(Quatorze heures trente-quatre minutes)
Le Président (M. Bernier) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance
de la Commission des institutions ouverte. Bien sûr, je demande aux personnes
présentes d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie afin de poursuivre l'étude
détaillée du projet de loi n° 62, Loi favorisant le respect de la
neutralité religieuse de l'État et visant notamment à encadrer les demandes
d'accommodements religieux dans certains organismes.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Melançon (Verdun) est remplacée par M. Auger (Champlain); M. Ouellette
(Chomedey) est remplacé par M. Bernier (Montmorency); M. Bergeron
(Verchères) est remplacé par M. Bérubé (Matane-Matapédia); et Mme Hivon
(Joliette) est remplacée par M. Bourcier (Saint-Jérôme).
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le secrétaire. Donc, bon après-midi à tous. Il me fait
grand plaisir d'avoir l'occasion d'être parmi vous cet après-midi pour
présider cette commission fort importante. Je vous souhaite de bons échanges et
de bons débats sur un sujet qui est d'actualité et très suivi.
Document déposé
Avant de commencer, je dépose une lettre
transmise le 30 août 2017 par le Réseau québécois de l'action
communautaire autonome, dont je crois que vous avez tous reçu copie.
Étude détaillée (suite)
Alors, lors
de l'ajournement de nos travaux, le 24 août dernier, nous
étions rendus à l'étude d'un amendement déposé par Mme la députée de Taschereau introduisant le nouvel article 4.2.
Mme la députée, je vais vous donner la parole. Et peut-être
nous faire une relecture de votre proposition de l'amendement.
Mme Maltais : Ah! je le cherche, ce
fameux amendement, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : Bien, je
peux vous aider en en faisant...
Mme Maltais : Je l'ai, je l'ai, je
l'ai.
Le Président (M. Bernier) : Vous
l'avez?
Mme Maltais : Je l'ai, je l'ai.
Merci. Et vive nos recherchistes, M. le Président!
M. Nadeau-Dubois : M. le Président,
je veux juste m'assurer qu'on fasse les choses en bonne et due forme. Lorsqu'on
a suspendu, il y a deux semaines, le 24 août, j'étais en train de faire une intervention. Le président m'avait dit que je pouvais
reprendre cette intervention-là, la compléter lorsqu'on redémarrerait les
travaux de la commission. Alors, je me demandais si c'est ma mémoire qui me
fait défaut ou si...
Le
Président (M. Bernier) :
Bien, ce n'est pas la mémoire qui fait défaut, c'est peut-être
un oubli simplement que nous avons au niveau de la commission. Donc, je vais vous laisser la parole, M. le député de Gouin, pour terminer votre intervention, ça nous
fait plaisir. Vous avez le droit de parole, allez-y.
• (14 h 40) •
M.
Nadeau-Dubois : Merci beaucoup. Donc, on était donc, vous l'avez dit vous-même, M. le Président, en train d'étudier un amendement. Et ce que j'ai dit la
dernière fois, je peux le rappeler, c'est que c'était important, à ce
stade-ci, pour moi, d'intervenir dans la
mesure où, bien qu'on ait eu nos différends par moments sur ces enjeux-là avec,
bien sûr, le gouvernement mais aussi les autres partis de l'opposition,
on considère que cet amendement-là est bienvenu et qu'il aurait le grand mérite de permettre de tourner la
page, au Québec. Parce que le débat sur le port de signes religieux au
sein de la fonction publique, ça fait
maintenant 10 ans qu'il a cours, il a débuté autour de 2007 avec la
commission Bouchard-Taylor, et ce
débat-là, en s'éternisant, il a fait beaucoup de victimes. Tout ce qui traîne
se salit, comme on dit souvent, et ce débat-là,
au Québec, il a traîné. Et on ne fera pas de procès d'intention, il y a toutes
sortes de raisons qui ont fait en sorte que ce débat-là a traîné, qu'il n'y a jamais eu de
décision prise. Et là on a l'occasion ici, durant les prochaines
semaines, de clore ce débat-là pour faire en
sorte qu'on en finisse enfin de discuter du port de signes religieux au sein de
la fonction publique au Québec. Parce
que les premières victimes de ce débat-là, ça a été les communautés culturelles
au Québec, en tout premier lieu la communauté musulmane, en particulier
les femmes de la communauté musulmane, qui, plus ce débat-là s'est éternisé, plus ce débat-là s'est envenimé, elles ont été
victimes, les statistiques l'ont démontré, de plus en plus d'agressions, de situations de détresse. Et, pour
nous, la meilleure manière de venir en aide à ces gens-là et de leur
donner un sursis, c'est d'adopter une
position de compromis, une position qui, certes, n'est pas parfaite. Et
l'amendement qui a été déposé n'est
pas parfait, les recommandations de la commission Bouchard-Taylor n'étaient pas
parfaites, mais elles ont néanmoins un grand mérite, celui d'être une
position de compromis.
Et, les
commissaires Bouchard et Taylor, c'est comme ça qu'ils la présentaient, la
position. Je suis allé relire, les derniers
jours, le rapport, je l'ai relu, et, dans la conclusion, il y a un passage qui
m'a marqué, les commissaires écrivent : «En soupesant toutes ces
considérations, nous croyons que l'imposition d'un devoir de réserve à cette
gamme limitée de postes — en
parlant, donc, des postes des agents de l'État qui ont une autorité
coercitive — représente
le meilleur équilibre pour la société québécoise
d'aujourd'hui. Il s'agit des postes qui représentent de façon marquée la
neutralité de l'État ou dont les mandataires exercent un pouvoir de
coercition.» Et en effet ce n'est pas un hasard que le rapport Bouchard-Taylor en soit venu à cette conclusion-là,
parce que ce que le rapport disait, c'est que, bon, la soi-disant crise
des accommodements raisonnables, à l'époque... les commissaires nous
disent : C'était surtout une crise de perception. Et la meilleure manière de corriger cette crise de perception, c'est
d'agir sur les agents de l'État qui incarnent le plus le pouvoir de l'État puis incarnent la cime du
pouvoir de l'État, c'est-à-dire le monopole de la violence légitime, le
pouvoir de coercition. Et donc ce n'est pas un critère arbitraire. Ce
n'est pas seulement une position de juste milieu, c'est une
position qui est fondée sur des raisons
fortes, sur une idée forte, c'est-à-dire l'idée selon laquelle les juges, les agents de la
paix, parce qu'ils exercent le pouvoir de coercition, parce qu'ils ont, dans
notre société, le pouvoir extraordinaire de brimer les gens de leur liberté... Ce n'est quand même par rien. Puis l'État est la
seule institution qui a ce pouvoir-là, et c'est ces gens-là qui exercent
ce pouvoir-là. Et donc la réflexion était très simple, c'était de dire :
Dans le cas de ces gens-là, c'est justifié
de demander peut-être une plus grande neutralité puis en fait une apparence de
neutralité. Parce que nous, on ne doute
aucunement, à Québec solidaire, qu'un homme ou une femme portant un signe
religieux peut faire tout à fait preuve de neutralité et de réserve dans
l'exercice de ses fonctions. Or, le débat, il n'est pas là-dessus, il est sur
l'apparence de neutralité. Et le rapport le
disait clairement, notamment en prenant l'exemple des juges et en disant que,
dans le cas des juges, il n'y a pas
seulement un devoir de neutralité, il n'y a pas seulement... il y a également
un devoir d'apparence de neutralité parce qu'on est, là, à la cime du
pouvoir de l'État, et des préoccupations qui peuvent être secondaires, quand on parle des préposés de la SAAQ ou des
enseignants, des enseignantes deviennent, là, beaucoup plus importantes
quand on est à la cime du pouvoir de l'État, c'est-à-dire quand on parle des
agents de la paix, des juges, des gardiens de prison.
Donc, c'est
pour ces raisons-là que les commissaires Bouchard et Taylor recommandaient
l'interdiction des signes religieux pour ces quelques postes là. C'est
pour cette raison-là que, dès le début du débat, Québec solidaire a adopté cette
position-là.
Mais, en
terminant, je vais peut-être boucler la boucle et dire qu'au-delà, dans le
fond, de ces considérations-là, qui sont
des considérations philosophiques ou de théorie politique, il y a des raisons
beaucoup plus pragmatiques qui font en sorte qu'on appuie cet
amendement-là, c'est qu'en tant qu'une position de compromis, elle permettrait,
je l'ai dit au départ, de conclure le débat,
de tourner la page et d'éviter que, dans les prochaines années, des parties ou
des individus mal intentionnés
profitent d'un autre fait divers ou d'une autre anecdote dans l'actualité pour
redémarrer la question, pour relancer
le débat, et donc qu'on se réenlise dans ces enjeux-là. Ce sont des débats
importants. On a eu le temps de les mener en long et en large, depuis 10 ans. Et la position de compromis,
qui n'est pas d'unanimité, hein, il faut qu'on le comprenne bien, mais de compromis, qui a émergé de
10 ans de débats, c'est la position d'interdiction des signes religieux
pour les individus en poste... disons, qui exercent un pouvoir de
coercition.
Alors, nous, on appuie cet amendement-là puis on
invite, si possible, la partie gouvernementale à aller dans ce sens-là.
En terminant, je voudrais signaler que
contrairement à ce que des porte-parole du gouvernement soutiennent depuis
plusieurs années, il y a seulement une infime minorité des recommandations de
Bouchard-Taylor qui ont été appliquées. Le
chiffre de 80 % a circulé dans les communications gouvernementales, mais
une étude indépendante produite par un
chercheur de l'Université Laval en 2014, M. François... pardon, de l'Université
d'Ottawa, M. François Rocher, estimait
plutôt qu'il y avait sept recommandations sur 24 qui avaient été adoptées, donc
le tiers des recommandations. Seulement 37 % auraient été mises en
oeuvre.
Alors, pour
toutes ces raisons-là, on croit que l'amendement est bienvenu. Et on pense que
c'est le temps, là, de passer à
l'action, de clore le débat puis d'adopter une position, qui ne fait pas
l'unanimité, certes, mais qui fait consensus au Québec.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
Avant...
M. Nadeau-Dubois : ...c'est une
position de compromis.
Le
Président (M. Bernier) : Oui. Merci. Avant de redonner la parole à ...
de tradition, je pense, c'est la députée de... à Mme la ministre sur le sujet, je veux juste relire le projet de
loi n° 62 en ce qui regarde l'amendement qui est présenté, parce
que, là, on en discute, mais on n'en a pas fait une relecture.
Donc,
l'article 4.2. L'amendement est présenté par la députée de
Taschereau : Ajouter, après l'article 4 du projet de loi,
l'article suivant :
«4.2. Parce
qu'ils doivent incarner la neutralité de l'État et exercent un pouvoir de
coercition, les agents de l'État suivants ne peuvent porter de signes
religieux dans l'exercice de leurs fonctions :
«a) les magistrats;
«b) les procureurs de la poursuite;
«c) les agents de la paix.»
Donc, pour que
nos gens qui nous écoutent puissent suivre nos débats correctement. Mme la ministre.
Mme Vallée :
Alors, M. le Président, en réponse à mon collègue, c'est certain qu'il y a deux
semaines j'avais fait quand même le tour de la question pour expliquer
en quoi cet amendement-là n'a pas sa raison d'être. Je voudrais simplement souligner, en toute amitié, à mon
collègue que gérer les perceptions, ça ne constitue pas un motif
suffisant pour brimer une liberté qui est
protégée par la Charte des droits et libertés. Et la liberté de religion, bien, ça inclut le fait de porter un signe religieux. Et c'est une fausse réponse à
un problème de perception, c'est une fausse réponse à ce que
le collègue soulève lorsqu'il nous
dit : C'est une réponse pour aider les femmes des communautés
musulmanes qui ont été injustement ostracisées
depuis le début des discussions sur les accommodements et sur la laïcité,
neutralité. Ce n'est pas une position de compromis, M. le Président, puis je pense que j'ai abondamment expliqué. On
a aussi rappelé la sortie récente de M. Taylor sur la question, il n'y a pas de justification qui commande le
tout. Puis au contraire, selon moi, ça exacerbe la crise de perception
dont notre collègue parle, dont notre collègue fait état.
J'arrive tout
juste de Montréal, où nous soulignions le début de l'année
judiciaire avec le Barreau de Montréal, et le Barreau de Montréal abordait cette nouvelle année judiciaire sous le
thème de l'inclusion. Ce n'est pas anodin, ce n'est pas anodin du tout.
Et je pense qu'on a tous et toutes un rôle à jouer. Et, lorsqu'on tente, sous
la... lorsqu'on tente de justifier une telle proposition en disant que ça
atténuerait les enjeux de perception, que ça permettrait de lancer un message fort, moi, au contraire, je suis d'avis
que ça ne fait qu'encourager ceux et celles qui ont une difficulté
à voir et à vivre la diversité.
Nous avons
des juges en place qui portent la kippa; jamais on n'a douté de leur
objectivité, de leur compétence. En Ontario, on a des juges qui portent
le turban sikh et qui sont reconnus pour la qualité de leur raisonnement juridique.
Il y a des uniformes, il y a des règles qui encadrent la magistrature, qui
encadrent les agents en autorité, les agents de la paix, il
y a des règles qui encadrent le
comportement et la... les règles qui entourent les membres de l'équipe du
procureur des poursuites criminelles et
pénales, ces règles-là permettent d'assurer la neutralité des individus dans
leurs fonctions, d'assurer que le
travail s'effectue en toute impartialité. Et cet amendement-là n'aurait qu'un
message, finalement, c'est de justifier
une stigmatisation des gens, et viendrait, de facto, brimer l'accès à certaines
professions à certains membres de communautés religieuses, pas seulement
aux femmes, parce que la question ne vise pas que les femmes musulmanes qui portent le voile mais vise l'ensemble de ceux
et celles qui, au nom de leur liberté de religion, portent un signe, au
nom de leurs croyances sincères et profondes, portent un signe religieux
apparent.
Donc, M. le Président, je pense que... Et je
pense qu'actuellement les règles en place permettent... et sont très strictes à l'égard de la magistrature, à l'égard
des procureurs des poursuites
criminelles et pénales et à l'égard des agents de la paix. Et nous n'avons actuellement aucune
situation qui commande de brimer des droits et des libertés, qui
commande de déposer un tel amendement, au
contraire, c'est un faux problème. Et je nous invite à tourner la page sur cet
amendement et de poursuivre l'étude du projet de loi.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
J'avais la députée de Montarville et Mme la députée de Taschereau qui avaient
demandé la parole.
• (14 h 50) •
Mme
Maltais : Écoutez, M. le Président, moi, je suis heureuse de l'appui du collègue de Gouin.
Je reviendrai plus tard, j'ai déjà beaucoup
parlé. Je sais que j'ai mon collègue de Matane-Matapédia qui a assisté à une autre commission parlementaire, hier, de laquelle on pourrait peut-être tirer des enseignements, ça fait que
j'aimerais ça l'entendre. Il m'a dit... D'ailleurs, il est venu ici aujourd'hui pour essayer de nous faire
profiter de sa sagesse, bien sûr, et d'une autre vision des enjeux. Ça
fait que, s'il veut prendre la parole, moi, je suis prête à la céder.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé :
Et je suis prêt à l'accepter, M. le Président. Et je me permets de saluer la
ministre, l'ensemble de son équipe, saluer les collègues de
l'opposition, tous ceux qui travaillent sur le projet de loi.
J'écoutais
avec attention le député de Gouin, qui est ouvert aux compromis. Je pense que
c'est le genre d'attitude qui peut servir en toute circonstance. Alors,
je suis heureux de l'entendre là-dessus.
Une voix : ...
M.
Bérubé : Absolument.
On ne peut pas réparer le passé, mais c'est intéressant.
M. le Président, le projet
de loi n° 133, projet de loi n° 133, qui relève du ministère de la
Sécurité publique, j'y ai assisté hier en ma
qualité de porte-parole en cette question, mais aussi, comme leader de l'opposition, il y a un certain nombre de choses qui permet de comparer ou de comprendre l'action gouvernementale. Quand on est au gouvernement, on a l'initiative législative pour décider du moment, de la pièce législative,
sa coordination, des échanges entre les parlementaires. Et hier on a discuté essentiellement de code vestimentaire. Alors, je sais qu'ici ça
fait partie des réflexions, ça fait
partie des discussions. Alors, hier, on a parlé de code vestimentaire pour les
policiers et les constables spéciaux, donc des gens qui travaillent à notre sécurité ici, à l'Assemblée nationale, et dans les palais de justice, et les policiers.
Alors, on a parlé essentiellement des pantalons, mais ça pourrait porter sur d'autres signes, d'autres
signes distinctifs en fonction
de la foi des policiers, par exemple. Alors, le débat est ouvert.
De
tous les projets de loi qui étaient potentiellement susceptibles
d'être apportés pour le débat par le ministre
de la Sécurité publique, il a choisi celui-là. Alors, il ouvre la session avec
celui-là, grand bien lui fasse, on sera là pour en discuter. Mais ce que je
veux savoir, d'entrée de jeu, de la ministre, c'est comment elle conçoit que,
dans le projet de loi n° 133, l'État n'a aucun problème à aborder la
question des vêtements de certains de ses employés, en l'occurrence les policiers de la Sûreté du
Québec, les constables spéciaux de l'Assemblée nationale, ceux des palais de justice. Ça touche également
par la bande d'autres employés mais qui relèvent du municipal, par exemple les
policiers du SPVM à Montréal, de Laval, de
Longueuil, de la ville de Québec, du Roussillon, etc. Alors, ce serait une
première question sur l'arrimage ou
les discussions qui ont lieu ou pas entre le ministère de la Sécurité publique
quant au projet de loi n° 133 et quant à son lien ou pas avec le
projet de loi n° 62.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la ministre.
Mme
Vallée : M. le Président, je pense que mon collègue aura la
chance d'échanger sur le projet de loi n° 133. Ici, je lui rappellerais que nous sommes à l'étude du
projet de loi n° 62. Et l'amendement actuel porte sur l'interdiction
de signes religieux aux agents de l'État.
Maintenant,
pour ce qui est du projet de loi n° 133, il répond à une situation toute
particulière. Je pense que je n'ai pas
besoin de lui rappeler les débordements qui ont eu cours et l'importance de
s'assurer qu'un citoyen sache qu'il a ou qu'elle a affaire à un agent de
la paix, à un policier, à quelqu'un en autorité. Et actuellement... Et
d'ailleurs le projet de loi vient préciser l'importance de l'uniforme, c'est
tout à fait en lien avec ce que j'ai mentionné.
Alors,
M. le Président, je n'aborde pas la question de l'uniforme et de l'habillement
dans le projet de loi n° 62. Ce n'est
pas un projet de loi sur la tenue vestimentaire des gens, contrairement au
projet de loi qui avait été présenté par le Parti québécois. On n'interdit pas le port des signes religieux. Et,
l'encadrement, le projet de loi n° 133 s'inscrit dans un enjeu de
sécurité et de lien de confiance nécessaire entre la population et ses
employés. Et ce projet de loi est étudié devant
cette commission, M. le Président, par mon collègue du ministère de la Sécurité
publique. Alors, je référerais mon collègue
à cette question-ci, parce qu'on peut passer des heures et des heures à
s'amuser à parler, et je sens... Je trouve ça étrange, mais je ne
voudrais pas présumer d'intention.
Le
Président (M. Bernier) : Non, je suis persuadé, Mme la ministre, que vous
ne voulez pas présumer ou donner des motifs à vos collègues sur le
sujet. M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : C'est ma première question, imaginez. Les mots-clés
à retenir : débordement et s'amuser. Alors, ça fera partie du verbatim.
Le Président (M.
Bernier) : ...je viens de le mentionner.
M.
Bérubé :
Oui, puis vous le faites avec l'expérience qu'on vous connaît et la probité
qu'on vous connaît.
L'intention
du législateur, c'est important, ça. Alors, c'est le même gouvernement, c'est
des ministres du même Conseil des
ministres. J'ai eu le privilège, moi, de siéger avec ma collègue, là. Je peux
vous dire qu'il y a une coordination qui s'effectue, et on ne peut pas,
d'autant plus à 24 heures d'avis, dire une chose et son contraire. Alors,
s'il n'y a pas d'interdiction des signes
religieux, alors on ne va pas interdire aux policiers de la ville de Montréal,
par exemple, ou de la Sûreté du
Québec d'ajouter des signes religieux pour démontrer une appartenance quelconque,
au même moment on veut leur faire
garantir qu'ils vont porter l'uniforme tel qu'il est prévu. Alors, je trouve ça
étonnant que, d'un côté, le collègue de la ministre me dit hier que c'est l'uniforme intégral, aucun
débordement, aucun changement, il n'y a pas vraiment de liberté, c'est l'encadrement requis par cette
profession-là, et ça se termine là, et que, là, aujourd'hui, j'arrive dans ce
débat, je l'ai quand même suivi...
qu'on laisse tout aller, hein, par une vision qui épouse parfaitement celle du
gouvernement du Canada, à tout le
moins, là, dans ses intentions, qui est partagée par bien des membres et pas
seulement cette formation politique.
Donc,
c'est la coordination entre les deux, parce que, quand je vais revenir dans le
projet de loi n° 133, lui, il va me référer à la ministre de la Justice, qui, elle, va me référer au
ministre de la Sécurité publique. Finalement, on n'aura pas de réponse. Alors, l'idée, ce n'est pas de s'amuser,
c'est de comprendre la cohérence entre le même gouvernement, qui a à
coordonner une action gouvernementale cohérente et des communications
gouvernementales cohérentes, ce qui n'est pas un luxe, vous en conviendrez, M.
le Président, vous êtes également un fin observateur de la vie politique.
Je soumets à
l'intention des participants de cette commission qu'il y a quelques heures à
peine, puis certains collègues étaient là
hier... que cette question-là mérite d'être analysée parce que, dans les deux
cas, on parle essentiellement des mêmes choses. Ce n'est pas tellement le
vêtement mais la possibilité ou pas de porter des signes religieux.
Alors,
je comprends que les policiers de la ville de Montréal pourraient... devraient
porter intégralement l'uniforme mais vont pouvoir rajouter des signes
religieux. Alors, c'est là qu'on serait rendu. C'est ça?
Le Président (M.
Bernier) : Mme la ministre.
Mme Vallée : C'est assez spectaculaire de voir le travail qui
se fait, de l'autre côté, pour tenter de compliquer somme toute des
intentions législatives qui sont très claires.
