(Dix heures deux minutes)
Le Président
(M. Tardif) : Alors, bon matin. Et je vous demanderais, s'il vous
plaît, pour la séance de la Commission des
institutions qui est maintenant
ouverte, de bien vouloir fermer ce magnifique appareil qui est si utile,
mais qui dérange parfois. Je vous remercie.
La
commission est réunie afin de procéder à l'interpellation du député de D'Arcy-McGee à la ministre
responsable des Affaires autochtones sur le sujet suivant : La nécessité pour le gouvernement caquiste de déposer des orientations tangibles et
de faire preuve d'un leadership fort et consensuel afin de donner suite aux
142 appels à l'action de la Commission d'enquête sur les relations entre
les Autochtones et certains services publics.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements, s'il vous plaît?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Lachance
(Bellechasse) est remplacée par Mme Guillemette (Roberval); M. Tanguay (LaFontaine) est remplacé par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee);
M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est remplacé par M. Zanetti
(Jean-Lesage); et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
Le
Président (M. Tardif) :
Merci beaucoup. Alors, je
comprends également
qu'il y a une entente à l'effet que le deuxième
groupe d'opposition interviendra lors de la troisième série d'interventions,
alors que le troisième groupe d'opposition interviendra lors de la cinquième
série d'interventions.
Alors,
pour débuter, M. le député de D'Arcy-McGee, vous avez donc la parole pour
10 minutes. M. le député.
Exposé du sujet
M. David Birnbaum
M. Birnbaum :
Merci, et bon matin, M. le Président. Mme la ministre, l'équipe du cabinet de
la ministre, les gens du secrétariat,
collègues de deuxième opposition, merci de cette opportunité importante
d'interpeler la ministre responsable sur
la suite des recommandations du rapport Viens. Je suis reconnaissant de
cette opportunité, parce que je crois que c'est très important pour les communautés des Premières Nations et Inuits,
pour la population du Québec parce que je crois que nous avons tous, et la ministre va en convenir
avec moi, une responsabilité collective de faire mieux. Et est-ce que ce
n'était pas un des messages clés du rapport en question?
Je
tiens à souligner la présence, je ne sais pas s'ils sont tous arrivés, mais ça
me touche qu'ils soient ici, et je crois que leur présence est une façon
de nous rappeler de nos obligations solennelles de faire mieux à leur nom.
C'est des membres des familles attikameks de Manawan, et je vais les nommer.
Comme je dis, c'est de valeur, ils sont en train d'arriver, mais vous allez comprendre qu'il me semble que c'est
l'opportunité actuelle de les saluer. C'est Armand Echaquan, Madelaine Dubé Echaquan,
Mme Viviane Echaquan Niquay, M. Pierre-Paul Niquay, M. Réginald Flamand, Mme Cécile Ottawa Flamand, Mme Jacqueline Flamand,
Thérèse Dubé Flamand, Guylaine Dubé,
M. Frédéric Flamand, Mme Marcelline Dubé et M. Blais, ainsi que nous aurons l'honneur d'accueillir le
grand chef d'APQNL, le grand chef Ghislain Picard. Alors, je les
souhaite la bienvenue.
On
va se rappeler que le premier
ministre du Québec
s'est levé dans cette Chambre, le 2 octobre 2019, au nom de tous les Québécois pour offrir formellement ses excuses. Les chefs
des trois formations de l'opposition ont fait ainsi. Le premier ministre, entre autres, a dit, à juste titre, et je le cite : «Les femmes
autochtones sont celles qui ont subi une large part des préjudices décrits dans le rapport de la commission [Viens].
L'État québécois n'en fait pas assez, et cette situation
est indigne de la société québécoise.
En conséquence, j'offre aux membres des Premières Nations et aux Inuits du Québec les excuses les plus
sincères de l'ensemble de l'État québécois. L'État québécois a manqué à son
devoir envers vous. Il vous demande aujourd'hui pardon.»
Et
je continue à citer : «Et j'ai une pensée toute particulière pour les
femmes autochtones qui ont vécu les tristes événements de Val-d'Or. Je tiens à saluer leur courage. Ces excuses sont
nécessaires. C'est très important, mais ce n'est pas suffisant. On doit comprendre les raisons qui ont
mené à cette situation et, à partir de là, on doit changer les choses.
Comme pour le Québec tout entier, on doit
faire plus, on doit faire mieux, on doit le faire avec les membres des
Premières Nations et les Inuits. Comme je le disais dans mon discours
inaugural, on doit travailler ensemble à développer le Québec pour le bien
commun de nos nations respectives.»
C'est
des paroles sérieuses et des paroles dignes de notre premier ministre. Ce n'est
pas la partisanerie qui va nous empêcher
d'avancer dans un dossier tellement, tellement sérieux. M. le Président, la
ministre responsable, son gouvernement, et nous tous sommes devant
maintenant l'obligation de faire honneur à ces paroles.
La tâche est énorme, j'en conviens. Il y a
142 appels à l'action dans le rapport Viens, pour ne pas mentionner les
21 appels à la justice inclus dans le rapport Québec de l'Enquête
nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues
et assassinées. Each recommendation carries tremendous weight
and demands of us a real and measurable accountability.
M. le Président, le
rapport Viens identifie de façon des fois déchirante des lacunes dans les
services essentiels publics et l'offre de ces services aux peuples
autochtones.
C'est sûr
qu'on ne va pas avoir le temps de faire le bilan du progrès nécessaire dans les
142 recommandations, mais, à titre
d'exemple, je vous cite trois : L'appel à l'action n° 28,
explorer la possibilité de mettre sur pied des corps policiers autochtones régionaux; appel à
l'action 42, favoriser l'implantation de programmes de justice
communautaire et la mise en oeuvre de
programmes de mesures de rechange pour adultes autochtones dans l'ensemble des
villes où la présence autochtone
l'exige; appel à l'action n° 60, instaurer un programme de financement de
déplacements familiaux lorsqu'il n'y a pas d'autre choix que
d'incarcérer un détenu dans un établissement provincial éloigné de son lieu de
résidence ou dans sa communauté d'appartenance.
Dans chacun
de ces cas, le gouvernement est interpellé à faire en sorte que les services
sur lesquels nous devrions tous
bénéficier soient aussi accessibles, aussi adaptés, aussi encadrés, aussi
disponibles à la famille mohawk de Kanesatake, à l'enfant inuit de Kuujjuaq, à la femme de la nation anishnabe de Val-d'Or.
On ne parle pas, M. le Président, de traitement spécial, on parle de faire notre part comme État pour rendre la vie et
l'accès aux services livrés par l'État, qui sont essentiels à notre...
de la vie, équitables, équitables pour ces communautés, et ce n'est pas le cas
actuellement.
• (10 h 10) •
Je veux citer
quelques constats, dans le rapport Viens, en ce qui a trait à l'accès à ces
services, et un des aspects qui est
essentiel, et je cite le rapport : «...41.1% of Québec's
indigenous population has English as a second language, it is
not surprising that language was rapidly identified as a vector for
discrimination.
«The first difficulty
highlighted by the commission
is the fact that it is very often impossible for First Nation members and Inuit
to have access to services in indigenous languages or English when those are
their first and second languages.
«Simply
put, what we're facing has to do with the availability of health professionals
who speak English. There are several areas for which our people and other English-speaking people
struggle with in receiving services. We're often talked about
psychology, clinical social workers, speech therapist, to name a few.»
I'll
be looking, during this «interpellation», to hear from the minister responsible about these kinds of problems. Je souligne
que... qu'on ne tombe pas dans le piège de dire que je viens d'identifier un
problème qui tombe dans le panier de la langue. On parle de l'accès aux services uniquement. Voilà la préoccupation, comme je dis, M. le
Président, qui est clé dans
les 142 recommandations.
Alors, évidemment, je serai à la recherche des
pistes de solution, des échéanciers clairs, des indications des allocations budgétaires — on
est à un mois d'un budget, M. le
Président — une feuille de route, une suite. Je vais
respecter le fait, et je les privilégie
d'être là, que nous étions... vous venez de... nous venons de compléter un
deuxième sommet, et je félicite la ministre pour avoir pris l'initiative
d'approcher ces deux sommets avec un esprit ouvert, avec un oeil sur l'importance, que je seconde, de respecter la façon de faire. La ministre responsable va en convenir avec moi, par contre, que nous sommes devant une obligation de résultat. Nos enfants vont l'exiger, les
enfants des Premières Nations et
des familles inuites vont l'exiger, M. le
Président. Ce n'est pas une... Il n'y a pas de prétexte pour ne pas faire
avancer ce dossier-là.
Les leaders
des communautés des Premières Nations et Inuits vont être les premiers à dire
qu'on a devant nous un rapport
difficile, mais étoffé, mais qui fait des constats qui auraient été faits déjà.
Alors, on peut parler un petit peu de la patience, patience légendaire de
nos peuples autochtones, mais là c'est le temps des solutions.
Je me permets, dans les petites secondes qui
restent, de noter que nous sommes devant une crise actuelle, la situation du blocage des routes ferroviaires. Je
vais tout simplement dire deux choses. Un, j'espère entendre la
ministre, qu'elle apporte son poids pour
assurer qu'il y a une solution et, deuxièmement, qu'on ne fait aucunement le
lien entre ça et les questions très, très nécessaires qui vont être le
sujet de nos discussions pour les prochaines deux heures. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Tardif) : M.
le député, merci. Je céderais maintenant la parole à Mme la ministre pour une
période également de 10 minutes. Mme la ministre.
Réponse de la ministre
Mme Sylvie D'Amours
Mme
D'Amours : Merci, M. le Président. À mon tour de saluer mes collègues,
mes collègues de l'opposition et mes
collègues du gouvernement, ainsi que toute l'équipe qui m'accompagne, qui sont,
tout comme moi, très dévoués à la cause du monde autochtone, du monde
des Premières Nations.
Quand j'ai eu
connaissance que j'aurais une interpellation sur, en fait, là, le rapport
Viens, le suivi du rapport Viens, j'ai
été étonnée, parce que, comme l'a bien dit mon collègue de D'Arcy-McGee, moi,
je travaille habituellement, dans ce dossier-là...
pas habituellement, depuis toujours dans l'optique et dans l'obligation de
prendre ce dossier-là et de ne pas le politiser.
Nous travaillons de nation à nation. Ce n'est pas pour des organismes qu'on
travaille, mais pour bien des nations, et
nous devons, en tant que gouvernement, travailler en collaboration avec leurs
instances gouvernementales parce qu'ils en ont. Chacun a sa façon de
gouverner.
Donc, quand
on dit «travailler de nation à nation», ça veut dire que le gouvernement du
Québec et tous les députés de
l'Assemblée nationale devraient avoir en tête que nous ne devons pas politiser
ce dossier-là, mais bien de travailler ensemble à trouver des solutions
pour bien cohabiter ensemble.
Après un rapport du... du dépôt... Il
y en a eu deux rapports. Il y a eu le rapport de l'ENFFADA puis il y a eu
le rapport Viens. Ce que mon collègue avance
depuis... dans son discours, c'est que là, il a parlé des familles, des... Et
donc, là, je suis un peu mélangée parce que j'aurais
aimé ça que ce soit plus clair au niveau de l'interprétation... de
l'interpellation, pardon, parce que
l'interpellation nous amenait à nous préparer pour le rapport Viens, qui avait
été déposé, et la suite de ce que l'on allait en faire.
Par
mesure de transparence, par mesure aussi, là, d'inviter les gens à nous écouter
sur un dossier très précis, j'aurais aimé
savoir qu'on allait parler de toutes sortes de choses, dont Viens et dont la
barricade qu'on... le dossier chaud qu'on subit, là, présentement, donc. Mais je vais répondre à toutes les
questions de mes collègues sur n'importe quel dossier. Ça va me faire plaisir. Mais j'aurais aimé, par
mesure de transparence, avoir un titre qui reflète bien les discussions
qu'on a aujourd'hui pour l'ensemble des gens qui nous écoutent aujourd'hui et
ceux qui auraient pu nous écouter, parce qu'il y a certaines personnes, M. le Président, qui ont un intérêt pour un
certain dossier ou un autre puis, quand ils voient que ce n'est pas le dossier auquel ils ont un intérêt,
ils ne regardent pas ce qu'on dit. Donc, j'aurais aimé un petit peu plus
de transparence à ce sujet-là puis
d'intégrer dans le titre ce que le député de D'Arcy-McGee voulait bien parler
aujourd'hui. Mais je vais répondre à toutes les questions, soyez assuré, M. le
Président.
Naturellement,
le député a cité le premier ministre puis qu'il y a eu des gestes qui ont été
posés. Effectivement, je suis d'avis
qu'on a une obligation de résultat, et une obligation de résultat commence par
des gestes que l'on doit faire immédiatement.
C'est ce que notre gouvernement a fait. Il y a eu des excuses historiques aux
Premières Nations, du premier ministre,
le 2 octobre. J'ai la date du 2 octobre. Je vous assure que le
premier ministre, lors du dépôt de l'ENFFADA, le 3 juin, a eu des commentaires aussi disant qu'on n'en avait pas
assez fait, qu'il fallait faire plus pour les Premières Nations.
