que vous êtes admissible à la Régie de l'assurance maladie du Québec, vous êtes citoyen ou vous êtes résident permanent, on peut y aller selon les catégories...

M. Jolin-Barrette : Bien, il faut avoir un facteur de rattachement avec le Québec. Tu sais, si vous n'avez pas de lien avec le Québec, vous êtes résident permanent, mais ça fait... Je pense, la résidence permanente, vous devez... pour ne pas perdre la résidence permanente, vous devez être... vous devez revenir à l'intérieur de cinq ans, à moins que je me trompe, là, vous me corrigerez, là, mais, si quelqu'un ça fait quatre ans qu'il est parti du Québec puis qu'il est à l'étranger, il ne sera pas indemnisé parce qu'il n'a pas de facteur de rattachement avec le Québec, outre le fait qu'il a une résidence permanente. Il faut... Dans la loi, c'est prévu qu'il faut avoir passé la moitié de l'année au Québec. Puis on comprend aussi que cet objectif-là, là, c'est parce que c'est un régime qui est payé par tous les Québécois. Donc, nécessairement, si vous voulez en bénéficier, il faut que vous participiez à la société québécoise aussi. Le critère d'un régime de solidarité sociale comme nous avons, c'est le fait de dire : Bien, l'État m'aide, mais moi, je contribue à ma société aussi, je ne viens pas juste bénéficier du régime quand il m'arrive un événement, puis je n'ai jamais contribué moi-même dans ce régime-là ou participé à la société québécoise, puis là je viendrais prendre ça, là.

M. Tanguay : Là, on s'entend, là, puis, je veux dire, on le voit, là, c'est 183 jours de résidence, il y a le facteur de rattachement, on s'entend, je vais parler au premier titre, parce que j'essaie d'être englobant et complet, là, dans mes interventions, je vais parler du Québécois. La Québécoise ou le Québécois qui est intervenant, qui est bon Samaritain à l'étranger puis qui se fait faire mal, je l'aurais couvert. Autrement dit, M. le Président, je pourrais... puis on le ne fera pas, là, mais je pourrais demander une suspension, je pourrais déposer un amendement, puis ça, le ministre en est conscient, puis je ne le fais pas, pas pour dire que je fais une fleur au ministre, ce n'est pas ça, je vais le faire de même parce que je connais le résultat. Le ministre, il dit non, alors je vais être efficace aussi dans mes interventions, mais je veux être «on record» que ça, ça aurait mérité, si vous me permettez l'expression, un amendement qui aurait dit : Je comprends qu'on va avoir un débat pour les Québécois victimes à l'étranger. Puis il y a des critères sur lesquels je voudrais dire, bien, ça, coudon, on n'est pas d'accord. Ça ne prend pas la nécessité de faire une plainte à l'autorité compétente au Québec pour être couvert, pourquoi il faudrait l'exiger à l'étranger pour être couvert? Puis je comprends qu'il y a des éléments, des préoccupations d'administration et de constat que ça ait eu lieu, alors, quand tu fais une plainte, il y a un constat que ça ait eu lieu. Mais ça, ce débat-là, à 10.1°, on va le faire à 62, mais, pour les Québécois bons Samaritains à l'étranger, j'aurais aimé ça qu'on puisse avoir un autre régime à 62 et suivants, ce qu'on n'a pas, là.

M. Jolin-Barrette : Le principe de base pour toutes les lois québécoises, c'est la territorialité, ça s'applique sur le territoire québécois. Le député de LaFontaine le sait très bien, les lois québécoises ont compétence à l'intérieur du Québec. On fait une exception pour la personne victime, mais, sinon, on rattache le critère à la territorialité.

M. Tanguay : Oui, oui, ça, je comprends ça, on fait une exception, mais on aurait pu faire l'exception aussi à 10, à 11.1° et 11.2°.

M. Jolin-Barrette : Je comprends.

M. Tanguay : Je comprends la territorialité, là, il n'y a pas de problème là-dessus, mais on va y faire un atermoiement à 10.1° via 62. Là, je comprends qu'à 11.1° et 11.2°, il n'y aura pas d'atermoiement, la porte est fermée carrément, alors j'aurais pu, puis je conclus là-dessus, M. le Président, et j'aurais aimé... j'aurais pu, mais je ne le ferai pas, là, déposer un amendement qui retirerait de l'article 12, 11.1° et 11.2° et n'aurait que conservé le paragraphe premier du premier alinéa de l'article 10 parce qu'on va en reparler à 62, ça aurait été mon amendement. J'aurais plaidé, puis le ministre aurait voté contre, c'est le signal que je lis, je pense que je ne me trompe pas, puis il me fait signe que je ne me trompe pas, mais ça, je le déplore en tout respect, puis ça aurait été... c'est notre vision par rapport à l'article 12. Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Abstention.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 12 est adopté.

Cela dit, à cause de l'heure, dû à l'heure, nous allons suspendre nos travaux. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 15 h 16)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi. La Commission des institutions reprend ses travaux.

Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement.

M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, on était rendus à l'article 13...

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Oui, Mme la députée de Joliette, pardon.

Mme Hivon : Oui, merci beaucoup, M. le Président, de me donner la parole. Je m'excuse, je sais que je n'étais pas là ce matin, puis que les absents ont toujours tort, mais je m'essaie quand même.

Je voulais juste comprendre un petit truc en lien avec l'article 12 qui vient d'être voté. En fait, on voit qu'à l'article 62 on prévoit des exceptions, même quand ça s'est passé à l'étranger, et l'article 62 dit clairement : «Malgré l'article 12». C'était juste une question de compréhension légistique pour que la loi soit la plus claire possible, vu que, quand on parle à 12, on ne sait pas qu'existe 62.

Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle, à 12, on ne dit pas : Conformément ou sous réserve de l'article 62, outre les conditions, na, na, na, je ne sais pas si vous me suivez, pour que, quand on lit 12, on le sait d'emblée, qu'il va y avoir une exception plus tard à 62, plutôt que d'attendre d'être rendu à 62 qui dit : «Malgré 12»? Je vous dis juste ça parce que moi, quand je l'ai lu, en me remettant dans le bain pour venir, je n'avais pas en tête 62, et donc ça me faisait me questionner.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Ce que l'on m'indique, c'est qu'en législation on ne fait pas de renvoi vers la fin de la loi, mais parfois, lorsqu'on est à un article subséquent, là, on peut renvoyer à un article plus tôt dans la loi. Bien, dans le fond, il y a un régime particulier pour les infractions hors Québec à 62 et suivants.

Mme Hivon : Et c'est pour ça... En tout cas, je vous soumets juste que je pense que nous devrions toujours évoluer vers une plus grande clarté. Je sais qu'il y a des experts en législation, mais peut-être que, des fois, on peut aussi améliorer les choses pour faire en sorte que le lecteur qui prend connaissance de l'article 12 ne pense pas que c'est une fin en soi, puis qu'il sait qu'il va y avoir un régime particulier qui s'en vient. Fin de mon commentaire. Je vous soumets que je pense que ça serait plus clair, mais je sais que l'article a été voté, donc.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. L'article 13, M. le Président : «Aux fins du présent titre, on entend par :

«"conjoint" : la personne qui est dans l'une ou l'autre des situations suivantes :

«1° elle est liée par [...] mariage ou par une union civile à une personne victime;

«2° elle fait vie commune depuis au moins trois ans avec une personne victime ou elle fait vie commune avec cette personne et l'une des circonstances suivantes survient ou est survenue :

«a) un enfant est né ou est à naître de leur union;

«b) elles ont conjointement adopté un enfant;

«c) l'une d'elles a adopté un enfant de l'autre;

«"infraction criminelle" : à moins d'indication contraire, toute infraction prévue au Code criminel perpétrée après le 1er mars 1972 et qui porte atteinte à l'intégrité physique ou psychique d'une personne; ainsi n'est pas visée une infraction criminelle perpétrée contre un bien;

«"personne à charge" ou "personne qui est à la charge" : toute personne pour qui la personne victime décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle à son égard subvient à plus de 50 % des besoins;

«"proche" : le frère, la soeur, le grand-parent ou le petit-enfant de la personne victime, l'enfant du conjoint de la personne victime, le conjoint du parent de la personne victime, l'enfant du conjoint du parent de la personne victime ou la personne significative désignée par la personne victime qui subit l'atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle à son égard ou par l'intervenant, selon le cas; lorsque la personne victime ou l'intervenant est âgé de moins de 14 ans, cette désignation est faite par son parent, par un titulaire de l'autorité parentale ou par toute autre personne majeure chargée de la représenter à cette fin et lorsque la personne victime ou l'intervenant est décédé, la personne significative est celle qui démontre un lien significatif avec cette personne ou cet intervenant décédé;

• (15 h 20) •

«"scène intacte" : — là, on comprendra qu'il y aura un amendement à "scène intacte" — l'endroit physique où une infraction criminelle a été perpétrée avant que ne s'y trouve un policier, un agent de la paix, un pompier, un technicien ambulancier d'un service préhospitalier d'urgence ou tout autre premier répondant.

«Aux fins du présent titre, est présumée décédée toute personne disparue dans des circonstances qui permettent de considérer sa mort probable et de croire que cette disparition découle de la perpétration d'une infraction criminelle.

«Lorsqu'une disposition de la présente loi fait référence à un parent, elle n'inclut pas celui qui est déchu de l'autorité parentale ni, dans le cas d'un enfant majeur, celle qui en était déchu lorsque cet enfant a atteint sa majorité.»

Alors, je vais avoir un amendement à l'article 13, qui est juste ici. Donc, l'amendement qui est transmis, M. le Président, sur Greffier, donc, dans le premier alinéa de l'article 13 du projet de loi, supprimer :

«"scène intacte" : l'endroit physique où une infraction criminelle a été perpétrée avant que ne s'y trouve un policier, un agent de la paix, un pompier, un technicien ambulancier d'un service préhospitalier d'urgence ou tout autre premier répondant.»

Donc, concrètement, vu qu'on l'a traité à l'article 10, la «scène intacte», on l'a déplacé de l'article 13 à l'article 10. On vient supprimer de l'article 13 la notion de scène intacte, donc elle ne s'y retrouvera plus. Donc, dans votre article, vous pouvez rayer «scène intacte».

Donc, les commentaires sur l'article 13, là, en général, là : L'article 13 propose certains principes et une série de définitions permettant de mieux comprendre et appliquer la loi.

Ainsi, un conjoint de fait serait une personne mariée ou unie civilement à la personne victime. Ce pourrait être aussi une personne qui fait vie commune avec la personne victime depuis trois ans ou depuis le moins si, ensemble, elles ont un enfant.

Une personne à charge serait celle pour qui la personne victime subvient à plus de 50 % de ses besoins.

Le proche serait l'une des personnes suivantes : le frère, la soeur, le grand-parent ou le petit-enfant, l'enfant du conjoint de la personne victime, le conjoint du parent de la personne victime, l'enfant du conjoint du parent de la personne victime ou la personne significative désignée par la personne victime ou par l'intervenant ou, en cas de décès, qui démontre un lien significatif avec elle ou avec lui.

L'article 13 établit quelques infractions... pardon, l'article 13 établit quelles infractions criminelles seraient considérées aux fins de donner ouverture au régime d'aide financière. Ces infractions seraient toutes celles perpétrées contre une personne, c'est-à-dire celles qui portent atteinte à l'intégrité physique ou psychique de celle-ci.

Ainsi, toutes les infractions contre la personne comprises dans la partie VIII du Code criminel seraient considérées. Ces infractions incluent notamment le meurtre, l'agression armée, l'agression sexuelle, la traite de personnes, les voies de fait, l'enlèvement et la séquestration, la négligence criminelle, la menace ou le harcèlement criminel.

Seraient aussi considérées certaines infractions lorsqu'elles causent des lésions corporelles ou la mort, telles que la conduite avec capacités affaiblies ou la conduite dangereuse, le vol qualifié ou l'introduction par effraction.

Seraient finalement considérées les infractions à caractère sexuel tel que l'inceste, les infractions reliées à la pornographie juvénile, les contacts sexuels, l'exploitation sexuelle ou l'action indécente.

Ne seraient pas considérées et donc ne donneraient pas ouverture à l'application du régime d'aide financière les infractions perpétrées contre un bien.

Enfin, les infractions qui seraient considérées seraient celles perpétrées après 1972, puisque c'est l'année du début de l'existence, au Québec, d'un régime d'indemnisation des victimes d'infractions criminelles.

Et l'article 13 crée une présomption en faveur de l'entourage d'une personne disparue dans des circonstances qui permettent de la considérer décédée. Cette présomption vise à faciliter la démonstration de l'admissibilité de ces personnes au régime d'aide financière.

Finalement, l'article 13 établit qu'aux fins du régime d'aide financière seul un parent titulaire de l'autorité parentale serait admissible aux aides financières. Un parent déchu ne serait pas admissible.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Alors donc, interventions sur l'amendement? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Juste... Puis on pourra peut-être y aller systématiquement, si mes collègues le désirent. On pourrait statuer sur l'amendement, puis après ça on pourrait... de façon plus globale, l'objet du litige étant l'amendement. J'essaie juste de voir dans Greffier, M. le Président, l'amendement adopté ce matin, à 10... j'essaie de voir dans Amendements adoptés. On pourra peut-être m'indiquer... Je ne le vois pas, à l'article 10. J'aimerais juste voir, donc, via notre Greffier, l'amendement qui a été adopté à l'article 10, qui fait foi de définition.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce que vous l'avez reçu?

(Consultation)

Le Président (M. Bachand) : Est-ce que vous l'avez, M. le député de LaFontaine?

M. Tanguay : Est-ce qu'il est possible de l'avoir sur Greffier ou... Est-ce que vous le voyez sur Greffier?

Le Président (M. Bachand) : Il est sur Greffier.

M. Tanguay : Ah! il vient d'apparaître, par exemple...

Le Président (M. Bachand) : Oui, c'est ça.

M. Tanguay : O.K. Parfait. Merci beaucoup. Alors, juste... M. le Président, donc, sur l'amendement du ministre, qui demande... qui propose de rejeter, je voulais juste voir... Là, en l'ayant, j'aurais pu faire l'économie de cela. Moi, je vais laisser l'autre collègue commenter, mais ça me semble être... on n'a rien... on semble n'avoir rien échappé en route. C'est juste ce que je voulais vérifier sur l'amendement. Moi, je... puis, sous réserve de ça, donnez-moi une minute, vous pourrez aller voir les autres collègues, je n'aurai pas d'autre commentaire sur...

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement comme tel? Pas d'intervention. M. le ministre, ça va? Tant mieux.

M. Jolin-Barrette : J'aurais un questionnement, M. le Président, sur c'était qui, Leblanc, pour le mot de passe, mais...

M. Lévesque (Chapleau) : Pierre-Évariste Leblanc, orateur à l'Assemblée nationale.

M. Jolin-Barrette : Ah! Voici, le député de Chapleau fait notre éducation, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Donc, M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Et là on se retrouve dans la situation où... Je fais juste un clin d'oeil à tout le monde autour de la table, ou je pense que c'est la collègue de Joliette qui avait dit : Bien, pourquoi on n'a pas les définitions à l'article 10? Je me dis : Ah! bien là, c'est à l'article 13, là, puis là on l'a à l'article 10. Alors, on aura... on a réussi... on aura eu cette victoire-là, M. le Président.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, ça, c'est la démonstration que nous sommes à l'écoute et que nous entendons la députée de Joliette.

M. Tanguay : Ça n'arrête pas de bien aller, M. le Président.

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je trouve ça positif, M. le Président, que le député de LaFontaine dise que ça va bien puis qu'il aime ça faire de la législation avec nous. Je suis content, M. le Président, parce que c'est réciproque.

M. Tanguay : On va arrêter là, parce que ça va être suspect.

Une voix : ...la Saint-Valentin.

Le Président (M. Bachand) : Bien, c'est ça, là, il y a des relents de Saint-Valentin. Alors... Oui, Mme la députée de Joliette, sur l'amendement?

Mme Hivon : Non, pas sur l'amendement.

Le Président (M. Bachand) : Mais est-ce qu'on peut disposer de l'amendement?

Mme Hivon : Disposons, disposons.

Le Président (M. Bachand) : Alors donc, on va prendre... on va mettre l'amendement aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement à l'article 13 est adopté. Donc, interventions sur l'article 13 tel qu'amendé? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Bien, s'il y a des collègues qui veulent y aller... Moi, j'aurais une...

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, et Sherbrooke.

M. Tanguay : Oui, bien, allez-y, c'est bon.

Mme Hivon : Bien, c'était une question sur un élément, là, mais je me réserve le droit de revenir sur d'autres. C'était sur «personne à charge». Donc, je veux juste savoir si la définition qu'on retrouve ici est une définition générale dans la législation, que l'on parle de revenu, que l'on parle de mesure familiale. Donc, le 50 % est-il toujours la base pour évaluer si quelqu'un est une personne à charge?

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Ce qu'on me dit, c'est que, dans la législation, il y a plusieurs cas de figure associés. En fait, il n'y a pas un corpus uniforme dans la législation québécoise sur «personne à charge» qui est uniforme partout, mais, oui, il y a des exemples dans d'autres lois qui reprennent cette définition-là.

Mme Hivon : Moi, je serais intéressée... Là, je ne veux pas être pointilleuse, mais je serais intéressée de savoir dans quelles lois c'est ça, la définition, versus d'autres lois où, par exemple, on pourrait être personne à charge avec des critères moins restrictifs.

M. Jolin-Barrette : Exemple, dans la loi sur... la LATMP, donc la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles, «une personne qui a droit à une indemnité en vertu de la sous-section 2», bon, inclut conjoint, enfant mineur, enfant majeur de moins de 25 ans qui fréquente à temps plein un établissement d'enseignement, une personne autre pour laquelle le travailleur pourvoyait à plus de 50 % de ses besoins. Donc, dans la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, c'est la même définition au niveau de «pourvoyait à plus de 50 % de ses besoins».

Mme Hivon : C'est fort intéressant. Donc, c'en est une, mais est-ce que c'est... Je voudrais juste savoir si c'est comme quelque chose d'assez généralisé, notamment en matière de revenu, de loi fiscale. Est-ce qu'il y a une expression consacrée?

• (15 h 30) •

M. Jolin-Barrette : O.K. Bon, dans le fond, dans la LATMP, c'est le régime d'indemnisation de la CNESST. Donc, ça, c'est la définition. Dans l'autre régime qui ressemble...

Mme Hivon : La SAAQ.

M. Jolin-Barrette : ...à celui-ci, la SAAQ, donc la Loi sur l'assurance automobile, personnes à charge, notamment 4°, paragraphe 4°, «l'enfant majeur de la victime et la personne majeure à qui la victime tient lieu de mère ou de père, à la condition que la victime subvienne à plus de 50 % de leurs besoins vitaux et frais d'entretien»; et, à paragraphe 5° de la loi, «toute [...] personne liée à la victime par le sang ou l'adoption et toute personne lui tenant lieu de mère ou de père, à la condition que la victime subvienne à plus de 50 % de leurs besoins vitaux et frais d'entretien». Donc, dans les deux autres régimes comparables, c'est ce qui est utilisé.

Mme Hivon : Merci. Puis je note, M. le Président, que le ministre parle de régimes comparables, donc, dont il veut pourtant beaucoup se distinguer. Ça fait qu'on pourrait y revenir plus tard, quand on va parler aussi de comment on va aborder tout ça.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, le régime de l'IVAC, c'est un régime qui est unique. C'est sûr que c'est des régimes d'assurance, mais... C'est ce qui se rapproche le plus, mais ce n'est pas la même chose non plus, parce que l'agent contributeur n'est pas le même non plus, alors... Puis, par rapport à ce qu'on souhaite faire, dans le fond, d'élargir la notion de personne victime, bien, c'est sûr qu'il y a des comparables à faire avec ces régimes-là, le tout en prenant compte que l'IVAC, ce n'est pas un régime d'assurance, alors que celui de la Loi sur l'assurance automobile, c'est un régime d'assurance. La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, c'est un régime d'assurance aussi, tandis que l'IVAC n'est pas un régime d'assurance. Bon.

Mme Hivon : On va avoir l'occasion d'en débattre, de toute façon, là.

M. Jolin-Barrette : Comme ils disent, mutadis mutandis, hein, en changeant ce qui doit être changé. Je sais que le député de LaFontaine adorait particulièrement ses cours de latin en droit à l'Université de Montréal.

M. Tanguay : C'est mutadis ou mutatis?

M. Jolin-Barrette : Ah! c'est peut-être mutatis.

Mme Hivon : C'est mutatis mutandis.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Ça va, Mme la députée de Joliette?

M. Jolin-Barrette : Voyez-vous, M. le Président, je suis venu ici pour apprendre, M. le Président.

M. Tanguay : Ah oui! C'est ça.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce que ça va pour la députée de Joliette pour l'instant?

Mme Hivon : Pour l'instant, oui.

Le Président (M. Bachand) : Oui. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui, c'était... Je vais avoir une autre intervention plus tard, mais pendant qu'on est sur la notion de personne à charge, j'ai une question sur la proche aidance. Disons, par exemple, que j'héberge, chez moi, une tante qui n'a pas d'enfant et qui est vieillissante, et que je suis sa proche aidante, je contribue à plus de 50 % de ses besoins. Dans la définition de personne à charge qui est ici, je comprends que cette personne-là, si je contribue à plus de 50 % de ses besoins, elle est une personne à charge pour moi. Ça ne correspond pas à ce qui a été décrit dans les autres régimes, mais c'est ce que je lis ici. Est-ce que je me trompe?

M. Jolin-Barrette : La réponse, c'est oui. Dans le fond, notre régime est plus large que celui de la Société de l'assurance automobile du Québec et de la CNESST.

Mme Labrie : Parfait, merci. Puis mon autre question, c'était sur la notion d'infraction criminelle. Je voulais savoir qu'est-ce qu'il en est d'une personne qui aurait subi de la brutalité policière. Est-ce que ça peut être considéré comme une infraction criminelle admissible pour l'IVAC?

M. Jolin-Barrette : Bien... Excusez.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : S'il y a commission d'une infraction criminelle, oui. Donc, si...

Mme Labrie : Mais est-ce que ça doit avoir été démontré en déontologie, ou une personne qui considère avoir subi des voies de fait de la part d'un policier, par exemple, cette personne pourrait s'adresser à l'IVAC?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, tout est dans les faits, hein, M. le Président. Si c'est démontré qu'il s'agit d'une infraction criminelle par la personne qui va évaluer le dossier, dans le fond, à l'IVAC, oui, c'est admissible. Mais il faut juste faire bien attention que... sous réserve, généralement, quand il arrive des événements avec les forces de l'ordre, avec les agents de la paix, généralement, et je n'exclus pas... il y a des situations particulières qui arrivent, mais, généralement, lorsqu'il y a utilisation de la force par un corps de police, bien, généralement, c'est l'utilisation de la force raisonnable parce qu'il y a un refus d'obtempérer aussi.

Mme Labrie : Donc, ce serait comme une faute lourde.

M. Jolin-Barrette : Bien, peut-être, mais, tu sais, chacun des cas est un cas d'espèce, et il y a déjà... Et, lorsque les policiers commettent des infractions criminelles qui sont en dehors de la Loi sur la police ou de l'utilisation de la force qu'ils peuvent faire, bien, ils peuvent être cités en déontologie, tout ça. Donc, si jamais il y avait une personne qui aurait subi une infraction criminelle de la part d'un agent de la paix, effectivement, pourrait s'adresser à la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Mme Labrie : Sans avoir besoin de porter plainte en déontologie.

M. Jolin-Barrette : Sans avoir besoin de porter plainte en déontologie. Mais là c'est une question de faits aussi puis de démonstration par la suite.

Mme Labrie : Comme pour toute agression. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Ça va pour l'instant? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. Ah! vous savez, ça, c'est un article, là, puis le ministre le sait, là, qui... Il y a du stock, là-dedans, puis on aura beaucoup de choses à dire.

Je vais commencer par le commencement. «Conjoint», le ministre s'est-il réuni avec son conseiller spécial, Me Alain Roy, pour avoir une discussion sur cette notion?

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, il y a la réforme du droit de la famille, hein, qui s'en vient, et que je sais que vous attendez avec enthousiasme.

M. Tanguay : Là-dessus, juste là-dessus, là, quand?

M. Jolin-Barrette : Bien là, M. le Président, je ne voudrais pas me précipiter trop.

M. Tanguay : Il faudrait qu'il parle au leader.

M. Jolin-Barrette : Non, mais c'est surtout, M. le Président, je ne voudrais pas que le député de LaFontaine dise que le ministre de la Justice s'emporte dans sa précipitation de vouloir déposer une pièce législative pour faire évoluer le droit et faire avancer le droit.

M. Tanguay : D'un coup qu'on aurait le temps de le lire puis de le comprendre.

M. Jolin-Barrette : Bien, d'un coup! Mais, vous savez, M. le Président, je reconnais les aptitudes du député de LaFontaine, qui est un très bon juriste, M. le Président, et qui, d'ailleurs, dans le cadre d'un débat à l'Université de Montréal, avait dit que c'était une bonne idée de faire la réforme du droit de la famille.

Donc, en fait, pour son information, j'y travaille présentement, M. le Président. Mais je ne peux pas être assis partout et travailler partout en même temps. On travaille fort au ministère de la Justice, les équipes travaillent fort. Mais là, pendant le temps agréable, faut-il le dire, que je passe en compagnie du député de LaFontaine, je ne peux me consacrer ces heures-ci à la réforme du droit de la famille. Donc, étape par étape, comme on dit. Mais, comme je l'ai dit aux crédits, M. le Président, j'avais énoncé la séquence dans laquelle je souhaitais déposer les projets de loi. Et je respecte la séquence, l'IVAC en premier, ensuite la réforme du droit de la famille.