Le
projet de loi de mon collègue s'inscrit dans un contexte très
particulier, et l'uniforme et son imposition ne vient pas brimer les droits et libertés des policiers et
des constables spéciaux. Le port de l'uniforme est prescrit, s'inscrit
dans un contexte tout particulier.
Et, lors de ma
présentation, et, dommage, notre que collègue était sans doute affecté à une
autre commission parlementaire, mais on a eu des échanges, lors de notre
dernière séance, et j'expliquais justement que tant les policiers, tant les magistrats étaient assujettis à des codes
particuliers. Les membres de la magistrature portent la toge, respectent un
code d'éthique et de déontologie. Les policiers sont assujettis, comme les
agents de la paix, au port de l'uniforme. Cet uniforme-là, il est décrit et il
est prescrit par la loi. Donc, il n'y a pas de raison de venir ajouter au projet
de loi n° 62 l'amendement proposé par notre collègue de Montarville.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
• (15 heures) •
M.
Bérubé : Toujours sur le même sujet, j'invite les
collaborateurs et collaboratrices de la ministre à lui fournir avec
empressement le libellé du projet de loi n° 133, ce sera certainement très
éclairant, parce qu'encore une fois le même
ministre, qui doit être assis pas tellement loin de la ministre lors des
séances du Conseil des ministres, pourrait lui indiquer qu'est-ce qu'il
nous a annoncé hier.
Le
respect intégral de l'uniforme des policiers, je prends cet exemple-là que je
connais bien, a pour but notamment d'assurer
l'autorité, d'assurer la reconnaissance rapide de la personne. Ça, c'est ce que
prétend le ministre. D'ailleurs, il y a des fortes chances que la ministre soit concernée avant longtemps
parce que les différentes associations de policiers
ont déjà annoncé qu'elles allaient contester
en cour la constitutionnalité de ce projet
de loi là. Et d'ailleurs à voir,
hier, les échanges avec le ministre, j'ai l'impression qu'il n'est pas
convaincu, lui aussi, que c'est si solide que ça.
Alors,
les policiers de la Sûreté du Québec, ceux qui relèvent de Québec, je
ne prendrai pas le SPVM, s'il
s'agit de port de signes religieux de religions connues présentement, ça peut
être l'islam, ça peut être le judaïsme, ça peut une grande croix, ça peut... etc., ils portent l'uniforme, mais ça s'ajoute,
c'est possible de le faire, dans l'esprit de la ministre, c'est ce que je comprends? Ils portent totalement
l'uniforme, mais ils ajoutent des signes religieux. Est-ce que c'est le
message que je vais pouvoir livrer à la commission sur le projet de loi
n° 133, qu'ils vont pouvoir ajouter ça à leur uniforme?
Le Président
(M. Bernier) : Mme la ministre, des commentaires sur cet énoncé.
Mme Vallée :
C'est, encore une fois, assez incroyable de voir le raisonnement du collègue.
Et, la question, et je pense qu'on
est très... mon collègue de la Sécurité publique est très à l'aise avec son
projet de loi. Ça, là-dessus, je tiens à rassurer notre collègue de
l'opposition. Il y a des raisons de sécurité, il y a des raisons d'ordre public
qui justifient l'encadrement du port de l'uniforme.
C'est quand même
assez impressionnant de constater qu'on veut une chose et son contraire, du
côté...
Une voix :
...
Mme Vallée :
Pas du tout. Parce qu'en fait je ne comprends pas ce que notre collègue tente
de laisser sous-entendre, parce que notre
projet de loi sur la neutralité religieuse ne vient d'aucune façon toucher la
tenue vestimentaire des agents de la paix. On parle d'un amendement
présenté par notre collègue de Montarville aujourd'hui.
Une voix :
Taschereau.
Mme Vallée :
Ah! désolée, désolée. Parce que je sais... C'est parce que notre collègue de
Montarville avait mentionné son intention de déposer un amendement. Donc, je
suis un petit peu en avance.
Une voix :
...
Mme Vallée :
Oui, tout à fait, tout à fait, M. le Président.
Donc, le projet de
loi n° 133 s'inscrit dans un contexte particulier et fait l'objet d'une
étude en commission parlementaire. Le projet
de loi n° 62 est un projet de loi, également, qui s'inscrit dans une
volonté d'encadrer la neutralité religieuse de l'État, d'encadrer la
prestation de services, et il n'y a pas d'ajout ou quoi que ce soit... Mais ce
que je mentionnais, M. le Président, c'était
qu'actuellement il y avait au sein de la magistrature, parce qu'on a omis d'en
parler, des membres de la magistrature au
Québec qui portaient la kippa. Et, à ce que je sache, ça ne pose pas problème
et ça n'a pas posé problème, parce
que ça fait quand même... c'est présent dans la communauté juridique depuis des
années puis ça n'a pas posé problème. Alors, c'était le but de mon
intervention. Et voilà.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : O.K.
Bien, ça va être très utile pour la poursuite du débat du projet de loi
n° 133.
Donc,
la ministre fait référence à la magistrature, elle aime évoquer cette question.
Moi, je parlais des policiers et je
vais toujours parler des policiers. D'ailleurs, c'est de ça qu'il est question.
Et merci d'avoir rappelé que c'est de ça qu'il était question, M. le
Président.
Donc, à
partir du moment... C'est le laisser-faire, hein, c'est ce que je comprends,
là, c'est la liberté, on ne veut pas encadrer
les personnes en autorité, c'est ce que j'ai compris. Sans avoir participé à
l'ensemble des échanges, là, je pense que c'est un élément qui se distingue de la position, notamment, du
gouvernement, et appuyé par un certain nombre d'autres personnes.
Donc, les policiers considèrent, eux, puis c'est
ce qu'ils ont dit hier, puis d'où l'importance qu'on achemine rapidement à la
ministre les propos qui ont été tenus, que ça va à l'encontre des chartes, et
que partout où on a voulu encadrer cette
question, puis ça se fait dans le cadre, par exemple, de négociations, c'est
circonscrit, d'avoir un vêtement différent,
parce qu'ils n'ont pas le droit de grève, pour toutes sortes de raisons, ça va
à l'encontre des chartes, donc ils vont aller en cour. Il se pourrait donc que, dans un nouveau moyen de
contestation... Parce que le gouvernement va exercer sa majorité parlementaire pour adopter le projet de
loi. Il faut que les gens comprennent ça, qui nous écoutent, là. On a
beau débattre, proposer, mais ultimement
c'est le gouvernement majoritaire qui décide, d'où l'importance d'être
vigilants. Alors, l'ensemble des
membres d'un corps de police pourraient décider qu'un de leurs moyens de
pression, c'est d'afficher de façon
très ostentatoire un signe religieux, surdimensionné, à la rigueur, qui
s'ajouterait à leur uniforme qu'ils porteraient intégralement. Donc, ce
serait possible de le faire, c'est ça?
Le Président (M. Bernier) : Mme
la ministre.
Mme Vallée : M. le
Président, c'est très mal connaître l'application de la charte, c'est très mal
connaître l'encadrement des accommodements
pour motif religieux. On aura la chance, un peu plus tard, d'étudier les
balises que nous proposons pour les
demandes d'accommodement religieux, mais, chose certaine, M. le Président,
tourner au ridicule une liberté de croyance comme le propose le
collègue, il y a absolument... Non, mais c'est...
Le Président (M. Bernier) : Mme
la ministre, je vous invite à être prudente dans vos énoncés de façon à... Il
faudrait... Écoutez, c'est des...
Mme Vallée : Non, mais,
M. le Président, les commentaires du collègue sont tout à fait...
Le
Président (M. Bernier) : Oui, mais il faut faire attention, il y
a des propos parlementaires à respecter, Mme la ministre. Je vous
invite, là... Puis je sais que... vous êtes certainement capable de présenter...
Mme Vallée : ...la
semaine dernière, on a... pas la semaine dernière, mais il y a deux semaines on
a parlé des pastafaristes. Le pastafarisme,
c'est justement une manifestation où l'on tourne de façon... où on se moque des
demandes d'accommodement pour motif
religieux. Et là le collègue dit : Est-ce que quelqu'un, à titre de
protestation, pourrait porter un
signe religieux ostentatoire? M. le Président, la liberté de religion, ce
n'est pas quelque chose qui se manifeste du jour au lendemain, la
croyance religieuse sincère n'apparaît pas du jour au lendemain pour un choix
de manifestation...
Une voix : ...
Mme Vallée : Non, mais
laissez-moi terminer.
M. Bérubé :
Question de règlement.
Le Président (M. Bernier) :
Question de règlement.
M. Bérubé :
Ce que la ministre a dit précédemment, c'est que j'ai tourné en ridicule les
confessions religieuses...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, puis d'ailleurs j'ai...
M. Bérubé : ...et
vous ne l'avez pas noté, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) :
J'ai souligné à la ministre...
M. Bérubé : Ah!
c'est subtil.
Le Président (M. Bernier) : ...en
ce qui regarde les propos tenus, que ces propos-là...
M. Bérubé :
J'attendais votre intervention, qui manifestement devait venir, j'imagine.
Le Président (M. Bernier) :
C'est ce que j'ai fait, c'est ce que j'ai fait.
M. Bérubé :
D'accord.
Le
Président (M. Bernier) : Et j'écoute ce qu'elle dit pour être sûr que
vous ne serez pas... que la commission ne sera pas brimée par rapport
aux propos qui seront tenus ici.
Continuez, Mme la ministre. Je vous écoute
attentivement.
Mme Vallée :
Je nous invite à la prudence, M. le Président, tous autour de cette table puis
dans nos propos parce que, lorsqu'on tente de... lorsque l'on utilise...
Une voix : ...
Mme Vallée : M. le
Président, je parle, et la collègue reprend mes mots. Là, je comprends, là, on
essaie... Non, non, non...
Le Président (M. Bernier) :
Écoutez, là, si on veut avancer dans nos échanges et dans nos débats...
Une voix : ...
Mme Vallée : Bien oui,
mais on ne se moque pas d'un collègue qui a la parole.
Le
Président (M. Bernier) : ...en ce qui regarde la personne, le
député qui a la parole, on la laisse prendre la parole. Par la suite...
Une voix : ...
Le Président (M. Bernier) : Je
vais vous revenir, madame... Avez-vous une question de règlement?
Mme Maltais :
Oui, j'ai une question de règlement. Parce que la collègue vient de
m'interpeler en disant que je me moquais d'elle. Au contraire, je
l'avisais, comme on l'a fait...
Le Président (M. Bernier) :
Écoutez...
Mme Maltais :
Non, c'est très clair, on a une très bonne relation, la ministre et moi,
jusqu'ici, dans le projet de loi, et
je veux la garder. Quand j'ai répété ces mots-là, délicatement, c'est que je
voulais lui indiquer qu'elle allait dans un chemin dans lequel elle ne
devrait pas aller. Et je pense qu'elle a compris, elle a changé ses termes.
C'est correct.
Le Président (M. Bernier) : Bon,
écoutez, Mme la députée de Taschereau, vous savez, en ce qui regarde les
chemins, ici, j'en suis le guide, actuellement, et je conserve mon autorité en
ce qui regarde ces points-là. Continuez, Mme la ministre.
• (15 h 10) •
Mme Vallée : M. le
Président, moi, je ne veux pas banaliser le respect des droits et libertés des
citoyens, et l'exemple que notre collègue
nous a donné tout à l'heure était, à mon avis, une illustration d'une
potentielle banalisation. Je ne
disais pas... Mon intention n'était pas de prétendre que le collègue banalisait
les droits et libertés, pas du tout, pas du tout. Mais, par contre, ça
m'amenait... ça m'a fait penser à la question, justement, soulevée par son
propre collègue, il y a deux semaines, où on a abordé la question des pastafariens,
et ça me permettait de dire qu'il ne fallait pas non plus se moquer indûment
des droits et libertés des citoyens.
Et d'ailleurs
la question des pastafariens, c'était ça, et la Cour supérieure l'a d'ailleurs rappelé, que l'objectif de la requête était futile, visait tout simplement à
ridiculiser certains droits. Donc, ça m'a amenée à... ça m'a fait penser à ça. Et l'exemple de mon collègue serait, à mon
humble avis, de la même nature, c'est-à-dire que de prétendre d'utiliser
par moyen de manifestation le port d'un signe religieux par quelqu'un dont...
qui n'a pas une croyance véritable, à mon avis, ne tiendrait pas la route.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé :
...précision, ce n'était pas le propos. Et, lorsqu'on relira les galées, on
verra très bien que je parle de quelqu'un qui manifesterait de façon
ostentatoire sa propre religion, pas la religion de quelqu'un d'autre.
D'ailleurs, la ministre a certainement noté que
sa propre collègue de Bourassa-Sauvé avait porté une croix surdimensionnée à l'Assemblée nationale, puis elle
avait dit qu'elle avait fait exprès pour provoquer, à ce moment-là, convaincue que... Sa collègue du Conseil des
ministres s'est empressée de la ramener à l'ordre en lui disant qu'il ne
faut pas banaliser les questions de religion
et de port des signes religieux. On pourra en faire une photocopie, de cette
photo, pour le bénéfice de tout le
monde. Ceci étant dit, je ne veux pas accabler davantage à la députée de
Bourassa-Sauvé, mais je veux rappeler ce souvenir-là.
M. le Président, sur la question de la police,
c'est quand même important, c'est un enjeu. Le gouvernement considère que c'est suffisamment important pour
que ce projet de loi là soit traité présentement, en même temps que le projet de loi n° 62, avant bien d'autres
projets de lois importants, par exemple, sur l'indépendance de l'UPAC, de la
SQ, sur les chiens dangereux, sur un
ensemble d'autres projets de loi. Donc, à partir du moment où ils l'amènent et
où on en débat, cette semaine, puis parfois c'est les mêmes parlementaires qui siègent sur les
deux commissions, je trouve qu'il y a un enjeu de cohérence.
La ministre
me précise un certain nombre d'éléments qui vont pouvoir me permettre de mieux
cibler les interventions qu'on va
faire sur le 133, mais le gouvernement va toujours bien... Et il l'a dit très
clairement, le ministre, hier, il va
choisir d'intervenir sur une question vestimentaire, c'est ce qu'il va faire.
On a même parlé de la qualité des tissus, hier, tel type de tissu, la couleur, la coupe, on était là-dessus. Et il
y a des droits aussi là-dedans : la liberté d'association, la liberté, pour un corps syndical, de choisir ses
moyens de se manifester. Moi, je suis sensible à ça, surtout pour un
corps de métier qui ne peut pas le faire,
qui ne peut pas le faire de façon aussi visible que d'autres, comme les
juristes de l'État, par exemple, qui ont manifesté devant l'Assemblée
nationale. Alors, l'État légifère toujours bien sur des vêtements. Le projet de loi n° 133, il porte là-dessus.
Mais, pour le reste, pour tous les autres employés de l'État, là on ne va pas
baliser vraiment beaucoup, en tout cas pas
autant que les citoyens le souhaiteraient, selon moi. Alors, c'est ce que
j'évoque, tout simplement, un souci de cohérence.
Moi, je vais
retourner à la commission pour le 133 avec la volonté de comprendre s'il y a eu
des communications entre les deux ministères. Moi, je... Si c'est le
cas, qu'on me le dise. On ne me l'a pas prouvé jusqu'à maintenant.
Et il n'y a
pas eu de débordements tant que ça, soit dit en passant, je veux y répondre,
parce que la ministre a parlé tantôt
de débordements, et, dans toute la commission hier, aucun cas n'a été recensé,
de débordement, qui aurait mis en cause la sécurité du public parce que
quelqu'un n'aurait pas reconnu l'uniforme du policier, aucun cas recensé. Puis croyez-moi, M. le Président, s'il y en avait un,
on le saurait. Puis, s'il y avait... Même les chefs de police, on leur a
posé la question, ils étaient assis
là : Non, on n'a pas vraiment de cas. On pense qu'il y en a, mais il n'y
en a pas. Alors, ce n'est pas tout le temps des perceptions...
Alors, nous,
on est dans le réel, on est dans le pragmatique, on n'est pas dans le
théorique, c'est pour ça qu'on veut qu'il y ait des balises très claires
pour des personnes en autorité. Et c'est le message que j'envoie. Puis moi, je l'envoie dans la dimension policière, qui relève
de mes responsabilités. Et c'est pour ça que je veux juste m'assurer
que, lorsqu'on va légiférer puis peut-être
même adopter presque au même moment, à la fin de la session, si c'est
l'intention du gouvernement, les deux projets de loi, on n'envoie pas des
messages contradictoires aux citoyens qui vont observer nos travaux. Voilà.
Le
Président (M. Bernier) :
Merci. Tout à l'heure, le
député de Gouin
n'avait pas terminé, il avait une question à poser. Malheureusement, je suis allé rapidement. Étant donné qu'il y a
plusieurs visages, je ne l'ai pas vu lever la main. Alors, M. le député de Gouin, vous vouliez poser
une question additionnelle par rapport à votre exposé que vous avez fait
tout à l'heure.
M.
Nadeau-Dubois : Ça tombe bien parce que j'allais établir le même
parallèle que le collègue... bien, donc, le même parallèle, le même
parallèle que mon collègue vient d'établir, ça fait que mes remarques vont
converger avec les siennes.
La ministre
nous dit que, pour enfreindre... pour limiter une liberté fondamentale, ça
prend des raisons très fortes, ça prend
des raisons... on ne peut pas faire ça avec légèreté, puis personnellement et à Québec solidaire, on est tout
à fait d'accord avec ça. Ça prend des raisons importantes pour le faire,
on ne fait pas ça à la légère.
Et j'allais justement poser la question :
Comment se fait-il que, dans certains domaines, le gouvernement ait autant de facilité à limiter ou enfreindre les
libertés individuelles, comme le droit à la libre association, le droit d'expression syndicale, dans le cas du projet de loi n° 133,
mais aussi avec l'adoption d'un nombre record de lois spéciales dans les
dernières années?
Donc, il semble que, dans certains dossiers, sur
certains enjeux, ce soit assez facile pour le gouvernement d'empiéter sur les libertés fondamentales,
garanties, elles aussi, par la charte, alors que, dans d'autres domaines, il
semble y avoir une timidité puis un... oui,
vraiment une retenue totale. Parce que nous, on est bien d'accord que c'est
important, le respect de la liberté de
conscience et de toutes les libertés fondamentales, mais le défi de toute
démocratie, justement, c'est d'établir
un équilibre entre le respect de ces libertés-là et des décisions collectives,
le bien commun, les valeurs communes, tout
ce genre de choses là qui peuvent entrer aussi en ligne de compte, le bien-être
de la population, la sécurité publique. Il y a toutes sortes de raisons qu'on peut invoquer puis mettre en
parallèle ou dans un balancier avec les libertés fondamentales. Donc, ce n'est pas quelque chose qui est
absolument inadmissible et impossible dans une démocratique, au contraire.
On le fait, au Québec. On limite, par
exemple, la liberté d'expression des commerçants, en leur disant : Vous
allez afficher en français. Et c'est
une limite qu'on a mise à cette liberté d'expression là collectivement parce
qu'on considérait que c'était justifié. Donc, c'est quelque chose qu'on
fait déjà, là.
Alors,
d'essayer de nous prêter une position qui serait quasi tyrannique ou en tout
cas qui aborderait la question des libertés
individuelles avec légèreté, je pense que c'est mal comprendre la position que
j'ai tenté de défendre, qui est au contraire
une position de compromis et d'équilibre, où on dit : Dans des cas très
spécifiques, très limités, ceux des agents de l'État en position de coercition, est-ce que ce n'est pas légitime,
est-ce que ce n'est pas souhaitable, pour toute une série de raisons,
oui, de venir limiter un peu cette liberté-là de conscience?
Et ce n'est
pas pour rien que ces corps de métier là, donc ceux qui détiennent un pouvoir
de coercition... ce n'est pas pour
rien qu'on parle, en ce moment, de ces corps de métier là, ce n'est pas un
hasard, ce n'est pas arbitraire. Ce n'est pas un critère arbitraire, ce n'est pas un critère... ce n'est pas une question
de goûts personnels, il y a des raisons profondes, que les commissaires Bouchard, Taylor avaient bien
exposées. Ce n'est pas pour rien que c'est aussi ces corps de métier là
qui portent les uniformes les plus stricts,
parce que, parce qu'on impose les uniformes les plus stricts à ces métiers-là,
c'est qu'on reconnaît déjà, d'emblée, qu'ils
ont un statut particulier, différent des autres mandataires de l'État. Et c'est
pour ça aussi qu'il y a actuellement un projet de loi sur
la table pour étudier l'uniforme de ces corps de métier là. Rien de tout ça n'est arbitraire. Tout ça est fondé sur la
même idée, l'idée selon laquelle c'est des gens qui, dans une société de
droit, ont un pouvoir exceptionnel qui est celui de la coercition.
Donc, il n'y
a rien d'arbitraire ici. Puis ce n'est pas seulement... ce n'est pas faire des
parallèles de mauvaise foi ou démagogiques
que de dire que, oui, il y a un lien dans ces deux débats-là. Le lien,
c'est : Est-ce que, dans le cadre de ces professions-là, qui sont
exceptionnelles et limitées puis qui ont un pouvoir exceptionnel dans notre
société... est-ce qu'on ne peut pas, dans
ces cas-là, oui, aller un peu plus loin dans l'exigence de neutralité puis
d'apparence de neutralité?
Donc, il n'y
a personne, je crois, en tout cas pas du côté de Québec solidaire, qui prend à
la légère le fait de limiter un peu
certaines libertés individuelles, bien au contraire, on est tout à fait
sensibles à ça. Mais je veux seulement indiquer que, des limitations de
libertés individuelles, il y en a déjà plein, dans notre société. Ça s'appelle
une démocratie où on fait l'équilibre entre
les libertés individuelles et d'autres considérations. Donc, ce n'est pas
farfelu, là, ce n'est pas... oui, voilà, comme préoccupation que de
demander que, dans des cas très spécifiques, la neutralité s'accompagne d'une
apparence de neutralité.
Le Président (M. Bernier) :
C'est beau? Mme la ministre.
• (15 h 20) •
Mme Vallée :
Je voulais juste, pour notre collègue de Matane... Parce que notre collègue...
Je voulais revenir sur sa déclaration puis je voulais le rassurer, les
balises sont claires, c'est le respect de l'uniforme.