Mais
les excuses ont suivi après le dépôt du rapport Viens, parce que nous
attendions, nous savions qu'il y aurait un dépôt de rapport au mois de septembre. Mais ça a eu lieu le
30 septembre, le dépôt du rapport, où j'ai d'ailleurs invité tous mes collègues des formations politiques à
m'accompagner. Ça s'était fait à Val-d'Or, toujours dans l'optique de ne
pas politiser le dossier, qu'ils soient avec
nous, tous les députés de l'opposition avec nous, notre équipe, afin de
rencontrer les gens là-bas, afin de parler
avec eux, afin d'entendre les mêmes mots que j'ai entendus. Donc, c'était
important pour moi que ces gens-là... que les députés de l'Assemblée
nationale m'accompagnent.
Donc,
il y a eu les excuses, comme je vous le dis, le 2 octobre. Après ça, on a
commencé à faire des annonces, bon, l'hôpital de Chisasibi. Ensuite, le
premier ministre, le 8 octobre, a fait une reconnaissance des principes de
la déclaration ici, à l'Assemblée nationale.
Il y a eu une invitation aux chefs pour discuter du processus de la mise en
oeuvre de la déclaration.
Je
rappellerai à tous mes collègues ici et à ceux qui m'entendent que, depuis le début,
j'ai fait des envois postaux. Je l'ai
dit publiquement, j'ai fait l'invitation publiquement que nous attendions une
date pour parler de la déclaration des Nations
unies pour convenir ensemble, Premières Nations et gouvernement du Québec, sur
le sens des mots. Et je pense que mon
collègue de l'opposition officielle est assez au courant parce qu'il y a eu les
informations de son parti politique et les informations probablement de l'ancien ministre, M. Kelley, qui...
D'ailleurs, la déclaration, ça fait 12 ans qu'elle est... presque 13 ans, là, qu'elle a été déposée,
alors ils le savent très bien, tout comme nous, leurs demandes à eux, aux
Premières Nations, c'était de donner un sens
aux mots. Donc, moi, je réitère la même position que l'ancien gouvernement, qui
est de donner un sens et d'avoir une discussion de nation à nation.
• (10 h 20) •
On
a eu aussi une première rencontre, parce que, lors du dépôt du trois... de
l'ENNFADA et de Viens, à partir de ce moment-là,
on a déjà enclenché un processus dans l'agenda où est-ce qu'on pourrait faire
notre première rencontre. Alors, on a
fait notre première rencontre le 17 octobre, toujours avec l'invitation de
tous mes collègues, pour qu'on puisse travailler tous ensemble sur la
suite de ces rapports.
Nous
devions faire, nous, au gouvernement, avec l'équipe de ma sous-ministre,
Mme Thomas, de juxtaposer les deux rapports pour être capables de
travailler efficacement et immédiatement. Alors, on a enclenché le processus de
juxtaposer les dossiers, de regarder quels
étaient les appels à l'action ou les appels à la justice que seul le
gouvernement pouvait faire sans passer par
des projets de loi ou... Ça fait qu'on a enclenché le processus et on a
commencé à travailler. On n'avait pas
besoin d'avoir tout le monde alentour de la table pour certains appels à
l'action ou appels à la justice. Par contre, ceux auxquels on doit travailler en collaboration, de nation à nation,
le but de la rencontre du 17 octobre, c'était d'avoir un premier...
d'avoir des échanges pour qu'on puisse trouver ensemble comment on allait le
faire.
Moi,
je dois vous avouer, M. le Président, là, que j'étais déstabilisée, parce que,
quand on se rencontre comme aujourd'hui,
tout comme mes collègues, on se prépare. On a un thème, on a un ordre du jour,
on a des points très précis, on va
dans nos recherches, on s'installe, on a tous nos papiers, on s'installe, on
est prêts, on est prêts à répondre, on est prêts à donner de
l'information.
Cette
journée-là, le 17 octobre, je n'avais rien, M. le Président. C'était
vraiment, là... J'avais le vertige, parce que je me disais : Bon, comment on va... par où on commence? J'ai osé
apporter une seule page, une seule feuille, en fait, avec trois cercles, puis c'était une proposition très
timide que j'ai déposée du bout des doigts, parce que je ne voulais pas
me faire dire que je voulais être encore
paternaliste ou colonialiste, mais je voulais vraiment que les gens sentent
qu'il y avait une volonté de
travailler ensemble. Et j'ai été vraiment surprise, j'ai eu une belle réception
de toutes les nations. C'était vraiment, là, une belle journée, le
17 octobre.
On
a convenu d'une deuxième journée ensemble pour faire la suite de cette première
journée, où tout le monde retourne
chez eux, réfléchit, et on revient le 27 janvier dernier. Le
27 janvier, là, on avait un ordre du jour, mais pas la mienne, M. le Président, celle des Premières
Nations. Les Premières Nations avaient décidé d'un organigramme, et j'ai
accepté d'emblée, parce que moi, un organigramme ou l'autre, il n'y avait pas
de problème.
Alors,
on a eu, après ce 27 janvier-là, deux rencontres techniques, et, à chaque
fois, à chaque moment, lorsqu'on a des
informations ou lorsqu'on a des invitations, j'invite tout le temps mes
collègues de l'opposition parce que je veux que ce dossier-là ne soit
pas politisé. Alors, je réitère ma volonté pour faire de belles échanges
aujourd'hui au salon bleu. Merci, M. le Président.
Argumentation
Le
Président (M. Tardif) :
Merci, Mme la ministre. Vous me permettrez ici de faire un petit écart.
Nous allons saluer les gens des Premières Nations qui se sont joints à nous, qui sont dans les tribunes aujourd'hui. Nous vous souhaitons la
bienvenue à cette interpellation au
salon bleu. Merci d'être là. Et je repasse la parole, le droit de parole, avec
la période d'échange, au député de
D'Arcy-McGee en... Le député est également porte-parole en matière d'affaires
autochtones. Cinq minutes, M. le député.
M. Birnbaum :
Merci, M. le Président. Je vais ouvrir une petite parenthèse sur la
partisanerie, et on va la fermer bien
vite, parce que, par respect au grand chef, aux familles, we are going to get
to work this morning. I will try to contain my anger d'être accusé, dans un premier temps, de politiser l'affaire
par le fait d'interpeler la ministre pour qu'on mette la grande lumière
sur le progrès ou là où il y a un manque, sur les questions tellement sérieuses
devant nous. Ce n'est pas de la
politisation. Et le sujet, est-ce qu'il n'est pas évident? Est-ce que j'aurais
pu choisir un autre titre? J'aurais été bien ouvert aux suggestions.
Let's get to work, let's understand each other.
Et je prends
la ministre à ses paroles. Nous avons une tâche tellement sérieuse, il n'y a
pas de place pour la chicane partisane.
On a chacun nos rôles à dire, mais je comprends que j'ai ma responsabilité de
me joindre à la ministre responsable pour
assurer du progrès. Là, je ferme les
parenthèses, qu'on passe à l'action sur les questions d'une importance
capitale devant nous.
Le rapport d'enquête nationale sur les femmes et
les filles disparues et assassinées, volet Québec, parle, à la page 162, d'un des gros problèmes devant
nous, et je cite : «Nous demandons au gouvernement du Québec de
remettre aux familles autochtones toutes les informations dont il dispose
concernant les enfants qui leur ont été enlevés suite à une admission dans un
hôpital ou tout autre centre de santé au Québec.»
Nous sommes
en train de parler d'un aspect du problème déchirant, déchirant suite à
l'enlèvement et la disparition souvent
des enfants des familles, dont on a des témoins avec nous aujourd'hui. We're talking about the most basic and difficult of tragedies to
deal with, families who have not only had to find their way to heal after
having a child taken from them, having to find ways to heal after having
learned sometimes terribly circuitously about the loss of a child.
Est-ce qu'on peut, chacun de nous, imaginer vivre
un tel deuil, une telle douleur et d'ajouter un autre chapitre, une autre indignité, de ne pas être en mesure de
retracer la vraie histoire de cette tragédie-là? Quel déchirement! Est-ce
qu'il fallait... est-ce qu'il faut
s'attaquer à un tel problème? Mais oui. Est-ce que le gouvernement, et
j'imagine en bonne foi, a fait une tentative? Oui. Est-ce que c'est
clair et net que ce n'était pas la bonne façon de procéder? La réponse, une
autre fois, c'est oui.
Vous allez
vous rappeler que je parle des amendements, des amendements ajoutés, presque à
la dernière minute, à un projet de loi sur les pharmacies. Avant, je
veux ouvrir et fermer une parenthèse très vite. Est-ce que les partis de l'opposition, en catimini et avec grande
ambivalence et colère, ont dû dire : Oui, voilà un petit pas tellement,
tellement pas bien fait de l'avant? Oui, on l'a fait et on est conséquents.
Est-ce qu'il
faut maintenant, suite aux conseils de la Protectrice du citoyen, suite aux
conseils du grand chef, suite aux
exigences des familles concernées, retirer ces amendements? Ce qui est très
faisable pour le gouvernement s'il y a la volonté exprimée lors des excuses du premier ministre. If we can take the Premier at his
words, if we can understand that the minister responsible, despite insisting that her
Government will go ahead, will be ready to reconsider based on all the evidence.
Est-ce qu'on va avoir un constat de la ministre
responsable qu'au bénéfice des familles concernées, pour satisfaire les critiques très, très, très documentées de la
Protectrice du citoyen suite aux interventions des leaders autochtones,
on va sans délai retirer ces amendements ficelés de façon très douteuse pour
mettre voix à la volonté exprimée par la ministre
responsable de donner suite aux recommandations du rapport Viens, et déposer
comme il faut, en bonne et due forme,
un projet de loi qui va être assujetti respectueusement aux négociations et
collaborations des familles du monde concerné? Merci., M. le Président.
Le Président (M. Tardif) :
Merci. Merci, M. le député. Mme la ministre. Vous disposez de cinq minutes.
• (10 h 30) •
Mme D'Amours :
Merci, M. le Président. Bon, on tombe tout de suite dans le rapport de
l'ENFFADA, puis c'est un dossier
auquel je porte une attention particulière, parce que c'est les femmes et les
filles assassinées et que, dans ce document, dans ce rapport-là, il y a
20 recommandations qui sont spécifiques au Québec.
Là, on va
parler directement de l'appel à la justice n° 20.
L'appel à la justice n° 20, ça parle des bébés, ça parle des familles qui veulent avoir l'information. C'est
leur demande. Ce rapport-là, cette commission-là a duré plusieurs
années. C'en est une commission... Cette
commission nous a apporté des informations auxquelles, aujourd'hui, moi, j'ai honte. Et lors de
ma motion, où lorsque j'ai parlé de ces familles, que j'ai parlé de ces enfants
qui avaient un nom, les familles étaient ici en haut... Je les ai rencontrées après et, M. le Président, quand ils m'ont pris par les épaules, ils m'ont dit : On a
confiance en vous, vous allez agir. Je n'ai
pas le droit à l'erreur. Le mot «agir» a une grande signification pour moi. Consultation, à mon sens, a été faite. Le temps, ça fait plus de
50 ans. Et ce que mon collègue... bon, je ne pense qu'il n'avait pas
l'information, mais je vais lui mentionner aujourd'hui, ça fait que donc il va
avoir l'information.
Quand
on parle du projet de loi n° 31, ça n'a pas été pensé à la dernière minute,
parce que dès le lendemain que j'avais rencontré les familles ici puis
que je leur avais dit : Moi, je ne fais pas de promesse, le grand chef
attikamek d'ailleurs m'avait vu avec les
familles puis il m'avait dit : Ne les déçois jamais, ne les laisse pas sur
le coin de la rue. J'ai dit au grand
chef : Non seulement je ne les laisserai pas sur le coin de la rue, je
vais leur donner la main et je vais traverser la rue avec eux. Dès le lendemain, j'ai demandé à ma cheffe de cabinet et
ma sous-ministre une rencontre avec la ministre de la Santé et le
sous-ministre. On a eu une rencontre dans les jours qui ont suivi sur ce
sujet-là, puis là j'ai parlé au sous-ministre de la Santé puis je leur ai
dit : Ça fait 50 ans que ça dure, ça fait 50 ans qu'ils veulent
avoir la vérité, qu'ils veulent la justice.
Il y a eu un rapport, l'ENFFADA, le rapport de
l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues où il y a un chapitre... il y a
20 appels à la justice que pour le Québec. Il faut agir. On a discuté. À
chaque fois, on revenait à :
Bien, ça prendrait une commission d'enquête, une commission d'enquête. Oui, une
commission d'enquête, M. le
Président, moi, des commissions d'enquête, j'en ai juste une en tête. Il y en a
plusieurs, mais j'en ai juste une en tête, où ça a déçu bien des gens, la commission d'enquête Charbonneau. Je vais
prendre elle, je vais prendre cet exemple-là, hein? Les gens ont suivi ça, les Québécois ont suivi ça à la lettre. Ils
étaient dans leurs téléviseurs puis ils écoutaient l'enquête. Puis d'ailleurs j'ai une de mes collègues qui
s'est fait connaître par son petit claquement de doigts. Qu'est-ce que ça
a donné à la fin? Est-ce qu'il y a eu des
arrestations? Est-ce qu'il y a eu des... Non. Ce que ça a donné, c'est de
l'information sur un système qui existait. Une commission, c'est ça. Une
commission d'enquête, c'est ça.