M. Tanguay : O.K. Là-dessus, M. le Président, parce que c'est important, puis, je pense, vous avez un intérêt, parce que vous risquez de siéger, je pense que la réforme du droit de la famille serait en CI, je crois, ça relève de la Justice, mon point est le suivant, puis je lance l'idée, puis il le fera s'il veut, puis il ne le fera pas s'il ne veut pas, mais je l'invite, si d'aventure son projet de loi sur la réforme de la famille qui... Puis là on s'entend, il n'y a pas de partisanerie là-dessus, là. Il y a des députés caquistes, libéraux, du Parti québécois, puis de QS, qui vont être d'accord sur certaines mesures, puis il va y en avoir d'autres qui ne seront pas d'accord sur certaines autres mesures. Pour qu'il ait le temps, la réflexion, l'analyse, la consultation, je l'invite, s'il est prêt, à en faire le dépôt d'ici la fin de la session, ce qui nous permettrait peut-être de revenir avec des consultations cet automne. Donc, si... plutôt que de dire : On le dépose cet automne, puis là on a trois semaines, consultations, et je l'invite très fortement à faire ça, puis on arriverait, après avoir consulté nos caucus et fait notre analyse aussi, puis les groupes sur le terrain. Qu'en pense-t-il?

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je me précipite, dans la hâte, d'ici le mois de juin, pour déposer le projet de loi. Mais le député de LaFontaine ne souhaite pas qu'on fasse les consultations avant le mois de juin?

M. Tanguay : Bien, si on pouvait les avoir cet automne, ça nous laisserait le temps de se revirer de bord. Moi, je le propose.

M. Jolin-Barrette : Bien, je vais y réfléchir. Et puis, tout dépendant à quel moment je vais pouvoir déposer le projet de loi sur le droit de la famille, on fixera les consultations en conséquence. Supposons que je le dépose le 1er avril, le député de LaFontaine va avoir le temps de le lire, tout ça, puis on pourrait tenir les consultations après.

Le Président (M. Bachand) : ...parlementaire, on n'est pas au salon bleu, donc il n'y a pas de dépôt de projet de loi ici. Mme la députée de Joliette.

M. Tanguay : Oui, mais c'est intéressant.

• (15 h 40) •

Mme Hivon : Bien, si on parle de ça, moi, je veux juste dire au ministre que je lui suggère...

Le Président (M. Bachand) : Bien, rapidement, toujours en lien avec le projet de loi, bien sûr, oui. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui, bien, c'est sûr qu'il y a un lien parce que, là... il y a un lien, parce qu'il y a des notions ici de droit familial, là, donc «conjoint», «vie commune», ça fait qu'on voudrait être sûr que tout ça va être cohérent. Mais évidemment, s'il faut revenir changer la loi, on va en profiter pour la bonifier avec le rapport du comité d'experts, puis tout ça, en même temps que le dépôt de la réforme du Code civil, s'il faut même changer ça pour être raccord, comme on dit avec le nouveau Code civil, mais je pense qu'il y a un lien direct.

Moi, je veux juste dire au ministre, j'en profite, de ce moment où on fait un aparté là-dessus, que j'espère qu'on va vraiment être mis dans le coup pour pouvoir travailler ça en amont, de manière vraiment sérieuse, puis pouvoir vraiment bien travailler dans tout ce dossier-là. C'est mon simple souhait, parce qu'on ne peut pas fonctionner comme dans un projet de loi habituel pour une réforme de cette envergure-là. Fin de la parenthèse. Puis je laisse mon collègue continuer, mais je partage sa préoccupation sur la cohérence pour les notions de droit de la famille puisqu'on a une réforme qui s'en vient.

M. Jolin-Barrette : Il y a juste certains éléments, là, sur lesquels je veux inviter mes collègues à réfléchir. Dans le Code civil du Québec, c'est des rapports de droit privé, hein, tandis que, dans une loi comme l'IVAC, c'est en rapport avec l'État aussi. Ça fait que c'est distinct aussi. Parce que, vous savez, dans la législation québécoise, il y a différentes notions de vie commune, de conjoint, notamment avec... en lien avec les lois qui sont sous la juridiction du ministre des Finances aussi. Donc, le corpus, il n'est pas toujours le même partout. Donc, les rapports entre le citoyen et l'État, c'est une chose, mais les rapports entre les citoyens entre eux aussi, c'est une autre chose. Donc, la définition, c'est autre chose. Puis il y a des raisons aussi pour lesquelles c'est cela. Mais là la proposition que nous faisons, c'est en lien avec l'État en régime d'indemnisation, qui est cohérent avec les autres régimes.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Par contre, pour l'avoir vérifié ces dernières années, la définition de «conjoints de fait», pour quelqu'un qui me posait une question, j'étais tombé sur l'article 61.1. Parce que je suis d'accord avec le ministre, là, on ne parle pas des relations interpersonnelles, de droit privé, on parle d'un régime public d'indemnisation. Mais, quand même, il prend une définition de «conjoint», puis il met la barre à trois ans, «vie commune, trois ans». Loi d'interprétation, 61.1 : «Sont assimilés à des conjoints, à moins que le contexte ne s'y oppose, les conjoints de fait. Sont des conjoints — puis là il faudrait peut-être voir, avec le projet de loi n° 70, là, cette définition-là — de fait deux personnes, de sexe différent ou de même sexe...» Tu sais, il y a peut-être quelque chose à actualiser avec thérapie de conversion, parce qu'on a touché à ces concepts-là, qui sont plus que des concepts, ce sont des réalités humaines. Donc, «sont des conjoints de fait deux personnes de sexe différent ou de même sexe, qui font vie commune et se présentent publiquement comme un couple, sans égard, sauf disposition contraire, à la durée de leur vie commune.»

Donc, déjà là, je sais que c'est la Loi d'interprétation, puis elle pallie le silence d'une autre loi qui, par ailleurs, peut le préciser, le ministre le précise à trois ans. A-t-il un tableau qu'il pourrait nous donner, qui pourrait être intéressant, s'il est fait, s'il n'est pas fait, là, qu'il... je ne lui demande pas qu'il le fasse, mais un tableau des lois québécoises? Parce qu'effectivement, au point de vue fiscal, je pense que c'est un an, puis je pense que... Là, il y a la Loi d'interprétation qui supplie à... qui pallie au silence d'autres lois, mais ça serait intéressant pour nous, parce que là, la barre, visiblement, est à trois ans. Lui, donc, son choix, il prend exemple où, dans quelle autre loi pour trois ans? Parce que ça me semble long.

M. Jolin-Barrette : Oui, la Loi sur l'assurance automobile et la CSST...

(Consultation)

M. Jolin-Barrette : ...O.K. Donc, oui, la Société de l'assurance automobile, la Loi sur l'assurance automobile qui prévoit trois ans.

M. Tanguay : O.K. Et donc c'est le...

M. Jolin-Barrette : Et on change «vit maritalement» par «vie commune».

M. Tanguay : Excusez. Vous changez ça dans la rédaction de l'article 13?

M. Jolin-Barrette : Non, dans la Loi sur l'assurance automobile. Dans le fond, eux, leur définition, là, c'est : «Conjoint : la personne qui est liée par [le] mariage ou une union civile à la victime et cohabite avec elle ou qui vit maritalement avec la victime, qu'elle soit de sexe différent ou de même sexe et qui est publiquement représentée comme son conjoint depuis au moins trois ans, ou, dans les cas suivants, depuis au moins un an : un enfant est né ou à naître de leur union, elles ont conjointement adopté un enfant, l'une d'elles a adopté un enfant de l'autre.» Donc, ce qui change, c'est le «maritalement».

M. Tanguay : O.K. Que vous ne reprenez pas ici, vous dites «vie commune».

M. Jolin-Barrette : Vie commune.

M. Tanguay : C'est ça. Ça va être plus moderne.

M. Jolin-Barrette : Mais c'est sûr qu'avec la réforme du droit de la famille, on va actualiser le vocabulaire. Puis il y a beaucoup de choses aussi. On a eu un jugement récemment du juge Moore de la Cour supérieure qui suspend certaines définitions, qui dit au législateur de corriger certaines choses relativement aux personnes binaires aussi. Donc, c'est des choses qu'on examine présentement.

M. Tanguay : O.K. Est-ce que le ministre, s'il l'a... A-t-il le tableau, justement?

M. Jolin-Barrette : Bien, je n'ai pas de tableau.

M. Tanguay : Il n'a pas... O.K. Sinon, j'en aurais pris une copie, là. Trois ans. Ah! il y a l'exemple, donc, de la Loi...

M. Jolin-Barrette : Sur l'assurance automobile...

M. Tanguay : ...l'assurance automobile.

M. Jolin-Barrette : ...la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Le conjoint, c'est «la personne qui, à la date du décès du travailleur, est liée par un mariage ou une union civile au travailleur et cohabite avec lui; ou vit maritalement avec le travailleur, qu'elle soit de sexe différent ou de même sexe; et :

«a) réside avec lui depuis au moins trois ans ou depuis un an si un enfant est né ou à naître de leur union; et

«b) est publiquement représentée comme son conjoint.»

M. Tanguay : O.K. Et la Loi sur l'assurance automobile, elle a été adoptée en 1977, j'ai des dispositions de 1977, de 1989. Conjoint, ça date... Mon point, c'est qu'on pourrait très bien, surtout que ce n'est pas silo, silo, ce n'est pas silo jusqu'au point où, si vous êtes indemnisé par la Régie de l'assurance maladie du Québec... excusez-moi, la CNESST, pour un accident de travail ou un accident de la route, si vous êtes, par ailleurs, couvert, vous ne pourrez pas avoir une indemnisation en vertu du régime actuel de victimes d'actes criminels. Donc, c'est ça, le seul lien qui fait en sorte qu'ils ne sont pas silo, mais, à part ça, essentiellement, ils sont en silo, ces lois-là. On ne s'en félicite pas, je pense qu'il faut essayer d'harmoniser le plus possible.

Mon point, c'est que le ministre peut très bien dire : Parfait, dans ces autres lois là, c'est trois ans, mais il pourrait justement nous faire arriver plus en 2021, en disant : Bien, mon trois ans... Ici, il pourrait très bien dire : Ça va être une année. Tu sais, il n'a pas besoin d'être raccord avec les autres lois, là, là-dessus, tu sais. Et c'est écrit dans le ciel que, dans les prochains mois, on va avoir une pièce législative qui va nous faire revisiter tout ça, puis du trois ans, il n'y en aura plus, là.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, ça, je ne suis pas prêt à dire ça, ça va dépendre de l'intention du législateur et de la pièce législative qui va être déposée. On ne pourrait présumer des intentions du législateur à ce stade-ci, M. le Président.

M. Tanguay : Oui, bien, c'est Cioran qui disait : Un homme seul est en mauvaise compagnie. Le ministre peut prendre conseil de lui-même, avoir une bonne petite idée ce vers quoi...

M. Jolin-Barrette : Ah! bien, M. le Président, le député de LaFontaine faisait référence à mon conseiller spécial, Me Alain Roy. Donc, je ne suis pas seul, plus les équipes du droit de la famille au ministère de la Justice, plus le rapport sur la réforme du droit de la famille qui a été déposé en 2015, commandé par le ministre St-Arnaud.

M. Tanguay : Mais est-ce que... Parce que je vois que c'est l'article 2 qui définit «conjoint» dans la Loi sur l'assurance automobile, de mouture 1977. Et, à défaut, qu'on me dédise, là, il a été modifié à plusieurs reprises, la dernière date de 2002. Alors, dans le meilleur des cas, le trois ans a 20 ans, mais, dans le pire des cas, le trois ans a 45 ans, 44 ans.

Alors, est-ce que le ministre serait ouvert à prendre acte de ça puis à dire : Bien, on va faire un deux ans ou une année? Puis ce n'est pas pour... Ce n'est pas juste un simple chiffre, M. le Président, mais ça traduirait... Écoutez, des conjoints de fait, là, ça traduirait une réalité qu'il y en a de plus en plus. On voyait, dans l'article de La Presse, qu'on a tous lu, récemment, je pense que c'est ce week-end, on me détrompera, là, sur le fait que la majorité ou presque des enfants nés au Québec sont nés d'union des conjoints de fait. Ça, c'est une chose, mais que des conjoints de fait... des unions maritales, là, il y en a de moins en moins, de plus en plus de conjoints de fait. Alors, faire avancer le Québec, passer de trois ans à deux ans ou à une année, est-ce qu'il serait ouvert à ça ici, là?

M. Jolin-Barrette : Bien, actuellement, pour la loi, c'est trois ans, dans la proposition législative que nous faisons.

M. Tanguay : Puis si on déposait un amendement à une, est-ce qu'il voterait pour? Je vais virer ça de bord.

M. Jolin-Barrette : Non, je voterais contre.

M. Tanguay : Il voterait contre. Bon. Alors, il a pris compte... L'Association des juristes progressistes, eux, disaient... Puis on est toujours sur «conjoint», je pense que c'est un extrait de leur mémoire, là : «...le droit tarde de se mettre au diapason de ces réalités qui continueront de devenir de plus en plus présentes au cours des prochaines années. Nous incitons donc la commission à s'inspirer de la définition de "conjoint" telle que décrite dans la Loi d'interprétation.»

On en a parlé, et eux proposaient — je ne sais pas si le ministre a considéré ce qu'ils proposaient — un amendement où... et qui se lisait comme suit, là, la personne qui est dans l'une ou l'autre des situations suivantes : «Elle est liée par un mariage ou par une union civile à une personne victime». Ça, ça ne change pas, mais le reste changeait. «Elle fait vie commune et se présente publiquement comme un couple avec une personne victime, sans égard, sauf disposition contraire, à la durée de leur vie commune. Si, en l'absence de critère légal de reconnaissance de l'union de fait, une controverse survient relativement à l'existence de la communauté de vie, celle-ci est présumée dès lors qu'une des conditions suivantes est remplie :

«a) les personnes cohabitent depuis au moins un an;

«b) un enfant est né...» donc, et ainsi de suite.

Ils avaient une nouvelle approche beaucoup plus libérale, et j'aimerais savoir si le ministre l'a considérée. Ça, c'est les juristes progressistes qui nous disaient ça d'entrée de jeu, là.

• (15 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Bien, on prend note de leurs commentaires. Cela étant, je pense que le régime que nous avons est un régime qui fait en sorte... qui s'inspire notamment de celui de l'assurance automobile, de la CNESST. Donc, je pense, c'est important d'avoir une cohérence gouvernementale au niveau des régimes d'indemnisation de l'État et des régimes d'assurance de l'État. Donc, je prends note, mais je maintiens à trois ans.

M. Tanguay : Est-ce que le ministre, là-dessus, pour clore cet aspect-là du débat qui est important, considère, à ce stade-ci, peut-être que sa tête n'est pas toute faite là-dessus, mais qu'il y aurait un principe à l'effet que — d'où le lien, la pertinence en vertu de notre règlement, de ce qu'on disait tantôt — lorsqu'il y aura réforme du droit de la famille, il va toucher justement à uniformiser tous ces aspects de la vie des citoyens, citoyennes et il va s'uniformiser? Bon, «conjoints de fait», il faudrait avoir la même définition puis la même durée dans notre corpus législatif, que ce soit en matière d'accident d'automobile, d'indemnisation, fiscalité et ainsi de suite. Est-ce que le ministre part de ce principe-là, qu'on fera, dans la réforme du droit de la famille, d'uniformiser, là, tous ces délais-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, on aura une discussion, mais les choix passés notamment des gouvernements successifs aussi ont eu l'opportunité d'uniformiser le tout, puis je comprends que ça ne s'est pas fait. Mais ça fera partie de notre réflexion aussi, mais il y a des raisons aussi pourquoi ça n'a pas été fait.

M. Tanguay : Parce qu'il y a des distinctions qui tiennent la route, dans certains cas, dire : Bien là, vous êtes conjoints de fait, mais là vous n'êtes pas considérés conjoints de fait.

M. Jolin-Barrette : Il y a des explications pour chacune des situations, effectivement. Mais il faut rappeler, pour la réforme du droit de la famille, l'important, entre autres, là, la réforme va être basée sur le critère de l'intérêt de l'enfant. Moi, c'est ce qui va me guider. Donc, les dispositions que nous allons mettre en place vont être pour favoriser l'intérêt de l'enfant. Donc, à la fois la filiation, à la fois la conjugalité vont... En fait, le fil conducteur sera l'intérêt de l'enfant.

M. Tanguay : Est-ce que le ministre a... Et ça me permet de poser la question : Est-ce qu'il a pu mettre la main sur les chiffres? Je ne me rappelle plus très... Mais, dans la première... les premières séances qu'on a eues ensemble, M. le Président, il y avait un engagement de vérifier l'impact du nombre de victimes, puis l'impact financier, puis les évaluations. Je ne sais pas si les évaluations sont prêtes à être communiquées.

M. Jolin-Barrette : On va vous revenir avec ça, on est encore en train de faire les documents.

M. Tanguay : O.K. Est-ce que le ministre... Puis, si le ministre a dit : Non, je ne l'ai pas demandé, il n'y aura pas d'engagement, mais, s'il dit : Oui, je l'ai demandé, ce serait le même engagement. Est-ce qu'il a demandé l'impact qu'aurait de passer ici «conjoints» trois ans à deux ans, et trois ans à un an? Est-ce qu'il a eu une analyse en termes de nombre et d'impact financier?

M. Jolin-Barrette : Non, je ne l'ai pas demandé sur le trois ans, deux ans, un an, mais, dans tous les cas, c'est sûr qu'il y a des impacts financiers.

M. Tanguay : Non, c'est sûr, c'est ça qu'on élargit, puis... O.K. J'ai d'autres questions plus loin. Je ne sais pas si d'autres collègues veulent intervenir sur le...

Le Président (M. Bachand) : Je ne sais pas. Je n'ai pas de main levée...

M. Tanguay : ...sinon, on va continuer.

Le Président (M. Bachand) : Alors, M. le député de LaFontaine, vous avez le plancher.

M. Tanguay : O.K. Bon. M. le Président, il y a également... Là, il y a tout l'aspect, puis plusieurs sont venus nous le dire, autant des théoriciens, des théoriciennes, des juristes aguerris du domaine que des organismes représentant des victimes sont venus nous dire : Bien, la définition d'«infraction criminelle», on pourrait aller plus loin que le Code criminel, et les infractions contre la personne, les crimes contre la personne. On parlait, et c'est toujours les juristes progressistes qui parlaient, d'ajouter — puis c'est sûr que, si on l'ajoute, là, aux définitions de l'article 13, il faudrait y faire écho dans les autres cas d'indemnisation — les actes à caractère sexuel non consensuels.

Alors, je vous lis, M. le Président, la définition qu'en donnent les juristes progressistes. On ajouterait : «Acte à caractère sexuel non consensuel : tout geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu soit sans le consentement de la personne visée, soit par une manipulation affective, soit par du chantage, soit par l'abus d'une [proposition] d'autorité, y compris notamment :

«1° les attouchements de nature sexuelle non désirés ou forcés, comme les baisers et le tâtonnement;

«2° une relation vaginale, orale ou anale contre son gré ou sans y avoir pleinement consenti;

«3° le harcèlement sexuel, l'exhibitionnisme, le voyeurisme;

«4° la violence sexuelle;

«5° l'exploitation sexuelle, incluant la production, la diffusion et la possession de pornographie juvénile;

«6° les gestes posés via des moyens technologiques, comme le cyberharcèlement, le sextage non sollicité, la sextorsion, le leurre, et la diffusion d'images intimes sans consentement de la personne visée.» Fin de la citation.

Ça, il est clair que ce n'est pas criminalisé au sens du Code criminel, crime contre la personne, mais on nous invitait à aller au-delà. C'est clair que ça a un impact où ça va ajouter au nombre de personnes victimes, ça va ajouter au nombre d'indemnisations et de ressources à pourvoir. Mais j'aimerais entendre le ministre là-dessus. Puis on en parle beaucoup, puis je vais dire ça de même, là : Ça fait plusieurs, plusieurs années, tout le monde autour de la table en sont témoins, M. le Président, qu'on parle qu'on veut une justice réparatrice. On veut une justice réparatrice puis, ultimement, la vieille vision d'il y a 100 ans ou à peu près, de dire : Bien, vous avez été agressé, on prend le malfaiteur puis on le met en prison cinq ans, justice est rendue, tout le monde est content, non, tout le monde n'est pas content. Justice réparatrice, les moyens nouveaux pour que la victime puisse reprendre contrôle de sa vie, puisse passer à travers, puis dire : Bon, bien, c'est derrière moi, puis là j'envisage l'avenir.

Le fait d'inclure, dans le processus d'indemnisation, la possibilité de déposer des demandes, d'être reconnu comme victime, qui n'est pas victime d'un acte criminel comme tel, mais de faire en sorte que, socialement, on le reconnaisse, on le nomme, puis ce qui est dit dans la définition, c'est cru, là, mais on le nomme, on le dit, on le reconnaît, on évalue, on accompagne, on indemnise, ça, ça participe aussi, puis on gravite autour de la justice, là, d'une justice réparatrice, à quelque part.

Je ne pourrais pas dire plus clairement ce que je voulais exprimer que ce que je viens de faire dans les deux dernières minutes, M. le Président. Puis j'aimerais entendre le ministre là-dessus : Est-il ouvert à ce qu'on ait une discussion sur ce qui pourrait être un amendement dans ce sens-là?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : L'objectif de la loi puis du régime, c'est de couvrir les infractions criminelles. Alors, on fait... On est passé d'une liste, qui était restrictive, d'une quarantaine d'infractions, à toutes les infractions contre la personne qui seront couvertes désormais. Donc, dans les exemples qui ont été donnés par le député de LaFontaine, il y en a plusieurs qui sont couverts par la liste, donc, par les infractions criminelles. Mais c'est sûr que le critère de rattachement, le but du régime étant de viser les infractions criminelles contre la personne, et c'est ce que nous faisons en abolissant la liste, toutes les infractions criminelles contre la personne sont désormais couvertes.

Alors, je comprends les juristes progressistes de vouloir élargir à ce qui n'est pas les infractions criminelles, mais le but du régime est de viser les infractions criminelles.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît. Merci.

Mme Labrie : Sur la notion de conjoint, il y a quand même énormément de couples, et de plus en plus, qui ne font pas vie commune et qui sont quand même, se considèrent quand même comme des conjoints. Je trouve qu'on échappe quelque chose, là, si on se limite à cette définition-là. Ici, j'aimerais savoir le degré d'ouverture du ministre à des éléments de la proposition, justement, de l'Association des juristes progressistes, d'inclure : «Elle fait vie commune [si elle] se présente publiquement comme un couple avec une personne victime, sans égard, sauf disposition contraire, à la durée de leur vie commune».

Il me semble que c'est important d'inclure ce choix-là. Il y a énormément de couples qui décident de ne pas faire leur vie commune de nos jours.

M. Jolin-Barrette : Mais, même dans le Code civil, le critère, c'est la vie commune. Il faut que les gens fassent vie commune. C'est le sens même du couple et de ce qui est visé par l'infraction. C'est sûr que si vous me dites : On est ensemble et puis on a deux maisons, exemple, le cas de Marie-Mai pour sa téléréalité, bien, l'intention des gens doit être l'intention de faire vie commune. C'est le critère.

Mme Labrie : C'est juste que c'est une définition de la famille ou du couple qui est quand même passée date, là. Puis je pense qu'on l'a vu vraiment beaucoup avec la pandémie, là, quand on a interdit aux gens de voir quelqu'un qui n'habitait pas à leur résidence. Ça a été l'occasion de mesurer à quel point il y a énormément de personnes qui considèrent être en vie conjugale avec une personne qui n'habite pas à la même adresse qu'eux, puis qui se sont senties, notamment, extrêmement brimées par le fait de ne pas pouvoir continuer de voir leur conjoint ou leur conjointe qui n'habite pas à la même adresse, puis parfois même qui habite dans une ville différente pour des raisons professionnelles ou pour toutes sortes de raisons. Ça n'empêche pas que ces gens-là forment un couple.

• (16 heures) •

M. Jolin-Barrette : Mais ça ne veut pas dire, parce que vous n'êtes pas à la même adresse, que vous ne faites pas vie commune. C'est l'intention, c'est les faits. Vous pouvez être avec une personne, un conjoint, une conjointe, être dans... habiter dans deux villes différentes, mais faire vie commune quand même.

Mme Labrie : Dans la définition de l'article 13, pour le ministre, faire vie commune, ça ne veut pas dire vivre à la même adresse.

M. Jolin-Barrette : Ça ne veut pas nécessairement dire vivre à la même adresse.

Mme Labrie : Qu'est-ce que ça veut dire?

M. Jolin-Barrette : Bien, ça veut dire que l'intention...

Mme Labrie : Prendre des photos ensemble devant des beaux paysages, prendre des vacances ensemble? Qu'est-ce que ça veut dire, faire vie commune, pour le ministre, si ce n'est pas habiter ensemble?

M. Jolin-Barrette : Bien, lorsque vous faites vie commune, parfois, pour des raisons professionnelles, vous ne pouvez pas nécessairement habiter ensemble, mais vous avez une intention de faire vie commune. Donc, dans votre... C'est la situation de deux personnes qui entretiennent des liens affectifs et intellectuels ainsi que des rapports intimes et qui, dans la plupart des cas, cohabitent.

Mme Labrie : Dans la plupart des cas. Donc, un...

M. Jolin-Barrette : Le principe de base, c'est que les gens habitent ensemble et qu'ils font vie commune, mais ce n'est pas requis dans tous les cas qu'ils aient la même adresse, parce que les circonstances de la vie fait en sorte que, même si vous êtes un couple... Prenons la personne qui travaille dans le Nord puis qui fait du «fly-in/fly-out», bien, oui, son intention, c'est de faire vie commune avec son conjoint ou sa conjointe, là. Donc, c'est l'intention qui est derrière ça. C'est le cas sur plusieurs lois qui sont comme ça, où est-ce qu'on regarde l'intention des individus.

Mme Labrie : J'essaie juste de comprendre comment on fait pour démontrer l'intention de faire vie commune. Tu sais, si, par exemple, moi, je suis en couple depuis un certain temps avec une personne puis on n'habite pas ensemble, mais on a l'intention de faire vie commune, puis là je suis victime d'un acte criminel, si nous, ensemble, on savait qu'on avait l'intention de déménager ensemble à un moment donné, comment le régime va faire pour savoir, là, qu'on avait cette intention?

M. Jolin-Barrette : Bien, comme les régimes actuels, comme l'État regarde au niveau fiscal. Dans le fond, c'est la démonstration... En fait, c'est parce que, là, ce que la députée de Sherbrooke dit — on a l'intention de faire vie commune — bien, dans le fond, c'est un état de fait, vous faites vie commune, mais vous êtes dans deux situations séparées. C'est différent de : vous entamez une relation, ça fait un mois que vous êtes avec l'individu, vous l'avez rencontré, peu importe les circonstances, vous êtes aux balbutiements de la relation, vous n'allez pas être considéré comme le conjoint. Vous n'êtes pas conjoints au sens de la loi. Il faut avoir l'intention depuis trois ans, de la personne, et elle fait vie commune avec l'individu.