Et, lorsque
notre collègue dit : Il n'y a pas eu de problème, je veux simplement lui
rappeler qu'en novembre 2014 il y a un citoyen de Châteauguay qui avait
appelé le 9-1-1 parce qu'il avait été arrêté par un shérif. Il faut se rappeler
qu'à l'époque il y avait les shérifs de Châteauguay qui manifestaient contre le
projet de loi n° 3 et qui arboraient un costume
de shérif. Et, rappelons-nous, il y a ce citoyen, je pense que ça avait été rapporté dans les médias, en novembre
2014, qui a appelé le 9-1-1 parce qu'il
n'avait pas réalisé qu'il était devant un policier en bonne et due forme... en
bon uniforme, en bonne et due forme.
Et donc le respect de l'uniforme est important justement pour ça, pour assurer la sécurité des
citoyens, assurer qu'il n'y aura pas de débordement. Et, je l'ai
mentionné, c'est pour ça également que la magistrature est encadrée par un code
d'éthique, des règles de pratique, même chose pour les procureurs aux
poursuites criminelles et pénales.
Donc, en soi,
toute la question est déjà balisée. Donc, le débat que nous avons actuellement
sur l'amendement, à mon avis, n'a pas
sa raison d'être. Les balises sont là pour vraiment venir encadrer ceux et
celles qui occupent ces fonctions.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Gouin, avez-vous une autre question? Ça va? Mme la
députée de Montarville.
Mme Roy :
Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je vais me joindre au débat parce que, ce
que mon collègue de Matane-Matapédia
nous dit, je considère que ça a une pertinence, et j'ai dit sensiblement la
même chose dans des termes différents
il y a deux semaines. Et on va revenir au droit, si vous le voulez bien, parce
qu'à la lecture même de ce projet de loi
n° 62, quand on parle effectivement d'encadrer les vêtements des policiers
parce qu'ils ont des costumes ou encore les juges parce qu'ils ont un code qui leur dit comment ils doivent
s'habiller, tout ça, cette liberté-là qu'ils ont de s'habiller comme ils
veulent, on l'encadre. Donc, leur liberté d'expression, elle est encadrée. On
peut restreindre cette liberté. On y revient, aux libertés.
Mais Mme la
ministre nous dit : Ah! lorsque ça va toucher leur liberté de religion, là
on ne peut pas y toucher. Et, légalement
parlant, et je sais qu'il y a des juristes qui sont ici, là, ils vont
comprendre ce que je dis, c'est qu'on est en train de privilégier une liberté au détriment d'une autre
liberté. On nous dit, dans le projet de loi n° 62, que la liberté de
religion est plus importante que la liberté
d'expression. On en vient là. Et je trouve que c'est pertinent au débat de se
poser la question.
Et, nous, de ce côté-ci de la table, je sais qu'on questionne le sous-amendement de la collègue
de Taschereau, un sous-amendement qui nous dit, parce
que nous devons y revenir, que «parce qu'ils doivent incarner la neutralité de
l'État [en exerçant] un pouvoir de coercition, les agents de l'État suivants ne
peuvent porter de signes religieux dans l'exercice
de leurs fonctions», et, les agents, on les nomme : les magistrats, les
procureurs de la poursuite ou de la couronne, c'est selon, et les agents
de la paix, auxquels on inclut, et ça, on l'a bien compris, il y a deux
semaines, les agents correctionnels, les
policiers, etc. Vous comprendrez que je souscris à cet amendement,
naturellement, parce que c'était un amendement... mon collègue de Gouin
disait de compromis, mais, non, moi, je vous dirais de consensus.
L'hiver
dernier, rappelez-vous, après les tristes événements à Québec, nous avions tous
tendu la main au premier ministre
pour lui dire : Acceptons Bouchard-Taylor minimalement. Ça, c'est le
minimum de Bouchard-Taylor. On va régler la question une fois pour
toutes, on ne sera pas ici à en discuter. Nous n'aurions pas été ici à en
discuter à la rentrée parlementaire, près de
deux ans après le dépôt de ce projet de loi là. Et, pour nous, c'était un
compromis... c'est-à-dire, c'était un
consensus, parce que toutes les oppositions s'entendaient là-dessus, et la
population, et le message aurait été très fort. Et, quand on dit : Magistrats, procureurs de la couronne,
agents de la paix, déjà ces personnages, ces personnes, ces travailleurs, ces travailleuses, ces
professionnels ont un code vestimentaire, déjà le gouvernement a limité,
encadré leur liberté d'expression. Mais, le même gouvernement, vous
allez me dire qu'il n'est pas capable de limiter leur liberté religieuse?
Alors, ça, si Mme la ministre considère que
c'est sa position, elle est en train de hiérarchiser ici les libertés individuelles, et ça, ça ne se fait pas. Et elle
est en train de le faire actuellement. J'aimerais que ses juristes l'informent à
cet égard-là. Il est là, le problème, dans ce projet de loi là. Oui, on peut
dire à un policier comment s'habiller, mais, oh! on ne peut pas lui
enlever son hidjab, par exemple.
Je vais poser la question
à la ministre : Est-ce qu'une policière aurait le droit de porter le
hidjab, avec le projet de loi n° 62?
J'aimerais qu'elle me réponde sans dire que je stigmatise qui que ce soit,
parce qu'elle me l'a sortie, celle-là, il y a deux semaines, là...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, mais là on est aujourd'hui.
Mme Roy :
On est aujourd'hui, alors elle ne me le dira pas. Mais je vais m'attendre
seulement à une réponse. Je veux
qu'elle nous explique si une policière aura le droit de porter un hidjab, avec
le projet de loi n° 62. À la lecture de tout ce qu'on a vu jusqu'à présent, la réponse, c'est
oui. J'espère que Mme la ministre va nous le dire, mais je pense qu'elle
n'aura pas de gêne à le dire, la réponse sera oui.
Alors, vous
comprendrez que je suis d'accord avec l'amendement de la collègue du Parti
québécois. Et même j'aurai l'occasion
de faire un sous-amendement, parce que je trouve qu'il ne va pas assez loin,
parce que nous considérons qu'il faut également inclure les enseignants
du primaire et du secondaire, et c'est la raison pour laquelle je ferai un
sous-amendement.
Le
Président (M. Bernier) : Est-ce que vous proposez immédiatement
votre sous-amendement à l'amendement déposé?
Mme Roy :
Bien, par la suite, plus tard. Je vais laisser les collègues poursuivre sur
leur amendement. Mais, pour qu'on voie ici qu'il y a une différence,
pour nous, c'est important de le faire.
Le Président (M. Bernier) :
Plus tard. Pas de problème.
Mme Roy :
Par ailleurs, Mme la ministre dit : M. Taylor a dit que ce n'était
plus important, puis on est ailleurs, mais
M. Bouchard a continué à dire que, non, il fallait accepter ce compris qui
est un consensus au sein de l'opposition. Alors, nous, nous abondons dans le même sens que M. Bouchard. Et,
pour ces raisons, nous voterons, naturellement, pour l'amendement, qui
est un début, mais qui, pour nous, ne va pas assez loin.
Et Mme la
ministre de la Justice a dit quelque chose tantôt qui m'a fait sursauter, et
j'ai pris une note. Mme la ministre nous dit qu'il ne faut pas se moquer
des droits et libertés des citoyens. J'ai pris des notes. Alors là, j'ai eu l'impression de me retrouver dans le
p.l. n° 59. Je m'excuse, si je veux me moquer d'une religion, je vais
continuer à me moquer d'une religion,
quelle qu'elle soit. Alors, le fait que la ministre me dise : Il ne faut
pas se moquer des droits et libertés
des citoyens... Est-ce qu'on veut censurer les gens? Est-ce qu'on veut ici
créer un nouveau crime, c'est-à-dire le crime de blasphème? Pourquoi Mme la ministre a-t-elle dit qu'il ne faut
pas se moquer des droits et libertés des citoyens? Parce que vous
remarquerez qu'elle faisait allusion aux pastafariens, et que, les
pastafariens, il y a quelques années, il y a
deux ministères qui ne savaient plus où donner de la tête, parce que, la dame
qui a voulu se faire photographier avec son foulard puis une passoire sur la tête, il y avait la RAMQ qui était
impliquée dans le dossier puis il y avait la SAAQ qui était impliquée dans le dossier, et puis une de
ces deux sociétés d'État a pris une photo avec une passoire sur la tête
et l'autre a refusé. On en est là, M. le Président. Alors, voilà. J'appuierai
le sous-amendement de ma collègue de Taschereau.
Le Président (M. Bernier) : Des
commentaires, Mme la ministre, sur l'énoncé?
Mme Vallée :
Je ne prétendrai pas que la collègue stigmatise, mais je constate que
systématiquement les exemples donnés visent les femmes de confession
musulmane.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
Mme Roy :
Pourrais-je avoir la réponse à ma question, M. le Président? Est-ce qu'une
femme pourra porter le hidjab avec
son uniforme de police de la ville de Montréal ou de la ville de Québec? C'est
une question toute simple, question à laquelle,
d'ailleurs, M. Couillard n'avait pas répondu lors du débat des chefs en
2014. Alors, peut-elle nous répondre?
Le Président (M. Bernier) : Le
premier ministre, oui, le premier ministre. Avez-vous des éléments à ajouter à
cet énoncé?
Mme Vallée :
M. le Président, M. le Président, c'est certain que je m'attends à ce que les
prochaines semaines soient comme ça. Est-ce qu'on peut faire ci? Est-ce
qu'on peut porter le hidjab? Le hidjab, le hidjab. Ça va être ça
systématiquement, systématiquement parce que c'est ça, la CAQ :
l'intolérance.
Mme Roy : Oh! M. le
Président!
Le Président (M. Bernier) : Mme
la ministre...
Mme Vallée : Par contre...
Le Président (M. Bernier) : Mme
la ministre, je vous demanderais de retirer...
Mme Vallée :
D'accord, je retire.
M. le Président, M.
le Président, je réfère notre collègue au projet de loi n° 133, je réfère
notre collègue aux articles prévus à
l'article 133, et elle pourra participer aux échanges de la commission,
mais l'article 263.1 du projet de loi prévoit le texte suivant : «Tout policier ou tout constable spécial
doit, dans l'exercice de ses fonctions, porter l'uniforme et l'équipement fournis par l'employeur dans leur
intégralité, sans y substituer aucun élément. Il ne peut les altérer,
les couvrir de façon importante ou de façon à en cacher un élément significatif
ni nuire à l'usage auquel ils sont destinés.
«Le
premier alinéa s'applique sous réserve d'une exemption législative ou d'une
autorisation du directeur du corps de
police ou de l'autorité de qui relève le constable spécial lorsque l'exercice
des fonctions du policier ou du constable spécial le requiert ou que des
circonstances particulières le justifient.»
Donc, pour le port d'un signe religieux, évidemment
une demande devra être acheminée à la personne en autorité de qui relève le policier, la policière, le
constable spécial, et là, si les circonstances le justifient... Et la personne devra faire une demande, qui sera évaluée cas par cas par le
directeur en fonction des tâches du policier, des enjeux de sécurité, de
la demande qui est faite et en fonction, évidemment,
des critères que nous verrons plus tard quant aux demandes d'accommodement
pour motif religieux.
Alors,
la question, aujourd'hui, de notre collègue, qui est une question
hypothétique, devra être analysée dans le contexte particulier dans
lequel elle s'inscrira. Ça, c'est la vraie réponse, M. le Président. Et voilà.
• (15 h 30) •
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée de Montarville, est-ce que vous avez terminé ou vous avez
une autre question?
Mme Roy :
Non, j'aimerais poursuivre, M. le Président.
Le Président
(M. Bernier) : Allez-y.
Mme Roy :
Je trouve assez invraisemblable qu'on traite aujourd'hui d'une loi qui
s'appelle, pour les gens qui nous écoutent, là, Loi favorisant le respect de la
neutralité religieuse de l'État et visant notamment à encadrer les demandes d'accommodement religieux dans certains
organismes, mais que je ne puisse pas mentionner aucune religion. Ça,
là, ce n'est pas loin de l'Absurdistan, vraiment.
Et, je persiste et
signe, la question était légitime, parce qu'à la lumière de la réponse de la ministre,
oui, une policière pourrait porter le hidjab ou encore, un policier, le turban,
Mme la ministre, ou tout autre signe religieux. La réponse, c'est oui, parce que ça va être à la discrétion de son
directeur. Là, on embarque dans la subjectivité parce qu'il n'y a pas un directeur qui va avoir la même
perception. Y aurait-il un code? Seront-ils... Finalement, dans quelle
mesure c'est acceptable ou non? Mais je comprends que la réponse, c'est oui,
après que le directeur aura fait une analyse du dossier. C'est ce que je comprends. Donc, on va déléguer au directeur de
police la décision de savoir si, oui ou non, ils peuvent porter un symbole religieux. Mais, chose certaine, le gouvernement actuel n'a aucun problème à encadrer la liberté d'expression en édictant un uniforme — c'est
une liberté, ça, je vous réfère à l'article 2 de notre charte
canadienne — mais ne veut surtout pas toucher à la liberté de religion, qui, elle, se
trouve au même article 2. Alors, on hiérarchise ici les libertés,
et il est là, le problème, Mme la ministre. Voilà, c'était mon commentaire.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Mme la députée de Taschereau, je
reviens à vous.
Mme Maltais :
Oui, M. le Président. Je suis vraiment désolée que le ton ait changé.
Le Président (M. Bernier) :
Et je souhaite qu'il s'apaise.
Mme Maltais :
Oui, mais je veux quand même faire un commentaire. Se faire traiter
d'intolérant autour d'une table de commission parlementaire, j'ai
rarement vu ça, et je suis désolée que ce type de...
Le Président
(M. Bernier) : ...sur ça, j'ai réagi.
Mme Maltais :
J'ai encore le droit de dire, M. le Président, que c'est quelque chose
d'inacceptable, je pense que j'ai conservé mon droit de le dire.
Le Président
(M. Bernier) : C'est pour ça que j'ai réagi.
Mme Maltais :
Et ce n'est pas dans ce sens-là qu'on avait travaillé jusqu'ici.
Je
comprends l'idée — puis ça
a été dit aussi par le député de Gouin — qu'il y a eu un effet de stigmatisation
sur les femmes qui portent le hidjab, les femmes musulmanes qui portent le
hidjab, parce que ce n'est pas toutes les femmes musulmanes qui portent le
hidjab, c'est une minorité.
Maintenant,
quand on parle de la police, ce n'est pas de ça dont on parle, en général, on
voit, par exemple, qu'à la GRC les
hommes portent le turban, c'est possible. C'est plus là-dedans qu'on est, pour
moi. Alors, je ne suis pas dans la
stigmatisation d'une religion, mais dans l'impact de l'arrivée de gens qui
considèrent que le fait de correspondre à ses croyances est plus
puissant que l'uniforme de l'État et que ce sont des agents de coercition.
Alors, je vais reprendre l'argument de la
ministre tout à l'heure. Moi aussi, j'ai lu le projet de loi n° 133, et on interdit, là, d'avoir un autre uniforme que
l'équipement fourni par l'employeur. Mais le deuxième alinéa dit qu'il
peut y avoir une
autorisation de l'autorité, qui relève de l'autorité, puis là elle nous a
référé aux accommodements religieux dans la loi dans laquelle on est. Il n'y a rien qui interdit, actuellement...
Si on utilise les balises des accommodements religieux, on accepte l'accommodement, c'est ce que je
comprends. Parce qu'est-ce qu'il s'agit d'une demande d'accommodement
résultant de l'application de l'article 10 de la Charte des droits et
libertés? Ils vont dire oui. Est-ce que l'amendement demandé respecte le droit
à l'égalité entre les femmes et les hommes? Ils vont dire oui. Est-ce que
l'accommodement demandé ne compromet pas le
principe de la neutralité religieuse de l'État? Bien, ils vont dire oui parce
que la neutralité religieuse de l'État, c'est l'acceptation des
religions, ce n'est pas la laïcité, c'est la neutralité. On est neutre envers
les religions, donc on accepte leur arrivée dans l'État. C'est ça, le principe
avec lequel on a des problèmes.
«L'accommodement
doit être raisonnable, c'est-à-dire qu'il ne doit imposer aucune contrainte
excessive [...] au respect des droits
d'autrui — ça ne
bloque pas le respect des droits d'autrui, en tout cas, moi, je ne le vois
pas — à la santé,
à la sécurité des personnes, à ses effets sur le bon fonctionnement de
l'organisme ainsi qu'aux coûts qui s'y rattachent.» Il y a peut-être le bon fonctionnement de l'organisme.
Mais pourquoi on ne le dit pas, tout simplement? On laisse encore un flou.
Et je vais
revenir à une phrase de tout à l'heure
de la ministre. Elle a dit que c'était un problème de
perception. Oui, il y a une partie de ça qui est un problème de perception.
Mais je vous rappellerais les mots de Régis Labeaume, du maire de Québec.
On n'est pas toujours d'accord, puis je ne suis pas d'accord avec tout
ce qu'il a dit, mais, si on va sur le fond, ce qu'il
a raconté, c'est : Écoutez, nous, les hommes et femmes politiques, ne
trouvons pas de solution valable à ce qui interpelle profondément la
population, à ce qui les ébranle. Or, qu'est-ce qui les ébranle? C'est
l'arrivée du religieux dans l'État. C'est ça
qui les ébranle. Alors, pourquoi, à certains endroits, le gouvernement
n'accepte pas de simplement le dire?
Si la ministre est d'accord avec moi qu'au Québec on s'est entendus que les
uniformes policiers des agents de la paix, c'étaient des uniformes
clairs et que c'était seulement l'uniforme de l'État qui était important,
l'uniforme fourni par l'employeur, bien,
disons-le. Parce que, dans 133, il y a encore une ouverture puis, dans 62, il y
a encore une ouverture. Puis, si 133 nous ramène à 62, 62, il y a la
même ouverture.
Alors, il faut véritablement, véritablement
essayer de rassurer la population parce que, oui, la perception est forte. Puis je ne pousse pas sur la perception,
j'essaie de régler un problème de perception. Mais je rappelle que, par
ailleurs, ceci dit — sur le global, là, je ne suis plus sur les
uniformes seulement — quand
j'entends la fédération québécoise des médecins
spécialistes nous dire : La neutralité, ce n'est pas assez, ça nous prend
la laïcité parce que ce n'est pas un problème de perception, c'est carrément un problème dans nos milieux de santé, on
n'est plus dans la perception, là, on est dans, véritablement, un
problème vécu par des Québécois et des Québécoises qui ont un service à donner.
Alors, moi,
je remarque ce qu'elle m'a dit : 133 réfère à 62. Je lis 62 puis je pense
qu'on a encore cette ouverture. Je l'invite
à accepter l'amendement, je suis prête à prendre juste les policiers, juste...
on peut trouver d'autres amendements, mais
à faire qu'on avance, mon Dieu! Est-ce qu'on pourrait avancer là-dessus? Si on
s'entend, pourquoi on ne l'écrit pas? C'est
ça que je ne comprends pas, puisqu'on s'entend. Je l'écoute, la ministre, je
sais qu'elle cherche comment me dire que c'est fermé, que ça ne se peut pas. Puis j'écoute notre ami le ministre des Affaires municipales et de la Sécurité publique dire : Non, non, il faut qu'ils
portent l'uniforme. Bien, disons-le. Disons-le dans toutes les lois et
disons-le ici. Acceptez cet amendement, puis on va l'avoir dit. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la ministre.
• (15 h 40) •
Mme Vallée : M. le
Président, je veux simplement
ajouter... Vous savez, notre collègue, tout à
l'heure, faisait une analyse
d'une demande d'accommodement, mais il y a quelque chose qui aussi très important
puis qui est toujours analysé, c'est : Est-ce que la demande
d'accommodement compromet la sécurité de celui ou de celle qui en fait la demande également, surtout en matière de
l'uniforme pour policiers et constables spéciaux? Le préambule même du
projet de loi n° 133 fait référence à
la notion de sécurité. La notion de sécurité, c'est la sécurité publique mais
aussi la sécurité de ceux et celles
qui portent l'uniforme. Donc, le port, par exemple, d'un accessoire qui
viendrait compromettre la sécurité de la personne dans le cadre de ses
fonctions, par exemple qui empêcherait le port de l'équipement antiémeute,
serait vraisemblablement refusé pour des raisons de sécurité pour celui ou
celle qui fait la demande.
Donc, il faut faire attention de ne pas
généraliser des cas hypothétiques. Mais l'histoire nous a enseigné, la jurisprudence nous a enseigné que chaque demande
d'accommodement, de modification qui peut être faite à une règle générale est analysée dans un contexte, avec le
cadre, avec les faits, avec les particularités propres à la demande,
propres à celui ou celle qui fait la
demande, et vise à trouver une voie de passage qui va respecter les contraintes
de l'emploi, les contraintes de la
fonction et également voir si ces contraintes peuvent s'arrimer avec la demande
présentée par la personne qui la
présente. Et j'apprécie que l'approche qui a été prise dans cet exemple soit
plus ouverte et vise une demande générale et pas nécessairement stigmatiser une communauté parce que c'est
important. On a vraiment une responsabilité ici, et je comprends que les
enjeux sont importants. Je comprends qu'on peut se situer à différents endroits
quant à la façon d'aborder la question, mais il
faut le faire avec calme et il faut
tenter d'aborder ces questions-là sans cibler constamment les mêmes
personnes parce que ça n'aide pas à faire avancer le débat.
Mais ceci étant, les demandes d'accommodement
seront analysées, puis la question de la sécurité, elle est importante,
puis ça, il ne faut pas non plus oublier ça. Puis le projet de loi n° 133 y fait référence, à la sécurité. S'il y
a une raison pour laquelle le projet de loi de mon collègue a été déposé, c'est manifestement pour des enjeux de
sécurité, pour s'assurer que les citoyens et
les citoyennes sauront qu'ils font affaire avec un agent de l'État, avec un
policier, un constable spécial et non
avec une personne qui tente d'usurper l'identité ou les fonctions de ces
personnes qui occupent des fonctions très importantes dans notre société.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
Je vais rester sur le même exemple, là. La GRC a considéré que ce n'était pas
un problème de sécurité que de porter le
turban sikh. Au Québec, on a une réticence. Si ça se rend en Cour suprême, la jurisprudence, c'est la
GRC. Ce n'est pas un problème de sécurité, a dit le Canada.