La commission
de l'ENFFADA, ça nous a donné les outils pour dire : Maintenant, il faut
agir. Donc, je disais au sous-ministre de la Santé : On revient à
une commission d'enquête, je ne veux pas que ça dure encore trois ans, quatre ans, cinq ans, je veux agir. Il me semble
qu'il y a une solution. Comment peut-on trouver cette solution? Et il
est arrivé avec le projet de loi dont on
parle aujourd'hui. Ce n'est pas à la dernière minute, là, c'est il y a
plusieurs mois. Donc, ce n'est pas à la dernière minute que je
travaille, puis je travaille en collaboration avec plusieurs personnes.
Le
Président (M. Tardif) : Merci, Mme la ministre. Je passerais
maintenant la parole, dans cette première série d'interventions, au
député d'Ungava. M. le député.
M.
Lamothe : Mme la ministre, M. le Président, collègues, j'aurais bien
aimé prendre le 10 minutes d'un coup. Par contre, je vais prendre
deux fois cinq minutes pour le même... si on veut, le même discours.
Si on veut
réussir, avec le rapport Viens, à travailler, à faire en sorte que ça marche,
c'est important de connaître et de reconnaître l'histoire puis c'est
important d'en écrire une aussi. On a une belle opportunité.
Je suis membre
de la Commission de l'exploitation sexuelle des mineurs. Le 21 janvier
dernier, Mme Viviane Michel, présidente de Femmes autochtones du
Québec et deux collègues sont venues nous rencontrer et nous parler. Mme Michel
a fait une allocution d'environ 12 minutes, une allocution que j'ai
saluée, une allocution au cours de laquelle je l'ai félicitée. Suite à ça,
j'ai expliqué à Mme Michel, puis ceux qui me connaissent savent que je ne
suis pas prétentieux, que j'avais la recette
pour faire en sorte de développer un partenariat, de faire en sorte de
travailler ensemble pour réussir une fois pour toutes, et ce, versus les
142 recommandations du rapport Viens.
Je vais
revenir avec ma recette plus tard, sauf que, quand je parle de connaître
l'histoire, Mme Michel a mentionné à un certain moment donné, là, il y a le pensionnat autochtone. Il y en a
un brillant, à un certain moment donné, qui s'est levé puis qui a dit qu'il faut assimiler les
autochtones. On a créé les pensionnats autochtones. On a sorti les jeunes des
familles puis on les a envoyés au
pensionnat. On a cherché à leur faire perdre leur identité en leur coupant les
cheveux, en ne les laissant pas
communiquer dans leur langue. On les a abusés physiquement puis, en bonus, on
les a agressés sexuellement.
La rafle des
années 1960, on en parle tantôt, des bébés disparus. Ma fille a accouché
lundi midi, j'étais là mardi pour
visiter. Puis la relation mère-fille, mère-fils à la naissance, et tout au long
quand on grandit, est vraiment importante. Je peux juste imaginer ce que
les femmes autochtones ont dû ressentir lorsqu'on enlevait leurs bébés pour les
mettre en adoption puis souvent pour les vendre aussi en adoption.
Dans mon comté, déportation d'Inukjuak, j'alerte
certains faits, là, je me... on parle d'histoire. La déportation d'Inukjuak, il y en a un autre génie, à un moment
donné ,qui a dit : On va sortir des familles d'Inukjuak puis on va
les envoyer à Grise Fiord ou à Resolute Bay
sous le prétexte que, là-bas, la pêche était meilleure, la chasse était
meilleure, mais qu'en réalité c'était l'occupation du territoire qui était
l'objectif principal visé.
Les femmes disparues, assassinées, la dernière
commission d'enquête qu'il y a eu... Il y a des femmes qui disparaissaient, pas personne qui ne savait ce qui
se passait. Il y a des femmes qui étaient assassinées, il n'y avait pas
moyen de savoir les résultats d'enquête.
Avec les
quatre points que je viens de vous apporter, il y a des personnes qui ont
souffert, des familles qui ont souffert
puis qui souffrent toujours, puis ça, c'est en plus, en bonus si on veut, des
échecs des services gouvernementaux. J'ai
commencé à travailler dans le Nord en 1989, puis j'ai vu ça aller, puis c'est
partout au niveau autochtone, c'est que les gouvernements ont toujours su être capables de trouver des solutions aux
problèmes des autochtones sans les consulter, sans les impliquer puis
sans adapter les lois puis les règlements.
Cette
histoire-là, ça a été reconnu. Il y a eu des rapports qui se sont faits. En
1991, la Commission royale sur les peuples
autochtones, après les événements d'Oka. Ensuite de ça, il y a eu la
déclaration des Nations unies en 2007. Il y a eu le rapport
vérité-réconciliation en 2015, la commission... récemment, la commission des
femmes, filles autochtones disparues et
assassinées, et finalement, la raison pour laquelle qu'on est ici ce matin, le
rapport de la commission Viens.
Ce que je
veux dire dans tout ça, c'est que ces rapports-là nous donnent des lignes, ces
rapports-là nous donnent des recommandations. À partir du moment qu'on
connaît l'histoire qui n'est pas très, très jojo, dans les 50,
75 derniers... l'histoire des
autochtones au Québec, on a deux choix : on continue à vivre comme ça pour
les 50, 75 prochaines années ou bien on écrit l'histoire. Ça fait que je vais
vous expliquer comment écrire l'histoire tantôt dans ma deuxième
intervention de mon cinq minutes. Merci.
Le Président (M. Tardif) : M.
le député, merci. Je vais céder maintenant la parole au député de l'opposition
officielle. Député.
• (10 h 40) •
M. Birnbaum :
Merci, M. le Président. On va poursuivre nos discussions sur ce projet de loi n° 31. J'écoute la mise en
contexte très pertinente de mon collègue le député d'Ungava, ce qui nous
interpelle davantage à faire les choses correctement et avec respect. Juste pour nous rappeler de l'importance
du dossier dont on parle, la cheffe de la communauté Anishnabe de Lac-Simon disait que certaines femmes
n'osent même pas demander de l'aide ou dénoncer la violence dont elles sont
victimes par peur de perdre leurs enfants. En langue anishnabe, les termes
«directeur de la protection de la jeunesse»
sont traduits par «celui qui enlève les enfants». Je ne parle aucunement
de la dévouance, le professionnalisme de nos gens qui travaillent pour la DPJ. On parle, là, d'une lacune énorme,
un gouffre énorme entre la façon que les services sont offerts et les
réalités. Est-ce que ces amendements du projet de loi n° 31
sont moyennement... ou la réponse? La question se pose.
J'aimerais citer la ministre responsable lors du
débat sur ces amendements, le 29 novembre, et je la cite : «Peut-être que j'aurais dû, moi, déposer un projet de loi en bonne et due forme, étant la ministre des Affaires autochtones. Mais, en déposant le projet de loi, combien de temps ça aurait pris encore? Six mois? Un an? Je me
disais : Bien, voilà...» «Je me
disais — je trouve ça intéressant : Bien,
voilà l'opportunité que ma collègue puisse l'insérer dans son projet de
loi, parce que c'est un article-là, c'est...
avec des amendements qui sont très, très simples, très simples, qui vont
changer le cours de l'histoire de ces bébés disparus là, très simples.»
«Alors, Mme
la Présidente — c'est
une autre citation — pour
moi, je trouve que c'est un beau cadeau de Noël qu'on vient de leur faire. Puis je suis convaincue que, malgré que
toutes les oppositions nous disent qu'ils sont d'accord avec le principe, puis qu'on doit le déposer, mais
qu'ils auraient aimé être consultés... Moi, je pense que les familles
sont, tout comme moi, je vais peser mes
mots... ils sont tannés d'être consultés, ils voulaient des action. Bien, par
ce projet de loi, parce que M. le premier ministre nous a dit :
Maintenant, il faut agir, bien, nous avons réagi dans ce dossier.» Fin de la
citation.
Mais réagi
comment? Je me permets de citer la lettre de la Protectrice du citoyen
là-dessus, et je suis d'accord avec ce
qu'elle dit au début, et je la cite : «D'emblée, je salue la volonté du
gouvernement du Québec de se mettre en mouvement afin de répondre aux
appels à la justice du rapport de l'ENFFADA.» Et je tiens à souligner :
Est-ce qu'on ne peut pas comprendre deux
choses? Premièrement, cette question est notée dans le rapport Viens.
Deuxièmement, et à juste titre, et je la
salue, la ministre responsable elle-même dit qu'elle va aller au-delà du
rapport quand il y a des questions qui pressent. Alors, le sujet est
très pertinent.
Là, je continue, la Protectrice du citoyen
note : «Toutefois, cette volonté de procéder rapidement a eu pour conséquence de ne pas permettre aux Premières
Nations et aux Inuits ainsi qu'à leurs représentants ou à toute autre
instance, comme le Protecteur du citoyen,
d'être entendus par les parlementaires sur le contenu des dispositions
législatives. En effet, les consultations
particulières et auditions publiques qui ont eu lieu concernant le projet de
loi n° 31 n'ont porté que sur les activités
réservées aux pharmaciens, qui faisaient l'objet du projet de loi tel que
présenté. Les amendements concernant la transmission d'informations aux
familles autochtones n'ont pas fait l'objet d'un tel exercice.»
M. le
Président, Le Devoir, le 11 février, dans un reportage :
«À l'APNQL, Ghislain Picard a aussi dit attendre une réponse du gouvernement Legault, à qui il a
écrit le 24 janvier, que le projet de loi actuel — on parle de 31, mais je cite
l'article — ne
"convient aucunement, ni dans sa forme ni dans son contenu", aux
besoins des familles autochtones concernées.
Il estime — le grand
chef — avoir été
"pris de court" et "par surprise" par les amendements
proposés, dont il a été avisé par les oppositions — puis
c'est moi qui ai parlé avec le grand chef — et non le gouvernement.
«Les familles
à la recherche d'un enfant disparu sont conscientes des retards que pourrait
engendrer le dépôt d'un nouveau
projet de loi, a-t-il ajouté — et c'est clé, ça. "Mais c'est
quoi, le prix pour retrouver sa dignité? Si c'est ça, les familles sont
confortables avec ça", a dit M. Picard.»
Le Président (M. Tardif) :
Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme D'Amours :
M. le Président, je vais vous lire l'appel à la justice n° 20 :
«Remettre aux familles autochtones toutes
les infos concernant les enfants qui leur ont été enlevés à la suite à une
admission dans un hôpital ou tout autre centre de santé au Québec.» Ce que ma collègue a déposé comme projet de loi, et
d'ailleurs je dois le dire, là, le projet de loi où il y a les
articles concernant l'appel à la justice 20, la volonté est d'avoir l'information pour continuer. Ce n'est pas une fin en soi, là. Ce n'est pas parce qu'on va mettre, dans un projet de loi, l'appel à la justice 20, qui va être entièrement répondu par le projet de loi n° 31, qu'on arrête de travailler. Au contraire, ça
nous donne des outils pour continuer le processus pour aller plus loin
dans la démarche. C'est juste un début à la réponse.
Avant qu'on dépose le projet de loi, puis personne
ne va être étonné ici, moi, depuis le début, puis concernant ce projet de loi là, mais d'autres projets de loi, je suis
convaincue que plusieurs chefs pourraient vous dire ce que je vais vous dire, ils pourraient corroborer ce que je
vous dis, c'est qu'on essaie de leur parler du projet de loi sans rentrer
dans les détails afin de ne pas faire en
sorte qu'on fait outrage au Parlement. À chaque fois, on essaie d'être très, très
vigilants sur les propos qu'on a. Et, à plusieurs reprises, j'ai eu
connaissance... j'ai même interpelé mes collègues lorsqu'il y avait un projet
de loi, je leur disais : Bien, je pense que ça, ça touche les Premières
Nations, il faudrait les rencontrer avant, et on le faisait.
Ça n'a pas été différent dans ce
cas-ci. Tout l'été, j'ai été en tournée. Le printemps, l'été, j'ai rencontré
des gens, je rencontrais des
familles, je rencontrais des femmes, je rencontrais des chefs, je leur parlais
de ça. Je leur disais : Vous, qu'est-ce que vous en pensez?