Mme Labrie : Donc, même si on n'habite pas ensemble, une personne qui fait vie commune... Bien, en fait, je ne comprends pas qu'est-ce que ça veut dire, faire vie commune. J'essaie, là, mais... Parce que partager des choses en commun, à la limite, on fait vie commune avec plein d'autres personnes, tu sais, ça ne veut pas dire de vivre ensemble, là, je...

M. Jolin-Barrette : Non, non, c'est vie commune en ayant des rapports intimes... Bien là, je ne veux pas dire que ça prend un rapport intime, là, mais ce que je veux dire, c'est l'intention de la personne d'être un couple. Il y a des liens affectifs, intellectuels, intimes avec la personne aussi. Donc, ça peut arriver que, pour le travail, vous n'habitiez pas à la même adresse parce que vous...

Mme Labrie : Mais quel genre d'enquête va faire l'IVAC pour savoir si on indemnise la personne que je fréquentais, mais qui habitait dans une autre ville que moi? Qu'est-ce qu'ils vont lui demander comme éléments de preuve pour pouvoir être considéré comme conjoint?

M. Jolin-Barrette : C'est une question factuelle qui ne se pose pas, là. Lorsqu'on dit... C'est de la démonstration, dans le fond. Je veux dire : C'était mon conjoint, depuis quatre ans, on s'est... on est ensemble depuis quatre ans. Oui, on n'habite pas à la même adresse, mais, voici, on faisait vie commune, on a maintenu notre union d'une façon soutenue. C'est une question de preuve, c'est une question de fait. Même si vous êtes à Sherbrooke, puis votre conjoint est à Montréal parce qu'il travaille au centre-ville de Montréal, puis que vous vous retrouvez à chaque week-end, ça, c'est la nature de la relation qui est soutenue. Donc, c'est flexible comme notion. On ne requiert pas...

Mme Labrie : Mais est-ce que la personne va devoir rassembler une correspondance pour démontrer qu'il y avait une relation? Moi, j'essaie juste de voir ça va être quoi, le fardeau de la preuve de la personne qui dit : Moi, je suis conjoint.

M. Jolin-Barrette : C'est par témoignage, c'est la démonstration de la personne. C'est la même chose qu'une personne qui ne dénonce pas l'infraction criminelle, qui demande de l'aide à l'IVAC, c'est basé sur le témoignage de la personne.

Mme Labrie : O.K.

Le Président (M. Bachand) : Ça va pour l'instant? M. le ministre, oui.

M. Jolin-Barrette : Puis l'autre point, l'autre point aussi, c'est qu'aux yeux des tiers les gens se présentent comme un couple aussi. Tu sais, quand vous faites vie commune, là, vous savez... Puis comment je pourrais dire? Ce n'est pas éliminatoire, mais c'est un élément de preuve aussi qui démontre que les gens sont des conjoints, dans l'entourage...

Mme Labrie : Mais pas de preuve.

M. Jolin-Barrette : Non, non, mais ce que je veux dire, c'est un élément factuel qui démontre que vous faisiez vie commune, le fait qu'aux yeux des tiers vous étiez des conjoints.

Mme Labrie : Oui, mais moi, je viens d'entendre qu'il ne fallait pas nécessairement démontrer, le témoignage suffisait.

M. Jolin-Barrette : Bien oui, bien, le témoignage suffisait, mais c'est une question de présentation. Quand l'agent de l'IVAC vous dit : Ah! vous étiez en couple avec tel individu, bien, là, vous allez répondre : Bien oui, on s'est rencontrés à Sherbrooke en 2015. Puis là : Ah! vous n'avez pas la même adresse? Non, mais on avait deux maisons séparées, mais on est ensemble depuis x temps, puis tatati.

Mme Labrie : O.K. Puis, ce temps-là, il va falloir que ce soit trois ans?

M. Jolin-Barrette : Oui, sous réserve des enfants. Là, il y a des critères différents pour les enfants.

Mme Labrie : O.K. Sinon, est-ce que la personne pourrait être considérée comme un proche si ça fait moins de trois ans?

M. Jolin-Barrette : Bien, le proche, la définition, vous avez souvent des liens de filiation, mais vous pourriez être considérée comme une personne significative, là. Dans la définition de proche, là, et... est décédé, la...

Mme Labrie : Donc, la victime elle-même pourrait désigner son conjoint de moins de trois ans comme personne significative. Mais là, si elle est décédée, elle ne pourra pas faire ça.

(Consultation)

M. Jolin-Barrette : O.K. C'est ça. Dans le fond, si la personne victime, elle est décédée, le conjoint...

Mme Labrie : ...de moins de trois ans...

M. Jolin-Barrette : ...de moins de trois ans peut démontrer qu'il était une personne significative pour la personne...

Mme Labrie : Il peut le démontrer lui-même.

M. Jolin-Barrette : Il peut le démontrer lui-même.

Le Président (M. Bachand) : Ça va pour l'instant, Mme la députée?

Mme Labrie : Oui, pour l'instant.

Le Président (M. Bachand) : Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Donc, je prends acte du fait que, par rapport à élargir ou ajouter une définition qui élargirait, oui, plus de victimes à indemniser et plus d'indemnisations à donner, celles qui se qualifieraient à une nouvelle définition, dite «acte à caractère sexuel non consensuel», ça, je conçois que le ministre, bon, il a fermé la porte à ça.

M. Jolin-Barrette : Bien, juste là-dessus, là, un acte à caractère non consensuel, ça constitue une infraction criminelle. C'est une voie de fait plus une intention de nature sexuelle. Ça s'appelle une agression sexuelle.

M. Tanguay : O.K. Est-ce que l'exhibitionnisme est un acte criminel?

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est couvert.

M. Tanguay : Est-ce que le voyeurisme est un acte criminel?

M. Jolin-Barrette : Oui... C'est couvert aussi?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : C'est couvert aussi.

M. Tanguay : Est-ce que la sextorsion est un acte criminel?

M. Jolin-Barrette : Exemple, le partage de photos intimes?

M. Tanguay : Bien, c'est ça, c'est du chantage, sextorsion.

M. Jolin-Barrette : On est en train de faire la vérification.

M. Tanguay : Parce que c'est ça, les concepts, diffusion d'images intimes sans consentement.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : Bon. Là, sextorsion, il faudrait voir... Le sextage non sollicité? Je ne pense pas, là.

M. Jolin-Barrette : On va vérifier.

M. Tanguay : Mais je trouve ça intéressant parce que le ministre dit : Regarde, on couvre déjà tout ça...

M. Jolin-Barrette : Mais ce n'est pas... Oui, mais, si ce n'est pas...

M. Tanguay : Puis il me dit : Ça, ça, ça. Si on se rend compte qu'il en manque trois, on les met-tu?

M. Jolin-Barrette : Non.

M. Tanguay : Non?

M. Jolin-Barrette : Si ce n'est pas une infraction criminelle, ce n'est pas dedans.

M. Tanguay : Ah! O.K., là... Le ministre aurait été fier de me dire : Bien, vos 12 exemples sont déjà inclus parce que c'est important. Mais là, des 12, on en échappe trois, puis dire : Ah! ce n'est pas criminel, on ferme la porte. Mais mon point, là...

M. Jolin-Barrette : Mais je pense que ce n'est pas une surprise de dire que ce doit être une infraction criminelle.

M. Tanguay : Non, non, ce n'est pas une surprise, mais c'est une déception récurrente.

M. Jolin-Barrette : Je travaille à tous les jours pour éviter que le député de LaFontaine soit déçu. Puis je crois qu'on a une bonne moyenne, M. le Président, pour renchausser le député de LaFontaine.

• (16 h 10) •

M. Tanguay : M. le Président, mon point, là, c'est que sextage non sollicité, sextorsion, diffusion d'images intimes, on est là-dedans, surtout pour nos jeunes, là, surtout pour nos jeunes, on est là-dedans «big time», si vous me permettez l'expression. Alors, je comprends qu'il veut mettre la ligne à «Code criminel», mais on aurait pu élargir plus. Puis c'est correct, mon... je reviens à ma question du début, qu'il le dise clairement, puis c'est correct, c'est son choix : On ne les met pas. On ne les met pas.

M. Jolin-Barrette : Supposons, M. le Président, que le député de LaFontaine m'envoie des messages textes de nature sexuelle d'une façon harcelante, ça pourrait constituer du harcèlement criminel et ça serait couvert.

M. Tanguay : Est-ce que le sextage non sollicité... Parce que sextage non sollicité, M. le Président, est-ce que ça, c'est un acte criminel? Ça, ce qu'on ne dit pas dans la loi, ça va être interprété après. C'est couvert ou ce n'est pas couvert? En le disant, «sextage non sollicité», ce serait clair, là, «cyberharcèlement» également. Quand on le dit, on sort du corpus d'évaluation criminelle, qui est assez étroit. Mais, quand on le dit dans une loi d'indemnisation de victimes, c'est une interprétation large et libérale. Alors, en le disant...

M. Jolin-Barrette : Si c'est considéré comme de l'incitation sexuelle, c'est couvert.

M. Tanguay : Oui, mais le ministre comprend mon point. Si on le disait dans une loi québécoise d'indemnisation, l'interprétation serait plus large et libérale, et on ne serait pas étroitement... de dire : Ça ne fitte pas dans un acte criminel. C'est ça, mon point.

M. Jolin-Barrette : C'est la loi que nous étudions présentement, là. C'est une loi à vocation sociale, qui est interprétée largement.

M. Tanguay : Donc, vous dites que — puis ça, c'est important, ce que vous dites là — l'IVAC devrait, de façon large et libérale, permettre l'indemnisation de sextage non sollicité, de sextorsion, et de diffusion d'images intimes sans consentement, et de cyberharcèlement. Ça, ça devrait être couvert dans l'exécution de la loi.

M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas ça que j'ai dit. Ce que j'ai dit, c'est : Si ça constitue une infraction criminelle, c'est couvert.

M. Tanguay : Oui, ce qui est assez étroit.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, le régime. C'est ça, l'objectif du régime.

M. Tanguay : Bon. Bien, en tout cas, j'ai fait mon point, M. le Président. On aurait eu un impact plus large en le mentionnant puis on se serait sorti de l'analyse un peu plus étroite et condensée de ce qu'est un acte criminel, bon.

M. Jolin-Barrette : En complément, M. le Président, le partage d'images intimes, c'est une infraction qui est couverte.

M. Tanguay : Il y a les juristes progressistes. Les juristes progressistes, M. le Président, ont suggéré également, toujours dans cette logique... il y avait l'aspect violence conjugale. Là, le ministre pourrait me dire : Bien, violence conjugale, c'est déjà couvert par le Code criminel, même nature d'analyse. Les juristes progressistes disaient, proposaient d'ajouter une définition toute québécoise. C'est sûr que, là, on se décolle un peu du fédéral puis du Code criminel. Moi, je ne suis pas contre, peu nationaliste.

 Alors : «"violence conjugale" : S'entend de toute conduite, constituant une infraction criminelle ou non, d'un membre de la famille envers un autre membre de la famille, qui est violente ou menaçante, qui dénote, par son aspect cumulatif, un comportement coercitif et dominant ou qui porte cet autre membre de la famille à craindre pour sa sécurité ou celle d'une autre personne — et du fait, pour un enfant, d'être exposé directement ou indirectement à une telle conduite — y compris notamment :

«1° les mauvais traitements corporels, notamment l'isolement forcé, à l'exclusion de l'usage d'une force raisonnable pour se protéger ou protéger quelqu'un;

«2° les abus sexuels;

«3° les menaces de tuer quelqu'un ou de causer des lésions corporelles à quelqu'un;

«4° le harcèlement, y compris la traque;

«5° le défaut de fournir [des] choses nécessaires à l'existence;

«6° les mauvais traitements psychologiques;

«7° l'exploitation financière;

«8° les menaces de tuer ou de blesser un animal ou d'endommager un bien;

«9° le fait de tuer un animal, de causer des blessures à un animal ou d'endommager un bien.»

Ça, les derniers aspects, on s'entend, on élargirait ça aux biens et aux animaux. Ça, le ministre peut me dire : Violence conjugale, c'est couvert pour le Code criminel. C'est déjà couvert, on atteint le même objectif, mais il va m'accorder et accorder aux juristes progressistes que, si, dans la loi québécoise, qui ne vise pas la compétence exclusive du fédéral d'établir les actes criminels... mais, dans la loi québécoise, elle peut prendre le modèle du Code criminel, elle dit : Bien, c'est ça que j'indemnise ou elle peut jazzer ça, si vous me permettez l'expression, elle peut dire : Bien, j'indemnise, par ailleurs, ça, ça, ça. On peut le faire.

Et le fait de définir nous-mêmes «violence conjugale» de cette façon plus large et libérale là viendrait... oui, il y aura un impact en termes de nombre et de coût, mais on ratisserait plus large, parce qu'encore une fois on veut aider les victimes. Ça, «violence conjugale», le considérerait-il ou ça va être la même réponse?

M. Jolin-Barrette : Mais, M. le Président, ça sera la même réponse, parce qu'on n'a pas voulu venir définir et verrouiller la notion de violence conjugale pour faire en sorte qu'elle puisse évoluer, M. le Président, avec le temps. Et donc de la violence conjugale, c'est notamment des voies de fait, donc... Et je reviens à l'objectif de la loi. L'objectif de la loi, c'est de venir indemniser lorsqu'il y a une infraction criminelle.

M. Tanguay : Oui, oui, ça, ce bout-là, M. le Président, on l'avait compris.

Mme Hivon : ...

M. Tanguay : Oui, oui, je vous en prie.

Mme Hivon : ...mais je ne veux pas vous interrompre.

M. Tanguay : Je vous en prie, allez-y.

Mme Hivon : C'était vraiment sur le même sujet, en fait. Deux éléments des juristes progressistes, là, parce que mon collègue avait l'air de vouloir approfondir quelque chose, donc, pendant ce temps-là, il ne faut pas qu'il y ait de temps... et qu'on reste sur le même sujet. Il y avait l'actus reus, donc ils voulaient être sûrs que, quand on parle d'infraction criminelle, on se fie au geste qui est posé et non pas à rechercher l'intention criminelle derrière le geste. Et donc j'aimerais ça que le ministre puisse nous dire qu'est-ce qui en est de ça, quand on évalue, à la face de l'IVAC, si quelqu'un se qualifie, parce qu'il y a quelques groupes qui nous ont parlé de ça. Pour les gens qui nous écoutent, l'actus reus, c'est le fait de poser le geste, puis la mens rea, dans nos cours de droit, c'est évidemment l'intention criminelle. Ça fait que, pour avoir une infraction criminelle, il faut qu'il y ait rencontre, normalement, entre les deux éléments. Et donc est-ce que le ministre peut nous éclairer là-dessus?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans un premier temps, là, si on parle de ce concept-là, le concept est surtout pertinent. Bon. Il y a la liste... Toutes les infractions criminelles contre les personnes sont couvertes. Là, on part d'une logique où, en matière criminelle et pénale, lorsque l'accusé est... bien, en fait, lorsque la personne est accusée d'une infraction criminelle, le fardeau de preuve au procureur de la couronne ou procureur aux poursuites criminelles et pénales, c'est de démontrer les deux éléments, de démontrer l'intention de commettre l'infraction criminelle et de démontrer également que le geste a été commis. Bon, à l'IVAC, ce n'est plus ça, parce qu'il n'y a pas nécessité d'obtenir une condamnation, il n'y a pas nécessité non plus de faire une dénonciation à la police pour que la personne soit accusée.

Donc, lorsque la personne s'adresse à l'IVAC, relativement au fait de dire : Bien, écoutez... Elle dit à l'agent : J'ai subi une infraction criminelle, voici ce que j'ai subi, bien, l'agent de l'IVAC ne va pas aller contacter la personne qui a commis l'infraction pour dire : C'était-tu vraiment votre intention de faire ça? On se fie sur le témoignage de la personne.

Mme Hivon : Et est-ce que ce ne serait pas un plus de l'écrire? Moi, j'essaie toujours de partir du fait que, là, on fait une loi pour les victimes. On vient de déposer un rapport en décembre pour accompagner le mieux possible les victimes, pour qu'elles comprennent dans quoi elles s'embarquent, c'est quoi, le processus qui les touche. Donc, il me semble que ça serait bien que la loi soit la plus compréhensible possible pour une victime qui essaie de s'y retrouver quand elle se débat avec l'IVAC, ce qui semble être le cas plus souvent qu'autrement. Donc, est-ce qu'on pourrait l'inscrire dans la loi que c'est indépendamment de l'intention, ou sans égard à l'intention criminelle, ou... Comme ça, on saurait que ce qui compte, aux yeux de l'IVAC, c'est la perpétration du geste lui-même, donc de l'acte criminel.

M. Jolin-Barrette : Bien, ce n'est pas juste ça, parce que ce qui est couvert, c'est l'infraction criminelle. Donc, il faut qu'il y ait une infraction criminelle, hein, qui est commise. On ne couvre pas les accidents dans le cadre de la Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement. Donc, je comprends l'intention de la députée de Joliette. Moi, ce que je vous dis, c'est que c'est interprété largement et qu'il n'y a pas un fardeau important qui est mis sur la personne qui est victime, qui demande de l'aide, mais encore faut-il... on ne peut pas exclure totalement ça de la loi, parce que ce n'est pas les accidents qui sont couverts, mais plutôt la perpétration d'une infraction criminelle.

• (16 h 20) •

Mme Hivon : Donc, j'ai un exemple pour le ministre. Il y a un épisode de violence, une des deux personnes dit que la personne lui a donné un coup de manière volontaire, et donc qu'elle a été victime de violence conjugale. Le conjoint, l'ex-conjoint dit : Pas du tout, c'est un accident, je veux dire, on était... je veux dire, c'est un accident, je me suis déplacé d'une certaine manière, c'est vrai qu'on parlait fort, mais je n'ai jamais voulu... Alors là, est-ce que le ministre me dit que l'IVAC, dans tous ces cas-là, va dire : Il n'y a aucun doute, il y a un coup de coude qui est rentré dans le ventre, ou... et donc, c'est sûr que c'est un acte criminel, et donc je ne vais pas plus loin?

Moi, la raison pour laquelle je soulève ça, c'est que le ministre en a entendu quelques-unes, comme nous, des victimes, et il a entendu, je pense, Mme Rochon, qui est venue, qui avait répertorié énormément de témoignages de gens qui ont eu à se battre avec l'IVAC, ce n'est pas quelque chose qu'on n'entend jamais, au contraire, ça semble assez répandu. Donc, il me semble que, si on peut spécifier les choses le plus clairement possible dans la loi... je pense que les gens de l'IVAC font une différence entre un accident et non, mais, ceci dit, dans le doute, il me semble que ça devrait aller à la victime, qu'on ne soit pas en train de faire une preuve de l'intention devant l'IVAC.

M. Jolin-Barrette : Je comprends, et ce n'est pas ça qui arrive non plus. Dans le fond, dans un cas de violence conjugale, généralement, ça va être des événements à répétition, entre autres, aussi, en matière de violence conjugale. Puis la voie de fait va constituer une voie de fait basée sur le témoignage de la personne qui s'adresse à l'IVAC.

Et l'autre point, et ça, c'est important de le dire, tout le monde a identifié la rigidité de l'IVAC, associée à l'ancienne loi puis aussi aux directives, qui n'étaient peut-être pas nécessairement données, mais on rapatrie tout sous le ministère de la Justice, puis, ce que l'on fait, et on l'a vu au début de la loi, le fait d'agir avec compassion pour la victime, on change la façon de fonctionner à l'IVAC.

Mme Hivon : Ça, c'est l'intention du ministre, O.K.? Mais, dans la loi, il n'y a rien qui vient changer l'IVAC ou exiger des formations en travail social, je parle dans les interactions entre les employés de l'IVAC. C'est bien de mettre des principes de courtoisie, puis tout ça, mais ils étaient déjà là dans la loi sur l'aide, là, donc qu'on veuille franchir un pas puis qu'on le dise plus clairement. Puis je ne pense pas que l'enjeu, ce n'est pas qu'ils ne soient pas courtois, c'est qu'il y a plein d'embûches ou, en tout cas, d'éléments dans le comment ils gèrent ces cas-là.

M. Jolin-Barrette : Puis il y a un enjeu aussi que la violence conjugale, c'était prescriptible, puis que l'approche qui était amenée, c'est une approche qui était plus restrictive. Puis ça fait des années qu'on le sait, puis on va changer, puis c'est pour ça qu'on présente le projet de loi aussi.

Mme Hivon : En tout cas, moi, je soumets au ministre que trop fort ne casse vraiment pas, surtout dans un cas où la confiance est tellement effritée entre les victimes et le système de justice en général puis entre les victimes et l'IVAC. Donc, il me semble que de dire qu'on ne se mettra pas, à l'IVAC, à chercher l'intention criminelle puis qu'on va se fier à ce qui est rapporté par la victime, en termes de gestes criminels qui ont été posés, ce serait un plus. Puis les juristes progressistes qui, vraiment, en ont fait un grand point, les deux coprésidentes aussi ont discuté de ça quand elles sont venues, du comité d'experts, donc il y a quelques groupes qui ont soulevé ça, je pense que ça vaut la peine de le considérer.

M. Jolin-Barrette : Je comprends le point, mais je suis à l'aise avec la définition qu'on a.

Mme Hivon : Puis je vais... En tout cas, moi, ça va être vraiment quelque chose qui va me tenir à coeur à travers tout ce projet de loi là, c'est que, quand on l'écrit, on pense aux victimes, pas juste en théorie, mais dans le concret, puis d'être capable de leur donner le plus de chance possible pour qu'elles fassent valoir leurs droits et qu'elles comprennent ce à quoi elles ont droit puis ce dans quoi elles s'embarquent. Ça fait que je pense que ce ne serait pas trop demander d'écrire ça, surtout que le ministre nous dit que c'est ça, son intention. Donc, c'est quoi, le problème de l'écrire, qu'on ne fera pas un gros examen de fond, de l'intention qui était derrière le geste, et tout?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : On va juste clarifier quelque chose, M. le Président, là. Je pense que tout le monde travaille pour les victimes ici. La présentation du projet de loi fait foi qu'on travaille dans l'intention des victimes.

Alors, lorsqu'on bâtit un projet de loi, M. le Président, il y a plusieurs éléments à prendre en considération puis il y a aussi des modalités d'application qui doivent être là. Il doit y avoir un cadre aussi, et c'est à l'intérieur de ces paramètres-là qu'on le fait. Et je pense que ça constitue des avancées significatives, et, lorsque je peux donner suite aux demandes des oppositions, je le fais, M. le Président, mais il faut penser qu'on est tous là pour les victimes. Et d'ailleurs, par la suite, ça pourra faire l'objet d'une directive ou d'une politique à l'interne aussi.

Mme Hivon : Est-ce que le ministre s'y engage, M. le Président? Ça me rassurerait beaucoup.

M. Jolin-Barrette : Là-dessus, je vais m'y engager.

Mme Hivon : Je peux recéder la parole à mon collègue, parce que je lui ai pris un peu de temps, là. Je ne voulais pas...

Le Président (M. Bachand) : Oui. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Sur exactement le même point, ça fait partie effectivement des discussions, je vous demanderais une courte suspension, M. le Président, pour qu'on puisse officialiser un amendement qui est en route, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bachand) : Donc, on suspend quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 25)

(Reprise à 16 h 33)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je lis l'amendement suivant, article 13 : Le troisième alinéa de l'article 13 est remplacé par : «"infraction criminelle" : tout événement dont la description correspond à un geste criminel, soit l'actus reus d'une infraction prévue au Code criminel, survenu après le 1er mars 1972 et qui porte atteinte à l'intégrité physique ou psychologique d'une personne».

Autrement dit, pour faire suite au débat initié par la collègue de Joliette, débat que nous avons eu, discussion que nous avons eue lors des auditions, notamment avec Me Lessard, Michael Lessard, qui était réellement intéressant, hein, Michael Lessard...

M. Jolin-Barrette : Je pense que c'est Michaël.

M. Tanguay : Michaël, j'ai dit Michael? O.K., il m'aura pardonné, sûrement, là, surtout que je l'encense, là, parce que j'ai trouvé ça réellement intéressant. Son mémoire, honnêtement, il était d'une lecture excessivement tangible, concrète, et c'est lui qui nous a inspirés... pas inspirés, je pense même que c'est sa rédaction.

Là, le ministre dit : Oui, mais je pense qu'il va sans dire, et, même qu'à la limite... pas je pense qu'il va sans dire, pour le ministre, il va sans dire qu'il n'y a pas de débat de mens rea, il n'y a pas de débat d'intention coupable, c'est réellement l'acte, l'actus reus. En le disant, ce serait clair, le ministre promet un bulletin qui va le dire. Je pense qu'en le mettant comme ça, que quelques mots d'ajoutés, dans la loi, ce serait excessivement clair, on n'aurait pas besoin de bulletin, et, aussi, ce serait une affirmation très claire du législateur que de le faire ici.

Mon point : l'exemple que je reprenais, parce que les... on a fait des discussions à l'interne, puis l'exemple que je reprenais par rapport au débat de la mens rea, je le prenais dans le contexte d'une infraction pour agression sexuelle. Lorsqu'une personne dénonce une agression sexuelle, ultimement, dépose une demande d'indemnisation à l'IVAC, oui, il y a l'actus reus, il y a l'agression comme telle, c'est ce qu'il est allégué, c'est ce qui est démontré par témoignage. Le fait d'exclure très clairement toute discussion ou analyse, à savoir est-ce que l'agresseur savait que la victime n'était pas consentante, toute la question du consentement, puis Dieu sait qu'on en parle beaucoup, beaucoup ces dernières années, ah! est-ce qu'il y avait consentement, oui ou non, mais qu'en matière d'infraction criminelle, ce soit l'acte qui soit reproché, qui n'est pas contesté, qui a eu lieu, puis il n'y a aucun débat au niveau du consentement, ça, ça serait faire avancer, je pense, le Québec en le disant très clairement, puis, honnêtement, je ne vois pas l'écueil de dire : Bien, on ne le mettra pas. Honnêtement, là, j'aimerais entendre le ministre là-dessus.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, je comprends l'intention des collègues des oppositions, par contre, une infraction criminelle, pour constituer une infraction criminelle, comprend à la fois la mens rea et à la fois l'actus reus. Donc, minimalement, bien que l'interprétation qui est faite au niveau de l'IVAC, au niveau de la recherche de l'information, à savoir est-ce que la personne elle est victime d'une infraction criminelle, elle se base sur le témoignage, bien, on ne peut pas complètement exclure de la loi la notion de la mens rea qui fait en sorte que ça constitue une infraction criminelle.