Le kirpan, l'Assemblée nationale considère que porter un kirpan est un problème de sécurité, mais la Cour suprême a décidé que, dans les écoles, les jeunes pouvaient porter les
kirpans. Il y a deux visions qui s'opposent. Il y a la vision canadienne, la
générale, là... On va faire les majorités, là. En général, la majorité
canadienne et la majorité québécoise sont dans deux univers. Notre vivre-ensemble
est différent, notre système de justice a ses particularités.
Alors, je veux
savoir. Étant donné qu'il y a un phénomène au Canada qui fait que ce n'est pas
une question de sécurité, est-ce que la
porte est encore ouverte au Québec, par
exemple, et que les corps policiers
pourraient dire : Oui, oui, on
accepte le turban? Moi, à la lumière de ce qui se passe dans d'autres juridictions, je lis que ce serait possible. Je voudrais juste une dernière... Tu sais, vraiment, pour moi, là, c'est
une bonne compréhension de la chose. J'ai l'impression que la porte est encore ouverte, je ne suis pas
encore rassurée. Dernière chance, rassurez-moi, puis après ça on passera
à autre chose. Parce que je me suis vraiment
demandé... Avec mon collègue de Matane-Matapédia, on a regardé ça, tous les deux, puis on se demandait : C'est fait ou ce
n'est pas fait? C'est fermé ou ce n'est pas fermé, la porte? C'est vraiment
une vraie question qu'on s'est posée.
Puis, à notre sens, la porte n'est pas fermée, puis les débats qu'il y a eu
hier, c'est que la porte n'est pas fermée.
Et, pour moi, la preuve, c'est qu'à la GRC on peut porter le turban sikh et
que, pour moi, c'est une contravention à la laïcité ou même à la
neutralité religieuse de l'État telle que je la conçois.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Mme la ministre.
Mme Vallée :
Bien, en fait, l'article dont j'ai fait la lecture prévoit une analyse pour
tous ceux et celles qui souhaitent apporter
une modification à l'uniforme parce que, dans le fond, le projet de loi est très clair : il y a un uniforme, et, cet uniforme-là, on doit le respecter
complètement. Et ça, c'est évidemment la règle. Mais le deuxième alinéa de 263.1
que l'on retrouve à l'article 2,
évidemment, prévoit la possibilité «d'une exemption
législative ou d'une autorisation du directeur [d'un] corps de police ou
de l'autorité de qui relève le constable spécial lorsque l'exercice des
fonctions du policier — ça,
c'est important — ou
du constable spécial le requiert ou que des circonstances particulières le
justifient».
Donc, chaque cas est
un cas d'espèce. La personne qui est tenue, dans le cadre de ses fonctions...
qui occupe des fonctions particulières, mais
la demande sera formulée et analysée en
fonction du contexte. Est-ce que
c'est un policier... Est-ce que c'est
quelqu'un qui oeuvre dans l'escouade antiémeute? Est-ce que l'équipement permet
le port que ce soit du turban ou...
de l'élément qui est demandé ou de l'élément modificateur différent qui est
demandé? Alors, ce sera les cas... et ce
sera au directeur du corps de police ou au directeur de l'autorité... qui verra
à déterminer si la demande est justifiée. On ne peut pas aujourd'hui présumer d'une réponse générale. Les
accommodements présupposent une exemption à la règle générale. Les
accommodements dans leur ensemble présupposent une exception à cette règle
générale là, et cette exception-là, elle est accordée ou elle est refusée en
fonction du contexte particulier.
Donc,
nous, aujourd'hui, on établit des règles, des règles générales.
C'est ce que mon collègue fait avec 133, et il prévoit très clairement la règle générale, qui est celle du port de
l'uniforme et du fait qu'on ne peut altérer cet uniforme. Toute demande visant à accommoder, à amener un
accommodement à cette règle-là, que ce soit pour une question...
Notre collègue nous amène une question
d'ordre religieux, mais il pourrait y avoir, d'aventure, une demande d'accommodement
pour un autre motif. Est-ce que quelqu'un,
en raison de sa situation physique, requiert un ajustement? Mais ces
questions-là... Et il est prévu dans le projet de loi, il est prévu également
dans le projet de loi n° 62 qu'il y aura une personne responsable au sein des organisations pour
analyser ces demandes-là. Et pourquoi les demandes d'accommodement sont prévues? Bien, les
demandes d'accommodement résultent de l'application de nos chartes.
Donc,
vous voyez, M. le Président, c'est la situation devant laquelle nous
sommes. Donc, on ne peut pas présumer d'une
réponse, on ne peut pas généraliser, puisque chaque cas devra faire l'objet
d'une analyse en fonction du contexte, en fonction de la fonction du
policier ou de l'agent, en fonction de l'occupation de cette personne-là, donc,
voilà.
Mme Maltais :
M. le Président, pour compléter, je comprends que...
Le Président
(M. Bernier) : Mme la députée, allez-y. La parole est à
vous.
Mme Maltais : ...je comprends que la liberté de religion prime,
prime encore sur l'obligation de porter l'uniforme pour les gens, puisque les demandes d'accommodement existent toujours et que ce qu'il
y a dans notre loi, c'est sensiblement ce qu'il y a dans la jurisprudence,
sensiblement. Donc, il est toujours possible de demander de contrevenir
au port de l'uniforme pour les personnes en
situation de coercition dans l'État. C'est toujours possible. Et la réponse est
oui, elle est claire pour moi, là, je n'ai
pas besoin de le redemander. La réponse, c'est : Oui, c'est toujours
possible de faire une demande d'accommodement religieux. Parce que la
loi qu'on étudie, c'est les accommodements religieux, demandes d'accommodement religieux. Section III,
Accommodements religieux : «Le membre du personnel d'un organisme
qui traite une demande d'accommodement pour un motif religieux...»
Donc,
le port de l'uniforme, je ne sais pas s'il y a d'autres collègues qui vont parler,
moi, je n'ai plus de temps là-dessus,
mais je nous invite à fermer cette porte tout simplement, celle-là, là, ça vaut
la peine, pour les agents en situation de coercition, puis de faire enfin un pas en avant, M. le Président. On
peut-u régler ça, là? C'est le gros bon sens. Pourquoi des fois on ne vote pas le gros bon sens? Le gros bon
sens, ça ferait bien du bien au Québec actuellement. Puis le gros bon
sens serait bien accepté par la population, comme il est porté par tous les
partis d'opposition.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Je veux apporter une
précision parce que la question a été posée. Chacun des députés a
20 minutes, et, son temps, je le protège sans égard à la réponse donnée
par la ministre. Donc, la ministre ne répond jamais sur votre temps.
Mme Maltais :
Oui, je le sais, ça.
Le Président (M. Bernier) :
O.K. Non, je veux juste... C'est parce qu'on m'a posé la question.
Mme Maltais : Ce
n'était pas ça, la question. C'est parce qu'on a essayé... Excusez, M. le Président,
je veux simplement vous expliquer le débat
de la semaine dernière. J'avais réagi parce qu'à un moment donné la ministre a
droit à cinq minutes pour répondre à chaque fois, puis c'est correct, des fois
ça dépasse à six, à sept, à huit, mais, à un moment donné, la longueur des
réponses avait pris un certain espace, où on a dit : Écoutez, c'est
important qu'il y ait des échanges plus rapides, plus variés, tout simplement,
là.
• (15 h 50) •
Le
Président (M. Bernier) : O.K. Mais je veux rassurer, le temps de
parole de chacun des députés... Et je l'ai toujours fait et protégé.
Donc, on va... M. le député de Saint-Jérôme, c'est
à vous ou...
M. Bourcier : Oui.
Le Président (M. Bernier) :
Allez-y.
M. Bourcier :
Écoutez, je vais faire un petit retour en arrière, je vais essayer d'être
encore pédagogique, je ne peux pas me
soustraire de mes origines d'enseignant, mais moi, j'ai constaté qu'en février
dernier, pour M. le premier ministre, c'était un enjeu inexistant, ce
qu'on discute actuellement. Pour le Parti québécois, bien, c'est un enjeu qui
est majeur.
Alors,
exemple, je reviens sur le rapport Bouchard-Taylor, dont on ne semble pas tenir
beaucoup compte au niveau du
gouvernement, mais c'est un rapport, quand même, qui a coûté plusieurs
millions, qui a été payé par les contribuables, qui est toujours sur les tablettes, on ne s'en sert pas. Alors, c'est pourtant
une des positions communes, ici, des gens du côté de l'opposition. C'est quand même 3 130 $ par page.
MM. Bouchard et Taylor l'ont signé tous les deux, ce rapport-là.
Alors, avec son application puis avec la laïcité
au lieu de la neutralité religieuse, qui me semble, à mon avis puis pour la première opposition, la chose la plus
claire, on ne se poserait pas la question aujourd'hui. Alors, pour les
agents de l'État, tel que décrit dans notre
amendement, c'est : pas de signes religieux. Pour moi, c'est simple. Mêler
la population puis ceux qui nous
écoutent, là, ce serait d'accepter qu'un signe religieux comme un ajout à un
uniforme ne compromette pas la
sécurité ou la neutralité religieuse d'un agent de l'État québécois, avec le
projet de loi de Mme la ministre dans son état actuel. Du moins, c'est
ce qu'on peut en conclure.
Je regarde le
projet de loi n° 133 de mon collègue de Matane, et, dans les considérants,
on dit ici que l'uniforme...
«Considérant
que l'uniforme des policiers et des constables spéciaux, symbole de leur
autorité et de leur crédibilité, impose le respect essentiel[...];
«Considérant que le port de l'uniforme par les
policiers et les constables spéciaux permet de les identifier sans équivoque...»
Et il y en a
un autre, considérant, aussi, que j'ai remarqué tout à l'heure :
«Considérant que le port de l'uniforme dans son intégralité — mais
dans son intégralité — par
les policiers et les constables spéciaux est nécessaire afin de favoriser la
confiance de la population à leur égard...» Bien là, on est ailleurs, avec ce
qui se discute actuellement et la neutralité religieuse.
Mon collègue
de Bourget, la semaine dernière... il y a deux semaines, plutôt, mentionnait
que ce serait le chaos. Ma collègue
de Montarville mentionnait justement l'exemple de nos amis les pastafariens,
qui ont engendré des coûts en avocats
pour l'État. Ça va être encore le chaos. Alors, de sous-entendre que les agents
de l'État québécois n'enverraient pas de
message, de manière intentionnelle ou non, avec le port de signes religieux,
d'ajouts ostentatoires à leur uniforme, ça, ça peut donner une mauvaise
perception, une mauvaise perception publique. C'est encore errer.
Alors, de
quelle manière on va gérer ça, les possibles débordements ou les accommodements
de Mme la ministre? Comme l'a laissé
sous-entendre un petit peu plus tôt mon collègue de Matane, la neutralité, ce
n'est pas la laïcité. Alors, l'amendement qu'on propose, au moins, ça
pourrait minimalement clarifier la situation.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la ministre.
Mme Vallée : Je n'ai pas
de commentaire additionnel à formuler.
Le Président (M. Bernier) :
Vous n'avez pas de commentaire additionnel? M. le député de Saint-Jérôme.
M. Bourcier : C'est tout pour
moi.
Le Président (M. Bernier) :
C'est tout pour vous? Mme la députée de Montarville.
Mme Roy : C'est beau,
merci.
Le Président
(M. Bernier) : Ça va?
Une voix : ...
Mme Roy : Est-ce qu'il
faut le présenter ici? Là, je veux juste...
Le
Président (M. Bernier) :
Oui, bien, si vous avez un sous-amendement, oui, sinon vous allez devoir en faire un amendement
spécifique.
Mme Roy : Merci de me
spécifier, M. le Président, le moment exact où le passer. Alors, oui, je ferai
un sous-amendement.
Une voix : ...
Mme Roy : Ah! O.K. Question : Est-ce que c'est possible de
voter celui de ma collègue de Taschereau et ensuite déposer le mien pour que ça
devienne un amendemen?
Le Président (M. Bernier) : Ça
devient... Si on vote...
Mme Roy : Parce qu'il
est différent dans le libellé, là.
Le
Président (M. Bernier) :
Bon, O.K. Donc, à ce moment-là, on
peut voter l'amendement de Mme la députée de Taschereau, et à ce moment-là vous aurez l'occasion de formuler un nouvel
amendement, et ce ne sera pas un sous-amendement mais bel et bien un
amendement.
Mme Roy : Exact, M. le
Président.
Mme Maltais : Vote par appel
nominal, s'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) :
Vote par appel nominal. M. le secrétaire.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. Mme Maltais (Taschereau)?
Mme Maltais : Pour.
Le Secrétaire :
M. Bourcier (Saint-Jérôme)?
M. Bourcier : Pour.
Le Secrétaire : Mme Vallée
(Gatineau)?
Mme Vallée : Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire :
Mme Montpetit (Crémazie)?
Mme Montpetit : Contre.
Le Secrétaire : M. Auger
(Champlain)?
M. Auger : Contre.
Le Secrétaire :
Mme St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis : Monsieur.
Le Secrétaire : Oh! M. St-Denis
(Argenteuil)? Pardon.
Des voix : ...
Le Président (M. Bernier) : Est-ce
qu'il y a eu des changements?
M. St-Denis :
Pas encore.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : Mme Roy
(Montarville)?
Mme Roy : Pour.
Le Secrétaire : M. le
Président?
Le Président (M. Bernier) :
Abstention.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Bernier) :
Donc, l'amendement proposé par Mme la
députée de Taschereau est rejeté. Mme la députée de Montarville, vous
avez un amendement à nous proposer?
Mme Roy : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Alors, on va en faire des copies. En avez-vous des
copies?
Le Président (M. Bernier) :
Bien, faites-en lecture. Par la suite, on va faire des copies pour tout le
monde.
Mme Roy : D'accord.
Alors, je vais en faire la lecture?
Le Président (M. Bernier) :
Oui, faites-en la lecture.
Mme Roy :
D'accord. Alors, ajouter, après
l'article 4, l'article suivant — là, on était à 4.3, là, selon le
libellé :
«4.3. Les personnes suivantes ne peuvent porter
de signe religieux visible dans l'exercice de leurs fonctions :
«1° les juges;
«2° le
Procureur général, le Directeur des
poursuites criminelles et pénales ou
une personne que l'un ou l'autre autorise à intenter une poursuite en
leur nom;
«3° les agents de la paix;
«4° les enseignants de niveau primaire et
secondaire.»
L'article, tel qu'amendé, se lit ainsi :
«4. Le
respect du principe de la neutralité religieuse de l'État comprend notamment le
devoir pour les membres du personnel
des organismes publics d'agir, dans l'exercice de leurs fonctions, de façon à
ne pas favoriser ni défavoriser une personne
en raison de l'appartenance ou non de cette dernière à une religion, ni en
raison de leurs propres convictions ou croyances religieuses ou de
celles d'une personne en autorité.
«4.3. Les personnes suivantes ne peuvent porter
de signe religieux visible dans l'exercice de leurs fonctions :
«1° les juges;
«2° le
Procureur général, le Directeur des
poursuites criminelles et pénales ou
une personne que l'un ou l'autre autorise à intenter une poursuite en
leur nom;
«3° les agents de la paix;
«4° les enseignants de niveau primaire et
secondaire.»
Alors, on peut faire des copies, puis ensuite je
pourrai faire les commentaires.
Le
Président (M. Bernier) :
Oui, on va suspendre quelques
instants pour faire des copies, et je
vais m'assurer également de la forme et de la recevabilité de votre amendement.
Je suspends.
(Suspension de la séance à 15 h 57)
(Reprise à 16 h 3)
Le
Président (M. Bernier) :
Donc, nous reprenons nos travaux. Nous en étions à un projet d'amendement déposé par Mme la députée de Montarville. Et, Mme la députée, la parole est à vous pour vos explications sur votre amendement.
Mme Roy : Merci beaucoup, M.
le Président. Alors, je l'ai lu tout à l'heure. Je ne vous le relirai pas, ne
vous inquiétez pas.
Le Président (M.
Bernier) : Non, ça va.
Mme Roy : Cependant, j'ai des précisions à apporter. Il est important
que vous compreniez une chose, c'est que nous, à la Coalition avenir
Québec, nous avons la même position
depuis 2013, depuis août 2013 que nous disons la même chose, que nous sommes en faveur des recommandations Bouchard-Taylor sur l'interdiction de signes religieux chez
les personnes en position d'autorité coercitive. Nous les avons nommées tout à
l'heure, nous les nommons dans notre amendement. Et nous ajoutons les
enseignants pour plusieurs raisons, entre autres à la suite de plusieurs
témoignages d'acteurs du milieu de l'éducation qui sont venus nous dire dans quelle mesure les signes religieux ne
sont pas anodins et influencent. Il y a un message avec un signe, et
comme les enseignants sont avec... Et nous spécifions ici, dans cet amendement, les enseignants du primaire et du secondaire. On comprend très bien
que les jeunes du cégep et de l'université sont capables de faire la différence et comprennent le message, mais les
tout-petits, il y a une grande influence des signes et des symboles, et on dit : Il ne faut pas que
des professeurs, les enseignants du primaire et du secondaire, portent de
signes religieux pour ce motif, entre autres parce que les signes spécifient quelque chose, expliquent quelque chose, enseignent quelque chose même si la
personne ne parle pas et ne fait pas de prosélytisme, mais le symbole lui-même
en est un qui parle beaucoup. Ça, ce sont les spécialistes qui sont
venus nous dire ça.
Et par ailleurs j'ajouterais aussi un motif légal. Vous savez, quand vous envoyez vos
enfants à l'école, les parents envoient
les enfants à l'école, et Mme la
ministre de la Justice, qui a
travaillé longtemps en droit de la famille, pourrait confirmer ou infirmer, il y a
une forme de délégation de l'autorité parentale. L'autorité parentale, ce sont
papa et maman, mais, lorsqu'on est à l'école, les enfants du primaire et
du secondaire, les petits, papa, maman n'est pas là, et c'est l'enseignant qui
représente l'autorité parentale, qui représente papa et maman, et comme les
enseignants ont cette délégation d'autorité parentale de facto, ils doivent
représenter chaque parent. Mais on s'entend que, dans une classe, il y a plusieurs confessions, il y a plusieurs
enfants de toutes les confessions. Alors, l'enseignant ne doit pas
représenter une seule confession, mais
toutes les représenter ou, ce qui serait encore mieux, aucune, et, pour nous,
on se dit qu'un enseignant n'affiche pas de signe religieux. C'est le
respect de sa délégation d'autorité parentale puisque l'enseignant représente
le parent pour l'enfant, il est en autorité, et c'est la raison pour laquelle
on mettait les enseignants.
Et ce n'est
pas une question de stigmatiser qui que ce soit, c'est une raison de gros bon
sens, et c'est une raison qui nous vient aussi, un motif qui nous a été
soulevé, qui nous a été apporté par plusieurs personnes que nous avons rencontrées, parce que des commissions parlementaires
sur la question, M. le Président, on en a eu plusieurs, hein, et c'est la raison pour laquelle nous ajoutons les
enseignants à notre amendement. Pour nous, c'est important qu'ils ne
portent pas de signe religieux, et c'est la
raison pour laquelle j'ai l'obligation et je me fais un devoir de déposer cet
amendement, parce que nous conservons la même position. Nous conservons
la même position et la même logique depuis le tout début. Alors, pour certains détracteurs qui diraient
qu'on change d'idée au gré du vent, c'est totalement faux dans le dossier
qui nous préoccupe ici. C'est totalement
faux à d'autres égards également, mais là on en a la preuve puisque les
documents ont été déposés en 2013, en ce qui
nous concerne, et nous avons la même position. Donc, c'est la raison pour
laquelle je me fais un devoir de déposer cet amendement même si je sais
très bien, eu égard à ce que Mme la ministre a dit tout à l'heure, qu'il sera battu par la partie
gouvernementale. Mais je me fais quand même un devoir de le demander. Alors,
voilà, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
Mme la députée. Mme la ministre.
Mme Vallée :
En fait de constance, M. le Président, je pense que nous aussi, on est
constants quant à notre position sur
cette question-là. Donc, vous comprendrez qu'autant j'étais en désaccord avec
la proposition d'amendement présentée par notre collègue de Taschereau
autant je suis en désaccord avec la proposition d'amendement présentée par
notre collègue. Et je pense qu'il y a eu
quelques débats. J'étais sous l'impression, puis corrigez-moi, là, qu'il y
avait eu une modulation de la position de la CAQ suite aux événements de
janvier dernier, il me semble. Mais, ceci étant, M. le Président, j'ai pu me méprendre avec une autre déclaration, puis,
n'ayant pas avec moi l'information exacte, je ne voudrais pas prétendre...
Ce que ma collègue a dit, je n'aurais pas osé le dire. Je la laisse le dire,
là, mais je n'aurais pas osé prétendre qu'elle changeait d'opinion avec le
vent. C'était une défunte formation politique.
Le Président (M. Bernier) : Il
faudrait peut-être arrêter avec les derniers mots.
Mme Vallée : Non, mais c'est
elle qui l'a dit, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : Non,
mais... Avec le vent.
Mme Vallée :
Bien là, le vent n'est pas antiparlementaire. C'était le terme «girouette» qui
l'était, oui, mais ça, c'était une autre époque.
Le
Président (M. Bernier) :
O.K. Mais, en tout cas, évitons ce genre de terme dans cette commission cet
après-midi.
Une voix : ...
Le
Président (M. Bernier) : Oui, oui, vous... Mme la députée.
Effectivement, vous avez le droit de parole, c'est votre droit de parole
actuel. Mme la députée de Montarville.
Mme
Roy : Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, il y
avait une position de compromis, de consensus
que nous avons faite pour régler le dossier cet hiver, mais on sait ce qui est
arrivé, M. le premier ministre a rejeté
du revers de la main notre position. Donc, nous revenons à notre position
originale. Et, comme je l'ai dit tout à l'heure, et plus d'une fois, ce dossier-là aurait pu être réglé cet hiver et ce
n'est pas le cas. Alors, de toute évidence, ce compromis n'a pas eu
lieu, et nous revenons à notre position initiale. Alors, il n'y a rien qui
change. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Saint-Jérôme ou... Mme la députée de
Taschereau.
• (16 h 10) •
Mme
Maltais :
Écoutez, M. le Président, c'est clair qu'on est, nous, sur la position de
compromis. On y croit encore. On aurait aimé
tout à l'heure que la position de compromis soit la proposition adoptée. On l'a
déposée comme telle même si elle ne
correspond pas à tout qu'on pense. On a un congrès en fin de semaine, c'est le
congrès national du Parti québécois. On va débattre de laïcité. Il y a
d'autres éléments qui vont arriver, dont les CPE, les enseignants. C'est en
discussion dans notre parti politique actuellement.