Ma
dernière rencontre, avant que ma collègue dépose son projet de loi, c'était les
Attikameks, chez les Attikameks, où il y avait
le grand chef Constant Awashish... il y avait les deux chefs,
M. Ottawa — je
ne me souviens plus de l'autre nom,
il faudrait que je regarde mes notes — et
il y avait une dame, une vice-cheffe. Ça fait que les trois communautés
étaient représentées. J'ai fait sortir tout le personnel pour qu'on soit entre
élus. Je leur ai parlé qu'il y aurait une possibilité qu'on intègre des amendements dans un projet de loi. Je leur ai dit quel était le projet
de loi. Je leur ai dit quel était l'objectif. L'objectif, c'est de donner toutes les infos concernant les enfants qui ont été enlevés à
la suite d'une admission dans un
hôpital ou tout autre centre de santé. C'est à nous à faire le travail, là,
dans notre propre réseau. C'est à nous de faire ça. C'est à nous de donner l'ordre aux gens qu'ils donnent
l'information. Il n'y a pas personne d'autre qui va le faire qu'à part les législateurs. Ça fait que moi, je me
demande tout le temps : En quoi le projet de loi n° 31
ne répondrait pas aux besoins des familles? Parce que ce n'est qu'un
début, là. Il faut vraiment penser que ça, c'est première étape, premier pas
vers d'autres étapes qui vont nous donner les réponses auxquelles on a besoin,
auxquelles les familles ont droit.
J'ai
consulté, M. le Président, plusieurs personnes, la commissaire,
Michèle Audette. J'ai rencontré des familles, j'ai rencontré... Dernièrement, j'ai parlé à une dame
Rosanna Niquay. Je parle régulièrement au grand chef
Constant Awashish. Je parle aux Innus.
Il n'y a pas juste des Attikameks dont les bébés sont disparus, il y en a
d'autres. Je parle aussi à ces communautés-là, je parle aussi à ces
familles-là. Puis ce n'est pas 24 heures avant le dépôt du projet de loi,
ça a été discuté. J'ai essayé de leur dire que ce n'est que le premier pas
d'une marche ensemble, et ce geste-là...
C'est mon
gouvernement qui a failli, c'est ma nation qui a failli, je dois résoudre le
problème de ce que mon gouvernement... mais
je dis «les gouvernements», parce que je ne veux pas me défiler, je suis une
Québécoise, une nation québécoise qui
a fait des torts à la nation autochtone, les Premières Nations. Donc, il faut
faire un geste de notre côté pour arriver à une solution et d'avancer
dans ce dossier.
Le
Président (M. Tardif) : Merci, Mme la ministre. Je cède
maintenant la parole à la députée ministérielle, et ça finira ce
deuxième bloc d'interventions.
• (10 h 50) •
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. Donc, je tiens d'abord à remercier le député de
D'Arcy-McGee qui me permet encore une fois aujourd'hui d'aborder une importante discussion concernant
notre leadership. Je prendrais quelques instants pour saluer la ministre
et son cabinet. Merci d'être avec nous ce matin. Les collègues
des oppositions, mes collègues et les gens dans les tribunes, merci également
d'être avec nous.
Comme vous le savez, dans mon comté, dans ma circonscription de Roberval, j'ai la chance d'avoir une communauté autochtone, et je dis bien,
oui, la chance d'avoir la communauté
autochtone de Mashteuiatsh. Je tiens d'ailleurs
à saluer les élus de Mashteuiatsh,
chef Cliff Moar, Jonathan Germain, Élizabeth Launière,
Charles-Édouard Verreault, Stacey Bossum,
Patrick Courtois et Stéphane Germain. Donc, merci à eux d'être des fidèles
collaborateurs dans ma circonscription.
Vous
savez, M. le Président, bien des événements regrettables ont eu lieu au Québec.
J'en ai même vécu un, en tant que
conseillère municipale dans ma circonscription, qui a créé et qui a laissé de lourdes traces. Au Québec,
vous savez, on est fort, on est résilient, on a l'obligation d'apprendre
à mieux nous connaître. Mais de ces épreuves-là vont souvent naître de belles
collaborations. J'en ai un exemple dans ma circonscription.
Donc,
comme vous savez, M. le Président, ma circonscription, nous avons un bel
exemple de projet, un projet mixte,
c'est celui de la Société de l'énergie communautaire du Lac-Saint-Jean. Ce
projet, c'est une collaboration entre les communautés autochtones et les deux MRC de Domaine-du-Roy et de
Maria-Chapdelaine. C'est un projet concerté chez nous. Sa fondation a eu
lieu en 2007.
La
société s'est donné comme mission de favoriser le développement et la mise en
oeuvre des ressources d'énergies naturelles,
des ressources d'énergies renouvelables sur le territoire de façon à développer
une économie locale forte, tout en
respectant les valeurs et les intérêts des milieux où ils s'implantent. Le
projet développé par la société est axé sur une vision de développement
durable et ne sont pas mis en place... et ne sont mis en place qu'après une
concertation entre tous les membres de chaque communauté, incluant Mashteuiatsh.
Le
partenariat établi entre les élus du Conseil des Innus est une source de fierté
dans notre région. Il s'agit de la première
entente de ce type qui a été signée entre des autochtones et des allochtones. La réussite de ce projet est en
grande partie due à l'approche solide de
partenariat entre les différents groupes impliqués et un grand désir d'établir
des relations durables. En ce sens
même, on a renouvelé ce partenariat dernièrement avec Biochar Boréalis. Et
cette fois, c'est toute la région qui a été impliquée dans notre milieu.
La ville de Saguenay et toutes les MRC sont impliquées.
Alors,
M. le Président, au gouvernement, nous avons exactement la même vision en ce
qui a trait aux relations avec les Premières Nations. En effet, nous
souhaitons que soient établis des partenariats durables entre les membres des Premières Nations et le gouvernement. Nous
souhaitons que la collaboration, l'écoute et l'échange constructifs
soient au coeur de nos relations et de nos réalisations afin que celles-ci
perdurent dans le temps et permettent de mettre mieux en place des actions
utiles, concrètes et adaptées à nos réalités.
Nous
souhaitons travailler avec eux. J'ai bon espoir que nous serons en mesure
d'établir un lien de confiance entre notre
gouvernement et les Premières Nations, mais cela demande du temps, des efforts
et du respect. Cela doit se faire sans précipitation et dans le respect
de chacun. Nous avons la volonté d'agir, et j'ai toute confiance en ma collègue
la ministre des Affaires autochtones et en
sa volonté de mettre en place des bases solides avec les Premières Nations, ce
qui nous permettra d'agir efficacement dans
les actions qui suivront. J'aurai la chance d'accueillir la ministre chez moi
dans quelques jours, et on ira faire, à ce
moment-là, une visite dans la communauté de Mashteuiatsh. Donc, merci de venir rendre visite à notre communauté,
Mme la ministre.
Et
je veux rassurer tous les gens que le gouvernement, et moi également, on est là pour aider, pour travailler
avec vous, pour continuer le travail et mener plus loin nos actions. Merci, M.
le Président.
Le Président
(M. Tardif) : Merci, Mme la députée. Nous débutons la troisième série d'interventions avec un député
du deuxième groupe d'opposition. J'inviterais le député de Jean-Lesage, s'il
vous plaît.
M. Zanetti : Merci, M.
le Président. J'aimerais commencer
par saluer la présence de chef Picard, de l'APNQL, et aussi des aînés dans la salle, et des
12 membres de familles attikameks qui ont perdu un enfant et qui vivent
encore avec les conséquences de cette
perte-là. Et j'émets le souhait en même temps qu'un jour on ait des
institutions politiques dans lesquelles,
hein, ils ne soient pas pris pour se faire représenter par nous, mais qu'ils
puissent être là comme des acteurs directs pour que leurs voix soient
entendues sans intermédiaire et sans filtre.
Je vais revenir sur une chose. Ce dossier-là,
là, il est éminemment politique. Il n'est pas partisan, mais il est politique parce
qu'il s'agit de pouvoirs, d'autodétermination, de droits, de dignité. On ne
peut pas dire : Il ne faut pas politiser
ce sujet-là. Ce n'est pas une affaire de judiciaire, c'est une affaire qui
parle de nos relations de nation à nation. Alors, je ne veux pas qu'on
perpétue cette idée-là qu'il ne faut pas politiser l'affaire, c'est éminemment politique.
Ici, à l'Assemblée nationale, là, assez récemment, depuis les rapports de
l'ENFFADA et le rapport Viens, on a adopté des motions qui disaient : Que le gouvernement du Québec, là, reconnaisse les principes et s'engage à
négocier la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les
droits des peuples autochtones avec les Premières Nations et Inuits.
On a fait ça, et la commission Viens et l'ENFFADA aussi, le rapport de
l'ENFFADA, demandent de procéder à l'adoption d'une loi garantissant la
prise en compte de la déclaration des Nations unies.
On a dit ça,
on a déclaré ça, et ça me fait un peu penser à un proverbe italien, là, qui
dit : Entre le dire et le faire, il y a la mer. (S'exprime en
italien). Ça veut dire qu'il y a souvent une longue distance entre les deux. Et il y a une parole de Descartes qui dit, René Descartes, philosophe
français : Si vous voulez savoir ce que quelqu'un pense, n'écoutez pas
ce qu'il dit, regardez ce qu'il fait. Et je
veux dire ça parce que je pense que c'est comme ça qu'on doit analyser ce que
nous sommes en train de faire. Et,
quand je dis «nous», là, je ne dis pas juste «le gouvernement». Je ne veux pas
que ça se transforme en procès
d'intention. Je sens et je suis sincèrement convaincu que vous avez les
meilleures intentions du monde, et je parle de la ministre et aussi de son équipe au complet, mais on le sait, les
ministres, ils sont dans une équipe, et puis ce n'est pas les ministres
qui décident si on va faire un projet de loi sur ça, puis comment le
gouvernement va utiliser son temps de commission. Ça se passe au bureau du
leader. Donc, je nous invite ensemble à pousser là-dessus.
Et je veux
donner un exemple d'écart important qu'il y a entre la déclaration des Nations
unies qu'on a décidé, nous,
d'appliquer, et ce qu'on est en train de faire avec le projet de loi n° 31. Dans la déclaration, à l'article 19, on dit : «Les États se concertent et coopèrent de bonne foi avec
les peuples autochtones intéressés, par l'intermédiaire de leurs propres
institutions représentatives, avant d'adopter et d'appliquer des mesures
législatives ou administratives susceptibles de
concerner les peuples autochtones, afin d'obtenir leur consentement préalable,
donné librement et en connaissance de cause.»
Et là ce
qu'on fait avec le projet de loi n° 31, c'est qu'on fait
ça pas de mauvaise foi, là, mais tellement rapidement que, cette consultation préalable, elle n'a été
faite que partiellement. Elle n'a pas été faite donc pleinement et donc
elle n'a pas été bien faite. La Protectrice du citoyen a soulevé ça, cet
enjeu-là, et demande au gouvernement de retirer les amendements et de faire un projet de loi distinct pour ça. Nous, on fait
la même demande aussi. L'APNQL fait la même demande. Ils disaient, en
janvier dernier, que ce projet de loi, et j'ouvre la citation, «ne leur
convient aucunement, ni dans sa forme ni dans son contenu». Fin de la citation.
Alors, il
faut, je pense, qu'on aille de l'avant là-dessus, et la bonne nouvelle, c'est
que c'est possible. Même si le projet
de loi n° 31 est très avancé, par consentement, avec tous
les membres de la commission, il serait possible de retirer les amendements. Il serait possible de prendre un
engagement clair à déposer un projet de loi complètement voué à ça. Il
faut qu'on donne une suite à l'ENFFADA et au
rapport Viens. Il faut qu'on soit cohérents avec nos paroles et la
Déclaration des Nations unies sur les
droits des peuples autochtones, et donc il nous faut un projet de loi distinct pour mettre en place des mécanismes
d'accès aux renseignements personnels détenus par les municipalités et organismes du Québec
concernant les enfants autochtones disparus
ou décédés et à leurs familles en consultant les autochtones en amont. Et je
suis persuadé qu'on partage cette ambition-là sur le fond. Maintenant,
allons jusqu'au bout et poussons ça au bureau du leader du gouvernement tous
ensemble parce que c'est là que ça va se passer.
• (11 heures) •
Le Président (M. Tardif) : Merci,
M. le député. Merci. Mme la ministre, je vous recède la parole.
Mme D'Amours : M. le
Président, je trouve que c'est des
bonnes questions. C'est aussi des questions qu'on doit songer dans l'avenir, mais il faudra les songer
pas juste le provincial, mais le fédéral. De l'autodétermination donnée
au peuple, là, en partie, ça passe par le
fédéral et par le provincial, puis pour faire ça, bien, ça prend la modification de la Constitution, puis le fédéral ne veut pas ouvrir
là-dedans. Est-ce qu'on va attendre après ça pour donner des réponses aux
appels à la justice et aux appels à l'action des deux rapports?
Il n'y a personne ici qui est surpris quand je
disais au tout début que moi, mon intérêt, c'est les femmes et les enfants. Non seulement c'est mon intérêt, mais
c'est mon leitmotiv pour me lever le matin, pour travailler dans un
cabinet qui, j'aime bien le dire, 50 % est autochtone, puis c'est voulu,
c'est moi qui les ai engagés.