M. Tanguay : Donc, pour le ministre, il pourrait ne pas y avoir d'indemnisation d'une victime d'agression sexuelle parce qu'on jugerait insuffisante la preuve de l'intention coupable.

M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est pas ce que j'ai dit, mais j'ai dit que, dans un régime d'indemnisation étatique comme celui-ci, lorsqu'on couvre les infractions criminelles, une infraction criminelle a deux composantes, à la fois la mens rea et à la fois, également, l'actus reus, le geste qui est fait. Et je reviens à la question de l'accident, donc, s'il n'y a aucune intention coupable de faire l'infraction et que ça constitue un accident, l'accident n'est pas couvert par le régime.

M. Tanguay : Mais tantôt, en voulant rassurer ma collègue de Joliette, il a dit : Je vais m'assurer qu'il y ait... je prends l'engagement qu'il y ait un bulletin à cet effet-là.

M. Jolin-Barrette : Oui, oui.

M. Tanguay : Donc, il est à quel effet, le bulletin, dans le fond?

M. Jolin-Barrette : Pour envoyer un message à l'administration, une politique, pour dire : Concentrez-vous sur le geste, et, dans la recherche de l'intention, ce n'est pas nécessaire de faire une recherche exhaustive au niveau de l'intention.

Dans le fond, actuellement, puis de la façon dont ça se déroule à l'IVAC, là, le régime, la loi que nous avons, c'est une loi à portée sociale. L'objectif de la loi est d'indemniser les victimes d'infractions criminelles. Elles le seront. Par contre, il faut quand même prévoir que le régime applicable en est un d'infractions criminelles, donc ça inclut la mens rea. Bien entendu, l'agent ne dira pas à la personne victime : Avez-vous la preuve qu'il avait vraiment l'intention de vous agresser sexuellement? Ce n'est pas comme ça que ça se passe, c'est basé sur le témoignage de la personne, mais, pour être cohérent dans un régime d'indemnisation étatique qui va être couvert, on va le paramétrer.

M. Tanguay : C'est cette zone grise là qui m'inquiète, moi, M. le Président, comme législateur, on dit... C'est une zone grise, pour moi, là, «on va le paramétrer».

M. Jolin-Barrette : Bien non, puis le député de LaFontaine il le sait très bien, la distinction entre une infraction criminelle et un accident, c'est au niveau de la mens rea.

M. Tanguay : Oui, mais là je lui donne mon exemple de ne pas en échapper aucune qui se plaindrait, qui viendrait demander indemnisation pour agression sexuelle, je voudrais en échapper aucune, parce qu'il y aurait eu finalement un doute quant au consentement, puis on en a vu, là, des cas, M. le Président, là, judiciarisés, là.

M. Jolin-Barrette : Non, mais le député de LaFontaine mélange des choses, hein, des cas judiciarisés, s'il fait référence devant la cour, il sait très bien que, le fardeau de preuve, c'est hors de tout doute raisonnable, hein, la cour, il le sait très bien. Là, on est dans un régime d'indemnisation où est-ce que la personne, elle décrit son histoire à l'agent, et l'agent la dirige vers les services appropriés pour la rendre admissible aux aides auxquelles elle a droit. C'est un régime qui est large, et ce n'est pas du tout le même régime qu'en matière criminelle et pénale devant le système de justice.

• (16 h 40) •

M. Tanguay : O.K. Est-ce que j'ai entendu dire le ministre dire que, dans tous les cas d'espèce, parce que c'est une loi à portée sociale, les analyses se font selon la prépondérance des probabilités?

M. Jolin-Barrette : Mais ce n'est pas hors de tout doute raisonnable en tout cas.

Une voix : ...prépondérance.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, c'est au niveau de la prépondérance, 50 % plus un.

M. Tanguay : O.K. Prépondérance des probabilités sur l'actus reus et sur la mens rea.

M. Jolin-Barrette : Oui, sur l'analyse qui est faite.

M. Tanguay : Sur l'analyse qui est faite. Parfait. Une fois qu'on a dit ça parce qu'on va poursuivre la logique, il pourrait y avoir, donc, un débat... excusez, sur la présence ou pas d'un consentement non pas sur — puis je le concevais parce qu'on n'est pas dans une cour de justice — le doute raisonnable, mais sur la prépondérance des probabilités, puis il pourrait y avoir une décision qui est prise en disant : Bien, je pense que vous avez 49 %, vous n'avez pas 50 % plus un. Il pourrait y avoir des refus aussi si on n'exclut pas cette analyse du consentement là dans l'indemnisation des victimes d'agression sexuelle.

M. Jolin-Barrette : Pour tout type d'infraction, effectivement, il peut y avoir des refus. Il peut y avoir des refus, pourquoi? Parce que c'est un régime étatique, c'est de l'argent public, puis on veut indemniser les victimes, les personnes qui sont victimes, donc il faut faire en sorte aussi d'avoir des mécanismes qui s'assurent d'indemniser les personnes victimes. Il ne faudrait pas que n'importe qui qui s'adresse à l'IVAC n'ait pas à passer avec l'agent pour dire «bien, écoutez, voici de quoi j'ai été victime» pour pouvoir évaluer son dossier et pouvoir la consolider. Et ça se fait dans tous les régimes, à la fois à la SAAQ, à la fois à la CNESST, à la fois à l'IVAC aussi.

M. Tanguay : À quoi se limitera l'enquête de l'agent de l'IVAC, au témoignage de la personne devant elle ou lui ou pourra-t-il faire ou pourra-t-elle faire une contre-enquête pour, à la limite, aller contre-interroger monsieur pour se faire une tête? Est-ce que ça pourrait être possible, ça?

M. Jolin-Barrette : Non. L'agent de l'IVAC n'appelle pas monsieur pour voir si c'était son intention d'agresser sexuellement madame.

M. Tanguay : Donc, il va prendre, dans tous les cas d'espèce...

M. Jolin-Barrette : Il prend le témoignage de la personne victime et l'évalue.

M. Tanguay : Et là s'arrête son enquête, entre guillemets, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, ce n'est pas une enquête, c'est une...

M. Tanguay : Entre guillemets, là.

M. Jolin-Barrette : Il reçoit la version de la victime, peut-être qu'il y a des renseignements supplémentaires pour consolider sa demande qui doit être évaluée. Exemple, si la personne décrit un geste, mais finalement l'infraction qui est décrite ne serait pas couverte, supposons, relativement à une infraction contre un bien, bien, l'agent peut lui poser des questions à savoir si elle se qualifie à titre de victime d'une infraction criminelle contre la personne sur autre chose, c'est des cas individualisés dans chacune des circonstances, mais les gens qui sont à l'IVAC ne visent pas à exclure des victimes, là, il faut être clair de ça, là. C'est un régime d'indemnisation qui vise à faire en sorte que, si vous êtes victime d'une infraction criminelle sans avoir dénoncé, sans avoir été à la cour, que vous bénéficiez... et même on change le régime, la façon de réfléchir à l'IVAC, pour dire : Bien, vous nous dites que vous avez été victime d'une infraction criminelle, on va vous offrir du soutien psychologique dès le départ, avant même que l'agent ait analysé d'une façon approfondie votre dossier.

M. Tanguay : O.K. Parce que le ministre dit... Pourquoi on fait une réforme? C'est parce qu'il y a eu des refus dans le passé. Alors, le ministre dit : Bien, ce n'est pas un régime qui a vocation de dire non aux gens. Mais il y a des gens qui vont se faire dire non, c'est ça, mon point, là. Alors, quelles seront les balises des décideurs? C'est de ça dont on parle comme législateurs, là.

M. Jolin-Barrette : Dans tout programme étatique, quelqu'un qui n'a pas subi d'infraction criminelle, il ne doit pas être indemnisé par le régime. Quelqu'un qui fait une fraude, voulez-vous qu'il soit indemnisé? La réponse est...

M. Tanguay : Ce n'est pas ça que je dis.

M. Jolin-Barrette : Bien non, mais ça revient à ça.

M. Tanguay : Non.

M. Jolin-Barrette : Bien, ça revient... Oui, ça revient aux balises qu'effectivement c'est un régime qui vise à indemniser les infractions criminelles. On met en place un régime souple, généreux, large avec une loi à portée sociale qui vise à indemniser les personnes victimes d'une infraction criminelle. La personne, elle reçoit les faits, l'agent reçoit les faits et statue en fonction des faits qui lui sont décrits par la personne.

M. Tanguay : Bon, le témoignage de la personne, on revient au début de l'intervention, M. le Président, il y aura une analyse qui sera faite et basée exclusivement sur ou substantiellement sur le témoignage de la personne, témoignage qui sera évalué quant à sa crédibilité selon la prépondérance des probabilités au niveau du consentement également, qui participe de la mens rea, qu'on n'exclut pas pour les agressions sexuelles, là.

M. Jolin-Barrette : Non, effectivement, mais il n'y a pas d'agression sexuelle par accident.

M. Tanguay : Mais, une fois qu'on a dit ça, on revient à l'analyse du consentement de la personne qui travaille pour l'IVAC qui va vous dire oui ou non, sur la foi de votre témoignage, quant au consentement ou pas, puis il pourrait dire : Non, je ne vous crois pas, prépondérance des probabilités, je pense que c'est une relation consensuelle qu'il y a eu. Il pourrait même ajouter «pas d'acte criminel n'a été commis» et refuser l'indemnisation.

M. Jolin-Barrette : La personne, l'agent, évalue à la lumière du témoignage.

M. Tanguay : Ça pourrait arriver. C'est ça. Mon point, M. le Président, c'est là où le débat est important, là, comme législateur, là, qu'est-ce qu'on veut puis qu'est-ce qu'on ne veut pas, puis, entre deux maux, lequel que l'on veut privilégier, que deux personnes sur 100 se fassent indemniser alors qu'elles n'auraient pas eu droit, mais qu'il y en ait une sur 100 qui s'est fait refuser alors qu'elle aurait eu droit? Je préférerais le deuxième scénario puis je suis sûr que le ministre aussi, là, puis ça revient... c'est le copier-coller, en justice criminelle où il faut condamner hors de tout doute raisonnable, puis le pire des scénarios, ce serait d'emprisonner quelqu'un qui n'a rien commis, là, qui n'a pas commis de... Donc, c'est là où se situe le débat excessivement important, et, si le ministre ne veut pas évacuer mens rea dans tous les cas d'espèce, pourrions-nous l'évacuer ou avoir une rédaction dans le cas d'agression sexuelle?

M. Jolin-Barrette : Non, pour tous les types d'infraction, ça demeure avec une infraction criminelle.

Le Président (M. Bachand) : Interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Lorsque le ministre a élargi, donc, les catégories de victimes, est-ce que, le ministre, vous vous êtes fié — ou l'équipe qui vous a aidé — sur l'expérience des experts à l'IVAC, finalement, leur expérience pour voir comment on peut élargir, avec confiance, dans le sens que, sans les procédures qu'on verrait devant un tribunal, mais que l'expérience nous dit que, quand on rencontre une victime, que cette victime nous raconte son histoire, et qu'il y a des dommages physiques, psychiques, etc., si on pense à l'agression sexuelle, et qui leur donne confort qu'on n'est pas dans «hors de tout doute raisonnable» parce qu'on n'est pas devant le tribunal, mais on voit bien... il y a comme une appréciation qui est faite, aussi, de l'état de la personne? J'essaie de voir, de l'expérience vécue depuis tant d'années par ces personnes, est-ce qu'on est allés puiser un peu dans cette expérience pour élargir, en toute confiance, que, finalement, pour le niveau de preuve, ce n'est pas une preuve dont on a besoin pour la cour criminelle, là, mais une preuve d'éligibilité à l'indemnisation, on est capables de porter le jugement sur la situation aisément ou en posant les bonnes questions par l'état, l'état de la personne devant soi? On est dans les agressions sexuelles, mais ça pourrait être d'autres choses aussi. Les agressions sexuelles, c'est vraiment un bon exemple parce que, souvent, le débat, c'est est-ce qu'il y avait consentement ou pas consentement, puis là ça devient difficile devant les tribunaux, mais, dans ce cas-ci, le ministre semble dire que non, il va être capable d'évaluer, puis ils ne vont pas creuser trop si elle elle dit, je dis «elle», ça pourrait être «il», certainement, dans certains cas, alors je voulais juste voir si le ministre ou s'il y a quelqu'un ici du ministère qui serait capable de répondre à cette question.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, pour construire le projet de loi, on a travaillé avec la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels qui, eux, reçoivent annuellement plusieurs infractions criminelles, demandes d'infractions criminelles, d'indemnisation, on s'est inspiré notamment de leur vécu, et, il faut le dire, dans le fond, l'amendement propose de faire en sorte qu'il n'y ait plus de vérifications, essentiellement, c'est ça, ça constitue une infraction criminelle. Alors, oui, ça a été pris en considération, l'expérience des 40 dernières années aussi, et ça ne constitue pas un enjeu à la DIVAC, il faut le dire. Une personne qui demande de l'aide, on change la façon d'agir à la DIVAC, notamment, c'est vraiment au niveau de l'accompagnement, au niveau du soutien, une personne qui est victime, qui se dit victime, son dossier est analysé pour faire en sorte de lui donner les meilleures aides possibles pour qu'elle retrouve le contrôle de sa vie, mais on ne peut pas dépouiller l'infraction criminelle de son constituant, de sa composition, qui comprend l'actus reus et le mens rea, c'est ça, l'infraction criminelle.

• (16 h 50) •

Mme Weil : Oui, oui, c'est ça, mais l'évaluation... la personne...

M. Jolin-Barrette : Bien, l'évaluation se fait en fonction de la personne.

Mme Weil : Donc, il n'y a jamais eu de refus dans un cas comme ça.

M. Jolin-Barrette : Bien, ce que je veux dire, c'est, selon la prépondérance, la personne, l'agent qui est là écoute la personne, lui demande de spécifier certaines choses. L'agent n'a pas comme objectif de dire : Non, je vais trouver tous les moyens de ne pas vous indemniser. Au contraire, l'agent est là pour dire : Je vais trouver tous les moyens pour vous indemniser puis pour vous aider. Parce que, généralement, quelqu'un qui demande de l'aide à l'IVAC, c'est quelqu'un qui a besoin d'aide, puis il est là pour être soutenu, puis l'objectif du régime aussi est là pour être soutenu, mais on ne peut pas ne pas mettre aucune balise par rapport au régime.

Mme Weil : Et la personne va décrire, j'imagine, les troubles qu'il vit pour que l'agent puisse déterminer le type d'aide et d'accompagnement que cette personne a de besoin.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans un premier temps, l'agent va évaluer est-ce qu'il y a eu une atteinte, est-ce que le crime, il est couvert. Parce que, là, ça va être moins un enjeu parce qu'auparavant, il y avait des crimes qui n'étaient pas couverts sur la liste à cause de la liste restrictive. Là, dès que ça va être un crime contre la personne, le crime va être couvert, ça, ça va aider beaucoup les choses.

Autre élément, avant il y avait des gens qui... le crime était couvert, ils avaient subi l'infraction criminelle, ils avaient tout, là, l'actus reus, la mens rea, la personne s'était fait agresser sexuellement, sauf qu'elle en avait eu connaissance, puis ça faisait plus que deux ans, ça fait qu'on disait : Bien oui, vous avez été victime d'agression sexuelle, mais on est désolés, on ne peut pas vous indemniser parce que vous n'avez pas présenté votre demande à l'intérieur de deux ans. Ça, ça n'arrivera plus parce qu'avec le projet de loi, on rend l'infraction criminelle d'agression sexuelle imprescriptible, ça fait que ce motif-là de refus ne pourra plus être opposé. Donc, on élargit vraiment beaucoup.

Alors, dans un premier temps, l'agent évalue quel type de victime, quel type de personne victime c'est, est-ce que c'est la personne qui a subi l'infraction ou il s'agit d'un proche, puis, à partir du moment où, là, tout est évalué, on va lui offrir les aides associées à la catégorisation d'une personne victime, mais, dès le départ, on va lui offrir du soutien psychologique même si sa demande n'est pas encore autorisée.

Mme Weil : Donc, pour un acte qui s'est produit même deux ans avant, c'est ça que vous avez dit ou...

M. Jolin-Barrette : Bien, une agression sexuelle qui est arrivée en 1995, maintenant, la personne va pouvoir s'adresser en 2025 à l'IVAC puis être indemnisée parce qu'on aboli la prescription en matière d'agression sexuelle.

Mme Weil : Et l'exploitation sexuelle?

M. Jolin-Barrette : L'exploitation sexuelle, ce n'était pas prévu à la liste, donc c'est à partir du moment de la sanction de la loi, bien, de l'entrée en vigueur de la loi.

Mme Weil : Pourquoi cette différence? J'essaie de comprendre, je sais qu'on en a parlé un peu, et puis on y reviendra sûrement lorsqu'on va parler parce que...

M. Jolin-Barrette : Parce que l'exploitation sexuelle n'a jamais été sur la liste.

Mme Weil : Et puis?

M. Jolin-Barrette : Et puis, et puis...

Mme Weil : C'est vraiment le même genre d'actes. Non, mais...

M. Jolin-Barrette : Et puis, en 1999, ce n'était pas une infraction criminelle.

Mme Weil : Mais c'est presque des soeurs jumelles, là, l'agression sexuelle et l'exploitation sexuelle, c'est le même acte, on pourrait même parler d'agression sexuelle dans un cas d'exploitation, c'est juste parce que c'est pour de l'argent.

M. Jolin-Barrette : Donc, si c'est une agression sexuelle, c'est couvert.

Mme Weil : Donc, c'est peut-être la façon de le présenter, en tout cas, on y reviendra, mais, je pense, ça va être un sujet important, parce que...

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je référerais la députée de Notre-Dame-de-Grâce aux propos de la ministre de la Justice Vallée, alors qu'elle répondait aux questions au salon bleu, entre 2014 et 2018, par rapport... sur ce point précis, précis là qu'elle vient de faire.

Mme Weil : De l'exploitation?

M. Jolin-Barrette : Exploitation et agression sexuelle.

Mme Weil : Maintenant...

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, juste pour être clair, clair, clair, là, c'était la réponse du gouvernement libéral 2014‑2018, par le biais de la ministre Vallée, sur le point précis que la députée de Notre-Dame-de-Grâce vient de toucher.

Mme Weil : C'est-à-dire?

M. Jolin-Barrette : Relativement à l'exploitation sexuelle et à l'agression sexuelle.

Mme Weil : Mais la réponse, c'était quoi?

M. Jolin-Barrette : Bien là, je vous invite à aller prendre connaissance.

Mme Weil : Bien, vous savez, tout évolue, hein, surtout que...

M. Jolin-Barrette : Oui, beaucoup, beaucoup, quand on est rendu dans l'opposition.

Mme Weil : Non, mais surtout dans...

M. Jolin-Barrette : Quand on était au gouvernement puis qu'ensuite on se retrouve dans l'opposition, il y a beaucoup de choses qui évoluent de la part du gouvernement libéral, effectivement

Mme Weil : Mais le gouvernement libéral...

M. Jolin-Barrette : Surtout, M. le Président, je vais juste faire le point là-dessus, M. le Président, là, surtout sur ce point-là de l'exploitation sexuelle, je suis, comment dire, on ne peut plus surpris de la réaction de mes collègues du Parti libéral, de l'opposition officielle, M. le Président, beaucoup, puis on va faire le débat plus loin, là, mais on va avoir vraiment des discussions intéressantes.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée.

Mme Weil : Mais, moi, je ne suis pas dans des réactions, là, je suis juste en train de regarder l'évolution de la société, hein, l'évolution de la société et aussi nos connaissances en matière d'exploitation sexuelle. Je ne peux pas vous dire qu'il y a 10 ans on avait une bonne appréciation. Là, on vient...

M. Jolin-Barrette : Je m'excuse, M. le Président, là, mais là, une fille qui était victime d'un pimp en 2015, en 2016, en 2017, qu'on me dise que ce n'était pas la même réalité, je m'excuse, mais j'ai un problème avec ça, puis j'ai un problème avec ça, M. le Président, parce que...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Non, bien, je m'excuse, mais je m'exprime.

M. Tanguay : ...appel au règlement, elle avait la parole, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Oui, oui, mais c'est pour ça que je préside.

Mme Weil : Je veux juste finir, je veux juste finir.

Le Président (M. Bachand) : Oui

Mme Weil : Parce que, ce que j'allais dire, c'est qu'on a fait une commission, hein, donc c'est sûr qu'on a fait une commission, il y a des recommandations et, oui, c'est le gouvernement qui a demandé... qui a recommandé, mis sur pied cette commission. Pourquoi? Parce qu'il fallait mieux comprendre la dynamique de ce milieu-là. Cyberexploitation, écoutez, il y a 10 ans, est-ce que Pornhub existait, là? Je ne pense pas, à cette époque-là. En tout cas, malheureusement, c'est un domaine qui évolue de façon horrible, inquiétante, je ne pense pas qu'il y a 20 ans, il y a 30 ans, c'était la même dynamique, mais vraiment, maintenant, ces jeunes sont... Bon, oui, il y avait des gens qui étaient très conscients, mais je ne peux pas vous dire que j'avais une connaissance fine de tout ça, il y a 15 ans ou il y a 20 ans, je pense que ça évolue dans le mauvais sens, d'où la création de cette commission où on a pu mieux comprendre la dynamique.

Moi, je ne suis pas en train d'argumenter quoi que ce soit maintenant, tout ce que j'essaie de dire c'est que pour... et pas de blâmer qui que ce soit, vous avez mis deux... vous avez décidé, comme gouvernement, c'est très bien, vous avez fait des promesses et vous avez mis en branle cette commission, ça a été bien nécessaire. J'ai adoré, c'est drôle de mot à dire, mais j'ai vraiment apprécié l'expérience parce que ça m'a... bien que j'aie fait beaucoup de cauchemars, ça m'a sensibilisé à une réalité que moi je n'aurais pas pu voir parce qu'autour de moi ça ne se vivait pas. Et, en tant que membre d'un gouvernement, quand ce n'est pas son dossier, ce n'est pas une réalité qu'on connaît.

Donc là, il y a eu tout ce travail qui a été fait, il y a d'autres... j'inviterais quand même, à un moment donné, quand ce sera peut-être plus à propos, il y a d'autres remèdes aussi qui sont dans ce rapport où le ministre de la Justice... d'ailleurs il y a une recommandation, on y reviendra plus tard, où il y a des remèdes qui pourraient être examinés par le ministère de la Justice, qui est plus de nature «recours civil». Bien, je pense que, parce qu'on touche la question d'indemnisation des victimes, à quelque part on touche aussi comment réparer la vie des victimes. Je ne suis pas du tout dans qui a dit quoi, qui a fait quoi, quel gouvernement a promis quoi. La société évolue, la politique évolue, les promesses des uns et des autres. Vous êtes élu, vous avez fait des promesses, et on est en train de vous aider à livrer votre promesse, et de le faire de façon honnête et ouverte.

Je ne pense pas... ça pourrait m'aider de regarder l'argument de ma collègue d'il y a quelques années, mais les choses évoluent tellement que je vais... oui, je vais le regarder, mais ça ne veut pas dire que je serai convaincue. Je ne sais pas ce que je vais trouver, mais, de toute façon, c'est plus ou moins pertinent, là, on est dans le présent. Moi, je pose des questions, juste pour voir comment... j'étais vraiment dans quelque chose de très terre à terre, c'est-à-dire l'expérience vécue par les personnes, les experts de l'IVAC, ceux qui font l'évaluation, eux, ils ont la certitude, et le ministre a répondu oui, c'est-à-dire le confort, un niveau de confort que... ils sont habitués à faire ces évaluations d'une personne qui aurait été victime d'agression sexuelle, ils n'ont pas besoin d'aller creuser en profondeur, est-ce que c'est vrai ou ce n'est pas vrai, ils ne vont pas sur le mens rea, etc. La victime décrit, et c'est cette expérience-là qui a beaucoup alimenté, d'après ce que le ministre a dit, et là on a glissé quelque part, là, mais je reviens à sa réponse, c'est que le niveau de confort est là pour dire que ça va marcher, il n'y a pas d'inquiétude à ce niveau-là, ils seront capables de faire cette évaluation, hein, le ministre l'a confirmé puis ensuite on a parlé d'autre chose. C'est tout.

• (17 heures) •

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre. Interventions sur l'amendement? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. On est sur l'amendement, M. le Président, «infraction criminelle». Et vous avez noté, M. le Président, que, tel que rédigé par l'amendement, «infraction criminelle» vient faire l'économie de ce qui est prévu dans la mouture actuelle et qui débute... «infraction criminelle, à moins d'indication contraire...»

Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale est venu dire : «...on peut se demander quelle est l'intention du législateur lorsqu'il indique "à moins d'indication contraire". Y a-t-il d'ores et déjà des crimes qu'on souhaiterait retirer de la liste? [...]lorsqu'on dit qu'une infraction criminelle perpétrée contre un bien est exclue, comment considérera-t-on les méfaits dont sont victimes...» En tout cas, que veut dire cette expression «à moins d'indication contraire»?

(Consultation)

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, dans le fond, ce qu'on me dit, c'est qu'on le met dans les définitions comme ça, pour faire en sorte que, si jamais dans le futur, on souhaitait s'en éloigner, c'est possible de le faire. Mais on peut supprimer «à moins d'indication contraire», si tel est le souhait.

M. Tanguay : Mais je l'enlèverais, moi, monsieur, parce que, nécessairement, «à moins d'indication contraire», si c'est pour être plus généreux, je ne l'enlèverais pas, mais, si c'est, dans tous les cas d'espèce, de fermer des portes, toute infraction prévue au code... Autrement dit, on dit : À moins d'indication contraire, c'est l'entièreté du Code criminel. Donc, il faudrait le lire : À moins d'indication contraire, tout le Code criminel, sauf tel, tel, tel. Je l'enlèverais, M. le Président, je...