Maintenant,
je dois vous dire que, malgré cela, moi, avec des nuances que je présenterai
tout à l'heure, mais je vais être
d'accord avec cette proposition-là. Ça fait partie de ce qu'on veut aussi. Puis
mon collègue est enseignant, alors lui, il pourra... le député de
Saint-Jérôme pourra vous en jaser, de tout ça, de la présence du religieux à
l'école.
Maintenant,
je tiens à dire qu'on est.... même si nous, on voulait vraiment la position de
Bouchard-Taylor pure, on la voulait
parce qu'on croyait que c'était adoptable, on pensait que tout le monde ferait
un pas vers ça. Ce n'est pas fait. À partir de maintenant, on va se
diriger plus vers des positions qui sont les positions des partis, on lâche un
peu aussi l'espèce de recherche de consensus
qui se faisait, puis je trouve ça dommage, mais maintenant on va agir en
fonction de nos positions
respectives. On ne rechercha plus le consensus. On va chercher à faire évoluer
le Québec chacun de son côté, de la manière dont on le voit, de la
manière dont on le pense. Alors, de ce côté-là, je vous le dis tout de suite,
là, sauf des discussions qu'on veut avoir avec la collègue, on va appuyer la
proposition de la collègue.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Je vais donner la parole au député de
Gouin, si vous permettez.
M. Nadeau-Dubois :
N'étant pas membre de la commission, je n'aurai pas le droit de vote sur
l'amendement, mais c'est important...
Le Président
(M. Bernier) : Mais vous avez le droit de parole.
M. Nadeau-Dubois :
Voilà. Néanmoins. Alors, je voulais partager la position de ma formation
politique aussi pour le bénéfice des gens qui nous écoutent.
Les
enseignants et les enseignantes au niveau primaire et secondaire, jusqu'à
preuve du contraire, au Québec, n'ont pas
de pouvoir d'autorité coercitive sur les enfants. Ils ne représentent pas la
cime du pouvoir de l'État, n'incarnent pas en leur personne même l'autorité coercitive de l'État. C'est une des
raisons pour lesquelles les professeurs, les enseignants, enseignantes ne portent pas d'uniforme,
d'ailleurs, ce n'est pas pour rien. Encore une fois, il y a une cohérence dans
la manière dont on réfléchit le niveau d'autorité dont bénéficient les
mandataires de l'État. Et, troisièmement, le métier d'enseignant et d'enseignante
est un des métiers les plus encadrés au Québec, les plus réglementés. Ça prend 120 crédits universitaires pour devenir
enseignant ou enseignante au niveau primaire, secondaire. On considère qu'il
y a suffisamment d'encadrement de cette
profession-là et qu'il n'y a pas... Donc, il y a suffisamment d'encadrement du
point de vue professionnel et du point de
vue déontologique, puis il n'y a pas de pouvoir coercitif, pas d'uniforme.
Alors, on ne voit aucune raison justifiée de restreindre le port de
signes religieux pour les enseignants et les enseignantes et on trouve ça dommage de dériver de la position de compromis
qui est celle des recommandations de la commission Bouchard-Taylor.
Alors, nous, on réitère que c'est notre position et puis on signale notre
désaccord à l'égard de cet amendement-là.
Le Président
(M. Bernier) : Oui, Mme la députée de Montarville.
Mme Roy :
Je souligne au passage qu'il y a tout l'argument de la délégation de l'autorité
parentale dont personne ne fait état, mais qui pourtant est très réelle.
Mais je ne sais pas si tout le monde la comprend.
Et
par ailleurs il ne faut pas oublier, M. le Président, qu'on a
déconfessionnalisé nos écoles, et les gens qui nous écoutent le savent. Et je ne sais pas si vous vous
souvenez, mais, moi, en 1970 — oui, je trahis mon âge, j'ai
53 ans — c'étaient
des bonnes soeurs qui nous enseignaient, et
elles ont quitté pour des laïcs. Et, l'école déconfessionnalisée, ce serait le
fun que ce soit une école laïque.
Je comprends que Mme
la ministre ne veut pas accepter le mot «laïque» dans son projet de loi, mais,
en déconfessionnalisant nos écoles, ce n'est
pas pour y faire entrer davantage de religieux. Et ce que je dis depuis le
départ, depuis l'amendement à l'article 1
sur l'objet de la loi, c'est que cette loi, en changeant son objet comme elle
l'a fait, va faire entrer plus de religieux dans l'État, alors que c'est
l'inverse que la population demande. Il faudrait aussi écouter la population à cet égard. Et, dans cette veine de la
déconfessionnalisation de nos écoles, il est pertinent que les
enseignants ne portent pas de signe
religieux. C'est un des motifs également au soutien de notre amendement, je
voulais l'ajouter puisque je ne l'avais pas dit.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, madame. Oui, une remarque, madame?
Mme Vallée :
Petite remarque, là. Ce n'est pas tout à fait exact de dire : Il y a une
délégation de l'autorité parentale. Ce
n'est pas une délégation de l'autorité parentale, là. Il y a certains attributs
de l'autorité parentale, la surveillance, la garde, et il y a une distinction. On en a discuté, d'ailleurs, de
l'autorité parentale, dans le projet de loi n° 113. Mais, ceci étant, M. le Président, je pense qu'il faut faire
attention. Lorsque je parle des nuances, lorsque je parle de
l'importance des mots en commission parlementaire, c'est de ça que je parle.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Saint-Jérôme, on
me dit que vous êtes enseignant et que vous avez des choses à nous dire.
M. Bourcier :
Oui, bien, écoutez, j'ai enseigné
35 ans au primaire, alors c'est sûr que j'ai vécu cette
transition-là de la religion catholique qui
était à l'intérieur de nos écoles, et puis cette transition-là, elle s'est effectuée
au fil des années. Et je veux juste
répondre à Mme la ministre que je suis assez en accord avec ma collègue de
Montarville en présumant — et
je l'ai vécu — que les parents s'attendent de la part de
l'enseignant à de l'éducation impartiale du point de vue religieux. C'est très important. Il y avait certains
élèves, lorsque c'était l'Halloween, on ne devait pas leur présenter de
matériel à l'Halloween parce que leur religion leur interdisait. Alors, il
fallait respecter ça. Et les gens s'attendent à ce qu'on ait une impartialité
religieuse en tant qu'enseignants, et, en portant des objets ostentatoires, on
envoie des messages.
Je vous
dirais que la religion catholique, au début de ma carrière, était omniprésente.
On avait des crucifix dans nos classes. Mon école s'appelait l'école
Notre-Dame. Regardez tous les noms des anciennes écoles, c'est souvent des
Saint-Jean-Baptiste, Sainte-Marcelle, Saint-Louis. On l'a tous vécu, là,
Monseigneur-Frenette à Saint-Jérôme...
Une voix : ...
M.
Bourcier : Ah! Voyez-vous?
Et souvent, ces bâtisses-là, je ne vous dis pas que les églises étaient plus
petites, mais c'était à partir de personnel
religieux qu'elles ont été nommées, de célébrités religieuses. Aujourd'hui, on ne retrouve plus de noms à consonance religieuse pour nos
écoles. Alors, par exemple, à Saint-Jérôme, il y en a une qui s'appelle les Hauts-Sommets. On se rapproche peut-être
de Dieu, mais là, regardez, d'une autre manière, O.K., une manière beaucoup
plus laïque.
Alors, tout
ça pour dire qu'on a retiré les crucifix de nos classes, on a retiré les cours
de catéchèse, la confession collective
des étudiants. Il n'y a plus de représentants religieux qui visitent les écoles comme ça se
faisait déjà. On a tout enlevé. Mais il y a un danger. Moi, en tant qu'ex-enseignant, je
réitère à nouveau que le plus important, pour un enseignant, c'est d'avoir la
confiance des parents. Les enfants nous sont confiés tous les jours de
8 heures à 4 heures, et ils nous délèguent
une partie de leurs pouvoirs. Par
contre, il ne faudrait pas envoyer de
message à des niveaux de religion qu'eux autres n'accepteraient pas. Alors, moi, en tant qu'ex-enseignant...
Mais, lorsque j'étais enseignant, j'étais le modèle des enfants, alors
je me devais d'être neutre, en tant qu'enseignant de sixième année du primaire.
Et Dieu sait qu'à cet âge-là, les enfants,
on peut les influencer, parce que le professeur, l'enseignant devant eux, c'est
leur vérité à tous les jours, là,
leur manière de vivre. On les éduque, maintenant.
D'ailleurs, je tiens à saluer les
collègues enseignants, qui en plus de faire
de l'instruction font de l'éducation beaucoup plus, aujourd'hui.
Ce sont des gens qu'on doit considérer et qu'on doit beaucoup respecter
dans leur travail.
Alors, je nous invite et je vous invite, Mme la
ministre, à une grande prudence avec ce qu'on envoie comme message à nos élèves et à considérer l'amendement
qui est proposé par ma collègue de Montarville, avec une certaine nuance
qu'on va apporter un petit peu plus tard avec ma collègue de Taschereau.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Gouin, vous vouliez ajouter?
M. Nadeau-Dubois : Non, ça va.
Le Président (M. Bernier) :
Non, ça va? Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Oui, M. le Président. Je veux bien comprendre l'amendement
de la collègue, là. Elle parle de signes religieux visibles. Jusqu'ici, dans tout ce qu'on avait déposé, nous, on
parlait de signes religieux ostentatoires, c'est-à-dire qu'ostentatoires étant un peu sur le mode d'exagération.
Je pense que l'apparition inopinée de l'immense croix de notre collègue
de Bourassa-Sauvé avait été qualifiée d'ostentatoire. Je pense qu'on peut
clairement dire qu'à l'époque la collègue avait un signe religieux ostentatoire
qui était... Elle voulait vraiment se faire remarquer, elle l'a été.
Une voix : ...
Mme Maltais : Alors, aujourd'hui...
Oui, elle se fait remarquer pour d'autres choses parfois aujourd'hui.
Aujourd'hui,
la collègue parle de signes religieux visibles. J'aimerais voir la différence,
parce que, moi, la petite croix dans le cou ou la petite main de Fatma
dans le cou, je n'ai pas de problème, là, ce n'est pas ce qu'on appelle les signes religieux ostentatoires ou susceptibles
d'avoir une marque d'influence auprès des enfants. Ça fait que
j'aimerais ça comprendre la portée de «visible» versus «ostentatoire».
Le Président (M. Bernier) : Mme
la députée de Montarville.
• (16 h 20) •
Mme
Roy : Ça va me faire plaisir de répondre à cette question-là,
parce qu'à l'époque de la défunte charte de — on peut le nommer — M. Drainville je lui avais dit cette
chose et je dis la même chose : À partir du moment où on dit «ostentatoire», on vient de créer une catégorie,
une grosseur. À partir de quel moment c'est trop gros ou pas assez gros,
c'est trop visible ou pas assez visible? Et,
à partir du moment où on crée des catégories en disant «ostentatoire», là on
ouvre une boîte de Pandore, parce que qui va
vérifier, qui va dire : C'est assez gros, ce n'est pas assez gros, cette
croix-ci est permise, cette croix-ci ne l'est pas? On se crée des problèmes,
alors qu'en disant : Zéro signe religieux, on ne les voit pas.
Je
pense que, pour ce qui est de l'application... C'est parce
que nous faisons des lois, ici, M. le Président, et les lois, elles doivent
être appliquées, et il ne faut pas se casser la tête, là, outre mesure en
créant des catégories, puis des sous-catégories, et des sous-sous-catégories, dans le cas qui nous préoccupe,
là, si on parle de signes religieux. Alors, dire : On peut en mettre ou : On ne peut pas en mettre,
c'est clair. Et, dans la mesure où c'est visible, la petite croix, si vous la
portez sous votre chemise, votre chemise est
fermée, vous n'influencez personne, ça ne dérange personne parce qu'on ne la voit pas. À partir du
moment où on voit des signes religieux, ils deviennent visibles. Et justement,
le fait que je ne dis pas «ostentatoire»,
Mme la ministre, qui m'a dit que je stigmatise une seule religion, on s'entend
qu'il y a des religions où c'est plus
visible que d'autres, et, en disant : Aucun signe religieux, on vise
toutes les religions. On ne vise pas une religion, on vise toutes les
religions.
À l'école, pour nous,
ce n'est pas l'endroit, lorsqu'on est enseignant, pour porter un signe qui va
influencer. Il y a des sociologues, il y a
des psychologues, il y a des tonnes de documents dans nos universités sur les
signes, et la symbolique, et
l'importance des signes, et chez les enfants particulièrement, les signes
portent un message, et nous, ce qu'on dit,
c'est qu'il faut sortir le religieux de l'école. Alors, ce message religieux
n'a pas à être là. Je lisais quelque chose de très intéressant. Les
enseignants sont là pourquoi? Pour enseigner les mathématiques, le français et
autres cours, la géographie, etc., les
langues, l'anglais, mais ils ne sont pas là pour porter un message religieux.
Et on a même sorti le cours de religion de l'école, je m'en souviens
très bien.
Alors,
c'est dans cette optique, Mme la députée de Taschereau. Lorsque vous dites
«ostentatoire», vous créez des catégories — à partir de quand
quelque chose est ostentatoire, à partir de quand il ne l'est pas? — et
vous créez des problèmes, et vous devrez
évaluer... Et j'avais même posé la question, je m'en souviens très bien. C'est
heureux qu'il soit parmi nous
aujourd'hui, le député de Matane-Matapédia, il s'en souvient peut-être. Nous
étions au Club des ex, et j'avais posé la question... M. le député était ministre, à l'époque, des
Installations olympiques, et je lui ai dit : Qui chez vous, à la Régie des installations olympiques, va décider si
un fonctionnaire porte un signe qui est ostentatoire, qui est trop gros
ou qui est trop petit? Il m'avait dit :
C'est une véritable question, ça? Et j'avais répondu oui. À partir du moment où
on crée une catégorie en disant : Le signe doit être d'une telle
façon, on vient de se créer des problèmes.
Alors,
c'est la raison pour laquelle nous disons : Pas de signe religieux
visible, point, ce qui n'empêche pas le bijou qu'on ne voit pas, qui est personnel, collé sur le corps et surtout
caché. Mais, de cette façon, on vient justement ne pas viser une religion parmi tant d'autres, mais on
les touche toutes dans la mesure où il n'y aura pas de signe religieux.
C'est une façon, comment dirais-je... C'est égalitaire dans la mesure où
personne n'en porte, point. Voilà. J'espère que ça répond à votre question, Mme
la députée de Taschereau.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la ministre, vous m'avez demandé la parole.
Mme
Vallée : C'est quand même assez particulier parce que
l'amendement de notre collègue favorise clairement une religion au détriment des autres. Le signe
visible, le signe invisible... Visible pour qui? Visible, je dirais... Et je
ne veux pas faire de blague, alors je ne le
dirai pas, mais visible pour qui? Et on vient, à quelque part, catégoriser les
religions. Donc, si votre religion ou votre
croyance n'amène pas le port d'un signe religieux, elle est plus acceptée
socialement que la croyance ou la religion qui amène le port d'un signe
religieux. Si vous êtes athée, votre liberté de croyance est plus importante
que celui ou celle qui est de confession, par exemple, juive ou de confession
catholique et qui porte une croix par-dessus ses vêtements.
Donc,
en utilisant le terme «visible», on vient catégoriser les religions parce que
ce ne sont pas toutes les religions et toutes les manifestations de
croyance religieuse qui amènent le port d'un signe, quel qu'il soit. Notre
collègue faisait référence au débat entourant le projet de loi n° 60, le
défunt projet de loi n° 60. Je me souviens qu'on avait eu des discussions. Est-ce qu'on devrait avoir un
ruban à mesurer? Qu'est-ce qui est
ostentatoire? Qu'est-ce qui ne l'est pas? Qu'est-ce qui est trop gros? Qu'est-ce qui est trop petit? Mais on en
est dans le même type d'argument : ce qui est visible, ce qui ne
l'est pas.
Donc, vous, votre
croyance religieuse, votre croyance sincère n'amène pas le port d'un signe,
c'est plus toléré socialement que si votre croyance religieuse amène le port
d'un signe. Lorsqu'on a débuté les consultations, M. le Président, puis... notre collègue de Gouin a dit : On peut
parler de l'inconfort des gens parce que, c'est vrai, il y a dans la société un inconfort à ce qui est différent, à
la différence de l'autre. Parfois, cette différence-là se manifeste,
s'extériorise, mais, c'est ça, on... Là,
actuellement, là, on est justement dans le coeur de tout ça. On est
inconfortable avec ce qui ne nous ressemble pas. Moi, c'est ce que je
ressens, M. le Président, de l'amendement présenté par notre collègue.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Oui, Mme la députée de Montarville.
Mme Roy :
Oui. Je vois que Mme la ministre n'a pas retenu les autres arguments.
De
un, ce n'est pas une question d'être confortable ou non confortable, c'est une
question d'interdire tout signe religieux à qui que ce soit. Mme la
ministre ne le lit pas de la même façon que nous le lisons.
Par ailleurs,
elle ne m'amène aucun argument relativement à la déconfessionnalisation des
écoles, et ce qu'on fait, c'est
qu'elle vient confirmer qu'on va, avec le projet de loi n° 62, permettre
plus de religieux que d'autre chose. Et, moi, quand je dis : L'interdiction de port de
signes religieux, je dis «visibles» pour qu'on comprenne bien, là. On ne veut
pas en voir, point. On ne s'attaque à aucune religion. Donc, à cet égard, on a
une interprétation qui est différente.
Et j'aurais
aimé l'entendre sur la déconfessionnalisation des écoles et j'aurais aimé
l'entendre sur l'importance des symboles et des signes, également, qui
sont des marqueurs qui influencent les enfants, par ailleurs.
Et, encore
une fois, Mme la ministre nous prête des intentions lorsqu'elle dit que c'est
parce qu'on n'est pas à l'aise avec...
Ce qu'on dit, là, c'est : Pas de signe religieux pour ces personnes parce
qu'elles sont d'une importance extrême, surtout les professeurs avec les enfants, là, elles sont d'une
importance extrême pour l'État. Quand nous disons : Les juges,
les procureurs de la couronne, les gardiens
de prison, qui, oui, eux, représentent l'État de façon coercitive... Mais
vous irez me dire qu'un enseignant n'est pas
quelqu'un qui formera l'esprit et le cerveau de nos enfants pour le futur,
vous? Vous viendrez me dire qu'un enseignant n'a pas une importance
particulière dans la mesure où ici on parle de signes et de symboles, là, et que les signes et les symboles,
avec des enfants... Il y a une spécificité, là, avec les enfants du
primaire et du secondaire. On ne parle pas
du cégep, on ne parle pas de l'université, mais on parle de la symbolique, de
l'importance du message derrière les signes religieux quels qu'ils soient.
Et donc,
naturellement, je n'ai pas la même lecture de Mme la ministre. Je ne suis pas
d'accord avec ce qu'elle dit et je ne suis pas d'accord avec son
interprétation de cet amendement. Pour nous, ce message... M. le Président, si
cet amendement avait été accepté, ou était
accepté, ou est en voie d'être accepté, ce dont je doute fort, très fort, vous
vous rendez compte du message qui est lancé?
Je comprends qu'on n'a jamais dit que l'État québécois était laïque parce
que Mme la ministre a refusé l'amendement sur la laïcité que j'ai déposé à
l'article 1, refusé d'inclure le mot «laïque» dans
son projet de loi, mais, minimalement, avoir des officiers de l'État en
position d'autorité coercitive, qui ne portent pas de signe religieux, alors qu'on a le droit de limiter la liberté
d'expression en exigeant un uniforme... Mais là Mme la ministre vient de
nous dire qu'on n'a pas le droit de limiter leur liberté de conscience. Ça ne
tient pas la route.
Alors, moi,
c'est l'argument que je voulais soulever. Et je mettrai, s'il n'y a pas d'autre
commentaire, aux voix par appel nominal, je vous prie.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, mais malheureusement il y a encore des
personnes qui ont... des députés qui ont à s'exprimer sur le sujet, dont
Mme la députée de Taschereau.
• (16 h 30) •
Mme
Maltais :
Oui, merci, M. le Président. Écoutez, quand les religieuses ont décidé de
retirer leur uniforme dans nos
écoles, ce n'était pas par peur, on n'avait pas peur de la différence, c'était
pour la laïcité, parce qu'on avait fait un choix collectif, la laïcité. C'est pour ça que j'ai parlé aussi de
petite croix comme main de Fatma. Il y a des petits bijoux comme ça... Moi, je connais, par exemple, une
personne qui porte la petite croix de sa grand-mère puis je connais une personne pour qui sa croix de Fatma... sa petite
main de Fatma, c'est le Maroc, pour elle, c'est son pays d'origine. Mais
c'est des personnes qui portent un petit
signe, qu'elles glissent parfois, hein, sous la chemise et tout. Mais on n'a
pas peur de la différence, vraiment,
puis ce n'est pas parce que c'est une religion qui vient de l'étranger. Il faut
écarter tout de suite ce type d'argument là, là.
Mais je pense
que la CAQ, de ce côté-là, va trop loin, dans le sens que moi, je crois que les
gens peuvent garder encore des petits signes qui ne sont pas
ostentatoires et je vis bien avec ça. J'ai toujours bien vécu avec ça. C'est le
prosélytisme qui nous fatigue, c'est l'ostentatoire.
Puis la
liberté de religion, c'est une chose. Croire, c'est protégé, là. Il n'y a
personne qui va vous envoyer en prison au
Québec parce que vous croyez. Il n'y a personne qui va vous empêcher de parler
de votre foi dans la vie privée, dans la vie publique, quotidienne, d'aller au lieu de culte, tout ça, mais, dans
l'État, c'est de ça dont on parle, on parle des enfants, on parle des
enseignants.