De le mettre,
de l'insérer... Bien, mon collègue leader a le dos large, là, mais ce n'est pas
sa volonté d'insérer ça dans un
projet de loi. La volonté était de remplir une action, de faire un appel à la
justice, on parle de l'appel à la justice n° 20
concernant les bébés, qu'on puisse passer à l'action. Rapidement, je
n'aime pas le mot «rapidement», moi, je dirais «immédiatement» parce que ce n'est pas vrai que
j'ai fait ça à la dernière minute. Depuis le début que je suis élue,
depuis le 18 octobre dernier que ma volonté, c'est de donner justice aux
familles. Là, on parle des bébés. On parle de l'action.
Moi, j'aimerais ça entendre les collègues me
dire, les amendements, dans quelle mesure ils ne répondent pas spécifiquement
aux actions. Puis quand j'entends mon collègue du deuxième groupe d'opposition,
je me dis : Wow! Est-ce qu'à chaque
fois qu'on va faire une action pour les appels à l'action auxquels seul le
gouvernement peut intervenir dans son
propre gouvernement, dans ses propres ministères, s'il faut, à chaque fois,
qu'on fasse un projet de loi, puis qu'on fasse une commission, puis qu'on... À un moment donné, quand je disais
qu'il y a des gestes qu'on doit poser immédiatement, que seuls, nous, peuvent le faire, c'est des
gestes auxquels on doit donner les outils nécessaires pour les étapes à
venir pour que, de nation à nation, on travaille.
Le
17 octobre dernier, un de vos collègues était là. Le 27 octobre
dernier, une autre de vos collègues, votre cheffe, était là. Elle le sait très bien, vous le savez
très bien, tout comme la première opposition, que les gestes qu'on pose
sur des appels à l'action qui vont concerner
de nation à nation dans le but de donner un service adéquat, il faut prioriser
ensemble les appels à l'action. L'appel à
l'action n° 20 sur le rapport de l'ENFFADA, je le répète, c'est de remettre aux
familles l'info concernant les enfants qui leur ont été enlevés à la suite
d'une admission à l'hôpital ou dans un centre de santé. Il n'appartient qu'à nous d'ouvrir la porte, de leur
donner l'information pour qu'ensuite on fasse des gestes ensemble
pour donner suite. Ce n'est qu'un pas.
Alors, je répète ma question, moi, M. le
Président, à mes collègues : En quoi le projet de loi n° 31,
les articles concernant l'appel à l'action n° 20, brime les familles? En quoi? Ce n'est que le début. Certaines
personnes disent qu'ils n'ont pas été
informés. Ceux qui ont été informés ne le disent pas, hein, c'est normal.
Certaines personnes disent qu'on ne va
pas assez loin. D'autres comprennent que c'est juste un pas pour la marche. Je
n'ai pas encore traversé la rue, main dans la main, avec les familles. Moi, je suis encore sur le coin de la rue
avec eux, mais je veux attendre que la lumière soit verte. Je veux traverser et, lorsque j'aurai
l'information, parce que c'est les ministères du gouvernement qui détiennent cette première information à laquelle on doit procéder à
une autre étape, bien, il faut que je le fasse en collaboration avec mes collègues pour qu'on puisse aller à une deuxième étape
avec les nations autochtones.
Le
Président (M. Tardif) :
Merci, Mme la ministre. Alors, pour clore ce troisième bloc
d'interventions, j'inviterais le député d'Ungava, s'il vous plaît.
M.
Lamothe : Je vais continuer
ma première intervention. Ça fait que comment réussir à... suite à
l'interpellation, là, comment réussir les
52 recommandations du rapport Viens? Ce qui est vraiment
important, c'est qu'entre le gouvernement... puis
quand je parle du gouvernement, c'est le gouvernement, les partis
d'opposition, nous. C'est de créer une communication
avec les peuples autochtones et inuits,
c'est de créer une communication respectueuse, une communication honnête,
une communication de confiance continue. Je salue la ministre qui, le
27 novembre dernier, a proposé aux dirigeants des peuples autochtones et inuits qu'elle était disponible, de l'appeler
n'importe quand. Il faut que ce soit une communication continue, durable, pas durable pour le quatre, 10,
15 prochaines années, durable pour les 75 prochains... 100 ans.
On a la chance d'écrire l'histoire.
L'histoire qui a été vécue, c'est du passé, c'est là, ça va rester, mais par
contre on a une chance d'écrire une
nouvelle page d'histoire, puis c'est de le faire aussi en collaboration puis surtout démontrer une bonne volonté.
Quand je
parle de communications, c'est quoi? Bien, pour moi, une communication, je pense que c'est de savoir parler,
c'est de savoir écouter puis surtout savoir comprendre. Ça fait qu'en établissant une communication
semblable on ne peut pas se tromper. À
partir de là, c'est quoi le plan de match? On a 142 recommandations, on
s'assoit ensemble, on détermine les priorités,
quelles sont les priorités des 142, puis on y va une par une. On se fixe des
objectifs. Les objectifs sont déjà
fixés. Par contre, on fait quoi face à tout ça? Comment qu'on le fait? On
détermine comment qu'on le fait, qui fait quoi. On se fixe des échéanciers, beaucoup de rigueur dans les
échéanciers. Puis il faut, comme le mentionnait le député de D'Arcy-McGee, il faut atteindre des résultats,
des résultats concrets, qu'on fasse ça un par un puis, une fois qu'un
est fait, on en fait un second puis on fait
en sorte que, justement, l'évolution de ces recommandations-là soit appliquée.
Puis c'est de cette façon-là qu'on va être capable, justement, de créer
cette communication-là honnête, durable, respectueuse puis de confiance.
Les gouvernements ont du travail à faire pour
améliorer les services, que ça soit au niveau fédéral ou au niveau provincial. Je mentionnais tantôt que, les
50 dernières années, on allait avec des règlements puis des lois
qu'on appliquait sans consultation, sans prendre en considération la réalité
des peuples autochtones. On a du travail à faire là-dessus. Les dirigeants autochtones ont également du travail à faire
dans leurs communautés. On n'a pas personne de parfait, sauf qu'on a du travail à faire. On a un rapport, le rapport de
la commission Viens, à travailler avec les 142 recommandations. Ensuite de ça, on a d'autres rapports qu'on
peut travailler ensemble également pour améliorer la qualité de vie des autochtones dans leur milieu,
pour faire en sorte également de travailler en partenariat, développer
un partenariat également. Je pense que le
temps est venu à la réconciliation, la cohabitation positive. Je crois
fortement à ce qu'une communication,
comme je le mentionnais tantôt, c'est vraiment gagnant, c'est «winner». Puis,
si on avait établi une communication
semblable 50, 75 ans passés, on ne vivrait pas aujourd'hui les événements
qu'on vit présentement. On n'aurait
pas vécu une crise d'Oka qu'on a vécue en 1990 puis on n'aurait pas également
vécu l'histoire des 50, 75 dernières années. Comme je le dis, le
temps est à la réconciliation. La façon de le faire, c'est de s'asseoir
ensemble, travailler ensemble puis d'établir une communication durable, honnête
et respectueuse.
So, let's sit, let's talk,
let's work. Il y a beaucoup de travail à faire, mais commençons par le
commencement, une étape à la fois, de façon positive pour un futur meilleur
pour les relations entre les gouvernements et les peuples autochtones et
inuits. Merci.
• (11 h 10) •
Le
Président (M. Tardif) :
Merci, M. le député. C'est ce qui termine le troisième bloc. Et nous
commençons avec le député de l'opposition officielle, de D'Arcy-McGee, notre
quatrième bloc. Cinq minutes, s'il vous plaît.
M. Birnbaum : Merci, M.
le Président. Je tiens à saluer un
constat bien simple de la députée de Roberval,
parce que des fois les mots... toujours,
les mots sont importants. Et je la salue, elle a dit une petite chose,
mais qui en dit long, elle a
dit : J'ai de la chance d'avoir la communauté de Mashteuiatsh au
sein de ma circonscription. Est-ce qu'on ne rêve pas? Mais il faut que ce soit un rêve réalisé de passer
beaucoup plus de temps sur la collaboration, sur le développement
de notre territoire ensemble avec nos voisins et voisines des Premières Nations
et des communautés inuites. Alors, je tenais juste
à noter ça, parce qu'on est souvent, et c'est notre fardeau collectif, mais
dans les difficultés et des difficultés tellement réelles qu'on oublie l'importance
de la cohabitation et la richesse que nous avons à partager. Alors, je tenais
juste à souligner, ça, ça m'a touché.
Dernier mot
sur le projet de loi n° 31. Je trouve ça important de constater qu'il
n'y a rien que moi, j'aurai entendu, qui
change la donne. Nous avons une demande très claire et nécessaire
de repartir avec un projet de loi unique et désigné à résoudre ces difficultés
et à redonner la dignité aux familles dont il y a des représentants avec nous.
Juste une petite chose sur le processus. La
ministre responsable, quand elle parle de la contrainte de la possibilité de l'outrage au Parlement, ce n'est
pas un concept conçu hier. Chaque ministre, chaque gouvernement a cette obligation, mais ce n'est aucunement, aucunement
un frein sur la consultation transparente, longue si ça prend du temps.
Ce n'est pas un frein à la possibilité
d'impliquer le monde touché et les grands experts pour ficeler nos projets de
loi comme il faut. Je me permets de dire que le ministre de l'Éducation
aurait dû se rappeler de ce concept-là aussi.
Je veux
prendre un petit peu de temps pour parler aussi de la déclaration des Nations
unies et de nous rappeler qu'il y
avait une motion unanime de cette Assemblée pour faire en sorte qu'on avance
dans l'esprit et dans la lettre de cette déclaration-là. Et y a-t-il une manifestation plus primordiale pour
opérationnaliser cette déclaration que l'importance de déclarer le droit à l'autodétermination des
communautés autochtones en ce qui a trait une autre fois à leurs enfants?
Est-ce que c'est compliqué? Entendu. Y
a-t-il des communautés de plus avancées là-dessus? Oui. Oui, il y a une
communauté qui a été le modèle pour le
projet de loi C-92, une communauté autochtone ici, au Québec, qui a été le
modèle. On parle là d'une manifestation
réelle de l'autodétermination. C'est le droit de ces communautés de gérer les
familles en grande difficulté et les
enfants qui doivent être placés, mais placés de façon qui ne les déchirera pas
de leur âme, de leur humanité, de leurs racines autochtones. Une autre
fois, est-ce qu'on ne parle pas d'une chose de base?
Maintenant,
chaque formation de cette Assemblée nationale, chaque gouvernement du Québec va
comprendre l'importance de protéger les
juridictions, mais que ça ne soit pas un prétexte pour rendre en otage des
communautés dans cette instance, les
communautés autochtones qui sont souvent prises au milieu entre les difficultés
juridictionnelles. Ce n'est pas un
prétexte pour l'immobilisme, M. le Président, surtout quand c'est de mise que
les deux paliers du gouvernement, chacun
avec sa responsabilité, ne se permettent pas de lancer la balle à l'autre. Et
là, de façon subite, la ministre de la Justice, appuyée par la ministre responsable, a dit qu'on va contester ce projet
de loi parce que c'est dans notre
plate-bande. Ça, ce n'est pas
suffisant. Alors, j'espère que la ministre va nous parler du progrès clair et net fait ici,
au Québec, pour rejoindre les objectifs qu'elle a dit qu'elle partage,
qui sont dans ce projet de loi fédéral.
Le Président (M. Tardif) : Merci,
M. le député. Je cède la parole maintenant à Mme la ministre.
Mme D'Amours : M. le
Président, on nomme souvent
APNQL, là, mais, pour ceux qui nous écoutent, j'aimerais qu'on dise
le... je vais vous dire le nom au complet, c'est l'Assemblée des premières
nations Québec, Labrador. Ça fait que, lorsqu'on va dire APNQL, voilà le titre
exact.
Chef Picard,
dont il est nommé par les chefs, là, pour les représenter, à plusieurs
reprises, me mentionne que, quand il
y a un dossier auquel on doit
travailler, là, souvent il me dit qu'il faut travailler auprès de chaque
nation. Et, dans ce cas particulier là, j'ai fait ce qu'il m'a dit. Je
suis allée voir les gens les plus ciblés dans ce cas précis et j'ai fait le
tour. J'ai fait le tour de toutes les
nations, de toutes les communautés auxquelles... Quand j'ai regardé l'enquête
nationale, que j'ai lu les recommandations, je me suis dit : Bien, il
faut que j'aille voir les chefs de ces communautés-là, des familles, certaines personnes. Et le travail a été fait.
Donc, la recommandation que le chef Picard m'avait faite pour plusieurs dossiers, je l'ai écoutée à la
lettre. J'ai fait exactement ce qu'il a dit. Je suis allée consulter les gens
concernés.