M. Jolin-Barrette : Mais, comme je vous dis, il n'y a pas d'enjeu à l'enlever, c'est pour que la loi soit évolutive, mais...

M. Tanguay : Puis l'amendement est déjà prêt, M. le Président, il s'agirait juste de voter.

M. Jolin-Barrette : Bien, votons l'amendement sur lequel on est présentement.

M. Tanguay : Mais, si on vote oui, on fait une pierre deux coups.

M. Jolin-Barrette : Non.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Un tout petit point sur «à moins d'indication contraire». Comme le soulève mon collègue de LaFontaine, à moins qu'on veuille élargir, ce qui n'est pas le cas, je pense, comme c'est écrit là, mais on va avoir un débat, en tout cas, prochainement, après des amendements, sur «une infraction criminelle perpétrée contre un bien», notamment dans le contexte de violence conjugale, où certains sont venus nous dire : Si, par exemple, on casse une fenêtre, on casse un lit, on casse des pots dans la chambre, dans le cadre d'un problème de violence conjugale, il faudrait que cela soit compris comme faisant partie d'une infraction criminelle qui peut donner ouverture, même si... On se comprend que c'est un pot qui est cassé, mais c'est dirigé contre la personne. Bref, on va revenir, on va faire le débat. Mais je veux juste, à ce moment-ci, tout de suite, semer la graine que, dans ce cas-là, on pourrait mettre plus loin, avant cette phrase-là, «à moins d'indication contraire, n'est pas visée une infraction criminelle perpétrée contre un bien». Et là on pourrait se permettre de faire le débat sur... dans certains cas, de permettre qu'une infraction contre un bien soit considérée, parce que, dans le fond, elle vise une personne. Mais je ne veux pas faire tout de suite le débat, parce qu'il va falloir le faire, mais je veux juste dire que, si on enlève «à moins d'indication contraire»... Moi, je pense qu'il aurait pu être pertinent de le mettre là, pour maintenant ou pour se garder la porte ouverte pour plus tard.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Juste vous dire qu'on doit... avant d'aller plus loin sur un autre amendement, il faut disposer de l'amendement qu'on a devant nous. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Sur le point de la collègue, parce que l'amendement l'exclut, «à moins d'indication contraire», j'aimerais savoir une chose de nos légistes, là, parce que c'est important ce qu'on se dit là. «À moins d'indication contraire», est-ce qu'il est sûr à 100 %, puis il n'y a aucun doute, que, tel que rédigé, il viendrait impacter la première partie avant le point-virgule? Là, on est rendus dans les points-virgules, mais c'est ça, notre travail, là. «À moins d'indication contraire», à cause du point-virgule qui précède «les biens», il est de facto très clairement établi que le législateur veut dire qu'à moins de faits contraires c'est toutes les infractions du Code criminel, que c'est uniquement à cette première partie là qu'il s'attache ou qu'il pourrait être interprété, pouvoir sauter de l'autre bord du point-virgule, le «à moins d'indication contraire».

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, ça couvre la première partie de la phrase, M. le Président, donc jusqu'au point-virgule.

M. Tanguay : Donc, ça couvre uniquement la première partie de la phrase. O.K., ça fait qu'on peut statuer sur notre amendement puis, après ça, on pourra, le cas échéant, avoir le débat.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement du député de LaFontaine?

Mme Hivon : ...je veux juste vraiment réitérer mon appui à cet amendement-là. Je pense que ce serait beaucoup plus clair pour les victimes que ce soit nommément inscrit que ce qu'on vise, quand on parle d'infraction criminelle, c'est nommément l'acte, donc, criminel, et qu'on ne se mettra pas à faire une enquête sur les intentions, surtout dans des cas où tout tourne autour de cette notion-là d'intention et de consentement. Et donc je veux juste dire à quel point je trouve que ce serait une avancée pour les victimes, pour l'intelligibilité de la loi, pour que les victimes sachent à quoi s'attendre, et pour que ce soit très clair aussi pour les gens qui travaillent à l'IVAC et qui vont devoir appliquer la loi.

Le Président (M. Bachand) : Merci. D'autres interventions? Donc, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. On retourne maintenant à l'article 13, l'amendement. Oui.

M. Tanguay : Si vous me donnez la parole... Merci, M. le Président. Sur le débat qu'on a, «à moins d'indication contraire», je prendrais... puis je ne sais pas où loge la collègue de Joliette. Mais, si, considérant que l'on a la confirmation, sans aucun doute, qu'«à moins d'indication contraire» est exclusivement et uniquement ici utile pour la première partie, à savoir «toute infraction [...] au Code criminel perpétrée», là, que l'atermoiement, «à moins d'indication contraire», s'il est uniquement pour la première partie, avant le point-virgule, je serais de l'école de l'enlever, puis, après ça, on pourrait avoir le débat, est-ce qu'on veut en avoir un, sur «à moins d'indication contraire», «n'est pas visée une infraction perpétrée contre un bien», bien, je l'enlèverais, considérant qu'il n'est aucunement utile à «bien», si le ministre... puis le ministre disait qu'il était prêt à faire écho à ça, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je dirais : Ayons la discussion sur la totalité. L'amendement, il est déjà prêt pour enlever «à moins d'indication contraire», mais ayons la discussion sur l'alinéa au complet, puis on le présentera à la fin.

M. Tanguay : Sur «infraction criminelle», c'est ça.

M. Jolin-Barrette : Sur «infraction criminelle».

M. Tanguay : Là-dessus, M. le Président, moi, j'appuie l'opportunité que le législateur... On a... Le régime, aussi perfectible soit-il, actuel, puis aussi décrié par certains dans des termes, là, non équivoques, aura permis une évolution parfois jurisprudentielle, parfois de direction, parfois de... C'est une soupape de sécurité de plus. Si on se rend compte qu'un cas d'espèce... Puis on en a déjà parlé dans nos premières séances, M. le Président. Violence conjugale, monsieur revient sur le lieu de résidence de madame. Il n'a pas d'affaire là. Il brise la voiture, crève les pneus. Il n'y a rien qu'il ne fait pas aux biens, et quitte. Madame est bouleversée. Qu'on puisse faire vivre la loi, qu'on ne rouvrira pas l'an prochain puis à brève échéance, d'avoir «à moins d'indication contraire», moi, j'aimerais ça que, par règlement, le cas échéant, le ministre ait cet outil-là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair que le choix du législateur est de viser les infractions contre la personne et pas celles contre les biens. Donc, elles sont exclues.

M. Tanguay : Oui, mais, je veux dire... Parce que le ministre vient de dire : J'aimerais ça avoir le débat. Mais là, je veux dire, il m'ouvre la porte pour me la refermer dans la face assez rapidement, là. C'est de la négociation industrielle, c'est quoi? C'est...

M. Jolin-Barrette : Mais, M. le Président, je lui...

M. Tanguay : Il dit : Ayons le débat, mais... O.K.

M. Jolin-Barrette : J'ai écouté sa position. Je lui dis ma position. S'il veut continuer à discuter, il peut bien discuter, mais, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : ...la députée de Sherbrooke et la députée de Joliette aussi, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui, bien, on va avoir le débat parce qu'on a un amendement de prêt à cet effet-là. Donc, je ne sais pas s'il est déjà sur le Greffier... ou on suspend quelques instants.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il est envoyé? Parfait.

Alors, on va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 09)

(Reprise à 17 h 12)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui. Donc, ma collègue de Joliette a préparé le terrain tout à l'heure en abordant une question qui nous a été... un problème qui nous a été présenté très, très souvent par les victimes de violence conjugale. Donc, c'est pour ça que j'arrive avec un amendement là-dessus. Ça se lit comme suit :

Ajouter, au 3e alinéa, après «perpétrée contre un bien», le texte «sauf si elle est perpétrée dans le but de porter atteinte à l'intégrité physique ou psychique d'une personne».

Donc, l'objectif, c'est de faire en sorte qu'une infraction perpétrée contre un bien, si c'est fait dans l'intention de porter atteinte à l'intégrité physique ou psychique d'une personne, notamment en contexte de violence conjugale, c'est quelque chose qui arrive très fréquemment, que ça puisse être couvert. On pense à des exemples comme un conjoint qui va aller crever des pneus, qui va aller casser une fenêtre, qui va détruire des documents d'une personne, qui va briser son téléphone pour l'empêcher de communiquer avec l'extérieur. On parle de gestes faits dans un contexte de violence conjugale qui visent à installer un climat de terreur, là, envers la personne, à exercer une emprise sur elle.

Donc, même s'il n'y a pas de violence physique perpétrée directement sur la victime, il y a définitivement des situations où les infractions perpétrées contre des biens visent à atteindre psychologiquement la victime. Puis ça nous a été rapporté à moi, à ma collègue de Joliette puis à toutes... à mes autres collègues des autres formations politiques aussi, là, dans nos travaux. C'est quelque chose qui est très fréquent et qui est d'ailleurs utilisé par les auteurs de violence conjugale comme un stratagème pour, justement, éviter de laisser des traces physiques sur le corps de la personne.

Donc, je fais appel à l'humanité que j'ai sentie de la part du ministre sur la question de la violence conjugale pour cette souplesse-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Mais je comprends l'intention de la députée de Sherbrooke relativement à cela, relativement au fait que, parfois, on utilise les biens pour atteindre la personne. Le régime que nous instaurons est celui en vertu des crimes, des infractions criminelles contre la personne. Ça, c'est une infraction criminelle contre les biens. Cela étant, dans certaines situations, ça pourrait constituer du harcèlement criminel qui est couvert aussi. Donc, il y a cette poignée-là aussi qui est offerte aux victimes de violence conjugale notamment. Il faut le rappeler, violence conjugale, dans le fond, c'est un concept, ce n'est pas le crime en soi, parce que le crime va être voies de fait, voies de fait envers la personne qui est le conjoint ou la conjointe de la personne.

Cela étant, l'autre point aussi avec l'amendement, avec l'amendement qui est proposé par la députée de Sherbrooke, on amène un critère d'intention aussi, donc un critère de mens rea aussi. Donc, je voulais juste porter ça à l'attention aussi, «dans le but de porter atteinte à l'intégrité», donc il y a le critère d'intention qu'on ne voulait pas avoir aussi sous l'autre volet. Mais je comprends l'objectif, je la saisis très bien, la conséquence. Mais, dans le cadre de ce régime-ci de l'indemnisation de l'IVAC, c'est vraiment le crime contre la personne qui est couvert et pas les autres crimes qui pourraient avoir des conséquences, sous réserve du harcèlement criminel qui pourrait remplir cette situation-là.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Moi, je ne suis pas familière avec la jurisprudence, donc peut-être que le ministre peut m'éclairer quels types d'événements peuvent constituer du harcèlement criminel. Est-ce que les exemples que j'ai donnés, si une personne crève les pneus une fois de sa conjointe, est-ce que c'est suffisant pour... constituer, pardon, du harcèlement criminel, par exemple, ou si ça doit être fait dans plusieurs événements séparés? Moi, c'est quelque chose qui m'inquiète, que ça doive être des gestes répétés pour être considérés comme du harcèlement criminel, alors qu'on s'entend que d'aller, je ne sais pas, asperger d'essence la maison de quelqu'un, ça n'a pas besoin d'être fait plus qu'une fois pour instaurer un climat de terreur puis avoir des conséquences psychologiques sur une victime.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, le harcèlement criminel est la définition prévue au Code criminel. Donc, notamment dans une publication du gouvernement... du ministère de la Justice fédéral, voici des actes qui constituent du harcèlement criminel : Vous appeler de façon répétée et peut-être raccrocher dès que vous prenez le téléphone, communiquer avec vous dans Internet ou en vous envoyant des courriels sans arrêt, vous suivre, vous, les membres de votre famille ou vos amis, vous laisser des messages vocaux ou menaçants, vous envoyer des cadeaux que vous ne voulez pas recevoir, vous suivre ou tenir compte des allées et venues, vous menacer, vous et vos enfants, vos animaux, vos amis. Donc, ce sont des exemples courants de harcèlement criminel.

Mme Labrie : ...les exemples que j'ai donnés pour présenter mon amendement, il n'y en a aucun qui entre dans la définition de harcèlement criminel.

M. Jolin-Barrette : Bien, je ne peux pas vous dire que ça ne rentre pas dans la définition de harcèlement criminel, il faudrait l'analyser d'une façon approfondie.

Mme Labrie : Parce que moi, si le ministre me convainc qu'une victime qui subit des gestes comme ça, il va y avoir une poignée quelque part pour qu'elle soit admissible à l'IVAC, je peux me laisser convaincre. Mais là je ne suis pas convaincue du tout par la liste que le ministre vient de me lire, je ne reconnais pas là-dedans des gestes qui sont posés fréquemment par des auteurs de violence conjugale, qui sont subis par les victimes puis qui se retrouvent sans possibilité d'être indemnisées, là, en ce moment.

Puis, sur la question, bon, de rajouter une intentionnalité, là, dans l'amendement, ça peut avoir l'air contradictoire par rapport à ce dont on vient de discuter précédemment, mais je pense que ce ne l'est pas, parce qu'on parle spécifiquement ici des infractions contre des biens. Donc, pour moi, il n'est pas du tout question de rajouter une notion d'intentionnalité pour les autres situations, mais par rapport à un bien, je pense que c'est une notion qui devrait être ajoutée.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre, et j'aurai la députée de Joliette après.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, souvent, dans ce qui est... dans les exemples donnés par la députée de Sherbrooke, il y a souvent des menaces qui sont proférées, il y a souvent du harcèlement aussi. Puis le harcèlement, ça n'a pas besoin d'être nécessairement répété, ça peut être une fois aussi, le harcèlement criminel aussi. Donc, ça peut être des événements qui se qualifient de harcèlement criminel ou de menaces.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

• (17 h 20) •

Mme Hivon : Oui. Je veux juste dire au ministre que je suis certaine qu'il a vraiment bien fait ses devoirs, mais ma collègue et moi, on a eu la chance, avec sa collègue, donc, la ministre déléguée à l'Éducation puis notre autre collègue de l'opposition officielle, la députée de Verdun — c'est ça — donc, de vraiment entendre beaucoup de témoignages dans le cadre de nos travaux sur l'accompagnement des victimes de violence sexuelle et conjugale. Et je dois dire au ministre que ces personnes-là n'étaient pas reconnues. Donc, c'est une réalité, toute la question de la violence psychologique qui n'est pas reconnue dans le Code criminel.

Et c'est assez extraordinaire, parce que je viens de voir à l'instant que Mélanie Lemay, qui est une jeune femme qui a fait énormément pour l'avancement de la cause des victimes de violence sexuelle et conjugale, témoignait aujourd'hui devant un comité parlementaire de la Chambre des communes précisément sur la question de l'étendue de la notion de violence conjugale au sens du Code criminel pour venir inclure la violence psychologique. Et il me semble qu'on a devant nous une occasion extraordinaire, surtout avec le travail que le comité d'experts a fait, les victimes qui nous ont ouvert leurs coeurs et qui nous ont dit à quel point il y avait des limites et que c'était inconcevable qu'on ne soit pas plus avancés pour reconnaître la violence psychologique, la coercition psychologique, qui est fondamentale dans un contexte de violence conjugale et qui n'a pas toujours des ramifications physiques, et, en plus, toute la question des gestes qui sont faits de manière ponctuelle et qui, non, malheureusement, ne se qualifient généralement pas de harcèlement criminel.

Donc, c'est vraiment quelque chose dont on a débattu spécifiquement. Ce n'est pas pour rien que Julie Desrosiers, la coprésidente du comité d'experts, est venue en faire un point précis, que ma collègue de Sherbrooke présente un amendement. Puis il me semble que c'est juste le gros bon sens. On pourrait même le limiter au contexte de violence conjugale si le ministre veut aller plus loin. Mais ça montrerait qu'on est à l'écoute puis qu'on a compris tous ces messages-là, répétés, qui nous ont été envoyés par les victimes, et qu'en plus le Québec est capable d'être progressiste puis d'avancer sans attendre que le fédéral, peut-être un jour, bouge parce qu'on va peut-être attendre longtemps. Alors, il me semble que tout est là pour le faire. Et puis ce n'est pas la fin du monde, ce qui est demandé. L'amendement de ma collègue est très bon, puis ça serait une avancée significative.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Je comprends. Je suis très sensible à ce que la députée de Joliette dit. Cela étant, les paramètres de la loi et du projet de loi sont vers les infractions criminelles. Donc, ce qui est couvert au niveau du régime, c'est les infractions criminelles. Et là on est sur un amendement perpétré... d'une infraction qui est perpétrée contre un bien. Alors, je ne donnerai pas suite à l'amendement. Et surtout, dans ce qui est décrit, ça pourrait constituer du harcèlement criminel, ça pourrait constituer des menaces aussi dans le contexte particulier de violence conjugale aussi. Donc, c'est une analyse en propre de la situation qui est faite.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke, oui.

Mme Labrie : Malheureusement, ce n'est pas le cas. Le ministre dit : Ça pourrait, mais c'est juste que les victimes sont nombreuses à témoigner que ce n'est pas considéré comme tel. Puis le harcèlement criminel, c'est déjà quelque chose qui était couvert par le régime techniquement, mais ce n'est pas quelque chose qui servait de poignée aux victimes pour être indemnisées jusqu'à maintenant. Ça ne fonctionnait pas.

Donc, moi, je suis très ouverte à ce qu'on formule ça différemment. On pourrait écrire «sauf si elle est perpétrée dans un contexte de violence conjugale», par exemple. Mais je pense que c'est essentiel de faire cette modification-là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, avant notre réforme, le harcèlement criminel n'était pas admissible à l'IVAC.

Mme Labrie : Il n'était pas admissible?

M. Jolin-Barrette : Non. On le rend admissible.

Mme Labrie : O.K.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, oui.

Mme Hivon : M. le Président, c'est une avancée, là, mais je veux juste dire que ça ne change rien, parce que ces victimes-là vont dans les postes de police, certaines, pour rapporter ces faits-là. On ne retient même pas les plaintes, parce qu'on estime que ce n'est pas du harcèlement criminel, ces situations-là, alors que, je veux dire, il me semble qu'on devrait avancer, puis évoluer, puis voir la gradation. Puis il me semble qu'on veut agir plus tôt que tard, autant du point de vue criminel comme tel, que du point de vue d'indemniser et de soutenir avec de l'aide psychologique avant, justement, qu'on soit obligé d'être rendu qu'il y a eu des menaces ou qu'il y a eu répétition des gestes sur une période de temps, puis que, là, clairement, on est dans le harcèlement parce qu'on a les éléments.

Donc, bien honnêtement, je ne comprends pas pourquoi on refuse ça. Ça serait vraiment un geste d'ouverture, un, à l'égard de tout le travail qui a été fait, parce que je le sais, que le ministre a l'ouverture, puis nous, on milite pour dire au ministre : Bien, ça serait bien de prendre un temps d'arrêt pour considérer le rapport d'expert qui a été déposé. Le ministre dit : Non, non, non, on franchit les premiers pas. O.K., mais quand on apporte des amendements qui sont directement en lien avec des recommandations consensuelles de tous les experts des quatre partis, qui sont relatés par un nombre important de victimes, je vous dirais, là, qu'en violence conjugale, là, c'est ça, les gros éléments. C'est la violence psychologique, les atteintes indirectes pour vraiment agir, pour contraindre la personne qui est victime de violence psychologique ou physique, et c'est toute la question ensuite, on pourrait revenir dans un contexte, mais du civil versus le criminel, versus l'IVAC, qu'il y ait une cohérence dans tout ça.

Ça fait que, bref, c'est vraiment au coeur de ce qu'on a fait. Donc, je ne comprends pas. Tu sais, est-ce que le ministre pense que là, soudainement, il va y avoir une avalanche de demandes, là? Je pense que de fournir de l'aide psychologique puis un soutien à ces personnes-là, c'est la moindre des choses. Et puis il n'y aura pas une avalanche, du jour au lendemain, de gens qui vont imaginer ou créer de fausses infractions à leurs biens pour venir plaider qu'elles sont victimes de violence conjugale, je veux dire, il y a un contexte à ça.

Ça fait qu'il me semble qu'on a une opportunité extraordinaire de marquer un pas significatif pour les victimes de violence conjugale sur des cas précis qui nous ont été rapportés, que le Québec pourrait vraiment marquer le coup. Puis, en même temps, ça enverrait un message au fédéral qui se penche sur ces questions-là, ça enverrait un message aux policiers qui interprètent ces dispositions-là. Il me semble qu'à un moment donné il faut bouger.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, pour bouger, on bouge, hein, ça fait 40 ans qu'on n'avait pas bougé puis on bouge. Le rapport du comité d'experts ne dit pas non plus d'inclure la violence contre les biens dans le cadre de l'IVAC, il demande de revoir l'IVAC.

Là, l'autre élément, M. le Président, qui est important, là, en lien avec les propos de la députée de Joliette, c'est le fait que l'IVAC, ce n'est pas un corps de police, ce n'est pas le système de justice non plus. L'admissibilité, elle est beaucoup plus large que quand vous déposez une plainte au criminel. La police regarde le fardeau de preuve, hors de tout doute raisonnable, avec le procureur de la couronne. Là, l'agent de l'IVAC... Et je l'ai dit tout à l'heure, c'est une loi à portée sociale, qui est interprétée largement. Maintenant, on ajoute le harcèlement criminel comme infraction admissible, alors c'est plus large de que ce qu'on avait auparavant. Puis je le réitère, la violence conjugale, c'est un concept, mais on demeure tout de même avec les infractions criminelles qui sont prévues au Code criminel.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Bien, parlons de ça. Si le ministre dit : Moi, je suis fermé, parce que c'est les infractions criminelles prévues au Code criminel, bien, moi, je dis : Faisons une exception pour la violence conjugale. Parce que là, on se rattache à un code qui est figé, c'est correct, moi, je ne suis pas superconfortable avec ça, là, j'aimerais ça qu'on ait toute notre autonomie et notre marge de manoeuvre pour décider ce que nous, on veut indemniser ou non. Bon, le ministre a fait le choix, il se rattache à la liste du Code criminel, donc on part de là. Bien, pourquoi, justement, on n'est pas capables, pour la violence conjugale, d'aller plus loin, puis de dire : «Sauf dans les cas de violence conjugale ou», puis là on donne ouverture avec ce que nous, on envisage, qui est de nature criminelle?

Avant, le Québec avait sa liste. Je ne vois pas pourquoi on ne peut pas avoir une approche hybride pour un cas précis comme celui-là, où, clairement, le Code criminel n'est juste pas à la hauteur de ce qui est requis pour les victimes, là. Puis juste nous, comme société, pour protéger les femmes et les hommes aussi, qui peuvent être victimes de ce type de violence là, c'est un signal fort qu'on enverrait, que le Québec prend un leadership sur la question, et qu'au moins, si ces personnes-là ne sont pas reconnues dans le système judiciaire formel, qu'aux yeux de l'IVAC, elles le sont, parce que nous, on les reconnaît comme de réelles personnes victimes de violence conjugale. Puis avec le travail qu'on a fait, il me semble que le Québec a tout en main pour dire : Oui, on va le franchir, ce pas-là, puis cette différence-là, on va la faire.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre. Ça va. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Ne serait-ce, M. le Président, que pour appuyer l'amendement de la collègue de Sherbrooke, je pense que c'est un élément, et, tel que rédigé, toute ouverture est faite afin de bonifier, modifier la rédaction de l'amendement. On comprend l'intention. Et moi, ça m'a parlé beaucoup, beaucoup, quand les deux collègues de Joliette et de Sherbrooke sont venues faire état de ce qu'elles ont entendu justement, à travers les travaux, les témoignages recueillis de la commission à laquelle elles ont participé, commission transpartisane, moi, ça me parle beaucoup. Puis il faut se nourrir de cela dans nos travaux comme législateur, sinon ça donne quoi, de faire des commissions?

Alors, je comprends l'argument du ministre, qui dit : On est ici pour indemniser les actes commis contre la personne, pas les biens. On le fait, le débat, puis je pense qu'il y aurait lieu... même, il y a eu une ouverture de limiter, ne serait-ce que pour certaines catégories, certains contextes, notamment de violence conjugale. Moi, je trouve que c'est tout à fait justifié. C'est pour ça qu'on va voter en faveur, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

Mme Labrie : ...

Le Président (M. Bachand) : Oui, pardon. Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : J'aimerais juste rappeler au ministre, tu sais, que son projet de loi, c'est un projet de loi pour favoriser le rétablissement des victimes, puis, quand on ne reconnaît pas que des atteintes à des biens sont faites dans un contexte de violence conjugale et peuvent avoir un impact sur les victimes, on rend beaucoup plus difficile le rétablissement de ces personnes-là, qui sont quand même des victimes de violence qui n'ont pas choisi d'être là-dedans, qui, en général, ne demandent qu'à s'en sortir puis à être outillées pour ça. Ça fait que j'aimerais amener le ministre à envisager le potentiel de rétablissement que ça offrirait aux personnes qui sont dans une situation comme celle-là, qui, des fois, elles-mêmes ont de la misère à voir que les atteintes envers leurs biens, c'est de la violence conjugale, parce que les stéréotypes puis les préjugés sur la violence conjugale sont forts, puis il y a encore, malheureusement, des victimes qui pensent que, si elles n'ont pas reçu un coup de poing dans la face, bien, ce n'était pas de la violence conjugale, alors que... alors, quand on sait, là, on sait maintenant, tout le monde ici, autour de la table, sait que la violence conjugale prend toutes sortes d'autres formes que ça, dont celle de la violence psychologique, dont celle de porter atteinte aux biens de la victime.

Je pense que, si on le reconnaît dans le projet de loi puis qu'on l'inclut, on va envoyer le message aux victimes qu'il va y avoir de l'aide pour elles si elles veulent s'en sortir, des victimes qui, en ce moment, n'ont peut-être pas de la violence physique envers elles, mais qui sont quand même dans un contexte de violence conjugale. Puis ça, le ministre sait très bien qu'il y a énormément de personnes dans cette situation-là, mais les... Donc, oui, il y a un potentiel que, si on l'inclut, ça amène plusieurs personnes à pouvoir bénéficier du régime. Mais, en même temps, le plus tôt elles se sortent de cette situation de violence conjugale là, le moins pire seront les conséquences, et, au final, comme société, c'est sûr que les coûts vont être moindres de leur donner les moyens de s'en sortir avant, justement, que la violence prenne d'autres formes, avant que cette personne-là se retrouve avec un traumatisme crânien qui va l'empêcher de travailler le reste de sa vie, par exemple. Donc, je pense qu'il y a une nécessité de s'ouvrir à ça puis de le reconnaître.