L'autre chose
que je pose à la collègue, moi... On a eu un grand débat, dans le temps de la
charte des valeurs, de la charte de
mon collègue Bernard Drainville, et finalement nous, on a pris une position qui
a dit : Bon, bien, écoutez... On s'est
tellement fait écoeurer sur : Allez-vous mettre à la porte quelqu'un, une
enseignante, ta, ta, ta, alors que, on le sait tous, la seule personne qui a été mise à la porte sur ce
sujet, c'est Fatima Houda-Pepin, permettez-moi de le rappeler. Elle nous
écoute d'ailleurs souvent. Bonjour, Mme Houda-Pepin. Alors, c'est elle qui
a perdu son emploi. Alors, pour ne pas qu'il
y ait une deuxième personne, outre Fatima Pepin, qui perde son emploi, nous, on
parle de droits acquis, maintenant. Est-ce que la collègue est
ouverte à rentrer les droits acquis?
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Commentaires sur l'amendement de Mme
la députée de Montarville? Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? Non?
Oui, M. le député de Saint-Jérôme, vous avez un commentaire?
M.
Bourcier : Oui, tout à fait. Écoutez, j'ai été... Encore une fois,
c'est ma conscience professionnelle antérieure qui m'a poussé à retourner voir la définition d'«ostentatoire», plutôt
que «visible», et dans «ostentatoire» on dit : «Qui est fait avec ostentation, mis en valeur de façon excessive.»
Et le contraire d'«ostentatoire», bien, c'est «caché», «discret» et
«secret». Alors, il faut faire confiance aux enseignants à ce niveau-là.
Nous, ce qu'on dit, quand on voudrait qu'il y
ait également puis on le suggérait à la collègue de Montarville, d'accepter notre point de vue, c'est dans le
respect des droits acquis. Par exemple, pour ceux, comme Mme la députée
de Taschereau disait, que ces symboles-là, pour eux, sont très importants, mais
portés de façon discrète, pour ceux qui sont
déjà engagés, ils pourraient le garder, mais, pour les futurs engagements au
niveau des commissions scolaires, des enseignants
pour le primaire et le secondaire, bien, ce sera tolérance zéro pour les signes
religieux ostentatoires. Je pense que les enseignants le savent déjà.
Ils ont une grande responsabilité. Comme on le disait tantôt, ils exercent
beaucoup d'influence sur les enfants, ont la
confiance des parents. Et nous, on va aller dans le sens de ce que je viens de
vous énoncer.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Donc, Mme la députée de Montarville a demandé un vote nominal. M.
le secrétaire, si vous voulez bien procéder, s'il vous plaît, à l'appel du vote
nominal.
Le Secrétaire :
Pour, contre, abstention. Mme Roy (Montarville)?
Mme Roy :
Pour.
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : Oui.
Des voix :
...
Mme
Maltais :
Non, non, c'est parce que mon collègue a annoncé un sous-amendement...
Le
Président (M. Bernier) : Ah! vous annoncez un sous-amendement? Ah!
excusez-moi. Donc, je vous en prie, allez-y. Si vous avez un
sous-amendement, je vais le recevoir.
M. Bourcier :
Alors, je le redis, j'ai un sous-amendement qui viendrait modifier l'amendement
actuel.
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y, M. le député.
M. Bourcier : Alors, il viendrait modifier l'amendement ajoutant l'article 4.3,
alors, en remplaçant le mot «visible» par
le mot «ostentatoire» — d'où mon propos de tantôt — et ajoutant, à la fin du paragraphe 4o,
ce qui suit : «, dans le respect des droits acquis».
Alors, dans le texte
modifié, on lirait ceci : «Les personnes suivantes ne peuvent porter de
signe religieux ostentatoire dans l'exercice de leurs fonctions — tels :
«1° les juges;
«2° le Procureur général, le Directeur des poursuites criminelles et pénales ou une personne que l'un ou l'autre
autorise à intenter une poursuite en leur nom;
«3° les agents de la
paix;
«4° les enseignants
de niveau primaire et secondaire, dans le respect des droits acquis.»
Le
Président (M. Bernier) :
Alors, merci. Donc, je vais suspendre pour recevoir votre sous-amendement, auquel nous allons également
faire des copies pour les collègues, et assurer son... vérifier
l'admissibilité. Je suspends.
(Suspension de la séance à
16 h 36)
(Reprise à 16 h 39)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Donc, nous en
étions au dépôt d'un sous-amendement par M. le député de Saint-Jérôme. M. le
député de Saint-Jérôme, la parole est à vous.
M.
Bourcier : Oui. Alors, écoutez,
je vais réexpliquer à nouveau le but de ce sous-amendement à l'amendement
de la députée de Montarville. Donc,
pour nous, premièrement, on a rajouté «ostentatoire» parce que...
Et, je le répète, c'est que l'objet ostentatoire, c'est un objet qui est
mis en valeur de façon excessive. On a pu le voir tout à l'heure sur une des
photos qu'on a montrées ici. Le député de Matane en a discuté amplement.
Une voix :
...
• (16 h 40) •
M.
Bourcier : Je ne sais pas,
mais je sais que vous en avez beaucoup parlé tantôt. Oui, c'était un objet qui
était mis en valeur de façon excessive. Alors, on voudrait éviter ça en
utilisant ce mot-là. Et, au contraire, «ostentatoire», évidemment, s'il ne l'est pas,
l'objet devient donc... il est caché, il est discret, il est secret, à la
discrétion de la personne qui le
porte et sans pour autant porter atteinte aux valeurs morales ou encore à la
confiance que les parents font à cet enseignant-là.
Maintenant, je
reviens dans le respect des droits acquis. Donc, pour les enseignants de niveau
primaire et secondaire, eh bien, pour les
enseignants qui sont déjà engagés par leurs différentes commissions scolaires, pour toutes sortes de raisons, qui portent un objet évidemment qui est un signe religieux,
ça a été fait par le passé, nous, en
tout cas, au niveau de la première opposition, on veut qu'ils gardent
leurs droits acquis. Donc, ça demeure évidemment dans le respect... l'objet qu'ils portent actuellement. Sinon, on va
s'en aller dans une chasse aux sorcières qui serait vraiment désagréable
pour tout le monde. On ne veut pas ça. Donc, on va le tolérer pour ces gens-là,
mais, pour les futurs engagements, pour les gens qui ont été engagés par les commissions scolaires dans les années futures en tant
qu'enseignants au niveau primaire et secondaire, eh bien, pour nous, ce qu'on
désire, c'est tolérance zéro. Ils n'auront pas de signes religieux ostentatoires dans l'exercice de leurs
fonctions en tant que professeurs et évidemment guides des élèves. Ils ont une responsabilité
extrêmement importante.
Donc, c'est la juste part
qu'on peut faire au niveau de cet amendement-là, à l'amendement de la députée
de Montarville.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
Mme la ministre, avez-vous des commentaires?
Mme Vallée : Non.
Le Président (M. Bernier) : Non? Mme
la députée de Montarville.
Mme Roy : Oui, brièvement.
Pour les motifs que j'ai exprimés tout à l'heure, «ostentatoire», pour nous, va
peut-être créer plus de problèmes qu'il va n'en résoudre dans la mesure où il
faudra évaluer ce qu'est une façon excessive, à partir de quel moment c'est excessif ou non, donc à partir du moment où
on doit poser un jugement de valeur. Et c'est la raison pour laquelle,
nous, il n'y en a pas, point. Donc, on n'aura pas besoin de poser de jugement
de valeur.
Par ailleurs,
pour ce qui est du point 4... «Les personnes suivantes ne peuvent porter
de signe religieux ostentatoire dans l'exercice de leurs fonctions :
«1° les juges;
«2° [...]Procureur général;
«3° [...]agents de la paix; et
«4° les
enseignants de niveau primaire et secondaire, dans le respect des droits
acquis.» Je suis ravie de constater que les enseignants du niveau
primaire et secondaire demeurent là.
«Dans le
respect des droits acquis», je n'ai aucun problème avec ça, là. De toute évidence, il n'est pas question de faire perdre des droits à qui que ce
soit, des droits qui sont déjà acquis, je suis tout à fait d'accord.
Mais le mot «ostentatoire», malheureusement,
j'ai un problème.
Le Président (M. Bernier) : Merci. M.
le député de Gouin, avez-vous des commentaires?
M. Nadeau-Dubois : Non.
Le Président (M. Bernier) : Non?
C'est beau? Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Bien, écoutez, M. le Président, on cherche toujours la position où on pourrait
atterrir tous ensemble au même
endroit. Puisqu'on a perdu un peu le gouvernement au début, bien, on cherche au
moins encore l'unanimité des oppositions.
Vous voyez qu'on est quand même très près sur les enseignants. On est plusieurs
à dire que c'est possible en considérant
les droits acquis. J'apprécie la collègue qui dit : O.K., on irait vers
les droits acquis. Maintenant, entre «visible» et «ostentatoire», pour
moi, ce n'est pas quelque chose de fondamental, mais je pense que conserver en
l'espèce le droit aux gens de juste avoir un
petit bijou ne me fatiguait pas trop, hein, ce n'est pas vraiment très, très,
très fatigant. C'est contraignant
particulièrement pour certaines religions, je suis d'accord, mais la laïcité,
c'est ça. La laïcité, c'est permettre que l'État n'affiche pas de
préférence religieuse, et les employés de l'État représentent l'État, ils
représentent l'État.
Puis, si on
vise, là, les... si les enseignants sont ajoutés aux gens ayant un pouvoir de
coercition, c'est qu'ils ont une influence
morale sur nos enfants. On a déjà beaucoup de critiques sur le cours d'Éthique
et culture religieuse. Justement, dans
le congrès, en fin de semaine, nous autres, on veut changer ça, on est en train
de parler de qu'est-ce qu'on pourrait en
faire. Il y a déjà beaucoup de critiques. Pourquoi? Parce que les jeunes sont
très influençables et qu'il faut les approcher d'une façon extrêmement
prudente quand on parle de concepts religieux.
Je ne pense
pas qu'en tant qu'athée je sois privilégiée dans un État laïque. Je pense qu'en
tant qu'athée je ne suis pas privilégiée dans un État neutre
religieusement. J'ai toujours cru que l'État devait être protégé de toutes les religions. Je le crois profondément, l'État doit
être protégé des religions. On ne doit pas faire de l'État quelqu'un de
neutre devant les religions, la religion
doit se retirer de l'État. Il y a une séparation entre l'Église et l'État, qui
d'ailleurs est dans le préambule de
notre collègue, qu'elle propose. La ministre propose un préambule où on parle
de séparation entre l'Église et l'État,
mais on permettrait à des enseignants de porter des signes religieux
ostentatoires devant les enfants. Ça ne marche pas. Il y a quelque chose qui ne marche dans les concepts qu'on nous
présente actuellement, du côté du gouvernement.
Alors, moi, je pense que la position de mon
collègue de Saint-Jérôme est très raisonnable et j'espère que tout le monde va l'appuyer. Je sais que ça ne fait
peut-être pas tout à fait l'affaire de la collègue de Montarville, qui aimerait
mieux pas du tout, entre «visible» et
«ostentatoire», mais qu'elle réfléchisse à une chose : les droits acquis sont là, puis je pense qu'elle devrait voter avec nous de ce côté-là.
Pour le reste, entre «visible» et «ostentatoire», je pense qu'on peut
laisser... il y a un espace sur lequel on peut jouer.
Le Président (M. Bernier) :
D'accord. Autres commentaires? M. le député de Saint-Jérôme.
M.
Bourcier : Je n'ai pas de commentaire... Bien, écoutez, j'en ai
peut-être, oui, un dernier. Je reviens encore sur le fait que, oui, l'enseignant est un modèle. Ils ont
des très grandes responsabilités. Et puis je reviens encore sur
«ostentatoire». Je pense qu'il y a un
certain niveau de confiance qu'on doit faire aux enseignants, mais aussi il y a
des droits acquis. Là, je suis
content. Merci, Mme la députée de Montarville, d'accepter notre point
là-dessus. Mais, pour ce qui est de la discussion sur les mots «ostentatoire»
et «visible», moi aussi, je pense qu'on est très près d'un compromis. Je
demande au gouvernement de nous entendre à ce sujet-là. Et les enseignants,
oui, se doivent d'être totalement impartial au niveau religieux, et je l'ai vécu moi-même, cette transition-là,
et il faudrait quand même considérer notre sous-amendement par rapport à
ce sujet-là.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
Mme la députée de Montarville.
Mme Roy :
Oui, je vous remercie, M. le Président. Simplement pour mentionner que «dans le
respect des droits acquis», ce n'est
pas quelque chose de nouveau, là, pour nous, aujourd'hui. On a déjà mentionné,
dans un point de presse il y a déjà
plusieurs mois, que c'était quelque chose qui était également important. Alors,
on n'a aucun problème avec ça.
Le Président (M. Bernier) : Oui, Mme
la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Dernière intervention. Vous savez, on parle beaucoup de
liberté de religion, mais il faut parler de liberté de conscience aussi, et c'est protéger la liberté de conscience
des enfants que de les protéger de toute influence forte d'une personne en autorité sur le phénomène
religieux, et je pense que c'est protéger la liberté de conscience des
enfants que de demander aux enseignants
d'avoir une certaine réserve quant à l'affichage de leurs sentiments religieux.
C'est heurtant, pour quelqu'un d'une
autre religion, que de... Puis moi, je suis athée, comprenez bien que c'est
heurtant que quelqu'un d'une autre
religion que la personne en situation d'autorité devant soi affiche des signes
religieux ostentatoires très forts. C'est
autant heurtant pour quelqu'un qui se fait arrêter par une police qui aurait un
signe religieux, ce qu'on n'a toujours pas réglé, que c'est heurtant pour un parent, peut-être, de voir que son
enfant est devant un enseignant qui croit que l'affichage de sa religion
est extrêmement important. Parce que ce n'est pas de liberté de religion dont
on parle, c'est de liberté d'afficher dans
l'État sa religion de façon ostentatoire. Tu sais, la limite, je pense qu'elle
a été posée par bien des pays et c'est
accepté dans bien des pays. Je ne vois pas pourquoi le Québec n'embarquerait
pas là-dedans. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?
S'il n'y a pas d'autre commentaire, est-ce que le sous-amendement
proposé par le député de Saint-Jérôme est adopté?
Des voix : Rejeté.
Le Président (M. Bernier) : Rejeté.
Donc, nous revenons...
Une voix : ...
Le
Président (M. Bernier) : Vote par appel nominal? Je vais revenir
là-dessus, effectivement, on va y aller par appel nominal. C'est pour ça
que je vous regardais. Allez-y, donc, M. le secrétaire, allez-y par appel
nominal.
Le Secrétaire : Donc, sur le
sous-amendement. M. Bourcier (Saint-Jérôme)?
M. Bourcier : Pour.
Le Secrétaire :
Mme Maltais (Taschereau)?
Mme Maltais : Pour.
Le Secrétaire :
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé : Pour.
Le Secrétaire :
Mme Vallée (Gatineau)?
Mme Vallée : Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire :
Mme Montpetit (Crémazie)?
Mme Montpetit : Contre
Le Secrétaire : M. Auger
(Champlain)?
M. Auger : Contre.
Le Secrétaire :
M. Boucher (Ungava)?
M.
Boucher : Contre.
Le Secrétaire :
Mme Roy (Montarville)?
Mme Roy :
Contre, à regret.
Le Secrétaire :
M. Bernier (Montmorency)?
Le Président (M.
Bernier) : Abstention.
Le Secrétaire :
C'est rejeté.
Le
Président (M. Bernier) : Donc, nous revenons à l'amendement déposé et
présenté par Mme la députée de Taschereau. Est-ce que vous avez des
commentaires sur l'amendement... votre amendement?
Mme Maltais :
L'amendement de la députée de Montarville a-t-il...
Le Président (M.
Bernier) : Montarville, excusez, députée de Montarville.
Mme Roy :
Je me demandais s'il y en avait un autre.
Le
Président (M. Bernier) : Non, non, non. L'amendement de la députée de
Montarville, oui. Allez-y. Est-ce qu'il y a des commentaires sur
l'amendement avant qu'on procède à son adoption ou à son rejet?
• (16 h 50) •
Mme
Roy : Dans mon cas, je voudrais souligner le témoignage de mon
collègue de Saint-Jérôme, à ma droite, ici. Le fait qu'il soit enseignant et qu'il a été enseignant pendant des
années, je pense que ça vient donner une valeur accrue au fait qu'il est
important de réfléchir à l'idée d'interdire le port de signes religieux aux
enseignants. Les enseignants du primaire et
du secondaire sont à peu près les
personnes... surtout du primaire, encore, tu sais, parce que
c'est le même enseignant à longueur
de journée, ils sont parmi les personnes les plus importantes
pour les enfants dans leur vie, et le fait qu'il y ait une délégation
d'autorité parentale, qui n'est pas complète, j'en conviens, mais qui est tout
de même une forme de délégation
d'autorité parentale... Ces enseignants doivent représenter tous les parents,
mais ne pas représenter une religion. C'est ce que nous croyons.
Alors,
moi, je soumets... Naturellement, il y a peut-être d'autres commentaires, mais je soumettrais au vote par appel
nominal, je vous prie.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, Mme la députée. M. le secrétaire, le vote
est demandé par appel nominal. Allez-y.
Le Secrétaire :
Donc, sur l'amendement. Pour, contre, abstention. Mme Roy (Montarville)?
Mme Roy :
Pour.
Le Secrétaire :
Mme Vallée (Gatineau)?
Mme Vallée :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini :
Contre.
Le Secrétaire :
Mme Montpetit (Crémazie)?
Mme
Montpetit : Contre.
Le Secrétaire :
M. Auger (Champlain)?
M. Auger :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Boucher (Ungava)?
M. Boucher :
Contre.
Le Secrétaire :
Mme Maltais (Taschereau)?
Mme Maltais : Contre.
Le Secrétaire :
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé : Contre.
Le Secrétaire :
M. Bourcier (Saint-Jérôme)?
M. Bourcier : Contre, à regret.
Le Secrétaire :
M. Bernier (Montmorency)?
Le Président (M. Bernier) :
Abstention.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Bernier) : Donc, l'amendement déposé par Mme la députée
de Montarville est rejeté. Donc, nous allons donc passer à... Oui, M. le
député de Gouin, vous avez des choses à nous dire?
M. Nadeau-Dubois : Bien, j'aurais un
ajout d'article à faire.
Le Président (M. Bernier) : Vous
avez un amendement à nous proposer?
M. Nadeau-Dubois : Suite à
l'article 4, oui.
Le Président (M. Bernier) : Pour introduire
un nouvel élément à l'article 4?
M. Nadeau-Dubois : Exactement. Donc,
ajouter, après l'article 4, l'article suivant :
«4.4. Le
devoir de neutralité implique qu'un symbole religieux ne peut orner la salle de
l'Assemblée nationale. Le crucifix
qui est suspendu au-dessus du fauteuil du président de l'Assemblée nationale
est [donc] déplacé ailleurs dans le bâtiment, en un endroit auquel les
visiteurs auront accès.»
Le
Président (M. Bernier) : Donc, je vais suspendre quelques instants
pour qu'on puisse analyser la recevabilité et faire des copies pour les
collègues. Je suspends.
(Suspension de la séance à 16 h 52)
(Reprise à 17 h 1)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons reprendre nos travaux. M. le député de Gouin, je pense que vous
avez des propositions à faire.
M.
Nadeau-Dubois : Voilà, suite
à une discussion avec le président, je demanderais le consentement pour retirer mon amendement, puisqu'il nous semble plus à propos
de le représenter à un autre moment dans l'étude détaillée.
Le Président (M. Bernier) : Oui. Mme
la députée de...
Mme Maltais : M. le Président, j'ai
bien entendu. Plutôt que, le collègue, présenter son amendement... plutôt
qu'être obligé d'aller recourir à la vidéo pour aller chercher le libellé, puis
comme ça concerne tous les députés de l'Assemblée
nationale, puisque c'est bel et bien l'Assemblée nationale
qui gère ses murs, ses couleurs et son patrimoine, est-ce qu'il serait
possible d'en avoir une copie, puis qu'on y réfléchisse, puis qu'on voie
comment on pourrait gérer tout ça d'ici la prochaine fois?
Le
Président (M. Bernier) : Oui, si vous êtes à l'aise, nous allons faire
des copies pour tous les députés en regard de cette proposition
d'amendement qui est faite.
Est-ce qu'il y a consentement pour retirer la
proposition, cependant?
Des voix : Consentement.
Le
Président (M. Bernier) : Consentement. Donc, la proposition est
retirée. Par contre, on va s'assurer de faire des photocopies pour les
gens. M. le député, vous avez autre chose à nous proposer?
M.
Nadeau-Dubois : J'aurais un autre ajout d'article à faire, donc un
autre amendement. Donc, ajouter, après l'article 4, l'article
suivant : «Le devoir de neutralité implique que toute récitation d'un
texte à caractère religieux est interdite lors de la tenue d'assemblées
municipales et lors des travaux de l'Assemblée nationale du Québec.»
Le
Président (M. Bernier) : Alors, je vais suspendre quelques instants
pour faire des copies aux collègues députés. Je suspends.
(Suspension de la séance à
17 h 3)
(Reprise à 17 h 7)
Le
Président (M. Bernier) :
Nous reprenons nos travaux. Donc, le député
de Gouin a déposé une proposition
d'amendement à l'article 4 qui se lit comme ceci : Ajouter après l'article 4 : «Le devoir de neutralité implique que toute récitation
d'un texte à caractère religieux est interdite lors de la tenue d'assemblées municipales
et lors des travaux de l'Assemblée nationale du Québec.»
Je
veux simplement aviser nos collègues
que le privilège du droit de parole est protégé ici pour chacun des
députés, et, à ce moment-là, si on décide de
se restreindre, on viendrait restreindre le droit de parole des députés. Donc,
sur ce, je vais vous laisser débattre
de la question, mais je voulais juste vous le mentionner. Quand on le fait dans
le cadre d'un lexique, par rapport à
des mots, c'est un choix unanime en ce qui regarde les gens, au niveau des
députés, mais cette proposition-là d'amendement
vient restreindre la liberté de parole des députés et des parlementaires. Je
veux simplement vous aviser. Je vous en fais la remarque et je vous
laisse en faire le débat.
M. le député de
Gouin.
• (17 h 10) •
M.
Nadeau-Dubois : Pour introduire mon amendement, je commencerais par
dire que cette proposition d'amendement
ainsi que la proposition précédente que j'ai faite sont toutes les deux tirées
du projet de loi n° 398 qui avait été déposé par ma prédécesseure, la députée de Gouin, en 2013, un projet
de loi qu'on avait intitulé Charte de la laïcité de l'État québécois, un projet de loi qu'on avait
déposé, à l'époque, dans une volonté d'affirmer la laïcité de l'État
québécois et de trouver une position de compromis sur la question du port des
signes religieux.