Contester la
loi, c'est un grand mot que moi, je n'emploie pas parce que
ce n'est pas une contestation à la loi, c'est un renvoi. C'est très
juridique. C'est au niveau de la justice, là, ça n'a aucun rapport avec le
dossier, le sujet de la loi. C'est vraiment
la façon dont ça a été... dont le processus que le gouvernement
fédéral a fait pour déposer cette
loi-là. On parle ici de la loi C-92. Donc, ce n'est pas une
contestation à la loi.
Avant le
renvoi de C-92, avant le renvoi — le renvoi, c'est qu'on demande à la cour de
se prononcer, là — notre questionnement,
c'est : Est-ce que le fédéral a fait en sorte, là, qu'il ne touche pas à
nos compétences? On veut avoir un avis de
la cour. Et donc, la cour, on a fait un renvoi pour qu'ils puissent nous
répondre si le fédéral a bien agi avec le provincial. C'est tout, puis ça n'a aucun rapport avec ce
qu'il y a dedans. Et non seulement je peux vous dire que ça n'a aucun
rapport, c'est qu'avant même qu'on fasse le
renvoi on a invité le chef Picard, on a invité CSSSPNQL à nous entendre. On
voulait leur expliquer qu'est-ce que
c'était, le geste d'un renvoi, et que nous voulions les inviter, parce que,
dans le C-92, nous devons commencer
le processus de discussion pour remettre aux Premières Nations de l'autodétermination
dans... là, ce qu'il s'agit ici, là, c'est pour les enfants puis les
familles, qu'on était tout à fait d'accord, qu'on était prêts à travailler
immédiatement, qu'on... Notre demande à CSSSPNQL et à chef Picard était :
Combien de personnes allaient nous interpeler,
nous demander de travailler dans le sens de C-92? Il n'y a pas un législateur
ici qui va dire qu'on est contre C-92. C'est une loi, nul n'est
au-dessus des lois, il faut l'appliquer.
Alors,
cette rencontre-là était un geste d'ouverture. Il faut travailler ensemble à
donner de l'autodétermination, sur ce
dossier-là, aux Premières Nations. Alors, notre rencontre a été : Voici,
on est prêts. Un groupe, cinq groupes, 10 groupes, on a lancé l'appel. Après la rencontre, on a
envoyé du courrier à tous les chefs les invitant à venir travailler avec
nous sur un dossier auquel ils ont droit,
avec C-92, et le renvoi s'est fait à la suite. Ce n'est pas une contestation,
je le répète, M. le Président, c'est un renvoi pour que la cour réponde à
notre questionnement : Est-ce que le fédéral vient toucher nos
compétences? C'est tout.
• (11 h 20) •
Le
Président (M. Tardif) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, la
parole serait à la députée de Roberval. Mme la députée.
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. Donc, comme mentionné plus tôt, j'accorde une grande
confiance en ma collègue la ministre
responsable des Affaires autochtones afin d'établir des relations durables et
afin de concrétiser la mise en place
d'actions concrètes et utiles, mais aussi à tous mes collègues. Nous sommes
tous imputables ici et nous nous devons de travailler de concert avec
notre ministre pour le bien de nos deux nations.
Donc,
récemment, à titre de membre de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle
des mineurs, j'ai eu l'opportunité
d'être reçue par la communauté anishnabe de Lac-Simon et ainsi que par le
centre d'amitié autochtone de Val-d'Or, et on a eu également droit à une
visite du centre de police mixte de Val-d'Or. Donc, je tiens à remercier la cheffe Adrienne Jérôme de son accueil. On a
eu l'opportunité et la chance d'avoir des discussions enrichissantes
avec plusieurs membres de la communauté et de partager un repas avec eux.
On était
13 députés, donc je crois qu'ils étaient aussi impressionnés de voir
13 députés pour la première fois au Lac-Simon, en même temps que, nous, nous pouvions l'être de pouvoir
discuter avec eux. Ces rencontres m'ont permis de mieux cerner les enjeux et les défis auxquels font
face cette nation et ainsi que les groupes qui collaborent avec eux. Un
enjeu qui m'a d'ailleurs interpelée davantage, c'est le dossier des violences
faites aux femmes issues des Premières Nations puisque les intervenantes de la
communauté d'Anishinabeg nous ont longuement fait part de leur réalité.
Toutefois,
comme vous le savez, M. le Président, notre gouvernement entend agir dans ce
dossier. Que ce soit par les actions
de la ministre responsable des Affaires autochtones ou encore celles de la
ministre responsable de la Condition féminine,
nous avons la ferme intention de collaborer avec les membres des Premières
Nations afin qu'enfin toutes les femmes
du Québec se sentent en sécurité. Ce n'est pas normal qu'on ne se sente pas en
sécurité dans sa propre maison.
Par contre,
il est important de comprendre que les réalités des femmes autochtones sont
différentes. Les femmes des Premières
Nations et les femmes inuites connaissent un taux de violence plus élevé et
sont victimes de formes de violence plus
graves que les femmes non autochtones. À cela s'ajoutent des facteurs de
vulnérabilité économique. Où peuvent-elles aller? Rester dans la communauté? Abandonner leur famille? Abandonner
leurs enfants? En ce sens, les solutions envisagées doivent être évaluées rigoureusement et elles doivent
répondre aux besoins ainsi qu'aux demandes des femmes des Premières
Nations.
En outre, la
ministre responsable des Affaires autochtones s'est déjà engagée à aider ses
partenaires autochtones dans la
recherche de solutions. Par ailleurs, nous comprenons l'urgence d'agir et la
complexité de la problématique, mais nous comptons agir avec
intelligence et respect. Les champs de nos actions doivent concerner tant la
prévention, la formation que la sensibilisation, et ce, de façon concertée avec
nos partenaires des Premières Nations, et ce, pour nos deux nations. Malgré tout, notre gouvernement est déjà en action,
notamment en octroyant du financement pour des maisons d'hébergement qui accueillent des femmes
autochtones et inuites en milieu urbain ainsi que des maisons
d'hébergement au Nunavik et en terres cries.
Nous avons également accordé un financement au projet de maison d'hébergement
de deuxième étape du Foyer pour femmes autochtones de Montréal. Mais
tout cela n'est qu'un début, M. le Président.
Bien que
certains puissent penser que nous sommes inactifs et que nous manquons de
leadership dans le dossier des affaires autochtones, nous sommes, en réalité,
grandement proactifs en mettant en place des comités de travail non partisans et axés sur la coopération des
intervenants. Dès 2018, nous avancions que nous comptions faire plus, faire
mieux pour les Québécoises et les Québécois. Cela incluait indéniablement les Québécoises
et les Québécois appartenant aux Premières Nations. Nous n'avons certes pas la même sorte de leadership
que les précédents gouvernements, mais cela est loin d'être un défaut. C'est en fait une très bonne chose, M. le Président. Notre gouvernement n'entend pas imposer, mais il entend collaborer, et c'est avec ce genre de
leadership que nous comptons faire avancer les Québécois, les Québécoises.
Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Tardif) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous allons débuter la cinquième série
d'interventions avec un député du troisième groupe d'opposition, le
député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci,
M. le Président. D'ailleurs, Matane-Matapédia, deux mots micmacs de cette grande nation qui résonnent souvent
ici, à l'Assemblée nationale, et ailleurs au Québec. Nous sommes ici pour
discuter les orientations concrètes que le gouvernement compte adopter à la
suite des 142 appels à l'action issus du rapport Viens. Dans la dernière année, pas moins de deux rapports
ont été déposés pour mettre en lumière les importantes problématiques
vécues par les autochtones du Québec. Il y a
d'abord eu le rapport sur les femmes autochtones disparues rendu public
en juin dernier puis il y a
eu le rapport issu de la commission Viens déposé à la
fin du mois d'août. Ces rapports sont consternants et mettent en lumière des réalités d'une grande tristesse. Des actions
rapides et tangibles étaient nécessaires, cependant le gouvernement
s'est davantage démarqué par son inaction tangible dans les derniers mois.
Il y a d'abord eu une rencontre avec les leaders
autochtones, le 17 octobre dernier, rencontre qui a finalement été qualifiée par ces leaders de rendez-vous manqué et pour plusieurs raisons. D'abord, le premier ministre brillait par son absence, puis la ministre des
Affaires autochtones est arrivée à
cette rencontre les mains vides, sans aucune base pour travailler, prétextant qu'elle voulait d'abord
écouter les leaders autochtones. Cet argument aurait été légitime, si la ministre n'avait
pas eu entre les mains deux volumineux rapports énonçant des dizaines de problématiques à
régler : 180 pages pour le
premier rapport, 522 pages pour le rapport
Viens. Plus de 700 pages, ça commence à être suffisant pour avoir une
bonne base sur laquelle travailler. Première improvisation du gouvernement.
Environ un
mois plus tard, fin novembre, la CAQ convoque les oppositions
pour inclure un amendement sur les Autochtones
dans le projet de loi n° 31. Or, ce projet de loi n'avait aucun
lien avec les affaires autochtones puisqu'il visait à permettre aux pharmaciens d'offrir des services de
santé supplémentaires. Pourquoi le gouvernement voulait précipiter l'inclusion de cet amendement
dans un projet de loi qui n'était même pas en lien avec les enjeux autochtones?
C'était la deuxième improvisation du gouvernement.
L'amendement
en question était sensible et il visait à remettre aux familles autochtones
toutes les informations dont le
système de santé québécois disposait concernant les enfants autochtones enlevés
ou disparus. Nous étions en faveur de l'amendement
puisque c'était l'une des demandes formulées dans le premier rapport, mais nous
trouvions déplorable que le gouvernement
garroche un amendement dans un projet de loi qui ne s'adresse même pas
principalement aux Autochtones.
Les
problématiques autochtones méritent un projet de loi qui leur sont pleinement
dédiées. Nous avons aussi appris à ce moment que les leaders autochtones
n'ont même pas été informés de la volonté du gouvernement d'inclure cet amendement et n'ont pas non plus été consultés
pour donner leur avis sur le libellé. Ça commence à devenir une recette,
M. le Président, et pas seulement dans ce
domaine. Ça nous apparaissait aussi un flagrant manque de respect. Le gouvernement prétextait à ce moment-là que passer
cet amendement dans le projet de loi n° 31 était la voie la plus
rapide pour offrir aux familles autochtones
l'accès aux données sur les enfants disparus. Or, M. le Président, le plus
ironique dans cette histoire est que le projet de loi n° 31 n'a même pas
encore été adopté à ce jour. Ce que ça nous illustre, c'est l'improvisation la
plus complète dans laquelle patauge le gouvernement sur les enjeux autochtones.
À la suite de
cette situation, une deuxième rencontre s'est tenue le 27 janvier dernier.
Encore une fois, devinez qui brillait
par son absence. Ce que toutes ces situations nous indiquent, c'est que les
enjeux autochtones ne semblent pas être une priorité de ce gouvernement.
Vous savez,
M. le Président, nous avons toujours eu une sensibilité particulière, au Parti
québécois, pour les nations autochtones.
J'entendais, il y a un instant, que le gouvernement fera mieux que les autres
gouvernements. Alors, j'espère qu'il fera mieux que ce que je vais
évoquer à l'instant. Le gouvernement du Parti québécois de René Lévesque a fait
reconnaître les noms... les 10 nations
autochtones. Nous avons fait élire le premier député autochtone en 2007
lorsqu'Alexis Wawanoloath est
devenu député d'Abitibi-Est sous notre bannière. Nous avons aussi signé
plusieurs ententes avec des nations
autochtones, dont la plus célèbre est la «Paix des Braves» en 2002, entente obtenue entre Bernard Landry
avec la nation crie. La CAQ a justement
déposé récemment une motion pour rendre hommage à la «Paix des Braves». Au-delà
des belles paroles, le gouvernement devrait s'inspirer de cette entente pour
agir concrètement dans le dossier autochtone. Tout ça, M. le Président, par un
gouvernement indépendantiste.
Justement,
quand j'entends la ministre évoquer qu'il faut attendre après le fédéral, que
c'est de juridiction fédérale, bien,
nous, les indépendantistes québécois, on croit que ça serait une excellente
occasion de redéfinir nos rapports avec les nations autochtones, si on était un pays indépendant. La CAQ a choisi
d'évoluer au sein du Canada, elle est fédéraliste, elle voit les limites de ce régime, et, encore hier, le
premier ministre du Québec devait rappeler
au premier ministre du Canada qu'il était responsable des
affaires autochtones.
En
conclusion, nous sommes très fiers de notre héritage de relations avec les
nations autochtones, et, comme le dit la
députée de Roberval, si le gouvernement peut en faire autant, on sera spectateurs, et
nous applaudirons quand ça sera le cas. Mais jusqu'à maintenant, en
matière d'affaires autochtones, ce n'est pas très reluisant. Merci.
• (11 h 30) •
Le Président (M. Tardif) : Merci,
M. le député de Matane-Matapédia. Mme la ministre.
Mme D'Amours : Bien, merci
beaucoup, M. le Président. Ça va me faire plaisir d'intervenir après ce long discours. Je dois vous dire qu'une chance que le collègue
lit les journaux parce qu'à chaque
événement, à chaque rencontre qu'on a
eue, il avait les invitations, et le Parti québécois brillait par son absence.