C'est mon dernier plaidoyer, là. Je trouve ça vraiment dommage, comme ma collègue de Joliette, qu'on soit à la remorque du fédéral là-dessus. La position en ce moment du gouvernement, tu sais, c'est d'attendre que le fédéral se réveille pour considérer la violence psychologique comme une infraction criminelle. C'est franchement dommage, parce qu'on a été précurseurs ici sur beaucoup de choses, on est capables de l'être là-dessus aussi, puis je trouve ça dommage d'avoir un gouvernement qui décide de laisser notre... de laisser ça entre les mains du fédéral, finalement, puis d'arrêter d'essayer d'être précurseurs nous-mêmes dans ces causes-là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, je ne suis pas du tout d'accord, M. le Président. La démonstration, c'est qu'on a un projet de loi qui actualise grandement l'IVAC. Mais d'ailleurs, pour amener des précisions, exemple en matière de harcèlement, M. le Président, criminel, en matière de menaces, on prend l'aspect psychologique en compte dans l'infraction criminelle.

Écoutez, on est des précurseurs. On a l'IVAC; dans les autres provinces, ils n'ont pas l'équivalent. Le critère de rattachement, c'est les infractions criminelles. C'est des bons points qui sont soulevés par les oppositions, M. le Président, mais il faut évoluer aussi en fonction des paramètres du cadre législatif que nous avons. Et, dans le cadre de la pièce législative que nous avons, le facteur de rattachement, c'est les infractions criminelles. Donc, je vais voter contre, M. le Président. J'ai entendu les arguments, mais c'est cela.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : C'est vraiment un point qui me tient à coeur, je pense, qui nous tient à coeur. Donc, je veux quand même essayer... Je sais que le ministre peut avoir une écoute pour ce type de crime là. Donc, je veux lui dire qu'on est au coeur du travail qu'on a fait avec le comité d'experts, c'est-à-dire d'envoyer le message et de comprendre que le système, il n'est pas adapté à la réalité de la violence conjugale et de la violence sexuelle. On est en plein dedans, là. Quand le ministre nous dit : Je comprends, on est dans un cadre puis il faut marcher dans notre cadre, bien, justement, le cadre, il n'est pas adapté aux personnes qui sont victimes de violence conjugale et de violence sexuelle. Puis là on en a une, opportunité de faire un petit geste. On n'est pas en train de créer le tribunal spécialisé, là. Imaginez, si on n'est pas capables de faire ça, qu'est-ce qu'on va faire avec toutes les autres recommandations qui sont encore plus costaudes?

Donc, moi, aujourd'hui, je me dis, le ministre, il a une occasion extraordinaire de poser un premier geste et de dire : Oui, au Québec, là, on va en prendre acte que ces crimes-là, ce sont des crimes complètement différents et le système n'a pas été pensé pour ces crimes-là. Et on commence sur ce sur quoi on a du contrôle, en l'occurrence l'IVAC. Ça fait que je ne m'explique pas qu'on ne soit pas ouverts à ça parce que c'est précisément au coeur de ce qu'on demande dans le comité d'experts, c'est de dire : O.K., inversons les choses pour faire en sorte de s'adapter un peu à la réalité des victimes de violence conjugale et sexuelle. Puis arrêtons de leur dire : Oui, mais le système n'est pas fait pour ça, il n'est pas pensé pour ça, puis c'est plate, mais ça ne rente pas dans les cases. Bien là, justement, on en a une, occasion.

Puis est-ce que quelqu'un pense vraiment qu'une victime de violence conjugale à qui on a brisé la fenêtre, cassé les pneus, fait du dommage sur sa voiture, des graffitis, tout ça, va aller là pour le plaisir, là, alors qu'on peut éviter, comme ma collègue de Joliette le disait, des torts plus graves? Puis c'est ça aussi, notre responsabilité. Je sais qu'on est, là, dans l'IVAC, mais, s'il y a tout de suite une reconnaissance par l'État que c'est un problème puis qu'on l'écrit noir sur blanc dans une loi, bien, on aide à l'évolution des choses, puis on aide à réprimer, puis à faire reculer ce fléau-là de la violence conjugale. Donc, je m'explique mal cette non-ouverture-là.

Tu sais, je comprends, là, que le ministre, il a un principe de base, c'est les infractions contre la personne. C'est une avancée dans la loi, on réfère à l'ensemble, donc, des infractions contre la personne, je comprends tout ça, puis on n'est pas en train de lui dire : Aïe! là, on l'ouvre, là, on change complètement ton principe. On dit : Dans le contexte particulier... puis je pense que ma collègue est ouverte à dire : S'il faut spécifier l'amendement «violence conjugale», on va le faire. Mais je réfère, là, au mémoire aussi des juristes progressistes qui soulevaient ce point-là, comme le comité vous l'a dit, Julie Desrosiers, du comité d'experts, est venue vous le dire. Ils disent que ça ne se limite pas, la violence conjugale, aux infractions criminelles, il n'existe pas spécifiquement d'infraction de violence conjugale dans le Code criminel. Tu sais, les mots, là, cette infraction-là, ça n'existe pas. Et donc c'est très limitatif, et c'est ce que les femmes, les victimes sont venues nous dire. Et donc il faut s'en remettre à divers types d'infractions, comme les voies de fait, la menace, le harcèlement. Ils sont venus nous dire à quel point c'est limité.

Donc là, je veux bien que le ministre nous dise : Oui, mais nous, on va bien l'interpréter, puis tout ça, mais le fait est qu'il refuse l'amendement où on dit : Des gestes qui sont clairement faits dans une volonté d'exercer une pression ou une intimidation, une atteinte dans un contexte de violence, qui sont de la violence. C'est de la violence, briser l'auto de ta conjointe ou de crever ses pneus, puis ça atteint, ce n'est pas pour faire du mal à l'auto, là, c'est pour faire du mal à la personne.

Ça fait qu'il me semble que tout est là, puis ils proposent une avenue qui être très intéressante à la page 15 de leur mémoire, la recommandation 4, de dire qu'ils créent un autre paragraphe pour la définition d'infraction criminelle : «...s'entend aussi d'un acte à caractère sexuel non consensuel ou de tout événement s'inscrivant dans un contexte de violence conjugale, si cet acte ou cet événement constitue une atteinte violente à l'intégrité de la victime», qui peut être psychologique ou physique.

Ça fait que les pistes sont là, les possibilités d'avancées sont là. Donc, moi, je suis prête à ce qu'on prenne une pause, que le ministre y réfléchisse. Ça ferait une énorme différence, puis ça montrerait aussi que le gouvernement est ouvert à franchir les premiers pas qui vont nous amener à la mini-révolution que l'on veut amener pour les victimes de violence conjugale et de violence sexuelle.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre? Pas d'autres interventions? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement de la députée de Sherbrooke? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. On retourne maintenant à l'article 13 tel qu'amendé. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. M. le Président, j'aurais un amendement à «infraction criminelle». Il est en voie, il est dans la sphère technologique, là. On pourrait peut-être suspendre une minute.

Le Président (M. Bachand) : On suspend...

M. Jolin-Barrette : ...l'amendement

Le Président (M. Bachand) : C'est parce que je dois en prendre connaissance pour la recevabilité puis donner une copie au secrétariat. Merci.

On va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 40)

(Reprise à 17 h 45)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. M. le Président, je présente l'amendement suivant, article 13 : Dans le troisième alinéa de l'article 13 :

1° retirer le mot «; ainsi» après les mots «ou psychique d'une personne»;

2° ajouter, après les mots «ou psychique d'une personne», les mots «. À moins d'indication contraire,».

Autrement dit, la dernière phrase se lirait... la dernière portion, qui n'est pas une phrase mais qui devient une phrase, après «l'intégrité physique ou psychique d'une personne», ce serait un point, ça se lirait : «À moins d'indication contraire, n'est pas visée une infraction criminelle perpétrée contre un bien.»

Donc, on viendrait... puis je pense que tout a été dit de mon côté là-dessus, permettre, rendre possible, rendre «pas illégale» en vertu de la rédaction de la loi, une ouverture réglementaire ou autre d'interprétation au cas d'espèce dont on vient de parler dans le contexte de l'amendement de la collègue de Sherbrooke.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député.

M. Tanguay : Puis, si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : Oui, allez-y.

M. Tanguay : J'aurais pu inclure dans l'amendement le fait de retirer, mais je pense que le ministre s'en va là-dessus, retirer au début, après «infraction criminelle», «à moins d'indication contraire», où là on aurait toute légitimité de le retirer à ce moment-là. Mais ça... J'ai préféré ne pas tout mettre en même temps, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez, M. le Président, ce n'est pas l'intention de vouloir rendre les infractions contre les biens admissibles, alors je ne serai pas en faveur de l'amendement.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Mais, M. le Président... Puis le ministre a dit : Ça fait 40 ans qu'on attend la réforme... ça fait 30 ans qu'on attend la réforme, des réformes, des modifications, il va y avoir peut-être plusieurs années avant que ce soit bonifié. La possibilité n'est pas une obligation. Puis je comprends la philosophie du ministre de dire qu'on ne veut pas couvrir les biens, mais «à moins d'indication contraire», ça pourrait être réglementaire ou autre, ça lui donnerait l'opportunité de le faire. Pourquoi se priver socialement de le faire?

M. Jolin-Barrette : Si d'aventure un gouvernement souhaiterait le faire, bien, il déposera un projet de loi puis il fera la modification, mais ce n'est pas l'intention de couvrir les infractions contre les biens. On vient élargir d'une façon très, très, très importante les infractions contre la personne. On parle d'une liste restrictive à toutes les infractions criminelles contre la personne. La liste, elle était très, très, très restrictive. On l'élargit à toutes les infractions contre la personne. Alors, c'est déjà une avancée majeure. Dans le régime que nous avons, notamment pour assurer la pérennité du régime, on vise les infractions contre la personne et non pas contre les biens.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Question de compréhension : Est-ce que la loi sur l'aide et/ou la loi sur l'indemnisation actuelle exclut textuellement les infractions criminelles perpétrées contre un bien?

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, c'est l'annexe. Donc, les crimes admissibles sont ceux prévus à l'annexe, puis, dans l'annexe, c'est des crimes contre la personne.

M. Tanguay : Puis, dans le Code criminel, il y a des crimes contre les biens?

M. Jolin-Barrette : Méfaits.

M. Tanguay : O.K., donc, dans le Code criminel. O.K., on va suivre la logique. L'annexe des 42 infractions, qu'on élimine, n'incluait pas des infractions criminelles contre les biens, mais l'annexe aurait pu être amendée et aurait pu, sur le corpus législatif actuel, permettre d'indemniser les infractions contre les biens. Là, on vient de fermer la porte à double tour. Là, je ne peux pas avoir plus fait mon point que ça, M. le Président.

M. Jolin-Barrette : C'est les infractions contre la personne. La démonstration est à l'effet que c'étaient des infractions contre la personne qui étaient couvertes sur la liste de l'annexe. Et d'ailleurs c'est vrai que la liste n'a pas été modifiée en 2005 ni en 2014.

M. Tanguay : Puis l'annexe aurait pu être modifiée... Aurait-elle pu être modifiée réglementairement ou ça prenait un projet de loi?

M. Jolin-Barrette : Non, c'est dans la loi, je crois, hein? C'est dans la loi.

M. Tanguay : Ça prenait une loi, une modification législative. Là, M. le Président, ce qui arrive, c'est qu'on vient, législativement aussi, fermer à double tour cette possibilité-là, alors qu'on pourrait la laisser ouverte, cette possibilité-là.

Puis je comprends l'intention actuelle du législateur, mais le ministre confirme que ça va prendre... ça prendrait une loi pour permettre d'indemniser plus de victimes, le cas échéant, si on voulait faire écho à ça, dans un contexte bien particulier, puis, sauf indication contraire, pourrait aussi être des indications très, très limitées, très ségréguées, là, ça pourrait être dans un contexte de violence conjugale, de harcèlement, et ainsi de suite, de... Puis le harcèlement, en passant, a une certaine répétitivité. Si M. arrive une fois, brise les quatre pneus, puis défonce la vitre de l'auto, puis s'en va, effectivement, ça va être difficile d'être harcèlement s'il n'y a pas de répétition là-dessus.

M. Jolin-Barrette : Non, non, ça peut être une fois.

M. Tanguay : Mais juste, juste, M. le Président...

M. Jolin-Barrette : M. le Président, ça peut être une fois, harcèlement.

• (17 h 50) •

M. Tanguay : Ça peut être une fois, mais on a entendu le témoignage... les témoignages dont fait écho le témoignage de la collègue de Joliette, qui disait que, dans les faits, ça ne se passe pas de même, là. Je veux dire, dans les faits, il n'y a pas de suite qui est donnée à cela. Quand c'est une fois, ce n'est pas du harcèlement. On vit dans la vraie vie.

Alors, voilà. Moi, c'est l'amendement que je présentais, qu'on présentait. Puis je pense que ça aurait été de bon aloi de ne pas fermer à double tour, de laisser ça ouvert...

M. Jolin-Barrette : M. le Président...

M. Tanguay : ...puis de permettre aux gouvernements qui suivront de faire en sorte de l'ouvrir, peut-être, dans deux ans, trois ans, qui sait?

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Un point là-dessus, là, soyons honnêtes, le harcèlement, ce n'était pas un crime qui était couvert sur la liste. Maintenant, il est sur la liste. Mais le député de LaFontaine dit : Avec les témoignages qu'on a entendus, ils se sont fait dire non. Oui, mais la demande ne pouvait pas être admissible en matière de harcèlement...

M. Tanguay : Sur le régime actuel.

M. Jolin-Barrette : Sur le régime actuel. Maintenant, il le devient.

M. Tanguay : Mais là le ministre me dit... il me donne un jouet, mais il ne me donne pas les batteries. Il me dit : Je vous donne une partie... Non, mais je ne veux pas faire de farce là-dessus. Il me dit : Je vous donne une partie, contentez-vous-en, puis le reste, bien, passez-vous-en.

Je veux dire, oui, je suis d'accord avec lui, on abolit la liste, il y en avait 42. On l'abolit, c'est tout le Code criminel. Mais, s'il y a un méfait sur les biens, puis clairement, là, monsieur, là, il veut faire peur à madame puis il veut réellement, là, lui jouer dans la tête, puis c'est dégueulasse, ce qu'il fait, il le fait une fois, bien là, on ne se donne pas les moyens législativement de couvrir madame. C'est juste ça que je veux dire. Alors, oui, il peut tout me dire ce qu'il fait, puis on le salue, puis il y a des éléments, il y a des pas en avant, mais on aimerait ça qu'il fasse d'autres pas en avant aussi, là.

M. Jolin-Barrette : Non, parce que harcèlement criminel, ça peut être une fois, le député de LaFontaine doit le dire, ça peut être une fois. Puis ça doit être analysé concrètement, en fonction de la situation.

M. Tanguay : Mais pas contre les biens.

M. Jolin-Barrette : Pas contre les biens.

M. Tanguay : C'est ça, mon point.

M. Jolin-Barrette : Mais ça peut faire partie de l'infraction de harcèlement criminel, ça peut faire partie de la composante de harcèlement criminel, comme ça peut faire partie de la composante de menaces, qui sont couvertes.

M. Tanguay : Ça peut. Dans les cas, on a des témoignages qui disent : Ça ne l'est pas. En le disant...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais les témoignages sont prémodifications législatives, entre autres, aussi. N'oubliez pas de le dire aussi, M. le Président, pour le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Mais, M. le Président, en le disant, on vient galvaniser tout ça, on n'est plus dans l'interprétation, en le disant.

M. Jolin-Barrette : Ça couvre les infractions contre la personne.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Oui. Je veux juste amener une précision, là. C'est évident que, si ce n'était pas prévu à l'IVAC, ce n'est pas des témoignages qui nous sont nécessairement rapportés en lien avec la question de harcèlement criminel. Ça nous est rapporté notamment dans un contexte criminel où les policiers eux-mêmes disent : Ce n'est pas une infraction criminelle, madame, ce que vous me rapportez. Ce n'est pas gentil, ce qu'il a fait, ce n'est pas une infraction criminelle, ça fait que vous ne pouvez pas porter plainte.

Ça fait que, là, je veux juste savoir : Est-ce que le ministre nous dit que lui... Parce que sa définition, c'est infraction criminelle. Ça fait que lui, dans le fond, il nous dit qu'on n'aura pas la même interprétation à l'IVAC que ce que les policiers ont comme interprétation et qui fait en sorte qu'il y a des représentations en ce moment auprès du fédéral pour dire que c'est beaucoup trop limitatif, les infractions qui, de près ou de loin... on peut utiliser dans un contexte de violence conjugale et qu'on est en train de demander un élargissement du Code criminel. Donc, ça doit être parce qu'il y a un problème. Là, le ministre nous dit : On va avoir les infractions criminelles, donc ça va être parfait, ça va être couvert. Mais, bizarrement, quand on vient détailler ce qui pourrait en faire partie, c'est-à-dire un acte violent lié à un bien, mais pour atteindre l'intégrité et faire de la violence psychologique à une personne, là, il dit non.

Ça fait que, moi, c'est ça que je veux lui expliquer, là. On comprend tous que ce n'était pas dans la liste, mais, dans les faits, les policiers... plus souvent qu'autrement, c'est ce qui nous est rapporté, là, et, fréquemment, vont dire : Non, désolé, c'est vraiment dommage, mais ça ne se qualifie pas. Ça fait que je ne comprends pas pourquoi on ne se dit pas : Bien, nous, on va le clarifier, tout ça. Puis, si le ministre, pour lui, une fois des pneus crevés, ça peut se qualifier, bien, pourquoi on ne l'écrit pas? C'est ça que ma collègue de Joliette suggérait.

Le Président (M. Bachand) : Députée de Sherbrooke.

Mme Hivon : De... je me dédouble. Je parle de moi à la troisième personne, ça ne va pas bien, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : La députée de Joliette comprend très bien, et le sait, et j'apprécierais qu'elle le dise aussi, à l'effet que ce n'est pas le même fardeau relativement en matière criminelle lorsqu'on dépose une accusation, relativement à du harcèlement criminel versus l'appréciation qui est faite par l'IVAC, ce n'est pas le même fardeau. C'est hors de tout doute raisonnable en matière criminelle et pénale devant la cour, alors que ça sera la prépondérance au niveau de l'IVAC.

Et c'est la même expérience qui se fait pour tous les crimes qui étaient déjà couverts par l'IVAC, où, lorsqu'un policier, un procureur analysait le dossier, il disait : Malgré le fait que vous ayez dénoncé, malgré le fait qu'on vous croit que vous avez subi une infraction criminelle, on ne peut pas porter d'accusation parce que la preuve ne sous-tend pas qu'on va pouvoir obtenir une condamnation hors de tout doute raisonnable, par contre, l'IVAC vous indemnisera parce que c'est un fardeau de 50 plus un. C'est la même chose. Et je pense que la députée de Joliette devrait le dire, ça. Mais je pense qu'on a fait le tour du débat, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Le fardeau n'est pas le même, mais là on ne parle même pas d'une question de fardeau pour se rendre à déposer des accusations, ce sont des policiers qui n'acceptent même pas la plainte parce qu'ils disent : On n'est même pas devant l'actus reus. Vous me suivez, là, on n'est même pas en train de rechercher l'intention, on dit : Non, ça ne se qualifie pas. Donc, là, je le sais que le ministre peut dire : Moi, j'ai raison puis c'est possible. Puis nous, on est... des dizaines de témoignages, là, parce qu'on a fait une enquête avec des dizaines de témoignages de victimes. Ce serait bien, d'ailleurs, de faire ça dans le cadre de ce projet de loi là, de vraiment les entendre, les victimes, pour qu'elles nous racontent comment ça se passe quand elles vont à l'IVAC. Fin de ma parenthèse.

Et donc, là, on a des témoignages très concrets, de policiers aussi, parce qu'il y avait des policiers sur le comité, qui disent : C'est vrai que, dans un contexte de violence conjugale, c'est très difficile de faire la preuve x, y, z, et d'être reconnu même comme étant quelque chose qui peut donner ouverture à une infraction criminelle. Puis là le ministre nous dit : C'est vraiment dommage, mais moi, je vous dis que ça va pouvoir se pouvoir, même si, en termes d'infraction criminelle, les policiers estiment que ce n'en est pas une.

Ça fait que je suis tout à fait d'accord que le fardeau n'est pas le même, mais on n'est même pas à ça, on n'est pas au fardeau pour démontrer hors de tout doute raisonnable, on est juste à l'admission que c'est un motif de plainte criminelle parce que c'est une infraction criminelle. Et, en soi, c'est refusé.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Moi, je comprends très bien que le ministre, là, il est... bien, je comprends, je ne suis pas d'accord, là, mais je comprends qu'il est fermé à ce qu'on reconnaisse une infraction perpétrée contre un bien. En fait, là, notre objectif, ce n'est même pas tant qu'on reconnaisse des infractions perpétrées contre un bien, c'est qu'on reconnaisse la violence conjugale de type psychologique.

Quand on propose des amendements pour inclure la notion de l'infraction contre un bien, c'est juste un moyen pour que, dans le fond, des victimes de violence conjugale de type psychologique puissent avoir accès. Le noeud du problème, c'est que, dans le Code criminel, la violence psychologique... conjugale, elle n'est pas reconnue comme une infraction. Si elle l'était, on ne se poserait même pas la question pour les biens, là, on n'essaierait pas de faire cet ajout-là.

Donc, c'est là où j'aimerais ça que le ministre nous rejoigne, c'est qu'en dépit du manque de progressisme jusqu'à maintenant du gouvernement fédéral pour reconnaître la violence conjugale de type psychologique nous, le Québec, on le sait qu'elle existe. Ça fait partie de la définition qu'on fait de la violence conjugale ici, là. Comment ça se fait qu'on n'est pas capables, quand on met à jour l'IVAC, de l'inclure, alors que ça fait partie de la définition qu'on fait ici de la violence conjugale, que ça peut être d'ordre psychologique?

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions?

M. Jolin-Barrette : J'ai déjà répondu, M. le Président. L'objectif de la loi est de couvrir les infractions criminelles.

Mme Labrie : Bien, c'est une... C'est juste que le ministre, il nous met à la remorque du gouvernement fédéral. C'est vraiment désolant de voir ça, c'est vraiment désolant de voir ça. J'aimerais voir un Québec qui ne se met pas à la remorque du gouvernement fédéral pour définir c'est quoi, la violence conjugale.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Juste un dernier point là-dessus, là, M. le Président. Ce n'est pas une question d'être à la remorque. C'est un régime qui s'applique en fonction des crimes qui sont commis au Québec. Le partage des compétences fait en sorte que ça relève du Parlement du Canada, les infractions criminelles. La construction de la loi vise à indemniser les victimes d'infractions criminelles. La violence conjugale, il y a plusieurs infractions criminelles qui constituent de la violence conjugale. Je suis d'accord avec vous que la violence psychologique pure ne constitue pas une infraction criminelle à ce jour. Par contre, il y a des éléments de violence psychologique qui se retrouvent comme étant générateurs de l'infraction, notamment en matière de harcèlement criminel, en matière de menace, qu'il y a un aspect psychologique dans cela.

Donc, l'objectif du projet de loi est le suivant : Est-ce que ça empêche le législateur québécois, dans un autre volet, de venir définir ce que constitue la violence psychologique dans un contexte conjugal? Le législateur québécois pourrait le faire, mais, pour ce projet de loi ci, le critère de rattachement, ce sont les infractions criminelles, donc les crimes qui sont prévus au Code criminel.

• (18 heures) •

Mme Labrie : Sauf que c'est une barrière que le ministre se met lui-même. Parce que je comprends, là, qu'on ne peut pas légiférer ici sur le Code criminel, là, ça, je comprends ça, mais il n'y a absolument rien qui nous empêche d'indemniser les crimes qu'on voudra ici, là. Ce régime-là, c'est le régime qu'on crée ici. Puis c'est une barrière que le ministre a décidé de se mettre, de limiter le régime à ce qui est déjà dans le Code criminel. Mais ça, c'est sa barrière à lui, là, ce n'est pas notre barrière à nous ici. Ce n'est pas le fédéral qui nous empêche d'indemniser quelque chose qui n'est pas dans son Code criminel.

Ça fait que je voudrais juste que le ministre reconnaisse que c'est un choix que lui-même fait de ne pas être plus créatif que ça puis d'être à la remorque de ce que le fédéral fait. Il s'impose lui-même une limite que le fédéral ne nous impose pas, là.

M. Jolin-Barrette : Dans le véhicule législatif que nous avons, M. le Président, c'est les infractions criminelles.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Bien, ça nous ramène précisément à ce que plusieurs ont soulevé : Est-ce que c'est vraiment la bonne chose à faire de simplement s'en tenir, dans une loi québécoise, à se référer à une autre loi, donc le Code criminel, et donc d'être assujetti à l'évolution ou à la non-évolution de cet outil législatif? Puis moi, quand je vois les débats au niveau fédéral, je trouve qu'ils avancent pas mal moins vite qu'on est capables d'avancer au Québec. Donc, ça ne me rassure pas. Puis je n'ai pas envie de mettre la suite de l'histoire et des avancées pour les victimes de violence conjugale dans les mains du fédéral et des débats fédéraux sur le Code criminel.

Puis honnêtement ce n'était pas ça, la logique avant, ce n'était pas ça, la logique, dans la loi avant. On faisait notre liste des infractions qu'on estimait qui devaient donner ouverture au régime d'indemnisation. Il n'y a rien qui nous empêche. Il n'y a personne qui a dit : Oh mon Dieu! Quel accroc au partage des compétences! Bien non, c'est notre régime québécois d'aide aux victimes d'actes criminels sur notre base de compétences à nous. Là, c'est le ministre qui décide, dans un geste... Franchement, pour un gouvernement qui s'autoproclame nationaliste, assez surprenant de ne pas avoir une ouverture pour dire : On va bonifier, puis on ne va pas juste se référer... puis de dire : On va élargir au maximum pour pouvoir aller dans tout notre champ de compétence, faire une différence, sans dire : Ah! on est pris, là, dans ce carcan-là des infractions criminelles du Code criminel, parce que la violence conjugale, le Code criminel n'a pas avancé là-dessus. Ça fait que c'est sûr que c'est surprenant de voir ça. On n'est pas en train de lui demander d'absolument tout revoir, on est en train d'amener ça dans un contexte très précis de violence conjugale, où le Québec a une chance extraordinaire de faire une différence.