Et,
pour ce qui est de la proposition spécifiquement sur la récitation de textes à
caractère religieux, très brièvement, je
dirais que, depuis le début de nos travaux sur le projet de loi n° 62, on
a eu toutes sortes de débats théoriques, parfois même terminologiques sur la laïcité, par rapport à la neutralité
religieuse de l'État, sur les définitions qu'on pouvait donner à ces concepts-là. Ça a été des débats par ailleurs
assez intéressants, mais ça me semble assez clair que, qu'on adhère à la
notion de neutralité ou à la notion de laïcité, dans les deux cas, on devrait
reconnaître que la séparation entre l'Église et
l'État implique que dans un lieu aussi sacré, aussi important en démocratie que
celui de l'Assemblée nationale du Québec, bien... ou des conseils municipaux, les assemblées ne soient pas
ouvertes ou ne soient pas tenues sous l'autorité ou sous le symbolisme
d'un texte à caractère religieux.
C'est
des débats qui ont eu lieu au Québec, ce n'est pas comme si on sortait cette
idée-là de notre chapeau, ça a généré
des débats dans les dernières années au Québec. Et, pour nous, c'est important,
dans le cadre d'un projet de loi qui vise à assurer la neutralité
religieuse de l'État, de venir corriger cette situation-là.
On n'est pas sans savoir que ça a été déjà discuté
par les tribunaux. Or, ce n'est pas une raison, selon nous, qui nous empêcherait, dans une loi, au Québec,
d'affirmer qu'on veut que les séances de délibération démocratique se
tiennent à l'abri, dans le fond, de l'autorité religieuse d'un texte qui
viendrait ouvrir les séances.
Et
je prends peut-être de l'avance sur certaines objections, que je vois
venir. Il ne s'agit pas, bien sûr,
d'empêcher de faire une citation d'un
passage de la Bible ou d'un autre texte religieux. J'insiste donc que
l'attention... disons, j'attire l'attention de mes collègues sur le concept de récitation,
hein? Donc, il ne s'agit pas de dire que c'est interdit en toutes circonstances d'utiliser une expression, par exemple, ou même une phrase d'un texte religieux, mais de dire que
l'idée de réciter, donc, qui implique... le
concept de récitation a un certain poids ici, là, donc l'idée de réciter un
texte religieux n'est pas compatible
avec l'idée d'une séparation entre l'Église et l'État, n'est pas compatible
non plus avec une conception de neutralité
religieuse de l'État, qu'on nous a définie depuis le début de nos
travaux comme le fait de ne pas favoriser ou défavoriser une religion,
une croyance ou l'absence de croyance.
Alors,
moi, j'ai vraiment la conviction que cet amendement-là
peut recevoir l'approbation de tout
le monde parce qu'il correspond à la fois à la notion de neutralité
religieuse de l'État et à la notion de laïcité de l'État.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la ministre.
Mme
Vallée : J'essaie de
comprendre à quelle situation particulière... Parce que, lorsqu'on
légifère, on répond à une préoccupation, à une situation particulière. Et j'aimerais que notre collègue
puisse nous éclairer quant aux exemples précis auxquels il fait référence. Est-ce qu'il y a actuellement, dans nos pratiques parlementaires, des
situations qui nous amèneraient à
devoir encadrer et prévoir, insérer à la loi cet article, considérant que la
Cour suprême s'est prononcée sur la question de la prière dans le
dossier Mouvement laïque?
Donc,
j'essaie de voir, ici, à l'Assemblée... Je comprends, le dossier Mouvement
laïque, on était dans une situation particulière
à ville de Saguenay. Maintenant, notre collègue nous dit... fait référence aux
travaux de l'Assemblée. À quoi fait-il
référence particulièrement? Qu'est-ce qu'il a soulevé comme problématique qui
commande une réponse telle que celle-là, d'une part?
Puis,
d'autre part, je ne sais pas, mais est-ce que ça ne relève pas du privilège
parlementaire, autre question, et du Bureau de l'Assemblée?
Le Président (M. Bernier) : C'est ce
que j'ai soulevé, d'ailleurs. M. le député de Gouin.
M.
Nadeau-Dubois : Il y a deux éléments, là, qui sont mentionnés par mon
amendement, d'abord les assemblées municipales, ensuite les travaux de
l'Assemblée nationale du Québec.
Je reconnais
qu'il n'y a pas eu à ce jour de grande controverse concernant ce genre
d'événements là durant nos travaux à
l'Assemblée nationale du Québec. Or, ce n'est pas le cas quand on pense aux
assemblées municipales. Il y a eu, bien
sûr, le cas de la ville de Saguenay, mais il y a eu plusieurs cas, dans les
dernières années, d'administrations municipales, de maires, de
conseillers municipaux qui, par zèle, par fervente conviction religieuse, ont
tenu à ouvrir leurs séances municipales par la récitation d'une prière ou d'un
texte de nature religieuse. Et à chaque fois ça nécessite un effort et des dépenses de citoyens et citoyennes pour
entamer des procédures. Et ce qu'on veut éviter... En fait, l'objectif
qu'on cherche à atteindre, avec cet
amendement-là, c'est de donner une balise claire qui va établir non pas dans un
jugement de la Cour suprême, un tribunal
fédéral, mais dans une loi québécoise... qui dirait : Au Québec, dans les
assemblées municipales, on n'ouvre pas les travaux avec la récitation
d'un texte à caractère religieux. Et, considérant que le projet de loi déjà s'applique à toutes sortes d'organismes, y compris
des organismes municipaux, on ne voit pas en quoi on outrepasserait les limites actuelles du projet de loi en
disant : Bien, ça s'applique aussi à la délibération démocratique au sein
des municipalités, qu'on n'ouvre pas
les séances avec un texte religieux. Et il y en a eu, des cas de ça, au Québec,
et pas seulement à Saguenay. Et donc
l'idée, c'est : Mettons une balise qui n'obligera pas les citoyens et citoyennes à entamer des procédures pour faire respecter cette notion fondamentale sur laquelle on semble s'entendre. On ne s'entend pas sur tout, mais là-dessus
on semble s'entendre, c'est-à-dire l'idée qu'il doit y avoir une
séparation entre l'Église et l'État.
Pour ce qui est de l'Assemblée nationale du
Québec, c'est une question
de cohérence, c'est-à-dire qu'étant
donné qu'on le réclame de la part des conseils municipaux c'est une question de cohérence de dire
qu'à l'Assemblée nationale du Québec
on va montrer l'exemple, et que, si on exige quelque chose des élus municipaux,
bien, on entend, à Québec, faire la même chose puis, donc, prêcher
par l'exemple.
Le Président (M. Bernier) : Mme la
députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Écoutez,
M. le Président, il y a une différence entre les intentions et le libellé
d'un amendement. Je comprends les intentions du collègue, puis il a de
très bonnes intentions, qui sont, par
exemple, d'enlever du poids
des épaules des citoyens
cette idée qu'il faut laïciser
les assemblées de conseils municipaux. Ça, je suis d'accord. Sauf qu'il
faut qu'il écrive ce qu'il pense. Et là ce qu'il écrit, c'est dommage...
Moi, je suis
une parlementaire, là, qui me bat pour la liberté d'expression. Or, on s'est
assez battus ici, autour de la table, à la Commission des institutions,
pour la liberté d'expression, en jasant du projet de loi n° 59, qu'aller
baliser négativement, qu'aller diminuer la
liberté d'expression des élus de l'Assemblée nationale, ça m'embête en mosus.
Et surtout qu'en plus ce n'est pas
écrit «avant la période de questions», «avant les cérémonies», c'est «lors des
travaux». Mais, «lors des travaux»,
c'est vaste, les travaux de l'Assemblée nationale. C'est ce qu'on fait en
commission parlementaire, c'est ce qu'on fait dans le salon bleu, c'est...
ta, ta, ta.
Moi, je n'ai
rien contre le fait que quelqu'un, par exemple, fasse la récitation d'un texte
de saint Augustin si ça lui tente.
C'est son choix. Je n'ai rien contre quelqu'un qui ferait... Moi, je peux
réciter les 10 commandements, si ça me tente, puis je suis athée, mon Dieu, arrêtez! Mais je
crois énormément en la liberté de parole et la liberté d'expression et je
crois profondément qu'il faut protéger la
liberté d'expression des députés de l'Assemblée nationale, au prix parfois
d'entendre ce qu'on ne veut pas entendre,
parce que c'est ça, la vraie liberté d'expression. La vraie liberté
d'expression, ce n'est pas de moduler
ce qu'on veut entendre, c'est de s'organiser pour que ce qu'on ne veut pas
entendre puisse avoir droit de cité et droit de parole.
Ça fait que,
là, je ne comprends pas la différence et l'immense distance, puis je suis très,
très sérieuse, là, l'immense distance
entre les très bonnes intentions du collègue puis le résultat final. Il va
falloir qu'il revoie son amendement, qu'il nous réécrive quelque chose qui vise le bon objectif. Moi, je l'invite...
On a du temps, là, je placote, là. Je sais que son parti n'a pas une grosse équipe, mais il y a une fille
pas mal intelligente à côté de lui, là. Ça fait que je suis sûre qu'ils ont
le temps de prendre un crayon puis d'essayer de nous concocter quelque chose
qui ressemble aux intentions et qui n'ait pas la portée qu'on a à l'heure
actuelle. On ne peut pas... Ce n'est pas qu'on traiterait les députés de
l'Assemblée nationale différemment des
assemblées municipales, c'est qu'on restreindrait la liberté d'expression des
élus à un endroit où cette liberté d'expression est fondamentale, parce
qu'elle est la base de la démocratie.
C'est facile,
avoir le mot «démocratie» à la bouche, mais, dans la vraie vie, là, elle
s'applique ici, la démocratie. Les votes
se font ici, la parole se prend ici. Puis des fois on se convainc, les uns les
autres, de choses. Puis on cite. On a déjà
reproché, à l'époque, à des
ministres, quand Wikipédia arrivait, de citer Wikipédia, parce qu'il y avait eu
un libellé tel quel. On en a ri, mais on n'a pas interdit Wikipédia.
Mais je
comprends... Moi, je suis athée, je veux une société laïque, je veux un État
laïque profondément. Mais jamais je n'empêcherai un député de réciter un
texte religieux, je ne suis pas capable de faire ça.
Ça fait que
revenez aux intentions, écrivez vos intentions correctement, lisiblement, puis
on va pouvoir adhérer, parce que je
ne peux pas adhérer à une idée, mais que cette idée... Je peux adhérer à une
idée, mais je ne peux pas adhérer à un libellé qui est différent de
l'idée. Le libellé de ce que vous dites est différent de ce qui est énoncé dans
ça.
Et la loi,
une fois qu'elle sera votée, elle ne sera pas votée d'abord par ce qu'on a dit
puis après par le texte, elle va être
votée d'abord sur le texte et ensuite sur ce qu'on aura dit autour. Mais le
texte est d'abord fondateur, fondamental.
Et
je suis étonnée de voir proposer quelque chose qui limite la liberté d'expression,
je suis vraiment... des députés de
l'Assemblée nationale. Je vous le dis respectueusement, c'est une erreur, c'est
une erreur. Respectueusement, c'est une erreur. Puis je suis d'accord sur les intentions, mais je ne peux pas
vivre avec ce libellé-là, je ne sais
pas quoi faire avec. Changez-le,
c'est le temps. On a le temps, on n'est pas pressés, on a jusqu'à
six heures. Puis je continue à jaser parce
que je sais que vous
avez du monde intelligent autour, je
ne sais pas s'ils sont en train de travailler, on me regarde avec des beaux yeux, mais... des grands yeux, excusez,
mais il faut absolument en arriver,
si vous voulez cette intention, à décrire votre intention de façon correcte, lisible, pour qu'on puisse débattre du vrai
sujet que vous voulez débattre mais pas de restreindre la liberté
d'expression des députés de l'Assemblée nationale, je ne peux pas.
• (17 h 20) •
Le Président
(M. Bernier) : Mme la députée de Montarville, vous m'avez demandé
la parole.
Mme Roy :
Merci beaucoup, M. le Président. Oui, avec tout le respect que j'ai pour mon
collègue, je dois souscrire à ce que disait
ma collègue de Taschereau, parce que vous n'étiez pas là à l'époque du
p.l. n° 59, où on parlait de liberté
d'expression, justement, et je conviens du fait que peut-être il y a une
intention, mais sauf que, si on met ça, c'est la liberté d'expression
des députés à laquelle on va s'attaquer carrément. Pour moi, c'est
inacceptable.
Et
peut-être que je ferais ici une demande d'information, parce que, M. le
Président, ce qui est écrit là rejoint une question que nous nous étions
posée il y a deux semaines à l'article 3, alors que la ministre nous
disait qu'elle voulait soumettre les élus de
l'Assemblée nationale au projet de loi n° 62 sur la neutralité
religieuse de l'État. Nous avions suspendu à l'époque, mais moi, je demande un point d'information, je ne sais pas
si c'est la bonne façon de le dire ou de le faire, parce que Mme la
ministre nous avait expliqué qu'un député serait soumis à cette loi-là et qu'un
député pourrait se voir blâmé ou pourrait
voir un citoyen porter plainte contre lui auprès, entre autres, du Commissaire
à l'éthique parce qu'il ne ferait pas
preuve de neutralité religieuse, parce qu'il aurait refusé de rencontré quelqu'un
pour des motifs religieux. Et là on s'attaque à la liberté d'expression
de l'élu, aux droits de l'élu. Et peut-être que, si on répondait à la question
de l'article 3, on pourrait régler cet
amendement-là, parce que c'est vraiment cette liberté d'exercice du député dont
il est question ici et auquel on
s'attaque. Alors, peut-être que la ministre pourrait me dire qu'est-ce qu'il en
est de l'article 3, parce que, comme ça, on vient brimer la liberté
d'expression d'un élu, et, pour moi, c'est inacceptable.
Le
Président (M. Bernier) : Juste pour rappeler quel était l'élément
que vous soulevez, c'était un amendement qui disait ceci : Insérer, avant le paragraphe 1° de
l'article 3, le paragraphe suivant — puis présentement c'est en
suspens :
«0.1°
les députés de l'Assemblée nationale, les élus municipaux, à l'exception de
ceux des municipalités régies par la
Loi sur les villages cris et le village naskapi ou par la Loi sur les villages
nordiques et l'Administration régionale Kativik, et les élus des
commissions scolaires instituées en vertu de la Loi sur l'instruction
publique.»
Donc,
c'est à cet élément-là que vous faites référence. Mme la ministre, si vous
voulez compléter les informations.
Mme Vallée :
Bien, en fait, il y a deux choses. Je pense qu'on est dans le cadre de
l'amendement de notre collègue. L'article 3,
on pourra y revenir, puis on aura des discussions à avoir sur cette
question-là, puis on pourra élaborer lorsqu'on reviendra à
l'article 3.
Mais,
pour notre collègue, et suite à l'intervention de la collègue de Taschereau, je
pense qu'il est important aussi de se
rappeler un peu ce qu'avait enseigné la Cour suprême. Puis la Cour suprême, ce
n'est pas un simple tribunal fédéral, c'est
la plus haute cour de justice au pays. Et ce qu'elle indiquait, c'est qu'elle
reconnaît que, dans le paysage culturel canadien, il y a quand même de nombreuses pratiques traditionnelles et
patrimoniales à caractère religieux qui existent et que ces manifestations culturelles là ne violent
pas la neutralité de l'État. Ce qui viole la neutralité de l'État, c'est
lorsqu'on dénote vraiment, de la part de
l'entité publique, une volonté vraiment de professer, d'adopter ou de favoriser
une croyance à l'exclusion d'une
autre, donc, et puis que la pratique vient porter atteinte à la liberté de
croyance, la liberté de religion des gens
qui sont présents. Dans le cas de la prière de Saguenay, la prière récitée
portait atteinte, par exemple, à la liberté de conscience de ceux qui
étaient non-croyants.
Donc,
si on prend le libellé dans sa forme
actuelle, c'est certain qu'il viendrait interdire, par exemple, de réciter un texte
religieux, nonobstant le fait de la volonté de celui ou de celle qui récite le
texte. Si, pour une raison ou une autre, dans le cadre de nos échanges ici, à l'Assemblée nationale, un
collègue devait réciter un passage d'un écrit religieux sans pour autant vouloir professer la religion, il n'y
a pas d'enjeu. Notre collègue de Taschereau mentionnait tout à l'heure... je ne sais pas si le micro était coupé, mais récitait
certaines phrases que l'on retrouve dans la Bible, mais son objectif n'est clairement pas de professer
et d'imposer une croyance religieuse. Alors, il faut faire la distinction entre
les deux.
Et
c'est là que la neutralité religieuse prend tout son sens, c'est qu'il ne faut
pas imposer une croyance, il ne faut pas imposer une priorité à une croyance religieuse. Mais que des paroles,
que des propos tirés d'un texte à caractère religieux puissent être prononcés en ces murs, ça ne
contrevient pas en soi au principe de la neutralité. Donc, il y a
une distinction entre les deux.
Puis
là je comprends aussi qu'à ça s'ajoute, évidemment, la liberté, l'indépendance
de l'Assemblée de pouvoir, dans cette
enceinte... Puis c'est d'ailleurs ce qui a permis à des parlementaires de tenir
des propos qu'ils n'auraient jamais pu tenir
à l'extérieur de nos séances, à l'extérieur du salon bleu, parce qu'il existe
cette protection qui permet de véritables échanges, qui nous permet
vraiment de dire le fond de notre pensée.
Le Président (M.
Bernier) : ...des présidents de commission parlementaire.
Mme
Vallée : Oui, évidemment. Évidemment, M. le Président. C'est
certain qu'on ne peut pas toujours dire tout ce qu'on souhaite dire,
parce que vous nous rappelez à l'ordre, puis c'est correct. Mais, ceci dit, il
y a une distinction.
Donc,
ce n'est pas le fait de prononcer une parole, un extrait d'un texte religieux.
Ça, en soi, ça ne porte pas atteinte à la neutralité religieuse de
l'État.
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée de Montarville, vous aviez... Est-ce que ça répond à votre
réponse... à votre question? Avez-vous autre chose à ajouter?
Mme
Roy : En partie, en partie. Mme la ministre a dit qu'on reviendra
sur l'article 3, parce que je sais que nous devions tous faire nos
devoirs auprès de nos caucus respectifs. Alors, c'était juste pour savoir à
quel moment on allait y revenir, parce qu'on
parlait ici de la liberté d'expression des députés et du travail des députés,
là. Je voyais un lien, là, tout simplement.
Le Président (M.
Bernier) : C'est beau. Mme la députée de Taschereau.
• (17 h 30) •
Mme
Maltais : Bien, écoutez, M. le Président, je vais regarder... J'ai été
voir, évidemment, grâce à mon fabuleux recherchiste, qu'est-ce qui est
écrit sur le mot «prière» à l'Assemblée nationale : «Le 6 décembre
1922, l'Assemblée législative — ça s'appelait comme ça à l'époque — adopte
une motion du député libéral de Saint-Maurice, Léonide-Nestor-Arthur Ricard, qui instaure la récitation de la prière au début
de chaque séance.» 1922. «Au Conseil législatif, une prière est lue
depuis le 12 janvier 1793.» C'était une vieille tradition.
«En 1972, le nouveau
règlement provisoire de l'Assemblée nationale remplace la prière par un moment
de recueillement, mais la prière est maintenue jusqu'au 15 décembre 1976.»
Ils n'ont pas osé, c'était trop difficile.
Et évidemment ce
Parti québécois n'a quand même pas fait que de mauvaises choses dans son
histoire, cher collègue de Gouin. «Ce
jour-là, le président Clément Richard met officiellement un terme à la
tradition en instaurant le moment de recueillement "par respect
pour tous les membres de cette Assemblée, qui ne sont pas tous de la même
dénomination religieuse".»
Ce
que je fais souvent, moi, dans... Tu sais, moi, je n'ai pas arrêté de le dire,
là, je suis athée, vous commencez à le savoir.
Ça fait que qu'est-ce qu'on fait dans un moment de recueillement? Moi, souvent,
je vais penser à la question que j'ai préparée,
à ce qui se passe, et puis je vais souvent penser un peu à la noblesse de
l'Assemblée. D'autres fois, je vais me réciter
le serment, qui est d'être loyal envers le peuple du Québec et de servir avec
honnêteté et justice, dans le respect de la Constitution. Il y a trois mot-clés, hein : loyal, honnêteté,
justice. C'est trois mots-clés. Puis ça peut guider un parlementaire
dans son avant-midi, mettons, ces trois mots-clés-là. Ce serait bien que ça
guide les parlementaires en général.
Mais donc il y a déjà,
à l'Assemblée nationale, une élimination de la prière dans nos règlements, dans
les règlements, c'est fait. Pour la récitation de texte, je vais encore revenir sur
le libellé du collègue, c'est que ça inclut les gens qui viennent en commission
parlementaire, il n'y a
pas de différence entre les élus puis les gens qui viennent ici. Ça veut dire que, quelle que soit sa religion, un
archevêque, un imam, n'importe qui, ne peut plus faire une récitation de
texte. C'est parce que, là, récitation,
c'est quelle longueur, tu sais? On va-tu dire : Un paragraphe, deux
phrases? Moi, je ne suis pas à l'aise
avec le libellé. Retravaillez, cent fois sur le métier remettez votre ouvrage,
mon cher collègue, et nous arriverons peut-être à quelque chose.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois :
Bien, d'abord, je pense que j'ai été assez clair dans les intentions de mon amendement
lorsque je l'ai présenté. C'est tout à fait possible — et
c'est manifestement le cas — qu'il y ait un écart entre mes intentions et la manière dont c'est formulé. C'est le propre du langage, hein, de
pouvoir, des fois, s'écarter de l'intention du locuteur. Alors, moi, je n'ai aucun problème à reformuler,
c'est tout à fait possible, ça va prendre un peu de temps quand même. Donc, peut-être éviter de
s'éterniser sur le fait que le libellé n'est pas exact, c'est tout à fait
possible, mais peut-être revenir... Et, si
c'est possible, on est tout à fait ouverts à suspendre et vous revenir avec une
formulation plus conforme à nos intentions.