Ça fait qu'une chance qu'il a les journaux pour s'informer.
Vous savez
aussi, M. le Président, qu'il faut rappeler que la commission Viens, là, ça
s'étendait sur 15 années. Puis les
15 années dernières, qui était au gouvernement? Le portrait, là, que les
services offerts au gouvernement étaient... c'est une photo de l'époque. Ce n'est pas la photo
d'aujourd'hui, c'est la photo de l'époque. Alors, moi, je me demande si
c'est à propos, les propos que mon collègue dit, là.
Et on fait
des gestes d'inviter des gens à se joindre à nous, puis qu'ils ne viennent pas,
c'est une chose, puis ils ont probablement
les meilleures raisons du monde. Je ne veux pas juger ça. Mais de dire des
choses lorsqu'ils ne sont pas là lors des
discussions, de lire ce que les journalistes ont écrit, c'en est une autre,
parce que, je l'ai dit d'entrée de jeu, oui, je n'étais pas préparée à une rencontre dans la façon dont
nous travaillons, mais c'était dans la façon dont les Premières Nations veulent qu'on travaille, c'est de ne pas arriver
avec des choses toutes prêtes, toutes établies. On veut les faire
ensemble.
Alors, je me
suis, moi, dans... Quand on se prépare, on est dans notre sécurité de vouloir
bien faire les choses. On ne veut
rien oublier. Quand on regarde ça de l'autre côté des Premières Nations, quand
c'est eux qui sont concernés, c'est du paternalisme
et du colonialisme. Alors, oui, je n'étais pas préparée et je suis très fière
d'être la première ministre des Affaires autochtones de ne pas avoir été préparée pour cette première rencontre.
Je suis vraiment fière de ça. Moi, j'aime mieux, là... Je préfère mieux me défendre sur les actions que
je vais avoir faites que sur les actions que je n'aurai jamais faites.
Moi, je l'ai toujours dit, les promesses, là, je n'en fais pas. Vous me jugerez
par les actions que j'aurai faites.
Nous en avons... Le premier ministre
l'a dit, on n'en a pas assez fait. «On», là, bien, c'est le portrait des
15 dernières années. «On», c'est qu'on
aurait pu s'en laver les mains puis dire : Aïe! ce n'est pas nous. Non,
non, moi, je ne l'ai pas pris comme
ça, M. le Président. Je me suis dit : Moi, je fais partie de la nation
québécoise et j'ai une responsabilité en tant que citoyenne, maintenant en tant que députée, en tant
que ministre, de changer les choses. Puis, plus les citoyens québécois vont savoir ce que nous avons fait comme... qui
n'était pas correct, plus les citoyens vont comprendre, puis plus on va
aller de l'avant avec les Premières Nations,
puis plus on va avoir des relations de nation à nation dans le respect et le
dialogue.
On
travaille avec les autochtones et les... On travaille avec les Premières
Nations, les Inuits et le fédéral. On ne peut pas se défaire de ça. Il n'y a pas un chef autochtone qui peut dire que
je me suis lavé les mains sur un dossier : Ah! ça, ce n'est pas de
notre ressort, c'est le fédéral. Parce que je l'ai dit, au tout début, jamais
je ne dirai ces mots-là avec cette intention-là,
ce n'est pas vrai. Ce que je leur dis par contre, c'est qu'on va se parler du
problème, on va s'asseoir du même côté
de la table puis on va aller cogner à la porte du fédéral, et vous allez avoir
mon appui sans borne. On va travailler de nation à nation. On se côtoie,
là, on partage notre territoire, on va aller travailler avec le fédéral, mais
on va être assis du même côté de la table. C'est ça, le message que je lance.
Alors, oui, je travaille avec les Premières Nations, et les Inuits, et le
fédéral.
D'ailleurs,
il y a un dossier auquel peut-être que le député n'est pas au courant, mais le
projet Tortue, je l'invite à regarder
ce projet-là parce que c'est un projet supposément que le fédéral... et
le gouvernement de la CAQ a travaillé avec la première
nation qui est les Wendat, et le fédéral.
Le
Président (M. Tardif) :
Merci, Mme la ministre. La parole... On ne lâche pas, ça va bien. Je
passe la parole au député de Saint-Jean.
M. Lemieux :
On ne lâchera pas, M. le Président.
Le Président
(M. Tardif) : Non.
M. Lemieux : Merci,
M. le Président. Le 2 octobre
dernier, lorsque notre premier
ministre a présenté ses
excuses à l'autre nation, j'étais fier.
Remarquez que, 140 appels à l'action dans le rapport plus les appels à la
justice dans l'autre rapport, il y avait
de quoi s'excuser. Mais j'étais fier aussi, parce que le journaliste en
moi ne pouvait pas oublier que, s'il y a eu la commission Viens, s'il
y a eu la ENNFADA, c'est à cause de
reportages d'enquêtes journalistiques qui ont mis au jour des situations, qui ont fait en sorte qu'on fasse bouger les choses, qu'on bouge. Oui, on veut
bouger. Oui, M. le député de
Jean-Lesage, il faudrait aller aux Nations unies régler ça une fois pour
toutes. Oui, M. le député de Matane-Matapédia, vous venez de dire que la problématique autochtone mérite une loi qui
leur est... j'oublie le dernier mot, là, je l'ai mal
écrit, mais pour eux. Vous avez tout à fait raison.
Mais,
en attendant, j'ai aussi entendu notre ministre dire : Mon leitmotiv, moi,
c'est les femmes puis les enfants, et je
me lève à tous les matins, depuis que j'ai ces rapports-là, en pensant aux
femmes puis aux enfants, parce que ça, on peut faire avancer ça. Il faut faire avancer le reste. Il y en a en masse, du
travail. M. le député d'Ungava nous a dit comment il voyait comment on
pouvait faire ce travail-là, j'en suis, mais la ministre, elle, elle a une
situation particulière, l'appel à la
justice n° 20 qui presse. Elle aurait pu en choisir un autre,
mais c'est celui-là qu'elle pensait pouvoir faire avancer.
Vous
allez me trouver fatigant en disant qu'on est pragmatiques puis on essaie
d'être efficaces. Mais là je nous vois depuis le début de
l'interpellation, au début c'était l'éléphant dans la pièce, ensuite, c'est
devenu la pièce, le projet de loi
n° 31. Je nous vois parler du projet de loi n° 31 avec ses mérites.
Le leader, les amendements de dernière minute, c'est juste de la procédure parlementaire, ça, c'est
juste de la procédure législative. Je ne dis pas que ce n'est pas
important, je dis juste que, si la ministre,
elle a trouvé qu'elle était capable de faire avancer l'appel à la justice n° 20 et de faire avancer toutes ces
mères, toutes ces familles, toutes ces... parce que c'est devenu des dizaines
et des dizaines de personnes autour de ces familles-là qui attendent des réponses, qui veulent voir ce qu'il y a
dans les dossiers. Et c'est ça, l'appel à la justice : qu'on livre les dossiers, qu'on puisse communiquer à ces
familles-là les réponses qu'elles attendent. Allons-y! C'est ce que la ministre s'est dit, c'est pour ça que le projet de
loi n° 31 est en chantier et c'est pour ça qu'on peut se dire : Bien
oui, la procédure parlementaire, la
procédure législative est ainsi que ça s'est retrouvé en amendement dans un
projet de loi sur les pharmaciens. En
autant que ça se passe, moi, comme nouveau législateur, en tout cas, et comme
nouveau député, je trouve que ça va
faire avancer les choses. C'est ce que les journalistes, qui ont sorti et mis
au jour ces affaires-là, ont fait en espérant que ça fasse bouger les
choses. C'est ce que la ministre veut faire avec la partie du projet de loi
n° 31 qui concerne ces familles autochtones.
• (11 h 40) •
Et,
puisque je parlais de mon passé de journaliste, il y a un documentaire sur les
documentaires, parce que c'est Anne Panasuk qui est à la source de
la plupart des révélations qui ont mené à ces convictions de nombreuses
familles autochtones que leurs enfants leur avaient été volés. Ce
documentaire-là ne nous donne pas la coulisse ni l'envers du décor, mais nous explique les motivations
journalistiques et les circonstances dans lesquelles ça s'est passé. Et ça a
été tellement difficile quand on entend la
journaliste nous expliquer le nombre de portes où il fallait cogner, le nombre
de dossiers qu'il fallait ouvrir, le nombre
de refus qu'il fallait subir. Mais là on veut leur donner les dossiers, on veut
leur donner accès aux réponses auxquelles
ils ont droit, pas pour que ce soit réglé, au contraire. Si j'ai bien compris, c'est la suite des choses, c'est on ouvre une nouvelle porte et on va
avancer, puis là les journalistes vont suivre bien sûr, mais là c'est
les familles qui vont pouvoir le faire en
partenaire avec le gouvernement, avec l'information qu'ils auront trouvée pour aller plus
loin, et c'est ce que je pense qu'ils vont faire et c'est ce que je pense qu'il
faut faire.
Il y a plusieurs véhicules
pour arriver à nos fins puis aux objectifs. Il y a assez d'ouvrage dans les
140 appels à l'action puis dans les
appels à la justice des deux rapports pour trouver tous les véhicules
possibles. Puis moi, en ce qui me
concerne, je suis très satisfait d'avoir entendu notre ministre
nous dire que c'est là où elle s'en va, et c'est là où on va arriver, je
l'espère, M. le Président.
Conclusions
Le
Président (M. Tardif) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. Alors, nous en sommes maintenant
aux dernières interventions. Nous sommes rendus à la conclusion. Le
premier 10 minutes serait pour la ministre, s'il vous plaît.
Mme Sylvie D'Amours
Mme D'Amours : M. le
Président, merci. C'est un dossier
auquel... Bon, moi, je ne suis pas fière d'être ici puis parler de ça parce que c'est un dossier
auquel on n'aurait jamais dû faire vivre et vivre. On est en 2020, une société
dite démocratique, hein, puis avec un
respect mutuel pour chacun, avec une grande ouverture sur la diversité, puis de
parler de ce dossier-là ce matin, là, je ne
trouve pas ça drôle, mais il faut en parler. Je remercie mon collègue de faire
des interpellations. C'est la
deuxième qu'on a. Je le remercie parce
que, plus on va en parler, plus les
gens vont entendre ce qu'on dit, plus ils vont être informés.
Je vais vous
faire remarquer une chose, M. le
Président. C'est que, quand on parle
des autochtones, là, savez-vous c'est
quand? C'est l'été. Lorsqu'il n'y a pas d'autre nouvelle, là, on parle des Premières Nations. Ah! on n'a rien à dire, on va se trouver sûrement un petit article,
là, puis on parle des Premières Nations. Puis là, dans les médias... puis
faites l'exercice, puis regardez ça. Puis
ça, moi, je me suis dit : Comment ça se fait qu'on ne parle pas de
dossiers qui sont aussi importants? Comment ça se fait qu'on ne va pas plus loin
quand il y a quelque
chose qui est sur la table? Ça fait
que, plus on va en parler, nous, comme
législateurs, plus on va avoir la volonté de régler des choses, plus les citoyens
du Québec seront... les Québécois, notre nation, là, seront informés, plus
ça va être facile d'aller dans le même sens, parce que, quand on n'a
pas d'éducation, quand on n'a pas d'information, bien, c'est la peur qui
s'installe. Je pense qu'il faut arrêter.
On travaille avec le leader présentement, puis
ça, c'est connu, là, de tous les législateurs, à réformer notre processus. Et moi, ça fait plusieurs
rencontres que j'ai avec le leader parlementaire, mes collègues du cabinet,
avec le cabinet du ministre,
et, à chaque fois, nous, ce qu'on défend, c'est d'avoir la possibilité
d'intégrer un processus législatif pour qu'on puisse l'intégrer dans notre processus lorsque ça touche les Premières Nations. Il faut vraiment essayer, du mieux qu'on peut, d'avoir les coudées franches pour ne pas
faire outrage au Parlement ou de ne pas... l'intégrer dans notre
processus, et ils sont en train de regarder ça, ils sont en train de travailler
là-dessus. Ça fait quelques mois qu'ils sont sur ça, qu'ils connaissent nos
demandes et avec une grande ouverture.
Les gens
auxquels, bien, moi, je veux m'adresser en dernier, c'est les familles. Il y a
des familles qui nous écoutent. Il y
a des familles qui sont ici aujourd'hui. J'ai toujours été très ouverte. Moi, j'ai su que les familles
venaient aujourd'hui à notre
rencontre. Je ne l'ai pas su avant. Quand j'ai su qu'ils venaient, quand il y a eu
la première, bon, salutation, je me suis dit : Ah! il y a des familles ici. Donc, M. le Président, je les invite, je les invite à venir me rencontrer pour qu'on
puisse discuter à fond du dossier, du projet de loi, de l'intention d'aider, des prochaines étapes qu'on devrait faire
ensemble, parce que les prochaines étapes, c'est ensemble qu'on devra
les faire. De mon côté, qu'est-ce que j'ai commencé à travailler, à
réfléchir avec l'équipe du cabinet, avec l'équipe de l'administration, de
Mme Thomas... Donc, je les invite.