Donc, je pense qu'il y a beaucoup, beaucoup d'arguments qui sont soumis au ministre, qui devraient l'amener à considérer l'avancée significative qu'il pourrait faire, plutôt que de dire : Bien, moi, c'est le Code criminel. Ce n'était pas ça avant, mais là j'ai décidé que c'était ça, puis je n'en démords pas, puis je n'en sortirai pas. Mais le...

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée, allez-y, oui.

Mme Hivon : Oui, mais il y avait une liste, il y avait une liste que le Québec avait déterminée. Là, le Québec dit : C'est le Code criminel en ce qui concerne les infractions contre la personne. Puis je l'ai dit tantôt, là... Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'avancée à dire qu'on va ouvrir à toutes les infractions du Code criminel contre la personne, mais ce que je dis, c'est qu'il y a un petit bout de chemin supplémentaire qu'on peut faire, qu'on a tout à fait le droit de faire, et que le ministre ne fait pas. Je veux dire, son régime d'indemnisation, il l'appelle, «d'aide aux victimes d'actes criminels», il pourrait aussi dire que, dans le coeur de ça, il y a aussi des éléments que nous, on considère comme de nature criminelle, qu'on considère devant donner lieu à de l'aide et à de l'aide financière, de l'aide psychologique, puis dire : Ce n'est pas juste la liste du Code criminel qui va faire foi de tout. C'est une option qu'on a.

Puis quand on est législateur, puis qu'on veut faire des changements en profondeur, je le sais que le ministre veut en faire, des changements en profondeur, sur différents sujets, bien, il faut aussi saisir les occasions qu'on a pour les faire, puis aller au bout de nos compétences.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Je voulais intervenir parce que je suis porte-parole en matière de protection de la jeunesse. Quand il y a un signalement, disons... Ce scénario-là, on le voit souvent, c'est des régimes de terreur domestique. Et souvent, justement, c'est l'homme, la plupart du temps, et qui peut passer par détruire tout ce qu'il y a autour de lui, faire peur. Et tout le monde est terrorisé, les enfants le sont. Ils entendent le bruit, ils entendent les cris. Et les enfants sont retirés de ces milieux, où le père perd... Les parents ou l'homme violent peut risquer de perdre ses droits de visite. Donc, ce n'est pas une infraction contre un bien. Ce que c'est, c'est un régime de terreur où on utilise les meubles autour de soi pour montrer sa force et faire peur à sa femme, mais la femme, dans son milieu, chez elle, son domicile où les enfants sont aussi. Il y a beaucoup de ça actuellement... bien, actuellement, il y en a toujours eu.

Et donc, dans notre système de protection de la jeunesse, les enfants sont retirés de ces milieux-là parce que c'est malsain. Et évidemment le ministre, même le ministre souhaite modifier la loi pour faire en sorte que ce père n'ait plus de droit de visite. Et ce n'est pas nécessairement toujours que le parent, le père, ait violenté l'enfant, mais il est violent, et ça traumatise les enfants. Ils ont deux, trois, quatre, cinq, six ans, ils vivent ça.

Donc, je me demande si la situation qu'on décrit, c'est vraiment plus atteinte à l'intégrité physique et psychique. Ce n'est pas vraiment une infraction contre un bien, c'est autre chose qu'une infraction contre un bien. On dirait que ça, c'est pas mal singulier, un bien, c'est autre chose, mais le scénario... Moi, je n'étais pas... je n'ai pas participé à ces consultations, mais je connais... beaucoup a été écrit là-dessus. Aux États-Unis, ils ont le même problème de faire reconnaître, dans les cours de justice, ce problème-là et une meilleure protection pour la femme et compensations.

Alors, je me demande si c'est cette notion de... Et je comprends le ministre lorsqu'il dit : Nous, on n'inclut pas les biens. Est-ce qu'il n'y a pas une autre façon de décrire cette situation où elle serait, cette situation, décrite par mes collègues... ne rentre pas dans le cadre d'une infraction contre un bien? Parce que ce n'est pas l'intention de l'homme violent, dans ce cas-là, de briser tout simplement un meuble. Ce qu'il vise à faire, c'est de terroriser la femme, dans son domicile, pour terroriser tout le monde, parce que c'est la mère, les enfants vivent avec la mère, il y a...

On entend beaucoup de femmes parler de ça. Moi, juste dans les fonctions que j'occupe maintenant... Et je me demande si on ne devrait prendre un peu de temps pour réfléchir tout en... que le bien, ce n'est pas défini. La situation qui est décrite par mes collègues ne rentre pas dans ce qu'on est en train de décrire ici.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention... Est-ce qu'il y a d'autres interventions, une dernière fois? Donc, nous allons procéder à la mise... Oui, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Non, non, ça va. Je vais avoir d'autres interventions.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? O.K. Désolé. Merci. Alors, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Merci. Donc, on retourne à l'article 13 tel qu'amendé. Interventions?

Mme Hivon : Oui. Moi, je vais avoir un autre amendement, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée, oui, allez-y. Est-ce qu'il est prêt?

Mme Hivon : Il est prêt. Il va vous être envoyé incessamment.

Le Président (M. Bachand) : Parfait, on va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 10 )

(Reprise à 18 h 13)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Madame... Oui, monsieur...

M. Tanguay : Me donnez-vous la parole? Oui.

Le Président (M. Bachand) : Oui, allez-y, M. le député.

M. Tanguay : Oui, c'est ça. J'ai eu l'accord de ma collègue de Joliette, qui a annoncé, puis c'est pour ça qu'on a suspendu, qu'il allait y avoir un amendement, puis qu'elle l'a préparé. J'ai demandé la permission, puis elle me permet de juste prendre quelques secondes. Puis je pense qu'on a des travaux qui vont relativement bien. Le ministre fait part de sa position, on fait part de notre position. J'ai regretté, M. le Président, qu'on ait passé au vote avant d'avoir demandé au ministre s'il n'avait réellement, absolument rien à ajouter sur le point de ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce. Je ne veux pas partir de chicane avec le ministre, mais, je pense, la collègue de Notre-Dame-de-Grâce apporte une contribution excessivement tangible et intéressante.

Et elle demandait au ministre... elle ne reprenait pas les arguments qui ont été faits par les autres collègues dans l'opposition, elle demandait au ministre : Il y aurait-tu une autre voie de passage qui tiendrait compte de cette réalité des hommes violents qui brisent et qui n'attaquent pas directement l'intégrité, mais qui créent un climat? Puis elle a posé la question. Puis j'aurais aimé, j'aurais souhaité, je me serais attendu que le ministre daigne lui répondre. Je ne veux pas partir de chicane avec le ministre, mais j'aimerais lui donner l'occasion peut-être de faire écho à cet argument nouveau là qu'a apporté notre collègue de Notre-Dame-de-Grâce, là.

Le Président (M. Bachand) : Si le ministre veut intervenir rapidement.

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, ça va me faire plaisir, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ont été dites, puis souvent, bien, les arguments qui sont plaidés d'un côté, c'est les mêmes arguments aussi. Et on peut aussi prendre les réponses que je donne aussi et faire en sorte de cheminer avec les réponses que je donne. Mais ce que j'ai dit, et je le réitère, les infractions criminelles contre la personne, elles sont toutes couvertes, incluant la violence subie pendant l'enfance, où est-ce qu'il n'y a plus de prescription non plus rattachée à ça. C'est une avancée significative. Les infractions contre les biens ne sont pas couvertes. Les cas de menace, de harcèlement criminel, désormais, ils sont couverts. C'est des centaines d'infractions, voire des milliers d'infractions qui sont dénoncés à la police annuellement et qui n'étaient pas admissibles au régime de l'IVAC, qu'on rend admissibles maintenant. Alors, le travail, il est fait, le régime, il va évoluer, et on va faire en sorte que, justement, les infractions de harcèlement et de menace sont couvertes... seront couvertes lors de l'adoption du projet de loi.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Écoutez, c'est parce qu'il y a un amendement qui a été annoncé. Rapidement, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Après ça, je donne... je m'en vais avec la députée de Joliette.

Mme Weil : Oui. Le ministre avait dit... je pense que j'ai compris qu'il a dit : Le harcèlement criminel est reconnu. Il se pourrait que les évaluateurs, donc qui vont évaluer dans le cadre de l'IVAC, pourraient dire : Oui, il y a des biens qui ont été détruits, mais ce n'est pas ça qu'on regarde. Ce qu'on regarde, c'est l'atmosphère, un peu, de harcèlement que la famille, que la victime a vécue, etc., et indemniser dans ce cas-là.

M. Jolin-Barrette : On regarde les critères du harcèlement criminel, à savoir est-ce que ça remplit les conditions du harcèlement criminel et ça fait partie de la composante du harcèlement criminel.

Mme Weil : Mais sans le niveau de preuve qu'il faudrait avoir pour la police ou pour les tribunaux.

M. Jolin-Barrette : Comme on l'a dit précédemment, ce n'est pas le même niveau, c'est un niveau qui est la prépondérance, donc 50 plus un, qui est analysé concrètement avec la personne. Mais vous comprendrez qu'on ne peut pas faire l'analyse ici de cas fictifs, c'est vraiment lorsque la demande sera présentée à la personne à l'IVAC, à l'agent d'indemnisation qui va faire l'analyse dossier par dossier, de façon sérieuse. Mais le critère de rattachement, c'est l'infraction criminelle, pour laquelle il n'y a plus la liste. C'est tous les crimes contre la personne qui sont au Code criminel.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Oui. Pour mon amendement, donc, ce ne sera pas long. Je pensais que le collègue voulait revenir sur... Donc, l'amendement se lit comme suit : Dans le troisième... Un instant. Donc : Ajouter, dans le troisième alinéa de l'article 13, après les mots «contre un bien», la phrase suivante :

«. S'entend aussi de tout événement s'inscrivant dans un contexte de violence conjugale, si cet événement constitue une atteinte violente à l'intégrité de la victime.»

Donc, M. le Président, là, on change un petit peu de manière d'amener l'enjeu, qui est toujours le même, qui est de s'assurer qu'une personne qui va vivre une atteinte de nature violente, qu'elle porte atteinte à son intégrité physique ou psychique, que cette atteinte-là soit directement contre elle ou sur un bien dans le but d'atteindre son intégrité à elle, physique ou psychique, va être compris. Et donc on contourne les écueils qui nous ont été nommés par de très nombreuses personnes victimes de violence conjugale, à savoir que les infractions actuelles, tel que prévu, trop souvent, ne reconnaissent pas la violence conjugale qui a un aspect de violence psychologique, et dont plusieurs sont venus nous parler, et dont, notamment, Julie Desrosiers, du comité d'experts et l'Association des juristes progressistes.

Donc, je me suis inspirée de leurs recommandations. Je l'ai vraiment mis, par ailleurs, dans un contexte de violence conjugale parce que c'est ce qui apparaît le plus urgent et le plus spécifique dans... comme type de crime où il y a des enjeux en ce moment. Et ça permet donc au Québec de dire que nous, on va franchir un pas de plus, on ne sera pas en attente du bon vouloir du gouvernement fédéral de pouvoir agir davantage sur la violence conjugale et la violence psychologique, et que, minimalement, dans ce qu'on contrôle, bien, qu'on aimerait, du moins, pour ma part, contrôler le Code criminel, parce que je pense que tout ça pourrait être beaucoup plus cohérent, au moins, dans ce qu'on contrôle, on vient écrire noir sur blanc que, pour nous, ça constitue de la violence, et donc ça donne ouverture au régime de l'IVAC.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions?

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, je ne pourrai pas donner suite, parce que, comme je le disais, le régime qui est couvert, c'est le régime des infractions criminelles. Je comprends ce que la députée de Joliette souhaite faire et je le salue. Cela étant, la violence conjugale s'entend de plusieurs infractions criminelles qui sont couvertes et qui sont admissibles, M. le Président, et notamment le harcèlement, et notamment les menaces qui vont être admissibles, désormais, avec la réforme que nous proposons.

Mme Hivon : Donc, je veux juste être claire, M. le Président, est-ce que je dois comprendre que le ministre, dans le fond, il remet en question les témoignages de dizaines et de dizaines de victimes de violence conjugale...

M. Jolin-Barrette : ...

Mme Hivon : Non, mais je veux comprendre.

• (18 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Aïe, aïe! pour vrai?

Mme Hivon : Oui.

M. Jolin-Barrette : Ah oui?

Mme Hivon : Je veux comprendre si le ministre donne du poids à des travaux de 18 mois où les victimes sont venues nous dire que ce n'est pas reconnu quand elles font une plainte, et que ce n'est pas vu comme du harcèlement. Aujourd'hui, il nous dit oui, puis il nous dit : Moi, je n'irai pas plus loin, parce que, de toute façon, j'inclus le harcèlement, et il y a les menaces, puis tout ça. Mais, je veux dire, c'est une question, vraiment, qui se pose, parce que, moi, cette question-là, je vais l'avoir des victimes, parce qu'on a travaillé avec elles, puis la question de la violence psychologique, elle est fondamentale pour elle. Ça fait que moi, je veux vraiment savoir qu'est-ce que le ministre, aujourd'hui, veut leur dire quand il refuse de dire : Nous, au Québec, on va le faire, le pas? On fait plein de pas, puis tout le monde le reconnaît, mais pourquoi, ce pas-là, on ne le franchit pas? Pourquoi on ne peut pas le franchir, nous autres, dans notre loi sur l'IVAC?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, moi, je trouve ça ignoble, les propos que la députée de Joliette tient.

Le Président (M. Bachand) : Juste faire attention.

Mme Hivon : Oui, un instant, là.

M. Jolin-Barrette : Vous savez pourquoi? Parce qu'elle me prête des intentions, M. le Président.

Mme Hivon : Je n'ai prêté...

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, choisissez les mots.

M. Jolin-Barrette : Ah oui? Parce que de la façon, dont la députée de Joliette pose ses questions, M. le Président, je ne trouve vraiment pas ça correct. Savez-vous pourquoi? Parce qu'on a fait le projet de loi n° 55 pour abolir le délai de prescription. On a fait en sorte de créer une commission spéciale sur l'exploitation sexuelle. Ma collègue, la précédente ministre de la Justice, a mis en place un comité transpartisan pour se prononcer là-dessus. J'ai déposé le projet de loi sur l'IVAC justement pour aider les victimes d'agression sexuelle, de violence conjugale. On abolit la prescription, M. le Président.

Puis je vais vous dire une chose, M. le Président, c'est bien facile, M. le Président, lorsqu'on est assis de l'autre côté et qu'on a déjà été au pouvoir, M. le Président. Je ne vise pas du tout la députée de Sherbrooke dans mes commentaires que je vais faire, M. le Président, mais il y a des choses qui doivent être remises en perspective, M. le Président. En 2013, alors que la députée de Joliette était membre du gouvernement, le collègue St-Arnaud, qui était ministre de la Justice à l'époque, tout ce qu'il a fait, quand il a réouvert l'IVAC, il a rajouté un an de délai. Il aurait eu la possibilité d'élargir la liste, mais, à cette époque-là, M. le Président, pour un gouvernement souverainiste qui, aujourd'hui, on plaide, on dit : Ah! nous, là, j'aimerais ça avoir, là, la mainmise sur le Code criminel, M. le Président. J'aimerais ça être indépendant, M. le Président, puis avoir ce contrôle-là. Parce que c'est souvent la réponse des péquistes, M. le Président, de dire : M. le Président, que, si on avait fait la souveraineté, tout serait réglé comme par magie.

Or, quand ils sont au pouvoir, M. le Président, puis ils ont la possibilité de faire des changements réels pour les victimes, comme par hasard, ils ne l'ont pas fait, ça coûtait trop cher. Le collègue St-Arnaud, c'est ça qu'il avait dit en commission parlementaire, M. le Président : Il y aurait la possibilité, puis on va faire un rapport tout de suite. Or, quand vous avez un gouvernement, M. le Président, qui le fait, bien, on reçoit des critiques du Parti québécois, mais alors que, quand eux, il s'agit d'avoir du courage puis de le dire, puis de faire des changements réels, ils ne le font pas. Puis là aujourd'hui, on me dit : Le ministre ne prend pas en compte les témoignages des victimes d'agression sexuelle ou de violence conjugale.

Je suis désolé, mais je n'accepte pas ça, parce que si j'agis, je le fais pour les victimes. Puis si on met presque 200 millions, on le fait pour les victimes. Puis si, M. le Président, notre gouvernement décide d'aller de l'avant avec un projet, est-ce que le projet, il est parfait? Peut-être pas. Mais est-ce que la députée de Joliette peut avoir l'honnêteté intellectuelle de dire et d'expliquer, M. le Président...

Mme Hivon : Oui, un instant, là.

Le Président (M. Bachand) : Juste faire attention, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : ...le corpus législatif de comment ça fonctionne? Elle le sait, M. le Président, au niveau des crimes contre la personne, c'est un élargissement significatif. Alors, je rejette, et je vais le dire moi-même aux victimes d'infractions criminelles, aux personnes qui sont victimes de violence conjugale, M. le Président, je vais vous le dire : Je vous ai entendues. J'agis le plus possible, M. le Président, dans ce que je peux faire et dans ce qu'on peut réaliser. Mais le véhicule actuel n'est pas le véhicule approprié relativement à la violence conjugale, parce que c'est un concept, en matière de droit criminel, qui n'existe pas, et ça, la députée de Joliette le sait très bien.

Il y a plusieurs éléments, dans un contexte de violence conjugale, qui existent, et qu'on vient même les couvrir : voies de fait, agression sexuelle, harcèlement criminel, menaces, qui étaient des infractions qui n'étaient pas couvertes. On vient les rajouter. Ça va faciliter l'indemnisation des femmes victimes de violence conjugale, et ça, on ne le dit pas. Je ne l'entends pas de mes collègues de l'opposition, M. le Président. Et ça me choque profondément, M. le Président, parce que plutôt que de dire : Écoutez, ce sont des avancées significatives, ce sont des éléments qui vont permettre notamment de dire, en matière de harcèlement, et je fais référence à tout à l'heure, les infractions contre les biens : Non, ce n'est pas un régime qu'on peut ouvrir relativement aux biens, mais c'est un régime, parce qu'on inclut le harcèlement criminel, parce qu'on inclut les menaces, qui vont permettre à des femmes en situation de violence conjugale de bénéficier de l'indemnisation de l'IVAC...

Et surtout on a eu le débat tout à l'heure, M. le Président. On nous dit : Les policiers, ils ne prennent pas les plaintes ou les policiers ne déposent pas des accusations. On a bien beau expliquer c'est quoi, le fardeau de preuve, M. le Président, on sait qu'on comprend l'autre bord, mais on continue à faire de la politique avec ça. Alors, je suis déçu, M. le Président, profondément, du type d'intervention que la députée de Joliette fait, parce que j'ai vraiment à coeur les victimes de violence conjugale, les victimes... violence, d'agressions sexuelles. Puis trouvez-moi un gouvernement, M. le Président, en deux ans, qui a agi, qui a mis autant d'argent pour répondre à ces préoccupations-là des victimes de violence sexuelle, de violence conjugale. À ma connaissance, M. le Président, là, 2014‑2018, ce qu'on a eu, c'est une loi sur les universités avec peu de conséquences pour les universités en matière de violences sexuelles sur les campus. En 2013...2012‑2014, le ministre St-Arnaud n'est pas allé très loin. Il a rajouté une année à la possibilité d'avoir... de s'adresser à l'IVAC, un an au lieu de deux ans, puis il n'a pas élargi la liste non plus.

Alors, moi, M. le Président, je ne pense pas que j'ai de leçon à recevoir de la députée de Joliette. Puis dire qu'est-ce qu'elle va dire aux victimes de violence conjugale, M. le Président... Qui a mis en place le comité? La ministre LeBel.

Mme Hivon : Un instant.

M. Jolin-Barrette : Qui a mis en place le projet de loi n° 55? Qui dépose le projet de loi sur l'IVAC? Tous des éléments que la députée de Joliette aurait pu faire à l'époque où elle était au gouvernement.

M. Tanguay : ...j'aimerais, pour la suite de nos travaux, savoir de votre part si vous allez accepter qu'un collègue qualifie d'ignobles les propos ou les comportements d'un autre collègue. Si, et je vous le soumets, vous ne l'acceptez pas, je vous le soumets et je vous le demande, j'aimerais que le ministre — je l'ai laissé terminer son diatribe — retire le mot «ignobles», parce que la collègue de Joliette, on peut qualifier ses propos et ses comportements, mais très certainement pas, surtout pas dans les 10 dernières minutes, d'ignobles. Puis je vous fais grâce, M. le Président, de la définition du mot «ignoble». Honnêtement, je pense que le ministre, en gentleman, pourrait retirer ce terme.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Je le retire, M. le Président. Mais je suis profondément choqué... Puis mes excuses à la députée de Joliette d'avoir utilisé ce terme. Mais je suis profondément choqué puis je m'attends, M. le Président, à ce qu'elle ne me prête pas des intentions, alors qu'elle sait très bien que, s'il y a quelqu'un qui fait quelque chose pour les victimes de violence conjugale puis de violence sexuelle, c'est bien moi. Alors, ce genre de commentaire ou ce genre d'insinuation, pour la suite de nos travaux, M. le Président, je ne les accepterai pas.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup d'avoir retiré ce mot. Mme la députée de Joliette.

• (18 h 30) •

Mme Hivon : Oui. Alors, je vois que le ministre est passionné par ce qu'il défend, puis c'est une bonne chose, mais le fait est que moi aussi. Et le comité sur les violences sexuelles et conjugales, je veux juste ramener ça dans la perspective, ce n'est pas le gouvernement qui l'a créé. Je veux juste... Et on pourrait débattre ça longtemps, mais j'ai tendu la main à la ministre en lui disant que je souhaitais qu'on mette sur pied un comité transpartisan dans la foulée de la seule plainte qui avait été retenue contre Gilbert Rozon en décembre 2018. Et ensuite la ministre m'a retendu la main, a accepté ma main tendue, on a inclus les autres collègues.

Donc, oui, c'est formidable, et on avait une supercollaboration avec la ministre, qui est présidente du Conseil du trésor. Puis je m'en fous de la maternité, de la paternité, je veux juste dire que, quand même, on a travaillé tout ça ensemble. Pourquoi? Parce que ça nous tient toutes à coeur. Puis je pense que le ministre qui revient en arrière, puis tout ça, c'est correct, là, ça aussi, c'est le jeu politique. Donc, il fait comme si, lui, il n'a pas de jeu politique, puis nous, les méchantes oppositions, il y a beaucoup de jeu politique. Mais je veux quand même lui dire que le comité, il n'existait pas, puis il n'y en avait pas, de rapport.

Donc, aujourd'hui, ce dont je lui parlais, est-ce que c'était de toutes les victimes, puis qu'il n'écoutait pas aucune victime, puis qu'il n'y avait aucune avancée dans son projet de loi? Je l'ai dit à plusieurs reprises, vous irez réécouter. Lorsque j'ai parlé de l'adoption de principe du projet de loi, j'ai nommé toutes les avancées. Je l'ai redit au point de presse, je l'ai redit même aujourd'hui. Ça fait que, là, à un moment donné, là, il faut faire la part des choses si on veut se comprendre. Puis c'est normal, quand on ouvre une loi qu'on n'ouvre pas souvent puis qu'on vient de déposer un rapport où il y a plein de victimes qui nous ont rapporté la même chose, bien, qu'on se batte ici avec toutes nos convictions, parce qu'on a siégé là-dessus pendant un an et demi pour faire la différence parce qu'on l'a devant nous l'opportunité de la faire.

Ça fait que, oui, j'ai posé la question au ministre, je suis désolée si ça l'a choqué, mais nous, puis vous pourrez demander à tous les membres du comité, la pression qu'on nous a communiquée pour qu'il y ait des avancées sur la violence psychologique en violence conjugale, c'est la priorité numéro un, ça fait que c'est normal qu'ici, moi, je demande au ministre, je pense que je l'ai fait correctement, de savoir pourquoi il ne voulait pas reconnaître ça, puis, oui, est-ce qu'il remet ça en cause, puis qu'est-ce qu'on leur dit?

Ça fait que, là, le ministre nous dit : Moi, je vais m'adresser à elles. Donc, il s'adressera à elles, mais, nous aussi, on porte une responsabilité, donc, c'est ça que je voulais lui témoigner, et puis je ne comprends pas, sincèrement, l'attitude du ministre par rapport à ça. Je pense que c'est bien d'être passionné du dossier, mais c'est bien aussi de comprendre que, les oppositions aussi, ça peut être des enjeux qui les touchent profondément puis qu'elles veulent saisir l'opportunité pour faire avancer les choses après avoir travaillé aussi avec un comité d'experts sur un enjeu, parce que le gouvernement est super actif, fait plein de choses, mais il n'a pas le monopole non plus de tout faire puis d'être le seul à avoir des bonnes idées, je pense que les oppositions aussi ont un apport à faire.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, prenez l'intervention de la députée de Joliette : Est-ce que le ministre remet en cause la violence conjugale?

Mme Hivon : Je n'ai jamais dit ça.

M. Jolin-Barrette : C'est ça... Bien, oui, je viens de l'écouter, M. le Président.

Mme Hivon : Les témoignages.

M. Jolin-Barrette : Alors, non, non, je peux l'assurer, je ne remets pas en cause la violence conjugale, pas du tout. La démonstration, c'est qu'on inclut des crimes qui font partie de la violence conjugale, qui n'étaient pas admissibles puis qui deviennent admissibles. Alors ça, c'est la démonstration qu'on prend en compte la violence conjugale, on prend en compte la violence sexuelle aussi. Je pense que les actions parlent d'elles-mêmes.

Alors, c'est ça qui me choque, M. le Président, quand on dit : Est-ce que vous remettez en cause les témoignages des personnes victimes de violence conjugale? Bien, voyons donc! Voyons donc, M. le Président! Ça, là, moi, je trouve ça, là, dans le cadre d'une discussion qu'on a ici, là, je ne trouve pas que c'est à la hauteur de ce qu'on devrait discuter.