Ceci
étant dit, je veux quand même corriger certaines choses, en tout cas certaines perceptions, peut-être. J'ai dit très clairement, quand j'ai
présenté l'amendement, qu'il ne s'agit pas, bien sûr,
d'éviter... en fait, d'interdire à des parlementaires ou à des gens qui
participeraient aux travaux de l'Assemblée nationale d'utiliser des portions de
texte religieux. Par exemple, personnellement,
je suis un grand... je suis un amateur de l'Évangile de saint Matthieu,
particulièrement du Sermon sur la
montagne, où Jésus, s'adressant à ses disciples, dit : «Il est plus facile
pour le chameau d'entrer par le chas d'une aiguille que pour un riche d'entrer au paradis.» Personnellement, j'aime
bien cet extrait de la Bible. Et mon intention, avec l'amendement, ce n'est, bien sûr, pas d'interdire
à ce qu'on utilise de tels extraits à l'Assemblée nationale, sinon je
viendrais d'enfreindre l'esprit de mon amendement.
Alors,
je pense que j'ai été assez clair que ce n'est pas ça, mon intention, là. Et
nous, on est prêts à suspendre, à reformuler,
à ramener une nouvelle proposition ne serait-ce que pour se rapprocher de
l'esprit de la décision de la Cour suprême
que la ministre nous a rappelée. Parce que c'est très clair pour nous, là, que
notre objectif, c'est de faire en sorte que des élus qui, pour x, y raisons, voudraient tenir des travaux... tenir
des délibérations démocratiques en les plaçant sous l'autorité ou sous
la sanction d'un texte religieux... Parce que c'est bien ça que ça signifie,
là. Quand on ouvre des délibérations
démocratiques, quand on les ouvre officiellement avec une prière, ça envoie le
message que ces débats-là sont faits
sous la sanction de la foi. C'est pour ça qu'on avait coutume de réciter des
textes religieux avant les débats, c'était pour les faire sanctionner par une croyance religieuse. Nous, on ne voit pas
comment cette idée-là peut être compatible avec la neutralité religieuse de l'État ou avec une
laïcité bien comprise. Et c'est ça qu'on vise à interdire avec notre
amendement, pas des citations ni des références à des textes religieux, que ce
soient des prières ou des extraits historiques, là.
Et
donc nous, on vous propose, en fait, de suspendre l'amendement pour qu'on vous
propose une formulation plus adéquate. Et on est, bien sûr, ouverts à
vos suggestions et à collaborer avec tous les collègues pour trouver une
formulation qui soit plus conforme à nos intentions.
Le Président (M. Bernier) :
Alors, M. le député de Gouin demande... propose de suspendre son
amendement. Est-ce qu'il y a des commentaires sur ça?
Mme Maltais :
Je ne voudrais pas suspendre tout de suite, je n'approuve pas tout de suite la
demande parce que j'aurais encore des réflexions, avant qu'il réécrive,
j'aurais encore une autre réflexion à son... pour rattraper...
Le Président
(M. Bernier) : Je vous redonne la parole, Mme la députée
de Taschereau.
Mme Maltais :
O.K. Alors, c'est que, si quelqu'un voulait introduire une prière ou réciter un
texte avant l'ouverture d'une séance de l'Assemblée, il faudrait qu'il change le
règlement de l'Assemblée nationale, cette personne enfreindrait le
règlement actuel de l'Assemblée nationale.
Article 31,
Conduite des députés et du public : «Lorsque le président fait son entrée,
les députés et le public se lèvent. À son invitation, ils observent
ensuite un moment de recueillement.
«Pendant la séance,
le public admis dans les tribunes doit se tenir assis et en silence.»
Donc,
pour l'arrivée du président et l'ouverture d'une séance, il n'y en a pas.
Alors, je veux juste que ce qui est couvert
soit couvert puis qu'on examine bien les choses. Je ne dis pas que... il y a
peut-être des choses à améliorer, mais il faut prendre connaissance du
règlement de l'Assemblée nationale.
C'est
parce que, là, on essaie d'introduire des éléments de la conduite des députés
dans ce qui est normalement géré par
le code d'éthique ou le règlement des députés de l'Assemblée nationale. C'est
ça, là. Je comprends que le député est nouveau,
mais il y a le règlement de l'Assemblée nationale qui gère la conduite des
députés, on ne gère pas, jusqu'ici, la conduite
des députés par législation. C'est d'ailleurs le débat qu'on a eu sur
l'article 3, l'amendement sur les élus. Alors, c'est tout. C'est
fini.
Le
Président (M. Bernier) : Donc, effectivement, ce que mentionne
Mme la députée de Taschereau, au niveau de du règlement de l'Assemblée nationale, l'article 31 se lit
ainsi : «Lorsque le président fait son entrée, les députés et le
public se lèvent. À son invitation, ils observent ensuite un moment de
recueillement.
«Pendant
la séance, le public admis dans les tribunes doit se tenir assis et en silence.
Tout signe d'approbation ou de désapprobation lui est interdit. En cas
de désordre, le président peut enjoindre à toute personne de se retirer.
«À
la fin de la séance, les députés et le public se lèvent et demeurent à leur
place, en silence, tant que le président n'a pas quitté la Chambre.» Article 31 de notre règlement. Donc,
vous ne pouvez pas aller à l'encontre du règlement de l'Assemblée
nationale.
Oui, M. le député de
Saint-Jérôme. Qu'est-ce que vous avez de beau à nous dire?
M. Bourcier :
Bien, écoutez, dans une autre vie, antérieure, parce qu'on peut avoir certaines
vies aussi... j'ai été conseiller municipal, et puis...
Une voix :
Quel beau métier!
M. Bourcier :
Ah! mon cher monsieur, que de beaux souvenirs! Mais ça, c'est après que j'aie
été enseignant. Mais il y a le bout où c'est écrit, dans, justement,
l'ajout de l'article du député de Gouin, «lors de la tenue d'assemblées municipales». Je vois que ses intentions sont
aussi très claires, mais, encore une fois, je l'invite à reformuler son
terme, parce qu'il peut se produire aussi
toutes sortes de situations dans des conseils de ville. Donc, l'enseignant en
moi l'invite à aller refaire ses devoirs. Et puisse l'ange Gabriel
l'inspirer lors de ses pensées.
Le
Président (M. Bernier) : Bon, il y a une demande de suspension
qui a été faite par le député de Gouin pour cette proposition. Est-ce
que vous êtes consentants à ce qu'on suspende la proposition d'amendement
déposée par le député de Gouin?
Mme Vallée :
Moi, M. le Président, j'irais de l'avant dans nos travaux. On a un amendement,
qu'on procède aux voix. Si le
collègue, plus tard, veut redéposer... Parce que, si on continue comme ça, on
va suspendre... Si on dépose un amendement,
puis avec respect, lorsqu'on dépose un amendement, c'est parce qu'on est prêt.
Puis ce projet de loi là est sur la
table depuis deux ans. Je remercie ma collègue de Taschereau, qui a déposé en
bloc ses propositions d'amendement, qui nous a fait part de ses
intentions. Et je comprends que notre collègue n'est pas avec nous depuis deux
ans, ça, je le comprends, mais j'ose espérer que, lorsqu'on entre ici, on est
prêt, et que nos amendements sont prêts. Et, si nos amendements ne passent pas le cap, moi, j'ai fait mes représentations,
mais je suis prête à passer au vote sur
l'amendement, M. le Président.
Le Président
(M. Bernier) : Donc, comme il n'y a pas de consentement... Oui,
M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois :
Je veux peut-être juste rappeler qu'il y a deux semaines, lorsqu'on a discuté
des amendements déposés par la ministre
concernant l'article 3, il y a toutes sortes de questions qui ont été
soulevées sur le champ d'application,
sur à qui devait être déposée une plainte, et Mme la ministre dispose d'un
ministère à sa disposition, avait encore, de son aveu même...
Le
Président (M. Bernier) : Oui, mais, M. le député de Gouin, s'il
vous plaît, M. le député de Gouin... Vous avez fait une proposition pour suspendre; c'est refusé, il n'y a pas de
consentement pour suspendre. Et on demande le vote sur la proposition
d'amendement. Est-ce que cette proposition d'amendement est adoptée?
Des voix : Rejeté.
Le
Président (M. Bernier) : Rejeté. Donc, nous passons à
l'article 5 du projet de loi. Mme la ministre, si vous voulez nous
en faire la lecture et donner les explications. Article 5 du projet de
loi.
Mme Vallée : Oui. Juste
m'assurer... Alors, l'article 5, je voulais simplement m'assurer que je
n'avais pas d'amendement, de feuille rose d'amendement.
Le Président (M. Bernier) : Je
peux vous dire que je n'en ai pas ici.
• (17 h 40) •
Mme Vallée : Alors,
c'est ça, donc : «Le devoir de neutralité religieuse ne s'applique pas à
un membre du personnel qui offre un service
d'animation spirituelle dans un établissement d'enseignement de niveau
universitaire ou dans un collège
d'enseignement général et professionnel, visés au paragraphe 5° du premier
alinéa de l'article 2, dans un centre exploité par un établissement
public visé au paragraphe 6° de cet alinéa ou dans un établissement de
détention visé par la Loi sur le système correctionnel du Québec
(chapitre S-40.1).
«Ce devoir ne
s'applique pas non plus à un membre du personnel chargé de dispenser un
enseignement de nature religieuse dans un établissement d'enseignement
de niveau universitaire.»
Donc, le
premier alinéa de cet article vise à exempter du devoir de neutralité
religieuse les membres du personnel d'un établissement d'enseignement de
niveau universitaire, d'un cégep, d'un établissement public de santé ou d'un établissement
de détention qui offre des services d'animation spirituelle.
Le deuxième
alinéa vise à exempter de ce devoir les membres du personnel d'un établissement d'enseignement de niveau universitaire chargé d'y dispenser un enseignement de nature religieuse, par
exemple les professeurs au baccalauréat en théologie.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée... Oui.
Mme Vallée :
Et d'ailleurs peut-être simplement, pour nos collègues, pour rafraîchir la
mémoire, c'est un article qui était
rédigé de façon similaire dans le projet de loi n° 60 qui avait été
déposé. On faisait alors référence aux devoirs de neutralité et de réserve. Et, la restriction quant
au port d'un signe religieux, parce qu'il y avait... évidemment, le
projet de loi était distinct, mais cette exemption se retrouvait dans le projet
de loi n° 60 pour respecter notamment les services spirituels qui sont offerts dans les hôpitaux, qui sont offerts auprès
des détenus et dans les établissements universitaires.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais : Juste curiosité,
il y a des services d'animation spirituelle dans les établissements de niveau universitaire, services d'animation spirituelle?
Parce que les facultés de théologie, oui, ça, je comprends. Puis
d'ailleurs la faculté de théologie est contenue dans l'alinéa deux. Mais des
services d'animation spirituelle?
Mme Vallée :
Oui. En fait, il y a des universités qui ont des... Bien, évidemment, il y a
les universités qui ont des départements
de sciences religieuses, qui ont des facultés de théologie, et elles offrent...
certaines, il ne s'agit pas de toutes les universités, mais certaines universités
offrent un service d'animation spirituelle.
Pour ce qui
est des cégeps, c'est un peu distinct, parce que la plupart des établissements
offrent, évidemment, le cours de
philosophie ou de science des religions, puis il y a aussi des cours dont les
thématiques peuvent comporter des aspects
religieux. Il n'y a pas d'enseignement de nature religieuse en tant que tel à
l'intérieur des cégeps. Il y a ces grands cours, mais il n'y a pas d'enseignement de nature religieuse,
contrairement aux facultés de théologie. Puis par contre il y a certains collèges privés qui offrent un
enseignement de nature religieuse, donc, mais évidemment les
enseignements... les collèges privés ne sont pas visés par le champ
d'application.
Mais il y a,
dans certains établissements, des services d'animation spirituelle. Ce n'est
pas dans tous les établissements, mais
il y en a qui en ont. Et les établissements sont libres d'offrir les services
spirituels, qui ne sont pas nécessairement un service religieux en tant
que tel, c'est peut-être plus large, pour accompagner les étudiants.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme Maltais : Sur les facultés
de théologie, les cours de science des religions, je comprends que c'est là
historiquement et que ça reste à université, bon, je ne veux pas faire la
critique de ça.
Maintenant,
moi, services d'animation spirituelle dans un établissement de niveau
universitaire, qu'est-ce qu'un service
d'animation spirituelle? C'est ça. Puis où est-ce que ça se donne? Peut-être
que, si on avait des exemples, je pourrais comprendre à quoi ça sert. Parce qu'il y a peu d'exceptions, puis là,
tout à coup, c'est l'exception. C'est vraiment pour comprendre où est-ce que ça se donne puis
qu'est-ce que ça fait, quel est l'exemple d'un service d'animation
spirituelle. Je ne suis pas fondamentalement contre, mais je veux bien
comprendre ce qu'on vote, tout simplement.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Mme la ministre.
Mme Vallée :
J'essaie de... Je vais essayer de le
retrouver, parce qu'on avait une liste, si je ne m'abuse. Si vous me
permettez de suspendre, je veux juste pour m'assurer... Parce que j'ai...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, je vais suspendre quelques instants. Je suspends.
(Suspension de la séance à 17 h 45)
(Reprise à 17 h 49)
Le Président (M. Bernier) :
Donc, nous reprenons nos travaux. Donc, Mme la ministre, suite à la demande d'information
de Mme la députée de Taschereau sur le sujet...
• (17 h 50) •
Mme Vallée : Oui. En fait, je voulais simplement retrouver le document auquel... parce
qu'il existe un document, un cadre
ministériel. Alors, les services spirituels, ce n'est pas improvisé, ce sont,
évidemment, les services spirituels qui correspondent au cadre
ministériel de l'animation spirituelle et l'engagement communautaire, un
service éducatif complémentaire. C'est un
cadre ministériel qui a été mis en place en 2005. Et, à la page 10 du
cadre ministériel — là, j'essaie de... je me rends — on
définit évidemment la nature du service, donc : «Le service d'animation
spirituel et d'engagement communautaire est un service éducatif complémentaire
qui constitue une sorte de laboratoire de vie permettant
aux élèves, par la pratique et la réflexion, de développer leur vie spirituelle
et leur engagement dans la société.
«Le service
[...] spirituelle et d'engagement communautaire est un service scolaire,
c'est-à-dire qu'il est offert aux élèves
en tenant compte de tout ce qui caractérise l'école, qu'il s'agisse de sa
mission, de ses manières de faire, de ses forces ou de ses limites.
«L'école dans laquelle évolue ce service est
commune, inclusive, démocratique, ouverte.
«Comme bon
nombre de services offerts à l'école, le service d'animation spirituelle et
d'engagement communautaire porte sur des réalités qui concernent
d'autres institutions, qu'elles soient familiales, politiques, communautaires
ou religieuses, sans toutefois leur
suppléer. Le service agit en complément, en aval et en amont, de ce qu'elles
accomplissent, en offrant aux élèves des activités qui les préparent à
s'insérer activement dans la vie et la société.
«La vie
spirituelle est une démarche individuelle située dans une collectivité, qui
s'enracine dans les questions fondamentales
du sens de la vie et qui tend vers la construction d'une vision de l'existence
cohérente et mobilisatrice, en constante évolution.»
Alors, il y a, dans ce cadre-là, tout... en
fait, la définition des services spirituels qui sont offerts dans les
établissements collégiaux, et donc qui correspondent, évidemment, à ce cadre
bien défini.
On en
retrouve aussi... On en retrouve, par exemple, au cégep de Saint-Hyacinthe, au
cégep de Limoilou. Alors, par
exemple, pour vous donner un exemple, peut-être illustrer ce à quoi ça peut
ressembler, au cégep de Saint-Hyacinthe, on a Animation à la vie spirituelle et à l'engagement communautaire, et il y
a une série d'activités, ça passe par le bénévolat au sein d'Amnistie
internationale à des midis-discussions, des relais solitude au monastère, pour
ceux à qui ce besoin peut répondre; relaxation, méditation.
Donc, ça
s'inscrit dans un cadre qui est déterminé et qui existe quand même depuis...
qui existe depuis longtemps, mais qui a été encadré de façon... qui a
été normé en 2005, exactement.
Donc, je
comprends la question de ma collègue, M. le Président, parce que ma collègue
voudrait s'assurer qu'on ne vient pas
autoriser des mouvements qui pourraient aller à l'encontre des valeurs,
justement, de notre société, mais, si on prend le temps de lire le cadre, de passer à travers le cadre, on
comprend que l'engagement spirituel, oui, parfois, peut comporter, pour certains élèves, un accompagnement
de nature religieuse, mais peut aussi comporter un accompagnement de nature spirituelle et culturelle plus général,
tout ça à l'intérieur, évidemment, d'un cadre, puis sera autorisé dans la
mesure où on respecte les grands principes
de l'école que j'ai énumérés tout à l'heure, c'est-à-dire l'école commune,
inclusive, démocratique, ouverte. Alors, c'est dans ce contexte-là que ce
service est offert dans nos établissements collégiaux et universitaires.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
Bien, écoutez, je vois qu'il y a un cadre ministériel, que c'est déjà très
normé. Je ne connaissais pas, je ne savais pas. Alors, pour moi ça me
va. Je n'ai pas d'autre question, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée de Montarville.
Mme Roy :
Oui. Je comprends ce que la ministre nous dit. Je lis le texte et je me pose la
question, je me demande s'il ne
serait pas judicieux de rajouter, puis peut-être que Mme la ministre pourrait
commenter, que c'est une... On soustrait ces enseignants religieux qui
offrent un service d'animation spirituelle ou encore des cours de nature
religieuse de l'application de la loi. Ma
question est la suivante : Ne serait-il pas pertinent de rajouter «dans
l'exercice de leurs fonctions d'animation
et d'enseignement», parce que je comprends qu'on dit qu'ils offrent et qu'ils
dispensent... mais qu'on les soustraie
de la loi dans l'exercice de leurs fonctions? Parce que, cette personne-là, ce
religieux ou cette religieuse, peu importe, moi, je veux que, si on la soustrait de
la loi, ce soit uniquement dans l'exercice de ses fonctions religieuses,
parce que dans une école, par exemple, la
personne peut avoir plusieurs chapeaux, faire plusieurs choses, et que c'est
uniquement lorsqu'elle dispense un cours de
religion x, y, z ou qu'elle fait une animation spirituelle x, y, z qu'elle est
exemptée de la loi, pas lorsqu'elle fait, par exemple, la surveillance,
à un moment donné, ou d'autre chose, là. Parce que souvent les enseignants ont
plusieurs chapeaux, il peut arriver qu'ils aient plusieurs chapeaux.
Je comprends qu'on
parle d'universités, de collèges d'enseignement... bon, système
correctionnel, là, c'est peut-être un peu
moins litigieux, mais rajouter le fait que cette exemption de la loi se fasse
uniquement dans l'exercice... Je ne pense pas que le mot «qui offre un
service» ou «qui dispense un service» est suffisant.
Mme Vallée :
J'ai peut-être quelque chose à vous proposer, on est en train de vérifier avec
les... Je comprends très bien
l'intervention de ma collègue. Puis l'objectif, justement, c'est de permettre
aux membres du personnel de pouvoir offrir,
de pouvoir dispenser ces services-là aux étudiants. Donc, peut-être, et là on vérifie, mais on pourrait modifier
le libellé : «Le devoir de neutralité religieuse ne s'applique pas à un
membre du personnel lorsqu'il offre un service d'animation spirituelle...»
Mme Roy :
Oui, oui, vraiment dans ses fonctions.
Mme Vallée : Alors, à
ce moment-là, ça permet de répondre à
la préoccupation de notre collègue. Donc, c'est vraiment dans ce contexte-là.
Et ça ne permet pas, par exemple, d'exercer... sous prétexte qu'on est à l'emploi
et qu'on est affecté à un service, de
ne pas respecter le devoir de neutralité ailleurs dans l'interaction
avec les enseignants et les étudiants.
Le Président
(M. Bernier) : Donc, il n'y aurait qu'à remplacer le «qui» par «lorsqu'il».
Mme Vallée :
Ça pourrait... Alors, on...
Mme Maltais :
Est-ce qu'il faut changer le deuxième aussi?
Une voix :
Oui, c'est ça.
Mme Maltais :
«Lorsqu'il dispense».
Mme Vallée :
Lorsqu'il est chargé... «Lorsqu'il dispense», oui.
Le Président
(M. Bernier) : Alors, ils vont préparer l'amendement. Si vous
avez d'autres questions, Mme la députée de Montarville, vous pouvez continuer.
Mme Roy :
C'est bien.
Le Président
(M. Bernier) : Non, c'est bien? Donc, on va laisser rédiger.
Mme Vallée : M. le
Président, je vais remercier ma collègue parce que je ne
voudrais pas que nos échanges, les échanges
que nous puissions avoir parfois sur des enjeux empêchent de soulever la
collaboration qu'on a et le travail qui peut se faire tout au long de
nos travaux.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Gouin, est-ce que vous avez
des questions sur cette...
M. Nadeau-Dubois :
Non. Non, non, on est très pressés, alors je n'ai pas de commentaire.
Mme Vallée :
En fait, on m'indique... Évidemment, pour l'équipe de légistes, c'est comme ça
que ça avait été interprété, que c'était vraiment pendant les fonctions.
Mais c'est vrai que, dans un souci de clarté, l'utilisation ou la modulation
pourrait être apportée.
Et, je ne sais pas,
est-ce que ma collègue souhaite déposer l'amendement?
Mme Roy :
Écoutez, moi je vous... Faites-le...
Mme Vallée :
Parce qu'on est à le rédiger, mais, si vous souhaitez le déposer, il n'y a pas
de problème.
Le
Président (M. Bernier) : Bon, ce que je vous suggère, c'est que...
rédigez l'amendement. Et, lorsque nous allons
reprendre les travaux, vous le déposerez, et on complétera, à ce moment-là, les
éléments nécessaires, parce que, compte
tenu de l'heure, il serait difficile de poursuivre sans faire de suspension,
sans faire la distribution, donc, il reste environ deux minutes.
Moi, je veux vous
remercier, les parlementaires, de votre collaboration à cette séance de
travail, où il y a eu plusieurs éléments
discutés, et remercier le personnel de l'Assemblée nationale qui nous
accompagne dans nos travaux, le personnel du
ministère, également, qui nous accompagne. M. le secrétaire, vous avez fait un
excellent travail, merci de votre collégialité.
Donc, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux au mercredi 4 octobre 2017, à 15 heures, où elle
entreprendra un autre mandat.
(Fin de la séance à 17 h 58)