On a eu la
chance, à la dernière minute, là, d'avoir accès à un local. Ça fait que je leur
dis, j'invite les familles, j'invite
les représentants des familles à venir au local RC-161. Il y a quelqu'un qui va monter en haut pour aller
les chercher. Ceux qui veulent bien
venir discuter avec moi, je les invite à venir discuter, je les invite à venir
me rencontrer. Certains me connaissent,
d'autres, je les invite à venir me connaître, quelle est l'intention derrière
tout ça, puis je suis convaincue qu'ils vont entendre ma volonté
d'aider, ma volonté de commencer quelque chose.
Quand ça fait
plusieurs années que tu en parles, après 50 ans dans leur cas, quand on a
un portrait, on a le rapport de l'enquête
nationale des femmes et des filles disparues, ça nous touche, ça touche. Il n'y
a pas un Québécois que ça n'a pas touché. Il y a des gestes qui ont été
posés dans la communauté, il y a des gestes qui ont été posés aussi dans la
société québécoise, dans la société, dans...
toutes les provinces sont touchées. Il y a un rapport qui a été déposé, il y a
un gros problème, mais il y a
20 recommandations spécifiques au Québec, donc il faut maintenant passer à
des gestes concrets.
Moi, M. le
Président, ça ne me tente pas d'avoir, dans quatre ans, dans huit ans, un bilan
qui dit : On va refaire une autre
commission puis on va déposer un rapport des 10 dernières années pour
dire : Bien, voici, vous n'avez rien fait. Non, non. Je pense qu'il y a assez de rapports. Moi, je
l'ai déjà dit, dans le monde agricole, quand j'étais dans l'opposition,
M. le Président, je disais : Aïe! il y a neuf rapports sur l'agriculture,
on peut-u commencer à travailler?
Il y a eu
neuf rapports. Mon collègue en a mentionné plusieurs au début : le rapport
d'enquête royale, l'enquête nationale,
il en a nommé plusieurs, puis on finit avec le rapport Viens, une commande
de l'ancien gouvernement, un portrait des
15 dernières années. Il y a-tu eu de l'évolution? Bien non. Mais c'est
assez, les rapports. Je l'ai dit, à Val-d'Or, quand le juge Viens a déposé son rapport... que le
commissaire Viens a déposé son rapport, je l'ai dit aux
journalistes : Il n'aura même
pas le temps d'aller sur la tablette, il n'y aura pas de poussière dessus parce
qu'on va agir, pas dans l'empressement, mais avec ce qu'il y a dedans.
Il y a un rapport. C'est les autochtones, les
Premières Nations, les Inuits qui sont venus, qui ont dit leurs messages, qui ont dit... qui ont raconté leurs
histoires. J'aurais aimé plus de choses, moi, pour les femmes, puis je l'ai
dit, et mon collègue l'a aussi mentionné,
j'aurais aimé ça que ça aille plus loin, moi. Bien, ce n'est pas parce que le
rapport a été plus... je dirais, avec une certaine réserve sur ça qu'on
est obligés de ne rien faire. Non, on va faire des choses.
Ça
fait que, donc, mon message, c'est un message pour l'ensemble des Premières
Nations et des Inuits. Moi, je suis ici
pour travailler avec eux. Je suis ici pour trouver des solutions afin que des
enfants, des femmes et même des hommes trouvent
leur place, trouvent la place à côté de nous, pas une place dans la société
québécoise, trouvent une place... On est des gens qui devons se côtoyer, qui devons partager le territoire, qui
devons s'entendre, et s'entendre, M. le Président, ça va commencer par le
respect mutuel, par le dialogue franc et honnête, mutuellement. Et les gestes
qu'on pose comme gouvernement, ce n'est pas
des gestes qui ne sont pas réfléchis, c'est des gestes auxquels on doit... Moi,
mon action, là, mon geste, ma
volonté, c'est de donner une lumière à ce dossier, aussi sombre soit-il. C'est
de partager la première étincelle, c'est
de dire... c'est de répondre aux familles qui m'ont tenue par les épaules puis
qui m'ont dit : On a confiance en vous, on va avoir enfin des
réponses à nos questions depuis 50 ans.
Ma volonté,
c'est ça. Ma volonté, c'est d'avancer. Ah! est-ce que c'est parfait? La
personne qui est parfaite ici puis
qui a des idées parfaites, qu'elle se lève puis qu'elle me le dise, parce que
jamais je n'aurai la prétention de dire que je suis parfaite. Jamais je n'aurai la prétention de dire que tous mes
gestes, toutes mes actions seront parfaites. Mais la volonté, par exemple, elle va avoir une bonne direction, puis c'est celle d'aider les
familles à retrouver la vérité et avoir enfin la paix.
Donc, M. le Président, je remercie encore mon collègue d'une interpellation, parce que ça
nous donne l'occasion de parler, de
donner de l'information à notre propre société, pour dire : Il y a des
choses qu'on a faites pas correctes, maintenant,
c'est assez, il faut agir, et j'agis. Agissons donc ensemble sans méfiance et
en confiance. Merci, M. le Président.
• (11 h 50) •
Le
Président (M. Tardif) :
Merci, Mme la ministre responsable
des Affaires autochtones. Et nous allons finaliser cette interpellation
avec le député de D'Arcy-McGee pour 10 minutes.
M. David Birnbaum
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. J'apprécie en quelque part l'expression sincère, que j'accepte avec humilité, de la ministre responsable. Je crois et
j'espère que sa volonté, sa sensibilité n'auraient pas été remises en
question aujourd'hui parce que je n'ai pas de
doute là-dessus, je n'ai pas de doute là-dessus. Et je respecte qu'elle et son
gouvernement, comme notre gouvernement
précédent, est devant un fardeau de l'histoire et de la situation présente
qui exige un énorme effort qui ne serait
jamais facile. Mais ce qui va de pair avec ce fardeau, c'est de répondre de
façon concrète et satisfaisante aux gens qui sont avec nous.
In English, we talk about the litmus
test for success, and that test will be for these families to feel some comfort and some reassurance.
Because their example is only one, it's touched on... almost not directly by
the 142 recommendations in Viens, each one of which is so
important.
Mais n'y a-t-il pas une façon de se donner
l'obligation d'être jugé qui est plus importante que le sort des enfants
issus des communautés des Premières Nations
et des communautés inuites? Et j'admets volontairement que ce n'est pas
facile, mais on a devant nous un test... sur les actions que nous avons à
entreprendre, et c'est le sort des familles qui cherchent des renseignements sur la fin de leurs enfants, souvent. Et je
réitère, les experts, les familles, les leaders, les trois formations de
l'opposition se sont prononcés, la solution actuelle n'est pas au rendez-vous.
Une autre
fois, quand les paroles de la ministre, que j'accepte, sont répétées à maintes
reprises, qu'il faut parler d'un dialogue nation à nation, il faut s'écouter,
je respecte et j'admets que c'est un geste très audacieux lors de ce premier
sommet, de venir, de façon très claire, en écoute. Il n'y avait pas de
proposition, et je respecte ça. Mais cette écoute, maintenant, il y a un autre exemple de démontrer cette écoute, c'est
d'écouter les gens concernés, M. le Président, et de retirer, et tout de suite, les amendements, qui
sont mal ficelés d'ailleurs aussi, de 31 et de proposer, M. le Président,
un projet intègre et unique sur le sort de ces familles et leur accès aux
informations tellement essentielles.
Je n'ai pas
entendu beaucoup... Je respecte que ces sommets... bon, tout le monde était
libre de sortir après pour faire ses commentaires. Mais pour qu'ils soient
productifs, et ils l'étaient, je
trouvais... j'étais privilégié d'être
là, mais pour qu'ils ne soient pas
lettre morte, il faut, je crois, que le public ait un bilan assez
régulier du progrès, c'est qu'il y
ait des comités techniques en place, et tout ça, comment ça va se
dérouler, et je n'ai pas entendu, avec respect, grand-chose aujourd'hui. Alors, c'est quoi, la feuille de route, M. le Président, pour l'avenir
et l'action concertée sur les recommandations devant nous?
Et je nous rappelle que ces recommandations, ce
n'est pas un sujet comme un autre. On parle d'assurer les familles dont il y a un jeune incarcéré. Et on
va se rappeler que la proportion des jeunes incarcérés issus des
communautés autochtones, l'ancien policier en face de moi va en
constater, est tellement élevée et de façon injuste. Est-ce qu'on va trouver des solutions pour que les parents peuvent voir leurs
enfants, avoir accès aux dossiers, tout ça? Voilà un exemple.
L'accès aux
services sociaux, je n'ai pas énuméré les problèmes. L'action sur le logement,
dossier entendu pour une grosse part
dans la plate-bande du fédéral, mais on a notre part à faire. Est-ce qu'on va le faire? Sécurité, on en parle longuement dans le
rapport Viens. Là, c'est un dossier, en quelque part, grosso modo, divisé
50-50. On a des communautés... On a la crise devant nous aujourd'hui. On a des communautés qui ont de grandes préoccupations en ce
qui a trait à la sécurité, Kanesatake
entre autres, mais il
y en a plein. Est-ce qu'il y a un plan, une feuille de route pour que ça avance dans l'esprit des recommandations du
rapport Viens? Est-ce qu'on va, de façon claire et nette, poursuivre les
choses?
Et, comme j'ai dit, les mots sont importants. Je
ne veux pas du tout minimiser les excuses exprimées par le premier ministre parce que c'étaient des mots sincères et des mots
importants. Mais la lourde responsabilité d'avoir exprimé ces mots, c'est une obligation d'être en action après, d'être en action avec les
échéanciers, d'être en action avec des mandats, d'être en action avec des aspects qui vont faire en sorte que notre motion ne serait pas lettre morte, que la déclaration des Nations unies sur
l'autodétermination commence à avoir tout son sens sur le plan quotidien ici,
au Québec, que si on parle de nation à nation, que ça soit clair que le premier
ministre du Québec est au rendez-vous.
Et
je me permets de citer sa lettre, et il n'a pas tardé de répondre à M. le grand
chef, la même journée, où il a dit : «Je tiens maintenant à vous inviter à une autre rencontre, dès le
printemps prochain, pour discuter avec moi des enjeux soulevés dans votre lettre.» Et le premier ministre continue : «En terminant, je veux également réitérer que la ministre, avec qui je travaille en étroite collaboration, a toute ma confiance pour assurer le suivi des appels à l'action et à
la justice des rapports du commissaire Jacques Viens et de la commission d'enquête sur les femmes et les filles autochtones
disparues et assassinées. Il s'agit d'un
enjeu auquel j'accorde la plus haute importance et pour lequel je souhaite faire le point
avec vous au cours de notre rencontre du
printemps.» Bon, c'est une lettre qui date de trois semaines maintenant et, une autre fois, c'est des paroles qui ont des conséquences et
qui sont sérieuses.
Alors, et je
vais conclure là-dessus, je me permets d'énumérer une liste de choses, M. le Président, qui vont être, sur le
premier plan, pour moi, respectueusement, à suivre dans les mois qui s'en viennent pour
que l'opposition officielle
puisse jouer son rôle de façon fidèle pour avancer des choses.
• (12 heures) •
Dans un premier temps, est-ce qu'on va entendre
très prochainement une date de rencontre avec le premier ministre du Québec et les leaders autochtones? Est-ce
qu'on va entendre que c'est une rencontre pas conditionnelle sur quoi
que ce soit, mais une rencontre qui va avoir lieu pour poursuivre nation à
nation ces discussions? Est-ce que, dans les prochaines
semaines, et je n'ai pas grand espoir parce que la ministre responsable a
réitéré sa détermination pour procéder de
la façon actuelle, on va voir que les amendements du projet de loi n° 31
vont être retirés et qu'un projet de loi désigné à résoudre ce problème déchirant va être mis sur la
table, ce qui serait assujetti à la grande collaboration, j'en suis sûr,
des trois formations de l'opposition? Est-ce qu'on va voir de l'action sur le
dossier qui touche au C-92? Bon, bataille de juridiction,
je peux comprendre. On ne peut pas attendre la conclusion de ce débat de
juridiction. Est-ce qu'on va avoir clairement
et nettement des réponses sur un plan fabriqué ici, au Québec, pour protéger le
droit de l'autodétermination des familles autochtones en ce qui a trait
à leurs propres enfants?
Moi, je vais
suivre avec grand intérêt, M. le Président, mais ce n'est pas moi qu'il faut
satisfaire, je réitère, c'est les familles en haut, c'est le grand chef,
c'est les leaders des communautés autochtones, qui méritent des résultats. Et
c'est à ça qu'on s'attend. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tardif) :
Merci, M. le député D'Arcy-McGee.
Maintenant,
compte tenu de l'heure, je lève la séance de la commission... ayant accompli
son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci. Bonne journée, tout le
monde.
(Fin de la séance à 12 h 01)