Alors, j'ai expliqué pourquoi j'étais en désaccord avec l'amendement, parce qu'on se rattache à la liste des infractions criminelles contre la personne, et sachez que, dans le contexte de violence conjugale, il y a plusieurs infractions criminelles qui constituent de la violence conjugale et qui seront désormais couvertes.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, oui.

Mme Hivon : Et je veux dire au ministre que je n'ai pas dit qu'il remettait en cause l'existence de la violence conjugale. Ce qu'il fait depuis tantôt, c'est qu'il dit que ce qu'on nous rapporte, c'est du harcèlement criminel, que ça peut être du harcèlement criminel, que ça peut être des menaces, puis ce que je m'évertue à lui dire, c'est que ce qu'on nous a rapporté des dizaines de fois dans des témoignages, c'est que malheureusement non. Les policiers disent : Non, ce n'est pas une plainte qui est admissible. C'est ça, le point que je fais depuis tantôt. Je suis-tu en train de dire qu'il ne reconnaît aucune victime puis... Il ne faut pas non plus quand même, là, aller, de l'autre côté, exagérer, ce n'est pas ça que je dis, ça fait que je trouve ça important que ce soit clair, puis qu'on ait un échange au moins sur les bonnes bases puis qu'on se comprenne parce que sinon on n'avancera pas.

Donc, ce que je dis, si le ministre me dit : Bien non, je suis tout à fait d'accord qu'ils disent ça, les victimes, je le reconnais, les policiers, c'est vrai qu'ils ne reconnaissent pas ça. Bien, je vais dire : Super! Vous avez entendu leurs témoignages. Mais ce n'est pas ça qu'il me dit, il me dit : Nous, on va le reconnaître, puis le harcèlement criminel, ça comprend ça. Moi, je dis juste : Ce n'est pas concordant avec ce qu'on nous a dit. Donc, je pose la question : Où le bât blesse, puis qu'est-ce qui fait qu'on n'est pas capable de reconnaître ça? Je pense que c'est une question légitime, parce qu'elle nous a été posée avec tellement d'insistance que, oui, même si je suis juste une députée de l'opposition, je trouve ça important d'être capable de creuser ces questions-là puis de pouvoir répondre aux gens qui se sont investis dans le comité. Donc, ça va être la fin de mon intervention là-dessus.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Puis, pour la troisième fois, M. le Président, sur cette explication-là, effectivement, lorsqu'on est en matière criminelle et pénale, ça se peut qu'il y ait des personnes victimes de violence conjugale que leurs plaintes ne soient pas retenues, oui, ça se peut. Ça se peut que les policiers ne l'aient pas pris, puis ça, c'est peut-être déjà un problème, hein, qu'ils n'aient pas pris la plainte, ça, c'est un élément aussi où est-ce que ce n'est pas le forum approprié en lien avec le projet de loi sur l'IVAC, où on ne réglera pas ça.

Deuxième option, c'est possible que les policiers aient pris la plainte, mais que la plainte n'ait pas été... qu'il n'y ait pas eu d'accusations qui ont été déposées parce que le fardeau de preuve à remplir, il ne pouvait pas être rempli par le procureur de la couronne, hors de tout doute raisonnable, de déposer l'accusation, ça aussi, c'est possible.

Puis moi, ce que je dis en réponse à ça, M. le Président, c'est que quelqu'un qui est victime de harcèlement criminel, si ça rentre dans l'infraction criminelle, le fardeau pour dire : Bien, écoutez, oui, vous avez été victime de harcèlement criminel. Hein, pour le procureur de la couronne, il voit, là, qu'il y a un commencement de preuve, un début de preuve, mais il n'est pas convaincu, hors de tout doute, ou il ne réussira pas à faire la preuve, hors de tout doute, mais le critère à l'IVAC, ce n'est pas le même critère, c'est ce que j'explique depuis tantôt, c'est 50 plus un.

Donc, il va y avoir, parmi les... En 2017, parmi les 15 320 personnes qui ont déclaré avoir été victimes de menaces à la police, puis parmi les 5 761 personnes qui ont porté plainte à la police en matière de harcèlement criminel, bien, ces personnes-là vont pouvoir bénéficier du régime de l'IVAC maintenant, parce qu'avant ils se présentaient à l'IVAC, puis l'IVAC disait : Bien, ce n'est pas sur la liste d'infractions criminelles, je ne peux pas vous couvrir, ce n'est pas un crime admissible. Alors, le fardeau, il n'est pas le même. Alors, on va se retrouver avec des victimes qui vont se faire dire non à la police, mais qu'à l'IVAC ça va être beaucoup plus large puis ça va être admissible.

Puis ça se peut, effectivement, aussi que, dans certaines circonstances, l'événement rattaché à une infraction contre un bien ne soit pas admissible à l'IVAC, effectivement, c'est possible, puis ça se peut que ça soit dans un contexte conjugal, effectivement, parce que ce n'est pas rattaché à une infraction criminelle, mais l'objectif est de faire en sorte que lorsqu'une personne victime d'une infraction criminelle, dans un contexte conjugal, elle demande de l'aide à l'IVAC, elle va l'obtenir parce que ça constitue une infraction criminelle, si le comportement le constitue.

Alors, dans certaines circonstances, oui, ça va être couvert, dans d'autres circonstances, non, ça ne sera pas couvert. Je ne peux pas vous assurer à 100 % que toutes les infractions contre les biens, dans un contexte conjugal, dans l'absolu, à 100 %, elles vont l'être, mais il va déjà y avoir une avancée significative avec les menaces et le harcèlement criminel qui va être couvert, mais, à ce stade-ci, je ne peux pas vous le dire parce que ce n'était pas sur la liste, l'IVAC ne le couvrait pas parce que ça n'avait jamais été changé, mais nous, on le change. Alors, c'est les explications que j'ai en lien pour expliquer quelle est la différence entre la police, le système de justice et l'IVAC.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui. Je pense que moi, je le crois, le ministre, là, quand il nous parle de toute sa sensibilité envers les victimes de violence conjugale, c'est juste que sa confiance envers le fait qu'elles vont trouver des chemins, dans les paramètres actuels du projet de loi, pour être indemnisées, moi, je ne la partage pas, en regard de tous les témoignages que j'ai entendus. Puis je peux comprendre que peut-être que lui n'a pas été confronté à autant de témoignages parce que... par la force des choses, donc, je peux comprendre que lui soit dans une grande confiance par rapport à ça, là, en ce moment, mais moi puis ma collègue de Joliette, on les a entendus les témoignages, puis je dois dire que mon souhait le plus sincère, c'est que la majorité et presque toutes, et toutes, idéalement, les victimes, qui sont dans cette situation-là, de subir de la violence psychologique, trouvent un chemin avec les changements qui sont apportés dans le projet de loi pour être indemnisées, mais j'en doute quand même pas mal, parce que souvent elles se font dire par les policiers que ce n'est pas criminel ce qu'elles ont subi, que les textos qu'elles ont reçus, ce n'est pas vraiment des menaces, que l'infraction sur un bien qu'elles ont subi, ce n'est pas vraiment grave tant que ça, ce n'est certainement pas criminel, ils ne les prennent pas, les plaintes. Ça fait que, ça, ce que ça fait, c'est que les victimes, là, elles ne risquent pas d'aller chercher l'aide de l'IVAC si elles se font dire par un policier que, bien non, ce n'est pas vraiment des menaces, bien non, ce n'est pas vraiment criminel, ce qui s'est passé là, elles ne se sentiront pas concernées par l'IVAC parce qu'elles vont se faire dire que ce n'était pas criminel ce qu'elles ont subi. Moi, c'est ça qui m'inquiète.

Ça fait que, tu sais, le ministre, il a l'air confiant que ça va se passer puis que les victimes vont être indemnisées. Bien, pour que ça marche, là, il va falloir qu'il y ait un travail énorme qui soit fait auprès des services policiers pour qu'eux transmettent l'information adéquatement puis que ces infractions-là soient nommées, reconnues, considérées, traitées, que les plaintes soient prises comme des actes criminels puis que les victimes soient référées à l'IVAC, mais, en ce moment, ce n'est pas ça qui se passe, c'est des infractions qui sont très largement banalisées auprès des victimes, en ce moment. Ça fait que c'est pour ça que, moi, je ne réussis pas à partager l'enthousiasme et la confiance du ministre à l'effet que son projet de loi va permettre de couvrir ces victimes-là. J'aimerais vraiment ça que ça soit le cas, là, mais il y a encore une banalisation énorme de la part des policiers de plusieurs des gestes qui relèvent de la violence conjugale de type psychologique, puis, à cause de ça, moi, je pense que les victimes ne seront pas orientées vers l'IVAC.

• (18 h 40) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, là-dessus, M. le Président, là, en lien avec les propos de la députée de Sherbrooke, là, l'enjeu avec les corps de police, c'est un enjeu en soi.

Aujourd'hui, ce que l'on fait, c'est qu'on vient couvrir des situations qui n'étaient pas couvertes antérieurement, le harcèlement criminel, les menaces, maintenant, elles vont l'être. Puis ce que je dis aux victimes de violence conjugale, c'est : Quand un événement comme celui-ci arrive, soumettez votre demande à l'IVAC. Le régime n'est pas le même que le régime rattaché à une plainte à la police, c'est un régime qui est plus large, qui est plus généreux, qui n'est pas le même fardeau de preuve, ce n'est pas le même processus, ce n'est pas les mêmes engagements pour la victime.

Alors, moi, je souhaite, comme message, là, que l'on retienne, avec ce qu'on fait dans le code... dans le projet de loi, que les victimes n'aient pas de crainte d'aller à l'IVAC suite à l'adoption du projet de loi, notamment en matière de violence conjugale. C'est un régime qui n'a pas encore été éprouvé parce qu'il n'est pas adapté, mais, ce que je dis aux victimes, c'est : Allez-y à partir du moment où on va avoir déposé... qu'on va avoir adopté le projet de loi, notamment en matière de violence conjugale, notamment en matière de harcèlement, notamment en matière de menaces.

Donc, il faut le dire puis il faut le dire que c'est une avancée, puis l'expérience vécue par les victimes de violence conjugale dans les contextes qu'elles ont vécu avec la police, ce n'est pas le même que celui avec l'IVAC. Puis avec l'IVAC aussi, on veut le rendre plus humain, on veut le rendre plus accessible, on veut s'assurer qu'il y ait un meilleur service à la clientèle, c'est ce qui motive le remplacement de l'ancienne loi par une nouvelle loi, il faut le dire puis il faut inviter les victimes à dénoncer.

Puis l'autre point aussi, c'est que, dans le projet de loi, on vient pérenniser le programme de violence conjugale puis de violence sexuelle, le programme d'urgence. Ça, aussi, là, c'est dit, là, dès le moment où il y a une personne qui va être victime de violence conjugale ou de violence sexuelle, qui doit sortir de son milieu, les fonds vont être rattachés à l'IVAC, puis l'IVAC va pouvoir le donner : aide au logement, nourriture, transport. Pour se revirer, on va pérenniser ce programme-là d'urgence. Ça, c'est l'IVAC, puis ils vont être en mesure de l'utiliser. Ça, je pense que c'est une avancée significative du projet de loi qu'on vient de le mettre noir sur blanc dans la loi en matière de violence conjugale.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Je voudrais juste rappeler au ministre la grande vulnérabilité dans laquelle se trouvent les victimes de violence conjugale. Puis on va même prendre l'exemple d'une victime de violence physique grave, là, de violence physique très grave avec des sévices corporels, là, même ces victimes-là ont souvent une grande difficulté à reconnaître qu'elles étaient prises dans un contexte de violence conjugale et que ce qu'elles ont subi n'était pas acceptable. Elles sont sous une emprise telle que ça peut prendre des semaines, des mois de travail à des intervenantes pour leur faire réaliser que ce n'était pas normal ce qu'elles ont vécu, puis que, non, elles n'ont pas mérité cette violence-là, puis que ce n'est pas de leur faute. Ça fait que, dans ce contexte-là où leur confiance en elle est tellement réduite, quasiment à néant, c'est certain que le poids des mots d'un policier qui leur dit : Bien non, ça, ce n'est pas vraiment des menaces, madame, moi, je doute fort que la victime va se revirer de bord puis va aller chercher de l'aide à l'IVAC en se disant : Oui, mais, de toute façon, le fardeau de la preuve n'est pas la même pour l'IVAC. Je comprends que le fardeau de la preuve n'est pas le même, c'est juste qu'on fait face à des victimes qui se sont fait détruire par en dedans, pendant des années souvent, puis ça a commencé insidieusement par de la violence psychologique puis, souvent, ça se prolonge en d'autres formes de violence. Puis vient un moment donné où ces victimes-là sont juste... leur jugement est altéré, leur jugement est altéré par la violence qu'elles ont subie, par la destruction de leur estime de soi, ça fait que les mots, la banalisation des policiers, c'est dur, pour elle, de faire la distinction puis de se dire : O.K., lui, il ne veut pas prendre ma plainte, mais peut-être que je suis admissible quand même. C'est pour ça que je pense que ça vaudrait la peine de l'inclure noir sur blanc qu'on le reconnaît.

Puis je fais appel au nationalisme du ministre, puis de se dire : Écoutez, on peut-tu, nous, aller au-devant puis ne pas être à la remorque du fédéral là-dessus? Qu'est-ce qui nous en empêche vraiment, à part la volonté politique, là? Le carcan dans lequel il s'est enfermé de se limiter au Code criminel, c'est lui-même qui l'a créé, il n'y a personne d'autre qui lui a imposé ça. Ça fait que si on pouvait reconnaître que les victimes, elles ont souvent besoin de pouvoir lire, noir sur blanc, que leur situation s'applique pour aller chercher de l'aide, je pense qu'on se donnerait les moyens, là, de favoriser le rétablissement de ces personnes-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, c'est un travail d'équipe aussi, les organismes sont là aussi pour outiller les victimes, puis il y a beaucoup de personnes aussi qui n'ont pas besoin... bien, en fait, premièrement, il faut le dire, ils n'ont pas besoin d'aller à la police, mais aussi on fait en sorte de bien outiller les organismes aussi puis de diriger aussi, puis ça va être un effort collectif, ce n'est pas uniquement le gouvernement qui va... oui, on va publiciser les nouvelles avancées de l'IVAC, mais il y a aussi dans les organismes qui accueillent les victimes, dans un premier temps, qui vont pouvoir leur dire : Écoutez, vous êtes admissibles à l'IVAC, n'hésitez pas à y aller.

Puis l'autre point qui est bon sur ce que la députée de Joliette dit, elle dit : Parfois, ça fait des années que la personne victime est dans la situation de violence conjugale, puis elle ne raisonne plus puis elle ne sait pas où se diriger. Mais à partir du moment où elle pourra... elle trouvera un chemin, elle trouvera de l'aide ou une situation où elle pourra se sortir de ce milieu-là. Elle ne se fera plus dire : Vous n'êtes pas admissible parce que vous n'avez pas fait votre demande dans l'année ou dans les deux ans, parce qu'on rend imprescriptible l'IVAC, puis toutes les mesures de soutien vont être là pour elle. Mais, aujourd'hui, là, ça arrive, ça, elle n'est pas admissible. Après le projet de loi, ça fait quatre ans qu'elle subit de la violence conjugale, la personne victime, mais là elle va pouvoir bénéficier de l'indemnisation, elle va pouvoir bénéficier du soutien psychologique, tout ça, toutes des choses qu'elle n'a pas le droit aujourd'hui. Ça fait que, dans le projet de loi, en abolissant la prescription, c'est ça que ça fait aussi. Ça fait que, ça, il faut le considérer.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce)?

Mme Weil : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.

On retourne maintenant à l'étude de l'article 13 tel qu'amendé. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

Mme Hivon : Le 13 au complet?

Le Président (M. Bachand) : Bien, c'est pour ça que je pose la question.

Mme Hivon : Moi, j'ai une question.

Le Président (M. Bachand) : Oui, allez-y, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Parfait. Sur l'énumération de «proche», donc, ce qui a guidé le ministre dans cette énumération-là, je veux juste bien comprendre l'intention d'être allé vraiment par l'énumération, puis comment on est sûr qu'on n'échappe aucun cas de figure. Est-ce qu'il est passé par la jurisprudence, toutes les personnes qui ont pu être reconnues au fil du temps, ou si c'est la définition que lui a décidée, avec son équipe, qui était la meilleure pour, j'imagine, je le souhaite, être le plus englobant possible?

M. Jolin-Barrette : Bien, un des objectifs qu'on a faits, c'est vraiment la cellule familiale pour faire en sorte que la personne... En fait, l'énumération, elle est la plus large au niveau du noyau familial, on le voit au niveau... le frère, la soeur, le grand-parent ou le petit-enfant de la personne victime, l'enfant du conjoint de la personne victime, le conjoint du parent de la personne victime, bon, etc. Et aussi on a mis un concept qui est très, très large à la fin de la définition, où on parle de la personne significative. Alors, cette personne-là n'a pas besoin d'avoir, supposons, un lien de sang, ou un lien de cohabitation avec la personne, ou une forme d'union avec la personne. La personne significative, ça peut être la meilleure amie de la personne victime, ça peut être quelqu'un qui l'aide. Dans le fond, c'est son support, son aidant, c'est la personne qui est significative pour elle.

Donc, cette personne significative là, si la personne, elle est blessée, c'est la personne victime blessée qui va l'identifier qui est la personne significative. Et si la personne, elle est décédée, bien là, une personne significative pourrait demander à l'IVAC d'être reconnue comme personne significative en démontrant : Bien, moi, j'étais la personne significative.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée.

Mme Hivon : Puis j'essaie juste de comprendre la désignation, le reste du paragraphe, là, «lorsque la personne victime ou l'intervenant est âgé de moins de 14 ans, cette désignation est faite par son parent». Donc, le parent vient déterminer le statut de proche de son enfant.

• (18 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Là, au niveau de la personne significative, dans le fond, pour la personne de moins de 14 ans, le parent pourrait dire : Bien, c'est cette personne-là, la personne significative pour l'enfant. Exemple, là, supposons que l'enfant aurait une tante très proche qui s'occupe de l'enfant beaucoup, tout ça, bien, l'enfant est victime d'une infraction criminelle, il est blessé, l'enfant, le parent pourrait dire : Bien, on va identifier aussi la personne significative comme étant une personne victime parce qu'il y a des conséquences aussi sur cette personne-là, et elle fait partie du noyau de la personne.

Le Président (M. Bachand) : Interventions?

Mme Hivon : Puis ça, il va y avoir une ouverture, c'est-à-dire qu'on ne remettra pas en cause ce qu'on détermine comme personne significative pour la personne de moins de 14 ans. Est-ce que tout ça va être purement subjectif, compte tenu de la réalité d'une famille donnée, ou il va y avoir comme un examen de fait?

M. Jolin-Barrette : Non, mais, dans le fond, la personne victime elle-même identifie qui est la personne significative ou quelles sont les personnes significatives, donc, c'est elle qui la détermine. Dans l'éventualité où il est mineur, moins de 14 ans, ça va être les parents qui vont le déterminer. Dans l'éventualité où la personne, elle est décédée, donc, que ce soit le mineur ou le majeur décédé, à ce moment-là, là, ça va être, dans le fond, les personnes significatives qui vont cogner à la porte de l'IVAC, qui vont dire : Bien, moi, je suis une personne significative par rapport à la personne qui est décédée, alors je souhaiterais avoir... je souhaiterais être reconnue comme personne significative et avoir les aides qui vont en lien avec le statut de personne significative.

Mme Hivon : Puis effectivement... Puis, en fait, ce n'est pas huit personnes qui vont se présenter comme personnes significatives, parce que la personne significative va avoir un statut particulier de personne significative, donc on n'assistera pas à plein de gens qui vont vouloir se déterminer, qui ont plein de personnes significatives.

M. Jolin-Barrette : Bien, théoriquement, non, mais vous pourriez avoir deux personnes significatives.

Mme Hivon : Oui. Puis ça, c'est prévu, il n'y a pas de limite comme telle.

M. Jolin-Barrette : Bien, il n'y a pas de limite, c'est juste au niveau des aides qui vont être offertes à la personne significative, supposons, en matière de soutien psychologique, supposons, je pense qu'on prévoit une trentaine de séances de soutien psychologique pour la personne significative, bien, s'il y a, supposons, deux personnes significatives, ce serait 15 séances chacune. Dans le fond, le soutien rattaché à la personne significative...

Mme Hivon : ...on le diviserait par le nombre de personnes significatives, c'est ça?

M. Jolin-Barrette : C'est ça, exactement, sauf que, le noyau familial de la personne, il est pratiquement couvert par la question de proche. Tu sais, la définition de proche, elle est très large, donc il faudrait trouver quelqu'un qui n'est pas dans la définition de proche pour rentrer dans la question de personne significative.

Mme Hivon : Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : J'aimerais que le ministre nous dise à quel endroit, dans le projet de loi, on voit ça, que l'aide va être divisée entre le nombre de personnes significatives.

M. Jolin-Barrette : Ça va être par règlement.

Mme Labrie : Ça va être par règlement. Puis est-ce que c'est la même chose pour les proches? C'est-à-dire, une personne qui a cinq frères et soeurs, les cinq frères et soeurs vont devoir se diviser l'aide ou...

M. Jolin-Barrette : C'est uniquement les personnes significatives qu'il y a une répartition. Dans le fond, chacun des proches va avoir ses propres aides rattachées à sa personne en sa qualité de personne victime.

Mme Labrie : O.K. Donc, on ne divise pas l'aide entre les proches puis toutes les autres catégories, mais seulement pour les personnes significatives, mais il n'y a pas de maximum au nombre de personnes significatives qui peuvent être...

M. Jolin-Barrette : Non. Puis il faut dire, avec l'IVAC, actuellement, avec la loi actuelle, actuellement, il y a une division entre les proches. Dans le fond, là, on dit, bien, supposons, actuellement, c'est 25 séances, bien, il y a trois proches, supposons, bien, c'est splitté dans les trois proches. Là, il va y avoir... chacun va avoir ses aides propres à lui, comme proche. Donc, ce n'est pas divisé, à l'exception de la personne significative.

Mme Labrie : O.K.

Le Président (M. Bachand) : Intervention? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : La page suivante, 45, donc : «Aux fins du présent titre — donc, ça s'applique toujours à l'article 13 — est présumée décédée toute personne disparue», etc., ça, c'est en vertu du Code civil, les personnes qui sont présumées... les articles 85 et 92 du Code civil? C'est-à-dire l'absent est présumé vivant durant les...

M. Jolin-Barrette : Non.

Mme Weil : Non?

M. Jolin-Barrette : Non. Dans le fond, c'est vraiment le régime lui-même. «Aux fins du présent titre est présumée décédée toute personne disparue dans des circonstances qui permettent de considérer sa mort probable et de croire que sa disparition découle de la perpétration d'une infraction criminelle.» Donc, on...

Mme Weil : ...durée de temps ou... Comment on présume? Quels sont les critères?

M. Jolin-Barrette : Bien, ce sont des critères... le critère, c'est on considère sa mort probable. Donc, ce n'est pas un critère de temps, ça peut être, supposons, dans le rapport de police, ça peut être des éléments factuels, mais on n'a pas à attendre un x nombre de temps avant de le faire déclarer disparu ou décédé, ce n'est pas les mêmes critères. Dans le fond, la personne, selon les probabilités, on présume que la victime a été enlevée par des individus qu'on sait être associés, je ne sais pas, au crime organisé, supposons, bien, cette personne-là ne revient pas, on pourrait présumer, c'est probable qu'elle soit décédée, et donc que sa disparition découle de la perpétration. Donc, le critère, il est moins important que dans le Code civil.

Mme Weil : O.K. Et donc l'IVAC a ses propres... ou aura ses propres... par règlement ou c'est tout simplement...

M. Jolin-Barrette : C'est le critère de la loi. Donc, c'est le critère que nous avons, sa mort probable, et de croire que cette disparition découle de la perpétration d'une infraction criminelle. C'est une question de faits, dans le fond.

Mme Weil : Dans la loi actuelle, est-ce qu'il y a une disposition semblable?

M. Jolin-Barrette : On me dit que oui.

Mme Weil : Est-ce que c'est le même texte ou le même critère?

M. Jolin-Barrette : Donc, c'est 5.1 de la loi qui... le deuxième alinéa, qu'on dit : «Pour l'application du paragraphe 2° du premier alinéa, on entend par "victime d'homicide", la personne décédée à la suite d'une infraction dont la description correspond à un acte criminel visé à l'annexe de la loi, la personne qui est disparue si les présomptions tirées des circonstances entourant sa disparition permettent de tenir sa mort pour probable et de croire que cette disparition découle de la commission d'un acte criminel, de même que la personne décédée dans les circonstances prévues...» Donc, c'est sensiblement les mêmes critères.

Mme Weil : Oui, O.K. Et qu'est-ce qui a changé, juste pour bien comprendre, en changeant de texte? Parce que je n'ai pas l'autre texte devant moi.

M. Jolin-Barrette : On parle de «si les présomptions tirées» tandis qu'ici on dit «présumée». Dans le fond, on change «probable» par «présumée». On change «présumée» par «probable», excusez-moi. On disait : «Si les présomptions tirées des circonstances entourant sa disparition permettent de tenir sa mort pour probable». Puis, ici, on dit : «Toute personne disparue dans les circonstances qui permettent de considérer sa mort probable et de croire que sa disparition découle de la perpétration...». Alors, «toute personne disparue dans des circonstances qui permettent de considérer», c'est plus large.

Mme Weil : Savez-vous si les modifications apportées, c'est parce que dans l'expérience, il y a... Peut-être l'ancienne version était trop limitative ou parce que la nouvelle version répond plus à l'expérience qu'ils ont eue dans la... dans ces cas-là.

M. Jolin-Barrette : On me dit que, dans le fond, c'est une réécriture plus moderne de l'article.

Mme Weil : Plus moderne, O.K.

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Weil : C'est des légistes qui ont accordé avec la modernité. Et quant au... «Lorsqu'une disposition de la présente loi fait référence à un parent, elle n'inclut pas celui qui est déchu de l'autorité parentale ni, dans le cas d'un enfant majeur, celui qui en a été déchu...» Et ça, est-ce que c'est une disposition qui existait déjà aussi, la déchéance?

M. Jolin-Barrette : Ça, c'est pour faire en sorte que, dans le fond, le parent qui n'avait plus l'autorité parentale ne puisse pas bénéficier du revenu associé.

Mme Weil : Oui, c'est ça.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Sur ce, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 19 heures)

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